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https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-1.pdf
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en ' ajournement & affignation d~ 28
li'Septembre .1'782,. en Rèquête de çommuatit>n de '
::lr(es fins- pf-i.n'dpa1es ~u 4 Septembre 1']83, ~n Re" .;quête t(;onrtaire dü 18 Se-ptéinbre 1783;& ,en Re~ 1quête' irl.cide-pte d'u 31 -}'àhvièr :1784, ten~:ante .-en
" ~ré\Tocatibn de l'Arrêt . du ·a.o Septembre '17-83 ', &,".
, Detnande'ur;'én"rééeption ~'expédient. ,
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DéfendereJJe.
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le Sac & Pieces
d~
[ufdit
Proc~s.
~ L' A VIS eft. qu'il ne renferme que deux queftions;
é~lle ' de -' la provifion & celle ' de 'la rejonél:ion, & ces
d'eÜx ' queftions dépendent du point unique qui confifte
à' [avoir fi' dans Pétat où les deux èonjoints fe trQuvent,
là Dame de Lifle a le- droit de continuer à tenir une
maifot1 à MarfeiUe, maifon dans laquelle elle invite
fOli',mari à la. rejoindre, ou fi ce n'eft pas au con- '
tratre- fur la [ère de ' ce dernier que réfide le droit de
mer'. par-tout -ailleurs fon domicile, & par conféquent
célù'i de 'fon époufè & de fa fille.
:J Les : principes ~J'ij " Ijl. mâti.ere ne
petlvent être dbcetr)ment conteft~s ni dans l'ordre général, ni dans les
ctrconftances parriculieres du fait. Dans l'ordre des,
p'r incipes, qui peut méconnoître l'obligation étroite ,
A..
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~
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Civil.,_eelui~~s
r~iu:: ,~\sa Re1igTo,-\;I~'~p'rf.nt ~ la, femme de fU'~t;,
J'f 1 " d ~tout domicile quelcpnque que ce derq.l~
(en man ~.
', )
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elLbie~'
" e fe ch<n{i~::._ _ . .,
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' ation e~t+it-on, de- Molt CIvil & mêm
et
de droit Canonique. "
Les C
lOIl{ tant 'IVI'1es qu'Eccléfia!H des 'fe réuniffent pour tracer à la .femme ~e devoir ;{fenrid dont J'honneur & la conFclence lUI pre[crivent i'accomplilIem ent le plus ngoureux: Cet~e
obligation n'exi{tc. pas feulement [ur un ' premier ~hol,ç:
~ _d;roic;ile fait par le mari; mai~ elle eH abfolue ~
fans /fefir~aion pOJ1r ~OM$ les choll{ qUt;1~9nques q!:l Il
p.ouuaIJaiJ'e ' pen~an't ~~~ cours d~ fa vleo ; &, com~e
le .d:jt LÇov,a~ruvla?, 'part. 'J.,. çqap. 7 " n. S-, mu 11er
tI:nttllr ,mMi.t)L~ flqili 'IlLJocumque "ir 1}1igrar: e -voluerir ,
fi- domiàliuTTI: mutale, veltt; & ' pour 'prendre les termes
dé Boffius dan:> fon Traité de Matrimon. tom. l ,
cap. 6, §. r' tenetur fequi virum domicilium mutantem
quocumque ,vadat) ce que \ ceS deux Auteurs fondent
fur les ee~tes les plus précis & les doarines toutà-la-foi~ les plus refpe8:ables & les plus nombreu[es,
al! poynt que quoiqu'il fait vrai de dire, fuivant l'obfervation de Duperier, qu'il n'el! rien d'ab[urde [ur
tous les points de droit, qui n'ait été dit & avancé '
par quelque Interprete, néanmoins il n'en el! pas un
qui ai~ méconnu l'obligation où fe trouve la fe,mf!le
de (uivre fon mari pa,r-~çu.t où il vqudra fixer & tran.[- ,
porrer, fon domicile. Tous fe font acc'Ordés au contraire à ,reconnoître que cette obliO'ation effentielle ' qui '
fe trouve écrite dans _tous les tex~es connus d~ droit
P.ofitif & du droit C~nonique, tient à ' des bafes refpe&ables & même facrées; c'eft-à-dire, au droit na7' .
tureLprouvé par l'e~em~l~ de toutes les nations policées"
& _de plus ~ drOit Dl~ lO; c'eft-à-dire aux principes
de cOn1,?u,mon, ~ d'individuité qui fo~t du mariage J
un affOClatiOn mevocable que la puiifance humaine ne
peut rompre. '
o Delà vient que, flli~ant de Luca de Legat. dire.
n . ~ , cette obligation, ne peut êtrt;! détruite par la .
faveur que peuvent mériter les teftaments &. dernieres
fi '
'indif2enfable-~é te :d~Wt
. -....
69'
conl~tioti~
ditpid1itiJn!l ', &rlC 1é'
fdl'!r tènoes ponr 'noft
édites qU!H1d ' e-ll-es- contrarient l'6bligation que tou~
les t'droits" impoferill .à let , fèmnië' rde : fui\1re fan mar!dans, l~scontrées ~ù ' é~ l dërhier'~e!ft 1>iio · aife de réfi4er1 Cect«: obI igation' , djt BofiIiuS" a. ' l'éndroit déja'
élt~ :j n?;' 40 , - né peUt' 'pas ,non!"'pltlS ·'être ébtanlèe 'n-il
l
p':ü' ,',(d~s'J paéles ,tii ' ~ar une cOl;ltume controi'.re , , l$ê
la' 'r-œtft)fl' '' qu:il en don~e dl: tirée' de ' ce principe ' qui
nous. ?~t ~qu~ , ~œ~ d~liAatf~ ji'mul' hab'ithndi eJl ')dè-~'jur~'
naturdlz & dzvzno, prmelpe-egarement 'attené pal' S'urdenda:ns [o'n traité' (je Alimentis, tit. ' 7, queft. '2. ') ,0'0.., -r:êY
& " fuivants. .
"
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)
- Delà- Vient qùë.. Ii:, femme el! 'o bligée âe ' fuivre ' fait{
m~f~ bàÎln'~ , exilé~, ~légué ', & de venir : le ;joindr~\.
d'ans''''le ieu de ' [ori exit.' 'Cerce' obligation dt' ' ehco~è ,
r~traeéé' dins touS le~1. l-ivres.' E11; l fl'~à ;ien d~ pl~
q~\J.fi~ tl,é-pen'dance l'<lù' pfinèi~è ' qu10n ' vién tl Ge 'po[er!
cl-deffü9J • ,car on a manqué la queftiori , & Pon u rvatné-'
ment tent'e' d'écHapper à la regle, en difant ~ue rdhliga~
don où en 'l-a fèm me de Cuivre fon mari dans le lieu de
fon ~xi'l , ~bli~aridn qu!on a été forcé de reconnoître-,
deVOir' a-v olr 'beu', parce que dans ces cas la r.etraite
d1J _maTi l . >&: fori changeme-rlt de ,: domi~ile fe trouvent: '
f~rc és. On a éca,rté' le :vrai pri~cipè ~& décider. , pÔUf,
s at\achel' à une clrco'nnance qll1 ne fait. qu'en ' renforcer
l',llppl iè ation : car il Jaut convenir que l'obliO'ation eft
plui étroite ' quand~ il s'agir 'd'un mari co~damné
flétri- ,ou~ malheureu~ ,~ p~r~e que la fe rT,l me ' qui pirdg:
fad état -contraae d'e plus dans 'ce cas- l'ob-ligation dele . co.n~oler & d'adoucir [on infortune; mais le vrai
prmclpe qui foumet la femme à fuivre [on mari dans
lli' lie~ d~e' fon exil ; n'en autre que celui de l'obligation
que rdus les draies lui impofent de s'a1fujetir à toutes
{~s ; vQlonrés pour ce qui concerne le choix du domic Il~, 'aU ,poin~ , q~e Juivant le droit , la femme ne peut
même en aVOIr un autre que celui de fan mari.
• Er, pour rendre 'la chofe plus {enIible , on n'a qu}à
examlDer en point de droit ce qu'on penferoit dans '
les cas ordinaires d'une femme ' qui voudrait contener
à fQn ,~ari le droit ' de fixer le domicile. commun, &
•
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if
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dernier veut changer de domicile. Delà, dit pothier
à l'endroit déja cité, n~. 383, naît une aaion que le
.
recette voudtoit fe difpeo(er de le (~lvr,e
~ ~~scI.e p u' ce dernier veut réfider. Il faut même
".ans
.
i. ' 1..es
r leuX 0
moment que le man. n, ait
aucune
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pouc
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1 .,r.LI..: r aucun motlt ranon na e e c h anger
l'3.\Jon p awll(l,l« ,
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'f
fon domicil~ ~ le' mari veut parpr ,la em~e au con_.
fier Quell'ugement faudra-Hl porter de
t;~a\Ce veu t re
.
~e -débat! BolIius
va noUS· l'apprendre en p~~ant ,
, n la quefrion; fi maritus velit mutare
am
r. . l domzczlzum
Il .
qbfque càuf4 ar;,llx,!r ,~eTlea~ur ..ilIum ).equz .
.<:lte un
Au.tèut q~i a teny Jtl:,l\ég~tl;e: Il/aEPort~ , ~,!lf!!lt~ tOUte~ l~s a.utres doéhine~; d ou Il \r~fu~e la regl.e f?IVa-tlte
qui forme fur cette impo~tante manere le pnnclpe çes
principes. Vir eft caput , IPfj,usque eft guber!zare
con/ • .fj
0
J
&.
f~quenter eriam digue domicilium , np11:. autem 'uxons quœ
UM
gubernationi viri [Ilbeft; ac proindè QUOMODQc:
QU~ J'IR E.LlG;AT DOMIClL'IUM, modo non ob
turpem & inhonefta1JZ caufam uxor mariwm fequi tfebet.
L(!. fllffilJl e ne .peut donc fe refu(er . de fuivre fon mari
o que içrfque le nouve~u domicile, que ce .dernier, ,choi~~
-peut, mettre fon honneur en fouffrance ou en péril, ou
bien, comme ce même Auteur l'~vàit dit un peu auparavant " quand fa vie feroit en dan~r dans le nouveau
domi~ile; & è~efl: en force dù même principe que
Po~hler, 4é!,ns, 10n traité' du contrat de mariage, tom.
~, part. ~, chap. 1 , art. 1 , §. 'l., nO. 38,1., pag. 3.,
obfe~ve que la femme de fon côté contraél:e envers [011
mari L'OBLIGATION DE LE SUIVRE PAR-TOUT
OU IL JUGERA A PROPOS D'ÉTABÜR SA RÉSlDEN~E O~ SA DEMEURE, pourvu que ce ne [~it
P'ls neanmozns hors le Rovaume
- o? n'a pas
'
même à demander çOll1pte au mari Ms~otlfs d~ fon changement de 'domioile. Cçs- -motifs
tiennent a la liberté qu'a tout citoyen 'libre ae fe tranf~o[[er .par-tout où il trouve bon & de s'y fi xer avec
'
' bafes
la famille . Ces'f
motl s ont ou peuvent
avoir des
ref1dP71~able;, facrées, qu'il faut refpeaer, & fur lt:fquell e
a "\ejlCatene
& l'ho
i- .
Ir'
T nneur d' un man. ne' permettent pas
. & toures les ca~Gd équ 1, iOH,prene
. ' ous 1es d rolts
ratIOns
c
. ds unl!fem
'
' .donc pour impoc1er '1
a a lemme
0 b~'
,J\- gauon e s afi'uletlr ~. la volonté de fan mari quand ce .
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mari a 'droit de former en Juftice contre fa femme, lorF
qu'elle l'a quitté pour la faire condamner à retourner
avec lui. La femme ne peut rien oppofer pour fe défendre
de cette demande. Par exemple elle n'eft pas é,outée à
oppofer qué l'air du lieu où e{l [on mari eft contraire à
fa fanté, qu'il y regne des maladies contagieufes. Elle
ne l'ejl pas m~me à alléguer les mauvais traitemens
qu'elle prétendroit que fon mari auroit exercés fur elle,
à moins qu'elle n'eut donné une demande en féparation
d'habitation pour rai[on de[dits mauvais traitemens. Et
telle eil: encore la Jurifprudence de touS les Parlements.
Le mari auroit l'aétion' même criminelle contre ceuX
qui retiendraient fa femme, & qui l'empêcheraient de
le venir joindre, & de remplir par ce moyen le pluS
refpeétable & le plus faint de toUS les devoirs. C'eft
auffi ce qu' établit fort bien Bodin dans fa République,
liv. l , chap. i , pag. 28, où il atteil:e que fuivant le
droit de toUS les peuples, la femme tient la condition &
doit fuivre la qualité du mari ; encore que le mari fut
banni & vagabond, néanmoins la femme le doit foivre ,
& en cela tous les Juri[confultes & Canoniftes s'accordent. Au/fi toutes les loix & coutumes ont fait le mari
maître des aaions de la femme & de l'ufufruir de toUS
les biens qui lui échoient, & ne permértent pas que la
femme puiJfe être en jugement, foit en demandant ou
défendant fans l'autorité du mari, ou du Jugr; à [on
refus, qui [ont touS arguments indubitables, pour montrer l'àutorité puifJante & commandement que le. mari a
for la femme de droit divin & humain. Sur quoi l'on
doit obferver qu'aux termes de cet Auteur la femme
n'eil: pas feulement obligée de fu ivre fan mari b anni,
moiris encore fan mari 'V agabond , ce qui ne défigne
pas un homme fans confiU:ance, mais un mari changea nt fou vent de domicile, changemel1s auxquels la
fe mme d l tenue de fe conform er.
Mais, a':t-on dit, le fie ur de LiOe a failli à fes
créanciers. Tous les biens de la fortun e lui font
enlevés. Sa femme a fauvé fa do t , fes droits & fes b i~
B
�'!
&: des .perfonnes ; & même la repriie que ·fait ta fem-=
6L
'fon qu'elle occupe
•oux. Elle vit ~ Marfeille. a EmIl al offre d'y recevoir
1
e, ntrete01r
. cÇ>nvenalouée pour fi0 n compte. . &.
. d e l' y 10 ger , nournr
fon man,
r.
d eLine a éte, d'b
e out é
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U Le lIeur e
if l
blement a Ion reve~ •
bénéfice de cette 0 r~, e
de fes fins- en provdion au
1 fort que doit aVOIr fa
préjugé de cet ~rrêt. annf,nc~éee fur les mêmes princidemaode en re)ontbo n , on _
es que la provilioD •
à l'écart le préjugé
P
r.
cer par mettre
It IaUt commen
•
&. par conféquent
de cet Arrêt intervenu fur Requt~ ' 1de la Cour a été
fournis à la révocation, fi la lr,e ,g~onété fi elle- a jugé
r
·r 0
11 ne peut que aVOIr
,
11.
1 Dame de Line , forcée de
lurprue. r e .e
que dans les CJfCOOllanc~s a
d fa dot ). uf,qu'à
.
'fon man les revenus e
&. de fon entretien,
commuOlquer a
.
' la concurrence de fa nourriture
à ' 11
.
fa"re le prix de fon confel1tem e nt ce qu e e
pOUVOIt en 1
li d M fi lie Les raicontinu~t de réfider dans la VI e e ar
à
é
fons les plus fortes l'émpêchent de con entJ~ 1 y r:
fider & dès-lors il ne refie plus qu'à v~ir 1 e man
failli' prenant fa nourriture &. fon entretJe~ fur les re- .
venu; de la dot, peut, à raifon de cette clr.co~ftance,
être privé du droit qu'il av.o·t dans le , pnnclpe , d~
fixer fon domicile, &., par ralfon de. confequ ence , celUI
que fon époufe doit oc~uper .a~ec 1~1.
._
Le mari failli perd bd mlO1ftratlOn de la dot, ad~l
'
. . SI
'1 parvIent.
nifiration qu' il peut rcpren d re neanmolOs
à une meilleure fortune. Mais la perte de cette ad 011niUration fût-elle aMolue &. définitive (dans le cas ~e
billite , le mari n'en conferveroit pas moins ~a pUl~
fance maritale, &. par conféquent tOUS fes droits pn.mitifs fur la perfonne de fon époufe, &., par ~a,fon
de conféquence, encore le droit, peut-être le plus )alou x
de tous, & fouvent le plus ' effentie1, de changer de domicile, de fe fixer par-tout où il trouve bon, &. d'y
appeller lon épeufe.
. La preuve commence à s'en faire par l'évidence mê·
me. Autre chofe eU la dot &. le droit de l'adminilhation , autrechofe efi la communion individuelle de tout
ce qui peut inréreffer l'état &. l'honneur des con jointS.
La féparation des biens n'entraine pas ceUe des corps
en
t .'
y
me de -fa dot &. droits, n'eft pas une réfolution de la '
communIon. L'ap,plication de la dot n'eft pas changée. Elfe ~ft toujours affeél:ée au fupport des charges
communes du mariage. La différence qui fe, trouve
· ~ntre l:état primitif &; celui que la reprife de la, d~t
opere, ne confiHe que dans le changement du drOIt
d'ad m inif!:rer qui paffe de la tête du mari fur celle ?e
la femme. La collocation pour vergence, la repnfe
. pour caufe ,de faillite, donnent. à la femme le droit
d'adminiftrer ks revenus de la dot, dont les fonds font
mis en fûreté, attendu . la décadence ou la faillite du
mari. Mais la: deHi.nation .de la dot e.fi. toujours la" mê' me, & 'l 'uR a lùrieuf~ment erré fur les prinçipes dè la
.matiere, lorfqu'on a vQulu prendre drol[ de ce que la
Dame {je: L'iOe
devait fournir
à l.a nou.rritute'. & en,
.,
trerien de fQ-D .r:nar-i, .pour .en conclure qu'elle ,avoit par
· conféquen( le droi't ' de lui faire eni6indr~ àe venir
,prendre les alimens chez elle, comme on le prati.que
à l'égard des peres qui (ont fournis par la loi à la fourniture des alimens à' leurs enfans, & d ans les autres
•
1
cas de c e ttl~ efpece.
Car d' abord, la Dame de Lifle ne· fourn ît ic i rien
du fi en. T ant que le mariage fubfifl: è , les fruits de
_~a dot appartiennent au mari , jufqu'à la '" concurrence
de fon entretien &. de fa nourriture. L'excédant rn ê"ine, quand ii s'en trouve, appartient aux créanciers du
mari [uivant les anciens Arrêts. Aillfi lorfque ce 'dernier r~€~it
fon entretien '& fa nourrltu're fur les revenus
,
de la dm reprife par fa femme, ou pour caufe de vergence, ou pour caufe de faillite, ce n'ef!: pas fur les
l>iens de fa femme . qu'il prend cem; nourritu re &.
fon éntietieri: c'eft fur les fiens propres, c'eft fur ceux
~ Ollt la loi lui do nne la particip àrion dâns fon état
de d ~ [r~ lIe, Cauf le droie d'adminiftration que la loi
dans ce cas défere à fOI) époufe.
D ,aucre parr, ou\ pourra- t- on trouver d e quOI. autorirer, ou même colorer le fyfrême indécent &. même
atroce d'ajouter d ~ ns ce cas à l'infortune d u m ari,
l'injuUice de le Friver du droit per[ol1l1el que la loi .
�CJ
, "
cl
fixe~ fan
domicile & celui de
lui donne a' 1 effet e
dminifrrer les revenus d~
"fa famille? La ~emme peut tans l'autre; mais le ~an
e
fa dot dans. un heu com m b'
ne le ferait pas de
d
qui ne ferolt que fépa~! e :ens'de nxer le domicile.
corps. Delà' il e~ toU) urs m!utre 0 1
obferve avec
er
Raviot fur Pern , qude!t{c.; Sl 'C'~~ d~ biens le mari
.r
d s le cas e cpara J
'r.:
ranon que an fi fc me & qu'elle doit retourner 11
Pleluclrappudt'tfan: U~mgranJ péril. C'efr aufii ce qu'~be e e pe
.
0
A 'nli dit-ll
fi
Denifart vO • Séparation, n • 3'
l 'Jo ,
.'
on
ervefemme fép~rée de biens doit demeurer avec f
m~n;
•
&e fl elle le quitte, il eft en état .de ,d7man~er qu ~l~~
'Oit renfermée dans un Couvent;]~ 1al vu ]~ger am)'
J'ar deux Arrêts rendus {ur appolntemens a mettre,
~ais en grande connoijJance de caufe, au rapport de ~.
l'A bilé de Salabery, lm la Grand'Chambre, les 9 A,out
ft 11 Avril 17 S3, entreles fleurs ft , Dame Pdl~.
dnS'2.. devoit pas avoir be[oin d' ~rrêt~ , po~r .é~abhr
ne
cette' regle. On fent bien qu'un~ feparatlon hn;!teedau
bien de la femme & à la dot, ne peut, pas s eten ,re
d là de l'objet pour lequel elle a eté prononce~.
~ett: féparation a fans doute l'effet d'anéantir le dro~t
primitif qU'ilvoit le mari d'admini!her l~ dot; maiS
. comment &: par quels principes pourrOlt-elle porter
atteinte aux 'droits inaltérables qu'a le mari fur la perfonne de [a femme, & [ur-tout au droit pré.cieux ~e
fixer fon domicile, de le changer à [on gré fUIVant [o.n
intérêt ou [es Vues, & d'affurer par ce moyen la paix
& l'honneur d'une union qui ne doit nnir qu'avec la
vie- des deux . conjoints?
, Tels étoient les principes [ur le [quels la caufe du
fieur de Bellanger & de [on ép,oufe fut plaidée en
1780 . , La Darne de 'Bellanger étoit colloquée. Elle
i?uiffoit de fa dot & droits. Elle avoit conCenti au profit de fon mari, à qui il ne refroit plus rien que le
droit de vivre fur la dot, une penfion de 800 livre~.
Le fi~ur de Bellanger fit affigner [a femme ' pour venl,r
le rejoindre pour vivre avec lui dans une mai[on q 11
avoit loùée ou qui le [eroit. La caure fut plaidée. La
Darne de Bellanger alloit être condamnée tout d'une
u:
VOIX,
voix, 16rfqu'elle' 6c offrir un expéçliént par lequeLeltè
offrait de prouver les faits les plus atr?ces, q~i , avoient,
di[oit-dl'e , donné , lieu à la- 'Jépara~ion, & lqUoÏ pouvoient & devoient la faire .. difp.e.nfer à jamais de
rejoindre fon mari. Le neur de Bellanger étoit failli;
il vivoit fur la dot & fur les biens de fon épou[e qui
.(l'éluda l'obligation de rejoindre f~n mari que par le
parci d'extrêmité qu'elle prit, d'offrir la preuve des
excès & des attentats qu'elle prétendoit avoir été comnüs contre fa vie. Ici l'on préfurne trop. bien de deux
époux pour croire que le neur de Line ait jamais
donné lieu à l'offre d'une preuve pareille, & J_que la
Darr: e de ~ine voulut fe livrer au travers d~ l'allçguer
& d .en exciper.
'
.' '
Vainement a-t-on oppofé l'A.rrêt de la Dame Bouquier. Cet Arrêt a été cité mal-à-propos dans les
' défenfes de la Dame de LiOe. Cet Arrêt, fuivant le9
notes que nous en avons relevées dans les regifrres du
Procureur du Mari,; enjoignit à la fe'rome de fe retirer ,
auprès de lui après le délai de nx mois. Mais que
p~urra-t-og répondre fur l'Arrêt rapporté par Decor- .
mIs, tOm. l , col. 1193? Il s'agiffoit d'un mari failli
à qui la femme qui avoit repris fa dot devoit les alimens.' Cette derniere trouvoit le féjour de Marfeille
pl~s doux. que celui de la campagne où fon mari vou~Olt fe retirer. Le mari gagna fa caufe. Un mari peutIl la perdre en pareille circonfl:ance?
Qu'a-t-o~ dit? Quelle doéhine, quel texte du droie
a-t-on pu cirer au contraire? Aucun. On a voulu fe
prévalo~r d'un mot lâché dans un ouvrage portant des
tnHruébons fur la pratique & la procédure. On a cité
l'Auteur de la procédure civile du Chatelet tom. l ' '
pag. 176. Auroit-on jamais pu croire qu'on p6t trouve:
dans, cet ouvrage des reffources pour la difcuffion &
le developpeJIle:Dt du grand principe dont il s'agit dans
ce procès? MaiS encore qu'y a-t-on trouvé? Rien du
tout. La Da me de L.ine '. forcée de reconnoÎtre la puiff~nce mamale, voudrOlt la borner & la reiferrer en
dlfant en général que la pu.ijJance maritale efl établie,
non pas en faveu.r , du mari feulement , mais en faveur
C
�II
(fe
t
par confiquenr ' dis deu:c
pas dû fentir que ce, mot vague
,la [aciété conjugale,
époux. N'a-t- on
général n'effieuroit pas même la qudbon, &
le
mari eft tOujours celui fur la
duquel la 101 fe
r
: ..1 d '1 s'ag'lt d'un objet commun?
Son fuf'
'
repOle qU·.. R l
frage eft .toujours prépondérant, ou pour mIeux dIre,
le mari fc.èl dl: à confuiter dans les cas de cette efpece.
Les Tribunaux ne peuvent lui ravir les droits que ~es
loix & la religion ~j don~~nt à cet égard, & ce prtnurs
cipe fera refpeaé
qu Il 1- aU,ra
mc:x: ;
a
même ofé dire à l'AudIence qu Il n y aVOlt pot nt d Arret,
de Do8:rin es ni de Loi topiques pour la quefrion de
la caufe' on v.Quloit dire. fans doute qu'il n'y. avoit ni
loi ni do8:rine , ni préjugé qui put autorifer la répu"
gn;nce & les refus de la femme qui veut fixer ellemême le domièile au préjudice des droitS du mari
même failli qùi fait de fan chef un choix contraire.
En appliquant toUS ces principes au fait de la caufe,
on y trouve à fe convaincre toujours mieux du droit
du fieur de Line , & de la néceffité de l'appliquer au
cas préfent. Cette difcuffion de fait dl: m ême inutile.
Ce principe ea que rien ne peut difpenfer la femme
du mari, même failli,de l'obligation de fuivre la volonté
de ce dernier dans le choix du domicile , à moins que
1& choilè que fait ce dernier ne mette en péril fa vie,
fon honneur ou fa religion. Le plus ou moins d'utilité ,
les, convenances font des détails dans leCquels les Tri• bunaux ne doivent pas même encrer. L'honneur des'
maris, leur repoS , les droits que la loi leur donne
font des objets d'un ordre fupérieur à toutes les confi' dérations qu'on peut faire valoir en pareil cas. Qui
pe~t entrer en effet dans les motifs qui peuvent déterml,ner ~n époux e~ par~in;s ci~conH:aoces? Qui pourrOlt bl~mer un ch~)lx, qUI n aurOlt même qu'une opinion .
érronnee pour pn~clpd Une femme en pareil cas fe
prévaudrOlt en valU de ce que fon mari ne lui fait '
aucun ,rep,roche du côté des mœurs. On lui répondroit
. n" n a pas br
elOm
" Cucces que le ma
avec
' de toucher ceC
artlc~e ,Important pour 'ufer du droit qu' il a de fixe r le
domicIle de fan époufe, que le mence qu' il garde CUf
~oloncé
ta~
de~
qu~
O~
•
cet a:r ticle , dl: . fouvent une preuve de l'honn~teté ~
de la modération dç fes principes; qu'il s'agit fO\1'ven t de faire ceffer des maux . pr6fents ou de prévenjr dl!s maux futurs; que l~ ' choiX des moyèns
légitimes form~ fon bi~n & fan patrimoine;- qu'aucune plliffance ne peut le lui' faIre perdre tant que
fon mariage fubfio:e1,"a. Et qu.oi! même lorfque " les
é pouJj: font féparés par juftice, le mari conférve encore des droits pour inlpeaer le " domicile de fon
épouCe & fa conduite. Comment n"aura-t-il pas çelui
,de la rappeller auprès de fa perfo nne & dans le
domicile ~u'il choiGt, quand il n'exift,e & ne peut
exiHer aucune caufe de féparation! La femme même
féparée doit fé faire un devoir de refpe8:er l'opinion _
& les délicateffes de fon mari. Comment celle qui
n'eft Pé\s féparée pourra-t-elle fe difpenfer d'abandonner
le féjo\lf d' une VIlle que le mài'i juge trop dangereufe
pour elle?
.
Et quels miférables prétextes a-c-on donné pour difpenCer la D arne de Line de fe rétirer dans cette ville..
avec fon m ari, & pour l'autorifer à vivre à Marfeille
çn dépit de ce dernier? On a âit que h:s de'ux familles la deuroient à Marfeille; qu 'elles pouvoient fe
ré unir JDour lui faire du bien; qùe l~ fieur de Line
e,n Fe reürant à Marfeille avec elle, pouvoit devenir
10bJet du même fePtiment; qu'en venant à Aix, en
y ~pporrant fes meubles & fes bijoux, il feroit à
cramdre Clue le Geur de Line ne s'emparât de tout &
ne difiipât rout.
, Mettons à l'écart le, reproche de diffipation, plus
~n,core celui d'expilation & de déprédation. C'eft une
1IlJure, un affront qu'on a voulu faire gratuitement
au fieur ?e Lin~" qui ne veut s'en venger que par
les atrentl?ns qu 11 veut ~voir pour fon êpoufe, après
que la rejona\On aura eté ordonnée. La D ame de
Line oubl ie que dans le projet de réGder à Marfeille ,
elle con Cent à ce que fOll m ari vive avec elle da ns
la m~me ~aifon, & cela parce que les caures de fépara,tlon 1~1 manquent tout - à - fait : or, ce d ern ier
ferOlt expllateur & déprédateur à Aïx ~ tandis q~'il
�~e' le
1
•
I?.
feroit poipt à Mar(~ill,e. ' Comment tout ~e1a
peut-il fe concilier dans les Idees, de la Dame de Ldle
& dans l'ordre de fe~ exceptions?
Elle eft di'i:.ëUi à Màr[eille auprès des parents
communs. Mais ' un~ femme n'eH: à [a place que quand
'elle eft auprès 'd~ fon mari. Mais d'autre part comment ,la Dame de LiGe 'eH-elle auprès de (es parents?
Seroit-elle dans la mai[on & fous les yeux d'un pere
& d'une merc, ' de quelque parent ou ' parente refpectable? Plût à Dieu que cela fût. Le pere, la mere
'0\1 ~e parent refpeél:able fous les yeux de qui la Dame
de Liile fe trouveroit, ne, manqueroit pas de lui infpirer l'amour du premier de fes devoirs. Mais la Dame
de ~ille ea à Marfeille, dans une maifon louée, à la
tête d'une maifon montée, ayant cuifiniere , femmede-chambre & porteûrs. Trouvera-t-on dans ces circonaances des, m~tifs légitimes ou plaufibles pour
coloter au moiOS fon refus,' ou, pour mieux dire, n'y
trou,vera-t-on pas au, contraIre de nouvelles raifons pour
fortifier les fins pnfes par le fieur de Lifle ?
Elle ea, dit-elle, à portée des bienfaits depuis
deu~ ans. Rien ne peut engager la Jufiice à l'en
croIre. Des parents
,
b'len f:'
altellrs commenceroient par
le plus, effenuel de tous les bienfaits; c'efi-à-dire par
la remettre à fa place fous l'aurorité maritale. D~puis
deux ans elle ne voit
r
b eau- pere. .Suppofons
,,' p as lOn
cependan~, co~tre 1eVldence, qu'il exiae à Marfeille des
~are~ts b,lenfalteurs. lis font honnêtes fans doute les
fi artles n en on~ pas d'autres. La Dame de Lifle 'n'en
era rend
que plus
1
b'len f:'
été
e à fidIgne
d de,eurs,
alts, quand elle aura
duire d: la d~s bevOlrs. D'aIlleurs s'agit-il de la trad'A' ' 11.
ro er aux yeux de fa famille? La ville
IX eu: aux portes de M fi 11
parents de la Dame d L,ar el, e, & les plus proches
e Ille s y trouvent.
, d
L 010 e nous & de 1
fi
que quand il s' ' d' a cau e cet étrange principe,
conruiter la vol~~~~ &u~ do~icile ~e volonté, il faut
conjoints. La 10' 1 ,~ ratfon réCIproques des deuX
1) a rallon & 1
l"
d' r
I:
a re IglOn Ilen t rout
1e contraire. La lemme
f' '
nous d'
vant Franclfcus M "
lt-on encore, UIarc lUS , n'dl pas obligée de fuivre
, fon
,
fRlMn;fJ i. rJ~a4ooP
1
,}r3
'1
•
tAJa qO~ln~' ,h~,'tre po~r ~, mat
~ g,~!Hlfq4i sui n'a .,~ nif .veut avnr y.Hc~?e affiem:, au·
~He<li, qü'9!jure <tjxe~ ~!l\~. ' ~~ pp~t q.Ul. ~e ' v~uf pJu~
vmt\~J"~tarfe~~r!) ,, ff. :,Su~ p,feo.a -, Irr ,I?a~t1, ~e bJSY fon
~Om~f~\~ ~ ~1.x"" t?eYfïlf ê~r~ p~êf~n~e ~?mme tm' f~O~~
~~~IlJ' ~'lL , . , ; 'J ' I< :',.'
. "
l' ~ n ~/
,'~c" ,~"'S~QjJ qtfCl e(~wre" c'e~ \t,R ca~ p~~ttru.,Ie-L · ~
lit .fp,~jEe 'toit 4Jgre,r~ plus à 1a r,alfon qu a. i~ a~t9n(~.
r.r}R-fip.~J e!çgeè~f ~o~u.) i'qn a, dé?r~li~ ~n~ c?Lnfé~~ ,o~~
S'uJ l{~ll;l e9:c?fe aav..a.ttF~~Ç· ~n m~t~r,~ :Ge 4ptlll,~ll)~_,
F'~~l ra~t.p.qt~ d) ' ,-\\1,3'1'1, qU'li fauF confult.er. ~es , ra~:
f?,p? ': c\<?jv~At ~ fe l~gees q~e d~,?~ le!? cas g~a~e~ ~u~
_J.ljféJeJf~F-, !:r?p,~e"l1:, la ,"le ou. la re1I~~çl1r ~~
réP~u~
, • , Hors
de Cf;" as,;' c'çfl. l'futA ire feul~ du map
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•
,
q~
Ei s+il falloit "j,e(er leS motifs, fe Geur de Lille
n'ea a-t.il pas d'a4f? i~r~Ves dap~' la répugnance .ab~
folue qu'il a dé+'vivre ~ ' Marfeille? Forcé d'y vivre
pen,d~p,t ~fl~'J ans; , apr~s ' fa ,failli~e, pour la li9uidatIon de [es affaIres, Il n'a )2mals ofé fe prodUIre;
il ne l'oferoie pas davantage aujomdJhu i, Il a tropde délicatdlè pour vivre à Marftille après tout ce qui
s'eft paffé. Le mari failli, dont il dl: parlé dans Decormis, ne donnoit pas d'autres motifs. Et qui pourra
fou tenir dans l'état de la caufe, que le fieur de Lifle
n'en a pas d'autres infiniment plus graves, & s'il
peut eo avoir d'autres 'de toute autre efpece, qui
pourra blâmer fon aaion & l'intérêt qu'il y met? Ma ,
dot, ajoute la Dame de Lifle, ne rend pas 3 000 liv.
Comment pourrois- je me réfoudre à venir montrer
à Aix le fcandale de ma mifere? Le- fcandale confifte
à ne pas vivre avec fon mari, à lu i plonger le poignard dans le cœur, en voulan', le forcer d'opter
pour un féjmlr qu'il abhorre. S'il falloit juger d~s
revenus de la Dame de Lifle, pa r le train qu'elle
mene à Marfeille, il fe monteroit au moins au double
de Fe que la Dame de Lifle en accufe. Au furplus, 1
ce revenu quel qu'il foit peue plus à Aix 'qu'à Marfeille
fuffire àux deux conjoints & aux befoins de la famille. Il 'y aura bien moins de fcandale, moins de
D
1
�-r : d
14- ."
1 1lJl
le' "dorhicile d'Aix que' (fans cé U.l e',~~~~
m~ e.re ans
, 'euX dire tout fcandale dlfpfioma':
feille' ou, pour ml
,
. , 11
l ' d'
.'1'
' qu'un au procès, c eu: ce ul
une
lo. M t1el
r '11
car 1 n y en a
.' ::c" dans le fane & le
luxe il ii
qUi VI
•
d ,..e,
f&emme
qui refufe de (uivre (on man dans un onllclle
"te analogue auX circonftances,
' . . .à porrée Ides
honne ,
deux familles, & (ous les yeux des .pnnclpaux parepts.
Rien n\n donc plus jufte en drol~ & plus fav.oràble
en faic q~ le fyfiême du fieur, de LJ!le dans ce I?rocè~
incéretfant;& qui. ne peut qu ~\!~rmer tout Junfcon(ulte & tout Citoyen; tout Jun(con(ulre, parr l'atteinte
llue la Dame de , L'me, v?u~roit faire port.er au plus
i:~fpeél:a\"le de toUS les prtnClp~s , & tout Cltoyep, par
les tr~ubles qui ne pourraient que .s'en enfuivre 'dans
l'intérieur, l'ordre & le gouvernement des famill~s.
. ... :fe " d
•
MÉMOIRE
. ,, .,
",
\
POUR
GA S SIE R.
,
•
,
1
Noble LOUIS-AuGUSTE
-
DE
LIS L':E.
~
~
. C
0 N T R, E
,
r
~.
~
v
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'
La Dame A N GEL J Q U E-M ART H E
[on , Epoufe·
~
.-
,
,
DE G~B1ÜELY6
\
.
\.
N mari maltraÎté par la 'fortune & qui: ne fou
•
•
,
U
4
pire qu'après une r~unio'n néceffaire à fon bonheur
& ~onf~ntie par fon époufe ; a:t::il ; le 'choix du domi·
cile oÙ' il doit jouir d'une paix trop long-temps adirée!
Telle dl: la queftion qui a divifé nos Arbitres & qui
e~ (oumife aujourd'hui à la décilion de la Cour. Un
Défenfeur éloquent a établi les droits que j'invoque
aveé cette chaleur qu'infpire la vérité & que le fl!L1tÎment juHifie ,m,ais le fuccès de ma caufe n'eH pas le
feul triomphe qùe j'itmb'iti01\Oe ; il en eH un , j'ofe le
dire, plus délicat poo['" moi & qu' il ne m'dt, pas
permis de retarder. Madame de 'Lille, en me difputant uo droit ql1e~ je tiens de (on cœur, a fait foupçonoer la 6ncérité du ' 'm ien: 'cet oubli du premier
de fes devoirs ne peut être que l'ouvrage de 10n erreur.
A
L
�' 3
1
u1C du public toutes
. dois donc de ~e~tre f~us - eds ye is mon mari,age.
Je l U1
, U
'a écntes epU
1
' les lettres qu e, e ml' fe pour eUe, fera !pa P u,s
Cette )'uftilicatlon , g oneu
x que )"él'rouve. S'Il
"
'
dans
les
mau
douce coniol atlon
femme que 1 on alm~,
eft affreux de plaider, avec : : : d'autres armes que les
'1 ft flatte~r de n empl y
~é~oignaKçs de fa tendrefi'e.
1.
P'A l 'T S.
,
,
- , 6 la DUe. de Gabr~ely fut proEn Septembre 1'171: ' d T ifie' plus cette propor'
'age au lieur e.....
,
,
-é
1
pOlee- en man, l' tl' ~u'il avoit mfplr e , p us
fition annon~olt, e Im~ pureté 'de [es intentions;
il devoit la mériter par a Iles des Négocians, avait
c
comme toutes ce
r
'
f:a Iortune,
'l ' - d [on intérêt & de les pnn"
gérée & 1 etOlt e
'
Il
ete exa
fi ' t ce qu'on devait en crOlr.e.
cipes. de fixe.r à /e uJe Abb' d'Ainay l'état de fes
expo[a à ~. ,dée a:ente ~ , la e[omme de cent mille
b - s qUi s levolent a
1
f::~cs quoiqu'on eut fuppolé lui en refter ~?c?re P, us
de deu~ cent milLe: cette franchife augme,nta 1 ~dee q~ ~n
avoic concu de fa probité &' M. l'Abbe d'Amay, QIn
d'être réfl'oidi par la vérité, s'emprefi'a de ddli.~er
toutes lell \perplexité.S du fieur de L.l~e. Mon aUlee,
Orpheline lui dit-il ,_ n'a ,d'autre efpozr que mes pro-,
•
me.Dès & 'elle n'aura pas plus de defirs que pourra lu;
e
en per.mett~e yorre fortune ; Le fieur d~ Lille ? ch arm.
de ces pl\v'.ertures, demanda un délai de deux mo~s
pour s'aifurl!r de la conformité des c/ara~7res ; mais
il n'attendit pas ce temps pou~ être {t,dUIt pa~ la dpuce ur de la DUe. de Gabriely & pour en~ager fa
liberté avec tranfport.
. .
•
Le contrat civil de mariage fut dreifé le 4 Décerni'
bre i , li dot qui fut conftituée étoit moindre que, celle
qui avoit été annoncée ; mais la générofité d.e M.
l'Abbé _d'Ainay répara cette erreur & il prom tt au~
deux époux une penfrqn
file cent livre s jufqu'à u~e
époque .déterminée: le fieur de Lille - t a i~oit èes (qr'7
coottances , fi on ~) l:avoit forcé de d6mo ntr q':/1
droiture & [on défintereII'ement.
,( .
h
pe
.
~
.
,
:
f r
..
Les denic époux ilé ;ureor darÎs :Punion -Iâ plus touchante, dans la ~nfianc,e la plus inerme. Les lettres
q~e lia Dam.e cie Lille a écrites .dans touS les temps
en renferineru la preuv.e la pllJls fidele.
A ,LiOedu -Comtat le 2. Mai 1777, " Je te prie en
" gJ:ace de vçnir me ,ptendre le plutôt que tu pourras .: ..
. " ce dont je t'a1I'ulle. ., (~e.H:. que ce n'eft que l'envie
" d'être aye.c un 'man que ,'alm.è à la paffion & ,avec
" qui 1 je çefire de .vivre dans 'la plus grande jntel1i" gence ....... Ainfi, mon cher ami ais égard à ce .que
.." je te dis & fais ,en. forte de ,.venir me chercher
..
" plutôt que nous n aVIons compte; ...... pour mOl }e
" t'~J11braff'e mille ,& mille fois, adie,u .. ..
Le 7 ....... " Pourrois-tu me croire inciifférente pour
" (oi., mon cher ami? Ah! que _tu connois peu mon
" , c~ur! Les larmes que j'ai verrées à notre féparation
" p.olJrfoient een rendre témoiglilage ; dix puionnes
" en .out été les témoinli; j'e[pere pourtant que tu
" n'auras pas bl!{oin des affurances d'.un tiers pour
,, -être perfuadé ,de mon amitié pour toi ; fi quelque
" chD[e daus moi a p.u t'en faire~ dou.ter , je t'a1I'ure
" bien de n'être, ,jamais plus dans ce cas-là; de grace,
" mon bon ami,. rends pll:ls de juflice à mon ' cœur
" & crois que jamais il n'yen aura ,de. plus. tendre
" qee le mien pour toi. Depuis que tu eft parti, je
" n'ai pas eu on infrant de plaifir; touS les amufem,ens
_" me deviennent ennuyeux dès _que tu .ne les panagll rj
" tOut le monde m'ohfede, je ne fuis bien que quand
" je fuis feule à ne penfer qu'à toi ; il me fembJe te
" p.arler, m'entretenir avec un époux, un amant ~que
" j'aime plus que ma ~ie même.; , oui, mon rendre
" ami, çu eft adoré .p.ar ton époufe ; dans le momelle
" ,même où ru me orois la plus indjftiheote , c'eft -alors
lU' gue je t'aime le plus; •. •... . ne penfons plus qu'a-ux
u momens heureux qui aous font promis quand nous
" aurons le plailit ,de nous el,n hraITe r, je deure que
u ce [oit bienrôt. Jf! , m len,muie ici à la mort; ce .n'dl
" pas certainement que tout le monde .....• Embralffe
ta papa _un million de fois de m a part : be auco up
J
•
.J
,
,
�.S
4
,
.'
Adieu, cher anll, Je
', ;d'amitiés à ton frere .......
, b {li bien tendrement.
'l
'
" t em ra e
,
1 affion la plus vraIe,
a mIeux
Ces lettres refp~rent a Pf r
u plailir de répéter ,enr ' &'
pUIS
me
re
mer
a
"
h Ul'
je ne
ffif & qui forment aUjourd
'Ienne
core ces motS li , expre 1 s uis ue tU eft parti je n'ai
un contrafl:~ :jlli ~;za;:e. l~J~, t;US les amufements me
J
,eu un zn a
ue tU ne les partage; tout le
devunnent ennuye~x efts 9 b 'en l1ue quand je fuis feule
monde m'obfede , Je ~e (lIS 1 "I
à ne penrer
qu'à
r
'
à
J'
d LIOL.
'IGe eut bientôt d'autres lentlmens
. La, D ameIl efut mere & ce titre
.
ren d'It 1e fileur d e
eX?~lme:. ' e e lUS tendre du moins plus attentif à
L1lle Il non pl ' .
,
8 11
réve~ir toutes [es volontés. En Septembre 177 ,e e
P, '
le defir de faire un nou.veau voyage à 1 IGe
p(lS
t&emOlgdnar. fut accompli' ces prévenances continuelles
ce elH
'
{li
1 '114' 11
devoient exciter fa reconnoiffanc~; au 1 ne al ,Olt-e e
échapper aucune occalion d'éc~1fe à fon ~an.
.
" Rappelle-toi, mon b?n a~l, que tU m as ,pro,mls
" de venir me prendre, je ne t en tiens pas qUItte .....
ta fille fait mes délices, ...... mon bon, un enfant
',: ef\: qllelque chofe de bien agréable, il fait .l~ bon~
." heur d'un pere & d'une mere; pour mOl )e me
" crois la fe~me la plus heureufe, : ..... avec ,tOI nouS
l n vivrol,ls tOUjours d'accord, le rent/ment de l un efi le
" fentirawt de l'autre, c'ef\: ainli q,ue ~ous vI~rons
" toujours ....... ,Adieu, m?n bon amI, . a~me~~ol taU,n jours bien, je t'eh prie, pour mOI Je t aime de
" tout mon cœur.
Le lieur de LiGe goûtant le bonheur domefl:ique ,'
n'imaginait rien qui pût en troubler la fécurité ; m:I1S
l'inf\:ant de criee approchoit où il devoit perdre fes
biens & tout ce qui pouvoit l'en dédommager: des
pertes dans la liquidation des anciennes affaires, qu'Il
avait été impoffible de prévoir & d'autres non moins
confidéra~les depuis 1776 ju[qu'en Mars 1779 , av~ient
ab[orbé bIen au delà de la fomme de .c ent mine hvreS
à laquelle il avoit réduit fa fortune aux. yeux de M.
l'Abbé d'Ainay.
Le
,
\
"
-
' Le mal ét~nt · devenu fans remede ..~ la Rai[on , de
Louis de Li{le .& fils fut forcée de dUclarer l'état de
, fe~1 affaires ': l~' ca~fe de cet é~énement, dl: .purement
Fortuite, il Y aurait de l'injuf\:ice à l'lmppter au Sr.
9~ ,L ,ille. Sop ,ép~ufe , fut )a, plus ardente àpa~~.a]er
ram~rtume, de f.a .11iuation & quand eUe ofe. aUJourp'hui .lui ~n .faire un reproche, eUe dément. .Ir, 1a:ng~ge
fie , fo.n cœur & ,' outrage' la naEuœ. Le lie~lr de ~~Ge.
r~~oit , co~pable aux yeux de l'univers" que . fon
époufe ' ,n'en auroit pas plus de droit d'infultèr à f0 V!
malheur. Son époufe s'empre{fa , comme nous l'avons ,
,dit, d'adoucir les chagrins de fon mari; un voya~e
il, LiQe lui fut · proEofé & elle n'accepta ~ette offre
qu'à condition de ne le point quitter. Si des circonftanc~s, néceffiterent le fieur de L iGe d'aller à Avignon,
voici de quelle maniere elle luiécrivoit de . Lille où
elle, était.
.
. ~o Mars . 1779' " J'arrive, mon bon ami', & trouve
" ma tante ( Madame la Marquife du Baucet) dans
" les meilleures difpolitions ; elle m~a fait les amitiés
" ' accoutumées ', & deure beaucoup de te voir ; je lui
11 ai dit ce qu'il en était d~ nos affaires, ça n~ nouS
t ' rènd que plus intére1fans à fes yeux ' ainli, mon
l' bon, . . . . . viens au plutôt; adieu , je t'aime
v bien."
2 1 . "Au moment où j'allois t'écrire, il vient du
t. monde; je lui demande excu[e & me void. M . .de
tJ Varvarenne m'a donné de , tes nçuvell es ; . tù veux
n refler quinze jours à Avignon, ce temps me pau roh long & ~a tante me charge 'de te pre1fer de,
" venir; elle delire de te voir & de te faire oublier
" tes chagrins; il ~ fl fort m al, dit-elle, que tu ne fois
" pas venu tou ~ de fuite; je 't'ai excufé fur te s affai>, res ; ainli, mon bon, viens au moins paffer les .F êtes
" avec nous ; ma tante vouloit t'écrire ; fais- moi ce
" plaiftr..... .! Je penfe que tf.!. auras befoin d'argent;
.., dis-moi li tu el1't ve ux , je t'en envoyerai lorfque
" mon frere ira te voir; je fuis éconnée qu'if t'en
" coûte fi peu; je crains que tu ne te nou,rri1fes pas
" bien; tu as cependant befoin de te réparer; prends
B
1
�'6
. ("
d t i J'e t'en prie. AdIeu, mon tendre
,t bien lOin e a ,
& fi' à '
1
ami "Je t'aime tOUjours plus
UIS
tolo pout a
" "
Je prie ton Domefrique d'avoir bien foin
" . Vle. • • •
t
, h'1er,
. mon ,c her anll,
'
t'ai pas éc[\t
, 2. 3, ~':f)'e <
ne 'Tavois pas que le Porteur fût à
" parce
'lue
Je
" pour t engager à
' j
'
Ma tante t'écrit
venlT
" AVTgnon. . .
,
à 1e rewler
c (' . ' r .
'1
d' la mauvalfe grace
, amll, mon
"trae
'f,
" ami 1 je ' re conreilles de ventr; tu 1 eras . ~es d,a fIi
aires
"
omme là-bas & noUS aurons e pi a1l1r e nous
u ICI C
, c '
'd '
" voir' à la vérité-je fuis tout-a-ratt en -l'elOe e 'te
" [en~:r à Avignon tout feul ; rends-toi, au nom de
" Dieu, à noS infrancès'; mon fr~re & l~ Baron vou" loient aller demain te prendre; le veux te donner le
,
'à'
L
" temps -de t'arranger & tu n as qu v~OIr .•. , a
" 'confcience de me laiffer feule! ••.• 51 tu ne Viens
" m'aider, je ne fais que faire .... Adieu, mon bon
" ami, je t'aime ,bièn je tç jure, .•.•• ta fille t'em"braffe, Adieu,,,
JuCqu'à ce mom~nt l'union la plus parfaite a régné
entre les deux époux & l~infortune du fieur de Liile
n'avoit donné qu'une nouvelle énergie aux tendres fentimens de la Dame de Gabriely: mais cette fituation paifible devait bientôt être troublée & leur mutuelle affeétion alloit être altérée pa~r la haine & pàr l'artifice. SI l'honneur oblicre le fieur de LiDe de rerpeeter les al~teurs de fes 1>m<1Ux, il ne peut leur facri-,
ner le pl Ils doux témoignage de fon cœur. Les foup"
~ons ctuels, don,t ' la Dame de Gabriely a été agitée
ne font pOlOt--touvrage du fieur de Lifle on a vu que
l'adverllté avait refferré leurs chaînes & ;ugmenté leur
confiance.
Un~ ,pr.emiere lettre a produit une méfintellig ence
auffi IOJuneufe à la Dame de Gabriely, que doulo ureure pour fon époux: voici des fragments de cette
lettre qu'elle re~ut à Lille, lettre que le fieur de Liile
a, eu la générollté de rendre à l'Auteur en Juillet derOIer, fra~ments qu'il rupprimeroit avec plaiGr fi l'Au·
teur'blaVOir eu la g'enérOlue
r., de w.:. pas t:n éCrire
' d
e. iPs
u
tem es encore.
'1t
" de tOf:11);:'
n:
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•
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•
7
/1. A.•.. le 2'7 Avril 1799-' ~' .. re vous engage à'
" réfl.é,c,h ir, Mildame, ~' " .. que qui a pu vous rrom" per .... p'lr fon mfl~iage, peu,t vqus [ramper ençore~.. ;
" co~~dérez qui ~ous fomnle~ ,~ ' l,"e,gaI;dez, ro(~ inca" .Pillcit:é ••..• , fe~ ~ort,s .... ;ç'.eq: Jui <l~ nous f9"rc~ à ,
" dé\lo~le,r fes cr,un(e~ " • r •• lç fll'arrêçe , ,les' ..~t;t~1.1s •
" VOllS._ feroient frérn,ir ; je vous en djs affef lWllI que
,'t VC\~I ,fefi{be~d u qlo,in!\ aux !llenfQ~ges d'un '~om ~e
" qUI l '\P~'ès ~voir fait votre malhellr fcù:mmc,1J. f , · vo~
" draie encore vàus priver de l: il:\t~rêt que votre .'ho'n" nêçeJé infpire; a:eft le plu~ gran~ ,d~ [es torts. ;~ " "
Gette le~tre devOIle le projet artifiCIeux que 1'01'\ ~v9it '
. fornH~ de feparer les deux époux; le fieur de Liile avec
Ir ~œ!lr de fan épot,lfe ne pouvoit être .malheyreux ; avec
.1~ revenus ' de fa dot jl ne pouvait connoj~re ' l'indige.nce ; ~ais la haine, mais l'intérêt perfonn~l vouJ~ten~ lUI ravir ces biens précieux & rien n'çi:oit plus
'L<;,hffic~le fi on ne lui enlevoit l'eflime de la parne de
_Gabrielly ; voilà le motif de cette affectation crüelle
,à. }ui j}[~rer des torts, des rufes', même de~ ' c'ricies ;
voIlà enfin ra p.re miere lueur de ce complot cériébreux dont il ne peut expliquer la caufe & dont il
.: ~
.gémit d'ê tre la victime.
". Dep.uis cette fq.tale lett~e, ~e fieur fl1e_LiD<; ne r!!fra
pas long-temps avec fon époufe ; elle fèhâtâ q'q.rrive~ à Ma~feille tan~is que fan m ~ ri allait à :Ro~ue
vaire: mais c~t élOIgnement ne d,evoit point alilrmer
Je ~eur de LIDe; fon époufe allait puirer "ans:! !ès
fentlme.ns t9J.lt ce qUI pouvoi.t détruire d.es. iinpref~
fions facheufes_ & clle réitéroit le ferment inviolable
de eréférer la mort à l'o ubli de fan mari. On va_ entendre de fa propre b~uche le récit
ce qui fe pa{fa ft
Marfeille.
,
12 Juin 1779. "J'ai. été on nc peut pas plus mal
J, re<r~e;; .•. tu fel)~ combien cela me fait de pei ne ....
,n mais n ImpOrte, Je reilerai ... ' mon ami; je ne te
J' c~nfellle pas ge v,en i,r " tu ferois même très- maL .....
" lal{fe-Ies faire & tranquillife-toi ...... Il faut çonven ir
" ~ue notre fort eft bien trilte; lJlais, mon ami, je '
" t en prie, ne viens pas ici; fais-~e par égard p Ç>ur
de
�•
,
,
9
s
'
'ce qui peuft'être nécefl"aire pour
Laiffe.;lesfaire , tranquillife-toi. On tentoit ' donc ~'af.
faiblir le zele & la conftance de la Datr'e de Gabnely.
On te défefpere; on t' a~cable; elle eu~ dit plus vrai
fi elle eut ajouté: on diffame ta réputauon, on outrage
tes mœurs on s'efforce de t'avilir dans mon cfprit. Je
- .• • Je t envoleenCaot fe porte b'len • • ••• Ad leu,
'
. ' t' notre li
D,
.
. t'embraiTe bien tendrement."
D bon ami, le
r
• J
ft cache pas que mes parens IOnt
Du
, e ne
. &
fi'
l
ro . -~ indifpofés cont~e . t?l. t c.e erOlt m~b~s
tourol:r à dos ft tÙ venolS ~Cl.; Je ~IS m~~fft~ 1 e
r tes faire revenir, mais Je ,~,~OlS ~a l, CI e.. •• ..•
.
'11
1
On. te deJeJpere, on tacca ble,
Sois rranquJ e.. • . .
.
d'
. fi
r..
dre cela en pauence; Is-mol 1 tu as
n il Nut pren
befoio de quelque 'chofe.".
.
·remler
. Iu'llet"
Tu me lalfl"es bien long-temps,
1
•
.
P
ami
en peine fur ton compte; vOilà
b on . '
.,
. recu. detes nouve11es,.
" mon
.
•
hUI't
lours
que
le
n
al
n b lentot
' . ,. é .
" je ne fais que pen fer de ~on -fi-lence ; le t al C~lt
" [auvent depuis; écris-mOl dope pour me tranqUll" luer...... "
. , '
13, " Je puis bien te prot~.fie~ que le R.éco~t~ mn
" de toUt ce qu'on peut me dire · contre tOI ; d ailleurs
" tout le monde rend juftice à ton honn2te~é; on te
" blâme de t'être marié; à cela dès que Je n.e ~'en
'" plains pas ..... que l'on dife ..... Mon projet efi toujours
" d'avoir ton pere avec moi; j'efpere qu'il ne s'y refu" fera pas; c'ea la conrolation que je lui demande;
" toi, fais-moi le plaifir d' écrire qu'on me re~ette teS
" haôits; je les ai demandés & on m'a ~It. qu;o.n
• " les gardait •.... . . Adieu, mon bon ami, Je t al" me toujours bien' , fois-en perfuadé. "
'la. (, Je fuis étonnée de n'avoir pas des lettres d.e
" ta part; fi c'ea par rancune, tu as tort; je ~e diS
" les choCes comme elles font ,· mais cela ne dOit pas
Il t'affeaer à un certain point; tu es dans un mome~t
" li. avoir befoin de beaucoup de patience •••• éc[\~
" m~i deux mots touS les jours; tu fens bien que le
" dOlS être en peine quand je ne re~ois pas de tes 1et" tres .. : • Je me fuis chargée de la part de ta ~lle
" de te dm: qu'elle t'aime beaucoup : mon frere VIen" dra te vOir quand tu voudras .... ne te laiffes pas abat" tre par le malheur & mets-toi un peL! au defJùs de '
» ra.ut ; ce n'eft que par ce moyen qu'on vicmt à bout de
" bIen deI chofes •••• • Adieu. ~,
.
t;
puis -vien procefler,que je n'4coute· rien de tout ce qu'.on
me die contre coi : voudroit-on une preuve plus trap-
pame de to'lt ce que l'on fe permettoit aup~ès de la
D ame de Gabriely pour l'éloigne r de [on man?
Quelle que fut la fermeté de cette Dame, elle devoit céder à tant d'efforts réunis, à . tant d'artifices
préparés & voici ce qu'elle écrivit au fieur de Liilea
" Mon oncle s'eft expliqué clair.ement fur votre.
" compte à touS; ...... j1 oe veut plus entendre parler
" 'de vous, ...... 4 fi tu veux que .je te dife tout, il
" 'n'a conCenti que je refie à MarCeille, qu'à condition
" qu'aucun de vous ne ..viendroit refler avec moi; là·
" deffus je lui répondis que mon mari faifoit 4 ne •
" exception, mais qu'il fe tranquilliCât, PARCE QUE
" TU NE VOUDROIS PAS y I\ESTER, QUE
" TU , T 'EN ÉTOIS EXPLIQUE AVEC MOI;
" alors il me dit: à la bonn.e heure. Voilà, mon bon
" ami, quelle dl la ta<;on de pen[er ge mon oncle &
" des fiens; il faut prendre p<l.tience & ne pas fopger
" à leur écrire ....... Comme je t'ai ' dit, je ne veux faire
l, ni plus haut ni plus bas que ce qu'il voudr 4_; .rien au
,; monde ne me fera cha[lgedà-deJJlls ...... Je t'·emb.liaffe •
12.•
,
,Adieu.
.
\ La Dame de , Gabriely . efi · donc déterminée à ne
faire ni plus haut ni. plus bas que ce que fan Qnc!e voudr~, rien nu monde ne la fera changer là-dejJu,f. Eft-ce
là! même femme qui écrivait auparavant? Je puis bierz
u 'pro'tefter .que je n'écoute rien de tout ce qu'on me dit
Co!!!re ·coi. Mon b,on ami., je l'aime toujours bien, (oisélJ .perfuadé...... E(1:-ce la même.. femme qui écriv.oit
apfès 1'.iGfor[uQef. d~ [on mari ,? p:rerz.ds bien foin de toi,
je t'en prie; je e1aùne,1tj)JJjoU/'s plus.:... Tu n'as qu'à venir...... La confc.ience 'Ue me laiffir feule! ... ". Si tu ne
viens m'aider , je .ne fais que fair; ........ Il n'eft perfonne
qui .ae fente .la:"'fai.fof\ \"de ·cettç, c\i{férel1ce & qui ne
C"
�,
•
1-1
10
s'indigne de cette foible-ffe honteufe' à adopter un reffentiment étranger.
Le fieur de LiGe, fenfible à un changement auffi
bru[que , ffilffi blizarre, s'en plaignit avec une forte de
fierté & vafti 'quelle fut la réponfe de fon époufe.
" Il mè pàroît , mon cher mari, 'que
ton fec q~e
" tu pren!; avec moi te fied fort mal, Je ne croyOls
" point que ta mauvaife h?meur s'étendît jufqu'à t~
" fem~e; je t'ai fouvent ,dIt 9ue da?s le malheur Il
" faUoit être doux & tu n dl: rien molOS que ça : tout
" ce que je t'ai dit d'e Mrs. de Jarente eft vra~ ~ il ~~
" eft ft cheux que tü le prennes comme tu fais; malS
" ce qu'il y a de bien' sûr c'eft. que n'attend.a m du
" bien ' & mon bien-être & celOl de ma famille que
"d'eux je dois les ménager & ne-' faire ni plu.s haut
" nï plu~ basque ce .'lu'ils voudront, c'eft bien .fur
1)
qùoi tu peux compter; ......•. du refte tu ~s ~altre
,., de ' faire ce que tu voudras, le me garderai ble~ de
" t e dbnner des confeils, tu les prends trop mal pouru que je m'en avife; ...... ménage un peu tpn mon~e
" & ne me dis pas fi féchement que tu es mon man,
" parée que je le , [çais.
.
" J'ai recU ce matin une lettre de ton pere., Je te
" l'e~voie ~vec une autrl! que j'ai reçue il y a plufieurs
" jours & '<lue j'avois oubliée, tu re~eY'ras auffi celles
1:
", du ' C. V:, je te prie de n'en pas fmre ufage dans ce
r
" moment-ci ,~fais attention que tll n'as abfolument pe " fonne pour toi & que tu feras blâmé de tout è~ 1~e
fùas ; eh! mon Dieu ~ Dit!U te préferve de ventr lCl.'
" tu ferai! dérolé du matin au fou; tu . ne veux :as.
" tu
1
" l'entendre, fais ce que tu voud·ras. Adieu. St. AN . .
;, DRÉ TE DIRA MILLE CHOSES QUE JE M~
;, ' DISPENSE DE T'ECRIRE; je t'embra!fe & fUIS
" ta femme ". E~ le 28 Août elle lui marquait eocQr.e:
., ••..• Tu as recommandé à mon frere de me dU;
" que fi je n'avois rien d'agréable à te marquer, !
" étoit inutile que je t'écrive; cela étant je ne le fa'ls
" que pour te donner des nouvelles de, ton enfant q~e
" je vas févrer •...... J'aurois bien d'a~tres ch~fes à
" dire, mais elles te déplairaient & Je me tazJ'.......J.
t:
" fuis toujO\lI:S avec !le.s fe.ntimens :qw~. tu, me cQfl.nois;
,. ta femme ...... .
j
çeJte jei,tir!! fut· J;l d~rnie..r~ qu\!, . re~uÇ le fie ur de
~iae "un~ plus longue c;;orr~fpqnQé(nGe , de.venpit p,énible .& (upçrJll,le .~ l'époufe ne. témqig69jt plQs.le m1m~
empreffement . à ~ partage'r les . B.I!ines de fon, mat;~,
l:épou~ ' ne lifQic plus qu?ayee d.Ol:!.leur des lettres fi
différente.s , d~& , prem~tres &. ceJt~. crift.e. c;;olJ.1paraiJo~
ne Pfodujfoi..t. qut\ des fo,uyenirs affiig-ean t.s• Pour; qUOl
cqiodroit-on de le déguifer? Le cœur de la _Damç de
(fabrre}y n'é~oit poinç chang6, mais il n'avoit plus
cette fenftbilité cQPlpâtiffaJ).te pour fOJ;l mari-: ell,«;. av,oi..c
(i.!];I(litpç! cie5, g<;>ûts. ffi'{()h;s à l'ilmOP.r dç fes .devoirs
&c, des pe-fides lui j~LbfiQieQt fap~ c~!fç cette_ coupable
in~ifférenœ.
i
Si la, Da,lP e de LiRe " dans le calme de!l paflions
h,ainetife,s qu'Qn lut) fajfoi~ partàg~r, eut confult~. [es.
nlus (eerets .IPQ"vem~ps , fi e.llç , eut rappeJlé à fon
erp,rit ces l~t~l'e~ f( tpqchantes que fon arne. 'lvoit djc~es" elle , eut yo.1~ y~s Un époux 1T!a1~e\l.reux ,_~lle. 'Cu~
PtY féré le p-hüfirr dç vivre avec lu.i à la - vain~e g!oire
d.'êtte· flatt.ée: mais dOllée pe~ chllrmes de la beauté &
des g~ac::e.s, plus féduifaqtes encor!1, , . t.o\lt l'ipvitoi,t ~
jouir des délices de la foéiété : des;; pt;rfqn9-e.s. .JP.al:-.
intentionnées ne cr~ignjrent point d'emrerenir ce g~l;lr~
de vie, el\es lui faifoien~ aimer un domicile' pl~in dç
f~fte qu~elle eut qQitt,é fans, e{I:orts & ,qu'elle !l~ f~cji7,
fi!:r~ plllJ' qu'avec r~.gr!!c. Voi~ ce qui .~ PfÇ>fqndèm~n~.
é:IJilu.. 1~ fj:eur de LiPe.; voi\~ u~e de~ grandes raifqn~
qui l'ui rendra toujour~ QdieQx le féjop,r de Ma,rfeille.
\ .I,.e fi!!ur de J;,iQe ., Qhligé <ie faire 4iverfioo ~ [es
ll1au~ 1> voyag.e_oit de Roquev,\ire en Languedoc & de
Lflngue~oe à Roquevaire: fans celfe il fe livroiF II
l~efp',!ir 0 fans cçffe lHl,e fâcheufe expérience renverCoii:
f/!s chirn-er-es. Des procès l'çxpofçnt-ils à de~ dépenfes
~onûdérables (Sc ,vlmt.... il 'lJIplorer quelqùes fecours, 0 ,0
Ifi offre. ironiql1emeM::j:J,;Q I:yenj.r pa,r:tage~ à M~r!éille,
la table & la maifol1 de fOll époufe ou plutôt de fes
e~nnemis. Ofe-t-il pe.i~dn, par écrit fon affreufe fit~a
qon à. M. l~Abbé d' 4iQ,~y, ). il ne reç9it qu r. des ré??,n~
C
1
.
~
.
�,
13
.
" . vptre lett!C? avef <pr'rere de .me fair~-dont~et' fa. réponte ~
1" rJ~ lenderp~inM,. ,Lavabre me . fit dir~ qu'elle n'en
" avoit aucun/!
à, donner & c::lue
....., ·J'aO'i.s
comme "J avife~J
,
r ~
t
~
12.
fes feches' rébutantes. Defire-t-it de prendre quelque
arrangeme~t provifoire, toute fa famille eO: déja à
Lifie dans le Comtat pour réparer la fanté de fOll
époufe-, ~ai~ dans la vérité p.our fuir fa prHence; enfin
prelfé par <!le befoin , ~ontralOt par la .décence , tyrannifé par ' lel défefpoir , le fieur de Llfie préfenta une
requête le l.S Septembre pour demander des alimens,
& comme auparavant il ~avoit engagé M. de Varvarenne
de faire encore quelques tentatives, voici quelle fut
•
fa réponfe. .
..
A Lifie du Co-mtat lé' l 4 Oé\:obre l']S2. " J'ai reçu
" le même fair du départ de Madame de Lifie pour
" 'MarfeiUe ..... : là lettre que vous m'avez fait l'hon" ne ur de m'écrire le 4 du courant , par conféquent
" il ne m'a pas .été poffible de)a lui. communiquer,
" & qui aurait peut-être fait plus d'effet que tout ce.
" que je puis lui avoir .dit ,pour fe. rap'pr~~her effica:'
" cement & pour la vie d un man qUI 1 aIme & qUI
,, - la chérie, v~us ~ver rairon de dire. qU,e c~ ' Tt' efl. pas
" fan cœur qw agit, car on ne fauroLt lavoIr mezlleur
" qu'_elle l'a toute la Ville l'a vue partir à regret, &
\
\
\
,, ~ nous en p~rticu'ier n'étant pas 'dans les difpoGtions
n
bù toute la famille aurait deGré qu'elle fut .•.. ' . Je
" rû.j a-i 'Communiqué · votre lettre
d' ~ois; 'îe.lrc:wi~ . ~l,IfiitÔ~ !'-' fyiva,nt vos or~res; ~.e~pJoit
o!, ~'évoc:.~ti~.n ,qut fu~ fignifjé .....ù
~,
'
~. "p'lut au\.q~\.quej~ lit \fieu.~\.d.el Line 11 eut :à , rçl'rq~her
~~ [es epneJtni!;J61}-l~ Je l:éfroj~iq-eN~Çlt ,de: fon, ~PQufe
~
uée
f~Wis , p'a;-t~on FilS vu 1" D~m!1 d~ qabriely fubj4g
~.u , point ,d~ fe \~igH~r avec· ,(on be.au-frer~. ç,ontre fan
mari ? ~'tl,t"91\. P!l~ . lu un ' Mémoire ou les ,p.er[on.nes
les plus ch~res l'~ct:ufoient indignement d'avoir violé
.cF qu'~l. Y: ~i èe ' plus facré? N~a:t-on pas été. les té:moins ... ~~: ~ !: QI,I~,efi-il ~efoin de fixer les yeux du
ppblic fUI: .dçs obje~ fi ,.alHigeants ? Ne fent·~.n. pas que
le fieur de LiGe trOUve dans le rein de fa famille fes
j~placable~ epnemis? N'appréci~-t-:on- pas ce qu'il lui ,
~ n ~oit c,?ûp;;r P9.ur . l~ilfer dans l'obfcuriré cet odieux
mynere?
.
'
'" A.vant .de;t.~iJt:juger · un procès important le fieur
~:~ Lifie du:t p~vo~r ,en prévenir fon époufe; ce. procédé
!iof.lnê,te o',eut :d'au~re ~éponfe que la lettre fuiyante.
• '!l Vous (~ve:z , . MonGeur. , quelle , eft ~a façon de
{ ' r penfer ,. je.: vous. dirai ce que je JlOUS ai déja dit, c't;ft-·
1.' là t9ut ê~ que je puis répondre.
'\ ~. ,
,J
1 t
J
• ..
\
~..
~ ,à M~
Lieutard fan
" . neveu) il m'a promis d'éérire' à M. de Gabriely
" pour quiil engage Madame fa' fc;ur à fe .rappro~her
" de vous & c'efl: bien tout ce qu eHe aurOlt de ,mieux
" à faire ........ D'abord après ' la' Touffainr je 'in.
" rendrai à Marfeille , quel plainr pour méi fi je' pou- '
" .vbis vous trouvèr enfemble! " .- ! '
• Le fou hait de M. de Varvarenne ·ne fut point eltauèé,
la Dame de Gabriely'marquoit t0uj6urs le ~êm~ éloi- ,
gnement pour le Geur de Lifie & elle ne dalgnOlt plus
répondre à fes lettres : il fe vit forcé d'évoq~er fa ~aufe
en vertu du privi\ege des pauvres apr.è~ avoir offert un
premier arbitrage à fan époufe -& VOICI ce que l~ fieur,
Efielle fan Procureur à Marfeille ,chargé de . là'l,~rrre, } ;
lui répondit.
' .J~~"
" N'ayant pas trouvé Madame de Lifie chez 'eUe &u n'ayant pu y paffer raprès dinée , je lui fis , remettre'
" votre
1
De Lifle de Gabri~ly.
Cette lettr~ cruelle fut pour Ïe fieur de Lifie comme
un préfage · fi;~ii!r.e ,qui lui annonçoit la deftinée de fan
procès. En effet il le perdit le 19 Juillet dernier & le
' 2.0 arrivé à MarfeiHe, il écrivit en ces termes à la
Dame de LiSe.
" Madame, l'improbation que dans vos dernieres dé'? fenfes vous avez donnée au procès de mon commerce
'1 avec mon frere me fait juger que vous ferez moins
., touchée de fa ,perte; je me dois néanmoins de vous
,. en faire part &... qu.e c~t{c perte m'acheve,. ce font
" de nouveaux avantages fur moi ; pas de cœurs fen.!' fi~I~~J je penfe , q~i les envient! PuiŒe le vôtre les
.....h:Jetter ! Je dçfir~ r §c. j'ai, befolll de me concilier
•
1
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:o~re
"
~I'ét"àt
, "
venez lavée
fille, autrement,
~ , avec vous,
" {i 1',( d
dh
, ' fi' fi: fi cruel que la vue 1 ce e m
" ,ou Je UIS e
' . J doute ~uion 'art jamais' en4
" enfant 'm~aceablerOit , J,e
.~
' 1. 'b' {4' d'
" core' iOnrttré & marque , l'Jus vI~e~ent e e"OI? e
" conrolation & qu'J;lne époufe flL~ 1amals '~u pI~: d~
;r;. ;;J ! 1,',1 I.. 'ous (leJ. venir' dans lu br'as' du mar~, qu,
" raLjUll '1 t: ' Y
, . '
,
' r.
l
ême
J -fI.. "d
. _ f' Coneinudez-v.OUs lur e m
" l a ae,nun e-. .. . . • • .
r
,
,
lb ' ~'
" tO~) RIen alors ne m~nquera plus a ~eS ma eu~, '
né fera pas pour moi
tErre
n'employer
" ma..!~ :.eto!l~ ,atttres hon~~tes m9yens , à ttôflS enten'dié':
" encore
' -. 1C't'
.
liratfe1.u, p6urt1'mo1 "ma fi\le. H e'l as
\J etolt lpOU'r
" ,elml & le repos de fes 'peres qûe' j'étois a là ppur" e e
'
f: lflé~ch'Ir. " .
" Jfuite " de mes ' drortsq, "mais il aut
" Jè fuîs, Mâdame, avec le.s fent!nl'è,~fs ~qe Je v~us
"
~Lr n ' , é man i, '!' , G..
' T
" dois
vb" tre aneclIonn
,
,
La Dame, dé', Gabriely ne ~ép~ridi( pas. à. ~ette lettre;
quinze jours apres le Geur de Ltf1e "en écrIVIt pne a~t~e
qui n'eut pas le même [orto ' .
: ,"' . ' ;
cc Il feroit à1I'ez diffiCIle que Je réponddfe, Monfteur,
" à tbus ies anicles de votre lettre, : fa 'longueur ncr
" me '1e permet pas ; je me bornerai à vous dire te
" , que j'{li (fit à Madame votre Tant~ .f;:, à M. le
" D;.. ,; 'il'Y a long-tems qu'e ma façon 'de penfer V<JUS
" eft connue, rien ne peut la 'change/ , je vous en prén viens. ~l .e{l: fort inu çile que vous vous concilie,z avec
" moi'ftir vos nguveaux projets, je les approuve toUS
" f~ns vouloir en êtn iqil:ruite ".
.:
°
un
1
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~!.
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li;':) .... ··
l
J
, . '. ' l ' De Lif!ede 'Gabriely. ' "
l.,
\
,
•
·1
Si l'on VeUt favoir ce que 'la Daine ' de 'Gabriely
avoit dit à la Dame de P .... née D .... , qu'on life
ces mots terribles ..... Qu'elle & [es parents exigeoient
une Jepararion de corps {ans laquelle point d'arrangement.
Q uel efi: donc le motif d'un arrangement auffi ex~
traord,inaire dans l'ordre des chores? auffi violent pour
le fieur de LHle? .. .. A- t-il attenté à la vie de fon
époure ! Son ,caraaere féroce ~{l:.-il incompatible, avee
le repo~ de la Da~e. de Gabnely? A-c"-jl ç~ff;"'. ~'être: .
un man tendre, ralf~nnabte! Non, mais- il efi: l'ot>j1t
,))
.... ."
.
..
1)
a'uné ' ,haine ïnv~"térée , mais ' il' li ir~ité toutes _ces peJ
tites paffions qui craignent de paroître, mais il eft
niaIheurtuJC 1& 6n 'lle péut le hl'Î ' pardo'flGe1'.\ Sa femme
. eil le -feul bien, 'qui lu i ref1:e', il faut igte.retferJon.amaur
, pI'0,pAe .' à." ~éj'(frre-r un f nral'i 'qùi, 14> déihonore, il faut
étouffen œs; reprod,e's ' de . la canfc.ie~è\ par.. les\ appas
d'une.granâe ville, ii faut éloig'aeli u'n . objet . dé{àgr~able
- pour. rie JJlü i offrir , qu'e 'des tabl ~a l,lx ' féduiIànts'.;_ voilà
, lé , p-la:n naI'tificieux que 1'on colore 'Par de vaines d é_ .dainatiol1s fundées fu.r .ta décence ~ ,la bonne foi, la
' .lcanqJ.JillUé de la Dam:e.:de Gabr.iely- ~ & : d'o nt orr'va
voir, 'l'exéeuti0n par une lettre artifi:ement imaginée.i ~
: Ille ~fil!'U ' de LilJ.e pôÙr s'affurer un. , fort 'trop long~ .tems incertain, slé rôü, .encore adrdfé. à [a refpe&alJ,le
Jparenre pour prendre ; One voie:.de " conciliation, &
'VIilici ta lettte qll'e1k~recut de fon :a'urre:\neveu. ,
'
" J'ai ,lu la li longue épître . qûc ,M. :Auguflc' "bus
' " a ,écvit" , mille trairs de caraaue Jorn èonnottce l.ou, ;, jours plus fho:mme & réfroidiro ient l~ intér~ t le plus
., ,c'haud, fi ce fehtimenr pouvoient .exifl:n , je ne puis
,., 'en ' auc une ma'n iere accepter le titre d ~a rbitre .. ;,. Nous
;, ne vo'yons de poffible que les d uX ', pr.apoliti<5-n s. fui. ;, v'a ntes que vous voudrez bien ,e:Xlprimer à M~ Au,; guflé.. .. • Primo, celle de partir: ;: ';1 ;.& .AtflJ"cce
" cas, ,600 Liv, de pe[lfion qU? - Ma'dame de Lifle de
" Gabriely offre, [ous ' la condition d'une 4,éclartl.!ion.
" fignée far [on mari, dpnt nous difcuterqns la telÏèll'1' ..::,
,,,, m'Umm M. A ugujfe' én~ état d'{lller vivre en paix dans
" ·'un petit -endroit. , ' ,
"
,
" 2°. Si ce premier parti ne convient pas à M. Au..
" gufle , nous ne voyons que l'Inde qui puilfe lui .. :.
n fGI:lroir quelqu'es moyens raifonnables; dans ce cas,
" on pourra lui fournir une p ite pacotille dans la
" fa,,:, llle qui, à ~ ue de pays , ne pourra pas palfer
." m ~lIe éc u~ f .. .. .z! ny a donc à arranger qu'un des
'~, del,lx, p ar;tlS que Je pr0p,0fe, que M. Augufie choififfè j ... .
Il voLla le réfult dt 'iJe m'eS confére nCes avec . .... , a Ye~
rJaaa,me de
".
a été écrite avec le fa
id de
eft pil",jiUq
1
\
1
�•
17
16
r'
_
ens
t1u'elle a dû faire
,
. de peindre touS les lenum
naître..
maniere' accepter le titre d'ArbiJe ne p~s e~ ~cunevous montrer un Juge inexorable
_.cre; .... POU$qU~l one t:
aere re:jiroidiroit L'intérêt
uand v.aQs ~dlte, que Jon cara . '
' fi'
0"
~ plus. clraud fi ce fentimentpOuvolt exifter?~; ;ru~e~~
. , iiftadans l'ame de ce parent, pUllqu 1 almo~
-'feep~~:.anlee Lille, puifqu'il l'eftimoic '. puifqu'i~ r~ndOl~
'uftice à fa droiture & à fa franchlfe: aUIOlt".ll fubl
é l . s de fa fortune? Le fleur de Llile fe
les r va uuon
f 'd' 1
. aTdera de le .p~ér., de craiILte de re rOI Ir a conLnce ue lui infpire le cara8:ere de ce parent. .
J
.' '. Nou; ne voyons, de poffible que les deux propofttLons
,. .
Que fignifie ce nous ? Vous ne voulez
U/vantes
•
•
•
•
. lOt
. érenc::e.
ff"J.).
•
Arbitre & vous devenez. Parue
1.
{t
pas
,r;
Celleerre
de partir; dans ce cas 600 l'Ivres, de 'pen)lon
que
_Madàme ae LiJlé , . &c.... Avez-voUs efpér\! 'lu une fo"!~e
t~utes
À
: d'âra:enc le dédommagerait dè la privation de ce qu l\~
de plus précieux dans le ~onde? Avez-v~us cru. q,u Il
. pourroit vi~re en J'ai~ apres a~01r co~fentl au. traite le
plus humihand l. • SI.ce premier parti. ne conv"nt pas.,
&c. Ainu efclave feIVIle de vos momdres de~r~, ~1
_ira traîner dans l'Inde fa honte & fan ignoml~le, .11
fera même forcé de louer votre barbare générofice, puir-
,
que v(Jils aurer pu lui affigner une petite pacotille qui ne pourra pas 'paffer mifle écus... Etces conditions révoltantes que
l'on ferait à peine ' entendre par la confufion, par le
'trouble, par l'embarras, vous les appeUez froidement,
le réfultac de vos conférences avec la Dame de Lifte.
Le moyen de continuer une pareille analyfe fans
épouver l'indignation & la fureur ! Que M. Augu~e
choififfe. Oui, MONSIEUR, il choiGra , mais il chOl{ira le parti de l'honneur: ce n'eft point dans l'Inde
qu'il ira s'affliger fur fes maux, qu'il ira faire entendre
fes phintes, c'eft en France, c'e{\: dans les Tribunaux de la Juftic~ qu'il viendra demander fi une femme peut contraindre fon mari, [on matere, DE SE
FIXER DANS UN LIEU D'OU SONT PARTIS
DES TRAITS SI DECHIRANS. ~
.. ...-,....,
~
C'en
, C'en eft trop ; le fieur de LiGe franchit le temp~
qui s'eft écoulé pour arriver au temps préfent. Mais
quelle eH: la bizarrerie de fa deftinée de ne voir par~
I
tout que des images douloureufes ? Son cœur revole
malgré lui vers \,époque fortunée où il y retrouve une
époufe chérie, c'eft-là qu'il va fixer [es regards & il
ofe efpérer que le public lui pardonnera cette foi-,
bleŒe.
.
, La correfpondance de la Dame' de LiGe a dû con·
vaincre touS les efprits qu'elle s'eft montrée fous les
traits les ' plus aimables tout le temps qu'elle a été
fidelle à fes. dev?irs ; époufe fenfible, mere tendre,
elle commuOlquOlt à ce qui l'enrouroit la douceur de
fon caraétere, l'infortune de fon mari lui infpira une
paillon plus fublime , elle ofa braver les _malheurs elle
fupporta l'adverfité avec courage & elle épuifa
les reŒources pour faire oublier à fon mari les revers
qu'il, éprouvoit.. Û ne lettre oblige les deux époux d~
fe feparer, malS leurs cœurs ne craignent rien de
l'élo~gnement; la Dame de Gabriely va diffiper des pré..
/ ventlons funeftes, elle va combattre pour l'hol1l1eur de
fon époux.
, Arrivée à Marfeille fon ame fe livre à des impreffions
etranger~s par une gradation infenfible ; on lui peint
fon .man coupable, elle n' ?fe , déja plus aŒurer qu'il
eft mnocent; les doutes nalŒent & fi la rufe n'étouffe
pas fon amour elle commence à le rendre défiant. On
. a ~oin de lui faire perdre de vue celui qui mérite des
fOlOS , des confolations; les intérêts de fon mari
font d'autres intérêts que les fiens' la flatterie la diffiIpatlOn
. , ca~ment de v~ins murmures
" & elle eft par\Tenue au pOlOt de facnfier le bonheur de fon mari à
,des plaifirs bruyans.
Dès ~e moment tout 5'arrange, tout fe devine,
[on m~n fera trop heurwx, lui dit-on, fi on lui laijJe
un p,am ; la décence s'oppofe à avouer plu5 long-tems
c~hll ,que le malheur, pour[uit ; & voilà des projet5
d, élOlgnement, des Idées de réparation des propoutIons
, révo 1tantes. C' eu:
fl. amft
!
que par un' progrès lent
malS aŒuré, la Dame de Gabriely a été entrainée &
,
.
,
E
•
�,
"iS
,.
.'"
qu'eUe e~cufe aujourd'hui d~s procedés, qUI Jadis n auroÎent excité que fan mépns.
Ce contrafte trop frappant eft affez marqué par l~
féjour de la Dame de Gabriely en la vine d~ Mar..
1t
feille : loin delà elle était tout ce qu'elle devo être;
ufe
elle aimoit fan mari fan enfant, eUe étoit jalo
de
iempfii' l~s !bins que' ce double titre lui pre~criv?it; à
peine elle y a établi fan dom~cile, qu'on lUI fa1,t oues
blier [es principes, pour la dlftralre par de fnvol
amufements.
Que la Dame de Line lè rappel~e l~s lettr~~ o~
élle calmait les aUarmes de fon man, ou elle lUI exprîmoit la conftance de fes fentiments & qu'el~e dé':'
i>1ore la cruelle illulion qui l'a féduite. Pourrolt-elle
expliquer autrement que par une dangereufe facilité,
lé changement de {a conduite? Le fieur de Line n'a~
voie 'point ceffé de mériter fa tendreffe & , fa con'"
fiance n"étoit qu'un nouveau droit à la générolité de
fon , époufe; mais enrourée par des ennemis fecrets,
elle ne fuivoit que leurs malignes infpirations, &
dans ce moment elle n'écoute que leurs paflions
quand elle croit n'obéir qu'aux loix de la néceflité:
Îl'en eft-ce pas affez pour lui faire quitter un domicile
où fa liberté en fubjuguée, & où elle ne peut confulter ni la voix de la raifon, ni celle du devoir?
'
Ma ,plum~ fe ref~fe " à juHifier mon averfion pour
une Ville. qUi enc,hal~e la Dame de Gabriely, il eft
trop affltgeant d avoir une volonté qui contral'ie le
~efir de fon ~p,oufe; mais ' fi des difcours empoifonn s ont altere la ?ouceur de fon caraB:ere', qu'elle
7 pas du mOInS à l'intérêt de fon bonheur:
ne reline
peut-elle être heureufe dans une ville où elle vit loin
du fie~r de ~ine & où elle eft privée de cette conTidé~a)t1on qu une femme tire de la préfence de fon
m~n , Peut-elle être heureufe dans un lieu où tout
lUl retrace, un' éclat qui s'eft évanoUl. & ' ou\ 1eS
regards qu a:ure fa beauté font troublés par les re~:ets, q~'exclte fa parure? Peut-elle être heureufe avec
de fan b'lenlalteUr,
c'
1es reproches de fon
b Indifference
.
eau- pere 6r le blâme des gens de bien ( Qu'elle
19
compare cet état à cette fituation l'aifible que lui
offre la félicité domeftique, elle verra fe réalifer cette
chimere qu'elle décrivait dans unè de fes lettres, elle
aura la gloire de réparer les malheurs de fan mari,
elle jouira du plaiûr d'élever fa fille avec décence, &
elle ne forcera point ce jeune cœur à une préférence
in;ufte; enfin, elle édifiera fon fexe par fon exemple,
& elle ' ne facrifiera fon goût que pour faire triompher
les bonnes mœurs.
U ne main plus habile développera les loix inviola1 bles qui obligent la femme à fuivre le domicile de
fon mari: auffi bien cette tâche eut attrifré mon ame:
ce n'eft point la raifoq de mon époufe que je veux
, ,convaincre, c'eft mon attendriffement ,que je veuX lui
faire partager. Eh! puis-je m'abufer en croyant à la
fidélité de fon cœur? Ses lettres atreH:ent l'hommage
•
qu'elle rendoit à mes intentions & fon zele à me
confoler dans mon infortune; depuis cette époque rien
n'a changé que fon domicile, qu'elle le quitte & elle
fe livrera à fes premiers fendments.
Si l'Arrêt que j'attends aveC refpeB: pouvoit me
~ontra!ndre d' aller ,à Marfeille, ce. Mém,oire, compofé
a la hate, atcdterolt à mes concitoyens, que je n'ai
réclamé les droits d'époux que pour l'honneur de la
Dame de Gabriely & l'intérêt même de la fociété.
LOUIS-AUGUSTE DE LISLE.
AILHAUD fils, Avocat.
J
SIM 0 N, Procureur.
M. l'Ayocat-Général DE MONTMEYAN portant
la parole.
l
/
�-
.
!
...
.
.
J
.)'.;
,
•
,.
.,
•
..
PRE CIS
1
J
POUR la Dame de Gabrielis de l'IDe
CONTRE Le fieur AUfjufle de l'Ifle, [on mari.
L
E fieur de l'IDe réclame fa femme. L'a·
t-elle quitté? C'efi lui qui la quitte., & qui
vient en[uüe demander que [a femme [oit tenue
de le joindre.
Dans quelles circonflances & comment cette
demande efi-elle formée? Le fieur de l'Ille efi
failli. Sa femme efi féparée de biens. Il declare
vouloir établir [on domicile à Aix. II dit à fa
femme: je n'ai rien. Apportez vos meubles &
vos revenus. Venez concoùrir au choix d'un,
logement. Rendez-vous, avec notre enfant commun, auprès de moi) ou retirez-vous dans un
?
A
\
�2
Couvent. Les in jonaions , que, je follicite con·
tre vous, doivent m'être accordees avec la daufe
etiam manu militari.
Nous foutenol1S que ces fios vr~i~ent ~xtraor.
dinflÏres, font in ju{les &. ahfurdes, fOl,t qu'on
les cOIlGdére dans l'ordre général des, pnl1cl ~es ~
foit qu'on les confronte avec le~ faIts paruculiers de ta caufe.
La femme efi obligée de fuivre fon mari.
Voilà le grand principe invoqué p~r le fieur
de
l'IDe.
Mais l'obligation de la femme e{l-elle fans
refiriétion , fans limitation aucune? En-dIe ab·
folue dans toUS les cas!
Pour décider cette quefiion " importante, il
faut remonter aux véritables principes des ,hofes.
- '
Le mariage impofe aux- époux le devoir de
cohabiter enfemble, &. ce devoir dl fondé fur
le droit naturel &. Divin. Il eft intrinféque à
l'e{fence même du mariage qui établit entre les
épÇ>ux individuam virœ conJuetudinem.
Il faut convenir que, toutes les fois que l'obligation, impofée à la femme de fuivre [01\
mari, fera une fuite du devoir de la cohabitati,on ,cette obligat~on, fera abfolue comme le prinCipe duquel elle dénve.
De-l,à !es Aure.urs en feignent que la femme
efi obligee de fUlvre fon mari dans l'exil dans
le lieu ~u bànni{fement, pourvu qu'il ne' faille
pas [ortlr du Royaume &. oénéralement dans
tout domicile forcé.
'
b
En effet, dans toutes ces différentes hypo•
the~es , ou
3
il faut dire que le mariage eil: di1fous,
ou Il faut avouer que les époux doivent faire tout
ce qui eft en eux pour fe rendre ce que l'on appelle en morale &. en Juriîprudence debùum conjllgale.
Or " le bannifièment &. l'exil ne rompent pas
le map~ge : d?n~ la femme doit accompagner
fan man dans 1 exll &. le banniLfement. Car fauril bien qu'elle fe rapproche de lui, puifqu'il ne
peut fe raprocher d'elle? Sans cela le mariaO'e
re~onnu fubfifiant de droit, feroie rompu pa~
1:
faIt.
Et nous devons faire obîerver, que d~os, ' les
hypotheîes fur lefquelles nous raifonnons' &
qui touchent à l'efiènce du mariag,e , l'oblig:tion
de la femme &. celle du mari font égaléS. Le
mari eft obligé de fuivre fa femme dans un domiIcj1e forcé, [out comme la femme, dans ~n cas
(~mblable ~ eH obligée de fuivre fan mari : ~ir
tenet~r u:x:orem fequ~ ,e~ jufiâ " & neceffariâ
cau.fa deferentem, domlcl~LUm, & in aliud migran.
t~m (1). La raifon qu ell donnent les Juriîco-n·
flll,tes ell:" que dans tout ce qui tient aux ,de- Vairs, fans ~e(quels le mariage ne pourrait [\.lbfi,ll:er, !es ep.ou:, font dans une é.galité entiere
~ parfaite , quza quoad debiti conjugalis redditLOnem , é{ mutua obfeguia, ambo conjuges fone
pares (2).
.
([) Boffius,
de matrimonii contra(~u tom Nernier
. 5
~l,
cap.
h
6 , y, 2.
(2) Ibid.
,
.
'
.'
�5
1 as d'ûn do~
Mais eut-on raifonrier, ans e c
,
,
"
Ph'
d'un domicile fpontane, d un
IDlclle de ~ OlX,
l'on raifoIlIle dans le cas
domicile lIbre, c;omme
, '1e cJorce' 1,
d'un ' domiCl
d . ' '1
S'a it-il d'un domicile libre, d'un O~lCi e
hg, 1 Tous les rapports entre les epoux
d
e c OlX 'Alors les Jurifconfultes nous dirent
.
r. .
r
c hangen t '
ue fi la femme peut être obbgée de lUl:re Ion
q , 1 mari n'dl: plus obligé de [Ulvre fa
mar1 ~ e
' r. ' fi br;
fi mme : non ramen tenetur Vlr Jequ~, z a '} que
4
,e,fl A
cl
,fia" & viri licenciâ decejJent uxor (1).
.,
1 D"
.
JUJ.a cau)' ,
D'où vient donc cette dlffer~~ce .
o~ VleIlt
l'hypothefe d'un domIcIle de ChOIX, les
,
, ,
'
que da ns
époux ne font plus reputes, eg~ux p~r. rapport a
leurs droits, & à leurs obhgauons, reclpr~ques ?
Il n'dl: pas difficile d'appercevolf la ralfon de
/
cette différence.
Dans le cas d'un domicile forcé de la part de
l'un des deux époux, l'époux, qui demeure li,bre de' fc tranfporter où il veut, ne pourrOlt
refufer d'accompagner l'autre époux, fans rendre la co-habitati-on impofIible, & conféquemment fans attenter à la fubfiance du contrat de
manage.
Et dans tout ce qui eft de l'effence, & de la
fllbftance du mariage, la condition des époux
eft néce,ilàirement égale , quoad debira conju-
galia ambo flint pares.
Dans le cas au contraire d'un domicile de
chàix~ 'un domicilié fpontané , les deux épouX
(1) Bolllus) Ibid.
peuvent
peuvent s'entendre & fe concilier, & s'ils ne fe
concilient pas, il faut donner la prépondérance
à l'un d'eux, parce que, dans une fociété de
deux perfonnes , il faut donner à l'une d'elles le
pouvoir de décider, pour conferver le bon ordre
de cette fociété.
On comprend donc que, dans le cas d'un
domicile de choix, d'un domicile [pomané , l'o bligation , impofée à la femme de fuivre fon
mari, tie!lt plutôt à une loi de Police qu'à une
loi de néceffité. Cette obligation n'appartient plus
alors à l'e{fence du mariage qui n'en filb-fif!:eroit
p~s moins, foit que la femme f~t plus ou moins
dép:.ndante de la, volonté du mari, fait' que le
man eut un empIre plus ou moins étendu fur la
femme.
On a cru à la vérité qu'il étoit utile pour
le gouvernement domef!:ique, que·, dans l~ c·hoix
-du domicile, comme dans toutes les autres affair.es du menage ! le mari eut la prépondérance,
& Il faut convemr que ce pouvoir du mari eft
fondé fur les indications de la ' nature fur la
différence morale & phyfique des deux fexes.
Mais ilu'efl: pas moins vrai que la diffërence
entre l'hypothefe d'un domicile forcé & cel'e
d'un domicile libre, ef!: entiere.
'
;
Dans l'hypothefe d'un domicile forcé l'oblig~t5.on impofée à. la femm.e, de fil ivre [o~ mari,
der~ve du deVOIr e{fentlel de la cohabitation
conjugale -' devoir qui eft même commun par fa
nat~re aux deux époux. Conféquemment l'obligatIOn de la femme ef!: dans ce cas abfolue. Elle
B
�rte
p~>urtoit
.,
()
ceifer ', fans qùe lé' mal'iago même
fut àiifous.
'
Il en dl: autr~me.nt dans Thypothefe
d'unJdomicile libre. L'obligation, impQfét\l à la femme
de Güvre fon mati, ne dérive p1u5' ators clet. ,la
néceffité des chofes. Elle dépend d'allt(es pnncipes. EUe tient U1iÏ-q\:lement cl l'a\tl01'lté ,d'admini!lration & de gouverae ment .,. q\l~ lon a
crû devoir donner aU mari ,. comme chef de la
[ociété ~onjugale: vit eft . e~Fl.l ,. ,ipJiUSq"f .~~
gûbe
& con{equenter euam dl~-ere d(jfNL01>
m4Fe
lium. (1)
"
"' ,
Cela étant ,_ il eft aifé de nxer les regl(tE; qui
doivent nous diriger.
~ .,
1 0. Le choix du domicile n'étant qu'u:ne bran.
che de' l'autorité d'adminiftration & de gouver"
nement reconnue dans la perfûllnè du , mari, la
liberté de ce choix ne fauroit appartenir- plénié.
rement au mari qui eft judiciairement '& légalement dépouillé en tout, ou en partie du poùvoir dont cette liberté n'eft qu'une dérivation.
20. Le mari même, qui copferve toute [on
autorité, ne peut raifonnableme nt prétendre que
cette autorité foit ;.lrbitraire ,& _puiife devenir
tyranmque.
.
S'il eO: donc vrâi que le mari ait le cholx
du domicile, il eO: également vrai que le Inari
ne peut abufer de la liberté de ce choîx.
On objefre inutilement que la terre dt' le
(1) 2olIiu!»
ibid.
partage des e~fans des· h0111mes, que chacun
peut, fe traq[p.?rt~ où il veut , & que c~~~e facul~e ea le pnqcLfilal tO(lde~l1~llit d~ la hbefr~ humame..
.
I;objefiion ~eroi.t con·cluq.nt~ ' , fi elle '-é_~oit
pr.opqfèe . p~r un· .êtrtil i[olé :1 maître abfolu de fa
defii.p.ée , au fort , d.~quel' ne.lt~;it Slttaçhé le raRt
de p.ed~one autre.
'
_! !\tais le chef _
d'upe fa.l11ille n~ : Be~t r~~[(}.Qner
ai,n:~.. 11 dt co~p.taQle d(}: [~ ~9.!p.ç1uit.e à,-~eux
qU} Y:lVent ~,s- Fo.Q.l t t'0uv~z;.Qen,~J1t. Son 4.l!tQrit.é
ne, ~u~ ~ pa;s e:te ~n~e urMq~e!neqt PP!\fl.t: _Jon
lltljlte parqçuhefe i mal~ . pOtt( l'~utilité C€lnu.nune
de la famille dont il eil le cb.ef.
,
~ .]) , Ce~x qui) ont,-d.~~ , ; s'~cie W'} J~lii[i~.fulte
)) ?Io.?er~~ (1) i CJtlJ~~ l,a pui&ànce QumaFi était
)) mftltuee en faveur du mari, [ont tqmQés dans
» une gr~d~ ~rr!4F: Car Gprtal-l1ent: co.rtcevoi~
) une admtnlftraÇlQn . qui 'tourne ~oute à ta vanp tag~ dé l' Aqmin~ft(atetm? »
,
» ,Ce qui a p'eut--êt~e d~nné li~u à c'etce' I..né» rr:.lfe , efi Imcapacité 'où etr la femme; de
)• .falr~ auc~ .a~e [an~ l'au.wrifatÏon :d~ [on
!!, (Dan: , MalS q~~ ne V.Olt que ce pouvoir-,o'eil
) donne ~u t"?,~n que parç,e qu\l lui eft ~.pfolu·
) i~ent n~cefi~lrel ~our exercer la .proteélion. que
» l,on e.xl.g: ~ - Ul envers, [a fè'mme, & gérer
)) ,a d mmlnratlon
de la [ociéfé con}' "gale'
"fi
.. . ., que
) c eut ete ,une ab urdité de lui !~pofer une
(1) Pige au procédure civile du Chatelet de Paris , :
tom. 2.. pag. 176. & Cuiv.
�9-
.
n
»
»
)}
)}
obligation ~ fans lui fournir les înôyens nécef..
faires pour la remplir; .en un mot, de le
charger de conferver le bien de fa femme &
de la Communauté, & la~Œ:!r à celle-ci la faèulté de le diffiper à fon gré; aiofi la Elne
ou
femme, ~ l'autorÏte confiée ,au mari,
)} doivetu être ·coiifidérées comme établies ~en fa» lieur de la femme .,& de la fociecé conj!tgale',
)) eft la
» de même que les impôtS' &.. l'obéi-fiàllce el1» vers la puifiànee politiqué~ ,;font établis pÇlur
» la mettre en' état:- de rempl~i le ,but de fo# ,inf~
» titution, & fonf par cûnféquent fn faveur
» des peuples, &: non en faveur de celui qui
» les gouverne. »
\
•
Mais-' qu'avons - nouS ' befùin d'autorifer des
maximes ql!li font fondées fur la' nature & fur
la raifnn ?
{
Si le- mariage donne des droits au mari, il
lui impo[e des obJigations~ 'Lë plus faÎné
des contrats [eroit-il le feul -à n'être pas recir
proque ?
'
La reg}.~ eft €lue: les droits du mari , ce {fept ,
toute-s 'les fois quë l'ufage , 'qu-'il "v,eut en faire,
feroit" iriconciliàble avec fes oMigations. Voila
la véritable limite de l'autorité maritale.
Ce que nouS dirons de l'au't orité maritale en
général, s'applique par nécdIité de conféquence, à la liberté de choifir le domicile, liberté
qui n'eft qù'une branche de cette autorité. '
Auffi le choix du domicile n'a jamais été réputé eotierement ârbitraire.
On 'a bien ,dit en thé[e que la femme elt
obligée de Cuivre fon mari quelque part qu'il
aille) [ans que celui-,ci [oit obligé de prollv;,r1
qu 1
•
qu'il' a' juA:e ckufe de chang-er fon dOlui:cile
~
teneeur uxor fequi lIirum, licèc ! riuUa dewr 'jufla
caura mùtandi , fld arbùralll tantùm [uo ' lIir
mutile (1).
~
"J
M,ais les' mêmes Auteurs ont- dit' également
que fi le ma~i " enJ changeant de clomicilè' ~ e~
difpenfé de' prouver que ce changement efi'.falt
pour ju~e cau[e, la femn~e !le fon oôté eIl:' il1coat.dlablement difpenfée de l"'ôMlgaÜon~de' fuivre ~ quand eUe_-prouvé que la lC~ufe du · c~an-.
gement e!l: n~al~ànriête & dat'lger~l'if~l: ,ux,Qr non
tetz~éw.r feqUL
,voZ,en,iem 'mutare. ~do
mïdlitlnf " quanclà " lf,zum - fequehdo exp(}~~€tl-l-~
rilO~ali" periculgf\ virœ-i'el- iltt-èr'ius IJ gr!avi's 0 de'tfii'
menti corporizlis t vel 'ani~œ-1('i.,;) ~rD' :', 01 ('~lr_,~
,: Et , il ne faut l pas abu,fe:r; _de~' tnats J,pericttl'à
l'uœ lIel, ammœ J 'peu,r 1 en- .~ndu~re qu 1dc ii~y a
l'lrüm' /ùum
qU'e le dan:ge-r Ide- la é: ~ie oùA lù falut de bl'a:rnè
qui puiife autorifel":.u.lJeI fëfufil'è-( à~ Ï1e ' pas' fŒlVll0
,j1 ~
••
,r-'" • ~
~' ,~1 .1 ' ....L- ~, r
i
Ion' ma-rl.
' ~.:.-,
,iJ_' "
Car , -dctns- ,cett€f' matier'e' , ',è'eft " lm '-'pl'i'lcipe
Gé'l'.taÏ'n 'que Ile~ ':J dàngè1"s: ~ (1~sLr~fques "doiyerit
êtrè pèfés relafivetnen~ i~à' !Pécat -& ;,à l~ edh~'
tioJ~ dès perfo'nneS:.'"
;- . ,i "0'; ,;-' j:: ,k '" ,r, ~ ~>
, En" ~!fet, qu1à'n'd ;1-1': s~agit~iir~~ ','de la ~fé'pa:.
tion ,'des! -épbu.xi \ ,\ <?~n';), n exige, l.pds '9..u'é-'td :v,<ie-'âe
la femme foit en l datiger.' l',)~ Ile \.D(oit G'àd.OÀ11
» .qué ; -:dif ,Dlcon1be:
-(
~)
~
iparoiffoit
'l,e~' déiiter.
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(1) ':S61nus
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[ ~ ;,. 551UCI•
.~ Lr'f -)
E '') ;:
(2) Boffius, i'bid.. "l"
! '
'Jb !i.!~,cr
(3) Matieres Civiles, au mot fepara .im, part. 1 -n:'9'
:r:
C
�.
10-
no~ tnϝ"rs,~ ceJ~ v~ea PJlS, te.
» qùis. Il- (uJ\iit· que le~ faits [oient , graves. Il
» faùt avoil! égarcl. aux perfbnnes. C~r ce q\,li ne
» feroit pas un moyen de féparation entre g'ens.
» Mais" fu-ivant
n dl!] t~mmu'n ,e~ p,eue r~rvÎ:.1\ ~1ttr~ per[opnes
)) d'u'[]~ ClOHditiQIl-' plu-s relev.éc«(. ·,:,
' .. ,
E~ droit, la cÔ:9f.éQu_~nce dL\. p.tlslS' au,' 1'J1oins
eil: ~alable. Obn.Ç-, Ji- 10r[qu'iL '~~\t , d,t: la 'fé.
paration des épo~! " il, n'è,Q pas ~éçelfaite ~ -p-~~r,
autor-ife-è cette. [épar~tJ,on- " <t~e IR f€fl!lme~ CPllre
le d'que de .fa. vie _, fi on m~fur.e *s f,i.i ~ Jur
b fI4,alité d~s , p~r.f0.nnes,' ~ . pl'~ JQrre . ~aiJoq
faut""iJ-adm~tt1:~ J~~ 'm111les iegl~~ ,,' qljaQQ , il' n'e~
q_uefiio~l. que- de pef~rl les , cÎ.1sço..nfiâf)(~.es dari~, l~["i
quelles u?e fem~~ peu:t' êt.,r~P,U :dl'êtt;re . pas' olüil
gée . à'...\ful-v("~i fon' ma:l i domlczl~u..m. mutl:mte~. .
, Da {acl\lte :,de )chOll1r ie ' dOI1HÇl1~ appartlen~
fans !dQyt~~ ~J.l. mari. ') Mais ;- !, uf~ge d~__ce~çe 1a'"1
cuIté ,d9.it êJ.~e :'piSJ.1 ~§:H1Qnaé'1 ' , , . "
.. '
Il
dès Auteurs, & ~ entr'autres, AleJ<;an4~r
de N(E,'fIrO 'f! c:jt~l 15ar J3"o.jJius, <}:4i .,gnrc :foi!t~nu que
la f~mme , n~é~pjt 'pC}ipc ~blig§e G de fl:livré .JQ!J
ll1a,ci, ~ ij).J3;l1Q _cel1.lj ~uj ~h'!tl~~9jt :~~. dOl11'ivi}~ [<\n~
néceŒté & fans raifon légit.im.e :'] 20n l~JJ§ri- ~i
qt~ )r ili L!. m .n ~fz:.,t:-'Jfn n ~ç~ji/ q~e ln f.fp j-f1 q' ~cO:lIfL!f1~
la~él]1 ~4oml~zl~wp j quo 4 d..lJ.{)UlJ1xfit: -p:bligan r.9;d
ici c/ùrc.J CJ1-4fâ juftâ (mUfat.b9,n.is {1 J ' • L! ~ __ .
_~ t~~ l\.9tePJ.s ..llj~ qplljsl rl~~cWfu .&~ le~ ': p!us ~llfteres ont au moins' av'ou"é que l'obligation, im·
pofée à 1a rem-me-de- fu,~vi~ full mar' , celfe J
quand il y a grave preJudlc~,iRouLi!le (,d~~s
le changement de domicile ,.\;, lvqve 1 Pr.œl uflt.
. t'J\ t'\"~I.~~' 1~
Pli: ,.2~' ..; ,....,;. '"- ....
• '"
( ~
, (lJil1J
.'il 1 (~ HU,
ea
ft
4
,
.
,
,.
'I I
C'efi un au'tre principe, que la femme; da'os
les conventions matrimoniales, peut fiipuler que
fan "mari demeurera avec elle dans un certain
lieu" daos ' une 'certaine Ville. C'efl ce qui nous
cfi! en[eigné par 130ffius ( 1). - Dicendum, dit-il,
paJum habùandi in certo loGO, aut aliquâ Ci1lùate, aut domicilia llxorÎs, inter conjlfges appofitum ab inùiô matrimonii, effe validum &
obligare -prœcisè ad commorandum in illo , loco.
Et q.uoique, continue le mên:e Auteur, la
'femme fait renee en.. général ,de fuivre [on mari
par-tpllt, où ,celui-fi; trouv..c bon d'aller; Il efi
pourtant certain que le patte ~ par leql:lel -Ie mari
s'enigage. 'à ne pas changer de d6micÏlIe &. à -demeurer avec [a femme dans un certàÎ'n lieu, :'o'a
rièn de ,~ontraire aux ' bonnes mœurs ~ parGe que
Ge patte peut ,être . fiipulé pour junc cau[e" p'ar
e}Cemple, pour motif de fanté, & 'p our qu'e la
femme , ne quitre pas des parents "qui lui ' fone
~hers. .& _qui p.euvent être utiles~ à. fa famille:
& ,licèc uxo.r tenealllr obedii-e ,~ tnan'to in-alill'rrf
loeum ft. transflrenci, nulla tamen. apparet tur-pitudo
,bonos mores natuU1le~ in hOG' ql,Jod
il~efe paao ob}iget 'od habit:anallm.:,cum Je& ' in
cerI~ ,l?co,., quia.. lalis Qoligat!'o ','e,:Jc 'juflâ ~aufâ
apponz poteft & fllet : quaiz s . effet, fi ijm-uliet
effit, vale1udinaria , & aliud cœl~,m (aIubriùs ' eo
quotL Jlafcifehs , elil5'lt, non teperiatur ~ vd ne
pape~Ie:rl.l & ,confa~gllineos defèrer:e cogatur-, - &
l'm:cul ' ah ers ,V:ll!ere • • . • ,: hoc paaum';l non
contro.
f~-
~~
,
T'
1~~..!._
~
~ .,...
. ....---:'.-:,~
, - - -'-:-:, ----.--;-O--.....,..---r--:.'
(1) I}e matrimonii cO'ntraBu, ch. 6. §. 3.
..... ! . '
l
,
'
/
�q
d' , ,
11
aditnit lihertatèm fld folùrri rejlringit & unzj
. quœ
.
diminutio honeftarur
quo,
mut,
" ex bone
,
. d' xor imà uterque conJllx acclpll,
.
zn F
e
u
,
.
l'b
fc
gne
ont;nella, de ,paais nuptw l us , en e l .,
1
A
chofe 11 penfe comme Boffius qUl
~ mlet"?eme
cIte
UI- Ame ~ne foule de.' textes & de doctrines pour appuyer [on aVIs. .
. ï .
Or fi la liberté dans le 'chOIx du doml~l e ,
11. d ' volue au mari, peut êtl e modlfiee &
qUl• en
e
,
1
refirei~te par la convention. des padrt1~,s ': a' p u,s,
e
'
.r
cet' te liberté peut & olt'fc erre' re.
Jorte
rallon
gIée .oq .d~rjgée par la loi ." par la raI ~~ ') . par
la jufiiCé. ,
.
,
, '1'- 'r ~.
Car enfin l'office. de la loi efi d~ reg ~r:r Q- ,
fi .. de tout droit, de toute autonté quelcon- '
age ( L,'office d..c la loi en de nip.uler pour ' le
que.
.
r'
d
foibl~ contre le ', fort. On n'a, pas .belOIn · e con-'
vention pour . fe . ménag~r les ' ava?ta,ges qu~ ',la
' l1.ice' naturelle' &. ciVIle 'g arantit a wu t, I€H~.
)UI1
• il '
..,
1
[enfible' & raifonnable. Là où la Jt:l:UIC~ . . p~r e.,
c'eft· i~ lui [ans . lé minifiere des partIes, 'qu.~
~ , 'c~~tr,aae' PQW' la per[opne ~ qui .ea mena~ée
ou .. Qffe.nH~ ; 'pout', l~ . perfonne " quI , fQU~rB~...'. \
If .en dans le', drent , comml;m.; dans la. natute
m~l~~ des choies. , qU'tIn mari ,-',qui :veut cha,n:..
';'pr fon , do'm icile, ait les mqyens de l'établir•.
~.., Car ~n particulier, qui en fans fuite,'" peut
avec'-p lus ou moirs, ,de re{fo'u_rèe,s îe tianf~6rte:,
par-.t our fan s ~~nfequenc~; ,' ~IS ,un ~ar;I- \.qUl~
quitte·fon d-orn.lcde., & q.lll a. ,la, :pretentlon d'ap,peÜer femme, & enf~ns dan~ ~ nou~.::u dom Icile -qtrrl chOlfrr,-'11@ pouvoIr, Gans ce nouveau
femme. & : ' fe.s
domicile, offrir ~ Qa~an~i.r0.jl
fm ans,
fans, ce qu'il leur doit en force des obligations
1
la.
,
1
•
que lui impofe le mariage.
'
,
Les droits d'un mari fo'n t inféparables de [es /
obligations. Con[équ~ml~eqt p~ur pouvoir ~orc~r
fa femme & fes enfans a le fUIvre, un man d'Olt
pouvoir être dans le cas d~ remplir à leur égard
[es obligations -dans le lieu où il les' appelle.
. Le [eul déplacement phylique de la perfonne
ne conn.itue pas, pour un mari, qui eft tenu '
de pouvoir au bien être d'pne famille entière,
veram mUlationem domicilii: Un pareil déplace- ~
ment., f.ait [ans moyens & ,fans r~ilources :", n'ell
que ~e 9u~ les 'Nuteurs, a~pe1Ie?t v~lJ,ar~o: : Or.,
cerdune-ment la f~mme n €fl ' 'p~ ~ 'oblIgee d~ fUIvre , ifon lmar.i- qui 'vaglje, . fi lé 'dépticem:eht ' de
ce mari :n'ell: qu'~n €hangern ~nt ' t~h;éraire, fondé
fur alJCUne rai!On'-légi'f1 mÇ: ~'eft dè 'qùi nous
eft attefié par ç~~arruv!as ,~ ( i ). : Cumux-;ribus
€dmpdat', dit ce- Jurifcanfulte, .'obremperare mariris Ji marÏtus vagari velit; :!Lon temer..è, fed
jufte; tenetur "& tunè' lIxor je. mprÏto ' flkiam
exTziheT'c :--{zn vero , vâgatlo' ii:rriùprla Jit" nul .
lâque juflâ ratio ne fiat, 'ux oFrvirum fiq u.i' non
tenetllr. '
~.,
r:
r
,:
~1"(l'
Or certainement" il n'y a rpas ~de déplacement
plus téméraire de la part d'un ' Plari, que celui qui dt fait -[a'us "que le m~rï:ait les moyens de
l'exécuter convenablement· pour fa famille.
Pothier, dans fon traité du contrat de ma.
(1) Tom. premier, parr. 2, Chap. 7, n. 7, pag.
23 S.
p
�(2.) dit
14avec la Loi & avec les JuriC-
J'
.
l'
d
.
confultes , que le man eft , o.b Ige ': recev9~r
che,lui fa femm~, de l'y. (t auer marll~lemen:, '
c' efl-à-dire, de lui J;;.urmr ,lPut c,: qlll eft ne,,!"
ceffaire pour le~ bejoms de la vu, filon.. fis.
facultés & [on ét,a t. .
.
Ce -que dit Pothler, en Journellement JCon~
facré ~ fuppofé par les Anê,t$ de la C?llr qm
ne font injQnaion à une f~m,[l1e de CUIvre OU
de rejoindre fon mari, qu' 4 ,la (;/Ja-rge · ·p,a.r hli
de la traiter marÎ!alem,e nt" c' ~œ·à-dire " à la
charge 'p ar lui de rempli,r toutes l~s 9'J;):1igati<m.s
inhérentes à fa qualité de m(!ri.
, , ' .. '.
Dpq.c , l!! ppt,lvQir, qu'à , le Inari de., ,j:haru
ger ~ J<?n domi~le J & cry .~ppeUer fa fe8Jme',
efi: n~ceJfaireme..~t .f\lbordç>nne ~u~ moy~us t & , aux
relfource,s qp'iJ ~ d:y entr~te:njr décemtn.è-nt ,&
convenablement
~ ..'
. "
,
.'fa famille.
- - .. ~.
Tels ~on,t le~' principes;. Fat[ons-ep' l'aEPl.i~
cation à~ la caufe.
,
_ î ,":
Le -fi~4r..d~ rIDe veut établir fon, ~do rrricj~
à ' Aix. Qu~ls (o.Qt~ l~s I~oyen§ ..qu'jl : a' (:Fétablin
ce nouy:eau domicile? '"' ,'-'.
\',
.~
De fon propre aveù, il efi fans fortune ;.
puifque le proc~s .a ,débuté de- fa part _par Nne
dema!ld~" "en alirlfents contre (i{- f~m.U1e.
,l't,"
Il e~ f<;lns état , fans pf(~feiliOR,. fans =:in du{:
trie. Cela ~fi notoire.
~ _ . . . - -~ ,...) ~:
•
0;0
n aD"'"
1
J
(rJ Tom.
2.,
tions du mari. rr
parr:
~
.
S , chap.
_
premier , §. l , obliga_' ,
.
15 ,
~
" 'Sa" femme efi féparée de biens. Gela efi encore COHvenu.
D'où il faut néce{fair~ment conclure que le
ftel!l~ <le l'HIe ne peut pas trop' réclamer fon
droit cl' Adminifiration & de Gouvernement.
' L'adminiltnition du fieurde l'IDe ne peut
porter fur aucun objet pécuniair.e ~" car, ce mari
ne poiIëclant rien par lui-même, fon adminifira~
tion fur fes propres biens manque par défaut
de- matiere. D'autre part, y ayant une réparation de biens entre. les deux .époux, fon acfmi~
tration fur les biens de fa femme , manque par;
défaut cfe pouvoir. ,
II :{ (a'plus: non-feulement le fIeur de l'file n'di:
plus Adminifiratear des biens de fa femme' mais
Gel1e:;ci a. vérit~blement fur fes propr~s bie;s tout
le pau'vO'l-r qU'il faut ' pour les adminifirër "av.êt::
libe(té & avec indépendance:
~ La fel?,me ' ,{éparée de bIen;' , "ne peut' fans
dQu_~e 'ahener les fonds de fa dot , tant qüê le
manage· fu'hfifie. Cela efi p ~ohibé aux deux conjoints. Mais· elle peut adminifirer les fruits ' lX.
i~t~riêts ' . com~~. ~on .l.ui femble , p'ourvu qu.'çn~
aIt le CO!" de pourvoIr à l' obli àa'éion ou ' eUé -efi
d'€?t-r,etenir f~n. rll~ri .-& fe~ e~fal1s, fld fufl~n~
tP.tLO~~m manu & jillOrllm fi "quos hahët. C'di:
la ~eclfion de la Lü Il.bi adhuc au code de-J'ure
dOtlum.
l
'-
",
~a femme, fép~rée de -nieils- , '-a toutes les
açhons de .ra dot. Son mari ne peut plus exercer ces aéhons. Elle feule peut agir. Elle n'eil:
plus quant à ce, alieni jllr~s, fe d fo i. Delà
�16
vient dit Decormis (1), que la prefcription
courc', 'au profit des tiers, contre la femme
féparée.
Le mari, qui par le dé[ordre ou par la dé.
cadence de [es affaires, force une femme ' à r:é.
péter [a dot, eil donc entie~e~e?t dép~uillé de
fon pouvoir & de [a quahre d AdmlOlilrateur
fur les biens qui compofent cette dot. Il peut
feulement prétendre des àlimens.
Or, plufieurs con[équencen~iflènt de ce prin.
clpe.
. D'abord les alimens, qui [ont dus ex Lege,
ne ·font communément dus que dans la mai[QIl
de celui. qui eil obligé par la 'Loi à les f.ournir :
ljui a-limenta renetur prœflare , non alibi cogitar
da,re, qu.àm in ,domo ~rop"riâ, & Ibi C()girur
alrmeritarzus habuare. C eil la DoB:rme de~Sur.
dus (2.). La -regle eil fi certaine, que, d'ap·res.
le I?ême Auteur, le, p;re ll!i-même. ne peut ré.
guherement & fans caufe forcer fon fils ~ ,lui
fournir des alimens hors de fa maifon: eodem.
modo parer non porefl à filio petere alimenta
exrrà domum (3).
....,
:, ,.
, Nous he ' voulons certainem~nt pas ind~i;e,
delà qu'apres ra féparation ·de ' biéns ' la 'femme
fait al1torifée à fortir de la maifon d: fon -m~ri,
f
"
(1) Tom. 2. col. 1 S17.
('1.) De alim,ntis titre 4- quefiion
2,SI.
(3) Ibid.
14. n.
1.
page
Il. II.
1
pout
..
17
'
.
pour obliger celui-ci à venir chez elle . .Mais' ,
nouS voulons & nous fommes fondés à vouloir
en induire qu'un mari, qui eil dans la cas ' de
demander des alimens contre fa femme, ne peut
arbitrairement quitter un domic'ile établi, & .
dire à fa femme: venez me nourrir où il me
plaira d'aller, Un pareil fyfiême feroit cqnçraire
à tous les principes , à toutes les idées, à tbutes
les regles connues.
.
En fecond lieu, le choix du domicile tient
effentiellement au pouvoir d'a~minifirei & ' de
gouverner les biens. Car ce choix ne peut fe
faire fans les dépenfes néceflàires pour l'exécu- '
ter. Il faut des frais de tranfport, de voyage .
d'achat , de déplacement. Il faut · combiner c~
qu'il en c~ûtera dans le nouveau domicile élu.
Il faut balancer les charges avec les' revenus.,
Or , de bonne foi, le mari 3 qtli n'a rien par
lui-même, & qui efi dépouillé par la Loi de
toute adminifiration fur les biens de fa femme
peut-il fe permettre .des aétes 'qui continu~roien~
à le fuppofèr Adminifirateur libre & abfoI'u?
A quoi ferviroit donc la féparation des biens, fi '
nonobfiant c~tte féparation . le mari pouvoit conferver le drOIt de ' ~~riger les opérations du menage? Que deviendroit même l'adminiilration
que les Loix confient exclufivement à la femme
féparée? Le .pouvoir d'adminifirer efi inféparable du pouvo~r de regler les dépenfes. C'efi mê~ne le pOUVOIr de regler les dépenfes , les proJets, ,& autres ~hof~s ,cemblables , qui conilitue
effentiellement 1adlmmfirateur. Si la femme féparée étoit obligée de fournir & de ' payer, ,&
E
�'tS
<tue; l~ droit de dée..enfer demeura.. à l'arbitrane
du mari, c'eft vraiment celui-(;:i, qui demeu~ergit
nanti _du pouvoir d"adtrunifiJ'"tio,n , & la femme
ne ferait plus qU'UR Tréfori~ ou un ,caiffier pu~
remenç paffif, obligé d'ouvrirJa- caifiè à, lave>.
lonté de l'Adminifirateur. Or, cela n'dt pas
poffible ~ ~n droit." puifque la femme fépafée a
l'adminifiratieln ' pl~niere & proprement dite, à
l'excluGon,du mari qui n'a plus la Gonfial1ce
de la Loi,. Donc ' tout maTi, qui a perdu l?ad·
minififat~on . des bien: ' a necefiaÎl:ement pe·rdu
le pouvOIr lIbre de faIre des aétes efièntÏellement
liés -à -cette adminifiration.
.
Et que ron ne dife pas que, la féparation des
h.iens ne détrui(ant pas le mariage, elle né détruit pas le pouvoir du mari.
, ~e ~na~i ~ deux pouvoirs difiinéts : le pouvoir
de JunfdIéb0!1 rur les mœurs de la perfonne, '
& le pouvoir d'Adminifiration fur les biens.
~~ fé~:~ati.on des biens ne détruit pas le POll~ o~r J~n.èl.Ia~onne~ du mari, parce que ce pouVOIr, 111tnnfeque a la n,a ture du mariage, dure
autant que le mariage même.
'
Ma"is la féparation des bien détruit ou fu[~
p~nd '. d,ans la perfonne du mari , le pouvoir
~ adm1t1lfi~er les chofes , puifque l'effet légal de
la féparatlon ne conGfte même qu'à faire paOèr
fur la t~te _de la femme l'AclminifiratÏon qui appar~_et.101t auparavant au mari. ,
Or le choix, du domicile eft~il ude branche du
pou~oir JurifdiCtionnel , ou appartient - il au
pouvoir 9'Adminiftratioll?
Le chofX dL} damic;il~ appartient réguliére~
19
ment au pouvoir cl' Adminifiration. En effet quel
eil: communement l'objet d'un changement cfe
domicile? Dans un pareil changc: ment ? on [e
propoCe ,d'ordinaire de porter ,[on lOdU~f1e dans
un lieu plus favorable, de mieux a(feolc fa for·
tune ou [on commerce, de cho~Gr un afyle plus
conforme à l'état que l'on a embra(fé, de mul·
tiplier {es re{fourc~s par. un dép~la,cement bien
combiné. Ce font-la les ral[ons uhtees. Donc le
choix du domicile, à le conGdérer par fon objet,
eft une dépendance du pouvoir d'Adminill:ra-
..
tlon.
GonGdere-t-on le choix du domicile dans fes
effets &. dans [es fuites inévitables ? on trou v e
de ,noluvelles raifQns pour fe convaincre que ce
choix eO: e(fentiellement lié au pouvoir d'Adminifiration , puiCque nous avons déja etabli qu' il
fuppoCe & qu'il entraîne des dépenCes & des
projets qui ne peuvent être dirigés que par celui des .époux à qui l'AdminifiratÏon des biens &
des revenus cft confiée par la Loi.
Ce n'eft pas que le choix du domicile ne puilfe
devenir, dans certaines circonfiances &. par oc,'{Gon, un aCte ,du pouvoir Jurifdiaionnel. AinG
un mari peut condamner Ca .femme à un dOlni ,île de peine ' ~ de cor~eaion. Mais ce n'eH-l à
qu'une cho[e ~'accident.
'
Et quand on f~ ~rouve dans une hypothefe
~uffi Gnguliere &. auffi émergente du cours 01' Cilinaire des choCes, le mari doit motiver & prou ver. Il s'agit alors ,de l'honneur de fa femme
qu'il ne peut compromettre fans preuv~.
Ce qui eft vrai dans tous les cas, le Ceroie
�21
Z.d
bien davantage vis· à- vis d'une femme féparée.'
Car le choix du domicile, lors même qu'il de.
vient par accident un aéte du pouvoir J urifdic_l
tionnel, enrraÎnant toujours dans ce cas ,~om
me dans les autres, des dépenfes & des projets
qui ne peuvent s'exécuter fans le vœu, & tans
le concours libre de l'Adminifirareu'r des biens;'
un mari, qui feroit dépouillé de l'Adn1inifira_
tion des biens, &. qui voudrait par forme, de
peine &. de correétion arracher fa femme à fon
domicile, {eroit dans une obligation plus fpé.
ciale & plus rigoureufe de jufiifier les motifS de
fa conduire, avanr que de pouvoir compromet_
tre l'honneur de fa femme & de pouvoir la gêner
dans une Adminifiration qui lui eft contée à
l'exclufion de fon mari.
Au furplus nous ne fommes & nous ' ne pouvons pas être dans ce cas fingulier.
'
En effet comment a comme,ncé le procès? par
une demande en alimenrs forméé pâr le fleur
de l'Hle contre fa femme. Les pàrties n'agitoient
dQnc pas entr'elles une quefiion de mœurs.
Qu'efi-il arrivé? la femme a dit à fon mari :
je n'ai qu'une dot de cinquante mille li-vres. ' Je
perçois des revenus très-bornés.' Il me' feroit im,::
P?Œb!e de fourn,ie à l'en~retien d~ deux ménages
fepares. V,e~e'l a Marf~llIe, ~UI 'a été jufqu'ici
votre -dolllicIle, & l~ mien; je vous y offre le
logement & 1 entreuen convènable à vetre état.
Cette défenfe parut fi raifonnable que la Cour .
fiatuant [ur une demande en provifio~ formé~'
pendant procès à ,la Requête du .fieur de l'Ifle ~
débouta
débouta celui-ci de cette demande, & fit ' droit
aux offres de fa femme.
C'eil en haine de ce déboutement, que le
c.
de l'Ifle qui pendant plus d'une année
neur
", ,
,
/1'
d'
entiere avoit pourfulvl une fimple queulOn aliments , çlemanda , pour éluder l.'effet ,des 0f!r~s
c. '
ar fa femme que celle-cl feroIt obJlg~e
laIt es p
"
"
l ' r 'd
de le fuivre & de venIr etabhr ,avec 1Il lOn q,.
micile à Aix.
" r "
Il eil donc évident que ce, dern,ier fyfiême n'~
'nt eu les mœurs pour obJet; Il a été propofe
pOl
"1 e, & dans
ar forme d'exception. purement CIVI
but unique de repouire,r I;s ?ffres de la femme,'
ui prétendoit ne 'pOUVOIr etre tenue de fourmr
~es alimens hors du vrai domicile des, deux
époux. Car d'aiileurs le mari étoit li peu en peine
des mœurs de fa femm~, qu'il la l<ùiroit à Ma~
feille , pourvu qu'elle lui, donna des alimens
par-t0ut où il auroit la ~antallie de fe ,t~anfp~rter.
Il ne s'agiffoit donc pOInt ,alors de dellcatefie.
Il eft vrai que le fieur de ,l'Hle, d~ns le co~rs
des Audiences a voulu laiirer entrevoir des craw,·
tes qu'il n'a p~s ofé développer. Mais ce réavi~é
tardif imaginé pour colorer une demande delabrée', ne change pas la queftion .fixée 'par les
Requêtes, par les coné1u~ons ?e,s ~artles, &
par toutes les procédures qUI ont ete faites.
Tout ce qui réfulte de la nouvelle t~,u~nu~e
donnée au fyltême adverfe, c'elt que 1 ~nJonc
tion, demandée après coup , pour oblIger la
femme à Cuivre fon mari, n'efi qu'une aél:ion
fufpeéte d'animolité & de haine., une ~ét~on
ménagée pour fe venger des premIers fucces JU-
fe
~
�1,.'2.
ni:cilaicès " oh:tefiu~ , pa,p la· D~I!~e ete- l'Jflè, ; J éètt~
dfipèJlfes
quemment une aébo.n. 9ui fil!! .fau rQit hre a~u.eil
-lie, . pat:ce qU-è malm'Ls lfommtlfti non efl -lMul, ---1-.,
t:Jenwu
17fit
•
)
- •
1
emtfaÎrIJl.-efOlti:Jit. infuiH1blemen~ 1<
L~ fiquf d~ EHJe·,mt fœ! œ'lleloppe Ras.. .J ne
dit pas ce qu'il veut faire. Il a même ,hLprét~ql:4Pfl r de : n€i Pj6lu:y~.rr\ être i.t)te;Hogé~ Th fa; i€mme,
fan~ ritln (Wroll~~ , _ fanS rieR! e«aminep, 'fer.a
tmue-! d~ · C.QUrlll -après W1. lIlhd qUi fi1nit. .tmi~ue
.Ja'l€Qt ~ur ftL fa~~ .fuivro , .& ,..dpntl les l1bro.jets
,pouj'rQm: eomprQl:1lfttre, la:.. .dcilt )( -&. le, '~Uhpà-
,t:}i~n}QiJl~' . qui pe.ur garant:w la. 'J fubfifiaooe . ' d~s
:.deu.J épata, .& d~ .. l:'~nfaflt' rué àë lemr union!
~el~ n!,ett ni 'jpfté ,_ ni laifonnahle, -ni )poUihl@.
QU:a~d QJIl. {aiu [ur-tout ..qu.e. la fen~il16 a i.6[~
trompée da.ns, fes dPérances ~ q1l: 'elle a èpn-: en.
Jr~r~ êl~llS une ma.ifrr1il '()'purenne , lqu}~n le. lt.ll jJer[uadoit, ,lX. qu'il rélllite pourtant ) dü COliCotdat de fon Ola.ri .que le ~érangel11ept dËs affaires étoie ,abfolu, à l'époque du l11ariag~;1 'on
.c.a., encore m<D:iDs~ cli[PQfé à forcer cette. fiIiune
fi fuiwre d~s pJ~:OL([étaWifiè'pent ' qu'elle pe' connoît pas, & qui la mettroient de nouveau en .d<fugel'\.JJans l;In~ : pareille' hypot>he[c) le6 ~oix qui
onr opéré en faveur de la fèmme la ftfpttl'q,tion
,de $, bieus, n~ v:pudra1~nt pas, 'par ' ul1tl iltC6n·
[équence inexplicable., pnv-fl1 cette femme .du 00néfiG:e de cette féparation.
_ _1 • ,_
Les Loix ,.pe!Jv.ent d'alUtant rN{i)ins le vouioü·
.que le P<ltâl~QiJle de tla ·feml111e , eia: en l'état le
feul patrimoine de la famille, & .que fi elle dmt
fiu" ce patrim6iné, fQl1rni rf des alimens à fo~
l~afi, il n~ faut pa,s COllllll€nCf:!r .par compromey~re & 'p~r ,m~ttr~ en -danger la foutCé qtli
) 10at prQdUlre ces ahuleris. , ,_
1
--
& dans tautés [.es Rt't'lu-êttis.,
.qŒ'lG v0l110it: t1aMh
fQg dOHffÔI€ if A~x: ';
rar€e
cpül'ihefpéroi:r !"iH.)"V@ir y th~~Vgf plus', dt> ItlAo1erl-s
de fonune & d'établifièment. C'ell: - doii · ail
àae' dl àllmini!hatl'où q\.lr)l'~ <Î ' éYîteGflUJ d-erEer.
S'il vouloit ufte~ ~ù POYVoif d~ G01'u!~ho~ '; il
d-eVt'dlt érlonce,l dêS faits' grâ-ye-s '.& hfs pr"ou-
ver. .
, Or, comme Afhûiniltràteut
i
'
lé heur de ' l'Ule
elt cléflMillé de fes droits 1 & il e~ efi dépouillé
par la l.Q~. U he peut dORé éxercer un pouvoir
qu'il. tf'a plus, .N~ fetoü-il.pa~ €uasge & ,a-bfur,de
que lt -fieut de o.l HIe, qm n 4: q\H~ le neee'ffalrè
à 'demander {kit !les b΀-ds de ft fèmine .~ p-Ut, fous
prétexte ~h. tlrgit qû il à dg (zhângèr le dOlhicik
de fa fanlil~'è , faIre CC:Unloffiéf ces biens. en ciépenfes fuperfll!lés? Ne fel'êlr·i-l' pas étrafigè & abfurde qu'une femme, qui à l'âdminifira"isn des
biens ', à l'~'j(clufIoI1' de fên Infifi ,. pat être arbitrhireltlel1t féparee de 'ceHé adrniniftràtÎQn, &. 'a'rrachée aU lie'u où les biens [ont fituës &. nû ils
doivent être r-égis & fucvèillés?
'
e0'mmént po'l!lnoit-en GOtlGilier l'adminifhat.len ,. qUI appar-tlent a la femme, & qtû, dnit
~tre ~g.e_. &, 'éclaùée ",avet l'ob'ligati<H'l 'que l'on
lmrpofetûlt a cette m€lh'ë f€-Inme t1e [e livrer
aV~Blelne.nt aùx projets de fon 'mari, -&' a~X
•
j
..
-
'".
<>es. ptQjets poucr.owat entrainer,
~
- ' Lefrear de l'.ffle a <llir, l\)l .. tnê.n1e ~ claA - t~Ut~
{'es' 60nfuhatiohS,
-~tl~
' 43
,
l
_1
/
i
]
'
,
�24
Si du moins le fie ur de l'I~e a~oiç que1que
raifon apparente. d'éleve: la pretentl?n ,ext.raor~
dinaire qu'il a mIfe au Jour, la chofe f\;; rolc to~
lerable.
.
"
.
Mais il veut que fa femme qUItte un blenêtre certain, fans lui rien donner en échange.
Il dl: mari. A la bonne heure. Nous refptctons fa toute puillànce. Mais; comme nous l'avons déja dit, li le mari a des. droits à' exer,ce~, il a des ,devoirs à remplir'; & fes rdèv.oirs
naiiIènt de fes droits eux-mêmes. Le manage
eft un contrat. C'eft même le plus facré. & le
plu!! religieux de~ c?ntrats,'. Il foumet donc les
parties à des obhgatlO.ns reêlproques.
Par':'tout où un man 'appelle fa femme & ,. fes
enfans, il doit avoir les moyens de ~emplir, 'à
leur égard, les obligations que lui i~pofe le
.
manage.
Quand donc un mari parle du choix du domicile, il doit indiquer les reifources qu'il a pour
établir ce domicile.
La préfomption eft pour lui, quand il eft
integri f/atûs. Mais c'eft autre chofe, quand il
eft failli, quand il ne poiIède rien, quand il
eft dans l'extrême détrellè.
Si le heur de l'HIe difoit à fa femme: venez me trouver' , voilà mes reifources; je vous
promets bonheur, proteéhon & décence. Il poutrOIt etre ecoute.
Mais le heur de l'HIe, qui n'a rien, ne peut
rien pr~m~ttr~, ni rien garan:ir. Son langage
eft CelUI-Cl: Je veux aller où bon me femble.
Apportez-moi vos meubles & vos revenus. N'importé
,
•
A I
l
.
.
,
porte que je dévore vos meubles en fraÎs de
tranfport, & vos revenus en projets abrur~~s.
Je fuis maître. Plutôt que de ne pas m obeIr,
vous devez être condamnée à la faim, à la foif,
à la mifere.
.
Ce langage n'~ft-il 'pas affr~ux.? N'e~-il pas
contraire à la faIntete des pnnclpes qUl fixent
les rapports mutuels des deu~ époux ? . " _
On trouve des Arrêts qUI o~t enjoInt a la
femme qui demandait des alimen's , d'aller les
prendre dans la maifon. d,e fon mari" & qui, l~i
ont dit: vous êtes oblIgee de le fUIvre, ou Il
n'eft pas obligé de vous nourrir.
. , Mais aucun Arrêt n'a encore dit à une femme,
& fUF-toUt à une femme féparée ' de- biens: prenez votre fortune & vos meubles, facrifiez vàs
enfans, & votre propre exiftence, pour être à
la fuite d'un mari qui veut aller où il lui plaît,
& dont~la - volonté, même injufte ,. eft fupérieure
à toute Loi divine & humaine.
La Dame de l'Hle dit avec jufte raifon à fon
mari ! vous voulez h,!biter à Aix. Soit. Mais
pourquoi ne ferais-je pas · autorifée à demeùrer
à Marfeille ?
Marfeitle elt notre domicile matrim'
oniaI. Mar.,
[eille a été ju[qu'ici votre propre domicile. Marfèille elt le domicile commuri de votre famille
& de la mienne: Marfeille -eft le lieu de la fituation de mes 'biens, & ces biens doivent être
adminiltrés par moi exclulivement à vous.
Inutilement prétendez,vous que le féjour de
cette Ville vous eft Infupportable, depuis que
.vous y avez donné le fcandale de votre faillite.
G
�16
Apr~ cette cé~éb~e faillite, n~..v6~-VOUS ·lWs _~<)n.';
tioué à demeurer à MarfeJIl;p? Unç fou~e de
citoyens honnêtes', ne fayent-ils . p~s ." a près de
malheurs répétés t fupporterr le iéJ-our q~ letlr
ancï"enne opulence? Que vous dl-il ar i\lé qui
ne f~~t arl'i~é. à ce~t autre:.?, ])e~ez-v,~us me
rendre' la vICtIme d Une faune déhcqt~e.? .la
feule perfoone dont les rega-rd;s , Q.evrpien~ téeUe ..
ment reveil1e~ pans votre <,lme des . il1,lp-rl'!(liollS
importunes? ë~e~ moi; parce ; qtte j'aj{l ~t é: trouipée" P31rce q,ue . de fall-lres jpfitué;tjqjl~ m'ont
été données fur votre fortu-ne lors de { l1tOIlJ 1mb
riage, parce que vous devez vous repl: o~:.ll;~r} d'4
voir conc,quru à ces fa4lfes in firu~ions' 1(1)rf~
que yot~e devoir eut"é~é de tn~ .9é(rom~er. C'ell
ma· préfence que vou~ devr~êz .Cr,~ind're" &: ,tQuroe
autt:~ appréhen-fion de yo~r~ ipar,t efi fjdiculè &
même fimulée. , ' .
..' '
~
PourqU?l , rr'app'elle'l-vou'~ à· Aix .?, Comme.Jlt
y figurez-vous ~ Comme pla-i-deur .mfllheure,ux.
Quel ~t:at y p!ofe{fe'l-vdus? .Au~l1JIi Qu 'y poffede.z-y~us? ,Riet}. '1 Qu'y., f~jj~s~vous? ,Vo.i.lLY
contraaez dc~s ~et.te_s. (.
'J ' 'Et ' c'efi-là où vous voudriez inhumaÎ'tlfment
me donne~ e~freB!àcle ! c'efi,..lfci où, ap rès avoir
fca~d~ljfé les , Tr..ibijnaux par 'n~s querelles , do.:mefijqu~s , VOllS }1QlJdrie~ ei1.ç,0q~ )q ~-e. no us
,.fi,oo~ ~un .objet ,de pitié par :pOJJ~ miCere & IT00
tre CQmmune ~étre.ffe! & . ç~dl ~là . fnfin1 où ' Val$
voud:ie'l,. loin de n1es pa~ep.s & des vôrres, ine
eo~qamDer à la home & aU" défefpoir ! ,
C~~Jloi{fe'l mieux · vos imérêts; ma Call[e eft
~a vô~re, elle efi cene de notre enfant cOQlnlUn,
1-7-
,~~fil !'~ f~qt' ~at é.J~gl1~F- cl~ , ~'.' qui ~etÎ1.v~nt
~ }i. :qlll~ ~~t1 aJ.,Olflr.a. t6ltl~ours
FIM~ rl(ar.J'~9,t\ld~ q11Ç. 10..$ "JMf"'?e le :V~IP ~
d e(1 I ~,qr~ ~IIJHl., V.9tlgne~-;i1CàUj), lm , fermer. &. a
14 1•fr:!JJV
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.sQu;~~ . Je~ } lt;(f9 rçes ' qiJ'A.i ($QJ.lS fommes .en
d~?iç Id'~ t~pd\edf ~Qt.J;~ (llLIUUQ'? N'e ..fçaVlell:y\>,l)~ Ii'~t qu~ l'p.~ s'Rtq~cl:ter.p;jlf'JqS propJOOs. ~jeR
f~4s ~ ~ q1ile, 1'9fJRi-Çl.}qe li. pr~[AYf1 ' aurant llê-y.ar-t
~ l'"ffç~iq-ÇI. q~t..~ç .feOtj~~p~ 1.lglJol1e'l~ v.ou-i--que
mlJ . f<?.I\\'W1! : ~e (u~L V;:\.$ :po Ill. Il0'U~ 6ntredn:ir
felqil\ tlQfre l é~~t ? JgpQrej.,vQUS qJJe ,tfi L tlOU~'
fomHH:sJ'J\l~lp;eW.~!:H: 1 ~qll~ chlv..OJ]~. fair~ nOs. 'efr q1.l~ ~pr.r.e e9fanUHdeftiJl~ pas { -Vous:
fQrt ,pq1J
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~[~s) Il r~ .,~ ,~P-9.~q :~P ' ~.~ H94.b!e · üe,re, q~~ ,I~
~<\~lj1r J ~ flw~e'~ë 9!f~ I .n?S il r~l't\phr i Je ne .v(,)g.s
Qep1~pdq; B0\},rtjlPt . q~ ,d' ~tfe }u{te ~ hùmraÏ-n .."..
fi" vôus êtes peu touché de Iijo,o >[ort " .lpe.nfe.'l
au JP,QWll. i311 ygffe lJ~ ta~ fqy(r~J pasl in juft'i!LGln-
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de l'équité.&
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' QJ~e) ppelfenû ,tOUf.~
l'g~J'U!,9,itt ~e ; f~ d~milqqp . .S.~chant qu lil ,t1'â ~î
toit}. .AiJt qtle~ ~<11~!1lÇ plf\icW~l\~ 'fçacham q,u 'il '
y I!~S)1r~ [an~ , cr. î .~:;, fgos rte,lfc~lVlc~S; fç~ôhant
qy'iL ;avQif psrc!q t0:,lue adin~9'ill'r:atjon, ' il Sl~ '
toit llli=\l:l~m~ jtJgé. , Il a\1Qi~ , Ü~l1!lli . que, 'dans
cettf" t 4iHioQ .Q~pior.apl~ ,. f~$ GJI.p.ric.es ne' pouvoieQ~ ~tn: des · pç,dr~s. li :, f~t<,j~t mode,fiemrn~
réQ\li~ , .Yp~ , fitp.:ple dejmande Jf;!liiuftnts. Il avoit
vu qu'il ne pouv~it f,!ire le préjl.Hlice du tiers,
& qu~ ~:ay~nt ' pas de quoi ét;lblir un domicile
4
e
.-
~
,
,.
�:tg
fa mi l-ier' , 'il ne p6uvoit exiger cjuè' fa famille fût
forcée. à. changer avec lui de domicile,' Voilà ll!
jugement porté par le fieur de l'IDe iui-mêlb~ :
Les Loix feroient":elles moins juftes que lui -?
Le nouveau fyftême du fieur dé l'lile n'a .' ~té
qu'une nouvelle tournure pour tracaffer; 11 fèiilt
de demander [a femme. Il ne ve~r que l'Yp qui,é ter. L'aher~ative , qu'il lui doqne de k joincre,
ou de fe retIrer dans un COl.}venr , .'prou ve' qli'il
ne la veut pas. La claufe eîiam ma'nu ïFzl'itarl
qu'il a eu l'imprudence d'iÏl{ér~r- a~llls - fes fiins'
annonce la difp0Îltion où il feroit d'a6ufèr à mai~
ar~ée, & a~e~ fcan?ale du plus pe_tit 'a\,'ântage
qu Il rourrOlt obtemr-: Une' pa teille clau [el e!te~f: faIte po~r rapproch.er deux ~pôux d'-une -con(ll~lOn honnete, & qUI appartlennent ,à des famIl~es honorables?
'
- ' ..
Dans quel moment le fieur de l'IDe 'v ient-il
s'armer d'une rigueur auili ho!lile &. àüŒ in{olice? Dans ùn moment où fa femm'e l ui offre un'
d0m.icile décent qu'il n'a
& -qu'il. . ne p'e ut
. aVOIr fans elle, dans un moment où elfe ' oublie
eUe . . même les t6rts de fon ma; i &. où' elle éher,he à fui faire oublier fes ma-lhe'urs ; en lui" pré:1
[entant ~e.s ~e,ffou rces qu'il n',eût pas dû efpé;er~ ( ,
En vente, toutes les circonftances de la C31J{e
font telfe.s, qu'elles doivent faire rejetter la-cieman~e ,du fieur de l'Ille avec indignation', '
. SI nous avons propofé fubÎldiairement à' I':A.udlence de prendre le vœu des deux familles ce
n:eft pas certainement pour fûbordonner ' Iii décIÎlon ,de la Cour à ce vœù.
. ' . ,
,
MalS l~ famille eH toujours le premier ~tri- '
pas, '
nunal
~9
des mœurs-. Elle d l J f<i>~v~n t cO)lfultée
par les Tribunàux pour l' éd uc atIon & l'é t~ bli f
\[eme'nt des, enfans. S'il s'agit de donner ~ùli tu teur ou de le jllg~r ,_ s'il faut modérer l'autori~ .J
d'un pere qui abtlfe de [on pouvoir, ou qui re'fufe injuftement un con{ente.ment nécefiàire,
Elans mille autres occaÎlOIJS {emblables, ,on aflemble les parens pour les entend œ. Pourquoi deux
époux ne s'en remerrroient.,.ils pas à leur .arbitrage ?
. ,
L'aŒernblée préalable des familles refpeéhves,
pourroit.devenir un Tl,ibunal de pacification. Le
vœu. de cette affemblée pou rroit donner des v.ues
capables d'arrêter le fcandale . Que favons.-uous ?
Les époux pourraient être éclai rés par ce v œ u 2
& Y tl'Ouver la fin de leurs difiènti6ns domelliques.
On dira peut- être que cela eft extraordinaire
que des parens , n'ont jamais été aiI'emblés po ur
juger deux époux, & que la Cour eft fuffi [amlnent inftruite.
Oui, [ans doute-, la Cour n 'a be[oi n que de
fes propres lumieres pour prononcer; mais la
Cour peut indiquer aIJ X P a rties des Juges de
paix, avant que de ju ger elle-même. Elle p eut
épuifer tous les moy ens q.i.J i s'offrent pou r caI -:l'11er l'aigreur inévitable de ,deux épo ux qui plaident , ava nt que de prononcer ces oracles,
Le Îleur de l'Ille craint-il [a propre fa mille &
la mienne? E t que faut-il alors penfer de cette ef.
pece de récufation qui eft auŒ co ntra ire à la na tu re
qu'à la r ai{on? Le Île ur de l'We prévoit donc
qu e le vœ u des de ux familles lui ferai t contraire.
bUQltl
. H
�t
•
3°
•
C'eft donc déja un terrible préjugé contre
lui. •
l\llirs nous n'avions pas be[oin de ce préjugé.
~:. SI principes, invoqués par la Dame de l' HIe,
ont évidens. Nous les avons établis. Les faits
de la caure parlent d'eux-mêmes. La fituation
du fieur de l'IDe eft évidemment incompatible
avec fa demande. S'il vient en meilleure for.
(Une ~ on verra ce qu'il peut ou ce qu'il ne peut
pas. Mais dans les circonfiances, fa prétention
ne peut être accueillie. Au bénéfice des offres
de fa femme, il doit être débouté en l'état, à
moins que la Cour oe veuille préalablement con·
fulter les deux familles, & ménager encore aux
deux époux ce moyen de s'éclairer eux-mêmes,
avant que la juftice prononce [ur leurs contefiations.
•
CONCLUD comme en plaidant •
POR TALIS , Avocat.
MAR TIN, Procureur.
M. l'Avocat-G&zéral DE MONTMEYAN,
porrant la parole.
,
�t
•
3°
•
C'eft donc déja un terrible préjugé contre
lui. •
l\llirs nous n'avions pas be[oin de ce préjugé.
~:. SI principes, invoqués par la Dame de l' HIe,
ont évidens. Nous les avons établis. Les faits
de la caure parlent d'eux-mêmes. La fituation
du fieur de l'IDe eft évidemment incompatible
avec fa demande. S'il vient en meilleure for.
(Une ~ on verra ce qu'il peut ou ce qu'il ne peut
pas. Mais dans les circonfiances, fa prétention
ne peut être accueillie. Au bénéfice des offres
de fa femme, il doit être débouté en l'état, à
moins que la Cour oe veuille préalablement con·
fulter les deux familles, & ménager encore aux
deux époux ce moyen de s'éclairer eux-mêmes,
avant que la juftice prononce [ur leurs contefiations.
•
CONCLUD comme en plaidant •
POR TALIS , Avocat.
MAR TIN, Procureur.
M. l'Avocat-G&zéral DE MONTMEYAN,
porrant la parole.
,
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.-,
~.
'POUR~ '6etir: El!!ar ~Ambrbrri ~oche, ré6d<i t
a~' :~:eu " d'A.~'[o~is én ~Oàl!té \ de -ihari &
,.lmaître de ' la dot .& droits } Ue Dame Margù'e-ritè- de - Rlpùé ~ o défendèur' ~ eâ exploit lr' betl'e du 14 A'o\Ît 118 4' ' ~ : '/ .
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Jeanne 'II.n.nn'e:{ltz
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•
'E S T appâr'emment, - parà . que Jeanne
-1· Annezin ell alfez difcrete 'pour ne demarr-
J.
•der que .~~o 1. à qUèlqu'un qui 1 ne lui doit rien,
qû'elle trouve que - ce procès e(l- minime &
~ qu'eile le traite fort -Gavaliérémeqt. Il JI efi
pourtant ' quefiion d'one entreprife d'autant plus
"importante & d'autant plus hardié qu'elle brave
1
•
__
,
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,
les loix fondal!lfnta'les de la fociété & du repos
des famille.s...
.
P~r des a....udes pnvés ,de mar~ag,e dlJ z6
O'ét~bre 1778,\ &O]ltrôlés &r enréglfhés lq z8
Noveljlble 1'781 " entre. ie ~e~r Roohe ~ la
DIIe. de Rip~;J1t, p:II~-cl~fJii!ee d~ lM Rer!,
fe contlitua tous fes .ble~~ prefens & à , v~n!r,
not Ql.ment ?X fpécialeme~: Ja, fo~me d,e. J f?7 6
livrt s en coIrres ~ rue!Jb~~ J ' capitaux & l~ns
fcinçs y m~Q-t~oJl~~. Cette fo!ll-me ~e ~ 3°76 lt v.
formoit toute la confrfiance "des biens pr~fens :
le fieur Rocqe ..n'en a -pas .HÇ-U, 8( n a pas
rnêlijt! Jieu d'eu .attendr,e ,d'autres.
- ..
Jeanne Anneûn a pYérendû dans la (une etre
créanf.}er e d~ ~o<v,Jjy! .?e la Plie. -de; R~pe-r~
' en ~enu d'un b~ll.el pnl/e portant ,la date 9u 17
fto'ût 1'77 8 , a1t'é:i~(Jre de r/ei. ,Ix mois ~~ i fufdic
mariagç,. Ce billet ~n c?nçy e~l; fe~ t~rr!l~~: .
cc Jé promets p~yer 9 ~JIe. ~eann~ ~nn'eZlrI
» veuve Martin , Lorfqu elle manera Tulle
)) Martin fa fille-, la fOI1J:me de fix cent livres
» valeur reçuë êii a-rgeilt "comptant à Anfouis
))).e 1 7 Ao,ût , } 7·7B , llppée.: M.Q~gr:erùe de
» de Ripert. Bon p'0ur ,~.c;o lIv. '
Ce billet qui n'exprime autre chofe qu'une
ç!onlJ/niQP eQ,tfl! vifs fUfJ?J:i(~ ep fr'a,u:de- qe- la
loi 1 à l'état lle foiblell.è ~ d'iofirmité- de la
Darpc: Jl,e,. /ÂiFfrf? ~ ,Qemeui~ foU,s, .'jign1dl1lre
EriJ!~ ".&...par ;~of)fégyeEt' Iilrçep~!~Je d~une
dp[tj! qr:b~l'i(llr~ , ;Jufqu f'u ~ ré,,:"ne.r .1779 ,
époqlle ~ ~aq~llS il q . ~té ~s;>ntrôl)é: à' cene
épô,qlJ~ le'~ él1Qu(a.jlJ~s ,q ui- fi~ent l'h:y'porheque
des
COI;lVedtio~s 'matrimonialès
dU' heur Roche ~
,
~
étoient célébrés depuis long-rems, moyennant
quoi celui-ci devait fe ~roire paifi!>le poffe,~eur
de, la dot effeétive de 13°76 lIvres qu 11 a
reçue.
- Oelt pourtant en vertu ' d'un rel titre que
J'eahn€! 'Annezin s'eil: pourvue pardevant la
Codr en qualité de pauvré pour demander
contr: le fieur R<;>che e~ fa q<llali[~ de mari &
roa$cre de la dot , & d.rolCs de Jadue Dame de
R.ipe~ J le paye~nent qefdits 60.0 liv. , en. préfuppofant ' qu'elle eil fur le pOint de marIer fa
fille . . Ses moyens lui paroiffent fan fimples :
eIte ::tffimile le mari, portep-r d'une conltitu'rion
géItérale ~ à ,UI1 héritier. pur & ~m'ple ,= d'~ e,lIe
,0nclu~, .qu'jI n'y a pOInt de dlft.lnétlOll' ~ faIre
â .CgiI êgarq , :eri~ré~ les det,t,eS' 'c!ttr'~gr~folre~ ~
les deces' hypoth'eames : qu Il eft oblige de 'payer
i6cfefinimet1t 'les unes & lès ' autres;- toen de
lI1~lrtè ~ùe l'hér-itiet , fuivam la,'regle boriq non
di'CCiHiür ;-/l'fi dë'tl"ao œre tllieno.
-.
-
- '. QuC(nd on lu~ a oppofé -que ,le mari el! Dn
'tiers; que ç'et'i ' à tirre onéreux & non ·à ti'tre 'gratûiê 'qu'il ~fl poffetfeër d~ la do! de la
, femme, foit en -vertu cl'tlne éo-nfHttltion générale,
foic' en vertu d'une confi-Ïttlfioh-parriculiere , &
que pil r cQnféquel,lt les detteS c!t[rogrtlfaù:!s'peuveri.t encor~ mo'ins .préjudicier: ~ ~fon hyP6theque qu'à celle' de -tops autres' riers acquére~rs ;
~is-a, v'is defquels les ~illet'S· p;iv~s n'ent point
d'autre date que celle du -Contrôle & de l''-avération; Jean,ne' Annezin a fr:anchi cavaIiéremerit
cet obllacle -, en oiifrant de prouver par temoÎns
..
•
,
_
l
.
�4
.
que fon billet a exiflé a~ant le manage de- la
Dlle. de Ripert avec le ,heur Roch,e.
s'agit donc de favolr fi . a~ , benéfice dF la
preuve offert~ & en ~uppofan~ qu'e~le. ~o~t ren,lo
plie, ,ce qUI ne ferolt pas, ble,n dtflicl,le, - pes
qu'elle feroit livrée à l,a fOI de. deux ,t qnolns,
quoiqu'il foit très-~,~rtal~ &. tres-pofit1~ qY,e le
fufdit billet, tel qu Il eXlfie , a. été fabrIque environ un mois après les épou[.allles dans l'Etude
d'un Notaire de Cucuron, où.1a Dame de Ripert fut tranfmarchée; ~l s'agit de, favoir "difons-nous, fi le fieur Roche, en fado CJ-ualité ,
doit être condamné au paiement de la fomme
énoneée dans ce billet privé, [oufcnt par fa
femme.
_
On ne feroit paJ étonné qu'une pareille ,queftian fut élevée dans les pays çal!lUmiers" 0\1 la
-communauté de biens entre mari ~ femme opere
une identité de perfonoes ,&. une confufion de
patrimoines, tellement que les dettes mobiliaires
&. immobilliaire..s, contratlées pendant la corn:
muoauté, doiyent être payées .fur les biens qui
la compofent, ' comme l'obferve Denizart, vo.
,
communauté de biens n°. 40, & SQ.
Cependant cet Auteur, au . même endroit 'no.
s't;xplique fur, cette' quefEooen ces termes:
n Il ne faut pas croire qq'un mari qui auroit
» négligé de faire--.faire un inventaire des biens
» de fa -femme ~n. fi: mariant, pût être pou r» fl,livi indifiintlemen~ pour ~outes les dettes
» que fa femme pouvait avoir concratlées avant
)) : l,e mariage. Sa négligence p e u~ bien l'a(fuje'nir
)) à payer les dette5 fondées fur des titres au)) lhentiques,
n
S4
S
» thentiques, mais non pas celles qui réfultent
» d'atles fous fiBnarure privée, autrement ce
» feroit ouvrir une VOIE TRÉS-FACILE
» auX femmes pour RUINER LES MAl)
RIS.
)l
Ce même Auteur rapporre tout de fuite qu atre Arrêts; rendus en 171.9, en 17~ 5 , en 174)
& en 1744 en faveur du Marqui s d 'Harbon ville, du Marquis de Melun & autres, contre
des porteurs de pareils billets quoique dat és
AV ANT le mariage, filUf a ceux-ci de fe pourvoir fur les biens de la femme apres la diffaLucian de la Communawé.
Le Brun en fon traité de la Communauté, liv .
2. chap. 1.
n°. 17 & 18 va encore pl us
loin. 11 foutiene que pareils billets privés fo nt
nuls, néln feulement vi s-à-vis du mari, ma is
encore à l'égard de la femme, & c'efi pour o bvier aux fralldes allxql1el~es on feroit journellem ent expofés dans le fein des familles. ,Mais fi une pareille q!Jefiion a pu ê tre élevée dans les pay s coutumiers, il n'dl pa s pardonnable de l'élever dans les pays de droit
écrit : auffi ne trouve-t-on nulle part qu' elle y
ait jamais été propofée. Il étoit refervé à Jeanne
Annezin de donner le premier exemple d'u ne
,encreprife qui parmi nous ne peut ê rre en vi fagée que comme féditieufe.
N ous tenons, d'une part, pour ma xime qu e
t~us\ le~ billet~ privés ne ~rennent leur exiftence
VIs-a-VlS du tzers que du Jour du contrô le & de
l'avération ; &. d'autre part, que la femme n e
peut avoir dans aucun [ens la difpofirion de fa
9. s·
B
�6
dot pendant le mariage, foit qu'elle dériv-e d'une
confiitution génénie, ou d'u'R~ confiitution par.
ticuliere : que jamais la femme ne peUL porter
la moindre atteinte par fon propre faie à la
jouiifance & à l'adminifiration qui en font dé-volues au mari, pas même par les condamnations qui feroient prononcées contr'elle pour
caufe de délit. Nous ne [ouffrons même pas que
le pere, ni tous ceux qui onr concouru à une
confiitution générale, puiffem prendre après coup
des mefures poùr en empêcher l'effet par rapport
aux bien.J venir: que doit-il en être des biens
préfents? Et l'on voudra que dans un clein ,d'œil
une' femme fufceptible de foiblefiè, d'ignorance
ou de caprice, puiffe, à l'aide de deux témoins
en antidatant des billets , confumer fa dot
ruiner fon mari & fes en fans ? En vérité il y
a trop à fouffrir pour l'honneur des loi x & de
la Jufiice d'avoir de pareilles quefiions à Combattre.
.
,
N'échappe-t-il pas à Jeanne Annezin de fe
confondre elle-même? Sous prétexte de la diftinfriou imaginaire qlu 'elle fait entre la confii.
turion générale & la coofiitueion particuliere
elle convient que li la dot de la Darne de Ri:
pert éroie certaùze & partiCtJliere fon mari au,r~it raifon de .f'lire valoir la p,i~rùé & le pri-
&.
1
J!l~ege e .(o~ lltre contr~ un créancier qui n'au'rolt .qu
un ture PRIVE, une créance chirogra_
p,hazre. Efi-ce donc que l~ confiittltion de 13°7 6
h~. que ,la Dame de Rlpert s'eft fpécialement
faIte" n efl: pas' cerraine> ? Le fiel!lr Roche
poiféde-r-il d:autpes hiens de fon époufé' en \leltu
7
.
de la c(jnllitution générale qu'elle y a aJoutée? .
Dans aucun cas pourrait-il être troublé pour le
tout, ou pour la partie de cette dot certaine fur laquelle il a dû co~~ter, ,par tous autres qU
des créanciers anterleurs a [on hypotheque , a
moins de l'en priver de voie de fait?
A quoi {erviroit dovc cette p~euv~ extravagante
qu'on offre , qui ayant po~r ~bJet, d a.1furer la dat.e
d'un billet privé au préjudice ~u ners, aboutl~
à faire dépendre toute [on eXl11ence de la [01
de deux témoins? Les regles du Droit public
quî ne veulent pas compromettre à une pareille
preuve, une chétive fomme de 100 liv., voudront-elles lui fubordonner la fortune & le fore
des familles?
,
_
uoiqu'il ne foit pas poŒble de fe former
le moindre doute fur la qllefiion que nous ve
odos de traÎter, fans manquer de refpeét à la
Jullice ~ il doit néanmoins nous être permis d'ajouter que le billet qui forme le citre de Jeanne
Annezin, ell également profcrit fous un autre
point de vue. Il n'y a qu'à le lire pour [e convaincre qu'il renferme une ç1onation entre - vifs
pW,e & fimpie , extorqu'ée à une femme foible
& infirme qui n'a pu réliller aux prefiiges pratiqués comr'elle. Le fait eIt tellement notoire,
que peut-être le re[peét humain mettroit l'Adver(aire en conlidération, fi elle était obligée
de Jurer qu'eHe a réellement compté les deniers.
Comment pourrait - on le fuppofer en conl!déraot que ce n'ell que conditionnellement
~ en cas ~e mar.iage de la fille que le fu[die
billet devraIt aVOIr fon effet? Ell-il tolérable
7
�8
qu'on efcamote des donations à la foiblelfe , à
l'impéritie, ou même au caprice de qui que ce
foit, en croyant fe former un titre invulnérable au moyen de la clau(e, valeur reçue comptant qu'on y aura fait inférer? Cet artifice groffier qui ne trompe jamais la loi, parce qu'elle
tient pour regle que plus valet quod agit ur , quàm
qllod fimulate conc;ipùur, peut-il fubjugu er &
alfervir fes Minifire s ) au point de leur faire
fermer les yeux à l'é vidence même? N'eft~ce
pas pour obvier à de telles f upercheries que
l'Ordonnance déclare radicalement nulles toutes
les donations qui ne font pas faites pardevant
Notaire) &. que nos Loix Municipales plus at-'
tentives encore à prolcrire la fraude, exigent
l'intervention du Juge &. la préfence d'un Confui?
Peut:-on douter que ce ne -fait par filrprife
&. par fraude que Jeanne Annezin s'eft procurée
cette donnati~n gratuite fous la forme d'un prêt,
quand on VOlt que la 'Dame de Ripert qui a
été affifiée de fan pere dans {on contrat de màriage) ne l'a pas éte dans cette prétendue obligation privée qu'elle érait incapable de contraLter par toute forte de raifon s.
CONCLUD au déboutement de la demande
de .Jeanne Annezin avec dépens & autremen t
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POCHET , Avocat.
D'ARBAUD, Procureu r.
Mr. le Confez'ller DE BALLON ~ Comm if
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l'impéritie, ou même au caprice de qui que ce
foit, en croyant fe former un titre invulnérable au moyen de la clau(e, valeur reçue comptant qu'on y aura fait inférer? Cet artifice groffier qui ne trompe jamais la loi, parce qu'elle
tient pour regle que plus valet quod agit ur , quàm
qllod fimulate conc;ipùur, peut-il fubjugu er &
alfervir fes Minifire s ) au point de leur faire
fermer les yeux à l'é vidence même? N'eft~ce
pas pour obvier à de telles f upercheries que
l'Ordonnance déclare radicalement nulles toutes
les donations qui ne font pas faites pardevant
Notaire) &. que nos Loix Municipales plus at-'
tentives encore à prolcrire la fraude, exigent
l'intervention du Juge &. la préfence d'un Confui?
Peut:-on douter que ce ne -fait par filrprife
&. par fraude que Jeanne Annezin s'eft procurée
cette donnati~n gratuite fous la forme d'un prêt,
quand on VOlt que la 'Dame de Ripert qui a
été affifiée de fan pere dans {on contrat de màriage) ne l'a pas éte dans cette prétendue obligation privée qu'elle érait incapable de contraLter par toute forte de raifon s.
CONCLUD au déboutement de la demande
de .Jeanne Annezin avec dépens & autremen t
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l .....,a .. ~- ~,'- 1l0"- ,·.ov aGI0 7J: l .....t O"<1 .....:"' <.LJ I\tJ~-''<''<;) '-'
POCHET , Avocat.
D'ARBAUD, Procureu r.
Mr. le Confez'ller DE BALLON ~ Comm if
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1
MEMOIRE'
V
A
eU'1"-_l\\...O...J'-O- .
CONSULTER
ET CONSULTATION
POUR Dame Anne-Rofe-Jacqueline de Peiffonnel de Fuveau) époufe du fieur Barthelemy.
CONTRE
Sieur Pierre-Mathieu Barthelemy.
L eO: affreux pour une femme délicate, pour
une mere fen1ible, d'être réduite à la néceJIité
de peindre de cOllleurs odieufes fon mari , le
pere de fes enfans . La Dame de Fuveau) voudrait pouvoir fe cacher à elle - même le détail
I
A
,
'"
�2
de 'fes, malheurs
clomefiiques: elle fi'
. cl" etre
cl
remit
'
o" bl Igee ,e1 [oulever le voile dont ils cl evrolent
err,e en ve oppés. C'efi l'excès de [es dou!
u1 la f(or~e a" e1ever l a VOIX,
'
contre un t eu rs
q ,
qUI, depUIS 7 années, difiille [ur [es jOllrs g~ran
à goune l,e poifon dont il corrompt habitue~~te
ment fa vie.
eSi [on ép aux n"aVOIt compromis que fan 'f.
phy!ique, peut-être auroit-elle eu la
f( e uyer 1es perféClltions dans le filence M ~e
on ~onneur , qu'il a voulu flétrir ar ie~ ais
lommes
les
C
p qu'ilcal
' plus atroces ' fies enrans
Val! u meconnoître ~ lui impofent 1 cl
. ,a
goureux d'implorer contre lUI' 1 ~ eVOlr rI. U
1
e lecours des
.
L OIX. ne p liS lon a
lâcheté . la D
"due FPatience ?e f-::roit que
"
ame e uveau
fi'fi
.
Il
J~ l, eron les
calomnies de [on mari
fans.
' e e trahuoIt fes en-
~~n~e
f~:1
.
Que le fleur BartheI~m n"
lui-même une dé
h
Y Impute donc qu'a
marc e que [es e '
, d'
10 Ifpenfable: puifc u'il
,xces ont rendu
frein des bjenféance~ con ~ bnfé ~ans refpeét le
enchaîner [a malheu ) g::~s, Il ne peut plus
reUle VlI..llme.
La nailfance & l'état . .
.
Dame de Fuveau & 11
a~OIent mis entre la
le lieur Barthelemy ~n m~n,' une difl:ance que
r
'fi
n auraIt Jam a1S
. pu firanchir,
lil , laCrl am à la fois & le
les avantages brillans
v~u de fa famille &
que lUI offraient les par-
3
tis les plus di!tingués , la Dame de, Fuvea~
n'av oit cédé à l'illufion trOp flatteufe d ennoblir
.
"
l'objet de fa tendreffe.
Mais en élevant le fieur Ba(thelemy )uCqu a
elle, Ia'Oame de Fuveau ne pu lui infpirer les
fentin1ens qui l'animoient. Il n'ea l?alh:ureuCement . que trop vrai, 9ue les premiers )OUt:s de
leur union furent des Jours de trouble, prefage
trOp certain des tourmens qu'elle auroit à endurf:r. Elle ne tarda pas à découvrir dans le
caraétere de fan épouX cette humeur a.lriere &
farouche ~ ce tempérament violent dont elle a
été fi long~tems la viétime.
Livré à toUS les excès, abfolu dans fes volontés ., tyran juCques dans [es caprices, jaloux
par politique, [oupçonneux [ans méfiance, Ce plai[ant dans les débats domeaiques, les excitant
pour fatisfaire cette humeur inquiéte qui s'irrite
dans le re~os & ne fe calme que dans l'orage,
paffant avec une égale rapidité de la fureur auX
carefiès & des carefiès à la fureur, le fieur Barthelemy ne fembloit avoir quelque énergie dans
le caraétere , que pour faire trembler la Dame
de Fuveau fur Ces jours.
Qu'on fe figure ~ s'il ea pofIible , l'impreffion
que dû faire fur une femme délicate & fenlible
le développement d'un caraétere auffi compliqué. Livrée à l'afcendant impérieux de fOll
époux, n'orant invoquer l'appui de fa famille
Al.
�4
qui l'auroit accablée par le fouvenir défolant,
d'uné volonté trop confiante, la Dame de Fu.
veau n'oppora d'abord aux emportemens de fon
mari, que [es larmes & un fond de douceur
inépuifable.
Un parti que l'honnellr confeilloit à la vertu
malheureufe, lui offroit une re{fource ; il exi.
geoit à la vérité une réfignation ab(olue ; mais
tel en le courage qll"in[pire à une ame noble
le defir de [ortir de l'humiliarion, qu'il n'ell au .
çun ' effort dont elle ne [oit capable.
. Déja la Dame de Fuveau, n'oroit plus fe
flatter de ramener fon époux à des felHimens
de t~ndre~è' ; elle ,~v0.it la trifie certitude qlle
[a feInte Jaloufie n etOit que le prétexte de [es
dégoûts & de fes dédains; mais elle [e flattoit
encore ' de forcer du moins fon ellime & de
conjurer les orages qui troubloient [a tranqui lité. Cet erpoir enflamma foncourage : on l'a vît
re,noncer à tOllS l~s amufémens de fon âge ~ [e
devouer toute entIere aux aufiéres devoirs de
[on état & deyenir étrangere à tout ce qui étoit
~?rs de [a maifon. On l'a vue, & per[onne ne
1 Ignore , perfiller dans ce généreux dévouement.
Une vie auai rétirée auroit encore eu quelque ?o.uce.ur " fi 1: fieur Barthelemy avoit borné
fo? InJll~lce a ~n~er fa femme de l'amour qu'il
lUI devoIt: malS Incapable de [eotir le 'prix de
5
ia con cl u •l te
.
.
r
mépris . ne , fut pas
mOl11S' mar·
,11on
r.
ué ' il ne chercha qu'à Ju{hfie~ la :yranOl e aux
q 'cl
u bll' c ré volté
& blentat la Dame
eU X
u p
,
d'I r '
1
Y
evint rob)' et de la Illamatlon a
d
de F u ve au
"
d r.
'
[on
mari
infeél:a
du
venm
e les
p1us cru elle .
l ' , 'fi
. le Il'eu de fa naiffance , ce UI ou re Ica 1otnnIes
d0it fa familleA
,
. Il n'efi aUCUNe efpece d'outrages ,qu on ne
doive attendre. d'un mari qui fe. porte a ce ge~re
d'excès. Livré à la paŒon du Jeu, fou vent :voré de fes fureurs, le fieur Barthelemy rent,rOlt
chez lui les yeux étincél.ans de r~g~ & menaçoit tout ce qui l'enlourolt. Pr~nOlt-11 quelquefois un ton modéré ? C'étOI~ po~r enleve~
à fa femme des bijoux dopt le pnx. était ~n;plore
à fatisfail e fes créanciers. Cette lOfo,rtunee. VIC;
time fe permettait-elle quelque repre,fentauon .
Le fieur Barthelemy s'abandonnOlt a la ,fougue
de fon caraétere , faiCoit des menaces ternbl~s Be
fin.i,ffoÎt par ordonner à fon épo,uCe de fO:,tlr de
chez lui , 6. elle ne voulait en etre c~fiee par
[es valets.
Après tant d'hu,mil~tions ~l [e~ble que la
Dame de Fuveau n avolt plus a ~ralnclr,e q~e de
les voir renouveller: mais, qu'ü efi diffiCile de
s'arrêtù quand on a franchi le~ bo~n:s d~s mœurs
conjugales! elle eut encore a gemlr d"un, no.u:
vel outrage: le Sr. Barthe!~my , ~orta .1 mdlgnu,e
jufqu'à la menacer de la redUlre a fervlr [es Mal-
r.
,
�-6
trefiès. Et, comme s'il avait voulu fe laver de
l'infarnie de [a conduite, par une infamie plus
grande encore, il difoit à [es domelliques que fes
déreglemens avaient moins pour objet de fatif..
faire [es goûts que de marquer [on mépris pour
[a femme.
Livrée au defpotifme le plus cruel, elle était
le jouet de toUS les caprices de [on époux; il
[e faifoit un jeu barbaré de la tenir dans un état
continuel de terreur. Ses difeours toujours mé.
naçalls n'annonçoient que Gnillres évéoemens ~
les mots de tuer & d'ajJaffiner, étaient perpé.
tuellem~nt [ur [es lévres; toujours déplorant
la fatalité
du dellin qui l'unilfoit à elle .J il ne
•
pOUVOl.t être h~ureux, difoit - il, que quand
leurs lIens feraIent brifés : pour éviter un événement. tragique il. a~nonçoit une féparation
volontalre & en dIél:olt les conditions devant
[es valets.
La
nuit
loin de ramener le calme ' ne lC
r er_
•
,\
VOlt qu a redoubler l'orage. Par un raffinement
?e ;ruau!~ qui n'a peut-être polnt d'exemple,
11 s amuraI: dans cette partie du jour à épouven~er fan epou[e par les repré[entations les plus
ternbles,
Q~elquefois il de[cendoit dans [on J'ardin
lachc)lt
1
. . . un coup , d e rru l'I
l , remontait avec préClpltatlO~, [e préfentoit à la Dame de Fuveau
en chenllfe, un fabre dégouttant de fang à la
A
7
tnain J' & fe promenoit des heUl'es entieres dans
[on appartement avec l'égarement de l~ fureur.
D'autres-fois il [e levait dans la Olllt, prenoit foo épée, [ort?it furieux, de. fa . mai fan &
revenait pre[qu'auill-tôt daos 1 ag~tatlon la plus
.violente. Quel était donc le motif d,e,s ~ou-v..e~
mens qu'il venoit de [e ~onner ~ C etaIt C~IUl
.de tenir [a femme dans un etat habltuel de cralnte
& de lui inculquer cette terrible vérité qu'il
.avait eu la barbarie de lui apprendre, que fa
vie ne tenoit qu'à un fil.
C'efi ainG qu'à de trilles ,journées, il [ai[oit
[uccéder des nuits plus trifles encore.
_ Il ne faudrait pas croire que le fieur Bar_thelemy ne Ce livra à fa brutalité que dans l'intérieur de [on domeftique. Il avoit bien l'attention d'écarter les témoins autant qu'il le pou",:
;voit, mais l'impétuoGté de [on caraaere -r endoit
{ollvent inutile cette perfide précaution.
. Il avait amené à Fuveau quelques-uns de {es
amis, & ce fut pour les rendre témoins d'une
[céne aulli affiigeante pour [on époufe ~ qu'humiliante .pour lui, Une promenade publique fut
le thé<ltre des excès auxquels il [e livra,
La patience la plus ab[urde a encore [es bornes, La Dame -de Fuveau réfolut de fuir le
tyran qui l'opprimait, & de [e jetter dans les
bras de [a fami.lle ; mais, gardée à vue par [on
mari .J elle ne pû qu'implorer la proteaiQn de
�S
.fott
. Ilpere' '€0Dtre
C' 'c.
, . _ ,la tyrannie & l'oppreŒIon. "4
latnl. e s ae p prevenue, par la rume u r pu bl'Ique
. r de)
.c;ob Hnt, Ull ordre pour 1 arracher de 1a mailon
00 epoux & la réintégrer dans celle d
f(
pere.
Quatre
, e tlOIil
.on
"
" àCavaliers chargés de l' execu
etoient pret
rempli-r leur commiaion' d "Ja
~a I?ame de Fuveau rendue à elle-même " . lle .
J~U1r dans la maifc:o patemeJle, de cette' li~e~t~
.dccente
dont le lIeur Barthelemy l' avolt
. auffi
te
. d'
10 19nement privée depuis fon mariacre'
. JI
' _ . l'
d'
b , mais
. é comme
'
,.
celUI, CI le voyant enoncé à l' autont
un epoux barbare:> contre lequel les L .
s'arm
'
, er d
e eur l
pouvoir,
joue le défefiOl X .VOnt
n1en.ace fa
d'aller poignarder
<IV oient f01hwé cet ordre
fi 11 fi'
qUI
pour l'exécuter.
)
e e aIt un pas
~et?-me
.
~es
)} Monfieur & très-cher Beau-Pere.
c!u~r ~
têtes que ceHe ménace avait
·
.
pour objet
etOlent
, 11 trop cheres à 1a D ame cle Fuvea
qu e e balança: la piété filial l'
u pour
fentimem de fes malheu
1. e emporta fur la
encore fous l'empire d rsr' e le confentÏt à refler
e Ion tyran
L e fieur Barthelemy ne
'"
que l'autorité n'eut 1"
pOUVOIt plus douter
échapper à fa vigilan~: y~uxfi ~ur lui. Il crut
en les couv rant d'
aire
excufer
fes
outrages,
.
e cette
f4 •bl
fl'
,
attrIbue
1 r communément'a l' amou r &al q eue
' ,qu11 on
1
III n ell e
p us Jouvent que l' effi t . d"
exalté, d'un fentiment d: fu ~~ a.mour propre
que toute comparaifon bl le~lOImé 'pe~fonnellCi:
.
e e . l feIgnIt d'êtrCi:
jaloux
r
9
-jàlo ux : comme fi cette foibldfe pou voit jamais
lui aflùrer l'impunité; comme fi un vice pou:'
voit jamais en faire excufer un aut re.
Aux tranfpons dont il paru faifi quand fa
.viaime alloit lui être ravie, on croirait que
-le fieur Barthelemy, abandonnant tout · projet
de féparation, n'avoit d'autre défir que de la
conferver auprès de lui. Mais bientôt, par llne
de ces inconféquences qui lui font familieres,
il écrivit à fOll beau-pere qu'il était prêt à lui
81
rendre [a fille: la lettre eH du z.) Avril 17 .
» Un motif d'amitié pour ma femme me fait
avoir recours à vous, pour vous prier de
vouloir bitn la recevoir chez vous. Ennuyée
de vivre avec moi par des raifons qui fon t
à fa connoiflàhce & que j'ignore, elle eft
très-décidée à ce que j'ai l'honneur de vous
écrire. Il
fûr que la tendre ire d'Lln pere
& d'une famille, dont les généreux foins
ju[ques à aujourd'hui lui font efpérer un ave» nir pl us heureux que celui qu'elle attend de
)) fon mari, l'invitent à cette réfolLJtion. Quant
)} ~ moi, Monfieur, autre raifon que celle que
»
})
»
»
»
»
»
»
ea
» Je V allS expofe au commencement de ma lettre
. » me décide à prêter les main s à [es défirs j'ef» pére que vous voudrés bien acquiefcer à ja
B
�10
,» demande, que j'appuye par la priere que je
1)
VOIU
en fais & me croire avec un lin cere atta_
» chernent, &c. »
Cette lettre ipfultante par les motifs qu'il
Nête à la Dame de Fuveau, par le ton d'indifférence & de mépris dont le lieur Barthele_
'my appuye h. ptlé~endue demalJd~ ?e fon époufe,
plu-s infultante encore par [es reucences, ne f\lt
point rendue au lieur de Fuveau pere. Son fils
·qui l'a reçu~ eut la prudence de la lui cacher,
pour ne pas affliger d'avantage le cœur paternel
dans [es- derniers memens'. ,
La Dame de Fuveau eut bientôt le malheur
de te perdre; & fan frere , qu'une fanté trop
délPcate renetoit habituellement malade, faifoit
craindre que ta mai[an de Peilfon'nel ne s'éteignit
avec lui.
L'afpeét riant d'ulle [occeBiarr importante,
une terre dom le: nom flattG!t la vanité du fieur
~anhelemy, pouvaiient ?pparter quelque ad()l.lo
clirement au fort de f().FJl épou[.e. Mais, telle: était
la ha~ne q.u'il a- co.n5oe,p.@l!J1r eUe. , que' fes prll)o
pres Interets ne, 1ll1f In(pm~tent Ipeme pas le défir
de clla'nlgu.
Se f.lanant' de reGueillir, la ftll<ï:ceffion du fieur
de Fuveau qui d~péri{f()ù à vue' d'œil il ne
fongea même pas à avoir pour fo'n épo~fe ces
'q.uelques égal ès qui amoient fLlffi pour lui ra-
Il
, mener l'affeétion de fan beau-frere J jeune~ham
me dont le caraétere doux & le cœur allnan~
ne connut la haine que par l'averfion que lUI
. r .
t les procédés du fieur Barthelemy.
111lptreren
cl
Par fon teflament, fait pe~ ,e tems avant
fi mort le fieur de Fuveau lOfiltua pour fan
:éritier 'un coufin au quatriem~ degré,
ne
laiffa à fa ' fœur , pour qui il avoit ,~oUJours'
confervé l'affeétion la ' plus tendre " qù un legs
d'u[ufcuit. Il , défendit au fieur Bat~helemy de
s'immiCcer dans la pofièfIion de fes ble~s & vou1 t que dans Fe cas où il s'en mêlerolt, l'.u[uf~uit fut - par ,c ela feul confoliBé à la propnété,
rédui[ant alors fa fœur\ à une penfiort de 17 00
livres qui ne pourroit être comptée qu'~- ~lle
même. Enfin, le fieur de Fu'v eau permu a la
Dame fa' fœur de difpofer d'une fomme, de 30000,
livres en faveut de qui ell!! 'youdroiç-, t?ùJ()'u~S'
fous la -candition que fon mari rie totTcnèrolt
point à l'admin!firation de l'tifufru,it., J a?éanü~
tànt cette p'e rmlffion dans le' ças 'ou' II s ~n me.,
J
1 . 1 . • j~ • }(,
,,-' .' .
1-erolt.
Les motifs de ces difpofitions ne peuvent être
mécot1~l:ls. te fieu~ BarrlleYemy
)~~ at.tribue'r qu'à lui-n1ême.r Son beau-fIere
. da1~01t
J _L .L1
qu~une [llcceffiQÎùlp leln e ;' le <
dél'ol.1r'n,nHl.,e-route-
l?'
#
nél'd1ii-t
accu p~tid~ utHe , ';:nXèihpi-ra'l 1a 'i0nûi~OW d~~.Y é ~
B0tlfê ; ,; ttn JbiurnifTh tfth un'°hotiY'el -.a~~en)~Jlau x:
paffi61h's fd ù~ mari :
t ,;
~'
~
1
l"
B z
�J2
La mort du lieur de Fuveau & Ces difpofi~
tians, devinrent le fignal de nouveaux outra_
ges. Furieux de la privation de cet héritage
plus furieux encore ~e ne pouvoir porter u~
nom & jouir des droits honorifiques qui flattoient fon amour propre, le fieur Barthelemy
annonça à fan époure qu'il falloit abfolument
que les diCpo{itions prohibitives du teftament devinfIènt inutiles, ou que l'événement le plus ter·
rible ferait la fuite d'un refus. .
Il étoit cependant indiCpenfable, à moins
qu'on n'eut ' voulu manquer à la mémoire du
fieur de Pei{fonnel; Dès l'inf1:ant qu'il l'eut effuyé , le lieur Bart,~elemy ne mit plus de bor~e à. ~a fure~r: l,es étrangers que le féjour de
1 hérmer atmolt a Fuveau furent plus d'une fois
~émoins des propos inCultans, du ton ironique dont
l_e fieur Barthelemy, mortifiait fan époufe. La
Dam: de Fuveau n'avait pas même la liberté
de. lUI répondre & pour prévenir toute plainte
d~ fa part autant que pour l'humilier d'avantage encore, il lui écrivit la lettre que voici.
•
»
»
»
»
»
-
fI"
.
~
» N'étant: point a~coutumé ,Madame à lcout~r de, rang froi~ les. cor;nplimens que ~ous me
f~te~ 3: tab\e ( '1_ Je _p~end fagement la [éfolu~
lil0 n rl
.. - Vou:;
' -auriez tné. ) 'tr )fIl "1'
e
o~J)~~r~ 'cl'C rE 0us.
rlté
. Ir.
J
,
" ...
'
,qP!1 n JeU>l\eOl~outJ dfr fu te r.éprimé votrel
audace: rendez grace à je.' ne Içàis quoi fi;,
l-)
»
'e ne l'ai pas fait.1kais c'eft rec.ul.er pour
~ielLx fauter. Je ne dois pas vous ladler Igno-
avez élevé ~ans m?n at?e d~s
r;'
s d'indignation qtll ne fimront jamazs.
), j'enumen
.
f &
)) Je fi ais heureu[ement apprécler~ les cha es
vou; jugez bien ce que vous etes & ce que
».
l
Il ne VOliS fied plus après cette
)} VOliS va q:.
e
» déclaration de vou.S obftiner a
~Hvre,
}) vous engage beaucollp à refler LCl & a ne plu
}) penfer à moi. Je prendrai l~s arrangetnens que
» 1'011 voudra & je ne faurol s trOp payer cher
~ ma tranquillité. Joulfi"ez à votre tour de votre
:> liberté, je connais trop l'.ufage que vo~s en
» faire~ pour ne pas vo~s fazr~ ,!,on come.lzment.
) Adieu dattez bien le Jour d hIer &. 'lu Il vous
l)
fer que
VOliS
'.'f
r: i .
J:.
).) en fouvienne. »
Cette lettre renferme autant d'injures que de
mots. C'eft l'expreŒol1 du mép~is le, ~lus ca_raEtérifé, de la haine la plus lDveteree. El~e
ne contient qu'une vérité: c'eO: qu'après l'a~o1C
reçue, il ne convenait plus à l'époufe de f~lvre
le mari qui l'av oit écrite. Tout en rendait les
traits poignans jufqu'à l'état où étoit la Dame
de Fuveau quand elle la reçut.
C'eft effeEtivement à cette époque que parurent les premiers figues d~ fa gro{fefiè. Elle fe
flattoit que fan mari inO:ruit de fon é~at rendrQit la férénité à des jours qui lyi devenoient plus
�14
précieux. Inutile erpoir qui l'le fut que trop.t~t
di Œpé ! La groffelTe de la Dame de Fuveau , f~t
po.ur elle la fource de la perfécution la plus dé~
(;hll·~nte . ~e fi ur B~rthel em y o fa dire ( pour_
qUOI faut-Il que nQUS foyons obligé de le réfléter-~ ) il ofa Pllblier- que l'enfant de fa ,femme
Ile lUl appartenoit pas, qu'il le défavoueroit
f1\l'il était cenain de fQn infidelité flour en avoi;
été te témoin occulaire-. Calomnie infernale-, qui
~è p~UE pas même être excufée par le délire d'une
}magtnauon [o~pçonneuîe. L e fieur Barthelemy
Ile peut p~s reJetter cette atroci-ré ftir la- jaloufie. ~l la )o.ua qudqueJots; mais, il I~e la con ..
Dl:l'~ pmals. Sa c-onviétion intime démentoit fa
langue. Il éwit affuré de l'honnêteté de fl'
compagne ;. mais la haine qu'i-l a conçU' pou:
elle, la haIne feule, le pouffait à fe flétrir lui
& [es, e~fans_ , pour imprimer la honte du crime
ftll' Yon 11180cenle v itlime.
PI>
X u on ne· eroye pas qtl''il' y ~l1t ici d"en-lumi..
n~re, c"efi le trait llll1ple· exa8-ement de-Œné
L ef1quê:e- a été prife: fe fixIeme témoin dé:
po~ ~om'!le- plufi.e\:lrs am-res ftlr la di~aJUation-,
maIS' Il ajou~e que ». ayant demandé· atl fieur
» B~rthelemy fi. c'étoi:t à la i-al Ifi. .
":1 r. -l
» lolt aftri-buff fc cl
'
r ~u le qu l la». fi j , • , . _\ e~ .'U·retes perpetuelles ' envers:
a remme
, Il lu·t. cflt qu.''i& n "etau'
. pas "Ja l aux
',
~)- mat~ ~~e' fan- ~ntér-êt étoù de parôf{r~ tel :
J
}) q.Uot:/u zl· fot bien convaincu de la- fageffe &
!~
,honnheté de fan éprJlJfe » & il réd e.
" de l
.
d ·Îron
mande fa femme! ..: ... zl ~tol~ :on~al~cu e ,
honnêteté & il dirolt avoIr e{~ temdln de fo~
• c. . ,
& la Dame de Fuveau pourraIt
lnla1111e ........
.
.
être obligée de fouffrir à fes côtés ce man qUl
a tenté de lui · enlever la plus chere des pro" , ,
Mais retenons les mOl:lvemens
prleteS ............
.
.
d'une indignation trOp Jufte & pourfulvons
l'hiftoriqwe du fait.
.'
,
, <
Après avoir auili cruellemênt dIffame fon epou·
fe , le fieur Barthelemy anno nc.e C'lu'il ~7u~ l'a·
bandonner qu'il part pour Pans afiq d evlter ,
<lifoit-il, u~ malheur. 11 exécuté en effet ce projet; mais, en s'éloignant de la Dame de Fuveau f il ne ce!fe pas de la tourmenter. Les
outrages [{! multiplient avec leS lettres, elle
n'en reçoit aucune qlli n'ouvre de nouvelles bIef·
l'
•
fures.
Nous ne falirons' pas notre plt:lme par la
tranfcriptio n de toute cette (!orr,efpond~n,ce ,
c'e{} bien affez que nouS ayons elé oblIge de
la lire. Le fieuf Barthelemy 5 confirme toUjours d'avantage le de!fein qu'il avait al~rs d 7
vivre réparé d~ fon époufe. Dès fon arnvée a
Paris il lui écrivit )) enfin je fuis où vous dé1) !iriez' , Madame, deux cent lieues nous
fén parent. Cet efpace dl trop court encore pour
) votre indifférence, je dirai plus pour votre
,., haine , &. elle n' dt pas a!fez 'diHante pOUf
�16
17
~ ) mes proj ets. Felicitez-voUS flie" de m'avoi'f
- l -
.'
»
»
»
»
»
»
))
»
•
~
'i'
rendu l'être du monde le plus malheureux.
C'en eJl fait je VOllS abandonne, flOUS & tous
mes parens. Je vais porter dans d~s pays· bar_
bares ma mélancol.ie & mon défefpoir. Vous
n'avez pas voulu co.nnoÎtre en moi un homme qui VOliS adoroit & qui accroit fOll lDa~.
heur par l'amour :qu'j.l ne ceffera d'avoir pOUF
vous. Des plaintes, des foupçons dénaturés,
J) des méfiances, des brutalités, des préfél'en) ces, des perfidies ....... defi tout ce qué j'ai
» reçu en échange de mon amour extrême. .
» Refièrrez les nœuds qui vous ont porté à
» ma p~rte. Faites triompher celui qui me cha·{fe
» éternellement d'auprès de vous, aimez-le au...
. )L tant que je le hais: commencez· avec lui votre
).) carriere d~, ?on.he~r, & moi je vais remplir
» celle que J al gemt , que vous m'avez prédM:
.» au moment me me ou J aU'rors voulu mounr
) & renaître pour vous. J'efpére que vous ne
)) rendrez pas le .fort auffi funefi~ aux petits
.» malheureux qm refient avec vous. Si vous
~) leur a;rach~'l leur pere, ayez- au moins pour
.,» eux d entrailles de mere. Qu'u,ne perfonne en
» vous rendant perfide ne vous rende poim bar» bare. & dénaturée. Voilà la derniere plainte
» que Je '?le 'permets ( fi les fanglots & les lar·
» mes qUI 1 accompag nent pou voient fe mon··
» trer, vous en verriez ma lettre remplie ) je
, .
.
n eXCiteraI
1\
\ ., .
•
'exciteraiplu-s: votre pitié, je vou~ deman~
» ~erai feulement quelquefois de nouvelles de
» mes en fans, &c. (1).
.
La féparation n'dt qu'annoncée da.ns cette
lettre; mais elle va biet~tôt. être. cO,nfolldée.
. Le 16 du mois de Mal, Il éCrIt a [a femme.:
:~) Vos démarches & vos procédés m ayant falt
» prendre la réfolutÏon de v~us abandopner &
)} de m'éloigner de vous, alnfi 9ue . ma pre» miere lettre vous le marque, Je viens. vous
» faire part de mes intentions pour ce qUI vous
» . regarde. Vous retirerez vous-même les pen» fions des maga.fins, lXc. « Le fieur Barthelemy
regl e ici l'article de l'intérêt & il le regle en defpote, qui, ne conn~ifi"ant d'autre loi .que fa v~lODte , fait tout plier fous fan empIre. Apres
• ')J
( 1) Nota 'cette perfonne que le. fieur Ba~thelemy
indique fans la nommer, celle dont Il eft queftlOn daus
toutes fes lettres, eil: l'héritier foncier du fieur de Fu~ t'eau. C'eft un Citoyen refpeaable, âg~ de S6 ans, un
..J ancien Militaire
qui -; mérité la récompenfe nationale
( tiont il ' eft décoré. Il n'a eu avec la Dame de Fuveau
que les' rélations indifpenfables entre l'héritier foncier &
l'ufufruicier, 'pendânt la confeaion de l'inventaire, liaifons qui n'ont pas duré plus d'un mois., ·Mais i~ . a eu
, vis-à-viS) dl[' fieu!' Barthelemy le tort grave & vraiment '
irrémiffib1e' , de moins refpeaer fes volontés que celles
du tdhiteur &. de refufer de fe départir en fa faveur de
l'inHitution d'héritier.
c
�18
19
ces arrangemens, il ajoute; » A préfent re:e
» vet mes adieux, nous ne nous re.ve:rons J~ "
» mais . ..• Ce mot me coute, mais. 11 çfi né"
A
) ceffaire. J'arracherais mon caur, fi Je foupçon» nais qui'l pût l'emporter. "y 0us m'a~ez rendu
J) la vie aftreu[e. Je IedoutOlS ce derOlet: cpup :
)) le Ciel me punit: je 1/0US ai tr~~ aimée; j~
).) ''JOus aime encore· , cft\;ldle, voIla tout t:110~1
-n Ilnalheu-r. Mais du{[ois, j~ périr, du{fo.i$ - je
» . traîner 'rna v.ie Iangl!liffante ,de perte ,en pçHt,e
» pour la Joutenir, je ferai con:fi.an,t dans ~~
.» réfolution . .Les miferes de la ·vie font moz l,U
)) affreufs pour moi. q u.,e .vos p:;fi:di~s. J ~ vous
.)) ai facnfié mon ,nefientlm.ent; J al devore dans
.» 'mon arne les IHan[porcsque la jaloufie donne;
)) j'ai [ouri à votre :ad~iateur ; ;j'ai comb~ttu ma
» rage, & je l'ai laiffé vivre. Ce triomphe n'dl:
)) point l'éflet dU '[ang -froil1 ;-fl n'en' circule point
' » d~.tns 'mes 'veines .; n1:·ais le , mépris, l,e p~c!ail1
» .& totit ee que ll>a lnature ·a de pills ,v il. 'efi la
) jufie ' vale.ur 'des auteu1'stle 'lJwn -in'tQrtune; ;
u j'érois r'éfervëà :ces coups', 'du ' (art ; :-fafiè le
» Ciel queje les, endl-H'e. ':Eill 'l'ne, Qé~v o.~ Qt 1~,ul '
» j~aurai 'fini l'na . ca(rt~er-e d!.ual,he HeU[~~ent . ;
- » ' mais ' clou nmQj,ns ili~ <l!UIl:a,i-je J'r.ien ~jl ·me: 'repfO1 »
cher: i\dieu-;«
,'.
JII
Cette lettre ne reria pas' r~ns répo.rl Ce : 'a', Datue
, de Fuveau, y eft tf9P ,iodignemeut 9 ut t il$ ée':pour
n'en avoir pas témoigné fa (enfibilité. ~llé rapC
.
. ,
pella à fo'n inaî'i les principes. qUi ont t?u}ours
ciri é fa conduite. Eh ~ qu'avait-elle be~Ol? de les
, ,gap' peller? Le fieur Barthelemy etolt con. d' A
l Ulr
.
de fan hormêteté , & ne fi'
elgnolt etre
vazncu
J'
.
If'
•
•
u , lï
jaloux que parce que [on lntuel, eXlf!,feOLl ,1
1 fi
parût tel. V oyo~s ~~pendant la repon e qu 1 t
à la lettre de [on epoufe.
'
.
.
, » Je n'ai rien à me re~rocher qUI ne fort vo» tre ouvrage. Le vil objet dont vous .~~ p~r
)) lez l'a tOùjours été à mes yeux, '& fi J al feint
l) de lui en vouloir, c'était pour me venger d,:
» l'indifférence que vous me~~e~ aux cho~es qU,l
» me déplairoiént. Vous p~efene7. me ':voir mal
» content & aller votre tralO, pourquQ1 -ne vous
» l'aurais-je pas rendu? . . . . . . •
» VOliS parie"{principes dans 'J.'olr~ lettre, VOLIS
» vous en accordet. Ofe'{~VOllS aVOlr le front de
1
)
»
»
~)
vous croire ' honnhe femme? Qui, vallS ~ ..•
un monftre eJl moin~ farouche à l~humanùé ,
que VOliS à vos devozrs. Sur quel ture.fonde'{VallS votre vertu? Efi - ce pour -avoir voulu
» mon malheur ' éternel? efi-ce pour ' vous être
~) afiociée d'intérêt & d'intrigue avec un malheu» reux qui ne refpire qu'intérêt & ba!feife ?
» Vous me reprochez de vous aVQir voulu
» mettre hors de ' chez moi. On voit bien que
» le fonds de votre cœur dément votre main :
» vous' me cherche'{ des défauts pOlir pallier vos
» CRIMES; mais vous - même ' vous ne vou s
C
2.
�20
zr
» abufez pas. Vous fçavc'Z qu'·il n'en eft rien.
» Vous avez connu le fonds de mon ame ; vous
. L'honneur diaoit fa réclamation J la bien
féance devait préfider à fes démar,ches. Sa gro~
felfe ne lui permettant pag de chercher un afyl7
dans des MaiCons Religieufes , elle voulut attendre .le lnament où elle paurroit y entrer.
Cependant le fieur Barthelemy ret~u:na de
Paris. Il marqua le moment ~e fan arnve: dall~
la mai Con par l'annonce publique du motif qUl
déterminait fo-n retour. Sa femme vole au-devan,t
de lui pour l'embralfer ; i,l l~ repoc~IJ;" la fau
)) fçavez qu'on peut l~ mettre à. des épreuves ~
» fi vous en étle'L mOinS convalOcue,
, vous ne
» VOllS y joueriez pas..
.
)) Quant à mes enfans, zls fi reffenurom d~
)) la fat~te
leur 17;ere. }e. n~ .~anqu:rai 'pas
» leur bien a coup·sur ; IlDlmlt1e que Je m at» tire de mon pere dans cette circonftance , &
» dont vous êres la caufe.J le leur a{fure. Ils
1e
)1
ne connoîtront jamais à qui ils doivent le jour.
» S'ils héritent de vos fentimens.J ils s'en fOll» cieront fort peu. Adieu, voilà la derniere
» lettre que je vous écris de Paris. Vous avez
l)
dû en recevoir qllatre avant celle-ci; elles te
» prouvent touS mes fentimens. Je confirme dans
» cette derniere tout ce qu'elles contiennent ) ~
)) tu n'en recevras plus de moi) fi ce n'eft la
» nouvelle de la fin de mes tourmens, &c.
A ce tiŒu d'horreur on s'attend fans doute
à voir la ' Dame de Fuveau brifer le lien fous
lequel elle a fi long-tems gémi; & prendre Ull
parti que confeilloit l'honneur à ·la vertu ourragée. Une demande en féparation devoit être
l'unique réponfe aux lettres de fon époux; il
n'en aurait pas reçu d'autre) fi la Dame de Fuveau n'avoit conCulté que fes droies, mais une
délicateilè, peut-être exceffive, lui en fit fufpelldre l'exercice.
r"
rewler plufieurs pas.& IUl decl~re qu d ep v~nr:
pour faire un mauvalS coup ; q~ elle ,verrou penr
1OUS {es enfans ; qu'on trouveroct un Jour des bras
.& /es .têtes qu'il auroit féparé.
Ces menaces répandirent le deuil &. l'épouvante dans la maifon; les dameftiques n'o[aient
' plus' C.e livrer au [a.mmeil: cha;u? tremblait ,d'apprendre à (on revell quelque evenement fi01llre :
tous voulaient fuir une mai[on orageu[e, où leur
vie &. leur réputâtion pou.voient être à chaque
inllant campramifes: ils n'y furent retenus que
par ce Centiment de cammifération que les malheurs
&. les dangers de la Dame de Fuveau ne pouvaient qu'infpirer.
Le fieur Barthelemy s'était trop permis d'indignités, pour ne pas prévoir qu'il n'étoit pas
éloigné ce te ms où , les forces de la nature {uccombant fous le poids de la douleur, la Dame
de Fuveau iroit ,hercher ailleurs la paix & la
�z,~
.
.
22
'sûreté qu'elle n'e po-u'véit 'plus r~trouver aupr~
"de fan tyran. Soit qu'il voulût fe ménâger de~
armes pour repouifer une demande en fèpara:
tion, foiç qu'il voulût appvyer par des preuves
l'horriole diffamation qu'il s~étoii: "permife , 11 en.
tre dans l'appartement de fon époufe, vers la fin
de fa grofiè~è , dans le filenëe de la nu'it , il fe
préfente à elle armé d'un papier, d"un çcritoire
.&. d'une plume, la fait afi"èàir fur ron lit &Iil
force d'écrire fous fa diélée une lettre déshono.
rante, Ce dernier trait iI)anquoit :a ux exéès dl!
.fieur Baphdemy &. àux douleu'rs de fon infor'tu née vinime.
Le moment de fa délrvrance arriva. Cë mû' ment trop reculé pour f~p repos faillit à être le
~ der?ier .de fa 'vie : k~ ~fforts qu'ehe avoit fait
"pour. furl110nter les chagrins c"uifans qui la dé·
vor~le~t,' la terreur habituelle dans laqu"eHe :elle
,aVaIt ,ete pendant fa grofièffe, avoient "épuifé fa
Janté; On ~éfeCpéra l.ong-tems 'de [es jours; mais
fon et~t ne to~cha . pas le cœur de fon miui,
. f~s acc,es de fur~ur ne fu .r em ni 'moins frequens
nI mOInS redoutables. La Daille de Fuveau en
_fut ,la ~iaime tant que fa Caneé ne lui 'larifa pàs
' d
i elUite;
'
d'es que fes . forées lui. pero
, l'ef
,~olr
,~a
mlr~nt cl echapper aux "mains de fon tyran elle
f~rtlt d'une maifon où fes jours' é~oient c~inp·
tes par fes larmes, & fe jetta dans ùn Cou.·
ven.t.
. Le lendeq1atn, c'eO:-â~dire, le 6 Mai de l'an·
née derniere' , 'elle" préfe.pta ffi Reqûêt en fépaprovifion qui lui' fût acfat'ion & d.ema·nCla
cordée par Ordpnoanèe du ' 13 du \nêine mois.
Le 22, le Geur Barthelemy donna fa Requêt~
en réint~granpe; & le ' procès s'engagea lur la
.fép,araFÏ°~' , . - "
.
.
'
Pour l'obt,~pir j la parne de Fuveau n'au,roit eu 'be(?i? qu~è de) ~, o, mmut;li~û:e.r ' 'l~s let~
Hes de fOin m~!i. M\lÎ~ elle p<?~fia la ' délicatefiè jruCqu'à ,vpuloir démontrer oue [es démar"-
une
~~es ,ér~i"e'pt l~i'~'es .pa~ ~~. p\~SI i~p~é/ie'~re d~'s
)~~x? .p~r np:~r~t
d.e f~~ ~onn~ur, & de .fa prc.:;.~re cqpfery~~l~r' E;lle ~l:'lfa Ça d~fen,fe ~n troÏs
.l}loyeqs. : . ~,-~P~fs _~?~lfapt ~ ôiffaniatÎ?n publî.que ,' y;l'3Wp'ces 1 ~~~~lf1yes. Elle offrit en conq. ~uence l~n _exp~~~e~t ' .Ellr ,leqllel elle Je foull}'t
~ a prouver 1°. q~e le fi,e~r Barthelemy a fouu ,ve~t ~~.Olfe~é . a Jon ;epouCe , dans les termès
,u les Elllq.pJ~ieu.x & les .plu,s ou~rageànts po~r
~> fon hQnn~~r, tant .p~~devant témoins que par
,>? fe,s le!tF~s, qnteq~ion de ne plus vivre avëc
;" ,e.1 I: ,, . 1~i ..0tfra~t. ~è ,~ollfcrire un .aéte de fépa.,n rat.l~n . v<:>~pn.taJ~e, & qlJe fi elle s'obflinoir 'à
, » dr~l1eurer .. ~he~ ~ui ~ q;uelque malheur en f~
: ».L~Ol.t , !a/~l~e) .lt?te;qtlO;n &. menace qu'il a r/f.» . n,o.uv.ellees avec plus (racharnemen~ pendant
.;)} fa ~er.~Î.ere ,groifeKe. ,,'
,» lo°. Qu'il ' l'a toujours tenue dans un ét~t
»:
1_
�24
)} habituel d'dfroÏ' pour la fureté de fes Jours
)} par la terreur q.u'infpiroient fes fé roces
» naces; lui difant, tant avant qu e pendant fa
)) derniere grofièflè, qu'il était t rop malheureux
)) de voir fon fort atraché au fieu, pour ne
}) pas chercher ' à en brifer Je lien ~ qu'il fallait
)~ des viétimes à fa fu reur; qu'un jour on trou',
)) veroit des têtes & des bras qu'ïl aurait fé.
)) parés~ & qu'enfin il la tueroit : menaces atro',
)) ces devenues fi allarmantes pour la famille da
» fieur Barth.elemy ~ que fa mere avertit la fem.
» me - de - chambre de la Dame Barthelemy de
}) ne plus laifièr fa maÎtreife feule avec fan
» mari!. pour pr~ve~ir un malheur. Qu'un jour
» entre autres elle unt cachée la Dame Barthe,
l}
lemy fa belte-fille dans la chambre de la Dame
» Efpina([y, pour foufiraire fes jours à la fU"}) reur de fan époux.
" 3.° Qu"apr,es
\ cette1 lUIte
r.'
cl'-o~trages, crarl7
» gnant une demarche' en réparation ~ dans un
» tems où elle. ne conv~noit plus à fè"s intérêts,.
)J 11 - rut deVOIr fe. ~nénager des armes' 'pour ra
» repouffer. Dans cette idée vers ta fin du mOTS
» d~ !~.il1et dernier, il entra dans' ]a chambre
• » . de. fa ~~m~e r~,rles ' deux C h(!tl n~s apres " mi.
» nUIt ~ 1 eveIlta , ~n fur(a~~ " ',& . Faya~t faÏre
).) a~eoIr fur ron ht " &. luI' preféntaIlt"
pa'.
pler & de l':ncre, 'lui- dic , du . tO'n le plus,
effrayant, eallle'{, Madam e, ce que-je vais vous
» diaer :
me:
i:
un
1
25
" diJer: elle s'y étant refufée, il prIt .un ton
» fi allarmant qu'elle fllt forcée d'écrire une
» lettre désho~orante pour elle ~ & qu'il lui
» diéta.
» 4 0. Qu'à la fuite d'une rixe élevé~ entre
» eux à peu près dans le ~êl~e t~ms, 11 vou~
.» lut qu'on lui dre{fa un ht a pilant dans la
:» chambre de fa femme, à qui il réieera penn dant la nuit fes menaces ordinaires, & étant
» fo~ti de grand matin, on trouva un piaole!:
» fous fan chevet.
» 50. Que tant avant que pendant fa der» niere graifeffe, il n'a ceifé de lui reprocher
» que les eofans qu'elle avoit ne lui apparte.» noient pas, que celui dont elle était enceinte,
,» n'étaient pas de fes œuvres. Cet odieux prol) pos fut réitéré dans le mois cl' Août dernier,
» en préfence de témoins. Sur quoi la Dame
~) ayant répondu à fon mari que ce genre d'ou"
.» trage n'était pa5 nouveau pour elle, qu'il du » rait depuis fon mariage ~ fan mari faifi de
» fureur, prenant une chaife en l'élevant po u r
» la frapptr, fut retenu par le tiers préfent à
» ces difcours .
» 6°. Que dans toutes les occauons, il l'a
» diffamée par les imputations les plus outra» geantes & les plus calomnieufes, pour ca» raétérifer par-là le mépris qu'il en fai[oit ;
)) mépris dont il la humiliée tant en face, que
D
�z6
» dans fes lettres & pardevant témoins n.
Le heur Barthelemy, femblable à tous les
maris qui ont à fe défendre d'une demande en
Iëparation, fuppofa que les. démarches de ~on
époufe n'étaient que le fruIt de la fuggefhon
& de l'obfeŒon: mais, plus hardi que les au·
tres, il demanda qu'elle fut perfonnellemellt, interrogée. Elle le fur, en effet, le neuf, JUillet
de l'année deruiere , fes réponfes contlennent
les motifs qui ont déterminé fa demande en lé·
paration, & avec eux le détail des indignités
qu'elle a eu à foutfrir pendant [ept an.nées.
Ces préalables remplis, il n'y avoit plus à
balancer: il fallait fe réfoudre à recevoir l'expédient & ordonner la preuve, ou dépouiller
tout femiment d'humanité, & rejetter dans- les
mains de fon oppre{fem la viéhme qui fe dérobait au péril. Un Tribunal hum'ait} & jufle
ne pouvait pas héfiter: l'expédient fut reçu,
& la preuve- ordonnée par Sentence du 15 Juil·
let dernier
Le .délai pour faire la preuve, n~éroit que
de huit jours. L'éloignement des témoins qui
devo,ie~t dépoCer, était trop grand pour que
ce delal pu fuffire. La Dame de Fuveau en demanda Ira,mplÎatio~ :- f-e lieur B:arthelemy la contefla, mars elle fut accordée par Ordonnance
rendue le 5' Août, en contradiél:oire défe-nfe.
Les mêmes motifs qui déte-rmil'lere-nt l'amplia-
2.7
tion de délai, autoriCoient une nouvelle provifion. Le fieur Barthelemy la contefia encore;
mais elle fut également ordonnée par Sentence
contradiél:oire du 26 Août.
Enfin, la Dame Barthelemy fit procéder à
Con enquête; elle fut parachevée le I l Septembre dernier.
.
. Nous ne rapporterons pas touS I~s excès qu'~lle
renferme il faudroit la tranfcnre en entier.
.
Nous ne prendrons que les pnnclpaux tralts .
, L'enquête prouve que le fieur Barthelemy
avait journellement des querelles avec fan
époufe; (1) que le ...(ems de fa derniere. cou~
che ne fut , pas moins orageux que celUl qUi
l'av~it précédé; (1.) qu'il lui donnoit les épithetes les plus. groffieres & les plus falle.s (3);
qu'il la méprifoit fans ceifc de la maOlere la '
plus cruelle (4) ; qu'il lui difoit que fes beaux
jours étaient paifés; (5) que
fan. cœur le
portait à lui faire une bonne manzere, zl le percerait plutôt; (6) qu'ill'obligeroit d'aller dans
un jardin fervir les maÎtre{fes qu'il diCoit Y
,
'
'
Ji.
(1)
'( 2.)
(3)
(4)
(s)
(6)
1er. 3, 4. 7. 10 & onZleme témoins.
6e. témoin.
1er. 4· )' & 7 e. témoins.
1er. 4. '). & Ile. témoins.
). & Ile. témoins.
') e. témoin.
'
D
2
�28
%.9
avoir; (1) qu'il répé.toic prefgue continuellement qu'il ne pou volt pl~.s V,l vre ,ave~ elle;
qu'il falloit abfolument qu Il. s ed~ !e~arlat pour
éviter un malheur; (2) qu'Il Il,,lOIt e~ conditions du divorce devant fes ~ol11e!hque~, .
chargeant [a femme de les por~er a ~11 Not~.lre
pour les rédiger; (~) qu'un Jo~r, Il eut 1 Indignité de la chafièr de [a ma1fon de grand
matin ~ &
demi vêrue; (4) que la Dame de
Fuveau n'oppofoit que la plus grande douceur
à [es outrages, qu'elle portoit mên~e la, g~né
roUté jurqu'à obliger les perfonnes qUl en etol,ent
témoins, de garder le filel1~e, & de parOltre
.
prendre le parti de fan marI (S)·
Peu [atisfait d'outrager [on époufe dans 1'10-tirieur de fondomeflique, le fieur Barthelemy
la diffamait au dehors par les calom'oies les
plus atroces. L'enquête jufti6e qu'il lui reprochait des fréquentations fufpeaes; (6) qu'il
ofoit dire ne pas être le' pere de fes enfans;
(7) que fa femme étoit une p ...... (8) qu'il
a
(1) 7e. témoin.
(2) ter. 4. S· & '7e. témoins.
(3) 1er. témoin.
(4) 4e. témoin.
(')) 7e. témoin.
(6) 1er. & se. témoins.
(7) 1er. 4- & 7e. témoins.
(9) 4e. témoin.
l'avait furprife en flagrant délit. Cl) Il faut
le dire: le fieur Barthelemy eft l'homme du
monde le plus malheureux, ou le plus noir,
puifque le même témoin, à qui il avait fait
cette horrible confidence, dépofe que dans une
époque poftérieure, il lui dit n'être pas jalaux"
mais que /on intérêt était de paraître , tel ~ quOLqu'il fut bien convaincu de la fagejJe &, de l' han ..
nêteté de fan époufe·
L'enquête prouve encore des menaces & des
excès à faire bondir d'horreur le cœur le plus
infenfible. Il efi jultifié par la dépoGtion des
témoins qu~ le fieur Barthelemy répétait [auvent qu'il fallait des viaimes à fa fureur; (2)
que les mots de tuer & d'affaffiner étaient con·
tinuellement dans [a b&>uche; (~) qu'à fan arrivée d,e Paris, fon ép'oufe ayant accouru dans
le veltibule pour l'embraffer, il la pouffa &
rudoya fortement, qui la fit reculer de plufie!-lfS pas, & lui dit q~'il était venu pour faire
un mauvais co'up, qu'elle verrait périr toùs fes
enfans; (4) qu'il avoit menacé- fa femme d'un
coup de chaife, qll'un tiers préfent à la que-
oe.
. ,
témoin.
1 er. & 3e. témoins.
, .
1er. temOIn.
, .
1er. temOlD.
l
,-
,. ..., (" fi
.
,
m'
,
r
'C
�p -
~o
relle l'empêcha de lancer; (~) que fur fa Ill!
de fa derniere gro{fdfe, 11 1 avolt .forcée pen.
dant la nuit d'écrire une lettre déshonorante t
(2.) que pl~s d\lOe fois, il avoit l.nenacé fon •
époufe de coups de .coût~au & .de pl~ol,et; (3)
er 1epee co~~
qu'il avoit eu la lac,hete de
tre c: Ue ; (4) qu'apres une nUlt orageufe, s é·
tant levé.de grand matin, la domeHique qui
défit le lit à pliant que le {ieur Barthelemy avoit
fait dref1èr dans la chambre de ta Dame de Fuveau, trouva un piO:olet qu'il avait oublié fousfOB chev-et; (S) que [es menaces allarmant les
domefriques, qui craignoient pour les jaurs de
leur maîtreUe , (6) tantôt ils prenoient la précalluion d'enlever les armes du {ieur Barthelemy J
(1) &. tantôt ils pa{faient les nuits entieres
fans Ce coucher, pour prév.enir un malheur;(g) que la propre famille du fieur Barthelemy
éooit fi effrayoo, qu'elle s'étoit crue obli-gée de
chaJ!ger l Ies domefiique-s , de ne jainais laiilèr la
u.r
'.
J
r
;
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a
fi
d
;
r i '
- (1) ' fer. &: i e. témoins.
(2.) 1er. 3. & loe. témoins.
. (3) e. témoin.
( 4) 7 e• témoin.
( )) 3e. témoin.
(6) 1er. & 3e. témoins ': . 'r
(?) 1er. témoin.
(8) 3. & 4e. témoins.
4
,
')1
.!
t
.1
j
.
•
excès, qu'il l'avoit mis hors de chez lui pour
ne pas en être le témoin; (2.) enfin, que même
pendant procès, il s'étoit permis de faire dire
à Afo~ époufe par ~a femme de chambre, qu'elle
eut a ne pas forur du Ca.uvent où elle étoit,
que {i elle contrevenoit à fa défenfe elle ou
lui périroient. ()) .
'
,
Le verbal d'en.qu ête avoir été" {ignifié au S r.
Barthelemy depUIS le 2. I Août· l'enquête lui
fut également lignifiée le 1 I S:ptembre,
A la ~eél:ure de cette piece, le {ieur Barthel,emy ~llgea fon procès: il vit que tous feS'
exces ~~01en~ prouvés, & qu.'il n'el1: pas poilîble ,qu 11 ~xJl1:e ~n T:ibunal au monde, qui,
apres avoIr lu 1 enquete, condamne la Dame
de Fuveau à, ret?urner avec fan mari. Ne pouvallt plus detrulre la preuve direB:eUlenr foit
pa~ des. rep~och~s " foit par une preuve' contraIre, Il a ImagIne de l'attaquer indireétement
en .appellanr de la Sentence interlocutoire L'ap~el .n'a été d.éclaré qUé le 23 Septembre', c'el1:a-d.lre, 12 Jours après la fignification de l'enquete •
\
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.
Dame de Fuveau feule avec fon mari; (1) que
Je pere de celui~ci avoit été fi affeB:é de fes
1
.
(I) 1er. ~. & 4e. témoins.
( 2. ) 4e. temoin.
( 3) 1er. & 3e. témoins•
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On ignore encore quels ~~t eSfg~: s: ma,~sl
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dml' s ni afie'L clrconftancles pour etre
erre a ,
,
prouves.
' d
La Dame de Fuveau peut~elle ~ratn re, qu~
es évaGons en impofent? eXlfte-t-ll de LOl qUI
. ~Lli faire un crime de la fuite à l'approche du
danger? Sa réputation déch~rée, fes enfans , méconnus, ne lui impo[oient-lls pas le devOlr, de
fe plaindre? Peut·on refufer de prêt,er attention
au récit de [es maux, d'en exammer la réa, , '1
,
l ne ,
Aujourd'hui que l'enquête eft achevee, peuton lui oppofer le défaut de vraifem?lance? Des
faits dont l'exiflence eH démontree, peuve~t·
ils être regardés comme impoffibles; o~ fero,lt:
elle plus malheureufe, à raifon de l acro·Clte
des procédés qu'elle dénonce?
A
Anne-Roft-Jacqueline de Pey/Jamzel de FuveauBarthelemy.
CONSULTATION
Vu
' le Mémoire, ci-de,{fus ~ toutes les ,Pieces du procès, après aV.Qlr OUI Me. ~[ouhers,
Procureur au Parlement,
LE CONSEIL SOUSSIGNÉ ESTIME que
l'appel du fieur Barthelemy n'a rien qui doive
allarmer la Dame de Fuveau. Elle peut lui
oppo[er les prin~ipes les plus certains, les maximes les plus facrées. Il n'eft point ' de Tribunal qui condamne une démarche que fa sûreté a confeillé, que fon honneur a ordonné.
L'appel du ' fieur J3arthelemy n'eft ni recevable ni fondé. On peut renfermer la défenfe
de la Dame de Fuveau dans ces deux propofitions: elles [ont également vraies, il ne s'agit
que de les démontrer.
La fin de ' non recevoir fe tire des acquiefce mens donnés à la Sentence interlocutoire &
de l'époque de la déclaration d'appel.
En p~incipe : l'appel n'eft pas recevable quand
les partIes ont formellement acquiefcé au jugement qu'elles voudraient faire reformer. (1)
, -~:
(1) Art, S.
tIt.
27, Ordonn. de 1667.
A
�2,
Il ne faudroit pas croire, dit R~diç~, que
pour opérer la fi? de non recevOir? Il fadle
ùn acquiCcement {ormel, tel que [eroIt. un aRe
par lequel la partie condamnée ,~éclar~~olt qu'elle
renonce à l'appel; il [uffit qu Il y al.t de la part
de la partie elle-même, JqlJel~[Je fa~t " quelque
démareh qui (uppofe nçeejJalrement l approba_
tion donnée au jUB'ement. Ç'e~ e~ effet ce que
décide la loi 5. cod. de re .JudIe. quan~ elle
dit: Ji q/loliQet modo fentemlœ acquleverze . .
AinG, par ex~mple , qu'on app.elle de la t~xe
des 9ép~n~; set ,\ppel ~{t un veritable acq~le~
c,ement , parce qu'on ne peut ap~ell:r de 1 exe·
c4 tion [ans approu'(er la cho[e Jugee ..
- AinG, par ç~,ernple encore, qu'un Jugement
ordonQe l'ex~cution Wovi[oi~e d'une Se1lten~e
Ërécédente , en dqnnant callt~on ; . que la partie
condamnéf:! conteHe [ur la recepuon de la cau-,
~ion , tlcette coptefiat~op vaup'ra acquie[cemen~
&. renpra l'appel npn recevable. C'ea l'hypo.
the[e de l'Arrêt rendu le 15 Mars 1749'
La Dame de Fuveau p~u~ oppo[er ' à [on
mari quelque choCe de plus déciGf encore ,
qu'un appel de taxe ou une cOI)tefiation Ctlr
la validité d'un cautionnement.
Le fieur Bar~
.
,
~helemy a phlÎçl~ [ur l'ampliaçion du délai pour'
faire l'enquête, il a nlaidé [qr la nouvelle pro~
vifion d~n.!and ~e ~ ç,au[e de l'éloignement des
témoins: il , au rl.0l!S p!fÙslé (u~ e}Çéc!-Hipn ~e
r
3
la Sentence;- mais il ne pou voit conteaer ~lIr
[on exécution {ans approuver la cho[e J~
gée, & par con[équent [ans [e ferm er la VOle
de l'appel.
.
'
J
Toute démarche qur jilPPOfe neeeffazrement
[' approbation donné~ al,l jUB"emem r,end l'appel
irrécevable. Or , Il n dt pas pofbble que la
contefiation [ur l'ampliation de délai du [ur
l'augmentation de p'rovilion ait eu d'autre principe.
L'es moyens [ur le[quels ]a Dame de Fuveau
appuYDit j'une & l'~ut~e demande, .f~nt. confignés dans [es réqUlGtlons. Elle [olbcttolt une
ampliation de délai , parce que l'éloignement
des témoins ne lui permettoit pas de parachever [on
enquête dans la huitaine -' elle demandoit une
augmentation de provifion , parce que ce même
éloignement l'expofoit à des dépen[es auxquèlles
la premiere proviGon ne pouvoit [uflire.
Si le Sr. Barthelemy n'avoit point reconnu
la jufiice de la Sentence interlocutoire, s'il
n'y avoit point acquie[cé , il auroit po'n é la
coignée à la racine, il auroit dit à fon époufe:
» vous ne fondez vos demandes que [ur l'é» loignemeDt des témoins, mais cette circonf») tance ea indifférente,
it ne peut pas être
)} queaion d'ouir des témoins, la Sentence qui
» l'ordonne ea injufle, & j'en appelle.
Qu'a-t-il fait au con't raire' ? Il a contefié [ur
l'inutilité de .l'ampliation de délai, [ur l'iuju[.
A
•
•
2
�4
tice de l'augmentation ?e pr?viGon •. M,ais il ~e
pou voit (ou tenir que 1enquete devolt etre faite
dans la huitaine, (ans avouer qu'elle devait
l'être au moins dans ce délai, & par canfé_
quent (ans approuver la Sentence. En plaidant
fur cet objet, il requéroit. l'exécu~io? fi~iae
de l'Ordonnance interlocutoIre: or Il Implique
contradiCtion de demander l'exécution d'un ri.
tre qu'on n'approuve pa~ , d'appelle~ d'une
Sentence qu'on a voulu faire exécuter a la lettre.
Le filence induit (ouvent la rénonciation à
un droit acquis: qui prefens eft f~ non contradicÏt, juri [110 renuncÏare cenjetur. Le Sr. Bar·
thelemy a reçu copie de la Semence interlocutoire, & il n'a pas appellé : il a reçu copie
de l'Ordonnance porrant ampliation de délai,
& il n'a pas appellé: il a reçu copie de l'Or·
donnance portant augmentation de proviGon J
& il n'a pas appellé: il a été aiIigné pour voir
prêter ferment aux témoins J & il n'a pas appellé: enfin il a reçu copie du verbal d'enquête,
& il n'a pas appellé: ce filence obainé induit
rénonciation au droit qu'il avoit dans le prin.
,cipe. Juri {ua renunciare cenfetur.
Quelle ea l'époque où il a émis (on appel?
Le 23 Septembre, quand il avait l'enquête en
fan pouvoir depuis 12 jours; après l'avoir mé·
ditée , après s'ètre convaincu que la preuve
S
émit plus que remplie. Si, elle. ne l'avo~t pas
été, le Geur Barthelemy n aurait appelle; on
ne peut en douter, pui[qu'il a attendu de l'avoir
examinée pour s'expliquer. Son appel ea donc
doublement frauduleux; d'abord, en ce qu'il
ne l'aurait pas émis fi l'évenement de la preuve
ne lui avoit pas été funeae (1). Puis, en ce
qu'il a pour objet de faire crouler indireCtement
une preuve qu'il ne lui ea plus permis d'attaquer
direCtement.
Il ell: en effet de maxime que la partie qui a
reçu communication de l'enquête faite contre
elle, ne peut plus faire ouir aucun témoin à fa
Requête, ni donner aucun moyen de reproches
contre les témoins ouis en l'enquête de la partie
(2). Tout dl confommé par la communication:
l'enquête devient la feule piece qu'il faille confuIter pour le jugement du procès. Mais fi l'on
ne peut pas détruire les preuves qu'elle contient en objeCtant les témoins, ou en rapportant
une preuve contraire J on peut bien moins en·
core parvenir au même objet, par l'appel tardif de l'Ordonnance interlocutoire. S'il entroit
--== (1) La regle nous apprend que non eJl audi,ndus is
qui ill contrarillm eventum non fllilfèt contrarium poJlulaturus.
(2) Art. 34. tit. 22. Ordonnance de 1667.
•
�7
6
dàns o
le [y{lêlne des L?ix de rendr~ l'~nquête
chancelante même apres la commUnication, ce
,
\ l'
rr
ferait fans doute dans le cas ou on oure d'é ..
clairer la Ju{lice par une nouvelle preuve, plutôt que dans celui où l'on s'oppofe à tout éclair.
ciflèment par un appel.
Une raifon auffi déciuve, ne peut manquer
d'avoir fait impreffion. Le Parlement de Touloufe l'adopta le l ~ Avril 17~o, lorfqu'il jugea
contre Mre. Boutonnet, (( que c'e{l un acquiefu cement que de lai{fer procéder à une enquête
» ordonnée' par une Sentence » , l'auteur qui
ra'pporfe cet Arrêt (1) obferve fon judicieufe.
ment que le p'rincip'e «( a été folidement établi,
)0) pour prévenir la réticence & le dol des par)') ties, qui, laiffant exécU'ter par malice les Sen»), tences , expoferoient lei pourfuivans en de
)')' longues proeédllres & de frais confidérables.
») Il faut convenir, contintte-t-il, que ces ré» flexions font f@lides & fondées fur les vrais
» principes. Ce font ces principes qui ont dé» terminé l'Arrêt de Boutonner & lorfque les
» Juges s'err écareent, il faut croire qu'il
» décident par des drconfiances extraordinaλ res, .qui forcent d'oublier les regles les plus
Je
)} cerlatne ».
Auai ne fOllt-eUes III c lluues ~:JI' :WClll1 Au· le Pré{jdent Faber (1) eOrCI Il que ql1 nd
t eu r .
les cho[es ne fOllt plus daos leur nncr, l'appel
n'dl plus recevable fOlls aucun pr texte. F 1'tiere (2) qu'on peut oppo[e: fin de 110n-1' ccvoir ( à celui qui après aV01r ex' cu té ou fo1lf
n firt l'exécution d'une Sentence vaude It el1
°
appeller ».
C'ef1: encore ce qui fut expre{fement décidé
par l'Arrêt, du 20 Mai 1769, rendu au rapport de M. de Ballon, qui déclara non-recevable l'appel d'une Sent~nce de dé~aut, é.mis
après le procès ex écu tonal. Les parues étOlent
les hoirs de Me. Bergera & la Dlle. Rua de
l~ ville de GraŒe. Pour obtenir gain de caufe
le {jeur Bergera n'eut befoiu que de rappeller
la' maxime que nous invoquons; «( n'elt_-il pas
» de principe, difoit fan défenfeur (3) , que
» quand une fois la procédure ea confornmée,
)} tout ell fini & que le citoyen, qui ne peut
, » exécuter qu'en force de la Senténce de défaut
)) dont il n'y a point d'appel, ne doit pas être
)} expo[é pendant 30 années, à une inaance
» d'appel qu'il ne peut pas prévenir? L'acH
(1) DefI". 7. cod. quor appel!. non recip.
(2) Diaionnaire de droit & de pratique va. acquiefcer.
(3) Me. Pafcalis , l'un des fouffignés.
(1) Nouveau Brillon va. acquiefcement avant l'appel.
,
�8
» quiefcement que 1'011 donne auX e~écutions,
» vaut alors acquie[cement formel a la Sen» tence. Il faut que les chofes ayent un terme
,
\.
» dans la vie ».
Le Geur Bergera, ne difoit rien que la Dame
de Fuveau, ne puifiè oppofer à fon époux. Il
a acquieCcé à l'exécution de la Sentence, puif.
qu'il ne s' y eft pas oppofé. Il a. plus fa~t encore, il a demandé cette exécutIOn, pUlfqu'il
a contdlé l'ampliation de délai. Comme le fleur
Bergera, la Dame de Fuveau peut donc dire
que tout dl: aujourd'hui confommé & que l'appel eft irrécevable. .
Cette conféquence eft jufte; on ne l'affoibli.
rait pas en excipant de ce que dit M. Janety
dans fon Commentaire fur le Réglement de la
Cour. l Q • Cet Auteur n'examine pas la queftioo , & quelque confiance qu'on lui donne,
on ne le mettra peut-être pas en paraUele , avec
Faber, avec Ferriere & avec le judicieux Auteur du nouveau Brillon. 2,0. Il ne fe fonde
que fllr un Arrêt également rendu au rapport
de M. de Ballon. Or , il n'eft pas poffible que
~t Arrêt ait jugé la quefiion in punao juris,
Il ferait contradiB:oire avec celui du Geur Bergera que nOLIs venons de citer: car, G l'exé~lltion confommée rend l'appel non recevable,
l~ ne p~ut pas être accueilli quand l'enquête a
été communiquée" L'exécution d'une Sentence
interlocutoire
9
interlocutoire eft confommée par la communication de l'enquête, comme l'exécution d'un jugement définüif l'dl: par la coll.ocat.ion. 3°' Cet
Arrêt, dont Me. Jancty voudroIt faIre une tegl e
générale, a été rendu fur la circonftance particuliere &. décîG ve d'une Sentence des Intendans
de Police de GraŒe. Or, les Sentences des Officiers de Police étant exécutoires noaobftant
appel, & celle dont il s'agiŒoit en portant une
claufe expreŒe, il eft tout Gmple qu'on n'étoit
point fondé à imputer à la panie d'avoir attendu la Ggnification d'une enquête dont fan
appel ne pouvoit empêcher la confeétion. Ce
moyen érait la bafe de la défenfe de l'appellant, c'cil: celui qui détermina la Cour, fuppofé qu'elle ne le fut déja par l'abfurdité de
l'interlocution ordonnée par les Officiers de Police, & l'injuftice évidente de la condamnation
qu'ils avoient prononcée. Que ce foit ce motif
ou le premier qui aye déterminé l'Arrêt il n'eft
. '
pas m01l1S
certaIn qu'il ne peut pas être 'préCenté
co~me formant la Jurifprudence , & qu'il faut
crozre que la C~llr. s'eft d~cidée par des circonftances extraordmazres quz forcent d'oublier les
regles les plus certaines, ou {oit qui en écartent
l'application.
Mais ~ n'inGfions pas plus long-tems fur des
fins de non-recevoir; fuppofons que l'appel du
fieur Barthelemy puiife être reçu : quel fruie
B
,
�10
retirera-t-il de cet avantage s'il n'ell: pas fondé?
Or , il n'dl pas poilible qu'il le [oit.
"
Ici les principes ne doivent pas être méconnus: ils dérivent de la nature des chofes.
Le mariage, conGdéré dans [on ra'pport avec
la Loi naturelle &. la Loi civile, e!t alitant
l'union des efpries que celle des corps. Sa fin
eil bien moins encore la propagation de . l'ef~ce , que le bonheur commun des individus qui
le cootraEtent.
Il eft quelque chofe de plus r.elevé, quand
on le conGdére dans [on rapport avec la Réli.
gion. C'et1 un figne myilique, c'eft un Sacrement, qui imprime [ur ceux qui le reçoivent un
caraEtere ineffaçable, qui les unit par un lien
indiiroluble.
La religion influant néceffairement fur les ma·
riages. La Loi civile, en joignant [00 autorité
à. celle de la Loi réligieufe , a dû s'abflenir d'y
ajouter des caraéte,es contradiétoires. Elle a
donné fa [anaion au principe de l'iodiffolubilicé
du lien.
Mais, les hommes. font tro'p foibles
pour
que. les Loix qui les gouvernent confervent
touJours une égale inflexibillité. L'unio.n indif(oluble de, de,ux perfonnes eft le plus haut point
de la perfelbQD naturelle: & c' cft préciIement
~ett; même
II
perfeEtion qui oblige la Loi de fe
relâcher de fa rigueur &. de [ouffrir lès tempéramens &. les exceptions.
Le mariage unit deux êtres effentiellement inégaux : l'un a la force &. l'autorité, dont il peut
abufer contre la foihleife de l'autre. Il ferait barbare de rejetter la plainte de la partie opprimée,
&. de la forcer de vivre éternellement avec un
tyran dont les emportemens ménacent fan exiL:
tance, ou dont la cruauté lui fait de la vie un
long fllppltce plus affreux que la mort. Delà le
remede de la féparation; ce demi bienfait, qui,
conciliant la rigueur du précepte avec l'indulgence due à la foibleffe humaine, épargne à la
[aciété des Jcandales, & aux époux des tourmens.
Les ~aufe: q,ui doivent y conduire ne peuvent
A
etre determmees par aucune Loi: elles [ont
rélatives aux mœurs (1): elles varient avec
elles.
La premiere déciGon qu'on trollve dans le
droit eft celle que donn'l le Pape Innocent III.
dans le, commence.nt du 1) e. Gécle. Elle porte
que, (! ~ les. [ervlces du mari font tels, qu'il
)) n y aIt pOIDt de sûreté à refler auprès de lui,
(1) Efprit des Loix liv. 19. àap. 26.
B
2
�12
» il faut plutôt éloigner fon époufe tremblante)
» que la lui rendre (1) ».
.
On dl étonné de trouver dans les LOIX Ca.
noniques , les premiers exemples des féparatio ns
légales: mais il ne .faut pas en conclure, comn:e
on a fait en prelmere Inftanc~, que ces LOIX
foient les feules que nous devlOns conlulter, &
que, puiîqu'elles. ne parlent q:Ie d~ danger de
la vie, il ne dOIve pas y aVOIr d autre caufe
de féparation.
A l'époque où la Décrétale d'Innocent fut
faite , les Loix Canoniques étaient pre[que les
feules Loix de l'Europe; l~s Tribunaux Ecclé.
fiafl:iques étaient ceux qui avoient la confiance
des peu pIes) &. , fous le prétexte que la fépara.
tian difpenfoit de la Loi impofée par le Sacrement) ils connoiilaient exclufivement à tous
autres de ces fortes de caufes. Il était couféquent qu'on recourut à . eux, &. que) jugeant
[ur les principes qui leur [ont propres, ils con·
fidérafi'ent le mariage dans [on rapport avec la
religion , plus que dans fan rapport avec la
fociéré.
Que dans ces tems de barbarie &. d'ignorance,
ont ait affimilé la femme à l'eCclave quî , def·
tiné à Catisfaire tous les caprices de fon maître,
CI) Cap. litteras 13 extra de reflit. [poliat.
'13
n'a point à Ce plaindre tant qu'il ne ~net, p.as
fa vie en danger, quelque ,dur. que ~o~t d aIlleurs [on empire, la chaCe na nen qUI et.onne :
ces temps font voifins de -ceux où les mans s'arrogeoient le _droit de mort fur leurs femmes
quand ils n'en étaient 'pas contents.
,
Des fiecles plus éclaIrés &. plus doux fuc~e
oerent à ces fiecles d'ignorance & de barb~r1e:
les bornes de la Jurifdittion Eccléfia(bque
furent connues &. fixées: on fentit qu'il était
ab[urde de regler par les principes du droit
Canonique, les chofes reglées par les principes
du droit civil: (1) on reconnu que le remede de la
réparation était un bienfait de la Loi civile; bienfait déterminé pour le bonheur général de la
fociété ,toujours dépendant ou bonheur privé,
de la paix intérieure, des familles qui la compo[ent; &., lai(fant aux Officialités, ou, mieux
encore, au Tribunal de la Pénitence ~ la fpiri~
tualité qui eft de fon re(fort, on ne confidéra
dans l'engagem.ent du mariage, que le lien civil, que ce contrat inventé., (2) pour que le
fexe aimable & foible trouvât de la protettion
dans la fociété du fexe à qui la nature a dé-
-:------:-----------_
Cl) Efprit des Loix, liv. 26, ch. 8.
C2) Boniface tom. 4, pag. 303.
..,
�,
14
parti la force:» car, dit pothier, (1) felon
» les regl es de l'ordre politique, on doit, nOn
» pas faire, mais permettre un l110ind~e mal
» pour en éviter un plus grand : or, 11 n'eft
» pas douteux que la difc~rde & les querel_
» les qui arrivent tGUS les Jours entre le mari
» 6( la femme, fi on les laifiè enfemble, font
» un bien plus grand mal que leur féparation:
)) on doit donc pour l'éviter permettre à la
» femme de fe féparer d'habitation de fon mari,
J) lorfqu'il
y a pour cela de jufies cau» fes. »
C'efl: de cette ma.xime que découle le principe général qui admet la féparation, toutes les
fois que la femme, au lieu de trouver un proteaeur, un ami dans fon époux, n'y trouve
qu'un caraaere infociable qui lui rend infupportable la néc~(Jùé d'habiter avec lui : toutes
les fois qu'elle a confidérablement à fouffrir de
l'averfion que [on mari a conçue pour elle. ( 2 )
Principe immuable, parce qu'il tient à la cature & à la fin de la fociété que le mariage
forme & dont l'application feule peut varier
avec les mœurs &. l'état des pefonnes.
» H faut, fuivant_ le droit canonique , dit
15
» Lacombe, (1) que les févices & mauvais train teroens, aient été capables de faire craindre
» pour la vie de la femme 6( qu'ils aient mis
~) fa vie en danger. Mais fuivant nos mœurs,
)) cela n'eft pas requis; il fuffit que les faits
» [oient graves, qu'ils rendent la 'J,'ie infop)) portable & infiniment trifte & diftracieufe,
)) & qu'ils foient d'une nature à pouvoir être
» admis. ))
» La féparation efl: admife, dit Boniface ,
» (1) lor[que les femmes prollvent des outra» ges & févices qu'une compagne ne doit pas
» follffrir. »
Et en effet les Dames de Pomereu, de Montendre &. de, Ste: Maure,. n'accllferent point
leur man cl aVOlr attenté a leur vie; elles fe
bornerent à prouver qu'ils la leur avoient rendu infupportable, & on n'hélita point à prononcer la féparation.
Mais quel degré de fouffrance la femme doitelle ~voir effuyé, pour qu'on puifi"e dire qu'elle
a , ral~9~ ~e r~garder comme infupportabl€ la
necefilte d habiter avec fon mari? Pour le déterminer, il faut confulter les mœurs générales, le rang & l'état des perfonnes.
1
c -
(1) Jurifprudence civile vu.
(1) Traité du contrat de mariage tom.
,ho 3, art. 1, §. l " pag. 179·
(2) Pothier loc. cie.
2.,
part. 6,
(2) Tom. l, liv• ."
féparation.
tit.4, ch.3, n.S
�16
aient leur fource
Q UOI'que les droits des époux
. c
1 f "
dans la nature des êtres qUl lorment a OC)~té
du mariage ils font cependant plus ou mOins
étendus, plu~ ou moins rapr.o~h.és ?e_ l'épa,lité ,
à raifon des progrès de la cIVlhfatlon gen er~le.
Dans une fociété naiffaote les mœurs peuvent etre
plus pures, mais elles foot p~us gr?ffieres ; les p~f:
f ons ont eocore toute leur eoergle ; la fenGbillte
~orale eil pre[que nulle; i~ faut les procédés l~s
plus violens, pour rendre m[upportable la malCoq conjugale.
.,,'
\
Mais dans une foclete pohçée, ou des mœurs
douces 8< une éducation [oignée ont modifié
les pallions, corrigé leur aprété , d~ fi~é des
regles de bienféance, une femme Olt. S attendre à des éga rds: fes orgaoe~., ,Plus fOlble~ &.
plus délicats, ont une fenGbdne plus .atbve.;
ils exigent plus de ménagement : ce q.Ul ne falrait aucune feofatÎon dans les premiers tems,
ou {ur une femme du peuple, peut, dans nos
mœurs aB:uelles, laiffer dans le cœur d'une femme
fenGble, des bleffures qui, ne cicatrifant jamais,
formènt ces haines irréconciliables qui rendent
la fociété des époux in[upportable , 8< leur féparation néceffaire.
)) La qual ité des per[onnes efi une circonf.
» tance Importante, dit Cochin (1) d'apres
Ba[oage ,
-----------~--,--
(1)
Tom. 4, · pag.
III.
17
» Barnage, parce 'que dans des per[o nnes [ans
) éducation, 00 doit attendre moins d'atten» tion de la part du mari, moins de [en{ibi» lité de la part de la femme. On tolere donc
» bien plutôt de leur part quelques emporte» mens, quelques violences, quelques excès:
J)
mais entre des per[onnes d'une condition ho» norable, les preuves de mépris & de haine,
» les infultes, les injures atroces, la perflcu» tion habituelle, fuffifent pour opérer la [é» paration. » (1)
Combien d'exemples ne pourrions-nous pas
citer de [eparations prononcées entre des perfennes d'une nailfance rélevée , pour des caufes bien moins graves que celles que la _Dame
de Fuveau articule? 11 [eroit inutile de les rapporter: ce~ exemples [ont encore pré[ents à la
mémoire de tout le monde. Qu'on les compare, on ne trouvera point d'e[pece qui ne le
cede à celle-ci.
Il n'eil malheureu[ement que trop vrai que la
Dame de Fuveau a raffemblé dans [on expédient
toutes les cau [es qui peuvent opérer la féparation : il n'y auroit qu'à copier la piece, G 011
\
---------------------------~
, , (r) ~a maxime eft encore atceftée par Lacombe va.
fep~rauon, par Dareau traité des injures pag. 24 5 ; par
le Journal des Caufes Célebres tom. 6 , pag. r 3 5 , &c.
C
�18
voulait les retracer taures', pour en former.un
traité complet.
A la leau re de cet expédient, il n'dl: perfonne qui ne foupçonne la Dal?e de Fuveau
d'une exagération coupable; malS quand on fe
rappelle qu'il n'dl: aucun excès dont le; l~rtres
ne prouvent que le fieur Barthelemy erolt ca·
pable ; quand on fçait que y~oquêt,e a re,l1chéri
[ur l'expédient; que les de~ads 9u dIe fourmt
prouvent que, même en veillant a fan honneur
& à fa fureté ., la Dame de Fuveau a eu pour
fan mari plus de ménagemens qu'elle n'étoit
obligée d'en avoir: on fe demande comment il
dl: poaible que la nature aye produit tlne femme
capable de fupporte\' pendant fept années un ty·
r.an auai farouche.
Les faits articulés dans l'expédient fe c1affent
naturellement dans les trois diviGoos annoncées
dans le Mémoire. Mépris confiant, diffamation
publiqlle ~ ' violences exceJ]i.ves.
Si ces moyens peuvent opérer la féparation
en les fuppofant prouvés, il eO: incontefiable
que le Lieutenant ne pouvoit fe difpenfer de
les admettre. Il faut donc démontrer qu'il n'en
eO: aucun dont la preuve ne doive conduire a
prononcer la féparatioq.
Les principes que nous venons d'étabrir nOliS
difpenferoient d'entrer dans des détails: il [ufli·
roit de les rapprocher de l'expédient offert. Mais
19
donnons le dernier dégré cl' év idellce à la dé_Olonfiraeion, en dilcutant chaque moyen fép~rément.
La Dame de Fuveau demandoit de prouver
que dans toutes les occaGons fon mari témoignait
.du mépris pour elle, tant en face & dans fes lettres, que pardevant ténJoins.
Pouvait-on fe difpenfer de l'admettre à cette
preuve? Il faudrait, pour le f~utenir, méconnoître la nature de la fociété que le mariage forme , & dégrader le citre honorable d'époufe.
Nous l'avons dit en commençant: fuppofé
que le bonheur commun des conjoints ne fait
pas la feule fin du mariage, il en eO: au moins
la principale. Si éet engagement donue des draies
au mari, il lui impofe auffi des devoirs. Il doit
fe refpeaer dans la perfonne de fa femme; il
doit concourir à fan bonheur avec la même attention , -avec lé même 'leIe ~ qui le porte cl faire
le fien propre. Sa femme n'eO: pas fon efclave,
mais fa compagne, mais fon égale, aux différences près que la nature a marquées. 11 lui eO:
comptable, de tous les fentimens qu'il manifefie
fur fan, compte, de tout ce qui peut altérer [on
bonheur ou [a tranquilité.
.
» Le mariage a pour fa part, dit Montagne,
» l'utilité, la juO:ice ~ l'honneur & la confi:an» ce. C'eO: une douce fociécé de vie, pleine de
» fiance, & d'un nombre infini de vie, pleine de
C
2
�20
» lides offices & obligations mutuelles.« Le
mari qui témoigne du 1l~ €pr is .à ~a feml~e, dé.
clare par cela même la Juger llldlgne d egards ,
d'efl:ime & d'attentions. Il rompt, autant qu'il ef!:
en lui les liens qui l'attachent à elle; il viole
le prel~1ier de {es engagemens , celui de rendre
fa compagne heureuie : il les vio~e tOl~S , puif.
qu'il voue au mépris, celle d?nt 11 dOl_t proté.
ger l'honneur autant que la VIe.
De tOllS les chagrins qui peuvent affliger tlne
femme dans {on domeftique, le mépris de fon
mari eO: fans doute le plus cuifant. Perdre tout
le fcuit d'une vie retirée & auftere ; être privée
de l'e!Till1e de l'homme dont on attend ' tout,
pour qui on a tout {acrifié; ne lir'e dans les
regards d'un époux que l',inquiétude de la mé.
fiance; fubir la peine du crime quand on a
l'innocence de la vertu; ne pouvoir promettre
à fes enfans la tendrefiè de leur pere; être ré·
duite à rougir devant fes propres domcftiques;
fans celfe expofée à de nouveaux outrages ~ ne
pas o[er fe plaindre , ne pas attendre de con·
folation; être humiliée, avilie, par celui qui a
juré de vous aimer ~ de vous hunorer toute fa
vie . . . . une telle exiftence fait frémir la na·
ture qui. nous a donné !lne ame pour {entir:
elle eft znfupporrable à tout être qui conferve
encore gu~Ique !èntiment de (a dignité.
Une lllJure, une vivacité) une brutalité mê·
2.1
me, une femme peut la fupporter : fan ame peut
réuniŒant toutes fes forces, en fe contraaant ~
~:pouŒer la douleur ~ ~éfifte~ à la violence du
moment. Mais un mepns habituel ab bat .les forces que la douleur inftantanée réunit; Il ôte à
l'ame tout [00 refiàrt; il ouvre un champ fans
borne ' aux égaremens de la douleur ;. elle ne
s'évapore plus, elle ne coule plus avec les la~
mes elle ne diminue pas avec le tems ; les r-efl.exi~ns loin de calmer l'inquiétude, l'irritent;
elles ne' fervent qu'à dévoiler toujour~ da~an
tage les difpofitions de l'ame de ~el~l qUI. les
fait naître : c'ea une blelfure qUi 5 envelllme
toujours plus 1 parce qu'elle eft toujours plus
déchirée.
AuŒ a-t-on toujours regarâé le mépris habituel comme une caufe de réparation. » L'ef)} pece fe préfenta il y a 4:nviron une vingtaine
)} d'années, dit Pothier (1), dans une caufe
» fur une demande en féparation d'habitation,
» que la femme d'un Tréforier de France avait
li donnée contre fan mari: le mari n'avait ja)) mais frappé fa femme, ni tenté de la frapper;
) mais, dès la premiere année de leur mariage
» _ & pendant toutes celles qui avoient fui vi ,
» il n'avoit celfé de lui témoigner le plus grand
--
"
( 1) Loc. cil. Tl.
)I O.
�,
23
JE SOUPÇONNOIS qu'il pm l'emporter. (1)
Sur quel titre fonde'{-vous votre vertu? VOLIS
vou fe'{ pallier vos crimes ... mes enfans Je reffentiront de :a faufe de lel~r mere. (2) Efl:-ce
2Z,
)) mépris clatu toutes les occafiolls, devant les
» perfonnes qui fréquentaient la maifon, devant
» les domefl:iques & même devant leurs eofans
» communs, que le pere excitait à fe moquer
» de leur mere. La preuve de ces faits ayant
» été faite par l'enquête de la femme ., intervint
» Sentence du Bailliage d'Orléans, qui la fépara
» d'habitation, & cette Sentence a été depuis
» confirmée par Arrêt contradiétoire. ((
Comment en effet un mari peut-il fe plaindre de voir fortir de fa maifon , une époure
qu'il n'y retenait que pour l'accabler de [es
~ép~'is? La jufiice peu't-eHe le croire ~ quand
Il declare dhmer fa femme , ou faut-il que
fourde à [es plaintes, elle lui préfenteelle~
même la coupe de l'humiliation mille fois plus
amere q~e ~elle de la douleur phyfique?
Le mepns du fie ll.i Barthelemy ne fçauroit
êt:e' ,pl~s ~~r.qué: je fais apprécier les chofes,
I,UI een,volt-Il dans une lettre, (1) & VOlIS
j UfY, bzen ce que vous êtes, & ce que vous Jlal~,. ~e connais l'ufage que vous fllier.. de votre
l7.~erte:. .. ; En ,de,v.er:an,t perfide, ne _.devene'{ , pas
enam r.ee; Hu ecnvOlt-il dans une autre, (2.)
Je vous àbandonne, J'arracherais mon cœur, Ji
4
(1) Sous cor. O. dans le fac de
(2.) Let. fous cot. N.
ainu qu'on eent a une epouCe? Une femme
qui a de la naiŒance & des,fenti.me?s,.e~-elle
faite pour fupporter de pareilles lOdlgmtes ?
Ces mépris , ces outrages ne peuv~ent pas
même être excuCés' par l'impétuofité du caractere . Ils font eonfignés dans des lettres écrites
à différentes époqlles , & par conféquent avec
le fang froid de la réflexion. Ils annoncent le
fond des d.ifpofitÏons de rame: difpofitions trop
fOLlvent manifefl:ées,pour qu'on put héfiterd'ajouter foi auX témoins qui devoient dépoferque le S,.
Barthelemy méprifoit (on épOl~(e de la maniere la
plus cruelle, lui donnant les épithetes les plus groffieres & les plus fales. l
.
,
Ce n'efl: pas feulement par des propo,s que
, le mépris du fieur Barthelemy s'efl: manifefl:é;
il a éclaté bien davantage encore par le défir
qu'il a fi fou vent témoigné de fe féparer de
fon époufe. Défir conugné dans une lettre écrite
au Sr. de Peyfonnel , perpétué dans une correfpondanee humiliante , annoncé aveë tout le
(t) Let. cot. M.
(2.) Let. cot. K.
l~ Da~e 'de Fuveau;
,
�24
fang froid de la réflexion, exécuté autant qu'!
était en lui, par des arrangemens propo[és 1
& pour comble d'humiliation , défir manifefi!
devant les domefiiques.
e
Or quelle elt la regle ? Elle fera invaria.
ble tant que les hommes ne regarderollt pas
leurs compagnes comme des 'êtres privés de dé.
lic~te{fe & de fenlibilité. Propofer une féparatIon, c'ea annoncer n'avoir ni affeaion ni
efiime, c'ell la mériter.
Le Marquis DefIiat, dans un moment d'humeur ~ écrivit à fan époufe qu'il ne voulait
~lu~ VIvre avec elle. Ce procédé parut fi inJuneux pour une femme de qualité
qu'elle
n'eut qu'à s'en plaindre pour obtenir 'fa fépa.
ration. L'Arr~t ea. ~u 1er. Mars 1664. (1)
On pourraIt y JOIndre encore les Arrêts de
162 7 & 1644 , ~ors defq~~ls ,le~ MagiJlrats
p~nJe~ent , avec raifon , qu d etau impoffible
d ob!lger. u~e femme d'aller demeurer avec un
man qUl IUl avoit fait l'injure de l'éloigner de
fa préfence. ("2) '
Combien cette injure dl-elle plus grave, quand
(1) Il ell: rapporté dans Brillon VO t:/
•
l '
con' ,
& d
'
• Jeparatzon ueS
JOlnts,
ans le Journal des Cau[es Ce'le'b
17. pag. 7 1 •
res, tom.
(2)
.
. Journal des Caufes Célébres '' l oc. cu.
elle
25
elle ea faite devant des domefiiques? A l'abnégation de toute affeél:i~n & de toute e~ime,
elle joint un caraél:ere qUI la r~.nd pl~s od~eu.f~,
s'il dl: pofIible; elle prouve llOtentlOn cl aVIlIr
à leurs yeux, de rendre méprifable, celle que
le Sr. Barthelemy devoit leur faire honorer &
refpeél:er. Si elle opére la féparation quand elle
eft conGgnée dans des lettres qui ne font & ne
doivent être lues que par l'époufe, quand elle
n'ea connue que des conjoints, à combien plus
forte raifon doit-elle l'opérer, quand elle efl:
faite devant des tiers, & fur·tollt devant des
tiers qui violent bientôt le devoir de l'obéiffance & du refpeél:, quand le mari, quand le
chef de la fociéré ~ leur manifelte l'indifférence
& le mépris qu'il a pour fa femme?
Puifque Je- mépris habituel efi un moyen de
féparation, la Dame de Fuveau l'oppofant , il
érait indifpenfable de l'admettre à le prouver,
ou plmôt, à ajouter à la preuve que les lettres
fournifiàient déja ; à juftifier qu'il avait été
P?rté à ,f0n d.ernier 'période, par la propofition
dune feparauon faIte devant des domeftiques.
~l en efi. de mê.me du fecond 'chef qui a pour
"obJet la dtffamatlOn publique.
La Dame de Fuveau a articulé que lant
llva~t que pendant fa derniere groffeffe
(on
m~n n'9 c~JJé de ~t.Ji reprocher que les e'njarzs
qu elle al/olt ne luz appartenaient pas .. que ce-
D'
�2.6
1.7
lui dont elle étoit enceinte n'étoit pas de (er
œuvres. (1) Que dans toutes les occaftons il l'a
diffamée par les impucations les plus OUtraB"eances & les plus calomnieufes. (2.)
Ou les idées que nous avons fur les droits
&. les devoirs du fexe font bien fa u fies , ou
de cous les griefs celui-ci eft ,le. plus faigna~t,
le feul qu'une époufe ne pUlfIe, ne dOIve jamais pardonner.
Les traitemens les plus barbares ont encore
une excuie dans les paflions dont on n'dl: pas
toujours maltre de réprimer les mouvemells;
-les violences les plus exctilives ont un effet •
borné par notre organifarion phyfique: il peut
fe trouver des femmes qui aient la force de les
fupporcer , & le courage de s'y expofer. Mais
la diffamation ôte plus que la vie. Malheur cl.
la femme qui a la lâcheté de la fouffrir: [on
filence l'accufe & fullie pour la convaincre:
infenfible à la perte de fon honneur, elle ell:
au.deflàus de fon fexe, elle ne peut plus que
ramper dans l'ignominie.
Exclues des charges &. des dignités, les fem·
mes ne peuvent prétendre qu'à l'eftime & à la
confidération publique. L'opinion de leurs con-
(J) Arr. 'i. de l'expédie nt.
(2.) Art. 6.
'coyens eft la recompenfe &. l'objet de toute
.
b
\
d
le~r conduite : c'eft l'unlq~e ut ou ten ent
toutes les aaions de leur VIe. La leur enlever
par des imputations calomni~u[es, c'eft, leur ravir le fcul bien qu'elles plldfent poffeder , le
feul qui les flatte, le ~eul qui foit capable d~ les dé·
dommager des devolfs qu~ la nature &: ,la [0ciété leur impo[ent ; deVOIrS aufteres , plllfque ,
felon l'exprefIlon d'un ,Phylo~ophe moderne,
l'apparence même en falt parIZe.
Les coups que la d!ffamation leur po~te f?nt
mortels quand ils Vlennent de la maIn d un
époux, parce qu'on ne foupço?ne, m~,me \ pas
la calomnie dans une bouche 11lterefiee a repouffer la médifance. L'.honneur eft f?li?aire
parmi les époux : .le l~an, ne p~ut f1~tr~r fa
femme fans [e flétrIr lUl-meme , !ans flernr fes
eofans ; on ne préfum e pas que des intérêts
auffi chers foient facrifiés fans les plus fortes
rairons. Quand il accufe fa compagne, la moitié de lui-même, on eft plutôt tenté de la
croire plus coupable, que de la fuppofer parfaitement innocente.
La diffamation qui dans la bouche d'un étranger foumet aux peines les plus graves, doit
dans celle d'un époux opérer la féparation. Elle
le doit, parce que l'injure eft plus atroce ,
parce qu'elle fait une bleŒure plus profonde :
elle le doit encore, parce que le mari étant
Cl
D
2
�z8
o bligé de ven ger l'injure faite à fa femme, de
protéger fo n honneur, viole, quand il aUeote
à là réputation, les droits attachés à la qualité
d'épou[e, les devoirs impofés à celle de mari,
& la fainteté de leur union. Elle le doit enfin
parce qu'il n'dl: ni décent, ni honnête, ni
ju{te d'obliger une femme à foutenir pendant
toute fa vie la préiènce de fan calomniateur,
& de les expofer l'un & l'autre aux fuites
d'une faciéré qui feroit le fupplice de l'innocent, bien plus encore que du coupable.
D'aiUeurs de deux cha [es l'une: ou le lieur
Barthelemy croit aux imputations dont il s'ea
[ouillé, ou il n'y croie pas.
S'il penfe que [es enfans ne font point à lui,
s'il a été témoin de l'infidélité de {on épou[e,
pourquoi la réclamer? Il ne peut ni l'aimer,
ni l'efiimer; pourquoi donc la rappelle-t-il dans
la mai fan conjugale? E{t-ce pour l'y faire expier [es prétendues fautes? Mais les loix ne
peuvent permettre des expiations qu'elles ne
prononcent pas, qu'elles ne peuvent pas {urveiller. E(t-ce pour lui rendre [on amour,
pour la traiter maritalement, comme il dit dans
[~ Requête : .Quel~e idée veut-il donc qu'on
a,a ~e [~ dehc~te{Je? Dans cette [uppofltion ,
loffre d un traitement marital eft trop illdéceme pour qu'on y croye. Par honneur il faut
penCef qu'elle n'eft pas flucere.
2. 9
' 0'
1
Mais, cette fuppoli ti 11
bll t: : t ' !t'tll
Barthelemy qui n'a p s m ' 111 l' ~ d 0 11l ,~(lli
eil convainC/! de la /a Ot~O'· d , .( 1 j '1Ilf7~~' ,. 1)1 '!I
.
1110lOS
encore la cet·titll de ph)' fJ."nu
1 . flLl
'! tl . IlIUll
donner au public. D ~s -l r la dtfb~n. fol Il .Il
plus criminelle &< la fi p:u:uioll plll lt1dl[p nfable ? Comment obliger ulle fe mmc de r c. llrt.l c r
auprès d'un hOlllme qui ~ con vaincu .dc {on II~
nocence , a eu la noirceur de fe dU'e télll Olll
de fan infamie & d'imaginer la plus étrange ,de
[uppoutions pOUf donner plus ~e force & cl a~
tlvité au venin de [es calomnIes? En faut-Il
d'avantage pour rendre infi'Pportable la néc~ffité
d'habiter avec Lui?
Les coups les plus terribles qu'une femme
pui{Jè e{fuyer, le fleur Barthelemy les a,portés.
Il a fait à [a compagne tout le mal qu Il pouvait lui faire. Réalifa-t-il [es ménaces effrayantes, lui ôta-t-il la vie ~ il [eroit moins cruel,
moins odieux, que lor[que, méditant de fang
froid fes calomnies, il avi[oit aux moyens de
les rendre croyables, Il n'y a fans doute pas
d'excès plus grands à craindre; mais c'eft précifémeot parce que fa haine eft parvenue au
dernier période, que la réparation eft plus néce{faire. Plus la Darne de Fuveau a [oufferr ,
moins elle avait ci appréhender que la juflice
ferma l'oreille à [es plaintes; plus un Tribunal,
qui. connoÎt les reg les & le prix de l'honneur,
�3°
•
devait s'empre{fer de l'admettre à achever Une
preuve déja commencée par les lettres.
Les difpofitions de la Sentence rélatives à ce
fecond moyen, ne font donc pas plus fu[cep~
tibles. de critique que celles qui fe rapportent au
premier.
Quant au troifieme, qui concerne les vio.
lences, il ne faut que lire les fecond, troifie.
me & .quatrieme articles de l'expédient, pour [e
convamcre que la preuve ne pouvait en être
refufée.
On ea faifi d'horreur, quand on entend une
femme ~rticuler, & demander à prouver, que
fan man la tenoIt dans un état habituel d'effroi
qu'il ne la ménaçoit de rien moins que de 1:
tuer, qu'on trouvait fous fan chevet des armes
dont la vue feule fait trembler un fexe timide
q~e la famifle, eotiere ,dll fieur Barthelemy s'é~
tOit cru obltgee de lUI donner fes domelhques
~our furveillans, de la cacher pour la dérober
a Ces fureurs. Quels feraient déformais les faits
do.nt l.a Julbce admettrait la preuve, fi elle
reJettolt ceux-ci? La Dame de Fuveau n'eft·
elle ~as cette ép~lI:(e tremblante pour qui il n'y
A
'!
pOint de surete a refler dans la maifon conJugale?
Q,ue fig,nîfie ce piJlolet trouvé fous le chevet
du ~lt. ap,res u?e nuit orageufe? A quelle fin y
av OIt-Il ete mIS? Pourquoi l'y avait-on laiifé?
F
Efi:-ce oubli? Eft-ce affetlation ? L'énigme n'a
pas été expliquée, ne ch~rchons .ras à la deviller. Affeé.latian , ou oubli, peu llnporte, fi le
fait dl vrai, ( & il ea trop grave pour qu'on
ne dût pas l'éclaircir) fi le pifiolet a été tro.uvé
fous le chevet J il faut arracher au man un
'autorité dont il abu[e. Il le faut de néceffité ab[olue, c'eO: le cas ou jamais de dire, qu'une
rigveur ~rop inflexible., ir:fulceroit" 1'1lllmanité,'
écrafero.lt à for,ce de Jufhce la fOLO~efJe ~pprL
mée , changerolt les douleurs en déjefpolr J &
Je rendroit complice des crimes en les néceffitant
(1).
La famille du fieur Barthelemy inquihe [ur
le [art de [on époufe , inquiéte par pitié, fi elle
ne l'était pas par intérêt, a d'avance jugé le
procès. Ses craintes, [es précautions) [es allarmes, dont on offrait la preuve & que l'enquête
conltate , [ont ici décifives. Quand elle était
obligée de prendre des précautions, quand elle
croyait qu'il n'y avait pas sûreté à abandonner
l'époufe ~u mari, la jufi:ice la lui livrerait!
Elle De daignerait pas prêter l'oreille à [es plaintes! Elle aurait plus de confiance dans le fieur
Barthelemy que [a propre mere, que fa Cœur !
Il s'en flatte inutilement.
•
(1) Journal des Caufes célebres tom. 6. pag. 7 8•
�~2
Mais, croyons que ;e ,fieur Bart~elemy n'a_
' t pas intention de reahrer fes menaces: ou.
VOl
l'
"
blions , s'il eO: poffible J que enquete 'prouve
qu'il a tiré l'épée contre fa femm e. Il D eO: pas
moins certain que les ménaces les plus a:rocei
'té faites qu'il a levé le bras pour lUi por.
on t e
,
d'r
1 f"
ter un coup de chaire. Nous 110ns que e ,ait
efi certain parce que la Dame de Fuv eau s, eil
,
engagée à ,le prouver & que 1" evenem.e~t
a,J,u,[.
tiflé [es promelTes, Le calme de la !l~lt , .1 etat
cl g ro{fefiè cet état périlleux qUI lOrpae la
e,
t'
'1
tendrefiè
& imprime le, rerpe é
~ ceE etat ou a
moindre frayeur pouvait deveOlr funefie , tout
aggravoit les ménaces du fieur Barth~lel~y, ~es
préfentera-t-on comme n'ayant qu.e 1 objet ef·
frayer fon époure J elles ne ceŒerOlent pas d err.e
un moyen de féparation..
.
Une femme n'dt pas faae pour paffer fes JOurs
dans les tfanfes de la frayeur. L'effroi compro'
met fan exifience: il peut avoir des fuites te~.
ribles. La tranquillité &. le bonheur fon~ banms
des lieux où régne l'épouvante. Leur féJour eil:
infupportable à tout être fenfible ; il l'dl plus
encore à ce fexe à qu-i la nature n'a donné d'autre défenfe que fon irréfifiible afcendant, fur
celui qu'elle a doué de force. Quand au heu,
de protéger la foihleffe d'une époufe , de caltne~
fes allarmes, de diHiper fes craintes, un mari
les augmente chaque jour par de nouvelles
fcelle s ,
?
H
,
'1 d .
fcenes , par des frayeurs foudal~es , l" eVle~t
le tyran de fa compagne :. la . haIne. qu Il manlfefie , les dangers qu'il lUI fait counr, font. ~ne
infraétion des Loix de la nature & de la [ocleté.
Il a banni la sûreté & la tranquillité de la mai[on conjugale, il doit être permis à fa viétil11e
d'aller les chercher ailleurs.
Il efi donc démontré que les trois moyens
dans lerquels la Dame de Fuveau a réduit fa
défei1[e doivent opérer la féparation, s'ils font
fondés en faie, c'efi-à-dire , s'ils font prouvés.
Il efi donc démontré, par raifon de conféquence,
que fi le Lieutenant d.e Marfei!le ,n'avait point
ordonné la preuve, Il faudrolt lardonner en
caure d'appel.
Celui qu'a déclaré le fieur Barthelemy eft donc
évidemment mal fondé. Son fyilême de défenfe,
. juilement profcrit par le premier Juge, peut
bien moins encore avoir de fuccès pardevaot
la Cour, aujourd'hui que l'enquête eil achevée
& connue, aujourd'hui qu'il efi confiant qu'il
n'y a eu que de la modération dans les plaintes
de la Daine de Fuveau, qu'elle n'a rien avancé
qui ne fait exaaement vrai & jufiiflé ; en un
mot, aujourd'hui qu'il efi prouvé qu'elle a plutôt d!minué qu'exageré fes fouffrances.
Dtra-t-on encore que les faits articulés dans
l'expédient ne font pas vrai[emblables? Cette
reifource ordinaire & impuiifante de tou s les
E
�.
34
maris qui s'oppofent à la preuve de leurs excès
feroit ici ridicule. Efi-il tems de s'agiter fur l~
vraifemblance, quand on · a fous l'es yeux la
preuve de la réalité? Il ne s'agit pas de rai.
fonner ftlr la pofIibiliré , il ne faut que lire la
preuve de l'exifience. De l'atte à la poffibilité,
la conféquence efi infaillible.
Les fàics que renferme l'expédient, ferollt
invraifemblables tallt qu'on voudra. QlI'impor.
te? Ils fOllt prouvés par l'enquête. Parce que
la Dame de Fuveau a plus fouffert que les
femmes les plus infortunées, falloit-il que toute
pitié lui fut refu[ée 1- Pour avoir gémi plus
Jong-tems de la barbarie d~ (on époux ~ fa1l0Îc.
il qu'elle eut à gémir de l'injufiice des Tribu·
naux ? Parce que le fieur Barthelemy a excellé
dans l'art cruel de tQunne.mer fa · compagne,
parce qu'il aura, fi l'on veut , reculé dans ce
genre le~ bornes d\!b puffible &.. cha vrai{emb1a·
ble, faUoit-iL qu'il trouva l'impunité dans le
raffinement de fa barbarie 1
D'aillellrs' fes lettl'es étoient au procès, e-Ues
commemçoient la pre-uve, ~l n'y manquait plus
que le derruer trait~
Répéte.ra+om encore qut' les faÏ1es de l'expf'
dient n'éc(i)iem paIS. cÎ.rc01.)fianûés? Eh! pou'
vOlent-iill$ l'êtr~ d'a'lanrCllge? La frame de Fuveau. offro~t la preuve de l!liabiw'dre & paf
c'
'
çonl:œqueat
de:: ka C'Ol1illuinu~té.
C'é~"it aux ' tém,~jns
3)
. 1" d .
à rapportér les .faits dont on, pourrol~ ln Ult~ ,
à donner les détails &. les c111confiances; & Ils
l'ont fait. Le prétendu vague de l'expédient eft
'dérerrRlné" fixé par l'enquête : on y voit des
outrages journaliers, un mépris conftan~ , une
propolitio n de {épa~ation rép~~ée , une ~lffama
tian [ourenue &. ' clrconfianClee. Les VIOlences
[ont détailléeB dans l'expédient, elles le font
encore dans l'enquête. Le vague ne feroit donc
que dans l'objettion, fi on la répétoit en caufe
d'appel.
.
Enfin, dira-t-on que les faits n'étoient pas
f.écens? Comment pouvoient-ils l'être d'avantage? Ils ·da-rent de la derniere groifeife, ils fefOllt prorogés même pendant les couches ~ &. la
Dame de Fuveau efi {ortie de la maifon de {on
mari des que fes forces rétablies lui ont permiS
la fuire.
L'appel du heur Barthelemy ne peut donc
avoir aucun fondement folide. Tout eft aujourd'hui confommé. L'enquête efi connue: {es mé·
pris, fes calomnies, fes ménaces , fes accès
de fureur, tout efi confiaté. Il n'efi pas poffibIe que tant d'excès demeurent impunis ~ &.
que la jufEce fait fourde aux cris d'une épou.
fe , dont l'exifience malheureufe a été aifaillie
dans fan moral ~ par des chagrins infurmontahles, par une- diffamation horrible' , & dans
, ,
�~6
[on phyfique, par les excès les plus révor.
tans.
Délibéré à Aix le 5 Janvier 17 8 5-
1J ;,,-,.JT{U"1'- c;)'" (~_ \,.;~
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A AIX, chez J. B.
MOURET
fils
17 8).
, Imprimeur du Roi;
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BARTHELEMt~ FifVEAd~:;
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PEISSONE;L DE.FUl!fAU;IW! lJ;;j;fflflse ~<~
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E m'écois
{jnguJîére~entlab9f.é : ti'!lyois cr.\j l~\le ,Îa~a~m.rm:
JP't~, 5'(~mit-iotin ~a.Ύe ld~
pll:9cluir (oUJ;. te nbm de m()n
,a ttachée depuis long-tems . -à mes
mc pourfuiv;e •. qn jib.e.J~ç "ffre.uoc
Epoufe , vient de dimBer mon erreur. Toue - cel qUI1 j-a[ haine:
& l'impoil:ur:e peuvent .imaginer.de plus. atrqce ;. tout cç .quc
l'adre,~ç p~ut p-réfe!J~er , de ,plus :fé.dul(àiit ,~ .re .trouve (téq:Di
~ans ce libelle. )l,_en~ ieL que )' fLjé liiétoiS ,xie!cendu .q-ans' J e
A
�· ( 2) ,
"
fonds de mon ame; & n'y avois MeConnu la pureté de mes
fentimens & de mes aéhons, j'aurPis peut - être craint de
n'êcre- ,c9 u pable des
,
abominatio~s
'
qu'on m'a imputées, & me
J
ferois fait h-orreur, à moi-mêm~.
, Ce n'~it i pas que cette ' dern{ere attaque ait droit de me
furprendr~, route f,wglante qu'eHe puî!fe être. Je connois la
cabale ~énébreufe & intéreŒ\e qui me pourfuit depuis près
d'un an: je fais à' quel excès de rage elle eit capable de [e
porçe.r .dans fan dé<:haînem.enr.
Non, ce 1n'eH poin..- une
\
\" '
Epo(~e}éli~at~ & Je:1}ble ; oe n'eO: 'po~lJ1t la mm: vertueufe de
mes enfans qui m'outrage & me calomnie. Non, il n'dl pas
r~ tIlle !'h~n'1éuI ~~ X~n~
&
~e J'intérêt des autres
d me oeindre, ~e- couleurs ~uffi odieufes,
c'\'j
l""~,,)'
"'
1- - ,
~...
1
•
-.I.J.
•
v
les forcent
& de me préCenter
l'
.....
comme le p\llS monitrueux des , nommes.
. . 1
Si \a [ûreté de l'exiflencep'hyfque dè mon Epôt& ; &: le
foin de venger Jan honneur; fi l'état & le fort de mes enfans
~eia de créer 'lln
( 3)
roman ê\lomnieux, de le préfenter au Public
avec une affeél:ation fcandaleu[e, & de paroître triompher en
proportion d~ l'éclat & dt: l'atrocité de l'ouvrage.
Mais il faHoit à mes ennemis cette douce &
cruelle
fatisfaél:ion. Que fais-je : peut-être ont ils voulu provoquer eu
moi un juite reffentiment, me faire oublier ce que je devois
à ma femme, à mes cnfans, à moi-m ême, & m'expo(er
enfin à mériter par une vive & imprudente ripoite
lln
jugeme"nt
'qu'e ma conduite' & leurs calomnies même ne peuvent me faire
-craindre.
Je fuis bien éloigné [ans doute de tomber dans ce piege
odieux: cela ' [eul annonce qlle je parlerai [ans paffion comme
fans impoiture. Mais on doiç [e. galder de croire ' qu'une
crainte ' puGllanime me force all lllence. Mes ennemis ont
affcz abufé de ma retenue & de ma modération. Il eft te ms
que je parle avec cerre liberté qui appartient à rout innocent
avaient [euls dirigé l'aél:ion -fur lâquelle je fuis obligé de me
calomnié.
Tant ' que ' les démarches de mon Epoufe , tallt que fes
défenGre, r urojt-tln eu béloin ~e. m'outrager aaffi cruelLe.(rJent
'plaintes & [es imputations ont rdlé enfevelies dans le faoc-
&
tuaire de
~e. donner _à l'outrage aut~l.1t -à'é,clat
erifans lont
& de publicité?
Me~
av~c moi; 'je les ai7n~ ,- je 'les idolâ. tre. li eft
affreux de les faire fervir de prétexte à une calomnie atroce,
:Cot'lnn!c1ellr :pFré·. ~é'arit':à'
b:e[oi~pcrOvoi't~elle
mo~
Epoure
avpir dè püb!'iei- fa
'qllel idtérêt
~d~fenfe ? J'ai
h<}Uteofœntfa ver.tù~ j'aij fvaA'té. [es ·b\;Hl~'es quaiirés
pu
d'u~e'
épargner au
Public
l'hi{l:oire de Qotre diviiion domefl:ique ; pén étré de mon
innocence, convaincu de l' impoffibilité dans laquelle on feroit
quel
'de rien prouver qui m'il'lcriminât , j'ai bravé tranquillement
r:fpcaé
1es pou duites & les éa~omnies ; j'ai méprifé fans emportem'en't
~eS déclama'ttons' & fe ' déclamateurs' ; heureux de poitv<;>'ir
,
& s'il étoit
v.olUble' qulelle . eüt
avoÎ"t beroin
jllftific:'tion aothentique
'
, déchirant qu'elle devoir tâcher
, . '~ ce ~ ' e,i t
polO~
eq me
d '}',I -, pUveolu. ill.~ "[-6paratior1'
q'tl'efl
~ 1ame. :r:c;talt
"
l' uOlque
' 1
_
•
1- t: .' ..
rc;C
obJ~jj 'qu'J:llJ: eiUbdâ .c:henche ~ à; [atipf'a.ire, J Il {était inutile Vour
A
la junice, j'ai cru devoir
1
~ppofer à ce déchaînement de mes ennemis la paix de mon
ame & 'l'opinion ,de mes' concitoyens.
' Mais' aùt0'urd'hllÎ qùe la haine, la calomnie & l'aüdace,
�{.4 )
fe {ont portées conn~ mpi, jufqu'au
du.qie r ~xç~s; allipl,l('d'h~j
que leurs trillts ont percé dans l'ua Province, peut-être mêru;
~ )
ne doit jamais rougir de la Genne , quand elle n'dl: qu'obfcure
(
dans la France entiere, & que les hommes qui ne me Con.
& qu'elle n'a rien de déshonorant.
Mais loin d' àvoir à rougir de ma naiffance, j'ofe croire que
noiffeot que par mon nom, & n.e font inHruits d~ pos
je fuis fondé à m'en énorgueillir. II dl: glorieux de devoir Fe
Ep0ufe, doivent rue
jour à un Né~o ciant indufhieux, franc & loyal,. qui depui5
juHe titre comme un homme féroce : j.e {ui~
quara[1te ans fait le bonheur de toUS ceux qui l't!ntourent ,
forcé de déchirer le voile dont j'avais enveloppé le tableau
qui, s'il n'a créé une des branches des plus importantes- de
de nos diffentions. Ma modération à préfent üwit une lâchet~
.norre commerce, l'a du moins étendue & animée ,par ' fa:
& mon filence un crime. Je dois à mes cnfans , à ma fan)ille
à moi·même de repouffer la calomnie, & d'embellir l'h iftQire
de ma vie li horriblement défigurée.
Cepen.dalilt .que .de circonHances effeotielles ne ferai-je pas
,
fabrication la plus aét·ive & la plus éclairée, qu i al ouvé-rt les
voies de la fortune à une foule de gens qui n'avQiént d'autre
patrimoine que I~ur indufirie, qui journellement emplore
forcé dl! p.a{[er fous ftJence '! Que de tra;ts frappans n~ fefai~
favorife tout-à-la-fois & l'induil:de & le commerce & l'agri-
je J'as obligé d'affoiblir ! Il .eil: des vérités,. il dl: même
.iiUl;Pl~ ,expreffions q.u'on.ne permet pas aux maris d'employer
culture elle-même.
•
Certes, un tel homme vaut bien un noble obfcur qtiî n ~a
.c.optre leu.rs .femm~s. Tel eH Leur avantage dans ces fortes de
jamais rien fait pour {es Concitoyens, ni en le-s défe ndant
combat. Elles fe font un plaifir, elles triomphent à publier
contre les attaques de l'ennemi, ni en les garantiffa-nt des
..o1;'s moi.n.dx:es. défauts, tandis que nous efclaves d'un préjugé
encreprifes du fcélérat. Je refpeéterai tant qu'on
~pérLeux, nous attachons notre honn.e ur· à cacher leurs
nobleffe de la famille Peiifonel. Mais
J.llrpitudes & leurs v.ices, de peur d' en partager la honte avec
peine, que c'eil: faire un fingulier écart, que de [uppofer en tre
,dks , <Qu ,plutôt d'en effiryer {euls le ridicule •
l T.
es. .,ennemis n'euŒ:nt ~té facisfaÎts qu'imparfait(~ent '
mon Époure & moi une difiance qu'il m'é toit impollible cfe
divifions que par le libelle de mon
regarder
à
de
., 14
.li
'
.
h
'
• .ap!c:rf 'J,êv ~!r d~c iré ma t,~\ltation, ils n'avoient cru poumon amo ur propre. Is lpretendent
'
.que la
..v.rur
. ': hUD;J.wer
'
..llai1fan.ce
,/1., l' ~tat
.
. entre mon époltCe & moi une
,,~, ,(
:r
J
aVOlent
mis
Aiflanoe Clue l' ,
".
.
'
••
•
Jl
. ,e n aurOJs :,Jamals pu franchIr faDs les circonr.;.
tances ex~raordinaires . qui ~orcer.ent Dotre Mariage. Je fais
~ja
Ilaiffance ·dl n ~eu
t!\l 'hafard &
ql1'e l'homme honnête
ne
& fait vivre un nombre infini de mercenaires, qui enfin
0-0
voudra Fa
doit convenir fans
franchir, dans un Bec1e où la fortune rapp,r oche ~e's diil:ances
les plus immenfe5'; &, puifqu'il faut tOtl·t dire, Jorfq'ue Fa
DlIe. Peiffooel m'avoit donné avant notre Mariage les marques
les moins équj.voq~s d'un fentiment qui fuppofe & admet
l'égalité, lorfqu'enfin par fa· fituati0n & notre fuite, eUe
avoit mis à ma difcrétion fa rép utation & fon é tat .
L'hiil:oire de Dotœ Mariage &
les circ,onfiances J qui
B
fe,
�( 6)
.p(é"éderen~
[OElt en effet conl~ues de I~ Province eoticre. La
Dlle. de Pei!Ionel vivoit preCque route l'ant1ée à Fuv eau,
qQoÇ r~ flmille po{r,~.,ioic en partie la Seiglleurie. Mo n pere
'ln;
également co _ Seigneur de cette tene. C'dl - là que
j'e~s oc~afion de .voir lX de connoîtr~ la Dllc. de P eiffooel.
elle éraie dé}3 à. un âge où le cœur a [enti [es premiers
beCoins
,
& où il convient au '{ filles de fe ma rier. J'étais
conrrai(~ de I~ ' plus. gran..d jeune!lè; une ame vive &
fenCible ~ ~ne con!titurion vigo\lreufe pouvoifint avoir dévaocé
(;hez nlpi le~ premieres imprd'6 ons de t' amour ~ mais j'eus
lIU
été inc;apab.\e de féduire une fille, quelque fimple & quelque
novice qu'~n~ eût été., J'étois loin dé connoîtl'e cet art clatir
. ger~l/x qlle l'exp.érience feule P~qt nous. d0.riner, de faire
patfer dans l'lme d'une fille noS propres [enrÎŒnenlS, de
y,!vellgl er [ur l'~tat de fOEl cœl!llr & d-e puofiter cie ce p,rettige
pour l'amenet; ~ liIDtre but. II me faUait au moins 'J & paur
Ile rien ,dire de t:r.op ,. une fiLI.e dj,[pofée à me- voir &. à m'en,.
,cend~e ~,!ec plalftr 'J à paftage~ mon a·mou!' & à. le fa-cisfalÎllle.
Ce n'eft . pa? qU;e je v~uille fai,re un uime à mon ÉF~,u{-é de
fan penchano pour mo-i & des,'fuiteS d€ ce- penchant, qllelqpe
a.m~Keantes qp'e)'les, [oi~-nt aujourd'hui pour mon, repos. Je
~,,,!R~Ü'is q~,e d~UK ~e-rConl1;!ls, d'ua. [exe diHere~1t, jeunes. &
{e!.lLi.ble~l , , ~i oat o",ca~o.ljJ de' ~ voj-r , [-ou\leni: & fe voifnt
(.~v.e~ pl<pi.fir" tClimjn~)ie,AJt tli)ujo~H.;s . le~.r, Rema,Q' pa", l'e même
déno'l(!lnent
qil ~ QO~S .~ al!.~~·
lE
" I.e rekv.~ €lïS €iccoü!taO(!6S
"
,
_
la' al
C!HJ,e par~,Cl ql-1'o~ a, voutu ~~l-adrQi;liel11en~ f~àaie' enten:dre q\le
c'e~ camtt}q- par une ef'PIt~~ <\-:enl:lhatWementt que; la Dlhè\- d'f
.Jret{.fqn!!1 rn'~ Ja{t!?Àr~tl«o. Il. ~C~t p~\bé:cdrruœ p0l11l1a. dtf.è.n[e
•
( 7)
~e
vouloir défigurer ainG la caufe & les circonGances de
notre Mariage. Tour le monde [ait qu'apr ès une longue frés
Auentation no.us diC urûmes & nOliS en fuîmes dans le. P ays
étrangers. C'éto it une faute, fa.ns d,out e ; mais cecte faute
avoit été pré cédé e par une autre qui la rend olt n€ceffaire; &
dans cene faute qui nous dl: au moins commune, il ne
faut cherchel' d'autre caufe que le penchant naturel & irr éfi!iibIc des deux fe xe s.
Je jeu e un voile [ur tout le ,eGe; je laifle dans l'oubli
toutes< les autres c)rconfiances de notrt inrrigue,. de notre
_tuite .& de notre retour. Je m'arrête à notre Mariage, qui
,cut 1ieu. verS la fin de Janvier 1171' 11 dt inutile dé dire
de queUe l1l<l'nJÎere nous vécûmes dans les premiers infians de
notre' umion. Toms les mar'iages fe reffembleot atfez par les
comrtYfnCCffilellls. Ils De préfentent en général que des fatisfaétions &. des doucel!lrs. Le nôtre devoit avoir néceffairement
nO\!lv,ea'\!1 €harme ,. puifqu'il étoit l'ouvrage du penc13'.a~t & que' des olY!tades de divers genres de\l0tent avoir
donné à la paffTOIIl nOlllte la force dont eU~ dl: fufceptible.
l Qula'nd
0 :111\ dit dans le libelle de mon Époufe, que les
Fr~miers j liJ urs de notre union furent des jours de trovblf! " on
a~aC€4 la pll\iJ S gt:l:nde eTes impofiures , une impGfiure démentie
'pal! le-s fai ~ les; p'lo!S (!ertaillls & que mes ennemis n'ont pas
l'lIn
• <Jtlbne: ofé offrir' en pleuve,
0ll' me ®elvna<t'lde ~ll , f aims tlh!)1nlte '1 dYQ>lr vrent que la Danle
Ba:r.1!he:lKlTUIÎl ooo dren1 ent:l aim ée; de foo. maTi" oomme }'e le
. pllémelll!d'i l' demande. aU}GucalJhùi à s"én féparer "après ~euf anS
, elle d:Gl1Iaubliiaif~1. JllI tëmbie eJil 4.eç 'q u\me l pat'e.itle d8marche
�(s)
ne peut qu'avoir pour motif ou le delir d'une indépendan'ce
fufpe5\:e ou la néceŒcé de [e [ouO:raire ~ des perfécurions
con flances. Màis pour peu qu'on étudie le cœur humain &
( 9 )
rare; il efi peu de monO:res dans l'ordre moral, comme dans
les nl'I:urs de notre fiecle , il dt facile d'appucevoi.r d'autre~
l'ordre phyGque.
.
C'eO: ailleurs, c'eO: dans des fl'urces différe ntes qU'Il fallt
caufes dans les réclamations de cette nature.
chercher la caure de pre{qne toutes les diffeotions domef-
Ce n'dl pas, toujours de l'abus des devoirs conjugaux ~
des vio\.ations graves que nai-ffenc la méfintell,i gence & les
défordr~ domd1:iques. Ces inconvéniens. ré{ultent bien plutôt
des. incon{équences d-u caraél:ere, ete la. diverfi.r:é d'humeurs
& de goûtS, &
fur-tout du défaut
d'indulgence que hs
Époux apportent dans \a [ociété conjugale. Il efi peu de
maris cruels; il dt également peu, croyons -le du moins,;
de femmes vicieu{es & déréglées; mais, fi: p'Our le malheur, de
l~ordTe Public, il en.
dt qui portent des atteintes fecretes aux
tiques. Une fille qu'on defiine au mariage, {e permet ' ordi,
d
' n s & des délices
nairemenc de ce nouvel etat, es agreme
dont elle fe fait un tableau exagéré. Dans les commence mens ,
r é ' n' . le !ToÎlt
elle rrouve prefque toujours fes erp rances rea 1 ce s ,
"
réciproque de la nouveauté, les amuremens '& 'ài{ance qUI
accompagnent ces premieres rems, font doubler les m~yells
en tout genre. Le mari fait des {acrifices qui alors ne parodI, nt
lui rien coûter. Une femme fur-tout qui cft parvenue au
mariage par 1~ r~ol1te p~ife par la Dame Barthelemi , ("j[ige
qui font éclater la dircorde dans. leurs ménages , ni qui.
davantage & l'obtient dans le principe.
Mais rour, comme 00 fait, a fes périodes & fa fin. Le
vte.nnent demander à la juO:ic.e le remede douloureux de lill
moment vient où les illufions ceirent, 0(1 le charme cit levé ,Ott
!epararion·.. On voit au contraire que p-ar leurs attentions &.
l'on ne trOUVl! plus dans le mariage que deux êtres de différent
l'e.o.rs prévenances. elles tâ'c hent ' de couvrir d' illufions & de.
fe xe, faits pour {upporter patiemment leurs défautS' mutuel s /de f-
charmes celui qu'elles Ont intérêt de tromper;. & qu'enfin,
tinés à partager en[emble la petite fomme de plaifi.rs & la grande
fentant le be{oin de. l'indulgence pour ekle!>-mêmes, elles fost
fomme de peines diO:;ibuées à l'humani té par la nature avare.
volo.ntiers indulgentes {ur les défaurs de leurs maris •. J'excepte
C'efi-Ià l'inO:ant de crife pour le mariage: fi une femme
<ct'pen.daoe: cette claire pa.r~iculier,e de femmes qui;, ayant perdu
a des priocipes de vertu, ' fi elle refpeél:e les ' devoirs de fon
toure idée de leur fe xe & de leur état, bravent effrontément
état; fi ene eO: jaloufe d'une bonne réputation, elle cherchera
I-es. loix. ,. lcs·rnceurs &.l'opioiotl publique, & qui après avoir
à remplir le vuide qu'elle éprouve par les douces occupations
tracaffé & per[écuté leurs maris, ne. craignent même. pas de
& d'Epoufe & de Mere.
devoirs du maria3e, ce ne [ont pas 0rd.inairement celles-là·
"les L.en-J re. témoinS{ de .leurs déportemens '. muis heureufemenc'
'P" rhooneu.r .de l'humanité.
l'ernece:'d
c
Il
'.
"Ir:
. e c.es remmes
eu;
rare.;
Mais fi peu ferme daos les principes qu'elle a reçus; fi
plus fidelle à fes plaifirs qu'à fes devoirs, elle cherche d ans
le tourbillon de la fociété des difiraél:ions & des amu[emens
C
�(
( 10 )
1t
)
que fa maifon ne lui préfente plus, la vanité, l'amour du. luxe j
aélions; qui, enfin; croyant avoir rempli tous leurs devoirs
la contagion de l'exemple, l'habitude dangereufe de fatlsfaire
par cela feul qu'elles n'en ont pas violé le premier, n'ont ni
fes g0ÛCS, tout lui fera bientôt oublier [es engagem~ns , tOUt
indulgence pour les
contribuera à l'aveugler fur fes écarts; elle fe crOIra même
d'autant moins coupable en cela, qu'en comparant les amorces
l'infortune.
Je ne crois pas de me tl'Dmper; voilà quelle eG: dans nos
mœurs la caufe la plus commune des divifions domeaiques.
flacteufes d'un monde corrupteur, avec les froides exhortations
d'un mari, qui exige, qui commande & qui accorde peu; elle
fe fera accoutumée à ne plus voir en' lui qu'un tyran ennemi
de fon bonheur, ,qu'un hOIl}me inju(l:e & ingrat, qui, le
premier, a violé f-es promdfes & [es engagemens.
Ces inconvéniens font bien malheureux, fans doute, pour
la foci été; ils/ont, terribles Eour l~ mari qu. i le.s conapît
ou qui feulement les foupçonne : mais oferai-je dire qu'il ~11
eil: d'auffi grands qui naifl"ent d'un excès de vertu, ou plutôt
dë ce que la plupart des femmes appellent improprement de
ce nom.
FamG:e ic-i taUS ceux qu'llne Cfi~e expérience a mis à portée
~'en juger. C'eG:, (ans doute, un préfent du Ciel, qu'une
femme qui, joint à la pratique exaéte de fes devoirs, un caraco
tere doux, un efprit indulgent, une confiance heureufe pour
les per[onnes avec qui ~Jle vit. Mais combien ce prMent dl:il rare? .C ombien de femmes voyons-nous dans la fociété,
qui, fou~ pr.étexte d'une vertu pénible, tyrannifent & croient
pouvoir tyrannifer tout ce qui les entoure, qui femblent
défauts d'autrui,
ni humanité pour
Dois-je attribuer à une pareille caufe la réclamation de mon
Epoufe? Je fuis, fans doute, bien 1 éloigné de lui prê ter un
caraél:ere auffi outré; je ne f\livrai pas dans ma défenfe l'exemple
perfide de mes calomniateurs; je ne me permettrai jamais de
dire que la vérité, & encore tâcherai-je fouvent de l'affaiblir.
Mâis pourquoi dois-je diffimuler qu'un efprit ombrageux
IX défiant, une difpo!ition habituelle à croire facilement les
rapports méchans, cette incotl~ance malheureufe de l'ame
'lui nous fait tout de!irer & ne nous laifl"e prefque jouir
de rien, devaient rendre mon Époufe néceffairement inquiette
IX par la même inquiétante: fi l'on fe peint en mêmetems une femme d'un tempérament vaporeux qui la rend
plus fufceptible de toute forte d'impreffions, livrée d' un côté
à des per[onRes faibles, complai[antes ou mal intent ionnées
qui flattaient [es idées ou aigriifoient fon cœur, livrée d' un
autre côté à un prétendu parent, homme inréreffé & vindicatif, qui, après l'avoir dépouillée du patrimoine de fa
mai fan , cherche encore fous le prétexte artificieux de la [ervir ,
d evoir fe dédomm ager par-là des efforts & des facrifices quç
11 lui enlever [on repos, [on mari, . fes eofans, en un mot
tout ce qui pouvoit contribuer à fo'n bonheur, (e'ra-t-on
leur vertu leur coûte; qui, toujours ombrageu[es
étonné alors gu' avec un tel caraél:ere, avec les iufpirations
défiantes
& jaloufes, font toujours aigres dans leurs prop:s, ména-
çantes dans leurs geG:es, & défefpérantes par to ut es leurs
perfides qui l'ont invefiie, elle
ait cru d'abord avoir à fe
�'( fI~ )
'( 12 )
plaindre de moi, & (e (oit en(uite laiffée entraîner dans la
démarche inconfidérée qu'elle a faice & dont elle méconnaît
encore les conféquences cruelles. Neuf ans de Mariage,
une cohabitation confiance & non interrompue, ux grofTeIfes t
l'amour le plus paflionr.wé, pendant long-rems, tau jours les
{oins les plus tendres, & les témoignages les plus unceres
de mon atlachemenr & de mon efiime, [embloient devoÎr
me garantir d'une entrepd[e auffi injurieu[e & auffi horriblement conduir.e. Mais que ne peut la féduél:ion (ur un efprÎt
faible & un cœur agité? Jamais on n'en fit une plus cruelle
épreuve que moi. Doublement malheureux? je [ouffre & de
mes maux & de ceUx que des mains ennemies préparent
peut-être pour toujours à une femme que j'aime tendre ment,
malgré toutes fes iojuHices.
Je n'ai pas befoin de faire mon apologie, queTque droit
que la calomnie m'en donnât. Mais je ne puis m'empêcher
de dire qu'il n'eft aucune marque d'atrachement & d'amour
que je n'a1e donné à monÉpoufe, ni aucun r..,crifice que
je n' aie fait pour elle & pour les liens, toutes les fois que
l'occa(lOn s'efi préfencée. JI dl connu de pluueurs de mes
Concitoyens que j'ai fait pour mon Époure, ce qu'un amant
paffionné auroir à pei'ne. la -génêrofité & 1e courage d1 entreprendre. Mais ce qu'ils ignoren·. fans dout~
f i q u'e d"
", c , en
IverS,
de [es pa,rens, hommes & femmes fur-tout réduits à un
état de détrc{fe & d'humiliation Ont imploré ~on fecours &
1
l'ont pa,> Imploré
.
ne
en VJIO.
. D e tout tems je me fuis fait
'
'cl e r é-pandre mes
'
un, plaifir encore plus qu'un d eVOlf
bien- ,
faIts [ur tOUt ce qui lui appartenoir.
Je
de Pei«"~n~l fH~,
mon tJeau-frere ; mo11' ami d~ abord, même avant- que d't%tre
mon allié, & mon enm:m~ ennn , comme il l'a été de tout
1e n'eXCf11te
_pâS même le feu fièur
fan farrg. Je fuis bien éloigné
de
dire qu'il a1HU a15folum~nl:(
befoin de mes fecours & de mes biehfaits. Sa fortune ~
fon eXtrême économie le mettoient à l'abri. de pareines rtffotf.rces. Mais certes dans mille occafions, dans toutes les circonfiances poflibles, je n?ai ménagé ni ma bO'l1rfe ni mes
d'émarclles: pour complaire à mon Époufe, je m~étoi~ f.ait
une loi de complaire à tOUS les Gens, & fi après avoir été
d'abord intimement lié avec [on frere, je n~ai pu maintenir
cette union jufqu'à fa mort, c'ef\: qu'une petite & infupporrable vanité des goîICS extraordinaires & des liaifoRs ind'ignes
,
,
de lui m'avoient forcé de le veil' plus rarement.
On me fart \!ln -crime d'ans , le l'ilherte de ce' qHe -je ' n~avois
pu conferver l'affeél:ion de ée beau-.frere. On [uf'pofe qu'em~
brafé de l'ardeur de fa fuccefl10n & avide de la poffeffion
d'une terre dont le nom Battoit ma vanité, je n'avois cependant . pas fangé à avoir 'pour mon' Époufe quelque~ égard9
qui auraienr [uffi pour -ramener PafFeél:ion du-Défunf. Mais
fans vOilloir oucrager ici fa mémoire, je fu'is forcé d'e èire'
que ce j':l1ne-hommc qu'on ~ous peint d'un cal'a&ere. doux>
ff d'un cœur aimant, qui, fuivant le liBelle ' , ne' connut 1
haine que par' l'averfion que mes procédés lui inJpiruent,
fut ~ependant Jingrar & dénaturé envers fa mere, ibjufre.envers fa Cœur & toute fa famille, & qu'il n'aima que fes
Laquais & quelques per[onnes de la plus vile condition.
le. n.~ chen;he nullement à me iufrifier [ur l'averfion qu'il!
D,
�(l'f'~ '
l\voit pu concevoir contre moi i ni fur les prétendus' motifs
qu'on lui attribue. Mais fans prétendre à cette ju!tification
qui ne me tient pas plus à' cœur que la fucceffion du Défunt,
( 1)
,
qui lui avoit été tranfmis par fan pere & qui étoit le patrimoine de la famille? On lui eût pardonné de m'en avoir
prohibé l'admini!tration & la jouiffance, d'avoir pris enfin
de fa petite vaaité, encore plus que celui d~ mes préte.ndus
à cet égard toutes les précautions q~e fan ~effentime~t jufie
ou injufre pouvait. ,lui infp!r~r_ ; , ~ais /éd uire Ua. légi~i~e .ra
meré en~ore v~val1te & . une me~e r~fpe~a?le, ôt~r le pat,ri-
torts.
Le lieur de Peiffonel pere était mort inte!tat & n'avait laiffé
moine de fes peres ' à fa fœur ~ aux _ enfans de fa Cœur , ..
pour le donner à qui, à un Étrang~r, oui, ~ un Étranger- , .
~ pi:ouverai faci;lement par quelques ,obfervations que Je .tefia~
ment de; ce ie,une-homm~ fut youvrage de fon ingratitude &:
conf1:ituées en dor. J'aurois pu fans crainte dema~jdtr un
qu'on a dit être .parent du Défunt au qu~t,~iem e del?r~ ':.1 ~ui
fl', 'e{l: pas même . de la famille & qui n'en a que le . n,?m
& l'héritage: n'efi-ce pas la une preuve b 'ien frappante
fupplément & inquiéter l'héritier; je le laiffe cependant jouir
peu de fageffe, de l'inju!tice & des fentï'mens odieux qui
de tout tranquillement & tâche de bien vivre avec lui, tant
qu'il n'eH que!tion que de [acrifices d'intérêt. Mais il m'étoit
animaient le Défunt? Ah! fi en laiffant [a fucceffion à cet
impoffibl~
reffentiment , que [es manes [e r ~j ouiŒlOt; l'h éri tier a rempli
que ce garçon & une Époufe. La légitime devoi!, comme
on imagine bien, excéder de beaucoup les trente mille livres
de [upporter plus . long-te ms les petiteffes de [on
,ru'
.
É tranger, le lieur de Peiifonel a youlu le faire hériter de fan
.
E!t-c!! donc là un tort qui me rende i!)digne de la [ociété
tes intentions 'a u-delà de tout ~e qu'il pouvoit exiger.
,
'
Mais je m'arrête & ne veux point fonir des bornes de ma
de mon Époufe? Qu'importe que le fieur de Peiffond fils
défenfe. Je Cens d'autant plus le be[oin de me contenir, que
~it fait un tef1:amenc qui manife!te fan éloignement pour
c'e1l: ici la partie la plus délicate de ma caure. Voici en effet
le moment où mes ennemis ont jetté les premiers fonde-
caratl:ere, les écart~ de fan orgueil & la vileté de [es goûts.
.moi? .ELl::'ce contre moi ou ,:obtre lui que cet aél:e dépofe ?
Que dis-je. ? un te!tament qui fe reffent autant de l'injufiice ,
d.e l)iogratitude & de la [otte vanité, ne dépofe-t-il pas contre
~Qn.feul. auçelJr? & ferait-ce jamai? à mon Époufe qu'il appart1eQqrOlt de 's'en faire un titre pour me calomnier?
Je [upp<?fe en ~ffet que ce- jeune-homme ~ût eu à f~ plaindre
d,e ~oi, & que Paverlion qu'on lui attribue eilt eu un principe
leglpme. É tait-ce donc là une raifon pour priver fa Cœur &
ll':s enfans de fa fœur d' un b'len. qu "1
.pOInt
, acqUIS,
.
1 "n aVolt
mens de
la [ource
Je me
entre le
l'entrepri[e calomnieùfe, dirigée contre m~i. Voici
où ils. en ont pui[é les in!trumens & les matériaux·
garderai bien de rappeller rout ce qui a pu fe paffer
fieur Peiifonel héritier & moi. Nos démêlés font en
eux-mêmes étrangers à la caure; ils ne l'intéreffent du moins
que par le motif qui taifoic agir le lieur Peiffooel' & par celui
qui me donnait lieu de me plaindre. Je le demande avec
confianct. Quel homme, à ma place)
elU pu voir de fang froid
J
�•
( 16
r
.
.
daus fa maÎCon le fpoliateur de fa famille, l~uîul'pateurl dU,·
bien de fa femme & oe fes et.fans, & quand on di t de plus '
qùe cet ufurpateur ne paraît que pour indifpofer la femme
contre le mari,. pOUl' lui donner
dt: dangereufes
infpil'ations'
•
l,
& de perfide.s confcils? pourra-t-on 1 me bHi?1er d~avojr voul'u
f~rmer à un tel homme la porte' ~e ma mai Con ? Pourra-t-on.
me faire le moindre reproche d'avoir témoigné de la fenfibiq
lité & de l'humeur contre celUi qui, après avoir dépouillé
mes enfans d'un patiimoine que ta natùre leur dellinoit , veno~t
enco're jetter dans le fein de la famille le trouble & le
déCordre? Pourra-t-on enfin me faire un crime d'avoir cherch~
toUS les moyens, & employé même des décours pour ronipre
toutes liaifons entre ma femme & lui?
Qu'on ne s'y_tromp-e pas; Ies fairs vagues contenus dans
l'expédîent, qui femblen~ laiffer appe,rcevoir de ma parto
quelques emportemens, font abfofument étrangers à mon
Epoufè. Ils n'ont trait qu'à des dt: mêlés entre le fleur de
Peilfonel héritier & moi. On verra bientôt que c'eH: par une
confuuon affe&ée des objets, des circonHances & des
per[onnes, qu.e mes ennemis font parvenus à préfenter non,
~as certainement un corps de preuves, mais quelques fairs
, .
.
equlvoques qUI ont pu en impofer au premier ai"pe&.. Ces
lettres elles-mêmes dont on a fait tant de bruit & qui
d
' .
cepen am ne peuvent former ni tort, ni preuves' ces lettres
'6"ecnteS par rnoi, que dans la vue d'écarter
'
n ,ont et
le fieur
de Peiffonel de ma maifon., & d' efi raIre
C •
' 'à ma
un d
eVOIr
~emme que je connoilfois verr~eufe, en lui témoignan t de la
)!!J.~l.lfie çontre_ 'le I?réteAdu p.ut;;nt ; il efi:. - impoffibl e de [e
méprendr~
.."
- - 1"" "t".
~ 17)
méprendre fur le motif & l'objet de ces lettres: tout y laiffe
éclater l'amour & l'ellime que j'avais pour mon Epoufe, en
~lême-terns que l'envie d'éloigner d'elle un perfonnage défagréable & dangere-ux pour moi.
Cependant c'efr dans ces démêlés étrangers que mes
ennemis ont plliCé les moyens de m'attaquer en jllfiice &
de me calomnier. Eh, dans quel rcms ont-ils con~u, prépaJ'é
& exécuté leur projet de féparation ! Dans le moment cù ,
non pas plLls tendre époux (car je n'ai jamais celfé de l'être)
mais plus affidu auprès de ma femme, enriérement livré aux
plaifirs domelliques & aux occ upations de mon état, je
donnois à mon Epoufe les téme>i gnages les plus conHans de
mon attachement, de mon amour & de mon ellime; c'eH
~ans le _moment où , ma femme rétab lie d'une maladie
grave [urvenue à la fuite de fon dernie r accouchement, la
tranquilhté, l'u.nion & l'amitié paroilfo ient plus 'lue jamais
fi xée s dans notre ménage; c'eil: dans l'inllant même cù elle
ven oit de recevoir & de provoquer même les preuves les plus
extraordinaires de mon amour & de ma fidélité, qu'eUe
difparoÎt & va fe refugie: dans un Couvent.
Tout étoit préparé, fans doute, par f-es perfides infpirateurs , par mes ennemis. Une requête fllivi t de près ~ette
démarche. On y expofoit que, pour metCl"e [es -jours en
fÎll'eré, la Dame Barrhelemi avoit été forcée de cherchçf un
~fyle dans le Couvent de Sainte - Claire; on n'y .allégu oit
d'ailleurs aucun févice, aucun danger; tout -s'y réd.tlifoit .à
des mots. Cependant on demandoit qu'elle feroit fépa rée de
[on mari de corps & de biens, ju[qu'à ·c.e lJu~autr,ment il fût.
E
�~(
( 18 )
'9 )
dit & ordonné,. comme fi l'on eût craint de fixer un terme à
la fépar:ltion. Je ne m'arrête pas à la difcuŒon de la provifio n
f' lui offrant de [oufcrire un aél:e de féparation volontaire ;
., & que fi elle s'obfiinoit à demeurer chez lui, quelque
demandée dans cette requête. Je laiffe même
à l'écllrt les
" malheur .en ferait la fuite, intentions & menaces q\.1'il a
diverfes demandes en
lors contre
" renouvellées avec plus d'acharnement pendant)a
proviuon faites depuis
moi, quoique chacune d'elles ait été un fujet particulier de
vexation, & une preuve frappante d'injufiice. Ces intérêts
pécuniairès doivent [e confondre & [e perdre ici dans la
d~rniere
" gro1fdfe.
i
,
.
,. ' _
~ 0 Ou'il l'a toul' ours tenue dans un état habItuel d effrOi
"
J,
.. .
~
pour la fûreté' de fes jours, par la terreur qu'infpiroient
di[cuŒon des grands intérêts d'état & d'honneur que nous
" fes féroces menaces, lui difant, tant' avant que pendant fa
avons à traiter.
1\ eft viflble qu' en décidant mon Epoufe à une demande
" derniere groffe1fe qu'il étoit trop malheureux dè voir fan
" fort attach~ 1
fien pour ne pas chercher à en brifer lej;
" liens; qu'il falloit des viél:imes à [a fureur; qu'un jour
en féparation, mes ennemis crurent m'épouvanter par cette
démarche brufque &
hardie. Mais la réfifiance ferme &
tranquille que j'oppofai à leur Olttaque, la réclamation que
je fis de ma femme, déconcerterent leurs me[ures. Ce fu c
avec peine, & après des délais fans fin qu'on me communiqua les prétendues preuves, c'eft-à-dire, l'expédient & les
lettres. Bien éloigné d'affoiblir ce que la cabale ennemie
regarde comme le fondement de la demande en [éparation,
je vais rapporter & l'expédient & les lettres dans tout leur
contenu. On verra d'un [eul coup d'œil & l'on jugera facilement
fi ces preuves [one auŒ redoutables pour moi qu'on l'a annoncé
dans le libelle.
Commençons d'abord par l'expédient. La Dame Barthelemi y offre de prouver:
CI
1°. Que le fieur Barthelemi a Couvent manifefié à fan
" ~poufe dans les termes les plus injurieux & les plus
" outrageans pour fon honneur, tant pardevant Témoins,
)1
que . par fes Lettres, 1'1' "'teotl'on
d e ne pas vivre avec eIl e,
....
ail
" on' trouveroie desltêtes & des bras qu:il auroie féparés; &
" qu'enfin' il la t-ueroie, menaces atroces devenues fi allar" , mantes pour ' la famiHe même du fieur ' Barthelemi, que
" fa mérè avertit la Femme-de-chambre de la Dame Bar" ehe1eroi, de ne plus laiffer [a maîtrelfe feule avec fon
" mari pour prévenir un malheur; 'qu'un jour entr'autres elle
" tint cachée la Dame Barthelemi fa . belle - fille dans la
" chambre de la Dame Efpinalfy , pour [oufiraire fes jours
" à la fureur de fan Epoux.
., 30. Qu'après cette fuite d'outrages, craignant une dé" marche en féparation dans un tems où elle ne convenoit
" plus à fes intétêts, il crut devoir fe ménager des armes
" pour la repoulfer. Dans cette idee, vers la fin du mois de
" Juillet dernier, il entra dans la chambre de fa femme ;
r"
fur les deux heures après minuit, l'éveilla en furfaut, &
" l'ayant fait a!feoir fur fon lit en lui pt éfentant du papier
" & de l'encre, lui dit, du ton le plus effrayant : écril'e{
�~
io )
(
~I )
r,.
Mtrdimt ,ce que jt! 'tItJÎs .vous dic1el. Ella s'y étant r\!fûlh,
il prie un ton fi aUarmanc , qu'elle fut for~ée d'écrire
'Violences t!xcdfi'Vt!s ; ~ 0. mépris tonjlant ; diffamations
publiques; & c'eft pour con[olider ce dernier genre de
.!P,
16te;e_ cl1lslwnuranr~ pour elle, r & 'qu'il lui diaa.
preuves
f"
un:
ra fi'·1>
ulte u une
'J
n'.J.. e tl'1 eve"
eette , eux, l.
ioI- peu-pres
" dans le même eems, il voulut qu'on lui dreifâ~ -\ln lit a
.t' .pLiant dans la chambre de fa femme, à qui il réîtéra pendant
~,.. la nuÏt [es menaces Qrdinaires' , ' & t6arlt forci. de granQ
~; mitin r on trouva cn pifroki: fo~s fort -chevet • ..
( : .. , (. Que tamu aYant que ' pendant fa petfliere- gtoŒ!ffe,
• it . n'a cdfé de. \{ri reproC'hev que les eafilns -qu'elle âVait
•• ne lui apf>artenoient pas; que celui dont elle était- enceinte
~.
" . 4o.•
.()
X u,-a
,
" n'était pas de, fus œDvres~ Cet odieux , prop~s fûc. r~tér6
." .d~ns le mais .a' A0Îtt clex:ote-r,
~, q\loi
1!fl
préfe,ace de témpitls; fllt
la lDl\me ayant répondu à fOQ mari qlle~ ce . g{nr,e
ct
... cil' ()lU ~ <loes
• n'é'
tait pas nouveau pour eHe ,
qu'il dllroit
" depuis fon mariage, [on mari faifi de fureur ' , prenant
-ul'1è ohdife en l'élevant ' pour la-frapper, tuc retenu par le
.... eit:rs préfet1t à ce àifcours.
l.
10.
qu'on
a communiqué quelques lettres que j'avais
écrites à mon Époufe dans des tems différens. J'ai promis
de rapporter moi-même tout ce qui fait preUVe & moyens
contre moi & je tiendrai parole. En rempliifant ma promeife ,
j'y trouverai peut-être l'avantage de [aire conno-Ître les véritables difpoGtions de mon ame qu'on a cru.e11e.ment altérées,
en morcelant mes lettres & en les détachant des motifs & des
circonil:aoces qui les ont diaées. Il dl: curicux d'entendre
dire à l'Auteur du lib.elle qu'il ne veut point jalir fa plume par
la tranfcription dl: tou te la correjjJOndance , candis qi/il ~n r~?T
porte précifément tout .c.e qu'jl y a d~ reproi:'he1> & qu'il en
omet tout ce qui peut les tempérer,. &. laMÏts [liIf-tPP-t q~
fa plume trempée -dans le &el ne diftill.e fur .moi ijl3~ l'iniUt'
& la calomnie.
V-O~ci la premJÎer.e lettre que j'ai 6cr~t,e rehitive~M
démêlés domd!iques ; elLe étoit à la vé~it.é adre~e...à
11
nos
mQR
n, 6°. Que dans tomes les occafions ,11 l'a ditfamée par les
beau-pere. Mais on doit ohfeEVcr qià?-elle ne lui a jaR\ajs ét~
" imputations les plus outrageantes & les plus calomnieu(es
envoyée, que je la remis moi-même à mon Époufe , & qtJ'elle
t
pour caraétériCer", l'ar-là,
dMt il l'a h Uttll'l'é
1 e., mnu
Tel eil:, dl\l1s fon e ntt'·el:
le mépris qu'il en faifoir • mépris
c
'
en rac.e,
que da,ns ft:s lettres
n.
,
l' expl;.UJeqt
/..J '
~
- dont mon Epoufe
a
~mal1dé l'adfüi!li n. Il ferâ bientôt démontré qu'on a h~{ardé
ulle foule de fa-ils , défigure' & exagere
' , 1es autres
c · d6S
rait
applications & des aIl u{jlotis trtaoger:es
,
'
pour pliéfenter
un
Il
torp? de preuves gui en j'm pofât 'à la Jûllic'e . c't H delll
né
'
,
anrnÔlI1S, qu'on a 'l'oulu ' i:bJ"l'~e
l"'s tr01's moyens [uivans:
.. ' "
o
l •
a toujours refté en fon pouvoir, telleOilelilt j'y attaçl1<lis peu
d'intérêt.
" MonGeur & très..cher beau-pere, tin motif d'amir-ié po~r
" ma femme me fait .avojr re:œu.rs à vous
pOtlF
VOllS prier
" de vOilloir bien la recevoir chez vous , ennuyée di! v-ivu
&. qu~
à ce que j'ai l"honneur di
" avec moi pOllr des raiCons qui font à fa connoilfance
" j'ignore: elle eH très~décidée
al
vous écrire. Il dl: iûr que la te\ldrdfe d'un .p.e-re & d'jJ~
1';
�(
( 2.3 )
2/2, )
" famille dont les généreux foins jufqu'aujourd'hui lui font
A travers quelques expreffions inconfidbrées; on voit faci,
" efpérer un avenir plus heureux que celui qu'elle attend de
lement qu'un mari qui écrit une pareille lettre à une femme
" fon mari, l'incitent à cette réfolurion. Quant à moi Mr.,
qui vit dans fa mai[on , n'eil gueres dange'reux ni dans l'in-
" d'autres raifons que celles que je vous expofe au comm'en_
tention, ni par les effets, & que les reproches qu'il fait font
" cement de ma lettre, me décident à p'rêter les mains à
le pur ouvrage d'une ame honnête trop fenub!ement agitée • .
à fa
Voici la premiere lettre que j'écrivis de Paris. Elle '.dt
" demande que j'appuye par la priere que je vous en fais, &
datée du commencement de Mai 1783. Le voyage que je
" me croire avec un ûncere attachement & un profond
fis à la ' capitale. n'eut d'autre motif, je l'avoue, que de fuir
" refpea " .....
J'examinerai tantôt quelle preùve & quelle induaion il ell
ma maiCon que . je voyois fréquentée, ' malgré moi, p.ar ; un
perConnage qui. m'éfoic odieux. Un mari qui fuit ainfi , & qui
fe contente de faire quelques légers reproches, n'dl: cer-
" fes defirs. J'efpere que vous voudrez bién acqlliefcer
pe~mis de tirer d'uae pareille lettre. Je continue de rapporter
les. aunes . .
" . N'étant- point accbutumé, ~adame,
à écouter de fang
" froid tès1complimens que v.ous me fîtes à table, je prends
,; <fagement 'la réfolution de' m'éloigner de vous. Vous auriez
" mérité que j'euffe tout de fuite
réprimé votre audace.
". Rendez ~race, à je ne fais' quoi, û je ne l'ai pas fait. Mais
... c'ell:. peti' reculer pour mieux fauter. Je rie dois pas vous
" biffer ignor.er que vous avez élevé dans mon ame des fen" timens d'indignation qui ne finiront jamais. ' Je fais heureu.
'\
" fement apprécier les choCes, & vous jugez bien ce que
" vou,s ête~ & ce que vous valez; il ne vous ûed plus, d'aprè?
'" cette déclaration, de 'Vous obiliner à me Cuivre. Je vous
" engage beaucoup à reiter ici, & ne plus penfer à moi. Je
" pre'ndrai les arrange mens que l'on voudra, & je ne faurois
" trop payer cher ma tranquillité: jouiffez à votre tour de
;>,J ~otre
liberté. Je connois trop l'ufage que vous en ferez pour
•• n~ pas- vous faire l'non .compliment
't.
tainement, pa? un tyran féroce, un homme avide de fang.
" Enfin,! je fuis où vous defirq , Madame: deux c,e qt lieues
" nous réparent.
Cet efpace eft trop ,court 'encore pour
li:
votre ill'différence. Je dirai plus pour . votre haine,
çJ1e
" n'eft pas a1fe1. diilante pour mes projets. Félicite'{ - vous
i. '
~, bien de m'avoir rendu l'être du monde le plus malheureux;
" <;'en eft fait, je vous abandonne, vous & touS m....:s parens;
" je vais parter dans des pays barbares ma méla.nc.olie . & mon
" défèfPoir; vous n'avez pas voulu connoître en moi un
" homme qui vous adoroit & qui a4JdJit jan malheur par
" l'amour qu'il ne ceffira d'avoir pour vous: .des plaintes,
" des Coupçons dénaturés, des m éfiances, des brutalités,
" des préférences, des perfidies .... C'eft tout ce que j'ai re<;u
" en échange de mOIl amour extrême ".
" Re1ferrez les nœuds qui vous ont portée à ma perte.
t)
Faites triompher celui qui me chaire éternel.1em ent. d'aùprès
" de vous. Aimez-le autant que je le hais. Comme,m:ez ave~
�<2.4 )
( !2.) )
D' mi vot!'e carriere de bonheur, & moi je vals remplir cel1~
»
" de gémir, celle que vous m'avez prédit au moment même,
"
"
"
"
où j'aurois voulu mourir & renaître pour VOIlS. J'efpere
que vous ne rendrez pas le jort aujfi funejle aux petit~
malheureux qui reflent avec vous. Si VOliS leur arracher
l~ur pere, ayez au moins pour eux ' des entrailles de mere,
" Qu'une perfonne en vous rendant perfide , ne vous rende
" poine barbare & dénaturée. Voil~ la derniere plainte que
" je me permets
(Ji les Janglots & les lal'fTlcs qui l'es accam_
" pagnent pouvoient Je montrer, vous en verrier ma lcttr@
u remplie; je n'ex citerai plus votre pitié ;je vous demanderai
» flulement quelq,uefois des nouvelles de mes en/ans; vous
n m'en fèrez donner, s'il vous dérangeoit trop de m'en
donner vQus-même.
;~ Ad1eu, nous n.ous revenons
tIu moment aù la vérit~
A
" para ltra. •
;
1
S'il eft poffible de voir quelquefois dans cet'te lett're le
langage du -défefpoir, dl-ce un -défefpoïr qUf doive dFrayer
pour ma femme? Ecrivois-je comme un homme affliO'é
ou
1>
cemme un mari dange'reux ? Annonçois-je u,n profcnd mépris
, ..
Le 16 Mai 17 8 3,
Vos démarches & vos procédé~ m'ayant fait p~endre la
" réfolution de vous abandonner & de '(l'éloigner de vous,
" ainfi que ma premiere lettre v~us le mar_que, je viens vous
" faire part de mes intentions pour ce qui vo,us .rega.rde. Vous
" retirerez vous· même les penfions des magafins de toulon.
" M. Jean-Marie Brun recevra ma procuration à cetr effet.
" Le produit de l'augmentation qui provient des 1 épara,tjons
" que j'y ai.faites, m.ontant à quatre çent cinq.uante livre,s d.e
n rente, ferviront , pour , l'~nlretien de mes enfans, &. .comn;:e
" cette fomme n'dl pas fuffifante , mon pere vous c,o.~').~tera
<," encore deux .cent livres p.o ur y pouryoir , q.ui~ ferone priees
.~
fur
les
"uime
cent
livres.
qu'il
dl.
obligé
,
de
'
me
faire.
. "
~
"'i
J
.1.
(.
•
C
.1
n
J'aurai à moi, franc tf,eize cent livres p~ur-n:~J~~r:!l:ilnq"
" Cette fomme fera 'pl~s qu'~b?nda!1J.e '., P9~, 1. ~o Jrvo.ir à
" mes bcfoias. Le genre de vie que je me prop,o{e t e rpener
& qu.'il ne ~era plus~ er, .mpn l:'0,uvoir qe1 réformer). a,p,r,ès
,
'
.
l' un certaJl1 te.ms, m ~ fa.it efpéreJ. q~e Je P?U ~roIS encpr e
" avoir à vous remettre pour le foin de votre famille. ",
" A préfent, recevez (l'les adieux. Nous I,le nous reverrons
'! ,
& une haine terrible pour ene , ou bien n'y parlois~je pas
" jamais; ce mot me cotue; mais il dt aéce1faire. J'arca-
le langage, de l'amour le plus tendre & de l'e-Hime la mieux
{entle?' Je laiffe à m es Juges,
if
aux h ommes honnêtes &
impartiaux
à prou' 0lOcer entr'e ces deux extrêmes.
"
" V qus m'ave z rendu' la vie affre,~fe: ~e redoutois
VOici une fe conde lettre date'e
d e P ans"
.
.'
.
que J."ecmlS
à mon É poufe peu d '
, : elle préfente les
e Jours apres
mêmes réflexions &
'C Il
. m,aQI;.elLe
les mêmes fencimens que la
'1 , cherois mon cœur, fi je foupçon~JOis qu'il pPt l?er:np orte,r.
Cf, d,ernier
" coup. Le' Ciel . me punit. Je VOliS ai ,trop aimé~. !e :'Ol~S
" aime encore, cmelle. Voilà tout(l'lon malheur; mais dulfoisl'
je périr ... dulfoi s- je traîner ma vie languimnte de porte
" en porte pour la foutenir, je ferai conhant dans , ~a
Il réfohuion, Les miferes de la vie font moins affreufes pou~
~
�" moi que vos
( 16 )
perfidies. le vous ai facriJU mon reJ!èntiment.
" J'ai dévoré dans mort ame les traniports que la jaloufie
" donne. J'ai fouri à votre adorateur; j'ai combatru ma rage
" &
je l'ai lailfé vivre. Ce triomphe n'dl: point l'effet du
" fang froid. Il n'en circule ' point dans meS veines; mais
'" le mépris, le dedain & tout ce que la nature a de plus
" vil, efi la jufie valeur des auteurs de mon infortune. J'étois
" réfervé à ces coups du fort. Faffe-Ie Ciel que je les endure
" en me dévorant feul! J'aurai
fini ma carriere malheureù_
.
"fement. Mais dll moins n'aùrai-je rien à me reprocher.
•
Voit-on dans cette lettre les prétendues marques de haine
.
& ~e mépris? N'y voit-on pas -au contraire les témoignages
' les Il'fus certains de la t~ndrelfè & du refpeé1: que j'avais pour
1
,mC?Îl
Que les fou'pçons de jaloud~ q~e je Jlai!re éclater
dlb'sl' qJè-lq1i~s rriom'ens fUfIeflt
. ' vrais ou' feints dl-ce un
ÉpC;llfe:
,
- crime 'qu'on doit m'en 'faire? Que dis-je? n'dl-ce pas
un
,
-hommage que je rendais à la. vertU de ma femme
en té moi·
gnant :des foupçons ) toujours -accompagnés & d'amour &
d'efl:fm1e;
,
"
Vo'iéi enfin - la derniére lettre que je lui ai écrite de Paris.
Mes ennemis la rapportent avec- triomphe dans le libelle. Ils
' la ~eg:rde,nt .comme la , preuve :convaihcante de leur fyfl:êm~.
LoItl d en c~a\Qdre le moindre effet, j'y cr~is pouvoir puirer
la réfutàtion des horr_eurs qu'on
imputées. Mais il faut
m'a
pour ~ela la lire en entier & oe pas en détacher quelques
n
1ques expre ffiIons qui ifolées peuvent avoir un
._phrafes
"ou
. :t~e
[ens lU)Uneux.
,, - Je n'ai rien à me reprocher qui ne foit votre ouvrage;
( 17)
le 'vit objet dont vous me pa~lez ', l'a tonjoIlCS été
IJ
aImeS
" 'yeux , & fi j'ai feint de lui .en \'ou;oir, ~'étoit pour m~
" venger de l'indifférence que vous rl1etèie~ at/x ) c~6f~s <1 Ell
d1!-plaifoÛnc. V~u~ pr'éférrez "me-.-v~tr m~\)(' ~dntent ,&
?l lf 'f n \.- ? .u ..! dd" ' )
u aïr~t' ('~otre rrairt ; pourq1.rI:ii' ne vous aorox:-jc; raS're .... .
" Àu refle fi réellement j'avais' du goùt pour ~lIe , Ile n'ën
" ml!
•
-
•
C
•
1":5
' " au rois
agi comme j'ai ' f"jt , &, ée 9ue i ,e vouS ai a-{furé
,,. d~ns' un t'e'ifis à cduj'è t ;' ' efi ct l qùè Te'v6uilaffilrëraf rotite
ma vie. - Il n'étolt pas d~urèux que ie~ !objet devint'f6ùr
" ' moi le p-Ius méprifable. J'ai ï:ohjoffi~ .accord6 . ée ' tirre
r"
" à ceux qui fervent à la v'è ngeante. \
. (
l t Vous parlJz principes dans ( ~otre lettré; -vo'~S' v~us 'in
' l'dez " ofez~vousr• li oir le' front
'a-e vouS'
:'Cr()j~
honhêt'eac "'o
"
...
.
.,
r
,
" femme ? .. " qui; vous~,.. ' un monfké eft moins ·farouche à
" l'humanité que' vous ' à ~osj devoirs. Sûr quel titre fondé-z" vous votre vertu? efi"ce pour ~vofr voulu- mon malheur
" éternel? efi-ce pour vous iêttl:' aff'oc1é (l'i~Lérêts ~ d'in&i"
"
"
"
"
"
"
gues avec un- malhéu'reux ~ qul .né.! ~efpite qÛ'ln,térêt' &
bâlfeffe? Vous me reprochez d~1 vous avoir .voulu · mettre
hors de chez moi; on voit ' bien que le fon';! de votre
cœur démentvotre rnain; VOI1S- me cherchez des défa uts
pour paHier vos crimes; mais vous-même vous ne vous
abufez pas; vous favez qu'il n'en eft rien; v6us avez cunnu
le food de ' mon ame; voUs favez 'qu'on' peut la mettre à
" des épreuves ; fi vous en étier moins convaincue, vuus
" ne vous y jouetier pas. Quant A MES ENF ANS, ils
" le re./Jentiront de la faute de leur Mere. Je ne' mgngerai
" pas leur bien à coup fûr; i 1inimitié- que je m'attire- de
�,,-
( '2.9 )
" 2&) )
,i ~on pere 'd.ans cette circonO:anc e & donc ' vous êtee la
" caufe,. le leur affun; • .Ils n~ connoîtront ja(l1ais à qui ils
~, doiv~ nt le,iour. S'ils hé,ritent d.e vos fentimeqs, il~ s'en
. " loucie50~t fort .peu; aclieu, .vo}là la dern~ere let,tr,e ,qu.e je
" vous écris de Paris "Jv.ous
avez
dû en( rec~voir quatre avec,
,
1
\? celle-ci; elles te-prouvent touS mes f6ntimens ; je confirl1)e
i
'1
."
"
"
qans 'fette de~nierc; t~u~ ce qu'elles contiennent & tu n'~n
rccevr~' p}~s de rppG. fi . ce n.'pfi la . no!ryell~ de la fin.
de mes tourrnms J~ l'attends avec impatience pour ton
bonheur & pq\.U .le mien .. ~a fonté qui s'affoiblit to~s
les jours me donne. çet eJpe{r, c'eflle fou.,! qui puiJJè me
•
.
J
.
. " confoZz{< , ~e . ~~écris )pl~s à ~aris' j~ paIts pour i7 ne
"Jais q~ t feul ~ fap~ acg e!1.t 3 tant ~ieul(..., je viais avqir
, I! bien de~ i c~ag~ins ~ bien. pc:;s .. peipeG
i ' ~an~ .~ie~l(... i'y
_ ,~ . fucco.mber'li, t<!llt mieux ,: t~nt mieux ...
Il paU)Ît d'<jbord à, la premier~ leél:ur~ de cette lettre, j'~n
: clj>nvjeos r9uei'ai
[ouncoQ.né
la vertu,le
mon Epoufe. - M~is
)
oU" ~
11 1!"'
.J , .. J
qu'on,
apr• écie 1 bien 1les I }JfOl~DC.oDS
qljê
je
cQncois,.
& les
~
~ J, .1
• J
I[
;
H')
;J
......
J
rept;pc!JeJo que je lu~ ff!i.
.hi im p ~ te d'S1Y,eif vou-Iu';mon
malh.~ur &; de s'être a~o~iée ' d'inrér êrs & d'illtri~u e~ avec un
homm~ qui ne refpir,e qu'in.,térêt & bajjèilè,.
Métis y 1a-t-il en
•
•
cela un mot q.~i déiignç l'i l'lfidél\t~ C<1njugale , ,&, la violation
des ~(v o irs du m~{iage? Eh.! qu.a.nd même j':lUNis con~U
de.s [oupçQns , & que je lui e,n eutie fait part, par n1a tertre,
{eroir-.ce là une. diffamation; , un outrage? J'examinerai bientôt
'jufqu'üù peuvent :;'é-tendre ~ doivent !l'arr êter à cet égard;
les droits d'un mari. Mais, pu.ifqu ' il
qu(;' fri~n', à p(éfent,
!!
en
}k ~~t(e (krni~rt: l~~ti"e l ofl dqit
". c:n cÇln!id,
,.. érer lll,
" fin & jugerfi
.~. ~
{i l'an
y trouve, ainCi que dans les précédentes, des menaceS
féroces, le plan d'une calomnie concertée, d'un mépris froid
& co.nftant, l'annonce de traitemens cruels, la perfpeél:ive
éun danger quelconque pour mon Epoufe. J'en appelle même
lci à la premiere réflexion qui naît de la leéture de ces
lettres .& de l'expédient. Que fera-ce donc, lorfque j'aurai
écarté ceS lettres, éclairci certains faits de l'exp édient, démontré l'invraifemblance de plufieurs autres & l'infu ffi fance
de toUS , lorfqu'enfin, j'aurai donné les preuves les plus
fenübles de l'amour, de l'eftime & des égards que je n'ai
,eHe d'avoir pour mon Époufe ?
Tel était l'état des chofes, tels éroient les moyens &
les titres que l'on produifoit contre moi, lorfque ma caufe
fut plaidée en premiere infiance. Jamai~ la calomnie ne
s'exprima avec plus de hardieffe & plus de groffién!té ., que
par l'organe du défenfeur de mon Époufe. L'indignation
générale, le cri de toutes les ames honnêtes me fervirent
de vengeance: ce fut pour moi une bien grande fatisfaétion
de voir le Public entier s'iatéreffer au fuccès de ma défen(e
dans une caufe, où un fentiment naturel & une pr€vention
involontaire ~ devaient l'entraîner de préférence dans une
opinion & des vœux oppofés. Je devois m'attendre avec:.
raifon au rejet de l'expédient & de la de.mande de mon
Épou re. Cependant l'expédient fut admis ; on m'a affuré
qu'après une longue difcuffion & des opin ions long - tems
divifées, des circonfiances alarmantes, qu i m~é toient abfolu ment étrangeres, déciderent le Tribunal à ce Jugement.
~agiHrats humains l hommes fenfibles , devez - vous ê tr~
H
�( 30
)
( fi)
-
étonnés que fral'pé de ce premier coup; anéanti par Un
Jugement que mon ame & la conviél:ion de mon innocence démentoient, je cherchafle à me dérober, pour quelque tems
à des lieux qui me retraçoient fans cefTe mes malheurs & la
fatalité des chofes? Je voyageai, en effet, pendant quelques
mois, & cherchai à me di{haire fur les horreurs que je venois
d'éprouver. J'ignorois que dans ce tems, on fit procéder à
l'enquête ordonnée. J'ignorois encore mieux qu'il fallût ap-
,
peller de la Sentence quand on ne vouloit pas l'exécuter.
Mais tout ce que ie fais, c'etl que j'ai été bien éloigné
d'acquiefcer à un Jugement qui admettoit la preuve la plus
calomnieuf~. Retourné dans ma Patrie, j'2i appellé de cette
Sentence pardevant la Cour, où j'efpere que le fort de mavie & de ma réputation fera plus fcrupuléüfement difcuté.
Mais on a dit pour mon Épeufe , & on a répéré dans le libelle
que j'étois aujourd'hui non-recevable à appeller de la Sentene;
interlocutoire, en même-tems que j'étois mal fondé dans
mon appel.
Voilà donc une queO:ion de. plus qU'I'1 m
etraiter.
·
Ce
e raut
n'eO: pas affez pour moi que de prouver que je n'ai été ni
hO,m~e cruel, ni lâche calomniateur, il faut que je prouve,
en meme rems, que je ne fuis pas non-recevable dans mon
appe l, & que les voies de la J u0:'Ice me fcont encore ouvertes
~ou,r att~quer la, ~entence interlocutoire. Je fens que fi ma
J~O:JficatlOn eO: alf~e, la dircuffion des moyens & des objectIOns eG: alfez difficile pour
l'
"
'
,
à fi b ' ,
que qu un qUI n 1:0: pas accourum e
u t1hfer & à fophifl:iquer.
En parcourant les livres du droit, ' j'ai vu que l'appel d'Lln
Ju"ement étoit re~u pendant trente ans, tant qu'il n'étoit p~s
o . r é Or entre la Sentence intetlocutoire qui admet l~'
acqUlelc •
,
. 'ft
preuve & l'appel que j'ai relevé de cette Senten~e, Il s ,~
écoulé à peine deux mois: je ne fuis donc, pas non-recevable
fous ce premier point de vue.
Je conviens avec la loi, que l'appel n'eO: plus recevable,
quand les Parties ont formellement acquiefcé au Jugement
u'elles voudroient faire réformer. Mais où eo: donc l'ac,q
d
'
quiefcement formel que j'ai donné au Jugement on t Je me
plains? Cert.ainement, on ne peut m'en" oppofer aucun. Je
conviens également qu'il eO: divers acquiefcemens tacites qui
opèrent la même hn de non-recevoir, qu'un acquiefce,ment
formel; & c'dl: ici l'exception à laquelli: on a recours pour
me {uppofer non-recevable dans mon appel.
On a prétendu dans le libelle de mon Époufe que j'étais
non-recevable; 1°. parce que j'avois laiffé procéder à l'enquête
fans en appeller ; '1.°. parce que j'avois conteO:é une nouvelle
provifion demandée après la Sentence interlocutoire.
Je m'arrête d'abord à cette derniere exception, & je la
combats par une réponre bien fimple, c'dl: que je n'ai ni
conte fié réellement cette nouvelle provifion, ni pu la conteO:er, puifque j'étois abfent & que je n'avais lailfé aucun ordre
relatif à l'exécution ou à l'appel de la Sentence. Voilà donc la
premiere ex.ception détruite par le fait.
J'en viens à la feconde. Eh ! depuis quand le filence abfolu
d'une partie, pendaoç deux mois, devient-il UHe approb,uioD,
�...
r'~'
•
( 12.- },
( H )
ou du moins un empêchement à appeller d'une Sentence
,
tan4is q\\e ~a loi ~ la ' juriCpI'\,Jd.ençe ~c:;cQrdem ~ln délé\i de
•
trente ~(ls? Dans quel livre a..t-Qn trouvé, & quI:! hOlll ll1Q
raifqnnahle pourroi~ .. il croire
qUI;
ft
~aire & parlu fu[ent'
fyn.o.nymes, ?
Je fuis hien éloigné d~ fuivre le défenfeur de mon Épouredans ce déd ale de fubtilités, de paradol(~ s & de fophifm~s
qu'il a c;~éé pqur me fuppofer non-~·e cevable. J~ me bornerai
à.1 e combactre par l'objeél:ioo qu'il a vQulu prévenir, & qu'il
li. çraint avec raifon. Sans examiner fi ME;. ]snety mérite plus
ou moins de confiance que Faher, Ferriere & le Récréateuf
dt: Bül10n qui, en fa,ic de (~gle judiciaire, en fave-nt peut-être
moins qu« le moindre Pratiçien du Royaume, je crois du
mains que l'Arrêt rapporté pa.r Me. Jane~y, avec fes vériràbles.
mQ(~fs & circonll:ançes} dQit; aV-Q~r bien plus de poids que les
autorités écrangeres & les raifonnemens {ophiftiqlles qtl'Ol'\
~OIJS a oppofés. Or , l'Arrêt en qu~Hioll jugea bien topiquement qu'après la lignification. de l'enquf te on pou\l'o~r encoreappeller du Jugement qui l'ordonnoit, pourvu ql,1e Fappe1tant.
n'eût fait aucun aélie approbaüf, & que le Jugement eût été
exéctlté vis~à-vis de lui d'~tl.e man iere purement paflive.
Je veux trancher d'a~l.leurs toutt: difficulté. Loin d.:: récllI«
J'enquête
.,
.
l J' e l' ~ dopte, illatS
ce ft pour établi~ que ta preuve ~
t;lle qu'elle a éf~ fel)1phe pa r J'1!nq uête ,dl: inconclllaOle &
c,onféquemm~or inadmiffible. o( , fi je lai{fe fubfifter dans
l'état
des chofes &, malg re, l' appe 11' enquete
• pnre
. par le rremlep
.
~ .
~uo.e, quel mOCl f, quel intérêt légitime peut avoi r mon
~poufe po~r me cQl\cdtet la, façll.lté d'appelle.r d.u. Jugemenc
tt\terloçutoue ~
.
Ç'eft
C'd1: en dire alfez fur une eXc'iption qui me tient peu à
'cœur & qui dl: étrangere à ma juil:ification. Il eil: rems que
j'érabli{fe enfin que je fuis fondé dans mon appel, & que
les moyens de féparation invoqués par mon Époufe font
infuffi(ans ou .faux, abfurd és ou cal0!:1nieux.
, J~ ne'-' me natte pas ' de préfenter 'à mes J~ges & , au public
des vues auŒ neuves & un fyil: ême auŒ relevé qu'on l'a
fait dans le li'b ell~ de mon É;poufe. Mes idées & Ipes obfer~vâtio\ls re /ol{é i fimple'~ Je les p.uiferai, fi non dan ; la nature
des :chofos , du ~~oins dans la nature d~s hommes, dans nos
mœurs & dans que lques prîncipes qui dirige'nt aujourd'hui
les Tribu'naux & les JurifconfLlltes.
1
l'
~
t1
:J
r
~
Jl
1 _.
.1
...
•
l
. Le Mariacre
confidéré
[oit com01e
Sacrement,
fait comme
b.
1
"
.
contrat civil forme dans nos ma;urs un engagement
indif, t
fol uble. Toute
féparatio.n entre mari & femme ell:.l doncL.con,~
~
;J
_
.....
_
....
.;.
r
traire aux Loix divIn€s & J1ûmaines,
'\
Cepe.ndant, il faut convenir que dans une i.\1il:itûtion qui
' ~onrrarie la nat~re à quelques tgards, il a éc'é , abfolur,nent
.J
J
... •
.,
néce{fJire d'apporter des. tempéramens. Les hommes font
trop imparfaits, trop foible~, trop i,nconflans p~ur q.ue l<;s
, Loix qui !es gOt)vernent, pui'ffent r~~er i~~~xibl~s .& fa~s
el\cep[[Qn.
!.Je
De tOUt tems le torrent des' mœurs entraîna le.s L.oix; il
fàut néce{fairemenr qu'clles fuivent l'homme de loin, qu.' elles
J e " prêten c un peu à fes égards. Or quelle Loi dQÎ.t plus fe
,{elâcher de la rigueur & (ouffrir les tempéramens que celle
~-
.
,
_..
"
-
-
!1
1
�( H )
'( 34 )
qui impde un joug éternel à deux êtres auffi variables &
,
auffi imparfaits que l'homme & la femme, à deux êtres
dont l'un a pour lui la force & l'autorité & dont l'autre
•etl: préfume du moins être foible & facile à opprimer. CO!l]~
ment pourroit-on ne pas recourir l'Epollfe malheureufe ~- qui
l
' au lieu de trouver un ami & un protetteur dans fon Epoux
n'y rencontre qu'un tyran odieux dont les emportern,ens
menacent ' fa vie à chaqut; innant ,ou qui par une cruauté
lente & ménagée lùi fait de la vIe un long fupplic~ mille fQis
plu,s affreux 'que la mort? Tant que.1'homme pourra fe tromper
,
& fe corrompre, tant que des intérêts étrangers au bonheur
de l'individu pourront déterminer les unions, tant que l'autorité
defpotique des parens pourra traverfer le penchant, enchaîner
la laide~r à la beauté, la décrépitl!de à ~a jeuneflè , le ,vice
"]t 1_l.. ve'ku '& lier' enfemble, des hume~rs, des caraélères
& des goûts -infociables, il fera juGe & indifpenfable d'accueillir -la plainte de la paitîe "opprImée & d'en1.ever la victime
a
à [on oppreifeur.
Mais, fans conrulter même la religion combien de ména"
'
'geme'ns &~ de précaurions n'exige pas l'application d'un remede
~Iont le but à la vérité en ~e prévenir de plus grands mal· ,
11e~rs"
mais qui, même lorfq,u'il eG June, entraîne toujours
~es maux · graves & certains. D'un côté une rigueur trop
mflexible infulteroit l'humanité ~ écraferoit par un faux prin.
cipe de jufiice la foibleffe opprimée changeroit les douleurs
en défefip Olr
, & !e
rren
d fOlt
" complice des crimes en les nécef.
1
Deant.
De l'amre co' t'e, trop <P'lOuU
..:1- l '
' &
,.
gence pour le capnce
Imconfidnce des l
cemm
tr:
1"
' 1 a ~hglOn
"
' ' à
' e s Orren!erolt
, nUlrolt
1
J
r
1
j
1'ordre de la fociéré, encourageroit le vice & précipiteroit
la corruption des mœurs.
,
Le remede de- la féparation eft néceIraire dans ~ep~,~ns
• c'eft , une chofe convenue. -Mais 'quels font ces cas?
l ~
cas ,
,Quelles font , le.s caufes .qui doiv~nt l'autori~er .? ,c;'ça ,ffr
quoi les .Philofophes, les Canonifi~s, les J urif.confultes &
les Tribunaux ont fouvent varié & varient e~core ~ _comrpe
entraînés par c,eue innab~l,ité de principes, _de " préjug~ ,
de goûtS & de mœurs qui cara.étériCe la légeretê nat~QnaJe.
,
'
Pendant long-tems on a raifonné [ur notre Mar,iage CQlllrpe
fur celui des Romains; 'on a traité la féparation" cette efpèce
d'e divorce -, adoptée dans n05 mœuJ:s, comme
fi qn
~_I
J!Jl tfau
.. J i·Ltoit
.
,
>
.J
le divorce _p~ op~e~el1t ~jt. JQuelqu~>s ~l~ilofo:ph(es .on: , ~ême
deGré cette,. défunion eotiere du Ma.riage, comme le~mPl-en
LI ~,'') 1 {
~
J
le plus propre au bonheur des hommes & au ,b ien r?~ la
fociété. Ont-ils raifon? ont-ils tort? Sans vou,loir proqoDcer
à cet égard, nouS l~s renvoyons à :ce, qui efl ,établi ~ aux
Loix, fous lefquelles nouS vivons. il e~ cepe~danç vra! que
les Loix Romaines fur le divorce adoptées _en ,grande. pa~-tie
par nos Loix canoniqués, ont fervi de regle dans noS mœurs
.& de principe à notre Jurifprudence dans la matiere . ~-es
féparations " quoiqu'il y ait entre ces deux eff.ets un~ diffé~e~ce
<-
l
'
..)l"r r.
bien effentielle.
Dans le droit ,Romain, le divorce était une ,défunÎon
réelle, entiere & parfaite qui remettoit les deux parties dans
leur premier état, leur rendoit toute l'étendue de leul liberté
& en faifoit deux individus abfolument étrangers l'un pour
l'autre. Dans le Chrifiianifmc & d'après les Loix canonique~
~
�( 36 )
à (es préceptes, le divorce n'en qu'u.e défu.
{ubordonnées
!lion fJtlive, imparfaite, qui relâche la chaîne (ans la brifer,
De cetFe dif(éce!)ce, il s'c;nfuit que rçCpèce de ?Î.vorce
~aoptée pà~mi nous, ~enferme une forte de c o otradic1ion
, eo fép~ra!lt de fût
1
ce qui refle pourtant réellement uni &
,
, înféparable, & que. ce n'eH là qu'un remede viqle nt i.ntroâ~i~
( 37 )
" Ces caufes du 'd ivorce éraient bornées à trois différente~
fi rtes d'excès
1:
comme par exemple, fi le mari avait profane
couche nu.p'tiale fous les yeux de {on Époufe &
in~roduit le
libertinage dans {a maifon, s'il avoit attenté à {es Jo~rs p ~r
le poifoa ou le fel', &. fi par fes {évices & Ces mauvais rraltemens
il avait mis la vie de fa femme en danger; enfin
- deù'x. m~JUx, celui qui dl: le Il)oinqre. Mais telI~ eJl: 1\1 c\ell:inée
s'il l'av~it diffamée publiquement & dans les Tribunaux de
la J uUice, en formant contre elle une accufatiun d'adultere
• ~d",Lojx & des t~lé~anc~s rénpues riéceIfdires par l,a déera.
don.~
p~r néceflité & par l'obligation naturelle de choifir en~re
vàtÎôn Ides mœurs, que chaque remeae particulier accroît le
- -m~i' public, &
il n'avait pu remplir les preuves.
ill faut avoue!' que ces caufes ,éroient bien dignes d'alla~mer
que \a Loi ~our avoir une fois fléchi çll: bientôt
la fociété & d'intéreffer la Loi au feconrs de la femme
forcée de , fléchir encore davanrage & de fe corrompre en
, q~êl~lÎ~ forre" avec J'homn\e~ J,, ;: , - .1
~. 1 • "
qui {e plaignoit de pareils ourrages. Auffi n{)s Loix cano-
~ " ..' Lies
'FI J R omaln~
' ' l' eprouv~re!lr
,
à l'.occallO(1
~ . d',u d
' !vorce.,"Ap[è~
'
'dés ·ftecl~s ' ~coulés fans ,clu'u,n felul mal'i ' ~ùt
,J
-
url,
'du privilege
niques qui , fixerent long-rems la Jurifprudence en matiere de
féparation adopterent-elles ces trois caufes fixées par la Lor
Se. au Code de Répudié:s & par les NoveHes
2.2.
& 111',
qu Il avoit feul de répudier (a femme, il s'en trouva enfi.n
pendant long-tems même la Jurifprud.ence s'eU rigoureufemolt
un qui ora II( premier ~a{arder ce 'dangereux exemple. Bientôt
affujettie à une de ces trois caufes & pre[que tQus les Arrêts
' l~s l~itateursJ {è multipliereJl)t & J'abus fe p_~o'page~ au' point
~,què pour établir une balance; , on fut~ obligé d'accQrd~r a~x
qu'on trOLlve dans Les Recueils de nos coinpilateurs, on r_
~ 'f~mm-es"la liberré réci,proq~e de quitte,r leurs maris. Au lieu.
C'eU eR effet la caufe qui ti\lnt de plus pr ès à l'homme,
-'d'arrêter le torrent, c'étoit lui ouvrir deux paffages .. Les
qui le ferre davantage, fi je puis me Cervir de ce terme,
~ ~mnies abutèrent à l~ur tour de leur nouveau droit ;, bien~ôt
qui agit {ur les C~ns d'une ' maniere plus imm édiate & qui
~ çb'mme ' l'a obfervé un grand homme, eHes cOmpt.erent I~s
aonées p~r le nombre de s maris qu'elles avaient eus, plutôt
affcél:ant généralement
>
que par celui de s Confulats. La dillp lution fit des progrès
Ct
fap!des qu'il fallut que les Empereurs TheodoCe & Vatentioien.
fh~. {fent
t
i'. liS'
& rpécifiallènt dans une Loi'
'
,
les {eules caufes &;.
.
cas ~artl~uli~rs où L~ d.il'o~c~ ~ourrqit être a,uto!iCé.
ç~~
ils eu
pOuf moti fs les féviçes & les, m aùva is traite l'l.lcns ?
toUS
les hommes , _ doit être .plus g.é né- .
ralement accueillie •.
Je conviens cependant que liotre derniere juri{prudence plus
conforme à n05 mœurs, & mieux proportionnée à l'é tat &
~ l'éducation d es perfo nnes , n'a pas toujours exigé un d anger '
immiQent PQ~~ !~ Vle. M~is, enfin, les Arrêts quj ont le;:
K
�G -"s J.
plus favorifé l'es d"l!mandes en (éplll"ation ,uiflnt Ï!l;s' èlGÏg~ du
mains que les févices fufTent graves , {auvent' réitérés, &
capables, en un mot, de rendre la vie infupportable ? Une
circonŒance efTentiel!e qlle les Tribunaux ont ,toujours exigée.,
& fur . laquelle ils ne [e font jamais relâchés, c'eft que les
féviceS fuirent récens, & que la plainte eCit été portée imrné.
dia~ement après les [évices; autrement ils {oppofent avèc
raifon la réconciliatian & le.pardon de l'outrage.
La délicatefTe , ou phrtôt Je: relâchemenç de nos mœurSlj
l'intéllêt natme.\\e.rnent vif que Uon dDit prendre à un [m
qui patOît foible, quoiqu'au fonds, il [oit bien plus notre
. tyran que notre efclave , la connoiffance particuJiere des
parties, diverfes conûdérations érrangereS' à la ioi ,"pot quel.
quefois introduit des exceptions à la regle dont n,OU5 devons
être étonnés. Telle dl: l'hypotlleCè.· de quelques Arrêts épars
dans une colle8:ion immen{e de préjugés de cette nature. Mais
qu'on y prenne garde. Ce ne font pas là des principes. Quand
on vient nous dire , par exemple, que de fimlJles 'menaces
non fuivies d'exécuticrn pendant neuf ans, des pr;pos en l'air j
~uelques expreffions peu mefurées, des foupçons éclatans de
Jalou~e , [uffiCent pour autorifer la féparation, on avance
CertaIDement le plus abf.orde des parodoxes ; on parle ouver.
tement contre les loix', on out~age
.
1es T'
flb~lllaux . on choque
tous les principes de re rIgLOn
' , d e morale & d'ordre
'
public.
Eh ,fi un pareil paradoxe p.ouvoit être adopté l'idée feule
du mariag e auraIt
. d e quoi faire trembler! Cette
' [aciété la
dans f,
"
' 1'plus refpe8:able
,
on prmclpe, la plus douce dans (es
lens ou qUI , du 1110'IDS, d evroit l'être, la plus intéreffanrej
<-19)
enfin; darub fus_' efl!ets , D~;. Fnifcmlle.tojt: plus qu~uJle affteufe
• quifition où ks m(j)uvemens, les geftes, l~s démarche~ ;
w
,
,
é~
&. les oloindres _CenCations J'euve~t ~tre à tout moment . p S
. avec malignité , interprêtés avec ~igueur, dénoocé~ avec&:m.é.
c: anceté. La confiance, ce cbéLIme dIL cœur ~umain ., S'lut
bien tôt bannie. de l'I!lrllon à qui ,~Ile eft la prus n6eeffaire • ..Au
, lieJ de trouver un véritable ami. dans le fein d·uque!- il puifTe
. épancher [on cœur, ver[er fes [oupçon- & [es c.r.àlnte~L,
_ exhaler, en un mot, les imp.reŒ:ons agréahl-es ou do.u}Qt:lreu,fes
de fan ame, l'homme ne trouv_eroit pl.us dans fa, femme: que
'le pIus prévélilu de tOUS les cém-oins, & le plus févere de touS
les Juges. Afl'ez de [aucis , 'afTez de peines , affez d'inconvé,niens éloignent_l'homme du mariage:; faudra-t-il eocore l' en
éloigner par la défian.ce & la crainte les mieux fandées ?
J'in,terrage ici volontiers touS les Époux? Quel ea celui
qui, dan!; le cours d'une longue cohabitation, n'ait eu le droit
de fair~ des plaintes à [a femme, de lui témoigner quelques
foupçons, de [e permettre même quelques vivacités. Falloit-il
pour cela qu'il fût trainé aux pieds de la J uftice, préfenté
, comme un jaloux dangereux, dénoncé comme un furieux qui
médite un affaffinat? falloit - il pour cela qu'il fôt deshonoré
par une réparation juridique? ou je me trompe fort, ou ce
n'eH: point là le vœu· des Loix.& des Tribunaux.
-En inUiruant-le mariage, ou plutôt en établi;fTant des prin..:
cipes relatif.g à cette infl:itution, les Legiflateurs n'ont pas
H>u-jours con[ult.é l'homme de la nature porté par le feul
irtfl:in8: à la- liberté & à l'i.ndépendance. Mais, du moins,
-ont-ils eu foin cl'accommoder leurs principes, autant qu'il
,
�(- ,41')
étoÏt poffible, aux diverfes qualités des deux fexes. L'hOlbtlle
plus franc, parce qu'il a moins de befoin de tromper, phls
rmporré, parce qu'il d\: plus fort, avoit intér êt de trouver
un correél:if dans la di1fimulation des femmes qui leur faie
c;acher à nos yeux, une grande partie de leurs défauts & dans
leur douceur qui leur fa.it [upporter les nôtres.
Je ne crains pas de le dire: ce n'ea prefque jamais que par
1~ faute des femmes que la méfintelligence & la difcorde [e
glifTent dans le mariage. Qu'une femme foit douce, complai_
faRte & attentive env.ers fon mari, qu'elle potfede ,les qualités
de fon [exe , & rempli!fe les devoirs de fon état, elle adoucira.
tot au tard l'homme le plus emporté ou le plus farouche ,
elle ~ ferà efrimer. & reffieél:er lors même qu'elle ne pourra
pas afpirer à un fentiment plus tendre,
Mais quelle que foit la ,c<fufe d)une méfinte1ligence momen~aDée , dl-ce donc là une raifon pOLlf féparer deux Époux,
& pour. déshonorer fur-tout le mari, quand d'ailleurs, cwe
méGntelligence n'entraîne ni féviees , ni mauvais traÎ.temens ,
ni dang~r? Que les loix rendent juaice à cous les hommes
indiainél:ement, qu'elles accordent proteél:ion aux femmes
qu'elles les accompagnent par leur· vigilance & leurs folli:
citud<;s j~Jques dans les foyers dome.{liques., c:efi un avantage
que la fOlbleue de leur fexe femble folliciter pour elles, Mais
qlJe tes loi" aC,cueillent leur réclamation. & fatisfa.lfent leur
Jènfibiliré jufqu'au point où la (Dame Barr'helemi l'exige,.. c'dl
de proc.he en proche , & . d' un pas a\ l' autr~ tran[mettre aux
femmes 1 d . .
,
e rOlt ngoureulf de quitter- leurs maris & de s'en
{efa.rer. à. l~ur. fa.ntaifIe.• Car d\! févice. à. la menace , de .. Ia,
menaC.9.>
menace au mépris; du mépris à la plainte ~ de la plainte au
'défaut d'égards, bientôt toutes les gradations feroient franchies, toutes les nuances [eroient confondues. Il y. auroit
u>u;ours lieu à la féparation toutes les fois qu'une femme
fer~it mécontente de fon mari ., . & trouverqit à p.ropos ge Ce
plaindre.,
'
J'admets volontiers la d~Uinél:ion des per[onnes , ,& la différence des qualités, en fait de féparations. Mais on a fin- '
guliérement abufé de cette confidération dans le libelle de
mon Époufè. Jé conviens qu'il 'ne fàut- pas léS mêmes outrages
peur une femme de qualité que pour une perfonne du peuple.
Je fais qu'il eÜ u.ne certaine c1atfe d'êtres. qu?il faut prefque
éeorcher pour les rendre fenGbles. Je conviens que plus de ·
délicateife & de fenfib-lité préfumé, dans' une femme bien
née, doit ol:lvrir plus facilement" fon ame , à la. honte , -à
la ,douleur & au déferpoir, Ce qui, par conféquent ·, ne feroie '
pas la . plus légere caure de féparation pour des ' gens du
peuple, peut en fournir une caufe décifive. à des citoyens .
d'une najffance plus relevée. Les uns nés dans Ia.baffeife,
.
,
ont contraél:é des mœ\jrs .& un genr'e .de vie ' conformes li letl't'
état ; accoutumés dès l'enfance à un langage> groffier, le-s ·
.propos les plus outrageans les trouvenc prefque infenfibles. ,; ·
les emporte mens d'un mari brutal , .. ne laiR'ec'lt. a.ucunes tra~e&
\ de reffenrimens dans 1e cœur d'une femme, .& ' le 1 calme. lie .
pJus profond fLlccede toujours . à ceS' orages .paifagers; les ;
autres, au .çontraire, élevés · avec tendreffi: & douceur au fein ,
de l'opulençe , font. délicats . lX fenUbles · à l'excès . . Pouc. e.u.!', :
~len a' eU janocene.; u!) gçfre , . un. re.gard [one des olltr.ag~s ': :
L, .
�(J 1\-1. )
'( 43 )
fai~e & (ur le champ rlmiél:ée;
opérât ~n- nle-y en de féparat·i on juridique: en vérité, il n'e~
~l mtlt 'ï'hllp.riR,e . & feJ .perpI!ro'é
-&t'I~- l)elÎh
,
'"
-penfées. M~is, enfin ~ 'faut - il tO\1jours des féviC1!s-, des
Jinrple prbpoûtion' legérement
-outrages, des in[ultes, des rraitemens , tels qUe par lenr
rien de plus aDfurde & de plus injurieux même pour, les 100x
I.4blltJM\ft 'UA·
\
nat~re ou leur puMiciré, ils rendent à une fe111me la fociété
de- fon mari juGement odieufe, la vie infuportable, & la
réduifent, enfin, 1l ne pouvoir plus vivre avec lui fa.ns danger
1
fans douleur, ou fans ignominie.
qu'tm pareil moyen.
_
, Pour lui donner plus de force, on a àjouté que des menaces
- 'terribles acc9mpagnoient ces propofitions, qu'elles avoient
été même faites avec plus d'acharnement que jamai,s pepdant
la derniere groffeffe. Ah, c'eft ici que le ridicule, l'in.vrai-
Ces principes ainu. poCés ,. j' entre dans le détail des preuves
qu'on a offertes & de celles qu'on a remplies par l'enquête
J'examin~ [Qut
•
femblable & le _faux de la plainte fe manifefient dans tout
. leur jour. Quoi donc, j'aur:li fait & continué des menaces
terribles pout obliger ma femme à foufcrire un aae de fépa-
à la fois fi les premieres font aGmiffible s
'r ation volontaire, & elle qui aujourd'hui veut fe faire féparer
i)()mme pertinentes & concluantes en droit, & fi les feconde s
làtisfont, du moins, à l'offre de mon Époufe , & au vœu
'fans fujet, fans droit, & contre toute jufiice aura refufé
alors de l'obtenir, & fe fera expofée volontairement par [on
1flême de la Sentence interlocutoire que j'attaque.
,r efus à des dangers terribles, même pendant fa groffeffe. Il
On a fuppofé en premier lieu que j'avais témoigné fouvent
faut avouer que ceS faitS font bien difficiles à croire, quand
l'intention de ne plus vivre avec ma femme. On a rapporté
,on ne trouve fur-tout n,i violences, ni févices, ni coups qui
en preuve de cerce intention, la . premiere lettre que j'ai
rapportée. Mais j'ai déjà dit que cette lettre n'a jamais été
.en aient été la fuite.
Le fecond chef de l'expédient contient-il quelque 'chofe de
.envoyée, qu'elle fût retra&ée auŒ - tôt qu'écrire. Eh, quand
plus grave & de plus v.raifemblable? Ce font encore des rue-:-
-elle eut été envoyéè & re~ue, une pareille propofition faite
naces effrayantes, à la vérité, par l'épithete dont on les a
dans un moment de vivacité par un jeune homme de vingt.
accompagnées. On dit que j'ai toujours tenu ma femme dans
-ans qui la Mfavoue tout.de fuite, peut-elle ttre regardée, ou
. un état habituel d'effroi pour la fûreté de fes jours par la
.comme uD ' outrage , ou comme u·ne intention décidée qui deie
-terreur qu'infpiroient mes féroces menaces. A ce mot,
équivaloir, à la réalité? Eh quoi la féparation confentie par
. m'arrête. Il me femble voir un homme farouche pouffé au
les deux Epoux dans un a&e libre & volontaire
dernièr degré de ft;reur, qui va exercer quelque a&e de cruauté,
_y~x ~es loi~
eil nulle auX
qui , ne veulent pas que les ma:iés puiffent fe
!cpudler, amli au gré de leur caprice, & l'on vou droit qu'une
je
fur la petfonne qu'il a menacée d'un mafliere auffi féroce.
Raffurons-nous. Mon Époufe a toujours vécu dans la fécuricé-;
�, ( 4;1- )
f 41 ) ,
jamais elle n'a été attaquée par fan mari; jamais elle n'a r
ni mauvais traitemens , ni outrages; que dis-je: loin de v'~
lYre
dans un état habituel d'effroi, ellt: a porté pendant fi,· f, .
" OIS
les marques d'une union bien tranquille, & bien douq , en
II
a re~u les preuves les plus multipliées de ma tenoreffe; elle
était mêwe bien éloignée d~ I~s rejetter, ces preuves, pui[.
qu'elle témoignait quelquefois de la jaloufie . fur ce . qu'elle
Cl aigooÎt que d'autres ne les partageaffenr avec elle.
]p[ques-Ià, comme on voit, il n'y a , rien de bien dan.
gereux j il n'y a. aucune. marque de !ùocùé de ma pan. Mais
ces. menaces, nous dit-on, ont été expliq~es'" on m'J'rn pUte
en effet d'a'loir dit tapt avant que pendant la derni.ere grof•.
fdfe de ma . femme "que j'étais trop malheureux de vo.ir
't mon [art attaché au uen, pour ne paJi <;hercher à en
" b,rifer les liens, qu'il fallait des viétimes à ma fureur'
,
, .
" qu un J~ur on trouverait . des têtes &, des bra~ que j'au rois
" [éparés, & qu'enfin je la tueroi~. ,
.
R~{Lrez-vou~ encore hommes fenuble,s, qu:une, pareille
roenac;e pourrait allarmer. Je . [llis bien . éloigné de l'avoir
réalIfée. JUfClU'à
préfe
t'
,. c·
.'
']
, J I Je fl.al laIt aucune vlél:ime. Je s'ai
féNré aucul)e tête , n'l, aucun b ras. T o.us le.s objets
.
de ma
prétendue fureur refpirent. Mais -comment mon Époufe ofef-elle prétendre à nou f'
.
S. aIre adopte!: c/!s .abfurdes invrairC ~l1blances ? comment
Il
f' ,
d '
.
. veut-e . e nous aIre c(Cire que cette
eqllere m,enace eft vér'rabl &
'
r
~
\
e
quoel)/! , a fait. quelque im- ·
pre IIiIOn ~ur fan aijle) Ju
.
TI.
'
. ge,ons en par fan propre
cXRédient,
ouces 4.,es menaces prét d
r
1 1.
'
~n lles IOnt an~iennes &: l'époq~ e la :
l'. Ils r'iç~!\te .eU ce.l1e d [; d .
,
- e.. a .• eJ.,11l.ere gr~:dfef(e. , J;:ù qUQI li
Dam~.;
.-
pante Bartbc:h:mi ~ en~~d
çeJ m«1na~e~; en ~ crain~ , s
-fers ï a v.u l'apPllreil qui deVQ-i~ le.s fu;vre, & elle qui ~
:Q!rré. m~p1ai[on 'Iong~telt?s aprè~ aIlI> ,fyj.e~, du moins r~cçl,lr
d'1lp-rès, e~lermême t Cilqs ra-inte, fans ~apger, a bravé IIlors
~~[\; ,Pl} ; te~s , de 1t~o~effe_ ~ .pendanr dçs 4n[)ée~ cntieres
la fùocité de :ces menaces, le danger d'être tu ée, la perfpc;'~ive Cangl'\nte de. têt~s & de bras féP\lrés.
.ç~ rr'reH .p~s la tQut, ; par quel prodige f~ faif9iç-i l qlJ e
~'ayant ' jamais ~fç. p,Ortl;r la main f'llt ma f~rp01e, l'ayan):
;oujoU(s refpe&ée , m~me dans les mome~~ où r)Ous ~tioP$
filns témoin & où il m'eût été facile d'affÇ>uvi~ ml! prétendue
férpc~té, j'a-vqis cep~ndant l~ tnal-é!~fefJe ~'at.t~n.dre l~~
momens où il. y avoi~ d~s rém9ip$ pOYf P1~ bprner encpre:
à faire des menaces? çornmel1t fe ~ f~~fQit-il 4Ir-Jollt qu'un
homme dont .les menace? feule? f~ifQient trembler, .~ui ne
parlait q.ue pe vi&imes ~ de f110ns .. 9ui t~lljours éroit fi
fil~ieux, qui [Oujo~:rs çetlpit fl!- fel1une .Q~ns un ,éc;lt habitIJ.el
d'effroi, Je . fait c,ep~nd<!-nt p9JJé,4é ~ ç,pnttOll ptIldant nt!uf
~nfl jufq.lj'au poin.t de I)e ,pas ponf1,~r le ~ mojndr,e cQuP, de
n.e pas 'fair\; la moinnre égratignure, !je ne jflma-is porter lac
1J1ain fur fa femme dans les ,gl(jlJD~f1S d.e fureur Q~ J'h,o!l1'lij.1 ~ ·
fe méco nnaît & s'oublie fi fa~ilefll~'t'?
.,Ai-je befoin de le dir~? Le.s ,PJ.emj~r,cs qpahté.s A,ue les ·
Loix exig,etlt dll'ns l'admiflion de:; preuves , !-='~fl: qu'e lles foient
p.récifes .& vr,aifEmblables. Il ef:l: trop çl'jlO:gereu:x d'adme~trl: '
en preuve des faits vagl,le~ {$( d,é·nu~s <lI! vraifentbl ançe. Id '
la p-reuv-e qu~ je 'lie,ns de difcuter. d~vrbit chre. ,rejettée à
~aufe de ces fculs défauts, q~and mênu: ed~e- IjJC ,(erQic. p'3.~
M.
�( 46. )'.
évidemment inconcIuanre. Car !enfin jè 1u~po~ ies rhl!nîiètt
Ii!S plus graves. Ces menaces pourront-elles jamais don ntt
lieu ~ une féparation , lorfqu-'elle's n'au'root jamais été fui1);es
d'aucun effet? On voudroit en v·ain en induirê quelque da~ger;
y attacher quelques crarntes. Ce' feroit en cela bien peu
connoÎtre le cœur humain. L'homme vif & impétùeux 'qui
exhale fon retrentiment en propos, qui fans ménagement ISe
fans réferve fait éclater fes menaces-devant té'moins ; l'ho'tnme
qui a fait ainli fes doùbles ' preuves dé vivacité & de foibleffè ,.
ne fera jamais à redouter. Craignons tout de l'homme froid
& en apparence tranquille, qui concentre en lui-même fes
paflions. Il ne menace pas, mais il frappe; il n'annonce
pas, mais il exécute; il ne fe permet pas une -vivacité avec
imprudence , mais il cemmet uo attentat avec toutes les
précautions qui peuvent en dérober les traces.
Elle ne s'y méprenoit pas, la Dame Barthelemi. Elle
connoitroit mon ame; elle Cavoit bien qu'elle n'avoit rien à
en craindre. Sa cohabitation ,conHante & tranquille avec moi,
dans les momens les plus critiques de fa vie, pendant Ces
diverCes groffeffes, prouve bien que les pn!tendues menaces
ne l'alFeél:oient pas, que fi je pouvois en faire quelquesunes, elle étoit loin de fe les appliquer à elle-même; qu'enfin
elle en connoiffoit le motif & l'objet, Quand,dans fes réponCes
c,athé~oriques, elle n'a pas craint de foutenir qu'elle a dll
s app!Jquer ces menaces, puifque je les lui adretrai directement , elle a parlé ouvertellient contre fes connoitfances
~ fa, ' prop re convl'él:'Ion, elle a cherché à en impofer à la
lu{hce & au public.
t r41 ,} ,
"
,
, ~ 'M:ii's p'ou quol~ nbûS fit-t-b'n :lair,'" fi ces menaCes ri1avëîëne
ltas été au-ffi -effrayanr'es ~L la Dame Barthelemi ,-Belle-Mere,'
-l'auroit .. elh: fair' -ça'ch'et dans les appam:mens de la D~me
:Efpinatry? J'admets pbur uri moment' ~ fa,it' càlomnj,eufeme~t
l'
\
' 1 r- 1
f
l
~ivan'cé ; ' t'nais ièl! ~ehlan'd'e a tnan t~ur, ,q,ue ID,Ott, ' t qu_e
,levit-e ,-quel oO
utràge aU'roit}'u fo~cer cette~fl1tre &. ce,s p,ré-ca~
tions? On 'nous, parl~ èncore' de menaces; mais qnui,d'es m.enà:e's
-q ui, fuivant l'expédient, n'éroient pas nouvelles o~t déte mIné
feùles fa' fu'itb & -êxc1té ' re~ daint~s 1 'Qu'al-je dOlIC fal~ ~ in~i
~omme féroce & 'fa~gui~aire, quand mon 'ÉpOl~e ai?fi I?éc~
'a reparu chez moi? l'ai-je maltraitée l' l'ai-je battue? l'ai~e
punie de fa dé~arche ? Et quel homme éronna~t fuis je d~nc ?
terrible dans mes appartemens ,féroce dans mes' m-enacC\S , le ne
touche jamais, je ne bats jamais, je tle montre pas même l'e
moindre reffentini~nt ..... Dites moi, raifonncurs tnal-~-droits ,
autant que calomniateurs, quels 'font les hotnmes bons &
humains, fi je ne 'le f111S pas? Voyez quelle dt votre inconfé~
quence. En voulant me calomnier, en voulant peindre l)hotnme
féroce & dangereux, vtius peignez, malgré vous, lë mari le
plus débonnaire, quoique le plus indignement outragé.
Ici je VOllS vois revenir à votre enquête. Vous m'oppoCerez
l~s dépofitions vagues de quelques témoins ; mais d'abord
j'annonce, non à 'mes Juges qui ont l'Enquête fous les yeux,
mais au Public qu~ VOllS avez trompé, que 'les témoins, tout
méprifables; tout indignes de foi qu'ils peuvent être, n'oilt pas
dit ce qu'an leur rrêt~ , dans le hbeHe. Leur dépéfirions
n'énoncent elFeél:ive'ment que des propos hgues, de fimple~
'oui-dires, des faits équivoqu~s. Qu'eft-ce' d'ailleurs que cc:t~~
l
'
�(- 4>9 )
car il en plus facile d'inventer que de prouver.
Me voici à la difcufUon d'un fait (ur lequel mes ennemis
'iéponfe ;
fI! font appéfantis avec tranfport. Que fignific , difent - ils,
ce Pijlolet trouvé fous le ch~vef. du lit, après une nuit ora..
geufe? A quelle fin
y avait - il été mis? Pourquoi l'y avoit-
on l'liffé? ' Efl:-ce oubli? efl:-ce affeél:ation ? L'énig!l1 e , ajoutent-ils, n'a pas été expliquée. Ne cherchons pas à la deviner.
Il faut avou~r qu'il y. a dans ce l'eu de mots beaucoup
de méchanceté & de noirceur. L'idée de parler ~'UD pi!l:QJer,
efl:-elle feuJe- une calomnie
?_ Le
doute. ou l'énigme qu'on pro-·
p.ofe , efl: une atrocjté fans exemple_
D'abord, qUaJId pour. donner quelque- apparence à un
méchant deffein, on commence de dire qUI! je fis drelIer
un lit à pliant dans la chambre de ma. femme, on cherche
à en impof!:r à la Ju!l:ice & au Public, en défigurant & en
ebfcurciffant un fait {impIe & exc1ufif de toute machination .
de ma part. On s'eft bien gardé , .. en effet, de dire que
il!
couchais dans le même lit que ma femme, avant de faue
dreffer un lit à pliant dans le même. appartement.
Mais ra-ffutons-nous un moment , & fixons nos idées :-que dire d'une rixe Gui entraîne, fuivant mes ennemis, la ,
machination d'un attentat, d'une. rixe à la fuite de la ql,lelle
on fait
paraître un pifl:olet ? QueJ1e incohérenoe d'idées !..
Quoi donc!. un homme: emporté qui dans fes pl~s grand~s
viyacités , & pour des motifs iotéreffans , n'a . jamais l'ien ,
ofç fe permettre contre (a femme, n1éditera une vengeance
terrible, & recourra à un pi!l:olet pour
UDe
fimple ri.xe ?;'
Gett.e . accufatiou a. vraiement de qUQi boule.verfer oos idées .
4ç. cho~.er
le.s notions.. cômmunes,.
N,.
�(,!) ~
Voyon5 ' dramcufs, quel!! effets ont ' 1àlfti ceue
tion, & quelles en ont é~é les circon{bnces.
machin..
Peof.:-t-o~ que fi. j'eufl'e pu former qu elq l!le coupable der.
fei n , com'rt1e OUl a la' noi-rceur dè le faire f0Uf-' l nner, Cahs
y cro:re, j'eu-11e eu Oe-f011l de cacher l!In' pifrolet fous tt
ch( ne i ,e mon-lit N~av<>is-je pas d,afl·g la rnaj-f(l)n d'·autres ~ n.
r
~roits plus fûr.s pour Pe- récéler ? AUfois-je eu cnfifl la mal~
a . reffe de fI!' 'larHer fous- les yeu'X ide ma femme & de mes
dc meffjque~.
~t ),
qè rèlr é;i'lalèti':'1 coit' chargé.. Non. ;~ .oe2: n~eft pas 'c\'a,,~s
eUe-même qu'elle parle : elle n'a en effet rlen vu; mais ell e
ort que c'dLfa Femme-de-chambl)e qui lu i.. a fait part , quel.
qUles j(l)U:f~ 3!1'rès " de, cette' clécou verte ,~ ~oe -101 ayant ,'p as
Ial ême. dit. fi elle: aVQlit , vécifié Jqu.ê 1~ pifl::oler .fût morcé ,&,
élJ:3iog6 , ne.. l.u.i_ayant pas.même falÎ r:vmnI;. :~nemis cette armè
Sir.lt6nihle; c1d \-à-dire , "'lue. ma éhaàtab~e épou.fe m'imp ..
ou? me llagffe 1impu ier le;p [;(!lj e.ti ~un a,ctemlt at .noriril>l-e "d!a.p~èSJ
les idées calomnieufes.,- e:rr.on&s b\1/p~ül'laJn i lWl!s d?utle no~
mé!hiqlre'. ~pœs :cela, croyàrrs à:de 111m'e.its faits; axhnre.ttooS:les err preu'le ; établiffons fur- eux. des féparations cnn:1:1es
par leurs effets t & déshom.orantes. pat leurs. motifs.
• ,dVhJ..fi ce pitiole:tnqu'om. préfeoce comme- de:ll:iné au rneUilltre ;
i u:mt IUl p,itotec, démont é , qui n"en aV'.oic plus ÇIue la forme ,
/Si! ~éfervé-.?a fàire ïouer un e.nfan1i : ~ fi ce ·p'ifrolet. avait été jetté
qêJms' le. I~t par un enfant fans fl1alice, ou par tout autre
Flyec intention,. quelle conféquence pourrait-on en cirer contre
moi, fi, ce n'dl. q.ue je fuis indignement calomnié ? Je' fu~
bien éloigné de pr.ê rer à ma fetnmft une imp uta tion auBi
ca'omnieufe, & des vues a",ffi abominables. Mais elle cA: fi
mal entourée, elle eil: fi injull:.e. a.ujourd'hui à mon égard que
j'ai droi~ de ta foupc;:onner. On Iu.i fait dire_qu?il y a de qUOi
trembler, &,'êne faifi d'horr.eu 1) Ic'r r fon.geant au fa.it du pifiolet.
E h " qu~' mieux. qüe moi ..doit frém ir ., - & d~ indignatiQn & de
i age, en me . 'voyant accufé. fans . pr,eove , . & contre toute
(
)
Si ~on: fupp'Of-e, peut ttn' m'Oment, ce f<tit véri-table , · c~m·
ment croira-t-on que mon époufe, après un app-areil auffi
terrible, ap-rès des menaces auRi féroces, ait tranguiHement
.continué de vivre dans ma mai{on, de comcher à côté dt
moi & aveC mOT, qu'die ait expofé fon état è-e gr-offelfe
&. ta vie de fes enfans à- des dangers aufifi irnminefls?
Mais veut-on favoir co-mme- l'impofitlre de cette ac;cura~
tian s'eft MCOlWerte, comme le feeret du Roman a été
trahi? re n'ai befoin pour cela que de parcourir les propres
réponfes cathégoriques de mon époufe.
)
Je demandois , en plaid-ant pardevant le premier Juge;
quel était l'état de ce piil:olct, lorfqu'il fut trouvé fous le
chevet du lit, s'il étoit dans un état à faire craindre ou à
ralfurer? J'obfer vo is, avec raifon, que fi ce piil:olet av~it
é ~ é chargé, mon é~oU'fe & fes gens s'en fuiTent appercus;
qu'il.s l'euffent dit dans le- tems ; que mou époufe & ' (eS
parnfans euffenr agi cOI1[(-quemment à cette découverte .il
.
.
'
Imp o:.tolt donc cfe la faire interroger fur un fait auffi effentiet.
On 1 Interroge : que répond-elle? qu'elle a vu le pi·Holet ;
v-raifemblance de .la plus.. affreu fe machination.
" }!ai menal>-é ~â fé.mnle.- ,. me dit-ollole'n€OI''e , d'.un coup de
(;haife après quelques reproches od ill ux, & je l'en C!U~
�".
Cs-1. ),
':.
frappée, fi je n'avois été reteou par un tier.s. Mais
je
le rép6te.:
Quel homme bifarre fuis~je donc ? ou plutôt quels raifo n_.
nenrs pitoyables font mes ennemis? Je menace fans. frapper"
lorfque je fuis feul, avec ma femme, & lorfque Je· rnenac~
devant des Liers, on fuppofe que Favois l'intention de frappel:
& que j'aur.o is frappé, fi je n'avoisété retenu ~ que' d'abfl)rdités~
que de minuties? que de fauifetés ne faut-il pas dévorer dans
une caufe où. il femble que l'on, ne 'devroit voir ' fjgur.er· que
•
des moyens majeurs, .-& des fait psécis.? J'
Yoilà, cependant, tout ce qui .compoCe l'expétlieat offer~
& l'enquête, ho~s. \a pi'é tendue diffamation que je vais bieAtôt
difcuter. Voilà ce qui a. fflit dire aux défenfeurs de mon Épouf;
qu'elle avoit toujours vécu>da.ns un a&e continuel ·d'e.ffroi pour
[es jours, &que ,ë'étoit pouimettre fa vje en fûr.eté'qu'elleavoil
été,forcée, de cherche.r un afyle & de deman~er la fé.paratioD~
Les preuves qu:elle offre & qu'elle a rapporrét;s , font-elles
c'onféquenres à fa réclamation & à,[atl. fyfl:ê.ml: {, Que voyons.
nous Qans fon expédient & dans fon el!quê;te !?-.'des, menms,
toujours des menaces, & jamais rien de plus. Efi..,il vrai, du
.tl1ojos , que ces menaces loient p.récj[es, graves, indicatives
de quelque délit. Wa-t-on vu former qu.e lque
proje~, préparer
.des . moyeas, f~duire des complices, m*ioe.r ennn un
.attentaç? A,,~oo vu le; moment o.ù .j'eulTe commis un outrage,
exerçé quelques {é.v ices" farisfaiè · un . e.mpo~ten~e.nt fi , la ,prévoya.nc. e de ma; femme ,. fa , rérJfl:.anc.e,. , fes cr·is : ne m'euifent
c.ontenu? Non , . jamais on n'a rien. vu.~ riel} e-ntepdu de pareih
Les >em,portf:Ju~ns, Ce fQot exhalés, en:. propos; les. menaces. Ce·
{\l9,t ('\if{ip.êes .~.J\l.lr\é~
..
,
~."('i'
' ~'
J. ~
.
~.
"
•
( H)
Dans quet co'd e; dans quel livre a+on puifé un principe
ui fondât la féparation fur de pareils moyens? Dira-t-on que
~ les menaces ne préfentent pas un crime réel, e!le.s en offr,eot
le danger & la crainte? Mais ~ pour cela, du moips, faudroit- ·
,il rapporter des menaces précifes, d,étep1;lfpées .& voifines de
la réalité ·? Ilfau,droit , ce femble,. au défaut de coup'>' donnés
.dire au moins, qu'armé d'un bâton, d'un c.outeau , d'un infcrument quel~onqu.e ~. j'ai menac.é & pourfui'li . ma .feFlme •
. Enfin , quand·. on ne. peut dénoncer à la jufiice de~ Qutrages &
des févices. réels " il faut au. moins lui démontrer l!l c.rain.~e
imminente de ces févices & de. ces Qutrag~s.
Mais raffurons-nous pour toujours •. La crainte & le dang&r
ont été & . (ont encore bien loin de , mon Époufe. Nel,!f aos
de Mariage font une' épre~)ve affez fûre 'pour ca;l.mer fes inquié- .
tudes & . di1liper fes craintes. Que dans la foug.ue, de l'âge,.
dans ces momens. critiques o~ . des befoins réels pouvoieot me
"eodre mée.o ntent, dans ces circonll:anc.es. où. I~ t~ll:ame.~t ·
bifarre du Geur de Peiifpne1 fils & la. conduice, pe ~on Jigue
. héritier avoie.nt droit d'exciter mon,reuenriment; q~e ' d~os
. oes momens orageux ., je ne me fois jamais~permis la moindre ·
violence c.o ntre ma femme; que je l'aie tou.jours . tlfiimée, .
r,efpeél:ée & c.hérie ;_ il feroi.t ridicule de témoigner la R1aigdr e :
inquiétude..; il fer-oit barbare de faire ent~evoir le moindJe.:
, danget, aujourd'hll-i qu'une: plu~ , lang\le exp:~ r \e nce de s ,
Qçcupations folides, une firuation r-iante & des e;.n.fans que ·
_ j!idolâtre ont écarté tOllt çe qui pouvoit affeél:er douloure.ufe-..
ment 019\.1 . ame , & ne me Ia.iffl!nt , plu~ q,~e _ èes. dQQceurS';
~ai(ihtes. ~ Ql:S (ati~faéhQIls p,ure.s à K<?û,ter •.
�, ( 'H )
,
.~ . )
. da~ i)!wl11.me itout ,germe de fenfib~lité & d'énergie; 'brjfons
le moule de l'.homme véritable & formo.ns un automate
qp'un dangt'r irnrni:
Eaço.nné au gr-é des femmes & ,difpofé à fuivre touS leurs
-t1e!'l~ a forcé fa fuite'" fa retraite. On croiroit que ce n'eQ
-.que par l>e-ffit de ·fA ' ~r~oya{lèe~ & de fon cmlrage qu'elie
mOllvemens.
Non-, ~l (l'd~ pas pomb1e d'entendre farts frémir qu'9 n
m~nà.ço:t. DMabufons.
<{).fe .dem,\nder la Iép.arat'ion pOlir des fuiees atlffi rtdiGules que
nous: les fai-t-S les plus récens dont parlent 'l ·eaquête & l'expé.
faux, qu'on vienne rravdhr en hOOJ·me féroce, en époux
. di-i:ncJrem6ntent ail reCHS -de (a ' iF(}1fe1Iè) & p<H ~onféquent
barbare, en Citoyen dangereux, un homme franc & bon,
qui dans les emporremens même qU'OD lui arcribue, tout
.
.. qu " epoux 'te n dre
.exagerés ou -ca1OffiOieux
qu "\
1 S rlo.~lt, ne ~par(),1r
. D 1aî1leùrs
~~ quelles menaces, de quels tml'0rtemens "
.de quels dan'gers nous parle-t-on? A entendre mon Époufe
- 011
croiroit· que quelque menace
~e{trlbJe,
<a pu ' écba-ppe1" au cou.p 'fuaette qu.i Ja
à tome epeqlte de plus 'de ·fix: mois. Depais lors .eUe dt tt'an.
.ql'li\\~Yent accouchée '; depuis 1or'> , eUe a vêcu avec moi dans
(:~t état d'union, de tranquillité & de fatisfaélioo (;}ui cma...
. & refpt'aueux, pere {enfible & Citoyen bievfaifag,t. Eh quel
té.rife ks Mariages les mieux a1f()ftis. Si en(uite elle a été
mari, je le .demande, quel homme, s'il écoit ceof\lré &
11!3111de
pèridant quelques mois, elle a été par moi f0i"née
.
0
- & ~endrement . foignù.
n
R'efl: prefque auCun {nome,nt où
je m: lui aie donné Its marques les plus certaines de mon
atta'c hement & de mon amour. Pa[fer les nuits auprès ~'elle,
iui rendre les fervices les plus dégoÎltans & 1e·s plus dan·
gereux , le~ fervices dont l'amour feul peut -infpirer le facrificej
... o~à ce qne j?ai faie pour ma fe-mme confiamment & furtout d-ans les dernrers tems. EUe n'a pu s'empêcher d'avouer
dte.-même que je Pavois têtée plufieurs fois pour la (oulager
J
l
d'uh hit !!~anché dans (on corps & que le pus afffeux qui
- en fortoit ~~avolt jama:is découragé mon zele & 'mon amour.
Ah ·! fi c~efl: un tel épéùx qu'il faut craindre
PMei~ -homn:e dont '1a
fi c'eH un
cohabitation foit dangereu;e pour une
femme, fi c dl: un pere a'uffi,t-endre que moi qui doive apporter-l'effroi & la eerreur,
'
..J' 'r
"
.
-uIVllOflS
à lamals
touS les manages.
Il n'y a P1us de"surete, pour all:,;une femme ou plutôt détruifons,
fcruté dans toutes les aaions de fa vie ap(li. .matigQ.ement que
je ,l'ai été , offriroit fi peu de tratits ~ la critique & à la
>méchanceté! y a-t-il beaucoup de maris qui pu[feoc dire comtpe
moi .? " J'ai été cruellement pro.voqué & ne me fuis point
,., vengé. Ma femme m'a tourmenté par fa jaloufie ~ & tout ce
., que je ,me fuis perm~s,
c'dl: de lui en témoigner quel-
" quefois à mon rour .; elle a écouté mes ennemis & je
. " me fuis contenté de les éloign.er de I1;Ia mairon; pou4fé
~ ~ à des vivé).cités . par des horre\:lrs de touteS les efpeces "
" j'ai fait quelques légeres menaces & n'.ai jamais frapp.é ;
CI
."
l'Na femm.e enfin m'a traîné aux pi.eds de la J uftice , ca'l omnié
& 0\1tragé de tmaes 1.es manieres; loin de .fu~vre cet
" exemple dàogereu,x , je l'ai refpe&ée & la refpe&e, je l'ai
u
a.imée & . l'aime encore plus que jamais.
Je {ais 'lue mon Époufe dl: b.ien éloignée de convenir de
_ c~~e v~ricé, qui e-fi empreinte qaps le fond -de mon aIDe; elle,
�( S6' )
prétend au contraire que je l'ai con!l:amment méprifée & dif.
f.amée. Mais prouver, comme je l'ai fait, que je ne l'ai point
maltraitée, c'eil prouver que je nc: l'ai pas méprifée par des
a&ions. Il me reile à préfent à prouver que je ne l'ai pas mé.
prifée par des propos, c'eil établir par*là que' je ne l'ai point
qiffamée , & combattre tout à la fois les deux moy.ens .fondés.
(QI.' le mépri.s & la diff4m atirm.,
•
D'abord je.demande quelle dt cette efpece de diffamation
QU de mépris qui peut donner droit à la femme de demander
laJéparation. Regardera-t-on comme moyen de ce genre quel.
ques propos échappés à, l'emportement· , tenus dans un moment de vjv"a cit6, prononcés enfin fans intenr~on & défavouls
par une conduite fubféquente? J'en àpppelle aux hommes
jufit:s & fenfibles qui n'apportent dans leurs ' Yugemé.ns que
les lumieres de la faine raifon. Sans doute ils re.jetterOllt
- tous une pareille idée. Efi~e donc par les principes du droie
" . qu'on . voudroit établir cet étrange fyfiême? Je ne trouve alJ: cune loi,' aucun préjugé, aucune autorité. qui pui1fe l'étayer,
lI: ne VOlS au contraire pa.r-tou.C qlJe. de.s princ.ipe.s &. des jlJ.
gernens qui le combattent..,
Que le Mari acçufe fa Femme. d'adlltcere & qu'il fuccombe
àans fon accufation, Voilà une caufe fuffifance , 'fuiva.nt tOUS les
A..vtew s , pour ~.J torife,r la demande en féparation. Le motif
. 11'
d u" pnnclpe,
"
. en eH
' fenGble
, , " & la' J~llllce
eft frappante. Un
• Maq
D
'
.
, ' ~ dOlt~d r~... clam ef Ulle ~:
emme, d:ont 11
a. voulù détrUIre
1'eJ'.~J~e!lce
fI\orale
& '"1
"
.
",
. .
. ".... Ç~Vl e, ~u II a voulQ. déyouer. à l'ignom\!)le
'cl'un jugement Géf{iffa~t r&
( ,7 )
au défefpoir ' d'june fervjtud~ ~t~r
.tlle ? ,Ull.4: _F-emme. pourroit~elle v.ivte fan~ ~rémir d'h(:meu~.
/l'leI< celui ql:li la.$~gard~ comme une inJ.a me 'jréature , . q\li p~
lnoi$l1 1'auPjréfe-ll'tci.e. CQmme t elle à la jl:laic~ & ' éI:J.I~ p~blic "
qui lU'tl0tl 1u .dé:ttuJr~l t~us J~s fll:pport~ &, ' \>-Ji!c!r lpu~ )~ ' J )it1l)~
qui ~ 'l).(tt1f~e11tJ~~tn.bte, qU:Î j!ojj.~n~H~éA.qf11jW,vai':. fHSf,è?,
'ç1C1 rQà. •. tarrep~ife:" ft.iliff~roit , c.~aindrc::, a,VC;Ç.; rajft.qfl· " ,q~;.l ne '
çWerçhâ.t }}OFS,)~li .L!;)Jx~& Qe }~ouv~} enJu.kwj,rn51 ,d~,q o~ Ja~
6s~ire , f'l C' Y!Uigell~'C~€!1 C\!.s JO:!'l{i.qér.fltj09mIJ~p'nçl,J?f$,· 'J p Cpit\
d'êue,'d.;YJ!:l9flF é O&l djOl}v~[aglt ... l~'N~i* ' ~e,ib\~ai[pt;J . l , ~< de
1'hu.m~ni~,. tbus ·l~s"· {éPt.ill\çnS P9Q,iv~~s juftiji~ : ,~n: p~eil.
prÎ:ncipe.:l{- 1 _r J~' \ ' iJ ""
~- ~"'-J
0
~J
. I Le uA re~ ~(m~ bé;:):l'"e1!l"~if9j~(· n ifl~u ' i?;tl-t'i JPÏ#'rfI ue S~ '
l'~i:n;cÜ),tI.I , ~5 _ s'éç;a:1'.ttt tlèAnro9ins:, qe c (~SdHO~i.fF· ~ On ep'
tiBllWe, ~uir onlI.J~ügéf ~lto l ll. , ~e; , mAr4 I:a~~j) ,R# d §Il-\>itil%i ~~lj~
..
(.1
llo ,proc;:è!i civlidtvcll:8 i...pJaiÎ!lilJ~CI3 ) &g 'l tm,q,u4;<,p ,(g;r Ja-~t.p gra.'4e ,~
~,omm<lacWlteIl!O(, huci'nH·k . ~lJ~§r.faitl!;s1e! -c..e;~.e fHlt-Ufg l,Ja.rr .
pGllY.oir lt6~ ~onNajplJT~ f f i~J ,~v~1J ~ : ~cm:·,tjfj,+ ~;d~Jép'r
"don. Le>::rlJolif,ft:i-..deifusl ûiH~u~ ,,< ~o~t teB ~~!)p ljl1êmq·
cetU :derDi~œ. · .h}!p0cllHe : ",,~ét9ic j[fI1~~ dfts.~°ll:.t;I:~u
'
,
pourn~ femme." mêr&e, I0plntoll:JtlIl:)l'lllaf' "'i l,Jlê~e ~a~g:':1j ~(L
w'vre èllf.ernwfe .,_..enfin nbe.s , C:AA!j(é'q~JtPçç;> .A~ S9 U~_ les{i1)$J & imr!i ~tQus: ! les r<l!~t~ pAl{fWle~.}.
r'!
, )"J, ,
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4'onme.l'. de , l'l!~rei!llftDD à .cette ca>~~ de ~ép-aratio,[l. ,0n )3. prt.....
~du ..qu~ocre . pMai!Rœ.. tpcmée Il ljau't0l\'it€' " pp~r foUi.ci~q~ 'un
~llofe Iuphie;III:"" , ~vni~ .J1VOU:- ~ ' ij'\~fl11!) ,~.fef qu'pne· acccfa..--
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.E. on t'e\1t 8ire d'~n' C1'&ré ~'il . tniltÎque-· tJan! ~ ~ ·!U '~ l:te ..
deux circon'fia~ces les ~l'Ius 'effentielles , 1a- ~~bhè.lf~ .&. lat
('~9 \)
mmqyiHe qlli' {uivoit
~..
hal;îjeaticm
pfOp(l~.
Auffi,
ç~
der-
eier (yHêtne qlJ.i n'a ' pour .bafe Slue des 'raifonoen1'e ps fophif.
calomnie de ·Ia plainte. Mais la femme pelH düe.~ , de 1 aucre;<rVe~c{tlècès à -fon -mari: l ' Si vou's :youléil me .f:Ure .p.unir parAa'
prj.y~(i()nde - ma ~berté. &_13 p~l'te- der: ItÎÔCll1 00r)ndr t'rr; ~~
,, _renfermàôt[ dll'ns qll~qlle Co\îVe11t ,'<iJ!le, t1Iî l'()rCeZl..~OirS un~
" p'1~iQ" eejüridlque qui me lai{[e' !àl ~ èl.lhi "'~~ · me ;ru.H,ifier ~'
,es
~iqllts '; quj n'érQi'c 'écab!i
~o'nt:rairt;
a-f.il été
'par -aucun prioêipt;, -qui étoie 1111
cotnbattu ~ par' 'tous ·les
.Ô(.
1
p,rincipes
'ce
la matiçre
,!
doit-il é·trl: cOClfiamf!1t;nt r~jegépal' ,ltS r·rib:U~
Qa\lx ,?
Quelle l
dt .
d'aifl·eurs
la ,p.rtteC)d-ue diffa'malion do~rt fç piain(r
.
..
•
~
<I~ v lieu !.<fu recourir, i!Omme : VOUS " hI Jflift'~S: ~ nel'M ..
,, ; ~oilctàêiorÎn ~8rete , qui' teiJ~ à fllrprel\drtl! >-al'f{Q;j é:;, :LQc ~
,, ) ~"~n1bvePl~ cardit .. rlégifli'ne[ &: ' at\f.~·é=F, de' l~ &fe'[lfu .~ (El
';':Ie'tif àin,. fqne ; d'l~d1'&IPri' en iind\léHoh ~I! & ,de ' fyfrê.me
'mon Époufe? elle me reprochç d'avoir, dic gue J'les ' enfqn ~
-en fyfiême, on a pouffé les chores jllfqu'au po'i nt, <té fOI!l
E~ ce donc !~ . unJait préc},s lrpY-a"'\t-il el'l cela ,diffamation .~
renrr tfe 'l~ ' mari Uqffi rl'tpF~lt" à;fa:' f~ffl'me ~~rti4u . fi8élifé à · f~g ah~ib -; qùi' }Nt ,t-éll'loîgno:i't~'quelqtl es( foçpyoms
V.çilà. peux ;p~in.[s :au.~qu~ls
réJ~tifs à i fan hôhne~~J ,~obéiGi( ég31f>rtlen~;;lj~u rà) lacck:ma:l'llde
femme? Ai-je ci~c.s)1~flancié le:ur,s liaifons ? Ai-je fait les .pré-
-n'a ' pas vù' qu'ü~ép.enda'mptlent des <motifs
~ndu..s reproches ,avsc un con tpe RerfuaG~n, av~c deffei n :d'y,
;,
en féparati'o'n. :On
~'ctJ\e.avoit ,!le _tn~a-PRârtepoie-p~ pal!, & que ce.lui !dont !Jle
c;toit ençeime ,n'.6toic pas' de mes œuvres. Ge reproche ell
Ç.aloplpieax fans dout~; mais je i'adlT!ets pour un mOl]1ent.
•
~ùe ~rqir~,
tJx. d;aîlS l'inçemio~ .de diffanler mo~' Ep,?J.lfe?
Ai-je "gr con(4Huerpenc à ce~ idée,s & à 'ces repro<;hesJ ? Mon
3'OCU..
fation l d;adulcère, une impura'Jiv(f Jfaire ' dans dt! _èol1itefl:a~
tions juHidaifes' , une -{i~ntHtci
fio-o " portée 'à l'autorité' étoient
les unes & les 'autfes J'.olivrage le,m..de 1a réfle.xioo , le réJ
fultat 'comtMné (de rdél~béI'3l~ohs rrck>mefUqu:ei ,; q'u'e-lJ'
foient, en un mot· ~ <5u~
50
fuppo..:
n. éal4m'f.l-ie
'laI plus a[(roé);: " olf'du
~àins w l.a r perfuaifon tromp:euie d~) aél\égle'llens r im'pu~és lia
J
s~arr~ter. A.j-,j If" di c , d;rbQrd
que ,ces el)fans ~H)ie!lF,ld.uFoAfrperq: d'un tel homm,e aveC"h1a
cl-deJus TappOr[~ , :qUi. mânquoiêflrdÎ - ce. nOlolvaw r;fyitêmq
tF'j1 ~avhir e"tore t~trt tlj.ffér~-I}cê: rem'3l'qùabll!~ qu'ûné
il. faut
époure s'eH-elle comportée comme une femme, & comme
1
une mere qui en craignoit l'effet! Rien de tout cela ne fe
l'encontre dans nos circonnances.
,
..
Il faut avoue(" que. mes. ennemis font bien mal-adroits dans
le ch9ix des moyen.s & d~s preuves. Comment n'ont-ils pas
vu que m'imputer d'avoir fait fans ceffe les mêmes reprQches
fetnrrte " taniirS -que, des propos échappés dàns la chaletl1~ rde
à ma femme, c'étoie ne me ' rien i~7pllter) c'écoit ne m'artf}b,uer
fa ' àJfput~
~ la ,fuire dé -rerroches mutuels" n'éfoi'Cnt ja..
que des plOpOS en l'air, ,. d: ,s propos fans i(')tention de la .pa,ct
ni~is que l'effet- involoRtaire' de l'en)p.or.tementlcou.joùrs .dé ..
_
t··
.
menti par la 'réfkx?on & co!l'tre'-dit; êonftalllmenc par' -la co~
de cdui qui les ti,e l} t & fd9s effet pour celle qui les eif~ie'
lx
ça! enfin, fi J'aYQis cru à ~a v~ rité des imputations qu'con me
J
•
�( 61 )
( 6Q )
fuppofe, aurais - je continué de vivre avec ft10n ÊpOufe
,~
Aurois-je vécu avec elle dans cettl:- u,nioo intime que la grotrelto
fuit de ~rès? Me ferais-je ex!,ofé ~ en avoir des co.faos dàn~,
? AUFo)t-~lle enfùÏ{e
pluûelirs aon~es 'qui Ofl~
la rta-iffance flIt douteuf.e dans mon etprit
vécu ttanquille:ment avec ' moi pendant
féparé un acc;,ouchement de J'autre? Auroit.. elle voulu couri L',
lèlrifque d'une groffelfe qui pOuvoit dopper prife à la prétendue
calomnie qU'OD me reproche?:
'
réflexions (ont feafibIes & puilfanteS. El1es le fOnt hic!n"
. ceS
~avantage
quand Qn faiç que je r\'ai ce~ de vivre avec ma.
femtne comme un mari tendre ' & pallionné, que j'ai idolâtré
,
.
.
.
&. <fue ridolâtt'e' rild.iellfans ; . quand 'oh fllit que malg,re" que;
~.
la -drfparution fût
.
~
çOhèenée", /.l1on Epoufe
n~a 'pas cr~~t d;
tailf& (es ' enf~Î1s chtns m'eg l'n'ains, & tllJmon'P euVcin OO.,t~db
p~nler, ore-t~on dire, -3l'rb ~el;,' qu'ell~ a cru
inflant à l~"
uo'
vl~icé ;de ces i~putat-ions~ Faut-illlli faire çet outrage de-croire:
~u'eHe ~ ût inbumai~ln.e'~t livrê1 les ' ~.èfaits à ,~Ù;~ 'qui è~,
Mfavouoic 'hl pa.rernité , &0 qoi 1ts ngatdoit c,o mme -,Üs {'tl~f~,
éremek d'opprobre pour Itli? k ~eods ici m~n Epoufe pill'
un endroit' b-ien fenGble. C'ej} {on cœur que j'interroge. C'd~. '
à une mere, ~ à unI: mere tendre ql1e: je parle. Si, dIe eû",
àj-oti-t~
foi
au~ pIOp~S qo'en~ m~atrribue ;
fi e-He eût
CfU
que:
~~ri()is perfu'adé de leur véJiré; li plu,tôt elle ne 1~s eùt p~"
tegardé~ comme d,es propos , vagtre-s lSç, éch'appés à l',e mpor-'
t'e'ffi-ehr, eÎlr-eHe cohabité fans crainte" ~ fi iong-tem; avec,
un_mari rotrrmenré ,d'trot ldée, allffi <;Fudlj , & a.'..ec un 11)ari
qd'Ht-e' peint fi: f~roce ~. r~ d'lngeJeux f _ eûh elle abandonné,
t c,~t hgmme . rt~outable J ~s enfal}s , , cçs êtres malheureux ,
qui a fon défaut, devoient nécelfairement fervir de viél:ime à
[a rage.
II dl: difficile d'entendre & de difcuLer de pareilles pre\lves
fans en reconnoitre l'invrai[emblance & l'abfurdité. Mais
dans
,
tou t cela même, eo les apprécial\E- avec uQ' efprit débonaire ,
dl-il pofIible de tFouver la dJffal'Vation , cette publicité de
D'ap~ês
l'injure qui doit forcer la féparation?
l'expédient &
l'enquête, c'ell à elle-même que, je parlois. On dit que
je lui
faiJoj s des rep!~ches. II n'y a ~onc pas diffamation, Eh, quand
même, il Y aUfoit eu quelques témoins de ces' r~proches, tels
que des domelFiques de la maifon ou de la famille, pourroiton j~mais en jnduii~ diffamation & injure. La diffamation
fuppofe la publicité ', & ici [Out fe ' palfoit dans l'intérieur de la
•
maifon iJ L'injure fuppofe l'intention d'injurier 1 & quelle in•
(
v '
•
r
,
tenngo d~ ce 'penre pouvoit avoir un mari qui a fait conflamment preuve d'eflime p~ur fa fem~e
enfans..
/'
&. d'e
tendr.effe pour fes
. '
On fe r"jette .e.n~or~ e~ vain fU,r~ la qualité des. per[onnes :
J'adm~J s vol~ntiers ~ne difiinél:ion , &. je l'admets dans toute
. [on
étend~: qlta~d
i!
~'agi;a,-de [évi.'~s
,
d'_Quitrag~s ~orporels.
Je veux crOIre qu'une femme d'une condition ' diUinguée pe ut
réGfier plus difficilement à des out,rages . qui portent fur [a
;erfQl:pe. ~ai~ qu~~t à ~a, fidéPté aux devoirs. conjugaux, quan c
a la feputatlOn qUI Dalt de la conduite d'une femme
je
dUavoue cette clifi inél:i,o n.
~~- femme
d'une ArriCan"
Marchand, d'un Bourgeois, accu(ée d'adultere
.
'
~"un
fera tout au
'
rnoll1s. al~ffi fenfible à l'outrage qu'une femme de qualité •
.Que .dls le ? elle en ~era peut-être encore plus affeél:ée, p .u:
Q
�' 6 631)
( S2. )
cela (eol que le pr~jugé frappe for elle avlSC' plus d empire..
AinG en accordant à mon Époufe la rupériorit.é de condition
~raîfonné fur âtte· quefl:' n, fe" font toUS aCè6rdés à dire que
qu'elle veut fe dorrner, elle ne pourra : jamais échapper -il la
jrtJure.
J'en' 'Viens aux 1ettfeS écrites par un Mari à fa Femme. Je
fage riaueur des principts
acune~~ilhll~Hon
'161,
,i'e quatité~ '
:
~
'elt-fait d'àccofation , ne
.J
;t,
_
~
:
c
font
Mes ennert'lls
J
;
ceslè~tres ! p'r:olWent tout '~ ' élle~ 'rei\f~rnt.eih~ fa pktivti. d~s
ôuc'rages ; . dù mêp'ris ', iIë l ta ditfatn-atîotl; En· u.n' mOt, :i1 ' n'y
a pas moyen d~ fe ,coutl:rafre( à la ldrJ &: .à- Ià' darce ' de- ces
1~tt'res ....~'C'e{falnJ1 que jug~nt' :t<>~jrd6rs- la' prévention' & la
l
'1
d
' ,,,
. l·or
' .J
l ' ,
r
'b
' hain·e. Mâis q~'il s'en faut de .oe'llucoop qoe' n'n:s etetes ,p r uvent le mOÎndré
? Que- dis j ~ ?t e11 s
,
. des
. faits qu'on m'im'pute
.
prou.vent tout le contraire ;dles C?ll!batr-ent le ,Roman calomnieux ~ ~ : publié cont'r~ moi; eJ1e's juftifléHt e ti~t'ement
ma conduite. Ii dl facf1~ dè s':ên~ c'onvain'tre eo~les 'l'ifanr!av~c
~.,
"~l
,1'.
f,~.
"ff.l'fI
l mpartiafité.
.
Avant tout, je demande:Ç1 en droit', des lettres écrÎtés :panB
Mari à fa Femme, ' pe~v~nt
for~le~
n'i délit ni preuvè. Cet,te
"lu~Hion roût réce~~~n't: ragit~~~ n'k par~ît 'pàs av6\~' b-etIJîh ici
- - , •a J ~ne autre11" quelJlOn
Ji, 10p.pement. EII
d'un grand deve
' l e tIent
J
dont le principe avoué "par la plus faine' moralt: ,& l lès' r'egtes
r
..
les plus pures, n'ell plûs aujou,ra'hui' [u{ceptible d'e' dîfficullé.
Qui dou"te à préCent qu'une lê~tr~ é~ri[e I. en co.nfitle~~e· ~ bn
(li rs ) 'ne peut_pas être oPRofee à celui' qui l'a 'é~;'ite" &Jf~;m:er
,
feul fclifoi t
"ftJppofe- qu'elles tefnferment les imputations les plus forres .
",").
r -M'ais ' qJe df(e) dt tb~S"~ttrd; ~:(1 j'~iH:~6rs
c'éco-ic celui qui violoit l'a confidence " qui
A-tLon bonne grace d-e prétendre qu'elles font diffamant'es &
-'qu'elles outragent 'la réputation de c.ette Femme? Il n'Y a
qÙ'lln mot à d,i re pour répouffer ce fyfl:ême. Que la Fenime
ne b'~lilbitLellè .ces lettres, ' ou ne leS cachoiF-elle foigneuCementl ? 'D~~lors '"où feroic-Ia diffamation, où feroit l'outragè?
. C'eft tout comme fi un ' Mari renferrT1a'nt fa Femme
un
'Cabinet, dans un appartement bien fermé, lui ouvroit fon
,Jans
cœur; épan'c hoit 'dans foh fein , fes foupçons , fa jàloufie &
[es craintesA Dans c.e cas, je le demande; où feroit l'outrage?
.où fero'iëla âiffamation ? Or, lés lettres écrires-' p'.a
un Mari
qui efr abfe.nt ou qm veu-t' éviter les daogers ' ~d'un -édai,rcilferoenc· trop anîmé , ne font autre chofe qu.e ·Ia: cdmmlinica1ii~n
·verbale de fes .i dées & de [es feniimens. .
<.
t"
"
, Je dis
plus. Je loue l}Jén' davantage le mari pf-tIdèjlt, qui
,croyant avoir 'à fe plaindre de fa' femme, ,Iu,i rén1oign'e pa.r éàit
{es plaintes, que celui qu.i cherchant un tê~e . à 'tê'tè r , rs'expofe
jmprudemment à un é.clairciffement dangereux, ,à une" difpiHe
vive dont lés fuir-es - peuveht entralne-r qLiefqué' .[cerfe'· a.Hlil?eanre.. Mais dans touS ces cas " je le répér:e ' , ' quel ~tl: Irou-
délit ni preuve c~~tre lui~ [oi~ que 'Îa' lettre' ait' 'éte in'Œrceptée
tl-a~e"', qÎ:lelle eLl la ' diffamation qui pell\7enr:e'n" iéfuftei. Un
C:)it qû3 ç1!e ait été rémiCe par le tiers perfide qui viol.é:la con-
mari écrira ' ou témoignera verbalement -
~dence'. On 'trouve ~dans IJs' Compilateurs divèts Arr'ê ts qui
•
•.
)
l
""
~.
W\I$ p'l}t relette 'l'arell1~s preuves, & les ' Aute'ur~ 'qui ~nt
'll.l'C' çe qu'il -peut ~.c;e qu'il doit fairi: ' G!~fr"lnà- fémm~
a' fa
fe'm'me' des
lOupçons & .d es -idées ' qui ' -le t0urm'enteût~ 'Il De -fair eh fcèla
�'( 64 )
à drŒper ceS foupçons; Il fe jull:' erdes imputations ~ à
,.
éclaircir ce qu'il peut y avoir de louche dans fa conduite. '
à donner enfin à fon mari toutes les (atisfaélions qui peuvent
calmer fa talouli-e & cranquillifer fon efprit. Je fuppofe ,..
j'admets les foupçans les plus violens, les imputations les
plus graves, les reproches les plus fanglans, les expre'ffions
les plus o.utrageantes dans ces leures? Ne [croit-il p.as tou_
~urs abfurde de prétendre qu'il y a diffamation dans ce qp i
fe palfe du mari à la femme, dans cette communication
fecrete de leurs affeélions & de leurs idées. Si la femme
produit de pareilles lettres, fi elle les montre, c'eil: elle
qui fe calomnie, c'dl: elle qui fe diffame, c'eil: elle feule qu i
s'outrage. Le mari n'a fait qu' ufer du droit le plus légitime
& le plus refpeélable.
'
Voudroit-on faire un. crime au mari d'être jalou,x de 'fa;
- femme. C'eil:, à ce point qu'il faut néceffairemeat réduire la
quefiion ~ fi l'on perG1l:e à me trou.ver coupable. Mais. je·
ne puis croire qu'lin fyHême auffi étrange , . (oÏE le vœu,&
le langage d'une femme quekonq,ue. La ialoufu! eU de
les ftotimens celui qui flacte le plus les
C~llS
femm.~s ~n ce~ qu'il'
prouve notre amour pour elle. Les femmes les plus froides.
& les moins amoureufes de teurs maris font coujou vs fumées.
de. ce fentiment. Elles en font préfent à leur amour· pr,opr.e ,.
. q4:nd .n~ême leur amou.r n'en v.oudroif pas. Mais il ' s'agit
moJUs KI de lClurs plaifirs que de leu·cs de\loirs. Je n;examine
pa~ dans
cene. caufe. , fi la jaloufie dojt t~ujOUtS leur plaire "
mais fi elles ont droit de s'en plaindre en J ufl:ice . u2.!ld
n,leotraÛle
'" traltemens nl. outrag.es,' qu'die:
q
"~ _ _ _ _ tÙ Ina l.i,\(alS
~e.
•
s'exhale
'(' 6'~ )
s'exhale ..en ': propos ~ .que fes éhuJs fe .dHIip~lU ',pour ~~{i
d-iore ,. dans le xuyau de l'oreille _
.où (e perdent d'tlts te fe:e:tj:t'
d',un, lett.re. Eh fi. les femmes p.ouv.oienc pOfler jllfqy!:s-là
leu.rs ppéuentioo?, que. de~.iençl!;O.it ·.dare[oavamt.la tfo.ciété pqn~
jugale , cette fociété defiinée à l:Qnfonare IiOUS
bs jruérç~ "
li.oU5 'les penchans; JDollteS .:lies Jlffeai~os i ELl:e ..ne fe-r<9'Ît plus
qu"une ~peufe .'~mqu,jJition. ,.où .le mari . ret~mi pAf;la ç ra..Î ote'
Ile 'P0urroi-t plus lil'rel'd fon ame aux, dou.ces impre.1JiQos gç
f-a joi-e , >ni lai{fe1:' ,é~~ate'r fes .doul~U1's- fa.ns c.raindr.e:Jlne QffiQ1,l-,
èiat'ion ju.l'idiQùe .; un . examen _ccalamn.iellx ,dé tolit~s • Je~
àél:ieU's de fa vie, un jugement .peut-être déshonorant. \Quëll~
contradiétion ·n)'y aurait·il pas eI,lt1'e les Loix .& I~Qpinion
publique, entre' ,res JLoix :ell~sJ'U}-lê.més • .L'Qpinion p~lJJi.wtCf'
imprime un déshoneur
..aU t
mari., le& Laix dui JonHlU .çi'im.c:-
de .l-ailfer .vivr:e fa femme dans Je défordre' ;
où
,moins ..J'opi
Dion publique le \cou.vre-t-elle de r.idicule, quand. même eJlç.
l'le fo,up~onne. en 'lui. qu?u.n époux .cqnfiant :& ct:édule .; __cepe.odant l'on voudrort ioi lui (wrueil:er l'e .droi-t: de p,ré",e,nir des
liaifons trop fréquentes,. d'écarter des h-ommes qui tui.font
t>mb-rage, d'élcigner les
occauons qui pe.uvent f~jl'e Juc-
comber tôt ou tard la femme la plus verrueufe. Comm~nt
donc concilie-r ces· idées ?, Comm.ent accorder des fy.fiêrnes.
aufIi cootradi:aoires ~
Mais c'-e'fi alfez s'égal'er dans cet abîmede conféqw:nces.qu ï
-naiffent du fyfl:ême de mon Époufe. Je m'arrête au pFincipe..
·Les -lettres ·écrrtes 'par le mari à fa femme' ne peuyenr renferm-e·r ni délit ni preuve; -elles ne peuvent figure!' ni comme
cflljet de 'plainte ni comme preuve · de cette plaint. N,on Leut'
R.
�(( 6:JJ
( 6-6 )'
ment elles doivent &!tre regardées :Domme non produites,. mais
encore elles doivent être tirées du procès parce que leur Communication viole la loi facrée de la confidence, outtage la ·
digtliré. du mariage & .le 'droie précieux d~iqfpeél:ion ' Ql1e les
l!objet de la tir\l.~e e-f1:J·p~nnu. C'eil: l'i térê~; s'eil: la bafFeff.
maris' ont fur lellrs fem'mes-.
J'
J~
1
" Voyons «pendant ce que contiennent les Lettres , Je;Jes ai,
raporcées en .enrier; je me contenterai deJes parcourir .àpr6fen,t,
Sera ce la premiere de mes lettres .à< ma' femme qLÜ .cQotic{lt
mépris &, ùijfarnatioll ? J 1aurai êliecant qu'oh. Noudrll'!. Vous
a~er ilevé dans mon arné .des folltirneos d'indign dtion qui n,e
finiront jamais? ,Etl-ce là le langage de 1<1 réflexion ou celui d'un
moment de vivacité? Que prouvent ils ces reproches & d'autres équivalens fi ce n'ell que je refpeél:ois & craignois alfez
ma femme pour n'ofer lui dire en face ce que j'avois le cou·
raie de fui dire par écrit? Qu:importe que je parle dans ma
lettre cl'une indignation qui ne finira jamais, lorfqu'après cette
lettre & long-tems après j'ai cohabité. avec ma femme, je l'ai
chérie, je l'ai foignée tendrement & en ai eu des' enfans que
fé,~~il'~_ Far l,!,nC..l\a~nçe ; 4e.., fa . r~p,utac~o}il ,. ~!'\;~foi~-'i ~a~, là, un..
h0llmi1a.ge & r qO;~ù n: outr?gF ,B~~ ie. .l~! . (a.\fpi..s· ? , ' , ,, . ,_.'.
Mai~. ~g!in XRy'pns ce qy' , (yl.t dans se,tt r l~ttre , ~ ,recon-
J
_
'
,
4re ~igfi.
Eh 151ua~d j'aur-9is. vo.ul~ le ~orper .PRur tel, quaD~
j'~urais cherch(~< ~n imppJef. ~)a. Ve(Cll 4e ,I;na f~mme , à ~a,
.
j'idolâtre?
- C'ef! ici qu'on a cru m'accabler dans le lîbelle. J'ai ' dit
â la vérité dans une autre letrre à ma femme: Vous parler prin.
" ['hucipes. , • fJUi , vous?. , un monjùe efi moin$ forouchea
manité que vous a vos devoirs", Jiu quoi fonder VOU] votre
vertu? , , , Efi-ce pour vous être afficié d'intérêts & d'ill trigues
avec un malheureux qui nè reJpire qu'intérêt G' baJlelfes ? ,, /
Iv1.ais a·c-on pu prendre .le change fur le fe-ns de la rir.ade, •••
officié ' iJlintùêts & d'intl'iglles avec lm ma/hellreux ' qui ne rcI-
Rue qu'intlrù & baJJ~? •• L'interpréiilcion
qu'on)ui ~cproche ; ce n',cft point un amant ' 'lll~on veut pein-
.,
dt façi le 4faire').
ll oilfons-y, s'il eft poffible cet Époux djjfamateur & féro~e,~
T{~us ,al! lr' ~Pfl fllf le [q'!d ~-e. r.n:~~ a.pa.e; . vOUf ve{; qu'on (peut
lè
Za..p'eçtre 1I.da; p..r.eulles1 Si vo~s e'l ,é(;e{ ,moins ~?T{1',ai[l(l.t! VPU{
ne vous y jou~"ie{ Po/ ,', .' Je ne p'arle P?i,nt d'outrage & de
diffamation, Il ne p~ut y en , avoir, .comme je l'ai dit" dans
des L~fF~ : ~c;içe~ .par, un mari à [~.femme; ~,ais le ~ty'~e de
mes !eJtr , ~, le~le~timeGs /51ui y .foPt · e~WÏfPé ayec ,exagéraj'
ti~~, I,e Aé[9rdre. q,:i ,y regn~ p.eign~nt ils .un 'Pari qlli (ait de~
prçjets férs>c,e) ? Lailfent ils craindre le ~oil?drç ,d angù pour
la, vie & ,p~9r l'qoJlqfi u~ d~ mon ,flpou[f· ~:: , ,
'1
L
D'Ins lç~ 'lfltres \t;ttres ,:-~'eil: !e mém~ déf9r~~~ ; , ~eA?p.t
les Arêr;nf!~. [enti'1le,n-..
s ; . qu'y,'- voit-on conltamnJenr
1n.liun fi aci
• - ""
amOl1reux de [a femme, un pere idolâtre\) de [es enfans,
· Si
~,
je témoigne d~ foupçons, fi je fais des reproches; fi je
,JI.
.
prends <l.u~l.q~~,foi:; u,q ton jron~que , c'eft;to~jou,r:J pou
1
écal'~!rJ l'hér~tiu , int ~ u5 deJa fa~l1ills . Peilfonel, mon Pfpp.re
-c;qne.mi fr. le perrp'r:b ~teur de mOl) rpé,na.g: , ,~'e~ pour ,Tt]et,tre
en jeu}a vertu de ma femme & l'obliger de rompre toures
liaifons avec ce perfollnage qui m'étoit, odiellx,
i'
(.
)
lil
, M-ai~ , qu'o~
, life la .fill jde n1es leures : ç'e !1:2là qu'çn p ut
u...;
l
, J
• ,_ !~ ..
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1l
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'liser
.J
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,
1.
pe- me~
vrais
f~ntimens....
Commencel E.,,,..'
votre c.arriere
,
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...
J~
J
...
1
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......
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i!e ~()nizhtlf, ~ , ntoz' je 'vira ' allpli; 'e'II~ ~ui 'VI:nIS" :n~-a*t
prMite, OH moment 'm,êm~ ?lt i'a.urois wJldu ":t1urzr." ~
IIIl1tre pctIr 1'oas.. PtfPère tj~ 'Volis' Ize renlfu{ pas 'le fort'
;t-.
4àj JflnéJ~
'tt/J'x
~e1tt.> 'rrr;lh~uyillXj ij'llÎ'1 refl~ ,tî~CC ~ous:'
vous kat ùiiacllt{ 'l~u;" 'jJtre :, ayè:(') dtt rrroin'S' pM:;' e~x
des entrailles ~ck4;re: :.:1 Je _nlticiterai f'plus votre pitié. !le'
voûs ilemanderai feulemint gu:elq~eJois des, -nmivelfffs de mes
St
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III c
A11tebrs je lin~" par
Le
-CiU' I,nè:
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1Ibâi irf 'uop dÏf'l1le. "Jt vôùf Jiriii èncure ~ 'crJûle:; 'Vo;}à rcut"
.
trton:1TfalheÎJr•. ,. Pdurai 'fini ~1n11 ca"iere nutlheureufetrtent;;
tnl1i~ du. m~irls Il'a/Jfai
'ràn
me reproèlzer.
-'.. ;~
. . '
" ' .
. ,
Eh,'b'iéO ! ·l'épOhdez-·tnoi i holnmes impartiaux. &: êfi:rlfrbh:s::
froo-v~z~voùs 8ahs be làhgag.e ' [dl:- més. ~ettre,s rôtit : ~utTe "
cJîre: ...
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ljuTil ' p~bt ~tr~, Ile lang:tge Hl un.dlOlTime J fe~o'Ce & -fêlngui-
naire, -4'uo El10UX 'më~haht qui :veur càlûmnie. ~ èllffa~et
fa. femme? Efr·ce afdfi qu'agilT'ent la m~'éhanceté '&.' la 'Ca,
=lômni'e' ? l:!t - c~ p'û -de"s hYenices qui 'né pdrtoi~nt &: ne
tomboién~
que ' l'Ur 'mcrl , . ,?à~ "'des:'pPcüntes
mal -àrt.i:cul~é.i; :&
"'")
î
.
ijtlÏ dtcel~nÎ: toôjours l'amouI 1kplus teildte & ~l~ plu's 'pafqtorfé 1-. Eft-ce 80nc <te teue 'nianieÈe 'q)re s'exprrme le mar,i
ëtue! 'lX m'échallt jqui veUt détnlhê la vj'e "& la r.éputation,
~e fa fefunie ? 1\h! ihtdrprete~ tn';I~aàroîts, éefr vOu sfeul$;
~urc%),tnrliéz l'e cœu~ :huhiàin:'; c'e'tl::'v'ol1s [euls qu'i , en
()Utrâg~anr un m1ri honnête, 'Outragez &: dHfame,'L 'la fe'mme.'
au nom de qui ' v'ous parlez.. '
.,
Ecartons, en6d ,. ces Iehrès 'q uija'mais ri'àurore'~t. ôfr' lfurtir,
~
'
~~ r~~f~u:l~~ ~ laquelle èlles' étoient. -deftinée's , éèS 'letrtes qui
loin,
( 69"1)
l~n de cléRofe( cont{e moj, ~ j afbifir.n.tc;. J au cont1'~i~ " :}11)-aj tefl~'
dreffe pOll;' ma femme & pour ' mès c.'tIfams ; 1& ftrvent paj\.l~'
même' à combamc c~s preum~us févkè:s ' ~ é'es o\llt!a,es [uppofés qui . compOfcljI~ile)ihell'Cl fomane1qptt ..dQ, milp E~~{e :
écartdns. enc0~e~ 6l1lpMLeQt1œt6.r:rni.cUD(. ac 1lÎCkt1le. ,:.~~' ~9fP$
b ifàrre~de pr,eavè~ a:~oe s.,;,;l1V't a:il"emffia.1HeSi ~ h~a.:C!§ I';~\jr*~~
v,lcieulC de, quelques mi[érab~cs œmoros ,. '~Qrrp~p1ls'; , el1à~.x
tr.inés &' impofleurs.~ Gal'Jjes J le.tncs.,. rex,é~ienl.,c~ld'~Jl.q~~te"
nie préfCllUl!Or. rieinq.u~ pmJffe fooale~ M Jfé.pàr:aJiell 0 l ,r i ... r
C'.effi emrain :. qu:<ia a. eruaHe, les ~rnpoaures fN 'lJs- fl~iQ~5' ~,
les. ('Ilb[ili&~ &l1es (ophifmes., Dr.uoc gralidt:S c~n'-iMFatiotls ' ,
d(!\l>x cJCcepcions invincllilesi-repoolle:r.oD1 I~ détriljrtUH tO-\J.j~(US
ce va.i.n .& .mon'ftru(!ux . .écalagê On. ~ me..l)ep(oçh,t :ÀJ}~ji P'l§llj!~~ '
fé~ocês ., ,' d~ ~r~s ,;,~e ~iu.(liffa~tiOinj , pJr!è~lft§!ligf?~ ~eF~l)(
tdantl . ail " m rh e lI! des', ~nlpKiXrte:m;ens ~ i,dt.s 'J~~~,Ç~~:. q~ra 'ljl
iùppotés ;i ~as 'un Céu! ·coup>,. pa' ume -égra:d gn,ure ' , t'~s 1J-I1
aé!:e ?voifin .' même. 'd'url rniuvais ' rr.aite.m~n.r. ' QUé ,dis. ~ je ?'
wl-rnbttati~nu pai1ihle ~c;\,eŒe.llf. ,alll'S ~
:6x..>.grPi1I~1JitSn:SX .. ,le~ ~~~ '
moigra,ge d, ',iPa:môU.n.l le. p1m~ scoidilran.t.~... ·l~JlQrte!J1eqs ~
rne nn es , 'fi" l'allJ v.e\iUtl; J.o€lqor e (. HC!s b cie~') ~lJrSi r tgu.jÇ!"lliS àe '
l',unour pour
'fe~J!l'llfe & , pour' rnq-s enfa:ns r; ! taJ-<tuGe ' ~ ' ,1:'--
ma.
-pro6hes faoglàrrs: ; fI ' l'on. v.eut! en~QJ'e" .ro~SJ p ~pl.i ~clolrs ,de '
~'efiim.e & même du refpeé!: ; ennn , propos inconfidé.r.éfij ~
raé!:àttctsqrèrprl!ct!ëS, l'lùel lès:...e1il!fàns' hé fonr: -ns ià:::Iilll~_" c.;1i~e nd~n:t : oe( la'.4:end~eH'e; ~c crlr~ ll'ido.lâruie ~ P:Otlll" ),Q:~ 'rnpme~ é,nfa~ •.
QLJ'O~ fe rap.palle mes: lettres~ Jly pardé ~qsf c~fftl ' d'elix; je::
ne fi, oC4:L1ppe
qu.e de leur fun "\ wlIltnui.d'hui': {ur rou'
ce fon.,j c
.
•
lès ' fe.ub o~Jets qui lltl.e--:çonf61leac·ttms mes- ioq iéHlld\j$l; (;'~~ :
1~
~ , ~
s.,
�'( ;0 )
(~ .!1~
)
pouche \lnJa!lgage déme~i par foo oœ~r ~ par fa .bouche
elle-même. Qui mieux que moi doit ·Ia · connoÎtre? Elle
'peut étre crédule & tàcile ·à tromper; mais elle eft vert~e u[e ~ -f~n1ibk; ene , aim~ . r~s enfa9s ~ .(on r T ari ; _eU y
en oeux .fepls qo.e je recc;ouve ma Jemme. ; & que j'eistrevoîs
l'efpérancè d~ne heateùf~ rélilnian.
~
Te dis plus, & c'eft ici le grand moyen de ma caure. Ma
femn-ie fe rp1âint de- (}lwaces-" de Jmt€piîS; , de diffarrll~tion &:
â~olltràge$; LiiOns -Con , exptdreot:l, (UD enquête & [es . lettres
qlJi lresf~l'ffient.~Ol1c. àJlh.fois,Î& fes. plaintes .& fes pr:euves. ',Ves
derniers ·fair~, les dernieres époqu.es,·iemont.ent à prus de' llX
mOIs . avaRe: fa! difp.arution. Pas uw[euDfait récenc.l Tout dl:
ancien i toUe III ité oublié; tou't a"'1éué liffacé',pan un:e iéconciliàtlon iuàtlif~ne ; enfin ~ <.ceue ~ dconcilianon i a été: féèIJée
d es a'aes 'rerpea~fs: l'es' lJ1oil'l' équivoques c , & les plus' Ilefpectables du mariage. Que craint donc la ' Delme Ballthelemi '? Que
-doÛ'crairi'dr'e lal loi p<llff elLe? Eh.. quoi:! cette fenlme qiui , le
;oÎlI" dè .1à1metiace ,-qui leiJenderi~ain " qui ~ lès rjollJ'S [uivans ,
-n'a
craÎnt pdLir fa vie -, quioa cohabité paiffib.lerrilltlt 'aveo fon
mari; qui a vu les emportemenSr ceffer "le calme renaÎtr.e 4
le plaiûr fuccéder à la ' crainte dans les' douces étre1 n es · 'âe
• j1amour :coojugan.Qudi 1 ~etté femme àinG con(0Ié~, aioû
ratruréè, viendra, fix' mois _après, ffa.ns nO,uyeau Cu jet " fans
-nouvel1~ craint-e, eJemander:la fépa-ration , & l'on;'veut qu'cHe
l'obtienne! Ah !', jnléfie qu'onrrouve un préjugé, un exemple,
\lne raifon quelconque qui>aurorlife- Ulle prétention, auffi révol'-tant-e.-' 'uo/.i 2 '. '1 ~ .. rh r f )1·1:)1 .) '" rr ?J "f. l i
- Mais ,ce 'l'l't'eil: , PÇlindcr rIa. Dà111.e.: BmflelelTll ~uhpark ~ J ç~
fOPlt ·des infpirate~rs fo~cénés, érnoeniis_de fon' repos ', enclins
à faire du l'nal, acharnés' r me nuire, heureux fans doute
par le malheur d'aurrui; oui, ce [ont eux qui Ont dirigé les
j l'a~ ' d~ ( m tez)femm-e ë ~ téç' " féduite ,. quj, 'p'rêt.eh ·.à f~
aime & refipe&e
fes ,devoirs. El,ie ciL
abfGlum·ent.
I,' ncapablre
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joper. d.ep~u ·s ft long-te,m~.
Lui ,accord,er par conféqu ~ Llt la féparation q~',elle !le-ma l1 de ,
c'cULlui
el1lever iuCc.u'à l'dipoir
du bonheur
.; .c'eO:1la
dé.vouer
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à _ùne m9rt
le1nte__ ; l(Jla ,fa
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t'lrécieux J des Im ,O, ! rs ~ , i[ur r. les dro-its 11 plusoyrécieux
t'leur-être
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de .~la nature?
Qu~lle ju.{tiq: y , ~-\,]ro'f_i,l , saU:lolO_m-ar~ tendre,
t.
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,u n pere fen(jbl~, . un citoyen honnête" fût aifligé d'une
féparation outrageante ,p ar fes mo.tifs ' . & . défe[f ~ ~aote par
{es effets?
Quelle juftice\, qu'il ftlt féparé (ans , fuiet
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befoio de cel1f,!que- Dieu, les hommes & N·a/Piouf lui. allt
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.donné.
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Si .les femmes [ag.es & vercueuf.es, ûceI1es qui ont · droit
de fervir de modeles à leLlrs femblables afpirent à J'indé1.'
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v narv Î.eLlpen.t par la calomnie, qud ex ~ mp e
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moins. ~e , r.et,enu e, o ne plu ~ ,à 'ior érêr de .parvenir ,à l'inMIJJI
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end ~ nce l, Q uel exe mple effrayant [ur-tout pour.1es llOmmes
4e!1:î.o.és au mariage ! Qui d ' en [ r'~ u J( , Ilprès dt' ~ f~ enes a~l(fi
(caudaleufes , - a\lra ' ie courage &; la haràieife èI;y fo nger ~
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'AlT'ez d'embarras & ' de peInes tntouretrr certe doucé & rerriblè·
union. Pourquoi ' faut - ~l 'qu'un ' mari- craigne . &ncbr'e dans! fâ·
CONSULTATION.
Compagne le cenfeut le plus rigoure\Jx, le juge lê plus fé-
fL's aérions ·?·Un h~rnttiè .
né honê~e:e.eut répondre de ta dtoifore de fc!s' fetlrlmen!l; /hais
vere
,
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le tém;ih le plos calomnieux de
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p'e,uc":il r~p6~d.re .d>'un lnomenr,'d'e ' jalbuGe & de y.j aCicé:
Nd_
& ouï Me. MARTIN, Procureur au Parlement.
LE SOUSSIGNÉ, penfe que le fieur BarthelemÎ paroit avoir
bien démontré l'injufiice de la demande en féparation formée
contre lui, en établiifant, comme illja fait, l'infuffifance.,
l'invraifemblance & l'abfurdité des préuves dont on a voulu
l'étayer. S'il efi vrai que fa défenfe laiffe quelque chofe à
defirer du côté de la difcuffion des points de droit, il faut
convenir qu'elle efi convaincante par les faits & les raifons,.
& l'on peut ajouter que fur une matiere auffi fouvent difcutée
& auffi arbitraire que celle des féparations, ce font les faits
& les circonfiances qui doivent fixer la difcuffion. Ici tout fe ,
réunit pour obtenir au lieur Barthelemy le fuccès de fa caufe ;
{cn-t-il fans trembler qu'à propos d'un gc~e & de quelques. .
pa'rol~s. ;
il
pui~e
trâd'u'~t c.omme h10i auX: pieds dè 'la j'u(_.
tes c&i'lcitoJehs,,;r~r'étlinté"ébA,tn ~ dn~~5rTI:,.
,
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me féroce & ' fanguinahe' qùi Rê trérplr~
'tièe & d'evàn'c tbu$
uè " drn~gè ..& J
f'~bd , conda~ nl peut-~tre \.pat'u~ fùgem~n[ qui
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If{-m d-iAun tabfea'u ' ~0f!i' Hri~y.anr. ,
_. ,Mais je' dét?urne loid
~J'6ùblie1 metne
que
1\Ji' enl~\re' t OUt:
:à' lffois, fa femme, ' fJh 'honneur' & fa vIe'?
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~u~ Î des lJoudh~~ '
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éttangéte'S
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' oin pl'od~Hes ' & que ina femme â fahs dbll-fe méconnues: J~
_. t eux.. plüs v6irquè - 'dës objets bien 'lntéreffaris
nrré
,
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~
pour
,
~of
&
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-dignes de l'àttenrion' de mes Juges, Ce font' deux e.nfans
~b~ureux
~
qui {ollft itent
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ra
réunion -dé
~e'u~
•
~
mat-,
jufqu'aux efforts qu'on a faits pour le calomnier.
dbnt-11s bb't ';ècu te,
le Mémoire cÎ-detfus & les diverfes Pieces du Procès;
...
-rour. QüeUe teçon crueltè pour ' eu'x , fi, pou'vanc:d'ittinguer
~ie.ntôt & I:ur Eere & leur rnere, i}s ne voyaient entr~~u~ que
d,e l'éroi,gnemem , de la haine- & un~ diviGon perpétu ~lie' qu i,
VILLECROSE, Avocàt.
~es ferolt ceffer ,d'êr re ce qu'ils furent autrefois quand ils leur
donnt'ren~ la vie t M'ais quel fpwkcle_(ublime fi' , (réJ,~is to~s
e.n~embrè ~ nous pouvons nous confondre dan;Jles tra~rports dé1
d e :concert
' , un
hCleux de la tendreiTe & de t'amo"r
" , & b emr
Juge~ent qui rend au x uns un Époux tendre ou une É'poùfe-
~;uloree, & aux autres les auteurs bienfaifans de leur exiHence. ,
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OBSERVA'
. T IONS
POUR LE COMTE DE MIRABEAUr
) Dieu veuille nous rejoindre bientôt; car nous ,
» ne fommes pas faits pour être féparés.
Letlre de M adame la Comleffé de Mirabedu ' a Jon M-tri>
qui ne ra jamais revue depuis fa date. ( 15 août 1774)'
,
.
M
! ADEMOISELLE de Marignane épou[a-Ie n ·de juin
177 2 le Comte de Mirabeau; & tout le monde
[ait éans cette Province fi "et époux n'é toit pas de [on
!
t
choix.
Ell~ donna le jDur le 8 oétobre I773'. à klll fil~ 'g-ù'elre
nourrit.
'
.
. 1 • , •
l
En 1774 les [ymptômes â'urre Jlouvelle gr~ireffe diEparurent au milieu d'un rhume violent'.
Le 23 oétobre de la même année 1774, Madame là
Comteffe dé Mirabeau partit pOUf Paris à la priel'e de
A
--
,
•
•
�z
{on Jl!ari é\1in d'y prévenir fon beau-pere l>< fa famille -'
fur les fuites d'une affaire bifarre & ~alheureufe, tOUtà-fait etrangere à Madame de Mirabea.u , dans laquelle
fOI1 mari fe trouva engagé par un fenument honnête Be
une démarche impruqenteDepuis cette ép?que !'1adame 'de ~irabeau ne. l'a ja~ais revu. (Le fa~t.eft lDcontenable &. de notorlété puMique ). Or, VOlél de nombreux fragmens des lettres
qu'elle lui écrivoit , & de fa route, & de la maifon de
fon beau-pere, où, pendant dix-huit mOls, elle a reçu les
marques d'amitié les plus foutenues, où toujours elle téInoiana p ur foru ma:ri un vive tendreire. On tranfcrÎt ces
Ie.Hr~s <IVe!> d1aatanr. p us.'· de confiance ., qu'elles fOnt
honorables aux deux époux, chofe au moins infiniment
rare.- au milieu de tels déba"ts.
r
•
Mardi 23,
)) Je pars enfin, mon ami ;. ne me gronde pas; car
»' j'airêF.affé hier ' la pkls tdft~ journée q\)è j'ai.e jamais eue.
.' » M . d€ , *~t }l1'a EU !)le prêter [a chaife: ie n'avois plus
» que cette reirource; car j'ai demandé à tout Je monde,
)-) de ma connqi{fance ou non. J'ai écrit aux uns, fait
» parler aux autres. Enfin j'ai été réduite à en louer une ....
), "7\~teu~ ar~. Je volis regrette tous, tous les jours
» davantage. Mille complimens. Je t'embraire, mon bon
) ami. J'ai écrit à t.a Cœur i écris moi vite.
3-
.,.' a {li'
rette bien à prt!fent tous les ,~omens q~e, ~ al"p es
)) reg ). d
'Si J"en ' avois un a l'réCent" Je J:empIOY,e-
aupn:;s e tOl.
•
'ai fait
'
,
)) rois mieux que Je Il IRAB;AU N'A JAMAIS. ,REvu SON.
ET MADAME DE M
l
li.
MARI DEPUIS QU'ELLE ÉCRIVOIT CETT.t: LE.TT ~.
»
.
De ' Lyon '25, aO\Jt 1774
~
» Je viens d'écrire 'à ton pe:e ,(a~ .mle~ Il~ ~:~ser~~
» à préfent c'eft ton toUl: - •••• » , ulv~n (
Bi non
voyage). » Tu aurois du penfer ~ m y
?u '1 g!Ii 1~
e Marquis de Mlrabeau ou 1 pa e a
1 M. l
terre (e
ç', aur~lt. é'te un gr~n d
belle faifon ) adreffe: une lett~e..»
» confortatif pout mon üne. Je [UlS tflne ,mo~ o,n
. Je Cuis déJ'a l'aire d~ -ne voir que rdes. gens que J~
» amI.
'
1 ' té ' , 01
» ne connois pas, & qui ne prennent nu lnre~ a ~ •
)) Je touche' quafi encore à la Proven;:e, &..Je la ,re~
dé'a
du ,moÎ-ns les. -üeux. 'lu/tu . llabues. DIeu
» grell e • ' : J ' , ,
1·
C
» vèuille nous rejoll1dre bumtot--, car- nouS ne omme.s pas
)} faits pOUt être' fép,~.~és. <)A1dieu , ln-0n. tendre amI. Je
» t'embrafl'e de tout mOÀ' cœijr.
'".~
\ l
"
ET MADAME DE MIRABEAU N'A JAMAIS REVU, DE~
PUIS QU'ELLE ÉCRIVOiT CET'tE LÈTTRE , CE MARI DONT
ELLE N'EST PAS FAITE P.()tJR -~ El'RE- SÉPARÉE; E~ PONT
ON ASSURE ' QU'ELI,~ ' VEUT 'lt;mE -SÉ.PARÉlE.'
-~ ,
,A
Que Ji hm préten~f,) ê6fiill1ie '~~' fJttérëifés le r~~ndent,
D'Aix le Lundi matin.
» Tu n'auras rien compris à ma lettre d'hier, mon
» ~n ,ami, .J'étais fi troublée que je ne [~vois ce que je
» fauois •• _.. (détails relatifs au dépàrt & à l'affaire du
Comfê de Mirabeau, au milieu defquels elle l'ap,pelle
mon bon Allge). » J'embraire ces Dames de tout mon
») vœur, & te recommande, ainfi qu'à toi, mon pauvre
) gogo., CfoJ1fils),_ Aq.ie~" mon ,bon lX ~el!dre ami. Je
,
flue ·les expfeffioAS' de laé.tendl'efi'e de- ~adame de Mml~eau
n'étoiet1t que l'aéle de généFOfité , d urre femme qm ne
n ll~mafquèra
veut · ~as -})'ldfer un 'ép~~x ' =t.nat~~l'eüx
qlie ' cette ' ~ettre -du 25 ' arn1t,; é~n~e tllO'l? Joo~~piè le
départ: de · Ma-dame:tde . Miiahe-àù,J& FJu5 '~n nfiU)]SlaV~rlI
la détention de [on mari, n'eft pas ütfO'eptib1é de r cctte
explication of;E.cieufe ..do~t au r~fte o~ appréciera la va~
leur en. lifant les letfl'es. fuivàntes. - ~
:.: _
~
11 _',
Iii" arr '-' .l\~ii:·' ~~
J c:
- -"
�•
4
5
'Tu n'as pas befoin que je te dire, que
rabeau ) )~ .. ~ . .'
e fera J'amais rien auprès du tien,
on necellaue ne m
,
cl
» m
"ai & aurai t'appartient comme e
» & q,ue' todut ;~ que J Mon beau _pere me cita l'autre
droit & e laIt... . .
,
fi
)} ,
'
1
'[ons
qu'il
me
donnolt
pour
re
er
arm 1
l . es lralnéceffité d'être ton Avocate. Celle,JI Jour,' Pd
) aupres e U1, a
'fai
'
il
ne
fe
plaint
de
ta
tete
qu
en
•
'
e
plut
J') Ja m · · · · · · ·
.
,
bl
ur
[ant l'élo e de ton cœur. Enfin, il ,m a~ca ,e. po
;; mon cQl!pte d'amitiés; & il efi fûr qu on, ne tr~lte pas
Il ainu la femme d'un fils dont on ne veut nen faire .• is'
}) Je ne fçais quels ar~angeme~~ prendr~ pourr. ~on L~ ~
» Vois, mon bon amI, ce .qu Il t; plaIra ' de aire;
In
» tention de mon beau-pere efi cl envoyer q~elqu un de
) confiance d'ici pour ie prendre • . • . SaVOIr. . . .. ft
Il tu veux le confier à quelqu'un pour l'amene~ , ou ft
tu veux attendre qu'il [oit fevré ,& nous Je fenons alors
:: venir; car, à te dire vrai, je crois que fi nous nous,
)) conduifons bien l'un & l'autre,,' la Provence n.e nous
" fera plus grand chofe." " Apres ~ela,. mo~ amI, ,pour
) peu que LU penfes qu, J' te puijfe ure nec1Jal,re,' uttle ou
Il agréa61e, écris.- moi. & je YOler~L avec ,gla,nde J0Le , quelqu. e
» part que LU folS. Je IZe te jerat pas ',Je t affure, .de facr~
)) fieu ; car malgré tO\:lS les bons ~raltemen~ qu; Je r;çols
)) ici je ne m'accoutume pas; Je ne pUIS m empecher
» de 'penfer que je fuis ici étrangere, & ne tenant à rieR
)) par le cœur. De forte que je cherche toujours fans
» jamais trouver.
•
•
)
" De Montargis 30 ' aoCrt.
'}) !Je luis (arrivée 1 hier grand matin, mon bon ami .. , .
(Détails des attentions de la faniille du Comte de Mira.
beau qui 'avoit été au devant d'eUe.) » Adieu , Mon
» ami; je t'embra{fe.
Du Bignon JI.
( Détails DOOlell::iqtles, - il1utJles à communiquer au public ,.& quLprouveront, fi !lon s'obfiirte ,à cOhtinuer ce
trifie procès, que le plus vif deur de Madame de Mi.
rabeau étoit de revenir en Provence auprès de fon mari,
& de lui' ramener fon exceIIent oncle. )
(
A
.
Du Bignon ,3 feptembre 1774.
, : )) J'ai enfin vu mon Beau-pere j mon bon ami; ) ( Il
étoit aux eaux lor[que Madame de Mirabeau arriva chez
lui.) )) ..• Il ,m 'a propofé de refier auprès de lui le tems
]) que, tout ceci durera'. Sachant tes intentiol}s fur cet arti» , cle, je n'ai POto.t r.efu[é: mais tu ' [çais, mon bon a!l1 i ,
» qùe je fii. 1(iU}(l.YlS tds,.·i;lifPoJée, q te. fuivTe, ou , 4 l'allu'
» trouver en queLque lieu J fj~e. c~ {'où, & avec un, grande
» joie. je l'affure. »
l
'
ET MADAME DE . M;lItABEAU N'A lAMAIS REVU, DEEUIS QU'ELLE tCRIVPIT, CE,' Tl;E LETTRE, CE MARI D9NT
ON PRÉTEND" QU':ELL.E 'YJWT ~ETRE Sf;P .AR~E.
__ ,
» Il-m'a edit <ly'il n'y aYQit pas d'autre parti à prendre
que de -te foufiraire à la Jufiice. (C'étoiten 1774). J,
lui ai Plop~fé de te févr" & il m:a dit que cela ne
Jeroitnpas ' déc~!1t. II .!1e çe{fe ,de .nlf! répéter ;, lui 8ç
t,QI4~ le$! aùtr~~) que' ,je fl!is içi çhll,z ~oi • , . " Adi~~ ,
» 0101} bttn r <uni:; . j~ ;t3a!me .g~ ' tout f;mon: çœur, &_t'ef11» lbraife de;1même.
,
,
•
»
»
»
)
0
' .
,
, ET MADAME DE MIRABEAU .N'A. . 1AMAIS REY'U, DEPUIS QU'ELLE ÉCRIVOIT .CE'I:1lE LET1'RE , CE MARI
DONT ON PRÉTEND QU'ELi~ VEUT ETRE sÉP 4-RÉÉ.
'\
,
t'
[
.• Mercredi au foir ,,6, fçpte~bre Ii774.
(Détails ~itfès - honorables fur l'affaire de M. de Mi~
,
,
-
,
•
.
~
•
..
-
J
Du Bignon Il Septembre 1774. _
'f) Tous mes efforts ont été inutiles, mon tendre amI"
li &je n'ai pu te fauver le coup qui m'accable,» (l'ordre du Roi qui envoyoit le Comte de l)1irabeau au .
,
....
•
1
{
�7
les ordres que tu me donneras. Adieu mon tendr~
» ami, je t'en:braife d~ tout mon cœur. Eçris moi,
» car je fuis bien en pellle &. j'ai bien befoin de- ce fou-
lJ
6
Château-d'11f j; » ton ' onc'l e & (on pere m'ont afii
» qu'il n'eût pas été en leur pouvoir d'empêcher le Gouvuré
» nement de te punir de la rupture de ton ban 8{ ~rl.
» n, ont r.'
laIt, d u mOllls
ton pere, que s"approprier pIS
}) leur demande, plus de droit de t'en tirer_ To~ oar
'aIallure
r . ' qu "1
fi'
l
Il·
» cern
1 s en erment , es. plaltres dans tres.
l
» peu de tems. T,on., pere .a ffefre tOtlJ?UfS. beaucoup de
» colere contre tOI; Je crors, pour prevemr mes impor_
» tunités. Tu penfe. bien qne cela ne l'en foulagera pa~
» davantag.e. Je fUIS dans la plus profonde trifieife de» puis qu'on m'a apris que les Minifires avoient expe») dié l'ordre; car il n'a pas paITé par ici; &. ils *
» étaient infiruits même du décret quand mon beau» pere a écrit. TI:! ne me fors * pas un il1fl:ant de l'i.
n déc,. dans l'état affreux où te mettra cet ordre. Les
» larmes' couleI;1t de mes yeux dès que je fuis feule ou
» qu'on parle de toi. Tes lettres font encore pour moi
» un fujet d'atte~ldriifement ••~ • • Au refte, mOIl bon
)) ami" j,e fuis ici parce que .tu, m'y tiens. Du momen~
» ou LU n;e ,defzreras, lU Il' as qll ~ èi farler & je vo'~/ai . , , '.
)) On f i a' dit que la regle étoIt, que les pnfonniers,
») d'Etat ne
recevoient point de lettres ; mais 'qu'on
» avoir ~emandé per~iffion poel" que tu puiifes être
» en comm~tce de' lettres avec. moi. Mon bea~-perè élI
» vo~Iu eXiger ma parole que je ne me' char.gerois
» .polllr d'aucune lettre. Je l'ai,' refufé net, difant que
» Je ~e, pou vois pas la tenir, ne' pouvant ni ne vou» la nt nen fe fefufer • -.•. Adieu, mon bon ami, Or·
» dO,nné'. de moi. Quand- j'aurai : de l'argent il fera ~
)<)
to~ ~ alnÎ! que t01:!te ma perfonne. Conferve ta fanté,
» fOlgl1e-la, &. c.ompte fur mon zele pour exécuter tous.
l>
lagement.
ET
MADAME DE MIRABEAU N'A JAMAIS REVU SON
MARI DHUIS QU'ELLE ÉCRIVOIT CETTE LETTRE.
A
, ,
{~) Ce,s mots ont' été enl~vés par un éclat de cire; mais il ea im·
pofEble d -en fublbnrer cr.ui intmer!iifent le fens de la l'hra{e.
•
Au Bignon 22 feptembre 1774·
» Tu me dis ., .. que je t' annonce avec l'air. le plus
l> tranquille que tu feras enfermé . .J~ t'aifur~, mO,n
II tendre ami, qu'une pareille tranqUllhté efi bien lom
)) de moi. Mais fouviens-toi combien tu m'as recommar:·
» dé dans ta premiere lettre de ne pas m'effrayer dt:
» quelques mois de Citadelle. J'ai cru devoir te diffimu~
» 1er tout ce qu'il m'en coûtoit; mais tous ceux qUl
» font ici, &. qui oM vu mes pleurs &. mes inquietu» des continuelles, pourroient t'affurer que je n'ai pas
» été fi brave que tu fembles le croire, . . .. Je t'em») braife mille &. mille fois, mon bon ami.
Au Bignon le 26 feptembr e 1774·
» On m'en apporta une (lettre) de ma mere, &. point
» de toi. Le courrier d'auparavant une de mon pere,
» &. point de toi non plùs. Serois-tu malade, m on bon
» ami? Voilà ce qui me tourmente. Je me fais fans
» ceife des images plus ailligeantes les unes que les
)) autre~' ; &. mon imagination me les perfuade au point
» que J'en fuis tourmentée à l'excès. Mon bon ami,
» la fe~le efpérance de te tirer promtement de la trifie
.» firu?'tlon _où tu ' te trouves _, ple la fait fupporter.
» MaiS éCrIS moi exaétement fi tu veux me rendre un
» pev de tranquiI1ité. Mànde moi comme tu es ce
,
'
» que tu veux que Je faife &. que je' dife .•••• La bile
,» me fuffoque à un point furprenant. Mais c'efi là ce
» qui m'.occupe le moins. Je ne puis _que fonger à toi
�-8
» Be à mon pauvre enfant dont je fens rudement la '
» vation. Eft-il poffible que nous foyions ainG fép~~'
» les trois. Cette idée me, navre le cœur & remplit ~ S
» yeux de larmes. Mon tendre ami, prends Courage ~
D. efpere que nOlis I1'OUS rejoindrons bientôt & que nOliS
» j èl)tirons mieux le bonheur d'être enfemble. Adieu m el!
» bon & tendre ami .... Je t'embraffe mille & . milI~ fo~:
ET MADAME DE MIRAB[AU, N'A JAMAIS ' REVU'
DEPUIS QU'ELLE ÉCIHVOIT CETTE LETTRE, CE M
'ARr
DONT ON PRÉTEND QU'ELLE VEUT ETRE SÉPARÉE.
»
))
l>
»
Au Bignon le' 29 Septembre.
» Que ne RUls'Je mêler mes larmes avec les tiennes
mon pauvre tendre ami! Je n'ai pas befoin de te dir~
combien ta lettre m'en a fart verfer. Tu connCùis afi'ez
mon cœur & mon tendre attachement pour toi pour
juger de l'effet qu'elle a produit fur moi. Tu as été
trifte en paffant à Peyrolles. , Il femble que ce foit
un effet ,de la fympathie qui nous unit; car le tems
que j'y paffai en allant à Aix, fut auffi bien cruel
pour moi. Efl' tout, jama'is féparation ne m'a tanr
coûté q.ue celle -là. A prUent, 1110n bon ami, ne .
J" al·11 e, &
J';
m'y
' rendrai tout de fuite,
,
.»,
d' tre volonté que les tIennes.
; ~) n aYM:D:~E DE MIRABEAU N'A JAMAIS REVU, DE4
ET U'ELLE ECRIVOIT CETTE LETTRE, LE MARI
PUIS Q
TEND QU'ELLE VEUT ETRE SEP ARÉE.
DONT ON PRE
1 tt une
. fi l'on veut trouver dans cette m~me e, re
- Que 1
d la douce familiarité qUl regnolt entre
autre preuve e
,
ces deux époux, qu'on life ce badl~age..
.
» . . . . Quant aux autres polIffonner~es,,Je, vou~
~) rie de croire, Monfleur le Comte, que Je fUIS a pré
,» ~ent une Demoifelle trop chafie pou,r les entendre.
» J'ignore abfolument , ce langage. AdIeu, mon bO,n
» Ange. Je t'aime toujours de tout mon cœur, & Je
u voudrois bien te le prouver.
tu "eux que
A
»
» penfons p lus qu'aux moyens de nous rejo indre •• •. Il eft
» effentiel de faire dire du bien de toi par le Comman.
» dant. AinG., 1110n bon ange, ufe de cette magie qUte
» tu pofféde fi bien quand tu veux enchallter qu.elqu'un.
Le COl11te de Mirabeau eft trop bien payé pour ne
pas fe croire bien favant dans cette magie; m ais nOlis
ne pouvons que répéter·: Voilà ce que M adame de Mi.
. rabeau écrivoit en 1774, A SON MARI QU'ELLE N'A JA.
~AlS REVU DEPUIS •.
Du Bignon 10 oLtobre 1774·
. Je ne f,çais fi l'e t'ai mandé que mon pere m'a
» • ••
. . d
-1> fair offr,ir fi je voulois aller le J0In re au cas que ce
» féjour m'ennuyât. J',ai f~i~ rép?,fldre que dans ce , mo:
» ment-ci tu me VOUIOlS 'CI Jufqu a ce que tu fuffes hbr~,
» ce qlle j'efpérois qui feroit bien~ôt ~ qu'apr~s- cela Je
» ne favois quelle feroit notre hal>1tatlon. AdIeu, mon
).) bon Ange, penfe quelquefois à ton Emilie. Je t'affure
» que je n'ai d'occupation agréa~le que, celle de. penfer
» à toi. Une circonfiance finguhere, c eft que Je mets
» une grande affiduité à mon ouvrage pour pouvoir rê» ver en repos Be fans en avoir l'air.
ET MADAME DE MIRABEAU N'A JAMAIS REVU, DEPUIS QU'ELLE ÉCRIVOIT CETTE LETTRE, LE MARI DONT
ON PRÉTEND QU'ELLE VEUT ET RE SÉPARÉE.
Du Bignon' te 7 Ofrobre.
» .-.••
à mon féjour à 'Paris, tu fçais , man
~ cher amI, que c'eft toi qui m'y as envoyé. Du ma·
l> me!J(, où. je t'y dé plairai tu· n~as- qu'à me mander GU
tlX
Au Bignon le 13 oLtohre- 1774.
)') Je n'ai reçu ce courrier ci , mon ami, que ta lettre
» du 18. Le délai dont tu te plains eH jufiement celni
' }) que je t'ai expliqué dans ma derniere lettre. Tu es bien
)1
»
»
»
9
l1.ant
B
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»
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(J.
jj
.,
" ment que
lU
me demanderas.
ET MADAME nE MIRABEAU N'A JAMAIS VU , DEPUIS
QU'ELLE ÉCRIVOIT CETTE LETTRE, LE MARI DONT ON
PRÉTEND QU'ELLE VEUT ETRE SÉPARÉE.
_
.,)
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»
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'»
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»
"
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b
tendre am.oUf, je t'embrà1re <Te t..out mon
"nion on ~
1
œur. Quand fera.c,e tout de bon.
,
J) c.r:
"
de
farce
d'
.J.prit que tO~ dans le malh~UI"
P e'J onne Il a pJUs
<Jf,
l l'h
Cette phra[e efi très-remarquable. C efi ,( ~
~mme, qu~
'nt fi fougueux, que la femme q~l Jufqu alors avo}t
l 'on p
ell A
dIt que perÎonne n a
été la compagne de fon ~a etre,
!'
LIIS de force d'eJprit gue lm dans le malhfllr. SeroIt-c~ da~_!i
PI b
h r que l'homme qui a tant de force d efpnt
e on eu
1 "[; fi
c tt-fi
au milieu de l'infortune , auroit ma ,traIte, La, e~me ., e
Co
q i ne l'a J'amais revu depuiS qu e e eCflVOlt ceue
~cmme u
! '
'
f. '
i 1
lwre, fi que l' Oll prétend vou Olr , en ure J epar e .
'bon
mol1 doux ami, de t'inquiéter au fujet de '!ll<l
fant/: elle efi bonne à préfent. Mais comme je touf.
(ois fort au commencement , mon beau-pere fit venir
un· Méde<;in de Montargis, nommé Trzofon, qui m'ordonna des bains pendant trois femaines, des veffica_
toires pendant ce tems-là St des médeci,nes. J n'ai rien
7
f ..it. de tout cela, & me porte affez bien, a un peu
de bile près, que je c:ompte diffiper. avec un ,peu de
firop de chicorée à la rhubarbe, & une petite mé.
decine. _ •.• Pour " qui efl de mon fijour ici, je te
répete ce qiU je t'ai déja ,dit: j e Juis Il us ordres au mo-
Au Bignon 18 oélobre 1774.
(Détails .domefiiques & pécuniaire~.))"", ~on pau·
"re petit goo-o ,( [on fils) comme 11 ~Olt aVOIr pns de
1:)
,
•
' me
la conhoiifance
depuis que Je
ne l" al vu.1 A u ffi1 Je
,promets ut;1e bien grande joie la premiere fois que je
[erai aifez heureu[e pour l'embraffer•. En tout, outre
les .raÎfo.ns plus .que fuffifantes que j'ai pour [ouhaiter
de revoir la Provence, je fens que je l'aime miel)x
que ce pays-.ci i & ce qui ,te par?îtra, fil1guli~r, je
n'ai nuIJe . curiofité pour Pans, mm qUl en aVOIS tant
autrefois .••. Adieu, je t'embraife de tout mon cœur.
Du Bignon le 24 ofrobre 1774..
) .... Je veux te tenir au fil de -toutes mes aéhoDs
» pour n'en faire aucune qui te déplaife. Ainfi, du ~10'
» ment gue je ferai à Paris, je te manderai rout ce qUI fe
~» paitera. J'ai été frappée ~ mon ami, de la patience avec
. » laquelle tu prends ta trifie {ituation. Perfonne n'a p!us
.1)..,de.. t;olce d'efp~ü_ .gue t9i dans 4e mal.heur...•. Adieu
L..
Du Bignon le 25 oélobre I77~.
Mon cher ami j'avois bien penfé que tu fero~s · fou» ~)a(1é en apprel1a~t qu'on ne lai{foit pas le. public clans
l 'I,bdée que tu euifes mérité un décret de prIfe de corps.
»
'
» Ton pere m'a pro~is pofitiv:ment qu "
1 ln' en re fi ero.a
)) pas ' traee. Je 11~ fms encore rIen de plus que ~e qU,e Je
» t'ai 'mandé dans mes précédentes lettres. Tu Imagines
» bien que je ferai à l'afftlt des prerilieres nouvelles pour
» te les mander. Quant à ce qui -eft de retourner en Pro" vence, je l'ai dit. mon. amï, & je te répele que je Juis
i, a lU ordres, & que du mommt où je te déplairai ici,
» j'irai où lU voudras • •• '. Pour répondre à l'article de
» la Citadelle , je te dirai , mon ami, que quoique tu
» me manda{fes dans ta- pr~i~re lettre que tu t"y at» tendois, je n'en ai- pas m0iri·s f-ait mon poffible de tou» tes les m-anieres pour l'empêcher. Jete jure, mon
» ami, que cette ti,gu~\:Ir m'a coûté, 85. me coûte certaine» ment bien plus qu'à toi. Airrfi , mon bon ami, je me
)l flatte que tu' me èOlmois trop bien pour mé croire ca» pable d'avoir pris mon parci fU'r ce que tu paroi{fois
)l . voir cet- événement avec fermeté-.
Je fuis encore bien
») perfuadée que tu ne me fais pas le tort d'imag-iner qtle
l) tes charmes de Paris, comme ' me mande )I->t}t aient quel-:
B ij
-"•
-'--
�1'2
}} que pouvoi'r (ur moi. Pr~miéren:,ent ; .rien n'eil moins
» felon mon .goût que la VI~ que J'y vais ~ener; car tu
J) fais bien que je veux avoir
la hb~rté daller par· tout
» pour jouir voluptueufement du plalur d~ n'aller nulle
J) ' part, que je tr.ouve. délici.eux par la
ra.lfon que. c'ell:
» mon goût que Je fUIs. Mais tu penCes bien. que Je ne
» trouve pas ma fituation fort agréable à traîner à Paris.....
» Je n'ai point de nouvelles de mon pauvre enfant. Hé» las! mail ami, depuis que tu ne m'cn donnes plus, elles
» font bien rares; mais patience: il faut, comme tu dis,
» attendre le bon te ms , quand on efl dans le mauvais.
» Adieu, mon tendre ami, je t'embra{[e mille fois de
» tout mon cœur.
t
»
»
»
»
»
»
13
net froncl. Mais on ne s'en croit .pas moins le
~~~it ~e dire: c'efi bien l~i qui, efi le
mart de .Mad~me
alU ne l a pas revu depulS .qu elfe
7..
d 'l'
, . 't cette lettre' & ,'e fi bun lUI aollt on preten
qu e le
ecrLVOI
,:r
• . dl'
'Veut être /éparée. Que fi l'on trouve encore l~l e a genéroJùé qui ne veut pas écrafor ~n malheureu;; Il faut co.nvenir que cette génér?fité ferOlt un chef-d œuvre de dlCumulatioll bien gratuIte.
tefTè de Mirabeau
la C0 m 'JI'
j
,
De Paris 3 Novembre 1774·
» •••• ( Détail du voya~e du Bignon à Paris ) .• : •
l) J'eCpere que dans peu de Jours mo? papa,. ( fon. beaul) pere qui était incommodé), f~rtlra, & J'aurai alors
» mon tems à moi. Tu peux bien penfer, mon bon
» ami ~ que j'en emploirai une bonne partie à m'entre» tenir avec toi, & par ce moyen me tromper, au
» moins pour quelques momens , fur la diflance qui
» nous fépare.
ET MADAME DE MIRABEAU N'A JAMAIS REVU, DEPU IS QU'ELLE ECRIVOIT CETTE LETTRE, LE MARI DONT
ON PRETEND QU'ELLE VEUT ETRE SEPARÉE.
»
»
»
»
»
»
»
»
»
fi ft
Au Bignon 28 oétobr e 1774.
» Je reçois ta lettre du 1 5 oétobre, mon bon ami.
Il ferait inutile de te dire le plaifir qu'elle m'a fait. Tu
Juges bien que je n'en ai pas qui approche de celui
de voir ton amitié pour moi fe retracer dans tes lettres, étant malheureufement privée d'en jouir autrement pour ce moment-ci. J'irai à Paris avec moins
de repugnance, mon ami, puiCque tu es bien aiCe que
j'y aille. . . .. Les *** m'ont écrit; elles prétendent
qu~ c'efl la feconde fois. Je n'ai pourtant reçu que
cette lettre d'elles. Mon fils fe porte à merveille, à
ce qu'elles me difent. Il rit tout le jour & appelle
èontinuellement papo & marno. Je brûle véritablement
du defll" de le voir. Quand pourrai -je joindre fon
pauvre petit mufeau avec le nez froncé du papa, &
baifer tout cela en même te ms ? Mon ami, cette
image me tranCporte.
Le Comte de Mirabeau fçait depuis long-tems ce que
»
»
l)
»
»
»
l)
))
))
»
»
l)
»
»
,
•
A Paris 8 Novembre 1774·
)) Je vais reprendre mon train ordinaire, mon cher
ami, & répondre à tes lettres par ordre. J'en ai reçu
quatre depuis que je fuis ici, deux chaque courrier.
1°. Celle du 18. Tu te moques de ma cbafteté; à
la bonne heure: Je t'a{[ure que tout. le monde me
prend pour une Demoifelle. Donc. j{ faut que ma
chafteté foit bien étendue, puiCqu'elle perce en dehors. Voilà u ne preuve f:lns réplique. Je ne répondrai pas auffi gaiement au fecond article où tu te
'plains ,de ta fanté. :Ayes en fain , ,au nom -de Dièu,
mon tendre ami. Tache de brider ton imagination
qui eft chez toi ùne lame uCant fans cerre le fourreau
par tous les bouts, comme on dit. Quant à tes yeux,
point de conferves, je t'en prie: C'eft le moyen de
ruiner ta vue. Quant aux reproches, mon ami, je
�I4
• c:ol1viel1s que cemi que tu mè fais font hiell doux '
) .st proùvent ta ten~reffe non ton humeur.
'
Nous- ne ' favons pas (il l'on rendra, bien clair aux Ju~
ges & aux leéteurs que la gél'léroGte fa-lfe écrire de c
lhle par \me femme maltraitée au mari maltraitant:
. nous ne pouvons, que r épeter;
'
)
maLS
ET MADAME DE MIRABEAU N'A JAMAIS REVU, DRPUIS QU'ELLE ÉCRIVOIT CETTE LETTRE, LE MARI
DONT ON PRÉTEND QU'ELLE VEUT ETRE SÉPARÉE.
A Paris le 15 Novembre 1774.
» Th te plains certainement dans ce moment ci, mon
., cher ami (*); mais il faut ahfol~ment ql'le tu m'el("
) cufes pour ces commencemens ' Il dt exafrement vrai
}) que je n'ai pas le telns de me retourrner )) . . . . ( Les
nouvelles pl:Ù>liques ). . • • ) POlIr mOl, mOll bon ami
»- je t'av.oue que fi je c!.Oyois t'être ptus ' utjle al!! Châ~
»--teau-d'Hf qu'ici, certainement ce feroit avec ~r:and
» plaifir que je t'y joindrois. . . . Mon bon ami, tou.
» tes les fuis qû'il [e préf.etlte quelque amufement, l'idée
» de ta fJ,tlllatiofl m'empêche bieri d'en jouir. le œ
» 'pus: jamais m'a couper d'autre cho[e tOl!lt le tems de
» Ja Comé.qie; & j'éprol!lv.e bieo que je me goûterai
» de plaifirs.-que Jorfque :tn ies partageras avec moi. ~ ..
» Je ne répandrai à t014 para11ele de l':amitié que j'm pom:
» 'toi à celfe dj.ue.. fai pout lui, ( fan fi.ls ). autre chofe
» (inun ~qtl'il, eli' après toi ce que j'aime le mieux au
» mond:e. Adieu, mon ami; je ['embra:!re cle to.ut mon
l). cœur. . J '.
1..
.
•
. ~dteùl' ne 'V(D,li)S .froonez pas. !es yeux~ vous avez bien
m:' cli# rhielill-du mâri. de, Madame le Co:mteffe clie Mi·
.... ;,j"H;r
1
l"
\
("') Et en' effet, on prie d'e remarquer que res dates des ICI~es cl,
Mad:ame la C"'ffileife de Mirabeau commencent à s'éloigner.
•
15
. l'
, II •
rabeau dont il et1: ,q~en:ion: c'efllmn Ul, qu .e, e n a paz
ci ,"uis qu'elle eeTlYOle ceue lettre: & c eJ/ oml lui dont
revit e,
•
r.' '
on prétend qu'elle veut elre Jeparu.
De Paris 17 novembre 1774·
» •.•• Je t'ai répondu d'avance auiIi d~ns ~a p,re:" miere lettre [ur l'article de mon retour a AUI:. J at:
» tends ce que tu me ~iras fur .c.el~ •. :. ' P,,?ur ce q~a
1) eil: de la peine que Je me faIS d être a PariS [ans tOI,
il me [emble que c'eft une cho[e toute fimple, &
:: qu'une femme eft une efpece d'être amphibie 4 u.al\d
» elle eft fans [on mari, fans parens proches ?ans ce
» pays.ci, & avec des créanciers qui. vont m'arnver, ~
» qui ne me pefent pas peu .••. ' AdIeu, mon bon amI,
1) ménage toi; je t'embralfe de tout mon cœur.
De Paris ' 17 novemm-e 1774. (erreur de date~.
» •.•• A propos de ,dents, j'ai fait limer la mienne
, ) l ce matin; je l'ai fait à ton intention; car il me fembie
» que tu m'en avais (ouvent parlé; on prétend qu'elle n'eft
}) pas alfez limée: mais comme elle commençoit à me
» faire mal, je n'ai plus voulu qu'on y touchât, parce
» que je fçai bien des gens _qui 's'en font ' mal tro.uvés.
» J'ai fait auffi nétoyer mes dents. AinG, M. le Comte,
» vous n'avez qu'à revenir pour trouver une bouche
» bien ornée, c'eft-à-dire, moins mal qu'elle ne l'était.
» .... Adieu, mon bon & tendre ami, je t'aime &
) t'embralfe de tout mon cœur.
Seroit-ce encore là l'expreffio'l' d'une gén.éroGté qui
épargne les malheureux? Quoiqu'il en foit, MADAME
DE MIRABEAU N'A JAMAIS REVU, DE,PUIS QU'ELLE
ECRIVaIT CETTE LETTRE, CE MARI DONT ON PRETEND
QU'ELLE VEUT ETRE SEPARÉE.
�17
tr6
De Paris 1.1. novembre
"
4
, ffi '
( Cette . lettre répond d'ahord à quelques
qui décéloient de la jaloufie ).... » M ais !TIpre IOns
, Je
. liUlS
' b'len liure que ton bon cœur ' te fait
On ·cher
» amI,
d'
» des reproches du trouble que ,ta lettre a J'etté cl éJa
. . &
d
an~ le
» mien,
que ans un moment plus tranquille
» tendu plus de juftice à ton Emilie qui t'eH 1 tu as
d
c.hé··
P us tell\» re;nt a;ta fie que J,a~als" & dont les [entimens
» ~~~ ent
me ~re qu e e eprouve les rigueurs de
»
en~e . . . . f; ,anges ~Lle c~ux qui [ont affez tes
» tnnenus p~~r al~e fides .1Ovel?~lOnS , telles que tu me
» es as clm~n (i~es, . e ouoent tres-peu de l'effet que cela
» a pro Ult ur tOI, & que leur vrai but eft de
).) donner du chagrin; & ,à cela ils ont très-bien r fin::
','
eu l ,
» car a fIi' u~ém~nt, Je n en. aValS pas éprouyé de plus .vi~
» &. ne !TI y eto~s pas livrée d'auŒ bon cœur depuis ce~
(c lm. de notr~ [eparation ...•. , Mais non,
mon bon &
» ul1lque
amI
r _ n l'
.
.
f i ' ne veut pOInt me' chagriner'' lJJ
• magl'
» natIOn e ' vl\~e, elle l'egare :quelque fois & il en eft
)} la dllpe. CroIS, mon cher ami, qu'il s'en faut de
» beaucoup ~p:le tu defires autant ta liberté & ton ho » heu~ que J~ I.e fai.s moi·même. Cela feul m'occup~,
» & Je ne faIS Jamals un pas que je n'aie cet ohje~ en
» vue. Ton pere ~ft bien difp0[é. en ta fave ur. Il eft tems
» que tu. fOlS traité com:me [on enfant: encore un peu
» de. p~tIen~e &. cela arnvera .. ~e crois, mon bon amr,
» q.ue Je gaterots tout en te Jorgnant dans ce moment» Cl., parce que nous aurions l'air de nous méfier de
» lut & de vouloü:' donner des [cenes au public ' au lieu
» que tout le monde fait que' je fuis ici par ton ord~e & en
» attendant que tu ayes fubi la peine ' de la rupt~re de
~ ton ban • . ~ .• Si ... , (des détai.ls fur la [anté dll
o;.te de. MIrabeau qui était fort d~angée alors.) .• ·.
» ais ,écnre ,un mot par M. d'Allegre (le Commandant
d u Chateau-cl If) » pour que cela n'ait pas l'air d'un, jeu,
1:1
»
JO\le
'oué entre nouS, & tu me verras, comme de raHon;.
~ ~mpreffée à aller te prodiguer mes foins. Mais j'efpére
Ue mon tendre ami con[ervera fa fan ré, & fe fervira·
q
»
r.
r
'd ans tant
» dans cette occaJ!On
du courage qUI'1' a lerVl
» d'autres, & ne fera pas naufrage fi près du port.
Et c'eft cet homme dont le courage, au rapport de
[on époufe, l'a [ervi dans tant. d',occaû?ns, qui au~oit
maltraité cette épou[e! Ce [erOlt la le re[uIrat de fa jorce
J'efrit, de
courage, & la noble épreuve qui en auroit convaincu CETTE EPOUSE QU'ON PRETEND vOULOIR
EN ET RE SEPARÉE, QUOIQU'ELLE NE L'AIT JAMAIS RE~
VU DEPUIS QU'ELLE ECRIVOIT CETTE LETTRE.
Ion
De Paris %4 rrovemhre.
JI Un premier mouvement -de ' ta pa-rt 'ne m'a pas étoIT'» né, mon cher ami ; mais j'avoue que j'étois hien per) [uadée que ta juftice vien droit auffitôt à mon recours,
)) & que tu ne [erois pas long-tems à voir que je ne
) mérit~. pas un pareil traitement .. En_ effet t mon ami,
»exa.mI?e UA ~om~nt avec ~OI fi ' f quand .même je
) crOIraIS que c eil bIen te [enm que de t'aller ioindre
)). j'en aurais le pouvoir.
'
On n'examine point ici fi Madame Ja Comteffe de
Mirabeau avoit ou n'av oit pas Je pouvoir, ou s'il étoit
ou l:'étoit ~.as de fan devoir de fe rapprocher (*) de [on
man .lor[qu II la de~afl{:I~it ~ mais on. ob[erve, 10~ que l~
premIer germe de dlffentlment entre le mari & la femme
naît à l'occauon de la demande que l'époux fait de [on
époufe. 2,0. Que celui-là ne devoit pas prévoir les difficultés
. ('1- J Nou~ .dirons fo Tapp,rocher, parce q,u'auffi long-rems que le
Com'te de Mirabeau a rené au Chateau-d'If, il ne demandoit ~ fa
~ernm~ que de: leveni~ à Ai x. 'Yne foj~ en Franche· Comté , le Comte
';illMIf~beau (e. Ct.oyolt le dum de faue habiter il. [a femme la même
, • e ou 11 habltQIt.
•
,C
�18
de celle-ci, ' puifque dans vingt lettres -qu'il avoIt reçuei
d'elle rreuf -lui témoignoient formel1ement lit fans pro.
vocation le defir de le rejoindre, lit · la ferme réfolutioll
de le faire- à ton p'remier mot; réfolution qui n'a varié
qy'au moment ' où 1~ m~ri a c~u de~oir - accepter des
offres tant réitérées. Contmuons cl extraIre la lettre du 24
novembre.
» Je puis t'affur.er qye ta! feul· régies mes plaifirs ' Ou
)l mes peines de l'endroit où . tu es .. Ce . n'e~ . que feloll
» ce que contiennent tes lettres q~e Je fUIS tnfle ou gaie.
» Adieu, mon bon & tendre amI; ayes un peu plus de
» confiance en ton Emilie, lit fois [ur qu'il lIle feroit
" bien i~poffible de ~im~nuer rien des tendres [entimens
» que 'je te. dois, &: qui ne finiront qu'avec ma vi~.
~
~)
"
»
1>
»
»
i,
»
;,
1 -
•
De Paris 1 er • Décembre 1774.
n Je n'ai plus , reçu aucune de tes lettres, mon cher
ami, depùis celles qui m'ont cau[é tarit de chagrin;
Je t'avoue que ' je fuis en peine de ta fanté; & là
feule è+J.Ofe qui me raffure un peu, efl le Glence dé
Mo' d'Allegre qui ne manqueroit certainement pas de
no,us écrire fi tu érois malade. C'efi donc pour me
défeîperer que tu agis ainG, mon ami. Mais réfléchis
Uh, moment, & tu Verras fi je mérite ce ttaitement.
Je' ne .trains pas de m'en remettre à ton propre Tri~
buna!; rI ~' toujours été jufte pour moi.
JÈ N~ CRAINS PAS DE M'EN RE:METTItE A 'l'o'N' PRO~
PitE TRIBUNAL; IL A TOUJOURS, ÉTÉ JUSTE POUR MOI.
Que Cès paroles retentî!tent danS --l'oreifle des calomniat@ur.s, &. gla"en~ la voix dans les houGhes téméraires!
DIEU VEUILLE NOUS REJOINDRE ~I:E;NTOT, _CAR NQUS
NE SOMMES PAS FAITS POTJR ETR": SEPARÉS • • • • JE
NE CRAINS PAS DE M'EN REMETT'RE A TON PROPRE
,TRIBUNAL; IL A . T.OUJOURS ÉTÉ.. JUSTE POUR MOI.
Epoufe ~fiimable, mais timide, tendrè mai~ captive,
1'9
.
vous même avez tracés, Jugent le procks
ces ' mots
quer
us contraindre. L'ob[effion n'étouffera
el on Ole vo
.
,
auqu
.
oIes qui retentiront par - tout aux
point ces douces ~r urfuivrortt [ans ceife vos cruels
oreilles fen fibVIes , li po envoyée au tribunal que VOliS
. a' teurs ' ous erez r
,
. fi
III 19a
'.
q
é que toUJ' ours vous trouv-ates jU e,
même avez mvO u ,
é
& que toujout'S 'v ous trouvere.z gén reu~. ,
A Paris le 3 Décembre 17.74·
.
.
'
.
on
ami
que
tu
puŒes
foutemr
Je ne croyols pas, m
. ,
.
:uffi Ion ·tems le ton injufte que .tu :pren?s ave~ mOI,
t) Me conl~oilfant Comme tu ,le fais, tu, DOIS [.aVOIr q~e
..
, ft 'ni Paris ni les prétendllS plaüirs que " tu m y
)l ce n e ,
, l" m oilihilité pJo, fi
'fi s qyi ,m'y retiennent ~ mal? 1 P . "" ~ - .
" uppo e '1
'ttel' 1 0. Pa-l'ce qué ce 'ferOIç, ( crOIS.
1
œ .
., raie de e qUI.
'fi
cet
article)
qUIller
i1bfo
utnenf
tes
-allalres.
., mOl ur
,
'Jr"
r.
d lieu toH pere ne me 1ç.IHerolt certall1e» E. n '.... e c
on'
r
c
l'
dO'Jt
., ment pa s partir fans le conlentement
. .' d
.li ,mren,' - • .
"~l' '-"eçu un. ordre' de refie.r ;el"
ont J ~ , t~nvOl~ ~co~'J"" • .
.
•
• 1·
.. ,
(
'" pIe.
,.'
. fi'
" » D'ailleut s, ~ mon bOlh<;L~Thi ,) je me de[efpéfer~ls ' 1 Je
" ;royois qué tu euffes encore aITez de. tems a ~efier
" au Château·d'Iff, pour que ce fût la pell1e de faIre le
n voyage de deux cent li.eue,s., A.•pelpe mes ~ardes
» font-ellès arrivées. Ton ll1te·ntIPlJ, fbJ me les envoyan t n'étoit [urement has, Gùe je. repartiffe Gtôt. Aies
))
"
r
'd'
» ·un peu d~ pitié de mo.i oZ mon b~>n ami; oe ~e e.» chire pas le cœur à pIanu', & dalgne te fouvemr que
1) je n'ai jamais agi dans tes <Jff~ir:s qtle pour. c~ ~lIe
») j'ai cru être ) ton avantage: .SI Je · de man doIS ,a t ,al») lér J'oindre on cornmencetolt par fe pourvolr d un
~
• herolt.
' . • •
» ordre qui m'en
empec
"
Aujourd'hùi même, on menace de, ce,t ord~e, d~t-~J],
& fi le Comte de MIrabeau eft force d y crOIre , Il s .en
applaudira ~ car on ne profererait pas cette , menace 111·
décente fi l'on pouvoit compter fur un Arret: & nO\;l~
C ij
,
\'..
•
•
.
-
':110-
'
_ _ ."
�10
le difons hautement: Quiconque invoque l'arbitraire '
n'eft pas plus digne de la faveur des Tribunaux, qU~
d'y prendre place.
' .
" ••. Et enfuite cela retomberOit (ur mOl &. m'ôte_
,) rait tous les moyens d'abréger le tems de ton exil
~, Au refte ·, fi c'eft Paris qui te déplaît, tu ~l'as qu'à
" me dire quel eft le Couvent que tu veux que J'occupe
" &. je m'y rendrai, en demandant. feulement la permif:
" fion à mon pere comme de mOl.
Ainfi Madame la ComteiTe de Mirabeau méditait dans tous les tems, de {e (acrifier au défefpoir de n~
pouvoir altrer fes devoirs divers_
. » Je n'avois pas voulu te parler de cet ordre, de
) peur de te faire de la peine; mais je ne puis endu» rer tous les foupçons dont tu me charges, &. je te
" prie de croire que tu n'es pas celui des deux qui fent le
n plus viv,ment notre féparatioll.
Et voilà la femme à qui l'on ofe prêter le defir d'être fépar~e de (on. m~ri !
.
. " Ton pere a ajoute quelques mots au bout de l'or~
" dre, dont le feus eft que tu ne peux qu'approuver que
" je fois chez lui. Adieu mon ami i ne fois pas fâché
" contre moi. Je te jure, mon bon 8mi, que je ne t'ai" .mai jamais plus tendrement, &. que je n'eus jamais
" ta ni d'en·vie de te voir; mais l'impoŒbilité &. la rai.,. fon feules me retiennent. Je t'embraiTe de tout mon
" cœur.
II
(:onrulter que lui-même. Voici ce qu'il penfoit alors des
devoirs d'une époufe.
2.8 oél:obre 1714·
» Mon intention, ma fille ,eft que vous profitiez des
») offres obligeantes de M. votre heau - pere. Vous ne
1> pouvez être plus décemment nulle part que dans fa
maifon. Dans la facheufe circonftance où vo~s vous
")) trouvez vous devez ,au delaut
. c.
d e votre mar l , être
» fous la ~utele &. l'infpeél:ion de M. votre beau-pere.
» Vous me déplairiez fi vous imaginiez de cherch~r u~
» autre aCyle. Méritez les bontés que l'on vous y te~Ol
» gne, &. payez pour le moment à vous feule le trIbut
" de foin &. de devoir filial que vous devez en commun
» avec votre man.
..
.
. Eh bien! peut-on dire que M. le MarquIs de Mangnane prévît ou defirât alors la féparation de {on gendre
8< de fa fille? Son billet {enfé, noble &. décent, ne fuppofe-t-il pas leur c.onco~de? leur unité d'intérêts.&. de devoirs, leur prochatne reumon ? Par quel finguher hafard
M-le Marquis de Marignane, qui n'ignore pas que depuis
ce billet écrit, fa fille n'a jamais revu fon gendre, auroitil fi complétement changé de fentiment &. d'avis? Nous ne
le croyons point encore; nous le croyons au moins neu'"
tre: &. s'il (e trouvoit que nous nous fuffions trompés ,
nous mous garderions bien de lu.i imputer une <:ontradic-.
tion fi manifefie &. fi trifte.
ET MADAME DE MIRABEAU N'A JAMAIS REVU, DE'PlTIS <:!U'ELLE. ECRIV-OIT CETTE LETTRE, LE MARI
-DON'!' -O/Il PRETEND QU'ELLE VEUT ETRE SEP ARÉE.
Ma.is tra!lfcrivons cet ordre prétendu de M. le Mar<Guis de Marignane, qui peut avoir des préventions, de
. .j'humeur, parce qu'il n'eft pas donné à l'homme d'être
infaillible hi parfait; mais qu'on ne recufera jamais pour
it1ge en matiere . d'honneur &. de procédés, s'il ne veut
J
•
»
))
}}
»
l)
Paris 6 décembre 1774.
» Ta lettre m'a comblé de joie, mon bon &. tendre
ami, tu n'es donc plus mché contre moi, &. tu reconnois que je ne refpire jamais que je ne t'aye en vue •
Oui, mon ami, je n'ai pas à me revrother d'avoir
jamais fait la plus petite démarche depuis que je fuis
ici, que je n'aye pe'nfé à tes intérêt). Tu m'as rendu
�%J
u
•
• •
II.
'la VJl!~ , 'mon ange; car Je ne pou.vOIs ·etre .un ·moment
» en repos dans l'idée que tu étols faché contre moi
» en vérité fani que je l'euffe mérité. Comment as-tu p~
» me . foupçomler de ' faire quelque chofe pour mon plai» 'fir ? Tu me ,connois aiIt:z pour favoir que même par
'
» te,mpérament, je me r
lQUCle
peu d. e ce qu "on appelle
» s'amu.fer. D'ailleurs, mon bon ami,. comment as-tu
» pu croire q~le pareille raifon pût entrer en balance a\'ec
~) , to,i ? •••• Adieu, je t'embraffe mille fois, mOIl bon 8t
)J tendre ami.
.
J}
ET MADAME DE MIRABEAU N'A JAMAIS REVU, DEFUIS QU' ELLE ECIUVOIT CETTE LETTRE, LE MARI DONT
(l N PRET END QU ' ELL E VEUT ET RE SE-P ARÉE.
»
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II
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De Paris 15 décembre 1774.
» Je reçois en mê me tems, mon cher ami, ta lettre
du {J'rem rer décembre &. celle du 6. La premiere m'af·
flig,e ; j'y vois que tu te creu[es l'imagination pour te
donner du tourment &. me trouver des torts. Tu prétends ql1e j'élude; que je te dis des mots; que je me
fais fifler; du moins tu me le fais entendre, &c. '&e.
~fftlrémelJt, mon ami, fi j'étais capable de tout cela,
Je ne vau{:\rois guere la peine que tu t'en inq uiétaHes.
Mais non, mon bon &. tendre ami, je vais ' to ut droi~
mon chemin; je ' te rellds compte de ce q ue je [ais i,
j'examine toute la j O llrn~e quelle ef1: la co nd ui te qui
peut le plus te tourner à profit ; &. qua n-d je l'di cl ecouverte, je la fuis. Je ménage t out le mond e pour
t'en faire des Avocats, &. ju[qu'icî je dOlS leur rendre
la jufri~e qoe je n'ai pas be[oin de les preiTer. Au
tefte , Je te prie de croire très-fort .... q ue perfo nne
ne m'a jamais dié1é d'expreffio ns, parce que perfonne
~e s.'eft jamais douté de ce que je voulois t'écrire; S<
Je t'affure que j'ai été bien étonnée d'un pareil foup'
ç~n ,,: M.ais j'e[pere " mon bon ange, qu'a u moment
ou J aural le bonheur de t'envifager , ils feront t o US
•
» détruits; 8<. j'Qfe même t'affurer que li tu pouvois lire
" dans mon cœur, tu te reprocherais d'en pouvoir for» mer fur ma conduite & fur mon attachement pour toi.
» Crois-moi , mon ami ; comme je ne t'ai jamais perdu
)j de vue fi long-tems ,je' n'ai j~mais fi bien fenti le be ~
» foin indifpenfable que mon cœur il du tien. Jete vois
» d'ici rire de mali expreffion, & faire de mauvaife,s
" plaifanteries; mais je t'affure que tu as tort; c'eft pré)) cifém'e nt cela; mes fens font comme enfévelis ; il n'en
» eil pas queilion ; mais mon cœur me tourmente, 8<.
» je tombe malgré moi de temps en temps dans une efpece
» de langueur mélancolique qui me porte infenfibJement
» les larm'es aux yeux, [ans que je puiffe m'en emp ~:
) cher. Cela ne vient d'autre chofe que de la folitude
"., de mon cœur. J'étois accoutum ée à dire de temps en
) temps ce qui fe pafIoit dans mon ame; j'étois rore de
» trouver quelqu'un pour m'écouter dont les intérêt!,
» étoient les mêmes que les miens , & qui me témoil) g~oi~
q~elquefois de la tendreffe (pas toujours )'. J~
» fUIS Ifolee à préfent ; perfonne ne m'aime; car . qu'eil» ce que l'amitié raifonnée d'un beau-pere , belle-fœur,
» &c. q~and on eil accoutumée à des fentimens plus vifs?
» Je fUIS toute feule de ma bande, au'tre chofe fort
» défag:éabre; enfin, je fuis ici fans rien qui ait rapport
» à mOI, ni parens ni amis, pas même de connoiffance.
» Crois-tu que cette pofition n'ait pas fon amertume ?
» Je puis t'affu.rer que fi , mon ami, &. peut-ê tre plu~
» q,ue tu ne C~OIS. Cependant tous les gens raifonnables m è
t> di~ent , &. Je fens que c'eft la feule où je puiffe t'être
»utlle. . . • .
. .• . . .
..
Nous affefrons de donner ' prefque en entier les lettres
où l'o~ al'.perçoit quelques germes de divifion, afin qu'on.
ne putiTe, pas n?us imphlter de rien atténuer, &. que rOll
cherche a fon alfe dans les diffentimens du moment les traces des griefs anGiens, fi jamais Madame de Mirabeau eut à
.
1
.
�2.'5
-l4
eG articuler. Il efi évident ici que le mari était mécon;
lent, & fans examiner s'il avait ou n'avait pas ton d
l'être (examen dont nous. ne connoiffons le droit à per~
tonne quand le mari ne fe plaint pas,. & pour lequel
nous manquons de données); nous trouvons plus évident
encore que le fiyle doux & pénétrant de Madame de Mi.
rabeau annonce ici, comme dans toutes fes autres lettres.
plutôt une amante qu'une (pouf~, ET CEPENDANT ELL~
N'A JAMAIS REVU, DEPUIS QU ELLE ECRIVOIT AINSI
LE MARI DONT ON PRETEND QU'ELLE VEUT ETRE SE.~
J'ARÉE.
Paris 3 janvier 1775.
» Je ne reçois point dè lettre de toi, mon ami; je
}) ne pourrais t'exprimer à quel point tu m'affliges, de.
» puis que je ne reçois plus de tes nouvelles ,. il me
» femble que l'univers m'a abandonnée. Je ne vois plus
» pel fonne qui prenne un véritable intérêt à moi; celui
» qui fait partie d"e moi-même n'yen prend plus. Il ne
» fe foucie plus de la compagne de fes malheur.s, de la
}) mere de fan enfant, de celle qui tie trouve de plaillr
)-) qu'à s'entretenir de fui & de fan fils; qui ne foupire
» qu'a pres le moment ou elfe les verra l'un & l'autre.
» Tu es injufte envers moi, mon ami, je te le répéte;
») tu ne devrais pas me favoir mauvais
gré de ce que
» je ne fais pas ce qui n'eft pas en ma puiffance, ce
» qui te nuirait certainement, & de ce. que je m'attache
» feulement à tacher que tu re.c ouvres la liberté, après
» quoi tu difpoferas de fa mienne à. ton gré.
Eft-ce une amante, dl·ce une époufe qui tient ce
la~age? > C'eft ,une époufe QUI N'A J~MAIS REVU, DF.~
puIs
QU ELLE ECRIVOIT CETTE LETTRE. , LE MARL
DONT O~" PRETEND QU'ELLE VEUT ET RE SEPARÉE.
Le 25 janvier 1775,
(On voit que les dates s'éloig;nent beaucoup, & que
le:
•
le mari qu'on réftlfoit ?e re~oind~e, & qoi d'aillèurs n'b
toit pas dans une pOlluon bIen rIante., ne pouvait guere
en être efficacement confolé).
» Je commence par répondre à ton dernrer article
» de ta lettre du 14. Tu es fans doute fort étonné qu'a
}) ton imitation je ne' prenne pas le ,haut ton avec tor;
» Mais pour moi je penCe que cela n'eft boil' gue vis» à·vis tes indifférens, &. que- quand même on fuppofe
}) des torts à un autre (ai-même, comme on €ft toujours
» à peu pres fûr de l'intentÏ'on, ' & qu'il n'y auroit tout
» au p'lus ' que de la foibleffe à reprocher: or en ce ccrs
}) celut qui 'a tort eft le. plus à plaindr.e ;- l'autre doit
» donc chercher à le confaler. Ce n'eft pas le ca. où tu
» t'es trouvé envers moi, tes reproche8 n'ayant nul
» fondement, mais bi~n celui dans lequel je me trou» ve à ton égard; car je crois que tu c~>nviendras
}) avec moi que c'efi un tO&t de céder à un pre mie!;
» .[otlpçon qui nous vient fans rien appmfotJdir. Je
» te donne ma 'parole d'honneur que je n'ai. montré
». à . ton pere que les artiCles ofiemiibles que tu m'avais
» écrit à cette intention, & il Y a long-tems que je
» n'en ai reçu de pareils: Quand je dis à ton pere c'efin à-di-re, à qui que ce foit dans le monde'. Je ~e fuis
» informée quel était le contenu' de~ la lettre de tOQ
» pere à M. d' Alfe~re. J'ar vu. qe'il y parlait de ton
» frere. Il eft vrai que j'ai dit dans le tems à Madame
» du ~aiI1ant . ( la f~ur d~ Comte de Mrrabeau) que
» tu 1attendOls; malS non feulement tu: ne me l'avais
» pas, défendu' , mais tu Fas écrit toi· même à ton peré.
» D'atlleurs me voi}à c'orrigée~ Pour l'h:iftoi:e de ...... *
» s'il.la fai·t, ~e que j'ignore err vérité;' n'ayant pas
» e?,ne de le 1.u1 d.emand~l'· , comme tu penfes bien; ce
» neft ~as mOI qUi la. lUI aurai apprife , "puifque je l'j.
P. gijorOlS, le me fOUVlens encore d~avoir par.lé tout a
D
/
�'1.7
z6
n fait dans 'lés commehcemens des lettres de Mada
.,. >t >t. ;. malS
' (ce1a ne pOUVOIt
'~ ,
l) d e
te laIœ aucun to lUe
, pas empec
. h
'
rt,
» pUI'lique tu ne pOUVOIS
er qu on t'écriv'
»
~il~ ma confeffion la pl,us ~xaéte, & to,ut ce q~t~
) J ~I a me rep~o.clrer. Je te 'pr~e, mon aml, de me
l) dire fi cela merHe les d:Ure:tes dont tu m'accables im
~) pitoyablement; car je délie d'ell renfermer davantag'
)) dans fept lignes , . &. quij,fQient plus outrageantes fall~
,,_ me âonner la petite fatisfaéti.on de moti'V'er tes ~riefs
» Mais, mon bon ami, je fuis bien perC~adée que tu m~
) ren?s juftic~ da.ns ce moment. Je t'avoue même, mon
» aUll, que J étolS l fi l perIuadée que la premiere réfle.
1) xion fetoit en ma faveur, que j'ai attendu le courrier
» de Dimanche pour t'écrire, & que je- n'ai pas été peu
l) furpriCe de ne recevoir aucune de tes lettres. Affuré.
» ment je ne m'attendois pas que tu puifes jllmais me
) Coupçonner de trahiCon. Je n'ai voulu, en te faiCant
» part de l'ordre de mon pere, que te prouver l'im.
» p~iffance phyuque où je fuis dans ce moment - ci
)t d'aller te joindre, en te faifant voir la difpofition des
)) efprits. à cet égard. Je fuis fûre, mon ami, que je
.) gât~rols beauéonp tes affaires & les miennes fi je les
» obligeois d'uCer de.. violence à mOf! égard. Il me fem.
» ble qu'il vaut bien mieux travailler à te retirer d'où
l) tu .es , que de faire encore des éclats facheux qui ri'o·
» _péreroient rien du côté qui m'inréreffe véritablement.
» La lettre du 9 décelllbre m'avoit fait trop de plaifir'
. avec III confiance qui convient &'
» car tu m ,y par1OIS
» qUI: j'ofe dire que je mérite. Tu m'y 90nnois des nou·
l) velles détaillées cie notre pauvre enfunt. Il me fallait
» un rabat-joie comme ton dernier articte de la lettre
t) dy 14. Affurément je m'en ferais bien paffée" car je
p t'a{fu(e que l'effet qu'il a fait fur moi n'a été rien
n mOÎI~s qu:a~réable. Il y a à parier que telle était
!) tqn IntentIon; en ce cas elle a été bien remplie ••• ~
y
•
)) Adieu; mon cher ami,. je t'embra{fe d~ tout mon
Jt cœur.
'
.
On voit que Madame la Comt'e1lé de Mirabeat~ fe
plaignoit vivement de l'humeu~ ql:le lui témoign.oit fan
mari,. & que toute forte de clrconfiances excufOlent, fi
elles ne la juftifioient pas. N'étoit-çe pas le cas d'articuler
'lueIques .t:eproches à fo,n tOUf, ou du moins d'en appel1er -a1J~ anciennes injuftices de l'époux, & à la patience.
de l'époufe , s'il 'eût été poffible de le faire avec vérité?
Eh ' bien! nous trouvons au pojl fcriptum de cette même
lettre ces proFres mots :.
_,
,
Du 09;
'" Ma lettre n'a pas été à' tems à la pofle mardi : J~
" la rQuvre pOUf te faire mes plaintes fur tes procédés;.
" point de lettres de to.i ; tu comptes ' done ,. tout de
'" bon,. rolflpre avec moi fur un fi~.ple foupçon. Au:
" moins faut-il être fûr de quelque chofe pOUf penfer
' l à en punir; mtlis tu n'en feras pas quitte à fI.. boit
" marché. , Com.me tu · ne peux pas m'e.mpêcher de t'é,) crire, je nverti~ qlje 'tu feras aiTommé de mes lettres
" juCqu'à ce que tu teconnoHfes' ton erreu.1'.
_ ah 1 fi c'eft là la colere d'un: agneau, n'eft ce paseelle de J'agneau chéri & [Nr ~e l:être du -Ber~er quO
i
le boude. Au refu!, 1'!1adame de ,MIrabeau ne tint ma1he~~~u~e~ent- p',!s}a p~role; lk ~'" pti:miere "lettre- qu'elle.
écnvlt 3 . fort man, ap.fles celle-Cl 'eil à un mois de date..
J
.
, ' . I?e Paris u F évrier
: " .Ie ((,Jas au dtfe[poIr, mon am). Votre
»
"
»
"
"
~
1775.
pere a reçU!
DHnancb7 lJ~~ _ l.~t~~·e de ~arfeil1~ très - volumineufe~
~o~me rI .il)
eto.~, pas ~1.'1:and ~n l'aFporta f &; que
J~ VlS lC! tI~b~e ,.- j'efperai: q~' c'é.~it de .M. d'Ale;
gre, &. que Je. fau.rois ,par là de vos nouvelles. Mais:
~er~onne ne m a nen tlIt; au contraire,. on fe cache de
IllO J",. on chllch;otte;. lIlQn _onçl~ & . lllon beau-pere Ce-
r
Dij
,
�2g
;; parlent à l'o'reille &. Ce montrent !,eCpeélivement des 'let.
" tres. Je tremble qu~ vous ne fOylez. malade, mon cher
" ami. Au nom de Dieu, donnez - mOl de vos nouvelles.
t' vous ne favez pas les peines que. vous me caufez. J e m~
" fuis informée de Madame du Saillant ce que c'étoit que
" cette lettre; mais elle m'a répondu qu'elle n'en favoit
" rien non plus que, &.c, &.c. &.c. Ecrivez-moi au plutôt.
" je vous en conjure ies larmes aux yeux, s'il eft vrai
" que vous ayiez jamais eu la moindre amitié pour
"moi. V ous m'avez traitée bien durement, mon cher
" ami; vous avez eu le courage de m'adreffer troi~
" lettres fans un feul mot pour moi, qui, nonobfiant
" la défenfe que vous me faifiez de VOliS écrire, &. les
" chofes dures que vous me difiez" &. affurément bien
" injufiement, n'avois pas ceffé de vous écrire - &. de
" me juftifier ". ( C'eft efcamoter un peu leftement la
lacune d'un mois; mais nous fommes bien loin de chercher des . torts à Madame de Mirabeau qui depuis le 23
eél:obre 1774, eft beaucoup plutôt digne de commiféra~
tion que de . reproches ). » Adieu, mon bon . ami; je
" vous le demande à genoux; donnez - moi des nou" velles de mon fils, je vous en fupplie. Je vous em-,
" braffe de tout mon cœur.
On ne trouve plus ici les douces iàmiliarités de l'amour; mais c'en en toujours l'accent, la trifteffe &. les
uproches. Et l'on prétend que Madame de Mirabeau
veut être féparée du mari qu'elle aimoit ainfi au temps
où le l1:talheur &. les circonftances pouvoient le rendre
un peu trop févere; pour ne plus l'aimer lorfque fa
jeuneffe éprouvée &. - mûrie par tant de revers l'auroit
montré plus folide &. plus eftimable, fans lui ôter les
qualités qui le rendoient autrefois aimable aux yeux de
fon époufe?
A Paris 27 Avril 1775,
». Le ton de votre avant derni~l'e lettre, mon ,h~
2.9
ami m'avoit attérrée; fur-tout cette lettre; étan~ une
» ré ;n(e â une lettre à moi, ~ù tous les fentlme~s
)) p ,'e conferverai toute ma vie pour vous fe peI)) que 'ellt J'avoue que J'e fus embarraffée à y répon» <1nOI .
.
' d'
.
)) dre. J'avois pourtant pTiS le parti. a,:"Olr re~ours
laintes &. de tacher d'émOUVOIr votre anCIenne
)1 aux p ,
.
1t
)) tendreae pour moi, lorfque Je reçus enc?re une eon ~o.urage, m aband,onna ~J
)) tre de vous. Pour lors,
)) en voyant combien vou~ ~tes ~nJufte a mon egard,
1) &. je crois que je n'aurols Jamais eu la for,ce d.e vous
) écrire fi les çirconftances pré{entes ne m aVOlent Ull
l ,
.
C'
é
u
)) peu raffurée, &. ne m'avol~nt ~alt . prouver l:n mo .» vement de confolation que Je n aV?,I~ ~as f~ntI depUl,s
» long-tems à votre fujet. Co~me J etOIS . hI~r a~res ,a
» follicirer votre pere, comme a mon ordl11é\ue, Il ma
» .dit qu'enfin je; ferois fatisfaite, &. .qu'en attend.mt que
» la tournure de ,nos affaires permit davantage, vous.
» alliez être dans un endroit beaucoup plus convenable
» que le Château-d'Iff; &. que de plus il n'avoit donné
» aucun ordre contre votre îiberté , finon au Comman" da nt de répondre de vous jufqu'â nou . .'C1 ordre. En-'
» vain lui ai-je demandé le lieu que vous alliez han biter; il m'a feulement répondu que vous feriez plus
» à portée de moi, &. que vous m'en inftruiriez vous» même, ayant déformais pleine liberté d'écrire. Dai» gnez me donner bien vîte de vos nouvelles, mon
)) cher ami, &. croyez qu'il m'eft impoffible de refter
r; plus long - tems privée de votre -amitié &. de votre
» confiance qui · font ce qui m'intéreffe le plus au monde:
)) Dans l'état préfent, je ne puis m'empêcher de me
)') regarder comme une créature ifolée qui ne tient plusil à rien, &. que tout le monde abandonne: A peine
)) reçois-Je quelque fois des nouvelles de ma famille ...•'
» Ah! mon amI, croyez que je fuis plus à plaindre
» que ,vous ne le penfez, &. .q ue mon ame eft plus-
n:
- ---,
..
•
-;
�3'0
~ rem'plie de tri{l~{fe qu~ de to~te autre cholè. : : :
~) Adieu mon (eui & unt~ue a~l . .Rendez - moi VOtre
.) confiance; croyez, qu~ J:n . [UIS. dIgne: & fi vous nI!.
~) m'ayez pas tout a faIt oté votre tendreffe ~ daigne~
» renouer avec moi un commerce de lettres q1;li fai~
» toute ma con[ola-tion, en attendant un bonheur plus
l> grand.
'.
_.
On ne trouve point encore ici le plus léger germe dll.
deur d'une réparation ; on en démêle bien plutôt , Ce110US [emMe, la crainte dans cette renre. Cependant un~.
correfpondance tou~ours plus. ra,re, ~ne ig~o~an~e plus
profonde de ce qUI [e 'paffOlt a ParIS, algnffOlent le:
Comte de Mirabeau loin de le raffure!" ; mais qU'aIl.
iuge des difpoutions de Madame de Mira.beau par la
lettre [uivante,. l'anti-pénultieme de celles qu'elle ecrivit
alors à [on mari, & où le mécontentement paraît aU:
iomble des deux. parts..
.
.f.i
.
..
\.
PaflS 2 Jurn J775 ~
(
» Il ferait trop dur pour ~oi , Monyeur, de répon~:
» dre à tous les articles de votrË le,ure ,. comme vou~
» avez· fait . de la , mienne. Il "ft affell malheureux pou ..
ri moi· de les lire tracés de vot~e ItJain , [ans . Ies recopier:
" pour aioli dire, pour vous en faire [entit; l'injaftice. Vou~:
») n'ig/)orez pas gu'apres la ter.rible lettre ~qtÜ a commencé.
» la. djviuon: qui regne entre nous , }~. vous en ai écrit.
» au moins deux. [ans aucune réponfe de votre part. Il:
» eft· vrai que j'ai. ~efté. en[uite quelque tems de vous:
» écrire ,. voyant que je n'avançois r.ien. Je vous écrivis:
» ~pres cela ulle autre lettre, ~y~nt appris par Madam~,
)~ *** que vous vaus' plaigniez de moi .. Vous [avez queJl~~
>1 répoq[e. ,mortifiante je me fuis attir.ée. IJ en a élé .,deo
)' f!1ême toutes lt!s fois que depuis Jars j'ai ofé vous'
». écrire; ,,& je m'att ~nds bien cette fois-·ci que je ne,
III fel:a_
i..FiJI) mie.ux tJait~ :: mais n'im,Eorte, j;e .fuis ré.,:!
-
,
.
11
l> (olue à faIre 1110n dev.oir du mieux qu'il me.fera pom" hie, non feulement en veillant de t outes mes fO;C L'
» à vos intérêts, mais encore en vous en inftrui[ant réguliérement , quelques duretés que cela puifft: m'atti}) rer de votre part, jufqu'au moment ou vous vous
» déciderez ab[olum::nt à n'avoir plus rien de commun
,) avec moi, & que vous me défendrez de ~ous écrire; fi
» te He eft votre intention, je m'y réfignerai , quoiqu'il
»)' "m'en coûte. Je vous prierai feulement de m'avertir
t> d'avan<:e .....• pour que je tâche de Ille ménager un
" a[yle chez mon pere. . . . . •
.
1>
N'IGNOREZ PAS QU'A PRÉS LA TE'RRIBLE LETTR~
'QUI A COMMENCÉ LA DIVISION QUI REGNE ENTRE
NOUS ••••• C'eft donc une iettre , & une lettre du Comte
Vous
de 'M irabeau qui a commencé cette divifion. Aucun pro't:édé du mari au tems de la cohabitation n'a donc con"
tribué à cett? divifion. Je vous en ai écrit au moins deux
Jans allCftne répon(e de votre parr. Cette phra[e fournit au
Comte de Mirabeau la modification de la lettre du Z 2
février, où fOIl époure prerend n'avoir pas ceiP d'écrire Gde
Je j uJlifier.
• Encore ~ne fois, ,1OUS n'examin~ns point lequel de.s deux
epoux av Olt tort au tems dont nous extrayons la corre[pon~ance; fi tous de~x ne l'avoient pas; fi la pareffe l'il1~rtle, & de mauvaIS con[eils d'un côté
une fituation
vl,olen~e "& une imagination ardente de l?autre , ne cont~lbuo~ent pa,s par égale panie à ces mal-entendus qui
Il aurOlent eVldemment été qu'éphémeres, li l'ôn eût laiffé
les époux fe, rapprocher: mais nous demandons fi Madame . de ~Irabeau dans ces lettres où [on mécontentement. eft vIVement empreint , loin de provoquer la réparatIOn , ne la redoute pas. Or, Madame de Mirabeau
D,EPUIS ,QU'ELLE ECRIVOIT AINSI, N'A JAMAIS REV~
'L ÉPOUX DONT, ON PRÉTEND QU'ELLE
l'AStE.
VEUT ETRE sÉ
�Paris du 1 z juillet. .
Je n'-aurois pas, tardé un illftant à vous répondre '
.» MonGeur, fi j'avo~ été, airez heurelld[e pour ayoir, quel:
» que ch.o[e d'inté~ell~,n~ ~ vous man er ;, malS n aY,ant
" pas ce bonheur la, J al Jugé que vous ne vous [OUcliel
) guere de recevoir de mes leures ,. quand elles ne Con,
~>' tenoient rien qui pût vous taucher ( .: .. >. ( Maè·: IU~
!de Mirabeau ne fairoit qu'augurer , que JUGER. ; elI~
,
't dooc pas reçu ce qu'e1le appellolt dans la. précén aVOI
'
J" fi
.
dente une DEFENSE D'ECRIRE) .•, ••• » 0 e vous pner,
. M ' fie ur de rl1-e- Gonner de vos nouvelles un peu plus
n
on,
.
M' b
.
» en détail
(A bon drOit , M. de l~a eau auron pu
'r épliquer :, Je juge que vous lU VOlIS foUCU{ 9uer.e de rece,.
voir de mes lel/res ~ PUifqU8 VOliS n f} me ,;ep~nde{ pas).
» Vous ne fâvez pas à quel point elle.s ru mte.reirent. Je
. TOUS prie , de. me marquer auffi fi mes .lettres vous'
» ,
rh'
l
" ,
» [ont agréables ' " & , fi vous 10U altez' que. )e es renere
, plus Couvent ((. La pare{fe provoque éVIdemment ici
~e qu'on appelloit Elus haut la défe.n[e d~écrire. que . l'on
D'a iamais reçue.
«.
Alf Bigrron }-I- oel:obre· 1775.
) Je commence, Monfieur, par- vous faire des el..";
» cures de ne vous. avoir 'pas , plutôt donné de mes nuu» velles .. _ . Je vois q,ue. vous gilrde2 le filence ., & ja
}), con\!iens que c'étoit à moi de le ro~pre. J~ ~ous
» avoue,. MonGeur, quelles , [ont les,. 1'éIifons,.qUl ru ont
)') retenue:. j'e[pere trouver en vou-s' air~z d iOd~J gence
D pour pe pardonner cetre faute " q~e Jft COllv'lens en
) être une.
, Ici finiirent les lettres, EppTES AU 'FEM'S PASSÉ PAR
MADAME LA COMTESSE DE MIRABEAU . A SON MARI
QUI NE L'A JAMAIS REVUE. Cette répétition' peut-être f~,
ûgante ,. n'dt du moins. p~s., [uperflue,; ' ,car il. eft trop ~I
zane, foit en morale, [Olt en procedes 1 folt en . mOl t ,
'lue.
.B
que l'on prétende faire prono~cer ~nff:e [épar,arion bet re
deux époux, dont la cohabitatIOn n ~ re qu un ta eau
'de tendreire conjugale & d'eftime récIproque, telles que
la femme ne CRAINT PAS D'EN APPELLER AU TRIBUN AL
DE SON MARI QU'ELLE TROUVA TOUJOURS JUSTE POUR
ELLE. .
.
E n 1776 Madame de Mirabeau retourne en Provence
avec M. [on pere. Le Comte de Mirabeau commence · à
traîner dans les Pays étrangers la vie malheureu{e qui
. tant agité; & dans le m ême période un Tribunal [ub alt erne le condamne à perdre la tête [ur une accu[ati on
de rapt de '[éduétion {uppo[é commis envers une femme
mariée, & un prétendu crime d'adultere dont le mari ne fe
plaignit jamais.
Le 17 mai 1777 le Comte de Mirabeau eft arrêté en
Hollande, & Je 7 juin de la même année il eft enfermé ,
par ordre du Roi au Donjon de Vincennes, où il refte
'ju[qu'au 17 décembre 1780.
Au commencement de 1781 il rentre clans la mai[a n
paternelle, & Y [ubit une épreuve d'une année qui a fuffifamment convaincu [on pere & [a famille qu'un homme
de trente ans n'a ni les mêmes idées ni la même conduite qu'un homme de vingt.
Le 12 février 1782, le Comte de Mirabeau va ré remettre pour anéantir l'attroce Sen tence de Pontarlier & faire
revoi~ [on ab[urde procès . Là il pour[uit avec un~ c!nergre
peut-etre [ans ' exempPe , l'accu fa teur, les con[eils les
tém~ins? les pr?cédés, l~ procédure, les premiers J;ges.
Aprescmq mOIS dt.: la défen{e la plus opiniâtre, l'accu[ateur eft force de reconn oÎtre la non exiftence du prétel:du délit qu'il avoit déféré ' à la J uftice ; le Comte de
Muabeau remet les dommages & intérêts & l'on écrit
à la priere de l'accu[ateur l'aéte [uivant. '
ra
ART. r. Madame de Monnler, en exécution de
E
,
fa
feu-,
�34
miffion a~x ordres, du Roi, reflua pendant, la vie de M.
de Monnier, Jan epoux, fi encore ItIZ an apres la mort d"
celui, dans le Couvelll où elle ejl aéluellement depuis l:J:Jt
& il demeure convenu 'lue la révocation deJdits ordres
Roi ne pourra être demandée avant ceue époque fans l' a~
grémelZt refpec1if & par écrit du familles de M. & de Madame de Monnier.
ART. 2. M. & Madame de Monnier rejleront comme ils
rejlent par les préfontes , /éparés de corps & de biens. En
conJé'luence Madame de Monnier renonce dès'o"préfont cl tour
les dons & avantages qui lui ont éd faits par fon contrat de
mariage, même au douaire & 4 La Communaute; & s'oblige a
donner, après la mon de Jan mari, taUleS quittances, dé.
charges & ratifications nùeffaires à ce Jujet.
'
ART. 3. M. de Ruffey, & de [on autorité Madame de
RuJJèy, s'obligent principalement & folidairement à procum
l'exécution des engagements ci-deffus contraélés par Madame
l~ur fille, pour Laquelle ils Je font fort & Je portent expro·
miffours jafitu' à concurrence de 4:' 000 liv., & non au·dela.
. ART. 4. E1l confidération des articles précédens , M. de
Monnier céde & abandonne, toutejôis Jans garantie, cl Ma,dame [on époufe tous intérêts non payés & à échoir de La dot
'lui Lui a été conjlituée par fon contrat de mariage, & lui
,donne par les préfonces toutes proèurations fs' autorifations ni·
ceffaires pour Les lOuchu & en faire quittance. Mondit fieur
de Monnier a de plus remis cl ladite Dame Jan épouJe, comme
elle compare , . les effets, nipes & hardes Jervant à Ja ptT-.
fonne; dont Jécharge.
. Enfi~, mondit fieur de Monnitr s'oUige de faire payer par
-Jes hérmers cl ladue D~me Jan époufe, ' en la ville Je Dijon,
la (omme annuelle & vzagere de 12.00 Liv. par moitié en deux:
, urmes égaux, dlmt le premier fera échu fix mois apres Ü
déces de M. de Monnier.
ART. 5. Mdyennant l'accomplifJement des conventions ci~
,leffus, M. le C0m.te de Mirabeau fe défzjle de l'appell.lliorr
l
35
r:
.
qu'il a inurjmle pa~ Lettres
,Explo~t ~u 8 mRi 1:;~'1.;
de la procédure injlruue au B ~zlüage cT7.m~ml de PO~larlur,
a la requête de M. le Marqua de Monnar & de l Homme
du Roi, & tOll/es les difficultés nées & à naître au Jujet tant
de la plaintt portée par M. de Monnier, 'lue de la Sentence
par lui obtenue, demeureront éteints & terminés fans que les
parties puijJent (e reclzercher à cet égard, lous quelque prétexte & de quelque maniere 'Ille ce Joit. M. de Monnier con(entant 'lue ladite Sentence [oit comme non avmue en lOUS Jes
points, moyennant, ainfi qu'il ejl dit ci~d1fuJ) L'accompliffement du préfont lraùé.
ART. 6. Mais en cas d'inexécution d'aucune des conYWlions ci·devant jlipulées de quelque part 'lue vienne ceue
inexécution, tOUles les parties rentreront dans !turs droits re[pealj;. M. de Monnier ou fes héritiers pourront, Li Leur ckoix,
ou donner Juite au proces de la méme maniere 'lue Ji la préfente uan/aaion !J'eût pas été faite, ou exercer contre M. &Madame de Ruffey, & leurs héritiers l'aaion réJultante des
obl;gauons far fltX jlipulées dans ,l'art. 3 •. ci-deffus. Si l'intxecutLon "'lent de M. de Monnur, Madame de Monnier
pourra ohtenir toutes leuns, nécejJaires pour purger la contumace; {.> M. le Comte de Mlrabeau çonJer1lera audit cas le droit
de po~rJuivre l'appellation dom il Je défrfle par le prirent traité ~
ou d appe~ler de nouveau de La, p,rocédure , pOflr l'ropoJer-&
faIre valOIr Jes moyen.s de nulfue, ,/tf'luels, ainJr 'lue les déftnfesde M. de Morm~er~ refleront lntaéls de part I:i d'autre.
, ART. 7" Les p~r~lts &m~ll~eront de conurt l'hoF.lologal;on du p:éfont, (ralle au Bad!cage de Pontarlier, ainJi 'lue
l a~torifallon d office d~ Madame de Monnùr. Les frais de
ladlle homologauon, arnJi 'lue' C(lIX de la préfeTtte tflmJacUon feront Jitppor~és ~n ',ommun par fes parties.
Et pour parvenzr à ladue h~mologation, le/dites partÏu ;
,cmme e~/es cO";p'arent ~ conjluuent Le For/eur d'une expédilion deJdues préJentes leur procuuur géniTaL & fp~ciaL , aux
fins de dreffer, jigner & préJmrer la "quête en homOlogation ~
]; ij
.
�36
& Je faire pour l'obtention d'icelle toutes JémarclLes & diûrre!lces néceffaires. Dont aBe.
b Cet aae eft homologué par les Juges qui avaient con.
damné le Comte de Mirabeau, homologué fur les con.
cluÎlons de la partie publique, qui, au refte , n'étoit pas
partie pourfuivante & agifIante fur l'accufation d'un délit
privé· & le Juo-ement qui fu it intervient.
: VI/par nous CLaude.Prançois-B alhilde Maire, Lieuunant
g é:z.ùaL du Bailliage de Pol2tarLier, La requête préfenrJe de
lfl pan de .A1,e. Claude. FrançoLS, MarqlUs de M.0nnier,
Premier Pré/ident en la Chambre des Comptes, cl-devant
Jéante à DoLe, Dame Marie-Tlzerefe-Soplzie Richard de Ruff.ey, Jan époufe, Mre. Gilles-Germain Richard de Ruffey,
.Prifident honoraire à la C/zumbre des Comptes de-Bourgogne,
& Dame Anne-Claude de La Foret, [on époufe , Mre. ViBor
de R iqueti, Marquis de Mirabeau, Comte de Beaumont-, &c.;
& Mr~. Honoré-Gabriel de Riqueti, Comte de Mirabeau,
undanu à ce 'lu' il nous plât , autorijant d'office où beJoin
ferait ladùe Dame de A1cnnier, homologuCT la tranJaBlon
T1!fue de Poulet & Chery, &c.; les conc/uftons de l'Avocat
Micholud de Doubs, du même jour, au.iJi ~n marge de ladite
u'luête pour l'abfence des Gens du Roi, par LeJquelLes il
n ·empêche qu'il Joit fait comme il efi requis, &c.
Autorifam où bejoin feroit d'office ladùe Dame de M onnier, nous homologuons La tranJaalon du I l aoât courant,
pour être exécutée feloll Ja larme & teneur. En conféquen.
ce ordopnons 'lU 'elle fera enrégijlrée au Greffe de ce Siege,
pour y avoir ruours au beJain; & que ledit Comte de Mi.
wheau fora élargi des priJons de ce Siege, le Giotier à ce
contraint, même par corps; quoi faifant il en demeurera va-.
la6!ement déchargé.
Fpit à la Chamhre le 14 Aoât 1:7.8 2, &c.
37
de contuma<:e, recouvre fon exil1:ence civife, &.
tence
.•
t
ace ·
dl: légalement abCoute fans aVOir purge c~tt~ con um
~
, ccufation était abfurde &. le pro ces mCoutenable.
tant l a
M· b
.
h
!ra e~u VlIl,t I~ou: éeI:
Le 19 oaobre, le Comte de
au Château de Mirabeau; & ce meme Jour, a arr~v e
de Ces gens, M. fan. onde. aV,ertit, Ma dame fa me:e.
'il attendait fon man ce fOlr-la meme : Nouvelle qu zf
~: vouloit pas lui la1fer apprendr~ par fe p~blic . .La let1r~
de M. le Bailli de Mirabeau dont Il na pOlllt garde
de copie, vu la fimplicité du ton & des ch o[~s, ne
contena it précirérne nt que cela. Mada me de M irabeau
a répondu à cette lettre Bar ~a. ~uivante., en da;e dl,l
29 oaohre, mais que M. le BaIllI de Mirabeau n a reç le que plus d'un mois après, comme l'enveloppe fur-.
ch~rgée de timbres différens le prouve alTez.
»
»
»
l>
Il
1)
»
)l
Il
Il
Il
li
»
Il
II
De forte qlle la co-accuféé du Comte de Mirabeau;
déchue de fon état civil, &. auth::ntiquée par une Sçn:
,
»
Il
A Marignane le 29 Oaobre 1782.
)} J'ai reçu, mon très· cher oncle, la lettre que vous
m'avez fait l'honneur de m'écrire. J'ai fait part à mon.
pere de l'arrivée de M. de Mirabeau; il vous prie,
ainÎl que moi, de vouloir bien vous rappeller de la prameffe que vous avez bien voulu nous faire cet ét~. Mon
pere el1: très-déterminé à ne jamais vivre avec M: de
Mirabeau. Cette rai fan feroit fuffiCallte p o ur me tenir
auffi éloignée de lui, étal1~ dans la ferme réfolution
de ne jamais me féparer de mon pere. Je fLlis fûre,
mon très· cher oncle, que vous m'approuverez au
moins fur ce point. D'aille.urs les événemens qui ont
eu lieu depuis que M. de Mirabeau & moi v,i vons
éloignés l'un de l'autre, fero!}t toujours un_ obftac1e
infurmontable à tout projet de réunion. Vous favez,
mon cher oncle, que j'ai toujours deftré le bonheur
de M. de Mirabeau. Je puis peut-être me fla tter
d'avoir contribLlé à fa liberté. Il en jouit. Il [eroit
bien extraordinaire qu'il e,u fît ufage P9ur atrenter à
�38
)) la mienne. Dans ce cas, mon cher oncle, j'oCe
» flatter que vous ne trouverez pas mauvais que
39
111
e
)) pere & moi la défendions par les voies que moùll'
. fi'
d e. ma can fte. M . de MIrabeau
'
no fis
» 0 ffi e }a Juntce
» heureux dans fa famille comme moi dans la mien e
'r
"1
Il.
' de vous. M es vœux pour fine '
» pUl1qu
1 eft
aupres
)) bonheur Cont remp-lis; je penfe que mes devoirs 01}
» vers- lui le font auili.
en·
« Je fuis bien fâchée, Inon cher oncle, que la feu
.
,
éJ
r'
ete
» ne vous alt
pas epargn.
e ne .çaurOlS trop va
D prier de ménager une fanté avili chere à tous ce Us
» qui ont le bonheur
de vous connoître, & fUr-toul Udl(e
.
» vous appartenIr.
» J'ofe efpérer, mon cher onde, que les circonf.
)') tances préfentes ne me priveront pas de l'amitié que'
>>. vous avez eu la bonté de m'accorder. Daignez être
» perfuadé qtle jamais rien dans le monde ne pourra
,) diminuer le refpett & le tendre attachement qlle vos
D vertus & vos bontés pour moi m'ont infp'Ïrés
& avecJO lefquels j'ai l'honneur d'être,
,
Mon très-cher onde, &c.
. Cepe~dant le 22 ottobre, crelt:-à-àire ,- le forlendemain
de l'arrIvée du Comte de Mirabeau, il avoit écrit 1t
f~n épou(e dont affUl'ément j:} ne pouvoit pas prévoir lareponfe a M.. fan oncle, la lettre fuivante.
"
"
"
"
-"
"
"
•
A Mirabeau le n Ottobre J7th.
:" ~e vous dois, Madame, de vous annoncer mam
arnvée ~ans ,cette P~ovinc~ où, fous les aufpi5es &'
la cundurte- d un' onde, qU1 elt: en tout fens mon fe·
cQnd. pere,' (e!pére conquérir l'eft-ime dt! public, &
~,e~etller 1 amltlé des perfonnes ql:li m'aimoient & que'
J" aIme. Vous .. êtez affurément ,.. comlne vous devezetre, ~u: pr~mler rang, de celle-ci; & fai d'autant pIuS
de plaIfie- a me reVOIr en Provence} que ie ferai en-
- fin à portée de Cavoir plus rouvent des nouvelles de
" votre fanté & de tout ce qui vous intére{[e. Je vous
" prie avec confiance de vouloir bien préfenter à M.
" votre pere mon hommage refpeétueux, c'eft le moyen
" que je crois le plus fûr pour le lui rendre agréable .
" Affurez-le bien, s'il vous plaît, que fi je ne lui écris
" pas direttement, c'eft par une fuite de ce même ref·
:: peét que je lui dois à tant de . titres. Recevez, Ma·
" dame avec bienveillance, l'affurance de mon très"tendre attachement, & de mes vœux finceres pour
" votre bonheur.
Quinze jours après, c'eil:-à-dire le 3 novembre ; le
Comte de Mirabeau n'ayant point de réponfe à fa let·
tre, n'en voyant point arriver à M. fon oncle, &. juftement inquiet de ce filence, fe décide à envoyer un
exprès à Marignane. Cet exprès ~toit porteur des lettres
!uivantes.
A M. le Marquis de Marignane 3 novem6re.
» Monfieur le Marquis,
» En prevenant le 2Z du mois palfé Madame de Mil>
n
)
n
1)
"
1)
))
»
)
»
»
1)
rabeau de mon arrivée en Provence, dont mon on·
cle ~'avoit avertie déja , je l'ai priée de vous préfent~~ l.hommage de. mon refpett } & de vous dite _que
C erOit ,p~r ~ne fUIte. de ce même refpeét que je ne
vous ecnVOiS pas .dlreétement. Quinze jours fe font
écoulés fans que III n'lon oncle ni moi nous ayions
reçu d'~lle un mot, pas même l'affurance qu'elle fe
porte .blen: Vous pard.onnerez, M. le Marqui-s , à ma
Jult:e 1n~ulétude, fi Je prends la liberté de vous la
c?mmumquer ; il eil: fi naturel qu'un mari qui chérit
cl a,~tant pl~s fon époufe qu'il la connoÎt davantage, &
qu Il a mIeux éprouvé qu'il n'eil: point de bonheur
fans le bonheuI domeil:ique; il eil: fi naturel qu'il fait
�_ 40
-
,
effray~ d'êtrè quinte iours à quelques lieues d'~l1e r
fi '
" ,
lans
favoir fi elle re pire , que J al cru que vous Ile tr
,
., d !Ii {li h
ou·
veriez p as mauvais que J a re a e c ez vous, foit '
Aix fait à Marignane, tin exprès chargé de me p a
, de fes not:lvè Il es. J
'Is apprendre par ell
QP'
porter
e compta
' » des vôtres : puiffellt-elles être allffi b onnes que je ~
)} deGre! & vous ferez long-tems tain & heureux.
,
» J'ai l'honneur d~être avec un tendre & profoHd
' »- refpeét, &c.
,r
»
)}
)}
)}
)}
A Jl{adame la Con,ue.fJe d~ Mirabea u.
Au Château de M irabeau le 3 novembre 178z.
» Je vous ai écrit avecempreffem ent le zz du mois
) paffé, M adame, & mon o~c1e vous avait. écrit dès le
»- 19; l-ui , pour vous préye-mr de mon arrIvée, moi,
» po ur vous demander de vos nou velles, v9uS expri.
» mer mes fe ntim ~ns , & ,vous prier d e pon er mon homo
}}' ma-g e aux pieds. de M. votre pere. Je ne fais par quelle
)} fatalité nous n'avons pas mê l,n e la certitude que vous
» ay' iez reçu nos lettres; & il ne m e fa ut pas moins
» que ce doute pour me ra-irurer un p eu fur v otre fante
» qui m'inquiete cependant airez p our m'enhardi r à
» en dema-hder, l'llême par Uf! exprès , des nou vel!es à
» M . v otre pere. ' Mon projet était de ne lui écri re ru.
» reétement qu '~u-tant que VOt:l S m'ef! obtien driez la pero
» million de lui· même. Mais on ne do it pas ê tre furpris
» fi, quand j'aurai quelque doute fur un intérêt auffi
" cher qoo 'vOliS & votre fanté, je f-ors des mefmes que
» m'irhpàfe le de(jr de ne déplaire à qui que ce foit,
» & de ne pas faire ' une démarche qui ne fait de l'aveu
) - de vous & de M. v-otre pere.
" Je fentirois bien peu ce que vous v alez , M adame,
" fj j'oubliais qu e vous EI'êtés unie p ar des liens indn' ,.> folubles ; &. j'jgn on~ ' quel fentime-nt fecret- me perfuade
» que
•
•
~I
que VOUS ne me Cavez [:as z;tàu~ais ~rë d~ ne V.as roublier. J'avoue donc, &. meme Je m en faIS glO1re, que
:: vous êtes à mes yeux la p.ropriété .la plus précieu~e, &. la
feule qui pui1re déformaIS embelhr ma vie empOlfonnée
" par trop d'erreurs &. de revers. Qu'on ne s"étonne donc
.:: pas que je veille de près fur ~ que j'ai. d~ plus cher,
. fur l'wnique fource de "onfolatwn &. de JOie perfonnel"les nue le fort & mes falJlteS m'aient lai1ré.
"
''1me laiffez nlus en doute lUr
l'
r.
é , Je
.
Ne
votre . Lant
"
r
" vous en fuppli~, Mada~e. Mon pere, mon on.~le vous
feraient vbl.onuers la meme demande. Quand J entends
)',
d'un c6té Fexpreffion de leur fenGbilité ftlr vous, fur
tout ce qui vous intére1re' , fyr tout li:e -que vous mé"" ritez ; &. que je me rappelle de l'autre les qualités
que je vous connais, votre amatir pour vos devoirs,
" votre airnabl'i! de ur de plaire :-j'ai peine à m'expliquer
" que ~outes: leurs, lettres reftclll fans réponfe ~ &. je rêve
.", " trillernen~.
: " Vive~ heureufe, Madame ,~ croyez que votre bon..
" heur eft l'objet de mes vœux les plus chers, puifque
'" je ne puis plus être' heureux que par vous &. de Votre
' " bonheur.
, Uexprès rapporta les réponfes 'qui fuivent , &. une
lettre -de Madame de Mirabeàu à M. de Bailli fan oncle.
Oh en prié de ne pas perdre de vue .que celle de Madame
'la Comte{fe à M. le Bailli, en date du 29 oétobre , était
-loin encore d'être reçue~
ç;
"
.
De M. le MarqJ'Î.s de Marignane;"
;;. Je fuis d'autant plus"étohné", Monfieur, de l'Înqu ié;; tude que vous me témoignez pour la fanté de ma fille ,
" que j'ai vu la réponfe qu'eHe a faite à la lettre que M.
" votr~ oncle lui a fait l'honneur "de lui écrire p o ur la
1t prévenir. de votre arrivée ell> Prov.ence. Je la laiilè
F
�,
4Z
;'; s':expliqtter. vis-à,vis , .d~ vou_s. !e ~lll1ois : ; ~IÛl qUI!
toute la France " les natfons JIU 1 lUJ ,donnent luite lieu
., Ide fe croire fond~e à être foulhaoÏ1te pat" tPIlS les Tri" bwnaux du Royaume à ce dro}t de propriélé que vous
:: femblez ,réclamer aujouJX'i'hui , ~. auquel v,om , a.ye~
." pa>ru .fi fe~eJIll1eUemej1lt ~ ,fi publiquement ,ren(j)&ce~. Je
ne puis nI 'n'e/ilu:epreJ)œa l de ddlip~r fes luites , cralotes
." pour une réunjQtl lQ<ilJut f.épreuve patrée ne Ùli promet
" pas un grand bon1leur pour J" avelllr. Sur t Dut 1e reUe
." je Jais des vœux 'Pour votre bonneur. C'eit d.ans ce;
" [ootime.rns qlil j'a], l'honne.ur d'êtl!e, M011fi~ur , vQtre, &ç.
'"
.
'\ JJ 1
?
~ l "'*
=
~
/Je .MJul.a11!e Ju ii.omteifo pe. .MÙ:a&eaf{~ ' .t
l
"
lit
,
A Macig'l3ane le 4 novembre 178z.
'" ' ~e -reçois .ûa?S le moment v_otr~, l~ttœ 1 ,Monfu:ur ,,i.e
. .fuis fort furpn[e cql!le celle: ijue pl eu 1 honneur d e,." crire à mon oncle, ne l 1.11' IOlt
r '
'pas parvenue. .J,e.n'eu
." cançois :Pil> -la .raifon, &. je fuis p.erfuaclé.e qu~elle (era
" .enfin . rendue .à fa defiination.
:'"
Recevez mes remerciemens., ManGeur, 'fur l'in.térêt
.-,,' ~ue vous avez la' bonté de prendre à ma fanté; je
.fais auŒ des :vœux pour votre bonh:eur ; perfOntle ne
~' l'a plus . vivèmènt .defiré que moi. Mais , Monfieur .,
" il ne m'eil Flus 1 poulble
a:
d' y contrl'b uer ,: t-rop de clr'
."
V
d
r
·
,
_" _conftances nous féparent. ous evez lentlr vops-~eme
" que les ·événemens qui ont eu lieu.., ferpnt ~ouJours
" une barriere infurmontable entreyous & mOl. Vo~s
" jo uiffez, Ma nGeur, des mêmes ~vantages que mal ,;
J, vous êtes dans le fein de votre famille ; 'puiffiez'vous
-" Y trouVler autant (ie b.onheur _que ~.e Je èleGre ! le mien
" confifte à vivre atlprès de mon pere. :Je me J latte que
." vous ne chercherez pas à ,I.e ' troubler en.me forçant ~
." défendr.e .ma liberté par le fecours cres_Loix. Soy.ez per:"
" fuadé , M onlJ.eur, -que fur tout autre .fujet , je, ne f'llS,
~3
-", aes vœux qué 'pôur ce qui peut contribuer i! Votre fa-J:'. .n'
"" tislal.LlOn,
L-mre de Madame 1(: ComtejJe de -Mirabeau li M , le B ailli
,
_
de Mirabeau •
A Marignan~ l~ 4 rovembre 17 82 :
» . J'efpére' , mon cher oncle" que vous ne me fanes
» ' pas le tort de· croire que je ,né . m~, fois pa~ e~ preiTée
» à · rep€lndre à la tettre, que vous ru avez (~lt 1 honneur
) ;" âe m"fècrire-: la mienne a peut-être pris une fauCre route;
» . m qis eUe vous ' parviendr,a certaine~e et; ç'eft la raifon
» qulf~it que- je ne ~'éteqds p'!.s d~v~n~age. (u ~ ce qu'~Il~
»' cun.tenoit, qui q eft qu'une .fuite ~e la promefIe que
» vous avez eu ' la bonté de n9ûs ~ire , 8<. dans 1aguelle
» nous avons la prus intime conhance,
» J'efpére que votre fanté eft l'aFfaitement rétablie;
»' métla~ez-~a 1 mon cher OI~cle, I:0tp' le honheur' de tout
)) ce qUI. vous ,appartient.
.'
•
_ -» Re~v~,z avc~ ' hO/Hé Paff~ranc!e "de mon . retpeéf 8{
». de mon tendre. attachement .
J) J'ai 1'hOf>lneur ·d'être., mon tr~s·cher oncle, &.c_
'
Le Comte . de Mira~eau s"a»percevant au langage de
~. 'le M<1rqurs de Mangn~ne ,. qu'fI '.ignoroit abfo.lum~ni
1)i[u~ ?U ,PSQcès de ~~h tar~(e r, poifque la- prt/endlieJ ré:'
l1onClau07z du Comte de -Mirab'eau à: fa n épou(e ne pbuvoit 's'entendre ('que de cette -affaire il crut -devoir les
éclaircjffeménts fu.ivans à M. -fan pe;e & à- Madame hi
Co~teili: de Mirabeau.
~
..
.. • t'
J.,
c_
. . ') _
~. 'A M.~ le JfÙrquis; de Man~(ini: '
,
.
•
•
;J
,
l
De Mirabeau 6 novembre-,
- )} M. le Marquis ,) . J e~n'ai l1~Ue ènvie -de vous engager dans un polémique
F ij
•
�44
)) trè,-déîagréable ' qui vous enn~yeroit. Mon premier in~
» térêt ell de ne plus vous déplaIre; & en celar mon defil'
» eft parfaitement d'accord avec mon intérêt.
)) Mais, -M. 'le Marqilis, vous ête~ · homme fage autant
» que je le fus peu; & moi je fuis homme d'honneur au» tant que vous l'.êtes; ainfi nQUs (entons également toUt
.) 'deux que la ·circonllance aétueUe, c'eft-à-dire, mOn
»' arrivée en Prpvence , & ce 'qui vou_s a fembU une rén clama,rion de me$ droits de mari, 'eft Couverainement
» importante" pour la maîCon dont vous êtes le clief
) pour celle dont je dois l'être un jour, pour le bonheu:
)) de Madame votre fille, pour le mien, pour la répu» tation & la tranquiIJité de nous tous· Vous me par» donn.erez conc dt;: m'expliquer encore une fois avec
» vous, & 1de foumettre à votre excellente judiciaire &
» .à votre équité de courtes obCervations CJue vous pefe·
» rez d'autànt plus (crupuleufemt;:nt, que c'eft dans le
)) procès dont on a engagé Madame votre fille à me
" menacer, que je vous prends pOl,lr arbitre.
» V-Otre : lettre, M. le Marquis, contient deux ob.:
» jeét!ons. Vous motivez d'abord le refus de Madame
» votre fille de fe réunir à celui que Dieu
les hommes
) lui ont · inçliifolublement uni, fur la renonciation fi fo·
» lemneLle .& fi publi-que que j'en ai faite, & q\cli ~fi connu~
» ete toute la Franee ainû que de ypus.
» Ceci .porte & ne p~ut porter que fur le procès cri.:
») minel, yraîment inf~nfé & ridicule, .s'iln'.eût été atroce;
n ql,le l'on m'ayoit "fait ~ POl}tarlier fur un prétendu ~n'
» levement de femme. Mais ignoreriez - vous , M. le
» Marquis, que ce procès eft fini, parfaitement fini; que
) j'ai été completemen~ abfou5. Que dis-je abfous? ' 111 es
» partjçs ont imploré un accommodement; j'ai ' diété la
» Loi; St les mêmes Juges qui m'avoient condamné à
» perdre la tête, ont homologué /Jotre tranfaétion il I~
» fequÎûtion de l'Homme public, . fOL,S la di{tée de Mo'
f't
45
)} le Procureur Général Sc. de M. le Premier Prélident du
» Parlement de B:efançon.
.
'
» Defirez - vous, M. le MarquIs, que )e vous ~a{fe
» pa1fer une expédition en regle{'d~e c,e tte TranMfaétdlOn ,
" de ce Jugement? C'eft par con 1 eratlon po~r a ame
» votre fille, & par refpefr pO~,r vous que Je, ne vous
» l'ai pas envoyée. J'ai cru qu Il ~le conv,enoa pas de
» vous rappeller ces t~ift~s fo.uvemrs .. MaIS vous avez
» droit à connoître ma )uftlficatlon 1 daIgnez-la demander.
» Exigez-vous davantage? Demain touS les papiers pu» blics de l'Europe feront remplis de ce Jugement, .&
» attefteront que je fuis loin d'avoir renoncé à la femme.,
) dont j'ai dit dans ce proces même, que le CIel m'avolt
» donné ceue aimable époufe, indulgente, & tendre autant que
» chérie. dans un ums Olt j'en étois peu digne. fans dOUle
» pour m'encourager. ci ripare~ les trop lon.gues erreurs de '!la.
" jeun(ffe, en me laijJàn.t, LOU)?UrS la perfpec'llv.e du h~nh~ur.
J)
)) Je crois, M. le MarquIs, votre premlere obJeéhon
bien inconteftablement levée : paifons à la feconde.
» Elle porte fur les ju{les craintes de Madam e de Mira-.
» heau, pour une réunion dont l'épreuve pafJle ne lui promet
JO
D
»
)
»
»
))
)
»
»
»
n
~)
pas un grand bonheur pour L'avenir.
» D'abord, M. le Marquis, vous me permettrez de
douter beaucoup des juftes craintes de Madame de
Mirabeau. Mon cœur y eft trop intéreifé, pour y
croire légérement; & je connois trop ma femme; fa
douceur qui la rend aimable aux yeux de tous; fa
fenfibilité qui lui feroit pardonner à un mari même
très-coupable, s'il étoit fincerement repentant, quand
il n'auroit pas été très-puni; fon attachement aux de-.
voirs du mariage, avec lefquels une honnête femme
ne compofe jamais; je connois trop enfin fon cœur &
fa raifou , pour lui attribuer la lettre que je reçois
d'elle, &. dans laquelle, outre l'annonce la plus franche
d'un divorce non ~otivé, on me menace des Loix,
�»)
»
•
),
»
»
»
»
»
»
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»
»
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»
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»)
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»
»
»
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»
J)
»
»
»
»
4~
qui ëep~nâant ll·~nt . j~mais, quI! je (ache; ref'uCé une
femme a un man qUl la redemande avec toute fOrt '
d'inftances .& de tendrelfe.
e
» Mais en fuppofant même c~s . crai~tes ,--que la pré• .
fence de mon oncle, chez qUl Je fUIS, devroit appa.
tamment atténuer, j'ofe vous demander 1°. quel en '
eft l'objet. Il eft. très ·vrai que j'ai été fort dérangé '
& qu~ ce .dérangement à a~tiré beaucoup de .défagté: ·
mens a mor & qUl!!lques uns a ma femme. MaiS ce clé- .
rangement n'eft plus, & tout ce qui refte de l'ancien
va difparoÎrre. D'ailleurs quel jeune homme n'a pas '
cOlltraaé de dettes? Quelle femme s'eft jamaIS crue
autoriCée au divorce, patce que [on mari" à des créan.
CÎ'ers? V ('us obCerverez que le revenu per[onnel deMadame de Mirabeau n'a pas fupporté la plus legere
atteinte; qu'il a même quadruplé depuiS" que les cir'
conftances nous ont éloigné l'un de l'autre.
» 2°. J'orerai vous demander encore fi la théorIe des
devoirs du mariage fe ' réduirait donc à ceci, qu'il 'el('
annullé de droit fitôt qU'O:1 n'y trOuve pas en pere.
peaive un grand bonheur? Eh! M. le Marqui~, vou.
le [ave~ miellx que ,moi, e~ fait de ~onheur il n'y a:
de vraI ql1e ce qu on crOit. Madame de Mirabeau
ne croit point; on lui fait croire. Il eft airé de me'
trouver des torrs; il eft plus l1ifé encore de les exagé"'
rer: mais j'efpére qu'il fera difficile de donner (éri'eu[em~nt à Madame votre fille Une idée fi légere da
m;mage & de fes devoirs, que la perfpeébve d'un
bonheur plus ou moins grand eri doive être à fes yeux
le fceau ou la diifolution. Jetais du moins qu'i l n'eft
pas poffible de faire condamner aux honn'êtes gens ma
réfolution de réclamer nia fem'lle avec refpeét pOut
vom~ &. tendreife pour eUe; mâis avec tln'e .férmeté pro·
portIOn née à l'eftime que j'en fais & à l'honneur que
Je mets à votre alliance.
.
.
•
, 47
') Voilà, M. le 1\farquis, ce ' que' j'ai cru devoir i:e~
~) . 'préfenter à l'hom~e d~n~, j:ai l'honn eur d'~tre l,e ~eau
)) fils de [on choiK, a qlll J al connu un efpnt tres-Jufte,
. l) des principes très-nobles, beaucoup de générofité, &
. 1) toute forte de , vertus privées.
11 Yous ajouterai-je que le ton de la menace, fi peu
r» convenable. d'une femme.à fan mari, ne peut que rel> doubler la fermeté de mes réfolutions (que je fuis bien
Jl loin de défavouer , puifqu'elles ne me portent qu'à re» fufer de renoncer au titre de votre fils), en intére{[aut
.» mon hOJ1neUr à la pourfuite de mes droits? Ah ! M.
» le Marquis, des menaces que la décence reprouve &
J) dont le bon fens [ourit, ne doiv.e~t pas être les arm es
, l) de Madame votre fille; elle en .a de bien plus puif;» fantes, fes qualités aimables, fes titres à l'eftime pu» blique 8< à la mienne, [es droits d'époufe & de mere.
,» ,.Q u'elle me rende avec fa perfonne [on cœur & {a
-» raifon, votre bienveillancç 8< vos bontés; & je vous
.» jl!re que je croirai moins avoir recouvré mes droits
,)) [ur elle, qu'en avoir reçu un bienfait.
,» J'ai l'honneur d'être avec un tendre refpea, &c.
'A Madame la Comteffi de Mirabeau.
Au Château. de Mirabeau le '6 Novembre 178z:
' ~~Je. v?us enVOle, Madame, la copie de la lettre que
,~) J eens .a M. votre pere, où vous "Verrez que je me
» reprocherois de vous attribuer celle que vous m'avez
.) adreifée le 4 oaobre.
» .Non, Madame, je ne croirai jamais qu'il ne vous
.» fOlt plus poffible de remplir vos devoirs; & vous n'ê.
,)) t~s pas, capable de vous diffimuler C(;!UX que votre
;.» tItre d épc;mfe vous impofe.
». Je ne eroi.rai pas que vous 'ayiez eu l'idée d'atte[-'
! )~ ter pour barnere mjurtllomaMe elltre votre mari & vous;
�48
" des tvénemeni chimériques dont j'ai ' démontré la fa f.
» feté comme un Jugement authentique l'a déclaré~'
» J~ ne croirai pas fur-tout
que vous
, ayiez" pu III.
.
" me fOl'lpçonner d e , POffiuvb~lr attenlter ~ votrç hberté que
» ma famille entiere au 1 len qlil~ a V0tre défendroit fi
;) j'étais capable de l'attaquer; ~I ue vous ayiez me,» nacé de vous-même votIe man d'illvoqwer COntre: Itti
» le fecours des Loix.
.
.
)) C'eft fous lelilr garantie, Madame, que Je fuis Votre
_» époux; /3( ce 1l0~ m'e1l: bien cher. Je fuis réfolu d'en
» réclamer les droits & de les défendre, fi, ce qu'il
» m'ell encore impoffible de croire" quelqu'un préten» doit me les difputer, parce que j?y vois vott e bon» heur arnfi que le mien. Huit années ont mûri ma
» jeunelTe' , depuis, qu~ nous vivons loin. l'un de l'au. " tre. Je croirai diffiCilement que ces huit années, dé·
» vouées au malheur, titre tœs-facfé fur les bons CŒur9
» m'aient chaifé du vôtre. Interrogez-le ~ Madame; Con» fultez vos vrais amis ~ ceux de vatre ~ifon, ceUDt
» de votre perfonne, ceux qui ' n'ont- pOillt d'intcrêt il
» . nous défunir, à nous brouiller, à. nous animer l'un
» contre l'autre: Je doute qu'ils contrarient mes VŒuX.
» Mais ce dont je ne doute pas, c'eft qu'en de[\;en» dant en vous-même, c'eft qu'en écoutant le cri de),)' votre' confcieilce., de votre équité, de ' votre généro» fité naturelle, vous' n'ayiez hon'el1r de- plaider 'que
»- l'homme que vous avez choifi, avec qui. vous aVM
» vécu . deux années, à qui vous avez écrit. quelques
» lettres très - dignes de vous, & qui ne vous a pas
» revu deplilis que ces ' lettres" 'témoins de votre ten'» dre{fe, : ont été écrites; que ce.t homme, le per-e
, !)
d'un fils _que v.ous avez pleuré 18, mois avec des lap·
, :0'",
mes dont votre époux peur feul tarir la fource en
- n- \(OUS- donnant d'autres gages de fon am our·; que l cet
» homme.. n'dt plus, ne doit plus être "-otr.e époux.,
9.
,
:,»
-
>
» Eh !
49 . . ,
oJ-- Eh! Pourquoi, Madame? Parce qu'il a des dettesf
~ " u'i! n'auroit plos fi leur arrangement n'é'
toit pas a" ~aint à de lentes formalités? Parce qu'il a été très,.,
, , malheureux
€
, très- calomnié, &. qu'il plaît à je ne fais'
q uels confei-ts de regarder comme un outra ge per" fonnel
' une accufation qu ,un J ugement auà vous,
" thentique a repou{fé? Ah!' Md
. vous cona ame, Je
'.' nais ,bien' votre cœur s'indrgne de ces [ophifmes bar,
,'
bares,& défavoue votre plume. V ous n)-Ignorez pasIl.
'r
'
"" que l'époux que vous avez ,~h 01'fil , n' eIl
. III HlI1S gen'érofité, ni fans nobleife, III fans entrailles. V ous:: mêqre avez dit mille fois' <pIe fa fougue naturelle
" amortie par l'âge, feroit place à des qualités efti" mables qu-'el1e obfcurci{foit. Vous en parliez avec
" plus d 'é loge~, Madame, qu'il ne me convient d'efT
répéter id. • •. Mais je ne dois pas les oublier; ils
': me font tin gage précieux de ,:,otre affeétion, de vo:.. tre efiime; & daignez vous fouvenir à votre tour,
" ql1e fi la menace même férieufè &. non dérifoire,
,,' comme eil: celle qu'oll vous a cunfeill ée, n'obtint ja" mais rien de moi-, votre tendre{fe, votre raifon, vo~, tre douceur eH furent rarement refufées, & fur-tour
,1 ne le feronç jamais. ,
Le même exprès qui portoit ces lettres, étoit chargé'
de I~ part de M. le Bailli de Mirabeau, pour Madame'
fa mece, de ce qui fuit ..
;,
"
"
"
,
"
_
.'
Mirabeau fe 6 Novembre '1782.
" Quoique' vqus refufiez, Madame ma chere niece, ~e réa1i(er le titre d'oncle; puifque vous vou lez bien me le' donner encore, j'aurai l'h'onneur devous dire mon' avis en onde qui vous chérit à l'é rra l' , ~;
des ntief'l! d'e mon fang.
t>
", Vous ,~le rappeliez la parole que je vous donnai ,
a111Ji ·qu a- M. votre pere, que mOI'- neveu ne fe pré'";
/,1/< e
G
Cc 1
:J
�so
51
;; renterait à lui, chez lui, que ,de fon aveu, Votre mar' .
__ car enfin vous ne pouvez lUI refu[er ce titre ac ' .1,
-)J tera ma
. paro 1e. M'
Arr
,quitais vous etes la lemme & n II
. ' rlOUS 1e C'le 1 nt' laurOIt
r
'd'Ir
" autonte
1110U dre le' lien U e'
" l'attache à vous & vous à lui. Le Souverain Iui- q~l
fi
d'
me,
,., me ne l e pourrait que par un a\,.le t'1 urannie ino .
,'
L
lIl.
" V ous 1e menacez d aVOIr recours aux oix Cont
" lui. Je fuis également témoin de fa douleur & de ~e.
" juftice qu'il rend à votre cœur que le fien lui a([u a
" n'être pas d'accord avec votre plume.
re
" On vous trompe, Madame ma chere niece fi l'on
~, vous perfuade qu~ les loix peuvent vous fép;rer d
" lui. Il faut pour cela des [évices bien caraétérifés e
" réitérés, & qui n'aient été fuivis d'aucune marque d~
" retour vers des fentimens d'amitié.
" Vous ne l'a".ez pas vu depuis l~ mois de feptembre
" 1774; & depUIS ce temps vous lUI avez écrit plufieurs
" lettres bien dignes de vous & pleines de marques de
" votre tendr.eife. Qu'oppofera - t - on aux droits facrés
)J du mariage? Sera-ce un adultere peut-être nul dans le
)J fait , devenu nul dans le droit,
& reconnu pour tel
'-' p~r les .per~onnes intéreifées à l~ fou tenir , quoique
" bien 101ll d amadouer (es adverfalres , votre mari leur
" ait diLté la loi? L'on a · envénimé auprès de vous les
" te~m~s de deux Mémoires. Le premier n'eft pas de
" hl!; Il en offre les preuves, mais feulement par ten.
" dreife pour vous; car ces termes même fuifenr, ils
" avoués de lui, ne fignifieroient rien. ~
". Quant à ceux du deuxieme Mémoire,. l'interpréta,., tl?1l qu'o~ ~eur a donné, efl fi forcée qu'elle en
ri.
'.' dlcule. D atlleurs, plufieurs phrafes 'de ce Mémoire
'7 marq,uent de fa part une tendreife qui démellt l'idée
" qu'on a cherché à vous en donner & celle même
,
'r
'
" qu on ~ous ~ empolionnée, la voici; jugez-en. Le voila
" ce proces qUi m'a ôté cinq" annù:s en/ieres mon exifl'""
ea
". . '
ui m'a fi ad d'une tpoufe indulgente & ttnJrc
" clvde ,tj
h" 'P nui m'a privé des dermers embraffiUlant ljue C eTle , 1
.ff: 1 l
" a
1
fil dont J'e n" ai ,pas prej)
e es evres ago·
mens al! mon s,
.
fi ' L' ,rr.
";r,
& qui peut· être refpireroll encore 1 Je eu.JJc
flIJ a·ntts ,
" gard'e.
& h
nl'ece. Il s'a~,
Réfléchi{fez-y bien, Madame, cere
.
. "jt du bonheur de toute votre vie. Renoncez·vo~s au
" gl'fi d,A tre mere
de relever deux races qUI ont
al If e
-,
., '
d
t
P
" toujours
.
b'len lerVI
r
. l'Etat 1 Ce que J al vu
e vo re
.
, Ir.
" douleur fur la perte de votre fils, m allure que non.
"J
s le répete nulle autorité fous le Clel ne peut
" e vou
,
d r ~
M . tre
em êcher un mari de redeman er la .lemme.
. vo
"
Pe ne fauroit défaprouver le fenument le plus na" turel.
per Votre mari aura pour 1UI. 1a 101,
·
l'h onneur &
" le fuffrage de tout ce qui fait penfer..
.
•
"
Il connoÎt votre cœur; il ofe, ainfi que mOl, fe
'fl' tter que fa chere &. très-chere Emilie, n'efl pas ca" _ able
a
' 1es T'b
- d es er-de faire retentir inuulement
fi unaux
"p
'IT.
" reurs de fa Jeunelle.
Avant de répendre , Madame de Mirabeau, qui était
à Marignane , part pour .A ix & y vient, accompagnée
de Madame la Comteife de Gra.lfe , confulter des Avocats.
A la lettre amicale, noble & touchante de M. le Bailli
de Mirabeau, Madame fa niece répondit.
"
"
"
;1
;,
"
•
.
De Marignane le 10 novembre 17 82 .
La lettre que vous m'avez' fait l'honneur de m'écrire,
'Mon très-cher oncle, efl faite pour me caurer de l'étonnement: auffi a-t·elle produit fur moi cet effet, J'avois lieu de me flatter, d'après l'efllme & l'amitié que
vous avez eu la bonté de me témoigner , que vous
accorderiez plus de poids aux raifons qui me (éparent
de M. de Mirabeau .
;; Perm1:ttez , Mon c;her oncle-, que je conferve l'ef~
G ij
�5~
;;
,.
"
"
"
"
"
"
"
"
"
"
"
::
"
"
"
»
pérance qu'au fond de votre ca;ur Vous me l'ellde~
plus de jull:ice. Mon malheur ferQIt trop grand, fi en
perdant mon repos pour ?éfendre . un~, ca~fe fi jUfie ,
je perdois encore l~s f~ntlme~s que: J ~VOIS été airez
heureufe de vous Infplrer. J oferal meme vous dire
que votre façon de penfer jufqu'à préfent Il:e donnait
lieu de croire que vous ne défaprouvertez pas la
mienne, Les lettres de mon beau~pere me donnaient la
même efpérance à fon égard.
, J'él0is loin de penfer , mon très-cher oncle, quand,
"
c.'
r lij'ai
travaillé a, lalre
~en d
re 'a M . d e M'Ira beau la
berté, qu'il n'~n ferOit uf~ge ,Cf,ue pou~ tâ~her ,de ~e
priver de la mienne. QUOI qu Il en {Olt, Je fUIS tres,:
déterminée à la défendre avec le fecours 8< l'approba_
tion de mon pere. Il m'ell impoffible de penfer que je'
me conduis mal, quand j'agis d'après fon aveu. La
jull:ice de ma caufe me rafT~re, con~re tous les événe_,
mens: il n'en eil aucun qUI put faire changer ma ré~
. folution.
" Daignez recevoir l'afTurance du refpeét 8< de l'atta~
chement avec lequel j'ai l'honneur (l'~tre , txc.
Sa réponfe à fon man portoit.
De Marignane le 10 novembre 1782;
" J'ai peine' à' concevoir, Monfieur, les raifons qui
;, v.ous empêchetlf de croire que la lettre que vous avez
, reçue de moi, conti~nt mes véritables femimens . .Je
" croi.s ,ne vous les avoir pas l'lifTé ignorer les dernieres
" fois que j'ai' ét~ , dans le cas de vous , écrire ; & ma.
" réfolution n'a pas paru alors vous furprendre. Je ne pré" tends vous faire aucune menace. Je me crois en droit.
~, de ne plus vivre avec vous, Monfieur ~ & je vous ai inf-.
" truÎt de l'intention dans laquelle je fuis de m'.appuye~
,~ du feco).lrs d.es loilt pO~lr '~ainteni~ ma ~~er!é~ J~fIl
-
,
53
.
,. ' ' de' m'On pere MonGenr,
îl
ne m ,ab an cl onnera
pas
-" laveu
,
1
d
'a
" d
erte circonll:ance; & rien dans e mon e ne m r-,
" rachera
ans c ,jamais d" aupres d
e l UI.'
.
.
.
",
Et la réponfe de M. le Marquis de Marignane étoit
conçue en ces termes:
A Marignane le 10 novembre, 178z:'
Il n'y ~ point de menace, Monfieur, dan!> la declarauon
» )~ue vous a fait ma fille de recourir a,u,x n:oy~ns de
» défenfe que votre conduite lui a .donnes pour fe fouCn traire à , une réunion qui ne peut qu'op érer v?t~e
)J malheur commun; le fien, en redevenant v?tre .vléh-) me' le vôtre en vous donnant occafion d avoir de
): nou~eaux tor;s dont la récidive dans un âge plus mÛl"
acheveroit de vous perdre. L'impétuoGté de vos dé: marches la même fougue & le même ton tranchant
» & affirm~tif dans votre ll:yle épill:blaire , fuffiroient pour
» me tenir en, méfiance fur la réalité de votre change» ment, fi tout ne me prefcrivoit d'a illeurs la plus.
J) grande circonfpeétion fllr cela. C'ell donc avec mon
n aveu que ma fille va fautenir le procès dont vous la
)) menacez. Je n'épargnerai ni ma perfonne ni ma for:
» tune pour le [{)utien d'une caufe que je crois jull:e.
}) J'ai l'honneur d'être, &c,
A ces afTurances holl:iles, à ce ton menaçant que la
famille de Madame de Mirabeau crut devoir en réponfe
aux lettres de M .' le Cpmte . d~ Mirabeau (lettres que
M,le Marquis de Marignane trouva fougueufes, tranchantes
& affirmatives, mais dont les Juges & le pùbl1c penfe.rO:nt
différemment peut-être) ; le "Comte de Mirabeau n'oppola que ie fiIence & l'interceillon des amis de M. le
Marquis de Marignane, qu'il put engager à lui parler;
& quarame-fix jours fe paJTerent a'infi de fa part. Mais
�54
avoit alfembIé le 28 novembre; au dom de Madame
~~ Mirabeau, MM. Simeon pere, Pazery, Pafcalis,.
Barlet, Portalis &. Simeon fils..
",
Le 2 2 décembre le Comte de ,Mlrabe~u mfirult qu On
attribuoit fon Iéjour à Mirabeau a la. crainte que M. fo~
it de le montrer au publlc, fe tranfporte a
one1e av O
'1 é .
l'
· L premier J'anvier 178" 1 cnt ce comp lmellt
A IX.
e
. cl M'
Q.
'
M
fimple &. nud à M. le MarqUIS e... angnane '-'" a adame la Comteife de Mirabeau.
M. le Marquis,
,
» rafe efpérer que vous n~ défaprouverez ,pas qu ail'
» renouvellement de l'année, Je vous apporte 1 homma.ge
»d
es vœux &. de rtU!S fOllhaits pour vons. 11 ne
e m eroit rien à votre bonheur s'ils étaient exhauffes;
» manqu
. fi" . . fii h
) il ne manqueroit rien au mien 1 J etols a ez eureux
») pO\!lr pou\'oir y contribuer, &. vous donner les preuv~s
J) les plus efficaces &. les plus touchantes de mes fe nt.l
» men~ &. du tendre &. profond refpeét avec lequel Je
» fuis, &c.
• J)
<
A Madame la ComlejJe de Mirabeau.
-n Il ne peut pas yous ;trriver , Mad,ame, de vtai bon,..
» hem que je ne le partage. Vous n aurez, pas un cha» grin que je ne le reifente. Toutes mes annees fe reffem)} bleront à cet égard. Puiffent les vôtres être longues
» &. fortunées! Puilfai-je les embellir, &. être long-rems.
» heureux de vous &. par vous!
.11 n'en reçoit pOi~lt de r~pon[es • .
M. le Marquis. de Mar'ignane & Madame fa fil.le re·
viennent à Aix. M. le Bailli de Mirabeau va les vditer ~
~ M. le MilrqtJis de Marignane llii protefte que fon beau~
•
55
GIs SEROIT IRRÉPROCHABLE DEUX ET TROIS ANNÉES -;
QU'IL N'EN CROIROIT PAS DAVANTAGE A SA SAGESSE.
-
. Le 27 janvier 178, le Comte de Mirabeau éCrit à M.
le Marquis de Marignane la lettre fuivante.
1\ Aix le 27 janvier ]78,.
» M. le Marquis,
J) Le filence que je garde
depuis plus de deux mois
» envers vous &. ma femme, me paroiiToit une preuve
» non i.quivoque de ma dtférence pour vos defirs , & d'une
» ferme réfolution d'eiTayer ce que pourroient fur vou~
» des procédés refpeétueux &. une conduite irréprocha» ble. Refufé avant d'avoir rien demandé, repouifé
» avant de m'être montré, j'ai dévoré mon jufie cha" grin; &. ménageant d'un côté votre répugnance à cor.
» refpondre avec moi; dégageant de l'autre la parole
» de mon oncle qui, bien qu'à mon in[u, vous avoit
)) promis que je ne me préfenterois p'as chez vous fans
tl votre aveu; j'ai ceiTé de vous écrire (l'occafion de la
» nouvelle année exceptée), & [u[pendu toute démar» che , pour vous donner le tems d'apprécier ma con" duite, &. d'éprouver celui pour qui des circonfiances
» malheureufes vous ont infpiré -des préventions & de la
» méfiance.
)~ Je ne croyoi~ pas qu'une telle conduite fût fufcep» tlble. de d.eux Int.erprétations; & j'en attendois avec
» une Impatience bIen vive, mais renfermée au fond
» d~ mon, cœur, l.'effet &. le fruit. Mais j'apprends qu'on at... -,
» tnbue a l~ cralOte ~e q~'on ne devroit imputer qu'au
» refpeét; a un parti pm par Réceffité de renoncer à
» vot.re fille, ce qui n'appartient qu'au defir de vous
» pl~lre, &. de recevoir de vous une époufe que je fe» rOIS profondement affiigé d'être forcé de redemander
}) malgré vous, mais à laquelle auffi nulle confidéra-
�,l'
: 56
rIon hunr.rirre ne Cau1'Oit me fdire re.noncer fur-tout cl _
)J
puis qu'.u1l )lruit s'dt ~épandl,l qlle ~e m'en étois rel)~
J) indiane par ma conduite envers elle.
. » . Jg lU! Cawrois, M. le Marquis, accréditer 'plus long_
" temps la maniere injufle dOIH or:. explù:jue. mes pro.
» cédés &. ma déférence. Elle. eft telle ~ette déférence
» Hal!, ri~o : ~ dey'tΧ les . 1)Lus .'petltes attentl~n~ . d~ fociéré
)} jllfqu'aux plus grands facnfices '. Jl1! 'lne c.outeroit pour
); vous eil convaincre; &. que lmn de chercher il. gên er.
» Madame votre fille par une rencontre, qui l'embar_
» l'aŒeroit aurri long-t~ms que vous perfifterez dans les
». fentimens d'éloignement- Ique vous me témoign·ez ·
» j'ai évité, j'évite &. j'~viterai tout ce qui: pourroi;
» vous inquiéter. Mais daignez me faire favoir' fi. vou~
» n'impofefez pas un terme à ceue condLlÏte d'un fils
». difgracié, timide &. docile. Vous êtes tfQp june &1
» trop fag~ pour ne pas fentir q4e li je défefperois que
) vous vouluffiez en fixer un, des délais qui me fe~
» raient C0nfurner en pure perte le temps. le ph:ls prél> cieuiX de ma vie, pourraient. me paraître fuperflllS;
» Je le répéte, M. le Marquis" rien- ne me coûcera
» pour vous fléchir; mais daignez' m'apprendre fi je puis
~) en conferve,r l'eCpoir; car je ne dois ni' n2 veux re» fiancer à ma femme.
» J'ai l'honne'ur d'être "avec un tendre &. ptOfond ref.
» petr, lXc. .,
M. le Marquis de Marignane juge- à propos de répondre verbalement au.' Domellique porte.ur de cette leItre; JE N'AI POI.NT' DE REPONSE A DONNER: M. DB
MmAB·EAU FERA CE QU'IL VOUDRA •.
,{,es interceffeurs les plus. refpeétables s'épuifent en vailles tentatives.
. Le Comte de Mirabeau réfolu de· combler la ' mdure
des procédés, écrit à. Madame de Mirabeau la lettre
fuivanre •.
d'Ai&:
1
1
57
cl' Aix 29 Jan",ier i7S.3·
;, Vous verrez, Madame, par la copie que je vous
,, ' adreire, &. à laquelle je n'ai reçu d'autre réponCe,
" que cette phrafe verbale, M. de Mirabeau fera ce
" qu'il voudra; vous verrez, dis-je, que je n'ai rien
" épargné pour fléchir M. votre pere, & que s'il m'en
" eût lai{fé feulement l'eCpoir, je n'aurois pas balancé
" à n'attendre que du tems notre réunion &. le retour
" de (es bontés. Mais il n'a pas voulu me permettre
" la moindre confolation; &. l'inflexible jamais dont il
,,_ a accueilli, tous les conciliateurs que j'ai chargé au" près de lui de mes intérêts, fans me faire renoncer
,~ à la' dou~e ambition d'être toujours [on fils, fêmble
" ne me lalffer d'autre moyen de le convaincre que je
" n'en ai pas démérité le titre, qu'en le démontrant au
" pu~lic. Je vois ,donc avec un bien vif regret, mais trop
" c1am;men.c , qu II me faudra recourir aux voies de
" droit ap,r~s . avoir vainement épuifé tous les moyens
" de col1clhatIon.
.' " Mais avant d'en venir à cette trille extrêmité ' "
t
t
,.
d ' é"
qu a
" ou pnx Je vou rOIs vIter, Je YOUS demande une
", conférence.
.
, Je ne ferai pas le - tort a' ma fie mme d e
" croIre quo elle redou.te le moins du monde cette entre" Vl1e. MaIS comme Je ne veux pas ' inquiéter M. votre
" pere, &. que d'un autre côté il me paraît .ufte
" perConne n'intervienne dans les explications en/re é o~~~
". Je propo:e que cette çonférence où un tiers quJcon~
" que [eroIt plus qu'inutile, ait lieu dans un a . arte". men,t attenant ou feraient mon beau-pere &. pp
cle'
d
mon on"
,ou e toute autre maniere qu'il vous plaira fixer
" pO~,rvu ,que perfonne n'entende notre converfation '
" a~te~ds vocr~ réponfe avec l'impatience natur~l1e
" aux entlI~ens VIfs &. tendres qui m'attachent à vous
". pour la vIe.
Madame de Mirabeau demande 24 heures pour - f.e-
H
�)8
{;onfulter. :Le lèndemaia la conférence efi: refufée ver.
balement camme IM~~SSlBLE ET fNt.TTfLE. •
.
Le 5 février, M. le Bailli,. de ~irabe.u, fe G:roit .
obligé d'expliquer l~ pamle cru il alVOl1r c:fontlée <fue LOll
neVell n'ent11eroit palot cilez M. Ion beau-pelie fans [on
élveu•. Il pN:vient Madame l~ . ' COl~ltd~ de Mitra~eau,
en h'~nœ œ M le ~ar:tq'U'1S de MalHgnane~ qu Il n'a
j1lill1lais" n~ pu ui> ~~u; ',"OIlt1 p!a~alre daI11Is ~e~e patl~l(! t
dOlllil~e' d'ailrellll's a l'infçu dt.l Corn'te de Mlrabtau, l-ap. ,
pruremenr- de Madame' fOR é"po,u(ie', dann pertonn~ n'a le.
dro$t de Lui difp:tJter l?entl!& 'T tanC' que' les Trrbunaux ,
n'eoccpas prolloncre ,la; {6p6l1:a«:Îon (*)
Le inême jour, le [WlI1' @retiIiftn 1 Avocat au Parle.'
ment & charaé des affaitfes de M: le Marquis de Mi~
b
•
d
rabeau, à la veille de parNr pour renourner ans le~
terres qu'il. t:égit, va. pIlend~e les ord:es de ,Madame
de Mirabeau. M. le MarqUIS de Mangnane s avance,
St lui dit:. Monjieur , Je vou.r prùt de fortir ; fe Juù le
maÎtre che{ moi. M. le Marquis, lui répond le Sr. Grèffien,
à Dœu ne
plaifo que je
Madame la. Comreffe que je prenois ta Merd de ~maJlder de
YOl/oS
l-e conœ;te; mais
0 'étoit
La p(m cU M. le Bailli & de M. le Comte' de M'zrabeau. Et
il· {Ott.
Le fix le Gomte de - Mirabeau. (e pré'(ente> à l'Hôtel de'
Marignane. Madaf7te de ' Mùab:au, yefl-el!e, dît-il: au P~r.
tier engag.é par M. le MarquIs de MarIgnane, Immédia-'
temenr aprês la déclaration de M. le BaiIIi de Mirabeau.
Non, MCllfiilUt', ûle efl' jà,ûe, répond. le PQrrier. Faite~.
lui. m~ complimen~ , répond le Comte ,. & dft'es~lui 1Jue j e'
Til/'afJÙ.ai. .
Des~ pr~cMtion
reu;oup,>· fufpeae~, mais4 aUlC.qu'eIfèS · da'
C"") Certainement r~ lettre du G novembre 178+ l i MhdarM la
CJ)\I;(C.!l:. d.e .Mi.r.ab:nu, eag!, 4:9-&' 5)-> "portnit 'ùéja cette explioatiol)
J ~!lS les t ~ ll]leS les plùs PI CC!S & les plus flirrnds.
59'
'clonn-e toojours trop de créance, a.Œtrent' que le f"on ier
rappor~a ainli la , réponfe du Comte <le .Mü·.a~eaLl: Eh
hiell ! Je rttYundra.. fi joltY<nt que Je ta trom,era.{.
Nous ne faurions croire qu'o.n attribue un propos fi
inepte ab! CGmte de Mirabeau; mai.s comme .à l'inHant l~
jJruLt {e r~pan9it qlle M. le MarqUiS de MarJgnane aVQJt
donné ordre à fon Portier de crier MAiN-FORTE fi fa n
~el1dre repareiifoit, ,le Comte .de Mirabeau" {ans vouloir le moills du monde croire à un tel ordre; d'autalaJ
qu'il fut énonoé, dit-on, en termes dOfll un homme tel
que M. le Marquis de Marignane ne fe krt pas; réfoJ ut'
.de s'abfiènir de fe préfenter à fa .p0cte d'une maifon où
fans dou-ne fon beau-pere efl: le maître-~ le feul maître;
où le Com,.te de Micaae;1U ne -prétend réclamer . que (a
femme ~ où. dans tous les tems il [e.roit défefpéré d'être
l'occalion ou le prétexte d'uge fcene également défa.gréable à tous les aéteurs.. .
,
De là jufqu'au 28 février le Comte de Mirabeau a
,gardé les mêmes mefures ~ le même filence .
.- Mais les. conjett1.lres injudeufes &. les propos caJom,l11eux contl/luants, le Comte de Mirabeau s'eft décidé
.enfin le 28 à écrire la, lettre fuivante à Madame de Mil'abeau~
. _
A Aix 28 fé yrier 17 8 3» !e me· (UlS . ~jl~té IO,n.g-:~ems , Madame, que. toutes
)J VOI~S de -concIliatIOn n eJo.!eO~ . pas l fermées entre nous ;
2' ~laI~. vous me devez la, Juihce que je les. ai touteS.
» epUlfées.
» Je ~us al déja. fait part du. clia.éiil . très· vif -que j'~i
.» r~ffe[HI d'entend~e attrihu~r à ,la ",onviétion de mes, prê~) . ~endus t1~(ts. la Qr~onf~eéhon ~ de J11fll cpnduÏte. CQmme
?> J~ ne pu~s Ignoret. ni J~ cfiRtinuanon de ce bruit inju» neux ~ ni les calomnies qu'on répand fur moi, &. que
» mon 1~lence .fembleroit .autorifer fi je tardois plus .long» lems a manife1l:er ma )ufiification ; c'efi profondément
Hii
�60
." affligé, mais néceŒté par l'ho'n neur, que je vais em" ployer les moyens judiciaires auxq~els mon caraEtere
" &. ma tendreffe pour vous répugnOient égalemenr. All
"refte il ne tiendroit qu'à vous
d'empêcher encore
,
. . tout
" éclat, en vous rendant a mes vœux; mais Je ferai
j) forcé de prendre votre filence pour un refus que je ne
" puis tolérer plus long-te,ms. •
.
"Recevez , Madame,, 1 affurance des, vœux que Je fais
.,) pour votre bonheur &. p~ur ~ouvolr y contribuer.
Nous ne tenterons pas d explIquer par quelle fatalité
:l'aigreur augment~ dans la m~ifon de ~. le Marquis de
Marianane en ralfon de la clrconfpeéhon de fon beaufils' o&. nous nous contenterons d'expofer les faits.
Le Domeftique du Comte de Mirabeau, chargé de
remettre la lettre, demande au Portier : Mad.lme ta
ComcefJe y efl-ûle ~ -~-- De quelle part? -,- -- Vous me connoiffe{ bien : je fuis d M. le Comte de Mirabeau. -'-- Non)
Madame la ComtefJe ny efl pas.
Le Domeftique vient reprendre de nouveaux ordres ~
lX. reçoit celui de laiffer la lettre dont il eft porteur. Le
Portier la refufe, &. dit qu'il va demander autorifation.
Il tom boit une pluie froide &. forte. Le Domeftique demande il être admis dans le veftibule ou renvoyé à l'in[tant. Alors un Domeftique de M. le Marquis de Marignane fe charge de la lettre, &. celui du Comte de
Mirabeau reto'urne chez fon Maître. Cinq minutes après
le Domeftique de M. le Marquis de Marignane rapporte
la lettre intaél:e &. cachetée.
, A ce 'procédé inoui le Comte de Mirabeau a cru qu'il
'é toit tems enfin de montrer que la modération n'étoit
pas infenfIbilité, la patience ftupeur, ni le titre &. les
dr.oits de mari un vain nom; lX. ila préfenté à M. ~e
Lieutenant, ce même jour 18 février , la requête {UI-,
vante :
,
•
~I
A M. LE LIEVTENANT GÉNÉRAL.
Upplie humblement Mre. Honoré-Gabriel de Riqueti,
Comte de Mirabeau.
,
Remontre qu'en vertu des ordres de Sa MaJefté, &
pour fes affaires particulieres, il eft demeuré plufieurs
années abrent de cette Province. Lorfque cette abfence
forcée a commencé, il vivoit dans la plus parfaite unio.n
avec la D ame Marie-Marguerite-Emilie Covet de Man"na ne fon époufe, retirée alors avec lui à Manofque où
le Suppliant, par ordre du Roi, avoit établi fon do~i.
cile. La Dame fon épou[e fe rendit peu de temps apres,
de l'aveu du Suppliant ou plutôt à fa priere , auprès du
fieur Marquis de Mirabeau fOll beau-pere, domicilié à
'Paris où elle fut reçue &. traitée en fille chérie. Dixhuit ~ois après, ramenée par le fieur Marquis de Marignane fan pere , elle vint demeurer en Provence.
A [on retour dans cette Province, le Suppliant écrivit
de Mirabeau à la Dame fon époufe pour lui en donner
'connoiffance. Il reçut en réponfe des lettres qui lui annone
çoient q\le la Dame de Mirabeau ne fe propofoit pas de
fe rendre auprès de fon mari.
Le Suppliant ne pouvant reconnoÎtre dans un tel projet le véritable vœu d'une époufe attachée à fes devairs, s'eft efforcé de la rappeller aux inCpirations de
fan propre cœur. Mais tous les moyens employés par
lui , puiŒlmment traverfés par des intérêts contr aires,
ont été jufqu'à préfent inutiles. Les Médiateurs les plus
reCpeél:ables n'ont pu rendre Madame de Mirabeau à
l'époux auquel elle s'eft donnée irrévocablement. Il n'a
pas même été permis au Suppliant de parvenir juCqu'à
eUe: La p~rte de l'Hôtel de fon beau-pere che z qui elle
Àablte, lUI a été fermée. On a éconduit, [ans vouloir
l'entendre, un homme d'affaire envoyé de fa part lX. de
S
�.
62
~ne' ~e r?l1 oncle , à la Dame fon époufe. On elt . . '
venu a faIre refu[er par elle au Supplicmt une ent
dans tel lieu, à telles conditiom, & avec teUes pr~~vue
t.jons qu'il plairoit à la famille de la Dame de Mirobcau.
·
cl e Ion
r
u eali
d,eXIger
marI.. A'
UJOUrcI"1"
1111 meme le SuppLiant a
aIJt
écrit à [OH tpou[e une. lettre où il faifoi,t tlne .dernier/t
.
r
r I '
tatIve
pour liC· d'llpenler
ce r.eCOlJnr aux voies. de dro'en·
le Domelliqm; du Suppliant d'abord refu[é s'eft r1;,
fenté de nouveau fans pouv{)ir parvenir.à rem~lir fe/ •
dres; là lettre remi[e au Portier du fieur Marquis de Mao~.
'
, par un de fes ge' n·
gnane a é t é ,a'l'lleure meme,
renvoyt:c
cl
.
'
liS,
·
L e Supp 1Iant, avant Cette ermere d emarche
av'
. fT' palLer.
Ir.
1 .d
.
f'
, Olt
1a~ne
p us e ql1atre ,mOlS., e perant' que [a patience
demontrerolt une ferme n:[olutIon de plake à [on pe
adoptif, & que le temps fourniroit à la Dame de Mir~~'
beau le moyen de Cuivre fon inclination plutôt que des
i,nfpiratjons étrangeres & ~téreffées. Mais ce temps n'a pas
eté perdu pour cellx qUI mettent ohfiacle à la réu~ion
.des deux époux. Sans doute on n'a d'au.tre deffein qu~.
.de néceffiter une rupture eou'eux,_ Mais les auteurs d'un
~el pr~jet feron~ troDlpés da,lls leur ,atteote~ Le Suppliant
Gonn.oa t~op bIen [011 efhm~ble epou[e , pour ne pas
favoIr qu en ne [e rendant ,pOlnt auprès de IHi elle ne"
f~it tl,ï [on .incl~hation ni [es principes. Il con~oÎt trop
~len 10b(:Œon a laq!!:lIe elle ~ft en proie, pour ne pas~tre aiTure que les [entJmens qu on lui fuppo[~ ne fqnt pa~
les fiens,. & que tout ce q).li paron émané d'elle efl
lancé & dirigé par des mains étrangeres. Rien ne
nuera la tendreiIe qu'il a pour [on époufe; & il ne met
V,as en ~o:tJte qu'il ne <lui [oit aifé de diffiper les , préven~
UWlS ~efavora,bles qu'on vondroit lui )n[plrer.
UI pourrolt dGnc mettre obftacle à ce. que deux cœurs
~UI ~e fo~t ~vol{)~taircme~t d~llnés l'un à l'autre foient il
Jamais. UIllS.• ,QUI pourrolt brIfer des liens ~0llfacré5 l'a!
les LOIX dIV mes ~ humaines?
pal.
d!mi.
9
•
.~
(5~
Afra 8< trop long-temps fe Suppliant a iou1tert qtre
fan époufe ftt comme étrangere à la famille de fon max;i.
La telldrelfe qu'elle a , 8{ qu'efIe doit a'Q'oir pour [on
pere, dt un {enfiment rerpefrafJle que le Suppliant partage. Mais ce [entiment dont 011 abufe pour rarrurer le
iœur hbnnête de Madame de Mirabeau {ur les démarches étranges auxquetres on la contraint , He [auroit être
un obftactè à ce qu'dIe vive avec fOIl mari.
Pour -éoncilier, autant qu'il étoit en [on pouvoir, ce
qu'tl doit à la tendreiTe de [on époufe, à ta refpeétueufe
inclination pour [on beau-pere, & à lui-même, le Suppliant a fufpendu jufqu'à pré{ent fes juftes réclélmations.
n auroit même encore différé. Mais il [eHt , & c'ell avec
lè plus vif regret, que les circonftances ne lui permettent
pas de pouiTer plus loin d'es ménagemens dont on abu[e
comre lui. C'eff peu de le braver, on l'outrage. Les calomntes qu'on répand contre le Suppliant, à raifon defqueUes ft prote[{e de fe pourvoir, font l'le nature à ne
pas lui perm'ettre de laiiTer plus long-tems fon époufe
-éloignée oe fui.
Le Suppliant eft bien affuré que cette digne époufe
~ [on pere qu'il v?udr~ toujours refpeéter, ne [ont en ,
aucune faç,on complIces de ces. calomnies dont ils igna- '
rent peut-etre la fc}Urce; dont ds connoi[fent [ans doute
l'ab[urdité, & que le cœur de Madame de Mirabeau
<Ié.ment :ururément. Mais il ne convient pas au Supp1la~t ?aband.c>nner pl.us I~ng- temps (on épou{e à des
lIlfpIraUOns qUI pourrolent a la· longue diminuer la- ten~œiTe qu:elle a confervee pour lui.
ne lui ,convient
pas de félIre ~uppofer au puoliG par- un plus long û'Jence
$( u~ plus long abandon de fes droits-, q~'il a mérité
cfe les ,pereire, & que [a conduite envers fon époufe
affra~~hIt . .ce.lIe-ci.. dès devoir.s st des obligations que cette
qualtre -lUI lmpofe.
Sa tendreiTe juftement allarm~e lX l'h o nneur compra-
n
�64
mis ne permettent plus de délais. Il y va de (on b .
lieur &. de celui ~de {on époufe. Il y ~a ?e la pero~:
tuiré de deux famIlles notables. Pour fatlsfaue à des ~
térêts fi facrés~ il ne s'agit pour le Suppliant que d'ex ln·
èer des droits certains &. inconteftables.
et·
. C'eft au mépris des Loix &. des Magifirats que 1
Dame [on époufe eft retenue loin de lui, malgré lui. ~
fans doute malgré elle. ,II eft temps ~ue. la voix du n:ari
puiife [e faire ente~ldre a .la femme. S il Im~lore l'autorité
du Magifirat, ce n eft pOlllt contre elle, malS pour elle.
Le cœur d~ Suppliant étoit autre~ois le [eul . juge de
fon époufe. C eft devam ce tribunal qu dl~ appelloLl de 10
.
>
.
d'Il
I/S
ÜS ]ugemens ~I~ on pouvait. porte~
e e. C'e.ft a' [on pro.
IHe cœur ql1 tl ra renVOIe mall1tenant. C eft par elie.
m ême que· [on mari voudroit être jugé. Mais il faut
pour ce1'a qu'elte [oit parfaitement libre ~ il faut qu'elle
plliife v.oir &. entendre le mari qu'on lui peint fous de
noi'res couleurs : il faut qu'eHe demeure dans [es engagemens d'époufe que nu l ne peut diifoudre, que les Tri.
b'unau-x feuls peuvent [u(pendre. A cet effet, &. dans ces
circonftances, le Suppliant a recours à votre jufiice.
Aux fins qu'il vous plaife, Monfieur, ordonner qu 'inj onc~
tion [era faite à la Dame Marie-Marguerite·Emilie de
Covet de Marignane, Comteife de Mirabeau, époufe du
Suppliant, de fe rendre auprès de lui dans trois jours
à compter de celui de la fignification de votre décret, &
demeurer en fon état d'époufe du Suppliant; à la charge
par lui de la traiter maritalement, comme il a toujours
fait. Qu'inhibitions &. défen(es (eront faites à toutes pero
fonnes d'y mettre obftac1e ou empêchement, direél:ement
ni indireél:ement, à peine d'en êrre informé de votre autorité, &. fera jufiice. Signé, Honoré·Gabriel de Riqueti,
Comte de Mirabeau, fils, &. Sicard.
.
D écret. Soit montré à partie. A Aix Îe premier Mar!
1783.. SifJ!1é, Audier •.
Sut
d';
.
65
.
. . .
..
. Sur la fignification faité à fa pedonne ,Mada~e de Mirabeau a répondu: qu'elle Je 'rap,porte d une requête contraire
qu'elle aura L'lu:mneur de préfonter ci M. le Lieutenant. Cette annonce n'a point encore été réalifée, &. ne le
fera peut-être jamais (*). Elle indique feulement que les
.
.
(*) En effet elle ne l'a poim été; car on ne (e (eroit jamais douté
que la REQ..USTE CONTRAIR~ annoncée pût être autre . chJ[e qU'IUle regu.!te ~n répar ati on. Or voici ce qu'oll _a lïg~fié le 8 mars au nom
de Madame de Mirabeau à (on mari.
A M. le D emenant G énéral.
SUpplie. humblemem Dame Marie.Emi!i~ de Covet de Marianane '
_
b
"
Comreffe de Mira!lea u.
: ".Remontre. qu'elle a été "(urpri(e 'de la lïgtlification qui lai a été
" faite d'une Requ ête préfemée par M. le Comte de Mirabea u, aux
" fins de fair~ ordonner à la Suppleante de fe rendre auprès de lui
" d,IIIS trors Jours, &: d'y demeu~er dans ·[011 élat d 'opou (e; à la
~' ch~rge, ~ar !tll de la Ir~lter marItalemeut, La 'Suppliante n'e(ltre ra
" pOllH ICI dans tous les det~ds que cette reql1ête re nferme; mais elle
." _a~ra l'ho~lIleur de vpus faire . cbferver qoe M. le Comre de Mi".' rabeau n'~gnore pa~ It:s rai(oÎ1S qu i a\1roiel1t dû empêche r une 'd~
" marche à I~guelle Ii érait difficile de s'anend l e.
. ' " La, Supplia'He vit dans la mai(on ' de (on pere, &. etle y vit (OIIS
" la fOI du vœu commun des deux familles. M. le Comle de Mira •
.:: ' ~,~a\l con ?oÎt.. ce v~u ; il s'dl engagé à le rerpeaer; & il co nnoÎt
"
COre les faas qUI ,O nt d ~ (erminé ceue (one de jugement domdliqtl:
. que ,Id Sup pJran(~ reclame.
'
, "E. rIle red ' fera 10 uJours
.
d
.
.
'
. tOUt éclar J amais la
un e~OIr d e prevel1lr
"mall on e fon pe
" é f,
,
•
" Bailli d
.
re Il a. et
errn ee aux parens de (on mari. M. le
e MI.rabeau y dl venu hbrement qu an d it l' a J' ugé COll.
""
vcn,
a bl e'
,
' & tl ' n'a t e fTj'e d' y parome
que , depcis le jour où il vine
'" retra Cter pe((onnellement là parole d'honneur qu'il avoit donnée '
" d~e ~;ele dComte. ron ~eveu n'approc\J.eroit la Suppliante, ni la mai{o~
'" étoit ·cr. ~ lia Suppllal1[e, fans l'agrément de ce dernier. Tout
" 1
Il q ~ a Qrs dans le cours ales procédés les plus décens & les
pus 1onnctes. La suppr~
f
•
r: ,
" Comt d M' b
1 nre 0 e meme erperer encore gce M. le
'
(( d ' e e. Ira eau renonce ra a' toute d'emarc h
e l
u téneure
& qu'il
" e ; panrra des fins de [a reqU~te.
'
., C ell dans ce juO:e erpoir qu'elle fi: crOIt dirpen(~e de motiver- le
l)
l
�66
intéreffés à l~ dé[union- des d:ux épo~x, veulent pOUrrer
Madame la Comteffe de Mirabeau a, une de~ande el
féparation. Il ne refte qu un moyen à fon man de pré.,
67
venir cette démarche funefte; c'eft de démontrer ~t fori
épou(e qu'on la trompe, en fuppofant cette féparation
légalement poffible. Et comme le Comte de Mirabeau
----~--~~--~----------., refus de rejoindre [on mari, Elle ne voudroit pas avair ~ re reprocaraél:ere & res
l ' d e c ommencer des procédures auxq ueUes1 (on
., Clet
C te
d
'
., rincipes ont toujours répugllé , & que M, e ,
e Mirabeau
p
évenir hli-même en abandonnant une pretention que le vœu
.,
peut
pr
' d u' l'empec
• het de
" commun & manifefte de [a propre Crattu'Ile aurait
0n:
.. former.
'
b ' 1 d 'b
d fi
" Daus as circonnances. pour a telllr e ~ oultement l' es ilS de
., la requc'te du "Comte de Mirabeau [on man, a Supp lante are.
>,
cours à votre luftlce.
,
,
" Aux fins qu'il vous -plal[e, MonGe ur • ordonner ~ue (ans s arrêter
, l
'te du lieur Comte de Mirabeau du premier du courant.
" a a reque
l'
r.
'r. r
' II
. d
'1 r a démis & débouté, la Supp lante ,era ml,e ,ur Ice e
., Ol\t l ,er
,
S ' - M'
d '
., hors de Cour & de procès; & fera juftlce, 19n. •
arlgnane e
'" Mirabeau, Pa!fot.
" Soit montre
a partie
&> au Procureur du
., IJ 8 3- Signé, Au~ier.
_'
_ A certe requête qUI veut due en fra~çals:
QUE JE VEUX L'ETRE ,
, A
ROL.
A '
nLX
le 7 mars
,
JE SUIS SEI'ARE E PARCI
ET JE VEUX L ETRE PARCE IQU1 J~ L~ ,SUIS.
le Comte de Mirabeau a répondu [ur le champ par a requele ,UIVantr,
Upplie humblement le Comte de Mirabeau.
"
, ,
Remontre qu'une requ~te en date de ce jour, lUI a eté GgOlfi~e
~u nom de Madame de Mirabeau. ,
',' ,
Qu'oa ne [auroit avouer plus clairement par le fait, ~u Il n y a
,nul moyen de (épara,tion el,me e1~e ~ le , Comt; de MlCabeau (on
_époux. puirq ue affurement il eft 1110UI q U une c:pou[e refu~e de (e
fendre ~ une réclamation judiciaire de (on man, & s'ablbennc "c,n
même tems de pré(enter une requête en [éparation; une femme ma~lee
' n'ayant ~ ne pouvant avoir" d'exi!teDce ~égale que la, co~abllal1on
""vec [on mari, quand les Tnbunaux ne 1en ont pas [eparee ..
Qu'~n général il eft ab(urde de prétendre que le ~œu de deux fa·
milles pui!fe opérer la (éparation de deux ~poux, pUl(q ue las LOIX Il<
les Tribunaux ne reconnoi!fent de réparation que celle qu'ds ont ~ro
nonGée; & que dans l'c(pece il dl flUX que le veeu des deux fallllll es
autorili: \a {épar.tion.
S
Qu'il dl: étrange qu'on attelle ce vœu, taudis que Madame la
Comte!fe de Mirabeau a reçu ré,emmenc plulieurs lertr~s de [on beaupere. & notamrr,ent deax du mois pa!fé , qui non (euleOlenr maniferlent le plus vif delir (l' une réul1ion, elllre [on fils & [a belle-fille,;
mais encore qui IcpréCentent à celle-Cl ron ref~s de (e rendre aupres
de {ail mati, comme (gaiement Imprudeilt & mdlgne ll'elle•
Que ces lettres Ile lai llbu > en langage de procéd(/, aucun prétexte
aux conréquences qu'on voud.roir ti.rer des opinion~ que 1.:: pere dn
Sup pliant put a ' r autrefuis de la conduite de [on fi l.; puifque ce
qu'on veut appel!or le 'Vœll do-flù!,,, rur l'événement aaue! , ne d oit
apparemment pas être cherché dans d~s lenres écriTes, il Y a plulieurs
années, plulÔt que dans celles écrite, il y a peu de mois, & même l'ru
de jours.
Que ces lettres ,'le toutes autres qui ne [croient pas des deux époux.
font abfolumelll étrangeres à la demanae flte laf{uefle il s'.cit de prononcer , puirf'Jue nul n'a pu légitimément engager le droit" du ti ers
pui.(que le Suppliant a formé [a demande devant un Tribunal lé'7al:
& non devant le Tribunal domerlique. (ans l'aveu duquel, au ~elle
il ne re reroit point permis de démarche j.udiciaire,
Que M, le Bailli de Mùabeau n'<1voit point donné (a parole d'hon_
neur que le Suppliant , n'ap'pr?c~eroit, pas de (on, époure, parce qU'il
cft trop (~- -pour ..troue avou Jamil~ ell ce ciral! ; qu'il a.,oit {eulement prOfilS que le, CORne ron neveu ne [e pré(t:oteroir point à M.
le MarqUiS de Mangnane. & que le Comte de Mirabeau a religieufement acquilté certe parole.
Que ces promelfes ne rauroient d'ailleurs avoir aucune inRuence
da'ns lln!:: dem'lIlde Judici-aire, nécellilée par des procédlis qu.'on. n'dfacera pas en les pafrallt (ous fi[ellcc.
, Que (j les perron nes q ai agilfc:llt (ous le nom de Madame de Milabeau, s'étoienr fait un devoir de preytm"r roUI t'clat dies n'aoroient
pas, eu le procédé rans exemple de renvoyer à un m:ri la leme qu'il
rCnt, à (a femme, Cans permeme à Gelle-,i de la lir~. Mais qu'cmpon~es, hors ~e leurs propres me(ures par leur reule paŒon, elles
vo~drOlent, valJ~emen~ aujourd'h!li imputer à modéralion une requcte IIl folllc, l11{.igOifiante , de nulle vakur dans la quellion . dont i}
l ij
�68
ne peut ni parler' ni écrire à fa femme; comme il
peut fe faire entendre d'elle que par l'organe du pn~
hlic, il livre à l'impreffion le lettres aimabl~s &. to~_
chantes de Madame cie Mirabeau, &. laiffe à fon CŒL
&. à fa raifon le foin cI'en tirer les conféquellces.
Ir
Voilà le tableau fuccint, exaét &. ficlele des procédts
&. des moyens refpeétifs. On invite les citoyens de tout
état à fe demander , qui pourra fe croire à l'abri d'un
procès en féparation , fi un mari choifi par fon epou[e
deux fois pere en deux ans , riche des lettres les plu;
tendres, écrites par fa ' femme éloignée de lui de deux cent
lieues, &. qui ne l'a jamais revu depuis ces lettres écrites'
peut voir brifer les n(,1!uds les plus chers &. les plus [a~
crés, parce qu'on affure, au nom de fon époufe, qu'elle
ne veut pas le rejoindre: affection fi téméraire &. fi peu
vrai[emblable, que ceux-là même qui l'ont entendue de
la bouche de Madame de Mirabeau, mais qui favent de
quelle maniere 1 cette femme douce &. timide e!l entourée
obfédée, confeillée, captivée, la croient, autant qu~
fan mari même, pénétrée du defir de la réunion.
' HONORÊ· GABRIEL DE RIQUET! "
COMTE DE MIRABEAU, fils.
J
SICARD, Pmcureur.
s' agit. & une lenteur qui n'dl: précifémenr que difete de moyens &
• de pretextes,
'
meme
Celte requête>â été 'répondue d'un flit d abondant montre li partie;
& le çomte d!= . Mirabeau, qui fent ell effet que la futilité des rairons
employées pour Madame de Mirabeau a dû étonner un Juge, fup'
porte ce délai dans le mËme efprit qu'il en a [upporté tant d'autres;
c'efè,à-dire dans l'efpoir que les erprits fe calmeront par l'attente, ou
du moin! [e convaincronr que ce n' efè point avec des réticences qu'on
daigne à peioe colorer. loin de les motiver; qu'on parviendra à re
foufèraire à !lne demande avouée de toutes les Loix divines & humailles.
•
•
.
CON SUL T A T ION'
V
~ les Obf~rvatiolls ci-deffus; la Requête préfentée
a M. le Lieutenant Général le 28 février dernier ,
par Mre. Honoré· Gabriel de Riqueti, Comte de Mira'·
beau; copie de la Requête contraire de Madame de Mirabeau, fignifiée le 8 mars; feconde Requête de M. de
Mirabea u du même jour; les concluGons de M. l'Avocat
du Roi, & les décrets de M. le Lieutenant fur ces di·
verfes Requêtes: Oui M. le Comte de Mirabeau.
~~ C<?NSEIL SOUSSIGNÉ ESTIME, qu'on ne fauroIt Imagmer fur quel prétexte Madame de Mirabe
peu,t refufer de fati~faire à l'injonétion demandée. C':~
,accI~entellement qu elle habite chez M. le Marquis de
Marignane fon p~re. Elle n'e!l pas légalement féparée
du Comte. de Mirabeau. Le retour de ce dernier dans
cette Province, de voit donc la ramener auprès de l '
Les Lo.ix .& les bienféances difent également qu'~~e
femme dou ~Ivre auprès de fon mari. Pour qu'elle en puiffe
demeurer'feparée, ri faut des faits', 1'1 liCa ut qu "1
r·
d
1 S ~oIent
1 e finature. a. rendre la cohabitation très·dangereufe pour
a é ~mme ~ rI faut encore que ces faits [oient énoncés
pr CIS, recens, perfonnels à la femme
rOll é
'
{!lIe
p
~ s p~r
, é : II faut enfin que la légitimité de l" exception
aIt
{!t reconnue, par un Jugement authentique.
.
,Il ne pa~olt pas poŒble que Madame de Mirabeau
al~ de ~arells moyens de réparation. De plus il e!l certam équ aucun&. J~gement ne l'autorife à viv~'e loin de
[,on poux;
Il ne 1'!l
' b
la fi
• n e et, es lettres élevent de grands doutes [ur
~~aiée~eme;,t
volont~ d~a~a~e ;:l~~~~~ ferèl~e;lI~~~~
�7°
cette volonté qu'on lui fuppofe; t~ndis qu'~lles n'en laiC.
fent aucun fur la véFité des fentunens ,qu
,on
· y trouv e
e-xprimés avec autant cle ,gra~e ,qwe d ener~le.
Madame de Mirabeau s eft pelllte elle-meme clans c
qu'elle a écr,it au Comte de Mirabeau. Son ame s';
'voit toute entiere ~ Et, ces lettres -toucha.ntes fuffiroient
.pour juflifler l'emprefiement Ade fon, man.
. Il eft peint atlffi de la melne mam; Et certes, il ne
perdra ricll à Aêtre jugé d'après, ce tableat;, à l'être par
fan époufe meme fur ces témOIgnages qu elle ne fauroir
.ni {u{peél"er ni récufer.
On trouve dans cette partie intéretfante de la correfpondance de Madame de Mîrabeau, fl0n feulement les
tendres épanchemens d't1l1 cœur pénétré de l'amour con·
-jugal, mais encore t'opinion jufte qy'eHeavoit de fes
devoirs envers l'époux qu'elle n'a pas revu depuis cei
lettres.
Ce qu'elle lwi écrit, ce q\<l'elle dit de fui, ne permet
'Pas qu'on éleve le moindr~ doute, ni ~ur. fa bonne Con4luite envers Idle, ni [ur leur ·limon tnurne pendant ~ la
cohabitation.
..
Nous- ne ra.ppellerons point ici tout çe qye ces let.
tres contiennent de tendre &. de touchant. On ne peut ou·
blier, après les avoir. lues, combien Madame de Mi'
rabeau defiroi:t de [e trouver auprès de {on mari~ On.
la voit trifle de leur ffparalion : Elle ~n gémit, eUe regf// I
les lieux habités par lui. Son amour croît à me/ure qu'tlle
Jprouye les rigueurs de L'abfence .-- SA féparaLion .flli fait
yerfer des larmes qui ne Jont arrilée'9 'lJue par L'efpùana
d'une pr().f11pte_ dunion après laql:1elle ' eik f'013piroit fans
ceKe. C'ejl toi qui m~as :nyoyée .:à Paris, lui écrivoit-ellfl
Du moment
je
deplairai, lU n'as qu'à me mandlr
où tu yeux · que j'attLe fi ;e m'y rendrai lout de fUÎle. pOlir
]leu que . lU penfes que je puijJe t'être utile Olt agréable,
icru mai, & je 'Volerai <1Y~ /Ille grande joie- -quelque pari
eu
,
<y
71
Je ne te ·ferai P9 s ; je t'affill·e', Je Jacrifices.'
t:~fi de ce ton qu'elAIe !ui ~Iemandoit [es ordres q~'eI1<;
aroi{foit toujours prete a fLuvre aveuglement. T<>uJours
~Jle regardoit [a Coumi{fion al~l;C volontés, de fon, mari,
-comme un devoir [acré & bien d~ux a ~emp~lr;. les
malheurs de celui-ci, comme des tItres qUI obhgeolent
plus particuliérement [on épou[e il ne s'occuper que de
lui, à le dédommager par [a tendrelTe de ce qu'il avoit
alors à [ouffrir. ,
Le portrait qu'elle fait de [on mari, d'après un corn"
merce continu de plus de deux années, & le temoignage
même de [on pere; dans un tems où le fils, par [es diffipations, avoit encourll [a difgrace; ne lailTe pas la plu$
légere vrailTemblance aux calomnies qu'on [e permet
contre lui. Madame la Comtelfe de Mirabeau attefie l~
générojité de [on mari: elle - ne craint pas de s'en remettre
Jon propre Tribunal" que toujours elfe trouva jufle pou.,.
elle. Lor[qu'elle dit de lui que Jon imagination. ardente l,Ji
jàit e;cagérer fes maux, elle ajoute qu?il a le courage ~
la fo1'ce néce./Jaire pour en [urmonter la violence, de la par
tience pour en fupporter la durée. Elle avoue que le Juge
le 'plus [évere ([on pere) ne [e plaignait de la téte du Comte
de Mirabeau ( alors bien jeune) qu'en faifant l'éloge d~
foh cœur. Elle reconnoît enfin que perJonlle n'a pius de
jorce d'e[prit que lui dans le malAeur.
[
C'eft elle qui fe jufiifie. C'ell: eUe qui femble redouter
-que [on mari ne [oit mécontent. Sa tendrelTe n'eft a11ar ..
méc que des injufies [oupçons qu'elle tremble qu'on ne
lui ait in[pirés. Dans les débats auxquels [on filence -<;lU
celui de fon mari donne lieu, rien n'indique qu'elle pût
avoir d'autres craintes, &. bien moins encore d'autres fujets per[onnels de plainte.
-,
Elle gémit fur [a polltion. Une femme féparù de Jol}.
,mari ejl une e[pece d'être ampAibie, dit-elle; &. c'efi d'une
féparatio.n de fait qu'eUe parle. '€Y;
2)l pour.rpit-elle
tu fois.
a
�(
72
fe diilimuler aujourd'hui que l'état d'ut e femme féparée
de droit dl: bien plus fâcheux e~core '. ,.
.
Nous ne le croyons pas. Mals gUO!qu Il. en, fOlt, un
rocès une fois engagé , ne .caurOIt etre Juge que fur
fes principes. Or il n'en eil: ~Olnt de plus connus, de plus
.
. bles , de moins fu[ceptlbles de controver[e
que ceUl{
lI1vana
T .
d'après lefquels ?n prononce dans les nbunaux fur les
procès en féparauon de corps. . .
.
u'une
telle
féparatlon
fOlt
ordonnée , il faut
P our q
r
.
cl '
,
1"
qu'une cohabitatiQn oragellie aIt emontte que. umon
deux époux était impoffible. Il faut du mOIns que
en tre
'd '
d
1
[' ,
cette impoilibilité réfulte éVI emment ~ que que lait re.
1 t" f à la èohabitat;oil ' ou dont les confequences tombent
f~: elle. Tout autre J~oyen peut faire diil:inguer les intérêts , féparer les biens, jamais les eer[onnes. ,
Ces prineipes [ont tous pour M.1e,Co~te ~e ~Irabeau~
1apphcatlOncl Jufques a
1es lettres de fa femme en ponent
,
.,
l'évidence; & l'on n'échapera pmals a ce co:ps ~ ~reuves
au-deuus de tome fufpiEion, Comment arrIveroIt'11 cl?nc,
e des' époux fi. tendrement unÏs pendant la cohabita·
~~n & qui ne fe font pas revus depuis que les !et:res,
tém~ins de leur tendreiTe réciproque , ont été eentes,
fuUent féparés judiciairement?
'
.,
Une lettre fut .la premiere caufe de le~rs ,dl·uen;lOns do·
meil:iques' caufe légere qui ne peut aVOir etoufl'e dans le
?
Ir.
" Al a V~~Jt
&' é,
cœur cre l'époufe
fa tendrelle
pour 1e mari.
d'autres griefs font incliql:lés vagliemen-t dans les dernter~s
lettres de Madame de Mirabeau & de M. fan pere. MaIS
les réponfes inférées dans le~ Obfervation~ p,aroiffent fa·
tisfaifantes. Auffi ont-elles demeuré fàns rephque. On ne
.
., ' . .
peut pas dire ~ue l'affaire de PontarlIer qm n etolt nen
en eUe·même, Ile foit pas finie. La plainte de M, de
Monnier eft anéantie par fon dé{iil:ement; & comme el,le
n'annonçoit' pas un ' délit public,' il n'y" ' a 'aucun m~yefl
l'oUr la faire· revivre, &. nul prétexte - pOlU' en exclpeli
,
•
73
11 y en a d'autant moins, que le délit de.
M. de Mi-
rabeau étoit accufé n'a rien d'infamant, ne }Jorte pas fur
le rems de la cohabitation, ne peut pas la rendre dangéreufe, & ne fauroit faire perdre au mari les droits
qu'il a fU,r [a femme.
On dOIt donc efpérer que Madame de Mirabeau ne
fe refufera pas plus long-temps à la demande d'un homme
au fort duquel elle s'eft unie irrévocablement, & qui
l'appelle avec autant d'empreirement qu'elle en montroit
autrefois à le rejoindre. Madame la Comte{[e de Mirabeau retrouvera [ans doute dans [on cœur les [enrimens
qu'elle peignoit fi bien , & ne confulrant qu'eux , elle
n'attendra pas que les Loix qu'elle invoque la rendent
à un époux dont elle ne doit point être réparée.
Délibéré à Aix le 9 mars 178 3.
JAUBERt,
AAIX, chez 10SEPH DAVID, Imprimeur du Roi.
1783.
�•
•
�PLAIDOYER
Prononcé par le COMTE.DE MIR~B,EAU àr Audience de Mr. le Lzeutenant · General ~ le
20 Mars 1]83-
MESSI~URS~
- 1
•
Lor[qu'en 1772 je béni·frois le Ciel de m'avoir accordé
l'épo\l(e que mon cœur avoit choilie, . & que fan'
cœur m'avoit donFlée; lOl'fqu',::n 1773 je paign.ois de l.a-r~
mes le fruit de fa tendretTe, 'dout j~étQis defiiné à pleu~er,
la mort prématurée; je ne m'attendo.j~ pas que dans- peu
d'années celle que l'amour avoit conduite aw pÎed des
Autels, viendroit demander aux Tribunaux de nous defunir: & fi quelque Prophete finiftre m'eût anrHHlcé.jde
tels malheurs, faurais repouifé la main, cruelle ql.li m'eût
o'uvert ce trine avenir.
Le voile eft \evé ~ il dl trop nai qu'on a forcé Mada.me· de Mirabeau. à refu[er fon. époux, à rejetter le vœu
de fon propre cœur. Envain j'ai mis en ufage les- procédés jes plus modérés,. les motifs les plus facrés, les fup~
A
-,
•
j
�2-
p.~ication~
le~ plut tendres: on n'a pas même daign'
' é
' ;~n n'a pas dai
ell\e'
' pas daJgn
répon dre; on na.
me VOIr
m'entendre. Séparé de fait par une , vo~onté qui s'eft l·gn,~
'"
,
r fié ."
rr(Ù
tée e
d tout ce, que J al tente pour a . chlr, on a ' né.
gligé. de ..dema.n?er un A.rr~~. Et 19ffquff~~n j'ai VOlÙu
que ,c~tt....e_ fitu~tlon, am p1uble, éga~eme\1t l1~fultante pout'
les 100X, pour le!) Tnbunaux &. pour. le~ ,mœurs, ~ût un
tefme; on m'a forcé d'exprimer mon vœu par un Huif.
fier en refufanL tolite efpece d'explication &. de confé·
re-nce avec moi, en refufant, en renvoyant jufqu'à mes
lettres.
r •
Il fau~ 4?n,c, . .,ME~SIEURS J • qu~ vous ,décidie~ en·
tre nous. Helas! Je ne m'en cache point, j'ai rèpugné
\onftte~s-. ~ cette ""extrêmité . dolllo~re~fe (on verra bien·
\ 6t fi favois ' lleù de la red~uter). Mais quelle ' ame
hÔ11liête condamnerait cette répugnance &. n'y compati.
rait pas! Ah! fi j'eufI'e douté du c~ur .de Madame de
Mirabeau; fi ceux qui captivent fes defirs &. gênent
jufqu'à fa penfée, n'eufI'ent pas compromis mon honneur
par d'in[ultantes calomnies, je n'~urois jamàis Co~t~(!U ce
~rifle proc.ès. ~l eil loi11 ~e moi l'efpoir &. le deGr de
rechaùffer urt -cœur par Arrêt, d'attendre d'un 'o rare des
~~ibuna.tl>:Ju'lIne .femme redeyienne ~endre époufe, fidele
tompag~e-t bonne niere, &. que le .doux commerce d'une
amitié, a'af1t! · oort:li~nce ' récipr-Oque, onourrHfe-de fe9 illu.
600s -des plaifirs"'empruntés de l'amour.
Mais .quand j'au rois ie malheur de croire aux fentih1~~S qtl'Da pr~~e 4 Madan:e ,de Mirabeau, que
dirda.on pas ' fi Je · me refufOis a cet étl.>ange procès ?" Que
n!a+on 'pûS - èéja ·dit 't ·que n:a-t·on pas teAte '1 On il
voulu. faire de l~ réclamation la . plus fimple un procès
·d~. parti? a~eLite~.le 'public, me fèrme~ toutes les portes,
in lflterdIt'e JuCqu a la vue de mes plus anciens amis,
âe mes -amis les· plus chers: .on · a · voulu m'ôter [Out
fecours; tout, GénfeiJ., tout ·organe. Lei plus . célébres
ne
H
Oratèurs- db Baàéau ont "été précipmmment <:otl(ùlte~
contre moi; tandis que rafI'uré par la fimplicité: de mil.
caufe, ' &. mon efiime pour Madame de Mirabeau, je ne,cherchais qu'à toucher fa famille par l'excès de ma dé.férence " on a cru que je fuccomberois faute de défenfeuI"_
Mais vous me ' refiez, ME.SSIEURS. Vous 'allez m'enteu·
dre. Vous ne fongerez point à l'homme qui VOliS parle ::
· Vous n'examinerez pas s'il. a bien ' ou ' mal dit:, vous
examinerez feulement fi fa , caufe eft bonne. Il eil un
orateUr inviGble qui plaide au fonds des cœurs; c'eil
l.ui, que le~ Juges & les ~peél:a~eurs. ~couteront; c'eil lui
' CiJUI parle ll1térleuremel1t a' celUI qU1 parle au dehors ; &
: c:eil. lui que ~oi-vent . ef1~e~dre ' ta.us ceux qui prêtent
1 oreIlle aux dlfcours qUI tnrérefI'ent la fuci été & les.
mœurs.
Sans doute il eil de ce genre le pr.ocès qu'on ofe m 'iIf:tenter ' aunom de Madame ' dé Mirabeau; &.1000 cf Offrir
;a.ucùne de (ies difcuillons litigiéures, où les fubtilités 'lX.
· l'a~ré{fe.l ~es Défenfoors peuvent 'induire ' en erreur l'éqllité
mem~ .; il eil .du nombre des caufes ql1C tous ' les hommes
. honnetes p@uvent & doivent juger••
· . C'efl: leur A.rrê~ que j'inv@~Ye, MESSIEURS, p4lr votre.
,organe. En 'Va1l1 m~s Adver{'~lItes cherchent a'S1env elo,pper
· dé préve.nti~ns; en l'ain ~es nombrèufes erreurs 'de
je!l.n~fI'e pla,ldent. eh leur faveur; èlIes font toutes étrangeres
au proces ~Ul nous ra1Temble. Et fi,. ce qui pourroit ê tre
plutôt une Illufion. qu'u?e ;érité, l'opinion publique fe.4W?~~ en, effet ceux qUI m attaque.nt ~ leurs procédés en·
:dO'weil: lê.tre pl\1s fcrupuleufemenr examinés. .
, -:rout m'annonce qu'ils ·ne me comba troBt &. ~e pour-110?t en effet me combattre dans un procès fi défefpér é.,
€lu avec des ,calomnies pû'bliques &. [ecretes. Je v ais être
co~vert d.e ce bOUlbi~ ~ ÏJ)feél:; j'aurai à: exprim er f éponge
,qUI en)e~era cert~ fOthlluré, poNr reCORlmencer [ouvem
· ce dégolitant office ;' S( fi, '1a fI'é', •affoibli par de contim.elS,
ma
.
A
ii
�4
foulevemens de cœur, j'en laiffe Cubfil1:er la trace la plu
.Iégere; l'attentio~, du .public fixée fur nous.~ per~ant
vue tout ce que J aura1 réfuté, tout ce que J aura1 dédai_
gné de renvoyer à m~s Accufa.teurs, ne m~tt,ra d'impor_
tance qu!à cette trace lnvOlo?-:a1rement négltgee . . . . . .
-Telle eft la déplorable condmon de' ce~~ que la calomnie
l'0urfuit! Telle eft la déplorable cOI~dlt1on , de l'homme!
Mais n'dt-il do rie aucun , moyen d honorer, d'ennoblir
çette fituation cruelle? . . • . Je I:eiTayerai, MESSIEURS.
Loin de moi çe miférable ergotage, qui veut tirer parti
.de tout· 'qui ne craint pas d'aifocier . à une lumiere éclatante &.' pure, la foible lueur qu'on obtient à force de
frotte mens. Loin de moi fur-tout cet amour propre ira[.
cible _qui veut n'avoir jamais tort ~ 8( qui me, conviendroit
moins qu'à tout autre. ~ans, doute, MESSIEl!RS, la veritable févérité envers fOl-me me eft le prem1er &. le plus
ncble des devoirs. Sans doute l'homme .moral fe connaît
mieux en cenfure que les plus forcénés calomniare~rs. Je
'le' dis donc hautement; j'ai eifuyé tous les malheurs que
Ijl fougue de l'âge 8(, des paillons p~u.vent . attirer, fur un
jeune-homme. Mais c .ea parce que Jal fub1 cette epreuve
cruelle, q).le ma femme 8( fa famille me doivent plus d'in·
dulgence. Mais de toutes ces pallions, d.e toute. cette fou~
'gue, il n'a pas réfulté un fUJet de pla1nte perfonnelle a
Madame de Mirabeau: 8( tout le monde peut - être eut
droit de me condamner, elle feule exéeptée.
Pour moi, MESSIEURS, qui viens vous démontrer cette
.vérité, je me préfente aulli pour abfoudre Madame de
Mirabeau, 'dans votre opinion 8( dans celle du public,
de la conduite qu'on lui fait tenir aujourd'hui &. depuis
trop long te ms.
Madame de Mirabeau eft capable de tous les fentimens
&. de toutes les aétions honnêtes. Livrée à elle-même,
elle n'eft capable que de cellx-là,. C'~ft . moi qui la connoÎs
bien, c'eft moi qui . femble aVQir qwelq\le droit de m'en
d!
..
•
• dre , c'ell: moi qui vous
; j'en jure eUe-même
l'1am
, ~'aifure
.
fi
.
&. l'honneur: 8( j'ai tant d efhme pour ma emme que je
lui confie ma défenfe.
.
En effet MESSIEURS, pour tout ralfon~ement, pour
_t;lJIt art, pdl:lr toute éloquence, j'ai fait impnmer les feules
lettres qu'elle m'ai~ écrites, depuis que les orages d: m ~
vie nous ont -éloignés l'un de l'autre. Vous avez pu Juger
jilar 'Ces temoignages au-deiT~s ~e t~ut Commentaire 8( de
tout foupçon, de l'union qU1 regnolt entr~ !lOUS au temps
de mon bonheur_, au temps où nous habmons enfemble •
Il -s'agit marntenant d'examiner s'il eft poillble de con·
.cilier tout ce qu'elle a dit à moi, tout ce qu'elle a dit de
moi dans reffufion la plus ardente d'un cœur fenfible,
noble, tendre 8( pénétré, a'vec la conduite 8( le langage
auquel on la contraint aujourd'hui; s'il eft pofiihle d'ap,préciet' mieux l'obfeilion qui me ravit ma femme, que par
les inconféquences auxquelles elle ea pouffée.
J'entreprends cette difcullion, MESSIEURS, 8( j'ofera'i
vous demander enfuite, j'oferai demander au Public, à
,'ce T~ibunal qui juge tous les Juges de la terre, quel eft
le procès qui nous amene ici? S'il Y a un procès dans
.çette caufe? Si l'on y voit autre chofe que le defir forcéné de s'oppofer à une réuniQn jufte 8( nécefraire, mais
qui n'eft pas de l'intérêt de tous ceux qui obfédent mon
époufe? J'oferai vous demander, s'il eft permis d' abufer
ainfi de vos momens, 8( fi vous ne devez pas, par ref·
peét pour vos fonétions augufies, vous hâter de rendre
Madame de Mirabeau à mes vœux, 8( je le dis avec af-,
Curance aux Gens mêmes?
O! toi qui m'aimas toujours 8( qui ne fortis jamais de
mon cœur! toi qu'un regard m'eût ramenée! ah ! n'accufe
que nos ,ennemis communs du trifie rôle que tu me forces
à jouer ici! je gé~is de celui qu'ils t'impofent, 8( jamais
!Ii ne me fus plus chere .•• Je vais parler de toi comme
Je t'ai vue, comme je te vois, comme je te verrai tou,:
�.,
'6• . " ïnal'grè' les ' fil agëllions (le" 'ceux qui veutent nous
'jOtllii"S 7' 0
lutôt J' ~ va,js te' faire parler le langage qui
dé lIOIr.
u p
, .
fi
l'
1
'
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'
le
langage
qui
fut
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tien,
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te propre,
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&
cœur
q ue 'tu n.'é cou t 0 I~S que ta cO'llfClence é ton
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VI' .o.oire· elle eft Il .ceualre
te d oute paIn . ID
1...
,
•
Il' r ton bon:.
r
heur lans
quo l' J-e ne Id voudrOis pas. E 1e lera
'b ton ou.
vra ~" les ex.preffions de t~, tendre{fe. ,. e t.r~ ut de ta·
. Il:~Ice. V a il'a. m
es armes
valla mes for·
JU
, voüa. ma magie,
.
tileges.
1.
· -·Je pré venu:.
'?A
. par o·u commencer? Que·'d1
OIS
, .
M aIS
'
l' .
UOl me faut-il répondre? Le pro ces que' on me lait :n·
TI.
ft de telle nature que ma caufe & mes drOits
ce
Jour
".
e
.
,
d ' éléb .
d'
rlont expoles
r'
p ar la, leéture de 1aae e c . ranon r e
.
& qu'il eft impoffible de devlOer Ut] leul
mon manage"
l'
cl M d
des moyens dont ont p~.ét.end appuyer le relUS e l a ame
de M.~rabeau de me reJolOdre.
,
On nous annonce des griefs de la, nature la r:lus grave;.
~ais on n'en déduit auc~o, & je n'en f4is 'palOt étpnné.
Les défenfeurs de Madame de Mirabeau ont, plac.é cl~ns.
les Loix & les chicanes de forme, tout 1 efpO\: cl u~
procès qu'on voudrait . nous, faire a~a.n~onner. ~Ials . mOl
qui ne veuX' point . de proces; mal .qul' y:oudrolS .effacer
jufqu'à la plus légere trace d.e 1.1OS dlifenuon.s,', mal pOlJr
qui le plus court débat dame/tique eft ~n ver.t,at;te ~a~
neur , je me Mterai , n'e.n do~tez pas; J,e me hâterai dei<,
1e pre,!Uier moment où Je p~IS parler a m~s Juges, de
'démontrer à"Madame de Mirabeau" par l écho du p~
hlie., qu'<::)n la trompe, qu'il ,11e fauroit. êtr~ ,: de l'races
-entre nous. çette difcuffion au refte. cft 10)0 cl elre étrangere à l'incident qui vous cft fournis , . 1'y1:E'SSfEURS ; car
'la décifion de cet incident tient à la. na!ur.e. du fond"
. dont l'efpece ell: abfolument nouvelle.,
,
. En effet ~ je. Iai{ferai la plus libre-, c,arriere aux. qécla'
!mItrons, la pIus grande latitude à la' lrcence de- P?lloiopner" d'inltituer, de flé.truire i & fans attell:er la famte-
•
tè d'un Sacrement augufie; la fainteté M(}n mOi ns 15l'ahde d'yn contrat fous la foi duquel nous refpirons tous ,
fans examin er encore toutes ·les belles chofes que VOU$
ne manquerez pàs ' de répandre fur la néceffité du divor, -ce que les Anglais vont s'interdire au moment où vous
i'inv,oquez.; [ans vous dire ,que fût,il en effet néce{faire,
les convent!ons [ecretes faites entre les .citoyens pour
abroger une loi quin'eft pas ' encore effacée [ur le Code, n'en feraient que plus fùneftes : je vous demanderai
à quel titre, da ns les fuppofitions les plus favorables,
,danS' tous les fyltêmes ,p 0ffibles, vous prétendez m'arra.cher ma femme?
.
, Alléguerez,vous en [on nom ces antipathies inexplica.
<hIes qui rep(}u{fent -des êtres ·que leur malheur unit?
Mais Madame de Mirabeau ne le cache point de m'a:.
~ oir époufé, parce qu'elle m'aimait! Qu'une jeune per;
Conne qui ne connoit encore ni le monde & fes dangers,
nI (amour & fes tourments, ni la féduétion & fes pieges,;
qui n'a d'aut.re guide que fan inexpérience, d'autre appui
que fa foib!e{fe, d'autres confeils que des pareos dont elle
te cache; qui fent [on cœur gonflé par des dffirs dont
elle cherche avec inquiétude à démêler l'objet; aux yeux
de qui fa trompeufe ' imagir.lation repréfente l'hymen con~
-duit par l'amour, couronné de fleurs, ia férénité fur le
front, la tendre{f~ d,ans le.s yeux, les ris fut' les levres ,
àpportant la félicité d'une main ,& la liberté de l'a.\:Itre;
qu'elle [e lai{fe aIler au defir d'échapper à tout prix à
'l'état de 1fille, & décevoir par un [éduéteur adroit: art
'le conçoit fans peine.
, . Mais Madame de Mirabeau, que tout appelloit à chaiiir, pouvait nommer parmi plufieurs rivaux; elle avait
même choio avant de me connaître. C'efl: pour moi qu'elle
-a rétraété [on choix, & je m'en trouve honoré. Elle m'a
vu habituellement pendant fix mois avant de prendre mo'n
nom. Ce n'eft donc p oint à nos préjugés, à nos cqn.ve ~
�8
nances, à oos inftitutions faciales qu'elle a été facrifiée •
c'eft à fan defir, à Ion choix, à fes v;œux que [es pareo;
ont déféré.
. Mais fi fes parens ont été trop complaifans? Si Madame
de Mirabeau fut trop crédule aux mouvemens de fon cœur 1
Si l'union qui lui promettoit tant de charmes, ne fut pour
elle qu'un eCclavage trifle & cruel? • . . .
. Ah! de grace, n: vous ép.uife21, ~Qi~t en, co~jeau~es, ar.
ficulez-nous de! faits. Je vous 1 al dit; c eft a Madame de
Mirabeau que j.' ai confié ma défen~e. Cherchez dans Ces
leares. ce qu'elle perue de notre umon. Sans doute vous
ne la récuferez pas dans fa propre caufe . . . . . • Quels
regrets plus touchants! quelles invocations plus tendres!
quels ~émoignages plus honorables! quel amour, quelle
enime mieux prouvée!. Qui n'a pas été attendri ~ à la lecture des lettres de ma femme? C'ea Fanniil, cette Fannia
que l'amour conjugal a rendue celebre, & qui duoit à [011
époux: ton fOrl f era le mùn;. comme je n~ ai de plaijir qu'en
toi ~ je ne Pblis avoir dl peine qble de ue pas Vlvre & rnourir a.ve/i
toi. (*) Eh! qui ne gémiroit pas qu'une union, fi l'are dans
.une certaine daITe de citoxens~ fût brifée! Qui mêm e ,parmi
ceux qui veulent: croi·re que Madame de Mirabeau ga,
.gne.r a fon prods, ne la plaindroit pas d'être obligée d~
renverfer l'Autel de l'boy menée , . elll! q~i l'ay oit ·tant _dé~
, 1
core .Deux années entiere.s, tes deux feules anRées- de bon~
heur domeftique que le ,fo rt m'ait aocordées, notre uniolt
a , fait. notre: félicité _commune.,. de ' quelques traver[es que
des circonftances malheureufes, & mes fautes euITent d~
ja. [emé ma. carriere" no.us éprouv,ions _des conu.'arietés;,
no·us avions de.s dettes; mais Madame de Mirabeau f<il'\loit mieux qU:Ull autre, que. fi. véritab-lement il m'eût été
Roffible'
:
9'
poŒ61e . cren avoir 'beaùcoup moins '; rI m'avoit été a-bfoJument lInpoffible de n'en point contraéter. Nous avions:
des d~ttes; mais que!que raifonnable que fût Madame
de ;.Mlra'b eau (ur fa depenfe perfonnelle, eUe ne pouvoit
q~ etr.e t~uchée d~ . ce. qu'une grande partie de ces dettes.
n aVOlt d autre mouf que le defir a'aif & fans celfe renaif~ant . d'orner l'idole de mon cœur. J 'avais des dettes, &
J ét~ls tourmenté pour ces dettes: mais jamais la tendreITe
conJugale, fi ce n'eft la tr-anqtlillité domeftique, n'en fut
troublée. On a vu mes preuves ; elles [ont publiques on
n'elfayera pas de les détruire.
'
: On . eft, donc ~bligé ' de .m'abandoO\~er le temps de la
~ohab.Jtatlon. MaiS a,t-on bien apprécié cette viétoire .que
Je dOlS aux lettres de Madame de- Mirabeau? Non fans .
doute, M'ESSIEURS, puifqu'on 'la lailTe plaider.
,.
En ef!et, parlcms aux. Tribunaux le [elIl langage vraiment dlgn.e €le lé!' MagIfl:rature, & tra'ç om fous la dictée des tOl'X les vrais principes qui doivent juger cette
caufe.
, Les liens d~ mariage, indilfolubles de droit & de- fait 1
rendent les biens & les maux communs entre ceux q ")
'lT
,r; '
UIS
ul1Iuent,. CO?Jorllum om.nis vitte. Tel en le mariage & tel
eft le
c
' d
. .
, L . 1 • If.
pnn Ipe, qm. ans no~re rehglOn r notre- légifJatiol'1 de Rii ..
&. nos mœ~rs, a fait profcnre le divorce. La réparation ""t"~r.
de corps n,eft pas un divorce; elle n'en a l'effe t ni pour
Je ,temps, Dl pour l;s conféquences :. elle n'dt précifément
qu une, feparallon d Ju:bllal/~n. C'eft a.infi que les JurifconfuItes 1 appellent :- touJours IL<; la regard ent comme momentanée; & tous, Ils conv iennent qu'elle lailfe. fubfifter dans
toute leur force les liens du mariage_
~ !ls font égalem~nt unanimes fur la nature des moyens
q~l pe.u~ent aut?nfe.r u~e demande en féparation. Il faut,
dl\enHls '. que 1 habitatIOn commune ait de tels. dangers ,.
'lu elle [Olt, devenue odieufe & impoffible par l'iniquité:
& la tyranme du ch~f de la [aciéré çonjugale.
B
•
�10
.
L eç
'dens rans nombre, dont. no'tre
faible Vue -&; no;
acel
d l'
1 l'
e, lOrtune,
l' I l'1 "ompo[ent le domame
tre la
orgue ...
, e raveug
r
r
'
Ir. '1111' r un homme.
Ses
biens,
la
lante,
la
rah
euvent alla
, . '
.
P
fon, [on état même peuvent dl[parOltre; malS tOUjours [a
compagne lui refl:e.
é '1' . d
l"
dml's
au
bonheur
attach
a umon esd'deux
U ne lOIS a
r'
,
UX
[on!
~gaj.ement
lOumlS
aux
con
ltlons
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fiexes, 1es p0
1 r '"
l'un à l':autre , &'a ce 11 es que
"l"
r
l 'r. a &IOClete'
q u 1 s s Impolient
•
r
Ces conditions font que leurs p allirs
leurs
leur Impole.
1
.
1eu rs accidens & ,leurs avantages; en un mot, eur
pell1es,
defl:inée deviennent communs.
.
'
qui
le
voulurent
ainfi
font
priees
dans
la
·
L es L OlX
,
fl: 1 .
d
·r
la perpétuité des umons e
e pivot e
J:lature, pUlIique
"cl
' .
r
'été Auffi n'efl: - ce qu en mvoquant es prulc.pes
I a 10,Cl
.
A'
cl
d .
tirés du droit naturel me me , qu une fem,me peut erpan er
la féparation de corps. On n'écoute yomt fes convenances
momentanées; on dédaigne [es capnces;, on ,[e m~fi: des
l' 'bles & incertaines qui changent d un Jour a 1 autre
•
d'h' d
1 d r.
ames 101
de Îltuation 8< de [entiment; aUJour, Ul ans es ellrs
& les enchantemens de l'amour; demam dans les ~angueurs
d l'indifférence & même dans les querelles dune rup'
t~re; on [e garde de I~ur accorder .un ~ivorce fur lequel
de tels êtres auroient bien de la peine a prononce.r ~ux.
Ames peu d'heures après l'avoir demandé. La focl.éte fe~~t boulever[ée chaque jour, ou bientôt deffechée, fi le
Légiaateur n'avoit pas prévu un~ telle mobilité; fi la fe~me
pouvoit demander une fép~rat~on . de corps, fans qu 11 y
eût à 'craindre pour elle, c e!l:-a-dlre, pour [a propre vie
qu'elle n'a pu donner. Il faut qu'elle paroiffe ré~lamer 8<
défendre la con[ervation de [on être. Cette premlere pro.
priété, ce premier droit de tout individu efl: le feul qu'une
femme n'ait pas mis en communau,té dans ~e 'p~a:e. du mariage. Ainfi nul motif légal pour ~epa,rer d ha~)ltatlon ~ qu~
la preuve. certaine que la co-habltatlon [erOlt contralr~ a
la premiere Loi de la .natllre " à celle de la conft:rva,uoll
des êtres.
•
'~
Il
Eh ! quelle efi la femme qui défavouera ce vœu de' lét
Loi? Quelle efi celle qui niera que [on plus grand in ~
térêt ne [oit d·appartenir toute fa vie à l'homme auquel
elle 's'efl:' donnée une fois? II elt dans l'amour que nous.
accordent les femmes, un facrifice que l'orgueil ou la dé:
}icate1I'e met au-delTus de tOU,t. Elles ne peuvent le faire
qu'une fois à un feul homme. L'a rapidité même de leur
jeuneffe; la fragilité de leurs attrait. les obiigeroü à la
confiance: plus elles ont VlCU aveC un homme, plus elle~
ont intérêt de vivre avec lui. Certainement elles feront
r
'
p Ius louvent
ma Ih eureu fies par l eur legéreté
que par leur le
confiance. Et Îl, comme elles- le prétendent, Comme les
homme~ fe,nfible5 aiment à le croire, elles l'emportent fur
nous par le don d'aimer; ,:e 'don: p~ut-êt~e le plus grand
de .tous les charmes, & qUI ' devait a ce titre, leur appartemr; ne le\:lr al éte donné que pour le fuIre fervir an
1
bonheur ' des deux fexes.
Je vi~~s de tracer les principes, la rigueur des prin~
"ipes. EXlgera·t-on que je les applique à la caufe ? O[erat - on fuppofer. que la cohabitation que je deÎlre , 'que
Madame de MIrabeau abfente & gémiffant de mon 'abCence
a tant invoquée,. o[era-t-on fupp 0[er qu.'elle contrarierait
le premier droit de mon épou[e & menacerait [a vie 1 .. :.
"Ah !' je [Çlis ce que la calomnie peur ofer. _ Je [ais ce
-qu'elle ore ; &. mon cœur bondit d'horreur à l'idée de fes
'excès .•• ~ Mais nous Commes' ici dans le Temple de la
Jufl:ic~. Peut - on m'y inve~ter d~s. crimes ? Peut-on
foutem-r que Madame de MIrabeau a tout à craindre de
moi? Peut'on' ~uppo[er entre nous cet effroyable ordre de'
'ch,o~es J' fans, dire, fans prouvér que ma .femme n'a pas
-éte en Curete auprès de moi?
-:
Comment jugera-t-on notrecohabitàtion ? Sera· ce fur
des clilmeurs confu[es,. répétées par une foule de bouches
~méraires &. avouées d'aucune? Sera-ce -fur des imputaMIlS va~es & des faits inaftÎçulés? Tandis qu'ils font lit
y
B ij
Garat, rut
Div,
�I!
les témoignages chéris de la tendrell'e; de la confiance;
de l'efiime, de la reconnoiffance d~ Ma~a,~e de Mirabeau;
J'en appelle à ton Trihunal; El a tOUjOUrS ere fuJle, pour m Ol •.'~
' l' Univers efl un deÎert
pour ton r;Em lùe • •• Duu
J'
r: '
S ans tOt,
hientôt , car n.ous
veut'lle flOUS re;'o;ndre
•
.
POur être J éparés !
lU
Jommes pas Jaus
.
entre nous ell:
E t 1,on~,nCeroit dire que la cohabitation
.
'
é ? Qu,e11 e
d
f, ? Qu'elle ne doit pas etre cont111u e .
an~ereuffieb'le 7 Tandis que pour qu'elle foit poffible , il
e Impo 1 •
,
fi'
è
fuffiroit qu'il ne parût pas que , m~n ~podu e eut co~u
s
de moi des riCques auxq~els .11 lerolt anfigjereux b~ ~xr
car 1 a co h a !taUon
pOler
en core', &. tout ferOlt dit aé ors:
Ir.'
'ell: pas impoffible , elle eft n ceualre.
. .
n D es rlli
' rques , bon Dieu! des riCques!
111Jure je
. ' quelle
. [;.,
.
fais à Madame de Mirabeau! quelle Idnl~re Jée raids a mal;
•
'Et quel monftre n'aurOlt pas. elarm
la ouceur.
meme.
'
r
.
Quel homme de courage éprouva Jamais un autre lenUment auprès du fexe foible, que le defir ~e le ,déf~ndre
&. de le rendre heureux de fon bonheur. Ah. latifons
aux méchans le cruel plaiÎlr de chercher, .de trouver partout des coupables! Lailfons-leur cet odieux rafinement
de calomnie d'empoifonner ju~qu'aux. ex~reffions ~e In:a
tendrelfe , jufqu'au fentiment qUI me fait m honorer d avo~r
été choiÎl par ma femme: renfermons-nous d~ns fon temoignage ; elle en appelloit à mon Tribunal; J'en ~ppelle
au fien; dIe a prononcé; fes lettr~s f?nt un Arret que
vous confirmerez MESSIEURS: &. pUlfqu aux MlIllftres des
JJoix il ne faut que le langage des Loix, je ~ous le dis
avec alfurance : il fuffiroit que Madame de Mirabeau ne
prouvât point de févices, pour qu'on me .Iai,ff~~ dans mes
droits d'.poux. Mais fes lettres excluent Jufqu a la pombilité des févices. Il faudroit autant d'abfurdité que de
mauvaife foi pour ofer en fuppofer déformais.
Ceft de l'habitation, MESSIEURS, qu'il s'agit dans ce
procès, &. de rien de plus; ( ne le perdons jamais d~
ll:
r
q
vue.) On ne peut donc le juger que Cur' la cohahitationJ
Tout ce qui eft étranger à la cohabitation, eft donc étranger à la caufe. Il ne fuffit pas qu'on dife, au nom de Ma.
~ame de Mirabeau: elle ne veut pas hahiter avec Jon mari.
NObls débattrons ailleurs cette affertion ; contentons-nous
.d'obferver ici que cette volonté même prouvée ne feroit
.d'aucun poids dans la caufe. Moi - même MESSIEURS
qua.nd je ~oudrois confentir à la féparation ; quand je vou:
:cirais déchirer mon cœur &. partager mon être mon vœu
Ier.oit impuiffant. L'accord des volontés qui 'fuffit pour
umr, ne fuŒt pas pour réparer. Quand mon honneur nt>
[ero!t p~int engagé ~ans le procès que je fou tiens , ce
ferOlt vail1ement que Je partagerois les defirs prétendus de
mon époufe. La fanétion du Magiftrat feroit refufée à cet
accord ~nfo~ial: Et puifqu'il n'exifte d'autre moyen de féparer .d h.abltat~on deux époux que l'impoffibilité de leur
cohabitatIon; Il faut, pour donner à Madame de Mirabeau ~ne ~~tr~ habitation ~ue la mienne, il faut qu'on l'e.con.n0lffe 1,1.ndlfpenfa~le neceffité de cette féparation; c'eil:à-dire, qu Il faut qu on a1Ture, qu'il faut qu'on admete
non pas l'improbable, non pas l'invraifemblable mais
'
l'impoffible moral, mais l'abfurde.
, Cependant nous fommes en caufe; &. l'on annonce 1 I~
,?e toute part qu.e mon procès eft déteil:ab!e, &. que
Je porterai la pell1e de ma témérité. Cherchons les
raifons ou du moins les prétextes d'une telle confiance.; &. pui[que l'examen de la 'caufe ne nous a' pas
découvert le ,.pl~s léger moyen de féparation, difcu~
tons ceux qu Indique la requête de Madame de Mira.
beau.
Le prc:mier motif de réparation qu'on aIIégue 'en fon
nom, c'eil une interdiétion de biens qui fut autrefois
prononcée contre moi par le Châtelet de Paris. • • • •
�,
' r4
.
Né roùs:regarcfei' point aveC ~éfônI1erri.ent;· MESsrEuRS'
~ :vous pa{ferez dans" ce 'p r.oœs .de furpnfe en ~urprife. Il
.--,
eft bien vrai que J étolS InterdIt (autant que Je poUvais
l'être), lorfque Madame de ~i.rabeaù no~rri{foit auprès.
de moi notre enfant;, lorfqu elle devenOlt une feconde
fuis mere; lorfque noUs habitions enFemble à Manofque.
Gont j'attefterois volontiers tous les cItoyens pour garants
de ,notre t-endreffe mutuelle. J'étais inte~dj.t lorfque Ma'
dame de Mirabeau m'écrivoit de Pans des lettres fi,
tendres fi touchantes. N'importe; je fuis interdit: donc
. je dois "être féparé de cGrps d'avec ma femme. Telle eft
bien la, logique des pallions!. . • . .
.
~ Vous me permettrez cepend,a nt" MEs~IEURS" ~e ne_répondre à. ce grave' argument '. qu en mant l~, .fal,t fur
. lequel il repaCe. Le chef du Tnbuna~ auquel Jal 1han' neur de parler a légalifé lui-même, Il Y a quelques femaines l~s procurations des parens dont meIl pere a,
-demancJé l'aveu pour lever cette interdiétion: &. nous
attendons tous les jours la Sentence du Châteltt de Paris.
Efui certainement n'a pas pu m'Î'nterdire, mais qui peut
hien détruire fa propre Sentence.,
'
On allégue au nom de Madame .de Mirabeau pOUt
Fecond morif de féparation, les procédures dans lefquelles j'ai été impliqué, &. qui ne [ont pas purgées.
J'ai dans mà vie' effuyé deux-' pr.océdüré~. L'objet' ~~
la premiere eft, une affaire dev:enue tres- férieufe par l'eclat 'que j'nomme dont on dt:voit le moins le redouter,
jugea à propos d'y donner;; &. fur laquelle, fi je pou'·
vois jamais être preil'é de me jufl:ifier,. je ne ' faurais.
-rapporter d'apologie plus h.0norahle que les lettres d'e:
.M. le ..Marq~is de Marignane lui-même. Cette affaire fi
connue dans la Province que, même en l'exagérant, o~ '
n'a pu' -la. dé-naturer, dl: jugée .. 'Elle eft · donc hnîe. St
ma partie n'a. pas cru dev.:0ir me faire fighifier 'ma Sen
4
l~,
'tence:; ra~s doute .il vous parottra dur, MESSI'rU'R:S '
qu'on. excipe contr'e moi de l'atrocité de la plain~e.
;
MaIs, MESSIEURS, ne VOllS femble+~l Fas bien étrange. que l'honneur de deux époux étant folidaire, on rel'
veille au ~om de. ma femme des accufations criminelle~
cont-re mOl, tandiS que l'immoralité d'Hne telle conduite
.~'a pas. mêrt?e pour prétexte l'utilité de fa ' c~uf~? Car
Je ferols vénta?lement ?écreté de, prife de corps, qu~
Madame de Mirabeau n en feroit pas moins indiffolublement ma fe~me., Ma mort civile elle-même ne pourroiç
donner atteinte a notre union . . Madame de Mirabeau;
affe~ géné~eufe, affez tendre pour m'aimer d'autant plus
que Je ferols ,Plus malheureux, joignan~ à l'amour conjugal
une f?rte d amour de compallion 1une des plus vive,
affeétlOns des ames nobles &. des· cœurs élevés; fe croiroit. d'autan.t plus. obligée à remplir fes devoirs enver$
m,ol, que Je ferolS plus out~agé, plus opprimé, plu~
.cfe(lué; que fon pere" fa faml.lIe, la famille même de
illOn. accufateu,r &. la Province e.ntiere auroient plus
n:ilmfeftement reco?nu que fi l'imprudenoe étoit de mOij
coté dans cette affaIre, tous les tons des procédés étoienJ
_ à mon adverfaire.
Mais que parlé-je de procédés ? Ici du moins on n'en
yeut <Jl!I'à. mon caraétere ; car perfonne n'aura l'audace
de foutemr que la procédure dont il eft quefiion, intérelfe mon hpnneur. Mais on en rappelle une autre au
nom de Madame de Mirabeau, qui n'inréreffe pas moins
que ma vie.
En effet, M~SSI~UR.S, la feconde procédure que j'ai
effuyée, que Ion . IndIque vaguement dans la Requêt~
de . ma femme, maiS dont on tàit ·retentir oetre Ville depuis plus d'une année , eft celle prife à Pontarlier à
la ~equête d'un mari, fur un prétendu rapt de féduétio ll
qu'Il m'accufoit d'avoir commis envers fa femme, ~
•
�16
pOlir Iequel- j'avois été' condamné par contumace 'à per..,
dre -la tête..
.
Avant qu"on engage Madame d'e ~Irabe;u dan~ cette
étrange difcuffion hâtons-nous de dn'e qu"Il ferOlt. bien
odieux qu'on relevât ell fon nom, contre Ion man, wne
accufatioll criminelle dont l'acc\:lfateur, dont .te . prêt.endu
'offenfê a é~é obligé de fe défifter. Que dIs-Je? Il ne
forma jamais l'accufatron d'adultere : & l'on ofe foutenir
pour Madame 'de Mirabeau, que cette procédure dégénm
en injure grave C012lre elle, & en abdlcallon pubh9ue de la
qualité d'époux :. ce qui ne peut s'entendre :rue d'un ad~ltere authentique & folemnel, ,tel qHe celm dont on mavoit déc1a'\'é aHeint & convmnc\:l par une Sentence ijue
les Juges qui l'aviJient prononcée on~ été obl'i~és ?'anéantir après m'avoir entendu. Et que ?e~t-on !maglller
en effet de plus inique qu'une - prononCIatiOn cl adultere
dont l'e mari n'avoit pas proféré l'acCH[;nion!
Un mari s'eO: pl'ain~ de- ce· que j'avois fac.ilité Févafion de- fon époufe. EnAammé de l'animofité des èn
nemis de fa femme, il a, par un renverfement de
tout idiôme, de tal.H prtllcipe, appellé rapt de féduction le délit d'avoir facilité l'évafi.o n d'une femme mariée' délit a la- preuve duquel il a fu<:combé. Après
cinq' années de, recherches inf~uaue\:lfes; après fix f!1ois
de chicanes & de fubtilités , i1 s'en défifté d~ fa plainte:
~ J'ai rendu ce défi{l:ell'1ent' public. -) Et l'bn v oudroit
la faire- revivre· aujourd'hui ! Et - c'eft- ma compagne 1
mon époufe, la moitié de moi - même qu~on tente de
·flétrir par ce ' procédé auffi infame que le moyen eft rh-·
furde !
II l'dl: ,fans doute, cal' quelle accufation préteodi'oit"
t'ln' relever? En - ce Cf~lle du rapt de féduébon? eO:· ce
celle d'adulrere? Si c'eft la premiere, je demande à M'aè'dme- de Mirabeau, à-fes défenfeurs, s'ils font les gardiens
cie for.dre pubJic ? le demande_ comment ils pourroi:nt
croIre'
,
Termes de
l'a. RC'lu<te.
,
,•
' 17
;croire avoir droit de ne pas fe tenir ' pour , fiHisfairs ..
quand la partie publique a conclu pour mon abfolution;
Quand les Ju.ges on,t d~claré -par.le fait que ma conduite
,en ~et~e affaIre ' étolt Legalement . irrépréhenfible ?
~I C eft la feco~de ? Si, c'eft l'accufation d'adultere que
.vows prétendez f.ure revIvre ?- Par une jurifpru dence tou.te nOll.velle, & que les bonnes mŒurs repouiferoient de
-la, malll des Juges, fi les loix la leur préfentoient; une
fen: me ~eI:a donc recevable déformais à intenter J'accuf~t\on d adultere. Contre fon mari! [on mari bouilJonant
.cl ardeur & de }euneffe, fût - il à cent lieues de cette
lemme, ~ ~ette femme eût-elle refufé de le rejoindre! ..
,Morale f[,Jbhme ! Merveilleufe décence! Raifon profonde 1
tOUt ~e tro.uve da:ls ce beau fyfiême de défenfe.
.
- Mais, dItes-mOI. Madame de Mirabeau va donc changer la ·nature. de fon procès; ce n~eft plus en fép'a ration
que \Jous plaIderons, ou du -moins elle commencera
par
de
. man der a" erre a·d'fi'
ml 'e a 1a preuve qu'il a été commis
un aclulter·e entre ma co-accufée & moi, & 1
' &
fi
é
.
'
e man,
. on poufe" & teurs famIlles refpeétives trouveront ce
~rocédé auffi régulier que noble... .• En vérité vous
etes ~eureux en expédients !
: ~~IS vous avez tranfigé. Oui, [alls doute, & il VOLIS
:ét,clIt réfervé de, me reprocher ce procédé noble & gé:~ereux. Eh quoI! parce qu'un vieillard déja trop mal, ~urcux; & plutot l'efclave & la viétime de mes enn/!~llS ·que ,mo~ ennemi perfonnel; avoit été égaré par
,des. confeJ1s vlOl~~s & r~mérair~s; je me ferois ohftiné à
"lfijJger fa caduCHe débIle, apres avoir été l'occafiOR &
le prétex~e des haines furieufes & des agitations pénibles
~Iont on a tourmenté fa vieilleife ? Ah ! loin de moi
ce,tte J,âcheté coupable! J'ai tranfigé, quand mes ennemIs m ont ,demandé grace. Et fi vous en doutez, lifex
les ~émOlres alors trop célebres que je fus forcé ' de
p.u hher pou~ ma déf~n(e~ ,Çherchez dans les regiftres dej
-.
c;
,
�-, '
18
Greffes ; coÏtipulCez l~ recu~ils les plus nombreux; Sè
ré qui fe fOlt défendu avec cette éner~
trouvez \:In accu l'
, r
1 r.
l' ,
,
1 L'fez
& dites fi vous 1 Olez, que es lUpp lCatlons;
l
fIe "f é ont arraché fon déGftemeot à mon accufateur.
J~ ,pli G é ' & pourquoi ne l'aurois-je pas fait? Qu'aa~ t,ra~ Igdem' ander à ma partie? Rien que des domma:'
vOIs-Je ' a é ' ts Et c'eft pour cette CUpl'd'ne, l'"o r d'd
1 e que
ges & lOt re .
. l
'
1 U
'
"
'
oloogé fes tourmens & es miens,
n pl'Oces
~aUfirolsd Plerux un éclat fi déplorable! Hélas ! po~r-qui
Il can a ,
" ,
'/ Q ,
me hâtais-je ? Qui fomentoit mo~ ImMPat~ence 'd ~~,me
rendoit intolérab1es tous les 'délaiS ? a ~me e l:-nra-me' me cette époufe trop chéne dont Je ne
he au eIle
,
, M'
fi" '
r. ,
,
'pas
le
cruel
accueil.
ais
en
n
J
al
tranuge.
preVOyaIS
d
&' , .
'S J'ai tranGgé pour les ommages
-tnterets;
01
d
J e 1e ev .
'
h 'G
&
d'
c'eft,à-dire , que je les ai remIS fan~ ~ l~er d av~c au·
tant {'lus de plaiGr , que j'en pouvais e r,erer, e p ués céo~
'fidérables pour expier une erreur qUI m aVOIt, t Il
,c.
long-tems de ma hlIberté,
lune ft e, qUI' m'avait privé G
, r .n. '
1
..l
xiftence civile. MaiS cette trallla ...llOn, omo o·
ue mon e
è
• 1
• d
guée par les Juges faiGs du proc s, a a req~ete . e
l'accufateur même" & fur les concluGons de ,1 homme
chargé de la vengeance publique; ~ettetranfaétlOn po;te
mon abfolution pure & Gmple. Et c eft mon époufe qu o,n
voudrait charger de me la di,~puter! 0 honte ! ô délire-!
. Mais cette tranfaétion que J attefte comme le monument
tle mon innocence, porte qu'en cas . d'in~xécUli0n. d'aucune
des conventions jlipulées, de quelqu~ part que . vunne c~m
inexécution , /es farties rentruont dans leurs droits refpe8ifs·
Tout n'ell dOllc pas fini. Cette procédure n'eft que fufpendue; chaque jour elle peut revivre.,
'
, Voilà l'objeétion , ·dont on fatigue le p~bhc depUls que
la Tranfalfrion & le Jugemenc-de ·Pontarlter font connus,
préfentée dans toute fa fo~ce. ,Je, demanderai d'ab~rd;
<lui 'peu~ dire qu'il y aura mexecutlon de quel,~ue ,coté,
lI'outes les parties . ne font-elles donc pas a!fez lte~sa leqt.
,~
19
parole Fiar leur pr.opre intérêt? Ce-pèhdal'lt dévor{)ns Cette·
a.b(urdi.té ; j'y .coR(ens. Toujours renera-t-il que je n'ai'
oontraété qu'avec le mari ( il eft impoŒhle de le nier en '
dr~it ); & que fom déGfiement contient un ' aveu qu'il ne
peut rétraéter. D'ailleurs on lui · feroit injure de fuppofer
qu'il ait exigé que je me {ois remdu envers lui ca·u-rion de'
fon époufe.
Mais quand il auroit deGré ce cautionnement; q·uancF
je l:a.urois foufcrit, qui pourrait dire que j'ai eurore de
répondre de la foumiffion d'un tiers -? Qui pourrait- dire
que ce tiers trompera mon efpérance ? Ma co-accufée ne
fauroit la tromper, puifq'ue , foumife ·à des ordres du Roi
qui ne feront révoqués que du confentement de fa famiHé
& de f~n mari, l'auto·rité concourt avec fan intérêt pour
me g.arantir fa fidélité â des engagemens volontaires. .
. Et quand elle parvierid·r oit à brifer à la · fois les liens
de l'autorité royale, ceux de l'autorité domeftique, ceux
dlune con.v ention juridique qu'affure la {anétion des Tribunaux , ceux r.nfin de fan intérêt & de fa parole, à quoi'
s'e!t-ètle~ engagée? à confentir â la perte de fes gains nu'p uaux. C'cft. une pu-re fpéculat·i on d'argent, un flmple intérêt
pécuniair.e pour lequel fan per.e & fa mere font garans
avant moi; & qui , dût - on recourir.à mon ca·wtionnement, ne feroit après 'tout qu~u-n objet de peu d'importance;
. C'efi d-0llc " en derniere analyfe, un cautionnement
pécuniaire <ïue j'ai foufcrir ~ & jamais conudérat'ion dli
cette nature ne fauroir influe.r fur un procès en féparation ~
1Ij'u! d'ailleurs ne gagtle'r oir rien à ce qu'on établît que
facoufa.t.ion p()~rr{)it renaître. Car enfin une accufa-tion de
rapt ,de féduét.ion e·nvers u·ne femme màriée ne fera jamais I!flluFl'e ab[.urdité que j'ai tellement d é ~oilée, qu'il
me 'faut pa-s craindre -de l'entendre articuler de nouveau
par .des 'nGmmes -de Lot Et dans tous les cas, ofera· t - on avouer au nom de
ldadame 4.~ Mirabeau, qu'ell~ pourroit JamaIs fe - ré~
C ij
•
�10
.
(eS refus les ioupçons d'une accu:
foudre à renfor~~r par r
. 7 Enfin
MES SIE URS
. 1
ntre Ion m a n . ,
)
ration caplta e co
étence
cette
accufation
qu'il
vous
p
elt-elle. de
votre
codm
'
r 7 Ma ame de Mirabeau n'a pas le droit
, de
d
. fau rolt Juge
. T'b
1 Sous aucun afpeét vous
ri una.
Ii n avez
'
tre
la porter a vo
& l'on n'a pas fans doute e péré de
celui d'en COnn?ltre, dans une telle ·quefiion" des tiers
vous faire oublier q~e
rocès avec Madame de Mitout à fait étr~ngers ~ mO~rfïennent à la haute Magifira_
rabeau , d.es tle;: q~llla~ent (;ompromis &. profondément
ture , 11rerolent euentle e
A
•
intérelfés.
vous débattre, s'écrient. les défen.feurs
V ous aurez b~,u abeau' le Minifiere pubhc efi toujours
de Madame de Ir
e' accufation qu'une Cour fouvel~ maît;e de ~ele~er ~~us pouvez donc à tous les inllans.
rai~e n a pas Jugee. le laive de la Loi; & l'on n'orvous retrouver fous
gé oure rentre dans la couche
q ue votre P l i ,
donnera
pas la cralOte
,
uptiale avec
co ntinuellé
, de vous en vOir arran
1 M' 'Il es de la J ufilce.
cher pa~ es lnl r
mme tout autre , être accufé
Je PU,IS fans !oau~i~ c~r le Minifiere public qui veille
ns' PC & l'on n'exigera pas pour me
chaque Jour de ,
pour tous les cltoye ,; donne caution, pour le refie de ma
rendre ma femme que J ,
uis l'être que pour un
' . ) Mais comme eux Je ne P
, .
li 1
~~~" ublic Or celui fur lequel j'ai tranfige ,non eu ee It p ,
.
d ce enre mais plus qu'aucun autre
e des 3élits
ne peuvent être déférés
Ii ell u,
l' ffenfé La procédure dont on
à la Jufilce r que ~ar n?a J'am' ais offert aux Tribunaux
e1le le louvemr,
fi
ra
pp
r '
de
apt
de
féduétion
envers
une
emme
qu'une aCClllatlon
r
,
ïli nt
" ,( délit chimérique que nos LOIX ne connOi e
;a:r:)e quelques prétendus indices
adu!tere
~ent ~ efin;~bre
~ui
(f~n
dépou~vu
de t~ute preuve" dont and ?fi'.?ut j~maI~s dr~t ::n~ol~n~:~:
arce que le man ne le e c;;ra Jamai ,
. u'en
~ureut: Général ne pour~oit po~rf~ivre la vengeance q
&.
•
•
II
accuCant ce m'a ri de la plus lâche des complicités. Qu'on '
celfe donc de vouloir ' dénaturer des erreurs judiciaires,
qui ne porterent en aucun temps que fur des -délits privés.
Celui qu'on prétend offenfé ne fe plaint pas. Lorfque perfûnne ne fe plaint, le Miniil:ere public revêtu de l'autorité tutélaire &. non des fonétions ' d'!nquifiteur , ne 'p eut
être excité. Lors même qu'il intervient dans des débats '
entre particuli ers, c'efi plutô t pour tenir la bala nce entre
l'accufateur &. l'accufé ; c'eil: plutôt pour qu'on n'abufê
pas COntre celui·ci de la rigueur des forme~ , que pour .
aiguifer & diriger Contre lui le glaive vengeur de la
JlIfiice.
Puifque la procédure dont il s'agit eO: muète Rour le
Mjnifiere public, dites-nous> je , volls prie, èla~s la Cup-,
pofirion que vous faites, quel feroie fan infiigateut? De
quel dénonciateur le crayon cenforial enrégiO:rera _ t. il le
nom? Le livre de la cenfure va-t-il donc devenir une
table de profcriptions, un fignal de guerre in'tefiine > chargé
de réveiller la vengeance> l'anlmofité, la haine entre les
citoyens? Non fans doute. Malheur "à qui ne .voit d.art'~ .le'
Magifirat des mœurs & dé forare p.ubnc, que le veügeùr
facial. II eil: auffi le pacificateur des , citoyehs; & la branche d'olivier doit plus fou vent encore orner fa main, que.
le fceptre de fer de Dracon la furcharger.
Lorfqu'une querelle privée a di'Vif~' trois f~miJIes, lorf-,
qu'elles fe font accordées' pour l'étouffer, lotfqu'elles ont
obtenu une fanétion légale à cet accord; fi quelque bouche incendiaire effaye de rallumer quelque étincelle des
reffentimens amortis, le devoir de l'homme public- eO: de
diffiper ce foume infeét par un- foume . de paix', fan de-,
voir efi de repouffer tous ' ce.ux qui fe préfenteroient pour
réveiller des procès fcandaleux (ur lefquels 'Id' intérelfés
font appaifés.
, Et voilà comme Ce renverfe de mille manieres cet argue
ment odieux, qu'oll préfentoit Comme un géant, & qui
�~z.
n:ea. ffU\N1 ' pigmée. Voilà Cô~me. ;on ~ouclr?ït rend,re:
Madame de :Mirabeau! complice, cl unie InfamIe &ra~uJte
jfo.tir l'âvilir s'il étoit poffible ~ ~ mes yeux., MaIS Je la,
con'h~is tro/, pour lui attribuer, r!en de mépnfable, rien
de perfide :"& je jure de ne lUI ,Imputer aucun des ou.
qu'on accumulera fur ma tete, au1ft )ong·temps que·
trages
.
,
" li
,.
te
ront cap-,
fies volo .."'tés , Ies aai~ns &. Jl1fqu da esEopmtons
T
fi d
m
tives. Cefl ,mon E\l1j1ie, I,lla ten r.Je
~e, ,1 ou~e, CL
fi fiBle CL pénéfr~e de l'al1).ou! ne es · evOIrs; ~ eft la
cC:~p~g~~ &. I~ confolatrice. d~ me~ malheurs, qU,e Je vois.
toujours; que l,e ne ce1Ièral .lamalS de reconnoItre dans.
Madame de MIrabeau.
. ,.'
.
'
• o.t;l, a~t\r.e. cepe,f\d~nt que Je 1al dIffamée, &. c dl: le dernier, mdtif'c\ii fé p,ar,aUOJl q~' on al1eg~ au ,nom de )1adallle
de Mir'aÉeau. '
.
, Sans doute;: pour qui conn,? Ît le cœur hUliIl~ln " le fenl ,a~e
Je réc1illner ma femme, prouve aiTez que,le Il attentaI Jamais à [on h0nneu~. Mais T'honneur eF] gé~eral, &. fur-tOt'lt
~eIuïc1'u'n [e'fe ,p'o ur qUl1a -<!télicateffe fut H1Vem~ e, comnJe
lA' compagn'e _ né,cFfJ:aire de. la beauté;, fGlf.! ' hop~etlr. elli
J.Ili~ùx ! .Cervi par:Je filenc~ : q\!le ,pa,r .les elol:';~s. mçme. J~
me coorcnterlli donc d:obrerver ICI que J at défavoue
dan.~ mes lettr,es à ' mon beau - pere, à ,ma femm,e, ,tous
M'émoires dônt .~~l~ a~roit à fe p,la.i~dre ~ çomme lfldlgnel
de moi" Gomme JII)ll[ :eUK po.ur mOl. Ce ,d é [ave~ efl refié
{ails 'rèponfe; /?t.. j'en de~0fs 5fllldure que, ma famIlle ado.p,
tîve en étoit' fatisfaite. J?<youte, q:!Xam aux lettres lilue1~
ëonques que j'ai pu é.crire aux gens en ~la.ce , &. f;lu'{i)n
~t-!e!t~ ~9.lj .e j~ n'.t;.n dqis. au.oun oOty)pte, fo~t par~e qu~ de,s
febtrÇ.s ëIll~vCf JOl1t\ tOJ.1~ 1\1 gar.de ..de la [<Dl p1ubll<,!ue , fo~t
iia~ce
"'âe~ ;plaintes, même "ma,Îs dépofée.$- dans le f~!1}
d~~: ~i6~ft;,e~ ~ RQi " ne ,Iaurcie/1t p"ait'er pour des dif.
famatlons.
.
.
D es diffamations contr~ ma femme! moi dont le dé·
refp~r dfns les ,eX5ès de ma févéri~é la plus chagrine, de
t
.
,
°iué
•
• 1 li 1
1 ..
'2~~ '
s.
.
ma Ja ou le a p uS In112fie, fut ~e pemer que je ne poti\l'ofJ
plus la rendre heureu[e! Des dIffamations! eh! n'aur'ois-je
pas ~té, la p,rer,niere viétime de ma vengeance? Qu~l mal
alllOls-Je faH a ma femme que je n'euffe pas feori? Ah '!
:fi les hommes,. dont le fentiment efl droit &. la tête faine'
font bons par 'fageffe, il's [o'nt auffi cIémens par ;ven:
geance ; c',efi la. feule "qui foit à , leur u[age. Mais_ aucun
homme, a mOlliS d erre un furieux [ans ame & [ails
t:(prir, n'a diffamé la mere de [on fils. Les enfans forment
un nœud vraî ment indiifoluble entre les deux fexes e~tre '
'cel!X 5ui leur ont ,donn~ j'ê tre. C'éïl là ' l'invincible'rai[on
'G'll s oppofe au dlvorce;' &. mon -fil s vivoit au temp's
-où l'on prétend ,que je ~.~ffamois fa mere ; fa mere que je
ne redemanderolS pas fi J avois ceiTé de l'efiimer .. Ca 'mere
dont i; n'aurois I:a~ été jaloux fi j'avois ceffé
l'aimer"!
Arretons-nous, ICI, MES SIEURS. Voilà donc la requête dé
Madame ~e MI~ab~au , ép~i[ée . Voilà ce qu'une multitude de conférences de célebres Avocats dtAix ' a p _
'
c.,
d [ ,
,
ro
d ult
en laveur
u yfieme de ~eux qui veulent m" .
ter. ma femme! J:ai ~é}a 'parc~uru une longue çarrier~;
&. Il ~emble que Je n al nen dit fur' l'incident que vous
'alIez Juger.
'
, ~ais,. MESSIEURS; vous laifferez c~tte erreur à ceux
qUI Ol!t Intérêt à l'ac,~réditer, à ceux qui ne ~voulant
1Jue m enlacer dans cl eternelles longueurs, 's'efforcent dé:
g~gner leurs fins provifoires, indépendamment de toute
dIfcu~on de la. cau[e, parce qu'ils n'ignorent pas qu'il
efi,.legale~ent Imp,offib!e q~'ils , gagnent davantage, &
qu. II leur faut VOIler Ju[qu au dernier inftant 'la futilité
de leurs mQyens dè fond. Ils [e font renfermés dans des
~gén~ralités i~définies" dan~ d~s én?nciations vagues; co~
~e fi leur aemande provl[OIre n'etoit 'pas même fufcep ...
lible de controverfe. Je le crois 'c omme eux Meffieurs
'II
l'
. '
,
,
-qu e e ne efi ,P.~s : Je troIs que dans la thefe généraie, &, . fur-tout- dans' feCpece '1 particuliere; iil eft impo{-
cl;
�2.4
fiblq de J'li!fe~ Madame de Mirabeau ch'ez M., f?n' pet~s
& i e vais' établir ' en peu de ' mots mon 0'p1l110n déJa
très-éclaircie par les lettres de M. de Mangnan~, par
la difcuffion du fond, par les lettres & les requet~s, de
Madame de Mirabeau, & fur-tol!t pa~ la ,contrad;éholl
Jna'nifefie' qui {e trouve, .entre fes écrits ,& les demar~
che's que l'o,1l fait ,e n fon nom.
III. . Les fins provifoires & l,a dem~nd·e. en, féparation ~e
-'
de '.Mirabeau , dOivent , etre Jugees
me;
M aHame
d furA les C'
" C;.I)
es " parce qu?elles dependent r u meme ,rait.
mes prm
'.r
S s fins. provifoires comme la 1 deman~e en féparatlon,
~ t ur bafe que la fuppoGtion d~ la volonté
de Ma.
n on po
b b'!"
,
dame de Mirabeau. Or, de quelques, pro a 1 Hes qu ou
veuille étayer cette fuppoGtion, touJours ne fera-t·elle
qu:une fuppolltion.
f
.. ,
l i ,
. Je ' vous le demande, MESSIEURS ,. l'.e ut - ~~~ ~~garder
:comme de même nature les mOy~!1S .qL'! , J oppofe .
il mes adverfaires? Les doutes., que J éleve ,!ur la . volonté de Madame de Mirabeau ., fon,t ~ondés, non 'pas
fur des fuppolltions, mais fur des témolgnages,certalOs.., .
irréjJroGhables, dé~i~fs.de fa ten:lr~ffe pOlU ~Ol, Ses l~t:
tres, le- .v œu de me rejo~l1dre qu'ell~
expnme : VOila
mon titre. J'ai donc dans cette lutte IIDco~~enfu~ abl.e
avàntage d'oppo[er la certirude à. des fUppo{ltIOns.; Je dIs
à des, (uppolltions, parce que t?US les moyens de, Ma,dame de Mirabeau re.pofent, aJl1fi que . fa volonte pré;
'ten'due fur , d~s [U.ppolltjons, On fuppofe 4es grjefs qu'o\1
fe iéfe;ve '~e p;ouver. On [uppo{e gue ces, griefs qu'on
n'ore pas dédllir~ & . que j'a.profo?dis mO.I, on, fuppore que ces griefs do~t aucun n efi perwn.n~l a Madame .de Mirabeau que Je n'ai pas .revue depUIS. [es le~
tres écrites, ont fait naître [a v~lonté de [e [~parer de
moi~ cette volonté fi conttaire 4 fon ancienne tendre{f~.
r;.
1
, .
Et
' 2.-)
E~ ~oi je ne {uppo(e rien. Je dis·: Mada.me de' Mirabeatr '
m almOlt avec ~rdeur, lX. [es lettres en font la preuve:
Madame ' de 'Mlraheau éto.It heureu[e auprès de moi, 8(
fe~ . l~ttres en [ont la preuve. ~adame de Mirabeau 'gé'
7
nll{fo!t de m~n ,abfen~e; elle Invoquoit l'amour conjuga l ; eHe fouplrolt apres notre réunion; & [es lettres en.
fon~ , la preuve~. RéunilTez-oo.us donc, rapprochez-nous dL1
mOIns.
Dans cet état de chofes pouvez-vous balancer MESSIEURS, à m'accorder la vue de mon épou[e à m~accor
der le provi[oire q.u.e ··j'-ai- l'honneur de vou; demander 1
m'efi dû,- MESSIEURS, parce que le Magifirat ne fau.
raIt refufer . de confiate~ mon titre. Il m'eIl dû , parce
que le Maglfirat ne dOit pas autorifer le trouble qU'OR
apporte à l'exercice de mon droit; il m'efi dû parce
que m~ quali:é n'étant p.as comefiée" mon nom d'époux
lie dOIt pas etre un vaIn nom.
Les L.oi x prononcent, & les J uri[con[ultes conviennent
que la féparati.on. de corps même ordonnée, ne faie
perdre au ' man nI [on autorité, ni [es droits: & dans
notre. légiflation" il efi hors de doute que. la femme même [épar~e, e~ to~jo~rs [o,us ,la ~ui{fance du mari: que
,l a [éparau,on d ha,hltauon n aneantlt ni les devoirs de la
femme, nI la pUI{fance du mari.
Quoi! D~ns un état de réparation 'jugée, j'aurais en,.
co:e: l~ droIt de pre[crire à mon époufe tout ce qui [e.rolt de~e~t & convenable! J'aurois le droit d'infpeéter
~ de dlnger [a c.o·nduire ! Et l'on [uppofera & l'on [ou.
tJen~ra q4.e quelqu'un pofféde aujourd'hui celui de m'in.
terd~e [~ vue? Quoi! J'aurais incontefiablemem le droit
d~ dIre ' a Madame de Mirabeau .: Ne re,cevez pas des
vI~fes de telle & telle perfonne ! Je pourrois lui dire: ne
freque~tez .pas telle & .telle fociété! Je ne [erais re[ponfable , a qUI que ce [OIt de mes motifs? Et il ne me
fe~ l'as permis de la. voir, de lui é.crire! De me
faire:
,
,P
D
�2.6
•
. _
.
~7
ente~dre -cl' ~l1e ! .. : ., .Tel reroit cependant l'effet infaillible
I~oté de Madame de Mir~eau .d'obtellit Sa féparatiolT ;
de fa demande provifoire,
Depuis long - temps toute avenue m'd! fermée. auprè~
de ma femme ; cela eft avoué au procès, p.Ulfque je
in'en fuis plaint, d'abord dans toutes ml;s bttres; enruite
dans deux requêtes judiciaires, & que les requêtes de
Madame ·de Miralieau ne l'ont pas nié. Cela eft avoué
puifqu'un des griefs de f~s req~êtes c'eft que j'ai deGré
de la voir & d'être entendu cl elle,
. Or, pourroit-on établir un. éta,t provi~oire plus ~éci(if
dans la caufe, plus attentatOire a mon titre, que 1 adjudication entiere des demandes formées au nom de Madame de Mirabeau? Voudroit - on établir un état provi~
Foire rendant lequel on m'interdiroit tout moyen d'étouffér ce malheureux procès, d'empêcher qu'il n' ait des
ruites funelles pour les deux épo~x, po~r la Société.
pour les Mœurs; qu~il ne néceffite un dIvorce éternel?
On ne manquera pas de me dire que M. de Marignane eft le maître chez lui; qu'il peut y recevoir tous
ceux qu)il lui plaît d'admettre; que je n'ai nul droit
d'exig.er qu'il renonce à fa fociété, ni qu'il fouffre mes
vifites. Et je ne l'ai jamais contefté. Mais '. MESSIEURS,
c'eft- parce que mon beau-pere eft le maltre chez lui,
& q4'il ne peut y avoir qu'un ~aître d~ns fa maifon;
que fa fille, jadis fous fa pui{fance, aujourd'hui fous
~elle de fon mari à qui feul elle eft comptable de fa
·conduite ; ne doit pas demeurer dans une maifon, où
non feulement la volonté de ce mari ne peut être écou·
tée, mais où fa voix même ne fauroit fe faire. entendre,
. Je ne fais, MESSIEURS, combien de fois on me redu ira . dans cetté caufé . à prouver ce .qui ell évident;
mais je fais que j'aî honte de déduire de telles trivialités.
Eh ! com.bien plus doivent-elles vous paroître inutiles St
faft~dieufes, fi· vpus nloubliez pas le point e{fentiel de
cette -caufe? Si vous n'oubliez pas que' la prétendue VO~
n ell (ondée que fur un PEUT-ETRE! tandis que l'a~ou~ .qu'elle. eut pour moi, le bDnheur de notre cohablta~·lon , Ie de{.i-r de n·otre réunion, fori,t établis for des
o.errttudes, fur ~~s prewves inattaquables! & qu'ainli
ro,ures les probabl'htés fon~ .eu faveur .de l'opinion que·
ID Qnt é.gal.emel\lt fuggéré les apparences & ma t,endre{f€.1
Je. ve~ dIre que la condu,ite contradiétoire de Madame
de ,Mlrabeas:t & . fe,s ~rocédé~ négatifs, appartiennent touS'
à 1 ~h1i:iIion qUI.1 agite, qUI la captlve. Eh! lequel des.
pa~tl.can~, des ar;us de ma femme oe doit pas chérir cette
opInIOn. Eft-ce a Madame de Mirabeau ·époufe dévouée
bonne mere, tendre amante, peintr.e-.éloquent des: fenti~
ments les plus ?OllX, les pIus honnêtes,. les pills faerés
d~ ~œur humain;. ell:-.ce à dIe qu'on s'~ntéreffer~? ou
lu.I ~éférera-,t-on la femme qui foulant' aux pieds des.
affeLhons ~ cher.es, aux [up~licaJtioL1s les .plus tendres ~
.HJX (OU.V.eflll'S les plus attendnŒlnts, aux invitations les:
pl~~ fimple~, nt; répond . que. par des refus ipjurieux?
QIJIl , • ';' n~ Z J~ ne feral p{)'lOt .un leI parahlele; mon
~o.t!r 1 a~oi:bhrOlt &. m0néquité m~me m'arrête: car je
~IS ~cQnva+n.cu que rien de. ce q-N' o.n me montre a~liour
d hw .de. ma, femm~ ne lUI appar.tlent. Mais ch0ifi,f fez,
-vous qUI v.ou'lez faIre renoncer au bonheur domefiique
~e1le :que ~ous préte~dez. aimer, comme fi vo.us pouviez
p:~aIs lUI I.endre rien qui l'égale .: choitifièz, & dites
I!J:W hOllO~ :le plus ~~dame. de Mira'b eau, de moi qui
ve~x t0U]OlllrS la vmr lOvefhe de toutes fes ,qualités ~ de
~out7s Je,s venJ,Js, de ~ous fes charmes? ON de vo~s, qui,.
~:oes .d .a~ouer com~en elle étoit tOl!lchante lorfqu'elle
p::Ignolt ld a~res feUU.Iuenrs, d'aNtres opillions, d'autres
"~~, n-e lua en .attribuez pas .moins des fentimens, des.
~.p--ll1llons , Jdes >
v œux Cos-tralres?
~ :Ma'is? M,E;SSlEU~S, j'abandonne pour un inRant tou~
Jes avantages que le .viens de .déve!oper. Je fuppofe qu~
D ii
�18
la quellion de Pobfeffion ~~ telIettie.nt problématique;
la balance refte en équlhbre; & Je demande fi dans
~:e cas (le plus favorable de tous au fyftême de mes
adverfaires; car ils ne rangent apparemment p~s, la poffibilite de l'obfeffion dans la c1affe des abfurdltes : On
a beaucoup appelle le XVIIIe, fiec~e le fie,cle de la phir
hl·e· on ne s'eft pas encore aVlfé de . l appeller celui
I OIOp
,
d '·1 ft d
. Il·
du defintérelTement). Je deman e sie
e votr.e JUill'
'ffer, pendant le procès,
Madame
la l
.
1·
d de Mirabeau
.
ce de
expofée à l'obfeffion dont Je m~ftP ainsI' an~ une malfon où: cette obfefIion, fi elle eXI e, a a carnere la.plus
libre & la moins difputée? où entouré~ de gens lIlté, lT ' S à notre diffention,
ma femme n entend que des
rewe
.
1
. ' ? '
'x
ennemies
qui
m'accufent,
qUI
me ca omment.
ou.
VOl
•
d .r
je ne puis ni par ma préfence, nt p~r mes. ,l1co~rs, nt
même par mes lettres diffiper le preftlge qUI 1 environne.
Ce n'eft pas tout. Les cruels ~ffets de cette obf~ffio~
peuvent & doivent s'aggraver. ~ amour ,propre ~ lhab~.
rude fecondent à l'envi la mechancete lorfqu une fOIS
elle eft nJe dans le cœur de l'homm.~ .. L~ malheur que
j'éprouve n'eft donc pas le feul que J ale a redouter. Je
dois en prévenir de plus grands. On peut, on veut
même (& j'en attefte fa requête), on veut pouffer
Madame de Mirabeau de fauffes démarches en fauffes
démarches, jufqu'à jetter le f~urreau du glaive que fa
main timide tremble encore a toucher. On veut, en
accumulant fes torts envers' moi, faire naître une vraie
répugnance dans fon ame pou~ celui qui }ui f~t fi cher:
on veut lui infpirer des craintes fu~ 1111~p~lffan,e du
cœur humain à pardonner de certames lJlJures;. . elle
en viendra jufqu'à redouter mes implacables fouvemrs ....
MESSIEURS, prévenez un tel complot. Ils ne me pourront rien tant qu'ils n'aliéneront pas le cœur de , mon
époufe. Mon ame, j'ofe le dire, mon ame pla.ne a une
trop 'grande hauteur au-deffJls de leur ,am~. M!11S fi leurs
..
,
2.9
ca10mnies perfuadoient enfin ma femme! fi eHe en ve';
noit jufqu'à me craindre, jufqu'à me haïr! Ah? MES-'
SIEURS, je fens que je ne pardonnerois jamais à ceux
qui m'auroient attin! [a haine!
Certainement, MESSIEURS, ce n'eft pas [e leurrer d'un
efpoir trop improbable que de croire qu'une voix qui
fut le chemin de [on cœur; que des procédés qu'elle ne
mécon?oîtra pas long,temps, lor[qu'ils ne feront point
traveihs ; que la vue d'un mari qui lui fut cher réveilJeroient en e~le d.es fentimens {ur le[que1s on 'ne peut
élev~r le momdre doute, qui tout au plus ne [ont qu'amortls, & que tous les gens honnêtes voudroient voir'
r-enaître. Madame de Mirabeau m'a aimt! ; elle m'a beau<:oup aimé: & le premier homme qu'une femme a aimé
n'eft jamais ~ndifférent à fort c~ur. Une premiere impreffion a6ili ,Vive qu~ celle de '1 ~mour , a de long~ effets,
dont {)n n. appe~çolt pas la c~al~e ~ans le progrès des aa-.
nées, malS qUI ne ceffent d agir Jufqu'à la mort,. Mad~m~ de Mirabeau' m'a ~imé ; elle m'aime encore: j'en
al mille preuves de détaIls. ' Ses vœux , fes prieres, fes
efforts fe font fait entendre jufqu'à moi. Je connois les
obftac1es , les perfécutions, les confidérations même refpeét~bles qui .l'en~haînent; la trifteife, l'inquiétude qui
la devore : Je faiS tout; & mille lettres comme celles
qu'elle m'a écrites depuis que je fuis de retour en Pro~e?ce, ne me per!"uaderoient p~s , p~rce qu'elles, ont été
eVIdemment combInées, fi ce n eft dlétées. Elle m'arme'
cependant elle m'écrit des lettres dures , des lettres ou~
trageantes: elle a,pelle le divorce.
Chere Emilie, écoute un homme qui t'aime dont les
intérêts font les tiens, & le [eul dans l'Univer~ dont les
intérêts foient les tiens. Le divorce! Eh! quels moyens
as-tu de l'obtenir? Des lettres dures que je t'ai écrites ~
t~ ne les montreras point. Eh que.! wari jaloux n'en écri_Vit. pas de pareilles! Des févices? Ceux qui ,'obfédent
,
!
�-j0
füborn~roient une fOlire de témoins pour" me chargerque toujours renera-t:-il ceci ~ depuis 1774 je ne t'ai
vue ~ 'depuis 1774 tt! m'as écrit les lettres les plus tendres; &. c'eft toi qUI craignois Je divorce, loin de le defirec-. Ces lettres effaceroient tout: toi-même as écrit ton
~rêt. Qu'articuleras-tu donc? L'enlévement prétendu d'u·
ne femme? Non: Emilie ne feta pas ~{;fez lad\e pOUl'
m'accurer q.uand toUS mes accurateurs mont abfous. Elle.
ne [aurait être .recevable à m'acclll.[er. L'erpoir du div or'ù eIl: donc une aMurdité dont te leur:rent les intéreffés
à notre fépara.rion. , Dn r;'y réufftra jamûs. Mais voici à
quoi on tentera de' réuffii. On te compromettra par une
défenCe forcénée ; on m'olltragera; on s'efforcera de me
ienc're impofrtble de vlvIe déformais avec .t oi....
'0 ! tOI que j'ai vue fi honnête, fi décente, fi fenfib :e
à l'opinion pub1i'que ! quoi!' cet <éclat &. tout ce qui en
.{~,eut r.éfu1ter ne ' te Tait Fas frémir!' Quoi! Viétor l ce
ma1heureux Viéto.r , 6J:u·i ,. s'il vivoit, me redemanderait fa.
tPcre" ne crie ,pàs au fond de ton ame : C:EST MON PERE;
~T VOUS LE REPOUSSEZ! .•• Non,. tu ne pla-ideras pas ~.
ou je t'ai mal co:nnue.
_ MESSIEURS, je puis rue trom,per.; mai~ hela~! il reroit
affreux que je me tI'om'parr~ : &. Je pui~ bien auffi ne pas
me tromper. C'eft dans ,cette alternative gue VOHS allez
j,!l,ger ; '&vous ne pr0nont:etez certainement Fas 'lue to,u~
~0yens de ramener mDn époufe à des Centimens pluS.
aoux, à fes vrais .fent.imens ~ doivent .m'être interdits ;
yous ne prononcerez .pas qw'un débat ~G .trifte "qtlÎ p.eu-t
n'etre . encore qu' un mal-entendu facile .à ctermioer 1 ,ru:viendra , un, px:oœs à oUtrance ,; 'il rendRoit à jamais enne·
imes deux TarriiJles que' les Minifues ,des .Autels. croyoient
unit 10rfqu"ils in,vo6J:uoient Iur 'nous St les .nôtres les-héI1édlfrions célefies ,. lo.rfquWs ferroient les ·nœuds indift"e!ubles que Dieu même a voulu cimen:ter,~
pa:' .
: Mais ~l1# 'aemfu~d<ti-:j.er Hùniairui & fcnLibles pa~ i(l~
.
fI , ·
clination, les !uges font inflexibles St rigides par 'devoir~
Leur vertu meme ne fen qu'à les endurcir. Jamais ils ne
co~b~ttron[ la Jufiice fous Je. v~i1e fpécieux de l'équité.
Rehgl~ux adorateurs. de la 'L OI, tourds , inexorables
co~me e~le , la LOI feule, ou la Jurifprudence , fi 1<1
L,OI fe taIt ' . p.euven~ leur ~iéter leurs Jugemens. Loin
d eux les é~otlOns, Ils rédulfent tout à la regle.
'
Je foufcns à ces.,!l1aximes. J 'invoque les Loix, j'in.
voque les formes, J lt1voque la J urifprudence ; &. je vais
chercher avec vous, ME SSIEURS fi elles ont défendu
~ue ma femme me fût donnée pe;dant l'inftance ' fi elles
permettent qu'elle refie dans la maifon parernell~.
On affure qu'elle ne fauroit être ni plus ' décemment
ni plu~ natu.reIl:~ent ~equefirée que chez fon pere; 8{
que c eft faIre ll1Jure a ce pere refpeétable q1.le de le
mC!ttre en doute •
_Je, me vois ,fo~cé d'examiner {j l'affertion eIl: exaLte en
pr!IlCIpeS; mais Je protefierai du moins que mon refpeét
Jne~e , mon ~efJ:e~ profo,nd pour M. le Marquis de
~arIgnane, m enjoInt de 1écarter entiérement de cette
dlfcuHio~: car c'efi la caufe &. non les perfonnes que
?O~s plal?om. , A Dieu ne plaife que dans mon refus d'acgUlefcer a l~ de,mande provifoire j'aie eu l'intention d'offen~er ou d affliger mon beau-pere. Le Ciel m\:fi tén:?ll1 que, mon ,vœu le plus cher feroit d'embellir fa ·vie.
S ~l ne ,m y ~VOlt forcé, j'aurois tout facrifié au de{jr de
lUl p~alre.: Je dis tout; hors ma femme. Mais fi après
m: l.avOIr. d,onnée, il veut - me la ravir, je dois à
lUL, , Je d~:llS a. elle de la réclamer de lui-même.
• N oubh?ns J~mais dans ce procès, MESSIEURS, que
Je me .plam~ cl obfeffion; que. l'obreffion peut &. doit
meme lt1Vefilr le pere plus naturellement St plus affidû-'
ment encore que la fille. N'oublions pas que ma femme _ ( ~ê~e ~ans le fyfi,ê~e .qu'on lui prête) n'eft lJitS
mOinS IntereiTee que mOl a faIre ceiTer les plaintes d'ob~
A
•
---
--
�,p
{effion: . qu'iL · lui convient à eJl~ ,om.me .à · moi 'de -fe
:montrer libre; ,&. qu'o.n ne faurOit la due hbr~. dans une
maifon teUe qu elle fOlt, où. les obfef!eurs, s 11 en eft ,
font admis, tandis que la VOlX du man ne peut s'y faire!
entendre.
.
Après des confidérations d'une tell,: nature? Je n'a~roiS'
pas h;foin fans doute de confulter ,. fil les L~lx pofitJves 2
IÙ les formes ni la J urilprudence. La premlere de toutes
les Loix eft c~lle qui accorde à ma femme la· liberté que
je demande po~r elle. La f?rme l~ plus fac.ré'e
ce~le
qui r~fpeéte le titre ~ ,l~ drOIt étahlI. La meilleure,. JU,n!.
pruaen~e pour la Foclete, p.our les mœurs, pour llOt~ret
de la paix domeft flue, eft l~lconteftahle.ment celle qUI ~e
laiffe à la femme que le c1101X de la malfon de fon man.,
ou tônt au plus. l'hofpice ~.oll[acré ~ar le~ Autel~.
Je pourrois donc me. dlfpen~er d o~lvn: des . lIvres de
Droit,. qui. devojent tOUjours m être b~en etrang;rs., pour
{avoir c.e que. d'autn:s o~t p,:nfé ou )u,gé fur l éVldc?ce
mêtne. Mais voyons ,. pUl[q,U Il ne refte a mes Ad~er~al.res
que ce foible retranchement; v0yon~ queUe .eft IOPlnlO1l
des J.urifconfultes, &. qu~lle. eft la Junfprudence fur la fé,
paration provifoire.,
'
..
B,illon ' .!'.
Les. Auteurs de Droit Iépe;:tent comme un. aXIOme, dl.
paration. Luc. vortii. causâ f endente, & UXOfem & r.es . apud viruln eiJe de,
li b. S. t it. +. c. bère~ Pendant l'infiarice de divorce, la femme. &. tout ce
1..CY l ..
qui lui appartient doivel!t. être c~e~ I.e mari ..
Brillon, qui a recue!ll! la Junfprudence de tout le
Royaume. , établit que ». lor.fqpe la femme demande ~
» ê~re féparé.e d'habitation,. elle doit être ·mife dans 1lI~
». COlLvent., ou maifon bourg!,!oife n011 fufpeéte , <?lI le mari
» pouua la voir, & obtenir le moyen de proc.u rer la réu~
». ni on des.e[prits. Ain.Îi fut. jug~ à Paris le- I7 · Août 17II,
1) par Arrêt de.k cinquieme Chambre des Er:quéres, C'eft
l). la. Jurifpru.dence établie. &.. courante,, » aj9ute cet Au,.
te.ur ~
ea
.
.
B.
teur; &. cette Jur!fprudence ell- ancienne. En elfet, voici
ce que nous tl'ouvons dans Papon,
.
» Pa.r . Arrêt du Parlement de Paris du 15 Février 149 z, :rr~" èf p,_
» fut dit contre une femme pourfuivanr divorce &. lie' _ p n, liv. '1 .
tic. 3. dt di't ,C'"
» paration contre fon mari, que [ans préjwdice de [es ce & fépara.
» )uftes. moyens au principal, &. de lui faire droit , elle tion, u•••
» lierolt tenue , .par p!ovifion , S'en retourner à la compagnie
". d~ /on ,man, & lUI obéIr & entendre tout ninJi qu'aupara.
» vant; &. autant en fut jugé le 18 Août 153 6 par
» Arrêt de ladite Cour. »
,
oilà donc tr.ois Arrêts qui auter ifent l'injonétion que
l al. d~mandée : Ils ne font pas les [euls à beaucoup pres:
malS Ils Fuffifent p01!r prouver que dans notre jurifprudence
les drOIts du man fubfiftem dans toute leur intégrité
pendant l'inftance -en 'féparation, & qu'ainfi ils doiven;
être refpeétés.
On tr~uve/ il eft vrai, (&. je fuis loin de le déguifer)
d'a~tres ,Arrets par lefquels l~ fe.mme a été [e~ueftrée.
MaiS .qu on y prenne garde: Jamais la- fequefiratlon pro.
vi[oire n'a été ordonnée fans un commencement de
preuve de {évices. Je défie mes Adverfaires de trouver
un [eul exemple, je dis un feul, ql'li contrarie cette
affertion. Il n'en eft point, il ne fauroit y en avoir la
nature des clao[es s'y; oppofe. On ne peut [ans prou~er
.les orages de l.a cohabitation pal1ée, &. fans être ain6
prefque affuré que la cohabitation demandée fer oit dan.
geretlf:e, dépOtJiller de fait le mari de [on droit, On ne
peut commencer par éloigner l'un de l'autre deux époux
dont la réunion eft le vœu de la [ociété des mœurs &.
des loix; dont on doit en tout temps fa~iliter la recon.
ciliation.
Auffi lorfque nOtIS trouvons des Arrêts qui 0nt ' or- Plaidoxc"
donné la fequeftration provifoire; nous trouvons en XIV.
même temps qu'elle n'a été ordonnée que fur des preuV(S. Tel eft l'Arrêt rendu le 10 février 1663 dans une
caure plaidée par Le MiÙftre. .C et Arrêt eft rapporté
"y
E
,
•
�34
â la Cuite dll' plaidoyer .: » La Cour; fur le~ cori..
du lions de feu M. Omer Talon ,Avocat Général
» qui déclara que les [altS aliegués 1~lls le. plaidoyer:
)) ùoiellt vérifiés far les lIlformauons ''lu d avolt ,vues; or!
".donna par fan Arrêt que la Dame de Mailly ferait
)l féquefirée ell la maifon &
près. la p.erfonne de Ma~
" dame la Duchelfe de Longueville ; . que le fieur de
) Mailly lui donneroit 600 liv. de. penlion, & qu'il
» n 'aurore autre liberté que celle de la vijiter.
,
La Dame de Mailly avoit , prouvé par les informa~
tions les févlces dont eHe fe plaignoit? -elle fut fequef.
trée. Elle avoit .pere & mere; fon man ne foupçonnoit
pas qu'elle fût obfédée : & cependant, elle fu~ féq~eflrée
en ma1fon tierce; ' elle fut 'mlfe aupl'es cl une PrlOcefi"e
d.e la maifon royale' , fi recoanue de Joute li France, dit
Le Maiftre, pour 'être par fa vertu. l' om~m e~ t de fon fex(.
Cepelldant 'le . mari ' dont les féN'lCeS etolent prouvés,
.eût la liberté de la vruter dans cette mmon. Et l'on
_v(}udroü que ma, femme fût ' Iaiifée dalJs untel état qu'il
~Jle me fût pas poffible de la . .voir! Le mari qui avait
-abufé de fes droits, eut celui de [e , fàire entendre de
,fa femme; on lui Iaiffa le pouvoir & les moyens de
lI'appel1er., de r.eve~ller fa tendretfe. Et l'onI?e ~efufe:
-roit à moi ce droit, ~e moyen, ce pouvOlr! a mOl
Icontre -qui on ne prouv:e rien, ,contre qui on n'allé gue
rien!
'
Car qu'eR-oe q.ue cette locution fi légere, fi cruélle;
·fi' coupable, fi calomnieufe~ dont on a chargé la R.equêt,e
:de- ma femme? Sans parfer de jévices. €! de mauvais t,at- :
-tetneos dpl!J Madame de Mirabeau peut ft plaindr~. Quoi!
vous intentez un procès en féparation, [ans parler ,de fé-vices &..de mauv.ais traitemens ! Quoi! 'vous les indiquez,
&. vous n'en parlez pas! Quoi! vous lan.cez [ur un homme
-le {Q)upçom d'une lâcheté .telle -que des Iévices & de mau'v ,ais 1rai'emens , envers d'a compagne, envers la mere ile
)l
J:5'
fOrl -6ti, st vans ; fie ' dàigoe~ pas
l'a;pr(}r~ndù
? Vous ma:
fiuppofez apparemmeO't fi c.oupa!Jle, que ce délit n'ajoute
rien à mes attelUars ~ .
'
Mais ftW qUI nerombe cetre inj1.lrieu[e rét:Ï:<.lence,. quand
deux joms après celui où vous voes l'êtes permife, trente,
QÏnq lettres paroiifem " dont chaque ligne '\lo~ nomme
4i:alomnia-teur r .... Dieu j\lfle r auquel .00' m'2Clcufe de'
flÇ • pas. croire". comme .fi tout. aU,tre q~'un aveugle 'pouVOit lller la r,uLàn [ubhme. qUJ prefide a la Nature r Dieu
jufte! à qu.oi tient la réputation d'un homme !' Il Y a huit
mois que je ne potfédoi-s pas une de ces lettres. En{evelies
flans des papiers mille: fois abandonnés. dams. mes courres
infortunées, la vigilance fidelle d'un ami me les a conftrvées. C'efi: après huit années de malheur & d'oubli que
je les retrouve. Et fi je ne les euffe' pas rapportées, il
me falloit ployer la tête fous le poids d''une invincible
calomnie. Une Ville, une Pt:ovince entÏere l'eût.répétée,
l'eût accréditée! Les intéreifés à perfuader les bruits. inju.rieux, ardents à les répandre, en font prefque toujours
-les auteltrs; n'importe: ils triomphoient, St moi je fuyais
ma patrie, mes amis ,. ma famille ~ je fliyois . les regardl
des vivans . • • • . Mais calmons~nous" car ils empoiforr.l'lent jufqulà ma fenfibilité la plus jufie. H eft difficile d'ex...
pofer froidement des fentimens qui déchirent l'ame j cependant la ch<tleur nuit, dit-on, à la vérité; difons d"nc.
la vérité toute nue.
. Si nous parcourons encore le recueil des difièntions.
tlomeftiques &' civiles, nous verrons dans ces mêmes Plaidoyers de Le Maiftre, une autre femme, qui,. fe ptaignant PI.idoy.w
de févices, & foutenue par fon pere chez qui elle s'était, Vlll.
1!éfugiée, fut condamnée à· retourner fans delai auprès de:
fon mari qui la: réclamoit. Et peut.êtl'e il ne [er:a pas inu.tile de répéter ici· un patfage de l'Ecr,iture , vraiment ,remarquable, que Le Maifire, fuivant -J.'efprit du temps."
mais: plus .ençOl'e par · fexceUenw de l'à-propo~, cite à:
"
"'
~
E, Il
..
�36
.cette occaûon. Je vais le rapporter,' Be. ~e ln'abfiiendrai
d le traduire. Fuit quidam Vlr LevItes qUI acc~fll Uxomn
d: B eth.lu m Juda: quœ reliquit eum ft reverfa efllll do mum
•
Judi" 11 · 1.
, J.
,Amh. 1• 6 .
c, H ·
, ' fi ' , Beth/eem
manÎztaue apud eum quatuor menf/hus.
patres Ul ln
''J'' 1
'f' ' .
J"
s.r:
./1
eam vir fuus volens reconCI larl el, atque Man.
ecutuJ que 1)'
J"
.
ft ' d. ' ,
diri ft fecum reducue; qute JuJcqnt eu,",
~ntro uxu li! do.
,
fiul'
Quad
dm
audifTèt
Jocu,
9
vi.
mum patres.
.
'.li '
, us , eumaue
1
diffa occurrù llftus, ft amplexatus eJl h.omzne'}7. A quoi le
, aJoute : OCCUNÙ
P ere d e l'Eglife qui commente dce paifage
'
fi
l'
'/ ' ,
pro Ort'hus j acu , generum, intro uxu,
'
.lUm
r. reéonCl lavu;' &
ut lœciores dimiueret, trtduo tenult, qua)1 reparare,t nupuas.
fi
Les temps, les mœurs &. jufqu'à la morale font hie Il
changés!
li'J. d d'fr
Des Dotteurs étrangers fe font propo t:S es Imcultés
fur la queftion que nous agitons •. S~r une . deman~e en ré.
atl' on la féqueftration provlfolre dOIt· elle etre or.
p' a
r,
,
d d'apres
, 1a nature des
d néè ? Ils diftinguent d ahor
on
. ils diftinguent ~n liulte
' d'
'1".age .d es fiemmes
moyens;
, apres
Dt, L uu, Jt maltraitées par leurs mans. ~t dlfent : Cum, ag~cur de mu.
mar,,"'.""to • l '
' /veni in auâ urpoeat pertcufum h.oneJlatls vtdendo extra
fpcnf·l .bus (9'
u re JI
,.
1
0
l . fi 1
l' d
Ii '!;orti• • Rift,
X I , ,. .. '
Tom. ~. 1. 1,
tit.
Il,
,b. 1.
Mmum VIn. • ••• Low honœflœ matronœ egr. . 0 el . a IqUO
monaflerium : Et C!lm agatur . de multer~ p'rol<eBce. œtau~ , pro.
Jencer de mandato fequeJlro zn g enere ~/üus foc«,s remijJ~s eft
ar6ùrio judicis. De forte que ces fophlftes fubtl.ls ne lal{fen~
eux· mêmes à une jeune femme no~ maltralt~e, . &. qUl
cependant demande à être féparée , cl autre habItation que
celle de fon mari ou celle du Couvent.
Les Jurifconfultes y font unanimes. Il n'y a lie:r à, la
féqueftration que lorfq~e. les d~ngers de la cohabItatlO~
font évidens' c'eft l'oplmon umverfelle: &. cela fut attelle
• rayport é ~ar
par Mrs. les, Gens du Ro.i !ors. de 1'A rret.
Boniface. » C'ell auffi, dlfolent·Ils, ce qUI a donné heu
» à tant d'Arrêts qui ont établi cette Jurifprudence tri.
l '
cl 1 fi
e
» viale au Palais, que la premlere
p aInte e a emm
» n'eft jamais écouté.e , & qu'elle. eft ~oujours ,con4~mné~
<J
,'
~7
» à retourner avec fon mari, avec injonaion à lui de
~) la traiter maritalement; &.à moins de récidive, la
t, féparation .n'eft jamais ordonnée.
Celle qu'on demande provifoirement pour Madame de
Mirabeau ne fauroit l'être, pari:e qu'il n'y a point de.
preuve de févices, parce qu'il n'en eft pas quefiion
parce qu'il ne peut en être quellion, parce que l'in~
vraifemblance même de la fuppofition, en feroit rejetter
la preuve fi elle etoit demandée. Ainfi fut jugé dans le
proces de la Dame Rapaly , plaidé par Cochin. Ainfi fut
jugé le premier février 1745 par Arrêt rapporté dans De.
nifan. Ainfi fut jugé le 4 mai 1750 contre la Dame de
Melun, qui articuloit des faits de févices. Ainfi fut jugé
le 7 avril 1756 en la Grand Chambre du Parlement de
Paris, Contre la Comteife de Montboiffier·Canillac. On
le jugea de même enfin le 4 feptembre 1768 contre la
Dame de Falé.
Ma caufe eft fans' doute infiniment plus favorable que
celles des pro ces en , féparation provifoire dont j'ai rap-=
porté les décifions. Non ' feulement il n'y a point de
preuve de févices; non feulement on ne PARLE PAS d'un
tel moyen, quoiqu'on ait l'indicible méchanceté de déclarer qu'on en pourrait parler; non feulement on n'en
parle pas; mais la fuppofition ·même eft inadmiffible.
Ce n'eft pas, gardez-vous de le çroire , M ESSIEURS,.
que je prétende exciper d'une fin de non recevoir ré.
fultante d'une réconcili;ltion. Ce moyen, tout puiifant fur
l'efprit des Juges inviolablement attachés à la regle, eft
au-de/l'ous de mon carattere moral. Je n'en ai pas betoin.
Ce n'eft pas fous cet afpeél: que je vous ai préfenté- ,
MESSIEURS, les lettres touchantes de Madame de Mira.
beau. J'ai voulu vous démontrer, j'ai voulu démontrer
au public (&. véritablemenl la preuve étoit fa cile),
qu'il étoit impoŒble de fuppofer que notre habitation
eût été .orageufe. J 'ai voulu démontrer qu'une leJtre ,
�38
fb't:tnt teHre~ jalbUre,~ Be par conféquent ~iélée ~requ\\>
tltke{fail'e-ment. par 1 aluour ~ fu,c la p re I1?Jel'e., l ,unIqueca.utë de nos di.ffentiol18 ; qu 11 11 Y en em j'amals d autre;
~ qu'uh' regard' n<HIS eût rendus à notre te.ndretr'e, . il
I;!otre ~ol1fiançe lliluw.eIJe.
'. .
Aü refie , la néceillté de , la coh~bl~atlOn' penda~t l'in[-I1è
ftli~ pour etouifel' des le pnnclpe_ un pro ces .clont
ta e,.
. r'
fi
. ne PQuvez qu~ génHt , J'Olf pour coq arer par cette.
;~suv'e la v'ol<>l1té 8< la ~ifl~o!itiol1 rédie des deux ~po.ux j;
la néceffité <te ht &ohabl'tatlon eft tell~m.ent de, prlnC.lpe ,.
'Ille- l'exception pour le fe ul cas des fevlces, n ell venue
'lue du te1.âckemeflt de. n0S mœ~rs. On. ne la t.rouve;
. (';uj.J.d CA.p- daus aucun des J utifcollfult~s anclen~. .CuJas e~~m~ne . en·
liltms de reJht_ ...lus d'un endroit la queftlOn pro;vJfolre. » S II s agit "
[p,I •• t. &.d r
d- éud
' ..,. o~ . que. rund es
",p. '- , in lit, » dit·il, de la. vala lt
m.anage
f,"d .. " nihil " deux époux en demande la dJ·f [olutlon ,:i1s dOIvent ~tre:
m"''lJ.<t,
» féparés. S'il ne s'a ?i~ ~De de fufpe?dre la ~oliablta •.
".. tion ,. attendu 'li!s fevlces ,: les deux epoux dOIvent ha,·
» bite.r enfemhle pendant procès.
.
Le Barreau. de cette Vi-lle n'lm doutOit pas du temps,
de feu Me. ' Julien , ' dans les notes manufcrites duqud
_ ' aous trouvons ptécifément la même déeiGo~. Il ~emande ::
\C, Marrimo- dn, lite p6ndente, juper di1Jolulionem m.al~lmonll, ddeqnt·
nium 4" ~ B. conju<Yu /zmul cohabùare ? Non debent, dte-ll , . ut , Ille pen4Ifnle.~. nlh'il innOV8LUrr•. SEl:J SI AGATUR TANTUM DE SIE·
YITIA, DEBE N T
•
COHABITARII.
-
. '
.
- De forte que dans la, rigueur dès prirte~pes, e~vi~agés,
dans leur relation avec les. mœurs" adoptes par 1 UI1lver·
filEté des Jurifconfultes. anciens, & par ceux-même d~
c;e Pàys, tine demaride en fépàratiOll> pout fé~ices n'e~·
pêcheroit- pas la cohabitation, pend~nt ~é prbces. On VOlt
il quel IUJSe ' de 0chefi'es · & d,a1:ltontés Je renOBce;
,
Je ne croirai pas aifément que· des. tnénagemens puiflent porter -les Magifirats à permettre ","o,nue lou·te regle. "
la. ftEaration provifoir.e...
.
•
.
~9
..,., L~ premier objet. d~ LégifIateur ; dépolitaire de foit
" -efpnt?- co~p:gne lllfep~ra~le de ,la Loi; l'équité, ne
peut JamaIs etr: cont:a~re a la LOI même. Tout ce qu:i
- t) b!effe ' cet·te équité, verttable fource de toutes les Loix'
" ne. réGfie pas .mo,~ns ,à .l~ Juftice. Le Légillateur l'au~
}) rolt con9amne, SIl 1 avoit pu préVQir; & fi le Magif:.
-.) trat, qUi eft la. ~oi viv~nte, peut fuppléer alors a\1
)) fiIence de la 'LOI morte ', ce n'eft pas pour combattre
» la. regle, c'eR au contraire pour l'accompli, plus par.:'
) faltement. "
_
Ces par~ les aogu.fles , proférées' par le premier Magit.
-trat de ce fiec1e, VIvent fans doute au cœur de tous lis '
.
·Juges_
~a!s ~,nfin quel qu~ foit l'o:ac1e q~e la :Tufiice va retÎd~e ICI, 1 en re~peaeral .l~s motIfs; ~ J élaguerai une foule
~ exemples ~Ul n~ f~rOlent m~iritenant que des. répétitions
fu~~rflues. en al ?It alTez. > J'en ai trop dit peut - être , _
qu 11 me -[Olt permIs feulement de chercher en fiQilTant
~omment , fi la féparation 'p rovifoire pouvoit être oi~
'"<fonnée, elle devroit l'être.
' "
, Dans cette fup~ofit·ion même, elle deyroit l'êtte en ref'pe6tanr mes drOl.ts. Elle dev~oit ,l'être de maniere gU'e
ma .f emme n~ ~t, 'pas foufir~llte .a la . puilTance .de fon
'man. Elle àevr01t 1 etre de, mal'1iere à ~ donner les moyeqs
d~ rappeller m~1l époufe a [es premIers devoirs, à [es inclInations. premIeres. Cette réparation provifoire devroit
' fur-tout etre ordonnée, en garantiifant Madame ' de MIrab~au. des obfeffions qui captivent [a volonté. El'le devr,01t etre ordonn.ée" en me donnant tous les moyens de
'm alTurer par m<!l-meme ·decette volonté. C'eft aux pieds
' des 'Autels que ;Je reçu~ [a foi: c'eft aux pjeds des Aùte~s q~~ l~s Iilufions qUI la tro.ublent , peuvent fe diffiper.
. Là delIvree dl:! ·totlrbiHon nui l'entraîne Be dont on s' eff,
d"
4
,
·orce· ,augmenter '!'~gitation;. là rendue à elle· même, fqn
cœur 'volera 'vers,J époux que Ion. cœur a choiG. , Là mes
t)
!
D'AguelT'oaa..
�J
4°
fOins
mes attentions, mes gémiffemens fur le {entiment
,Cfùel' qui lui feroit préférer un tel aCyle à la cO,uche nup_
:tiale , aurônt bientôt Céduit .fan1 ame
Jenfible •&. tendre.
r
,
'Eh! que redoute-t-~n de mal,. onqu on veut a tout prix,
:m'éloigner d'eHe! C ~fi la v~nté de ~on accen~, de mon
langage, <eft l'énergie que. Je félur?,~s d?nlle~ a J?a mo'dération même' c'eft l'émotion' que J lIlfplrerOls facllemen-t
là' ma femme :11" lui parla\1t' d'elle, comme j'aimai tau.
jours à en p~!le! ~ ce' f?nt !OUS ces fe~tin:ens que, je raI.
lumerois dans le cœur dune époufe qUI mIeux ~u une aU:'
tre ' connaît mon cœur, quoiqu 'il ne lui fait pas m~me pero
mis de t'avouer. Et c'efi là, MESS,IE~.RS, ce qui m'adjug~
'mes fin's proviCôires en cette cauCe, que nous voudrio!1s tou,S
'Voir étouffer dans de mutuels 'embralfemens. Malheur à
qui ne defire ' pas que Madame de ~irab~au ai,t tort, év~.
demment tort au proces, ou du mOl11S qu on ait tort pour
elle! car ie ne cerrerai jamais de l'en écarter. Malheur à
qui pénétré de cet eCpoir, qu'un fi tr!fte débat n'a com:mencé que parce qu'on ~'a pas perm!s .aux d~Hx .époux
de fe voir &. de s'entendre, ne deyre pas que Je fOlS au/lî
{avant dan5 la magie de pla.ire, que mon aimable Emilie
' l'écrivait aùtrefois, &. qu'elle fuccQmpe aux doux efforts
(le cette magie t
,
Mais pourquoi préféré-je un Couvent à, la maiCon de
{on pe·re '{
,
, Moi je ne prefere den, je ne deman.de rien que ~
regle~ Je demande que ma femme me fOlt rendue. MaiS
, fi 'le's Juges ne. cmient pas devoir ' l'ordonner ~ s'ils trou·
ven-t quelque obfiaëIe à la 'coha~itation ~ je dis, Q.ll
plutôt ua célehre Av,?cat Général dit av~c moi,. que fa
r
--
1
ml!ifon d'où ta.' paix do.me(liCfue $' é./oign'e.,. doit être u~e
maifon de deuil. Je n'ai pas le _dro-Ït d?exiger q.ue eeH,:
de mon pere, àdoptif en foit attrifiée. Je ne faurois lUI
demander qu'il renonce pOI!r moi à fes amis, à leur
focié.tê,- il leurs plaifirs q~e tr~l? lonK - temps peut- ê.,t~:
,. .
.
,
Jal
_
4r·
rai fufpendus. Mais j'obferve avec regret ' avec {yn-cf _
l'elfe, qu'il eil de mon intérêt, q\:l'il efi {ur-tout de cel~î
d,e ma femme .ql:l'elle ~e' {oit point di,firaite dans une
·E:lrconfiance. qU1 va déCider du bonheur de notre vie. Il
.efi de not!e plus grand intérêt; il ea de la déeence que
dans cer mfianr elle foit fel!lle avec elle-meAme Il r.
, Il
.I r d
'
.
laut
~u e· e, pUllle .,e~cen~re ait fônd de {on propre cœur, de
c:e cœur que Jal pns po~r Juge . . N'admettez plus, MESSIEURS, entre .elle 8( mOi que le Ciel qui' l'eçlH {es fer.
mens &. fIes mIens,.
~. voix s'épuife "je rav,o ue; 8( je vous ai trop
fatlg~, ,MESSIEURS: ~. ~oil11el:lr &. la caufe appe1l0ient
d~~ , dét~t!s .•• .' . les lI?~ra~s!: .. combien ne leur' en
al-J~ pOInt épargné:. MalS' Jamais, non jamais je ne porteraI à- des ennemiS fi chers des COHP!; que a .
Ir
' I r 'bl' Jr.
'
•
m
VIV~ _
ten d~eue n ,a l i 0 ,1 . ll~e pas. ,SI Je voU§ l'acontois, MES:"
SIEl:1~S., fi Je .vous raC~ntol,S, même , avec la ptus grande
fImph~tté ,_ fi Je deffinol's fans ra moindre enluminure le
_!a~le~w êtes p~o~édés, ~galè!TIent inouis &. i.njurieux dont
J~ [UIS pourflHvl depUiS fix mo:is; VOUS eroiriez que " .
'dfi
li'
d d e'l'HS atroces Madame de Mirabeau J31
· 1 pen ~ par es
de
!<>ute. déférefu;;e-, de 'tOIH égard" de tOlHe p01iteire (fi
}a~aIS ~n~ femm~ peut en être di~pe,nfée envers fan mari);
ou q~e. Ces comelIs font frapés cl aveuglement. Les 'lettres
que.1 al. re?du~s pUbli,ques, &. dont chaq·ue ligne attefiê
ma conduIte a Con egard, ent aifez ' manifefté ce que
tou~ homme q~i a ~uelque candeur dans l'ame 8( quelque
loglq~e dans 1 eCpne '. peut &. doit penCer de notre union ~
~~l!es ont airez mamfe~é que la hauteur qu,'on a tour'~ur's affeétée avec mOl, ' &. qu'on' a couronnée par l'in-,
:J~re ,d,e me renvoye~ m,es lettres, fans les Iailfer parve,ll1r a mon épouCe; etait deftinée à cbuvrir le vuide de
moyens, &. de raifons, &. fur· tout il denner il entendre ,au PU~I,lC J 9~'o~, lui , cachait d~s ,feerets ,effroyables qu~;
:là fciulc ,g",nëroÛte de mes, adverfalres m'epargnoit•.
F
•
�~lent
\.
Tls .circulo
nd;!~
ces Cecrets; Sc.
'Me
~~
~l1ii ,pour des Avo~ats que çelui de- la toi l , ~ec.onIlÔw.
voIci il
et pe der enfin qu'on les dévoile. C'eO:
deman -c'eft avec une ame ln
our
'd'19n ée "1R..
S
MEsslEUl\ , P
d'wle voix ~e Sten.,tor, élevera mon génie, que j'llppel14;
'
qUI peut-etre
br ul ante,
1 niateurs. • • • •
.
dans la lice les ca do.rn ,
répétoit jufqu'à 1'0utrag~ lej
, Mais, non .. Tan, 15 ~u o:u cabalait po~r reculi!r la clé.
refus les plus 11lfle2Uble , 'interdire ma défenfe RatUi\ell~
mande judiciaire, podur, m as "U}' ourd'hui, MES~J.EURS.
tn'en~en nez oP
,.
.
St VOUS ne_
J eS vulgaires ) ~ po~ .e~gager rn~
fi j'eu{fe trouvé des ug i0~S pour Pleure le QtfQrdre
famille à lop~e(<< ~~tl~:aires ': p 0 1J1' me qécoura.ger.
dans mes affatres P
'ôter de? d~(e!1feprs •..•. Et
Cilur ·me c\é%ol1ter, PdP\l\ ~r<>s décéloiem-t lWOi crai~tes~
P
, G
mei a vertatavo~
'"
. Ma~ame
.J
d M'
c'efi am
1 que .
f<ilrcé
, e, . uant
Fln dfet , vameme ~o~ ava~t mêm~ que ie r~u:ff~
bealll. à oonfu1.tel cont(.(:n ' me prGd.i.guoit l~s hoftiH~és le~
t'écl~mée.; 'vamemeDt (}
DE MIRAB~AU . CON-SULTE •
. déc uifées' MADAME
. 1E
AN"
malUS . g.
. fficielilx -donneurs d'aVIS;. 1#-E '" ~Y. "
Tepondols-}e aUX 0
. BIEN A PLAIN.p.RE. rPOOR <MOI
r
."
•
ELL·
E
EST
r. .
J e me
"t'
JJN PB:oc.J O.'Q'
E NE ,CO~SUL TE; PAS.
OlS
Q-VI N'EN Al _POINT ~é 1 ~ muette ,fi l',on 'peut padet
~nferm.é dans c:et:te r pon e
'). .. '
<-
ainG. . , mes ge~s ni m0n écriture ~
Le jOl:lr , où ni, mOl t >1)1 M le Ma'rquis de l\îladgnane
1
enetl1er cuez .
'
. '.J'
peuvent P us -p . ~ . ' f, ێ de recourir ~u~ MOteS , JUJ;'l~
ar,rive ,enfin: Sc. ~e UlsA'Or cais alors &. je ,m'applaudirrQls.;
ciaires. I.e ch~réhe des dVP , n ~voi; cherché q.u'al(m. J\:
.
,
lau1ils encore e n e
J"
d
J
~e ~m app d .d C0nfeils au bien petit nOt!1pre .e ~!ll
"'aiS deman er es.
'. ·.de· ett~r les I)'e\llt ,p"-lfq}le 11
e
fur quHe:JJl croy.o~ ~m~au )ne les avoir pCis ·çQnfultés •
famille de Madame e Ir furent fans autlies ~aifoR~ , fans
l'luGeurs d~nt:r'~uX m.~ re ·
~F; ,s '..t:llfGAG,f;R PA'~S u~
,tlt~ motif~ que LA CRAlN;:J;'E,·
~t' .\lR-E <DE PARl';" .
' . , , t:'1l :1 d. 1.W \iO ;~\lt~
\Jne. .affltiJI-e- ~~ l.PMt~ . .p}i!,1) :J).~I;l.. ""'J'~ l 0,
'
<
•
'fent-Hs .uo autr,e Empite?- Une affaire de p.a.rtU Et.,qu'à
$Io.nc Qette lOoble pro{effion ,.qe plus. fa:cré, 'Ique de (lOI]llo
battre ce. monfue aux cent Noi(lt, qui Dourû d'illufions:
~ menfonges .tX. de .ç alomnies, me v(j)mit qu'iüWi0ns, .ca·
", 1
•
:., T
iomaies ~&. menfonges?
·,une >aff«ire de parti! oui, [ans doute, mpo qncqcès, ed
ell Wle, ,(!JU ' clu moins il i d.~1vrpit ,ea, êtrct iU.e.; b r- tous
les honnêtes 1gens, tous .cel>liX 'liJ:l.Ii aoient J'ordre ,publie
jntéreifé aux bonnes mœurs, -& taus ,les .citoyens jntdreffé~
il l'.ordre public, doivent trembler · p,our les .engagemem
que l'on contraéte au fieele, où la feule convenance Iilf
l~égoïfme ,; où 1a fe:ule rép.ugnance ·vraie ou f~, seiJ at ..
'eltée pac autant de témoins .cufpe~s, (bÙJ dc:;s scule arme)
:d'un ,abful'de rerfIflage, au d'lun IDon run pnéteqdu" 'ilà
aoit dominer dans les ceroles, parce «qu' oh Jtft · atru
pufiIlanime pour ,en redouter les ,r idicules v.engeauces ~
peuveut donrner >créance à ,des bruits ilJjurieu,x, 11'&5 di&
famations atroces, il des' caLQI~mies ahfw;Ms, peu.v.ell élever, fouteuir , màintenlr ,.prCi>wnger, étenlÎCer le l'lus .tcall.
<ialeux, le plus défefpét:é des-Froces, en tràmpant -les f?ir
hies, en recondant ~es méchaas, A gla\lant la voi.x dans
ies bouches honnêtes, mals pufillanio;tes, & roLl}OUrserochaînées par des clameurs qui étourdiifen,t les .-hommes fri,
!Voles & p21Ïfwle~ ', & mettent 'en méfiance jufqn:aux rages.
Sans doute un tel ordre de cho[es devroit effl!ayer taus
nos concitoy.ens, &. je pournris les fu,pplier au nom : deI>
Loix, au nom de la Jullice,..at;! nom ,de -le:urs iatét:êts,
;& d'eux-même, .d'ou'V.r ir les y:(WX, de _voir dans mes PfQ,
cédés un ami, de la paÏtx, & .daas ·ma .caufe, ,èelié de .tbuœs
'~- .\
les familles.
'
Oui., . MESSIEURS, c'~ft 'une choIe éié,p-Ioiable & .:N'J 'mi'
,ment <honteufe pOIll' le .fie cie , pour la ' Nation, .poûr -loes
manda-t aites de .l'autorité , pour les Ma~ÏJfi[ats, que ~t:$
:fortes d'arra.li!g~men$ qui mfllltent aux àoix:, .aux mœurs '1
--
--•
�~4
.
~ larre:ligion '" r la mora'le, & au moyen d'efquels ' unI!
:fdIDme vit dans' le monde libre , indépendante ', ne te:
DaOn plus::> LfQl1 mari,que . p<1rI .fOIl nom, & trop fouvent
paT fe riaicule ou la honte do~t el'Ie le couvre.
. l\1ais malht:~r à l'épDu~, qUl dégotité de cette phil o~
fophie fi commode, mais fi funeHe , & , par eonféql!lent
fi. cOupable par r t-errdieffe pou'r fa femme, ou "par une
roule- rde fentiml:!ns. &. de principes ' honnêtes! Malheur à
lui s'ij fe ndiuœ a " I\:es i compotitions, amiables! Rien ne
peut le' inetrre à:couvert+d'une demande en ' féparation .
&. cette'. demande' trouvel'a de la faveur, n'en douton;
Fas~
~.
J
!
;-UJîe ~ remme· jlltèreffan~e par elle·même,J plus intéreli
filnte e11èotlè <par. Fapp.arence . de Finfonuue .qu'on fait lui
iiol1ner , . ~alq rfllll'lJlir, .Je Royaume de fes plaintes. Elle
fédllira~ ~'abord le cel'cle ' qui lienvironno; fes parens, fes
amis, ' [es' connoiJTances fen:>nt entraînées. & deviendront
les , échos de. fes'l plaintes, ~Un mande .entier qui n1a,pro.
fondit ',rien, t dGfltl. la ... malignité ne l v.e ut l~ plus [auvent
trouver' gue des ' torts, n'éco,ut~r · qn:e . de:s anecdotes ., ne
,répéter que. des épi~ramm.es:; fera -'d:un ' procès. en féparation ', une affaire de- pani; & les plus fages, 'les plus
-équitables. des Magifirats ,. ver.ront la balance trébucher
.dans: leurs mains.,
' J
,
. ' L'intérêt .dei la morale, & des mœNrs ,~ celui même de
ce fae. fi féàuifarit, mais q.tIe. na.us avons :rendu fi foible ;, fon intérêt, dis-je., car toute fociété a befoin d'un
chef; le rerpet! dû au plus augufie àes . C€lntrats-, à l'eIl;
gagement;,Iur lequel repo[e la_ faciété enriere.; les· fuites
,Ul:ribles de- la ( profanation de . ce, liefl\ facrt~ ~ }:'Ol;dre ' public en un mot, ce motif fublime devant qui to uS les
.à atres, fe ' iâifent ,. iIl'voq'uent . à : grands !>ris la rlÎgueur des
maximes en ' matieie de fépar.ation .. Et- s'il eil tr.op vrai"
comme· une foule de· divorces, fans divorce l~ariefie, que
Je.s Tribu.naux..Ùn : font, f.ouY..ent. r.élâchés ;~ ie. .me. trouve
.
heureux
.
45
heureux de pouvoir ta'ns imprudencé le dire devant voûs '
& vouS in~iter l,ar cda même à plus de févérité. O~
attend, de . voo~ ~e gra'nds exeinples; MESSIEURS;
MaiS que dis-Je? Il ne filUroit être qùetHbn iti de fé~
vérité. Il ne s'agit qùe de bienfaifance. Madame de Mi~
tabeau n'a: pas cëffé 6'0 infiant d'être l'épou[e de l'non
c.œur; el!e n'a pas ceifé un infiant de délirer d'én réal~~er le tltre. ~our être, heu,r,etJfe 1 elle. n'a qu'à vouloir
1 etre, ou plutot elle n a qu a fe reifembfér & prévenir
,v otre 1ug.ement, ou lui obéir.
,
Signé, HONORÉ· GABRIEL DE iUQUETI '
COMTE DE MIRABEAU, fils.
'
JAUBERT i Avocat.
SICA RD , Protureur..
,
A A 1 X, chez Jo SEP H
DA VI D ,
Imprimeur ~
, ' .' . Ro'1.
;~
17 8 3.
'.:
�MÉMOIRE
A
CONSULTER
ET CONSULTATION
LA
Dame de Mirabeau vivoit depuis plutleurs
années dans la maifon paternelle, & "elle y vivoit'
féparée de fon mari.
Un jugement domefiique, bien motivé, prononcé par les peres refpeB:ifs des deux époux 1
juges naturels de leurs enfans , avoit détt';rminé
cette féparation , devenue néceflàire.
Mr. le Comte de Mirabeau qui devoit refpecter ce jugement auquel il avoit lui-même fouf'rit t
er
a pré[enté le 1 • du préfent moi~ de Mars , une_~
R
~ .<,t~~..,..._
equete a M
r. IeL 'lel,ltenant en l a S"enechaUp:":~::
)~dR.;tl
A
\
A
.
•
" .: !<. !:J!~ 1 r.~';.~·
�. 2
i1le d'Aix, pour qu'injonéHon (oit faite
de cette v d M' beau de Je rendre aupres de
à la Dame ,e, lra & d'y demeu ,.er en fan état
lui dans tro,ls l JOu~s . e par lui de la traiter mad'Epoujè '~OM~EîL A TOUJOURS FAIT.
riralement,
t le font pas rafiùrans.
Ces derlllers ma ~ 1
d' bord témoigné
Dame
de
MIrabeau
a
a
, '
La
'ntraire
co
, toute fa furpnfe.
cl ans une Requete
l
u' porté par les deux f:at111'Ues.
Elle a réclame, le ~~fi qu'eUe avoit de prévenir
Elle a marque e e lt
1
0
un éclat.
de Mirabeau, qui pouvait mieux
Mr. le Comte
, ndu que le vœu
'cier ces ménage mens , a repo
,
'
fi 'Il ne pouvait opérer la feparatLOTJ.
appre
de deux ~ml es
e la Dame de Mirabeau ne
de deux ~poux ; qu
u candis qu'elle 'avait
ce vœ ,
deVOlt po 1I1t alterif1. er
,r; r' lettres de Îon beau-pere
, mment p uJleu
~
J',
'
ref.u receifift
t le plus VIif defir d'une rellmon;
,
d"
qw manz e Olen
d'
' ement imputer a ma eratLOn
que l'on ~ou, ~~11t, val~ r.gnihante de nulle valeur,
'r;,
d
Requele znJo lte ,lnJl, 'J"
.&
uneune l emeur <lU! n erf1. précliflément que dl, elle e
moyens & même de pretextes.
, l
La Dame de Mirabeau . a cédé poour lors a a
"fl 'ffité de pourfuivre fes drOIts & fes act~'1 e nece fil'ce en témoignant qu~elle eut bien
tlOns en J u ,
,
d 'l & de
défiré de poul/air s'abftemr, de tout etaz T
.
cl
n>eAtre pas forcée à s'txpllquer.
U
d'
ct
une'
er.
» PluCteurs nufons, a-t-e e lt ans r
de
» niere Requête , empêchent la Supp lante
» confentÎ:r à une réUnIon.
o
0
0
,
1
l
'
0
J
»
La premiere de ces raifons eit l'état aaueI
de Mr. le Comte de Mirabeau, qui fe trouve
au Civil fous une interdiélion de biens, & qui
d'autre part
, a elIùyé des procédures qui ne font
pas purgees.
» En fecond lieu, la Suppliante a perfonnel» lement à fe plaindre de plu fie urs faits , dont
» la plûpart ont donné lieu à ces procédures ,
» & qui dégénérent en injures graves wntr'elle,
. » & en abdication publique, de la part de Mr.
» le Comte de Mirabeau, de fa qualité d'Epoux.
» En troiiieme lieu, Mr. le Comte de Mira» beau, s'dl: rendu coupable à l'égard de la
» Suppliante d'une diffamation cruelle, confiatée
» par des Mémoires imprimés & par des lettres
» écrites à des hommes en place.
» En quatrieme lieu, fans parler des févices
» & des mauvais traitemens dont la Suppliante
» peut fe plaindre , Mr. le Comte de Mirabeau
» s'efi permis contr'elle des excès qui [ont conf» tatés par écrit, & qui avoient principalement
» déterminé le jugement domefiique en fépara» tIOn.
» Dans ces circonfiances, la Suppliante attend
. » de l'équité des Tribunaux, la même jufiice
" qui n'a pu lui être refufée par la propre fa) mille de M. le Comte de Mirabeau.
Cet .expofé eH terminé par des fins en fépa ..
ration.
Après la fignification de cette R equête, M. le
A z.
»
»
»
»
�4
cl M ·Ira b eau a publié des
0 blervatlOns
r.
•
•
lmD
cl
')
C omte e, r. l
"
divenes ettre~' écrites par ,la
ame &e
pnmees ,
d
1 cours des annees 1774
I\1irabeau ~ ans e r. a' une demande en fépa.
,
l'on oppole
177 S, quI'! ,
8
& qui ne peu~ent aVOIr
r3.tion formee el~/ 7ue~ 'que pour précipiter un
été rendues pu lq .
éclat. ' 1 pu bl"lcatIOn de ces lettres & des Ob·
DepUIs
a,
M. le Comte
'
UI l es accom paO"l1ent
b
,
fervat1:)Jls q
demandé que fans prejudzce du.
de MIrabeau ~
, rribucion d'auClIn nouveau
l "
droit des partl,e[s, nI, ar I)'oint à la Dame de Mids l Jfèroze er
, ,
fiIIr le Jf.:on
~
d
'
's
de
lui
dans
crOIS jours,
I r. l'en re aupre
rabeau le Je
(;
t d'époufè à la char{5e
ç d'
demeurer en J on eca
')' ,
'l
t5 Yl ' d l a recevOir
' & trairer manta ement ,
par ,Ul : '
ladite Dame,
retirer dans l!n
Ji mzeux n arme, 'll d'Aix dont les panzes
Couvent de celte VZ, et: . fixi par le Supérieur
' d nt ou qlll J el a .
"
convzen r~ ,
1
ladite Dame demeurera jllfqu a
EccléJiaJhque, o~
"
' l i d'y recevoir les
.
d t/: 'if enjoLnt a e e
J~gement eJ.nw,~ & 'icelui de la enter & frévziJices · de fOn man,
a
, h 'b' ,
&
J'
d
l
d't
tems
avec
Ln
1 rtlons
p
ter pen an! e l ,
,fi. l
qli_n
d'y
mettre
obJ.ac
, e 'ou
défenfes a toute perjonne
l
t ~ . direaement ou indireaemenc, a pezne
empecl1emen
d'en être informé.
.
"
Il a fallu plaider fur ces fins :,r~l1nent, et;A~1
Je
1
1
,
. (;
A
ges, qUI, on t e'te' la matieFe
, , d'un 111cIdent a 1 'dience prêt à receVOIr Jugement. "
'
M l'e Comte de Mirabeau, autonfe lUI-meme
•
'r.
à plaider
fa caufe , a de nouveau prelente
, COIume
A
1
difette de moyens, la modération avec laquelle ,
on pourhlÎt Ul}e inaance malheureufe; · & on an- '
nonce que fa défenfe va être rendue publique
par l'impreiIion.
Il n'ea donc plus poŒble à la Dame de Mirabeau de fe taire fur les caufes qui juaifient
fa demande en féparation. Tout lui impofe la néceŒté de fe défendre; 'elle va expofer les faits
& les preuves. On jugera bientôt fi l'on doit
attribuer à ménagement ou à directe de moyens,
le filence qu'on la force de rompre.
Mlle. de Marignane époufa le 2.2. de Juin 1772. ;
. M. le Comte de Mirabeau.
On peut fixer l'époque des févices & des mauvais traitemells, au moment même du mariage.
Il ne fe pàfiàit pas ' une feule journée qui ne
fut marquée par quelque fcene. Au milieu même
des emprefièmens le plus affeB:ueux, M. de M irabeau avait l'art de faire paître quelque difcuilion qui était ordinairement terminée par des
procédés indignes.
Quelques jours après les nôces, la famille s'était rendue à Marignane. On fut à Berre pour
voir les falins. On retourna le fair. Dans la journée, M. de Mirabeau s'était porté contre un tiers
à des violences dont on fupprime les détails. En
arrivant, il feignit d'être malade. Il annon ça qu'il'
pafièroit la foirée dans fan appartement. La Dame
de Mirabeau l'y fui vit, elle lui fit apporter à fou~,
•
�6
& ' ne te q~it.ta pas. Le repas fut ' ~ient~t
troublé par des lllJures ~ par des mauval~ traltemens. La Dame de Mlrabea~ut trahIe par
fes cris. M. le Marquis de Mangnane, averti
par des Payfans qui avoient accour~ au bruit,
a~pella pluGeurs fois ~a fille, en lUi ordonnal~t
d'ouvrir la porte de l appartement ..M. de M~
l'abeau, à qui la voix d: M. de Mangna~e aV?lt
rendu le faflG' froid, pna fa femme de n en nen
faire, & de ~épondre que ~out fe paflüit e? plaifanterie; La Dame de MIrabeau fe rendIt aux
prieres de [on mari, & diffimula to~t.
Peu de tems après , M. de Mangnane C011duifit les deux époux à Tourves chez M. le Comte
de Valbelle. Il feroit difficile de rappeller tous
les excès que M. de Mirabeau fe permit à cette
époque contre fa femme, & qui font connus de
totis ceux qui habitoient le Château.
Par-tout où les deux époux fe trouvoient, des
tiers étaient témoins de quelques fcenes affligeantes. Lq. Dame de Mirabeau étoit habituellement
expofée à des reproches injurieux, à des coups,
à des outrages, à des foufflers, à des violences
de toute efpece. ,Le tems de fa groflèfiè ne fut
pas même refpe8:é.
Sur ces entrefaites , le dérangement de M. le
Comte de Mirabeau détermina M. le Marquis de
Mirabeau pere, à obtenir un~ lettre de cachet
pour fixer fon fils au Château de Mirabeau. Mais
iilr les plaintes des Agens& des Fermiers ' de 1a
pèÎ',
7
terre, M. le Marqùis de Mirabeau pere delllahda
.une feconde lettre de 'cachet pour transf~rer la
de~neure de fon fils à Manofque. La Dame cl
Mlrab.ea~ qui. n'avait point quitté fan mari pendan~
[on eXIl a MIrabeau , le fuivit dans fa nouvelle
retraite.
M. de ,~irab:au rompit fon exil. Il fut à
Graffe , . ou .11 efluya Urie procédure criminelle &
un premier Jugement qui fubfiite encore.
11 craignait les iùites de cette affaire · il envoya
fa femme à Paris pour les prévenir. '
Les effo~rs de la Dame de Mirabeau n'eurent
aucun fucces.
Mr. de Mirabeau fut enfermé au Château-d'If
par. un ordre du Roi que fan pere follicica &
obtlllt.
C'eit dans cet intervalle que l'on place la Cor.
refp?ndance de la Dame de Mirabeau avec fon
man, correfpond.ance. qui a été rendue publique
avec une affettatlOn Imprudente & plus qu'indifcrete.
M., de Mira~eau pere , qui connoiffoit tous
les fUJets de pla1l1te de la Dame de Mirabeau ne
s'eft pas mépris fur les motifs fages & raifol~]a .
bl~s qui diétoient les lettres de fa belle-fille. Il écri.
VOlt à M. de Marignane à la date du 1 l Oérobre 1774: « Qu'on ait jugé Madame votre
» fille, aveugle fur le compte de fan mari ...... On
) s'eit fottement trompé. J'ai trop d'intérêt à con~) noître lé fond. des chofes pour m'y méprendre.
.,
�-8
) Cette jeune felTInle voit dair ~en toùf & .trèS'.
. « clair, & fi j'avais .quelque Vice à cacher ou
quelque défaut cher à mon amour propre, je
.:: me tiendrais fort ferré devant ell~. Encore un
» coup elle voit tout, & elle a d'ailleurs l'~l~e fi
» fenfible fi délicate & fi noble., que ce qu elle
» ne fçiw:6it voir ni com~iner, faute expérie~c~,
) dIe le fentiroit. Ce n dt donc pomt un matl11
» ébourriŒ:! qui en impoferoit à des organes auŒ
j) fins & à une tête aufii droituriere que l':ft cellel) là·
mais cette jeune femme eft finguheremellt
) at;achée à toute idée du de'i.Pir, & en nous met)) tant à fa place, nouS [entirons que tou~e~ ~es
)) circonftances ont été telles par leur rap1d1te ,
» leur bi[arrerie & leur nature que fans encourir
» de juftes blâmes, qui d'ailleurs coutent fi peu
J) aux fpeélateurs,
elle n~ pouvoi~ faire q~e ce
) qu'elle a fait. Quoique Je n~ lUl. cache nen ~e
» mes deflèins & de mes mottfs, Je ne fç aurols
.» exiger d'elle la même confiance. Mais j'ai plus
» qu'elle près de 40 ans d'expérience & c'eft eL!
» ce aenre un avantage pour qui fçait s'en [ervir.
)} To~tes fois comme fa miffion eft aujourd'hui
n (on re~l objet, c'eft contr'elle-même. qu'il. fa~t
n la fervir, c'eft fur quoi, Monfieur, Il eft mdlfJ) penfable que nous confultions enfemble, puifJ)
que je ne veux ni ne dois agir que de concert
) avec vous.
» Son mari eft fol, vous le fçavez. II eft retomhé
)) dans mes mains au moyen de patience & . ete
» longeurs
?'
'9
» lonpueurs dont :,ous avez"vu les motifs & la ftlite
» & Il eft de .mamere que je fui s derriere l'autorité
» R~yale, q~I ~ en fuppofant que dans les partis
» pns, 1 Opl11IOn d,u tler~ ne me faflè pas grand
») cho~e, comn:e c eft aflez ina mét'h ode, me ga» rantlra. du mOI11S d'importunité. Mon deflèin donc
» ~ft mal11t~nant de l'éprouver tout de bon &
» a ma ~11amere. Il e~ ou il doit être & il Y fera.
) En ftlppo fa nt un mm'}cle & . qu'il fe contint' af» fez pour q~e le Commandant ci la fin réponde
» d~ f~ fage~e & de fa répentance, alors je le
» falrols
dans quelque Citadelle ou' 1'1 . au. , pafler
.
» raIt a vI~re avec. quelqu'un ~ pOur l'éprouver.
» Autre miracle qUl le fit fortir à bien de cett
» fecol~de épreu~e, yen ,tiendrais d'autres prête~
» & al11fi par deg.res~ C ,ea tout ce que je puis
» de nouvelle patIence a fa qualité de mari &
» de pe:e, c'ea l~ tout. Mais [uppo[ant que
» ce qUI fut & qlll ea, fa courfe en fera plus
» abrégée, c'ea un parti pris. Madame votre fille
)J
VO~IS a donné un fils; . j'ai bien réfléchi mes de)J
VOlrs envers elle & envers lui. Mais euffions» nous perdu cet enfant, ma confcience ne fe
)J . repaît ~as de chimeres,
& je ne mettrai pas
» ?eux fOIS entre les mains d'un fol furieux, une
» Jeune perfonne pleine de mérite & toute la for» tune de ma ma~fon. Ce n'ea pas [ur ce point,
) Monfieur, que Je vous demande votre avis. Ou) trè que ma pen[ée ne fçauroit en ceci contraéle.r
» avec la vôtre, c'ea un point fur lequ~l je n'ad-
B
�10
» . me t s pa s d'alternative (i l'ort .ne vouloit
' me..réduire
.
» à ne jamais m'en mêle.r en nen. Mals VOlcll~alll_
» tenant celui filr lequel Je vous demande vos 01 dres.
Il En demandant la clôture de cet .?~mme ~
, lui ôtât toute correfpondance , J al excepte
» qu on .
. , 'r
d'E
~) celle de fa femme, quoI'9 u en ~fl1on
tat,
Il elle fait fupprimée de droIt, maLS pou~ n~ pas
n par~ître trop tranchant:; & pout favoIr .a peu
)) près quelque chofe de l'effet que feraIt filr
» cette tête la prifou de fan honneur, de fa v~nde fes manifefies . & de .tout
1) gean ce ,
, fon, train.
. l
ne
[ais
fi
J"ai
bien
faIt,
malS
Je
preVOIS
e
Je
Il
.
'
,
d'
h
.
ffi
. S
Il ca
fi e ets
, où nouS fenons oblIges a. vier aux
1 notre
de cette corrdipondance. Certal11elnent
Il
'n"
fi 6
Il homme faÎt quelque folie, cett~ lil~e
er~ er» mée comme tout autre. J'en al dep prevenu
» le Commandant , mais avant 'Cela il pourrait
» lui écrire telle chofe qui nouS dérangeat tout.
',) Elle me dit l'autre jour que fi . fan mari lui
» mandait de fe retirer ( &
fws par ailleurs
1) qu'il avoit touché c.ette corde) eUe (e.roi~ obli» gée de [e mettre dans un C~uve~t; .que. ,~ ... &
)1 M .. difaient qu'elle était bIen atfe deJa prl(on de
" fon mari pour être à Paris. Je répond.is à cela
'n que bien fol eft cel<r:â qui prétend -content'er tout
Il le monde & fon pere.
1) Que fan mari étant in reClCId civil & .royal,
» .oell~ n~avoit d'autres confeils & d'autres or dres
Il à fuivre que ceux de Mi". fOll petre; que quand
» à moi, elle ne pouvoit me rien devoir que par
;e
II
Il
»
»
Il
Il
II
»
Il
»
»
))
égard pour f~n ma:i & par tendreffe pour
f~~ fils. !e derournai la converfation , mais je
refolus d~s-lors de . vous en écrire. Je ne crois
pas que pmais enfant ait tant aimé fan pere
qu~eI1e aime le fien. Je fuis perfua,dé que vou;
fenez f~rt faché de la voir à fon âge prendre
un parti auquel elle mettrait enfuite fon han
neur, qui n'dt point fait pour elle, ne [!Jt-c;
que parce que c'eft retrecir une tête dans l'âge
~ la pofition ou il eft le plus nécefIàire de
l etendre....•
.Quelques mois après la . détention de Mr. de
MIrabeau, & le l l Février 1775 , le Cantinier
du Château-d'If, écrivit à la Dame de Mirabeau
la lettre fui vante :
')
»
)1
)1
»
»
»
)1
»
,)
)
Madame,
Il Je n'au~ois jamais cru qu'un projet auffi fcan-daleux qu'mfâme, .concerté d'un commun accord
par Mr. le ~omte de Mirabeau votre époux
& par. mon ~poufe perfide,. eut opéré un jour
ma. rume entlere. En effet ~ Je ne me ferais jamalS perfuadé qu'un homme de probité & pui,["
fan~ exerça à mon égard, fans aucun fujet de
plamt~ , les outr~ges les plus fanglans & la
perfid~~ la plus nOIre pour ternir ma réputation
& qu Il fut capable de fufciter des confeils à
une i.eune femme pour me ravir le peu de bien
qu~ Je pofIëdois , pour enfuÎte m'abandonner
B z,
•
�Il.
I3
enfant de troIS ans , & nous laiifer
» avec
Ut
r.'
L e cl'etaI'1
. , . de rl'en , ainu qu'elle
» Vls-a-vIS
. , a raIt.
.
d
» des faits que je vais aV?lr l honneur e vous
» retracer vous ell conval11cront; & nul Cdoute
» qu ,.111 d'Ignee des démarches de Mr. le . omte
d .
'
& de ma femme,
vou rez
» votre epoux
. . ,vousd·.
rr·
l'r
a'
faire
pU1ur
une
con
.
UlLe
aUIll
» blen concour
.
bl
'horrible
&
me
fiure
rentrer
une
'
» bl a ma e qu
'.
.
.
r.
d e quatre mille hvres qUi formOlent
» lomme
. tout
» mon patrimoine. Vous êtes trop humal11e &
» vous a vez le Cœur trop 110ble pour que vous.
» n'ayiez commi[ératiO.11 d'un pau&vre h~:n1l1e . q~I
» a été imni.olé par l'oppreffion
que on a rel)
duit à la derniere indigence.
» L'année derniere je .pris en fociété la ~ e'rme
» de la cantine du Château-d'If, pour faIre la
» débite du vin & autres fournitures aux prifo~
» niers. Ma femme me fervoir d'aide pour le d~blt
» des denrées dans ladite Ferme. Les affaIres
» n'étoient pas des plus malheureufes & nous v~.
» vions d'aflèz bonne intelligwce enfemble.· MalS
,
.
» il fallut que Mr. le Comte votre epoux vInt
» troubler cette tranquillité. Pour réufli~ dans le
» projet qu'il avoit enfanté , des confells clan» clefiins & illicites furent fouillés par Mr. le
» Comte à mon époufe. celle-ci fe prêta à [es in~
» pirations vicieufes , quoique cependa?t elle l!folt
» de ména crement, vû ma préfence Journahere.
» Mais m~heureufement pour moi, indépendam)) . ment que j'avois toute confiance à lI?on époufe )
1
» il fallut que troi.s mois après l'expiration du bail
» de lad. Ferme) Je fus atteint d'une maladie dan» pereufe q~i me t~nt pendant une vingtaioe de
» Jours monbon audIt Château-d'If pour les favori» fer. Ce fut dans cet intervalle que Ml': le Comte
» par fes vfves inaances, gagna en entier l'efpri~
» de. mOn epoufe & la fit donner dans le vuide;
» PUIfqu'elle fe livra fans ' crainte à fes avis &
» fes promeiIès flatteufes. Tout cela ne fati snt
» cèpenclant point tous les defirs ni de l'un ni
» de .l'autre. Quoique malade, j'étois à charge,
» & Ils ne pouvaient agir felon leurs Vues c'ea» à-dire, . en pleine liber~é. Mais pour fe ia pro)l curer, Ils trouv.e~ent. bIentôt un moyen qui filt
J) que par .les folIICltat!Ons & les prieres les plus
.» for.tes., ;ls engap-erOlent le Chirurgien qui me
)) traltUlt a me faIre entendre que le climat du
» Château-d'If m'étoit nuiGble, & qu'il falloit .
» pour le bien de ma fanté, me rendre en ' cett;
~) Vill~; ~ù le c~im~t étoit p!us ~oux & où je
.n feroI~ mIeux fOlgne. Le CllIrurglen fans doute
» tout pour eux, s'acquitta divinement bien' de
.)) la commifiion à laquelle je foufcrivis fans peine,
» dans. la pe~fu~uon que mon bien être s'y trou» verolt. MalS Je n'eus pas plutôt quitté le Châ». teau-d'Ir., que Ml'. le Comte Votre époux &
» ~n~ femme pouflèrent des ris par l'excès de la
» JOIe, & fe mirent en état de s'arranger enfem») ble &
de projetter ma perte.
» Arrivé en cette Vjlle, je l'eaa encore deux
1
•
�r4
1" dan.
1
J" ours cloué dans un lt
mois & que quels d Les fecours de ma femme
"
fement ma a e.
.
.
d 1
" gereu."
. l' fi"' la direébon entlere e a•
Ul J'avOls
al e
" ~. q fi ne & les fonds de 4 000 IV · .lTll e.o~el;t
"
lte en
" {fi , Cependant mon bal expire,
" d'abfolue neFce It~. prit pofièffion. Néanmoil1&
eau ermler
"r.
[.
1
" e nouV
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t
point.
Huit
Jours
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pa
' oufe ne p a l u .
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" mon ep
f< 1 voir arnver, encore m010S
ferent ellcore alns arrets dont elle s'étoit nan"l
lts & es ew
"
fi
d
" es al/:Jel
d
. t de qUOI me urpren re.
"tie. Ce ret.ar ~VOI mal préfumer, de maniere
" Il me faifOlt. me~~e mes fonds & le fecours de
que les befOll1S ,
U les effets m'étant d'une
"
fi me de meme q
'" ma em
,
, {fit' furent caufe que Je pna
" indi[penFa?~e nece 1 e 'de mes amis de fe poraJIocle avec un
"', mon
Ch" ~" tl-d'If pour en favOlr. le re'fili1_
ter au
atea
Ch '
d'If ma
"tat Ceux-ci paroifiànt au
ateau"
h l ' fi trouv.at encore, ne put
" .'
" femme 'c oùpa e qm e ,fi
Elle fe déroba
point réfifier en le ut pte ence.
d
" avec précipitation aux yeux de ~es eux pelr". fonnes bienfaltnces,
. .
es
Four s'aller
" , Jetter {(entrePro"b
de M .Je C@>mte, votre epoux, on
"ter;;eur q~i' eût la [age précaution de ~a~c~"
LL,
.
cl f< h bre c en-a" cher 'da:ms l'inténeur e a ~ aM l~ Comte
dire dans l'alcove de (on h t . .
fi
" reçu~ fans le -1l101ndre fujet, ces, deux p~r o~
"
d .
,
rler a mon epou
" Des qui àeman Glent a pa
fi ds & effets
Gulf le recouvrement de mes on
, 1
" P
avec une cruau t e & une indifférence fans, ega
ufee,.
;: ·en leur difant qu'il n'avoit point v~ mon epo
,
r"T .
'0'
D
\>
1
•
•
•
:ts
» que d'ailleurs ils pouvoient me figni6er que ja» mais elle ne vivroit plus avec moi, que je ne
la toucherois pills, que j'étois Un coquin & un
)) frippon. Ce rapport me fut fait par mon aila» cié & mon ami. Tout malade que j'étois, je"
» me fis porter chez M. . . . . . .. pour qu'il me
» rendit jufiice; mais il fit le (ourd à ma
» priere, pour colorer non feulement Une vie
» licentieu{e , mais encore pour favorifer ma
» femme, & M. le Comte à me rendre plus
J) que
viéJ:ime, ce qui eit odieux & fouverai_
n nement injuRe. Me voyant joué de cette [orte,
e» & mon bien à la voirie, j'allois porter ma
» plainte lorfque M. le Comte, votre époux,
» fit expatrier ma femme avec les 4000 Ev. qui
» étoient les fonds de -la caiife de ladite ferme,
» & qui formoient ce que j'avois de vaillant,
» avec la plus grande partie de mes effets, [ur
)} quoi, je n'avois cependant qu'une moitié, l'au_
» tre appa1"tenante à mon affocié. Quelques jours
» après, j'appris que ma femme s'étoit réfugiée
)} à Grailè chez M. • • . . . . •. dans la perfuafion
» où j'étols, qu'elle avoit porté avec elle les
» 4000 liv., & les effets qu'elle m'a enlevé, je
» fis préfenter en mon nom une R<€q-uête en réin.
» téz,crramle par M. le Liewtenant de cette Ville,
H pour être autorifé à me faire mettre en pof-.
)) feilion de ladit:e fomme & effets, & la pern miŒon de la faifir au corps, ce ,qui me fut
u accordé. Je donnai cette commiilion à un Huif~
»
�16
)
»
»
»
»
»
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»
"
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»
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»
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»
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})
»
n'avec Une perfonne fon-,
' fut - a, Gralle
fi~r ~Ul a procuration pour ~a l~ett:efien. ex;dee. lie m
' x fut blentot 111 {(rult
M votre epou
. lie
cutron. • .
. fi s Emifiàires, ou Olt par
cette démarche p;~ e oit entrepofé & mis en
les perf-onnes qu l av ce il dépêcha fur le
. fi r cette annon ' . .
G n'
garde, u
.
traOrdl11aIre pour taue,
champ un Courner.
e~ M•.•••• .. qui enfuite
.. aVIS a
pour en donner
d mier reçut, fe prépara à
d es que ce e
des or r
.
& il vint arme, a'd eux l'Ieues
un coup tragIque, .
tre de l'Huiilier & de
n'
'la rencon
de Grane, a
f, cl'. 11ais heureufement fa
P cureur on e, 1
. , , G ffi
mont fut
ro trompee
'L'Huifiier
arnve
.
Ma ra e,
rou ,ed d ns la maifon qu'occupe, &" 'l;H' . :f.'
acce
. bruta l'Ile
f".' & menace,
. a , aVOIr
, UI _
qUI apres a1 Procureur,
fiOl1dé il leur pretexta
.
&
fier
m~l.
. t 11a femme encore mOIns
qu'ils ne faI6roI.ent po~n !'l en fut' des perquiles effets. MalS qUOlbqU l
,
al:re' chez lui
fi .t s on are m b ,
6tions furent al e,
b
Où l'on ne trouva
en préfence de M ...• '1' . [~l n'lais fèulement
malheureufeme~t pas uee l'01~ fai6t, de mêll1e
quelque peu d effets q
.
e l'on tra'
f".
i
s'y
trouvolt,
qu
que mon epoUle qu
1
. Il efi vraI.
duifitavec lefdits effets c lez mOl. r
qu'elle
, 1 fomme de 4000 IV.
.
q~e q~a~t, a it n'étoit pas pofiible de la faIm a UfUl pe ,
..
.
de tous les In6r puifq·ue l'oplmon unamme
fi qu'elle
~d
d
Château-d'If
&
autres,
e
.
l
va l es u
. d M le Comte, vola laifIà entre les ma111S e
'. fi . bl bie ftlrtre époux, ce qui eit très-vraI em a ): tout
17
» tout étaht dans la crainte que je 'ne la fis ar" rêter dans la route: ce qui fait préftlmer que
») M. le Comte efi le dépofitaire de cette fom» me, ce font les dépenfes extraordinaires qu'il
» a faites, & qu'il fait journellement de toutes
» les façons; mais ce qui m'outrage, c'efi qUe ma
n femme conduit chez moi deux jours après, elle
)) eut encore la témérité de me quitter fans [u» jet pour aller voir M. le Comte, Votre époux,
» au Châte.a u-d'If ~ qui, par des nouveaux conn feils qu'il lui donna toujours à mon préjudice,.
}) elle a trouvé bon de décamper èncore pour
») fe
rendre derechef chez M....... ou fait
» chez M .......
où elle fe trouve. Ce qu'il
» y a de plus étonnant encore & de remarqua_
» ble, c'efi qu'ayant été au Château-d'If pOur
» prendre le refie de mes eflèts ~ M. Votre époux,
» comme un furieux, ne m'eut pas plutôt ap» perçu, qu'il venoit fe faifir de ma perfon
ne
) pour me facrifier à fa · colere, que je n'ai en
» aUcune façon ençourue, & je fus aŒez heu:.
)} reux que des perfonnes , ou foit les Invalides
» le retinrent. Je pafIè fous filence les menaces
» violentes qu'il me fit, & les confeils qu'il infpira
» aux patrons qui m'y avoient conduit qui ten» doient à m'enfévelir dans les entrailles de la
» mer, en me retournant à Marfeille, pour rail) [on de quoi il leur offrit dix louis.
» Vous voyez, Madame, de quelle façon j'ai
,> été çourrol-lçé. Jugés maintenant s'il eit de fi.
r
••
C
�#
'r8
lh
'
qUI
tuation plus . crue ut eil: au comble. Trahi
, 1 au n11en. T 0
l' à l'
Ir.
ega e .
erfidie. Immo e
opprelllon.
par une 111figne p.
'nation échauffée. Réduit
. fi ' ar une lI11agl
. .
A fi'
Sacn e p . ., ar des con[eils VICIeux. ccu e
à la mendlClte ~
,
le poids de la ca. .
Afiomme par
. .
111lufiement.
Et enfin vlaulle des
. 1 lus atroce.
&
lomme a P
. 'ont ravi une femme
. e les qUl. m'étois acquis par 1a lorce
1.:
deurs 111 an
tout le bi.en que le m livrer à la proie de la
d u trava 11 pour me t' t enfant. VOl'1 a\ au vraI.
.
ec mon pe 1
, \
fialm,
.av
M votre époux a exerce a mon
les tralts que 1 i< Is je gémis. C'eil: dans ce
égard & fo~se . que·'o[e implorer votre clédéplorable etat dque l ter ma plainte au SupéPor
mence, avant e d
azile aupres de la
.
& de pren re un
neur
fi d'
e vous vengerez mon honJufiice. Per ,ua e q~e votre cœur animé' par
neur o~t~age , u~hl de commifération me fourl'humamte & ta d
fi bfianter pendant le
. 1 s moyens e me u
1.: •
mra
e
r.
.
U
1
s
voyes
pour
me
lalre
tems que vous laI Irez e
11e & s'il efi de ma eUr
»)
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
» rendre jufiice.
r cl refipea , Madame,
J fi ' s avec un pralon
\ b el
,. fiànt ferviteur,
e Ul
» )Votre
très-humble & tres-o
r:
Muret à l'original.
.
»
dJnoncées à la famille
faites pour re firOI'd'Ir 1e 'le1e de la Dame
,
" e Ira
oublié,•
Ju[qu'à cette époque, elle n aVOIt ne.n
~~;~lai:res
1
'détMoi~ntb~~:n
dans l'objet d'adoucir le l~~r~ dfi: fO~;l1t~;~eaer
- Il avait eu pourtant 111JU lce
fe~
J9
démarches , & de l'accu[er de perfidie. Il n'avoit pas 'craint de lui écrire, à la date du
14 Septembre 1774 ~ une lettre qui finiilàit par
cette cruelle apoilrophe: » Vous êtes Un monf.
» tre. Vous avez montré mes lettres à mon pere.
» Je ne veux pas vous perdre, & je le devrois;
» mais mon coeur [aigne de l'idée de facritier ce
» qu'il a tant aimé, mais je ne. veux plus être
» & je ne ferai plus votre dupe. Traînez Votre
» opprobre où vous voudrez. Portez plus loin
» que vous n'avez fait, s'il efr poffible, votre
)J
perfide duplicité. Adieu pour jamais. »
M. de Mirabeau fut enfuite transféré au Château de Joux. Là commence [on commerce avec
la Damé de M ..... Il fe brouilla avec M. le
Comte de St. Maurice Commandant du Château
& il fe fauva.
La Dame de Mirabeau qui était alors à Paris
avec fon pere, retourna avec lui en Provence.
L'affaire de la Dame de M ...... faifoit du
bruit. Cette Dame avoit pris la fuite. Elle s'était
retirée dans les Pays étrangers avec M. de Mirabeau.
Les détails de cette malheureufe affaire furent
écrits le 9 Septembre 1776, à M. de Marignane
'par M. de Mirabeau pere.
Voici la lettre de ce dernier: )) Ce ferait s'en
» avifer un peu tard , Monueur le Marquis ~ li
» le principe de tout ce qu'on voudroit qui nou~
--' .- .
C
2.
�»
»
»
»
»
»
»
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))
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»
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)}
»
»
»
»
»
'»
»
»
))
»
'))
n
»
20
fut fait, ne l'eut emporté 'chez moi [ur des
confidérations peut - être flus , nat~!:lles. l Mes
amis même les plus timores ne ce Oient ~ e me
dire que j'allois m'engager dans une depenfe
a:.
able (comme elle
le "
fera en effet) .&
ellroy,
.~ l
ment inutile , & nUlIlb e meme pour mOI;
pure
intérêt étoit que ce miférable fe fit
que mon
.,
b
. ,.
Co
r. ' t par quelque cnllle qUI le
Ion
lor
l anmt a' Ja-.
. du Royaume '
afin.
de ne p us aVOIr. nt
malS
la peine de le tenirr, ni le nfque de le .vOIr ~
dans quelques annees, trol:v~r des ap!,u~s qUl
transformeraient tous [es. de~lt~ w fredaz~e de
jeuneffe; que j'avois fatlsfalt a mon deVOir en
demandant & obtenant des ordres de tomes
parts, &c.
» Dans ces circonfiances, MOl'lfieur, & celle de
votre réponfe qui n'éto.it pas enco~Fageant:,
il parvint jufques à. mOl des. le~tres Interceptees
par la famille dont zl pourfiavou la fille ~ ~ans
laquelle- j'ai trouvé un cOflcor.Jr~ plus (uWE. Je
vù dans ces lettres que ces rniferables fols ne
parlent que de leur unio? ; qu'ils.fimblem ny
flair , d'autre obflacle q1l lI'n man de 7 ~ . ans ,
la minorité de la femme, &c. Untel dehre &
la- connoiifance des têtes quoi en f041t pFévenues & du confeil fenaeUe qui s~eft tranfPO'rté
à Lyon pour lier 1 éChau.wer & meH€r à fin ~€ s
cri1ne-s qtli en réfuhene , toutes ees- dlOfès reu·
nies, à l'avis cfe quelques clîfcou1"s a.na.l0g~es !
ceme. qui vous font parvenus) lEC' firent araendre
»
»)
»
))
»
»
»
»
»
zr
~ue ma . belle-fille ne fût en' pt!ril ou ny pût
eere un Jour ou l'autre. Les fentimem s qu .
.
.
e Je
l Ul. cl OIS,
ceux que Je me dois cl moi.
me me
, 'd
me deICl erent. Ne voulant pas troubler vot ,
repos & d'ailleurs préparé à VOLIS croire :::.
A
garde contre ce qui vous viendroit de moi je
n~ cr~s pas de~oir répéte~ des ouvertures 'qui
zn ~voI~nt mal re~fIi. Je pns donc mOn parti de
mOl-m: me , au. nfque de m'écrafer feu!. Je de» n:and,n & ObtIns Un Infpefieur de Police
» a.ur.fi que tous les ordres néceilàires &
t.
'
,
M'
m~me
» ceu~ a tous
Inl~reS & gens chargés d'affaires
» de l appuyer de :-edama;tion dans les pays.
'
me
J) II: eU partI llll. r
• le 6. Jtlillet. Il a hlivi
» la plfie en SavoIe , en Dauphiné ci Lyon
'r.
.)) en P :ovel'lce ,1u~ques
a'L
. ?rgues où ' ils étoient,
» en JUlllet ~ ?U ~s f~ laIflerent détourner pOur
-3)
aller a~x Iffues a NIce, auJ,f petits Ports, &c.
» & r.e vrnrent à Lyon. Là fur nouveaux avis
·n du lIeu de fa retraite ~ ils retournerent à Lo r
) g.~s & le. trrouverent parti avec un conrreban.
,» d.Ler au faIt des p~dlàges des montao-nes & un
,» nommé Cab:rifulit. Le fieur <?1iyier de Lorgues
Jl al leurs paP:-ers fdon des aVIS Interceptés ....•
»' V:0OWS pUlUi"ne.z en les fuivant, faifir ~ y t.rouver
,»)
blem., ches rumreres par fes lettres.
)1' Qllo,iqu'i-! en foÏt" ce Fecond Frocès verbal
!» e~ alu 13 AQût., fur avis qu'il gagl'loit les
) f Echeides, de: SaVOIe & les Venrieres de SuiiIè
,
~ 1 y: C<i>ururent. Le mi.{êrable retourna par Tu~
0
0
.•
�2.~
22
'n OU' il etait tant fignalé : il avait fait le
» rI
r:
.
1
» coup le 24, & ils ne lOnt arnves. que e 26)
» à la vérité l'enleve1l1ent ne. d~VOIt fe~on les
Il Jettres avoir lieu que le 30, 11s lont hate. Mes
cretIS fe font mis après & courent encore, fans
»
b
. r:
'r:
» qu'-on fache même )tllques
a' prelent
ou'1es ar.
Il rêter.
.
)1 Le refte de ces détails vous Importe peu)
uand au préfent. Je ne vois pour le moment
» q
fi
.
.
» rien à craindre pour votre Ile, malS quoIque
Il la fpoliation foit immenfe, comme tous leurs
» Agents les pillent & que leurs troupes leur
)} coutent cher, quand l'argent man~uera,' c'~a:
» alors que nouvelles irruptions ferOIent a cram» cire. »
» Au refte harraffé, diffamé par la mere , poi.
)1 gnardé chaque
jour par les enfans, acca?l~
» d'affaires, de lettres, de correfpondances, rume
Il de fanté, dérangé par tant de dépenfes.
Je
» lutte & lutterai jufques au bout pour 1110n de~
» voir que je fois feul ou aidé, jufques au bout
» fi M~dame votre belle-fille fe croit expofée en
)1 Provence, je lui oili'irai comme à un enfant cheri,
» un azile où l'on ne viendra fûrenient pas la
II chercher
à préfent, quand -le compte dl1
)) fieur Maron arrivera & fera foldé, je vous en
II donnerai part, Monfieur le Marquis" & vous,
Il ferez filr cela tout ce que vous jugerez b.on
)1 être.
Dans tous les cas je n'en ferai pas mOInS
)1 votre ferviteur & votre ami, toujours dévoué i
1
» ~ou; J'our vous fer,:ir, & regardant tous vos
Intere:s & tout ce qUI vous touche, Comme étant
1) dans 1 o~dre de n;es devoirs les plus prochains.
" figne MIrabeau a l'original.
L'on. fupprime toute reflexion. Mais dirat-on tOl;Jours qu'un projet de mariage avec Une
femme etrangere , découvert dans des lettres interceptées .. & auquel on ne trouvait d'autre obfta~le, que la vfe d'un Vieillard oaogenaire, eft un
nut etranger a la Dame de Mirabeau?
n
1
Les événemens fe fuccédent avec rapidit
Dl'
e.
ans a meme annee 1776 , il parut fous le nom
de M. le Comte de Mirabeau un Mémoire'
prit~é , di~ig~ contre. M. de Mir~~e~u pe~e au f~;~
de 1InterdltllOn de bIens que celUI-cl aVaIt fait prononcer contre fan fils. Dans ce Mémoire
1
Dame de Mirabeau eft outragée d'une ma~ier:
affreufe.
1
1
On ~, l~t ~ la page 20: )) Ici je me rappelle
» que J al du vous parler de Madame de Mira» beau, & un refte de fenfibilité, peut.être bien
» p1ac~, ~n:a fait éloigner de ce moment autant
)) que Je 1 al pu . . . . . . . . . Hélas! Monfieur,.
II elle .eft !a mer: de mon fils, il eft des cha lès
1) que ~e depoferolS dans votre fein il eft des cllOfes
» q.ue Je ne craindrais pas de dire vous, pere des
) cltoyen~, & le plus vertueux de mes compatrio)} tes: malS qu'oferois-je écrire? Ce qu'effaceraient
)) les larmes de la honte & du défefpoir••..••
l
�1.4
' MOI1Œeur' vous en verferiez vous-même
,
. ., fi
» d'attendrifièment & de pItie., 1 vous connol_
» filez t ou te l'e'tendue de mon Infortune
&.......•
l
.
» Celle qui me doit to~t, l'honneur
a Vie . ..
t rien pour mOL, parce que' mon pere le
» niIII
e.peud/i'.
)}
a eJcf). du • • • • • • p'uiife-t-illa
, . défendre aufii
»)
d es remo rds qUl' la doivent dechlrer n
Et à la page 40: » mon beau-pere ...... .
h ' . le refipeé1e trop pour IUl plonger Un
» a . Je
M' fi' d' r .
.
d dam le fein . .....
aISfi 1 il.
Je 1101S
» pOlgnar
1
t
A
h
t
mes
J
uges
~
re
pel.leZ
es
» un ma .....
"
» fecrets domefiiques, & croyez que vous ne
. Irez que les moindres de, mes , malheurs.
)) COll1101111
Mon beau-pere efi trompé. Ce n eit pas par
» )~oi qu'il fera détrompé. Je préférerais ma perte
lt
une telle extrémité; mais que
de
» Mirabeau ofe paro1tre , qu'~l1e profer~ ~ne
» plainte, que cette plainte me fOlt commu111quee,
) ma réponfe eit prête. »
:
M. de Mirabeau a voulu défavouer cette hornbie diffamation. Mais fi elle n'était pas fan ouvrage, que rren pourfuivoit-il l~s a;tteurs ~
C'eit 1\11. d.e Mirabeau pere IUI·meme qUl, dan~
une lettr.e du 4 Nov. 1776., écri.te à fa belle-fille,~IUl
mandoit, en imputant à une tIerce per~onn,e ~ uupreffwn du Mémoire, que ce MémoIre. etott un
r-ecueil de trois qu'il ( M . le Comte de Mirabeau)
fit pour ieMinifire, dans le te';1s de la b~lle flal~
doirie .que vous fçave'{, 6/ pUIS d'un MemOire a
wnfidter for fin interdiJion & de deux Con[ultauons
Ah.
»
~
·c
Ma,d~me
tatfo. mendi~es
ns
z)
dans
,lems pour donner quel.
qu Ql~ de )i~aijémblance a cette affaire qu'il prétendoir aVOir.
Ce
, Dans une autre lettre écrite le 13 Décembre
même année, M. de Mirabeau pere ajoutoit: » man
)-) enfant,' fi. €e fol. d~ns un moment de. f~ugue~ en
» un MemOIre eXcIte par fa mere, delhne au men» fange & qui eit farci de contradiétions extra).) vagantes, n'avait pas dit du mal de vous, il vous
» aurait mife à côté de ..... , & mieux vaut encore
)) être injuriée avec moi. Laifions tous ces gens» là filer leur corde. Voyons-les en pitié. Tenons» nous à 110S devoirs. Songeons que nous [om/ » mes à préfent fort en vue. La patience le tems
)) & les circonitauces ameneront tout. '
, Enfin, daus une lettre du I I Juin 177 8 , M. de
Mirabeau pere difoit encore eXprefièment: ) ce
) Mémoire n'eit que le recueil de trois Mémoires
)) par lui envoyés au Miniitre dans le tems où il
)) était arrêté & plaidait fa caufe. II y a menti)
» infulté, Ca'folunié. C'eit fan métier.
.
Cependant M. le Comte de Mirabeau continuait
[es courfes ; & dans le moment où la Dame de
M ..... était fou s fan empire, il 'avoit formé le
projet d'enlever la Dame de Miubeau elle-même.
CeHe-ci en fut avertie par 'des avis fecrets & non
[ufpeéfs, confirmés par les craintes annoncées dans
les lettres de M. de Mirabeau pere.
D
'""'-~.."
-~~~~
- ~~~~~"~·~~~7
~
•
•
�Du 29 'Mars 1777»
»
»
»
»
»
»
»
- . . . • \) J'ai encore quelques
chofes
.
fi petites
1
cl
••.
.' ma1l1tenan.
.
t 1° . TermIner na ement
, & ans
' faIre
a
d
ois prochain mon proces
pourle ~o~rant uh m eur & à celui de mon nom afièz
VOIr a mon onn
"1
r.
fc 1'5 aux pieds à ce qu 1 me lemlong-tems o~ ~e ea la racine de tout, & j'ai
ble. Cet artlc
.
l"
0
A " fi &
d
tience
Jufques
a.
2. . VI er
du pren re pa
fi~ t'
\
,
fi
lement
,
à
ma
propre
ure
e
,
a
pourvOIr na
.f.',
~
&
à
celle
de
votre
en)
am.
la votre
A
19 Avril 1777.
confenti & propofé
» V ous avez
, & qu'une
' r. '
... .'.', de s frais indifipenfables fcfaIts
a raIre
mOItie
'
" our parvel11r
. a'nous mettre
une OIS pour toutes
.
d
P
" & fizna leman t en jiûreté tous ùfur-tollt
ame
,
' Ma
d
d
" votre fill e qu z' ejf hurriblement menacee ans
. fil es
" 1eures lfltercep
.
te'es & à l'avenir notre -petlt- s ,
" fut pris filr ces fonds-là.
, . ,
" La premiere de ces deux lettres fut ~cnte a la
Dame de Mirabeau, & la feconçle a Mr. de
Marignane.
Le Tribunal de Pontalier inaruifoit la procédure
prife au fujet de l' enleveme~t de la Dame de M
Il intervint un décret de pnfe de corps contre .
de Mirabeau & il fut condamné par contumace
à perdre la vie.
Après le [candale de cette procédure, la D ame
rYi
1.7
de Mir<J beau & fa famille exigeaient une fépara :
tian de corps. On en écrivit au fieur de Mirabeau pere.
Le 13 Janvier 1778 il répondit à fa belle-fille :
Je ne me fuis pas fait prier pour
" pr:n.dre à tout prix les me[ures néceifaires pour
" chatler mon fils, pour le contenir, pour pré[er" ver à jamais de [es fureurs , & [a femme & [on
" fils. A cet égard j'ai tout fait, & per[onne ne
" m'a [ollicité. Mais s'agit-il d'accroître & d'ag,~ graver [on opprobre? on n'a pas ' befoin de
" moi pour cela. Mais quels font donc ces avis
" & confeils qui prennent le plus long inutile" ment dans l'affaire la plus fimple? S'ils vou" laient demande~' la féparation de ' corps, elle
" entr~îne d~ drOIt l'autre, & ils n'auraient pas
" befol11 de cette autre form alité. C'était l'année
" panee qu'ils pouvaient craindre, mais à pré" fent la fituation légale & perfonnelle .de cet
" homme, ne peut être fufceptible d'aucun chan" gement; à moins que les faux pas d'autrui ne
" le remettent en un~ forte de niveau, ce qui
" en tout cas ne peut fe parer ~ puifque tout .
" te qu'on fait [e fait par défaut. Voilà nion
" avis , ma chere fille, pui[que vous me le deman" dés. Au reae, mon intention n'ea pas de vous
" contraindre. Vous êtes en droit de tout.
• • • • • • •
J)
•
-•
Dl.
.
.
�z8
Du 1) Janvier 177 8•
ès-chere fille, votre lettre
» Je reçols, ma r la copie qui y efi jointe
d courant avec
, d
)} du 3 clu' cacaetee.
, . . . . . . 1' e vous remerCle
" .e
u toute
. bl le
" ctete comlllUmcatlOn
'
. epoint ou
l qUI
» n aVOIr
. . pou r completter d'autant es.ar.
'
, efialre
u eR tres-nec
d fi fils & de votre propre repos.
" chives du [alut le fi. on enir s'efface, les impreOiolls
u Le tems coule, e ouv
là ont de l'e[pt'it & des
d ' lli t & ces t;ensV'
) eCfOl en ,
fiede efi: pour les aurr,lens.
" tournures, ~ iecl.
t op rafièmbler de pleces
n Je ne filurols onc, r oi & donner force à
fa' re face apres m ,
&
,., pour l, fi
chargés d'aauœr la mere ,
~, ceux qUI ero~t
eut me flatter, Dn me dit
)) l'enfant. ~uan 0111 v le marier jeune, chofe
u .que faural l~ t.ems d,e c . '
maifoll alIèx
'
iàit bien que Je rerOlS en
,
,
,) qu on
'ain forte après mOl; malS
t) puill.à.rn:e pour temr 111
fi'
l' C'efi à
" ie ne donne pas da?S ces pre tges ,ai l' fIè.
J ,
, ft
111\11lle encore que le e al
n decouverr '. cep r
't l.a confidération
) rai & qUOIque M~ votre pere al
,
.e fe" & fermeté néce:ffàire po~ ~e p~Clteger ! cd'
)') rait un poids pou.!' .ià. V!el,ue~ ~ue J.e [~~
)) ,aHéger du mollis de ce cote-.cl .. C eit ,U;;e dès
rur Ifll'fu.el mes mefures (ont pra[e.s me~ ;._
»). '
E.ll e, VOl us avez mU a:ns
. -'1d'huâ Vous ma 11
» .a:uJO~
.
&" cie l'h:Ol!l!Iileur dans le [en?
,) dams l oonneur ,
our votr.~
j~ l'ai toujours connu. Vott'e am0ur p
' ,jJ,
c
ell "",, · votre wniidératio-Jl .pour le .nom qlU,
»
[....,.'~, .
cl
'fi. t les um·
» porte & que vous avez a opte, on
.
t
la
~)
•
•
•
29
"
.qiU~S rolO.feils :que voaws deo/iez firhwre. Ici eQ
) /Votre mai[o!i. Tr:ois jours plus tard vous n'eq
,) feriez i-amais [ortie, à mo>ÏllS q<1lte :M. 'v-Otre
" pene aue V(j)U& eut demanclé fp>éd.aIeI.llleI1Jt, ce
u . q1Jl'iI ne 6.ifoit pas, péllr.ce ,que law'ois appri~
)) ,que .ce foJ étoit in r.eotu J & :h0.rS d'état de
» C01lllil>l!le.a cer Un pr(j)ce's [candaleèlx qu'il amlilon~
» <ÇoiÏrt' par la :deman.ole de (à fèmme . Daf.ls tous
n les .cas, je 'Penfe <qU'D11 :v.ous dOQne Un malqvais
» confeil ell v.ous vou1ant i[oier de 1a famille.
» Une femme inébranlable dans to.utes !Vos cir_
» conftan.ces el! bien Iorte a\Jl futur à tous. les
;) titres. Vne fel1~me ifolée un jour, n'a finale~.) men! pour dIe que des con!èi1s hien peu Ca» pables de la garantir.du p.o.ur & du .contre,
» &• ,d'lm fou .défordonné•
Du
2
JuLLlet 177 8.
• . ~ .... '" " La féparation de droit ne fera
" rien & par ia nature des perfoHaes & par
" fa pmpre défeé.tuofité; il s'agit de la fépara_
" tian de fait. C'efi .celle·là qu'il faut qui tienne
" & tout ce qui s'intérefiè · à vous, qui a droit
" de s'y i:tûéreilèr, -qui le doit, qui le veut, qui
" le v,01Jlcll'a, .à me[ure q\U'.o1'1 vous.connoÎtra da.
" vantage, feront auta.nt de partifans de la Ch0fe;
" .qui, vo.us fépaf'ée, dir0ntau cont-raire, à -qui
" donc auj.ourcfhui peut-il foire du mal? Chaque
" jOIl!lif' pouiI~ celui ,où j'.on dira que la pélùtence
'.
�30
" efl: bien longue fi ' l'on vous croit hors d'iuté.
" rêt. Dans le cas contraire, c~acuri s'employe.
rait & dirait: cette pauvre Jeune femme que
" va-t-elle devenir? Et enfin en fuppofant que
" 'e vienne à manquer avant le complement de
"" Jmes mefures qu'on devrOlt
' pourtant commen" cer à s'appercevoir que j'embrafiè & mene de
" loin, jufques au haut, dans ce cas, dis-je,
tout ferait pour vous & votre enfant. Elle a
"" faigné fan pere & fan beall~pere ,& tous fis
" devoirs, il faut la garantzr de ce furieux ,
" & l'on feroit certainement vos conditions alors,
" & tous s'y intéreflèroient. Au lieu qu'avec les
" meftlres efiropiées qu'on vous confeille aujour" d'hui, patemment défavouées de tou s les miens,
" au cas que vous ne hâtiez pas de mon tems
" même fa fortie, ce fera bataille à ma fin; ·
" & Dieu fait ce que fera it l'efcadron de vos
" confeils, contre l'audace & l'impofiure & la
" turbulenèe & l'intrigue & les moyens..... , .
" alors réunis pour vous défoler & vous oppri" mer. Le mieux qui vous en put arriver, (e·
" rait d'être tympanifée par le côté le plus in.n jufie, & que vous auriez le moins mérité ......
" Vou~ ne méritez pas, ma fille, que je vous
» en dife enr;ore auai long fur cet article, apres
" la déférence que vous me témoignez ftlr cela. »
D'après ces aflùrances, la Dame de Mirabeau
ne réclama qu'une féparation de biens, & ne
voulut faire aucune démarche .qui pût Ïtlquiéter
la famille de fan mari.
'
3I
Ori parut lui [avoir gré cl'
une détermination.
généreufe.
M. de Mirabeau ·avait ' , fl'
avec la Dame de M
ete ~lfi en, Hollande
fermé, par ordre du R.'o·j·,'
Il ~vo~t été enP?rter les lettres que M. de
efienuel de ,rap.
VIt fur cet objet a M
d Mlr~beau pere ecri. e
angnane.
li ..
M!t
Du 5 Septembre
.
" Vos lettres M le M
'
1777·
arquls ont cl
' '
"
"
" rcums: celui de la
'& '
eux mentes
,
'r.'
rare te
celui cl 1
" IntnnlCque.
Je
va
"
, ,
us remerCIe de 1 e Ca valeur
" mcatiOn que vous
b'
a ommu_
" ner de celle que avez ien voulu me don_
.
vous avez écrit
M' ,
" e ,au
HU!:
" tre a l'appui des trifies
" me[ures que je vie
d
malS Indl[penfables '
" déplorable fils J n: , ~ pr~ndre Contre mon
" s'approcher de' m:i DTai -jamais cr~int qu'il ofât
. ous mes aWis '
" tazntllent con[eillé de 1 1 'fi'
,m ont conf" à lui-même m' fi"
e al er [e faIre fan fort
, a urant que tau 1 l'
" fiIbles [e re1âchoI'e t
'
s es lens pafn un Jour a l'
" ce pays-ci. Malgré cela " , ,u autre dans
" neur & 1110n devoir C' ~ en ,ai cru , mon hon_
" d'objet que Madame ~ t e fi enuer pOl11t n'avoit
"petit-fils J'ai p '1,0 re, lIe, & notre commun
. 1"
aye annee pafiee au E
"qUi avaient manqué fur
' ' x, x~mpts
." la Police, 6600 liv cl t ,I~~mol.re regle par
"année-ci l 00 1 .' 011 J al qUIttance; cette
'
OUIS pour [on
t d"
" H ollande & M cl 1
ex ra ItlOn de
,
. e a Vauguyon) notre Am"
�32.
il
.
...
.
é défenfes de r;na part de te.
oa1Iideur, malgr
a payé pour 95 0 6 liv.
" Ieyer aucune dette, en . a er. C'efi ' r8600 liv.
" qu'il a fallu
p
j-e paye 2.4 0 liv.
0
" que me coûte fa
0}1 , t en lieu fûr, & dont
"
{'
our qu 1 10 1
,
" de pen
' Iond p tan d'19 que J" acquitte d autre part
.
on repon e, " {' t r_ ifis & tout ce que Je
"
.
. qUI aIl ~
~.
1 r. 'fi
fes revenus '\ Ml . M arquis, es J,aCn ces
"" lui dois.f". 'VOIlà, nu
!'l:leu e de t ,ant d'autres motifs
q
ue je raIs au "
'tenant l'obj et. Quand
"
' E n VOICI mall1
'cl
de
rlllne.
,
f". ' r. it plaIder
...... \.
"
' { f" Il nous rauo
\ evant
Î.
.
l'annee pa ee,
'1 demandoit a j er V li:' , a
" M. de Malesherb,e 'd l
de l'arrêter pour
n
& ' 'toU ommage
[.
réparer ~
c (; , fl
u'il fit de la conde" des frédaines. L u adge
fis que lui valurent
"
& forre e ... r
d
cendance ,
fi ' t d'enlever Madame e
" fes belles phrafefis "1' u r. nailon II demande
" M
& de po 1er la l
,
"
&
.......
r.
'.
cl1ez
l'etranger,
"
'h ' d' 11er ierVlI
.
'-'
" aujourd Ul
ah ' de bataille. Il n'a plus
" mourir_en:
c am:x édition à faire que d'ens';n faire un ôtage~
dans le falt cl autre p
" lever fa propre femme po.ur '1 pourra de vos
" & tirer par elle le
folle . plu s elle
"
Pl
une expe ltIon I l
,
il
"biens.
us
'1
nd cela pour de l'éclat,
" lui rit,
qu
quelconques? ayant
. ' ands 11 en avolt rafen aura touJ?-urs
" l'art de rallIer les
H '11 d Or qu and
"
,
pagme en a an e.
,
" fem.bIe,
fi' t' de 1\1 adal1le votre fille ,
" les ll1terets & a ure e ,
des liens du depas [acres pa~
'L.aI'te de
." ne ,Ill e feraient
.
'ai ni le cœur, 111 la
. tete 1.
, _
" ma111el e
" VOIr; Je n
"
"
"
finaleme?~ ~ù
P~?l
ft~,
Ut;
fd~r:l qUe~
par~e ~e!:~oyells
~ne co~
~ng
~r
maniere à être infenfible, 1)i à fes malheurs,-
qu~lités,
qu'~lle
ni .a lés bOllnes
ni à j'amitié
m'a témoignée. Voilâ, Monfieur, 1110n unique
motif; vous avez trop de juiteilè ~]'~fprit pOur
" ne pas concevoir qu'a çela près, je n'q.urois
" en perfpeétive que le prompt déno~ement de
mes peines à cet égard, & la ceilàtio de
" mes dépenfes, que les lIJle,S ceflèroient du nmo" ment que je l'aurais relâché.J que le$ autres
" auraient Un terme bien prochaiI). en le livrant
" ci [es propres folies; car enfin, une telle ma" niere ne peut aller loin. Au lieu de cela, vous
" avez vu un échantillon des peines & des dé,..
" marçhes . fi étrangeres à mon caraétere & à mes
" mœurs habituelles que me COlÎte la marche con_
" traire. Rien au fonds, ne réfifte ci l'idée du
" devoir, & ce devoir a pour objet uniquement
la jùre.té de Votre famille .
"
"
•
"
M. de Mirabeau écrivit enfuite plufieurs lettres
à [a femme & à [on beau-pere pOur les inviter
ci [olliciter [a liberté. La Dame de Mirabeau ne
crut pas devoir [e refu[er ci des démarches qui
pou voient adoucir le [art de [on mari, [ans compromettre [a propre tranquilité. Son beau-pere
lui écrivit ci ce [ujet le Z2 Juin r 779, la lettre [uivante..... '. » Mon parti fixe & calme efi pris
}) d'apâ~s le s idées du devoir, je n'ai déformais
» ni intérêt, ni [entiment qui m'engage & m'o» blige ci me mêler de cette affaire. Je n'ai ré) pondu ni ne répondrai. Ainfi prenez que je n'y
"E
�34
'.
- vous avez un pere,
-'
ma fill e ,& dans l' efi'
. . lus' malS,
pnt tau t
» fUls p
dans le
& connaître vos den vous 'il faut pour fenur vous ordonne d'en
ce qu
r.' S . tout
d:f.: d
)») VOlrs
. & vosf belolU,
r. il
tollt vous e en
J
. come
.)) ,
. . le che de votre
» falle
d vous en [e'parer jamQls.
IIi
ma fille , J"envois
votre ' penm l@n, & celle de mon
» eA
»
vec
tre lettre
'1' .
'M
Lenoir
,
va
.
Quand
l
» a.
1 lus courte.
" a ecnt
&
ui efi a p .
mon partI pns
» frere, q "1 e fçavolt pas
fff. Il a tout
» l'autre , ln. 'vocable ment pa 1 •
.
urement & .ure
de moi en toute, Occa») pdrOIt
. a'fe faIre fort pas qu "1
l s'en prefente,
'"
) ) fion, &)'e ne
veux
,
il
pUlfie
VOIr
.
.
aucune ou
.
) dans ma pé11lble
, Il ne doit pas
mal)
:: les bornes de ce
ociation. D'ailleurs -' ma
r. mêler de cette neg
. avait l'ame lache )
» le
fi votre man
.. ' & tout
» chere fi!le,
a es de contntIon, .
il écrirOlt douze'p g la ne luicoute nen. ,~l
»
» ce qu'on
. " voudraIt
. . . .Ce
& toutes les bafièffes qu 11
» a tout le contraue fc r s & folies gauche" par
» a fait font pures a le ueufes par le fang. Ses
» l'efprit autant que,~ougr.: nt vis-à-vis de VOll~.
lus grandes bafJe.1.Jes J.~ er l/'lin autre. MalS
' en pouve'{rmieux)
g d
& d'autre 'ne
»» I;I
1/ OliS
. ' lence 1une
.
» ma malheurel\,le exper 'là S'il était contnt.,
'
. & J'fèrolt
» le grevent
p as. de ce 'cote.
n'écrirait pOlUt
» il en penferolt p.lu~ 'fi tre fûreté poffible que
» mort dans peu. ~l c e vaac uerir par-là, ~lle
vos confeils pretend~nt 'c~ffaire & négauf,
»
d'
fan etat ne
.
us
» efi plutôt ans
. . 1 i ni eux, m va ,
» je ne vois p'!s fur qUO! mu,
ave~
cœu~
Vl~
dr01~.
f~lon
A
~I
H
ni moi, qUlll1d . nous ferions tous d'accord 8è
» également délireux de le r~tab1ir dans (es droits,
» nous en fonderions l'efpérance. Cet homme eH
» in reatu de droit & de fait. Deux familles
» appuyées & puifIàntes fur les lieux, & ' un
J) ,homme fur-tout qui a le plus grand intérêt à
» tenir fraîche & marquée la trace de fo crin
n me, veilleront foigneufement à rendre précaire
» fon exiftence. Vous , feule ma fille, vous pou» vez quelque cllOfe pour lui, & je doute qll'il
» fut jamais en votre POuvoir de l'arracher a la
» plus a1freu[e dépendance. 1)
li Au refte, ma chere fille, je ne me permets
» 'de raifon ner fur ceci que pour excufer la liberté
» que je prends pour contrarier vos délirs. A
»cela pres, je ferai toujours Votre correfpondant
n
» a1feéhon é. Vous pouvez me regarder Com'me
» teJ & je le dois bien , être. A cela pres: je n'y
» ftlÎs plus. ))
Cette lettre conftate des démarches queM. de
Mirabeau n'eut jamais dû oublier.
: Son pere perfiftoit toujours dans l'idée de ne
pas lui rendre fa liberté. Il écrivoit encore à_M.
de Marignane le 24 Avril I780. )) Il eft vrai,
» M. le Marquis, que M. de Rougemont (a) vint
'» me voir, quoique fous Un autre nom, qu'après
» tous les détails de ' maladie & autres dont j'ai
» rebattu, & auxquels je répondis en conféquen_
interce~er
Ez
-
l'Ou~
(a) Cet ho mm e, ' qui vient fi généreufement
pour fan
prifonnier, méritait-il l'épifode que l'on trouve COotre lUI dans
yrage récen t & anonyme dCf prijimf d'Etat, '
�36
)} ce , il me mit dans le cas de lui faite la prc.~
» feffion de foi dont je me fuis armé depuis qU'ail
» me tournlente fur cet article & qui me Coute
» d'autant moins que felon ma méthode qui m'a
» beaucoup fervi contre toutes, qui eU de n'en
» point avoir, je l~i difois & ell~ cOl~tient pleine
» vérité. Je lui diS donc que ]' avaLS pardonné
» tout ce qui m'était perfannel & par caraaere,
» & parce que je regardais le délinquant comme
» fol & finale.ment p'ar;e que j'étais fan juge &
» comme tel, Je devols elre fans paffion ; que cela .
» fait, je l'avais jugé par droit naturel & focial,
» & comme tel, JUGE INCURABLE & propre
» uniquement à troubler la fociété , & déshonorer
» mon nom, que tout étoit die à cet égard; que
» je ne donnerais donc jamais les mains à [on
» élaréffement ~ qu'on pouvait me la forcer en
)) deux manieres : l'une de fait, l'autre de droit,
» la premiere était l'autorité qui m'en avait me» nacé, & à laquelle j'avais répondu qu'elle était
» bien la maîtreffe ~ mais que mon défaveu ferait
» notoire & que fes dépoJùaires feraient garans
» de ce qui en réfulteroit ; la feconde étoif fa
» femme qui aurait tou;ours droit à la demander,
» mais que je ferais le premier à juger digne
» d'être interdite ~ fi elle le faifoit fans l'aveu de
» fonpere. Sur cela cet homme qui me parlait
» en véritable Agent de fan prifonnier , me de ..
» manda fi .c'était à elle qu'il falloit qu'on s'a ..
» dr~ffât de ce côté là, & fi je ne trouverais
l) pomt mauvaIS qu'on tachat d'mtéreflèr, &c.
--
.
" Sur quoi, .comme il
37
1
heure fous différentes l;!e aJlter~oit depuis Une
.
rormes J I ·
» avec vIvacité: Eh ! M b
,e UI répondis
)} net-VOUS pOUf' un b or. Monfieur, me pré
\ C.
ourreau? J.
.
» a onfians que Vos tours . e ne PULS aller
" tourner
à dé-'
, la tête du Cote cf.l'Olt. ne me.forcent
.
" tme d" honneur & d e cony,ance
, h ' maLS
& . Je fois hom ~
" eraz Jamais aVec le ei
' je 'le me gra~
" apparemment ces par~e gne . d autrUI. Ce font
" homme lui ont fait d· s qUI. rapportées à cet
" ~nuble , &c. Dans l:re que Je n'étais pas in" tIOn, M. de Rougem COurant de la converfa
" der le Château pou ont.;?e demanda d'accor:
.
r pnlOn &
"1
" pan dOlt également J I ' . qu l m'en réG
. e UI dIS ql
".
"
ouverneur qu'il de . ,
le c etaIt au
\
'.
VOlt repondre
'
'" a mal, Je ne connoiIrois d
' que quant
" ?uatre murs & que .e ne e bOll s . garaus que
" a aucun adouciflème J
ldounerols les mains
n t que conque
1)
A'
."
Q.u~lques mois après M
.
fe lalfler fléchir fur 1
r. de MIrabeau parut:
vit à Mr de M . e compte de fan fils II e'c . .
.
angnane & à I D '
n~eau des lettres qui l'anno
a ame de Mira~ rappelle les infiances O"n~e?t. ans ces lettres,
e. .Mlrabeau pour obteni~~~e~eu es, de la Dame
& Il donne les paroles les ltberte d~ fO ll mari,
fan fils efi rendu \ 1·
plus p.outlves , que li
'.
a Ul-meme
l '
,I 11 approchera
Pou~tant pmalS de fa f(
.ceLUI de Mr. de lVI . emme faus fan aveu &
angnau€.
r
A
�38
Du
10
39
Décembre I7 80
li s qui font entre tious , Mf.
» M'
Quand,
les,
e,n raient pas que
je vous tinfiè
UlS n eXIge
,
l
» e ~l q , t ce ui peut impliquer votre repos
" averti de
Mddame votre fille , le concours
" & la furete:
., ' t uJours trouvé en vous à toutes les
" que J al a
malheurs m'ont forcé de
'fi s que Ines
Il. :
,
L'.
" me ure .
ffaires domenlques m en re" prendre dans, mMes a fils depuis le tems où l'on
'
ne LOI
on,
d fi"
,
" raItl ' fi"'
u porter
. l'b
ent
fes
lettres
a
re
ees
a
1 rem
, 'r.
,
"a al ~
'cefi"é de vouloir vemr JUlques a
" la famüle ',n, a ,
core répondu à res lettres.
' Je n'al JamaIS en
, , , Md '
f i ' Iles avaient ete a
a ame
" mOl.
Vous avez u qu el
l' 'te' pafle la pé.
"
fill & u'el e ellt, e
'.0
. '"' v~tre , ee m' Jcrire en faveur de fo~ man &
" nerofite d d d relâcher lès fers Jufques au
d me deman er e
J',
"1
.
" e 'nt du mOllls
. ou\ l'on peut Juger
s
1
y
avolt
,.
cl
" qpal
.
L'.
d
.j faire ·fur les ' temolgnages
uelque ron s ..
. J
'e
romeifes pour l'avemr. e re"
. & fi
" reped~tlr 1 s ~~o~ ma penfée. Une pareille épreuve
pan IS a or 11
fi .
" mes
"
.flait pouvoir être alte qu a .
;, n.e me ~rolérils. Depuis le ' Prifonnier s:e~
"
, fi PfœUli & â fan
celUlfl
" a re)le a a
& 1
aratUItement 111" jadis
uS' tque~te9 .d'autant plus.
. ., puqliquem&ent
. cl ant
qUI, PaVal
'"' ~ur~ebl~l-q'~;iÎ eft moins dans le cas de ' s'.attirer III
"lenIl ,
.
d qUl que ce
d'endurer un pareil traltel~ent e
hl fiè
"" Pul.fi'e e' tre ~ prit la chofe avec tant de no e
t?d
ndfqu~,:
beau~frer~;
, .
;; que - c'était ' trop, & li je l'en avais cru ; je
" le lui aurais donné tout de fuite pour le me- .
", ner au Saillant où il va paffer l'hyver. Cette ,
" généralité me força cependant de fouffrir fa
" correfpondance; vous jugez qu'elle a été fré"quente entre un Prifonnier qui cherche une
" ifIùt! & une fœur une fois libre de s'appuyer
,,~ur lin frere, tantôt aveugle, ' tantôt néphré" tIque, tantôt fébricitan "' je vis d'abord qu'il avait
" pour la premiere fois de fa vie, pris le bon
" parti, car fur la lettre de fa femme, il pa" rut touché, attendri, humilié, contrit, met" tant fort haut cette bonté inefpérée & fe ra" baiflànt lui-même d'autant, foit qu'il . ait vu
n que cela lui avait réuili, car il voit fin, fait
" qu'un commencement
d'efpoir l'ait radouci , il
.
" a toujours été fur ce ton depuis, dans des
" lettres même quelquefois vives & même gaies.
" Ona trouvé moyen de lui dire toutes fes vé.
"ri rés. 11 a tout fuppo~té fans écart & fans
" baffeflè, & je . me fuis trouvé obligé de dire
" qu'il commençait à avoir de l'efprit à luit
" car jufques-là, je ne lui avois vu dans tous
"les tems que du pathos, de l'enflure, du pla~
" giat & des bouffées fans fuite & fans natucel.
" cependant mes · enfans n'ont pas perdu de vue
" le deffein d'obtenir ce qui m'avait d'abord été
"demandé. Leur frere s'eU fait des partifans
" très-chauds, & précifément dans le détail par
" où paflènt les lettres pour arriver à lui. Les
�40'
'
1
.
s de b onne conduite n'ont pas p us
1
témoIgnage
,
'qui l'a l'endu comme e
"
'que 1 appUi
,
" manque.,
lieu où il n'étoit ent&re lqupe 1';>ut
maître en un, ' T s enfemble
e r11011" demeurer enfetreh. d ou ndé à l'autorité un or"
, ' t ont ema
j'
nier y )0111 ,
tems & en tous leux
"
' 1
et en tous
'" '
" dre qUl e m 'té abfolue; de mamere qu a
fous mon autan '1 fi t arrêté par-tout & par"
"fi ' 1 1 U
'r.
ma reqUl lt101 , fi ' t dans les prllolls roya"
& re re111
1
tout reçu
" t arrangement toute a
,.,
0
donne a ce
fi'
Ar
les.
n
a
r. l
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formes
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ltees.
"
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offible le on
, '..J _
fan<-Llon p
.,' l '
eux-ci m'ont conjure ue
" furés de ce . cote- a, c
r garant vis-à-vis les
"
'b'
ne norter pou
len,l r IJ. f: 't dans tous les genres,
" voulou'
,
, 1 s eu al r.
.
& er_
ennemIS gu I
le guider
"
'
quelque IIorte ,
"
l
le couvnr en
're ou s'li faut e
"
fi
'il peut revlV ,
,
en
11 s
':f:'
T
s
fe
portent
cautIOIl
fayer
."
.
t ut a ait.
ou
Q cl
"condamner a
d folies marquées.
ua~
q
.p us eune p leine foi à cet effet,
' ~ .ajouter
" , u'il ne fera
" Je pourrai:>
,
'eft oint affez pour mal.
P, Ile tâche & quel
de leur zele, ce nfi
"
•
au len, que
, 11
ï-
mo~ ag~
~
paternelle à recommencer, qu e
"g~nre e vie
el entafièment d'affair~s,'
circonfiances, qu
M fi
les Muufires
."
'? Cependant,
on leur,
,
~, pour qUl 'fi' ' I l falloit bailIer la mal11 ou
'1 ap' t qu lOnne.
prononcer la l:lOrt, ou ce qu I s
" a
'"
fUls rendu.
. pellent la VIe, Je me
d' '1 bien long pour
" . Voici, Monfieur, un etaI,
reds à ce
""
,
, d mande ou )e co nu
' vous dIre que Je e
. 'f(
1 Château de
"que mon fils ait pour pn on e Vincennes,
" A
".~n ~~leve;
P
"
"
4I
;; Vincennes, jufques. à nouvel ordre, qu'il;r
" [oit inco15nito, & fous le nom de M. Honoré,
" qu'on fafIè le moins d'éclat poffible de [a [01'" tie. En effet, j'ai des me[ures de tous les gen" res à garder. Je vous le devai s ce détail, mais
" j' ofi vous demander plus d'attention à ce que
"je fiais avoir l'honneur de vous dire.
" Je vous donne ma parole, Monfieur, que
" de mon aveu, il n'approchera jamais de Ma" dame Votre fille, que vous ne l'ayq ordonné
" ou permis. J~ puis VOliS promettre mIme. de
" l'empêcher, pu{(que filon le pouvoir qui m'a'
" été confié, ' il ne doit aller qu'aux lieux où
" je l'enverrai. Parvenu à ma foix ante _fixieme
,-' année fons avoir encore jamais trompé perjànne-,
" ayant dédaigné d'être fin, je ne commence_
" rai pas à mon âge à être parjure. Nos inté" rêts d'ailleurs en ceci font COlllllluns, Je ne fou " rois être flupçonné de la plate manie de lIOU,,' loir tirer en tOute maniere lin enj'ant d'un fou.
" Si mon fils eft ce qu'il filt, il retrouvera
" bien - tôt ce qu'il quitte. S'il eft changé,
" il faut qu'il le (oit du toUt au toUt. 4 2 mois
" d'une exaéte prifon, .s'ils n'achevent point Ulle
"tête [ont, dit-on, capables de la r etourn er.
" Dans tous les cas -' c'eft à moi à en [ubi r
" & fui vre l'épreuve. Et je puis vo us ê tre cau tion
" qu'elle ne troublera point Vo tre tranqu illité .
" Je puis manquer, il eft vrai, mais en ce Cas
" vous l'auriez également eu [ur les, épaules ) ~
F
�.~,
"
"
n
"
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."
"
"
'41.
. au l'leu qu
. "1
.
fans. dou. t e qu'il ne fera,
.
d 'l
pIre
, r. r. t pour tOUjours en cas e refixe 1011 lor
.
',.
aura
'1 ' M le MarquIs, ce que J aVaiS
cidive. Vo~ a, &' l s aaùrances que j'avais à
'
s dire
.e
'Il
a vou
'Permettez-moi d'y ajouter ce es
vous .donner.
fi aueux attachement avec le..
du Gnc~re & le ped'être ManGeur, votre trhl " il'honneur,
S' , M'
que
J
a
'
b
''(fant
ferviteur.
Igne,
1humble & tres-o el
rabeau.
A La Dame de Mirabeau.
Du même jour .. ......•
, . . ma penfée quand
Je vous ecnVlS
'd vous eutes
l . .
"
, & l'honnêteté d'interce er p~ur ~l.
" la bonte . Z. conclure delà que je l'ai pafia" Vous pO,uv,e & dites à tous autres. Mes enfans
" b:~ment e~nt;s d'un ordre du Roi qui le mettent
" s etant a~ure~ifipoGtion m'ont demandé en grace
" àd mon
en~ler~
d'fi! r & en répondre, aux
voulOIr
bIen en 1 po e
d
'" e
bre qui pourraient crall1 te
.n perfolldlles r. eln'b n.~~n La charge efi plus que forte
l'abus e la 1 el .
, 'aye
" our un homme de mon âge, non que Je n, ' .
" lP oignet
,
encore . bon pour le. remettre ou
d' te
,
" 1; P, , u premier Ggnal d'incommo tt,e,
auraI pns a
, cl'
fan Geo" mais ce ne ferait pas la peIne' etre ' & de
" r ,& condUire
' un ham Ille de ~, 2. ans fi '
,,1er,
'fi as chofe fage. Toute OIS
" cette trempe, ne
D'
& le s ho mmes
" je l'entreprens J pUI que
leu
A
,t
4~
~-, le \l'eUleRt, & je réponds d'ahord à VOUs qu~
votre tranquillité ne fora point troublée. Je fais
que vous ne méritez pas ces précautions de ma
part, que vous ne m avez pmalS parle que
pour lui, & que dernierement encore, quand la
~, bienféance de votre état, vous, obligeoit de lui
), écrire avec mefure, la lettre que vous m'a-:
" dreiliez à ce fujet " était toute pleine de bonté.
." Mais je mérite moi de foire mon devoir ju.f
." ques au bout, & une partie très-précieufè de
,H
ce devoir, c'eft Votre fi2reté, Vot.re dignité,
" votre repos. Votre cœur efi bon, & votre ame
" noble & élevée. Si mon fils peut devenir ce
." qu'il promet d'être, il faura vous refpeaer
" avant tout ~ connaîtra que ce fentiment l'éleve 1
" & peut feul le porter jufques à vous, & vous
" nous aiderez alors à le rétablir dans fan état
" & dans le monde. Mais Ji voUs defcendie1. à
'" lui, vous pourrie'{ .pour lui peu de chofè, &
" riiquerie'{ de Jaire tOUt Contre VOllS. La meil" leure précaution COntre cet écueil, c'eft de nè
" rùn Jaire que de l'aveu & fans le confeil de
" M. Votre pere. . . . • . . .. nous ferons toujours
.n parfaitement d'accord fur les chofes efièntiel" les, M. votre pere & moi, il cotivient peu
'" de donner des confeils entre mari & f~mme,
'" mais ce font mes enfans, & je le dois au
,; moins une fois, attendu les circonfiances. Si
" Votre mari m'en croit, s'il m'obéit même, il
,." ne fera l'empreiIë auprès de vous que de. la
"
"
"
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'C"
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F
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2.
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r.
. Tenable à44un homme
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h ' r du tout au tout, c'eft-à" maniere
"
el'co&"' cange
" regener.
our vous montrer que revenu
dire umquement p '1 fent le prix dont vous de"d r. écraremens l
ft'
" e les,;O & veut mériter votre e une avant
etre ,creaIt
' da
vantage
le
" vez lUIS"l
, vous êtes dans
,
"tout. l eXI/) 1 d voir même de lui dire :
d ' & dans e e
':1 .. /', d
" rOltJ
fi
os
guides
rerpeccIJ
sonnes
peres ont n
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" nos ueux
& de uis confirmes par notre pro'J par la nature d l'~bus des enf5agemens contrac,,, pre aveu quan,
volonté perfannelle en eut
n tés par not,re prof~e & l'alltre font d'accord
" dilaté les lIens.
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& font convenus que la
nous
concerne,
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qm l' n ne Jr;.erul°t rl'en 1Îans celle de ' autre.
" vo ante e li
\ ce qUI efl de décider de notre fort fOJ
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M 1 Comte de Mirabeau lui-même connoiffoit
' . e
&'u eoit mieux de celle des aualors fa pofitlOn
J p ,
ett'e époque
1
'11 ecnvolt a c
tres .. Les.JamaiS
ett~es diuceffer d'être préfentes à fan
n'eufIent
4)
" avec autant de confiance qu'aujourd'hui. J'ailieu
" de croire que l'adoucifIèmellt de mes maux & le
" foulagement de mes peines ne dépend que de
" vous feule & des fentimens qui vous pOrteraient
" à le demander .. :......... Votre famille ne
" veut pas notre réunion & VOliS deve'{ de L'obéi)"fonce & du refpea , aux volontés du ' chef de
" vorre famille. Je Lui dois, moi litr-tollt.J dans
' J , ma pojùioll, de chercher à détourner cette Vo" lomé ell ma foveur & de ne pas luter comr'el!e.
" Ce fora donc vous, ce fora Lui, qui marquere'{
" la diJlance où je dois être. Ne vaut-il pas
" mieux que je fois fous vos Loix que dans un
" donjon? Il m'en Coutera peu de me conformer
» aux defirs d'une ' femme aimable à laquelle je
» devrai le peu que j'aurai de liberté & les mo» yens de conferver mes yeux & peut-être ma
" VIe.
A Mr. le Marquis de Marignane
Du même jour.
0
0
0
\
efprit.
A la Dame de Mirabeau
2J
28 Mai 1780
Je ne vous ai point encore écrit, Madame 1
•
" J'ai recçu un peu tard, Monfieur, (ce que
" j'attribue à la pofition ou je fuis) Votre lettre
" du 17 Avril qui m'apprend que vous avez eu
"la bonté de ' faire pafièr à mon pere celle que
" j'avais eu l'honneur de vous écrire: que vous
" défii'e'{ qu'il trouve le terme de ma punition
" affi't Tong & qu'il prenne affi'{ de confiance en
,., moi pour rifquer l'épreulIe que j'ai propofte.
�46
.
. d ' . d s remerèimens de ce defir &:
" Je tvou~
e de votre part. Ils font
dlfipoolfis,
1tlOn
" ' d'au-,
de cet e
fc
à l'opinion que J al tou" tant plus con ormes
humanité & de Votre:
;, ,
e de votre
, ,
'1
JOurs
eu
d]
'e
n'aurols
pmaiS
e
"
q ue q~lan
d
, Il'
" pru ence ,
me rendifiiez JUluce »
h
q ue vous
' de l' ex'douter ~ouJours
" bon eur
d
us pourrIez
,
"quan vo,
ue "ai de réparer autant que J,e
. trême enVIe ~
]
fiëes quand vous crOl"
,
es rautes p a ,
,r;'
le
pUIS,
lU
Il
t vous onpOJ er a tolite
" , d 'étane emen
J:
,
l'
ne, eVOlr
&
moi
la
demIe
1,
n re ma femme
" reunwn
e : r. Il'' ne pourroit aucunement
b
e Je 10 lClte
r. "1 ' '
;, e~te ~u
es' deforte que lonqu 1 s agIt
" nUIre a ' vos vUl ' , fans déranger vos plans,
" de rn 7 rendre ~ ~:~~.feulement fur votre tolé" je dOlS co~npte:me ftlr vos fécours~ Tel efi le
rance, malS me .
fi
"
n..
de votre genero Ite.
" caraLlere,
J dOlS attendre encore plus de Madame
1
\de
" ,e
ue 'e lui tiens de p 'us pres.
Mmth~au, ~arce!i q J ération pour me fouf.
Je dOlS efperer a c~op
& J'e l'efpere.
"
. \ 1 prifon & a la mort,
, '
" tri\lre a a
elle efi ma femme . J a~Elle eft votre fille "
" '
' \ lui temr
"
" l u i deVOlr' J almerOlS a
" merors a
"
, 11 m'auroit rendus.
" compte ,de~ [ervlCes qu e e
vec fincénté ,
Je le IUl dIS avec confiance , a I l
ble de
,.,
ffi fi
de cœur. Elle en capa
" avec
,
' t e du elOn& J','unagme
.qu'elle m'entendra.
,
','
l
' s de refléchlr mu" m en en r
Sans do me , ] al eu e. tem
' & d' e l'u"
1
. de la palx
" rement for es avantaB~s
' r; uhaùeroù de
(lion domeflique;. fans LlOUle ~ le JO '
"
,
47
;; me rapprocher d'elle & de flous; mais vous ne l~
" vouler. ni l'un !Ji l'autre, & je ne le demande
'" pas aujourd'hui.
.
" Je demande la guérifon de mes maux phyflques
" & une épreuve {llr mes di{pofitions morales.
" SaLIs le double lien d'un ordrB du Roi & de
", ma parole d'honneur, je demeurerai aufli loin
" de vous que je jùis , la place qu'on voudrait
'" m'indiquer, dans une égale impoflibilité de me
-" réunir à Mme. de Mirabeau fins fin aveu &
"fins le Vôtre avec QlI/]i peu de liberté civile
" que ;" en di maintenant, mais avec un peu plus
." de liberté perfonnelle & de moyens de conferver
mOn exifience.
a
l'
1
1
1
"
1
A la Dame de Mirabeau.
)t
"
"
\
"
},
"
16 Juillet 17 8 0 .
" J'ai reçu, Madame, avec une bien vive re~
con no illànce; la lettre dont vous avez adouci
mes peines & dans laquelle j'ai reconnu Votre
cœur.
" C'efi Un grand foulagement pour le mien
" d'efperer que je ne vous fuis pas odieux. Vous
" defirez 1110n bonheur. Croyez qu'un des plus
" amers tourmens de ma vie efi d'avoir troublé
" la Vôtre. Je n'ai pas oublié que le ferment de
" vous rendre heureufe efi celui que j'ai prononcé
" avec la fati sfatho n la plus pure, avec le plus
ardent deflr cl' en remplir tous les engage mens.
"
�8
4
.
'tuofité de la jeuneŒe, l' aIgreur
que
L ,'Impe
d'l'
d
" ma lh eUI. l' nfipire même quan Z Vient. e notre
le
,
" fiaure une fiU1\r.ceptibilité , une hauteur
1 qUI
h'tenolent
" a\ l' exces
" d e 1na 11Fenfibilité , un fata enc aine ment
"
,
Il
es ont accumule
mes
de Clrconnanc
"
, torts envers
" VOliS; malS
, Ja
'mais ils n'ont ete entlerement
fi vo"lontaires. Mes égaremens el,w ers vous u~ent
" toujours empoifonnés & pUnIS par votre ou"
, • • .
.
"vemr.
1
. . ...
•
•
"
"
"
::
"
::
"
"
"""
•
•
•
•
•
•
. C·royez
. 'qu~ J'e fens bien, les" droits que vous
,
donnent vos. bontés, & n'lmagl11eZ pas ,que Je
veUI'Ue a b Ullr.er de celle-ci. Je refpeaeral
, votre
1
,
t
t
que
J"
efiime
le
cœur
qUI
me
empIre au an
"
, , , , l" es
d & que J'e connoillàis, pUlfque J al ete 111un
'"
voquer. Marque'{ la dijf~nce ou vous . ~rozre\
d evozr
, me renz'r de vous " Ce refie de pelI1e ,me
fera très-fenfible, car plus Je vous verrai &
plus il me feroit doux d'employer t.o~s mes m~mens à vous prouver ma reconnol11ance, malS
je ne me permettrai point de I11Urt:1Urer & le
defir de voir effacer jufqu'aux der11leres trac~s
de vos J'ufies mécontentemens , ne fera qu'un alguillon pour les mériter.
A M. de Marignane
Le i Oaobre 1780.
J'ai eu l'honneur de vous remercier, Monfieur,
"
avec
49
'" avec ùne recoruloiilànce bien vraie de' la' démar• .
'" che que vous avez.. tolérée que ma femme Et en
" ma faveur. ' Je ne fçais point encore quel en '
" fera le fucces ; mais je ne puis pas avoir tort en
" efpérant quelque chofe de l'impreifion que fa '
"générofité & la votre peuvent & doivent
" faire fur ceUe de mon pere. "
.
" Dans le cas où la bienfaifance de ma ' fem" me, la clemence de mon pere & votre magn-a" nimité ameneroient l'accompliŒemellt d'une par" tie de mes ' vœux, je dois me hâter de 'mettre
" à vos pieds ma profiffion de foi. & l'enBage" ment de mon honneur. n .
.
" Non, ce n'eft pas pour faire le tourment de
" . ceux qui me font chers & qui m'auront fauvé
" que je defire de fortir de prifon où je péris •.
" C'eft au contraire pour meriter leurs bontés .
" par ma conduite, fi je peux les efpérer encore ,
" ou du moins pOlir leur faire oublier tous les
" égaremens dont je [5lmis plus qu'ils n'ont pû en
" être oDen(és. "
" Que puis-je faire pOur cela, Monfieur? C'eff:
,; de m'abandonner entierement à la conduite de
" tous ceux qui ont des droits & de l'autorité
" fur moi. Vous êtes un de ' ceux qui en avez .le
" plus. Vous êtes mon fecond · pere. Vous êtes
'" le proteé1:eur de la femme qu e j'ai promis de
" rendreheureufe, & aux follicitations de la" quelle je devrai peut-être le retour à q:uelque
" félicité ou dumoins à un état [upportable. Ce
G
•
�50.-
VD~ o"d~e~ qr'è j~ r~glera,i & mOrt ,
" fljou-r
Je delllem ltbre , & la mamere dont :
,; je "devrai my comporter. 1V!0n cœur ~endra fans ;
,,' cefiè à m'approcher de . vous; malS ma jllfte ,
~;~ .foIi1Jlijfù:m ne me permettraI pas un pas qui ne ;'
,; foit de votrt! aveu. "
" On m'a fait craindre que vous ne vouluffiez
,i _mettre un obfiade infunnontable à toute réu.
"nion future entre Madame de Mirabeau & ,
p
moi; mais fi vous ne l'avez pas fait, lorfque
" j'écoù fort coupable, il ne feroit ni de votre
" générofité ~ ni -de votre jufiice de le faire ,
" lorfque je fuis fort repentant, lorfque je fuis
" le plus loin pofiible d'avoir aucune difpofition
" qui puifiè vous offen[er , qui puiilè déplaire ni
" à votre fécourable fille, ni à vous. Vous avez
" trop d'élevation pour vouloir donner en fpec" tacle votre nom & le mien. Je n'ai que trop
" eû ce malheur & j'en fuis pénétré. Ce ferait
" un foin bien fuperflu quand je fuis à vos ordres
" ~ à votre merci; recevq: ma parole de Gefl" tzlhomme & de fils .de me conformer à taU" !es les intentions que vous dail5nq me mani.
,i
,Ji
"fefler.
"
"
"
"
"
SI
f:ra -doirc-p,ar
n
-
» Le plus cher de mes vœux feroit de reconquerir un jour avec l'atfeétion de mon pere,
celle de ma femme & la votre , & la premiëre
regle de ma conduite fera de ne rien faire DÙ
vous 'ne puilliez trouver une preuve de l'anache ment & du refpeét, &c. ·"
•
..
A la Dame d e M'Ira beau.
~
-....
\
7 -Oaobre I7 80.
" L~s témo'ignages direéts d "
" néreufe n'arrivent pas 'ufc u"e Vot.re - ba~té g~7'
" app:ends ailèz pour êtr~ q ; ~nOI; malS j'en
" qUOIque rien ne me fi ' pro on ement touché,
." noble & fenfible cœur ud~PEre~nl,e de la parc du
' , ,
.
lnl le
. " P enetre de reconnoiil' h
'"
" l'époufe que le Ciel
a cde pour l'amie & .
. ,
, me ren au
.
," tle, Je la fupplie de
mOIns en par.
d'
me mettre aux . d d
'
"pere on~ Je connais la é '
~le s e fon
" promettre ( elle a d ' gdnerofite & de lui
raIt e tout
.
" pour mOl, elle a drol't d'A
promettre
" '
etre
" . J aune l'honneur & - co '
,
uree comme
f: .
.
- mme Je cheris fl b'
" a1t~ que Jamais je ne la d d"
es, lell, e IraI fur nen. )
" OUI, Madan~e ma
,
, n amIe ma fi
"proteétnce qûe fi -' d '
emme, ma
,
,
mes eux pere d'
" llvrer à quelqu'indul
. SaIgnent fe
" corder un pard"n '"' gelllce pour moi, & m'a~~
'" \..omp et 'ou p . l '
." entIerement foumis à I l ' artla, Je -ferai
' r. .
eurs OIX & au
" & Je leI7,lI plus dans leu
.
x Votres;
" pQ{ition que J'e ne le- fi~s }~a!n~ & à leur diC, r. '
ms ICI. , Car
r.'
~, pourral .lalre tout c~ _u'ils eoci
,enn~ Je
." tes" je ne ferai .'J· a ~
geront ., & cermalS, autre chofe M' "
,
'" Je ne ; puis que foufli '
"
.
aIS IC!
emu
." qui ,n'le 1 devore- & .l'èn~?
nVle gd ~'' & ~eJ repeptir
..
'" conf4iue 'font- éga'l - ' .
:{fP~rer: qUI r ~~
'. ~ .
e,ment 1mOlllnOl"S
.
am '
,
•
4'/ .
~ ••
Gi :
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j
�'~1
A M. de
Marign~rte.
'B
13 Décembre 1780•
"
H
"
M . '.s je viens de franch: r
. Mo.nfieur le & a!<I);1 a' 'vous 'que je r'~ois le
"
'1 c. t I c eu
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reconnoifiànce
,
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9
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pmaiS
pu
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r.
ous 1110n ·
,
cl ,
q ue lans
' r IOn
.
1 v de
n oble cœur, m accor er . ,
maIgre e, vœ~ 'Ordre da Roi qui change mon
la difipofition abfolue
le bienfaIt. SI l ,
,
ettolt pas a " ,
fort ne . me m comme le
. l" al demande , J aude 'mon p;re, l'on me mit à la votre. Groye:,
rois fupphe que
,
daigl\és croire que Je
Monfieur le Marq~l~ " neriter déformais vos
mettrai autant de J,Ole a/hl r de nlettre de fuite
û e ma eu
J:
hontes que j oz e .
. ne me permettraz de
à les perdre ,
ce qui vous appartient
vous demander,
propos de m'accorder
que ce ~lle vous jugere'{ a
J/ous-meme. "
1
"
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"
"
"
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"
::
"
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"
1
l
"
,
t t~:jte
1
. 'd
M de Mirabeau rentré da~s une
VoIla onc.
Il C premIer pas
R' .
. d fc liberté perfonne e. e .
partIe e a
A {( rtir des mams du 01 .,
n'étoit rien encore. . ~ - 0 d tomber dans celles
il ne falloi.t pas cra/l11. ~e ~é:efiàire de terminer
ur er .la contümace.
de . l~ Ju/hce. Il. etolt d
l '~' rifons:.
l'affaire -de Pontarher ou e . p g
Mr. " dè Mirabeau f~ remet d~n.s ~~e'~a ' ro...
Son iclébut- 'efi de dèmaCnder .1~ .~t~~t~ft folem~ifé.
.cédure co~nme nulle. et lOCI e
.
On publie de part & d'autre des Mémoires ilnprimés: On communique dans le procès une Ieare
,écrite par M. le Comte de Mirabeau ,cl Madame
de M ....... la veille même .de la difparutio;l
de cette femme.
, . .. ,
Le 14 Mai I779 , On avoit drefIë à Pontarlier
un procè's verbal , tendant a faire nommer un ', tutellr à un enfaut dont la Dame de M ......• '.
avoit accouché à Paris en Janvier I77 , dix8
huit mois après S'être éloignée de fon mari & dix
mois après fan évafion en HoUande.
"
Après la publication des défenfes refpeétives des
parties, l'atfàire eft terminée, nOn par Un jugement,
mais par Une tranfaébon. Dans cette tranfaétio ,
toutes les parties comparoifIènt par Procureur; n&
voici les difpofiti.o ns de l'aéle : " Lefquelles parties
" Comme eUes comparent, defirant terminer les
" difficultés énoncées daRs 1eUFS Pf0(;urations ci~
" devant réIatées &de la maniere reglée & ar" rêtée par lefdites procurations, s'étant certio_
" rées d'ailleurs de l'exécution préalable de l'art.
" 7-, du projet d'arrangement rélaté & tranfcrit
" dans lefdites procurations par la repré[entation
" qui a été faite des Ordres du Roi manifeftés
." par deux lettres de Mr. Amelot Minifire &
" Secretaire d'Etat, adrefIëes, l'une. à M. I.e
" 'Préfidènt de Ruffey & l'autre à M. le Mar" quis de M ...... enfemble , de la foumiŒon de
" Madame
de M •••.•••. de sy conformer, le
.,
""
"
•
.
�-& l '
lefq~:ls
ordres & foumiffio ns
'" tout v!l
U, les mains des fondés de pou.
entre Inés ont lefdites
parties
COll'" font
' refies
'd~vant nom,
1
.
-" VOIr
CI.
gement en. a mamere
1'. nmé ledIt arran
.. que
' " 101
.
s'enfUlt: "
s~ ·
,; ge'mens c1-deffus contraél-és pour 'Mada111e leùr .
,, -fille, pour laquelle ils fe font fort & fe por- .
" tent expromifièurs ju[qu'à concurence de 45000 .
"liv. & non au-delà.
1
"
exécution ' de
d e de M .... en
1
A
Ma~n
'd
RT. . "
rdres du ROI ont mentIon
" fa foumiŒonfla~lxo dane la vie de Monfieur de
.d
t ren.ela pen
, 1
" Cl- evan ,
,
&
encore un an apres a
M
fon .epoux
, eIle en
Il.
-' , ••• d. • •CelUi-Cl
, cl an s le Couvent
ou
.
mort e
. 1 8 & Il demeure con':. aauellement depUis , 7 7 defdits ordres du Roi
la revocatlon
"
'
,,,venu que être demandée avant c;e.tte epoq~e,
"ne
- re'"fipe a-1f & par écnt
[; spourr~
l'agrement
M des famIlles
an M. . . .. &. de Madame de ..•.•
_,,,
." de
ART.
M
.~ &. Madame de M .... .
II.,,
...
'
1
"
fleut par les préfentes
t comme ·1 s rell
fl
f'.'
." 1'.'
relleron
&
cl
biens.
En
conlequence
rés de corps e
"
'r.
" lep a
M
renonce
desa
-prelent
e
d d •.
qui luÎ ont été
"
' " a tous es ons
d l~aria e , même au
faits par [on contrat e ,
g, bl'
de don."
' & à la communaute, & s 0 19~
~adal11~
::
"
&' ;~antaO'es
~~~:;;ès
la mort de fon ma~i, ~mes ~Ul~~~~~j:t:
décharges , ratificatIOns llece aIres a
ART.
III
."
M . de Ruffey &
. ,
r.
auronte
d e Ion
.' .
" . leinent &
M dame de Ruffey s'pbligent pl'lUClpa. .
,
."" la
r. 1 all'emen
'.
t à procurer l'exécution des enga-
l~d
, ,
IV. " En confidération des articles pré- .
" cédens. M. de M. . . . . . céde & abandonne,
, ART.
" toutefoIs' [ans garantie, ci Madame [on époufe
" tous interêts non payés & ci écheoir de la dot
') qui lui a été confiituée par [on Contrat de ma-~
" riage, & lui donne par les pré[entes toutes
" procurations & autori[arion néceffaires pour les .
" toucher & en faire quittance. Mond. Sr. de .
" M.. . . . . . a de plus remis à ladite Dame [on
" époufe, comme elle compare, les effets, nippes
" & hardes [ervans à [a per[onne dont décharge.
n
" Enn mond. Sr. de M .. ... " s'oblige de
-" faire payer par [es héritiers à ladite Dame [011
" épou"fe en la ville de Dijon la [omme annuelle & .
" viagere de 1200 liv. par moitié en deux termes
" égaux dont le premier fera échu fix mois après
" le décès de ManGeur de M .....•
V. " Moyennant . l'accompliffement des
conventions ci-deffus , M. le Comte de Mira-
ART.
J)
,; beau [e défifie de l'appellation qu'il a inteljettée
" par lettres & exploit du 8 Mai 17 82 , de la
-procédure infiruite au Bailliage Criminel de .
" Pontarlier à la Requête de M. le Marquis de
M. . . . . • & de l'homme du Roi $ & toutes
)t
l'
•
•
�56"
.. les d1'ffi-ct 1Ite/s nées ' & à na1tre'
M d M fujet, tant
cl
" de la. p l'
ortée
par
.
e
•
~
.
.
•.
eamte P
.
r.
1
" meureront e't el!
. 1S & termme~ ", lans qued es parr. .
'" ties. . pm. fi'en t 11re 'rechercher a cet egar
,
IOUS
,
",
, t & de quelque maOlere que ce
,; . qu.elquMe
prdete~Me
{( It
e
...• . . confenrant 'que ladite
" o.
. r.· comme non advenue en tOlUS fes
Sentence lOI t
"1 Il. d' . d fi'
,,"
1ant , ainfi
qu_ 1 ealt C1- e us
01l1ts
,
moyen!
,
P
" l'accomp l"fi'
l el.nent du prefent traite.
au.
1
"1
"
ART.
d'auc~ne
VI'• " Mais en cas d'.inexécutioll
11. '
l'
d
[!t.
des conventions ci, devant H~pU ~es, e que 'lue
" Part que VLenne
.
cette inexecutLOn "
, f
toutes
les
i ét"C.
"
. rentreron t dans leurs .droits
re pe lIS.,
.
PartIes
" M
. d eM. . . . . . . ou [es héntlers pourront
\
cl a
" leurs
• c1"
101X , ou donner ft,ite au proces r.ou
a" e
'J la même màniere que fi la préfente tr~nla Ion
" II,eut pas ,e'té faite , ou exercer,. contIe
"
l'M.
U"&
',' ~1adame de Ruffey & leurs hentl~rs" al.llon
" réfultante des obligations par eux ~Ipu}e~s da~s
:: l'artide3. ci-ddlus. Si l'inexécutIOn vient . e
M' de M ...... Madame de M ...... pourra
" obtenir
.
, fi'"
toutes lettres nece
aires po,ur "purger
.
" fa contumace & M
. de .Mu'abeau
' . Ie e ornte
,
," ~onfervera audit cas le droit de pourftllvre 1ay:
" pelIation dont il [e defifte par le préfent traite
" où d'appeller
.
'd ure Il"
pour
de nouveau de l
a proce
" procéder & faire valoir [es moyens de m~zte 1
" lefiquels ainli que les défenfes de M. de
.,•
'" reileront intaéts de part & d' autre ~
VII
1
"
AH .
.
•
•
57
, »" Art. VII. Les parties demanderont de COllcere
» l'homologation du préfent traité au bailliage
~) de Pontarlier, ainli que l'autoiifation d'office
,
» de Madame de M ........ les frais de ladite
») homologation, . ainli que ceux de la préfente
») t,ranfaéhon feront
fupportés en commun par
» les parties.
.
),) Et pour parvenir à ladite homologation,
» lefdites parties , comme elles comparent, conf» tjtuent le porteur ' d'une expéditiondefdites
», pr~fentes, leur Procureur Général & fpécja~
») aux fins de drefTer, ugner &
préfe"nter la ReJ)
quête en homologation, de faire pOur l'obten~
» tion d'icelle toutes démarches & diligences
» néceilàires, dont aéte.
II réfulte de cette tranfaétion que la procé.
dure continue du fublifier, que M . le Comte
de ' Mirabeau n'eft qu'élargi, & que fes parties
n'ont confentià l'arrangement qu'après S'être certiorées de la foumiŒon de la Dame de M .......
cl fe conformer aux ordres du R oi.
II en réfulte encore que la Dame de M .....
efi traitée comme coupable, qu'elle efi privée de
fa liberté, qu'elle perd tous les avantages de fou
contrat de mariage; & li la Dame de M ....... .
eH coupable du crime dont elle était accufée ,
il faut néceilàirement par la nature de ce crime)
lui fuppofer un complice.
Il en réfulte enfin que M. de Mirabeau n~
con[el've qu 'un état précaire, fubordollné à l'exéH
�58
.
aéles convenus avec des tiers,
éütîort des dl~e~s p cune faélisfaétion perfonnelle;
& qu'il n'obtient a~ rivant cet aéte que M. de
Et c'eft en, trdan cres Obfervations imprimées,
1
M ' b u s'écne ans 11
Ira ea
, 'forcé de reconnozlre a non
que l' Accl~(ateu; adeted 'lit dé"éré à. la JlIftiee, &
' if! du rI1reten
u e:1'
br;
fians
ex ence
{e'
'té
léo-alement
,
a
1
oute,
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,
avozr pu
1
roeès infowenable!
llbJurde, & ~ PM' beau convient que la tran~
La Dame, he
11roaO'uée Mais on trouve à la
r n.'
a éte omo b '
'l'
lal.LIQ11
R
At
en
homologatlOn
empeJ.
cl la eque e
, , l '
marge
ede M R 0 bel 0 t , Lieutenant CnmTne, J
h
r emen~ ,
. l'vI Par :lés, Lieutenant pamcu.
la [ufplcwn de
. A.h mqçnt de M. R oulJel, Conlier, & autre empe, e
.
'
-
A
A
feil/er
AfficlejJeuJr.
concouru au jues ut!O'es qui avoient
.
Aucun
A
nt de la procédure, ne paroIt.
,'
geme Re uête en homologatlOn eft -, eH: pl ef<
& qdécrétée d'un foit commumquee
entee cl
R ' ? Les Concluuons font donnees
Gens u
01,
D l
n empêou x , e
G
l'Avocat ftlichaut de
L~
~;;m'nt d, l'Avocat
a~x
Collin, ,n abfena d" . 'o~
J s plus anciens Avaocacs d?1
Szeb 1 ~
du' R 01' & ae
,
't
. L'Ordonnance d'homologation l?tervlen {]'~J,;
fuite
& on déclare que ceux qUl on~ aB! e
r
M rs. Jean - Francors
à ce ,jugement, IOnt
,
Pevar.
l et, . & J,Tean-Antoine Bocards,l' Avocats (J'Il a
l
de meurants à Pontar zer.
d
ement,
I l b'
'
1
'
née
La Dame de Mirabeau eIL . len e Olg
", :
59
vouloir juger fon mari. Mais elle ne peut s'em_
pêcher de fair: e obferver qu;il n'ell- pas jugé. Et
que l'on ne dife paf que l'affaire de Pontarlier
dl- étrangere _à Ja caufe! M . 'de Mirabeau ne le
penfoit point ainfi, lorfqu'il chercllOit dans un tems
non fufpea à fléchir Je cœur de M. de Marignane, lorfqu'il le conjuroit. d'oublier poyr Un
moment qu'il étoit le pere de la Dame de M i.
rabeau, & lorfqu'il lui difoit: Je j'ais, M. le
Marquis, ' que voUs qui ne. m'avet j amais perje_
C~t~ ~ êtes 'l~ flul de .ma famille, qui oye, de
ventables ft/ets de plQlnte conJre moi. Je -ne me
les déquift point. ... ~ •.. un homr:ze moins fimfible
f$ mOins ,ufte que vous ~ trouveraIt des railons de
fi c~oire dégagé. en,vers ,moi des , liens de la pa.
rente, & me dlroLt ~ll ayant vecu fi publique_
ment avee une autre jemn;e que Jà fiLle, je l'ai,
en quelque forte, renonce pour beau-pere.
Il eft donc permis à la Dame de Mirabeau
.d'être fenfible. On feroit autorifé à lui faife un
r eproche de ne l'être pas.
. Après la tranfaétion pailee à Pontarlier le 14
82
Août 17 , M. de Mirabeau vint en Provence.
Sa femme vivoir fous la foi des conventio~s
domefiiques, & des pl10meilès les plus facrées
les plu s inviolables, & les plus foleznnelles.
"
Il n'étoit pas croyable qu'après tout ce qui
s'étolt paffé dans le Cours de huit années, le
pr~~ier ufage, que M. de Mirabeau feroit de
Hz
�60
.
'
~aqUlohber~té
a~01
,
fèroit dè compromettre une famille
'fi généreufement
à la lui faire
_
conco~ru
-
A
.
\
0
0
0
-,
ee _
0
0
•
,
. 61'
quillité d'une époufe dont les craintes étoient jufti6ées par tant d'événements?
obtenIr.
'1
Oaobre 1782, c'efi-àe It9des prifons de _Ponta~lier,
o Cependant
fi 'ende~lortan
.
dIre, pre qu cl MOr beau fait annoncer fan arM le Comte e
la
r. ·relnme
L"
.
'1
'
-t
IUl-meme
a
l,
Il
...
a
0' Le 22 1 eCrI
. r. c _,
uvee. .
' i l ' t encore à la _lemme pour
·3 Novembre,
:elcn liens qui l'uniflènt à elle"
1
eller que es
-1 ' - \ M
Ul r~ppo .
L même jour,. 1 . eent a
,
font 1U~dlolublet 6e N ovemb~'e, il lui écrit eul
<le Mangnane,' e
fes droits d'époux, & il
'Core (J'pour
reèfilamer copl'e- de la lettre. Le z.t
,
femme
adrene a ao
Aix Les premier, z. 7 &
Décembre,. Il VIent ,a 1
. \ M de Marignane,
.
J o , euvelles ettres a .
'29 anvler, n d M' beau. Le ·1.8 Février~ M~
& ' la Dame e Ira
, . fa
a
de Mirabeau écrit de nouvea~ . a, .
le
Comte
Il.
r
La lettre en
renvoy , parce qu Il, etolt
lemme.
,
e correfponclance fatlgante. tems de tenmner un
"n.
de- rel' oin"
C
ême JO our Requête en lO]Onl.'tlOn M· ' b . "
'\ ce 'que M . 1e _Comte _de
Ira e.,atl
d e mValla
re. _'
dans fes Obfervations i~npnm~es,
ofe pl ef~!1ter, .
d f - déférence refpeaueufe,
comme les prel1Ves ~ a
"
& de fà longl}e - patH:nce.
-' -, les d'honneur
~ -Que font pourtant de..venues les pat, 0 _ \ 1 Damè
& de Gentilhomme fi fouv~nt donnees, a e~ de [ad
de Mirabeau, de ne 1la vOlrr. qUteded~e. ~l~:s ces afilt- & cl fi propre Que Ion
_,
pere
u len
,_ ,0,
u'il fallait des é.preuves
rances fi fouvent repetees, 9 .
. &. la tl-ano{
longues & efficaces pOlI'r afll:lrer le repos .
0
,
,
Dès l'année 17 81 & après que la Dame de
Mirabeau avoit eu le malheur. de perdre fOll fils,
Mr. de Mirabeau, pere paroi (foi t confeiller une
réunion. Il préfentoit à fa belle-fille le peu d'attachement des collatéraux & les doux avantages
d'être mere, il ajoutait ellfuite:" Ces chofes
~, confidérées, il faudrait maintenant débattre les
'" 'tifques que vous aviez à courir de ce côté-ci'.
" , 1°. Un fol déja , C~)finu. 2°. Décanceller tous
" les moyens ci-devant accumulés, d'obtenir une
" féparation propre à vous garantir d'un tel homme
" quand nous n'y ferons plus. ~o. L'abandon ac" tue! de M. votre pere, & de toute l'utilité dont
'" -vous lui pouvéz ,être. Oh! voici ce qu'on peut
" 'oppofer ( à ces difficultés-là. Car dans tOUtes
." chofes il faut partir de fa fituatiOll.
Il Quant à lapremiere " il faut que vous VOliS
'Il met-riez en' tête que ceux qui Ont penfé à la déIl livrance d'Honoré, car mes e-nfans n'y ont été
1) 1nis que quand on a cru la ~ho[e mûre J
que
'» ceux-là -' dis-je, n'avaient d'idée principale que
'l) de perpétuer la, race d'un pauvre homme qu'ils
~) · voyoient fi pauvrement paternel. Ils [e difoient ~
:,1 la jeune femme n'a rien à craindre, car s'il efl
'Il toujours crâne, elle n'en fera
plus honorée &
-n mieux garamie à jamais: tout le monde s'armera.
il pour elle- & elle jèrà foule à la tête de la mai)) [on . . " ..........•. ' . Quant au fecond _
que
�6~
n
»
»
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)
. 1e , -ce 1a n)eft pas vrai. r
La- '
co-habitation
aruc
d b' n~
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' t du tout la leparauoo es lens
ca~ceil.
'1re qui eft faite, qui VOLIS rend
q u 1 ell en éPolfin,
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quant
a
1
autre
ans
tat
pI-emaHre e ,
l' b
ï f
Cent vous ne l'obtiendrez pas,;- as 'Ill d' ;~~
,
'domo dans la"
mauon.
l'a d u'[ cerzum
zn
c
.ilOtt,
que quan cl l'1 eut la femme d autruI,
"1 éIOrce
' l'ma'
1e leparo
r'
it de la fienne;
Jeure
& "l'SI ' CtOIt lage
SI etaIt rou "1vous
vous ne l ,ane ndriez pas
, ,
'
voyant
n ' en aunez
p as la peine; , car
C
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b' qu 1 - n~
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pe~t touc her a ux biens , Il lerolt
A
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artIcle,
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Il:
cl e ce la . Honore IUI-meme qUI eu
n quelllon
b Ilraaux ec es
H Cl'1 e comme UDe catin , & (ur-tout
,
f.
"
» _.l' !l1aglDatlons
, fenciroit la néceffice que vous rLlr _
devoirs de fille, & autant que les
» fileZ a'·os
v
e ffùtons auxquelles je ne prete pas, Ont p~ me
"
'a pas d' envIe cl,u
))» faire connaître (es Idees,
1•l n
J) tout de s'aller [(otter à la Prove9ce;
car Il
» Cent [es dé{avantages, & fi ce n'eft par fougue,
) il n'ell: pas facile à décourager.
J) Maintenant donc que vous avez un beau-pere
» & un oncle (ur qui la rnaifon eft toute. en), tiere, vous feriez fort à l'abri de tou.tes Vlva-cl
.» cités & vexations & vous retournertez qua.n :
» vous voudriez avec mon frere, & vous aune:
» réuni les deux maifons. Moi de m~ part qUI
» n'ai plus de famille, je n'aurois que vous ~
» Votre enfant quelconque fi vous en avez. un J
l)
1
•
A
A
•
63
t)
& je difpolèrois de maniere qu'après avoir affuré
» le forr de ceux qui ont eu la confiance en moi
» vous demeurerez à la tête du relle. . ...•. :
s'ap~er~oit que cetre ~errre m?tivoit le proJet cl une reUlllOn par des ral[ons qUI Ile pouvaient
que confirmer la Dame de Mirabeau dans la ré[orurion d'être féparée. -
, O?
Le Darne de Mirabeau n'avoir pas oublié d'ailleurs que M. de Mirabeau pere lui écr~voit à la
date du 2 Septembre 1777.
.
)) Vo.us avez trop ,?e p:incipes & de trop bOll
S
») con[ells pour que J y ajoute les_ miens. Quand
1) un forcené dont le caraél:ere a été tâté
tant de
» fois, feroit '{u[ceptible d'amandement, chofe ab.
)) folumenc impofIible, il s'eft fermé routes les
» portes à une réintégration quelconque par les
) libelles infâmes & repétés qu'il a publiés Contre
) [on. pere avec une fureur qui ne pouvait avoir
» d'objet que la fureur même & le rot orgueil .
») de faire du bruit en faifant détourner tOLIt le
» monde. Le pire pour un tel homme [eroit de
i) devenir honnête homme, il [e pendrait de honte
)) de lui-même, mais il n'en ell pas là. Mourir
» en un champ de bataille, n'eft pas du tout [a
» pen fée ~ il n'aime pas la bataille, & il n'y ea
» a pas. Au relte, fi l'on ne me tient pas mieux
» les premieres parolès données, certainement j~
» le lâcherai., aimant mieux qu'il [e faflè fOIl
i) fort quelconqu~ que de nourrir auprès de moi
» mon fléau & celui de ma. famille. Mais en ce
�»
»
))
»
»
»
n
::
"
{
. r .r '
"
1 fi le64fort qu "1
1 çaura le raire.
cas je fçals que de uis plus long-tems que qui
Je le co~nOls ~p e ferai que trop juftifié ,
que ce folt, ~ )eDn moins vaudrait-il mieux
mais trOp t~rl' ue j'avertirai, & à laquelle
pour fa f~lnJl eer~ fert de quelque chafe qye ce
l'Clmb~e cl un Pms u'après. Sur toutes ces cho-,
foit de mon te 611 q, je dois faire la guerre à
fes, ma chere
e , ue . e fois averti de tout ,
l'œil. JI
q mi à mâcher les ,i nconvé-,
étant plus qu accoutu
jm~orte
',nients.
.
.
blié que dans le moment
'voit palOt ou
,
. l' II'
e na
. . ' ar humanité deVOir 10 1même où .elle , c~o:o~~/ mari, Mr. le Bailli de
citer la hbe.rte, . . t le 18 Septembre 1777:
Mirabeau hu, eCrlMvol
'& ma très-chere niece,
" .
hIer
a d ame
c. '
» J al reçu.
' la lettre que vous m'avez ~al~
» par MartIn, , , . & dont je ne vous dual
» rhonneur de me~nre la multitude des lettres
» pas la date, ~tte~ u, q~e
vous a fait oublier
vous aVIez a ecnre,
» que
' '1 Cela n'efi pas étonQant.
d e dater ce Il e-c.
vez
»
"
la iece d'éloquence que vous a
,
» J al lu
p
"
'entiensau proverbe
» J' oint à votre lettre. MalS Je m
fi . 'en fia
. d'
, me trompe une OLS, ç J.
» Turc qUI, It: .qUl
e deux c?efi l~ mienne.
» faute. MalS qUI me tramp. .
. te trompe
)) L'Italien le traduit en dl~ant: qUI d ux [oit
» une fois fait maudit, qUI te trompe e
'Ell
» bénit.
.
» Je ne fçals fi
M
1 Mar uis de Marignane
. e . ,q .
• bes OU
» aura la même foi q~e mal a ces proyer »' s'il
•
65
» s'il prendr" argent comptant les phrafes ronn flantes de cette épître où l'on croiroit voir un
» homme tyranni[é par tout le monde. Ce n'eft
» pas a moi a lui donner des confeils. Mais ceH lui que je prendrais pour moi, [eroit d'ajou») ter trois ferrures & double verroul.
» Comme j'ai ,toute ma vie, ma bonne & chere
~) Iliece, voulu \ faire de mon mieux, ce que je
i..> fais, je tiens pied à boule ici pour des atfai» res de Votre beau-pere, encore ai-je bien pe.ur
» que ma malhabileté ne me fa[fe Commettre q LIelllque balourdife, & je conviens auŒ facilement
II de ma faculté pour faire des [Ottifes, que de
» celle d'un prunier pour porter des prunes. Mais
» vous [avez que l'on 111et des ngüres d'hom-me
II dans les chenevieres pour écarter les oi[eaux,
» il pourrait bien être que je figuras très _ bien
» comme épouvantail à chenevieres.
Elle n'avait point oublié enfin que M. de Mi, rabeau pere lui écrivoit encore en 1780, qu'il
regardait comme un devoir de pourvoir à [a /ûreté, à fa dignité, & a [011 repos.
, T~nt de fois avertie & éclairée par la propre famille de [on mari ~ comment la Dalpe de
Mirabeau pourroit - elle [e réunir à Un époux
donc elle eft réparée par des . raifons toujours
fubfiftantes, & l'on peut dire, invincibles? [ans
doute le langage de la famille de Mirabeau dt
bien changé. Mais les faits ne font-ils pas toujours les mêmes? Mais des paroles d'honneur qai
.
1
..
�66
des faits avérés & confiatés',
.
.
ont
ours des engagemens lnVIO_
ne font-elles pas t~uJ l'honnêteté, & même de la
labl~s, aux 'ye~x :fe les retraéter?
.
\ r
J {lice qUOlqu on
U
,
d
M'
beau
n'a
pOlOt
a
L Dame e
Ira
d rle repro_• .
. d'1fI'lmll lé à la famille e &100(; man
1 a d'avoir
cler.
. ' fiti ot [es répognaoces
à cooles moufs qUI JU . 1 e · fut d'en .écrire à M. de
duite. SOli premier G010
rd'ees
été ron
r r
lU
Mirabeau 'pere.
r la répon[e ~ ce qu'elle pou.On va Juger, p~
voit efp.érer . & cralUdre.
la Janvier 1783.
. ~ Madame ma très-chere
fille,
» Je reçoIs
1
I I ' vo» tre lettre de bonn e année ' dans
. aquc1 e Je ne
fi'
»))
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
' )J
1 s que cher pere, au heu de c 1er papa
UIS JP, etolS
~. CI-. devant.Or, .il y a de l'alJac.roque
nill11e dans ce choix; car Je. vous ~(fu~e que
fi l'on me prioit d'être pere, Je ferols b~end,u,n.
allfre bruit que VOUS:I qu.and on vous p.lle e. défieraiS pour
le coup
tous
tre mere, & Je
.
b
a na
les Arrês du monde, au lIeu9ue on p •
ri'.
& c'efi ce dont dl quelhon.
paU€,
.
pa r
» POUf marcher par ordre, J~ commence
vous remercier de vos [ouhal:s de b?llne an, Si le calendrier rebrou{fo-lt chemw, peurnee.
. , que 1queJOl,
[' 's
ou du
être aurOls-]e
. moins efil
pérance aux bonnes années. MaiS co mm:
va toujours, je ne [aurois [lir ce p OI nt e tre.
67 .
» dll nombl:e de ces Provençaux qui prennent
» les complllnens pour des paroles, comme di[oit
» le Cardinal Grimaldy. Quant à vous, ma chere
)) & e(piegl e fille, vous avez encore de belles
» & bonnes années devant vous, & beaucoup
,
fi vous le voulez, ail pour mieux dire,
v.ous .ne (avez encore ce que c'eft que la vie;
alnfi Je vous la [ol/haite tres-beureufe, au nom
du pere, j'cn réponds, du fils, c'eft Votre af» faire, mais [ur-tout du St. Efprie, & nous y
» Commes.
.
»
»
»
»
» Quoique les reticences euirent pu m'être per-
» mires à mon tour, je puis vous afi ùrer que j'ai
» répondu à Votre premiere lettre le 26 de No» vembr'e dernier, & je ne ments pas.
» Venons. maintenant au grand article qui COn» filte en ce que ma fille fàit aujourd 'hui le
» contraire du rôle de la Marion de la chari» [on: Marùm pleure ~ il1arion crie, Marion
» veut qu'on la marie. Elle veut que je lui [erve
» de [econd dalls ce per[onnage. M ai s , ma belle
» & bonne fille, je viens de VOllS faire ma Con)) feaion [ur l'article de la paternité, quand on
» en efi là, l'on n'eft plus propre, dirent les
» Grivois, qu'à tenir la chandelle. Mais pour ce
)) qui eft du rôle du chien du Jardinier, on en
» eft di(pen[é.
" Mais, dites-volis, j'en ai donn é par ole à VallS
» & à M. Votre pere. Eh! je les ai maintenant
» devant les yeux, ces deux farneu[es lettres dtl
1
2
�68
))
)}
»
»
»
»
»
»
)}
»
,)
»
»
»
»
»
»
»
»
»
))
))
»
»
»
»
»
»
»
,
80 pour le[quelles on Ille
Décen:bre 17 't " devant les Maréchaux
dit on Cl el
,, ' l
l ,
vou Olt,
-" ' ,
du à cela que c etolt p uF
e J al repon
'r "1
de ranc.
M'chaux ferrans, pUllqU 1
tôt devant
les
~,rde,
mulet. Les voilà
'n"
de b II
el "n
..
s'y agluolf
, ' M. v utre pere, que
J'
'd f:
.
promets a .
donc.
y
1
pas
de
lui
01
e
a
mal,
.
fil ' proc 1era
mon [;s n sap[a perml'Iron
Je
n'entendais
pas
1
•
.
cl
[on, an
fils n'approcheraIt pas e
[ans doute que ?1~n S à préfent, il n'en eft
la mienne, & JU que bjeEtcr que M. votre
que là. J e pOllrro~s 0 du & que parole non
'a pas repon ,
fil
pere ne' m
I
n
donnée.
Ce
1 ence
ft para e no
acceptee, e.
as du peu d'importance de la
ne prOVen?ltJ
pere a fagement voulu
chofe., MaiS, . d· ~~tr;e la chofe, & s'en eft
l1~e lallfer 1 en. a
. , cl t
Porté à mal.
rap , . , fait 7 . e l'ai tenu 'treize mOIS, o~
» Qu al-Je.
. \
& à la campagne ~ & Je
huit fur mel?ell·tol, '1 n'a mangé perfon.ne.
lui dois la ) UllIC~ qu 1
bécari'e au rez-deDelà ~ il a été, c anter en chan tiez en bémol
if'
r ndis que vous
,
chau 1ee 'h a r Il ne m'appartient pas de due
au · p LIS au.
fi
De tous les tons,
mon avis fur la ~nu lql~;·le lus c'eft le concelui qui me. c~nvI~nbd~f:ns d'~pin~r. Refte que
cordant. MalS Je ma
r
l
& J'e VOliS
' . l"
voyé à lon onc e ,
dela, Je al en
h . firiez à tout prendemande ma fille fi vo~s c. O~t & un t émoin
dre un arbitre plLls equna e,
.
plus fûr • .
10
69
) Dans ta premiere (tatiOll , il a redem andé
» fa tête. Dans la feconde, il redemande fa
» femme. Ces deux 'chofes Ont par fois plus d'ha» dhérence qu'il ne faut.. Que puis-je cl cela ma
» fille? Penfez-vous que le pouvoir que me donne.
» fur lui l'ordre du · Roi, aille jufqu'à lui pro...
» hiber ce draie? VOliS ne le croyez pas. Mais
l) il ne fallait pas le mettre à panée. Oh Dame!
» on le met où . l'on peut . . Refte que je vous
» ai confeillé dans ma fameufe lettre -de ne le
» rejoindre que quand M. Votre pere & moi
» nous ferions d'accord fur ce point. Et prenez
» garde que c'eft-Ià le chef-d'œuvre de ma pro- .
» fonde iàgelfe & prévoyance.
,
• . » En effet, fans cela, vous feriez aujourd'hui,
)) ma fillè, entre l'enclume & le martea u. D'une
» part, M. Votre pere, fi aimable & fi bon,
» & qui ne veut pas. De l'autre, la Loi qui
» veut & vous force d'offen[er l'un, & de fubir
» l'autre; car on a beau dire, toutes les fois que
» la volonté confulte, elle trouvera toujours des
» Avocats. Mais dans le vrai, ni ici ni ailleurs,
» aucun ne peut vous dire que la Loi puilfe être
~) éludée en ceci. Or, je vous ai fait Une loi
» dome(lique par ma dire lettre qui vous juf» rifle. M. votre pere, dit n on. Et moi qui
)) ne veux pas de difcordance, & moins avec
») lui certainement, qll'avec rout autre, je dirai
)} non at!!]i. Ainfi il en -,réfulrera que vous ferez.
•
•
�0
CIl e,
• bonne il
JLlri[con[u!te,7 maIs
.r
» mauvaue
» vaut bien mieux.
»
»
»
""
"
ce
qUI•
'" à un pere de médire de M. fOIl 61s. Mais nOIl
» Malheureu[ement, ma chere fille ~ .nos deux
Is ne valent pas le cum fpzruu tua de
non
p;.
t
erne
cétte I l mme qui [ervoit la . Me!fe. Nous. pouvions
vous d onner LI n mari 'malS
. ne pOUV011S pas
, vous
l'ô'er La Loi veut des citoyens ,&veut, aes en~
f:ans qUI rec onnoil1ènt un pere,
.
I lqu
' lin man
une fois pris, le [oit pour touJours. 1 n Y ~p;uth
etre pRs un des J u vcres 'qui ne trou
1 ve a Cale
"1rart
.
d e, & c'~ ft. pour ce
qu 1 1a
mcommo
1\ a fmeme
t'
fallu des. Loix. Ma~s celle- a . e ? Je vous :
,
r epete
, & . J'e vous Jure que Je 11 y prends m
n'y mets.
.
r. .
,
r
Mais, d'ires-vous, M. papa H11C. qu on le" re 7. Oui' ma fifle , quan-d le1 man au fond s
pa
n'en veut pas. Mais laiHons ce a.
Vous me parlez en[uite de toutes mes lettres.
Oh! oui, elles manifefteront que mon fils en
tel tems tilt un brù;onne. Belle
..."un fait cel-a. Mais outre que ce 11 eft
. pas a [a
1
femme à te dire, cela ne prouve rIen pour e
tems prérent; & il vous dira .que dans le tems
de fes folies vous le trollVlez encore .....•
bon pour vous.
. de cet aXIOme
.
Mieux vaut le [ouventr
gr ec ,
q dit qu'il fa-ut être ennemi, comme
r
.r
être ami. A. plus IOrte
ralIon,
entre ge ns qUl
.
ne peuvent être aurre cho[e. Il dl permIs
L
71
"
"
"
."
" lébres.
A
"
"
"
"
"
"
::
-"
::
"
"
"
""
110~vetle. ~ha.
,
'~i
pouvan~
•
,
~ais perr à. peu !l paraîtr~it
que je plaide, &
" Il s en faut blen, Je vous dJS feulement, quant
" aux lettres, que c'eft un dépôt de c onfiance.
" qui ne doit jamais fortir du bureau ~'une per~, fanne honnête. On a dii1equé bien de mes let"tres. J'en avais dont je pouvois me fervir
" utile.ment. Je ne l'ai pas Voulu. Encore les paf~, fe.rOlt-oll , 9uand elles font décifrves pour une
~, caufe ? MaI3 les lettres d'un p~re ne fOnt rien
" à la réparation de [on fils. Au l'efte j'ai écrie
" Çelon l~s tems & les cho[es, & toujours aïnli
"Je feraI.
?'
'.
A
a
pas
une femme de fan mari. Vous ne ferez
aucune de ces cholès. Mais on le fera en votre nom, & peu à peu l'on vous conduira à
venir prendre \fotre cafe: dans les Cau[es Cé-.
" Mais , ma belle & bonne fille, ceci devien_
" droit d'un féri eux: mourir. Daignez Madame
' Flere fille, erre mon truchem em auprès
" ma tres-c
" de M. Votre pere, lui dire d'attend re pour être
" étonné, ~e voir I?On ii}s Marignane, mais que
~, de le VOIr aupres de mon frere & en tout lieu
" ou ~~'!ui-c~ le lTleoe:ra, je. l~en lailfe le juge,
" & 511 aVa it un fils pOJ.ll'folt-Jlle placer mieux?
" que quand il' a bren voulu . choilir mon fils &
" m'engager par une adoption alLai honorable
n à 'mettl'e & à doubler même fllr fa tête les
." [ubfi itutions de ma maj[on , ce n'a pas été fans
a
A
"
a
�.
2
n' i 7feulement.
doute pour u~, e l~honneur de
,
as rait
Que quan d' 1'1
répondre à la
"
'cl
ne 111 a p
I l ' lui rendaIs compte es
,., lettre par laque, e ):doient l'épreuve que vous
d
",
I l nces qll1
'f.
" ClrCOl1na'
" eCI'ai compris qu "1'1 m' en l al_
m'avez demande:, J b ut de deux ans en con",
Cc'· qu au a
&
" fOlt Je al?,
Ïs autorifé & comme pere
,., féquence Je rfera
& comme chef de famille, de . réde_
r.
lue"" comme
d ·tureu
ur mon fil s,. mon pupille & mon
,
r.
. man er po
'il lui avait donnee, lUr" celIèur, la femme qu dérateur refpettable en
" tout en offrant un fi11:0 e que J' e n'en fais rien
"
fi
de mon 1er ,
h
"1
la per onne
,
'ne puis empêc er qu 1
" cependant, malS que Jde s fes droits, les miens
d
de à rentrer an
Q , . r
"
"ne eman
'allant pas jufques là.
u am 1
" d'aucu~ genre n.. d la bataille êc qu'on le
cl
' & ' r.
Je me retll e e
"" olle
'11 lui conVIent
a lon
connaît mal ou qu e.e
ou'à moi. Qu'apres
"
tt
encore mOIns ~
l' l ' , ,
" ca r a er,e
,
,
onfulté , dépenfé, 10 lIcIte,
'"' avoir bien rem~e , c, Ix il en adviendra que
& amufé les Olfifs cl A ,
. b' fé baiiera &
" qui a confulté payera " que qUi ad' al au boU! du
-"
' M d MarJO"oane, Ira
,b
"ls ne m'en rompent
)) que ltu, J • e
comme c' eflleur affaire, 9ll l ' E t que
"
r
'Il & e lazfJent en 1 epos.
plus les orel es
~ , , x voudrait peut,.
"
nme dirait feu Clneas: ml eu
»
COI
l'
.
être commence: par- a..
cl prendre le con.
V
. direz peut-eere e
»
ous . me
, ,
b lIe & bonne
» Ceil pour moi. Auili feral~Je
. ~ ite bonheur
7 A
le dez Je vous lOU a
» fille,
vous
~. ,
ous mettiez entre
)1 & fauté. Du fefte IOlt que v
de lIX
"
ru;
n
» deux la grille qui e{l: plus péremptoire que
» to utes les prohibjtions paternelles, fait qu'il
)) eu advienne fina lement qu'on vous gâte la
» raille, &c. Je m'eu lave les mains. Je ne puis
)) en ceci que recommander aux miens d'épuifèr
» toutes' les voies con venables , honnêtes . &
}) honnorables, avant d'en venir à celles de
}) droit. MJ.is aprè~ cela je n'ai ni le droit ni
l) par conféquellt la volonré d'agir Contre
mOQ
~ fils ~ pa.rce qu'il aura refufé de vous laiaèr,
» comme une praline embaumée) briller à la chan.
» delle pendant quelques heures, & le relle du
)) tems femblable au figuier ltérile de l'Evan_
}) giIe, donc-on guette la place pOur y l'lamer
» du fruit étr;llJger.
PuiŒez-~ous
voir en ceci ma filIe que Je
» ne fuis. pas incorrigible & que quand on me
)) menace de publier mes lettres , j'en écris de
») très-prudentes, Comme auŒ la vérité & èffi» cacité des fentimens d'attachement que je vous
.)). ai voué & avec lefquels je VOllS embra[fe
» très-tendremeot, /igné, Mirabeau.
Cerre le ttre ~ dont le tOll était bien peu a[foni
aux circonfiances, fut fuivie d'une aorre, da ns.
laq uelle on feignait de foupçonner la Dame de
Mirabeau, de céder à des impreŒo ns érrangeres ,
& à laque ll e elle crut devoir répondre avec toute
la fermeté & toute l'aaùralJce que la ju{lice de
fa caufe lui infpiroir.
»
K
•
�"
r.
tnon très-cher l?ere.
» Monlleur
l'honneur de vous
Permettez que J"aie
.
d .repré.
(l"
nCc ter que vous ne m'avez pas ren U ',"
JUulce,
» en
la derniere lettre que J al eu
» en croyant que 'écrire m'étoit diEtée & que
») l'honneu.r de vous véritables fentimens qu'elle
'étolt pas mes
c .
1.
» ce ntenOIt
" J e me fu is touJ' ou rs laite
une
, 1 c 01
» con
•.
les décrui[er,
a p us rone
b
cl
POint vous
» e. fi ne l' blerveral
r
. - J'e d'Jns
l'occafion la plus
"
» rai.
on. a d e ma vie. Vous devez d'autant
"
eiIentielle
».
douter Illon tres-cher pere, q'l e Je
» 1110lOS en
,
. l
J" cl fi '
. vane
., (ur cet artlc e. . alb e He&,
n'al".Jamais
» "
. 1 l'bercé de M. de MIra eau,
» Il','eft 'l'honneur
vrai, a Id ev ous obCcerver, dans le Lems
l
» J.al eu
pourriez juger de fon changement
» que vous ne
cl
OIlS prouver
» u'en lui donnant les mo y ens e ~ - ,
q '" ' " h· cr' J'ai . crÎt
preter
» qu Il erolt c anoe.
, . . deVOir
,
pourmes
le
» fecours à l'homme que J av ols ,epo u " 'M' "
.
d la poGrioll la plus fach etlle.
~JS Je
» tirer e
.
. cl
'acre lY r
n'ai J'amais crû. lui deVOir avan·.tJ " ~d '
» m'en fuis toujou
. rs c 1aue
. men t expl
ans
. whl
t e.e ' .'.
l'honne ur de vous eCI lie
" les lettres que J al eu ,
fi 'M de Miraà ce fUJ'et, dans . mes l'epon es a .;" . : ave c
,t beau & dans les converla
r t"
t ns
aque
. J al eu'our
" M. le Bailli de M irabeau. Fllt-ü change p
J)
ré
-"
•
•
','
A
7)
tout le monde, il ne fçauroit l'être pour moi, il
ne pourra jamais effacer l'imprefIion qu'a dû
me faire le libelle publié fous [Oll nom & nOnt
on pourroit prouver qu'il eft l'auteur. Je mériterois que le public ajouta foi aux calomnies
qu'il renferme, fi j'étais capable de les oublier.
-'J Voila Un des
gri efs donc je me plains .depuis
" que llOUS vivons éloignés l'un de l'autre. La
" lettre injurieufe qu'il m'a écrit au f~jet de fan
" affaire avec le Cantinier du Château-d'If par
;, laquelle ilm'accufoit de l'avoir trahi auprès
" de vous & qui a terminé tout commerce entre
" M. de Mirabeau & moi; fon ordre de me
" rendre auprès de M. Lenoir pour me j uftifier
,~ du prétendu propos tenu contre Madame fa
-', mere, tous fes procédés, tandis que j e n'é" tois plus fous fa pui fiàNc e, peuvt:"nt faire j uge r
" de la l1laniere dont il [e condui[oit avec moi
" quand je dépendois ab[olumenr de lui. Au refte
" illol1 très-cher pere .... Quand la jufiice que
" vous avez daig.né me ren dre publi-quemeot Ile
" m'en mettroit pas à l'abri, j'oferai encore camp.
» ter fur la réputation que j'ai travaillé cl a'querir
» en tachant de remplir de mon mieux tous mes
» devoirs. Je doute même que M. de Mirabeau
» ore jamais me réprocher d'autre tort que celui
» de ne vouloir pas le réjoindre & j'e[pére m'en
» jultifier aux yeux du public.
1)
On aurait torr de préjuger de ce que juf"
"
"
"
"
"
K
2.
�76
"
.
me fuis pas plainte. Je
qU'aujourd'hll,i Je ne laindre
je n'ai pas crCt
'
's pas a me p
" ,
"
[.
naval
.
,
'ai
pas
ete
attaquee,
ln.
'
tant que Je n
, ,
,
devoir,
,
'JI:.'
des
chofes
qlll
n
aVOlellt
' 1 lOdwerens
,
trUlre es
' & qui ne pOUVaient que
u'à mal ~
'
. 1
rapport
q
dont
Je
porte
.
\ l'homme
, e nom.
"
faire tort a
ontrainte & forcee que J ex» Ce ne fera ,qu~ c n us par des témoins J &
'd faItS lOure
,
,
poferai es r
'efl: LlO fupplice pOllt mal.
r 1 louvemr
l 'C
dont le leu"
n très· cher pere, les al-:
uls-Je ma
,
"
Que ne
1:5 le filence! mais
Il Ignofer enfevehs da
M de MIrabeau a
, ment pas que.
"h '
rez certame
' . "ai répondu aUJourd UI
i l ' fa Req'lete. J
",
plé ente
,
è'efl: bien malgré mOI que J en.
par une autle.
'iens fi f! urer avec quell'
& que Je
V
0
"
tre, en lee,
,
à
ce
genre
d
excnme.
lus fàlt que mal
d .
qu
~Il,IlPy va d e 1a fîtreté & du bonheur e ma
MaiS
~,
vie.C
»)
»
»
»
»
»
»
»
"
"
"
"
"
n
"
))
»
»
»
»
»
»
»
»
»
~"
vo~s
, hpr
mon tres-c
_ pere , qu 'i l ne Ille
» •rayez, ,
e des rairons aul1i fortes p,our
faut pas mO,lns q~ r
t r toutes 1.;s pelues
d'
Iner a lUppor e
lX •
me et~rm, fi"
t me cau [el' une au3Ire
dolt nece alremen
,
'f:fl , \
que
11 J'
layerai pour reUllel a.
aul1i tnalheureu e.
el1~p
'e nce u'il m'a
M d Mirabeau la 111e111e patl
q
. e.
«u er la violence de [on
ere,
fallu pour e y
" , vécu avec luI.
pendant le tems que J, al h
que malmon tres-c er pere J
» Permettez J
c. .
l'h nneur de me man.
'
voU" me laiteS
gre ce que:,
'le 1110n manage
.
flatte encore q.
, '1
der,
Je
me
,fil
vous
a
été
agreao
CJ
avec JVlonfieur VOtl e s
car~
°
a
.
77
» & n'a même 'é té qu'une fuite de vos projets.
» Je n'ai conçu cette idée que d'apres une lettre
» que j'ai reçu de vous à ce fujet pendant mon
j) féjour à Mirabeau, & plufieurs autres écrites
» à Monfieur Votre fils. Quand je n'en au roi s
) pas eLÎ ces preuves, la maniere dont j'ai été
)) traitée par voùs , me l'aurait perfuadé. Je
) fuis loin ,de perdre le fou venir de vos bontés,
) mon très-cher pere, elles Ollt ~té telles que
) j'avais l!eu d'efpérer que je trouverais en vous
)) un appuJ.
» Mon efpérance deçue dans cette occafion,
» ne diminuera pas le relpeét & l'attachement que
» je vous ai voué & avec lequel j'ai l'honneur
» d'être, &c.
_
}Walgré des déclarations auai affirmatives J ou
COntinue à répandre dans le public que ce n'e!1
point la Dame de Mirabeau qui demande d'être
féparée, que ce n'e!1 pas elle qui fe plaint. Mais
il f~lUdroit do nc pouvoir dire auai , que ce n'e!1
pas elle qui a fouffert ; que ce n'efl: pas elle dont
011 croioit nécefTaire de protéger la fûreté , la
dignité & le repos ~' que ce n'e!1 pas elIe qui areçu
des lettres outrageantes; que ce n'eft pas elle qui a
é té calomni ée & diffal1Jée dans des Mémoires rendus
publics & dans des lettres écrites à des hommes
en p lace; que ce n'e!1 pas elle qui a été ofl'enfée,
aux yeux de la France entiere, par la difparution &
par le comm erce fcandaleux de M. de Mirabeau
avec Ulle fèm me étrangere; que ce. n'efl: pas elle
�8
7
'
. 1 cl Mirabeau lUl-meme
a cl.oC
on nI;
enfin à qUI 1\. e & de Gentilhomme les plus
1
d'honneur
'.
d r
les pa ro"es
l'
rocher pmals que e IOn
folemnelles de ne app
_
A
aveu & de [on ordre. "t 'e ju/te , il fam q ll e 1'011
Si l'on ne veut pas el. M de Mirabeau ne
r'
-PourqlJOl.
foi t COl1leq,lent. cl r inrér,êt perfonnel ? Pour, e 100
.
,.
s'occure-t-~ 1 que
_
fition avec cet Inte re t, que
q uoi ne volt-Il, en op~o leS qu'il ne déGgne mê. d
Iques penom
_
r
celuI ,e q~~ 'rêt & la Dame de MHa?eaU leme. pas?
L Hlte
pour nen dans
-1 d ne
le feu l 'a ne cOlnoter
l
rOlt-! 0
Ce affaire?
toute cette malheurMe~ b u n'a point difiimulé
11 de
Ira ea
La faml
e
•
.
L' n a vu qu 'en 17 81 , lorfque M.
0
ençoit à J'etter les prefou objet.
1'11' b • pere comm
"Ir '
de i't 1ra eau
. cl éunion Il parolllolt
'cl' cl' 1 projet e r
~. f.
mieres 1 ees u!. l'
'en tremblant. Sans JU _
ne prO-pofer ces, 1C ees qu, , perfuader la fèmme.
'
-' il r.herc hOlt a
cl
ofier le malI,
'Ir
lors à la Dame e
1 u'il ad relia pour
,
'd '
etr1 e q
' a dé' a été ra pportee, fe re UlMIrabeau &, qUI
1 Jfe à lui dire: donnez-nous,
foit en dermere ~na ~fi'
s afi'urer vos biens
qUI pUI e nou
un ftJcc~lIeur.
& maintenant que ~OllS
& perpetuer nOlre nom,
I r ; ' la maifàn
•
un one e jU r qlll
';C
avq lin . bea~'-f'ere & ferie fort à l'abri de tolites
ell tollte entlere ~ l/.~llS
&\ vous retourneriq ,
J.'
& xatlons
VlV-Qcltes
ve
,
fi
& VOLIS
'
quand VQUS 'lIouel ne,\,
av,ec mon rere,
,
, . les deux· mai rans .
, 1
a-une\ reZllZl'
.
,
'Je,
langage a a
Ce [('l'fit ceux, -quI tenolent ce
ra re
Dame cie Mirabeau uniquement pour leur p p
L~
(J'
'1
•
,
79
intérêt qui lui refufent aujoiird'hul le droit de
confulte~ le fien. Seroit-eIle le feul être da-ns la
nature, à qui il ne fut pas permis de fuir le
malheur, & de travailler à fan repos, à fa tran'quillité ,- cl fa fûreté?
On répete fans ceilè qu'une fëparation ne peut
être autorifée que pour caufe de févices, & que
la Dame de Mirabea u n'a point de févices à
alléguer.
Mais on n'aura point oublié que l'époque
des févices, remonte cl l'inltant même du mariage.
Ces févices étaient Connus des deux familles.
Car M. de Mirabeau pere écrivoit cl fa bell _
e
fille le 21 Mai 1774: » Je fais que vous ap_
» partenez à lin farouche fol, à qui tOute atfec_
u tio n de votre part fait ombrage. Les coTites
» qu'on en fait à cet égard, font at~ffi ridicu.
) les qu'extravagans. Mais comme toutes les fa..:
~) lies Fe tiennent par la main, la foi aux ré.
» cipifcences doit efpérer qu'elles en feront de
» même, Ii dl: vrai, ma fille, que ma puiflànce
)) paternelle & m0n autorité ont fait de belles
») chofes, &
0nt empêché la ruine de ma mai» fon. Si mon fils deit -devenir /aBc, ce n'ea
» pas felon les autres, c'eH: felon moi qui m'y
1)
cannois, du moins en ce qui m'appartient,
n ce fora affurément revenir de biol loill ; mais
)1 J premier pas de ce retour & le plus indifpcn _
)1 fable , fera d~ defircr ft peine très-méritée, plus
�80
» méritée qu'elle ne fia jamais, & la jitbir ;"
» eft un commencemeflt de Jolde du compte. Au
11.
vous parle7' \
comme
» rene,
. vous le . devei,
d . ma
» .fille, & je tâcherai d'agIr comme le OLS.
On peut juge r encore. d~ ce qu~ la Dame
de Mirabea u devoit foufl:'nr a cette ep~q~le,. par
la lettre que M. de Mll:abeau pere ecnvolt à
M. de Marignane:
Le 9 Septembre 17n
» Comme je fais,
Monfieur, que les . lettres
)} vous importunent, j'ai à cet égard refpeété votre
repos IJerhIadé d'ailleurs que vous me rendez
»
~ de penfer qu.e les lentH1~en~
r.'
d' ellll11e
n'
» la juflice
» & de confiance que Je vous dOls · a tant de
» tir-res font ni plus ni moins vivans dans mon
)l cœur.' Toutefois,
il eft des circonftances où
); le concert eft nécefiàire entre les chefs de fa-,
» mille, & je crois que nous nous trouvons dans>
» ces circonftances -Ia.
» Quelque bonté naturelle qui domine dans va» tre cœur, elle a quelquefois befoin de s'éten» dre à des vues plus éloignées, & c'eft ftlf
» ce genre de prévoyance que mes engag.emens
» avec vous, l\10nfieur, 111' obligent à vous Conl> fuIter. De tOlite part ~ je reçois des lettres de
» créanciers, de leures de change proteftées, des
}) dettes les plus baffes & les plus folles, d'en» gagemens oubliés, méprifts " ne daignant jeun lement
•
»
»
»
»
»
»
81
lement pas faire de répon[e ~ enfin de notices'
de. dé/ordres accumulés qlli ne peuvent mene;
lom la catafirophe. Je mets a part les viol _
en
ces, les. aff,ai:-es! & t?lIt~S les folies for lefquelles Je n Ql ni pu m du me réfirller du rer-
fort ~ d'autant que les mefures de -refpeét vis-
» à:vis de. moi .font, perdues, & quant à ce der) mer artIcle, Je m en mets peu en fouci.
» Je ferais tout auf1i tranquille fur celui des '
» dettes fur lequel je n'ai ni n'aurai jamais qu'une
» réponfe, à favoir . que mon fils a fon revenu
. ) qu'on peut le faifir, & que je ne lne mêl;
» aucune,ment ?e fes ,.affaires : mais je prévois le
» terme a favolr, qu 11 fera dans peu arrêté pOur
» dettes, & finalement mis en prifon ........ .
Cette lettre fut bientôt fuivie d'une autre écrite
le 9 Janvier 1774, & dans laquelle M. de Mi_ ra.beau pere annonçoit le parti qu'il avoit pris de
faIre procéder Contre fan fils à une interdiaio n abfllue pour cal/ft de · diffipation. Dans la même
lettre,,il ajout~it , en parlant de fa belle-fille: c'eff à
nous a fol/temr cette chere enfant, tandis que le
malhew la formera.
Et M. le Comte de Mirabeau ofe dire con-"
tre le témoignage de fa famille, & cont;; celui
de fa propre confcience, que c'étaient_là les années du bonheur domeflique pour deux époux dont
l'union faiflù la félicité commune, & que l'on
L
�8z.
efi. obii!!,é de l ut. abandonner. Ir: 'tems de la coha.
bitario? Ca)
arlant de res dettes. qu.e .fo n
Et 11 ofe, en P & folles ' & qUI fa IfOIent
,
Cb) a\ les
r.
pere appe Hoit baffes
{ ( ' oufe annoncer
le malheur de 0 .11 ep e q~elque raifonnable que
&
ub 1IC J qu
, ,r;
P
JugesM d au
M'
beau fi,r fa depenJe perlon.
le de
lra
, d
'
futli a an
. qu'être touchee e ce qu une
II ne pal/volt
. d'
nerane,d e e . d
d fttes n' QVOlt autre mo.
,
:fr:
d'
8: e pa rlLe ale ifces & fans
c~fJc renaz)Jan.t . Oftif que
le defir af(on cœllr.
,
1 En vérité, c'cfi JOIndre
J le de
11er l ,'luO
.
, 'fi
'
. \ la den lOn.
'"
.'
la calomme a
M', 1 eau qui a dep parle des
L Dame de 1 l l a ) ,
"cl'
a
.
1
détails
8,qUI
VIent , ,en
ro"
avec que q u e s ,
~eVlces
ve par eCflt,cl
'f( ter les commenc emens de' preu
'.
pre en
uitte de toute vexatlOn, qU3n
ne
fut an
p~s fut
m€me
r. q, 'au Château-d'If vers la fin
r.
ellIet
me
.
\
Ion
m
,
11. \ d'
deux
années
enVIrOn
apres
d l774 c en-a- Ife ,
'
. ' Ell e ep
' rouva alors un genre
l e nanage
p nouveau
, \ l
e l . . Elle était partie pOlir
ans, a a
de tyrartme.
. C) ahn d'y prévemr fan
'ere de [on man, C
'JL
"
,
,a: '
prz
&fa famillejitr les (imes d lIne o))azre
bealt/h-pere r; Elle fut récompenfée de fan zele
ma cureuJe.
.""
& par des lettres
par des foupçons 1111 Llfleux "
A
~
.
.,
Ca) Pag. 8 & 9 du Plaidoyer Impnme.
. (b) ibid. pag. 9.
. .
"
,
(c) Pag~ 1 & 2 des ,Obfervatwns ImprImees
de M. le Comte· de Mu-abeau.
83
menaçantes. M. de Mirabeau [e porta ju[qu'à
l'extrêmité · de lui annoncer qu'il ne la reconnaî_
trait plus pour [a femme, fi elle ne partoit brufquement de Paris pour aller s'enfermer avec lui
. dans la même Citadelle.
Le 24 Novembre 1774.
. . . . . . . .. » Je ne ' vous dirai pas que vous
)) pouviez facilement croire 111' être utile dans Un
)J
lieu tel que celui-ci, dans une fai[on telle que
)) l'hivçr, [oit pour me donner quelqu'aifance de
)) plus, flit pOlir me tenir compagnie .. ... c'eft
» un lan[5a[5e que le cœur fouI peut entendre,
) & j'ai. per·du le vtJtre jàns retour....... ce
J)
n'eft pas tout-à-foit ma fouee ,. car fi j'ai pu
)) l'aliéner, vous conviendrez de vous à moi que
» j'ai beaucoup fait pour le reconquérir..... ..
n Quoiqu'il en foit, je vais Valls parler po/ici» q.ue, puifqu'il jèroit inutile de Valls parler jèn» tlment.
intérêts [ont les Vôtres. Vous êtes
) la mere de man fils. Vous n'aurez d'aÏ» rance que la mienne, & fi le [éjour de Pa) ris vous plaît, vous ne pouvez y avoir une
» exifience ftable & décente qu'avec moi. Il faut
» donc me tirer d'ici & ma meilleure arme pour y
» parvenir, eft & a toujours été Votre réunion
) brufque avec moi> parce que de deux cho[es
) l'une: où ils ne vous ' laiiIèront pas partIr,
» c'efi-à-dire, qu'ils me retireront d'ici, où ils
» Mes
L
•
•
2
�84
. "
,» craindront le coup d'œil de vous retemr ICI
» en m'y rete?a~t.
lan doit vous par'oître
» La jufiefie ~dcet p que mon pere a plui
t plus eVI en e,
.
d,
»
autan
vous retemr.
» fait d' effor~s. pour
j~ vous ai déja tant fait
» Ajouterai-Je ce que
. .
ce que vo us auriez dû, vous dire,
» prefientlr,
d
. fi long-tems, que vous
P
» à vous-même el ~lS mplice de mes parens~ &
[' . d'être a co •
l
Al
» ave,
azr
.
'
un
plus
p
at
ra
e que
'
làurolt Jouer
,
,
» qllT on
ne /"vous remp l:IJJ'
1Tè7'\ a pre[ent
........ .
•
.,
» ce.Ul que
fi np 1 que de dIre a mon pere 1
» Quoi de plus lld e., deux mois dans la plus
» mon mari e.fr d e11PUlds France trois [e feront
1< CIta e e . e raye rejoint.
,
fi
» mauvai e
Cela e
» écou.lés avant (ue Je our mon cœur, peut-être
» infinunent trop ong p . ma réputation. Perp
» auai beaucot:p. tllro d~~l~~r fOll fort qui empire
tt z que J al e a
.
.
}) me e
. fi
.e pars demaIn...... Je ne
» à .chaque 111 an~ 't J u'un autre à refrer court;
» fUlS pas plus fUJe.,. q _ qu'elle forte de bonne
» mais j'avoue que J I~nOI(~
l'
'fi
-p eut faIre a ce a.
» repon e on .
ui font afiùrément plus que
)) A ces ra~fo~s q. oint d'infiniment plus fortes
» fuŒfantes, Il s en ) .
d'
mot.
. & VOICI mon ermer
» pour mOl,
dans les grandes occ~fions
» Vous fçavez quel
d' tion & que Je me
. fçais trouver de a mo era.
.
our
» Jde,
tout feuI. AinJi ne cralgne't nen p
-» evore
.
r ; " " [ fiaut oU me cam.
)i votre réputatlOn. Je J çals qll l M ' " ai opté
) promettre ou vous compromettre..
au J
1
s)
~) &j'endurerai mon fort jufqu'au bout. Quelque
» chofl donc qu'il m'en puiJJè arriver,
fi
le pre» mier Janvier vous voit à Paris, je fois forment
» que jam(2Îs de ma vJe VOlIS ne me reverre, loger
» en meme mm,:r;on que vous. . . . . . . . . . . .. J' al.
» pour vous ici lin appartement propre & décent.
» Vous n'irez à Aix que pour un infiant avant le
» jugement de mon affaire. Vous pafferez à Mar» feille tant que vous voudrez , au premier mot
» je vous ferai palIèr vingt-cinq louis, & fi vous
)) vouliez y mettre plus de célérité, empruntez_
)) les, ils font tous prêts pour être envoyés fur
» votre lettre.
A
» Tout cela eit dans la filPpofition où mon
pere tienne aux apprêts de Votre départ ,
ce que je ne crois pas; quand ils feront faits
de bonne foi, & fur-tout quand cela paroÎtra
venir de vous, car l'humeur pourrait très-bien
s'en mêler, s'il me flupçonne de l'avoir ordonné.
)} Je fçais que la crainte d'une bouderie vous coal) tera beaucoup à vous charger de ce r~le. Mais
l) en vérité ce font de biens petits motifs en pa» reille circdnflance. Quoiqu'il en flit, que mon
») pere boude ou ne boude pa.s, qu'il me fçache
» bon ou mauvais gré ~ peu m'inporre, & je ne
» veux pas que vous paffie, le mOlS de Décembre
» il Paris. SI VOUS MÉCONNESSIEZ VOS
)) DEVOIRS AU POINT DE Balancer, JE
»
»
»
»
»
») REGARDEROIS VOTRE INDÉCISION
» COMME UNE DISSOLUTION DE VOS
�,
86
.
. , GEMENS DE FEMME ;ET VOUS '
» ENGA
S
JE VOUS JURE -'
)~ NE SE~JN~tUNI'DE MA 13RÉSENCE
» IMPOR
S LETTRES.
» T
NI 1 DE
fi 1" ME.
pIre ql.le M .. de Mirabeau même
e e' em
oit contre fa ferùme.
dans lés fe~s -' .eX~~ble qui rendoit toùjours préCet empI~e ll1~tn~o-es du pafle, 8{ qui étoit la
. Otes
pour l'avenir, doit donfentes les tn~es
l
fource de lTI111 je cra;lt s & fenfibles l'idée du plus
ames 10nne e
.
ner aux
ft ifine qui fut jamais.
effrayant de pot 11' point ici des faits qui ont
On ne rappe era
l D
cl
'" "
. ulés des outrages dont a
al~e e
c1e1a ete artlc droit pouvoir écarter le fouvemr.
toute
MHabeau vo~
M' on dIra que -M . de Mirabeau, pour &.
l
e
cl 'r ~s eft réduit à renvoyer fes Juges.
ci " de fon manao-e ,
eren
e
,
.
,b .
blic à ces premIeres annce:> .
pu
fi ce defquelles Il eft force lUldans le court e pa
. r;,
des circon fiances
d'avouer des trave') es ,
J"
-' des contrariétés, des
& des
il. a' -dire
fautes, ( a'J) c en, tous les
. procedes
lh & tous
d'un
les, événémens qui peuvent faIre le ma eur
::~:urel/fès
~et;es
A
C
87
dans la {ociété. Menac~s, injures, calomnies .,
diffamation affreufe C0ntre la Dame de Mirabeau,
cOmmerce fcandaleux avec Une femme éttangere,
& alors même, projet odieux d'enlevement Contre
fa propre femme -' fuite dans les Pays étrangers,
ptocédures éclatantes, décrets, Sentençes, lettres
de cachet accumulées ........... &c . .
Et M. de Mirabeau ofera s'écrier que fa femme
n'a point de févices à alléguer!
Quelle étrange idée auroit-o u conçu de l'opinion des hommes? Quelle idée fe fonneroit_on
de la Jullice!
Eh! quoi? un . mOUvement involontaire, Ull
difcours fouvent ha[ardé deviendroit lin motif légal de féparation ~ & la réunion de tous les gen~es de févices " & la réunion de .tous les procédés
les plus. affreux, & une longue fUite de faits graves
& majeurs qui [e font fuccédés fans intervalle &
qui e!nbraffent la vie entiere de l'époux, ne le
feroit pas!
,
menage.
,
r des épo~
Les tems poftérieurs font marques pa
'fi
es bien ' plus affligeantes encore. Il: ne pre den.
qu
d
bles inténeurs ou es
tent p.as uniquem.ent es tr~u des défordres publics
vexatIOns domeftlques, malS
Ca) Pag. 8. ' dl,l Plaidoyer J!flpnme.
•
.
0
,
. ..
Si dans cette caufe il eft quelque chofe de plus
effrayant que les faits dont la Dame de Mirabeau fe plaint, c'eft la morale avec laquelle on
prétend les jufiifier.
M; de Mirabeau, écrivant lui-même à M. de
Ma.rignane fur fa di[patution & fOn commerce
folemneI avec Une femme étrangere, réclamoit
Contre les oracles des Tribunaux ce qu'il ofoit appeller la morale ,du monde. Il avouoit fes intri-
�88
[; CO -h bitation en Pays étranger avec
gueDs ~ a d ~onnier & t::>ut l'éclat de cette
,
'r.' 1
l
la ame e ·
cr:.
•
Mais
il
ne
prelentOlt
es
eXCt:S
effraya hl e a'lalre.
cl
comme
dont 1'1 s.,etol't rendu coupable 1que
.
l
1es
.
d ences accumulées. Il par Olt avec
lmpru
. . a .p u;s
1
.,
l' , té d'un événement qUi Jetton a
l11decel~te
familles
entieres, & qui faifoit
défolatlOn deger~es
ans
.
fcandale pour le public.
" d'
il. d
auans le même fens qu Il l' lt encore
,
C , en
.
"
['alf.'aire de Pontar
ter n erou
rzen
•
r.
.
Jourd hUi que 'JJ'
le Juger par les pnnen eII e-meme. Qu'on daicrne
b
Cl'pes &. par. fes œuvres.
1
•
•
A
L a D ame de MI'rabeau , affreufement. calomniée
& cl
& diffâmée dans des Mémoires publIcs
ans
d s lettres écrites à des hommes en place, a cru
d:voir encore fe
hautement
ces calom. &. de ces diffamatiOns. 1On M"
lUi oppofe pour
nIes
r... J'ai dej~
!Qvoue es
emOlres
. .... .
toute reponle
','
quant aux leures quelconques que J a~ p~ e7r.e
aux gens en place.~ (5 qu'on mtefle, Je n e~ OlS
a u ccompte
u n , fo u parce que' des . lettres
fi mij]ives
.
(ont fous la garde de la foi pubhque, Olt 'pa~ce
ue des plaintes, mais dépof!es dans le fozn es
A-tinzjlres du Roi, ne !faurolent pajJer pour des
diffamations. (a)
.
Comme fi le fimple défaveu d'un ouvrag~ ~on.
tre la publication duquel on n'a pas réclame Jun-
plaindr~
?e
1
1
1
(a) Page
l'
22
.
.,
du Plaidoyer Impnme.
diquement
89
diquement, qui a été répandu dans toute la France
& même dans les Pays étrangers, ne devenait pas;'
lui-même un nouvel outrage!
.
Comme fi des lettres écrites à des hommes publi~s & qui auroient [ervi de matériaux à un ou.
vrage que l'on fuppofe publié par des tiers, pou.'
voient être regardées comme fecretes !
Commè fi les lettres même' les plus [ecretes &
les plus intimes ne cOllfiatoient pas toujours l'opinion faufiè, injufie & affreu[e du mari!
Commè s'il falloit autre cho[e que cette opinion~
de quelque maniere qu'elle éclate, pour autori[er
une femme honnêt!! & fenfible à ne jamais rejoindre l'époux qui lui refufe fon efiime, qui
compromet [on honneur & ne croit point à fa
vertu!
La DaIne de Mirabeau en appeUe à la [ociété
entiere. Quel eft i'homme de bien qui ne la COndamnerait pas, fi elle pouvoit être indifférente à
la diffamation & à ·la calomnie, fi elle pouvait
[outenir les regards d'un époux qui a voulu l'abreuver d'ignominie & d'opprobre? (1)
(1) La famille de Mirabeau avoit reconnu elle-même
tous les droits de l'Epoufe qui réclame aujourd'hui [a
féparation d'avec [on mari. Voici . ce que M. d'e Mirabeau pere écrivoit à [a belle-fille Le II Juin 1 77 8 ~
lor[qu'il cherchoit à la détourner du projet qu'elte avoit
alors formé pour demander d'être . réparée : Je vous propqjè dehons & forts Co-Adjuteurs " & avant que.,. le cas:
.
~1
�0
"
' .
'hui &9 Cous J'es yeux
ln,'ê~e cle
Encore aUJourd
M
'
loires li moderes en
cl
l
ces
ell
"
a Jufiice, ans C t de Mirabeau n a pas
M . le , am1 ennier le pnnclpe
"
,
apparence ,
mell1e
h her a ca 01
'
dOnt'
craint de c erc.
r.
'lamer les d
rOlts,
. d on t Il"ndifiolubilté
Ole rec
' cl' , _
oe l'union
& qu "1
1 pren a tei) ofe invoquer II
. fiice de fa caufe., (lJ)
moin de la préte~~e ~:au ne peut croire que l'on,
La Dame de 1 Ira .11 obligation où elle efi de
fur la tnne
'lh
fe méprenne
Elle foutient un proces m.a eufe faire entendre. . .
QUA n'a~t-elle p3S faIt pour
reux mais néceilalre 1 ; Elle vivait fous la
en
;'rév~nlr le
fcan
d~e~i· ue.
9I
eUe s'eR lùéme réiignée à s'expofer aux reproche$
momentanés du public qu'elle refufoit encore d'il1G
truire. ,Pendant long-tems elle n'a répondu que
par fon filence , à cette foule de Requêtes , . de
Mémoires, de Plaidoyers dont 011 a déja Ïnuondé
la Ville, la Province, le Royaume.
PouVoit-elle pen[erque ce fijence feroit indi~
gnement calomnié, & .qu'il fero it préfenté comme
le défefpoir de la plus jufie des caufes ?
.
On objetl:era peut-être aujourd'hui qu'elle en a
trop dit pour fa défenfe, que rhonneur de deux
époux eft fllidaire , & qu'elle auroit dû.refpeéter
le fecret des lettres qu'elle communique, & qui
'ont été écrites fous la foi de la confiance la plus
intime!
au~
Elle a reculé
foi d'un Jugement d0r.
~uvoir le moment
"l ' '·é en Ion p
,
'b
1
tant r.qu 1. . aforcee
eL , cl d' oncer aux Tn una~x es
e en
. ,
e
elle lerolt . avoient motIve ce Jug .
' & l s preuves qUI
. . . _ ,l t
faIts
e
"
de
'
ne'
précIpIter
un ec a, ,
ment. Dans la craInte
.
ou
.
Si M. de Mirabeau Vouloir- que l'on refpecra
,
'
champs,
cli
e des
fious":la
uarde1I0US
des aU~lei
fOlx ,
y e'clze'am, il eut ~o6tenu lame'tre
b
,
10U 'ours le tems ae 1I0~S
~
• càr ce Mémoire ne pe,u
en q,tt'v ,,, ul", '"
nppui de plu, vui
f'P'''t~'; ~n
~
ftro~
'me pas Mais alors 1I0US aUlI,e
,
d . ma ' fiamille , r:I
Tl.
l p arue [allie
', fi
d 'c précédef/(e que ce n ~J'
dJ'Ùre d'accord avec a
'avoir montré par votre con UI I! 'e n~ fo 'lt pas vos d~volr~
Pas elle 'lue vous repu
, d'·
,. ' 7il '.1 e cfl~ret~
~ oui 1I011S fiorce la
l~l
'
t , maLS votre "U
l
fui 1I0US repugnen
. '
mam.
. l'on compare c~ Tangage avec c. r'Ul qu e tient all-'
Que
,
famille.
J• our d'h Ul' la même
. ,
( a) Page 1. cl es Obfervations -impnmees.
•
•
Ah! que l'on ne Fe hâte pas de prononcer fur
ces objets.
,
k [ecret des leures, il dev€>it refpetter lui-même
les engagemens qu'elles. renfermoÎent.
,
En Jurifprudellce, en morale & en procedé ,
on a, pu oppo[er ces engage mens à ceux qui fe
faifoient un jeu de les retratter. .
'
Si le fecret des lettres efi de drOit naturel, le
droit facré de la défenfe, n'dt-il pas également
fondé [ur la nature ?
Eh ! quoi? ferait-ce à ceux qui les premiers
ont donné fans' néceilité l'exemple d'une .commu~
nication de lettres , qui manquent Publiquement
.à des paroles d'h.ùnneur & de Gentilhomme , q.ùl
-
Ml.
�2
9
, , . .d 1
'
'cle réclamer7 les ' prInCIpeS e ' a
apparuenclrOlt
,fi' & de l' honneur ,
dehcate , ~
., eft de la fubftance de tout
La reclproclte
'n t la Dame de 'Mirabeau
t
En attaqu:l
r .
. r.
gagemen ,
épris de la 101 prom1!e, 011
& .en
l'at~.
aquant.~au
Ce
,
1
la cnue n e~cellité de fe défendie.
r.
lUI lITIpOle
mpt le fçeau des leCrets do'fi: as elle qUI r a .
' 1 ' '1
ne p
'Il.
1 i qUl la force a es reve er,
Il.'
S C en ce u
d"
d"
menlq.ue ,
t donc prouver, It-on ep,
fl
M
que peuven
aIS
"
ar
un
pere
peut-etre
l11]Ulle
ou
des lettres ecntes p
r.
fil 7
.
. . . , contre Ion s ' .
.
du moms IrrIte
feraIt affreux,
C qu'elles peuven t prouver! qu'Il ,
. r. .
e
'
.
ft
ppofition
que
1
on
VInt laIref.
•
dans cette u
,
dl"
lneme roche a' 1ia D al ne de Mirabeau, e Impre.
P
un re f( de u'elles ont fait dans fan ame; qU,e
p~o and e qM'Ira beau devrait. refpeaer des re-&
lfionfé mIlle
:a a
. '. Lferoiënt dès-lors fan ouvrage,
pugnances qu~
.
du' le droit de forcer
tte falmlle aurOlt per
.
fi '
que CIe t' d'une époufe dont elle auraIt, par es
la va on e .
. & fl' . 1 œur
~
fi'd it l'efpnt
etrI e c
.
manœu~Tre:> ~ . e uffet après avoir peint .un fils,
res
SerOlt-ce, en e
,
.
fous les couleurs les plus nOlres, ap
.Un neveu
11
fles & les ' plus .tet'ribles
,
&.
. d 'pofé
les p1us fiuneH
aVOIr e
cl
1
fi' d'une époùfe wmde
confidences ans e .em.
.
. . , _ r urie
r. fible que l'on pourraIt fubttement opere
\
.len
l
,
.
'11'
fi
1
.
g
_
tems
a
' .
que 'l'on . aurOIt traval e 1 on
reUl1lon
en articulant des faits graves, c'eft en indiquant la
preuve de ces faits !fi le pere accufe fon fils, s'il le
juge, des procédures légales & publiques n'avoientelles pas déja préparé & dévancé le jugement pafernel? le fils ne s'eft-il pas démafqué lui-même
dans ces lettres outrageantes qui font fortit;s de fa
main, dans. ces M ~moires calomnieux & diifamans
qui ont été publiés fous fon nom?
Qu'il ·dife tant qu'il voudra que toutes lettres
qui ne feraient pas des deux époux ,font abfolument
étrangeres à la demande fur 'laquelle il 's'agit de
prononc.er , puifque nul n'a pu légitimement engager le droit du tiers. (a) Qu'a-t _il donc à répondre aux lettres qu'il a lui-même écrites, qu'il
ne peut recufer, dans lefqueHes il convient de fes
torts, de [es. dettes, de . fa conduite fcandaleufe ,
de fa difparitioll & de fon commerce public ~ en
HoII<;lnde, avec une ,femme étrangere, de fes violences & de fes excès? Qu'a-t-il donç à répondre
aux profeffions de foi & d'honneur, qu'il a fi fouvent répetées de ne jamais approcher de fa femme,
que de fon aveu & de l'ordre de fon beau-pere?
rendre impoŒble?
.
l'
" , ~ifiànt de
Non ' dans.ce cas, les OIX, en gel
. '1
1
.
pronOJ ~
l'in'ullice des peres, ne fe haterolent P?S (e. . . a~
cer] fur le fort des enfaIis. Elles ne hvrerOIent p
. .,
(a) Seconde requête de M. de Mirabeau). l1l1pnmee
la page 67 des obfervatioos.
.
~u malheur & au défefpoir, une époufe trop au. tarifée à tout redouter & à tout craindre.
. Mais il s'en faut bien que l'on fait dalls une
lilppofition pareille! fi le pere accufe fon fils, c'eft
en . .
A
•
'
-
.
• ••
9;
A'
1
�.94 qUi. pa~Ie?t co~ t re ,l'
Ce ne [ont plus .des tiers
~.
r.
OU en lOn.nom
, c'dl lui-même qUI
l ' saccule, c eu:
r. de/nonce , c'efi UI-meme qUI re.
h.u meme' qUI le
gle- f011 fort & qui ditte [es. propres .enp~geDens.
Pourquoi d'ailleurs voudrolt-on ra~lrla • a cl a~lle
· beau 1e ,droit légal de
de M Ira
r. feillpreva
? l olr U JU.
r. n. ble des deux ram es.
g ement relpel-La
1 Jes peres ne:
1
l premiers Juges, es uges natu ..
·[Qnt-l sI pas esc. ns ? dl-il aux yeux de la nature,
tels de eurs enra.
,
.
1 1 r. .
. & delnœurs
taInt 1,
des 10lx
s , un T nbuna 1p us
T'b
.
r. fr n. & nlus religieux, que e
Cl una .
m~SIU~l-Lr
domefiique? . .
1 n. .
. Il eft fans doute malhe~reux que .es acres lU.
/.
d e ce Tribunal. fOlent prodUIts
grand
teneurs
' 1 r. au
a'
d
J.our. M aIS' r,C.al10I· t·il bIen reclamer a tan 10n. de
l'autorité civile, quand on a· voulu foul~ aux ~le, s
des conventions arrêtées par l€s .éP.ou~
protegees
ar l'autorittf paternelle? fallolt-Il ble~ ?ans une
pqueluon
. I l ' de mœurs ', fe .préfenter. aux
. Mlmfires
'1
' l des
loix avec tout . l"avantage qu'affurolt a a reC<lama.
tion de la Dame de Mirabeau, le vœu c?nnu de
la famille, le témoignage des parens, vrals Juges
'des mœurs?
A
•
A
•
•
•
1
Que veut-on, dire, ' ~uan~ Q~ a~ance que l'hon~
mur de deux cpoux ejl fllzdalre '
.
. ..
N'a-t-on pas craim, en invoquant ce pnncl}Je ,
d'y trouver un. nouveau. motif, pour la Dam~ d~
Mirabeal.J). de pourfulVfe" fa demande en fepa.
ration?
\
9>
. ' C'e!l parce que ['honnèur de 'deux eprrox cft
fllidaire pendant leur union, qu'ils font forcés de
la r~mpre ~ quand l'honneur ne permet plus de la
COntInuer.
. Et quel cft l'homme qui 'vient réclamer les
égards , les ménagemens , les convenances ?
C'eft celui qui n'a pas craint de compromettre [on
propre honneur par lès travers , & d'attenter à
celui de . [a femme par fel calomnies.
C'e{l après avoir outragé, ménacé, injurié, diffamé fan époufe dans des lettres & dans des Mé.
moires publics, qu'il oCe réclamer pOur lui &
pour lui feul, les prétendues reglesde la -décence!
il s'eft pertnis l'outrage, & il voudrait interdire la
'p lainte! tout· feroit licite, quand il diffame ou
quand il attaque. Alors il annonce hautement
qu'il ne doit aucun compte de fes lew'es miffives;,
de celles même qui renferment les plus cruelles
diffamations COntre [a femme; & l'on ne pourrait
fe défendre Contre lui fans indécence & fans crime! .
& la Dame de Mirabeau [eroit affreufement ré ..
duite à plier en filence fous le poids du malheur,
fous le joug de l'oppreffio n & de la tyrannie !
Quel étrange .l}ftême? Et quelle monfirueufe pré.
tention !
. Pouvoit-on pen[er qu'au fortir des pEifons de
Pontarlier, Ma de Mirabeau viendrait infulter à
J'ho1]neur de [il femme , & attent er J ' fa fûreté?
, Igrroroit-il que s'il n'e.xiftoit pas déja un juge-
�96
re'paration c'était uniquement par égard
d'fi'
ment en l i ,
our une famille malheureufe 7 &, par , e erence pour
~n pere dont on avoit cru deVOlf me1.lager la dou~
7
.
leur.
" " , rt
· D . de Mirabeau s etOlt ouve etnent ex1.a
ame
, ffi 1 d'
r.1
.
cl · le · tems filr la nece lte c ,erre Iepa_
'
l
pIquee ans
, d' "
bl'
d'
.' dont les défor res etolent pu les,
ree U11 malI
1 T 'b
't
't
pourfuivi
&
Hetn
par.
es n unaux.
.
& qUl e 01
,
l'
l'
.' r.
'
'pal' nt dlffimule ' ies. p al11tes penonnel.
EII enavolt
; & aucun Juge
1es , eIle a' voit propofé fes gnefs
fi r. ,. 1 . I l ' d'
\ m 011cle n'eut pu fe re Uier, a1,a JUIuce une
cl ans le
, 1
t'on
qlle la décence, , que a mrete,
rec~ama
l
. 1 que
1'\lOnneur , que toutes les., 10lX"&
f itoutes
' r. hl 'es con' · ations enfemble rendQ.1ent
ficl
1 er
. r Indl r.penia e.
La famille .de M,irabe",u le prelell~e . pour pre..
venir un éclat. Elle prie, elle in;ercede, eUe prûles
Ille t , 'elle conJ' ure , elle cherche
" il,'a remuer tous
r.
fentimens & à fe rendre intere~rante par les ma ..
'1heurs. Les chefs de cette famIlle f~ placent en:
tre la Dame de Mirabeau ' & les 100X, pour lut
offrir la jufiice . qu'elle e.ut pu Çe promettre, des
loix eUes-mêmes 7 pour lUI garantIr les effets cl une
féparation étenielle.
,
On céde, parce qu'il eut été malhonnête de refifier. On fe ' rend par générofité à des paroles.
fceIlées par la reconnorflànce & par l'honn,e~r;
" Que s~efi-il pafle. depùis lors? quel efi l evenemeut connu qui peut avoir changé l'état des c~o.
fes , & que l'on puifiè ' raifonnab}er.nent citer
.p our autorifer l'i!ilraétion des engagemens les plus
r.
i.,
M.
lacres
f
A
•
1
1
l'
rA
1
1
1
•
•
•
97
M. de Mirabeau efi enlevé au milieu de lès
défordres, pour être enfermé dans le Donjon de
Vince,nnes. On ne relâche enfuire fes fers que
pour lui ménager le moyen de terminer la procé- .
dure de Pontarlier. Il fe tranfp orte fur les lieux:
il ne fe jufiifie pas, il reconnoit l'impoffibilité légale de fe jul1ifier; il foufcrit une tranfactîôh flétriffante qui écarte cl. jamais toute idée poilible
d'abfolution.
Cette tranfaction efi palIee dans le mois d'Août
82
17 , & dès le mois d'Octobre ftlÎVâIlt, il
vient en Provence braver le public &: les Loix.
El1·ce donc ainfi qu'il prétend [e réintégrer dans
l'opinion publique? Quoi? depuis les excès qui
avaient déterminé fa clôture, il a toujours été ou
dans une maifon de fOr'ce, . ou fous la main de
la Jufiice! Aujourd'hui même il efi encore fou s
la main du Roi -' ou, par ordre du Roi, à la dir.
pofi,tion de fon pere! on n'ofe le livrer cl. lui-m ême!
& il ofe ' exiger qu'on fe livre à lui fans réferve !
il ne fait retentir les Tribunaux que du bruit de
fan autorité maritale! il attaque) il perfécute, i1
provoque!
Quel efi donc le Citoyen honnête qui ' peut
envifager toute cette conduite fans indignation ?
Avant que de parler de fon autorité, M. de'
Mirabeau devait jufiifier de fan amendement. Le
tableau effrayant de fa vie pafiëe infpiro it des
craintes qu'il devoit diffiper; avant que de former des prétentions, il devait au moins fe ména.ger des titres.
N
�8
" mIte" dune
1
. Il avoit reconnu lui - 9même,la' ,ne,ce,
,
longue & folide. II aVaIt
epreuve
d;necnt a ' la1 Dame .
de Mirabeau de marquer!a ,0,an,ce, a aquelle
il devait fe tenir; il s'étol~ refigne a tout; &
, fans aUCUn
Val'1a\ qu e fiubl' tement ~ fans 11ltervalle
, '1
c. ' nouvea u , fans aucune
raIt
, , garantIe,
d 1 veut,
' , avec
,
.111 d'ecence , donner la. 101 a ceux c. e qUi Il aVaIt
,
. d e la receVOIr.
II .veutd
rorcer
promIS
,
l " une reu.
L
.
r.
F.e mettre en pe111e
e
a
menter.
e
1110n , ~ans H
d d'
d
' pas qu'il. fait pour fe l'en re Igne e, fan
premIer
,
F.
les l
paroles
epOUle
, eft de fe J'ouer de toutes
'
I
'd ho n..
donnees.
meconnolt
neur qu "11 lUI' avoir
.
, tous
fes devoirs , &. ne parIe que de , fes pretendus
droits. Il infulre hardiment aux LOIX & aux per..'
fonne s.
.
M. de Mirabeau ne s'eft-ll don c pas ~pperçU',
que fes Requêtes précipitées, ~es MémOIres accumulés . fes provocations hofttles, fO,n t autant
de traits' d'audace qui l'accufent & qUI le c?ndamnent?
. ,
Que peut· on ef~érer d'un ~o,m,me qui ne fçalt
point refpeél:er la June ~enfiblIIte des perf~nnes
qu'il a publiquement , offe~fée s p,a r , fe s exces ~
par fe s fcandales, qUI 'crOIt en unpo fe r par fe ~,
jaél:ances à ceux qu'il n'a que t~'op long-tems allanné par fe,s égaremens , & qUi peut penfer que
l'autorité confacrera des démarches que l'honneur
& la Loi défavouent?
S'il fallait 'de nouveaux motif" pour jufijfier'
les répugnances de la D~ilne de Mirabea u ; elle'
. 99
les trouverait donc, ces motifs , dans l'aétion
que fan mari a ofé porter en Jufiice, & qui,
par le concours de toutes les cÏrconfiances , devient elle-même le plus cruel outrage & la plus
criante perfidie.
.
Cette aél:ion eft formée par un homme qui
Croit pouvoir s'armer de toute l'auto rité de la
Loi, 10rfqu'iI ne peut efpérer d'en obtenir la Con.
fiance, qui commande Iorfqu'il devrait [e faire
pardonner, qui pourfuit ceux qu 'il n'aurait dû
que flé chir, qui ofe invoquer la foi conjugale
apr(~S l'avoir fi indignement trahie, & qui imagine
de réclamer des droits) avant que d'avoir fait
oublier fes défordres . .
Et contre qui l'aél:ion dt-elle dirigée ? Contre
une époufe à qui le même homm ~ doit [a liberté
& même (on exiftence ~ qui [èroit plus tranquille
fi elle eut été moins généreu[e , & qui n'dt
payée de [es facrificcs & de [es bienfaits que par
l'ingratitude, par les manquemens de parole, par
la perfidie, par le fcandale d'une infiance forcée
en féparation.
M. le Comte de Mirabeau cherche inutilement
à s'envélopper dans des Mémoires étudiés qui,
à travers les exprefIions empruntées d'une fauilè
modération, ne refpirent que la dureté, la méchanceté, & le defpotifine. Le public éclairé a
déja percé le v oile. Il a reconnu l'homme dont
M. de Mirabeau pere lui-tnême difoit en 177 8 :
dans le fonds, ma chere fille" vous connoiJJe'{
N2
•
�roo
le fol à qui nous allons à faire: Faut - il ~t,.è
finfje , loup, ou renard, ,tOllt IUl eft égal, rien
ne lui coûte.
b'
cl fi its com b'len d'intrigues, C0I11_
Cam
e a , ont déja vérifié ces trifres
bien
de len
manœuvres
annonces
!
d l'illufi~n eft: pallë.L Les griefs
M .s le tems e
al
Mirabeau font connus. es preuves
de la Dal?e, de -ées Elle propofe, pour moyen de
en font developp. . tiere de fan mari.
1'.'
t'on la Vie en
. ,
lepara
l,
. fils , mauvaIS
. clepoux, mau11- été mauvais
" C
toyen
angereux.
' a
mauvaIS
l , fUJet
& fi'
vaisMpere ~ fil'
l'a vû par tès folles
ba es
auvaIs s. on
'
cl 1'.
'
d'evorer le patrimoIne , ed' wn pere,
d' Œ tlO11S
f
t Ipa,
des procès 111 Ignes , atroubler fon ~~pos/ar, 11 llè par le fpeB:acle de
& humIlIer la viel e
fi ,
à fan honneur par
{èsIgertravers ~ & atten ter 'uême
,
d'infâmes, lib,elles. . ï ., refipeB:é dans [es fuMauvaIS cpoux, 1 n a . , 'd [, fi
'1 fi 'blefiè ni la fenfiblhte e a emreurs , ni a 0 1 ,
'fi été le tems de fa grofme il n'a pas meme re pe,
, - barbare
r. ffi" 1 [e faifoit une habitude, un Jeu
le e, l
, ,
cl fi pçons de menaces
',s de brude l'accabler d'InJures , e, o,u l
& de coups; il s'eft: porte a (es e~ce a ulace
talité & de jalo~f~e que la pl~;s ~1!~X p f~nilles
défavoueroit, qUl lont connNus
'"
II a per'1'.
t atteft:és par la otonete.,
,
&
qUl Ion
C· Il '
t donnee ,
fécuté la Compagne que le le ut ~V~l outraO"es ,
ar des excès en tout genre, par (e, fc . D
.
des diflàmations atr?ces. Il a profane la alIl teté
du mariage par des CrImes.
~ar
-•
•
101
, Mauvais p'ere : quel fort, quel avenir, préparoit- il à cet être innocent dont il ofe invoquer
les mânes, comme pour infulter encore à la douleur maternelle! des exemples funefres & humilians,
Une fortune ruinée, un nom avili & dégradé,
le malheur entier de deux familles: voilà les
bienfaits qu'il lui deftinoit.
Mauvais citoyen & fujet dangereux: toute fa
vie ne préfente qu'un tiilù de dettes baffiment
contraaées , d'enfjagemens oubliés & mépriJés , de
folies, de violences, de défordres accumulés. Il
a attenté à la propriété d'autrui; il a porté la
ruine & la défolation dans des familles étrangeres ; .
il a déchiré & diffamé des citoyens honnêtes. II
a été flétri par des décrets, par des procédures.
par des Sentences infamantes.
Voilà l'homme dont la Dame de Mirabeau
demande d' être féparée. Voilà l'homme qui ofe
, attefter le principe que l'honneur de deux époux
efl fllidaire, pour forcer fon époufe à partager
fon infam ie. Voilà l'homme qui, fous les yeux
même de la Juftice & au nom des Loix,
vient avec audace demander fa femme, la menacer même pendant procès de la" plus aufrere
clôture, & réclamer ce qu'il appelle fes droits
(J' epoux.
1
Ses droits! . Et quels droits peut donc avoir,
c;elui qui n'a jamais connu de devoirs, qui s'eft
joué de l'honneur ', de la bonne foi, de la, vertu?
qui n'a refpeété ni les liens de convention ~ ru
�rol,
r. a ou de la nature " & dont le
ux du lan
'r caraC4
ce fi1 connu/:) & tant de fois éprouve prClente
U11
tere
7
.
ble a' t0 ute. reumon
.Ir
r.
.
'b'
obftacle l11[unnonta
f1
d
l
J
uO"e
qUI
Oieroit
auez
al
Q ue l elL onc e b
Il
r . . 1.
d'UpOIe!
r r, du fort d'une ma r
leureule
VIC..
tralrement
',
,
ume
pOUt l a l'IV rer à Ull caraB:ere reroce qUI a:
7
menacé la [oClete .
d' Il d'
one
La D ame de.Mirabeau ne Olt·ee d
l 'pa~il .
fe promettre ave c confiance le ,[écours es OIX.
' dre que les Tnbunaux protegent
Peut-e il e Cl'am
1 d'
preŒon
e erep , l'abus d autonte,
1"
l 'cl
au ace, l'o
l'hoIlneur,
contre '
Innocence,
glemenc~ , con"re
L
M
f1
'
contre les mœur s publlques ? Les
" • aglurats qUI:
, t ga rautir la ffireté du mOllldre
citoyen,
cl OlVen
"
, ne
1
(e [ont - ils pas également engages a garantir a
1
,
r
10 1
•
'1
1
" 1
fiœnlle ?.
.
'
.
r'.
On la menace, pendant l'mftance en lepar~tlOn,
de la forcer à [ouffrir les regards & la pre[euce
d'un époux' dont elle dévore les manqu~lUens &
les outrages, de la réunir ~ême ~vec lUI, .ou de
l'en[evelir dans une retraite qlll ne ferolt ouverte qu'à [on perfécuteur ~ à fon tyran: Peut.
elle donc craindre que le }ugement meme .du
fonds en précéde l'infiruB:iOl1? Pe~t - e,lle cr~m
dre d'être condamnée, avant que d avoIr pu legaIemel1t être entendue &: jugée?
A
MARIGNANE DE MIRABEAU.
CONSULTATION
Vu
le i\1émoire ci - deftus.
LES S'OUSS'I GNÉS ESTIMENT qu~avant
d'examiner quels fo~t, ou quels peuvent. être les.
--droits de la Dam~ de Mirabeau, pendant l'inf_
tance en féparation, il faut pefer les principes,
les faits & les preuves qui doivent fix'er la dé-.
ci fion des Tribunaux fur la néceŒté même de la
féparation demandée.
.
Dans nos mœurs, no,us n'admettons pas le
divorce. Notre Jurifprudence a con[acré le principe de l'indifIàIubiIité du mariage.
» Mais les Loix, dit un Ecrivain de ce fiecIe,
» qui dirigent les aB:ions des hommes, ne chan» g.e nt pas leurs çœurs : en 'prbnonçant que deux
)) époux feruient liés<en[emble ju[qu'à la mort de
» l'un des deux, elles n'ont pû prévenir la né» 'ceŒté de rélâcher quelquefois ce lien, quoique
n fans le rompre, & d'écarter l'un de l'autre,
» 'deux êtres qu'une proximité immédia te rendoit.
n réciproquement malheureux. C'efi ce qu'on ap-
�rol,
r. a ou de la nature " & dont le
ux du lan
'r caraC4
ce fi1 connu/:) & tant de fois éprouve prClente
U11
tere
7
.
ble a' t0 ute. reumon
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obftacle l11[unnonta
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uO"e
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Q ue l elL onc e b
Il
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d'UpOIe!
r r, du fort d'une ma r
leureule
VIC..
tralrement
',
,
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pOUt l a l'IV rer à Ull caraB:ere reroce qUI a:
7
menacé la [oClete .
d' Il d'
one
La D ame de.Mirabeau ne Olt·ee d
l 'pa~il .
fe promettre ave c confiance le ,[écours es OIX.
' dre que les Tnbunaux protegent
Peut-e il e Cl'am
1 d'
preŒon
e erep , l'abus d autonte,
1"
l 'cl
au ace, l'o
l'hoIlneur,
contre '
Innocence,
glemenc~ , con"re
L
M
f1
'
contre les mœur s publlques ? Les
" • aglurats qUI:
, t ga rautir la ffireté du mOllldre
citoyen,
cl OlVen
"
, ne
1
(e [ont - ils pas également engages a garantir a
1
,
r
10 1
•
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1
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fiœnlle ?.
.
'
.
r'.
On la menace, pendant l'mftance en lepar~tlOn,
de la forcer à [ouffrir les regards & la pre[euce
d'un époux' dont elle dévore les manqu~lUens &
les outrages, de la réunir ~ême ~vec lUI, .ou de
l'en[evelir dans une retraite qlll ne ferolt ouverte qu'à [on perfécuteur ~ à fon tyran: Peut.
elle donc craindre que le }ugement meme .du
fonds en précéde l'infiruB:iOl1? Pe~t - e,lle cr~m
dre d'être condamnée, avant que d avoIr pu legaIemel1t être entendue &: jugée?
A
MARIGNANE DE MIRABEAU.
CONSULTATION
Vu
le i\1émoire ci - deftus.
LES S'OUSS'I GNÉS ESTIMENT qu~avant
d'examiner quels fo~t, ou quels peuvent. être les.
--droits de la Dam~ de Mirabeau, pendant l'inf_
tance en féparation, il faut pefer les principes,
les faits & les preuves qui doivent fix'er la dé-.
ci fion des Tribunaux fur la néceŒté même de la
féparation demandée.
.
Dans nos mœurs, no,us n'admettons pas le
divorce. Notre Jurifprudence a con[acré le principe de l'indifIàIubiIité du mariage.
» Mais les Loix, dit un Ecrivain de ce fiecIe,
» qui dirigent les aB:ions des hommes, ne chan» g.e nt pas leurs çœurs : en 'prbnonçant que deux
)) époux feruient liés<en[emble ju[qu'à la mort de
» l'un des deux, elles n'ont pû prévenir la né» 'ceŒté de rélâcher quelquefois ce lien, quoique
n fans le rompre, & d'écarter l'un de l'autre,
» 'deux êtres qu'une proximité immédia te rendoit.
n réciproquement malheureux. C'efi ce qu'on ap-
�104
" pelle réparation de corps. C'eH un moyen de
») concilier à la fois la rigueur du précepte 8(
» l'indulgence due à la foiblefiè humaine. C'eft
» un demi bienfait qui épargne au moins à la
)~ {aciéré , des fcandales , & aux époux, des tour:.
» mens. ))
Aucune Loi précife n'a determiné les caufes. de'
réparation.
Nous fçavons feulement que la dignité du
mariage) la tranquillité des familles & les bonnes
mœurs ne comportent pa& qu'une féparation
foit prononcée fans caufes ou même fans canfes
graves.
, Quand il s'agit enfuite de raifonner fur une
hypothefe donnée,. on difcute les circonfiances &
les faits artic;ulés' ;' on combine ces faits avec la
qualité des p:erfonnes i on ' cherche & on indique.
les réfulrats; on fe décide fur.l'enfemble de toutes
chofes.
Dire en général qu'une féparation ne peut~
être demandée qué pour fiviees & mauvais rraitemens , c'efi ne rien dire du tour. Sous les mots,
flviees & mauvais traitemens, on comprend in··
définiment tout ce qui peut juflifier la répugna;;u;e invincible d'une femme à rentrer dans le
lit conjugd.
'
Il efi- ges faits qui font de nature à attaquer
l;exi.fience phyfique. 1,1 en ea: d'autres qui camprpmettent l'exillence. ' morale. Tous font ou,
peuvent.
r05
peuvent être matiere à féparation s'l'ls r:ont g ,
J1.'
,Il
raves
·
& blen
conllates.
» Il faut filÏvant le Droit Canonique, dit La» combe, (I) que les févices & mauvais trai» temens , pour
opérer la féparation de corps,
,
~) ayent ete capables de faire crail1drepour la
» VIe de la. fel~me " & qu'ils ayel1t mis fa vie en
)) danger; malS fllvant nos mœurs cela ':fi
» pas, requis, il./ùflù que les faits foi;nt gra~e:
» qu'ds
& z'zfi'
,on rendent
' la .'vie infùpportable
/~
n nzment'
)) tn),e & difgracleufe. »
Cet Auteur ajoute qu,'il faut m'air égard aux
perfonnes
, & que ce qUi ne J.Îerolt pas un moyen
d ('/'
e J eparatzon entre gens du commun
'entre
f per
ionnes d'une cOl1diez'on ' plen peut
fierVlr
us re1evee.
)! Entre, perfonnes d'une condition difi:inguée
» dlt COChlll, (2)
on n'exige pas q ue l es VlQ"
,
)) l ences du man ayent été portées ]'llfcqll'à fi _
» per fi fi
l ' ,
rap
a emme; es lllJures atroces, les procédés
» durs ~ barbares, les menaces, les OlJ,traaes
» ont toujours été des motifs filflifants pour fé» parer une ,femme qui n'e{t pas née pour ianguir
» dans un etat fi cruel. . . . . .
.
» La qualité des perfonnes , continue le même
» Auteur, efi une clrconfiance importante, parce
1
(r:)J
,patieres Civiles 'au mot SéparatiPn, part.
omo 4. pag. 1°9. & II 1.
o
1.
1,).9__
�'106
)') 'que dans -des p-erfonnes ~ans education, On ,d~it
)} attendre moins d'attentIOn de la part -du man,
Oins de fenGbilité de la part de la femme.
,» m
, d' '1
l
» On tolére donc bien plutot e .' eUT part que.
ortemens ' ' 1
'f'tueIques
vIOlences,
n ques em P ,
ft
cl'
d'quel.
,
) ques excès, mais entre per onn~s " u&11e dCOl1h' ~.tlOn
bie les preuves de meprlS 1 ef taIne,
» honora,
'
)} les infultes , les injures atroces ~ a 1 p~: 'ecu·
H tion habituellè fu$fent pour operer a lepa.ra..
» tlOn. »
.
. .
Argou, (a) attelle pare1'l1eme~~ le prInCIpe,
qu'il faut apprécier la n~t~re & l Importance des
.r 'ts etl épaid à la qua lue des perfonnes, & que
laI,
0
d fil
.
,
ce qui ne fera pas une calife eh .,r:f.aratiJJLO? l'm·
fonnabie entre des peTfonne'S de • ajJ e 7141 , ~nce ,
pourra l'être e{1tre des perfonnes dune qua Ille plus
r-élevée.
,
De-là Pothier (h) obferve: qu'o~ per-tt dire en
général qu'on doit ftparer d'habitatlO,n une f~mn:,e
torfqu'ell~ a confidérabl;men~ à (al/if:zr ~ 'qUOiqU Il
ne foit pas faCIle d~ determmer le degre '~e ce qU,e
la fem!11 e doit a~oir à fluff,rir pour 'qu'd :JI ~zt
lieu à la [éparatIon, nt d applzquer -ce p-rwczpe
aux différenTes citconftarrc;s d~ns lefqueUes (e
donnent les dem'Qlfdes en [eparatzon.
•
(a) Infiit. au Droit François. tom. 2. liv. 3. chap.
ç~g. Q..16 ~ fuü,v~
20.
•
( b) Traité du contr.at de m~ciage,
chap. 3. ~t. I. §. I. pag. 179.
tOl1il.
'2. -Pait.t•. 6.
1°7
Ce ferait doncméconnoître évidemnaent la figl1Îfication légale des mots jévices & ma.uYals tmitemens que de lrmiter cette fignificat!(:>n aux coups
ou aux voyes de fait d-ire8eluent dirigées Contre
l'exiilence phyfique de la perfonne qui [e_plaint.
Le vrai principe de la matiere eft ql!l'il faut
péfer chaque hypothefe, que ce ne font pas précifément tels faits déterminés qui peuvent [euls
opérer une féparation, mais que c'eil toujours à
f équité & à la prudence du Juge à prononcer
convenable~nent ,dans chaque cas particulier, feloIl'
les circonilances ,- & les perfolli1eS , fur les faits
préfentés comme caufes de féparation.
Il en eil des (eparations entre conjoints" comme
de tous les objets qui tiennent principalement ~ux
mœurs. Il efi impoaIble que de pareils objets, [oienr
précifément réglés par des Loix. Elles ne pourroient
entrer dans des détails qui compromettroient leur
augufie fimplicité. Elles ne pourroient marquer
des nuances qui fOllt différentes dans chaque con.
dition. Elles ne powrroient enchaîner, fous des
points de Vue fixes & généraux, des circonfi:ances
qui ne font jamais les mêmes & qui varient dans
chaque hypothefe particuliere. Il a- donc faUü
abandonner tous ces objets à la fagenè & à la
jufrice des Tribunaux.
On fe tromperoit pourtant " fi on alloit croire'
q:ue la matiere des réparations eil -purement ar-bitraire. Rien ne doit l'être dans tout ce qui in. '
téreŒe le bon ordre & l'honnêteté publique. A
02
�108
défaut de loix J nous avons des ,OpInIOnS autoriLees, des exem'ples reçus, des deCIfio?s refpeéh.
bles, des regles cO!lfacr~es par la J unfp~·udence ,
des principes avoués 9Ul ont f~rce . de 10 IX.
L'objet des féparatIOns ~ft IIlcon:efta?lement J
comme nous Favons obferve, de prevel11r le malheur de celui des deux ép~~x qui fouffre. ~ qui
fe plaint. Des raifons pol,ltIques ou. rehgleuf~s
ont pu faire ordonner qu~ 1 Union conJ~ga l~ fe~Oit
indiilûluble. Mais le drOit naturel, qUi veille a la
con[ervatioll de tout être fenfible, & que les loix
politiques, religieufes & civil~s ?e ~euvent jamais entierement étouffer, a faIt etabhr, pour le
foulagement de deux époux malheureux l'un par
l'autre, une forte de divorce fi éhf qui allége le
lien du mariage, ·quand les circonftances r endent
ce lien encore plus infupportable qu'il n'eft folide.
D'où il réfulte évidemment que toute queftion
de ftparation emre conjoints, eft une véritable quef.
tion de mœurs, qui peut influer fur l'état civil des
perfonnes, mais qui eft principalement fubor:c1onnée à leur bonheur moral. Conféquemment, en pareille matiere, le vrai principe de c1écifion eft
dans le cœur des gens de bien , dans la fenfibilité
bien ordonnée . des hommes juftes & raifonnables,
dans cette eftimation commune qui ne trompe pas
& qui ne peùt tromper, qui préfente la plus fûre,
la plus impartiale de toutes les regles, & qui eft
comme le réfultat indélibéré de. ce que chacun
éprouve, quand on met fous.. fes yeux le malheur
,
1°9
•
ou la trifte fituation de fon ~mblable. Le Magiftrat à cet égard n'eft que l'interprête des affèétions ou de la fenfibilité générale. Il eft, au nom
de la loi, l'organe refpeétable de l'honneur, de
la délicatelfe & de l'humanité.
C'eft ce qui a fait dire à nos meilleurs Auteurs,
donc nous avons déja rapporté les doétrines , que
lorfqu'il s'agit de prononcer fur une dem ande en
féparation J il faut elIèntiellement ex miner les faits
qui fervent de bafe à cette demande, & . fur-tout
QI/oir égard à la condition des parties, parce que
chaque condition a des principes qui peuvent modiner diverfement la maniere de voir & de fentir,
& tout ce qui contribue au bonheur ou au malheur de la vie.
Ainfi pour nous r'éfumer fur les principes June
féparation llepeut être ordonnée fans caufes &
fans caufes importantes. Mais ces caufes ne font
exclufivement & par forme de limitation, déterminées pa.r aucune loi. Elles peuvent fe diverfiner à l'innni, comme les pallions même qui le,
produifent. Il fuffit, fous quelque forme qu'elles
fe foient manifeftées, que rélativement à l'état des
perfOll11eS & à toutes les circonfiances, le M agiltrat fage, honnête & fenfible, puilIè fe croire
autorifé à venir au fecours de l'époux qui réclame
fon autorité.
Cela pofé, parcourons les faits principaux de
la caufè.
La Dame de Mirâbeau fe plaint d'une diffama-
�III
IIO
tian cruelle; & elle produit e.~ preuve de cette
diffamation, un Mémoire publie {?us le .n~m &.
pour la défen{e de fan lliJa:ri contre 11nt~l'"d}éhon de
biens qui avait été prononcée contre ltu. Elle pro-,
duit encore pluiieurs lettres de {0~1 beau-pere, d;{quelles il réfulre que le.s cal~l~n!eS ;", renfermees
dans le Mémoire, aVOlent ete 1l1ferees dans· des
plaintes manufcrites adreBees au Minifue par Mr.
de Mirabeau~
Quoi . de plus grave qu'un pareil fait ?
M. de Mirabeau répond: rai défavoué dans,
mes lettres à mon beau-pere, à ma femme tOIlS Mé.
moires dont elle aurait à (c pfaidre, comme indignes de moi, comme ~njurieux .p~,ur moi; (a) C~
défaveu eft rejIé ,fa:zs repon/:: 7' 1:"5 ) ,en. devo:s c~n
dure que ma famd[e adoptive en elOU .(au.sfà.zte.
J 'ajoure quant aux lettres q.udc~nqlles qlle ) al p.lI
écrire aux gens en place, & qu on attefle, que Je
n'en dois aucun compte, (oit parce. que des lettres
mi[Jives font fous la garde de la. foi pub! ique ,
fait pa r.ee que tles plaintes m~me, mais dépof!es
dans le foin... des Miniflres du Roi " ne fçaurolent
pajJer pour des diffamations.
Mais que ferait-ce donc qu'un' défaveu. fecret
auprès d'une calomnie publique ?
Un MémoiFe diffamant était difiribué dans la
fo ciété, il était répandu dans tout le Royaume & .
même dans les Pays étrangers, & on {e contentait de le dé{avouer dans des lettres écrites à la
fa~ille que ce Mémoire outrageait! & on ne faifaIt aucune démarche publique & légale pour arrêter la diffamation! & on laifIait le poiron de la
calomnie {e diltribuer & fe répandre par-tout! &
on ne travaillait point à détromper le public la
fociété!
'
Le défaveu, ajoute-t-on, a demeuré fans réponfe; d'où l'on devait . condure que la famille
en était {atisfaite.
?n ,eut bien .mieux ,~ait d'en conclure qu'elle
ne 1 etaIt pas. SI le deiaveu a demeuré [ans réponfe, c'efi qu'il ne préfentoit qu'un aél:e {ans
effet; qu'y avait-il donc à répondre à Ull dé{aveu
{ecret qui laiifoit {ubiifrer toute la publicité de
l'outrage?
Un mari n'efi-il pas le protetteur -' le défenfeur né de {a femme? ne doit-il pas par deyoir .&
par état venger l'injure qui lui efi faite? S'il
diiIimule cette injUl'e, il la partage. Les lou tonnent, contre un époux qui ne s'arme pas de toutes
{es forces & de toute fa puiifance po.ur protéger
ou pour ,"enger la compagne .que la Providence
lui a donnée. Elles le punifiènt, par la perte de
la dot, d'un lâche iilence : ei qui mortem lIxoris
Mn .deffer.zdit., lU indigno dosattfertur. (a) .
•
(a) Page
•
•
22
du Plaidoyer.,
(a) Leg.
20.
ff. de his qua: ut indignis.
�Il2
rq
fi vrai
qui
Ce texte, 1'1 e
, ne parle qu'e' du
r .mariM'
, pour fiU1VI
' , la mort de fon epoule.
aIS
n'a pOInt
U'
, ne dOlment -elles pas également
a\..LlOn au
les 10IX
c
'c dre l'honneur
de la lemme,
pour
man, pour deren
"
l '
'Il
'r.
éputation bien toujours p us pre.
vel er a la r
'"
7 ( )
,
elle que la Vie meme. a
CleuLX pour, ' I l il pas même le premier offenfé
e man n eH, fi '1
dans la perfonne de Jà femme, (b) ? e -1 pas ,apllxons ?
pe Il e' par l e droit arbuer
' (amœ,
.
, r.Vindex
' fl'
a la pUluance , ne
N e renonce- t - il pas IUl-meme
.
" ' 1 ' li
cl
'1
s
toute
communaute,
s
1 neg ge
rompt-l pa
cl r.
l"
&e
Ite ,
remp 1·lI' un devoir inféparable de la
1 qua
r. " ,
qUl' d"enve de l'efiènce même e a lOclete coujugale?
"
. Le Mémoire public, qu on ne défavouoit ,qu,e
fecretement, fe trouve foutenu par des lettr~s ecn tes à des hommes en place qu'on ne defavoue
• e pas. Je ne dois aucun compte de ces lettres
mem
:rr. ,
dit M. de Mirabeau, parce que des lettres mZJJt-
à des hommes en place ne font pas une diffama":
ves font fous la garde de la foi publique ~ ''par ce
que des plaintes même dépoJé.es dans le few. des
M iniftres du Roi, ne /faurolent paffer pour des
diffamations.
, .
Eh! quoi? des lettres ou des plaintes portees
(a) Lacombe, Matieres criminelles ,pag. 160. Serp. ,
Code criminel, tom. 1. pag. 37 ~.
(h) Brillon, au mot injures a. femmes & à filles.
des
,
•
tion? Quelle plus cruelle & plus dangéreufe diffamation que celle qui tend à perdre une femme,
un citoyen quelconque, dans l'opinion de ,ceux qui
font à la tête du Gouvernement, dans l'opinion
du Souverain lui-même! des lettres adreifées aux
Minifires , donnent aétion en Jufiice à ceux
qu'elles offenfent. Elles autorifent la réclamation
aupn~s des Tribunaux. Combien de procédures
criminelles confirmées par des Arrêts de la Cour,
prifes à la Requête de ceU2\: qui fe trouvoient
injuriés dans de pareilles lettres?
Peut-on d'ailleurs regarder comme pieces fé, cretes, des lettres qui ont été divulguées, des
lettres qui ont fervi de matériaux à un Mémoire
public, des lettres qui auroient été il la difpofi _.
tion du tiers., des lettres qu'une main indi[èrete
pouvoit fi facilement rendre publiques?
. En elles-mêmes, les calomnies .dent la Dame
de Mirabeau fe plaint, font affreufes. Elles font
aggravées par des réticences atroces.
Ici je me rappelle que j'ai dû VOlIS parler de
Madame de Mirabeau, & lin refte de fènfibilùé ;
peut-être bien placé, m'a fait éloigner ce moment
autant que je 1'ai pu . ...•. Hélas! Monfieur,
elle eft la mere de mon fils, il eft des chofes
que je dépoferois dans votre fein , il eft des
chofes que je ne craindrois pas de dire à VOllS., pere
des citoyens & le plus vertueux de mes compatriotes: mais qu'oferais-je écrire? Ce qu'efface-
p
�,-
Il4
-
.
, "
-- cl l honte & aù rléfèfpOlr. ... :
. -'
i:oient
les n(lI~mes
e a 'v Jf;rerie"'l vOlis-même
d'at_
'
,
leur VOlIS en
•
_ .
:Ahd. ;m
Mo tflnt &' de puze
" , Z VOlIS connoij]ie'{ toUte
.
urt rI» - e m e .
Celle qUl me
1
l'étendue de mon m!0&rw :<1·vie·.:::: ••. . Ne peut
1
d .
1 lIII' a d'eolt W..l I .l', .honneur. ue mon peree
rien pOCl~ mal , PP:ifJe~l-il la défendre al!!Ji des
"endu . ...•. " .
dl h'
J'
,
. [ dOIvent t:C lrer . ....•
remords 'Juz ailleurs' Mail beau'pere . ....•
'.
.
O ft encore a
n. l[ oh:ie trop pour lw plonger un POIAh! Je e r Pec. ,
Mais
je diJois lin
gnard dans , rifpeae'{ {ecrets
mot . . '.' " . •
ue vous ne connoiffe'{ que
domeft.lqdues d& Cf;;alheurs. Mon beau - pere eft
le mOin re e me .
.z t:. d '
~,fi
pas
par
moi
qU'l
jera
etrompe.
tromn é Ce· n eJ >
II
_ .
r
.
perte
à
rwe
te
e
extremlte;'
Je pré'lèl erOtS ma
. que
:J'
lIlT d
aH
lYla
ame de Mirabeau 0 e pamure,
l .
m , lie prbPére lme plaime, que cette /lP aznte me
'J'
ft:.,(J. prete
qu e
[Oit communiquée , m~ reponje eJ> . " . as
Rapporter de pareilles horreurs , n dr-ce p
. prouve, qu'ell..,s
offrent
aVOlr
'"
. le plus cruel de tou.s
f'J'
, & le plus ternble de tous les mauvais
l es leVIces
fi
1~1F'M;s' j~!!;es
Ze~
1
l
>fi-
'
1
1
tràitemens ?
.
<1'e:;
On n'~ jamais douté en drolt q,ue la. 1 a~l~~
tion ne foit un moyen légal de [eparatlOn.
.
concompro'met l' honneur, la reputatlO.
7'l ~ cette J uriffidéraliotn fiâr-enfe (ans Zaq'œlle, dirent .}e.s. &
tOl1[ultes une fie'mme 110 n n êee ne petit
. VlVI e , 1 l.
dom Za p~rte ~fl ~enfl.e ,lui ren~r~ lI'ljùppenave
. à jamais, ie nlnn quz l en a pn ;ree.
1
•
Il)
hrutalit~ fanguinaire qui Compromet la
» vie, di[oit un défen[eur célébre, on ~ joint
» A la
) la groŒéreté injurieufe qui attaque l'honneur;
» on a jugé que dans les Cla1fes élevée~ de la
» fociété, ce fentiment délicat qui parQit en être
» l'ame, devoit fuivre les mêmes Loix que le foin '
» de la confervation qui anime lX vivifie les
» autres; On a pen[é qu'un mari capable, dans
» un certain rang, de flétrir la gloire de fa com_
» pagne, l'auroit été dans un rang plus vil,
» d'en attaquer les jours & qu'il méritoit par
» con[équent d'encourir le même chatiment. n
Le langage des Jurifconfultes efi uniforme fur
1)
cet objet. » Un mari, dit M. TerraiIon
» ne mérite pas de demeurer avec une femme
» qu'il a déshonorée. II s'exclut lui-même de fa
» compagnie, en attaquant fon honneur, parce
» qu'une femme n'ayant rien de plus cher que
» la réputation, c' eil: l'attaquer par l'endroit le
}' plus fenfible que de vQUloir rendre fa vertu
» fufpeéte. »
,e
Le même Orateur, qui dévéloppoit ces principes pour une femme qui [e plaignait des outrages
de fon mari & qui obtint g,ün -de .caufe, ajoutoit: » Quelle é!utre réparation une femme peut-:» elle efpérer contre fon marÏ, què d'en être
» féparée ? Elle feroit très-certainement en droit
» de pour[uivre par la voie extraordinaire, un
(1) Pap.
29') •
p z
•
�Ii6
» étranO'er qui lui aurait fait une tèlle' i;lfttlte.
s bienféances du mariage ne permettent pas
» Le
, . Il
.
urfuivre ' Un mari cnlllllle eme~t; malS
po
d
» e
'r.
& a\ q~elle
» du moins l'aétion civile eft permae ;
» fin le ferait-elle ~ fi ce n'eftpour parvel11r à
» la féparation ? 1) ,
,
Les mêmes prinCIpes furent atteftes par M.
(1) dans une caufe Oll
la femme
d 'Ao'bUefreau
IH
,
.
"..
de nandoit d'être féparée pour aVOIr ete InJufieel t accufée par fan mari. » Pourra~t-0fi refufer
111 n
. , r. Ir.
d'
.
)) à une femme accufee lauuement . un cnme
» capital, diroit ce grand Magifirat? la jd~fie
)) ratisfaétion de re réparer pour tolllours .un
)) mari qllÎ a voulu la déshonorer par tl.ne ca» lomnie atroce ' ? L'obligera-t-on à 'foutel11r pen» dant toute fa vie , la . vue & la: préfence de fon
» accufateur? Et les expofera-t-on l'un & l'autre
» à toutes les ftlÎtes funefies d'une fociété maIn heureufe qui ferait le fupplice de l'innocent
» encore plus que du coupable? »
A la vérité, la Dame de Mirabeau ne fe plaint
point d'une accufatio? p'o~tée contr' eI~e en J 1I~
tice. Mais elle fe pla1l1t dune accufatlOn portee
aux Minifire~ dû Roi; elle fe plaint d'une diffa- .
·mation publique & conféquemment d'un aéte bien
plus illégal, bien plus üljufie, bi~n p~us, ~ruel
que ne pourrait l'être une accufatlOn Jundlque
•
(1) Tom. 3. plaidoyer 34. pag. 178•
•
II7
qui du moins laiiIè toujours les Loix entre l'accufateur & l'accufé.
, Mais 'qu'a-t-on befoin d'invoquer des textes '
& des doéhines pour établir que la diffamation
contre la femme eft un moyen de féparation ? tJ ne
femme pourrait-elle fans fe compromettre & fans .
s'avüi~ elle-même, rejoindre un mari qui la calomnie & qui la déshonore ?
. Le mariage dans l'homme eft bien moins l'union des cO/ps que celle des eJPrits & des cœllrs~
(1) C'(ft de l'accord des volontés, c'eft de l'honneur, c'eft de l'affe8:ioll maritale, que ce contrat tire toute fa force & .toute fa dignité,
trimonÎum facil deflinatio animi, quam mox fequùur IlOnor & maritalis affeaio. Ce ne font
point les cérémonies, ou les conventions écrites,
c'eft la foi qui fait le !nariage ; & la compagne
qu'un homme s'aiIocie, a des droits facrés à
l'attachement, au refpeét, à tous les fentimens
honnêtes de celui qu'elle . confent d'avoir pour
époux, honore pleno uxor diligùur. (2) La qualité d'époufe eft fi honorable, fi fainte, fi reverée par les Loix, que, fuivant leurs expreiIions ,
ce n'eft point la volupté, màis la vertu, mais
l'honneur même qui fait appeller une femme de
ma-
( 1) Raviot fur Perier ,Arrêts notables, tom.
pag. 92.
( 2) Cujas ad leg. J'l. 1f. de donationious.
1•
�118
noIn uxoris nO/pen, honoris non volaplatis
ce'men Donc tout attentat à l'honneur de la femnu
.
.
h ' '1
eft une violation des drOlts attac es a . a
me ,
'1 F:'
, & '
qualité d'épou,fe , . un attentat a a lamtete
a
la dignité du manage, un renverfelUent abfolu de
l'ordre & de l'e!lènce même des chofes.
Faut-il raifonner dans l'hypothefe où l'on ne '
rencontreroit pas les caraaeres d'une diffamation
publique? On n'en fera pas plu~ a~ancé. ~~1 mari
eft comptable à fa femme de lopl.non qu Il manifelle fur elle. De quelque mamere que cette
opinion f?it connue, & fous quelque forme .qu'elle
fe produire au dehors , dans des lettres mlilives ,
dans des confidences fécretes à des tiers , ou autrement, elle n'en fait pas moins une plaie profonde dans rame de l'époufe qu'elle jette dans la
plus trifte méfiance & dans la plus affreufe humiliation. Comment cette époufe pourroit - elle
déformais foutenir la préfence d'un Mari qui
la méfellime , & qui n'a pas craint de le déclarer?
Sans doute la diffamation eft un crime qui
ble!lè la Police & le bon ordre. Maison n'auroit pas befoin d' n crime aufii atroce pour faire
prononcer une féparation. Car on ne juge pas
des caufes de fépar'a tion entre COTljoincs par le
l'apport que ces caufes peuvent avoir avec l'ordre
général de la fociété, mais par celui qu'elles ont
avec le . bonheur ou avec le malheur particulier
des époux ~ ce n'eft point pour l'exemple ni pour
CI 19-
.
l'é~ification du rublic que l'on féparé deUx époux
qUl ne peuvent VIvre enfemb1e; c'efi: pour les fouf;
~rai~e au~ ~angers d'une cohabitation forcée, que la
)uftlce relache les nœuds de l'union. conjug;Û e .
» La Loi de ~race.' ~it. Bafnage, (1) ayant
) rendu le manage ll1dliloluble parmi les Chré» tiens & la licence du divorce étant abolie
) il était jufte de donner quelque fécours au~
n femmes malheureufes & de les délivrer en quel~
» que forte de la captivité de leurs maris, lorf» que leur mauvaife conduite ', leur violence, ou
» leur humeur fâcheufe - & bifarre rendaient leur
» c,onditio? mi[é~able -, &; c'eft. pll,. ce motif que
» l on (.l Introdull les feparatwns de corps & de
» biens. »
C'eft donc l'intérêt des époux qu'il faut confuIter, c'eft leur fituation perfonnelle, c'eft leur
condition plus ou moins malheureufe.
' ~n outrage n'auroit pas été j~fqu'à la diffamatlOn. On n'auroit pas eu intention, fi l'on veut.
de le rendre public. II le ferait devenu par hafard, ~ar l'indifcrétion d~un tiers, par quelquç
.autre clrconijance. Qu'importe? En aurait - il
moins déchiré l'ame & le cœur d'une femme verrueufe & honnête? En aurait-il moins eu l'effet
.de révéler à cette femme, l'injufte & crueHe opinion de fan mari , .cd' établir entre les deux époux
-des rapports conftans de méf.i.ance, de haine , de
(1) Coutume de N<ormandie tom. 2. pag. 93.
�•
12.0
mépris & d'infociabilité, cOllféq ue t?h1ent d'élever
entr'eux un mur éternel de féparatiOn ?
Indépendamment des calomnies débitées à .des
tiers ou rendues publiques, la Dame de MIrabeau fe pl~in~ enco:e, de pl~?eu~s lettres, Outrageantes qUI lUI ont ete adreiIees a ell~-meme par
fon mari. On lit dans une de ces, lettres: VOl/~
êtes un monftre. JIous ave:r montre mes lettres a
mon pere. Je .ne lieux pas ~ous per~re, JI & je
le devrais. MalS mon cœur fazgne de lzdee de facrifier ce qu'il a tant aimé. Mais je ne veux plus
être & ne ferai plus votre dupe. Traîne:r. 'Yotre
opprobre où v~us ~~udre:r. Portq plus lom que
vous n'ave:r [au, s d , eft po./fible, votre perfide
duplicité. A dieu 'pour jamais.
,."
En faudroit-il davantage pour autonfer une
femme à demander d'être féparée?
Des faits capables d'aliéner les efprits & les
caraéteres , de fimples procédés injurieux, ,des actes de mépris afièz marqués pour agir fortement
filr ui! cœUr noble & fenfible, font en général des
,motifs légitimes de féparation entre perfonnes d'un
état honorable.
)) Ce qui pour les gens du peuple, difoient les
1) défenfeurs d'une femme dont la réclamation fut
» accueillie par la Cour Souveraine de Nancy,
» (1) ne feroit pas la plus légere caufe de fé(r) Journal des -caure Célébres, tom. 6; pag. 2~9.
)) paratlOn ,
•
121
)} paration, peut en· fournIr ùné raifon férieufè
» ci des citoyens d'une naiffatlce plus relevée. Les
)) uns, nés dans la baflèlIè, ont contraété des
» mœurs, un genre de vie, conformes à leur
» état. Accoutumés dès l'enfance ci un langage grof-.
» fier ,. les propos les plus c>tltrageans les trou» ven~ prefque ll1fe~lfibles. Les emportemens d;uft
» man brutal ne lalffent aucunes traces de reffen.
.) timent dans le cœur d'une femme;' & le calme le
t> plus profond fuccéde toujours à ces orages paf" fagers. Les autres au contraire élevés avec
» te~?refiè & douceur au fein de l'o~ulence, fOl'lt
'» ddrcats & fenfibles. Pour eux, rien n'dl inno» cent; un gefte, un ré~ard ~ font des Outrages.
» Souvent un mot feul s unpnme & fe perpéwe
» dans ,I.e urs pen[ée~. Ce font moins les paroles
» que IIntentlOn qlq les offenfe; & les, difcours
) en apparence les I?o,ins outrage ans , ont' pou;
» ,leur cœur". des. p01l1tes. déchirantes; elles y hif» (ent ,des Gicatnces <JUl. ne fe ferment jamais:.
» De-la ces longs refientimens, ces haines irrê ...
)) conciliables qui plus d'une fois c1ht rendu la
» fociété de deux époux infupportable, & leu~
» féparation néceffain~.
., "
. Pothier, (a) rapporte un Arrêt qui prononç~
llne féparation, pour fimple mépris témoigné à là.
•
.-
(a) Traité du contrat' d~ ma'riage, tom ~
1. §. 1 . pag. 181.,
3· art.
2.
part. 6. c h.,
..
Q
�•
'lU.
fufeinê'. " L'efpece [e préfenta,. dit-il,. il" Y a en.
)) viron une vingtaine 'd'années, d~ns ,un~ caufe
» fur une demande en féparation d habltatl.on que
» la femme d'un Tré[orier de Franc~ aVOlt don» née contre [on mari: le mari n'avolt p~s fr~ppé
.» [a femme ni tenté de la frapper; malS des la
» premiere ~nnée de leur m,ar,ia~e ~ pe,ndant ~ou
» tes celles qui avoient fmvI, Il, n ,avolt ceile de
» lui témoigner le plus grand mepnl\ da,ns ;outes
» les occauons devant les perfonnes .qUI freque?
» toient la maiîon, devant les domeihques & me.
» me devant leurs enfans communs, que le pere
)) excitoit à fe mocquer de leur mere. La preuve
» de ces faits avant été faite par l'enquête de la
» femme intervi~t Sentenèe du Baillage d'Orleans,.
» qui le: fépara d'habitatfon; & ce.tte Sentel:ce
» a été depuis,. confirmee par Arret contradlc.
» toire. l,)
On remarquera que, dans cette hypothefe, il
,n'y avoit ni lettres injurieu[es,. ni calomnies quî
pufiènt compromettre l'honneur de la femlbe.
Tout k monde connoit le célébre Arrêt du
Padement de Paris, rendu le 1er. Mars 1664,
contre le ueur Marquis !Jeffi.at en faveur de la
Dame !Jeffiat. n Sur' une Requête verbale,. la
) féparation de corps & de biens fut ordonnée
)) par cet Arrêt...... dans le fait, le Marquis
» . Beffiat ayant quelque tems' aptè"s finnila"riage, •
» témoigné grande,. aver60n pour la . !Jarne [~
li femme, s'étoit retiré en ~lwer~n~, d'où il lUI
,
.
» écrivoit qu'eUe eut cl fortir de la maif6n &
'il
\ l'
,.
" qu ,ne y trouva , pas lor[qu'il demeuroit à
» Pans ~ qu'elle n'étoit point fa femme, qu'il en'
» vouloit ~tre fép~ré . pour toujours.. La femme
» demandolt permIiIion d'informer,. cette lettre.
)) & aut~es de femblahle thle,,- tinrent lieu d'in.'
» formatloh. l) (a)
.
Nous pourrions citer encqre les Arrêts de 1621,.
16,27 ~ 1644, rendus en faveur des Dames de.
MIrepoIx, de ~ofny '& de ·Qu'efnél,. & lors defquels les. Mag,iftrats penferèm avec raiJOn qu'oru
ne pOUVOit oblzg:r u,!e,fomme diJli n8 uée à :demt;u.,
Ter avec ,un man :quz loutrageou. Cb)
Et qUI pourraIt, dout~r, en effet que des outrages, qes provocatIOns IhJurieufes des r.oupço
fI'·ffi
.
'
'J.l
ns
~t~l ans, annonces' & répétés. dans des. lettres;
m.lfilVes , perp~tués dans une correfpondance affllgeante, ne fOlent aux yeUx de toutes les Loi
~ de, ~ous les , Tribunaux, des caufes ' valables d~
~ep~ratIOn ! fi. Jo.cius , . ,dit ~a . Loi, (c) ira. fit. i.n-.
,~lrlOJ!,s ut non expedlat eum pàti, renunciatur /0czetatr. F evret, (d) raifonnant [ur cette Loi qui
ne frappe
que fur
une ftmple fociétécontraétée.
'
,
pou,r n~goce . , aJoute: }) Cela dait bien lavoir
l' , heu a plus forte t:aI[on .au mariag~'1 »
': -.
n,,~
,
•
(a) Brillon., ÂI,j.X fllotAS4par..atiofJ d. .crJ.r.U2.ints
(b) Journal des Caufes Célébres, tom. 17' pag.
(c) Leg. 14' ff. pro [ocio.
Cd) Traité de l'Abus J) tom.
pag: S.2.8~ coL
I:
Q
'1;.
JI: ' .
'l.;. .
•
•
�•
'124 ·
•
•
; " SerD1t~i1 prùdfht, ' feiDi~~il fag~ ,. fer-oit'·il :~u!ie ,:
, " :Ql"daruier:: une f~naratIQtl: , cl at~ndt:e que des .
pOUl'
r'"
'al fi'
cl
paroles ' ménaçante.s ,eufiènt , ete re 1 ees par , es
1:'. •
'& q'ue des 1DJure.s graves, atroces, eufient
raits,
'/l.
& l fi d
été fuivies 'd~ fceues ,plus tnf~es
p us can à ..
leufes? La .j.uftice .au èontraire n'eJt-ell.~ pas ita ...
blie pour prévenil' ces défordr~s 'hpot~r ~e.~~:e U&ll
frein aux pâffions, '& pour en arreter es al les:
les excès ?
'
,
"
"
.
, 1) LOllfqüe l'aliémi~i~n des ' caraéteres ~ 'dlt, }~au ...
" teur ,du traité des lOJures,' 'Ca) eil: ~arqu~e ~U'
)) point.de. .ne po'ùvoit oblIger ,deux epoux a VIn vre en[emt(le. , -.f~s ~es exp?Fer à t~us ,les dan» 'gers d\me !SOh~blt~t!On ,fQTce.e , ,la Julhee alors
n, nerp'eut ~ue::e;s ernp~cp.e!· ~cle rel.ichAe; ies, !1~ucls!
l~ ,de 'leUr , unrdn,.'llan.r ie dQute memt ,,\1 d Y a '
)} ahfoiummt lieu à une féparàtion , le piUf pru») dent 'eft de la 'permettre: fouvent un Intervalle
» efl: propre à récohcilier les', ,Qœurs ,& les, e[•\
.
•
r
n pnl!s. l)
"""". •
. 1
•
Cet ' Auteur lavoit l déja dit précédeminent, (b)
que les injures atroces, les calomr:it:s & (lutres
exces" font des moyens de fép.aratlon, .fur-cout
quand hs faits: & les prapos jÙTrJ.t ~affè({ 'gp'p;ves pour
rendre infuppgriab.le n unelfimme. la TJ6<;ef1ùé-d' habù~r I1V,Ç folI· mari J & q~lu{es .récidives fréquentes ,
!ullùluent
une férocité de caraaere od une 'haine
donc ,le~ effets dégénerent en perflc;u:ion confiante
~.. .!lIlVle.
.
,
•
>
QU
: ,Bafuage, Ca) dans le 11ile énergique de fan
tems ', obfe;ve très~bien qu'il n'efl pas néce.Daire
que l~ patl~nce de 'la femme flit mUWe jujqu'à
. ce 'l'u elle au un bras rompu QU un œil crévé
CQm.me voulolt l'ancienne COutume, qu'ellq peut
plaLnd~e pOl/,r des flvices moins ~randes , que les
mauvaIS. lr:auemens du mari (ont plus ou moins
jùpporta,kle.r felon .la qualité des petflnnes, ou
J:lo!J qu ,l retombe fouV,nt dans dçs .emportemens
flchellx & atroces.
Enfin, le réCumé de tous les Jurifconfultes efi'
que felon le$ reglcs de. 1'ordre ' Politique on doit'
"
, ~',
~on l,as fi(l{t-e, mali permettre ~n moindre mal pour
en eYlfer .un plus grand, qu'zl n'efl pas doulell:X;
que .la dijéorde & les querelles qui arrivent tous
les Jours en.tre le. mari & la femme, Ji on le~ laiffi
fo(emb~e , font ,un ~i~n. plus grand mal que leur
efpar4t.l~(l'; , qu On dOL] dQ~' ~ pour l'éviter, permettre a, la femme de fi fiparer d'habitation de
~In, man, que le Jüge n~ dolt ~tre ni trop facile
a. l 4c~or,4:r pour d~s diffenfions. pa1Tggeres, ni
trop difJ!czle" lorfqiJ>zl apperçoit, dans les parties,
lme a.ntlpathze J & une haine invétérée, que lt].
fi
~.
1 ~1
r 'z, 5'
•
(a) Coutumes de Normandie, tom.
d
:2..
pag. 94>
•
�126
coahabitation ne pourroit qu'allgmmur ;
Ji on
IZ7
les-
IfliffO ir ~nflmble. (a)
. 'pes que la jufiice'
C'eft d'après ces fages p~l~CI JI
bl
d
d'
condItIon onora e, en
entre perfonnes une
de l'époux qui déno _
.
ue au fecours
,
n
toujours ."~n
des foupçons revoltans,
ç oit des In]ures g~avesou' des calomnies caraétéri_
"
ques
'
des mepns mar . 'qu'il falloit refpeéter ~ ven-,
r.'
On a compns
" , d
r.
lees.
,.
lIè & la fenfibI11te es penonnes
ger la. deltcate ft frer elles-mêm'e s, qui ont
qui dOIvent fe :e pedl'J1:nguée & qui font faites
& d
e éducatIon l U ,
reçu
un
d
la
noblefiè,
du
caraaere
l
e
pour ~ontrer e
•
l'énergl~'/1A
traire abfiration faite des déLe lyneme c o n ,
d
r.
'11 '
"1
oÎt amener entre es Laml es
fordres q~ Pou7eroit aviliffant pelUr nhs mœurs;
d'un certam rang,
.
, \ fi' "
r.' _
1
. ne ten d"
'en n
mOlQS l'lu
etnr dtout1 lentl
If
raIt a
,a \ d'
ef.
ment délicat dans les ames , qu~' egra ~r ' es ,
-, \ 't frer l'inftinB: me me de 1honneur,
pnts
~ q:u a al.lle::,.uf d,e tant de vertus
& de. tant de
ce
pnnClpe
.
' ,
qualités généreufes pour des cltoyens d'un certain,
état.
"
voir
D'aill-eurs Ie,s Loix n'ont pmais cru pou .
s"arroger le pouvoir ~noui de, comn:~nder au fenâ
timent ou de faire VIOlence a la dehcat~lfe,' ,& .
cette liberté du cœUF, ,~u~ dans chaque lt;ldl":ldufi
fait partie de la propnete perfonnelle & qUl e
•
1
le droit le plus jaloux de l'humanité. Nos Tribullaux ne connoifiènt point ce genre de defpotifrne ,
~u plutpt, ils ne pourroient le connoître. Etablis
pour modérer les e·ffets des paffions, ils fçavent
qu'ils n'en peuvent guérir les caufes, que chacun
dt gouverné ou. entraîné par des principes inflexihIes d'état & de iituation qui modifient diverfeIDent la [eniibilité, & qu'il [eroit trop dangereux
& même impoffible, dans des queftions de mœurs,
de choquer ouvertement les mœurs elles-mêmes.
Il ea dOllC évident que les feuls outrages J
'1"enfermés dans les lettres miffives adreilëes à la
Dame de Mirabeau , feraient par eux-mêmes des
moyens très légitimes de féparation, quand même
jls ne feroient pas fOtltenus par les calomnies &
par la diffamation publique dont elle fe plain.t. (a)
-Mais de plus elle dénonce, dans [on Mémoire
1
( )
"
Caufe entre le fleur & Dame M. .. ..... fèparation
de corps. La diffamation ea dans tous les états un
" moyen de féparation pour la femme. Nous en avons
" rapporté plufieurs exemples: cette caufe en offre un
" nouveau. Un Arrêt du mois de Décembre 17 81 , avoit
~ admis la femme à la preuve des faits par elle articulés,
" fauf au mil ri la preuve contraire. Arrêt du 12. Février
,. 17 83, fur les conclufion's de M. l'Avocat Génél'al d'AH gueffeau, qui prononce la féparation de corps & de
" biens, condamne le mari à rendre la dot, les effets
" de fa femme, & aux dépens. " Mercure de France
du 2.9 Mars 17 83.
lt
(a) Pothier, {oco ciiato.
•
--
•
�11..8 .
ci con[ulter, l'~dultere public de [on mari, [a
difparition publique avec une femme étrangere ~
fa co-habitation fcandaleufe avec cette femme
en Hollande' elle expofe le projet
que fon mari
"
avoit de l'enlever elle-même, a cette epoque;
elle rend comptè des procédures, qui ont fuivi
le crime du terrible jugement qUI a clôturé 'ces,
procédur:s & de la tranfaéhon flétrifiànte qui en
a été le terme.
,
, Quel nouveau point de vue po'ur la Caufe !
On ne manquera pas de réclamer le ,pr!ncipe
que la femme ne peut, accufer fo~ l~an d adul,tére' &. il faut convemr que ce pnnClpe eft vraI'.
Nou~ ne [uivons point à cet égard le droit Canonique qui autorife é,galet?ent les deu~ ép~ux
à fe plaindre de la vlOlatlon de la fOl conJugale.
)} Nos Loix politiques & civiles ont demandé
» des femmes, un dégré de retenue & de con~ tinence , qu'elles n'exigent point des hommes.,.
» parce que la violation de la pudeur fuppofe
).) dans les femmes , un renoncement à toutes les
1) vertus; parce que la femme en violant les Loix
», du mariage, fort de l'état de fa dépendance
-il naturelle, parce que la nature a marqué l'in)J
fidelité des femmes par des lignes certains &
» que les enfans adultérins de la femme font né» cefiàirement au mari & à la charge du mari ,,'
» au lieu que les enfans adUltérins du mari ne
'font
12 9
,
•
,
» font pas à la femme, ni à la charge de la
» femme. (1)
Mai. , » s'il n'ell: pas permis à une femme
» dit Cochin (2) d'intenter contre fon mari l'ac:
» tian d'adultére ~ c'eft-à-dire , .de lui' faire fâire
») f~n proces pour raifon de ce crime, il Y a des
» clrconftances dans le[quelles elle peut s'en faire
» un moyen de [éparatioJ1, »
La même chofe eft en[eignée par BretoJ1uier
(~) » en France, dit-il, nous [uivons la dif:» polition du Droit Civil qui ne permet pas à la
'}) femme ~'a:cufer fon mari d'adultére. Elle peut
» néanmollls exciper de la débauche de fon mari
» pour fe faire féparer de . lui de corps &: de
)) biens. »
Ferriere (4) dit également que la féparation
peut-être ordonnée, en conflquence des mauvais
traÎtemens faits par le mari à fa femme ou de
[es débauches..
'
(1) Efprit des Loix.
(2) Tom, 4. pag. 116.
(3) Dans fa differtation fur l'adultere rapportée dans
le tom. 3. des œuvres d'Henrys. pag. 747.
(4) Diél:ionn. de Droit aux mots jèparation de corps
. .& d'habitation.
R
•
�•
3: ~~
d'H .
Defpeiflès-, 1) Pere7.lUS, (2.)
éncou.rt ,
(~) Decormis, (4) Morna~,. (5) tous
Au.
teuts établilIènt le même lJnncipe.
. ,
A la vérité tout adultére
m~n n eil: pas
-de fa rtature urt mbyen de feparatlon pour la
fel1une. Il faut que le ct"Ï!t1e foit tel ,~u'i1 dégénére el1 injure IX en bifenfe contre l epoufe qui
s'en plaint.
Car qu'un mari préfére dan,s fon cœu~ une
"étrangere à fa propre fetnme , .c eil: Un~ f~:ble~e
-qu'è l''On p;n-donne à l'humamté. MalS s il faIt
tro}\lhéè ùe [a Pàllion , s'i~ ~t1fulte à ]a femm~ par
Lln commerce publit: & " fU1\tI ùe fcartclale : 'VoÛa le
'Ctime qwe les Loix rega.rdent CD111me une caufe
trop légitime de d~vorce.
. Auffi toùs -1es t'extes tlOt'lnétlt , pOUl" ~xemple )
i'aéHotl eh divorce t::'ontre le mari qtü fait habiter
Ù~r1S fa propre maifon l'objet de !ès criminelles
complaifances , Ji quis in eâ dotn(J in YJuâ Œ~
t
qr
;éS
1«
fuâ conju,ge commanet • contemnens eam , cl~m a~ta
Înlleniatur in eâ domo manens; & la ralfon en
eft expliquée dans le droit, cSeft qu'il rt'y a
nen qui fait plus capabl~ d\r.[ite~ une femme
'",, '
Il
.
,
'
1 'llt.,
,
,, 1 ,
[
""
lb
rH,
"
S'
" S:C "
(1) Tom. r. ,pag. 2. 87:
(2.) '! '6fu. '1. Uv. '~. tir. t7. h. J. pâg. jll.6.
(3) Loix EccIef. pag. 109.
(4) Tom. 1. col. 1194.
(s) Sut le liv. 24. tit. 2. du digefie.
f
•
,
d'honneur, quod maximè caftas uxoru exa.rperat.
La même raifon, tirée de la julle fenfibi-lité
d'une femme honnête, a fait appliquer à tout
adultére public & fcandaleux du mari , le même
principe de décifion en faveur de répoufe qui demande d'être féparée.
Sans doute la co-habitation du mari avèc une
femme étrangere, dans la maifon où demeure ra
propre femme, eft une circonftance fuffi[ante, pour
donner l'aél:ion en féparation contre le mari. Mais
cette circonftance n'eft pas la feule. Elle n'eft pas
nécelfaire. Il en eft une foule d'autres qui opérent
le même effet.
D'après la Loi 8. de repudiis., l'adultere du
mari, s'il a été fuivi d'une condamnation, eft par
lui - même & indépendamment de toute autre
circonftance, un moyen légal de divorce , fi quœ
ÎI5Îtur. maritUTn jùum adulterum condemnatum inveneru.. .
En général tout adultere avec éclat & fcan. claie, donne aB:ion à la femme pour demander
d'être féparée d'un mari qui méconnoît tous [es
devoirs & tous res engagemens. C'cft la maxime
q ui fut atreftée par M. l'A vocat Général Seguier dans la caufe de la Dame Heraut qui proporoit ~ entr'autres moyens de féparation, -l'adultere de fan mari ., & qui fut admife à faire
la preuve de ce cl'Îme par Arrêt du 26 Avril
R
2
,,
�rp'
1769, Ce Magifirat obferva que quoiqu~ l~ fern. ,
me ne. fut pas reçue à accufor fan man d adul_
tere néanmoins il ne dOl/toit pas qu'elle-ne dut
avoit ~e<s
être ~dmi(è a ft plain~re, lorf(Jlt' il
drconfiances qui rendolent la mauvaife condlllt~
du mari une infulte & un outraf!;e accablant pOlir
la femme. (1)
Paron rapporte un A.rret du ,3 Avnl, l 54~ ,
qui ordonne une feparatlon fondee fur l adultere
du mari. (2)
.
'
Raviot (~) en rapporte un a~tre du Parlement de Dijon, rendu le 28 F évner 17°7, qui
re~voie une femme de la demande fonnée par
fàn mari ', à ce qu'elle fut tenue d è retourner
dans fa -maifon. Elle fe défendüit contre ' (on mari
en lui reprochant · uri adultere public,. des menaces, & elle l'accufoit d'être un diŒpateur.
. Certainement d'après les circonfianees expofées
dans le Mémoire à confulter, il feroit impoŒble de rencontrer un adultere accompagné .de plus
de circonfiances graves & "fcandaleufes que celui
que la DaIne de Mirabeau dénonce, puifqu'elle
préfente un mari qui difj1aroit, aux yeux de toute
la France, avec une femme étrangere , qui co-ha-
.r
A
•
_
1
(1) Code matrimonial au mot aduliere n. 12.
(2) Liv. 22. arr: 3. pag. 1292 __
(3) T.om. 2. ·pag. 297. on. _26 ' •
•
lB·
bite publiquement en Hollande avec l'objet de.
fa paŒon, qui avant fa difparition veut enlever .
fa propre femme, comme pour la rendre témoin
& viétime de ce fpeétacle , & qui efi pourfuivi ,
décrété & condamné pour fan crime. Quelle dl:
donc l'injure, quel dl l'outrage dont une fem- ,
me honnête pourroit fe plaindre, fi la Dame
de Mirabeau n'était pas reçue à préfenter un
Rareil crime comme une caufe de féparation? .
Lors d'un Arrêt du Parlement de Paris du .
16 Mars 1751, rendu en faveur de la Dame
de Chables contre le fieur de M ~li[onrouge fon _
mâri, voici ce que l'on difoit pour la défenfe
de 'cette femme: » Eh! Quoi de pl ' propre
» à révolter les efprits, qu'un homme qui ca» lomnie
e époufe dont les mœurs font pures,
» & qui dans le même infiant feprofiitue à des
)) objets étrangers, & fait même, dans un de
» fes voyages , porter publiquement à une com» pagne de fes plaifirs, le nom de fa femme ?
) C'efi une vérité reconnue qu'un mari ne
» peut faire de plus grand outrage à fa femme
» que de fe livrer à des affeétions étrangeres. Si
» les Romains, qui nous ont laiffé dans leurs'
» Loix le plus précieux monument de leur [a)) gelfe, 'e~ faifoient une caufelégitime de divorce,
» pourquoi ferio'ns-nous mqins délicats fur un
)) point . qui intéreiIè eiIèntiellement la Religion
)) & l'ordr~ PJfplic ,& pourquoi ne feroit-ce pas
)) ' uÎle ' cauf'e de fépa.ration parmi nous? 1)
1
,
�134
'
» Les femmes, il eft vrai, ne peuvent en France
» exercer l'aB:ion des mœurs contre leurs maris
» par la voie de l'accufation, mais quand la de» mande en féparation eft devenue nécellàire,
» quel moyen plus fort peut-on el?ployer que
» la notoriété d'un commerce publIc avec Une
» femme étrangere? ..... Il eft de la fageife &
)J de la prévoyan.c: des Loix ~'ouvrir ~ quicon.
)} que reçoit UI~e InJure, ~ne ~OIe pour ,s en plain.
» dre. Le man a le droIt d Intenter l accufation
» d'adultere, la femme ne l'a pas; clIc n'a que» celui de demander fa féparation. Il cft jufte
)} de lui laifi'er du moins cette rell"ource. Auffi
» pourr -on cIter plufieurs jugemens de fépa») ration qui n'ont
été fQndés que ' r ce feul
) moyen. (a)
Les mêmes principes ont été réclamés avec
fuccès lors d'un autre Arrêt du Parlement de
Paris, rendu dans le mois de Mai 1775,!LIr les
Conclufio ns de M. l'Avocat Général d'Agueffeau ,.
& qui prononce la féparation de corps & d'ha.
bitation en faveur de la Dame Hàsbrouck. Les
moyens de féparation étaient des outrages, la diffamation, le départ du mari avéc une fille nom.
'rnée Limoufin, ql/'il avoù eu l'audace de recon.
naître pour fa légitime époufe, ave( laquelle il
t
(a) Journal des Caufes Célébres,. tom.
• •
7, pag. 14.9-
rH
•
av.oit pajJé un an, & dont il al/où eu un en~
fant. (a)
~
L'on feroi~ infini, fi 1'011 voulait rapporter toutes. les doB:nnes, tous les Arrêts qui atte1tent &
qUI conf~crent le même point de Jurifprudence .
;1 Dupe~ler, (b) Auteur célebre du Pays; n'a-t• pas dIt en propres termes? » Il e1t certain
» que Ife con.cubinage du mari eft une jufte caufe
u de feparatlOn pour la femme. Cela eft fi claï» rement décidé par la Loi confènfo des Em» pereurs !,héod~re & Valens, ~'il eft impoili.
» ble, apres aVOIr lu <:ette LOI, de mettre en
» doute cette -quefiion. Parmi les caufes pour leC» quelles la femme peut intenter l'aétion du di» vorce J celle de l'adultere du mari eft énoncée
» la prenftere. Cela a été confinné par Juftinien
» , dans la Novelle 22-, chap. 15, & dans la N 0-"
» vel~e 1I7? <:h. 9··· ... On pourra oppofer If!
» LOI prelmere, au Code ad lecrem ,J,uliam de
» aduheriis ~ ou il , eft ,dit que la °femme ne peut
» pas acculèr ~{j)n mari d'adt.Ùtere; mais outre
)) que .cette LOI {.è trouve abr9gée par la N-O» ~el1e q ~, el1~ ~e doit. être ençendue que d,e
» 1 accufatlOn crllmnelle llltentee contre le mari
» pour ie. taire punir, ma1'S n~Tl pas 'quand la
)) femme J.lltente fan attion, pour iè faire [épa~
1
'------------------------------(a) Journal des Caufes Célébres, tom.
(bJ Torn. 3) pag. soo & [uiv.
12,
pag. 167_
�q6
..
» rer par une pro~édure purement Clv~e ....••
» Si le mari peut accufer fa fel:1111e cl adultere
» & la faire enfermer, pour9uol la. femme, ne
» pourroit-elle pas pour le meme. fUJet fe ~epa_
» rer de fon mari? Il n'y a p0111t de ralfons
» de différence ».
La caufe dans laquelle Duperier réclamoit ces
principes, fut jugée, il eft vrai, contre la felTI1~e
par un Arrêt de la C~lIr r~n~u en l 7 ~ S. Ma~s
cette décifion ne fut detenmnee que par le defaut d'application des principes aux circonfial:ces
particulieres; car l'Auteur dans [es ObfervatlOns
fur l'Arrêt attefia toujours la même maxime :
» quant au' concubinag,e ~ ?it-il,
croi~ que. c'eft
» lacaufe la plus legltlme dune feparatlOn,
» parce qu'il viole la foi conjugale. Ca)
L'adultere . attaque fi direaement la fubftance
& l'e{[ence du Mariage que l'on a même douté ,
s'il n'étoit pas une caufe légitime de difloudre
entiérement le lien conjugal. Cb) Mais on n'a
jamais révoqué en doute que l'adultere, tant du
mari que de la femme, ne fut un moyen légal
de féparation. (c)
je
(a) La Touloùbre, fur l'article cité de Duperier.
(0) Gibert dans [es notes fur Fev~et) tom.
pag. 52.7~
(c) Giben, ioid.
.
l,
Cette
•
q7
Cette maxime h'eft pas no~eUe dans nos mœurs.
Elle efi fondée fur les plus anciens Arrêts. Elle eft
avouée par nos J urifcon[ultes les plus aufieres.
Elle ne nous eft pas non, plus particuliere. Elle.
(dt admife chez toutes les Nations policées de
l'E urope. Nous en prenons à témoins Voët, Ca).
Covarruvias, (b) & tous les Auteurs étrangers"
dont ces deux Jurifconfultes invoquent le témoignage ..
On objeéte inutilement que l'adultere eft un
trime privé, que la femme n'efi pas recevable
à pourfuivre fon mari" &. que la tranfaB:ion de
Pontarlier tennine. tout.
L'adultete ea un crime- privé, quand il n'eft
point accompagné de l'enlevement ou de la difparition publique de la perfonne ,_ quand il n'efi
pas fuivi de fcaudale. Car fi de pareilles circonftances fe vérifient, l'adultere efi alors authentique & folemnel. Le Minifiere public auroit action pour le pourfuivre & pour le faire punir.
(c) Il en auroit la vindiéte. au nom des Loix
& des mœurs.
Qu'importe d'ailleurs que radultere foit en gé.néral un crime privé de fa nature? S'agit-il ici
(a) Comment. adpandea. tem. 2., pag.. 8ry2., n.
(0) Par$ 2., cap. 7, §. S, n. 8.
.
l H
(c) Voy. tous les Criminalifres, Lacombe, Serpillon ;
~ouglans, &c.
�I~8
de venger l'ordre puàic? Il s'agit de venger une
époufe honnêt~ que l'ad~ltere, offenfe. Elle ne,
pourroit fe plalOdre pellt-etre, cl un aclultere clan~
deilin fugitif, pafiàger. MalS un adultere qUI
a été' l'objet d'une pro:édu:e éclatante ~ d'un
jugement public, ne devlent-I; pas pour 1epou[ele plus fanalant des outrages.
Nous {à~ons que ia femme n'a point l'aétion
des mœurs contre fon mari. Mais tous les Auteurs mais tous les Arrêts, mais toutes les Loix
ne lui donnent-elles pas l'aEtion en féparation?
Mais [ur les ConcluGons de M. l'Avocat Général S~guier, la Dame Heraut, qui demandoit d'être féparée, ne fût-e~le pas reçue p~r Arrêt du ,
26 Avril 1769, à fazre preuve de l adultere de
{on mari? Mais l'Arrêt de l 54~, rapporté par
Papon, mais celui de 17°7, rapporté par Raviot, mais les Arrêts de 17S l & de 1775,
que nous avons déja cités, & qui font rapportés
dans le Journal des. Caufes Célébres, n'ont-ils
pas prononcé des féparations fondées fur l'adulteie du mari? Pourquoi vouloir donc s'élever
contre l'évidence, contre un point de Jurifpru, dence établi par les Arrêts de tous les Tribunaux du Royaume?
Que veut-on dire quand on avance que les Tribunaux de- la Province ne feroient point com}Dé
tens pour connoÎtre de l"adultere qui a fait la matiere de la procédure de Pontarlier? Et nOll ce r~
tainement, ils ne le feroient pas pour connoître
139'
de cet adultere par voie d'accufatibn, & dah?
l'objet d'infliger au coupable la peine méritée pa.
.[on crime. Mais ce n'efi pas ce dont il s'agit.
l.a Dame de Mirabeaun'accufe pas, ne pour.
fuit pas criminellement (on mari. Elle vient fim-plement, par exception, lui oppofer comme caufe
légale de féparation, un crime confiaté par une
procédure publique, par un décret exécuté, par
un jugement folemnel prononcé par des Juges légitimes. Elle n'a pas befoin defàire juger de nou~
veau fan mari. Aux termes de la Loi, il fu$t
qu'elle le trouve procéduré & jugé ~ Ji. marùum,
adulterum condemnatum invenerit. (a)
Il lui fuffiroit même d'invoquer la CC5mmune
renommée, adlJlterÎum probatur per folam famam
quoad feparationem thori; (b) & il lui fuflit certainement de communiquer des procédures léga'.
les qui n'ont jamais été purgées" & des décrets
qui fubfifient dans toute leur force.
,Ma1.à-propos, veut-on donner à entendre que
la tranfaEtion de Pontarlier termine tout. Cette
tranfaEtion qui ne fauroit avoir l'effet d'abfoudre le coupable, devient eUe-même une nouvelle
preuve du crime. Elle n'a point éteint les pro:"
cédures. Elle les laifiè exifier en leur entier. Elle
A
-•
(a) L. 2 S, de repudiis.
(b) Mafcardus de probat. vol.
&
l,
Concluf. 63, n.
2.
S
2
1
�140
n'empêcherait pas la partie publique ' de pour{ui.
'vre un adultere public & folemnel.
Que l'on donne d'aillc:urs toute la ~orce que
l'on voudra à la tranfaébon de Pontarhec cette
'tranfaB:ion peut-elle effacer l'outrage fait à une
époufe fenfible & vertueufe? ~lJe pourra mettre l'Accufé à l'abri des pourfUltes de l'Accufa_
te ur. Mais l'Accufateur en crime d'ad~lltere ',
a-t-il pu remettre cette autre injur~ qui
le
regardoit pas, & que la Dame de Mll'abeau etoit
obligée de dévorer en filence?
C'eft un principe conftant dans nos mœurs &
dans notre Jurifprudence, que le divorce, la répudiation arbitraire eft pour la femme un moyen
de féparation des plus puiffans. On a 'compris '
qu'il feroit barbare qu'une femme demeurât fous
la dépendance d'un mari qui l'a publiquement
méprifée, .& qui l'a notoirement traitée comme
étrangere. Or, quelle répudiation plus arbitraire,
quel divorce plus criminel ' & plus infultaht que
celui dont la Dame de Mirabeau fe plaint au'x
loix & à 1a J uilice ?
Elle expofe que fon mari a indignement trahi
la foi conjugale; qu'il a difparu aux yeux de
toute la France, avec une femme étrangere; qu'il
a publiquement cohabité pendant 18 mois en Hollande avec cette fet1lme; qu'ils parloient entr'eux
,de mariage, & qu'ils ne trouvaient d'autre obf.
tacle à leur union- que la 'vie d'un vieillard o c~
togenaire .
11;
•
,
14 1
Et des faits auffi graves, qui portent le mépris & l'oubli des devoirs jufqu'à l'excès le plus
inoui, ne feroient pas l'injure la plus fenfible,
la plus terrible pour urreépoufe honnête ! Une femme
difiinguée & vertueufe ' pourrait donc être arbitrairement méconnue, délaiifée, reprife, abandonnée de nouveau, avilie & dégradée aux yeux de
la fociété entiere! Elle deviendroit le vil jouet
des caprices, des panions, des emportemens de
fan mari!
Sans doute le mariage eft le contrat le plus
faint & le plus refpeéhble. Sans doute il faut
craindre de n'en relâcher trop facilement les nœuds.
Mais ce font ces principes mêmes que la Dame
de Mirabeau peut réclamer avec force contre l'époux, accufé d'avoir voulu la flétrir par une
forte de répudiation publique, & de s'être féparé
d'elle par une voie de fait inouie, par un crime!
. ~Je divorce que les Loix reprouvent, que les
Tnbunaux condamnent, que les mœurs puhliq~es -défavouent, eft celui qu'un mari opere de
fan autorité privée par un commerce criminel,
& par fes fcandales.
. Mais, après une profanation auffi honteufe du
mariage, tous les liens font rompus. L'union de
de~x époux ne peut plus fubfifter aux yeux des
LOlX, que par le facrement. Il faut néceflàirement rompre d'ailleurs une fociété qui n'aurait
plus ,pour objet que la domination arbitraire d~
mari ~ & l'elèlavage avilifiànt de la femme, &
�142-
qui feroit dégénérer le lien conjugal en fuppHce.
Enfin la Dame de Mirabeau expofe dans fon
Mémoire à confulter, les diilipations de fon mari
terminées par une Sentence d'i?terdiétion '. le$
plaintes graves por~ées, ~o~tre lUl par des tIers;
les violences dont Il s etoit rendu coupable, &
qui ont été fuivies de procédures, de d~crets
& des Sentences ,les divers . ordres du ROi ob~ '
tenus contre lui par fon pere, les lettres que ce
dernier écrivoit {lIr la néceilité- de pourvoir à la
jûrecé, à la dign.ité, au. repos. de fa b:lle-fille ~
les [évices & les' . mauvaIS traitemens d un man
dont on fait remonter les excès jufqu'au premier
moment du mariage; & de plus, le vœu des deux
familles, qui ' fur la connoiflànce de tout ce qui
s'érait paffé, avaient elles-mêmes pour la fûreté & la dignité de la Dame de Mirabeau, prononcé une féparation devenue nécefiàire & indif~
penfable.
Efi-il donc poilible de réiifier à l'évidence qui
naît de cet effrayant enfemble?
Il ne faut pas ici fe borner à difcuter chaque fait
féparément. Il faut péfer la réunion de tous les faits.
La feule interdiB:ion de biens ne ferait point
par exemple, une caufe de féparation.. Mais cette
interdiB:ion prouve des diflipations hors de toute
mefure; elle confiate un défaut de conduite, capable de jetter la mifére & tous les défordres qui
l'accompagnent, dans l'intérieur du ménage. Les
•
143 .
faits, qui ont dû fervir de ba[è à cette interdictian, accufent le caraétere de l'homme légalement
interdit. Ils font un trop funefie préfage de ce
qui peut arriver encore.
Quant aux violences commifes contre des tiers,
<juant aux procédures & aux jugemens intervenus
(ur ces violences, comment peut-on dire qu'elles
font étrangeres à la caufe & à la défenfe de la
Dame de Mirabeau ? Eh! Quoi ? tout ce qui
confiate le caraétere confiant & fuivi du mari, peutil être êtranger à la femme qui demande d'en être
féparée. » La renommée du mari, difent les Au» reurs, ( a) peut être encore un grand motif
» pour procurer à la femme le bénéfice de la fé» paration. S'il paflè dans le public pour un hom»me d'un caraéte~e violent, acariâtre, plein d'hun me ur & de fauflè jaloufie, ayant des liaifons
» fufpeB:es ou de s'oublier envers tout le monde,
» ces confidératÎons peuvent influer pour beau» COUD fur la réclamation de la femme.
D'autre part, n'efi-il pas naturel qu'une femme
fe montre humiliée de réjoindre un mari qu'elle
préfente comme flétri par des lettres de cachet
accumulées:, par des procédures d'éclat, par des
décrets, par des jugemens qui ont prononcé des
peines affiiétives ? Les Loix n'avaient-elles pas
prévu, que tels événemens pourraient faire une im1
4
(a) Traité des Injures, par M. Dareau, pag.
2')0
&
2)1,'
�.
1:44 ·
ilion afièz forte fur une femme d'honneur ,
pre
"
1 d'
? N'
pourl la détermIner
a demand~z; e Ivorce,
~.
, t- Iles pas ,. dans une pareIlle hypothefe
VOlen e
d: r. fi' ,. remIS
,
la liberté du divorce à la. feule ,tipO ,ltlOn., ,a la
feule volonté de la femme, matrzmo,nzum qUldem
de ortatione. non jolvitur , fi ~afus zn que,!, ma.
.P , 'dl't , .· non mutet"
affeazonem
uxarzs? Ca)
rllUS Inez
" '
, ..
M 's c'efl de .l' habuatwn ,. s ecne-t-on" qu Il
, ".'ta~ans ce proces, & de ri-en de plus, (b) & oui,
s aBI
' '&
' fi: d '1?habitation qu "1"-1 s, agIt.
c 'fi
e parce qu "1
1
~':git de l'habitation., qu'il faut ~ien pefer l'état, le
cara8:ere, les fentimens du man avec lequ'el cette
habitation doit être commune..
.
Lors d'un Arrêt du Parlement de Pans du
mois de Mai 177 5 , qui, ordonna la féparation de,mandée par la Dame de L *.** , cette femme propofoit ,. pour moyens, les p~l!les & les .conda~~a
tion encourues par fan man;. la nature des dellts
qui avaient mérité ces co~damnations & ces peines,
& qui lui faifoient cramdre pour elle-même les
plus grands dangers, les mauvais traitemens d'un
époux qui n~ l'avoi,t point ~énagé~ lors mêm,e
qu'il la fçavolt grolIe, & qUi, au heu de proteger l'honneur de fa col~pal?ne, ra,voit diff~;né,e
publiquement ,. &: elle fimifolt. par dlfe que: c etolt
ea
p
(a) L. I. Cod. d~ repudiis.
(b) Pag. 12. du Plaidoyer iinpriiné de Mr. de
heau.
Mira~
d'un
145
d'un tel homme qu'elle demandait d'être réparée,
que née d'une ftmille diJlinguée dans la Province,
.elle ne pouvait être forcée à paffir ft vie avec
un homme qui raffimble tollS les vices, qui ne
refpeae rien, qui enfin couvert d'opprobre, &
d'infamie, la ferait partager à ft femme. Ca}Il
donc efièntiel dans des caufes femblables
à celles-ci, de préfenter l'homme en entier &. de
ne rien diiIimuler de ce qui peut infiruire ' la religion du Magifi:rat fur l'intérêt majeur & efièllciel de la femme qui réclame.
C' cJl de ·l' habitation· qu'il s'agie dans ce procès
& de rien de plus! Mais la Dame de Mirabeau ne
; révéle-t.elle pas'ce qui s'efi paifé dans le tems de cette
habitation que l'on invoque avec tant d'afiùrance ?
Elle fe plaint d'avoir été excédée & outragée dès
les premiers jours après fes nôces, de maniere
qu'elle efi peut-être la feule pour qui les premie~s
.rems du mariage ayent été des tems d'amertume,
de trifiefiè & de douleur. Elle expofe que ce ne
fut plus dès ce tems-là, qu'une fuite d'emportelTIens & de fureurs · contr'elle. Journellement elle
était expofée à des propos offenfans, à des inju. res groiIieres. Les foufflets, les coups accompagnaient & frIivoient de près ce langage, parce qu'ils
partaient du même principe qui était , fuivant
l'exprefiion de Mr. de Mirabeau pere, un fonds
,
(a) Journal des Caufes Célébres, tom.
10.
pag.
T
214,.
�146
·147
cl:
de jaloufie &:.
btutalité~
On ajoute que l'état m~me de ,gr,oUe~e n.e met~
toit pas la Dame de Mirabeau a 1abn des fcenes
les plus révoltantes. On atte1te en .~r~uve ~e ces
faits les lettres du pere,
publIque,
. '" la notonete
.,
.
Mr. de Mirabeau lUl-meme qUi n a pu taIre en_
rierement les excès dr: fa flvérité cha~-rine & de fa
jaloufie injufte, (a) & qui da.ns Ces obfe~vat~ons ~
veut fe faire un rampart des lettres qUI lUi 011-1;
été adreUees, dans le .cours de l'année 1774, par
fa femme.
. Ces lettres exi!bent, il dt vrai, mais que peuTerlt.- elles prouver? Dans quel moment etoient ..
elles écrÎlte.s? M. de M1rabeau étoit alws enfenll~
au Château-d'If, oùla juilice parerne-l1e le detenoir.
Sa femme étoit partie pour Paris à fa priere ,
dans l'objet cie 1ui épargner les · f.iûtes Icl'un~
affaire fâccheiulre. Pouvoir-eLle ,de bonne foi choiT
fiT cet inftant pDUl' accabler celui ,qui récJanlOic
{ès foms ~ là :bie.mfaifance , [on hum.aruté? Pou. .
vort.-eile ne pas prendre le langage de la pitié o~
même de l'intérêt, qUle le malheur feul de l'être
qrii mons iferort le ,plus étranger 1nfpirewit? Cea:
-a'UX.ames clcllicate.-s & [eraibJe5.à bien ilp.préçier une
pareille irtuarion.
QruiÏ .pourmit cd'ailleurs {aire -un l1eproche à la
Dame :de . Mirahea.u d';av,oa- é.té généJ.1eufe, ,d'a..
qe ·carciaere farOuche
,
•
voir rendu des fervices , quand eUe . étoit flutorifée
à former des plaintes? Eh! Quoi ? U ne fim~
aura tâché par fa douceur, p.ar fis bienfaits,
par fa ·pat.ience de vaincre les emporterJl,en:r &- le;
fttreun de [on mari ~ &- -on lui oppofera que
ces procédés honnêtes ont couverl tous les faits de
plainte qui ont précédé? Efl-ce donc fur {es premiers empartemens " ,d it Cochin ~ (J) -qu'une femme de vertu abandonne la maiJon ,de fin mari ?
Quand elle ejl forcée à ce parû extrême" ce n'efl
.ordinairement qu'apres une fuite d'excè.r &- de
mauvais traÏtemens" lui dira-t-on alors -qu'elle
efl non recevable à demander fa ftpatation ? Si
cela était, -i l
auroit jamais de femme dans le
cas de pauvoir fe faire jèparer, & ce feroit faire
triompher la cruauté des maris.
. .
Que prouvent donc les lettres de Madame de
MIrabeau? Elles prouvent fa patience, fa conf.tance, fa dou.ceur. Elles prouveront même, fi
J'on veut, qu'elle el:lt pû .parLlonner de fimples
'[évices, qu'elle confentoit à dévorer en fecret les
.vexations, les procédés cruels, le~ traitemens
barbares. Elles prouveront qu'elle repugnoit à une
féparation , tant qu'elle a cru pouvoir la différer
:dans l'efpérance d'un changement que1conque,
:dans l'erpoir d'un avenir moins trifle " tant qu'elle
-n:y
(1) Tom. 4. pag. 103.
=
-
T2
�14S
3voit plutôt à fouffrir qu'à rougir d'une union
malheureufe. '
\ ' Mais coinment peut-on s'arrêter. à ce tems
intermédlaire de miféricorde & de pat.lence , quand
on pefe les événemens p~ltérieurs qUI l'~mt effacé,
& dont la Dame de Mirabeau fe plal~t.? !?ouvoit-elle être infenfible à des foupçons InJuneux, ,
à des lettres outrageantes , à une diffamation publique ? Pouvoit-elle voir ~e fang fro,id l~ fcandale de l'affaire de PontarlIer, la vIOlatIOn folemnelle de la foi conjugale, & tous les défordres qui ont accompagné cette ' violation?
Alors, nous dit-on, les deux époux étoient
éloignés l'un de l'autre. Et qu'i,mporte cet éloigne_
ment? Il a pû être une barnere aux coups, à
certaines voies de fait contre , la perfonne; aux
exces d'un certain genre. Mais quelque part
que , foit , la l11ai~ qui dift:ibue le . poif~n de la
calomnie -, ce pOiron en clrcule-t-II mOlliS dans
la [ociéré , -en eft-il moins perfide & moins dangereux? La prérence du diffamateur eft-elle néceflàire, pour que la perfonne diffamée reçoive
ces bleffures intelleauelles & profondes qui ne fe
ferment , jamais?
'
M. de Mirabeau étoit abfent! Mais fa qualité
d'épQUX le fuivoit par-tout. Mais l'abfence ne le
delioit pas des engagemens & des obligations attachées à cette qualité. Mais ces devoirs & ces
engage mens continuoient d'être inviolables. S'il
a pû les fouler aux pieds, s'il a pÎt aux yeux de
•
, 149
toute la France abjurer & méconnoître tous {ès
devoirs, qu'importe le lieu où fe paflaient toutes
cesfcenes aillizeantes qui ont révolté le public
& déchiré l'ame d'une époufe vertueufe & fen fible? Le fcandale en eft-il !nains arrivé? La
Dame de Mirabeau en a-t-elle moins reçu la plus
cruelle injure, le plu s fanglant de tous les outrages ? Si elle n'a plus fouffert dans fa perfon ne
des févices barbares, n'a -t-elle pas été expofée
dans fon honneur à des dangers plus affreux que
tous les févices ?
Et qui ne voit qu'après une pareille conduite,
qu'après les attentats que la Dame de Mirabeau
'dénonce, tous les févices, tous les premiers
excès de fon mari, s'ils avoient pû être affoiblis:
par la patience de l'époufe qui avait à s'en plaindre , revivent dans toute leur force, & viennent
faire corps avec tous les événemens fcalldaleux
qui fe (ont fuccédés pendant huit années confé.
cutives, qui attaquent l'honneur & la fûreté de
la femme , & qui envéloppent la vie entiere de
l'époux? Qui ne voit que tous les défordres expofés dans le Mémoire, embrafiènt tous les tems ,
qu'ils font liés par le même principe, qu'ils forment un (out indiviGble & qu'ils autorifent ~ par
,le tableau effrayant du paflë , la jufte réclamation
de la Dame de Mirabeau qui dem ande à êtrerafillrée fur le moment pn!fent , & a écarter d'elle
les rriftes & funei1:es préfages de l'avenir?
�rSb
Les deux familles , a\1erties pnr tnnt de faits ;
infiruites & affligées par tant de (candales, ont
porté leur vœù fi.Ir la néceffité d'une féparatiOh
abfOlue. On voit par toutes ies lettres communiquées ·, que c~ vœu a été. lllbtivé fu~ l'obligaûon, re<:ünnue pa~ ~ fal~Ille ~ de Ml:ab~~u
elle-même de houtVOlt a la furete ~ à la d1gnue ,
t'
' que
l 'on a acau repos de, l~
femme; l' on v~lt
compacrué le Jugement domefilque de toutes les
parolef d'honneur & de" Gentilhomme les, plus
précifes, de tout ce qu Il Y, a de plus falnt &
de plus facré aux .Y~~x de ~leu ~ des homm,es;
rien ne reflèmble ICI a ces feparatlOns volontaIres
'que le caprice ou l'intérêt ~eul opérent, &, qui
font reprouvées par les LOIX. . Tout porte l empreinte d'un att,e ~eflé~~i & raifo,nné " d'un atle
diaé pat les LOIX Impeneufes de la decence, de
l'honneur & du devoir. Qooi donc de plus impofant & de plus inviolable qu'on pareil jugement ?
Depuis que la vettbl ·n'a plus, ~omtne autrefois, un for ~'(térie.ur, <:onnu fous le nom de Tribunal des mœurs, les .:peres, les parens ne font-ils
pas les premiers & vrais <:enfe.urs de leurs familles?
n'exerœnt·ils pas une forte de Magifirature privée, refpeétée & protégée par les Loix publiques?
La Jufiice ne confulte-t-elle pas tous les jours
les familles, quand il s'agit du mariage des enfans, ou de tout ce qui peut influer fur leur fort,
•
'ln
•
fur leur 'çoÏ1clüit~ , fur leyr honheyr? (a) N'<!vfim,..
l1QUS pas une fQuie d' Arr~t~ qui oqt confirmé dep
féparations arrêtées PiJr des délibérqtions qomef.
tiques ? Brode~1U fur LOllet, (b) en rapporte plIJfi~urs des années I('ü4, 16zI, I(jz6, 16z~ 8ç.
I644, &. il Qpf~fVt; que ce Arrêts font intçr-"
venus el'ltpe perfonnes ' qualifiies, qui qn{ intérêt
que les caprices, fribllfcules & divifions qui furJI ieruzçT/t en ICILr mari(jge ne [oient point divl!lguées par une hmg[,ç contfjfqtien & u!,!e enquêle.
La Dame d~ Mirabt;~u q. donc l'avantage de.
fe montrer 4U~ LQi)Ç avec tl!l jugement domefiique qui fi reç\1 la fanaion ge l'honn~ur, qui
e1l foutenu, par la grayit~ des faits , tx P<J.F la
force des prt;u-ves, &. qui lil'4 PQur cOlltr?diaeur,
que l'époux ql;li s'e{l engagé hû-tpême p~r pq._ .
raIe d'honneur & de Gentilho'71mç ~ à l~ refpecter. Ne doit-eUe dons:; pas Ce prOl1'leH}:'('! que 19J ultice fcderfl 'p,e fOI} ;imtorÏté tlne fépag.t:iO!1 malheurefement trop nécefIàire, une féparation, qui)
d'apr~~ les fait$ exp.of~s &. comJlaté?, ei}: fQIliciliée par la déc~I}ce ,Pl1r l'hOIJne\lf) par la fÛr,eté
de ,14 feJIl1P~, p.ar ki mœws pHbliqu~? ~Ues-mê
mes?
P~tJda,tlt rill,i taaceen fépantioll, on demande
,
(a) Code matl'imonial.
(b) Leme.s, pag. 536.
,
�1)2
quels font les droits de la Dame ,de J.Wira?eau.
Son mari veut que, pendant proce.s, 11 lUI fait
enjoint de le rejoindre, o~ ?e f~ ret~rer da~s une
Maifon Relicrieufe avec lnjOnalOn a elle d y recevoir les v/fites d; (o~ m.ar:i., & à. icel~i de la
ndnter & fréquenter, 1l1hlbltlOnS faItes a toutes
perfolmes d'y porter empêchement, ou obfiacle
direaement ou indireaement.
En vérité, ces fins ne font pas concevables.
S'il faut en croire le fyfiême adverfe, les fins
proviflires & la den:ande en. f?paration. doivent
être JUBées fur les memes pnm/pes. Mals ou ces
paroles ne fignifient rien, ou eUes n'annoncent
qu'une erreur. Car que veut-on dire par-là? Veuton ·donner à entendre qu'il faut pour les fins provifaires , les mêmes preuves, & une iùfiruB:ion
auŒ approfondie que pour le fonds? Mais deslors qu'aurait-on befoin de fiatuer fur des fins
provifoires, puifque le fonds lui-même ferait in!.'-
IH
truit?
L'état provifoire efi ,un état qui n'a de vie
que pendant l'infiruB:ion, & jufqu'au jugement du
fonds. Donc il doit nécefiàirement être réglé pa~
des principes qui lui font propres.
Quels [ont ces principes en matiere de féparation? . La liberté de la défenfe qu'il faut conferver à la femme qui demande d'être féparée, &
la fùreté de fa perfonne.
Comment . une femme qui continuerait d'être
fous la puiilànce immédiate de fan mari, auroitelle
,
elle la liberté nécefraire pour dénoncer & pOUl'
pourfuivre les abus de cette puilfance? Combien
de fois ne ferait-elle pas gênée, arrêtée, perfé-.
cutée par l'époux contre lequel elle aurait porté
fa plainte? Toutes fes démarches feraient épiées).
toutes fes mefures déconcertées, tous fes confeih.
écartés, tous fes efforts traverfés.
. D'autre part, comment les Loix pourroient_
elles obliger deux époux qui demandent d'être
féparés, à vivre en[emble pendant l'infiruéhon
du proces, & les expofer ainfi aux vivacités,
aux aigreurs, aux reproches, aux [cenes amigeantes que peut entraîner, & qu'entraîne nécefrairement une contefiation ouverte?
. De plus, une femme qui fe plaint doit être
en [ûreté, fi l'on ne veut entiérement lui fermer '
le recours aux Loix. La pré[omptioil efi pour elle,'
parce qlle les Loix pn![wnent toujours en [aveu\;
de l'être le plu9 foible contre le plus fort. Les
Tribunaux ne voudraient point, dans le doute,
expofer une femme qui dénonce les excès de [on
mari, à des exces plus grands encore, & à un
préjudice que le Magifuat peut prévenir , mais
qu'il
ne ferait pas toujours en fan pouvoir de
,
reparer.
'_
Delà c'efi une maxime confiante que, pendant l'infiance en [éparation, la femme ne peut .
être obligée de rejoindre [on mari. Nous en avons
un Arrêt précis 'de la Cour; qui eit rapporté
V
�.
1).4
.
.
d V· . ' cl.'
par Bennet. (a)) La Dame e lanl , I t Cet
)J Autetlr
felnme du flellr M-art611y, de 'la ville
» d'Hyer;s, pourfuivoit fa fépara:ion d"avec fOI1
)} mari & la Cour, par fon Arret du 10 ·Sep.
» temb;e 1729 ,prononcé par M: -le Pré.ûdent
" de Bandel, lui adjugea une provIhon de 400 ~.,
» & caffa un~ Ordonnance, de l' Avocat. plll~ an.
" den, rempliffant . le- Tnbunal, qZ:l luz -or.
}) donn~itde Je retlre~ vers [on man, pendant
) l'inflam:e en (eparatzon.
Lacombe Cb), en parlant de la . réparation,
obferve' que la femme pelLt r:endr~ plainte, ft
retirer -t>n la maifon de [es pare.ns, ou Maifon
rélif;ie~ifè, [e fair.e amorife.r pour pOllrfuivre ft
féparation., demander provifion -en attendant le
jugement.
, .
. , .
..
.
La femme n~fi donc 'pas oblIgee de reJomdrefon
mari, & elle .peut à fon choîx fe retirer dans
fa famille, ou clans un ,Couvent.
.
Et qu'avons-nous befoin d'autoiifer un . prin~
cipe, qui eft de pratique univerfelte, &.. qui eH
fuppofé même par toutes 'les formùleS âe ·Requêtes en réparation, qui font tr-acées dans tou~
nos livres.. ? Cc)
Le fils qui plaide avec fon pere, n'-t!fi pas
i
E
(a) Lettre S, Arr. .'i , .pag. 34).
-Ch) Matieres ' civiles au -mot foparation.
(c) Procédure du Châtelet, tom. 2.; pag.
r5~
'obligé d~aJIer prendre les alimens chez lui. Le
Religieux qui plaide avec f-on Monaftere eft autorifé à 'chercher un afyle daFlS une m;ifon. religieufe d'une autre Ordre .. Pourquoi donc les Loix
n'auroient-elles pas eu la même prévoyance pour
la femme qui demande d'être féparée de fan:
•
mati?
. Lors même qu'une inftancè en féparation ea:
Jugée, lors même que la femme a été déboutée de (es moyens reconnus faux & invalables ,.
les Loix .n.'ontgarde d'ordonner fa réunion
fubite des époux )J. ' Il cft de la prudence
)~ des J u-ges, dit Brillon' , (a) de donner à la
- H femme quelque tems à demeul7er dans un Cou)} ven.t avant de retourner avec fan mari. La
)} même chofe e.fi atiefiée par tous les Auteurs ,.
) & con{àcrée par une foule d'Arrêts. Cumrnent
)-) donc -ferbit-iJ. pofiible que, pendant l'inftance mê..
) ·me en -réparation, on obligea les deux: <époux à vi) vre enfemble, c'e1l:-à-dire, à fe déchirer & ~
) te défàler journellement l ' Mais, .ajoute-t-on, fi la Dame de Mirabeau
veüt -ufer du droit qu'elle a de pas ne rejoindre
fan mad, eUe doit Jèretirer càans un Couvent..
Quel1~ cft donc cette crueHe alternative? Pourquoi celte aultet-e dôture?:
2
. (a) Au mot: féparation ' des conjoints~
2. l ').
Vz
•
�1)6
Le Couvent ne peut, être
. ordonné que COl11me
peine, ou comme precautIOn. .
\. .
. Comme peine il n'en dl: p01l1t a InflIger à
l'innocence & a~ malheur. Pourquoi punir une
.
époufe qu'il ne faut que venger?
. !
Comme précaut~on., on ne t:0u:rolt ordonner
le Couvent fans inJu!hce, .fans Indecence & fans
.'
?
1l1Jure ' .
, .
Inutilement l11voque-t-on le temoI.gnage des Aute urs , qui ont examiné ~, pe?d.ant 1'1l1fianc: en féparation, la femme. dOIt r~J?1l1dre le man ou fe
retirer dans une malfon rehgIeufe.
. Il ne faut que péfer les doéhines qui font citées
pour renverfer le. fyfiême que l'on prétend autori.fer par ces dottnnes.
.
Le Cardinal de Luca ~ (a) que l'on nous oppofe ne dit-il pas que la décifion de ce point dé'pend' de la nature des moyens propofés par la fem,me & de la confiance que peut mériter le mari ,
ex [aai qualilate ex quâ pendet an cautioni Jit
fidendllm, necne? Ne di:-i,l pas que la décifioll
. dépend encore de la quahte des perfonnes ? . Ne
dit-il pas que l'alternative de réjoindre le mari ou
.de fe retirer dans lin Monafiere , peut être propo. fée à des perfonnes du bas , peuple qui n'ont pas
certaine élevation d'ame, dont les principes &
l'éducation
ne fçauroient fuffifamment garantir la
,
•
conduite, & que l'on peut d'aiHeurs expofer avec
moins de danger à des rixes auxquelles ces perfOlmes ne font que trop habituées & qui font fa, cilement fuivies de réconciliation. Mais qu'il en
efi ;lutrement qûand il s'agit de perfonnes d'une
certpine confidération qui ne font jamais préfumées
fe Plaindre, que lorfqu'elles y font forcées par les
rairons les plus fOrtes, & qui méritent par leur
état ' tou5--1es égards, & toute la confiance due à
la délicatelfe' & à l'honneur? Vel [cilicet cugendi
lIxorem ad cohabitandum ,vel illam fiqlleflrandi
apud hOlleflam matronam, Jive in Monafterio ;
id nimium pendet à qualitate perfonarum, quoniam Ji agatur inter magnates inter quos Contractœ Jint indignaciones ob quas ad judici1/m 'IIenÎatur, Cl/m id argua! magnam caufom ~ idcircà non
de facili cautlollis remedium adhibitllr, dùm lis
duratura eft, ob inconvenientia quœ relultare paffum; fecùs aIJtem lIbi agatur de perfonnis privatœ
fortunœ qllœ jllxtà mores regionllm de facili rixantllr ~ GC feparamur ,fed de facili conciliant ur ,
quoniam tunc hujufmodi provifzones proficllo eJJc
(oient ad lites omninà componendas.
Le même Jurifconfulte (a) ne retrace-t~il pas
ailleurs les mêmes principes? Ne répete-t-il: pas
qu'il faut faire une grande différence inter popu-
•
.
(a) De matrimonio, difcurf. XI. n. 13 •
•
I57
(a) Difcurf. 17.
,
.
�. 1)8'
lares vèl mediocrés, & MagniueJ & Nobil€s, &
flue ces def/liers d?ivent ê~re gouvernés ,par d'au_
tres regle:s Db majoreTtl fllmu~um honohJ & exif
rimacionis? Ne rut.:.if. pas qu'il faut fur-toat é(jt1-,
fuIter [ur cette matiel'e les opinions reçu€'S &. l'è§.
mœurs du pays moreS. refjionù? Or, y g .. t ...il dàn~
fiOS Lnœur's un feul exemPle d'unie fenlln~ Qttachée
à l:i maifou Vàremeltfe }10ur être enfè.velie diins Ult:
Monafrete pendant l'inlbnce ·eil [éparilÜ(}u ?Y à ...
t-il un Tribunal dans h~ inondé qui ait jâl11:lts faie
tet uutragè <i la làlnœté, à la màjefté GQ pere ?
Sans 'rloute les Monafte-res f~nt des afyles. tef.:..
pe&ablespour la vertu. Mais la ffiaifor1 pnretneHe
l"eft· bien d'avantage •. Elle eft i~ prel1'liet afyle de
YillllOcence .. Elle èfr re vrai [ahcftuàire ' des filœurs •.
Bien avant dees etah1i1fem'e'ns qui Me doivelit leur
vrigine 'qu'à des '1N{~itutions pat'ticuli~r€s' de pî€té 1ià [tJatul'è , . la reHgi0/t & l'état avaient défigné'
fa lllaifoll du pere, i:!tHflllfe 'UN tillflple fucté dans
1-e1lI~1 l~s 'eIffatts dûivefit tt!c~Vè>ir l-es principes
d~ 'tous ies devoirs,. 1~~ femMces & les exemples.
'cle ro I!lre s le s Vêttus ~
l.!ne femme '&Ï'a fuus l'infp'€B:ion, fous la pro
tetti0n 'd-'uli pete vérèuéux & refpe8:âble '; & les
LoiX ~l.ii IChét'chètbient lm â'utre 'afyle .! Et dan-s
-qu~l li'e'de 'VivtfQ1is MU~ â6trè , -pùifqûe hous.
ferions réduits à la trifle extrêmité de ne pou- _
'fê5Ir, plik comij"fer iur, es tiens âÜ Tang, fur les
fentllnens les plus réhgieux,. fur les infpira6ons.
les plus fortes de la nature ?
.
a .
-•
I ).~
.
.
Mais il faut faU\~er, s~écrie-t",on, la Dame de
Mirabeau de l'QhfejJion. Et qu'a-t-elle donc befoin d'être abfédée, pour réfufer de fe livrer à
ll11 épo'ux qui l'a outragée, q~i l'a . dia:an:.ée !
~ui a menacé fon honneur,. qUi a attente a fa
{ûreté, qui. ne! s'ett rendu fameux q4e par [es
iléfordres & par fes fcandales 2
Quels feroient . les obfeiJèurs ? Un pere ver'tueu~ & [enfib:le, des parens honora,~les 9ui
voudvo\ent éca'l'ter la hunte , Poutrage , llI1fanue ,
flui [e préfenter?ie~t pour PfQtég~ une femme
malheur~ufe & mdIgnement attaquee!
.
- La Dame de Mirabeau obfédée ! D'après les
faits expofés & con(l:atés, elle n'a hefoi\1 que ~e
fe replier fur elle-même, de confulter les fent1'mens ne f0m cœur , d'interrog~r fon alne, de
céder à l'infiintft #licat de l'honneur 1 pour répoufier avec fo{ce . & ayec énergie des, t~aits
d'audace ,q\li ,feroient [euls .capables de Ju{hfier
{ès repugnances , {ès crainçes , fa ,réfifianc.e frrme
& inN"incible.
La Dame de Mirabeau obfédée ! Et oui elle
raIl: , & elle doit l'être; mais par la voix cl,; fa
c01lfcience , mais par celle de tous ~s gens de ~)1en,
mais par.la ,rociété entiere J
. :La ,llame de Mirabeau . obfédé.e ! LEt n1efr,.,ce
donc pa-s la propre famille if [on mari qui la
pllel~i(}re .il v-t:rre ,dans fOUI anoe les femences
dont ,on ,v'ÜÎt ,aujourd1hui l: _ ?éve1op~ement ]
N'e!1;.,cep3s cette famille qUl ta .4!v.el'ue .de fe
<
�r60" "
renir en garde contre un époux peint fous les
couleurs les plus affreufes, & aux etnpreilè_
mens duquel on ne pou voit .ce rendre fans cam.
promettre [a fureté, [a dignité, [on ·r epos? N'dlce pas la même famille qui a dévoilé tous les
complots, qui a révélé COliS les myfieres do.
rndliques, qui a infpiré toutes les craintes, qUl
a démarqué J'homme en entier?
La Dame de Mirabeau abCédée r Et c'efi pour
la [ou (haire à cette ob[effioll prétendue , qu'on ·
voudrait l'enfévélir toute vivante dans un tombeau, pour ne lui laifièr communication, dans ce
fomb.re reduit, qu'av!::c celui qu'elle dénonce C0111me [on perfécuttur & fan tyran!
La Dame de Mirabeau abfédée !" Et fous ce
perfide prétexte, il faut l'arracher à la proteétion
parernelIe , à toure fa famille, à la nature eurie.
re ! Et fous ce perfide prétexte, il faut lui ravir
Je droit [acré de la défenfe naturelle lui ferme v
d
,
l"
·acces
. es T·
nbunaux, lui interdire tout
recours
à la J ufiice, lui ôter la refpirationde l'a me
l'abandlmner au m~fheur & au défefpoir!
'
1rab.e au obfédée ! Et avec ce
La ~arne de
il faut
mot ~lelU de malIce & vuide de feDs
la pover du. bén.éfice de toutes les pron:effes f0JemneIIes , qlU lUI ont été faites ,. de toutes les
~Jaroles d. honneur qui lui ont été données ! E t
li fau.t lUI ravir t.ous ~es grands avantages, pour
fav~n\er un man qUI s'eft fait un jeu d'attenter a 1 honneur de ~a femme, de violer la foi
1\1
conjugale "
16r
conjugale , touS tell devoirs & tous les engél'-
semens!
La Dame de Mirabeau obfédée! Et fur cette
allégation calomnieufe, il faut attenter à fa tranquilité , faire"injure à un pere vertueux, accufer
& traîner dans la boue toute une famille honorable ! .•...
Non: les Loix ne fçauroient fe prêter à- de pareilles manœuvres.
La Dame Je Mirabeau n'elt pas dans la c1a{fe
de ces femmes qui quittent fubitement la maifon
de leur mari, pour venir former une demande en
féparation. Elle efi, depuis huit ans, en poffeffion de
l'état qu'elle demande de con[erver. Elle jouIt de
cet état, de l'aveu de fa famille, de l'aveu même
de l'époux qui vient indignement troubler fon
repos. ErIe en jouit fous la foi des conventions
IfS plus facrées & les plus inviolables, fous la
foi d'un jugement domefiique , dont eUe invoque la fainreté & la jufiice. Pourrait-on lui ravir
provifoirernent des droits certains & reconnus?
Elle n'a jamais refufé demanifefier elle-même
fes iptentÏons il fan mari. Elle a accueilli [es émi{faires; elle a reçu fes lettres, qu'elle n'a renvoyés
qu~ quand il · a fa.Jlu rompre une correfpondance
inutile & fatiguante. Elle lui a offert des entrevues, avec les précautions qu'elle a cru devoir
f indiquer pour fa fûreté & pour fa dignité. Mais
el~e a déclaré qu'elle ne pou voit faire le facritice
de fa [enfibilÜé ) de fan honneur outragé, &
X
\
\
�161:
~'el1e était comptable à fa famiJIe, .au public ~
à la fociété , de tout ce qui pouvoit inréreiièr f~
é.tat & fa délicatefiè.
"
Les Loix pourroient-elles donc défa1"Doliver 'Ult
langage qui n'ell que celui du fenciment? Pour ..
,"oient-elles ne pas p'r otéger une épo.ufe malhe1.l ...
reu[e qui réclame leur autoriré ? Quel ea même
J'homm.e raifonnable. qui.., ? l~ lVue de t0ut ce qui:
a éré écrit par la famille de Mlr.abeau.., ne s'étonne
pas de la confiance audacieufe, avec laquelle le
lllari accourt de fa prifon , pour r.edemander fa,
femme, & qui ne l'accuferoitpas elle-même
fi elle pou voit fe déterminer à rejoindre {o~
mari?
à Aix, le
DÉLIBÉRÉ
2.,
RE. Q U -E TE ;
D ' U , C 0 M T EDE
Mars r78~.
PORTAlJIS ..
SIMEON.
,PAZERY.
PASCALIS.
BARLET.
SIME.ON, fils,
" -
)
Pl'éfenréé ' à. No«eigneu~s ..du Padement, &
fignifiée le ~ .A vrit -)
1
J
. En réponfe à la Requête de la Dame Comteffi
DE. MIRABEAU, fignifiée la v~iUe.
e um de p 0.J1e/liolle , & t]lI.S momm to caufo dicitur , '!Ji appel/alio
illterpojùa fuerù, l am'" lala S ententia flrt itur effic1um. La Sentence
rendue fur la poffeffion du mo ment doit avoir fo n effet malg ré
l1apf el. L. lm;'. cod. fi de mommtanea polfdJione fo en' f appûlatu nl.
BERNARD ,. Proltureur.
.A
j
-
A A I.x , .chez JEAN-BALTliAZARD MOUR fil
l mpnmeur
'
,
ET
S".
.
du ROI. 17,83'
MIR ABE A .U..-
•
IN 'OSSF:IGNEURS
.Du
PARLEMENT.
Upp1ie humblement Mre. Honoré-Gabl'iel de Riquetr."
. Comte de Mirabeau.
. Remontre qu'on vient de lui fignifier, au nom de la~
S
Dame ComtdTe. de Miraheau ,_ üne requête tellement:
.
A..
�.
.... ~. .. I ~r.
t
nutrageante; qu'il tl~exHle peut-être pas un autre éxem 1
d'un tel excès el~tre époux; & qu'au bas de cette ,requëi e
il a été furpris à la religion de la Cour, fur un fa e,
expofé, & fur des autorités tronquées, un Décret é Il.''
demment contraire à la loi; lequel, s'il étoit maÎtltenVl,
rendroit vains & iIlufoires les titres les plus ' faérés.
u,
C'eft devant un Tribunal; c'eft devant des Juges ii
verains; c'eft à la Cour même où réfide la majefté
Roi & de la Nation; c'ea aux confervateurs des la' U
aux gardiens des mœurs, aux protetteurs de tous
droits, qu'on ofe dire au nom d 'une époufe que es
" citoyen nota bl e & qua l'fié
,
marI,
l ,a éte' détenu des
ann 'on
entieres dans des mai/ons de force, defquelles on ne ees
fortir fans flétriffure , & que les coups de l'autorité la pelut
L:
'
"
p us
"
ar bltral~ ne .urent JamaIs ~onnoItre à un homme de fa
claffe; a mOins que le donJon_de Vincennes, la Baftille
&c. {)ù .furent détenus, par 0rdre du R{)i, les Condé:
les Conti, les Luxembonrg, & plus récemment en co
des' fils de Ro'is, ne {oient DES MAISQNS D.E ·IOR~
CE : c'eft devant des Magjftrats qu'on ofe dire
l' honn~urA & la déLicat,effi. de.'~ Dame Comteifè de Mi:a6~~~
pourrou ,ure compromlS, a re;ozndre un époux-dont elle déclare
ne voulOIr & ne pOlIVOI~ approcher Jans s'avilir & Je camprameure aux yeux des fozx. & de la fociité enriere.
- C'eft à des Magiftrats qui connoilfent toutes les circonfiances du procès, qui favent ce qu'on fuppofe au
nom ~e la d~m.ander~ffe ; ce qu'on dit, ce qu'on tait,
~e qu on ~ccredlte meme en feIgnant de le taire: c'eft
~ ~es Maglftrats qui connoiffent leurs concitoyens & leurs
llalfons de fociéré-, leurs int~rêts cachés & leurs pallions
fe~retes; qu'on ofe foutenir pour la Dame Co~teffe de
Mlrabeg u , qlie l'obligation de fouffrir au moins le, vifi.
tes de fon man,
. 1"urou avec. lUI
1 un commerce que la décence
que l'Izo(2neur & I:s confidératÙJns lu p lus fo".~es doivenz écar~
, ( r; qu~ <1e f~rolt Ull eXCfs' de tyTannie que d'ordonner
J
°t
It
'f i
r
ces "vi{îtes, puifqu'oh démolltrer qu'il Ile peur plus y avoi,..
aucune forte de fi!Jcù té entre elle . & Jan mari.
C'ef!: potlr une femme qui ne fe plaint d'aucuns févi~es, ( & qui ne fç auroit s'en plaindre, ptlifqu'indépendammeot de ce qu'eHe n'en effuia jamais" les lettres
d'elle qu'a fatt imprimer fan mari, démmJtJeflt invinciblement que leur tlil'ion fut intime', fic leur cohabitation
fans m age!» ; c'eft pour la Danle de mirabeau,. qui, dans
UDJ temps depu is lequel elle n'a pas revu le Suppliant ,.lui
a écrit du {tyle d'une amante paillonnée; c'eft en fon
nom qu'on t,ient ce lang<!ge.
Et c'eft d'un ton fi décent) fi noble, fi impo[ant ~
qu'on repréfente le Suppliant comm~ Joulam aux pieds
Jes propres rngage'71.ens ; parce qu'il redemande fa femme aUlQ
Tribunaux, après l'avoir tant & fi vamement Iéc1alltée
d'eUe-même &. de fon pere.
n'etl: point ici le lieu de mont1'er qble celles deS'
lettres cdu Supplia.nt qu'on attelite, /Te prollvem év idemment rien, finon qu'il demandott a.Io.r!>, &. dans la fitua..
rion la plus cruelle qni fut jamais, un élal'giffement cEl nU
ditiortnel &. partiel qui ne lui fut p{,)~l<lt accordé. Or,
du moment où i-I n.e l'obtint pas, n'dt-ce point bine
truauté dér-ifoile que de ra-ppdler comme des. engagtmens.
les conditions qu'il pwpofoit de. s'i-mpofer pour W'l prix:
qu'il l'l.'a pas reçu?
/
11 l1le s'agit p as non p.lus de débattre iCI les lettres dfi
fan pere, qtli r co mme tou tes autres lettres m ifiiV6s de
ciers, devQlient re(l;er fo us la foi du fecrer. On prouverait aiféme nt qUI'une pa-role qui ne f-ut J AMAIS l'Ii- demanolée , P}f reçue, ne fa-ufQ i.t être réclamée" &, n'exi'fie
pas- Oll > p »ol.l-V~ r,o.rt qN~ cene pal'o.le eût-eHe exifté , eUe
Ile pouvait être donnée qu e p our un temps , & pour lin
temps d'épreuve ~ que. le JAMAIIS ne Cauroit {e fwppofer i.
pw.[qu'if feToit également abfur de & barbare: qu'un pere:
~ûit condamné [pu, fils à. n'avoir JAMAtS ·fiJli d'expier. fe~
ee
,.
)
Aii
-
"
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erreurs; à ne pouvoir les répare'r JAMAIS' 8<
"1
d
'
l"
.
,
qu
IlIt con amlle ul-meme ,a ne JAMAIS voir perpét l ft:
f:imille, On prouveroit enfin que ces lettres ll'étab~% fa
rIen que les exagérations & la crédulité d'un pere ,1 ,e,nt
'fi
'
trnte
pli! que la plus grande partie de leurs déta.ils & de l '
alferrions eft démeotie par les événemens poftérieurs ~U[s
propre conduite du {jeur Marquis de Mirabeau T'
a
'r
'Il
'
OUtes
d
ces IICUI1l0nS trouveront al eurs l:eur place: car {j 1 S
pliant fe doit de ne point demander Compte à fa e up.
de ce qu'il a pu écrire contre lui> il fe dOl't n pere
encore
p1us de demander compte du procédé d'employer
lui les. lettres de fon pere.
cantre
Mais il fuffit · au Suppliant d'obferver en ce
'
C: ' r
mOment
que tous ces laitS .lont étrangers au procès' qu"l '
.
'd'
,
1 n eut
J<1mals
autres engagemens avec fon épouf.e
. fi
r ,
, que ceux
qUI urent conlacrés au pied des Autels' qu'il
r
'
.
'd'
, n e laUrOlt
en avoir "Pr,ls e con;ralres' ; que s'il en eût Contraété de
tels, les TrIbunaux s empre{[eroient de di{[oudre
.
'r' 1
une Con·
VelltlOn IllWCla, e & fcandaleufe' que les engage
d
cl eul' époux fiont reclproques,
' . '& qu'Olt ne peutments
es
r
"
fi 1
•
lans Ill'
u ,ter, a toute morale, fans fouler aux pieds tous les
pnnclpcs, fuppofer que La décence La dé/ica.tefT:e & L"
d'C: d
•
':11'
/lonneur , ~len ent a une femme , de recevoir les vifites d
r,n .man . . L'HONNE,UR d'!lne époufe eft de refpeéter & d:
aIre refpeéter celUI de fon mari, dont elle ne pourrait
que partager : a honte auill long-tems qu'elle porte fan
nom . . SA D~LICATESSE eft de ne pas fe permettre
~.afim~lOdr,e, demarche qui pui{[e caufer à fan mari une
J~ e I?qll!e~~de. Enfin LA DÉCENCE repou{[e avec in?lgnatlOn ,1 Idée ? 'une époufe fans cerre entourée de la
Jiieun elfe d une VIlle elltiere, & illacceillble à fan mari
eu l,
• C'eft le refus obWlOe' d' une con fierence entre les deux
eM?? ubx, auill long-temps qu'on a craint que la Dame de
fi"
,
Ira eau
~ ne ut pomt a{[ez fL{b)uguée . l'al' l'ohfeffion ;.
rA
=
'5
'C"eft le procédé inO'1.li d'avoir renvoyé au Suppfiant, fans
les décacheter, les lettre~ qu'il écrivoit à fa femme;
c'efi la violation du dépt t dt.s It:ttres d'un tiers; c'eft la
diffamation publiCiue d'un mari par fa femme qui efi contraire à toute décence, à toute déLicateffe, ~ tout !lOn~eur.
Les confeils de la Dame de Mirabeau & fes obfe!feurs
reconlloi{[ent apparemment uIJe partie de ces vérités 5
}Juifqu'ils offrent maintenant de lnontrer leur captive,
fans doute a{[ez bien infiruÏte, à fon époux. Mais comment l'offrent-ils? Ils ne veulent la lui montrer qu'une
feule fois, \:In feul infiant, entourée, invefiie, Ils ne le
veulent qu'avec des précautions injurieufes au titre d'é~
pO'JX, & fur-tout au Suppliant dont on attaque fi cruelkmeta le caraétere, & qui réclame principalement pour
fa femme la liberté dont elle eft privée! Peut-on mieux:
.:iivou'er l 'u'elle n'eft pas libre que par cette ridicule antitheCe 6.dellement tranfcrite de la Requête de la Damede Mirabeau? On jiiim de craindre pour La. Suppliante, une.
ohfeffioll gui n'exifle pas, & on voudrait LA LIVRER A UNE
OBSESSION
QUE
TOUT
DOIT LUI FAIRE CRAINDRE ET,
REDOUTER. Etrange terreur que dévoilent fi naïvement
les obfe{[eurs ! Etrange terreur que celle de voir UNE
J~UNE FEMME OBSÉDÉE PI lit SON MARI qu'elle ado ~o it
autrefojs , & contre lequel on n'efpére pas lui avoir encore infpiré a{[ez de haine ! Etrange terreur ctue celle
de la voir rendue à fes fentimens premiers, à fes plus
grands intérêts, à fes devoirs les plus facrés ! Cette indifcrétion fans nom & fans pudeur démontre invinciblement qu'il eft des obfe{[eurs qui ne veulent point de ri~
vauJC; & le langage odieux qu'on fait tenir à la Dame
de Mirabeau fuffiroit pour le prouver. Sans <iqute fi elle
était libre, elle ne diffameroit pas [on mari: Sans doute
elle ne divulguerait pas les lettre~ de fOft beau - pere :
fans doute elle ne fuppoferoit pas contre toute vérité
qu'il exiftoit un vœu domefiique contraire à la réclama-,
�6-
ri~rr dit Suppliant, Sc qu'un' jugement de {; . ,
'7
fOlt la Dame ~ Mirabeau' a' d
famdle
é ' autor'r·
éPQ~. Sans dou~e elle n'auroit emeurer
pas dîi1imPa~ee de fan.
demrcres lettres qu'cUe a rprues d r
ule les deult
"
-,..
e IOn beau
qu,c 1·e~ Supp:l'rant JOint
ici; eHe aurait fenci
- pere, Be
felgnO'lt de prendre- pour regle d r
qlle, des qu'elle
'"
fi'
,.'
e fa condulte l
e vœu
Pieu"-iu}- ",o~e lqt-l~ ~ eue devOIt le chercher dans l
Pl01S
defnrer
&.
non
dans
celles
à
trois
d
es
lettres
da
,ijjcat, Tl, 1
& 2.
n'auroit pas ?iffimulé les infi:ances touc~;~tese date. Elle
traoces énergiques de l'onele de r
"
les cernon_
IOn man du B ' ,
' he
M Ira
au, dont on connoÎt ré-roIt'
"
aJlh de
..1'
r.'
...
e unIOn avec f. c
UÇpWS JQlxante années, &. dont le S
'
"on aerePiuu jll}- demiere lettre à fa niece écrite '1
UPplI~lt JOint ici la'
,
1 Y a trOIs JOc '
,
llftcat, n, 3 que l.'étrange repoofe
évidemment
·d'été
rs, amfi'
&""
complaifaos, incendiaires & p"~ll ~ e par des Confeils.
M '
. lUI ammeSL
ais le· vœu de la fàmille exifi:a-t-il en
'
ab[olwnent étranger à une infrance r' d eiTer-, 1·1 eft
bunaI légal, 'devant Hne Co
[,
le~evant un Tri.
lin Trib4na.l domefiiqne r:r ouveraIne ~ non devant
Dame de Mirabeau l'a îr
bien reconnu' elle a- ft - b'
chez- M {';o l '
lien reconnu qll'elle n'hahito'~
• JI j:} pere
que p l , r
h·
Suppliant ou par u' . li' ar e COluentement tacite dt!
~ demandé provi[o::m~~te a~e {~ conde[cen~ance; qulelle
a. demeurer chez le Sr 1\ ,.
,~tenant: d etre· autorifée
Il.
•• lY.l arqu.ls ue Ma
r
C ' eH
fur cette demand 'd'fi
ngnane 10n pereL
plaidé au Siege' & ,~In 1 p~n[aWe & forcée qu'on a
iimulé dans la Re c. e ~e qUI a. été infidieQ[ement di:fpar une déc1amafquete e la- Dame de Mirabeau, ott.
kils, on ore a 1~7 auffi repréhenfrhle qme vl:Iide de~
USURPATION qtJp-kr~r p~{!ejfi01/; jàcrée & inviolable UNE'
Mœurs,. a~ L~x, ~erOlt egal,ement à la: Religion:, auX'
conciuuer
auX. Tribunaux, fi elle pouvair
Le Suppliant joint . {;
•
.
.Pieces ilif- ten ce du Siea-e 0
a a requete un extrait de la Sennficflt, n, 5,
M. le Lie~teha~t q~t ~er;,~ qu'j.l n'av~ it tien demandé il
put aue la matlere d'un litige. Il
L
'
•
-<lemandoit une ÎlmpIe injoné.tion de droit, à tappui de Ia:~
'qu.elle il n'invo~uoit aùcune force coa8:ive.
Mr. le Lieutenant, par un excès d'égards pour la Dame
de Mirabeau, & par une [enfibilité peut-être jufte pour
.les bruits calomnieux qu'on répandoit au nom de cette
Dame, & pour- l'éclatante annonce d'une répugnance in~
vincible, Mr. le Lieutenant crut devoir décréter d'un foùmon/ré à partie la requête du Suppliant. Le refus de [on
épou[e fut fuivi d'une demande en féparation qui eft ertcore pendante au Siege, & d'une demande provifoire, aux
fins d'être aù'corifée à demeurer chez le Sr, Marquis d~
.Marignane. Mr, le Lieutenant ne ftatua point en'core [ur
l'injonétion, & fe contenta de renvoyer en Jugement; de
force que la demande en injonétion du Suppliant devint
une dépandance des fins provifoires de Madame de Mirabeau.
Les Parties étant i\ l'Audience de M. le Lieutenant, le Sup:
pliant, pour accorder à fon épo.ufe t?ut ce qu'il pouv?it , fans
préjùdlcier à fes droits, préfenta un expédient, par lequel
il laiifoit à la Dame de Mirabeau la liberté de fe retirer
provifoirement pendant le procès dans un Couvent, où les
deux époux [eroient également obligés de fe voir, c'étoit
demander purement & fimplement le déboutement des fin§
provifoires de la Dame de Mirabeau; &. la Sentence a
prononcé conformément à l'expédient du Suppl~ant. . .
Nous ne Cuivrons point l'Auteur de la requête dans fes
excurfions auai inutiles qu'indécentes ,fur la Sentence du
Siege, fur les conclufions tant vantées qui la précéderent,
&. fur L'ÉTONNEMENT du public qUÎ en entendit la prononciation . . Nous croyon·s le caraétere de Juge toujours
& par· tout également refpeétable; & nous n'imaginons pas
que N ofi'eigneurs ignorent les applaudiifemens urtiverfeJs·
qu'excita cette Semence, qui n'affiiger-oit pas tant les
obfeifeurs , s'ils la regardoient comme le vœu folitaire de
quelques Juges.
..
Ceux.j qui ont lu la voifieme partie du Plaidoyer du
�pe',j"~nt 'aH~ment ~,
Suppliant;
•
Autorités & les pr\ncipes.
de 19 uel cô'té
;J1ne,r, fi, enfuite de l'appel de 1 ar; mallJtenant d' elt
[uno
e Lieutenant étoit devenLl incom a ame de J\1i r abe il·
llOno6jlant appel, comme on le [~é:~nt pOUl' ordonne all ,
pouCe du Suppliant; mais il eft à ll' lent au nOm
les vrais principes [ur la de
d propos ,. Pour réli e·
la quellion incidentell~ den~al: e en [ur[éance qu'i [,umer.
la p é d '
, a I r e avant 1 d'r
orille
" : teCl ue Illcompétence quel
a Ilcuffio n d
lllinilires.
ques obfel"vations '
,e
10' Il s
préÜ.
fi . !if 9 'flle la Sent~nce du S'
,
orme de 1il prononciation' & q I€ge n ell, quant à 1
ment, qu'un d.tboutement Or' ua~t au fond' du J~ a
la nature de tout déboute:nent 14 ~,~/nconteRablement ù~~;
e
appel; car il fe roit abfurde d' _ ' d: exécuté nonohfi
t e m,.ecenqu
t ' Oll ne poiféd ' e sa Juoel"
0
apres le déb ant
le demandoit.
Olt pas auparavant pu'r ?u.
° S' M
'
lIquon
2.
1
adame
de
M'
b
.
'
. Ira eau
.
leutenant
[es
fins
prov'r
'
avolt
obtenu
de
M
1
L
mett
' llOlres [ans d
'1
r, e
re en quefuon. fi la S '
oute 1 auroit [; Il
exécutée malgré l'appel dent21ce provifoire pouvoit :treli
'Iue cette Sentence auwit é !:l'd ' omte de Mirabeau' parc
d'épou'
VI emment p " d' ,
,
e
,
. ~, tJt~e non colltellé M' M reJu IClé à [on titra
;:if~l,c\~~e con:~ildiÇtoire à, c'eluia~~ ç adame de ~irabeali
l' u e ~ ~e lUI Contefte,pas.[a
r omte ,de Mirabeau.,
~gale, pUlfqu'elle dem~nd ' ~ua né de man, ni poffeŒon
fe' [on Pere, (où elle n? olt ~ r,efte! provifoirement chez
elftem~n; exprès ou tacit:v~~t ;té Ju[q~es.là que du con,
e a ete déboutée. Madam d on· man) demande dont
E~s pu prétendre, dans le cas
e e Mirabeau n'auroit donli:
Olres. lui. e.uifent été adj' ugé
~ême où [es fins provi~
autorIté e "
,
es, a donne
d r.
Comb - ' Xe,GutlO n provifoire à I r , e la propre
, len mOins p'eul _ elle
, a Sentence fuppofée
&
époux
[on déboutement qui
.E Ifs, rretendre.. d'
at naturel de leurs titres
.
eroger proviCoiremenc a' ces, titres !
)e~
;t~~e:.
de~' ~e
;;~~~~l1e
~on
a.
da~ta);éets
~
9
tees! prétendre -à- s'arroger le droit de demeurer chez-'(on
pere malgré fan mari!
. 30' Les SeJltences des :Z4 &. 31 du mois ne font que
donner l'exécution à un titre non contefté; mais dans l'ef~
}Jece, ce titre eft exécutoire, indépendamment de la Sentence, puifqu'il n'eft pas contredit. C'ell donc en vertu
de ce titre, plutôt encore que par foumiffion à une Sen·
tence provifoire, que Madame cfe Mirabeau doit demeurer
en fon état d'époufe. La Sentence a feulement refufé de
fufpendre l'exécution d'un titre non contellé.
40. Si l'on conGdere la Sentence relativement à la demande du Comte de Mirabeau, on ne peut nier qu'elle
ne lui adjuge une RÉINTÉGRANDE. ,Or toute réintégrande,
fuivant L'ar/icle !J du titre lJ de l'Ordonnance, & même
fuivant tout le titre 18, eft exécutoire nonobfiant appel.
.11 eft défendu aux Cours, titre I7, art. 16, de donner déftnJes ou Juiféances en ce cas; & Ji aucunes étoÈetrt
intervenues, elle les déclare nulles ~ & veUl que fans y avoir
égara, & fans qu'il Joit befoin d'en demander main levée,
les Sentences foielll exécutées l'!onobflant tous Jugemens,. Ordonnances ou Arrêts contraires.
50. Si l'on conGdere la Sentence relativement à l'alter·
native prop~fée du Couvent, il faudra convenir que c'dl
une forte de fequefiration qui a été ordonnée: Or toute
fequeftration eft exécutoire nono-bflant appel, fuivant le
même article 5 du· tit-re 17 de l'Ordonnance.
60. L'exécution provifoire de la Sentence du Siege rre
fauroit préjudicier au droit de Madame de Mirabeau, ni
à fes moyens, quels qu'ils pui/Tent être; tandis que la
:non. exécution de cette Sentence peut dans les circonfiarrces de la caufe, porter un préjudice irréparable' au Comte de Mirabeau, q.ui n'a pas ceifé d'attribuer à l'obCeffion les dt:marches hofliles de fa femme, &. de prédire:
fiu'e11es ne feroient Clue s'aggraver, tant que Madame de:
B
�M'Irabe~ ne reroit'
pàS
I~
libre de
· 11
ne conrulte
.
de [a ral[on &: de [on cœur.
r que le VŒll
On, ~o~prend que, clans Je cas d'
.oà~on peCUnl<lIre avec contrainte pa
une Condam.
dll~ par elle-même, &: fouvent a r r ,corps, ( loi il
diétlons incompétentes) la faveur ~~:~u~e l~r des Jurif.
nellf, &: la certitude de faire répare 1a 1 e~té perfon.
en ,réfultoit quelqu'un, ayent décidé 1r ~ préJudice, s'il
ne( à accorder des Arrêts de défenfe es&: durs [ouverai_
J\1~{S combi~ri n'y a-t-il pas de diftan~e de es [urféances.
homme vexe par une Sentence des J
la caure d'un
(e~e,ilRle" à la prétention d'une femm~gesUI- Con[uls, par
lt. dune Senténce
du premier Trl'b unaqt veut,
en dé.:.
..
•fc01 exprefre, refter . féparée de r
.' &: Contre unê
.
l'
d
'
IOn
man
m ne enten re, )ufqu'à ce qu'eH ~.
' 8< ne 1e voir
le peut y parvenir) par la Cour ;ou~~ a.utori[ée, ( fi elféparée d'habitation! Certes il ne ' ~alOe ~ a demeuret
fomme plus ou moins importante' i~ alpt . po~nt ici d'unè
venu; il s'agit du premier d '1 s/glt d un titre concelui fur lequel la focieté e~t" u p us acré. des titr~s, de
pouiller par le fait le Comt ' ~ererJ~pofe; li s'agit de dé·
d'un tel titre qui ne lui e ft e
Irabeau de l'exécLitiorl
puiffance fous le Ciel n'a ~ li pas contefté, que nulle
U
fan!=e fous le Ciel ne peut d pten?u ~ 8< que nulle puif80 . Enfi n,leu
'1 Il.
e rUlre.
tellement
.
donné .par fa Sentence d S· vraI fique l'état prov{foire orpendant le pro ces . qu'il u leg~ eh le feul qui puilfe exilter
d
d'une féparation a'éfinit . evrOlt etre tel même dans le cas
Juges. C'eft l'obfervati:;~en} or~onnée par les premiers
J7 de l'Ordonnance » A ~, ou e, fur l'art. 17 du tir.
» ration, dit-il foi; d b,l egard des Sentenc~s de fépa~
» d'habitation 'eUes ne, le~s [euleme~t, foit de biens St
» l'appel. On ~rdon'le ;. s,ex cutent pOInt au préJ'udice de
,
Jeu ement p ,
;1:
t.
»
»
DE SÉPARATION'
ar prOVlylOn DANS LE CAS
D HABI7'ATIbN Ii
'
emme re}lëra dans un M
RONONCEE, que la
fi
e
ifion
al
ou Couvent indifj.ué par
•
)} . fOI!
»
mari ou par (es parms,
JU$Qu':A C.E QVE L'A PP EL
SOIT JUGÉ DÉFI NIT IPEMENT. " .
Tels (ont les prinçipes inconteftables que le Suppliant
a déja eu l'honneur de mettre au moil)s en grande partie
fous les yeux de la Cour, au premier avis de la demande
en [urféance. Il avoit différé jufqulicj de difcuter le moyen
particulier d'Î:l)com'pé~ence propofé contre la Sentence d~
nonobfian t appel, parce que les principes une fois connus, &: Ja matiere avouée provifoire, il lui [embloit que
la compétence ne po,u voit pas être mife en quefiion·.
En effet, toute ~ ENTE)'IICE PROVI SOIRE doit être EXÉCUTÉE NONOBSTANT APPEL. C'eft le mot de la Loi, qui
ne dit pas que les Juges POURRONT PERMETTRE l'exécution 'provifoire; mai~ gue les Sentences provifoires SERONT EXÉCUTtES NONOBSTANT APPEL.
Donc l'appel de la Sentence provjfoire n'eft pas fufpenfif.
.
Il EST DÉFENDU aux Cours D'ORDONNER DES SUR'
SÉAN.CES · A L'EXÉCUTION
DES .SENTENeES
PROVISOI-
RES.
Donc' les Tribunaux d'appt;l eux-mêmes ne pourroient:
pas donner un effet fufpenfif à ,l'appel.
Ro~"c.le J ~ge qui ordonne le oonobfiant appel, ne fait
,'lu ecnre dans (a Sentence le mot de la Loi.
.
Donc ce Juge n'attente pas à l'appel qtÙ n'eft pas.fuG
l'enfif.
- Donc it n'att.ente pas à l'autorité du Juge d'appel qui
n'a pas (upendu,. qui ne pourroit plus même fllfpendre ,.
.I:'_ul~q.ue,}'Ordonnance _~utorife l'exécution des Jugemens
provlfOlres, NONOBSTANT TOUS ARRETS CONTRAIRES.
ÇOI'Dll}enl l'appel pourroit-il fufpendre, Iorfque , fuivan t
la ri~l).e~~r de l'a Loi, l'Arrêt même de fufpenfion ne·
fufpendrOlt pas -? S.ans doute la Loi n'autorife 'pas des
attentats contre les Jugesfouverains; &: pui.fqu'i{ n'y auroitt
g~s d'a~t~tat à exéÇj;lter uo Jugement provifoire maluê:
, . ' B ii
�Il.
leur Arrêt de défenfe , il n'yen a point à exécuter a è
un relief d'appel.
pr s
Si la déduétion évidente & fimple que nous
d,e tracer, ne rend pas abfolument inutile un ét l venons
cItations & d'autorités, dont on cherche trop lia age d7
, 1 déC.1aut d
l'
,
ouvent a
~ouvnr e
,e ogIque, nous ajouterons que l'ufa
de s'adreffer au Juge qui a prononcé pour faire 0 d ge
'
r onner
LE NONOBSTANT APPEL, e ft umverfellement établi L'
aut:ur d e l a requete, qUI, comme on le verra bientôt
n eft pas plus heureux que fcrupuleux en citatI'o
'
l
"
ns a
lie, att&eft1er Sa
: Pl:auqu; undIverfelle de tous les Tribu.
naux;
e ' upp Iant repon par une notice de ~
U"-4~çinq exemples , comp~lfés dans. les regiftres de"'~l!if:alfl~oH~:-Ioo.
/1
néchauffée dans un penode de dIX années. Il en aJ'
'1 fi ' if;' d e paretlles
"
Outera
SI, e . ~e,ce aue
pnfes dans les Greffes des
JunfdlétlOns de la Province.
Au 'refie cet ufage eft attefié par la plus grande 'partie
des Auteurs. Il l'eft
dans .le Commentaire du R egtement
'J
,
d ont M. 1e P rocureur
Général aétuel a agréé là déd'
UA ' d R ' 1
lcace.
n rret e .eg ement, celui-là même que l'infidele
~u[eur d~ la requete de la Dame de Mirabeau a ofé mu.
tller & cIter, un Arrêt de Réglement légitime cet ufage:
En effet l'Arrêt de Réglement du z 5 février 1699'
r~pporté dans le recueil de M. de RegulI'e , défend au~
~Ieutenans de t?ucher aux matieres après la déclaration
d appel des parues; & c'eft tout ce qu'on a cité de cet
~rre~ d~ns la . req~ê~e de la Dame de Mirabeau; mais
l Arret ajoute ImmedIatement EXCE.PTÉ AUX CAS PORTÉS
PAR L'ORDONNANCE; & c'eft ce que l'Auteur de la
requête a i~fidieufement palI'é fous filence.
cl Le S~pphan~ !"e fait pas Comment on qualifie au Palais
e pareIl!es reucences ; mais il fait que dans l'idiôme
d.es ~lOnnetes gens, elles s'appellent de criminelles préva-.
ncaUons.
A '
•
°
Il eft
•
don~
fâux que, fuivant l'Arrêt de Réglement
13
6dellement rapporté, l'appel dépouille toujours les pre';
miers Juges. C'eft le contr'aire qui efi vrai, l'Arrêt EX-'
CEPTE LES CAS PORTÉS PAR L'ORDONNANCE ; & quand
. on a prouvé que celui dont il s'agit efi un de ceux portés
par l'Ordonnance, la compétence du premier Juge ell:
fuffifamment juftifiée.
JoulTe que le Suppliant a déja cité ' plufieurs fois, dit
exprelI'ément fur l'article 17 du titre 17, QUE C'EST AU
JUGE QUI A RENDU LA SE~TENCE, A' CONNOITRE DE
L'INCID EN T ET NO:O;OBST ANT APPEL MEME, DANS LE
tAS OU IL Y AUROIT APP EL DE LA SENTENCE.
Serpillon rappelle l'autorité de JoulI'e , & parce qu'il
s'eft permis d'ajouter : Il fe roù à fouhaùer que M. JOIIJ!e
eût apporté quelque autorité pour fonder fon fentùnent: l'Auteur de la requête foutient que Serpillon, qui ne dit pas
un mot de plus, déclare le premier Juge incompétent ...
Et c'efi donc là ce refpeét religieux pour la vérité & la
jufl:ice, que des hommes qui s'appellent fes Minifires
apportent dans l'exercice de leurs fonétions, auxquels ils
donnent tant d'importance! qu'ils prétendent exclufives!
qu'ils voudroient interdire à ceux aux droits defquels i1~
ne font que fuhrogés ! (*) Ecoutez-les! Eux feuls peuvent plaider, AFIN QUE LA VÉRITÉ S'ÉPl[RE EN PASSANT '
PAR LEUR ORGANE, ET DEVIENNE DIGNE D'ETRE PRÉSENTÉE AUX MAGISTRATS...... Voilà comme ILS
ÉPURENT LA VÉRITÉ!
Quand on peut attefier la difpofition littérale de l'Ordonnance, un Arrêt de Réglement de la Cour, l'ufage
confiant des SénechaulI'ées, on peut fe confoler qu'un
C") Une ~ffemblée de quelques Avocats a, voulu que tou,t l'Ordre
intervînt pour empêcher le Comte de Mirabeau de plaider IUImême ; , & tout le galimatias qui fuit appartient à l:un des Membres de cette Affemblée. Heureu[cment l'Ordre a mIeux connu fa
véritable gloire,
\
'\
"
�14
,
manvais PratrcÎen de TOllloll[e • appellé Rodf~
,
~ne autre opinion. Eh! faudra-t-il confacrer :é~ aIt e.lt
rou t es 1es reverles de eeux qUI. pré tendent au d 10rmalS
'
clufif D'ÉP1:1RER LA V~RITÉ? C'eft à Rodie r~1t exr.redit .les principes, l'analogie, la Jurifprud~nqul ~on
Loi; c'eft à lui &. non à }ouf[e qui s'accorde ce
la
droit naturel lX: le droit pofitif, qu'il faudroit davec;dl~
. '.il Je~ fionaeJ ,. ou pourquoi -ce 10 eman
erfiflr que/'.~ au/orue
ud
pilateur [e mêle une foi5 d'inventer pour déb: cam···
fi r
".
It,er une·
·
erreur. M aIs en n lOn oplOlon ifolée &. difcrédité
.
vaudra-t-elle contre la dilipofition littérale d' e 'LPr~.
, é
'
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une
01
dont l·ex
CutlOfI con ante dans c.e Pays a .!.te' ID .
';
d s
R
.
,,,,
alOtenue
tout le 'Jolra~me Pl~ré une fotùe d'Ar.rêts du Confeil
d Etat, reeuel IS '" pub 1 s par ordre du Gouve
.
,.
,
rnement.
en Inte.r pre tauon de 1 Ordonnance de ,t L6 7 7 On l
, 1 fi '
.
.."
es trouve
a a ulte . du CommentaJre de Bornier [ur cette 0 d
on·
n a nce
,,&.J
.,.ans l'Otd
re des '
Utres de cette LOI' , ~n
" r pe~t
,
VOl! tou~ ceux qui ont ét~ rendus [ur les matieres rom.
m~lres.
o~.r la confirmauon des ·principes que le Su _
plIant' ,a eu 1 ?~nneur d'ex,pofer à.1a ,Coy,r ; ~l en rapportla:
u!1 qUJ; ne laIife aucun· prét.e xte ~. ,l a. clùcane,. & dont les.
cJr~~nfrances [ont telles gu~Il déi:lde feul la quefiion . Je.
VOIC!'.
, .
A
•
:w
~f1 r66,. faifies faites par les Maîtres ,Epéroniers de'
Pafl~ [ur deux p,a,rti~uliers de la même Ville; » fur- c,es;
» ~alqes les partIes ayant procédé en la Prévôté de
•
» 1Hotel
·
. de Sa Mal'efté ; fiulvaot
les <.Iffign<.ltions donnéeS.
» par .les. Jurés Epérooiers ,. il imerviht Semence conn tr~dlaOIre_, ordonnant main-le:v.ée provifoire des eif~ts,
» r..[alfis'
malS au
rleu par '}elid'HS J urés EpéroOlers
. de·
'r',
.
» J'a tlSlaue
auxdnes Se n t ences , . 1'!s. J.e
Î. f"
"
jerOUnl le meme Jour
t) p<JUTYUS au Grand (;on roI'! &' ./','
" fi d"
'Z
- 'J~
DaL .e re'luele a n ·etre recus
" appe., ans def'dites S
"
'.
/"
entences,. en· ce· que l'celle maIn,
l
» NAN
evee auro 1 é ' r.'
1
te Jalte par pr-ovifion;' ET PAR ,ORDON.
)J .
GE APPOSÉE AU BAS, DE LADITE REQUETE, LES-
1)
') DITS JURÉS AUROIENT ÉTÉ REÇUS ApPELLÀNS DESD·~
j) SENTENCÉS Dt PROVISION, AVEC DtFENSE DE RIEN
"» FAIRE AU PRÉJUDICE DUDIT APPEL ET DE LA JURIS';) DICTION DU GRAND CONSEIL. ( (Il Y avoit plus
que l'appel, plus qu'un relief CI'appel; il Y avoit une
'Ordonnance fur requête qui recevoit appellant des Sentences cie provifion, &. même des défenfes de rien faire
·au préjudice de l'appel &. de la jurifdiétion du Grand
~onfei1. L'Ordonnance étoit femblable au Décret [urpris
hier à la religon de la Cour par Madame de Mirabeau. ) » Cependant les intimés fe pourvurent en ladite
i) Prévôté de l'Hôtel contre lefdits Jurés, & demanderent
» l'exécution de[dites Sentences de provifions; & par
i) deux autres Sentences contradiétoires rendues en ladite
» Prévôté de l'Hôtel, il fut ordonné que les Sentences
» provifoires feroient exécutées nonohftant l'appel defd.
) Jurés; ceux·ci s'adre{ferent .de nouveau au Grand
» Confeil, excipant de leur appel, & ils y furprirent un
» Arrêt le 1 1 oétobre, portant défenfe de faire exécuter
» lefdites Sentences de provifion. Demande en caiTation
~) de cet Arrêt. « Les défenfeurs excipoient [ur - tout
» de ce que ledit Grand Confeil, Juge compétent, étoit
»faifi de l'appel: par Arrêt rendu au rapport du fie ur
» Pulfort, le Roi étant en [on Confeil, faifant droit fut
» lefd. requêtes refpeaives, a caffé & annullé ledit Arrêt
n du Grand Confeil du I I oétobre, & tout ce qui s'en
» eft enfui vi , comme contraire à fan Ordol/nan ce QU mois
" d'avril 1667, fait DÉFENSE AUDIT GRAND CON,SÉIL
) ET A :rOUTES SES AUTRES COURS ET JUGES, D' y
» , PLUS CONTREVENIR, NI PLUS DONNÈR DES DÉFEN» SES OU SURSÉANCES D'EXÉCUTER LES SENTENCES ET
» JUGEMËNS RENDUS PAR 'PROVISION 'ET MATIERES
» SOMMAIRES, aux peines contenues en ladite Ordon» nance.
Il n'eft donc aucun moyen d'éluder la difpoGtion ' de
�1.6
l'Ordonnance fous le prétexte que le Siege était inco
nt
pétent, pour ordonner après l'appel relevé, l'exécut. 'r .
1
IOn
provllolre
nono bfi ant l' appe.
. De plus fi le reli~f d'appel donnoit à la Dame de lW
rabeau le plus léger avantage, on ne devroit pas en exci 1er
pour elle, parce que les manœuvres employées pendant
heures pour que la requête en nonobfiant appel ne fût p24
décretée le jou,r même d'un fimple rmvoi en Jugenzelll ~
fignifiée, font rres-connues; &. fi connues qu'après la lecture d'un chiffon qu'un Procureur lût pour Madame d
Mirabeau à l'Audience du Lieutenant, ( le.q uel chiffo~
l'Auteur de la requête appelle une DÉMONSTR ATION) •
le Procureur d~ Suppliant a.ttefia le. Commiiraire , qui
e.n abfence du Lieutenant av Olt décrete la requête, qu'elle
lui avoit été préfentée vingt~quatre heures avant le décret.
Mais
circonfiance du relief d""appel efi totalement
Indifférente. Il n'obligeoit pas le Suppliant à fe départir
de fa requête pré.cédemment préfemée. Car on ne doit
point oublier q.ue rappel" des Jugemens prov.ifoires n'eft
pas &. ne peut être fufpenfif ' fuivant l'Ordonnance 8è
l'Arrêt de. Réglement ci·devan.t cités &. qui nous difpenfent d'invoquer l'Ordonnance de. Provence d'e 153-5, les
Ordonnances de CharJ"es VIII, toutes celles qui ont pre.
cédé l'Ordonnance de 1667 &. la LOl RomaIne elle-même .•
S'il efi certain. que rappel n'eft" pas fufpenfif, il
faut, fous peihe de la plus révoltante abfurdité, convenir
q:u.e les lettres de relief prifes à Ta Chancellerie ne Cauro~ent don?er cet effet à l'appel. Des lettres d'e relief,
pr!fes en Cl1ancell.erie , ne. fauroient faire. ce q}J'ùn Arrê~
IUI-meme ne ferolt pas ;. or, feron la rIgueur de la 101
un Arrêt ne peut pas fuCpendre l'exécution d'un Jugement·;
ra
1
1
A
17
nient provifoire, St les Jugemens ont à cet é~ard le
m ême privilege que ceu~ qU,i fon~ rend~s en manere. de '
difcipline par les Juges d Eghfe. Ceux-cI Cont exécutoues
nonobfiant l'appel comme d'abus des parties.
. Sur le tout, la Sentence du Siege dont l'exécu tion
provifoire a été· ordonnée, ne conrenoit qu'une injonction. Le nonobfiant ~; pe1 ne doit être wnCdéré que
comme un e itérari ve injoné'tion à la Dame de Mirabeau
de demeurer en [on état d'épouCe du Supplianr. S'il eft
de reale confiante que les Sentences s'exécutent de l'autorit/' des Juges qui les ont rendues, fi les Cours ellesmêmes renvoyent au premier Juge cette exécution, a pres
avoir prononcé [ur le bien ou mal jugé; à plus forte
raiCon cette exécution . doit-elle être laiirée à ces premiers
luges, 10rCque l'Ordonnance,. prive les Juges. Cupérieurs
du droit de la fufpendre. S Ils ne peuvent 111 la fufpenclre ni l'arrêter, il efl: évident qu'ils ne peuvent en con. noît~e, &. que l'appel n'en dépouille pas le Juge inférieur. Cette vérité a é.té incontefiablement reconnue lors
de l'Arrêt de Réglement de 1699 t &. con~bien l'ap~li~a
tian n'en devient - elle pas plus néceiralre lor[qu a1l1f1
que dans le cas préCent, le Juge qui a prononcé LE
NONOBSTANT APPEL n'a pas ceffé d'être le Juge des
per[onnes, de la matiere, ni du litige.
.
Eh! de bonne foi, qu'efi-ce aU fond que cette, ~hlcane de Procureur à laquelle le Suppliant oppoCera d atlleurs.
.
.
,
l'
r
f f
Pu;cu Ill{ourre le tableau des., exemp es qUI appuY,ent Ion
tificat. n. 1.
tême l'aéte de notorieté de leur Corps? Qu on dépOUIlle
1~ q~efiion de tout cet ergotage barbare qui C:tll lui
donne une apparence de difficulré ; que ~efiera.t~ü ? La
demande d'ull mari (&. ce titre de man ne lalffe pas.
que d'être quelque chofe encore dans l'ordre légal, quoi-·
q.u'en puiffent penfer les oracles des foupers &. des ruelles ) la deman ~Ie d'un mari qui dit à une Cour fouve:
ralile :
r-
�18
""
» On me' ferme dès lo~g-t~ms fout accès auptlès dei
\19
)). ma femme. Sa fequeftratIOn Illégale doit-elle être
)1 lon~e? L'obfeffion qui me l'arrache doit-elle êt prr
)} vorifée, fecondée, protégée parce qu 'elle a décid~e a
)1 femme à former une
demande en f'éparation 7 Il rnéll
r.
ér
.
'
ne
)l laudra donc d lormalS pour etre féparée que voul _
)l l'être? Et d'avides collatéraux,
ou de perfides nO ur -1
- l'
at ...
)l. teurs, OIL d es, conlel s VIO ens pourront jetter impu é
» ment la divifion dans toutes les familles, avec la en ~)
» titude, d'opérer autant de féparations qu'ils en exci~;.,
» ront de demandes? Ces demandes, ainfi que celle d
» Madame de Mirabeau, ne. repofaŒmt-elles fur auc el
. • 1li 1
'
un
)) moy:en qUI. p Ût llltere
er a coh
amtation
Be faire crain.
» dre fes dangers. ? , La Dame de Mirabeau, demande àt
» deme~rer proVlfOlreme?t chez fo? pe,re oû je ne puis<
)l la vOir. €ette' prétentIon contraire a mon titre nonl
» ~on~efié, contraire à notre commun' -intérêt, a éré re.
)l Jettee; Be cependant mon époufe a Continué de fe foufn traire à l'ordre légal; à l'ordre des. Tribunaux. Jlai
» invoqué une fe~onde' fois le Magiftrat, Be maintenant
)l la Dame de Mirabeau s'adre{fe, pour arrêter le COUrs
» de ' la ,Juftice', au) Magifitat fuprême qui veille fans
Il ce{ft: pour qu'il ne fait pas fufpendu. Elle a cru qu'il :
» fuffiroit de s'écrier: ON ATTENTE A VOTRE JURIS»' DICTION. ; Be- qu'à ce mot tout devait être interverti,
- » comme fi toutes . les Jurifdiétions n'étaient pas égale~
» ment fous llempire de la Loi; comme . fi tout ordre
» ju~icia.ire, tout .or.dre _facial ne feroit pas bouleverfé,
» aneantI, fi la magie de ce mot APPEL fufpendoit dans
)1 to~s les cas !.'e~écution d'un Jugement; qui, de quelque
» Tnbunal qu 11 emane, eft fouvera.in s'il eft conforme à
)1 ' la Loi; puif~ue les Magiftrats
fu;rêmes ne font tels
» que parce qu tls font confidérés comme la loi vivante •
. Oui
. faQs doute, il eLl:des. attentats dans- cette caufe .
m:l1S ce [ont ceux que le Suppliant déféré à la Jultice~
/
,
,
~
,
,
J,J'eft un attentat, .51: des ' p'lus gra'VeS, dans une féparation
de faü prolongée après LIe refus d'une autnrifation légale.
Il eft un attentat dans le mépris de la Loi qui ordonne
l'exécution provifoire de tout Jugement rendu dans les
cas qui requiérent, ou .dans ceux qui .ma~nti eoneo t l'exé-cution d'un tinne (&. quel titr.e ! ) lOU dans .ceox qui mettent l'objet en 'liti-ge dans un dépôtlfûr, où iLne .peut être
préjulilicié à' aUCtilll dt:0lt. li eft fur-tout un .attentat infiniment od~eux, 'infiniment criminèl .dans le délit, de profaner le 'Sanétuaire de la Juftice 'pa.r des calomnies atroces., :par <l!les confeilspe1liférés qJli arment l'épc}U[e c<Drrtn!
l'époux du glaive de la diffamatioQ' , pOOf .élever -entr'eux
des barrieres' éter'nelles , au gré de la cupidité .& .de la
haine; qui tentent d'immoler le- lfils de liJ main du .peré-:;
de mettre .en contradîétion la piéte filiale &. l'intérêt perfonnel; d'allumer des guerres étern-ell~s ~ntr.e des familles
qu'un même .efproit devo~ un.ir, dev:~It Inco~porer.
Sans doute une telle lIcence, .·de ters exces.,.de teUes
fureurs font des attentats que le cœur pur des Magiftrats
J'epourre aiv.ec une {ainie horreur'; que Je ur-1Ïlr-is lmpartial
faura pour[urvre, lorCque' la . venigeance ' leur ~n fera
tlemandée; &. ce mOment ne tardera pas. La pwifanc.e,
le .crédit, Be l'acharn-ç.ment ,de~ .ennemis'" dIL Supp1i:ant peuvent .tout lui .enlever fors l'honneùr. Ce tréror., fans le·
quel il n'en eU point d'autre, & qui aes- reriIplace toos -; ce
tréforefi fous la garde des Magi-ftrals ., qUI veiHent pour
"a Iûreté commune, pour la fûreté publique, qui ne font
P lus fi l'honneur des citoyens .p eut être ,impunément- -at~
taqué.
Dans' Ces circonftances , le Suppliant a recon.rs à votre
juUice.
Aux fi'ns .qu'il vous pla~fe, NOSSEIGNEURS, en €o~cé.
dant aile au Suppliant de ce qu'il {~ réferve de l''O~rfUlVr,e
les ConCei.ls Auteurs & RédatteutS de la Reqllete prei'~lqtée hier ~u nom de la Dame de Mirabeau, & ce pat;
.
C ij
�zo
toute voie de droit, 8< même crimineIIement, tant à ra 'f,
des atrocités & des outrages qui y font contenus 1 011
de la violation de toUS droits humains & divins la'q Qlule
fi'
'
ne •
,
Ue e
confifle en la fédul..LIOn neceualrement pratiquée ell
,
1 . f;'
fi
vers
une f~mme honn;,te, pou.r. ul aire 19~.~r une pareille
Requete contre . 0fin m~rll. or d o.nner q&u l , fera pOurfuivi
neanmoins r
fur les appels, am 1 qUI apparuent;
·
R
'
, lans
1
s'arrêter aux fi ns cl e a dHe equete, dont ladite Da
de Mirabeau fera démife & déboutée, le Suppliant ~rne
mis hors de <?our & ~e p~ocès; & fera juflice. Sig:~~
Honoré - GabrIel de Rlqueu, Comte de Mirabeau , fil s.
1 Procureur.
C arbonne,
Mr. de Beauval. Soit montré à partie. Fait à Aix ell
Parlement, le 3 Avril '1783.
Le 3 Avril 17 8 3, fignifié & donné copie à Me. Bernard, parlant à lui, lequel a dit fe rapporter à une Re.
quête contraire qu'il aura fhonneur de préfenter à la Cour.
Signé, Graffan, HuilIier.
•
, Pojl fcript~m. Cette .Requê,te n'étoit pas finie d'impri~er? lorfqu O? a publIé & repandu, avec une prodigalité Illconnue . dans nos ProvInces, un Libelle diffamatoire contre ma famille & moi, figné, Marignane DE
1VfIRABEAU: C~ ~i~elle dépourvu, de tout~ fignature
d Avocat; mais fUI VI dune ConfultatlOn du meme genre
& du même flyle, ell apparemment la réponfe qu'on a
c:ro devoir à la propofition de mon oncle, qui fit ~
J!8fer hier un arbitrage de quatre Gentilhommes de
robbe ou d'épée •
.Je déno.nce cet Ecrit aux honnêtes gens, avant qu'il me
folt permis de le dénoncer aux Tribunaux. Je fupplie mes
concItoyens, au nom de la vérjté, au nom de la juflice,
au nom du grand Juge, de celuI qui voit les cœurs, 8<
conn?Ît nos aél:io?s & nos intentwns les plus fecretes; je
fupphe mes concitoyens de lire attentivement cet Ecrit,
2.1
'd'examiner s'il a répondu à un feul de mes moyens, st
s"il a par conféquent un autre but \lue celui de me déshonorer . Je fupplie fur - tout mes concitoyens de s'abfteni.r de prononcer fur les ' faits avant ma réponfe, qui
ne tardera point à paroîtrt'. . . .. 0 vous! qui m'avez
lu ! qui m'avez entendu! il ne me relle plus fur la terre
qu'un feul efpoir; -c'eft de conquerir votre efiime pour
adoucir mes malheurs ! Vous avez fous les yeux deux
époux ' qu'on a forcés à plaider. L'un d'eux parle
un langage qui a fait couler v'Os larmes. On abufe, au
nom de l'autre, de ce qu'il y a de plus facré fous le
Ciel, pour couvrir d'ignominie, s'il étoit p oŒble , celui
qui a tant vanté fa compagne, qui lui a donné l'exrmple
d'une honnêteté qui ne s'eft pas démentie. 0 mes concitoyens ! interrogez votre rairon-&' votre conrcience! Elles
vous diront lequel de ces deux époux doit avoir raHon ,
pour que l'humanité n'ait pas à rougir.
MIRABEAU, fils.
LETTRE de M. le Marquis de Miraheau à Madame la
•
ConZlejJe de Miraheau fa helle-fille.
•
"
Paris, le
'J' E
10
Janvier 1783,
reçois, Madame, 8< très·chere fille, votre lettre de
, bonne année, dans laquelle je ne fuis plus que cher
pere, au lieu de cher papa que j'étois ci-devant. Or il y
a de l'anacronifme dans ce choix; car je vous affure que
fi l'on me prioit d'être pere, je ferois bien un autre bruit
,
•
l' "
1
�2-1>
lJltC vous, :quand 0't1 IVOUS prie. d'être' mere; St je défie~
rois pour le coup touS les Arrets du mo.nde, au lieu q
bon papa paffe; &. c'eil: ce ~ont eil: ÇJueftion.
Ile
. Pour ·ma,r cher par. ordre, Je commence par vous re.
:Qlerc;ier de vos fouhalts
de. •bonne année.
. . Si le Ca,lendri er
.
reprouffoit chemlll, peut - etre aUIiOls'-Je quelquefoi... , IOU
~u moins e~pérance éj,u?, bonnes ~nr\é~s. Mais il va;
tou.jo,urs, &. ~e ne fauro!s (ur ce pp-mt ~tre du nombre
de -ces Proven.ÇilUX,. qUI. prennent . l~s c0!llplimens pour'
des paroles, comme dI[O.l't le Cardmal Gnmaldy. Quant
à vous, ma cher.e &. efpIegle fiUe, vous avez encore çl.e
belles &. bonnes années devant YOUS, .&· Àeauco ~p, fi vOliS
le vouIez; ou pour mieux dire", VQUS tne [avez -encore ceque c'eft que la vie: ainfi je vous la [ouhaite tres - heu-,
r.eufe, au nom du Pere, j'en réponels-; QU Fils, c'eft Votreaffaire; mais fur-tout du Saint - E[prit, &. nous y (ommes.
Quo.ique Jes réticences euffènt pu m'être permifes à mon
tour, . je puis vous affurer que j'ai rép.ondu à votte premiere lettre le 26 Novembre dernier; &. je ne ments.
pas.
Venons maintenant au grand' article, qui confifte en,
ce que ma fille fait al!ljourd'hui le contraire du rôle «le
Marion de la chanfon ,. MariolZ pleure, MariolZ crù,. Marion'
'Y~ut qu.'on Ja marie. Elle veut que je lui. [erve de [econâ
d~ns ce perfonnage. Mais, ma belle &. bonne fille, je
VIens de vous faire ma confeffion fur l ~articJe de la paumité• . • • . • Mais, dit~s.-vous , j'ai donné ma parole ft.
vous, .& -à- Mr. ·yotre pere, &. je les ai maintenant devant
les yeux ces deux fameu[es lettres du 10 Décembre 1780 ,
par Je[queJles on me v,ouloit~ ,mit-on" ,citer devant les Ma:
ré.chaux de Franc:e. J'ai rép.andu· que c'étoit pLutôt devant
lt:s JMaréchaux:f:r.rams, pU'ifqu'i-1 s'y agiffoit de brider un·
mulet. Les VOIlà donc. J.e promets à M. votre pere que
_0>11 fil~ n:appruch.era pas de ~ui, ni ,de [a maifoll,. fans,
!Ao
.
'/li
,.
cl 23 .
)
la perml Ion. Je Il enten ois pas fans doute que mon fils
n'approcherait pas de la mienne; &. juîques à préfent il
n'en eft que là. Je pourrais objeaer ,que M. votre pere
ne m'a pas répondu, &. que parole non acceptée, eft parole/ donnée. Ce fi/mee ne provenoù pas du peu d'importanc,"
.de la ehofe; mais M. votre pere a f tl'jement voulu me lai.fJer
l'endoUe de la chofe, ET S'EN EST RAPPORTÉ A
MO!.
~u'ai -je fait? Je l'ai tenu treize mois, dont huit fous
même toit &. à la campagne; &. je lui dois la juftice de
dire qu'il n'a mangé perfonne. De là il a é té chanter eri
bécarre au raiz- de chauffée, tan-dis que vous chantiez en
!Jimol un peu plus haut. II ne m'appartit>nt pas de dire mon
avis fur la mufique. De tous les tons, celui qui me con-'
viendrait le plus, c'eft le concordaht. Mais je m'abfiiens
d'opiner. Refie que de là je' l'ai envoyé à fan oncle; &
je vo us demande, ma fille, fi vous choifiriez, à tout:
prendre, ut1 arbitre- plus équitable, un témoin plus ' [û'r.
Dans [a premiere il:ation, Il a redemandé fa tête. Dans
la feconde, il redemande [a femme. Ces deux chofes ont
par fois plus d'adhérènce qu'il ne faut. Que puis. je à.
c-ela , ma fille? Pen[ez-vous que le pOLivoir que me donne
aujourd'hui l'ordre du Roi, aille ju[qu'à lui prohiber ce
droit? Vous ne le croyez pas: mais il ne faut pas le mettre à portée. Oh dame! . . . . Refte que je vous ai confeillé dans ma fameufe lettre, de ne le reprendre, que
quand M. votre pere &. moi ferions d'accord fur ce point; '
8{ prenez garde que c'eil: là le chef-d'oeuvre de ma pro- '
fende fageffe & prévoyance.
En effet, [ans cela vous feriez aujourd'hui, ma fille; '
entre' l'enclome &. le marteau. D'une part, M. votre pere, '
fi aimable, fi bon pere, &. qui ne veut pas; de l'autre, la~
loi qui veut, &. vous forcée d'offenfer l'un &. de [ubir,
l'autre. Car on a beau dire, toutes les fois que la v.~-J
lenté confulte, elk trouvera toùjouts dës Avocats. MalS
J f[d IA..J
1
•
�2.4
dans le vrai, ni id ni ailleurs aucun
.
· 'Jr'
'
ne peut Vo
que 1à. dL 01 pUlue
etre éludée en cecI' . O
.
r 'Je Vou us . dire
1
01
ome111que
par
ma
derniere
lett
une
.c
M
.
ie, qUI. Vs al .fait
tlI1e.
. votre Pere dit non' & moi'
OUs Juf'li d
.
'
qUI ne veux
d 1 cor ance, & mOll1S avec lui qu'avec t
'pas de
out autre Je d'
- fi '1
nOI~ au ffi1. A In lien ré[ultera que vo s li
'
Irai,
J un[conCulte, mais b01111e fille; ce qui vaUut ~!ez m~uvaife
Malheureu{ement, ma chere fille no ' en. mIe ux.
'
s (jeux non
.pe1s ne va lent pas l e cum fpùùu tuo de
r
pater_
r.ervOlt. 1a M eue.
Ir
N
r
cette lcmm
.
ous pouvions vous d onner un e qUI
.
'
~als nous ne pouvons pas vous l'ôter. La Loi v man;,
cItoyens, veut des en fans qui reconnoiJr
elJt des
,
.
r .
.
Hent un pere &.
qu un. man une lOIS prIS, le [oit pour tou' our 1 :
l'eut·etre pas un des Juges qui ne trouve
c~· li lfi n Y. a
commode, & c'eil pour cela même q' "1
c. II 0 e art 10,·
.
Il 1'"
u 1 a la u des L '
mais ce e, a cil:, Je vous le répete &.
.
OIX;
je ;l'y prends ni n'y mets. Mais dir~z-voJ:s vous Jure que
pa
qu on Je /épa re: oui, ma fille quand le m ~ m0i,pa lau
veut pas., Mais lailrons cela:
an all onds n'en.
2.;
bureau d'une perfonne honnête. On a- -difi'équé bien de
mes lettres. J'en avois dont je pouvois me [ervir utilement; je ne l'ai pas voulu; encore les pafTeroit- on quand
'elIes [Ollt décifives pour une caufe. Mais tes lettres d'un
pere ne font rien à la réparation de [on fils. Au refte, j'ai
'écrit felon le temps &. les chofes ; &. toujours ainG j~ ferai.
Mais, ma belle & bonne fille, ceci deviendroit d'lm
fériellx à mourir. Daignez, ma chere fille, être mon
truchement llupres de M. votre · pere; lui dire d'attendre
J'our être étonné de voir mon fils à Marignane; mais
que de Je voir au pres de mon frere, & en tout lieu où
celui-ci le menera , je l'en laifTerai le Juge. Eh..! s'il avoit
un fils, pourroit,il le placer mieux? Que qu;wd il a bien
voulu choifir mon fils, &. , m~engager par ~ne adoption
auffi honorable à mettre &. à doubler même [ur fa tête
les fubfl:itutions de ma maifoll , ce n'a pas été fans doute
,pour un effai feulement. Q ue quand il ne m'a pas fait
l'honne\!lr de répO-ndre à ' la lettre par laql:lelle- je lui renclois compte des cinwmftances qui 'dé~idojent· l~épreuve
'€lue VOlilS m'aviez demandée, j'ai compris, GIu'il m'en
laifToit le foin : :qu'au bout de deux ans, en con[équence
i e [erois autorifé &. comme pere, &. comm~ t({teur, &.
-eomme chef de familJ.e, de redemander pour mon fils,
mon pupillo &. , mon. JuccdTeur , la femme qu:il lui ayC!.i~
donnée, [ur-tout en offrant un modératr,ur r~[peaable
dans la per[onne de mon frere: que Le n'en fais rien cependant, mais que je ne puis empêcher qu'il ne demande
à rent!er dans fes droits; les miens d'aucun genre' n'allant
pas jufque!!~là: Qu'ainfi donc je" me retire â~; l!l bataiIlc,;
& qu'on le connoÎt màl, ou qu'elle" lui convient &. à
fon caraétere mieux qu',à moi. Qu'après avoir bien ré[ulné , . confulté , - 'dépenfé, fonicité &. amuré les oififs
~'Aix, il en adviendra. que qui a con[ulté, payera,
que qui a ...• &. que lui, M. de Marignagne , dira au,
~out. du, compte : ,'efl Lm! affaire. , fJ.u'iLs ne m' en rompen~
.D , . .
la
elI~o~a~~te~:e~ue~l[:~~l ~~
toutes mes lettres. Oh! oui,
Belle nouvelIe! ChaCLIn [ait s fn ~ !emps fut un bricone•.
pas à [a femme à Je d'
ce éiI.
ais outre que ce n'eft
temps pré Cent . & 1'1 Ire 'di~ela ne . prouve rien pour le.
.
.
vous
ra que da 1
foltes vous le t
.
'
ns e temps de Ces
,
rOUVIez. encore Dr
b
M'
[ouvenir cfe cet ~Xl' O
r ou on.
leux vaut [e
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grec ' ql:ll. d'It qu"1
r
nemi Comme u
1 laut être en,
p o uvant etre am' .' 1 r
.
gens qui Ile peuvent •
l , a .p us IOrte ral[on entre
ere de é'd'
d'
etre autre cho[e. Il eil permis à un·
mire e [on fils"
,
P
de [on marI' V
' maiS non pas a Ulle femme
•
OUS NE FE RE
MAIS ON LEe
1
Z AUCUNE DE C.ES CH OSES'
• FERA. EN VOTRE N
&
'
,
'
conduira à venir
OM;
peu a peu l on vous'
Mais peu à p::e.~dre v~tre caze dans les Cau[es célebres.
faut b··
J
. 1 paroltroit que je plaide & il s'en
len. e vous diS li l
'
ùil un diépo' t cl
fi eu ement, quant aux lettres que
d"
, [orm
" du,.
e C,on ance nu'
4 l ne.
Olt lamaiS
bureau.
•
..
1
�2.6
'pluJ' les oreiOes & me. laifJent en ~epos; ~ que; COlt1nl-é
difoit , feu Cyneas , mIeux vaudrait peut-etre commence{
par l a.
Vous me direz peut-être de prendre ces confeils pour
moi; auffi ferai .je , ma belle & bonne fille. A vous 1
dé. Je vous fO,uhaite bonheur & f~lJté. Au relle, foi~
que vous mettIez entre deux I~ ,gnlle, ce qui eft plus
p~remptoire .que toutes les prohlbmons paternelles; folt
qu'il advienne finalement qu'on vous gâte la taille &c.
je m'en lave les mains. Je ne puis en ceci que récom:
mander aux miens d"épuifer toutes les voies con~enables
honnêtes & honorables' avant d'en venir à celles de dr0it~
Mais "a~rès cela, je n'.ai ni Je droit , ni par conféquent
t'a volo[H~ d'agi:r_contre mail fils, parce qu'il aUra refufé
~e , vous laiffer conime une praline embaumée, btiller
à la chandelle pendant quelques heures, & le relle du
-temps fe,?blable ,au figuier fiériJe de J'Evangile, dont
on ' guete la pla'ce pour y placer du fruit étranger.
, P'uiffiez-vou~ voir en ceci, ma fille, que je ne fuis pas
lincorrigib>le , Sc que quand on me menàce de publier
mes lettres, j'en ecris de très-prudentes: çomme auffi là
vérité & efficacité des - fentimens .<l'attachement que jè
<'Vous ai voués, & avec lefquels ~e vous embraffe trèsr
t~hdrement. M.adame de Mirabeau a fait imprimer celte letlf~
{tins parler il, la fùivante.
Lettre de M. le -Mar~uis de Mirabeau à Mada{1Ze la COlnlejJe
de Mirabeau fa belle-fiLle.
De Paris le 25 Février 17 8 3,
M
Adame & chere fille, je répondis en badinage à
votre derniere lettre , qui me parut avoir été
diaie pour 'mettre en ~re nous un genre - de Jérieux que,
if ,
'
,
mon cœur n"adoptera 'jamais. -Je dchal cependant à travers,
des plaifanteries, de vous préfenter des vérités qu'il me
paroÎt qu'on vous déguife fur votre lituation Efruelle,
d'après les récits qu'on me fait de ce qui fe paffe à Aix.
Je crois devoir vous parler avec la ftatlchife '& la ten-drdre dont- j'ai toujours uf~ avec vous, ma chere enfant.
€ar vous le fil.!es & voulûtes l'être. Je ne vous con='
noiffois ' pas, je ne vou~ cherchais pas ; je ne ch1!rcITois
pas à mar ier mon fi ls : & ce ne fut que d'après votre'
choix & celui de M. votre pere, que je me déponillai
& que je mis toutes meS efpérances fur votre tête. VOLIS,
favez fi : je vous ai été .bon pere dépuis ce ' temps là ";
mais ce n'eft pas de moi dont il dt queftion:' Vous pouvez'
ne pas me faire entrer dans vos cè>l'lfidérations ; & vou1
êtes en droit de ne vous occuper que de votre proprel
fatisfaétion : du moins n'efi-ce que de vous ~ue je veu~
vous entretenir.
Il eft ai{é, ma tres-chere fille, 'de commenGer Une
affaire; mais il faudrait en bien connaître la rtature; il'
en faudro1t -prévoir là fin. Etiez-~ous n€e pour deve ni r'
par votre volonté l'héroïne d'un fcandale -? Etait-ce làvotre attrait? J'entends la réponfe : il faut donc fuppofer
de grands motifs: V ~ Avocçns vous en trouveront; mais
jls vous font illttf10 n ,. 'Croyez moi. L'on a 'tout éorrfult~
ici, Pays, où l'on fépare fort aifémenr. o.n a tout énoncé,
établi, eXil géré , fllppofé comme démontré; & tOlites ces
chofes ont été rejettées comme étrangeres à la quefiion~
Il n'a point commis de délit légal envers fa jenlnle depuis
elle a été la compa!}/Ze dè fa déroute, de fon exil,. de fes
privations, depuis qu'elle a couru el! pofle jour & nuit pour
venir l'excufer. Ma chere fille, je ne répo nds de perfonne
iu'
que de moi; mai s je puis vo us répondre que votre mari'
eft beaucoup mieux à tous égards que quand vous le.
prîtes. Le paffé relevé par des Adverfaires , fera bruit:
fans doute'. Mais quel bruit! . • VouS' fur qui je comptoii,
, D ij
/
�28
pour rendre à mon nom le lullre en ce genr
fieurs très _ refpeétables Dames confécutives el" que ~Iu
procuré ; que craignez·vous en cédant aux i ~l aVOlent
votre mari & de fa famille? Vous êtes fépar~ ~nc~s. de
Mon frere vous offre une maifon convenabl e e, Jens.
oUS
ferez la maÎtreffe. Lui & moi nous travaillons c. ou IVâ
à réparer les ravages de la défunion.
ans re che
Il ne relle donc que l'éloignement de M
t
t'ell bcaucoup fans doute. Mais ne voyeJ.z ~~o re pere.
ce fentiment porte fur fon rebut pour le t~a us &pas que
1 t
bl
&
1.
cas
pour
e :.~u l eS~l
que. vous UI ?pportez ce mal en voulant
l e IUlr. 1 pOUVOlt vous faire laiffer en diC. . ' r;
lien~rai ma fi!f~, paffe. Mais il ell trop' éviden~n~l;/e JOUma~l eft trop avancé: qu'il faut qu'il prenne
vdotre
t
't
l'
Ît .
con amé
na lOn a out ce que oppo mon peut femer &
de bruits contre lui, en renonçant à fon état exag r~.rl
vous obtienne. Eh! font-ils de bonne foi ce ,o~
qu 1
U
. difent que tout ce qu'ils entaffent de reproc~~ 1t 1 vous
à la
ft·
li r. •
e rangers
que I~n ur la tete, opérera la féparation ? S"I ft
q~eJque ralfon cachée, je l'ignore: car tout ce ~e e'e;
faiS ( ~ peu font .plus in~ruits .que moi, je penfe q) nla
nul pOids e? cecI ; ou s tls aglffent comme mercenaires
o~ ~affionnes, vo~s avez. affez d'efprit, ma fille
our
demeler les vues etrangeres à VOliS. Ayez donc alre~ de
coufIirage pour ne pas fouffrir d'être compromife pour de
f au es apparences.
Les. mœ~r~, les exemples, les propos répétés feront
~n .véa~n Ides tllufions paffageres. Tant que la fociété fera
ldOCI cl'·
te e nœud que v ous avez contra~l
!'l.é le
r ra le premier
lees eV~lrs dans .l'opinon générale raffife, parce qu'il dl:
cl premier. de~. lIens. Le devoir filial 11e perd rien fans
oute, pUlfqu 11 eft le germe du devoir paternel Mais
ma ~Ile? les fabines fe jetterent entre leurs peres '& leur;
mans
àL
s'égoraer
'
. renommées pour cet aéte
d'hé prets
ïi
b ' A Jamais
rOI me. e terme fut qu'Albe fe réunit & fe confon·
2.9
-dit dans Rome. Je 'Vous renvoie loin, dirons les moc':
queurs ; mais c'eft à la racine de nos Loix. Les Magiftrats en font les gardiens obligés. Et fongez, ma fill e ,
contre qui vous allez les réclamer : contre le pere de
votre enfant, contre un homme dont vous avez enchaînél.'état & la parole, tandis que vous allez demander l'in·'
dépendance & la liberté: un homme qui s'eft bien fait
du mal fans doute, mais qui ne vous en a point fi.lit à
'Vous, qui, s'il étoit foufl'rant & malheureux auroit droit
à réclamer votre affiftance, & qu'aujourd'hui l'appareil
de vos répugnances entoure d'hoftilités.
Mais il me femble que ce foit pour lui que j'ai pris
la plume. En vérité, ma fille, en honneur, ce fut pour
vous. Je crois devoir vous dire néanmoins, pour n'avoir
pas à me reprocher d'avoir rien néglige pour empêcher
l'éclat, que depuis plus de deux ans que votre mari eft
en liberté, j'ai défiré votre réunion; mais je l'ai défirée
par les douces voies de la perfuafion. Vous êtes témoin
que je ne vous ai jamais trompée fur fon compte. Ma
fenfibilité fur fes torts s'eft même quelquefois peut· être
exprimée d'une maniere exagérée dans le fecm d~ ma
correfpond.ance de famille. Qu'importe? Le paffé eft paffé
pour tout le monde devant Dieu & les hommes. Il a
vécu neuf mois dans ma maifon. Je l'ai envoyé en Provence où -eft fon domicile -naturel, chez fon oncle qui
eft un fecond pere pour mes enfans. J'ai efpéré que fa
bonne conduite feroit renaître les bontés que M. votre
pere eut autrefois pour lui. Je cannois votre cœur, ma
fille, votre amour pour vos devoirs, votre refpeét pour
vous-même; & je m'étais flatté que vous rappelleriez
aifément les fentimen~_ premiers que vous m'aviez témoigné avoir pour lui. J'ai exigé qu'il ne cherchât aucun
moyen de vous raflprocher de lui, qui pût ne pas vous
être agréable & à M. votre pere.
On m'affure qu'il m'a tenu parole; & tout me dit en
�"
jO'
Jrt~-temps que je n'ai pas le droit d>-exi
'
,.
~crIfie plus long-temps [es [entimens dans l' g~r. qu If memtérelfame de [a vie. Il eft queftion d li a aire la plUSl
dit ~ue fOIl honneur y eft comprom~s ~~~onheur. On:
~OInnIes dont on cherche à l'accabl
J 1 par .les caa p t ' d'
.
er. ,e ne li
or ee en Juger, & je ne veux pas lui f i ~I~ point
a },4 ans. Je [ui~ colltent de [on obéiffia re IHJufiice.,
}.u[qu a préfent, & Je ne puis lui refufer la ~,I~ce ,en ceci!
plo~er les moye:Js qu'on jugera les lus 1 erte d'em-'
~orttr de. la liruation pénible où il eft. tra t eefficace5 pour'
Je ne [UIS pas heureux. Il ne tiendroit
,; s-chere fille,
donner
un
bon
J'our
en
ma
vl'e
V
qu
vous c..
de me
l
•
ous me al'a'
perer; car pourquoi me demand'lez - vous e VI f'' Z,' lait ef·1
mari à porte'e d'"'erre eprou'
,
n JUInfi 1780
d e mettre votre
.
ne ' vous étiez .pas confervée des d rolts
. liur lve,
' d1 vous
v~lrs envers lUI ? Cette lettre dont il fu
UI,. es de~Ul une révolution .q~i me parut fubite &t averti, fit eœ
Ce CŒur fier & qUI paroilfoit endurci
de bon genre.'
j & par conCéquent
ég.aré, parut [e fondre tout à
dn, repentant huml'll'é' &
coup:.l Ce montra atten·)
.
" c o m m e Ii 'ft
.
a ~es fortes de démonftrations
fi n e POI?t flexible
qUI me donna quelque eli é
" ceOhut la premlere chafe
l'
"
p rance.
'm fill
.
.i.e cepete, il n'y a pas d d
. a
e, Je vous
dans les fuppofitions les ~us ~nger ~our vous: & fut, il'
mon frere !1.
•
&
P
nnemles , nous y Commes
.,., m01,
vous da
"
ceux [ans pair que
'
ns tous vos droits, & avec
confiance Ce J:our d vous dronneroit un nouvel aae rlp'
.
one ne 1.
•
vous, mais au comra'
b' auraIt etre malheureux pour'
vos jours..
Ire len honorable pour le refte de
!l
A
~e
refilr
vous
vous
'
prends, ma fiUe une
"
,
cette lettre pa'
,vI~le ~etournee pour vous faire '
à mal' ~ SI·'l a VOIX
rc~ qu e e n Importe qu'à vous Fiezd'
. .
.
.
ébranle d'
un VieIllard qUI vous chérit '
r
'
ltes un mot· & fi
'
,
.i.eule votre parti a"" ' d '
1 vous n ofez prendre
"J. d
' Hure e vous " •
.
,.
n... e. mon fr.ere &. r béiffi
' J arrereral, par 1 aml,
a
ance de mon fils, tout aae
5l
"
.JY. •
Judiciaire. : : ~ S'il Je falloit, fi cela vous était nécc;-nalre;
j'irois vous tendre ulle main qui ne fît jamais de mal à
,perfonne ni ne le voulût. J'irais faire au nom de mon
fils toUres les fatisfaaions dûes à M. votre pere, & j'en
porte loin l'idée en fait de devoir filial, vous donner le
baifer de paix, ma fille; qui ne s'éloignera jamais de
'Vous. Mais en fuppofant vot,re volonté, vous pouvez
'm'éviter cette peine &. cette dépenfe. Sinon je détournerai. déformais mes regards de la carriere ou vous voulez
entrer, &. je m'envelopperai dans le triae & con[olant
fouvenir du defir que j'eus toute ma vie d'être juae &.
bon envers ceux même qui ont titru les amertumes de
'ma vie. Je vous ai dû comme à mon enfant les confeils
de mon expérience &. les témoignages de tout l'intérêt
que vous m'infpirez. Ces fentimens ne peuvent vous offenfer, ainfi que le témoignage de mon ancienne tendreife. A dieu ma très·chere fille.
Lettre J.e M. le Bailli de Miral>eau à
de Miral>eau•
Mada~
la
ComteJJ~
Du Z9 Mars 178 3.
'Apprends, Madame, que l'on veut faire paroître ea
votre nom un Mémoire; que ce qu'il contient, s'il
tel que l'on me l'a dit, me force à m'abfienir de le
qualifier. vis-à-vis de vous.
.
. Avez _ vous bien réfléchi, Madame .• fur cette démarche, & fur les fuites? Si les faits qu'on y expofe étaient
vrais, ils feraient tort à vot1"e mari; mais je vous de ..
mande fi vous ne partageriez pas la honte; ils font {aux.,
&. il fera aifé de le démontrer; vous fourniifez vous~
même la preuve de leur faulfeté.
J
-ca
\
�,-H
P-
, L~on m'affure, mai!; je ne le croIs pa!;, que vous lesappuyez fur des lettr~s de mon frere. ,D'abord je ne faurois me perfuader qu un quelqu un qUI a quelques fentimens d'h-onneuf, abufe de la confiance d'un pere irrité'
'lue cette man-iere d'être rend très - fufceptible de croir~
aveuglément tout ce qwe l'o,n lui dit fur un fils qu'il
aimoit, & qui verfe dans. le [e1l1 de fa belle-fille ou même
de fon beau-pere ~es- pl~intes fur/es cha~rins domefiiques,
au feeret defquels d a du les erOlre auai I11téreffés que lui.
Obfervez, Madame, que mon frere a été d'autant plus
fondé à confier fes pe-ines à M. le Marguis de Mal'ignane
que M. votre pere n,ayant que VOliS, & ne pouvant, fe-'
Ion les apparences, Ce voir-revivre que par vous, la liaifon des deux familles devenoit> encore plus réelle. Si 1'011
pourre les chofes à un tel excès, que l'h-onneur défende
à jamais teute r.econciliation, avez - vous bien examiné
jufques où cela peut aller?' Je vous le rerete, Madame,
réfléchiffez -y bien, & vous verrez que tous les faits étrangers- à vous que vous pourrez citer> ne Caliroient fervif
fi votre caufe, & ne ferolent que montrer que la paillon
vous a_fait franchir toutes les bornes de l'honnêteté: car
i.1 faut prouver" & vous ne les prouverez pas.
Ces faits ont été' exagéré's, & plufieuri même des plus
graves fon~ abfolument faux. Vous attell:erez les lettres
de mon fiere. Je n'ofe croire que vous vous permettiez
cet abus de confiance; & je vous répete que dans le l'10ment de la colere, un pere peut €roire tout, écrire tout
dans fa famille, & que cela ne prouvera rien, fur-tout
contre des preuves contraires. Il n'en reIl: e-r a: que l'abus
d'e confiance, & l'horreur' d'avoir cherché à diffamer
l'homme dont, vdus portez' le nom.
J
Enfin, M-adame" fongez à'votre' état de fi-I1e , & que vous
€ompromettez très -errefltiellement M .. votre Pere. Je vous
demandè- fi VOliS croyez, que ~ui Ge f.oit pui{fe approuver
une
une manœuvre qui _vife à déshonorer votre mari & à
cômpromettre votre pere.
,
,
n'ignorez
pas
tout
ce
que
votre
man
a
faIt
pom
V ous
•
r cl ' l '
vous voir, & favoir par vous· me,me vos lU)tt& e p alIlIe ;
vous n'ignorez pas non plus la haut~ur avec laquelle tuus
yens de conciliation ont été re}ettés en votre nom.
.V~us favez avec queiIe honnêteté il a parlé d.e votrs dans
fa défenfe. Jugez vous-même de quel côt~ font ,les tort,~'
_ CTell: probablemem, Madame, la dermere fOIS que ]e
il ell: celui d'un homme
oo rrai vous donner mon avis;
P
.
dfi
•
"qui s'int~reffe encore à voos'; Je e Ire, pou~ vous-me~e,
-que vous veuilliez bien en prqfiter. Je fUIS, &c.
,
.
"
- LE lYAILLl dE MIRABEP.fJ.
1 r
,
..
.
.•
,
1
N°. 4-
a
Mr. le Bailli
Lettre de Madame la Comte.fJe de Miraheau
,
_de Mirah,au.
',
.
À Aix, l~ 30 MatS IÎ83~ .
,
Ou, pouvez, M; le Bailli, vous en rapporter à m~i
fur le [oln de mon honneur. Les Juges & le Publtc
'décideront fi les lettres de ,M. votre frere, foit ji. mon
pere; foit à moi, ne (ont pas 'utiles 'à !a"défenfe de nia
caufe . & le mall'-luement des engagemen~ qU'ql1 ya contratté; , ne me mét pas dans la néceffité indir~eI1[ab~e d~
les publier dans mon Mémoire, en ' réponfe a celuI ou
l'on a publié les miennes.
J'offre toujours à Mon{j'eur votre NeVetL la c.onférence
. qu'il a paru detirer. Je fuis pr~te à, le rec~voJf deva,n:
, d'es témains refpeétables, quand Il. l~ Jugera a p,ropos. Jal
l'honneur d'être, Monlle'uT le BaIllI, votre tres - numble
&.. très-obéiffante fervante,
.
r
•
V
MARIGNANE DE MIRABEAU ;'
E
�)~ ~
'\
Extrait
,
du Greffe du Sénéchal d'Aix.
,
N la
caqCe. de parne L\;larie · 'Marguerite • Emiliè cie
Covet Je. MarIgnane, Comteffe de Mirabeau de.
'mandereife au.~ fins HroviCQi.nes de fa Requête du
courant ~ défendereffe aux fiQ.S .d es Requ,êtes du Sr. Co.mte
~t: ~1irabe~~ des premier &. 8. dudit mois, &. en récep~
'tlon d:expedIt;l'\t , ~u IS ,du, ~pur.ant, 1. Ear .{?a{fot, ioint
M. le Pr.ocu,,~r ~ dl' ,R ,o.I d:.,u.!1 e part; &. Mre. Honorë~
Gabriel de Riqueti , Comte de Mirabeau, défendeur &.
-&' demandeur par Sicara', d~autrë. Ouï la Plaidoirie de Me. Portalis pour la Dame Com~
telfe de Mirabeau, &. la Réplique du Comte de Miraveau, en propre., &. les conc1uftotls d'e \ Me. Fabry-,
Avocat du Roi, nous., eu ,avis d'Il: Mes. Aubert &. Lange
St. Suffren , ConCe~llers, &. pris avis con[ultatif de Me.
Trolle ', 'Lieutenant' partieûlier, avons ordonné que fur
les fins prinçip"les de .la· Requête- de la Dame Comtde
' de Mirabeau, du 13 du courant, il fera"- pourfuivi ainli
que ?'a~p~rti [lt ; ~ cependéjnt fans; préjudice du droit
des {'anies ' ni ùlriblil:t~on d'a.uclln Qouveau" fans oous
arrêter ell l"état a).l;K fins pIovûoites r de. )adite. requê.t;e
de la Dame , COlUteffe e:le Mirabeau dont raYOnS dé~
mife &. déboutée, ayant tel _égard que de raifon a~x
fins dè" là requête du Comte de Mirabeau du premIer
du courant mois, ,\'Vans ordonné qu'il fera eojoiat à l~
dite Dame Comtdre de Mirabeau de fe rendre provI~
' foirement auprès, de fa (;1. mari dans trois j0urS', à compter
' de celui de la fignifieation de notre préfente Sentence
&. d'y demeurer ' en fon état d'ép.o.ufe du dit Comte , de
M.irabeall.., à
charge par' fui de la recevoir &. traiter
E
;3 du
1<:.
,
. 1
t fi mieux n' aime ladite Dame de Mlrabeaa
rnantél emejll , un Couvent de cette ville d'Aix dont les
fe reurer (ans
C
d'
, conviendront 'pardevant nous, &. laute en conpart!~Sfe retireront pardevant le fi~ur, A~chevêque ou fes
Veil~~ires généraux p04r leur être rndrque un ~ouvent en:
. V'lIe Il ladite Dame C01nle(fe de Mirabeau decettec;\!te ,, ~ ~ il J llgement définJtif: enjéint fi ene d' y
~~~~~ \:s~:~fit~s de, fon mati, 8!. àl celui ~e la hantér'
~ fr équenter; fajCons inh~bitions lX ,défenfe-s a t?U~S perd' mettre obnacle ou empeohemenF dire ement
~ni~l~ireJement à peine d'en- être informé de notre
'é Fal' t à Aix en Jugement 1,: 24 mars 17,83' Slgn
torlt .
. 'ETTENNE
AUDIER. Collationné. SIgne
f
,
,, E~ploit ,de figl!iQ.cj\tiQIi du 26 dudil..
au:
, J '
. ~
,~
lij
-
�37
N°, 6.
Sentences en
nonobftant
Sentences.
appel
RELEVÉ des Sentences de nonohfiant appel ~ rendues
après les Sentencès, par les mêmes Juges qui avaient
[el{te~cië ' ,- tant au. Sénéchal", S?umiŒons ~ qu'au
Juge Roy~l, extraJtes des . Reglfires appellatoires
dans lefqùels fe trouvent les aB:es de cautionne_
ment, en remontant jufgues à dix ans, expédié par
le Greffier en ,chef foufIigné.
\
•
•
Sentertçes en
Semences.
nonobftam
nppel.
1
•
Nom des parties.
15 decem. 17 82 2+ janvier 17 8 3 Au nom de Fredelic Hugues, contre Bel,
•
liard .
12 decem. 1780
Au nom du lieur Lange, ColTeigneur de
Tourtour, contre Boure.
9 mars 178z J 1 août 178 1 Fabre, contre Sambouis.
16 février 1781 27 avri l 1781
Lanoir, contre Martin.
13 avril 17 80 'J avril 178 1
Roure, fermier, Cantre les hoirs Roux.
3 janvier 178 l 17 {ept. 178 l Vachier,
c. Michel
1 février 1782 '5 mars 17112
Blanc, c. RoInmd,
14 juillet 1779 7 août ' 780 Viton, c. Roux.
12 février 178 0 24 juillet 17 80
BarilTon, c. F vugue
30 mal 1780
{
7 août 1780 Bourguiguon, c. Cavaillon
31 août 1780 20 fepr. '780 Augier, c. Augier.
20 decem. l799 9 mars 1780
Les créanciers de David Beaucaire, c.
St. Donar.
28 avril 1780 JO mars 1781
ROll x, c. Roure.
13 decem. '779 10 jan vier 1780 Billard, c. Pourrer.
J 1 fe pt. 1779
21 oél:ob. 1 77 9 Noël, c. Gaubert.
27 mal 1779
9 fept. 1779 Panurel , c. Millard.
1 3 clecem. 1779
22 avril 1780 Durbec, c. Pigno!.
14 novem. 1778 7 mal 1779
D'Ollivary, c. Honnorat.
13 mars 1779 2i,.mars 1779
Roux, c. B~rtralld.
•
Noms des parues.
.
"Gerard, c. Daumas.
27 J'uillet 1776 12 . aVIl i 177 8 De Meynier, c. Ba(\ac.
8 1 J oaob. 177S Ma;>:e t , c . de Simiane.
1.0 mars 177.,.
8 24 fept. ] 77 . 0 ano
1 n ,.
c Reymonenc.
. F fi'
7 feptem. 177 6
1 oél:obre 177 12 fept. ] 77~ ~1auril1, c. les hom dore •
5
.
7 8 L 3 mars 177
'A 1
II c Bremon.
5 févner 176
. '11er 1776 1 ame e, 'b· "
c Decani~.
l.L avril 177
Roman Tn utuS, .
. 7 jU~
]0 mai '777
9 )U1Il1 1777
Vion, c. Burle. B
.
1 et 17 77 M
'5
JUI
'er
contre
onnm.
.
.
7
17 JUill 177
.'
77 6
anm,
.
10 JUill 1
PIf c Mme.
mal. 76
l.} ,
17 ' '.775 27 août 177 6 Hey;s 'contre Brignal.
2.4 nove.m. '77 19 juillet 177 6 Mug~ r' c Bonnin .
' 5 Janvier 1 6
. .
6
ome,·
cl
1
.
6
10 jUll1 177
J ffray, -co Bertran .
2.j mal 177 6
24 mai 177 6 GU 'mard, c. Terry.
]7 m ~1 177
,8 mars 177 6
a~ nd c. Ode.
2.6 aout ]775 5 16 janvier 177'6 GCUlra rt' c D eporler.
decem. 17'J
4 ouve "
. d
15
,
11 novem. 177 B
'0 c GUlran .
,p aout 1774
G oél:ob. 177 5 ernar, c' Croux.
~8 avn l 1775
fep r. '77 5 Jaubert, . Depofier.
aVfll 1775
7
Cou verr, c.
.
4:,
A.
11 nov'em. ] 77 4. S'
n c Barlaner.
o aout 177-,:
.
7'
Imo , "
B
d c. Comtes;
} . illet 1774 1G m~l 17 J
Audlffret & ertran,
4 J~
4 16 JUillet 1775 1>' • r .c. Meyfren.
16 declelm. 17~5 10 juillet '775 nclqU~t ' c Manen.
13 jUi ~t 17
16 mai 1775
r o ! , · Blanc.
III féVrier 1775,
r'il 1775 Menre, c. B' c'hord .
• . ' II
4 av
L fb os c ou
G .
1 t\:I~. \ 7;741 4 mars 177 5 Dee dier' P~yron, c. holfS ",rcIO·
3 ep
75 20 mars 1775 M Ytin c. Chambe.
6 mars 17
ars 1775
ar . '
A bert.
~ 6 décem. 1774 10 mars 17 75 Gabnel, c. u c de RoITe!.
r' .
, 75 10 m
B er & autres, .
-] 7 1ev ner 17
1
oaob. 1.774 oy
Blanc.
4
2~ août 177'+ Unard, c~. Peuin.
1 7 ~e~r. 177
4 1 . uillet '774 Brunet, C. ' lITerÎs.
1 3 J.UI.lIet '77
,0 JUin 1774
9 luin 1774 Mandllle,
c Villache.
2.6 avril 177 4
27 1..
1774 Bonhomm. e , . Boulle Reymond.
"
74 '4 JUill
D Ma\Jpy, c.
7 ~~vr~~: :~74 28 février 1774 E:rrar, c. Sil11ian.
7 le vr
2 aVril ]773
'
u mars 177}
. , ETIENNE.
'd'"
Aix
le 4 avril 17 83' Signe,
Expe le a
Q
•
1
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�•
-
P
Ardevant NOlIs, •
Chauvet 8t
. . . . . DoubI~, Syndi;s de la Commu_
nauté des Procureurs au SIege gêneraI de cette Ville
d'Aix eft comparu Mre. Honoré-Gabriel de Riqueti .
Comt; de Mirabeau, fils, affifté de Me. Sicard,
reur audit Siege, lequel nous a expofe qu'au procès qu'il
a pardevant la Cour., c~ntreA la Dan:e Comteife de Mirabeau fan époufe, 11 a Intéret de faIre confia ter que par
l'qfJge obfervé aux Jurifdiétiol?s .de cette Sénécha u1Tée"
10rfqu'i1 y a un Jugement provIfoIre dans Un des cas exprimé~ au titre des Matieres fommaires dans l'Ordonnance
166
de
7, dont la partie condamnée a déclaré & relevé
appel, on s'adrefTe au Tribunal qui a rendu le premier
Jugement, pour faire ordonner qu'en c.onformité de l'Ordonnance il fera. exécuté nonobfiant appel. Au m0yen
de quoi, ledit lieur Comparoiifant nous a requis de vouloir bien lui fournir, par notre réponfe au bas du pr{. fent Comparant, une attefiaüon conforme à l'tlfage conf•.
tamment ohfervé en ladite SélJéchaufTée fur ce point; St
a figné. Honoré - Gabrid de Riqueti, Comte de. Mira.beau, fils.; & Sica rd.
39 .
s'adreffe au Tribunal
rage généraleme~t rd~br~~Vg~~: ~npour faire ordonner, ~~
. a rendu le lU li It
'il fera exécuté nono
.qUI Cormité de l'Ordonnance, 'fiqu
Avril mil fept cent
coml
A'
le trOl le me
. D
E
tant l'appel. A.
és
CHAVVET, SyndIc.
OVBL,
quatre-vingt.trolS. 19n ,
Syndic.
r'
Procu~
Nourdîts Syndics. de la Communauté des Procureurs au
Siege de cette Ville, ayant reçu communication du Comparanr ci--deffùs, & l'ayant référe à ladite Communay té ,
atteftons, enfuite de la délibération prire ?! cet.effe.t , qu!aux
Jurirdiétions de cette Sénéchauffée ,. lorfqu'il 'Y a un lugemeut provifoire,. dans un des cas exprimés au titre. des
Matier~sc fommaires da~s l'01:'donnance de 1667, dont
la pame condamnée.. a de,laré & relevé appel, il eft d'l!-
- - ------:- JOSEPH DAVID, Imprimeur du Roi.
. A AIX, chez
17 3,
8
�!
.'
R E fQ U E T 'E
A . NOSS EIGNE U ~l{.S
D E
,
PAR LEM E N T.
r
L
1•
hUJ;bI~ment
.. ........
~~~iie
.:SUPPLIE
Daille! Marie":..
de Covet de Marignane, Comteife de Mir-abeau , '
d~ ' cette . ViLle.
'
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,
, RéMojnk~
l,
L
_
~fi forcê~
..
(f
.. :,
~1
reco~rtt ~à
qu'eUe
de .
votre autorité pour faire réparer deux injuftices
~tri n'am jam~is e'u d'exemples "&,'qui, yraifem",
hlabJerq~'nt" n'en' f~rviront jamais. . c_"_
, L~ 'S4Ppliant~ vivait .dans " la, ~aifot1 '~e fon
per.e ; 'elle 'y v.ivait fous la pr.oteétioq des . Loix
-
" _ . .l_
t A -
�z
3
& fous la fa! des enga-gemens dOl11eJEques les
plus facrés. Le fieur Comte de Mirabeau fO.11
mari, jufqu'à ce moment ~ det.enu dans de.s maifans de force, ou à la fuite de procédu~res (candaleufes dOllt la France enriere cannait l'objet"
arrive fubitement en Provence, au tarti,. des Pri.
fOl1s de Pontarlier; & au préj udice des paroles
d'honneur & de Gentilhomme, qu'il avait lui-même données à une famille j uft ement offenfée des'
putFages S{. des fcandales dont il :.'ét<;lit rendH
coupable à fan égard , il ofe demander à la
Jufiice des in joné.1îons Contre la Su pplia'nte qU'TI
veut obljaer -de venii' le rejoindre.
On eft d'abord-- étonné de l'audace de cette
démarche. Mais on :veut préve.nÎr un éclat affli.
geant. On fait une réponfe moderée à la Requête. On cherche à faire rentrer le fieur Comte
de Mirabeau en lui - même & à le rappeller à
tous fes devoirs. Il s' obf1ine dans une demande
que, tan~ de raifons auroient. çlu écarter. 4Suppliante ,fe voit alors forcée à former uo'e d_~~a~{j~
juridique en féparation: le fieur Cotpte de
rabeau pourfuit fon objet. Il cOlic'lût à ce ) q-ue
penqant praces, il, [qit er joint ~ la . S~up'pliante
de l~ rejaï'ndre, fi mieux elle n"aime fe retirer
'dans une Maifon .Réligieufe, qu~ fera choifie paF
les parties ou fix~e p~r, le S-vpfrieur Eccl~fi'lf
ti.que. ~ ,avec . irijpn~Ï?n _,à . eVè r ' p'y: r;;c~voîr 'Ié~
vlfi-tes de fon mari & a lcelu! ,de la nanter &
fréquenter ~ '& -inhibitions' & défénfes â 'tdtiCes
J\2i-
.
,
perfalll1es d'y porter trouble & emp&chemenr.
L'a.bCurdiré de ces fins étoit frappante. Elle
forme pardevant le Lieutenant la matiere d'un
incident à l'Audience; on plaide. Le mil1if1ere
'public rappelle les vrais principes. Il pmuve
combien la prétention du fie ur Comte de Mirabeau
eft infoutenable & contraire à toutes les regles
connues. Il concluc au déboutement. Mais au
grand étonnement de tous ceux qui connorlfent
les Loix & les principes de la matiere; il fort
à la pluraliré des voix ~ une Sentence 'qui adopre
à plein les fins du fieur Comte de Mirabeau. La
Suppliante ne tatde pas à vous dénoncer cette
premiere injufiice. Elle prend taot de foite Uh
relief d'appel, l'e fait fignifier, & met le même
jour fa préfentation au Greffe. Le fieur Comte
de Mirabeau n'eft point arrêté par ce rewurs
légal à votre autorité; il Va de nouveau au
Lieutenant & lui pré fente une- Requête en nonobftant appel. Cette Requête eft renvoyée en
j ugement. La Suppliante donne des défenfes,
dans lefquelles on démontre que le Lieutenant
n'étoit plus compétent & elle demande d'être
renvoyée ainli & pardevant qui , il appartient.
. La premiere chofe à faire dt, donc de légitimer le Tribunal, & de décider fi le Lieutenant
était encore compétent ou non. Point du tout:
le Lieutenant ne prononce pas même fur les fins
de la Suppliante, & il ordonne l'exécution de
la premiere Seorence- nonobftant l'appel. Cette
'
A
2
�4
feconde Sentence efl: fignifiée à la Suppliante,
une heure après quelle a été rendue; il lui érait
re{ervé deflùyer tant d'injufiices & tant d'irrégularités dans un genre : de procédure donr. la
marche. efi fi ~mple & fi clairement fixée par
la pratIque uDlver{elle de tous les Tribunaux.
Dans la forme, nul doute, qu'après l'appel
relevé, le premier Juge dl: entierement dépouillé
~e la matiere ; & alors fi la matiere eft lù[ceptlble du nonobfiant appel, c'eft au Juge d'apT
pel 'lui-même qu'il faut s'adreflèr pour Je demander. C'efi la doéhine de tous les praticiens
& notamment de Serpillon {ur l'art . .17' du rit,
t7' de l'Ordonnance de 1667. De Rhodier dans
{es queftions [ur, rOrdoruJance pag.. 24Z,. , Voic~
com.ment . s'e~prime cet Auteur: fi le Juge qui
aJ)~lt O~llS d'LTifè~er dans fan jugement 9u.'il ferait
execute par provifzon , fou que la partie eut . omis
.:zu.(Ji de la ,dem~nder '. ou non,. cela, n' ~11lpêche.
rOl: p~s qu ap're~ _ le Jugement on. n obtzm ' cell~
exe~ltlon provifozre, foppofl que ce fia le cas :;
malS pour cela . il faudrait SE RETIRE~
DEVANT LE JUGE DE L'APPEL &,' NON
DEVANT LE JUGE ' QUI A . REN0Q LA
-SENTENCE. Nou's aVons même un Â.J~r~f· d~
·R~gle~ent de la .Cour du 25 Février ' 16
qza ~éfind. aux Lzelilenans & à tOllS les Juges
<~e Tlen fG!r~ apr,es l;a tféclaratio,? d'appel;T &511 eft fi vra~, qu apre~ b~pel rélevé le pre/nier
Juge e1t entleremenr depoLvllé, que 101.-(qu'on i~
99 ,
)'
départ de 'cet appel, ' il faût 1 ver de 'J1o,uvélle~
lettres pour l'invefiir. Le Li~utenant a ,donc prononcé Je nOPQb!t<\.nt app_el ,filr _Uf) JQbjet doqt ,H
ne pou voit plus COEl nqître :~p.lÎJme.Jlljge. '11 a prQ":J
nonçé [an's pouv,?i,r, lX Jans, .ëaraétere., _, .:.:
- III p·eq &udpoiç c~rtaine11)ent ,PqS davantage
pour, prouver l'injufii;e ~e la Sentence, &. pour
y i f9 ire Jurféoir. Car- le ,d~f?~~ . d,~ pOUYdtr &
finçe>mpéte,nçe; JoDt l, d(:? , ll}9y~nL atfui'és- 'ide. furféa.:ll0e:
'
d Jt( r
"'0... ~H 0
J~
?
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~ M~ajs ~IJ fà~:d~" l~', l11atl~r~ éçojt~elle don~ :fui;
ceptible du , n~nobfi<fnt; ·apilei h L~ ,Tpg~:I]t .do.IJv
>
le Ljeotepaqt :..oJcl~n.e l l' e,~é(jltiQ9 i P@r1§01H. tllQOPC~
~9n :::~ .Ja.~ SLtPpli~·nt~. ~1~iI~e-,j9i'PPr:~.~oq ..;1nar! 1.03l; de
f~ , r~jr~t" - ç,anls :,uQ.~ r'M~l{oJi )t.eVgtey[e, .CifJu~, I(fèré!
thr;>ifie par l~s p~tties 0ll fi~~~ p«t:k SupenJ!u!i
Ecclé{,iafiique, 'ay'~ç joJ1~jj)'l_&jgn iLàI eJle t,d'y ~ecS!~
VOÜi l~~ .vj(i~e.s de fop: ~jJu~i-· ~jâ.Ji~hl((h:} Ij{thaDt eS
J
~.ff~q~ell~téf, ,;lv ·C.J inhjRitiqQs.. ~ d~(ep~s~ t~~
te$,-.p.erfO(1ne~ d'y: p[jr,(e l!; tf~1àbl~ u~~§l:JJf~.o.1J~91~!l~
A là~ frt'npl.e )eB:uçe'J qe r ce' Juge.rIJél!t :;;: qu1 .ine•• 'tP}1:
cOIHpTen il étoit peu fuCceptible _(fexécut1Ç>o pra ~
vk[elre & nonobfiapt .rappel? '
, -,
': ~;)
-' Ù'.ne, s'agilfoit ~i ~:ut].e P1atier~ , fblTImait~, nj
~'ulj~~ I~ati~re qui p~t ,req~érir c~.léI;"ité & : à r,a~.
fon 9~ laquelle l'on t'ut dIre qu Il y aV~lt penl
dans la dem~llre. Ici le danger ne peqt etre que
dans la précipitation: la Suppliante pré{en~~ d~s
cij,Ljfes graves de ,{éparation & des cau~es q,Ul men'a çeut [0I! honnellr, fon repos, fa fur~te;. elle
�6'
l'réfente -dés Mufes j'u(tj6ées par êc~it, conCacrée~ par 'un -jugem~nt d0tHefiique auquel le fieur
Oomte de l\~rQbeau a · fçru[crit lui-même. Dans
de part'i11e'3 ~cifc6nll:ances, C0mÜJept la jufiiée
pourroit-~Ue donè tiv'rel' la Supplia::nte à des dangers qu'elle annonce & qu'elle prouve, &. l'expofer à un pré-jtldi.ce qui -pourroit devenir irréparabl.e .? Cpt11ment fur-teut pourrElit-0o la forcer;
avant- 'EIne <1'àVO~f e~àmitï;é fi·
h:Onnèllr & Ca
dél~cate~è ~,e (on~ pas comp~omi.s, ,_à rejoindre
ml epoux clofi!1 e-~le de(;}aré ne ' vou'ICim & ne pouvôir . àpÎ"r(j~her fans s'avitif ' & .fe compromettre
àti~ ''èu>xOéléSl !olx & ' de ' l'a fo'€iéré entiere ?. ' 3J' . lè ïrfiè'ut' Comte <te !Mirab€àu 'ne veut, .comfu~H al tP1e.I@ dirJ·" qu'être phfonnéllemeflt éclair€i '{lès _ vé-ri1~}jté$ difp0Îlt10lijS dé la ,$upplîante, il
ne. tiecilt ql/à- lui ' de l'è-tre. Là' Suppliante lUI a
ê~j'a:fkFtl êifitt: pÏttfiiart 'fois:,ufle :entrevue chez
~~J & 2~"e~h~ èès=lé-ln04~s .ré:(peétaoles. II .a ré':'
ili1·ê~~t{~:-fëtt&.... uè: ' On a1 <iri6fié à la l!t1i offJtir.
Ii'h'a~ f-ieh répéndw'. On la IUl- offFe e-ncore & iÏ 'ell:
lé IijaÎtre àe~ l'aGte-Pte'r, mais ' que le fieur Comte
~e M~rabeal! veuille pendant procès, retenir la
SUPfJ.~ia:nte l f0U-S fa puiilànce, qu'il veuille ·:l'0blig-€l' pa.i-..J itnpreai0n ,d'al:Jtotriré, à lier avec ' lui 'un
commerce q.ue la décence, que l'honneur que
les confidéraliens les plus fortes doivent éc~rter,
c'eil un excès de riramnie auquel les loix ne fe
.
preteront certaf'ne1nent pas. On ftûnt de craindre pour la Suppliante une obfelIion qlli n'exilte
nm
o
.
q
pas J.
Sc: on .vo~dr.oir- ~a livrer à tlne o!Jfe"Œon qùe
deJlt hl1 fatr,e' GJ'all~dre & redouttlr. ; La .suFl': pltant~ f'e lla'tte , de;; délb~ntr~:t1 q).l ~ikn~ p:eùt -J)lus
_y . a~Qu: aU.Pll1:ei COfte lèe fodé~j! .~çr:elk-. & ' fQil
· mac; ; . poorr<Oirt -on:,. ava..ut -qu~ : d~ J'ent~ndr~ IX
de la' JlJger" faà1'~ violeoce à [es [~ntiJJ1~ns, &
, à fes répugmance " [$( confonitner ,.1e , ma~,Ln de
~a , vie. dans un ltJ0ment , o.il till1! .vient dem.anQer
-à! la j:ulitioc de la lpioté!;et' & dé I.a défendre?
- _ S:il : s';i~oiu ~ci: et une. deJTIànde en féparauop ,q.ue nen ,n'eût p:ié~édé, fi là Suppliante
fortoit . PQ).Jf la prcmiere- fois de la maifon de
Ü>a.. 411a;ri. dans l' o~jet de former ,Ile.t.t~ dema,nde,
-Qll.JfÎbur oitJ p~~-ê.tÂe (ègqrder f-a dén~arche COLU-1~J~ èllHl'!os./av0rable--. . Mais . depuis ~ huit ,années
eUe vit dans un état dé' féparation; depuis huit
qonée.s . elle .gémit des e}$.cè.s, des égare mens &
des travers de fan mari; 'depu,is .huit années eUr.
vit, de l'aveu des deux familles, dans la mai~1J; de ' fon pere,i -:: dep~is' ht<IÏt artQéesr eUe vit
,~ 1'~lJlbre des pare-!ei d'honneur qu'on lui a
q01\pés de garantir .à . jamais jon honneur, [on
;n ;pqs; [cl rligil ù 6, ,fa JlLtflté" & l'on . viendra
d~upitemelli~ JfPllblù: oet ~ét@,i co'gA:ant & . avoué.,
"~tte pqflè$-on fa~rée ~, inviolable! Non, la
Suppliante ne peut le croire. Elle fçait que penqant p~9cès , les Loix ne permettent pas d'in.
iI!-o;ver txl d'entr~pren.dre rfur des droits reconnus
.& -pi·Rapts. ) Nos: ,ayti!UrS rapportent ,une foule
d',Ar1iêts qu.i, [~ns préuve juridique ' . ont confO?1i
0
�'~F
Mirabeau el.l: l penfonne, ::.~ttetùliJ' qu'il LtJla p:aintl
8
nrmé des ' fépàrations pr011onc6es -darts les famiI- les, ~ui . 'ont re{petté les .attes de cette jufiice
domefiique -<Ili! \f~ille fùt: le.s mœurs & le bonheur
[!d€S~ enfaRsJ , ~& ~ùi épargne dés éclats Jcai1daletfx
, ~ t1ds:i fa~'lles') !1o.qorablës: L..r' $o'p-plialllve
del
; m~nde è~'rtain:ernent ' pas qU'e ·tout Ge què l'on a
prOlfloncé 1 pour ëlle dan's les .deux .familles 'ait la
•fotce , d'uil Arrêt: i.trétiFaatablél) elle n~ (demande
rien'. tant- qu'e de :P"OI.11VQir )iqfrrLire ~votrë reH' gion & 'l\tot-r·e 1ufiit:e: Mais' pou'rro,i~-élle s'emp ê~he,r d)ob~erver que les )ugelnéns domearq:\lés
qUi fervent ii Couvent de b~[e au.x v&t~es, .doivent au' moins régler. l'état , prov-ifoire. ? ' POUlf,roit-on balancer entre le St'.... Comte de' (Mii1a~ beau qùi "vient fouler aux pieds . fe;J propres' efl';"
gagemen~ ', & la Suppliante -qui tés 'invoque ?
La P(Ovl{~n n'efi-elle pas dûê à la bonne foi
à l'inn.ocence & ~u -ma:lheur ?
,,-, )'
ne
,
,
:..
"
,
...
f J,
1
,
. Ce,
confidété
; iV'.ouS"hlalI'a
NOSSEIGNEURS.,
,
r
t'"
en c~n~ê_dan~ ';atte a la ~lI~p'pliante de ce qu'elle
.ampJ.le C~n ~.p~~,l ~nve~s ' la .Sen,tence ·du p Mars
dermer, ordonner" qu èH~ 'r.e<ip':l€1'fà 'en plâidant
[ur l~Erel , de,:l,a, Sel1t~n~; .du i4 du melne mois ,'là
calfat'lon ou refàr-matl<ln"'É1e -celle 'dù ~ 1 dùdit' mois
cOlUnie mdl~', Incompétente & injufie & que
tant fur ladite amplja~ioe d'appel que fU'r c~lu- i
d.e la ~~rttence ~H ' 2'4 .Mars ~ .i:l lfera peLirfu'Îvi
alnh qu 1-1 appar.tren~, à ·l'effet dé qilOi: l~ pié~
fente Rrequete fera. ~ fign~~ée ·au ~ Sr. Comte ' de
Mirabeau
encore con(htué de Procureur, pour venir défèndre. fur -làdite .arupliàliiôu tYappil dans le tems
& aux formes de droit.
Vous plaira cependant .1NtiS.s~~uIDs." or;'
donn,er e~l o,u~~~ que provifoirement & pendant
ptoces If'"mhlbltlorls '1& ' déf.èrifes · ferôh Ifaitê.s · au
Sn. Hemte! de .MiraJjeauE, lKi:à ' 01J& a~tl!es h .d
mettfel.!lrfditeà SenŒ:p~S di ~~tid.b of ~Httcine .
lIob<l; d'alp1np~ç; l:ilépenS I,odol.ll.Jm~&~ .jinté-:-'l
rets; &- en! cas<; d~,! c:.ontra\~enti011 ~ die.fil: être ,in:
for.m~ de l'autorité de la Cour, & que le dé~ei'
qtlll.dètHvJeddtj' e8J,l ru:él,1U gôk@fiant & "fans
p~éjudice ?e l'oppofition, & fera jufiice.
G:
;J ..
',;.,
")l J-~~l! i ;-!l' ~!: U.) :ln :<:> 1(1~1 Iim
l1.1i'.1
MARI GNAN~.. \Qf4 M.l~A8E~Alh
BERNARD, Procureur.
M. DE BEAUVAL
Soit montré au Procureur Général du Roi .
Fait à Aix en Parlement le 2 Avril I7 8 3'';
Je n'empêche l'atte, le renvoi en Jugement;
que {~r les appels ~l fa,it pour{uivi aiofi qu'il
appartient, la figmficatlon de la Requête au
Comte de Mirabeau en per{onne, & pour le
~urplus, que ladite Requête {oit montrée à par,
ue ~ demeurant cependant tout en état ju{qu'à
B
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larinfpoM'e i<Jil.élilimf:l!ie ( t- (t ~.ni:lq I!7~ )/Js::,cl
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pIaiparw ~E &" ( figni5è t3w:;')Ss' iMe 3 ~inrbeià .cil
ctinrphI~ ? fotto nbntr:é , à
pàt~
~rnn()ltoue nef! ~ ~t~ gufqu.és obd.Lré
ponti:: . Fâili à ~iit ' ëtt ·, prall~'l~no 1:, t ,' Avri~
(",
t7 8' 3. ::J ' 5Up. '" , i v,", , 3 ,)
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on l ;6 l rtdlclIi>ES UlA'I!;~j:8 ~nt9 l lI.cA: ' iOOU.Rol
.:l:ifbr lm) ;& (rlOilil oqri o'l !l!. ii:s ~ '1
p'eifuprie ,. r&illp:mr.tJ fi:
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L'an mil_ /~p~. ~nt !juat!";-ving;-.trois & le Fe.
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IOl'tre
s faTfatheme ~fërC1>n{el
d~ biens , l~ foéété enticre.
!)",
rous-l"eS"" gens
l
,
. Que le fieur .Comte ' de Mifa~eliu fe défab,ufe :
le e'ms des mé'mlgemens ell: pan . ~aLgttpp~aln-e
ooit-avc:;.: confiance prék oter aux; lOl)(-fe~ cra1lltes,
fes mâlheur~- & . tout ce- qu'elle' â~{otiffert". Peuton lui faire u~ crime .d'invvquer la proteétion
des Magilhats étàblis pour fau ve--gatder l'h~
neur, la propr,iété & Ja rûreté d TtO.llS les citoyens? A 'luI s'adn~~hoi~.: ;!le dbri~" l ,fi 1'aceès
de' votre ju(tièe pouvoît 'lÜl ~tre ferm~- " & fi
le recours légal à votre autonté _ pOUVOlt etre regardé comme un ~ttenta~?~ _. _
,,:
.
Le lieur ' Comte de Mmibeau a-t-l1 pu fe, permetirk de " dire ,que' l~ Suppliante
te pliJignolt
d'aucuns févice1, tandis qu'elle' fait remonter les
févices & -les' mauvais traiternens jufqu'au premi~r infl:ant du mariage, tandis qu>~lle prefente
le' rènls de fa ' cohabita't ion avec fon 'époux ; ' comme un tems d'oppreilià ~ d'an,~eriu~e, de triff un' tems ll1ilI'qué par
teffe & de douleur; comme
les procédés les plus inouis & les mauvais trai·.
temens les plus barbares? Il efl: vrai qu'elle n'a
pas cru d'abo~d ' ~ev.oir fà~re un obje..t ' de plainte
des févices qu'elle dévoroft dans le filence. Elle
il oppofé la patience aux premiers emportemens
de [on époux, elle a même confenei à lui être
utile, lorfqu'il n'a-:'oit été que cruel '; & jamais
elle n'eut' déchiré le voile qui couvroir' tant d'in~nités, fi le -Cc"mte 'de Mirabeau lui-mêrtl~ ne
'oe,
fe fut porté aux outrages les plus fanglans & à
l'oubli entier de fes devoirs. C'efl: quand l'honneur de la Suppliante a été menac~ par des calomnies atroces; c'eft quand [a fenfibilité a été
provoquée par des 1ettres infames ; c'efl: quand
des Mémoires diffamans ont été répandus contre
elle fous le nom 9u fieur Comte de Mirabeau;
c'efl: quand ce dernier a indignement foulé aux
pieds' h "foi :conjugflle par fa difparition publique
avec ul1e ,femtne 'étrangere, par fa cohabitation
en RoUande avec cette femme & par tous les
dé[ordres qui ont accompagné ce crime, que la
Su-ppliante cru qu'il falloit rompre une union
que la décence, que la dignité d'époufe, que
l'honneur & la' fûreté ne permettoient pas de continuer.
La propre famille du fieur Comte de Mirabeau
fçavoit , dans un tems non fufpeét, apprécier la
lltuation affligeante' & forcée de la ' Suppliante.
Elle regardoit comme un de [es plus ' précieux
devoirs de veiller à la ji1reté & au repos d'une
époufe dont elle ne pouvoit fe di!Iil11uler les
malheurs. Pourquoi n'oppoferoit-on pas aujourd'hui à cette famille les paroles d'honneur qu.'elle
av oit donnée & qu'elle fe fait un jeu de retraéter ?
On avoit pris des engagemens [acrés avec la
Suppliante. On ofe les méconnoÎtre, pourquoi ne
préfenteroit-elle pas fon titre? que l'on ceflè de
parler de violation du droit naturel, d'indifcré.
tio~, de perfidie: la perfidie efl: pour ceux qui ne
a
�tç
-~ 'lla: ~~ifpc:d1çÎ<~1'l ~ abrolué da: mOn, pèré' -é~ffifuè:)
)l --Je, l ~1 demandé, j'aurois Jupplié que l'oh .mé .
» lU,tt fi ,la ~ôc:e., Ctoy~z, MOl1~euf le Ma t qu is, '
)>- ~l~aigl1e~1!CfQlre l ;qu:e '1er;( m e,~ tr:W a-tflart~ ' {je :j~ ie
. » -:.;<'1>. ln,~t1J,tetd 'dé[()rm~Χ . vQS.·/jorJrM 1qub j'lai ~hI
» .l~=-~m.alhe&r" dé: flf~tr~ dJ fuite p ·l:ts perdr.J J ~ &1
»)- qUf! le ne hil·q permiettrai -de vous demflnder & J:
J
r~
tra1gnent pas -de fe rendre parjure.• :
' ' •
Et comment le fieur Comte de MIrabeau n at-il pas craint,d'avanceli ,que 19r[qp'il avo,i,t , fou_~
crit -au vreu deda ' famille, .)q~<:: lor[qull ' a~Olt
lai -même 'donné per(QnneUemenil d~s lParol~~ ,d,!1O
neur & de èentilhomme, ces parolès' ~,Ji~Olent
été qùe conditionnelles de fa ' part, qu Il , be les
avoit idonnées ' que . pour ach.et~r: [a 1~~el'.t~ 'A ~
qu,e rie l'ayant pas onteou.-e", ll lnc :>poJ1v,Qlt' ~tre
lii pa( .des ' engagem~l1s, ~ui ' ,l~ès!'a~r' " ~: av~Ien~
jamais été réels? En venté? Il fa~t erre blén llia!'?!
pour croire ou pour voulol~ ' en lln~,o[er aux l~lx
& 'à la Juftice' par des a{[ertlOOS .qu Il, ~ft fi Ifa Ile
de dévoiler.: .Le fi~ur Comte çle , MIrabeau , ,de
mand'a1Lfa , liberté, le fait è.fi_vrai •. II réclama>i-t
les bons offices du fieur Marquis· de Marionane
& de la Suppliante, le fait eft' éncore. vr~j. , Mais
pourquoi v:eut-il piffimuler , Fourquoi meme ofc:"
t-il' nier que des démarches & . ;du fieur Marq~ls
de Marignane & dé la ' SupplIante eurent to~.t
le fuccès qu'il pou voit s'en , promettre ? A.-t-I1
oublié la lettre qu'il écrivit au .iieur MarqUIS
Mario-nane' le 13 Décembre mil fept cens qua ..
tre-vingr- l ,, » M. le MarIJuis, difoit-il dans cette
» lettre, je') viens de: franchîr' le 'feuil fatàl, &
» c'eft à vous que je dois le premier hommage
» de ma reco~noiifance,. puifque fans vous, !U 0n
» pete n'eùt jamais pu, rnalg.ré le. vœ~ ~e fon
» noble creurJ'
,
, m'accorder le bleofalt. Sl lorldre
.
» du Roi qui change mon fort ne me Jnett'oI~ paS!
qe
•
) . tOli,t.c:, qui WJus. ,~pp'af~ie,nt
) 1 9&.:qt. lhp't~P()S
~u'e ce
que : vott~ /11':
Ide nfJà:ccoflder:Vot s-inGtne,jf t~Sr
G"o.tn.'lle . ~7J Mi-r~beàu" reéoRorufiolt ' e1olic- 'i'l dfè'':'"
v.o,tr: ~pr.es lel., !ecouvrel,?em, de fa libertë J ' pr6W
fen,rer ,~e ,prémzet . ha~mage de. fa reconno.ijJanèé
auL tiew Mâftqo:~s ~' de . ', M'ar-IgrHtne. rDGnc ' fi.
qû
j
le recouvrement de Jt..l J}ibdté- )éroi~ J è nime- il
?,':é}l~ J:olire , l te 'ptix : ide - {ès i'àr9I~s' d'hérine ifr
ü doù: être fiq~J<: , pui.(q'u'il eh <f.Qr-éé ' de Ir-ec6n~
n~ît~e qu :à fon' égard 'oro a ~té ' gén'é reùx.', Mais
qUel l eff dO,n è J è(j~ lang~ge'··üoli,~a_u en: "mat.iél'ë
dlhonnèlîlr? . Cf.t1el elb:e (yfiême ~t ange' ~Ge 6Llibir
préfen.ier cbmm~ ment.alèfi1~nt ~<lâdi:~io1fnt'lle9 ' bld
pàrol~s_ de Ge'fftilhiJmmq' )es plus- a:ffirmati ~e? : . de
v:DulOlt Ce délier .dé l'Qfuligatf.oh la plu ~ '(acrée ) etl'
ex«ripant â'ut1: ·prét'èl1du. d€fàtitl rrd~ J'ilhetté ~. COlnm~
fi ;':~{UJ.[]
1? L. .!.t_
'
,
'
•
Deulud'l1A' , G.entilhrQ'tl'll1 e _l}.'éto:lt paUlbrë
m~m€ "dlans les ~ fers ~'? \. ..\!':l ~,\ ',1\' r' 11';" ,
'l~;M'ais: pD; r4m<?-i hous~ ru;rêt'ei davÎPntagè '~. çIes
raits ,\q,éJ" ,1îufliTa,tnmént .'édàircrs & 'ôi'fé'utés d'ans
Je ~émàir~'J.Jn'P~im~~.det..la. Sy pp1faHtt: ?J '~ll~ . va
f~ l:ib ~~er.l ,~\ 1pl\0pofu. ~ 9tlelqûe.s obferv-a~on '; 'fur
c~ ' 'qÙl -fillt ". la r'1!latlere ,des ' Requêtes •. ' Ella
:1 •
�16·
de.mande la furféance fur di~ers moyens. Le premler de ces moyens porte [ur l'incompétence du,
Tribunal qui a ordonné le nonobltanc appet
~e principe de la matiere eO: J qu'ap-rès H<ip-,c
pel relevé, le premier J lige eO: entierement <té-< c
pouillé ~ & ne peut plus prononéer fur l'clICécuJ '
ti,on de fon jugel?ent. Nous avons étayé ce prinCIpe de la doétnne de Rhodier, & de cellCJ de I
Serpil1on. On dit des injures au premier & on :
tronque Je fecoud. Rhodier: a ~noDcé '. cI3{rem~nt .
la ma~ime, & cet Auteur eO: eO:imé. ' Ge t. llldi:
point en traitant fon fuffrage avec-· une légéreté
pe,u. décente, .que l'on peut fe promettre d~en di ..
tt.lmuer le pOIds & l'autorité..
Il • . /).
'" l A
. ~erpillon ~ut dû être · cjté ayecl plt;JS J de ',fidl.(}
lite. Il rapporte fur plufieurs objets, le .lèrltÎ- '
ment. de Joulfe dont le fieur Com~e de . Mira,b eau
veut ~ant.Je . pré;Vflloir., & il aj.€lUje ,: luiv:anLle)
mêm.e Auteur: r )) Si ,ul\e p'lrtie àVQit . 0~hlié db'
» .dem~ndero;~l'le J.~ Sen~en~e .;fu:r;. C!X..~ou!tée' 'p.a.q
» provlfion, elle pOUUOlt le.. demander. <après ' ~
)J SeDte~ce rend~~;. C
I: r fexplt ·au :mê.me Juge cà.
») ;~~nIlo1tre ...de. l,~)1Ç!.d~ijt~1 mê~l ~ansï le1 ~asl' ow
») . 11, Y aurOl~~âppel ,rpour'gl« ,Jiianmalslfjcte 'l"alppe~
» ne fot 'pOint .relevé; autremém d foudro.it r f1:t
» 1'.ourvozr. devqn~ -k ', J,t/fJe -d?appel, &: ifflfbit
» a fouhauer q~~ . Monfieur Jouffi cm, 'apporta
Ï }~elq.ue auto.rz{.e. Four[fonder ji9n,jeJliimèJi.
»r
~ reful~e deux çhp{eSj:de ,'ce.t.te: -dô.étrÎne,.de Ser':l
Plllon: la ,,PreUliere, flu.'H :penféit : que ~Jpullè:
,
.
n avolt
:,
,
il"âqOit pas éré.j fqu ~a r dir~' que Ie 'premi~r lugr:
put --0~~onber dre ~0t1Qb.Il~ ij~12P~h,. (iIH~n~ lfi.t
'P~inav~t.1t! T1e~er l~ ff~P-n?~ ~d14.. o~ ,c ~y, t
•. 1W:lfie l plls' ~U'C) IIQQifj::; eY,c:..!rft!G::HJ ::> q~ lwqf'rm q e
-I!â'I?p'ê~ )ar~e } 000 tld~~b fl~ f~jP<l.§ W1 • qn·
cIe à ce Œ{ue ae ' prém~r )' l!JQ~ lP1.3t p.r.\jn<?nq!f' ~e
fioMbVl:atu r '!Wel · . n~p<l)~S ~rE1ülQflw 1 ~ eûr
~O~te ' ~e<Mirab<r.l.u n~l sFW1rr~O{l,c rf~::, ~1ê~~
"~ev!Üdll( ldu (o.ffnage r ~ J9i-lff~ rf'oBUjjfsHJ,~ ~d§~s
j.Ililhe !J~poŒefé ..,~rlt.aJl.'pej:. dttpi 1 ~qlf,~orqP4 ~,Ae
· JloMb'lta'ut appe,1
été Q~qpgç. ;;,6')
'"
,
- .l0n ~ l ,b~au, di~e - q\l~ lq ~oll<j~~r}:hfw.Re!;~
- ~I drolt~~: llaJi1re cl:je1i?p.as.o.; ~,5.3!\) A ~~OH}dr~tf5 ~ffi'-
9H-
' ë0~~rf.é 1 ~h h ~aut..lCp~\rl ~ flra~~~~,m u~~
poL'luon -pa .t1chlirêre, !'oi,! i par ~e (tl10!l v:f!:Île ~ep
..rem:.e... Or oeil: cette , nou'vell~ ~ .t,e~ce . RI,Ü ,,!?e
p6ut., plus êtr.e . p.r01ldru:ée:nar J$! ;~,ugh aH'lM\.,ap' pel 'r~leV'él -dépG>ullle.. ' ; , ~i. :;~;.h -2 "J
.:;! . . "Noos œmanHoo ' Ji !:tP(~§ ' il'f\fQRe~, ~c~Ûe. ,, 4Fs
·1:pârti~s :'qoi ') eiXéèu'téroi-t i ~.r'0v,iIoire111ent Ai'~~
. téfute. fans ry j êrre- autor~{ée ., rn'atten!erois .p~sl à
}1atltbr~té de da', (3ouc. ;QQ. l~O~ L~APo ~r~~q ~il
. -y â~rôlt attentat. Dopçdar çop~ (!!jjt. l!lViIi(l.e r9?Pc
eI-le .... {eule ' peut prono>ocef'
le,'· b, ,~:; ~ .
Mais ~ ajoute-n-oil le) pr'emrer. Juge peut; FU
'. certaines matieres, ordonroer :;Je : PQ!1Qbfia.~t fl.prpel.. Qu'i~porte '{, IIIIe--pellJt ,;' tallt quc~J'a~e :e-f!O:
pas rélevé. Il ne faut pas donnêr en pr~,*V.~ l ce
qui eft e111 q'ueIhon.. :' -" ~
;, Ji
. Mais quoi )' dit-on encore, .eft-cf q~e le.. preC
�'l:S
1uief Ju~e D',a ' p,as. l~~xécutioli':~e ..fès 'S~nténc~s ?
"Eil.:ce que 1 txec.utlo'n ne hu en ,dt même pas
:réri oréé! p~r Jes: l~flet) âe laJ(1jur ~ l Dui ', mai~
lBmd Pàfipéi eft CY(filIélsn &{f\é ett ce 'p!nvqi !'111.ê.m~
-qUI prouvé 1Jûre, l'on atft'o.rhé ath [o~:en:d-u
iu[r
qu'à ce que le J~g,é rd'appeh~jt pr..ononcé. . ~ r
'" - ~ux moyens -de c:fOlfdle T [e l jojgn~nt: desl mo:ye1fi ~ bi~fJ:tpIi1s otmp~alf8: lnld uatu're!JiclLt fon..ds
' rie,powôiiJeolDp ~:c:è &) né'i~l>mporlloit ;: ifdtJs ~au.
~bu'n 'fapPoTi'~Itè ~iHiba~f~1 'pp.eP ~ IDârboid il {atit
mettre de côté toùt- l.'o qui r.ega~qe l~s'_ :matieres
~~~n,~~eY}~"t{~ CP~rt l ~P~l:I~e.. tous .ïes RégIe,rRen --; tbUS}e A J1eùJ1, "iutl~cll!n t de1~OClSJ 1~1l.i: i~5ëgl 7. :ce1ta~élli@~:tl ~1 "J r~rt.>\.tt,erad pasl'cclle
\Iut fa1l: ' 'l'ObJet-Udur: jltlge t a'ét:uikb -Il: ',était Idanc
~ mutile -de !faiWor~ér.J deSl rA UêCSl du Confeil.~ une
''f6tifé- lli? t1eéifi?rls êtfei'l~i:e:lhmreqt inappliCiibles.c
. Le , Sr . .Comt~ d~ Mira/Jdu fej~réplie l lllt j [es
~~foltl~r:c?s. :?~v~r~if.eg., (~~l ,prétenau;qu 'il lleo~~aglf
ron 1~ que -(le 1 eXWtftlé'>rrJdelJ foD') contrat, :d~ :Illa.
, rl~ge ',.1 &. .<tué 'la, -provifiml> dt tŒ<ljours' p.Q,l:J~ ;Ie
1r
;1 t1t:l 'llo~lôu~;
.)~~éJ qà -Sentèncé .du
l
nrr
LieuJ"a~nt
-qtl' un aébèUtem:eht ,0& .qu ll ,efr :cle rJa nao
ture de to~t déboutemètl tl~ ê.rre °exécut'é l1onb15[•
• tant ~âppel i attenôu] qu\l r[efoit ab[~rde ie i;d.
~' jU~fet- -_aerè§ te déhoutemei'1t, ce que l'on 'deman.
: i:l31t (~ r. cé' 'ijûe •l'tHll l:ltle' :polfUoit ,pas âup~faooIJ van t?"1 . lJ
~ ~"'~r)
/f .. ....
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, ,E;Il. v~rité,
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ce n'efr ici Iqu1un. tas. d',erre4fs,
d equlVoques
&. d'abus de mots. Rie,o 'n'efr plus
,
��,
•
22
•
fOJrement c0ntr'elle une clôture ou p'énaI~ ou in:
jurieufe. Enfin il feroit impolIible de la dép oU'ft...
le ~ provi[oir.ement d ~un rep?s qui lui 'eff garan ri
Ear~t~nt de tItres & par les- faiton ~ les ptàs ' Fortês
& 'les plus viélorie"ufes. '.
"
~ [ . ~..
Que l~ Sr. Co.l~ ~e 'Ide Mî; aheau' né fe , !gl~orifie
pas d' un triomphe momenrané, furpris à la religion des prem~ers .Juges ;. ta' Suppliante ofe fe
l
promettre de la Julhce de ' fa caufe un trfompn
plus d-urable & p ~us ,comp~ec. Elle réclame ' des
principes certains & con~lls ; e'lle expo[e de~ faits.
.& .d~s l?r~ uves ;. en faut. il ,davantage pour lui ga:rantlr la proteéllOn .des LOIX ~ dont vous Jêtes l~
.auguftesdép,ofitaires ?
' l "
l.,'
1
~.'
_ fJ
Ce ' coniidéré ,. vous p!air-a" N OSSEIGN'BURS ',
,fans ,s'arrêter à la R.equête contraire & ! echarge
< d~ ~" , Comte c; de MIrabeau, accorder à la- SIl,E. pha~te ~ ~s. ~ns_ de fa prerrtler~ Requête,' ci..jointe ,
& fera, jufiice.
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- MA~IG~ANE DE MIRABEAU-~
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Al!' Pà'Jl: Scr iptum 'i/nprimé à la
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âe Mr. de Mirabeau.
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N ~eft.. inflrui~ de,'tü.ut ce que j'ai fait pour
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1'préyenir u~ éclat. Des per[onnes refpecta,bl~s, pe.uye.l!t ,en rendre témoignage.
'
,1 L~ lendemain de la premiere Sentence, rendue
.par la S~n§cq,âuffée, ' je reçus un billet de Mr.
.d~ 1\1ir~keau~ " c;on~u en ces termes:
• J ,H _'L;éch~,ç, qU t .l ~ c~u[e de la Dame 'de Mi» ra,beau vient de ·recevoir, doit lui prouver
monde ~e penfe pas comme [es
.) ,qge. tOllt
)J
Coo[çils~, ~ ~ qu'ils p\!uvent Je l t~omper .,- Elle
» fera bienA t; ne: .pap fuiy~~ 17 chasrin 'de) 'a)) ~lour propre. Pour moi, qUl o'ài d~autre objet
. » que celui de finir, voici ce que je prbpofe :
» Si c'eft de bonne foi que l'on a des doutes
» ·fur ma conduite, j'au'rai Fëxtrêine ~ondeJceJ, » dt}nce de [ubir une épreu~e jufciu" ~ la (in de
» l'année, à con~ition que toutes les 'hofl,ilirés
» judiciaires cefferont. Je permets que Madame
» de Mirabeau refte chez Mr. le Marquis de
, » Marignane. ,Elle y 'recevra mes ' vifites ', qui
» feront. to'ù t-à-fait étrangeres à Mr. de Marin gnalle, tant qu'il ne voudra pas m'admettre.
te
�.-
Z4
» Si g~ boUl.É: ta,:n~~L of!. n.efl pas Content if.e
l)
l)
»
»
»
»
l'épreuve, nous rentrerons dans nos arôùs re[peaifs, q cOfldz' ion (lûe ltfadàp1eak Mirabeau
ne pow/a pfzls obJ'eaer ql1~ le~-.raltS qui (e font
p,aiJésr- çl1!~l:} '{1~~,f("~il!é~ ,e~, Pr.~~~nc~ ,..,&/l.l~'on
ne jè"a paroure li autres ecnts que ceux ~UL 0 1
déja été imprimés.
' 1
Ç'~toit, _\!? me renda.n.t e,n ~pp~re,nce I~ )iberté
cfe plaider ', m'ôrer "celle' d~ ,me 'lléfen"dr~~
me
réduire à renoncer à tous les fnoyéii's de 'fé aration, fi j~ ' perfia'?ls ,à del~ana~r d'être fêfarée.
" On remarquera encore qu'à, l'époqu~ ',tle ce ' bil.
let, Wn' y' aVaIt que les"MéiilOires & !ptaiâ~yef
_de Mf,' < d+e : Mi:~6èau ' qui euIrent é't é ftli'priinés~;
& ce font-là les fel,lls écrits 'dônt: on!'confeluoie
'la public"arion, 'fi ' le lproèès étoit continué •
. Je fis répondre 'à ' Mr. de MiraBeau ' qu'il rn'é'•
•toit àpparêmlnél1t =pas :~ccout~ù1é ;~, avJir des fué.
J~:~" J;~Xfqu'J~~.f~ 1ai~o~t ~'lfqrt ..,é.~o~~u~if-li:.i par
le. pr~~ll~r qu 11 ob el.lolt' ; ql,le J efperols, "'avarie
. !~ §? de .l',ànpé.e '. -:n ~voi!. ?e ,Plus dfeiuie1s, &
Jlue Je,;t~l .f!ro~ver~l~ qu"e Je ' f9avok en" uferfplus
mddéremt;~t. .
.
"
i/~ o~s ~1bfo~;: à' ~~. :,~e . ~i~abe,au i~ne- e;~trë-
"
vue, en 'p!e(~?ce ,,~e .temolns.
. . .(
" L'entrevue rut refu'fée. Je
reçus le nillet fui.
r
, van't: » ) {e cOlife.n.s,_que "Madame rte -Mi[abeâu
' »~ rel1e c~lq 1\1r: de Malilgnân~ juJqii'à nouveau
l)-fait, à' condition' que ''je ~er~i' adlIl!S a l'y vdir.
' Il Autrement clle petit Je retirer dans un Couvent
,
» a
,
1
1.
. .
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~
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acéepté- ;~ qu!ltOtal1\';qu~i' lle- feroit, qurUM formet<
moins <!fl1igean\~ . P.o u l". M ~.- ,de Mirab.eau _drus le;
€onfeittem~1t>, IqU!an! létalE : eI\ :.d~~oit 9Yei~gH ,de:
lui, à une 5fléparati:&lJnéçeililirélq,u:ibtà1Jbit :.&;ire.
au!ol'Oer roi JafiOOe. 2~) J l ' ~ 0'1'3 1 rOl e l
Ce parti fut ·ref~[é. Je fus .ÂIors forcée à pU'""
~iier. mon 'Mémoi.re; Mr., de Mirabeau prétend
quel jl!l rn'ai ~(~u Rqu~ le bui /':de '. .Ir! dé.shon:.m.rer,~
tout 'œ-qui ,s:'.eil:pailllë méJjimi1ie frUffifimmentde çe
Fèproche~ J nIai: youltà tiLle: 111e_ d~Jiendre. Mais Ji,
les ' faits J & .les preuves le déshonorent , fi les
uifs & Jes pœuves le CQllyrent~' igpominie. .,. pe.ü..trur:m.e : cpUdalllllel1 , io·r[q~~rje. de:manc;I. '6.li'êJ:v
.
e -le:
parée de lui?
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j-·ï~r·!i no MARIGNANE 1)E MfRAREAÙ.
J
4 ,.
1
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,
. , :.1 . . _ .......... I_~
.
•
-...
..
Su R la t!emande dè . Madame l~ Comteffe de.
MIR ABE AU, en Surflance..
.
Adame de Mirabeau' demandoit d'être autor.i{ée à
demeurer , provifoirement chez Monfieur le Maruis de Marianane. fon pere.
q Elle a éfé déboutée de fes fins provifoires. par Sentence
GU 24 Mars.
S
Madame de Mirabeau dé.cIaré appel de cette entence
M
a
le Elle
26. prétendoit ., au bénéfice de l~
r. cl' 1
.
d' ap pel ,
• ec aratl~n
• d'
le provifoire dont elle a ete déboutee. ,
s ar!~g~~mte de Mirabeau a préfenté le 26 r~quete en
nonobjlallt app el ; & le nonohfiant appel a éte ordonné
3
lè M I·a cl am e de Mirabeau demande
qu'il foit furfis à' l'exé.,
.
cuti9n . d.!! •cette Sentence.
Le Comte de Mirabeau fomient que cela ne fe peut
. ' ].,0., Parc.e , q~e la. ,Sentence du Siege n'eft, l.uant a. a.
pa:_
~he~ hAN-B.A. THA?-Ap"P. .MPU-Rr;T I.fil~ ,
'
Imprimèur du ROI. 17tf3~ _ '
j
•
')
�z.
'forme de fa prononciation &. qua~t au fond du Juge.;
ent qu'un déboutement. Or Il ell Incontellablement dans
na:ure de tout déboutement, d'être exécuté nonobllant
appel: car il [eroit abfurde de s'adjuger après le ~ébou
tement, ce <tu'on ne poiTédoit pas auparavant, plufqu'on
le demandoit.
zoo Si Madame de Mirabeau avoit obt~nu de .Mr. le
Lieutenant [es fins provi[oires, [ans d~ut~ Il aurol~ f~llu
mettre 'e n quellion fi la Sentence provl[ulr~ POUVOlt etre
exécutée malgré l'appe1 du Comte de ~I~a~e~u; p~rce
que cette Sentence auroit évidem~ent préJudlcl~ a f?n tItre
d'époux, titre non c~IJte~é. lV!als Madame de ~Irabeau
n'a ni titre contradiélOlre a celuI d~ Comte .de .Mlrabeau,
puifqll'elle ne lui contelle pas ~a ~uahté de m~1 '. Dl poiTeffion
l ' craIe puifqll'elle demandolt a reller provlfOlrement chez
Pere, où elle n'avoit été
que du Confentement exprès ou tacite de fon ~lan, de,mall~e dont
elle a été déboutée, Madame de Mt-raheau n aurOlt donc
pas pu prétendre, dans .le cas I?ême où fes fins provifoires lui euiTent été adJugées, a don ner, de [a propre
autorité exécution provifoire à la Sentence. fuppofée.
Combie~ moins . peut - elle, ap:~s fon déboutement q~i a
remis elle & fon époux dant 1 etat naturel de leurs titres
rerpeétifs, prétendre à déroger ~rovifoirement à' ces titres! prétendre.à s'arroger le droit de demeurer chez [on
pere malgré [on mari!
3°· Les Semences des z4 ' & 3 l du mois ne font que
donner l'exécution à un titre non contellé; mais dans l'ef.,
pece, ce titre eil: exécutoire, in~épendamment de la Sentence, puifqu'il n'ell pas ContredIt. C'e~, don~ en vertu,
de ce titre, pllltôt encore que par foumlfI1on. a une Sentence provifoire, que Madame de Mirabea~l doit demeurer
en fon état d'ép oufe. La Sentence a feulement -refufé' de
i:ufpendre l'exécution d'un titre Il on",c 0
fié.
,
4 °, Si l'on confidere la Sentenc~ ~1'elatlve.ment à la o .de-
~
~t fo~
jufqu~s.là
llt:
J
3
mllnd~ d~ Comte de Mirabeau, on ne peut nier qu'eIle
ne. lUI ad}ug~ une RÉI~TÉGRANDE. Or toute réintégrande,
fUlvant L arade .7 du lltre 1:J de l'Ordonnance & même
fuivant tO,ut le titre 18, eft exécutoire nonobftilnt appel.
Il eft defendu aux Cours, titre 17, art. 16 de donner définfes ou fu//iances en ce cas; & fi aucu';es étaient
inreTl1enues, elle les déc/are nulles, & veut Ijue fans y aVOHégard, & fans Iju'i! fait 6efoil'l d'en dem ander main levée
les S entenceJ fiient exéClllées nono6jlant tous Jugemens, Or~
donnances ou Arrêts COlltraires.
.
5°, Si l'on conÎldere la Sentence relativement à l'alternative propofée du Couvent, il faudra Convenir que c'en:
une forte de fequen:ration qui a été ordonnée: Or toute
[equefiration ell: exécutoire nonobftant appel fuiva!1t le
même article 5 du titre 17 de l'Ordonnance.'
. 6°., L'ex,~cu:i~n provifo~re de la Sentence du Siege ne
[aurOlt prejUdICIer au drOIt de Madame de Mirabeau ni
à fes mOy~lJS, quels qu'ils puiiTent être; tandis que' la
non exécutIOn de cette Sentence peut dans les circonll:an_
ces de la, caufe, porter ,un préjudice irréparable au Comte de MIrabeau, qui n'a pas ceiTé d'attribuer à l'ob[ef_
lion les
e démarches holl:iles de [a femme, & de prédire
-qu.'e.11 s ne feroie I,1t que s'aggraver; tant que Madame de
MIrabeau ne ferolt pas libre de ne confulter -'Iue le vœu
de [a raifon & de [on cœur.
7°· Enfin, on Comprend que 10rfqu'iI s'acrir d'une Condamnation pécuniaire ave'c contrainte par gorps, (loi fi
d,ur~ llSpa: elle'n;ê
me, & fouvent appliquée par des Jurifm
dIétlO Il1co pet 7nt es ) la faveur due à la liberté perfonnelle, & .la certitude de faire réparer le préjudice, s'il
en réfultolt quelqu'un, ayent dé,cidé les Cours [ouveraines. à acco>rd~~es Arrêts de défenfe, & . dës furféances ..
rvtals.
n'y' a· t-il
de dill:ance ge la caufe d'un
h6mme vexe par une Sellt'ence des Juges Conful~;, par
exemple, à la prétention 'c rune femme qui veut, en dé -
combI~~
~~
----~
j
1
1
1
1
�4
pit d'une' Sentence du p~emier Tribunal, &. contre une'
loi expreffe, refler féparée de fon mari, & ne le voir '
ni ne l'entendre, jufqu'à ce qu'elle fair- autorifée, ( fi elle peut y parvenir) par' la Cour .fouveraine, à demeurer
réparée d'habitation! . Certes il ne s'agit point îci d'une
Comme plus ou moins importante; il s·' agit d'un titre con·v enu; i~ s'agit du premier, du plus facré des titres, de
celui fur lequel la focieté entiere repQfe;. il s'agit de dépouiller pat le fait le CQmte de Mirabeau de. l'exécutiolL
d'un tel titre qui ne lui efl pas conteflé, que nulle
puiifance fous le Ciel n'a fufpendu, & que nulle puiffan ce fous le Ciel ne peUL détruire~
OBSERVATIONS
SUR
)
UN LJB-ELLE DIFFAMATOIRE,
INTITULÉ:
MÉ:M-OIRE A C·ONSUL TER
HONORÉ-GABRlEt DE IUQUETI,. COMTE DE
MIRABEA U, fils.
'ET
POUR MADAME LA COMTESSE l>E . MIRABEàU~
JAUBERT, Avocat.
. a..,.,.J...
tL.("-'-.V·..-, S ).
('.''<l'q;:~ i.."
cI<...'" t; •..;J
t.'_C o.,' f
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'l. .
':u v~e 17 y~ . J,...
t...._ ...u.....~.s.... ·""Ù
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c. lt.. . &_6~v-u..L J~: ~· 8<n.\""\..A..
l' ~ t,J~·- ...t..
e,..{ L.
s.......
tLl L
.fm;x-
u,-
f.fJ.:t: jU.'l~'
!
""-7 u.L1t::
dcn.:-'--
Je ne coanois le Droit ni la Coûtume,
Je n'ai pas "lu Cujas; mais je pré[ume
Que ce [ont tO\ls de mal-honnêtes gens •
V rais ennemis du cœur & du bon [em ~
Si dans Jeur Code une ftmme en çolere
•
""&L<""':? "dL ""[,<ro<.
Uo. l \", ••
~.
r
I HUlLP
L
CONS'U 'LTATION
CJ..-.-/
Pçut diffamer fin · mari l'arJ jiHJ pere;
"'-' ~ ~.tu.u<... S-...>
Et la nature & Yhonneur ont leurs droitt
Qui v.aJent. mieux que Cujas & vos lou,
,
lh....& a..-6LCo-W.
Voltaire, .
/
J
,.~~
:V&.l.l..~!!1
_-w- .
.
~
..
A AIX ~ chez
J
,
"
. du.
RQ1 __
JOSEPH DAVID, Imprimeur
1783.
A AI X.;
Chez
JOSEPH DAVID,
Imprimeur du Rot
M. DCC. LXXXI.q,
•
�A VIS.
J
'A vois promis dans le P of! (criplUm de ma Requête;
que ma réponfe au Libelle publié fous le nom de
Madame de Mirabeau, ne tarderait point à paraître.
J'efpérois alors que les lettres inférées par lambeaux dans
'Ce Libelle, feroient promptement déppfées au Greffe; j'en
ai attendu, follicité, requis pendant plus d'un mois la rémiŒon; & quand elle a été faite, Madame de Mirabeau
a "'annoncé des prGoès verbaux & des opérations qui ,ont
retardé la communication de ces lettres, & qui pouvoient la retarder plùs long-tems. C'~!l: Ce qui m'a fa't
livrer à la preffe, le 3 mai, ces ObCervations tout incom,plettes qu'elles fom, vû le défaut des communications
tant attendues. Depuis lors on a renouvellé & confidéTablement aggravé pendant deux audiences les diffama'tions c'omenues dans le Libelle. Le public preffent que lIes
,doive tH être & quelles font mes difpofitions à l'égard dè
.M adame de Mirabeau. Je les ai annoncées dans ma
Plaidoirie du 23, dont une partie fera bientôt donnée
:par fu,pplémem à ces obfervacions , : fupplément où l'on
,trou'l7era aoffi les fuppoÎrrions & les 'falfifications qu'on
's'ell perml[~s en lifant ou citant les lettres de mon pere,
lequel, ainli que le Bailli de Mirabeau mon oncle, eft
intervenu dans ce procès pour demander raifon & ven-geance de l'abus de confiance qu'on s'ell permis en di-.
:vulguant les confidences domelliques.
,
.
.. .
OBSERVATIONS
SUR UN LIBELLE DIFFAMATOIRE ~
INTITULÉ:
MÉMOIRE A CONSULTER ET CONSULTATION
POUR MADAME LA. COMTESSE DE MIRABEAU.
A
,.
'T etiam liueras quas me fihi mifiiJe diceret, ruùavit
homo & humanitatis expers & vitœ communis ignarus.
Qui.. enim unquàm Cj.ui paulùm modo honorum confue'tudinem
nofcet, tilleras ad Je ah , amico mifJas, offinfione aiiCfuâ ' interpofz.â, in medium protuLù palamCfue recùavù? Quid hot e(l
(JlIud quàm tollere t vùa vùœ focietatem? Tollere amicorum
colloqlll:a ahJentium? Quàm multa joca folent effe in epijlo!is
qf/œ prola'ta fint, .inepta efJe videantur? Quàm multa fella,
& ' tame{Z nullo modo divulganda! Su hoc lIlhumallltatrs tliœ;
jiultùiam incredibilem videte, ( Cie. Philip. II. 4°· 9· )
Ji
) , Quel homme qui n'étant pas dépourvu de toute
"'I?' honn"êr~té, Qe; toute hJ.tmanité , -de tn.ut refpea: vaut
~
r
J\r
ij
�5
4
poignarder; & la Nature a frémi. Mais je ne fais li l'on
a jamais vu le beau - pere fe rendre le délateur de fon
beau - fils par l'organe de fa fille, & fur les précendues
preuves acquifes par les lettres miffives du pere de fon beaufils. . • .. Que le lâc he qui ne préféreroit pas l'atteinte
d'u n poignard à celle de la calomnie lancée du fein de fa
pro pre famille; que celui qui ne fe fent pas plû tô t c"p.lble
de pardonner à l'alfaffin qui atttnteroit à fa vie, qu'au lib ellifte qui attaque [on honll eur, trouve ce paraUele
exagéré! je le lui pardollne. . . . . Pour moi la plume
me tomb e des mains & me refufe de l'achever.
Un M émoire a paru. Ce Mémoire figné Marignane DE
M [ RA. B EA. U , & viÎ1blement deftiné à flttrir ce dernier
nom; ce M émoire, fouillé des imputations les plus atroces, & cependant dépourvu cle faits; ce M émoire, où
l'on n'a pas même daigné annoncer une preuve; ce Mémoire eft un vrai libelle. Compofé de cent deux pages , il
en offre foixante une confumées en copit:s de let tres, au
nombre defquelles on en compte quinze de mon pere ,
imprimées non feulement fans fon aveu, mais malgré fon
cléfaveu formel (1). Ces quinze lettres, évidemment dic ..
tées par la colere d'un pere juftement irrité de l'inconduite de fon fils; mais qui, comme tous les peres, s'exagéroit & cette inconduite & fa propre indignation; ces
lettres renferment les dénonciations les plus cruelles, les
))
»
))
»
les hienféances" quel homme fe croira difpenfé , par une
méGntelligence imprévue, de teni r fecretes les lettres
qu'il a reçues? U Il procedé fi fauvage bannit de la yie
toute union, toute douceur, interdit tout commerce aux
» abfens, t oute confiance aux amis; c'eft le comble de
)) l'ln umanité; c'eft une incroyable extravagance. »
Voilà ce qu'adrelfoit l'Orateur Philofophe de l'ancienne
R ome au Triumvir implacable qui avoit divulgué fes lettres, & qui depuis le fit aifafliner. M J is Antoine les avoit
divulguées pour fa défellfe perfo nnelle, pour repoulfer les
attaques de [on redoutable a.dverfaire, de fon ennemi déclare; pour répondre aux Philipiques, à ces ha rangues enflammées dO Rt le -nom feul-efl:. devenu le fignal de la plus
terrible véhémence.
Il ne s'agilfoit pas d'appuyer fur ces lettres des accuCations capitales; il ne s'agilfoit pas de reveiller des procès
criminels, d'o utrager un ami, de déshonorer un parent.
Ce n'étoit pas un beau·pere, ce n'étoit pas une époufe qui
'S'armât du glaive de la diffamation Contre fon mari, contre fon gendre, contre le mari de fa fille unique. Antoine
ne produifoit pas les lettres d' un tiers; il ne s'efforçoit pas
de faire fervir les lettres d'un pere à la perte de fon fils.
L a Loi Romaine appelle [rues le pere & le beau· pere.
La Loi Romaine n'a point alfez dit. Les enfans des freres
ne leur font que neveux. Les enfans iifus du mariage [ont
des enfans communs au pere & au beau · pere; ils le [ont
bien plus, s'il eft poffible, quand le beau - pere ne peut
placer que fur une tête l'amour & l'orgueil paternel; quand
fa fille unique, quand le [eul être par lequel il puiife rev ivre, a fait de fa famille adoptive [a véritable, fon unique famille. Il eft peut-être inoui qu'un beau-pere ait, [ans
provocation perfonnelle, cherché à déshonorer fon beaufils. Dans notre climat brûlant, où coutes les affeétions de
l'a me tiennent de l'emportement, où les paflions s'exaltent
jufqu'à l'atrocité, on a vu le beau·pere & le gendre [~
( 1) O n n'a pas même daigné le di!Timuler. La leme de mon pere,
en date du 10 la nvier 178j à fa b. lle-fille, & imprimée par elle. porte:
Je 'Vous dis feulement. quant aux lettres, 'lue c'eft VN DEPOT DE
CONFIANCE Q.V ! NE DOIT JAMAIS SORTIR DV BVREAU
D'VlVE PERSONNE flONNETE. Et dans (a lettre du 15 Février, que
l'on a perfidement, mais mal-adroitemcm paffée (ous lilence : ma fenft/'i/ité jî" fes torts s·eft même quelquefoÎJ peut-être exprimée d'une manie"
'''''gérle DANS LE SECRET DE MA CORRESPONDANCE DE
FAMILLE.
J
�6
tpithetes les plus outrageantes, les faits les plus contraires
à la vérité; parce que mon pere était loin, en les écrivant, de la liberté d'efprit néce{faire pour la difcerner .
parce qu'il débitait tous les ON DIT dont on affiigeoi~
fan cœur paternel, les ON DIT dont tant de bouches téméraires ont dans cette Province été les échos· les ON
DIT, qui to,us peut·être y étoient nés, &. de ~uelques
lins defqu~ls J'y trouverai certainement la fource : de forte
que mes diffamateurs, en attefiant les lettres de mon
pere, n'attefient le plus [auvent que leur propre témoignage.
Mais enfin ces lettres [eroient véritablement la profeffion
de foi ferieufe &. réflechie de mon pere; elles ne feroient
pas d~menties ,par fon défaveu, par fes démarches, par
les faItS pofiéneurs ; elles contiendraient autant de vérités
qu'elles contiennent de faulTetés démontrables jufqu'à l'évidence , qu~ ce fer~it encore le plus lâche des outrages
que de les hure publIee par la femme qui porte mon nom .,
~ malgré mon pere, qui auroit eu horreur de foupçonne:
d'un fi criminel abus de confiance, un homme d'honneur
lln ,homme qui n'étoü pas moins que lui le pere de fo;
pem-fi15. Ces lettres feroient tout ce qu'elles ne font pas·
elles [eroient appuyées de preuves utiles, ou même néce/faire~ à la caufe; ,de nature à être légitimément employées : que ce 1èrOl!. encore ~Il procédé fon odieux, que
de, repo?dre par une telle dlffamatio~ auX- défenCes plus.
qu honnetes, plus que meCurées, que J'ai fait paroître.
Eh! qu'ai-je fait, qu'ai-je dit, depuis qu 'il ea quefiion
d,e ,ce ~~tal"p:ocès, ,~on,~ ~n ne, doi~e ,pa,s me favoir gré?
J al prIe, J al ~upphe" J al patiente; J al reçu les injures ,
avec calme, Je les al redre{[ée.s ayec modération' j'ai
loué mon beau·pere; j'ai vanté ma femme . • . .
l'ai
fe~emandée à la vérité! Mais ne le devois-je pil S devant,
Vleq &. les hOJ1JalC;~? L'ai-je fajtavec hru[querie ~avec hau;,
J:
7
teur (1), ave~ précipitation? Où vouloit-on que je vinlfe
montrer ma régénération, fi ce n'était dans ma patrie?
A quels témoins devais-je mes premieres fatisfaétions, fi
(1) Il
Mi, .bea"
.pparence
on trou ve
n'en pas encore une {eule des écritures pour Madame de
où la véri ,é ne (oie outragée, même dalls les détails Cil
les plus indifFérens. Dans le puft fcriptum de {es requêres
ces mots: le lendemain de la premiere Smtençe rendue p..r
/a S'nicha1llfèt, JE RE('~US UN BILLET DE M, DE MIRABEAV.
Cela n'en pas vrai, Voici le fait. V n parent commun voulut bien
{e charger de pro poli tians de paix; & pour être plus religieu(ement
fidele à (a mifIion, il demanda qu'elles fuffent rédigées par écrir.
Mon papier n'a pas dû rener chez Madame de Mirabeau; aufIi l'a[-on défiguré.
Voici mer prupojilium Ic/les 'lue je
Lu ai écrites.
Le.! 'Voici telles qu'olt /es Il r..pporrées.
Je n'ai jamais deliré & je ne delirerai jamais que de finir à l'amiable l'étrange procès auqu el on a
pouffé Mada me de , Mirabeau. Elle
ne (aurai, :e difIimuler que le premier échec que "'i0it (a caufe ,
L'échec que la caure de la
Dame de Mirabeau vient de recevoir, doit lui prouver que tout
le monde ne penCe pas comme
{es Con(eils & qu'ils peuvent {e
tromper. Elle fera , bien de ne
pas Cuivre le con{eil de l'amour
propre. Pour moi qui n'ai d'autre objet que celui de finir :
voici ce q lie je propo{e.
Si c'd! de bonne foi que l'on
a des doutes {ur ma conduite.
j'aurai l'extrême condefcendttnce
de (ubir une épreuve ju{qu'à la
fin de l'année, à condition q ue
toutes les hofii lirés judiciaires ccC{eront. Je permets que Madame
de Mirabeau refie cbez M. le
Marquis de Marignane. Elle y
recevra mes ",/ites 'lui feront
tout - à -,fait étr~ngeres à M. de
Marignane. tant qu'jl ne voudr~ ,
prouve qu"'on peut ê(re d'une autre
opinion que (cs Con (cils. Il eft temps
enCOre de finir un éclat trifte &
{cand.leux; & il ne {eroit pas (age
de n'écouter en certe occalion que
le chag rin de l'arr.our propre. Pour
moi qui n'en metc(aÎ jam ailii d'autre
11. ceci q uecelui rie finir: voici ce
que je propo(e,
Si c'en de bonne foi qu'on a des
crainr-:s · (ur ma coudùÎ(e , j'aurai
cet excès de déférence de me (oumettre à l'ép,eu,'e du rclle de l'année; (ous la condition que toute
nofiilité. judiciaire cerrer~ de part &
d:aut<C j que toUte publication ~'é.
�s-
ce ~~ét?it. à mes compatriotes? Quelle contrée a plus de
drOIts a 1 ho mmage de mon repentir, au redrelfemenr de
mes erreurs St de mes torts, que celle qui fut le berceau
d~
crits qui n'one point ~l1 co re p2ru,
fera lùfpend u ~; qll~ li après le terme conven u je n'ai donné Ilul fu jet de plaime . ma ~mme me (era
tendue ;. ~ <j'le da"s [Qus les c as
per(onne ne poorra oppo(er que des
faits qui Ont ou q.ui auront eu lieu
depuis mon retour en Provence.
A ce prix je confens que Madame de Mirabeau refte chez Mon1i~llr fon pere, -pourvu que je fois,
admis ;\. l'y voir durant tOUt le
temps de cetre épreuve do mdhq ue
(bIen enrendù qae je ne prétends
voir qU'file , aulli IOl1g .. emps que
M. de Marignane refu(era de me
recevoir ). & que mes engagemens,
rell:enr daos les mains de M. le Mar_
qois de . M arign~ne. pourvu q ue (00
acceptatIon lignee & ga rantie de Ca;
p arole d'honne ur refie entre les mains,
d u ~cteur .des paroles re(peéOves.
A AIX ce vingt· cinq Mars mil (ept
cent 'luatre-vingt.trois. Le C omle de.
Mirabeau fils,
(.) P
~~.
Jl«juê".
.
A" bOlif d6
1'''11111. on n'tjf pas conlent d6
"rprCRve , nfJN.I rmtrerHlJ
dAn! nos
droits rtfpeaifs , à condition 'flte
MAdou de Mirabt"" .nt pOltrr..
plNs obleatr 'fltt lu flf1ts 'Iii; ft
[om paf{és d.puis mon IIrr;vù en
P~01Jmct, & '1":on. ne ftra P'"
rO"re d'aulru ecrIts '1H' cu/",
'fui Qm dlja éd imprimis..
~. (e~~d ~crit q u'oll appelle aulli Wu (j. reçuI ft billt'~
t",ant~ , ItAIi~hté e~ plus.grave . . Il ell: li peu vrai que j'aie tracé
fi
le 11
-pas m 'admettre. s i
\! de
.Quant
he
p~u
mots que I on a un pn mé (") comme- un billet à Madame
e. Ira ~~ '
ce ne fat que par complairance pour la per(onne'
qUI VInt
. S ~ AR! demander à mon oncl~ des propolitÎons nou~e~es , q ue dJ~d r~dJgral celles q ue j'ol1 rappone; 1erq ue/les fu rem re_
u es avec e a1l1, ·Mon oode n'en fu t point .découta ~ . &
urmettre le comble aux procédés il ACCE nT A l' b' g 'd
po
(;<!nülsho
d
.. '
,".
ar mage e q uatre:
m~es e rabbe ou <1 epée , qu ",n Ilers ami commun l ui co,.
pofa , '" qU1 ne fut refufé que lor(qu'il l'eut acÇ~pté.
p
lue
•
9
de mes peres, où tant d'affaires m'appelloient d'ailleurs l
Où j'étois le gage néceffaire de mes créanciers trop nom.
breux? Comment étoit·il pomble que j'y vinlfe, que j'y
'd emeuralfe fi voifin de ma femme, fans lui offrir le tribut
de mes premiel's fentimens? Ai-je fait autre chofe? Loin
d'attenter à fa liberté, je n'ai demandé que celle de la
voir, On me l'a refufée; on me l'a refufée avec outrage;
on a repoulfé tous mes VŒUX; on m'a déclaré fans détour
qu e j'étois POUR JAMAIS profcrit du fein de ma famille
adoptive; que mà femme m'étoit POUR JAMAIS ravi~ . . . , . Et ce font eux qui fe jaétent DE LEUR MODERA TION! Ce font eux qui fe plaignent d'être forcés de rompre le filence !- . , . Ils font f orcés ! • • , Eh !
qui les a forcés de refufer toute conférence, toute conciliat.i on; d'accumuler outrages fur outrages, de publier pour
premiere produétion un tilfu d'horreurs &. de calomnies,
Ce ne font pas :es feules fa u!Tètés à relever dans ce pojf fcripmm
donc tou s leS" failS font inventés ou d énaturés.
Madame de Mirab ea u n'a fait aucune propolitÎon qui ne fût p récédée de cette cond ilion ; M. de Mirabeau prendra lm expédiem de
condamnation. Mada me de Mirabeau n 'a offe rt a ucune entrev ue fan s
fpécifier q ue Cet expédient en feroit le réfu lrat. Mad ame de Mira bea u
a envoyé à m idi fOIl Mémoire à m on onde, & l'a fait reJemander
à trois he ures. Je ci,erois des témoins, li je pouvoi s fuppo(er que
mO Il oncle en eût beCoill. Il fit rendre ce M émoire fa ns allCline réponfe.
Je le crois vraiemen t. Eh ! qu'auroit.i1 pu dire de celui q ui livroie
les Iw res d' un tiers , qui re ndoit un pere délate ur d e (0 11 fils , qui
:ar moie (a fi lle con tre fon gendre? Qu'auroit.i1 p u d ire d ' une femme
q ui tra hilfoi, les fecrers de fo n bea u. pere pour d iffamer (0 11 m ari ? ...
Mon oncle ne répondit r;m. Et ce Mémoire n '~,oi t-il pas déja imprimé ? Et la moitié de la Ville ne l'avoit· elle pas v u ? Qu oi! j'allrOls
eompoCé par la crainee d'un infame libelle ! Ah ! pui fq ue la paix était
impotTtble, je n'avois qu' un d d ir à for mer , c 'dl: qu'il fùt p ub lic enlin ce Mémoi re tal![ a nnoncé. que je puffe le débattre. & faire retomber (ur la tête de mes diffama teurs tOUC le poids de leurs calom.
nIes.
B
�10
de m~ poignarder de la main d'un pere irrité? .- ; ;
font forcés! • • . • L'honneur peut-il [e croire forcé à des
moyens odieox! . . . . Ils [ont forcés! • . • • Ah! que
ne fe croyent-ils auffi forcés de me donner la mort! de
m;;trracher cette miférable vie qu'ils me font haïr! Ils Ce.
roient au comble de leurs vœux, [ans doute - & moi je
ne fouffrirois plus.
'
.
. ~is hél~s ! je vis, & mon honneur en attaqué. Que
dl-Je? CeluI de mon pere l'en peutê-tre davantage : car
r'l(. 60 du on le montre tout à la fois Comme le délateur de [on
L,b,lIe.
fils, comme infidele à fa parole, comme parjure à [es
aveuglément entraîné qu'il en par la foif de
Pag. 7 8. [ermens,
l'
C
or. 'eft la fortune de [a belle-fille qu'il convoite - c'eft
P.~. ,t. [on Itonneur, c'eft fa fo i de Gmtilhomm e qu'il a ~iolés
pOl~r al\0uv!r fa cup.idité. (1) 0 vous qui n'avez 'pas
craInt d afflIger la vlellelfe & le génie! vous qui rou.
nez dans le cœur d'un pere des blelfures fi profondes! ..•
voyez-vous ce chêne antique & fuperbe. Il ne tient à la
terre que par de foibles racines. Son poids [euI l'y atta.
che encore. Il n'étend plus dans les airs que des branches
dépouillées; mais quoiqu'il vous paroilfe prêt à tomber
fous le premier effort des vents; quoiqu'il s'éleve autour
de lui des forêts d'arbres verdoyans & robuftes, c'ell:
ns
II
encore lui qu'on révére ••••. (1) Ah! c~oY,~z-moi: le
énit: dédaigne long-tems de Ce venger; maIs sIl fe réCout
lancer un trait, il tombe de toute fa hauteur & retentit fur la terre.
Mon honneur eft hle1fé; celui de ma famille eft atta·
qué; & je garde le fiIence ! Et déja les hommes honnêtes
m'on dit: TU DORS, BRUTUS; TU DORS.
Pardonnez ô mes concitoyens ! mon foib~e talent eft
& n'eft que dans mon ame; & mon ame ~rOl1fée, .meurtrie déchirée mon ame a ployé peut-etre un lOftant
fous' le poids d~ la douleur. Mais à la voix de l'honneur
elle fe relevera, n'en doutez pas; elle reprend toute [a
vigueur.
f
Je vais démontrer que l'emploi des lettres de mon pere
eft on crime, que rien ne peut atténue~, & q1jle l'attrocité de leur révélation doit les faire reJetter du procès.
1.
Je vais démontrer que la produétion des lettres de
mon pere ne peut avoir d'autre objet que de me désho·
norer par lui , (ans utilité pour fa belle - fille. Que ces
lettres ne prouvent rien de ce qu'on a prétendu prou~er
par elles, & que leur _infuffifa~ce, ~utant que 1 atrocité
de leur révélation, dOIt les faIre reJetter du procès.
(t) " Que (one devenues les paro les d'honneur & de Gentilhomme
" li (ouvenr données ~ Madame de Miraboau ? ,. pag. 60 du Libelle.
"
..
.,
"
"
..
>,
"
" La fam,lle de. Mtrabeau Il'a poinr diŒmulé (on objer. Lor(qu'en
1781 M. do Mirabeau pere commenyoir à jerrer les premieres idées
d'un projer .de réunion, •.•. la letere qu·tl adreITa pour lors à la
Dame ae Mirabeau . . . '. (e rédui(oir en derniere analy(e il lui dire:
donnez-nous un (ucce[[eur qui puiITe nous aITurer vos biens.... Ce
(ont ceux qui renoienr ce langage à la Dame de Mirabeau uni.
queme~t pour leur pr~pre intérêt, qui &c., pag. 7i du Libelle.
" Serolt-ce à ce~x qUI manquent publiquement à des paroles d'hon~
~IU Ile de Ge?ulhom me , qu'il appartiendroit de réclamer les prin..
elpes de la déliC3tc/lè Ile de l'honneur ? Pag. 9 1 du Libelle.
Je .vais enfin rétahlir les faits perfidement altérés ou
(J) Qualis frugifero quercus (ublimis in agro,
Exuvias veteres populi, (acrataque gdlall< ;
Dona ducum; nec jarn validis radicibus IlXrens ,
Pondete lixa (uo ell; nudorque per aëra ramos
Elfulldens, trunco, Ilon frondibus eiIicit umbram.
At quamvis primo nutet ca(ura (ub ellro.
Tot ci,c~m iilv% lirmo fe lobole 101le11l;
Sula lamen colilur.
B ij
JI 1.
Lucan.
l,
�q
' 1 2-
calomnieuCement inventés, qu'oA il ofé publier pour m~
déshonorer. Je vais répondre aux futiles ohjefrions qu'on
m 'oppofe.
PUMt!1U
PAl\TU.
Demandez à tous les hommes ce qu:ils penfent du procédé de la divulgation des lettres: tous frémiront à l'idée
d'un pareil abus de confiance, parce que tous y verront
leur fûreté compromlfe; &. ceux même qui ne compteroient pour rien la probité, la morale, la foi publique ~
privée, calculeront du moins leur intérêt.
Quel eft donc le principe de cette opinion indélibérée,de cette opinion univerfelle que le feul inftinét de l'homme
éveille? Cherchons - la pour nous affurer fi l'indignation
générale qu'excite un procédé de ce genre, ne feroit pilS
l'effet de l'erreur ou d'un vain préjugé?
.
_ T oute chofe confiée dans l'intention qu'elle ne foit p'as
révélée, eft un SECRET. Cette intention doit toujours
être refpefrée, parce que recevoir une confidence, c'eft
conrraéter les engagemens qu'elle fuppofe (1).
Si cette définition ne refte pas intaéte, fi fa conféque-nce
~'eft pas un axiome inattaquable, tous les engagemens qui
hent les hommes font diffous. Car fi je dis à mon voifin:
J'APPORTE LA pAIX, &. qu'il entende ou feigne d'entendre: JE TE DECLARE LA GUERRE; fi je lui dis:
JE ME LIVRE A TA FOI, &. qu'il veuille traduire, JE
TE PERMETS DE ME MANQUER DE FOI : nous
ne parlons plus le même langage. C'eft la confufion de
(,) " Quand le {er~ent en (du (ecret) {eroÎt retranché, j'ore avan.
" c.e r que nous n'aunons pas la liberté de violer le {ecret. Nous fenons un
.
L · ·
.
" .
. '. parJu~e uc mOI,ns; ~~lS nous commettrtons toujours une
" tnfidéht~, & ~ dl: ce qu un verHable homme d'honneur ne [e per.
" met point, meme pour [auver [a vi: l'. Traüé de l'amitié, liv. ~.
pag. '57.
.
.
.
la Tour de Babel; c'eft le fignal de la difperfion des hom!.
mes.
.
Lès Roinaindirent une Divinité du fecret (1), &. nouS
en faifons du moins un devoir facré; non feulement parce
que le fecret eft le premier reffort en affaires, parce qu'il
eft le fondement de tOute bonne conduite, de tout fuccès,
de toute confiance; mais parce qu'il eft indifpenfable à
tout honnête homme, parce .qu'il eft la bafe de la probité
la plus commune; puifque dire imprudemment fon fecret
c'eft SOTTISE; mais révéler celui d'autrui, c'eft PE~~
FIDIE, c'eft CRIME.
.
Qu'eft-ce qu'une lettre miffive? C'eft le dépôt . çl~s fen~
timens, des penfées, des fecrets de ,~elui qui l'écri.t. -C'e!l:
UN SECRET ET LEPLUS ·SACREDES SECRETS (z);
car celui que ma bouche feule a confié, n'a laiffé dans
la mémoire qu'une trace invifible &. fugitive. Si la perfidie
vient à le décéler, je puis défavouer le perfide. Mais
'Iorfque l'écriture a donné la vie à mon fecret, lorfque le
papier qui le contient eft forci de mes mains, ma confidence eft fans retour; ma confiance eft dônnée toute
~ntiere; je me fuis livré fans précaution &. fans délenfe à la
perfidie; je me fuis interdit à moi-même jufqu'au défaveu
du perfide.
. '
.
U ne lettre, à moins qu'elle n'énonce la permiffion d'être
divulguée, eft donc un dépôt facré. C'eft un dépôt dont
la fufcription indique le dépofitaire. Ma fignature &. le
nom de la perfonne à qui j'écris, forment entre nous deux
(,) Tacita.
(1) " On ne peut douter que le {ecret ne Coit un dépôt; car le:
..
"
,;
"
•
,
dépôt n'dl: autre cho{e que ce qui dl: confié à la foi d'aunui'. St
le Cecret ell: un dépôt, je doü le garder. {ans pouvoir en f.ire au.
cun ufage. Je viole le dépôt fi j'en ufe. Nulle occ.lion, nul. prét~xte ne peut m'en donner le droit; jufques.là que ceux qUI ont
fait toute lellr étu l e du fond de la juflice naturelle, four ce de tou.
�·
14
un triuté qu'e é é 1'1
fieindre (1). n g n ra 1 ne fauroit nous être permis d'enUne lettre eff un dé ôt d
écrite. Et Comme perfotne n'e~ penfée11de celui qui l'a
on ne peut, en violant ce dé c.ompta e de fes penfées,
mettre un homme dans le cas ~~t p.ar. l~ur .publication,
a pu penfer dans tel ou tel
voU" a J~{hfier ce qu'il
~et afpeét eil donc un délie ~~~er' ~a dl~uJ~ation fous
Une lettre eil un dé ôt
. , nut!.e qu odieux.
celui il qui il eff Confié .~l e~~l nAappa~tlent ~ucunement à
Cette lettre n'eil com~un~
me~e n y avoir aucun droit.
~ qui elle eff adreffée, que ~~~~ u?~tuteffur & ~a perfonne.
q e, e. e defflnée à renIermer la preuve d'un en
partient à celui à qui el1rg~~en~ reclproque. Elle n'apcnte. que lorfqu'elle ne
e
------
" tes les loix , ne feignent point d
.
,. du dépôt: il fa Ît, dirent· ils un veoltrdaltel~ ~e voleur. celui qui ufe
a f
(1) " Le d epo
' liKaire doit polTéde
'
-d. 1-b-d
à 1 e U.3_'" e· • (Ib1
1 .).
" ollice di de renh:rmer JI ne d - r. a manter. du cotfre. Tout fOI1
l"
Olt • ou"nrf. flue
.. C1lcE.• Il faut
que tout• autre qui
0' _ pour ce /UI- qUI. a la
" mot, il n'y a qu'une bon
veur y OUIller, le bri~. En UI1
d' bli
ne mantere de polTéd 1 d
>'
ou cr q U'OD J'air pour ne '
fc
_
cr e épot; c'ell
;, le rendre.
s eD Ouvenu que lor(qu'il s" gir de
" Le fecret dl un dépôt dao.
•
li bérer que ce1UI• qui Yous l' • vous
'
1 ne
- peut vous
,.
-1 CICS chargé ,nu
" le {(cret t'Il feale en droit d:
;. d~~e peto;lne de qui vous tenea
" Une rupcure même (urvenue entt e
r . a a~lgu:.
.. rre qui éloigne J'oblj acion d lë
deux amIs n
point UI1 ci.
S
» deues en fe brouilJant avec (0 u e~ret·o 01) n 'dl pas quine de {(s
o d Olot , .pour ainli dire , nla creancIer
•
.. _ III
le-,
.
., caIO de la mémoire où l'on ne get"_
_(ecret d autruI dans un re.
" lible, (e le cacher à lë
ê fodulHe JamaIS. Il (aut, s'il dl pof01· CD me
ans la
d'é
.. tH"~ 'lucl"1ye avaneage. S'cn
.' 1 c~~lI1t_e . Ire tenté d'en
" on le lient, ou pour (a [Opreva ou ~u prrJudlce de celui de qui
.. dont on JI'di pas pro - , p. pre UU/He, ce (eroir urer d 'un biel1
A
7:
en
0
0
,. DE LA VENGEANdn;;~~;À g~yRPATION QUE LE DESIR.
" N'_EST PAS CAPABLE D'EXCUSERM~.NEL PAR LUI. MÊME .>
&
v.).
f U1
. ( Des Mœurs> pag.
Jn
t)
contient rien que celui qui l'a écrite ait eU intention ou
intérêt de cacher; ou lorfqu'elle ne renferme que de~
chofes indifférentes à celui qui écrit, à celui auquel il
écrit, & parfaitement étrangeres à tout autre.
Si le viol d'un tel dépôt pouvoit être excufé, la foi-bleffe ne rélifferoit plus à la tentation fi ordinaire de J'amour propre qui afpire à montrer tout ce qu'il fait 8(
que les autres ignorent , tout ce qu'il poffede exc1ufive~
ment, ou tout ce qu'il poffede aulIi bien que fes rivaux
de vanité. La perfidie trouveroit fous fa main l'arme la
plus facile, la plus irrélillible , la plus fûre contre les
CŒur!> fenfibles, naïfs , confians ; celle qui lui garantiroit
à la fois, le fuccès 8( l'impunité.
_
Ull fecret confié par écrit doit donc être d'autant plus
facré qu'i! feroit plus facile de le violer. Le délit de di..
vulguer un fecret écrit doit paroÎtre d'autant plus odieux,
d'autant plus vil, que la lâcheté Cuffit pour le commettre.
Mais plufieurs circonffanoes peuvent le rendre plus infarne,
plus atroce, plus monffrueux.
Il n'eff> en général, qu'une manlcre de juger fainement
de nos devoirs 8( de nos afrions : c'eff de les conlidérer
fous les rapports de la deffination de notre être, 8( .dans
leur relation à l'utilité générale &. particuliere. En tout
genre, en toute chofe, L'ufage contraire à la .dejlinaûlJn eft
ahus. Plus l'uCage eff -éloigné de la defiination d'une choCe y
plus grand eff l'abus. Un délit eff grave , eff repréhenfihie, eff puniffable en raifon de ce qu'il eff plus ou moing
contraire à l'ordre, à l'utilité, -à la deffj'nation des êtres•
Mais ce qui rend ATROCE un délit, c'eft la qualité
des perfonnes, c'eff·à·dire, le rapport qui nille entre ceo:
lui qui abuCe, & celui contre qui il abuCei
Que l'on divulgue fans fcrupule des lettres qui ne contiennent que de petits faits, que de petites nouvelles, que
des complimens frivoles; cette liberté feroit au Ploins ap~
�1'7
16
l'ag. , . du
Llh<JJc.
'peIlée manque d'uCage du monde, ignorance groffiere des
bienféances > qui apres les Loix régiŒent la fociété.
Détourner des lettres plus Cérieufes de leur ufage ; les
employer, contre leur dellination, à diffamer un tiers
ou celui qui les écrit, c'eft toute autre choCe fans doute,
c'eft un délit très-grave.
Mais que des lettres qui roulent fur de grands intérêts;
fur de véritables fentimens , fur des fentimens profonds,
fur des épanchements de confiance; que des lettres d'amis
ou de pareils qui ne fe déguifent rien, qui fe difent tout,
& tout avec [urabondance; que des lettres qui [ont de
nature à diffamer les tiers les plus proches, à compromettre leur réputation, leur fûreté , leur honneur, puiCfent être divulguées, imprimées, répandues malgré celui
qui les a écrites; que les lettres du pere [oient employées à outrager le fils de la maniere la plus cruelle, à
le diffamer par d'affreu[es calomnies, à reveiller contre
lui des accu[ations capitales! .. l • • L'imagination glacée
d'horreur croit errer dans le champ de la fable à la
lueur du flambeau des furies.
On publie> malgré mon pere, des lettres écrites par
lui à mon beau-pere, qu'il regardait comme [on frere ,
auquel il tenait même par des liens encore plus étroits.
On publie, malgré mon pere, des lettres écrites par lui
à fa fille, à ma femme; des lettres qui, de [on av.eu ,
contiennent Its plus FUNESTES ET LE~ PLl!S TERRIBLES CONFIDa-{CES; des lettres DEPOSEES DANS
LE SEIN D'UNE EPOUSE TIMIDE. Mon pere devoitil, pouvait-il fe méfier d'eUe en lui parlant de l'homme
qu'il _croyoit le plus chen à [011 cœur ? Pouvait-il fe
méfier de mon beau-pere, qui, Celon toutes les probabilités humaines, ne fauroit revivre que par moi ju[qu'au
moment où, retranché dans la tOmbe & gardé par la mort,
je n'aurai plus rien à craindre des djffamateurs 8{ de leurs
calomnies ~
calomnies? Mon Fere pouvoit-il en écrivant à fa familfe
fe méfier <le lui-même? Il a dit qu'i l épanchait fOll ame
dans celIe d'un ami, d'un frere , d'un ellfant ; qu'il parloit de moi fuivallt les craintes qu'on lui avoit infpirées,
8{ qui lui fai[oient ajouter foi aux moindres bruits qu'on
répandoit, que tant d'int·éreŒés répandoient fur mon
compte .. , . Il a flit ccla. Mais qui ne comprendra pas,
(ans qu'il le dife , que [on cœur profondement bleffé,
faign ant, ulc~ré , ét oit bien plus féduit encore que [on'
imagination, quelque ~ xaltée qu'elle pla 8{ dôt être:
par toute forte de malheurs & par des circonftances qu'une
invincible deftin ee [embloit avoir ourdies pour 1l1'en~
traîner à ma perte ? Ne [ait-on pas que la fiévre la plus
violente, produit moins de délire que la colere d'un pere
irr ité? Plus il aime, 8{ plus il eO: furieux de voir Ces
eCpérances trompées ,. reculées, perdues. Plus il aime,
8{ plus [a cré~ulüé cft avide. Plus il aime, & plus il eft
inacceffible à toute obCervatio n, à toute réflexion, à.
toute modération. D ans un e fituation fi violente tous les.
oc je ts fe défigurent à [es yeux. Les vrai[emblances s'al-,
térent, les ab[urdit":s. difparo iiTent, les nuances [e confonè.:nt, les couleurs s'exagér.ent..... Non, mon pere ·
n'eft pas l'auteur des écrits qu'on lui attribue. La colere
feule les a dittés ; & 1'0 11 ne peut fans une maLlvai[e foi
i,nfigne 8{ cruelle, choifir lX citer ces emportements de'
la paffion , ces délires t.rap excufables du co ur vo ux pa ..
ternel , pour les monumens où feroi ent confi gnés les o pinions durables> les vrais fentimeni d'un pere connu par
(es lumieres ,. connu par [on génie, connu par fà termeté ; 8{ dont la· conduite pofté-deure 8{ des lettres fup é~
rieurement penfées, des lettres également nobles & w u-,
chantes, ont démenti dans touS les points les rê ves de!
f p colere.
Si ces fatales lettres contenaient véritablement les api.,
n,IOns de mon pere, les divulguer feroit rrahifo n> pu-·
C
.
•
�19
18
fi die, attentat envers lui. Mais li ces lettres ne font que
répéter des calomnies qu'on lui a écrites ou ~ébitées; li
l'on fait, fi l'on prouve que tous les faits que renferment
ces lettres font faux ou exagérés , comme mon pere l'a
reconnu lui - même, implicitement par les faits , ex pli citement dans des lettres qu'on fe garde bien d'atterter ,
parce que ce font des calomnies & non des vérités que
l'on ch erche; je. le demande aux ho mmes qui ont quelqu e
candeur dans l'ame : exagérai-je un tel procédé quand je
!'appell'e une ATROCITÉ INOVlE ?
Quelles [ubtilités , qu ell es dillinéti o ns , qu els foph iîmes
déguiferont cette in fam it: ? Qu elle plume venale fe cha rgera de la colorer?
Sans doute celui qui n'a pas eu . h onte de n'o fer ligne r
le M émoire qu'il Droit éc ri re , va [e préfem er dans la
lice, ou du moim il y j t(cra fes produétio lls avortées ,
& fes fr oides antith efes , & [es dillinétions vuid s de fens
& [es déclamations glacées,
Ah! n'envions point à nos Adver[aires un te! écrivain,
& montrons-leur une fois dans tOUte {a dignité le défen,
feur que la nature & l'honneur me donnent,
Voulez-vous connaître le véritable vœu de mon pere?
Voulez-vous entendre par (on organe la voix de tous les
honnêtes gens fur la divulgation des lettres ? Lifez la
derniere lettre qu'il a écrire à M, de Marignane, lorfqu 'il
ft pu croire qu'on fe propo[oÎt d'abufer de fa confiilnce,
•
»
»
»
»
»
»
»
De Paris le 12 avril 17 8 3
» J'ai voulu douter jufqu'à préfent, Monfieur, de la
vérité des avis qu'on me donnait, que je devais être
compromis d,ms les moyens qu'on employeroit pour
appuyer la caufe de Madame votre fille, & fan refu~
de fe réunir avec fan mari. Je trouve aujourd'hui dans
une réponfe qu'elle a faite à mon frere, de quoi confirmer cet avis; & j'ai peine encore à croire ce que
j'ai lu.
• l
» QUOI. c
.
'ell vous , M 'o n fileur , q lOd croyez pOUVOIr
é <1.
'1
confeffions d'un pere allarm
"'"
» révéler au pubhc es f; , un titre contre fon fils cou» irrité, pour vous den ;~fi~s dont il pouvoit être, alors
» pable, ou non, es
1 eut faire à la quelllOn de
ac cufé? Qu'ell-ce que ce a dP "a fiemme 7 Et n'ell _ce
))
l ' 1 fé pare e l,
'
» fçavoir fi la al
1
té & de prudence que vous
1) pas en pure pe.rt~
~ ~Y~oi une aétion fi peN digne
» commettriez vls-a.-vls ~'m
lé & évité touS fujets de
}) de vous? J'ai tO~Joursl 1 ull u
la mefure des procé'd
"vou u corn b ler
,
,
d e cordialité. Je ne vous al
» me plam re: Jal
l> dés d'honnêteté ~ mee~ee de nos enfans communs, J'ai
Il v~ que comme \, e P es droits pour ne vous par~e~
b
Il bIen voulu, ou
l~ ~e m'occuper que de vous f~Ire
)) que des votres, ,
d'h i répondre à tant de deféIl refpeéter. Ell-ce aUJour
u
,
.
& d'éO'al'ds 7
,
» rence
0
'M
depuis le jour fatal ou vous
» o~s le favezfil ;;ur votre gendre, en rompant
» preferares mon ,s 1 c un autre ( & ce ne fut pas
1) un engage,m,em, pns aV~e n'ai- 'e pas fait
pour écarn- à ma folhcltatlon ) , ,q d
J bi 7 Quels avam30'es
d
ous tout ftqer e trou e,
, ~,
» ter e v "
h ché dam v o tre alliance? Qu al-Je
» perfonnels al- Je7 CA er s des droits Clue me d onnaient
' é de vous
L1cun
, l '{ré
'[; s de Provence. Je vous al al
» eXlg ,
» n?s 100X &. le~ u d1g~ des revenus de Madame vorre
» dlfpo~er des °r~ s Quand elle ell venue à moi, ma
» fill~ a v~tr: ïté' ouverte fans réferve, fans payer (~e
)) mal~on 1Q 11 dife fi elle y fut traitée en fille che» p,en IOn.
ue e~e a voulu aller vivre avec vous,
)) ne.
qU,and
l ' a l Je empec hé e,7 Quand elle a defiré de garder--"
,
1) ~ en fil~ au res d'elle, malgré 'les ,me,fu,res que ) a,vOls
â
y
A
~: p~~es
~:C~~l I~l-~e :é~i ~a~~e !e~
pou!. fan é,ducation,
» fils le feul efpOlr de ma
'
'l' des fêtes'
'cl
al' r on é~rangere au ml leu
,
}) mains, . ans une m l'
.
,,'
' lailTé échapef
1) &: loin que ma profonde affi~lOl1 ait C i j
•
�20
11
» la moindre plaInte, je n'ai fong é qu'à confoler la
) mon gendre, Be aux témoignages du repentir de mon
" fils accompagné de bonnes réfolutions pour l'avenir.
)1 Je ~ous promis alors que, de mon aveu. il n'aprochera
» mere. dans fa jull:e douleur. Elle voulut alors (& les
» premiers mouve~ens .font équitables ) fe venir jetter
l) dans mes bras: ils lUI furent ouvert, toujours & dans
» tous les tems , & en toute occaCi on. J'ai veillé à Ct:
» que rien ne troublât [a vie; & tou t li:: m onde ell tél) ma in, que tandis q~le j'étais a cca blé fous l e poids
» des malheurs domelhques, elle vivait en paix & en
» allégre{fe.
1) J 'ai puni mon fils quand
j'ai o!"u que ' je le devais.
l) Je l'ai pardonné quand j'ai cru qu 'il [eotoit [es to rts
» à la priere ardente de [a Cœur & de [on beal.l-fre r ~
) qu'il avait offenfé , qui pouvo it cro ire le remettre [ur
» fan. chemin; en [li pp ofa n ~ de vile. idées, qui prefqu e
» touJo~r~ e.ntrent dans toutes. les défu nions ; qui enfi!1
» ne lUI etolt pas auffi proc hain que fa femme , & q ui
» me demanda it à l'i nll:ant mê me de vivrE ave c lui &
» de l'emmener chez lui. J'ai voulu le reme tt re à portée
II de réparer [es torrs: il n'en avait pas de direéts enve rs
» vous ni envers [a femme. Je l'ai enfia envoyé à fan
) oncle, dans ma maifon, à portée, il eft vrai, d'em» ployer les moyens de regag ner l'affe étion de fa fem» me & de méri ter le reto ur de v os b ontés paternell es
» par une conduite fans reproche, fous vos y eux.
» Pendant les temps malheureux de fes écarts , je VOLIS
» avais confié en tou te [écurité tous ~ es rapports qui
Il m'en vena ient. On [ait qu'il en ell qui fe font t ro uvés
» faux, d'autres exagerés. Mais en vorre qu alité de pere
» de Aotre cnfant qui exiftoit alors, vous deviez tout fan voir paur tOUt parer, pour tout couvrir. D'ailleurs
» MonCieur, moi qui étais grievement & per[onnelle~
» meot offenfé, je vous donnais l'exemple de cacher
» ~utant ,qu'il était en mon pouvoir, nos playes dome[:
» tlques a tout le refte du monde. Je vous ai rendu un
» compte exaét de ce qui s'ell: pa{fé. Je vous ai dit
Il. comme,nt j'ai cédé aux foIlicitation-s de ma · fille & de
-
.
)) jamais de M adam e votre fille 9ue VOliS ne l"ayie{ ordo nné
» ou permis. Vous ne répondites rien à cette lettre. Je
» dus croire que fan contenu , vous était indifférent. C el> pendant je lis dans la lettre de, Madame votre fille il
» mon frere, qu'vil a ma n9ué de p arole , &ç. Et qui fom1) mes-nons donc vous & moi, MonCieur, pour qu'un
)) tel langage pui{fe [e trouver entre nous? Des paroles
1)
données? & qu'ell:-ce que je vous devais? Quelles
» conventions à cet égard avions-nous faites en[emble?
)) Si par un excès d'égard pour vous & par une fuite
Il des fentimens qui doivent toujours être entre des perl) [onnes qui ont des rapports
indeltruétibles entr'elles;
1) j'ai exigé de mon fils qu'il n'employât que la foumif» fion' & le re.[peél: vis-à-vis de vous, les [oins, l'em() pre{fement & la tendre{fe auprès de [a femme, êtesIl vous en droit de vous faire un titre de mon honnêteté
1) qui [ousentendoit de votre part
des difpofitions pa» te ruelles ? Vous avez évité prudemment de vous en
» expliquer en ne répondant pas à mes lettres; & il
)-) vous a plu de me regarder comme lié fans aucune
» réciprocité d'engagement de votre part.
» Mon fils n'en a pas moins tenu fa prome{fe. Vous
» avez dit à mon frere, que fi Madame votre fille vou1) lait
rejoind,re [on mari, vous ne vous y oppofiez
» point, quoique prêt à la défendre Ci elle refufoit. Voilà
» {ionc votre permiffion donnée; & lui libre de témoil) gner fan empre{fement. Je n'ai été témoin de rien;
" mais tOIlS les rapports. s'accordent à dire qu'il n'a reçu
n de votre part que des rebuts & des in fuItes. Tout fe
) tolére d'un pere à un fils; mais il n'en eft pas de
» même entre des hommes de niveau dans la fociété:
» & votre défouci de toute affaire épineufe ne [auroit
» vous juftifier de manquer gratuitement à .un homme
�22
» qui ne fut inférieur à perfonne quant aux procédés. Si
» je parlais à un autre que vous, je lui dirais que c'ea
» être trop peuple auffi que de s'expofer à marcher fur
» les traces des infenfés qui ont ofé imprimer des libelle,
)} contre moi. Si je crus alors indigne de moi de def» cendre dans la boue pour les y repoufTer, &. fi je les
» abandonnai à leur J?ropre délire qui les a conduits à
» l'opprobre; qui vous dit que je dois obferver la même
» conduite avec un homme qui s'ea mantlué pour la pre» miere fois à lui-même, &. qui me chai fit , moi, pour» fecvir d'exemple du danger de fe fier à fa foi? »
» Mon fils a 34 ans. Il m'a repréfenté que je ne pou» vois plus long-temps captiver fa volonté &. fes fenti» mens vis-à-vis de fa femme, quand rien de votre part
» n'équivalait à la gêne que je lui impofois; quand fes
» égards ne lui attiroient que des mépris publics ; quand
» on fe refufoit à toute conciliation, à toute offre, à toute
» épreuve. Je lui ai rendu fa liberté entiere. Je ne fuis
» point à portée d'en diriger l'ufage, ni d'en répondre.
» Mais je répete avec toutes les perfonnes impartiales.
» que tout ce que j'ai pu dire, écrire &. penfer ,de mon
» fils, tout ce que j'en penferois même encole, fuppofé
» que je fufTe dans le cas, quoique pouvant -niluer fur
» l'opinion de fa femme &. même du Pl,blic (fi devenus
») des délations ces témoignages ne co:maétoient dès-lors
» une forte d'impuifTaoce) étoit abfolument étranger à la
» caufe préfente, de laquelle la Loi ftriéte &. rigoureufe
» écarte tout objet étranger. »
» Si vous perfifiez donc, Monfieur, à révéler les co n.
» feffions domeftiques d'un pere livré alors aux plus vives
» allarmes, à riclamer des paroles que je ne vous devo is
» point, que vous n'aviez pas acceptées, qui ne pouvaient
» s'entendre que comme l'expreffion d'un efprit concilia» teur, qui ~ous ~afTuroit fur les entreprifes d'un jeune
» homme qUI aVal! montré de la fougue, qui vous pron mettoit enfin ce ~ui vous a été tenu pendant deux ans
2~
» &. demi écoulés depuis cette é.poque,
1
do~t fix
moJs fe
» font pafTés dans les mêmes lIeux que vous hab.ne z ;
») (&. cette fa'ge conduite durerait encore, fi on tl'avolt pas
he rché à le mettre au pied du mur par des procédés.)
»
c
' l'Ivrer a,
» Si vous perfifiez , dis-je, Mon fileur, a' vou l Olr
» l'impreŒon les tri fies dépôt~ de ma confi~nc~, fachez
ue les Loix m'autorifent à en demander Juftlce : &. fi
» q
.
1
'e
fais vous n'en aurez pas molOS paru pour a
J ne le ,
»
br
» premiere fois, mais bien décifive, en pu lC, pour ap)) prendre il tous les hommes il fe tenir en garde contre
» leurs propres vertus, &. ~ontre la ~onfiance aveugle
» en celles qui ne furent palOt éprouvees. )~
» Eh! Monfieur, où donc allons-nous par cette funeft~
» voie? Quel avenir efi-ce donc que nous préparons a
» nos enfans? Efl·ce à nous il fomenter leur~ paffion~ &
leurs averfions en faifant de nos préventIOns le meme
:: bruit que l'âge' fougueux ferait de fes illufions les plus
» ardentes? Où allons-nous, encore un coup !. Tous les
» ménages que nous avons fous les yeux fo~t.Jls fans al» tercations? Furent-ils toujours fans orages. Supp~fo~s
» Madame votre fille féparée ( ce qui n'eft pas lopl» nion de ceux qui y voient fans paffio~) fi mon ~Is c~n
» tinue il fe. bien conduire, chaque Jour rét~bhra 1 un
» &. gatlchira l'autre; ce qui n'eft pas égal. SI mon fils
» retombe dans des écarts, elle aurait & la gloire, &. la
» liberté &. le concours. Quelle différence! Efi.~e à nous
» il voir cet avenir avec indifférence &. à nous lalfTer égal) rer par les échos du jour? Vo~s ne .v~ulez pas mes conn feils; mais je fuis d'âge & d acquit a vous en donner
» fur le point qui me concerne, &. fort au-~eirus du .tort
» 'que vous pouvez me faire, en vous en falfant un Irré·
» médiable il vous-même. »
» J'ai l'honneur d'être; Monfieur, votre très-humble, &.c.
» Signé pour copie, MIRABEAU.
A Dieu ne plaife que je dépare une telle lettre par me'
•
�25
24
foibles commentaires. Et quel plus noble Playdoyer pourrois-je tracer! Quel langage fera mieux entendu des honnêtes gens?
M ais fi le droit nat'urel, la morale, la convenance des
procédés qui conilitue l'honneur, nombrent jufqu'aux IlUanc~s les .plus légeres qui difiinguent le jufl:e de l'injufl:e, la
(eparauon marquée par les Loix ne l'cil & , ne doit l'être
qu'à ~rands t.raits. ~Iles auroient été inintelligibles pour le
~ulgalre, fi ell~s n eufTe~t parlé que le langage des am'es
timorées & déhcate~, Alnfi les Légillateurs ont d6 pofer
des bor~es qu~ tous les yeux pufTent ap'percevoir de loin
& de bien lOIn, afin que chacun fût averti.
L'homme qui fe contente de refl:er en dé ça de ces bornes de peur de fe ~riÇer contr'ell~s. échappe aux peines.
pr,ono~cées par l,e Legillateur; mais 11 peut être encore à.
mille lteues de: 1 ho.nneu r.: & ce n 'eft pas la feule délicatefTe des ~ens de ,bien qUI l'a décidé ainli. Les Loix même
en ont fait un aXIOme. NO/1 omne 'luod prohi6itunz tielt/lin
ejl. TOUT CE QUI N'EST PAS DEFENDU N'E'iT
PAS POUR CELA PERM IS.
L ~ur(' ç
T!5,
&
miffi.
n' , 3. 4
fui.,.
Le procédé de la divulgation des lettres pourrait donc
ne pas encourir une punition dans les Tribunaux & cependa~t être fort mal honn ête., Mais nous ne failo~s point.
U? traité de morale. Nous plaIdons; & l'opinion des hOIl~etes gens ne nous fuffit pas. Invoquons donc celle des
liv~es de Droit; & montrons que la divulgation & l 'empl?1 des lettres d'un tiers non c.ol-lfentant, eil un crime
meme aux Y,e~x des J urifCOllfultes & des Tribunaux.
Les Aut~rJtes s'offrent en fO,ule. Denifart dit formellement, ». q~'ll eil des cas où celui à qui des lettres miilives
» font eCrltes , ne peut les meure au jour jans crim e fur » tout lor/tU 'elles ont clé écrites avec myJlere & 'lu 'elfes REN-
FERMENT DES CONFIDENCES. LE CRIME EST
» EN/ORE PLUS GRAND ,ajoute-t,il, LORSQU'ON
)J, D.:.VOlLE LE SECRET D 'UNE LETTR E, DANS
» L'UNIQl!E
J)
." EUNIQUE BlIT DE FAIRf. INJURE. A L'AU» TE UR , J)
•
L'injure dl: double dans l'efpece: car elle p(me à la
,fois fur mon pere & (ur moi. L'injure cil double & gra.tuite: car les lettres divulguées feront d~molltrées entié,rement étraIlgeres au procès en (éparatioll. r
,
» Dans ces fortes d'oocafions, continue ,DeniCart, la
, )J .J.ufiic~ a JPlIjOllfs ordonné que les leuJ'es mij]ive.s j~,o iefz~
» rendues, 'luelrJue J'elalion 'lu'ef/cs pr~lJe!l1 aV<J ir à l'pJ/tjir;e.
." S Of!. matif a été 'lue le dépô./ du fierez o:Ya,!r été vioLé<, ~'l
.» ne de vait y avoir aucun égatd.
Catelan rapporte un Arrêt de 1666, qui l'a ainfi jugé
~eo matiere l;>énéficiale. David oppo(oit ~ Buffer.al)t deux
lettres que ce dernier avoit écrites avant le procès com~
'mencé au Procureur CabroJ, &. quel 1i>ayid avçu 'trouvées
parmi des papiers que Cabrol lui avait remis. Ces- lettr'es
étaient décifives ; elles prouvoient clairement que Bufferant étoit coupable de fjmonie, &. aifuroient par là le
'(uccès d'un dévolut jetté (ur (on bénéfice. Le Parlement
-de Touloure, au lieu d'y avoir éI}ard, ordonna qu',eIles
feroient rendues à Cabrol. Et voici la raifon que dorne
'de cet Arrêt l'Auteur récent du répertoire univerfel dè
·Jurifprudence, qui confirme la doéhine de ceux qui l'ont
précédé, & qui atteile comme eux l'unanimité de la
.Juri(pru.dence (ur ce point: ?' IL LUI (au Parlement de
.) Touloufe) PARUT TROP DANGEREUX , D'AS» SEOIR UN JUGEMENT SUR UNE LETTRE QUI
» N'AV OIT PAS ÉT~ ADRESSÉE A CELUI QUI
» VOULOIT S'EN PREVALOIR.
Ou M. de Marignane a remis celles des lettres de
mori pere qui lui {ont adrefTées, & qui font imprimées
..dans le Libelle, 011 il les a LaifJé trouver. Si c'eil le ha·
fard qui les a fait tomber dans les mains de Madame
,Mirabeau ' , comme il envoia les letu"es de Bufferant
..tians les mains de David ; qu'elles (oIent rejettéés de
'le
- .
1)
Voy, part, Il.
Tom. 1., liv •
9 , chap, 4·
Au mor LET-
TRE S, p. '5'"
�16
m~me
St. fans héfiter , puifque l'emploi de lettres ou.'
trageantei ou délatrices eft mille fois plus odieux dallS
un procès entre deux époux, que dans tout autre débat
judiciaire. Si M. de Marignane les a remifes • . . . .. je
m'abfiiens de qualifier fan procedé, mais je n'ai rien a
changer à mes principes l & tout le monde fentira quels
avantages j'ai de plus que ceux de Bufferant contre fan
rival: cruels avantages que mon cœur détefte quand ma
-plume les invoque!
, Jnmnal des
Une déc/fIOn femblable 3 celle du Parlement de Tou.:
tom. loufe a été portée en matiere criminelle par un Arrêt du'
1 • • , . , C,lI, 9 Mars 1645. Les lieurs Davoux, Doiffeau & Guibert
{e prévaloient contre rA vocat le Mazier , d'une lettre
écrite de fa part aü' l1eur Jouhye qui la leur avait remife.
L'Arrêt ordonna QU'ELLE StROIT PRÉSENTEMENT
RENDUE ET RESTITUÉE A LE MAZIER.
1
Denifart cite un autre Arrêt du 14 juillet 1717 par
lequel J) la Cour a renvoyé de l'accufation un Curé d 'Or» léans, Cinquel fan Evêque avoit fait faire le procès fur
» le fondement d'une lettre qu'il lui .avoit écrite conte» Dant des difficultés (ur la Bulle Unigenitus.
,'
S'il étoÎt vrai que celui à qui une lettre eft écrite, en
pût être regardé comme propriétaire, & n011 comme dépoûtaire; s'il pouvait lui être libre d'en ufer à fan gré
10rfqu'eUe compromet celui qui l'a écrite, affurément
fEvêque pouvait former cette prétention. Et qu'on ne
dife pas que c'était ici matiere de confeillon. )) Le Curé,
» ajoute Denifart , difoit qu'une lettre n'étant qu'une
,» efpece de converfation écrite, dans laquelle , felon les
» maximes de la 16i naturelle , il doit être permis de
» s'exp~ique~ avec une certaiAe liberté, on n'avait pu
Arr~t de Ca- » fans InJUfilce abufer de la confiance & de la lincérité
«
1.0
r.
11es 1'1 s'é
' exp l'lqU é. «
chap,' \.11V, , ' J ) avec 1elque
tmt
_ Ce font donc mes frin;ipes que l'Arrêt de 1717 ii
confactés. Cependant 1 Eveque n'~mployoit qu'une lettr~
A·t,m"
"
1.7
ecrite à luÎ-mi!me; 'Sc ton emploie, a\1 'nom de Madame de Mirabeau de! lettres produites par ' un tiers!
L 'Evêque pouvait dire, oomme un ancien , (1) AMI
JUSQU'AUX AUTELS i & l'on ne fauroit nlleguer ell
faveur de Madame de Mirabeau, je He dis pas le devoir,
la décence, l'honneur ( il a fallu lés fouler aux pieds t
pour former le' feul ' projet èle divulguer )es 1ettrés de) d~~{~1~~~ir~~
mon pere) , je' dis l'utilité dé fa caufe.
'1
Un Arrêt plus remarqnable encore .a été rendu le I I
Ao{\t 1760 au rappert de, M. Pafquier. !JSelon Denifart l
cet Arr@t jugea : » que quoique les preuves réfu1taHtes
» des lettres écrites par un fieur Everat à 'fan fils, fufI'-ent
» très-concluantes contre eux, on !le pouvoit cependant
» les leur oppofer; parce qu'il étoit évident que ces
» lettres avaient été interceptées par les lieurs Boifleve
») qui les produifoient, & qu'il n'eft pas permis d'em:}) ployer de pareilles voies pour fe pr6cur.er ses ~itres ' &
» les oppofer. »
,
'
Il eft vrai ' qu'i~ èft', quefiion ici d'intereeption. -Mais
outre que je ne fais par quelle voie les lettres de mon
pere, écrites à des tiers, font tombées dans les m'ains de
Madame de Mirabeau ; outre qu'une libre carriere eft
ouverte à mes foupçons , puifque ' Madame de Mira,beau
s?eft refufée à m'apprendre quelle eft la fource de ces communications -immorales; aucun honnête homme n'ofera
d~ci,der lequel , eft le ' plus odieux d'une interception de
léctres., ou de l'abus de confiance qui fait livrer par le beauper~ l~s révélations domefiiques du pere CÔ'1tre fan ~ls. Code crimi o.
~ . Serpillon.a dit qU!! dans un 'procès - crimfnet même, [o m. 1., p. 9 1'
les , p,apiers ftcreu
d'u'n acwJé ne pOl/Truient Jaire preuve.
Quels papiers plus Jecrets que des lettres ' miffives ?
~
..
__------_________~o~~.~~~,~,~
. -~ç~'~il~'~'~l-_iS~'-'~O~"~
-
( 1)
Pçriclés,
~.
J
. "r
1
!
•
.11-
'1. ' 2
'D 1'}
•
& ') 17,
�~hr, «im io.
rom, J, P 6 t1.
zS
Selon Joufl"e enfin, » il n'dl pas permis de Ce' Cervir
iffi
)) de lettres m Ives pour établir une preuve , lor/que
)) a lui auquel el!. s f01l 1 éc,ites , ne peul les mettre au jour
Il fa ns mail qua li la bonne foi.
V oi' les principes, v oilà la (a inteté des principes
réfumés en un mot: car c'ell une loi du droit des gens,
c'eft une loi facrée parmi toutes les Nations, que celle
qui a rendu le fecret inviolable; & c'eft à cette loi que
s'applique la J urifpludence univer(elle en cette matiere;
Chaque Arrêt de ce genre crie : l'homme qui abufe
de 1. confiance qu'on llli témoigne, qui divulgue le (ecret dépofé dans fon (ein , cet homme eft très-co upable;
& quand on veut qu'un fecret trahi devienne une preuve
contre celui qui l'avoit confié, on veut donc que la
J uftice autorife la perfidie !
_
Chaque Arrêt en cette matiere répéte : de tous les
fecrets le plus rcfpettable ell celui des lettres miffives. Il
ell de l'intérêt du -genre humain que leur fceau foit :
inviolable. Une convention tacite: des peuples ne permet de les ouvrir qu'à ceux à qui elles s'adrelfent.
Publier celles que nous avons reçues, les publier pour
nuire à celui qui les a écrites, ou à quelque tiers qui_
lui foit cher &. facré, c'e(l l'abus de confiance le plus
criminel; & les Tribunaux le repoulfent avec horreur,
parce qu'ils ne pourroient tirer des preuves d'uDe attion
criminelle fans applaudir au crime!
Chaque Arrêt confacre cette regle que l'intérêt -public
auroit diél:ée à tous les Légiflateurs, fi la droite raifon
ne l'eût iDfpirée à tous les hommes. Cette regle eft également facrée , foit que la lettre ait. été produite par celui,
à qui elle étoit adrelfée , foit que le dépôt t1u (ecret ait été
violé par un tiers. D'où il fuit que pour admettre ou rejetter la preuve qui réfulte d'une lettre miffive, il ne
faut pas feulement demander à qui cette lettre étoit
adretTée, mais par quel moyen & dans quelle vile elle;
1
19
.
a été produite afin que fi c'eft par une ~rahifo~ ; par
la violation du fecret, ou dans des proJets haweux.
on la rejette. Car il vaut mieux, il vaut mille fois mieux
s'expofer en quelque matiere que ce (oit à manquer de
preuves contre un accuré qui peut n'être pas coupable,
que d'autorifer au fcandale de l'honnêteté, au détriment
de la fûreté publique, une p,erfidie manifefte. L'intérêt
public & l'intérêt particulier ne demandent jamais, ne
peuvent jamais demander que les prt:uves acquifes I;>ar
des voies honnêtes, parce que la fûreté publique eXIge
avant tout que la trahifon foit bannie de la fociété; parce
que l'honnêteté, ce fentiment qui ell l'ame de la Jùftice
& l'Interprete de la Loi, l'honnêteté ne veut pas que'
pour découvrir des preuves contre un accufé on autorife
la perfidie parmi les hommes! •... Voilà ce que Joulf~ ,
a renfermé dans ce feul mot: IL N'EST PAS PERMIS
DE SE SERVIR DE LETTRES MISSIVES POUR
ÉTAaLIR UNE PREUV~, LORSQUE CELUI AUQUEL ELLES SONT ECRITES NE PEUT LES
METTRE AU JOUR SANS MANQUER A LA BONNE
FOI.
Ce même JoulI'e, le plus eftimé des Commentateurs; Tom , l"pm;
regarde la révél~tion d'un fecret 'comme UNE ESPECE dd i~u~ rcetà
DE FAUX TRES-PUNISSABLE; & c'eft avec raifon, du fa ux, pat
puifque abufer d'une lettre , détourner un écrit de fa parité 6l"' 1\.
,·
-J ft
.
filOon aux yeux, d u molOS
' a. pag, 1 •
d eft lOatlOn;
",-e
mentir,
l'efprit. Suppofer , donner à pen fer , donner à croire quele contenu d'une lettre dittée par une intime confiance,
eft une profeffion de foi defiinée au public; que les
épanchemens d'un cœur agité qui déborde, font une opi~
Bion avouée & invariable; c'eH une véritable falfication:
& c'eft fous ce point de vue fans doute, que les crimi-.
naliftes confidérent l'atte de divulguer une ' lettre miffive,
lorfqu'ils le traitent de délit, lorfqu'ils le déférent à la
vengeance des Loix. Mais, qu'on parcoure les ouvrages
'. :!
�31
3°
de -tous teux qui ont décrit & cIaffé les crimes; qu'on
çxamine toutes les hypothefes fur leCquelles ils differtent;
que l'on compare les exemples qu'ils rapportent avec
çelui que mon procès otTre aux yeux du public; & que
les fe[tateurs les plus tQlérans ou même les plus prévenus
dlJ fyfiême de défenfe de Madame de Mirabeau, fe demandent s'il efi un feul de ces exemples dans lequel la
divulgation des lettres ne fait pas infiniment moins coupable que dans les circonfiances du procès.
Voyons donc comment on a effayé de colorer un procédé prefque inoui, même dans les Recueils des Criminalifies.
Au premier bruit que l'on devait fe fervir pour Madame de Mirabeau d'un tel moyen ,_mille voix fe font
élevées, & l'on a entendu s'écrier de toutes parts: QUE
Pag. 31 du
Libdlt. PEUVENT DONC PROUVER DES LETTRES ÉCRITES PAR UN PERE PEUT -ÊTRE INJUSTE ET DU
MOINS IRRITÉ CONTRE SON FILS? C'efi là le
propre aveu du LIbelle. Mais comment effaie-t-il de répondre à cette quefiion foudroyante?
(tic!.
)} Elles peuvent prouver , dit-il, qu'il (eroit affreux
» que l'on vînt faire un reproche à la Dame de Miral) beau de l'impreffion profonde qu'elles ont faite dans
l) fan ame: que la famille de Mirabeau devroit refpeEter
JO des répugnances qui feraient dès lors fan ouvrage; &
» que cette famille auroit perdu le droit de forcer la
l) volonté d'une époufe dont elle auroit par fes manœul) vres féduit l'efprit & flétri le cœur.
Quel j:U'gon! quel prétexte! Be quelle jufiification!
On demande : qUI! pwvent prouver les leuns de mon pere?
Et le Libellifie répond gravement: elLes prouvent que l'ef
prit de Madame de Mirabeau a été féduÎl & (on cœur flétri
briferont touS fes liens! Ainfi tout mari qui aura été cà'
lomnié devra être féparé de droit, fi fon épou[e fut cré<lule! Si même elle jouait une fauffe crédulité pour de!>
calomnies répandues p<1r fes émiffaires qui auraient abufé
la famille de fon mari!
Si Madame de Mirabeau reconnoît la féduélion, pour",
quoi ne fe fouftrait -ell,e point à fon empire? Si, de fan
aveu, fan cœur fut FLETRI PAR DES MANOEUVRES.,
comment ne fe fouleve-t-il pas d'indignation à la feule
idée des calomnies qu 'on s'eft permifes, contre l'homme
dont elle porte le nom, & qui lui fut cher? Sans doute le
mari eft le défenfeur naturel de la femme; mais fans doute
auffi la femme eft le premier témoin, l'éternelle caution
de l'honneur du mari. Le cœur d'une époufe doit en
-être le fanétuaire; il doit une invincible réfiftance aux
calomnies, aux délations, aux MANOEUVRES. A L'Univers Jéduit, Madame de Mirabeau devoit oppofer Jon eflime ,
fan efiime, tant & fi tendrement exprimée. Elle le devoit,
Ji eHe m'a aimé, comme on n'en fauroit douter, à moins
de l'accu[er de la plus effrayante duplicité; elle le devait
par amou'r propre, puifqu'elle m'avoit juré un amour éternel, puifque je lui appartenois, puifqu'elle M'A VOIT,
CHOISI. Oui elle m'AVOIT CHOISI; 8( fi l'on ne
cherchait pas à fauver à tout prix l'inexplicable , la
révoltante contradiEtion qui fe trouve entre les Centimen~ que peignent les lettres de Madame de Mirabeau ,
-& ceux qu'ofe lui prêter une plume, qui ne fait que
difiiller le menfonge & le fiel; on n'aurait pas effar.é
d'empoifonner aux yeux des LeEteurs inattentifs & malins
le fentiment noble & jufie qui me rendoit glorieux de ce
choix (1). Je cherche à calomnier, felon le Libellifie, juf Li~:ff~:O d,
par Les marueulIres de la fa miLLe dl! Jan mari.
Aioli déformais une époufe aura le droit d'imputer à crime
les infortunes de fan époux! ainfi les manœuvre1 qu'on aura
pu tramer contre lui, la dégageront de tous fes devojrs,
(1) " ERcore aujourd'hui, & (ous les yeux meme de la jullice, dans
" les Mémoires li modérés en appar.cnce, M. le Comte de Mirabeall
�32
principe mIme d~ l'union dont je réclame les droits ...";
Femmes, qui r gardiez comme le plu grand des bo nheurs
celui d'aimer les époux qu'une délicieuCe fympathie vous
;n-oit unis ; fen:mes, qui juCqu'ici vous êtIez applaudies
de n'avoir juré tendreJTe & fidélité qu'à ceux qui avaient
fu mériter votre cœur, gardez-vous bien d'avouer déformais des fentimens fi chers! Vantez-vous il préfent d'avoir
choifi pour épol'x l'objet de votre haine, ou vous calomnierez vos maris & vous-mêmes! . . . D e quels délires
la paffion n'dl-elle pas capable? De quel!es imputations
]a mauvaiCe foi (ait-elle r ougir? Mais laiiTons-la s'agiter;
ne conCpirons pas avec les méchans, contre notre propre '
tranquillité; n'obéilfons qu'à notre conCcience; ne parlons
qu'aux honnêtes gens. Je leur dirai toujours: C'EST
CO TRE L'ÉPOUX QU'ELLE A CHOISI QU 'ON VOMIT EN SON NOM DE TELS OUTRAGES! C'EST
L'EPOUX QU 'ELLE A CHOISI QU'ON CALOMNIE, QU'ON DIFFAME DANS UN MEMOIRE SIGNÉ D 'ELLE! & toujours ils répondront par un mouvement d'horreur & d'effroi . . . . .
Ah ! fi j'avois été auffi injulle, auffi crédule, auffi cruel,
que ne m'aurait-on pas perfuadé? Que ne m'a-t-on pas
dit? Que n'ai-je pas réfuté? Que n'ai-je pas repouffé?
PuiCque je redemandais ma femme, je n'avais pas ceiTé
de l'eflimer. Eh! combien ne m'aurait-il pas été facile de
m'en croire difpen(é, fi mon ame, au - deiTus de roule
méfiance, n'eût pas été de trempe à défier les calomniateurs & leurs diffamations!
Mais les calomnies auxquelles votre époufe prêta, feIon
<]
1',lll
" n'a pas craint de chercher à cal omnier le prlnCl pe même de l'u" nion dom il aCe r~c1amer les droies, dont il ore invoqu er l'i ndiC" (olubilieé, & qu'il prend à eémoin de la préeendue jllilicc de Ca
» caure ". Et l'on cite la page 1 de mes O blervations Imprim~es.
Ion
?3
" 1
une oreille tl'Op credule. Ces col"lI1l11es 0111 etc 1'erJies d"ns jan j;'III de /" m,'ùl d'un pCle! ... Et quand ce pere
déplore (on erreur; quand il rec o,nlJ~ît 9ue Con amou r p~
ternel d'autant plus a!larmé qu JI etaIt plus tend re, na
que tI~OP réaliCé à, [es )'e ll~ des ch;mer;s, & qu'il exagéra juCqu'aux véTltés dont JI a prodigue .la .confidence ,
l'oipouCe que ces calomni es, flue ces exageratlons ?nt SÉD UITE, dira: JE NE VEUX POINT ETRE DESA~U
SÉE? Cerre formule (uffira pour lui obtenir une féparatlon
d'habitation, pour l'ab[oudre du procédé de réveiller, de publier tous les [ecrets de [on beau-pere, & de donner l'air
de la vérité à [es craintes & il (es erreurs? Quelle bonne
foi trouvez-vous do nc à lui faire tenir ce lan gage: J'AI
CRU LE MAL UNIQUEMENT., PARCE QUE LE
PERE DE MON MARI ME L'A ECRIT. JE NE CROIS
PAS LE BIEN QU'IL M'ÉCRIT, QU 'I L M'ATTESTE
AUJOURD'HUI, PAR\; E QU'IL CONTRARIER OIT
MES PROJETS D'INDE PENDANCE, MES EFFORTS
EN DIFFAMATIONS? Avez - vous dalle eCpéré qu'il
exiftoit un Tribunal f[ui pût accueillir un tel C}'ftême?
Remarquez qu e lorCque mon pere écrivait contre moi 2
il ne me voyait pas; remarquez qu'i! écrivait [ur la foi
d'autrui: mais que le moment où il parle honorablement
de mo i, le mom ent où il attefie ma bonne conduite, fuit
un long période, où d'abord retenu pres de lui, toujours
obfervé, furveillé, mis enfuite aux pri(es avec la fortune
& les affaires & les hommes, j'ai fubi tous les genres d'épreuves. . . . Et mon pere devait refpec7er des répugnance!>
qu'on veut appeller fon ouvrage! Si véritablement elles
étoient fan ouvrage, mon pere fe devrait, non de re!pe8u
ces répugnances, mais de les détruire; mais de prouver,
en aurorifant mes réclamations, qu'il eit loin de me juger aujourd'hui, comme il faifoit autrefois dan s ce lle.s de
[es lettres qu'on ore imprimer. S'il avait fait une promelTe
qui nuisît à la fodété , à fa famille, il fan fils, il aurait
YOUS
E
--
�~4
Lt':t~/' do
35
fait une promelTe qu'il ne devroit pas tenir. S'il en avait
.juré l'honneur, il faudroit détruire l'honneur par l'h onneur
même; il faudrait rétraéter un engagement tém éraire
1,( coupable; & l'honneur ne ferait plus que dans le jufte
déCaveu d'une crédulité trop excufable. Voilà ce que mon
pere Ce devroit; voilà, fi j'ofe le dire, ce qu'il m'a dû ,
& s'il l'a fait, on ne fauroit l'accuCer de contradition. IL
A PARLÉ, comme il le dit lui - même, SELON LES
TEMPS.
Il lU forait donc point affreux 'lue L'on f'eproclzâl à l'vIaJarne de Miraheau L'impr1fion 'lue les calomnùs dOIll ail
m'a déclr.iri, ont faite fur [on ame. Cela ferait au contra ire
tres-naturel. On lui reprocherait avec jufiice d'avoir cru
trop aiCément qu'ull mari qu'elle avoit aimé, & que de
cruel~ malheurs devaient lui rendre facré (1), était un
homme vil & infame. On ne lui pardonnerait pas furtout de fermer l'oreille aux éclairciITemens qui pourraient
dilIiper fa fatale erreur, & de ne croire avec facilite!
que les bruits & les témoignages injurieux à fan mari.
Mais, dit-on pour elle, » ferait-ce après avait- peint
" un fils, ·un neveu f~us le5 couleurs les plus noires,
Il après avoir DÉPOSE les plus FUNESTES ET LE')
» PLUS TERRIBLES CONFIDENCES DANS LE
» SEIN D'UNE EPOUSE timide & fenfible que l'on
.» pourrait fubitement opérer une réunion que l'on au" roit travaillé fi long-temps à rendre impolIib!e ?
N'oubliom pas que c'efi pour répondre à cette 'q ueftian: doÏl-il être permis, peut-il être ulile à Madame de
Miraheau Je puhlier les lmres Je fan. beau-pere, qu'on' la
fait parler ainfi! St not-om précieufement cet aveu que
11
-----------~-- --_. " ._.
(J l. HtmU mifer flcmimll rtS; combien cela n'ell. il pas plu~ vrai
cutte époax.
ces lettres éotitienr-lent LES PLUS TERRIBLES CON- Pag. 9' d"
Libdle.
FIDENCES DÉPOSEES dans le foin d'/lne époufe timide•
De forte qu'il fe trouve tout à la fo,is qu'on avoue LE
MYST1:.RE, la CONFIDENCE, le DEPOT; & qu'on met
en qucfiion fi Madame de Mirabeau peut en abuCer, ou
plutôt qu'on le décide ainfi. Ah! fi l'on donne à ma
femme de te rrible~ conCeils, fi on l'entraîne à de funeftes démarches, on lui fournit auffi d'étranges moyens de
les jufiifier !
.
.'
Mais vous avez le premier donné SANS NECESSITE.
l'exemple d'une communication de l.:ures •..• , Ce n'eJl point
ra ~, 91 da
votre femme 'lui rompt l~ fceau des Jecr(lS domeJli'luti, Libelle.
c'
vous 'lui la force t à les rivéler.
Qu i croiroit que cette bifarre objeétion m'a été fait~
fi on ne la lifoit page 9 J du Libelle ? Eh quoi! vous
poufTtZ une infortunée à la guerre, fans avoir une rai{on fpécieuCe à lui donner! VouS exig.ez d"eUe ,un pro-.
cédé infame, & vous ne pouvez pas .,même effayer de
le défendre fans que vos principes re~<;>mbent fur votr~·
tête! J'ai. commu ni'l,ué fans néc1fité tes lettres de ma fëmme.
SANS NECESSITE ! Eh pourquoi m'accufiez - vous ell
fon nom d'avoir étouffé dans fon fei·n l'amour conjugal ~
Il m'a bi!:!n falltt Je montrer vivant- à l'époque où nous
nous fommes quinés? Vous prétendiez qu'il n'était pas
polIibJe que mon épouCe pÎlt fupporrer ma vue; & j'ai
répondu par les regrets qu'e lle témoignoit de not·re féparation. Vous foutenie21 que je l'avais maltraitée; & j'ai
~ontré par [on propre témoignage que j'avais lDujours
été jufie & tendre pour elle. On la calomnioi.t dans tOute,
la ~roviuce ;. &. ie l'ai fait v.oin teU~ que. j'aimois à la.
croire.
Efi-ce ainfi que J'AI ROMPU LE SCEAU DES ~
CRETS DOMESTIQUES? La tendreife que mon épouu .
avait pour moi devoit-elle être un SECRET, un MYS..
TERE.? De.vQis-ie !ailIer. croÏlre. que je. l'avais démérité.e
.
E ij
'.
�~
~6
que j'en étai,; dépouillé 1 Qu'ai-je dit qui l'ait pu faire
rougir, au moins [ur [a conduite paffée ? Ne la rendais.
je pas plus intéreffante en montrant au public abuCé par
les contes &. lt's conjeél:ures de la malignité, peut· être
auffi par le manége de ceux qui formaient alors le
plan qu'ils ont preCque réali[é aujourd'hui, qu'elle n' é t o~t
point parjure à [es [ermens, étrangere à [es affeél:ions
premieres, &. qu'elle [avait exprimer avec grace les [çn.
tirnens honnêtes dont je croyais [on cœur fortement pénétré. Ah! li elle prétend avoir à [e plaindre, qu'elle regarde
autour d'elle; qu'elle accu Ce ceux qui CuppoCent qu'elle
poffédoit l'art de [e contrefaire au point de peindre avec cet
air de vérité que le public a tant accueilli, des [entimens
qu'elIe n'avait pas . .Qu'elle accuCe ceux qui Coutiennent que
fan cœur démentai t fa bouche &. fa plume! Qu'elle ne m'ai·
moit pas, qu'eIle me regardait avec terreur au moment
même où elle me diCoit, JE T'ADORE. Que ceux qui
lui ont fait ligner ces étranges affertions lui [oient en
horreur! Eux feuls l'ont calomniée, l'ont diffamée cn lui
imputant la plus lâche duplicité, e'l l'accufant d'avoir
pu fe dégrader jufqu'à tracer dans fes lettres les fermens
d'un amour éternel pour l'indigne époux qu'elle avait
tant de fujets de haïr ~ De quel délit pourrais-je aujourd'hui noircir Madame de Mirabeau qui parût auffi odieux
que la fauffeté, le men[onge, l'impoll:ure dont [es défenCeurs compo[ent fan caraél:ere ?
Mais enfin, &. quoiqu'il en puiife être , j'ai imprimé
des lettres de Madame de Mirabeau qui m'appartenaient,
exc\ufivement même, parce qu'elles m'étaient adre!fées,
&. qu'elles contenaient la preuve de ma fidélité aux engagemens réciproques qu'on m'accuCoit d'avoir enfreints;
tandis que je ne formais aucune accuCation, moi. Ces
lettres qui contiennent des moyens de défenCe &. pas un
d'attaque; &. quelle défenCe! Ces lettres qui honorent celle
qui les a écrites, bien loin de la diffamer; ces lettres'
qui ne renferment que la confidence de [entim eli ~ dont
~7
on cloit faire gloire; ces lettres {ont décifives au proces;
elles pouvoient &. devoient l'empêcher. Je les ai publiées.
J'ai fait ce que j'avois le droit de faire, ce que je devais
faire.
.
On imprime, au . nom de Madame de Mirabeau, des
lettres qui ne lui font point adreifées, des lettres qui
n'appartenoient pas même à leur dépolitaire, parce qu'elles contenoient des CONFIDENCES , des SECRETS
domell:iques. Ces lettres n'offrent que des diffamations
étrangeres au pro ces : car je l'ai dit, &. cela eIl inconteIlable : je (erois criminel envers toute la Nature, qu'il {uffi·
roit que je ne le fuffe pas à l'égard de Madame de Mirabeau, pour qu'elle n'obtînt pas la (éparation qu'elle invo·
que. Ces lettres qui me déchirent, qui m'outragent, qui
m'accu Cent de tous les crimes, paroiffent malgré leur auteur. . • • . • Comparez 110S procédés fi vous en avez le
courage.
» Mais pourquoi . . .• voudroit·on ravir à la Dame L ~aTI' H
)) de Mirabeau le droit légal de fe prévaloir du jugement 1 C <.
" re[peél:able des deux familles? Les peres ne font-ils pas
)) les premiers Juges, les Juges naturels de leurs enfand
» EIl:·il aux yeux de)a Nature, des Loix &. des mœurs
» un Tribunal plus [aint, moins [uCpeél: &. plus religieux
» que le Tribunal d.omefiique ?
» Il ell: [ans doute malheureux que les aél:es intérieurs
» de ce Tribunal foient produits au grand jour. Mais falloit·
» il bien réclamer la fantl:ion de l'Autorité civile, quand
» on a voulu fouler aux pieds des conventions arrêtées
» par les époux, &. protégées par l'autorité paternelle ~
» Falloit-il bien, dans une queIlion de mœurs, [e pré[enter
» aux Minill:res des Loix, avec tout l'avantage qu'affuroit
» à la réclamation de la Dame de Mirabeau, le vœu
» connu de la famille, le témoignage des parens, vrais
» Juges des mœurs. »
Il Y auroit beaucoup de cho(es à répondre ici; j'aurois
beaucoup à débattre [ur la théorie qu'on y trace, fi je
d.
�38
pouvois me réfoudre à traduire cette inintelligiblè ferie de
grands mots vu ides de fens; & fi je croyois devoir ménager mon fiec1e & mon pays, je pourrois dire du moins
que le Tribunal domefiique fuppofe une CommÏmauté d'honneur, & que la Communauté d'h.onneur entre parens divifés par mille intérêts) [ouvent coupables & vils) eft un~
chimere, lors même qu'elle n'ell pas une [ource d'iniquités.
Mais je fuis loin du malheur d'être obligé de récurer
le jugemenr de ma famille. Et [ans demander à l'Auteur
du Libelle où [ont les cam "entions arrêtées par les époux?
[ans lui demauder où [e trouve le droit légaL de [e _prévaloir de ce Jugement, je fuis prêt de [ouCcrire à celui
qu'elle prononcera fur les faits, après m'avoir entendu; &
je ne craindrois pas même d'y a{focier la famille de Madame de Mi rabeau. Mais ne conviendroit-il pas d'examiner
d'abord s'il a réellement exifié ja.mais ce jugement domeftique qu'attelle le Libelle?
IL EST UN JUGEMENT DOMESTIQUE. Ce mot
ell Je premier qu'on ait mis au jour pour la déftnCe de
Madame de Mirabeau. Où efi ce jugement? On le demande,
on Je cherche; on ne [ait où le trouver.
IL EST UN JUGEMENT DOMESTIQUE". Eh! qui l'a
r.endu? Où voit-on. le concours ~ le concert des dcux familles? dans les lettres divulguées! Mûn pere écrit, Oll
he lui répona pas; mon pere a une volonté.,.. [a belle-fille
une autre; les d -ux peres ne paroiLfenr -d'accord que parce_
que l'un lailfe toLU faire à l'autre.
Eh! que [eroit - ce donc qu'un jügement domefiique ,
lors duquel la perfon ne jugée n'auroit pas été entendue?
Que [erl~ it un jugement rendu contre moi, en mon ab(ence & fans qu'on m'eût communiqué les chefs d'accufation ? Quelle horrible Inquiîuion! Que dis - je? quelle.
Cour d 'iniquité plus. infame que l'Inquifition même , faitezvous du Tribunal domefiique!
Quoi !. il exille un Jugement qui me prive de tous mes
droits de citoyen, qui fait plus encaœ, qui m 'ôte tous
39
les droits que fna mort civile n'éteindroit pas, [ans que
je puiffe le faire annuller! Et c'ell aux Tribunaux Ugaux,
c'ell aux Magifirats, Juges des. familles, comme des Membres qui les compo[ent, qu'on vient propofer de confirmer un Jugement qu'on ne montre pas; qui ne [auroit
exifier tel qu'on le [uppo[e , fans une abominable iniquité;
qui, dans tous les cas, moins encore qu'aucun autre
jugement, pourroit difpofer à jamais de mon état & de
mes droits d'époux.
Mais, encore une fois, où voit-on ce jllgement ? Dans
les lettres de mon pere. Mon pere compo[oit donc à lui
feulle Tribunal domefiique ! Les lettres d 'un pere trompé
& irrité font - elles des Sentences? Ces lettres [ont - elles
écrites avec le fang froid, l 'impartialité, le calme, [ans
lefquels on [eroit coupable de [e préfenter pour être Jugd
Il ne faut que les lire pour en décider. Et s'il eft vrai que
-l'on fe peigne dans [es lettres, on comprendra aifément
combien, au temps où mon pere écrivoit celles-ci, la co..
lere avoit défiguré J'homme refpefrable dont elles offrent
une image fi infidele.
Si dans de telles lettres mon pere a"oit difpofé de (es
biens; fi dans ces momens d'emportement du courroux
paternel il. avoi~ voulu dOl1ne~ à [es enfans ~es Loix ql.li
dutrent lUi [urvlvre, les Maglt1rats refu[erOlent de VOIr
dans cet aUe paffionné la volonté d'un pere. Et l'on voudroit fai-re regarder, comme un jugement domellique, les
cruelles inveUives que ces lettres renferment! Et l'on voudroit que des Magifirats prononça{fent plus légérement [ur
mon honneur que [ur mes biens!
Quel Centiment cruel, que de tOUrner à ma ruine les
injures qu 'on arracha de la bouche d 'un père, en oppre{fant [on ame du pGids, de l 'horrible pQids des plus
abominables calomnies! Quel Centimtmt cruel que de vouloir rendre à un vieillard infortuné, cent fois plus amere
la crédulité qui déja lui fut trop funefie 1 de lui faire un
crime d 'une facilité qui a pour principe une exceffive dé:
�4°
licateffe; d'attaqner fon honneur par l'excès même de fon
honneur!
On nous parle Cans ceffe d'ac7~s intérieurs du Tribunal
domlli que, de conventions ar,êttes par les ipoux & protégées
par fautorùé paurnûü, & l'on produit des lettres! de, lettres! C'eft là le regiftre des Semences du Tribunal domeftique! Des lettres! Ah ! s'il eft un crime du reffort du
Tribunal domeftique, c'eft la divulgation des lettres! Eh!
quelles conventions renferment-elles ces lettres? On n'en
trouve pas une feule trace. Cunventioll fuppofe réciprocité! Où eft la réciprocité?
Suppofons que ma femme m'eût réclamé comme fOIl
mari; que M . de Marignane m'eût réclamé comme fon
gendre; & qu'ils m'eu{fent réclamé malgré mon pere ~
que leur auroit oppoCé celui-ci? Les droits de l'autorit':
paternelle; mais i.luro it-il p.u dire, auroit-il été recevable
à dire: VOUS ETES LIES; IL Y A ENTRE NOUS
DES CONVENTIONS? Ne l'auroit - on pas fait rougir
d'une telle prétention? Ne l'auroit-on pas préfentée comme
également infultante pour les Tribunaux, les mœurs & la
fociéte:: ? Eh bien ! c'eft précifémenr là le point de vue
fous lequel il faut confidérer nos prétendus el1gagemens
refpeé.l:ifs. Car, quel feroit donc cet accord étrange par
lequel ma femme & mon beau-pere n'auroient pas été liés,
mais par lequel mon pere feroit invinciblement enchaîné?
Quel feroit ce patte, qu'un feul des contrafrans auroit le
droit d'attefter?
Ce n'eft pas tout. Quand mon beau-pere, qnand ma
femme, quand mon pere feroient véritablement liés entre
eux, je demande à quel titre ils pouvoient difpofer de
moi? A quel titre en pouvoient-ils difpofer pOUl:. toujours ~
& fans que je fuffe appelle? Qui auroit fait valoir mes
droits dans cet accord? Qui les auroit défendus? Seroitce mon pere qu'on nous montre comme mon accuCateur & mon juge? Serait-ce mon heau-pere 'lui ne répondoit
1
. (s
4
.
as aux lettres que mon pere lui écrivolt. , erOl t-ce
cl't
01 f emm
p, e .
7
Que.
ne .
puis-JO
e encore le croire! mais. l'ufama
.
.
e qu'elle a fait des calommes lan~ées contre m?1 , .me
de le (uppofer ? Il pourrOlt donc .Y ~volr, Il Y
aurait donc contre moi un Jugement auquel Je n aurOlS pas
été appel1~, lors duquel je n'au.rois pas ~ t~ défendu?.Il y
auroit un accord qui difpoferolt de mOI, & auqu~1 Je ne
ferois point intervenu! Une telle collll~on fer olt I~on
plus fon argument contre Madame de MIrabeau, meme
aux P ays où le divorce légal eft connu (1 {'
Mais fi ce n'eft pas un Jugement, fi c.e n eft Fas un
accord , c'eft du moins un vœu de famIlle; c eft dll
moins le vœu de votre pere?
D'abord je pourrois dire: les lettres de mon pere. &
fan vœu me font également étrangers. Lui-même l'a dit:
L'A UTORITÉ PATERNELLE NE V A PAS JUSQUESLA.
.
. fi .
EnCuite la queftion Jous cet ,a(peé.l: change 111 mmeut
de nature , & j'ai répondu à tou.t en renvoya~t aux
lettres récentes de mon pere; en dlfant: pourquoI chercher fon vœu dans des lettres écrites il y a plufieu.r:s
années quand vous en avez qui manifefient fo.n OpInion , [es defirs au moment où nous plaidons? · Elles font
publiques, lifez.
.
Mais il eft faux que le vœu de mon pere ai~ jamais
reffemblé à celui qu'on attefte. Le,s lettres produ:tes pa~
Madame de Mirabeau prouvent qu au moment meme ou
mon pere fembloit m'av~ir e~tiérement c~a{fé. d Con
7
. cœnr & profcrit de fa famIlle, Il ne fongea Jamal.s a un~
_ fep~ation éternelle ~ pas mçme à relâcher les lIens qUI
llniffoient les deux familles, .••.• _ Dans fa lettre du 13
~ermet.il
(~l En
Angleterre, par exemple. il {u!lie de la ph, s l"égere arp~
; ~ence de collulie ll entre lu falllille~, o.u entre les épou x pour te u r
- i'e \!iY\1r"e-.
j.
F
•
�4!
J anvier 1778 il s'oppo[e à une réparation de droit. Dans
celle du 15 du même mois il dit:. » Votre amour pOur
» vo tre enfant, VOTRE CONSIDERATION POUR LE
» NOM QUE VOUS A VEZ ADOPTÉ, [Ont les llniq-ues
» con[eils que vous deviez Cuivre. ICI EST VOTRE
) MAISON; trois jours plus tard vous n'en feriez jamais
» [ortie. c( Le z jeIillet fuivant il écrivoit. » La [épa.
» ratio n de droit ne fera rien & par la nature des per.) [o nnes ET PAR SA PROPRE défefruofité ..• Chaque
» jour pouffe celui où Ion dira que la pénitence dl: bien
» longue. « Etoit-ce là le vœu d'une réparation & d'une
fépa ratioll éternelle f
Cette obCe rva rion bien fimple fera portée dans un
in/hnt juCqu'à l'évidence par f!e-xamen des lettres de mon
pere, confidérées d'une maniere iColée &. comme pieces
adm~ffibles. Mais arrêtons-nous- ici puifque no us avons
épuifé tOllS les . moyens de défenCe de Madame de Mirabeau pour l'emploi de ces 'lettres .fata'les, & fai[ons
quelqlTeli réflexions 'géflémles, qui [elnt les con[équences
natoreHes & comme le rêfumé éle tout ce qui précede,
Rien de ce que l'imagination humaine peut atteindre,
ne POUVOtt exclifer ·clans l'ordre judiciaire, pas plus qu'en
moraie , la divulgatic~m aes leltr-es de mon pere. Eh bien!
plus le procédé ell: odieux, plus il eft inoui, plus il a
révolté tous les honnê tes gens; & plus les motifs que
l'on en allégue fon t in[uffiCalls & frivoles, déplorable
deftinée que d'être dirigé par des confeils violens i
Ils ont perfuadé à cette infortunée, que cette extrémité
fâcheufe (telle ell: leur éloqueme ~pre-l1ion ), étoit
indifpenfoible à [a défenle. 'Ils ont prerex-I'é la néc1JiLé , on a prefque dit la ' fatalité qui contraignait à
cette -di-vulg~tio.n funell:e. .Q ue lÙl - t • .elle confulté [on
cœur? II eft bien horriblement changé, ou, [ans héfiter ;
il lui aurait dit qu'il n'y a de néceifaire que ce qui eft
honnête; qu'il n'y a de fatiil~té que pour les foibles liS
43
dour les lâches. Maintenant qu'ils ont pouffé Ma~amede Mirabeau dans le précipice.' ~16 atteftent la fatah,té !.
Elle n'ell point, elle ne faùrolt etre une excufe. L~ (lrOlt'
des gens, qui' n'ell: qu~ le dévelop~ement' dn .d:olt na~
..,urel , veut que même avec ecux qu on peut
légltlmemel-lt
.
traiter en ennemis, tout moyen de nUIre,. tout moye~.
de défenCe- ne [air pa's indifféremment permiS'. ))' Ea ~Ol
» naturelle, ~it P'uffendorf, nous ordonnant de r;tam-" tenir & de rétanli-r ra paix autant qu'on le peut Com1> modém ent, elle eft cen[ée pre[cri~e auffi l'ufage des
~) moyens, fan s qllOi on ne peut arnver à. cette fin ... •
., II n'ell: pas permis de diffamer un ennemi par des cnn mes fuppofés : car l'état d?ofl:'i1ité. ~u l'?n eft. par
» rapport à lui, nous donne a- la- vénte plein d'rOlt' dt!
" lui cacher noS' penfées, mais non de l'accàfel' de
) quelque crime devant des p:r[onnes. neutres.»
Il n'eft pas, il ne peut pas etre vra! que la prA
udence
exige qu'on vive avec [-es, amis ~ mn;e pou.vant etr~ U?
j'our ennemi (la nature r1 eft p'mnt alnfi ' faite), MaiS ri
èft profondément vrai que' d~ns toute efpece de ga~rre
on doit regarder tout enlleml comme pouvant un Jour
être ami.
.'
Il ell: permis de [e défènd:e; mais il .n'efi: pas _permis
de [e défa ire de [on ennemi par une Iqche' tralllfon. Il
ell: permis de [e défendre; mais il eft des armes dont
tien ne peut lé.,.itime r l'u[age. Eh! quelle ell: donc la
caufe qu'on avo~e ne pouvoir foutenir que par des perfidies ? Quel eft donc cet objet de diffention auquel on
facrifie tout juCqu'à l'honneur?
.'
[ Et fi dans la re gle générale on ne dOIt employer comm e
moyen de défen[e qL~e ceul{' que l'honneuz: avoue , c~m-.
bien cette maxime n ell:-elle pas plus vraie, plus falllte
entre des per[onncs unies par · des liens à jamais [a~rés ?
Si 1'0 11 ne fa~ t la gtierre, même contre [on en nemi naturel, que pour avoir la paix ua jour ; fi tOllFt .~ombat,
IJ
Liv. 4,
J ,
§, 19.
ch,p.
�44
•
tout litige ne peut, fous peine du plus odieux des acharnemens, avoir d'autre objet que celui de rétablir. l'harmonie entre les hommes: queUes raifons, quels prétextes, quels motifs légitilt)eront de! moyens qui doivent
rendre des haines irréconciliables? Des haines entre époux!
des difiàmations entre beau-pere 8< gendre-.;. elirre beaupere 8< belle-fille; entre pere 8< fils! Dieu! Dieu! quel
fyftême ! . . . . . Vous qui deviez vous précipiter entre
votre pere 8< votre époux, les retenir, les d~farmer ,
vous qui deviez joindre leurs mains dans vos mains pacifiques ; feul gage de leur alliance, vous vous efforcez
de la rompre! Vous fécouez entre eux la torche des
furies! Arrêtez! Epargnez-vous de longs repentirs. Arrêtez! La mort n'eft que le milieu d'une longue vie: 8< le
grand Juge qui pefera vos. confeils, n'en pefera pas
moins votre foibleire.
Ce n'eft point l'utilité feule que toujours la pallion
appelle la néceffité; ce n'eft point l'utilité qu'il faut confidérer dans la défenfe ; c'eft la morale. Il faut fe demander fi telle défenfe eft honnête; il faut fe demander
fi elle n'eft pas plus propre à prolonger l'état de guerre
qu'à ramener la paix; 8< fi la raifon , fi la confcience,
fi l'honneur répondent OUI, il faut détefter une telle
défenCe ; il faut (e rHigner à tout, fi ce n'eft à fe
rendre atroce, fi ce n'eH à fe montrer perfide.
Mais fi une défenCe mal honnête, immorale, odieu(e
n'a pas même le prétexte de l'utilité, qu'elle fera l'excufe
de ceux qui l'auront confeillée? Valeureux champion ,
cherchez dans les reirources de votre !l1orale ténébreu(e ,
de votre dialeO:ique entortillée. Pour moi, je vais vous
démontrer que les lettres que vous n'avez pu employer
fans crime, ne prouvent rien de ce que vous avez prétendu prouver par elles; 8< que l'infuffifance, autant que
l'attroCÎté de leur ' révélation, doit les faire rejetter du pro,
cès auquel elles font. parfaitement étrangeres.
4)
La publication des lettres de mon pere n'ell pas feule':
ment un procédé odieux jufqu'à l'atrocité, je fuis forcé
d'y voir encore un piege abominable. On a cru que je
n'échapperois point à la cruelle alternative, ou d'abandonner le foin de mon honneur, ou de me jetter dans une
difcuffion o{lenfante pour mon pere: on s'ell: trompé.
S_ufpendons encore l'examen des faits; 8< contentonsnous dans cette Feconde partie d'envifager ces triftes lettres 1°. comme un rémoignage infiniment grave 8< redoutable, par l'influence que doit avoir fur les honnêtes
gens l'opinion d'un citoyen, d'un pere refpeétable.
2°. Comme des pieces admifIibles, concluantes 8< déci.
fives au procès, ainfi que le prétendent les Défenfeurs de
Madame de Mirabeau, en ce qu'elles énoncent le jugement domeftique, le vœu des deux familles qui nous a féparés, 8< dont Madame de Mirabeau a le DROIT LI::.
GAL DE SE PREVALOIR.
Que réfulteroit· il de ces deux points de vue?
Quand j'ai dit que les lettres de mon pere étoient publiées
COntre fon aveu, j'en ai rapporté la preuve, en imprimant
fon d~faveu. Quand j'ai dit que la colere feule les avoit
diétées, j'ai dit tout ce que les yeux non prévenus appercevoient à leur premiere leéture. Quand j'attefte fes dé ..
marches poftérieures 8< fes lettres récentes, je donne la
preuve la plus irréplicable que fon cœur a démenti cette
colere momentanée. Quand j'obferve que fes diatribes véhémentes portoient fur des récits que fa follicitude paternelle avoit trop légérement adoptés; 8< que le bien qu'il
dit de moi ell: le fruit de fes obfervations perfonnelles 8<
des épreuves qu'il a dirigées; j'indique airez lefque1s de
fes témoignages nouveaux, ou de fes accufations anciennes
méritent le plus de confiance. Sans doute de telles réponfes fuffifoient au Public, qui fait qu'un pere ne peut
accufer ni juftifier fon fils, fans être fufpeét d'humeur ou
de partialité. Il n'eft donc point d'honnête homme qui
•
SeCONDS
PARTU.
�46
a',tpprouvât que je me renfermaife dans ces obCervations
gén~ra}es; &. fi je ne parlois qu'à mes concitoyens, c'eu
(erolt alTez.
Peut ..être ne dé(aPJ'rouvero~t-on pas davantage que pour
~oute dl(cuffio~, ~leme relatIVe au procès, je répondiife
a ~es comm~mcatlOns fi étranges:» Je me ju1lifierai ou
» Je prendraI condamnation à l'égard de tous ceux que
» j'ai p~ avoir le malheur d'offen(er , quand chacun d'euX'
» m'obJeitera la cho(e dont il a droit de me demander
» la réparation. Mais dans mon procès, il ne peut être
» quelhon que de mes torts envers ma femme. Ceux
» qu'o~ ch~rche à fonder [ur les lettres de mon pere,
» f~n~-,Ils,legaux &. ad~iffibles en matiere de réparation.
» \ Olla 1 examen (oumls aux Juges. Qu'on n'e(pere pas
» me détourner de ma caure par des diverfiolls qui
» toutes (enfibles qu'elles me doivent être, apparti;nnen;
)) à d'autres temps, d'autres lieux, d'autres per[onnes?
» Ne changeons pas la nature du procès.
Ce [yfiême de défe.n[e [eroit régulier &. d'une raine logique, [ur-tout ~près avoir démontré, comme je rai fait,
~ar la na.ture m.eme de~ cho[e~, que le jugement damerttque, qUI [ervOlt de pretexte a la publication des lettres
n'auroit jamais pu exifier que par une extrême iniquité '
&. que dans tous les cas il ne [auroit être d'aucune in~
fI;uertCe dans le)ugement légal. du procès. La Jufiice, qui
n admet pas meme les [éparatwns volontaires confucreroit ~ien moins encore un prétendu jugement q~j priverait
un cItoyen. non entendu, non défendu> de tO\JIS res droits.
~uvent meme,. exporée à confirmer un jugement dame[t~que provoq~e &. proDo.mcé par des parens Ju.ges &. partI.es, ne [e IIvreroit-elle pas au d.inger de foul~ aux
piedS la morale, J'ordre [ocial &. les Loix pour frapper
deux famiJIes de fiérilité?
'
J'ai ~.it ~lu.s ~ i.'ai ~ontr~ par d:s obrervations générllles qu II l1aVOJt Jamais eXlfié. dCll.. jllgement domefiique
{ur la féparation. EN QUEL TEMPS AUROIL-IL ÉTÉ
,
•
PRONONCÉ! QUEL A3E LE CONTIENT? Il n'y
a qu'une répollfe à ces quellions fimples; c'ell que les
Défenfeurs de Madame de Mirabeau ont improprement
exprimé le vœu de mon pere par ces mots: JUGEMENT
DOMESTIQUE, VOEU DE FAMILLE. Eh bien! fuivons-les jufques dans ce derniec retranchement.
·H du
Ils n'ont publié, difent-ils, les lettres de mon pere que l ib,P..g.
lle.
pour conftater fan témoignage, le vœu cOllnu de l.1i! farnl~le,
les cOllVlntions domefliques. Ils .n~ont par cette , dI~ulgatlOn P.g. !1.
que voulu produire au ,gran.d Jo~r les a~7es l~te~leUrs du Pag. 1 5 0 !<
tribunal domefllque; &. meme Ils feignent d-en gemlr. Enfin I~ de la Cooils ont appuié cene produétion de ce1!es de mes l~ttres (Illtaticn.
qui, felon eux, conllatent mon acqUle(cement au Juge.
ment domeftique & mes engagemens perfonnels.
Et moi; je nie que les lettres de mo.n pere expmne~t
[on vœu. Je nie qu'elles renferment un Jugemem domeftlque. Je nie qu'elles renferment aucun témoigna.ge ~ên:e
fpécieux. ire n.ie qu'elle~ apprennent un fe~1 fat: ~UI fut
"inconnu (ans elles . .le me que leor produ6holl ait eté de
la plus légere utilité po.ur Madame de Mirabeau. tT~ nie
enfin que j'aie donné ni pu donner une pasrole relative à
,la réparation.
.
'
Pour mettr.e ,quelque ordre dal'ls ces dIfcu{ftons. ,corn.pliquées , rangeons d'abord le périG-<ile ~c,,:uI6 d~pUl~ mon
mariage fous trois époques: La . c()hahiCatl~n: 1 affalfe de
Pontarlier: le temps écoulé depUiS ce~te affa~re. Cherchons
·s'il eft, pour aucune de ces époques, quelque appar~nce
que ce jugement ou ce vœu, comme 0n voudr,a 1 ap'peller, ait exifté: cherchons s'il .eR énoncé dans le; lettllfs
même les plus violentes de mo~ {Jere, ou plut~t fi Je
vœu contraire n'y perce pas ' tou~Ol!l,rs. Nous examl1nerans
enfuite ce que ces tettres prouvent, quels engagemens elles
manifeftent, quels engagemens perronnels j'ai contraétés.
. Je demande laquell~ des lettres de mon pere rupp.ofe
que j'aie donné ~ ra belle-fille ?~nda~t notre coh~b.INl
-lion, quelque ral(on de delirer d etre [eparée de mOl, &
1
�48
F,o. 79 du
LIbelle.
Voy. la tro iberne Partie.
Pag.
&1.
du
Libell •
;tg.
7
~.
Pag. 80.
ft par conféquent il put jamais former alors l~ vœu de
cerre féparation ? On a rapporté un feul fragment d u~le lettre
de mon pere à fa belle-fille, qui remonte à ce pérlO~e? &
ce fragment eft ~ité c,om.me une preuv,e 9ue les fevlces
dont fe plaint aUJourd hUI ma femme, etOlent CONN.US
DES DEUX FAMILLES. On croit bien que cet ar~lcle
fera férieufemenr examiné dans la fuite de ce MémOIre;
mais je conudere ici la valeur des lettres ifolées de tout
autre fait: Or voici les expreffions de mon pere telks
qu'on les rapporte; je dis telles qu'on ~es :apporte :. car
je n'ai pas pu obtenir encore la commUlllcatlon des pie ces
originales. Au refte, ce qui fuit ell, felon l'Auteur du
Libelle UN COMMENCEMENT DE PREUVES PAR
ÉCRIT' DES SEVICES. On pourra juger des preuves
qu'il nous deftine ( car il ne nous en a point encore
donné d'aucune efpece ) par ce COMMENCEMENT d'e
preuves.
Du ZI mai 1774.
) Je fOiis que vous appartenez ~ un farouche fol à qui
D toute affefrion de notre part fait ombra~e: Les co?tes
» qu'on en fait à cet égard font au~ ndlc~les qu ex.)J travagans. Mais comme t?utes les fo.hes fe tlennen,t par
) la main la foi aux réf1plfcences dou efpérer qu elles
) en fero~t de même. Il eft vrai, ma fille, que ma
» puilfance paternelle & mon autorité ont fait d~ belle~
» cnofes, & ont empêché la ruine de ma malfon. SI
» mon fils doit devenir fage, ce n'cft pas felon l~s au,» tres c'eft [elon moi qui m'y connois, du mOins en
) ce ~ui m'appartient, ce fera aiIurément revenir de
» bien loiR; mais le premier pas de ce retour & l,e 'plus
» indifpenfable, fera de deu;er ~a peine très-.mentée·,
» plus méritée qu'elle ne fut Jamais, & la [ublr eft un
) commencement de folde du compte. Àu refte VallS
11 parlez, comme ' VOUS le devez, ma fille, & je tache~
» rai d'agir comme ie dois. »
Je
49
,
Je pourrois faire plufieurs ohfervations fur cette lettre;
& noter, d'ab?rd qu~ mon pere parlait déja fur les rapports d autruI, ~ .enfune qu,~ mon per~ n'y dé[e[péroit
pas de ma réJzpijcence ; qu Il ne voulaIt que m'amener
à croire ma peine beaucoup plus mé,itée qu'elle ne
l'étoit réellement; enfin qu'on faifoit de moi des conus a1Ji. ridicules qu'(xlravagans j ce qui explique mieux
pourquoi mon pere me croyait un fà! furieux, que cela
ne le prouve. Sur le tout, il me [eroit aifé de mOntrer
que des CONTES AUSSI RIDICULES QU'EXTRA_
V AGANS ne paroiffoient pas devoir mériter une grande cr~ance, & qu'une telle lettre n'établit rien dans
l'inftance en [éparation, li ce n'eft le delir d'imprimer,
au nom de Madame de Mirabeau, que mon pere écri-·
voit Je 2 l mai i774, que j'étais U/1 fol fiaieux.
Mais il me paraît plus umple d'olTrir aux Juges & aux
leéteurs ce que ma femme pen[oit alors de cette alfertion. Or je ne [aurois mieux 'le faire qu'en rapportant la
répon[e de Madame de Mirabeau à la lettre cie mon
pere du ZI mai 1774.
Du 14 juin 1774.
" Monueur & très-cher pere,
" Je n'ai reçu que hier la lettre du zr que vous m'a" vez fait l'honneur de m'écrire à caufe d 'un voyage
" qu ' a lL"a it *** a'G reno bl e .....
" J'ai [enti un grand [oulagement en voyant vos let4
"tres. à mon mari, il en avoit réellement be[oin ,_
&
"
Je ne puis pas vous dire l'effet qu'elles ont fait [ur
" lui. Daignez l'encourager pour [Ortir de l'abattement
" phyuque & moral dans lequel il eft tombé. Je dis
" phyuque parce fa [alité a véritablement beaucoup
" [ouffert, & que fa tête n'était pas tranquille. A 1'E" GARD DE SA CONDUITE AVEC MOI, SOYEZ
" PERSUADÉ QU'ELLE A TOUJOURS ÉTÉ TRÈS-
" BONNE ET. SES 'PROCEDÉS
EXCELLENTS.
Je
.' .
G
,
,
'.
.
.
-
•
�5°
deIirerois de toute mon ame qu'il Ce fô.t conduit autant à votre fatisfafrion qu'à la mienne. ET JE VOUS
ASSURE QUE BIEN LOIN D'A VOIR A M'EN
PLAINDRE, JE N'AI QU'A M'EN LOUER. Je
fi nis par vous prier de vouloir bien lui lai!fer voir
un terme à to us fes maux. Je vous demande cette
grace, parce que je la crois néce!faire à mon mari.
Pardonil~z-mù i la liberté que je prends de VOLIS don~, ner mon avis fur pareille chofe. Mais comme je vois
" mon mari de fort près, je me crois obligée de V OllS
" rendre un compte exaét de ce qui fe pa!fe dans fan
" intérieur. »
Je demande fi cette réponfe eft péremptoire? A fu pp,ofer que mon pere eût, fur des rappo rts RIDICU LES,
EXTRAV AGANS ou perfides, cru aux févices ' cette
lettr~ ~'auroit- e!le lai!f~. d~ns cette erreur ?' Si qU; lq u'un
pouvait le penfer , qu II IIfe ce que mon pere écrivoit à
fa belle-fille ~n réponf~ à cette apologie, le 28 Juin 1774.
» Je reçoIs en meme temps, ma chere fille
une
)) lettre de votre mari &. la vôtre, toutes les de~x du
)) 14 Juin ..... .
)) JE N'AI PAS D'IDEE DE VOUS AVOIR PARLÉ
» DE MAUVAIS TRAITEMENS. S'il ( fon fils ) croit
)) avoi r été en butte à de telles imputations, c'ell de
» fan vieux cœur d'zppeller cela des platitudes . J'ai beau» coup vécu, tout fourmille d'accufations fau!fes; m ais
» je fuis encore à en voir aucune qui n'ait eu un germe
» quelconque de vérité. )}
Je prie l'Auteur du Libelle d'inférer dans fa premiere
édition tous CES NOUVEAUX COMMENCEMENS DE
PREUVES PAR ÉCRIT.
Une autre lettre de mon l'ere à M. le Marquis de
Marignane remonte au temps de la cohabitation: c'eil
P'g. 10 du ceHe du 9 feptembre 1773,
Lib lie.
11 le confulte fur mon dérangement. (Cet atticle fera
"
"
"
"
"
"
"
"
:
'.
.
.
'.
SI
difCllté av:ec éte ndue S\ clarté dans la troifieme partie de
ce MtmOl;e. ). Il p~rCllt excefIiveme nt fatigué des lettres
de mes crt:ancle~s; Il en p'lrle ayec beaucoup d'humeur.
Il déclare que j',}i mon rev,ellU; qu'on peut le faifir'
qu'il ne fe mêle aucunement de mes affaires' qu'il crain~
feulement que je ne fois arrêté pour mes d;ttes.
L~ fui~e de cette lettre ne m'ell pas connue; elle n'eil
pas Impnm ée dans le Libel.le; & jufqu'ici, je ne faurois
trop le répéter, on n'a pas dépofé au Greffe les lettres
que Madame de Mirabeau a publiées.
Q~e prouvent ces plaintes? finoll que mon pere vouloit
que Je fu!fe interdit? Où trou ve-t-on li! plus léaere apparence du defir d'une féparation?
1:>
Le malheur s'aggrave & les fautes à fa fuite. J e fuis
conduit au Château-d'If par ordre du Roi. On a vu
da ns les lettres de Madame de Mirabeau fi fan voyaae
, 1) .
, " 1 : >
a
ans eut un autre motif que celui de me fauver
cette punition cruelle; on a vu fi elle en étoit affeétée'
ün a vu fi elle dc;firQit alors une féparation. Une preuv;
bIen forte a!furément qu'il n'yen avoit point de convenue ni même. de méd itée., à cette époque, c'ell que
Madame .de. Mm)~eau fut Joindre fon beau-pere. Ell e
n~ pou VOIt etre mieux non Jéparée, fi l'on peut parler
aI!lfi , qu'en fe retir i,lll t pendant ma détention au fein
de ma famille , ou M. de Marignane lui ordonna de
reller. (1) Uoe pr:euve fans réplique que cette féparation
-------------- - --_._--~ ----
(J ) " Mail jmention, ma li Ile , Nt que vou s profitiez des offres.
~, oblJgeantes de M. votre beau-pere. Vo us ne pouvez êrre plus dé" cernme~t nulle p~ rt que da", (~ m ~J(on. Dans la fâchell fe cj , con(" ~an ce ou vous vous CrÛll\'C Z , vo us de\'ez ) au défa ut de votre m.Hi "
" et re rous 1;. ru rd le de M . \' otre beau.pe re , V allS me déplai riez li
" ~ous Jm ag ltlte~ de cheocher lin am rc aryle. Méri tez les bon tés ql1e
" 1 ~11 VO liS y. temolg ne , & pa iez pour le m oment à V O ll~ (cule, le
>' tribut des. (oIns & de devoir lilial gue vous devez en com mun avec:
" votre matI ••, Voyez les premieres Obrervatiolls , pa(( . 1 1.
G ij
.
•
�52
n'étoit pas plus defirée qu'elle n'étoit convenue; c'ell:
to'lt ce que Madame de Mirabeau m'écrivit alors, qui, s'il
ne prouvoit pas la plus vive tendreire, le plus vif defir
d'une réunion, démontreroit la plus effraiante duplicité.
Ce n'dl donc point dans ce période qu'i! faut chercher
ni le ju ge ment domel1:ique ni le vœu de mon pere. Pairon>
au temps qu'embra{fe l'affaire de Pontarlier.
20•
Pourquoi, fi le jugement domellique ou le vœu de mon
pere avoir prononcé alors la féparation ? pourquoi M.
de Mlrignane voulut - il la demander en J ullice? (1)
CGmment ne penCoit.il point au jugement domel1:ique auquel on attribue aujourd'hui, pour lequel on réclame une
fi grande force, & qui certainement en avait une fuffiCante
au!Ii lo ng·tems que j'étois ' détenu ? Que faut-il de plus
pour conllater que cette invention fublime efl: moderne,
& que l'h onneur en efl: uniquement dû aux défenfeurs de
Madame de Mirabeau ?
Les lettres qu'on a produites en fan nom, prouvent
. que mon pere s'efforça de la diiruader, ainfi que M. de
l'~g. '7 I"LC, Marignane, de,
ce .
projet
de féparation,
en leur, repréq U';1 3 l dU 1. .
•
be le.
fentant 1 ° . qu 11 ferait auffi inutile que peu genéreulÇ,
d'accroître & d'augmenter ce qu'il appelloit mon opprobre. z o o Que tout ce qui feroit prononcé, le ferait par
défaut. 3°. Qu'on priverait Madame de Mirabeau de
l'appui de fa famille adoptive. Que mes fers feraient
d'autant mieux rivés que je ne ferais pas féparé ; au lieu
que dans le cas de la féparation, le premier mouvement
du public ferait de dire: a qui donc aujourd'hui peut-il
faire dw. mal ?
Ces raifons perfuaderent apparemment la famille de
(1) Voyez les letrres de mOIl pere des 1 ~ , 15 ja1lvier & 1 ~ juillet
177 8.
.
.
'.
B
Madame de Mirabeau; puifqu'elle demanda en Juflice la
féparation de biens & non celle de corps, quoiqu'elle fe
fût propofée de la demander auffi.
Il eft vrai que mon pere annonçait dans plufieurs de
fes lettres, la réfolution de ne pas brifer mes fers, &
qu'il voulait fe furvivre à lui·même p:tr fa colere. 1) Je
» vous remercie , » écrivait-il à fa belle-fille, en lui
accuCant la reception d'une copie de je ne fais quelle
lettre décachetée, » je vous remercie de n'avoir pas oun blié cette communication, qui eft très-néceiraire pour
» completter d'autant les archives du falut de votre fils
» & de votre propre repos ... Je ne faurois trop ra {fem» bler de pie ces pour faire face après moi, & donner
» de la force à ceux qui feront chargés de la mere &
» de l'enfant. »
Ceci prouve bien clairement que l'on faifoit d'étranges
communications à mon pere; & que ceux qui invoquent
aujourd'hui fan témoignage, tout en l'accufant d'avoir
. tant & tant violé fa parole & fes (ermens , n'atteftent que
leur propre témoignage. J'étonnerais le public fi je livrais
tous les indices que je pourrais donner à cet égard,
d'après Madame de Mirabeau eIle - même , qui, par
exemple, m'écrivait le 3 feptembre 1774: » Je ne te
» demande pas de brûler mes lettres: cela felioit inutile;
» mais au moins ne répéte rien de ce que je te dis:
» CAR ON MANDE TOUT DE PROVENCE ICI,
» & je crois qu'il ne ferait pas avantageux que l'on fe
)) méfie de moi ici. »
Mais enfin que conclure de la terrible réfolution que
cette lettre préfente? 1°. L'excès même de la cruauté
d'un tel projet, fi étranger au cœur d'un pere, démontre
de quelle colere il était tranfporré. Zo. Il défefpéroit que
ma conduite le fît changer d'opinion; & la preuve qu'il
avait tort d'en défefpérer , la preuve qu'il a changé d'opio,
Pag. ,. 3 d"
libelle.
�·.
$4
nian, c'ell que mes fers font brifés, &. que fes démar_
ches ont été diamétralement contradiétoires à [es réfol utians. Elles avaient donc été conçues témérairement dam
un tranfpon aveugle de paillon, que des communications
de toute efpece aiguifoient [ans celfe. Il ell donc égale.
ment iniqut: &. ;;.bfurde d'en exciper contre moi.
Mais enfin trouve-t-on dans cet arrêt de profcription ,
dans cet arrêt cie mort, Ol\ jt crain drois que des Juges
féveres n'apperçuffent que la colere du pere était au
moins en partie l'ouvrage de la belle-fille; trouve-t-on
aucune phrafe, aucune locution ,qui préftnte ce fens?
NE DEMANDEZ PAS LA SEPARATION JUDIClAIRE; JE LA PRONONCE COMME PERE ET
COMME JUGE DOMESTIQUE.
Nulle part alTurément on ne trouve ces mots ni leur
équivalent. Mon pere a défefpéré dans un temps de me
voir jamais une bonne conduire. Cette b Olllle conduite
m'a valu fan pardon. Qu'y trouve-t-on d'étrallge? Et
quel homme voudroit.on faire de Illon pere, fi l'on
prétend que l'amour propre de la per[éveraJ!ce aurait
dLi f';cher [es entrailles; &. qu'il lui fallait prononcer ma
mort plutôt que d'avouer ma réfipiCcence ou [on erreur!
Les centons de l'Auteur du Libelle me paroiffent le plus
(auvent du Montefquieu mal copIé. Comment le Libellifte
Jl'a-t·iJ donc pas deviné que fi la juftice humaine n'a
(fu'un patte; celni de l'innocence; la juftice d'un pere,
comme celIe.de l'être fuprême, en a deux : celui
de l'innocence &. celui du repentir? (1) L'Enfant prodigue revint dire à [on pere: JE NE MERITE PAS
c;
;; Il
,,;
i
<
= i'
Il
q
.,
" (/)' La jurlic;e J1Utn~ine qui oe voi[ q~e les aé1:ions, n'a qu'un
" paé1:e: cel ui de l'inno"nce. La jnrlice divine qlli voi[ les penlées ,
" en a dt'!x: celui de l'innocence & du répcmir. [ Elp,i[ des Loix,
liv, ~6 , chap. IJ..]
.
55
D'ÊTRE APPELLE VOTRE FILS; J'AI PÉCHÉ
CONTRE LE CIEL ET CONTRE VOUS. Son pere
attendri le reçut, le ferra dans [es bras, &. dit:, MON
FILS ÉTOIT MOR T; IL EST RE~SUSCITE; IL
ÉTOIT PERDU; IL EST RETROUVE! Voilà le pere
de l'Evangile ; voilà le pere de la nature. Tout, aut~e
feroit impie &. barbare; &. mon pere ne le fut J<lmals.
Si [on imagination ardente clonna trop d'av?nt~ge au:c
d~lateurs, aux calomniateurs, revenu à lu\-meme, Il
fut toujours clémc:1t & généreux.
"
_
Quoiqu'il en f?lt, ~on pere a ,dlff~ade fa belle-fille
de demander fa [eparatlOn lors de 1 af{all'e de PontarlIer.
Cela ne prouve certainement pas qu'il l'aie prononcée luimême.
Madame de Mirabeau crut alors, ou l'on crut pour
elle ql.'il étoit entre nous de j~ftes ~au,fes d.e réparation.
Pourquoi donc' attefte-t·elIe aUJourd hUI un Jugement do·
mefiique qui n'a pas été prononcé? Qu'elle fafre valoir
ces caufes fi elles font bon nes ? Au lieu de fuppo[er
qu'elles [ont jugées par le, tribunal domefiique,' qu'eII.e
les faiTe juger par les Magtftrats? II eft trop blfarre, Il
eft trop abfurde de prétendre qu'en diffuadant alors [a
belle-fille de demander la féparation, mon pere m'aurait
Illis.dans une /ltuation pire que celle où je me [erois trouvé
par la demande de Madame de Mirabeau, &. même par
une Sentence qui nous aurait féparés.
Cela feroit cependant: car enfin j'aurais appellé de
cette Sentence, qui ne pouvait être accordée que par
défau t à fuppofer qu'un défaut puiJfe être demandé contre
un ho~me que des ordres du Roi ~mpêchel1t de parohre
en J ulftice.
"
Et fi j'euire pu rép0nclre, j'aurois été. reçu à dire que
le principal moyen de Madame de MIrabeau étant la
procédure de Pontarlier., il fililoit, rèfi\7oj}'er à fiatuer [ur
�S6
la demande en fépararion jufques après le Jugement Contradiél:oire de cette procédure.
Ne ferait-il pas abfurde de fuppofér que mon pere a
donn é à fi.. belle-fille le droit de faire juger la fépara_
tian d'après ce que l'affaire de Pontarlier paroilToit être
alors, & non d'après ce qu'elle étoit effeél:ivement, Comme
il a été éclairci depuis, enfuite de fix mois d 'inftruél:ion
& de deux mille pages de procédures? N'eft-il pas trèsétonnant que ma femme prétende avoir acquis de fon
be.au-pere le droit de m'interdire toute défenfe naturelle,
foit relativement à mes propriétés de citoyen & d'époux,
foit relativement à mon h onneur? .... Si les défenfeurs
de Madame de Mirabeau étaient auili las de difputer
l'évidence, que je le fuis de débattre des abfurdités,
tout polémique fer0Ït bielltôt fini entre nous.
Nous fommes arrivés au troifieme période que trois
féries d'événemens remplilTent : ma détention au Donjon
de Vincennes: l'emploi des deux ans & demi qui re font
écoulés depuis que ma liberté m'efl: rendue: mes démarches depuis mon retour en Provence.
Je n'ai point à juftifier ma conduite à Vincennes ,
puifque les ordres du Roi m'ont rendu ma liberté à la
foll icitation de mon pere. Madame de Mirabeau prétend
y avoir contribué. Je pourrais, mais il eft inutile; & je
ne veux pas prouver qu'elle écrivit une feule lettre il
cet égard, qui ne mérite pas plus le nom de fupplications
[orus que celui d'injlances preffantes. Si mon pere feignit de lui donner beaucoup d'importance, c'eft précifément parce qu'il defiroit la réunion qu'on foutient
qu'il voulait empêcher. Tout fon but fut d'embellir à
mes yeux Madame de Mirabeau par le charme d'un bienfait, & de l'honorer aux fiens même par le merite d'une
bonne aél:ion.
,Q uoi qu'il el! foit l
je, fll~ ~argi, E.ll:çe alors que la
féparation,
.
11 '
7
réparation a été prononcée 57
dans le tnbunal
c1~melllque
.
Madame de Mirabeau a-t-elle provoqué ce Jugement?
Elle fe glorifie d'avoir follicité m~ l,i~erté: cela nt:! fu~
pore alTurément pas qu'elle voulut ecre féparée; & Je
demande fi cette reftriél:ion in,érieure & cruelle peuc fe
fuppléer ?
La réponfe de mon pere à la lettre où fa bell.e.fille
d emandoit ma liberté; .cette réponfe dont on a faIt va- 11 juin f 779.
p'g. II & foi ••
l oir Cous les termes avec tant d'affeél:ion ; cette réponfe du
Lib 110.
très-pofiérieure à la cohabitation, ~ l'interdiél:ion., à l?
procédure prife à GralTe , à l'affaIre de Pontarlter ,'. a
toutes mes erreurs à toutes mes fautes, à tous les dehts
'
,l jui me font imputés;
cette réponfe. qUI- ? pré~éd~ de
dix-huit mois mon élargiiTement, qUI paroIt fi negatlve,
& que pour cela même j'ai choifie entre toutes les lettres
,de mon pere, prouve que fan imagination étoit calmée,
& qu'il ne voyoit plus fous un jour fi fombre ma conduite palTée. Les mots fui vans font décjfifs: » D'ailleurs,
» ma chere fille, fi Votre mari avoit rame b alTe, il Pag . 14 du
» écriroit douze pages de contrition & tout ce qu'on Li belle,
» voudroit; cela ne lui coûteroit rien. II a tout le con» traire; & toutes les balTeiTes qu'il a faites font pures
» folies , & folies gauches par l'efprie, autant que fou» gueufes par le fang. Ses plus grandes baffeffes font
» vis-à-vis de vous; vous en pouvez mieux juger qu'un
.) autre ... S'il étoit contrit, il en penferoit plus, n'écri» roit point, & feroit mort dans peu.
. L'ingénieux Auteur du Libelle a fait imprimer en lettres
;italiques ces derniers mots: IL SEROIT MORT DANS
.PEU; & les précédens: SES PLUS GRANDES BAS,sESSES SONT VIS - A - VIS D E VOUS. Cherchons à
deviner fes motifs , qui ne font apparemment pas de
-sendre odieufe Madame ·de Mirabeau.
S'IL ÉTOIT CONTRIT, IL SEROIT MORT
PANS PEU. Certes mon pere, dans ,elte llhrafe que 1'011
-
.
.
H .
'-
•
�.
58
Par' Ll.il du
"'" c.
i~prime con~m~ une infulte notable, reconnaît un cœut'
bien noble a 1 homme que .I~ gaucherie d'efprit & b
~ougue du fa~g o~t égaré. S\ Je vois de fang froid mes
egaremens, Je fUIs capable d en mourir!
Mais ce n'ell pas mon éloge qu'a voulu faire le Lib ~ lI.ifie. , A - t - il donc prétendu conclure de ces mots
ùt!hngue~ par .des car~éteres italiques, que je ne fuis pas
contru pUI[que Je ne [UlS pas mort! Etrange preuve d'amen.
clement qu'on exige de moi!
.
A-~-il cru trouv~r ~ans ces mots la promeffe de la fé-'
p aratlOn ? En vénté Je voudrais bien voir découler de
la plume du Libellifie, ce dilemme vraiment digne de
[a dialetique. SUR CES MOTS DU MARQUIS DE
MIRABEA!J, SA B.ELLE-.FILLE NE POU VOIT MANQUER D'ET RE SEPAI\EE : CAR OU SON MARI
NE DEVOIT JAMAIS ETRE REPENTANT ET IL
RESTOIT DANS SES FERS; OU REPENT ÀNT , IL
DEVOIT MOURIR.... 0 vous qui futes la mere de
';l0n fils! y?US qui portez encore man nom! à quel
etrange logiCien vous avez confié votre plume & votre
fignaturé!
SES PLUS GRANDES BASSESSES SONT VIS-A-VIS
DE VOUS. Les baiTeffes que vous prétendez prouver
p,ar ce~tel:ttre de mon pere, [ont-elles des moyens de
[eparauon . En ce cas, veuillez me définir ce que mati
pere a entend~ p~r m es grandes bajJèjJès envers [a bellefille: car on lIt bien dans cette lettre le mot de BAS.'
SESSES , mais on ne trouve pas un fait j & ce [ont ce"
pe~dant mes; ~LUS. GRANDES BASSESES que celles
qUI [ont relatives a ma femme. Mais nous y revien./
dron,s? occupons-nous encore de cette lettre qu'on a cr~
fi decllive.
~on pere jugeait que toutes mes bajJèjJes Ont été de purd
folles, & Joftu gauch.es par L'ejprù autant Gue lôulYueu rd
par le r.
&
fi " J •
J
J' b
J' ,
Jang;
que
1 )
~tOLS
contrit,
.
je mourrois dans peu
,
'é
59
Oh ! certes Je n tais donc point à (es yeux l'homme
attroce que l'on a repréfenté dans le Libelle. » Je n'étais
» pas ce mau\'ais pere qui ne préparait il [on fils ' que
» des exemples funefies & humilians; .... un nom avili
TOO &
» & dégradé; . . .. ce mauvai~ citoyen; .... ce fujet 1 0Pag.
' du Llbello.
» dangereux, parce que j'avais des dettes baiTement
)r contraétées ; .. "
parce que j'étais flétri par des dé» crets, par des . procédures, par des, Sentences infa» mant!!s;. parce que j'avais ATTENTE A LA P R O1) PRJETE D'AUTRUI. » Imbecille calomniateur! qui
me forcez à tranfcrire cet amas d'horreurs,. dites: ofez
dire que mon pere n'aurait vu dans tout cela que de
pures folies, & jôlies gauch es par L'efprit autant que fo ugueules par le fang! Quoi! j'aurais SPOLIE la maifon d'un
mari dont je forçais la femme à me Cuivre ; j'aurais conçu
le projet d'époufer du vivant de mon épou[e une autre
femme; j'aurais voulu enlever ma propre femme pour
m'en faire un ôtage! Et taures mes baiTeiTes n'auraient été que PURES FOLIES, ET FOLIES GA UCHES PAR L'ESPRIT A UT ANT QUE FOUGUEUSES
PAR LE SANG! .... Vous me jufiifiez donc en voulant
m'outrager! Mon pere n'a Pas cru, même au temps de
fa [év~rité la plus exceffive , les faits [ur le[quels vous
attefiez [on témoignage.
Il était bien éloigné de pen[er que je fuire un infame ,
& que ma femme pût être féparée; pui[que a uffi long• temps qu'il per[evera dans le deifein de ne pas me rendre
ma liberté, il craignoit que Madame de Mirabeau ne me
Pdg. 3 S du
reclamât: il lui en reconnoiffoit le droit. VOUS SEULE, L ibdlo.
MA FILLE, POUVEZ QUELQUE CHOSE POUR
"LVI. Et dans fa lettre du 24 avril 1780 : SA FEMME
"AUROIT TOUJOURS DROIT A LA DEMA NDER. Pag. 3,.
( La liberté de [on mari.) Mon pere etait encore irrit~,
'cela eft évident; mais il' ne l'cil: pas moins qu'il était
H ij
•
�60
m i.;!ux in(h' uit que dans les premiers mOlllens de l'affaire
de P ontarlier.
. , ;,
Eh ! qui n'eût pas été trompé comme lUi ? Mon e"a~
{ion, celle de ma prétendue complice laiifoit le Chal!lp
le plus libre à la calomnie. De grands, de fervens, 1I1~
térêts la proclamoient de toutes parts. Et le p~re qu elle
aŒ ' geoit, ce pere abymé de douleur ne devolt pas tout
croire! Et l'opinion qu'il a proférée dansl' le~ ~ranfpéoflréts
de 'f.r juCle doule~r , eft l'o~inion faine, Opll1l0n r
chie! l'opinion digne de fOI! Ah! malheureux, queUe
ame avez-vouS donc pour calomnier ainfi le cœur hu~,
•
1
maIn .
A
,
Mais ,Madame de Mirabeau elle-meme , au temps ou
elle recevoit cette lettre de fon beau-pe,re, ~adame de
Mirabeau étoit bien revenue de [es premIeres llnpreŒo~s
[ur l'affaire de P ontarlier, puiCqu'elle dema.ndoit ma !l~
berté. Elle ne jugeoit certainement pas que j'~uife ménté
de perdre la tête, ainfi qu'une Sentence m Y, condamnoit; car eUe n'auroit pas voulu me rendre ltbre pou~
me livrer au glaive des Loix. Au fimir da mazns du R;OI
'aLLait pas craindre. de Lamber dans ceLLesM'de La
P,~, ! 1 dU 1'L ne J'
b JujlLce;
LIbell e,
C'eft la réflexion du LIbelle. Madame de,
Ira eau ap-,
précioit donc mes fautes tout au plus co~me [on ,~e,au~
pere. Elle n'auroit pas voulu me rendre ~ l~ [o~lete fi
elle eût imaginé alors, comme on le I,UI faIt dire au~
jourcl'hui, que J.'avois baJ1èment cont~aél~ des, dmes; 'lue
j'avois ATTENTE A LA PRO~RIETE D AUTRUI;
que j'étais flétri par des Sent~nce~ znfamantes,; 6- que mau",
vais pere, autant que mauvaIS clloyen & fUJet danjJereux,
je n'avais à laiJ1èr à m~n fils ql~e de~ exemples junefles ~
'lu'un nom dégradé & avdl . Elle n aurolt pas demand.é m.a
liberté , {i elle eût pen[é alors comme on le lUI fait
~gner aujourd'hui, que j'éto~s capable d'ép'0ufer une ,autre
femme, de [on Vivant, (,. de l enlever elle-meme pour otage~
6r
1
Cette lettre .de mon pere ne prouve donc pas le ' juJ
geZ?enr domeftlque ou paternel qui a prononcé la féparatIOn. Ce:te lettre & les démarches de Madame de
Mirabeau • prouv~nt au contraire que mon pere & fa
belle-fille t:tolent egalement revenus de leurs premieres impreffions [ur mon compte, & qu'ils me juftifioient même
des plus fortes accu(ations vomies Contre moi.
~ Madame de Mirabeau écrivait autrefois; ( lettre du
fix Septembre , 1774 ) )) TON PERE NE SE PLAINT
) DE TA TETE QU'EN FAISANT L'ELOGE DE
» TON C<I!UR. » Et dans celle du 8 Novembre même
année; )) Tache de brider ton imuaination qui eft chez
.
1
b '
)) toi Ulle ame -u[ant fans ceife le fourreau par tous les
) bouts, comme on dit. L'imaaination de mon bon &
» unique ami eft vive; elle l'égare quelque fois, & il
u en e.ft la dupe. )) " .. Certainement elltre ce portrait
& celUI que ,mon pere a tracé dans la lettre que je difcute.: )) II n a pas l'a~e lâche; toutes les folies qu'il a Du tl
) faites font pures folies, & folies gauches par l'e[prÎt '77' ·
)) ~utant qu~ fougueu[es par le fang .... S'il étoit contrit,
}) Il mourrait dans peu)) '" .. Certainement entre ces
po;traits il eCl une très-grande reifemblance ; & la nuance
qu on Y trouve eft ceUe qui doit exifter entre la touche
molle, douce & flatteufe d'une femme
& le pinceall
ferme, dur, exagéré d'un pere irrité. '
SES PLUS GRANDES BASSESSES S'ONT VIS-A.:. '
VIS DE VOUS. Je reviens à ces mots encore une fOisj
~uelles font donc ces balfeifes ? Des févices ? Rien n'in~
<lque que mon pere m'en imputât. Sa lettre du 28 Juin'
~74, prouve même formellement le contraire. Ces
i1felfes ne font donc que les faits connus' & ces faits
ne ue
t 'etre que l ' aualre
fT •
~
uven
de Pontarlier
; car j'ai
mO!\'é évidemment que mon pere & ma femme ne
croY(ent plus ni au double mariage ni à l'enlevement
pour ~age.
juio
�oz.
- MES BASSESSES envers ma femme ne peuvent être
que du nombre de ce~les <Iue mon pere appelloit pures
j olies
rTiluches par 1 ejimt atltant que fougueu((s par le
'd
!aJlt/J j & par conféquent mon p~re n. a pu enren re par
ces mots des févices & de mauvaIs traltemens dont Mada,
Pag. H
tibcllc.
0
me de Mirabeau ne s'eil: d'ailleurs jamais plainte.
Voilà donc mes plus. grands torts reduits, aux yeux de
mon pere, à l'affaire ~ Pontarlter qui n'ét.oit point encore
éclaircie.
Mais revenons au point principal de la difctlffion actuelle. Où trouve-t-on dans la lettre que je viens d'analyfer &. de débattre la moindre trac.e d'un jugement 00mefiique qui ait ordonné la féparatIon? Elle prouve au
c ontraire cette lettre, elle prouve, de concert avec
les démarches de Madame de Mirabeau , que mon plus
- grand tort étant l'affaire de Pontarl~er, ~elle, qu'ell,e paroiiToit alors ma femme ne fongeOit pOll1t il fe feparer
pour cette c;ufe, devenue moins gra~e dans fan ef~rit.
quoique la Sentence de c?Ut~ace eXlil:ât encore, qu elle
ne l'avait paru dans le prmclpe.
, Il Y a plus: non feulement orr ne, tro~ve pas dam
cette lettre la plus légere apparence d un ,Jugement do.
meil:ique , mais elle en exclut tü:u~e Idée; e~le y
efi formellemen t contraire ; &. VOICI comment Je le
prouve.
.
du
Madame de Mirabeau avoit demandé mon élarglife.
ment. Mon pere le refufe; il ajoute: » vous avez Ul
l) pere; vous avez dans le cœur &. dans l'erpr.it tout je
)l qu'il faut pour fentir &.
connoftr~ vos deVOIrs & ~s
)) befoins - tout vous ordonne d'en fa.rre le chef
. de . vlire
J) confeil . tout VOfl,f défend de vous en jeparu J amaiS.
L'Auteu:. du Libelle a fait imprimer en italiqv ces
deroier3 n!0.rs ; -& je les aurais 'bien remarqués fal' cert,e
attention am,ieufe. Mais -quelrle confé!1Juence pttend tl
en {irer ! Celle-ci probablement: TOUT VO'S OR-:
,
6J
DONNE DE VOUS SEPARER ' DE "VOTRE MARl:
Eh bien! de cette conféquer.ce même j'en tirerai une
autre qui en découle bien naturellement; c'ell: que mOll
pere donnoit Ull confeil, & ne prononçait pas le pré-;
tClldu Jugement. Le confeil qu'il donne à fa belle-fille,'
parce. qu'il croyait ap~aremment qu'elle en a~oitbefoin,
ce confeil prouve aflez que Madame de MIrabeau ne
réclamoit pas f~n mari pour en être féparée. Et comm~nt
mon pere aurait-il prononcé un jugement de féparatlo~
qu'on ne lui demandait pas?
Mais votre conféquence efi auffi fau./fe, qu'à l'adoptét'
celle que j'en tire ferait vraie. Madame de IYIüéfb~au <le,'"
mandait ma liberté. Mon pere troUvé cette demande
peu prudente; il craint que ma femme n'.ufe de fes droits
plus puiffans que l'autorité paternelle ; Il rappelle à f~
belle..fiUe qu'elle ne doit rien faire fans le- ~onfeil de f~r[
pere; il ne lui dit pas , il ne pe~H pàs lui <lüe: » fi
» juge jamais à propos de brifer les . fers de votre mari,
» vous ne devez vivre avec lui qu'autant qu'il plaira le
» votre pere ». Et remarqtlfZ bien la différenoe entre,
ce qu'il dit &. ce qu'il ne dit pas: » Doit-on ou ne doit1
» on pas rendre la liberté à vo~re mari ? Aval<\t de le'
» réclamer, avant de faire valoir les droits que vou!:
» avez fur fa perfonne , conftl1rez avec vot~e pere ~u~
» cette démarche qui pourrait être imptudeme~). V 011<1;
évidemment ce que dit mon pere. Mais mO~l pere.
qui feul m'a privé de la liberté, qui feul pouv.oit
m'en priver, qui n'avait pas befoin de vo,tre aIde
pour me la rendre , au moment 00 ,il m'en trouvojt:
digne; mon pere me trouve~t-il capable de la reeO\lV'rer ~
Il n'y a plus matiere à confeil pour v.ous S vous n'avez
pas même le droit de mettre en queil:ion -fi vous devez
vivre avec votre mali. C'efi votre devoir fur lequel vous
ne devez ni confulter ni délibérer, &. qui fradmet aucun
devoir fupérieur.
,e:
�65
64
Eh bien! que fOllt devenues les objcaions que l'on
tirait de cette lettre dont on a fait tant de bruit? Celle
du 24 avril 1780 n'ell pas plus redoutable. Il ne s'y
trouve pas la preuve la plus légere du jugement domeftique. M. de Rougemont a été porter à mon pere mes
jtlfies réclamations. Mon pere rend compte à Madame ~e
Mirabeau de cette demarcjle, & de fa réponfe que le LIbellifie n'a pas manqué d'imprimer en italique. Cette réponfe commence ainÎl :
<.
)) JE LUI DIS DONC QUE J'AVOIS PARDONNE
,,) TOUT CE QUI M'ÉTOIT PERSONNEL.
Mon pere m'a pardonné mes torts envers lui., & vous
les publiez ! & vous les agravez ! vous l'époufe de fon
fils! vous [ouffrez qu'on imprime dans un LIbelle figné
de vous , que votre mari » a été mauvais fils, parce
Pat; :fI~.du » qu'on l'a vu par fes folles & ba!fes diffipations dévorer
» le patrimoine de .fan pere; troubl.e~ fon rep~s par des
}) pf"Ocès indignes; affiioer & hum Il ier fa vletlle!fe par
» le fpeétacJe de fes tr~vers, & attenter ?'1ême à fO.1l
t) honneur par d'infames Libelles». Ah! Je ne fauro ls
.vous di[puter de vous connoître en Libelles; & nous. n'en
fommes point à examiner les faits ; ils feront tous dlfcu.tés, & tous renverront [ur.la tête coupable du cal~m
:niateur l'opprobre dont la vérité même, s'il l'e~tt dite,
}le l'ab[oudroit pas. Mais ces torts qui ne ferolent pas
des torts, qui feroient des ferfaits ; ces torts qui., [eloQ
votre Lihellifte, font un des aéles de celle vie enliere gue
l'.g. 100. ')JOU! f!rofl~fe{ pour moyen de féparatipn; ces. t-orlS fuflèntils réels, vous les publiez en · nous apprenant que
mon pere les a pardonnés. Ah! dites, dites aL! calomniateur qui vous prête [a plume, que c'eft par de tels procédés, par de telles délations, par de' tels outrages, par
de telles calomnies, & non par d\:s dettes & des e,rreprs
de ieune!fj}. ~ qu'ON PROFANE LA SAINTETE DU
hg. 1 0 0, MARIAGE.
•
Non, je ne puis le croire encore, le cœur d'une femme;
le cœur de ma femme n'a pas conçu Je projet d'une diffamation fi .atroce contre le pere du fils qu'ellc a fu pleurer! Jouet Infortuné d~s con!eils q~i la perdellt, parce que
fon [alut ou [a perte n l:npone pomt à leurs infligateurs,
pourvu que nous ne pulillOns plus nous réunir' en vain
un précipice toujours plus e[carpé s'ouvre fous' (es pas;
el.le le Cent ~ e;le le vo;t, .& ne peut rélifter à l'impulfion
VIOlente qUI 1Y entrame; elle y tombera . moi. même
peut·être; moi-même je ne pourr,ai plus l'en ;rrach er! Ah!
pourquoi fon fort l'a-t·il pou!fte vers l'antre de la chi~a~e! ~llj[que fes par.ens., fes. amis, [es con[eils l'égaroient
a l enVI, que ne la !;;1l!fOlent-lls du moins [ur ces théatres
qu'on lui reproche tant d'avoir embellis? Combien elle
y eût trouvé une morale plu~ pure, moins étrangere à fon
cœur. que cell~ de [es mémOires. Qu'elle apprenne le rôle
de LI[e, plutot que des Con[ultations des Faétums & de:.
Libelles! Qu'elle me voie, s'il le fil~t , (ous les traits du
fil~ ~îné d:Euphémoll; il quitta le meilleur des peres; t~ois
fOIS Il le mit au~ bO,rds du .tom~eau; il quitta la plus tendre
des amantes; Il n eft pomt d outrages que [a débauche
in[enfée n'eth fait il la nature, à l'amour. Life alloi~
pa!fer dans les bras du [econd fils d'Euphémon. Réduit
à n'avoir pour héritage que le courroux & la malédiétion
de [on pere, l'infortuné fugitif revient dans la mai[oQ
paternelle avec un cœur épuré par le malheur & fes premiers feux •. L'amour l'ab[out,i la nature lui pardonne;
le pere reçoIt fon fils des malllS d'une amante qui l'accepte pour époux des mains d'un pere. Euphémon cadeç
eft le [eul dont L'ame illlerejJée n'applaudi!fe pas à la
clé~ence du pere, au repentir du fils , ~ la généroflté
de 1amante.
Cet intéreifant tableau qu'un des premiers génies du
fie cIe a tracé, préfente cette grande &. con[olante leçon
l
'
Non;
.
.
-. .
•
�66
qu''! n! fiutt jJmais dé(ejpùa de la ieunejJe. Que Madame
de Mirabeau le confidere , qu'elle l'étudie: Que Life qui
n'était point époufe; que Life qui avoit tant à pardonner,
&. pour qui le pardon n'étoit point un devoir ; que Life
apprenne à Madame de Mirabeau tout ce que je n'ai pas
te courag<: de lui dire.
M ais revenons à ces lettres affreufes qu'il faut achever
d'éclaircir. Envain mon cœur bondit; envain mon imaaination avide de fe dillraire frémit &. ie glace; cette
fâche m'ell im pofée ; il la faut remplir; je ne fuirai aucune des éprel!ves que le forr réfervoit à mon courage.
La réponfe que mon pere crut devoir à M, de Rougemont, ell inCérée dans fa lettre du 24 avril 1780;
on l'a imprimée en caraéteres italiques pour la rendre
plus remarquable: Et certes le début aurait fuffi pour
frapper d'indignation tous les cœurs honnêtes Contre le
Libelle, Voyons ce qu'on peut inCérer de ce qui fuit.
» Je lui dis do nc que j'avois pardonné tout ce qui
Pag. ;6 du » m'étoit perfonnel &. par caraétere, &. parce que je re·
Libelle,
)l gardois le
délinquant comme fol , ~ finale_me,nt parce
» que j'étois (on J uae ; &. comme tel Je devols etre fans
» pallion. Que cel: fait, je l'a,voi~ )ugé par droit na» turel & focial ; & comme tel, Juge lllcurable &. propre
» uniquement à troubler la fociété &. déshor:orer mon
» nom; que tout étoit dit à cet égard; que Je ne don» nerois donc jamais les mains à fon élargiifement; qu'on
» pourroit me la forcer en deux manieres : l'une de fait
» l'autre de droit. La premiere étoit l'autorité qui m'en
» avoit menacé, (1) &. à laquelle j'avois répondu qll'elle
- - - - - - - _ _ _ . - -_ _
--~,~.
d' _
(1) N ouvelle preuve qu'il dl abrurde d: prérendre que c,e foot à la
Collicitarion de M,Jame de Mtrabeau 'lUt ~e dOlS ma lil>t:llte! NQ\lyelle
preuve rW'-tOut que mon P"'~ éJ.oj,r. dan s l'errc\I< lorf,!u'il éa.'I"W' (~
1mres : car e\llin c'ell à lu i que je dois l'élarg iffement auquel Il affurolt
ne d~.ir jamais donner les maim .
.
67
» étoit hien la maÎtreffe; mais 'que mon déraveu (eroit
» notoire, &. que fes dépofitaires feroient garans de ce
» qui ,en réfulte,ro i~. La feconde étoit fa femme qui avoit
» tou)o,urs d~olt il le demander, mais que je ferois le
) prem~er ~ Juger digne d'être interdite, fi elle le faifoit
» [a~s 1 aveu de [on pere.
ICI deux chofes peuv~nt {ervir à ce qu'on appelle la
d~fel:fe de Madam~ de Mrrabeau. L'~ne que [on beau-pere
m a Jugé, par droit naturel &. [oclal, foi incurable &
propre ulllquemenl d lfouhler la fociité & à déshonorer ~on
nom: l'autre, .que ma femme auroù toujours le droit de me
demand:~ j malS ~lIe fan beau-pue ferait le premier à la juger
dIgne d elre znurdl,te fi elle le foifoit fans l'aveu de fan pere.
- Remarquons d abord que la premiere partie de ce di[co.urs ,eft un langage dont mon pere étoit convenu avec
l~l-meme pour écarter ceux qui [ollicitoient mon élargl[fement. Il l'avoue en propr~s termes : il ( M, de Rougemont) me mu dalls le cas de lui faire ma profiJ/ion de
fin , DONT JE ME SUIS ARMÉ DEPUIS QU'ON ME
TOURMENT;E SUR CET ARTICLE. C'étoit donc une
réponfe combInée 1?ar [on efprit, & non diétée par [on
~œur,; &. [~n efpm a dé[avoué cette réponfe, puifque
Je [UIS élargI. Mon pere avoit à motiver fes refus à M.
~e ,Roug~m~nt ; il avoit à refufer ma femme elle-même;
Il S a:molt, dune profellion de foi préparée, Per[onne ne
de.v oIt mOllIS [e tromper à ce langage que Madame de
Mirabeau. qui m'écrivoit le 13 Septembre 1774: Ton pere
affi,c7e .toujeurs beaucoup de celere Contre toi, je crois pOlir
prevelllr mes impartunités. Il y a plus. A travers le langage
affeété , avec lequel mon pere eifaie d'éconduire M. de
Rougem~nt, les difpofitions favorables percent de toutes
~arts ; lUI-même. s'en apperçoit. Ce folU apparemmelll, ditIl, ~es p'~ro.'es qUI, rapportées à cet homme, lui Ont fàù dire
que Je n eU:IlS pas injenjible. Cette lettre du 24 Avril 1 780 L~:t·c.l7
1 ij
du
�68
ell donc pure affeél:ation , & ne prouve abColunientt rieQ
contre mOI.
M a feco nde remarque ell qu'a{furément on ne (aurait
in f~re r de cette lettre de mon pere qu'il juge aujourd'h li ou m Ame qu ' il jugeait autrefois fa belle-fille digne
âtÙr~ inlerdite , fi après mon élargi{fement elle me rej oignait Can, l'ave u de (on pere : Il ell évident q.u' il a
feulement voulu dire : » ma b elle-filJe. a le droit de
» réclam er fan m ari; mais fi, tant que je .Ie croirai
» incap able de (upporter la liberté , elle agit (ans l'a» veu de fan pere pour la lui faire rendre, je la
}) c ro ira i diane d'être interdite ». Et combien cela n'ellil pas difré~e nt? Mo n pere a fou pçonné (a b elle· fille
d'un amour ave ugle ; il étai t bien éloigné de foupçonner qu'elle n'aurait que de la h aine.
N on feule ment cet te lettre du Z4 avril 1780 , ne prouve
p as le j uge me nt do mellique 9ui prononce , la fé?arati~n,
mais elle ne fuppofe pas meme que la feparatlon pUl{fe
être demandée.
Par quel moti.f , dans quel!~ ,:ue l'a-t-on donc. p;o,
duite? P our avoir occaCion d ecnre une note, qUI d un
b out du R oy aum e à l'autre, a fait pâlir tous les honn êtes gens. Ma dame de Mirabe~u feroit a~ ~éf~fpoir ~
je lui m ontrais la moindre par~le ~e ce qlll m " eté écrIt
à cet égard. C~l homme , ell·tl dit au bas de la page,
cet homme ( M . de Rougemont) qui vient fi ginéreufement
inurcéder pour fan prijonnier , mérite-t·il l'épifode que .t'on
trouve concre lui dan s l'ouvrage récent & anOlly IJu des priJons
d' Etal ? Si j'étois l'Auteur de cet ouvrage , n~n feul: •.
ment anonyme , mais annoncé pollhume; fi J e~ étols
l'Auteur, je faurois au befoin, n'en d?ut:z pas, ' Je fau·
rois & l'avouer & m'en honorer, & Jullifier 1 éplfode ,
& me laver du' reproche d'ingratitude. Mais que j'e~
fois ou que je n'en fois pas l'Auteur, ce n'ell pas de qllOl
il s' agit entre Madame de Mirabeau & moi. Que cet
69
ouvrage (oit bon ou mauvais, peu importe ; l'A uteur
de la note avant d'effayer d'impofer à Madame de M irabeau l'infame rôle d'Efpion de Police, auroit dû lui
faire lire le palTage fuivant de ce livre, qu'il dénonce
en fe réfervant Ul\ moyen de défavouer la délation.
» Il y a un palTage de Velleius Paterculus , que je
) n~ ~e rappelle jamais fans effroi .•.• Les Profcrics,
) dlHI, trollVmnt DANS LEURS FEMMES UNE
)} FIDELITÉ PARFAITE, médiocre dans leurs affran» c/u s & leurs eJclaves , nulle dans leurs fils , tant t'eJPi\. rance eJl une . dangueuJe f éduélion pour l'eJPrit humain , &
» c~pab!e de Ylo ler /es droits les p lus faints , dès qu'ils de» vIen nent des !etardemens & des ohJlacles. ·Vell. II. 67. Il
H eft donc vrai que le defpotifme peut no ilS montrer
NOt. 8 . ch. S.
" Le fils 10U' dégoûlam du nleunre de [on pere ,
" Ec [a lêle à la main demandant {on (alaire.
" M ais du moins les époufes étoient encore fideles &
» m ême capables du plus généreux dévouement du t:ms
» des profcriptiôns, du Triumvirat, c'eft-à·dire, au mon ment ou le regne du defpotifme commença à Rome.
_ Nous ne fommes point au tems des profcriptions, nous
v Ivons -fous l'empire de Louis XVI. Les Triumvirs, les
T ibere , les Claude, les Domitien rie font plus. Et l'on
a v oulu que Madame de Mirabeau offrît un genre de
d él.a t~on, qui auroit effrayé un fiecIe, des mœurs de fang,
JUlqu aux tyrans de Rome.
Le 10 décembre 1780, mon p~re écrit à M. de Marignane ,qu:i1 a confenti que j'euffe pour prifon le Château de Vl1lcennes, & qu'il va me faire fubir des
épreuves.
O? re~arqliera , JO. que dans cette lettre mon pere
ne dIt palOt que ce foit aux ' follicitations de Madame '
de Mirabeau qu'il -ait accordé mà liberté. 11 dit au con- Li~:ll~. 3 8
&
•
dq
�7°
Pag .• 1 du
l..bdk.
Pag. 4l du
l.ib:1I •
traire formellement qu'il l'a refuCée. 1°. Que 'la premiere
épreuve parut bientôt d~ciftve l car je n.~ ~eCl:ai pas qUinze
jours au Château de V IIlcenn~s, &.l 31 pubhq~ement,
&. de notoriété publique, habité Pans &. Verfatlles tout
l'hiver &. le ptintems de 17 81 .
Mon pere ajoute: )) je vous donne ma parole, Mon» (jeur que de mon aveu, il n'approchera jamais de Ma,
,
,.
d
é&
» dame votre fille que vous ne 1aylez or Ol1n
perl ) mis. Je
puis vous prom~ttre .mêl~H! , d,e l'el11pêc~er ,
J) puifque, Jelon le pouvoIr qUI
m a et~ confié, ~I ne
» doit aller qu'aux lieux où je l'enyer:ral , ~arvenu a ma
» Coixante-fixieme année, fans aVOIr JamaIs trompé per)1 fonne, ayant dédaigné d'être .fin,
j~ n~ c?~me?c.e .
1) rais pas à mon âge d'être parjure. Nos I?tt!! ets d allIl leurs en ceci font communs. J e ne faurols e tre foup'
» çonné de vouloir tirer en toute maniere ul1 enfant d'un
Il fou. Si mon fils eCl: ce qu'il fut , il recouvrera blenIl tôt ce qu'il quitte;
s'il eft changé , il faut qu'il le
Il foÎt du tout au tout. Quarante-deux mois d'une exatte
Il nri (on
s'Ils n'acbevent pas une t&te , font, dit-on,
L
,
'ft.
1) c"pables de la retourner. Dans tous les cas,
ce a
Il moi à fubir &. en faire fubi .. l''!p reuve.
L'autre lettre eft écrite à Madame de Mirabeau le même
Jo ur.
.
» Vntre cœur eft bon &. votre ame élevér. Si mon
Il fils peut devenir ce qu'il promet d'être, il faura vous
Il refpetter avant tout, connaîtra que ce fentiment s'é·
Il leve , &. peut feul le porter juCqu'à vous. Et vous
» llbuS aidert!z a~ors à le rétablir dans fan état &. dans
» Je monde. Mais (j vous defcendiez à lui, vous pour,. riez pour lui peu. d,e chofe , &. rifqueriez de faire to.ut
Il contre nous. La meilleure 'précaution contre cet ccuell,
Il c'eft de ne rien faire que de l'aveu &. fans le conCeil
JI de M. votre pere •.. • . N9uS ferons touj~urs par.fail> temest d'accord fur los chofes effÇ1ltielles ; Il conVlent
71
), peu de donner des conCeils entre mari &. femme 5 maiS
ce font mes enfans , &. je le dols au moins une fois,
» attendu les circonftances. Si votre mari m'en croit,
Il s'il m'obéit même ., il ne fera l'empreffé que d'une maIl niere convenable à un hemme qui d oit fe régc:nérer
Il &. changer du tout au tout, c'efl:·à·dire, uniquement
Il pOUl' vous montrer que, revenu de fes égare mens , il
)1 fent le prix dont VallS devez lui être, IX veut méri·
)} ter votre' ellime avant tout. S'il exige oit d.a vantage ,
)1 vous êtes dans le droit , &. dans
le devoir même de
" lui dire, &c. ce ne fera jamais de mon confentement
Il que veus recevrez I1lOn fils de toute autre main que
)1 de ceUe de M. votre pere.
Comment trollveroit-on dans ces lettres le jugement
domeCl:ique qui prononce la féparation , puifque non feulement Madame de Miraneau ne la demandoit pas; mais
qu'au contraire mon pere craignoit que fa belle ,flUe ne
me réclamât avant qu'il m'eû{ éprouvé?
Comment expliquer ces mots: Et vous nous aident
alors li le rétablir dans fon état & dans le monde. EfI:-ce en
prononçant une féparation de c<?rps que l'on comptoit
ME RETABLIR DANS MON ET AT ET DANS LE
MONDE? Et cette expreffion: CE SONT MES ENFANS prouve-t-elle bien que 1e vœu domefljque, que le
vœu de mon pere ait jamais été la SÉPARATION?
Reae 'l a parole denflée Il M. de Marignalile que mon
pere a fuffifamment expliquée dans.(a lettre du 10 janPag, 68 d~
vier derni~r : )1 Je pourrais, dit-jl, O'bjeaer que M. votre Libelle.
II pere ne m'a poirrt répondu, &. que parole nOfl accep'
») tée , eft parole non donnée. Le fiIep1:e ne provenait
)l pas du peu d'impahanc~ d~ la chofe;
mai~ M. ~,.otre
)l pere a fagemell't voulu me l.aiffer l'en.do ffe de la chaCe
Pag. 7L dfll
)1 &. ~'en rapPQrtef' à moi . . . . . Quand il ne m'a pas
Libelle.
Il férit l'hoflOeut' d..e répondre à ~a lettre par laquelle ie
Il lui renclois compte des drconftances qui décidoient l'é~
Il
�71preuve que vous m'aviez demandée, j'ai compris qu'il
7)
m'en lailfoit le (oin. & qu'au -bout de tout en con(é» quence, je (erais autori(é , & comme pere, & comme
1) tuteur, & comme chef de famille, de redemander pour
» mon fils, mon pupille & mon (uccelfeur, la femme
J) qu'il lui avoit donnée, (ur-tout
en offrant.. un modé» rateur re(peél:acIe en la pel'(onne de mon frere.
Comparez ces deux dernieres lettres , & vous verrez
que celle-ci explique très-naturelle ment la parole d'honneur contenue dans celle-là. Mon pere n'a pu prendre
l'engagement de m'éprouver, & de ne pas m'env oyer à ma
femme a\'ant les épreuves, (ans l'aveu de mo n beil u-pere ;
qu'à la condition que Mad.ame de Mirabeau (e réuniro it
à moi, dès que je (erois éprouvé. Son engage ment ne
s'éte ndait qu'au tems des épreuves, puifque fon autorité,
(on VETO ne s'étendoit pas ali-delà. Madame de Mirab eau n'a celfé de le reconnoÎtre qu'au moment où fon
fyfiême de féparation a été formé; & jamais elle n'éLettre du
chappera à la vérité de ce mot : poU/qllOt me demandiezfévrie r i 7i J~
pag. JO du VOliS en juin 1;;80 de mettre l'otre mari à parlée d'élie
73
1)
1.
Libelle.
Pag. 30 de
ma Requête.
Iproll),é , fi VOliS ne VOliS ùie{ pas conJervée des d,oits fur
lui , des devoirs e!lvers lui?
Certainement quand mon pere confeilloit à (a belle-fille
de upas defcendre jufqu'à moi avant le tems, il ne s'at·
tendoit pas même, au milieu des exagérations les plus
étranges, qu'après que par des témoignages d'une meil·
leure conduite, je me (erois élevé , pour parler (on lan·
gage, jufqu'à ma femme, elle me répondrait en ver(ant
fur moi des flots de diffamations, de calomnies & d'injures. On dit 'lue fan honneur y ejl compromis auJli, écrivoit mon pere dans cette même lettre du z 5 février,
par lu calomnies dont on cherche à l'accahler. Je ne veux
point lui foin injujlice. Je le demande à tout Leél:eur hon-
nête : un pere peut·il être lié par
facrifier l'honneur de fon fils ~
fa parole d'honneur à
Mon
,
Mon pere ne m'a renvoyé en Provence que quand il
a cru les épreuves (uffifantes; il ne les a pas abrégées
avec précipitation? puifque deux ans & demi (ont
écoulés depuis mon élargiirement. Il a tenu (a parole:
car il n'étoit pas lié , ou M. de Marignane le délie
en ne tenant pas (on engagement co-relatif. Les lettres
de mon pere ne prouvent donc ni jugement domefiique,
ni parole d'honneur, dans le (ens où J'on feint de l'entendre pour Madame de Mirabeau. La procluél:ion en
étoit donc encore inutile à cet égard.
On chercheroit vainement dans les lettres de mon
pere un jugement domefiique. Ces lettres ne (om point
des aél:es du tribunal de famille. Ce n'étoit pas dan. des
lettres que mon pere, que M. de Marignane exprimoient
leur vœu. Madame de Mirabeau, au nom de qui on
parle depuis Îl long-tems du jugement domefiique, Madame de Mirabeau qui a trouvé, fans doute dans le portefeuille de M . (on pere tant de lc:ttres dont elle imprime
des lambeaux , auroit-elle laiiré échapper un aél:e authentique, qui contient un vrai jugement domefiique & qui
di(po(e de notre fort? Croira qui pourra que cet aél:e
efi inconnu à Madame de Mirabeau; qu 'elle ne l'a pas
mis fous les yeux de (es confeils. Au moins M. de Marignane, qui n'ignoroit pas l'exifience d'une convention
qu'il avoit lignée, devait-il leur apprendre que le z7 Mai
1776, dans la délibération qu'il prit avec mo:! pere Be
rédigea par écrit, fur la Îltuation refpeél:ive de LEURS
t:NF ANS, il ne jugea pas que j'eu ire eu le moindre
tort envers mon époufe; qu'au contraire il jugea, conjointement avec mon pere , que les liens qui m'attac haient à
elle ne pouvaient être ni brifés ni r elâchés. Bien loin
qu 'il fût quefiio n entre nous de (éparation de corps, le
. tribunal domeilique , compo(é de mon pere & de m OIll
beau-pere, ne b'occupa que du foin de pourvoir au paie,,:
K
�'74
ment de mes creanciers, [ans toucher aux revenus de ma
ftmme.
Pourquoi cet aéte n'a-t-il point été ~mployé au procès
& rendu public? Parce que les conf~lls & les pare~s d.e
Madame de Mirabeau favoient que Je ne le connOiffOIS
pas & qu'ils efpéroient que je ne le connoîtrois jamais.
Leu~ attente efi déçue ; il me parvient enfin. L~s Maoifirats & le Public vont décider fi Madame de Mlrabe.au
~ été de bonne foi lorfqu'elle a feint de chercher un JU.·
(fement domefiique dans les lettres de mon pere, tandis
~ue ce jugement exifioic dans u~ aét; expr~s & ~uthen
tique, qui maintenoit & re~errOlt, me~e,' 5 Il étolt poffi:
ble les liens qui nous undTent 1 un a 1 autre.
Voici cette convention que j'ai en main Ggnée de mon
pere & de M. de Marignane.
» Nous Marquis de Mirabeau, d'une part: & nous
» Marquis de Marignane, d'autre. Apr.ès ,avoir mûre)) ment conféré entre nous 1°. [ur ce qUI s eIt paifé de)) puis le moment où le Comte de Mirabeau s'eIt dérangé
)) par des dettes immenfes de toutes efpeces, même par
)) lettres de change qui l'ont expofé & l'expofent à la
)) contrainte par corps, ce qui nOlis a déterminé avec
) nos parens à faire prononcer fon interdiélion , avec
) nomination d'un curateur honoraire & d'un curateur
» onéraire. zO. Sur la néceffité qu'il y a eu d'obtenir
» des ordres du Roi pour faire enfermer le Comte de
» Mirabeau en différens Châteaux, dans l'un defquels il
») eft. 3°. Sur les fommes que nous avons refpeélivement
» avancées, tant pour le Comte de Mirabeau & pour la
) Comteife de Mirabeau, que pour le paiement d'aucun
» des créanciers du Comte de Mirabeau, dont les caufes
» nous ont paru jufies & privilegiées. 4 0 • Sur les .obfta';
)) des que le Comte de Mirabeau & la Marqulfe ~e
~ Mirabeau fa mere, ont caufés par teutes les vOle_
.
75
» qUI, lem on~ été poffiblt.s, [oit pour obtenir la main
,
)} levee du ROI & celles que nous [avons qu'ils médite t
n
») d'emp 1oyer pour l"a.velllr, ~fin d'empêcher les arran» gemens que nous. aVIOns pro)ettés envers les créallciers
») du Comte de Mirabeau pour le temps préfent &
l'
.
0
E
fi
pour
J)
ave~lr. 5· t en n [ur les fom mes que nOLIs avons
» promiS de payer annuellement élU Comte & à la Con.
») telfe de Mirabeau, ainG & de la maniere que le rol~t
» eft porté par leur contrat de mariage. Nous avons fait
» en.tre nous les conventions & reconnoiŒlnces qui s'en.
» [ulvent:
» Par les
piece~
juftificatives qui font entre les mains
» de n?us MarqUIS de Marignane, il eIt conItaté que
» depUIS le temps auquel le Comte de Mirabeau notre
») ge~dre, a c~lfé de demeurer en l'Hôtel de la Mar» qUlfe de Mar~g~ane no~re I?ere> nous lui avons paié>
» &. en fon acqUl~ a [es Crean(llerS, la Comme de quatorze
» ml.lle 9uatr~ lIvres; .a~ moyen de quoi nous [omm es
» quItte Jufqu au deux JUillet prochain de la pen lion an.
» n.uelle que nous avons promis par ledit contrat de man r~age de notre gendre & de notre fille; & pour l 'ave» mr nous confent~ns de payer & remettre ladite penlion
» à M . .le MarqUIS d.e Mirabeau, ju[qu'à ce qu'il [oit
» rem.ph . de ce. dont Il eft ~réélncier pour avances qu'il
» a faJte.s , & qUI v~nt être CI-après expliquées: au Comte
» de !'1lrabeau & a aucu? de fes créanciers privilegiés,
» & a la Comtelfe de Mirabeau depuis ledit temps que
» le Comte de Mirabeau a ceiTé de demeurer enl'Hôre1
p de la Marquife de Marignane.
») Par les pieces jufijiicatives qUI font dans les mains
K jj
•
�-...
76
» de nous Marquis de Mirabeau, il ell conClaté qu.e nous
)) avons paié la fomme de vingt-tro!s mille celH fOlxante·
» onze livres quinze fols. De maOlere que fur cel,le de
trente mille livres à laquelle fe montent les arrerages
:: qui écherront le deux juillet prochain de la penfion
» que nous avons promis de I:'ayer annuelleme~t au
» Comte de Mirabeau par fondit contrat de ~anage.,
» nous fommes créanciers de ladite fomme de vlOgt-trols
» mille cent foixante·onze livres quinze fols, de laquell~
» nous ferons rempli foit fur les arrérages échus & a
» écheoir de ladite penfion que nous devons. payer a~foit fur celle que M. de Marignane dOIt
n uellement
»
,
. apres
, qu '·1
éé
» ayer de fa part· & ce néanmollls
1 aura t
Pretenu pendant 'te temps que le Comte de Mirabeau
»
d
· ml·11 e
» fera ,
retenu par ordre du Roi, la r
lomme
e troIs
» livres, que M. de Marignane déliv.rera comme il le
» jugera à propos à la Comteffe de Mirabeau, & après
n auffi que nous Marquis de Mirabeau, aurons. fourni
» aux dépenfes néceffaires pour le Comte de Mlrabea~
» pendant ledit temps qu'il fera retenu par ordre du ROI.
3e.
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
» Notre umon exillante à l'égard du Comte & de
la Comteffe de Mirabeau depuis qu'il s'ell derangé,
comme il eft ci-deffus dit par les dettes qu'il a contraétées & autrement, continuera de fubfiller envers
eux - & c'ell par l'effet d'icelle que nous Marquis de
Mir~beau avons pris le parti de confentir que la Sen:~
tence d'interdiétion prononcée contre le Comte de Mlrabeau foit & demeure fans effet, & que nous Marquis
de Marignane, nous propofons de faire prononcer Sen~
tence de féparation de biens d'entre le Comte & l~
Comteffe de Mirabeau.
" Soit pendant le tems que le Comte de Mirabeau fera
» encore retenu par ordre du Roi, foit après qu'il aura
» fa liberté, & foit que la féparation de biens ait lieu
» ou non, les conventions ci· delfus feront exécutées:
» entre nous Marquis de Mirabeau & Marquis de Ma.
» rignane, & à cet effet nous continuerons d'être ert
» exaéte correfpondance pour le bien & avantage de
» nos enfans & pour notre propre fatisfafrion.
» Fait double fous nos feings privés. A Paris le 27,
III mai 1776.
» Approuvant l'écriture ci-delfus. Marignane. Approu--:
» vant l'écriture ci-deffus. Mirabeau.
Quelles réflexions pourrois-je faire ici qu~ le Leéteur
n'ait pas déja faites? Depuis qu'on parle du jugement
domet1ique, les gens impartiaux defirent de voir comment ma famille affemblée a prononcé fur mes rapports:
avec mon époufe. Pour deviner fon vœu au moins dans:
la correfpondance des deux peres, on auroit voulu lire
les lettres de M. de Marignane; mais M. de Marignane
n'écrit pas; du moins il n'écrit pas à mon pere.
Il fut cependant un moment où ils s'alfemblerent, où
ils prononcerent fur mes intérêts, où ils me jugerent.
En ce moment on ftatua pour le bien des ENF ANS
communs; & nul des peres ne fongeoit à en répudier
aucun.
En ce moment il fut quellion de la féparation de
biens; & l'on ne fuppofa pas même la féparation de
corps poffible. Ma liberté fut prévue; & cette circon[tance ne devoit rien changer aux conventions.
Cependant les févices prétendus de la cohabitation, les
dettes, l'affaire de Provence, l'infame calomnie du CM-
- .....
�r~
.~dU-a lt,
mon évaGon de Pontarlier; (1) tout avait eu
lieu, tout étoit connu d S parties: je dis tout, même le
,prétendu Mt!moire diffamatoire enfuite duquel Madame
de Mirableau affure s' être regardée comme féparée ; car
ce Mémoire était, dit-elle, compofé de lettres t!crites
à M. !ie Malesherbes, alors Minifl:re. Or, mon pere &
~mon beau - pere aValent perfonnellement traité avec ce
'Milliftre; ils ne p-ollvoient ignorer l'exirrence des lettres;
& l'ôn fait qu'au 27 mai 1776, date de la convention,
'M. de Malesherbes n'étoit plus en place.
_ Les prétendus outrages que 1'011 cherche dans certaines
lettres dures que j'écrivis à Madame de Mirabeau avan.t
cette époque, depuis laquelle jufqu'à celle de ma détention au donjon de Vincennes, je ne lui ai plus écrit,
.exifl:oient, SI. n'avoient pas do'nné l'idée d ' une féparation
de corps.
Que fournit-on alors au jugement clu Tribunal domertique? des intérêts de forturie & d'argent. Il n'y avoit donc
J"ien de plus à juger. Les moyens de pourvoir au payement
(1 ) C'eft ici la place de rdever un anacroniCme du Libelle, bien
"olontai re de la part de l'auteur, & dont l'intention renferme beau·coup de méchanceté. Je veux dire la [uppoli,ion faÏle à la p~ge 19, que
.mon évalion du Ch~reau de 10ux & de Pontarlier, "'.gagea Madame de
Mirabeau, dom le pere étoit alors à Paris, il retoomer avec lui tn
l'rovence. Mon évalion cft du mois de février; & Madame de Mirabeau ne revint qu'à la fin de mai en Prove>1ce.
On voit encore que c'eO: bien long-tems après cette évalion que fat
écrite la lettre du 9 Ccptembre r 776, qui rraire du prétendu projet
dom il s'agit dans le rexte: cette leme même le prouve; & fa date
fait remarquer une grande lacune dans la correrpondance de mon
pere. Je ne puis pas croire que pendant les Jeux ans qui compo[ent
cette lacune, il n'air écrit ni à (a belle-fille ni • M. de Marignane; &
l'on comprendra facilement combien les lertres éc, ires pendant cet int ervale, & qu'on ne montre pas, pourroient contredire le fyO:ême de
Madame de Mirabeau.
79
de mes créanciers; fans préjudicier à Madame de 1\1i~
rabeau; il n'était dOllC quefiion que de cela. On n'avoit
aucun defir de féparation de corps, cela eft incontefl:a-.
ble; car perfonne ne voudra fuppofer que M. de Marignane qui aime tant fa fille unique, & qui veut aujourd'hui la défendre à tout prix, fClt alors plus occupé de
fauver fes biens que de pourvoir à la fureté .de cette fille
chérie. M. de Marignane ne me jugeoit donc point à cette
époque comme il me juge aujourd 'hui. On ne lui avoit:
pas encore infpiré les préventions qui ont ourdi le fatal
procès. Mais ce n'efl: pas fur ces préventions que l~
demande de fa fille doit être jugée.
Ce ne doit pas être non plus fur les lettreii d~ mOIl'
pere. On y chercheroit inutilement, ou plutÔt on ne
peut, fans une infigne mauvaife foi, y voir déformais
la preuve d'un jugement domefl:ique qui prononce la fé ...
paration de corps. Il n'exifl:a jamais; il faut donc renon-.
cer à trouver mOIl acquiefcement à un jugement qui il'eff:
qu'une chimere. Mais on affLlre que mes lettres renfer~
ment des engagemens indépendans du jugement domeftH
que, & qu'elles expriment un jugement perfonnel SI. de~
engagements d'honneur & de gentilhomme. Examinonl:
ces lettres par ordre de date.
'
Celle du 28 mai 1780 s'offre la premiere; & l'on re':
marquera que cette date efl: antérieure de fept mois à
mali élargifi'ement.
» Le foulagement de mes peines ne dépend que de vous Il.g. 45 d~
Il feule ET DES SENTI MENS QUI VOUS POR TE- Llb:llc.
1> ROIENT A LE DEMANDER .. , •. Votre famille
» ne veut pas notre réunion; & vous devez du rerpeét
» aux volontés du chef de votre famille; je lui dois,
» moi, SUR-TOUT DANS MA POSITION, de cher ....
» cher à détourner cette volonté en ma faveur & de ne
» pas lutter contre elle. Ce fera donc vous, ce fera lui
» qui marquerez la difl:ançe où je dois être, &ç,
�80
J'écrivois à M. de Marignane le même jour:
Pog 4\ d.
» rai reçu ..... votre lettre du 17 avril qui m'apLlheUe.
» prend ....• que vous defirez qu'il (mon pere) trouve
» le terme de ma punition affez long, & qu'il prenne
» airez de confiance en moi pour rifquer l'épreuve que
" j'ai propofée ..... .
» Quand je n'aurais jamais le bonheur que vou~ me
» rendiez juftice; quand vous pourriez douter toulou:s
» de l'extrême envie que j'ai de réparer autant que Je
» le puis mes fautes pairées; quand vous croiriez devoir
» éternellement vous oppofer à toute réunion eotre ma
J) femme &
moi, LA DEMIE LIBER Tf: QUE JE
D SOLLICITE ne pourrait aucunement nuire à vos vues.
» De [orte que lorfqu'il s'agit de me rendre la vie fans
» déranger vos plans , je dois compter non feulement
» fur votre tolérance, mais même fur vos fecours ....
» Sans dOUie j'ai lU le ums de réfléchir mûrement fur les
» avantages de la paix & de l'union domejlique; SANS
» DOUTE JE SOUHAITEROIS DE ME RAPPROD CHER D'ELLE ET DE VOUS ; mais vous ne vou» let ni l'un ni l'autre; & JE NE LE DEMANDE PAS
D AUJOURD'HUI.
» Je demande la guérifon de mes maux phy{zques , & une
» épreuve fur mes difpoJùions morales. Sous le double lien
l-> d'un ordre du Roi & de ma parole d'honneur, je de)J meurerai auffi loin de vous que je fuis, à la place qu'on
» voudra m'indiquer, DANS UNE EGALE IMPOS)J SIBILITÉ DE ME REUNIR A MADAME
DE MIl ) RABEA U , [ans
fan aveu fX fans le vôtre , AVEC
» AUSSI PEU DE LIBERTE CIVILE QUE J'EN AI
» MAINTENANT; mais avec un peu plus de liberté
» perfonnelle , & de moyens de conferver mon exif-,
):) tence .
Pag. "7.
Lettre du 16 juillet 1780 à Madame de Mirabeau.
» Croyez qu'un des pl LIS amers tourmens de ma VI t!
» eft
8r
» eft d'ayoir troublé la vôtre..... L'impétuofité de la
)) jeuneflê, J'aigreur que le malheur infpire même qu and
)) il vieut de notre faute, une fufceptibilité, une hau» teur qui tenaient à l'excès de ma fenfibilité , un fatal
)) enchaînement de circonftances ont accumulé mes torts
) envers vous; mais jamais ils n'ont été entiérement va·
» lontaires. Mes égaremens envers vous furent toujours
" empoifonnés & punis par votre fouvenir .....
» Croyez que je fens bien les droits que vous don)) neur vos bontés; & ne croyez pas que je veuille
» abufer de celles-ci. Je refpetterai votre empire autant
» que j'eftime le cœur qui me les reud, & que je con}) noiirois, puifque j'ai été l'invoquer. Marquez - moi la
» difiance où vous croirez devoir me tenir de vous, Ce J'efte
» de peine me fera très-fenfible ; car plus je vous verrai gé» nércufe , & plus il me fera doux d'employer touS mes
» momens à vous prouver ma reconnoiirance ; mais je
» ne me permettrai point de murmure; & le de{ir de
» voir eflacer jufqu'aux dernieres traces de vos juftes
» méconter.ltemens, ne fera qu'un aiguillon pour les mé» ri ter (1).
D
»
»
»
»
»
Lettre du 3 ottobre à M. de Marignane.
» DANS LE CAS où la bienfaifance de ma femme.
la clémence de mon pere, & votre propre générofiré
AMENEROIENT L'ACCOMPLISSEMENT D 'UNE
PARTIE DE MES VŒUX, je dois m'empreirer de
mettre à vos pieds ma profeffion de foi, & l'engagement de mon honneur.
» Non, ce n'eft pas pour faire le tourment de ceux
qui me font chers & qui m'àuront fauvé , que je de-
,
(1 ) Je tta n(cl'is comme Madame d~ Mi,a bea u a imprimJ , qUOIque
je vOIe tlèi ' bIen q ue cme pllr ~[e incc,{ccle n'a l'as Je {en, .
L
PJg. 49 da
LibOll<,
�82
» lire (ortir de priron ou .ie p éris; c'eft au contraire
)) p'o ur mériter leurs bontés par ma condui te , fi je peu~
P,,~,
10
Llbcll~,
» les efpérer encore, ou du moins pour leur fa ire ouJI blier tous les égaremens dont je gémis, plus qu'ils n'ont
» pu en être offenfés.
» Ce fera par vos ordres que je réglerai, & mon fé» jour fi je deviens libre, & la maniere dont je defire
» m'y comporter. Mon cœur tendra fans ceife à m'ap» procher de vous ; mais ma ju{le [oumiffion ne me
» p ermettra l'as un pas qui ne [oit de votre aveu.
tu
» On nf'a jait craindr~ 'lue v ous n ~ vouluffie, mettre un
» o6Jlacle infu rmor.ta6le à taUle réunion jù/ure entre Mada t) me de k lira6eau & m oi ; mais fi vous ne l'avez p as fait
» lorfque j'étais fort coupable, il ne feroit ni de Votre
» générofité , ni de v otre jufiice d e le faire lorfque je
» fuis très· repentant ; lorfque je fuis le plus loin poffible
» d'avoir aucune difpofition qui puiife vous offenfer, qui
» puilfe déplaire ni à votre. fe~ourable fille, ni à vous .....
» VOUS AVEZ TROP D'ELEVATION POUR VOU» LOIR DONNER EN SPECTACLE VOTRE NOM
» ET LE MIEN. Receve{ ma parole de fils & de g emi/.
» homme , de me conforma à toutes ù s intentions QUE
» VOUS DAIGNEREZ ME MANIFESTER.
Pa ~.
Il du
Lib,Il"
»
»
»
»
»
Paz· p.
Lettre du 7 oébobre à Madame de Mirabeau.
» Oui, Madame, mon amie, ma femme, ma proteariee, SI MES DEUX PERES daignent fe livrer il.
quelque indulgence pour moi, & m'accorder un par~
don complet ou partiel , je ferai entiérement fournis
à leurs loix & aux vôtres, & je ferai plus dans leur~
mains & à leur difcrétion que je ne le fuis ici.
Lettre du IJ d~cembre 1780 à M. de Marignalle.'
» M. le Marquis, je viens de franchir le feuil fatal;
» & c'eft à vous que je dois le premier hommage d~
8~
,
A
ma reconnoiffilOce; puifque fans vous mon pere n eut
» jamais pu , malgré l,e ,vœu de fan ~obl~ cœur, m'ae») corder ce bienfait. SI 1 ordre du ROI qUI change mon
» fort ne me mettait pas à la difpofition abfolue de
» mon' pere, j'aurais fupplié que 1'0,n me mî~ à la v~
» tre. Croyez , M. le Marquis, daignez .crolre que Je
i> mettrai autant de joie à mériter déformaiS vos bontés,
Il que j'ai eu le malheur de mettre ' de fuite à les per» elre ; & qu e je Ile me permet.trai de vous demander ,
» & à to ut ce qui vous appament , que ce que vous
» jugerez à propos de m'accorder vo.~ s : même.
.
Telles font les lettres par lefquelles J al engagé , dlt.on,
ma parole d'honneur , & ma foi de gentilhomme de ne
jamais ufer de mes droits ~'époux fans l'aveu de Madame èle Mirabeau, & celUI de fan pere.
Qu'on réfléchiife d'abord fi lorfque je difois à Ma:
dame de Mirabeau, le jou fagemenz de mes peilles ne d epend' 'lue de vou~ feule, & des .felllimens qeu V OliS p o~te,oe~/ll
â le demander, Je ne rappellols pas, to us mes, drolt.s . d ~_
poux, bien loin d'y renon~er? SI lorfque Je .r0lhclt~IS
M. de Marignane de me faire rendre Une demee Leberte ,
je le confidérois autrement que comme un be~u-p.ere?
Si j'avais fi je pouvais avoir quelque chofe a lUI dem ander fdus tOllt autre afpea? On m'a reproché au
nom de Madame de Mirabeau, que j' étais Ir~s-ava~la
geu x dans mes défen(es (1). En vérité, des prétentlor,.s bien
étranges percent dans les fi~nnes. Eh ! quels ra~ports y
a-t-il donc entre M. de Mangnane, fa fille & mOi, autres
que ceux d'un époux & .d'un g~ndre, qui pou:,oit & . dev ait compter [ur leur reclamatlon? Quels drOits avolent1>
( 1) Dans la répon(e à l'aél:e 'l ue je lui fi s teni r le 29 avril, P? ur
abreni .. la communicalion des oâginJ ux de~ Jeures qu'elle a fait Im~
Lij
�•
84
ils {ur 1 moi à tout autre titre? Quel autré que mon pere
pouvoit prétendre à décider de ma détention ou de ma
liberté? Sans doute il lui était facile de me la rendre
Jans favw de M. de Marignane & .de ma fel?me. Il m'é·
toit donc impoffible de montrer mIeux que Je ne renon·
çois pas à mes droits, qu'en invoquant leur interceffion.
Qu'on me dife enfuite fi defirant alors une DEMIE
LIBERTE, & plutôt une prifon moins re{ferrée (foulage.
ment indifpenfable à ma fanté) qu'un élargifiement réel; il
n'étoit pas fimple que je ra{fura/Te des efpriti prévenus fur
les fuites de ce nouvel ordre des chofes? Je demande fi
je ne devois pas leur éno~cer claire~ent que je n~ defi·
rois pour le moment qu un adoucl{fement de prIfon &
une épreuve? Je demande en quoi ce langage conditionnel peut me lier aujourd'hui? Et s'il ne porte pas avec
lui fan commentaire? Sans doule je fouhaite rois me raprocher d'lIle & de vous. Mais ••.• • je ne le demande pas au·
jourd'hui•. JE NE. LE DEMANDE ~~S AyJO?RD:HUI .'
fignifie·t-II donc Je ne le demanderaI JamaIs? N expnme-t-Il
pas précifément le contraire?
Qu'on me dife fi les conditions que je m'impofois à
moi·même en faveur de la demie liberté que je follicitois,
peuvent m'obliger, dès que je ne l'obtins pas? Ce ne
fut que plufieurs mois après que je fus élargi. Et certes,
dans ce période un homme qui demandoit fa liberté pour
le foulagement de fes maux phyfiques, avoit eu le tems
de mourir.
Qu'on me dife fi ces circonfiances font les mêmes au"
jourd'hui que j'ai recouvré tous mes droits de citoyen;
qu'au te ms où je propofois une épreuve avec auffi peu de
liberté civile que j'en avois ; dans un momef)t où je n'a~'
vois pas même d'exiftence ,civile, qu'au te ms où j'étoi~
DANS L'IMPOSSIBILITE de me réunir à Madame de ",
Mirabeau ? Et fi l'on peut prétendre qu'en réclamant ma
femme aujourd'hui je romps une convention qui ne fu~
8)
que propofée par moi, & qu'Olt n'a jamais daigtlé paroî~
tre même accepter?
Qu'on me dife fi quand j'écrivais à M. de Marignane;
on m'a [eNI craindre que vous Ile 'VouIUifie{ meure un obflacle
informontable a 10ute réunion füture entre Madame de J'r1irabeau & moi•••.• Mais ..•... VOUS A VEZ TROP D'ELÉ-
VATION POUR VOULOIR DONNER EN SPECTACLE VOTRE NOM ET LE MIEN; Qu'on me dife fi
bien loin de trouver dans ces mots la preuve que je confentais à une féparation , mon beau·pere n'y devoit pas.
voir un averti{fement très - refpeétueux , mais très-formel
que fi jamais il voul~it faire prononcer cette féparation,'
je m'y oppoferois & réclamerais ma femme? Peut· on
trouver un autre fens à ces mots? Vous ave{ Irop d'élévation POUR VOULOIR DONNER EN SPECTACLE
,VOTRE NOM ET LE MIEN?
Qu'on me dife enfin fi cette lettre qu'on m'a tant op·'
pofée ,je yùns de franchir le feuil fatal, &c. n'eft pas une.
fimple formule de compliment refpeétueux, qu'il [croit
auffi ridicule de prendre au pied de la lettre que le '110·
Ire très-humble ferviteur que les hommes lu moins humble$.
prodiguent à ceux dont ils font le moins les {ervùeurs J,
Aurois-je écrit en tout autre fens que mon pere n'eÔt jamais pu m'accorder ma liberté fans l'aveu de mon beau'pere?,
Ne font·ce pas là de ces exagérations convenues en fociété;
St naturelles à employer auprès d'un beau-pere très-préve-,
nu? Que M. de Marignane nous indique quelles lettres il il
écrites, quelles démarches il a faites pour obtenir cette
liberté par laquelle il veut que je fois lié, comme je le
ferais par un bienfait conditionnel , fi pourtant la condition n'était pas téméraire & coupable; car les conditions
de ce genre ne fauroient lier?
Eh de bonne foi! la féparation de deux époux peutelle être matiere à parole d'honneur & de fientilhomme ?
Certainement la queftion n'en eft pas une fuivant la loi
�86
cIvile; elle l'ell bien moins encore Celon les principes de
la morale, de la religion & de l'honneur. Je n'ai pu donner une teIle parole: on n'a pu la recevoir. Un engagement téméraire ou forcé contre le droit naturel, contre
la [ociété , contre les bonnes mœurs, ne fauroit être un
engagement d'honneur. Si je n'ai pas mérité de perdre
mes droits d'époux, quel feroit le co· relatif de ma promelfe? Il faudr6it que pour un point d'honneur chimérique &. coupable, je m'expofalfe à dDnner à la feciété
l'exemple du concubinage & de l'adultere !
_ Je n'ai pris ni pu prendre cet eHgagement illégal, irréligieux, infocial; & mes lettres~·ile fauraient être citées
oomme preuves de ma foumiffion à un jugement domefiique qui n'exifta jamais.
• J'avais fait- de ~r-andes fautes; mais elIes n'étaient ni
perfonnelles à Madame de Mirabeau ni impardonnables.
Je fairois des excures, parce que j'avais des torts, parce
que je les reconnoilfois ; &. graces au fentiment honor~ble & jufie d'un repentir {incere, je me réfignois à
demander ce que, comme époux, j'avais droit d'ordonner.
Il ne faut pas rnefurer la grandeur de ces torts fur les
excufes. Les prieres [Ont humbles, dit Homere ; les excufes
le font bien davantage. Aucune loi, aucun jugement ne
pouvoit rompre le nœud facré qui m'unilfoit à ma femme.
Je me réfignois à fouffrir des délais, des épreuves; mais
puifque je les propofois, je ne fuppofois pas un refus
irrévocable. J'ai donné des paroles J'honneur; mais pour
un tems feulement, & dans la perfuafion que je reconquérais ce que j'appellois des bOlllés: ce qui traduit en
français & en morale, veut dire que j'avois l'efpérance
de déterminer ma femme à rentrer de plein gré dans fes
devoirs.
Indépendament de la nature des qualités refpeétivrs de
mari & de femme, qui préfentent des devoirs d'époujé &
du drOltS de mari , cette itltention réfulte des excufes
87
même. On ne les fait alfurément qu'en vue du pardon
que l'on efpere d'obtenir {inon d'abord, du moins après
la fatisfaétion. L'homme qui a toujours befoin de clémence, l'homme dont la feule vertu, aux yeux de l'Être
fu~:êm~ , e~ ~e repentir; , lui adrelfe fes prieres, parce
qu Il fait qu Il Implore un Etre tout puilfant , & par cela
même fouveraincment bon & très-miféricordieux.
" Et s'il n'ouvroit {es bras qll'~ la (eule innocence,
.. Qui viendrait dlns le Temple encen{er les Autel s !
J'ai donné ma parole d'honneur & ma foi de Gen:
tilhomme de me tenir li la diflancs qu'on me prefcriroù; de
me conformer à toUleS les intentions 'lue M. de Marignane
voudroll. me m.anifeJler. Puifque.ie parlais ce langage, je
regardols touJours M. de MarIgnane comme mon beaupere, & Madame de Mirabeau comme ma femme. Au,trement qui donc étaient-ils pour me donner des loix J
Que m'auraient fait les intentions de M. de Marignane ~
Il ne m't:n, a manifefié aucune. Je n'ai point reçu les gra~es dont j'offrais le prix; & dans tous les cas je n'ai ni du ni
pu croire qu'on me preCcriroit de m'éloigner pour jamais
de ma femme. Je n'ai pu croire qu'elle fe refusât pour
toujours à fes devoÎrs. Je n'ai pu croire que l'intention de
mon beau-pere fût de ne nous réunir en aucun temps. Je
n'ai donc pas pris l'engagement de n'ufer jam;ais de mes
dr?its ~'époux fi mon beau-pere & ma femme ne le vou~
laient Jamais.
Je n'ài pu cr,oire à un refus abfolu, & je n'y ai pas Lettre du <J
cru. Sans dOUle Je jouhalfe de me rapprocher d'elle & de VOUs; mai 17 80 •
malS vous ne le voulet ni l'un ni L'autre, & je ne le demande pas aujourd'hui. Je ne renonce donc pas à le demander demain; je me réfigne tout au plus à ne le demander
qu'après un temps d'épreuves. J'e/pere vous faire oublier Leme du ,
le S ega
' remens d
,no,<;ftib. 178Q.
Ont '
Je"
gemls p lus 'lue. vous n ' avt{ pli en etre
,,
)
�88
9uI.
iJ.ffenfl. Je m'engage donc dans l'efperance qu e la péni-
tence aura un terme . L a fou miffion à la pénitence n'aur a it pas été promife par le défefpoir. O n m'a fait c raindr~
'lue vouS' n~ vouluffie{ mettre un objlacle ùz!urmo.nla,ble ,à
IOUle réunion fulU'~ t ntre Madame d~ M lrabeau & mal. J efpe-
,Leme da
Ij
clecem b. 17 80 •
rois donc une réunion au moins future, c'efi-à-dire apres
un temps d'épreuve.. . . .. V ous ave{ lrop d'élévation pour
'Vouloir donner en fPeélac!e v orre nom & le mien. J'étais donc
tres-réfolu de ne fouffrir une féparation qu'auffi long·temps
qu'elle me conviendrait. Si L'ordre du Roi qui chang e mail
.
. , 1 d; r. ,r, .
,f. 1ue de mon pere,
J ort,
ne me met/ou
pas a a ljpOjlllOn ab'Jo
co mm~
je
l'ai demandé, j'aurais fupp lié q u~ L'on me mû à
la vôtre. Je regardais donc M. de Marignane comme un
fecond pere . { 1) J'éta is bien loin de lui croire un cœur
i mpl acable.
J 'ai tenu l'engage ment que j'avais contraété. Sorti du
Donjon de Vincennes en décembre 1780 j'ai été éprouvé ;
je l'ai été deux ans & demi. M on pere m'envoie enfuite
fous les yeux de mon beau-pere. De nouvelles épreuves,
des fatisfaétions de toute efpece font offertes ~ elles font
refufées. La maifop qu'habite ma femme m'efi fermée.
Mes lettres même font renv oyées; & ce n'efi qu'en Mars
1783 que je redemande Madame de Miraheau il la Jufiice,
après avoir enduré cinq mois de refus, & de menaces ,
telles, dès le début, que fur la fimple nouvelle de mon
arrivée, on écrivit à m on oncle, on écrivit à moi
qu'on alloit invoquer ù fecours des L oix. Et l'on dira que
je ma nque à mes engagemens!
Quelques paroles d'honneur que j'euffe données ~
on m 'en aurait délié. Si comme M adame de Mirabea u
l'affure, elle. avait pris depuis. les prétendues diffarnatioru:
qU I
(1 ) SI MES DEUX PERE:S daiglTent Je [ivr.r ;,. (J'Id,!" , i7ldll.'s,' ,I('
pour mo~, Lettre du 7 Oéll)blC il Matla= de. Mi r ~bea<l .
•
•
fi
b"
.
89
.eront lel1to~ exanllnées , la ferme r éfolution de ne
Jamais fe re~d:e a mes vœux, je n'av ais rien à lui pro.
mettre. , Je
, n al, pufi me. lier par des promeifces CI ue fious
1a con d mon
qu ~I) e lalfferoit fléchir aux preuves de mon
amende~ent. L engagement a été réciproque, ou il n'
en. a pOint de ma part. Les refus abfolus de Madame d~
.tyIlrabeau ont affez manifefié qu 'elle ne [e croy oit
liée: Je ne l'étais donc pas; je fuis rentré dans les dr~i~~
do~t en ,reto ur de fo? cœur je lui av ois fait le fa crifice
qu elle n a pas accepte.
~t quels ont été les motifs des refus de M adame de
Mtrabeau ? Les. infa m~es qu'on a enfin publiées par J'impreffion , & qUI depUIS huit ans n'ont ceffé d'être débitées dans les cercles, dans la Province dans le R
yau!ne ? ,Pouvois'je être lié par des paro les d' honneur o~
facflfier a Madame de Mirabeau MON HONNEUR 1
Mes lettres n'offren t donc pas plus que celles de
.
.
mail
Pere aucu,ne trace d' un Jugement
domeftique, ni d'en 11gemen~ d h onneur. Les lettres de mon pere ne prouv~nt
pa ~. mem e fa n v~u perfonnel, ou plutôt clles prou vent
q~ II fu ppo.fa to uJours la poffibilité & même la néceŒté
cl un e réumon fi }e recouvrais ma liberté. Po urquoi donc
les a-t-on pro duites ?
Si c'efi Comme preuve des griefs de Madame de Mirabeau. Elles en établiffent d'inconnus , ou elles ne ra _
port~nt q ue. ceux qui [Ont Connus & pro uvés. Le ur pr~
du étlOn 'étolt affurément inutile pour ce ux q ui feraient
~onn us & prou vés fa ns elles. Voyons donc quels faits
IJl co nnus elles con tiennent.
~ad ame .de Mirabeau
propofe pour m oyens de fi ' _
r ation
.
.
.
. epa
. .ma vIe enuere . q lU me prtfeme comme mauvais fils
m auy
1
•
.
.
aLS epoux , mauvats p ere , mauvaIs Clloven
g ueux.
,/
'
,
ruiez dalz.
, j ' .1
':' oy ons fi les lettres de mon pere prouvent tout cela ,'
M alS qude leéteur ne perde jamais de vue que je n'examine
M
,
�9°
ici que les lettres en elles-mê mes, 8< que n011S revienr.l~.
t OO
u
l tbdle.
r.,;
&0 & St .
drons à la di[cufiion des fa its lor[que j'aurai dép -cé
l'odieufe b rode rie dont on a voulu les [urcharger.
J.IJut ::is fiLs . Co mment? On m'a l ' U par 1/US fol.es &
!'ciTes
diffipations dil-orer le p atrimoine de
IllOIl
pere.
Lettre de mon pere du 9 D écembre 1773 à M. de
M arignane. » De toutes parts je reçois des lettres de
» créanciers, des lettres de change proteftées, des dettes
» les plus balfes &. les plus folles, d'engagemens oubliés,
» méprifés, ne daignant pas feulement fai;e de. réponfe ;
» enfin des notices de défordres accumules qUi ne peu» yent mener loin la cataftrophe.
Lettre du 9 Janvier 1774 du même au même. Le Libelle ne la rap porte pas en entier; &. l'on y trouve feulement que mail p ue allnonçoù qu'il avoù p ris le p arli de
fJ.ire procéder contre moi à UNE I NTERDICTIO N AB·
SOLUE POUR CAUSE DE DISSIPATIONS (1 ).
Voilà tout ce que renferment les lettres de mon p ere
fur cette partie de l'accufation : MAUVAIS FILS; al! L'a
Vit par de folLes & baffes diffipations dévorer le patrimoine de
f on pere.
La nature de mes dettes fera fcrupuleufement examinée dans ce Mémoire. Difons feulement ici que mon
pere me nomma à mon mariage aux fubftitutions de ma
maifon : que depuis ce mariage mon pere a acheté un
Hôtel qui vaut plus de cent mille écus. Certainement
les fubftitutions ont été &. n'ont pu qu'être refpeélées.
Comment donc ai-je dévoré le patrimoine de mon pere
qui confervoit la joui/fance des biens fubftitués, &. qui
ne m'abandonnait qu'une penfion modique ? J'ai dépenfé
au-delà de mon revenu. Il y a bien des mauvais fils 4
( 1 )
lettre.
Les mots en majurcule (ont les fculs qu'on ait rapportés de l~
91
c'en eft là le type. J'ai emprunté; &. tout mineur doit
beaucoUp plus qu'j,l n'emprunte. J 'ai fou[crit des lettres
de change: Eh qui n'en a pas foufcrit! Que fait aux ré·
fultats la forme de l'engagement? Je ne ferais pas plu..
MAUVAIS FiLS pour m'être obligé par lettres de change
pour fimples prêts, que pour avoir emprunté. Uil fils
diffipateur eft-il pour cela mauvais fils? Et pefez cette
cÎrconftance : diffipateur en minorité. Il paraît jufte d'appréci er le caraélere d'un tel diffipateur, plus par l'empl oi
des deniers empruntés que par la quotité des emprunts.
Un mineur qui a contraélé des dettes pour dil1îper l'ar~ent en débauches &. au jeu, ce mineur eft dans toute
la force du terme un fol diffipateur. Me reprocha - t - on
jamais la débauche, la proftitution gagée, la paffion du
jeu? Nous verrons bientôt comment &. pOLIr qui mes
dettes furent contraélées.
DES ENGAGEMENS OUBLIÉS, MÉPRISES. Le
mineur qui emprunte pour diffiper, &. qui fe trouve dans
l'impuilfance de s'acquitter aux échéances; &. le créancier qui prête &. qui calcule les cifques dont les moindres
à fes yeux font ceux du retard, jouent un jeu de hafard où très-certainement le mineur n'eft pa.~ le rufé. Graces
au Ciel, on ne perdra rien avec moi à ce jeu. Mais qui
donc autre que mon p ere fe croit un droit d'inquifition fi
févere fur ma jeunelfe ?
II eft un homme eftimé qui, par fon âge, devait être
aufIi fage qU'il m'était excufable de l'être peu à vingt
ans; à qui l'on a vu des dettes qui excédaient fes mo y ens,
puifqu'il n'a pu les payer que par la vente d'une terre
fubftitu ée , Si par hafard cet homme avait en fa p ui/fance
des lettres qui accu[aifent un autre homm e de diffipations .
&. ce q ui elt plus, un homme dont la famille aurait eu le
bon pru cédé de ne faire enrégiftrer &. p ublier des fubftitutio ns qui l'intéreltoi ent, qu 'après cette vente néceffaire
a u rep os des créanciers &. du débiteur; le débiteur, quel
M ij
�92.
l',g 100 du
l ibelle.
qu'il fait aurait un étrange procédé en livrant 8< divul~
gant ces lettres, 8< fur-tout en permettant que fa fille accusât d'intérêt 8< de cupidité la famille qui aurait eu
pour lui ce procédé.
NE DAIGNANT PAS SEULEMENT FAIRE DE
RÉPONSE. Ceci prouve feulement ce qu 'on ne favoit
que trop, que j'avais des dettes, 8< que j'étais dans l'impuiffance de les payer. Je n'ai pu être diffipateur que
pour avoir contraété des dettes que je ne pouvais payer
fur mon modique revenu qui était mon unique bien. Si
je les euffes payées, on n'aurait pas à me reprocher de
les avoir contraétées. Une telle obfervation n'ajoute donc
rien il l'accufation de folles di.f1ipations.
D ES DETTES LES PLUS BASSES. On verra bientôt
comment j'ai contraété mes dettes ; & le Libellille qui
ne peut pas mettre en fait que l'affenion de mon pere
foit une preuve légale, voudra bien m'indiquer celles
que j'ai baffement contraétées.
Mais la prétendue affertion de mon pere n'ell autre
chofe qu'une expreffion impropre. Dans fan idiome, au
mains, tel qu'on peut l'étudier dans fes lettres, baiJejJès
& folies font fynonimes; cela fe voit à toutes les lignes.
Il dit: LES DETTES LES PLUS BASSES ET LES
PLUS FOLLES. Cette derniere épithete renchérit fur
l'autre. Dans fa lettre du 5 feptembre 1779, mon pere
a défini lui-même ce qu'it entend par baffeffes lorfqu'il
parle de fan fils: I l n'a pas rame lâche . ••• • Toutes les
bajJejJes qu'il a faites font pures folùs, & folies gauches par
L'eJPrù autant 'lue {ougueufos par le fang.
J'ai été MAUVAIS FILS. Comment? On m'a vu hu~
miller la vieillejJè de mon pere par mes travers.
Quels {ont mes travers? Scrutez les lettres de mon
pere: vous y verrez mes dettes, l'affaire dé Pontarlier,
8< une certaine affaire en Provence qu'on n'explique pas.
Je le crois vraiment qu'on ne l'explique pas; 8< jq
porte le défi le plus formel d'ofer l'expliquer.
'
M'
Mes dettes ont affiigé l~93ç~ur Ae mon pere.
al'
comment auroient-elles humdd fa vledlejJe ..
L'affaire de Pontarlier a [ans doute affilgé mo~ pere.
Mais comment l'a-t-elle humilié fi mon honneur .ell: llltaét J
Si j'ai forcé mes accufateurs à [e rétraéter ? SI, comme
je l'ai prouvé, comme je le prouve.rai encore, c?mm.e
mon féjour en Provence le prouver~lt f~ul ~ff~z , le fUIS
abfous entierement abfous ..... Llbelhlle. 1 a.ccumul~
tion d;s mots décele fouvent la llérilité des Idées; il
paraît que c'ell votre maladie!
MAUV AIS FILS. Comment? On m'a vu troubler le L!:n~:i. 4.
repos de mon pere. p~r d~s procès indignes. ~ ?ilà une. infame
calomnie. Jamais Je n eus le malheur d etre en lllll:anc~
juridique avec mon pere. La dénégation cll:-elle formelle:
Maintenant prouvez votre affertion; il n'ell: pas un fait
au monde qui puiffe moins échapper à la preuve.
MAUVAIS FILS. Comment? Il a attenté même li l'lionmur de Ion pere par des Libelles infomes.
• Ici l'imputation ell trop grave pour fe contenter de la l'.g, .ot>;
dénégation. Puifque le Libellill:e n'ofe pas fe nommer,'
je fQmme Madame de Mirabeau, qui Feule a (j~né [on
prétendu Mémoire, de [e rétraéter; 8< Je la préViens q~e
fi elle ne fe rétraéte pas, je la forcerai par toutes vOies
à prouver que j'ai écrit Olt publié des Libelles Difames contre
mon pere.
Il ell: vrai que mon pere écrit à [a belle-fille dans fa l'ag. ,+ &: 'f.
lettre du 4 Novembre 1776, en imputant à UNE TIE~-,
CE PERSONNE l'impreffion d'un Mémoire qu'il m'attribue: » C'ell un recueil de trois qu'il fit dans le. te~ps
» de la belle Plaidoirie que vo us favez ; & p UIS d un
» Mémoire à confulter fur [on interdiétion, 8< de deux
'» Confultations mendiées dans le temps, pour ,~onner
» quelque air de vraiffemblance à cette affaire qu Il pré) tendait avoir.
.
Autre lettre à Madame de Mirabeau du 1 3 Decembre
•
�9)
Pag. 1f da
Ll lie.
1"l" (opr.
rn7,
g. 63 du
Libelle.
111"
'M
94
eme annee. » 1 on enfant, fi ce fol dans un mome t
» de fougue en un Mémoire excité par fa mere delli ".
)} au menfong~, ~ q~i eft farci de contradiaio~s extr~~
b v~ga~tes.' ,n avait dit du. mal de vous, il vous auroit
» mue a C?t:e . . . . . & mieux vaut encore être injurié
» avec mOI.
Autre lettre à Madame de Mirabeau du I I Juin 177 8 ;
où il répétoit les mêmes. expreffions.
Autre lettre à Madame de Mirabeau plus ancienn
. 'd
, e
que 1a pre ce ente, quoique felon la c06tume du Libellille
r or,dre en '~It
r"
~
C
'
Interverti. ( e font rufes de guerre.) 1) II
» s ell ferme toutes .les po~tes à une réintégration quel~
" co.~que par les Libelles IJ1fames & répétés qu'il a pun bhe~ cO,ntr~ fon pere avec une fureur qui ne pouvoit
» aVOir. d objet que fa fureur même, & le fot orgueil
» de fa~~ du bruit en faifant détourner tout le monde.
- Et v?üa donc toutes lei preules qu'on rapporte d 'une
accufatlOn auffi atroce que celle J'ayoir attenté il l'holT-
neur ~e Jo~ pe:e p ar d'infâmes Li6elles. . M~ls n eft-Il pas de notoriété publique qu'à aUCune
td~s ~poques. rappellées dans les fragmens ci·defTus, je
'11 étols aup~es de mon pere , & que pendant la plus
grande parne de ce temps j'errois dans les pays étrangers?
-Quel.,gen~e ?e .preuves ~on p'ere pouvoit-il donc a"oir
que Javols ecnt des Libelles que je ne connois même
p~s ? Quand on auroit publié de telles horreurs, en m'in-<ilquanr pour l'Auteur, encore un Libraire pouvait-il être
le feul coupable de ce double crime? Mais lequel a paru
fous mon nom, fi ce n'ell un Mémoire dont l'Autenrell
avoué, & qui d'ailleurs s'il n'a défendu contre mon pere
que . ma capacité civile & ma liberté naturelle
n'a
~ertalnemenr point exc t dé les bornes d'une légitim~ délenfe
7 U M"
.
. n
emolre qu ,on ne peut pas fans la plus indigne mauvaife foi, m'attribuer qu and ~ on a lu qu atre
lIgnes d
. .
M
.
'
e mOI, un
émoue que mon pere lui - méme
1
•
appelle UN RECU.E~L . Il s'y trouve de prét~ndues .1ettres écrites par mOI a M. de Malesherbes qUI devOient
l'.g. 61
me J~rmer touteS les parus à une réilllégraLi cll; & je fuis Libdle.
réùllé.-rri cependant. Je ne fais fi ces lettres Cont farcies de.
CONTRADICTIONS EXTRA V AGANTES, ni fi elles
peuvent s'app eller un Libelle; cela m'importe peu auffi
long-t~ms qu'on ne m'en repréCentera pa~ les originaux
écrits de ma 1l1ain; car fi l'on veut que je réponde de
tout ce qu'on peut imprimer fous mon nom, il faut me
rendre fouverain de toutes les Tipographies de l'Europe;
encore les Souverains me paroifTent-ils afTez mal obéis
en ce genre. Mais enfin, parce que le Courrier du Bas·
Rhin & le Chronicle-London , & l'ObCervateur Anglois,
& les Mémoires fécrets , & tant d'autres fottifes périodiques, ou de rapCodies diffamatoires auront ihfulté mon
pere & mille autres hommes de mérite; parce que mon
pere , dans fes accès d'une colere violente (& quoi de
plus iraCcible que le cœur d'un pere prévenu?) aura
vu dans ces infamies l'Enfant prodigue, que fes angoiffes.,
fans cefTe renaifTantes, lui montroient pa~-tout ; il refiera
démontré que j'ai al/enté d l'honneur de mail pere par d'infomu L i6elles ? A quoi tiendra déformais la réputation
des hommes (car ils [ont tous fils avant d'être peres) s'il fuffit
d'un foupçon pour leur imputer des délits atroces ? ... JevouIO
le répete ; vous prouverez celui que vous dénoncez:
(après quoi il vous refteroit encore l'odieux procédé
d'avoir réveillé un délit envers un pere qui l'auroit par-:
donné ). Vous le prouverez ou vous en ferez répara,rion
authentique & légale. L'honneur défend de pardonner
de telles injures.
Mais enfin quel excès d'immoralité, même dans un
homme qui par état ne connoît guere d'innocence &
de délit que felon les Loix & la Jurifprudence; quel exct!s d'immoralité que de faire dénoncer un mari par fOll
époufe à la J uftice, au public comme un mauvais fils,
•
dl1
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dans le
•
,.
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du
m~~:I
ecnt
où
l'on
imprime ces propres mOts
e
PSerO :
PARDONNÉ TOUT CE QUI M'EST
PER
NNEL. Et c'eft a r'
fers de fan fils' c'eft
P, es que ce pere a brifé les
honneur des é '
apres (lue le fils eft [orri avec
c'eft'
preuves auxquelles fon pere l'a fou .
mIs;
a pres que le pere a co nfi é [,
fan vœu pour la réunion de f~~ filons:ardon &. proféré
que celle-ci crie au public c' ,~ J de [a belle-fille,
~L EST UN MAUVAIS FiL~I~ ~ONes uge~: IL FUT,
ECRIT!
, P E R E ME L'A
97
7rairé des in·
Ouvrez Darreau , &. vous lirez' » 1 [, ,.
Caux enfans) d'être affez
Ih'
or qu Il leur arrive
, d'
ma eureux pour [,
» a es exces , &. qu'ils abufe t d
e porter
» trop (auvent retient de jufr ~. cette tendreffe qui
Ji' public ne fait que fon de e.s pdalntes,
le Miniftere
e
» caure des peres &. nleres vOIr é prendre le fait &.
.
outraa S Il
d'
» Jours attendre une dénonciat' b '
n.e Olt pas toul) d'être affuré des outrages p IOnl,.pod~r a~lr ; il lui (uffit
)
r
'
) pour que IOn
zele [oit à l' ar
b . ln
d Ignauon pu bl Ique,
» qu e lia pru d ence doIt. néanmoins
a fI 1 e• fitous éfoupç
o n s , Ce
» ca~, c'e~ de con{uIter auparavau~1 l:gg rer en pareil
» qUI [erolent peut-être plus offenfés d's peres ~ mfres
» tre un de leurs enfans
ue cl
,un~. plaInte conD en fouffrir ... , Il peu: ~rrive~s exces qu Ils pourraient
) premiers tranli arts u
. auffi que cédant à de
J)
à la Juft'
DP
, n pere. vIenne dénoncer fan fil
Ice,
ans ces premIers
.
s
) toujours de calmer [,0
momens , JI convient
On d . 1 l '
» d re; on doit croire nueCourroux
1
. •
OIt e p amJ) part à fes démarches q &.
radlfon n'a point eu de
» réflexion.
, U I onner le tems de la
jures) Chlp .• '
(ca. '. D. 8. ,)
f.
Ainfi le Miniftere public
au pere, ne peur a ir [a; p~ur d~s ?élits publics du fils
{urer fi le pere les a gpa d s ~enonclatlOn ,avant de s'af.
ou veut
pour Ie délits privé" r onnes
l
, l es d1'("
llm \11er. Et
public ne peut agir ~u,ipu;, e per.e den~~ce , le Mi 1iltere
e~ avou [olllClté le pardoo du
pere.
J
pere. Quoique la jufiice humaine n'ait qu'un paUe, celui
de l'innocence, elle n'eft dans une telle occafion que
rniniftre de la juflice paternelle, qui en a deux, celui
de l'innocence &. du repentir. Et Madame de Mirabeau
qui n'efl pas chargée de la vengeance publique, Madame de Mirabeau que le plus faim des nœuds devait rendre médiatrice entre mon pere &. m oi ; Madame de
Mirabeau qui auroit dû invoquer fur ma tête la clémence
de mon pere, au temps de fa colere; Madame de Mirabeau m'accu{e lorfque mon pere a pardonné!
J'AI ÉTÉ MAUVAIS EPOUX. Commen t? )) Je n'ai
» refpeété dans mes fureurs ni la foibleiTe, ni la fenfibi» lité de ma femme; je n'ai pas même refpeété le temps
» de fa groifeffe; je me faifois une habitude, un jeu
)) barbare de l'accabler d'injures, de foupçons, de me» naces &. de coups; je me fuis porté à des excès de
) brutalité &. de jaloufie que la plus vile populace défa.» vouerait, qui fOllt connus des deux fami lles 1 & qui
» (ont atteflés par la notoriété.
Leéteur! nous n'en fommes point encore à l'examen
des faits. Au nom qe la vérité, de la juflice, de l'humanité faime, de l'Etre des Etres qui nous jugera tous;
ne l'ou bliez jamais.
Mais ces lettres fi tendres, où dans l'effuffio n des plus
beaux fentimens, Madame de Mirabea u s'écriait; DIEU
.VEUILLE NOUS REJOINDRE BIENTOT; CAR
NOUS NE SOMMES PAS FAITS POUR ETR E SÉPARÉS; ces lettres 'a rr_ès lefquelles Madame de M irabeau ne m'a plus revu; ces lettres ne portent-elles pas
~n caraB:ere de feu. SI L'EPOUX FUT UN MA U VAIS
MARI; S'IL NE FUT PAS LE M EILLEUR D ES
MARIS, L'EPOUSE EST LA PLUS FAUSSE D ES
FEM ,1ES,
» M . de Mirabeau pere, a-t-on dit dans Je Libelle,
~ qui connoiiToit les flljets de plainte de la Dame de
N
P.\ 2". too dl!
Li <i l, .
Pag.7.
�98
» Mirabeau, ne s'ell pas mépris rur les motifs rages BI:
» rai[o nnables qui diétoient les lettres de [a beIle-fille.
Voilà donc la fau{feté, la . perfidie érigées en jàgeJJe,
en ra/fon! Cerre morale eft digne du refte du Libelle.
Mais enfin voyons la lettre que l'on cite en preuve
de l'accu[ation que j'avais maltraité la femme qui m'écrivait fi tendrement: elle eft du I I oétobre J774 &:
s'a dre{fe à M. de M arignane.
'
P.~. 7 & 8
» Elle n'eft pas aveugle [ur le compte de [on mari .... .'
du LlbeUe.
» Elle voit clair en tout & très-clair; & fi javois quel.
J) que vice à cacher & quelque défaut cher à mon amour
» propre, je me tiendrais fort [erré devant elle.....
)) ElIe v oit tout, & elle a d'ailleurs rame fi [enfible fi
)) délicate & fi noble que ce qu'elle ne [aurait voir' &:
~) combiner faute d'expérience, elle le [entiroit. »
" E t. cela pr~uveroit que mon pere ~'ignoroit pas que
J aVa is maltraité [a belle-fille? Il [avOIt le contraire 8<
par elle. Reli[ez la lettre de Madame de Mirabeau' du
14 JUIn 1774. Mais indépendamment de cette lettre
quelle ab[urdité n'y aurait-il pas à [uppo[er que mOI~
pere entendait parIer de mes [évices lorfqu'il a dit:
ELLE, VOIT TOUT; ELLE A L'AME SI SENSIBLE
SI D ELICATE ET SI NOBLE, QU'ELLE SENTIROIT
CE QU'ELLE NE SAUROIT VOIR ET COMBINER
FA ~TE D'E~PÉRIENCE. En vérité, il n'était pas né.
ce{falre de faire de Madame de Mirabeau un fi bel élo.
~e., pour perfuader qu'elle n'était pas in[enfible à des
znj~ru, à .des menaces, à des coups, à des exces de hruta.
lue & de jalou{ze que la plus vile populace défavoueroit lX
que la pauv:re . viétime, fût-elle auffi de la plus vile ~o
pulace, fentlrolt auffi [ans qu'elle eût be[oin de voir clair
lX d'avoi: l'ame a.ffè{ Jenjihle, a.ffè{ délicate & a.ffè{ noble
pour fenur ce qu'elle ne pourroit voir & combiner faute d'ex";
p érimce. Il répugne donc de penfer que ceux de rne~
torts fur le[quels mon pere jugeoit que ma fe~e EC;
99
.'
Cf. d
va1's
pouvoit etre aveugle, fuifent des [ev1ces ~ e mau
.
.
traitem ens. .
» Ce n'eft donc pOlllt un mâtin ébouriffé qUI en llnffi fi ns, & à une tête auffi droi·
») poferoit à d es, organes a~ 1
)) turiere que 1 eft celle-la.
.
.
UN MATIN EBOURIFFÉ qUi battrOlt (a femme,
pourrait· il lui en irrtpofcr, quelque groffi,ers quêe fu:fent [es organes, & quelque gauche que fût la t te e
cette femme.
. C' ft '
C'ejl contre elle - même qu'il fa ut la fervlr.
e - a.dire, a{furément que Madame de Mirabeau ne, vouloa
pas être féparée de [on mari, 8< non pas qu elle en
vouloit être féparée. Cette Lettre prouve ?onc,' non, p~s
ue Madame de Mirabeau était fauife, mais qu elle etOlt
{rès-vraie lor[qu'elle me témoignoit, dans fes lettres, les
plus vifs regrets de notre féparation.
.
1
, Son mari ejl un fol. Ce n'était pas pour. aVOIr ma :
traité ma femme que j'étais jugé tel. J'avo~s c,ontraéte
des dettes confidérables; ce qu'un pere a drOIt d appeller
folies.
.
d l' .
r Pag.,
Mon deffein eft donc malOtenant
e eprouve LibCi le.
';out de bon &. à ma maniere .... En [uppofant un
:: miracle & qu'il fe contînt a{fez pour que le Com) mandan~ ' réponde de fa [age{fe lX de [a. repentan~e.'
alors je le ferai pa{fer dans quelque CItadelle ou Il
:~ auroit à vivre avec quelqu'un pour l'éprouver. Autre
» miracle qui le fît fortir à bien de. cette Feconde épr~u.
» ve' j'en tiendrai de prêtes, &. alOfi par dégrès. C en;
» to~t ce que je puis de n?uftvell,le patience à fa qualue
a tout.
,) de mari ET DE PERE; ce
A SA QUALITÉ DE MARI. J'av~is do.n~ par cette
qualité des droits à la liberté que 1 aut?nte paternelle
me ravi{foit pour me punir de mes folIes p~{féeATI~
arrêter de nouvelles lX m'éprouver. Un man M
EBOURIFFÉ, FOL ET FOL FURIEUX enverNsf~. femme
A
1)
dll
�100
aurait-il confervé des droits à la liberté par SA QUA.;
LITE DE MARI?
P>g. ~ du
» Je ne mettrai pas deux fois entre les mains d'un fol
L. ""e.
» furieux une jeune per[onne pleine de mérite, &. toute
» la fortune de ma malion.
Cela s'entend &. s'explique aifurément fans aucun rap';
port aux févÎces &. aux mauvais traitemens. Mon pere
po uvait croire que fa belle-fille était compromife de la
m ême maniere que la fortune de fa maifon par de folles diflipations i IX me nommer fol fùrieux comme courant
à ma ruine. L es diflipalions font une efpece de fureur.
Ce n'était pas pour des févices &. des mauvais traitemenrs envers ma femme, que j'étais renfermé; les ép~eu
ves que mon pere annonçait ne pouvaient être relatives
à des torts de cette e[pece; &. mon pere ne parlait dans
[a lettre que des fautes auxquelles les épreuves pouvaient
être relatives, &. qui l'avaient déterminé à me priver
de ma liberté. Non feulement cette lettre ne prouve
pas les mauvais traicemens dont Madame de Mirabeau
fe plaint aujourd'hui; mais elle prouve au contraire
qu'elle était alors bien éloignée de s'en plaindre.
Que fi cette traduttion ou ce commentaire ne plaît
pas à Madame de Mirabeau, il en en: un autre, même
affez &. trop naturel; &. le voici: mais je lui confeille
'
de ne pas choifir cette verfion.
Pag. 7 & 8.
» Madame dé Mirabeau n'dt point aveugle fur le compte
» de fon mari. Elle voit clair en tout &. très-clair .....
» Un mâtin ébouriffé n'en impoferoit pas à des organes
» auffi fins &. à une tête aulli droituriere; mais cette
» jeune femme en: fingulierement attachée à toute idé:
» de devoir ...... fans encourir de juftes blâmes, qUI
" d'ailleurs coûtent fi peu aux fpettateurs, elle ne pou~,
» voit faire que ce qu'elle a fait ••.. Toutefois, comme
• fa million eft aujourd'hui fan feul objet, ,'eft c;ontr,9
» elle-même qu'il faut la fervir.
101
Cettre lettre en: écrite à M. de Marignane par mon'
pere dans le temps où fa belle-fille était auprès de lui;
Elle prouve, elle pourrait fervir à prouver du moins,
qu'en fe montrant fingulierement attachée à fes devoirs.,
Madame de Mirabeau avait cependant laiffé appercevQlr
à mon pere que le mari auquel elle écrivait alors les t t
lettres les plus tendres, ne lui paroiffoit pas digne des
fentimens qu'elle affettoit pour lui.
Elle prouve qu'alors encore Madame de Mirabeau re·'
gardait comme un devoir de remplir la miffion qui l'avait
conduite à Paris, &. ,qu'elle reconnoiffoit, aulli bien que
fon beau-pere, qu'elle ne pouvait avoir d'autre objet en
vue, mais que ce devoir était pourtant onéreux pour
elle.
Tandis que Madame de Mirabeau fe montrait ainli aux
yeux de mon pere, elle m'écrivait l~ 7 du même mois
jour dont la lettre de mon pere en: datee: » Tu fais, mail
.» cher ami, que.c'eft toi qui m'y as envoyée. ( à Paris)
» Du Q10ment où je t'y déplairai, tu n'as qu'à me mander
)) où tu veux que j'aille, &. je m'y rendrai tout de fuite ,:
» n'ayant d'autre volonté que les tiennes.
Le 10 Ottobre, c'cn:·à-dire, la veille du jour où mort'
pere écrivait la lettre que nous exami~ons '. M~~ame de
Mirabeau me difoit enCOre: )) Je ne faiS fi Je t al mandé
» que mon pere m'a fait offrir fi je voulais aller le join·» dre au cas que ce féjour m'ennuyât. J'ai fait répondre
») que' dans ce moment-ci tu., me v~uloi~ ici ~ufq.u'à ,ce
») que tu fuffes libre; ce que J efpérols qUl feraIt blentot:
» qu'après cela je ne favois quelle ferait notre habita~
» tian. Adieu mon bon Ange.
Deux jours après la lettre de mon pere , c'efl:~à-dire,
le 13 Ottobre, elle m'écrivait: ») Po~r ce. qu~. eft ,de
» mon féjour ici, je te répéte ce que Je t'al deJa dit :
» Je fuis à tes ordres au moment où tu me demanderas.
Mon pere, fans en être prié, veut, dit-il , SERVIR MA.
olt 177'<'
\
�100
aurait-il confervé des droits à la liberté par SA QUA.;
LITE DE MARI?
P>g. ~ du
» Je ne mettrai pas deux fois entre les mains d'un fol
L. ""e.
» furieux une jeune per[onne pleine de mérite, &. toute
» la fortune de ma malion.
Cela s'entend &. s'explique aifurément fans aucun rap';
port aux févÎces &. aux mauvais traitemens. Mon pere
po uvait croire que fa belle-fille était compromife de la
m ême maniere que la fortune de fa maifon par de folles diflipations i IX me nommer fol fùrieux comme courant
à ma ruine. L es diflipalions font une efpece de fureur.
Ce n'était pas pour des févices &. des mauvais traitemenrs envers ma femme, que j'étais renfermé; les ép~eu
ves que mon pere annonçait ne pouvaient être relatives
à des torts de cette e[pece; &. mon pere ne parlait dans
[a lettre que des fautes auxquelles les épreuves pouvaient
être relatives, &. qui l'avaient déterminé à me priver
de ma liberté. Non feulement cette lettre ne prouve
pas les mauvais traicemens dont Madame de Mirabeau
fe plaint aujourd'hui; mais elle prouve au contraire
qu'elle était alors bien éloignée de s'en plaindre.
Que fi cette traduttion ou ce commentaire ne plaît
pas à Madame de Mirabeau, il en en: un autre, même
affez &. trop naturel; &. le voici: mais je lui confeille
'
de ne pas choifir cette verfion.
Pag. 7 & 8.
» Madame dé Mirabeau n'dt point aveugle fur le compte
» de fon mari. Elle voit clair en tout &. très-clair .....
» Un mâtin ébouriffé n'en impoferoit pas à des organes
» auffi fins &. à une tête aulli droituriere; mais cette
» jeune femme en: fingulierement attachée à toute idé:
» de devoir ...... fans encourir de juftes blâmes, qUI
" d'ailleurs coûtent fi peu aux fpettateurs, elle ne pou~,
» voit faire que ce qu'elle a fait ••.. Toutefois, comme
• fa million eft aujourd'hui fan feul objet, ,'eft c;ontr,9
» elle-même qu'il faut la fervir.
101
Cettre lettre en: écrite à M. de Marignane par mon'
pere dans le temps où fa belle-fille était auprès de lui;
Elle prouve, elle pourrait fervir à prouver du moins,
qu'en fe montrant fingulierement attachée à fes devoirs.,
Madame de Mirabeau avait cependant laiffé appercevQlr
à mon pere que le mari auquel elle écrivait alors les t t
lettres les plus tendres, ne lui paroiffoit pas digne des
fentimens qu'elle affettoit pour lui.
Elle prouve qu'alors encore Madame de Mirabeau re·'
gardait comme un devoir de remplir la miffion qui l'avait
conduite à Paris, &. ,qu'elle reconnoiffoit, aulli bien que
fon beau-pere, qu'elle ne pouvait avoir d'autre objet en
vue, mais que ce devoir était pourtant onéreux pour
elle.
Tandis que Madame de Mirabeau fe montrait ainli aux
yeux de mon pere, elle m'écrivait l~ 7 du même mois
jour dont la lettre de mon pere en: datee: » Tu fais, mail
.» cher ami, que.c'eft toi qui m'y as envoyée. ( à Paris)
» Du Q10ment où je t'y déplairai, tu n'as qu'à me mander
)) où tu veux que j'aille, &. je m'y rendrai tout de fuite ,:
» n'ayant d'autre volonté que les tiennes.
Le 10 Ottobre, c'cn:·à-dire, la veille du jour où mort'
pere écrivait la lettre que nous exami~ons '. M~~ame de
Mirabeau me difoit enCOre: )) Je ne faiS fi Je t al mandé
» que mon pere m'a fait offrir fi je voulais aller le join·» dre au cas que ce féjour m'ennuyât. J'ai fait répondre
») que' dans ce moment-ci tu., me v~uloi~ ici ~ufq.u'à ,ce
») que tu fuffes libre; ce que J efpérols qUl feraIt blentot:
» qu'après cela je ne favois quelle ferait notre habita~
» tian. Adieu mon bon Ange.
Deux jours après la lettre de mon pere , c'efl:~à-dire,
le 13 Ottobre, elle m'écrivait: ») Po~r ce. qu~. eft ,de
» mon féjour ici, je te répéte ce que Je t'al deJa dit :
» Je fuis à tes ordres au moment où tu me demanderas.
Mon pere, fans en être prié, veut, dit-il , SERVIR MA.
olt 177'<'
\
�10Z
l"g, 10 & 11
du Libell .
FEMME CONTRE ELLE-MÊME; '&, il annonce la maniere dont il veut s'y prendre, comme on l'a vu pag. 99.
C'efi ainfi qu'il communique [on deifein à M. de Marignane. J ufques-là ce font des épreuves qu'il annonce ;
elles font rigoureufes; mais c'eft un parti pris par lui
feul ; on ne voit nul concours d'aucun parent; &, mon
pere avoue que ma femme &. mon fils ont des droits
qu'il doit refpeéter. (1)
Mais pourquoi mon pere entre-t-il dans tous ces détails dans la lettre qu'il écrit à M. de Marignane qui ne
les lui demandoit pas? La fin de fa lettre va nous l'apr
prendre.
C'efi en[uite d'une converfation avec [a belle-fille qu'il
écrit à M. de Marignane : » elle me dit l'autre jour
» que ifi fon mari lui mandoit de fe retirer, ( & je Jus
» par ailleurs qu'i! avoit LOuché am corde) elle feroit obli.») gée de fe mettre dans un couvent; que M .... &. M ....
» difoient qu'elIe étoit bien aife de la prifon de fon mari
(1) Voilà, pour le dire en paffant, une n'ponCe pérempwire à l'injurieuCe obferYation qu'on a tant r':pétée dapuis le commencement du
procès: A fa~oir , que li mon fils n'éwit pas mort, mon pere n'aulait jamais Congé à me rendre m~ liberté, & qu'il n'dl devenu moins
{évere que pa, le ddir d~ perpetuer Ca race. II aVOUaI[, du vl~aut
de mon /ils, que mA <JUil/III d. p<rt & ce/!. d. ",art, me dO'1nOleot
des droirs qu'on ne pouvait violer, & m'impoCoient des devo~s &
des obligations qui réclamaient pour moi la liberté que ma. femme
(olliciwit, L'on trouve dans la même lettre : " Mais euffions-nous perdu
)' cet enf"nt , (mon /ils) m. conCâence ne fe repaît pas de chimeres,
l ' & je ne mettrai pas deux fois entre les mains d'un fol furieux, une
)' je,une per[OItne pleine de mérite & toute la fortune de ma mal[on. "
Ce pafTage prouve bien clairement que dans les principes de mon pere.
la poftmnnanie ne l'abfoudroit pas du délit de m'avoir rendu I~ liberté
s'il me voyait des mêmes yeux qu'autrefois; & que du vivant de
mon /ils même, mon pere ne faifoir dépendre que de l'événemelH des
· tpreuves le recouvrement ou la privation de ma liberté.
ro~
» pour être à Paris.: •. Je détournai dès-lors la con::
) verfation ; mais j'ai réfolu de vous en écrire. Je fuis
» perfuadé que vous feriez fort fâché de la voir à fon
1) âge prendre un parti auquel elle mettroit enruite fon
f) honneur, qui n'eft point fait pour elle, ne fût-ce que
» parce que c'eft rétrécir une tête dans l'âge &. la pofi.
,) tion où il eft le plus néceifaire de l'entendre ..... ..
Le relle de cette lettre n'a point été communiqué i
mais aifurément on en lit aifez pour voir clairement qu 'elle
n'eft que la fuite & l'effet d'une converfation de Madame
de Mirabeau avec fon beau-pere; &. c'eft une circonftance
précieufe qui explique à merveille comment cette lettre
n'eft autre chofe qu'une apologie de la conduite de la
helle-fille.
Remarquez qu'à l'époque de cette lettre, j'avais déja
manifefié le defir du retour de ma femme en Provence.
Mon pere SUT PAR AILLEURS QUE J'AVOIS
TOUCHÉ CETTE CORDE. Cependant je ne corref~
pondois qu'avec ma femme. La lettre de men pere le
prouve. (1) Elle avoit donc communiqué mon projet à
quelqu'un qui en avoit fait part à mon pere. Mais pa.
roÎtra·t·il impoffible qu'une femme, dont les lettres 8(
la conduite étoient fi contradiétoires ,ait ufé de fine{fe
pour lui faire paifer cet avis? N'auroit-elle pas en(uite été
capable de l'affeétation de communiquer le prétendu projet
d'aller au Couvent fi je perfiftois à la réclamer? N'auroit-j
.
"
"
"
"
"
"
"
,,( 1) En demandaI\! la clôture de cet homme & qu'on lui ô,ll
!Oute correfpolldance, j'ai excepté celle de fa femme, quoiqU'Cil
priCon d'Etar , elle fait fupprimée de droit, , . , , Je ne fois li j'ai
bien fait; mais je prévois le cas où nous ferions obligés d'obvier
aux elfe« de certe correfpondance, Certainement li nOtre homme faie
quelque folie, cette ierue fera fermée comme !Oute alltre. J'en ai déja
prévenu le Commandanr ; mais avec cela il pourroit lui écri,e telle
chofe qui dérangeât tOUt,
•
�1°4
elle pas eu l'art facile de faire naître des fOll çons dans
cette imagination trop fenfible? En témoignant beaucoup
d'emprefiement à me fervir, elle lai!Toit penfer à mon
pere que j'étois peu di g ne de fon zele. Cependant cellt
jume j~mme vOY0lt clair n tOut & u ès clair. R ien n'échappoit à fon difcernemenr. Elle v oyoù donc qu'elle avoit
fait penfer à fon beau-pere que ma conduite envers elle
n'avoit pas été fans reproche; & elle ne détruifoit pas
cette idée! Elle voyoit que mon pere avoit l'intention de
ferrer mes liens & de me faire pa!Ter par de longues .&
pénibles épreuves; & elle ne combattoit pas ce de!Tein !
Dans le même temps où elle feignoit de vouloir aller au
Couvent, elle m'écrivoit: Mon pere m'a fait offrir fi je
voulois aller le joindre au cas que ce Jéj our m'ennuyât. J'a i
fait répondre que dans ce moment-ci lU me . vou lois ici ju(qu'à
ce que lU fu(Jès M re; CE Ql.{E J'ESPEROIS QUI SE.
ROIT BIEN TOT : QU'A PRES CELA JE NE SAV OIS
QUELLE SEROIT NOTRE HABITATION. Ce langage éroit bien différent de celui qu'elle tenoit à mon
pere. Les idées qu'e!le vouloit me donner éroient bien
différentes de celles q u'elle préfentoit à fon beau-pere. Si
l'on compare la lettre de celui-ci du I I Oétobre 1774,
avec celles que Madame de Mirabeau m 'a écrites quel'lues jours auparavant & quelques jo urs après, il n'eft
perfonne qui ne VOIE CLAIR ET TRES-CLAIR à
tout cela; & je n'apperçois qu'u ne reffource pour Madame de Mirabeau, pre!Tée entre la calomnie du jour &
la perfidie d'alors, c'eft de répondre que les allégations
de mon pere ne font pas plus de preuves qu'elles ne font.
infailliblement exaétes. Et voilà précifément ce que je
pourrois répondre à chaque ligne du Libelle. En effet de
qui ne peut-o,n pas imprimer, comme de moi, qu'il eft
un MA TIN .EBOURIFFÉ , un FOL FURIEUX , IIll
HOMME FEROCE , & toutes les accumulations d 'épithetes que peut fournir la langue: car laquelle ID 'a-t-oH
é p argne' l_
10<;
,
f,
-
e là des faits? A-t-on eîpéré que Je erols
épargné ' Sont-~ h t ? Comment n'a - t - on pas vu qU,e
jugé fur les éplt e e s :ée avec tant de complaifance, Il
lettre pu b 1l ,
C
d ans c ette
,
{', . q ue la converfatloll de mon pere av.e
n'y aVOl t de ) ~u b
,fait qu'elle peut d'autant mOllls
Madame de ~Ira eau '"
rime la lettre qui nous la
nier, que c eft elle q,Ul t Imp as vu qu'il était au moins
tranfmet? Comment n a-, ,on lât au' ourd'hui ce qu'il eft
J
fort finguli,er qu'e~lell m °f!~ écrire autrefois? C 'eft ulle
qu e e a
1
ffi 1
PreCque éVident
,
celle de a pa IOn ,
étrange logIque que
1 a-t-on pu croire que je ne
A-~-on cru , ~r ~~~~:e ed~s dates qu'on interve~ti!Toit,
faurOls pas r é ta ~ élé
t s de Madame de Mtrabeau
ou que les défenles
gan e
femme defiroit encore de
feroient les feules lues.
77
Le 18 Oétobre 1
~aoit du moins; elle me l'écrime rejoindre; elle me c:lV
s la lettre où elle difoit
. 1
d
ême mOIs d an
VOlt e 14 u m
bles ' J'ai élé ji-appee de la paentr'autres chofes remarq~a 1 I;'ijle fitual ion ; perfonne n'a
Limce avU La'll:elle lU prent~ ;ans le malheur: ce qui veut
plus de force d efpr~l
M'ASSOMIEZ TOUS LES
dire éVldemment
DE LA COHABITATION. Elle
MPS
JOURS
' d'On.obre'
Je
, ' AU TE 1 25 du me. me mOIs
\..1
'
m'écnvOlt
ellcore
e
.
.
'
e' . ue J'e fiuis à tes ordres, &
, . d'
ml & ,e te l ep 1. q
1 at
lt, mOIl a
~.
dep
' 1alfa.
. ; l'C;., ,"irai où lU v oudras.
ft Je te
.
d
que u m omenl ; , 1 28 dans la lettre où elle voulolt ,
Elle me le rép toit e fi
é de l'homme qu'elle refufe
difoit-~Ile , ,baiJer, Le ,lle{&ron~i ar conféquent la battoit
de VOIr ,au)oùrd hUI ~
q de Novembre, elle me té.
tous les Jours a.utrefols, ~e 3 , & le 8 du même mois,
moignoit ~es ,memes fentlme~1S '& tendre où elle me dielle m'écnvOIt une lettre ~ale.
.
' . , fi che toi une
-t'
7' che de brider Ion tmaglll all on , 'lut e)"
{
fi01 , ~ a
l bouts comme
lame uJant fans ceffi Le jourre%u paie I~:~vi:~s que ~eux que
(In dit. , : . Quan~ aux reproc &s PROUVENT TA TEN;:
~u me fats font bien doux,
0
?
•
t.é
Vous
1
•
�d'êtr~O?omplice
DRESSE NON TON HUI06
CEMENT DE PREUVES~EfR • .Nouveau COMMEN.
des mauvais traitemens!
R ECRIT des févic es 8(
M~dame de Mirabeau di/fer d
' . .
elle sen excufe dans de 1 e e m éCrIre Jufqu'au 15 .
'
s ettres où 1'0
l
"
n trouve encore
c es mots : pour moi
, ,•
, mon "on aml
'
croyOlS
T '
Je t aVOlU ,9lle (iJ'e
r. ' 1 elre plus lIlile au Ch aleau- d'~f,
",
Jerou avec un grandplait:
' , ' ,fl~ lCI; Cutamemenl ce
L
':lU flue Je 1 y Jorndrois
A
e 22 novembre, nouvelle lettr
. .
preffions de jaloux . l'alTur
d~
qUi répond à des ex·
.,
ance
une tendr rr.
d eVOie JamaIs finir y eft é é é M
eue qUi ne
prétend que mon pm en / Pd~/: r;, adam~ de Mirabeau
prIe d' avoir encore un ').eu un lJpOJ e en ma J'la veur. EII e me
cher de moi par la crafnte ~~t~~~~e ~ ell~ refufe de fe rapro·
que tout le monde fait qu'elle el{
eolle me repréfente
Elle ~e protefte que fi je fuis malade alrIS par n,t0n ordre.
de ralfon , emprelTée â ve '
, Je a verraI, Comme
efpere que je me ~rvirai ~Ir me prodiguer fes foins. Elle
, r. ' J
J'
ans cette occaÎzo n ci
'1Z a JerVI aans lant d'aulres
&0
,'p'
u couraO'e Cjui
Ji pres du pOri. Même a/fe'aio~ue Je ~e forai pas na~frag~
celle du 24 novembre.
' lIleme tendrelTe dans
Ce fut vers ce tems u'ell
lui écrivois le même joq
~ ~eçut cette lettre que je
porté des fragmens 0 » 0ur ,
ont le I.ibellifte a rapt) gage, que le cœu; feJt p~~t :~~~~~endrai pa,s, un lan» le votre [ans retour
C'
e .. " J al perdu
l'.
• '"
e n eft pas t
• l'.'
» laute;• car fi J"ai pu l' a l"lener
out-a-laIt
ma
vous co
d
» vous a moi que j'ai b
'
,
nVlen rez de
) quérir.
eaucoup faIt pour le recon.
0
'
0
o
•
..
0
;ep'
0
pa~
qu'elle Ce donne l'air
'de la Cévérité
ternelle , & qu'elle ne fauroit jouer un tôle moins convenable. Je termine ma lettre par cette phrafe imprimée en
majufcules: » Si vous méconnoiffiez vos devoirs au point /ag'bSl\ &
) tle balancer, je regarderois votre indécifion comme u LI , e,
) une dilTolution de vos engagemen~ de femme, & vous
» ne ferez plus, je vous jure ,importunée de ma pré-,
» fence ni de mes lettres.
Je ne fais fi ce feroit par hafard, dans cette phrafe ,qu'on auroit cherché le vœu de la famille, le jugement
domeftique; lit je demanderois alors contre qui l'on croit
que ce jugement eft dirigé, & lequel des deux époux auroit droit d'en exciper.
Quoi qu'il en foit, telle eft donc la lettre fur laquelle
on s'eft écrié: Voilà L'empire que M. de Mirabeau, mime Pag.&\.
dans les jèrs, exerçoÎl con Ire fa femme; CET EMPIRE
INVISIBLE, qui rendoÏt toujours préfentes les /rifles images du paJJé, & 'lui étoit la fouree de mille craintes pour
l'avenir, doit donner aux arnes honnêtes &0 (enJi61es L'idée
du plus effrayanl defpollfme flui fût jamais.
Diroit-on que la lettre qui fournit au Libellifte une
déclamation fi violente , eft celle à laquelle Madame
de Mirabeau répondoit le premier décembre fuivant par
ces mots: que tous les Libelles & les EMPIRES INVISIBLES du monde ne détruiront pas: JE NE CRAINS
POINT DE M'EN REMETTRE A TON TRIBUNAL,
IL A TOUJOURS ÉTÉ JUSTE POUR MOI ? Eft - ce
le tribunal du defpote le plu5 propre à infpirer la terreur
que toujours on a trouvé jufte ? Si ma lettre avoit retracé les Irifles images du pafJé; fi elle avoit . infpiré des
craintes pour l'avenir ; Madame de Mirabeau auroit-elle
écrit qu'elle ne craignoit pas de s'en remettre à mon tri.
bunal que toujours elle avoit trouvé julle pour elle ?..... ~
C'ell le cri de fa confcience qui la renvoyoit ~ ce triJlunal! Madame de Mirabeau s'étoit jugée au {ien même
0
e'eft a~rès ce début que le Libellift
~ent mutIlé , & par conféquent 1 é e a co~fidérable
a prouver à Madame de M O bat ré , que Je cherche
~ant que le mien, l'appelle ~~a ~au que ~on intérêt, auJouter ce que °e lui avo'
pr ~ de mOi. Je crains d'aauroit dû fe ~re il ell IS. ta~t faIt pre~entir; ce qu'elle
e meme depUIS fi long . tems ;
o ij
•
86
�108
auq~el on n'échappe pas •. Elle Cavait trop bien fi j'avais
~roIt. ou tort ~e me plaindre; elle Cavait trop bien fi
) aVOIS reçu d elle tous les Cervices que j'en devais attendr~ , fi fa conduite était auffi convenable fes lettres
au.ffi Ingénues , fes difpofitions auffi finceres ~u'elle VoulaIt le faire croire ; fi j'étais injufte ou déraifonnable
d~ deGrer qu'elle fe rapprochât de moi. Si je lui eufi"e
faIt alors une véritable injufiice, fi mes reproches euŒ:nt
été la fuite d'un deCpotiCme effrayant, fans doute Madame de Mirabeau fe fùtlenfin foulevée : qu'avait-elle à redouter? J'étais dans les fers; elle avoit fu infpirer à mon
p~re les fenti~ens le~ plus favorables pour elle; le pere
cl une fille umque lUi donne rarement tort; l'indignation
de Madame de Mirabeau pouvoit donc éclater fans danger & fans contrainte. Et cependant elle s'en REMET
A MON TRIBUNAL qui fut toujours jufte pour elle
&. le 3 Ceptembre fuivant elle m'écrivoit que C'ETOrf
q.LE QUI SENTOIT LE PLUS VIVEMENT NOTRE
SEPARATION.
_, C~pe~d~nt, dts le 14 feptem.bre 1774, on prétend que
} av OIS ecrIt a Madame de MIrabeau: 1) vous êtes un
» ~onftre , vous avez montré mes !ettres à mon pere,
» Je ne veux pas vous perdre , & Je le devrois. Mais
» mon cœur faigne de facrifier ce qu'il a tant aimé.
» Mais je ne veux plus être. je ne ferai plus votre dupe.
JI T:aînez votre opprobre où vous voudrez. Portez plus
» lOIn que vous n'avez fait, s'il eft poffible , votre per- _
» .fide d~plicité». J'avais écrit cela; & fans doute il parOllra bien étrange aux letl:eurs attentifs qu'on n'offre
une teIle lettre que par extrait.
Mais enfin, plus de vingt lettres poftérieures à cette
date contiennent les proteftations les plu. tendres. Etoitce contraditl:ion ? Cette contraditl:on ferait bien étrange! Diffimulation ? Quel en étoit le motif, & pourquoi
les converfations de la belle - fille avec le beau - pere
10 9
étaient. elles fi diflërentes des lettres de l'époufe au
• ?
marI·
•
r
On a prétendu que ces expre~ons , 'Vous etu u~ monr
"'c étoient un outrage. MaIS Madame de Mlfabeau.
Ire, '" •
1
l'
.
avoit montré mes lettres à mon pere, ou e~ e ne aVOlt
pas fait. Dans le premier cas, un Jufte re{fent~:nent contre
la violation du Cecret bien plus coupable, sil. eft po~
ble ,. de la part d'une femme enver~ fon mar,l , ~uton
foit ces expreffions. Madame de .MIrabeau n aVOIt - ~~le
pas montré les lettres? Elle n'étaIt plus que celle ~ue } ~
'Vois tant aimée. Sans doute Madame de Mirabe~u le Ju~eOlt
ainG puiCque le z 5 janvier 177 5 elle croyolt devoIr engage: fa parole d'honneur pour fe laver du foupçon. Eh!
fi les reproches que de faux rapports, des mal-entendus f
des illulions même peuvent attirer à une femme de la
part de fon mari, ét.oiem des outrages, ?es moyens de
féparation; ne verrait-on pas autant de dIVorces que de
,.
mariages ?
On m'impute un outrage tout autrement fanglant .s Il
était réel Sc que j'au rois réCervé pour l'examen des faits,
fi l'on po~voit' regarder comme un fait ce qui n'eft qu'une
fimple allégation.
.
.
,
Pag. 1) da
On lit dans le Libelle:» dira-t-on toujours qu un pro- Libelle.
» jet de mariage avec une femme étrangere, découve~t
» dans des lettres interGeptées, & auquel on ne trouvOIt
» d'autre obftacle que la vie d'un vieillard otl:ogénaire,
» eft un fait étranger à la 1?ame de ,MÎ1?bea~? , ,
Et cette phraCe interrogatIve que Ion ImprIme a 1en. droit même où l'on a la prétention de SUPPRIMER
TOUTE RÉFLEXION; fans doute par un effort de mo·
dération héroïque; cette phrafe eft fondée fur ce fragment de lettre de mon pere du 9 feptembre 1779 .à M.
de Marignane: » il parvint jufgu'à moi. de~ lettres mter- Pag. 1<t.
» ceptées par la famille dont Il pourfutVolt la fil!e., &.
» dans laquelle j'ai trouvé un concours plus fUIVI. Je
•
�lIO
)) vis dans ces Iet~res que .ces miCérables fols ne parlent
)) que de le~r umon., qU'Ils Cemblent n'y voir d'autre
) ohHac1e qu un man de 75 ans, la minorité de la fern» me, &c.
C'eH . un bien, cr~el procédé que de mettre toujours la
calomme Cous .1 égide du refpefr que je dois à l'auteur
des lettres qUI fondent la calomnie. C'eH une at . é
t '
" ,
rocn
peu. - etre moule que d oppofer, que d'armer ainfi les
drOits de la nature contre les droits de la nature
.
. Tout cela eH d'auta~t plus perfide, d'autant pius hornble qu~ le commentaire que l'on a fait Cur cette lettre
eH détrUit par Con texte même.
le 'Vis dans ~es 'etlr~s 'lue ces miférables fo ls ne parlen t
9u~ de leu: un IOn , 9" Lis fomblen~ n y 'Voir d'autre objlacle
'lU <m man de . j!J ans, la mlnoru i de la f emme &c Et
cet fi '. détruit la fuppofition.
'
.
L~ lettre de mon pere ne dit pas que les lettres interceptees fulfent de moi. EUe ne dit pas qu'il ait découve~t dans l.es lettres un projet de mariage_, comme l'ofe tradUire le LIbelle. Elle dit : ils parIent de leur union . ils
fo;nblen~ ny 'Voi~, d'autre. objlacle que ••• &c. Ce qui' eH
bien dlff~rent: J ore meme dire, ce qui eH préci[ément
le contraire. Car fi dans un commerce de galanterie deux
amans regarde~t Comme un o6jlacle à leur -union des engageme?s refpe~bfs; cela prouve feulement qu'ils en [entent
le pOl.ds; ma!s non pas qu'ils le méconnoilfent.
MalS examInons le fait fuppofé, indépendamment de la
lettre. Et dans le Cens où le Libelle le rapporte fuppofons qu.e mon pere a véritablement découvert un proJ'et
d~ manage.
Je ?emand.e à quiconque n'eH pas dépourvu de bon
{ens, Je demande à quiconque n'a pas réfolu de prendre
t)0ur une pre~ve irréplicable cette formule commode
. ~ A DIT; Je demande à quiconque me lit fa ns avoi;
lure ma condamnation, s'il eil poffible de trouver
III
quelque vraiCemblance à ce projet prétendu connu pat
des lettres interceptées.
Quoi! un mari de 75 ans, la minorité d.e la fem~e
auroient été des ohftac1es ! Et Madame de Mirabeau n en
auroit pas été un ! On ne vouloit pas [e défaire du mari
(à quelles di[cuffions, à. quelles apol?gies le fa:t me
réfervoit ?) On ne voulolt pas [e d~fa l re du man., ?n
vouloit attendre fa mort natu relle , aInli que la maJonré
de la femme. On ne penfait do nc pas à Ce défaire de
Madame de Mirabeau ! Deux ~rimes n'auroient pas plus
coûté qu'un Ceul. On ne pouvoit avoir le projet de changer de religion pour fa ire le mariage ; & même alors,
ou le mari n'auroit pas été un obftacle , ou Madame de
Mirabeau ne l'aurait pas été moins qu e lui. Si l'on eût
voulu [e marier en pays étranger en Ce difant libres; il
était auffi airé à l'un qu'à l'autre de ceux qu'on [uppo[e
amans de diffimuler fon mariage; le mari de 75 ans
n'aurai~ donc pas été un obfiacIe dans la fuppofition du
Libellifie.
Mais enfin quelles étoient ces lettres interceptées par
la famille, & qui les avoit écrites 1 Ces lettres n'ont pas
été produites ~n J uftice ? . C~mment peut ~ on les .ap~ré
cier? Ceux qUi me pourfulvOlent, ceux qUl pourfUlvolent
ma co-accufée ne voulaient pas nous ménager. Ils ont
fait des recherches de touS les genres & dans tous les
pays du monde, & comment n'ont-il~ dé~ouvert aucuns
inJices de cette efpece? Il eft donc Infimment probable
que ces lettres intérceptées étaient des lettres faulfes qu'on
employ oit, nOI1 en Jufiice, parce que leur faulfeté y auroit été trop facilement déco uverte; mais auprès de mon
pere pour enflammer [a co lere, pour le rendre plus ardent à ma recherche; il faut renoncer à ra ifonner avec
les hommes, ou l'invrai[emblance & l'abfurdité du projet prétendu connu par les lettres interceptées , décélent
la faulfeté de ces lettres qui d'ailleurs ne font rien moins
que connues, rieu moins qu'avouées.
�112.
On a [emé les calomnies avec tant -de profufion dans
le Libelle, que je me vois entraîné dans d'inévitables
digreffions. Mais daignez me fuivre leEteur, &. croyez
que le fil ne m'échappera pas.
Dans quelles lettres de mon pere Madame de \tirabeau cherchera-t-elle encore des preuves des févices &.
des mauvais traitemens qu'elle a endurés ? Sera- ce dans
celle du 2 juillet 1778?
Madame de Mirabeau voulait demander une [éparation ; pourquoi ? A rai[oR de l'affaire de Pontarlier &. de
la Sentence qui me condamnait à avoir la tête tranchée.
Mon pere paroiiToit croire à la légitimité de cette caufe
de réparation. Mais alors les faits n'étoient rien moins
que fixés; &. c'eft en l'état où ils le [ont aujourd'hui qu'il
doit être jugé s'ils font ou ne font pas un moyen de
divorce.
Mon pere diiTuada Madame de Mirabeau de former
cette demande, &. lui dit : " la féparation de droit ne
" fera rien &. par la nature &. par fa propre défeEtuofité.
" Il s'agit de la féparation de fait; c'eft celle -là qu'il
" faut qui tienne: &. tout ce qui s'intéreiTe à vous, qui
" a droit de s'y intéreiTer, qui le doit, qui le veut, qui
" le voudra à mefure qu'on vous connoÎtra d:wantage,
" [erOM autant de partifans de la chofe, qui, vous [é" parée, diront : à qui do~c aujourd'hui peut - il faire
" du mal ? Chaque jour pouffe celui où l'on dira que
" la pénitence eft bien longue, fi l'on vous croit hors
" d'intérêt. Dans le cas contraire chacun s'employeroit
~, &. diroit : cette pauvre femme, que va-t-elle devenir?
" Et enfin en fuppofant que je vienne à manquer avant
" le complément de mes mefures, qu'on devroit pour" tant commencer à s'appercevoir que j'embrniTe &. même
" de loin jufqu'au bout; dans ce cas, dis-je, tout feroit
" pour vous &. votre enfant. Elle a foigné fan pere &.
" fon beau-pere, il faut la garantir de ce furieux; &.
" l'on
113
,.... l' n ferait certainement vos conditions alors, &. to uS
,0 l' I1t~reiTeroient: au lieu qu'avec les mefures eftro"" spiées
y qu'on vous confeJlle
. aUJour
' d'h UI,
' patemmenht•.dé favouées par tous les miens, au cas ~ue v~us n,e atlez
" pas de mon tems fa fortie, ce feraIt bataIlle a la fi?,
" Et Dieu fait ce que feroit l'efcadron de vos confells
" contre l'aud<lce &. l'impofture, &.C.
" Réfumons &. fimplifions, il étoit de l'intérê~ d.e Madame de Mirabeau de n'être pas féparée , difOlt mon
pere. 1° . Parce que la féparation de ,.droit ~bt~nue' par
défaut ne vaudrait rien. zO. Parce qu Il fa li olt s occuper
à faire maintenir la féparation de. fait '. c'eft·à-dire, celle
que ma détention opéroit. Or, a JoutaIt ?lon ~ere , vous
féparée, on dira qu'il .ne peut être nuifible. a perfonne
de mettre mon fils en lIberté; au cas contralCe , • chac~n
s'employera pour votre intérêt à reiTerrer fes chal~es; Je
prends même des mefures pour ~ue ce.tte féparatlon de
fait opérée par la détention, fOIt ma1l1tenue al?rès ma
mort· fi je venois à manquer avant de les avoIr comFleté:s, -tout le mon~e fer?it pour vous &. l'on fer.oit
vos conditions' au lIeu qu en demandant la féparatlon
aujourd'hui, v~us hâteriez peut· être l:élargi{f~men.t de
mon fils de mon vivant, ou vous aunez bataIlle a ma
mort.. " Cela eft clair aiTurément:
.,.
Refie à favoir fi ces mots : à qUl donc aUJourd hw peul-
"
'il faire du mal? : • •. Cette pauvre femme que va-t-e!l~ devenir? • • •• Il faut la garantIT de ce fUfieux '. ne figlllfi~nt
pas qu'il fallait garantir Madame de Mlra~eau d un
homme qui l'avait maltraitée? Je réponds hardIment que
non; &. je .le prouve invinciblement.
En effét cette lettre du z juillet 1778, ainfi que les
(Jeux autres relatives au projet de féparation , eft poft~
t"ieure à la lettre du 9 feptembre 1776 ou mon pere d.lfait: » routes ces chofes réunies à l'avis de quelques dlCl> cours analogues à ceux qui vous font parvenus, me
p
,
�114
Ils
» firent ct'aill d re que ma b Ile· fille ne fM en péril 0ll
)) n 'y pût être un jour. . .. Si Madame votre fille f~
» croit expofée en Provence, je lui offrirai Comme à
» un enfant chéri un afyle où l'on ne viendra pas fftre~
» ment la chercher à préfent.
Elle eft poftérieure à la lettre du 29 mars 1777. 1) J'ai
» encore quelques petites chofes à faire maintenant,:
» 1° . • • • • zo. avifer & pourvoir finalement à ma pro~
) pre. sûreté & à la vôtre, & à celle de votre enfant.
Elle eft pofiérieure à la lettre du 19 avril fuivant:
» Vous avez confenti qu'une moitié des frais indifpenfa.
» bles faits & à faire pour parvenir à nous mettre un~
» fo is pour toutes & fin alement en sûreté, tous & fur1) to ut M adame votre fille qui eft horriblement menacée
» dans des lettres interc~ p tées , & à l'avenir nQ~re petit-.
» fils ; fut prire de ces fonds-là ,
Elle eft poftérieure à IF! lettre qu 5 f~ptelUbre 1777.
) Il n'y a plu~ d'lns le fait d'autre . t;xpéditiQn à f~ir~
)) que d'eoleY.er [a prQpre femme, pour s'en fair~ lm
1) otage ~ tirer par elle le parti q~'il pourra d~
os
1) biens.
AinÎ! lorfque clans c~tt~ leH~t: St autres poftérieun;s 4
l'affaire d~ ' Pootilr1ier, Illon p~l'e P'lrle dy. 111al q4~ j\l
puis faire à Madame d~ l\1irgb~qu, de lé! nécelfr;.é d\l
garantir d'un furieuK, la si(raé -" la djg'1ùé ~ le repos de [a
belle-fille; cela [e rapporte Ilnique.l\1el1t aux hruits qui
avaient couru que je voulois l'enlever pour I1]e faire
d'elle un otage; 8}. ne fauroit qlA'être fort étra.nger aux
mauvais tri.\.iterneQs pendéVlt ta çohahiti.\.tio{l dont Madam~
de Mirabeau [e plaint pOlJ( la pretp~re foj~.
En 1779 elle demandoit ma. liberté; ~. mem pere lui
écrivoit Le Z2 juin: /es plqs grane/es bajJeffi~ font vis-a-vis
dt: vous; voqs en pouve{ juger mieuJf cJ.!/un autre : celéJ
~gnifieroit - il que je l'ai maltraitée pendant la cohabita.
llon ~ Et remarquez que ceUe phra(e oe yient: qu'aprè$
.
.
.
fi votre man. avOI°t l'ame baffe, il éCrtrOit
d ·t.
"celle-Cl :)) l
'..
&. tout ce qu'on vou rOI ,
. . &.
es de contndOn
lJ douze pag.
•
. . n Il a tout le contralr~, .
» cela ne lÛI cout~Olt n'~l'a faites font pures fortes . ~
r
c
. ~
par le
» H)utes les baffellesl' qu
~ 't autant- que 16ugueu es
folies gauches par e pn
0
»
.
J
J
» fang.
' MW
rès la pnrafé qui éon7ern~
Rema'rquez .eneore 'i~ aF: ure: ))0 s'il é oit contrIt J Il
Madam'e de MlraJ.)eau, II .aJo.
. t &. ferait mort dans
" .
lus n'écnrOit pOlO
re
l) en petllerolt p . ' é
dans l ' opinion de mon pe
J)
peu ((: Oh ! je le r !;;~' "avois fait non des baffeffe~
je n'avOlS p~s 1ame :uché:i~ d'efprit &. fougu.e d~ fang,
mais de~ foltes par g
if,
hl pour mOUflr de honte
j'avoiS même le ~œur a e:6~~oiSe m'es fautes. Mon per.e.
;iu moment où ): d :ec~?
1 omme qu'il aur"ùit" fu aVOir
auroit-il eu cette 1 ee
udn 1 ) de brutalité que La plus
emme es exces
•
oommis envers f a f .
d'
1l omme que ces exces au·
vile popuLace défavoua~ll; [un
plus bas' &. le plùs lâche
le
roient démontré ~e P us V1 ' .
en p'arIa'nt de mes baf
·rels 7 Mon pere
. \. ,
e
1
de touS es mOl
.
1 ~ elles dans l'on le JOme n
ferres envers ma femme, ~tq~l1tendre des févices &. de
font que des foLteS, ne. pe . t été de vrais aaes de
mauvais traitem;ns ~1Il Ifu~~len arle que de l'affair~ d.e
l>afft:ffe &. de laèhet. M d P de Mirabeau parOlffolt
. d
laquelle
a ame
fi
llontarher ans
.
ft~' de ma famille, 1 cepeneffeEtivement la pl.us 0, en. ee s lus ue digne de pardant une telle affaire n.étolt ~~Là .gPnoit ~e ma femme lorf'r
j ce ma/eUTe me 1
don, pUllque. or
., J •
u cdle d'un autre.
.
qu'on fuppofOlt que J aVOls e
oint encore les mauvais
Cette lettre ne prouve d onC p
j '
o
•
•
traitemens.
'b
80 mon pere fe rend
Dans celle du la decem re dl? t'. il en inftruit M. de
aux témoignages de mon am~n em:n ;veTci de cout ce qui
Mari gnane, croy ant devo&IT le u~:elé de Madame fa fille.
{.
j an repos
a su
éd
J' eul I mp [(lue:
è l"
des lettres prée entes,
SA SURETE ! Apr s examen
P ij
-
�'rr6
P.1g. 6 r
Libelle,
nous ravons à quel genre de péril ce mot fe rapporte}
Dafls une lettre de l'année 1781, de laquelle on ne nou~
apprend pas la date (1), mon pere confeille à fa belle.
fille une réunion. Il calcule les rifques; le premier le'
f~ul qui p~iffe avoir quelqu~ rapport au point que J'agIte , eft aInfi défigné: un Jo l de;a eonnu; & fur cela il
écrit à Madame de Mirabeau:» il faut que vous vous
» mettiez en tête que ceux qui ont penfé à la délivrancc
» d'Honoré ...... n'avoient d'idée principale que de
» perpétuer la race d'un pauvre homme qu'ils voyoient
» fi pauvrement paternel. Ils fe difoient; la pauvre
» femme n'a rien à craindre; car s'il eft toujours crane,
» elle n'en fera que plus honorée & mieux garantie à ia~
» mais; tout le monde s'armera pour elle
& elle fera
» feule à la tête de la maifon.»
,
Le péril dont 11 eft ici queftion efi celui auquel ma
fe~me pou,voit être expofée. de la part d'un CRANE;
èpIthete qUI ne défiglle .certaInement pas un mari qui a
battu fa femme. Pe[ez bIen ce qui [uit: » La cohabi.
» t~tion n~ cancelle ~oint du tout la réparation des
» biens qUI eft néceffalre, qui efi faite, qui vous rend
» maîtrelTe; &. quant à l'autre, dans le cas préfent ,
» vous ne l'obtiendrez pas là bas; il faut l'adulterium ÙI
» domo, dans la mai[on. Il diroit que quand il eut la
» f~~m; ~'autrui, force majeure le féparoit de la fienne.
» S Il ~tOlt [age vous ne l'attendriez pas
& s'il étoit
» fau, vous n'en auriez pas la peine; ca: voyant qu'il
du
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - -_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ J
( 1) Ddt tannE. 17 8 [, 0- "pril que ta Dame de M irabeall avoit eu
le m.lI"e"r de padr. (on filI; [elle dt l'expreŒon caplieu re du Li.
belle qui voudrait cacher all Leéleur, no n inlhuir des dares , qu e j'érois
"bre alors " &
ma il fils élOi! mon plu. de di x.huir mois a upara.
v~nr : Le L,belle aJo ure : M, de Mir.lbe'''1 pen payoifoit cenfriller fm~
""n'on L'tde' d
" , tl. d
'
• ' ' . , e" C. c~[te reun ton Il eu OllC pas moderne , & !'epreuvq
11 a pJS cie preCtpllee,
qu~
tI7
ne pourrait toucher aux biens; il auroit bient6t faie
» une pointe.
Et voilà le péril que dans l'idée de, mon pe~e ,vo,uç
. a' craindre d'un fol d'un crane. C eft le pénl a 1a~,
aViez
b
" fil'
hri duquel vous met la '
réparation
de'lens.. S' 1L :IOU
0 ,
ajoute·t.il; & de quelle folie? De celle qUl a~Olt d~ter:
miné la premiere lettre de, cachet; de la dl~pa:lOn ,
de cette folie dont le fol lUI-m ême vous !Jaranllrou ~ ,tt ejl
1)
toujours Jol, en prenant le parti,de vous laijJèr, lorfrlu d verroù qu'il ne peut toucher aux buns..
,
Mon pere penfoit fi peu que Je f~~e coupa?le ,de fe& de mauvais traÎtemens , qu Il ne Crol~ pas q~e
fa belle-fille ait aucune caufe légitime d~ féparat.lOn, p~tC
qu'il n'en voit pas d'autre que. c~lle qUI r~fultolt de ~ affaire de Pontarlier, non exammee. Or, 1 adultere meme
qu'on fuppofoit alors ; cet adul~er~ n'étant .pas zn domo,
n'efi pas à fon avis (& c'efi auffi 1aVIs des Junfconfultes (1)
une caufe légitime de féparation.
,
Je prie qu'on faiTe attention à ce que mon pere ajoute
fur le deur de Madame de Mirabeau de demeurer auprès
CI
, lUl-meme,
"
de M. de Marignane. IZonore
'lUI' er,Il- fiac1/.~ comme
, t
Pag, 6. dll
Libelle.
vice~
une Catin fur. tout aux beLLu lmagmatlons, fenttrol.l la ;ze- :
ceffité 'lue vous fuffie{ aux devoirs de fille. Et le ~lbelhfte ·
perfuadera que mon pere ne p.ouv?it ~lors [~, d,lffinlUler
que le fils [ur lequel il s'expnmOlt amfi, s etou Jau un
'eu barbare de commeure envers fa Jemme du excès de bm.,
ltalùé que la p lus vile populace défauoueroù!
Voyez cependant le parti b;illant que ti,re, de c~tte
lettre l'Auteur du Libelle On s app erçolt, dit-Il, 'lu elle
motivoit le proja d'une réunion p ar du raifons 'lUI ~e pou~
voient que co nfirmer M adame de Mirabea u dans , la ré{olutlon
d'être f ép arù . Cette phrafe eft abColument vUlde de fens,
( tl Voyez la C on (u!larion.
,
Pa !;. 6,.
�I18
oa, erre dit précitement que mon rae I!Jl une blft , ( 'ce
qUI ne m'a pas paru l'opinion univerfelle) puifqu'on fuppofe ~~e pour p:'! r(uader , il a la mal-adre[[e de dire tout
ce qu Il faut pour di[[uader.
L~ D a.me de Mira beau n'avoùpas ouhlié J 'ailleurs,. ajoute
le Llbelhfte, ce <JUI! M. de Mirabeau pere lui écrivait li la
d~te du 2 Septellfbre r7 77 ; & il rapporte cette lettr\." .
~Infi .qu'une autre du Bailli de Mirabean, mon oncle, otl
Je prIe qu'on cherçhe uae expreffion qui, même détournée, indique un mauvais traitement.
~
Et parce que la colere d'un pere mécontem, ulcéré
parce que, fa colere ~ui ?'~fl jamais. mefurée dans [es pa~
Toles, qUI fe nourm d hlperboles, & qui dans le fik
dont J'inconduite l'excita , vit toujours le dernier des
h<>mmes; parce que fa colere a laiffé couler ces imprudentes paroles: M ounr en un champ de bataille n'e fJ
du
r.
,r.'
'1"
j" pas
to.ut .la fm,u ; 1 n aime pas la bataille, & il
en
a pomt, ajoute mon pere,. quoique le globe entier fût
-wors en guerre. Parce que mon pere a écrit ces paroles
la femme qui m 'écrivait autrefois, rapportant un propos d~
mon pere : ON NE SOUI!ÇONNERA PAS PLUS,
MON FILS QUE MOI - MEME D 'UNE LACHETÉ
D~NS LES PAYS OU IL EST CONNU, (r) fait impnmer ces paroles:- IL ( [on mari) N' AIME PAS LA
BA,TAI~LE •.•. " Je ne [ili~ pas répondre dans un MémOIre a une p,lautude fi vile; mais je fuis fâché que
~adame de ,MIrabeau fe [oit expofée à faire dire d'un
çoté au pubItc ~ elle. veut que Jon mari fe coupe la gorge,
<r
(1) .. Quant à l'affaiee de • Of.. on la re""' rde ic'
.
M
b-au pere ' di
",.
1 comme n en,
on
rnda
t en peo ples rerme~ que 'l uiconq ue te cOllnoiffoi r •
»
a mem e 1t 'lue dans les Pays où ru a vais pafTé, ail Ile re (ou ~
çonllerOlr. pas phi, que lui-m ême d'une l<1cheté, " (Lerere de Ml'.tlamc de Mitabeau du G SeL'temble 1 t74,-
" il - ,
'i
119
parce ,!u'enfin ce jw de hafard a hien dts clzances; Be de
l'autre aux leéteurs les plus tolérans : , mais. la poltronen~
d'ul! mari ne feroù pas une caufe de Jeparauon. Quel eIl
donc le motif de cette injure ~
.
Aucune des lettres de mon pere ne prouve de mauvaIS
traitemens . & c'étoit le feul des moyens de Madame de
Mirabeau ~ui ne fût pas fondé fur des f~its .connus. Les
imputations de mauvais pere, de mauvais citoyen Be de
fujet dangereux, font fondées fur des dettes, .fu.r des procédures & fur l'accufation ifolée d'un Cantllller. Cet~e
difcuffio~ appartient à l'examen des faits qui va r~mpltr
la troifieme partie; mais les dettes Be les procedures
étQient connues indépendamment des lettres de mon pere,
& l'étaient mieux que par elles; puifque ces lettres ~on.
dées fur des rapports, ne renferment que des allég;'ltlon,;
auxquelles on ne [aurait s'arrêter quanti elles on~ paiTe
au creufet d'une information légale, Be qu'elles n ont pli
y réfifl:er. Inutilement donc Madame de Mirabeau a fra.duit les lettres de fon beau'pere. Son unique but. et?lt
de me déshonorer ( r) ou de me force,r à la. crOire .111digne de moi.. Mais on ne lui a pas faIt [eRur combIen.
(,) Il dl évident 'lu'on â voulu ~ufIi f~ire illju re à mon pete , n~)ll
feu lement en me déshonorant par lUI, malS ell dfayant de fal re croire
que (es hyperboles n'~taient pas .produ~res par. la {eule colere. ~,elle
peut êrre l'intenrion d e ceux qUI 01\[ ,~ mp,n:ne les fragmw.' (ul van~.
Lillon de faire (oupçon ner un mouf Q 1I1Iere r dOIl' tls av,OIent be,rolft
pour colorer Ulle im~urarion .moce? " Mes ~mls même n Ont cdfe de
me d,' re que ,· '.!lOlS m'en",."er dans Ilne depenre elfroyabl e, comme
. 'bl e pour
"" elle le rera en effet, & "purement
"
. illutile , &: même nUlh
moi . qu e mOIl il1térêt était que le rnirér",b!e fè fîc fon (oct par
"
,
r
.
quelqlle crime qui le ballnÎt d,u Royallm e , , .. , Les lememens .q oe
" je dois à vOire fille, ceux que je me dois à moi-mê me me décltle: rent "- .... ' Je ne crus pas devoir répéter des ouvertures qUI .m'a ..
" voient mal ~éu!Ii ; je pris donc mon pani d e moi-même, au fi rq oc
1
�t1.1
Iza
c~tte produLtion était mal adroite. Elle l'eft infiniment '
~,' parce que cette produétion inutile décéle le befoi'
emp oyer les lettres de mon pere ou comme mic [n
cope ou comme verre à facettes, afin qu'au travers r~ v~:re m:s torts réel: infiniment plus grands & plus multi~
plies. 2 • Parce ~u elles ,donnent à pen fer que la colere
dhe mon pere étolt en tres-grande partie l'ouvrage de r
e lle-fille.
la
• N'import~ , on a eu le plaifir barbare de m'ôter les
~lu{jons q~1 me faifoient écarter Madame de Mirabeau
fûe cet,.odleux procès .. On m'a calomnié; & l'on eft bien
r qu il en reftera toujours du moins la trace. L'enfer a
dès
'" de m'écruCer {eul. •• '. . •. Déran '
,
.
>, je lutterai ju{qu'au bour
our m;: ~ar ~es depen~es , )e lutte &
" aidé. Si Madame' votre iiU p /ë
.
eV?lr , 'lue Je {015 (eul ou
" vous avez con{enti & ro eor.e cr~1[ expo:e.e, en Provence ... &c ••.•
" faits & à fair
pp . e qu une l11ol[le de frais indifpen{abb
), finalement en e(!r~~; p~~::n~ à{jnous m~med une fois pour routes
" horriblement
"
ur-tour Mu ame votre fille qui el!
fonds là
~en~cee. dans . des lettres interceptées, fûr priee de ces
:: fille & n;r~~ co~~~~ler e~~m~1 n'~~ol[ pou; objer que Madame vorre
" intérêts & la fûreré de Lad s. al Pfi"ye, &c ..... .Or quand les
., par des liens du devoi'
. a~e. vo.tre Ile ne me {erOient pas {acrés
.
r , Je n al nt le ca:
. l ' C' d
" llIere à être inr.enfibl
. . r.
ur nt a tere calle e ma•
U
1 e 111 a les malh
. à Cc b
.
" nI à l'amitié qu'elle m'
, . , eurs.' 111
es onnes quahu:s,
.
a temolgnee. Voilà M fi
.
" motif. Vous avez rro d . Il
, . ' on leur, mOIl ulllque
>, qu'à cela près je n'aut. e JU e~e d!{pm pour ne pas concevoir
" de mes peines à eer é;lSd en ~el pe~e. que le prompr dénouemenr
a ~e atlon de mes dépenCes; que
" les unes cefferoienr du ar,
.
moment que Je l'a u '
l' hé
1
" aurOient un terme bien
l'
l ' rOIS re ac ,que es autres
n
" Si 1'011 ne me tienr a pro~ lam
e lr~r,.nt à {es propres folies .. .
s
" rainement J'e le l' che P . mIeux es .prerrlreres paroles données, cera rat, almanr mle
" 1 te C
/ë
. ' conque que de nour .
'd
ux qu 1 le caLfe on {orr quelr
.
flr aupres e m .
/lé
.
" ramtlle. " Le re'rain de t
d ~t mon
au & CelUI de ma
l'
1>- LA DEr!/{S!. Voilà
'outes ces olelln~es n' .fi. '1 pas: CONTl\IBVE 1.
ce qu on a yQulu fal{e dire au public!
&
t
".-t
'd ès long-tems révélé ce [ecret. On m'a calomnié ; St j'ai
tté obligé de defcendre à de dégoûtantes jufiifications.
Les calomniateurs goôtent un plaifir infernal en entendant
mes plaintes; elles leur an nocent que le poignard qu'ils
ont afilé , a fait de vives & profondes bleffur< s : mais.
auffi les honnêtes gens attendoient avec quelque impatience ma reponCe. Et s'il eft trop vrai que la jufiice
qu'on éprouve ne confole pas de la pitié qu'on effuye,
il ne l'eft pas moins que l'efpoir de les intereŒer ne me..
laiffe pas fans confolation.
Cependant voilà 120 pages d'écrites; voilà 120 pages de
confumées dans le polémique le plus trifie, le plus cruel;
& je n'ai pas encore dit un mot du procès. Car qu'eft.ce
que le vœu des Loix, de la J urifprudence, & des Auteurs fur la violation du fecret & des lettres? Qu'dl-ce..
que des difcuffions fafiidieufes fur l'exifience ou la non
exifience d'un jugement domefiique, dans une caufe en.
f-éparation portée devant les Tribunaux?
Je n'ai pas encore dit un mot du procès ;, mais ce.
n'eft pas ma faute. Une ligne calomnie; cent pages ne.
jufiifient pas. Je n'avois point de procès: & pour foutenir celui qu'on avoit rHolu de me faire, il falloit bien .
m'entraîner dans des difgreffions étrangeres à la vraie
quefiion de la caufe, il falloit s'efforcer de m'abymer:
dans la fange, pour que je n'ofaffe plus me montrer.
JE LE REDUIRAI AU DESESPOIR. On dit que.
ces mots font fortis d'une bouche qui avoit juré de
me rendre heureux; d'une bouchl: que la natu re n'avoit .
pas douée d'une mélodie touchante pour parler le langage des furies. JE LE REDUIRAI AU DESESPOIR . .
Hélas! elle a bien raifon. Le défefpoir d'avoir été fi .
c~uellement trompé par l'objet d'une de mes plus. vives,
affeaions , ce défefpoir efi dans mon cœur. Mais auroi.t ~lle efpéré ~~ me E,0utrer i for,e d'outrages au d.éfefp0lL:
.
~
•
TR0 1SH MB
PAi.T1E..
�1"2.2.
du. déc?urageft1:nt.? Elle (e [eroit étrangement trompée. Je
pUIS ?rJ[e~, mais. Je ne [aurois plier... . • Marchons au
~evOir ; il eft bien amer ; mais la nature ne donna a.
1 hom me une forte poitrine que pour lutter COntre le
s
flots de l'adverfité.
.
<In ne niera pas qu'elle ne m'ait cruellement affailli.
Emalt du mais on a/Ture que J'e l'ai plus que mérité Q . li"
,
l .bdle.
Ife 7
.
.
•
UI Uls'Je en
rag 95 du e t . quel eft 1 homme qUI vient réclamer les égards,
l .bdle.
)} le, m.:n.agemens, les convenances? C'eft celui qui n'a
. » pas cramt de compromettre [on propre honneur 8{
1) d'attenter.à celui de [a femme .... Il s'eft permis L'ou.
)} trage, & Il v~udroit interdire la plainte •• .•.• Quoi!
)} fa femme ~erOit affreufement réd uite à plier en file nce
)) fous le pOids d~. malheur, fous le joug de l'oppreffion
1) & d,e la tyrannie! ..... QUELLE MONSTRUEUSE
» PRETENTIO N !
Pag . 9 8•
H Que peut ~ on efpérer. d'un homme qui ne fai t pas
)} re~peéter la Julle fenfibdité des per[onnes qu 'il a pu» blI~uem:nt offenfées par [es ex ces & [es [candales l
)} QUI croit en zmpofer par [es jac7ancu à ceux qu'il' n'a
» que trop 10ng.te?lpS allarmé par [es égaremens ; & qui
» peut pen[er que 1 aUlorué confacrera des démarches que
» L'honneur & la loi défavouent ? •••
l'.g. n.
» L'ACTION QU'IL OSE PORTER EN JUSTfCE
)} DEVIENT ELLE-MEME, PAR LE CONCOURS DE
» TOUTES LES CIRCONSTANCES, LE PLUS CRUEL.
)} OUTRAGE ET LA PLUS CRIANTE PERFIDIE
» Cet~e ~étion eft formée par un homme qui cr;ic
» pouvoir s ar;ner d,e toute .l'autorùé de la Loi lorfqu!il
» ne pe~t e[perer d en obtenir la confiance . qui commande
» 10rliqu'll
. le
r
L'.'
,.
, d e~rOlt
Laire
p,arddnner; qui' pou'rfuit ceux
» qu n aurOlt da que fléchlr; qui' ore invoquer la foi
» ~onJ~gale après l'avoir fi indignement trahie, & qui
1) 1mai?lne de !édam!:r des droits a~'ânt que d'avoir' fait
» oublzer [es défordru.
I!
)
)
»
»
I2J
contre qui l'anion eft-elle dirigée ? ) Contre un~
épou[e à qui le même homme DOIT SA LIBERTE
ET MEME SON EXISTENCE ; contre une épou[e
payée de fes facrifices & de [es bienfaits par l'ingratitude, par les manquemens de parole, par la perfidie, par le [candale d'ul1e inftance forcée en fépara-
Et
»
}) tion ..••
»
»
»
»
»
)'
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
Il
» Les Mémoires de cet homme ne re[pirent que la
dureté, la méchanceté, le de[poti[me •.•. Le public y
a reconnu l'homme finge, l'homme loup, l'homme
renard. Tout lui eft égal; rien ne lui coûte.
» Combien de faits, combjen d'intrigues, combien de
manœuvres ont déja vérifié tout cela ? ••• Madame
de Mirabeau propofe pour moyens de réparation la
vie entiere de fon mari.
" Mauvais fils, mauvais époux, mauvais pere, mauvais citoyen, [ujet dangereux,
» MA UVAIS FILS. . . .
» MAUVAIS ÉPOUX . . . .
» MAUVAIS PERE . .. .
) MAUVAIS CITOYEN ET SUJET DANGEREUX...
n Voilà l'homme. .. Voilà l'homme ... Voilà l'homme . ... PERSÉCUTEUR . ... TyRAN .... DIFFAMATEUR., . • ATTENTATEUR ... , AUDACIEUX ....
OPPRESSEUR., .. DÉRÉGLÉ ...• FLÉTRI. .•. INFAME.... FÉROCE ....
» Ses droits! Et quels droits peut donc avoir celui qui
n'a jamais connu de devoirs; qui s'eft joué de l'honneur, de la bonne foi, de la vertu; qui n'a refpeél:é
ni les liens de convention ni ceux du fang & de la
nature ; & dont le caraél:ere fi connu & tant de fois
éprouvé.... s'ea fait un jeu d'attenter à l'honneur
de fa femme, DE PROFANER PAR DES CRIMES
LA SAINTETÉ DU MARIAGE, de violer la foi
conjugale. tous les devoirs & tous les engagemens! ... ,
Qij
Pag. 100 du
Lib, lle•
Pag.
1 01.
Pag.
1 0!...
Pag.
100..
�124
» VOILA L'HOMME . . . VOILA L'HOMME. ' : ~
l> VOILA L'HO~D1E ... .
En dl-ce affez, Leél:eur! Et m'avez - vous bien re.
connu ?
RHumons, s'il eft poilible, cet odieux pathos ces
infam es hyperboles; & voyons quels [ont les moye~s de
répa ration allégués par Madame de Mirabeau. '
P g. 1 du
I D. SÉVICES ET MAUVAIS TRAITE MENS dont
L;boUe
l'impreilion a été li douloureure, qu'à 200 lieues de moi
Madame de Mirabeau m'écrivoit comme une maÎtreife
écrit à [on amant, m'écrivait ainli, dis-je, dans un te ms
depuis lequel elle ne m'a pas revu.
Pag. 1" dit
2
DIFFAMATIONS HORRIBLES. Et certes on ne
Lib,lIc ~ p4peut
nier
qu'il n'yen ait dans cette caure & du genre
lJm .
le plus horrible en effet. Mais c'eft moi qui ai diffamé
Madame de Mirabeau; & c'eft ce qu'on ne [avoit peut.
être pas,
30. ADULTERE PUBLIC ( & pour qu'on n'en doute
pas on nomme en toutes lettres ma complice) ADULTERE PUBLIC ET SCANDALEUX (car tous les adulteres publics ne [ont pas [candaleux) & pour lequel j'ai
été condamné. Soit montré à ma Sentence d'ab[olution.
F.g. '5.
4 PROJET D'ENLEVER MA FEMME pendant mon
commerce adultere; & ce projet eft évidemment prouvé,
car mon oncle a écrit qu'on l'avoit averti que j'avois ce
projet; & c'eft à Aix qu'on l'en a averti. On auroit pu
ajouter que mon frere en avoit écrit tout autant [ur un
.O N DIT (1). Mais ce frere là eft un mauvais plaiCant
0
,
0
•
(1 ) Que veut-on que je réponde de plus à une allégation auffi vague que celle qu'on trouve pag. 1$ du Libelle exprimée ainli, u Ceu pendalH M. le Comte de Mirabeau cOlllinuoit (es cour(es ; & dans
" le moment olt la Dame de M, ." , élOi, fous (on empire , il avait
., formé le projet d'enlever Madame de Mirabeau die. même. Celle-cl
12 5
qui [e bat comme un b cuta 1 avec 1es en neln 1Os du. Roi :
.il ne faut point le mettre en cauCe. Pour n 0 1 QU I f' J.g: , ~
N'AIME POINT LA BATAILLE, il n'y a pas le plus t .bdl. ,
petit danger,
.
50. JE SUIS FLÉTRI P AR DES DETT~S; car pmais un homme d'honneur n'eut de dl;!ttes; Je vous en
attene tOIlS; PAR DES LETTRES DE CAC!lET; car
quic onque a reçu dt!s lettres de cache~ eft FLETRI. ,Demandez plutôt aux héros de la maglllrature : par D~S
DECRETS; &. v ous voyez bien que tout décret ~~tn~;
par DES PROCEDURES; , ca.r vous [~vez tous qu Il n ~
eut jamais de pro Ct dures cnmtnelles pnCes contre les hon
nêtes gens (1) : par des SENTENCES INFAMANTES;
Eh quoi de plus infamant qu'une Sentence prononcée [u~
un délit qui dans nos mœurs n'eft point infame ? QUOI
de plus infamant qu'une Sentence [uivie d'un Jugement
contradiél:oire rendue par le même Tribunal,?
60. Enfin (car véritablement il faut finir, Cauf ,aux
points à y [uppléer) la réparation qu'on demande a ~a
J uftice a été ordonnée par le J ugement de~ deux ~am!I
les qui' n'eurent jamais rien à juge~; & qUI ont ~alt des
-çonventions diamétralement contralre& à celles qu attefte
Madame de Mirabeau.
Cil
fu; avertie par des avis [ecrets & nOI1 [urpeéh, confirmés par
"" les craintes annoncées dans les lemes de M. de M'Ira beau pe,: " •
Il faut que les His aient paru bien [u(peél:s, ~ c~. (OU~9on bIen fr1v~le
aux con(eils de Madame de Mirabe.l.u, pUl(qU Ils Il IndIquent qu en
pa(fant un faie qui de,oit avoir lant de poids dans [on (yflême, Au
rdle voyez ce que j'cn ai di, page
,>
'
(1) Voyez ci-aptès [ur l'aff~irc, d,e Pontarlle~ 1a nec~o(>e ,el311ve l
un homme qui a obtenu & men te 1dhmc ,publique. & 1un des pre:miers arades militaires & que M, de 1aognane & Madame de MIrabeau "doivent plus qu~ IOUS aut,es trou ver re(peél:able, Il e(fuya une
-procédure du même genre que la mienne & ce([aillement plus glav.e,
~ 'J
�R fi .
1 z6
e plroils Sc répondons.
Quelles preuves adminiftre
quelles efpeces de griefs réfu1t~~~o~s des vos griefs, lX.
Quelles preuves 7 les 1 tt
d c:- vos preuves?
cr'
dl'
e res e mon per
' ft
Iyme e es avoir produites' je l'ai dé
e,: ce un
ous les produifez comm e ' é
.
montre.
me~ique, ou comme reuve d tabh!fant I~ jugement dole Jugement & qui dPo'
es grIefs qUI ont déterminé
Si,'
Ivent vous obt . 1 li'
c eft uni quement Comme é
. el1lr a eparation.
mefl:!qlle; la produétion efl: inu:i~bh~nt le )ugement do.
meLhque eft un rêve
u·
,
e..
otre Jugement doq
de la réalité' la feule c 1 n ~ut Jamais -l'ombre même
fà'
,
onventlOlJ domefl:i u
.
,Ir. crouler en entier votre f
'
, q e qUI exifl:e,
d ailleurs il n'dl: pas de rinci :~e~e. ~ cet égard; &
t~le que celui qui n'adm~t paflej~~IClalr~ plus incontefmeme volontaires.
eparatlOns convenues ,
Si vous préfentez les lettres de
,~~euves de griefs; ou elles en érabliff:~~,'pere comme
es ne rappOTtent que ceux
- li
Inconnus, ou
c~tte derniere fuppolirion que _~~I d ,Ont co~nus,. & dans
n avez voulu que m" d 1
J
emontree vraie, vous
... es wnorer par
t"
"
.mon ft rueufe de lettres 0'
ce te produéhon
& débite les calomnies d~n~n~~ ferle exag7re mes torts
d
e larcelolt. Car ce ne
fera pas d'après la m '
~
Aamere ont un pere t
é
. romp , peutrre -mClIle -par les intérelIes l
rom appréciés ces griefs ' m~is e~, aur~ pemts , qu'ils feeffet.
, a p r e s ce qu'ils font en
-
Ces lettres établiffent-elles d
.
.
es grIefs Inconnus? J"ai
"d
' J al
montré qu'ell
f!en e ce que vous avez
'
es ne prouvent
Cette prodllél:ion n'a d
pretendu prouver par elles
fi .
onc pour b t d
.
JtJon, que celui de me d h
u ans aUCune fuppo d es onorer fans utilité pour la
caufe. Le procédé f:
ans oute eft tou h M '
.
vous etes forcés d'ab d
c ant.
ais pUlfque
lettres, débattons les /n onner la preuve réfllltante des
alts en eux-mêmes, examinons mes
démontr~ que non' ",. dé
A
U7
délits St- vos griefs,.St cherchons. des preuves ou je ne
vois qu.e des allég~nons. Suppoliuons pour fuppofitions
le public préfererolt fans doute celles qui me fa uveroient
l'honneur: car le crime ne fe préfu me pas; mais ce ne
font pas des fuppofitions que je lui deftine; je ne parlerai
que les preuves à la main. Et pour commt'ncer par les
févices dont je fu is accufé, moi qui ne vis jamais fans
une indignati on qui tit:l1t de la fUJ1eur l'abus de la force;
pour commencer par les févices , remarquons que vous
n'en avez profé ré l'accufatioll qu'au moment où la produél:ion des lettres de ma femme rendoit abfurde autant
qu'attroce ce genre de plainte.
.
Jufqu'au moment où parut le l.ibelle imprimé fous le
titre de MÉMOIRE A CONSULTER ET CONSUL- Pag. HI!< l\.
TATION POUR MADAME DE MIRA:BEAU, elle: ~~y;~.OD Pl.. ·
était peut-être la premiere femme qui, demandant une féparation d'habitation, ne fe fût pas plainte de févices Be.
de mauvais traitemens. SANS PARLER DES SÉY ICES,
avait écrit le Rédaél:eur de fa requête en fépavation,
dont le (tyle à des conformités frappantes avec celui du
Libel!e. Je repréfentai que le SANS P AftLER étoit bien
étrange; qu'il était abfurde d'intenter un procès en fé~
paration , fans parler de févices St de mauvais traite~
mens; qu'il était cruel St perfide de les indiquer &. de
n'en parler pas; d'en lancer le fOl~pçon &. de ne pas..
daigner l'approfondir.
» Mais, ajoutais-je, fur qui retombe cette injurieufe l'ag. 11 de
» réticence, quand deux jours après celui où v.ous vous mon Plaidoyer.
1) l'êtes perm-ife , t'l'ente-cinq ter.tres parroiffent, clont ohaq,ue f
» J.igne vous nomme caI0mniate·ul'.
Je conneiilliis ma-lle courage $( lès tleil'oulces de l'Aut«;u: du' Libelle. Son Roman diffama taire il paru, &. les
fevlces en forment un des plus touchants épifodes. On
peut en fi~er l'époque, fuivant le Libelle, AU MOPag. S du
MENT MEME DU MARIAGE.
Libelle.
�12.8
Le LibeUifte, pour donner à cette ingénieufe décou_
verte du moins le mérite de la vraiiremblance, aura it.
d û nous dire fi c'ell: à la fignature du calmar, au fouper des nôces > dans l 'Eglife du St. Efprit, où les
deux époux reçurent la bénédiétion, ou par-tout ailleurs
qu'il f.lut chercher ce moment. Des fpeétateurs fans nombre nous fixaient. Les févices, les mauvais traitemens
d'un nouveau marié leur auront paru un hommage airez
étrange pour laUrer dans leur mémoire un long fouvenir.
Et prennez garde que ce n'ell point un fait ifolé qu'il
s'agit de [e rappeller. !l ne (0 pa1!0it p as une feule journée
( vous l'entendez PAS UNE SEULE JOURNÉE) qui ne
fût marquée par quelque fcene ; au milieu m ême des empreffimens /es plus affeélueux, ( en vérité le Libellill:e voudrait
nous faire fuppo fer qu e Madame de Mirabeau lui a fait
d 'étranges confidences ) M. de Mirabeau avait l'art de faire
naître q/tele/ue dlfcuffion qui était ordinairement terminée par
des proc/dés inJZ!Jn~.f. Et c'ell: parce que M. de Mira-
beau avait cet ART merveilleux, que plus de- deux ans
apres fa femme lui écrivait, dans un temps depuis lequel
elle ne l'a pas revu: USE DE CETTE MAGIE QUE
TU POSSEDE SI BI EN QUAND TU. VEUX ENCHANTER QUELQU'UN (1)'
l"g. f do
Libelle.
Quelques jours après les nôces, la famille s'était rendue a
Marignane. On Jill à Berre pour voir les Salins. On retourna
le foir. Dans la journée M. de Mirah eau s'était porté contre
un lùrs à des violences dont on Jùpprime les détails. C'ell:
pourtant bien dommage, & l'imagination vous manque.c
au .befoin : car qui vous auroit contredit ~ Ce tiers était
M. de St. Cezaire; ce valeureux Officier a- été tué au
Service du Roi; il a v.éc!l & eil mort mon ami. Il ell:
certain .
~ 1) Lettre dll ~? Septembre
UIIQns .
J 7H,
pag, 8 des premiere, Ob[er~
Il9
certain que j'eus un tort aVec lui, & le tort de l'ivrefie :
car j'étais yvre ce jour là, & beaucoup d'autres l\~ roient
auffi, Nouvelle épithete, nouveau vice, nQuveau r;!élit,.
nouveau crime dont v ous pouvez doter L'HOMME
LOUP, L'HOMME SINGE, L'HOMME RENARD.
II s'ell: énivré une fois. Mais le digne Militaire qu~ vous.
rappellez ici, & qui ferra des nœuds qu'il croyoit formés
fous de meiUeurs aufpices , feroit bien étonné de figurer
dans un Libelle · ou Mémoire en féparation, fous le prétexte d'une viva cité dont je lui fis prefque au moment
même des excufes, & qu'un quart d'heure après il avait,
oubliée dans mes bras.
,
l
. En arriv anl il (IL c'ell: l'homme loup) feignit d' ~tre malad~;,
il annonça qu'il paJferoit la foirée dans jon appa rtement.
(IL ell: apparemment ici l' 1lOmme R enard,) La D aille . de
M ir abeau l'y fuivit; elle lui fit àpporter à fouper, & ne le
quitta p as. L e repos fut bientôt troublé par des injures & p ar
de mauyais traitemens. La Dame de Mirabeau fut tra/lie pat
fès cris. Il le fallait bien: car le fouper étant eu tête à
ç
têté , n'a vait pas de tém oins, pas ' mètne apparemment
les dbmeftiques qui 'le fervoiènt.) M. le Marq!tÎs de Marignane> a'vertt p ar des Payfans qui avaient accoU/ u au bruit,
appella plufieurs f ois fa fille, en lui ordon nant d' ol/v,ir le
porte de L'appartement. M. de Mirabeau> à 9ui la voix de
M. de Marignan e avait rendu le fang froid, pria fç femme
de n'en rien faire , ' & de répondre que ( Olll fe pa1!oit en p laifan urie. ( Oh ! pour le coup IL ell: évidemment l'homme
jinge.) La D ame de Mirabeau fe rendit aux prieres de fo"
m'ari, (M. de Marignane fut ce me femb-Ie peu prudent
de Ce raffurer fi aifément d'un mot, & falls rien voir, ful'
la caufe des cris qui avoient ameuté un Village ) &, dl(!imula tout. Il étoit tem ps certainement de cefie~' de diffi-
muler après onze années.
P eu de temps après M. de M arif{nane conduijù ùs deux
époux à Tourves. dze{ M. l~ COlnte de Ya lhillé, Il ferait
R
Pa~.
Libelle.
'du
�qo
Jlfficile rie rappelLer toUs les excès ~ue M. de Miraheau fi
permit à etae occafion contre fa femmt , ( je foupçonne en
effet que cela n'eft pas très-aiCé; mais la figure oratoite
n'eft pas moins fort heureufe) & qui font connus de tous
ceux qui hahitoient le Château. Un moment, Mr. le Li~
bellifie. Les faits me paroifTent aifés à rappe/ler s'ils font
connus de tous aux qui hahitoient le Château.... Mais il
ne faut pas être fi difficile avec les orateurs.
-Par-tout où les deux époux (e trou voient , des tiers étoient
témoins de quelques fcenes affligeantes. La Dame de Mirabeau
était hahituellement expofée a des reproches injurieux, a des
coups , a des outrages, a des foufou, à des violences de.
toute efpece. Le temps de fa groffiffi ne fut pas meme ref,
peai.
LE TEMPS DE SA GROSSESSE. Eh! quel eft le
cannibale pour qui une femme enceinte ne foit pas lln
Être facré? AU TEMPS DE SA GROSSESSE! Lequel
de mes regards ne fut pas fon égide? Elle portoit mon
fils! AU TEMPS DE SA GROSSESSE! .••• Comment
refter calme en lifant, en tranfcrivant de telles horreurs?
J'ai voulu m'armer d'une ironie froide; & je fens que
je grimacerois fi je le voulois plus long-temps.
Eh quoi! c'eft au public qui a lu ces mots tracés pa(
ma femme: J'EN. AJ?PELLE A TON TRIBUNAL; IL
A TOUJOURS ETE JUSTE POUR MOI. C'eft à ce
même public qu'on prétend faire accroire des févices ; &
l'on veut l'intérefTer pour le monftre de lâcheté 8< de
duplicité , qui traitée comme une vile efclave par fon
compagnon, par fon égal, battue, excédée même au
temps de fa grolfelfe, au temps où la femme n'a plus
d'égal, où celui qui va lui devoir le doux nom de pere,
refteroit volontiers profterné à fes pieds dans le délire
de l'enchantement, de la reconnoifTance 8< de l'amour i
on veut intérelfer pour la femme qui, opprimée ainfi ,
auroit pu fe réfoudre à prodiguer la tendreife, l~~
13 1
"
.
St les éloO'es à fon tyran féroce! Vil LibelliJ'ie.!
~are es , ma fer:me telle que je la choilis , tell~ que Je
rends· mOl
. rimai' & cefi'e de la defigurer.
telle
la co~nus 'fi
,qlàuedJes ~iégariol1s terribl'es; voilà des
MaiS . en \1 VOl . 8<
e
de'
ue nous a-t-on It encor qut
imputat~ons atr1,?ces:r blqance l'abfurditt: de l'accufatioll
pÔt attenuer lllVral1em
,
!li
er
7
r"
de levlces.
er de colorer ces in, On devoit d'autant molOS n &Ig
1 fi"
8< mau,
fid
ue chacun c.ut que es eVlces
ve?tlon~ per e~, ql 1: mule de toute femme qui plaide
valS traltemens lont a lor
,
en féparation ( 1 ).
l . t s
1 d
i't d'autant moins, que toutes ces p alO ~
n e evo .
d 1 1 inutile & une humtdont
vagues devenOlent un fcan a e P us d M' àb
liation plus gratuite pour Madame e
Ir eau, .
les défenfeurs échoueront toujours contre I~s ~ente-cmq
lettres que j'ai fait p~ro.î~re d'elle, 8< qUl ont toutes
pofiérieures à la cohabl~atlon.
o
°
( 1) Cela dl: fi vrai, que voici comment un ~uteur d'ta~atiqùe,
,
'ment n'avoit en, vue que les mœurs gen~rales, fait parla:
qUI certame
une felnme des procès en leparation.
" Non, °je n'ai point alfez d'audace ni, de force.
Pour aller mendiet un malheureux divorce,
"" Je n'imagine pas qu'une rremme de b'leo
" Puiffe jamais avoir TCcours ~ ce moyen.
" Il faut un front d'airain pour donner ce (candale.
"
::
..
"
)'
"
"
Sur' l'eÏipoir
fu~cè~ t~uj;\lrs' dé~ho~or~nt ,
•
'
'r'
Je ne rifquerai poillt -d'crre
umpanllee.
Le plus grand des malheurs elt d'';tre mép~ifée.
Eh quoi! fur un prétexte abfurJe & ~e,ndle ,
Aller de porte eu porte implo~er ,la pmé ;
y faire de fa vie un Journal equlvoque,
"'ue perfonne ne croit, & dont chacun {e moque.
'oC
cl
'c
Subornet dei témoi:ns ,g3gnet es pawlans; R Oj}
d'ut;
�qz.
PJ~. 8 1.
Libollc,
On le devait d'auta nt moins, que de 'pareilles fu ppo:
fitions , & m ême des faits de ce gelU'e ne [ont jamais ap_
préciés que fur leur dégré de vraifemblance. Et quelle
ell la vraifemblance qu'un nouveau marié, amant recO\lnu depui, fix Illois, fignale , le moment, même qui
couronne fes vœux par des aétes de brutalIté féroce 1
Comment fuppofer que la maifon de {on ' beau-pere oq
celle de l'ami intim e de ce beau-pere, faient le théâtre
qu'ait choifi cet homme cynique & cruel? Comment [up~
po[er que fous les yeux même des parens de ma femme~
je me {ois porté à de tels excès? Comment {uppofer à
M, de Marignanç une tiédeur a/fez coupable fur le fort
& la C6reté de fa fille, t pour qu'il l'eM laiiTée dans les
mains d'un' homme [~ brutal ,fi féroce, qui emmenoit
dans fa maifon fa viélirne , [ans' parent, [ans {urveiUant,
[ans [auve-garde?
,
Rien n~ pr o11v'e mieux peut-être':1e' Mg~-é de corruption
où [ont parvenues les mœurs pub)iques, que l'àudace de
par.ei11e~ fuppofitions & le crédit .qu'elles avaient acquis.
On ne menait pas en doute que Madame de Mirabeau
n'eût été maltraitée avant que fes lettres euiTent paru,
parce que les émiiTaires!des intéreiTés à la réparation avaient
r épandu mille anecdotes de ' [évices. Le Libellille a été
plus intrépi~e . ~core ; .il en' a imprimé la ,notice, ou ,
du
pour par1~r comme lui, que/qU{J détail_, pour répo nfe
" Rem pli r los ,TribuQau<, de (;s çris. ingécens ;
" y faire Pébieer d~s plai nees infiddles ;
" Inonder le Public d'in jurieux Libelles;
Ebruire/' des m~lh:urs qu'on pouvoir empêcher ,
>, Ou qu'au moins la rai ron devoit faire cacher :
" Je ne pu); feulement {Queenie Cette idée.
,
,
, Si vous .C(?Yt'z qae ce roi r ici UJle (J1l yre rdati ve li mon procès t
h(~ la Fa uCfe, Antipathie de la ChauCf~c, ( Aa. III> fcen, III. )
,>
.
:r B jufqu'à la pOIll
rr'b'I"
aux lettres qui en détruifoient
1 He. E't
l'on n'a pas craint que la voix publique couvrît d'dn~
thêmei & d'opprobre le Libelle, fon auteur & [es adherans. Cent perfonnes auront lu ce Libelle qui ont été les
témoins affidus de ma tendreiTe pour ma femme. Plu fleurs
font encore journellement aupres d'elle, a~pres de fon
pere, plulieurs correfpondent avec eu~, ,Et Il ne [e , tr~u
vera pas un ami de la pai?" de la ;-ren,té, de la Jullice
qui aCe repré[enter combien ces allegauons [ont c,a lomnieufes & coupables. Je les dénonce à leu: ,conrc!ence,
ces hommes pufillanimes qui trahitTent la vénte en s a,bilenant de la proclamer ; je les dénonce à leur confclence
aufIi long-tems qu'ils garderont un innigne 01ence : ~11
s'ils oCent mentir à leur ame , à leurs yeux , ~ leur memoire par une lâche complaifance, qu'ils paro~iTent donc,
qu'ils s'avancent.1 qu'ils parlent, qu'ils s'exphquent, au
lieu de ricaner, d'inlinuer, de fous entendre, de donner
à p~nfer, Que ce {oit leur, témoignage qu 'on m'oppoCe
fur les faits qu~ils connoiiTent; & qU'9 n ne Ce ,borne pa.s
à capter quelques domelliques, quelque,s ouvr!ers , quelques créanciers pour vomir contre mOI des Impoftures.
Ce)l: dans cette cl!!iTe de citoyens, qu'on a h~utement &
mafqu~ levé chercl)é depuis,0x :nOIS des témol~s.1 ~es maté riaux d'enquêtes, Pour mOi Je n attelle aucuns temolgnag~s
à cet égard que la conviétion irréfi,llible conten~e dan~ la
couefpondance de Madame de Mirabeau; maIs ~a Ville
emiere de Manofque où j'ai paiTé plufi~ur~ mOIs ,avec
mon époufe &. les derniers , de la cohabitation, m offre
le fien par acclamations.
"
"
,
Des témoignages !. Et que ferolenHls ICI ? Qu e~,ce
que la preuve par témoins au pres de la preuve I?ar 1 abfurde. Qui ne [ait pas ce que des hommes rIches &
puitTans peuvent, même [ans le vouloir, fur une, cer'taine datTe d'hommes? Qui ne connoît pas la théone &
la facilité de fuborner [an~ [ubornation ?
•
•
�q 4
.
Voulez - v ous amaffer par des témoins des preuves irréplicables ? Faites -leur prêter ferment fous peine dt;
mort. Faites enruite , après la dépofition, defcendre Dieu
fur la terre pour confondre ou pour abfoudre les témoins;
&. mettez-les à mort s'ils font parjures: al ors vous aurez
des preuves par témoins .
. JuCques-là vous n'aurez par eux que la plus foible , la
plus imparfaite des preuves dont il foit permis aux Juges
de fe contentel·. Or, l'infini eft entre la preuve imparfa ite & la preuve parfaite; & ce ne fOIlt pas des témoi-gn ages d'une valeùr fin ie qui le combleront.
Où fe trouvera donc la preuve parfaite? Elle ne faut'oit fe trouver ailleurs que dans la nature même de
l'homme qui rend les aétions qu'il attribue explicables
ou inexplicables, poffibles ou impoffibles. Et prenez garde
que la preuve eft alors immuablement & abfolument parfaite; car les infinis foht égaux entr'eux; & il ne fauroit
exifier des impoffibles plus rigoureux & plus abfolus les
uns que le, autres.
Rejette~ donc la preuve par témoins 10rCqu'ils affurent
une ab[ur~ité, lorfqu'ils dépofont contre la nature humaine
1), fi l'on peut parler ainfi. Et que dépofera-t.on contre la n~ture humaine de plus fort que le récit des
vexations ~ontinueJ1ement exercées contre une femme qui
n'eft pas im~écille , qui n'dl pas folle, qui n'eft pas vile,
a qui cependant prodigue à fon prétendu tyran les protefiations les plus affeétueufes, lei plus tendres, les plus
--confiantes ? Qui dans un moment où elle fe plaignait
d'une injufiice lui a écrit: J'EN APPELLE A TON TRIBUNAL, IL A TOUJOURS ÉTÉ JUSTE POUR MOI?
Et je n'ai pas revu cette femme! Et je l'av ois maltraitée! ... ;
Quelle idée ont-ils donc & du public & des Juges & de.
<
(1) lleUe exprdlioll de M. Servin!
13S
.
moi; ceux qui viennent me combattré avec une méchan..,
ceté fi fiupide !
' 1
Il eft un moyen dont on avoit, & peut~etre, avec q~eque raifon eCpeeé plus de fuccès. On fait CJu en mauere
d féparation on juge trop fouvent au mOIns autant les
p:rfonnes que les cauCes. On fait que beaucoup de gens
l!( d'honl]êtes gens ont long-temps & b~aucoup trop longtemps fouffert du d~fordre de mes affaIres; que plufi~urs
en fouffrenc encore, & qu'il n'en faut pas tant pour s attirer l'aoimadverfion publique. En conCéquence on a prodigieufement affombri le tableau de mon dérang.ement: Et
renchériffant fur les lettres de mon p~re, qUI ta~tot,a
parlé de mes engagemens oubliés f; méprifés, & tantot mil
reproché amérement d'avoir ~atifié, des .engagemens en
exermaJ'orité', l'éloquence du Libelhfte fis efi dlCertement
ci
b . Ir.
cée fur mes del/es baffes f; f (Jlles, ur mes e~tes aJ) ement
contraéUes, fiur mes engagemens oubliés &. m.éprifés, [ur mes
ci
folles fi baffes di.ffi.pations, fiur l.: patnmo:ne, 7 mon Fere
dévoré , fur la f ortune ruinée 'lue } aurOlS lüiffee a mon fils,
&c . &c. &c.
.
,
Saos doute je pourrais répondre par u~e clénfion t,re~
amere & prier le favant Auteur du LIbelle de m ap-
prendr~ fi la formule ufitée dans les Tribunaux en çauf~
de féparation efi de commencer par demander au mar~
fon bilan. Je pourrois évaluer ce cliquetis de mots qUJ
ne produit qu'un fon vain & dircordant. Egayer. le public aux dépens ' du Libelle, qu'on devoit du mOIns ren1
dre fupportable à lire puifqu'on le vouloit atroce, Be
dire; » nous plaidons en féparation de corps; quel9ue
,) jour je vous donnerai fatisfaétion fur celle de biens
,) que vous obtenC'l cum eLogio quand perfotlne ne vous
n la difpute. 1)
Mais ce n'eil: pas moins au public qu'à mes Juges q~.e
je parle; lX. ç'eft fur-tou t reJativement à {Iles dettes qu il
Dette...
Pag. 80 cill
Libelle.
Pag.
10 1
Pag .
10<>,
�13 6
â m on compte re ndu, parce que lui [cul a été
[cSlndll!i[é, lui Ceul a [ouflè rt.
a' droit
. J'atteile M. de Marignane que je lui dis avant la fi.
gnatll~e des articles du mariage, que j'avais environ mille
louis- 'de dettes dont il m'importait infiniment d'être li~
hé ré pour pouvoir m'arranger l'ur mon très· modique revenu. M. dé l\Iarignane ne mit pas un moment en doute
qu'on ne confentÎt il les payer. Il fe trompa.
,
Demandera· t·on comment ces dettes de garçon avoient
été contraétées ? Quel eil l'homme de bonne foi qui fera
cette quefiion ? Q uel eil l'homme fenfible qui ne crain-,
droit pas - de me co mpromettre cruellement en exigeant
une réponfe précife? Où elt le jeune homme qui n'auroit
point outrepa1fé une très-modique penfion, [ur-tout quand.
une fortune confi dérable paroi1foit l'attendre ? Sur - tout
quand les circonftances le plaço ient dans la fo ciété des
gens riches, le conduifoient il la recherche d'un des plus
grands partis de la Province, & dans un pays, qui, quoi~
que la patrie de (es peres, ne lui offrait plus la mai(OIl
d'aucun grand parent pour hofpice.
Les fix mois que j'ai palfés dans cette PrDvince avant
de me marier, me coûterent & dûrent me coûter très'"
cher. Je n'y étois venu que pour des affaires de Com~
rn,u nauté, & avec l'argent il peine nécelfaire pour un féjour
tres,court & le voyage. Il fallut cependant me [outenir
:a vec décence.
~ Je me mariai le 22 juin 1772. Je priai M. de Mari~
gné\ne que les nôces [e fi1fent il Marignane; il ne le vou.
lut pas. Elles furent [omptueu[es. Madame de Mirabeau
avait des compagnes qui lui avoient fait il leur mariage
~e . f?rt beaux dons. IL ne lui convenait pas d'en rendre
l?feneurs. On fait quel efi l'ufage en Provence. Les pe~
litS pré[ens qu'on offre à ceux qu'on a l'honneur de re~
,eyoir à {es nôces, font des bagatelles pour un homme
opulent ~
~our
',~'iche
3
o ulen t ; ils ne l'étaient p:s
un homm'e t res
p
~ efrive très-pauvre en effet, & auquel on n aVait
-e~/~~~né un 'fol d'argent comptant, fi ce n'efi .Ies ce llt
is que mon oncle voulut bien envo yer. à fa I1lece. ~e
ou
que mon pen; m'avait affi goé étolt de 6000 IIV.
revenu
,
.
'
'1 f 11 '
M. de Marignane Pl'en donnait tr oIs mtl!e ?on~ l , q Olt
que je rendilfe cent louis de penfi o ~ aillne'nralre a
dame fa mere. J'avais donc 6600 IIV. pour fub~eI1lr, à
ceux des frais de nôces qui me regar do l e n~ & qu 1,1 11 a~
voit pas tenu à moi cl 'éviter ; p~ur m'habIller ma l, ma
femme ( dont le troulfeau en hn ge & dentelles éto lt
magnifique, mais il qui l'on ne donn oit qu'une robbe) & I~OS
gens; pour payer les intérêti de m~s dette,s, pour faIre
la bourfe de la mariée, le préfent cl ufage a AIX & da ns
les Communautés de M. de Marignane & celles de m on
pere; & pour vivre un~ année: ... Je ~upplie le Leéteur
de [e demander il lui· meme fi Je pouvaIs ne pas contrac ·
ter des dettes. J'en fis avec exc~s; c'eil un tort, j'en
conviens, un grand tort, dont après tour je fuis le feul
des deux époux qui ait été puni.
, Je trouve dans un Mémoire, fignifié au procès (quoi ·
qu'il Y fait parfaitement étranger, apparemment 'pour ac·
cumuler [ur ma tête tous les genres d'outrages; ) Je trollv e
qu'à mon mariage j'avais été lib éra /~menL pourvu ; qu'on
me donnoit 6000 livres de penfion QUI DEVOIENT
CROITRE JUSQU'A LA CONCURRENCE DE 8500 1.
Oui, en cinq ans. Cela m'aidait-il beaucoup la premiere
<Innée? Et n'efi· ce pas cette premiere année que j'ai fait
des derres qui ont néceffité les autres. J'y lis encore que
je me [erois trouvé par la mort de Madame de Mari~
gnane qllalOr{e mille cinq cens lit'res de rente fi je jùjjè de~
• m euré. Ainfi j'ai été très - bien pourvu en 177 z, parce
qu'en 1776 , j'aurais eu 14500 liv. de re nte SI J E F USSE
DEMEURE; qu'on apprécie cette conféq uence & qu'on
réfléchi1fe d'ailleurs fi c'e.fi moi qui choifis mon domü;ile
f
I.'1a-
S
•
�q8
au Château· d'If , au Château de Joux; &.c. &.c..
Pour, moi, j~ le dis dans taute I.a. fin~érité . de ltl01Î
cœur; a ~a mamere dont on me man?lt., 11 étOit impof_
fible que Je n~ filfe pas des dettes; malS Je devais en faire
beaucoup moins. Ces dettes en néceffitoient d'autres'
mais je pouvais &. je devais m'ab!l:enir des inutiles dé~
penCes &. des affaires ruioeuCes auxquelles je me livrai~
Peu de l1;1ois après mon mariage je regardai mon état
de fituation ; j'en fus effrayé; un enfant de famille n~
peut guere Ce procurer d'argent qu'au prix des plus
énormes ufures;
PJaut.
139 ·
~té plus vrai de clire que la conduite contraire me pouf
111 eodem lulO ha:{i[àS; ver{ud, {olvis.
Pour réparer une brêche il en faut faire diJÇ autres. Il
efl incroyable avec quelle rapidité l'aq.yme fe creufe.
J m'aI/perçus que je courais à ma perte. J'ouvris mon
cœ.ur à M. ~e Mat:ignane. Il me fit un~ offre qui prouvaIt la bopte dl:l fien. Il me propofa de m'avancer fu~'
la quittance de mon pere la Comme qu'il me devo~t a
la mort de fa mere. C 'était une fois plus qu'il ne fal.'
lait pour me libérer. La quittance de mon pere é toi~
nécelfaire à la sLlreté de mon beau-pere; puifqu'aux tel'"
mes de mon contra,t de 1ll!lriage mon pere feul pouvait
recevoir les deniers de la dot de fa belle - fille. On engagea mon pere à refu(er fan feing; il eût été digne de
lui de l'accorder; cela était même jufte & de fan intérêt; il ne lui en coûtoit rien; il s'évitait les embarras
où la fuite de mon dérangement l'a plongé. On . le dé.
tourna de cette qpinion qui fans doute était la 'fienne
puifqu'elle était équitable &. fenfée. On lui fit accroir:
qu'en accordant il m'encouragerait à recommencer. Il
eût été plus vrai de dire que ç'auroit été m'inviter à
l'ordre par l'indulgence, m'ôter toute excufe en cas de
rechût~, ~ m~ ll!ettre à une épreuve infaillible, Il eClç
.
..
,,
fait inévi-rablement dans le précipice, &. que plus je retardais ma chûte &. plus elle feroit funefte &. profonde,
parce que je ne pouvais impofer filence ~l mes créancier.
qu'en leur donnant de nouvelles &. plus fortes créances.
. Quoiqu'if en toit, mon pere offrit à M. le Comte . de
Grallè du 13<1r 18000 livres pour le payement de mes
dettes. Cette fomme ne pouvait du tout point m'acquitter. L'excédent de mes engagemens reftoit toujours chargé
d'uCures, &. le feul payement des intérêts eût encore abforbé mon revenu. Que me feroit-il arrivé après <lvoir
reçu cet à cQmpte ? Je ne m'en ferois pas moins trouvé
dans le plus cruel embarras &. forcé de manœuvrer de
nouvelles affaires. J'AI PAYÉ, aurait - on dit, IL RECOMMENCE. . .. ... Voilà ce que je pen(ai, voilà ce
que je craignis; &. je refufai.
Je ne diHimulerai point m~s fautes. Ma conduite péèuniaife 'fut exceffivement fplle. No n feulement je continuai de mauvai[es affaires (j 'y étais contraint) mais encore ie éommençai à Mirabeau des ouvrages plus qu'inutiles dont je calculai fort mal les ré[ultats. Par-tout la
dépen[e fut triple des devis. Dans le fait elle était décuple par la maniere dont je percevais l'argent pour :sr
(ubvenir. La douleur de voir échouer par des refus que
je trouvai s durs &. déraifonnables, le feuI plan praticanie d'arrangement que j'eulfe eonçu, m'avoi.t jetté dans
une [or~e de délire. Plus je fentois de trouble intérieur,.
&. plus pour me foulager j'augmentois l'agitation du tourBillon qui m'entraÎnoit. Je m'efforçais de ne rien voir
au-delà du préfent, d'étouffer ma mémoire, de détourner les ye,lx de l'avenir. v' oiJà la peinture exaéte de
mon éta.t; il était déplorable [ans doute, mais en quelqu'e forre forcé par les circonftaoces.
Il y a déja lon g- temps que j'ai prié que l'on examinât
(I dans l'état de mes dettes il s'en trouve de contraétée~
\
S ij
•
�,
ra ~ .
de
:)l a ~ dot c r.
mOn
14 1
au jeu, ou li les bonDes mœurs furent jamais offenfé~
par quelqu'une de mes dépenfes. On ne compte parmi mes
créanciers que des Juifs, des Ouvriers, des Libraires)
des Artilles ou des Marchands. Voilà ce me [emble une
rai[on de regarder avec plus d'indulgence mes fautes pé.
cuniaires. Je ne me fuis point dérangé comme la pltîpart
des prodigues qui s'en[eveliirent dans les ruines de leur
for tune, en l'englouti/fclnt fous un monceau de cartes Ou
dans la fange de la corruption. Une yvreire pairagere
m'a égaré; & le premier faux pas a néceffité ma Chûte
par la nature du terrain ou je courois.
Une premre manifelle de ce que j'ob[erve ici, c'ea
qu'immédiatement après le~ couches de Madame de Mir abeau, je m'arrê tai de moi-même, au ri[que de tous
les événemens qu'il n'étoit pas difficile de prévoir. Mon
dernie r emprunt a été pour [ubvenir eux dépen[es né.
ceITaires à [on état. On a beauc.oup déclamé [ur ce que'
j'engageai alors [es diamans. Ce fut de [on aveu, à fa
l'riere, dan un moment & pour un temps où elle ne
pouvait s'en [ervir; & c'ell: aux dépens de mon pere
qu'ils lui ont été rendus. J'ai lu dans le Mémoire étranger
au procès que l'on ma lignifié, que tous les bijoux de
IIlJadame de M irabeau avoient été La proie de ma fo lle diffip aLion. Sam doute l'Auteur de cet écrit, quel qu'il [oit,
n'en avait pas fait l'inventaire; [ans doute il ignorait
que j'ai donné à ma femme, en ce genre, les cho[es les
plus recherchées; que rai doublé [es diamans; qu'elle
trouvait [ans ce!le des robbes charmantes faites à [on
infçu ; que l'amant le plus tendre n'aurait pas porté plus
loin ces fortes C1'attentions envers la maîtreire la plus
chérie. Je dois à Madame de Mirabeau la jullice qu'elle
m'a [auvent grondé de cet excès de généralité, qu'elle
avoit peu de fantaifies de ce genre. Et parce que j'ai dit
cela, parce que j'ai dit: )) Quelque rai[onnable que fCr t
1)
~adame de Mirabeau fur [a dépen[e perfonnelle ~ ell~
•
;; ne pouvoit qu'être touchée de ce qu'une grande partI.e
" de ces dettes n'avoit d'autre lnotif que le de{jr atbf
» & [ans ceITe renaiirant d:orner . l'idole de mon cœur. )) Le
rag. h
Libellille s'écrie : EN VERITE C'EST JO.INDRE L~ Libelle,
CALOMNIE A LA DÉRISION. Je ne lUI demande.ral
pas qui donc eft calomnié dans la phralè qu'il qualifie
CALOMNIEUSE ET DÉRISOIRE? Mais pour lui montrer que je fuis fort loin de la déri/i~n , je dir~i au public
que je puis prouver par les mémOIres & quIttances des
,6000 liv. que j'ai payées [ur mes dettes, que Madame
de Mirabeau qui n'a refté qu'un peu plus de deux anS
avec moi, s'y trouve, quant à [a dépenfe yerf?nn,elIe ,
pour une Comme de zz600 liv. (~). Je [~IS pret ~ dépofer les preuves de ce fait. On Jugera p.ar ~na~ogle de
tout ce que j'éclaircirai en achevant ma hq,Uld~~I~n; on
ne perdra pas de vue que l'appartement q~e J al eu 1"
folie de faire conftruire pour Madame de Mirabeau, me
revient à 40000 liv. Et l'on voudra bien me dire ef\[uite
de quel côté [e trouvent ,la CALOMNIE & I~ DERISION. Si mon pere, & meme tout autre que lUI. pe~vent
avec juftice me reprocher mei dettes, en vérIté Je ne
devois pas m'attendre à ce reproche de la part de Ma-;
dame de Mirabeau.
Sitôt que j'eus un enfant, je [entis qu'il n'étoi~ plus
queftion d'éloigner l'orage; mais de l'affronter au heu de
le laiirer groillr. Je me retirai à Mirabeau, réfolu de ne
plus tenter le moindre effort ruineux pour reculer un éclat
( 1) Uil feul MémOIre de Marchand pour fournitures de gaze , f ••
veurs , petites delltelles & autres chiffolls , depui, le premier août ' 77 L
jurqu'au mois de juin
monte;t1600 liv . Cc~~ndant Marlame ~e
Mirabeau n'avoit > aux termes de [on contrat de man age , qu e r 500 I,v.
de pcnlion pour fa dépenCe perConnelle ..... Et vous voyez bien que
c'dl de mon côté q ue Ce trou ve LA DE RISION!
' 77"
,
•
d~
�J42
rê-
inévitable., Bientô,t j'y}us e:cilé, & je m'applaudi de
-tre. Je ne fongeOls qu a expIer par un long ennui un tro'
long égarement., Il ell: vrai que l'on fit accroire alors ~
P.lg, 6 du m,on ~ere que Je dégradois la terre de Mirabeau; & le
Lili.Ue.
Llbellifte en
" nous apprenant ce fait (1) très-utile , conlm e
l
c laCtln VOlt, a une caufe en féparation ,. auroit dû ajouter
9ue les donneu:s , d',avis , chaffés depuis pour friponneries
mfignes, ne mentOlent pas une grande créance.
Nouvel exil à Manofque; entiere réfignation de ma
part ; pro~onde !ranquillité; rigoureufe économie. Alors
on me fit JO~er~lre :, & cer~ainemellt ce ne fllt pas légaleme~t , qUOlqu en ait pu dIre la Confultation de Ma dilm e
de MIrabeau, au bas de l-aquelle je trouve des noms de
Jurifconfultes à qui je pourrois montrer fiané de leur
main, que cette interdiétion n'eft pas LÉGALE. On vient
d~ yoir quelles diffipati.ons ont donné lieu à ceUe interdla,IOn .. Elles peuvent. etre f~lles} mais je le deman de:
eU-il, Je ne dIS pas decent, Je dl~ fuppo1'table que ce
fait M~dame de Mirabeau au nom de laquelle ~!} affure
que mes dettes ont été haffemel/l conml.aées?
Traîné de fort en fort depuis mon interdiaion . détenu
o~ . fugitif, fans exi~e~ceA civile, fans reffoul'ce~ pécuo:alles , ·commeryt pUIs-Je etre ascufé ,& par elle accufé
d avoir OUBLIE ET MEPRISE MES ENGAGEMENS?
Çuand ai-je pu m'occuper du fQulagement de mè~ cr~an
cIers? Croit-on que leurs angoi{fes n'étaient pas, ne [on t
pa~ ~u fond de mo? ame? Mais aujourd'hui - même que
~uls-Je. fa~s la fanaIOn de ma famille? Que puis-je fan s
fautorifatl<m de moo pere- pOtlr m'acquitter ?-
.
d (1) . Er prenez garde qu'on '.l'én once pas da ns le Libelle la nature
es pla.lIJtes. des Ag~ns. II Fallou bien lailTer croire que l'homme 10llp
~s mao.geolC au mo1.lls .; que l'homme rmllrd les voloir. Pour l'homme
oge, Je ne [<us ce 'lu'Il leur faiJou.
l'
& meprt..Jc
"
:f.1
, rf
J'al, ouollé
mes14J
engagtments,.mOl
'lUI' 'd"purs
..
, le recouvrement de ma liberté 8< mon retour en Pro~
.. vence n'ai ceffé de folliciter un arrangement 8< d'en pro-
,
pofer ~haque jour des plans plus faciles, plu,<; acceptables
les uns que les autres! C'eft moi qui, des faibles épargnes
qu'on peut faire fur une pen{ion annuelle de cent. louis,
ai payé depuis trois mois pour plus de 1500 !Iv. de
vieilles dettes; c'eft moi qu'on accufe d'o ubLier & de mé-
prifèr mes engagem~nts!
J
r.g. 91
Je fuis mauvau. citoyen & fi'
Ujez aangereux,
parce que ma Libdk.
-vie Ile préfente qu'un tifJu de dettes haffèment contraaùs. Et
de ces dettes la plus grande partie fut indifpenfablft st
forcée! Et de ces dettes la plus grande partie eut Madame de Mirabeau pour objet.
Je fuis mauvais citoyen & fujez_dangereux . ... parce que
j'ai oublié 6' méprifé mes engagemens. Et je ne puis rien
fans le concours de ma famille! Et depuis huit années
je n'ai pas l'adminiftration du plus leger revenu!
Mauvais fils, Oll m'a Vit par de folles & haffes diffipations
'
1e pazrLmome
"
J
. de
d.evorer
ae
mon pere. . . .• E c que Il e partIe
ce patrimoine a difparu?
MAU V AlS PERE ..... Mauvais pere? Dieu jufte !
Efi-ce donc moi qui fis le métier d'hifirion fur la cendre
de mon enfant? .... MAUVAIS P ERE , 'luû fort, 'luel
avenir préparoit-il à cez être innocent dont il 01' inv0'luer les
mânes . ••.. oui mon fils! j'ai invoqué te~ mânes ! 8< tous
ceux qui m'écoutaient ont pleuré; & le lendemain on a
fait paroître au nom de ta mere un Libelle pour me
deshonorer..•.. M<>n fils, tu ne me réponds pas; mais
peut,être tu m'entends! ce font eux qui m'accufent d'av oir été mauvais pere! ....•
..Quel
avenir préparoit-il ci fon fils? .•••• une forlllne
rUbnee •••••
A cette déclamation horrible j'oppofe le tableau qu~
fuie : Mes créanciers y verront mon bilan 8< mes rcircur,
•
d~
Pag. lM d~
Libelle.
�144
ces; le public mes torts &. leur excufe~ mes calomnia_
teurs le fceau ineffaçable de leur honte.
Au mois de juin 1775, M. le Marquis du Saillant
mon beau-frere, vint en Provence, afTembla mes créan~
ciers, compo[a un état de toutes mes dettes, qui montoient, fuivant cet état, à 161 II6 liv. 8 [ols 1 denier
y ~ompris les lettres juives &. uCuraires qui étaient u~
. 0bJet de plus de 80000 liv. Tous les créanciers, un Ceul
excepté, con[entoient à être payés en huit années, [ans
intérêt.
A cette époque les Fermiers de mon pere étaient débiteurs &. difiributeurs de 95co liv. pour trois Cemcfhes
de ma penuon faius entre leurs mains par mes créanciers.
Le payement de cette fomme aurait opéré la mainlevée des faifies de mes rev.enus, &. réduit la maire
de mes dettes à 151616 liv. 8 fols . .
A cette même époque la vente de ma garde-robe &
d'un meuble d'AubufTon, objet d'environ 3000 liv., élOi!
plus que fuRlfante pour couvrir les frais & intérêts des
créanciers faiu[fans, & les petites dettes qui pouvoient
avoir été amiCts fur l'état.
Vers cette même époque la penuon de Madame de
~irabeau [e trouvait augmentée de 3000 liv. par le déces de Madame fa grand-mere; ou bien les 60000 liv.
du capital étaient exigibles, conformément à mon contrat de mariage 1 &. ma fortune fe twuvoit hypothéquée
pour cette f?mm~. Ces 60000 liv. auroient pu & dû être
employées a éte~ndre mes dettes les plus légitimes, &
mes det~es uCuralres dont une grande partie n'étoit pas
encore echue, & dans lefquelles des intérêts énormes [e
trouvoient inglobés.
En p~yant fur le champ, on auroit rabattu plus de
.045° 00 hv. fur ces dettes uCuraires. Avec 60000 liv. on
Buroit par conCéquent éteint 105°00 liv. de deues' &
la mafTe aurait été rédl,lite à 46116 liv. Au relt; le
payement
'l4S
payement des 60000 liv. fur lefqueUes je devais compter
à la mort de Madame de Marignane, était parfaitement
inutile; car les gens d'affllÎrCfs de mon pere avaient ttOUvé à cette même époque 60000 liv. à confiitution de
rente; & cette rente aurait été aiCément prélevée fur
ma penfion •
Sur les 46116 Ev. refiantes , un homme honnête 'em~
ployé dans l'état de mes dettes pour 7000 liv., l'un de'
mes créanciers qui a le plus cruellement fouffert pour
m'avorr gratuitement obligé, & qui dans tous les temps
auroit été le plus accommodant, ce créancier n'exigeait
qu'un contrat à conflitution; ce qui grévoit encore ma
penfion de 360 liv. de rente, 8( réduiCoit la maire de
mes dettes exigibles à 39116 liv.
Or cette derniere fomme aurait été paiée en huit années avec ma penuon ; & je vais le démontrer.
Madame de Mirabeau avait 6000 liv. de pen fion qui
auraient CuRl pour elle & pour woi vivans chez nos parens ; puiCque lors de mon interdiél:ion , on ne nous donna
que mille écus de penHon , avec leCquels nous nous fommes.
foutenus décemment à Manofque fans aucun fecours.
Ma penuon de 6000 liv. devait augmenter annuellement de 500 liv. juCqu'à ce qu'elle fût parvenue à 8500
liv. , Comme à laquelle elle étoit fixée. Cette augmenta.tian a commencé à Noël 1773, De forte qu'à la Noël
1777 , je me trouvais 8500 liv. de revenu.
Nous venons de voir que ma penuon auroit été libérée à compter du Cemeflre de Noël 1775, Elle Ce trollvoit à cette époque fixée à 7500 liv., au moyen de
l'augmentation progreffive & annuelle de 500 livres. Ea
prélevant annuellement 3300 Ev. pour l'intérêt des confii..
tl~tions de rente, il refioit pour acqllitter les 40116 liv•.
'l.-demli •.
1 - .....
...., ._
1
,T,
�'147
SAVOIR:
A St. Jean 1776, • • •
"
41QO J.
A St. Jean 1777, • • .
• • 47°0
A St. Jean 1778, époque à laquelle ma penhon étoit irrévocablement fixée, . . • • • . •. 5 zo o
- -I,4JOO
Pareille fomme de 5 zoo liv., les cinq années fuivantes qui expiroient à la St. Jean 1783, z6000
Total qui éteignait abfolument mes dettes.. 40100
Il devoit donc arriver, fans facr~--es, fans fecours
étrangers, & par le feul emploi, bien entendu de mes
revenus , que Madame de Mirabeau &. moi jouiffan~ de
6000 liv. de rente, ce qui étoit beaucoup phls chez nos
parens, que les 9000 liv. avec lefquelJes il nous fallut
tenir maifon la premiere année de no~re mariage; il feroit
arrivé qu'a-u moment ou j'écris toute;; me;; dettes auraient
été paiées, ma penfion de 8500 liv. ne ferait grevée que
de 3350 d'intérêts: ce qui me laiffoit 5150 liv. de re.
venu, qui joint aux 6000 liv. de Madame de Mirabeau,
monteroit à 1 II 50 Iiv. de rente pour netre feul entr-etien
&. nos fantaHies, puifque mon excellent oncle-, qui n'eft
riche que de fes bienfaits, n'a jamais mieux demandé que
de garder gratuitement chez lui fon neveu & fa niece.
Ou donc eft cette fortune ruinée qui m'a valu les épi.
- thetes de MAUVAIS FILS, MAUVAIS PERE, MAUV AIS CITOYEN, &: SUJET DANGEREUX? .--•• Mais
rien de tout cela n'eft fait? -'-"-- Mais eft-ce ma faute?
Et ~'a-t-<:>n !aiffé.la Iibeft~ de rien faire depuis huit ans
que Je fUIS Interdit, &: prIvé le pl-us fouvent de ma liberté perfonnelle ? Rien de tout cela n'eft fait? A la bonne
heu~e : quoiqu'il me fût aifé de démontrer gu'une grande
partie de ces chofes eft à peu près faite &: n'attend que
l'autorifation de mon pere. Mais en l'état de déCorde que
l'on veut fuppofer, il n'en feroit pas moins vrai que fi
mon Jill> vivoit, & que je vinffe à mourir, cet enfant
qui J"éuniroit un ;our fur îa tête au moins 140000 Jiv..
de rente, auroit à faire le facrifice d'environ une demi
année de fan revenu naturel pour payer les dettes du,
MAUVAIS PERE qui a dévol é le PATRIMOINE DE.
SON PERE, ( lequel patrimoine exifte tout entier) &:
qui préparoit à fon fils une forllIne ruinée, en contraétant
des dettes que la modique penfion pouvait acquitter ; ~
qu'encore aujoU1~ 'hui, malgré tout le défordre que de
mauvais procureurs ont apporté dans la gefiion de fa
tutelle &: moins de 80000 liv. liquideront en entier.
Voilà fans doute un paragraphe bien long, bien en·
nuyeux, bien [ec; mais je me de.vois & cette. profeffion
de fui &: ce compte rendu , qUI,. fans dégulfer aucun
de mes torts, les réduit à leur jufte valeur.
Paffons à mes crimes; 8t comme' te crime a Ces dégrés" Acc ll [,,;o n
. d
tm
' accu fie , du C,ntl".cr,
commençons par l ,·ln t'ame eficroquene
on on
par l'organe d'un Cantinier.
Deux efpeces d'armes fe préfentent à moi: celle de ,
l'ironie contre une acCtl[ation ridicule; celle de l'indigna.
tion contre UJle abominable attrocité. Mais je les rejette.,
l'une & l'autre. Plus je fuis offenfé, &: trop évidemment,
offeofé en cette occafioll par Madame de Mirabeau feule,
puifqu'elle feule a pu livrer la lettre du Cantinier &,
fuggérer l'idée de l'employer; plus je me dois de conferver le fang froid &: la modération d'un Juge : c<lr
Madame de Mirabeau doit être ju~e , dans mon opinion,
& dans mon cœu~ avant de l'être par les Tribunaux. Di[cutons donc froidement cette infamie.
, L'accufatiOD ea uniquement fondée fur l~ lettre du Can~,
tinier.
Examinons d'abord fi cette lettre peut fonder une accUr-
T ij
•
�,
Pag. Il & IL
du Llbelk,
'14 8
Cation ? Si quelque avides que les hommes [oient de bruit~
injurieux, quelque penchant qu'ils aient à les croire, une
anecdote que l'on fait avoir une telle origine, aUrait
trouvé la m oindre créance parmi les honnêtes gens fi
r
l ' on n "aVOlt pas eu 1e lecret
de changer mon procès ' en
une affaire de parti, où la prévention accrédite les ahfurdités les plus révoltantes,
Une pareille lettre ne fonderait certaillement pas une
accu ration juridique, ou du moins l'accu(ation juridique
des faits arriculés dans la lettre n'entâcheroit pas un citoyen, Autrement notre r éputation à tous tant que nous
fommes, eft au pouvoir du premier homme qui voudra
nous accufer non pas feu le ment devant les Tribunaux,
mais devant une perronne ennemie qui JUGera à propos de
fai re im prime r l'accu ration,
,
b
Je fu ppo(e que celle du Cantinier a été portée en J uftice,
Je fuppofe qu'il ait fourni les preuves que fa lettre énonce:
( on ne foutiendra pas apparemment qu'il en eût fourni
de plus fortes; certainement il ne me ménageait pas lodquOi! é,cri\'oit ~ Mad~me d,e Mirabeau; il ne vouloie pas
affaiblIr fa plaInte; Il a dit tout ce qu'il a cru pouvait
dire,) Voyons ce que j'aurais pu lui répondre.
,
Je n'au rois pas demandé quel était mon accufateur
quoique le caraétere d'un tel homme pût ajouter beau~
coup à l'invrailfemblance de l'accufation. Je n'aurais pas
même difcuté s'il avait quelque intérêt à me choifir plutôt
qu'un aurre pour l'objet de fan accufation. Non feuleme~t j~ me ferais abftenu de ces reproches généraux;
malS lOIn de récufer le témoignage du Cantinier je l'aurais admis, & j'aurois dit:
'
l'ai, felon l'accufateur, jùjcùé des con{eils a une j eum
{'. ~
.
:
1
J
b'zen 'lu "
[ , rr:d .
je·"me pour ravir
a' tjon
man. Le
pw ae
1 p0.lJe Olt ,
pour, en[ulle [' aband07lller avec un enfant d-e trois ans & les
Jaiffir vis-vis de rien, ainfi qu'elle a fail.
,'
, ,Cet homme ne parle pas d'après fil propre connoilfance.
'" 149 ", t:..r. ;' a l 'C '.r. '{j
Il n'y a nulle apparènèe! que j'ale.' IUjc /le ', e. te S ' C01Ij eZs
cl nt lui. On ne faif pas même s'il parre fur, lé fap ·
p~~:
d'autrui; il ne cire a ucun rémoÎ!~ ; & pr'obablemel}t
je n'ai pas ft'fè.iié des conJeils à. cme Jeune je"}me en prefence de rémolJ1s.
. ...
Pa". a
Le Cantinier dit lui-même que IN confil b z!!tcu~s que Libcll~.
j e foufJlois a fa femme, ~t~ient . C,~AN~fj,S,TINS; qu~
celle,ci qui Je préta d me~ mlpzratlOns ,'zcwifos,' Ilia lie
na(1'emml ell la prèfence Joum alu l'e de fon man.
°JuCques -là [on accufation à l'appui. de laquelle i~ 'n'adn1Ïni/1re aucune preuve, n'eft pas meme un ,témOIgnage
pedonnel contre moi; il n'a rieti vu. [
~
•
Le Cantinier continue; » milheureufement •.•. Je Jus Pag. 13,
)) atteint d'une maladie dangereùfe qui me tint pendant
» une vingtaine de jours ,moribond au.dit 9~âtè.aü ~ d'If
» Four les favorifer. Ce fut dans cet lJ1tervalle ~ue ,M.
» le Comte, par fes vives inftances, gagna en elnuer ,~ef~
» prit de mon époufe ' & la, fit ,donner ,d~ns ,~ V~l, ~ ~_
1> puifqu'elle fe livra fans crainte a [es aVIS &, a [es pral)
meifes flatteufes.
' Il
.
D 'où le Cantinier le fait-il ? Ce n'étoit'''pas aU chevet
du lil où la maladie le tenait moribond pour nous favoriJer,
que je foifois ces inJlances pour gagner en et/tier L'efp~ù de
fOIl époujè , que je lui donnais as avis, & lui ~lfols us
promejJes flaueuJes auxquelles elle jè !twa [ans craWle J en
un mot, ce n'était pas au chevet de fan lit que Je ' la
f,1ifois donner dans le .vuide.
.
Le Cantinier n'eft pas lui-même un témoin, & il n'en r'g, I l
attefte aucun. Nous nous cachions de lui, puiCqu'il a eu
foin de remarquer qu 'il nous gênait. Quoique malade j 'étais a clzarge, & ils ne pou1 oient agir jè/on leurs vues, c'eJlà-dire, ell pleine liberté. Jufqu'au moment de [a maladie
fa ,femme avoit eu toute fa confiance, il le dir. Elle ne
la perdit pas même à ce moment, puifqu'il lui la iifa la
direaion entiere de la Ferme 8\ -des ~ooo liv. qu'il yré-
:ne-
1
du
�l:5 9
tend av-oir pofTédées; & puifqu'il ne Ce crl2t convaincu
qu'après l'expiration du Bail, que fa femme étoit coupa_
ble. Je le répete; l'accufateur lui-même n'eft pas témoin
de ce qu'il avance.
P.g. 1) du
» Pour fe la procurer (la liberté), ajoute.: - il ils
Libelle,
» trouverent bientôt un moyen qui fut que par les 'fol» licitations & les prieres les plus fan es, ils e'ngllgerem
» le Chirurgien qui me traitoit, à me faire entendre que
» le climat du Château-d'If m'étoit nuifible, & qu'il fal» loit, pour le bien de ma fan té , me rendre en cette Ville
» où le climat étoit plus doux, & où je ferois mieux
» foigné. Le Chirurgien fans cloute tout pour eux, s'ac» quitta. d.ivinenmnt. bien de la commiffion à laquelle je
J) foufcnvls, fans peine dans la perfuafion que mon bien
» être s'y ltrouveroit.
~e Cant~ier n'a ~as ,entendu nos priues (.; n:os f ollicililllons aupres dll Chzrurgz-en . La preuve eo eft qu'il a fuivi
Je -confe.Ïl1 ~ lequel il ne voyoit que l'i~tér~t de (a
famé. VojJà.. qu'il eil obligé de donner à fa femme & à
moi un nouveau complice, mais à la complicité duqu el
il n'e'1l p~s plus> ' faci~de croire qu~-à celle de la m aLadie
'lui L'.avoù déten~ JJwr.i6ond au Lit p enda nt v ingt jours, p OUT
nous fa voriflr; car il étoit naturd que le Chirurgien, (ans
t tIe ' §~[',l é le moins .pu monde, confeillât par devoir &
péjr hi.llflanjté à UI~ homme malade au Châte,a u-d'If, &
qui POU'l'IOÏf f(}u,ffri,r le tranfpGrt, puifqu'iI le fouffrit en
effet, d'âller refpirer un air plus fain & plus dou x à la
'J/iUe. Rtpét-oas toujours que J'accufateur même n'ell pas
t~moin , ~ qu'jl n'en cite aucun.
Pag '3.
) JI; n'el,l.s pas pl~t-ôt quitt-é le Château-d'If que M.
» Je C9mte, votre ~poux, ~ ma remme pouiTerent des ris
., par l'eKcès cl(: la joie, IX fe mirent en état de s'arran.
n g~r enkrpble & de p,r,o-jetter ma perte?
Le C Mtinier n'a étê témoin ni des ris, ni du projet.
Il avoù IPÛ/té le Châceall..d'lf.
I~l
,
d.
• cl
l'.g, 14du
M n ;pouCe ne parut point. : :, .: €e retar aVQlt e Libelle,
» . 0 me furptendl'e; il me faifoit même mal pi'éfu.
») qUOI. de manierre que les befoins de mes fQnds & ' le
)) mer .
,
' 1
CL'
'é
» fecours de ma femme, de meme que es elle t s ,~ . ·,
)) tant d'une indiCpenfabIe néccffi té, fu ve~~ caure gue 1e
» ria mon aiTo~ié av e,c un· de meS amIs, J ~e- Ce p:one ~
n iu Châteaw - d'If pour en favoi., le ré{ullCat{. C~'U>x - c~
}) paroiiTant au Château-d'If, n~a femm4 coupable qu'
lt' s'y trouva encore , ne put potnt réfifter en leuJ.1 pré» (ence. Elle (e déroba avec précipitation aux . yeux de
» ces deux per(onnes bienfaitrices pour s'aller Jet.ter en» tre les , bras de M. le Comte, votre é~~x ~ qUI eut la
fage précaution de la cacher dans ltnténeur de fll
:: chambre c'eft-à-dire dans l'a1cove de (on lit. M. le
» Comte r~çut (ans le moindre (ujet ces deux perfonnes
» qui demandaient il parler à mon époufe pour le re)) couvre ment de mes fonds IX effets, aV,ec une ,~rua~té
)) & une indifférence f~t1Is égale, en ,l~ul' dlf~ntqu tl ? a>) voit poin,t vu mon epoufe; que ~ aIll.eurs Ils pOUVOle?t
) me fignifier que jamais. elle ne vlvro~~ pl~s avec mo~;
1) que je ne la touCheraIs plus; que J étOlS un COqulU
» &. un frippon.
.
Le Cantinier n'articule ce chef d'accufatton que fur le
rapport d'autrui, &. le rapport d'un aiTo~~é i~tér~iTé à
l'acC\lfation ' pui(que l'accufateur avoue qu tl n avolt que
la moitié des fonds & des effets, l'autre appartenant à
fa n afJocié qui pouvoit être, intér~iTé à faire accroire au
Cantinier que fa femme av Olt vole les fonds.
) Tout malade que j'étais, je me fis porter chez M .... P'g. '5 .
» pour qu'il me rendit jullice; mais il fit I.e f~urd . à ma
1) priere, pour colorer non feulement une VIe hcentieufe,
») mais encon pour favorifer ma femme & M,. le Comte
» à me T@d,e rl~ que viétime : ce qui' eft odieux &
1'> fouverai nement ifljufte.
Si la femme eût été accufée juridiquement par fo n-
�l'.g. Il &: 1 &
du Libelk.
1) !. ;:
mari, ellé.. auroït u lui dire ,: votre allégatiorl ne Càurcit
me .convaincre. _ Prouvez que j'ai _enlevé cette Comme,
Prouvez que vous me l'aviez confiée. Prouvez même que
vous l'av iez. Mais cet homme pou voit av'Oir la certitude
intérieure du délit, quoiqu'il fût dans l'impoffibilité d'en
cOJlvaj nçre 1iI femme. Ail1Î1 ce genre de défenCe ne me
conv ient point à m oi qui veux montrer qu'il n'avoit pas
m ême cOil t.re moi fa propre conviUion. J'ai fait, à ce
qu'il afft.!re , ~xp,ll!ùr fa l ;m ·ne avec les 4000 lil,. Il ne
l'g .p a~ vu ; il ne cite aucu n témoin. Je reviens donc ~
ce m ot profondé nen t vrai , l'accufateur même n'ell: pas été
tém in CO{ltre m oi , & , il ne s'appuye d'aucun témoigl1Jge.
.Te pa{fe quelques d-êtails dans refquels je ne fuis impliqué que par mes émiffaires ou par les perfonnes que
j'av ois inlu-poJees &- mi/es en garde , moi qui détenu au
Château· d'If envoyois des Courrief,s . e:,x traordin aires par
mer, & pré paro i;; du fond . de ma prifou des coups· tragifjuu à deux lieues de GrajJe dont j'étois ,éloigné de pl us
de trente lieues.
1
Et je demande : d'où le Cantinier fait-il que ces per[onnes qui devoient porter le coup tragique qui n'a pas
porté , étoient mes émiffaires ? Voilà encore que l'accufateur n'a pas été lui - même témoin: T.rès ~ certainement il
n'a pas été témoin du COl.lp tragique q.ui n"a' pas été parti ;
& fi c'e(l. ·l'HuiŒer qui henreufement trompa la raille dIs
imiffaires, qu'on .nous préfente pour' tém'Oin , nous ferons
fond és à crojre que pour fe faire valoir il a fuppofé des
pé rils q~'il · n) pas . co urus, & que le. Cantinier a été
trompé, par, les :rélations de l'HuiŒer.
J ufqu'jl préfent l\accufation . de l'efcrcquerie des quatro
mille francs eft bien loin de moi; elle n'ell tombée que
fu r la femme que Cf; Cantinier croyoit coupable.
1
» Quelques jours après, dit-il, j'a ppris que ma femme
)"t s'étoit (efugiée à Graire chez M . . ••. " La femme elt
...
. .
".
.
faille
.
.
• D
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B.
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t
làifie à Gram~.;.; es perquifitlons lont raites....
n TT:
trouva malhtureufemem pas le fol, dit le Cantinier, malt
foultment qltelfjue Pf;U d 'tffets q~e l'on Jaifit.
Etoit-ce une ralfon de crOIre que la Comme fllt reftée
·e ntre mes mains ? Le Cantinier était d'abord perfuadé
que fa femme l'avoit emportée. Sa prcm.iere ~pinion a
été fauffe. Qui lui a garanti que celle qU'Il a bien voulu
fe former enfoite fur moi cft plus vraie ? Il n'a donc
,
T
•
l'
pas contre moi fa conviétion perfonnelle. .ramars accu'
fateur lui-même n'eft témoin.
Mais voici le grand fondement de l'accufatron en efcroquerIe.
,
1& St
» Il ell: vrai que quant à la Comme de 4000 hyres duPal':.
Libelle.
» qu'elle m'a ufurpée, il n'étoit pas poffible de I~ fallir,
» puifque l'opinion unanime die. tous les Invahdes du
" Château-d'If eft qu'elle la laiffa entre les mains de M.
J) le Comte votre époux; ce qui ell très-vraifemblable,
J) fur-tout étant dans la crainte que je ne la Hs arrêter
J) dans la route. Ce- qui fait préfumer que M. le Comte
n ell: le dépofita-ire de cette fomme, ce font les dépen)) fes extraordinaires qu'il a faites 8{ qu'il fait journelle.
J) ment de tal:ltes les façons.
Je fuppofe que le Cantinier érait c?~vainc? CJ.l.Ie fa
femme lui détenoit la fomme de 4000 hv. N ell:-II pas
évident qu'il ne fait rien fur moi ? Il trouve de la vraifemblance, il a des préfomptions ; mais il ne trouve
cette vraifemblance , il n'a ces préfomptions que fur les
rapports d'autrui: & fi cet homme qui eft m~n a.ccufateur pouvoit être témoin, c'eft encore ub ~OInt 1I1<::ontell:able que fur le- chef principal de raccufatlon, fa dépoution ne feroit pas charge contre- mdi.
Veut-on fuppofer qu'il ait fait entendre dans une p~o·
cédure tous les Invalides & une foule d'autres témOlllS
'lui auront dépofé que leur opinion unanime ell: que fa
çQ
~me laiffa· la Comme entre mes mains ? Ils n'ont pas.
~,.
V
.{
..
I~
�1)4vu dépofer cette fomme: ils ignorent fi eH.e avoit été confiée
à la fel!Jme, & même u le Cantinier avoit en fon pou,VQir unç
telle fomme. Sur quoi donc .dl: fondée cette opin.,ion Una.
nime? Sur ce que cela eft vraife)I1blable, La fimme flanc dans
la eraillle que [on mari ne la j ü ~rrêter dans la rOiJte, 8\
,
moi foifant des dépenfis eXI1;aord.i.n.azns de toutes les façons.
Crainte de la femme d'êtrt arr 'tée fitr la route: 1;h ! n'étoit-
fag . 17
Llo::i c.
il PflS auffi poffible, n'étoit-il pas aum vraifemblable
qu'elle eût choiu tOtit · autre dépoutaire que moi?
Dépmfes extraorJinaires que j'ai faites, & que je fais journellement de {OUtIiS les façons. Cela eft bien vague & bien
relatif. Des Invalides, aux yeux de qui la moinqre fomme
dl: un tréfor ,-étaient-ils a{fez juftes app-réciateyrs de l'extraordinaire de mes dépenfes, pou_r juger (ainement qu 'eUes
excédoient mes moyens & mes re{fources qu'ils ne COIlnoiffoient pas, pour être fondés à préfumer que je ne
pouvois y fubvenir qu'avec les 4000 liv. du Cantinier 1
De telles dépoutions , u elles exiltoient, m'imprimeroientelles la tache la plus légere? Le Cantinier qui ne COI]noi{foic mes dépenfes au Château-d'If que (ur dçs ouj.
dire, elÎt-il dépofé ce q~'il a écrit; le Cantinier accufateur fùt-Îl témoin, pourroit-il efpérer de faire naître pa.r
un~ telle dépoGtion le moindre foupçon ?
Autres chefs d'accufatÏons acce{foires.
çu
» Mais ce qui m'ou~rage, c'eft que ma femme con';
» duire chez moi deux jours apres , eUe eut encore la
» témérité d'aller voir M. le Comte votre époux au
» Château-d'If, qui, par de nouveaux confeils qu'il lui
» donna à mon préjudice, elle a trouvé 190n de décam.
» per encore pour fe rendre derechef chez M ..•• ou foit
» chez M ...• où elle fe trouve.
Le Cantinier ne nous a pas vus enfemble, il n'a pas
entendu ces conJeils. Il ne cite aucun témoin. Sa femme eft
venue me voir au Château-d'If. D'abord il n'eft pas bien
(;lair_ qu'elle !l'eût rien à f~ire, St perfonne al!~r~ qu~
.
~
15)
moi à- voir dans un Fort où elle avoit demeuré Tong.;
temp~. Enfuite elle a quitté de nouveau fon Jnari. Donc
je le lui ai - confeillé. Cela n'efl: rien moins que conféquent. ElIe avoit fui fon mari: Elle efl: ramenée de force.
On n'ilnaginera pas que l'accueil du Cantinier ait été
fort gracieux, fur---rout s'il la croyolt coupable du vol.
Elle fuit encore. II n'eft· nullement befoin de fuppofer une
force majeure qui la détermine il cette fecon.:le évafion.
C'efl: un dénouement naturel qu'on n'a pas befoin de folire
defcendre des nues.
Mais après tout, de ces prétendus confeils, des proteRions même que je lui . aurais prowrées dans fa.foiu , à
l'efcroquerie des 4000 liv. , il ya loin très-certainement:
auffi loin que d'une défenfe honnête &. légitime à celle
où l'on s'eft }Jermis d'employer l'abfurde &. infame lettre
du Cantinier.
» Ce qu'il y a de plus étonnant &. de remarquable
» encore c'efl: qu'ayant été au Château-d'If pour pren,
'
» dre le .refl:e
de mes effets, M . votre epoux,
comme un
» furieux ne m'eut pas plutôt apperçu, qu.'il venoit fe
» faiGr d: ma perfonne pour me facrifier il. [a colere ,
» que je n'ai en aUCW1e façon encourue, &. Je fus a{fez
» heureux pour que des perfonnes, ou foit les Invalides,
» le retinrent.
'Si le Cantinier, accufateur, pouvoit être témoin, fa
dépoGtion [ur cette violence, ~uoiqu'!1 en eût êté l'objet, feroit un peu fufpette; ~ar II ne f~lt pas tro~ défigner
en préfence de qui il fouffnt cette vlOlence. Ge fureTll,
dit-il, des perfonlles, ou fait les , !nvalzdes, 'Ill! ~Ile reuwem.
Mais qualld même cette explofion d une June çolere
feroit prouvée , paroîtroit-elle élOnnallle & n mar'lua6Ie?
Le Cant~/lie,. n'avait, dit-il encolJ.TU ma ao/ere w aucune facon. Certes il elt difficile en motifs; &. l'imput1ltion de
i'infame efcroquerie qu'il avoit portée au Commandant !•• - 1
& ' }a "ifite des a{foçiés! •.... que font-elleSVd.~venues ~
IJ
•
�'r )6
1'.~.
' 7 du
Libd l..
Une co.rreéHon même peCante aurait certainement été uri
aae de J uftice. Il n'eft point d'homme d'honneur, il
n'eft point de Tribunal qui n'eût jugé que le Cantinier
avoit reçu des coups de bâton néceffaires.
» Je paffe fous fiIence les menaces violentes qu'il me
» fit, & les confeils qu'il infpira aux Patrons qui m'y
» avoient conduits, qui tendoient à m'enfevelir dans les
» entrailles de la mer, en me retournant à Marfeille ,
H pour raifon de quoi il leur offrit dix louis.
L'homme aux 4000 liv. n'a été témoin ni des confeils
ni de l'offre; & vraiffemblablement il ne peut en avoir
aucuns témoins, puifqu'il paffi fous ft!ence ce chef d'accu.
fation. On ne fuppofera pas fans doute que j'aurois été
convaincu en J uftice d'un chef d'accufation , que l'accufateur n'auroit articulé qu'en déclarant qu'il le paffoit fous
filence.
Sllr aucun des griefs de cette odieufe lettre, fi le Can~
tinier qui eft mon accufateur pouvoit être témoin, (il
dépofition ne pourroit donc faire charge contre moi. Il
n'allégue fa propre connoiffance fur aucun fait, fi ce n'cfl:
fur l'accueil qu'il reçut de moi au Château·d'If, accueil
bien mérité s'il étoit vrai.
Dans cette procédure, que je fuppofe exiftante, le
Cantinier, fes affociés, tous les Invalides, tous les habi.
tans du . Château·d'If auroient été entendus contrè moi:
En un mot la lettre du Cantinier même feroit une procédure réguliere, qu'il n'en réfulteroit pas une charge de
plus que toutes les abfurdités qu'on vient de lire. Le Cano.
tinier, le feul homme qui pui([e être certain qu'on lui a
efcroqué une fomme de 4000 Iiv. > eft mon accufateur:
fon aCUlfation ne peut Cervir de tém.oignage. Il n'en exifte pas
un feul, proprement dit, dans la procédure fuppofée qui re~.
pofe toute entiere fur des foupçons &. des oui dire. L'opi~:
mon unanime des Invalides n'eft fondée que fur les dépenfes
extraordinaires qu'ils at.teftent m'avoir Vu faire; ET SUl\1
...
.
,.
...
:tS1
'
M ",
CETTE OPINION IL FAUT REGARDER COM E
PROUVÉ, J'. QUE LE CANTINIER AVOIT UNE
SOMME DE QUAtRE MILLE LIVRES. 2.'. QU'IL
L'AVOIT CONFIt E A SA FEMME. 3°. QUE CETTE
j'EMME ME L'AVOIT REMISE EN DÉpbT. 4".
QUE J'AI ESCROQUÉ CETTE SOMME. . .
Eh quoi! par cette procédure même ne ferols-le. dODC
pas juftifié bien loin d'être inculpé? ... S'il étoit un TrIbunal
·aL! monde qui, fur la lettre transformée en procédure, ne
déclarât pas l'accufation évidemment calo~nieuf~ , la te.rre
-infortunée que régiroit ce Tribunal, (erolt mOlllS hablt~..
hIe pour des hommes civilifés, que les repaires des antropophages auxquels du moins on peut fair~ la guerre, &:
chez qui l'homme dont l'honneur el! l'exlftence morale J
ne rifqueroit que fa vie.
La lettre vient d'être difcutée comme procédure, St
c'·eft lui avoir. fait beaucoup trop d'honneur. Je le répete :
» Quelque avides que foient l~s h?mm~s de bru.its inju~
., rieux, quelque penchant qu ils aIent a le~ ~rolre, u~e
» anecdote que l'on fait avoir une telle ~rlgllle, aUr?It)) elle trouvé la moindre créance parmI les honnete5
» gens, fi l'on n'avoit pas eu .le f~cret de cha.nger mon
» procès en une affaire de part! > ou la préventIOn accréJ) dit-e les abfurdités les plus révoltantes.
Je n'attefte pas l'opinion publique> je crois que je n'en
ai pas befoin. Le vrai public, ce qu'on peut appeller le
-public, eft toujours jufte ; &. je ~e penfe pas qu'après
avoir montré que dans les fuppofiuons les plus fortes &.
les plus gratuites, je devrois être ju~ifié '. lavé, vengé
devant tous les Juges de la terre: le pUlffe êt;e .c~n ..
damné au Tribunal du public. Ce n en donc pas 1 OpIniOn
publique que j'invoque, c'eft la malignité des cercles que
je défie de croire à une calomnie dont la fource eft ainfi
connue. L'homme des cercles s'il eft impartial, peut être
malin; maii il n'eft pai de mauvaife foi. ~'jl croit ayi~
-
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15 8
dement la calomnie, s'il la crOlt fans preuves; que le
calomniateur fe garde bien de lui ell offrir: alors l'homme
même le plus léger, ne croit ,p lus; il juge, ne fût-ce qu~
par un fentiment d'amour propre qui doit être plus fort
que la ~alignité, & qui ne lUI permet (las d'admettre"
des pr'euves dont il peut apPEécit;r la fauffeté. La calomnie parvient à éLever [a tête jufqu'au Ciel, & à couvrir
la terre de fes rameau~ , emp'oifonnés, parce que fes. radnes vont fe cacher jufqu'aux enfers. Les racines découvertes, l'arbre tombe.,
Je le répete : c'eft la malignité d'es cercles que je défie
fur la lettre du Cantinier, fur fon accufation intéreffée,
fu.r le rapport 'intéreffé de fan aifocié, fur la préfomption
des Invalides qui n'a de fondement que dans mes prétendues dép enfes 'ex traordinaires à leurs yeux, fur l'aveu.,
que fait le Cantinier lui-même du jugement prononcé par
le' Commandant du Fort contre fon accufation ; fur tous
ces apperçus, je défie la malignité des cercles de me ,
crpire coupable de l'infame efcroquerie dont le û nrinier
m'a. aécufé [ans avoir aucune certitude, aucune probabilité même que je l'euffe commift:.
Et Madame de Mirélbeau au~oit pu croire à cette calomnie abfurde autant qu 'attroce! EUe n'y a pas cru ~
Un de [es partÎfans, après avoir lû cette phrafe de la ,
lettre du Cantinier: & nul doute qu'indignée des démarches
de M. le Comte, v OIre époux, & de ma f emme.",. vous vou-, dre{ concourir cl faire punir / une conduite auffi , blâmable
qu' horrible J & cl me f aire renlrer une .fàmme de 4000 liv.
qui fo rmoit tout mon patrimoine; un d~s partifans de Madame de Mirabeau, fans doute auffi bon logicien qu'hon·
nête homme, à la vue de cette phrafe, courut au. bas de
la Jettre pOUT y chercher la quittance des 4000 livres;
& comme il ne la trouva point, il en conclut que Madame de Mirabeau n'avoit pas cru un mot de la conduite auffi blâmable 'l.u'llOrrible~, Et en effet, fl Madame
'"
p. '
,
'~
'
ld ' '''~
de Mrrabeàu eÔt cril l'accufatiotl &. cralnt une proc~ ur",
elle fe [eroit apparemment empreffée de fauver Jlhonneul',
je ne dis pas de fon mari, je di: du. pere de ~ôt\ fils
qui vivait alors; & quand elle n aurolt pa~ cramt une
procédure, fi elle eût cru à l'accufation, elle aurait payé
le malheureux Cantinier autant par juftice que 'p our l'honu'eur du pete de fan filsl Car 'le dépofitaire infidele, le
débiteur de mauvaife foi~ qui ont le déteftable avantage
de pouvoir nier en Juftice le dépôt & la dette?, n'en fo~t
pas moins déshonnorés & infames dans l,a focleté, qUOIqu'ils n'aient pas été convaincus en Jufbce ; ~ nous ~n
connoiffons tous des exemples. Madame de Mltabeau na
-donc pas cru à la plainte, puifqu~ la quittance n'eft pas
au bas de fa lettre.
Et pouvait - elle y cr6ire ? Cette lettre n'étoit affuré..:
ment pas du fiyle d'un Cantinier. Jamais on ne fut to~t
à la fois fi i15norant &, fi emphatique; ft ridicule & fi 11·
!itéré. Cette tettre avoit.ét~ évidemment diétée; ellé pou"
voit donc avoir été fuggérée. Il y avoit des, perfonnes
iméreffées à tromper ce Cantinier; fan affocié, la f~mme
de fan affocié; Je Cantinier lui-même après tout n'a\;oitil donc aucun intérêt à porter une plainte fauffe ? La
lettre ne pouvait avoir aucune 'Confiflance:, puifqu'à l~
moindre réflexion on n'apperçoit d'au.tre fondement- a
l'accufation que l'opinion des Invalides fur mes dépen(es;
opinion rapportée par l'accufateur & par lui feul. Il s'agiffoit pour Madame de Mirabeau de l'honneur de fon
mari, du pere de fon fils, de l'honneur de fan fils, de
l'honneur du nom qu'elle' portoit. Et elle auroit crù fi
légérement à une plainte dont la moindre attention dev-oiJoit l'abIurdité! Cette circonftance- que le Commandant
du Château-d'If avoit jugé que la plairttë étoit fauffe;
, cette ciraonftance décifive rapportée dans la lettre, lui
auroit éohappé ! Comment Madame de Mirabeau époufé
& mere, Ilorfqu'il s'agiffoit ,de l'honneur de fon mari_
1
~
-
�160
GtI p~re de {on ~s, de l'honneur de
fils,
même, comment auroit-elle pu trouver une conviétion
~Ù la Jullice n'auroit pas même vu mariere à 'foupçon,
ni la malignité un fonaement ? Madame de Mirabeau n'a
pas cru à la plainte; & elle a publié la lettre.... ! Et
pourquoi l'auroit-elle publiée quand même cette lettre
auroit obtenu quelque créance {ur {on efprit. ? Je ' ne fuis
ni jugé ni condamné par cette lettre qui par conféquent
dans {es principes même & {es perfides {uppofitions ne
{auroit lui donner un moyen de féparation. Madame de
Mirabeall publie une calomnie évidente ! Elle qui aurait
dû taire mon déshonneur même, Îl elle en eût fait la
fatale déc.ouverte; puifque tout ce qui pOlwoit réfultep
pour elle de la divulgation de cette lettre, étoit de déshonorer le nom- qu'elle porte ! Madame de Mirabeau
n'a pas cru à. la plainte ~ j'en attelle jufqu'au {entiment
qui lui a fait divulguer ceJte lettre inutile autant qu'odieuCe; car l'animoÎlté fait toujours préfumer la mauvai(e
ron
du lien
foi.
La Jullie: n!auroit pu que m'abfoudre fUI la procédure qUI aurolt contenu les preuves énoncées par la lettre.
La malignité n'oferoit me condaml~er. Et je n'ai encore
tiré ma jullification que de l'accllfation même •.
J'di confervé jufqu'à ce moment le coup de matfue;
&. je le porte.
1';1} t t cIu
Lu plaintes dénoncùs à la Jâm.ille étoient, felon: le Li.ibclJ••
bellilfe, hien faites pour refroidir le zele de Madam.e tk
Miraheau qui "voit été ftf1lent jufqu'à cette époque. Or voioi
ce que · Madame. de Mirabeau m'écrivoit le 15 décembre
,J774 au · fujet de cette Cantiniere refroidifJante.
» Il (le Chevalier de Mirabeau mon frel'e)- m'a don~
) né. ~e tes nouvelles· dans le plus grand détail, fa'ns
» oublIer une Gertaine Cantiniere dOflt il m'a beaucoup
) parlé, & qui ne laiffe pas que de t'ocouper. à ce
~ 'lU:il pI:étend;. allons, Mo, à v.gtre plu$ graooe cQ.m~
Il modit~
»)
.IlSI
modit~ comme dit v<!>tre oncl~; il eft bien fait de
» chercher à -fe defennuyer. Plaifal1terie à part, mon bon
» ami; il m'a dit du bien de ta fallté dont j'étais très» réellement en peine.
Je n'ai pas donné ce patfage, dans ce que j'ai imprimé
'd e cette lettre, pag. 2Z de' q1es premieres Ohfervations',
lX je Ile l'aurois pas qonné, tant j'~tais éloigné de croire
qu'ulle plaiJa nrerie de Madame de '1irabeau pût dégénérer
en urie accuültio-n atroce. Mais voici ce oue Madame de
Mirabeau m'écrivoit le 21 février 1775, c'eft-à-dire,
préci(ément à la reception de la lettre du Cantinier, &
ce fragment a déja été imprimé. AillÎl Madame de Mi~
rabeau devoit s'en rappeller les détail~.
. » Je fuis au défefpoir, mon ami, votre pere a reçu
» Dimanche une lettre de Marfeille très-volumineufe;
) comme il n'y étoit pas quand on l'apporta, lX que
) je vis le timbre, j'efpérai que ce feroit de M. d'Al» legre , lX que je faurois par là de vos nouvelles;
» maIs perfonne ne m'a rien dit.
Ce VOLUMINEUX PAQUET était le paquet Mouret.
Et comment Madame de Mirabeau n'eut-elle point alors
cette lettre qu'elle nous communique aujourd'hui? Ou Îl elle
la reçut, pomquoi ne la communiqua-t-ëlle pas? Atfurément cela ell fort ohfcur, & cela l'eft d'autant plus,
que le Cantinier écrivoit le I I février 1775 : or Madame de Mirabeau qu'on prétend avoir été
jufiement
refi-oidie, m'a écrit poftérieurement des lettres auffi tendres que toutes celles qui les avoient précédées. Encore
une fois tout cela eft fort obCcur.
Mais en revanche, ce qui fuit eft très-clair.
Les plaintes du fieur Mouret furent communiquées à
M. d'Allegre par mOIl pere & par le Gouvernement qui
ne croit apparemment pas auffi aifément que le Liberlille à la complicité des Commandans. Et voici ce que
ce digne militaire, COMU depuis cinquante ans dans cette
Ji
X
•
�tl)l
Province pour un des excelleus- hommes - que le hO Il
peuple de Mal'[eillè ait Frodui~ , r écrivit à ce ' fltiet à.
mon pere. J'ai la copie de c<:tte Hlttre de lii main de
1\1. d'Allegre lui·même.
-
.
Lwre de M. li' Allegl'e Il M. 'le Marquis de MirdD-eau, dIJ
.
'9 mai ·tJ J!J.
» Vous trouvereZ ci -joint, M. le Marquis, une lettre
» de M. :rotre fils. Je vois par la précaution que vous
» avez. 'prl[e, q~e vous vous méfiez d'un Chef qui n'a
» eu tien tant a cœur que de concourir à vos vues
» pour vo~s r~ndr~ Url fils tel que ·voùs- te defirez. ' •
»). On m avon .dlt ~ ~. le Marquis, qtl'ùn vil Ca~ti
») mer VOliS aVOIt ecnt des horreurs de M. le Comte
») (j'avais ~e la pei.de à me le perfllader), · màis la let» tre dont 11 me faIt part, & la derniere que 'lOCS me
» fi~e~, i'h~nl1eur de m'~crire; ne le confirment Glue trop_
» SI J aVais pu prévorr qu un infame eût la hard lfffre
») ~'é'crÎ~e ùn libel.le éaromnieux- cOAtre M. votre fils,
» J aurDIS repouffe par les preuves les plus forte~ les
» fa~ffes i~pljtations de cette ame de boue. Pui[que jl!
» fl~IS force cfeutrer dans des détails qui ne [OAt fait~
) n~ pour va IfS, n~ I:?ur moi, j~ p3.ffe par-delfus Ina
» repugnance pour ]ufnfier M. le Comte (de qui la ramé
» a, beaucoup [ouffett de. t-outes ces tracalre,ies). J'aurai
» 1~onneur de VOliS repre[enter, M. le Marquis, que ce
» ml~érable -1\1 . • .• (dont vous avez trop accredité la
» ~1~!Ote) eft uu bUltal, que [a femme avoit quitté trois
» tais pour ne pas expirer fous le b âto n.
» Que ~ette rauvre. (e~me ma.ltraltée journellement
» par fa nvale & [on IOdIgne man, attirait la compai») fion de toute la Place. M. le Comte qui a le cœur
» l~ plus e~ceilent . que je connoitre, s'intéreiIa trop
) V'"tVement a cette Jetl~le femme. J ,
'
.
"
l
d
• ~ » 'Dès que 1~ m app~rçus
3
que
r.
"
•
" 'J"'J'.
"
cl
•
la t·toonnoouance ev~.
» noit trop affeétueu[e St s'enveloP?9it ,du Illy (tere, Je
» 1-'1 fis Iortir de la Pl:ace' ~ aprèS' avoill -ea laI ppécaution
» de faire vifiter [a mâle par, tout' l'tlm- illt1jor, pour
», que [on 11}a:~ ne pû~ pas dire av~ir été volé. Cette
~>~ femine pa-rutJdal1f la .ktltfie :.t'~oIltAlh n.•rk ne :p1us ha» biter avec [on ;a ffa ffin. V oili!, M. le Mè1:quis., .qUl}lle
» a été la conduite de M. le Comte. J'aurai l'honneur
i) '~de OÙS obfer:Vér lqU~ r.tg' ~ ·Vlngl.<linq g,fJs~ on [e
~) . charge volontiers de confoler tine jPlie affiigée; fi [on
'" âge j~n aurais fai't: ')au~ant .. D'ayr-ès l'aveu q~le je fais.,.
,.,. je cl'ois qu'uM fo-u-gue cfe leune.ffe ·Ile devoit pas pn:" ver' M, 'le Comte dê l'attt!ftàÜoH'> q~e' j'ai ll 'hongeu-r
)' de vous adreffer.
Quant aux plaintes '& aux prèuves ·dont vous me
.}) parlez dans votre ,demiere lettre, ' M. le Mé;JI"quis aura
)) la bonté d'ob.ferver que -la fi·g nature d'un cQef cft l'a
0» ,[eu le qui feffe ' fui.
1
J,
») ' ·M. votre fils v ous ' pl'6~vera par é1e5 . certifkats de
.») .rE.tat NIaJor & de
[e·i !:aitlaradei' d'infortune, ej"u 'il
.n . emporte avec lui reftime, l'amitié & la confidération
) de toute la Place .. Par l~ s proteftations que M. votre
.» fils m:a faites de n'avoir d'autre ambi~io.n que oelle de
» vous plaire, je fuis pho/fiquement fûr qu'il vous don») nera aoram de fati6'faéhon il l'avenir qu'il vous a dOIlné)) d'inquiétucl'c;:s.
.
'c
» Quoique la pureté de mes intentions & mon aUa1 chement poui' M. le C{)mte m 'ait attiré bien des déCa-}) gPémens le ,refpeU qu.e · j',ai pour 'Vos moùfs me les
.)) 'faie t-ons oublÎer.
~',; }e, rèiH!n:iIhedt a il. P':~: d~ prife [ur un-e ame hon» JH~te , que Je vous pne cl agreer les alrurances de mOlt
. ) r e[peélueux attaçhement avec lequel j'ai l'honneul' d'être
. p. &c.
.A qui Madame de Mirabeau Eer[uadera-t-elle q~ cette
h
-»
!toUs
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Xij
,
-
�'6"
.
1 4
_~
~
in'Cohoue? Elle n'o/ha
fOlÛerfir drl
rt;ait , pas eu conf1oiiTance de la (uivantc" ql,Ji
Iwtre ~dée que ~e lle ' d'une excellente C()n~
part (1) au Château· d'If.
lrttré lui te na
moins qu'eUe
exclue! routé
duite de ma
'pas
Lettre de M. d'Allegre au MJlt"quis., de Mirabeau fc{u
z4 Mai 1:775.
.i.
»
»
»
»
1
!:
J
~
,
•
» • Toute la PXOVill(!~ fajt, M. le Marquis, que vous
avez fixé l'e1argilfe.lJJent d~ M. te CQmte de Mirabeau,
au rapport qu.e je vous . ferai de (a bonne conduite.
Madame la. MarquiTe de Rochechouart me l'a affuré
pluGeurs _ fo~ ,_ St, M . . de Ga{faud m'a faIt part d'une
..
( 1) Madame de Mirabe.u n'ignoroi t pas les comptes rendus fav orables de M. d'Allegre, pui rq ue le '-7 No.vembre '77+, elle m'écrivoit:
" Mon beau.pere a re~u Mardi dernier unç leure de :M. d'Alleg re,
" mon bon ~mi , qui lui air".ir beaucoup de bien de toi. Il avo;e ce
., jour là a!lèmblée comme tu (ais. Tout à co"p il vint m'embra!lèr
>, al'ec les larmes aux yeu~ > & me montra la lettre, en me donnant
" à deviner prem ieremene de qui on .. ouloie pa der , en dirane tant de
" belles chofes , EnAn, mon cher ami, j'ai été très-comenre de l'effee
" que cerre lettre a produit. Fais enforre que M, d 'Allegre en écrive
. " en core quelq ues unes de (emblables, & nous (erons bientôt contents
. " à ce que j'clpere, " Elle n'ignoroit pas que mon pere croyoie déf~
rel' à ces comptes rendus & adoucir ma détention , lor(qu'il me
fairoi t transférer à Ponta rlier: Elle ne l'ignoroie pas. pui(que le 201-Avril ' 77 selle m'écrivoit : " Comme j'étois hier après (olliciter votre
" pere, eomme à mo n ordinaire, il m'a dit qu'enfin je (erois (atisfaite.
" & qu'en arrendane que la tournure de mes affaires _permierent davan" tage, vous alliez être dans un endroit beaucoup plus convenable
>, que le Chi teau-d'If; & que de plus il n'av oie donné aucun ordre
" CO lltre votre liberté , {j non au Commandant de répondre de vou,s
>, ju(qu'à nou vel ordre, En vain lui ai-je demandé le liell que vous
" allièz habiter, il m'a {eulement répondu que vous (eriez plus l
" portée de moi, & que vous m'en ini'lruirier. vous-même, ayant dé~
" [orlllai s pleine liberté d'écrire,
16'")
'1'
» lettre qu~ vous l,d avez écrite en ~O J1(equeI1C,e:
,»
,
Je vous avouera i, M. le Ma.rqUIS, q~e 1 hon~eur
») que VOLIS m e faite s ~e yOlIS en rapporter a, mo~ dIre,
» & le peu de confiance que vot re (ilence m a fa It pre(» (entir, (ont un problême que le plus grand calculateut
» ne yiendroit pa s il bout de , ré(oudre.
» Sans me donner les airs de vouloir analy(er vo,
». motifs que je rc(peéte infiniment; il me (uffira de vo~s
») faire part de ma profeffion de foi ~ pui(qu'elle d o~ t
» brifer les fers de M. le Co mte de Mirabeau. Je (U1S
» très-perfuadé que cette piece produira tout (on effet
» (ur le cœur de l'aini des hommes, qui a donné de li
» excellentes leçons d'humanité. La grace que je (olliCite
» ell: en faveur d'un fils qui, par (a ré{ignation à votre
») volonté, mérite tout le retour de tendreife d'un pere
») re(peétable que toute l'Europ e révére.
)) PuFque cetté lettre 'doit faire- ép'o que, recevez, M ..
)} le M ,u'quls, l'atteftation la plus authentique, que de~
» puis (ix mois que M, le Comte de ~ir~beau e,ll: ~éten~
)J au
Château·d 'If par ordre du ROI, Il ne m a Jamais
») donné le moindre (ujet de plainte, qu'il s'ell: toujours
n parfaitement bien conduit, & qu'il a (oute~u avec
» toute la modération poffible, toutes les altercatIOns que
» je lui ai quelquefois (u(citées po~r ép~ouyer (a fougu~)
» Que (ur (a parole d'honneur, Je lIu al donné la lL» berté de la Place, dont il n'a jamais abufé, Je me flatte
») que M. le Comte aura bientôt la (atisfaétion de voir
» réali(er (es efpérances; & que s'il (e pré(entoit des
» o~ca{ions où ' le zele & la fermeté ,drun vrai Militaire
» pull'ent vous être agréables, vous n'héGteriez pas de
» m'employer. C'ell: dans cette croyance que j'ai l'hont) neur '&c.
J'ai la permiffion de M. d'Allegre d'imprimér toutes (es
lettres, (qui certainement av oient paffé (ous les yeux de
Madame de Mirabeau, ainli que les propres lettres de
�,166
cene-ci l~atte{fent) &. voici ce que M. d'Allegre a enào1'e
T'OUlu .m'écrire à ce fujet.
A Mar{eille le 18 Avril. J7 8 j.
_» Je n'aurois jamais imaginé, M. le Comte, q:u~apres.
» avoir repouffé dans [011. temps, aupres de. [eu, M. le
MarqUIs ,d e -Hoche.chDllIart ,. CrunmandaJ\!t en P!1ov.ern:e,
'1
) &. de M. 11: Marqwis de Mirabeaû votœ ~i?ene, la plgilllie
)) infanie &. calomnieu{e du nommé Mouret, Cantinier au
" ChâtealI·d>If, il me fallût affirmer en~ore la fauifeté
>'1 de .res ilnylltatioDS..
_
» La vérit-é eft ,une: ce que j7ai Iffit dans ' un temps,
n ' je ' le ;répéterai toujours_ VOlTS l,pouvez pllo~uire les
,) lettres que j'ai 'écritos à M. le }'1ar:quis de MIrabeau,
:); relatives à cet objet, fi VaLlS en avez befûln pour votue
» jl\ftification.
Il li Y a pres de dix ans, M. le Comte, de toutes
») ces 'tracafferies. Les détails Ce (ont effaâs de ma 1lJ~
~ moire. Mais ce que je n'(!)ublierai jamais, & que j'affir.:;» milTa1 toujours en faveur de la vérité , c'cft que quand
}) la Cantînieré Mouret fortlt du CMteau-d'If, j'eus la
II précaution de faire viGter fa , malJe en préfence des
~>- -Officiers de la Garoifon &. des Se~gens : :qu'()11 n'y
.» "trouva que des effets de femme &. pifs un-(où tHargent
-») comptant. lJaffirme &. attefre Ide plus ., que red. MOUret
'» après avoir quitté la fellme du <;;l:! ilteau.a'f~ St avoir
» repris fa femme, eft venu chez moi fe pla.indre que
,~ la Blain., fon affociée, lui aVQft enlé-vé .toute [on
» argenteûe, fes meubles &- f~tl 'a~gegt ootnPT&IH., etal1t
~) la ,Mpol1taire des·JfoQd&~·.& l'aV'Gi~ eNfla ladfé à lu
-») chemire. _ _
, •_
,
» Cette plainte démontre clairement que fa feftlme nl!
li potl.voit pas lui 'avoir enfevé 4000 li\<. · puifque c'éro!t
» la ~Iain -qui avoit les, f{)ll~s de .la foci èré . ,
._
lt 'Je fouhaite que, ces v.éIlÜes aient .~ .f~c&~ lIq.u{' Je-
16 1
.
deGre. Ce que je delirerois plus ardem?1ent encore, (e» rait votre réunion avec M. le Mürquls de Marignane
t) que je refpeéte infiniment . . , . . .
J'ai l'honneur d'être, &.c.
Avez - VOliS bien compris ces mots, LA P.LAINTE
lNF AME ET CALOMNIEUSE DU NOMME MOU-,
REl"; &. ceux-ci: apres avoir 'luètté la Ferme dll Château"1
JI/f & 'avoir repris fa fimme, il efl VENU CHEZ MÇ>~
SE PLAINDRE QUE LA BLAIN SON ASSOCIEE
LUI A VOIT ENLEVÉ TOUTE SON ARGENTERIE f
SES MEUBLES ET SON ARGENT COMPT ANT ~
ÉTANT l.A DÉPOSITAIRE DES FONbS, ET LIAVOIT :ENFIN LAISSÉ A LA CHEMISE.
- Quand M. d'Allegre m'écrivait ainu, il ~e fe d?utoit
guere ~ue . Moure~, il'ldigI~é de ce ~u'on m'Imput?lt [o~
erreur a cnme, m envoyait de fan coté la lettre fUlvante.
)1
Leure de F. Mouret au Comte de Miraaeoau.
» A Marfeille le
2Z
Avril 1783;
)) M. le Comte,
))
H
))
II
))
)
j)
»
))
))
»
» Je viens d'apprendre que Madame votre ~pot.l[e vient
de rendre publique une lettre que je lui ai écrite eIl
Février 1775, par laquelle je me plaignais de vous
pa.r le confeil que mon affociée m'avait dit que v~us
donniez à ma femme, de même que les quatre mll!«
livrès & effets qu'elle m'av~it dit que VOliS lui avie<l
confeillé de me prendre. Je n'ai reCOllnu que trop
tard la fauIfeté de tout ce que j'ai Ccrit à Mad ame
votre épou[e. Il eft vrai que dans ce tem p~ j'étois
bien malade, & que mon affociée, conjoimem ent av ec
un Clerc de Procureur me f:aifo ieut ligner to ut ce qu'ib
vOllloient, pllifque la lettre qu e j'ai écri te à i\b da me
-
�168
Ji votre époùfe a été compofée &. écrite par - ce Clerc
~) dé.. ProlO uFeur, qui cherchoit conjointement avec mon
)J affociée à
me réduire à la mendicité, comme il y
» avoit bien réum, puifque j'ai été obligé de f'Crvir de
" Cuifinier chez M. de Mons à Aile, pendant tme année.
1)' Heureufement que par mon travail &. Pamduité de mal) femme auprès de moi, potlr mes affaires, je fuis par» venu à gagner quelque cho[e. La vérité eft donc, M.
) le Comte, que je n'ai trou\fé à ma femme qu'une
) malle contenant [es hardes, &. que les 4000 liv. dont
) je me plaignois qu'eUe m'avoit prifes, de même que
fT mes éffets, m'avoit été au contraire pris par mOIl <ll> fo ciée, puifque j'en ai fait dans fon temps la ré cl a» mation en J uftice cMtre mon affociée . Si vous avez
» befoin de preuve plus authentique de tout ce que je
D vous av ance,. je fuis prêt à le faire pour rendre juf~
» tice à la vérité.
») J'ai l'honneur d'être, &.c.
' 6
• .
".' !t 9 d • 'H'.
li Mouret
. lOUl'
.
~eolt <le Madame (le lYurabeau e s allUrer 1
riendroit Ca délation avant que de rendre publique cette
odieu[e lettre, eût-elle été auffi néceffaire à la caufe qu'elle
y eft inutile.
Quoi qu'il en foit, voilà l'épifode de la Cantiniere
'êc1airci. Une fimple allégation avoit petfuadé cette infamie.Que de preuves il me faut accumuler pour la détruire! L'homme [era-t-jJ ,donc toujours le premier enneIN
de l'homme .. . . ? Je ne me permettrai d'ajouter qu'une
réflexion bien fimple : Il n'eft pas [orti, je ne dis pas de
la main d'une -épouCe, je .dis de la mai.n de l'ennemi. le
.rlus ~o rc é né, ~Ile ,ca!omnie Vl~s év!dellte.' ni plus ~ ~ro ce
qué celle que Je v iens de dévoiler; &. qUI a calomnH: ti lle
fois, peut &. doit calomniér cent fois.
A des inventions fi horribles, fi abCurdes , à des aile garions dénuées de toute vraiffemblance, j'ai répondu par
des preuves légales. Et J'on m'inCulte encore! Et l'Pli (,u p,
pofe- a~quis tou ~ les" faits qu'on .~ Olé imprimFr, ~ Et 1'00patle au nom de Madame de MIEal:reau ~de Co.n. l:lOnn~ lIr j
de [a délicatèiI'e; de. Ces dtoits'; ' de; mes devoirs! 1 Je fais
tout' èéla; .mes amis, mes parens le Cavent, &. tous me
di[en~, modiration ,parÎmce ! . . . . La MODÉRATION ;
bui, je ' me lâ dois; &. la PATIENCE eft:la loi de. la néùnÜë; car les ch{)[ès ne _s'aff~rit point de no~ empor.
tem~n~. M ~i~ ne jugez ~o,nc plus fi légéJ:ement les- hommes, vous tous chez ' qui le pluS'-leger grai~l de calom nie
germe &. produit une légion de .phantômes, tandis que l'ac'Cumlllation des preuves &. la démonftra-tion des abfurdites
balancent à peine un conte .injurieux &. flétrilfant. ]Ne jugez plus fi légérement les hommes, &. demandez' à . '10tre con[cience lequel d'entre vous [auroit [e contenir il la
'vue de tant d'horreurs, qu'ofé fixer d'un œil calme, &.
.débattre d'un ton modéré celui dont vous avez tant proclamé la fo.ugue &. la yiolence.
/
,
Dira - t- on que Madame ·de. M<irabeau ne connoifToit
pas cette lettre? Sans doute eUe ne la connQiffoÎt pas.
Mais n'av oit-elle pas depuis affez IDng-temps, mille autres m oyens de réduire à l'ab(urde l'accu(ation du CantinIer : &. quand il [eroit (lomble qu'après. les lettres de
M. d'Allegre &. la combinaifon fi facile de toutes les
circ on fiances qui me juftifioient, il eût refié quelque
doute [ur une affaire antérieure de dix années, un mari,
un citoy en, un homme, ne valoit-il donc pas la peine
qu'on éclairdt une accuf<ttion fi infame avant de la rev eiller contre lui ? Le Cantinier Mouret eft aujourd'hui
Aubergifie de St. Jacques à Marfeille. Madame de Mirabeau l'ignorait fi peu qu'un de [es partifans ne celfe de
llarceler le pauvre Mouret pour l'effrayer [ur les fuites
p.e [a rétraétation. Il [emhle qU.e la prudence [eule ex~gemt
y
•
-
.r
,
�,
,."
.
"1-70
ti..) tette 'tiolen~ ex .
gt!rée ,; .rJIave1l!ie;ùlénaaiJée. çomm~ tous- les déÔlqfS &1:;
DiJF,matioDI. -
Telles
qti'alenLét~ cette .fougue
<lfres. .fle ma: v.iel, ~e ne. diffamai, ni calo;r.n.niai- jamais Ma
damt' de Mirabeau ,\ même au temps de [es procédés le;
}llu révOiltams.; ' &. fi quelquiù~ fut' 1er terlie J.e f.ait, a1fu~
rémen .c'.t!ft elle. Je t~ouve cependant dans: 1 Libelle "
l'ag. lJ du» En' r.776 ,111 parudous 1è nWIt ide ,1\1: I.e O~mlte ~e Mi:
L,belle.
,) tabeau. un Mémoire imprimé" dirigé' contre ,M. de Mi~) rabeau pere, au fujet de l '.interdiélion de biens que' ce.
» lui-ci avoit fait prononcer contre fon fils. Dans ce Mé» moire la Dame de Mirabeau eft outragée d'une maniere
)-) affreufe.
Et ailleurs:» Madame de Mirabeau eft affreufement
Pag.83' » calomniée &. diffamée da AS des Mémoires publics lit
» dans des lettres écrites à des hommes en place.
Pag. u
J'avois dit dans mon Plaidoyer: » Quant aux lettres
» quelconques que j'ai pu écrire aux gens en place lit qu'on
» atteHe, je n'en dois aucun compte, foit parce que des
)) lettres miffives font fous la garde de la foi publique;
t> foit parce que des plaintes même, mai,. dépofées dans
» le fein des Minill:res du Roi, ne fauroient pairer pour
» des diffamations.
Le Libellifte paroît méprifer beaucoup cette profeffion
de foi. Il faut y joindre quelques r~flexions qui la jull:i~
fieront peut-être.
Dans aucun cas ces lettres, diffamatoires feIon Madame
de Mirabeau, ces lettres adreirées au Minill:re, ne pourroient paffer pour des outrages capables d'opérer la fépara tien (1). L' A.rrêc r~cent ~ célebre rendu contre la Comr.
teffe de Montb"iffier y eft formel.
Î7 1
.
De plus, des lettres ne fauraient paR'er pour des dlfi'a'Jnations~ à moins ~'ell~ , ne deviennt:nt publiques par le
fait de celui qui les a écrites (1). Or, il n'eft pas prouvé
que je les aie écrites; &. non feulemént il ne l'ell: pa~ que
je les aie publiées; mais Madame de Mirabeau indique,
c1'après fon beau-pere, l'auteur de la publication, i& ce
n'ell: pas moi.
_
Mille fuppoÎttil'lns trÈ!S-naturelles peuvent expliq~er un~
publication de lettres à l'infu de celui qui les a écrItes. SI
j'avais réellement écrit au Minill:re, s'il avait en"oyé mes
lettres à une perfonne de ma famille, &. que cette perfan ne en eût ab\Jfé pour les divulguer, je ne ferais pas le
diffamateur.
Si j'avais à me jull:ifier de les avoir écrites, je pourrois
porter plus loin les fuppoÎltions. Je veux qu'elles exill:ent
ces lettres &. qu'elles [oient de moi, qu'en . rëfulteroit~il?
J'imaginois que Madame de Mira.beau avoit dit qu'elle ne
pou voit rien pour moi, 'p'arce -que fon pere le lui avoit tléfendu; peut - être même l'avoit - elle écrit; &. c'eft 'à ce
propos qu'elle ré'paroît fu~ la fcene. On a 'di11t>qué ~n lettres i.taliques , féparées par des points, la phrafe [ulVante
comme le com'plément de l'outrage: celle 'lui m~ dou tout
l' hOftneur & la vie .•• ne p eut rien pour moi, parce que mon
pere le lui a défehdu. ••••. Puiire-t-il la défendre aùffi des
remords qui doivent la déchirer!
Suppofons .que ces mots: ~elle 'lui me dOIt l'honneur &
la vie , foient un aveu de Madame de Mirabeau elle· même :
( car 'ennn rimaginatio!1 hu~aine va loin en fait de fupl'ofitionsl ) Ma&m1e' dC' Mi1'abeau ne pounroit~'accu(er d ~
ca~omn.je; &.. mai) ' pel1é<tt'ê -de fEln ingratitude, n'aurois·je
'Pas, fans ou~rage, plll ,rappeller "au Minill:re, des bienfaits
. 1"
1
J
1
1,)
1
( 1) Voy. l' Artl~c cancre la Comrelfe de MomboifIier-Canillac, rappo.né dans le Recueil de Deni(art, 'V 0 • Séparation, n O. IJ .
( 1) Voy: (ur le point de droit le Traicé des Injures, pag. 53-
Y ij
•
-
Pag. lof&< 1)
du l. ibeUe.
Pag.13
Pag.
&.~
1+(
�17 z...
.'
a.voués_ par. ma. (em~e? Un malheureuJt qui re croit aba-n;
donné de celle' qui lui doit (out, feroit-il criminel pour UJl.
te) mouvem~nt de fe.ntiihilité ?
,
Enfin, fupposât-on encore que ces lettres (ont de moi;
Cj'ai toujours affuré & -j'alTure toujours que je n'en fai~
rien, ) qu'ell~s fo,nt telles qu:onJe qit, t!< publiées par moi;'
je demanderai: où ell l'injure faite à Madame de Mira~
beé\u ~ Sont·ce les poims ? Ell-ce par ~es points qu'on m'a
calomnié moi? Ell-ce avec des p_oints qu'on m'a diffamé l
Milis pourquoi qfe+on m'imputer la publication de ces
Ecrits ~ ,tan4is ,Q4e le Libelle publié .au nom pe l\:1adame
de Jy1it~b~_u _ r~tlferme la prj!~Y!! .C puifqu~ ')es Iqt~res dè
mon 'pere font deS preuves, quand ces' lettres m'accufent),
que fi ces' lettres 'pnt >é~~ pnbliécs ; elle~ l'ont ét~ par une
tierce p~rfonn e , da ns un temps où je n'avois point ma liberté. Cet~e perfanne ell indiquée, mon ' défaveu fuffiroit
donc.
.,
_
Il ne fuffit pas, dit le Lib~llilte; il fallait pourfuivré
J(}S .9t1tellrs_de, la. puqlic.at~on du Mémoire, -& demander
v engeance de la diffamatiqn.
Eh quoi! Madame de Mirabeau, qui co.nnoÎt le n,a m
des perfonnes qlji pu.blierent, . dit-on, le Mémoire & les
lettres, Madame de Mirabeau laif('e le Libellille ,me dei
m.iJnder P9}lrqu,ai je n. ai pas fait , \lIJ procès , crimi}1el aux
auteurs de cette public~ion! 4.h !,je .ne ,catirais m'étonner
que ceux qlli 9nt armé contre moi mon époufe, & qui
ofent me reprocher d'avoir al/enté ci l'honn!ur de mon pue
p ar d'inJàmes Libelles , regrettent que je n'aie Ras déchiré
le fein qui m'a porté! Ils me l'auroient conJeillé f"ns doute.
Pour moi qui n'ai pas les mêmes expédiens, çlans la tête,
ni le !1lême ,c o4rage .dill}S J~ cœur., je n:aurois jamais foulevé le voile qui couvroit les auteurs de cette public a:'
tian; cette crainte religieufe eût·elle dû me coûter la perte
de !llon procès. Qu'il parle ç.elui qui oCeroit!!le l~ reproj
,
. ,
,
J
"
'
ln
. nd e 'pout,
cher, st que r h'orreut des honaê tes gelfs l'
Ul repo
moi.
.
Je n'ai qu'un mot à ajouter dans l'immenftté des ch~fes
que ma plume a tracées au milieu de la vie la plus agLtée
qui fut jamais; il m'elt impoffible de !De rappeUe~ tout ce
que j'ai écrit, tout ce que je. n'ai pOint é~~l~ ; & Je rép,ete
que je ne dois aucun cQJ11pte de ce que J al dép,of~ dan~
le fein d;u Minillre, du Roi. Mais, encore une fOlS, Je n'al
p oint calomnié Madame de Mirabeau; qu'elle me mo.~tre
mes lettres; je fuis prêt ' à' foutenie, à jultifier, à prouver
tout [ans exception, TOUT ce que j'aurai véritablem.e nt
ecrit, L'offre eft précife. Que Madame de Mirabeau fait
moins prodigue des épithetes ,de calomniateur & de diff..r.mc:twr juCqu'à ce qu'elle l'ait acceptée.
Acc~ptera-t -elle de même le défi d'expliquer ces mots
SPOLIATION IMMENSE, ATTENTER A LA PR04
PRIÉTÉ D'AUTRUI, & de prouver.les inf~mies qu'ils
indiquent?
'
Si Madame de Mirabeau n~ connaît pas la procédure
prife à Pontarlier contre moi, elle elt coupable '& tl'èscoupable en tout fens. Elle elt coupable d'une lâche tiédeur fur des' faits qui intére{foienunon honneur. Elle , ell
,c o upable fur-tout d'a fer parler d'un,e affaire & d'une af·
faire capitale, fans la connoÎtre. Elle eft coupable de réveiller des accufations qu'elle n'a puinl' aprofondies; &
tous ces délits font indépendans de fa qualité d'épou[e ;
qui certainement ne "les attenue pas.
Si Madame de Mirabeau connoÎt la procédure de PGllt~rlier, elle fait qu'il n'y elt pas même queltion de Jpo ~
,liation. Elle fait que toutes les circooflllnces de l'évafion
,d'une ,certaine Dame que le LibelliUe, à mon défaut,
a nomm~e, s'oppofeNt invinciblement à ce qu'elle ait emporté même ce que les précautions les plus ordinaires &
,Ie,s plus )imples ell:igeoient; elle fait qu'au preniier avii
,
Spo!i,"on;
�174
ès bruits populaires què les réticences perfides des Jntl.;
reffés paroiffoient vouloir confirr~er , j'écrivis , 8{ ~~priinai
'Cette diatribe véhémente.
Sotond mê» Perfonne ne v.oulut {e perfuader qu' une fuite d'un
r=~ir~a~~:,,~ai 1> tel éclat n'e-ât pas :été combinée de longue main & fadaos l'affaire de » vorifée ; & comme on ne (avoit pas précifément quel
POOlariier.
t li juf~. r H p,
. » étoit le lieu de ma ,r.etraite, oomme les calomnies feo:
» mées avec un art inrernal , avoient univerfellement ré~
» pandu de Ce5 bruits que la malignité humaine n'adopte
» que trop évidement, les méchans '& leurs émiffaires
» ne manquerent pas de me compliquer dans cette fuite ;
» mais auffi, .comme il n'eft dOflné qu'à. la vérité de ne
» fe contredire jamais, on répandit des bruits, &. l'on
» affura des faits contradiEtoires.
» Peu de joùrs avant le départ de Madame de M . • ... on
» hurlait encore que j'avais publié de fes écrits ; que je
» faifois imprime.r. à N .••. l'Hiltoire de nos amours; que je
» lui avais à la vérité promis de l'enlever, mais que je
» ne prétendais que l'afficher, ahn d'avoir le plai!ir de
» paffer pour fan amant & de m'en éviter les embarras,
" en rendant par mes indiCcrétions fan enlevement im» poffible. Je puis montrer des lettres , qui contiennent
» toutes ces chofes, lX citer cent témoins qui les ont
» entendues.
» Quand Madame ..•. fut partie, il fallut bien changer
» de langage. Au lieu de chercher à' étouffer un éclat trop
» utile à ceux-là même qui déclamoient avec véhémence
» contre l'énormité du fait, ils m'accuferent d'avoir en.
' ) levé Madame .•... pour m'approprier fon argent & Ces
» dépouil1es ...... Oui, ils proférerenr cette accufation
» infame! Je relte fans réponfe & fans voix, je l'a.v oue ..•
» Moi qui jamai, ne fus compter, moi qui toute '?~
J) vie me facrifiai pour des ingrats, lX par une fatalite
» funelte , n'ai méc.onnu que mes vrais amis, j'ai été
~
»
»
»
»
17>
.
taxé d'une cupi~ité fi vile! • ; : : Et ce (ont des ttr~
dont i'avarice, l'odieufe avarice, l'infatiable defll' d'aVOIr
ell: la premiere paillon " qui m'en accuferent ! Les calomniateurs fordides! Ils vous repoufferoient avec fierté
fi vous leur offriez un louis qu'on ne donne qu'à un
» 'Valet; mais ils s'attendriront devant des rouleaux de
" - ~ette monnoie ! Ils feront des infamies pour l'obtenir !
u .. La pile en augmentant diminue, efface l'inCulte, la
~ rend un bienfair.
» Je m'écarte & je m'aigris, je le fens ; mais quelle
» ame honnête, qu'elle ame fenlible ne me , pardonnet) roit pas une li jufte indignation! Peut-être fut-il un,
» temps où, enflammé d'ambition , emporré par Ull
» bouillant courage, je n'avois pas une morale très-pure,
» & où je n'aurais pas rougi d'être accuCé d'un crime
» confacré par de grands exemples, juftifié & honoré par
» de grands périls: mais comment fupporter le Coupçon de
» la ,Plus lâche des baffe,ffes? ILS SE SONT BIEN GARn DES DE LE PROFERER EN JUSTICE. C'ell: dans
» l'ombre des çabinets ou par l'écho tumultueux mai!>
» confus du public qu'ils en ont imbu tous les efprits 1
» afin de les faire incliner à la févérité , &. de les rendre
» par une vive répugnance plus dill:rairs &. moins capable!>
n de chercher la vérité au milieu de mille lX mille
» clameurs; & quand ils ont cru tous les cœurs remn plis d'indignation, tous les efprits préoccupés de prén ventions, & tous les Juges pénétrés d'horreur pour le
» crime qu'on alloit leur déférer, ils m'ont accufé d'aH voir favorifé l'évafion de Madame M .....••
Tout le monde p~ut juger fi des ennemis, pouffés
ainli, m'auroient ménagé, s'ils euffent eu la moindre
prife. Qu'eft·ce donc que cette infame accufation de SPOLIATION?
Mais on a dit . • •• . je confeille à Madame de Mirabeau
•
�1
17 6
177
ële rieuter les ONT DIT: car peu de femmes ont pIUf
",~g,
1
U
Ile.
.u
à s'en plaindre qu'elle.
Mais mon pere a écrit: ) Quoique la (poliation Coit
» immenCe , comme tous Ietus Agens les pillent 8t que
" leurli Troupes Jeur coûtent cher, quand l'argent leur
» manquera, c'eft alors que de nO"uvelIes irruptions [e~
» roient à craindre.
. - E~ jufques à quand les Coupçons de mon pere feront.·
ils des preuves? Oui, mon pere a cru à une fpoliation'
immenfe , pùifqu'il l'a écrit. Voilà tout ce que prouvent
Ces lettres; & l'importance qu'il donnoit à l'affaire de
Pontadier, le prouvoit affez: car elle ne p~uvoit venir
que de cette opinion. C'étoit le feul afpefi fous lequd
cette procédure pût être déshonorante. Mais mon pere
avoit·il ét~ témoin? Il n'av oit rien vu que par le rapport
d'autrui; & l'on fait affez ce que font de tels rapportS,
quand il ne s'agit que de charger un accufé qu'on croit
ne revoir jamais. Une feule chofe me difsulpe; on m'accufe de SPOLIATION: c!eft la procédure prrfe à Pontarlier. Ce, que mon pere a pu croire Ile m'accu (e pas plus,
fi la procédure me difculpe; que l'opinion contraire ne
me difculperoit fi cette procédure m'accufe. Or la procédure ne fournit pa~ le plus léger indice. Et voyez fi la
Sentence même par contumace, cette Sentence qui li indigné l'Europe entiere , cette Sentetlce où l'orl me cherehe
lies crimes dO"nt je n'étais pas accuf~ , (1) voyez fi cette
Sentence a même eilleuré l'idée de SPOLIATION? Certainement ce mot 8t cette idée de fpoliation étoient également étmngers à mon procès; 8t l'on n'a imprimé ceue
allégation de mon pere que pour me (aire un fanglant
outrage.
'
Rien
( 1 ) 'Je rllS d~cTaré par contllma-ce
~
aIle;'"
6-
il n'y avoit poim eu d'accu{ation d' adultere.
f~lw ..iT1rH d',u{,,(urt)
v
Rien pe prouve mieux que' les défenfeurs de Madame
de Mirabeau [entent l'infuffifance de fes ·moyens de feparation que les inventions calomnieufes ' dont on étaie fa.
caufe. 'Chaque calomnie eft une , forte d'hommage que la
force de la vérité arrache à- mes adverfa~res. Eh! que
m'oppoferont-ils encore en effet? La procédure de Pontarlier.
'
Je fuppofe pour un moment que j'aie été ,compUce de
l'évalion de la Dame avec laquelle on m'accufe de m'être
rendu coupable d'adultere. Je fuppofe acquis cos deux
faits, à la preuve du premier defquels on a (u écombé ,
tandis que le fecond n'a pas même été articu~é par le
mari, qui feul pouvoit être accufa~eur en ce genre, &
qlli ne formera & ne relevera pfus. d'accufarioll ; car il
eft mort. Je fuppofe davantage; & Je veux que Mad .. me
de Mirabeau foit recevable il reve ilter toutes ces acc u{ations: Où font les preuves des faits dont elle fe porte la
dénonciatrice? Elle nous rapporte des lettres de mon
pere! M'ais, enCGre une fois.., ce que mon1pere a pu croire
fur le rapport d'autrui, nc m'inculpe pas plus li la procédure me difculpe; que fon opinion ne IllC diic,!lperoit fi la procédure m'inculpoit. Si vous pl'étendez me
conV,aincre juridiquement des faits que vous énonc~s,
comment y parviendrez-vous? Je trouve dans le Libelle:
» La Dame de Mirabeau eft bien éloignée de voul oi r
» juger fon mari; mais elle ne Reut s'eIvpêc her de faire
» obferver qu'il n'eft pas jugé,
Je trouve dans la ConfulratÏon de Madame ' ùe Mira~
beau, qu'elle n'a pas be{oin de me FAIRE JU GER DE
NOU VEAU; St qu:aux t~rmes de la ,loi, il fuffit qu'elle
me trouve l?ROCEDURE ET ' JUGE.. Si marÙUnl condemnalllnt invenerit . (Le Illot PROCÉDURÉ, inventé par
le Rédaéteur de la Confultation, n'eft pas dans le texte
de la loi: elle porte, condamn é , CONDEMNATUM .)
Suivant la Confultation je luis jugé. Suivant le Libelle
Aff,ire de
Pon[ :lCli~r.
J
Z
•
P'g, \8 & \ ,.
Pag:
q9J~ L\
Coo ru 1rati o n.
�w
178
jt fie fois pas jug';. Les deux alfertions (ont contradiél:oires'
mats je réponds à l'une lX à l'autre.
'
Si je ne fuis pas jugé, & que Madame de l\1irabeau
reconnoilfe q~'elle ~'4 pas le droit de me ju~u , pourquoi
me regarderolt-elle comme coupable? Elle feroit plus
févere que la loi, qui ne préfume jamais le crime.
Si je fuis jugé, pourquoi dit-on que je fuis condamné_
Ma repréfentation a fait tomber le Jugement par conTumace. Il ne cefte que la plainte fur laquelle la tran.
faél:Ïon contient un département exprès. Je lailfe à mon
confeil le foin de difcutel' feul l'autorité de la tran{aél:ion,
La tâche que je me fuis impofée , ne m'a déja que trop
entraîné dans des longueurs faftidieufes (1).
_Mais j'aj~uterai qu'on ne peut pas même dire que je
fOlS PROCEDURÉ; car, de deux ch ofes l'une: la tran.
faétion eft bonne ou elle eft mauvaife. Si elle eft bonne
il n'e~ifte plus., de pr.océd.ure_ Si elle ell: mauvaife, l'ap~
pellatlon que ) avolS loteTjettée de la procédure inil:ruite au
Bailliage de Pontarlier revit alLurément; & cet appel, Cjui
(l) I} dl: cepe~d3nt une équivoque de mauvaire fOL, pag. 58 d~ Li.
belle, qu'li ell: necelfaire que je releve. Le LibeUilfe emploie cinq .linea
pour, établir qu'aucun del lugt! 'lf<Î avoient concouru au J ugement de la
prDeidure ne paroÎt d'ans l'homologation de la tranfaél:ion. Rien n'cn li
(impie ;. & l'on a pris pour Madame de Mirabeau trop d'informations à
Po?tarher, pour qu'elle n'en ait pas fu la véritable caufe, Les Juges
qUt ~ompofent ordinairement le Bailliage de Pontarlier, avoient pronO,nce dans mon affaire une Semence illcidentelle qui avoit été inlir.'
mee au Parlement de Befan<;on, De ce moment ils ne pouvaient pliJs
occuper dans le procès, & toutes les panies qui tranligeoient avoient
trop d'imérêt à ce que leurs conventions furTent homologuées- par des
Juges . non fufpeél:s, pour ne pas demand~r que le Tribunal en fùt
rempli: ce qui, au rene, étoit de droit ri"oureux. Mais comment des
Avo~ats ont.ils pu ~crire que des AYoca~s rempli (fans en ab(ence ou
em.pechement un Tnbunal, ne formoienr p3S comme les Juges ordlnalfes le T ribunal ~
179en quefbon
' fi'
fi '
,
éteint le jugé bilfe au> moins
I Je UIS proceduré. Je de~ande à quel titre ' Madame de Mlrabeau
reprertdroit les pourfui~es de l'.Jp~~I.?
Veut:on que par cela feul q~e ) al été PROCÉD~R.É,
Madame de Mirabeau ait une June caufe de fépa!'llt~àn, ?
( Supp0ution abfu~de &. monil::ueufe ,. avec la9uelle !I ~ y
aurait plus de manage; car qUIconque voudraIt le ddr~u
dr.e, intenteroit ou fe feroit intenter une accufatÎon l ~Iel~
ou mal fondée, ) N'importe, Le veut-on? Cette fépara- '
tian accidentelle n'aurait rien d'infamant; car la procédure,
dépouillée de tout ce qui eft relatif à l~ SP'OLI~ TION
ne pouvoit être infamante. M, If" MarqUIS de MarIgnane,..
grand-pere de Madame de, M.irabeau,. eil: mort ,i0lli{fa~t
de l'eftime & de la confideratlon publIque. Il n en avolt
p~s moins été accufé dans fa jeunefTe d'un RAPT &. d'un
RAPT DE VIOLENCE envers la femme d'un valfal voué
à fa proteétion par la loi des Fiefs. Une procédure avoit
été prife, Elle contenoit l'accufation d'alTafIinilt &. de guetà-pens. M. de Marignane avait été décrété, L'affaire
prenoit une tournure très:férieufe: La procédure fe trouva
nulle &. fut calTée. Que de rapports avec fI.1 0/1 affaire,
& que de rapports tout à mon avantage!
Mon affaire de Pontarlier n'étoit donc pas infamante,
& la [éparation, qui ejans ma [uppoution bien gratuite,
en feroit réfultée , ne le feroit pas non plus, L'adultere
qui peut être un crime felon leS' Loix, ne rend ' pas infame
dans l'opinion publique. Quel" déshonneur, quel grief,
quelle répugnance peuvent donc réfulter de ce que cette
affaire s'cil: amiablement terminée? A qui Madame de
Mirabeau per[uatilera - t - elle qu'l'I1'le' prooédure nOI1 infamante, tenrtinée par une trarr[aétion; éteinté &. tout au
moins fblfpendue par l'appel, lui fuffit 'pour me 1 préfen tel'
comme nuiuvais fils & mauvais pere (ce qui eft ' un crime
contre nature &. le plus déshonnorant de tous), mauvaLS'
~citoyen & fu)el dangereux.
Z ij
•
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"
»
»
))
»
»
»
1'80
» Il fe roit impollible, dit la ConfuÎlation, de rencontrer
un adultere accompagné de plus de circ(}fJfiances graves
& fcandaleufes qué celui que la Dame de Mirabeau de~
nonce, puiCqu'elle préfeote un mari qui difparoÎt aux
yeux de toute la France, avec une femme étrangere
qui cohabite publiquemeot en Hollande avec l'objet de
là pallion, qui avant la difparition, veut enlever fa
propre femme, comme pour la rendre témoin & vietime de ce [peétacle, qui efi pourfllivi, décrété & condamné pour [on crime (I).
'181
-Oe cette belle énumération de parties, retranchez deux
-circonfiances, le Jugement de condamnation qui n'exifie
,plus; le projet d'enlever Madame ·de Mil'abe·au, auquel
Moi.
Quelles .(om les ·caufes de réparation de corps l
.
L'Avocat.
Con(u(tation
pour Madame
Aucune Loi précife n'a décerminé les cau((s -de r~paracion.
Moi.
de Mirabeall,
Le.i ca,l(<< de (éparacion (ont donc arbitraires
l
'pag.
104.
L'Avoclu.
(1) Dans la -multitude de cho(es que j'av ois à dïrcucer, il eO: alh
{impie q ue je me Cois réCervé l'examen des fai ts, & que la C on{u lmion
que mOIl Avocat joint à ce Mémoire, ",ri ce les poincs de droics, &
réponde à la COIICulcation pour M,dame de Mirabeau: Con(ltlcacion
que {avoue naïvement n'avoir 'poillt entendu. Mais j'ai ~~u. qu'il ne
leroic pas m:lUvalS de placer ICI elt noce une lertre que j al rcyu d.
Mar(eille, & qui me paroÎ! prouver 1°. qu:' la logique dt bonne à
cout. 1°. Q:le le Rédaél:eur de la Conrultation ne s'elt poillt encendu
lui . m~me. ;0. Qu'il n'y a plus de mariage li les principes de la COIlfll1caticn -pour Madame de Mirabeau (Ont admis.
MarCeille le
'10
Moi.
'Qu'appeliez-vous cau(es graves de réparation ~
.
L'Avocat.
Quand il s'agir de ralronner enfuite (ur une hyporhe(e. donnle, ~n
·dircure 1.. circonO:a nces & les falts amculés; on combrne ces faits
avec la qualicé d es perConnes; on cherche & on 'indique tes ré(ultacs;
·on (e décide (ur l'e,,fomble de toutes cho(es'
'
Ibid.
Moi. '
Cela ne dic rien; y a-c- il d' autre, cau(~ de (~paration que des
(évices & mauvais tra.iremens?
avril 1783.
'Monlieur le Corn ce ,
L'Avocat.
Le l'roc';; en réparation que Madame la COlncelfe de Mirabeau vous
a intenté, fair dans cette Ville l'elHretien de tous "les cercles; les
c:fprirs {ont divi(és, & les dilpuces s'échauffenc; je ne (uis pas u" de
VOs moins zelés parci(ans; Be quand je difpucc je n'aime pas à céder!
j'écois arrez fort [ur les fa ilS ; mais connoitlànl ma foible{fe {ur cc qUI
concerne le draie, j'ai été con(ulrer un Avocat, permeccez moi de
veus recracer en dialogue la conver(ation que nous avons eue enfembic. SI elle ne peut pas vous être ucile, elle poarra du moins vous
amufer; & V01JS devez avoir be(oln de quelque dilhaêhon.
Dialogue entre l'Avocat & moi.
(Apr~s les "Civ-ilicés d'urage; & après avoi .. parlé de la pluye &.
b:au cemps.)
La digl1icé du mariage, la tra~qui '. I!cé des familles, les bonnes
'mœurs ne tomporcem pas qU'une (eparauon foir prononcée (anscau(es
& même [ans cau [es graves.
Dire en général qu'une (éparalioll ne peut êcr~ demandée que pour
[éviccs & mauvais craicemen., c'ell: 'ne rien dIre du louf. Sous les
mocs flvjceI & mauvaù tr"it,mens , on comprend indéfiniment tout
·ce qui peut . juO:ifier la répugnance invincible d'une femme à rencrer
dans le lit cotl"jugal.
Moi.
~l'appellez-vous la répugnance invincible d'une femme à rentrer dans
le lit conjugal! Suffira-c-il à la femme d'alléguer une répugNlllce?
Separera.t-oll la femme, patce qu'élie ne pourra {ouff,ir les care(!ès
d'un mari laid, craffeux, mal propre, &c.? Cette répugnance dOIl'Clle être autoriCée par des faics du mari? & quels (ont ces fairs l
•
du
Ibid.
L'Avocat.
-lI el!: des faits qui (ont
de nature ~ attaquer l'exillcnce phyiique;
-
Ibid,
�r8'z.
dfiJJ~ng,~ps elle " .cerré de c.rQi~ "CRm]11~j ~ 1';9 Prouvé:
rlÙ!Q.Doons. comme. fi t04$ le~ fé!its é!oi~nt aCfIpi~, ,IX partQO& dq, principe: d!l délit. OJ! I)'QuQlMir~. paS j q:R~ je vilis.
1'.g.
107 .
Ibid.
Ibid.
il en dl: d'aurres qui compromettent l'exi11:ence morale; tous font ou
peuvent ~tre matiere .. féparation; s'ils font graves & bien conl!:.té5,
Ce feroit donc méconnoÎtre évidemment. 1", lignification légale des mots
f/vicu 6- mauvais tr"iumtns, que d«: liJ11iter cette IignificatioJl aux
coups ou aux voies de fait direéte.me/l~ dirigées contre l'exillence ph y_
lique de la perfonne qui (e plainr.
-
parler &après la tuppOfition que tous lès l'aIts '~lIégti~s l';n"
Madame de Mirabeau foi\t ëonfiaré~ p'a r la plro é'dtirl:! 'db
Pontarlier. Or cette procédure a préciCément 'êtabli 1&
contraire.
Moi.
Je ne conçois pas comment la loi €ivile auroÏt comp l'omil fan !lUgulle Gmpliciré, en puifant (es déci lions dans la morale, qui n'a que
des principes limples.
Moi.
L 'Avocat.
J 'admets volontiers vos deux efpeces de faits. Mais donnez-moi les
principçs qui déterminem les cau(es de réparation relatives à l'une &
à l'aulre efpece,
Les loix ne pourroient marquer des nuances qui font différences
dans chaque condition. Elles ne pourroient encllaÎllel' fous des points
<le vue fixes & généraux, des circon(l:ances qui ne {ont jamais lcs
mêmes, qui varie", dans chaque hyporhe(e parriculiere. II a donc fallu abandonner touS ces objets à la fageffe &: à la jullice des Tribunaux.
L 'A lIocat.
Le vrai principe de la malier~ dl: qu'il faut pefer chaque hypothefe ; que ce ne font pas pré.cirémellt tels faits détermines qui peuvent feuls opérer une féparation; mais que c'ell: toujours à l'équité &
:. h prudence du Juge à prononcer convenablement dans chaque cas
p'U'ticulier, {e1on les circonllances '" les perfonnes" fur les r. irs prérentés comme caufes de réparation.
Moi~
Tout dl: donc a,bitraire dans une maliere a~Œ importante; je ne
puis me faire à l'idée que je n'aurai ma femme ~ qu'autant q ~'elle &
les Juges le voudronr.
L"Avocat.
Il en ell des féparations entre con J0tlns, comme de tous fes objets
q~i tiennent principalement aux mœurs.
Moi.
Vous me raffurez : non feulement la matiere n'ell pas arbitraire pour
le Juge , mais encore ellc: ne l'a pas Plême été pour la loi. La morale
a des reg les préci(es, claires, évideptes, & des regles que la loi civile a empruntées de la mo/ale, doivent avoir la mêPle précilioll, la.
même clané, la même évidence. Rappeliez-les moi.
Ibid,
1:8'3
L'Avocat.
Il ell impoŒble que de pareils objets foient préci(émcpc reg lés par
les loix ; elles ne pourroient entrer dans des détails qui compromettraient leur augulle limplicité.
Ibid.
Moi.
S'il éroir auŒ imporTible à la loi de déterminer les caulès de aparation qu'il peut l'être d'ench4Îner de! circonJfance! , avec ou fous des
fo ints de v ue, je Ile {erois pas {u'l'pris qu'elle eù, gardé le lilellce. Feu
l'rochée n'eûr jamais raconté les malheurs d'Orphée &: d'Euridice, li 011
n'avoir eu que des point! de vue pour l'enchaÎner, Mais il me parait
qu'il n'efi point impolTible, a'après les regles de la morale, d'apprécier les aétions humaines, quelle que {oir leur varieré. II n'y a pOlnl:
d'aél:ion do nt on ne pui!!'e dire qu'elle dl: bonne ou mauvai{e. Les
loi x arbitraires reglent les différens cas, quelque variés qu'ils foienr.
s'il y av oit quelque cho(e de difficile, c'étoit d'wchaÎner par des regles purement polit ives , ces cas infiniment divers, fous des point! d~
"/Ille fixes & g én/raux, La loi a f.it l'ouvrage le plus difficile; il en
{u rp,enant qu'die n'ait pas fair le plus airé. 11 fe peut que je me
trompe. Mais je retombe dans mes premieres frayeurs; je n'aurai donc
ma femme qu'autant qu'elle &: les Tribunaux le voudront.
L'Avocat.
On fe tromperoit li on alloit croire que la matiere des f~parations
ell puremem arbirraire, Rien ne doit l'être dans [OUt ce qui intérdTe
le bon ordre & l'honnêteté publique. Au défaut des loi x , nous avons
des opinions autori{ées, des exemples reçus, des déciGons rerpeétables, des regles conCacrées p~r la jurifprudence, des principes avoués
qui ont force de loi x.
Ibid.
Pag,
10 8.
�1,84
Tétois dans un lieu d'exil; j'y redemandois en vain.ma .
femme; j'en trouve une aimable & jeune, mariée à un
v,ieillard. Un (ival maltraité, fous les • ordres duql,lel j'éfois t
me
18)
me Coupçonne cl 'être plus heureux que lui. J'lIvois l'a Ville
pour prI(on. Le de[pote rival & jaloux, fol1icite des ordres pour m~ renfermer au Château. Je fuis; c'en une
Moi.
Et que ne le diliez-veus plûtôt! Les r.gles de la mauele ferollt
denc le réCuhat de Ce qu'en . meills de mets en appelle des doéhilles
& des Arrêts. J 'aime autant des regles faite. de cette maniere que
de. toute autle; & ces r"fultats (ont • . . . Je vpus . éCOUle.
ait raiCon de (éparalion, par cela {eul qu ' un maliage ne (era pa s h eu.
reux . Bienlôt, li uu pa rei l principe était adopté, l'e(pcce humaine ne
(e perpétucroit plus par les ma.iages.
L'Avocat,
Ma con(équence elt qu'cn pareille malÎere, le vrai princi pe de décilion en dans le cœ ur des gens de bien, dans la (enlibi lilé blell
ordonnée des hommes juiles IX raiConna bles , daus cette ellimaliOl1
commune, qu i ne trompe pas, & qui ne peut tromper, qui pré(ente
la plus (ure & la plus imparriale de routes les regles. & qui dl
cemme le ,é lûltat indélibéré de ce que chaClln éprouve, quand on
met (ous fes yeux le malheur ou la aine li,uation de Con lemblable,
Le Magi nrat à cet égard n'en qu~ l'interpréte des affeétions ou de la
knlibilité générale. 11 cil au nom de la loi, l'ergane rcfl'eél;able dl;.
l' honneur, de la délicatelfe & de I·humanité.
L,ebjet des. féparations elt · incomenablement de prévenir le mall.eul
d~ celui des deux époux qui (ou.f f,e & qui fe plai?t •. Des rairons polit/tf'<tS ou rthguufol ont pu faire ordenner que 1 Union cQnjugale ferait indi{foluble. Mais le droit naturel qui veille à la conCervation
de tout être fenfible, & que les loi. polit iques, religieures & civiles ne peuvent jamais entierement élellffer , a fait établir pour le Coulagement des deux époux malheureux l' un par l' autre, une forte de
divorce fiéhf qui allége le lien du mafiage, q-uand ' les circenllances
r-cndent . ce lieu encere plus infuppertable qu'il n'en [olide • .
Moi.
Je crois veus entendre, & je veus paflê: VOIre hérelie fur l'indiffolubilité du mariage, indiffolubilité qui elt de droit divin. Mais cemme
il y. a peu d'heureux mariages, & qu'il n'y a pas pour tous de~ moyens
de féparati on; comme il y a peu d'hommes qui n'ayenr à fouffrir les
uns par les auaes des maux, li non phyliques, au · moius moraUI,
j'atlends que vous m'expliquiez jufqu·à· quel peilll l'époux, qui fo plaint
doit · avoir fouffort au moral ou au ph)'lique, pour obtenir la (épararion, & qyell.!s circonftanceJ p.uvent rendre 1. lien du marù'ge plus in{Npportable qu'il n'dl [otidr.
L'Avocat;
Iilid.
D'al! il ré(ulte evidemment que loote quemen de (éparation entre
conjoi nts elt Ilne véritable queltioll de mœurs qui peut inlluer fur
l'état ci"il des per(onnes, mais qlli e~ principa\emel1t fubordpnuée à
leur bonheur moral.
Moi.
Je veus prends (ur le dernier mot: Il'entendanr pas les autres. Lt
bonheur elt-il fait pour l'homme? Combien de fois le malheur n'exinc-t-il
qJle clans l'epinion de- ceux qui (euffren~? Je ne. PQis croire qu'il y
L'Avocat.
Moi,
Il implique contradi'étion , ce me (cm ble, que dans Ulle maliere où
il n'y a poinr cl e loi , le J uge [oit , au nom de 1,1 loi, l'inrrrprùe de
L'llOnn",,", de /a. délical~e & de l'humanité.. S'iJ y a une loi, pourquo~
le Juge ne Ceroll-d pas l'organe de cette 101, plutot que de la fènftbiIJle', ér de " ajJrfh on générale? ~ déduifez-moi ie vo.us prie les regles.
pofees par la 101 •• MalS enfin I, je vous tradUIS bIen, ce qui n'elt
pas facde, le Mag lnrat , felon vous, en mariere de (épar .. ~on , ,,'a
' d'autre reg le que (a raiCOIl, (qn cœur & m" .... e res pa!lîons, t-bis.
l'homme peut être trempé par (a rai fan , Céduit pat {en cce"r> "'MI!par (es pallîons. Vous répondez: il y a une rai(on uni .er(elle, "un/t
affe.aion générale, une (enGbilité bic n .or donnée. Chaque h omme net
~roll-ll donç 'pas avoir une rai(on faine, lin ~œur bon, une, (enlibilité
julle? A vous entendre, ail ,,'aura\! jamais be(oÎJ1 d e 10i1l;; k Juge,
Drg,mf de l'honneur, de la déliclfl1!e & de "humanité, feroit lui-mêm~
la loi, Je ne vais pacs li loin, & je reto urtl e. il vous,lire ; je- 1)'2 Uiak
d onc ml femm e qu'alitant 'lue les Juges ne trouverent pas ull e rai(o,,de m'en p' iver, "aTIl leur affèaiO/1, l(lIr fènftbilitl, d,ail s ce qu'ils croiront l'ejftmallon comm'me & le rlfnltat indéliktré de ce 'lue {h,ft""
é.proJ1ve 'fua1l4 "'11 met fow fol 1'''''''- 1< f1?1i{heur OIS [a ,rift e ftl1lt11ioJ> d~
,
Ail
Ibid.
Pag,• .!>
�186
folie de jeune!re. Le mari de la Dame, fuppofée l'hérolne
de ce roman, ce mari avoit une beIJe·fille dès long.temps
ll'ifgraciée,. exhérédée., pro[crite par [on pere; elle ne pou-
-
fin fembt"ble; ce qui" dépouillé du clinquant des mots, lignifie que la
maticre des {éparario-ns dl: pl1reOlent arbitraire; & \'ous êtes cependant
conven u que rien ne doit l'êtte dans ce qui inrérdre le bail otdre de
l honnêteté publi,! ue.
L'Avocat.
tbid.
Nos meilleurs Auteurs ont dit que lor(q Ii'il s'agit de pronollcer fur
une demande en fépararion, il faur elfenl iellemenc examiner les faits
qu~ (cr~el1t de b~ fc à chaque demmde, & (ur-rout avoir égard à la
condition des panies, parce que c1uque condil ion a des principes qui
pe~ve1l[ rnoJi.fie[. diver(emem la maniere dt: voir & de (~lI[ir > & tout
ce qui comrioue au bonheur ou all malheur de la vie.
Moi.
C,"'lHe C#1Tdition a dt! princip'! ! Rapp:llez.les moi., je vous en prie,
L'Avocat.
Ibid.
AinCt, pour me réCurner (ur les prillcipes,. une (éparation ne peut
~tre ordonnée (ans cau (es & fôns caufes imponal1:es. Mais ces caulès
ne (om exclulivemenr, & par forme de limitalÎon, déterminées par
aucune loi. Elles peuvent (0 diverlifier à l'infini, comme les pafTiolls
même qui les produi(enc. Il fuflit, (ous quelque forme qu'elles foiellt
manifell:ées; que relativement à l'érar des pcr(onnes & à toutes les
circonll:ances> le Magill:rar (age, honnête & (enfibl".• puilfe (e croire
autori(é à venir au recours de l'époux qui réclame fon autorité.
18 7
voit fI! rele é.. que fur les ruines de fa be1le·m cre. Cette
femme eft perfécutée, calumniée, diffamée, opprimée. Elle
fuit la maifon de fon mari &. fes vexations, &. les ordres
qu'elle {avoit avoir été demandés contre fa liberté. Suppofons davantage, fuppcfons qu'une paillo n fatale l'emporta fur mes traces.
. Que devois·je faire? Trois partis pouvoient s'offrir à
un homme peu généreux, l'abandonner, la rendre, la gardu. L'abandonner eût été une iofame lilcheté ; la rendre·-·à qui? A un mari irrité, à des ennemis implacables: ç'el'lt
été une· infame trahifoo. -----,- LibeUifte, concluez vous!.,
même.
La ' gardèr, &.. vivre· âvec une femme cnarmante, une
femme de dix-huit ans dans la plus exaéte retenue, ç'eût
été un aél:e d'héroi{me d'autant plus· admirable, que per~
fonne n'y aurait cru. Mais pour n'avoir pas été à vingt.cinq ans un héros de continence, (erais·je dans votre ro-·
-man, ferois-je beaucoup plus 4u'un homme foible ?
Mais, dit-on, j'ai habité publiquè'ment ave'c cette Dame
en Hollande. Continuons le roman, &. fixons l'acception,
ties mots.
Le Comte de Mirabeau marié &. ta héroïne de votre·
roman n'dnt' pas donné en Hollande le fcandale public
d'une cohabitation adultere. Ils y avaient changé de nom;
&. la Hollande les a vus fans [cllndale vivre t:nftmble. Le;:
Moi.
Ainli, pour nous réfumer (ur les principes qui déterminenr les
cau res de fépararion, vous me diles qu'il n'y a point de principes
qui déterminent les caufes de (éparation. Avec vous la porte n'etl ni
ou vme, ni fermée; il J a & il n'y a pM "bUI tout le la fOÎI; vous
Ole bercés d'un come de votre grand-pere.
Je quittai l'Avocat, & quoique ma rête filr offu(quée par (on galimathiai aoubl•• j'eus acrez de préfence d'efprir pour ne pas manquer
envers {on clerc au devoir recommandé par Mt . votre pere dans (a
lettre du 19 janvier 1783 ' Revenu chez moi, j'ai rran(crÎt narre connrfation • que je prends la liberté de vous adre{[er. Je p~rs 'pOIK
Paris dans le delfeill d'avoir UI entretien avec Mr. vorre pere (ur (Ç5.
~ncie"'l\'s le ttr~; & je vous enverrai Ilorre dialogue> fi rapprend~
que .cdui-ci vous .aù plû.
Je fuis avec la plus haOiIC cpnlidéradon >.
Monlieur le Cowte,
VOU\! t~-l\u~ble '" trèS'-(l/)éirfà nl (erHttllr."
MOI,..
Aaij
•
�188
[candale n'a pas été pour la France, •qui le connoilI'oit '
mais qui ne le voyait pas, qui ne [avait où ils étaient'
& qui ne pouvait [avoir s'ils étaient en[emble. Le [can~
dale n'a pas été pour la Hollande, qui ne les connoilI'oit
pas, &. qui ne pouvoit [avoir que leur union fût crimin elle. Ils s'étaient C'ou verrs d'un voile épais; c'eft vous
qui le [o ule vez ; vous rapprochez les diftances &. les temps
p o ur nous les monrrer en[emble dan.> un même lit, ou
depuis long-temps ils ne [ont plus. Le. [eul [candale ell
venu de l'éclat de la procédure, qui certainement eft de
mauvais goût dans un roman. Et de bonue foi, deviez.
vous la leur imputer?
.
Le R édaél:eur de la CO '1 [ulta.tion pour Madame de Mi.
Voy. la COli.
filh.1tlOn pag. rabeau il dit, eu pillant M. Cochin, (ans le citer ni l'indiquer> &. mettant à l'écart ce qui, dans les principes de
110
Cocbin .
t . ce J uri[con[uite célebre, nuiCoit à Con [yftê me , )) qu'un
.. pag. I l '
)} l"!lari préfere dans [on cœur une étrangere à [a propre
» femme; c'eft une foible{fe que l'ou pardonne à l'hu.
1;)
manité. Mais s'il fait trophée de [a palIion; s'il inCulte à
» fa femme par un commerce public & [oivi de [candale:
» voilà le crime que les Loix regardent comme une cauCe
» trop légitime de. divorce?
Quand j'admettrois tous les faits dont on a ti{fu ,ce rom an de Pontarlier, je po urrais dire encore: au commencement de mes liai[ons avec la D.al11e que yous dénoncez,
M adame de Mirabeau n'avoit aŒurément pas plus qu'une
foible{fe à me pardonner, je ne lui avais pas même préféré une femme . érrangere , pUlhue force ,maieure m 'éloignoit
de la m ienne. (on a ,trop oublié cet aveu de mon pere. )
D a ns les fuites de ce prétendu commerce, comment en
ai-je fait trophée? Comment ai-je in[ulté Madame de Mirabeau par un commerce public &. Cuivi de [candale ~ .puiC.
qu'elle prétend que j'ai vécu en Hollande avec cette maîtreŒe, &. qu'a{furémeot on ne peut pas [uppoCer que nous
y [oyions refiés autrement que fous des noms inconnus.
1
18 9
Sans l'éclat de la procédure, ma fuite, très-antérieure Il
l'évafion de la Dame accu fée , n'étoit pas même un [canclaie, puifque [ans l'éclat de cette procédure, elle ne pouvoit être conlidérée que comme une évafion de pri[onnier.
Cet éclat n'agrave pas mon prétendu délit; &. malgré
cet éclat, Madame de Mirabeau n'auroit encore, fi j'étais
coupable, qu'une foible{fe à me pardonner, puifque j'aurois été un lâche, fi j'eu{fe abandollné la femme qui venoit me chercher; un traitre, fi je l'eu{fe rendue; un héros
de continence, fi je n'en eu{fe été que le chafte gardien.
II y a des adulteres publics qui [ont moins de bruit, mais
qui certainement [ont plus [candaleux qu 'un tel adulterc;
& nous ne voyons pas' tous les peres OIdulteres pa{fer pour
êt~e coupables de donner des exemples humilians & funejles à leurs enfiws .
La lumiere funefie eCl toute [ortie de la procédure. La
tranCaEtion J'avoÎt au moins éteinte, & vous la rallumez
inutiïemenr ; car per[onne ne [e per[uadera que par l'affaire de Pontarlier j'aie été mauvais époux &. mauvais
p ere; &. fi mon fils vi vait encore, Madame de Mirabeau
aura it fort à craindre que cette épithete atroce de MAUVAIS PERE, cinq fois mal appliquée, ne fût juftement
renvoyée par une double application à l'épouCe, qui [eule
déshonore le mari &. le pere.
Mau vais cùoyen & lujel dangereux, parce 'lue ):ai fait le,
m alheur enlier de deux fami lles . . , .• parce 'lue J al auenu
à la liherté d'aU/ rui' • .•. p arce que j'ai déchiré & diffamé des
éitoyens honné'es . •...•• Non, ce n'eft pas moi 'lui jais
le malheur enlier de dwx flmi!ÙS. Celle qui s'acharne à
Pag.
l OI.
Ibid.
un procès qu'elle ne peut [ou tenir que par des moyen.
odieux, celle-là feule FAIT LE MALHEUR DE NOS '
D EUX FAMILLES.
Non, je n'ai point auenté à la propriété d'autrui. Les calomniateurs qui oCent proférer .cette infamie, [ont d'autant
.,
-
�19°
pIus atroces, qu'ils en co 1ll0iffo ient la fau'ffeté' 8{ l' 1
" é cl e l'h onn eur e ft l
'
,
1\ a
pro pnd
a prenllere
des propriétés
.
cl
d
"
,
1UI es e ux epoux qUi outrage, qui diffame qui caloce·
nie , qu i s'effo rce de désho norer l'autre, celui-là feul
TENTE A LA P R OP RIÉT É D 'AUTRUI.
No n, j~ n'ai p as porlé la ru ine & la défo!at-ion ' dans l
familLes élTangms_ Où eR la famille que j'ai ruiné (~
Eft-ce m oi qui co mmen çai la procédure, qui déCola de~'
familles? Celui des deux époux, qui armant fon pere ~
fo n beau-pere contre l'autre, néceffite enrr'eux une guer
à outrance, celui - là Ceul PORTE LA DÉSOLATIO~e
Ilo n dans les fam illes étrangetes, mais dans [es prope;
fo y ers, dans [a pr o pre famille.,
Je n'ai pas déchire & diffamé dés citoyel1s honnêtes. Si
c'eft M . de R o uge,mo nt q u!o n ? éfigne ici, l'homme qui
m_e dénonce pour 1 Auteu r du livre dont M. de Rouge.
m o nt peut avoir à Ce- plaindre, celui-là fe ul, s'il eft Avo.
~a t, proft.j tue l1 ne profefiîon honorable à déçhirer il dif.
~mer des citoyens honnêtes. Si c'eft mon beaL!-frer~ qu'cl\
:m'accule d' avoir déchiré, d'avoir diffamé (r), qU'ail corn.
mence p.ar prouver c~tte a ll égation témé raire; qu'on Cache en(Ulte que depUIS plufieurs années nous vivons 1\1
de Saillant &. moi, dans une intime union' que je ~'ho:
nore des ~ervice-s 9u'il m>a rendus; qu'on 'fa che que Je
~alheur n eft pas Jufte, que les plaintes même injufies de
llllfortuné ne fon.t pa~ des, crimes ; que fi j'avais offenfé
mon beau-frere, il m aurolt pardonné; lX. que s'il a jetté
AT-
en
( 1 ) Celte ac cu far ion
fondée fur un parfage d'un e leme de mon,
pe{e
,', ,, ' 5011
, . b.!au - fcere , p' di,s pu bl'Iqu ement & p 1us que gratuiremenr
" U1 J ~rte ci-deva:nt . 'le qUI avait éré d'autant plus. fenlible qu'il e~
Ollls dar>S le
'
" U3 He ment de
"'m
.
. cas
'" de s'a. (urer
ou d' encl urer un parc!1
" q UI qlle ce putrfe erre, pm la chp(e avec ram de N oblerfe 'l ue c'était
' s ~r~ Je
. 1e lUI' a urols
'~
,
'" I COp' & li J'e l'avol
,
tlonné toUt
de fuite pour,
t>
-le ~~ ..~u SiiollJant
OU
11 va poUfct. l'hiv,r~
19 1
loin de lui le glaive de la vengeance, ilue {auro it q u'ê~
tre odieux que ma femme ofe le ramarrer pour s'en fer vir
.contre mOL.
Et voilà donc à qu els excès on a pouffé Madame de
Mirabeau! Par qu elles étonnantes manœuvres a-t- on fait
tout-à~coup d'un caraaere doux & modéré , une femme
implacable &. fLlrieufe, qui pourfuit la vie &. J'honneur
de celui à qui elle av ait juré amour & fidélité , qui injurie une famille dont elle n'a qu'à fe louer, un beau · pere
qu'à tant de titres elle doit reCpeéter, qui l'injurie juCqu'à
ofer J'inculper de la plus vile des cupidités, jufqu'à dire
qu'il n' w veut qu'à. Jes biens ?
Ah! c'dl: dans leur propre cœur que des hommes avi·
des Otlt trouvé ce motif ! Mais ce n'dl: pas dans notre patrie qu'on devoit nous en accufer. SI mon pere en a vécu
trop éloigné (&. je recueille aujourd 'hui des fruits amers
de cette circonfiance ) plus de voix auffi peuvent répondre
du défintéreffement d'un homme qui n'a jamais rien demand é en fa v ie. M ais mon oncle, dont le feul afpelt
défarme la calomnie, mon oncle a v ecu fous les yeux de
nos témoins aétuels. Ceux qui le furent des mœurs de
tu n grand'pere &. des Centimens de Ca famille, ne font
pas encore tous éteints. Les vieillards de leur temps avaient
connu leurs "yeux; &. fi jamais ils encoururent quelque
reproche (ce qu 'on ignore, ce qu'on ignora ju[qu'à m oi)
ce reproche fut certainement le contraire de la cupidité.
En un mot,. mon pen a défli>gé pour fa belle- fille à [es
devoirs de curateur, il l'a laiffée maîtreffe de [on bien'
j'en faiCois de même: fous quel prétexte vient - on don~
nous parler de ce bien?
Ceux qui penFent vraiment à en hériter, ont - ils cru
nous 3€cuIer d'ulrJ grand délit, en diCant que nous defirons d'es enfans? J'en appelle à tous les peres. Quel cft
celui qui renonce à [a pofrériré pour les égalt' mens de la
jeuneffe de {on fils ~ [ur-tout qpand ce fils, vcutt réparer
•
�r
193
J92.
fes erreurs. Quelque odieufe interprétation qu'on ait eu
l'horreur de donner aux lettres de mon pere aIl arme
prévenu, trompé, à quel homme de bonne foi aura-r-ol:
perfuadé qu'il vouhît m'accufer de mettre la vie de ma
femme en péril, par ces mots tant cités, de sûreté, de di.
gnité & de repos. Qui p:ut
voir autre ,chofe. 9ue la
_ crainte que je ne déternunafie ma femme a me JOIndre,
comme elle y paroiifoir difpofée dans un temps où Jo,
dignité & .rOll repos auraient femblé compromis par Cette
réunion; & c'eil à cette efpece de sûre te que mOIl pere
fe croyait obligé de veiller.
Eh! quel rapport entre ces circonilances orageufes &
celles qui fe préfentent aujourd'hui? C'eil dans la maifon
d'un oncle refpefrable, fo us les yeux de fon propre pere
qu'on a invité Madame de M irabeau à venir confirmer
ma réintégration . Er quand on lui auroit propofé d'aller
cOI1(oler un vieillard accablé de traverfes, & dont elle il
éprouvé la tendreife, cette propofition n'auroit - elle \las
été convenable? Ah! oui, plus convenable fans doute que
des efforts barbares pOLIr g raver de la main d'Ull pere l'a.
nathême fur la tête d'un fils, d'un époux.
Non, de tels fentim ens n'étoient point dans le cœur de
cette jeune femllle. Pas un mot de moi n'avait pénétre
jufqu'à elle, quand elle demanda à mon pere de venir le
joindre lorfqu'elle eut perdu mon fils. Elle y venoit en
efier, fans la mort de M. de Valbelle, qui lui fit retarder
fan départ pour rendre à fan pere aftligé les devoirs qu'exigeoit cette triile circonilance. Et qu'on ne dife pas que
ce fut un· mouvement fupir & l'eff~ t cI'ulle douleur qui lui
ôtoit l'empire de fes pro pres pen fées. Ce projet fubfifia
long-temps; plufieurs mois apre~ il fut queftion encore de
veni r à Paris avec M. le Marquis de Marignane, qui devoi t, auffi bien que Madame de Mirabeau, loger chez
mon pere. 'Penfoit - elle alors pouvoir m'en feq uefirer il
jamais? Où croyait-elle que ce beau-pere, avide de biens
r
.
.
2>< de poflérité, ne pour~oit pas l~ rete?ir pa~ q~elque
furprife? Qu'a-t-il donc fait pour ~u on .IUI té,mo.lgnat alors
tant de confiance, & qu'on le traite aUJourd hUI en agrefJeur cupide & parjure? Qu'ai-je fait moi - même contre
mon beau-pere & contre fa fille, que cie lellr donner des
·armes de foumiffion, de repentir & d'aveu dOllt on fe fert
aujourd'hui contre moi?
.
.,
. Mais mon pere m'a rendu ma lIberté; Il ma em' ?yé en
Provence. E t devant quel Tribunal le pardon fera-Hl donc
un crime? D'ailleurs av ois-je befoin de venir en Provence
l'our redemander ma femm.e.? Ne 'pouvois.je pas au co~
traire m'éloigner d'un domIcile qUI me retrace de fi pres
•
• C
? D' un
mes premieres erreurs, mes premieres
lllIOrtunes.
domicile fi voiÎln de mes créanciers? & rappeller ma femme
à celui de mon pere, à tout autre en un mot? Mais je
viens en Provence, je viens dans la maifon de mes per~s ;
je viens chercher & mériter, s'il eil poffible, la cautIOn
de mon oncle; je viens rendre à me~ creanciers I~ur gage
naturel · je viens réparer, autant qu Il ell: en mOI, celles
de mes' fautes qui ont préjudicié aux droits du tiers .. ~e
vois-je ,kmeurer à cinq lieues de ma fe!Ilme, fans. ha dire
qu'elle étoit le pr~mie~ de .mes fouvemrs? Ne. lUI donn~r
aucun figne de Vie, n auroJt-c~ pas été a.~qul~fcer mOImême à cette féparation, depUIS laquelle JavOls éprouvé
tant de malheurs? ----Que fais-je? Je m'informe de fa fanté ; je ne demandois
pas de retrouver une femme empreifé,~ , & ?'auta~lt plus
atteijdrie fur le fort de fon époux qu Il av Olt mOIns mérité les empreifemens de tout autre; je ne demandois
pas que Madame de Mirabeau s'écriât avec Aurelie :
COUPABLE JE T'AIMOIS; MALHEUREUX JE TE SE RS.
Mais j'efpérois du moins des politeifes , froides d'abord fi l'on v.eut, mais mefurées. J'efpérois qu'on ne
me :efuferoit pas de m'entendre ; qu'on ne refuferoit
'Fas à JUa famille une forte de concert; j'efpérois toute
Bb
&
•
�I94
autre choCe enfin que des hoftilités, que des rnen:!c e~'
que l'annonce D'INVOQUER LE SECOURS DES LOIX'
Je ne rou gis pas d'avouer que je ne pus croire il d~
telles apparences. Autrefois coupable, fugitif, {uivi , faifi
ram ené, puni, tout cela me vint de ma propre famill,,:
La haine de m on ~pouCe attendoit-elle le temps du re.
pentir ? Je ne puis me reprocher de ne l'avoir pas cru.
D'autres indices , d'autres rapports me faifoient penCer
l e contraire, & je voyois ma femme ébranl ée, tan dis
m ' me gu'on préparoit les hoflilités. AulTi la Province
entiere m'eff - elle témoin de l'honnêteté que j'ai mire
dall5 mes démarches, dans mes demandes juridiques , au
moment où j'étois prm'oqué par de [anglantes inCultes,
Eh bien! c'eft au milieu de telles circonflances que Ma·
dame cie Mirabeau, c Ile à qui l'on a fait Cigner un Mé·
moire que l'on a reg ardé comme la déclaration du di·
vorce entre nous, écrivoit à ma Cœur dont elle connoît
la tendreife pour moi: AH! POURQUOI M. DU SAIL·
LANT NE PEUT-IL PAS FAIRE LE VOYAGE Dt
PROVENCE COMME IL A FAIT CELUI DE BE·
SANÇON ? Que vouloit dire cette invocation? Madame
de Mirabeau eCpéroit. elle faire partager à un homme
d 'honneur éprouvé, le hideux perConnage d'avide collatéral ? Et mes parens n'écoient-ils pas en droit de penfer
qu'elle ne demandoit que du temps & du courage pOlir
tacher de concilier des eCprits oppofés? Quand el) 1778
& 1779 elle a voulu demeurer chez mon pere, elle (avo/t
bien qu'elle pouvoit un jour vivre fous le même toit
avec moi. Quand en 1783 elle appelloit mon beau·frere
à fon aide, elle fait que fa femme & lui ont été aupres
de mon pere les premiers interpretes de mon repentir;
elle fait qu'ils ont les premiers réc1i1mé ma liberté; elle
fait qu'ils ne deCirent que ma réintégration.
Je demandois ma femme quand elle écrivoit ces pa~
raies: AH ! POURQUOI M. DU. SAILLANT NE
195
PEUT·Œ PAS FAIRE LE VOYAGE DE PROVENCE
COMME IL A FAIT CELUI DE BbSANÇON .....•
paroles inexplicables, fi ce n'étoit pas 1I0tre réunion qu'elle
defiroit ! Quai·je fait depuis? L'ai·je demandée d 'un ton
qui pût l 'offenfer ? N'ai-je pas fait pleurer [ur elle & [ur
fon fils? Quel peintre embellit jama is plus que moi la
femme que je regardois comme ma compagne? Sui.· je
coupable d'avoir penfe que celle qui me jura aux pieds
des Autels de par!<lger les biens & les maux de ma vie,
ll1'aicleroit aujourd'hui il me relever de mes dUaflres?
J 'a vais dll l'augurer de [a conduite au temps ou nOlis
h <tbi t.îmes enfemble. Ce période fut de plus de deux années. J'~tois alors dans toutes les angoilTes du dérangement. Elle quitta tout pour me [uivre; elle étoit contente des févices continuels qu'on affure aujourd'hui que
j'exerçois envers elle. Un jour quittant la modefle retraite
ou nous vivions dans l'obfcurité , elle [ut au Château de
[on pere; elle y trouva la joie & les [êtes. On voulut
la retenir, lui refufant tout d'ailleurs fi elle venait me
rejoindre. Elle revint; & le lait dont elle nourriifoit mon
enfant, tarit de la douleur d'un tel accueil. Elle revint
en pleurant, mais [ans héfiter. (1) Voilà la femme qu'elle
fut lors que je la maltraitois. Qu'elle [e compare ellemême à ce qu'eJle fut depuis dans des temps plus fâcheux
(1) Primo toms ÎHlIxit, nunc ipfa p"icHla jungant.
OviJ. L. 1 . Metam.
La Loi m~me toute impalTible qu'e lle dl, <il péllérree de ce (e~ti
-ment) palec qu'une Loi f3ill~, n'dl q.ll ~ la n3rure r~ljt:. 0/~d ('mm ~
( Ilm hJ:m~mltm tft 6j1t{!t'}) fOrTHu/J c.ifibllJ mU/lfrlJ 'Nzrlfllm 1Jel
vir; partir pem cJJc? 1 . 12 , § 7 ,If. folu r. 11/'.lr;m. Et adleurs :
<L. 1 . de tipt. ""Pl.) m.HrtmOnthm tft .onforl/IU" m,nlS 'Illf&, ,d cft,
{oçùtaI p'-ofp(r~ & "dwrf~ fOrllm~.
<lie-elle: )
'1Ixorem
Bb
-
ij
�196
encore; mais où l'on préparoit ce que l'on voit éclore'
aujourd'hui.
Tous ces fouvenirs font fans cloute effacés de fan ame
graces à ceux qui ofcnt me taxer d'intérêt, & qui n'e~
ont & ne peuvent en avoir d'autre en tout ceci, que de
détruire toute intelligence entre les deux familles. Ils ont
fuivi leur plan odieux, en verfant fans relâche tous les
poifons de la méfiance & de la haine dans le cœur de
Madame de Mirabeau; on m'a empêché de la faire expliquer, de la voir, de l'entendre, de lui répondre. J'ai
réclamé l'autorité des loix pour la foufiraire à une telle
obfeffion. Les Juges m'ont accordé l'injonétion qui ne
pouvait m'être refufée. Alots ceux qui voyaient échapper
leur proie, ont mis le comble aux procédés violens. Ils
ont furpris ou obtenu la ugnature de ma femme, & l'ont
appofée au Libelle qui outrage moi & , les miens avec
une fureur fans exemple dans l'hifioire des dilfentions domefiiques. C'efi ainli qu'on a voulu établir, motiver;
démontrer aux yeux du public, la demande en réparation
de ma femme, difiraire les Juges de la futi lité, de l'abfurdité du pr,ocès, de la fainteté de mon titre, de l'invincible force de mes moyens, & ne porter leur vue,.
leur attention , leur efprit, leur fenfibilité que fur les
perfonnaIités ~ fur les dangers qui en réfqltent, tandis
qu'une foule d'honnêtes gens penfent encore que cette
prétendue répugnance qui femble tenir aujourd'hui de la
haine la plus forcenée, n'exifie peut-être que dans l'ame
de ceux qui ont tout fait pour l'exciter.
Quoi qu'il en fait, après de telles déclarations, c'efi à
,moi à renfermer dans mon ame mes fentimens , & à voir
que ceux q1,li fe font emparés de celle de ma femme, ne
1ouffriront pas notre réunion. J'ai celfé d'y penfer depuis
que le Libelle a paru. Je ne me fuis pas occupé un infiant
'<ie cet efpoir , qui n'efi ,plus qu'une illufion en écrivant
ce Mésp.oire. La modération que j'y ai mont,ée , j'ai cr~
197
me la devoir à moi-même, à moi Ceul. Le~ ménagemen'
que j'ai gardés n'ont point eu d'autres motifs. D'ai11eur~
je n'ai penfé qu'à ma jufiification.
Je viens de dévoiler ma vie prefque entiere. J'ai livré
tous ceux de mes fecrets qui p'intérelfent que mOI; & je
jure à la face de l'Être des Etres, que tout ce que j'aï
palfé fous filence me jufiifieroit plutôt qu'il ne m'accufe-.
rait •.... Oh! qui ne me plaindrait pas d'avoir été con-,
traint de m'abailfer à de telles apologies?
Sans doute je fus très-coupable; mais l'ai-je été ' dei
crimes qu'on m'impute? Sans douce je fus très-COUl'able i
mais méritais-je d'être diffamé, d'être dépouillé dans 'le
moment où je venais rendre mes concitoyens témoins
de ma conduite, arbitres de ma régénération? Heureux!
trois fois heureux celui dont la feve ne fit
trop 'd'effort
dans l'effervefcence de fa preiniere jeunelfe ! Ce bonheur
ne m'était pas réfervé. Mais ils -[ont 'trop jultes ', md
dignes compatriotes, pour vouloir faire revivre des' fautes
que ma famille a pardonnées> 8{ me juger auffi cruel1ement que je le fuis par ceux qui, après elle, ' avaient
peut-être le plus d'intérêt à y regarder Heux fois.
Je pardonne ....• _ Oui, je me .cens capable dC"par';
donner il ceux qui m'ont réduit à cette extrêmlté vraîment
affreufe ; à ceux qui ont armé de Libelles, de çalomnie!O
&. de diffamations les mains de tout ce que j'avais de
plus cher; à ceux qui ont féparé ce que le Ciel & les
hommes avaient joint; qui ont' perfuadé à une femme
faible & t(mide que quelque ' chofe au monde .pouvoit
lui donner le droit d'être la délatrice de fOA époux; que
quelque 'devoir pouvait entrer en parallele avec celui
de refpeEter fan honneur & fan nom. Ils ont achevé de
détruire mon bonheur; ils ont achevé ma ruine; 1 il?
pt'ont arraché l'efpoir de réparer la perte d'un\ fils ' ~ue je
pas
- -
1
:
1
�,ff!
,
~g
pas C;~I1."é d:: plelH'~r. ~ncore ~l1e ' fois; je leur pa ....
'!onne. ~als s ils crOient a un DIeu vengeur & rému..,.
nèrateur, ils doivent trembler. Je leur pardonne:
Mais que no s concitoyens inftrùits par ma trifte defii:
née, mettent à profit mes malheurs; qu'ils rendent un
çul:~ ~:ta , y?ix domeilique; qu'aucun {acrifice ne leur
~<))1.~~e ,r;our 1obtfAür ~ , que les di~entrons, qui pourroient
~ Meve , dajls leurs nJ<llfons, y fOlent toujours terminées'
qu'ils., n'interfo Cent jàmais entre ceux qu<. la nature ou l~
{o/t Je..~~ aJ~~ , des tiers indifférens , des cornfeils étrangers.
Autn::fOlS ch~~ !:es 'Romains s'il [urvfQuit quelque diffé.
~c:.f\d ::, ~ t:e . ~ u x époux , leurs parens l~s , ~onduifo ient
a ~~jj 8 ~gx_I!Wte ls de Junon . Cette DlVllllté pacifica.
ft? c:: IQ} ' ~Yeir (ous fa garde l'union _& la foi conjugale.
~lÎiés dans [ on . Temple, les ép o ux aigris fe communi.
,uo.ient..i~ u~sr [uj~ts ide plaintes; ils ne Ce quittoient point,;
ys n,e, lor.tqi,ell~ FP'iUt ge ·)'.epceinte !é}cr~e, que le mari
J?1:) ùt ~ffiJal~é:;;, que l~ .fe91me pe fût attendrie, que \"
cOiifia n.'J:.l ;q~j ,Ijl :paÏ?' t !:q\le l'al!lour n.e fufTent renrr.és
~l)S -leur fe~l:: ~ cerres ', dit l'Hift.orien qui nous a tranf.
tt: 1S c~ttlll pie~te coûtume, il , n'eft point de culte ni de
{acrlfi,ces , q~l(~~ .c~\t~ 1?ivi~lit~ [ecoutable ne m érite d'être
honort~< , -pUlCq4 efIe maintient a,vec tant de follicitude
~ ~ tralJ5.luilIité dDmefiiC}liC " pllÎCCLue. 'p.ar une charité toute
é.g~ta.qle j ~.ute généreufe i ,.eHe r~d la m~jefié au mari
~. 1honneur à, la femme ,( 1.) •.
1
.
199
les temps lont chang~! Les mœurs iimpfès,;
les mœurs purc.s, 1es mœurs r.eligleuœs bnt fui &. le
bonheur domefhlque avec elles. Ce n'~(t pfp s dnŒ d~ TwnpIe, ce o'ell plus aux pieds des Autels. , ce. n'ell point' au
rein d'une religion d'unio n, de paix &. d'amour que les
époux malhellreult VOJlt cherch er des remedes à leurs
maux: ils appeUent le divoroel; ilg Ce VOtltmt à la guerr~;
ils la font d'aut3,l1t plu~ atro ce, que l'indépendance eft,
au fond s, l\unique obj:et, de Ieur& vœu ; ils empruntent
toutes fes armes à la chicàne; ils 'en illl-'V oquemt, il s en
ra!remblent, ils en a11le:uteml les fuppôts. Leur cabinet
devient l'antre d'où la difcorde fouille la haine, lX f~j;
f ureurs &. [es vengeances.
.' .
f 1
Au temps où ' la corruption publique n'av oit pas bouI·
Yerfé les inftitutions auguftes des anciens, 011 né fouffroit
pas que les clients empruutaifent 'l a voix des patrons; on
exigeoit que les parties Ce préfenta!reot touj(l)urs elles·
mê mes, 8< v.iu!rent déoéler i "l'at'.Ja forte d"ingénuué de
-l'inexpérience . Leur droit ou leur tort, la flm; érité QI.Il'fjy..
'l' ocriGe, la vé rité ou la fauifené lilll·.l.elJlrs alrl6gatio DS St di::
deurs rliaintes (1). Le grand objet
cm u::os' légiilatio'ns
au·
. ,
,
Ob . que
j
1)
,
.
( 1) Je regrçte ce rte c~û tume fu ~ lou t dans ~ p,ocès qui intérdfent
les mœu rs, 13cau problême à réro udre que 'JI' (avoi r li des hom mes
in(ho its na,lS les ru res & les refftlarces ' du ' Pa laIs ,1 p. r ~ iend(o n t à jecrer
~uel ÇJ ue obrcurité (u r une cauCe q ua les (e ul s délais de fo rme rendent
f'!il idieu Ce _ ~ do uteuCe! S dn~ doute il auroit été bien Illils /impIe que
l'épouÎe don t q uelques parens ont de bonnes rai rons pou r exagérer &
fomente , les rép uguances & les craintes 1 d'aaleurs trop Il:;'lurel\es après
les fa uffes d é m ~ r c hes aUll q uelles 01) J'a .ppu crçe; (ans do ~ te il aurait
été bie n pl us {i mpIe (lue cette épou(e vînt alléglie , e)le-mê\l1e (es griif,.
Cl n auroit démêlé ai Cément li elle Cui voir ou cqmbatrpit le vœu de' fOI\
cœur avant qu'on l'eût imbibé du poiron de la calomnie & <il: la
haine, Le procès ~ toit termi né li Madatoe de Mirabeau m'eût e l,~ndll
le 1 0 Mars , . ,. , T el fm le cti de tOUS les Aud iteurs.
�%00
~ulles étoit la concorde domeftique, feol garant
r (.
p~it public> de la paix intérieure, de J'alllilur de; ePa
trIe. Chez ces peuples, il n'étoit point de profeffionad d"lOtéret partlcu l'1er .e
r
trouv â"
t pmals contraire à l'int 'Ont
•
focial ( 1).
.
,
eret
. C'eft lorCque l'Aréopage fe crut forcé, par la multipli_
cité .des caufes & la confufion des Loix, d'ufer de quelque co~de[~?lanlice e~v.ers les parties, & de leur per.me.ttre . es e en eors ettangers; c'eft alors qu'on jetta des
VOiles Impofteurs fur les chofes même les plus évide!lt
' h I es,
.pour en- dero er a nature aux yeux inattentifs' c'eft alo'
, fté" d l '
ts
q~e l au rIte e a ~ora,le /ut facrifiée aux graces du
dl(cours (2), & la vénté a 1 amour propre irafcible des
-Rhéteurs.
'
. Mais. du moins un Orateur, en commençant fa caufe
Froférolt le ferment de dire la vérité. Mais pour rendr~
~e fermen.t plus redoutable, on faifoit affeoir celui qui en
prononçoit
. fi'
,
' & laffiformule.,Jur les reftes [anglans des VI~l!meS
~gorgees
o. er;e~ par ceux à qui il appartenoit de les
~mmoler.. MaiS 1accu[ateur ne bornoit pas ft lui [eul les
!mpré:auo.ns affreufes dorit il chargeoit fa tête coupable;
JI c?nJurolt les ~uménides d'étendre leur courroux fur la
faml~le, fur fa ville, fur fa patrie; de venger fur le repos
r
.
parjure.
----- Ah! détournons les
F ublic rh o r reur d e .on
yeux de ces temps majeftueux, fi nous ne voulons pas
Jrop nous exagérer notre petiteffe! Mais craignons, en
effayant
a
A
•
(1) les c'
Athéniens
bannirent un O
' qUI" vendon des cercueIls
, ,
r:
uvner
paree que rallant un profit d 1
d
'
"
petr de la delirer.
e a mort
(1.), SalibuJ cmè &
,
'lJllfctmuJ & l'ortadf
Ç.
,
l
.
'
J'
'JI'
es CItoyens, Il étolt trop fu(-
iji'
. duo plurtmum
' , alT,am VAlent
t rrAttone 'lUt
'/
'II '
"
,
1J '
,
ept "loJ 1 1 m~s ,t1l1fllflS ab(lHlerÎf. Quiuc. 1. ~.
CI'",",
201
refTayant de nous approprier les urages de ces Nations
colofi'ales, dé n'en avoir confervé que les défavanta ges.
~ Soupiron~ ' ~ rapprochons·nous de nous-mêmes.
~ - Puf(qU'll ne nous appartient pas de changer l'orclre judiciaire; puifqu'il nous ell: impoffible d'échapper aux inévitables inco~lVénîens qu'il elltra~ne; pllifql.1'i! nous faut
coptier nos inté~êts à des hommes que noUs ne .pouvons
. pat toujours pénétrer de nos fentim ens, lier de nos de,foirs; inv'eftie de nos rapports; au nom de notre intérêt, au nom de ce Dieu du fiecle; terminons dans le fein
de nos familles les divifions <J,ui n'intéreffent que nos fà. ,ciil\es.
'
Le glaive de la dHfamatiorl & de la douleur a déchiré
la mienne en deux parties; elles faignent & palpitent. Qui
pourroit cicatrifer une teHe bleffure? Je l'ai dit: je n'en
conferve, je n'en cherche pas même l'efpoir. J'ai dt\ me
défendre; j'ai d~ débattre les horribles calomnies dont on
m'a fou illé; j'ai dù m'en ·laver. Si j'ai rempli cette tâche
cruelle, & que la divulgation de.s lettres de mon pere
( rêlry,~t' fi ,..?fllÈ~~~ p~ur l'on fiJ~, fi je ,l'ai rempli e , c'e~l eft
affez, IX Je-garaeral défonnals le {}Jence. Je ne feral pas
à Maclélm,e de Mirabeau le plus léger reproche. Je m'en
rapporte, fi ce n'eft à fon' cœur , du moins à fa confcience.
Si fon cœur eft content, fi fa confcience n'eft pas bourrélée, je l'abfous autant qu'il eft en moi; car Oll me conduiroient ces affreufes controverfes ? Le temps qui court
fur ma tête d'un pied plus léger que fur cell e des autres
mortels, m'a éveillé de mes rêves; & je n'ai point encore
vu que la colere, l'orgueil & la haine produifiifellt au tre
chofe que des maux.
Les Loix ne peuvent me refufer ma tèmme ; mais leur
puiffant fecours ne peut rien fur les cœurs; & c'eft le fien
que je voulois reconquérir. Je defirois la fOllnr aire à ceux
qui ont tant d'intérêt à nous féparer; je voul ois la fouf.
traire & non la déchirer. Eh bien! qu'ils triomphent! Je
Cc
•
�2.01.
ne prétend pas forcer la volonté de ma femme. Je me
devois cette déclaration auffi bien que l'expofition de hies
défenCes. Je veux, parce que mon honneur l'ordonhe
je veux que mon proc~s Coit jugé. Les . Juges rempliron;
leur miniftere. Je m'abandonne à leur fage{fe, lit lailfe
un champ libre à mon AdverCaire.
,
Qu'elle parIe donc encore; qu'elle m'acheve, fi elle en
a le courage. Pour moi, je me Cen's la force cre me latte'
je me fens la force de former, ~e profèrer des vœux pou;
elle, pour elle qui m'a voulu déshonorér. 'Oui, que ie
Ciel qui m'elt témoin qu'elle 'ne reçut de 'm oi qtie dès
hienfaits, que le Ciel m'envoie tout le mal que je lüi di:.
fire.
C'efl à mon Confeil à m'apprendre ce que les Loex accor,'
dent à celui qui a été auffi cruellement 'aL.ffamé & calomnié
que je le fu is par le Lihelle auquel je viens de répondre.
HONORÉ - GABRIEL DE RIQUËI'I i
COMTE DE MIRABE~U, fils.
.-
JAUBERT, Avocat.
\
-
"
•
�Il
r
CONSULTATION
V~
le Mémoire à confulter & Confultation pour Madame
-la Comte1Te de Mirabeau, dont un exemplaire imprimé a
.été lignifié à Mr. le Comte de Mirabeau le S Avril 1783 i
oui ce dernier, Nous ESTIMONS:
Que les écarts de cette produB:ion injurieufe au Comte
de Mirabeau, inconcluante & inutile à la demande en fé~
paration de Madame {on époufe, jufiifient qu'il étoit im ~
poffible de prévoir par quels moyens on {outiendroit cerre
demande. Ils - prouvent combien nous avions rai{on de
penfer & de déclarer au commencement d~ ce fatal procès,
qu'il ne paroi1Toit pas que Madame de Mirabeau pût trouver
même un limple prétex:e pour (e refufèf aux réclamations.
de {on épol,lx,
Nous avions alors fous les yeux les lettres qu'elle lu i
avoit écrites dans J'effulion de fon cœur; & lorfque nous
crûmes que fon mari devoit les rendre publiques, nous e{.,.
péri ons encore que Madame de Mirabeau, jaloufe de fe
re1Tembler, ne réliHeroit pas aux témoignages de fon anciellne tendre1Te, tracés par elle-même avec liberté, dans
des temps non (ufpeB:s, & exprimés avec autan t de véritô
_que de grace.
Cependant on a fait à cette démarche du Comte de Mi...
. ra9t)au un double reproche. Ses amis, ceux même qui G1I1S.
_la . publicilt~on de fes lettres fe {eroient peut-être rangés
au parti de fes Adverfaires, jugent que leur publica tion ~
.été prématurée; mais C'tG: qu'ils fentent quel effet elles
produiroient, li elles paroi1Toient aujollfd'hui pour la pré ..
JIl~ere fois,· ~ gu'ils ql~nignent que J'impreflion qu'elles Ol~~
1\
-- •
�'l.
faite, effacée par le temps, ne cede à la fenfation qui ré.
[ulte toujours d'imputations graves, quelque calotnnieufes
qu elque abfurdes m ême qu'elles puiffem être.
)
D'un autre côté, Madame de Mirabeau fuppofe que la
p ublication de fes le ttres juf!:ifie la divulgation qu'elle s'en
pe rmire dans le Mém oire ligné par elle.
Ma is que la publication des le ttres , de Ma,da.me ~e Mi.
r abeau foit nouvelle ou ancienne, en exif!:ent-elles moins
t elles que le public les connoÎt? Les conféquences en font.
elJes moins frappantes? Et peut-on comparer les mOuve.
mens refpeél:ables de l'union des deux époux, préfentés au
public par
m ari foupçonné, dans le moment où l'on vou.
loit fd ire penfer que leu r cohabitation feroit dangereufe?
peut-on les comparer aux diat ribes éc!1âppées à la plume
trop féconde d'un pere féduit ou préveriu, & publiées dans
la feule vue d'outrager fon fils par la plus cruelle diffa.
mation?
Rien ne paroiifoit plus propre à ramener la paix domefl:ique que le tableau de l'ancienne . union. Tous lès
h onnê tes ge ns ont deGré de la voir rev}vre. S'ils 6nt ap·
'plaudi ;ux défenres du mari, dans lefqu~lles on voyoit plutôt
le deGr d'empêcher le procès , que des hof!:ilités judiciaires,
combien n'ont-ils pas dû être révoltés du fyf!:ême mis au
jour a u nom de la femme, prop'r e fans doute à détruire
l'efpoir d'une paix prochaine , mais d' un ton bien peu con·
venable à une époufe rappell ée par des fupplications ' & des
prieres aux devo irs que cette qualité lui impofe !
Ce.tte efpérance de réunion guida les premieres démarces du Comte de Mirabeau. Lorfqu'il v0!llut s'aH'urer
par nous de le ur régularité, nous nous b.ornâmes à pofer
le principe immuable qùi doit régler 'les caufe~ de · fépar a tion. Nous ne voulîlmes pas nlors montrer à découvert
la refpeél:ab le auf!:e rité des Loix matrimoniales, & la rigidité de leurs conféque nces. Nous craig nions, .& nous avons
lieu de craindre encore, que le tal11eau des- devoirs ' d'une
le
3
époufe tracé par la Loi, n'effrayâ t celle qu e l'himen n'a
éclairé que dll flambeau de l'amour, & qui probablement
depuis fa féparation n'a pu dif!:in gue r les objets qui l'environnent & fes rappons avec eux, qu 'à travers la fumée
de l'encens qui brùle à fes pieds , peut-être même à la lueu r
j.n.cert~ in e çles feux qui le confument.
Aùffi DOUS parut-il fuffifant d'indiquer le prin cipe qui
ne po uvo it êt re , méconnu, & que nous devons tenir pour
avoué, puifqu'on n'a pas oré le contredire. Lorrque nous
nous abfien ions d'e n tirer des conféquences, nùus fuppofions que fi Madame de M irabeau ne les voroit pas, elles
feroient apperçues pa r ceux qui l'e ntourent, ou du-moins
par ceux d'entr'eux qui n'ayant & ne pouvant avoir d'aurre
in térêt que les Gens, ne doivent faire des vœux que pout'
la paIx.
C'étoit à ceux-ci à déc hirer le voile qui cache aux yeux
dé cette jeune femme les précipices qu'on creure fou s fes
pas; c'étoit à eux Il lui en montrer la profo nde ur. Ils pouvoient feuls di ffipe r le prefiige auq uel elle ef!: li vrée ; il s Je
devoienr; & s'ils l'a vo ient fa it, ce procès ne prélenreroit
pas le douloure ux fp eél:acle qu'il offre à la Ju!tice & au
Public, & don t le fc anda le s'aggrave de jour e n jou r.
On avoit vu dans le s lettres de Madame de Mirabeau
un e re ndre 'époure reg rettJnt l'ahfe nce de fon mar i , foupjrant ar,:é '11ment après fon ret our. Toutes les affe8ions
~e fon al) e lui fl i(oie nt regarde r comme des loix les volontés de fon époux. E lle appe lloü l'o bliga rion de s'y conforme.r. uo de1Joir Jadé.
'
'
. L e Memo iré prefente cette même femme agirée d'ulle
Û'J.rJe _Qe fren é.lie ~ voulanr attente r à l' honneur de fon mari,
effaya.ot mê me de l'immoler de la ll1ain de fon pere; contente' fi elle peut affure r fes coups, en arrêtant IJ défe nfe
narurelle par la pieté fil iale ; aimant mie ux s'expofer ,Ill
{oupçon de dupliciré"que de laiifer l fon é poux l'efpoir de
re trouver chez elle les [e.nrimens qu'il aimoit à lui fuppofer.
.
A 2.
-
�4
Qu'dt-ce donc qui peut mériter au mari de tels traite.
mens? Après avoir expié les erreurs de fa jeuneffe, il a
r éclamé des droits qu'il n'avait pas perdu, que jamais il
n'avait mé rit é de perdre. Malheureux d'en avoir vu fufpendre l'exercice pendant pluueurs années, devoit-il s'attend re à les voir entiérement oubliés ~ Pouvaient-ils l'être 1
Avant toute réclamation n'a- t - il pas été provoqué par
des mépris infultans? & par qui? Par une époufe à laquelle il n'offroit que tendreffe & foumiffions. Quelle di_
vinité recevrait ainft les ftlpplications & les prieres? QueUe
eft celle, qui même offenfée [e croirait le droit d'ê.tre implacable? Et c'eft une femme, c'eft une époufe dont les
premiers vœux furent d'être unie à celui qu'elle repoutre
nli j oU,[d' bu i.
Ce Cr elle qui refufe de le voir & de l'entendre; qui
ti ans ce moment même oll tout lui reproche [es imprudens refus, voudrait ne voir qu'une fois [on mari, ne le
voir qu'avec l'affurance de ne le revoir jamais; qui voudroit
ne le voir qu'à condirion qu'il figneroit [a home, c'eft.àdire, qu'il [eroit avili, dégradé par [es propres acquiefcemens. Que ne pouvons-nous dire encore : non, de tels
procédés ne viennent pas d e Madame de Mirabeau! que
ne pellt-on effacer fa fignature du Mémoire, que peut-être
elle n'a pas lu !
.
Depuis cette cruelle produél:ion on [e demande de toute
part, où peut donc aboutir cetre guerre cruelle? Et l'on
gémir!
Jufqu'à préfent le Comte de Mirabeau a repouffé avec
la plus grande modération tous les traits qu'on a lancés fur
lui. Ce n'eft pas l'époufe du Mémoire; c'eft celle des letcres qu'il cherchait; & il s'obftinoit à la voir dans Madame de Mirabeau. On véut lui per[uader qu'il [e fait
iltufio n. On veut arrêter [on empreffemenr, en défigurant
l'objet de fes pour[uites. On veut du-moins accomplir fes
tuneftes prédiél:ions. On veut faire pen[er qu'il avait bien
~
raifort de dire à fan époufe le 20 Mars : On té 'compra-'
mettra par une difenfe forcénée ; on m'outragera; Oll s'ef!àrara de me rendre impojJible de vivre déform ais avec toi.
Ceft le [eul moyen de féparation qu'on ait pu trou ver;
moyen révoltant, moyen atroce, mais moyen infructueux, fi Mr. de Mirabeau peut prendre fur lui de pardonner les outrages qui lui viennent d'une main qui lui a
été & qui pem encore lui être chere.
Confidérons cette caufe fous deux points de vue. 1". Les
moyens de féparation employés dans le Mémoire de Madame de Mirabeau font-ils honnêtes? 2 0 • Sont-ils prouvés
& concluans ?
Si ces moyens ne font pas honnêtes, la Juftice doit
les repouffer, & Mr. de Mirabeau peut fe plaindre de
l'emploi qui en a été fait au nom de fan époufe. S'ils ne
font pas prouvés, s'ils font inconcluans, leur infuffifance
ajoute à la gravité du dé\it, à la juftice des plaintes; &
Madame de Mirabeau déboutée, ou non, de fa demande
en féparation ne peut qu'être foumife à donner à [011
mari les plus amples fatisfaél:ions.
On a vu dans les obfen·ations fur le Mémoire, comment
l'emploi des lettres miffives d'un tiers contre un tiers était
abus de confiance, révélation du fecret, viol du dépôt.
On 'a vu combien la qualité des parties & l'efpece de la
caufe rendoient plus grave cette forte d'infidélité. On a
pu juger combien les exemples rapportés étaient moins
défavorables à la divulgation des lettres, que celui de la
caufe du Comte de Mirabeau.
Il s'agiffoit, lors de l' Arrê t rapporté par Catelan, d'un
crime de fimonie, efpece de délit caché que le ha[,1rd feul
peut faire découvrir, & qu'il importe néanmoins de réprimer. On trouva dans une lettre du fimoniaque lui-même
des preuves qui devaient faire adjuger à fon compétiteur
le bénéfice qui donnait lieu au pr.ocès. Le Parlement de
'T oulou[e n'eut cependant aucun égard à la lettre; il or-:
Pldidoycr ,
pog , l a.
�6
donna qu'eIl ~ (eroit rendue à celui qui l'avoit éèrite; il ah.
[out le coupable, & lui adjugea le bénéfice au préjudice du
dévolutaire.
D s lemes écrites par le pere à (on fils ont é~é rejettées .
quoique les preuves qu'e lles conte noient ,fuffent tuès. con :
cluantes cont r'eux (1). On a pareillement rejetté la lettre
qu'un accufé avoit écrite à fon Juge, quoique cette' lettre
Hu une forte de délit (2). Les Magi(hats ellt regardé comme
un abus de confiance très-re préhe nfible, l'u(age que fairait
un ami des lettres qui lui avaient été écrites dans le fe.
cret d'une correfpondance familiere (3 ). , Ils ont fait reCh.
ruer les let tres à celui qui les avait avoit écrites, & cela
pour empêcher qu'elles ne nuififfent à des tiers. Mais tOUtes
les hypothefes étoient encore moins favorables au rejet des
lettres, que celle du procès du Comte de Mirabeau. Les
lettres que [on époufe a imprimées é toient la plupart écrites
à elle & à (on pere par Mr. le Marquis de Mirabeau. Leur
état, leur qu al ité , l'â fTe de l'un, la tendreffe de l'autre, &.
plus que tout cela, les liens qui les uniffoietJt au Comte
de Mirabeau, étoiem les garans du pere. Pourrait-on '~'rè
étonné qu'il n'a it pas mis de bornes à [1 confiance, qu'il
leur ait communiqué toUtes (es idées, toures [es émotions
au moment même, fans retenl!e , fans ré[erve? On ne pour.
roit pas juger Je. Marquis de Mirabeau lui-m ême .fur ces
le ttres; on .ne devrait pas déterminer d'après elles fes vrais
(enrimens, [es véritables opinions. Elles n'expriment gue
la fenfatiorr d\! moment; elles [om le cri de la douleur gui
------~~------------------~------------------2
".
j
, (1) C'efi l'exemple de l'Arrêt rendu pn . le P a rlerne.nt ,de
Pans le 1: Août 1760, rapporte p"r Deni{art au mot lams mif.
flves, nO. 6.
.
.
(2) Arr~t du 14 Juillet 171 7, en faveur d' un Curé d'Or)éans,
Calelan, llv. 9, chap.
Deni[art loc. cir. nO.
(3) Journal ,du Palais, tom. 1 , pag. 162; Joornal des Audiences,
l'om. t, pag. H.
'
s;
s.
'7
.eil: prus prop're à faire cdnnrutre le degré de fenûbilité, que
la nature & la profondeur de la ble{fllre.
On ne doit juger fur ces lettres, ni le pere, ni le fils.
Leur communication n'eU donc pas excufable; la faine moraie, la prudence la plus commune, devoient l'empêche r.
C'ell: fur une telle démarche que Madame de Mirabeau
,devoit confulter fa délicateffe. On doit croire que jamais
-elle ne Ce fût permi[e un tel procédé, fi on ne lui en avoit
'voilé J'irrégul arité, pour ne rien dire de plus. Mais ceux
qui J'y ont pouffée, devoient examiner s'i l n'était pas aufli
contraire à la Loi qu'à la délicateflè & à l'honn eur.
On a dit avec raifon dans les obfervations fur le Mémoire, que J'emploi des lettres, contraire à leur dell:ination,
-était une e[pece de faux. Les gens inUruits favent que le
faux ne Ce commet pas feulement dans l'altératio n d' une
piece. Ainfi, par exemple, intercepter une piece d'écriture,
la louUraire, la montrer à qui on ne doit pas, eU aufli
commettre un faux (1). Combien plus ce prin cipe ne doitil pas s'appliquer aux lettres miflives! en faire un ufa ge
contraire à leur deUination naturelle & premiere; [uppofer
que celui qui dans [es lettres à un ami, écrivant [es plus
fecretes pen[ées, n'a pas voulu qu'elles fuffent un fecret
pour d'autres que pour cet ami, c'ell:, comme on l'a dit,
(1) Abradms inftrummta ', dicitur falfum committere; apperiens &
defigillans litteras alienas , ut illas oftendat adverfario, commit/it crimen
falfi· lta tenet Barrol. in L. Titio, nO. 3 , if. ad municip. & EST COM_
MUN IS OPINIO. Julius-Clarus, §. falfum, nO. 26. Sur quoi le [avant
Annotateur prouve que la divulgation des lettres pour faire injure
au tiers, efi un délit de même nature: & fi divulgaret contenta in
Lituris ad altuius injuriam , aaione injuriarum ' tènerur. Add. §. falfum ,
yO. apperiens litteras, nO. 106.
Tenetur crimine falfi ...... in publicante litteras aliwas in alwius inju_
riam , qui proptereà tenet ur aaione injuriarum ...... fin verà divulgaret
in injuriam f cribentis, Farinac. de falfitate, quœft. 1
nO. 113 ,
so,
p.
11.
�B
\
mentir, linon aux yeux, du-moins à l'eÎprit; c'ell: fup..
pofer une chofe évidemment contraire cl la vérité! Abufer
de la confiance d'un parent, d'un ami, c'ef!: tromper fo n
attente; c'ef!: un dol; & fi par-là on nuit à un tiers, il ne
manque à ce procédé aucun des carattere du faux (1).
On nous pardonnera fans doure la répugnance que nous
avons à appliquer ces principes à la caufe. Nous nous en dit:
penfons d'autant plus aifément, qu'elle ell: aIrez connue aujourd'hui dans la Province, pour que chacun puiIre juger li
le Comte de Mirabeau a rairon de regarder la divulgation
des lettres de fon pere comme évidemment contraire il
leur def!:ination, & leur publication comme Ifaite dans la
feule vue de Fourrager.
Mais on ne peut dirconvenir que les lettres, fuIrent-elles
admiffibles, elles ne prouveroient rien d'urile à Madame de
Mirabeau. Nous reviendrons bientôt fur cette obfervation,
qui ajoute confidérablemenr au délit à raifon duquel le
Comte de Mirabeau auroit le droit de faire informer [ur
le Ménwire & fur la divulgation de lettres.
Nul doute qu ' il n'e ût auffi le droit de faire informer
par toute voie contre ceux qui femblent avoir pris à tache
de l'ourrager par des calomnies atroces, rép é tées depuis
fi long-temps dans les cercles, & publiées ~nfuite par écrit
& par l'impreffion.
Mais le Mémoire dans lequel routes ces calomnies ' fe
trouvent raIrembJées, ef!: figné par Madame de Mirabeau.
Cette fignarure doit encqre fervir d'égide aux tiers qui
s'ell
(1) Falfitatem ad inducendllm tria requirantur, ' MUT~TIO VERl·
sn NOC'ITVR A, Ma[cardus, de
proba!. conclu! 739, nO. 12, p. 88.
Julius- Clarus , §. falfum, n. 7 ,add. Mathœi, de aJJlic1. deci[ 404,
TATIS, DOLUS, ET QUOD ALTER!
n. 8.
Theveneau [ur les Ordonnances, liv. 4, tit . 17, art.
.
l,
p.. 535'
9
s'en fant armes; elle doit {u{pendre toute pourfuite. Le
.Comte de Mirabeau pourroit difficilement aller à eux fans
changer la n~ture de {on procès en (éparation que fo n
honneur ne lUI permet pas d abandonner. Il peut d'ailleurs
p~r refpe.a: pou.r lui-mê~e, & par é~ard pou: celle qu'il ~
dIt voulOIr {ervlr ma Igre elle, fe crO ire permIs ce fàcrifice.
Ce ne fera pas nous qu'oll accu(era jamais d'avoir armé
parents contre parellls. Au reHe, les inrérêts du Comte de
Mirabeau ne perdront rien à ce qu'il differe de demander
vengeance des olHrages qu'on lui a prodigués. L'injure e{~
écrite.
& il eH de telle nature
. Le. délit ne prefc rit point,
.
que Jam aIs on ne pourra crOIre que le Comte de Mirabeau les pardonnoit enriérement & à tous, lorfqu'i l en
fufpendoit la vengeance. Ses protel1ations font aIrez (0lemnelles, aIrez étendues, aIrez réitérées, pour qu'il ne
doive pas craindre qu'on oppofe jamais des fins de nOllrecevoir à (es juftes réclamat ions.
Nous ne nous arrêterons donc pas davantage à ce premier point de la caufe, filf lequel d'a ill eurs on trouve
aIrez de détail dans les obfervations fur le Mémoire. Il
eH temps que nous venions à l'objet principal, qui efl:
la demande en {éparatioll de Madame de Mirabeau, & à
la maniere dont elle a été confidérée par {es propres
Confeils.
Que leur nombre & leur réputation n'en impofent à perfonn e. Jamais affaire plus importante ne fixa les regards
des Tribunaux & des citoyens. Il s'agit de la nature & de
l'effet du lien conjugal, c'efl-à-dire, du premier nœud de la
fociéré. Ce ne font pas les noms, ce .ne {ont pas les perfonnes, c'efl bien moins encore la qualité des partes :i
c;efl: la caufe qu'il faut juger; il faut la juger, non par les
fuites qu'elle peut avoir relativement à l'intérêt particulier
d e ceux entre qui la queHion ef!: agitée, mais relativement
!l l'ordre général, au maintien des mœurs & à l'influence
~
B
.-
,
�la
qü'un procès de cette nature peut avoir fùr les premiers
liens de la fociété. Le rang des plaideurs, l'éclat de l'af.
faire ne réclament que plus de circonfpeél:ion dans un ju.
gement que le public attend avec impatience, pour favoir
fi l'é tendue & la force des liens du mariage font perpé.
tuellement dépendances de la volonté, du caprice d'un des
conjoints; fi la qu alité d'époufe dl un vain nom, les
devoirs qu'on y fuppofe attachés, de vains préjùgés ; fi l'on
pourra déformais, à l'ombre du titre de beau - pere &
d'époufe, outrager impunément fon gendre, fon mari
pour le néceffirer par fon honneur même à abandonner
foin de fon honneur, pour le forcer à provoquer le di.
vorce, au lieu de s'y oppo[e r. Il s'agit enfin, on ne fau.
roit fe le diili mu l r, de favoir fi la théori.e du mariage &
fon code ne [ont plus que des probl êmes d'opinion que
1 Minifl:re de la Jufl:ice peut [oumeme à l'empire de
l'amitié.
Les étranges maximes publiées au norr. de Madame de
Mirabeau pourroient élever ces doutes. C'eft par elles
qu'il faut commencer J'examen de la caufe. Quand on
faura ql1elle eft la nature de J'engagement dont J'un des deux
époux réclame la force, & dont l'autre veut annuller l'effet,
les moyens refpeél:ifs feront facilement appréciés. Et afin
qu'on ne nous accu[e pas de diffimuler le [yftême de
défenfe de Madame de Mirabeau, nous allons rapporter
la férie des rai[onnemen's ql1i forme la Con[ulracion qu'elle
a communiquée.
,,11 faut, y dl-il dit, pefer les principes ...... qui doivent
"
fi xer la décifion des Tribunaux [ur la fléceffité même de
r'
" la leparàtion demandée.
" Dans nos mœurs, nous n'adlmletcons pas le di vorce.
" Notre Jurifprudence a confacré le principe de J' indiITo" lubiliré du mariage.
" Mais un Ecrivain de ce Hecle a dit que la réparatio n
1;
Pag. 1 de la
CDnfuh . c'ell.
à. dire, p. I D l
de l' imprimé.
Pog. I D ~.
Il
" de corps ef!: un moyen qui épargne à la [ociété des fcan" dales, & aux époux des tourmens.
" AUCUNE LOI précife n'a déterminé les cau[es de [é" paratlOn._
" Nous [avons feulement que la dignité du mariage,
" la tranquillité des familles & les DONNES MŒURS NB
" COMPORTENT PAS QU'UNE SÉRARATlON fait prononcée
" [ans caufe, ou m ême SANS CAUSES GRAVES.
" Quand il s'agit enfùite de raifonner fur one hYP?th~fe
" donnée, on difcute les circonfl:ances & les falrs articules.
" On combine ces faits avec la qualité des parues. On cher" che & on indique les réfulrats; on [e décide fur l'enfimMe
" de roures cho[es.
" Dire en général qu'une féparation ne peut êrre de" mandée que pour févices & mauvais traitemens, c'eft ne
" rien dure du tout.
" Il eH des fairs qui font de nature à attaquer l'exifl:ence
" phyfique: il en ef!: d'autres qui compro~utlellt ,f'exiflence
" morale. Tous font ou peuvent êrre matlere à [eparatlon,
" s'ils font graves & bien confl:~rés.
..
" Ce feroit donc méconnoîrre eVldemment la figmficarlOn
" légale des mors fovices & mauvais traitemen.s, que d.a
" limirer cerre fignificarion aux coups & aux vOIes de faIt
" direélement dirigées contre l'exiftence phyfique de la per" fonne qui fe plainr.
.
.
" Le vrai principe de la matlere ef!:, qu'II faut pefer
" chaque hyporhefe; que ce ne fon~ pas préciftmen.t tels fal~s
" déterminés qui peuvenr feuls operer une feparatlon ; maJ~
" que c'efl toujours
l'équité &
la prudence du Juge a
" prononcer convenablement dans chaque cas part~culzer,'
" . felon les circonf!:ances & les per[onnes, filr les faits pre" fenrés comme caufe de féparation.
" Il en eft des réparations entre conjoints', comme de
" tous les objets qui ·tiennent principah:ment aux mœurs. Il
a
a
B
-
,
:2.
Pag . l 0S.
Pa g.
1 0 7.
�12-
" dl
impof!iMe que de pareils ohjus {oient précif!ment ré.
" glis par des Loix. Elles ne pourroient enchatner {ou d
" points de 11ue fixes & généraux des circonflances qui ~s
l'.ge
P age
108.
109 .
" font jamais les mêmes, & qui varient dans chaque hypoe
" ~hefe particuliere. Il a do~c f~lIu abandonner tous ces o~
" Jets à la fageife & à la )ufrlce des Tribunaux.
" ~n fe tromperoit, pourtaoc, u on alloir croire que la
" mattere des fepararJOns el1 purement arbitraire. Rien 'le
"
"
"
"
"
doit l'être dans ce qui intérej{e le bon ordre G' l'honnétete
puMique; A DÉFAUT DE LOIX, nous avons des opinions
autorifies, des exempl::s reçus, des décifiorls refPec7ables
des regles confacrées par la JurifPrudence, des PRINCIPE;
AVOUÉS QUI ONT FORCE DE LOIX.
"
"
"
"
" Toure quel1ion de fépararion entre conjoints en: une
vérirable queftion de mœurs qui peur influer fur !'érar
civil des perfonnes, mais qui el1 principalement fil bo rdonnée à leur bonheur moral. Conféquemmenr en pareille
mariere, le VRAI PRINCIPE DE DÉCISION E.ST DANS LE
"
"
,.
"
"
"
CŒUR DES GENS DE BIEN, DANS LA SENSIBILITÉ B~EN
ORDONNÉE DES HOMMES JUSTES ET RAISONNABLES ,
DANS CETTE ESTIMATION COMMUNE QUI NE TROMP}
PAS ET QUI NE PEUT TROMPER, qui préfente la plus f ûre,
la plus impartiale de toutes les regles, & qui efl comm '
le ré/ùltat indéli6éré de ce que chacun éprouve, quand o.
" met fous {es yeux le malheur ou la. rrifte fitLlation de fo;
,, ' femblable. Le Magifrrat à cet égard n'en que l'inter" prete des alfeé!:ions ou de la fenfibiliré générale. II eft,
" au nom de la Loi, l'organe refpeé!:able de l'honneur ;
" de la .d,élicareffe & de' l'humanité.
" C'eft ce qui a fait · dire à nos meill~u rs Auteurs, qu~
" 10rfqu'i1 s~agit de prononcer fur une den~ande en fépara.
" tion, il fdut effentiellement examiner les faits qui fe rve nt
" de bjlfe à cetre demande, & fur-tout avoir égard à la
l> condition des Parcies; parce que CHAQUE CONDITION A
13
" DES PRIrtCIPES 'lui peuvent modifier diverfement la ma" niere de voir & de fentir, & tout ce qui contri/J/Ie au
" bonheur ou au malheur de la vie.
" Ainfi, pOlir nous RÉSUMER SUR LES PRINCIPES, UNE sÉ" PARATION NE PEUT ÉTREORDONNÉE SANS CAUSES, ET SANS
" CAUSES GRAVES; mais ces caufes ne fonr exclllfivement, &
"
"
"
"
"
"
"
par forme de limirarion, dérerminées par aucune Loi.
Elles peuvent fe diverfifier à l'i nfin i, comm e les pallions
même qui les produifenr. Il fuiEt que fous quelque forme
qu'elles fe [oi ent manifenées, que relativem ent à l'état
des perfonnes & à toures les circonnances, le Magiftrat [age, honnête & fenfJble puiffe fe croire autorifé à
venir au fecours de l'époux qui réclame fon autorité.
" Cela pofé, parcourons les faits, &c."
Avant de fuivre la COllfultarion dans l'examen des faits,
arrêtons-nous, comme nous avons dit, fur cette expofition
des principes, & tâchons à notre tour de les réfumer.
" Il faut pefer les principes...... Le vrai principe ell,
" qu'il faut pefer chaque hypo rhefe...... On fe tromperoit
" pourrant, li on alloit croire que la mat iere des féparations
" en pureme nt arbitraire ...... à défaut de Loix...... nous
" avons des principes qui ont force de Loix...... Le vrai
" principe eH: dans le cœur des gens de bien ...... Chaque
" condirion a des principes..... Pour tout réfumer fur les
" principes, UNE SÉPAR,ATION NE PEUT ÉTRE ORDONNÉE
" SANS CAUSES, ET SANS CAUSES Il'fIPORTANTES. "
Si tour le monde ne faifir pas cet enchatnemmt d'idées, ft
l'on en perd le fil, du-moins on fe retrouve à la concluuoll,
du'- moins 'chacun convient de la conféquence. Cependant'
aucune des Parties n'en fera plus avancée, quand il fera convenl,l enrr'elles pour toute conclulion, qu'une féparation ne
peut être ordonnée fans caufe, & fans caufes importantes.
Mais ce n'en pas pour certe conféquence que la Gonfulta,tion de Madame d(,! Mirabeau a été faite. On a VOUl4 l'au...
�14
Page l e S.
toTifer à dire à fes parti fans : Il n'y a point de Loi, il n'y
a point de principe général fur les caufes de féparatio ;
n
c'efr ici la quefrion de l'ami; vous êres !zonnêtes, fenfibles
jufles, raifonnables. ( Eh qui ne croir pas avoir ces qualités!)
Si vous êres touchés de ma trifle fituation, vous êres mes
Juges; vous êtes plus, vous devenez pour moi Légiflateurs.
La Loi que j'inv'oque, efr dans votre cœur; elle fera le réfulrat indélibéré de ce que je pourrai vous faire éprouver en
vous peignant mes malheurs. La caufe efrjùbordonnéed mon
bonheur moral. De quelque nature que foient mes peines ,
fous quelque forme qu'elles [e foient manififlées, a/lége? le
lien du mariage devenu pour moi plus injùpportahle qu'il
n'ifl fo/ide.
On affu re pourtant d'autre part, que la mariere des ftpl/rations tient principalement aux mœurs; qu'elle intéreffi
le bon ordre & l'honnêteté publique, & conféquemmenr qu'elle
NE DOIT POINT ÊTRE ARBITRAIRE. Que veut-on dire par
là? N'efl:-ce pas que la matiere des féparations a des principes, & qu'elle n'en a point? Comment arrive-r-il gue
chaque condition ales jiens, & que le vrai principe n'ejl que
dans le cœur des gens de bien, ou dans la jènfibilité bien
ordonnée des hommes jufles & raifonnables, ou dans cette ejli-
mation commune qui ne trompe pas, & qui ne peut pas tromper, ou dans le réfultat inddibéré de ce que chacun éprouve,
fjuand on met fous [es yeux le malheur de fon femhlable?
N'efl:-ce pas {)ire auffi : la matiere efr arbitraire, & elle n'ell:
pas arbitraire?
Pour nous entendre, recourons aux définirions. Qu'efr-ce
que l'arbitraire en général? Ce qui n'ifl pas défini ni limité
par aucune Loi générale, ou conflitution expreJ!è. C'efr dans ce
fens que l'on dir : la punition de tel crime ifl arbitraire. Et'
ft l'on convient que rien ne doit être arb irraire dans une
mariere auffi importante que les féparations; fi l'on reconnoit qu'elle doit être régie par des principes fixes & inva-
t'i
riables, on ne doit pas la faire dépendre de l'opinion indélibérée du Juge. Si l'on dit qu'il fam, pour féparer deux
époux, des caufes importantes & majeures, il ne faur pas
dire enfu ite, qu'un GESTE, un REGARD, {ont des outrages
qui doivent faire féparer des époux délicats & jènfibles,
élevés avec tendreJ!è & douceur au [ein de L'opulenc,. Ce ne
font pas taures ces difrinéb0!ls purement antirh é riques, &
dont on ne fauroit deviner ou définir l'id ée, le principe,
-la fubfrance, qui peuvent fuppléer dans les Tribunaux lm
vrai fyilême légal, un vrai code, de vérirables Loix. S'il
étoir exaét de dire qu'il n'en exiile poillt en cerre matiere,
il faudroir remonter au principe, il la nature de l'engage ment, pour en déterminer l'effet. (Ce n'efr que parce que
les Loix ont été ainG faires, qu'on les appelle la rai{on
écrite.) Pour favoir fi les liens du mariage peuvent être relâchés, dans que l cas, pour quel tems, & jufqu'à quel point
ils peuvent l'être, il f:lllt les conGdérer en eux-mêmes. Pour
juge r fainement des opinions vulgaires, il faut remonter ?t
leur [ource.
Le mariage efl: ~armi nous l'union indiffoluble de deux
époux. Tant qu'il fubGfre, il doit avoir [on effet.
Que les femmes n'aient point de regrers à l'indiffolubiliré de cette union. C'ef!: principalement pour elles qu' elle
f.ur établie. En effet f on- a reconnu qu'on ne pouvoir rompre de te ls liens, fans nuire à celle qui, par la narure, ne'
peut fe donn er qu'une fois, & que rien ne pouvoit la d édomm ao-e r de ce premier facrifice. C'efr princip::!Ieme nt
pour le~ femmes qu'on a cru que· la chJÎne ne devo ir, ne
pbuvoir fe rompre. De toutes les Loix, celle du divorce eH:
peut-êrre celle dont leur fexe auroit le plus à [e plaindre,
celle qu'il -auroit le plus à redouter.
Ce n'efr point le facrement qui peut rendre le mariage '
irtdiffoluble; ce n'efr pas lui qui a donn é cette force à l'union conjugale. Un [acrement efr le jigne fenfihLe d'une
/.-
�16
grace fpirituelle; il n'ell: point un lien. Le ferment que les
deux époux font d 'être l'un à l'autre, ne tire pas fa force du
Temple où il ell proféré. Ce n'ell pas l'Au[ l, ce n'eQ
pas le Mini{he qui rend inviolable la foi qu'ils fe donnent.
C'e!l: d'abo~d la nature d~ contrat qui forme un engage.
ment que rien ne peut dIffoudre, parce que la naiffance
des enfans en ell: le fceau à jamais inviolable; c'ef!: enfilite
l'impofIibilité qu'une diffolution de cet engageme nt ré ra.
bliffe les conrraél:ans au même état où ils éroient l'lin envers l'autre. La narure elle-même rend éternels les rappOrts
que deux époux ont enfemble. Ces relations une fois éta.
blies, nulle puiffance humaine ne peur les anéantir. Le
d.ivorce ~roit un vain, ren:ede, puifqu'illibéroit des obliga_
. tIons cIviles, fan.> aneanClr les relaClons naturelles. L'union
du mariage ef!: telle qu'on pem plutôt brifer que délier, &
qu'on ne peut en dégager que par une rupture funel1e. (1)
Que cerre, indiffolubilité ait des inconvéniens, ce n'ell:
pas une raifon pour en méconnoître la nécefIiré. EH-il donc
donoé à l'homme d'atteindre des jouiffances parfaites; de
(e procurer des inf!:itutions parfaites? Il peut être fâcheux
que des époux mal a{forris foient à jamais unis l'un à l'au.
tre. Mais la nature le voulm ainli. Ce [ut fans doure pour
nous avertir de fonger à l'importance de cet engagement;
& le danger de l'indi1folubilité ef!: bien moindre que celui
du divorce, qui faifant paffer une femme d'un lit dans un
aurre, rend précaire l'état des enfans " & leur ôte tou jours
la tendreffe & les foins d'un des auteurs de leur jour, li
ce n'ell de tous les deux.
Il
(1) Relinquet homo patrem fuum & matrem fuam, & adhœrebil
fUll!, & erunl dl10 in carne una. Genef.
.Signifi~a tur e.o verbo (acih:uebit) conjunc1io indiffolubilis. QUIt
Cillm gluuno conJunc1a fuelin! , ea frangas facili,~5 quàm folvas. Efliu5.
llXOfl
11
Il ne s'agit point, il ef!: vrai, dahs cette caufe de l'indiffolubiliré du mariage, ni d'un divorce proprement dit, qui
·pouvoit autrefois être l'effe t de l'accord & du concert des deux
époux, & que la fainteté de nos Loix reprouve. Aujourd'hui
il ell quefiion d'une féparation de corps, c'ef!:-à-dire
d'une efpece de répudi ation non moins fcandaleufe no~
moins infamante, mais plus cruelle qlle celle que le; Loix
Romaines avoient admife ,& qui renferme tous les inconvéniens du divorce, [ans offrir aucun de fes avanraO'es.
En effet, la répudiation des Romains rendoit au~ deux
époux lI.ne fortede liberté; & ce fe roit une gra nde preuve de la
corrupnon de nos mœurs que l'on regardât comme liberté,
que l'on o[ât même donn er ce nom à l'état d'une femme légalement féparée de fon mari. Déja 1'00 a dit qu'on Ile
conduit /IIS fil/es que par le mariage aux plaifirs & la liDuté ; & Ii l'on appe lle liberté l'état de féparation, bien.,.
tÔt la féparation fera regardée comme le but & le fruit du
mariage. C'ef!: ce que la Loi des Romains fur le divorce
~rod~i{it ( l ) 19r}. d e la décade nce de leur Empire. Ils
1 aVOJeot empruntee des Grecs d ans des temps où les mœurs
publiques & privées empêchoient qu'elle ne fût dangereu[e.
Ce n'efi pas l'intérêt des particuliers qui l'avoit produite;
elle n'avoit eu pour objet que le bien général, la profpé.,.
.ri té de l'Etat. , Oubli~e pendant long-temps, l'époux d'une
femme fiérile l'invoqua le premier après plulieurs {iecles;
& ce fut un fcandale pour la ~ation (2). Mais lorfque la
a
(1) Repudium verà jam & vatum, & quafimatrimonii fruc1us. Tertu!.
Apa!. C. 6.
(2) Repudiu,!, inter uxor~m G' virum à canditâ urbe ufque ad 52 Q
annum nul/Ilm Lntereeffit. Pnmlls aUUm Sp . Carvilius uxorem fl erilitatis.
causâ dimifit . Qui qfwmquam tolerabi/i ratione motus videbatur, re.
prehenfione tamen non ca",it, quia nec cupiditatem quidem liberarum
conjugali fic/ei prœpani debu,ijJé arbitrabantur. Val. Max. L. 2, C. 1 1
Il. 4.
c
-
Mont.!. 'l,
ch. 19·
�18
,
confiitution fut altérée, la loi établie . pour lè ma'Întien
des mœurs devint elle-même une [ource de corruption.
& c'efi ce -qui efi arrivé aux Nations modernes qui on;
adopté le divorce d'abord pour un feul cas; elles l'ont ad.
mis enfuite pour plu lieurs , ~ maintenant elles font. effrayées
de la marche de leur Jurtfprudence, dent la Itcentieufe
tolérance peut & doit entraîner la fubveruon de la fociété.
On a vu enfin que ce remede pellt être utile à des maux
très-rares, mais tout propre à les multiplier, à les aggraver.
On a vu que ce remede efi aux fociétés ce que fOnt au
corps humain ces violens fpécifiques dont on ne peut faire
IIfage qu'avec une confiitution forte, que bientôt même
ils ont affoiblie, mais qui font un véritable poifon , fi on
les emploie dans un état de langueur & de dépériffemenc.
Ce ne font pas de telles loix qu'il faut co"fulter aujour.
d'hui. Elles ne font pas faÎtes pour nos mœurs; elles leur
font bien étrangeres (1); elles fuppo!Oient chez les femmes une retenue dont on connoÎt aujourd'hui peu d'exemples. Lorfque cette retenue n'exifia plus, les femmes ne
compterent plus à Rome par des années con{ulaires ; elles
compterent par le nombre de leurs divorces. Qui croirait
maintenant que ce fut pour la confervation des familles,
& même pour maintenir l'unlon des deux époux, qu'on
voulut laiffer aux femmes un moyen de rompre leur chaî·
ne ? Qui croiroit qu'un citoyen, un citoyen tel que Caton,
Urat de la liberté du divorce, pour donner à [-on ami une
femme reconde, & la reprît après la mort de cet ami 1
Non, de telles loix ne [ont pas fà.jtes pour nous; elles
donneroient aux époux de notre temps le moyen de brifer
dl..'rr 'bl'
, .
,
au ma iru:I re c h oc d es l lens
eJa trop arrOI
IS, trop mepnrés. Ce n'eft dODC pas ~Ile qu'il faut confulter; on ne
le doit pas pour l'intérêt général, pour l'épurement des
mœurs.
On le doit bien moins encore pour l'intérêt des femmes. Ces lo ix qu'on ore invoquer pour elles, leur permetraient, il efi vrai, de répudier leurs maris. Mais quels
devoir!!, quelles foumiffions, quelles obligations, que de
gênes ne leur impofoient-el1es pas! De combien d'entraves & de liens n'étaient-elles pas furchargées par ces loi" ,
qui, les fuppofant dans une enfance éternelle, les mettaient
fous une tutelle perpétuelle! Auffi les mêmes textes qui
leur permettaient le divorce, fans doute comme un remede
à la dureté de l'efclavage auquel les mêmes loix les foumettaient, permettent au mari de les renvoyer elles, pour
des caufes qui paraîtroient bien futiles dans notre fiec\e.
Ainfi , par exemple, qu'une femme eût affifté aux fpefrades,. à des jeux pubIrcs, à l'inf'iu ou malgré fan mari,
c'érait llne caufe fuf!lfaore de répudiation ( l ) . Que
les défenfeurs de Madame de Mirabeau nous difent li
les femmes de notre temps voudroient être jugées [ur
de telles loix? Eh bien! qu'elles ne pourCuivent dOllc pas
leurs maris en réparation fur les principes de ces loix.
Obfervons encore que pour fe fervir des Loix Romaines , il faudrait admettre un vrai divorce, une véritable
répudiation_quj rendît aux deux époux ledroit de former,
chacun de leur côté, de nouveaux liens. ,,. Une féparation p '" d f 1
.
r.
1':1T.
r.
Un en or, •
IJ de corps &
de biens, lans que orr pume pourtant le 6. ç, J • ~. H .
" remarier avec quelque autre, répugne au droit naturel.
j
( 1) Marîtu$ rejJU dium nùttue fine periculo. poteft ,fi...... , circenfibul
IMalru iAUrfuerit a~ fp eaandum, ignorante aUI prohibent' viro.
(ï) Nous verrOJ1S bientôt que l'applic<ltion qu'on en a .voulu f~ire
~ la caufe de Madame de Mirabeau dam la Confultation qu'clle a
com muniquée, eft bien plus étrangere encore.
tl1ft
Nove,~!
11'7:, è , ~.
,
-
.
�10
" En effe t, il elt ahfurde de dire que le lien du mariâge
" fubfilte, & que cependant on ne peur ni on ne doit rem_
,! plir aucun des engagemens qui font une' fuite du Contrat
" fur lequel il elt fondé. "
Une telle abfurdité , un ufage fi évidemment anti-focial
n·exilta jamais dans la Légiflation des Romains; fi leurs loj~
fur le di vorce préfenrent des variations dans leur Jurifpru_
de nce , ce n'elt point fur les bornes & l'elfet du divorce,
ma is feulement [ur les c.wfes qui pourroienr l'autorifer , &
les perfo nnes qui pouvo ie nt , l'invoque~ (1). Les Em~ereurs
Chrétiens qui ont promulgue les dernleres de ces IOlx, Om
rantô t étendu, d'autrefois reltreint les cas auxquels ils le
pe rme troient ; m ais on ne trouve point dans leur Code
qu'ils aient eu l'idée d' un m ariage fans mariage, c'eft-adi re
d' une union ave c diffolution, ou d'un lien indiffoiuble, qui cependa nt ne lie plus les pa nies l'une à
l'autre.
On était loin auffi d'avoir ces idées dàns les premiers
ftecles de ' notre Monarchie, où l'on voie tant d'exemples de
di vorce, & pas un de ces efpeces dé féparation (2.).
Mais l'influence du Clergé dans notre Légiflation fit
introduire une autre Jurifprudence. On vit paraître des loix
(1) D idacus, Covarruvias & quelques autres Canoniftes ont pré.
tendu que le divorce des anciens Romains ne leur permettait pas
de fe marier à d'a utres. Mais c'efi une erreur facile à détruire pal
les textes des Jurifconfultes Romains dont les écrits font partie de
nos Loix. Voy. Gerard Noodt, comment. in ff. ad titu!. de divort. &,.
Tepl/d .
P uffendorf, ibid. ut fuprà.
B arbeyr ac , ibi d .
(2) 11 efi certain qu'en France, fous la premiere-& feconde Rau,
o n ten a it que le. m,!riage pouvait être dilTous pour fait s pofl:éneurs
à fa confommation. Voy. les formules de Marcu!. 1. 2 , for . l a.
U nd enbrog Le? ant. tOIl1. 2 in Jorm. jolem. 84 , p . 12 S 9. Le~ Ca.
pi tulaires de Charlemagne, liv. S , L. 19. Conférences- de Pans.
2'I
qui
fans profcrire le divorce, en détruilirenr entiéremel1t
& le rendirent nul, en faifanr un précepte de ce
qui jufqu'alors n'avoit ~té regardé que c~~me con[eil.
Elles inrerdlrenc expreffemenc aux gens marIes de paffer à
de nouvelles n6ces du vivant de leur premier conjoint,
fous. quelque prétexte que ce fût (1).
Que prouvent ces loix ? Elles prouvent feulement que
jufqu'à elles on donnoit au divorce la même étendue que les
Loix Romaines lui accordoient. Cependdnc roures les cau- '
fes de m ariage ayant été portées devant les Tribunaux
Eccléliafl:iques parce que la prééminence du Sacrement
,
' de ,
parut devoir emporter
même le c?nrrat qUI. l e prece
les facilités qu'o n y trou va pour faire annuller le paél:e religieux & le contrat, empê~ llerent qu' on ne s'attac
h at
' ~u
divorce & le firent . entierement oubl,er (2.) , ou pluroc
l'e~t
,
(1) Cap il. Car. Magn. L. 643. L. 6, c. 6 3.
(2) Il étoit inut ile de faIfe dllToudre un engagement, quand des
moyens fe préfe ntoient en fou ,le . p~ur J'a nnul!er. D ans ,c e tem!' s Ja
parenté jufqu'a u [ep Ile/ne d'gre elolt un. emp e~ hem ~ nt a u mariage .
(Ce fut Innocent Ill. qui dans un Con ode gé~er a l red utfit l a p r~ h l .
bition au quatri~me deg ré, parce qu'd y .avolt qu ?tre fortes d humeurs dans le corp' venant des quatre élemens qUI font da ns la na .
ture quia quatuor funt humores in corpore, qui confiant ex qu.a tu or Extr. de con~
elem:ntir.) L'empêchement fecret avait la ;n ême force: . L'aJllanc~ ~.ng. &. ,If. <.
publique ou cachée s'étendait de même. L allIance .cplmuelle q~1
fe contraél:oit par le Baptême & la Confirmation , etablI~olt , ~UI vBnt les Canons des empêchemens entre perfonne s qUI ne s e n
douroient pas. O~ prenait quelquefois jufqu~à vingt ?U t rente pero
fonAes pour parrains, & autant pour marratnes? qUI,dès.lors deve 7
noient alliés. Les ~nfans , les alliés de ceux qUI aVaIent contra él:.e
cette affinité fpirituelle, fe trouvaient alliés aulli. On ne t~nolC
point regifire des baptêmes ni des mariages. Toutes les parente~ ou
alliances & leurs degrés fe prouvoient par témoins & fur publIque
renommée. Rien n'était donc fi facile que de trouver deu x époux
parens ou alliés à un degré prohibé pour annuller leur martag.e r
fans compter d'autres emp êchemens dirimalls qUI ,depuI s ont etc
abolis.
�22-
on le confondit avec les demandes en calfation du mariage.
Les Hifioriens,. les Auteurs du temps, les Rubriques même du Droit Canonique donnent le nom de divorce aux
caufes de nullité de mariage.
Cependant que l'on confulte ces loix defquelles on abufa
enfuite pour former notre Jurifprudence; jamais elles ne
voulurent féparer ceux qu'elles crurent unis par Dieu même.
Pendant ces infiances en féparation que d'habiles Clercs
favoient prolonger, des époux impatiens, des femmes fur.
tout, fe féparerent de fait, & refu{erent de rejoindre leurs
époux, prétextant la néceffité de mettre leur confcience
en repos. L'Eglife n'autorifa jamais ces fcandales. On doit
remarquer qu'elle tonna contre de tels abus. Elle employa
les foudres des excommunications, pour obliger deux époux
à fe réunir. On peur voir dans un Canon du Concile d'Agde (1) , dans les Décrétales des Papes Alexandre II (2)
& III (3), qui font re~ues comme véritables,. comment
(1) Sœculares qui conjugale conJortiwn nullâ gra"iore eulpâ dimittunl,
tic! etiam dimiJerunt, & nullas eauJas thffidii probalriliter proporterttes ,
propter ea Jua matrimonia djrrùttunt ..... ~. fi antequam apud Epifcopol
comprovincia/es diffulii caufam dixerinr, & p,iuJquam in judicio dam.
nmtur , uxores futU abjeceriru, à commun,ione fana~ E"tefiœ & populi
c<rru, pro to quod fidem & cOllljugia maculant, ududuntur. Con/:
Afath. c. 2 S.
(2) Mu/torum relatione cognol'irnus, te. propriQ:1ll l'eUe abjice". uxo.
rem ....... apojlolicâ amhorita" interdiec.ndo mandamus tibi, ut halle
'lu am tune habes uxorem, nullatenùs prœf1JJll4s dimittue, dontc 'pifla.
parum rcligiofocum caufam iflpm examÏrl=ÏJ. Alc.x. 11. Cano mulla.
Tum 25. 6.
1.3
-on c-ontraigooit les époux à fe réunir,
t
~
,
étouffer leurs
-diffencions domefiiques. On ne permit la féparation thoro,
<Iue lor[que [ur J'expofé des moyens de nullité, il fut apparent que J'union feroit criminelle. Le lien conjugal fut
!'elâché par ce premier a8:e de condefcendance accordé à
la piété alarmée; & bientôt cette condefcendance en entraîna d'autres.
En effet, ce n'ell: pas fon éloignement de la couche
nuptiale qui tient le plus à cœur à l'époufe qui trollve le
lien conjugal infupportable ; c'ell: la liberté, ou plutôt l'indépendance qu'elle cherche: auffi quand les femmes reconnurent que l'intérêt de leur falut & les dangers auxquels
leur ame fembloit expofée, ne paroiffoient pas affez graves
pour les éloigner de leurs maris, elles parlerent alors des
périls que couroit leur vie, & on les crur.
On voit dans les Décrétales, que fous le Pontificat d'Alexandre III. une femme fe fépare de Ion mari, & demande lacaffation de fon mariage, fous prétexte de parenté. Son mari la redemande. Le Pape décide que fi le
mariage a été célébré &, conf~~mé, ~n do~t re~dre la
.femme au mari fous caUt10n qu Il ne lUI ferort pomt de
mal. Si cependant le mar~ a concru cont;e [a ~emme u~e
haine capitale; fi cette haine efi tel.le qu o~ dOIve [e ~e
fier de lui avec raifon, le Souveram Pontife veut qu on
la fequefire chez quelque fage & honnête Dame jufqu'à la
décifion de la caufe, en tel lieu où le mari ou fes parens
ne puiffent fe permettre aucune violence concr'elle (I).
a
•
(3) De Comite Parui"i 'lui B. raorcm JUiLm. abJq.ue.: judicio, Eacbrfia',
dimifit. _ .. · prudelltia rua. cogn6fcat qllo,d: & fi ctWfa ejJe.t pubtica & na• .
ta.ria, ab/qUA judicio Ecclefia ab; ea Jeparari non. potuit : qll.lV~ tpj_
a4 eam recipitndam, qUiZ petit reftitutionem ipfiUJ, di.jlriaè compelltl!;
'luam fi. r"ipare no/uuit, tum. Ilùuulo ezcarnmllDi,atÎanis adJltjogas.
.Âle%. 111. C. Parro, de divoTtiis.
,/
(1) REsrITUITUR CONJUNX VIRa PROBANT! DESPONSATIONEM ET
COPULAM ET DE IPSIUS IMPUNITAl'E CAVENTI, NISI MAGNA SIT
YIRI SA:VITIA .
.
,
. Mandamus quatenur, fi vobis conjliterit, 'luad pr~Jata, mu/ter ,prœ'dillo militi legitimè defponJata fuiff:t, .& ab .'0 eogm,ta : 'l'fam el reJtitui faciatis, '''epta tamen [uffieuntl .auttone, quod IIlt non debeat
•
�24
On y voit enéore que la même qüefiion fe préfenta fous
Je Pontificat d'Innocent III. La femme prétendait écr
parente de fon mari au quatrieme degré; & pendant le
e
procès fur la nullité du mariage, elle vouloit être féparée
Les avis étoient partagés. Mais le plus grand nombre fu;
à accorder la fem me au mari, difant: que les effets de [a
foumiffion ne pouvoient êt re un crime; que fa con[cience
ne devoit po in t lui reprocher les a&es de fon obéilfance
Et le Pape décida qu'à moins que la femme n'eùt en main;
des preuves très-claires de [a parenté avec fan mari elle
devait lui être rendue fans délai ni réferve , & qu'ell~ de.
voit m ~me être contrainte par les cen[ures EccléGafiiques
à le rejoindre. Si cependant, ajoute le Souverain POntife
les fèvices du mari font de telle nature que l'époufe trem~
Mante n'ait plus de sûreté auprès de lui, il faut plutôt l'éloi.
gner que la lui rendre, ou autrement; en pourvoyant f~.
famment à fa sûrete, s'il efl pojJible, il faut avant toute chofo
rendre la femme à fon mari (1). Et voilà le texte' invoqué
plr coutes les femmes qui depuis ont formé des demandes en réparation: Toutes ont prétendu être cette femme
tremblante, craignant pour fes jours, n'ayant plus de (û.
re,é auprès de [on mari ; toutes Ont prétendu que leur dou.
.ceur, les agrémens dont la nature- les 'Ivoit
douées ce
,
-,
c1larme,
aliq~od mal~m inf~T~e. s~ aute.m capîtal~ o.dia ita mulieTem ViT PlijèquLtur, quod merLto de Ipfo diffidat : allCul PTobœ & honef/œ muliai
uf1u~ ad callfa: decifionem cufl.odienda fl.udiojiùs committatur in loco
ub, VIT, ve/ parentes ejus mulieri, nul/am poffint violentiam infe~re. E~t.
de "fi.. fpoliat. cap . l!.
. (1) SI VERO- TANT..! SIT VIRI S~VITIA, UT MuLIERI TREPID1NTI
NON POSS I T SUFFICIENS SECUR I TAS PROVIDERI
NON SOLUM NON
DEBET E l RESTITUTI, SED AB EO PÔl'IUS A~-O VERI ALIOQU II{
SUFFICIENTI (SI PIER I POTEST) SECVRITATE piwvrSA
PRO.
FECTO VIDETUR CONJUNX ANTE CAUSlE ' COGNITIONEM 'R.I;STr.
TUEND4 ./I1.dRlTO.
de rej!it. fpoliat. ,ap. 13.
E.XJ.
2')
.charme, cet attrait puiffant que l'on fait avoir amoli les
cœurs les plus féroces, ne pouvoit dé[armer leurs époux;
.toutes en ont fait des monfires que rien ne pouvoit toucher, & dont elles craignoient toujours d'être les viél:imes.
Elles ne pou voient rien, di[oient-elles, [ur le cœur de leurs
époux, & elles ont attendri ceux que la Loi fuppofe impaffib,les. Et peu à peu rejettant tout divorce avec le CondIe de ,Trente (1), on eH parvenu à croire qu'on pouvoit
,
.
fép arer ce' qu'on croit ne pouvoir défunir.
C'efi avec raifon fans doute que les caLIfes en [eparatlon
font aujourd'hui portées devant les Juges ordinaires (2.).
(1) Dumoulin prétend que la Dolhine du Concile de Trente
(ur ce point elt nouvelle. ,. En la huitieme feflion , canon 7, trop
" ma) efi anathématifée dit-il, l'opinion de St. Ambroife 1 Doc.
" !eur de l'Eglife, & des' anciens ,~ de plufieurs grands Théolo.
" giens de ce temps; mêmement d Eraline & Thom,as de. VIOU ,
" Cardinal Gaïetan, laquelle eil conforme ,au te~te evangehque ,
» Matthieu 1<), qui ne pàrle. pas de la [eparall~n du III [eule.
» ment qui étoit cbe[e lors Inconnue, mal S du dIvorce total. Et
» l'opinion [uperfiitieu[e qu'en cas . d'adu~te:e, il n'efi lo ifi ble à
" l'autre partie ofTen[ée de {e remaner, a ete caufe de gran.!s maux
)l
que le,dit Concile dut avoir en horreur, & non pr éfé rer la (uperf•
" titiol] à la vérité & jullice. » Confult. de DumoullO (ur le Con.
cile, n. 45.
. . ,
Le Con cile ne vO\llut pas condaml1er GeU , qUI idl{olent que
" l'adu ltere rompt les , liens du mariage, & qu'il efi permi s d'en
» contraaer un autre comme le pratiquent les Orient aux, (rlon
» la Doa Tin e de St. ' Ambroi{e & des Peres Grecs'; mai, d'anaIl thématirer cellX qui di{oient, comme les Luthériens , q~e l'Eg l.i{e
" fe trompe, en en{eigna,nt que l'adultere ne rompt l'Oint le hen
)l
du maria ge, <'lç qu'~1 n'efi p"~ permi~ d'en contraaer Iln autre ......
Frapaale ' Hifi. d!l Con<rile ~~ Trente,!. 3. ,, 1. V.III . p. ~9.
(1) C:pen4'ln,t "de trè~ ~ doaes Tpéotogi!!ns jmagjn,e~t que, !e~
J uge s laïcs pe connoitrent ~~ ces caufes , qu.e par u[ur,p?tlon; VOICI
c e qu'on trouve d.ns les Conférences de. ~an~ [ur le man ag~: .
» La féparation des perfOJlne, manee~ a thoro ,& habitaIlC/le,
D,
�,,6
Les rapports faciaux que le mariage établit, font les premiers de tous; ils fervent de fondement aUl( autres. Ce
font donc h~s rapports du mariage avec la (ociété géné.
raIe, & fon influence (ur les man.lrs publiques, & privées'
c'eft le lien civil qu'il faut confidérer dans cet engage:
ment, & non la (pirirualité, qui peut-être eft plus du
reffort de la Pénitence, que de celui de5 Officialités.
Mai1i les Juges, de quelque ordre qu'ils (oienr, ne doi.
vent pas oublier que tam qu'il y a fûreté pour la femme .
i1 Y a nécelIité ~ elle de vivre avec fon mari; que tel fu;
le principe des demandes en (éparation, dès leur origine 1
qu'après même que la femme a couru des danger~, des
rifques, fi on peut être ralfuré p'our l'avenir, il faut
rendre la femme au mari; il faut la lui r~ndre, par cela
(eul qu' on doit préfumer que les Loix de la nature ne
»qu'on appelle autrement du nom de divorce, appartient dt droit
»au Juge d'Egli(e, parce qu'elle les àifpen(e de la loi qui leur .Il
'fimpo(ée par le Sacrement. C'ell ce qu'a reconnu· l'ancien Concile
»d'Agde qui fut tenu fi (olemnellement dan. le fixieme /lecle. Qlland'
l'la ComtelTe de Boulogne voulut (e fair-e-[eparer d'avec Alphonfe li!.
»Roi de Portugal, elle s'adreITa à l'Egli(e, &: fi~ nommer l'Arche~,
»vêque de Compollelle par· Alexandre IV. pour e-n juger comme
» CommilTaire du St. Siege. Nos anciens Juri(con(ultes, comme
»Papon & Bacqùet, avouent que cela âppartie-nt ~e aroit au Juge
"e<:cJéliafiique. Cela (e ptatjq~e' ainli eA Eipag.ne , & )no~s n'avons
»en France aUC~Re Ordonnance de nos Rois qui' Ôte ce dfoit au Juge
'>eccléfiaftique, pOlir te ' donne-< aux· J .. ges laïc~.
» Cependant en France les Par-lemell5 fe [ont mi's· en poffefli~n
"de juger de ces fépaFations d'habita'l ion , d.oi,.~ 5o'enfuit la (él'a-ra- '
»tion- à Morof Us réduirent les Juges eeclié/lafiiqlle-s' au-ta-nt qu'i.!~ peu"vent à J.a. o(eIlle- connoi:rr~n~e ~11 JHlfn.t cde dlreit', , & veuJént que
"ccII\! d'e f:üt (Ott 'examlliéë '& i Ilfimi te 'chlns les Trièùnallx féculiers,
'~r là ,rél'aration a'hll'~ipaûQ.n eniilor·~e avec [oi preliîue 10Hjeurs dei
" quefiwn~ de (liit [àr lerquelles il fàut Infermer-. M Confére/1'Ces de
P.arii [ur· le M4 riage, tOITh h pag•. 1'<l:t-:- _
'
'l,J
feront pas viefêes '; que }'hom'ttle ne ce1fel':l pas: d'être
l'appui & le foutien de fa foible compagne; il faut la
lui rendre, dans l'efpoir gue fi jamais ils ont méconnu
' lemrs de.voirs, jls ne s'en écarteront plus ni l'un ni
l'au~re;. il le faut, par <!:ela feol que l'homme, cet être fi
fOible, fi capabl~' de faute, l'eft: toujoups de réfipife::ence ';
il le faut, parce qu'il impone que les lLoii( & leurs or:'
ganes ne calomnient pa~ la nature humaine, ae préfument
point un délit.
Le Parlement de Provence a bien reconnu la vérité de
ces maximes, lorfq.ue, malgré les preuves de (év.ices, il
a ordonné ~ la femme qui les a malheureu(emenc con(tatés, de rejoindre (on mari, à la charge par lui de la traiter
maritalement. L'Arrêt a déja été cité par le Comte de Boniface, tom.
Mirabeau dans (es défenfes imprimées. Nous reviendrons 4) pag. 1° 1.
fur (a difpofirion •
.:Répétons auparavant. qu'il ne faut jamais perdre de vue
Gue c'eil: dans des Loix Canoniques & dans des Sentences
des Juges d'Eg!j(e que nous tr.ouvons les premiers exemples des féparations légales pendant le mariage. N'oublions
pas que ces Loix, rendues dans des temps oÙ la Cour de
Rome avoit de grands intérêts à ménager & nne vail:e
<lmbirion à (atisfaire ,. fe reffencent de la pofit'ion délicate'
& de la polit.igue circonfpe&e & précaire de leurs auteurs (1). Cepen{]anr aucune ne prononce une (éparat.ion dé.
(1) Innocent III. dont nous venons de citer la Décrétale , preITé
l'ar le Roi de Dannemart, mit le Royaume de' France en interdit.
pour punir Philippe Augune de ce qu'il ne vo~ loit pas le recon noitre pour Juge de la vahdité r de fOA mariag.e a"ec Ih[embutge,
!œur du Roi de Dannemarc. Le- Roi . rouché d·es ol ~meurs & iei'
défanres que j'interdit excita en France, fe fournit à J'aulorité.,
lui demanda des Juges pour examiner la validite! de (on mariage.
IX reprit fa femme avant qu'ilS ellffè"t prononcé, .& au moment
'OÙ on s'y attendoit Je moim.
Dl,
�'2.B
~niti.ve; on regardoit avec raifon ~ne telle féparation COll1llle
Pl aidoyer,
p' g. t o.
InfinIment
plus funeI!:e que le divorce que l'Eglife voulo 1't
r. .
prolcnre.
~otons enfin comme obfervation décifive en cette ll1atiere, que ces Loix, fource de notre Juri(prudence, n'ad_
mettent qu'une caufe, qu'un prétexte pour la féparatioo :
LE DANGER POUR LA VIE. Tous ces faits qui jadis annul_
loient le mariage, ceux même qui diffolvent l'union Con_
jugale dans la moitié de l'Europe, un 1èul excepté ne
font pas même caufe légitime de féparation d'après ces Loix
qui font devenues les nôtres, parce que la Jurifprudence le;
a adoptées.
LE VRAI PRINCIPE eI!: donc qu' il n'y a qu'une julle
caufe de féparation ; il n' y a qu' une caufe néceŒaire: c'ell
le danger pour l.a vie d'un des conjoints. On a eu raifon
de dire dans ce procès que la femme " ne peut deman" der une féparation' de corps', fans Iqu'il y..ait à èraindre
" pour elle, c'efi-à-dire, pour fa propre vie qu'elle n'a
" pu donner. Il faut qu'elle paroiffe réclamer & défendre
" la confervation de fon être. Cette premiere propriété,
" ce premier droit de tout individu, eH: le feul qu' une
" femme n'ait pas mis en communauté dans' le paae du
" mariage. Ainu nul motif légal pour féparer d'habitation,
" que la preuve certaine que la cohabitation feroie con" traire à la premiere loi de la nature, à celle de la con" fervation des êtres. " C'efi à ce feul moyen que l'inflexibilité du lien conjugal a pu fe plier; encore ne cruton jamais qu'un tel danger pour une .femme de la part de.
fon mari pût être durable. On voulut feulement la garantir
d'un premier mouvement, d)une violence fubite & prefque
involontaire. On ne la fépara que pour un temps. Les Décrérales n'autorifenr qu'une féparation provifoire, lo rs même
qu'on ne peut douter que la vie de la femme foie en danger; & les Arrêts ne fuppofent point une ' féparation ab-
'2.9
folue & définitive. Encore quelles précautions ne prend-on
pas avant de les rendre! Dans la Capitale même, où ce~
caufes font plus fréquentes & prouvent par leur nombre
~effrayant que la corruption efi plus générale; dans la Capitale où les mœurs font néceŒairement plus tolérantes &
moins déticates, les formes que l'on fuit, font très-propres
à appaifer ces diŒentions; fouvent elles opere nt cet effet.
Le Magillrat entend les parties par elles-mêmes; il les
met à portée de fe voir & de s'expliquer entr'elles devant
lui. C'efl: en préfence l'un de l'autre qu'il entend leurs
plaintes. Souvent il appaife leurs qu erelles; & fi elles ont
des fuites, on retarde le dénouement, en fequefir ant la
femme, en la mettant à portée de voir & d'entendre fon
mari avant d'accorder une féparation, dans le cas même
où on la juge néceŒaire. On peut voir le détail de ,ces
procédures dans le nouveau fiyle du Châtelet. Et voici
comment les Auteurs des Conférences tenu('s fur le mariage parlent de cette maniere de procéder fur les demandes
en féparation :
" L es Juges ne l'accordent qu'après avoir ordonné une Conférenoes
. c,
•
~
, to m.
lllIOrmatlon
ou une enquete
tr ès-exacre,
parce qu 'II
e e"de Pans
p'g. 1 0 ' .
" dépend abfolument de la dépoution des témoins, & de
" la certitude des raifons que les parties alleguent pour
" la demander. Après que l'information a été faite, les Empe" reurs Chrétiens & les Payens même veulent que les Juges
" foi e nt très-difficiles à l'accorder, quoique l'une des par" ties ait de juttes raifons pour la demander, fur- COllt
" quand il y a des enfans; c'efi pourquoi les Juges, avant
" que de l'ordonner, font ordinairement entrer dans la
" Chambre du Confeil le mari & la femme pOlir les en" tendre enfe mble, & tâcher de les reconcilier; & même
" avant: que de prononcer déciuvement fur la demande
" en - fépa Mtjon, ils ordonnent prefque toujours que la
" femme fe Tecirera durant fi x mois, ou dans lin Couvent,.
)J
�3°
" au che~ qqelque parente; le maric-a la libèrté de 'Ia
t. vOir...
Si on ne trouve pas dans cette procédure l'augu1l:e lirn.
plicité, l'impofanre majefté des formes antiques agrandies à
nos yeux par leur éloignement de nous., & peut-être embellies
par le coLoris de ceux qu.i nous tes ont tTanfmifes., on y voit
dU-l'noins le refpe& qu'infpire à ta Jullice même la fainteté
d'un lien formé par ce que la Nature, la_Religon & les Loix
ont de p1us puiffanr & de plus [olide. Non feulement elle craint
de le rompre ce lien, elle craint même d'y toucher. Et
;remarquons que dans cett~ feule occafton le Magiftrat de.
v~e nt pacificateur fans defcendre de [on Tribunal, & par
~es fOflétions même de fon miniftere. Ce n'eft qu'après
avoir épuifé tous les moyens poŒbles de conciliation, &
fur-tout, ce n'ell: qu'après que celui des deux époux qui ré.
pugne à la 'féparation, a pu s'eHarcer par lui même de ra.
mener à l'habitation commune celui qui veut s'en éloigner;
ce n'ell qu'après_avoir réitéré les épreuves de cette efpece,
qu'on fonge à prononcer fur la vérité ou la fauffeté des
dangers ftlppofés par la femme. Et s'il arrive que lors même
qu'on reconnaît la fauffeté de [es plaintes, on la laiffe
quelque temps encore dans la retraite qu'on lui a choiGe,
~,'efl: pout' mieux affurer la réunion; c'eH pour que le temps
& a,s pro~édés appaifent la fenûbilité de l'époux juftement
j,rité d'une telle réclamation, de l'injure qu'elle lui fait, du
foupçon qu'eJlt! lui a, du-moins imprimé.
Po.urroir-on [e diŒmuler en effet combien la malignité
!"éali{e aifément les foupçons les plus injuHes & même les
Blus aMurdes ,_·combien en général une demande en fé·
pa'4t-i op ea: inj-urieufe ? Si la l'épudiation d'un mari par fa
~mme [ef(}j~ regardée comme infamante, <combien plus
lr fame n:efh. pas. la demande <ie celle qui dit à la Juftice
<J:lle [on mat"-i e1l tel, qu'eUe aime mieux fe condamner
à, i,\ .airilité, paifer le l'eil:e de fa . vie dan, un etae contre,
31
narurè ,- dans un état amphi6i~, comme Madame de Mirabeau elle-même l'a nommé, étouffer dans fan propre
cœur tout ce qui peut refier d'une premiere eendreffe, en
effacer jufqu'au fouvenir, que d'habiter avec un tel tyran!
On a bien rlifon de croire qu'un génie ennemi s'dt emparé
de l'époufe qui [e porte à de telles cextrêmieés; rtlais Pinjure faite au mari n'en ell que plus grande; mais plu~
grande auffi doit être la circonfpettion du Juge; plus opinià.
tres doivent être fes efforts pour ramener la paix do:.
mellique, premier gage & premier fondement de la paix
fociale.
On étoit loin de la vérité, quand on a dit que les caufes
de féparation pouvaient influer fur l'état civil des perfonnes, mais qu'elles éroient PRINCIPALEMENT SUBORDON· Pag. ,,6 &
NÉES A LEUR BONHEUR
MORAL. On étoit loin de la vérité , lU
~ '17 de la COll.
"
[auon.
quand on a fuppofe" qu'on ne Juge pas des caufos de ft;, paration' encre conjoint:r,par ft: rapport qut ces caufos peu- Pag. 18 & '9
" ' vent avoir allec l'ordre général de la fociété, mais par de .la Con f,,!..
i1 celui qu'elles ont avec' le bonheur moral ou avec le tatlon.
l' malhe/Jr' particulier des époux, parceque ce n'efl: point pour
" l'exemple & l'édification du public qu'OG répare deux
" époux, qui ne peuvent vivre enfembl~, . mais pour les'
" foutl:raire aux dangers d'une- cohabitation forcée, que la
,; ·Jufiice relâche les nœuds de l'union conjugale." On
éwit loin de lia :vériré, EJu-a-nd: pour prouver de relIes aifertiens, on a d i·e: " les Loix- n'ont jamais cru pouvoir s' dr- .
,~ roger le pouvoir inoni de commander au fe'n timent , ou
" de faire violence l(le déticateffi & ci- cette lihert~ de cœur,
,1 qui t/(NZ's chaque indillMu fait partie de [a propritré per,,- [on-nefle " &- qui-- efl' le droit [e plus jaloux dé l'hufrJanité.
,,- Nos T ,ribuoaux ne eonno,j'Kent poim: ce genre de def,;. porif.me, ou p-lmôt ils- ne pourraient le c0nnoÎtre. Eta" Mis polir modùer les effets des pa.ffions, ils Javart qu'ils
,~ n'à/- peuvent- guirir les caufos; que CHACUN EST GOU- ,
a
.....
1
~
�,
,
OU ENTRAINE
Jl.
"
VERNE
"
"
BLES D ETAT ET DE SITUATION QUI MOD-IFIENT D
VERSEMENT LA SENSIBILITÉ, & qu'il ferait trop d [.
, '
PAR DES PRINCIPES INFLEX
1~
" gereux & même impoffible dans des queftions de mŒu:~'
" de choquer ouvertement les mœurs elles-mêmes. " 1
. Sans doute les Loix ne commandent point au fentirnent,
fans doute les Magiftrats ne peuvent rien fur le cœUt. AuŒ
les défenfes du Comte de Mirabeau ont-elles affez dit gue
n'érait point aux Loix & aux Magiftrats qu'il demand:,e
le cœur de fa femme. Ce qu'il leur demandoit, ce gui luit
, , accor d e,
' c'el[
a d" erre mis
. à portee
' d e 1e reconguérir 1
a ete
& cous les .honnêtes gens doivent defirer cette épreuve ~
elle fera utile ou infruél:ueufe: qu'importe! Elle ne [auroi;
être dangereu[e. Il profitera de cet avantage, ou il le dédaignera. ( Lui feul peut être arbitre dans une fi trille al.
ternative. ) M ais on ne peut lui refufer un droit gu'il n'a
pas perdu. Il ne doit pas ignorer que les Tribunaux ne
peuvent guérir1es coufes des paJ!ion~ funeftes qui Ont éloigné
de. fa maif9n la paix d{)meftique. Mais po ur rappeller cette
paix, pour modérer les effets <le ces paffions, n'avoir-il pas
droit de s'oppofer à ce que la J ufiice ne le féparât point'
de fon époufe? C'efr ce qu'on devoit lui prouver; on de~oit prouver fur-tout qu'une femme peut employer pour
moy~n de féparation la répugnance qu'elle a de rejoindre
{pn epoux, qu'elle a le droit de lui dire: Notre réunion
ftroit- violence il m:z délicateJ1è, à ceue lihert~ de cœllf qui
dans ~hafjue indfvidu fait partie de la propriété perfonnelle,
& qUl efi le droit le plus Jaloux d, l'humanité!
I:e mariage ne fera donc plus chez nous qu'une union
pafiagere, un engagement momentané! Si l'on met en réferve la liherté, de cœur, cette partie de la propriété perjànnelù:, , dr~t Jaloux de l' humanité; fi cette liberté de cœur
~mporte nece1fairement la liberté d'aél:ion' ft c'eft fa délic.areffe, c'eft:'à-dire, fon inclination qu'u~e femme doit
fuivre
33
,
,
1
'r
fu ivre dans toUS les temps, à quOi fe red lluent don c eçdevQ)rs du mariage? Si elle peut dire: Je me fens gOI/ l }unie' 6' entr(l fnée par des principes iriflexibles dejituation qu i
mortifient tellement ma [erifihilité , qu'il m'ef!: impoffible de
demeurer ,d ans mon é tat d'époufe. Qu'ef!:-ce donc que le
mariage ? Les liaifons paffageres que le caprice form e , &
que l'ennui ou le dégoût terminent, [erQient alfurém ent
mille fois préferables. Une telle morale n'a déja que trop
d'apolog if!:es, [ans qu' on l'érige en max ime dans le [anctuaire même de la Juf!:ice; & noUS oferons l'affurer : ce
font les principes de la Confultation dont on pourroit dire
avec vérité ce qu'on trouve dans le Mémoire de Madame
de Mirabeau : " Si dil ns cette caufe il ef!: qu elgue ch ofe
" de plus effrayant que les faits dont la Dame de Mira" beau fe plaint" ( ce qui veut dire les atrocités qu'elle
s'eft permife de publier contre fon mari) " c'dt la morale..
" 1 avec laquelle on prétend les juf!:ifier; " il faudroit dire,
Juftifier cette public\l.tio n.
,
Et qui ne [eroit point ejfrayé de tels principes! Les
époüx des deux fexes doive nt craindre éga lement que fi
jamais une bouche ennemie vient foumer entr'eu x la di fcorde, un moment d:humeur n'am ene un e rupture éternelle. Un gejle , lin regard, lin mot en fe ront le pré texte.
Des ciers intéreKés aigriront une femm e contre fon m ari ; la l'~~;li~~,I, r~"
& fous prétexte d'épargner [a délicateJ1ë & [a [enlibiIÎté,
on [e permettra pour elle de le déchirer, de l'Qu trage r ; &
l'on néceffitera par-Il des combats ré volt ans à la face de
la Nation & des Tribunaux; les enfans ont Il craindre de
voir ceux qui leur ont donné le ,jour en proie à de telles
-d ilfentioQs, de [e voir, eux-mêmes partagés entr'eux comm e
lln vi.! troupeau. Voilà ce qu.e .p(odl)ilirenc jadis les di vorces.
.voilà ce qu e prpâlliroient les [éparations, fi on les admettait avec la facilité dont on auroit be[oin pour accré.
diter la demande de- M<1dame de Mirabeau . Voil!! quel feroi
.
r-
,
E
�Ir
des
l' erret
.•
•
, 34-
pnnclpes Invoques par élIe; ft jamais ils ' 1
'
t1 •
•
eto ent
a cl optes,
m- a1gre' 1es contrl! d'ImOns
'e, vlderttes
qllji!s tel1~
m ent, cont'râdi t1ions dont la m6il'lclre eil: de dire: les
efir.
r.'
.
.
, Jt'
1 cl' .,
.
cau es
de leparatlOn
Inferenent a Igmte dù mal'Iage, là tranqlliJlit
des f11111l1es, les bonnes mŒurs; c'eft principaleme/lt é
botlne.s mœ~rs q~'elJes. tiennetit; & dât1S le jugement ~~
ne dOIt compter pour neh le rapport que ces éaù'ès pe
'
. avec l'ordre genera
"
1 de 1a fidcœtê.
..
JO
ut/etu
avoir
, Oil en avoit be{oin cependant de i:és pl'Încipes ttl
, Ct '
•r
1
r.'
ntta.
cl 1~{üI:e.s,
pour a.ut~mèr a èorhequehcè qu'on en tire, &
qUI vemableme.nt _n ell: pas nÔli~èJle; qu~ chaque condition
a . les Ii~ ns, tellement que ce qUl ne forait p ffS un moyen de
feparatlOn èntre gens du commun, ell pelle fèrvlr en tte
r;
d'. IIne ~on d'Illon
. pl
E xf1l1quon'S-lloUS
.
Jon,nes
us I
re evtt.
(utperce
.F0ll1t; Il en: Important à la caure.
. 11 n'y a qu~~n p~incipe en mà~ier~ de (éparation; il ne
peut y en avoIr qLl un. La cohatlttation eft-élle n'elt-el/è
pas dangereufe? C'eft la feule chofe quitJh doive 'el{amitler
& cel~ ell indépè?dàftt de l'état, de l;t tfuaHté &: dé I~
condHlon des parnes.
)
,
Sans doute que des attes de vi61eflêé aUl<qtlèls uM fetnme
du peuple pellt réfifter, f0urniroient 3 une fetntne de qualité
une cauCe Cuffifante de (éparatlon. Mais p-ourquoi? Cet!
q.u'on a penle que ée qui ne fuftiroit p~as pôtir mettre la
~~e <le l'une
da~ger, expof: f6it ~elJe de l'autre par la
~lOle?ce de 1 eniotlon &. du reftèbtl!'rient fi Ce rt'eft par
la .fol.bleffe de l'org~nifa tion. C'èft donc t~ujours le hlêtne
~f1nClpe. Il faut toUjours examiner fi on peut ctalndte rai.
ionnablement powr la vie de la femmè qui demande (a (é.
Confulr.t;olJ , paration; ~,e njeft pas .mêm~ âffez de dite !..Des faits Cà~
pJg. 1l 0 .
p~D~es .dalt.ener les efprus &. ~ès /al:tzc1eres , d~ ]impIes pro~
cedes ll1Jurœux f ont des motifs leglliihe,s de jèptttation. Sans
cl~ute u?e fe~t?e, & m ême ,de quelqae état qu'elle (oie,
n eft pOlUt. faIte pour effuyer de fon époux déS proèédés
;?
.
•
,l
~) , .
' M .
1
ÏJ!jlJrieu.x , 1l10J{1S encore 'les m(prLfi marfil/es. :jIS tOllS. e?,
torts <lu'l.lU homm~ peut avoir· envers la ,;:ompag-n e qu'il
s~efl: donoée, n'cperent pas la diffolution de cetre (ociété.
TI eft alfez puni de (es COrts envers elle par la dimin~tiol1
ou la perte de fa tendre{fe & dl1 bonheur domeftique.
il en eft alfez puni par le fpeél: ac1e des maux qu'i] a caufés ,
& qu'il parça o-e n éçe lrai r~ m e nt; il en efl: airez puni, [,1ns
qu'on le m et~e dans l'impoffi bîlit è de réparer fes fautes &,
de remédier à (on infortu ne.
L es deux époux doivent Ce fuppore er l' un l'autre. Il s
doivent Cupporter leurs défauts refpeél:ifs, fe les pardonner.
Eh! q'li n a pas beCoill d,e pareille indulgence! Que ceux
qll.Uuge l1t fi (évé.remenr les a~ tres defcendent i1~ f~~d de
leur cœur! Qu' ils (e demandent complen on verrolt d epoux
cobabiter .e.nfèrpble, fi la cohabiration n'était pe rmÎ(e qu'à
cepx qlJÏ n'ont ,;:elfé de s'~imer, &, dont , rien. ne tro~bla
j.all1 aii \'\lni8 n, -Que feHlIt-ce, .fi 1 ~n /eparOlt roux c; UJc
~êm~ dçnt le ~ien ~ pu df '1s cert anlS momens parome
in!ùpp~rtable l fi on les féparoit à J'e uf , 'p·r~miere plainte,
à leur pre miere r,é clamarion!, 1.1 n'y' a.uroit. bientâc pl~lS
de mari age J du-m.oins , on Il en recue lll e rol~ .a ucun ~rul.t,
La Cociété ne Ce renou-velle roit que par des Iqlfons cnml~elles. Or) ne conooltroit bienrâ.t plus de parens. En-ce
là où l'on yeut con~i\lire Itô p erfolln es d'un~ conditioll di[{inguù? Vent-on frapper les ~~ illes Î10tfl bles de ftérilit.é?
L 'a ncienneté des races ne mente-t-el1e pas au cont raIre
qu'eHe,c; (oient plus fOig neu(erae,n.t .çonCervées ? 011 re~~ rde
la Nob!elfe d'.orio-i ne COrnrt;le enlbl,lfanr des rangs lIltermédiaÎl"{!S (1) guj fo llt d,e l'~ffet)çet1'lêOl,e ~e la Monar~hie: 11
faut donc la ,CDn(ervt:r pour {le pa~ a'ltere r , li,/. con(utUtlOll
de l·é~af. C'efl: 'ç\alJS cene clilfI:e q~'il falJ~ parfi YLl.\iére mel1c
o
i
"
(1) Mr. de Montefquieu dit > pouvoi; inÎcrmèdiair. fubord!lTVIé:..
E l.
-
�6
·
.
I~
'
cl
3
h~alDeenJr unIon
es deux époux. Qu'on fe
arde
bl,en .de l,a rendre telle qu'au moindre fouille o~ puiif:o nc
detrulre 1 effet. Ce ferait compromettre bien effi . en
me t 1
,. , de'
entlelle
nb' a. perpetuite es ramIlles diil:inguées , que d" eta b"
,
1
1 ar It:alre po~r ~nique code de leurs mari<)ges.
Ir
Mals les pnn:-Ipes de la Confuleation de Madame de M'
r ab eau ne JonHls pas ceux de Cochin & de q l ,1tres Jurifconfultes ? Eh! quand cela ferol"
ue qu au.
"
une
d : cette Importance, une caufe dans laquelle il s'a cauG
it e
determlOer la nature & l'effet ou premier lien quO g Ide
h
r
""
1 unit es
ommes en IOclete, ne merite-t-elle pas qu'on
.
1
"
.
examine
fi
es principes eux-mêmes, & non ceux qui les ont
'
d
l
"
"
)
V
con
g n~s ans eurs ecrits.
oyons cependant ce qu'a d' C 1"
It oc 1lin, & . ce~x qUi ont parle d'après lui.
n plaldOit. pour les héritiers d'une femme morte leparee
r'
,
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e on. mar~ , & p~r Senc~nce rendue fur une enquéte légale. qUI avole prouve les fevices. n s'agilfoit de 1
fi
m t
d
S
' ,
a con ra lO.n e ceCCe . encence , au chef qui privoit le mari des
donatIOns de filrvle pour caufe d'it)O"ratirude
C' il:
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'
O '
, e
a~r s ~vQlr rappellé les preuve " de févices conf1a~es lar e~quere , par des procès-verbaux d'un Commifalre e
o!lce, & par des réponfes prêtées devant lui
l
par es parties, 9ue Mr. Cochin dit ce qu'on a rapporté
~~~s la Confultan.o~. Mais il n'en tire d'autre conféquence;
n 9ue I~ qualIte des perfonnes aggrave les févices &
mauvaIs traIte mens.
Il dit, il eil: vrai qu'
,.
J
P,ge
10! .
.. d"
"
con duzan 'ifJll1C7uee
on n exzge pas entre perfonnes d'une
nue 1
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d
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' ~' ( ' b
'1
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es VlO ences u man atent ete port~es .lu qu ~ jrapp,e. r fa femme; & cela ne dit pas qu'on
n eXlg: . pOIDt <J.U Il y ait du danger pour fa vie. 1
'
d MaISclce n'eil: .p a s d
ansl es mouvemens aratoires
du Plai.
°rer e Cochm qu'il faut chercher le principe. Il faut le
VOIl"C~ans la caufe même par la maoiere donc on a J'ugé
I es raits.
37
La Danle de Chalfe avait été battue, e l/cédée de coups
Cochin, tonh
par fon mari. Le Commilfaire avait déclaré avoir l 'U des ... , polg. 1 0 9 .
meurtri.ffures que la Dame de Chaffi avait au bras. Il yavoit
preuve écrite que le fieur de Chalfe avoit tenté de faire
annuller fon mariage, & dépouiller fan époufe de la plus
grande partie de fes biens. La tyrannie du mari érait prou-'
vée pâr des billets écries de fa main. Dès les premiers
jours de fon maria ge il avait placé ulle concubine à fa
cable & dans fon lit, il ne pouvait le nier ; & cepend a nt
on ordonna la preuve des févices, & la fé paration ne fut prononcée qu'après qu'ils furent prouvés. Voilà ce qu ' il falla it
obferver dans la caufe de Cochin. On devoit obferve r encore
que dans la m ê me caufe il " convient qu'il ne faut pas
" fe porter légérement li accorder des féparations de
" corps & d'habitation entre mari .& femme. Il convient
" même EN GÉNÉRAL que TOUTES SORTES DE MAUVAIS
" TRAITEMENS NE SUFFISENT PAS POUR SOUSTRAIRE LA
" FEMME A 'LA PUISSANCE DU MARI; " & cela fe trouve
efme les deux palfage5 de Cochin rapportés dallS la Confultarion. La c;ll1fe de la réticence dl: alfez cl aire; l'ave u
de Cochin ell: un hommage au principe; il explique ce
qui précede & ce qui fuit. Quand Mr. Cochin dit que toutes forces de mauvais traite mens ne fuffifent pas pour fouftraire la femme à la puilfance du mari , il montre alfez.
qu'il entend que ces mauvais traieemens fojent de nature à
mettre en danger la vie de la femme; & la caufe même,
qu'il plaidait le prouve. Il y avoit des écrits injurieux; il
Y avoit des meurtrilfures , & l'on demanda des preuves.
Il faut, fuivant le Droit Canonique, dit Lacombe qu'on
Page l OS .
nous cite encore, " que les févices & mauvais traitemens,
" pour opérer la féparation de corps, aient été capables
" de faire craindre pour la vie de la femme, & qu'ils
" aient mis fa vie en danger. Mais fuivant nos mœurs, il
" fuffit qu'ils foient graves, qu'ils rendent la vie infuppor-
" table & infiniment trifle & difgracieufo. "
�8
3
. . - ,eil .te'1
Cela prouve bien que le pnnclpe
.qu'on ~e peUt
guere s'en écarter [ans vaguer dans 1 arbltr;ure. Il n e~ .P<lS
abColument néceifaire, [elon . Lacombe? qu~. les [evlces
aient mis la vie en danger; II CulEr qu Ils IOlent graves.
Mais qu'entend-il par fèvices gr~ves? Ceux q~i renderu
la vie infopportahle, infini;nent r.:·ijle & difgrac.zeufè. Ce~
mots ne difent rien, ou Ils reViennent au. pnnclpe des
Loix Canoniques. Si L acombe entend qu'Il fulEr qu'uQ
des époux trouve I~ .vi,e tri~e pou~ .qu'on les ~épare,
il efl: li loin de la vente, qu'il ne mente pas de repon(e.
Et li par des févices graves. qui .renden,t la vie trifle, in[llpporrable & infiniment dlfg:acleu~e, Il entend d~s ~4U
vais trairemens capables de faire cratndre pour la vie cl une
époufe , ou du-moins d'en a~réger la .durée, al?rs il ne
dit rien de moins que les LOlx CanoOlques dont 11 femble
vouloir refl:reindre les dj!pofitions.
Mais il ajoute ces mors (al!. ne devoit .plls le diŒmuJ~r),
& qu'ils [oient de Ilature cl pouvoir être admis. Or , toute~
ces refl:riaio/lls prouvent: l'embarras de J'Aureur, pour q)Q _
ciiier des opinions vulgaires avec les principes & la naturtl
des chofes. Ainfi ,quand il avoue qu'il faur que les fait~
foient de nature à pouvoir être admis, il d.i t airez qu'on
n'admet que dilEcilemem les preuves de févic~, & ç'en
l'opinion générale.
,
Après la citation de Lacombe & de Cochin, on trOUl'e
celle .d'Argou, quj dit: " Qu.and un mari ma lrraire fa fern" me .; & qu'elle ne peur vivre ave.c lui (ans êtr-e en quel" que danger de fa vle ., elle peur [e faire réparer. d~ ÇOT.PS
i, & d'hahiu!lnn. ,. Ce )l'dl: PAS çe oqu'el1 a CIU? MaiS
l'Auteur .:l it que quant a IlX f1UlIJW1i.s traitemef/s, il [ulEt q,I,-t'ils
!Oient CONSIDÉRA BLES ,~{J égard 4 la flualicé {litS perfp,mes ;
il faut du-moins .qu'ils !Oient COJlllidéJ1lb1es ; & l'Auteur f~p
po re tellement que III fép;mltioll oe peut être prà,ollnée ~u'à
rai{o n.des féviœs,4u'il~j~l.Ite à la page {1;I~V6ptt!: QJL()llt4 la
39
flparatlon d'ltaMtation, COMME ELLE N'EST FONDÉE QUE sUR
z'Es MAUVAIS TRAITEMENS articl!lés par la f emme, il faut
néceJJàirement ordonnu un~ information ou une enquête, parce
que la fèparation dépend a6[olument des témoins. Ce pairage
confirrtle nos prin cipes.
.
Ceux de Mr. Pothier ( Trairé du Contrat de Mariage )
qu'on nous oppofe encore, ne nous fOnt pas plus contraires.
Voici comme il s'explique.
" L'union du mari & de la femme, qui efl: formée par T om. 1, par
" Dieu même, & le pouvoir que chacun des conjoints don- 1 7 8 .
" ne fur [on corps par le mariage à l'autre conjoint, ne
" perrnertent à la femme de demander la féparation
" d'habitatIon que pour de très-grandes cauCes. Elle ea
" obligée, dans le for de la confcience , d'attirer, par f.'l
" . douceur & par fes complaifances, les bonnes graces de
" fon mari ; & fi en faifant tout
qui efi en fon pou" voir, elle ne peut y réuffir , elle ne doit oppofer que la
" patience am, mauvaifes mnnieres de fon mari, & même
" à fes mauvais traitemen s : elle doit regarder cela comm~
" arrivant par l'ordre de Dieu, & 'comme une croix qu'il
}, lui envoie pour expier fes péchés; cela ne doÏt pas l'em" pêcher d'aller dans toutes les occafi.ons audevant d~ tout
\ " ce qui peut faire plaifir à fan man; & elle ne dOit pas
" le quitte r, à moins que les chofes ne foient portées aux
" plus grandes extrêmités. "
Ii obferve enfuite que les juiles caufes de féparation
ne font pas faciles à déterminer; qu'il faut que la femme
ai t eu conGdérablement à fouffrir; qu'il n'efi pas facile
<ie fixer le degré de ce qu'elle doit avoir à fouffrir. Il indiqUe -après <tue1quès points qui doivent fervir de regle aux
Juges. Le premier mériro~t d'ê tre r~~arqué dan~ cet~e, cau~e,
parce qu'il dOl'lne la clet d'une dlfl:tnébon qUi a ete faite
0
par plufieurs Auteurs: 1 • dit Pochier, le luge doit avoir lb. P'S' 18 0 .
ce
•
�4°
Pag. 11 6.
ig.lrd J la ' 'Iualité des partie~ ; & c'ell: ~ien ce qu'on de.
mande pour Madame de Mirabeau. MaiS ce qui fuit gê
un peu fan fyitême. " Un foumet , un coup de poing qu,ne
" r. c
.
,
Un
" 1lomme aura donne a la lemme , qUI pourrolt être cauG
e
" de féparation entre des perfonnes de condition honnête
" n'en fera pas une entre des gens du bas peuple, à moi'
" fcouvent reJteres.
" , , "
ns
" qu , 1'1 s n "aient ete
Il faut donc, fuivant Pochier, même pour les perfon nes d'u
condition honnête; il faut, même pour une femme de qualitn,e
qu'il y ait eu des excès pour aucorifer une demande en fépae~
ration. Qu'on craigne plus facilement pour la vie d'une pero
fonne délicate & fenfible par état, cela doit être, nous en
fommes convenus; mais encore faut-il qu'il y ait lieu de
craindre réellement pour fa vie, pour la féparer de foo
mari. Et à qui perfuadera-t-on qu'on peut craindre la coha.
bitation pour une femme qui a patTé plus de deux ans au.
près de fon mari, fans être expofée de fa part au moindre
danger, qui regrettait fon abfence, & ne l'a pas revu de.
puis ce temps?
Nous avons vu quels étoient, quels devoient être les
principes. Voyons maintenant les faits. Les détails des obferv ations abrégeront cette difcu{fion.
Madame de Mirabeau veut établir fon premier moyen de féparation , fur ,des ,outrages écrits & imprimés. Injures graves,
a-~-on dit " a ralfon defquelles elle auroit le droit de pour.
fUI~re u~ e,tranger par la voie extraordinaire. La fIIJlia
dolt venir a fan [ecours. On a compris qu'il faut tefpec7a
& ,wnger la délicateffi & la [enji6ilité des perfamles qui
dOlvent Je rejjJec7er elles-mêmes, qui ont reçu une éducatioll
diflinguée, & QUI SONT FAITES POUR MONTRER DE LA
NOBLESSE,
DU
CARACTERE ET DE
L'ÉNERGIE.
, :ans n~us arrêter à cette maniere de parler des qua.
ll!;s , de 1a.me & des vertus effentielles , comme fi elles
n etOient que pour les app(!rences, pour la montre, obfer:
vons
,
41
vans que les principes de Madame cle Mir:Jbeau fur ce
premier moyen condamne nt prefqu e touce fa dé[c:nfe.
, En effet, elle dit : il n'eil pJS permis à un mari d'outrager, de calomnier, de diffamer fa femm e , & dans le
Pléme remps, dans les mém es écrits, elle fe permet
d'outrager, de ca lomnier, de diffamer fon mari. Elle s'd~
dire, ou on lui a dit : la calomnie & la diffamarion portées à l'excès font des moyens de féparat ion; elle a calomllié, diffamé fan mari, fans doute pour en être féparée. Cette méthode n'eH-elle pas affreufc? Quelle eH:
la femme qui n'aura pas la fac ulté de brifer fa <.haÎne, fi
elle peut impunément outrager {on mari, afin que l'honneur lui défende de la réclamer? Er fous ce point de
vue encore, la caufe du Comte de Mirabeau eH infiniment intéretTanre pour la Nation. Tous ceux qui jugent
la caufe dans les cercles, ceux même qui pl acés fur le
Tribunal augufie de la Cour Souverai ne prononceront
bientôt au nom du Roi & pour le bien de la chof~ publique , dans cette caufe importante, tous feront ou peuvent être jugés demain {i,r les mêmes principes. S'il fuffit
à une femme d'outrager fon mari pour en être féparée
rien n'el!: fi facile à compromettre que l'honneur des fa~
milles.
Quand nous dîfons qu'il n'eit permis à une femme
-r
' d 'outrager fan mari, c'efi conve-'
lOUS aucun prerexte,
nir qu'il n'eit pas plus permis à un homme de diffamer
fon époufe. Peut·oa dire que le Comte de Mirabeau air
diffamé ~ calomnié la fienne ? C'eit ce qu'il importe
d'examiner.
- , ,M~d~me de Mirabe~ u fe plaint d'une phrafe qui lui à
-ete ecn~e par fan man le 14· Septembre 1774; mais des
rrenre-clOq lettres que ce dernier a communiquées vin<Ttneuf font poll:érieures à cerre date, & les plus ~end~es
lé trouvent parmi ces dernieres. Pourquoi Madame de Ml-,
F
�•
42.
.n'
r!beau n'explique-r-elle pas c~rre con~radlç{lon?- Le mari
avoit écrit: je ne veux plus être, & Je ne forai plus Votr;
dupe; & après cette époque, l'époufe écrit vingt fois: Dieu
veuille nous njoindre hientôt, car nOlIS ne fommes pas faits
pour être foparés. Madame de Mirabeau a donné ce fraO'.
ment de lettre ifolé. Lorfque cerre lettre fera connue tOll~e
entiere on verra fans doute que le mouvement de colere
étoit bi~n mérité, & qu'il fut pa/fa 6 er; m3is fans arltre ex.
plicarion on fent déja 9ue les. repr~ch~s ~u mari étaient
fondés fur une fuppoûnon qUI les jUfllfiOlt, fi elle 'toit
vérirable, & qui les rendoir abfolume ,l[ étrangers à Madam~
de Mirabeau, fi la fuppofition fe rrouvoit fauffe.
Qù'tm n'abufe pas de ce que nous avons dit que le mot,
vous êtes un monfire, peut être échappé dans un moment
de colere, pour eu tirer avantage dans la caufe pour Madame de Mirabeau. 00 trouvera dans Cochin à "1a page
cirée dans la Confultation de cette Darne ces propres mots:
" qu'un homme ait quelque mouvement de colere ou de .
" vivacité; que dans un emportement il lui échappe quel,,- ques termes un peu durs, on fait qu'il faut fe fupponer
" les uns les autres dans ces occauons." On le fait, dit
Cochin. Ce font des vérités triviales qu'on n'a pas befoin
de prouver. Combien peu, d'époux refieroienr unis, fi un
mouvement d'impatience ou de colere échappé à l'un d'eux
fuffifoit pour les féparer !
.
Un Avocat de Nancy plaidant pour une femme féparée
de fon mari par plufie.urs Arrêts, a foutenu néanmoins
que " pour les citoyens d'une naiffance relevée, élevés
" avec douceur, au fein de l'opuh:nce, rien n'efi innocent;
" un gefle, un regard font de~ outrages; fouvent un mot .
t! feu! s'imprime & fe perpétue dans leurs penfées. Les dif
" cours en apparence les moins outrageans ont pour leur
" cœur des poiotes décl1îtantes; el1es y laiffent des cica" trices qui ne fe ferment jamais, rendent la fociété d~s
• ,r; . . hle, 1~"
' . tlect.uazre.
1 ,n;'
,
.; deux époux InJupporta
<.S
eur ft,;partUlon
Il
Er cerre étrange autorité a été citée par Madame de Mirabeau.
On dira peut-être quelque jour à Nancy, d'après les Jurifconfulres de Provence, que les peines d'une femme, de
quelque nature qu'elles foiwt, fous quelle forme qu'elles loient
manififUes ,font calljès légitimes de ftparation; 'que ces caufos
font arbitraires, & ne font pas arhitra,ires, & fju'on trouve le principe dedicifion dans Je réfoltat indélwiré, &c. MalS parce qu'on
a dit ces chofes là à Aix, feront-elles v,aies ~ Nancy? Et ce
~u'on répete de la caufe de Nancy, où fans doute perfonne
n'en croyait rien, fera-t-il Vfdi aujourd'hui à Aix pour avoir été
dit en 1769 à deux cens lieues de cette ville? Suppofons-Ie
pourtant. La caufe de Madame de Miiàbeau n'y gagnera rien.
Si un gefie, un regard font des outrages; fi un mot échappé
à un ma>rÎ fournit à f01l époufe un moyen de Céparatioli
oéceffaire, pourquoi entalfer ta,n t d'horreurs cootre Mr.
de Mirabeau? Pourquoi fon époufe cherche-t-eIJe à avilir
le nom qu'eUe porte') Ses outrages tant répétés deviennen fwpedlus; ils [ont bien iootiles potir el1e & pour fa
caufe. Mais ils ne le font pas 11 celle du Comte de Mil'abeau. Us prouvent que ce n'en point one époufe douce
& timide ', endurante & retenue <jui demande la fépaJ.
ration. Madame de Micabeau ne peNt étre jugée plus dénvorablement que fur fes propres défenfes.
On ne trulDGjuera pas de dir~ ,-<ju'il fa<uc juger auffi Mr.
de Mirabeau fur ks' prod{H~ti()ns; & on lui ()ppofe une
prétendwe letNe écrite à Mr. de Maleshé~, imprimée A
b fuite d'un Mémoit'e à confulr-er & Confultati()l1s de Mes.
Beviere & Gr<H~bert de Gr.()u~entall, AVO<:3tS au ParJe1nent
de Paris. Madame de Mirabe.all impure â fon mari rimpt'e1lioa ~e cette lenre:; eUe veut la faire fega,fder <;preme
tllile diffamation. tandis <jue ies Jettl'es qu'elle cité &' dont
elle :s'étaye, prouvent qu'il n'a point eu' de part à l'im..
F~
-.
�44
pre,ai~n de cette lettre. Mais l'a-t-i~ écrite? Il ré):>ond qu'il
a ecrit à Mr. de Malesherbe, qU'Il n'a pas copie de fes
lettres, & qu'il ignore li ce qu'on a imprimé & qu'on lui
reproche, s'y trouve. On le preffe fur ce point. On fe plaint
P ag, 118,
de ce qu'il a dit n'être pas comptable de ce qu'i l peut
avoir écrit aux Miniflres du Roi. UN MARI, dit-on, EST
COMPTABLE A LA FEMME de l'opinion (fi/il manifeJle fol' elle.
Mais quelle ell donc l'opinion manifellée? Où efl: la calomnie? Des réticences, des points. Mais c'ell moins qu'un
mot; & on peut mettre à la place des points telle chore
qui juflifie pleinement le Comte de Mirabeau, en fuppo_
fant qu'il ait écrit comme on a imprimé. II lèmble que
Madame de Mirabe au, avant de fe plaindre des réticences
avant de crier 11 la calomnie, 'devait demander des expli~
cations à fan mari; fans doute il les lui eut données,
puifqu'il demandait à la voir; & li Madame de Mirabeau n'a pas eu befoin de ces explications; li elle [lit
ce que fan mari n'a pas écrit, ce qu' il n'a pas dit, ce
que d'autres qu'elle ne peuvent pas deviner, pourquoi fe
plaint-elle de la calomnie?
Nous n'examinerons donc pas les Doél:rines entalfées,
pour prouver qu'une accufation capitale & calomnieufe intentée par le mari, devient caufe de féparation pour la
femme. Madame de Mirabeau feule peut favoir de quelle
nature ell l'accùfation que les réticences fuppofent; elle
feule peut favoir li ,elle a été calomniée; mais c'efl: d'elle
dont il s'agit; on n,e peut pas , s'en rapporter à fan jugement. Et s'il arrivait que des apparences l'euifent accurée
auprès de fan mari, ce ferait à ces apparences & à la
fatalité, plutôt qu'à lui, qu'~lle devroit 's'en pren-dre; elle
fur-ront qui juge fon mari d'une maniere bien étrange
Contre toute apparence, & fur des prétextes bien frivo les.
On ne voit donc pas que ce premier moyen de féparatiol! ' puiffe être fondé; il faudrait que Madame de Mira-
r.
4~
beau èxpliquàt ce qu'elle croit que fon mari a voulu faire
entendre, & qu'on en jugeât la calomnie; & probablement
ni l'un ni l'autre n'arriveront encore.
Le fecond moyen de féparation
un reproche d'adultere fait au mari, & la tranfaél:ion par lui foufcrite dans
l'affaire de Pontarlier.
Il efl: avoué dans la Confultation pour Madame de Mirabeau , que l'adultere du mari ne doit point étre affimilé
à celui de la femme. On donne, d'après Montefquieu, la
raifon de cette différence, & on paffe fous lilence le principe. Voici ce que dit Momefquieu avant ce qu'on en a.
rapporté.
" Comme le mari peut demander la SÉPARATION 11
" caure de l'infidélité de fa femme, la femme la deman" doit autrefois à caure de l'infidélité du mari. Cet ufage
" contraire ci la difPcfition des Loix Romaines s'était in" troduit dans les Cours d'Eglife , où l'?n ne voyait que
" les maximes du droit canonique; & effeél:ivement, à
" ne reg::rder le mariage que dans des idées purement
" fpiritllelles, & ' dans le rapport aùx chores de l'autre
" vie, la violation
la même. Mais les Loix polieiques
" & civiles de tous les peuples ont avec raifon diaingué
" ces deux chores; elles ont demandé des femmes un
" deO'ré de retenue & de continence, &c. &c. " (Le
reRe 0 de ce paŒlge efl: rapporté dans 1 la . Confu~tation ,
p..ag, 128 & .fuiv.).
,J
• .
_ _
,
dire affez cl ai rement que l'infidélité du mari n'ea ,
point une caufe de féparation dans . les Tribunaux civils,
& on convient du principe. On pourroit même ajouter
q.ue jamais les Loix canoniques n'ont reg~rdé l:adultere
du m<U'j comme une caure i de . féparacion. Nous , avons ~
déja vu qu'ell es n'admettent qu'une caufe pour la femme : le péril imminent de fa vie. Qu'on ne faffe point
équivoque fur l~~ féparations alltorifées par quelques
ea
ea
C'ea
1
�46
Canons dans le cas d'adulrere du mari. Il n'yen
Il'
de, l're' pararlOn,
,
d'h ab"H3uon, mais
, fieulemenr pa~
q~el[lo~
de
feparatlOn a thora, qUI n'emporre pas l'autre &
les Cafuiaes prefcrivent encore pour la moindre' fouill<J ue
liplfJrue
"
II e de l' uq des conJoints.
' .
C 'ea d'après leurs opio ' Ure
que les Tribunaux eccIéfialtiques d'Iralie féparent enclons
,
,L
, d l '
.
ore
(il tnDra pour a li tere du man (1).
Mals dans ces pay
même, l'adultere du mari n'eR pas moyen fuf!1fanc po s
r'
d'h ab'nation.
.
Ur
{eparer
Ainli vainement invo.queroit - on fur ce moyen 1
.
.
d
es
L ?"r
qnomqyes ont on ~ fouvent. abufé dans de pareilles c~ufes; on ne pourrOJt en reUrer aUCun avantage
C'ell. par lés Loix civite,s qu'il faut fe régler, dit Mon:
tefquleu, & OR en conVient. Or les Loix civiles ne reEardent comme adulrere propx:ement dit, que celui de
la femme : Propriè ad.durillm committitur in Tlupta propter
partum ex altero conceptum, compojito nomine. L. 6
~ ff. ad Legem Juliam de adulteriis coercendis. On n~
p,eut d,one pa~ faire, d~ l'adu!tere du mari un moyen de
fep~ratlon. Qu on .n~ dlfe POIRt, la Loi doit être égale
pou.~ le~ dc:ux .cenJol?ts. ,Elle feroit bien injuile, li elle
lDRigeOlt parellIe pelOe a des aéOons donc les confé<}Ue.nc~s . font li différentes Ce n'eil pas le péché que la
~I clVlle c~dere da~ ~ne a~ion;, c'ell Je dommage
~u elle p'0rte, c eil Je preJudlce qUI en refulte pour le tiers,
&: ce n eil que fous ce rapport qu~elle punit J'aduJtere de
fa femme.
.
l,
C~l2i d~
mari peut d~autallt moins rournir un moyen
de .fep,arauon '" <pole ~'eQ, de la Loi Romaine qu'on voudreft 'etayer un ,pareJl m,o yen ,; & la Loi Romaine ne re8)1rde comme adulnere, que l'in6d,éii«é d'une femme ma-
4
,;ée qui s'exp-ofe à Jonner à 10n mari, à la famille de [011
mari, des enfans étrangers.
On a reconnu la vérité de ces principes dans la Con{ultation de Madame de Mirabeau. On a dit : J, Tout
" adultere du mari n'-efl p as de fa nature moyen de fépa/ la fiemme; car qu,
. pre' f'ere dans fion
" ratien pour
un man
" cœur une étrangere à fa propre femme, c'éa une foiblelfe
" que l'on pardonne à l'humanj.cé. Mais s'il fait trophée de
,,- fa paffion , s'il inCulte à fa femme par un commerce
" public & Cuivi de fcandale, voilà le crime que les Loix:
" regardent comme une caufe trop légitime de divorce. "
Cela retremble fore à ce que difoit Cochin plaidant
pour une femme qui avoit prouvé que fon mari , don~
elle vouloir êrre Céparée, l'avoit rendue témoin de fon
concubinage. Après avoir avoué qu'il n'ell: pas permis à
une femme d'intenter contre fon mari l'aétion d'adultere,
elle peut s'en faire /ln moyen de. fépa,;ation , lorfoue.'e. mari
fait hahita dans fa propre n:aifon l ohJ~t de .(ès crlm~nell~s,
1;omptaifances. " En effet, ajoute CochlO, qu un man pre, Fere dans fon cœur une étrangere à fa propre femme,
,; c'ea une foibleife que l'on pardonne à l' humanité; mais
" qu'il fatre trophée de Ca paffion; qu'il i?fulte fa femr:ne
" JUSQU'A PLACER.A COTÉ D'ELLE celle a qui il facrifie
" 10lls les devoirs de fan état; qu'il augmente fe s malheur~ ,
" par LA VUE D' UN OBJET qui l~i ra,ppelle fans. ceJ!è, ce qUl
" en efl la caufe dép/oraMe; qu en un mot, l~ deshonore
" LE SÉJOUR d'une femme de vertu, en faifant de S A
" PROPRE MAISON un afyle de proflitution, v~i1.à,ce que
" les Loix regardent comme une caufl! trop legJt1me de
" divorce. "
,
, En voyant ce qu'on a, omis de Cochin, on devme pourquoi on ne l'a pas ciré. On trouve auffi le mot .du proc~s
fur ce moyen de fé,par~rion; c'ef!: une concubme p/aCl!~
à côté de l'époufe ~sgitJme ; c'ef!: la vue d'un td obJet ,
Confullet.
P'g· IJO.
�49
c'efi. le fèjour ·de la vertu, la maifon d'une époufe ho •
n
nête transf~rmée en li~u .de proHit.ution. Vo:là ce qui
peut faire feparer d'habitatIOn. Cochm parle d après une
·Loi Romaine fur le divorce; c'efi donc à elle qu'il faUt
recourir, & non aux extenuons qu'on a pu lui donner
toutes encore forr éloignées des faits que Madame de Mi~
rabeau expofe, & qui ont été débattues dans les obfer.
vations de fon mari. Il faut toujours recourir à la Loi
."arce que fi, proche en proche, on , ~n . étend l'applica~
tion d'un cas à l'autre, on pourra s elolgner de plus en
plus du but qu'elle s'ell: propofée.
Ainli l'Arrêt de la Dame Hosbrouck, rendu COntre un
Bigame, donc les crimes étoieot prouvés, .comme on en
convient, efi inapplicable à la caure. Le Plaidoyer de Duperier qui ne fit pas fortune en 163), & qui n'empê_
cha pas qu'on renvoyât une femme à fon mari condamné
à un banniiTement, el!: également inutile à la caufe de
Madame de Mirabeau. C'efi la Loi qu'il faut confulrer, '
& non ce qu'ont pu dire des Avocats en défendant des
procès. Si les ArTêts même ne devroienr fervir qu'aux parties entre lefquelles ils ont été rendus, cela ef!: encore
bien plus vrai des Plaidoyers & Mémoires faits pour l'inftrutlion des caufes particulieres.
Les Romains n'ont point fait de Loix pour les caufes
de féparation; ils ne connoiiToienr pas cet état amphibie,
pour répéter encore une fois les expreffions énergiques de Madame de Mirabeau dans [es lettres. Le divorce entraînoit une
<iiffolution entiere du lien conjugal. Les Empereurs regar<ierenr comme un moyen légitime de divorce l'adu/terium in
4omo. C'e!t ce que prouve la Loi de Théodofe & Valentini~n, toujours citée dans de pareilles caufes. Qu'on la
lire, -on verra que ce n'dl: pas le crime, ce n'efi pas le
<lélit, ce n'eH pas l'infidélité, ce n'efi pas même le fcandale qu.i aucorue le divorce; c'efi les dangers que court
une
49
une femmé, quand fon mari fait de la maifon commune
un lieu de proHitution & de débauche. C'e!!: lorfqu'une
femme eft expofée aux infolences d'une pro Hi tuée autorifée par le mari; que la cohabitation a paru dangereufe. C'eft-lll le danger que l'on a trollvé aiTez grave
pour féparer d'habitation les deux époux. On a cru que le
mari ne pouvoit fe plJindre de voir fortir de la maifon une
époufe qu'il n'y retenoit que pour J'accabler des mépris
les plus cuifans pour une femme honnête: Si fluis in ta
domo in flua fua conjuge commana, contemllens eam , ctlm
alia illveniatur in ea domo maliens, dit la Loi; & quand
on dic, l'adultere dans la maifon d~ caufe de [éparation,
on s'écarte déja de la difpolition littérale de la Loi; elle
exigeoit que le mari eût voulu rendre fa femme non feulement témoin, mais même, p01,lr ainfi dire, complice
de fes défordres : Si ad colltemptllm fui domûs vœ fuœ, ipfa L.8, Cod.
inÎ.piciellte cum impudicis mulieribus (auod maximè cajtas die diY~.ni i ,
':fi
.
7 .
•
(e JU n IC1 0 (e
cxaJPerat) cœtum meulltem. Il faut que le man ait voulu, moribu. (tibia.
pour ainfi dire, unir à fa femme les objets de [es crimi- to.
nelles affeél:ions. Les exemples que l'on trouve dans nos
' Recueils de Jurifprudence font de cerre efpece: Une concubine affife à table à côté d'une femme qu'elle avoit chaffé
du lit conjugal, recevant à fes yeux les careiTes du mari,
accablant la femme de [es mépris, voilà ce qu'on a vu.
On a fufpendu pour de tels maris leurs droirs fur leurs
époufes; on leur a appliqué, autant qu'on J'a p~ , les Loix
des Romains fur le divorce, parce qu'on regrettait le filence
de nos Loix [ur un tel cas; mais ce lilence même eH honorable à la Nation; il prouve qu'elle n'a pas cru que tels
. rnonfires puiTent exifier; & li ~ou; n'avons pas de ~oi)( ~our
un tel cas, ft nous fommes obliges d emprunter les dlfpofitlons
des Loix Romaines, n'oublions jamais dans leur application
que le mariage efi indiiToluble chez nous, qu'il ne l'était pas
chez eux; & qu'il ne peut être quefiion aujourd'hui que de la
&,
G
--
---~ .~-~
�50
cohabitlttÏon. 'C'efl: dônc par ce qui s'efl: paffé pendant là coha.
bitation, qu'il faut juger des rifques & des dangers qu'elle peue
entraîner, & non pas des faits étrangers à cette cohabi.
fRtion. On n'a pas ofé combattre ces principes. Il ne fal.
loir donc pas les démentir tacitement, moins encore en
fuppofer qui les contredifent.
Mais parmi les caufes de divorce énumérées dans la Loi
Romaine, ne trouve-t-on pas la condamnation du mari pOur
crime d'adultere? (Si 'lUi!! igitur marùumfulim adulterium con.
deml/atum invenerit.) Si le Comte de Mirabeau pouvoit être
dans ce cas, on auroit encore à prouver que routes les
caufes de divorce che,.; les Romains, celle-là entr'autres
fom devenues parmi nous caufe légitime de féparation:
& on n'y -parviendroit pas. Le complice de l'adultere étoit
plus févérement puni chez les Romains que parmi nous,
Long-temps il fut permis au mari, au beau-pere de le ruer
en le prenant fur le fait; & la Loi ne fut jamais "ompléte_
ment abrogée chez les anciens: d'ailleurs il entroit dan!>
le plan 'de leur légiflacion , & dans lewrs idées fur la population, de favarifer ,des deux côtés un div.orce qui pouvoit
opérer qmelque bien. Ce n'ell dornc pas avec de tell~s Loix
qu'on pourrait fomenir une demande en féparation. .
Mais Je Com~e de Mirabeau dt-il condamné comme
adultere? On le croiroit à la maniere dont on parle dans
1es défenfe~ de Madame de Mirabeau de la pIocédune prie
à Pontarlier.
Il ft~t accllfé en 1776 d'un prétendu crime de rapt
'commis el'l:vers une femme mariée. La requête de plainte
dit expreffément que ce n'eLt pO~nt d 1un rapt de violence
-qu'on l'actu:f e, mais d'un rapt de féduéhon commis par
blandices. L'accufaceur fe plaint de l'évafion de [on époufe;
il n'ofe pas la quere~Jer en adl!üte:re; cependant une SenteRce Qe ,contumace ldéclare le Comte de Mirabeau arteint
& convaincu du crime de rapt de Ledllébon, .& d'avoir commis le crime d'aduItere avec cette Dame.
T
'Il
1
_ Cette Sentence n exine plus-; rendue pllr contumace,
elle efll rQmbée, par la rep~érentation du Comte de Miraln.eau. En droi(, elle eH regardée comtil1e non obveJl:.Je.
La contumace ef!: purgée , comone on dit au Palais, paf'
les réponfes & juLtitications de 1'3cclJIé; & dans l'h~'~o
thefè de la caure, les réponfes ont été deüruél:ives du
fyfrème d'accufarion, ce qui a uécetlicé le département
de la plainte configné dans une tranfaétion jl,ldicia1Îremenc
homologuée. De maniere qu'il ne refte [ur la procédure
que cette Sentence d'hom0Iogation.
, Mais Mr. le Procureur-Général au Parlement dans le
RefTort duquel l'accufation écoit née, ne pourrait-il pas la
faire revivre malgré cette Sentence? Qu'on le fuppofe ;
il n'en fera pas moins vrai qu'il n'exi-f!:e point de condamnation, .& ces craimes éloignées ne p0u'r mient fournior à la.
femme un moyen de féparation ; cependant on ne peut ,pas
craindre que Mr. le Procure1:lr-Général appelle jamais de
cette Sentence.
L'inf!:irution du Minif!:ere public a ew pour premier oli>jec
d'empêcher & d'aruêter les pourfu.ires des vengeances par~
ticuliere:s. Ainli lor[que la [ociété n'dl: pas {pécialement
bleifée par un aéte contraire à l'intérêt d'un particulier.
fi ce particulier <liflimule l' injure; s'il reçoit des fatisfacti0ns fufEfames; s'il la pardonne ou s'il ne s'en trCl>uve pas
o.ffi:m.fé,. le .PrQcureur d.u Roi 11e doit ni ne peut ef.l pour~
fuivre. la Lépa~atinn; elle efl:. tome faite,. &s que l'of[enfé
ef!: cnntellt; il P'y 31 plJ.ls t:ien à juger, lorfql:le les parties
lÏnréreffées fum: d'accord.
~ 'Delà vienr la difiinétion que l'oro. f-a.Î!1! des déltts ~n pu.,
blic ou privés. Les uns par le trouble: (q:u'ils ciIH!enr à l'l
traAquillli~é ' pmba,iqDe ', ada'1lÙ~nt tous les c.ttoyeos, ils bleffem d-ireél:ement la f<!lCJbé;. elle eLl: pru:tie offenwe, elle en.
poudiJit la vengeal'l.ce par le miniŒere de l'Officier cbargi
lie veiller à/la, fû.rec:é commune. Quant allJl ,\utres qui n'ilk
G
2.
�p.
réreffent que le particulier, le Minifl:ere Public ne v.iene
qu~ prêter a,ide & fecours à l'offenfé qui ré,c1a~e fan ap_
pUI; ou plutot, tenant alors la balance en equlllbre entre
•
l'accufateur & l'accufé, il veille à ce qu'on n'abufe pas Contre
celui-ci de la rigueur de nos formes.
Le Procureur-Général ne peut pas f:lire informer fur un
délit privé; il n'eft pas pnl'rie légitime pour en pourfui\'re
la réparation en fon nom. Le Parlemenc l'a jugé Cantre
Mr. le Procureur-Général en 1768, même pour un vol
fimple regardé en poillt de droit comme délit privé.
Le Miniilere Public ne pouvant pas pourfuivre la réparation d'un délit privé, il ne peut pas mettre obilacle à ce
que les parties tranfige nt entr'elles fur pareil délit; il
ne peut pas fe plaindre de leur accord, ni rallumer fous
aucu n prétexte une guerre dont elles ont voulu éteindre le
feu.
Parmi les délits que le Procureur du Roi eft non recevable à pourfuivre, il en eil un à l'égard duquel toute
ac1ion lui efi plus particulierement & plus rigoureuCement
interdite; c'eft l'adultere. L'accufation du Mrni{j:ere Public
aggraveroit l'offenfe faite au mari, & augmenterait la honte
qui peut en rejaillir fur les enfans. Les reconciliations entre
mari & femme font plus intéretlantes pour la fociété que
la prolongation de pareils débats, dont le fpeél:acle eft toujours dangereux pour les mœurs. On fuppofe facilement ces
re conciliations filr de fimples indices; on maintient [CJUpUleufelllent les ades qui les conHatem; jamais des tiers
n'ont été déclarés recevables à attaquer ces at1es, moins
encore le Procureur- Général, qui doit p.\us que tout autre
affurer le repos des familles.
PluGeurs Arrêts Ont déclaré valables des tranfaél:ion~
paffées entre le mari & l'adultere de la femme, quoique
des Jurifconfultes ( abufant d'une Loi Romaine faite contre
les maris qui, complices des défordres de leurs femmes,
j
' .
"
J
'i3
.
ne r.:herchoient qu'à retirer un falaire de leur complaifance)
euffent foutenu qu'on ne pouvait tranfiger fur ce délit; &
aujourd'hui la chofe ne fauroit être mife en queHion. Les
tranraél:ions fur l'adultere font entre le mari & la femme
un jugement domeilique qui doit être finguli érement refpeél:é; elles font enrre le mari & celui qu'il foupçonnoit
de complicité, un aveu formel qu'il n'y a eu de fa part ni
délit ni oflenfe.
Lorfqu'uo tel aveu ea fait par un majeur en ple ine li_
berté, il n'a plus aucun moyen pour faire revivre fon accufatioll ; & fi cet aveu eil {impIe; s'il n'a d'autre prix &
d'autre condition que l'~bandon des dommages-intérêrs &
dépens que l'accufé pou voit prétendre à raifon d'une plainre
témérairement portée contre lui, il n'eft pas poffible qu'il
puiffe furvenir entre celui-ci & le mari des différents gui
légitiment une rétraél:ation de l'aveu fait par la partie IUtéreffée.
Si l'accufation avoit déja été porrée aux Magifirats, ç'eil
devant leur Tribunal que les accords des parties doivent
être fcellés; c'eil de l'autorité judiciaire que ces accords
reçoivent leur derniere fanc1ion; & lorfque par une homologation authentique le vœu des parties a été, pour ainli
dire, confacré, leurs aveux & leur déclaration obtiennent
l'autorité dç la clzofè jugée; ils deviennent une vérité fur laquelle il n'eil pas permis d'élever le moindre doute. En effet,
quelle juftice plus certai.e que celle que les parties fOllt
forcées de fe rendre à elles-mêmes! Quel jugement moins
!ilfpeél: que celui devant lequel des intérêts oppofés fe tai[ent! Quel jugement plus équitable que celui qui étouffe
tout reffentiment, & anéantit même le principe & la caufe
des diffentions !
Le rapt de féduél:ion efi également un délit privé; on
pourrait même dire que ce n'eft qu'un quafi-délit pour
lequel l'adion criminelle ne corn pete pas, mais feule.
mêm l'aél:ion civile en dommages-intérêts.
�S4
Comment le Procureur-.Général pourrok-il fe rendre.ap_
peIJant de la Sentence qm homologue une rran:Caétion fuI"
pare ils objets? Hors l-e cas où' un mari p-~0tl:i{Ue fa fefll.rtle
le Min111ere public ne peut jamais pourfilivre en fon no~
de telles accufations: il ne peut donc pas dam tout aUtre
cas mettre obf!:acle à ce que l'accufation tOit anéantie par
le défifrement du plaignant. Mr. le Procureur-Général ne
le pourroit pas, fi la procédure s'inf!:ruifoit devant le Parlement; il le peut encore moins, lorfqu'eIIe a été illHruite
devant les premiers Juges.
L 'a rt. VI. tit. XXVI. de l'Ordonnance Criminelle, veut
qoe " fi la Sentence rendue par le Juge des lieu" POrte
" condamnation de peine corporelle, l'accufé & fon procès
" foient envoyés enfe mble à la Cour Supérieure. " L'art.
XI. du mê me titre veut que " Ji la Sentence dont ejl appel
" n'ordonne .poi~t de peine affii8:ive, & qu'il n'yen ait
" appel Interjette par les Procureurs du Roi ou "eu" des
" Jultices fe igneuriales, mais feule ment par les p arties le
" procès fait envoyé au Greffe des Cours, &c. "
'
D~ maniere qu'en matiere criminelle, l'appel n'ef!: né.
ceffalfe que lorfque la Sentence porte condamnatiorz! de peine
corporelle. D ans ce cas feulement l'appel ef!: de droit; dans
root autre , il a befoin d'être déclaré. Le Légi!1areur n'a
pas voolu que des Juges fubalternes p-uffent, même du
ton{enrement des accufés, leur faire fubir des peines cor.
pnrelles.
.
Mais a-t-il voulu que les Juges de l'j.nflru8:ion -He-plii1'ellt
abfoudre définitivement l'acctlfé ? Cela rre pal'OJ.t pas dans
l'Ordonnance, & ne doit poi11t fe fuppofer. .
,V'a rride Jtf. cT-deva nt ciré ne prefcrit }l'envoi des- ptoJ
~edl1r:s aux Cou rs , que lorfqu 'il y ~ ?ppel. n veut que
~ acqUletceC?~ nt de,s Gens du R oi à l'Il ' Sente1'lcé ne puilfe
et re p1'e}adlclable a l'appel que f;a pa-rtie 6vile pel:lt dé.
clarer de cette Sem ence. Mais delà i~' ne 's'en!bt~ pas que
. ~."
le procès doive ' être potté aux Cours, lorfque la partie
civile & le Procureur du Roi acquiefcent au Jugemel1 C.
On doit même tirer une conféquence oppofée de cet article , auquel, pour éviter toute équivoque, on ajoura ces
mots, mais foulemem par la partie civile lors de la rédactian, ainu qu'il réfulte du prooès-verbal publié par ordre
du Roi. On voulut marquer bien exp reffément que l'appel
n'étoit pas de droit ; que lorfque le P rocureur du Roi n'appelloit pas, il fallait qu'il y eû t appel de la partie civile ,
pour que le procès pÛt être p orté aux C ours.
Mais le Procureur-Général efl:-illié par l'acquiefcement
du Procureur du R oi? L es principes ci-deffus expofé,o;
flOUS donnent la folution de la que fl:ion. C ela dépend de
la nature des affaires. S'/lgit-il d'un délit dont le Procu.
reur-Général peut pou_rfLtivre d'office la réparation, c'efl:-àdire à raifon duquel il peut fe ,rendre partie principale ,
.il p;urra appeUer; encore ce point fouffre-t-il bien des
.àjfificultés parmi les CriminaJjf!:es ; & les raifons de la
majorité qui foutient l'affirmative, ne font rien moins
qu.e fatisfaifanres. Ma1s s'il s'agit d'un délit à raifon duquel
le Procureur-Général feroit ,fans aétion , il ne peut ni em,pêcher que l'accufation s'~teigne. d~ confentemen~ des pdrûes ni que le ,procès fOit termIne par leur acqulefcement
à la' Sentence. En effet, fan appel le rendrait feule partie ; & nous avons vu qu'il ne fauroit être partie principale d'une accufacion fur un délit privé, moins encore. fur
. une accufation d'arlultere , toute recherche de ce cnme
ll:li étalflt particuliérement interdite; bien moins auffi
dans l'h~pothefe d'une q~lerelle en rallt de fé~uél:ion, fort
impropr.emelillt appel'lé délit ennre rerfonnes hbres, & ne
pouvant pas eKif!:er entre ,g ens manes.
11 ref!:e à favoir fi y ayant eu par ~ontuma.ce une, Sen. cenee qui condamne l'accufé à une peIne. ~ppltale, 1 a~cu
liltion n'a pas pris un caraél:ere de graVite capable d au~
�'56
torifer les poùrfûites & les réclamations du Miniilere pu.
blic.
Qu'en 1777, des !uges fu~alternes, peu i~firui,ts o,u paf.
fionnés, aient regarde une plamte en r,apt ~e.redllébon IOten.
tée par un mari, comme contenant ImplicItement une ac.
c ufat ion d'adultere & qu'au moyen de la contumace
,
'fi'Iger.à l'accufé'
croyant le délit prou~é,
ils aient v,ou l u 10
la peine capitale portee p,ar une ~Ol ,de ConH~ntIO COntre
les adulteres Loi rombee en defuerude, meme de fon
,
' 'par ~ent aU,tres L Ol~
' du
temps, & implicite~en~
ab
rogee
Recueil où on l'a prIfe, Il ne peut lamaIS en re[ulrer qu une
ab[urdité de leur part.
Il fufEt que le Jugeme,nt ai~ été rendu par contuma~e, ,~
que l'accufé fe [oit re~refe~te" pour que t<:ut ce 9u, a ete
fait en fon ab[ence fOlt aneantl par cette prefentatlOn. Cela
efi établi p:\r l'Ordonnance.
,
La préfentation volontaire de l'ac,cufé an nulle" le Jug~
ment & les procédures de contumace, fans qu d fOlt neceIraire d'en appeller. Il ne refie donc plus qU'LI ne fimple
accufation qui doit être jugée par les termes dans lefquels
elle a été faite, & qui n'annonçant point de délit public ne pouvoit être pourfuivie par le Minif!:ere public.
Acc~fation de laquelle le plaignant pouvoit fe défifier, fur
laquelle par conféquent on a pu tranftger.
L'intervention du Minifiere public dans les procédures
fur délits prouvés, n'efi que furveillance. C'efi bien ,improprement qu'on les appelle parties dans ces affa,~es.
On auroit donc pu à la rigueur fe paIrer du Procureur du
Roi en terminant celle de Pontarlier; mais on lui a confervé [on droit de furveillance dans l'homologation de la
tranfaéhon. Il n'y auroit donc nul prétexte pour attaquer la
Sentence qui l'homologue.
Le Procureur du Roi a reconnu qu'il ne s'agiifoit pas
de
')7
'de délit public. Les teqnes de la plainte "& le titre de
l'accufation le lui indiquoient aIrez. Le Procureur-Général
ne pourtoit pas démentir la requête de plainte, quand
même il pourroit Contredire les aveux de fon Subfiitur.
Cette requête, feule bafe de la procédure, foutient également les aveux du Procureur du Roi; & fon acquiefcement à l'homologation de la tranfaétion empêcheroit toujours qu'on pÛt détruire un aveu dont il eH fi. facile de conftater la vérité.
Le Procureur du Roi a avoué qu'il ne s'agiIroit poine
d'un délit public. 11 fe feroit étrangement compromis, s'il
ne l'avoit pas fait; il auroit fallu ,qu'il fe rendît partie principale fans dénonciateur.
Le Procureur-Général ef!: au moins dans le même cas.
Il ne peut donc faire revivre cette accufation que Comme
il peut en intenter toute autre, c'efl-à-dire, en fuppofant qu'il s'agit d'un délit public. Et à cet égard il n'y
a nulle différence entre le ci-devant accufé & les autres
citGyens; tous peuvent être expoCés à des plaintes & à
des accuCations du Miniflere public. Nous diCons mal, quand
nous fuppofons qu'il n'y a nulle différence entre ceu"
qui n'ont point été accufés , & celui avec lequel la partie
intéreIrée a tranugé , envers lequel l'accufateur a reconnu
la témérité de J'accuCation, & le Procureur du Roi qu'elle
Il'étoit p~s de nature à exciter Con miniflere pour le main~
cie_n de l'ordre public. JI y a cette diflerence eIrentielle
que le Pr<?cureur-Général ne pouroit de bonne foi, pour
:intenter une accufation , prendre prétexte d'un pareil fait,
fans manquer évidemment à la raifon & à la jufiice. QU'Ull
fait foit obCcur, dO,uteux, on peut, en le préfentant, le
défigurer; on peut inlidieufement furprendre la crédulité
~ommune, en .feignant de la bonne foi. Mais 10rCqu'il a été ,
éclairci par des débats éclatans, lorfqu'il a été fixé & dé~
terminé entre ceux qu'il intére1TQit uniqu'e ment, on doit
' '
li
/
�.,8
ravoir ~ quoi s'en tenir fur ce fai t. Il n'y a plus alors nuUe
matiere à recherche.
Le Miniitere pubJj~ ne }Jourroit . fans détlOnciat{!ur &;
Gaution fe ren d re patrie contre un cHoyen. Et quels pour_
roiem être le dénonciateur & . la cautio~ ~>lm crime qui
n'exiHe pas, . & dont. la non-exIHe~c~ a ete re~onnue par
celui qUI, S'Il eXIHoIC, en aurolt ece le premIer bleffé?
E:ommenc le Procureur-Générdl pourroit-il flJppofer que
l'ordre public a été troublé, lor{que le fait expofé en Juf..
cice par' la partie précendue offenfée n'annonce qu'uRe que.
relie, un !impIe débat entre particuliers? Comment pourroit-il fuppofer qu'il y a feinte, coUuuon entre les COntrac_
tans , après que l'aftà ire a été difcu[,l!e puhliquernenc & fans
ménagement d'a ns le fanttuaire même de la Jufiite, lorfqu'il parolt à tollS les yeul( que jamais accufé n'eut moins
cl'égard pour fes aC(!ufateurs, leurs faureurs & cOl1Iplices
jufqu'au mom~nt où ils · ont reconnu l'injuHice de leur~
procédés & l'irr-égul<lrité de leurs démarch{!s ? De quel droit
dans ce cas por:reroit-il hl trou~le dans des familles hon~
nêtes & refpeél:ables ? Il faudroit en même temps qu'il
accu(ât de pTévari-cation l'Officier pt'lblic chargé de [on
minift:ere -devant les Juges inférieurs; il faudroit qu'il en
accufât ces Juges eux-mêmes, & que donnant un démenti
à la not0riété & à l'évidence, il fuppofât l'exifience de ce
<fui ne peut pas être. Voilà comment celui d'o nt l'inno. cenee a été authentiquement & judiciairement reconnue,
doit moinsccraindre de voir renouveller une accu[ation,.
que celui qui n'a jamais été accufé, principalement lorfqu'iF
a été vérifié que le délit qu'on lui imputait ,- n'étoit pas de
nature ' à être pourfuivi par le MrnifteFe., vengel:lr deS' droits'
de la foc--iété,
, Cela· 'nous difpentè d'examiner plus rigot1reu(emenc s'il'
efl: des , c-as- où - l1acquiefcement du Procureur du Roi ne
lie point Mr. le Procureur - Général .en· matiere d'ab[olu~'
tlon.
.
_ Le
19
principe duquel il faut partir, c'eft que-le Procureul'Général n'avoit point d'aélion à raifon d'un délit qui, vrai
ou fuppofé, ne pouvait jamais être que privé. D ès-lors,
pourquoi demander fi cette attion pe ut revivre? Pour renaître, il faut avoir exifté. Pour fuppofe r que l'acquiefcement de fon SubHitut a été fait au préjudice de fes droits ,
il faudroit d'abord prou ve r qu'il avoit des droits. Pour dire,
il peur, m:!lgré l'accord des p:mies, [e rendre appellant du
premi er Jugeme nt qui homologue cet accord, il faut ou
fuppofer qu'il éto it partie, ou prétendre q'll'il pouvoit le
devenir. Or, l'un n'efi pas vrai, & l'aurre eü contraire
à tous les principes. On feroit donc déclarer le ProcurelJ.rGén éra l non r ecevable en fon appel, fi méconnoiffanc
les c!evoirs de fon minifiere, il intentoit une parei lle
ilttion. . Il contrarieroit les principes de fon infbtution,
& il mettroit le trouble dans la fociété dont il doit
affurer .le repos, s'il fe rendoit accufar~ur d'un délit privé.
Mais ' il [eroit bien plus coupable , lorfc.lu'il a été reCOllnu
que le clélit n'e ~ i Hoi t pas, & cela par ceux même qui les
premiers l'avo ient fupp ofé , & qu'il eH rel par fa nature,
que, s'il étoit vrai, il ne pourrait faire la matiere d' une
accLtfation, [ans compromett re la délicateffe & l'honneur
de 'trois ou quatre familles envers le[quelles Ml'. le Procureur-Géné rai [eroit re[ponfab le du fcandale qu' il pourroit occaGoner; ce qu'on regarderoit fans doute comme
étant de [a parc un attentat à la tranquilliré publique,
_ On convient affez que l'accu[ation eH éteinte par la
tranfatl:ion & par là Sentence qui l'ho mol ogue : flle met
l'accu,jè
l'abri des pourfuites d~ l'a cc~fateur, dit~on ! m ais
J.> la
tranfac1ioll pem-ell e effacer loutrage fait a une
,. épouft:. fenlible & verc ue ufe? L'accufàtel~r,. en crim~
t> d'adultere, a-t-il pu reme ttre cette autre lllJure 'lut
" ne le regardoir pas, & que la Darne de Mirabeau
tl. é-tQir. QQligée de dévorer 'en jilence ? n
a
Hl.
�60
Si la nature de Pin jure elt telle que la Dame . de Mira~
beau foit obligée de la dévorer en lilence, pOurqu .
I
tant de clameurs fur cette injure? Pourquoi vouloir eO
faire un moyen de féparation? Si les femmes ne peu~
vent pas fe plaindre en Jultice des hommages paffagers
adreffés par leurs maris à d'autres qu'à elles; fi elles doivent
dévorer en frlence ces petits chagrins, & attendre le rerour
d' un cœur qui devoit leur appartenir exclufivement ; fI même
une femme honnête ne peut parler de l'infidélité de [on
mari que lorfqu'elle a été conftatée par une condamna_
tion légale, Madame de Mirabeau ne devoit pas rompre
ce jileT/et: obligé; elle le devoit d'autant moins, que [on
argument à cet égard roule dans un cercle vicieux. On
affure pour elle que l'adultere du mari eft un moyen légal de féparation, lor[qu'il ef!: judiciairement confl:até.
La femme peut fe plaindre alors, dit-on, de l'injure
qui lui eH faite; & lorfqu'i[ s'agit de prouver la condamnation, lorfqu'on eH arrêté par Une tranfaébon, pat
un départemenr, par un Jugemenr, ce n'elt pas, diton alors le J ugemenr, qu'il faut confidérer, mais l'injure qui eH indépendante de la procédure; de maniere
qu'ap rès avoir voulu établir l'injure par la procédure, 011
veut faire fubfiHer la procédure par l'injure que l'on fuppofe. Il femble même à ce langage que l'affaire de Pontarlier ne devoit pas être finie fans l'intervenrion de Madame de Mirabeau, quoique l'on convienne qu'elle n'auroit
pu fe rendre partie dans cette affaire que pour défendre
fon mari. ·
On le débat enfin fur la maniere dont l'affaire a été
terminée. C 'é toit une affaire d'honneur. C'ef!: une tranfaérion. On ne tranfige pas fur l'honneur. C'eH ce que
dit Madame de Mirabeau; c'ef!: ce que l'on répete d'après
elle.
'
C'étoit une affaire d'honneur! c'elt-à-dire, l'honneur de
Gr
Mr. de Mirabeau étoit compromis! Calomniè, calomnie
atroce. L'honneur n'a été compromis que par la maniere
dont on a parlé de l'affaire en Provence. L'honneur n'a
été compromis que depuis que Madame de Mirabeau ellemême a voulu élever des doutes, faire naître des foup<iooS
fur la nature du délit. Mais ce n'efl: pas fur des contes
abfurdes que des inréreffés ont fait courir dans la ville , il
Y a fix ans; ce n'eH pas fur les allégations de Madame de
Mirabeau: c'eH fur les requêtes de plainte; c'eft [ur la
Semence même que la nature de l'affaire doit ê tre fixée;
c'eft fur des preuves, & non fur des allégations, qu'elle
doit être déterm inée, [ur-tout quand on veut en conclure
que l'union des deux époux ne p,ut plus fulfifler aux yeux
des Loix que par le facrement.
. Ce n'eft pas ici le lieu d'examiner fi les févices dont
Madame de Mirabeau [e plaint, font de nature à autori[er
fa demande en féparation. Nous en avons affez dit [ur ce
point, en rapportant les principes dont les ob[ervations du
Comte de' Mirabeal.l contiennent l'application; nous croyons
feulement devoir ajouter qu'il eft fans exemple qu'on ait
admis pour moyen de réparation des [évices allégués &
non prouvés. Ce n'eft d'ordinaire qu'après les preuves des
févices, & d'après les faits conftatés, que l!on diCpute fur
les conféquences. On ne peut fe difIimuler en l'état que
la Dame de Mirabeau allegue des moyens de [éparation, &
n'en prouve aucun. On contefte la légitimité des moyens.
On pourroit fe contenter de lui en demander les preuves.
Il [ufEroit même de dire qu'elles font inadmifIibles. Et
combien d'exemples ne pourrions-nous pas citer des refus
de la Juftice à vérifier des faits qui paroiffent graves !
L'Arrêt rendu le 7 Avril 17~6, contre la Dame Comteffe
MontboifIier Canillac; celui du 14 Septembre 1768, contre
la Dame Salle, & tant d'autres plus récents, font affez
connus: il en eft auŒ de plus anciens. On en trouve un
Pag. 141 ete la
Confulration.
�6i
daos Ra~iot, (ur, u.ne affaire entre perfonr~es de qualité
de cette vIlle: les (evlces dont la femme fe plalgnoit , étoien
fi graves, que fon pere s'écoit cru obligé de venir à fan fe~
cours & de pourvoir lui-même à fa fûreté. Il n'en fut pa
moins décrété d'ajournement;. le décret confirmé au Par~
le ment de Dijon) où l'affaire avoit éré évoquée pour caure
de parenré, & la femme qui demandoit à faire preuve de
[ évices réintégrée dans la ma ifon de fon mari;. enjoint à lui
de la trairer maritalement, c'elt-à-dire, avec douceur &
avec condefcendance, dit Raviot ( tom. 2 . , quefi. 2.) r pag
) 02. ,Arrêt 62.) le mari érait Con[eiller au Parle~ent '
le beau-pere Marquis. Les familles ne fone point étran(7ere~
aux (?arties;. elles appartiennent au mari comme à la fe~me
L'Arrê t eH: du 10 Mai 164).
•
Eh! combien de fois n'a-t-on pas eu à fe féliciter d'avoir rejené de pareilles preuves! On voit dans le premier
volume des Plaidoyers de Gillet, la défe nfe d'une deman_
,
dereffe en féparation; elle préfencoit des faits graves; ils
ann~)Oç,oi,ent des dangers P?ur la vie de la femme; la plainte
avol.t et,e rendue ~n confequence de l'avis des pa.rens. On
dl[olt qu Il. y en avoIt un commencement de preuve par écrit
de la mam du pere du mari. On produifit ces écrits faits
pour le Ju,g e &.Jns le temps de la plainte; les parties éraienc
de quahte; la preuve ne fut point admife. Par Arrêt du
P la idoyer de 14 Mai 169), jl fut ordonné que la Dame de Noyau
<OIIlet tom 1 (
"
•
1
1
P laid.'lj, ~"g:
C eCOIt e nom de .a demandereffe ) feroit tenue de re.
' °7·
tourner dans fix mOIs avec fon mari & à lui en;oinc
de la traiter maricalement;. la mere cl~ la demande~e!Te
écoit au p.rocès, & défenfes lui furent faites de retenir fa
fille,
Après av?ir rapp.orré cet Arrêt, l'Aurem ajoute: " on a
.. cru deVOir avertIr que le mari & la femme vivent pré" fent~~·ent da~s une parfaite union, & qu~ n'y aran! point
1> eu cl Information des faits fimplement expofés claus la
63
_
,,'. pfainre; ils ne doivent pas faire la même imprell'ion qtrè
" s'ils avoient été jultifiés .. "
Il Y a d'autant plus lieu d'efpérer un pareil jugement,
que Madame de Mirabeau ne demande pas à prouver
ce qu'elle avance, & qu'elle n'en fournit aucune preuve.
On fent bien que nous ne donnons pas ce nom aux
lettres annoncées dans le Mémoire; leur communication
elt un délit donc le Comte de Mirabeau pourra, nous le
répétons, demande r vengeance. La qualité d'épouCe ne
fauroit autori[er des outrages. ( L'impreffion & publication
du Mémoire à' conflllter en elt un que le Comte de Mira~a1J pourra déférer à la Jultice, quand le procès civil
fera ju~. On ne penCe pas qu'il convienne à fes intérêts
d'incidenter à raifon de cet our rage . Ses prote1tations fuffifent· quant à préfent. ) Souvent on a puni des femmes
pour avoir in[ulré leurs mariS, lorfque la nature de l'inCulte,
les circonltances ou la foibleffe du mari ont rendu néceCfàire- J'intervention de la Jultice. Voici ce qu'on lir dans
Dareau, cité dans la Con[ultation de Madame de Mi'fabeau :
" A J'égard des injures de la femme enVers fon mari; .. Traité des
c
.
..
. bl es, 1·1 feLl.
III Jllres , ch. 4>
" )·1 raut
COnVenIr
que SI'·1 y a d es mans
InrraJta
l , n. 8.
H
Y a auffi des femmes d'une indocilité fi extraordinaire,
Jo d'un naturéÙi aœri"âtre,. dfune in{olence fi outrée, d'une
n conèluite fi volontaire & fouvent fi déréglée, que bien
,. lojn d'improuver la fermeté des maris envers elles, on
" ne fauroit trop la louer & la [econger da ns les occa" fions. Un mari n'el!' comptable à perfonne de la ma,) niere dont il punit fa femme, lorfquelle le. mérit~; il a un
» droit de jurifdiél:ion correél:ionnelle, dont II ferOlt dange» reux de le dépouiller. L'expérience nous apprend qu'il efl:
" des maris incapables d'u[er de J'autorité que la Loi leur
u donne, &. des femmes qui non feulement fecouent le
�64
joug de cette autorité, mais qui l'u[urpent & maltrai_
tent ceux qu'elles devroient re[peaer. Lorfqu'un mari fe
trouve dans ce.rte n:alheureufe poIition, & <.Iue n'ayant pas
la force de faIre lUI-même uf..lge du pouvOIr que lui donne
fa qualité de mari, il préfere de porter fes plainres en
Juil:ice; elles doivent être écoutées; & lorfque les excès
de fa femme fe trouvent conltatés à un certain point
c'eil: le cas d'ordonner la récltifion de cette femme. Ce n~
feruit pas affez d'ordonner qu'une femme convaincue de
voies de fait, & d'avoir été le tyran de fon mari, fera
renfermée dans un couvent; une infinité de femmes qui
ont paffé leurs jours dans les exercices de la vertu
font leurs délices d'une pareille retraite; & ce feroi~
plutôt les. récom~en~er que les punir, en leur impofant
une p.arellle ob!tgatlon; on doit les frapper par des
endroItS plus fenflbles; il n'yen a point qui foient plus
capables de les toucher, que la récluGon ou au moins la
privation des avantages qui leur font faits par leur contrat de mariage. "
_
.
" On trouve au Journal des Audiences ( tom. 6, pag. 299)
" LIn Arrêt du 8 Oaobre 1712, par lequel une femme
" nommée Catherine Durnet fut condamnée à faire ré.
" pararion, au .nommé Leprêrre fon mari en préfence de
" quatre. temolOs, po.ur inju~e~ &. voies de fait par elle
" commlfes envers lUI, avec 111)OnalOn de lui patter hon.. ne~r & refPea, défenfes de recidiver fous plus granùe
" peme. Cet A:rê,t la condamne de plus aux dépens." .
" Autre Arret a-peu-près le même du 1'5 Septembre
" 17 1 l , rapporté au même tome du Journal des Au" dlences."
Quoi! de~ ~aris autorifés à punir leurs femmes! Des '
femmes ?b!tgees par Arrêt à porter honneur & refPec7 à
lellrs mans! N'eil:-ce pas plutôt la délicateffe, la fenIibilité
de
;,
"
"
"
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,
6.,
de ce fexe, qu'il faut Tefpeaer? Sans doute il faut les refpeaer; mais il n'en faut pas moins redouter les effets.
L'exceffive ?élicatelfe eil: une véritable foibleffe qui peut
avoir des fmtes fâcheufes, & l'extrême fenGbilité a befoin
d'un frein. Ce n'eil: donc point faire tort aux femmes, que
de croire -qu'elles ont befoin d'être dirigées, conduites; ce
·n'eil: pas leur faire injure, que de penfer que l'appui donné
par la nature à leur foiblelfe feroit vain, s'il. leur étoit permis de le dédaigner, de le méprifer, de le fouler aux
pieds; cela n'a pas befoin de preuves. En effet, la corruption n'eil: pas encore fi générale qu'il foit nécelfaire
devant les Tribunaux de Juil:ice, de combattre par les Loi~
<le la Religion celles de la morale, les propos de cercleç
.& les maximes de ruelles. Et fi nous en étions à ·ce point,
les Loix divines & humaines ne feraient plus entendues.
Ce ne font pas ceux qui flattent les femmes, qui refpectent leur foiblelfe; ils en abufent. Ils feignent de les élever
par un fentimerit d'orgueil; mais ils les dégradent en les
,f~i[ant fortir du rang marqué ' par la nature. C'eil: pour
qu'elles slégarent, qu'on veut les ifoler de leurs guides naturels, qu'on veut les rendre fourdes à leurs voix, indociles à leurs confeils, rébelles à leurs commandemens. Ce
fut pour les préferver de ces dangers, que la Loi civile les
fournit plus ou moins à leurs maris; & quelque liberté qu'on
leur accorde en France, on a reconnu de tous les temps
que l'in[ubordination leur feroit plus dangereufe qu'utile.
Qu'on ne leur falfe donc pas méprifer les Loix qui femblent les alfujerrir. Elles en retirent des avantages qui durent plus que leurs charmes & les agrémens de leur jeuneffe.
Mais .on n'a pas befoin de rappeller combien une femme
doit être dépendante de Jon mari, pour prouver qu'il ne
fauroit lui êue permis de l'outrager; & il fera temps de
,Qéterminer la gravité .du délit, lor[qu'il conviendra d'en demander vengeance.
1
.'
�66
Il ne s'agit maintenant que de la demande provifoire
dont Madame de Mirabeau a été déboutée. Bien-loin que
[es dernieres défen[es diminuent la force des moyens employés par [on mari devant le Lieutenant, eUes leur en donnent une nouvelle.
En effet, elles prouvent que la mai[on du pere ne peut
étre confidérée comme maifon tierce, propre à une fequeftration. Le beau-pere [emble être devenu l'implacable ennemi de fon gendre. Ce n'eH donc pas entre [es mains
qu'on doit lai1fer une femme qui s'éloigne tous les jours
davantage de [on mari.
Le refus de recevoir dans la mai[on du beau-pere les
viCites du mari, était déja une raifon fuffifante pour obliger
l'épou[e à fortir de cecce mai[o n. Ne pouvant obtenir de
fon pere la permiffion de voir [on mari, Madame de Mirabeau devait [e retirer dans un Couvent, avant même que
le Comte de Mirabeau l'eût demandé.
Si l'on avoue que la fépa~ation d'habitation ne rompt pas
les liens du mariage; fi l'on elt obligé de reconnoÎtre que la
femme même réparée ne ce1fe d'êrce foumife à l'autorité de
(on mari, en tout ce qui ne compromet pas fa fûreté, elle
ne peut refufer de fe rendre dans un Couvent quand il le defire. L'indépendance totale d'une femme ferait contraire
aux bonnes mœurs; elle feroit d'un dangereux exemple dans
la fociété. Il n'y a plus de pui1fance paternelle, là où eft
la pui1fance marital4:. On ne doit donc pas abufer des idées
qu'on peut avoir fur la puilfance des peres en pays de
droit écrit. Suivant les Loix Romaines, qui régi1fent ces
pays, la femme elt fortie de la famille de fan pere, pour
encrer dans celle de fan mari; fa maifon, c'elt celle de fan
mari ; .ce n'dl: plus fan pere, c'elt fan beau-pere qui elt
devenu le chef de fa famille.
.
.
Ces principes peuvent pa.roître nouv-eaux ~ ceux que la
prévention ou l'efprit de parti égare; . ils n'en font pas
6.,
moins certains. Ils fitffifent pour jultifier la demanCle du
Comte de Mirabeau; mais ils prennent une nouvelle force
des circonltances qui indiquent l'obfeffion, & qui ne permemont jamais que la Dame de Mirabeau fait laiffée par
les Magiltrats dans le tourbillon qui l'entraîne.
DÉ LIBERE à Aix le 3 Mai 178 3,
1AUBER T,
A AIX, chez ANDRÉ ADIBERT, Imprimeur du Roi, vis-à·vis
le College. 1783.
�IL
OBSERVATiONS
DU COMTE DE MIRABEAU,
SUR
UNE
PAR TIE
DE
SA
CAUSE.
U
N Minifl:re de paix étoit comme defcendu du Ciel
pour l'apporter à Madame de Mirabeau & à moi. Que la
vertu foit pour lui la récompenfe de la vertu, puifgue Ma.
dame de Mirabeall refufe de lui donner celle du fuccès!
Il peut me rendre le témoignage que je ponois la géné..
routé jufqu'à la plus extrême indulgence, jufqu'à des facrifices condamnés par mes parens, & qui rendoient l'amitié
muette. Après des négociations bien dégolItantes) mais
fuivies par le refpeé1:able médiateur avec un courage admi.
rable depuis l'Audience du 23 Mai, des propoucions de
conciliation acceptées par moi dès les premiers momens.)
& toujO\lrS refufées par Madame de Mirabeau, m'ont été
A
�2-
annoncées enfin un quart d'heure avant ma plaidoirie d'hier;
comme irrévocablement agréées par elle, & devant être
rédictées en tranfaél:ion d'abord après l'Audience.
J: plaide; je retran~he pluueurs traits de ,mon ~Jaidoyer;
j'en adoucis d'aut;e~; J'.?mets de~ pages enneres; Je, facnfie
une péroraifon ,vebemen~e ,& decI~ve. Le PublIc s en ap~
perçoit à des vIces de dlél:lOn, à 1 ;mbarra,s, à la lenteur
de mon débit, à l'apofl:rophe que J adreffal à ~ad~me de
Mirabeau & qui fit couler des larmes. Ma moderatJon, les
avances n~ême que je faifois, préfagent dès~lors à tous les
auditeurs l'ac~ommodement.
Tout étoit fini avant l'Audience, tout efl: rompu le mo~
ment d'après. Le Minifl:re de paix efl: défavoué. O~ m'~
dit; il eH public qu'en voyant paffer , au cours C~IUI, 9u1
alloit faire à Madame de MIrabeau le reclt de la Plaldome,
les perfonnes infl:ruites des circonfl:ances locales & des
manœuvres de certaines fociétés, douterent de l'accommo~
dement dont la nouvelle fe répandoit rapidemenr alors.
Seroit-:e qu'en voyant l'emblême de la Peine qui fequitur
pede claudo, elles ne purent augurer que Madame d~ Mi~
rabeau recevroit par une paix trop honorable, une recom~
penfe peu méritée?
.
Je dénonce à mes Juges, je dénonce à mes concitoyens
cette horrible perfidie. Je leur dénonce la maniere atroce
dont on l'excufe. Je n'ai pas, dit-on, rempli mes 'engage~
mens! Quels engagemens ai - je pris? quels engagen~ens
pouv~is-je prendre à huit heures & demie, pour plaider
à neuf? Je devais j'!flifier la lettre! Oui, & m'avouer pa~
cela même calomniateur. Je devais m'en taire! Eh de quoI
donc aurais-je parlé? Madame de Mirabeau a abandonné
tOLIS fes moyens de féparation pour celui qu'elle réclame
dans la prétendue diffamation récente. Encore fi j'euffe été
prévenu la veille, j'aurais fait, je n'aurais fai r qu'une hymne
3
à la paix. Maig un quart d'heure avant l'Audience, pou~ojs
je autre chofe que facnfier mon amou r propre, mutiler,
affoiblir un Plaidoyer déja trop faible, puifque je n'avais
eu que deux , jours pour le, c~mpofer; mai,s le reflire ~
mais le fuppleer? Ou donc etolt la polIibJIJte? ....... Ah .
qu'ils jouiffeoc franchement du fp eél:ac!e de nos crllelle~
diffentions! qu'ils les prolonge nt en hame de la gl'olre qUI
pouvait en revenir au Pacificateur! qu'ils fouillent le feu
de la difcorde ces hommes vils qui difent ou font dire à
Madame de Mirabeau, ESPÉREZ EN NIDUS! Mais qu'ils ne
s'enveloppent pas d'abfurdes prétextes qu'un fouille renverfe .•.•...
Je vois cout, je fais tout; le théatre de tant d'intrigues
efl:- rrop refferré, pour qu'il foit néceffaire de les dévelop{Jer au Public; ,mais je l'ann~nce, &, ma p~édiaion ne
mentira pas: un Jour VIendra ou la Nation entlere en connaîtra l'h if1:oire.
Combien alors ne fera-t-on pas étonné que dans un e
caufe de féparation devenue d'amant plus odieufe, qu 'il
étoit mieux démontré qu'elle avait été intentée fans moyens,
on n'ait trouvé d'autre reffource pour la jufl:ifier que d'accufer le mari d'avoir rendu évidens les tOrts & les calomnies de fa femme! Combien ne fera-t-on pas éconné
qu'on ait cru devoir les récompenfer par une féparation!
Il ne me refl:e de temps & de force que pour combattre
ce nou veau moyen, qui pourroit influer fur le provifoire de
ma caufe en attendant qu'il me foit permis d'e n défendre
le fonds ' & de faire imprimer la difculIion du procès dans
laquelle Je ne fuis point encore entré. (*)
(*) J'avois en ellèt ,don,né mo~ con{entement il l'év?cation dll
fonds & principal; m a is n aurols-Je pas le drolt de le revoqllcr, fi
je n'av ois pas celui de me défendre!
Al.
�4
rI dl: donc vrai que l'on veut appeller diffamation fa'
divulgation de la lettre préfentée à l'Audience du 2.3. Je
ne fub,iliferai point; je ne dir-ai point que fa letture feule
n'ef!: point une injure, puifque le Défenfeur de Madame
de l\Iirabeau, qui n'avoit flIrement pas de1Tein d'injurier
fa cliente, a relu cette lettre, & qu'ainG ce fait n'eft
pas effentiellement injurieux par fa nature. Mais j'atta~
querai férieufemenr & dans toutes fes parties le moyen
de féparation que l'on a voulu en tirer. C'd!: le feul
fait fur lequel on infif!:e encore pour l'obtenir, tant on l'fi
convaiucu de la fau1Teté ou de la frivolité de tous les autres; & ft on l'ef!: aujourd'hui, ne l'a-t-on pas toujours été )
Examinons ce nouveau fyf!:ême de défenfe.
II eH ungulier en effet qu'avant cette le ttre il eût falh d'!bouter Madame de Mirabe~u de fa demande en fépararion,
& qu'il faille la féparer aujourd'hui, parce que fes moyens
font encore devenus plus odieux par cette lettre.
Il ef!: ungulier qu'avant cetre lettre, on eût rougi de ré~
compenfer par la féparation les calomnies qui n'avoient pas
d'aurre objet, & que l'on doive l'accorder aujourd'hui,
parce que ces calomnies font encore mieux démontrées par
cette lettre.
Il ef!: fingulier, on ne [,1uroit trop le répéter, qu'avant
cette lettre Madame de Mirabeau n'eût pOillt mérité d'obtenir la féparation qu'e lle deuroit, & qu'elle paroiffe dig t e
de plus de faveur, lorfque la néceffité de la défenfe a
révélé des torts qui rendent fa réclamation encore plus
immorale.
Cef!: donc un heureux hafard pour Madame de Mira~
beau que le procès n'ait pas été jugé quelques jours plmât!
c'eft dOllC un triomphe pour e le & pour fa caufe que la
letture de cette lettre, qui, aux yeux de tant d'honnêtes
citoyens, ajoute un nouveau degré d'intérêt aux malheurs
du mari, parce qu'elle fournît une nouvelle preuve des torts
de la femme!
~
'A 'Ini}r. ,1al lUI,II
'!l'fi'
.) ,
catIOn meme d un mari, accuf~ n'ef!: point
fans penl ' AJOU à force de prouver qu'l! ef!: Innocent il
peut fe rendre réellement coupable!
'
Dans l'état du procès, la femme reproche -<lU mari des
fevices auci,ens, & ~n carattere emport~. Cette imputation
peUL être derrulte d un feul mot; Ii po!lede dans une lettre
l'aveu touchant d'une rare modération. N'importe! qu'il
fe gar?e bIen de, la montrer, dût-il être féparé pour n'avoir
pas derrult les fevlces; car s'il la fait connaître il ne peut
plu" éviter d'être féparé.
'
La femme demande à être féparée pour les réticences
d'une lettre qu'elle préfente comme calomllieufes; une autre
lettre pe~t les, détruir;; une autre lettre peut montrer que
1. le mari avoIr dIt reellement de fa femme e/le me doit
' 1' ln' auraIt
.parle
, que d'un ,pardon génél "lloT/ne~r VJ:' l:z :'le,
:eux qUI de~OJt etre un lIen de pl~s entre les deux époux. Qu'il
fe garde bIen de montrer ce titre de la reconnoi1Tance de
fa femme; il vaut mieux s'expofer à être féparé pour la
diffamatio n, puifque dans tous les cas ce feroit la diffamer, que de montrer qu':! nE: l'a pas dilfamée.
Enfin la femme accufe le mari d'une ancienne infidélité
commife loin d'elle, & veut faire punir par la féparation
cet oubli momentané de fes droits. Une lettre prouverait
encore que le mari aurait dei s'attendre à plus d'indulgence.
F •.me!l:e lettre! qu'il fe garde bien de la montrer! Il vaut
xmeux qu'il fait féparé, que de mettre fa modération en
contra!l:e avec les emportemens de fa femme, puifque
cette modération feroit peut-être préfumer qu'elle a eu des
t0rtS, & que ces tOrts de la femme, qui loin d'être ceux
du mari, feraient le plus grand honneur à fon carattere moraI, que ces torts, dis-je, fe roienr encore un moyen de
divorce.
l~elles feraient les conféquences de la nouvelle caufe de
lfparation que l'on a propofée, & je rougis d'abai1Ter la
~aifon juCqu'à l'examen de ce ridicule foph ifme.
�'6
Tout accufé a le droi t de fe défendre: c'eft un prin.:
cipe qu'on ne m e contef!:era poinr; & fi l' on me ~Onrroit
un cod_ dans lequel il fût mo~ns dan gereu~ de .lal1!'e r ~ub.
fiaer l'accufa rion que de la refuter, mon Im agInation lU[ceme nt ind ignée placeroi.t ce code, ch ez des barbare.s.
,
Si to ur accufé a le droIt de {e ·defe ndre, tout man accufe
p ar des f3 irs de féparation a le droir de les réfuter; la JlIftice n'a p JS de ux poids & de ux mefure.s; & 10r{qu'.eIle
perm et à la fe mme de diffa me r {on man, fi elle pament
à montrer {es torts, pe ut-elle refufer au mari le droit de
juHifier fes pré tendus rorrs, quand mê me il auroit le
m alhe ur de montrer indireéteme nr ceux de fa femme?
Si cette L oi po uvait exif!:er, non fe ulement. elle violer a it le premie r pri nc ipe du dro it nat urel , q UI pe rmet b
défenfe, quoiqu'elle fa it funef!: e à l' ag re~e ur.
.
No n feuleme nt el L viole rait les premIeres .notlons que
les Loix Romaines donnent de l'injure, puifque ce nom ne
peur convenir qu'à ce qai ef!: fair fans droit, quod non jure
fit , injuria dicitur.
.
. .
,
Non feulement elle ferait contraIre aux prznclpes adoptes
par les Loi x ci\"iJ es, dans une fou.le de cas fembl ables,
puifqu' il ef!: permis de propofer en Jugement des repreches
in jurieux comre les témo ins , d'a lléguer COntre une demande
e n délivrance d'un legs , le concu binage de la légataire avec
le ref!:areur, & de propo{er l'ind ignité d'un héritier pour
moyen de caffation contre un tef!: ament.
Non feulemem elle feroit comrdire aux Loix de la défen{e
judiciaire, reçues dans tous les Tribunaux du .R oyaume;
car il ef!: des e{peces, difoit Mr. l'Avocat-Général Portazl,
" où l'on ne peut défendre la caufe {ans offen{er la per" {onne, attaquer l'injuf!:ice {ans déshonorer la partie; mais
" dans ce cas les faits injurieux , dès qu'ils font exempts
" de calomnie, font la caure même, bien loin d'en être
" les dehors, & la partie qui s'en plaint, ne doit aççufe~
" que le déréglement de fa conduite. "
7
Non feulement cette Loi renfermerait toutes ces af>rurdités, mais elle [eroit encore contraire au premier pri nc ipe des
féparations, où l'inconvénient de diffa mer les épou x l'un par
l'autre, ef!: préfére à celui de ne point écouter les p!Jintes
qu'ils peuven,t former. Et comment la diffa mation dans le
procès ferait-e lle un moyen de féparation, lor[qu'elle eft
exempte de ca lomnie, puifque cette dilt1mation même eft
l'effet nécefIàire, l'effet prévu par nos Loi" de rOute demande
en féparation ?
Enfin, l'objeétion que l'on propofe ferait contradiétoire
avec tous les autres principes des féparations. Quel eH l'objet
de la Jurifprudence en cette matiere? Que les féparations
deviennent toujours plus rares; & il ne ferait plus permis
de s'y oppofer. Que la femme foit du-moins arrêtée dans
[es calomnies, par la crainte de la divulgation de fes torts
perfonnels qui pourraient les détruire, & fi l'objeétion était
adoptée, les calomnies de la femme {eroient toujours un
moyen sûr pour elle de triompher.
Ce feroit donc établir en Loi, que le même fait i
qui dans certain cas pourrait fervir au mari pour demander la
réparation , ferviroic également à la femme pour l'obrenir;
& qu'un procès en réparation d'abord intenté par la femme,
fans motifs, {eroie cependant fuivi d'un Arrêt de féparation,
[ans que la caufe de la femme fût devenue plus favorable,
ni le mari plus coupable ; quelle Légi!lation pourrait adopter
ces principes?
Ici l'on m'arrête: le mari, dit-on, a le droit de fe juf!:ifier. Mais la lettre lue à l'Audience du 2.3 avoit-elle un rappore
immédiat à {a défenfe ?
. Quelle objeétion me force-t-on de combattre! J'en sttef!:e
tous ceux qui m'ont entendu : la réparatio n demandée par
Madame de Mirabeau leur parut~elle alors plus favorable?
Ne furent-ils pas, au contraire, plus indignés des oalomnies
dont j'avois .été J'objet? Qui ne remit pas qu'un mari capa-
•
�,
8
ble de .Ia, modération dont ~ette Tettre offroit un témoi_
gnage ~rrecufd~le , ne pO~VO.lt êrre. accufé de févices? Qui
ne fenrlt pas qu uni;! cohablrarIOn, qUI ne fur point dangereuG
à certe époque, ne pouvoit pas êcre préfentée comme telle
dans l'avenir? Qui ne fe dir pas enfin, Madame de Mirabea e
dev~ir plus d'indulgence aux erreurs de la jeuneffe de fo~
man? Elle fe devoir, fur-tour, de ne pas les révéler au public
avec une animoficé fi cruelle.
La lertre de Madame de Mirabeau renverroit tous fes
moyens de féparation. Elle-même, & tous fes Défell_
feurs, ne s'en formerent point d'abord d'autre idée' la
médiation la plus refpeél:acle n'a été acceptée, n'a été ;rovoquée qu'à cecte époque; & c'eH lorfque cetté lettre for~oit Madame de Mirabeau à fe rendre juHice, que changeant
tour-à-collp la nature de toutes les idées re~lIes , eUe la préfente comme un nouveau moyen de féparation.
On eft donc forcé de donner à cette objeél:ion une nouvelle
forme .. 11 efl: per~is au mari, dit-on, de fe j uftifier; mais il ne
faut pOlOt que fa Jufl:jficarion, quelle qu'elle foit, falfe éclorre
un nouveau moyen de féparacion; il ne faut pas qu'elle falfe
naître un nouvel état de chofes, où la fépararion ne doive
pas m~i~s êr:e ~rdon.née que s'il. ne s'étoit pas juftifié.
QUO!, la JulbficatIOn du man peut être un tort quj le
faffe feparer! Dans quelle Loi avez-vous trouvé le germe
de cette idée?
Lor~que les ép?ux viennent dépofer leurs plaintes au pied
des LOIX, !a Juftlce & la raifon ne féparent-elles pas l'inc~rv~lle qUI .s'e~ palfé; de celui qui va fuivre? Cette difclOéhon :ft IndlfpenCable , parce qu'il ElUt juger les époux
Comme ~pOllX dans .le premier intervalle, & comme plaideurs unIquement hvres au foin de fe défendre dans le
fecond. Leur reLte-c.il même alors d'autre devoir à obferver
que'celui de
l
. refpeél:er la vérité dans leurs défen{ies). Je
e fepeee , Ils [one plaideurs; ils ne [ont plus époux; & s'il
fallo;',
9
fallait juger des moyens de féparation par les injures CJue
ces caufes renfermenr, en feroit-il une feule où la féparaeion ne feroie pas prononcée?
Non, c'eft le mari rel qu'il a éré dénoncé, que la Loi
doit juger. Tout ce qui fuit la demande en féparation eft
un ~tat trop e.xtraordinaire & trop éloigné même' des ,
deVOIrs du manage, pour fournir de véritables moyens de
réparation,
Je {u~s votre objeél:ion ~ans fes derniers replis. II eft pafCIble, dites-vous, que la defe nfe du mari feme dans le cœur
?es époux un germe de di~ifion qui fe change en répugnance
mfurmomable. Or, contll1uez-vous, la lettre dont il s'agie
fait craindre ce danger.
Parlez-vous du relfentimenr qui peur naîere dans le cœur
de la femme? Il feroit injufte, fi la lettre eft vraie; il ferait
injufl:e, fi fa demande m'avait impofé la néceffité de montrer cerre let Cre , & puifqu'elle a cru nécelfaire de (ommu.
niquer la lettre même du Cantinier, po~r juftifier fon accu{acion, pourrait-elle fe plaindre que j'aie communiqué une
de fes lettres le 23 pour ma défenfe ?
Si la fenfibiJité d'une femme efl: protégée par la Loi,
c'eft dans les rorts qu'elle éprouve, & non dans ceux qu'elle
caufe. Elle efl: féparée pour le relfentiment de fes maux, &
non pour celui que peut lui donner la communication d'une
de fes lettres. Je ferois donc puni, parce que j'ai appris que j'ai
pardonné! je ferais déclaré mauvais époux, parce que j'au.
rois prouvé que je ne mérirois pas ce cicre, & l'on diroir un
jour de moi :
~
, Ce cyran de ra femme fut privé de l'autorité conjugale:
ve ut-on connaître {es déli ts? il fe rendit indigne d'elle pOlir
lui avoir donné de l'humeur dans Un procès en féparatioQ
qu'elle avoir intenté: il perdir fes droies d'époux pour avoir
détruit fes calomnies par une letrre qu'elle avait écrire, 6c
qu'il fut contraint de menre au jour.
B
,
.
.'
�'10
M:lis quel efi donc te mariage qui ne feroit point ébrânlé •
quels font les époux plaidant en féparation, que l'on dai~
gneroit encore réunir, fi l'humeur réfulrante du procès, fi
la haine même, bien ou mal fondée de la femme, fuffifoit
pour obtenir le divorce?
Autant vaudroit-il ériger en Loi dans nos codes, que
les tortS même de la femme deviendroient pour elle des
moyens ou des prétextes de féparation, & que les nouveaux titres qu'auroit acquis le mari pour conferver [on
at;torité, feroient précifémem autant de moyens de la
perdre.
Enfin, quand même il faudroit croire le re1Tentimenc
de la femme jull:e ....• Quand même entre deux époux diffamés l'un par l'amre, il faudroit choifir le mari pour
vi élime . ..... Quand il feroit vrai que dans l'opinion des hommes juftes, les torts de la défenfe du m ari, s'il yen avoit, ne
devroient pas être compenrés par ceux de la défenfe de la
femme ..... Quand même il faudroit admettre que dans ce
fingulier combat, elle eût feule l'avantage de pouvoir diffdOler, fans craindre de l'être à [on tour..... Quand il faudroit fuppofer que la lettre lue le "2.3 feroit auffi étrangere
à ma défenfe que celles qu'a produites Madame de Mirabeau le font à la fienne ..... Quand il falldroit croire que
cette lettre, que je n'ai point expliquée, doit s'entendre de
torts beaucoup plus graves que ceux qu'elle petrt annoncer .....
Eh bien! quand même il faudroit admettre ces ruppofitions, en réfulteroit-il jamais que la leélure de cene lertre eût
les caraéleres d'un moyen de réparation? Mais que dis-je,
admettre ces ruppofitions! En dl: - il une feule que vous
puiffiez me forcer d'adopter, & qui ne renverfe votre fyftême ?
N'importe, le re1Tenriment dont vous parle'z feroit-il un
rnoyen de féparation? Si c'ell: là votre allégation, vous êtes
forcés dans vos principes de confidérer ce re1Tentimeot
II
comme une fource de malheurs pour la femme, comme une
preuve d'incompatibilité entre les deux époux; c'ell:-à-dire,
felon vous, que la leaure de la lettre produirait plus d'incompatibilité que le fait rapporté dans cette lettre; c'ell:à-dire, qu'une femme ayant un re1Tentiment quelconque
contre fan mari, reffentiment que l'on fllppoferoit devoir
troubler la paix domell:ique, trouverait dans ron cœur un
titre certain pour être féparée; c'ell:-à-dire, que l'aigreur
réfultante du procès, qui dans toutes les caufes de cette
nature, n'a jamais porté les Magi(hats qu'à diffërer la rejol1ction, fuffiroit ici pour féparer & pour flétrir le mari, en
fairant droit à la plainte de la femme.
Non, je ne crains point que de tels principes pui1Tent
être invoqués dans cette caufe par le Miniflre de la Loi, &
il me remble déja l'entendre tenir ce langage à Madame
de Mirabeau.
" Le nouveatl re1Tentiment fur lequel vous fondez votre
demande en féparation, ne peut être protegé par la Loi t
qu'autant qu'il ell: approuvé par ell e; & dans les circonftances de la caufe combien ne feroit - il pas injufie?
Il ell: difficile de croire que votre mari fe foit rendu plus
coupable envers vous par la leélure de la let tre, que vous ne
l'étiez envers lui lorrqu'elle fut écrite. Plus généreux cependant que vous-même, il ne demanda point alors fa féparation , & fa modération annonce affez quelle devroit être aujourd'hui la vôtre.
"Vous aviez dû prévoir que dans une caufe qui ne conGftoi qu'à juger fa conduite à votre égard, il n'oublieroit
point de fe fervir d'une lettr.e propre à la faire fi bien connaître. Si cette jufl:ification femble vous diffamer, qu'ell:-ce
que ce tort dans un procès, où la ?éfenfe ;ll: de dro:t
naturel? N'avez-voLIs pas auffi diffame vot re cpoux jufqu à
l'excès? N'av z-vous pas auffi publié des lettres qui femblene n'avoir eu d'autre objet que de flétrir dans l'opinion
B
2.
•
�a
publique celui que vous deviez défendre contr'elle? Penfez~
vous que la Loi n'écoute que vos plaintes fans avoir égard
aux uennes, ou que la J ufl:ice vous venge d'une diffamation
dont vous avez donné la premiere l'effrayant exemple?
" Sans doute, contiQueroit encore J'organe de la Loi, il
peut nous être permis de vous plaindre; mais dans cette
caufe ne devons-nous pas plaindre les deux époux? S'il
réfulte qu'ils fe font mutuellement diffamés, il réfulte auffi
que le procès n'auroit pas dô voir Je jour. Il n'y a donc eu
d'autres maux que ceux qu'a fait naître votre refus de rejoindre. La diffamation même dont vous VOllS plaignez ell au
nombre des malheurs qui font votre ouvrage. Comment
pourrait-elle être un moyen pour vous féparer ? "
Voilà, MESS IEURS, quels feront fans doute les principes
du minifl:ere public fur cette partie de la caufe.
Mais je ne quitte pas fitôt l'obj eél:ion propofée. Il n'y a
point de moyen de féparation, on en convient, qui ne doive
être relatif aux malheurs que la cohabitation peut faire
craindre. Or, pour fuppofer ces malheurs, d'après la leaure
de la lettre dont il s'agit, voici les raifonnemens qu'il faut
certainement adopter.
Le mari fera fâché contre la femme; delà danger pour
elle; delà féparation. Si ce n'efl: point le mari, ce fera la
femme; delà incompJribilité dans .les efprits; delà danger;
delà féparation. On fe fouvient du FabuliHe, fi ce n'efl
toi, c'ejl donc ton pere; la logique de l'inlufl:ice efl: taujours
la même.
Il réfulteroit même de ce moyen que la féparation de
la femme ferait d'autant plus fôre, qu'elle feroit plus frivole; le mari en feroit bien plus irrité, & dès-lors féparation. Sil arrivait même que le mari n'elÎc pas d'humeur,
parce, q-u'il réfùteroic viél:orieufement les moyens de fépap ~ ra tlO,n, ce ferait la femme qui en auroit con~u par cette ,
refutatlOn même; delà danger, delà féparation.
'13
Ce nouveau moyen en a encore cette propriété dans la:
caufe, qu'il efl: indépendant de la vérité ou de la fauffeté
de la lettre dont il s'agit. Si la lettre efl: fauffe, il faut
évidemment féparer pour punir le mari; & fi la lettre efl:
vraie, il faut encore (éparer pour venger la femme. Le
même Jugement peut donc fubfiHer, quoique les deux' cas
f{}ient parfaitement contraires.
Veut-on encore une preuve de l'ufage admirable de cette
maniere de raifonner? C'efl: que l'argument était auffi fort
avant la lettre qu'après la lettre. On difoit alors du mari;
pardonnera-t-il à fa femme de l'avoir calomnié; comme on
dit aujourd'hui de la femme, peut-elle pardonner au mari
<Le l'avoir diffamée? La féparation était donc inévitable.
On pourroit même démontrer par ce raifonnement qu'une
féparation quelconque, & dont on ignore les moyens, fera
prononcée. Car fi la femme ne calomnie pas, fi les faits
fane vrais, elle obtient fa féparation; fi elle calomnie, le
mari fera préfumé vouloir s'en venger, & la féparation efl:
indifpenfable. Enfin fi le mari détruit la calomnie, Je danger viendra de l'humeur de la femme; il ne faudra pas
moins féparer.
Mais, dit-on, d'Agueffeau n'a-t-il pas fait le même raifonnement que vous trouvez fi abfurde? Ne difoit-il pas à
un mari qui accufoit fa femme d'une efpece d'adultere,
l'a<lultere eH vrai ou faux? S'il dl: faux, il faut féparer pour
venger la femme; & s'il efl: vrai, il faut encore féparer.
Non, d'Agueffeau n'a point dit cela.
D'abord veut - on s'étayer de l'efpece de la caufe dont
parle d'Agueffeau? Elle efl: inapplicable à la que{!:ion actuelle, puifqu'il s'agiffoic d'une plainte criminelle du mari
en fuppofition de part, & d'une requête incidente en féparation de la part de la femme.
Veut-on appliquer à la caufe l'Arrêt qui fut alors rendu?
~etce application n'dl: -pa-s moins impoffible. La femme fut,
�J4
afors féparéë, parce que le mari fuccomba dans Une
plainte capitale conrre fa femme. S'agir-il ici de rien de
pareil?
Enfin, veut-on fimplemenr raifonner fur une phra[e de
d' Agueffeau, qui dl: le feul endroit de fon Plaidoyer où il
parIe de la réparation; le voici:
" Enfin la demande en fépararion de corps & de biens
" n'dl: pas moins connexe avec ce chef important dans
" lequel nous renfermons route la difficulté de certe caufe.
" Si l'appellante ell: convaincue d'un crime auffi puniifable
" que celui de la fuppofition d'un enfant, fon mari vou" droit-il s'oppofer 11 la féparation? Seroit-Il affez aveugle
" pour vouloir con[erver dans fa mai[on une femme ca" pable d'un rel excès, & ne pourroit-on pas lui faire en ce
" cas ce reproche de la fageffe , qui tenet uxorem adulteram,
" jlultus (,. impius ejl , puifque, fuivant la pen fée d'un ancien
., Auteur, la fuppofition d'un enfant eft une efpece d'adulcere
" civil, auffi pernicieufe dans fes effers, auffi contraire
" 11 J'intérêt des tàmilles, au repos des ciroyens & à l'uti" lité de la république que J'adulrere naturel? Si au con" traire l'appellante eft juftifiée par vorre jugemenr, fi
" fon fils eft redevable de la vie 11 un ' commerce fuivi du
" mariage, pourra-r-on refurer 11 une femme accu rée faur" fement d'un crime capital, la jufle CHisfaél:ioo de fe ré" parer pour roujours d'un mari qui a voulu la dé shonorer
n par une calomnie atroce? J'obligera-t-on à foutenir pen" dant roure fa vie la vue & la préfence de fon accura" ceur, & les e ~ p o fi nl-r-on l'un & l'aurre 11 routes les fuÎres
.., funefl:es d'une fociéré malheureufe qui feroit le fupplice
" de l'innocent encore plus que du coupable?"
Voilà l'objeél:ion couverte d'un grand 110m; car n'dt-ce
pas comme fi d'Agueffeau avoit dit: le rort imput é à la
femme eft-il faliX, il faut féparer; eft-il vrai, il faut encore
féparer?
.
~
J')
Et non fans doute, d'Agueffeau n'a point dir cela, puir..
qu'il a dit précifément le contraire.
Parle-t-il du cas où la plainte en adultere eft4'offe, il
décide alors en termes formels: " Pourra-t'-on r furer il
" une femme accu fée fauffemellt la jufl:e fatisfaél:ion de
" fe féparer d'un mari qui a voulu la déshonorer par une
" calomnie atroce? "
S'agit-il au contraire du cas O~l la plainte feroit vraie,
il ne dit point alors qu'il faille féparer la femme, puifqu'il auroit éré forcé de dire au contraire qu/il auroit fallu
la punir.
n ne dit point non plus que le mari n'auroit point le
droit de la garder, puifque, d'après nos Loix, le mari peut
tellement garder la femme coupable, qu'il n'y a que lui qui
puiffe porrer plainte comr'elle.
n ne dit point non plus qu'il n'avoit pas le droit de la
reprendre après J'avoir accu rée , puifque la difpofition contraire fe trouve dans routes nos Loix.
Que dit donc d'Agueffeau? n raifonne d'après la volonté
prérumée du ma ri, & il filpp0[e que fon véritable intérêt
{eroit de ne pas rejoindre une femme coupable." Vou" droit-il s'oppofer , dit-il, 11 la fépararion? Serait-il affez
" aveugle pour vouloir conferver une pareille femme dans
" fa maifol1 ? "
C'eft ainfi que le rai[onnement que l'on prête à d'Aguef[eau eft formellement une propofition conrradiél:oire à la
fienne. Car il fuppofé qu'il ne faudroit pas ordonner la
-rejonél:ion, parce qu'elle puniroit le mari; & dans norr,e
caufe, c'eft pour punir le mari que l'on veut que la femme
foit féparée.
La nature du procès dont parle d'Agueffeau & la conduire du mari qui dénonçoit lui-même fa femme à route
la vengeance des Loix, faifoit facilement préfumer à c.e
MagiHrat qu'il éroit inutile d'examiner fi dans tous les cas,
."
•
�16
o
foit comme coupable; foit comme innocënte; la femme
ne devroit pas être ou fequefirée ou féparée.
Mais puifque d'Agueffeau n'envifageoit en cela que l'in_
térêt du mari, on ne peut changer le fens de fa propofition
pour ne l'appliquer qu'à l'intérêt de la femme. On n:
peut pas fur-tout changer en propolltion générale une
décillon relative aux circonfiances d'un feul -procès.
Et quel rapport ces circonHances ont-elles à la caufe
aétuelle ?
D'Aguelfeau parloit d'un fait non pardonné, & qui ne
pouvoit l'être, tandis qu'ici le pardon exiHe , & que la paix
domefiique qui a fuivi ce pardon, fait l'éloge des deux époux.
D'Aguelfeau parloit fur - tout d'une femme condamnée
comme coupable d'adulrere. S'agit-il ici de rien de pareil?
Vous m'oppofez le raifonnement de' d' Aguelfeau, & je m'en
fers pour vous confOndre.
Car s'il efi vrai que la lettre puiffe vous fournir un moyen
de féparation, à caufe de la révélation d'un tort qu'elJe paroÎt renfermer, je fais alors ce dilemme: Ou vous féparerez
comme le tort étant faux, ou comme etant vrai.
Comme faux, cela ne fe peut, puifque la lettre efi convenue.
Comme vrai, dans le fens que vous l'entendez, & que
je n'adopte point, c'efi donc l'Arrêt même que vous follicitez qui diffameroit mon époufe, & je réclame contre
cette fuppolition fes droits & les miens.
Et de quel droit réaliferiez-vous l'effrayante fuppolition
dont parle d'Aguelfeau? A quel titre prétendez-vous carac[érifer la nature d'une correfpondance que je n'ai préfentée
moi-même que comme un torr?
Oui fans doute, c'efi une faure gràve de la part d'une
femme, qu'une pareille correfpondance avec un tiers fans
l'aveu de fon mdri; mais je parle d'une faute, & d'Aguef.
feau parle d'adultere. Mais je parle d'une faute fuivie tout
à
17
?lIa fois du repentir & du pardon; & d'Agueffeau cite le
reproche de la ,f~geffe''''7ui tenU uxorem adulteram , flultus
efl. Et vous folllcHez un Arrêt fur ce motif! Cruels LOP'iciens! Laifft!z Madame de Mirabeau telle que je l'ai p~é
fentée. Elle a commis une faute fans doute. Mais li c'efi
rinjurier que de parler de fon repentir, quel nom donneriez-vous aux conféquences que vorre objeétion f3it
naîrre ?
On peut encore confidérer ce paffage de d'Aguelfeau
fous un aurre point de vue.
Auroir-il v,oulu dire que li ce n'étoit pas pour la femme
une ralfon legale de demander la fépar3tion, c'étoit un
morif pour le mari de confentir volontairement à la féparation. II n'auroit pu le dire qu'en ceffant de parler le
lan~a~e de la ~oi. dont il a toujours été l'organe. Il n'a
pu enger en pnnclpe dans aucun cas les féparations volontaires que la Loi prohibe dans tous;' & lui-même lors
d'un · Arrêt du [4 Mai 1691' qui ne s'étoit pas arrêré à.
une féparation volontaire, n'avoir-il pas arrefié le principe,
" que li l'on lailfoit à la femme cette faculré de ne
l' revenir chez fOll mari que quand elle voudroit, ce fe" roit autorifer les féparations volontaires enrre maris &
" femmes, ce qu'on appelle divortium bond gratid j que
" cela ne doit pas être fouffert, & qu'il Ile doit pas êrre
" libre entre deux conjoints de fe fép~rer volontairement
" & par des aétes particuliers j qu'il f31I0it qLe des liens
" qui avoient été formés publiquement, ne fe pulft" nt dif" foudre que de la même maniere & par des juge mens en
,. jurifdiétion contenrieufe. "
Et comment un Arrêt prononceroit-il la féparation dans
le cas où la demande de la femme n'étant pas fondée fur
la vérité de la plaillte, la fépar;ltion n'auroit d'amre moriE'
que la répugnance que fes (Orts auraient pu cau fer au mari t
car d'un côté, puifqu'il le roit fouverainement iniufie d~
C
�18
Li".,
1
prononcer la féparation à la requête dè la femme qui ne:
fi roit pas fondée, il faudroit donc, pour la prononcer, avoir
le confentement du mari; & d'un autre' côté, fi lui-même
n'étoit pas fondé à provoquer le divorce de fon chef, ne
donneroit-il pas un confentement il\ufoire? En effet, les
féparations entre maris & femmes ne font pas valables
fi elles font prononcées par Sentence rendue du conren~
tement des conjoints, parce que, dit Dupleffis fur la Coutume de Paris, cela ne feroit toujours que volontaire. " Il
ch. ,.
" faut, ajoute-t-il, qu'il y ait néce/lité, & que la fépara" tion foit prononcée en connoiffance de caufe, c'efi-à-dire,
" après information ou enquête de févices, malverfation,
" ou mauvais mén age de l'un des deux, qui en efi le feul
" fujet légitim e; au trement toure féparation faite par le
" Juge , en quelque forme que ce foit, dt abfolumenr nulle
" & n'a effet quelconque. "
N'imputons donc point à Mr. d'Agueffeau d'avoir eu intention d'engager à une fépa ration volontaire le mari dont
h femme auroit des tortS graves envers lui; & s'il a dit
qu'un mari qui feroit affez aveugle pour fouftrir dans fa
maifo n une femme convaincue du crime de fuppofition de
p:m, s'expoferoit à ce reproche de la fageffe, qui Unet
uxorem adulteram, flultus & impius ejl, cela s'explique par
Je droit reconnu du mari de provoqu er lui-même le divorce,
Jorfque fa femme lui en fournit de jufl:es rai fons; & c'ef!:
certainement l'exercice de ce droit du mari, & non une
Œparation volontaire que ce Magifl:rat avait en vue.
Enfin, MESSIEURS, le prétendu moyen de féparation :
tiré de la leéture de la lettre peut être encore confidéré
fous un autre point de vue.
Toutes les caufes de cette nature préfentent l'examen
des torrs réciproques des deux époux, & je fuis peur-être
le feul mari à qui l'on ait oppofé un moyen de cette nature.
Les Jurifconfultes appellent la demande en féparation une
19
allion fur les mœllrs ; parce que le procès né 11 cette occafioll
conulte dans l'e"amen des mceurs de l'une & de l'autre
des parties qui pbident. Il faut donc néceffairement qu'elles
parlent des mœurs l'une & l'autre; & u ce qu'elles el'l au.
{Ont dit, fuffir p-our fonder la demande en féparation, il fau.
dra touiours l'accorder dès qu'une femme la demandera.
Elle commeqcera par charger fon mari de faits atroces,
enfuj.ce ou le mari fe taira; & en ce cas, quelle apparence;
qu'il puiffe jamais efiim er & aimer une femme qui l'a trairé
de la forte? Il faut les féparer: ou il rejeHera les califes
des troubles domeHiq\les fur fa femme; & alors doit-il
defirer de demeurer avec elle? Peut-elle f~ réfouqre à demeurer avec lui?
- II s'en fdur bien que dans les Tribunaux où ces fortes de
queHions ont été portées, on ait railonné de la forre. Les
Plaidoyers de Mrs. Lemai{he , Gautier, Gillet, Erard, font
entre les mains de tout le monde. Il e n efl: plulieurs fur cette·
matien~. Ceux qui prendront la peine d'y jetrer le.s yeux, troLl4
v@ront qu'il n' yen a point où -la chal ~ur de l'accllfJrÎon &
la néce/lité de la défenfe n'ait en6'agé les parties dans
des difc;ours qu'ils ne feraient pas excufa bles de s'être permis ailleurs.
- Dans les Plaidoyers de Mr. Lemaifire, plus difl:ingué par
$Cl fageffe & par fa modération, que par (on éloquence, il
~'en trouve un pour un Confeiller d'A bbevil\e, où, pour le
ôéfend.re de la féparation que demandoit fa femme, Mr,
L emai!tre parle en ces termes... ..... Il a trouvé u~
démon domejlique, un~ ennemie de [on repos, qui luifait fo nsciiffè·la guerre, & 9ui le p.erfocute en public, dal(s fa maifon"
afa table, dans fan lit ...... En un autre endro~t on excuf~
le mari d'un e mportement qu'il avait eu, & on le fait en ces
te)'mes .•.... AuJ]i le feul f ait qu'OR. lui oiJjec1e, 1;l'ejl pas un~
marque dit l'aigreur de [o.n nature!', mais un témoignage deS!
tfériglmwl>S <1,< fo. f~mme. A-han Vu que pour cela les Juges
Cl.
•
�1.0
lot"
aient fait ce raifonnement, ou en aient été touchés,? "1 Si
" cette femme dl telle que [on mari la depeint, doit-il
" deGrer de demeurer avec elle? Et fi elle n'ell pas telle
" qu'il le veut faire croire, peut-elle [e ré[oudre à demeurer
" avec lui?" La femme, par Arrêt du l 0 Décembre I63 [
fut condamnée de retourner avec [on mari. C'efl:-à-dir~
qu'on renvoya auprès de lui ce démon domeftique, cU ennemi de fon repos ....... cette femme livrée aux déréglemens.
Le dix-neuvieme des Plaidoyors de Me. Gautier efl: pour
une femme qui vouloir [e faire réparer. On y lit que le
mari avoit écrit à [on beau-pere, qu'il était affuré de tout,
qu'il connoijfoit que fa dilJimulation ne flrvoit qu' d rendre les
efPrits plus hardis & plus libres dans leurs entreprifes, fans
lui laiJ/èr aucun [ujet d'en t:fPérer mieux; qu'il devait d fan
honneur & celui de {on beau-pere de ri'en pas {ouffrir davantage; enfin, il finit par ces termes : Si les chofes n'allaient d la bleJJùre de {on honneur, &c. Me. Gautier ne manque pas de commencer ces paroles avec toute la viVllcité qui
lui était naturelle; (c'cfl: lui dont Boileau parle dans ces
vers:
aaht tous ces· di[cours, loin de produire une [épàrarion
n'ont pas empêché que la réunion ne fût fincel'e; & ces
mêmes plaidoyers nous apprennent que le mari & la
femme vécurent depuis dans une concorde parfaite.
Enfin, le [eptieme des Plaidoyers de Me. Erard, dans
la caufe de Mr. & de Madame la Ducheffe de Mazarin ell:
fm une quefl:ion de cette nature. Il s'y agiffoit de [avoir fi
l'on contraindroit une femme de retourner avec [on mari
qu'elle avoit quitté. Ils étaient l'un & l'autre du rang le plus
éminent, & ils avoient l'honneur de tenir par leurs alliances à tout ce qu'il y a de plus grand en France; cependant
quand le mari a cru pouvoir tirer de la conduite de [a femme de quoi jufl:ifier la Ge nne , paroît- il qu'il [e fair retenu,
qu'il ait même ménagé les termes? Paroît-il qu' il ait craint
de fermer par-là tous les chemins au retour de fa femme
qu'il demandait? On fupplie les perfonnes fans prévention
d'en juger. Ces Plaidoyers [ont imprimés, en voici feulement quelques extraits. En parlal1t de la [ortie de cette
Dame hors de la maifon de fon mari, Me. Erard dit.. ...•
P eut-on nier que toutes les circonflances de cette évafion ne
foient extrêmement crimillelles par elles-mêmes? Ne forait-il
pas m~me permis d'y foupçonner qu'une femme qui s'efllivrée
de la forte, a mal gardé un tréfor dont elle a paru faire fi
peu de cas, par le danger où elle l'a mis volontairement?
pour peu qu'un mari eût du penchant d la jalolifie , ne regarderait-il pas un enlé1{ement de cette qualité comme une entiere convic1ion? Les Juges mêmes n'en auraient-ils pas été
frappés, fi l'on eût pouffi ce procès ? Madame de Maiarin ne doit-elle pas fo flntir fort obligée d Mr. de Maiarin de la jujlice qu'il lui rend, & du jugemellt favorable
qu'il a toujours fait de fa vertu, malgré l'imprudence de fa
conduite ...... Peu auparavant il avoir.. dit, que cette Dame
avait été rt:mife entre les mains d'un j eune Seigneur des plus.
gakllls e;. des '!lieux fait~ de la Cour, qui n'était point de fls.
a
Dans vos di(cours chagrins, plus aigre & plus mordant
qu'une femme en furie , ou Gautier en plaidant.)
& il s'écrie: que peut-on dire de pis contre la plus abandonnée de toutes les créaturês, convaincue d'adu/tere & d'incefle:
cependant par Arrêt de la quatrieme Chambre des Enquêtes, la femme fut déboutée de la [éparation; & les Parcies
fe réunirent en exécution de l'Arrêt.
Parmi les Plaidoyers de Me. Gillet, il yen a un pour une
Darne qui pour[uivoit une réparation d'habitation & . de
biens d'avec fan mari. On y vojt que la femme y accufoir
fan mari d'avoir tiré L'épée [ur elle plufieurs fois, d'avoir voulu
la tuer, é;. de lui avoir caufl! deux avorte mens par des coups
de pieds dans le ventre. Le mari 3 [on tour n'accufoir. pas
fa femme de moins que d'avoir voulu l'empoifonner; cepen~
i
�11
pdr,~s ..... : Dans un autre endroit il dit: Madame de Ma;;
1flrin a lfuiClé la •.. ... pour allIJT üahlir à. ..... une bqfJètte
pour y faire de fa maifon une académie puhlique de jeu,
de tous les défordres 9ue le jeu entra!ne, ou auxquels il fert
ordinairement de couverture ...... Ailleurs, comme fi l'affreufe
idée qu'il a dOm\ée de la maifon & de la vie de cette Dame n'é~
toit point affez développée, il répete: Madame de Ma:rarin f aifoit de fa maifon un bureau public de jeu, de plaijirs & de galan_
urie; une nouvelle Babilone, où des gens de toutes Nqtions,
de toutes Sec1es, parlant toute forte de langues, TTUlrclzoient
en confujion fous l'éundart de la fortune & de la volupté. Et
quatre lignes plus bas il continue: Madame de Majarill ,
idolàtre d'elle-même , e-herchoit cl Je faire des adorateurs de
qui elle exigeait un culte profane & criminel. Que pourroiton ajouter à ces termes, & aux idées qu'ils préfenrent?
C ependant uné Dame qui ne le cédojt à perfonoe, ni paL'
h naiffilOce, ni par les qualités pedonnelles, n'a pas même
imaginé qu'ils puffenr l'aurorifer à fe répandre en inveétives
contre lDn mari, & 1 s Juges n'ont point cru que ces dif~
cours puffenr fer vir de rairons pour ne la llli pas renvoye·f. Ils
ordonnerent que dans trois mois la f(wlme fe retirerojc
dans le couvent des Filles Sainte-Marie, pour) fix mois
après, retoumer dans la maifon.de fon mari.
Ainli, MESSIEURS, dans ~e-s califes, (oit qu'un mari accusât fa femme, pu qu'il oppos~tC.i condu,j-te l\, la demande
en féparation par elle formée, on cro)'oit qu'il n'y avoit
diffamarion de la part du~ mal'i, & moyen de fépararion
pour elle, qu'aurant que l'accufation o.~ les faits injurieux
prop.ofés .pai' une j,u /te e~cepri(\}l] étoient ,calomnieux.
C'efl: une d~fun.fe légirilfl'€ ,. s'pis. ne le [ont pOlllt. Alors
les faits injul'ieux, t1~s q.U"'i!S foNt exampts de ça/omnie, fuivant' -l'exp.reffioo de Mf, l'Avocar-Gén@pal Porta il, font la.
WlIjè même, bien lf>in tl'en im: l~.s dehors. Er li LUl mari nepouvoit rèpouifer .la '<1,eulImde en (épa~i\.tk!>R : par-'un~ excep~
&
injur~~fe ~
i
'tlot'! vraIe, qUI feroit
la femme if eh arri ...
veroit donc que le droir de la défenfe n.1ture le feroit int tdir au mari, & que la femme devroit être {éparée, par
cela même que le mari auroit contre fa deman de une exception légitime.
On peut encore citer pour exemple ce qui fut décidé
dans la c3-ufé en féparation de Madame de Pomereu, qui
efl: rapportée dans le dix - feptieme volume des Caufes
Célebres. Le mari produifoit pour exception des lettres
écrires, foir à fon époufe ou par elle; la verification en
fur conteftée: " c'efl: une conféquence nécelTai're, difoit-on
" pour le mari, que fi les lettres font utiles à la déf(!nfe
" de M. de Pomereu, la vérification qu'il en demande ne
" peut avoir pour objer de diffamer Madarile [a femme '" mais de fe défendre des èalomnies qu'elle lui impofe.
,; Que fi ~erte défenfe fair tom~er [ur elle tout le p~ids ~e
H
l'impofl:ure, dont elle croyott accablet fon mari, lem
" que ce foit une raifon de lui ravir une telle défenfe, c'e~
" ce qui doit' àu contraire engager plus fortement à la lUI
" conferver polIr le mettre en érat de fe jufl:ifier pleine" ment & de confondre la malignité d'uhe injulte femme.
" En u~ mùt il ne s'agit point Ii'examiner fi Madame de
" Pomereu p~ut fOllffrir quelque préjudice de ~ette vérihu cation; mais fi Mr. de Pomereu peut en tirer quelque
" avantage, quand M~dam~ de ~ome~e~ difii~ulanr, les
" véritab.les Ta-ifons qUi aVOIent determme à eXiger delle
H
plus de retenue, qu'on exige d'ordinaire,.ci~s ~utres fem" mes a demandé permifIiol1 de prouver qUII erOlt un tyran,
" un barbare, acharné à la perfécutet, q\li l'avoit tenue
" Elans la p1us cruelle captivité, on a perml~ à Madame ,de
" Pomereu, la preuve de cas faits, fans s embarralTer fi
1, cette preuve déshonoreroit Mr. âe Pomereti. De quel
" droit donc, quand il s'agit de permettre à Mr•.de Pome" reu b preuve des fart.s qui Je jufiifieRt 1 examlflera-t-oll
�;, li
24
ces faits ne portent point quelque atteinte à la réputa~
" tian de Madame de Pomereu? De quel droit fera-t-il
" privé de juflifier Ca conduite par celle de Ca femme, la
" fageffe & la modération qu'il a eue par les imprudences
" & par les foibleffes de Madame de Pomereu? "
La vérification fut ordonnée par Arrêt rendu en la Grand'_
Ch J mbre du Parlement de Paris, le 1 S Mars 17°7; l'Arrêt
définitif admit à la vérité LI demande en féparation; mais
parce qu' il jugea que les ~ettres ne fourniffoient pas au mari
une exception fuffifanre, & lailfoient fubfifler tous les moyens
précédents, il n'avoit pas moins été jugé par l'Arrêt précédent fur la. vérification, que des faits injurieux propofés par
exception ne conHituent pas une di{fam~tion.
Un Arrêt plus récent ell rapporté dans le cinquieme tome
des C aufes C élebres, caufe '1.7. Refus du néceffaire, mauvais
traite mens réitérés , outrages publics, imputations calomnicu[es, injures atroces , emprifonnemen t, enlévement de la perfonne de la femme; telle éroit l' hiftoire de la vie du mari
depuis fan mariage. Le mari, fans nier la pl upart de ces
faits, en expliquait les caufes; la femrr,e vo ulut faire regarder cette explication comme une dilfdmation; voici ce
qu'obferve le Journalifle : La diffamation qu'elle reprochait il
fo n mari, n'étoit autre que fa propre défen[e, & non des di[cours di1Ju/gués dans le deffiin de diffame.r fans nécejJité. Enfin l'état .des Parties, l'éducation qu'dIes a1'oient reçue, & [urtout la mauvaife conduite de la femme, déterminerent l'Arrêt
q.ui déclara la femme non-recevable il fa demande en fèparation.
Ee non des di[cfJ urs divulgés dans le deJ!i:in de diffamer. Ce
mot feul jugea cette caufe : que doit-ce être, fi ces difcours
ne font pas m es difcours , & il çette lettre eft une lettre de
ma femm e ! Si cerre lettre pouvoitla diffamer, ce [eroit donc
ell e-même qui fe feroit diffamée.
11 f<lut donc en revenir au premier point de la caufe dont
on
'2.)
on chùcheroit vainement à s'écarter. T ous les m oye ns d e
Madame de Mirabeau étaient frivoles ava nt la pla id o irie du '2.3 Mai, où une feule lettte écrire par elle achev a
de me juHifier & d e les détruire. Mais lo ng- tem s ava nt
cette Audience, plus jalou x de rame ner Mad ame de Mirabeau par fon opinion que par des Arr,êts, je lui fis parler de la néce lIité de rétraél:er ce que cetre [eule lettre ne
permettoit pas-de croire ; & que l'on juge fi mon intentio n
pouvait être de la dif/::l mer, puifque je lui faiCois connaître.
ma défe nfe mê me. Et qu elle dé fe nfe !
Tous fes 'moyens de fépar ation , caraél:eres, fév ices, emportement, procédurès, diftamation, adulte re , fe réuniffoient à ce feul point, que la cohabitation qu'elle refufo ir
[èroit dan ge reu[e pour elle. Mais ce danger im ag inaire é toie
détruit par la preuve de ma modé ration conGgnée dans cette
lettre. Mais la paix domeHique qui la [uivit, montrait affe1l.
que les liens qui ne furent point alors rel âch és, étaient ceux
du caur autant que de la Loi. Cette lettre raffilroit donc le
Magi{hat; elle montrait mFme que dans l'ordre des procédés j'au rois dû m'attendre peut-être à plus d'indulgence
de la part d'une époufe autrefois tant aim ée , & qu'il eut
été plus flatteur -pour elle qu'au lieu de la , demande en féparation dont elle accueillait mes malheurs, j'euffe pu écrire
un jour: ces erreurs, ces fautes nombreufes de ma Jeune ffe ~
ma femme me les a pardonnées p ar (l(/e modération qu.i lui
cft perfonrielle.
'
Non, je ne m'abufe point. Si je fus
à ce~t~ Audi ence
dans les eCprits, dans les cœurs; la defenfe w ee d'e cette
lettre me laiffa bien peu de fuiE-ages à conquérir. Madamede Mirabeau même vit alors fa caufe fous un autre point·
de vue; le burin acéré de la calomnie tomba de fes mains ~
elle ouvrit fon ame à des propofitions de paix , & je dus"
fal,lt-,il l'avoue r 1 je dus à çe tte lettre le feul efp oir qui m'ail;,
I!re
D
�'!6
enco~e fouri, & les feuls jours Ot1 l'illllfion du bonheur d .
mefhque fe foit encore offerte à mon cœur.
~
o.
J'ai difcuté fi cecce le ttre, qui penfa me ramen
'
fi 1 {( 'II {( .
.
er mon
epocue, or qd u e le ; J~geo1,e elle-même, eft capable de Ole
l a [,lire per re onqu on Jugera fa caufe. Ce que '
,
ffi
1
br
'a
'
'
.
Je
PUIS
e
a, urer, avedc'h pu IC, ce , qu aucune des obJeébo ns que l'on
f ait aUJour UI, ne fe prefenta pendant 10nO'-remps
àr
fi ' , ' n ue l
' r.
b
Ion
es dPartlians même de fa caufe ne s'oeeu_
e pne, cd;H qd
p e rene
a b or que es moyens inueiles d' y répondre' &
c'ea lorfqu'on n'a pu ni la nier, ni la combattre qu"
00 a
,
vou l u comparer cerce lettre à cerre accufation capitale d
,
par 1ent nos L'
OlX, & qUi' deVIent
un moyen de féparat' ont
lorfque le mari qui l'a dirio-ée contre fa femme y lfioo,
b
, .
uc.
corn be.
/
N~n,
je ne vous en crois paine, & vous n'êtes point
avoues d,e ma ~emme , vous qui foute nez qu'une lettre qu'elle
r~connole vraIe, ferole pour elle une atroce diffamation.
Ne fentez-vous pas que vous la perceriez de fes propres trairs 1
N,~ fentez-\'ous pas q~e pour ~xagérer le délit que vous
m Imputez, vous exagerez celUI que renferme la lettre)
C'eft donc à moi que vous réferviez le foin de la défen~
dre; ce rôle je le remplirai, ou plutôt un feul Inot me
fiJffit : vous n'a,vez n,ul d,roie de wéfumer que jeuffe pardonné
ce dont Votre Hr. i!glOatlOn s'eft fouillée.
Mais je découvre vos véritables motifs; en voulant faire
r,egard~r la leél:ure de la lettre comme une cruelle diffamat1,on, Il ~ntroit ~a?s vo,s vues. de paroÎtre embarraffé d'y
r~pondre, v.c us etIez bien - aIfe VOus-même qu'on en tirae les confeq~ences les plus fâc~eufes, pour mieux prép J:er les efpflCs à Votre nouveau fyftême. Eb bien! je
vaIS vous apprendre moi-même à répondre à cette lettre.
. La correfpondance d'une femme avec un tiers eft touJours une grande imprudence, lors même qu'elle ea inI1oc:nre ,
cette correfpondance fe paffe à J'infu de [on
man. VoIlà ce que vous deviez avouer: malS pourquoi
p.
'1.7
n'a vez - vous pas ajouré, ,9ue pui!que j'avois, pardollllé ce
(Ort , j'avois eu des motifs de n en pas croire les apparen ces ?
Le reCOUf d'un porrrait n'eft pas non plus fi difficil e à
expliquer, je n e dis pJS dans le Roman, mJis dans J'hiftoite même d'une femme qui ne feroit qu'imprudente.
Combien de fois cette image de la beauté n'eft que J'ombre du bonheur! COl1lbien de fois cette foibleffe mêm e qui
apprend à une jeune ~emme, à fe défi~r de fon cœur, ne fe re
qu'à lui m.olltrer le penl qUI la ~ortIfie! VOl,là ce qU,e YO Us
pouviez dIre [ur cette lettre; mais alors feroIt tombe votre
nouveau moyen de féparation; mais alors vous n'auri e z pu
m'accufer de cett e atroce diffamation dont vous avez be~
foin, non pour ma femme, mais pour fa caufe, de me faire
un crime.
Mais, répondrez- vous, ne dit - elle pas dans la lettre
qu'elle revient de [es égaremens? N'annonce - t - elle pas
qu'elle retourne d la vertu? Vous ne connoiffez donc pas
le véritable idiôme de l'honneur & de la [enfibilité. Vousignorez donc que la femme qui Teae verrueufe au fond de
[on cœur, ne fait rien fe pardonner; qu'elle donne à l'errtur le nom d'tgarément, & que jugeant de fes fautes par
le péril, elle ~ppelle retour à la vertu, le retour fur elle-mê_
me. Voilà comment vous pouviez expliquer la le ttre; voilà.
ce que la modération à laquelle cette lettre rend hommage,.
vous autorifoit à pen fer ; & vous aurois-je démenti? Ma
défenfe ne refle-t-elle pas toujours la même, quelle que
[oit la lettre? N'exclut-elle pas tGujours les févices, puif_
qu'elle fait J'éloge de ma modé ration? Nannonce. t-elle
pas que la coh abitation qui ne fut poillt alors orage l1fe, ne
peut j~mais J'être? Ne fait-elle pas [entir que l' homme qu i
excufolt des erreurs, n'aurait point infulté à des Vertus &
que le mari qui jugeait h1 fe mme moins févérement qU'elle_
même, n'é tait point un ennemi de fon bonheur ni de {Oll
repos? :
D 2<
�28
Mais j'ai lu ,ddns 'Votre ame, & ne croyez pas m'écha
V
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pper,
'Ao,us. red erlvezCcetrevexp ICatlOn naturelle de la letne apres
l net e a our.
ous prouverez Llcilement alors qu'
ftemme d Ont l'1 eXI'[e[
,
unel
pareIlle
le ttre n'ell pas PlIne
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c: 1~ coupa bl e; d' ou\ vous conclurez que '
cerre
Cre ner
la
,
•
29
,
&"
qui par état font plus fenfib les fur le point d honneur,
ne s'accoutllm~nt point à l'âpreté du Palais. Mais je demander3i à tous ceux qui connoiffent ce fatal procès; je
demanderai aux efprirs les plus froids, aux cœurs les plus
infenfibles: n'ai-je pas été outragé fans mefure? 0 mes concitoyens! ô vous à l'indulgence defquels je me fuis voué,
mais dont j'excitai plus d'une fois l'arrendfl ffe menr, dont
plus d'une fois j'ai vu couler les larm es, vous qui forrant
de l'Audience du Siege vous écriâtes unanimement: ou eJl- ,
elle? où dl-elle? Cjue ne l'a-t-elle entendu, elle 110/eroit
dans [es bras? Chers & dignes concitoyens, n'ai-je pas
été outragé fans mefure! Qui de vous me répondra: non,
vous n'avei pas été outragé? Lequel de mes ennemis même,
lequel de mes p.lus forcénés détraéteurs ofera dire :
l'imputation d'efcroquerie & de vol à vous faite, parlant
à vous; cette imputation abfurde autant qu'atroce à laquelle il ea démontré fau x que Madame de Mirabeau ait
cru un infrant l'accufarlon d'une vile & fordide cupidité,
d'u n odieux machiavelifme, d'une duplicité lâçhe & frauduleufe lancée fur VOLIS & fur les "ôtres, ne font point
des olltrages? Ce font les jeux des combats judiciaires.
Ah! fi l'on ne peut pll)s recourir à la Juaice fans fe
déshonorer, fans crair dre d'ê tre traîné dans la fange,
ces temples allguaes où la Majeaé Souveraine, où la Majeaé même du Dieu vivant ea toujours préfente, font de- ,
venus plus affreux, plus redour ables, plus fouillés que Farelle des gladiateurs. Au milieu de ces fpEétables horribles, jamais du-moins on ne vit des parens s'enrredéchirer; jamais on ne vi tune époufe arracher la vie à" fon
époux!
, Et dans nos mçeurs , dans nos mœurs dont nous vantons
l'urbanité, la douce ur, la philofophie, nous nous perniet-'
trions ces horreurs au Palais de la Jufrice? Ah! MESSIEURS,
p'ea-ce pas VOllS calomnier jufqu'au blafphême, que d'ofe~
dJff-ame ~as; & cependant, que l'on juge par-là de VOtre
bonne, fOI, vous ne vous fondez aujourd' hui que fur la dif.
famat lon que cene le~[re renfe rme.
Ainfi c~ prétendu m~yen de féparation , dont 00 parle
tant lor~qu o~ en a bef~ll1 , ceffe~'oJt d'e:l être un lor(qu'on
en aurOlt faIt ufage. Ce phanrome s'e vanouiroit de lu'_
n~ême,' lorfqu'il auroi t produit l'effet qu'on en atrend. ~n
dIt aUJourd'hui pour la caufe de ma femme qu'elle ell diffamée, comme on diroit alors, comme on prouveroit alors
pour fon honneur, qu'elle ne ,l'eH: point. Voilà le piege
que. l'on tend à la Juaice de la Cour.
J'ai donc eu raifon de l'annoncer en commenCQ1Jt ces
obfervations; .ce nouveau moyen de féparation fe~lbleroit
n'être inventé que pour récompenfer les calomnies de ma
femme, ou pour m'empêcher de les détruire; & qui pourTOIt me blâmer des efforts que j'ai faits pour cela?
Ce n'ea point la caufe de féparation que Madame de
Mirabeau a plaidée;
elle m'a accufé comme fils comme
'
pere, comme cItoyen; & pour me frapper de divorce,elle
me .
frapper de mort civile. Indi bO'nement caloma"
voulu '
me, non mOJl1S atrocement ' arraqué dans mes qualités
morales, dans la vraie exiaence d'un homme facial,
d'un homme d'honneur, n'àurois-je pas eu le dro it de me
défendre contre tant d'outrages? Exiaeroit-il une loi affez
partiale, affez meurtriere pour m'en priver?
J: ne veux pas confulter ma fenfibilité; je ne contultera.! pas celle de mes parens, de mes amis; je ne confLl lterai pas même celle des hommes qui ne tiennent à
mOl que par les rel ations communes de l'humanité, mais
,
\1
. ".
.. ..
•
•
•
�3°
1
croire, que d'ofer efpérer que ce qui nous paroîtroit effro..;
yable, ce qui nous feroit tous reculer d'horreur dans la
{ociété, eft permis, eft légitime devant vous?
Mais la néceJJité de la défenfe l'exige! La NÉCESSITÉ!
C'efl: le mot de ralliement des brigands. LA NÉCESSITÉ!
Eh MESSIEURS, VOllS envoyez tous les jours à l'échafaud
les complices de la NÉCESSITÉ! Peut-il donc y avoIr Jamais néceffité à CALOMNIER?
Ai-je été calomnié dans les Mémoires de Madame de
Mirabeau? Le come abfllrde du Cantinier fait avec mau_
vaife foi, imprimé avec méchanceté, & que l'indignation
publique a feule fo~cé d'abandonner; le conte du Cantinier
répond à cerre quefl:ion cruelle: & cette atroce qlomnie
qui plus évidence , plus connue dans ce pays, parce qu'il
en avait été le théatre, a plus frappé que toute autre, combien il s'en faut qu'elle fait la feule!
'
J'ai éré c~lomnié! j'ai été outragé! par qui? devant qui?
Par une époufe que j'avais louée, vancée, trairée comme une
divinirp. J'ai été calomnié! devant qui? Devant vous,
MESSIEURS, aux: yeux de toute l'Europe, où le nom que
je porte n'avoit reçu Jufqu'ici que des titres d'honneur.
L'Allemagne, l'Italie, l'Angleterre retenriffem de cet horrible procès, & des calomnieufes diarribes imprudemment
ugnées, avouées de celle qui s'appelle MIRABEAU; & plût
au Ciel que je pt.iffe encore les attri buer il d'autres qu'à
elle!
Eh bien, MESSIEURS, on vous en fupplie; on profl:itue
l'éloquence à vous en fi.lpplier; récompenfez cette conduire,
en difJ>enfant MadJme de Mirabeau de tous [-es devoirs d'époufe. Puniffez-moi, parce que j'ai voulu me jufl:ifier. Déshonorez-moi pour la maintenir en libre polfeffio n de [on indépendance. Oui, déshonorez_moi, de peur qu'on ne croie
qu'elle m'a calomnié; mais ce morif même, je ne dis pas
dans l'opinion du Juge 2 maiS' dans celle de tout homme [eu~
•
.
3 avIlir
. -- fcon man').. Si lion doit
'liGIe, feroit-ilune ralfon
pour
tant de chores à l'honneur de Madame de Mlr:lbeau, ne
doit-on rien à celui de l':lmi des hommes & de !on. fils?
Voudroit-on par un Arrêt confacrer, graver en traits Ineffaçables fllr la tête de mon pere, le c~raél:ere de d~lareur
de fon fils? & fur la mienne les hOrrIbles calomnies fur
lefquelles on a fondé la demande en fépar~ri.on ? V,oudroiton donner à cet illufl:re & malheureux vleJ\lard 1hornble
douleur d'avoir immolé fon fils par un excès de confiance
dans fa belle-fille? Sa famille feroit-elle donc frappée de fiériliré? condamné moi-même àl'ennui, aux dangers, aux facrifices d'un célibat involontaire? Les doux noms d'époux &
de pere ne feroient-ils plus faits pour moi? Et je l~ fus cependant! & ils ne pourroient plus être prononces devant
moi fans déchirer mon cœur! ...... N'eft-ce point affez?
Faud;a-t-il encore que je fuye la fociéré des vivans pour ne
pas lire dans tous leurs reg~rds.: le voilà le. mauvais fils ~
le mauvais pere, le mauvaIs citoyen, le fUJer dangere ux,
le voilà l'homme féroce, qui par des forfaits de tour genre
s'efl: rendu indigne du nom d'époux: , & auquel il n'eft plus
permis d'être pere ....... Ah,! lorfque ~erfé,cuté par ~es ennemis acharnes qUI menaçOlent ma VIe, Je foutenols mon
coura<Ye par le fouvenir d'une époufe à la ten?reffe, aux
procédés de laquelle j'avois confervé des droH~, !orfq,ue
je me repaiffois du doux efpoir qu'elle me fero~t oubl!er
mes maux, mes fautes, mes traverfes, 9ue la paix dom~[
tique répareroit mes perces & fermerolt toute~ les, plaies
de mon cœur j'érois loin de redouter que la [eduéhon de
cette époufe dÔt m'être encore mille fois plus .funefte.
J'étois loin de pen fer qu'elle me tralnerOlC d~vant, ~es
Tribunaux & qu'elle permettroit que la calomnIe fOlllLât
fa défenfe'! Eh bien! je me fuis borné à ~le. lave: de fe~
imputations horribles. Et fi l'une de ces jufilficatlons lUI
~appelle quelques torts oubliés, pardpnnés, ce n'dl pas
A
�.,
.
32.
.
une vengeance que J al voulu exercer; c'efl: un moyen de
défenfe auquel elle m'a contraint, dont;e Pavois avertie
dont je Pavois fàit avertir, & qu'elle a rendu indifpen~
fable.
•
Dans aucun cas, je ne cefferai . de le répéter; l'u[aO'e
de la lettre ne .peut fournir un moyen de féparation. Je
veux prévenir d'un feul mot toutes les objeél:ions poffibles.
Il répugne, dira-t-on, que la réunion foit ordonnée dans.
un inHant où le mari vient de calomnier & de diffamer récemment fa femme. C'efl: donc au repos & à l'honneur de
lalèmme que l'on veu~ pourvoir: or ici l'e repos ne pellt être
que dans l'honneur, & l'afyle de l'honneur eH la réunion
que je follicite. C'efl: ce qu' il efl: facile de démontrer.
D'abord Madame de Mirabea u a-t-elle éré calomniée?
Ce n'ell: pas moi qui ai élëvé cette quefl:ion; c'efl: elle.
~'el\ elle qui a ~iré d; s conféque.nces de la lerc,re, lor[que
~e ~ ,en. abfl:enols ~ c efl: ell; qUI l'a commentee, !or[que
Je m etols contente de la pre[enter. C'efl: elle qui [ans ofer
la dé[avouer, a dit, la lettre me calomnie. C'efl: elfe qui
feignant de vouloir' établir [ur cet·te leme un nouveau moyend7.féparation, m'a mis dans la néceffité d'en parler ~llcore.
SI JamaIs Madame de Mirabeau n'avoit dit, 011 me calomnie'
jamais je ~'~u~ois ~a it ~marq~er, pour me jufl:ifier, qu~
la lertl'e n etolt pOInt defavouee, qu'elle ne pouvoit pas
l'être.
NOIl feulement donc il n'y a p~s calomnie
mais
il n'y a pas même di/tàmation. C'efl: Madame de' Mira~
b;a~ .9ui ~ fait forcir ·.la let.tr~ du porce -, feuille qui la
Iecelolt. C eH eUe enfurre qUI l a commencee. J'annoncois
~n torr; & l'on a dit pour fa caufe;. & l'on a dit en' la
çalo.mnia,nt : la ~ettre l'ac;cufe d'un crime. Mais peut-ail
l~ dIre après le Jugement que j'ai porcé Tout mari n'eH-il
I?a.s le premier Juge dans l'intérieu( d~ [a famille? L~
r
femme
33
femme n'efl:-elle pas fuffifamment jufl:ifiée, quand il 1'3bfout? Si elle J'eil à fes yeux, ne l'efl:-elle pas 11 tous les
yeux? La condamnation du mari n'efl: jamais fans appel;
mais fon abfolmioll fuffit toujours. Et qui aurait le droit de ne
pas croire innocente cel1e que fan mari ne trouve poine
indigne de lui? qui auroit le droit de lui faire rendre compte
de ce jugement? La femme la plus refpeél:ée n'efl: - elle
pas celle à qui dans tOus les temps l'amour & l'efl:ime
de fon mari fervit d'égide. Je l'offre encore à Madame de
Mirabeau. Elle a dll fentir combien le moment où fes
Défenfeurs même vouloient la juger fàns moi, pouvoit être
cruel pour elle. Elle a Vll un inÜant où l'on érait prêt à
confondre des erreurs ,\Vec des délits; elle a goûté le frulc
amer de la précipitation d'un pareil jugement, & déformais
je l'éloigne d'elle par ma préfence. Mon cœUf faignoit à
la voir ainu fe déchirer elle - même. Je lui offre l'hon-.
neur & la paix; j'oublie [es torrs, je lui p"rdonne même
fès calomnies. Elle peut rétablir la confiance, faire
renaître en moi les fentimens qu'elle fuc m'infpirer. le
peux la voir encore telle qu'elle fut; & chaçun la verra
par mes yeux ,. embellie par mes crayons, & bien plus
par le retour de ma tendreffe. Je ne l'ai donc point ou.
tragée; je n'ai point faie à (on am~ des b~eifures que
la cohabitation dôt agrandir: au contraIre, la reumon feule
peut réparer tous les maux paffés; la réllnio~ fe.L11e peu,c
réparer les atteintes faites à fon hOll~eur; la re.L111I.on {ellie'
peut faire oublier fon imprudence, Alnu les prrnclpes des
Loix, ceux de la morale & l'intêrêt même de Madame de
Mirabeau f()llicitent également, & plus pOLIr elle qLle pou~
moi, mes premieres fins.
.
, .
,.
Parlera- t-on encore de reifentlment, d aIgreur, cl l11COmpatibiliré? Il ne faut que jet,te~ un regar~ f;lr les ~rc;.-
céd és de la cau.[e & fur les evene mens qlU 1 01, t prec~~
dée , l?our s'indigner d'une telle obieèl:ioo.
•
E
•1
�\
34
Il
•
n'en exifte pas. 11 fullie de jette'r les yeux fur les
procédés pendant la caufe , & fur les événemens qui l'oOt
précédée, pour en être convaincu.
En J lin 1772 je re~ us la main de Mademoifelle de
Marignane; je crus alors que ce don avoit été précédé de
celu i de fon cœur; & quelque amérement qu'on m'ait reproché d'avoir ofé manifeHer cerre opinion honorable à
1\ladame de Mirabeau, je le crois encore; un fils fut le
premier fruit de notre union; nous vécûmes enfemble
jufqu'au mois de Juin 1774, un peu moins de deu x années. C'efl dans cet efpace auquel s'eH bornée notre coha_
bitation, que depuis l'on a placé ces févices horribles,
ces traitemens féroces qui on t fait une épifode dans la
premiere hifl:oire de la demande en féparation formée par
l\1adame de Mirabeau; & c'en précifément ddns ce court
période que j'eus pour elle le procédé dont j'ai enrre les
mains un témoignage écrit de la fienne; procédé que
l'incréduliré feinte ou réelle de ceux qui ne croienr pas à
la vertu n'a pas anéanti, n'anéantira pas, & dont elle
a même rehauffé la générofiré.
Je ne voulus pas être généreux à demi; la crainte que
ia réputation de mon époufe, de la mere, de la nourrice de mon fils ne fôt même légéremem compromife,
me détermine à partir pour Graffe, malgré J'ordre du Roi
qui me retenait à Manofque. Faral voyage, fource de toures
mes infortunes! faral voyage d'où font éclos raus les prétextes de la demande en féparation! & je J'avois entrepris
pour elle!
Une procé,dure réfulte de ce voyage; Madame de Mi.
rabeau part pour P dris à ma priere. Je fi.lis enfermé au
Château-d'If depuis le 23 Juillet 1774, jufqu'au 3 Janvier
1775, & dans ce période j'y re~ois de Madame de Mi"rabeau les leures les plus tendres, les lertres d'une amante
plutôt que d'une époufe. Et combien n'encollfageai-je point
-3)
.
1
•
,
?
E2.
:'
~ ..
'.
.
alo'rs fon émulation & fa confiance! Mais bientôt les' dates
s'éloignent; fa négligence, .la .crainte de voir ma ~on~
fiance rrahie par la corn mu Olcanon de mes lettres m ln fpirent des fO\lp~ons, de J'aigreur: & qu el étoit encore
alors le plus terrible effet de ma vengeance & de ma
haine? Je l'appellois dans mes bras.
Celle qui m~avoit fi fouvent eCflt que nou.s n Wons pas
faits pour être ftparés ; que tous {es vœ~x étoten~ pour no~~e
réunion; que tout pays que Je Il haouols pas , e~olt un ae~
fort pour elle; que je pouvais marquer. le lieu , lllifl~n t ou
'je voudrais qu'elle vînt me reJoindre , é' qu'elle volerolt avec
tranfPort; cerre femme alors fi e~pre.Œée de fe réunir ,à
moi, m'a fait depuis un crime
avol~ tr~p , f?uven,t r~
clamé l'exécution d'une parole mille fOIS repetee, d avol!'
fait tant d'in fiances pour opérer une rejontbon folemllellement promife., , .
.
,
Je fuis transfere à Pontarlier, & cetre tranDatlOn m efl:
accordée comme une grace- méritée par ma bonne ~on ...
duite' les lettres de Madame de Mirabeau en fOllt fOI. Je
veux ~ue le féjoul" du Château-d'~f n'eôt . pas été affez dé~
cent pour elle; je ne demanderai pas s'JI peut être que~
tion de cette efpece de décence, lorfqu'une épouf~ dOIt
des foins confolateurs à un époux malheureux ~ à un epo~x.
qui fut fi généreux pour ell~. M~is qu elle r~lfon d,e decence l'éloignoit de Pontarlier, dune vtlle ou fa. prefence
eut prévenu les plus funefies événemens d~ m; vIe? .
Madame de Mirabeau ne crut pas deVOIr m y reJolOdre.
Force majeure (je répete les propres expreffions de mon
pere) force majeure m'éloignoit d'elle. Ah! MESSIEURS}
euŒai-je été coupable. de c~t a~ u ~tere qu:elle m~a tant reproché quoiqu' il n'aIt po lOt ete prouve, qllOlqU~ toute
accufation foit éteinte, érait - ce à Madame de Mirabeau
qui refufant de rendre une époufe à fo~ man, le , lal.Œolc
en proie à toures les féduétions de la Jelll1eŒe? etOlt~çe
•
•
�_.
36
à. e 11 e qu "1
1 appartenolt de ne pas me le pardonner)
Je filis dans les pays étrangers; on prend une pro~é_
dure aff:'eufe .contre. moi.; perfonne ne me défend; per[onne n examIOe fi Je fUIs atrocement accufé pourfuiv'
. "
.
'1,
juge; on execu:e par effigIe une Sentence de mOrt; &
Madame de ~I~ab~au m'oppofe aujourd'hui cetre fatale
~entence que J al faIt annuller fans fecours, [ans réclama_
fIOn de [a parr. Je fuis arrêté en Hollande fur la demande
d,j' Roi, au moment même où j'allois par ma repréfen_
ration volontaire attaquer l'odieufe procédure; je fuis enfermé au Donjon de Vincennes; tout le monde dans cette
Province a été témoin de la conduite de Madame de Mirabeau durant ma captivité, & moi [eul peut - être je ne
la lui ai pas impurée à crime.
Plus mes cha înes s'appefantiffent, plus Madame de Mir abe3u allege le joug du devoir ....... le joug! En a- t- eHe
poné mê me le plus léger? . J'étais cependant loin d'eHe
dans le plus horrible efclavage, & depuis que je fuis
libre, je n'.ai ?ppofé qu'un filenc~ indulgent à un genre
de ~' ,e fi IOdependanc.' fi diffipe. Je ne me fuis rappelle à elle que pour lUI faire l'hommage de ma liberté;
Je ne m'y fuis rappellé qu'après avoir obtenu à Pontarlier,
fous l'agrément du mininere public, un déliftement honorable de la pa nie qui feule m'avoit accufé, qui feule pouVOIt être reçue à m'accufer, R1ais dom les imputations
pou voient avoir affligé le cœUf de Madame de Mirabeau
ou prévenu [on efprie.
'
e devoir prefcrit par l'honneur une fois rempli, je
revIens en Provence; alors même je ne réclame point encore ma femme comme époux; je la demande à ellemême à MI'•.de Marignane comme Suppliant; j'implore des
pardons, mOI! des pardons de Madame de Mirabeau! &
je ne les obtiens pas J
C:
L a premiere réponfe à toutes mes prévenances, à toutes
37
mèS foumiffions, eft que l'on va invoquer le fecours des
Loix; je n'en deviens que plus circonfpeél:, plu s modéré;
j'ai prefque dit, plus fOurnis. Mes v}Gtes font refu f~es; mes
premieres lettres demeurent fans reponfe, les dernleres me
font renvoyées [ans avoir été lues. Déja l'on fait plaider
dans le Public par les plus atroces calomnies contre moi la
demande en féparation; on me force de recourir aux
Tribunaux, ou de me rendre complice de mon déshonneur; il s'agit autant & plus de recouvrer mon honneur
que ma femme.
La modération guide encore chacune de mes démarches; les conclulions de ma requête font une fimple injonB:ion de venir me joindre. Madame de Mirabeau préfente fa requête en féparation, dont chaque mot ef!: un
.
., .
outrage.
Je me flatte; Je veux croire encore que celle que J al tant
aimée, que celle que j'élevois au deffus de fes torts par les
pardons que j'implorois moi-même, je ne ceffe pas de me
flatter qu'elle n'eH: que féduite.
Ma plaidoirie au Siege eH: connue d~ toute la Ville_;
je l'ai faite imprimer, afin qu'on ne put pas la traveftlr
aux yeux de Madame de Mirab~al~. Elle n'a pas ,dû trouver
mon pinceau dur, ni fan portraIt IOCulcant .. QUI n en fut ~as
touché! Qui ne fut pas attendri, lorfque Je redemandaI à
ma femme ma grace & fa tendreffe au nom de [on fils, de
cet enfant notre commun me'dolateur.1
Et un Mémoire paroît où elle me reproche d'avoir infulté
à fa douleur maternelle! Un Mémoire paraît où elle me dénonce comme mauvais fi ls; & mon pere avoit alors pardonné les fautes de ma jeuneffe envers I~i ! .
., .
Où elle me dénonce comme un mauvaIs man; & Javols
eu pour ma femme les plus doux, les plus tendres, les plus
.
généreux procédés!
Où
elle me dénonce COmme mauvaIs pere; & la vue de.
L
�3!r
mon fils qu'elle allaitait, m'avait rendu capable de facrifier
les reff'entimens les plus amers!
Où. elle me dénonce comme un mauvais citoyen comm
r.
' e1
un IU
jet dângereux qUI. a attente'à la propriété d'autrui
Ju.fle Cie;! & c'efl de [on époux, c'efl de [on bien~
falteur qu elle parle! & el1e l'accufe d'une infame efcro~
que rie [ur la le~tre d'un cantinier, à laquelle jamais el1e 'n'a
cru, Dl pu croire!
Un Mén:oire paroÎt où el1e s'arme contre mon pere &
contre mal .de la, confiance que mon pere eut en fan pere
& e~ elle; je dev?re tant d'a~i'o~ts, .tant d'ou,trages; je
rravatlle ~ ~ne reponf~. Ma j~fll~catlo? efl energigue,
elle efl vehemente; mais combien J'Y menage encore Mada.me de ,Mira~eau.! Je m'ab~iens d'en médire, moi gui
[UIS accufe de 1 avoir caloml1lee, de l'avoir diffamée. Une
l:ttre d' elle qui renverfoit , de f~nd en comble tout le [yfterne de [a demande en fepararlOn, ne [art point encore
de mon porte-feuille.
Madame de Mirabeau plaide devant la Cour, & met le
camble à fes excès; el1e m'outrage, elle outrage mon nom;
elle outrage mon pere, qui n'a eu d'aurre tOrt que de lui
montrer trop de confiance, trop de facilité, & de defirer
d'el1e des peris-fils. Elle outrage l'il1uflre vieitlard qui fut
pour el1e le plus rendre des peres! certe rête vénérable
couronnée des pal;nes de la gloire & du génie, efl rraînée
dans la fange de 1 ?pprobre par fan fils adoprif!
Alors enfi? p~~olr la lettre. 0 vous tous qui avez en.
fend~ la plaldolfJe de Madame de Mirabeau c'efl vous'
que ~'arrefle! pouvais-je dlffé~er 'plus long-tem~s l'ufage de'
cet lDdlfpenfable moyen de Jufbfication, tandis que Madame de MIrabeau m'avait fi cruellement acquis le droit de
ne rien diffimuler ?
.
Madame ~e ~ira.beau,~fl c?nvaincue par [on propre rémoi.
gnage de m aVOIr Jufqu a pre[ent calomnié, moi [on mari,
39
moi le pere de fan fils, moi fan bienfaiteur; elie m'a q_
lomnié & l'avoue, puifqu'elle abandonne tous fes moyens de
féparacion; elle en crée un nouveau, & vérifie ce que je
n'a vais que trop foupçonné, qu'elle n'avait afpiré à la fépàration ni par l'efficacité de fes propres moyens, ni par fa
convittion perfonnelle qu'elle lui fût due.
Cependant la paix nous efl offerte. Je confens à l'acceprer à des conditions honorables pour elle; je confens
à la payer par des facrifices condamnés par mes parens,
réprouvés par mes amis; & c'efi elle qui l'a refufée; &
c'efl pour elle qu'on follicite cancre moi des LETTRES DE
CACHhT.
Tels furent, MESSIEURS, les procédés de Madame de
Mirabeau envers moi; tels furent les miens envers elle.
Décidez entre nous.
Si je fus indulgent, fi je le fuis encore, qu'on me permette de le dire, j'ai plus de mérite qu'un autre à l'être.
Jamais on ne le fut pour moi, & toujours je recueillis cie
ma modération des fruirs amers. Ce n'efl pas feulement
de l'ingraritude dont j'ai à me plaindre; j'ai acquis trop
d'expérience pour en être encore étonné. Mais il m'efl impoffib1e de ne pas être profondement affligé, quand je vois
qu'on a tourné cancre moi prefque toutes les attions qui
m'honorent, tous les attes de ma modération. Mon procès
fur-tour n'a pas échappé à la fatalité de certe deflinée.
N'a-t-on pas rourné conrre ma caufe les fupplications qui
Pont précédée? On a dit: il efr mari, & il prie; donc il
efl coupable. On attribuait mon filence au fenriment de
mon indignité; mon confentement à roures les médiations,
au défefpoir de ma caufe. Non, MESSIEURS, je n'en défefpere poinr: ce ferait vous faire une trop cruelle injure. Je
'répéterai hautemenr all)ourd'hui ce qui efl devenu public
depuis la derniere Audience. Je faifois , j'acceprois des propofitions exceffivement contraires à mes droits, ~ mes i.ll~
�40
térêcs. C'eft Madame de Mirabeau qui s'y eft refufée, cetà
eft vrai: mais ne jugez point de ma caufe d'après ces
propofttions; jugez-les d'après ma caufe, & jugez-moi
d'après elle.
Mais avant de décider, affurez-vous encore que la plu.
part des procédés de Madame de Mirabeau ne lui appar.
tiennent point, tandis qu'on ne peut me refufer le mérite
d'aucun des miens. Je dis que la plupart de fes procédés
ne lui appartiennent pas, & j'en appelle aux contradiébo
ns
de fa conduite qui fuffifent pour l'excllfer, lors même qu'il
eft impoffible de la juftifier.
En effet, ft l'on prétendoit qu'une haine profonde née
de la feule incompatibilité des humeurs ou du reffentiment
des procédés refpeél:ifs pO,uffit Ma~ame de Mira~eau à tous
les excès qui ont ftgnate cet odIeux procès, Je deman_
derois quel efl: donc le premier germe de cette haine?
quelle en eH: l'époque? quels faits en ont révélé le recret
dont il faut néceffairemen t faire l'hiaoire avant que de
fe décider à prononcer fur un tel précexte la féparation ?
En 1774, la cohabitation a fini. Certainement il n'exifroit alors ni haine, ni projet de fépara~ion; la femme voloit au fecours de fon mari, qui vers cette même époque
avoit recu d'elle un titre irrécufable de reconnoiffance.
La fi~ de 1774 & la moitié de 1775 font remplies par ~ne
correrpondance affeél:ueufe, tendre & prefque paffionnee;
alors naît la mélincelligence entre les deux époux, mais cette
mélintellip'ence n'ell: évidemment fondée que fur des maL'
entendus oproduits par l'abfence. Elle n'offre pas la plus l egere trace, au moins de la parc de Madame de Mirabeau envers fon mari, d'un reproche fondé fur des faits antérieurs.
L'époure, loin de rappel/er au mari brutal, féroce do~t on
vous a depuis déféré le caracrere & la conduite, qUI ta nt
de fois. le rendirent coupable des mêmes in juftices, ré~ond
à [es reproches &. à fes duretés, à ce qu'on a no mme fes
out ra Q"es"
.4 1
outrages, par ces mots, ces mots inatt<lquablçs: j'en appelle
ton tribunal; il a toujou;.s été jlljl~ pour moi. On
ne· fouriendra pas fans don te qu Ii faIlle fep3rer pOlir une
prétendue incompatibilité née durant l'abfence , tandis
qu'on a été obligé ~e convenir que la. féparati?n ne peut
jamais être prononcee que pour des faits relaufs à la co.
habitation.
En 177 8 , nous perdons notre enf..lnt. Alors je gémiffois
dans une d ure captivité; alors tous les écarts qu'on m'a
tant reproché, tous les événemens qui one fervi de prétexte à tant d'atroces calomnies & de bafe aux moyens
de féparation allégués pour Madame de Mirabeau, tous ces
événemens étoient arrivés. Penfoit-elle à la fép aration?
Mr. de Marignane en avoit-il le plus léger deGr. L@s lenres
les plus tendres qu'ils écrivirent alors, & peu de temps après
à mon pere; ces lenres où elle demandoit A MÊLER SES
LARMES DANS CELLES DE SA FAMILLE; ces lenres appren,
nene affez ce qu'on en doit pen[er.
Non, la haine n'ell: point née dans le cœur qui diBa
ces expreffions touchantes. Non, la femme qui pleura
ainG fon enfant, n'en hait pas le pere. Non, tour ce qui
dans cet affreux procès porte le cara Be re de la haine, efl:
étranger au çœur de Madame de Mirabeau. L'indéciGon,
la foibleffe, la précipitation, la ti midité, enfin je ne fai~
quelle fatalité, I~onc. jettée dans l'étou.rdiffemen;.' dans. le
délire. Je le croIS, Je veux le croIre 31nG; & deJa, fi nell
ne s'aggrave, déja ro~lt efl: oublié; tout le fera, MESS IEURS,
agréez-en l'augure. Un momel]t de calme, & Madame de
Mirabe jlU ne m entira plus à fon cœur; un moment de
calme, & fan cœur impofera ftlence à fan imagination 1
elle bannira des craintes indignes d'elle, indignes de moi l
elle ne croira plus que le mari de fan choix, le mari donc
elle a conllU la tendreffe , dont elle éprouva les procédés,
GOnt dIe à pleuré les malheurs &; prét:lgé la refl:quratÎoq
a
f.
�42& tes tuccès; elle ne croira plus que celui dont elle a tanf
vanté la généroGté, la fenGbilité, au temps où elle ne
voyoit que par fes yeux, où elle le jugeoit elle-même &
non fur d'infideles & perfides rapports; au temps où fans
<loute il était loin du degré de mâturité que l'âge & le
malheur lui ont donné, mais où il ne fut pas plus méchant
qu'il n'ell: & qu'il ne fera, elle ne croira point que ce
mari la redemande pour être fan tyran; elle ne fera pas
cet outrage à fon cœur; elle ne fera pas cette injure à fon
efprit; elle ne craindra pas qu'il abufe de fa viétoire; il
ell: fi doux, il ell: fi facile d'être clément & généreux,
quand on ell: vainqueur! Ah! fi 'Ie déni de Jull:ice peut indigner jufqu'à l'atrocité une ame énergique, un moment
de fuccès attendrit, pénetre, échauffe un cœur mâle &
généreux. Non, je ne la redemande pas pOllr être fon tyran;
je ne fuis point atroce, je ne fuis pas frupide. Eh! qui
qui donc pourroit être heureux, en tourmentant la compagne de fa vie! Et quelle vengeance plus noble & plus
complette me rell:e-t-il à prendre de tant de calomnies,
de tant d'outrages, qu'une conduite qui démontre que je
ne les méritois pas! Puis-je mieux répondre à l'imputation
de ferocité, que par la douceur & la modération! à l'accufation de machiavelifme que par la loyauté & l'oubli
des injures! Qu'oppofer à l'horrible tableau qu'on a tracé
de ma vie entiere, fi ce n'efr une vie déformais irréprochable? Ils n'ont pas rougi de publier que je fus mauvais
mari, mauvais pere; & moi j'ofe dire; fi le Ciel me réferve d'être encore pere, je ferai ce que je fus, le plus
tendre des peres, & d'autant plus tendre, que je fus plus
malheureux. Je ferai bon mari, parce que je le fus, & parce
qu'on a pu croire un infl:ant que j'aurois été plus excufable
qu'un autre de ne pas l'être; je ferai bon mari, parce que
battu depuis G long-temps par les orages du fort, je fais
mieux qu'un autre qu'il n'ell: de bonheur que le bonheur
'43
oomefl:ique: tout le rell:e efl: fituation. Cela feuI ell: un
état· & ce n'ell: point à trente-quatre ans, avec trop d'expéri~nce & que~ques lumi~res, .qu'on facrifie l'ét~t à la fitua tian ; je [eral bon man; OUI, MESSIEURS; daIgnez me
mettre à même de l'être; rouvrez-moi la carriere des vertus
domell:iques; que je voie en vous mes ~égén.éra.teurs, & je
jure entre vos mains, à la fa~e du P~.bhc qUI faIt. des vœux
pour moi, & qui ne les ferOlt pas, S II me croy?lt ~apable
de tromper [on attente; je jure de regarder la jull:lce que
vous allez me rendre comme un bienfait, & de ne donner
jamais lieu à l'homme fenfible de pleurer fur ce qu'il aura
fait comme Magifl:rat inflexible.
HONORÉ-GABRIEL DE RIQUET!, COMTE DE MIRA.BEA.U)
fils~
JAUBERT, Avocat.
CARBONEL, Procureur.
Monfieur DE CALISSANNE, Avocat-Général, portant
la parole.
1
1
A AIX, chez ANDRÉ ADIBERT, Imprimeur du Roi,
le ColJege. 1783.
Vi5-à ~ vis
\
�13
~~
__~~ G___
~~
~~~~=~-m,r;~~--;~='m'iC~
POUR LE COMTE
DE
MIRABEAU.
~====~===
~
P R l N C l P E S.
LES torts d'un mari, pour qu'on puiffe les préfencet'
comme des moyens de féparation, doivent être
PERSONNELS A LA FEMME. Les torts étrangers aux devoirs du mariages ne peuvent relâcher des engage mens
dont ils ne font point la violation.
GRA YESo Il faut que le malheur de la femme faffe teIle~
rnenc oublier les droits du mari, que ce malheur ne permette plus au Magifirat de s'arrêter, ni au déshonneu r
qu'imprimera fon jugement au mari, ni aux fuites funefies
des féparations, ni ail fcandale dl1 fpeél:qcle qu'elles offren~
à la Société.
R ÉCE NTS. Les réparations n'étant jamais définitives parmi
nous, les 'torts anciens du mari ceffenc, après un certain
période, d'ê tre des moyens de féparation.
RENOUVELLÉS. Pour rendre vraifemblable cette impref1
fion profonde dont la femme le plaint, & parce qu'un des
premiers devoirs des époux efi de fqpporter leurs torrS réci...
proques.
Ces torts doivent rendre k V~E INSUPPOR TADLE A LA,
FEMME. C'efi l'exprefiion dont fe fervent tous les Auteurs i
& Madame de Mirabeau elle-même J'a adoptée .
•
•
.-
�ft
Enfin, le malheur que caufent ces torts doit étre rel que
la fé,Parati?n LE F!,SSE CESS.liR ?U LE PRÉVIENNE, fans quoi
la feparatlOn ferOit un remede I1lefficace dahs le premier cas;
inutile dans le fecond.
APPLICATION DE CES PRINCIPES.
LES DETTES? Elles feroient tout au plus un moyen de
féparation de biens, & non d'abitation.
LES PRÉTENDUS EMPORTEMENS ENVERS DES TII!RS? Ils
ne font point parti€ de cette fûreté perfonnelle que la Loi
garantit à la femme.
3
exi!l:oit
une tranfaél:ion fignée & librement exécutée par les
,
epoux.
LES SÉVICES? Ils ne font ni précis, ni caraél:érifés, ni
récents, ni prouvés, Di admiffibles, ni vrais, ni vraifemblables. La correfpondance de Madame de Mirabeau ne
permet pas de croire qu'il en ait exifté pendant une cohabitation fi regrettée; auffi Madame de Mirabeau n'en a-t-elle
point ,offert la preuve, & la lettre du 28 Mai 1774, lue à
l'Audience du 23 Mai 1783, les exclut par l'hommage que
l'épou{e rend à la MODÉRATION du mari, dans un moment
fi voiGn de la fin de , la cohabitation, & d'après lequel on
peut juger de taus les autres.
L A PROCÉDURE DE PONTARLIER CONSIDÉRÉR DU CÔTH
DE L'HONNEUR? Elle n'dl point infamante; la peine ne le
feroit potnt; l'exiŒence d'une procédure dont l'accu{ateur
s'e1l: départi l'dl: bien moins encore. Et le fût-elle, qllelle
que [oit la procédure, on ne fépare jamais pelrdant procès.
. LA DIFFAMATION ANTÉRIEURE AU l'ROCES? On n'en a
ni preuve réelle, ni preuve légale.
. Madame de Mirabeau a cité UN MÉMOIRE IMPRlMÉ AU
NOM DU COMTE DE MIRABEAU; il était alors ab{enc du Royau~
lne; on ne prouve pas qu'il en était l'auteur, & il e!l: con~
venu qu'il fut impri mé à fan infçu par le fait d'un tiers,
LA PROCÉDURE DE PONTARLIER SERA-l'-ELLE COMME
POUVANT ETRE RENOUVELLÉE? Le renouvellement en eU
impoffible puifqu'il ne s'agit que d'un délit privé : on ne
fépare point d'ailleurs [ur des poffibilités, & je fllis réputé
innocent, tant que la procédure n'efl: pas rep-rife.
Sa mere difoit, dans un Mémoire imprimé au Parlement
de Paris, que le Mémoire qui contient ce qu'on, appelle la
diffamation étoit de [on fils --- Qu'importe ce que difoit le
LE JUGEMEN1: DOMESTIQUE? Il n'exifl:e- point, & ne
prouveroit rien s'il exifl:oit. La convention du 2T Mai 177 6,
dans laquelle on ne s'occupa que de la réparation de biens,
dans laquelle fes deux peres paél:i{erene POUR L'EURS ENFANS,
défend de croire q_u'on ait voulu réalifer la féparation de
~orps. L'équité exclut t6ut jugement domefl:ique, où le
Jugé n'auroit été ni appellé , ni entendu. Enfin, fi des ArrêTS
Ont homologué des jugemens domefl:iques, c'eft lorfqu'il
,
défenfeur de fa mere fur un fait dont il n'avoit pu être
témoin?
Il
Madome du Saillant écrivait à fa helle-fœur en 1776 que
le Mémoire était de [onfrere. --- Elle n'avoit été témoin de
rien, & ne par\oit que d'après le Marquis Mirabeau fOll
pere.
Le Marquis de Mirabeau écrivoit à fa belle-fille le II
Juin 1778, que ce Mémoire étoit le recueil de trois que [on
fils fit pour le Miniflre, dans le tems où il était arrêté & plai1
doit fa caufe; il ajoutait: vous aurù::poujours le te ms d'atta ..
quer en jeparation , . car le mémoire ne périme pas. --- Mais le
A 1.
\
�_
4-
Marquis de Mirabeau avoit déja écrit en 1776:" On voit
" clairement qu'il n'a pas fait imprimer ce Mémoire. " Il
ajourait dans la lettre. DU 1 1 JUIN, 17Z8 : '.' on. fe, trompe
" grandement de croire que le MemOire Impnme foit Un
" motif valable de féparation, &c ...... Votre mari fou~
" tient qu'il n'ell point de Ion fait, & IL LE PROUVE. Il
" écoit en Hollande, & le Mémoire efi imprimé à Paris &c.
" Ces Mémoires étoient fecrets, & la diffamation ~'efl:
" devenue publique que par le fait de ....... qui fit im" primer le Mémoire fur une copie envoyée à .... " C'EST
" CE QU'IL PROUVE. "
Le Marquis de Mirabeau ne croyoit . donc pas lui-même
que ce Mémoire flIt un moyen de féparation.
Mais par cela même qu'on ne prouve pas que la publicité foit du Comte de Mirabeau, on n'a aucune certitude
qu'il foit l'auteur du frag ment qu'on lui impute; car par
quelle voie établiroit-on l'identité de ce fragment, avec
ce qu'il peut avoir réellement écrit?
01'1 cire une lettre du Comte de Mirabeau au Bailli de
Mirabeau fon oncle, dans laquelle on lit ces mots: mes
larmes ne peuvent effacer le délit de mes Mémoires imprimés--Mais où efl: la preuve que ces Mémoires amérement regrettés fùffent ceux où il efi quefiion de Madame de Mirabeau? Mr. le Bailli lui-même a écrit à fa niece, " que
" les erreurs de fait manifefies dans ces Mémoires ne per" mettoient pas de croire que fon neveu en fÎlt l'auteur. "
D'ailleurs, comment le Comte de Mirabeau auroit-il 3voué
à fon on.cle une diffamation que dans le même temps il
defavouOlt auprès de coute fa famille? Il écrivoit à-peuprè.s da?s le même temps à Mr. de Marignane: " J'ai vu
" Im~n~e: fous. mon nom des chofes que je n'avois ja" ~a~s ecnte~ alfl[~, & fur-tout que je n'avois jamais def" ~Ifl,~es à. VOir le JOU(,. cont~e lefquelles j'ai réclamé avec
" lflolgnatIOn; ce que Je pUIS prouver par des lettres au-:;
~
" thentiques. " Il écrivoit ' alors, il a écrie depuis les
mêmes chofes à Madame de Mirabeau; il faut joindre à
ce déîaveu celui de tome îa conduite, les éloges donnés
à [a femme dans tOllS les écrits pofl:érieurs, & îur - tout
dans les Mémoires de Pontarlier.
On n'a donc pas le témoignage de fa famille; fi on
l'avoit, il ne pourroit exprimer que des conjeél:ures; car
qu'en réîulteroit-il , fi on le transformoit en dépoIirion? Que
des gens qui n'ont rien vu, ont atteÜé ce qu'ils préîumoient.
Enfin cette diffdmation ne pourroit être comparée à
celles dont fe pl a ignoient la Dame de Seveyrac, la Comtetfe de Sourches, la Marquife de Goni, & la Comtetfe
de MontboifIier accuJèe d'adultere auprès du Minifire; elles
ne furent cependant point féparées. En effet, la diffamation n'étant un moyen de féparation, que comme afiimilée par la Juriîprudence moderne aux févices, il faut
qu'elle en ait tous les caraél:eres . . Or, celle dont il s'agir,
n'eH ni PRÉCISE, Plliîqu'elle efl: fuîceptible de mille interprétations; ni GRAVE, puiîqu'elle était inconnue dans cette
Province, avant que Madame de Mirabeau en eÎlt parlé;
ni RECENTE, puifqu'elle efl: de 1776; ni RENOUVELLÉE ,
puifqu'elle a été défavouée dès qu'elle fur imputée au Comte
de Mirabeau, & que fes Mémoires de Pontarlier, bien plus
publics que les autres, renferment l'élope le pl~s flatr~ur
de Madame de Mirabeau. Enfin cette pretendue diffamatIOn
n'efl: point un motif fufl,iîant pour féparer, puiî9ue Madame
de Mirabeau crut au defaveu de certe diffamation, & defira en 1778 D'ALLER AU BIGNON I?ANS LE SEIN DB SA
FAMILLE.
r
Il
L'ADULTERE! Que cite-t-on pour le prouver?
La plaillte de Pontarlier; elle ne parle que de liaifons
intimes, & non d'adultere.
\
�6
La procédure! La Cour ne la connoÎt pas, & ne peut pa
la juger. L'acc uCateur ne s'en Cerait point départi, fi ell~
avoit été inconcluante.
La Sentence! Elle eil: tombée par la repréfentation. Le
Comte de Mirabeau feroit mort integri jatas dans les cinq
ans; à plus forte rai[on eH-il Î!ztegri jlatûs , puiCgu'il s'efi
repréCen té. Ce titre inutile pour l'-acculàteur, l'eH: bien plus
pour la femme de l'accuCé.
La tranfac7ion ! Elle exclut le délit, plutôt qu'elle ne le
prouve. On dit qu'elle ne détruit pas l'adultere; mais ce qui
ne le détruit pas, ne le prouve pas.
Les facrifices que l'oulut faire Madame de M ...... C'efi
qu'elle [e croyoit coupable par [a fuite feule. Il n'efi pas
néceffaire pour cela de 11 [uppoCer adultere.
La nomination d'un curateur, dans laquelle un enfant de
la Dame de M . ..... efl appellé bâtard adulterin! C 'efl: une
procédure faite par l'accuCateur lui-même, & gui ne
prouve ni J'adultere, ni fur-tout J'auteur prétendu de
l'adultere.
Les lettres du Marquis de Mirabeau! Elles ne renferm ent rien de relatjf à J'ad ulrere. Dût - on rega rder un PERE
comme tém oi n, témoin contre fan FILS, ce qui eil: impoffible, il ne parle que [ur des oui-dire.
les aveux du Comte de Mirabeau dans [es défen[es! Il a
raifof)flé dans une fuppolltion connue telle.
L'aveu renfermé dans une dl! fls lettres écrite en l777 dll
DonFJ/l de Vincennes cl Mr. de Ma rigllane!
Le Comte de Mirabea u ne parle dans cette lertre que
d'après les bruirs publics; , & il s'en faut bien que l'aveu
foit fo rme l. UN HOMME MOINS JUSTE TROUVEROIT .....•
UN HOMME MOINS JUSTE ME DIRO IT QUE J'AI vÉCU.....•
Cette femmff s'é-tant jeuée, SI L'O-N VEUT, dans mes bras.
Le fé jour 'du Comte d{! Mirah<!au à Vincennes & le
genre de fec ours qu'il invoquoit ) indiquent alfez que ces
7
prétendus aveux étaient alors ceux de fa lituation, plurdc
que ceux de la vérité. Efi-ce en difpuranr avec Mr. de Marignane Cur la vérité ou la fa uffe~é des faits r.épandus filr fdn
inconduite que le Comte de MIrabeau auraIt pu le toucher?
Cette lettre [eroit d'ailleurs rejenée du procès, d'après
les principes avotléi par Madatne de Mirabeau, qui[gu'elle
he renfermoit aucuns engagemen!, & que la communication.
qui en eJl faite efl tvidemment contraire cl fa dejlinacùJn actuelle.
Enfin au criminel même, l'aveu de l'ac€ufé ne fupplée
pas aux preuves; & au civil, la confeffion extraordinair6
n'en tient affurémenr pas lieu, ou du-moins n'efl: qu'ull
commencement de preuve.
,
L'adultere n'efi donc pas Ugalement prouvé. Les pteuves
en ma tiere de réparation doivent être <iependant bien ri..
goureuCes, & puifqu'on ne fép;ireroit [ur [évices qu'après
1:lI1e enquête; les préComptions ne [uffiroient-elles que lor[qu'il s'agit, d'un crime?
Un autre Tribunal [ur - rout étant invefii de la procédure légale qui feule pourroit le confiater, ce [erGi~ a(furémenr réaliCer les charges fans les connoÎtre, & Juger
indireaement une accuCation dont per[onne n'ignote que
le Comte de Mirabeau ferait déchargé, fi la procédure·
pouvOlt erre encore Jugee . , .
..,
En droit, l'adultere dont Il s'agIt ne [erolt palOt 1 adultere de la Loi; & s' il efi vrai que les Loix Romaines
doivent juger les catl[es de [éparation, ce qui certainement efl: très-difputable ,puifque ces Loix n'admettent que
le divorce, & non pas les [éparations, on n'échappera jamais aux textes [uivans.
La Loi confenfu de TheodoCe exigeoit ou l'adultere in
domo ar! comtemptum mulieris & ipfâ infpicierzte ,ou l'adultere dont il fallait [ubir la peine, parce gue la cond amnation était prononcée ,.Ji condemnatu~ inv,enerit. La No~elle 2.2) qui ne fait que rapporter hlHonquement cette
•
A
•
,
�8
Loi, fubllitue delinquentem à condemnatum' & cette '
~iatj6n ne fût-elle pas très-équ ivoque ro~jours fau~no.n.
II recourir à la Loi même citée par Juftinien . mal's rOlt.
L .& 1 N
'
cette
?I ' a
ovelle 22. elle-même font expreffément abro
gees par la Novelle 117.
•
Or, cette Novelle, après avoir dit qu'il y a pl fi
r
1ri'
U leurs
cau les pour elque les Il n'ell pas raifonn able d'ac d
le d'Ivorce, les re' d'
Ult à un certain nombre qu'eUCOrd'er
clare
déformais les SEULES ' has err:.
fil e ,;;r; devoir
.être
'
pce 0 as cauJas
d lJpommus. Parmi ces caufes font l'adultere in do
contemnens eam ...... ou l'adultere aétuel & public dma"'I'"
•
V'lI
. l 'A
ans a
meme . 1 e, ~~ ~ la domo & in eadem civita te , qui n'e1l:
pas mOins un leVlce & une fource de mauvais traitemens
po~r la ~emme , p~r~e que fa rivale ell fous fes yeux: Si
debens zn eadem ClVlt~te, in aliâ domo mm aliâ mufiere
fin:quenter manere convzncitur, & .(i Jeme'. & quandà culpatus
p er foas parentes aut per muheres hUJufmodi injuriâ n
a.bflinerit. ~ar s'il revien:, dit Godefroy, il n'y a pl~~
lIeu à la pelOe, refipifcentt pœna non irife rtur.
Que fi l'on poua:oit l'abus de l'érudition jufqu'à oppo.
fer au Comt~ de Mirabeau un des Capitulaires de Charlemagne , qUi donne pou.r c~uf: de divorce la prollitution
de la .femme par le man, Il tuffiroit de la plus légere
!!ttenrlOn
. eJus
. EAM
d 'pour s'affurer que ces mots , Jil Vlr
a ulteravem, ne peuvent lignifier Ji le mari efl adultere
ADU~TERARE veut dire GATER, CORROMPRE. Le Comte'
d.e MI~abeau l'a prouvé par les Gloffaires, par les Die~onnalres & par les exemples tirés des Loix même de
harle.~agne, fi étrangeres d'ailleurs aux féparations du
Ix -hUICleme fiecle.
Vadultere
d ont 1'1"
.
s agit, & qui n'autoit pas fuffi pou r
le divorce, ne peut donc pas fuffire pour une féparation
que ~ous les Auteurs, d'accord en cela avec le bon fens '
conviennent être plus difficile à obtenir.
'
C et
d
9
Cet adulrere ne ferait pas le délit de la cohabitation;
il ne fuppoferoit ni mépris, ni préférence injurieufe; il
n'auroit pu caufer à la femme l'humiliation réfultante d'un
adulrere commis fous fes yeux. Rien n'annonce dans la
conduite de Madame de Mirabeau qu'elle ai t regardé cet
adultere comme une fource de malheurs pour elle. Cet
adultere n'dt donc ni perfonnel, ni grave, ni récent, ni
aauel, ni craindre.
N'eH-il pas inoui d'ailleurs qu'on ait jamais puni par la
féparation , d'autre adultere que celui qui a pu inr éreffer
la cohabitation? Dans l'efpece , cette cohabitation a été
interrompue par force majeure; le mari étoit retenu à deux
cent lieues de fa femme; fi les devoirs des époux les fui~
vent par-tout, mille circonllanoes n'en modifient - elles
pas la violation?
La Jurifprudence eH encore plus favorable au Comte
de Mirabeau; comme elle ne tend qu'à la reconciliation,
elle efr bien éloignée d'approuver le reffentiment de Ii:\
femme pour des torts anciens.
Une foule d'Auteurs parlent des moyens de féparation)
fans y comprendre l'adultere.
D'autres, tels que Pothier, n'en parlent que pour l'exclure. _
Ceux qui l'admettent, tels que Cochin, fe bornent à
l'adultere in domo qui dégénere en févices, & rend la vie
infupporrable à la femme.
Plufieurs foutiennenr que .cet adultere même n'ell pas
un m yen de féparation, s'il a été exempt de mauva,js
traitem ens, & n'a pas caufé le malheur de la femme.
L'adultere même in domo ne ferait point admis, s'il
avoit été paffiger, IX s'il n'était qu'ancien.
Il eft inoui qu'on ait cité dans aucune caure l'adultere
public qui n'éto it pojnr. in domo, pour tout autre objet
que pour rendre les févices plus vraifemblables. AinU
a
fi
•
�10'
la prétendue dil1:inétion de l'adultere fcandaleux ~ &: de
celui qui ne l'ell: pas, n'el1: fondée fur aucun Arrêt; elle
feroit tout au plus colorée par quelques Auteurs canoni.
ques, qu'on ne peut fans abfurdité citer en matiere civile
dans les Tribunaux Francais.
,
L'Auteur du traité de l'adultere dit expretrément que l'a.
dultére fcandaleux doit être accompagné de mauvais traitemens, pour fournir un moyen de féparation.
Et quel adultere pourroit être plus fcandaleux que celui
dont- on accufoit le Comte de Montboiffier!" 11 entre" tenoit publiquement une concubine Cl.ont il avoit eu
" plufieurs enfans qu'il faifoit haptifer fous fon nom; il ne
" nioit point ce commerce, & fe bornait à foutenir que
" l'adultere n'ell: point un moyen de féparation parmi
" nous." La Comteffe de Montboiffier fut cependant déboutée de fa demande, par un Arrêt que tout le Royaume a trouvé digne de fixer la jurifprudence fur la matiere
des féparations.
Qu'entend-on d'ailleurs par le fcandale? Si c'ef!: la publicité, tout concubinage connu fera fcandaleux ; [ur quoi
il ef!: même à remarquer qu'ici le [candale fut l'ouvrage
de ceux qui privent la procédure, & non pas des accufés.
Si l'on entend par fcandale les circonfiances qui peu·
vent aggraver le délit, on les fuppofe donc prouvées.
Il n'y auroit d'ailleurs point de fcandale dans le fait
dont il s'agit, ni pour la France qui ne voyait pas les deux
prétendus coupables, ni pour la Hollande qui ne les connoitroit pas.
On cite pour dernier moyen de féparation LA DIFFAMATION RÉSULTANTE DU PROCÉS, c'efi-à-dire, la leél:ure
de la lettre du 28 Mai 1774,
Mais pendant le procès il faut juger les époux comme
plaideurs, & non comme époux.
Il
Ùn n'a point calomnié Madame de Mirabeau, fi la lettre
ef!: réelle; & Madame de Mirabeau ne l'a point défavouée.
On n'a pu la diffamer, pd.rce qu'il en impoff(ble qu'une
lettre écrite par elle l'ait diffamée.
Dans les procès de cette nature, où il ne s'agit que de
juger les torts des deux époux, la divulgation des verités
facheufes ef!: la fuite néceffaire de la demande en féparation; le Comte de Mirabeau l'a pL"Ouvé par des exemples
tirés d'une foule de caufes.
Il n'a parlé de la lettre que comme -d'un tort, & ce font
les défenfeurs de Madame de Mirabeau qui ont cru devoir
l'aggraver pour en faire un moyen de féparation.
Madame de Mirabeau crut li peu d'abord que la lecture de cette lettre lui fournît un moyen de féparation,
qu'elle a écouté depuis l'Audience de 23 des propoutions.
de paix.
Cette lettre était d'ailleurs un moyen invincible de défenfe contre lell févices allégués dans le Mémoire 'imprimé,
& dans les plaidoiries de Madame de Mirabeau, puifqu'elle
annoncoit
un fait de modération incompatible avec des fé,
vIces.
Elle répondoit de même à cette objeél:ion, qu'on ne
cetroit de faire pour Madame de Mirabeau, que fa fûreté
perfonnelle feroit compromife, fi on ne féparoit pas.
Le Comte de Mirabeau pouvoit-il être infenfible à cette
horrible imputation? N'était-il pas de fon devoir de raffurer le public & les Juges fur les craintes injurieufes que
témoignoit fa femme? Et quelle preuve plus raf!'urante pouvoit-il donner que la lettre de Madame de MIrabeau ellemême, qui faifant connoître la MODÉRATION PERSONNELLE
A ELLE, dont avoit ufé fon mari dans une circon!l:ance
infiniment délicate, & dans un âge où la vivacité trouve
facilement des excufes, ne peut laiffer aucune inquiétude
•
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13
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& c'efi pour ces deux faits anciens & non renouve es qu on
{ur les dangers que Madame de Miraheàu paraît craindre '
pour (a sûreté perfonnelle?
C'était fi 'bien 'là l'unique motif du Comte de Mirabeau
que non feulement il n'a pas rendu cerre lettre publique'
mais qu'il a pouffé le ménagement jufqu'à n'en pas cotntnu~
niquer l'adreffe (1).
la demande: CE QUI EST ENCORE SANS EXEMl'LE.
Le troifieme, c'e{1: que bien loin d'ofhir la preuve légale des faits allégués, on (e borne aux préComptions les plus
frivoles: quoique la féparation ne puiffe être prononcée
contre le Comte de Mirabeau, fans entacher fon honneur
comme homme civil, en le déclarant coupable d'une diffamation & d'un adultere dont on feroit forcé de l'abfoudre
dans une infl:rllfrion légale: CE QUI SANS DOUTE SERon
ENCORE SANS EXEMPLE.
Que -re{1:e-t-il donc au-procè's? De l'aigreur? Ouvrage de
toUS les procès en féparation ; elle n'en efi point un moyen.
L'aigreur ne peut être d'ailleurs que récente, puifqu'en
1778 , lorfque tous les faits dont on (e plaint étoient connus, Madame de Mirabeau. fe propofoit de venir au Bi-
gnon mêler [es larmes à celles de
HONORÉ-GABRIEL DE RIQUET!, COM:rE DE MIRABEAU, fils.
fa famille.
JAUBERT, Avocat.
Elle ne peut être que légere , puifqu'il a été quefiion pendant le procès de plufieurs projets de conciliation, dont
la rejonfrion , quoique différée, a toujours fait partie.
CARBONEL, Procureur.'
Il réCulte de ce que l'on vient d'expo(er , que la demande
en Céparation de Madame de Miràbeau a trois caraéteres qui
la difiinguent de tQute autre, & qui ne permettent pas de
l'adopter.
Le premier, c'efi que les Moyens que l'on allegue, étant
pQfl:érieurs AU TEMS DEPU"lS LEQÙEL LES ÉPOUX NE SE SONT
PLUS REVUS, la demande en Céparation n'efl: fondée (ur
aucun fait relatif à la éohabitariôn : CE QUI EST SANS
"
E~EMPLE.
Le feéond, c'efi que la fé'paration ne pourrait plus être
continuée aujourd'hui pour llne diffamation & un adultere
commis depuis huit ans, fi elle avoit été alors prononcée;
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(1) Le Comte de Mirabeau a fait imprimer des Obfervation~ par~
\ku1i'eres fuf ce prétendu moyen de fép'aratÎ'otr.
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A AIX, chez ANDRÉ ADIBERT, Imprimeur du Roi, vis-à-vis
le College. 1783,
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SERVANT DE
RÉPONSE
POU R Joreph-Antoine Roman, Ménager dl!
lieu de la Javy , héritier tefiamenraire- de
Jofeph Roman -fan oncle, ep fan vivant ,
Aubergifie de _la Ville de Mar[ei)le , Appellant de Sentence rendue par le Lieutenant
de la même Ville, le z. ShPtembre J 779.
CONTRE
Cl
Les Hoirs & Héritiers de la DemoiJdle Anne
. Bonifay, veuve en fecondes N6ces dudit
, . Jofeph Roman, Imimés.
·
U
NE lemme a fait des acquifitions très-
"
confidérables pendant fan mariage, à l'in[çu
de [on mari. Elle n'a eu aucun commerce particulier & réparé. Elle n'a pû les ayer qUè
A
\
�1-
de j'aigent de fon ..mari. Le prix - de ces acqui.
iitiônk doit-il être rendLt aux héritiers de ce
derni~r, où les héritiers dé la femme ' doivent_
ils p/rofiter des avahtàgèS iriJufies qu'-elle s' efi
pr(j)c~rée ? Telle efr la quèftiblI fdutnife au lu.
t de 1a.:Co.ur.
r:-.
.
1
L Lteutenant a jugé que les hérItier' de
la . 11 mrué po votent tout garder. Rom1na
app~.bé de . cette Séntence injufie, le joùr rrlême
qu~elÎe a été rendue. Le cfétail des faits . &
l'examen des objeél:ions d~s Ad.verfaires , prouverdnt que cet appel eil: fonùé en princjpe & en
rai[0n. _
geinI
..
1
FA 1 T.
~"
.
Anne . Bonifay ùu, Ije~ de Cuges ( 1) _vint
ci Màffei.Ùe· pour y .~rvir '& gagrler fa vie;
tdmÎftè f~nt tanÉ d~ filles du peuple qt.li quittent
letifs llialfons pour échapper à , la mifete. Elle
fut àlIèz.- heureufe que de fa!t-e ·là conI1oifiànce
de Jeafi Lyon; voitUrier qui n'avoit pas O'rand
chore- J !nais t3tiur qui n'a rien ,-· quelque ~ho[e
v~ut beaucoup. JI y a apparence qu'il ne fût
faIt aucun contrat -de tniriage ehtre eux. Leurs
héritiers n'en ont point communiqué.
,
,
(1). Les, Adv~rf~irès qui voyent tout en grand ,
Ont dIt qu elle etolt de la Ville de Marfeille. Son
cQnt~a~ ~Ii rnaHagè, ave~ 10fèph Rornàn, prouve le
contr~~e : elle s y dIt : Anne Bonifiiy; fille de
Françol~ & de foue . Magdeleine BOTtifilY, originaire du
lieu de Cuges.
'
•
"
J
De Voiturier q,u'il étoit ~ '. ce Jean J,yon
devint un méchant CabaretÎ'et, ou fi l'on veut,
il fue Voùurièr & Cabaruier tout enfemble :
on peut admê~tre cette ftippofition des . Adverfctires.( Ses 'V{')JÏttires & ' [on Cab-àret ne
l'em:i'chlrent _point. On peut en juger par fon
tefiathettt. Il
Tégue trols livres à Catherine
Giraud fa mete pour tous, droils, & à chacun
fie [es enfans la fomme de telu livres· payables
aUx filles à leur mariage, & aux mâles à
l'âge de vingt-cinq ans, POUR TOUS
DROITS D'INSTITUTION, SUCCESSION LEGITIME QUE ·SESDITS E NFANS POURROIENT DEMANDER ET
PRETENDRE SUR SON BIEN ET HERITAGE. Quelle fortune que célIe d''un homme
dont las enfans ont 100 liv. de légitjme? Encore Jean Lyon avoit-il été co-héritier de Louis
Lyon fan frere. Que l'on juge des ~icheflès
de ces deux hommes , & fi: les Adver[alres ont
bonne grace de dire que la fucce{fion de Jean
Lyon devait être d'une certaine importance,
flit relativement au double commerce de. J('~~
LyoT!, fo~t parce que Jean Lyon avaIt ete
co-héritier de Louis Lyon fan frere . .
AuŒ Anne Bonnifay ne fit-elle procéder à
aucun inventaire, & [es -enfans ne l'ont jamais
recherchée à ce [u~et ,parce qu'ils [çave?t. que
c'était de [a part un aél:e de bonne admlmfiration' on n'a point d'inventaire à faire là 011
il n'; a rien, ou lor[que les frais abforberoient
ce qu'il y a.
Mere · de -quatre enfans, Anne · Bonnifay fi t
J
y
�4
tous [es effbrts poVr Jes nourrir, & gagner quelque
chofe. Elle tenoit en arrentement l'Auberge des
deux Po~mes, à Marfeille, & fes foi!1s y
ayant , ~pparemment attiré une certaine affluen.ce
de Muletiers, ou autres Rerfonnes , , ~lle fut
aŒe~ heureufe ,q ue de faire qùelques épargnes
qu'elle employa à a~heter une m~ifon à l~ Place de
l'Auriol pour le pnx de 6750 hv. , dont elle ne
paya peu à peu que la moindre par~ie.' ~lle
fupportoit l'intérêt d'environ 4000 livres en
1746 .
.
A cette ép'oque fa fortune confiftolt 1°. en
.la maifon dont on vient de parler , & dont elle
n'avoit p~yé que 3454 liv.; 2 Q• en 1007 liv.
qui lui étoient dûes par les nommés Turre! & '
Pecôul; 30. en' 550 liv. qu'~lle avoi~ à repeter
fur les fucceffions de fon ayeul & de fes pere &
mere , ainfi que cela confie au procès ; 4 en
la valeur des meubles, dem:ées & effets de
l'Auberge des del:lX Pommes dont elle était
locataire, & ·qu'elle évalua elle-même à 71101.
ainfi qu'on va le voir; ce qui formait en tout
une fomme de 12121 liv.
C'efi à quoi fe réduifoient tous les biens
, d'Anne Bonifay, ,ceux qui lui étaient propres,
ceux qu~elle avoit recueilli de fon mari & de
Louis Lyon fan beau-frere, fes profits , ~e s
épargnes, en un mot, tout ce qu'elle poffé.dolt.
C'efi un point eflèntiel & que l'on fupphe la
Cour de ne pas perdre de vue.
Anne Bonifay était dans cet état, lorfqu'elle
fe maria avec Jofeph Roman. Leur contrat de
mariage efi du 17 J,oût 1746. Elle fe confiitua
.
en
0
•
)
,
,
-.
"
en d~t la fomme de 7.11,° liv. à laquelle 'on iixa
le pnx de fes- cotfr-es & {le tous les me4blés ,
denrées & effets ' qui fe trouvoient dans ' f'Àubei~e des deu.x 'Pommes, qui appartinr~nt' au
man dès ce · nt01Ïlerit.l' II fe chargea même de
l'exploitation de J' A~be'rge " . & ' promit de décharger ladite Bonifay de l:''âfrenteme~t dudit
Logis & d'en . Jaire Jo'n fâit -è;- caufe propfè.
L'Auberge ceffa donc 'd'appartenir à Anné
Bonifay.. Jofepll Roman en' devint lùcarajre' in
même ,temps qu'if acquit tout ce qui
ctou:.
voit " & . par ce virement , ~ AfJne Bonifay cellà
d'être chez elle. Elle fut chez fan mari. Cefi
encote une circonfiance efièritiellé à remarqlJ er.
. Il. ,ne ·l'ell: pas moins .d' ob{erver qu'Ahne
BOillfay , ayant doaoé en ' aot à fon mari .1e'S
'7 110 liv. de la ' valeur de. .tqut~l ce qui fe troü~
voit dans .l'Auberge " c'e-fi'iutant de r~tr:anché
fur {a fortune que nous av6n& ne ~ fi ;ît1ônter
qu ~à J 1 21 21 liv. Il Qe (lui ' refia' ,dpnc e~ ~iells
paiaphemaux,'que. ' 5~(ü 1iv.~ ; nont 3454 'étoieÎit
déja -piacées . fùF ', u~ -mai{on. ".C'é(t '~veç \éèt:t;~
fortun~ ~u~ l' ori veut .qu' An~e ~~n~~ay ait ~aIl.rré
.2.000 I.tVl. a fGn fi.~9-; pa-r {on con,trat de manage;
du 13..M ai- 17'51 ,- -& ~u' elle ait Tartlégidniemenc
pOUt Î: 7oob'"Iiv. d"aéquifitioîisi.. Ma~s n'anticipons
1·<....
...... u"... ... 1~'1,J~
rl'en ,. 1 .....,. ..
J ofeph ' Roni~ etoitl à' Marfeill~ depuis· longtemps. ·:n y avoir~ l1fj Grolumêrce
; . il Y était .'AlIr
ber.gifle., ~ - ainfi.::qÎ!é t prbtivè ·{on contr'!-t de
mariage ~'1!l1 avo~t- ~né , fait. des' epargnes ,
&- il '<l90ir du tomp'1:a-nt. Cet rargent verfé danf
l'Auperge' des deux.:: Poi-umes ,'2'&_Utilément employé, lui profita tellement qu'il fit dans fep t
S'y
va
1
,
1
f'
.....
B
1
�(1
ann~~ des flcquÎfit~OIl~ pour la fo 1l1 me Îlnpor ..
tatit!' dé:. 3 542.0 liv. 'Ces. 7~ ~llnées qui foht les
premieres de l'on mariage, nou~ c()nduifepc à
l#;iQQÙ 1753, A .cet~e- .,Ié poque, ~9lJ[~S les déP~rlfes. étaient. ,(<J\tes, ROql~p a,vQi t . acq'\l'j~ l'Auber~ du graqd ,St. }~an. Il: n a.v olt confequem'men~ plus de ~ ~çnt,e à pay~I'>SQn . ~.uberg~. éto~t
pOUI'(L«! '. de ço~t, .a'Gcrédlt~~',)) ~ s Il avolt faIt ,
~ne fqrt~ne Li cÇl!1lldérab!e :~n, Ji ~~e!:1 _ çl~ tems
,avec : mo.ios ~~~v~ntages, (\!1 de,volt S:l;IttéJl~Le
voir çt:tte fortune. aug{!l~tl.1er eH prqportlon
lor~qu'il Q'avQit, pour atnfi, dire " plus qu'à
.
g~gller.
,
. C' dt çependant à _cette ' mê{lle époqt.te que
finl{fe9~' fes .acg:lifitiorls : pJ.u~. d'achats ~ 'plus
de placfll1ens dep.u.~s 17 S3.,)'}oman pe~ fa.it.plus
qu'une. qlodiqye_j-cguifirion ' d,u !pri?C de 'l 1:-06 1.
en l:7(iJ, & lo~fq~'it l)1e.urc en 1.77 4 ~ . 0;t .nc
lui tr~uve qq~d r'!J.V~, .-:' "
,
Qu'dl-il dgnt , ~rpv.e . ? Ql!:él ,açcld~nc a co.u pe.
le èôt\rs rapid~ qqe 'preppi,t la ;forcune de .RomRO ? _Il ' n~en ' fal!t point -cnj!rtiher d'au~~e que
la ,~çm~t~ È~.. fa r fel1:11~el' J\lln~ Bonif'ay avo~t
quarF'i ~nfa,ni.c. B!-h'N~Illl~, ~ hE ~U~ 'n'en avolt
po~r:-ç ~ ~'l1. -(e'io,n9,. . ~lle~ c~flyol~a: l~ fO,nune. .de
fon lllf\Pj. &; Xquk~~, en :;~~!f~ ...) p.dreLa. '.~~ : en
fans·, fioon la totalIté au mOIns la meIlleure
partie. ~ 'I;lle ~y:~! l: prjs :' l:Jl1Jù~~'irct .ibf~lu . fur
Roman q~.i , ~to4- ..d'u11- ,l!aiHfe.:t.. dQu~ Jk tranquille. Elle . en ~~fa. C~ :.n~~tolt . point affez
de i'a..Y
.Q.Ïr eng,ag~" jl dot~F . toû~\ [es enfans, elle
s'appropria ~~~ l~S ' PN&~~f .les béné6ce:s ~ en
fit de~ ~cqui4tiQ9S., à. [qn qom;, & fes"acquifi., ., ....
r
,
[
>
7
tlons .qui s'élevent à plus de 24000 !iv. commencerent en 17 P, c'efi-à-dire à la même
, R oman
'
;)c;:eifa d'en faire." EUe's ,con'é poque ou
tinuereur tant qu'il vêcut, & après ta, mort
dans l'an ~e 'deuil, elle a · ,e ncore p~yé. près
de 3000 IlV. Or ~ les .AdverCaires conviennent
page 10, que Les acquifitions faites ' dans 1'année du deuil Jont cenftes provenir ex fubfianua manu, parce que Le mariage eft cenJe M
quelque façon durer encore. Nous· avons donc
eu raifon d.e dire que les acquifitions faites par
Anne Bomfay pendant le mariage, ou dans
l'année du deuIl, font un objet d'eaviron
27000 Iiv.
'
Toüt cela n'étoit pas cori'nu en détail à la
mQrç , de . Jofeph Roman. Jofeph-Ancoine .1)0m~n fon neveu .~ qu'il avoit infiirué [on héfrÎ)
tiér ~ : & ' qui · clemeure à 2. 5 lietJes de. Ma'rfeille ., ,homme limple & illitÙé,' n'e~ fçavoÏt
que ,ce, ~U'OQ ,lui avoic. di! . vaguement. Il fe
rendu a Marfel~le. O,n ~t ~n inventairç parce
~~e .:~~ne B()~lr~Y s étou ~ncore faite . l~guer
1 urufru~t des. bIens de [on .mari. Cette femme
ii16de11ë jUfqlÙU pout, ne dé,ç:1ara ~r [es a~.
<f.tÛJi~lp~s: ell~ en çacha qlême u·r,t.e
~n' ma/:j _.~--.,~
~!i~ë:rBu'elJe. poft?i{ :fur ulïe.oJl~Qpriété·- CQ.ntiguë
a ~~nle Jes fi.t:no~s., & qu:t;llfi f comptoit fe 1'-<11'l!r.?pn~ arec: ,lç ~',otfl. ..E.!1r-1s~para de . ~out
1 ~r~ept _,comR9nF ,: ne , d:~cLa{a ~que ' ~ Ij\'." &
ht,.,e.n l U1;1 mot ..to~t ce qfJ' lIe ,put pour ..affqib!lr les . refies ,,; d(~)'bél'edit~ [ ql:l;e~le aY9!c .~év;afte~. .-!,{ornan fe cont5nta de ~~o~~fi~r" .fQ~~ pâur
avolr.~ 17!· tems -d'~gir avecconq.oiilà,nce-, fojc PQur
1
• II.
1
, 1
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" H'
• 1
•
•
•
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~
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•
8
s'en procurer les moyens, fait parce qu'Anne
Bonifay avait l'ufufruit du tout, foit peut-être
parce qu.'il ct>rnptoit fur un retour de fa part.
Mais lorfqu'il fe vit trom~. lQr~qu'il vit
qu'Anne Bonifay &~ fes e n f a n ' t prefque
tout envahi, & que par leur10 .. .:r~àtions, les
donations qu'Us s'étaient' (aites faire, & les re·
pétitions qu'ils ~voient à l:xerèer, ils rédui.
foient, une héredité 'confidérabfe à la- fomme de
20000 li v. fur laquelle il lui refioÏt en<:,ore d~s
legs à payer., alors il fe dDnna des peines;
il implora fes amis, on découvrit la fn~ude:
on lui donna des ' moyens, & il préfeqta fa
Requête au Lieutenant de Marfeille le 28 de
Juillet 1778.
'
, ,
, On contefta; on ' écrivit de part & d\llître.
La queftion fut enfin fixée aU 'poipt de fç-qv~,ir
fi Anqe- Bonifay , ~ ou fait fes héritiers, ,ét6ient
obligés'à rembou"rfer le prix des acqùifitions ~faites
par leurr'mere ùc' l'argent de fOll mari, ÇlÙ s'ils '
devaiènt- les gardé'r:
'
•1
Cette - queftiç>Il " était fimpJe. ' Çependant ~pn
furprit- une Sentencè qui débtlllb
Roman
de
f
r'.:. •••,. ~ fa dem~rl~ :-!l,e "Cft du : ~~ ' ~;p.t~H1br~ 17..79,
t'
• .....~oma? ~~ . al?'P:lf~ le me,~e), )\>~ ; ,S a ,?éclara~
Uon d appel ' eff dan~ fon' fac (bus cotte T: T.
ail "a eep-endinf .l~it :ql,l'il n'31'Voi,t p~s op én dê·
clarer . qppel ,- &- . qUe ce ' n'eft, 'que' le l b Mai ;
17 82 ; .
a iirfuii[n'é cle :; l~ ~'!t~arer 'f(. iJe. Ze
réléver. 111 l'a 'd éd,aFè Je, 2" de ,Sel2 tern l;>reI;79,
le jout : Juêlne ~ <:pie. la "Sent~ncé ' a; été ' rendue.
S'il 'à t!'rdé de ~Œ,"t~ever ; c'ë:tf parée qu'~t~nt
çhilrgé~ de i6 ènfans; les moYens1.1u i dnè1man.
qué
~.
quIa
\
~,.I
,
,
9
qué ; mais fa - volonté étoit mahifeflée , fan appel déclat:é. 9n né .'peu't donc pas mieux fe prévaloir de fan inaétïon forcéé "llprès fa déclaration , qu'il Il~ pourroit le f,!iré de ce -q6e les
Adverfaires ne l"onc 'ailigné ~ ni en anticipation,
Dien défertion. ~ -,
- Qlfqiq.u'iL e"ri Jfoit ' , l~appel eiifte ~ & nulle
~on{~dération ne ,peut en d!~in'u'er l'effet. '
" F:aut-il ~ rie, faut-fI paS ':éfotmer la Sènûhcè ?
Ç~fl tout ce ,qzie' nous avons à examiner. ; Les
in'tÎlnés ont raifon: mâis avant de nous 'Ji~rer
~ cer examen. " fixons les idées, d~après lès' i6tÏmés
eux.mème~ page 9' de leur Mémoit~ iml .
pnme.,
., _.
J.) Si la Sentence pou voit êtrê réformée, "fans
» doute il faud/oit adjug~r ' à ') R~:imari non:feu ~
;) lerncnt le prix aes acquÎfitiôns faites par Anne
» Bonifay, & payées pen.dan,c fôn fecadH ~ ma
») iÎage ',- & les intérêts des fommes for,lt111n't le
» prix de ces acquihtions, ' mais encore Î les
» 24~o "live 18 f. payées par Anne Bc;mifay
)) dans. l'année dû deuil. Toures ces adjudica)) tions ' ne feroient qu'une - ço~féque'nèe db
» principe, que la femme n~ayarit rie~ d.e libre
» pendarit le cours de fan mariage, & ne proù.
» vant pas undè habueric ~ 'il -fàut nécéffaire» ment préftimer qu'elle a acquis & payé · des
» biens du mari, & par , conféquent.la con» damner à refiituer aux héritiers du mafi
)} ce qu'elle n'a pû aV'o ir 'tût! ' du chef de "fon
» man. »
Voilà donc nos fins juftlfiées, ' fi l'on ' ne
prouve pas qu'Anne Bonifay ait, eu 'dès !-ièf~
C
J
L
r
'.
'
r
�lO
fourc~s
- Il
& des bieQs. paraphernaux aŒez ç:on-
jours .conv~nus'J ~a re,g1:!,! t<:efi-è lo-rfq-LIe la ,femme
iidéT,aples ' , -pour payer les acquifi60ns ~mpor ..
tantes -~u'eHe a faites rendant -fon mariage av.ec
J ofeph- ~9màn. ''- - - ,
ç~ poiiJt dç" l'û~ ' eit le feul quj doi:v~ ~ous
occupe(. te drOIt eit convenu de" p~rt ~ cl alf-'
tre. Nçws r~V9~s , diç dans ,[<luteS nos Co nfultatio~sda.n~' la derllierè çômrke~ dans' les pré-
piouve undèhabl~it, c'~'-à·dire b lorf<J:ü:elle
montre des , re~tl{c~s " parti.cuJi~r~s qui oqt pu
foumir . le, prix de~ l-!cqui{iti{)~s faites éORflqm-c
matnmonLO.
A
fem e, ;:J .,açqYl~ e:f f..~,f!!ma Vl{"l ,, ;~ {l10ln{i ~u elle.
Qe .WO~lV~, ùQ.i{rlJ.ab~erit. L,a Lcfx ' explique fe~
mo.uts ; ç èa ~a e1-·iûlndam iurpis' 9uœflûs .J}tr
piciôTlerjl. Les Atlver{aires en ~étôiént · co~verius' :
ils ont'·plûs fait dàns leur Mé1110ire imprim~ ;
ils ont ~~,<ilBli c~ .point de droit, rapporté des
au~od ~s ~ & tfiOlJS " fomm~s , en.core cett~ roi~
dj{pënfe~ dé i!pps,y.â,rêter. L'~) 'texte d~t~averfaire 'R'QLJS f\J$r.,
,'~' ;' l
!~ 'Rien Ij'èQ ~tus ' vrai ?, ~ifent-i1s pag'.~ tI ,
)} qijé :'~e~ priQclpe géné,ral irivpqué parAA'ntqin~
» KQmal1. If tiepç 'aux mœ/.lfS; à l'horinêtet~
)) l,up}ique, ~ il f~ut pour ï'honneufdnêùle du
)l rè~~ q\.le [Q~t cç qulil aç9uiert, to~t ce qu'il
)) p~ye QU ip.l.lt. Ç€ qu'il dept!n[~ conj~a.'!-te ma)) trif11oni.f), (Qit cepfé proveqir eX pecun/.â ma» rÙÎ, l'éUe Ilfi la difpoGtiofl çle la fatheufe Lbi
mrilius(jf
)l ~oQ~ · rQqfervaJlc~
. )
.
ea
c-é?~~~~; L~ pt~(9m~i!9~ 4~: ~}i : ~oi . ~a" qu~ li
qrÛhlÙs
r,
Mais on Ce fyrÇlir:ljl;l(IQn.fi l''On croyo.irt :q4~~
1impJe préfompti<:!n fu6it poue, déçruire la : préfomption de la,. Loi. ,.Geile-çi
jurÏs & 4,e jure.
_l' out appartient jl~ }l'Iari ça the{e généra!e. La
. f;mme .qui vel!t fe ,placer dans Texc~ption "do.ir
_poru: prouver ,q!.l'elle a eu des re{[ources, cl' ailLeun;) des biens p!1r~phernaux çapabl~~ ~'av.6ir
R~oduit les ' aç9ui6.t~9S.. La, Loi pe .dit pas /;Indè
habere potuerzt, 'mars unde habuerq. Il -ne {uf.
fit donc pas que la remme qit pu avoir" il faut,
qu'elle prouve , qu'elle démontre, comme le difendes adver{aires, undè habeat. Or une -pr-eù ve
une démonJlraiio'J. ne fe firent} jamais par une
fimple 'préfomption.
Lorfqu1on dit que la pre~Q.mptl?n de la ~Ol
peut être détruite par une preiomptlOn contraIre,
'cela s'entend de la préfompti09 ,de paiement -qui
naît de la certitude Eles refiources de la femme ;
mais ces refiources ne peuvent pas être préfumées.
Elles doivent être prouvées, dé,m ontrées; & la démonftration faite, alors qn;pr.éfume 9ue ces 'reffources ont fervi aux acqUlfiuons faItes pour b
&.
)l'
.
l '
de donat. iru., vi~~ Efùxo~:
dl: atteaée par 1 t,QUS les
•
femme.
n .autf;;~rs; &. qQpt la difpofirion eff d'ailleurs
)) fi trIviale qü"'eUe n'eft ap{olument "1éconnue
» 'dë 'perfonne.
.
.
~Qllt> ç..pnv{n<;l1J.S cl llQtre tollr , de l'ef'~ption
à, ,:-,:êtf~l!esJè S~!1eral~ , & ~ous en fo~m~e~ toU~
Si les héritiers d'Anne Bonifay provvent donc
qu'elle a eu des biens paraph~rn~ux afie1.. c?~
fidérables , & des re{fources afie'Z. multiphees
pour payer: 1.7000 liv. d'acqu,ifiti,~ns, la, Se?
rence doit être confirm€;!e : malS,. s 11s ,n,!:! rempIrf, fent p~s cette preuve) s'ils n'ollt pas même de s
1
\
•
�12
préfomptions à oppofer _, s'il eil: confiant que
Annè Bonifay n'a eu qlle des biens parapher.
nau~ -de pe.u. de valeur , dont elle a même
donn~ la majeure partie à fes enfans s'il ~R:
vrai qu:elle n'ait .~~ ni pu av~ir aucun c~11lmerce
particulier & féparé de celui · de rOll' mari ', la
'préfomption d.e la Loi s'applique d~ns toute ' fa
force.: les acquifItions de cette femme font_cen.
fées faites ex pecuniâ vil'i: ,elles appârtienne~t
à Roinan ': la fentence doit être réformée.
_
'Or il fera difficile, pour- ne pas dire iinpoffible aux hoirs d'Anne Bonifay,d'échapper -aux
con[éqüences qui naifiènt de deux faits c~rtains
& majeurs.
'
,
~e ' prel.nier di que dans l'efpace de 7 années
qUl von~ Juf~ues ' ~ll .. 1 753 , Roman a fait ' pour
36000 lIv. d acqll1fitlOns , bien qu'il eut à payer
le loyer de l'Auberge; & dans' ce tems là Anne
~onifay _qui n'avoit pas encore afièz pris ·d'em.
pIre [ur [on mari n'en a fait aucune : mais à
cette époque les fiennes commencent & celles
du mari c~~èn~ , bien qu'il eut acquis fon Au.
berge, qu Il n fU,t plus de loyer à p.ayer, &
que toutes les depenfes étant faites , il n'eut
plus qu'à gagner. Du moins s'il avoit accumulé
on 'po~rroit dire . qu'il avoit gardé fes profits ~
~als :a f~ I?ort AI1~e Bonifay a déclaré qu'il
n av.olt. la:ife. que 3 II v. Ce premier fait eH frappant , Il l11dlque la [ource des acqui1itions nombreu[es de cette femme.
.
Le [eco?d vient encore à l'appui du premier.
.- Anne B?mfay s'étant dépouillée. en faveur de
fon m~n, de l'Auberge & de tout ce qui s'y
•
trouvOIt
' q
.trouvoit ; . ce. qui forma fa dot,- n'a eU PQll1"
tous biens paraphefnau,x que )011 1iv,;: ~ dQnt
elle avoit même d~j~" lemplqyé: 3:4514 liv~ .,~il:itç ~
quifitiof.l de .1<1:. lJt1a ~fon ' de lé! ,pl.'!c~ de J'Auriol.
Nous J'avons 'pr~~Yf -: Cett,~ 4ern~re' fomme ne
pouvoi~ .plus_ [e~-V:~;r;. à :.d.e _n91.!yelles ~cquifitio~s.
Il ne refioit donc à Anne Bomfay qu.e J S:5.7 . hv~
fufçep:çib]e ~ de ?ouyel emplpÎ,' ~ le loyer de'
cette mai[on de J~ 'place d.e. tAU!.lOl. . COp1meôt
avec çe modique '~vôir , ~ au!'!-:t-elle payé l~ ~
intérêts ~ d'environ . 4qoo liv .. qy~ elle refi:~ {k~
voir du' prix ' de cette même mai[on?_ çpl1'lment aura'-t-elle, nourri quatre enfans du p-r~mier
lit qUI ~'toient à fa _ .~_~arge ? Comment ~.aura-t
elle donné 2000 liv. à .[on fils. ~n 175 1 ? I,Com·
m"ent enfin aura-t-elle fait des acquifitions po.ùr
·2.7 0QO liv. ? Cela tiendroit, du pro~ig~, fi :l'on
ne connoiifoit la [oyrce o~ eUe pUlfoit
Pe~[e-t-on échapper aux réflexions que préfentent ces deux faits, en di[aI.lt que ROlJlan a
pu ' (oulager fa famille " q,ui Je ~rouvoit ~an's
1'indigence, ou que les benefi~es n ont. peut-e:re
pasété auffi wnfidérables apres les hUlt premle·
,
resanoees.
.
Mais fi Roman avoit d0!1né des recours à [a
famille , il ne lui au"roit p_a~ [acrifié Ç911S fe s ,
profits, ou s'il l'avoit fait, [a tamille [eroit Jor·
tie de l'indigence; & cependant elle efi encore
ce qu'~l1e étoit , c'e!1:-à-dire , hon~êt~ & ~au~
'vre fans avoir jamais été dans l'zndlgence. SI
les bénéfices n' avoie~t pas ét~ auffi c0nJi.déra~les .
après les huit premzeres annees, du mOll1~.·n ~u
roient-ils pas été nuls : & . cepeQda~t ~- [~pp{~[e
f
\
/
�. , 14
.
qU·âJ'tès avoir -tWquls une 'A-uberge , s'être meuplus rien gagné .
.blé -Bi: ,a ccrédité, Roman
abl01ument rien : 'YeriffimiZ.i~ jinge. "
'
.' ',,)1 .- Le mar~ ' n'ayant rien" -11 a commencé de
n d~ .canfolidet:.fa furtune--atbc â,é pens m~me' de
~) . fa' femme ' iV-actt -de -lui : pèrmettte -d.C" ' penCer
, ,~ t_ fi
, ,
t) a fj;I:
leune. l'.'
- _. ,.
_,
.
n'a
.~ Et où, a-:-{)l~ (~u .,~ar où prouve:'!-~n
:,uè
R?I~an-1l avoit fien " & que JAnne Bomfay avait ·
urie fortune? Cetté fortune è!fi connue:' eHè avait
la : maifon de la. place de l'Auriol & 1:557. liv.
& .l'on · veut qu'elle ait : payé les intérêts des
4000 l ~ qu'elle dev<;>it, qu'eHe ait donné ~o'()o l.
à fon · fil-sen I7S1 ', ' c'efi-à-dlré, dans le même
tems ; que Romàn fairoit fes acquifiüo~s, qu'elle
ait 'holirri (es. quatre enfans ; & qu'el~e ait en~
core o
eil. de quoi fournir 36000 liv. à fori mari.
Si Roman n'avoit pas eu de l'argent en Tè-inariant ,. s'jl ne l~avoit pas verfé dans fan Auberge
poûr la f :!ire valoir, s'il n'avait pas eu ' Uh trafic oonûdérable, fes ·héritiers n'auraient pas à fe
pl~indre aujourd'hui,des ufurpations de fa femme.
- La ' foibleffe de la réponfe prouve donc combien font viB:orieufes les réflexions qui naiffent
de ces deux faits. Avançons:
""
.
)) La préfomption de la Loi ceflè , ' difent les
» Adve-rfaires.
»- 1°. Si la femme a accuèilli le mari chez elle.
» 2,0. Si elle n'dl: mariée que fous une conf» titution particuliere, & que l'on prouve qu'elle
JI avait des
biens d'ailleurs. 1
~) 3°· Si eHe a fait un commerce particulier
» lQdépendant de celui de fan mari.
) 4°· Si-fan mari a fçu & cOlmu qu'elle tra.
1
,~
j
,
15
"li'
, » . fiquoit ou ' qu'" elle fa~f~it des acq~ll It1Ons.
. Tout ' ceh , peut etre vral fous certams rappo'tts & en thefè générale; mais fans flous arrêter ~ ~Xatninèr le principe, venbrrs-en ~)':q.p,p licatio.n.
'
-'
"
.
- ,
1°. Dit-ùn, pag. ,24, Anne Bonif~y ac{euzl:lit the'{ elle Jofeph J{oman.
" ., " Point 'du tout. C'eil Roman qui reçut Anne
Bonifay ohez lui. On voit .par leur contf;1t_ d~
l!lariage 'qu'elle f~ confiitua en dot tout. çe qlll
était renfermé dans l'Auberge, & que '~o:man
fe chargea même du loyer de cette m ~tpe, Auber.ge. Il devint donc acquereur de t?US le~ e!fets &
, locataire de l'Auberge. Anae Bomfay cega donc
: d'être c=hez elle, & ne fut plus que chez [o~ l mari,
La préfomption mangue do~c Rar le fai~. S'il étoit
vni que la femme qUI accueIlle fOIl man ch~z ell~,
dut être exceptée des difpofitions ~e la LOI ql/znrus- ml/cÎcls " il faudrait au moins entendre cette
exception d'un~ fel~me ~ qui ~ya!1; ,une maifoll &
un coml11erce ètabh, recevrolt verItablement fan
mari chez elle, fans fè conftituer fa maifon ·, ni
fan cOlhmerce; mais n'efi-il pas abfurde de Val!loir appliquer cette , ex,ceptio~, ~onne ou ma~
vaife à la femme qUI fe depoUllle de fa malfort de fan commerce, de tout ce qui eft dans
Ctrt~ maifort, & qui fait tout pal1èr fur la tête
de [on mari? Cette femme ainfi dépouillée pour'ra-t-elle exciper de fa renonciàtioh à tout ce
qui lui appartenait, pour di~e q.u'elle a pu ~aire
des acquifitions à fan partIculIer? Ne duat'on pas avec plus de fondement que les bénéfices étant poor le mari qui s'efi chargé de tout,
. la femme a tiré de la çaiflè de celui-ci le pnx
�16
des acquilitions qu'elle a fait? or c'eft précifé, m~nt le ~as où ,fe t.rouvent les parties. La premlere prefompuon lOvoqu'ée par les hoirs d'Anne Bonifay, eft ' donc toute en faveur de Roman.
Ils font obligés ces hoirs, de convenir _à la
page 37, que Roman étânt devenu maîtêe 'de
to~t, les bénér~es de l'a~berge ont ëté .poùt
luI. Ils fe retranchent fur les prétendues refiources d'Anne Bonlfay , fur -[on eprétendu commer.
ce, & fes biens paraphern~ui ' , Mais .ils font en contraditlion avec -eux-~ê.
mes. Car fi les acqùiGtions d'Anne Bonifay ne
peuvent être jufiifiées que par des re{fources
étrangeres au commerce de l'auberge, il faut
que eon convienne que la circonHance du tranfport fait par Anne Bonifay a [on mari dans leur
contrat de ' mariage, .eH toute colltr'eux , & que
la premiere pré[ompti,o n qu'ils invoquent ne peut
figurer ici fous aucun rapport.
2;0. Continue-t-on, Anne Bonifay était mariée
fous une confiiturion particuliere.
Nous le fçavons ; & c'eft cette confiitution
qui eft la caure du procès: Roman n'en eût
probablement point e{fuyé, li Anne Bonifay
eût ét~ mariée. fous une confiitution générale.
MalS cette clfconftance feule ne dit rien. Une
femme peut être mariée fous une confiitution
particuliere, & n'avoir aucun bien paraphernal.
I~ faut donc prouver que cette femme a eu des
~lens paraphernaux dont elle a pu di[po[er, pour
t~rer quelque utilité de la confiitution particulIere. Les Adverfaires l'ont reconnu, pui[qu'ils
fe
,
r
\
17
fe [ont engagés à prouver qu'Anne Bonifay avoit
des biens d'ailleu~s.
,
, Quels font donc ces biens? Voici le détail
pompeux qu'en font les Adver[aires.
' Elle av oit la, fucceffion de Jean Lyon, fon
premier mari, une portion de la fucceffion de
Louis Lyon, dom Jean' Lyon [on mari avait
hérité, tol,lS les bénéfices qu'elle avait fait depuis la mort de fon premier mari, la maifon
de Lauriol, de l'argent comptant, puifqu'il lui
étoit dû 799 liv. pour prix d'une voiture & de
deux mulets qu'elle avait vendus, & que le 5
Mars 1746 elle avoit prêté 307 liv. ; enfin un
commerce particulier & indépendant de fan auberge & de fes voitures.
_
, Mais tout cet étalage ne produit pas grand
çhofe.
La fucceffion de Louis Lyon nè devroit pas
faire article, puifque Jean Lyon en avait hérité. Elle efi ntce{fairement confondue avec celle
de Jean, & les deux enfemble 'font bien peu
conGdérables. Nous l'avons déja prouvé.
Les 799 liv. pour prix d'une voiture &de
deux mulets vendus par Anne Bonifày le 2.6
Mai 1746, lui appartenaient réellement. Elle
n'en avoit reciré que 99 liv. le jour de l'acte. Il lui était encore dû 700 liv. , C'efi la dette
de Turre!.
,
Les 307 liv. que l'on dit qu'elle avait prêtées
le 5 ' Mars 1746 , ne lui étaient plus dûes lors
de fan mariage. On a fait une équivoque. Le
prêt eft du 8 Novembre '1745 , & le 5 Mars
1746 eft la date de la quittance de ces 3°7 liv.
~
E
l
�'Ig
'~ba~ ,Far ARne !Jlonifay. On peut 'vérifier
\
1 aéte. Il eH fous cote 4 B.' Le- mariagè etant
du 17 A,oût ~e J.a même année, eH poHéri'eur
de plus de ' CInq, mois à, la quittance concédée
à lPe~u1. ~r, ~~hS, cinq mois " Anne B<;>nifay
p@UV.Olt aVOIr dlthpe ces 301 hv. Nous fuppa.
{:ons .cependant le contraire ~ & nous 'l'admettons ~pu:ifq-u'of1 le vC'I;Jt.
.
Le ·commer<:e particulier& indépendant de Fau.
ber~e, cfm111er,ce {}u.e l~ en reproduit à tout propos,
&que 1 ·00 pretend prouver pàr les pieces cote
l R, S, -T , V, X, Z, & i 4 A, 4 B, ~il: un
com~erce ' purerbent idéal, imaginé par lès Adverfau.es pGur produire des fons à défaut de
paroles.
, ~QPS l .a,v ?ns ees pieces fous les ·yeux. Ce-IIe
q~l eft cotee 4 B, e{} le prêt de 307 liv. II
refljllte des, autres fJu'en -I74~, Anne Bonifay
paya . 280 hv. qu'elle devoit au fieur Jauffret .
qu'eile achet~ une fois cinq charges de féve/
&. [Ix mois. après vingt - fix autres charges
qu~r~n,te émfnes; .qu'eHe prêta, on 11e [çait quand,
pU.lfqu ea ?e V,Olt ~ucune dare , 576 Iiv. à un
homme qu~ l~i 1al~a en gage huit balles de
chan,vre peigne; c[u en 1744, elle avoit acheté .
58 h~. JIQ ~e grain; qu'en 1'746, elle avoit
ach~~e 45 lw. ,de [avon ; " enfin que la ll(ême
a?nee elle avoIt acheté cinquante charges de
féves. .
.
, Or une f(}rt1me qui a 4e's vtJÎtures &- une aub(!rge., P€UE bien fa-ire toutes ces' emplettes pour
la cO,nfpmmation de fon auberge. 'Elles ne [ont
certa~~ent pas, tr0p confidérabIes:
ces min.
&.
f:
ex
-i9
ces ~tll:pkttes me ptouveroot ;amais 12n 'commerce.,
~taplj .& ù:ulépendaht,QN voiwl'€s '& ,ile Il'au'b,erge t
.encoPe moins un s,rand ~(!Omrnefce.
A pprécions donc tout ce qu'on a dit des moyens
l$( ties r.e.ifollrces fc!'ÂllDe &nifay avant {'on--ma.
;r,iage. Les fUClceffiOllis~e Lot'lis. & de Jean,tYon.,
les b.étit.é1ices qu'elle avoit fait dans le commerce
des (J;Ioitwre-s & de tauberBe J -l'argent comptant,
tout Ce r~d.tlit à 7.00 liv. dûes par Turre!, à
1<D.1.Jiv.• qu'f:~Ie avoit ret~rées de Pe-coul le 5
Ma'rs j 746, à la maifon de l'Aul'iol dOQt eUe
i\v,oit payé HS4 liv., & en la valeur de ,ropt
ce .qui étoit r~nfermé dans l'auberge, qu'elle
~YaL\lIa 'elle-même ,à 7110 liv. lors de fon contrat de mariage. Nous y ajouterons les 5'S0.-l iv.
qu'~lle. avait à ,rép€ter fur la [u-ccellion de tous
fes afceôdans. Il en ré{ultera , ce que nous avons
dit, que tout ce dérail pompeux' fe réduit à la
(omme de 1.1. I2 1 .liv. , de laquelle il faut dét'raire
l~s 7'1 la liv. de la cO!1fiituti<>n de dot: au mÇlyén
de quoi les biens parapnernaux d'Anne Bémifay
(e r~duifent à' 5011 liv. d?nt f454 Iiv. éroient
placées fur la maifon de ·1'Auriol. Ell~ n'avoit
ponç plus à àifpofer que de ' t 5 57 Ev., & dIe
avoü: à payer les 'intérêts d'environ 4°00 liv, du
{(l:!taQt Plix dè cette' Inaifo.n · ~ ' '& à noutrit; fe-s
qll.atrti enfans~ Telle éteit la polition d'Anhe
Bonifay lor[qu'elle Ce maria. ' 9n nous a forcé
de ré.péter ce flue nous avions- déja dit-; , mais
ce t~bl€au eil: fi ' frappant; ' qu'on nous paRera
d'y _êr:re.revenus'powr. dilliper J'iHufion que l'on
yotiloit faire.
. ~ .. _. "
. ,';. . ,
Que l'on dife à préfent que nous coizJtêllonJ
.."
"
\
�,
zo
que . la c,onlliC;Utio-Jl ,de dot- d'Anne Bonifay ne
prit abfo)ument rien, ni fur fan commerce ni
fur l'argent qu'elle avait, ni fur la maifon q/elle
avait acqui[e. .
'
On peut nous prêter des aveux; mais en les
créant, on Ile les prouvera pas. Nous ne fommes
jamais convenus que de ce que nous convenons
encore, c'ell-à-dire, que les biens paraphernaux
~'Aqne Bonifay fe réduifoient à la maifon de la
place !de l'Auriol & à la créance de ' Turrel. Jam,a,is: nops n'avons avoué fon prétendu commerce ;, ~ comment, l'aurioBs·nous 'a'voué puifqu'il
n'a jam~is exifié & qu'on n'en dOI;1ne au~une preu've ? Une femme qui tient une auberge, fera-t-elle
commerçartte pour avoir acheté4s1iv. de favon
S8 .liv. de ain & ,quelques charges de féves
QUI ne fecOlt co~nmecçant à ce ' pJ:ix ?
C'e!1: cependant [ur ce prétendu commerce anté4
rieu~,au mariage d'Anne Booifay; fur ce commerce
fi. important., fi bien établi que 1'00 fonde la princIP.àle',~eff~urce de cette femme. C'ell-Ià que l'on
put[e d~ 1 arpent, e~fio tout ce qu'il faut pour
prouver runde ,h abueru. La reffource ell mer veil~eufe '; ryJais 0,0 ~lt à même, de l'apprécier à fa
J~l1:e rf1l~ul.", o & ,9.e. voir fi l'on peut avec des
bIens ,p~rapher-naux t. auffi modiques fe prévaloir
de }~' P~oc~n.~aace J d!Cme confiirution parriculiere, ~our .legulmer .2700fJ liv. d'acquifitions.
~, ' . Du-on, fi ce~,! ne f~ffit pas ~ nOlJ.s 'au-
w
?
rons encore .Le commerce farticulier & iizdépenda~t .d~ ce!Ul ,de, .fon. man ~ qu'Anne Bonifay
faifou apres [on marzage. C 'ell le comnrerce de
falure.
r
''''
_
Or
1
2i
ce comme'rc:e appartenait à Jofeph R~ ..
& nori point à fa femme. U confillOlt
man,
..
.
l'.
&
ue
en proviGons d'ancholx ~ rIS, . lavon, .c. q
R oman a voit imaginé de tentr chez lUI p?ur
attirer un plus grand nombre de Muleuers
Y
ces fortes de
de 1a haute Provence ~ jaloux, de
.
ft
é
marchandifes. Ces proviGons eta~ent en erm es,
& fi dil1:ribuoient dans un petit magafin que
l'on eavoit pratiqué au rez de c~a~{fée de l'Auberge. Or, l'Auberge appartenaIt a Roman. Le
mag afin de [aiure était donc che~ Roman. Il
n'était donc pas~ féparé de. chez ~UI. II ell donc
cenfé lui appartenir à mOIns qu on ne p~o,~v.e
le contraire jufqu'â l'évi.de~ce. ~out ce qlll etaIt
" chez lui, était de drOIt ~ lUI,' &. t?~t c.e
ce qui s'y fai[oit, e~ pre[ume aVOIr ete faIt
r s ordres. L'exlfience feule du magaGn
par l e
.
S' A
chez lui ~ vaut une preuve entler,e. 1
nne
Bonifay a pris foin de ce magahn ~ fi. elle
des marchandifes ,
a ve illé ' à la dilhibmion
.
r. .
r
d
fi elle a aidé [on mari , elle a raIt..- lOn e. Elle ' l'av oit promis en [e manant. rUne
VOIr.
.
r.
ne de fan état ~ de vait donner [es lOlOS
rem!
.
"
d'
à l'Auberge & à tout ce qUI en etOIt une .ependa/1c.e , operas fo,as qllale(cumqu~ manc~
Or,
an cenetur , fi eam marltus
eXlbeat
Je
.
'
.
:fl
P
/cumque'(habeat.
Les ad~erFaires eu~-~emes conrœ
fviennent qu'elle ' devOl.t a fon marz ',o~er~s
obfequiales & reverentwles , un tra~azl relatif
'ommet ce de Î on mari. Les fOlns qu'elle
au c
JL
d' r ' d
'
és à la' vente des marchan Iles ont s a·
cl
n
a on
d'
.
e peuvent donc pas êtr~ règar es ' comme
glt, n
,
1 C' ' . l
une , preuve d'un commerce a el e.
etaIt e -
F
�~:.
comm~ce de fon ~ari, qu'elle faif0ic dans l'Au.
berge, de f~n. man. Les profits appartenaient
dOQc . a .celul-~l. On ne po~rroit dire qu'ils app~rten01en~ a ~nne ~omfay .qu'en prouvant
dune mamere bien claire. & bIen précife que
cette femme faifoit dans l'Auberge de fan' mari
un commerce féparé decdui de fon mari,.
q~e les fonds ·de ce commercë lui appartenaient.
Sion ne le prouve pas, les bénéfices du corn~erce de faILlre pe lui appartiennent pas davantage, que' ceux de l'avoine & du foin n'ont
<Jppartenu au Valet d'écurie chargé de les diftribuer.
. ~es Açlverfaires n'ont pu fe le diŒmuler
& ils ont . répété par - tOUt qu'ils avaient de;
preuves de ce commerce particulier & féparé
fait dans l'Auherge de ~Roman. Et quelles fon~
ce~ preijves? De$ certificats, des quittances &
des polices.
'
De qqatre po.lices qu'on a communiqué, il
en ell deux qUI ne fane qu'une. Elles font
à, la m~t;J;l~ ,clate du 18 Mars 17PI, à la même
configQ,~tlOn, & elles portent le même nombre
d;, ba~rds. Des, d~x, il n'en elt même qu'une
d, acgu.mée, ce q,UI proav:eque l'une 1n'efi que.
le ,double d,~ l'autre. Ces deux là & une troifi~m~ fQ.o,t po,ur Barcel~nl1Je, & non PQur Mar- .
fe~lre. Or, .Anne Bomfuy demeurait à Marf«!ill~: c~ qUI eft adreffé à Barcelonne; ne peut
~Pl\1c, R~s 1~ re~al'der. Il ~'efi donc qu'une poIt.ce qUI p-tllŒe ~tl1~ pr;odulte avec quelque apparence, . & FQn fent qu'une feule p01i<:e ne
prouverait rIen: mai~ cell.e.-G.Ï n'dl pas même
&
,
.13
Roman,
admiilible . . Elle eft adreifée à Mdlte.
rue des Pucelles, ~ Anne Bonifay demeurait
~ cette époque à là rue .des Etuves. On pbur·
, roit bien dire que ,le nom de la rue elt in - '
différent j mais Ce Jqui le rend effentiel, c'elt
qu'il exifie en effet . à la rue des Pucelles, une
Dlle.· Roman Marchande [aleufe, à qui la poÙc~ dont s'agit était adrefiee, & qui eH forEliée avec les Adverfaires.
-: Les polices .ne , prouvent donc rien. Voyons
l~s quittances.
,
'.
.
De treize qu on en a produit, II faut
e'n mettre à l'écart dix qui ne difent rien,
& qui étant antérieures au remariage d; Anne
Bonifay, font inutiles pour le point dont il
s'àgit dans ce . moment. Il n'elt .pas quefiion
ici d\.J prétendu commefce an'tér~eur au mariage , mais du comme~ce, p.~~éneur. Et ces
de ux commerces font bien dlfferents, le comm,efce ~mérieur était, CuivalJt les Adverfaires,
un petit commerce en fev~ '. en chanyre & en
{!,rain. , Le commerce. pofieneur un commerce
de Cal ure affez wnfidérable pour fournir à 27000
li-v. cl'acqL
uifitions. Or.l ce petit commerc~ an·
tBrieur n~ a même jamais exifié. Nous ravons
prouvé:. d'après le~, qu~ctant~s- q,u"on . nous op:
po,(e" & ~'ii a volt e1(~fié,. 11 fi ~urOlt ~as éte
COlûtintlé apIès. le ~ manag-e , p~~fque rien ne
pl!ouve qu'i~, l'ait été. Ces qllÎtranceii q~ij pe
l'rouveRe pas même le commél'ce anténeur.l
prouveront donc hien moins Jè pofiéri.etir qui
elt tout différent. Il faut donc
·les· lélilfeC' cW '
,.,
. - -'
, " .. _. '.
cooo.
li,.
,
�24
Il n'en relte donc que trois & c' . . .
r
'd'fc
~
es troIS
lefi're U1 ent meme a deux ,
parce
qu
e ce Il e qUI.
e . cotée MMM. n'elt qu'une copie de celle
qll1 elt cotée 000. Il en ré[ulte que le 16
Nove~bre 17 61 , Bernard \ Salvador a reçu de
Il Dlle •. Ro~an 1}0, liv. pour le montant' de
4° barn.ls d anchOlx. Il paraît par l'autre que
le 7 JUIllet 17 62 , le Patron Jean Vague a '
reçu de la Dlle. RQman 188 liv. 12 f.
'1 d'
. pour ,
8 z. b,arp?
. anchoix à rai[op de 2 liv. 6 f., "
& cette qumance n'elt pas même lignée ar'
Jean
Vaaue
0 r, 'qUI. nous d'Ira que
P
le Patron
."
'.
O'
ces deux quIttances n'oDt pas été 'co'ncédées à'
la Dlle. Roman, Marchande [aleufe de la rue
des Pucelles, & que les Advei[aires ne [e ' les '
[ont pas . pro~urées: df ~a même maniere qu'ils
ont eu la RolIce qUI etaIt adreflèe à cette même :
D!!e. ,RoQ1an, de la rue des 'Pucelles? Er quand
mem: on [u~p~fer~it que ces deux quirrances
ont eté concedees a Anne Bonifay qui
ffi
' Il
"
, n a li.s
a !-uera qu e e n agtfloit .pas _pour fc
&
' 11'
.
on man,
qu e e n en avoir pas reçu l'argent? Conclllr~-t-on de deux quIttances i[olées & fufpectes, les (eules ql,le l'on '. ait · pu produire dans
le long ef~ace pe, 3° ou 4? années que l'on
[~ppo[e qu a dure le commerce d'Anne Bol11f~r ·, que ce Cpnllnerce qui Ie [ai[oit dans la
~a~ion, ?,e ~om:an appartenoit .à [a femme plutaï.. qu .'a lUI :7 ' Y
. t rOLtvera-t-on . cette preuve
pleIne & . e~tlere, qui feule pourrait dérruire .
la p~t:nlhptJOn. lé.gale que . ce .commerce appart~oJt au man 7 . "
_
SI les polices & les quittances ne difent
nen
A
•
~
'
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)
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.
�~PJ
h9Pnêt~, fr<. d~'p Jnfj hoo~~e~ ~e,1alX des œd.
~erfa·· res ~f.QJllt #P MaU!t~'.m~.lfk' ~ runeidrime:t:..
tiq~~ ; un .V;qifWi~f~ , ~~JllvIiiru-es..tmABla~~
un tondeur d~\~~,lm . . V9Ih\de~J pe.rf~~s re(·
~aalt~~ ,qq.i. p~",~n~, itr~ , ,nue~ ~ J~r.[gufd.lles
he,t,I:r1telil,t ~ ff9lDt - ~, k~ pr~f~p!l!Olrur;_ ~~~
fl~ flH'~P : r~ê~:, (lJlf ~QnfuL, ·.àes ·.Mes, ,es,.
Artf. ri. df1S ~ u~l~p~s c., qUI . at;t~frfm, te~r ~r.op.re
f!liEl ,0~ ~pont j§s !~tbfiéJ!Mons \Com: fDrt;ifif!es 'pat"
' ~o l ~s' !Js . fl.réfotpI»(~ofj·S, fpij~.:dei gros uu:nnnus.,
~t ' ~e~ atte,ajlJ~O!lS (ont ifllies, &. dont" .les
c~rtifiFWS l}ç [Jl~uJ)mr p4p pqlafJeN les pUl:tJ'U
qJ.,li r,ç,(il~ten~ ~s .:~ut~~. .
... .
,Et. ~Uy 'dife-ll;t ,*s tt'/ndeut~ d~ 11J1Jl~eU, '.& ~s
fJJ~tr,~s,p~!{9nnes .re-fp-~atMs: 1. Us .c~rtrfie~t qu Ils,
n'QAt PqS 1/u . l\qman fe ' JTIf!!.é:r chl.:c0mme;nce cl.e
faii\.l~es. ~aisJ p'Irce q:~'Hs J)~ {e fDut Ir as ~rouvés.
d<J!1s. J'Au;bergl?, rot;! pajiçl! q.u~iils . avoient la he(r
he . n4 an.d J{9:I~P (. fpi{o~'fi rks:; Vteot.e~ & eu
-,. l I:L
•
r.'
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"1
jl .
r~ce.v~it~ j'jlrg.eqt : , ~'~qluIVf<t-~~' ''lu l ;ne Lalt
j~~~s_ fa~t' .~
Itf!s 9fio~r~-J:"~b ,pl-nt&t qll~ ietix .
q\Ji .. Q~t tr~l1te ~yec::~Iu.I , . qUl.ll>~ v:u.f~~ ! {OJl
commerce 1 Qlle devlent donc cetll3XlOme., plus
çZ:~6~tur . ~'W' a-ITe{-e~'li fJY.(J.frn mi~i .1Je~al1.ti.bhs ?
çep~nd~qt .a q~Qt (el' ~diùi ~et~ fo~le
dç prçUlI.es, dt l?qu~L1~ jk f~{ ieL ~è~dre al m01I!s
, YgiÜl
j
dji: yvp~:o,.\r ~~a,qerrlft{3h : C(lm€jJ~.r !l~ Jour en pltJin
midi -QLJ:it
qp-Ils fQJ-~ pe4iOl~ll(' œ, ne.rrpas _y
"
\
.
~ .: '. jJq
~ . :r.! .
« Mais ce n'ell: pas, dIt-on, fur des att.efia~
p tiOflt i!91ées -fly)l fiiUt' jygËr ,~'-un ' p.oint ; ~~~i
~) j;npwçint .. )) ; '
. . r,·.~
..-
.
~rpif.ç'"r
.
\
�2.8
A la' bonne heure: m'ais en reJettant nos
atte.fiations), ,s'il :.efi poillbIe de les rejetter
il faut donc auffi rejetter .les Vôtres. 1
~
Lcfyflême eft· un peu , êavaiier.
Ei: gu'a-t.:il de fi cavâtier? 'Les Adverfa{res
prétendroient-ils faire rejetter ~ nos atteITations
& . garder les leurs? Cèll celà qui [eroit ta.
yalier.- Car fOll't doit être <tgal, lX fi l'on- ~e
veut pas d'atre,fiations d'un "côté -' il · ne faut
pas , recevoir Èes certificats de l'autre. C'efi ' un
aéle qe Jufiice d'autant plus néc~lfaire id, qUé
fans être cavalier " nous p'ouvons dire' que nos
atteftations doivent êtf.e crues de préfé'rence aux
autces: , Ce' fer~lt donc beaucbùp faire .que de
les ~eJetter: malS en les mettarit de côté, celles
des_.Adverfaites devroieat fubir le ' même forr.
'~ Or ,' fi , Ob le,~,r ôte l~~rs certificats fufpeéls ~
q.ue leur re&-t~l} '? RIen. NOtls dirons "rieri' ;
~a:~e. qu:on aL,:vu que les 'polic~s lX, les quittances ne prouvebr ab{olumenr ',nen , &/ que la
foule -de preuvef dont on prétend nous' adcabler
te.,réduÏt . aur certificats', gt quels ce"rrificats?
D 'n: IfS" connoî~;; ) ~' I
~.
~ .Ân'ne.) BonifaYdn'avoit "dont point ' d'è-- corn ..
mei~e ~~ui iu.i' ,-f~t'- propne, Ellé né faitoir que
'donneL:; des " fOIns -aloi- commerce ' de roil ,' mari '
d'ant\ da mai{on de ' [on' mari, Les bé~éfices d;
<te ..cop1:ner~e '?nr donc alp'parrenu i:f R~man. Sa
fe~~~)e ~'a ,pu fe les approfr~er que p,ar un
larcl1;1,
( L,,' ,
'
• J:
·El!e · n'a . trônc~ j~niais eu -que Ies-soII Iiv,
de bIens paraphernaux dont nous avons'/ déja
parlé
•
/
�3°
fomp,t~on de la. Loi quintu~ mUlius e'fi fci aidée
JI
de tOlites ks clrconfiances.
,
4°~·-Dîlènt· ,les Adveiraires " Roman li fu &
cônnü l'es' aêquifitions ,d e féi- femme. IJ les a
ap2,rbuvées pa'r (à prerenci àJa'éte u 3 Janvier
.. hl-
.'-1,.
1
17.S'h. , '
M-als
•
~..,.-
-, , . é'fc
: ,l"
~'il ,n:,~_ e~e_ pr
9
'-n.
"1
ent qu a cet al.[e, s l
n'a ' -fl<l'fillë qù'a t.JQI: feu1e LaèqU.i1'itiolt d'Anne,
Bopifay ~ fa--préf&1êe pahïvé -à -ce.t atle aurat-el?ê 'Lllffi p'ôu-r légitin1e'r tous les autres? fi
cef~i:ct devie-nt - lëgi'hme par _ta prUence , ceu~,
au;qu:e1s il tl:a p<fs 'affi~€_r. ne ~euvent , donc
pas l'~tFe.
.
, .. _ ' _ " ' .
,
Et 'l'on peut d'autant molOS fe prévalOir de
fa -p,r'.è~~c!! 'à/aCte a~ 17f3 qû'Anne B~nifay
ne -pa'y"a Rue 2B~ hv. Olen , qU 7 le pnx ~e
racqt1Ï1iû~n rut pJus. 'C-onlidérabl~. Or elle aVOlt
atIëi ,tek biens p.(raphernâux pour payet:' cette
f<;min~~· -& ,RollJan pou voit conféquemme-nt pp~
pr;tJv~; 'c'cr ;aae)~ , fans qu'o,n pût induire delà
qll'il eût - ë~ilOù lè manege de fa femme. Il
pouv-oÎt' m'ème vqûlbir gratifie: fa femme d'~u
tanf", & c'en fur le fondement de cette donauon
prélmiŒe, -q~u: Tes .Arrêts c~tés. pa~ l.es Adverfaires Qin confirme les acqudÏtlOns faItes par la
fernme en IJréf~nèe ' âu nùrÎ. l\~~is de ce q~e
Roman aura, fi l'an veut ~ ~-on!Je cette fomme
à ,An~~ B\op~fai ~ en ~oÎ1c1ura-t-on ' qu'il lui
a dQnné 2700'oliX' &. qll'i~ '!- approu,vé toute~
les acqlltfitions qu'éIfe a Lfaites? Une femme q~,l
auroit I000 Ijv. _de .biens paraphernaux n'aurolt
d~?l~ ~'à. f~~f,e , affilier fb~:_ m.a!i à 1'e~ploi d~
ces ,io.oo liy.: one ~fenl1~ .~ .qui (on mat;i:. vou.droit f~~re ':1n~ l~b.ér~lité qe (IÇ\O écw§" n;aumit
dOlic q~:à achçt~:r fl~):lg~:e cJlOfe de cet afgeJlt ;
&. ' J'une &,-~'~~, JerÛètJt enfuite fondées à
envahc, • ilf 'to.ute b 1ufceŒol1 de leurs 'mariS par
'des acquiGtions; Jes. ,hér.it~rs de c'eux·ci iùur·oiè~t rLen dire; Ull atte de Jibéralité deyiendroit un aCte d~'- cli11ipati-oh enti~re : Et ces acquifrtions que les maris n'a~r~ient pas connues ~
ferolent irrévoc<iblement acquifes aux femmes,
fuirent-elles de 100000 écus? a·t-on ,;bien réfléchi fur l'inconféquelJlce d'un pareil fyfiê~e , &
fur les dange.rs gu'il y auroit à l'admettre?
Dirons plutôt qu'Anne Bonifay n'a fait afiif.
t.er fan mar! à cet aéte, que p'a rce , qu'elle
n'employoit que peu d'argent, ~ qu'eHef lui a
caché tous les autres, pa-rce ql1e leur impor,.
tance & le.ur nombre auraient découvert [es
'malverfations. La préfence de Roman ne paroîtra
plus alors que l'effet d'un pi~ge tendu à fa honne
foi par uue kmme açjroü-e , ambitieu{e & _avide
de faire pairer à [es eafaDs du premier Jit le
bien de fon fecond mari.
Mais 'cette fufe découvecte ne lui {ervira.de
ûen. Tout ce qu'elle pourrait opérer ce [eroit
de lui acqu.érir ce qu'elle a payé par cet aéte ;
le,s a.utres acqui6tions ft!rùllt toujours préfumées
avo.Ïil' été faites .de l'argent du mari.
Et comment fe diŒmuler les déprédations de
cette femme, 11Orfqu'011 voit Anne Bonifay les
conligner elle-même dans l'aéte du 2.8, Janvier
176 1. Elle y compeofe avec 'le vend,e ur 8B
a
1
, .
r
,
�,
32·
: 33
.
liJ.0 i7 f. du "mômant de :la fourniture. des de~
nurJ , . d'aliméns, logemeks, méç1icam-ens; &
remèdes que laUice acquereufe .avoit ci ..d~Jltint
fait pour ledit Bonifay vendeur. Or le vendeur
avait. . été nourri, logé, médicamenté datls "la
maifon de Jofeph 'Roman. Les 8B liv. · I7 ~ f.
qui étoient le mentant des ' alimens , logemens
médicamens & ;'~medes lui appartenaient donc:
& cependant Anlle Boriifay Te les approprie.
Elle les donne en paiement d'une acquifition
qu'elle fait à l'il1fu de faIT mari, d'une d.e- ' ces
acquiGtions qu'elle prétend faire pour elle , que
fe s héritiers veulent garder, & qu'ils fomi enn ent
,~voir été faite s de l'a rge nt de leur mere, & non
point de celui de R oman. Que faut-il de plus
qUç cet' acte pour .indiquer la {ource où puifoit
Anne Bonifay ? Que ne devoit-elle pas fe permettre dans l'intérieur, pui[qu'elle n'a pas craint
de s'approprier en public une Comme qui appartenoit à [o n mari?
011 n'échappera pas aux conféquences qui
réfultentde cet a8:e, en difant que l'on n'y trouve
pas que le vendeur eut été logé, nourri,&c. dans
la maifon de Roman.
Et qu'dt-il befoin qu'il le dife? Ne ftIflitil pas qu'il n'indique aucune autre maifon.
Anne. Bonifay en avoit-elle d'autre que celle de
fan mari? Si elle a logé & nourri le vendeur,
o~ peut-d Ie lui avoir fourni de logement & d'a LLmens que dans l' Aub erge de fon mari.
» Mais il étoit natu rel qu'Anne Bonifay fit
» quelque chofe ,.au befoin pour Jean-Baptifte
» Bonifay qui étoit le vendeur.
N ous
,,' Nous ignorons / x e - qu'orr ,a voulu pir.L :
mais queUes qu~ ~,dli!~t , le~ JIiifo:os d' Ann~ ~Bo
nifay éour i airœ.:qu.élr.q ue:l ~h:oi.è pour
vendeur.., ,d lç ne'p.oJlv.oii-+ni.De dci10Ît te faire aux dépens dt foq oi~'fi.s ((1)' U ,olu nno'iris elle devoit luiSaire
acquérir à lui cè qui l émit .veqdu pour prix du
l(».gel~(mt & de;lcn noqrriture qu'il avoit fourni~ Ce
trait d'illndélisé!Fouye ,qu'elle abufoit de la Gonfiance que [on'-mCIili avoit en. elle. pour fOrllirf;r. ~
. hér'itage conlidérable. Et qui fçait'-encore fou~ ' ce
qu'elle en' a tiré ' pour fes enfants? . S'ils' pouvaient [e " rendre ju1hce à cet égard , _ R a man
.. ' ,
.
ne (eroit. pas à r plaindre:
~ On a voulu tirer une autre, approbation de
R~)Jnan ,de la procuration dont il fe chargea
. iJO;u;r Ù'nniner queLques coritefbtJinns ' qu'Anne.Bonifay jlvoit avçc l'e ' rentier d'une. de [es 'mai.fons. _
_ , Cette maiCon était celle de la place de l'Auriol. .. Nous avions -obfèrvé qu'ayanf été acqui[e
'avant"' le mariage, Roman la connoiflàit ~ qu'il
fçavoi't-- qu'elle étoit paraphernale .à fon ~poufe
.& _CjJ1';ün ne pouvoit conf~quemment. p~s mdui~,e
,de-là.. qu'iL eut , approuve les acqmlltlOnS qu Il
, ..
n avoit pas connu. "
.on 4 été forcé de convenir que nous avons
raifon. "
.
Il Mais
du lTIoills 'J a-t-on ajouté, le .mari
,» r.econnoillàit que [a femme pouvoit difpofe.r
. 1) des 8oo..1iv. de- rente de cette maifon , ' qu'il
» ne ~pouvoit ni ' ne dev.a'it (e les .approprier ,
» & que fa femme p<?uvoit les employer à fon
.» profit.
.1
Sans doute; mais ce n'dl: pas ce qui eft en
wn
< -
<
,
,
-
1
�14
.
litige; il faut prouver qu'avec ).ces 800 liv. de
rente, Anne : Bonifuy a .pUi r,pa-ye~ les' .intérêts
de ce qu'elle de'\loit ' nouftir ' [es. 4 emans, fournir à leurs ..dép.én[es J , & fairer,pollr J27000 liv.
d'acquilitions;) 0 ' c'eit ce qu'o~n'a" pas prouvé
& ce qu'on ne :)pvouvua jàqtais. ' :'. _.__ •
Que . l'on . calCUle tanb'qu3on :\lOUdra, ce que
pouvoieUt: rendre :il Antre · Bonifay' les ~ biens pa~
rapluemaux ,qulelfeJ avoit un iè: -mariant,. & . les
acqmfttions "qU~élle a faites. en[uite; qu-e l'on
accqmule tdus ces l:evenus ~ ---qu'on leur fafiè pro.
duù:e des intérêt's. --plis ,qU'ordinaires; que l'on
filppo[e que des immeubleS! ren,dent plus que du
'S {Jmir-cent; que l'on fafiè produire les intérêts des ihtérêts à tous ces reyenus; que l'on
amafiè ) le ' <t'OOlt ', [an!> faire actention à la ptoportion'. qu'il faudrait , gardev, ' l.nême danS l'hypothefe ou l'on [e place; [ans parler dl'!s ,illtérêts , qu'Aonè ~ BouiTay i ,d evoit i -& qu'elle - étoit
ohl~ée
payer tous les ans .;. fans refléch.ir
que n'ayant pas ; payé fes, a.cquifitions: le j'our
du c,ontrait, ' leur revenu 'diminue d'auçant; fans
pa!fer 'en ligne les dépen[es &la"'lloUrriture de 4
enfallSi, & cP en fans qui ,~~~rollent ~-" ~onr :mx
HIes & reviennent battre le .pavé de Mar[eille;
qu'on fe fàfrè j:llulion par ce moyen, à la bonne
heure; mais on ne parviendra pas à éblo'uir les au..
~es:. ~ls 'verr~nr to.ujo~s .dam _Anne Bonifay
une . ~e.Il1l?-f' qUI [ans autre re.~àunce que 50 r: 1 1.
de blens 'paraphcn'llaJlllx prefqoe toutes- plaێes
fur. U!1f, mai[on /à fait Cies. acquiflrions pOLlir la
[Ol~ !mportame .de 27Qo-ÜJ liv. lhien que [es
modIques
revenus ne fufiènt, pas même. fl<Nffi[acrs
,
ae
...
... ...,
,. t -. ,.,. ..
t.
_ ... J.
/
,
. - 35
,
pour :,{ùppot'téJ w; ~chatges dOnt dIe êt,ô i{ -ac· ca/j~é'e. · Et~ q,uicmnple' fe g-auarnira de J'iUuf'wh,
'Verra- que C~.' acquitirion,s ,~'o~t pu avoir ~ été
fdllÏ1i<tS ~ '4 ue '.de 'Jlht.gmIt, d~ . m.ari. . >
•• ,
' . ~ue 1 t'~n Lpreœnde d'onner'<1~s motHs). Rol1lan i ~Là ,Amne 'Bo:nifuy poùr::>s'ên:'e mâti€"s tUllS
;une II canftitu t.iom ~ a.IttNuli el!è J ~ rqu' 0 ft létlt-- Jhifé
.pJ:évair (& ,éraindt.e; de.g re6hetches:.. dé 4a part
des, enfans -dlLlptevniùt !i;t- ~o'1!Ir: n'aVO-I.f pa:§'fâ1:t
,inventaire' 101)$:, rle.l~ i morr,' de J e~n "Lyon. ' Tout
'cda augnieI1tern_le'preftige:. Mais "lor(qu'on ,\}Ùta
qu'hm 11il.velltaiJe.aut:Çlic 'u>uç ahfO-l'bê ; qué "n'ëll
point faire ~ avoit été uri ·~.ae 'de bom1éi lfdmi;ndtration ~ quefle~enfàttS ' -qu "prel~iet l~t~ J'Bu~oieut ~pas s'en p-:laindre ~ qu'il,s ~~ s~en: {untja~
'1:daii- plaint '; qu?ûs: aur:QHenb eu: mauva1[ce :gtàc~
~ r,s'e:n. plài:nclr-e! ,-c qu' il'SI; ont '116u' [euJ~rtJ'enlf le
,b-ieu de Jéan Lyon; maisf1lCore cel~~ d'A-r,tn,e
.Bon:ifaYl ;' qu'ils.!"._ont tl'ouvé , dans l'h6réd-it~ de
celle-ci ~ de quoi 'fe àédorillnll'ge-r an:plem~nt_ du
' defaut~ d'inventaire des ' biens. . ,d'un homr1re ~tü
'leur J.a,iilolt 1 00: liv~ de légitime' ~ enfin loy,fq'u.~on
calculera tous .tes -avantages qù'lls ont~ retiré- dti
Temariage de leur. rnerer 'f &. 'to}it ce ,qu~ la.' çon.liante.... crédulité de -RO:t1!) an ~:a ~ permis à laIté-ci
,de f<.rire pOUl", eux , avllIiu..-g~. qu' éll~ avoit: prév-us .lors même de '. fari mà'tfàge, alni! ,que le
:p-rouvœ le , contrat ,.! ofil \fe ~ di~a q~e cet!~ ftHÉrne
-rufcie ne s'eU ~l'l'Ilariée' fous 't1n'è confiiWtîO-ù ' par, cicul!i~re qu~ rpoyir faire ctoiterà Roman ~ q:U-'elle
,gardait f~s bfe-ns' parapherMu-:JC: pour nourrIr {ès
,em:fi'hs' ,& méiIage.r un v?-i1é ..aux :dép'f~datidns
~qu'dbe , médit0it '
ne ' fa~lt ~aSl cller~l-1e~ : G~au
~es 'rqQ)cifs à cette conihtutlOn partlcultere.
1
Ir
�36
'
t-7..
. 9u'~' défaut: dé. raifons , ,on donne des COI1Iideratlpns; que f.on _prétende. que- l'induftrïe
qù' Aline;' ~onifay <l\'JGUt J'ait,: il. c~nfultr:dit-ll fur
la :re.gl.e , généraJe :;'1l1pour ;; l'âppUquer'Elanfq:u?il
f~it/ parvenu 1R; <5ihi o~tr(:!: <{f>U!tl o'Ie dptaiLdès
manu.>uvies ; dç rœtOO1r6!mm:e!. .11i.)le ;1'<\ ;même
GdÏllIl.UJ!:ea J.entiiér Xiu'ep!>€ bf32 '.Jl:ncir,y ;q t~;'qui
fçait'[Js;'iLn t t!Otib :rionnu ?~r t9'ail!eutswdle i av.oit
l.'ufufrnlt ~dé~ fC? :' ~n'S 1; J i PQuvçi~ -xm.iti8r(l
qu'elle Je rip>Œ)lffâJt:. ,pUllI 1e tenvriyer. à fa m.ort :
ibp@uvo' T'éfpererr qtièUe') fe rend/bit 'juill,ce;: lie'S
moyen lui mallqtl.ûlent. Char~ de dix ·enfans,
foo' telnps & .. cfes :.fiu:pkés._étoiei1t. à fa familléJ
n'en avo it pas pour refler à Mirfeille ,& ' [e
liv'tcr; .a des recherches-' pénibleS' & ' difpendieufes.
Efi.-.te ~ ,pn hQinœe :q.ui fe trouve dans de", circQt:lllanc(ls auffi Jâèbeufes Rue ~' on peùl 'dire
qJ:{ l 2 {!~ ~~eridu ~_~tro.p long -temps ? Ne ftitffit- i.:l
1 pas. qu~il ;:: ait
annoncé ' [es· prêtenti'ons du vIvant
d'~nne_ ..Bpnjfa.)C , ~qU:U "ait propofé ides voies ' de
concili~tiQn que }"on a rejettees i1pour qu'Af,lne
Bonift!i~ ait pû 'préparler fa défenfe'; & que {es
1I).üirs-'· ayent Inauvartej grace r de, fe prévaloir' du
filence J for:cé de ,Roman?, '
'
'., ' . Suc l~ tout il ' avpit, du .temps_. pour agir ~ &
il. a. agi avant le temps déGgné par -la Lor. C'eft
tàut J:e 'lu' il faut : Le _moren. tiré •de fon' fiEence
n~ eft pàs même, une e.xèeption . J' . il ne fo.upnie
qu'une préfomption qui e.Œ déçruite par les ' circoi1~aocesJ , c une "p,n:famption- ~qui ne forme ~pas
une fin de non - recevoir , . & . filr laquelle
les Apverfaires_eux, mêmes n'ont pas compté.
Tel eft donc ce procès. Anne Bonifay a
fait pOUl: 27000 liv. d'acquiGtions , & elle
n'avoit que SOlI liv. de biens paraphernaux,
dès femmes d' artifan. .donne. !e refJorc & viviJi~
le ,coh,?mZerce ~~ MarfIUe'; ;que -l'on 'veuille faire
fl ec Ir a prejOmptLOn de la · Loi, à cette Con-
fidéJation.. T(}tlt "ce~a annàiroera 1D délèfpoir de
la Cfnd~e ~aps p~~ture aUCU)1, ~effeti.J Les femmes
de,(~larf~llle fdncf.Qumifes a.lU{'fL.oix camine' les
;:l\,l~r~ ·! & 10'r[qn'dJes n'onL '(l\lcum commerce
féVM'é , de celui- cre lci,uc mari., : elles,noiven'L fe .dire
. qu'el,l€~;he peuweilt"tfien -acquérir~ p_Qu.t elles ', parce
qu'Slll,~s: ne peuveht pas J acqttél'icrans puuer d'a ns
la, c~dle
mariS'
. . - J de -l"urs
.. """
... 4....
. ... .. ...", 1
'.-81 ~~.!on, 'pouvoit juger - ce fpl~o~ès fl1~' des
co?fide'ril'u~,ns r; ,~ou~ dirions 'ayec. bien plus de
ralfon ,,11lUJl f,<;lrOlt tres-dangeneuX' d'autohfei les
f~mme§. à a~qu<ir:ir nu" unë '~fjmpl~ piéfomption ,
que Ct! [erolt mettre les fortunes'" de leurs' maris
à l~~i: ~d,i(crêtion ", '8{L que Ji ,fa, 'Loi n'é~oit pas
portee.-, il /audrOlt- la faîre: ; ' mais elle exifte
la LOI , QUlntl'li Mucius: EIle,-èfr obfervée : elle
n'ef! ~éç?nnu§ ~e '\'Perfo~n.e ;' l"intérêt 'paiticulier
pourrmt:-ll la ' fatre jlechlr devant lui?
QUé l'on excipe enfin 'du filence de Roman'
qu?on l'accufe . de Jinefiè .& ",de ' rnauvaife-foi ' '
parce ' L~.u'il _n:a..jli?~9té fo~ ' taébon qu'après
~ort ' Id Anne Bomfiay' : , tQut cela annoncera la
dlfe_~te Ji~s moyensi ROlnan 'a ' prote Hé lors de
l'i~~ellt?j~e qui f4t tait avec _Anne Bonifay ellememe, , - Il a conîulté ,avant fa mort. Il a arin~nce ,fes , prét~n~ions ; & il ne pouvoit .rien
fa~re cti!,. plus. Habitant à ~2 5:; lieues de ·Mat:feIlle , :~_ll ne co~nojfroit que. ' ;vaguement ' ce
_,~ J . ..
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do It ' 'la ' rtrajeUlk patitie . étlort méme plauée fur
ullq)miifooii ' fi Jf1t';avec qun~ ~nune aullif mé ...
àjocrè ~~que ::1' o1fllJ-v-.eut 1 q<ll?'CrlteJ ait I.nQurrr qUatre
errfam; f 'foonnirIà ~IIJn'Cfutootien., à leurs :chi-l
iuimfeJl3, paylfnIes~.darle r,<p ~ 'f~tt , ces\)acqWfi~
niolls ioffrotmlt1t€s.'Bllé n ai~oi:t d!a~blel.!trsl i ':ru<l~
œffuim:e ~ -P-O~Qq dlautreIl hlii&n ~5 :pctÏlillt rie <1:011:'
trrur.1let .~ai.ti~œr.· JElle ne pe'làdlr4J.'èfJIi~i Ws :1avoifl
i<Di.rès'? cfuè- ~<3i d'Wrgent de' ![oIF mn-i.! NOUi C réul,..
{lifions~ touteg ~'S-' circo'lilft~fJQlS " qui,: p:tilvenc
Morrer. de ,}a :îfoice' à ja pvé;[œIÏptlon ~ la' Lm
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qu ltzlllS' mlltZU.f._ ,
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.. ' wJl faut donc adjuger. à' -Roman tl9I1-fewle~
H•. mel1.t., le! pa)iXJ'des l acquiGtions . faites' .pù :-Anhd
U ' 'Bo1'lifay oo'payé 1pel1d<rnti fon fewnd ~ ïlJarÏ;lge 1
» trlàruS ento& les ' 24~ o. JiVi L8 ! f: p"âyctJs i p~r
" eHu ui2U1S-. <.t>'~1llll{t 1 du rdooiL. Toutes ~'~ ad:.;
» j ndic:ttIDris ~tle l fqnt qù'Utre'. conréquertcg..d'~
» prirre±ire , ,,'iqpe la, femllire rn làyaî1t eu "ptefquç;
» ri:en dè libie! pehdanr,Je COl!rs de ,fOh. 111a~ ri'age, -&1ne. prouvant 'pa~ tJtz.de hab.[Jeût~ , il
)) faut néceifairement préfume.r qu'elle a acquis &
» ) paye.. des, bi~m; ,du hnari ,i & .par. canféquent lui
JJ fairel'lionheu)( du la cOfldrUflheF' à tefiituet auX'
) héritierS .du ~ mati- , ce ' qu~elLe n'~ 11'U .avoir
» que ' du chef- de fon mari" ad , ej;!Îfandam.
wrpis qaœjlûsfofpicionem, )
CONCLUO r l;omme au procès, avea plus
grands..dépeos._
,
J
GRAS, Avocàt!
.
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SALVA~OR, Procureur . .
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39
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M. le Con/eiller DE MONS , Rapporteur.
au J ~rléanent.
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~.)LJfu Ç0NSEIL <50US8116ïNÉ., .E1 rIME
q:u'e la-Loi Q~ iatus Mucius s'apfXlique au prli)"C'its
aa:ll~l 'a~c ' ~oute ~ la ,-- force YoŒhle. Les .hoirs
d'Anae :(3onifay n'ont point -jufiifié qu'elle eût:
de.. oommerce parti.culier, ni. d'autres- biens ~ue
ceui-' qn'.e.ble aV,?it , 16rs de f~n mat:iage. Or leUr
mo:dicité ne permet- pas mêmtr de fuppofè.r qlôls
ayent .pû , fervir aux .acquiiitiomS" importantes de
<tette femme. Cefi bierr alIèz. de fe pci-fuader
qu'ils' ont pu fatisfaire à t 'outes ' les dépenfes
qu:elle avoit . à faire. On ne' peut donc pàS
do.~ter : qu'ell~ n'ait .payé. ces ) acquiiitions de
l~.r:gel1t -de fon mari. Il
.dOllC jufie qu'elle
en. Iieftirue le prix aux héritiers de ce dernier.
-.
. Délibéré à Aix .', . le p . Mai - 178'3 ,.,
ea
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, GRAS . .
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GASSIER.
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1
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Atllfl,!!i(!n" _du._ $r • . Alifo~. _
l\.. TOU S
Bonifay époure du Geur Roman aie fait un cOInmerce en fan particulier dans le tems ' qu!elle
étoit mariée avec ledit fieur Roman.
.1
Panralion Alifon natif de la Sale
1~ èn Savoye, 'réfidant enbcettt:<ville âèJMarfeill~Ldepuis plus ~de 20 ~n:-, _ cetti~on.s... ~, attefions en faveur de la vente que. deptns" nétre.
réGdence en cette Ville, où nous avons alcernat~emtllt fciié·]e' ·métier , de Raheirau=, OLI l de
C('>lnrniŒonna~ré ,nous avons to'ujours 1couché
darls, l' Auberge .du .grand St.! Jean, apparténant
ci'-deyaut . à feu " fteo r J ofepn ': Roman, de qui
noUt> ·é.tions Jregar.dé ·& tr.aÎlE comme une per[o~ùei '~ux OllCJres de la ma.i.G:lll", · y étantÎ pref- .
qué' p:>t:.Ijours. accu p:é.~ Déclarons en ) cO/ilféquence'
que ::p1mdant, e.qvia:on deux .années, iL a été .fait ,
un pêtit;~ commer.ce . 'en \ enchois, favons, ris, '
& att~res ;petits articles cle".peu, de con[éqtllence ,
& defiiné pour IfS: proviGons' des Muletiers qu~
venaient loger. dans l' Au~er,ge.; que Ip Magafin ... enl était dalli .la mai.{ocÏ i; ' cl côté de l~eica•
lier. , ..qJle le. tout appartenoiLà- M~ Roman .: qllfJ
véritablement la Dlle. [on épou[e éroit fou vent
•
dans ce ~Maga_.,. [ur-tout ~or[qll'il fut ouvert,
& que la vente & expédition des marchandi[es
étoit .faite indifiinétement tantôt par le mari ~
tantl3t par la femme, mais plus Couvent pourtant par c~elte." .derniere ~ attendu que [on mari r
érait fouvent à la campagne ~ nous déclarons
en outre que nous n'avons jamais entendu dire
à per[onne dans la mai[on que la Dlle. Anne
Bonifay
Atteflation dujieur Ba'i~e Mattre ès-Arcs.
.
Nous François - Baile Maltre ès-Arts ~ natif
duJieu de la, Javi, Diocéfe de Digne, réfidant
en cette ville de Marfeille depuis environ· 2 S
ans, déclarons' & certifions en faveur de la vé.
rité cque depuis notre réfidence, nous avions
continuellement & amicalement fréquenté feu
fieur Jofeph Roman, vivant Aubergjfie du
grand St, Jean, tant par rapport aux liaifons
du commerce qye nous faiiion,; dans la haute
montagn'e, que patce que ledit Geur Roman
éroit 'notre compatriote; cert~fions en conféquence que depuis que ledit fieur Roman avoit
,acheté l'Auberge du grand .St. Jean, ou foit
trois ou quatre années après, j,l Y avoit dans
ladite Auberge au rés de challm~e , un petit magafin à côte de l'efcalier, dans "lequel on tenoit
quelques barils d'anchois, du [avon, & morue
dont on étoit en ufage de faire la provifion
aux différens Muletiers qui venaient loger à
cette Auberge, ayal'lt nous-même eu occafion
d'y faire quelques ,emplettes. Certifions que led.
magaGn & petit commerce qui s'y efi fàit environ deux ans, érait de très-peu de con[é'quence, & geré indifféremment ta'ltôt par la
femme, tantôt par le mari. Déclarons en outre
n'avoir jamais entendu dire que la DUe. Anne Bonifay aye :fait ilucun commerce parriculier
L
�4~
4)
d-luant le 'cours ~e fon mariage avec ledit fie,"
morue ~n divers tetns '. dOht l'expédition lui
-avoit été faite tanult par Cun, tantôt par l'al/Ire;
que dans , l'intervalle qu'il a fréquenté lad. Auberge, .il n'a. jlHnaÏ"s entelHJu dire à per[onne
. que la DIle. Bdttifay ait fait un commerce à
fon particulier durant le ~ours de fon mariage
avec ledit fleur Roman.
_ ,
RÇ>maJ;J.
Atteflation de Meffire Beffon . Prêlre~
.
Mellire Jofeph-Pierre Belfon, . natif de la
ville de Digne f rijidan( 'en ceÈle ville de Marfeille dtp-uis près de . 26 ans, dédare en faveur
de la "ériré 'que ' .depuis,f~ r~Gd'ence en cette
dite Ville, il a été dans le ças de fréquenter
affidl,Hnenr l'Auberge du · grand ·St. Jean, appartenante ci-devant ' au _fieur Roman originaire
du lieu de la Javi Diocéfe d~ Digne, fait
à rai(on de la correfpondance à la montagne,
foit à rairon de la liaifon -que procure la proximité · de Digne flvec la Javi, ce qui 1'.11 mis
dallS le cas, de conl:)oÎtre c~ qui Ce pa1foÏt dans
la maifon dudit {jet,lf Roman. Certifie en conféquC?nce que dans la maifon dud. fieur Roman, \
il Y avoit au rés de chauffée un petit magafin
dans lequel on avait tenu pen~",nt environ deux
ou trois années, certaines marchandifes en talure
pour vendre feulement aux Muletiers, qui venoiepr loger d;iD~ cfltte Auberge· , ou à quelques pereonnes de ' leur connoifiànçe, moins à
titre de. çomm!lrce que pour faciliter ces étrangers. aux ped~(js provifions qu'ils étaient dans le
cas de faire en cétte Ville; que çe petit trafic n'a
du.~é ~ans ce mag9lin qU~ ' peu de rems, & ~'a. jamaIs eté de gra ode confeq uence, lequel petu com.
merce était {jeré i!1dijlùzaemeru par le mari ou par la
femme .ou pat /es e'1fans. Déclarant le foulligné
y avoir lui·mêm~ fajt qud<iJues petits ~har s cre
Atteftation dufleur Chalfle Maître ès-Arts.
Nous Jean-Antoine Chalve, Maître ès-Arts
libéraux, réfzdant en cette ville de Marfeille
depuis environ trente années, certifions qu'eu
égard aux liai[ons que nous avions avec les habitans de ' haute Provence, nOlis n(lUs fommes
ttou \'€S dans lè cas de fréquenter de te ms en
tems l'Auberge du grand Sr. Jean apparrenan.t
au: fieur Roman que nous connoilIions partiE:uBeremetit, & qu'au rés de chauffée de ladite
Aubérge il y avoit un petit magafin où, ledit
fieur Roman faifoit un petit commerce tantôt
adminiftré par lui, tant~t par fn époufe , &
,Gela pendant quelques années.
.
Atteflation du fieu/- Chauvet.
1
,
Nous Jofeph Chauvet, Muletier . réfidanr en
Ja vine de Digrte depuis environ 30 ans, certiSons en faveur de. la vérité q.ue nous avons
fait le voyage de Dignè à Marfeille avec nos
mulers pendant notre réfidenèe jufques à ce
jour, _& que depuis près de 30 ans nous avons
logé à l'Auberge -du grand St .. Jean à Marfeille
�44 .
\
45
. ,
petit , comm~re~ en Calur:e ;~ui fe faif?~ ~~J la
1'1IàiÜm dudlt fteu-r ~omanl & -pour ette 41a",\rér-Îté ,'telle, nous ' àv:onS:~ohné le préIHil cèrti ..
ap'parteniuit depuis . plufieurs années au fieur
Jofeph Roman, natif de la Bouilfe, hameau de
la Javi, & aéluellement au fieur Antoine Roman fan héritier ; que 'nous avons fait c~ voyage preique tous les huit jours,. ce qui nous
a mis à portée de connaître particulierement
tant ledit fieur feu Jofeph Roman qu'e la Dlle.
Bonifay fan époufe, ainfi que l'intérieur de
leur ménage & du trafic qui ' fe faifolt. Difons
en conféquence que lorfque ledit fieur Roman
avoit acheté l'Auberge .dite du grand St. Jean,
il n'y avoit aucune · marchandife de falure,
ni autres dans fon magafin qui fervoÏt feulement alors d'entrepôt pour les ballots que nous
y Jaiffions, ainfi que nos autres Multtiers;
que quelques années après ledit feu fleur Jojéph Roman pour nous faciliter à tous 'nOJ
ficat.
,
en. C0r11mUn dvet [on époufe comn-ze toutes les
alitrel affaires de Auberge, c'eft-à-dire, que
t~ntdt nous comptions avec l'un, lQntdt nous compIlOns avec l'autre &
que nous n'avons jamais
ri'
entendu dire à perfonne que la Dlle. Bonifay
pendant le cours de [on mariage avec ledit
(leur Roman, fut chargée à fon particulier du
petIt
-.
~
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_
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•
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Auejlation,. J'i.J. ··fieu;, Rà-Vel" Conful
,
- ' : 1 & - d-<:
F~l:èjlq':g. .
",.
......
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•
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~
~de' lNre'{el
"~
,.
• •
1
" Nou,s Jean.Jo~p~ Ravel, l'~n des Sr~: ~ire
& 'ConCuls, Négocjant de cette· Vine de Me'leI, & . Antoine Pele'fiorg, Mulétier égal~m"enc
(,le cette même Ville, cerrifions & attefions 1 à
t.oqs qu'il appart~endra, què depuis, envirQn 2. 5
ails ' nous envO)'ions à Marfeille dIvers lt1\.üeti
pég~ le tranfport des mar~handifes de J ' ~otre
éommerce ; : qtié',· dans cet lDlervalle -de , tems ..,
:Rous avons efél pous-mêh1e'\ üèS-COU \r'e'qt i faire
ce- :v o.y age : que \ n~us a'VO:rl s -pre[que ' t?uj?urs
rbg~ à l' ~uberge du ' grand J , St: Jean a 1'\1!arŒille a vec nos mulets- & pomefilque, fâquell e
Aùbtrge ap pa1'tenQit à feu :fieur Roman, origiIJ.aire de la ha:ti'te: montaq-ne, a~ec !eq~el nou s
vivio ns très amicalement, [cm a raICon de notre co mmerce ,1 qu~;' pa r- r-a pport à I~ , pm~ im it é
cles' li eux de tl'orre 'milffance, 'ce qUI no ~ s , ll;e~ :.
toit l à( p ort é~ de ~ ({)nooître~ ~ar,ticu~iere~en t' les
a ffil\i:res ~<luditt fieu r Roman ~ ! Declarons ' en . con~
féquenc e & en fa veur de la vé rité, que dur ant le cours de la vie dudit fieur Roman,
J
provifions en lalure , fit venir dans fin magafin
quelques marchandifes de cette nature, dont il
nous faifoit l'expédition pour notre facilité; que
cette expédition ainfi que leur paiement nous en
étoit faire tantôt par ledit Roman, tamôt par
la DUe. ~onifay fin époufe avec leJquels nous
trairions indijlinaernent. Certifions en outre que
'ce petit commerce o'a pas duré longues apnées,
& que ledit fleur Roman geroit autant ce trafic
'
~;,
,
ous avons toujours cru qu'iL étoit lui fouI pron 'e'ta ire & maître de ladite A uberge, bien qlle
prz
A
[on époufo parut [ ouvent etre
chargee dl
e a 1';'g ie d'icelle ; que de -plus, nous fo~nes me1
�-4;
moratifs qpe quelques années après que le Sr.
Rom;1D s~pt acheté l'auberge, il Y établit Urt
jJClj.t~ ~agafLlZ de fa/ure qui firvoù à faire
nos provifions, & celles de di'llers MulélierJ
qt4Ï venoi(w également loge,r à ladùe 4uberge.
Dé.~lar~I!S :& c~ti!i().n8 y avoir lait nous-mê.
mes quelques P.€tits\,c~argemellSo dotzt l'expédi~
rion nous étoù foùe, tanteSt par ledit Sr. Rolnafll 1 larudt pa. ' Jarl. époujè" lant~l po,r le
Pâ1~t' ,;j'~urie, le. L'our indiJlinEf.ernent. La vé~
tité étant .que- nous a'llOIlS égalemem payé in ..
difti(laement" tanuSt ~edit jieur Roman, tanteSt
fin q;puJè· Etant. néanmoi~s _mémoratif" que
quan4, :'10 US avons été dans le cas. de régler
le montant des marc.ha,udifes ,H~ec le Valet d'écur~è apNllé Jean,-~aptifie Roman- aaueUement
aux P,uc;,eJles , .5e ; ~çnier en, pOF,4QÙ le comple
au,dit ·Sr. Rorp_an & ., non 4 .(on éPDUJè;. que
MÉMOIRE
~aga~1l? ~~ltli
au pied de l'efcalier it
côté. de l'ÉcurÏe .de l'Auberge était de peu, dè
ce _l'frit
POUR les hoirs de la DIle. AUl~e Bonifay.,
confêqu.ence, & s'a duré que devx ou ttois
anné.;s..... D~c1aranr :au. furplus< que n'o us n'avons
jamais , entendu ~i[~ à perfon ne que l'époufe
dudie .fLeur ~an~~ fU-t a,UCi:un commelce. en fOD
prow e 1 ~i- qU~,=,l'l\l~erge du grand St. - Jean
lle~ [uF:. E'i~s qn pl~il?e proprié-té , ~udit ueu{, Rom~n, -AÎIlG qu~ r.gus , le.& ~ profits ; q~4i en fé!u1 .
tOlent, )
(\.. 1CL
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SERVANT DE
RÉPONSE
POU R Joreph-Antoine Roman, Ménager dl!
lieu de la Javy , héritier tefiamenraire- de
Jofeph Roman -fan oncle, ep fan vivant ,
Aubergifie de _la Ville de Mar[ei)le , Appellant de Sentence rendue par le Lieutenant
de la même Ville, le z. ShPtembre J 779.
CONTRE
Cl
Les Hoirs & Héritiers de la DemoiJdle Anne
. Bonifay, veuve en fecondes N6ces dudit
, . Jofeph Roman, Imimés.
·
U
NE lemme a fait des acquifitions très-
"
confidérables pendant fan mariage, à l'in[çu
de [on mari. Elle n'a eu aucun commerce particulier & réparé. Elle n'a pû les ayer qUè
A
\
�1-
de j'aigent de fon ..mari. Le prix - de ces acqui.
iitiônk doit-il être rendLt aux héritiers de ce
derni~r, où les héritiers dé la femme ' doivent_
ils p/rofiter des avahtàgèS iriJufies qu'-elle s' efi
pr(j)c~rée ? Telle efr la quèftiblI fdutnife au lu.
t de 1a.:Co.ur.
r:-.
.
1
L Lteutenant a jugé que les hérItier' de
la . 11 mrué po votent tout garder. Rom1na
app~.bé de . cette Séntence injufie, le joùr rrlême
qu~elÎe a été rendue. Le cfétail des faits . &
l'examen des objeél:ions d~s Ad.verfaires , prouverdnt que cet appel eil: fonùé en princjpe & en
rai[0n. _
geinI
..
1
FA 1 T.
~"
.
Anne . Bonifay ùu, Ije~ de Cuges ( 1) _vint
ci Màffei.Ùe· pour y .~rvir '& gagrler fa vie;
tdmÎftè f~nt tanÉ d~ filles du peuple qt.li quittent
letifs llialfons pour échapper à , la mifete. Elle
fut àlIèz.- heureufe que de fa!t-e ·là conI1oifiànce
de Jeafi Lyon; voitUrier qui n'avoit pas O'rand
chore- J !nais t3tiur qui n'a rien ,-· quelque ~ho[e
v~ut beaucoup. JI y a apparence qu'il ne fût
faIt aucun contrat -de tniriage ehtre eux. Leurs
héritiers n'en ont point communiqué.
,
,
(1). Les, Adv~rf~irès qui voyent tout en grand ,
Ont dIt qu elle etolt de la Ville de Marfeille. Son
cQnt~a~ ~Ii rnaHagè, ave~ 10fèph Rornàn, prouve le
contr~~e : elle s y dIt : Anne Bonifiiy; fille de
Françol~ & de foue . Magdeleine BOTtifilY, originaire du
lieu de Cuges.
'
•
"
J
De Voiturier q,u'il étoit ~ '. ce Jean J,yon
devint un méchant CabaretÎ'et, ou fi l'on veut,
il fue Voùurièr & Cabaruier tout enfemble :
on peut admê~tre cette ftippofition des . Adverfctires.( Ses 'V{')JÏttires & ' [on Cab-àret ne
l'em:i'chlrent _point. On peut en juger par fon
tefiathettt. Il
Tégue trols livres à Catherine
Giraud fa mete pour tous, droils, & à chacun
fie [es enfans la fomme de telu livres· payables
aUx filles à leur mariage, & aux mâles à
l'âge de vingt-cinq ans, POUR TOUS
DROITS D'INSTITUTION, SUCCESSION LEGITIME QUE ·SESDITS E NFANS POURROIENT DEMANDER ET
PRETENDRE SUR SON BIEN ET HERITAGE. Quelle fortune que célIe d''un homme
dont las enfans ont 100 liv. de légitjme? Encore Jean Lyon avoit-il été co-héritier de Louis
Lyon fan frere. Que l'on juge des ~icheflès
de ces deux hommes , & fi: les Adver[alres ont
bonne grace de dire que la fucce{fion de Jean
Lyon devait être d'une certaine importance,
flit relativement au double commerce de. J('~~
LyoT!, fo~t parce que Jean Lyon avaIt ete
co-héritier de Louis Lyon fan frere . .
AuŒ Anne Bonnifay ne fit-elle procéder à
aucun inventaire, & [es -enfans ne l'ont jamais
recherchée à ce [u~et ,parce qu'ils [çave?t. que
c'était de [a part un aél:e de bonne admlmfiration' on n'a point d'inventaire à faire là 011
il n'; a rien, ou lor[que les frais abforberoient
ce qu'il y a.
Mere · de -quatre enfans, Anne · Bonnifay fi t
J
y
�4
tous [es effbrts poVr Jes nourrir, & gagner quelque
chofe. Elle tenoit en arrentement l'Auberge des
deux Po~mes, à Marfeille, & fes foi!1s y
ayant , ~pparemment attiré une certaine affluen.ce
de Muletiers, ou autres Rerfonnes , , ~lle fut
aŒe~ heureufe ,q ue de faire qùelques épargnes
qu'elle employa à a~heter une m~ifon à l~ Place de
l'Auriol pour le pnx de 6750 hv. , dont elle ne
paya peu à peu que la moindre par~ie.' ~lle
fupportoit l'intérêt d'environ 4000 livres en
1746 .
.
A cette ép'oque fa fortune confiftolt 1°. en
.la maifon dont on vient de parler , & dont elle
n'avoit p~yé que 3454 liv.; 2 Q• en 1007 liv.
qui lui étoient dûes par les nommés Turre! & '
Pecôul; 30. en' 550 liv. qu'~lle avoi~ à repeter
fur les fucceffions de fon ayeul & de fes pere &
mere , ainfi que cela confie au procès ; 4 en
la valeur des meubles, dem:ées & effets de
l'Auberge des del:lX Pommes dont elle était
locataire, & ·qu'elle évalua elle-même à 71101.
ainfi qu'on va le voir; ce qui formait en tout
une fomme de 12121 liv.
C'efi à quoi fe réduifoient tous les biens
, d'Anne Bonifay, ,ceux qui lui étaient propres,
ceux qu~elle avoit recueilli de fon mari & de
Louis Lyon fan beau-frere, fes profits , ~e s
épargnes, en un mot, tout ce qu'elle poffé.dolt.
C'efi un point eflèntiel & que l'on fupphe la
Cour de ne pas perdre de vue.
Anne Bonifay était dans cet état, lorfqu'elle
fe maria avec Jofeph Roman. Leur contrat de
mariage efi du 17 J,oût 1746. Elle fe confiitua
.
en
0
•
)
,
,
-.
"
en d~t la fomme de 7.11,° liv. à laquelle 'on iixa
le pnx de fes- cotfr-es & {le tous les me4blés ,
denrées & effets ' qui fe trouvoient dans ' f'Àubei~e des deu.x 'Pommes, qui appartinr~nt' au
man dès ce · nt01Ïlerit.l' II fe chargea même de
l'exploitation de J' A~be'rge " . & ' promit de décharger ladite Bonifay de l:''âfrenteme~t dudit
Logis & d'en . Jaire Jo'n fâit -è;- caufe propfè.
L'Auberge ceffa donc 'd'appartenir à Anné
Bonifay.. Jofepll Roman en' devint lùcarajre' in
même ,temps qu'if acquit tout ce qui
ctou:.
voit " & . par ce virement , ~ AfJne Bonifay cellà
d'être chez elle. Elle fut chez fan mari. Cefi
encote une circonfiance efièritiellé à remarqlJ er.
. Il. ,ne ·l'ell: pas moins .d' ob{erver qu'Ahne
BOillfay , ayant doaoé en ' aot à fon mari .1e'S
'7 110 liv. de la ' valeur de. .tqut~l ce qui fe troü~
voit dans .l'Auberge " c'e-fi'iutant de r~tr:anché
fur {a fortune que nous av6n& ne ~ fi ;ît1ônter
qu ~à J 1 21 21 liv. Il Qe (lui ' refia' ,dpnc e~ ~iells
paiaphemaux,'que. ' 5~(ü 1iv.~ ; nont 3454 'étoieÎit
déja -piacées . fùF ', u~ -mai{on. ".C'é(t '~veç \éèt:t;~
fortun~ ~u~ l' ori veut .qu' An~e ~~n~~ay ait ~aIl.rré
.2.000 I.tVl. a fGn fi.~9-; pa-r {on con,trat de manage;
du 13..M ai- 17'51 ,- -& ~u' elle ait Tartlégidniemenc
pOUt Î: 7oob'"Iiv. d"aéquifitioîisi.. Ma~s n'anticipons
1·<....
...... u"... ... 1~'1,J~
rl'en ,. 1 .....,. ..
J ofeph ' Roni~ etoitl à' Marfeill~ depuis· longtemps. ·:n y avoir~ l1fj Grolumêrce
; . il Y était .'AlIr
ber.gifle., ~ - ainfi.::qÎ!é t prbtivè ·{on contr'!-t de
mariage ~'1!l1 avo~t- ~né , fait. des' epargnes ,
&- il '<l90ir du tomp'1:a-nt. Cet rargent verfé danf
l'Auperge' des deux.:: Poi-umes ,'2'&_Utilément employé, lui profita tellement qu'il fit dans fep t
S'y
va
1
,
1
f'
.....
B
1
�(1
ann~~ des flcquÎfit~OIl~ pour la fo 1l1 me Îlnpor ..
tatit!' dé:. 3 542.0 liv. 'Ces. 7~ ~llnées qui foht les
premieres de l'on mariage, nou~ c()nduifepc à
l#;iQQÙ 1753, A .cet~e- .,Ié poque, ~9lJ[~S les déP~rlfes. étaient. ,(<J\tes, ROql~p a,vQi t . acq'\l'j~ l'Auber~ du graqd ,St. }~an. Il: n a.v olt confequem'men~ plus de ~ ~çnt,e à pay~I'>SQn . ~.uberg~. éto~t
pOUI'(L«! '. de ço~t, .a'Gcrédlt~~',)) ~ s Il avolt faIt ,
~ne fqrt~ne Li cÇl!1lldérab!e :~n, Ji ~~e!:1 _ çl~ tems
,avec : mo.ios ~~~v~ntages, (\!1 de,volt S:l;IttéJl~Le
voir çt:tte fortune. aug{!l~tl.1er eH prqportlon
lor~qu'il Q'avQit, pour atnfi, dire " plus qu'à
.
g~gller.
,
. C' dt çependant à _cette ' mê{lle époqt.te que
finl{fe9~' fes .acg:lifitiorls : pJ.u~. d'achats ~ 'plus
de placfll1ens dep.u.~s 17 S3.,)'}oman pe~ fa.it.plus
qu'une. qlodiqye_j-cguifirion ' d,u !pri?C de 'l 1:-06 1.
en l:7(iJ, & lo~fq~'it l)1e.urc en 1.77 4 ~ . 0;t .nc
lui tr~uve qq~d r'!J.V~, .-:' "
,
Qu'dl-il dgnt , ~rpv.e . ? Ql!:él ,açcld~nc a co.u pe.
le èôt\rs rapid~ qqe 'preppi,t la ;forcune de .RomRO ? _Il ' n~en ' fal!t point -cnj!rtiher d'au~~e que
la ,~çm~t~ È~.. fa r fel1:11~el' J\lln~ Bonif'ay avo~t
quarF'i ~nfa,ni.c. B!-h'N~Illl~, ~ hE ~U~ 'n'en avolt
po~r:-ç ~ ~'l1. -(e'io,n9,. . ~lle~ c~flyol~a: l~ fO,nune. .de
fon lllf\Pj. &; Xquk~~, en :;~~!f~ ...) p.dreLa. '.~~ : en
fans·, fioon la totalIté au mOIns la meIlleure
partie. ~ 'I;lle ~y:~! l: prjs :' l:Jl1Jù~~'irct .ibf~lu . fur
Roman q~.i , ~to4- ..d'u11- ,l!aiHfe.:t.. dQu~ Jk tranquille. Elle . en ~~fa. C~ :.n~~tolt . point affez
de i'a..Y
.Q.Ïr eng,ag~" jl dot~F . toû~\ [es enfans, elle
s'appropria ~~~ l~S ' PN&~~f .les béné6ce:s ~ en
fit de~ ~cqui4tiQ9S., à. [qn qom;, & fes"acquifi., ., ....
r
,
[
>
7
tlons .qui s'élevent à plus de 24000 !iv. commencerent en 17 P, c'efi-à-dire à la même
, R oman
'
;)c;:eifa d'en faire." EUe's ,con'é poque ou
tinuereur tant qu'il vêcut, & après ta, mort
dans l'an ~e 'deuil, elle a · ,e ncore p~yé. près
de 3000 IlV. Or ~ les .AdverCaires conviennent
page 10, que Les acquifitions faites ' dans 1'année du deuil Jont cenftes provenir ex fubfianua manu, parce que Le mariage eft cenJe M
quelque façon durer encore. Nous· avons donc
eu raifon d.e dire que les acquifitions faites par
Anne Bomfay pendant le mariage, ou dans
l'année du deuIl, font un objet d'eaviron
27000 Iiv.
'
Toüt cela n'étoit pas cori'nu en détail à la
mQrç , de . Jofeph Roman. Jofeph-Ancoine .1)0m~n fon neveu .~ qu'il avoit infiirué [on héfrÎ)
tiér ~ : & ' qui · clemeure à 2. 5 lietJes de. Ma'rfeille ., ,homme limple & illitÙé,' n'e~ fçavoÏt
que ,ce, ~U'OQ ,lui avoic. di! . vaguement. Il fe
rendu a Marfel~le. O,n ~t ~n inventairç parce
~~e .:~~ne B()~lr~Y s étou ~ncore faite . l~guer
1 urufru~t des. bIens de [on .mari. Cette femme
ii16de11ë jUfqlÙU pout, ne dé,ç:1ara ~r [es a~.
<f.tÛJi~lp~s: ell~ en çacha qlême u·r,t.e
~n' ma/:j _.~--.,~
~!i~ë:rBu'elJe. poft?i{ :fur ulïe.oJl~Qpriété·- CQ.ntiguë
a ~~nle Jes fi.t:no~s., & qu:t;llfi f comptoit fe 1'-<11'l!r.?pn~ arec: ,lç ~',otfl. ..E.!1r-1s~para de . ~out
1 ~r~ept _,comR9nF ,: ne , d:~cLa{a ~que ' ~ Ij\'." &
ht,.,e.n l U1;1 mot ..to~t ce qfJ' lIe ,put pour ..affqib!lr les . refies ,,; d(~)'bél'edit~ [ ql:l;e~le aY9!c .~év;afte~. .-!,{ornan fe cont5nta de ~~o~~fi~r" .fQ~~ pâur
avolr.~ 17!· tems -d'~gir avecconq.oiilà,nce-, fojc PQur
1
• II.
1
, 1
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" H'
• 1
•
•
•
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~
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•
8
s'en procurer les moyens, fait parce qu'Anne
Bonifay avait l'ufufruit du tout, foit peut-être
parce qu.'il ct>rnptoit fur un retour de fa part.
Mais lorfqu'il fe vit trom~. lQr~qu'il vit
qu'Anne Bonifay &~ fes e n f a n ' t prefque
tout envahi, & que par leur10 .. .:r~àtions, les
donations qu'Us s'étaient' (aites faire, & les re·
pétitions qu'ils ~voient à l:xerèer, ils rédui.
foient, une héredité 'confidérabfe à la- fomme de
20000 li v. fur laquelle il lui refioÏt en<:,ore d~s
legs à payer., alors il fe dDnna des peines;
il implora fes amis, on découvrit la fn~ude:
on lui donna des ' moyens, & il préfeqta fa
Requête au Lieutenant de Marfeille le 28 de
Juillet 1778.
'
, ,
, On contefta; on ' écrivit de part & d\llître.
La queftion fut enfin fixée aU 'poipt de fç-qv~,ir
fi Anqe- Bonifay , ~ ou fait fes héritiers, ,ét6ient
obligés'à rembou"rfer le prix des acqùifitions ~faites
par leurr'mere ùc' l'argent de fOll mari, ÇlÙ s'ils '
devaiènt- les gardé'r:
'
•1
Cette - queftiç>Il " était fimpJe. ' Çependant ~pn
furprit- une Sentencè qui débtlllb
Roman
de
f
r'.:. •••,. ~ fa dem~rl~ :-!l,e "Cft du : ~~ ' ~;p.t~H1br~ 17..79,
t'
• .....~oma? ~~ . al?'P:lf~ le me,~e), )\>~ ; ,S a ,?éclara~
Uon d appel ' eff dan~ fon' fac (bus cotte T: T.
ail "a eep-endinf .l~it :ql,l'il n'31'Voi,t p~s op én dê·
clarer . qppel ,- &- . qUe ce ' n'eft, 'que' le l b Mai ;
17 82 ; .
a iirfuii[n'é cle :; l~ ~'!t~arer 'f(. iJe. Ze
réléver. 111 l'a 'd éd,aFè Je, 2" de ,Sel2 tern l;>reI;79,
le jout : Juêlne ~ <:pie. la "Sent~ncé ' a; été ' rendue.
S'il 'à t!'rdé de ~Œ,"t~ever ; c'ë:tf parée qu'~t~nt
çhilrgé~ de i6 ènfans; les moYens1.1u i dnè1man.
qué
~.
quIa
\
~,.I
,
,
9
qué ; mais fa - volonté étoit mahifeflée , fan appel déclat:é. 9n né .'peu't donc pas mieux fe prévaloir de fan inaétïon forcéé "llprès fa déclaration , qu'il Il~ pourroit le f,!iré de ce -q6e les
Adverfaires ne l"onc 'ailigné ~ ni en anticipation,
Dien défertion. ~ -,
- Qlfqiq.u'iL e"ri Jfoit ' , l~appel eiifte ~ & nulle
~on{~dération ne ,peut en d!~in'u'er l'effet. '
" F:aut-il ~ rie, faut-fI paS ':éfotmer la Sènûhcè ?
Ç~fl tout ce ,qzie' nous avons à examiner. ; Les
in'tÎlnés ont raifon: mâis avant de nous 'Ji~rer
~ cer examen. " fixons les idées, d~après lès' i6tÏmés
eux.mème~ page 9' de leur Mémoit~ iml .
pnme.,
., _.
J.) Si la Sentence pou voit êtrê réformée, "fans
» doute il faud/oit adjug~r ' à ') R~:imari non:feu ~
;) lerncnt le prix aes acquÎfitiôns faites par Anne
» Bonifay, & payées pen.dan,c fôn fecadH ~ ma
») iÎage ',- & les intérêts des fommes for,lt111n't le
» prix de ces acquihtions, ' mais encore Î les
» 24~o "live 18 f. payées par Anne Bc;mifay
)) dans. l'année dû deuil. Toures ces adjudica)) tions ' ne feroient qu'une - ço~féque'nèe db
» principe, que la femme n~ayarit rie~ d.e libre
» pendarit le cours de fan mariage, & ne proù.
» vant pas undè habueric ~ 'il -fàut nécéffaire» ment préftimer qu'elle a acquis & payé · des
» biens du mari, & par , conféquent.la con» damner à refiituer aux héritiers du mafi
)} ce qu'elle n'a pû aV'o ir 'tût! ' du chef de "fon
» man. »
Voilà donc nos fins juftlfiées, ' fi l'on ' ne
prouve pas qu'Anne Bonifay ait, eu 'dès !-ièf~
C
J
L
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'.
'
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fourc~s
- Il
& des bieQs. paraphernaux aŒez ç:on-
jours .conv~nus'J ~a re,g1:!,! t<:efi-è lo-rfq-LIe la ,femme
iidéT,aples ' , -pour payer les acquifi60ns ~mpor ..
tantes -~u'eHe a faites rendant -fon mariage av.ec
J ofeph- ~9màn. ''- - - ,
ç~ poiiJt dç" l'û~ ' eit le feul quj doi:v~ ~ous
occupe(. te drOIt eit convenu de" p~rt ~ cl alf-'
tre. Nçws r~V9~s , diç dans ,[<luteS nos Co nfultatio~sda.n~' la derllierè çômrke~ dans' les pré-
piouve undèhabl~it, c'~'-à·dire b lorf<J:ü:elle
montre des , re~tl{c~s " parti.cuJi~r~s qui oqt pu
foumir . le, prix de~ l-!cqui{iti{)~s faites éORflqm-c
matnmonLO.
A
fem e, ;:J .,açqYl~ e:f f..~,f!!ma Vl{"l ,, ;~ {l10ln{i ~u elle.
Qe .WO~lV~, ùQ.i{rlJ.ab~erit. L,a Lcfx ' explique fe~
mo.uts ; ç èa ~a e1-·iûlndam iurpis' 9uœflûs .J}tr
piciôTlerjl. Les Atlver{aires en ~étôiént · co~verius' :
ils ont'·plûs fait dàns leur Mé1110ire imprim~ ;
ils ont ~~,<ilBli c~ .point de droit, rapporté des
au~od ~s ~ & tfiOlJS " fomm~s , en.core cett~ roi~
dj{pënfe~ dé i!pps,y.â,rêter. L'~) 'texte d~t~averfaire 'R'QLJS f\J$r.,
,'~' ;' l
!~ 'Rien Ij'èQ ~tus ' vrai ?, ~ifent-i1s pag'.~ tI ,
)} qijé :'~e~ priQclpe géné,ral irivpqué parAA'ntqin~
» KQmal1. If tiepç 'aux mœ/.lfS; à l'horinêtet~
)) l,up}ique, ~ il f~ut pour ï'honneufdnêùle du
)l rè~~ q\.le [Q~t cç qulil aç9uiert, to~t ce qu'il
)) p~ye QU ip.l.lt. Ç€ qu'il dept!n[~ conj~a.'!-te ma)) trif11oni.f), (Qit cepfé proveqir eX pecun/.â ma» rÙÎ, l'éUe Ilfi la difpoGtiofl çle la fatheufe Lbi
mrilius(jf
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qrÛhlÙs
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Mais on Ce fyrÇlir:ljl;l(IQn.fi l''On croyo.irt :q4~~
1impJe préfompti<:!n fu6it poue, déçruire la : préfomption de la,. Loi. ,.Geile-çi
jurÏs & 4,e jure.
_l' out appartient jl~ }l'Iari ça the{e généra!e. La
. f;mme .qui vel!t fe ,placer dans Texc~ption "do.ir
_poru: prouver ,q!.l'elle a eu des re{[ources, cl' ailLeun;) des biens p!1r~phernaux çapabl~~ ~'av.6ir
R~oduit les ' aç9ui6.t~9S.. La, Loi pe .dit pas /;Indè
habere potuerzt, 'mars unde habuerq. Il -ne {uf.
fit donc pas que la remme qit pu avoir" il faut,
qu'elle prouve , qu'elle démontre, comme le difendes adver{aires, undè habeat. Or une -pr-eù ve
une démonJlraiio'J. ne fe firent} jamais par une
fimple 'préfomption.
Lorfqu1on dit que la pre~Q.mptl?n de la ~Ol
peut être détruite par une preiomptlOn contraIre,
'cela s'entend de la préfompti09 ,de paiement -qui
naît de la certitude Eles refiources de la femme ;
mais ces refiources ne peuvent pas être préfumées.
Elles doivent être prouvées, dé,m ontrées; & la démonftration faite, alors qn;pr.éfume 9ue ces 'reffources ont fervi aux acqUlfiuons faItes pour b
&.
)l'
.
l '
de donat. iru., vi~~ Efùxo~:
dl: atteaée par 1 t,QUS les
•
femme.
n .autf;;~rs; &. qQpt la difpofirion eff d'ailleurs
)) fi trIviale qü"'eUe n'eft ap{olument "1éconnue
» 'dë 'perfonne.
.
.
~Qllt> ç..pnv{n<;l1J.S cl llQtre tollr , de l'ef'~ption
à, ,:-,:êtf~l!esJè S~!1eral~ , & ~ous en fo~m~e~ toU~
Si les héritiers d'Anne Bonifay provvent donc
qu'elle a eu des biens paraph~rn~ux afie1.. c?~
fidérables , & des re{fources afie'Z. multiphees
pour payer: 1.7000 liv. d'acqu,ifiti,~ns, la, Se?
rence doit être confirm€;!e : malS,. s 11s ,n,!:! rempIrf, fent p~s cette preuve) s'ils n'ollt pas même de s
1
\
•
�12
préfomptions à oppofer _, s'il eil: confiant que
Annè Bonifay n'a eu qlle des biens parapher.
nau~ -de pe.u. de valeur , dont elle a même
donn~ la majeure partie à fes enfans s'il ~R:
vrai qu:elle n'ait .~~ ni pu av~ir aucun c~11lmerce
particulier & féparé de celui · de rOll' mari ', la
'préfomption d.e la Loi s'applique d~ns toute ' fa
force.: les acquifItions de cette femme font_cen.
fées faites ex pecuniâ vil'i: ,elles appârtienne~t
à Roinan ': la fentence doit être réformée.
_
'Or il fera difficile, pour- ne pas dire iinpoffible aux hoirs d'Anne Bonifay,d'échapper -aux
con[éqüences qui naifiènt de deux faits c~rtains
& majeurs.
'
,
~e ' prel.nier di que dans l'efpace de 7 années
qUl von~ Juf~ues ' ~ll .. 1 753 , Roman a fait ' pour
36000 lIv. d acqll1fitlOns , bien qu'il eut à payer
le loyer de l'Auberge; & dans' ce tems là Anne
~onifay _qui n'avoit pas encore afièz pris ·d'em.
pIre [ur [on mari n'en a fait aucune : mais à
cette époque les fiennes commencent & celles
du mari c~~èn~ , bien qu'il eut acquis fon Au.
berge, qu Il n fU,t plus de loyer à p.ayer, &
que toutes les depenfes étant faites , il n'eut
plus qu'à gagner. Du moins s'il avoit accumulé
on 'po~rroit dire . qu'il avoit gardé fes profits ~
~als :a f~ I?ort AI1~e Bonifay a déclaré qu'il
n av.olt. la:ife. que 3 II v. Ce premier fait eH frappant , Il l11dlque la [ource des acqui1itions nombreu[es de cette femme.
.
Le [eco?d vient encore à l'appui du premier.
.- Anne B?mfay s'étant dépouillée. en faveur de
fon m~n, de l'Auberge & de tout ce qui s'y
•
trouvOIt
' q
.trouvoit ; . ce. qui forma fa dot,- n'a eU PQll1"
tous biens paraphefnau,x que )011 1iv,;: ~ dQnt
elle avoit même d~j~" lemplqyé: 3:4514 liv~ .,~il:itç ~
quifitiof.l de .1<1:. lJt1a ~fon ' de lé! ,pl.'!c~ de J'Auriol.
Nous J'avons 'pr~~Yf -: Cett,~ 4ern~re' fomme ne
pouvoi~ .plus_ [e~-V:~;r;. à :.d.e _n91.!yelles ~cquifitio~s.
Il ne refioit donc à Anne Bomfay qu.e J S:5.7 . hv~
fufçep:çib]e ~ de ?ouyel emplpÎ,' ~ le loyer de'
cette mai[on de J~ 'place d.e. tAU!.lOl. . COp1meôt
avec çe modique '~vôir , ~ au!'!-:t-elle payé l~ ~
intérêts ~ d'environ . 4qoo liv .. qy~ elle refi:~ {k~
voir du' prix ' de cette même mai[on?_ çpl1'lment aura'-t-elle, nourri quatre enfans du p-r~mier
lit qUI ~'toient à fa _ .~_~arge ? Comment ~.aura-t
elle donné 2000 liv. à .[on fils. ~n 175 1 ? I,Com·
m"ent enfin aura-t-elle fait des acquifitions po.ùr
·2.7 0QO liv. ? Cela tiendroit, du pro~ig~, fi :l'on
ne connoiifoit la [oyrce o~ eUe pUlfoit
Pe~[e-t-on échapper aux réflexions que préfentent ces deux faits, en di[aI.lt que ROlJlan a
pu ' (oulager fa famille " q,ui Je ~rouvoit ~an's
1'indigence, ou que les benefi~es n ont. peut-e:re
pasété auffi wnfidérables apres les hUlt premle·
,
resanoees.
.
Mais fi Roman avoit d0!1né des recours à [a
famille , il ne lui au"roit p_a~ [acrifié Ç911S fe s ,
profits, ou s'il l'avoit fait, [a tamille [eroit Jor·
tie de l'indigence; & cependant elle efi encore
ce qu'~l1e étoit , c'e!1:-à-dire , hon~êt~ & ~au~
'vre fans avoir jamais été dans l'zndlgence. SI
les bénéfices n' avoie~t pas ét~ auffi c0nJi.déra~les .
après les huit premzeres annees, du mOll1~.·n ~u
roient-ils pas été nuls : & . cepeQda~t ~- [~pp{~[e
f
\
/
�. , 14
.
qU·âJ'tès avoir -tWquls une 'A-uberge , s'être meuplus rien gagné .
.blé -Bi: ,a ccrédité, Roman
abl01ument rien : 'YeriffimiZ.i~ jinge. "
'
.' ',,)1 .- Le mar~ ' n'ayant rien" -11 a commencé de
n d~ .canfolidet:.fa furtune--atbc â,é pens m~me' de
~) . fa' femme ' iV-actt -de -lui : pèrmettte -d.C" ' penCer
, ,~ t_ fi
, ,
t) a fj;I:
leune. l'.'
- _. ,.
_,
.
n'a
.~ Et où, a-:-{)l~ (~u .,~ar où prouve:'!-~n
:,uè
R?I~an-1l avoit fien " & que JAnne Bomfay avait ·
urie fortune? Cetté fortune è!fi connue:' eHè avait
la : maifon de la. place de l'Auriol & 1:557. liv.
& .l'on · veut qu'elle ait : payé les intérêts des
4000 l ~ qu'elle dev<;>it, qu'eHe ait donné ~o'()o l.
à fon · fil-sen I7S1 ', ' c'efi-à-dlré, dans le même
tems ; que Romàn fairoit fes acquifiüo~s, qu'elle
ait 'holirri (es. quatre enfans ; & qu'el~e ait en~
core o
eil. de quoi fournir 36000 liv. à fori mari.
Si Roman n'avoit pas eu de l'argent en Tè-inariant ,. s'jl ne l~avoit pas verfé dans fan Auberge
poûr la f :!ire valoir, s'il n'avait pas eu ' Uh trafic oonûdérable, fes ·héritiers n'auraient pas à fe
pl~indre aujourd'hui,des ufurpations de fa femme.
- La ' foibleffe de la réponfe prouve donc combien font viB:orieufes les réflexions qui naiffent
de ces deux faits. Avançons:
""
.
)) La préfomption de la Loi ceflè , ' difent les
» Adve-rfaires.
»- 1°. Si la femme a accuèilli le mari chez elle.
» 2,0. Si elle n'dl: mariée que fous une conf» titution particuliere, & que l'on prouve qu'elle
JI avait des
biens d'ailleurs. 1
~) 3°· Si eHe a fait un commerce particulier
» lQdépendant de celui de fan mari.
) 4°· Si-fan mari a fçu & cOlmu qu'elle tra.
1
,~
j
,
15
"li'
, » . fiquoit ou ' qu'" elle fa~f~it des acq~ll It1Ons.
. Tout ' ceh , peut etre vral fous certams rappo'tts & en thefè générale; mais fans flous arrêter ~ ~Xatninèr le principe, venbrrs-en ~)':q.p,p licatio.n.
'
-'
"
.
- ,
1°. Dit-ùn, pag. ,24, Anne Bonif~y ac{euzl:lit the'{ elle Jofeph J{oman.
" ., " Point 'du tout. C'eil Roman qui reçut Anne
Bonifay ohez lui. On voit .par leur contf;1t_ d~
l!lariage 'qu'elle f~ confiitua en dot tout. çe qlll
était renfermé dans l'Auberge, & que '~o:man
fe chargea même du loyer de cette m ~tpe, Auber.ge. Il devint donc acquereur de t?US le~ e!fets &
, locataire de l'Auberge. Anae Bomfay cega donc
: d'être c=hez elle, & ne fut plus que chez [o~ l mari,
La préfomption mangue do~c Rar le fai~. S'il étoit
vni que la femme qUI accueIlle fOIl man ch~z ell~,
dut être exceptée des difpofitions ~e la LOI ql/znrus- ml/cÎcls " il faudrait au moins entendre cette
exception d'un~ fel~me ~ qui ~ya!1; ,une maifoll &
un coml11erce ètabh, recevrolt verItablement fan
mari chez elle, fans fè conftituer fa maifon ·, ni
fan cOlhmerce; mais n'efi-il pas abfurde de Val!loir appliquer cette , ex,ceptio~, ~onne ou ma~
vaife à la femme qUI fe depoUllle de fa malfort de fan commerce, de tout ce qui eft dans
Ctrt~ maifort, & qui fait tout pal1èr fur la tête
de [on mari? Cette femme ainfi dépouillée pour'ra-t-elle exciper de fa renonciàtioh à tout ce
qui lui appartenait, pour di~e q.u'elle a pu ~aire
des acquifitions à fan partIculIer? Ne duat'on pas avec plus de fondement que les bénéfices étant poor le mari qui s'efi chargé de tout,
. la femme a tiré de la çaiflè de celui-ci le pnx
�16
des acquilitions qu'elle a fait? or c'eft précifé, m~nt le ~as où ,fe t.rouvent les parties. La premlere prefompuon lOvoqu'ée par les hoirs d'Anne Bonifay, eft ' donc toute en faveur de Roman.
Ils font obligés ces hoirs, de convenir _à la
page 37, que Roman étânt devenu maîtêe 'de
to~t, les bénér~es de l'a~berge ont ëté .poùt
luI. Ils fe retranchent fur les prétendues refiources d'Anne Bonlfay , fur -[on eprétendu commer.
ce, & fes biens paraphern~ui ' , Mais .ils font en contraditlion avec -eux-~ê.
mes. Car fi les acqùiGtions d'Anne Bonifay ne
peuvent être jufiifiées que par des re{fources
étrangeres au commerce de l'auberge, il faut
que eon convienne que la circonHance du tranfport fait par Anne Bonifay a [on mari dans leur
contrat de ' mariage, .eH toute colltr'eux , & que
la premiere pré[ompti,o n qu'ils invoquent ne peut
figurer ici fous aucun rapport.
2;0. Continue-t-on, Anne Bonifay était mariée
fous une confiiturion particuliere.
Nous le fçavons ; & c'eft cette confiitution
qui eft la caure du procès: Roman n'en eût
probablement point e{fuyé, li Anne Bonifay
eût ét~ mariée. fous une confiitution générale.
MalS cette clfconftance feule ne dit rien. Une
femme peut être mariée fous une confiitution
particuliere, & n'avoir aucun bien paraphernal.
I~ faut donc prouver que cette femme a eu des
~lens paraphernaux dont elle a pu di[po[er, pour
t~rer quelque utilité de la confiitution particulIere. Les Adverfaires l'ont reconnu, pui[qu'ils
fe
,
r
\
17
fe [ont engagés à prouver qu'Anne Bonifay avoit
des biens d'ailleu~s.
,
, Quels font donc ces biens? Voici le détail
pompeux qu'en font les Adver[aires.
' Elle av oit la, fucceffion de Jean Lyon, fon
premier mari, une portion de la fucceffion de
Louis Lyon, dom Jean' Lyon [on mari avait
hérité, tol,lS les bénéfices qu'elle avait fait depuis la mort de fon premier mari, la maifon
de Lauriol, de l'argent comptant, puifqu'il lui
étoit dû 799 liv. pour prix d'une voiture & de
deux mulets qu'elle avait vendus, & que le 5
Mars 1746 elle avoit prêté 307 liv. ; enfin un
commerce particulier & indépendant de fan auberge & de fes voitures.
_
, Mais tout cet étalage ne produit pas grand
çhofe.
La fucceffion de Louis Lyon nè devroit pas
faire article, puifque Jean Lyon en avait hérité. Elle efi ntce{fairement confondue avec celle
de Jean, & les deux enfemble 'font bien peu
conGdérables. Nous l'avons déja prouvé.
Les 799 liv. pour prix d'une voiture &de
deux mulets vendus par Anne Bonifày le 2.6
Mai 1746, lui appartenaient réellement. Elle
n'en avoit reciré que 99 liv. le jour de l'acte. Il lui était encore dû 700 liv. , C'efi la dette
de Turre!.
,
Les 307 liv. que l'on dit qu'elle avait prêtées
le 5 ' Mars 1746 , ne lui étaient plus dûes lors
de fan mariage. On a fait une équivoque. Le
prêt eft du 8 Novembre '1745 , & le 5 Mars
1746 eft la date de la quittance de ces 3°7 liv.
~
E
l
�'Ig
'~ba~ ,Far ARne !Jlonifay. On peut 'vérifier
\
1 aéte. Il eH fous cote 4 B.' Le- mariagè etant
du 17 A,oût ~e J.a même année, eH poHéri'eur
de plus de ' CInq, mois à, la quittance concédée
à lPe~u1. ~r, ~~hS, cinq mois " Anne B<;>nifay
p@UV.Olt aVOIr dlthpe ces 301 hv. Nous fuppa.
{:ons .cependant le contraire ~ & nous 'l'admettons ~pu:ifq-u'of1 le vC'I;Jt.
.
Le ·commer<:e particulier& indépendant de Fau.
ber~e, cfm111er,ce {}u.e l~ en reproduit à tout propos,
&que 1 ·00 pretend prouver pàr les pieces cote
l R, S, -T , V, X, Z, & i 4 A, 4 B, ~il: un
com~erce ' purerbent idéal, imaginé par lès Adverfau.es pGur produire des fons à défaut de
paroles.
, ~QPS l .a,v ?ns ees pieces fous les ·yeux. Ce-IIe
q~l eft cotee 4 B, e{} le prêt de 307 liv. II
refljllte des, autres fJu'en -I74~, Anne Bonifay
paya . 280 hv. qu'elle devoit au fieur Jauffret .
qu'eile achet~ une fois cinq charges de féve/
&. [Ix mois. après vingt - fix autres charges
qu~r~n,te émfnes; .qu'eHe prêta, on 11e [çait quand,
pU.lfqu ea ?e V,Olt ~ucune dare , 576 Iiv. à un
homme qu~ l~i 1al~a en gage huit balles de
chan,vre peigne; c[u en 1744, elle avoit acheté .
58 h~. JIQ ~e grain; qu'en 1'746, elle avoit
ach~~e 45 lw. ,de [avon ; " enfin que la ll(ême
a?nee elle avoIt acheté cinquante charges de
féves. .
.
, Or une f(}rt1me qui a 4e's vtJÎtures &- une aub(!rge., P€UE bien fa-ire toutes ces' emplettes pour
la cO,nfpmmation de fon auberge. 'Elles ne [ont
certa~~ent pas, tr0p confidérabIes:
ces min.
&.
f:
ex
-i9
ces ~tll:pkttes me ptouveroot ;amais 12n 'commerce.,
~taplj .& ù:ulépendaht,QN voiwl'€s '& ,ile Il'au'b,erge t
.encoPe moins un s,rand ~(!Omrnefce.
A pprécions donc tout ce qu'on a dit des moyens
l$( ties r.e.ifollrces fc!'ÂllDe &nifay avant {'on--ma.
;r,iage. Les fUClceffiOllis~e Lot'lis. & de Jean,tYon.,
les b.étit.é1ices qu'elle avoit fait dans le commerce
des (J;Ioitwre-s & de tauberBe J -l'argent comptant,
tout Ce r~d.tlit à 7.00 liv. dûes par Turre!, à
1<D.1.Jiv.• qu'f:~Ie avoit ret~rées de Pe-coul le 5
Ma'rs j 746, à la maifon de l'Aul'iol dOQt eUe
i\v,oit payé HS4 liv., & en la valeur de ,ropt
ce .qui étoit r~nfermé dans l'auberge, qu'elle
~YaL\lIa 'elle-même ,à 7110 liv. lors de fon contrat de mariage. Nous y ajouterons les 5'S0.-l iv.
qu'~lle. avait à ,rép€ter fur la [u-ccellion de tous
fes afceôdans. Il en ré{ultera , ce que nous avons
dit, que tout ce dérail pompeux' fe réduit à la
(omme de 1.1. I2 1 .liv. , de laquelle il faut dét'raire
l~s 7'1 la liv. de la cO!1fiituti<>n de dot: au mÇlyén
de quoi les biens parapnernaux d'Anne Bémifay
(e r~duifent à' 5011 liv. d?nt f454 Iiv. éroient
placées fur la maifon de ·1'Auriol. Ell~ n'avoit
ponç plus à àifpofer que de ' t 5 57 Ev., & dIe
avoü: à payer les 'intérêts d'environ 4°00 liv, du
{(l:!taQt Plix dè cette' Inaifo.n · ~ ' '& à noutrit; fe-s
qll.atrti enfans~ Telle éteit la polition d'Anhe
Bonifay lor[qu'elle Ce maria. ' 9n nous a forcé
de ré.péter ce flue nous avions- déja dit-; , mais
ce t~bl€au eil: fi ' frappant; ' qu'on nous paRera
d'y _êr:re.revenus'powr. dilliper J'iHufion que l'on
yotiloit faire.
. ~ .. _. "
. ,';. . ,
Que l'on dife à préfent que nous coizJtêllonJ
.."
"
\
�,
zo
que . la c,onlliC;Utio-Jl ,de dot- d'Anne Bonifay ne
prit abfo)ument rien, ni fur fan commerce ni
fur l'argent qu'elle avait, ni fur la maifon q/elle
avait acqui[e. .
'
On peut nous prêter des aveux; mais en les
créant, on Ile les prouvera pas. Nous ne fommes
jamais convenus que de ce que nous convenons
encore, c'ell-à-dire, que les biens paraphernaux
~'Aqne Bonifay fe réduifoient à la maifon de la
place !de l'Auriol & à la créance de ' Turrel. Jam,a,is: nops n'avons avoué fon prétendu commerce ;, ~ comment, l'aurioBs·nous 'a'voué puifqu'il
n'a jam~is exifié & qu'on n'en dOI;1ne au~une preu've ? Une femme qui tient une auberge, fera-t-elle
commerçartte pour avoir acheté4s1iv. de favon
S8 .liv. de ain & ,quelques charges de féves
QUI ne fecOlt co~nmecçant à ce ' pJ:ix ?
C'e!1: cependant [ur ce prétendu commerce anté4
rieu~,au mariage d'Anne Booifay; fur ce commerce
fi. important., fi bien établi que 1'00 fonde la princIP.àle',~eff~urce de cette femme. C'ell-Ià que l'on
put[e d~ 1 arpent, e~fio tout ce qu'il faut pour
prouver runde ,h abueru. La reffource ell mer veil~eufe '; ryJais 0,0 ~lt à même, de l'apprécier à fa
J~l1:e rf1l~ul.", o & ,9.e. voir fi l'on peut avec des
bIens ,p~rapher-naux t. auffi modiques fe prévaloir
de }~' P~oc~n.~aace J d!Cme confiirution parriculiere, ~our .legulmer .2700fJ liv. d'acquifitions.
~, ' . Du-on, fi ce~,! ne f~ffit pas ~ nOlJ.s 'au-
w
?
rons encore .Le commerce farticulier & iizdépenda~t .d~ ce!Ul ,de, .fon. man ~ qu'Anne Bonifay
faifou apres [on marzage. C 'ell le comnrerce de
falure.
r
''''
_
Or
1
2i
ce comme'rc:e appartenait à Jofeph R~ ..
& nori point à fa femme. U confillOlt
man,
..
.
l'.
&
ue
en proviGons d'ancholx ~ rIS, . lavon, .c. q
R oman a voit imaginé de tentr chez lUI p?ur
attirer un plus grand nombre de Muleuers
Y
ces fortes de
de 1a haute Provence ~ jaloux, de
.
ft
é
marchandifes. Ces proviGons eta~ent en erm es,
& fi dil1:ribuoient dans un petit magafin que
l'on eavoit pratiqué au rez de c~a~{fée de l'Auberge. Or, l'Auberge appartenaIt a Roman. Le
mag afin de [aiure était donc che~ Roman. Il
n'était donc pas~ féparé de. chez ~UI. II ell donc
cenfé lui appartenir à mOIns qu on ne p~o,~v.e
le contraire jufqu'â l'évi.de~ce. ~out ce qlll etaIt
" chez lui, était de drOIt ~ lUI,' &. t?~t c.e
ce qui s'y fai[oit, e~ pre[ume aVOIr ete faIt
r s ordres. L'exlfience feule du magaGn
par l e
.
S' A
chez lui ~ vaut une preuve entler,e. 1
nne
Bonifay a pris foin de ce magahn ~ fi. elle
des marchandifes ,
a ve illé ' à la dilhibmion
.
r. .
r
d
fi elle a aidé [on mari , elle a raIt..- lOn e. Elle ' l'av oit promis en [e manant. rUne
VOIr.
.
r.
ne de fan état ~ de vait donner [es lOlOS
rem!
.
"
d'
à l'Auberge & à tout ce qUI en etOIt une .ependa/1c.e , operas fo,as qllale(cumqu~ manc~
Or,
an cenetur , fi eam marltus
eXlbeat
Je
.
'
.
:fl
P
/cumque'(habeat.
Les ad~erFaires eu~-~emes conrœ
fviennent qu'elle ' devOl.t a fon marz ',o~er~s
obfequiales & reverentwles , un tra~azl relatif
'ommet ce de Î on mari. Les fOlns qu'elle
au c
JL
d' r ' d
'
és à la' vente des marchan Iles ont s a·
cl
n
a on
d'
.
e peuvent donc pas êtr~ règar es ' comme
glt, n
,
1 C' ' . l
une , preuve d'un commerce a el e.
etaIt e -
F
�~:.
comm~ce de fon ~ari, qu'elle faif0ic dans l'Au.
berge, de f~n. man. Les profits appartenaient
dOQc . a .celul-~l. On ne po~rroit dire qu'ils app~rten01en~ a ~nne ~omfay .qu'en prouvant
dune mamere bien claire. & bIen précife que
cette femme faifoit dans l'Auberge de fan' mari
un commerce féparé decdui de fon mari,.
q~e les fonds ·de ce commercë lui appartenaient.
Sion ne le prouve pas, les bénéfices du corn~erce de faILlre pe lui appartiennent pas davantage, que' ceux de l'avoine & du foin n'ont
<Jppartenu au Valet d'écurie chargé de les diftribuer.
. ~es Açlverfaires n'ont pu fe le diŒmuler
& ils ont . répété par - tOUt qu'ils avaient de;
preuves de ce commerce particulier & féparé
fait dans l'Auherge de ~Roman. Et quelles fon~
ce~ preijves? De$ certificats, des quittances &
des polices.
'
De qqatre po.lices qu'on a communiqué, il
en ell deux qUI ne fane qu'une. Elles font
à, la m~t;J;l~ ,clate du 18 Mars 17PI, à la même
configQ,~tlOn, & elles portent le même nombre
d;, ba~rds. Des, d~x, il n'en elt même qu'une
d, acgu.mée, ce q,UI proav:eque l'une 1n'efi que.
le ,double d,~ l'autre. Ces deux là & une troifi~m~ fQ.o,t po,ur Barcel~nl1Je, & non PQur Mar- .
fe~lre. Or, .Anne Bomfuy demeurait à Marf«!ill~: c~ qUI eft adreffé à Barcelonne; ne peut
~Pl\1c, R~s 1~ re~al'der. Il ~'efi donc qu'une poIt.ce qUI p-tllŒe ~tl1~ pr;odulte avec quelque apparence, . & FQn fent qu'une feule p01i<:e ne
prouverait rIen: mai~ cell.e.-G.Ï n'dl pas même
&
,
.13
Roman,
admiilible . . Elle eft adreifée à Mdlte.
rue des Pucelles, ~ Anne Bonifay demeurait
~ cette époque à là rue .des Etuves. On pbur·
, roit bien dire que ,le nom de la rue elt in - '
différent j mais Ce Jqui le rend effentiel, c'elt
qu'il exifie en effet . à la rue des Pucelles, une
Dlle.· Roman Marchande [aleufe, à qui la poÙc~ dont s'agit était adrefiee, & qui eH forEliée avec les Adverfaires.
-: Les polices .ne , prouvent donc rien. Voyons
l~s quittances.
,
'.
.
De treize qu on en a produit, II faut
e'n mettre à l'écart dix qui ne difent rien,
& qui étant antérieures au remariage d; Anne
Bonifay, font inutiles pour le point dont il
s'àgit dans ce . moment. Il n'elt .pas quefiion
ici d\.J prétendu commefce an'tér~eur au mariage , mais du comme~ce, p.~~éneur. Et ces
de ux commerces font bien dlfferents, le comm,efce ~mérieur était, CuivalJt les Adverfaires,
un petit commerce en fev~ '. en chanyre & en
{!,rain. , Le commerce. pofieneur un commerce
de Cal ure affez wnfidérable pour fournir à 27000
li-v. cl'acqL
uifitions. Or.l ce petit commerc~ an·
tBrieur n~ a même jamais exifié. Nous ravons
prouvé:. d'après le~, qu~ctant~s- q,u"on . nous op:
po,(e" & ~'ii a volt e1(~fié,. 11 fi ~urOlt ~as éte
COlûtintlé apIès. le ~ manag-e , p~~fque rien ne
pl!ouve qu'i~, l'ait été. Ces qllÎtranceii q~ij pe
l'rouveRe pas même le commél'ce anténeur.l
prouveront donc hien moins Jè pofiéri.etir qui
elt tout différent. Il faut donc
·les· lélilfeC' cW '
,.,
. - -'
, " .. _. '.
cooo.
li,.
,
�24
Il n'en relte donc que trois & c' . . .
r
'd'fc
~
es troIS
lefi're U1 ent meme a deux ,
parce
qu
e ce Il e qUI.
e . cotée MMM. n'elt qu'une copie de celle
qll1 elt cotée 000. Il en ré[ulte que le 16
Nove~bre 17 61 , Bernard \ Salvador a reçu de
Il Dlle •. Ro~an 1}0, liv. pour le montant' de
4° barn.ls d anchOlx. Il paraît par l'autre que
le 7 JUIllet 17 62 , le Patron Jean Vague a '
reçu de la Dlle. RQman 188 liv. 12 f.
'1 d'
. pour ,
8 z. b,arp?
. anchoix à rai[op de 2 liv. 6 f., "
& cette qumance n'elt pas même lignée ar'
Jean
Vaaue
0 r, 'qUI. nous d'Ira que
P
le Patron
."
'.
O'
ces deux quIttances n'oDt pas été 'co'ncédées à'
la Dlle. Roman, Marchande [aleufe de la rue
des Pucelles, & que les Advei[aires ne [e ' les '
[ont pas . pro~urées: df ~a même maniere qu'ils
ont eu la RolIce qUI etaIt adreflèe à cette même :
D!!e. ,RoQ1an, de la rue des 'Pucelles? Er quand
mem: on [u~p~fer~it que ces deux quirrances
ont eté concedees a Anne Bonifay qui
ffi
' Il
"
, n a li.s
a !-uera qu e e n agtfloit .pas _pour fc
&
' 11'
.
on man,
qu e e n en avoir pas reçu l'argent? Conclllr~-t-on de deux quIttances i[olées & fufpectes, les (eules ql,le l'on '. ait · pu produire dans
le long ef~ace pe, 3° ou 4? années que l'on
[~ppo[e qu a dure le commerce d'Anne Bol11f~r ·, que ce Cpnllnerce qui Ie [ai[oit dans la
~a~ion, ?,e ~om:an appartenoit .à [a femme plutaï.. qu .'a lUI :7 ' Y
. t rOLtvera-t-on . cette preuve
pleIne & . e~tlere, qui feule pourrait dérruire .
la p~t:nlhptJOn. lé.gale que . ce .commerce appart~oJt au man 7 . "
_
SI les polices & les quittances ne difent
nen
A
•
~
'
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.
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h9Pnêt~, fr<. d~'p Jnfj hoo~~e~ ~e,1alX des œd.
~erfa·· res ~f.QJllt #P MaU!t~'.m~.lfk' ~ runeidrime:t:..
tiq~~ ; un .V;qifWi~f~ , ~~JllvIiiru-es..tmABla~~
un tondeur d~\~~,lm . . V9Ih\de~J pe.rf~~s re(·
~aalt~~ ,qq.i. p~",~n~, itr~ , ,nue~ ~ J~r.[gufd.lles
he,t,I:r1telil,t ~ ff9lDt - ~, k~ pr~f~p!l!Olrur;_ ~~~
fl~ flH'~P : r~ê~:, (lJlf ~QnfuL, ·.àes ·.Mes, ,es,.
Artf. ri. df1S ~ u~l~p~s c., qUI . at;t~frfm, te~r ~r.op.re
f!liEl ,0~ ~pont j§s !~tbfiéJ!Mons \Com: fDrt;ifif!es 'pat"
' ~o l ~s' !Js . fl.réfotpI»(~ofj·S, fpij~.:dei gros uu:nnnus.,
~t ' ~e~ atte,ajlJ~O!lS (ont ifllies, &. dont" .les
c~rtifiFWS l}ç [Jl~uJ)mr p4p pqlafJeN les pUl:tJ'U
qJ.,li r,ç,(il~ten~ ~s .:~ut~~. .
... .
,Et. ~Uy 'dife-ll;t ,*s tt'/ndeut~ d~ 11J1Jl~eU, '.& ~s
fJJ~tr,~s,p~!{9nnes .re-fp-~atMs: 1. Us .c~rtrfie~t qu Ils,
n'QAt PqS 1/u . l\qman fe ' JTIf!!.é:r chl.:c0mme;nce cl.e
faii\.l~es. ~aisJ p'Irce q:~'Hs J)~ {e fDut Ir as ~rouvés.
d<J!1s. J'Au;bergl?, rot;! pajiçl! q.u~iils . avoient la he(r
he . n4 an.d J{9:I~P (. fpi{o~'fi rks:; Vteot.e~ & eu
-,. l I:L
•
r.'
:J
"1
jl .
r~ce.v~it~ j'jlrg.eqt : , ~'~qluIVf<t-~~' ''lu l ;ne Lalt
j~~~s_ fa~t' .~
Itf!s 9fio~r~-J:"~b ,pl-nt&t qll~ ietix .
q\Ji .. Q~t tr~l1te ~yec::~Iu.I , . qUl.ll>~ v:u.f~~ ! {OJl
commerce 1 Qlle devlent donc cetll3XlOme., plus
çZ:~6~tur . ~'W' a-ITe{-e~'li fJY.(J.frn mi~i .1Je~al1.ti.bhs ?
çep~nd~qt .a q~Qt (el' ~diùi ~et~ fo~le
dç prçUlI.es, dt l?qu~L1~ jk f~{ ieL ~è~dre al m01I!s
, YgiÜl
j
dji: yvp~:o,.\r ~~a,qerrlft{3h : C(lm€jJ~.r !l~ Jour en pltJin
midi -QLJ:it
qp-Ils fQJ-~ pe4iOl~ll(' œ, ne.rrpas _y
"
\
.
~ .: '. jJq
~ . :r.! .
« Mais ce n'ell: pas, dIt-on, fur des att.efia~
p tiOflt i!91ées -fly)l fiiUt' jygËr ,~'-un ' p.oint ; ~~~i
~) j;npwçint .. )) ; '
. . r,·.~
..-
.
~rpif.ç'"r
.
\
�2.8
A la' bonne heure: m'ais en reJettant nos
atte.fiations), ,s'il :.efi poillbIe de les rejetter
il faut donc auffi rejetter .les Vôtres. 1
~
Lcfyflême eft· un peu , êavaiier.
Ei: gu'a-t.:il de fi cavâtier? 'Les Adverfa{res
prétendroient-ils faire rejetter ~ nos atteITations
& . garder les leurs? Cèll celà qui [eroit ta.
yalier.- Car fOll't doit être <tgal, lX fi l'on- ~e
veut pas d'atre,fiations d'un "côté -' il · ne faut
pas , recevoir Èes certificats de l'autre. C'efi ' un
aéle qe Jufiice d'autant plus néc~lfaire id, qUé
fans être cavalier " nous p'ouvons dire' que nos
atteftations doivent êtf.e crues de préfé'rence aux
autces: , Ce' fer~lt donc beaucbùp faire .que de
les ~eJetter: malS en les mettarit de côté, celles
des_.Adverfaites devroieat fubir le ' même forr.
'~ Or ,' fi , Ob le,~,r ôte l~~rs certificats fufpeéls ~
q.ue leur re&-t~l} '? RIen. NOtls dirons "rieri' ;
~a:~e. qu:on aL,:vu que les 'polic~s lX, les quittances ne prouvebr ab{olumenr ',nen , &/ que la
foule -de preuvef dont on prétend nous' adcabler
te.,réduÏt . aur certificats', gt quels ce"rrificats?
D 'n: IfS" connoî~;; ) ~' I
~.
~ .Ân'ne.) BonifaYdn'avoit "dont point ' d'è-- corn ..
mei~e ~~ui iu.i' ,-f~t'- propne, Ellé né faitoir que
'donneL:; des " fOIns -aloi- commerce ' de roil ,' mari '
d'ant\ da mai{on de ' [on' mari, Les bé~éfices d;
<te ..cop1:ner~e '?nr donc alp'parrenu i:f R~man. Sa
fe~~~)e ~'a ,pu fe les approfr~er que p,ar un
larcl1;1,
( L,,' ,
'
• J:
·El!e · n'a . trônc~ j~niais eu -que Ies-soII Iiv,
de bIens paraphernaux dont nous avons'/ déja
parlé
•
/
�3°
fomp,t~on de la. Loi quintu~ mUlius e'fi fci aidée
JI
de tOlites ks clrconfiances.
,
4°~·-Dîlènt· ,les Adveiraires " Roman li fu &
cônnü l'es' aêquifitions ,d e féi- femme. IJ les a
ap2,rbuvées pa'r (à prerenci àJa'éte u 3 Janvier
.. hl-
.'-1,.
1
17.S'h. , '
M-als
•
~..,.-
-, , . é'fc
: ,l"
~'il ,n:,~_ e~e_ pr
9
'-n.
"1
ent qu a cet al.[e, s l
n'a ' -fl<l'fillë qù'a t.JQI: feu1e LaèqU.i1'itiolt d'Anne,
Bopifay ~ fa--préf&1êe pahïvé -à -ce.t atle aurat-el?ê 'Lllffi p'ôu-r légitin1e'r tous les autres? fi
cef~i:ct devie-nt - lëgi'hme par _ta prUence , ceu~,
au;qu:e1s il tl:a p<fs 'affi~€_r. ne ~euvent , donc
pas l'~tFe.
.
, .. _ ' _ " ' .
,
Et 'l'on peut d'autant molOS fe prévalOir de
fa -p,r'.è~~c!! 'à/aCte a~ 17f3 qû'Anne B~nifay
ne -pa'y"a Rue 2B~ hv. Olen , qU 7 le pnx ~e
racqt1Ï1iû~n rut pJus. 'C-onlidérabl~. Or elle aVOlt
atIëi ,tek biens p.(raphernâux pour payet:' cette
f<;min~~· -& ,RollJan pou voit conféquemme-nt pp~
pr;tJv~; 'c'cr ;aae)~ , fans qu'o,n pût induire delà
qll'il eût - ë~ilOù lè manege de fa femme. Il
pouv-oÎt' m'ème vqûlbir gratifie: fa femme d'~u
tanf", & c'en fur le fondement de cette donauon
prélmiŒe, -q~u: Tes .Arrêts c~tés. pa~ l.es Adverfaires Qin confirme les acqudÏtlOns faItes par la
fernme en IJréf~nèe ' âu nùrÎ. l\~~is de ce q~e
Roman aura, fi l'an veut ~ ~-on!Je cette fomme
à ,An~~ B\op~fai ~ en ~oÎ1c1ura-t-on ' qu'il lui
a dQnné 2700'oliX' &. qll'i~ '!- approu,vé toute~
les acqlltfitions qu'éIfe a Lfaites? Une femme q~,l
auroit I000 Ijv. _de .biens paraphernaux n'aurolt
d~?l~ ~'à. f~~f,e , affilier fb~:_ m.a!i à 1'e~ploi d~
ces ,io.oo liy.: one ~fenl1~ .~ .qui (on mat;i:. vou.droit f~~re ':1n~ l~b.ér~lité qe (IÇ\O écw§" n;aumit
dOlic q~:à achçt~:r fl~):lg~:e cJlOfe de cet afgeJlt ;
&. ' J'une &,-~'~~, JerÛètJt enfuite fondées à
envahc, • ilf 'to.ute b 1ufceŒol1 de leurs 'mariS par
'des acquiGtions; Jes. ,hér.it~rs de c'eux·ci iùur·oiè~t rLen dire; Ull atte de Jibéralité deyiendroit un aCte d~'- cli11ipati-oh enti~re : Et ces acquifrtions que les maris n'a~r~ient pas connues ~
ferolent irrévoc<iblement acquifes aux femmes,
fuirent-elles de 100000 écus? a·t-on ,;bien réfléchi fur l'inconféquelJlce d'un pareil fyfiê~e , &
fur les dange.rs gu'il y auroit à l'admettre?
Dirons plutôt qu'Anne Bonifay n'a fait afiif.
t.er fan mar! à cet aéte, que p'a rce , qu'elle
n'employoit que peu d'argent, ~ qu'eHef lui a
caché tous les autres, pa-rce ql1e leur impor,.
tance & le.ur nombre auraient découvert [es
'malverfations. La préfence de Roman ne paroîtra
plus alors que l'effet d'un pi~ge tendu à fa honne
foi par uue kmme açjroü-e , ambitieu{e & _avide
de faire pairer à [es eafaDs du premier Jit le
bien de fon fecond mari.
Mais 'cette fufe découvecte ne lui {ervira.de
ûen. Tout ce qu'elle pourrait opérer ce [eroit
de lui acqu.érir ce qu'elle a payé par cet aéte ;
le,s a.utres acqui6tions ft!rùllt toujours préfumées
avo.Ïil' été faites .de l'argent du mari.
Et comment fe diŒmuler les déprédations de
cette femme, 11Orfqu'011 voit Anne Bonifay les
conligner elle-même dans l'aéte du 2.8, Janvier
176 1. Elle y compeofe avec 'le vend,e ur 8B
a
1
, .
r
,
�,
32·
: 33
.
liJ.0 i7 f. du "mômant de :la fourniture. des de~
nurJ , . d'aliméns, logemeks, méç1icam-ens; &
remèdes que laUice acquereufe .avoit ci ..d~Jltint
fait pour ledit Bonifay vendeur. Or le vendeur
avait. . été nourri, logé, médicamenté datls "la
maifon de Jofeph 'Roman. Les 8B liv. · I7 ~ f.
qui étoient le mentant des ' alimens , logemens
médicamens & ;'~medes lui appartenaient donc:
& cependant Anlle Boriifay Te les approprie.
Elle les donne en paiement d'une acquifition
qu'elle fait à l'il1fu de faIT mari, d'une d.e- ' ces
acquiGtions qu'elle prétend faire pour elle , que
fe s héritiers veulent garder, & qu'ils fomi enn ent
,~voir été faite s de l'a rge nt de leur mere, & non
point de celui de R oman. Que faut-il de plus
qUç cet' acte pour .indiquer la {ource où puifoit
Anne Bonifay ? Que ne devoit-elle pas fe permettre dans l'intérieur, pui[qu'elle n'a pas craint
de s'approprier en public une Comme qui appartenoit à [o n mari?
011 n'échappera pas aux conféquences qui
réfultentde cet a8:e, en difant que l'on n'y trouve
pas que le vendeur eut été logé, nourri,&c. dans
la maifon de Roman.
Et qu'dt-il befoin qu'il le dife? Ne ftIflitil pas qu'il n'indique aucune autre maifon.
Anne. Bonifay en avoit-elle d'autre que celle de
fan mari? Si elle a logé & nourri le vendeur,
o~ peut-d Ie lui avoir fourni de logement & d'a LLmens que dans l' Aub erge de fon mari.
» Mais il étoit natu rel qu'Anne Bonifay fit
» quelque chofe ,.au befoin pour Jean-Baptifte
» Bonifay qui étoit le vendeur.
N ous
,,' Nous ignorons / x e - qu'orr ,a voulu pir.L :
mais queUes qu~ ~,dli!~t , le~ JIiifo:os d' Ann~ ~Bo
nifay éour i airœ.:qu.élr.q ue:l ~h:oi.è pour
vendeur.., ,d lç ne'p.oJlv.oii-+ni.De dci10Ît te faire aux dépens dt foq oi~'fi.s ((1)' U ,olu nno'iris elle devoit luiSaire
acquérir à lui cè qui l émit .veqdu pour prix du
l(».gel~(mt & de;lcn noqrriture qu'il avoit fourni~ Ce
trait d'illndélisé!Fouye ,qu'elle abufoit de la Gonfiance que [on'-mCIili avoit en. elle. pour fOrllirf;r. ~
. hér'itage conlidérable. Et qui fçait'-encore fou~ ' ce
qu'elle en' a tiré ' pour fes enfants? . S'ils' pouvaient [e " rendre ju1hce à cet égard , _ R a man
.. ' ,
.
ne (eroit. pas à r plaindre:
~ On a voulu tirer une autre, approbation de
R~)Jnan ,de la procuration dont il fe chargea
. iJO;u;r Ù'nniner queLques coritefbtJinns ' qu'Anne.Bonifay jlvoit avçc l'e ' rentier d'une. de [es 'mai.fons. _
_ , Cette maiCon était celle de la place de l'Auriol. .. Nous avions -obfèrvé qu'ayanf été acqui[e
'avant"' le mariage, Roman la connoiflàit ~ qu'il
fçavoi't-- qu'elle étoit paraphernale .à fon ~poufe
.& _CjJ1';ün ne pouvoit conf~quemment. p~s mdui~,e
,de-là.. qu'iL eut , approuve les acqmlltlOnS qu Il
, ..
n avoit pas connu. "
.on 4 été forcé de convenir que nous avons
raifon. "
.
Il Mais
du lTIoills 'J a-t-on ajouté, le .mari
,» r.econnoillàit que [a femme pouvoit difpofe.r
. 1) des 8oo..1iv. de- rente de cette maifon , ' qu'il
» ne ~pouvoit ni ' ne dev.a'it (e les .approprier ,
» & que fa femme p<?uvoit les employer à fon
.» profit.
.1
Sans doute; mais ce n'dl: pas ce qui eft en
wn
< -
<
,
,
-
1
�14
.
litige; il faut prouver qu'avec ).ces 800 liv. de
rente, Anne : Bonifuy a .pUi r,pa-ye~ les' .intérêts
de ce qu'elle de'\loit ' nouftir ' [es. 4 emans, fournir à leurs ..dép.én[es J , & fairer,pollr J27000 liv.
d'acquilitions;) 0 ' c'eit ce qu'o~n'a" pas prouvé
& ce qu'on ne :)pvouvua jàqtais. ' :'. _.__ •
Que . l'on . calCUle tanb'qu3on :\lOUdra, ce que
pouvoieUt: rendre :il Antre · Bonifay' les ~ biens pa~
rapluemaux ,qulelfeJ avoit un iè: -mariant,. & . les
acqmfttions "qU~élle a faites. en[uite; qu-e l'on
accqmule tdus ces l:evenus ~ ---qu'on leur fafiè pro.
duù:e des intérêt's. --plis ,qU'ordinaires; que l'on
filppo[e que des immeubleS! ren,dent plus que du
'S {Jmir-cent; que l'on fafiè produire les intérêts des ihtérêts à tous ces reyenus; que l'on
amafiè ) le ' <t'OOlt ', [an!> faire actention à la ptoportion'. qu'il faudrait , gardev, ' l.nême danS l'hypothefe ou l'on [e place; [ans parler dl'!s ,illtérêts , qu'Aonè ~ BouiTay i ,d evoit i -& qu'elle - étoit
ohl~ée
payer tous les ans .;. fans refléch.ir
que n'ayant pas ; payé fes, a.cquifitions: le j'our
du c,ontrait, ' leur revenu 'diminue d'auçant; fans
pa!fer 'en ligne les dépen[es &la"'lloUrriture de 4
enfallSi, & cP en fans qui ,~~~rollent ~-" ~onr :mx
HIes & reviennent battre le .pavé de Mar[eille;
qu'on fe fàfrè j:llulion par ce moyen, à la bonne
heure; mais on ne parviendra pas à éblo'uir les au..
~es:. ~ls 'verr~nr to.ujo~s .dam _Anne Bonifay
une . ~e.Il1l?-f' qUI [ans autre re.~àunce que 50 r: 1 1.
de blens 'paraphcn'llaJlllx prefqoe toutes- plaێes
fur. U!1f, mai[on /à fait Cies. acquiflrions pOLlir la
[Ol~ !mportame .de 27Qo-ÜJ liv. lhien que [es
modIques
revenus ne fufiènt, pas même. fl<Nffi[acrs
,
ae
...
... ...,
,. t -. ,.,. ..
t.
_ ... J.
/
,
. - 35
,
pour :,{ùppot'téJ w; ~chatges dOnt dIe êt,ô i{ -ac· ca/j~é'e. · Et~ q,uicmnple' fe g-auarnira de J'iUuf'wh,
'Verra- que C~.' acquitirion,s ,~'o~t pu avoir ~ été
fdllÏ1i<tS ~ '4 ue '.de 'Jlht.gmIt, d~ . m.ari. . >
•• ,
' . ~ue 1 t'~n Lpreœnde d'onner'<1~s motHs). Rol1lan i ~Là ,Amne 'Bo:nifuy poùr::>s'ên:'e mâti€"s tUllS
;une II canftitu t.iom ~ a.IttNuli el!è J ~ rqu' 0 ft létlt-- Jhifé
.pJ:évair (& ,éraindt.e; de.g re6hetches:.. dé 4a part
des, enfans -dlLlptevniùt !i;t- ~o'1!Ir: n'aVO-I.f pa:§'fâ1:t
,inventaire' 101)$:, rle.l~ i morr,' de J e~n "Lyon. ' Tout
'cda augnieI1tern_le'preftige:. Mais "lor(qu'on ,\}Ùta
qu'hm 11il.velltaiJe.aut:Çlic 'u>uç ahfO-l'bê ; qué "n'ëll
point faire ~ avoit été uri ·~.ae 'de bom1éi lfdmi;ndtration ~ quefle~enfàttS ' -qu "prel~iet l~t~ J'Bu~oieut ~pas s'en p-:laindre ~ qu'il,s ~~ s~en: {untja~
'1:daii- plaint '; qu?ûs: aur:QHenb eu: mauva1[ce :gtàc~
~ r,s'e:n. plài:nclr-e! ,-c qu' il'SI; ont '116u' [euJ~rtJ'enlf le
,b-ieu de Jéan Lyon; maisf1lCore cel~~ d'A-r,tn,e
.Bon:ifaYl ;' qu'ils.!"._ont tl'ouvé , dans l'h6réd-it~ de
celle-ci ~ de quoi 'fe àédorillnll'ge-r an:plem~nt_ du
' defaut~ d'inventaire des ' biens. . ,d'un homr1re ~tü
'leur J.a,iilolt 1 00: liv~ de légitime' ~ enfin loy,fq'u.~on
calculera tous .tes -avantages qù'lls ont~ retiré- dti
Temariage de leur. rnerer 'f &. 'to}it ce ,qu~ la.' çon.liante.... crédulité de -RO:t1!) an ~:a ~ permis à laIté-ci
,de f<.rire pOUl", eux , avllIiu..-g~. qu' éll~ avoit: prév-us .lors même de '. fari mà'tfàge, alni! ,que le
:p-rouvœ le , contrat ,.! ofil \fe ~ di~a q~e cet!~ ftHÉrne
-rufcie ne s'eU ~l'l'Ilariée' fous 't1n'è confiiWtîO-ù ' par, cicul!i~re qu~ rpoyir faire ctoiterà Roman ~ q:U-'elle
,gardait f~s bfe-ns' parapherMu-:JC: pour nourrIr {ès
,em:fi'hs' ,& méiIage.r un v?-i1é ..aux :dép'f~datidns
~qu'dbe , médit0it '
ne ' fa~lt ~aSl cller~l-1e~ : G~au
~es 'rqQ)cifs à cette conihtutlOn partlcultere.
1
Ir
�36
'
t-7..
. 9u'~' défaut: dé. raifons , ,on donne des COI1Iideratlpns; que f.on _prétende. que- l'induftrïe
qù' Aline;' ~onifay <l\'JGUt J'ait,: il. c~nfultr:dit-ll fur
la :re.gl.e , généraJe :;'1l1pour ;; l'âppUquer'Elanfq:u?il
f~it/ parvenu 1R; <5ihi o~tr(:!: <{f>U!tl o'Ie dptaiLdès
manu.>uvies ; dç rœtOO1r6!mm:e!. .11i.)le ;1'<\ ;même
GdÏllIl.UJ!:ea J.entiiér Xiu'ep!>€ bf32 '.Jl:ncir,y ;q t~;'qui
fçait'[Js;'iLn t t!Otib :rionnu ?~r t9'ail!eutswdle i av.oit
l.'ufufrnlt ~dé~ fC? :' ~n'S 1; J i PQuvçi~ -xm.iti8r(l
qu'elle Je rip>Œ)lffâJt:. ,pUllI 1e tenvriyer. à fa m.ort :
ibp@uvo' T'éfpererr qtièUe') fe rend/bit 'juill,ce;: lie'S
moyen lui mallqtl.ûlent. Char~ de dix ·enfans,
foo' telnps & .. cfes :.fiu:pkés._étoiei1t. à fa familléJ
n'en avo it pas pour refler à Mirfeille ,& ' [e
liv'tcr; .a des recherches-' pénibleS' & ' difpendieufes.
Efi.-.te ~ ,pn hQinœe :q.ui fe trouve dans de", circQt:lllanc(ls auffi Jâèbeufes Rue ~' on peùl 'dire
qJ:{ l 2 {!~ ~~eridu ~_~tro.p long -temps ? Ne ftitffit- i.:l
1 pas. qu~il ;:: ait
annoncé ' [es· prêtenti'ons du vIvant
d'~nne_ ..Bpnjfa.)C , ~qU:U "ait propofé ides voies ' de
concili~tiQn que }"on a rejettees i1pour qu'Af,lne
Bonift!i~ ait pû 'préparler fa défenfe'; & que {es
1I).üirs-'· ayent Inauvartej grace r de, fe prévaloir' du
filence J for:cé de ,Roman?, '
'
'., ' . Suc l~ tout il ' avpit, du .temps_. pour agir ~ &
il. a. agi avant le temps déGgné par -la Lor. C'eft
tàut J:e 'lu' il faut : Le _moren. tiré •de fon' fiEence
n~ eft pàs même, une e.xèeption . J' . il ne fo.upnie
qu'une préfomption qui e.Œ déçruite par les ' circoi1~aocesJ , c une "p,n:famption- ~qui ne forme ~pas
une fin de non - recevoir , . & . filr laquelle
les Apverfaires_eux, mêmes n'ont pas compté.
Tel eft donc ce procès. Anne Bonifay a
fait pOUl: 27000 liv. d'acquiGtions , & elle
n'avoit que SOlI liv. de biens paraphernaux,
dès femmes d' artifan. .donne. !e refJorc & viviJi~
le ,coh,?mZerce ~~ MarfIUe'; ;que -l'on 'veuille faire
fl ec Ir a prejOmptLOn de la · Loi, à cette Con-
fidéJation.. T(}tlt "ce~a annàiroera 1D délèfpoir de
la Cfnd~e ~aps p~~ture aUCU)1, ~effeti.J Les femmes
de,(~larf~llle fdncf.Qumifes a.lU{'fL.oix camine' les
;:l\,l~r~ ·! & 10'r[qn'dJes n'onL '(l\lcum commerce
féVM'é , de celui- cre lci,uc mari., : elles,noiven'L fe .dire
. qu'el,l€~;he peuweilt"tfien -acquérir~ p_Qu.t elles ', parce
qu'Slll,~s: ne peuveht pas J acqttél'icrans puuer d'a ns
la, c~dle
mariS'
. . - J de -l"urs
.. """
... 4....
. ... .. ...", 1
'.-81 ~~.!on, 'pouvoit juger - ce fpl~o~ès fl1~' des
co?fide'ril'u~,ns r; ,~ou~ dirions 'ayec. bien plus de
ralfon ,,11lUJl f,<;lrOlt tres-dangeneuX' d'autohfei les
f~mme§. à a~qu<ir:ir nu" unë '~fjmpl~ piéfomption ,
que Ct! [erolt mettre les fortunes'" de leurs' maris
à l~~i: ~d,i(crêtion ", '8{L que Ji ,fa, 'Loi n'é~oit pas
portee.-, il /audrOlt- la faîre: ; ' mais elle exifte
la LOI , QUlntl'li Mucius: EIle,-èfr obfervée : elle
n'ef! ~éç?nnu§ ~e '\'Perfo~n.e ;' l"intérêt 'paiticulier
pourrmt:-ll la ' fatre jlechlr devant lui?
QUé l'on excipe enfin 'du filence de Roman'
qu?on l'accufe . de Jinefiè .& ",de ' rnauvaife-foi ' '
parce ' L~.u'il _n:a..jli?~9té fo~ ' taébon qu'après
~ort ' Id Anne Bomfiay' : , tQut cela annoncera la
dlfe_~te Ji~s moyensi ROlnan 'a ' prote Hé lors de
l'i~~ellt?j~e qui f4t tait avec _Anne Bonifay ellememe, , - Il a conîulté ,avant fa mort. Il a arin~nce ,fes , prét~n~ions ; & il ne pouvoit .rien
fa~re cti!,. plus. Habitant à ~2 5:; lieues de ·Mat:feIlle , :~_ll ne co~nojfroit que. ' ;vaguement ' ce
_,~ J . ..
qu'Anne
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do It ' 'la ' rtrajeUlk patitie . étlort méme plauée fur
ullq)miifooii ' fi Jf1t';avec qun~ ~nune aullif mé ...
àjocrè ~~que ::1' o1fllJ-v-.eut 1 q<ll?'CrlteJ ait I.nQurrr qUatre
errfam; f 'foonnirIà ~IIJn'Cfutootien., à leurs :chi-l
iuimfeJl3, paylfnIes~.darle r,<p ~ 'f~tt , ces\)acqWfi~
niolls ioffrotmlt1t€s.'Bllé n ai~oi:t d!a~blel.!trsl i ':ru<l~
œffuim:e ~ -P-O~Qq dlautreIl hlii&n ~5 :pctÏlillt rie <1:011:'
trrur.1let .~ai.ti~œr.· JElle ne pe'làdlr4J.'èfJIi~i Ws :1avoifl
i<Di.rès'? cfuè- ~<3i d'Wrgent de' ![oIF mn-i.! NOUi C réul,..
{lifions~ touteg ~'S-' circo'lilft~fJQlS " qui,: p:tilvenc
Morrer. de ,}a :îfoice' à ja pvé;[œIÏptlon ~ la' Lm
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qu ltzlllS' mlltZU.f._ ,
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.. ' wJl faut donc adjuger. à' -Roman tl9I1-fewle~
H•. mel1.t., le! pa)iXJ'des l acquiGtions . faites' .pù :-Anhd
U ' 'Bo1'lifay oo'payé 1pel1d<rnti fon fewnd ~ ïlJarÏ;lge 1
» trlàruS ento& les ' 24~ o. JiVi L8 ! f: p"âyctJs i p~r
" eHu ui2U1S-. <.t>'~1llll{t 1 du rdooiL. Toutes ~'~ ad:.;
» j ndic:ttIDris ~tle l fqnt qù'Utre'. conréquertcg..d'~
» prirre±ire , ,,'iqpe la, femllire rn làyaî1t eu "ptefquç;
» ri:en dè libie! pehdanr,Je COl!rs de ,fOh. 111a~ ri'age, -&1ne. prouvant 'pa~ tJtz.de hab.[Jeût~ , il
)) faut néceifairement préfume.r qu'elle a acquis &
» ) paye.. des, bi~m; ,du hnari ,i & .par. canféquent lui
JJ fairel'lionheu)( du la cOfldrUflheF' à tefiituet auX'
) héritierS .du ~ mati- , ce ' qu~elLe n'~ 11'U .avoir
» que ' du chef- de fon mari" ad , ej;!Îfandam.
wrpis qaœjlûsfofpicionem, )
CONCLUO r l;omme au procès, avea plus
grands..dépeos._
,
J
GRAS, Avocàt!
.
.
SALVA~OR, Procureur . .
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39
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M. le Con/eiller DE MONS , Rapporteur.
au J ~rléanent.
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~.)LJfu Ç0NSEIL <50US8116ïNÉ., .E1 rIME
q:u'e la-Loi Q~ iatus Mucius s'apfXlique au prli)"C'its
aa:ll~l 'a~c ' ~oute ~ la ,-- force YoŒhle. Les .hoirs
d'Anae :(3onifay n'ont point -jufiifié qu'elle eût:
de.. oommerce parti.culier, ni. d'autres- biens ~ue
ceui-' qn'.e.ble aV,?it , 16rs de f~n mat:iage. Or leUr
mo:dicité ne permet- pas mêmtr de fuppofè.r qlôls
ayent .pû , fervir aux .acquiiitiomS" importantes de
<tette femme. Cefi bierr alIèz. de fe pci-fuader
qu'ils' ont pu fatisfaire à t 'outes ' les dépenfes
qu:elle avoit . à faire. On ne' peut donc pàS
do.~ter : qu'ell~ n'ait .payé. ces ) acquiiitions de
l~.r:gel1t -de fon mari. Il
.dOllC jufie qu'elle
en. Iieftirue le prix aux héritiers de ce dernier.
-.
. Délibéré à Aix .', . le p . Mai - 178'3 ,.,
ea
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, GRAS . .
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GASSIER.
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. ~J~Ü~.les \ b,~'~~~r~t1:~~~)Ùs:" -~ -Je ~Mémoir~ cidefiùs-4 après l'loir cQui)M~ Salv.ator) Procureur
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1
~
..,.
Atllfl,!!i(!n" _du._ $r • . Alifo~. _
l\.. TOU S
Bonifay époure du Geur Roman aie fait un cOInmerce en fan particulier dans le tems ' qu!elle
étoit mariée avec ledit fieur Roman.
.1
Panralion Alifon natif de la Sale
1~ èn Savoye, 'réfidant enbcettt:<ville âèJMarfeill~Ldepuis plus ~de 20 ~n:-, _ cetti~on.s... ~, attefions en faveur de la vente que. deptns" nétre.
réGdence en cette Ville, où nous avons alcernat~emtllt fciié·]e' ·métier , de Raheirau=, OLI l de
C('>lnrniŒonna~ré ,nous avons to'ujours 1couché
darls, l' Auberge .du .grand St.! Jean, apparténant
ci'-deyaut . à feu " fteo r J ofepn ': Roman, de qui
noUt> ·é.tions Jregar.dé ·& tr.aÎlE comme une per[o~ùei '~ux OllCJres de la ma.i.G:lll", · y étantÎ pref- .
qué' p:>t:.Ijours. accu p:é.~ Déclarons en ) cO/ilféquence'
que ::p1mdant, e.qvia:on deux .années, iL a été .fait ,
un pêtit;~ commer.ce . 'en \ enchois, favons, ris, '
& att~res ;petits articles cle".peu, de con[éqtllence ,
& defiiné pour IfS: proviGons' des Muletiers qu~
venaient loger. dans l' Au~er,ge.; que Ip Magafin ... enl était dalli .la mai.{ocÏ i; ' cl côté de l~eica•
lier. , ..qJle le. tout appartenoiLà- M~ Roman .: qllfJ
véritablement la Dlle. [on épou[e éroit fou vent
•
dans ce ~Maga_.,. [ur-tout ~or[qll'il fut ouvert,
& que la vente & expédition des marchandi[es
étoit .faite indifiinétement tantôt par le mari ~
tantl3t par la femme, mais plus Couvent pourtant par c~elte." .derniere ~ attendu que [on mari r
érait fouvent à la campagne ~ nous déclarons
en outre que nous n'avons jamais entendu dire
à per[onne dans la mai[on que la Dlle. Anne
Bonifay
Atteflation dujieur Ba'i~e Mattre ès-Arcs.
.
Nous François - Baile Maltre ès-Arts ~ natif
duJieu de la, Javi, Diocéfe de Digne, réfidant
en cette ville de Marfeille depuis environ· 2 S
ans, déclarons' & certifions en faveur de la vé.
rité cque depuis notre réfidence, nous avions
continuellement & amicalement fréquenté feu
fieur Jofeph Roman, vivant Aubergjfie du
grand St, Jean, tant par rapport aux liaifons
du commerce qye nous faiiion,; dans la haute
montagn'e, que patce que ledit Geur Roman
éroit 'notre compatriote; cert~fions en conféquence que depuis que ledit fieur Roman avoit
,acheté l'Auberge du grand .St. Jean, ou foit
trois ou quatre années après, j,l Y avoit dans
ladite Auberge au rés de challm~e , un petit magafin à côte de l'efcalier, dans "lequel on tenoit
quelques barils d'anchois, du [avon, & morue
dont on étoit en ufage de faire la provifion
aux différens Muletiers qui venaient loger à
cette Auberge, ayal'lt nous-même eu occafion
d'y faire quelques ,emplettes. Certifions que led.
magaGn & petit commerce qui s'y efi fàit environ deux ans, érait de très-peu de con[é'quence, & geré indifféremment ta'ltôt par la
femme, tantôt par le mari. Déclarons en outre
n'avoir jamais entendu dire que la DUe. Anne Bonifay aye :fait ilucun commerce parriculier
L
�4~
4)
d-luant le 'cours ~e fon mariage avec ledit fie,"
morue ~n divers tetns '. dOht l'expédition lui
-avoit été faite tanult par Cun, tantôt par l'al/Ire;
que dans , l'intervalle qu'il a fréquenté lad. Auberge, .il n'a. jlHnaÏ"s entelHJu dire à per[onne
. que la DIle. Bdttifay ait fait un commerce à
fon particulier durant le ~ours de fon mariage
avec ledit fleur Roman.
_ ,
RÇ>maJ;J.
Atteflation de Meffire Beffon . Prêlre~
.
Mellire Jofeph-Pierre Belfon, . natif de la
ville de Digne f rijidan( 'en ceÈle ville de Marfeille dtp-uis près de . 26 ans, dédare en faveur
de la "ériré 'que ' .depuis,f~ r~Gd'ence en cette
dite Ville, il a été dans le ças de fréquenter
affidl,Hnenr l'Auberge du · grand ·St. Jean, appartenante ci-devant ' au _fieur Roman originaire
du lieu de la Javi Diocéfe d~ Digne, fait
à rai(on de la correfpondance à la montagne,
foit à rairon de la liaifon -que procure la proximité · de Digne flvec la Javi, ce qui 1'.11 mis
dallS le cas, de conl:)oÎtre c~ qui Ce pa1foÏt dans
la maifon dudit {jet,lf Roman. Certifie en conféquC?nce que dans la maifon dud. fieur Roman, \
il Y avoit au rés de chauffée un petit magafin
dans lequel on avait tenu pen~",nt environ deux
ou trois années, certaines marchandifes en talure
pour vendre feulement aux Muletiers, qui venoiepr loger d;iD~ cfltte Auberge· , ou à quelques pereonnes de ' leur connoifiànçe, moins à
titre de. çomm!lrce que pour faciliter ces étrangers. aux ped~(js provifions qu'ils étaient dans le
cas de faire en cétte Ville; que çe petit trafic n'a
du.~é ~ans ce mag9lin qU~ ' peu de rems, & ~'a. jamaIs eté de gra ode confeq uence, lequel petu com.
merce était {jeré i!1dijlùzaemeru par le mari ou par la
femme .ou pat /es e'1fans. Déclarant le foulligné
y avoir lui·mêm~ fajt qud<iJues petits ~har s cre
Atteftation dufleur Chalfle Maître ès-Arts.
Nous Jean-Antoine Chalve, Maître ès-Arts
libéraux, réfzdant en cette ville de Marfeille
depuis environ trente années, certifions qu'eu
égard aux liai[ons que nous avions avec les habitans de ' haute Provence, nOlis n(lUs fommes
ttou \'€S dans lè cas de fréquenter de te ms en
tems l'Auberge du grand Sr. Jean apparrenan.t
au: fieur Roman que nous connoilIions partiE:uBeremetit, & qu'au rés de chauffée de ladite
Aubérge il y avoit un petit magafin où, ledit
fieur Roman faifoit un petit commerce tantôt
adminiftré par lui, tant~t par fn époufe , &
,Gela pendant quelques années.
.
Atteflation du fieu/- Chauvet.
1
,
Nous Jofeph Chauvet, Muletier . réfidanr en
Ja vine de Digrte depuis environ 30 ans, certiSons en faveur de. la vérité q.ue nous avons
fait le voyage de Dignè à Marfeille avec nos
mulers pendant notre réfidenèe jufques à ce
jour, _& que depuis près de 30 ans nous avons
logé à l'Auberge -du grand St .. Jean à Marfeille
�)~1.' L 'l.5.)~:,,- , ~"J. ï . . . .
G.....
f"~",-,-- ,... "'. o.".; ......r ''-'-, .......t-
~"- J~'CJ.:: :~ (~Ç)u.<..J~u, ... \1..,f",
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S E R ,V;A N T ' -D E , R, É P 0 N ,S.E •
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,
.
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...
.p 0 URIe -fiel:lr Terr-ein, en qualité de Tu•. t,eijr de~ .enfans PUpjl1e,s du fieur Claude San.din,
-. ., {\ttbergifiç ... de. · la ville de Tou.lon,
Intuue.
--
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,
·C 0 ,-:-N <T-
R ..E r
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l
La {Jal1!c :r~iJJei!Ç.,', .v~uve dudit jù:ur CI./Jude
-. SalJ.din , ;(f aauellement éP9TJfe !en Jeconde.s
nc3ces du jù:,ur'. Turcan, Officier da/1s le CarPI
~ 'Royalr 4f .la Mârine ,. appellwue" ê
l
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•
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4 {
~~ Es 'L.o'" ,.il efi vrai, diQ.inguellt l'édu- _
L cation , de la tutelle..; mai~ li! t,?ere qui fe
remarie pet,J,t-elle prétendre .à l'une .~u à l'autre? Efi=elle également exclue des deux? C'~fi
êin{.i ' que l'a penfé laJamiJle des' p.upilles Sangin;
-
A
�2
c'eft ainfi que l'a décidé 'l'Ordonnance dont eft
appel ; ç~èa a~n{i. que l'établilfcnt toutes les
LoiJ:C, ~ parucuherement celles de Provence.
Cepepdant t~ Dame Teilfeire veut faire dépendre la quc:!li9n des circonfi~nces ;,. elle ,veut \
que .
les mo~ndres p~éfomp~lOns luItéret ~
h, fureté mêtne des pùpllies [OIent compromIs.
Peut.,~lle être_ fondée ?/
.
nu'
, .FA 1 T. ·
La Dlle. Teiifeire époufa en premieres nôces ' [e .fieur Claude Sandin Aubergilte. Elle
ce!l: veuve avec , cinq eofans, dont quatre feulement ont furvécu. Un Soldat de. Marine ,
connu alors fous le nom de l'Auror.e. , 'fréquentoit fa maifon. Une Ordonnance J\o!ilitaire exigea
que dans i~ Corps Ro~al ?e la ~ârin~ èomme
dans CfOX de l'InfanterIe, Il Y eut touJouts un
nombri de bas.Officiers qui fût pvornu au .grade
. de Lieutenant ou de fous-Lieutenant . . Le fieur
Turcan fut un ~des doùzë ~ que ' l'on choifit pour
l'exécution de celte Ordonnance.
'!:;a quàtit~ dont le fieùr .T~rcâllven<?it-d'être
dééoré frappa r!lmouc- propl',e , de la veuve SandIn, Ellé" voulût en faire fon époux .
. Par les <ieI'"ier~s difpofidons d'e fon pcernier
mari, la Dl1e. Teilreire 2 indépef?dam11!ent' _d~
la. ~ütel1e 'd( fès Émfans ', av~it l'uft:lfr~ i,t' général
Q.lefls qu ~il a'v oit d61ai-f:les,
plus, le...ma:
bilié!r 'de b rmaifon, la 'vaj,ifelle & l'argent monnoyé lui ·31voient été .,Iegl-lës, en pr'Üpr~éEé. · "
Si la Dtl€>: Tel1fûré -vièuve SanEhn , déJlI
< '
des
·De.
~
(' comme elle le dit elle-même) dags un âge
mûr, ne eon[u1to~[ que la vanité en recherchant l'alljance du fieur Turean, celui~cï t'couvait daos ce mariage {]e quoi fo~[enir fa nouvelle dignité.
Les ,enfans du prémIer lit éto'Îent les feuls à
fo~ffrir de la folie de leur mere. Elle ne pouVOlt la cODfommer fans avoir pourvu à leur
intérêt. Aulli fa premiere démarche fut de préfeorer UDe Requête au Lieutenant de Toulon
pour avoir la permiŒ()n d'affembler les, pareDs,
& à difaut, les voifins, à l'effet d'être par eux
délibéré fur le choix &. la nQmiDation ,d 'un
Tuteur à ceux de fes enfans ql!Ï.. [e trou voient
encore en pupillari~é, &. fur les moyens de peurvoir à leur éducation, .qu'elle demanda J~ 'ptéférence à un érra,rtget '- incapable, dit-elle, de
leur donner les mêmes foins.
. Le' Décret qui intetvi{lt [!:Ir j:ette .Requête
le -I7 Juin. 1]-80, lui permit __d,e faire raŒgner
les 'par.ens ou voi.CIn!; au jour qu:jl indjqua.
, En .ex~cution d,e - G.e Déqe'Ç; la DUe. Teiffeire fit aŒgner les pçrfonnes , qu'elle juge~ fans
GOUtC les ' plus di[ppf~ê~ à f~~prjfer fes ' v.u.es.
, En! effet 1 dans l'aff-emblée_:, .le nommé Jean
Gelin, ! Argoufin .fur ' les Galerës du Roj, &
qui fe .cfi.t ~bn parent du pere ges puplles, mais
fon allié,; p'o ur en avoir époufé la fœur, laquelle
peut-être' ét-oit décédée fans enfans , ouvrit l'o.
pinien de nommer pour Tut~ur àux pupilles le
frere de la OHe. Teiifeire~ &, de laifièr à cette
derniere leur éducation.
.
�4
Cet avis fueJuivi de celui des i heurs Mouriés
& Peyron prétendus voifins.
Trois autres délibérans qui donrierent im'médiatement après leur avis, propoferent leur
excufe; ils prétendirent que les pupilles àvoient
des parens établis même à Toulon, lefquels
avoient dû êt r-e affignés avant les voifios. ' Ils
en requirent la convocation.
Le tour du fieur Terrein ne viot qu ~alors.
Il dévèloppa ~ il
vrai " les raifons qui ' devoient exclurre la Dlle. Teiffeire de l'éducation, ~ot:nme de la \ tutelle: Il' indiqua de ~ou
v eaux parens à affigner ~ & conclut encore avec
le ,dernier de oetfx qui com'p oroient cette affemblée ". qu'il ne ,p ouvoit légi ~imem ent être pourvu
à la tutelle & à l'éducation des pupil~es 'qu'après la convocation préalable de~ pareris no~
affignés.
l
~ ,
'
En con[éqQel1ce le Lihl~erla'nt qui J)~_~ fi.doit,
ordonn,a , d'u vϟ du Prod'uc<:ur dur Roi, que
les p'!r'ens dénpmmés feroiem affignés à jouroL
,
ea
certain. &, compétent " pôùr d~libérer & donner
.
leur (uffrage fu T:. l'objet p'rQP'C;f?
On, ne s'eit':atl'êté fti f' ~~ou s1 c,e-s :dé f<iils que
pour faire appercêvoir que 1 cette pr:'e!niere affe~,blée- ~:ét~it ' pas un ~ ._a~~mbl~~ ( dë~ ga~e~s .;
pUlfque , . h 1 on';. €n- excepte -Ie fieur 1!'ertem ; Il
n'yen : avoit p~'s un feul; .Iur-tout 'f1 ~ là femine
du , nQmmé Jean Gerin v\rgoufin : fur les Gale':
re s .. d'ul' Roi, & " fœur d'':1 ' pe re des pupilles, ne
vi vait : plus, & qu'il n'exifiât 'aucun!: ertfànt de
)
ce manage.
Il
11 "
-retui'te;
L".
ieco~d
en
lieu'
, : 1 ' fi '
•
,que
e leu r
T. erreln ne rut pas celui qUl"
.
l
f('
-,
rompit et 'vœu
, ~~me par. les trois PI~n~iers opi~ ; ts qUI v 1 _
JOlent -donner l'éducation à 1" Dl i-, T '.ir~u
a
le.
eluelre
, r
& l a tl}tee
l a 10n frere puifqu'l'
r ' .
role ,qu'au feptieme raug' & q' uial vannetPlt .a ,p.~~
r
" ,
, •
'
Ul trOIS
des penonnes
ailienées "avoien 't " " " . l' Ir '
bl' d
'
Q;
regUls aHem·
e~ es· vénta,bles parens, avoien't 'propofé- leur
e_xo:ne _,~ / VOle~t _ l?êm~ proteflé de tout ce u1
pourrolt etre fait aÙ -,contrairé. "' J ) ' q
Q uoiq,u>l en foi ( ,L1:.afIèmb1 Û cre:la famiHe fut
~onvoq~~e en éon.f6,~mlté de la derniere OrdonI!-ance .• ~1l~ 'rte fut c~l~~ofée ql:lê des pârens du
çhef d~ la Olle. Tetlleire ' & tous
~-' r
Fe "
-cl' '. '. ,
'
"
meme Ion
Ifere, ,rurent aVIS Be donner la tutelle au 1tem
Terre~n - ~ beau-frt'; re des .p upilles Sa d-" --- &
l" d
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'ID
"
nIn,
.e ,~cat:on ~ a Ile . .J'eiLIèiré',- ép;ufe du fleur
PhIlIp , le ~lr tante germaine.
~
~~" .C~ dernIer ne pou ,;,oit décemment POrter urt
aVIS en faveur de t fa femme .' 11 obi( '
'
l"d"
erva ~ue
, e ~catlon de~olt: êt/ é j'éunie à la tutelIè , -&
que par c~ nfeque~t ~ Il falloit la) donner ,audit
,J.
fieur
Te,
f rein
de prlféreizce à Î1<âi1('r,e, t'F0ure
M a1'-5
7"
"
L".
'J~'
lon av.ls' rut toujours de rie Roiût la confier '
1~
mere. Oelle-ci n'a donc pu u tèr' parti dt! c'e et:
ç!r COÎlft:~nce -' pour 'donner à "en'tendre dalfs ' fort
1\I~~l1oire ,~mpri,mé ; que la dél~ bération ne, pa/ni
qu a la lp/liralué de fiiffrage1; relativement à
e ~clufion qui lui a' été donn ëèd cette ' déIi'bé.
rimon fur prire d'uhe voix unanime.
~ Le Lieut~!1ant s'y' conforma: ~Par fon Ordonnance ,-en date cl~ 8 J uill,=~ l 782 ~ il nomma pour
Tuteur aux puptlles Sandln le fieur Tertein , &
r
B
\
�1
[ur J~ fpn~Jl1elJlt {;yIs. , dQute cJe
tette tpu~me -' lju,c p'~n4e!tte Ji;sr J~ibil ~lIari
ta
de~c~,
c.Q~r'J
je~ ;pan!e~ eA'dP~m~nc 4jOli':
preCiS c4!m~wa01t ~ep.e~~I1~ Wpt~~;Q ~kar, .'1(. .. .::
. Le fi.eu.~ . T ~feHl ne , ypuJ,~~ àJ-',iJs ,.f~ir.e,.r~te
re,Il\:,oya
n;l~ deux Ipllanaes,~ al,l:; pppi leI'- ~pm iJ -rt~fçn
~Olt ks: inrér.êts. J.J PR,I,I{ftl;y,.iÇ. ~ f9~ld.r ' ... "
J
. C' efi~ Qan~ . ç~t . éff!E.À~S cltpfF~' que. ~ , Pfl,1,'r
rIes (e .. C~,nt aslté~~ fu~ l~ qu~aiOJl de ' [~yoit
fi la '!1~!e , -remari,é{:!:Fe ~ r~cl~J~{ l' éd~~~[ip~
.de [es .enfalls p~pill.es., _tn~~i; .ç~.J3~rct 1~ 1l :Y~9
d~~ parens q.ui P'PIJt , .pa~ i~~é( à P..t;o~ ~ 1,
l41 wy6er; . ' . r
' f ' ''*' ' . ~';"L'
. La Q~m.~ . Tur~ÎlP rQUtin~rdAn'J ~.p,€ p~mj~r~
'
'"
"
-
l
_
40
... _
' CQh[ulç~tjqn qu~ ie~. Jr.ffi(Ç ~o~~iJJ~& ~'pP'Ç)19WP.,t
à l'éduC}H)on des .~n[~j If llfl.B;;' cfe pr~fé[~ç5;!
~ toyr , ~u,rre p~r~Il~ ~ qu.e fi urllcs,' qcepjoient
.celle qui .avoit p~~~ A.Ae [ç,pondes n.Q~~s ,.]1
ne fall.oic pas çoncIl,!~ç deU Bu'.ç~ltS eU«~:t ~_
t~nd).J l't:,lÇd\.lre abfolpmem ; RI1'~!! -,cette maûere,
. le JugË I: d~voit tRuJPl-lf$ . conf~IY=t:; J>intérêt &
Je plu~_ ~rand ,avabtagre des pup,i1tes, & ne Ce
,décider J.amais que .p<Jr les circqnflallces, EUe
.s',amorif.. ..çIe la d~Çrri~e d~, ~~~rir.man fur le
.çQd.e, de l'opinion ,qÇ! . JI,JIU.t:~D ~ns [es no~s
;nlanu[ùÜ.es , d'un r rê.t rapPPJi~é ,.par Antù~ RR.,-ben, &. <je ceux l11ê~p,e recuçi,1li~ par ~P~l.face, _Fom" ,1, liv. 4.,_ ~i,t, "/.", v
~ .:
Elle 'erHra en[llite dan,$ le -détail des cirç.on[..
;tances. ,I;lle fe p;éva!ut ~1~~'çrp du tell?ment
-pu fiel/r Claude Sandin, [on pgll1ier mari, qqi
. hü avoit légué l'u[uf~uitl de tous, [es biens,
~ & la propriété des meL/bles de [a mai[on) qe
4
�-8
~
,
1
~
Jà· vafl1èlle ' ~ d~ l'argent monnoye; elle auura aV'~ir ~mélldré les èHets de l'héritage .;
èlle : préte~d~~ .{b~~ la foi ~tS d.i v~rs ~erritr~~:s
aVOl~ ·touJours Pl'l,S des fOln~, dl{hn~ue~\ de ,1 education de fes cnfans, -aVOir fournI avec luxe
à leurentreuen -i & mêlne à leur parure; elle
ajouta: gu'eUe~ ayà~[ nl'arié ~vantag'ei.1feIp' en( . fa
fille aîn'ée- en liii-2confiituant ~ne d'?t de 12000
Ilv. ' do~lt 53)6" l1v. dë ' fo'p>. chef; elle donn.a
- en' p1'euve fié 'l! bonne èo-qduite qu'elle, avolt
eu- envers fes) ènfans le t teftament d'une ge ,leur
tim~e germaine,: par lequel ~I1e avoit - été inf':'
tiuée héritiere pure ,& fimple ,; , elle obfe rva
ql:1~- ,~e ,{èc~~~ ' .~afi dqnt/ elle avoi: f~ir , choix .
étoit un Miht-atre recommandable, qUi des dernit:fi- 'rarlg :) .éfoit )arven~ _ à ce.,lti! .:~, ?flicier' ,
-ql:Je- ë;e: ViBpc 9~1 rrollvo,It fo~ bl,e,n 'ttre ,dans
çe mariage,. ~ ~ne relfo~r~ lorfqu.ll.r;~o,~ a~
cas;le fûllicÎrer fa r:etraH'é \- ne f~ l COpdUlrOlt
j·ama,î~ ! que
rés Loi~,~'o(. la ' !eco?,nofflànce.-,
que- ce [eroy'" 'un fecoha ~ pere q':r èlle,. auroi't
donné ' à ' fes Lenfâns; eHereleva les pret~ndus
avantages . que :!-es pup-iltes devoib lt' .tfOuV~
dans' là 'tÏiaîfoo'f plùt.Ôt 'que 1. dans: cené '{'d'une
tante femme ~ d'u'n BouHwg'ér, .1aquéUe (ayant
elle-~ême 'Iaes ~enfans, ne '!..voudroi't ahùréme'rit
--pas -les nég1i~~r " pour: d~~rier . aux Tàin's' de l'é·ducation de ~es nevetn( ,,' le&' motnens ) que Iës
'océup'atio~s "de fon état;) potirroient lui Iailfer.
De- :toutes Lces o bferv3ti'ç>ns ~ dIe cpnclut que
la prefamption de fan ~~d-iàrla-ge, qU,i feu!e av?it
décidé, les parens ~ , Je J~ge ne ~ devolt pOlOt
l'eniponer fur: les preuves' que Ion avolt de
fon
Jar :
"r
r
fon
attac~eI11~nt. :nVèt:l les\. puplll~s, 'Be
rUf"les
~O~fi~1é:31rI~~~ q~)e~er aV9!:-e~p~\~, ,qt'Je d'o moins, '
la ' prr\!.ero ~e 1~'tJca6on
éllt: 'réavarH
clal?oit aJet )~wu,t~ fa chalèor ! d~rit la plu~ te'ndre des mÛes fut ft\fceptrblcr; JH falfait 'atten_
dre qu'elle s'eiJ Jilf--rentlüè )'i,adigne ; .' ~ù'alnfi
l'Ordonnance 'du' tLiëutemiffi 'de Toulo6' 'dev 'it
être réformée. ',', !.J' ,;: , ... _:.
: . ' ..
. On
répondit · de ', Ja 'pa;t dti fi:éur Tê~rein,
t
que , rien n'étcrtt .pIus . exprè'sJ1:tItns Je Loix Romaines, que l;exèltifion donnée "à Ja mèt'è' pour
l';édûë~tion de {es' enfans lbtfqu'e.lle ' a ';paffé à
, de ~ec,o~~es oôc~s'; - qu~. to;ù~~s ! lés fois ,"qu'el- ,
Jes cl . O'lent parJe de ['fa- fav~ot due ' àla )veuv'e>
<}U1: ~(yofJ: 'refté ltta~sr;rés preririe:r~ : engagèritéhs',
elles ' a'v,b~ent 'foTmelleQ1ent'~jex~~pté ceflé l qbï.J les
~vôii'~ méprifé pù ' uni fecooéf ~:;ti~a~e ',- fi t'hon
'vit'nicu'nr eis inilu±è'riL~ .' Nifi' âtt ficrin'das ~ffi
rit"! nupt-ias; qll'eI1ë~' ne po~,rr6ièht 'en" effet,
faRs ipconféqu~~cë' lX f~ms: tOÎ1trkdiaicin l'river
abfo}l1~'ent Ja :tnéf-e L.qui fe ienrilrie' de-:f.ir: tu'telleô.:'-ou de l'àdmin'i1l:ratî'on.' d(.s - biens ',. ~ .lui
r
laifféi une eipéraiice pq~r avbir l'édüéarlort
oui ië 1-f'01n dé J'la: perfonne, I~ q)le fi ' ei~és-' faiîoi~e , üne di~inêti6il de 'ceSrraéu'X çhofe~/è'é
tôient'~p'our êlôÎgtJer.. plu's' rJpfiru-c liéren1ëÎit _de
l'éc!~cation la ,!!1$re r~Ipariée & Je feç,ond époux;
que par le Droit Romain, ce dernier pou voit
être,' chq.rgé . de1.la . ruçellei r:da~ ;' ~e ,cai';: ~ù.) le
per~ :~~svi ~nfin.s t~à~hjit : âpp~U~ : ~ cet - ~lni>I1j, \
que :'- pourtant '11 ' etoIt abCoiuÏli'è'rlt exclu c;le· Pé.
'dutatiôlii par éèfie fcfltôn q~,gnlitcib'Îloit la ~èMft:,
aé
qu
l
1
.alilld in educarione quœ poffet vitCè -ej~s pIé-
e
,
�,
.
Il
r1
r ' ou
\. 1';on dut le
r. re 1acher de la re.
Clcconllance
sIe dont l'op[ervati-oo eft: fi fortement recomman<!I&e par ,1'Eqit cité 'du R,Oi René; que cela. etoie
bien' moins poffit>Je, lorCq'ue ' ta famine avç>it
parté up v~ JCoQft'>rme â' ceiui' de la Loi, 10rC
qu'dIe avoit juge néce-ifaire de ·p river la mere d'e
l'é8ué~tion ; ~'icl··l'avis ,des ' parens avqit été
ilpaOlme ; .O}u -aucun ~e ceux qui en aVo1t réerlemerrt .lla 9~alit.é ~'avoit ,témoigné la 'rp6in~re
~on~a~ce a Ia~ :Oam~ Tllrci;ln~ $l}o)q~'i~-s n'~'p;
p,arNnlfent aux pupdIes que, 'par dI.e ; Cqu~ fes
cjr~onltanc~s par 'lefque1'les on vo.uloit b~I,a~c~
ce: Jugement dotpefijq'ue ét-oie'nt , tol,lt-a-fait intO'nduantes; .que ~our ce bu~av6it Jair bu rp1
•
. ,
f
"
1:;,
. ,
falTe
la
Dame
T\mtaq
én
fa'Vè'ur
de
.
fés
enfaÎls
• r ,
f
,.....
ava:nc fan rel,nariag~, ne pto,uv,oi-c ,riel',..pc)ûi
ravenir; qu'à. préfert, ~~n c~~Ar 'étoit 'liV.ri :â
~ .autres afFetbotls '; q~ a (on, }-.Çe n~aya~t pu
dompter la p;tffioll ' qUl' l'iiVOl 'entraînée vers
1}n fecond époux, 'Hl a~oié· .tollt à crai~dre 'd~
l'effet -{!J~{éqùé~t ~d; cettè, R~gia n, qu~ même
la conduIte precédepte de" ~~ pa"me 'furean
ne dèvoit pas ,raffurer ' ftl.r "c.es craiQ,tes;
que la fU'cp:ffi6n:
lit , t,alh~ ; g~rmain.e u d~ , ~es
enf~ns ~u'eUe l '.lVO'ît obteI1u t at -!eur .'préJudîcè "
l
ô,orlt eile, avoit ac,ce,Pté ou, 8: e'u~-être , capté 8{
foljlcité la prop'ri~të ,. ferv~6~~ ~~ çié~ont,t è)r ~!J.C:
dans ' -{on 'am'e , 1'1lltérêt l.elnpôftoIt ' [ur , tQUÇ
autre rentÎmenr; q,ué 'la : q'ü'alit~
~eIu Vi~tic",êtojt
~f
'1
~
encore moins rafibrante; que de l'aveu .de la
Dame Turcan; c'étoit ,' UR 1116trlrile .fans ;bien
& fans fortune qui n~ p~4tr.6rt [e, faire ~' fo;t
qu'en prenant fur ' 'les pei vatlijifs- des ' puptIles J,
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(Ji)) R:ap.porté par ' Mourg;ues, 1.lirt.:::.1 , . PJ.g~ 36.
.
, ~} :pecormi~, t!~!Jl. h cg-l~ !'t3Ç> r ~ I!,uvt , & tom.
prfIt1i~l', ,col. aS l r; ~()ur~Ufj~,' .P1f. . ~.6,
Je nouveau : ço~ment,at~r ,des ,Sç!l~~~~ t,oIl]. prerwg " rag.
IP., n.
2.'~. ' .
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4
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1
que d'ailleurs quel que fut le mérite militaire
du fieur Turcan, ce n'étoit pas une raifon pour
lui fuppofer les vertus d'un pere de famille;
que le caraétere que l'on concraétoit dans l'état où ·il avoit paŒé fa vie, les principes qu'on
y puiroit étoient tout-à-fait inconciliables avec
les qualités' néceŒaires pour former une bonI?e
& religieufe éducation; que les pupilles [eroient cent fois mieux dans la mairon de la
tante germaine où le Juge d'accord av'ec les
pareos t .avoit cru devoir les placer; que cette ~
tante {œur de la Dame Turcan , quoiqu.e la
femme d'un Boulanger, avoit du' bien, & . vivait dam l'aifance, que fi elle avoit des enfans elle n'en auroit que plus d'aptitude pour
élever & foigner ceux qu'on lui confiait; qu'elle
devieochoic fa mere, commune; qu'elle étendrait facilement fe,s.foins fl!f to':l~, [ans qu'elle
fut plus détournée ile fes occupations, ni qu'il
lui en coûta', beaucoup pl~s de peine; que
d'autrè part '. fe . ferait un avan·tage pour les
pupilles d'être élevés ~vec' leurs coufin.s . ger- .
mains; que cùté faciéré leur ferait agréable,
qu'eUe leur feroiç. utile; Q4'à cÇ>té des enfans
de la ,Dlle. Ph~lip , en p~r~~g~~n~ leur. éducation ,
vivant fo~s le ,Iilême toit, ils s'inftrUlro'ient de c,e :q~.'.ils fon~ & ,de ' ce qu'ils doivênt ê~re , qu'éianf les fils d'un ' artifa,n & l'infu$,{~9c~ de Je~~ ~ Nrt~~~ . !.çe·, l~ur p~rmetta~t
pas ae s élever ac YP ' rang .fupénellr ,11 fallaIt
les /auver 'dw danger de , eôo~~voir des, idées
qui t~~r fi([eut dpns la ~uite dédaigner le travail & l'état daps lequel ils étoient nés; que
ce
én
,
1~
ce' feroit le rifque qu'ils auroient à courir au ..
près de ' kur mere qui ' commençoit déja à fe
~onter , ~ur le ton 'de la femme d'un 'Officl~r; qu atnû ,le chojx- des parens n'avait pas été
aveug!e ' ! ~ IDcoQlidéré; que 'leur unanimité,
leur fIl~nce gén~~~l fur le compte de, la bame
Turcan défignolent en eux ·des motifs qui les
a~rdient: ~ qé.~~rminés à lui r'efufer l'éducation
de ~e,s ,énfan~,. lors: 'm:êli1e qu'ils : [J'en au'r oient
pas- e:e empechés par la conGâération tl'e [on
_ rema,nage; qu'il ér,oit ridicule de dire . qu'il
fallo.lt att:ndre ,qu'él!e [e ,'fut ~7ndue iÎldigne
de ,cette, educatlon . pOur 1 en pnver; que .les
~,OIX, ~Ul ' concecn~ièri~ la, fû~eté des perMnnes,
Il,nFeret des . pupilles n étolent pas [eulêment
fa~;es ~O!.lt' remedi,~r aux abus, m'ais poti~ les
preveOlr; que nen" ne [eroit plus ordinaire
que. de fe laUrer .fédui,re.. par les apparences; que
de ].eunes enfans qUI n'auroient ni la force
ni lè cOl,lrage 'de [e plaindre, s:il étoient réel~
lement maltraités; feraient le plus [ouvent la
viétime de l'arbitrflire dans lequel la Dame
Turcan ' fuppofe . la: ~ quefrion; qu'e . c'écoit ' la
raifon ' exprefiè qui avait déterminé la pt-ohition de l'Edit du Roi Ren·é· ,.'" notre màxime
& 1 no'ne Jurifprudence; que ta .E>àine "Tü'rcan
qui par fan remariage avait p~rdu la pro'prjété
de c~ -qui lui avoit été légué par [on premier
mari- ~ difIipé' l'argent comptant , . vendu depuis
peù 'lesG r.le ti'b 1es , aurait nécellàiremenr' des intérêts~ à' vuî4er avec les pupilles, queconfél
-
.
,-
-
...
'.
D
,
/
�14
quem~~nt eUe.
fçaumit . .jam~i~
voir que
commê Jes eO·n.e,mls de fa , tr<tnqu~llte lX. du bon·
heur ci~ celui qU,i 'o ccupait la premiere place
de"ron . cœur; . q~e ' s'il y/avpit encore quel!que
chofe a préf\lll1er de ' fa t€ndreJfe pour fes en·,
fans, '.on ne 'poûrioit en.' efpérer a~ltant de la·
pa~t d~ vitric au pOUVOir 1.~qu.el ' Ils / e t~o.u
veroietlt; que tout donc folhCltolt. da?s les ~~r
conO:;mc,es l'application de , nos p nn 9pes, J.u(-..J
tiJioit ~ choix des' parens Sc la fageaè de l~ qr.
dOf,lllance attaqüée.
,'
' .
',
- .. ,
Telle" fut )~ aefenfe de~ <p1:lPllles a p.qu~p~"
, le fieur:_ Terrein
croyoit' pa~ ,devoir aj?u ser;
mai!!. la Dame ' Turcan l'.f!yant d e fig,:! r~e dans.
un Méinotre- imprimé qu'elle a . commu.niqué ,
il faiiu' la rappeller avec quelque éteodue, ,c'ef.[
. déJa ;avoir répohdu à la majeure partie" de -ce
Mém'o ire, il -de s'agit plus ql~e de s'arrêt~r fur
quelques-un-es' des oouvepes objea~on~ qu'il
renferme.
' ,
-. "
.'
La ' Oame Turean com'mence par demander
s'il ~fi 'q~elque' lioi, quelqué,:!,-rrêt qui a~t' ce·
fufé il" la 'meÏ:e,-Tédl,lcati09 de [cs en fans , ,IW'C
cela ï~ul qu'elle s'étp'i t remarjée ? & elle ai9~t~
tout,J ,Ide' fuite qu,'i1 n'y . 5n ,a. point da:ns )~s
livres: .• '. : .... '. -qu;à .pce.ine _ voit-o~ q,4~lques'
doar.inês qUl Jom,- même affei rar~f " : . .
:
. 'o.c -à' moin~ de vouloir ,nier l'évicle!]c5 peut-,
on' :âvancer p'~e -telle , pr.opo~tion_ ? -)a_ ~;oi !
ce Cont les LQI.x ~omaln ~s, c e!l le S~a;tut d:e,
Provence &: 11 f~oit impoffible f en, t~ou~er :
de plus (ormelles~ ' Les Arrêts! ils font rap-
D:
!es'
né
1
/
�d
.
. 17
» U manage, elle ne dit pas qu'on ne pourra
» plus la lui confier.
.
'/
Ma~s : ndiq ue-t-el,le. quel9üe 'occafion ,- quelque clrconftance ou Il' f'Olt , permis . de la lui
donne.r ? car l'exception eft abfolue fi ell
' Il.
'fi'
.
e n ea
p~s ma.d1 ee ~ & la Loi -qlli la prononce doit
necelfatrement renfermer la modification.
La Dame Turean ne trouve point de modification dans le texte ~ elle veut y fuppléer
par l~ glof:; ~lle pretend que · cette , glofe
» ap:es avoir dlt - que la mere· doit avoir l'é.
ducatl~,n de Jes enfall.s lorCqu.' elle . ne s:eft P:a's
remal'Iee? po~e enfuue la queftion ou 'ap;ès
le remar~ag~ Il s'éle~e dans ··la famille. '.' .. ,.
La ql!elh,o n d~. f~vOJr ?ù ( ~~s pupill~s ) .doi.
vent etre éleves, & qu ellë :dit avec la Loi ;)
que le Juge dole fe .déterminer par les circonf-tances.
Le texte & la glofe ne dirent rien de tout
cela. Le texte décide bien clairement· trois
chores. rO. Que réducation doit être donnée
à la mere qui ~e .s'eft pas remariée lor(qu.e
perfonn.e ne la lUl, dlfpuce. 2°. Que fi le tuteur
ou les · pareils ne veulent pàs la lui confi·er ou
qu~ i1s la ~emande,n~ à f~n p.réju~ice, le Ju-ge
doit examIner I.e' l~eu ou le, ,pupIlle fera pliJS
avanrageufemenr. ~o. Que' la mere remariée.
doit être abfolumenc exclue. '
Le . gloffatevr il en vrai ne s'expl-iqüe pas
av ec autant de netteté, mais' on voit à travers
, un peu ~e . verbiage qu'il ne .dit ~ien de plus :
ca~ en. dlftlOguan~, le ca~ pa~t1cu1ier où le Juge
, doit dlfpofer de l.educaClon 11 commence ' ainfi j
E
,
�18
ji.QUW11 (ld flÇfjmlt{~ mLp.tcial ~O~ cônvolaverir
& orta fuerù queftzo , &.c. · l~ .n dl dORe pas
vrai Cauf ,refpe&; que la ,gl-ofe .po[e l~ ,cas ou
aprb tle remariape ' i1, s'él~~e ,la quelt~on de
Cavoir ' à qwi l':éducauoo- dO,a et~e -con,fi ee , elle
raif{mne toujours ~ans l~.1uppo!itlon ou la ilP ere
'a pa" -convolé ~, de fècondes nôces & où le
n..
'ff. "
~
Miiili{tl!re · <lu Juge devient . neceU,alre ~I çau ,e
de§ qppofitioo;s dw tute~~ pu des pare[fls . , ~als
quânt ,à la mer,e remanee la glqFe. elt parfaitement :d.'.a<:c;o-rd avec le texte ,.. :VotCI comtn,e -eUe
s~xpÙq\le lit. e.. fed rwnne potcfl -elfe tlttar
-Jliélr.i cus? re{pond. fic. , fed. . .. . . nqn .p<r hoç
(. pllpilli ) apud eum NE.L EAM 4e'bem
.
,C arl .!
'
'
-
édtL.-
.
.
D '
•
. Oi s'il y ~vJ01t .un 'cas n~ ~ les LOIX l~om~~-
.nes .e~Jfen.t ~tewlu confier a ,la I?ere ,-remanee
l'éducation de· fes enfans du premier lit , ·ce [eroit aJfuré'men~-'çelt1i où ' [on ,f econd é:poux autoit, ~t:é ju~é , capable & digne de la tutel~ , &:
,c,ep~9aotdaps' ,ce cas mêmee!les ne .1al1fenc
pa..s. fi, la lui refu1èr. .
~~ • .
. 4 povelle )2':' .:Chap. :,38. ur1e falit qll~ con·
fifl~# 1'-exçl4liQn c.PfolloOQ6e p.<l!r les . LOIX, an~
~cieiJnç~ ~ il ' ~ faut qllep/.o'I~ les anathemes
qlll.'e1!e ~r.QJ!lo:n~~ dans 1, es: ç~api[res fU1V aIlS, con.t.r~ h .y~ljve qU1..3 c~Gyole. "à de: fecon.des noces,
pour [entir qu'elle l'l'a pas voulù 1.u1 <ÇDnf~rver
le tnO,Ï,t;idr,e drcUr: fU'r, [es ~l1fà,ns ~ Dl la mOJndre
~f~lllJÎ1!:e. ,à leltlt éOOucation. "
.
' .
. ,Maj!;, III Loi" nous .clit-0.n..,. ne [e .Nent pnn:
c.,j;p41~~.nt en .gar.de que lcontre .la veu~e qu~
,n;'4: qu'I,i.B epftlnt' <k [on . I prem1er ~anage a
1
19
caure. d.e re[pérance qu'elle ,peu.t avoir à fa
fuccelliQn; & ~'e~ par ~te r..ai[Qn ençore que
le parent [ub(htue au papIlle ne peut avoir- fon
éducatio'n.
'
,t'on convient ..q'le les dangers [ont plus
gra.nds IO,r[9ue le p.u'pille eil uf) enfant unique;
1~a1s rdela t1 Ile fult pas que -1a mere qoUi eft
bIen plus :coupable de s'être remariée lo r[q u'elle
a plu1Jeurs enfacs, mérite plus de coufianc,e ;
Gela ne dit pas que le pupille qui a des freres.- .doi.ve être plutôt livré à une per[ontle
.qu~ .1,11'1 dt tout - à - fait étr.angert:, qu'il
.doIve ,ê tre eXPQ[é au mépris, à l'indifférence, aux caprices ', à la jaloufie même d'un
V)lhic, qui d'ailleurs ,rne [a.uroi1t. li'enrÎchir qu 'à
Ies dépens. La Dame Turcaa a.":t-elle pu. établir la diltinétion qu''eJie fait du pupille qui e{j:
enfant unique de celui qui ne l'-elt pas fur
l'autorité de quelque Loi, ~ , quelque jugement, ou [ur la doéhin e de quelque Auteur?
L'exc1ufion donnée au pareot [ubllitué, prouve
toue au plus qu~ par d'autres motifs, dIe a
pu également être prononcée c0ntre la mere
remariée.
Qùant à l'opinion de Bruneman, de Surdus, de Fràn'c hiô, de Riccius & de' quelques
au'tres antiques Auteurs, eUe ne Cauroir prévaloir [ur la déciiion expreife des Loix . . Que
c'dl d'ailleurs le Iyltême de ces Auteurs? C'eft
de dire, que la mere peut mal,gré [on [ecànd
ma'riage , obtenir l'éducation de [es enfans fi
fa réputation elt intacte, ' fi probœ fit opinionis , ,& fi les parens con[entênt à la lui don.
ner., fi tamen cOlJnqti peta!Jt ex juflJ [atione.
�20 -
on laiffe à la Dame Turcan de juger fi elle
peut fe placer dans cette heureufe hypothefe.
L'Arrêt du Parlement de Paris rapporté par
Anne Robert, ne fauroit faire plus d'impreffion fous deux rapports: 1°. Parce que dans
l'efpece de cet Arrêe, la famille ayant difpofé
de la tutelle fans parler de l'éducation, il était
cenré qu'eUe avoit voulu la lailler à la tnere ;
2°. parce que ce même Arrêt été rendu dans
un pays où les Loix Romaines ne font regardées que comme raifon écrite, & n'ont pas
plus d'autorité , que parmi- nous la Doélrine
des Auteurs, puifque 'les cas non prévus par
la coutume lOcale fe réglent par la coutume
du , lieu plus voifin, plutôt que par la difpofition du droit ' commun; & c'eit auffi la réflexion que le défenfeur de la mere ne - négligea point. Il obfervoit que par les ~oix Ro- .
maines, & en thefe générale, la Qournture du
pupille dépendoit de l'arbitrage du Juge; mais
que dans les pays coutumiers, l'éducation étoit
de drait déférée à la mere. Or, d après un
principe fi contraire à celui gue nous fuivons,
il ne faut point s'étonner que l'on foit moins
rigide en pays coutumier, pour priver en cas
de remariage, la mere d'une éducation qu'elle
a aufrement de droit, & fans la participation
du Juge & de la famille.
Mais quoiqu'il en f~it, de toutes ces doctrines & de toutes ces déci fions étra'n geres,
c'efi fûrement à caufe des différentes opinions
qui s'élevoient parmi les Doéteurs, à caufe de
la diverfité de Jurifprudençè, qu'un de nos
anciens Souvéi-ains crut devoir rétablir parmi
nous
2.1
nous la force de nos Statuts .& des Loix Ra- .
;.matnes.
,
,
- Ce qui affeéte -principal,e~ent le Légillit~Î.1r,
ce q~li le décide. fi promulguer. l~ nouvelle ' L~i,
c'efi l'abus que l'ont fait t jour~~lle~ePt d.u prétexte de l'intérêt des pupitles, Il - & 'd'atitant
» que nous fommes infn,rrués, , dit~'il, .. 'qu"au
) grand dommage & ruine d~s ~tlpill~s "& mi-~
» neurs, les Sénecliaux de nofdite-s Comtés où
) notre Confeil, ' à, l'il1lport~nité 'des 'r equé» rans FAISANT SEMBLANT DE "PO UR)) CHASSER L'UTILITÉ : DES P[jPIL~:
» LES, & qu'aurrem,e[2t , iir ' '!-' en fe;-oJe!ll ' aû~
lr cune pourfuite" Ce 'font 'laiffés .podér ~ :qiC" penCer Cur l'infraélion : dés fuîdit J Sratuts,
r.
cl d
. ~
Ji"""
» non lans gran
om,magf , ~es p p ppl,~s " ~
» DANGER DE LEURS PERSONNÉS,
l) eu égard que la Loi défend; q-ud ' tei. Pf oll.i,!s.
Joient nourris cher. leur Viaric, Il ~< pour
éviter que , les Juges fe lai~rit : féduüè") à.'J I',a
venir par de 'tels prétexte~, ir eordonne à" r exécution des précédens Stat~.ItS" -fans que p.erfùnne puiffe s'ingérer d'y 'difpellfer (OUS,,quelque prétexte tant foit-il jufle ,ou équjfP~le? il
déclare même telle di'fpe'nlè "nuUe 'qüé].qti'en
puitfe être le ~odf. ,Or'! ~ 't~!-{ment ( ~ ,
les Loix Romaujes, 11 pouv_(h~ ' Cubfifiet -quelque doute fur l'exclufion ' ilbfolue qui doit être
donnée à la mere remariée / i1' feroit b~én"' fouj':'
levé par cette Loi qui efi la feu'le par l~gil,elle
nous devions nous régir. ',' :J
'~ ,
Que répond la Dame T~rcân! L'Edlt ,dqnt
il eH quefiiôn' .1 dit-elle-, rie 'ëoncer"né' qJe les
(
f
... ,...
pa'r
"
)
F
,
�r
~
~ut~lIes "
22
rl
ne gliffe qu'un mot en paffant de
l'éducation qui doi~ tpujours refieç dans les re.
gles pr~fi:rites Piar ~e ' . Dr~it Romain. "
QU,o iqpe l'épu~â.tlon [Olt un~ cho[~ dllhnB:e
de la ' tiHe,lIe , . , 'es deux chores ne lalffent pas
que d'a'v oir be~ucoup de rapport entr'elles}
il n'eU: donc p~s étonnant que dans un ,Edit
èoneernant les . tùtelles, ~l" ait éré également
pourv~ cl ce. qui re~ard.oit ' l'éducation; '~'ail
leurs -èet Edit né faH que. confirmer la dlfpo".
fitioas '-des Loix Romaines, nous .les avons di(~.
êutéeffi ~ &. ce ll'è~~ pas enfin . dans une Loi
émanêe. d~. TrÔne ~qll~ l'on glijJe un. mot en
plJffq"i}t.," tout ~fi cen[é avo,if f::é pelé par l~
Souvèrain .Léglüat,e ur dont elle emane, & dans
le C~Jr~il où H l'a , ~éférée ,; on. v~itA de plus
que ce p'efi I;~$ , [eule~ent l~s..., ~~,terets pé.c~,:,
riiaires -des- pupilles 'quI ont .exc!te la [0111CIt~de' d~ :L égiü-fl,téur'1 màis enc~re l~ d~nBer ~e.
leurs. : pèrfonnes ))i e"- ce. ~hef p,artl~uher, die
» Jylo~niues, ;pag. '56, l!a ~.t~ de~endu aux
Via:ric~ de prendre 1. admuuarauon ~ES
» -PERSONNES
' &.. '\biens
de leurs Provins,
. ,...
..
.
;;J.p,up!H~s ' ofl' );ni~~N!'s; réY~9~ arit &. déclara~~.
» nulles i ç,outes . p,rpYIGollS qu~ ~0':lrrolellt ,avOIr
n Jéri, _oû ' [~roiq~ëfai~ès dë ' ~,~ .~r~ per[onnes; )~
é'~f. ~iifi~ "cê', rppt ,gllffé' eri pajJdnt, qu'i a fi'x ~ '
d'u~é " maniere invaria'blt: notre maxi~e & noir~J ]li Ert{piud~~'c~:~( ~'ar ta'qüeIie t l~ mere remarié~' "a-toujour·s .J ~Œ d~.ns \~u,t,~~) ës . circJon,aances,' mê,me contre ~e, ,gré. de l,a fap1Il,l e, ~~c,hue
du droit
d'élev~r 'd le'l.- elle ~ . & dans la mai ..
'r"
»
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... . l
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23
'[on de [on recond époux les enfans ,do pre.
mier lie.
1
~
Mais put-il y avoir quetqJ,.lé occ<i-liôh 'où
Ton dut s'~ca~ter ~e la, ~igoeut ' d~ cette tegle,
ce ne [erOle J3m~us . que- 'dans des' CÏrc'oôftânces majeures où' il ~e;oit généralel-ilen't re)cOlll'lU
' que l'intérêt des 1pupil1es ex~ige -gu'ils' n-é fuient
'pas réparés de reur' mere, & où ' ce~ In'ttrh [erait mallifefie & de toure évrderice.
Ce ne [eroit donc pas qu~nd le
dè la
'famille ea tout-à-fai~ contraire'- quaôd"1e 'J u,ge
I?cal., qui doit avoir une ~on~oiilànce plus partlcuhere des chofes,. fe ferOle
c'énforme à ce vœu',
.
,ce ne ~~r~ pas 9uan~d une ~:(e, _'diiâ l~nlpI~
mer,Jt: J al nourn, V,~,tt,l, r pa ~l' me,.~ enraDs .pen.dant mon veuvage, -Je' leur al donné dés 'Itlllîtees pour les e1l1eigner à lire '& ,:à ·écrire' , j'ai
marié mes filles lorfqu'elles onteté en âge' b d' bile:, On lui repon'dra vous ,àVei. fait cé ,que
deVait 'une bonne mere, ce ql}~ la Loi 'préfumoit d'elle; mais aujourd'hui !> v,otis avez pëFdu
la confiance qui était 'due' à ~J6i/e qualité" 1;jnjure que vous av.ez' faite .à vo-s~_e-rlfans e'(l : une
preuve que v~s [entimens )à r; I~ u~ éga~:d ~.9}!t
èhangé ; vous vbuS êtes feridu'e- I [u'fpetle aux
yeux des Loix, 'elles 'île ~eb Vè-rlt mi mg· ~{en
préfumer de favorable de la per[onne à 'là',pJ1france .de .laquelle vous! vOu'sl.êtes [oumrfè', par
l'.effet ~'une pa~~n _,il!~~l1cjl~~/jle <avec }-e, ,~~_
rHable amour maternel: & a . ta Dame Turcan,
:lui dira \rbus av~'î z.n6i?·s, f~i~ _'},u'~ne
;lutre, parce que ,fi ( ~~us â~eir four~l'Ia l ,t; ocre-.
tien & à l'éducation' de Vos !'eTifarts; ' vbùs n'a-
l
vœu.
on
r '
{
�24
•
vez faie que remplir une obligation' au béné.
fice d'e laquelle vous jouiffiez d~ tous les biens
de leur pere. Vous avez , mimé avantageu[ement ' votre fille, mais ,vous avez été amplement dédpmmagée de vos , dons , par la [ucce[fion de cette tante germaine de vos enfans que
L vous leur avez enlevé;, ,& cette fucceffion n'a
été véritablement gue le but & l'objet de votre prétendue gènérofité. ,
'
Pour qü'une mere qui ,s'ell remariée put encore écarter l'application des Loix qui prononce
con'tr"èlle il ne 'faudroit pas feulement qu'elle
prouvât q~.e le;s pupil~es 'n'ont rai[o,nnablement
rien à cranfare au pres du fecond epoux dqnt
elle â fait ' choix, les craintes de la Loi font
fupérieures aux probabilités, il faudroit qu'elle
. démontra que fesenfans ont ~es ~vantages co~fidé
rables à reêueillir de leur habitation avec cet etraoger' or e!l:-ceauprès d'un homme fans bi~n,
fan: for:une, qui n"au'ra jamais que ce qu'fI
" ' p,oprta' enlever a~x enfans de [a femme, aupres
d'un" homme élevé dans ' les corps de garde,
-& , parmi une roldate[que du moins licencieufe,
1qu,e l'on pouqa .e[~é~er quelque c,hore da~an
tageùx pour l~s pupIlles, ~o~,_ du mOInS u,ne ed,~
cation capable 9'e former un bon & -pIeux Cl,
?"
"
"
t~yen .
. .
Q~e.Ie fie.ar Turcan fOl,t \.l~ ho~m.e .de pro,: '
bité; !Jn ho~me d'hopnjeur, qu Il a~r. ferVl
avec, exaétiwde, c'eil: c~ qui a pu favonCer fan
avancement; c'.éil: un' bon ,~ilitaire i : voilà c,e
qui eft prouv,é; I!lais (é'raï t-ll un" ~O? .)ere
de famille? On eil: encore .en doute , a ce
-'
,
- "':."
. ..'
, , fu jet.
,,.,r.
, "
25 '
ftijétt. nren iie-fa·Ît p-ré[umer lp~ur ou éo~tre I~:Ï'.
Sur q,uel fonde~eht: ~'o~~ Vou~i~-t-on que-' rpn
~ommence par, l~p c~bfi~r ~es el\lfans, [ur lefqolels
Il rtJa aucun drait des erifaÎl'i; qui riiqueroienr ' de
prendre (Jes impr'elIions doot ,'. peut-êtr~ ~ 'ils ne
l'è"'iendroient j~II1a}s i Pou'r.qubÎ veut-on l qu/en
faveur d:ll'n tel' parâtre 'oa ' renver[e toutb les
tna~imes , tou~ ) les ' prirlcipès,. tO'utes les 'LclllC
qu'e la .fageU'e a 'diétées, & : que l'irltéré t puhlfc')& le bon· ordre ,exigent , que· 1'08', maintienne. ~
J
~,J l',
,
_,
l
~ ~
,',:~,
f~ut donc lai~er ces je,lIne~' enfans . à cette
ta,nte-,' .fœuf de laDame TurcàÎ1~ en qui la'famine
& l'autorité ont plilCC~' lèur confiance \; ils ~rdu
verotit-da'Fls cet -alile :les princip,es , qui convietlnenrcà lellr état, & les {oi'ns , d!u~e per[onne ';lui
(>opnoÎt -les d:vQir~ r d'u~e Î tnërë, & , qUI' poui
mériter cette confianCe générale ~ les leur 'prodIguera fans doute de préférehcê -à fes pf<?pres
énfans',
~"i . ' : . ,.!'
.Fjni1fons cetotfdongue d-iféUàioo'l.par qu'eIques
obfervatioIls relativ~s à la 'pr-éEé,'l'e'nte aâmini['
tration de la Dame 'T u rcail.
~
~ . C'éfr de cette 'adinin-ifiratioH dès-' biens de [es
enfclns 1d0,fjt elle a parlé 'comme. l~ , tifre ~ f'é ' p.1U$
favoroable à ,fa rédall)ation. D~'j l1ouveI1.Cls piece:s
nous ~ inllruifeD.t , de " ce qu'eHe; a ~Ûé ;
'~I,,"~
La Dame',Turèan difüit aV-e-G emphafe' qti'eHé
avoit 'doublé., par ~ fes' améIi:or~'ti~DS , ' le ·re'venlt
. de "1' Auberge de la fuccelIion de fan marl,- "Cêtte
augmen.tation p:rocéde bien p'lus du bénéfice dü
temps.;, mais li la i Dame Turèm -a ·fait quelques
répaia'rions néce1fait~s , -eUe · a fil- dilapider .c5t,
;, nJ
l
.'
.!'.
,
•
G
,
�(
•
2.6-
a,1;i#pe.r les. autrc;s effets' de rhé:fÎtagel On prp.m@J ld'en fournir la pr~uve au procès..
,
. ]NQUS avens déja celle d'un abus, nGB moins,
~o-ndamllabl~ dans, les piecc;sl QU p.·r ecès " que'
les pupilles rent 9»li~és de Jo.uteoir <!ontte lei;
freres, Fillol ; dépireu.rs de J'hoirie de leur pere,,!
L~ Oame TU-FE:a~ leur 'lvp-i,t dGmné, par an çi..,
"ma!iqn, une qlJlitt~nce Hm\:jlée d~s [ommes don1l
il~ ft~ie..nt .tedevflDl~s, &~ Ç.~la pour ret.Ïrqr' elleUl~Ql~ c~s forpmês .& l'enley.éf à fes enfans; C~(t<;1
quitt~nce fut · lÎvrét:, peu de temps av.aRt; 1~
~e1lJ9rÏ';1g.e. O f. ql-Jelle. ~oiil fi.a·rtâe ' peu-r..oa , a'!~~if à
~t1~r ~r6 qUoi a dr t,eis procédés; :& avio~st-nou's
PQin~ ~ ·toq, de dire d~n§ D[(}s premiéres\.cléfefl,
fes_1 que le5- , pu}?iUes éroiem à la: \(eill:~~ d'avoi·,
~ne feule de ~ontefia~to'ns avec . 1eü;1i' mete'.;i ~
q~~ I1ftlaUoi~ pas ~lI.o~iér. 1 9s . p~rfo/1;n~s loG>f« qua
l~ : în~ér~ts pouvp-je:n~ .~ tr~ li .di ~~(és.
. ; ~.
c:_ ,oJl fe-.rojt · i['1fiQiK.on. Y9u·lg}it eJux~r .daJ1s) o
dét âil de tous les reproches que 1'on aU'f 0t t l'!cl
wr~ I à:,}p .. Dillr.Je · TH;-~ ëall. . ~-e li~ nlJI' T(trf,i:ifl~ qui
éd ;1t:>ll-; bga,l:l<rltlj§ ,: & .qJu .patl ~ l 2tu . l)Om~ ~e.' J'es
en fans , s'elt impo(~4iled.fe [ !;1)! .Qjjefl de c~i&s' J
c# a:,;t ·(}~Üéé .d~ ta' paF( ~~dI~;:bdl@>:lDl(üe-aé=-fléfi
te jIè'lLl-~ har.GJ.i. /~O}{tdW .'q \~é" oqu§ Flol;) s -o~ht ~ll tQnS
~:La~rq,t,'ç'efi ',~M e ( t! n(l€fiqi'~ :d~np 16's eéalti6cais
qu'elfe amaP'J:lié Lq!ll!"j·l fa,u~·~chL~ I'Q.hezi , la I [\Ïél'Ïrél;
~f1j~~p Gfl'Jr'G>'~ . _ir~keffog.e ~JItldJt:t. ·.:. 'peu(ooli:l e ,l: de
;L'. .G';"'1ô.n . :noo 'til-1~~, GJ<~~ ~e ' f(!llH ; . &. d w - ;fè ra
!Xyl!Jtqt : i,~fpfq-f~ ~ (je. ~1iG~fS efi une tr~cAflbil(J
ijJ.:Je)p:[J.e'u-t ~e tB!!isJ• ~ 'yQ,~lJ.J> , ' le~e1i
l ir.h @..1
lm,
"t'"
~ e~-tI _,r .& __ fI J <f,S;•.p~.r'i!tl t§(!i_ le! J.u gl~;[.o 'Ç> Ial:! ;pas
~7
réfufei- à' la Dame Turçan l'éducation que les
Loix ne fauroient lui accorder dans aucune
ciécopfiaoce.
J
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·!i: ...
~tf
1esl:~ oo1i.dl41iat ~o~ i~s ,p'lus cléc~!i~qs"
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CONCLUT au fol appel avec amende ,
renvoi & dépens.
Signé CARS, Avocat.
DESOULIERS,
Procuteur~
Monfieur le Doyen, CommiJJaire'. . _
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te Cofteje. l7 83 . ' )
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mi ~=m:r:~ ~~\,} ~5'SS$
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1
ME MO IRE
cr
...
POUR Dame MARIANNE TEISSEIRE, veuve
du fieur Claude Sandin, Aubergi1e, &
époufe en fecondes nélces du fleur Efprit
Turcan, Officier dans le Corps-Royal de
la Marine au Département de la ville de
Toulon, appellante de l'Ordonnance rendue par le Lieutenant-Civil au Siege de
ladite Ville, le 8 Juillet 1782, au bas du
procès-verbal d'affemblée de parens, &
au chef de l'éducation de deux enfans qui
font encore pupilles :
CONTRE
Le
fieur JEA N TERRIN, Marchand de la même
V ille, en qualité de tuteur nommé par la
même Ordonnance aux dits enfans pupilles,
znume.
•
t
U
•
1
NE mere, par cela fe.ul qu'elle eft remariée , doit-elle ~tre privée de l'édu-.
�2.
,
cation de [es enfans pupilles, malgré que les
circonfrances où elle [e trouve, rejettent gé.
néralement tous les [oupçons que la Loi lui
imprime à raifon de [on remariage, & qu'il
foit de la plus grande évidence qu'elle conferve toujours la meme tendre1re pour fes enfans , qui doivent être par con[équent beaucoup mieux entre [es mains que dans celles
de toute autre per[onne de la famille; lor[qu'ou voit enfin que ce n'eft qu'it'lquiétude
& tracafIèrie de la part d'un beau-fils qui
s'eft imaginé que [a belle-mere, dont il avoit
fait une vache à lait, n'auroit plus pour lui,
ni les mêmes témoignages d'amitié, ni la même
confiance?
, Voilà tout ce qu'il y a à juger d~ns
ce proces.
La Dame Turcan perdit le fieur Sandin
fon premier mari vers la fin de l'année I777,
il Y a près de fix ans, & il lui refta cinq enfans, pre[que tous en pupillarité. L'un d'eux
eft décédé du depuis.
Il avoit fait fon teftament le l A0l1t de
l'année de [a mort, où il légua d'abord en
propriété à [on éponfe la vai1relle & l'argent
monnoyé qui fe trouveroient dans [a mai[on,
& l'ufufruit de tout le furplus, pour en jouir
fa vie durant, à la charge de nourrir & éduquer fes enfans [uivant leur état, & de les
entre!enir, en travaillant par eux au profit
de l'héritage. Il la nomma enfl.lite tutrice-,
curatrice & adminiftrere1re de la pe r[onne
& biens de fes enfans nés &- à naî:tre, avec
difpenfe de faire inventaire, dé prêter [er-
3
ment, de donner caution de bien u[er, de
rendre compte, & généralement de toute
formalité de Juftice; après quoi il in11itua
pour [es héritiers univerfels fes cinq enfans,
& les leurs, en ca,s de prédécès, pour prendre poffeffion apres la fin de }'ufufruit &
en difpofer à leur plaiiir & volonté.
'
Dans fon veuvage, la Dame Turcan ne
fe ' borna p.as à l'éducation de fa famille dont
elle prit néanm?ins le J:lus grand foin', que
la Dlle. Françol[e Sand1l1 fa belle-fœur voulut récompenfer par une in11itution d'héritier
pure & iimple; elle s'occupa encore à améliorer la maifon fervant d'auberge, qui étoit
le [eul immelible de la fucceffion de [on
mari, auquel elle fit des réparations fi cou.
fidérables, que quatre ans après elle eu retira une rente annuelle de I600 liv., tandis
qu'auparavant cet effet n'en produifoit pas
la moit-ié, & elle parvint à peu-près dans le
même temps, partie de [es épargnes, partie
des profits qu'elle avoit faits dans la contitinuation du métier d'Aubergi11e, & par le
fecours de la fucceffion qu'elle avoit recueilli
de [a belle-[œur, à marier [a fille ainée avec
le iieur T erriri, partie adverfe, fous la conf..
tÏtutiOH d'une dot de I2000 liv. comptant,
dont 6000 liv. du chef paternel ( ce qui
étoitla payer grafIèment de [es droits), &
le reftant du lien propre.
Un des trois enfans qui lui reftoient
"é tant parvenu à fa puberté, & n'yen .ayant
par conféql1ent plus que deux dans râge de
•
�4
pupillarité, il fe préfenta pour elle l111 parti
de mariage, où elle ne vit que des avantages
pour fes enfans par le fecond pere qu'elle
, leur donnoit, & qui concouriroit avec epe
à l'avancemel~t de fa famille; l'événement n'a
certainement rien fait perdre de cette idée 1;
mais malheureufement pour elle fon beau-fils,
qui ne confultoit que fon intérêt à lui, ~ qui
11' envifa O'eoit pas la chofe fous le même pomt de
vue , pri~ de l'humeur, & ne s'occupa plus qu'à
faire un parti contre fa belle-mere dans la
famille; de maniere que lorfqu'elle fit procéder à une airemblée de parens pour l'élection d'un nouveau tuteur aux pupill/es (préa, lable nécefià.ire au remariage), en demandant néanmoins que leur éducation lui feroit
continuée, le fieur Terrin vint à bout de
rompre le vœu formé par le fuffrage de trois
parens ou voifins qui avoient déja délibéré
de donner la tutelle au fieur Jean - Louis
T eiireire oncle maternel, & de continuer
l'éduc~tion à la mere, en faifant dire à quelqu'autre voifin, & en difant à fon tour, plus
fortement que tous les au.tres, que tous .les
parens n'avoient pas été affignés , & que JU~
ques à ce qu'ils euir~nt été tous aP1?ellé~, Il
n'y avoit aucun vœU a rendre, ce qUi obhgea
le Lieutenant qui ,préfidoit à cette airemblée ,
d'ordonner que tous les parens qui avoient
été dénommés, foit par le fieur Terrin, foit
par fes adhérans, & don~ l~ ~lupart é,t~ient
étrangers, feroient affignes a Jour preCIS &
, compétant ~
"
compétant, pour délibérer & donner leur
fuffrage fu~ l'objet de ladite afremblée, qui '
fut renvoyee par ce moyen au 8 J uiUet de
ladite/ année 1782.
Dans ces entrefaites, & le 26 Juin d'auparavant, le fieur Terrin, qui avoit envie de
groffir fon parti, rapporta une Confultation
fur divers objets qui pouvoient le concerner vis-à:'vis de fa belle-mere. On ne nous
a fait connoître que celui qui regardoit l'éduc~~io? des, pu~illes , & on lui décida que ce
n e.tolt pomt a la t,nere remariée qu'on deVOlt confier cette education.
, .Avec ce papier ,à la main, qu'il avoit grand
fom de montrer a tous ceux qui devoient
voter dans la nouvelle affemblée, il ne lui
fut pas difficile de gagner d'autres fuffrages.
Tous les nouveaux parens qui furent ouis,
dirent qu'il falloit lui donner la tutelle comme
à celui qui avoit le plus à cœur les intérêts
de la famille, & un d'excepté, ils furent encore d'avis de confier l'éducation des pupilles
à la Dlle. Teifreire, tante maternelle, femme
de Philip, Boulanger.
L'Ordonnance qui intervint, fut conforme
à cette pluralité de fuffrages, en préférant
une opinion qui n'avait pour bafe que quelques confidérations en droit qui étoient détruites par le fait, à l'intérét évident des pupilles & au vœu généralement de tous les
enfans qui avoient reçu & recevoient encore
tous les jours de nouvelles marques de la
tendrefiè & de l'affettion de leur mere.
l B
�Ces fentimens, qu'elle ne comptoit pas de
perdre par le remariage, & ql~'elle a effea:iv~
ment toujours confervés , ne IUl ont pas perml~
de fouffrir l'exécution d'une Ordonnance qlU
devoit la féparer d~ ces deux ~nfans ,.qui, par
leur plus o'rande ]enne1Je, n 'e n aVOlent que
plus de. d~oi.t à fes fecours & à fes foins:
:Elle en l11tefjetta appel contre le .tu~eur, ,qUl
fe hâta de venir préfenter une requête a la
Cour le ~ Août fuivant, pour lui demander
l'exécution provifoire de cette ' Ordo.nnance ~
fous ce faux prétexte qu'on comptolt parmt
les peines prononcées par la Loi contr~ ~es
femmes qui fe remarient, celle d'être. pnvees
de l'éducation de leurs, enfans pupIlles, &
que le nouveau ménage d~, la D~me Turcan
~l1e pourroit comporter 1 educatIOn des pupilles, -ainG qu'il avoit été reconnu par les
"
parens atremblés. .
En conféquence du décret de fOlt-montre
à partie, la Dame Turc,an ~réfenta [a requête c01~traire ~ où. elle etab~lt que fon premier man n'avolt faIt une petIte fortune dans
[on métier d'Aubergifte, que par le foin qu'elle
avoit pris de le [econder; qu'il lui en av oit
marqué fa recoimoitrance d~ns fon te~ament;
qu'après [a mort, elle, avol; eu. un il g~and
foin -de fa famille, qu au temolgnage dune
foule de parens amis & voilins qui l'avoient
attefté par des 'certificats, ~ans que cel~ ait
été démenti par aucun certIficat contralre!
eUe joignoit celui d'une Cœur de [on man
qui aVoit été bien-aife de la récompenfer de fa
•
7
bonne. conduite .& de fon attachement pour
la. famtlle, en la l~ommant [on héritiere ,pour
fa~re de [on héntage ce qu'elle trouveroit
bon; qu'avec ce [ecours, elle avait fait des
au~~en.tations fi. con(idérables à l'auberge,
qUI .et~ lt. le feul !mmeuble délaitré par [on
matI, qu elle étaIt parvenue à en cloubler
la renté, & que le nouveau mari qu'elle s'étoit donnée, étoit un Officier de Marine clont
les [entimens d'honneur & de probité avoie nt
été prouvés depuis long-tems, pui[qu'il
avoit paffé par tous les degrés inférieurs,
n'étant parvenu par con[équent au grade
d'Officier que par [on mérite.
Après ces conGdératiol'ls de fait, elle [ou.
tenoit eu droit ; que la loi n'établi[oit que
des [oupçons contre la mere remariée qui
reprenoit néceffairement tous f~s droits [ur
l'éducation de fes enfal1s, Iorfqu'il paroitroit
par [a conduite qu'on ne devoit pas fe mé~
fier de fa tendreffe & de [on attachement à
leur égard, parce que c'étoit toujours l'intérêt -des pupilles qu'il fallait confulter fur
toutes cho[es, & qu'on ne pouvoit le fuivre
qu'en
continuant
de lui confier leur éduca•
1
bon.
.
Ces verités devoient étre [enties, & la
Cour ayant renvoyé [ur le concours de ces
requêtes les parties en jugement, le fieur
Terrin a p~is fagement le parti d'abandonner [es fins provifoires, en les fai[ant joindre
au fonds; qui ne peut cependant [edécider
.
'.
que par
, les mêmes principes.
�8
Efl:-il en effet quelque Loi, quelque Arrêt
qui ait refufé à la mere l'éducation de fes
enfans, par cela feul qu'elle s'étoit remariée?
Il n'yen a point dans les livres, à en juger
du-moins par les recherches qui ont été
faites ici de part & d'autre, A peine voit-on
quelques doarines qui font même airez ra·
res, & qui doivent. incontefbblement ~éder
à l'opinion générale des Auteurs qUI font .
dépendre la chofe avec la loi, des circo~f
tances particulieres, pour placer les pupIlles, comrp.e on vient de le dire, là où fe
trouve leur plus grand intérêt, c'eft-à-dire,
chez leur mere , ou chez tout autre . parent,
felon que ' leur avantage peut l'éxiger.
La loi l, au code ubi pupil. educ. debeant
ne dit rien de contraire; car elle ne déci.
de autre chofe, fi ce n'eil: que la préférence eft due à la mere pour l'éducation de
fes eufans, nulli magis quàm marri eorum, fi
elle n'eft pas remariée, fi non vitricum eis
i'nduxerÏt ; mais en lui faifant perdre cette
préférence dans le cas du mariag~, elle ne
dit pas qu'on ne pourra plus la lUI confier.
Tout ce qu'il eil: permis de faire y c'eil:
de mettre alOrs la chofe en queil:io~, vu les
foupcons qui peuvent naître contr elle de
fon r~mariage , .en laiffant au Juge la liberté
de décider, eu égard aux circonftances où
il convient le mieux que les pupilles foient
élevés,
.
Telle eil: auffi l'explication qu'en donne
la glofe, où après avoir dit que la mere doit
aVOIr
,
, l' e' d
'
avoI~
ucatiOn
d~ 9fes enfans, lor[qlt'elle
ne s ~[f: pa~ remanée, elle pore enfuite le
cas o~ apres le remariage, il s'eleve dans
la famIlle, c'eft-à-dire, entre la mere, le
tuteur' & ]les autres
du p-Upi-II e, 1a
" parents
'
que ft Ion ce
'_,
' favolr ou rIs
, doivent etre e'l e ves
& e Il e d It avec la 101 que le Juge
p'
.
{'d'"
"
, a l'es
aVOIr con 1 ere 1 etat & la qualité des uns
& des aut:es, .décidera quel eft celui d'entre, eux, qUI dOIt être chargé de leur éducation: perpendet ubi puer educari debe at.
La Novelle 22, chap. 18, dit exaétement
la même chofe. ~lle répute la mere la perfonne la plus digne de l'éducation de fes
enfans, tant qu'elle n'eH: pas remariée: mater fide dignior ad filiorum educationem vide.
hatur. Son remariage lui fait perdre cette
prérogative d'être coniidérée par fa qualité
de mere, comme la plus digne de tous les
autres parens des pupilles; mais cela ne dit
pas encore une fois qu'elle ne puiffe & ne
doive obtenir ~ l'éducation de fes enfans fi
c'eil: leur avantage, & fi l'on a raifon 'de
croire par la conduite qu'elle a continué de
tenir à leur égard , qu'elle ait toujours le
~ême .attache~.ent P?ur el~x, ,ou un degré
d affeétlO n fupeneur a celUI qu'on pourroit
pré fumer dans toute autre perfonne de la
fami1l~,
,
Mais, dit-on; il Y auroit une contradic.
tion manifefre dans le fyil:éme des Loix,
fi d'une part elles obligeoient la mere rema· 1
riée à fe départir abfolument dé la tutelle
C
�10
datur p~rfonn~:; & . fi de l'autre, elles
lui confervolent 1 educatlOn de fes enfans
dont .elle eft incapable d'adminiftrer les
biens.
Les Loix ne lui confervent pas l'éducation qui eft, de l'aveu de tous les Auteurs,
autre chofe que la tutelle, aliud rurela, aliud
educatÏo; elles décident au contraire qu'à
raifon de fon remariage, il eft permis au
tuteur & aux autres parents des pupilles
de la lui contefter; mais elles ne décident
pas qu'on la lui refufera, quand même il
paroîtroit plus avantageux aux pupilles qu'elle
continuât d'en être chargée; elles font dépendre la chofe des circonftances, comme
s'en explique Me. Julien en fes colle8:ions
manu[crites, va. rutela , pag. 14, litt. M. , hot
pendet ex circonflanriis ; & rien n'implique [ans
doute qu'en privant la mere de la tutelle ,
par la crainte que fon nouveau mari ne dilapidât l'héritage des pupilles (ce qui ne
peut pas fe rencontrer dans l'e[pece préfente, où tout femble fait pour la mere , puifque [es enfans n'ont encore que ce qu'elle
voudra bien leur départir par la rétentiol>l
qu'elle fait de [on legs général d'u[ufruit, )
on lui continne l'éducation des pupilles, en
coniidération de la tendreffe qu'elle a conrenée pour [es enfans auxquels elle s'attachera toujours davantage, à mefure qu'elle
continuera de leur donner des [oins qu'ils
ne peuvent véritablement recevoir que de
fes mains & par elle ~ & tout de même que
II
qUa:
•
l'on peut) 'feloll les circonfrances, donner
l'éducation à celui qui ne peut pas ~tre
tuteur, on peut auffi nommer pour tuteur
t,o,ut aut.re que ce!.ui qui doi~ ê~re chargé d~
1 educatl<;>Il , lorfqu Il le faut all11I pour le bien
& l'avantage des pupilles.
D'ailleurs il faut bien prendre garde de
ne pas confondre le cas d'après lequel la
plupart des Auteurs raifonnent, celui où il
n~exifte du premier lit qu'un [eul enfant puptl!e qu'on voudroit faire paffer fous la condl1lte d'une mere qui anroit d'autres enfans
& un mari dont le cara8:ere ne feroit pa~
pré[umer favorablement pour le pupille, ou
entre les mains d'un parent qui auroit été
fubfri~ué à [es biens.,L'intérét qui , gouverne
fi factle~ent les ~~mmes, pouroit [uggérer
des deffems pernICIeUX au pupille, & ce
n'eft pas [ans rai[on que la loi avertit de
péfer ces con{idérations, & prévenir en conféquence les rifques qu'il pourroit y avoir
pour la vie du pupille, en s'écartant même,
s'il le faut, de la volonté du pere, toutes
les fois que l'efpérance de la fucceffion du
pupille pourroit faire naître des [oupçons
contre ceux qui auroient été chargés de fon
éducation, ou qui demanderoient d'en prendre 'f oin; fi fpes fucc~!Jionis fufpicionem inducat, Leg. 2, cod. ubi pupil. educ. debeant.
Mais ici rien de pareil n'eft à craindre,
& c'eft pourtant l'idée qui a affe8:é le plus
le LégiDateur dans le détail des con{idérations qu'il ramêne pour, confier l'éducation
�12
\
du pupille; car en mettant pour un moment
à l'écart tout ce que la Dame de Turcan a
fait & fait encore depuis fon remariage
pour l'avancement de fa famille, comme tout
ce qu'on doit attendre de fon nouveau mjri,
qui en partage volontiers le foin avec elle,
pour ne nous occuper que de la raifon
d'intérê't . qui pefe li fortement dans la Loi,
on efr pleinement raffuré là-deflus, quand on
conlidere qu'il refre quatre enfans dans la
famille, ' parmi lefqpels il y a une fille mariée
au fieur T errin, Partie adverfe, & un garçon qui eil: dans la puberté, dont le choix
eft par conféquent libre, & qui ne refte
dans la maifon de fa mere & de fon vitric
que parce qu'il s'y trduv~ bien; de maniere
que la mort des pupilles ne donnant rien &
abfolument rien à la mere, le fentiment d'affeB:ion qu'elle a pour eux n'eft combattu par
aucun autre; & rien ne pouvant par conféquent la confoler de leur perte, il n'y a plus
de raifon qui s'oppofe à déféreJ; au fentiment
qui lui a, fait demander de continuer d'en
prendre foin.
On cite encore l'Edit du Roi René concernant les Tutelles, où, après avoir défendu
de nommer pour tuteur le futur mari de la
mere qui fe remarie, il eft ordonné que cet
article feroit ihviolablement obfervé, & on
en donne pour raifon que la Loi défend que.
les provings [oient nourris & élevés chez
leurs vitrics. Or, ce n'eft-Ià qu'un mot gliffé
en paffant, où l'on applique ' à l' éducation ce
que
,
1 L' d'
q
que a 01 ' I~ 'de la tutelle, & qUÎ n'entre
pas dans les ddipolitions de l'Edl't , q III. ne regle, comme nou~ v~nons de le dire, que
les. tutelles, & qUI lal!Te la matiere de l'éduCatIOn. dans les
.
R
. regles prefcrites par le D l'Olt
, omam, qm ne refufe pas à la mere l'avanta~e de, continuer d'élever fes enfans lorf9u el~e s eft remariée, & qui laifle au Juge
a qUi cette conteftation eft portée, dans le
Coucour~ de la ~ere & des autres parents
des pupIlles, la lIberté de choilir celui d'entr'eux qui doit en avoir le plus D'rand foin
& chez lequel il leur eil par cOl~féquent l~
plus avantageux de refter.
On .le voit effeB:ivement ainii dans toutes
le~ LOIX du code & du digefte ftlr cette rub~lque, ubi pu!nil: educ. deb. Le Juge conii.
derera, y eft-Il dIt, par les c1rconHances de
la qualité des perfonnes, de la condition &
du tems où il fera le plus utile au pupille
d'etre nO:lrri, ubi potius pupillus alendus fit.
On le vOIt encore dans l'Arrêt, qui, filr le
c.oncoU-r.s des Requêtes, avoit renvoyé les Part~es 'en Jugement, demeurant cependant tout
en état, c'eft-à-?ire, en laiflànt malgré la
Sentence les pupIlles fous la conduite & la
direttion de leur mere; ce que la Cour n'eût
fans doute pas fait, fi une Loi quelconque avoit
prononcé fon exclu/ion, & qu'à fon égard
la chofe' ne dût plus dépendre des circon[tances, fi le droit, en un mot, avoit dû l'em~
porter [ur le fait, & c'eft à quoi on n'a fait
. auffi aucune réponfe.
D
�14
On le voit enfin dans l'Arrêt du Parle ...
ment de Paris rapporté par Anne Robert,
liv. l , chap. 8. La Coutu;ne q?i gouvernoit
les Parties n'ayant pas d'Ifpofe fur ce cas,
c'étoit par la difpofition des Loix Romaines qu\l falloit. le décider. Auffi dans les
défenfes refpeéhves .ne trouve-t-Ol'l ~ue ,d~s
citations de cc's LOiX, quelques tra1t~ d hiftoire & deux a'l1tres Arrêts de p'1"éi,rigé que
'q ue la mere faifoit valoir à l'appui de fa ré.!.
damation.
Les difpofitions de fon premier ma:i étoient
exa>étement les mêmes que cellè'S du Üeur ~an
din, & ces deux efpeces fe reffemblerO'leht
entierement , s'il n'y avoit eu contreL la. rnere
-cette circonftance à laquelle la
01 atta''che tant lde confidér~tion) !I.u'il n'exiil:oit qu'mi
feul e'nfant du premier m~nage.
.
Cette femme cOlwel10lt que le DrOit Romaln la privoit de la tutelle, mais elle fou ..
tenoit auffi, qu'il n'en étoit pas de mtme de
l'éducatiotl qui devoit être donnée- à l'affec:.
tion , .& qu'il n'yen avoit au~une, pas même
à l'égard cles peres, qui pût furpafi'er celle 'd e
la mere. Patres quidam liberos amant, fed
nul/us eft ajfeCl!IS qui v'ineat maternum, & que
c'étoit une erreur de croire que cet amour
fe perdît dans le remariage. Elle ajoutoit
que daüs le 'remai"iage il y avoit moins à craindre la haine d'un vitric que les inimitiés d'une
marâtre : quin imô in feeundis nuptiis non .tàm
•
•
.'.
r
t
vùrici odium , quàm novereales lnltnzemas mettll
oportet; qu'il y avoit effe&ivement beaucoup.
\
I5
d'exemples de vitrics qui s'étoient attachés aux
enfans de leur femme, au point de les traiter comm: leurs propres enfans, & que puifqu~ la LOI confervolt au pere remarié l'édu/
ca~lOn. de fes enfans, ce feroit contrarier la
ralfoll ~ . le vœu d~, la nature, ,que de la
refufer a la mere qül ef!: ceI1f(~e avoir encore
plus de tençlreff~ 'pour eux, dans ce premier
age fur-tout où Ils peuvent plus difficilement
fe paiTer de fon recours & de fes foins. Par
ce~ confidératiol~s, dont nous avons hlpprime ·tous les détatls, le tuteur fut débouté de
fa, p,réten~ion de. priver la mere de [on legs
general cl ufufrUlt & de l'éducation de fon
fils: Senaws Meviœ matri & filii edueationem
&: legmi ufusfrutlus 'Commodum adjudieavir:
La principale raifon qu'on ' oppo[e, c'eil:
que dans l'hypothefe de cette Arrtt il ne
paroit pas que le fuffrage de la famille eût
été contraire ·à la mere; mais c'eil: convenir par-là, que les Loix Romaines qui étoient
les feules dont on s'appuya de part & d'autre, n'ont pas compris la privation à la
mere de l'éducat1.on de fes enfans, dans les
peines des fecondes nôces. Voyons mainte ..
Hant fi elles regardent comme quelque chofe
de bien décifif l''Üpinioll de la famille.
- P·ar-tout on voit. que l'éducat~on des enfans ef!: laiffée à l'arbitrage du Juge, 10rfque
la mere fe trouve remariée, & qu'il peut en
confé(.]uence s'écarter de la voloHté du pere
pour faire tomber le choix fur toute autre
perfonne de la famille, .& no-n nunquàm à
�16
17
yoluntate patris recedit, toutes les fois qu'il
lui apparoit, après avoir pr~s connoiifance
de la chofe, caulâ cognitâ, qu'il eil: plus avantageux au pupill~ de ne pas reil:er là où .le
pere l'avoit place .: fi .doaus .(zt no~ expedlr~
Pllpillum eo morarz ubl parer ]ufferzt; ce qtu
dépend entiérement, en~ore une !ois '. de 1'9pinion du Juge: & hoc ]udex efllmabu, leg.
7. ff. de ann. legato leg. unic. cod. divert. faa.
& leg. 1. 9. , 1. ubi pupill. educ. debeant. Or,
s'il eil: permis au Juge de ne pas fuivre la
volonté du pere, qui eil: le premier juge de
fa famille, à plus forte raifon peut-il s'écarter du vœu des parens, lorfqu'il ne lui paroit pas raifonnable. Il ne feroit jamais permis de l'attaquer, s'il de voit fervir de Loi.
Ce n'eil: pas qu'il faille abfolument le méprifer, puifqu'on a recours ordinair,e ment à
eux & toutes les fois qu'on eil: bien aife
de ;'aifurer plus particulierem,~nt de l'intérét
des pupilles, mais auffi il ne doit obtenir quel.
que coniidération que quand il eil: ~ondé fu: des
motifs raifonnables; car c'eil: moms un Jugement que rendent alors les parens, 'qu'un
~vis qu'ils donnent pour inil:ruire la religion
du Juge; & ici, où l'on ne donne point
raifon de fa détermination, (c'eil: même le
plus grand nombre,) où l'on en fournit ,de
bien mauvaifes, de maniere qu'en jugeant,
des uns par les autres, on peut bien dire
que tout eil: également vicieux & inadmiffible.
,
..
On a dit en effet, & c'eil tout ce qUl
a
)
a pu forti.r de la bouche du fleur Tenin
notre PartIe adverfe & le mel
d'
' l e u r œuvre
d
ans tOute cette tracatTerie, que la tel1dreife dont la Dame TeiiTeire faifoit parade
pour [es enfans, n'étoit qu'une imaO"ination
que [on. [~cond mari détruiroit, ainfi qu'on
le VOyOlt Journellement.
Mais .s'il. avoit peut-étre quelques exemples
pour ~Ul, Il. Y en ~voit un bien plus grand
110~bl e qUI atteftolent qu'une rnere ne perdo;t pas }?ar [011 remariage l'attachement
qu elle ?VOlt p.our [es enfans du premier lit.
Il de~oIt [~ dIre que. n'ayant rien à repro~her a [a. belle-rnere Jufqu'à cette époque,
Il ne fallolt pas fur une poffibilité la priver
~e l'avantage fi cher à [on cœur, de cont1l1ue;. d: donner [es [oins à [es enfans ; &
que sIl n dt pas permis d'appeller d'une Sent~nce filr le foùdement d'un préjudice à veun appel de, cette
lllr à futw:o gravamine ;
efpece dOIt être regarde comme prématuré
& par cela même irrécevable ; s'il faut attendr~
que , le mal [oit arrivé pour s'en pl~indre
on ne de~oit pas avoir plus d'égard [ur l~
futu~ ~oll~lI1gel1t don.t il excipoit, [ur cette
conÜderatlOl1 recherchée, que l'attachement
que la mere prendrait pour [on fecond mari
lui feroit oublier [011 devoir & [a tendrefIè
pour fes enfans, d'autant que quand cela arriveroit, on feroit toujours reçu à demander que l'éducation fût ôtée à la mere pour
la donner à tout autre parent, en cherchant
toujours, & dans tous les tems, ce qui pou-
fi
E
�18
voit ~t~e le plus avantageux amc p'upilles.
C'ea auffi la remarque de tous les Auteurs,
qui, fans fe livrer à ~es opinions parti.culie.~
res, ont parlé d'apres l~ ,vœu & la dlfP.oÜ..
tion- de la Loi. On a cIte dans les premIe rs
griefs de la Dame Turcan, la dothine de
Bruneman fur la rubrique du code ubi pupill.
educ. deb. où, parlant d'une mere remariée
qui eft appellée à la fucceffion de fOl~ ~ls,
pour un tiers ou pour toute autre m1l1lme
portion, il décide qu'il ne faut pas po~r ce.la
lui refufer l'éducation de fes enfans ; ft d'ailleurs, fa réputation eft fans tache, licet ad
Jecundas nuptias Je contulerit, fi tamen probœ
opinionis , n012 efl r:: alè prœfumend~m de
maternâ edJ.icatione; qu Il eil: rare parmI nous
qu'on refu[e cette [atisfaaion à la mere, &
que quand les Parents le demandent ainfi"
il ne faut avoir égard à leur réclamation que
quand elle eft fondée - fur des m.otifs juftes
& raifonnables , fi tamen cognatl petant ex
jufia ratione. Or , rien de plus frivole & de
plus faux, comme on a vu, que la bafe fur
laquelle ils ont fait porter ici leur détermination, qui eft par conféquent, on ne peut pas
plus méprifable.
Et qu'on ne dife pas que l'opinion de Bruneman eft unique. On la trouvera répétée
par Surdus de alimentis, tit. 4. queft. Ir. nO.
1.8. où, après avoir dit qu'on ne doit pas
-argumenter ici de la tutelle à l'éducation, à
rutela ad educationem non reaè fumitur argumemum, & que la Loi perd, p~r le remariage
Jit
I9
'
la mere, la confiance qu'elle lui donnoit.
ajoute. ,que tOtdIt ce. qu'il avoit dit de la mer:
remanee, ne evoit pas a"oir lierl & .,
r"
, s appIquer a c.eUe qUI. ne. devoit pas iilccéder à
fon fils pl~pIlle, qUI rejettoit tout autre [oupçon p~r 1~ bonn~ conduite, & dont le Juge
pOUVOIt faIre chOiX pour l'éducation d r
fil
.,
e 1011
s, qUla tune poterie Judex apud eam collo~
care alenallm filillm.
F:anchin, décif. 350, nO, 3, rapporte
un jugement du Con[eil de Naples qui ordonna contra~~aoire?1ent avec un oncle paterne~, 9ue l educatlOn des pupilles [eroit
confiee a. la ~ere, parce qu'elle ne devoit
ras fucceder a fes enfans, s'ils décedo' ent ab
lntefiat, & qu'il n'y avait rien à dire fur
fa conduite, 1108 plus que fur celle de [011
fec.o?d ,m a~i: ~ ipJà & JlùrÎCl/S effint . honeftœ Jluœ Jud~CaJllmUS , patruo filioram contradi.
cente , prœdlaOS filios debete penes e~m edu-
à:
cano
Riccius en fon recueil de decif., collea.
455,
I2. 1 4&
I940, ~après!avoirdit, comme
tous les autres, que la chofe eff laiifée à
l'arbitraçe .du ,Juge, obferv auffi. que quan?
7
la mere JOUIt d une bonne reputatlOn, &-qu'll
paroît qu'elle a eu toujours foin de [es en~
fans, rien ll'empéche qu'on l~i en continue
l'éducation, quoiqu'elle fe trouve remariée:
& quandd ma~er bonam traélationem probat;
binuba, non prohibetur filium educare, Il cite
enfuite Franc-Marc, décif. I5I & 192. Et
il dit tout cela, en expliquant diverfes Loix,
1
�~
tant GU
~e ,
COu
20
que du
if fur
•
b\
la rubnque u ,
pap. edac. deb. . f< utenable en point de
Il. efl: , doncmere
111 0f01t
, pl1vee
,"
de l'éduca.
droit, qu une
ar cela feul qU'elle. fe
tion de fes ~nfans { toi ne recommande nen
l
'emarie , tandIS que a
J e de ne S'oc.
t au
UO' ,
xpre ffi'
de plus
/que
l'intérêt des
cuper d autre.
1 le vœu du
pupilles, de mépnf<&er Pl o~;s cp~aacer là où ils
'1 le faut
(e
pere, S I , 1 lus d'avantage.
doivent être avec .e p 'ces coniidérations
C'eft en effet toujours a
' , & dans ce
.
,
P articulleres
qu'1
1 faut en 1ve11lrrocès
que d e
. "
, {fant pour e p
,
. ,
détall fI 111tere
.
r déférer ICI
raifons ne trouve-t-on pas p~u
,
, l
'
de la mere,
a la rec amatl?n
D' certificats qu'elle
On l'a dit aIlleurs. At IXcont~aire fur l'inci.
' ' . t à la requl.: e
0 d
avolt Jom
, .
. rovifoire de. l' r ondent en ~xe~ut~on Prouvent que dans tous
nance dont 11 ~ agIt 'IIP ,
ue que l'on s'ar.
& a que e epoq
,
les tems,
ant fon remanage,
rête, après comme av
de la mere la
' l ' ffi' des traces
elle avolt al e de l'avantage que trouvent
plus tendre,' &
s en être féparés un fe~l
[es enfans a ne pa
Ir' de leur te11lf
'f< 'lle n'a celle
inftant, pU! qu e
rendre à lire, à
des Maîtres po.ur leur, aPfte les a toujours
écrire & à chIffrer; qu e d ffi même de
habillés proprement, ~ a~~n~ s fille ainée
leur état; qu'après aVOlr"
à un Marchand
au Couvent, elle l'a manl~e , & que depuis
d t de 12.000 IV, ,
avec une 0
.,
.. ffer par un Perrucinq . ans, elle falfolt coe
quier
7
e~he~~e
d~
;a
•
21
quier fon fils a111é~ qui n'eIl: aéhTelietnel1t âO'é
que d'environ [eize ans, en faifant la mê~e
chofe depuis plus d'un an pour le [econd qui
eH encore pupiI~e.
Plus de quarante voifins ou amis de la
famille Ont . atteHé allffi que les foins qu'elle
donnoit à fes enfans, étoient bien au-deffus
de ceux d'tll~e mer e ol'dinaire, & que fa ten.
drefiè comme fes follicitudes pour eux étoient
•
également fans bornes. AlIcun des parents afiigné$ pour l'éleétion tutelaire & la ContillUdtion de l'éducation, n'a o[é démentir ce
témoignage, & le tuteur lui-même a toujours
gardé là-derrus le plus grand filence , toutes [es
craintes [e trouvant placées dans l'avenir; il
avoue bien par là que le préfent eH emiére_
ment pour la mere.
Enfin, des quatre enfans du fie ur San _
din, il Y en a deux qui [ont [ortis de pupillarité ; l'un eH l'époufe du fieur Terrin qui
n'a pas lairré que de certifier à fa mere malgré
[on remariage & dans les circonfrances du
préfent procès, qu'il n'y avoit forte de [oins
& de peines qu'elle n'eût pris pour l~i adou_
cir la perte de l'allte lir de [es jours, en lui
prodiguant, ail1fi qu'à fes freres, les [oins
les plus particuliers & les plus tendres, n'ayant rien négligé pour [on éducation, &
ayan t pourré [a tendl'efiè jufqu'à faire au-delà
de ce que le devoir exigeoit, pour lui
procurer un établifièment honnête; de maniere que ce feroit (ajoute-t-elle) le comble de l'inju.Œice que de la priver de parta-
F
\
�1
2l.
enfans qui IUf refl:ent les foins &
la tendreife qu'elle n'avoit ceiré d'avoir pour
eux; voilà pour la fille; & le mâle a paifé
une procuration pardevant Notaire ~vec l'affiib.nce de [on curateur le Il. Avnl l 78~ ,
pour intervenir dans le pr~cès dont il s'a- ,
git, & adhérer aux fins pnfes par fa mere
pour lui faire continue~ l'édu~ation d~ .f~s
frères en foutenant, fUivant l exaae vente,
que le's pupilles ne peuvent être ieux n~llle
part qu'auprès de leur mere, qUi, quozque
remariée, n'avoÙ ceiJé d'avoir pour eux toute
forre d'atuntion.
-Du côté du Vitric, on voit un citoyen de
cette ville d'Aix qui appartient à une famille
honnête, dont le nom & l'état font connus;
qui, de {impIe [oldat, eft parvenu au ,grade
d'Officier, & dont les mœurs ont éte par
conféquent éprouvées pendant pluGeurs années, qui, a trouvé fon bien être dans ce
.mariage, une retraite lorfqu'il ne pourra
plus continuer le fervice , & qui, en garclant
pour fa femme la reconnoiifance qu'il lui
doit, bien-loin de blâmer en elle l'attachement qu'elle conferve pour [es enfans, ne
fait au contraire que redoubler d'eflime pour
elle, en agifiànt toujours comme un fecond pere qu'elle leur a donné.
D'autre part (avons-nous ajouté) que
trouve-t-on dans la maifon où les pupil1es
font renvoyés par l'Ordonnance dont il s'agit, pour y recevoir leur éducation? Une
tante, Boulangere , & chargée d'une famille,
ger aUX
n:
qui donnera a,.
'.fies enlallS
/3 tout le tems qtle
pourront lui l alffi 1
état &
. ' ;~ e~ occupations de [on
qUI ne fera nen pour des nereux
, il
qu e e ne demande pas &
{'
reJ' ette (
.
,
que 10n mari
comme on peut 1e VOIr
. par [on
. .
OpUllOj1 dans le procès.yerbal)
, Il
doit a '
,
qu e e ne
&
. VOlr qu en paifant jufques à la puberté
_~U1 ne feront q?e lui donner de l'embar~
~a~ chez elle. Efi:-rl poffible de mettre en
a anc~ l~n pareil afyle avec celui que leur \
~ere 0 Icite pour eux dans fa propre maion, avec toute la chaleur que peuvent don
ner des entraille~ véritablement maternelles?
~ Que :epond a cela le fieur Terrin? Qu'il
'1 app,a:tlent point au gendre de contefrer
la venté de ce qu'avance fa belle-mere de
,pezer c~ 9ue les certificats peuvent va'loir
cont.re 1aVIS des parens, d'examiner fi ces
c.ertlficats font [ufceptibles de l'interprétatIOn ~u'on leur. donne , & que la Dame Turcan n,a pas bIen lu le procès-verbal d'a[femblee, lorfqu'elle a fuppofé que les parens
l:e s'étoient décidés que par la confidératlOn du remariage.
, On n'a qu'à le lire ce procès-verbal, &
lon.y verra que les uns ne donnent aucun
motIf d~ détermination, & que les autres
ne fournIlTent que celui pris de la crainte
que la mere n'eût ' plus la même tendrefiè
pour fes enfans. On a beàu chercher & re chercher, on n'y trouvera jamais autre chofe
'r. l
'
,
.
av~c l aveu qlU en relll te, que la mere n'aVOlt encore donné là-delTus aucune fo;te de
�1.4
mécontentement à la famille; & puifque nOlls
plaidons pour difcuter la conduite de la mere ,
à l'effet de favoir où if convie'nt le mieux
aux pupilles d'étre élevés, il eft du devoir
du tuteur de dire ce qu'il en eft; & tant
qu'il n'en dira pas du rn_a l, c'eft une preuve
non équivoque qu'illl'a véritablement, comme ,
tout le refte de la famille, que du bien à
en dire.
Il a fenti en effet la néceffité où il étoit
de parler; mais tout ce qu'il a dit n'eil bon
qu'à faire reffortir toujours plus l'impuiffance où il fe trouve (le combattre nos
preuves de bonne conduite.
Il obferve d'abord que bien des meres qui
ne [e diftinguent pas par l'excès de leur
tendreffe, en font autant que la Dame Turcan, pour l'entretien & l'éducation de leurs
enfans, pour leur feule fatisfaélion, & par
un {impIe fentiment d'amour propre. Mais
de quelque côté que vienne le bien, & par
quelque motif qu'il foit dirigé, il ne ceffe
pas d'étre tel; le bénéfice n'e,n eit pas moins
toujours pour les enfans, dont l'intérêt dt
la feule choie qu'il y ait à coniidérer dans
cette affaire; & l'on fait 'bien d'ailleurs qu'on
ne s'eft pas laiffé gouverner ici par de pa '
reils fentimens.
L'on en convient. Mais, dit-on, la tendreffe que la mere avoit pour [es enfans
étoit un fentiment naturel, tant que [on cœur
n'étoit pas livré à d'autres affeélions . fil
a cédé au mouvement de valîlité qui -lui a
fait
r'
-
h
2~
raIt l'ec erchet· l'alliance d'ul1
vétue d'une qualité qu' 1 fi e pelofol1l1e rechement qu'eUe avoit 1 a attoIt, & l'attaconfidérablement diminuPe,our"1 [e~ ~nfal1S eil:
, 1:' ete1l1t.
, .
, SIn eu pas to 11 t a-laIt
1
Sans doute qu'il a fallu que la Dam T
can appe"
rçut que 1que avantao-e dans e urveau mariag
1
b
,
ce nou.'
e, pour a déterminer à le f .
mats ce n'eft pas la vanité qUI' l' "'d' aIre;
. . 1
ale UIte' elle
a pnnclpa ement confulté l'intérêt d ) 1:
mIlle
"
.
e la 1a, qUI eprouve effeéhvement tous les .
Jours
qu'elle ~'y a rien perdu.
O~ repond qu'elle eft trop prudente pour
ne s tre pas obfervée à cet é ard
qu'elle avoit été d' 1 é '
g
pendant
~d
ft"
.
ec
ar
e,
par
le
Juo-ement
e Ique, 1I1capable de l'éducation bqu'elle
rec. ame, ~ qu'elle plaide encore pour l'obt~nlr, malS que rien n'affure que ces
point
enfuite datlS l"111 t'eneur
yu.clpIlles ,ne feront
)
.
u me~lage '0 la vlélime de [on indifterence ou
de Or.·,
la Jalouüe de
,r. celui qui doit y p re'fod
1 el'.
n laIt a prelent ce que c'eft que ce prétendu Jugement domeftique les mot'1:
.
,
d
'
"
'
Ils
qUI
1ont etermme, & le peu d'égard
.d
'
.
qu '011
Olt aVOIr par conféquent pour lui. La meill~ure preuve qu'on puifiè defirer pour l'ave11Ir, eft fans doute celle qui réfiIlte du paffi'
& du préfent; & s'il eft poffible que cele
c?ange., il n.'eft pas poffible que le tuteu:
n en [Ol~ pas lIlftruit. Il verra de quelle facon
on C~.ntl~l~era de les habiller; il les conful~~ra
[~lr 111:t~neur du ménage, filr leur OCcupatIOn; Il ll1terrogera les, autres parens & les
G
?7
�26
voifins: des enfatls ne fttpportent pas les in.
. ures comme des perfonnes raifonnables,
~'eft-à-dire, fans fe plaindre; & l'on doit être
bien perfuadé que rien n'échappera à la fu~
veillancè du Geur Terrin pour conteiter, s'lI
Y écheoit, .1'éd~1Cation à l~ .mere , qu'on ne
lui laifiera jamaIS que condltlOnnellement, &
avec la réferve de . la lui ôter, fi elle fe comporte mal. Mais c'eft auffi à cet événement
que le tuteur doit être renvoyé.
A l'égard de l'établilfement avantageux que
la Dame Turcan a procuré à fa fil~e, o~ fe
borne à répondre que , le tuteur? qm fouttent
aujourd'hui l'Ordonnance du LIeutenant, eft
le mari de cette fille. Mais que prouve cela?
Rien autre fi ce n'eft -que le remariage de
fa belle-me~e n'a pas été de fon goût, fans
qu'il puilfe en ~éfulter ri~n d,e contraire aux
preuves qui extfrent au proce~; que. malgré
ce remariage, l'intérêt ~es pupt1le~ eXI~e toujours que leur mere, qm ne cerre d aVOlr pour
eux la mtme tendreire, comme pour tout le
refre de la famille, continue par conféquent
d'être chargée de leur éducation.
.
On n'attaque pas plus puirramment le VItric. L'entiere indépendance dans l~quell~
vit le Militaire fùbalterne ( a-t-on dIt ) lut
donne toujours une févér~té .da~s le ~~rac
tere une roideur tOLlt-a-fait lIlconClhable
avec' la douceur & la modération, fi néceffaire au bonheur d'un ménage.. L'habitude
d'obéir , rend même les gens de cette
. pro.
feilion extrêmement durs. Leurs pnncipes
' fi f< 27
en 11 ont c~ux ~e l'h011tleUl', mais l'arement,
& prefq~e Ja,mals" c~ux de la religion.
, On VOlt, a la venté, quelquefois tous ces
defauts dans I.e militaire, mais on y ' voit fou~ent auffi bnller les vertus contraires; & le
ile~r , !urcan, à qui on n'a aucune perfonn~lIte a reprocher, qui n'a même pardevers
lUI que des traits qui lui font honneur do·t
I
_ ê t:-e .range' d ans cette derniere claŒe. 'Y aul'olt-Il du mal, après tout, qu'il accoutum~t
ce.s e,nfans à l'obéifTance, en leur faifant remplIr a. l'égard de leur mere un devoir bien
elfentlel pour eux, & qui tient fi effentiellement aux principes de la religion? Enfin, fi
la ~ame Turcan venoit à mourir, qu'auroit
~ VOIr fon Fecond mari dans la ft1cceffion du .
fleur Sandm, dont la jouiffance pafTeroit à
fes .enfans?
que ce fecond
. , Et qu'importe
.
man, qm n a certamement pas befoin des
reffources de fa femme pour vivre, pût profiter en l'état. de quelque chofe, s'il y en a
afTez pour llll & pour ces enfans? Seroient_
ils mieux partagés dans la maifoll de cette
tante, Boulangere, où ils doivent être rélé.
gués par l'avis des parens ?
~e fieur T errin oppofe à ce fujet que ces
puptlles font les fils d'un artifan, & que la
fortune de leur pere répartie fur quatre têtes,
ne leur permet pas de vivre dans un état
fupérieur. A la bonne heure, & leur mere
ne l'entend pas autrement; on en verra
bientôt la preuve.
Il ajoute qu'il faut qu'ils s'accouÊument
\
�28
,
tu travail; qu'ils en prennent le goût; qu'ils
s'infi:ruifent par l'exemple de leur future deftination. Tout cela efi: vrai; mais ce n'eil:
pas dans la pupillarité, à cet :îge tendre où
l'on n'eil: encore capable de rien, & qui eil:
defi:iné aux écoles & , à recevoir les premiers
principes de la religion, dans une éducation
foignée. Il faut laitIer f~rmer le corps av~nt
que de le plier au travaIl. ~l, fuffit de ~Ire
aux enfans qu'ils feront obhges de travaIller
pour vivre de leur inculquer cette vérité ;
& ce feroi: fans doute leur rendre un bien
mauvais fervice, que d'en exiger quelque chofe
de plus.
Avec cette précaution de les rappeller à
leur deftinatÏon \ future où on les livre dès
que le temps en eft ~rri~é, on ne ;if<1ue pas
-que l'appas d'une VIe oifive les feduIfe;. I.e
fieur Sandin ainé en efi: une preuve. Il a pns
l'état de fon pere, comme on peut le voir
dans l'a8:e de procuration dont on a parlé ~
où il fe qualifie Cuiiinier. Il n'a cependant
recu d'autre éducation que celle de fa mere,
da~s cette méme maifon où l'on fait femblant
de craindre que les pupilles ne prennent le
dégoût du travail.
Cette tante Boulangere a des enfans, &
le fieur T errin veut que ce foit une raifon
de plus pour lui confier les pupilles, foit
parce qu'il entre dans le plan d'éducation des
gens de la plus haute qualité, des Princes
méme, de les atrocier avec des enfans d'un
état tout-à-fait inférieur, foit parce qu'il ne
lui
"
. ' 29
lui en coute~a
nI plus de peine ni plus de
temps de velller fur les uns que [ur les autres.
1
Mais. 011 doit bien [entir que l'éducation
des .P;1nces, ou des gens de la plus haute
quahte, n' efi:. pas celle des gens du peuple,
&- que I:lus Il y a des enfans dans une mai[on, -moll1S on efi: en état de les [oigner
fur~toùt i~ l~ charge retombe [ur la femme d'u~
artl[an qll1 ale encore à remplir les occupations
de fon état. Or,. tout. le monde fe dIra que fi '
dans le nombre Il doit y en avoir néceffaire_
ment quelqu'un qui foit néglio-é cela arrivera
·
1"
b
,
b ~en
p ut~t , pour ne pas dire toujours, vis-àv~s des ettangers que des tiens propres; il
n ei~ guere poffible de [e refu[er à cette
vérité.
On reproche enfin à la Dame T urcan de
n'avoir fait aucun 'inventaire; ni après la mort
de ~on premiei- mari, ni depuis qu'en [e remanant elle a perdu tout ce qui lui avoit été
donné en propriété, & d'avoir fait au contraire une vente confidérable de meubles
dont elle avoit diffipé ou placé le produit à
[on profit; "
Tout cela n'efi: encore que calomnie. Si
elle a vendu quelques vieux meubles, ce n'a
été que pour en acheter de meilleurs, & 011
trouvera dans fon [ac le comparant qu'elle
pré[enta au Lieutenant le 12 Juillet 17 82 ,
quatre jours après la nomination tutelaire,
où, après avoir rendu compte de tout ce
qu'elle avait fait dans la fucceffion de fon
H
�' .~
~o
mari, elle demanda aillgnatioll contré le tu~
teur pour faire l'inveniaire du m6bilier par
déclaration; le décret du Lieutenant & l'af..
iigtiation qu'elle fit donner en conféquence
par exploit du lendemain au Sr, Terrin , à jour
& heure précife dans , la Chambre du Confeil. Elle n'avoit fans doute rien de plus à
_ faire, robt cdmme elle n'avoit non plos aUCUll
compte à rentlre, parce qu'au moyeh de fon
legs général d'ufufruit, elle n'avoit rien adrniniftré pour le compte de fes eIifatls, & il
n'y auroit à craindre des conteftations du
chef des pupilles, qu'autant qtl'on répareroit
leur éducation du legs général d'ufufrllit,
Mais cet évenement n'eft pas à craindre,
püifque l'on a vu à quoi fe rétlulfeht les
prétextes que l'on a pu faire valoir pour
s'àutorifer dans la tracaDèrie que l'on fait
effuyer à la Dame Turcan; de ma,n iere que
ce n'eft certainement pas trop dire, que de
foutenir dàns ces circonftances que ce fel'oit contrarier le vœu de la ùature, comme
le Ctefir de la Loi (qüi ne recommande
rieti tant que l'avantage des pupilles ) , que
de refufer à leur mere la fatisfa8:ion de
continuer à leur don ner fes foins, en ref..
tant chargée de leur édu"Catioh, qu'elle ne
, pourTuir avec tant d'ar'deur, que parce qu'elle
fent combien elfe eil: néceffaire -à ces jeunes
enfans; que perfonne autre ne peut la rem~
placer dans les imentiotls qu'ifs dé'f uândent
dans c-e pl'emier âge de la 'vie, & qùe ce'
[eroit vérirablemènt d'échire'r j'On cœur, que
)
F
~e ;a ~éllParer de cette portion fi précieufe de
la lam! e,
cl
CONCLUD
d
"
,comme ans notre mventaire
e produéhon" avec plus grands dépens &
autrement ,pertmemment.
'
GOUJON, Avocat.
CARBONEL, Procureur.
Monfieur LE DOYEN, Rapporteur.
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' MÉMi!JIRE
POUR les
.~
boi~s
dl}
~n~ur
DONET:
vivant
Négociant de la ville de Mar[eilIe, appel_
~ '1;'lns de Sentence rendue par le Lieutenant
. de Sénéchal au Siége 'de lad. Ville le Î9- ac, tobre 17 80 , & demandeur-s en requétè incidente du .... > 17 82 .
J•
CON T ' R E
Dlle. MAGDELI;:INE CRE,PS, époufe répétée en
dot du fieu~ Efiienne, Boyer de la même
. Ville, intimle & défendereffi.
"
.
.. A Selltellce dOllt eit appel aclopte un
[yftême' trop avaniageux a?x f~mines des
faillis , & trop funefte allX creancIers, pour
que la Cour puiffe la co~~m:er. Nous.[avons
bien que les pattes matnmonlaux [ont facrés,
~
L
,
_
•
J.
�1-
puifque c'eft par e1i~~ue. fe forme le plus fo~
lemnel & le plus r~rl'J~aable de tous les engagemens; mais les droits d'une marre de
. créanciers mérit,e n( )wffi toute faveur, & le
principal objet · d~ la .:il!ftk~ doit toujour~ être
de concilier & de remplIr autant qu'Il eft
poffible, ce que -r" ~iyènt exrger ces deux intérêts anxquels Î ~1.)trrive que trop {ouvent
de fe croifer l'un contre l'autre.
3
du fieur Creps pere qui fe trouvoit encore en
Amérique, & qui confritua de fon chef60 l:l0 1.
les droit~ maternels y compris pour la fomme
de 600 hv. , & le furplus pour les droits paternels. L'aBe' porte la numération de la dot
êO~ptant. . On a pourtant fait remarquer
9u Il y eft ~lt tout de fuite que hlr les 6000 1.
Il Y en aVOIt 2000 liv. deftinées pour le trouffeau que le lieur Boyer fourniroit à fa future
époufe; ce qui paroÎt indiquer, comme 011
l'a déjà fait obferver dans les défenfes, que
le pere n'avoit pas même été en état de faire
la dépenfe du trourreau, & que la dot fut
reconnue par le mari, fans qu'il l'eÎit reçue ~
. Il efr dit de plus dans ce même contrat,
que le lieur Boyer fait une donation à jà fu.
lure, & aux enfans Li na.ître de leur mariage,
de la fomme de 50000 L J prendre for fis hiens,
·A
. - -1 T.
,
Le fie ur E.fri~_nne Boyer, m~ri de la DUe.
Crep~, eft venu dans le monde fans fortune,
mais 'fW"ec le def.tr Immodéré d'en faire une.
A p~ine fort~ de tenfance il. entra .~~ns -le·
commerce; Ir y contraéla dans drfferents
temps des engagemérts pour lefquels il fut
nlccéffivement . pourfùivi. Mais las de travaillér fans avartcer fur -le pavé de Marfeille,
il prit le parti d'aller brufqtler' la fortune aux
IDes Francaifes.
,
Il revint peu d'anné,e s, après à Marfeille , en
s'y faifant annoncer, -& en affetlant d'y paroi. .
tre comme étant dans la plus grande opulence~
Il acheta divers immeubles dont il ne paya
qu'une petite partie' du prix. Pendant fOll
féjour aux mes il s'étoit lié <:l'amitié aveè le
fieur Marc-Antoine Crt:ps pere de la par~ie
adverfe. ~es liaif~~sJ<l.voient produit le projet
d'un rhariage entre cette derniere & le fieur
Boyh: Le contrat -en fut drerré à Marfeille
en préiênce du fieut Boyer, & -du Procureur
J
pour en jouir par ladite Dlle. Creps future é-poufe
fo vie durant en fonds & fruits,. ainji que de la
dot ·dans tous les cas de droit, & pour en di}pofir à fln gré po'ur caufi .de mort par portions
égales ou inéo-ales 'en faveur feulement des enfon s à naftre du préjèllt mariage, ie tout néanmoins fous ceS condirions,jàns lefquelles la pré.
fonte donatÎol} n'auroit pas été faite; que v~:
na,u la DUe. Creps à prédécéder.fe fieur Eltienne Bo-yer fln futur époux, ou jàns qu'il-y
ait des enfans de leur mar/age "-c} e~le forv.illant ,
ou que lefdits enfans Vle'lll1ent a mounr fans
enfans avant le 'décès dudit fieur . Boyer: leur
pere, ladite donation de 5O?OO , Izv. fa~ra re..,
tour en entier dans cous lefdus. ca; audu fieur
•
(
�4
Eflicnlle Boyer donateur, Le contrat renferme
de plus une donation de furvie en faveur du
iienr Boyer de l'uii.lfruit & jouifiànce de la
dot de 6000 liv, ; cette donation eft le pendant de celle de 50000 liv, dont on vient
de parler, & qui fè trouve écrite en faveur
de la femme & de fes enfans.
.
Le fieur Boyer vouloit paifer pour riche .
fans l'être. Pen de te ms après fon mariage
& les longues fêtes qui l'avoient accompagné,
il vendit par atle du 6 Novembre ' 1762 au~
fieur Conqueret deux maifons au ' prix de
11000 liv.; il en .fit tourner le prix à fon profit, fans fe mettre en peine de payer les.
créances vifcérales qui fe trouvoient établies
fur ces deux maifons. Le contrat de mariage
étoit de l'année 1761 ; le 31 Otlobre 1764 ,
le fieur Boyer paira vente en faveur du fieur
Donet d'une maifon & jardin iitués hors de
la porte de Rome pour le prix de 5000 liv.
Après ces opérations, le fieur Boyer remit
fon bilan le 2 Août 1766. Cette piece n'eil:
. pas un hors d'œuvre dans le procès aétuel.
On y voit figurer la femme du failli pour les
fommes portées dans fon contrat de mariage.
Le fieur Creps fon beau-pere ne s'y trouve
pas oublié; d'une part on l'y voit porté pour
4300 liv., outre 22600 liv. pour prix de billets de groife. La famille Creps trouve dans
ce prétendu . titre une créance de plus de
80000 liv. On voit par ce tableau rapide
de la marche & des opérations du fieur Boyer,
que rien n'eft plus facile que .d e fe proéurer
des
/
des richeires réelles a:
' ,
e
& combinée, La fa!ille uë fallhte {péculée
laquelle le fieur B
,reps ~ au foft de
vint par ce moyer avolt UnI le fien de.
oyen c"
,
8000 0 liv.
dont il eft re~nclere. de plus de
.v oit pas fo~rni le fol. .a ez clau' qu'elle n'a-
~près la rémiffion du b '1
'
1 an on Vit ftlrgir
le fleur Creps qui c
'
,
,
omme
pere & l' , ,
a d mUll11:rateur de fa:fi
egitime
dication de 56000 r emme, demanda l'adju_
de fa cl
"
IV, montant de fa dot &
OnatlOn portée d
l
mariage. Il requit de 1:1s ans ~ ~ontrat de
féparation de h d P
provifoirement la
s ar es meuble & œ
,
!ceifaires p'our fon uià 'e Il . s, , eu ets nemande en proviiioll t~ f/ )OlI?nlt une de'
-'des , m eu bl es &effets
:fi parahon
d
' des har!pied de l'eftimation Il futU~eor 1onn~~ fU,r le
.fieur Creps en la '-qualité l~tS ~o}u~e ,au
-une
provifion de 2000 l'IV. a~ preud
P cedoIt,
,
fi 1
.blens du fieur Boyer 110nobftant t re ur es
t & l'. 'f'
"
ous tranfP
or
s
laI les ; Il fut de plus de'l'.emp
f
C
.
H
are, au d
leur reps, tOUjOurs en fadite qualité d .
,meuble~ & effets eftimés pour la fomm~
19 6 1 hv,
.
e
Il n'eft pas hors de propos de connoître
comment cette faillite fut traitée, On fit paflèr
~n concordat, par, Ie9uel les donneurs à la
$roif~ & les hypothecalres devoient être payés
a ylelll. !l fut pro,mis 25 pour cent aux créan~Iers chIrographaIres & non priviléo-iés L
fleur Boy;r rét~~li, dans [es attions b reduifj~
fon, fafte a ~a vente; mais il ne Continua pas
m<;>l11S de VIvre dans. la plus grande âifance
;s
B
�-6
au préjudice des malheureux créahciers qui
ont perdu les trois quarts de leurs dettes. Il
vendit par aéte du 2.8 Septembre 1767, une
maifon au iieur Hubeau ; il eil: vrai qu'il en
indiqua partie du prix aux créanciers; m~is
il eut auffi l'attention d'en exiger une pattle.
Il fit l',\cquiiition d'une autre maifon dont il
paya partie du prix, & don_~' le r~frant fut
laiffé & converti en une peniron vlagere de
I2.ooliv. au profit du vendeur.
On ne fe plaindroit pas, fi les chofe'S avoiemt
refté dans cet état. Les créanciers c;:hirographaires qui ont p 'e rdu les trois quarts -de leurs
.créances, s'en font déja confolés-; mais on ~
voulu donner plus d'éxteniion. aa projet fur
lequel la faillite avoit été déclarée; on s'dt
mis en téte d'expulfer les acquéreurs. On
.avoit pris dans le temps la précaution de rapporter au nom dl~ ûe_~r Creps les acq~lÎts concédés par les creanCIers chIrographaIres. Enfuite ~e iieur Creps a émancipé fa fille époufe
du iieur Boyer. Cette émancipation eH du
8 Novembre 1775 , c'eft-à:-dire, de près de
dix ans après la faillite & la demande en répétition de dot; enfuite de cette émancipation, la Dame Boyer fe pourvut au Lieutenant de Marfeille par requéte du 17 Juillet
, 1776, en déclaration d'hypotheque tant contre
les hoirs du iieur Conqueret, que contre les
hoirs du lieur Donet, & d'autre part elle
obtint Sentence par défaut fur la requête que
,fon pere, en fa qualité de légitime adminiftrateur , avoit préfentée en 1766 pour les
~
6000 liv. de la dot
les S0000 liv. de la
donation, le toùt avec intéréts 1
droit.
te s que de
?n a déja. dit que le fieur Boyer avoit ac-
,
1
\
qU.IS une mal~Oll d.ont il avoit payé partie du
prIX, & fe trouvolt encore fo'umis à 1
fion vifcérale -& viaO'ere de 1 2
l~ pen, fi d
b
00 IV. au
pro, .t, u vendeur. La Dame Boyer VOlÙUt
fe faIre col'l oquer [ur cette maifon. Elle compofa fa créance, qu'elle fit confifter 10. dans
fa ,?ot fe montant à 6000 liv.; 20. en fa do11atIOn
de 50 000 liv•• ,. :>::> °• en 29 8 28 l'IV. pour
•
,,,
'U1~~r~ts courus du Jour de la requête en répetItiOn ~e dot,; 4~. & finalement en 4 0 121.
pour fraIS de juil:lce, faifant en tout l'imp'Ort~nl~ fomme de 89840 liv. fur quoi elle
nt dedUlre aux expe~ts d'une part 19 6 1 live
-du montant des meUDles & effets dont on a
·parlé ci-de~l~, &. qui luiavoient été féparés
-pour ~ette eihmatlbn, & de l'autre 40000 1.
.du l?rIX de là mai[on; au moyen de ces déd UétlOl1S, elle fut déclarée créanciere perdante
-de 4 7879 liv.
Munie de ce titre, elle vint en porter l'effet
contre les hoirs des fieurs Conqueret & bonet.
E lle les avoit fait précédemment affiO'ner eh
déclaration d'hypotheque. Elle prit b contre
eux des fins en regrès le 7 feptetnbre 177 6 .
.
Les hoirs du iieur Conqueret trouvaht qu~
la Dame Boyer avoit in[uportablement grom
·fa cr éance, appellerent pardevant la Cour
de la Sentence du Lieutenant qui avoit accordé les , intérêts du jour de la n.emal1de en
\
./
�8
Yergence. Cet article étoit efrentiel; il s'élevoit1
comme on l'a vu ci-defrus, à la fomme de
298 281iv. Il fut dit par l'Arrêt qui s'en enfuivit,
que cet article avoit été injuftement alloué,
& que la fomme devoit être rejettée.
Après cet Arrêt, la Dame Boyer vint re.
prendre parde."ant le Lieutenant ~e Marfeille la pourfUlte de fes fins en regres , tant
contre les hoirs du fieur Conqueret, que contre ceux du fieur Donet. Ces derniers, indépendamment des vices de l'a8:ion 9.ui ét,oit
dirigée contr'eux, trouven~n~ mauva.ls qu on
eût laifré confommer la faIlhte du iIeur Boyer à leur préjudice. Il.s mirent en , ca:lfe
les créanciers chirographaires, pour leur faire
rendre le 25 pour cent qu'ils. avoient}eç~ ,
& qu'ils n'avoient pu, re.cev01r au p:eJud~ce
des créanciers hypothecalres. On avolt prevu
cette démarche. Ces créanciers fe montrerent avec des acquits du fleur Creps payant
à la décharge du fieur Boyer fon gendre.
Par ce moyen on s'dl: ménagé le double
avantage de rétablir le lieur Boyer, & de pouvoir attaquer des acquéreurs qui font créanciers hypothécaires, & auxquels on a, laifTé
tout ignorer dans le temps. Sur cette produ8:ion les hoirs du fieur Conqueret & du
fieur Donet n'ont pas été jaloux, comme on
peut le penfer, d'entrer dans la difcuffion
des fraudes qui peuvent avoir été concertées entre le gendre & le beau-pere. Comment l'auroient-ils pu ? On ne leur avoit donné
aucune connoiifance de la faillite, ni de tout
ce
9
ce qui avoit été fait à cette époque. Tout
avoit été fait à l~ur infçu, fans les comprendre dans l'état des créanciers, fans les appeller dans les arrangemens de la maire. Ils
l~'en avoien~ aucune notion. Sur la productIOn des quIttances rapportées par les créanciers chirographaires , & portant l'énonciation du paiement fait des mains & deniers
du fieur Creps, les hoirs du fieur Conqueret
& Donet cmrent devoir fe départir des fins
par eux prifes contre lefdits chirographaires,
en recomblement des fommes qu'ils avoient
reçues. Il leur auroit fallu contefter la foi
des quittances, & l'on avoit eu l'attention
de les priver dans le temps de toutes les
lumieres qui pouvoient étre néceiTaires à cet
effet.
Mais il n'en eft pas moins vrai qu'on les
a tenus à l'écart tant que la difcuffion de la
faillite a duré, que le failli a pré[enté dans
le temps des tableaux de [on état, [ervant à
démontrer qu'il lui reftoit du bien à [uffi[ance pour payer les dOn\leUrS à la groiTe , les
hypothécaires, & le quart des chirographai,res. Il n'dl: pas douteux non plus que tout
failli qui concorde, [e ré[erve ordinairement au-delà de ce qu'il lui faut pour remplir [es engagemens. Faudra-t-il donc croire
que le lieur Boyer n'avoit rien du tout à
donner 'aux créanciers chirographaires, qu'il
avoit pris des engagemens au-defiùs de fes
forces, & que le lieur Creps , qui n'avoit rien,
a pourtant tout payé? On [ent, [ans que nous
C
�10
ayons befoill ?e l~ , dire, c:ombien ces ré~
flexions font mqUletantes pour des poffef~
feurs léo'Ïtimes que l'époufe du failli veut ex.
pulfer, 4)combien elles font al~rmantes pour
la Juitice à qui 1'011 veut faIre prononcer
cette expulfion , & combien ce titre que la
Dame Boyer préfente doit être épluché avec
févérité. Les hoirs du iieur Conqueret eu
ont déja fait retrancher par Arrêt , l'impor~
tante fomme de 2.982.8 liv. qui s'y trouvait
portée pour intérêt de la donation. Mais
cela ne ftlffit pas. Il fe trouve encore d'au ..
tres dédu8:ions à faire. La Dame Boyer prétend que les hoirs Conquer:t font non-recevables à les propofer. Mals cette:fin de
i1011-recevoir eH totalement étrangere aux
hoirs du lieur Donet. Elle efi: prife daus le
dernier Arrêt qui retrànche les intérêts, &
lors duquel les hoÏrs du iieur Donet n'é...
toient point en qualité. Cet Arrêt ne peut
donc pas être contr'eux le. germe .d'une :fin
de non-recevoir, & les hOirs du fleur Con~
queret fauront bien d'ailleurs fe démêler de
celle qu'on leur oppofe.
Quoi qu'il en foit, comme-les dédu8:ions pro . .
pofées en premiere infi:ance renaiffent en
caufe d'appel, & préfentent les mêmes points
à difcuter , il feroit inutile d'en parler ici ,
puifqu'elles doivent revenir dans la difcuf..
jion des moyens. Il fuffit donc de mettre fous
les yeux de la Cour la teneur de la -Sentence dont efi: appel.
.
.
Ce Jugement intervenu le 10 o8:obre 17 8er,
11
faiJà.nt droit à la requête principale de Ma '_
d ;g
·deleme Crens énoufè d'Elll'enn B
. .
r
r
'Je;
:J'
e oyer u 17
JUllle~ 1776 , a déclaré la maifon & jardin
acquLS par le feu fieur Dona d'E~n '
B
'.,
,
'pLenne oyer
par aGie dll 3 1 decembre 17 64 & 1 d
;,1 ; .
,
.es eux
'mm)ons co ntl!J.U es , aC<Juifes par feu fie ur Jean
'Conquerec dudu Bover par ac7e du 6
novem_
h
'
./ ,
62
, re 17
, fi'Jettes aux hypotheques de la dot
,de l~ D!le. Creps, .deriyant de fln Contrat de
manalfe . du 2,4 mal 1761,. ordonne que nulle
~rejènptlG~ nt laps du temps ne pourront lui
etre ,oppofls ; & ,de. ,même flùe ,fons s'arrê·ter a la requete mCldente des hoirs du fieur
Jean Conquetet du 7 J'uillet 1777 dont le
d' . & J'b
'
, sa
' emLS
~e OUles allec dépens, ayant tel égard
'que de raifon à la requête incidente de la Dfle.
'Cr:ps du 2 décembre 1776, ordonne que les
-IZOl rs du fieur Dona & ceux de Jean Con~
qu:ret in~i~ueront à ladi:e Cr~ps dans la quin"{ame precifèn:ent? des, bœns lLbres & exploita_
b!es & non Imbrl11ques appartenants audit E.f
tle:zne Boy~r, pour par elle S:y payer de ce qui
luz refle du du montant de fo dot & droits ~
aut~ement & faute par eux, &c. a permis à
ladite Creps Boyer d'exercer les regrès for lad.
maifon & jardin des hoirs du fieur Dona &
fùbfiiii~irement for les dellx maifons contlilles
d-es hOlrs du fieur Jean Conqueret pour la
flmme de fix mille cinq cens trente-huit livres
fix deniers, pOllr rejle du capital de fo dot &
droits, enfèmble pour les intérêts de ladùe flmme Courus depuis le 15 mai 1777, jour de la
mife de pOffeffion de la maifon par elle prife
A
,
�12
en collocation, & encore pour les annuités
échues & par elle acquittées ou à acquitter de
la perzfion viagere de 1200 liv. affeaée fur lad.
maijàn, & pour les intérêts d'icelle, à compter
du jour des paiemens qu'elle a jufiifié ou juflifiera en alloir fait, comvze azUJi pour les dépens à elle adjugés par Sentence du 18 décembre I776, jùivant la taxe qui en fera faite,
& pour les frais & dépens de la cf:!llocation
liquidés par le rapport d'icelle à la Jamme de
mille & dOll'{e livres, à ce non compris le droit
de fept & demi pour cent qui pourra être dâ
J l'occafion d'icelle; ordonne en outre que lad.
Dlle. Creps Boyer continuera à ex ercer regrè s
pOUl' les annuités de la penfion via§ue qui
écherront & qui feront par elle acquittés jufqu'à
l'extinaion d'icelle, à l'exercice defquels regrès
lefdits hoirs Donet & de Conqueret feront contraints aux formes de droit; condamne les hoirs
Donet & de Conqueret aux deux tiers des dépens de cette qualité, l'autre tiers entre les paro:
cies compenfls, &c.
Il s'agit aujourd'hui pardeval1t la Cour de
l'appel émis par les hoirs Donet envers cette
Sentence. Les hoirs Conqueret font intervenus à cet appel, & la queftion dl: de favoir fi les voies de regrès étaient ou non
ouvertes en l' état. Nous foutenons qu'elles
ne l'étaient pas. Nous ajoutons que la Dame
Boyer s'eft ménagée des avantages indus dont
elle voudrait mal-à-propos profiter, & dont
elle doit rendre compte à la maire. ~e produii de ces avantage ~ , le~ bénéfices qu'dIe
a
q
a voulu fe procurer, doivent ~tre mis en fonds
au profit de~. créanciers pour fervir dans la hlÎ..
t~ à paye,r, s Il y échoit, la donation de 50 00 0
lIv. portee dans le contrat de mariage de la
Dl1e. Boyer.
La premieye de 110s propoiitions eft prife
de ce q~e la Dame Boyer fe trouve plus
que payee de fa dot fe montant à 6000 1
& q~'elle n'avait pas droit de jouir de i~
donatIOn d: 5OO~O liv. portée dans fon cont~~t de man,a ge, a, rég~rd de laquelle il fuffifOlt de, former 'une ~oll?cation par affiette
~?u: 1 airurance & 1 execution du patte à
1 evenetnent du temps où elle devoit corn . .
mencer à jouir. Nous fommes là-deiTus d'ac~rd.!itr les principes. La coIIocation ne doit
fe faIre q'ue par affiette ou par aflio'nat quant
r.'r.
b
,
, aux lommes qm 10nt d'un événement incertain '. ou don: la jouiirance eft retardée par
les tItres qm la gouvernent. Ainu les femmes, pour les dons de fi.lrvie, ne font collo . .
quées que par affignat; ainfi l'on affigne des
fond.s .aux uf?fruitiers , & les légitimaires &
pa;tlclpants a la fucceffioll n'y prennent part
qu apres la mort de la perfonne à qui l'Ufilfruit efr dO.
Nous difon~ qu'ici fa Dame Boyer étoit
fUl'payée de fa dot; & quoiqu'~l1e paroiffe
en co nvenir, elle contefre néanmo.ins un article afTez intéreirant. C'eft celui de fan trouffeau que fon mari s'obligea de lui faite jufqu'à la fomme de 2000 liv. fur les 6000 liv.
de
dot, & c'eft ce qui fut exécuté. C e .
D
la
�14
premier fait n'eft pas conteilé. Delà il fuit
que le mari, en fe conftituant débiteur de, la ,
dot, devint propriétaire des hardes qui fer~
virent à compofer le trouffeau. La Darne
Boyer, en faifant fa ' procédure, ,a ' cOllftifué
fon mari débiteur des 6000 liv~; elle a gardé
fon trouffeau ~'Ont elle l~'a pas 'paifé le :.. prix
en dédu8:ion ; au moyen de quoi la voilà donc
en poffeffion de la chofe ,& du prix" au préjudice des èréanciers de fon ,mari & qes' tiers
acquéreurs qu'elle veut expulfer. '
..;
' Cela ne l'embarraffe pas; eUe :'préte!id :
qu'elle n'avoit rien à déduir~e, & qùe les ,
créanCiers de fon mari lui doivent , bonifier
lès '6000 liv.' de ' fa 'd 0t ; mais fi le trouffeau '
elltre da~s la dot pour: 2000 liv., votre c<:}n- ,
trat peut-il vous autorifer à garder l'~un -& :.
l'autre? Si vo~s gardez le tropffeau, ne ' fau...
dra-t-il pas déduire 2000 liv. fur la dot, & '
1i vous exigez les 6000 liv. de: la dot , ne
devez-vous pas rendre ou déduir~ les hardes
dont la valeur prenoit le tiers de la dot ?
Eft-il bien vrai qu~nous ayons fuppofé là- ,
déffus des regles qui l1'exiftent pas, & n'eft.
c~ pas plutôt à la Dame Boyer qu'il faut reprocher de fe donner dans fa défenfe, des
bafes que le droit !"eprouve ?
'La femme, nous dit-on, n'eft foumife par
aucune Loi à expofer ce qu'elle peut avoir
en, compte & en dédu8:ion. Autant voudroitil ,dire que la femm~ peut piller & s'engraiffer 'd ans la maifon de fon mari, & fruftrer
les créanciers de ce dernier de , ce qu'elle lui
15
enleve ; & en effet quels font dans l'ordre
des principes les droits de la femme qui fe
colloque? En a-t-elle , peut-elle en avoir
d'aùtre que celui ' d'a1furer ou de reprendre
fa dot & drGits far , les biens de ' [on mari?
Pourroir... elle slavantager_(ar ce 'd ernier? Ne
feroit-il pas plus cruel & plus funefte eHcore
que de concert avec fon mari, eHe s~avan
tage~t injuftement fur le tiers? C'éft cepeon.
dant ce ,qui ne peut ma-trquer d'arriver, lorf.
qu'une femme [e colloque pour plus qtl'il
ne lui ell: 'd û, & qu'elle vient enfuite con[o.mmede préjudice '& lé' rendre plus odieux, '
en le faifànt [upporter à des acquéreurs avec
titre & bonn.e foi ,qu'elle vient dépofféder.
Et :qu'eft-ce donc que la liquidation de fa
dot & droits à laquelle 'toute femme qui veut
fe colloquer , eft obligée de faire procéder?
Eil: - elle rien de plus que le compte exa8:
& rigoureux de ce qui peut lui refter dû après
toute déàuéHon faite? A - t - on jamais vu que
le calcul des [ommes 'dues à la femme pour
[a dot & droits, ,ne dût pas compreddre les
objets de dédu8:ioll qui font au profit du mari?
A- t - on jamais pû dire qu'en faifant cette 'liquidation; il, ne falloir p.~s mettre en comp~e
les articles qui [ont a8:Ifs au profit du man; ,
& faut-il une loi particuliere pour foumettre ,
to ute femme qui fe colloque, à déclarer les
valeurs qui font dans fes r,nai~s , pO,ut" qu~ le
mari & plus encore, fes .creancœr.s 11 en fOle~t
p as fruftrés? L'oblIgation de faIre cett,e declaration n'eft-elle pas [uffifamment portee par
j
1
�16
les loix générales & primitives qui défendent
à tome per[onne de prendre le bien d'autrui',
& de s'en prévaloir injuftement? Or fa femme"
qui d'un côté [e fait payer de [a dot entieré '
en argent, & qui de l'autre reçoit le trouireau
en nature, ne prend.:eHe pas la dlOfe & le _
prix? le peut-elle el). honneur,. en confcience _
& dans l'ordre des loi~? & quand eUe eft
munie de la cho[e, peut-elle décemment en
faire liquider le prix en [a faveur? Âvoit-on .
befoin d'un réglement pour faire diré que la l
femme qui fait liquider fa dot, ,ne prendroit .
pas le bien d'autrui,- & :qu'elle ne fe payeroit'
pas deux fois pour le même ,objet?
Mais, ajoute t-on, ri vous obligez les fem. ;
mes à déclarer la valeur de leur ' trou1Jeau
tel quil eft, vous n'en .ferez pas plus avancé.
Ce ne fera là qu'une vaine formalité dont il
leur fera loiiible de fe ~ouer. Elles ne dé- _
clareront rien, ou peu de chofe. D'ailleurs
,rien ne vous empêche de difcuter en tout .
tems ce que leur trou1Jeau pouvoit valoir
lors de la liquidation de la dot & droits.
~ Toutes ces petites coniidérations ne peuvent pas altérer notre. principe. La néce[cité de déclarer le trou1Jeau, de le repré[enter & de le faire eitimer pour le déduire
[ur la créance de la dot, eft inconteftable
en principe, parce qu'en fai[ant fixer & liquider la créance de la dot ~ droits, il eft
inclifpenfable d'en détraire tout ce qui doit
en être déduit, & de [e fixer dans la [omme véritablement due à la femme. En partant
17
tant de la néceffité de déclare}.
11'-,
ft
cl
l'
,
necemte
.
q UI e
ans ordre de tous les
. .
'
pnncipes
i1' 1a fiemme declare
qu'elle , .
,
1
.
n a rIen, on ne
a crOIra pas, parce qu'il n'eil: pas offibl
qu'une femme [oit [ans hardes & i". P " e
ment, nu IIa UXor fine vefJe . & 1 1:lans Vt::te-•
d' 1
.
:J L,
a lemme qUl
ec arera ne nen avoir fera )'uae'e t
"
'
b
Out com,me ce Il e qUI n aura fait aucune déclar t'
QUaI1t a' Icel e qUI. ne déclarera q'l' 1 a .lOn.
ffi
~ t n mmce
tr?u ea:l, les cré.anciers auront dans cette
.dec1~ratlOn de qUOI la confondre en cas d"
-fidél t ' .
111•
1 e '. parce qu'Ils auront [ans cerre l'état
_du troufIeau qu'elle aura déclaré & le m
dl'
,oyen
e Ul. prouver qu'elle n'a pas fait une déclaratIOn exatte & fldeHe. C'eft alors & par
.le• moyen de cette déclaration que les Cl.ean'
. CIers auront le moyen & la facilité de prouver que la femme n'a pas tout .déclaré. Sans
cela comment pourroit-on parvenir à [avoi;
fi la déclaration qu'elle a faite, eft jufte ou
11on?
1
" Dira-t-on à pré[ent qu'il en coûteroit trop
. a une femme de déclarer [on trou[[eau ? On
. ne fournira qu'une r~ifon de plus pour exiger cette déclaration ;. car enfin on ne fcait
q~le t rop, quelle eft la fi-équence & l'abus
des. p rocedures de vergence, combien l'int érÊt des créanciers s'y trouve [ouvent immolé., On ne [çait que trop encore que ces
-proce dures ne [om le ,plus [ouvent faites que
par [péculatioll & [ans l1éceffité. Dès -lors
il ne peut qu'être utile de les contenir. La
. néceffité de déclarer le trou[[eau, néceffité
\
E
�·IS
qui d'ailleurs dt de dro~t,' d'ordre & de
raifol1, arrêtera par la valUte les femmes dont
la procédure ne fe feroit que par des vues
de combinaifon & d'intér~t, & non par les
loix impérieufes de rIa néceffité. D'ailleurs
pourquoi confulteroit-on la gloire ou l'orgueil des familles dont les femmes . fe co11o ..
quent pour caufe de vergence? Toute fem:..
me qui vient dire à la Juil:iee que fon époux
eil: tombé dans l'infortune, que fon état cft
chancélant & douteux, & qui vient en con..
féquence faire valoir des droits qui peuvent
& doivent refluer contre le tiers, doit avoir
auffi le courage de déclarer en quoi cOli1îil:e
fon trourreau. La Dame Boyer a pris des
meubles en paiement; elle les a fait eil:imer.
Pourquoi n'en a-t-elle pas agi de méme quant
·aux hardes compofant fon trouffeau ?
,
On fent dès-lors quelle eil: la force & la
fagerre des motifs qui Ollt déterminé les Arrêts cités dans les précédentes défenfes. Le
premier rendu au rapport de M. le Confeiller de Saint - Marc pere, le fecond {ur la
plaidoirie du fouffigué dans la caufe de Mouifiet
de Salon. Ces deux Arrêts ont jugé que la
femme qui ne fait aucune déclaration de fOI1,
trouffeau ,eil: eellfée l'avoir repris fur le pieA
de la valeur qui lui av'Ûit été donnée dans le
titre de)a conftitution. Ce ne font pas des
Arrêts hypothétiques & pofés fur des circonftanees particul-ieres. Ils ont été rendus en
l'hefe & fur des regles générales; & c'eftIurtout à Marfeille & dans les villes coniidérables
19
que ces Arrêts doivent .être appliqllés, parce que le tr.ouifeau, au heu de diminuer pendant ~e manage, y re~'oit au contraire des
accrolifemens fouvent immenfes. Le cr01r01tO~l? CeiI: pourt~llt. à Marfeille qu'on nous
<ht. que notre pnncIpe doit périr. Ce n'eft
pOln,t l'ufage , nous dit-on, d'y mettre en dérluéhon la valeur du troutreau au moment de
la ré~étiti~n. On ré~ute cette valeur nulle.
. MalS d abord, ou eil: la preuve de cet
ufage? Quel ufage nous en a-t~Dll donné .
~uel aéle de notoriété en a-t-on produit?
Souffigné fe fouvient fort bien d'avoir vu
pairer des caufes de Marfeille ~ & tlotam·ment une fur laquelle la queilion des hardes
fit grand hruit, & arrêta long.temps Mrs. ,
les Juge$. On ne 1D1Jtenoit paB dans ce procès qu; .~ valeur du tr~uife~u ne dût pas
~étre dedurte~ La contefratlOn etoit m.ême une
preuve formelle du .contr.aÏre. A la bOllll1e
.heure qu'on ne .calcule 'Pas le trouifeau .d'une
.femme dans les faillites qui s'arrangèBt en
.gros & à ia maniere nes Marcha1llds; mais
. cela n'a jamais été dit, & l'on ne .cmit pas
que ia Ch0'fè ait jamais été p:ratiquée dans
:les collocations ..qui forment tCles opérations
jm1rliqNeB~ & fur-tout <p.laud il s'ag1Ït., c-c>mme
ici, d'en dirigeif i'efiet e.ol1t.-e le tÏ:èfs-acqué.!lieUr des lbÎfl1\lS '.d u ma1"i. 2. o. Queill.e )50un-.oit
~ être la r,aiiDn de cet ..étrange :tirage , &. p.our.quoi femit-id dit à Mad.eiiJe , .ob! >l'ab.us des
~1Il1me.mfe5 tronf!èau!X edil: plus répandu que
. parAont ail:1~'s , que lIa femme peut s'f;n .e11l-
L;
-.
�20
parer & en profiter au préjudice du tiers?
3°. Cet ufao-e ne feroit-il pas abufif? Non,
nous dit-on~ il ne l'eil: plus, dès qu'il eil:
o'éné1"at N'eil:-ce pas là une plalfante ma~iere d'e cufer l'ufurpation du bien d'autrui?
L'ufage feroit général pour les ép?ufes, colloquées des maris .infoh:a~l~s, Mal~ . qUl, ne
fent que les créancl~rs leglt~mes en aurol~nt
trop à fouffrir? QUl ne VOlt que le drOIt,
la raifon & l'honneur s'uniŒent pour les garantir de ce préjudice, & qu'il eil: impoffible
que dans un pays policé ?n puifIe donner ~
la même perfonne le pnx & la chofe en
force d'un feul titre?
C 'eft à Mac(ei~le plus qu'ailleurs, qu'~n p,a.
reil ufage devroIt étre condamn~, s Il ,s y
trouvoit établi, parce que c'eft a Ma:[el~le
plus qu'ailleurs que le luxe des femm~s epUl[e
la fortune aes maris~ C'eil: à Mar[eIlle plus
qu'ailleurs que l~ tiers peut en [ouf!r~r. .
Mais, nous dIt-on, s Il eil: des faIllIs qUl
refpettent le trou~eau de l~urs femm~s, &
qui l'augmentent, Il en eil: d autres qUl avant
de remettre leur bilan, ' l'exténuent en ven.
dant infeniiblement tout ce qu'ils ont de ,
plus précieux, & le lieur Boyer étoit de ce
nombre. Il en eit de ce fait comme de celui
de l'ufao-e. On ne voit pas que le lieur Boyer
,
.'
eût rienb vendu, mOInS
encore qu "1
1 eut alté re
le troutreau de [a femme, On verra bientôt
que toutes [es opérations, même les pattes
du contrat de ion mariage, ne [ont nen de
plus que la préparation d'une faillite co~~certee
A
21
certée pout enrichir [on beau-pere & [011
épou[e, La Dame Boyer ne fera croire à
perfonne que [on troutreau eût été entamé
par [on I?ari, & l'on fait que ce trouŒeau
ne POUVOlt être que très-important: en reparoiffant à Marfeille à fon retour des mes
le lieur Boyer voulut s'y montrer avec tou~
l'~ppareil & le fafte de l'opulence, Delà
vmt le nom de Boyer Fortune qui lui fut
ç10nné [~r la place, Les fêtes qu'il donna pour
[on manage furent longues & brillantes, On
[ent bien qu'il y. fit paroître fa fetnme d'une
rnaniere affortie à toute cette ,"onduite; &
que ne peut-oh pas dire, quand on vient
à confidérer qu'il faillit peu de temps après,
.&. que [a femme ne déclara point de trouf-.
[eau? Seroit-ce bien le cas de venir pro ...
pofer ici de faire une regle à part, & de
vouloir nous perfuader fans preuve que le
fleur Boyer av~nt de faire éclater [a décadence, avoit épuifé & réduit à rien le trouf.
{eau de [on époufe?
r
II en avoit, dit-on, fait autant quant à ces
meubles; mais ,d'abord, oÙ en eil: la preuve?
Quelle eft la partie de [on · mobilier qu'il
avoit ve ndue? E[t-il rien de plus impuiffant
.& e p lus négatif que de nous dire, comme
on l'a fait, que les meubles qui étoieQt dans
fa maifon ne répond.oient pas à fa fortune?
Cela p eut être; mais c~la pr{)uve-t-il qu'il
eût vendu des meubles précieux? Peut-etre
n'en avoit-il pas, fon luxe étant extérieur &
de pur appareil. Peut-être a-t-on mis en
F
�li
, fùreté les meubles précieux qu'il pouvoit
avoir. SuppofOtlS qu'il eût vendu des meubles précieux, èela pourroit-il fervir ~.~ pri~~
cipe pour en filer la conféquence qu Il ayolt
également vendu ou le trouffeau el1 entier,
oU la partie la plus précieufe de ce trouf.
feau?
Au furplus, on n'entre pas dans tout ce
détail dans les queftiolls de l'efpece de cellè
dont il s'agit ici. Nos Auteurs nous difent
avec raifon, que nulla uxor fine vefle. Le
trouffeau forme l'objet dont les femmes fe
détachent le m'Oihs, même ' dans les plus
grands malheurs. Il eil: !mpoffible dès-lors de
ne pas pofer en principe que toute femmè
qui [e Colloque doit avoir un trouffeau quelconque, & que quand elle t'ten fait pas la
déclaration, il fant lui déduire le · montant
du trouffeau tel qu'il eft fixé dans la conftimtion. Les femmes ne [ont pas maltraitées
pàr cette regle connue, & les droits précieux des créanciers s'y trouvent cOllfervés.
LôÎli que la ville de Mar[eille d?i.ve êt:e
exceptée de cette regle, les motIfs de 1y
faire exéêuter y [ont bien plus puiffat1ts 'que
par-tout ailleurs, puitque les trouITeaux y font
plus conlidérables, plus ruineux pour les maris, & d'une plus grande reffo'tll"ce pour le
malheureux tré-à'ncier. Auffi l'ufage dont on
excipe n'a-t-il jamais exifté dans la ville ·de
Maf'feille; on doute méme qu'on pl'liITe en
. citer <les exemples: mais s'il en 'exiftoit, on
pourroit dire que les ér-éancier s 'en. ont voulu
1
.
23
fouffnr .le préjudice, & ces exemples ne
formero~ent certainement pas une loi pour
ce?x qUI ne voudroient pas le fouffrir. :En
V~1ll la D,ame Boyer,nous ~it-elle qu'on peut
dec1arer 1ufage abuM, malS qu'il ne faut pas
toucher, au paffé. On voit bien qu'elle ne ré~
c~ame 1 ufage que pour elle. Mais comment
11 a-t-elle pas 'VU que cet ufage eft abuff
parc? qu'il n'eft jamais permis de pr enJr;
le ~len d'autrui; qu'on n'a pas befoin d'établIr UI)e nouvelle regle pour condamner
cet ufage; que nulle prefcriptlon ne peut
fauve,r 'Un abus de cette efpece , & qu'en
,confequellce toute femme qu' 011 ttouveroit
[ur le fait, feroit dans le cas de rendre aux
.créanciers ce qu'elle leur doit, & de déduire
le trouffeau? :Et quand elle viendroit dire
que tel eft l'ufage , & que les femmes pré~édemment colloquées en ont agi de méme
~n lui répondroi,t to~jours av~c fu.c~ès, qu~
1ufage ne peut JamaIS couvnr l'mJufrice &
:l'iniquité, & ne peut jamais autorifer une
femme à s'emparer d'un trouflèau coniidérable
.au préjudice des çréaJ~ciers qu'elle dépouille
-de leur bien,
D'ailleurs fuppo[ez encore cet uiàge, &
confidére z l'âbus énorme qui s'en eJ.lfuivroit.
A Mar.(eille plus qu'ailleurs le luxe dl: élwrme. Affr~nchiffez les femmes de la néceffité
.de déduire l~ valeur de leur troufieau ,vous
don.nerez au, débiteur le moyen de SalIver
une partie de fa fortune, en allgmentant
loutre m~fllre , & dan's les temps méme lei
�24
plus fufpeas , les effets qui compofent ce
trouffeau. Si donc l'ufage exiil:oit, l'abus en
feroit intolérable , & tellement révoltant ,
qu'on n'auroit pas befoin d'une loi nouvelle
pour le profcrire.
Mais encore un coup, l'ufage n'exifte pas.
Il eft même impoffible qu'il ait exifté. 9n n'en
donne aucune preuve. On n'en donnera jamais aucune qui foit concluante. Auffi la
Dame Boyer fe replie-t-elle fur ce qu'elle
ne s'eft pas colloquée pour fa "dot au moment de fa répétition. Elle obferve qu'elle
fit liquider fes droits en 1766 ; qu'elle n'a
repris fa répétition que dix ans ap~ès. Or,
dit-elle , j'ai vécu chez mon pere dans le
temps intermédiaIre; mon mari n'a pas entretenu mon trouffeau; je ne devois donc
pas le déduire lors de ma collocation. A
cette époque j'aurois même été bien en peine
de repréfenter quelques lambeaux de mon
antique trouff~au. C'eft bien affez pour les
créanciers d'avoir profité pendant dix ans
des intérêts de la dot, fans qu'ils afpirent
encore à me faire payer de ma dot en entier , fous prétexte de déduire la valeur d'un
trouffeau que chacun fait devoir périr dans dix
ans faute d'entretien.
C'eft ainfi qu'on fait jouer les conlidérations à défaut des moyens de droit~ Mais
d'abord nous demandons à la Dame Boyer,
fi ce n'eft pas en 1766 qu'elle a fait liquider
fa dot & droits. C'eft alors que fut faite
l'Ordonnance de calcul, qui fit monter fa
créance
,
25
creance à 56000 liv.; [avoir <5
l' cl
la dot & 0
r
,000 IV. è
mée
000 IV, de la donatiqn renferalors a~,s on ,Contrat de mariage, C'étoit
qu Il auroit ,fal1u propo[er la déduétion
du trouffeau, qUI probablement, & [uivant
la ~egle de tous l~s t1"Ouffeaux de Mar[eiIle
avo,It doublé, & trIplé de valeur, Cei!: alor;
&0-1a cette
epoque qu'a dû s'
1"
1
l
"
app
Iqner
a
re b , e (~nt nous ~xcI1?ons, Le trou1Teau étoit
en~tefiL ufage n~ 1avoIt ni épuifé ni même enta~e, ,eil: d~:>nc"Impomble que la Dame Boyer
elude 1appltcatIOn du principe que nous invoquons , [o,us prétexte de ce que fon trouf[eau de.voit être entiérement péri lors de
collOcatIOn faite dix ans après C
a-t-elle
'
' ,omment
pu ne pas VOIr & ne pas fe dIre qu'en
17 66 , elle prit [011 trou1Teau , que par con~équent elle fut ~ffeétivement colloquée quant
a ce ? lors de ladIte époque de 17 66 ?
D autre part, le temps qui s'eil: écoulé
entre, cette Ordonnance de calcul & la collocatIOn, efl: tout ~n faveur des créanciers,
Il en fort des confldérations infiniment puit:
[antes pour leur caufe; & en effet qu'eil:-il
arrivé dans l'intervalle? Que tous les effets
du débiteur ont difparu; qu'il a été fait un
concordat , par lequel les chirographaires
ont reçu
partie de leurs créances', que les
,
acquereurs n'ont pas été confultés du tout
dans cet arrangement, & qu'enfin on ne leur
a parlé qu'après que tous les préjudices
avoient été confommés , & quand il a été
quefl:ion de les dépouiller. S'ils avoient pu
cl
J
1;
G
�z6
feulement fOupçol111er el1 I766 , qu'ils ' feroient mis en caufe, foit par la femme, foit
par quelqu'autre créa1~ci~~ hypo~écaire , ~ls
n'auroient p as manque d mtervemr , de veIller à leur intérét; & leurs foins, leur vigilance les auroit conduits à mettre à profit
toute les reITources du débiteur: Qu'eil-il
arrivé au contraire? Tout a été concot'dé,
fini, terminé , fans que les tiers ~cquereurs
en euITent cpnnoi1Tance, fans qu'ils pu1Tent
méme en prendre aucune. Les créanciers
.même chirographaires ont été payés. O~ a
pris la précaution de faire pa1Ter ces paIemens fur Je compte du beau-per'e du iieur
Boyer, & ce n'd! qu'après le laps de dix
.an$ qu'on eft venu ,me.ttre en caufe les ,tiers
acquéreurs, dans 1objet de les dépoUiller,
'prévoyant bien qu'après dix ans, il ne leur
feroit plus poffible de fe procurer aucune
notion fur toutes les circonftances de cette
, affaire. Comment la Darne Boyer peut-eHe
prétendre que cette circonftance doit rendre
fqn fyftéme plus favorable ? Qui ne voit au
contraire qu'il n'en peut réfulter qu'un nouveau motif de réprobation? Et en effet, quand
le iieur Boyer remit fon bilan, il avoit un
aélif quelconque. Ce fut fl!r cet aélif qu'il
s'arrangea pour le paiement des fommes qui
furent promifes lors du concordat aux créanciers chirographaires? Que font donc devenues toutes les .re1Tources qu'il avoit pour
faire ce paiement? D'où vient que d'après
les arrangemens intérieurs du gendre & du
.'
)
1.7
·beau-pere , le premier n'a pas payé un fol
&: que tous les paiemens font repréfenté;
c?mme ayant été faits des mains & des defll~rS du beau-pere? Pel~t-oll t.rouver mauvaIS que dan.s les circonil:ances où [e trouvent les h01rs Douet & Conqueret
ils
tous leurs efforts pour fe ro il: .' à
1"farrent
'fi',
II U raIre
, e y1Q~lOn '9~ on veut leur faire fouffrir, &
qUI n eft eVIdemment que la fuite & 'l'effet
d'une fpéculation & d'un complot de famille?
Il eft donc hors de tout doute que rien n'eft
plus refpeé!able en pril:lcipe que la regle
qu'e nous 1l1voquons, quant à ce qui concerne le trouifeau , tout comme rien n'eft
plus favorable par le fait & fes circonftances
'que l'application que nous en faifons à la
caufe..
Il eft telnps d'en venir aux queitions concernant la <lonation de 50000 liv. portée
dans le contrat de mariage de la Dame
Boyer. Rien n'eil: plus extraordinaire que
cette donation accolée à une collfritution de
dot de 6000 liv. Rien n'eft moins proportionné
à l'état & à la iituation des parties que cette
dDnation. Le iieur Boyer, en époufant la.
D Ile. Creps , avoit l'air de faire en quelque
maniere fa fortune. Le don de 50000 liv.
en filS de celui de fa main, ne peut .que
. donner beaucoup à penfer ; mais les pattes
particuliers à cette donation fOllt en.core plus
'étollnans. Le mari donne 50000 liv. fans les
donner en effet. Si la femme meurt avant lui,
il ne donne rien. Si (es ellfans vie,n uent à
•
�,/
28
mourir fans enfans avant leur pere , le der~
nier ne donne rien non plus. La femme ne
peut difRofer de la donation qu'entre fes
enfans du préfent mariage. C'eft cette donation dont la Dame Boyer veut jouir aujourd'hui au préjudice des créanciers légitimes de
fon mari.
.
Son fyftéme eft très-court & très-fimple
dans fa fubftance. Rien n'empéchoit " dit-elle,
mon mari de me donner 50000 liv. ou de
me faire telle autre libéralité qui pouvoit étre
entre nous accordée lors de notre mariage.
C'eft fous cette loi, c'eft à cette condition
que le mariage a été contra8:é. Sans elle il
n'auroit pas eu lieu. Mon mari n'a donc fait
qu'ufer de fon droit en me donnant cette
fomme. Il me l'a donnée à titre de donation
irrévocable, pour en jouir dans le cas de
droit; il a li bien entendu me donner hic
& nunc , qu'indépendamment de ce qu'il a
déclaré par exprès l'irrévocabilité, il a dit
de plus qu'advenant la mort de la femme
fans enfans , ou du prédécès des enfans
avant la mort du pere, la. donation lui feroit
retour audit cas en entier. Or le retour ne
fuppofe-t-il pas la validité du titre? N'eft-il
pas réfolutif de la donation précédente?
N'eft-il pas néceffaire de conclure dès-lors
que la donation doit avoir fon effet, en attendant les temps ou les événeme.ns qui font
marqués dans le titre à l'effet de la réfoudre ? Et peut-on imaginer la réfolution d'un
titre, fans fuppofer qlie ce titre a précéde~~
ment
•
.
29
ment exifté? Le retour
.
"
, plénitude & la réalité
,en ,;~1tIer [uppo[e la
nation qui fait retour. preexl antes de la doToutes ces ' 'fi '
Elles Ont meme\~n:~~Ol:S, fOl~t ~rès.fpéc!eu[es,
, ne font pas faites r all1 e JU effe. MalS elles
, cl
'
pour le cas aa 1 S
Oute le fIeur Boyer" '1
,ue, ans
,
etoit e maUre d d
& l'r'aI're re'doJO'ere d011. 1ner.' Il pouvoit écrire
.
. e tItre une donation a&uelle & b • 'fc ans
de
l'
pl e ente
~ ; IO?,QOO IV, Ses créaQciers dans ce
11 auroIent eu rien à dire 0
1
d' c~s
'.
li
. Il eur Irolt
· ave~ raI on :. ~ourqu?i contraétiez-vous avec
un ,~~me qu:.1. s'étolt déja lié d'une tnaniere
'tnanlIelle & , bl'
.
.• .
pu lque pour une donation
: importante? Mais ce n'efi: pas notre cas S'
~ Juelques ,mots pincés dans ' le titre pel1;en:
· ,onuer a. ent~ndre que la donation étoit
~a,auelle . &. plelllere l0rs du Contrat de ma~
·nage, le fond~ & ,la, hlbfrance du titre prouvent au contraIre eVIdemment que la D
Bd"
ame
oyer ne .evolt en ~ouir qu'après la mort
,de [on, m~n. Or faut-Il en croire à' quelques
mot~ equlV,oques , & qui ne préfentent que
de iu,nples ,mduaions , ou au fonds & à la
..fl1o~ance- évidente du ti'~re ? N'dt-ce pas
t~uJours à l'intention évidente des Par'he.s q~l'il faut recoùrir, & :île faut-il pas s'y
'4xe r, quand on efr sûr 'de l'avoir trouvé
-& fur- out quand il s'agit de c011ferver le;
'ciro 't du tiers, & de ,les préferver de tout
préjudice? "
.
L es termes du titre [ont 1es fignes de l'interition; & quand cette intention efr d'ail-
H
�jO
leurs m~llifeft~e , fqit ~ar e fait, Joit ]ar
le fç>n<;I.s ~ ,~â -f~~~~nce ', du titre ·lpi-m~Ille. ,
ne ' doit-elle pas l'emp,<;>rter {Hr se 'i1\1e ~es
termes peuvent p~~enter rd~~,q~ivqq\le ou
.
d'obfcur' ?
bans Je ,cas pré[~\I?-t .il n'(~to~~ ~a1pai~ ~l~
tré d~ns -l'inteWioN .9~5 part :5 ,qt\e J.a .~O~t;
tiol? {ût payée hic !! lfunc. ~l ,tel\e ,av~l.t Il-,~e
lle~lr volont,é, l'a~e n'ept Jj>als !11attq\\e d ~nO!l
'q~r le FaieIl]-ent' de 13- do,n~9~· J.:.~ p'~e
Boyér If !;el}ti le co,up ~~ l'o~J~a!?;J} .&.I~
ç.ol)fé<l.~ences ,qtJÏ d~vo~e~! $'tW ~11Û~ rf~· EHf
4~iq~'~ la. ~,éri~é, ~e c0P..tt~F Re F~Rfer~9}t
pOf~lt de trarutlol1 ree!le ; ffiMs Hpe pa 1}?·n.
17 aS r.qrdQp'11~1~e d~ ~1 ~ l , fe§ peR~t!().~.s
f.ait es ~n -~PPttHt die m~r:1~ge? ~~f!1.e 'R~r J~s
coJI;atFfafP' ~ !l'~:VQI~pt B~~ 9~fQ1ll de ~P~~~4
tiqn ; que la JOI 35 ,9· $ ~ f~1. d~ dgngt. ~
le 9.~ 2 'infl· ~od. n'eligen! mûm è-e !~'!di
tion; qu'k~ p'ai11e~lrs FqlJt~ P:fldit!8ll ~ut ~té
très-i l1lftile, l~ co 14-itut!Q.p. .. éta!l~ g~n~rale ,
~ la femme n~ p'o.pV~l}t par S0!1f~qp~q~ r~Jl
EQffép~r ~~t.rç dote~ !~t . gH~ J~ ~a~i~g~
ru~im~roit.
.
Il( faut
écarter c~tte
dernjere
circollftanç~,
,i...
.. •
...... " 1.....
....... __ . '
qui felqif l1êan,~oil 5 ~'~~fq~l!~ né~eiij~~ P.9.!l!
a
...~
~çm'1~.r guë\q~! ~o~Il~lt~ ~ fyft~llJe
çe
Ijl
n~le. Boyer; c,\r ~ la cpnft.it\1tiQ?- r~nf~~1l1ee a~ns ~~n ,:ontr~t d;~ ~,!ri~~ ~to,i~ g~
ll~r,~le ~ ell~ B9Ut.r~~t dlr~ ~v~c q~.~~qu~ COtl~
leur qu'il -étolt inutile de payer 1:a d.on~!i~\l
10r~ dt,1 contra~, pp' [q\\e ~'~ta~~ confti.~uée
tous, fe~ bjens, fOll' ~_ar.i d~yo' t ioui[ ~t~ 1,
. 31
.dOiUa;tton. tm, fotoc; -cl~ pa~e conftitutif de là \
,dot. M:al~ eUe 11 a;VQIt pas biel~ tlu (on titre
quand eUe a ,v.oldu donner â
.J
.,
la '
,entenUlre que
L co . It~tIon .<i}t1:U s y ltro~lve étoit gélQéraie.
e l'cQn<tr;t.t , e!D d~te du 24 -mai 17 6 1 ne
renIelit:ne rt' t e _Il"
,
l''(~ \l .a~ r . POI1'l~liltutlOn que oeMe des
6000 hv. q\H lw fu.rent promifes & donlllées
~l nom du ,per~, IÎmput'aibles premiéreœent
i" le~ Q,r-Olts ma-teJfl~eJs qui [e trouvaient
~chus, &: ~e ~eilan.t [ur ceux qu'elle aur.oit
a prençI·re <l. 1avenIr dans la [ucœŒo11 paten)elle. On tro~ve dans ce titre que le Sr.
~oyer î~ çha~gea du troufreau pour 2000
l&lV. , ~ 1Ç>~l f<J.lt que ce troufreau valoit deux
tro~s, fOl~ l~ fomme à laquelle il avoit
.été ~x~ ~11~ le contrat; mais l'on clIer.c~e~o1t ~~ v<lin dans ce titre la cOllHitutioll
generaI~ ~R~ la Dame Boyer prétend y trou_
ver. L~ pere Y ~gtle en dot la [omme de
.6000 liv. qu~ l~ fleur Boyer confeife avoir
~eçu.es tOJlt préfentement, defquelles 6000
hv. Il y ~n aura deux mille pour le trouf[equ, lilJge & habillement, baglles & joyaux
qu~ le !l~ur Boyer q. fournis ou fournira à
faclit~ époufe. Tels fout les termes & les
pa8:es du contrat, Le iieux Boyer reconnoÎt
na··
.,
•
en corifèquence la Jamme reçue for tous fis biens'
pr-f.(elil s &. avenir, pour les rendre à elle ou aux
jien s au {~m.ps & au cas de droit. L'hypo-
!~eque de la dot eft générale fur tous les
~i~~lS du~ mari. Mais ce. qu'on vient d'en dire
lIe co.pa-itu@ p~~ la dQtt générale fifr tous les
bie:p$. d~ la. femme. Si pettdant le ~a..viage il
�p.
fût furvenu quelque . fucceffion à la Dame
Boyer , le mari de cette demiere auroit-il
eu droit d'en jouir? Point du tout. Son époufe,
,comme de raifon, en auroit confervé la
poffeffion. Elle auroit dit: ma confritution
ne tombe que fur les 6000 liv. Tous mes
autres biens font extras-dotaux.
D'où vient donc qu'en .donnant 50000 1.
à fan époufe, le fieur Boyer ne les lui tranfporta pas dans fan contrat de mariage? d'où
vient qu'on s'y contente d'un pa8:e tout nud
portant donation pure , fimple & irrévocable en faveyr de la future époufe & des
enfans à naître, falis payer cette fomme, &
fans livrer ou indiquer les valeurs qui devaient
fervir à l'acquitter? Il faut qu'ici la Dame
Boyer nous réponde. Il n'eft plus temps de
nous dire que tous fes biens étoient frappés
d'une totalité générale, & que dès-lors il
était inutile de s'arranger & de paé1ifer pour
le paiement des 50000 liv. données. Il faut
nous donner une autre folution, & fi la Dame
Boyer ne veut pas nous répondre, nous la
donnerons pour elle, & nqu~ dirons que fi
les 50000 liv. de la donation ne furent point
payées lors du contrat " c'eft'parce que l'intention des parties était que le fieur Boyer
ne s'en dépouillerait jamais, & qu'il eri,
aurait l'ufufruit pendal1t fa vie. Delà vient
que la donation ne devait avoir aucun effet
fuivant le titre, dans le ca! de prédécés de la
Dame Boyer fans enfans, ou de fes enfans
fans , enfans ; par où il eft de toute clarté que
l'intention
J
Jjye:'
l'intention du fié\lr
e'to 't b' - l'
é'd
r
rell carre
ren VI ente, à l'effet de ne fe d '
'Il '
des 00
r
d
epour et
5 00 IV.. années qu'à l'époque de la
mo~. La dOnatIOn eft dès-lors veuvagere &
en laveur des enfans mais n'Oll l
a~ue1.
'
(tl temps
& b'
1
Si le lendemain du COllrrat de m'
1
DB'"
anage a
, ame .oyer eut prrs les voies de juitice ,
fo~ man" fe trouvant enCore fur pied, &
,~u elle eut deman?é le paiement de la donatIOn
5 0 000 lrv., ce dernier n'auroit-il
,pas dIt avec fuccès:. notre intention n'a pas
été· q~1e :e.tte donatIOn fût payée pendant
·ma VIe: J. al donné purement & iimplement
le drOIt. -Irrévocable à ma femme dé demander un JOu~ les 50?OO liv. ; mais nos paé1:es
conformes a notre intention n'ont pas été
que la fomme fût payée pendant le maria.
ge ~ tant q~e je vivrbis. Si notre intention
e~t eté 9ue }e me fuffe dépouillé, nous l'aur~on~ faIt lors de l'aé1:e. Cela n'eft pas arnvé. La Dame Boyer n'a point formé de
:deman~e tant que [on mari a reité [ur pied.
,E lle a reconnu ' par -là qu'elle n'avoit rien à
·p,rétendre'. fut la donatioli tant que [on mari
·VlvrOlt.
Auffi ~iént~ell,e aujourd'hui ,nous 'dire qu'il
faut la farre JOUIr de la donatIOn ' depUis le
~emps .du jugement qui la [épar~ de biens
d'avec fan mari. Elle en avoit fait -liquider
les intérêts qui 011t été refranchés pour dix
ans au profit des lieurs Coilqucret. Mais toujours eft-il vrai qu'elle ne faifoit commencer
?es
1
�' J4
l'ouverture de Jon drpit qlnr l'époque du jugement qui lui avoit permis de répéter fa
dot & droits. 0,1'" , ~e fyll:eme qui eut été
conféquent dans te r cas ..d'U1}e dot~1ifé généraie, ne l'eil: pas du tout dans l'hypothefe
aB:uelle, où la Dame Boyer n'avoit .qu'Ull~ .
conftitution particuliere de 6000- liv.", 8t où
elle auroit eu droit à la jou~ffance de la <to:.
njttion de 50000 liv. depws l'époque de
fon' contrat de mari~ge, s'il fût entré da~s
l'idée & l'intention des parties lors dudlt
contrat, de confommer: alors: le patte & de
l'exécuter de fuite. En ne d'emand~nt les intérêt§ qUë. du Jour du titre qui lui permettoit de répéter fa dot', 14 DaJti(;! "B~yer ne
convenoit-elle pas bien o~ver#ement que fa
~onation n'ayoit . pas é'té faite; d.àl\S, l'idee.de
lui donner effet à è<:>mflte·r tht ;00'1'" du titre?
me contrat' <J.Ue
Et quand on vojt dans le
non content de ne pas' }l~yet.:la -donatf0tl
hic & nunc ', k m~ri ne ,prend pas ' t~tme pou\!"
la pàyer en quelqJxe temps que :ce~uiffe être "
& que lôutes les c1aufes du ti.tre indiquent
qu~ fa femme ou, fes ;enfans . n'en · de·v oienl
jouir qu'après lui, n_~ fauc!lra-t:-il pas C<:>lldure que l'intention évidente des parties
,(!toit . que la dOnàtiQll he férQit que weuvagere pour la femme, & que, les enfans à
naître du mariage ne devoient én profiter
(}u'après fa mdrt?
'
Auffi la 'fomme efl:~elle à prendre, fuivant
le titre, fllr . les bieh's · du donant, pour en
jouir par la femtne dans tous les ca-s de druit.;
m:ê
.
35
malS av~c la condition, fine quà non, qu'il n1y
aura pOlllt de donation fi la femme prédéçede , ou f~s enfans~ fans enfans. Il faut donc
r.enoncer (l'év.idence, ou convenir que le
lleur Boyer aVOIt voulu f~ réferver l'llfufruit
de cett~ donation ~m,portante ~ l~gére1l?ent
cOllfentl~ dans le ç011trat çle m;lriaO'e.
. Rien n'~toit d91H: Dhl~ inutile. qll~ de veml'" nous dlr~ que ~~, traqitiO)l l)' eft point de
l'eirence des dona,tioJ $ faites en Contrat de
mariage J &: d~ 1l0ij§ cit~r Jà-defrus les text~s
du droit roro.3il~ qui font ~œe,Z clairs [ur les
donations en génér'!l, ~ l'4'rt. ;7 de la Dédaration ~e J:7p: q»i p.;arl~ à l~ Y~rité des
rlonatl0ns Jaite~ ~!1 q,01}Wil} 9,e najl.f!~g~, ma~
.dans le quel il .cQ'~ft , !1\l»et\\~~ q~~fr,,ion d.e
tradition; car nO;lJ.$_,~&~ÏdJ9ns P.,!$ .d-l:' défal~t
.de palè1lW!$t & de 1lj<J.!:Y:Gi~ ,p<i>ur en .Jl.1d\lire
;que la }lonaû_OP ~fr ~1(wJ~, }.)u!(q\\e no\)s n'en
tletnandoo$ lP.a:$ bl c!lf.\~l. ~a qu,eftion que
inous q)'réJ(entpus, _co~ltiJ):e·..tê!1t f~~IJ~J)1~\lt .à faire
1ixer la'Y.érit~lt! . !n(ljtJ!l;e .~~ la :lil~éralité dOl~t
il s'agi.t: :.Ù.evQlt-.d le '-:tlt:e j)ay~ t.o\I.t :qe .(~l\te,
.ou feùketIieu.t .à lac :.~ft . ~u ~r:i1 Voilà
notte :qu.e.ftion. Si,,~QlrueIJWJls Jelopt~\1ons "
.la clonatio.n ,(lO}lt li1.i?git j !le .4.e..yoit ê~re ,pa~ée . qu~ :la' flUort ~!1 rfWlti, ,l.e~ ~r~s .~n . regxès 'ex.er<ltl:e,s .par hl ~Dtj.me ;B!'ly~r ét~lent
:dOlic prématut'é~,s.~ i ~ . If! ' :S51~tef!.ce :9:BI 1e~
~.djuge . en :c,Q1~féq\l_e!J1mel~t Jm~fte.
_ Mettons donç à l',~q~rt 'le f.alt , ~e ~a nOll
-tradition., .quant à ._c~ ~<p.lÎ smlc~r.ne )avali~ité DU l'invalidité de la -dol}atJon. P-;artons
\
.... . .
�~6
è:le ce fait prouvé par' l'aéle, & 110n Contefté
par la Dame Boyer elle-mtme , pour en induire qu'il efi: manifefi:e & même littéral que
la Dame Boyer ne fut pas inveftie de la
donation à l'effet d'en jouir tout de fuite &
incontinent après le contrat. Telle n'étoit
pas l'intention des pàrtiês , & nous demandons dès-lors quel étoit le temps, fllivant
l'efprit du titre où la jO,uiffance de la Dame
Boyer devoit commencer.
~ '
Elle nous répondra fans dQute- que cette
jouiifance devoit prendr~ fon 'commencement
dans tous les cas de droit; que (,ela fe trouve
dit ainii dans le titre, &. que par conféquent
elle devoit commencer ' à jouir au-temps, foit
de la mort de fon mari r .foit 'de -la colloca..
tion pour caufe de v-ergelice. . - ~
Nous ne lui conùi-ftôrs trie?_' fur le, pre ..
mier cas. Si la dOltàtÏon 'eft valable ( & nous
voulons bien confent~r~ à) œ qu'eUe' la foit)
elle devoit avoir fon ~ffet à la mort du mari
donateur, qui très-évidemment. n'avoit pas
voulu confen tir à fe dépouiller de , fon vi~
vant; mais nous fommes bien éloignés d'admettre que la Dame Boyer dût co.mmencer
à jouir au bénéfice d'une procédure en vergence. Nous préfentons là-deffus des raifons
d'une ' force à laquelle il eft impoffible de
réiifter. D'abord li l'intention du mari 'étoit
de garder la jouiffance pendant fa vie, comme
il n'eft pas permis d-'en douter, le cas de
vergence arrivant, cet ufufruit ' devoit pro..
fiter à fes créanciers ,- & .10n ;.à fa femme,
donataire
~7
donataire à la vérité, mais donataire fous la
réferve d'ufufruit; réferve qui fort avec évidence de la fubitance & de la teneur du
titre. D:autre pan, on oppofe inutilement
que le tItre porte que la femme jouira dans
tous les cas de droit en fonds & fruits, ainii
que de la dot. Le cas de vergence dt un
'cas d'affurance, & non de reftitution & de
p'ai~men~. Il f~ut ~i:n remarquer que la dbnatIon n eft pomt ICI un patte acceffoire de
ta dot. C'eft une eipece de gain de furvie
attaché à la perfonne de la femme & des
enfans à nahre du mariage. Si la femme &
les enfans prédécedent, la donation difpa-r oÎt ,; & va~neme?t veut-otl prendre ,p ied fur
le tItre; pour dire que la donation eft pure
~ fimple, & irrévocable, & que le prédétes ,de la femme & des enfans en doit
opérer le retour, & non l!anéanüffe'm ent:
~ar fi l'on veut bien y prendre garde, & fi
ft' l'on eft de bonne foi, on conviendra que
çes daufes du titre d'où la' Dame Boyer
~mprunte fôute la force dé fon fyftéme, peu:v.enf convenir'également-à une donation prife
dans le fens que nous cloùnons à celle dont
il s'agit au: p rocès.
'
, , ~t en effet ? cette donation n'en fera pas
m01l1s ptife-, ilmple & irrévocable. ~e -droit
n'en ' fera pas moins acquis hic & nunc, quoique l'exéèution en foit retardée, & : que la
jourtfance -de la: chofe donnée foit fubordonllée- au déCès du donateur. Ce droit de jouir
après le ' décès, n'en ferâ' pas moitis acquis
<
K
/
�38
purement, fimplemen~ & d'une' ma~niere it"~
révocable à la donat~ire. D'un autre cÔté,
ce droit acquis à la femme fera tlranfmiffible
à fes enfans, qui le recueiUir-Ollt après eUe;
& ce droit à la donation, joint à celui-d'en
demander la jouirrance après la mort du donateur, fera retour à Ge derl~i_er, palt" lé, prédécès defdits enfa)lS, donatau:es comme leur
mere.
Ainfi tous les termes du tItre ' fe venfient dans l'exaB:itude & la pr~ciiié>'11 la plu~
iégale" en dOlplan: au ti~r~' le fe1).s que ~OtlS
lui donnons, & qUi eft d aIlleurs le feul con..
forme à l'intention des parties, Là don:}tion €fÎ: irrévocable, parce qu'~l1e p.6rte .Ir...
révocablement le droit de jouir après l~
mort du donant. Le droit qui PàITe filé'çef.:..
fivement de la t~te de la mefe li celle ·de
[es enfans ' . péri~ ou f~it r~tour _au dOllaht j
par le prédécès _~e la ~ere .&. des. enf:ns.
Ain{i la Dame Boyer nilurOlt Jâmals du fè
fervir &. fe prévaloir des termes du titre ,
pour en conclure que la donation avoit pris
alors fan entiere & pleihe €onfiftance. Il
faut au contraire p'enfer & décider que ce
titre ne devoit avoir fon éffet -qu'après la
mort du fieur Boyer donateur.
On a fouvent douté fut le point de iâ.voir,
les d'Onations faités en contrat de
mariage par l'un en fayeur de l'aùtre des deux
conjoints, doivent ~ avoir lieu dàns le moment, comme abfolument püres & iimples,.
ou .s'il faut en renvoyer
l'exécutîoll à la mort
.
' . T
ir
•
'j9
du donant, & fi elles font ' cel1fées faites
in .cafom .{upervitœ. Cette quefrion eH trai~
tée par .Furgole des donat. queii. 49-, nO.,
2.4 ~ fUIVant._Il.la réfout., en 0bf:ervant que
Brue, dans le Jll1'lgt..tjuameme de fis Arrêts
flutiem que c'efi une décifzon reçue au .Palais '
& fondée for le t€Xt~ d~ la Loi Si l'iberis 18:
~od. de Donat. a~lte ll.1l1ptias, que les dona • .
lIOns faites entre conjoints en comrat de maria{5e , . quoiqllelles flient dites & qualifiées
entre-vifs, font ce.njées avoir été faù€s in cafum fupervitœ; de forte 'pœ les biens dtmnés- .
retournent au donateur pal" le prédécès du don'!taÎre, qUf!nd il a laifTé des enf(.llils . .Bechet,
dans fon Traité du droit de rév ertio Il , ch.
1 5 , efl du même aJ.!ls; & Belordeau, dans [es
Obfervatiollsforen[es, liv. 1, part. 5, art.
l , rapporte lin Ardt du Parlement de. Bre.t~
gne du 6 Avril 1617, qui l'a jugé de- même ;,
par la raifln
que dans ces flrte~ de donations ,
en confidere uniquement la perfonne du donataire, & que la condition de fitrJlie efi flusentendue, tacito juris inteJleau. On pe?lt encore ajouter les Autorités .& les réflexions de
Mt. de CambolaJ, liv. .4 ~ chap. 31 ; &. ce que
M. E xpilly . & Barret, au.~ endrolts Ci-deiJus
cités, Ont dit au /ùjet des ha{5ues & jgyaux,
comme pOllv.ant s'appliquer aux autres libéra_
lités. Je' ne pade pas de la Loi à marito 18,
C o-d. de Donat. inter vir. & UK{)Y; ni de
la loi cum alie11\am 10, Cod. de Legat. for
laquelle certailzs Auteurs Ont fondé le dr-oit de
retour au - profit des mariés qui Je font faits
�d
4°
libéralités dans leur comrat de mariage,
p:~ce que la premiere .~e parle que d'une. do'on l'aite entre marzes, conftante rnatnmona t 1 J' ll
, & d
'0
qui e révocable à volonte,
emeure
111,
:J •
d
'
&
l' aucaduque par le prédécès du on~tazre;
,n traIJ éloignée pour pouvozr y fonder le
tre e:J •
r
l
., d l
droit de retour, qui eft c~mtre a nature e a
.
L . 1, ff.. de Donat
entre -Vl:I'.S
J"
, .......
•
d onatwn
Cette derniere opinion nous p~ro,ît plus eq.uztable & plus conforme à l'~fPnt de l~ ~Ol Ro.
'ne' & à bien examzner la Loz 6, Cod.
mal ,
lIA
de Donat. ante nuptias, à laquel e . es uteurs n'om pas fait attemion '. elle déCIde nettement la difficulté; c'eft-à-dlr~, ~ue les donations Jimples faites entre fiances avan~ la
célébration du mariage, font valables, a la
différerz.ce de celles qui font faite.s entre ma., ' conftante rnatrirnonio , _parce
'd qu'elles
.
,
rzes,
doivent être conJidérées comme de.s .onat,wns a,
caufe de nôces; & comme les donatl~ns a caufe
de nôces renferment la condition taczte de fur.
'l en doit donc être de même des donaVIe , I
.
, li
l
tions fimples entre fiancés, pui/qu e es va ent
de la même maniere.
.
La tendance des principes eft ~onc à regarder comme fimple don de ,furvle tous les
avantages qui font ftipulés dans I.e contr~t
de mariage. Ici le texte fur lequel li fa~t r~~
fonner renforce la regle du droit,. pUIfqu ~l
eft clair que le. dQnant n'entend pOIll~ fe depouiller que le donataire n'entend pOIllt être
invefti dans le moment. Il ,eft évident par
l'enfemble des pattes que. le iieur Boyer n?
.
devort
4!
?evoit pas fe dépouiller de tOll vÎva!lt! or
Il .ne 110~S f~ut rien de plus. Le principe une
fOlS admIs, Il devient hors dë doute que la
Dame !J0yer & fes enfans -ne peuvent point
ac:quénr pendant la vie du donateur . le
droit de jouir au préjudice du tiers.
'
, Ic~ la ~onation étoit in cafom fupervÏtœ
uxorts & lzberorum; mais le pere donateur
vivant , ;le~ e?fans ne peuvent pas plus prétendre a JOUIr que leur mere. La jouiffance
ne peut commencer qu'à la mort du donateur, qui 11~ s'étoit pas ,fournis à [e dépouiller de fOll vIvant, & qUI par cette feule raifon étoit cenfé avoir voulu conferver le droit
de jouir pendant toute [a vie. Ici le D'ain
dont il s'agit eil tellement 'de furvie d'~~rès
le texte, que fi l'on examine ' fa teneur fllbftantielle, fans s'arr~ter à ce que les termes
dans lefquels elle eft conçue, peuvent pré[enter de louche & d'équivoque, on y trouvera, qu'en cas de prédecès de la femme &
des enfans , toute donation doit ceffer. Dèsfors 011 n'a befoin que de lier ce cas de fllrvie littéralement prévu dans le contrat, avec
le iilence du même titre , [ur le temps où
la donation doit être payée, avec l'i~tention
évidente où les parties. étoient de ne pas les
payer hz'c & nunc; & de tous ces faits réunis
& médités, il s'eil enhlÏvra cette conféquence
infurmolltable, que la donation ne de voit étre
payée qu'à la mort du donateur. Ûu1'a déja
~lit, & on ne peut ceffer d'y revenir, que la
c1aufe portant que la donation fera retour
"
L
/
�4'Z.
et} cas de. prédécè:s de. la fèmme. ~ dès e~~
fans, n'indiqae pas. l~ n~ceffité 'dqn~ ~xe;-,
cédente exécutioo. ~e. n~ ~on:t }!>.~s le~ ~l~ns;
de la donation qll1 ' devo~~nt f~J.Jl\e, :~Qttr. ,~
puifque le donateur dev.Olt el} être, lnv.efb;
jufqu'à fa mort, m~is felll~1!:lent ~e dro~ ~q~
demander la dQnatlon.; drQItt qUll n.e )~~u
voit être réalif-é , foit par· la femm~ , [Ott par:
les enfans , que dans le cas de. ftU-Vle_.
.'
, Et qu'on ne dife pa.s, qll(f. lfu.rgole. ~ dit
un Feu plus bas, que, ta d~»:atlQn .étQJ:t ~b.J
iOlue , & non depe.l~dante dll cas~ de furv,te_~
quand elle, étoit faine pJ}.ur en , difpQ~er tal1.t
en la vie qu'en la mort?, ou a:.ux ,plal~rs ,d.ll
dônataire~ Sans doute: cet Aute'UJ:: ~a dIt pans
cette hypothefe ; mais peut":(1)-11 la ~o..n(~UfIlte
avec la nôtre? La femme. ntaç~.ert· l"cJj le
droit de difpofer que. pour ca.liIfe de ~orlI
entre fes enfans ,. par portiollt,s -égales. ou l?é."
gales. Elle n'a ce., droit ~u'ell cas de, furv,le.;
tant d'elle que de fes enfans. C'e4.f a ce fa»lt
effentiel de la [urvie que font attachées la force
& la proroga!tÎQll de la -donation , . tant fur
la tête. de. la femme que. fiul' cene. de fes t:!~ ..
fans. Le droit de ~o:uib' ne p.eut donc s'o,uvrll~
en leur faveur, que pa~ le prédécès du man
ou du pere. donateur.
. ... .
Aïnli tombe & s'évanouit l'obJeéhen prm.
cipale & même unique de la Darne. Boyer.
Forcée de convenir en quelqtl~ mamere que
la fuhfral1ce de fon titre ne porte que fur un,
don de furvie fur une libéralité €lui ne devoit avoir lieu ,qu'en cas de pré d"eces du p,ere
donateur, elle fe prévaut de la daufe por-
- 'Il'
4 i.
~al1f q? e e Jouira en fonds & fruits dans
~~us les ca$"de dro' i :. f~llS. s' app~œvQ.ir que
.~~
ye-:gence l}'eiÇ. pa~ ~,q.r ç~as de., drpiF 'pour
~ut;(},nf~r l~ fe,mme .à jpuü: d'~l çpn d~ furvie,
au préJudl.ee qJ.l t;lers.
.
. La proçéam·.~ en v.t:rgel}C~ eft. établie ppur
~f,nm:t:' l~ d.o~ & le$, drOits· de la f~mme avec'
~e~te, dtffé}'~n~e néanmpjl~~ que la fumme
~o.uh f~ l~, dQ~, & q~e. l~s dons d~ [urvie' &.
autr.e~ _S'aJ.tJ.~ matrimonialpf, ne font affurés
9;U1~ paf qfflet,~e , pour: .el) jouir p~r la femPl,e J. le C11$' <Je, drQii ou dtf pré-~.cès arri:.~
vant.
.
,, '
. - InutiJe~eJlt'l1ous dkt~ol1 que la. f€rnme, elJ
ças ~e . d~cadence. de, fO~l ~ari. 8ç de procé~
dure ?~ vellg-ellce, dp~~J~~r des 9iens, de l'l~1,on,a~10):). .m.ê~ a~ pr~J.u.çhce d~s créancier,s,
~Ol~~ ç~t:nme le. pere perd ./flffufruir 1jlém,e ~u
p~eJud!çe d~ tlers., lor[qq'il en ab,u{e à l'en:
cOl}tl!e de fes el)fans. !.-~s; dcl,1x cas ne
pas les m~ri,l,es. Il f.'lut des fa4t~s J graves Bi:
Jqurdes, Gle,s ,tra,its de d,i1Iip~tionJ [outen~ &
e:x;cejlifs, q.~À\çl il s'~it de. l?r~ver un p~re
de fO,l"1 drGlti d'.u~u,iJ;l~lt.. ~lors la difp9 fitio l1
c:.Q; penale; l~ loJ. pnve le. pere de toute ad.
IV.iniftratioll, de to.u~e j.ou.ÏJffa,t1Çe , . ~ le dx~ït
plein ~ en~ier ef~ ûr.a.n[pp,.~ç au~ ellfal-l§, qU'j
çql~fohdel~t leurs dJ;o.Lts fonqers avec l'ü[ufnüt
Q01lt le p'.er~ e-ft privé dans Ce c;;r~. Alors ~
..d~J),$ cette hypothefe, les crç~J.1ciers n'ont
p~s à fe p.l~~ndre de
que lt:s eufans [o~t
entrés d~ns le <troit <Je. jouir e\1 force du
délit, ou du quafi. délit de' leu,r pere. C'efl:
[ont
çe
�44
ce qui a été jugé dans la caufe du fleur, Sica rd du Bauffet, contre les créanciers de fon'
pere. Le fieur Sicard difoit avec raifon: fi'
mon pere avoit été condamné 'a quelque'
peine emportant mort civile, fon ufl~fntit'
auroit fini, & les droits des créanciers 'n'auroient pas pû le faire revivre. Il ajoutait qùe
par parité de raifon, le droit d'adininiftrer
& de ' jouir avoit été~ p~rdu po?r lé- pere "
dès qu'il avoit encouru par fon fait la peine
de la privation. La décheance ~e ' l'ufufru!t
en cas de diffipation & de mauvaife )conduite
du pere, _eft une peine. Elle fuppo[e 'dans
ce dernier, une violation abfolue-de tous fes
devoirs quant au gouvernement des biens
dont la loi lui donne l'a garde & l'ufufrl;1it ;
mais en dt-il de méme dalis le cas de la
femme qui fe colloque pour caufe de ver.gence ? Point du tout. Cette derniere peut
affurer fa dot & tous fes droits, non à raifon de la faute, mais ob infortunéum mariti.
Tels font les propres termes de la loi. Un
pere qui ' ne feroit que. malheureux ,ne fe-r oit jamais déchu du droit d'ufufruit. Qui
pourroit avoir le courage , d'ajouter une peine
'à fon infortune? Par contraire on affure la
,dot & droits, même à ,l'encontre d'un_ mari
à qui l'on n'a nulle efpece d'inconduite & de
diffipation . à reprocher. Ainli. l'on voit que
les deux cas font bien différens dans leurs
principe,s. ' Pouvoient-ils manquer de l'être
auffi dans les ' effets que la loi leur donne?
La déchéance prive le - pere fans retour de
tout
~
,
1
d .
45
tout ,roIt d'ufufr<t.lÏt. La vergence met [eule
ment zn tlito la dot & les drOI't d 1 fc
EH
r: •
s e a emme
e . ne laIt pas naître au profit d
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derlllere le droit de fe payer h \ e& cette
. de to 1 d '
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nunc
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es
rOIts
de
furvie
&
des
l'b'
l' "
d t 1" ,
, 1 era Ites
d
on
evenement et1: attaché aLl pre'd"
'
eces u
m . A ffi
,an.
u 1 le tItre qui réfulte de la ro
ce~ure en ~e~gence, n'eft-il qu'un titre p ré~
~aIre , ,pr,ovIfoI~e & réfoluble pour le ca~ où
; man viendroit à rentrer dans un meilleur
etat de fortune.
De ces principes incontet1:aLles naiirent
une &foule de conféquences toutes plus funer
tes
plu·
1s meurtneres pour la caufe de 1
DaI?e ,B~yer. Elle veut attache~ le droi:
,?e .JOUIr a fa pro~édure, en, vergen~e; c'eil:_a-dIre que le man auroit été obi' " d l '
d
'
~e
e UI
00
, onner 5 00 hv. P9ur reprendre, lq. même
Jomme en cas de retour -en meilleure for •
tune. Le fyil:ême, de ce circuit peut-il être
,p;opofable? 2°. SI dans le fait le iieür Boyer
11 a entendu donner qu'un titre de fUfvie ou
·rubordont'lé à fon prédécès , comme il' eil:
Jmpoffible d'en douter, la procédure en verg ence aura-t~eIIe privé, le mari & fes ayant-'
.c~u[e du drQIt d'ufufruit qu'il s'étoit -réîervé?
;3 . E t finalement quand 011 a dit dans l'ade
que la Dame Boyer jouiroit de La donation
~el1 fonds & en fruits dans le cas de droit '
.~-t-Oll entendu & pu e,ntendre autre chofe:
il ce n'et1: que cette d01lation feroit réo'ie
,par les mêmes regles qui régiiIènt les aV~l
tages matrimo,lliaux) c' eil:-à-dire qu~ la fem-
M
�46
me s'y colloqueroit par affiette en ~as de
vergence, qui n'eft pas un cas de d:oIt I:0ur
ce qui concerne le~ ~v~ntages m~tnmolllaux
fubordonnés au predeces du man ?
Ajoutons que ce feroit le comble de l'in.l.
décence, que d'avoir fait une donation qui
ne feroit payable que dan~ le, ca~ de décon'nture ou de vergence, c eft-a-dire dans le
cas où les tiers pourroient en fouffrir, & qui,
ce cas ceffant ne devroit étre payée qu'à
la mort du débiteur. Autant . auroit - il valu
faire une donation en fraude & au préjudice
des créanciers. La Dame Boyer n'a pas pu
fe diffimuler la force de cette réflexion. Moil
"titre a-t-elle dit, ferQit mal.honnête, j'en
convIens. Mais tel n'eft pas l'objet principal
de la difpoiition. Le dépouillement de mOR
mari en cas de vergence, ·n'eil: qu'un éV'énement acceffoire. Exception impuiifante en.
droit & en fait. En droit, parte que cet
acceffoire feroit toujours cruel; [candaleux
& de la derniere indécence, parce qu'on nè
pourroit pas tolérer le ,Projet ~'u~ a8:e .par
lequel le débiteur fe re~rverolt, 1 u[ufrmt à
lui-même, pour le tranfporter a fon donataire au préjudice de [es créancie.rs en. cas
de mauvaife fortune. Cet ' a8:e [erOlt toujours
con!idéré comme fait & filé in fraudem creditarum , & l'on diroit avec raifon, fur-tout
au donataire qui catat de Il/cra captand? '
que puifque le donant s'eft réfervé l'ufufr~llt,
'il faut que fes créanciers qui font à fes .droits ,
en jouiffent tant qu'il -vivra. Nous ajoutons
8: cl
47
qu un pa e e cette efpece ne pourroit êtré
q~e de la plus dangereufe conféquence. ,Com~
len de fraudes ne p'Ourroit-on pas faire &
pr~par~r dans l'intérieur des familles! Un
NegOCIant dont l'état feroit douteux &
.
v d . ; m
'
qUI
ou rOlt saurer, pour l'avenir, en fe don~
l1~nt a~ te~ps pre~e?t une efpece de crédit,
n ~uro1t ,!U a oonfentlr une donation immenfe
qUI ne lm coûteroit rien à faire parce qu'ii
n~ feroit dépouillé qu'en cas de' malheur &
d adv~rfe fortune. Il abforberoit ainii tous
fes bIens par rhypotheque de la donation
Il en affureroit la jouiffance à fa femme
par c~nfé9.uent à lui-même, au préjudice' de
fes .creancl~r~..11 ne lui en coûteroit que la
petite ,hum.~l:-atlO~, ,qui. n'e~ plus comptée
P?ur nen aUJourd bUl, de falre faire un e proced.ure ~n vergenc~ à fa femme, & par ce
pe~It detour les. créaIiciers perdroielit les
fruIts, & le m'ln trouveroit le moyen de fi
le~ conferver I~ feroit donc de l'intér~t pu~
bhc de prafcnre un pa:B:e de cette efpece
a~e~ ?'a~tant p1u~ de raifon que d'lm autr~
cote lobJet de donner les frnits à la femme
&. d ' ~n priver ~es créanci~rs,. ne. feroit pas
Ull, ù?Jet a.ccelrol~e. Il fe'wlt pnncIpa1 & pré..
medité. Le man fe réfervant l'l1fuft uit pen.:.
dant fa vie , n'en.tend~l~t fe ~épouil1er qù'à
fa mort, toute dlfpofItlOn qUI tendroit à le
?é~ouil.ler pendant fa vie, à l'effet de faire
JO~ll' t.out autre ~ue fes créanciers, ne pourroIt être que prevue, contemplée & filée
pour établir qile le mari donateur fe préfere
$
J
,
b
&.
�48
,
à ta femme & à fes enfans, & " qu'il entend
néanmoins que fa femme & fes enfans dona~
taires foient préférés aux créanciers; ce qui
forme, comme on voit, la ' plus injufte de
toutes les opérations, d'autant que h1Ïvant
nos mœurs & nos principes, tout droit réfervé à la perfonne du. débiteur, doit nécef..
fairement appartenir & être exercé par fes
créanciers, fans que le débiteur puiffe rien
faire ni il:ipuler au contraire; d'où il fuit
que le contrat fur lequel il faut raifonner,
renfermant d'une maniere très ~.claire .la réferve de l'ufufruit au 'profit du .iieur Boyer,
fes créanciers devroient toujours en jouir,
lors même qu'il auroit été dit par exprès que
ce dernier perdroit fon ufufiuit, & 'qu'il en
feroit déchu dans le cas de verg~nce. A combien plus forte raifori doit ;..,il ,en êtr.e de
même, dès qu'il n'eil: pas dit dans le titre
que le mari perdra fon ufufrnir ' en cas de
. collocation de fa femme. Cette derniere y
trouve à la vérité l'affurance de jouir de la
donation en fonds & en fruits dans tous les
cas de droit; mais le droit n'autorife pas la
femme collo<:i}uée à jouir des gains de furvie ,
ou même des libéralités pures & {impies;
qui ne font payables qu'à la mort du mari~
Ces dons doivent être affurés. & mis in tuto
par l'effet ou le bénéfice de la procédure en
vergence; mais la collocation quant à ce ,
ne peut fe faire que par affiette, & les fruits,
en attendant ou le temps du paiement" ou
l'événement qui doit fixer le fort de la 1ibé~
ralité,
<
49~
r~lité, les fruits appartenant an mari doÏv~nt être . recueillis au profit d.e fes créanCIers.
Tels fOI?t .les ~raîs p:incipes fur lefqueIs
notre queftlOn dOIt être Jugée, & le contrat'
de mariage interprété. La donation de S0000
liv. priFe d~ns le fens qu~ la Dame Boyer
v0udroIt lUI donner , fe~olt nulle au befoin.
On y trouve un donateur qui donne & retient. Elle renfermeroit la donation des fruits
Idrfque le mari ne pourroit plus en profite;
lui-même, c'eft-à-dire el) termes 'plus nets
& plus clairs au prejudîce des ' créanciers:
E}le fa~iliteroit, ell~. encourage;'oit les pro~
ce dures, de vergence, qui, comme chacun
fçait, ne font déja qlÙ;; -trop commu1)es; .&
fi. les loix accordent une grande faveur auX;
paétes matrimoniaux, elles [ont aufIi conti,l1uelIemetÏt '. à veiller fur la po1fjbilit~.. des
fraudes que les débiteurs voudroient prati,quer au préjudice de l~urs créançien.
.
Mais les hoirs Donet !1'attaquent pas le
yaéte. Il.,fe,ra . bon, légitime & , meme favo ,rable tant qu'on voudra ,; mais il fera tou""
.jours vrai de dire que la donation de S0006
liv. n'eil: rien de plus qu'un titre de fUl'vie,
ou, fi 1'0ll veut, qu'une libéralité qui ~1e devoit pas être payée . hic & nunc, & dont le
mâri entendoit fe réferver l'ufufruÎt. Dans
'ui1 cas comme dans l'autre, il faut attendrè
'la mort & le pré décès du mari. Toute collocatioh fur cet objet ne peut ~tre faite en
attendant que par affiette, puifque les fruits
j
.
N
�5°
.
appartenal1ts_ au ~ari ?Ôi~e~l~ étre per~ns par '
les creanciers, a qUI feui Il appartient ~'
le repré,fenter. Nou,~ cq~1Ven01~s avec la Da.;'
me ,B oyer q"fte la donatIOn extfle .. t!l'e peut,
même obferver que nou~ ne l'attaquons pas ;'
mais il importe de la #xer. Or 011 vient' de:
voir qu'on ne peutv la confi~é~er 9uei,comme
gain de furvie, ou comme h~erahté :p'ayabt.~
J
a, l a mort.
,
Indiquez-nous un feu! cas, n~1~ ,-dit la.
Dame Bôyer, où un 'mari (qui fait' une donation à fa femme J qJi, fe , m?-rie f~û$ une
éonftitution générale, ait pay.é cette d(')na~
tion. L'hypothe[e . dans, ' 1aquelle_ la Dame .
Boyer fe place, n'en:~ pas telle du procès,
puifqu'il n'exifle PO!l~t ici - de ~<?nftituti0I?
génér~e ; '& nous' J demand~n~ à n~tre
tour s'il eil poffible; en, confi({érant le tItre
& l'executiQ11 donr il â été fuivi jufqu'à la
faillite du fieÎ1r ' Boyer; di ne p:-as dire que
ce dernier devoit être nanti ju[qu'à fa mort,
& fi la donation ne devoit avoir effet qu'à
cette époque. La procédtm; en. ~ergence. n'a
donc pas pu priver les creanCIers du fleur
Boyer des ' fruits qui doivent appartenir à ce
dernier ju[qu'à fa mort.
"
C'eit mal rai[onner , nous dit-on, que de.
conclure que la donation n'eit que de [ur,vie , parcè qu'elle n'eit pas payée' tout de
fuite. D'abord ce raifonnement ne feroit pas
ab[olument dépourvu de conféquence: car
les loix inc1inant toujours à faire tomber en
don de' furvie les libéralités faites par lis
,.
d
.
S1
cé>nJol1~ts ans ~es contratS de madllge ; 'on
pourraIt fô-rt b~en, fo~telli~ en ~on~équence
que celle don,t . t-l s agIt dOIt aVOIr ce.. carac ..
ter-~ , d'au,tant rniéux que ' â\me... part elle ~eft
pOl11t payee, & que de l~'autlfe le titre irndiqtle fuffifamment qu'el1e t ll~" (er.:a payée qu:à
la mort, .& qu'e,lle n'aura point Hel1':~ &
qu'~~ll: fera re!oul' dan~f l~ ~as de prcidtkès..
~als ~l ,1l0~S I~po:te peu . qùe la dŒ1ation
ccmt ·Il s aglt dOJ:ve, ou '11011" .étre crulfiderée
~?mme un clOll de [uroyie. !l [ullit quJeIle 'ne
~uP pas payéè.. oout de flûte, qU'Qt'! n'ait.: pxis
auéun arrangement _, qu'iH'l; n'ait fait· ~ucil1re
~ipulation pour ",la ..payel1', ' qu1on l'ait faite
-dépendre ~. CQ:8 • <hl .prédécè~, poùr en COI1du~e qu1à- tou;t é-véne~~~relle ne dev-Git 'é tre
pay-abt@ qu'à' la mOltt -du ..douant:.' Or dans
,tette ,hypo~hefe les fru~~.s l'l~appllr~f;nl~gtÎt pas
plus a la ... femme· que s 1~ s';lgtfrOlt: f d'un r ~on
de [urvie:, parce que l'incertitûde de la créan.:..
~e & le déla! ?onné PQQ~ le ~pa:iemef1t ;. font
'au pr(}:6~. des. ,créanciers, &;:"l1on à èe1ul çt"e 'là.
f~mme <tuf ïie-; peut jouir J qtf'~prè~ ~ueJé dOIl
de fiu'vie aJpfis, une cQhfH~anGe & Ane~ fàli.:.
dité, -défil~it~ve par 'le ·prêdécès, du- ~Jlri J
-ou- a l'arnvee €les temps- marques.: pour. l~
pàiement. !~t[qu'aI9rs .la -jpuitnmce appar(fent au mari j~ par cDnféquent à fes ::-créatl"
CIers.
t 1~Vainet!!enfC!bferve-~-on eucorè qtie
patte
a11J.!l1iie la-don'atiol'l â la ·aot. Ce'la l\'efr pas
exaaement~ 'v rai, m<tmè titr la lettre du titre.
Utl premier patte -.relatif à la dot porte
.
le
�52.
qu'elle: fera réndue foit àJa Da~e ,Boyer, ,
foit aux jiens, o.aus les temps & Iq cas d
droit. Enfuite vientdans le même tit~e' la d~
nation de S0000 liv. qui s'y. trouv.e énQn.cé~
cOmme faite en contemplation du mariage f
quh _ quoiqu~ pnu:e, ii~plecJ~,!jHévoca~e~
l1~efr néanmollls nt payee ,_l\ltt )pa;yab~~ le l?l;l~
dit titre dont la jouiffance cit ren,\IJ),yee , alnÜ
que, celle de la.. d?t " dal~s rrtOtlS le~ ~af d~
droit., Sur quOI. Ion , dOIt -o.bferver .d abord
-qu'il {e rencontre uhe cliffirel\Ge. te){tu,elle
dans les. deux difPofitions.': ,çar 'l~ dpt:- dOIt {~
refrituer, fuivaht le ,titre ., dans. t~us ,k! ças.. rEf.
tous le.s temps de dmit. La dE}l1atlOn i1ed~}.!
étre payée que , datl~ tous,' l~ ,c~.. :~ett~. d,lfférence . dans les l:.d~\;l~. , ora..J,fQ}lS' n 'ln~hquttl pIt,.
elle p.as qu'~n en ca vouhi. ,1l}~t:-r~ _une dans
l'exécution qui s'en .e!lfuJ".vr,?lt l~ Peut-~tr~
nous ._ dira-t-on qu'etLle eft q)1n!!r!~u(~: ,nou~
.répondrons qu}eJle exift~ , qu~~l1e ,eft httet:alel
& que tout doit être p;[é ~aps ;un~ cau~~ d,e
l'import;Ulce de cell~-;C1, ou ,tl s, agit de 1mte. rêt des tiers acqtJ.é.re!ifS ,av:ec t.l~re , & bonn~
foi, & qu'on veut expulfer. Le t~mps de la
vergence eft, tant qu'elle d\1r~ ~ un temps. d:e
jouiifance pour la dot; & voIla' pourquoI Il
eft dit dans le premier patte,'qui ,ne parle
que de la dot, qu'elle fera re~du: .~al!S les
cas & les temps de droit. MalS s agIt-Il eg,fuite de la donation de furvie & -de la dot,
la jouifi'ance n'en eft donnée à la femme que
dans -les cas de droit tant feulement. Or"
~nçore un coup., la vergence n'eft pas un c:~
j
J
tt d "
H
, ,e rOl,t p'oUl:-, le paie1l1elit d'~lI1e donation o '}
-de furv1e, QU payable à la mort On'
'
' " " . , n a pas
1
ffi
vou u a .lmIl~r ces d.e.u~ objets de la dot & de
!a ,dOnat1~Q l quoiqu'ils, [oient réunis & con~
-)0111tS d!,lns . la même oraifoll' & 1
d
d ",
. "
es cas e
. rolt etant· ddférens p~ur fa dot & la d
.
r ' • cl
'.'
ona·
,tlOn, 10lt . e furvie, fqit . ;payable à la lnort
~chacun ,de c~s, deqx ôbjets' a confervi . fa na~
:'ture & f?l,l caraél;re. En difant qu'ils f~(oient
'payables: 1 un & 1autre aux cas .de-, droit on
jl1'a entendu &, on n'a pq ~ntendre)pa~le; J
que
du
i
,cas de,_~ro~t P~w. _çh~cun d'enx . ~1J parti.
~~uher & dlftnbutIveP1~I1t. -Ainfi l'on a ,.dit par
~ce ~<:léle " ' cl9nt la D~:me ,Boyer v_eut fe pré.
Salolr -" que la dot f~rQit'Jpayée,9l! ~fi'urée en
:1:as de v~fge)1ce , & q1!'ilJeroit f<Yt,~ln ' .fimple
.affign'!t d'tns ce qs ,pour la dOl1?ti-ü1J. Telle
~eft la maximê, tel$ Jont ' le~ moiçn~~t'~4c tels
~fontles CflS:flLdroit. pf)~r tun & l'<l..utre de ces
:deux 9bje~s.
( Que Ja femm~ fût ':Ïnveitie pour pOUVOIr
-~of)ner à fes e~fans, à la Donne heure; mais
:11 ~emeute 'toujours yrai que le mari Ile de(vOltjPAS. k cJ~poùiller, qu'il n'y avojt aucun
J~rme au -paiement deJa donation"-;J Au'on a
'par conféqu~J1t éntelldu que le p.ajement ne
,s:~n ·feroit. qu'à la mor·t du mari 1 _&" 'que ce
ne fer9it A~l~ par l~ pré décès de ce· dernier,
. ~ue le' d-rQit, feroit -c9ufolidé, & qy.e le paie-ment devJ;:"oit ~n t:tr~ J4it., _Dès-lors rien n'eŒ
.plus ju~e que .notr~ fyitéme. L~ D~me BOJ;~r
.eft payee, furpayee d,e fa dot, fur-tout s'il
faut qu'elle nous pa{fe . en déduélio!l le mon•
.
<:)
�-54
tànt du trouffeau. ~lle n'a nul dr0it
jouir
<des 5°000 -liv. j l~ maifoll fur l'aq~elle . elle
~'eft fâite col-l oquer (pOUi'" le prix &,_ l'eibma- '
tion de 40Ô00 liv." ne doit prodttire ~ dés
fruits qu att profit des c-réanci~ts. · IDelà deu-~
conféqùeRces : Ig.lës egr~s .laxé~:p~r:ta Sen\.
\tence dont eft appeP fdm 1HJuft~s. · L.a Dame
-:Boyer -a dit: je doi~+~_uii'" de la n1ai1b~:~ parce
-que les temps de Joul-r·:de.- ma: do-~)10n fOlit
arrivé:. ' Cette malfon eft foumife:.à 1a r~nt~
-annuelle &. viagere de. âGe liy. C'ëft ;.3uta!it
- ~ dédui-re fut' la jouiffàl1Ce qui m'appartient;
-& dès~ors élie s'eft' ilôytJe-po{tr "'C~afldete
tfe.s , &.
-des différente6- anmt-it-é:S'!lu'elle a
-de toutes eéJles qu~~1ie ' ti?ùrroi" payer 'ià l'a'~énir. ~n cetiféque1A'e~~ -elle a· 4~li1a.htM · que
1efdit~ regrès lui ifùffenJt ?l~é8J pO,tir !lé[~i'te&
-annultés, lt--ant pafifé&i<}ué .fà~u~~.--.or -~e.t~
%afe de [on aéHon - .vre\jt · dl~~te ? 'tel1;vèfféè
par les principes qUt: nous ve~~h8J d7dtabliY:
car S'il èft vrai que la- -do'n:atlou de S0000
liv. ne '[oit qu'un fimple don -de [lÏrvie, oU
'm~me une libéralité' <Mont le 'Pa~enlènt foit
renvoyé-- à là mort d1:l -tnari, là>cdlloc~tîdn -,
-quant à a~e ', Re p0uvoitfe faire :que.if>at: .affiet-te
ou par vOle d'·affignat. Les frults 4e~olentel:t
~e mis en réferve a1:l.pre>nt du Jl1anlbu de fès
créaneiers , ~ la Dame Boyer n'avoit aucun
dIGit de fe les approprie-r. On ~onçoit . biel1
~ que le fieu.r Boyer1a la-itre faire; mais l~s
.tier-s--acquéreur-s qu'€olle ,veut expulfer ne pour~
. ront-iJ..s pas u.fer des droits &. des priyileges
-de le1:lr débiteur? -Qui- pOllrra les en S(mp~ ..
ae
PaY
·
'.
5'5 '
-ch~r ? S~ la dpnatioli de 5dooo iiv. n'étoit
. qllru~ gam de ~lJrvie, ou fi le paiement n'en
d~VOlt chre fàJt qu'à la mort du -.donnant
en 'cas que ' [a,'1femm~ fil1~éC{h ou [es en'fans '
la J?aiIJe lBoyell' devi>it sleftimer. bien heureuf~
~e -oJouu~ ~Ha).tnaif011 >vallant 40000 liv~ i &
~1Il prodmfant -plus de 2000 li\<. -Jll1e auroit
.<l~;.1l)~~ér ll~s r~;ltO~ liv. de la penfion viagere ,
&-protit~r -ûUlt~ildu d$ plus de 800 liv. que
~erfCJhne ne -lUi eOllteil:oit. ,Mais elJe a ;voulu
t'l"Op étendre fes rprétendus drQits. Non ICO:n~
tenté .de·jolli:rr~e [a ?ot qu'eUe a r.eçue ; '& de
, .SiLH) .hv. de-'r€llte qUl n.e lu~ appar..tenoientipas,
~lle a :v~ulu-c~lcu1e( les 4ur etfês annuités de
t~ . ~éniloil v-lagel1e 'de u~u liy., qu :elle a
-Rà~-es , -pout' 1S'~tl fbrm.er:ull titre 1de --«rlanée
'~Ont elh:l~€~t I[etp~évàl~f.r. .pOUl"~'éx1?I.l~[er des
tiers -acquër.èu:rs. Dês-'lots ces ·derniers [e ' r.etoûrœnt ront.r;1eUe, pour-lui .fuUt~ni17 que -non
fe~~e~ent ·eIl€: ~a riiju à pr.étendre contr!eux
malS que de 'plus ils qllt 1à:f.rire vafbir contr~
èlrecle cdroit <de "l'ohl~e.r ' à ,p.I1élaer Iles [fruits
~u'el,le ~ .~~l-à:.propos ~ pet~os·"&l: ceux-qtl'eUe
J){>1.lf~!t p:roevûj.r -à yQ~et1ir:jufqu'à la:mort
tl~ [on: mar,'l.
: . . _
_
'
.:- }lt ~11 effet ', li 'la tdOnàtioncrle S:OOGO ,If",.
he :préfente qulun titre:. de fur.:vie Ou une
futrtlfie pâJable à la mQt:t Idu <ma.ri ; la 'cbH6ç-atio-n fle ~ pouvoit 'tè falre ~pou.r ·cet -'()b~et
que par aiIiette. La couféqueuce tètC 'inconsfeftable. D€s-lors le .drqit ' tIe jouir n~appar
tenaÎt qu'à ta 'femme c.omme donataire: ce
droit ne pO-uvoit naître qu'au déc~-s ~du mari.
L
•
.
•
-
�56
Dès-10rs là Dame. Bdyer qui jouit dè la mai,.
fon ,qui en retiré 'en- outre' plusfde zooo ,liv.
de rente,. trou:v.aut dans ce loy.er qu'ellè (pet~
çoit les 1 zoo .liv. âe la peniibu, ' viagere'dollt
elle a payé les annuités,. ne p~uv~it pa 'en
faire un titre de créance, ni rcotitre ,feiullari~
ni moins encor.e çontre .les c:~éanc'iets, d'1 :~e
dernier ; & de plus elle a lO.Ut, tous lesI ârt~
de- plus de 800 liv. eR. [us t.qui.rie lui' ètQielft
pas dues. Or lés , hoirs - D9làet étant. ni~nar
-cés . d~évi8:ion,. font -indubitalJ,l ement tfondéJ
par cette raifon à demander Iq\ie- <e,rreye.nu
dont' la Darne :Soyer .a difpofé 1 & do lit ,:.elle
veut continuer'a. difpo[er , .foit pla;cé au profit
dl.bfieur Boyer~ & .de fes créanèier-s. Le) péril
cl.' évi8:ion efL évldent, & de plus très-itnmi4
!lent'; . 'L e fleur ' Boy.er peut.... mourir du toir
auJèndemain. Sa femme exifte ; il Y a de phl$
un enfant , peut~êtr.e <davantage. Si l~s temps
de payer la don.ation des )'booo liv. ne.follt
pas encore arrivés J-ils peuve.nf~rr:iver à .cha-:que inftant. Il faut, donc ou qu'on,nous donne
,
,
.
une cautIOn pour ce cas, ou qu.aq :tn,oms ' on
mette .en 's ûreté ,im intérêt que: le ·fieut Boyer
abandonne leilement à fon épQu[e, & qui
n'appartient pourtant ' pas a cette den)Î~re.
Delà viennent les fins que nous avo.ns priiè.$
là-deffus, qui feront réalifé~s par une requêt~
incidente, & par lèfquelles les hoirs Donet
demandent tant::, le déboutement de l'aaiolJ.
en regrès ,. que- le placement de l'excédant
des fruits que la Dame· Boyer a retiré,. &
qu'elle pourra retirer dans . la .fllite fur. le~
loyers de la maifon. •
La
57 •
/
La pame Boyer oppofe des fins de non..
receVOIr ,~ux ho~rs Conqueret, à raifon des
aveux qu 11s aVOlent faits lors du dernier Arrêt de la Cour. Mai.s ces eXCeptions nous font
étra~lgeres. Les hOIrs Donet n'étant pOÎlrt en
qualIté . lors ,de ~et Arrét , n'ont conféquem_
ment nen dIt; Ils n'oilt pu rien dire qui pût
leur barrer l'exercice des voies de droit qui
leur competent. A l'égard de ces derniers
la, Dame Boyer convient qu'ils font fondés'
SI la co~~ vient à j-uger que la donatio~
de 500 00 Izv. ef! de fimple furvie. La Dame .Boyer ~e dIt pas airez. Elle doit con~
vel11r auffi que notre fyfteme fera fondé fi la
~onation n'étoit payaQle qu'au décès d~ doIfateur: & il eft difficile qu'elle nous échappe
au m01l1s f~r ce dernier objet. En rapprochant , l~s dlverfes clalJfes ,du titre, il paroît
:;t1rez eVldent que le fieur Boyer n'a voulu
donner que dans le cas de furvie, en comprenant néanmoins dans fa libéralité les ellfans à naitre de fon mariage avec la Dame
<:reps. Mais d~ quel,que maniere qu'on con~ldere la donatlOn, Il faudra toujours tenirpour certain qu'elle ne devoit pas avoir lieu
/u'c & nunc. Cela eft manifefte fur la teneur
du t~tre & . fur l'évidence. Le mari: qui ne
devoit pas payer lors de l'aBe, ne de voit
donc payer qu'à la mo~t,. puifqu~ ce n'étoit qu'à la mort ,qu~ ,-1'-on pouvoit fav~ir que
1~ donatlOn aijro1t he,q ou non. Ainù dans
~ou~ les cas la femme . n'ay~nt pas droit de .
)pu!r en l'état, n'eil pas devenue créanciere
p
�s~
pour avoir payé d'une main 1 zoo liv. ,qu'elle
recevoit de l'autre. Elite , eit a:u contraire devenue dél:;itl~ice ;. . elle continuera ,de la d~
venir pour l'excédanrdu revenu rqu'elle a pr~s
& qu?eUe prendra fu,~ l'ex€édànt du prodl!ut
de la maifoll. ( . , . Ajoutons que la créam:e' pttop~fée pa.r la>
Darne Boyer à ra~fon des' I20D 11v. pRy~es.
annuellemeht au créan<;ier l.de la! rente Vlagere établie f~.u:, la mai[~\. , eft' d-a-ns w~s-les
cas illufoire & mat fOI'l.ùéfe ,~ ~aata>m! qUoil e~
de maxime ' fondamenta.le que' dans ,Ile Cas de
la colt0cati~1l. ~OUI?' eatife : de' vettge'?~e: , ' l' e~-.
cédant d~ mten~ts; de la- det ~ ap'rèls le pl'e ...
revement de la nour-rituil,e &J ~n'Fretiell. de l~
furnilla èGivappar:teni}Q aUN ettéa.lKkr-s-(~U1ma:n"
Il eft ;r.ai que- IDupe'Pier a dit l~' c0'llt'raire:
dans fes maN-ime.s ; tit: dë, l'œ eel1~tat40n " & )
que cette dothinè· efr El un.- g1"~dl p~ids ~u;
Palais; mais il' en eft l â.'~autres- qÙi [bnt égale ...
ment vigoureufes. Télte eili eiîtr"[mttes. celle
de Mr. Declapiers, cauf. 102';. que ft. umque ,
& de Me. Julien dâ.às fe~': collb:tlOl1SJ. manufcrites, vo. matrimonitlm,_fb1l43 ~ litt. J~ Ioesderniers>A~êts de· là Cour· iè fOnt rapprochés de cette.' dottrine.~ On- ell trouve un
exemple ' dans- 1Ar-r~t- rap'porté: p_a't'. M: de
Bezieux, liv, 7. chap. h 9'. 2;, n ' fut'Jugepar
cet Anêt que la trép6i:itlOll' que fonr les fils
de la dbt de leur mere pc:mr caufè de ver-::
gence de leur. pere, ne prive pas le- pere nt .
le créancier de l'uJùfruÏt -des Mem que l~s . en- ,
fans Ont pris .en collQcatian. On QPpcrferort 1l1U--
'l '
59
tI ernent qu'il s'agit ici d'une co1Ïocatio'n faitè
par la femme,; au lieu que l'~rrêt rapporté
par M, de Bezleux eft Ufi cas d'mIe 'cê>l1ocati~n' faite pélr les enfans : Car la coÙcicatioll
faIte par les enfans eft à l'inftar de celIé que
les loix ont intrbdlffre èl1'-fa~Mr de 'ra' femme.
~Ues fe régiŒ:!llt }'t'll'l'e & }'â'ù'trè tfar dés p'tinclpes comn'l1.ll1lJ.~..1!'aiilleurs per[ohnë li ~gnore
que la éoHoeattO'Il pour éaufé dé véro:e'nce
~'eft q~lluœ titré provlfO'i're, mi fifnp1e dépôt
11ltrodult pa:r la l6i Flt)Ui:' ta cO'tl'lervatiol de
fa dot. C'eft ce qo"on~ . ielf~~ntf-ë' _pa'f ,tottt,
notamment danS' DecormlS,- tom. 2 {~ol'. 12814 ,
~an~ M~ Dedapiers, à' )'endrOl€ .é-iLèlévaHt
cité,,t & même d'àn~ IDUpêtr'er.' Là! coti'ocatioA
ne, éhange pas Férai <!le1-p~i(ie-S" /ilÏiaffé8à...
tio'ri .de: Jar dot qui' - d6ft. él'<tbbfd-' -être e'm~
ployée ,a:e fU~~Ol::- des: c?at'gés '~Ul tbaI~aie',
& ,dont lei fut1plu9 ' appattléitt âUl mari,' &' par
conféquent': à Œs creahéiélrs~'~AÏlHi~ qüahd on
v,e ut battre ces derlUei"S\ éI 'l'éur dira it qh'i1~
ont dû cdmprèf-. {tir' la .do!' , l, ils" p~uvfnt ré:.
pondre . dluna~m'e ' côtê qu~ils 6rlt' éga1einél1t
compté fur le iiwphlS de'Sr ihtéftit's' dè-Jà ' dot'
d'autant qil'iIf eft· dit~ ditîîs~ le dr"o ir qliè"'la 1colf
locatiollpour ve,tgehcè nê'Cdbit l avoir nbu1qtle
fous la ! co'nditiotI , & ·l:c 101 pe'~h1lln-e'flt& dÈ!s
pattes rrlatrü.noni:rl1~ ,1;fàaIYm:atTfn16filalil}ui 'ifi
pei-petutLttt ' (Jurmurùl ;O rc fi(laf fefhitfeIc,qIlSquéé
paut" velifel1cê' n'a ~ ~U'ulti' 1 drdlt d~1.fuï"a~lte· &.
de~ dépôt pbUlt' la dot, Lfi r là' lül(nei l'enjc'o'!~[.!
iitue ~ que dépoii!rarf'e) pO,fIl- e'tf' ernpfdJ'è{ l~
prodùit a~x ufagës 'de'favetfr ' ni'âftft és:1pâ'f 1a'
�1
60
loi, il eft bien fimple que les ufages une fois
re~plis , le f~rplus des intérêts doit appartelUr au man. , & par ce moyen on remplit
tout à la fois l'intérêt de la dot & celui du
tiers.
i
Or ici la Dame Boyer & fon mari devraient bien fe contenter de pIns de 800 livd'excédant dont elle a joui tous les ans fans
.
'
venIr attaquer des tiers , & leur demander
une fomme de 1200 liv. qu'elle a prife fur
les produits de la maifol1. Viendra-t-elle nous
dire encore que 800 liv. ne peuvent pas
fuffire, & qu'il lui faut toutes les fommes
dont elle jouit, & qui la -furpayent de fa dot,
le revenu de la maifon s'élevant à plus de
2000 liv. par an ? On lui rappellera fOll état
ce~ui de fon mari, & la Cour jugera fan~
peme , en pefant ces circonftances, qu'un
revenu de 800 liv. devroit lui fuffire dans
tous les cas ,& qu'il eft de plus abfurde
& révoltant qu'elle veuille fe donner un revenu de 2000 liv. au préjudice des créanciers légitimes de fan mari; & ii cette derniere exception, que ~ous ne préfentons que
furabondamment, ferolt favorable & légitime
dans le cas où il s'agiroit des intérêts de la
dot dont le fonds appartient à la femme,
~uelle force ne recevra-t-elle pas, ii l'on vient
a conüdérer qu'il s'agit ici des fruits ou int~rêts, d'~ne don~tion. énorme, difproportlOnnee , 1l1comprehenüble, dont le paiement n'eft. attaché qu'à la mort du mari, & qui
feroIt.mal ~onnête, frauduleux, inique, fi l'on
vouloit
6r
vouloit doimer ouverture' au_paiemellf d~itel1e-·
par ~'é.~énemelilt du cas de vergence . ....
~ A1l111 tout J efr dit. Rien n'a pu difpel~fer
la: Dam.e BO)0e.r de déduire · de fes créances
l~ _ prix ldu é~t:0~ffe~u. Elle ne l'a pas déclaré
lors de la hquldatlOlL de Jes -créances. Il faut .
la: j.uger d'après fon filenae, & cotnpte~ au
m01l1S le trouffeau pour 2000 liv. Les créanciers fel'orit les feuls léfés à 'c ette --évalu~
tion, puifque le trouifeau valoit au ~oins
t-rGJis fois.. plus; & s'il falloit recevoir une
pr~uve l.à-deffus,' l~ I?ame Boyer ne pourroit
q.~~, perdre . . ~ Op1l11On -publique & la notonete donneroient la plus grande force à ce
que- 'nous v.ehons de dire; mais il eft inutile d'engager les parties dans de nouveaux
pro..~ès" \ûr cet. objet. La regle eft faite. La
femm~ eft cenfée avoir:fait fon choix pour
le pnx du trouffeau, tel qu'il eft porté dans
l'cl~e de. 'coùftituti~n, & l'on fent bien qu'apres qU1l1ze ou felze ans tout doit être fini
là·deffus. D'autre part, il s'agit ici de la
caufe des tiers acquéreurs qui plaident pour
n'être pas expulfés, contre une Jemme qui
veut prendre 50000 liv"" _à leur préjudice fur
les biens de leur débiteur. Que cette fomme
foit - payée au temps marqué par le contrat
& dans l'intetltion des parties, à la bonne
heure; mais e1t-il raifonnable, efr-il décent
de vouloir la faire payer avant le temps ,
& de prétendre que la femme en jouiffe
contre fon titre, contre toute raifon & jufti.c~ au préjudice des créanciers les plus légItImes & les plus favorables? Voilà notre
Q
•
�6l'l
pr()'e'~; Il ~git r.Jll. rouds 'ldl~ 'dIrait dè,-~ur .. :
vie tout "àll lplus d~tme,doJ.1QtllJn !pUte &. iulf,..pl'e.',.~ii Ion. 'veut ~ !nm~ ,qui ne ~uvoitr~ le,
d&voit être {p~yee qu:'él :ia')mol't db mar.!.,_&. '
chtl1~ Jie , càsctle ifunrre -de .la fwmn~ IOlI:de -[es ~
enfanlS. ~Catte :lvé~ité ' aOlitbtnr.e 'Ifm:nage: là '
ttave1'S rres iéq~i-v.mpœs & .I les ~hf.c~nritré6 ,.tj~o. t
réelS Ipeuk1tre ,à ·deH'eil1 ·dans )le (!ltlre 'de d~
Bame ~ayèl" -;. &. <dèhl il tfùlt 'ltlr.elreJ1l?'àft2p~:
du -tom rcréllnci.ate tdas -nt ot> IllV. AIJl!l? elle ;'a
payée's-, r& ;qu':é~e èil: déhjltri~ ~: d'e:xo:é~,
d~nt "lU'i!lœ 11 'tP,,ttlS iur ~ td,olWlOll ~~ le
paie~rlt ..J}7e:fl: JPlas .e-n.(!u.11e ~?kù. ,.n,da ,'vlen~
la 'jtiftitJè .àecs .co:nolulmns EdeJa p:r!f-q~ "~ qw.
fmlt re.n.fe11tnée8. dans ~l:te I requ~oo mOl-dent'e
que nom '\'étt~ns {de priS~t}r ; n:q~te dant
les firt5 ibJ1t fondées 1[ur Iles p~JillCtpes 'que
Jl0U8 'vetUJ.m rd.e pu[ell• .
C(!)NCLUIl> à' ce que :f1tpped.I~ljiml & ce
dont .etl:: appel 1Îetorrt mis :au Jl"l<!<flll:; & par
nou\tèau :jl.lg.eln.ent., fa11s :s!ar.rêtrer .atlX fins en
rergrè's pl1ife~ T'air la Dame Boyer ·<!l,ms fa re.
qnête ,do '7 .feptiemb1ïe 17.76.,.en lapl'eHe elle
fèn ;déotàlrê.e i'A'Oh-1-ecevaMre 'en l~état, les
hoirs '>DOïl:e:t ferout m:.rs f'ut iteHes h(i)'ts de
~ur & Jle rprocês, la cotlocatiotl fur la
mlllffon dont s'agit f.a-ite 'p ar b Dame Bdyer
umam néa,ttmoins pat" forme ~'aŒeue ,& 'd'afiiO't:rat t.a..ntiettlem.ent., & (am .a'ax 4-lO'irs Donet
:la débattf{€ 'qùallK1 il écbe~ra Far t.outes
les voies <& :tnQye1ls de d.toit, rêfervé à la
Dame .Boy.er l'es ' ex~epti01'lS & 'défenfes con.
tt:aires; &: . de ·même ;:fuite faifant droit à la
ck
63
requ~te incidente des hoirs DOllet, icelle en.
térinant ,il fera déduit fur les fommes liquidée~ au profit de la Dame Boyer les
zooo 11V.de [on troufTeau, fuivant l'évalua_
tion portée par fon COntrat de mariage, &
fera de plus la Dame Boyer condamnée à
repréfenter & placer au profit de fon mari
l'excédant du loyer de la maifon dont il s'agit,
~près. la dédutlion des 1200 liv. de la penflO11 vlagere, pour demeurer ledit placement
affetlé aux créanciers du fleur Boyer; l'amende du fol appel fera reftituée aux hoirs
Donet, & la Dame Boyer fera condamnée .
aux dépens, tant de la premiere inftance
que de l'appel.
GASSIER, Avocat.
FERAUDY, Procureur.
Mr. le Confliller DE FRANC, CommiJJàire.
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DAME CRESP •
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CONTRE
Le~
Hoirs du {zeur
du fie.ur,
,
DONNET, &
CONQUERET.
•
les Hoirs
E S Adver[aires reprodui[ent aujourd'hui
L
, pardevant la Cour ~ une queO:ion que
l'un d'eux y avoit élevée lors du dernier
Arrêt intervenu entre les Parties, & dont il
fe ' départit [ur la décj(jon de fes propres
€on[e i1s. C'eO: cependant cette même que[.
tion fur laquelle la Cour doit prononcer aujourd'hui. Fixons-là [ur les circonfiaoces •
. Le 24 Mai 1761 contrat de mariage
encre le lieur Boyer, connu à Mar[eille fous
•
•
�2;
, ".
Je nom de Boyer Forw;le , _8(. la. Olle. CreCp,
dont le pere réfidoÏt · à la Martinique; con ..
trat de mariage qui, par parenthefe , fut fouf.
crit par le fieur Conqueree, comme témoin:,
l'ur de nos Adverfaires.
P;u çe contrat .de .mariage , la PlIe. CreCr
fI! conflitue 6000 hv. de dot, & ,en con~
tcmplation d'icelui ,': le :~.e~r ~6ye"', qui
f.ans la fortune qu Il a~01t 1 fa.ae au-x HIe Il
,
.,.
1 j.
n'aurait jamais pu afpIN'" a. fa maln .~ u:,
fait une donation pure _~ fimpl·e en .cu
ter-mes. ,
On dit pure & fimple, foit pa~ce que
le contrat l'annonce de même, & fOlt parce
que les Adverfaires, e? rappella~t la claufe ;
ont précifément affeéte de fupprImer ces termes déciGfs :
») .I\yant été en outre convenu au traité
» du préfent mariage? & en contemplation
J)
d'icelui, que ledit lieur Etienne Royer
J) feroie, comme il fait, donation pure, firn» ple & irrévocable à la Olle. ~refp fa f~ture
" époure , & aux enfans à naltre du preFent
" mariage, de la fomn~e de 50000 l~v. ,à
" prendre auŒ for fis bten: , pour en JOUir
n par la Olle Crefp , acceptante fa vie durant
» en fonds & en fruits , ajn(i. que de ladite
)) dot , .dans les cas de droit, & pour en d;;:'
» pofer à [on gré pour caufe de mort, par
)) portions égales ou inégales, feuleme nt en
» faveur des enfans à naître du préfem ma» riage , le toet néanmoins fous ces condi.
» lions, (ans lefquelles la ~réfente donation
r
1
,
j
» n'auroit point élé faite, qu~ ve"ànt ia
» D1Ie. Crefp. à prédécéder le Geur Boyer;
)) ou fans qu'il y ait d'enfads de leur ma» riage ~ el!e furvivans, ou que lefdits en~
)1 fans vlnlIent à mourir fans enfads avant
» le oeur Boyer leur pere, ladite çlonation
))c fera retour ' en entier
au fieur Boyer dona)) teur. l)
. .Quelquijmporrallfe que ((jt tette libéralité;
~l1e n'avoit rien d'extraordinaire, eu égard
à l'état des panies; & aux facultés dont le
QelH aoyer jouiffoit alors.
, Peu d~ tem.s âprès le fi~ur Boyer; auquel
ta fortune ne continua pas de' rire, vendit
deux majfqns", Il lIne le 6 Oélabre J7 6 l- L aU
fté.li\" Conqllerer , qui ne pouvoit pas jgn_o~
t,er/ la don~:ion faire à la Dame Boyer; puifqu'il avoit été témoin infirumentaire dUt con:'
trat de lllari9g~ qui la lui affuroit. Et l'autre
au oeur Donnet Je ~ 1 080bte 1764 ; 8(
c'efi précifément fur ces maifons vendues
poflérieure!1l.cnt à foo cOQ"tr-~t de mariage ~
qile l~ Darne Boyer demande aujourd'hui les
•
regres.
.
.
Le fieut Boyer De fut pa~ toujours heure.ox .' le 4 Août 1766 il remet fon bilan
fiere e Greffe du Tribunal Confulaire ; & li
la Dame Crefp y figure, comme" elle devait
y figurer, pour les fommes porcées dans
- fon contrat de marÎage; s'il faie également
memion d,es ' fO)11 mes dues par le oeur Boyer
au heur Crefp [on beau-pere. il jullifie également les perces immenfes que le lieur Boyer
�4
effuya fur les armemens , tant en courfe
qu'en marchand·ifes.
.
Un' évenement 'a'Uiffi inattendu exigeoit des
précautions de la part de la femme; elles
font de droit, de néceHité & ·même d'ufage:
Auffi le 21 du 'mêtne mois d'Août, le {feur,
Crefp. ; en qualité de pere & légitime Ad ..
mioifirateur de fa fille, fe pourvoit en répé'"
[üion de ta dot & droits, & fur la preuve
de la dêcadence réfultante' de la rémiffion
du bilan, il obtient Sentence' Je 2 Septèmbre 1766, qui lui adjuge 56000 liv., à
quoi Ce · montoient la dot & la donation' ,
avec intérêts reIs que de droit.
!J'Ail lieu de pourfuivre rigou·reufemënt une
cotlat:ation, le pere de la Dame Boyer fe
contenta d'obtenir une provilion de 2000 1. ,.
& une ' défemparation de' meubles qui lui futent) réparés par rappore du 2i. Octobre fui·
van~. On ne pouflà pas les pourfuices plus
loin ', parce que les créanciers 'du lieur Boyer
ayant reconnu fa bonne foi, c0nfentirenHlU
concordat honlologué le 18 Mars 1767, &
à la fuite duquel le lieur Boyer rentra dans
l'exercice de fes actions. Le lieur Crefp penfa
donc qu'au lieu -d'~crafer le mari de fa fille
par des exécutions qui ne pouvaient que
porter le plus grand préjudice au commerce
renaifl"ant de fan gendre, il valait mieux
(out fufpendre, fe charger lui-même de le
nourrir: lui & fa femme, & laifièr au lieur
Boyer lt!s fruirs, avec le fecours dcfquels il
poqrroit pourvoir aux engagemens contraél:és
•
• •
Vls-a-vlS
.
. "
..
~
-vis-a-vls, de fes èréanciers st. parvenir' à fod
Tétabli'lIèmenc ..
•
.. Mai~ là providen,ce en difpofa autrement i
!~S' affaires du fie~r ~oyer ne prenant pas une
·:ournu.re: .plus fat1lsfalfante , la Dame ' Boyer j
~manèJl?e: ?~r fon pere, reprit les pourfllites
.(le fa répeHtlO~ en 1776, & en conféquence
-e-lle fe peurvoJt le 16 Juillet en déclànitiori
~'hypotlie<'tù'e fur les deux maifons ' acquife-s
var le fieut Conqueret & par le lieur Donner:& - èlle de'111ande 'que les regrès lui foian:
-'!a.xés. ..
,
1 . Elle àvoÎt
raifon de le cl'emancler; parcè
-qtie datfs l'intervalle il avait été procédé à
~n ~appo~t de collocation qui rour-à-Ja-foig
fixolt fes ,· di"oics & julii60ic de la difcuiliol1
:tigoureufe du lieur Boyer.
• Le rapport fixait les dtoies de là Dame
-Boyer, I~. à 60-00 liv. de fa dot; 2l 0 • cl
5;:>000 liv. de fa donation, & l'un &. l'autrè
'lui avaient été adjugés par ia SentenGe dd
répé.tition; 3°. à 28928 liv. d'intérêts; &
à 4012 liv. pour les dépens . 00 déduifoiri
-enfuire îur ces fommes réunies célIe de 79 6 9
livres déja indiquée à la Dame Boyer; &.
taure déduétion faite, elle refioit créanciere
oe 81878 liv., a compté de laquelle les Experts la 'cdlloquerellt fur une maifon qui r,e iloit
à [on mari, ellimée 40000 liv., mais cnargée
d'une peoûon viagere de 1 ZOO liv., eo forrè
qu'elle fut déclarée créaociere perdante de
41878 liv. outre la penGon vlagere de 12.00
livres qu'elle écoit obligée qe payer comme
B
�6
propriétaire de la maifon qui la devait ,. &.
dont elle dèvenoit par conféquent annuelle...
.
IDent crçanciere.
Ce fut pour obtenir le paiement du relilquat qui lui é.toi~t aalgn'é~ ;pàr le rapport pc
collocation, que l~ QAID.e )~,oyer veal.L1t exercer le,s regrès fur les ll1ajfons, 'l;lpqul(es par
le lieur Donoet·,' & par le lieur l Conqueree
pofiérieurement à fon contrat d.e . mari~ge;
elle comprit qu'il écoit fâ<:he.LJx pour 9.es tl~rs
acquéreurs d'être expulfés; auai s'empretra-t..
elle de leur donner tou.s les renfeignemens q~.i
pouvoiejl.[ a-doucir leur litu3tion , ~ de leur
déclarèc toutes les fommes qu'elle a oÎt le~ues à compee de fes droits. Mais ces égard~
remplis, ij falloit enfin · p'o uryoir à l'intérêt
. de la Dame Boyer; & i~ n'y avoit que les
regrès fur les fonds acquis par les, fieurs
Donnee .& Canqueret qui putrene les remplir. ,"
.
L'inllance liée, il n'dl forte de mauvalfes
.
"
- contefiatlOns que ces tlers-acquereurs, ou
leurs hoirs, n'élevatrent. Tantôt la donation
faite à la Dame ' Boyer n'étoit qu'une dona",
tian.. de furvie, done il ne lui étoit pas feulement permis de jouir. Tantôt il falloit re.
trancher de la collocation le fept & demi pour
cent. Tantôt on avoit eu tort de lui adjuger
des intérêts. Et tantôt eofin elfe ne pouvait
être colloquée que par aaiette pour les 50000
livres, puifgu'elle ne pou voit afpirer à en
jouir qu'après le décès de fon mari:
Rien n'écoic plus mal vu ; mOIns encore
~'
,
. parée qùe :J~""~ fe frouvoit. ~hÎ1iné paT {e rap_porC de ' co,JIbc'aciQ,n~ que parce 'rque, té'fOt:': que
,l'a 1S.enr~c.e: ,p'ortartt , adjucdi'ç alièn de ' la ~dot
& droies de la Dame Boyer fubGfieroic,Jj;1 ne
-kfQ~·ç .pas ,p' JE~le ~de ,:c~jtiquetl' d'eS opérations
...c.l/~" é cu.~i olllt l;q u.i\ a u:r.oien t . po lltr; (bafe .' la.. 8 e11CJlc,e el~,:,lnêllle. Auffi l:a. J)all1le Boyer u eliC
-~,'fi>eih-e l'âèté\le ', mot ", que 'Je\ hioirs Conq,œer'et
-à'e-pdler: e de J><1 7.:SelQte.nce " du 2 Septen1bre
crcy::y6 , ~-& 'Jporrhe,ÀJtJ\)Ct.er ,'à ppel "pardev'artt la
' . .l'''J' ~. ,'
... l~j .. \.~~_ \
Cour.
(l
.'
..
.rwI.I n;efi pas lnditn2rellir , de- .connohre ' q <u els
j~nt les:. griefs\. ; rilS1'1Hl €(nhent ·.~deux l ; l'll1l.,
~K)rtaritful" c..ewqule ll\ Senleo~ Gadjug'c anhl de.s
JSllltér ê.rsi -;'1 quii Ille, p'(l)~~oà 'ent êCljé dus d,è s que
:Jla. ,. DJtflC, BX!-ye'r_ ~I(.pit. été Jù)u.r,rie & .entre'..
enue pàt· lf'ûn;' mari; & JPàurtc-; {u'f ce ,que. 's'a..
tg'iIlà..,nt · d~tJne. fimple i ~nation :de · fu.rv1e~ ·il ne
falloit colloquer la Uame Borer que par af..
li'clHe" &20bn +ui L défelÙpar~r:;L ~'
" ~i.
, ; Ce èerni-er , grief:, que l'orr.: r,eptoduit au;';
jourd'hui.:, ~ qui fait la principale q-uéfHso' .dli
-pwcès, ne 'fut p.as ; fuivi' lors ,d~ }'j,n1lailce d'ap<pel des hôirs:· ,çonque'rer; leur ~ Confcil l'e ur
appricdars ,une Confult.acion du 16 Juin 1778-,
qu'il ne ' valait 'rien.., .& qu'il faUoit y reBoncer.
« . L~ Dame Boyer, efi-il dit"m'an's cette Gon-Jl ~Iltation, a pu répéter i!-. dot, ; cela n'ea
)J
pa s douteux . Il ne l'dl ,pas moins que fa.
)) donation eft un~ libù,dité pure & jim-:~) pIe , . & qui a dû. avoir .fan effet :des le
» momerli. qu'elle a 'été foite.' La Dame Boye-r
favoic'trop bien c.e qu'il faifoit 7 po.u! n'a ..
itt
.•
,
,
»'
�8
.» ' voir conferitbpu'à . une donacio. de furvle .. ;.1
» , êt. voilà potr,c.quoi '1la') l~béralicé qu'eUe mp1) porta ne fut pâs ~env"yée après la mort du
'"
'1
» d qnate.ur.
_"
, . » r Ainu -eD ' renonçant au projet ' de propà.
...» fer le mdyen de fraude & pdob qui re'R» droit éette donation ~Il.ulle ; ~ il-faUl re(J.tfrt-l
:J,)
J
noître qu~ ' Jé Lierueflam a bien foù d'à-cco".
der à la Dame Boyer ~ é..ès · deux o'bjets, é'efl» à-dire les QQOO livres-...d6 la :.dot ~ :& ; tes soooo
» livres de la donation. »
D'après cet av.is , ;lesdiOirs Conquêret renon-
,n
~J)
sant
~u.' moyen ,- la Dame Boyèr,i diCoit «( qu'il
',» !) n!écoit plus .queilion de .la contellation fur
.» ·la nature de: ' la donatio,n à- 'eHe faite dans
n , fon CO[]Cflft' .',rle mariage,. & qu'on pou.voit
,) . le ! ~ireJ ,a'î,tec- 'd'auraoç ; plus d'affùrance,
»' qU:'après ' avi~it c'ot,é grief fur ce' point, l'on
» y. ~ enfin ' r~llloncé. Il "
Le procès ne i'ubfIfioit' ,d'onc plus 'que pour
les intérêrs, & nous devons "Gonveoir que les
hoirs ' Conquer~t ' fur'e n:, heur.e.ux, & que la
Cour ne crut pas qu'one maqÈ' >d'inté.rêts ac~
cumurés pendant . dix années pût être un prétexte" de regrès contre des ,'ciers-acquéreurs.
Cette inHancé vuidée , & la donation légitimée vis-à-vis :des hoirs Conquerer, on fut
reprendre les · pourfuites des regrès pardeVant le Lieutenant d'e Marfeille, & les reprendre, tant vis-à-vis des hoirs Donnet qui
n'avoient pas été en qualité lors de l'Arrêt,
que vis-à-vis des hoirs Conquerer. Il ne pouvait pas y avoir de contefiation fur les regres
l
,
9
.
,
gres en e~x.mêmes, puifqu'il etolt
connu ~
&. même Jugé que la Dame Boyer étoie
créanciere perdante.
o
T ~u t I~ p~ocès, fe ~éd uiuc donc à deux poin [S~
F all~lt-~11 de.dulre le trourreau fur la dot
~' la redul:e alofi à ~00c5 li\'. au , moyen
des 2000 lIv. de provlGon qu'avait reçu la
Dam.e ,Boyer? ~o. En adjugeant les ' regrès ;
, f~llolt.d les ad)ug,er auffi pour la p~nlion
~lIagere de 1200 lIv. que fuppocre la mai.
fon. que la Dame Boyer a prife en collocation ?
1 •
Ces deux quefiions ne pouvoient étr-e déJ
cidée.s qu'en faveur de la Dame Boyer. La
pr,ellllere, parce qu'il ne faut pas déduire
un troul1eau qui o'exilloir pas ; Et la fe .!
conde, parce que la- maifon priCe en colla.
c~tion pal' la Da~e Boyer, fe trouvant grevée
dune penGon vlagere de 1200 livres, cette
penlion opérant une diminution fur les fruits
de la collocation, la coafiieue créanciere d;au~ant, & néceffite par conCéqueot les regrès
)ufqu'au coocurrent de la même penlion. Auffi
le Lieutenant le jllgea-t-il de même par
Seneence du la Otlobre 178o. Et c'eff
(ur l'appei de cette Sentence qu'ii s'agit de
prononcer.
Les hoirs Donnet qui n'avolent pas été
partie lors du précédent Arrêt qui confirma
la donation, fur le département du grief des
hoirs Conqueree, one été les premiers à iaterjetter appel, & les hoirs Conqueret y
one adhéré.
c
�ta
,
Les tins & les autres ont donné ieud
griefs fé'parémeDt. Les hoirs Donnet ont pré.
tendu que la Dame Boyer ne devait Cè
collbquer que par affiette pour la donation
de soooo liv. ; qu'il faut placer les revenus
excédant la dot au profit des tiers-acquéreurs
attaqués en regrès, pour être leCd. placemeos 6(
le furplus' de la mairon affefrés au paiement
de la donation le cas échéant '; & delà què
l'on ne devoit par conréquenc pas laxer les
regrès pour les 1200 livres de la penuol1
vlagere.
, EnfIn- ils ont coté un griefparticulier fur
les 200"0 liv. du troulfeau.
Les hoirs Conqueree one fiJivi le mêmè
fyflême J & en même temps ils ont tâché
d'établir que la donation qu'ils avoient re·
éonnù p'ure, Jimple , irrévocable & exigible dès
à préfihl d'après leur propre ConCultation du
16' Juin 1778 , n'était cependant qu'une donât~ion de Curvié, à raifort de
laquelle
la Dame Boyer ne devoit fé colloquer que
par àffietté.
No:us avons don'c trois queflions foncieres
à examiner; l'ulne co'n cernant le trouifeau;
l'autre éo'n ceénant fa donation, & la troi.
fieme concernant les 1200 liv. de la penuon
viagere , que Cupporte la maiCon priCe en
collocation par la Da'me Boyer.
Mais èes deux queftions ne doivent pas
être également traitées vis-à-vis des hoirs
Donnet, & vis,à-vis des hoi rs Conqueree:
Ces derniers font non-recevables à ' renouvel.
,
.
II
l~r ]a cO,nretla~iotr, tant àu fujet de
la
dona!.
Hon, qu au CUJet du trouffèau.
. La raifon ' en e~ que la Seritence qui 'ad':'
Jug:, ces deux objets à. la Dame Boyer J :i
paffe en force de cho[e Jugée vis-à-vis d'eux~
L'on fe rappe!'~e qu'jl~ avoient appellé de U
Se~[~nce) qu Ils aVaient coté grief fur la
validité ' ou fur l'invalidité de lâ dônation .
q,ue d~après leur Con[ulcation du r6 Juiri
177 8 Ils s'eri déparrirent; que la Sentence a
été confirmée vis-à.vis d'eux fur tous les ar':'
Heles qui n'ohe pas été réformes ' & fi eIlé
Pa et
'é '. 1'1 ne leur eCl donc plus ' permis dé
repro'dutre le même litige, 'l'Arrêt forme une
6n de non-recevoit' invinciblè, & une
de
1J'O~ -recevoir 'Ille 1'00 ne furmootera ja.
mals'.
. On pe~t voir ce qu'en dit à cet égard
Me. Co,"hln, tom. 4 , pag; 607 , 668, 61 9 ~
62,6 & 627. (c Rien de plus [acré, dit-il,
h rien de plus inviolable qUe l'autorité de
JI la chofe jugée. Si apres tant de décilions •
,
,
l)
Il fallait encore rentrer dans ,la di[cuffioxt
» des droits des Parties; il n'y auroit ja..:
Jt mais rien de fiable parmi les hommes J &
)l' l'inquiétude d'une partie que rien ne peut
JJ contenir, deviendrait un poids accablant
» pour la fociété.l) Et UI1 peu plus bas, ii.
ajoure que (( fi {orfque l'..<\rrêt confirmatif
» d' une Sentence eft une fois intervenu, on
n po'uvoit encore rep'~odu i re des griefs con- ,
j) cre la même Sentence, ce feroit renverfet
» tous les p rincipe s de l'ordre public, ÔQ
no
,
f
�.
Il
» admèttre des révolutions dans les Juge.
» mens &. dans la fortune des citoyens.»
C'efi ce que développe encore mieux le
même Auteur, tom. 6, pag. 57, S8 , 59 &
60. (( Celui qui a été condamné, dit-il t
).) au paiement d'un billet par un Arrêt, con·
n tradiétoire, pourra-t-il prendre enfuice des
» lettres de refcilion &. en demander l'enté" rinement; &. quand on lui oppofera la fin
n de non-rel.evoir réfultant de l'Arrêt, en
» fera-t-il quitte pour dire, oh ! mais je
» n'avais point pris des lettres; c'efl fine
)) demande toUle neuve. 11 n'y a perfonne qui
» ne fut révoltée contre une pareille propofi» tion ; on lui répondrait avec fuccès, ' que
) ne formiez-vous votre demande avant l'Ar» rêt; aujourd'hui que vous êtes condamné,
) vous ne pouvez plus former de demande
)} qui tende à faire tomber votre condam» nation. La défenfe plus ou moins éten» due n'empêche pas que la caure ne fait ju» gée dé6nitivement; obJlat res judicata, &
» pro verÎtate habetur. ))
Et la 6n de non-recevoir eCl d'autant plus
péremptoire fur l'article concernant la donation, que les hoirs Conqueret avaient corn·
mencé d'en coter le grief contre la Sentence, &. qu'ils s'en font enfuite départis. Or
ce département vaut acquiefcement à ce chef
de la Sentence; &. tant fuivant la Loi Romaine que fuivant l'Ordonn~nce , titre de l'exécutlon des Jugemens, art. 5. C'eft par l'acquiefcemenc
•
q
quiercement qù'un Jugement acquiert l'au;.
· torité de la .chofe jugée.
AinG les deux qualités concernant le trouffeau &. la donation ne fubfiClent que vis-àvis des hoirs Donnet. Mais les hoirs Conqueret font évidemment non-recevables à renouveller fur ce point la conteClation qu'ils
Îavoient agité fur la donation , &. celle
qu'ils auraient pu agiter fur le trouflèau
lors du dernier Arrêr .
, • r Maintenarlt difcutons nos trois articles vis"à-vis les hoirs Donner, &. voyons s'ils feront
plus heureux que les hoirs Conqueret, ou fi
' le "même principe de juClice qui força ces
· ~erniers à renoncer à nos deux premiers articles de contefiation, ne doit pas les faire
c'ondamner.
..
·('
r
Sur le TrOlJJfeall l
Cette queClion de nous agitera pas long.;
temps. Il e!l convenu que le trouflèau fai~
partie de lâ dot de la femme; que le man
<dl. obligé de l'entretenir; que la fem~e fe
' col'loquanc , -fe colloque pour le troufleau,
, q~'elle ne (' t!~n: &. oe gard~ ,que , p~ur
compte du : m,an qUI eCl ~b!Jge, de 1entre ,
' tenir' &. enfin que le man ne 1 a pas entreLtenue' -depuis 1-766 jufqu'eo 1776; ~uifque
les intérêts" de i la dot & de la donation ont
<été r~tranëh6s à la Dame Boyer, & qu,e
" i ~ s - (iers-aequéreurs ont profité de ce rerran ..
,
.
chemeat.
1:
D
�1'4-
1
Maintenant ce rroutreau doit-il être perdu
pour la Dame Boyer? Voilà la quefiion.
II ne peut pas l'être, ainfi que le. Lieut~' nane l'a jugé, 1°. parce que le troufieau faIt
partie de la dot, & que le mar~ ne peut pas
en faire le préjudice, ir21erefl Rezpubbcœ dote~
mulierum falvas fore. 2°. Parce qu'un man
diffipateur ne refpeB:e pas plus le troufièau
de fa femme, qu'il ne refpeae le furplus
de fa dot. Enfin parce que tel ea l'ufage &.
-la regle; on ne trouve point de collocation,
même pour caufe de vergence, où l'on faa:e
article du troufi'eau.
Les hoirs Donnet en conviennent; , mais
ils fupporeut que la femme répétant fa dot
-doit déduire Je montant du trouffeau. Et
l'on a raifon quand le croulfeau . exifie réellement. Mais quand il n'exiae pas; quand la
femme l'a ufé, ou quand le mari ra diffipé,
faut-il que la femme eD fupporte la perte?
L'aveuglement ou la pré\'en.tion n'ont pas
été jufques-là.
1) La femme, dit - Ol), doit en donner
)) écat ' & rôle, & fi eUe ne le donne pas,
)) elle eft cenfée avoir cOllfervé fon troufi'eau
» en nature.
_
La femme doié, dites-vous? Mais c'eft
' un point d'ofage. Si teUe n'ea pas la regie à Marfeille, pourquoi f~ire un crime à
)a Dame Boyer de ce qu'elle ne s'y
p~9
a'lfervle? En fe colloquant, elle ne doit pas,
ce femble, fuivre d'autre regle que c~lle
que l'on a flljvie jufqu'à préfenc à .Marfe.i~,le.
ea
,
,
15
Si .elle· n'a faie q~e tout ce que rout~s les
femmes de Marfe.dIe dans le cas de répéter
leur dot, Ont faH avant elle
1'1 .. 11 d '
f4
• •
,
.. H onc
n~n e.ule~ent IOjufte, mais inique, de voul_o~r lu~ faire perdre cette partie de fa dot.
Et 1 ufage eft fi con{}ant, que les hoirs
Conqueree ~nt été les premiers d'en parler~
Dans, l,a craInte qu'on oe le leur opposât, ils
ont et~ au~evant de l'objeélion; » l'ufage ' ,
. n , ~nt~lls. dit, n'eft pas juftifié. h Ils eo re~
J~0l!nollfolent donc l'exit1ence: Et de fait
qu~ l'on fou,ille ,dans touCes les répétition;
_q.u ont occaGon ne les decadences ou les faillaes des , maris à Marfeille, ,& l'on défie d'y
I t~ouver un feul exemple d'une femme qui
au donné un état & rôle de (on rrouiTeau.
» La femme gardera-t-elle, dic-on, fon
j) ,rrou.iTeau en pur profit au préjudice des
creancIers? It Non. Pourquoi? Parce que fi
,le troulleau fait partie de la donation dé
Jurvie,
, . . Ja femme en Je coofervant ne fait le
prej~dlce de perfo nne . Et s'il n'eri fait pas
partIe; de deux chofes 1'une : ou le trouf;(eau exi{}e encore lors de la faillite, ou il
q'exifte pas; pans le premier cas la femme
:en fa-ie article fur la Gmple requiGtion des
créanc,iers. Et s'il n'exi{}e pas, elIe le dé~
,cl are, & la déclaration une fois faite, ou
,il faut s'y tenit, ou il faut rapp-orter la
preuv e contraire.
.; Si 1'011 avoit demandé cette déclaration à
.la Dame Boyer, elle l'ellt faite, & tout de
même que l'on aurait été dans le cas de s'en
1
/
•
�, 16
rapporter à fa déclaration , on doit donc s"y
rapporter aujourd'hui. Mais il eft intolérable
q ue parce que la Dame Boyer n'a pas fait
une déclaration que 1'00 ne fait jamais à
Marfeille , on ne veuille pas permettre qu'elle
puifiè y fuppléer aujourd'hui, &. qu'en conféquence on la conO:itue en perte de fa dot.
» Nulla uxor fine veJle, le troufièau d'une
» femme fait toujours l'objet le plus précieux
» pour elle; c'eft le dernier article de difil» pation, plus à MarfeiUe Aqu'ailleurs, Be
» par conféquent l;u[age que vous inv6quez
» devroit être plutÔt profcrit à Marfeille
» qu'ailleurs.)i
Trois répoofes. 1°. La regte dit bien,
nulla nupta fine v~(fe ; mais elle ne dit pas;
nulla UXOf, parce qu'il n'eO: rien de plus
ordInaire, que de voir un mari diŒpateur
faire argent du trou{feau de là femme; dans
une ville celle que Marfeille, des hardes de
femme valent du comptant, &. un mari diffi·
pateur ne les épa,rgne pas.
20. Le luxe a fans doute trop pris à Marfeille; mais la diŒpation qui n'en eft que la
conféquence , n'y a pas moins gagné. Si le
luxe embellit un trou{feau, 1\1 diŒpation le
dévore, &. dans le doute fi ce trou{feaù
'exiO:e ou n'exifle pas, que peut-on faire de
plus que d'e xiger la déclaration a{fermentée
de h femme?
Enfin fi l'ufage de ne pas exiger des' bé,c1arations de la part de s femmes répétant
leur dot, peut être fujet à inconvénient, à
la
17
,'"
.1a bonne lieur:e qu'on le réforme. Mais ed
, attetldan~, il ~'eft pas jufte que la ' Dame
l Boyer fOlt .Ia vlél:ime d'un ufage auquel ellë
. a cru deVOir fe cO,nfôiïner;
: . Ell.e d.oit l'être d'autant moins; qu'ii eft au';
Jourd, hUI convenu que là Dame Boyer; C014
' loquee étl 1766; n'a exigé aucun il)terêt 5{
r'
pa~ contequent
,aucune efpece d'entret~en 'juf' qu en ) 776. SI vous vouliez doné fuppofèr
q,u'elIe eût un troutreau; & qule fon troulfeau
fut encore extant en 1766 ' il faudrait donc
a~ai fl!P_pofer qu'eUe a, re~u pour l'entrete~
blr : & ' les intérêts de la donation ont été
etranchés à votre profit;
_,
( A quoi aboutit donc Cette premjere~ con~
tefiation ? A cè mot: » il faut préfumer que
J) la femme avoit fOli trou!Ièau, & pai eeia
. » même qu'elle ' n'e~ a pas donné etat &.
: )) rôle, on doit conclure qu'elie i'avoié ~ &.
,u qu'elle doit par conféqu en-t 'en tenir comp~
JI fe: » Voilà tout le fyflême dès appepans ~
Le f1ôEre confine au cOIl'traire à . di.re
. ») que aous o,e l'~vions pas; .qu'il .n'e,ft pas
. u ' d'ufage à Marfeille , d'ep exiger d'etat ; '
_"il que quel que foit cèt ufage, bon ou rriau~." vais, on ne peut pas nous punir de ce ,que
: " nous l'avdns fu~vi '1 & qu'en o,ffrant de
» nous purger à ferment que les débrïs du
,)) trou{fe au , extant à l'époque de 1766 ont
»)
éfé ufés dans les 10 années , pendant lef~ )j queHeda fem'me n'a' poi nt exigé d'intérêts
." de fa dot .; tout do it êt re dit, parce qu'entin la femme ne p,eut pas perdre de deux cô.;
.
E
�18
' tés: du ctlte de fan troulreau, :& du côté
. des ~~térêts ;de.fa dot. Les intérêts eûtfe~e
' fêfvf à l'entretIen du reCle du troutfeau ; sIl
n'y a point d'intérêts, il n'y a d,one po~nt de
. troùllèau. Auai la Dame Boyer n en avait-elle
point 10rfqu'dle 's'ell coIIoq~ée : or li ,elle
n'en avoit point, il eil donc lmpoffib.le de ne
"pas le lui palrer en compte. En. vtHlà donc
'plus qu'il n'en faut fur ce Jer. pOInt; paffons
' au fecond.
" 'Sur la Donation
La
de
50000
livres.
Dame Boyer a-t-elle rapporté dans tott
'. COntrat de mariage une donation de 50000
'liv., & pouvait-elle la rapporter? C'eil Ci:
qu'il faut examiner.
Nous ~vons d'autant plus d'avantage fur
. cee point de la caufe, que les Confeils des
~hoi,.s Conqueret leur avaient annoncé ce
qu'il fa"lioit en pen fer lors de la derniere
inClance pardevant la Cour, & que ceux
des hoirs Donnet cODviennent, pag. 2.9 de
leur Mémoire, qVe » nos réflexions font très» fpécicufes, qu'elles ont' même une certaine
') juCleflè; )) voyons fi elles n'oor rien de
plus. Mais pour en décider fainement , il eil
d'autant plus néceflàire de rappeller quelle
. en la' claufe du contrat de mariage quant à
ce, qu'après tout ,'eCl cecCe même claufe
qui doit aujourd'hui décider, s'il s'agit d'une
donation pure, fimple & irrévocable, ou
fimplement d'une donation à caufe de mort.
1> Ayant été en outre convenu au traité du
pr~ferit
*9
mariage, & en contempiation tfice;.
» I{JI, que ledit fieur Etienne Boyer ferait ,
» C
' donatlori
'
,
,o~me J'1 fiait,
pure j fimple lX
"i) Irrevocable à la Olle. Crefp fa future époufe
» & au" erlfaos à naîrre du préfent mariage:
)) d,e la flm,me de 50000 liv. , à prendre auffi
" fllr jès IJlens ; pour en jouir par la D1Ie.
)) Crefp, a~cep[a~[e, SA VIE durant en fonds
» & en fiuus, aznfi que de ladite .dol dans les
h cas de droil; & pOUi' en diJpojèr cl fan gré
" pou,r ,c~ufe de morc, par portions egaie;
~, ou Inegales; feulement en faveur des en~l) fans
à naître
du préfeot mariage le tout
'
,
J) neanmOlns
fous Ces conditions; fans ley.
' jj quelles la préfeote donation n'auroit poiqe
il éré faite, que Venant la DlIe. Crefp cl
-» prédédder le fieur Boyer , ou fans qu'il
·n y ait d'enfal1s de leur mariage à elle fur~
' u vivans, Ou que lefdirs eofans vinflènt à
"u mourir fans enfans, avant le fieur Boyer
lt leur pere, la donation fera retour en enrie,
,,, au lieur Boyer donateur.
))
,
La claufe du COntrat de tnariage corinue i
& référée aveC ce que nous appelIons les
:donations de furvie; eCl-il en verité poffible
'qo'il y ait quelque équivoque? Il n'y a,
"l'on ofe dire, aucun terme de la daufe qlli
n'indique quelle eCl la véritable intention des
Parties; & fi ceue illtention réfulte évidem-ment de la comeClation du titre, qu'eil-il beoi
foin de vaguer dans des interprétations? Uné
,feule reflource reCleroit' aux Adverfaires, ce
ferait de dire qu'un contrat de mariage n'eLt
�10
-pas îuCceptible de donation entre-vifs ail pro.fit de l'uo des conjoints; & c'efi: ce qui
n'ell pas propofable.
S'il eft donc vrai que la Dame Boyer a
voulu exiger une donation entre · vifs; s'il
eft vrai que le {ieur Boyer l'ait confentie ;
fi c'eft fur la foi de cette convention que le
mariage ait été confommé , & le lien entre les
deux époux rendu indiifoluble , tout doit donc
être dit, puiCque le mariage Gonfommé il
n'eft plus poHlble ni d'anéantir, ni même
de regretter fur les conditions auxquelles le
mariage a été faie. Or la principale condition du mariage a été une donation de soooo
livres ' à la Dame Boyer; fi le contrat de
mariage le prouve, &. que le paBe foit d'ailleurs licite, tOUS les Auteurs qui Ce foot agités fur la nature des donations en contrat
'de mariage, ne difeotrien pour notre quef..
tion, puifqu'elle efi: toute décidée par le con' trat lui-même. Analyfons donc notre titre.
« Ayant été convenu au traité du pré)) feot, &, en contemplation d'icelui que le
» fieur Boyer feroit, comme il fait, dona» tion. La donation fut" donc un paBe du
contrat; fans la donation le mariage n'auroic
jamais eu lieu. Le mariage fait, il n'e!l:
donc pas p6Œble de critiquer la donation,
cela n'dl pas douteux ..
Quelle eft cette donation; eft-elle {impIement de furvi-e ; eft-elle entre vifs t C'eft encore au titre à nouS l'indiquer. Elle eft pure,
. jimple & irrévocable. Or une donation d·e
furvie
r
.
il
Jul'Vle n'eft qu'une cl
. '
elle il. r b cl
' onatlon 1 condicionnelIe'
ell lU or. onnee a' l" eveoemenC
,
du pré-,
, 'd
'd eces u man' & fi 11
ellt n'ert d
'.
1 e ~ eft conditionnelle
one
ni
pure
d
.
, DI fiImp 1e; d one route'
onanon pure & fimp-Ie h
unt donation d f i '
e, pe~t pas être
e urvle, pUlfqu'tl elt de la
nature , fide la donation de lurVle
r
. dIA
e n etre ' nl.
purefi 01 l Implel
Au {eul mot d e d Ooat1On
. pure
&
'
. llnp e, 11 eft donc impolIible de
'
dIre qu'il s' . d'
pOUVOIr
aga une donacion de furvie '
C en'
., 1
'
.
D eft pas t our. L a d 0l1a[lon
eft faite
a ,3 ,Ile. Creîp acceptante. Or pourquoi la
pr~~all,tJO.n ~e l'accèptarion, fi ce n'elt parce
gu 11 s, agit d u~e donation entre vifs, & arce
que 1 aceeptaC10 n eft de l'·efience de
P 'lI
d Oll Jti o n .
d' l'
,
pareI e
fi' .
,qu3n
acceptatIOn a donc été
tlpuJée, ce '(J'a donc été que pour mieux
ma'?lfefter quelle était la nature de la do~
n~tJ 0 ~, &. qu'il ne s'agi (loi c nullement d'un e
don a cJO~ de furvi: qui n:a pas be{oin d'uoe
aCCepC3tlOn, & qUI de fait n'a' jaf1lais écé formellement acceptée dans aucun de nos connaIS,
'
: , C( Pour
jouit de ladj:te 'donation (a vie
1) . durant en fonds &
en fruits, ainfi que
», de
dot, dans les cas de droit.)) La dona~IOU eft donc tranfportée ' à la Dame Boyer
lP/O, laBo par le contrat' ; la feule modifiCàrlon qui y {oit ajoutée, c'eft que la jouifran ce ~n eft aillmilée à là jouiffance de la
dOI- AlnÎl tous les cas de droit dans le{queJ-s
h . Dame Boyer pourra jouir CIe fa dot i font !
a-uili les ' mêmes cas dans l~f~uels ' ~an:Dame
F
/
�12.
Boyer pourra jouir de la donation; la dot
& la donation foot allimilées quant à ce~ Sans
doute le lieur Boyer, en donDant 500 00 liv.
à fa femme; n'a pas entendu que fa femme
~n jouiroit pendant le mariage, & lors même qu'elle ne jouiroit pas de fa dot. Mais
il a entendu aulIi que l'inllaot de la jouiffance de la dot ferait auni l'inllant de la
jouilfaoce de la donation; la claufe en eŒ
formelle: pour en jouir ainfi que de ladite dot
dans le cas de droit; donc li je dois jouir de
ma dot, je dois auŒ jouir de ma donation;
le paél:e en ell formel dans mon contrat de
mariage. & il n'eCl par conféquent pas poRi ..
ble de m'en priver.
Pourfuivons.
)) Pour en difpofer à (on gré par portions
J)
égales ou inégales feulement en faveur des
1) enfans à naître du préfent !Dar~age, » Oh!
pour le coup l'on vous défie d'appliquer la
c1aufe à une donacion de fUlvie. Perfonne ne
doute parmi nous que les avantages nuptiaux,
& par conféquenc la donation de furvie ne
foot pas difponibles ; qu'ils font acquis aux
enfans par virile; que le furvivaDt qui les
a gagnés, n'en a que l'u[ufruit, & une vi.
rile en propriété relative au nombre des enfans avec lefquels il partage; c'ell: la difpofition du chapitre 3 de la Novelle 127 dont
tous nos livres attellent l'obfervao'ce. Si la
femme fll donc la maÎtre{fe de difpofer; ft
les enJans n'ont aucune virile à prétendre fur
cette donation ~ c;e n'ell qu'une donation en-
.r.
&
:1
,
"
tre vas,
non Une donatiori de furvIe.
Il eft vrai que cette donation enrre vifs
cll grevée d'une fubltitution en faveur des
eofa~s q,ui naîtront du mariage. Mais cette
fubt1autlOn ne change pas la riature de
don~don; La Dame Boyer étarit la maî.
trelle de dodner tout l'un, & den à l'au~
tre, la donation ne peut plus être donatiod
de furvie, mais limple/llent donacion entre
vifs.
la
a
~t ~ela" e~
•
li,t-rai, que fi la Dame Bayet
aVOIt Itlt1Hue 1 un de fes eofans, & réduit
tous les autres à la légitime, les légitimai.
tes n'eullènt pas manqué de demander ieut
1égitime fui cetce fot1'lme de 50000 liv.
fi la donation de 50000 ]iv. avoir éré fou~
tllife a la légitime maternelle, il ell dont
nécel1àirement vrai que la donation étoit iri
bO'1is de la mere ,& qu'elle i'avoit i Don à
ti rre de" ddo a tion de furv ie di vi(iblè entre.
les enfans & le furviva'ot i m'ais
citre de
donacion entre vifs,
On peut d'autant dJaïns en doUter, quc:{
l'Od trouve dans ie contrat de mariage lli
fi ipulation fOfrnelle (1 du retour én entier
n en faveur du fieur Boyer, foit que fa femme
» meure fans enfans, ou que les enfans lui
II furvivaDt viennent à pré~écéder le lieur
J")
Boyer,)) Or d'après cette double ftipulation, toute conreftation devrait ceffer: Que
lignifie en effet Je droit de retour? Que les
biens reviendront. Mais s'ils revienneut, ils
ont donc été donnés; le donateur avait done
Or
a
,
�i4
été exproprié, Be le donataire invefii. Or fi
l'un avait été dépouillé & l'autre invefii, il
ne peut donc être 'quellioo que d'une donation entre vifs. Jamais l'on n'a vu ni l'on ne
verra de donnation de furvie fufçeptible de
retour, puiCque de fa nature elle ell conditionnelle, &. qu'elle ne peut Ce vérifier que
par le prédécès du donant . Mais .par la raifon concniire, dès que la donation peut ètre
au cas du retour, elle a donc opéré l'expropriation du donnant; elle ell donc pure &
{impie, ainfi qu'elle efl q ualifiée par le contrat; & fi elle eft pure &. fimple, ce ne peut
donc pas être lIoe donation de furvÎe.
Et elle l'eft tellement peu, même dans l'intention des parties, que la claufe du retour
fiipulée, )) même pour le cas où les ènfans
» viendroient à prédécéder, le Sr. Boyer ne
permet pas d'en douter. II efl inutile de voulo5r én pervertir l'explication, elle ell toute .
naturelle.
Le contrat fuppofe que ]a Dame Boyer J
Î"nveflie ipfo faBo , ' trao{inettra la donation
à fes enfans, comme étant dans fon patrimoine; . que les enfans l'ayant reçue dans ]a
fllcceffion de leur mere, en jouiront corn me
d'un bi en patrimonial à leur mere dans tous
les cas de droit. Mais que s'ils viennent à
prédécéq er leur pere fa ns enfans , au lieu de
pouvoir diipofer ' eux-mêmes . de la donation
de soooo liv. que la mere leur· avoit tranfmis, le fleur Boyer reprendra cette fomme
dans leur fucceffioo en force du droie de r'C~
tour.
,
25
tour. ' Voilà j'explication n~tu~eJIé de I~
cl aufe; qu'on la concilie) fi l'on peut, avéé:
une ~on a ri o n de furvie, & que l'on tente
de perfuader ~ fi l'on ofe , qu'une donation
de f~rvje, qui ne peut être acquife que par
le decès du donnant, & qui par cela lilême
eft con ditionnelle; petit être affimilée avec
~ne ~onation pure & fimple; & qu'elle peut
pmal.s êcre a,u "cas du ,recour; la feu,le ftipupulatlOn du drOIt de retour he permet pas dé
fe méprendre, fur là na ture de la donation
-q \1 i rib us di viCe!
,
11 n'cfl d,one pàs un fe;ll mot relatif
"notre do.J.làci 60 qui ne [erve à en Bévelôpper
' Ia nat Li re ; à indiquer que c'el1 une véiitablè
do nat ion eocre vifs ~ à exclure touee jdée de
dOI,Jar io n de furvie , &. qui n'autoriCe par con':..'
féquent la D ame Boyer cl réclamer le mo'nt a nt de fa donation, pour eri jociir en fondS
& , èn fruits ; ain/i que d e- fa dOL, da ris les cas
de droÙ.
~.
.
,
Maintenant pareille donation efl· elle lic~te ;
·ou' la femn'ie peut-élIe en récla'mer? QUl
=pourro'it en douter? D'abord il no'Us· fuffiroic
'de dire que les Appella"ns' n'ofent pas l'attà.
·<tuer-, & qué ta'nt que le ~o iJtrat de mariage
qui 1'a' po'rte fubfiltéra • l'es ' ;Tribunaux nè
p ourro'oc qu'e n allùrer l'ex'éculion.
. D e prus, voyez Furgol e que vous avei
éi cé , 'auq del nou s revien'drons àans un infta nt, ·q uelt. 49, h .' 2,; ne vous dir·il pa~
» qu"il faut 'd'abord re'co,nH()ître conime uné
ri maxime cdfljiallle ,; filivie de tous les Tri~'
a
,
G
•
�/
"
»
»
»
»
1>
,
26
Quoaux du Royaume, que les donàtions
faites dans les contrats de mariage fone
irrévocables; que. le contrar de mariage ea
G. favorable, comme étanr le plus folemoel & le plus utile de rous ceux qui font
pratiqués dans la fociété civile ~ qu'il ea
fiif?eptible de toute forte de claufis & de
conventions, lefquelles valent irrévocablement, pourvu qu'elles né foient pas Con'tre l'ÎlOnnêcecé publique & les difpolition~
prohibitives des Loix & des Coutumes.
Si ce n'en ell pas affez; voyez la Loi Ro..;
maioe & les Orùonnances . La Loi Romaine,
Ftlrgo(~ vous l'indique, c'eft le ~itre de doIl'bus : fi quis mulierem defponfaveTU ,. QUIDQUID: ei per rabu/arum ,fou charrarum . inflrumenta corifèripftrit, perpetualiter ilJconvuljùm
permaneac ~ & prenez garde à ce mot, quidquitl. Je ne veux pas vous époufer, li vous ne
:fI1e .d'o nnez pas rout votre bi en,. j'ellime autant ~a perfonne que rour votre bien, optez.
. Telle ell encor~ la ~ifpolirion des articIes J'7 & 39 de l'Ordonnance de 17 p. ]...'jlf~icle 17- veut que les donations en c.ontra~
de m!1 ria ge puiffe,nt comprend re les blells a
venir, qui ne font jalna is corn pris d?ns la
donation univerfelle; tant il en vrai que la
loi regarde les donations cn contrat de ma o
tiag,e , comme plus favora~tes ·g ue to ut e autre . ~ n Puifqu'eIle fuppofe qu'el)es , pou,r ront
compFçndre les biens à venir, qui ne font
jamais compris dans les autres donations.
. L'article 39 le fuppofe ég{ltement, en dé)
»
»
n
'"
-
.
,
27
,
cidant que ces fortes de donations ne feront
poi nt révoquées par la furvenance d'enfans~
Et de fair, elles ne doivent point l'être, COlUme dégén érant plutôt en patte, don t Je
donn anc a reçu la compenfarion.
Au/Ii rien de plus ordinaire dans l'ufaae
ou dans nos livres. La femme met à fa p:rfOll ne ,le prix qu'il lui Plaît ~ & l'engagement
Une fOlS confentÎ folis les aufpices du Sacre.
ment, ne peut être qu'irrévo cable & infufceptible de! cri tique. Que te foir difproportion
d'âge, d'écat ou de fortune; ou prix de ces agré. mem que le fexe prire tant, rien de plus égal:
. T4liS remuneratio, difen t nos Auteurs, foaa
imcr conjuges valet, ve/uti Ji jl/vents accipiat in
llxorern rnu liercrn fenem, nobi/is ignobilem, dic
Guypape queft, ~6~. En pareil cas, donatio
.compenfatur,. comme le dit Fromental in vo:
~-donation, cum {plendore conjugii. Ainu, la dolJarion . étant form elle & fe trouvant d'ailleurs licite,. approuvée par la Loi & par
l'ufage, il n'ell pas poŒbJe ni de pouvoir
Ja. conteller, ni de priver la Dame Boyer
du bén'éfice qu'elle s'en ell promife, Voyons
JI!S ,objeé.1:ions.
Le fyllême conuae à dire qu'il ne s'agit que
,d',une donation de (urvie. Mais dans l'impuifJ'a nce:,de 'pouvoir le jullifier fur le contrat,
fT jl : ne faut pas. d'Ît-on, en décider fUl'
» quelques mors pincés dans le titre qui
.) . pelllv.ent donner à entendre que la' dona» cioQ éraie a61uelle & pl éoiere.
Vous aviez befoin de cette précaution, &;
J
�2B
.
de ne vouloir pas qu'on jugeât le titre fur
~e titre lui-même. Mais {ur quoi f 9 ut-il en
Juger, fi ce n'eft fur le fens qu'il préfente
naturellement. Quorfum enim verba , nifi ut
memem dec/arene, dit Cujas. Ne faut-il pas
les prendre fecundùrn nawralem incelleaum?
D'autre part la loi ne vous dit-elle pas que
cùm in I/erbis nulla ambiguùas eft; non debet
admitti valun latis quœJlio ; que l'crbis dcc/aralUr animus, & que ralis prœjumitur qllalem
prolata lIC! ba fignificant? A, la bonne heure
fi l'on pinçait un mot pour donner au citre
une interprétation contraire à fa {ubllance.
Mais quand toutes les paroles du titre
'
.
quand l'enfemble des difpoGtions ne fe réfere , & ne peue fe référer qu'à_ une donation entre vifs, c'eft fe moquer des gens
que de croire que l'on parviendra à meUre le
titre de côté, en nous difaut, vous pincez
les mors. Eft-ce pincer la di{p06tion que de
dire que la donation ea pure & jimple ; que
la femme en a été inveflie par l'acceptation;
qu'elle lui eft tellement propre, qu'elle peut
en difpofer; qu'il s'agit tellement peu d'une
donation de' furvie , que la donation n'elt
pas dil/ifible entre les enfans & le furvival1t
par virile; & enfin que par cela feul qu'elle
eft foumiCe au droit de reLOur , le donnant a
été par cooféquent dépouillé, & le donataire iovefti. Ce ne font pas·là des mots, ni
des mots pincés; mais des chofes. C'etl i'1
lIifceribus caufœ, que nous cherchons la na.ture de la donation; & c'eft in J1ifccribus
caufœ,
,
,.
i9
[auJe, tant dans les paroies d~ la donatloci i
tânt dans les claufes, tant dans les coofé ..
quences ou dans les effets que dans la dif.
paGliao elie-même, que nous trouvons à fixer
hl nàfLlre de Il! donation:
Maintenant cro.i ra.t-on que l'intention des
Parties n'ait pas été de faire une donation
Cntre vifs? Et fur ql10i en juger?
» Sur ce que l'aéle n'énonce pas le paie» 'ment de la donation. 1)
.' Vous vous trompez j voyez la claufe ; La
Dame Boyer doit jouir de la donation ainfi
qr!e de la ' ddl dans les cas de droit; & il ne
répugne pas à la donation d'une fomme en
argent qu'elle rie (oit qu'à prendre [ur la fucce l1i o n du donna nt.
1) L'i nt ention
des Parties était que le
)) Geur Boyer aurait l'ufufruit pendant fa
,:) vie. J)
Vous vous trompez encdre, voyez tou"
jours le contrat. L'iocent}on. d~ Ge ur Boyer
était que fl femme ne, Jo~tr~1t de la donation, que quahd elle, Jou~rolt de fa, dot;
dans les cas où le dtolt lUI permettrolt de
j oui r de fa dot. Qu'dIe ne jou,ït ,d?~c pas
de la donation quand elle. ne Jo~dIOlt pa~
rien de plus Julle ; c eft la 101
fa dot
de
,
d '
, n contrat, Mais qu'elle ne
olve pa,s
d U
\
cl '
, . de la donation quand le cas de rOlt
Jo uI r
ft ' '
de jouir de la dot s'dt vér~fiée, c'e eVIdemment parler contre la ~Ol du cont~at . .
lendemain du manage le man
fur
« Le
•
. pz'ed auriez-vous pu demander le palemenG
))
,
H
�,
30
» dé la donation ? Non; ergo ,i'intention
» étaie donc que la fomme ne ferait pas
) payée pendant le mariage. »
Vous vous trompez encore, & vous VallS
tromperez toujours tant que vous vous écar.
t#rez du tit,'è.
D'abord le mari jiJr pied n'ell pas une hy.:.
pothefe que no~s devions preQdre pour regle, pqifque le mari n'ell pas fur pied.
De plus; le mari fur ,pied, je n'aurois pas
pu réclamer la donation, parce que je n'au_
rais pas pu réciamer la dot, & que la dot
8( la donation font allimilées dans le con ..
traC. A~oJi , d.ans les cas de dr.o Ït; devant jouir
de la oIonatjoo ainG que de la dot, vous oe
pouvei pas mieux vous oppofer à la répétition de la donation, qu'à la répétition de la
dot.
Enfin voyez l'intention des parties que vous
v-oulez confulcer. Si le mari avoit fait une
fimple recoonoifiànce de dot, la femme la ré.
péterait certainement avec la dor. Aujour_
d'hui la donation opere le même effet, avec
ceOte différence que la reconnoiff'ance de dot
eut acquis irrévocablement à la femme, fans
efpoir de retour; au lieu que la donation en
laiife fubfiCler l'efpoir.
II ne faut donc pas dire que la femme
ne pouvant pas réclamer I.-! mari fur pied ',
dIe oe peut pas réclamer pendant le ma.
riage ; eocore une fois, elle peut réclamer
dans les cas de droit: & le cas de la faillite
ou de ladéCQofiture opérant, de droit", la
,
'.
l
.
t
,
reClit~t~o.n. de Ta dot, opere par conféquén é
la repeclI10n de la donation , qui De peut
être répêtée qu'avec la dot.
1)
Le cas de vergence eCl un Càs d'alf..,.:
) ra nce & rion de paie men r: »
Mauvaife exoine. La collocation par af.
furanee peut fans doute devenir définitive;
auHi dt·elle un . vrai paiement. Ce n'ell, fi
\'ous voulez, qU'lin paiement provifoire : mais
Ç;'e{! t0-ujours un paienienr; & tout de même
que VOYS me payez la doc i il faut par conféqyent q ue vous me payiez la dotiation . 1
)) Le fieur Boyet n'entendit donner qu'ék
)) tirre de furvie; & quelles que [oient les
» àoo a ijd!~s eo comrat de mariage ~ elles n'ont
» jamais d'autre eff~ t. Voyd Furgole en [a
" que fti otl 49, nO. 24 & [uiv. li.
Eh bi en voyon s-le, & examinons fi ni
'
. .
Furgole ; ni perfonne autre auront pu dIre
qu'une donation en Contrat de mariage De
peut être qu'une donation de {urvie, ou que
tOLIte autre donation eotre vifs eCl prohibée:
D'abord il faudroit uoe Loi qui les prohibât , & .nous n'en connoi{foos pas.
.
Des - l o r~ que peut traiter Futgole ; & qué
t ra ite- t-il en effet? Comment il faut inter':
r ré te r Ilne d o oati~n, en. contrat d: mariag:~
Mais dès -que la dl[poGtlOn eil claIre & éVIdente, il n'eà pas queaïoô; & il ne peut
p J S être queilio'n d'interprétation: ou il faut
dire que toute donation en contrat de maliage eil prohibée du futur à la future, oû
que le contrat de mariage ne renferme pas
�p.
pareille donation. SuppoCer la prohibiriàn ' ;
ce n'eo feroit pas a{fez ; il faudroit indiquer
la Loi qui en eA: le fondement; & fi cette
Loi n'exifle pas, il n'y a plus que le texte
'
du contrat qui puifiè décider.
Aufii Furgole réduit-il [on examen au
point de favoir quels font les cas où une
donation pellt être regard ée comme une do ..
nation de furvie ·, & G cette ,.condition doit
êrre fous-entendue tacÏto juris intelleau. Et
s'il [e rend à cet avis ~ n. 28, c'eft parce
qu'il raifonne fur une difpoGtion dont rien
n'indique qu' elle fait plutôt entre vifs que de
furvie.
Et cela eft fi vrai, qutaprès la di[cuffion
que l'on nous a indiqué depuis le nombre
23 ju[qu'au. nombre B qui ea pour le 1er.
cas, Furgole en vient au fecond. Quel eA:
le fecond cas ? Lorfq ue la donation eA:
conçue entre vifs, & qu'elle a trait de rems
à la more. Mais ce n'eA: pas encore notre
cas, parce que notre donation, quoique en·
Cre vifs, n'a pas trait de tems à la mort, &
qu'elle eA: au contraire acquife en propriété
iflicà à l'ioA:ant . même du contr at, & en
fruits dans les cas de droit, où la femme
pourra répéter [a dot, pour jouir de la donation ainG que de fa dot.
Or ,en pareil cas Furgole dit. il que
la donation fait une donation de furvie ?
Non fans doute. Et il ne pourra pas le dire
fans heurter tOllS les principes, & fans fuppofer que les futurs ne peuv ent pas fe faire telle
donation
H
donat~on qu'ils jugent à propoS, ainG
qu'il
l'~ dép établi. Auffi le même Furgole ,ajou-
t.JI, que lorfque la donation eft faite entre
vifs , .o,utre l'au gment, ou qu'elle e(l faite pour
en ddpofer tant en la vie qu'à la mort, ou
aux pl 8iG rs & volontés du donataire cette
,
'
clrcon(lance fuffie pour la fairé regarder
comme pure & abfolue ..... Car la faculté de difpofer aux plaiGrs & volontés da
donataire, o ~ en la vie & à la mort, [uppore que la donation dl: pure & abfolue, &
que la propri été des chores données eft ac'"
quife au donataire au moment de la dona·
tian.
Si le Contrat nous prouve donc que la
donation eft pure & abrolue, que la pro ..
priété de la chofe donnée dl: acquife aU
donataire au moment de la donation, toute
difficulté doit donc cefièr fuivaot Furgole
lui-même.
~ Or la donation dl: tellement pute & ab ...
folue; que noUS le trouvons, dans le Con·
trat . ; voyez · comment elle y eft qualifiée ;
Pure ,Jimplc: & irrévocable. Or pareille donation ne peut pas 2tre UDe donation de furvie, qui ne peut être que condi tionnelle.
De plu s , la propriété de la chofe donnée
eO: tellement acqllife à la Dame Boyer ipfo
faa o, qu'elle accepte la donatio~; qu'elle
a la faculté d'en difpofer, quolque entre
Ces enfans, & par portions égales ou inéga.
les, & qu'enfin la même donation eft au
cas de faire retour, foie que la Dame Boyer
l
�34ptédécede iàns enfans, ou que fes enfans
prédécedent le Sr. Boyer.
La difficulté d'expliquer la donation &
tl'en' indiquer quel cft le véritable caraétere
fur la donariod elle .. même, embarraife cel.
letuent les Appellans, qu'ils veulent que ces
tlau[es diftinétives de la libéralité entre vifs
[oient louches & équivoques, & que le retour, qui de l'eft p.as, ne di[~ pas . davange.
Mais quarld il faut Juger un titre, 11 ne faut
pàs commencer de le mettre de cô té. Cea:
le tirre ~t1i indique quelles ont été les vé.
ritables convencions des Panies, & c'eft par
con[équent dans le citre qu'il faut les cher.
cher.
Et vOlllez - vdus Cavoir ia raifon de certe
Bonation qui vous offùfque cane? Elle cft
palpable. La Dame Boyer époufant le lieur
Boyer Fortune, vouloit en quelque façon fixer
la forrune, & ne pas expo[er elle & [es enfans aux variacioos du "commerce, & à mULlrir de faim, après avoir fondé fon ménage
fous les au[pices d'une fortune brillante. E~\
voilà pourquoi elle exige la donation qui
nous divife. Ee le lieur Boyer ne pou voie s'y
refufer, puifque la Dame Boyer n'avoie pas
l'indifcréüoo d'exiger une reconnoiifance, &
he [e proporoit que le plus grand bien des
eofans.
Maintenant nouS dire que ce ne ferone
pas les biens q.ui feront retour, mais le droie
de demander la donation, ce n'eft pas mê.
me s'afièrvit -au Cens des termes. Un droit
~5
ceBè, il s'éteint; & une donation fait ret~uf;
Aulfi tel eU le terme du Contrat: la donation
fora retour en entier. Or on vOus défie d'ex~
pliquer comment il fera poŒble que la do~
n a ~ion failè reto.~r;' li elle n'a été déja ac~
qUlfe au donataire, & mieux .encore comment une donatiori ne fera qu'une donation
de furvit!, quand il fera cependant libre au
,9onataire d'en difpofer eh favèur de [es enfans par portions égales du inégales.
Relativement à cette derniere claufe .> ou il
fallt que la loi l'emporte [ur le contrat, o~_
que le contrat l'emporte fut la loi ; car
la loi & le contrat ne peuvent êÜe d'ac.
c o rd fil f èe pOlne: Si vous voulez qu'il ne
foie q uen ion que d'une donation de [urvie ;
la femlll t! oe pourra pas en difpofer entre [es
ènfans p ar panions égales ou inégales; elle
n'en aura la faculré qu'autant que l<i dona.
tion {era - encre vifs. Sur quoi faut-il donc
juger de la nature de la donation? Sur les
d iffé'rentes claufes qui, l'expliquane, la déveIoppeàe & fervent à la èataétérifer. Or dès:
~ùe la donation ne peur être enùe vifs qu'au",:
tant qu'elle faie teto'ur, & qu'autant que le,
èbnjoinr peut en d'ifpofer en faveur de [es
enfans par porrion"s égales où inégales, notre,
dooatioll qui reunie ces deux .caraéteres '. ne(
}:leut donc être qu'uoe donatIOn entre vIfs;
c ela dl plus clair q'ue le jour.'
.
•
E ll un mot, pour que la donatIOn put
être u lle donation de furvie, il faudroit que,
toutes les claufes qui en fOllt partie puflent'
�36
5'y adopter; & elles ne s'y adoptent pas.
Si au contraire elles s'adoptent à une donation entre vifs, la donation ne peut être
qu'entre vifs comme pure, fimple; auffi tel ell
le terme employé dans le Contrat.
Que l'on en juge donc par les termes ou
par les claufes, tout doute fur la nature
de la donation doit difparoître.
» Le mari çommenceroit - il de payer
» 50000 liv. pour les reprendre en cas de
» retour?
Voilà quelque chaCe de bien extraordinaire.
C'eft cependant ce qui fe vérifie dans toutes
les donations qui font retour.
» On a entendu que la donation feroit
n régie par "les regles propres aux avanta,
» ges matrtmOOlJUX.
Et qui l'a entendll? Vous; mais vous
ne faites que tourner dans le cercle.
» La donation Ceroit en fraude & au pré» judice des créanciers.
D'abord, où l'ave'L-vous trouvé? N'eftil pas permis à un mari de faire une do~
nation à fa future, ou connoiflàns - nous
quelque loi qui le prohibe?
De plus, vous n'êtes pas cré ancier, vous
avez aquis au préjudice du Contrat de mariage, & les hoirs Canquerer font d'autant
moins excuCables , que le M auteur av oit
été témoin in!trumentaire du Contrat.
» Donner & retenir ne vaut, & le Sr.
» Boyer retint en donnant.
'
La
37
'
L a preuve que cela n'dl point exaét, c'eO:
que vous h'ofez pas attaquer la donatiori ~
Et vous f~ices bien, car il n'ell pas diffici~e de vOIr que le fieur Boyer tran(porte
zpfo Jaao, & que comme il auroit pu fe
réferver l'ufufrUit pendant fa vie fans que
la nature de la donation en fût altérée , il
a pu également oe fe le réferver qu'autant
qu'il jouiroit de la dot. Et l'on nti fa che pas
,que cette flipulacion aye rien de prohibé.
)} Il n'efl pas vrai q ue le contrat affimile
)} la donation à la d-or.
Mais il ne faut qtle lire le contrat: pour
en jouir par la Dile. Crefp acceptante SA
VIE DURANT eh fonds & en fruits, ainji
QUE <DE LA DOT, DANS LES CAS
DE DROIT. Le mot ft "ie durant n'ell:
pas équivoque; cet autre ainfi que de la dot
ne l'eH pas davantage; en cherchant donc
quelque différence d'un cas à l'autre; c'eR:
évidemment parler contre le titre.
Il Il n'y avoit aucun terme indiqué pour
n le paiement.
VOllS le répéteriei cent fois que vous ne
le pèrfuaderiez pas. Le contrat porte dans
les cas de droit: & ce feul mot répond à
l'ùbj eaioo.
Dès-lors à quel propoS ne pas expédier
à la femme la donation qui lui eft due?
On ne le peut fans anéantir le contrat: &
il ne' peut pas l'être.
1
<
�Sur les
•
~ous
1 2.00
lillres~
n'avons pas haucoup à dir~ fur cè
point. Dès que la don~rion n'eil pa~ Une donarion de furvie j malS Ulle dOnatIon entre
vifs; il n'ell pas poŒble que la Dame Boyer
n'eo jouil1è pas; & G elle doit eo jouir, la.
maifotl fur laquelle elle a été colloquée ne
lui produifalit le prix ordinaire., qu'à la.
cha~ge d'41cquitter une penGon vlagere de
1200 Iiv;, il n'el1: pas polIible que cette
charge pri~~ anr la femme du bénéfice de [a
collocation elle n'ait pas à raifon de ce l a
'
• pour 1,es
voie des regrès
comme elle l'auroI[
fonds dont elle ferait eo perre. Les frtJlts
Jçloot elle ef1 privée opérant une diminution
,de jouil1ànce de fes fond~, ~'elt\ une perte
,qu'elle ne doit pas fouffnr d apres. fan contrat de mariage; Et G elle ne dOI[ pas la
fouffrir, les regrès doivent l'eo venger.
Objeébon. » La maifon ne fut eRimée
») 40000 liv. , que parce qu'on eut egard à
'.) la penGon viagere des 12.00 liv. »
f,.e rapport de collocation à la main, il
eit aifé ,de fe convaincre qu'il n'en el1: rielJ,
puifque les Experts lui réferve~c d'agir pour
ce qui JU,i fera dû pour le paIement de ladite pen fion.
» Il ef1 de maxime que les intérêts de la
» dor excédaI][ l'entretien appartiennent ,aux
» créanciers du mari, en cas de collocation
)J pour
vergence.»
39
1
Deux réponfes. 1°. La Dame Boyer jouir.
fa,nt de fa dot & de fa donation n'auroit
que 2°9 0 liv. de',rènte, fur quoi il faudroit
prendre
. les r,ép.a,ratio,ns de la maifoll , fan
entretleQ, celui de fOIl mari & de fa famille.
Or ce n'en eit pas aH'ez dans Une ville telle
-que Mar{eille.
De p'llUS, la 'D ame Boyer a pourvu à cet
.événement dalls fon ContraC de mariage.
.Ell e n'a voulu fe ma~ier au Geur Boyer qu'au~
'tant q.u'elle s'aH'uroit Un bien-être pour elle
& ) pour fes enfans . Ce bi en-être, elle . l'à
.fixé au produit de fa .dot & de fa donation;
,& il n'ea pas pofiîble ql!J'elle foit trompée
.dans (es efpérances; puifque' c'ea fous la
f o,i de cerengagement qu'elle en ~ contratt.é
:Un bi el1J plus . ré el.
De plus encore, ce n'ea pas une collocation par forme d'afiùrance; c'ea une collo.
cation pour Une donation qui n'appartient
'point au mari, & fur laquelle le Contrat
a difpofé. Le contrat porte, POUR EN
JOUIR SA VIE durant. La Dame Boyer doit
donc en jouir; fan mari n'a donc rien à
y ,v oir, & par conféquent ni les créanciers
de fon mari.
Maintenant il feroie inutile de s'agiter fur
Je poinc de droit. Nous pourrions cependant
obferver que l'excédant des fruirs d'une collo cation pour caufe de vergence d'oit appartenir à la femme, ainfi que l'é tablit Duper-ier. 1) Comme il a été ju gé plufieu rs fois,
,» dic-il, que telle eil la bonne opiuion, par
�,
4°
) une rairon bien {impIe, parce que la femmè
» n'a pas confié fa dot au mari pour pay r
)l
fes créanciers, fèd ut Lautius viveret; q ue
Decormis , tom. 2, col. 1284, ne dic r1 ~ n
de contraire ; qu'il ne parle que du dr oit
d'offrir, dont il n'dl pas queftion; que Mf.
de Be'l.ieux, live 7, ch. 3, 9· z, ne dit é galement rien de contraire; que l'Arrêt f ut
rendu contre les enfans répétant la dot de
-leur mere, &. qu'ils avaient évi demment tort,
parce que le pere a l'ufufruit des biens des
enfans jure proprio, &. en remplacem ent de
la propriété que l'ancien droit lui attrib uait ;
enfin que l'Arrêt rapporté dans le qu atr;eme tome de Boniface, page 363; ne dit pas
davantage, puifque la femme ne cherchait
à exercer les regrès que pour des intér êts
accumulés: & il a été jugé entre les Part ies
que de pareils intérêts ne font pas maciere
de regrè s.
Sur le tout, il n'eft pas aujourd'hui queftian de dot, mais il eft queftion de donation
dont la femme doit jouir pendant fa vie.
En réclamant donc la joui(rance de cette
donation, nous ne réclamons que l'exécution
d'un patte formel de notre contrat de mariage. Or il n'eft pas pofIible que quand le
contrat porte que la Dame Boyer jouira de
la, donation pendant fa vie, un Jugement
quelconque puifi'e la priver de cette jouiffance.
Tel eft donc ce procès, qui, comme l'on
voit, fut d'abord condamné par les propres
Con[eils
.
Confeiis des hoirs 41
~
1
ne produit nu d Conquerer, & q
1'0' rt
,
"".1 e
ans l' fi'
ue
de vexer la D B ' a , urance de Jaffer &
.
ame oyer M .
.
vengeahèes eil arnve
' ; , &~
aIs. le .rems
. , . des.
moment où la D
'
nous ·touchons .iti
aIDe Boy
' ;
tes les chicanes , ;
er, vengee dé touparviendra enfi
q~ o~ Jui a, fait èfiùver
lable, facré & n a ~oulr du bénéfice in~io~
rlilloluble quë l' au l refp~étable Ol; auffi in:
du moins nousengageme,nc qui y donna lieu;
tendre de la J fi~~ons toute raifon de l'at.
Cour.
u Ice & des luitiietes de t~
j
CONCLUD comme al 'lé . ' é "d '
'
fenfes avec plus
d cl 1 pr ce entes de"
' .
gran s épens
pertJneinment.
.
,' & autrement'
PAstALIS' , Avocat:
CRAS, Procureur;
,
�MÉMOIRE
EN RÉPONSE
j
POUR les hoirs du fleur Donet, vivant Né- 'gociatlt .de la ville de Marfeille, appellant
de Sentence rendue par le Lieutenant de
Sénéchal au Siege de lad. Ville, le la Oc- ,
tobre 17 80 , demandeurs en requête , incidente du 8 Avril 178 z., & en autre requête
incidente du ..... Mai 1783, tendallte en
appel incident, ~ en tant que de befoin
envers la Sentence du 2 Septembre 177 6 ,
portant adjudication des 50000 liv. de la
donation faite à la Dame Magdeleine Creps,
époufe du lieur Boyer, dans fon contrat de
'mariage du 24 Mai 1761:
CONTRE
La Dame Magdeleine Crèps, époufe répétée en
dot du fieur Efiienne Boyer de la m~me Ville,
intim~e ~& défendêreffi.
L
A Dame Boyer prétend que nous fom.
mes nojl recevables, attendu que la S~n
tence dQ 2 · Septembre 1776, portant adJu-
�2
dicatioll de fa dot & droits, n'eil: pas attaquée. La nottvelle qualité qu'elle nous force
d'introduire pour furmonter & faire ceff~r
cet obirade, ne nous arrêtera pas long
temps.
Cette Sentence a été rendue fans appeller & fans entendre le fieur Donet, qui
n'étoit pas meme créancier à cette époque, &
dont les hoirs ne commencent à prendre intérêt aux affaires du fieur Boyer, dit Fomme ~
qu'à raifon des regrès que la Dame Crep$
Boyer vOlldroit leur faire fouffrir.
Dès ce mo~ent, & à raifon de tet intér-êt , naît le df0it qu'ont les hoirs du fie ur
Donet d'infpetler la collocation de la Dame
Creps 1}oyér, & de ' 'q1:lereller les adjudicatious injuftés qu'elle peut avoir furprifes' aux
'!Tribunâux~< f1 eft ind~fférent qHe ces adjudic'ations ayentété confenties par les autres
eréanciers, & plus e1!.core q~'ils les aient
laiffées iller fans s'en plaindre. Les hoirs Donet
agiirent d'après leurs propres principes; la
conduite des autres créanciers n'a rien' qui
doive leur fervir de r~gle. Il fuŒt que leur
droit foit entier: or, il- l'eft, certainement,
quant à ce qui concerne les fommes que la
Dame Boyer s'eft. faÏt -adjuger par la Sent.ence portant liquidation de fa dot.
Le feu iieur Donet n'y fut point appellé;
il n'y a pas été entendu. Ses hoirs ll-'ont pas.
âcquiefcé à €e jugement. Le titre eft donc
fournis à leur appel. ·Qu'importe. que les hoirs
eo.nqueret, avant le dernier Arret qu'ils 00-
3
1
.,
tinrent, n~aiel1t pas voulu exercer Je dtoit
que les hoirs Donet exercent aujourd'hui
que leur Confeil les en ait écartés? Tou:
ce que ce fait peut donner à examiner c'eit
"
la quefrion de favoir fi les hoirs Conqueret
fpnt, o,u non, re€evables. Mais que les hoirs
~onqt!-eret f'Oient rece.vables ou, non, la queftlon 11 en eit pas m01l1S neuve & entiere,
quant aux hoirs Donet, qui ne peuvent être
frappés ni par le fait des hoirs Conqueret,
ni par la ConfuIration qu'ils avaient rapportée avant le dernit:r Arr~t de la COUr.
. Ce n'eil: pas que cette Confultation que la
Dame Boyer oppofe, renferme des motifs
hÏlen graves. Les hoirs COBqueret ne prenaient
pas alors le vrai jour dé la ' queftiol1 qu'il
failciit propofer. Il ré[ulte de la 'Con[ultation ,
qu'oti prMoit la queil:ion d? côté du dol &
de J'a ftàude; & comme les preuves n'en
étaient pas bien complettel.., les Confultans
fureJ:lt <l'avis de renoncer au projét de propofer~ le môyen de fraude & de dol qui rendroient la donation nulle. Mais fi on }eur eût
propofé la quefriot1 de favoi.r ii la donation
devoir avoir fan effet dans le cas de- faillite,
ou s'il falloit {imp1ernent en renvoyér l'exé..
cution au temps de la morf, ces mêmes Confeils n'auroient certainement pas balancé,
{luifgu'aulourd'hui ~ &, d~ns: l'état. de, la conteftation atluetle, 119 n heiltent pomt a pen fer
que- l'adjudication de's 50000 Uv. pour en jouir
htc & nunc' par la Dame Borer, ne fo}r injufre; & cette dérliliefe ne dOIt pa·s aVOIr C>U,
1
�4
blié que lors du dernier Arrêt rendu dans
la caure des hoÏt's Conqueret, il fur dit qu'on
auroit prononcé la caffation de la donation,
fi elle eût été demandée. ,
On ne vit jamais en effet un titre plus mal
[onnant. Il eil: très-nouveau 'dans [on efpece;
il eil: [ur-tout très-dangereux; car le fieur
Boyer Fortune, au moyen de fon Contrat de
mariage, filé comme il eil:, & pris dans le[ens que la Dame Boyer veut lui donner, aufoit _toujours ,été le maîtr.e d'affurer à fes enfans le bien de [es créanciers. Un Marchand
n'auroit qu'à promettre à fa femme à.peu-près
le vaillant de toute [a fortune, pOUf_ en demeurer maître pendant [a vie; &- pour la
faire colloquer enfuÎte en;cas de détreffeou
d'orage dans. [on commerce. Cette maniere
de procéder le mettroit [ans ' doute à l'abri
des événemens & des rifques · de [on ,é tat.
Mais les créanciers feroient-ils dans ce cas
bien & loyalement traités, & la bonne foi
qui doit régner dans cet état peut-elle comporter lm titre de cette efpece? N'eil:-il pas
du plus ,dangereux exelPp]e? Et s'il exifte,
tous les Négocians n'auront-ils pas un moyen
toujours prêt pour _ ne rIen laiffer à leurs
créanciers? Quoiqu'il en [oit, ce premiet: ap.
perçu de l'ade prouve qu'il n'a certainement
rien de favorable i & que rien ne mérite plus
l-a faveur de ·lg.. juil:ice que le fyil: ême que.
nous propofons, & qui tend au moins à
prive~de titre de l'effet oclieux qu'on voudroit, hli dO.I111er au préjudice des créanciers
légitimes.
, ..
L
5
1egalmes.
. es motifs de notre fyf1~me fervent de gnefs cl appel de la Sentence de liquidation de la dot. Si la donation efr nulle
'il n'y avoit pas lieu d'en adjuger le mon~
tant; fi par contraire elle n'exÎfte entre les
deux conjoints & au profit de la femme que
~omme un pmple don de furvie, il Y avoit
heu de n'adjuger la fomme de 50000 liv. que
comme don de ftlrvie, qui ne pouvoit donner lieu qu'à un paiement de fiB:ion & par
affiette ,. en attendant le cas incertain du prédécès du mari.
. Entr~ns à. préfent dans le detail des queftIons deJa dIfcutées. La quefrion du trouiTeau
ne devroit pas en faire une, f<;>it en fait,
foit en droIt. Il eft inoui que la Dame Boyer
vienne nous dire qu'elle n'avoit point de
trouifeau, point de nippes, point de hardes,
point de bijoux, lorfqu'elle a fait prodder,
foit à la liquidation de fa dot, foit à fa collocation; car fi elle en avoit, comment at-elle pu fe difpenfer d'en rendre compte &
d'en déduire la valeur fur le montant de fon
adjudication? .Et par quelle étrange inconféquence ofe-t-elle prétendre qu'elle efr créanciere de 2000 Ev. de fon troutleau, & que
néanmoins elle ·peut fe difpenfer de recombler les hardes dont elle a profité. Elle veut
dOlic avoir la chofe & le prix. Telle efr notre
queilioll; l'expoïition que nous venons d'en
faire n'a rien d'infidieux, rien de fardé;
voyons. ce que la Dame Boyer nous dit all
contraIre.
B
�6
:Elle commence par convenir de la regle ;
& comment aurait-e lle pu la contefter, dès
qu'elle [e porte pour créanciere du troufieau?
Peut - elle en prétendre le prix par toute
autre raifon que par te qu'elle n'a pas la
chofe? Si la Juftice lui donne le prix d'un
côté, fi de l'autre elle a toujours été nantie
de fon trou1reau [ans en rendre aucun compte,
elle a[pire donc à [e fuire ' pàyet douhlement
de cette portion de [a dot, qui coniiftoit
dans le trouffeau. :Elle veut..en étre payée
en argent, quoiqu'elle l'ait iléja reçue en
nature.
Elle demande d'abord fi [on trouffeau doit
étre perdu pour elle ? Non [ans doute, eUe
ne doit pas le perdre; mais les créanciers
au moins auffi favorables qu'elle, ne doivent
pas le payer deux fois. La queftion coniifre donc à [çavoir fi la femme ' qui [e tolloqtle, & qui -ne fait pas eftimer [es har-des
pour en mett re la valeur en dédu~ion, peut
étre reçue à dire qu'elle n'avoit rien, que
tout etuIt pen.
La Dame Boyer n'eit pas la feule femme
.colloqu ée qui ait tenu ce langage; mais on
a [enti qu'il étoit indécent, & qu'on ne
pourroit y a~outer foi , [.ans [e livrer aux
plus dallge~ell[es conféquences : car fi d'une
part il n'eH pas jufte que la femme perde
fon trouffe.au, il n'eil: pas juH:e lilon plus qu'elle
[e le faITe payer deux & trois fois au préjudice des créanciers . .Entre ces deux écueils',
il doit exifier une regle. ~Cette regle eft
,.
1
•
1
.
[m:ple.}l faudroit.la faire , fi 011 ne la tro u..
VOit deJa toute faIte. La femme qui ne parle
pas ~e [es h~rd~s lors de fa colloqtion, ef(
cenf~e les retenIr fur le pied de l'eftimation
port'é e dans la conftitution. Il en a été cité
deux Arrets dans les précédentes défenfes.
·~.e feconé!. eil: parfaitement connu du Sou['flg~é ,yuifqu'iI pl~idoit ~ cette époque pour
les -hoIrs -de Jofeph Mouiffet de Salon, contr,e T .here{e Aç-nel de la méme ville, époufe
T~pétée 'en dot ete Claude Blanc, Fournier.
L'Arr~t efr du 22 Décembre 1780. -Therefe Agnel s'étolt pourv~ en répétition de
d~t. EU:. vi11t ~ttaquer un créancier qui s'ét'olt -coHoq\lé fur les biens du mari. Elle avoit
~'-$2 liv: 10 f. {te dot, dont 31:0 liv. au pri~
,de {Oll trouffeau. Il ne lui avoit pas été' dif:ncile, de- fe faire <Jdjuger lefdites 382 liv.
10 f.-; mais MouifIet appella de l'Ordonnance - qui renfermoit cette adj udication, &
qùi fe trouvoit antérieure de plu/ieurs années.
-Il difoit que Thel'efe Agnel ayant un trouffe au de 300 liv., & ne l'pyant pas repréfenté
lors de la liquidation de fa dot, s'étoit par c~
moyen procurée la chofe & le prlx au préjudice des créanciers légitim es du mari ;
-qu'en ne faifant p'oint 'évaluer [es h ardes,
elle avoit fait fon choix, & qu'elle les avoit
reprifes pour le méme prix fur le pied du'quel elles avoient été paffées dans l'efiimat1Ol1.
L 'Arrét le jugea de même nemine difcrepante, nOl1obftant qu'il fût oppofé d~ la part
�8
de Therefe Agnel pour qui Me. Sellon plaicloir, que fon mariage avoir duré long te ms ,
que pendant Fa durée fes harde~ avoient ét~
tout-:l-fait u[ees, & que [on man dans la ml[ere n'avoit pas méme eu le pouvoir d'entretenir [on trourreau. Il fut jugé que la femme doit déclare r [es hardes dans le moment
où [ès droits font liquidés, pour que les intérefiës puifIent vérifier & prouver qu'elle
n'dl: pas en regle; & ~i cela n'ét~it. ainfi ~
l es femmes auroient toujours le drOIt lmpuru
de [e donner l'avantage injufte de garder
d'une part le trourreau en natu:e, & de
l'autre de s'en faire payer le pnx.
Sans cette regle, les créanciers [eroient
toujours lé[és; avec cette regle les. femmes
ne peuvent jamais l'érre; au contraIre elles
ne peuvent qu'y gagner : car celle, ~o.nt ,le
trourreau [e trouve effealvement detenore,
ne manque pas d~ le repré[enter ~ de le
faire efr.imer ; au heu que par ContraIre celle
qui ne le re pré[ente pas, profite. de la plus
value , qui dans l'ordre & la ngueur des
regles appartiendroit aux créanciers; & l'on
[ent que cet objet n'dl: pas de petite confidération, [ur-tout à Mar[eille où les trou[[eaux [ont communément portés par le luxe
& le fafle qui regne dans cette ville at~ doubl.e
& au triple, & quelquefois méme vmgt fOlS
au
de ce qu'ils étoient lors de la con[. delà
.
1
tltutlOl1.
C'eft donc bien afIez, c'eft peut-être trop
que la femme qui [e colloque pour fa d~
.
,
9
& droits, ait le pOllvok de s'a'vantaO'er aÎnd
au préjudice des créancièrs de fon ~ari &
de s'approprier la totalité d'un troliiTeau fouve.nt très-important '. dont 1'excédant pourroIt empêcher la famdle honn~te d'un créancier légitime de tomber dans là mifere. Mais
ce [eroit outrer les cho[es, & iégitimer la
p!us c~l1elle de toutes. les injüf!:ices -; que
cl ~uton[er la femme qUI ~e colloque, à fuppnmer le trouiTeau en entIer, fous prétexteque [es hardes étoient totalement dépéries
à l'époque de la liquidation de fa dot. Ces
liquidations fe font ordinairement fans contradiB:eurl La femme [e Contente d'exhibet
[es titres, & raremènt elle y fait mention
<le [es hardes, quoiqu'il foit certaill qu'elle
en ait, & [ouvent & prefque "toujours alJ
delà de ce qu'elle en avoit lors de la conftitution. On ne fait donc aucun tort à celle
qui n'en exhibe & n'en déc1al!e aucunes, eli
[uppo[ant qu'elle en avoit autant lors de la
liquidation que lors de la: conftitutio11; &
cette pré[omption eft d'autant plus légale,
qu'outre que les femmes font très - jaloufes
d'entretenir & méme d'atlgmenter leurs hardes & trouiTeau, le mari d!: d'ailleurs obligé
à cer entretien, qui formé ùne des charges
du mariage; & 1'011 fçair qu'à Marfeille les
maris même les plus fen:és & les plus gênés
.
.,
dans leurs affaires, ne manquent jamaIS a rempli!' ce tte obligatio n, même avec une [urabondance & [ouvent pre[que au detTus de leurs
forces.
\
c
�1'0
Rien l1'eft 'donc plus étQtÎllant qùe d'entendre din: que l'ufagè.. ll'ei!: pas "à.J.MarfeiUe
d'exiger l'~ta.J des ha,rdes. Entendol1$ _ nous
fur le mot ~d'l1ltge. Yoplez-vous parlet èl'une
coutume ayallt, [Dree: dse'! Loi! Dal~ ,ce ' cas
' on vous ré:popdra q1le, 1a. COutum~ ,cie 'frauder
les -p-réa1:1cte ~~\ l~e ~peùt jaooais .dégélléter · eh
_.u[ag~ )~cite\ . J~' aillellrs tU,fage eTe ',Marf~ille
ne differe et;l · n~n de celut des aUU:es villès
-dè la Provit;lce. Les,Jemmes font~par _ tout
) t:; ' m~,lnes •.:: Il Jl'en eit, êUlcune,.ou prefque
-a; -Jut'l e '<lui (e faire- Ull ~pOilit -de ,:. cçmfcience
'de faire 1a-t.déeJqratioll de fOll tl<ol'lffeau, &
d'eil porter -1~ valèur 'eu.·aéduRwn fur .les
[ommes qu',elle Jait liquider , eri fa :faveur ;
~1s ç'e t 'abu$J '(Je la ' pait ~es femmes qui fe
fçll1t c.olloque-r" Il'eil: ;P,.Qs,l une r~g~è pour les
T. ribunaux. A,;'Marfetlle 'comm~ , aIlleurs, .les
'créanciers ont le droit de dire à la femme
qui fe c~ll~que 'qu'elle ne peut pas exiger
double reil:i.t4tion de [on trouffeau ).: & que
quand elle le prend en argent, elle doit déclarrer '& , renqre ou déduire ce qui lui en
reil:é ·en llat~re. Telle dl: la regle par-tout
où il eil: établi que la méme'~ .dette ne
<loit pas étre ..p<!yée deux fois, & fur- tout
quand le fecond paiement tourne au préjudice des créanciers.
'
Et par quelle raifon y auroif-fl une regle
contraire à Marfeille? Si la regle dont nouS'
excipons n'exifl:oit pas, ce fe roit effentiellement pour Marfeille qu'il faudroit l'établir,.
vu qu'il y efl: pour ainfj dire univerfel que les
Il
!rou~eaux font portés pe?,dal~t 1e mariage
1I1filUme,l1t ~u-dela de ce qu Ils etoient lors de
la confl:ltlItlOn, cette augmentation du trouf~
tfeau q,ui)fe fait pel~dant le mariage, fe fJit
au~. deyens du, I1lan, & par conféquent au
preJ~dI'ce de, fes,' créanciers, Pourquoi 'ces
, ~ertlIers 'ferolent-ils condamnés à fouffrir ce
_ptéju~ice ? Et n.e ferbit-ce
t
J
c
pas les y ccndam~
,ner t que d'autorifer la femme qui n'a fait
.a'U~une 8éclaratid'n de fon trourreau, qui par
,conféquent l'a gard S tout entier, à repren_
'elre fa valeur ehiiere fur les biens de fon
Ïnari ? '
, Mais, 'nous dit-on, le luxe à Marfeil1e em'bellit un tro~,ffeau; l~ diffiBation le dévore.
Il' peut' le faIre que quelques
, femmes difIi.:
pées -vendent leurs hardes , que qtielques
1
nlaris défefpérés fe permettent le mt me ufage
du trouflèau de- leurs femmès. Ce fOllt -là
des traits dé défe'rpoir très - rares, parce
,qu'après eux il faut fe réfoudre à ne plus
fe -montrer, ' Mais , ce qui eft très-fréquent,
c'en que les feînmes des N égocians , 'même
les plus génées dans leur intérieur, démentent par leur luxe extérieur l'état de détre'flè où leurs maris fe trouvent; c'eft que
~et éclat eH fouvent néceffaire pour [outenir
fe crédit· c'eft qu'il fe continue & fe ren~
force mé~e jnfqu'au moment de l'explo{ion
de la faillite; c'eft qu'il eft rare, ou pour
mieux dire fans exemple, que la femme d'un
failli n'ait pas un trouffeau, coniidérable, Or,
dt-il jufte, eH-il même dece nt de propafer
,
/
, ,
�I2
que ce trou{leau doit être , perdu pour les
' malheureux créanciers, & que la femme doit
join dre au bénéfice de la plus-value dont elle
profite, en ne faifant aucune déèlara'tion
celui de fe faire donner encore en argen~
le prix d'un trouffeau qu'èllé reçoit en
ture?
.
,
Concluons doilC que la règle dont nous
excipons, efr plus néceirairé encore â Mar-feille qu'e par-toût ailleurs. A la~ bonne heure
que dans les faillites qui fe terminent par
des concordats, portant des atermoieniens
& des réductions, les créanciêrs chirographaires & Marchands n'entrent pas en -cori{idëration du tl:ouireau de la, femme du"failli.
Ils en font bien les maîtres, yolenti nqn fit
injuria. Mais qui ne fait que la condefcendance des créanciers chirographaires ne fut
jamais une regle pour les créanciers hypothécaires? Qui ne fait que le ,c oncordat eft
étranger à ces derniers, & -qu'ils ont lé droit
de _compter jufqu'au dernier fol avec leur
d~biteur? Or, il s'agit icÎ d'un <?réancier hypothécaire, d'un acquérèur qu'on veut évin~
cer, d'un domaine acquis avec bonne foi, &
dont il a payé le prix. Et quélIe eil
perfonne qui veut faire fouffrir cette évitlion 1
La femme du failli qui veut reprendre fur
le tiers le prix d'uil trourreau qu'ellè a gardé
én nature.
Inutilement vient-on IiOllS dire que nous
reconnoi!fons l'exÏfl:ence de l'ufage, puifque
nOlis avons excipé de ce qu'il n'étoit pas jllftifié..
na-
ra
,
,
13
tifié, La réponfe el1 bien fubtile & cer'tal~
nement t~op avantagellfe, En difam que l'ufa o'e
de Marfeille n' dl: -pas J'uil-ifié nous ell
b
'é l' ,
L,
avons
ni , eXl~ence, Exciper du défaNt de juftificatlOn, n eft-ce pas contefter le -rait? Au [ur..plus, en ~xcipant du défaut du fait & de
c~ que l'ufage de Marfeille n'était p~s juftifie,? nous avons encore moins convenu du
pomt de droit. L'ufage de Marfeille exiftât-il
il feroit toujours impuiflànt pour autorife;
une, femme à. fe faire furpayer de fa dot &
droIts au préjudice du tiers,
Mais encore un coup, il ne fe fait rien de
plus à Marfeille que ce qui fe pratique dans
les autres Communàutés de la Province, où
les femmes ne déclarent point de hardes, &
où. elles s'arrogent le bénéfice injufte de la
.double reprife, quand les créanciers ne les
reIevent pas là-deffus, ce qui n'arrive que
trop fouvent, La Dame Boyer n'eft pas bien
inihuite, quand elle nous exhorte à fouiller
-dans le Greffe de Marfeille, & qu'elle nous
défie d'y trouver un feul exemple d'une femme
'qui fe colloquant, ait conné état & rôle de
fon trouŒeau, On' fait bien que les femmes
omettent toujours cette obligation, tant" à
Marfeille qu'ailleurs; mais on pourroit citer
des exemples mêine de Marfeille, dans lef..
quelS elles ont été' rdevées ; on pourroit citer
encore des exemples de liquidation dans
lefquels les Experts avoient · 1iq'uidé la va ..
leur des hardes en nature au profit des:
.créanciers.
D
J
�14
Inutilement nous obferv.e·d-on qqe la Dame
Boyer eût rait la déclara:ion de fe~. hard~s,
fi on la lui eut demandee, & qu II eft 111tolérable qu'on ne lui permette pas d'y fuppléer aujourd'hui, fur-tout au moyen de l'offre
qu'elle fait de fe purger à fe~m~l~t que les
débris du trou!reau extants a 1 epoque de
17 66 , ont été ufés dans les dix années pendant lefq.uelles elle n'a point exigé d'intérét de
fa dot. Elle tient le même langage que tenoit Therefe Agnel en 1780. Cette derniere
n'en fut pas moins condamùée. Comment la
Dame' Boyer peut-elle fe flatter d'échapper
au méme fort?
Comment peut-elle fe flatter en effet qu'on
recoive après vingt ans à Ul'le déclaration
qU'eUJe auroit dû faire alors, & qui auroit
dù ~tre a'ccompagnée de la repréfentation
des effets du tro'u!reau qui exiftoient à cette
époque? Ce trou!reau auroit dû être eftimé.
Or , comment parviendroit-on aujourd'hui
à
.
cette eftirilation ? Comment .pourroIt-on prouver aujourd'hui que fa déclaration eft exaB:e
ou qu'elle eft infidelle? En 1766, onauro!t
pris langue des voiiins, de ceux qui fréquentaient la maifon, & la perfonne de la Dame
Boyer. On auroit pu "la ramener à la vérité
dans le cas- d'une déclaration infidelle. Aujourd'hui toutes les preuves ont péri. La
Dame Boyer .pourroit ne repréfentê.r que .d:~
guenif'les ,ou rien du tOll!, & fes mfidéhtes
feroient impunies.
Eft-il rien de plus ,illufoire que l'offre dl!
la
J
,
15
ferment qu'elle a le courage de -.Bropo[er ?
Elle parle des débris d'un trouffeàa en re- '
" montant à l'époque' de 1766; mais à cette
époque ~lIe était dans l'état le plus brillant.
So,~ ~an, au reto~r des mes, n'avait afpiré
qu a Jetter de la pouffiere aux yeux, II avait
affiché l'excès de l'opulence par toutes les
manieres qui pouvaient en donner l'idée au
public. Ses dépenfes dans tous les genres
avaient été fans bornes. On conferve encore
le fouvenir de ceUe's qu'il avait faites lors
de fan mariage, & la parure de fa femme
n'en avait pas été le plus petit objet. Il avait'
[outenu cet appareil extérieur çle richeffe
jufqu'en 1 7 66 , époque de fa faillite; & dans
éet état des chof~s, là Dame Boyer ofe nous
,dirè qu'elle ne poifédoit alors que les déliris
oe fan trouffeau.
Mais', dit-elle, au moins il fera vrai qu'en
177 6 , temps où j'ai commencé d'agir pour
la répétition de ma dot, il ne me reftoii
plus rien. J'avais alors paffé dix ans fans riel}'
recevoir de mon mari. J'ai voulu faire liqui.
der en ma faveur des intérêts pendant ces dix
années. On les avait éffeBivement liquidés
en ma fa veur jufques à la fomme de près de
3 0000 Ev. Mais par le dernier Arrêt de la
C our les hoirs du fieur Conqueret font par,'enus à faire rejetter cet article. Je n'ai
donc rien recu pendant dix ans. Il faut par
conféquent que pendan~ cet, i!lter;allè mes
ilippes, mon trou~eau aIent ete ufes aux dé~
pens de mon man.
1
�,
16
Ce [yll:~me ne vaut pas mieux que le précédent. Oil a [enti, lors du dernier Arrêt
rendu fur l'appel des hoirs Conqueret, qu'il
étoit odieux que le iieur Creps, pere de la
Darne Boyer, joignît à l'inj'ufi:ice de fe pré'. fenter c'omme ayant payé tous les créanciers
de fon gendre, celle de former à fa fille
un capital de 30000 liv. pour prétendus
intérêts de la dot liquidée & 110n payée.
On a fenti, 'lors de Let Arrêt, que quoiqu'on
fe fût fervi du nom du fieur Creps pour
faire les paiemens , & quoiqu'on eût affeaé ,
de dire dans les quittances que les paiemens avoient été faits par ce dernier, néanmoins il avoit été trop facile de s'arranger
ainii au préjudice des créanciers, pour que
ces derniers duirent en fouffrir. Auffi la Cour
jugea que c'étoit bien airez, & peut-être
trop, .que d'admettre les quittances préfentées par le fieur Creps, & . qui ne paroiffent. au, fonds qu'un entendu avec fon gendre. .Elle ne voulut pas admettre la préfomption de la fourniture d'alimens & entretien faite par le pere . .Elle jugea, comme de raifon, que nonobftant l'accord du
iieur Creps avec le fieur Boyer fon gendre, les alimens & entretien de la Dame
Boyer devoient néanmoins être con{idérés
comme ayant été fournis par ce dern,i er y
& ce fut en conféquence de ce principe
que l'Arrêt de la Cour raya l'article d'environ '30000 liv. que la Dame Boyer avoit
eu le fecret de fe faire allouer. L'Arrêt n'a
pas
. ,
17
pas Juge pofitivement
comme 1 D
Boyer voudroit 1 :t .'
a
attle
d'h '
, Il
e aIre entendre aujour..
UI, qu e e ne devoit J'ouir d..'
cl
' 17 66'Jufqu'en 1 6
~ fIen
ePUIS
"
[011 mari l'avoit fuffifar: 7 , malS bIen que
cet intervalle' &
Jment entretenue dans
,
ce uO'ement ét 't cl'
[ouveraine jufi:ice' parc~ que
01
une
l' dé' d'
, '
, comme 011
da
J.a It, l'len n'étoit plus indignant que
e VOIr tous les effets du lieur Royer cl'f
paroÎtre & 1 f'
1 é
"
e leur Creps rapportant luim ,me des q,uIttances fous fon nom pour les
palemens faIts aux créanciers, Or ce
la Co
"
,
que
fiera ,ur a Juge par le précédent Arrêt
d
.Jugé de même par celui qu'elle va ren~
re dan,s ce~te ~aufe; & la Dame Boyer
fera regardee comme ayant été nourrie &
entretenue par [on mari dans l'intervall
donné entre l'époque de 1766 & celle d:
1776 ,
j
}o. C'efi: ftlr40ut à l'époque de 17 66
qu Il fau~ rem?nter;, c'efi: alors que la Dame
:B.oyer s efl: faIte adjuger fa dot & droits
& qtùlIe a rapporté la Sentence qui la dl
.clare C.réa!lCiere des 6600 liv, , dans lefquelles
les 1.000 IlV. de fon trouifeau fe trou voient
con:prifes; c',eft , alors que la Dame Boyer
i! faIt fon choIx, parce que c'e11 alors qu'elle
auroit dû repréfenter, faire efi:imer & dé~
duire les hardes qu'elle avoit en nature.
Elfe a mieux aimé les-- garder que de faire
cette déduélion. Tout étoit donc dit pour
çlle depuis cetre époque. Depuis lors le
trouifeau 'a refi:é à fon rifque, péril & for~
E
�18
tune; & elle n'dl:. pas plùs recèvable à
venir nous dire que fon troufIeau a été entiérement ufé depuis 1766 jufqlles en l'année 1776, qu'elle l'était à demander les intéréts de fa dot clans cet intervalle . .
. Et vainement nous dit-elle qu'elle ne doit
pas perdre des deux côtés, c'eil:-à-dire
du côté de fon trouffeau, & du côté de~
intéréts de fa dot. On eil: bien éloiO'né de
penfer qu'elle foit en perte de l'un b ou dè
l'autre côté. Elle avoit certainement fon
trolliTeau en 1766, & même un trouiTeau
très-fplendide, comme il' eil: notoire à Marfeille : depuis lors elle a été nourrie & entretenue' c0t;nme auparavant. Il eil: jugé par
l~ p.réc~dent Arr~t. qu'elle 'eft préfumée
1 aVOIr eté des delllers de fon mari. Certain~ment elle a continué de vivre & de
paroître après 1766 comme- auparavant. A
qui perfuadera-t-elle en effet qu'elle n'avoit
q~e des ~éb~is de trouiTeau , foit à la premlere , folt. {l la feconde des deux époques
dont on VIent de parler? Qui croira que
fes hardes étoient péries, foit à l'une foit
à, l'autre .de ces deux époques, &' qu'il
11 en reil:01t pas la plus petite trace , le plus
léger fragment en 1776, temps où elle a
commencé de faire ou de préparer contre
le tiers l'explofion de fon aétion' aiToupie
pendant dix ans ?
Que devient à préfent l'offre de fon ferment?
,Et .où en .fe roit-on li l'on admettoit;
,
apres envlron vmgt ans, un ferment de
I9
cette efpece? La regle dont nous avons pofé
les principes, deviendroit illllfoire , & toutes les femmes auroient par le fait le privi.
lege exorbitant & le plus inique de doubler
leurs trouiTeaux. D'ailleurs, fur quoi veut·
on faire rouler ce ferment? Non fur ce
qu'il n'exiil:oitpoint de trouifeau, car il feroit abfurde & révoltant d'en dénier l'exiftence, mais fur ce qu'en 1766 il n'en exiil:oit
plus que des débris qui avoient achevé de
s'ufer & de périr en 1776. Mais ne voit-on
pas que rien n'eil: plus abfurde que l'hiil:oire
de ces prétendus débris auxquels on veut
réduire le trouiTeau ' à l'époque de 17 66 ?
Rien n' eil: -plus mal fondé, foit en fait, foit
en . droit, que l'idée de faire urer entiérement le trouifeau dans l'intervalle de 17 66
à 177 6 ; foit parée ' qu'une partie de ce
trouifeau ne pouvoit pas · s'ufer' & périr dans
cet intervalle; foit parce qu'il a été entre·
tenu ; foit parce qu'il a été jugé, comme
de raifon, que l'entretien de la femme, dans
le tems intermédiaire, avoit été à la charge du
mari . foit enfin parce que la femme ayant
fait f~n option & fans en déduire le mon' tant en 1766, le droit d'en demander la
déduB:ion au moins jufqu'au.concurrent
de
1 '
2000 liv. était dès-lors' acqms aux creanCIers
dù mari.
, .
Et vainement obferve-t-on ,que 11 ~xtil:an.t
là-deffus' a • Marfetlle
, Il
oint de Réalement
I?
r
'r
P
faudroit laiifer paifer le cas qU,l le l?rele~)te,
fauf d'établir tln~ regle pour 1 ave1l1r, c efi:,
•
•
....
�20
à-dire, qu'il faudroit autorifer la Dame Boyer
à prendre un double paiement au préjudice
des créanciers de fon mari, c'eft-à-dire , que
dans le fens de cette derniere on auroit b~
foin d'un Réglement nouveau, pour appren_
dre aux femmes qui fe conl[ïtuent créanciel'es
de leurs trouifeaux, qu'eUes n'ont droit de
s'en faire .adjuger le prix, qu'autant qu'il
ne leur en rèfte plus rien en nature. Mais
dans le cas des Arréts qui Ont été rendus
filr cette matiere " a-t-on eu befoiu d'vn Ré~
glement pour décider Coutre les femmes qui
avoient gardé leurs tfouifeaux, qu'elIes s'eIl
trouvoient payées par ce moyen? Et où en
feroit-on fi l'on jugeoit autrement, & fur ...
tout 'lorfque, comme au cas préfenr ; la fem ..
me 'lui veut fe colloquer la laiifé dormir fOll
titre pendant quinze ou vingt ans, pour faire
. vieilIir & _difparoître les preuves qu'il eut
été facile d'~dminiftrer dans le temps fur la
confiftance de fon troufTeau ? Il n'y a donc
point de nouvelle regle à faire là.deifus.
Cel1e que nous invoquons a exifl:.é, dans tous
les temps , parce que dans (Qus les temp~
il a été vrai de dire que ' les femmes m:;lrrées qui avoient un trouileau lors de leur
conftitution de dot, l'Ont confervé pendant
le temps . du mariage; que . s'il efl:. des cas
dans lefquels le trouifeau fe trouve diminué:J
il n'arrive jamais qu'il foit entiérement péri;
que la poffibilité de la ~iminution eftabon_
daIl}ment compenfée par la poffibilité de l'aug~
meutation, fUT-tout à MarfeiIle, où 1'011 peut
1
tenir
tenir comme vérité certaine que les trour..
[eaux & ce qu'on appelle le coffre des femmes, font toujours augmentés plutôt que di ..
minués pendant le mariage, & que dans cet
état on ne peut pas frapper à ~aux ; quand
on foumet une femme colIoqùée qui a fai~
myftere de fon trourreau., t~l 9u'i~ fe trou'Yojt en nature lors de la liquidatIOn de fa
dot à le .recombler & déduire fuivant la
vale~r
qu'il avoit à l'époque de la conftitu.
:tlO11.
Et qu'oll ne dire .pas que nO:1s aVdns perverti le fens de la regle en lllvoquant le
brocard oonnu, nulla\ uxor fine vefie, & qu'il
falloit dire nuUa tzupta. La propofition etl:
beaucoup plus jufle dans le Fens .[ous lequ~l
nous la préfentons. Une :fiUe qUl Fe. ~an.e
peut ne rien avoir du tout. Qualld .11 s agIt
d'une femme mariée, on tient un pomt cer..
tain; c'eil celui de l'exiilence d'un trou1reau
dont le mari devient acheteur. La femme
devient dès-lors créanciere de l.a val~ur donnée au trollffeall , don.t le man d~vlent pro~
., . . N'eil-il pas Juile & faut-Il j'une
pnetaire.
1 LOI
l
nouvelle pour l'lous apprendre que 1 or.s (u
.
d e la dot la femme garde
tIOUfcompte
. fon
Il
d '" 7
.r.
1
'x
celre
dès-lors
de
ltu
en
dre
leau, e pn
111
,',
fi u.
N'eil-il pas évident qu Il n efi: pas. Ul:e ~m. Ion
r
troufIèau lors de la Itqmdatloll
me qUI. n,aIt
no d
fi d
& [ouve nt meme au-deuus e ce
ilaé
'10 rs de la co nftitution ? Con cluons
q
" n eu
I l plus Juite & plus favoradonc
que nen
, . l' ."
hie que l 'excep ti'on d'Ull creanCIer
F egmme,
d~, t~~
�2~
d'un acquéreur qu'on veut évincer; & qui
contefte l'évittion fur le fondement que le
bien dont il a déja payé le prix, ne doit pas
fervir 'à payer une feconde fois celui du
trouffeau.
. Venons à la feconde queftioll concernant
la donation appofie dans le .contrat de mariage de la Dame Boyer. Elle porte fur
l'exorbitant~ fomme de 50000 liv Cette libéralité n'el!t pas pour principe.Je rapprochement des &ges, des fortunes ou de l'état
.des deux conjoints. Tous les avantage~
~to.ient plutdt du cdté du fieur Boyer _;. &
cependant le çontrat renferme ce dol exceffif, Dans quel oblet ~ cela fut-il fait? Ne fe~
roit .. ce pas par une funefte combinaifon ima:ginée dans l'objet de fe ménager un prétexte
pour faire aux: epfalls du fieur Boyer, dans
le cas où il· en attroit, une fortune dont le
pere n'avoit que la pompeufe apparence,
& qui n'exiftoit pas en effet? De là vient
le commeree d'immeubles qu'il a fait, & qui
p.e paroiifent avoir paffé par [es mains que
dans l'objet de les faire frapper tralliitoirement par l'hypotheque de la dot; de là vient
fa faillite; de là vient fon concordat foufcrit
par les chirographaires tant feulement; de.là
viennent les paiemens prétendus faits, &
qu'on fait éclorre comme f.a its des deniers
du lieur Creps beau-pere; de là vient ce
repos affett.é qu'on a donné à l'objet de la
reititution de la dot liquidée en 17Ù6 ; de là
yient que les tiers n'ont été mis en caufe par
2;
,
.droit d'hypotheque qu'après la faillite lûnfommée, après le dénaturement & la difparutiü:n de tous les effets & de toutes les march~ndifes du fai~li; delà vient qu'on a fait
quIttancer les chuographaires, comme rece·vaut ·les deniers du beau-pere qui payoit à
la décharge de fon gendre; & par ce moyen
l~s nouveaux acquéreurs, qui n'ont jamais
6té- a~pel1és pendant dix ans, qui ne fe dout()iea~ pas qu'on pût un jour les mettre en
C!l.ltf~.-, ; fe [ont vus frappés au moment où
!Qfit~<s ~es ' voies du.. recours avoient péri.
. Rien n'eft donc plus révoltant que ce titre
&. {Ü'n e~écution. Il faut donc fur-tout prendre
bieJl.garde à Re pas, l'amplierl ll-faut en examiner le fonds & la marche. C 'efl, nous dit la
Damé 13oyer, Une donation pure & fimple
qùe j'~i voulu rapporter. Sans ce pa8e, le mariage ll~auroit paS' eu lieu. A la bonne heure;
mais ce patte renferme-t-il Ulle donation qui
doive avoir fon effet hic & nunc, ou }'exéçut:iQn en efr-elle renvoyée à d'autres temps?
P,remiere coniidération de l'éclairciffement
de -laquelle notre qUe.friOl~ dép~nd. ~'il. eft
dit- dans le contrat, ou fI le tItre mdique
qpe la femme doit jouir hic & nunc de la
don~tion de 5000 0 IiV-. , dans ce cas la Dame
noyer pourra prop?fer fon fyfiême, fino.n
avec faveur du-moll1s avec couleur; meus
c'eft toute ;utre choIe, fi · le titre fufpend
la jouiŒlfice & l'exécution de, la don.ati?n.
En fait la Dame Boyer n a pas JOUI de
la dOllatiol~ tant que fOIl mari a été fLlr pied.
�24'
1
,
Cela n'eft pas contefté. En droit, if eft' cer~
tain qu'elle ne doit pas en jouir dans. le m~me
temps., & la preuve qu'elle ne devoit pas
en jouir eft tout à la fois dans lé titre &
dans les principes. Dans là titre, ~ puifqu'il
n'y a point de tradition, & puifque le ~on~
trat ne renferme 'aucune indication' pour y
prendre la [omme donnée de S0000 liv. Le
contrat ne renferme donc qu'une {impIe promeffe.de compter un jOllrJa [omme ~ de )0000
liv. Il eft ünpoffible de le prendre daus le
Fens d'une donation a8:uelle & réelle. Le
.droit,~ fi l'on veut, eil: acquis dè's le ' momen,t ;, mais il eft plus clair que le jour que
l'exécution ne devoit. s'en ', faire que" d'ans le
temps.
.
.
En acquérant le droIt, la Dame,. Boyer
acquéroit · auffi celui d'en di[po[er entre [es
enfans par portions égales ou inégales; mais
venant à mourir [ans enfans & avant [on
mari, les el}fans delaiffés par elle venant m~me
à mourir avant leur pere, la donation devoit
faire retour à ce dernier; on dit la donation,
c'eil:-à-dire, le droit de la demander, pui[que,
[uivant ce contrat, la Dame Boyer & [es
enfans n'avoient pas méme le droit d'en jouir
du vivant du fieur Boyer.
La donation, nous dit-on, fut faite par le
lieur Boyer au profit de [a femme, ponr ell
jouir [a vie durant en fonds & en fruits,
ainli que de la dot dans les cas de ' droit.
Il faut en convenir, la clau[e eft littérale
dans le titre; il n'eft queft}on que de l'expliquer.
2S
pliquer'. On fait quels font les CJS de droit:
pour la jouiffance de la dot; mais les cas de
droit pour celle d'une dOilation ne peuvent
exiil:er que dans le titre. Cefl le temps de
la tradition qui doit en étre faite, qui doit
décider là-deffus; à défaut, c'eft la nature
de la donation qui doit fervir de regle.
, Or, ici le temps où la donation de S0000
liv. devoit être payée, n'eft point exprimé
dàns le titre; on n'a qu'à le lire. Un point
certain [e préfente d'abord, & ce point COI1fifle à dire que la donation ne devoit pas
étre payée illico. La Dame Boyer njayoit
nul droit de la demander le jour ou le len~
demain du contrat. Il eft donc entré dans
l'intention des parties qu'elle [eroit payée
dans un autre temps. Il exiile à 'c et égard
deux raifons auxquelles on ne peut réfifter ;
1°. le titre ne dit pas que la donation fera
payée illico; il ne . renferme aucu~le. indication; 2°. le titre ajoute, pour en JOUir par la
Dame Creps, acceptante ,fa vie. durant en fonds
.& en fruits, ainfi que de ladIte ~ot da.ns, le s
cas de droit; par où il eil: c~rtal11 & Imeral
'que la Dame B?yer ne d.evolt pas commen'cer à jouir du Jour du tItre ..
Mais nous dit-on, la donatlOll de 50006
liv. eft dans la même orai[on qne la dot, po~r
marquer le temps où la Dame Boyer dOIt
commencer à jouir. Çes ~e?x objets :Ollt
"fournis à la même c1anfe & regls p~r la me~e
di[pofition. La déconfiture du man & [a faIllite ont mis la femme dans le cas ·de cle-
"
(7
.
,
�26
mander l'.adiudication d~ fa dot ,& d'en jouir.
La ·Dame Boyer ayant le droit de jouir de
1;1 dot, doit par cette raifon étre admife à jquir
,!uffi dans le mém_e temps de la donation.
,Cette objeRion eft la feule qu'on ppifre
faire; elle :u'e1r que fpécieufè: çar .il n'eft
pas dit dan.s Je !itI"e que Ja donation doit :étre
pay~e lorfqqe la dot la ièra. On s'eft bien
gardé de .~lévelopp~r ainii le fens du titre,
& de lui donner cette tournure. Ces deux
obj~ts f;nt' -!égi's par la ~lallfe gui porte que
la P..atne p<?yer jouira fa vie dUfimt de la
dot &
. de la donation dans les cas de droit,
Les cas de droit de chacune de ces deux
efpec~s n~ font pas le:s !Dêmes. C~ux de la
dOl~a.tio_n font encore i\lcertain.s & dépe\1dent de fa nature. Cette donation eft-elle
faite pour ~voi! li~u pendan.t la vie du fieur
J3oyer, 'lU pour n'avoir effet .qu'à fa mort?
C'eft ce que le titre ne dit p~s; il établit
feulement u~e vérité certaine, qui confifte
en ce q~e la donat.ion, fuivanr l'intention
des parties, n'étoit pas payable ]Qrs du
titre.
Or, daJ1S le doute, & fur de point de favoir fi la donation ~toit ou non payable pendant la vie du mari, ou feulement après fa
·mort, .les .c réanciers ont pour eux d'abord
la faveur ~e leur potition. Ils fe préfentent
pro damno vitançfo. La Dame Boyer plaide
pro lucro captgndo. Les créanciers font étran,.
.gers ,!U t~r,e de ~onation. La Dame Boyer
y 9- iripulé. Les obfcurités du tit.re devroient
.
•
~
c
.,
-
l
'
27
étre interprétées contr'elle, ql,Lia pocuÏt legem
ap,erûùs' cpnJèribere, ~ non c011tre les créan.ders dQl1t l~s droits ne doivent périr que
-par un titre clair & formel. Ajoutons que la
-marche du -titre ind~q!le avec évidence une
-réCer.ve d'ufufcuit e'l faveur du mari. Cette
,téferve eil claite ; )1°. la femme n~ doit pas
jouir du jour du :titre; z. 0 • il n'eil pas dit
.nOI1 plus dans ·le titre qu'elle doive jouir
ayant la mort .de fon ,mari j 3°. on voit par
,la maniere adroite dont le patte eH tour-né, que le fieur Boyer donna pour jouir
_pendant toute fa vi~, puifqu'il prévoit le
_cas o.ù il .aura de"S enfans, & où ces derniers viendront à mourir avant lui. Dans
.ce cas, la donation, dit le ,titre, fera retour
au lieur Boyer, dOI1;lteur. On s'étoit d'abord
prévalu de ce ,mot., fera ,retour, pour en ·~on: dure que la fomme de. S9000 liv. devoit. être
payée a~x enfans d~ vIVan~ du pere, p\:1~fque
ces dermers venant a mounr , la,donatlon devoit faire retour " & que ce r.etour ·ü:ppofe
le paiement préQédent. Mais 11 eft, alfé, de
voir que l'expreffion i\\l ,retour 11 expnme
autre chofe dans le cas a-étuel que la ceffa. tion du droit, c'eft-à-dire que te fie ur ~oyer
:,l'epren d ra toUS les droits de la donatIOn en
cas de prédécès de fes enfans, to~~t ~~mme \
il doit les reprendre en cas de predeces de
. fon époufe fans enfaos. Or, ces ?eux cas fot:t
&.
re'''111'S
Glans la . dOl1atlOO.
pan'fi'e s
.
.
. Le ,droIt
du 1ieur Boyer doit, fUlvan.t le titre; ttre
.le même dans \10 CaS comme dans 1 a~m'e.
1
A
�28
Il n'eff pas permis de s'y méprendre & de
le conteil:er. Or, certainement les parties
ont entendu que la Dame Boyer ne jouiroit
pas pendant la vie de [on mari, & au préjudice de ce dernier. C'eil: un point d'évidence auquel il eft impoffible de [e refurer. Dèslors il eil: dans l'ordre de conçlure qu'elles
n'ont ni entendu ni mt:me pu entendre que la
femme dût ou pût jouir au préjuc1ice des
creanciers de [on mari. Tout ufllfnrit ré[ervé ,
[oit tacitement, [oit par exprès au mari, doit
tourner néceilàirement au profit de [es créan~
ci~rs. L~s regles de la juil:ice & celles de
l'honneur ne permettent pas de l'entendre
autrement.
Or ici, comment pouvoir dire que le m~ri
ne s'eft pas ré[ervé l'u[ufruit, tandis qu'on
voit bien clairement dans le contrat qu'il n'a
rien vouJu livrer alors, qu'il s'eil: contenté
de promettre 50000 liv., avec le droit à fa
femme d'en difpo[er en faveur de [es enfans,
& celui ·d e tout garder en cas de prédécès de [a femme & de [es enfans? 011 a
beau dire que le contrat ne refremble pas
aux donations de [urvie; il refTemble bien
moins encore aux. donations réelles
& ac...
tuelles; & dans le doute, à défaut de patte
précis, la donation doit étre prire dans le
[ens le moins onéreux aux créanciers.
Il nous eil: indifférent que la donation [oit
de [urvie, ou faite avec retention d'u[ufruit.
Dans un cas Comme dans l'autre, les fins de
la D ame Boyer contre nOLIS feront mal fon ..
dées;
19
dées; elle à été faite en contemplation du
mariage; elle aura été acceptée; elle fera 1
fi l'on veut, pure & irrévocable.. Tout cela
devient indifférent. Il faut accepter une cto- •
nation qui fe fait aujourd'hui pour avoir lieu
dans les temps futurs. Qu'importe enco~e que
la Dame Boyer puifTe difpofer de la donation entre [es enfans? Tout cela 'pourroit
convenir à une donation de furvie, & mieux
encore à une donation qui ne doit avoir effet
qu'après la mort du mari. Ainfi tout cela ne
prouve ' rien. La femme m?urant, les e.nfans
non inftitués par elle aurOHHlt un drOIt de
léO'itirrie fur les soooo liv.; à la bonne heure.
Il~ nauroient eu' c.e droit;.qu'a.près l'echéanœ
& le paiement de la [omme. Mais encore
un coup: cela ne fai~ ri~ll à n~tre ~ueftion.
L'efTel1tie.l eft de [avoIr fI. dans 1efpnt & aux
termes du titre, le fieur Bo~er devait, fe d~",
pouiller .avant fa ' mort. Or, l'atte ne le dit
pas, -& donne ritême à conclure tout le contraire: Nous VeIlGH1S de le prouver, & nous
répétons une dern~e're foi~" que la claufe de
retour ne peUt indIquer nen ~e plus ~ue la
ceffation du drbit 'qu'on venaIt de cr.~er, .&
" non la reprife des biens 'qui ne devo~e~t ]a~
mais étre li~Trés du vivant de fan man.
Les donations faites en. c~nt~'at ~e
ria e [ont irrévocables. Qu~ 1a ]aI?ais, C01~te ftg,e! F urgolo'" ·l'a dit
. ,· la LOI Romame l.avott
l'
'
dit avant lui; l'Ordonnance de 1 7 ~ .1 a reété. On peut ' donner tout fan bIen ~veG
p r. ou mêmé fans caure, en feHmanant.
aUle,
:na.
'1
�~C)
~ui ra 'jaitlais contéJl:é ? :L a quèftioti :âti pou ..
v.oir n'en a jamais fait .une entre nous. Mais
il faut examiner ce qu'on a voulu. Ici le pere
doanant n'a voulu faire ,qtùüi don de furvie f
ou tout au plus un don qui ne devoit avoir
lieu qu'après fa mor~, & qui devoit ~tre
comme non adven.u en cas de prédécès de
fa femm.e & de fes enfans. O'efr dans l'état,
c'eil: fur la loi.de .ce titre que nous avons COlltra8:é. Si le lieur Boyer eût promIs hic &
nunc les .5000 0 liv., nous n'aurioos pas coh...
tra8:é avec U11 citoyen qui auroit eu fur f011
corps' un pareil engagement.
Notre fy&ême a toujours ~té pris dans le
fonds & la: ma~-Çfie du titre._11 ne p0<rte point
l'expreffion du t.ems du paiement. Ii eft clair que
le donant a v.oulu demeurer faiû, qu'.ilne s'eil:
fournis à payer-dans aucun temps; il cil: clair
encore qu'il a v0ulu qu'en c~s de prédécès
de fa femme & de fes enfans, la donation
fût 110n adv:enue: Delà concluez que dans fa
marche lk dans fes effets, ce titre n'eil: rien
de plus que de 'fimple furvie. Dans le fonds ,
le mari vivant & fe trouvant fur pied, per..
fonne ne pouvoit a~oir Je droit -de le dé ..
pquiller dé la èhofe donnée. Nous l'avons
fait obferver dans notre précédent Mé.
moire, & l'..011 n'a pas ofé le conteil:er.
On fe répuit à dire aujourd'hui que la donation devoit ~tre payée avec la dot -; ce qui
aboutit à ~ire que le patte auroit été filé
de maniere que les créanciers auroient ét~
privés de l'ufufr.uit que le donant s'étoit ré,j
!-t
rervé ; -ce qu'il ne feroit pas méme perints
tIe il:ipuler : car en cas de déconfiture, le ~
créanciers re,préfentent le failli , & ne peuv.ent être privés d'au<i:un de fes droits. Il y
a là-dem~s une grande différenoe entre la
dot '& la ,donation. La dot eil: le bien d'au ..
trui ,qu'il faut affurer., ,ou rendre ,dans les
cas de droit. La donation au ~ontraire eft
le bien du donant. Quand ce dernier ne,
s~eft pas fournis à le ,payer de fon vivant, _il
Y a réferve d'ufufruit en fa faveur; & dès..
lors les créanciers doivent avoir ,le profit que
le -débiteur aUl'ioit .eu lui-même s'il ne fût tom~
bé en faillite.
Aioli les ·cas .de ;reftitutian de la dot &
qu _'p3!iement de.la donation 11e font lpo~n~ les
lpême-s. Faut-il Je ,p rouver? Il eil: certall1 qua
le ,fieur Boyer ne ~'étoit pas, foumis .à l'obli:ga-tioll ode payer ni lo:s --de 1aae, 111 de 10n
v:ivant. Si le lendemal(ll du 'contrat la Dame
BQyer eût demandé p~eme~t de ,la dOllati<m.
on ,ne ' l'eut· paséca,Qltee. Si la Dame Boy~r
fe ,m t collOquée contre .le .gré de fon J;nar~,
ce derni~r auroit ,p~ hudire que le ,te~f's
d~ ,lui payer la donat~on n'ét-oit pas a.rnve ;:
qu'il n1étoit l'as foum~s à la payer avant :le
t'€mps . qa'il ne dev@lt pas perd.re, par fa
cpIJoc;tion, un dr:oit qu'il S'étOl; réFervé , .
~ dont il tl'avoit pas voulu fe depoulller. Il
:;;t qit -à fa femme : jouiifez de votre ~oJ. ,
à la bonne heure. Mais Jes temp~ de )O\l~~
de la donation ne (ont pas. ar~ivé~, ~ J .
ne ' dois pas être privé du droit e. J~tur.
L
�32- "
Ce que le fleur Boyer auroit pu dire dans
le cas de la collocation pour caufe de ver.
gence) fes créanciers peuvent le dire avec
beaucoup plus de raifon pour le cas de faillite: car les droits des créanciers " dans les
cas de faillite, font infiniment plus favorables,
infiniment plus forts que eeux du mari, dans
le cas de fimple collocation pour caufe de
vergence.
La Dame Boyer [eut toutes ces réflexions: car elle eft en trop bonnes mains ~ :
pour qu'elle puiffe [e les diffimuler; mais)
nous dit-elle, le mari fur pied n'e,ft pas ù~e,
hypotpefe que nous . devions prendre pour
regle, puifque le- fie ur Boyer n'eft- pas fur
pied. Erreur ' évidente. L~hypothefe du mari
fur pied doit toujours régler la Juitiee, quand
il s'agit des droits des créanciers, - parce:
qu'il eft impoffible qu'où refilfe à ces der- :
uiers, dans les cas de la faillite" l'exercice:
des droits ,& la jouiffanèe des profits que le
failU auroit s'il étoi,t' encore fur pied, parce'
qU'Un p'aéle' qUI ne priveroit -. un 'citoyen dé '
fes droits qü'alttant qu'il, tomberoit en fail- '
lite, & qùi les déc1a~eroit par ce moyen
ihtommunicables à fes ' créanciers -légitimes,
feroit un patte nul & reprouvé, tant? par les '
L6ix que }?ar l'honneur. De là concluez: fi
ex conce.ffis, d'après la' donation le' mari furpied devoit 'en jouir ', ex cence(lé"ndù lë
cas ,de ' faillite étant arrivé, les créancieri
du mari failli doivent avoir le n'iéme droit. .
" Après cela, c'el1uue ' pé-tiüoll de principes~:
&
H
& rien de plus que de venir nous dire que fOI1
~ .......'
....
,
,
.'
,
r:-",
~
mari fe trou\(ant fur pied, la Dame Boyer
ne pOUVOIT jouir l1i de la donation, ni de
la dot, mais qu'après la faillite elle a pu
jouir de l'une & de l'autre,; c'e~ préfent~r
de nouveau la méme queihon; c dl: foutenir
que l'aéle lui donne le, droit d~ j~uir en c~s
de faillite de fon man, ce qUI nef! certaIJ
nement point exprès dan~ l~ titre; c'eil: foutenir -encore qu'on peut f!Ipuler des pattes
de cette 'efpece~; & néanmoins un p~ae de
cette nature feroit également profera dans
l'ordre ele la raifon & , de la Lo~.
"
. Inutileme.nt nous çlit-oll. que il le man a~olt
fait u~e reconnoi{fance de dot de 50000 Inl'. ,
if faudroit Ja pay.è r a:ujour.d'hui. L'obferva~
.
ile - mais'
a- t-el1eravec
tlon
e ff J' un,
-' quel ra·p pon
,
.'
r.? Une' recol1noiffance de dot leroit
1a- caUle.
' .
d
'l"t
toute autre chofe que le tme ont 1 s agt
comme
entre
nous,• 1'1 faudroit
. . la regarder
r
cl
la dot elle-même : Ce feroit au Ion s u~e
libéralité; mais ,à l'extérieur & dans. les !n.
bunal1x cette reconnoiffance ne ferolt lqu ~ne
ui devroit fe régir par l,es. r~g es e~
reconnoiffance feroit ,Irrevocable,
elle 'ne tomberoit point el~ ufufruit. Pour hto~t
,
,'
telle feroit toute autre COle
~~~s-qCette
dm
~n ;'ln~t~o~
qu~ ots
dont il s'agit au procès. &
avons cité Furgole, queil:. 49 ; .
'fon ue nous avons 111ce n'eil: pas fa~ ~aI
o~ pour établir qu'une
voqué, cette do,- nne
mariage ne peut fo~
donation en condtra;, . .e' car s'il nous fallolt
mer qu'un don e li.lrVl, ,
1
cl:
�•
34
cela pour notre fyft~me, il feroit déplora~
ble. Les contrats de ma-riage font plt1,~ que
tous les autres hlfceptibles -de tous paB:es
& de toute convention quelconque. lis font
dOl;C très-fufeeptibl6s de donations pures &
fimples, a&uelles & fans condition~
Mais pour admettre des dotlations de ceHe
efpece, il faut les trouver bien écrites dans
te titre ; car la préfomption de la donatioll
abfolue ' eft la plus- odieufe de toutes. cette
propofition eft dans tous le.s c livres & dans
l'ordre -de tous les priHcip-es. Delà il fuit
que toute interpré-t:ation qui tend à réduire
& refl:reÎndre les donations, eft extrêmement favÇlrable, fur-tout quand elle e:fit prol?ofée par des cr-é-'anciers :légitimes qui plai.
dent pour ne pas perdre leur bien: or voilà:
comment & &ms quel fens nous avons oppofé la doB:rine de Furgole. Dans cette acception eJle cft .eifentiellement légiûme. La
tend.ance des L~ix & des. ,~~ais principes eft
dans ce cas de réduire les gains que les
contrats de ma-ri-age-s renferment à de fimpIes gains de furvie. Voilà. le fens de la
domine & des Arrêts rapportés par Furgole. Dans ce fens & fous ce rapport, les
principes de l'Auteur & les Arrêts qu'il rapporte font d'une juftice inconteftable. Ils font
encore plus juftes, plus heureufement, plus
favorablement appliqués, lorfqu'il s'agit,
comme ici, de l'intérêt des tiers créanciers,
& de leur communiquer leur bénéfice dont
le donant ne s'eil: pas dépouillé. Ici la Da-
B
'
35
m~ oyer ll'echappera jamais à ce que pré
fente d: f~che,ux pour elle le tableau de la
caufe ~edl11te a ce qu'elle veut priver les
çréancIe:s d~ .fon mari d'un bénéfice dont
ce dernler n avoit pas voulu fe dépouiller
~ ,dont le titre. ne le dépouille pas de fo~
VIvant. Le man fur pied jouiroit. Le mot
eft au moins implicitement liché dans la défenfe que nOliS réfutons, & le mot étoit néeefi'aÎ:re, parce que la chofe eft d'après le
~tre, d'lll1~ évidence à laquelle il eft impof~
liMe de réiIfter : or il eft impoffible en matier: de donation & de titre purement luetatlf, que les créanciers du failli ne jouit
:Ce-n,t pas du bénéfice réfervé au débiteur fur
pied.
Au furpIus nous y confel1tons. L'autorité
de Furgole fera d-écifive pour la Dame Boyer,
fi elle parvient à prouver que la donation
eil: pure & !impIe, inévocable & ab[olue.
Mais il ne faut pas prendre quelques mots
à la volée, qui font démenti's par le fOlid~
d u titre & la marche de , fes opérations. Il
faut examiner & prendre: le titre dans toute
fa plénitude. Il faut fur-tout pefer les effets
que les parties ont voulu lui do.nner : O-r à
quoi aboutiffent-ils? A tranfporter les S0000
Ev. fur la tête de la femme, fans les donner
hz'c & nunc; ce q~i l'a réduit au f~mple droi~
de demander un JOur la fomme; a donner a
la femme le droit d'en difpofer, le cas
échéant en faveur de [es enfans tant feulement;
rendre la donation comme non adA
4
,
.
â
,
�,
36
yenue par le prédécès de la ' femme fans en..
fans, ou des enfans avant leur pere. C'efI:
donc une donation dont le mari garde 'les
fonds, & qui ne fera que paffer & couler
en écriture, fans avoir. aucun effet, fi 'la
femme ou les enfans viennent à mourir avallt
le donant. Or nous demandons s)il efr pof.:
fible de regarder un titre de cette e[pece
comme une donation pure &- [impIe, irré_
vocable & abfolue. Quand on veut faire des
donations matrimonialés , & qui portent COll.
tre le tiers, il faut- le dire de maniere à n'y
laifler aucun doute. Il ne [uffit pas de "dire
qu'en cas de pré décès de la femme ou des
enfa.ns, la donation fera retour en entier: car
prenez-y bien garde; ces mots qui ne [ont
que cauteleux, n'expriment pas dans le [y[.
tême de l'aéle la néceffité d'un paiement préalable. L'aéle prévoit le cas de prédécès de
la mere [ans enfans : or il eft convenu que
le mari reftant [ur pied; & la mere venant
à "prédécéder, il n'y avoit plus de donation. Cela eft littéral, & cependant [uivant
le titre, dans ce cas comme dans , tous les
antres, la donation devoit faire retour en en.
tier. De~à concluez " que le retour exprimé
dans l'aéle n'exprime que le retour du droit
de demander la donation qui n'étoit point
échue lors "du contrat, & dont le paiement,
[uivant ce même titre, n'ayant point de terme certain, ne peut dès-lors être renvoyé
qu'au décès du mari. Qu'on nous dife à préfem que nous ne nous a{ferviffons pas aux
termes
-- -.
:-
-
~._.
.
-....
~
,
37
t.ermes du titre, & qU'OD juge par contraire ,
fI ce n'eft pas la Dame Boyer qui vient tor- :
dre les termes pour échapper à l'evidence du'
fens que le titre renferme.
'
Ainii réfumons-nous. Tous les paétes du
titre peuvent convenir & conviennent en
effet 'à un [impIe don de furvie artiftement
coloré pour lui donner in litterâ l'apparence
d'un titre, pur & [impie, & ne devant néanmoins avoir fon effet définitif & perdurable
que dans le cas de furvie, [oit de la Dame
Boyer ', foit de fes enfans. D'autre part, il
nous eft même indifférent que la donation
foit regardée comme gain de furvie. Il nous
[uffit que le droit d'en jouir ne. fluiire nai:;
tre qu'à l'époque de la mort du mari. Si cé"
dernier s'efr réfervé la jouiiTance, foÏt par
exprès, foit tacitement, il eibimpoffi?le que
fes créanciers n'en profitent 'pas. Ajoutons
qu'il faut pro[crire to.u~ ce qui pe~t tourJler
en frauae de ces derl11ers. Il eft Impoffible,
de les rendre viétimes des obfcurÏtés qu'on _
pourroit gli{fer dal's les titres dC'.fa~ille , pour
agir & fe' c~n~lIi're à 17ur pré).udlc.e, [U1~ant
les cas & les eveneruens r oute!i ces l efleXlOns
vont à la cau[e. Elles [e réunifient à dire que,
foit qu'on juge du ûtre comme d'une donation de furvie, [oit qu'on regarde la dOllation comme- pure &. {impIe, & ne, devant
être payée qu'après l~ mort, du .man, da~s
tous les cas la Darne Boyer n aVOIt pas, drOIt
d'en jouir pendant la vie de ,c~ . dernIer,. &
au préj~dice des créanciers legltlm~ de fon
�38
,
mati. Ainii fe jufrifie notre appel émis envers
la . Sentence qui adjuge à la Dame Boyer les
intérêts de l'il donation depuis 1776. Les
temps d'en jouir ne font pas encore arrivés
pour elle. Son mari fur pied ayant droit de
jouir fuivant le titre, il eQ impoffible que
ies créanciers ne l'aient pas. Le mari avoit
droit de jGmir. C'étoit en force d'une réferve d'ufufrl1it implicite. Le patter qui priveroit fes créanciers de ce droit en cas de
f.aillite n'exifte pas., & s'il exiftoit, il n'auroit
aucune efpece d'effet, puifqu'il feroit tout
à la fois illégal & même fcandaleux.
Cela rend !nutile la queil:ion de la défalGation des 1 z.do ·liv. d'intérêts; car fi la Dame
Boyer .n'a point ' d'illtérêts à prétendre, elle
ne peut pas même profiter de la maifon à
compte de fal donation 'd ont la jouilfa1'lce eft
encore , fufpendue. Mais en fuppofant que les
fruits 'pufi'ent lui appartenir, ce ne pourroit
jamais être'. què jufqu'à la concurrence de
fes befoins ; le furplus appartiendroit toujours
aux créanciers; nous en avons pofé les bafes
aux pages 58 . & fuivantes de notre précédent Mémoire: Il eft vrai que la -Dame Boyer
prétend le contraire aux pages 39 & fuivantes
de la défenfe que nous réfutons; mais il ne
faut que confronter & rapprocher les Doctrines refpeB:ivement invoquées, pour
convaincre que la regle eft pour nous. Ainfi nous
n'y revenons plus.
,
. Vainement oppofe-l-on qu'il n'eft pas au":
jourd'hui queftion de dot., mais feulement
le
39
,
.
d'une don.ation dont la femme doit jouir pendant fa VIe. Nous venons de démontrer Je
contraire dans la difcuffion de la précédente
propoiition. Mais quand même cette derniere
exception feroit fondée, quand la Dame
Boyer pourroit revendiquer une vraie donation, cette donation ne proviendroit pas
moins de fon mari. Dans le fyftême de la
Dame Boyer elle-même, la donation marcheroit de pair avec la dot. Elle feroit foumife aux mêmes regles que la dot, & comme nous l'avons déja dit, elle feroit encore
moins· fav(i)rab1e que la dot elle-même, puifque la dot eil: un fonds qui procede des
mains & du patrimoine de la fem'm e; au lieu
qu'ici la donation ,feroit pri(e en elltie~ f~r
les biens & facultes du man; & les p n ncIpes qui veulent que ~enda~t, la collocati?ll
les créanciers du man partiCIpent aux frUIts
, de la dot, quant à ce qui excede la f~blif
tance de la famille, font encore plus VIgOUreux, quant au cas qui concerne les !ruits
d'une donation faite en contrat de marIage,
pour marcher du même pas que la dot. &.
poun~tre frappée par .les mêmes r~g~es. ,Amfi
toutes les regles, t.out,es les c~nüde,ratlOns,
toutes les faveurs de juftlce aboutlfi'ent a donn~r
à conclure qu'à tout événement les ~cqu~
reurs que la Dame Boyer VOUdr?lt d~'11 r ne doivent pas être touches, pU1[pOUl
e , le r.eront pas i'1 l' on retranc he de
"1
qu l s ne
le
J
"
'~
'nçe
cette
marre
importante
d
1I1ter ts
,
'
j a crea
'11
' v
qui s'accroît toUS ks jours, qu e e t-rou e
�4°
dans les biens de fon mari dont elle voudroit s'avantager & en faire un capital au
préjudice des créanciers; & l'on ne voit pas
comment elle a pu dire que le temps des
vengeances étoit arrivé. Cette expreffion outrée dans tous les fens devoit-elle étre appliquée à des acquéreurs qu'on veut dépouiller
en force du plus louche, du plus mal fonnant de tous les titres, & en dépit de tous
les principes? Difons mieux: la Cour par
fon Arrêt va faire arriver le temps de juftice & de vérité, où il fera fixé qu'une donation entortillée, non payable pendant le ma- '
riage , & au moins ex cOllfeJfis , tant que le
mari fe trouve fur pied, ne doit être envifagée que comme une 40nation de furvie ,
quand on la raproche des paétes appofés
dans le même aéte qui la font expirer ou retourner par le prédécès de la femme ou de
fes enfans; où il fera jugé tout au moins
qu'une pareille donation renfermant implicitement la réferve de l'ufufruit au profit du
mari, ne doit jamais paffer à la femme qu'après la mort de ce dernier; qu'on ne peut
pas fuppofer l'exifl:ence d'un paéte contraire;
que ce patte contraire feroit même abfolu-'
ment nul, comme encourageant les fraudes &
les faillites; où il fera jugé enfin & à tout
événement qu'une donation pareille, marchant
avec la dot, ne peut qu'affurer comme elle
à la femme le droit de fes alimens & de fa
fubfifl:ance, & laiffer le furplus de l'intérêt
aux ct:éanciers du mari; ou ,pour mieux dire
ces
4I
ces trois points feront jugés enfemblement
au profit des créanciers dont la caufe a pour
principe l'ordre & l'intérêt public, qui font
les plus fermes bafes de l'honneur, de l'intérêt & du patrimoine des familles.
CONCLUD comme dans notre précédent
Mémoire) & à l'el~nt de la requéte
incidente des hoirs
, avec plus grands
dépens.
GASSIER, Avocat.
FERAUDY, Procureur.
Monfieur le Confiiller DE F R ANC,
CommijJaire.
�CONSULTATlàN.'
POUR les hoirs du fieur
DONET:
(
CONTRE
La Dame
CREPS - BOYER.
L
ES Souffignés, qui ont pris Ieéture des~
pie ces & Mémoires du procès, & après
avoir entendu Me. Feraudy:
qu.e puifque la Dame CrepsBoyer s'obltine à prétendre que la donation
de S0000 liv. portée dans fon contrat de
mariage eft faite pour avoir effet dans le cas
de faillite de la part de fon mari, il n'y a
qu'à préfemer une requéte incidente au nom
des hoirs du lieur Donet, pour faire dire que
là où la Cour viendroit
à le penfer de même,
,
SONT D'AVIS,
\
,
�z
la donation fera dans ce cas déclarée nullë,
frauduleufe, & comme telle carrée.
Ces fins ne doivent étre que fublidiaires,
parce qu'il deyiént iftptile pour les hoirs
Donet de faire cafTer la donation, s'il fatit
la: regarder comme fimpIe don de furvie, ou
s'11 faut hi confitlérer COlnme ne devant aVblr
effet & exécutiuil qu'après la mort du mari
qui s'eh étoit réfervé l'ufufruit, finoh par un
pàtte exprès, du-moins par Ull aécdt'd d'évidence & teUetpent inné dans l'ordre & la
marche du tttre, que la Dame Créps-Boyer
elle-même n'ofe pas le co ntefter.
Or, 011 a fuffifam ment démolltté dans lè
'procès l'tÜl & l'autre de ces deux poims. II
feroit il}utile d'y revenir aavantage. Olï a dit
de plus qu'en confidérant la don:ttion comme
pure & fimp1e, fous· réferve d'ufufruit au
profit du mari, le patte qui auroit fait cerrer
cet ufufrnit eh cas de faillite, feroit un patte
indécent, d'un dang~reux exemple & contrair.e à la {ûreté pUblique. C'eft ce qu'il
efl: queftion de développe-r aujourd'huI, pui'fque la Dame Creps-Boyer s'obtl:ine à foutenir que l'ufufruit du mari, & conféquem- '
m~l'lt' de fes .oréâticiers, -devoit expirer par
fa- ifai1l1re. · La Dame Creps-Boyer part du patte du
cO'tlrrat &- d€ l-à claufe-, portant ~ue la donatIon de -5 '0000 li\'. eH à prendre fur les
mens <iu hi'a:ri, pour en jouir par ladite DUe.
Cr'e-ps -,ftltl'ire épOlljè, fi vie durant en fonds & '
frtd~s, 'dinfi "qUe de la dot 'dans -tous les cas
J
'
3
de droit. La faillite, dit-elle, eft un cas de
droit pour jouir de la dot; elle doit donc
,former auffi cas de droit pour jouir de la
'donation que te titre affimile à la dot, &
qui ambulac pari paffù , fuivant la loi du contrat.
Il éroit bien plus naturel, plus légal &
plus décent de conclure que cette claufe du
contrat, portant énonciation du cas de droit,
devait s'entendre difiribucive & fingula fingulis referendo, c'cil:-à-dire, que les parties
Ont voulu que chaque cas de droit fe vérifiât dans chaque objet, fecundum Jubjeaam
mmeriam; de maniere que la dot étant à reftituer ou à rembourfer dans le cas de mort,
de faillite ou de vergence, les parties ont
voulu dire que la dot [eroit reitituée ou af.
furée dans toùs ces différens cas, ce qui n'a
pas lieu, & ne peut même avoir lieu dans
le cas de la donation faite avec réferve d'ufufrllit all profit .du donant, le cas de droit relativetnent à cet objet ne pouvant être que
je cas de la mort.
Il ne faut pas perdre de vue que la donation dont il s'agit e11: faite avec réferve
d'tlfufruit au profit du donant. Cette réferve
ne fe trouve point éCrite dans l'a8:e; mais
/ les pa8:es qni s'y trouvent écrits la fuppofeht néteiraitetnent, & 1)e permettent pas
d'en dauter. D'abord l'atte ne dit pas que
la Ihme Creps en jouira tout de fuite; on
n'y prend pas des arrangemel:s ~our la ~a~e;.
I::-aéte dit même qu'il n'en Jomra pas llllco,
�4
puifqu'il renvoit, au contraire, fa jouiffance
au cas de droit. Ainfi le droit de jouir dans
le moment eft réfervé littéralement au mari.
Il eft de plus convenu que 11 ce dernier
n'était pas tombé en faillite, la Dame Creps
n'auroit jamais eu le droit de demander la
défemparation de la donation; & l'on fent
bien qu'elle n'a fait cet aYeu décifif, que parce
qu'il était néceffaire & forcé fur la teneur
& l'~nfemble du titre.
Dans fa derniere défenfe elle vient de fe
placer bien franchement dans la polition
d'une donation faite avec rétention d'ufufruit,
& néanmoins payable ~n cas de faillite; au
moyen de quoi il faut juger le titre fur cette
hypothefe, pour le cas où la Cour viendroit
à penfer que la daufe de l'a8-e p Orte effectivement que la Dame Creps - Boyer a,ura
droit de jouir & de fe faire payer de la do~
nation en cas de faillite.
Une pareille c1aufe prife dans ce [ens
pourroit-elle étre valable? Qui ne voit qu'elle
[eroit tout à la fois indécente & frauduleufe ?
D'abord elle faciliteroit les faillites. T out
donnant compta,n t avec 11li-1l]~me, verroit à
chaqu-e intlant, s'il ne lui eft pas 'plus avantageux de faillir ,,' & [a faillite feroit décidée dès le moment où il [e trouveroit tant
foit peu gêné dans [es affaires. Il jouiroit
par fa femme du revenu de [es biens, & [es
créanciers légitimes en feroient fruftrés. D'au~
tre part, pt:ut-il être permis en droit de [e
réferver l'ufufruit pour foi -même tant feule-
-
-
ment ,
tranfipo~ter
t & de
le droit cl jouir à
mell ,
,
.
l" ,
"1 Un
t autre qu'aux creanciers egltImes,
de cette nature dr-il dans l'ordre
Ph l'es licites? N'eft-il pas évidemment prec Ol~
é' d' d ' ?
' aré en fraude, & au pr JU Ice u tiers. .
p L
gle du droit eft, que tout ufufrUlt
a re
r 'Il'
uelconque appartenant au lai, l, tourne a~
qpreJu
" d'Ice de 11l'es créanciers qUI fuccedent
, ft
.a
tous fes .droits quelconques, & c,e n ~ pomt
r 't du failli que fes creanciers
font
par I e lai
,
'
l'
•
il'
C'e{l
par
une
de
ces
operations
elllveuis.
l
1 1
ales & d'ordre public, auxquel e es pacdes Parties ne peuvent
?éroge,r., La
'ffiOll des aétions du fallh a fes cre antran fiml
'1
f: ns
. ' . & ' de tous fes droItS que conque ~,
Clet s,
.
d' dre & d 111exce rion, efr une opération or
,
, ,P bl'
une opération par confequent
terd pu IC,
, d' fi il 't ne
à laquelle le porteur du drOit u u rUl
. & l'
P eut pas renoncer.
il
.
,
e
d'autant
plus
vrai,
apC e pnnclpe l [
,
1
..
ui s'en fait à la caufe d autant p us
q que la faillite di: un fait
lavora,
' d la art du deblteur.
touJ' ours volontaire e,
P,
d'
el'
fe pnvant d un rolt qu
Ce dernier, e~ fi l1'te fe réferveroit donc
conque e~l cas fi ~ alf~uffrir à fes créanciers
le pouvoir de ,alr~ d 1 raillite & de la
éJudlce e a l.
bl
le dou e pr
, U
éte de cette efde fes drOits. n pa
'b ' '1
perte ourrOlt-1
. '1 dOI1C n'être pas prohl
, 1 . e.
P
pece
l' d'Ire qtl'il ne dOIt e Jour
e pas le
C
ommen~ n
ft
les créanciers en cas
qu'à l'objet d~ fru rer & de détre1re dans le
de funeil:e évenement
B
t~~e
~es
~ltcatl~?e
d~s
~a~
~r~fque
�6
comm~rce? Ce patte [eroit prohibé vis-à-YÎs_
tout' cuoyen quelconque; mais il doit l'étre
encore aV.ec plus de [évériré vis-à-vis d'ull
Négociant. E~ en effet, la Dame Boyer dit
dans Fa denllere ~en[e qu'elle 'accepta la
donatIOn, parc~ qlf'elle ép0ufoit un homm.e d;
de fortune qui continuoIt un commerce péril_
leux , ' & qu'elle ne voulut pas s'expoJèr au. déJàsrqment d.'avoir Jai, un mariage de fortune,
& de. mourir de faim ûle & fis enfants.. Ce
qu'elle dit Jilr ce prétendu mariaf)'e de. for.rune
n'a tien d'exatt : car le chapeau valoit, com_
me on dit, la coeffe dans cette union, &. le
Sr. BQyev n'avoir pour lui que l'opinion de for....
tune <Ju'il àvoit [ç~ répandre da ns le pllbJic,
en fa[cinant [es -yeux Rar l'excès de res dépen(es. Mais eû.t-eHe 'fa~p ce qu'on a.ppelle
un mariage de fbrtune, il ne faudroi~ que
partir de ce qu.'el1e en dit elle-même, pour
fe convéûncre que le patte Gont elle excipe,
pris dans le [ens qu'elle veut lui donner, ne
peut érre qU'lill pa~e iIIicite & clreffé tout
exp~ès en frauoe- des créanciers . .Elle a vu,
dit~el1e, que [on mari fai[oit un comme]:~e
pérü1eu.K!; elle a v0\.du s'affurer un pain. Mais
rO. ce pain qu'eUi a voulu s'affurerexcédo.i;
la fortune_de [on mari. 2 q• Elle a voulu fe
l'ail'urer. au préjudice des créanciers. légiti_
mes, &. fef:l pr-éci[c€ment cette confidératioll
~~ J:>r-éjudice des créanciers qui rend l~ patte
IllIcIte, I;>at=Ce que tout de rn~rne qu'un débiteur ne peut pas faire que [es. créanciers ne
,
,
foient tels; d~ méme :1 Il'e ll pa' "
1 1
. '
•
.
l[
, s nOn
p us
en fon pOUVOIr de [opfrraire P
1 "1 ;
fi
'
.it:
,
iIr
que
OU~
paLLe
que
ce
pUIJ"le
~tre
une
part'
d
'~
1.. •
,
,
le e les
~}en,~ aux dt:'olts de [es créanciers,
',~
. C eft [ur-tout POUf les Négoclans qui ex _
eent un com1l}~rce périlleux nuè ce p. ,.~r ~
fe · " '1 é bl' Il r. '
" -:L ~.
nnqpt;
, Wb e . ta ,l, . s l~ ~9n~e.rOlent donc le drol
(te !le rIen n(qu~r & de fflire lel1r" CO mm " ~
.
.1'.,
& ' '1 d
.,.
ers;~
al!, rllqu~ , p'er! e leyrs cr~ançie.rs. Si c~
e,oQ1merce etoIt -h~llreùx) ils ~n retireroie~f
le. profit? fi .'par c0!1tr~re ~l le~r deve1J~i~
funefte , . Il,s. Il eu relfentiro~ent pas les pe; ~s
~$ ~ aU,rdl,ent. -r?~1r.Y9 p~>r un Ea:Çt~ quf le~~:
~1ftlrer01t .la Joulifauce A~ tous leUrs 'droits
ta.n~ ~u'iLs fet.~i~~lt fu.r p'i~.d, & qui i~~l ~(J
dépouIlleroit ,en ,~es cql~,~elltrant Qé~{lIpoin~
~P.s leur f~_1p~I1~, 10r[qq'Il: leur .plairoit de
fo~he~ e~ L:aIlh~e, &; çle depQ.uiller leur~
çré-anccers eh ' [~ ' dépolli\lant eux -ll)érnes.
tti~ée .c;l'u? ~épouil1eine~lt yolont~ir~ de 4l.
1;art du deblteyr, p04f ep donner le b~_
n~1ice ~ [~ famil1~ au pt:éj,uétice de [~~ cr~a,n.:
~~ets, ne p~l1t que révolter. Pa.r ce moyel\
tOut Négociant pourroit [e réfyrver le droit
~~ jouir dans ~ous l~s cas ou par lui-méme
ou, par les fiens, c'efl:-à-dire, p"r [a f~mmi
ou [es enfans, de la totalité <le fe~ biens,
~n les. don.l1.an,t ou les ~ff~rq,n{ ~ [~ fem1,1le
ou à fes enf~l1.S, quant à la, jQ~tranc~) d~1!.s,
le ca~ où il viendroit à faillir..
. COll)rnent ne pas ~oir qu'un 'pa.reil t~tr~l
ne peut qu'~tre du plus dangereux exemple?
�8
Cor,nment ne pas voir encore que fous pré ..
texte de s'affu:,er 11~ p~in, la ~~me Creps_
Boyer fe ferPIt enrIChIe au preJu,dice d'une
maire de créanciers légüimes? La Dame
Creps - Boyer 'convient que fi fon mari fe
.trQuvoit fur pied, le droit de jouir ne feroit
p.<;>int ouver.r~n fa faveur, Elle veut que le
feul fait de la faillite de ce dernier lui donne
~ri ôroit qll'elle n'auroit pas fans cet évéIH~mehf, Si le lieur Boyer n'étoit point failli,
fef - créanciers pourroient jouir pour lui.
s' auroie,nt ~onc p~rdu ce droit, par cela
feuI ! qu'il a~ ternis fon bilan', c'eft-à-dire , que
1 1 un 1nou,,"eal'1 degré!le
l"é
ëv nement."qUI (onne
fâ.veur a~~ créanciers, légitimes, tourneroit
~ontr'eûx : & e,lI1pireroit leur conditiop fur le
patrimoine de Iéur débiteur"
: 'De ~à ,>·il ,arriveroit que tous les N égocian,s ne fe marieroient plus qu'à des conditions pareilles, Ils fe conferveroient ainii
droir de mettre la fortune de leur famille à
l'abri, m~Il!e le moyen de l'augmenter, en
promettant - de donner, en cas de faillite,
foit la v.aleur des biens qu'ils poiredent, foit
, m~me 'au delà, & le cas de faillite arrivant,
les créanciers ferolent privés de tout, tandis
que le f~il1i jouiroit de tout par fa femme ou
par fes enfans, /
Pour bien' fentir ce que le titre dont il
s'agit au procès a d'odieux, d'illicite & de
~ariger~u~_ ~ans le fens que la Dame Boyer
veut lui donner, on n'a qu'à fuppofer le
It
J
le
~a
s
d'
d
'
9
c~~ un~, ~Ifilat~on &faite explicitement avec
re en'e
Ult! rUlt,
pour ~tre payé
r.'
'1 r:
.
r"
e, 10It
a' a lemme,
10It aux enfans ' ell cas de rJal'1
r
l Ite, Jans que dans ce Cas les c é '
r anclers y
pU1lJ;el~t rIen pr~tendre, Tout cela n'eft pas
~xphCI.tement
le t't, M'
, ,. l
,developpé
I rdans
e
aIS
fout ~e a s y trouve néanmoins du propre
~ ~~u. de la, Dame Creps-Boyer , puifqu'elle
~ol:vle n t d ~lfine part de la réferve de l'ilfllHl1lt .a,u ~pro . t " du mari & tant qu'il feroit
fur pIe d , 5X 9t~ elle veut d'un autre côté que
le cas de . falllIte faffe expirer l'ufufruit d
~61i rria~î .Jt éfêrvé p;lr le titre. Or encor:
~1l1 cOuPr>1 qUe penferoit-on d'un con:rat dans
l;,èrJ?eé~ , d~què~ on trouver~it tous ces traits
al,t] Ü, d,e.ve~?ppes' ? ~om~ent pourroit-on en
~~Je:l1l.r ,:1 a~pea? E,t des-lOfS n'eft - il pas
:i~~âeü~ " f~ lt en fentlmens., fait en principe,) ,de droIt, que la donatlOn efl: nulle dans
totali té " parce qu'elle eil: évidemment
~~u~üleufe - dans fon enfemble & dans la
d îa1ne des claufes indiviiibles qui l'accom~'ne)1t ?
. Et d 'ai:Ieur's , quand même elle ne feroit
~âs Inde en totalité, elle la fera toujours
ë',ans la . da ufe à laquelle la Dame Creps~3Yér "eut' do nnede fens de priver les créanCi~ rs d~ dona nt failli qui s'eil: réfervé l'ufuf!~t ' 4 '~ _de les en priver par le feul fait de
l ; : f~~'i rl}le - 'de ce dernier, Il eil: impoffible que
cff,tre c:âu fe, p lliffe avoir effet, parce que tous
1~S' pdn cip es connus s'opp01ent à ce qu'un '
.
'Ir
"
fa:
e
�10
éblteur puifre fe réferver l'ufufrait pour lui~
~e, pour en priver fes créanciers dans le
œid~, fuilltte; & la Dame Creps-Boyer l'a
tellem.en~ , feJ1ti, qu~ dans fes dernieres dé(eÙfe-.f\ elle fait obferver qu'elle auroit à tout
èv.,é!temellt dés alimens à, pr.endre fur la do~
'l .
ce' qui 'p réiénte' , comme on voit, tout
a~è '~oiîlt <le vu~ qQe celui de l'exéc~tion
~ , ~i&,.e_ , _& paroIt méme renfermer 1aveu
d:e ~la nullLté _; mais elle n'dl: pas mieux fon<fie, Ûll1S, ce dernier rapport; car elle a fes
altÏ.p1.ejlS à-prendre fur fa dot, & non fur les
wml;IleS qui fon.t dues aux créanciers. Ces
dernIers ' q'pi certant de damno lIitando, paf..
Cent av.api: le . fa-illi & fa famiIJe, quant à c~
9r éonierne les alimefls; on ne trouvertt
fUllais glll,e l~s .c;réanciers foient obligés de
Èerdr,e, p-our_'a-!imenter la femme où les enf.ans dN- fa il IL: Il eil: au contraire de princl~e ,. que quand la donation faite à la
femme èn contrat de mariage eft exceffive,
f~s et:éancien - du failli doivent profiter_pendant fa vie de ce qui excede la mefure d'un
hO,.tlll~te entretien. Mais cette regle n'a lieu
qn'a~ianJ ql1~ la donation eil: légitime, &
qU2Jle efr &ailf~urs pure & iimple. Quand
~Ue ~ e.fr ~rê~lVelyée à la f110rt du mari, ou
que fa temme l'l'en doit jo'u ir qu'à cette
époqne; & , pour tout dire en un mot,
quand le mari s'en efr réfervé l'ufufruit, les
cré.mciers. ont le droit d'en jouir jufqu'à fa
Iport" & l:al~mentation, foit de la femme,
i;
ui
Il
foit des enfants, ne vient qu'apt '. ~ le paie.
ment des créances.
V"
DtLIBÉRÉ à Aix le
I2
- A
Juin 17 8J.
GASSIER.
BARLET.
FERAUDY, Procureur.
Monfieur DE FRANC, Commiffaire.
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Monographie imprimée
Description
An account of the resource
Ouvrages imprimés édités au cours des 16e-20e siècles et conservés dans les bibliothèques de l'université et d'autres partenaires du projet (bibliothèques municipales, archives et chambre de commerce)
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums sur le mariage, notamment affaire du divorce de Mirabeau
Subject
The topic of the resource
Droit des successions
Factums avant 1789
Successions et héritages
Description
An account of the resource
7 affaires relatives au divorce exposées dans 28 pièces datées de 1782 à 1785
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gassier, Jacques (1730-1811 ; avocat)
Portalis, Jean-Étienne-Marie (1746-1807)
Pascalis, Jean-Joseph-Pierre (1732-179.?)
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence), cote RES 10646
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Veuve d'Augustin Adibert (Aix-en-Provence)
Joseph David (Aix-en-Provence)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1782-1785
Rights
Information about rights held in and over the resource
domaine public
public domain
Relation
A related resource
Notice du catalogue : http://www.sudoc.fr/202570673
Vignette : https://odyssee.univ-amu.fr/files/vignette/RES_10646_Factums-mariage-vignette.jpg
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
1 vol.
pagination multiple
In-4
Language
A language of the resource
fre
Type
The nature or genre of the resource
text
monographie imprimée
printed monograph
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
France. 17..
Abstract
A summary of the resource.
Comprend 7 affaires (28 pièces, manuscrites et imprimées) datées de 1782 à 1785, dont l’Affaire du divorce de Mirabeau constituée de 13 pièces (la pièce n° 10 contient 202 pages).<br /><br /> En 1783, Portalis plaide avec succès pour la comtesse de Mirabeau contre son époux, avec l'aide de Pascalis et Siméon : 13 factums en témoignent – tous imprimés en Provence - pour plus de 700 pages, avec un résumé manuscrit de l’affaire.<br /><br /> Sur cette affaire, voir : <br />
<ul>
<li>François Quastana : « Le procès de Mirabeau ou la justice d’Ancien Régime au ‘tribunal de l’opinion publique’ », dans sa thèse La pensée politique de Mirabeau (1771-1789) : ‘Républicanisme classique’ et régénération de la monarchie, PUAM, 2007, p. 281-328</li>
<li>Jean-Louis Gazzaniga, « Portalis avocat », dans Portalis le juste, PUAM, 2004, p. 43-61</li>
<li>Joël-Benoît d'Onorio, Portalis, l'esprit des siècles, Dalloz, 2005, p. 65-101</li>
</ul>
<br /> Numérisation CCL Arles 2010
Provenance
A statement of any changes in ownership and custody of the resource since its creation that are significant for its authenticity, integrity, and interpretation. The statement may include a description of any changes successive custodians made to the resource.
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence)
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
https://odyssee.univ-amu.fr/items/show/177
Table Of Contents
A list of subunits of the resource.
<a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-1.pdf" title="Affaires 1 à 4" target="_blank">Affaire n° 1 (1784)</a><br />
<ul>
<li><a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-1.pdf" title="Affaires 1 à 4" target="_blank">Pièce n° 1 - Louis-Auguste de Lisle c. dame de Gabriely de Lisle</a></li>
<li><a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-1.pdf" title="Affaires 1 à 4" target="_blank">Pièce n° 2 - Louis-Auguste de Lisle c. dame de Gabriely de Lisle</a></li>
<li><a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-1.pdf" title="Affaires 1 à 4" target="_blank">Pièce n° 3 - Dame de Gabriely de Lisle c. de Louis-Auguste de Lisle</a></li>
</ul>
<a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-1.pdf" title="Affaires 1 à 4" target="_blank">Affaire n° 2 (1785)</a><br />
<ul>
<li><a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-1.pdf" title="Affaires 1 à 4" target="_blank">Pièce n° 1 - Elsear Ambroise Roche c. Jeanne Annezin</a></li>
</ul>
<a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-1.pdf" title="Affaires 1 à 4" target="_blank">Affaire n° 3 (1785)</a><br />
<ul>
<li><a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-1.pdf" title="Affaires 1 à 4" target="_blank">Pièce n° 1 - Anne-Rose-Jacqueline de Peissonel, Pierre-Mathieu Barthelemy</a></li>
<li><a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-1.pdf" title="Affaires 1 à 4" target="_blank">Pièce n° 2 - Pierre-Mathieu Barthelemy c. Anne-Rose-Jacqueline de Peissonel</a></li>
</ul>
<a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-1.pdf" title="Affaires 1 à 4" target="_blank">Affaire n° 4 (1784)</a><br />
<ul>
<li><a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-1.pdf" title="Affaires 1 à 4" target="_blank">Pièce n° 1 - Mémoire - Comte de Mirabeau</a></li>
<li><a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-1.pdf" title="Affaires 1 à 4" target="_blank">Pièce n° 2 - Observations pour le Comte de Mirabeau</a></li>
<li><a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-1.pdf" title="Affaires 1 à 4" target="_blank">Pièce n° 3 - Plaodyer prononcé par le Comte de Mirabeau</a></li>
<li><a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-1.pdf" title="Affaires 1 à 4" target="_blank">Pièce n° 4 - Madame la Comtesse de Mirabeau</a></li>
<li><a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-1.pdf" title="Affaires 1 à 4" target="_blank">Pièce n° 5 - Requête du Comte de Mirabeau</a></li>
<li><a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-1.pdf" title="Affaires 1 à 4" target="_blank">Pièce n° 6 - Marie-Emilie de Covet, Comtesse de Mirabeau</a></li>
<li><a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-1.pdf" title="Affaires 1 à 4" target="_blank">Pièce n° 7 - Marie-Emilie de Covet, Comtesse de Mirabeau</a></li>
<li><a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-1.pdf" title="Affaires 1 à 4" target="_blank">Pièce n° 8 - Réponse au post-scriptum imprimé à la suite de la requête de Mr de Mirabeau</a></li>
<li><a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-1.pdf" title="Affaires 1 à 4" target="_blank">Pièce n° 9 - Madame la Comtesse de Mirabeau</a></li>
<li><a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-1.pdf" title="Affaires 1 à 4" target="_blank">Pièce n° 10 - Comte de Mirabeau (pages 1 à 100)</a></li>
<li><a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-1.pdf" title="Affaires 1 à 4" target="_blank">Pièce n° 11 - Madame la Comtesse de Mirabeau</a></li>
<li><a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-1.pdf" title="Affaires 1 à 4" target="_blank">Pièce n° 12 - Observations du Comte de Mirabeau</a></li>
<li><a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-1.pdf" title="Affaires 1 à 4" target="_blank">Pièce n° 13 - Précis pour le Comte de Mirabeau</a></li>
<li><a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-1.pdf" title="Affaires 1 à 4" target="_blank">Pièce n° 14 manuscrite</a></li>
</ul>
<div style="text-align: center;">###</div>
<a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-2.pdf" title="Affaires n° 5 à 7" target="_blank">Affaire n° 5 (1783)</a><br />
<ul>
<li><a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-2.pdf" title="Affaires n° 5 à 7" target="_blank">Pièce n° 1 - Joseph-Antoine Roman c. les hoirs et héritiers d'Anne Bonifay Pièce n° 2 - Joseph-Antoine Roman c. les hoirs et héritiers d'Anne Bonifay</a></li>
<li><a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-2.pdf" title="Affaires n° 5 à 7" target="_blank">Pièce n° 3 - Delle Anne Bonifay c. Joseph-Antoine Roman</a></li>
</ul>
<a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-2.pdf" title="Affaires n° 5 à 7" target="_blank">Affaire n° 6 (1783)</a><br />
<ul>
<li><a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-2.pdf" title="Affaires n° 5 à 7" target="_blank">Pièce n° 1 - Terrein, tuteur des enfants de Claude Sandin c. Dame Teisseire, veuve de Claude Sandin</a></li>
<li><a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-2.pdf" title="Affaires n° 5 à 7" target="_blank">Pièce n° 2 - Marianne Terrin c. Jean Teissaire</a></li>
</ul>
<a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-2.pdf" title="Affaires n° 5 à 7" target="_blank">Affaire n° 7 (1782)</a><br />
<ul>
<li><a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-2.pdf" title="Affaires n° 5 à 7" target="_blank">Pièce n° 1 - Les hoirs du sieur Donet c. Magdeleine Creps</a></li>
<li><a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-2.pdf" title="Affaires n° 5 à 7" target="_blank">Pièce n° 2 - La dame Creps c. Les hoirs du sieur Donet & Les hoirs du sieur Conqueret</a></li>
<li><a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-2.pdf" title="Affaires n° 5 à 7" target="_blank">Pièce n° 3 - Les hoirs du sieur Donet c. Magdeleine Creps</a></li>
<li><a href="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/177/RES_10646_Factums-mariage_Partie-2.pdf" title="Affaires n° 5 à 7" target="_blank">Pièce n° 4 - Les hoirs du sieur Donet c. la Dame Creps-Boyer</a></li>
</ul>
<div style="text-align: center;">###</div>
Droit de la famille
Mariage -- Droit -- 18e siècle
Mémoires (procédure civile)
Procédure (droit)
Provence (France)
-
https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/2/88/Janety-V1.pdf
a0f77300db7d8eab9b421f23a87dcf3d
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OURNA
•
1
PALAIS
DU
PROVENCE,
DE
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Il
RECUEIL
DES
ARRETS
.
R E N 'D V S depuis les derniers Journalifies, par le
'Parlelnent & la CQur des Aides de cette Province ...
f'
Par Me. JAN
Çhez
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AND RÉA D
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IDE R T,
E T Y.
X,
Impr.imeur du Roi, vis-à-vis
le College.
M.
DCC.
A\lU Approbation,
LX.XXIV.
Per!,l�(fion &
Plivilege du Roi"
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13100 Aix-en-Provence - France - Provence Alpes Côte d'Azur
L’Université Paul Cézanne - Aix-Marseille 3 remercie Internum
pour l’avoir autorisée à diffuser le Journal du Palais de
Provence dont les documents originaux sont conservés à la
bibliothèque Méjanes d’Aix-en-Provence
IInternum
nternum -- A
risthot
Aristhot
Projet de valorisation, d'exploitation et de protection
du patrimoine documentaire numérisé
La Bibliothèque Virtuelle INTERNUM - ARISTHOT vise à constituer
un corpus numérique des documents d'archives, de bibliothèques
et de musées relatifs aux Sciences en Méditerranée.
��T A)3' L,E
.
.
\
\
J)]!i:S SOMMlA][)RJ/tS
.
,
_. ,CONl''ENUS
. DANS CE VQLUMJ:., '
,
,,
ARR~T I~ Da~s 'les' c~ll~t;~~s' de' èh~pe/~;;;ie~;, lies p~o-
. '1J!fions contraires ,'ail titre' de la fondation fànt à6ujiws, &.
. les Loix de la fondation fànt imprefèripti61es.
Pag. 3
ARRÊT ,II. Re~uêté (civile' ouverte. a~ '-Profit 'dèll~la femme
envers un Arrêt d'expédient; le moyen fondé fur le dol
- perfà71nel'ti les. manœuwes pratiquées poür aliéner les hiens
, dotaux.
\.
7
ARRÊT III. Sur un dévolut fondé fur la prétendue nullité des
-. 'titres du patron &. .fur la confidence.) .
. 2. 5
ARRÊT IV. Sur la répétition du' rettait> lignagef, attendu la
-! prefiation de. nom.
\; :".
-\~ ,
'
Quels, {ont Us faits qui peuvçlJt 'étaNir la préuve 'de la
, fraude'? '
\'
,
, ,
56
ARR:T JI.' La' preuve de la paternité p,wt-elle êtl'e reçue en
"rId.1Jeu'r. d'une:fi.lle bâtarde? 1 . ' r.
'.'
La ,preuvr:' de la {é.auéfjom;p'el}t.efle êtr.e.. reçuè contre''IIn homme
~l maJ'ié' &- .après_'fà' mari? r ~. " . '" , ., '. "
P-enilàm,Pihjlance 'en "p(ltel'1lit'él p'eut.{)n" acèorder 'une provifion?
"in Il ~ '" ',0' ',' \ ~l ..;, ., ~\, ~
'64ARR'Ê12 'VI. ,Preu.velde'la démence du tejlareur reçue.
72
, A:RRE:l' ,VIL L'éduC(JtÏlJn d'une fille pupille doit-elle être laiffie
( d la mae, malgré la réclam'tltio!1',du' [ucelif qùi demande
'jir;ut!> 'f~ pupille fàit mife dans, un Gbuvent?
9l
Années 1775 &. 1776.
F ff f
�TABLE
VUI. La quarte trebellianique doit bre prolzihée /éTZ
, '
termes expres.
92ARRÊT IX. La préparation ·des cuirs n'en change point la
nature, & ne met point obflacle au droit de fuite .•
Circol/fiances qui peuvent établir la fraude d'un aç1e.
96
ARRÊT X. Le mari fe colloquant pOlir une créance dotale
dotlf il a pourAivi le paiement com"1e mari; é) maÊtre,
le fonds,pris en cpllocatif?n eft dotal,Ji la créance n'a pa~
été exprimü dans la confiitution de dot, mais feulement
comprife dans. la conflitutioJJ génçrale.
1
_. •
108
ARRÊT XI. Le Griffier, ou. tout autre. Officier fubrogé à-'rai-.
fon d'une procédure, n'a pas befoin d'un nouveau pouvoir à
raifan d'une plainte poflérieure, dépendante de la pre~miere... ,·~\~V
'
.\. t
~\'J
~·.iJ'-l
' f · 120
ARRÊT XII. ,En' matiere d!.impétratzàn de Bénéfù:e" ·la claure
.alio quovis. modo ;inftr.ü dans la 'fupplique ne éarac1érife
pas effintiellemeut " .. & _par. elle feule., 'l'impétr.auoa pdf)dé~
( .
va1ut.
rH
~.,
~
J.
I~
n" J"'1 ~
L'appel.comme 'd!.a~us.:.d'une rollation,,~,przr:,difaut dè·,pq,u. voir du collateur, ou par nullité. abJalue , ne conflitue point
. "•
~
.. ' 'l "
.., "
le dévolutaire.'" ...
Date retenue vaut collation. Doit-d(e ..être, pozdfèe .aUl', rel
,
.,
gl.
.. evee '!ans.. l~'"
0121 ~11
•
• _ ~ \~..
J. 'rH.' 1I..."1.
iflre u'J":I':T<
L'effet rétroac1if inftré dans les lettres d'attache &.·dan~,.l.'e"n
régijlr~tneJlt pur & 'jimple, peut-iL Tl,!ire: aI{ deoit dl! tiens]
L'indult ne peut être étendu au delà de fes jufles borrzèsl 1'2.3
AR~ÊT ,XIII. Le ,légtttaire qui, a foufcrit .z'inventme de ef~
Jets de la fuccelfipn, d'après léquel Ja . comR~jition des.'-Ihitns
de l'hoirie. a jt~Igite:., '&.1fk. 16gitime flxée:-\ peu~"ill alléguel:
des erreurs & des omiffions, &. YiemarÎ'd,eé 'l~exhiDitiofl.,de
, l'inventaire,
(s,'de$., tittes. de~ r:aoirie"","ow
PQJJ..voif,
ODte.lii .uri.
~
Jr
~
.' fupplément de légitime fur les effets omis? '
~ ,wI 59
ARRÊT .XIV. Le. Lieutenant'. de: l'Amirauté peut"il informer.
fur la plainte d'un çourtie", royal qui ft.. dit avoir itiJ. ÙJ:'
fulté il raifan de fis, fon8iQnû'
1 . \\ ' ~, l~', h\ i.6 5
A~RÊT XV. Le Jug~ Eqlijiaflirj1J~ ne peut. çOllnoJtre dUo-refu$
'j
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.J (. \ \.
1
• ~ ~~"
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�DES
·ws '
SOM MAI RES.
fait par un Curé de céléhrer un mariage, lorlque le refus
ifl uniquement motivé fur un fait contentieux.
169
ARRÊT XVI. La fupprejJion d'un Bénéfice, l'union d'un Bénéfice il un autre [ont abufives, s'il n'y a· caufe fulfifante
de fupprejJion ou d'union.
Peut - on appeller comme d'abUS d'une Ordonnance du Juge
d'Eglife, quoique confirmée pp", Lettres-patentes?
18)
ARRÊT XVII. Sur la péremption d'injlànce en matiere de
requête civile.
199
ARRÊT XVIII. Sur les réparations des mai[ons cU1:iales. 216
ARRÊT XIX. Sur l'eJfet de la date du contrôle d'une écrite
privée.
Le pouvoir donné par le Seigneur ~direa il [on I!rocureur
fondé, d'exiger les cenfes & les lods, de donner, l'invifliture, même avec ce/Iion des droits, fi hefoin el!:, renferme-t-il celui de céder le droit de prélation ?
'231
'ARRÊT XX. Peut-on tranfiger fur la fuccefJio'n d'un défunt,
fans avoir vu [on tiflament , quoique l'exiflence en [oit
connue & ajJiuée?
239
ARRÊT XXI. Le porteur d'un mandat l'ayant fait protefier
COlltre [on cédant dans les dix jours de l'échéance, & ayant
enf"üe prorogé le paiement, perd-il [on aaion contre le tireur
qui cr failli avant l'échéance, le cédant ayant failli avant
l'expiration de la prorogation?
.
247
:f\RRÊT XXII. Le recours du compte tfun Tré[orier tfune
Communauté, & l'appel de l'Ordonnance de clôture, doivent être parlés pardevant la Cour des Aides.
2')3
ARRÊT 2O\IIJ. (' efi d'après les circonfiances 'lue doil'ent .être
taxés les frais d'une captllre.
En matiere criminelle, les dépens de la converfion, d'un décret en ûn autre [ont co!ltumaciaux, & ne doivwt pas
être joints au fonds.
'.
2)6
ARRÊT XXIV. Le Fermier des droits de la Régie ifl préférable pour les droits fur un refie de la marchandifi:, au
vendeur 'lui la réclame,. & .dont le prix lui efi ençore
dû.
.
26z.
F fff"2.·
�'~ 91>
,
,T Â BLE ,
'ARR~T· XX\!. S'il n'y œ clauft contraire dans l'aae de vente;
l'acheteur' peut expulftr le Fermier, fauf les dommagesimérêts de ce dernier contre le vendeur.
Le cas requérant célérité, l'ajJignarion peut être donnée à
brief délai, ,,?-ême fur les fins prinèifales..
Dans /oe 'm'êmè' cas, le Jugé oMigé de renvoy.!r le fonds peutil ordonner par provijion ce 'qui étoit demandé principalement?
267
ARRÊT XXVI. On peut être reçu à la mifèraMe cejfzon pour
dépens en matiere criminelle.276
ARRÊT XXVII. Le porteur 'd'un hi/let-à ordre' fo4è:rit pa'"
quelc,u'un qui n'eJl pas Négociant, & enfuite entloffi par
un Négociam, peut-il' ajJigner le principal débiteur & l'erzdoffiur pardevant les Juges-Conful,'?
uh
ARRÊT XXVIII. Sur une ajJignarion don,!ée pard:t'ant lin
Juge royal, par un Sergent d'une Jurifdic7ion fcigneuriale.
286
XXIX. Dans les Jurifdic7ions feigneuriales, celle de,la
Poli.e pppartient aux Seigneurs, & efi comprift dans la
Jurifdiêlion univerftlle.
.
(29 l
ARRÊT XXX. Récufation fondée fur un procès que le Juge a
ave'c' ùne partie.
296
ARRÊT XXXI. {Sur l'appel comme d'abus de l'Ordonnance
- r,endue par M. l' A~chevêque d'Embrun , qui érigea un.e
Curé amoviMe dans la vallée de Barce/onette, avant fa
réunion à la France, & qui chargea les hahitans, quoique
de leur confenument , du paiement de la portion congrue"
& de' toutes les réparations & fournitures de la nouvelle
"ParoiJlè·,
30~
'ARRÊT XXXII. Le'mineur ejl reJlitué envers l'acceptation d'une
tettre de change tirée- fur lui par un mineur, lorique le
défaut de formalités ou des préfomptions légales font craindre
que, le tireur ne puiJlè lui-même étre reJlitué.
32 l
ARRÊ'f XXXIII. Un Chirurgien navigant efi j41iciaMe des
Jl/ges-Confuls à raifon des billets par lui foufcrits valeur
re~ue en marchandifes.
328
ARRÊT
�l\RRfiT
DES SOM MAI RES:
'~'91
XXXIV. Dans la pourfuite du crime d'ufur.e, la plainte
d.u particulier ne doit contenir 'lue des faits perfonnels; mais
l'information peut être également prife fur des faits étrangers.
L'ufurier peut être ohligé de repréfenur fes livres.
La caution falidaire a la même ae7ion contre l'ufurier que le
principal obligé.
331
ARRÊT XXXV. Le pere doit des alimens à fan fils & à fes
petits-fils, quoique le fils fe fait marié fons fon confente,ment & après les ac1es refPee7ueux; mais les doit-il hors de
cher. lui?
Le fils ainJi marié' ne peut être exhérédé.
le heau-pere 'lui n'a hi approuvé le mariage, ni répondu la
dot, doit-il des alimens à fa helle-fille après la mort de
fan fils?
3))
ARRÊT XXXVI. Bâtard -qui demande d'être déclaré fils légitime.
La légitimation par mariage fuhfè'luent ne peut avoir lieu,Ji
le mariage n'a pu être contrae7é lors de la naijJànce de
l'enfant.
Si la filiation efl certaine, la légitimation efl opérée de plein
droit par le mariage fuhfè'luent, etiam invieis parentibus.
Efl-elle opérée, Ji le mariage fuhfè'luent efi tenu flcret?
Quelles font les preuves de l'état des hommes? La preuve par366
témoins peut-elle être reçue.
ARRÊT XXXVII. Le teflament peut-il être rédigé, lu &- puh'lié
dans deux temps & en préfence de témoins' différens? 4 l 7
ARRÊ:r XXXVIII. Un teflament rédigé dans les formes ohfervées dan~ le pays où il efl fait, efl exécutoire par-tout 42.6
ARRÊT XXXIX, En matiere d'ajJurance maritime, la clauft
infèrée dans la police, portant qu'en cas de finiHre ou perte,
l~atI:uré ne fera tenu de produire d'alltres preuves ni juftificaeion , que l'obligation à là grolfe, efl licite, uJitée ~
va/aMe.
43~
ARRÊT XL. Lltifcontèflation formée par les défenfes four~
mes.
L'échange frauduleux efl fournis au retrait lignager.
445.
�1
59S
ARRÊT
T A B r. E.
XLI. En matiere de dîme, les gerherons une fOi$
faits, . & la portion du décimateur [éparée, on ne peut faire
informer contre le redevaMe qui s'oppo[e d ce que les gerherons [oient rompus, pour vérifier fi le droit 1l payé à
plein.
Le Lieutenant-GénéraI-Civil connalt, même par ac7ion crùninelle, privativement au Lieutenant-Criminel, des contraventions au droit de dîme. '
45:z.
ARRÊT XLII. A défaut d'ac7e des époufailles, peut-on prouver
la légitimité de l'enfant par l'aBe baptiflere, par d'autres
467
• équivalerls, & par la poffejJion?
ARRÊT XLIII. Le privilege des Chanoines ah[ens pour caure
d'étude efi-il applicahle aux diflributions manuelles & aux
anniverfaires?
.
Il Y a abus, lorlque l'ac7e efl contraire ·aux Saints Canons &
aux Ordonnances· du Royaume.
491
ARRÊT XLIV. On peut fqire informer au nom & pour l'intéré't d'une Communauté fans délibération précédente, pOUl'
ne pas donner d l'accu[é connoijfànce de la plainte.
5°9
L'erreur commune valide tout ce qui a été fait.
ARRÊT XLV. Au préjudice de rappel d'une Ordonnance pré-,
paratoire ou d'inflruc7ion, on peut continuer une procédure en
faux incident.
516
'ARRÊT XLVI. Tout Juge efl compétent pour informel:, décréter
· & interroger.
'
524ARRÊT XLVII. Une Communauté peut-elle aliéner les eaux
puMiques, en tout ou en partie?
La concelJion faite d la.per[onne pour la per[onne ne palJe point
au fùcceJJi:ur quelconque. .
528
ARRÊ.T XLV HI. L'une des parties contraBantes'n'exécutant pas
le titre, ou violant la condition, l'autre partie peut être r.ef
tituée.
).33
ARRÊT XLIX. Le teflament doit être interprété clans le Jens
· le plus droit & le plus correB.
La déclaration contenue dans le teflament de l'héritier, qui a été
enfùite révoqué, peut-elle étaDlir un fidéicommis non écrit,
.. ~ prétendl1 fait par le premier tejfateur ?
S3 9,
•
�•
DES SOM MAI RES.
'~99
:ARRlh L. Le tiers diffamé dans une requtte de plaillte peut
faire iuformer fur la diffamation, fans attendre que la premiere procédure foit décrétée, & que la plainte foit communiquée ou rendue puMique.
~ 47
ARRÊT LI. Celui qui a foumi la prime, a une préférence fur la
chofe aJ{urée vis-a-vis les créanciers de l'aJ{uré.
SS1
ARRÊT LlI. En matiere criminelle, lorique les Officiers Royaux
préviennent ceux 4u Seigneur, les frais de procédure ne font
répétés vis-a-vis du Seigneur, que fur le taux qu'ils doivent
être payés par le Domaine, lorique la procédure ifl prife a
la requête du Procureur du Roi.
~ S~
'ARRÊT LIlI. Quiflion de compétence fur un prétendu fait de
&~
~~
ARRÊT LIV. Les ouvrages d'or & d'argent fahriqués a Marfeille ne font point foumis au droit de marque & de contrôle.
Les mêmes ouvrages venant de l'Etranger a Marfeille, ne font
fournis a aucun impôt ni a aucune efPece de gêne ou de
déclaration.
~ 74
'ARRÊT LV. La dve étahlie furIa denrée étrangere qui fera
introduite dans un lieu ou fon terroir, ifl due fur la denrée
étrangere introduite & vendue dans le lieu ou fon terroir a
des étrangers qui la tranfPorterIt ailleurs.
~8~
Fin de la Table des Sommaires.
�PALAIS
DU
JD JE}
JP JR 0 V JE lV� C JEœ
PREIIv IE
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praviJions contraires
Le Loix d.: La fon-o.
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abl!(ives,
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fondatioll
la
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titrt:.
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datioll font imprefcriptiblcs.
Dalls les col/otlans de Chapellenies, les
j'
E J 3 Juillet
L le"-'lie qu'il
nricy fonda Llne Chape1�1373, Henri
annexa à la Ch p Ile St. Antoine qu'il
avoit fait bârir à Gra:ff�. Il conf irua pour Patron le S3C·:ç...
tain & les Conruls de GraiTe; il voulut rO, qu'on nonl �
un (uier des fiens 1 de gel ère meo ..Ji eJJèt ; 2(). il j l1iba aux PuiL
fa nces Eccl:fi: Hi ù 5 de s) en n "1er ja nla is. Il app lb e fuit
[es parens d'abord paternels, enfuÎre les nl�ltern_ s, & a
defaut le Chap ldin f rait in(hrué par les p. (on t11JS.3l
toricé eccléfiaHique; 1 étranger �rviroit la. h�
1 ie j' C
qu'à ce qu'on [rO ât un fujec de la faL11ill g i vOUlllt !<l
dota &.
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/t,.. ..,
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""-J
�'4
JOURNAL·
.
fervir; le F ondareur tranfporca le fervice de Graffe à Vence,'
de Vence à Gralfe, & enfuire à des Religieux. Telle efi la
loi qu'il impofa pour tous les temps. En 1714, Mre. Henricy,
Curé de la Magdeleine, mourut; les Patrorls préfenrerent
au lieu d'inHituer. ·Mre. Henricy, Clerc tonfuré, prit des
BuUes, & fUt maintenu, corn me parent plus proche, par Arrêe
de 17 17. E,n 173), Mre. Ifnard" Çuré de Saint-Cefaire, (e
fic mettre en poffeffion par les voie's canoniques. Le fleLlr
Henricy, Clerc tonfuré, p aren t d� cognomine patris, voulut
uier de fon droit; M re. Ifna rd répondit qu'il p o1Tédoit de
puis 37 ans, & que les Bénéfices étaient perpétuels; Mre.
I-Ienricy rapporta fo� titre.7 & fe mit en poffeffion; Mre.
Ifoard forma oppoGtion, & c o mmu n i q u a fes titres parde
vant le Lieuten�nt de Gra{fe; appel c omm e d'abus de la
pa rt de Mre. Henricy.
On érabli!foit pour lui un feul moyen d'abus, {impIe, dé
ciGf, & fondé fur la contravention aux loix de la fondation.
Le Fondateur ( dirait-il) a fondé une ChapeI1enie pour
n'être qu'un obit ·ou pre!bmonie; il jnterdit les proviGons
de l'Evêque &. de Ja. Cour de Rome. Les provifions de Mre.
Ifnard font donc contraires à la fondation, qui a voulu qu'il
n'y eût point de titre perpétuel au préj u d i c e des pareos. Il
y a conféquemment abus & dans le citre, & dans l'ufage
perpétuel qu'il veut en faire.
C'efl: en vain que l'on fufpeae le titre de cette fo n d ati o n;
l'extrait enrégiilré anciennement prouve par fon ancienneté:·
en 17 l 4 il fut produit, di(cuté & jugé corn me authentique.
Ill'éroit par lui-même, puifqu'il avoir été enrégifiré de man
data Judicis, & fervatis fervandis; il tient lieu d'original; il
en déGgné véritablement à la date du t') Juillet, & dans
quelques col1aeÎons à, ceIle du 2. S ; ce n'efl: qu'une erreur de
clare reconnue: les Supérieurs eccléfiafiiques ont pourvu tan
quaJn de heneficio; ils n'one pas moins commis abus, en ce
que les loix de la fondation font imprefcriptibles; l'urage
n'eH jamais qu'uo abus, etiam per mille annos, à moins que
le tirre ne (oie abufif.
On répondait pour Mre. Ifnard, que nonohfiant les claufei.-·
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PAL AIS
D Il
PRO V Il N C l!.
.,
prohibitives que renferme la fondation de la Chapellenie
affeCl:ée de préférence aux parens ou aux perfonnes du furnom du pere du tefiateur ou de fa mere, l'Evêque de Graffe,
fur la préfentation des Patrons, avoit conféré la Chapellenie
tanlJuam heneficïum. Il y a au procès feize collations qui remontent en IS S7; le Roi en a dilpofé en temps de régale
comme d'un vrai bénéfice, & des Arrêts ont prononcé fur
le poffeffoire de cette Chapellenie, & ont maintenu des fujets
pourvus par le Pape.
En 173 S, Mre. Ifnard a été mis en poffeffion du bénéfice
felon les voies canoniques, & il Y a quarante ans qu'il jouit
& qu'il deffert; Mre. Henricy fe préfente, & en qualité de
parent, il demande que Mre. Ifnard, qu'il fuppofe étranger,
lui céde la place, fuivant le titre de la Chapellenie, & appelle c0l1!me d'abus des titres de Mre. Ifnard. Les parties
font d'accord fur la nature de la fondation; le Fondateur n'a
pas voulu créer un vrai bénéfice, puifqu'il a prohibé la fpiritualifation: mais une pareille infriturion n'a-t-elle pas pu devenir un vrai bénéfice?
Il efr certain que la fondation efi laïcale par le titre conf.
tirurif, & qu'il efi porté par un article précis des Libertés
de l'Eglife Gallicane, qu'on ne peut déroger ni préjudicier
aux fondations laïques du Royaume: mais fi on ne peut
défobéir à la loi du Fondateur, il n'efi pas moills vrai que
cette loi peut être légitimément prefcrit6; rien ne répugne
que ce qui n'efi point bénéfice par le titre de la fondation
puiffe le devenir; rout le gouvernement eccléfiafiique en efi
une preuve.
Mre. Ifnard, en convenant que le Fondateur n'a pas voulu
établir un bénéfice, qu'il a pris à cet effet routes les précautions convenables, foutient avec fondement que toures
les claufes formelles pour fervir de fanél:ion à la loi ne peuvent jamais furvivre à la loi même; & fur le tout le Fondateur, dans le cas particulier de la caufe, n'a pu empêcher
la prefcriptibilité. Ici la prefcription efi certainement acquife, oon celle de quarante ans, mais une prefcription de
plufieurs fiecles vr'!iment immémoriable. Cela coufie par la
�~6JoURNAL
communication au procès de douze collations de l'Ordinaire
qui remontent au quinûeme fiecle; il réfulte enCOre que foit
~n temps orqinairê, foit en temps de régale, la Chapellenie dont s'agit a été conférée comme un vrai bénéfice ;
<:jue des Arrêts de 1<1 Cour Ont jugé fur le poifdfoire de ce'
même bénéfice, & maintenu des fujets pourvus par Bulle du
Pape; il n'y a aucune trace que cerce Chapelle'nie ait été adminifirée comme pure fondation laïcale. Mre. Ifnard oppofe
donc avec raifon la prefcription immémoriale, & la préférence donnée au parent du Fondateur ne pourra avoir lieu
que (eron les regles qui gou~ernellt les bénéfices, c'eH-à-dire
dans le cas de vacance, fecundùm jus. .
.
Il eO: de principe encore qu'il faut la bonne foi pour
prefcrire en matiere canonique; ici la bonne foi fe préfume
par le laps de temps, il n'y a que l'ufurpateur dont la foi
foit fllfpeél:e; & fuivallt rous les Canonifl:es, la mauvaife foi
fe termIne à la perfonne de l'ufulpateur, & ne paife pas aux
fucceifeurs, qlli in alterius locum fùccedum ,jriflanz habent callfanz ignorantiœ. Il n'y avoit donc aucun ob!tacle poffible à
ta prefniptiàn; ellè en: acquife, & dès-lors l'appel comme
d'abus tombe.
Arrêt du 13 Févrie.r 1771" prononcé par M. le Premier
:Préfident, conforme aux copc!ufions de Mr. l'Avocat-GéJiléra~ Le Blanc de Cafl:illon, qui concede aél:e au ProcureurGéné~a~ du Roi de fon adhélion aux appels comme d'abus de
Mre. Henricy, & de ce qu'il appelloit de fon chef, qui déclare y avoi·r ahu-s en la collation de Mre. ]fnard & en toutes
autres quelconques de la même .chapellenie, enfemble' en
l?exéClltio.n des Bulles la concernant; Mue·. Ifnard'fut condamllé
aux dépens. l~laid'ant Mes. Gaffier & 1?arcaJis. •
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PAL A 1 S
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PRO VEN C E.
ARRÊT
,
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Il.
Requhe civile ouverte au profit de la femme envers un Arrêt
d'expédient; le moyen fondé fur le dol perfonnel & les manœuvres pratiquées pour aliéner les hiens dotaux.
,
'.
E 24 Septembre 1749, la Dlle. Marie-Anne Chauvee
contraél:a mariage avec le fieur Carmagnolle, & fe conftiwa en dot une ba(bde dans le terroir de la ville d'Aix, quartier
de Malvalat, deux propriétés de terre au quartier du Pey61anc,
une autre terre & une maifon. En 17So, cette femme fe
pourvut en répétition de dot, & obtint un décret de vergence qui ordonna qu'die jouiroit des biens à elle dotaux.
Le 10 Avril 17) l, Carmagnolle fe pourvut à la Cour comme
pauvre contre fon époufe & c('Jorre Therere Gafl:aud fa bellemere folidairement, en refiitlltion des marchandires de la boutique de clincaillerie, effets, hardes, titres. & papiers done
il prétendit qu'elles s'étoient emparées pendant fa détention
éll prifon, & demanda en même temps le paiement de diverfes fournirures par lui faites aux divers effets dotaux. Cette
demande fm fuivie d)un expédient interlocutoire 1 qui porta
que Carmagnolle vérifierait par toute forte & maniere de
preuves l'enlévement des effels & les dépenfes par lui faires
aux rerres de fon époufe. Cee expédient fue reçu le 18 Avril
17fl.. Il fut procédé à une enquête, enfuite de laquelle, le
29 Novembre même année, il intervint un aurre Arrêr d'expédient définitif, par lequel les DUes. Chauvet & Gaflaud
furent condamnées folidairement au paiement de la fomme
de 12.12 liv. 12.
il quoi, fut-il dir, les parties ont évalué
& apprécié les marchandifes de la houtique, clincaillerie & hijouterie, effets & hardes de Carmagnolle , titres & papiers, dont
& du tout le[dites Chauvet & GaJlaud ft font emparùs pendant la dételltton de Carmagnalle. Marie-Anne Chauvet fue
condamnée en parriclIlier au paiement de 648 Ev. 1 g. f. que
L
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,
,
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.
JOURNAL
Carmagnolle avoit payé à fa décharge, & à la rémilIion des
habits à elle faits & fournis par Carmagnolle lors de leur
mariage, & des mnemens, effets & hardes, le rout évalué
& apprécié par les ,parties à la fomme de 500 liv., avec
intérêts du tout depuis la demande, dépens compenfés. Dans
les qualités de cet expédient, il fm dit que la Dlle. Chauvet
étoit alIifl:ée & autorifée par Me. BuiŒon, Procureur au
Siege, fon curateur. Cet Arrêt fut !ignifié aux Dlles. Chauvet
& Gall:aud, avec commandement de payer les fommes adjugées; Carmagnolle fit fai!ir-Ia bafl:ide & les propriétés de
fon époufe, il pourfui"it le procès exécutorial; les terres
furent ell:imées & mifes aUK encheres. Le 15 Février 1753,
?ayard, Concierge des prifons, fit offre fur la ball:ide &
les deux fonds de terre au quartier du PeybJanc, qu'il porta
à 4460 liv. 13 ( 2 den., & la délivrance lui en fut faite;
il paya comptant 3104 liv. 17 (, à quoi fe montoient les
fommes adjugées à Carmagnolle, & garda en mains les
1355 liv. 16 ( du furplus de fon acqui!ition, pour en fupporter les intéréts au denier vingt, jufqu'à ce qu'il pût valablement les pnyer.
Le 29 Décembre 1762, Carmagnolle fe pourvut à la
Cour en qualité de mari & maitre de la dot & droits de
la DUe. Chauvet, en caŒation de la délivrance qui avoit été
faite à Bayard; celui-ci obtint contre lui un Arrêt de congé
le 24 Mars 1763' Le 14 Avril 176'1 la Dlle. Chauvet fit affigner pardevan t Je Lieutenant au Siege d'Aix plu!ieurs particuliers, & notamment les hoirs Bayard, en révendication
des fonds de terre par eux acquis aux encheres, fur le fondement que ces biens faifoient partie de fa dot; eUe évoqua enfuite, comme pauvre, la caufe pardevant la Cour. Le
procè~ demeura impourfuivi pendant pluCteurs années. Le 2')
Février 1772, les hoirs Bayard offrirent un expédient; ils
fe condamnerent à vuider les deux propriétés de terre, attendu qu'il n'y avoit p-oint emploi des deniers, & conféquemment jull:e caufe d'aliénation. au moyen de quoi ils feroient
déchargés du paiement de la fomme de 823 liv, 14 ( du.
prix, & ils fe mirent hors de -Co,ur &de procès (ur le fur\plu~
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PAL ArS'
D E
PRO VEN C E.
9
plus de la demande de la DUe. Chauver. Cet expédient ne
fut point accepté; la Dlle. Chauvet prit des lettres royaux
de refiitUlion envers les acquiefcemens, fignatures, aliénations & ventes faites de fes fonds dotaux, fur le fondement
que ces aél:es n'étoient que le fruit de la furprife la plus caraél:érifée, de la collufioll la plus manifefie pratiquée par fOll
mari, & de la force exercée contr'elle pendant fa minorité,
& préfenra une requête incidente en entérinement des lettres royaux & en ca!fation des aél:es de vente. Elle impétra
enfuite requête civile envers l'Arrêt d'expédient du 29 N 0vembre 1712, & affigna fon mari & les hoirs Bayard.
La Dlle. Chauvet réuni!foit plufieurs moyens pour le fou;
tien de fa demande; 1°. dol perfonne!; 2°. non valable
défenfe de la parr d'une mineure; 3°. ultra petita; 4°. condamnation fans caufe & machination pour parvenir J l'aliéna tion des fonds dotaux.
Pour jufiifier le premier moyen, on prétendoit que la Dlle.
Chaùvet ne devoit rien & ne pouvoit même rien devoir à
fon mari; qu'elle étoit femme & mineure, & que fous l'un
& l'autre rapport elle ne pouvoit conrraél:er aucun engagement, à l'effet fur-tout d'aliéner fa dot, qui étoit de fa na·
ture inaliénable; que fon mari ne lui avoit rien fourni, &
que s'il lui avoit fait quelque fournirure, il n'auroit fait que
remplir fon obligation. Dès qu'il jouifIoit des biens dotaux,
qu'il en percevoit les fruits, il étoit fournis à en payer les
charges & à faire toutes les dépenfes néce!faires pour leur
entretien & pour leur confervation. Dans l'impoffibilité où
érait Carmagnolle de préfenter des créances légitimes &
réelles, on en créa d'imaginaires; on fuppofa que la Dlle.
Chauvet & fà mere s'étoient rendues coupables d'expilations pendant fa détention dans les prirons, pour tâcher
de couvrir la fraude, on fit d'abord intervenir un Arrêt d'expédient interlocutoire, portant que Carmagnolle prouveroit
les différens chefs de fa demande. A la bonne heure qu'il
Ru fournis à prouver les expilations ruppofées; mais les prétendus paiemens & les dépenfes qu'il diroit avoir faites pour
fa femme n'éraient pas des objetS qui pu!fent faire la m'lAnntes t 775 & z776.
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tiere d'une preuve par témoins, d'autapt plus qu'ils excé~~ient cent livres; il aurait filllu Qu-mpins, pour fauver lés
'apparences, que l'objêt de l'inrer!ocurion eût éré rempli;
Carmagnolle n'avqit jamais éré Marc~and, il n'était pas
poffible qu'il le jultifiâr. Ce fut cependanr dans cet érat ql,l'on
vir éclorre l'Arrêt d'expédient du 29 Novembre, qui. adjugea à Carmagnolle routes les fommes demandées. Le but
de cet Arrêt éroit de pouvoir dilapider la .dot de la Dlle.
Chauvet, en fraude des Loix qui déclarent la dor inaliénable; l'Arrêt avait préparé la fraude, en adjugeanr fans titre,
fans preuve, des créances inexifiantes ; la vente en fut la confommarion.
.
Le dol perronnel efi un moyen infaillible de requéte civile. L'arr. 34 du tir. 35 de l'Ordonnance de 1667 le décide
expreffémenr. Or, quel dol plus frappant, plus caraè1érifé
que celui d'abufer de la foibleffe d'une femme mineure, de
l.a conduire pas à pas jufqu'à l'aliénation entiere & la perte
de res fonds dotaux.
La non valable défenfe fournit encore un moyen au mi·
neur pour attaquer un Arrêt. C'efi la dirpoGtion de l'arr.
35 de l'Ordonnance. L'Arrêt interlocutoire avait accordé un
commencemelJt de faveur à des créances imaginaires, mais
il en avoit fubordonné l'adjudication à une preuve; cette
preuve ne fut point rapportée; ce défaut de preuve aurait
éré une exception viél:orieure conrre la demande de Carmagnolle; la Dl1e. Chauvet n'~n excipa pas; on lui en ôta
le pouvoir, en la forçanr à foufcrire elle-méme un Arrét de
.condamnation qui approuva rous les chefs de demande de
(on mari, fans .qu'ils fuffent prouvés.
Troifieme moyen: l'ultra perira. Carmagnolle n'avoit demandé que 1112 liv. 12 f. pour prix des marchandifes &
eflèts qu'il prétendait lui avoir été enlevés par fa femme &
fa belle-mere; cependant l'Arrêt lui accorde 1212 liv. 12 f.,
c'efi-à-dire 100 liv. au delà de la fomme qui avait été demandée" Enfin les mêmes conGdérations qui ont été déja
préfentées fur le premier moyen, fe réuniffent pour le foutien du troiGeme & du qua trie me.
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PRO V Il Nell..
1t
On r~pohdoit pour les hoirs Bayard, que la requéte civile
éroit non recevable, parce -qu'elle éroit fans intérér, dumoins relativement aux hoirs Bayard. Quel ef!: en effet le
but & l'intérêt que fe p'ropofe la DlIe. Chauvet dans fa requête civile? C'ef!: de parvenir à la. revendicarion de fes
biens qui ont été vendus par autoriré de juHice & de fan
confentemenr. Er quand même l'Arrêt ferait rérraéèé, la
revendication ne pourrait point avoir lieu & ne fauroir êtré
admire. Quoiqu'en regle générale le fonds doraI fait inaliénable, même par la femme répétée en dot, il peur êrre
aliéné quand il y a néceffiré; & le cas de nécelIité fe vérifie, quand il y a dette urgente: ita demùm fi œs alienum
immineat.
En fair, la DlIe. Chauvet avait été déclarée débirrice de
fan mari de fommes importantes. Ce fut en exécurion de
cet Arrêt que les biens avaient été vel'ldus; raures les formalités de droit furent obfervées; le prix fut employé au
paiement des derres, & la femme mineure avait été par-là
libérée. Ce n'éroit point à J3ayard à pefer la juHice ou l'injuHice de l'Arrêt; il f.woit qu'il exiHoit un jugement fouverain; que c'éroit en force de ce jugement que le bien éroit
expofé aux encheres; il s'efl: préfenré avec confiance, il a
fait fon offre, elle a été acceptée; il s'eH mis en polfelIion
du bien ,il en a joui pailiblement pendant plus de dix ans;
fes hoirs (ont par-là à l':.bri de route recherche, d'nutant
mieux qu'on ne pouvait pas imaginer que la Chauvet eÎlt
ligné fa propre condamnation, fi elle n'eût pas été débitrice. On ne pouvait pas préfumer qu'elle ellt agi par force
011 par crainte, puilqu'elle était féparée de fon mari depuis
trois ans; l'intervenrion du MiniHere public écartait encore
plu~ route idée de fraude; d'ailleurs toutes les procédures
pour parvenir à la délivrance des biens fonds avaient été
fignifiées à la Chauvet, & elle avait eu par-là une connoiffance léga le Je la délivra nce.
Les aclions refcifolres font des- moyens fournis par la
Loi contre la furprife & la fraùde; mais on ne peut fe ménager ces moyens par fraude ou par furprife. Les Loix prêJ3:lo
�12.
JOURNAL
tent une. main [ecourable à ceux qui [ont trompés, & jamais
à ceux qui trompent. Delà la Loi 1, if. de dola malo, veut
gue taute aél:ion qui aurait un fondement légitime, puiffe
être repouffée par l'exception de dol.
'
, Ici le dol dl: évident; la Chauvet a con[enti à l'Arrêt
d'expédient, quoique, [uivant [on fyftême, elle ne dùt rien
à fon mati; fan confemement, qui ne pouvait être produit
ni par la crainte, ni par la violence, ni par la féduél:ion, a
été l'eJFet d'une volonté libre; elle a donc été d'intelligence
avec fan mati pour entralner dans le piege des acheteurs
fous la foi d'un Arrêt, par l'appas trompeur des encheres
publiques.
Inmilement la Chauvet excipe du privilege de la femme
mineure, & de celui du bien dotal. La femme & le mineur
font capables de délit; la proteél:ion que la Loi leur accorde
ne leur affure pas l'impunité. Si les faits allégués à l'appui
de la requête civile font véritables, il Y a eu fimulation; la
Chauvet en a été néceffairemenr complice; cette fimulation
tendait à lefer un tiers: c'eft donc ici un dol caraél:érifé &
un délit; quoique femme mariée, dès qu'elle a fu la fraude
& qu'elle s'y
prêtée, le dol lui eft commun. Le mineur
n'dt pas reHirué, fi lors de l'aél:e il a dit & fait croire par
des preuves fauffes qu'il était majeur. Leg. 2. & 3, cod. fi
minor fi majorem dixerit.
La troifieme fin de non-recevoir eft tirée (continuoient
les hoirs Bayard) de ce que la Chauvet a confenti à l'Arrêt
d'expédient & qu'elle l'a figné; l'aél:ion que le mineur a pour
fe faire re{J:iruer envers fon confentement fe prefcrit par le
laps de dix ans, à compter du jour qu'il eft devenu majeur.
Or la Chauvet était majeure ~puis plus de dix ans, non,
feulement tor[qu'elle a impétré requête civile portant la
c1aufe de refiitution envers fes acquiefcemens, mais même
dans le temps qu'elle prit des lettres de refcifion ; fan
action a donc péri par l'eJFet de la prefcription ; & fi elle
eft non recevable à rétraél:er fan confentement, elle l'eft
conféquemmenr à demander la révocation de l'Arrêt. Elle
était mariée, mais elle était répétée en dot, & avait re"':.
couvré par-là l'exercice de fes aél:ions.
.
ea
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
13.
Suivant Radier fur l'Ordonnance de l 667, tit. 3';, arr.
34, 'lu. I, il n'y a que le dol perfonnel, c'eH-à-dire , celui
qui vient du fait de quelqu'un pour tromper un autre, qui
donne lieu à la requête civile. Mais le dol réel, qui n'en
autre chofe que le tort, la lélion qu'on relioir, & qui ne
dégénere qu'en injuHice, ne peur faire rérratler un Arrêt.
Il ne pourrait y avoir du dol qu'autant que les trois chefs
de demande que Carmagnolle avait formés contre fa femme,
feraient illégitimes & non prouvés; ils font au contraire
légitimes en eux-mêmes; un Arrêt interlocutoire en avait
ordonné la preuve, & l'enquête fut rapportée.
Les faits fur lefquels on appuye l'ultra petita ne font
point prouvés; d'ailleurs s'agiffant d'un Arrêt de confenfu,
ce moyen ne peut pas avoir lieu, parce qu'il fuppofe demande d'une parr, & aveu de l'autre. Le moyen tiré de la
non valable défenfe ne peut valoir contre un Arrêt d'expédient qui eH à l'inlhr d'une tranfatlion; & la femme qui
en puiffance de mari & autorifé,e en juHice a confenti un
jugement de condamnation en faveur de fan époux, eH préfumée avoir donné une défenfe valable.
Me•. Bovis, SubHiwt, obferva que le dol eH un moyen
puiŒ1nt qu'on emploit toujours avec filccès contre toute
forte d'aétes & de jugemens. L'honnêteté, la bonne foi
qui doivent en être l'ame, ne permettent p~s de laijfer fubfifrer des titres infetlés de ce vice. Les Arrêts même, tout
refpetlables, tout irréformables qu'ils font, perdent ce caraétere, dès qu'ils font l'effet du dol de ceux qui les ont
provoqués, qui les ont furpris, parce que tout ce qui patt
de ce principe vicieux, efr réprouvé. Les Loix civiles qui
l'ont aïnli établi, ne fane que l'expreffion du fentiment, de
la raifon, de l'équité naturelle, principe de tout droit.
Le dol, fuivane la définition qu'en donnent tous les Interpretes & la Loi même, eH furprife , fraude, fineffi , feintife , & toute autre mauvaife voie pour tromper quelqu'un:
dolus malus efl omnis calliditas ,Jallacia, machinatio ad circumveniendum, Jallendum, decipiendum alterum adhibita. L. l ,
§.
jf. d: dola. Comme les manieres de tromper font
2.,
�q
J&URNIL
infinies, il n'était pas poffible que les Loix prévi1fent tous
les cas, & qu'elles marqua1fent fpécifiquement tbutes les
éfpeces de dol, capables de faire annuller les conventions
ou les jugerhens. C'efi par le fait & les circonfiances qu'on
doit en juger. (Domat, loix civifes, parr.
liv.
tir,.
16 , feél:. 3 , n. 2.)
Il efi une efpece de dol qu'on appelle dolus re ipsâ, qui
provient du vice de la chofe même, ou de l'inatrention &
de l'inadvertance de l'une des parries fans le dol de l'autre,
ce qui n'efi proprement qu'une léfion : Ji nul/us dolus interfit
flipulantis, dit la Loi 36, if. d~ verl>. oblig., fed pfa
res in fe dolum hal>et. Ce dol n'efi point repréhenlible; il
peut feulement donner lieu à des dommages-intérêrs dans
certains cas. Le dol perfonnel qui vicie, annulle les aétes
& fournit 'un moyen de requêre civile envers les Arrêts,
eH celui qui renferme le de1fein de la part de l'un des contraél:ans de furprendre l'aurre, & qui produir l'événement
effeétif de la rromperie, Ji eventum fraus hal>uit.
La fuppofition de créances qui n'onr aucun principe
d'obligarion naturelle ou ci"ile, peur fans doute être confidérée comme un dol perfonnel, fur-tout lorfqu'elle a pour
objet de dépouiller quelqu'un de fan bien, une femme de
fa dot. Les articles de créance que Carmagnolle prérendoit avoir fur fa femme, éwient au nombre de quarre;
1°. le prix des marchandifes de bijouterie, de c1incai!lerie
& autres effets; 2°. le montant des dépenfes faires pour
les aRaires de fa femme ou pour répararions à fa maifon ;
3°. les frais d'exploitation des rerres; 4°. les hardes qu'il
lui avait achetées lors de [on mariage, ou leur légitime
valeur.
En t!Jefe générale, il n'efi point permis à la femme d'a..
liéner fes fonds dotaux, ni de conrraél:er des engagemens
qui puiffent aboutir à la perre de la dor; mais cerre regle
foufhe des exceptions; les fonds dotaux peuvent êrre aliénés,
pour caufe Julte & nécelIaire ; les Loix no ilS efi marquent
les cas. La femme qui délinque, qui vole ou rnalverfe eli
quelque maniere que ce fait, s'oblige nécelIairemenr, &.
1,
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PAL.A.IS
DE
PROVENCE.
I~
ceux conrre qui ces délits font commis peuvent la pourfuivre par les voies de droit. Le mari même à qui la femme
a expilé & dérqbé des effets peut la pourfuivre, non pas
cdminellement, mais par la voie civile rerum amotarum ,
pour obtenir la reHirution de la fomme ou des dlOfes volées, ou leur légitime valeur. C'efl: le fentiment de Brodeau, de Defpeilfes, de Builfon. Si la Chauvet, après avoir
fait emprifonner (on mari, lui avoit enlevé toutes fes marchandifes de bijouterie & fes effets, ainG que ce dernier
1'expofa dans fa requête, il aurait pu en réc1Jmer le prix.
A l'égard des réparations des fonds dotaux & des dépenfes
faires pour les propres affaires de la femme, celle-ci n'ell:
pas obligée de les rendre quand elles font modiques, fuivant la décifion de la Loi omnino, if. de impenfis in res dotales fac?is. Mais elle en efl: tenue, lorfqu'elles furl[ CO!1fidérabJes & foncieres, comme l'obferve Defpeilfes, tom. l ,
pag. 4Jo, n. 7S- Quant aux cultures & femences, fi le
mari en avoit fait les frais, & qu'il n'eût pas per9u les
fruits, il étoit jull:e qu'il en fût remboudé. Les différentes
créances dont Carmagnolle excipoir , n'étOienr poins invraifemblables, elles pouvoient avoir quelque fondement; mais,
il ne fulEt pas qu'une créance foit poffible, pour qu'on fQit
autorifé à la réclamer; il faut qu'elle foit réelle, & qu'elle
foit jull:ifiée.
Il ell: vrai qu'enfuite de l'Arrêt interlocutoire il fut 'procédé à une enquête; mais les hoirs Bayard ont dit que
1'Arrêt définitif en faveu'r duquel on doit toujours bien préfumer, tient lieu de preuve, fuppofe qu'elle a été remplie,
& forme feul un titre légitime qui exclut tout fouP90n de
fraude ï cette confidération feroit fpécieufe, s'il s'agilfoit
ici d'un Arrêt rendu en conrradiél:oire défenfe & avec con"
noilfance de caufe; on auroit lieu de croire, on pourroit
fuppofer que la Cour étant déja liée par fan Arrêt interlocutOire, fe conforma à fa difpofition , & n'adjugea les fommes demandées qu'après avoir vu & vérifié que la preuve
qui en avoit été ordonnée étoit remplie; la chofe jugée formerait alors un titre légitime ol;l apparent; mais ,'eH i;~
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un Arrêt d'expédient provoqué par un mari diffipateur &.
dérangé, foufcrit par une femme mineure, qUI, quoique
répétée, n'étoit pas délivrée des enrraves du pouvoir marital; un Arrêt dans lequel le miniftere des Juges avoit été
rendu inutile, parce que inter confentil!ntes nullœ funt judicis
parus; un Arrêt enfin qui n'étoit peut-être. que le réfultat
d'un accord domeHique, auquel la femme pouvoit avoir été
induite par erreur, par furprife, par crainte ou par force.
Prétendre que cet Arrêt fe foutient par lui-même, ce ferait
juftifier un titre qui peut être vicieux, & qui eH attaqué
par le 'titre même.
Me. Bovis difcuta enfuite l'enquête, & obferva qu'il n'y
avoit que l'article de demande concernant les expilations
qui eÎlt quelque apparence, & qui fÎlt en partie juHifié , que
tous les autres étoienr illégitimes, fuppofés. Aucun n'étoie
prouvé, quoique la preuve en fÎlt indifpenfable, pui(qu'elle
avoit été ordqnnée. Un Arrêt d'expédient qui a admis de
pareilles créances en faveur du mari cont re une femme mineure, ne peut être exempt du vice de dol.
Me. Ravis obferva fur le moyen tiré de l'ultra petita, qu'il
ne faue point confondre les Arrêts d'expédient avec les
Arrêts contradiétoires; ces derniers peuvent être attaqués
par touS les moyens de forme indiqués par l'Ordonnance,
parce que l'ordre judiciair,e n'eH point arbitraire aux parties,
& que les regles fur lefquelles il eH établi, n'empruntent
rien de leur ·volonré. Les Arrêts d'expédient au contraire
ne font que des Jugemens conventionnels que l'accord & la
commune volonté des parties gouvernent; ce fonr des tranfaB:ions judiciaires qui ne font point a!l:reintes aux fm'mes
établies pour les vrais' jugemens; l'autorité· du Tribunal
qu'on y fait intervenir, les rend coaétives & exécutoires,
mais n'en détruit pas l'origine. C'eH ce que nous apprennent Bellus en (es confeils & d'Argentré.
Les Arrêts d'expédient ont autant de force que les Arrêts
contradiétoires; ils font coac1ifs comme eux, & on ne peut
les attaquer que par les voies ulitées contre les Arrêts
rendus contradiétoiremem. Mais il eH certain vice de
forme
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PROVENC!!.
17
forme qu'on ne peut pas leur imputer; tel eH celui de l'ultra
petita, c'eH-à-dire, quand ils ont adjugé au delà de ce
qui avoit été demandé, ou ce qui n'avoit pas été demandé.
Comme l'Arrêt d'expédient eH précédé d'un accord, les
parties font cenfées avoir formé. verbalement, lors de
l'accord, routes les demandes qui n'avoient pas été énoncées dans le procès. Par la même raifon, il femhle que
la non défenfe ou la non valable défenfe , même de la part
d'un mineur, n'eH pas un moyen fuffifant de requête civile, parce qu'on préfume que lors de la rranfaaion le
mineur a corn pierré fa défenfe. C'eH ce qui fm jugé en
I7So entre le Chapitre c!e Riez & les Bénéficiers.
Mais fi les Arrêts d'expédient ne font pas fufceptihles
d'être querellés par des moyens de forme, ils peuvent
l'être par tous les moyens fonciers. Ainfi le dol eH un
moyen fuffifant pour faire rétraaer ces Arrêts envers qui
que ce foit. La moindre lélion peut opérer le même effet
de la part d'un mineur; car celui-ci dl; rellirué envers touS
aaes, quels qu'ils foient, judiciaires ou extrajudiciaires,
qui fe font formés par fon confentement, lorfqu'il y a été
léfé, non tanql/am minor , fed tanqlJam lœfùs reJlituitur. Or,
fi l'Arrêt d'expédient dont il s'agit ne renfermoit pas un
dol perfonnel, il contiendrait du-moins un dol réel, tlne
lélion envers la Dlle. Chauvet: fan mari avoit formé contre
elle plulieurs demandes, qui, à l'exception de la premiere,
ne paroitToient ni réelles, ni légitimes, ni apparentes, &
qui n'étoient point jufl:itiées; cependant elles lui furent
toutes adjugées; on lui en adjugea même de nouvelles. La
dot de la Dlle. Chauvet étoit route compofée de plu lieurs
biens fonds;
patrimoine entier de cette fem!De mineure
fe trouve difperfé, aliéné fous prétexte de prétendues
dettes, qui, en les fuppofant réelles & légitimes, n'exi.
geoient pas une vente générale.
Les Loix ont accordé une proteaion fpéciale aux femmes, aux mineurs. Convaincues que la fragilité du fexe de
celles-là, & la foibleffe de l'âge de ceux-ci: peuvent donner
un accès facile à la fraude, à la furprj(e & à toutes les
Années 1775 & 1776.
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i~pre/IJons étrang~es, elles ont pris des mefures pour les
en garantir. En' conféquen,ceelles ont prohibé le divertiffement, l'aljénation des qjens dotau){. Ces Loix font partie
de notre <,Irait public. Rien n'ell: en effet fi intéreffant que
la confervation de la dot <,les femmes, intereJl reipuMica! mulierum dotes falvas effi. Ce n'ell: pas pour l'intérêt du mari
feulement, ni même pour celui de la femme en particulier,
que la dot a été réndue inaliénable, mais pour l'intérêt public, pour le bien des familles; delà vient que ni la femme
ni le nlari, fait conjointement, fait féparément, ne peuvent
aliéner un effet dotal: nec confentiente marito mulier, nec Cfinfentieme muliere maritus pojJit alienare, ne fragilitate naturœ
[uœ ù/ repentinam deducatur inopiam. L. unique, §. & cùm
lex Julia, cod. de rei uxoriœ ac1ione.
Cette prohibitio,n eH encore plus rigoureufement prononcée à l'égard de la femme féparée de biens & droits d'avec
[on mui. Qlland la Loi lui permet de répéter [a dot du
vivant de, fan époux, ce n'eH que fous la condition expreffe
de ne pouvoir la vendre: ita tamen ut eadem mulier nul/am
ha/;eat licentiam eas res alienandi vivente marito & matrimonio inter eos conjlituto, dit la Loi ubi adhuc 29, cod. de
jure dotium. Le motif de cette difpofition dl: que la répétition de dot n'ell: permiCe à la femme pendant le mariage,
que pour mettre fes biens en fûreté & les garantir des déprédations de Con époux; & l'objet de la Loi [eroit trompé,
fi les précautions qu'elle a pris pour l'avantage de la femme
& de fa famille tournoient à leur préjudice, & fi une femme
répétée pouvoit diffiper Ces biens. La collocation marito vergente ad inopiam, n'dl: d'ailleurs que provifoire; elle ne
détruit ni n'anéantit les p.aél:es matrimoniaux; elle en [ufpend feulement les effets; delà vient que fi le mari revient
en meilleure fortune, il rentre dans tous fes droits [ur les
biens dotaux, & la collocation tombe.
Il ell: pou riant certain que la dot peut, être aliénée pour
cauCe jufl:e & légitime, & cette cauCe fe rencontre 10rfqu'iI
y a néceffité ou utilité évidente; le cas de néceffité arrive,
lorCqu'il s'agit de pourvoir au paiement de quelque dette
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9
de la femme; mais plufiéurs conditions font requifes à d
{iljet ; elles font marquées dans la Loi fundum' ult. if. d~
jllr~ dotium; il faut qu'e la dette fait réelle & urgente, IIrgentihus creditorihus ; qu'il n'y ait pas d'a litre moyen de pourvoir à l'acquittement des créanciers, ou que la venre & la
Iibérarion de la derre qui en eH l'objet, tourne au profit &
à l'avantage de la femme: quod lltilius l ' ideatur potÎlJS fundum qui dotalis efl, diJlrahere, quia mÎlzu's frùc7uofus fit; &
qu'enfin la vente n'aÎ't pas été frauduleufement médit.ée &
préparée, qu'il n'y lait interve'nll aucun dol, aucune tromperie,fi nulla in eâ r~ captio fit futura. Ce n'elt que par le
concours de taures ces circonHa'ncès qu'une pare/Ile venre
peut être autorifée. Dans le fa'it aél:uel, aucune d'e ces circonfiances ne fe rencontre.
La Chauvet a été affifiée d'un cura·teur lors de l'Arrêt,
le Miniltere public y eH intervenu; mais l'on fait que cette
intervention n'eff que de form'e dans ces occafions; cette
formalité n'eH pas. même néceifaire dans le. caufes des mineurs, fuivant nos urages; & le confentement que l'Officier
public donne à ces accords judiciaires eH toujours au rifque,
péril & fortune des parties qui le reql1ierent; delà vient que
l'autorifation du' Juge, l'intervention du curateur, ne prive
jamais le mineur du bénéfice de là refiirution dans le cas
où il a été lefé.
La vente a été faite aux encheres; les acheteurs fe font
préfenrés fous la foi publique & à l'ombre d'un Arrêt. Mais
tout cet appareil de ju/tice éroit affeél:é; ce n'éroiei1t-là que
des précaûtÎ'ons à la' faveu'r defquelles on chercllOit vraifemblablement à couvrir la fraude qu'on avait pratiquée, &
qui éro'ient incapables d'effacer le vice en vertu duquel on
agiifoit.
L'intérêt efi la mere d'e toute aél:ion , oppofent les hoirs
Bayard, & une demande en juHice ne peutjamaisérre écoutée,
fi elle n'a quelque objet, quelque rapport d'utilité ou de profit ~
pour celui qui l'intente. ( Cancerius, var., refol. part, l , cap•.
18, tit. de except. na. 19)' Le défaut d'intérêt en une -exception péremptoire; c'eflla plus forte de tOlites, dit Chorier
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Jou RNA L
fur Gu ipape, liv. l' feél:. 7, art. 1. Or, le but que fe pro":
pofe la Ch:luvet par fa requête civile, ef~ de parvenir à la
revendication de fes fonds dotaux; cette revendication eH
impolIible, elle eH impraticable en l'érat des chofes; cette
femme n'ayant rien à efpérer de cette aél:ion, attendu qu"il
y avait dette légitime & urgente, elle en fans intérêt, &
conféquemment non recevable à quereller l'Arrêt, Mais ( obferva Me. Bovis) on peut d'abord alléguer que la regle invoquée n'a pas lieu en matiere de requête civile; on diftingue dans ces forres de caufes deux aél:ions, le refcindanr qui
tend à faire rétraél:er l'Arrêt, & le refcifoire qui eH l'objet
foncier, le profit qu'on fe propofe de retirer de la rérraél:ation de l'Arrêt; ces deux aél:ions ne doivent pas êrre contondues; l'Ordonnance défend même de les cumuler dans
aucun cas. Il fuffit donc, quand 011 veut attaquer un Arrêt
par la voie de la requête civile, qu'on y découvre un des
vices indiqués' par l'Ordonnance, pour qu'on foit fondé à en
demander la rétraél:ation, & que la Cour doive l'ordonner,
& cela indépendamment de la juHice ou injuHice que l'Arrêt rétra'él:é peut contenir, indépendamment des raifons ou
exceptions que les parties ont à faire valoir fur le fonds, &
qui ne peuvent être examinées & traitées qu'en jugeant le
refcifoire.
Il eH cert,ain d'ailleurs que l'aél:ion en revendication dure
trente ans envers le poffeffeur al! détenteur du bien d'autrui : in rem .fpeciales ae perfonaZes ac7iones ultra 30 annorum
/patia minimè protendantur. ( Leg. fi èùm, cod. de prœfcript.
30 veZ 40 annor., & Leg. 2'''' cod. de rei vindie.) Cetre,
prefcl'iprion a été abrogée à l'égard du tiers poffeffeur; elle
a été réduire à dix ans entre préfents, & à vingr entre abfens;
mais pour qu'elle ait lieu, deux conditions font effentiellement requifes, le titre & la bonne foi. C'eU la décifion de
la Loi 4, cod. de rei vùzdieat., de la Loi 7, cod. de petit.
hœred.; de' la Loi derniere, cod. de prœfcript. 30 1'eZ 40
anI/or.
,
. Mais la prefcl'ip:ion de dix ans n',a jamais lieu en faveur
nulle, parce qu'alors
du tiers.acquéreur, quand la vente
en:
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PROVIlNCE.
2f
ce tiers-acquéreur fe trouve fans titre; ou ce qui en la même
chofe, il n'a qu'un titre vicieux. Une vente eH nulle, lorfqu'elle ell: prohibée par la Loi, & celle qui porte fur des
fonds dotaux eCl fans contredit de ce nombre. (Loi unique,
§. & chm Lex Julia, cod. de rei /Ixoriz ac7ione. ) Dup rier en
fes maximes du droit, liv. 'il pag. p l ; Mr. de Saint-Jean,
Mourgues, Louet, affilrenr que les aél:ions ref~ifoires qui
viennenr ex caufis pub/iris ( & ils placenr dans cerre c1dffe
celles qui naiffent de l'aliénation de' la dot) ne fonr prefcrites que par trente ans. Les Ordonnances qui fixenr les
aél:ions tefcifoires à dix ans, ne comprennent certainement
pas les ventes des fonds dotaux, parce qu'elles font nulles
de droit public, comme l'affurent d'Argentré fur la coutume
de Bretagne, art. 266, cap. )' n°. 2, & Buiifon en fes notes
fur le Code, liv. 7, tit. 27. On trouve un Arrêt de ce Parlement du 2) Mai 172.), rendu au rap~ort de Mr. d'Entrecall:eaux, en faveur de Jean Roubin du B<lu{fet, contre les
hoirs d'Augull:in Gueiro"rd, qui jugea que l'héritier d'une
femme pouvoit revendiquer un fonds fubiidiairement dotal
pendant trente ans, même contre un fecond acheteur.
Peu importe que la femme toit répétée en dot ou non;
dans l'un comme dans l'autre cas, la dor conferve fon privilege d'inaliénabilité; la femme reHe toujours dans le lien
de l'amorité maritale, !k aucune prefcriptioll ne peue
courir contr'elle. Boniface, tom. 4, liv. ) , tit. 14, chap. 3,
rapporte un Arrêt qui refiitua une femme envers la vente
qu'elle avoit faite du fonds ptis en collocation trente-cinq
ans après, le mari vivant; & le Compilateur obferve que
cet Arrêt n'obligea point la femme à rendre l'argent qu'elle
avoie retiré du prix de cerre vente, attendu que l'acheteur
ne jufiifia pas qu'il eût été employé à fon profit.
Peu importe que la vente ait été faite par le mari ou par
la femme, ou par tous les deux conjoint ment ; les maris one
fouvent réclamé avec fuccès envers les ventes des fonds dotaux qu'ils avoient eux-mêmes paifées, parce que ces forres
d'aliénations fone nulles; d'une nullité abfolue & de droit
public. Boniface, tom. 1, liv. 8, tit. 3, chap. 14, rapporte.
�Jou RNA L
un Arrét qui entérina la refci{ion obtenue par une veuve en';
vers l'ali'énario'n d'un fonds dotal qu'e'lle & fan mari avaient
faite pendanr, le mariage, & qu'elle avait approuvé durant
fa viduité, quoiqLl'elie ne fe fût pourvue que plus de dix ans
après la mort de fan mari.
En fuppofant done que les hoirs Bayard puffenr être con_ fidérés comme des tiers-acquéreurs, ils ne pourroienr s'aider
de la prefcription de dix ans, parce qu'ils n'onr point de
titre, ou que celui qu'ils onr eft nul & vicieux, & que le
vice ne peut menre à couvert que par le laps de trenre ans.
'Le prétexte qu'ils ont acheté aux encheres & en exécution
d'un Arrêt ne les conftirue pas en bonne foi, dès qu'ils connoiffoient Je vice de la chofe, & que les fonds qu'ils achetaient étoienr dotaux. Les hoits Bayard ne peuvenr faire en·
tretenir cette vente, qu'en prouvant qu'elle a été faite pour
juHe caufe, & ils ne le prouvent pas.
Sur la feconde fin de non-recevoir, Me. Davis obferva que
le mineur qui, en contraéranr avec quelqu'un, fe dit majeur
pour l'induire à erreur, fans produire aucun aél:e, n'eft pas
exclu pour cela de la reHitution: c'eft la déci{jon des Loix
1 & 3, cod. Ii minor ft majorem dixerit; il en eft de même
s'il fe dit ma;eur,' &' s'il palfe publiquemenr pour tel par erreur; c'eft ce qoi dt établi par les mêmes Loix. Duperier,
parmi les Arrêts qu'il rapporte, en cite un qui reHitu:l un
mineur, quoiqu'il eCIt affuré à ferment qu'il étoit majeur. Il
en ferait autrement, fi le mineur, en fe difant majeur, tâchoit de le perfuader, en fuppofant un extrait baptiftere ou
un autre aél:e fàux. II feroit alors vérir"blewenr en fraude,
& la peine de cette fnrude ferait ra 'déchéance de toute
reHitutionl C'eft ce q'ui réilllte de la Lo'i 2 al!' même titre
du Code ,.& de la Eoi, 32, if. de minor. ;'& c'efl: ainfi que s'explique Domat en fes Loix civiles, pa-ft. 1, liv. 4, tit. 6,
feél:. 2 , §. 2.
Quant à la fem"l'iie', les Loix 2, 23' & 30, if. ad Velleïanum, nous apprennent que -fi" dans les' aéYes qu'elle paffe,
elle emploit la rufe & la fraude; fi elle fe préfente' fous une
qualité qu'elle n'a point; fi étant interrogée en jugement ,22.
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PAL AIS
DE
PRO VEN C :Il;
2. 3
'elle nie celle qu'elle a, elle ne peut s'aider du Velleyen. A
l'égard de fes biens, Perezius in cod. tit. 39, liv. 4, na. 8,
fait cette diftinél:ion: ou la vente ou l'engagement en eft
fait par le mari à l'infu de la femme, & alors l'aél:e ell: abfolument nul; ou il eft fait de fon confentement, & dans_
ce cas fi l'on a caché au créancier ou à l'acheteur que le
bien appartenait à la femme, celle-ci renonce par-là au Velleyen; fi au contraire il en a été inftruir,'la femme continue
de jouir du bénéfice de cette Loi.
Si le mari en vendant les fonds dotaux, en a caché la nature
& les a donnés comme fiens, l'acheteur qui eft enfuite évincé
peut prétendre contre lui des dommages-intérêts; mais il
n'eft jamais renu à la garantie, s'il en a fait favoir à l'acquéreur la qualité, quand même il l'aurait promife. Boniface
rapporte plufieurs Arrêts qui l'ont ainli. jugé, & il en eft un du
mois de Juin 1748, rendu au ~apport de Mr. de Mondefpin,
en faveur de Me. Courier de Grans, contre le fieur Berard,
qui jugea qu'il fuffit que le mari qui vend un fonds dorai
prenne la qualité de mari & maître, pour qne l'acheteur fait
cenfé inftruit que le bien appartient à la femme, & qu'il
n'aie aucune aél:ion de garantie à exercer contre fan vendeur en cas de revendication.
Les biens dont il s'agit font dotaux, ils furent vendus
comme tels, Bayard en érait inftruit; il n'y avait donc poine
de dol dans la vente, il n'yen a point non plus dans ce
qui précéda l'Arrêt. On peut d'autant moins préfumer un
concert entre le mari & la femme, que celle-ci avait répété fa dot, qu'elle s'érait plainte des févices de fan époux,
& l'avait fait emprifonner. Quelle apparence y a-t-il que
ces deux perfonnes [e fulfenc raut-à-coup réunies & accordées pour tromper le tiers? Eh! quel peut êrre le dol d'une
femme mineure qui foufcrir un Arrêt de condamnation qui tend
à lui enlever tous fes biens? Un pareil aél:e ne peur être que
l~effet de l'inconfidération, ou du délire, ou de la force; on
ne préfume jamais que quelqu'un fe porte à une aaion
4éshonnêre, quand il ne doit lui en revenir aucun profir.
La troifieme fin de non-receyoir rend à [uppo[er deul(
�24
Jou
RNA L
aél:es difiinél:s dans un feul, qui efi l'Arrét d'expédient. Les
Arrêts d'expédient fe forment d'abord par l'accord refpeél:if
des parties, qu'on fait enfuite approuver & recevoir par la
Cour devant qui la contefiafion avoit été mùe. Dès qUê ce
Tribunal fouverain a appofé à cet accord le fceau d~ fon
autorité, il devient Arrêt. On ne pem pas difl:inguer l'accord de l'Arrêt; le premier efi incorporé dans le fecond;
il n'exifl:e de fait & de droit. qu'un feul aél:e qui, quoique
requis, provoqué & confenti par les parties, porte pourtant l'empreinte d'un jugement; on peut l'appeller tranfactian judiciaire, jugement conventionnel, ou Arrêt d'expédient, pour le difl:inguer des Arrêts contradiél:oires. Mais
quelque dénomination qu'on lui donne, c'efi toujours un
Arrêt; il en a la forme, il en produit les effets; il n'efi pas
plus permis de détacher le confentement des parties de cet
Arrêt d'expédient, qu'il le feroit dans un Arrêt contradictoire d'en féparer l'opinion des Juges qui ont concouru à le
rendre. L'accord des parties n'efi plus compté pour rien; il
ne fubfine enfin qu'un aél:e unique, infufceptible de feéèion,
de divifion; c'efi l'Arrêt. On ne peut l'attaquer que par les
voies que l'Ordonnance judiciaire a établi, la requête civile;
c'efi celle que la Chauvet a prife; fan aél:ion eH légitime,
parce qu'il en certain & convenu qu'il l'a intentée dans le
temps de droit; la claufe de refiiturion envers tous acquiefcemens, qui a été inférée dans les lettres en forme de re'. quête civile, n'ell: que de forme & de furérogation. AinG
l'Arrêt d'expédient étant rétl aél:é, les acquiefcemens qui
l'avoient pré..:édé & qui avaient concouru à le former, tout
comme ceux qui l'ont fuivi, doivent tomber par rai fan de
conféquence.
Me. Bovis conclut à ce que fairant droit aux lettres en
forme de requête civile, l' Arrêt d'expédj~nt du 29 Novembre 17 p fût rérraél:é, & l'amende reniruée à l'impétrant.
Arrêt du 23 Février 177~, prononcé par M. le Premier
Préfident à l'Audiénce du Rôle, conforme aux conclufions;
les hoirs Bayard filrent condamnés aux dépens. Plaidant Mes.
Gaffier & Roman- T ributiis.
ARRÊT,
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rP Il, 0 VEN C"Il•
•
.,
ARRÊT
III.
Sur un dévolut fondé fur la prétendue nullité des titres du
Patron, & fur la confidence.
E 24 Juillet 1770, Mre. Souffin, Prévôt de J'Eglife Cathédrale de Marfeille, réligna cette dignité, mettl mortis,
à Mre. Compian fan neveu, Chanoine Théologal de la même
Eglife. Le 6 Août Mre. Compian obtint des provilions en
Cour de Rome, & enfuite fon vifa de l'Evêque de, Marfeille.
Le l Septembre 1771 il prit polTeffion du bénéfice, & fut
admis aux diHributions.
Mre. Martinet, Bénéficier de la méme Eglife, dévoluta
cette Prévôté, l'impétra comme vacante, pel' nullitatem Titlllorum de Mre. Compian, aut alio quo vis modo, & prit des
dares à Rome le 14- Décembre 1772.; les provilions lui furent refufées, fous le prétexte que la Provence eft pays
d'obédience, malgré l'Arrêt du Confeil de 1569 qui la décharge de ce joug; il fe pourvut par requête, & le 3 Août
1773 il obtint permiffion de fe retirer à l'Evêque diocéfain
pour obtenir de lui des provilions de même date & de même
force que celles qui lui avoient été refufées en Cour de Rome,
& en cas de refus, de prendre poifeffion civile de la Prévôté pour la confervation de fes droits. En conféquence il
demanda fan vifa, qui lui fut expédié le la Septembre. Le
1 Oél:obre il prit poflèffion civile, après avoir eifuyé bien de
difficultés; mais il ne put parvenir à fe faire ouvrir la porte
de la falle capitulaire, ni avant fa mife en poifeffion, pour
repréfenrer fes titres au Chapitre, ni après, pour l'en inftruite, pour lui en faire la publication, pour le requérir de
l'admettre' aux diHributions, & de J'inftaller en la place deftinée au Prév6t; refus dom il fe fit concéder aél:e.
Le même jour, & au moment même de la prife de poffeffion, Mre: Compian forma' oppolition. Le 8 ~u même
mois, Mre. Martinet demanda au Lieutenant de Marfeille
L
Années t?75 & t776.
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Jou Il: N A L
le déboutement de l'oppofition & la maintenue du bénéfice;
Il configna l'amende .comme dévolutaire. Le 2. 1 Mars 17741
Semence qui le déboute de fa demande. Appel pardevan t
la Cour. Pe,u de temps après la fignificatiol1 du relief d'appel, Mre. Compian réfigna la Prévôté, metu mortis, à Mre.
Martin fon neveu, Chanoihe Théologal de la même Eglife,
qui obtint le 8 Juin fon vifa, prit poffeffion Je 22 du même
mois, & fut admv.. aux difl:ributions. Ce fur contre lui que
le procès fut continué.
Mre. Martinet obferva que les dévolutaires ne font pas
généralement odieux. Le dévolu taire d~vient l'homme de la
Loi, en rempliffant fes vues, eÇl s'élevant contre les abus
qu'elle a voulu condamner; & fi l'on a vu quelquefois des
Ecc1éfiai,liques abufer de l'impérrarion par dévolur, pour
tenter d'éloigner des bénéfices ceux qui pouvoienc les pofféderavec jufl:ice, avec décence, ces abus ne font point
capables de faire oublier la fageflè de la Loi, & ne peuvent fervir' de prétexte pour repouffer les dévoluraires quelconques. Il efl: vrai qu'un dévo!uraire peur paroîrre odieux,
lorfqu'il veur combatrre & renverfer le choix roujours favorable du collareur ordinaire, ou lorfqu'il cherche dans lit
perfonne d'un Ecc1éfiafiique des irrégularités qui le faffent
déc1arer indigne ou incapable de conferver [on bénéfice.
S'agir-il d'une collation? On ne voit point avec plaifir un
Ecc1éfiafl:ique quereller le choix, le jugement de fon fupérieur; il s'éleve conrre lui une prévenrion que la raifon
femble autorifer. S'agir-il de l'incapacité, de l'indignité d'un
Bénéficier? On n'aime pas qu'un concurrent publie des faures
ou des vices qu'il femble plus utile de laiffer oublier; on
trouve mauvais qu'un particulier veuillè chercher fon élévation, fa fortune dans le déshonneur d'un aurre. Mais il n'en
efl: pas de même, lorfque les moyens du dévoluraire ne
portent que fur le ritre de celui qu'il attaque. Il n'y a rien
dans cette efpece de contel1:ation qui bleffe les préjugés
reçus; il n'y a rien qui puiffe faire juger le dévolu ta ire
odieux; il a des droits, il a un titre, il oppofe le rout moins
à la perfonne qu'au titre même de fon compétiteur.
,
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DEr PRO V il NeE.
'12.7
Le dévolu taire fe pl'élente avec plus de 'favéur que le réfignataire dom il querelle le titre. Les réfignations el! faveur
créées daAs le fchifme d'C!ccident, font contraires à la pureté de la difcipline. ( Mémoires du Concile de Trente, pag.
37 l ; Thomaffin, difcipline de l'Eglife, part. 4 , liv. 2, chap.
17 in fine. ) Les réGgnations en faveur font condamnées par
les Canol1s, qui ne fouffrent pas que les Bénéficiers choififfent leurs fucceffeurs; elles font attentatoires aux droits
des collateurs ordinaires; elles perpétuent les défordres que
l'Egli{e a voulu prévenir par l'établiffement du dévolur.
C'eH ce qui a fait dire à Decormis, tom. l, col. 2S0, que
le dévolut doit wujours l'emporter fur une réfignation frau..,
duleufe.
Mre. Martinet tâcha enfuite de ju!1:ifier fon titre. Il foutint 1°. qu'en impétrant la Prévôté, il n'étoit pas obligé
d'exprimer l'efpece de la vacance. On voit dans Catelan,
liv. l, chap. 60, que le dévolutaire n'el): pas même obligé
d'exprime-r les caufes de fon impétration, & cela par un
ufage contraire à la regle de all/loli poJfejJione. 2°. Après
l'impétration, Mre. Martinet avoit obrenu {on 1)i[a, infinué
dans les quinze jours' de fa date, & la Loi donnoit un mois
à Mre. Martinet. 3°. Les provifions données par l'Evêque de
Marfeille font de même force que celles que Mre. Martinet
auroit dû recevoir de Rome. Cette maxime eH atteHée par
l'art. 47 des Libertés de l'Eglife Gallicane. 4°. Ses proviGons
expédiées, Mre. Martinet a pris poffeffion de la Prévôté
dans l'année de leur date. So. Attaqué par l'oppoGtion de
Mre. Compian, Mre. Martinet a formé, onze jours après,
fa de:nande en débouternent, & la Loi lui donnait trois
mois. 6°. Certe demande formée, il a {arisfait à l'a~r. 13 du
litre l S de l'Ordonnance de r667; il a conGgné la fomme
de soo li,'. au Greffe de la Sénéchauffée de Marfeille. 7°. L'in{tance liée pardevant le Lieutenant, Mre. Martinet a donné
copie à fon Compétiteur de fes titr,es & capacités. 8°. Après
la communication des titres & des capacités de Mre. Martinet, quel vice, quel défaut y a-t-on trouvé? Son certificat d'émde eH dans !lue forme probante; il Y elt dit qu'il
D2
�28
Jou R N' A L
a étudié en droit canon & en droit civil pendant le temps
prefcrit; il ef!: {igné par trois ProfeJfeurs. 9°. L'art. 9 de
l'Edit de 1691 ordonne l'infinuation des capacités dans le
mois, mais ne prononce poine la peine de nullité; il ordonne feulemene aux Juges de n'avoir point d'égard en pronon~ant fur les complainees aux capacités non infinuées; il
fuffit que l'infinuation en fait faite avant le jugement.
Sur ce que Mre. Compian objeél:oir qu'il y avait fubreptian dans les provifions de Mre. Martiner, en ce qu'il n'y
avait point exprimé la caufe de la vacance, ni les bénéfices
done il était pourvu, ce principe ( difoit-il ) n'a" aucune applicarion à la caufe; s'il n'a poim obtenu des provifions en
Cour de Rome, c'ef!: que les Officiers de la daterie n'ont
pas voulu lui en expédier, fous le prétexre que la Provence
ef!: un pays d'obédience où le Pape conferve le droit odieux
des réferves; ce fait ef!: prouvé par le certificat du Banquier
expéditionnaire. Mre. Martinet a exprimé la caufe fpécifique
de la vacance, ob nullitatem tituli; il alitait fpécifié inutilement tous fes moyens; ~'auroit été déterminer les efpeces
particulieres de nullité, & préfen.rer prémarurémem la preuve
de la vacance: l'impérram n'ef!: point a!fujerti à ces détails;
la Loi l'en a difi)enfé, en ne lui prefcrivant que d'exprimer la
caufe de la vacance. C'ef!: ce qu'on trouve décidé dans les
Mémoires du Clergé, tom. la, col. 12.10; ita Cate!an, liv.
l , chap. "60; Duperray, moyens canoniques, rom. 3 , pag. 26o;
Durand de Maillanne, Dic7ionnaire Ca7lonique, tom.
pag.
~ 07 & SIl; Conférences d'Angers fur les matieres bénéficiales, & la Simonie, rom. 2, pag. 30; Piales , du dévolut,
tom. 1, pag. 41I & 61 ~ ; Gibert, inflit. eidef.
"
. Mre. Maninet n'avoir pu exprimer les bénéfices dom il
érait pourvu, parce qu'il n'avait rapporté que fes dates de
la Cour de Rome, dans lefquelles il n'éroir pas obligé d'y
parler de fes bénéfices; les dates ne fom pas les provifions;
elles fervent à confl:ater la véritable époque de l'impétrauon , mais elles ne conf!:iruene pas le titre de l'impétranf;
ce titre ne fe forme que par la fupplique & par la figna(ure du Pape qui accorde la collation qu'on lui "demande:
1,
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
29
la fupplique efl appellêe fignature , difent les Auteurs, parce
que le Pape jigne les collations des bénéfices conjifloriaux &
des dignités, comme le Prefet figne celles des bénéfices ordinaires. La fignature dl: le fondement ou l'ame d l'acte de
collation, comme la fuppliquë en eH le corps, & ces deux
objets réunis forment le titre de collation, & les provifions .
expédiées en Cour de Rome. Il ne peut donc y avoir des
provifions fans fignature; & s'il n'y a point eu de provifions
expédiées en Cour de Rome, il n'dl: pas po/Iible de les
quereller.
D'ailleurs les différens aél:es de Mre. Compian ( continuoit Mre. Martinet) portent avec eux des abus formels,
inexcufables. Les regles canoniques y ont été facrifiées à
des vl}es d'intérêt. Les Loix de nos Souverains y ont été
méprifées avec éclat; enfin on ne voit dans ce titre qu'un
arrangement de famille, inconciliable avec la pureté de la
difcipline eccléuafiique; la réiignation de Mre. Sou/Iin eH
vicieufe, elle eH confidentielle; en réugnanr la Prévôté, il
a voulu cep'endant la conferver jufqu'à fon décès; il a confenri que Mre. Compian lui fuccédât; il s'eH choiu un héritier, mais il a voulu mourir en poffeffion de l'héritage,
& ce projet fut réalifé dans l'acte, en déclarant qu'il réugnoit metu mortis, quoiqu'il fCrt bien portant à l'époque de
la réugnation, puifqu'il ne ceffa d'affifier aux offices du
chœur, & d'y remplir à fon ordinaire les fonctions de fon
bénéfice. Cet acte eH nul; corn me cQntraire à la Déclaration
du 14 Février 1737, concernant les procurations ad rifignandum, qui veut que toute procuration pour réugner conCtate le véritable état de fanté ou de maladie du rélignant.
Le défaut de mention exacte rend le titre nul & de nul
effet.
La c1auCe metu mortis, en rendant la rélignation obreptice,
la vicie effentiellement. Suivant le chapitre Jùper liueris de
refcriptis, il faut dill:inguer en matiere d'expofé ce qui peut
déterminer le collateur ou le diffuader. Au premier cas, le
moindre déguiCement Cuffit pour annuller la grace. In his
'lu·aUbet fubreptio viriat gratiam & imponit nulliratem. ( Jour-;
�30
Jou
RNA
r.
nal cl.u Palai~" tom. 2, pag. 999, col. 1.) Il, Y a alors fubreptlOn, folt parce que ce ~lotif donné à l'acte efi abfolu ment faux, foit parce que la claufe metu mortis a rendu
plus facile l'admiffion de la réfignation. ( Dumoulin fur l'arr.
10 des petites dates, glof. 2, n. 'b tom. 3, & Pinfon, pag.
428 in fine. )
Cette claufe metu mortis rend encore la réfignation JJulle
fous un autre point de vue. Ce n'eH-là qu'un paél:e de re-'
grès, illicite de fa nature, & qui fait tomber avec lui le
tirre de Mre. Compian. Il eH défendu aux réfignans de pact·ifer fur leur rerour aux bénéfices dont ils fe dépouillent ,
& d'inférer dans l'aél:e aucune claufe, aucune condition qui
tende au même objet. Le feul regrès légal eH licite aux
yeux de la difcipline ecc1éfia/iique; le regrès conventionne!
ell: condamné par roures l~ Loix. Le premier eH a'pprouvé
par te chap. fiJper hoc, extra de renunciatione, par l'Edit de
Louis XIII de 1638, par l'ufage commun du Royaume,
&.par les Arrêts des Cours fouveraines. ( Conférences d'Angers fur les matieres bénéficial~s, & la Simonie, rom. 1,
pag. 220. ) Le fecond efl: univerfellement condamné, comme
tendant à rendre les bénéfices héréditaires. L'Eglife s'en ell:
expliquée avec précifion; d'abord elle a prohibé les conventions de route efpece fur les chofes fpirituelles ( cap.
pac7iones extra de paélis ); elle a déclaré enfuite que ces
conventions font toujours vicieufes & limoniaques ( cap. quœfitum de rerum permutatione. ) Enfin l'Eglife a prononcé formellement fur les conventions exprelfes ou tacites du regrès en mariere de réfignation, & fa décilion efl: écrire
dallS le Concile de Trente, feél:. 2.), chap. 1 de la réformation. Cerre décilion a éré reçue en France comme effentielle. ( Conférences d'Angers fur les marieres bénéficiales, tom. 1, pag. 2 J 9; Réfolution de plufieurs cas de
confcience, rom. 1, pag. 100; Louet in reg. de infirmis
re(ignat., n. 149,
in reg. de publfcand. rejignat., n. 4 &
6; Sachot, '14.0. regrés, & vo. rijignation. )
D'ailleurs cette fauire caufe, de metu mortis, préfente encore la preuve d'une confidence caraél:érifée. La condition
et
,
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PAt A ~ S
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PIt 0 V Il N C 1!.
3T
expreŒe ou racit~ de renrrer dans le bénéfice réligné, ell:
néceŒairement confidentielle. Le Pape Pie V. dans fa tàmeufe
Bulle intolerahilis, rapportée dans le Bullaire de Cherubin,
rom. 2, pag. 282, dir que la Simonie confidentielle dl: celle
qui fe fait lorfque quelqu'un a obrenu uo bénéfice eccléfiaftique,' foit par réfignation ou collarion, avec cette condition expreŒe ou racite de le rendre volontairement ou forcément par la voie du regrès à celui qui l'a réfigné ou conféré. Cette Bulle a éré adoptée en 1683 par le Concile de
Tours, reçue en France par une Déclararion de Louis-leJufie, rapportée dans les Conférences d'Angers, tom. 2 ,
pag. 179, & par Giberr, inJlitut. ecelef. tom. 2, pag. 23;
elle efi con!l:amment fuivie parmi nous. ( Mr. Le Camus)
tom. l , pag. 71, & tom. 2, pag. 414,)
La parenté du réfignant & du réfignaraire forme encore
une nulliré dans la réfignation, cap. ad extirpandas de filiis
preshyter. C'ell:-Ià plutôt une donation à caufe de morr, ou
une donation dans laquelle le donareur donne & retient)
aél:e qui dl: condamné même par nos Loix. ( Dumoulin in
regul. de puMicandis rif/gnac. 11. 369. )
La négligence du rélignaraire à dépoŒéder fan rélignant
plus de fix mois après la réfignation, forme par elle-même
une préfomption de confidence, fi le réfignaraire ne s'occupe
de fes intérêrs que par la crainte dù décès de fon réfignanr.
C'efi ce qu'atte!l:e Pa!l:our, de heneficiis, lib. 3, rit. 8, n.
S, & Rebuffe fur la regle de puhlicandis rejignat. glof. 13 ,
n. 10. Ici cerre préfomprion devient une preuve entiere ,
à la feule vue de la réfignarion même. Mre. Compian était
lié par les arrange mens qu'il avoit pris avec fon oncle, en
différant fa prire de poffeffion. II voulut laiffer jouir Mre.
Souffin de la Prévôté pendant fa vie; il exécuta le patte fecret qui l'obligeoir à ne pas dépofféder le réfignant. Il ne
fe permit d'entrer dans le bénéfice qu'au moment où il
crut que Mre. Souffin étair au lit de la mort. Ce rerard
de la prife de poffeffion, l'époque même de cer aél:e, démontrent invinciblement qu'il ne devoir être que le fuccelfeur de fon oncle. Il y avoit donc un paél:e de fucceffion
�32.
JOURNAL
entre lUI & Mre. Souffia. Il y a donc confidence dans là
réfign:uioa.
Il eft de regle qu'une réfignation eO: préfumée confidentielle, lorfqu'après avoir été dépolfédé" le réfignant s'ingere
dans le bénéfice réfigné en quelque maniere que ce foit.
C'eO: ainG qu'on le trouve décidé dans la Bulle inroleraoilis.
Ici les faits démonrrent que l'oncle & le neveu [e foor
conciliés pour rendre la Prévôté héréditaire enrr'eux. L'un
differe de prendre polfeffion pour ne pas dépouiller fan rélignant; le neveu laiife dormir [on titre pour lailfer jouir
[on oncle; une maladie imprévue l'avenit d'exécuter [a réligna tian : mais il craint d'abord la lumiere; il s'applique
à Clcher fa démarche; & lorfque [a prife (le poifeffion dl:
connue, le réGgnanr continue de jouir du bénéfice; le
neveu appaife l'oncle, en lui confervanr les droits d'une
dignité qui n'étoit plus [ur [a têre; il Y avoit donc entr'eux une convention formelle, & Mr.e. Souffin ne devoit
être privé de la Prévôté qu'en ce!fant d'exiner.
-Le vifa obtenu par Mre. Compian eft c1andeHin; il eft
[ans eitet, il eH nul aux yeux de la Loi. Il ne [uffit poin,t
au pourvu d'un bénéfice en Cour de Rome de [e préfenrer
à [on Evêque pour en obtenir le jugement de la capaciré;
il doit rendre ce jugement public, & juHifier aux yeux de
tous, qu'il a pu être pourvu du bénéfice impétré. La Loi
s'eH expliquée, & pour remplir cet objer elle a fixé un
délai péremptoire, après lequel le vifa tenu caché ne peut
plus [ervir 'de ritre à celui qui en eH p::meur. C'eO: la difpoGrion de l'Edit des infinuarions du mois de Décembre
r69I. Les requifitions de vifa, dit l'art. 14, les 11ifa feront
infinais dans le' mois de leur dole au greffe du Diocefe où les
bénéfices font jiwés , le tout peine de nullité. Il ne s'agie
donc point d'une fimple formaliré deO:inée à affurer la dare
du vifa, ou à établir un drOit bur[al; elle eft prefcrite pour
a
rendre public le jugement de -la capacité de l'impétranr.
L'inGnuarion faite dans Je diocefe Olt le bénéfice eft firué ,
remplit le double objet d'affilfer la date du vifa, & de le
readre public. Le vifa eH donc c1andeO:in; il reile [ans
effet
�DU
PALAIS
Dl!
PROVENCE.
33
effet lorfqu'il n'eH: pas publié. Ici Mre. COOl pian , porteur
de fes provifions depuis le mois d'Août 1770, obrint fon
'IJifa le S Février 177 t, & ce vifa n'a été infinué que le
1 Septembre (uivant, plus de fix mois après (a dare.
La priee de poffdIion de Mre. Compian_ efi encore· abfolument vicieu(e; elle - efi cbndel1ine, elle eH condamnée
par roures les Loix. Les regles aifujettiifent les réfignaraires
à prendre folemnellement poifeffion des bénéfices donr ils
font pourvus; ils (ont tenus de donner à leur prire de pof(elIion route la publicité poffible, & à défaut ils n'onr poinr
de titre pour conferver leurs bénéfices; la· Loi ne leur
permet pas même aucune (orte ç'arbitraire; elle a marqué
dans fa fageife routes les (olet111iités néceifaires à fon objet,
& ces folemnirés ne peuvent être (uppléées en aucune mi.
niere. L'oOliffion la plus légere eH punie (ans rerour pal' la
nullité de l'aél:e. Mre. Compian a-t-il fatisfait à la Loi,
lorfgu'il a voulu prendre poifeffion de la Prévôré? Il s'eH:
.porré précipitamment à l'Egli(e; il a mené avec lui un
Notaire & deux témoins; il Y eH arrivé à une heure où il
favoit bien de n'y rencontrer perfnnne, & là il a pris de
l'eau bénite, il a fait (es prieres à Dieu, & il s'elt affis à
la place affignée au Prévôt. On ne trouve da1.s l'aél:e du l
Seprembre 1771 ni la préfent<ltion de Mre. Compian au
Chapitre aifemblé, ni une demande d'être re~u & inHallé,
ni fa profeffion de foi qu'il devoit faire, fuivanr l'art. 10
de l'Ordonnance de Blois, Cuivant le Concile de Trente,
feff. 24 de reformalione, cap. 12, fuivant CabaiTut, theoriâ
t,; praxis, lib. 2, cap. 22, n. 4, fuivanr Paltour, de beneficiis, lib. 2 , tit. 1 S, n. 6 & 7, ni la dépuration d'un
Chanoine pour le mettre en poffeffion. Cependant les Loix
en ont difpofé bi~n différemment; c'eH unè premiere
maxime incontellable que les pourvus des bénéfices d~
pendans .d'une Compagnie ne peuvent en prendre poifeffion qu'après s'être préfentés au corps dont ils veulent devenir- les membres, <'5ç là ils doivent demander d'être re~us
in..ter Jrprres, & ,?'être inHallés par l'Ecc1éfiaHique ou par
Années 1775 V' 177 6.
E
�·.
34-
JOU,RNAL
le Chanoine que la Compagnie trouve bon de .députer à
cet effet.
La néceŒté de la préfentation & de la réception efl:
_prononcée dans le chapitre cùm inter de rt!nunciatione des
décrétales; o'eil: au Chapitre à dél~bérer fur cette réception & fur la prife de polfeffion. L'Edit de' 1691, an. l ,
portant création des Notaires apoil:eiliques , ne permet aux
pourvus de fe fervir des Notaires royaux que dans les cas
où les Chapitres refuferont de les mettre en polfeffion, &
leurs Greffiers d'en bailler aél:e. (Rebuffè en fa pratique
bénéficiellè, tit. de la mife de poffijJion, n. 14 & 20; Cabalfut, theoriâ & praxis, lib. 2, cap. 22, n. 6, pag. 173,)
Pontas dans fon Diél:ionnaire en rapporte une déci fion formelle. (Diél:i0naire canonique, va. pojJèjJion ; Lacombe fur
le même mot; Durand de Maillane datls fon Diél:ion. canon.
va. pojJèlJion; Brunet, tom. 2, pag:' 383; Defcombes,
Fan. 2, col.'680.)
.
L'aél:e du 4 Septembre 177 l , pol1:érieur de trois jours à
ta prife de polfeffion, dans lequel on y voit que Mre
Compian fut admis aux dil1:ributions , & qu'il jura de garder"
& obferver les Statuts, les délibérations & le> ufages du
Chapitre, ne peut couvrir la nullité ni la jul1:ifier, puifqu'elle étoit déja encourue par le feul fait. (Dumoulin,
coutqfne de, Paris, tit. l des Fiefs, §. 8, glof. in va. dénombrement, n. 87.) D'ailleurs le Chapitre n'y a pas même
utifié la prife de polfeffion; il n'en dt parlé dans cet aél:e
que par maniere d'énonciation.
•
On oppofoit pour Mre. Manin deux fins de non recevoir. la. Mre. Marrinec n'avoit point exprimé les bénéfices
dans la date; il Y érait dit feulement, cujus henejicia exprimi po/fùzt in litteris. Cerre daufe vague, quand elle eil:
appofée dans la date, ne peut fervir que pour deux bénéfices, fuivant l'obfervation de Rebuffe, de Jorm. fignat.
parr. 3, va. ql/od ohflentiœ, n, 9, ..pag. 71' & de Solliers
fur Ealtour, lib. 2 de hene! ecclef. tit. 9, nov. addit. nF·r.:
)ire. Martinet/polfédoit> trojs< béné·fices, outre la~ ·Pttl.vÔ'té',
1
.... j.
..
�.D T:T
PAL A IS
D :Il
3f
PRO V Il Nell.
'dévolutée ; fan titre peche dès-lors par le défaut d'exprefLion, ,qui efl: un vice annuBant, [uivant le chap. ad aures
extra de reJèript. , le chap. fi motu proprio de prœhend. 1 &
dignitat. & Ijl doéhine de d'Hericourt, Lqix ecelef. ch. 17,
arr. 17; de Lacombe, va. exprelfzon, n. la. C'eH auffi la
jurifprudence des Arrêrs rappor~és par Boniface, rom. l,
liv. 2., tjr. 2_4, ch. 4.
Il efl: cerra,in que les provifions de Mre. Marrinet feraient
nulles, quoiqu'elles porrafTent l'expreffion d"es rrois bénéfices, parce que la [lIpplique que l'on préfenre à Rome, &
fur laquelle les provifions [ont données, ne pem êrre rien
de plus que l'extenfoire de ce qui fe trouve porté dans la
date, ou dans le mémoire envoyé par le Banquier français
pour les provifions; la 'dare & le mémoire doivent êrre
portés dans le regifl:re du Banquier français; & quand il y
a dans la provifion quelque chofe qui n'eH ni dans la date,
ni dans le mémoire, cette addition elt nulle & contraire à
nos libertés, arrendu que le I)ape efl: collateur forcé, [uiv.an't les modes & les déclarations qui font dans la requiLition , & cerre requifition doit confier dans rous les points
efTemiels par ,le regiHre du Banquier expéditionnaire françois. Me. Piales dans fon Trairé des Collations, rom. l,
pag. ') 0 l , obferve que le mémoire qui eH envoyé en Cauf
de Rome, doit comenir [ommairement la fllbfbnce de la
[uppliqlle : favoir, 1°. le nom de l'impétrant, fan diocefe
& les bénéfices qu'il imperre; 2.°. le bénéfice réfigné, fon
diocefe & le genre de vacance•.
La [econde fin de non recevoir fe tire de ce que le
genre précis & déterminé de vacance ne fe trouve point
elCprimé ni dans la date, ni dans les prqvifi9ns ;' le d~volut
efi formé fur la tête de· Mre. Compian réfignataire, ob
nullitatem tÎtulomm. Voilà route l'expreffion que les titres
du d~volutaire renferment [ur le' genre de vacance qui
donne lieu au tJévolut. M're. Martinet, a donc conrrevenu
formellement à la regle de annali polfejJàre, qui exige la
déllararion e'XprefTe de la claufe fpécifique [ur laquelle le
dévolutaire prétend établir la vacance de droit. Cette regle
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eil: rigoureufement obfervée en France; aÏnli que l'obfervent 1'Aureur du Dicrionnaire canonique? va. déva/ue , pag.
1 JO; PaHour, de heneficiis, liv. 2" rir. 6, n. 1; Goard ,
des bénéfices, tO!).1. 3, pag. 2.90; Mémoires du Clergé,
rom. 10, pag. 12.10, & Decormis, rom. l , col. 373"
II ne fuffit pas de dévoluter fur le premier genre de vacanee, oh nullitatem titu/arum. La regle de anna/i po,/[ejJôre
veut que le dévolutaire exprime JPecificam & ·determinaeam
caufam ex quâ clare poterit corif/are quod nullum ipji poffeffori in di80 heneficio jus competal. ,La c1aufe vague & générale oh nullitatem eitu/arum, qui n'exprime aucune efpece
précife , aucun vice particulier, ne peut remplir cet objet;
c'eil: la remarque de Denifart, va. dévolue, n. 9 & 10,. &
de Me. Piales , Trairé du dévolue, rom. l , pag. 61).
Palfant enfuite aux moyens err.ployés contre les rirres
!le Mre. Compian, on réponmoit qu'il ne faut pas une maladie bien férieufe pour aurorifer une réIignarion in favorem
avec la c1aufe metu morris. Le réfignant peut être plus ou
moins frappé de l'érat de maladie ou d'infirmité dans lequel il fe trouve. La c1aufe metu mortis en légitime &
valable dans tous les cas de maladie ou d'infirmité, quelque légere qu'elle fait. L'Arrêt rendu en 17')6 au rapport
de Mr. Langlois eft bien formel. Il était gueHion d'un
rélignant qui n'avait que des vapeurs,. & qui avait fait deux
lieues à pied pour fe rendre chez le Notaire qui avait
reçu la procuration ad- rejignandum; il ne fut pas moins
_ décidé que la c1aufe était Jégirime & non obreptice, &
qne le réfignant pouvoit rentrer dans le bénéfice. On trouve
les mêmes principes développés dans Carelan, liv. l, ch. 4'
L'on n'a pu prendre droit de l'Edit de 1737, au chef où
il ordonne 1'expreflion de la maladie dans l'acre de procuration ad re/ignandum , puifqu'il eft convenu que cet Edit
n'eH point enrégiftré par la Cour; d'ailleurs l'acre de pro.
curation ad rejignandum renferme ici l'expreflion de la maladie.
Le pacre réfervatif des regrès n'opere pas nullité, parce
qu'on n'entend la réferve dç:s regrès que dans les cas de
�D U PAL AIS
D E
PRO VEN C 1!;
3 7,
droit; il ef!: vraI qué la réferve des regrès à e'xerc.èr to'ries
'luories peut opérer nullité, parce que dans ce eas Je paél:e
qui réferveroit au réfignant le droit de rentrer dans fon
bénéfice dans tous les cas & dans rous les remps, feroit
évidemment confidentiaire; il ne donneroit au réfignataire
qu'un titre révocable ad nutum rifignantis. Mais autanr ce)
patte ef!: nul & contraire aux Loix canoniques, aurant un
paél:e fimplemenr réfervatif des regrès dans les cas & les
remps d'e droit, par exemple en cas de mort, dl: légirime.
Quelle eft l'efpece de confidence que préfente Mre. Marriner? Il veut d'une part, que le réfignant fe foit réfervé,'
conrce les Loix , le droit de rentrer dans fon bénéfic~,
& de l'autre, qu'il n'a jamais cru en être dépouillé. Ces
deux propofirions, qui ne peuvent pas êrre vraies en même
temps, font complerrement fautres. D'abord il n'eft pas
vrai qu'il air exifté des accords entre le réfrgnant & le
réfignataire pour faire rentrer le premier en potreffion de
fon bénéfice. D'autre parr, il n'eH ni vrai ni poffible que
le réfignant ait ignoré fa dépoifeffion depuis la mife de
poifeffion dl,; réfignataire jufqu'à fon décès. On ne rrouve
aucune trace des prétendus accords confidentiaires, légérement fuppofés par le dévolutaire; la preuve par témoins
n'en feroit pas reçue, fuivant l'Ordonnance & la jurifprudence de tous les Tribunaux. D'ailleurs le dévolutaire n'articule rien, & n'offre pas de prouver; il n'y a donc point
de confidence. Peu importe que Mre. Compian ait retardé
fa prife de potreffion pendant dix mois, à compter du jo~r
de fon titre; qu'il ne l'ait prife même que d~ns un temps
où le réfignant fe trouvoit malade ; cet état de maladie
devoit naturellement offrit au réfignaraire l'alternative ou
de renoncer à fon titre, ou de le faire valoir dans ces
circonftances. Il a pris pqifeffion dans Je temps, puifqu'i{
avoit trois ans pour le faire. Sa prife de potreffion eH légitime, fOA titre dl: valable, puifque fon réfignant a furvécu
non pas deux jours, mais dix-neuf mois.
Peu importe encore que le Chapitre n'ait pas été pré•
.-venu lors de la prife de polfeffion;- trois
. jours après cette'
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prire de polfeffion, Mre. Compian s'ell: pré(enté au Cha..
pirre avec fes tirres; il Y a été reçu inter fratres aux formes ordinaires, & 'depuis lors il n'a jamais ceiTé de jouir
de cous les droirs &. de tous les revenus de la Prévôté; il
a fur-rout préfidé dans rous les Chapirres qui fe fonr tenus
depui~ celte époque. On dill:ingue la ,prife de poiTeffion,
de la prébende &. la réception par le Chapirre; l'admiffion en
Chapirre ne fait pas partie de la prire de po Ifeffio n. (Boniface, tom. 3 , Jiv. '), rir. I I , ch. 2.; Mémoires'du Clergé,
tom. I I , pag. 8 14') Mre. Souffin a contmué de loger dans
la maifon prév,ôrale; il Y fournilfoit un logement à fon
neveu avant, fa réGgnarion ; ce dernier lui a rendu la pareille après fa prife de polfeffion; l'oncle & le neveu vivoient
enfemble; ils mangeoient à la même cable depuis vingtfepr ans: devoienr-ils fe féparer & celfer de vi\'re enfemble
,après la dépeiiIeffion du réGgnant? Le neveu rélignaraire
delloir-il expulfer fon oncle de la maifon? Sanleger, quell:.
b,énéf. parr. 3 , ch. 160, n. 14, & Goard, rom. 3, pag. 813,
trairenr cerre quell:ion , que la raifon & l'honnêreté décidenr d'ailleurs fans le fecours des doél:rines.
Le dévolutaire ne peur 'prendre droir de ce que Mre.
Souffin avoir cdnrinué jufqu'11 fa mort d'occuper fa place al!
chœur. Dans tous les Chapirres, après vingr ans d'exercice,
on acquiert l'honneur de la vérérance; cer honneur conGlte
à la place au chœur & dans les cérémonies. Tel eft en
particulier l'ufage dl! Chapirre de Marfeille.
)\1dis, difoir Mre. M,1Itlner , Je vifa de Mre. Compian n'a
pas éré infinué dans le mois; l'Edit de 1691 exigeoir pourcant qu'il le fût dans, ce remps, à peine de llulliré. On
répondir que la peine de nullité que cet Edit prononce
n'eH que comminaroire. Dumoulin dit que <:er Edit ef!:
burCal, & que les Juges ne fane aucune arrention à la peine
de nullité 'lui s'y trouve é~ablie. Le défaut d'infinuarion ne'
peur 0Rérer nulliré que pour les cirres qui n'om point de
dare Colemnelle, &. ,dont i,l impQrte de fixer le j.our, relae~ept au droit quj peur être acq.uis au tiers. Dans' ~ous..
Its a';ltfes }irres la .pejn~ de nulliri .p.ro.non.cée par. la. Loi!
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PRO v E N, C E.
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n'e'/l: qu'une' pur~ 'comminatIon, fuiv<int les termes de'BQutar}c fur le concordat, tit. cfe coll(;t, va. /idem facJ:re. Or, rien
de plus indifférent que le vifa, relativement au droit que le
tiers peur acquérir. La difpolition de PEdit fîu-elle irrirante
& péremptoire, le dévolutaire ne devro'it jamais être é(out~?
parce qüe le prétendu vice pduvoit être .effa·cé avant l'impétration du dévolut; ici l'inGnuation du vifa fe' rpouve:it faite
depuis plus de' quinze mois lors de l'im pétration de Mre.
Martiner.
Mr. l'Avocat-Général de Caliifane opferva que rd'après
tous les Auteurs, le dévolutaire dl: celui qui obrient uf.le ptbviGon d'un bénéfice rempli de fait, mais fuppof~l vèèaclt de
droir, par la raifon de l'inhabilité ou incapacité rlu po'urvu,
ou ,fur les nullités de fes titres. Il ne s'arrêta point à_ jufl:ifier
J'il'lfl:itlltion du dévolut, des abus qui engagen:;ot" l'Eglife à:
J'introduire; elle l'autorifoit pour fubll:ituer à un fujet incapable, un titulaire légitime & digne de poiféde"r le béné.:,J
fice.
Ce moyen de droit fut reçu en' France, ou plutôt toléré. On permettoit par-là un mal, pour en empêcher Ull
plus grand; on crut que la crainte de perdre leurs bénéfices,.
mettrait un frein au défordre & à la licence de quelques
EccléGall:iques peu retenus par la confidération de leurs. de-'
voirs; on crut intimider ceux qui feroient tenrés de s'af:.furer par des voies illicites des biens fur lefquels chaque
ferviteur de l'Eglife a des prétentions égales; le Clergé'
àe France marqua même q~elque empreifement à l'adopter.
Tel fut dans le principe- le motif du dévolut ; il devait êrre
la fauve-garde des mœurs; on en ab'ufa, "il devint odieux;
il fut dans les mains des Prêtres aveugJés par l'intérêt, un
prétexte pour inquiéter des' poifeŒmrs de bonne foi. Il
fallut mettre- un frein à leurs avides pourfuites. La regle de
annali' pojJèj]ôre. fut établie. Arrêter de"s cour[es criminelles,. •
'maintenir lè bdn ordre, réformer les abus, tel fut fan objet;
ces· a15us fure'nt portés fi \ Ifin " que, l'on voyait des gens
ignorés ou connus:' feulerri~né par 'lb fOlindaIès qu'ils d0n~
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noient ~ l'Eglife, ufer hardiment des droits des dévolu,;
taires.
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Mais la fuire. des remps vit éclorre en leur faveur des
,privileges; ,~l1e les vit auffi s'évanouir, & paroîcre enfin des
Loix rig9~rel!fes & d'pne obligarion indifpenfable. Çes reg)es font-, [uivant, la penfée d'un Canonifte, comme autant
de pieges que la Jurifprudence a tendu à ces délateurs des
bénéficiers; ils font affujerris à les exécuter fervilemenr, dès
qu'elles (ont en vigue'ur; elles ne font vis-à-vis d'eux fufceptibles ni d'interprération, ni de refhiélion; manquer à
une feule des conditions, c'eH, perdre le fruir de l'obferyance-,de roures les autres. Il ne faur cependanr pas confondre tous les dévolutaires dans cette c1affe de gens méprifables, qui ne doivent avoir pour partage que la honce,
fuite néceffaire d'une aélion odieufe; il en ell: fans doute
qui agiffenc de bopne foi, & l'1re. Martiner peur être de
ce nombre. Ufel' indiHinélemenr contr'eux de toutes les
Loix r.eçues & non reçues, ce feroir enlever à l'Eglife un
t:J1oyen qui peur tourner à fon avanrage, & qui eH même
encore roléré.
,
On oppofoir à l'1re. Martinet des fins de non-recevoir
prifes dans la nullité de fes titres: 1°. La calife de dévolut
1l0nJPécifiée: 2°. la non expreffion des bénéfices qu'il poffédoir.
La premiere ell: l'inexécution de la regle de Chancellerie
de annali poJfè/Jore.
Les regles d~ Chancellerie, dir d'Hericourt, chap. 15, n.
io, font des Reglemens que font les; Papes pour les provifions
des hénéfices t,; aux expéditians de la Chancellerie. Jean XXII.
efi, il ce qu'on c~oit" 1::' premier qui ait fait pareils Réglemens. Il y â t,:ois de ces regles, flui [am expr.e.f!è.!1lent reçues
en France, celle 'lui concerne la' publicatiJn de,! prifès de
po.f!èfJions, de public. refignàr.; Ja,' connoJJfjz,!ce" vraifemhlahle .
de la vacance des; ~énéfices! ee',~eriCImili noti~~ _obit~, 6o.la regle des vingt, Jours pOlfr les) rijignations. [gites ppr I{Tl
B.éaijicier malade, de in!i rrliis ,rc:.~~nan.tibus. ft • [,O ~'~R' ~,
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PRO VEN C E.
Rien de moins Hable que ces regles (' continua Mr: l'Avocat-Générai ); en vigueur aujourd'hui, elles [e trouvent
demain abolies par la feule volonté du [uccelfeur; éteintes
rour-à-rour & renouvellées, elles ne peuvent avoir d'exi[tence légale que par une approbation fixe & déterminée du
Souverain. L'on ne voit pas la regle de amzali pojJèJJore dans
celles que l'on vient de citer, parce qu'outre celles que
l'on reçoit comme de chancellerie, il en eH d'autres adoptées comme regles d'équité, & dont il a été quelquefois
utile de (uivre les difpoÎltions.
Le motif de cette regle eH la haine des dévolutaires à
qui une balfe cupidité fairoit imaginer des prétextes plus
bas encore, pour colorer des conreHations injuH:es, & dépouiller par toute forte de voies des polfeffions paiÎlbJes
des bénéfices; [on exécution a pu fans doute paroÎtre utile;
mais cette Loi ultramontaine a-t-elle été publiée dans le
Royaume? Si cela eH, Je dévolutaire doit en fubir la rigueur; c'eH un délateur dont la fonél:ion peu honorable,
pour ne pas dire ignominieu[e, dit Piales, ne mérite aucun
égard; mais elle ne l'a pas été, difent les CanoniH:es; néanmoins, s'écrie Dumoulin, elle doit être ob[ervée; d'autres
ne pen[enr pas de même; [a néceffiré n'eH donc pas gél1éralement avouée par tous. Dumoulin & Charondas paroilfent les plus attachés à en recommander la néce-ffité ,
fondée principalement [ur le motif de la regle même; Pe.
rard-CaH:el dans fes qudtions notables [ur les matieres bénéficiales, tom. 2, quen. 2, n. 4, eH du même avis. Innocent XI. rétablit cette regle, & ordonna qu'elle [eroie
exécutée avec (on ancienne rigueur. Noyer, Expéditionnaire
en Cour de Rome, d'Hericourt dans (es Loix Ecc1éftafl:i.
ques, Goard dans fan Traité des bénéfices, Lacombe dans
fan Recueil de Jurifprudence, Maillane dans [on Dit1ion.
llaire, va. dévolut, Delli(art & Piales, atteHent unanimemene
que cette regle eH fuivie ell France.
/
D'un autre côté, Louet dit que cette regle fut long-temps
ç>bfervée par la Cour de, Rome; elle était en vigueur du
temps de_ Dur1lOulin &; de Pafl:ouf j mais il ajoute que dans
Années 1775 & z776.
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Jou
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la fuite, il Y fut dérogé, & que la dérogation fut favorable";
ment accueillie en France; Vaillant fur cet Aureur, Sollier, Expéditionnaire en Cour de Rome, Fromenral, Gibert,
Catelan, Duperray, & les Mémoires du Clergé, difenc la
même chofe.
Que réfu\te-t-il de ces aurarités? Que la regle d:: annali
poJJ4fore ne p~ur être regardée comme une Loi établie par
une longue & invariable Jurifprudence, & qu'elle a eu le
fort de ces Réglemens utiles dont les difpolitions femblent
d'abord des moyens fûrs pour arrêter quelques abus, mais
qui bientôt éludés & reconnus, pour ainli dire, impuiltlns,
tombent dans la défuérude.
Mre. Compian érait, il efl vrai, polfeffeur annal & paifible depuis le l Septembre 177 l , lorique le 14 Décembre de l'année fuivante, Mre. Martinet impétra cette dignité par dévolut. Celui-ci devait donc être fournis à la regle
de annali poffijJàre;' & il femble lui avoir rendu hommage,
en employant la claufe ob nullitatem titulorum. Mais Mre.
Martinet a dit qu'il attaquait le titre feul; & fous ce point
de vue il a pu fans doute impétrer ob nullitatem titulorum.
Ce n'érait point fous ce rapport une dénomination générale;
c'érait une caufe précife & fixée. Ce qui détermine à le penfer
ainli, c'ef!: que dans Ferriere, dans Bornier, la nullité des
titres ef!: une caufe particuliere de dévolut; c'eH enfin ce
que Paflour dit lui-même. dans le chapitre où il commence
la .regle de a/mali poffijJàre. Cet Auteur regarde l'expreffion
llullitas tituli comme une caufe fuffifante pour obtenir des
proviLions.
Mre. Martinet a donc connu la regle de a/mali poffiJJàre;
& quoiqu'elle ne fût pas de Jurifprudence confiante, il l'a exécutée: donc point de fin de non-recevoir fur cet article.
Mais on ne peut s'empêcher d'ajourer que Mre. Martiner, en
impétrant par la nullité des titres, s'dl: circonfcrie lui-même
fa fphere; il s'efl interdit taure accufation d'indigniré 011
d'incapacité; il ne peut plus oppofer que la nullité des titres; s'il n'yen a point, il doit être débouté; il ne peue
point accufer le dévolmé de confidence; le fujet de fan im-
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PAL A I.S
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PRO V E Ne E.
1-3
pétrat100 ef!: la nullité des titres; il ef!: non recevable à tout
autre défaut, & l'on doit fans doute être bien étonné de
lui voir prendre la confidence pour baf~ de fon fyllême.
La feconde fin de non-recevoir fe tire de la non expreffion des bénéfices que poffédoit Mre. Martiner.
Tour impétrant, même obituaire & prévenrionnaire, ef!:
obligé d'exprimer au Pape les bénéfices donr il eH pourvu,
à plus forre raifon un dévolutaire; & c'ef!: ici fans doute que
l'on doit invoquer la Loi de la rigueur.
Cette obligation confignée dans les Décrérales efi puifée
dans les ànciens Conciles, qui inrerdifoienr ·à tout Clerc la
pluralité des bénéfices: telle éroit la difcipline de l'ancienne
Eglife; point de bé.néfice compatible; le pourvu d'un fecond éroir déchu eo ipfo du premier. L'inrroduél:ion des bénéfices fimples fit abandonner à l'Eglife la rigueur de cesanciennes maximes; mais elle ne permir plufieurs bénéfices,
qu'amanr qu'un feul ne feroir pas fuffifanr pour procurer une
honnêre fubfiHance à celui qui en ferait pourvu. AuHi d'après
l'ufage conHanr & la regle permanenre, la déclaration des
bénéfices poffédés dl: néceffaire, fous la peille exprelfe de
nu Il ité.
On fuivoir à Rome à la rigueur la difpofirion du chapirrefi motu proprio, où Boniface VIII. qui en eH l'aureur,
déclare expreffémenr que l'omilIion qu'on en feroit, rendroit
la grace abfolument nulle. Er en effet, la Cour de Rome
ne veut pas être complice de l'avidité des Bénéficiers; elle
fe prête feulement aux befoins de ceux qui recourent à la
bienfaifance. (Mr. de Solve dans fon traité des bénéfices,
parr. 3, quefi. I l , n. 4, le chap. poflulati d'Innocent III. )
Brodeau fur Louet, Boniface ,. rom.· 1 , liv. 2, tir. 24, chap.
4, rapporrent des Arrêts qui ont décidé combien la mention
des bénéfices en néceffaire.
Mr. l'Avocat-Général rappella en(uite le fommaire de la
grace obtenue par Mre. Martiner, & obferva qu'il n'y avoit
aucune fp&.ification des bénéfices; l'impétrant en poffédoir;
il n'en donne ni le nombre, ni le détail; III claufe cujus henefiâa exprimi po.flint in litteris, inférée dans le mandat que
F:l.
�44
Jou
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Mre. 'Martinet donne à fon Banquier, ne peut prouvèr fa
bonne foi. Pourquoi ne pas déclarer qu'il poffédoit trois bénéfices? Il craignojt apparemment que certe multiplicité de
bénéfices n'occaûollnât quelque difficulcé. En vain diroit-il
que le Banquier de Mre. Martinet avoit fùivi la regle ordinaire ; il connoiffoit tous les bénéfices qu'il poffédoir, &
il fe réfervoir de les expliquer dans la fuppiique in litt~ris.
Solliers fur Pall:our, lib. 2 de bene! ecclefiaft. tit. 9, n. [,
nous apprend que la claufe générale n'eH plus uGtée, &
que lors même que les Banquiers l'emploient, elle ne peut
être réfervée qn'à deux bénéfices: Rebuffè dans fa Prarique
bénéficiale, rraité de formâ Jignaturœ, part. 3, va. ol'.ftantia,
n. 9, pag. 77, dir la' même chof",; Pia les dans le tom. 1·
du rraité des collations, dit que le mémoire qui eH envoyé
à Rome, doit contenir fommairement Je nom de l'impétrant
& les bénéfices qn'il poffede.
Mre. Martinet n'~xprima point formellement dans les dates
qu'il fit retenir à Rome les bénéfices qu'il poffédoit, puifqu'il n'ert coarta aucun in individuo, mais en termes équipollens par la claufe qu'il employa. Donc obreption dans les
dates, puifque, felon touS les Auteurs, tels que Louet,
Brodeau', Boniface, Maillane & d'Hericourt, chap. 17 de
la forme des provifions, la d~te doit renfermer en fubll:ance,
& fous peine de nullité tout ce qui peur déterminer le Souverain Pontife à accorder ou à refufer la grace. Mre. Martiner n'a pu réparer dans fes proviûons l'omiffion, ou, pour
mieux dire, la fubreption de [a date, fait qu'il fe décide
par les regles & J'ufage de la Cour de Rome, foir qu'il
invoque l'art. 47 de nos Libertés, qui fixant [on décrer par
fa date, exige qu'elle renferme acCu tour ce qui eil: de J'effence de la grace demandée. En vain Mre. Martinet obferve
que le Pape lui a refufé des prov.iuons, & que celles que
J'Ordinaire lui a accordé expriment les bénéfices en détail,
& ont par-là rour réparé, quia obreptio non éadit in ordinario. Mais fuivant l'art. 47 cité, l'Ordinaire n'a fait que
remplacer le Pape; s'il a accordé des ,provifions, elles ne
peuvent avoir d'autre effet que la date prife en Cour de
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PALAIS
DE·
PROVENCE.
,4,
Rome; le Pape n"eut pu exprimer que deux bénéfices dans
les provilions, s'il les_ elit accordées fur cette date; l'Or-'
dinaire n'a pas pu avoir plus de droit, aUlremenr le repréfentant eut été plus que le repréfenté; les provifions de
l'Drdinaire euffent eu plus d'effet que celles du Pape, quoique l'article cité ne leur attribue qu'un effet ur.iforme. Les'
proviGons de Rome eu{fent été fubreptices; celles de l'Ordinaire le font donc auffi; le vice de {ubreption n'aurait pas
été ni pu être réparé par les proviGons de la Cour de Rome;
il en ell: de même de celles de l'Ordinaire.
Paffant enfuite à la di{cuffion des titres de Mre. Compian, Mr. l'Avocat-Général ob{erva que quelque toléré que'
fait aujourd'hui l'u{age des réGgnations in favorem, les troubles qu'elles ont apporté dans le rein de l'Egli{e ont {ouvent rappellé à la religion éplorée la pureté des maximes
qui la gouvernoient dans {a nai{fance, & combien (1 di{ci pline extérieure dégénéroit toujours plus de fon ancienne
févérité.
Dans les premiers Gecles de l'Egli{e, le tendre attachement que les premiers Prêtres avaient pour les peuples,
dont les mœurs & l'in1l:ruél:ion étaient confiées à leurs {oins,
ne les rempliffoient que de vives inquiérudes fur les dangers d'un avenir incertain, & ne leur avait jamais permis
de fe prêter à des {ollicitations ambitieu{es. Quand, accablés fous le poids des années & des infirmités, ils ne pouvaient plus fe livrer aux fonél:ions de leur mini1l:ere, ils expofoient aux Souverains Pontifes les befoins fpiriruels de leur
peuple, & leur demandoient des Co-Ad jute urs qui pufIènt
les foulager dans leurs travaux; on regardoit comme une
récompen{e due 3. une vie pa{fée dans les fonél:ions les
plus pénibles, de les confulter fur le choix que l'on pouvait'
faire, & ceux qu'ils propofoient étoient jufl:es, humains,
laborieux. Guidés par leurs con{eils, les Co-Adjuteurs faifoient revivre en eux par des vertus les objets de la véuération publique; leurs dernieres années éraient pour ces
Prêtres adjoints des temps d'épreuves; & quand une conduite' exemplaire & foutenue répondait de ce qu'ils devaient
�~
JOURNAL
êcre toute 1eur vie, le peuple les délignoit pour leurs fuc..;
celfeurs. Cerre coutume, li mile dans fon principe, eut
le forc, qu'ont eu les plus fages infiitutions que le temps
faie dégénérer en abus.
La gloire de la religion fut quelquefois arrêtée; l'autorité qui fe mêla à des infpiracion déja alfez puilfanres, des
faalons dans l'Eglife, des partis dans le peuple, plus d'unanimicé dans les fuffrages, un changement d'adminjfiration
dans les biens eccléGaHiques, des créations de bénéfices
avec des prébendes qui leur étaient aftèaées, firent craindre les réGgnations. Les Ambalfadeurs cie Charles IX. en
demanderent, de la parc de ce Prince, l'abrogation au Concile de Trente; on les crouvoic attentatoires aux droits des
coll.lteurs ordinaires; on craignoit cette efpece de /ùcce[fion collatérale. Pour l'empêcher, les Papes établirenr des
regles de chancellerie. Urbain VIII. en établic une en 1634
inférée dans la Déclaration des infinuacions de 1646. On
fixa des regles nécelfaires, tan. dans' la réGgnation, que
dans [on exécution.
Ici l'on argue les titres de Mre. Compian fous trois rapports: nullicé de réGgndtion, nullité de vifa, nullicé de prife
de polfeffion. L'on aloute la clandefiinité aux deux derniers
aaes. Mr. l'Avocat-Général renvoya les nullités de la rélignation dans la difcuffion de la confidence, parce que la claufe
mew mortis en était la hafe.
Il obferva, fur la nullité du vifa, qu'il, n'avoie point été
inlinué dans le mois, comme l'ordonnent les arr. 17 & 18
de l'Edit de 1691. Mais l'arr. 22 du même Edit porce que
cette omiffion peur être réparée avant le jugement du procès.
D'ailleurs les Tribunaux onr confiamment regardé cee Edit
comme une de ces Loix burfales dont les peines n'éroient
que comminatoires. EH-ce d'ailleurs à un dévolutaire à faire
valoir de pareils moyens? Les citres de Mre. Compian
ér.oienc inGnués, lorfqu'il vit furgir le dévolue de Mre. Martiner. Mre Compian a exécuté avant la prife de polfeffion,
des regles qu'il éroie encore à temps de fuivre, même aprè~
la complainte formée.
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PALAIS
DE
PROVENC~
~
Il établit, fur la nullité de la prife de poffeffion, que c'efr
une erreur de croire que la réception in fratrem faffe le
titre du pourvu; c'en ell: une autre d'imaginer que ce fait
la réception in fratrem dans une affemblée capitulaire, qui
donne droit au pourvu de fe mettre en' poffeffion. Mre.
Compian n'avait qu'un feul titre; c'était la Bulle de provillon; elle feule lui donnoit droit de prendre poffeffion;
le vifa étoit néceifaire fans r':Jute, & un réllgnataire qui
prendrait poifeffion fans vifa, ferait un intrus dans le Chapitre; mais fan titre n'en ferait pas moins. valable, quoique le titre de poffeffion fût illégitime. La réception n'ell:
qu'une cérémonie extrinfeque au titre du pourvu, qui ne
l'empêche pas de jouir des fruits utiles & honorifiques,
puifque l'on voit tous les jours que le pourvu qui éprouve
un refus de la part du Chapitre, fe pourvoit à la Cour &
obtient l'adjudication de tous les droits.
D'ailleurs le bénéfice n'eut jamais vaqué eo ipfo & de
plein droit; ce n'eut été qu'une vacance de fait qui ne pouvait jamais être la caure du dévolut. Il faut un bénéfice rempli de fait & vacant de droit, & non rempli de droit & vacant de fait.
L'Edit de 1 SSa veut qu'il confie de la prife de poffeffion des bénéfices des Eglifes Cathédrales & Collégiales
pat aél:e ligné du Notaire & Greffier des Eglifes; qu'en
cas d'oppofition à la prire de poffeffion, il en confie également par aél:e re9u par le même Notaire ou Greffier,
lequel aél:e aura le même effet que la prife de poffeffion ,
& qu'en cas de refus du Notaire, le pourvu puiffe avoir recours à tel autre Notaire Royal ou Apofiolique qu'il trOUvera bon.
Cet Edit n'exige pas l'obligation de fe préfenter au Chapitre avant la prife de poffeffion. Ce n'ell: que dans le cas
de refus du Chapitre que le pourvu doit prendre aél:e de
la préfentation & requifition, parce que fans ce1J. le refus ne
pourrait être confiaté.
Panour fe fonde fur l'art. la de l'Ordonnance de'Blois;
&. non fur l'art. 13 de l'Edit de 1) Sa, lorfqu'il attelle que
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J
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;
le pourvu à un bénéfice d'Eglife Cathédl'ale ou Collégiale
cloir faire profeffion de foi au Chapitre, & exhiber fes titres avant d'être reçu, à peine de perte des fruits du bénéfice. Mais cet article n'exige poine l'exhibition des titres
avant la prife de polfeffion. Nous ne fommes plus aujourd'hui dans ces malheureux temps de j'Ordolinance de Blois;
les hérélles, les feaes faifoient dourer de la foi de ceux
qui fe préfeneoient pour rem;-lir les places. D'ailleurs cerre
profeffion de foi n'dl: placée dans l'Ordonnance qu'avant
la réception all CllJpitre. Pa Hour la met avant la prife de
poffeffion.
Dans la nouvelle Jurifprudence attef!:ée par les Mémoires
du Clergé, tom. Xl, pag. 814, on a diHingué la prife de
polfeffion, de la prébende & la réception par le Chapitre.
Un pourvu ayant été mis en polfeffion dans les formes obfervées dans les titres qui ne font paine bénéfices de Compagnie, le bénéfice ef!: rempli de fi1it, comme le feroit un
Prieuré ou une Cure dont la polfeflion ef!: réelle, aéruelle
& corporelle. Dans la prébende, ]'admiffion en Chapitre
ne fait point partie de la prrte de polfeflion; mais étant un
bénéfice de Compagnie, & dont les fonè1ions s'exercent
conjointement avec le Corps, cette réception du Corps ell:
nécelfaire pour y exercer les fonaions du titre; de forte
que le refus du Charitre ne doit être conlldéré que comme
un empêchement de faire les fonérions, à l'égard d'un Chanoine que l'on fuppofe n'avoir point négligé les précautions
pour être en érat de faire les fonaions avec la Compagnie,
mais qui en a été empêché par le [eul mauvais procédé
du Chap:t'e.
.
Par J'ancienne Jurirprudence, la prire de poffeflion ne ruffiroir pas. pour jouir d'une prébende; la réception érait nécefI:,ire; mJis d.lns la nouvelle, la prébe<1de eil: acquire par la
feule prire de pair. flion; il n'y a que les fonétions com{Dunes qui ne commencent qu'après la réception. Celui qui
diff~re (1 récepti'Jn, a -feulement à craindre que le pourvù
d'un ciere pofl:érieur qui prend poffeffion après lui, mais qui
.eil:
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PAL AIS
D R P R 0 VEN C R.
49
e!l: in!l:allé avant lui, n'ait [on rang, [éance & ordre avant
lui; c'ef1: ce que jugea l'Arrêt du 17 Décembre 167 l , rapporté par Boniface, rom. 3 , liv. S, tit. II , chap. 2.
Quant à la profeffion de foi qui doit être renollvellée au
Chapitre, c'efi une faveur paniculiere que l'Ordonnance de
Blois accorde aux Chapitres, & donc ils font maîtres de
profiter ou de ne pas ufer. Tels font les principes généraux,
& la prife de poifeffion de Mre. Compian y eH: conforme.
Mr. l'Avocat-Général examina enfin s'il y avait preuve ou
même préfomption de confidence dans la réfignation de Mre.
Souffin. Qu'eH-ce que la confidence? Conventio tacile vel
exprefse inita in renllnciaLÏone, vel provifione ,de fruc7ious alteris dandis, aut oeneficio altcris reJlituendo. C'ef!: une convention tacite ou expreife de réparer l'office du bénétice ,
c'ef!:-à-dire de mettre le tirre d'un côté & les fi-uits de
l'autre.
La confidence a trois caraél:eres; pac7um, fimple projet,
propoÎltion agréée; conditio, joui1Tance de totalité ou pan ie
des fruits même après la dépoifelIion; modus, rélignation
admi[e, bénéfice conféré, en laiifant le titre d'un côté &
les fruits de l'autre. AinÎl le dévolutaire doit prouver, réfignation admife & effeél:uee, paél:e illicite dans cette rélignation de réparer les fruits du bénéfice, enfin exécution
de ce paél:e & féparation effeél:ive du titre & des fruits.
Quelle efi la peine des confidenciaires? Auffi criminels gue
les fimoniaques, ils font trailés avec la même rigueur. Ce
fut de tout temps une Juri[prudence confiante; Pie IV. pronon~a .cette peine contr'eux: oene.ficio privari deoet, difoit
ce fouverain Pontife. Après lui Pie V. & Sixte V. n'uferent
pas de moins de févériré. En France l'Edit de St. Louis,
l'Ordonnance de Blois, art. 22, d'aurres de Charles VII.
& de Charles VIII. puniifent la confidence avec la derniere rigueur. AinÎl il exiHe des Loix contre la confidence,
mais leur but efi fouvent trompé par le peu de traces que
ce crime laiife après lui; c'eH ce qui fit croire un inHant
la preuve par témoins néce1Taire. Brodeau cite plulieurs Ar.
rêts qui l'admirent; mais on s'apper~ut bientôt qu'aucun
Années l775 & 1776.
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Eccléfiaflique ne feroit affuré de fon titre, & que, que Ique
légitime qu'il fût, des dévolutaires trouveroient la preuve de
la confidence dans l'infidélité de quelques témoins c or,rompus. C'en ce qu'attefte Boniface par .plufieurs Arrêts.
A cette preuve fuccéderent les préfomptions fouvent da ngereufes; & qui ne dépendent que de la juHeffe des conféquences de quelque fait connu. Ce n'ell cependant point à
des conjeél:ures domeufes qu'il faut s'arrêter, mais à des pré~
f01nptions qui conduifent à la certitude; il faut femir la
connexion des faits; & c'eU de ce rapport, comme d'u n
foyer lumineux, que doit paroîrre" le fait que l'on cherchoit
à dérober dans l'ombre du fecret. Des préfomptions ne font
que vagues & incertaines, quand elles peuvent être le figne
de deux faits différens & produits par des caufes oppolées;
le Juge exige qu'elles foient claires, juftes, conformes à ce
que l'on veut leur faire fignifier, qu'elles naiffent l'une de
l'autre; & quand elles ne raffemblent pas tous ces caracteres, leur furce défunie s'anéantir, les foup~ons qu'elles
faifoient naître fe diffipent, & la Loi, toujours portée ·à
juger favorablement des intentions de l'homme, lui préfente, dans la défiance dont elle eft armée, un afyle affuré
contre les erreurs & les injures de l'opinion.
Parmi toutes ces préfomptions, celles qui font fondées
fur l'autorité d'une Loi font les plus preffantes, & la conftirution RomanU"S de
du 17 Octobre l S64, & la Bulle
intolerabilis de Pie V. de 1 S69 femblent en offrit le tableau.
Il y a confidence, dit cette Bulle, 1°. quand le réfignant s'ingere par. lui ou par d'autres çlans l'adminiftration
& la perception des fruits du bénéfice. 2°. Si le réGgnataire afferme au réGgnant ou à quelqu'un de fes parens. 3°. Si
le réGgnant a payé les banquiers & fait les frais' de l'admillion de la réGgnation. 4°. Si l'on s'eft engagé, rendu
caution ou immifcé dans la négociation de la réfignation.
Telles font les préfomptions rapportées dans la Bulle de
Pie ·IV. Mais, dit Lacombe, la troiGerne de ces préfornption~ eft très-équivoque entre l'oncle & le neveu réfigna-
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PAL A B D l!
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PRO VEN C l!.
taire, & la quatieme dl: très-foible. Il e!l: de principe que
cerre Bulle n'a jamais été re<;ue en France; Piales, Lacombe, Durand de Maillane, d'Hericourt atteltent cette
vérité, & rien ne le prouve mieux que l'Arrêt du 3 Juillet
172.6, rendu fur les conclufions de l'immortel Mr. Talon.
Mre. Martiner accufe Mre. Compian de confidence, fans
preuve, fans commencemenr de preuve par écrit. JI fe contente d'oihir des préfomptions; la claufe mew marlis ef!: fa
premiere relfource; il la déclare tantôt nulle, ~ alors elle e!l:
préfentée comme moyen de nullité; tantôr obreptice, & elle
figure encore comme moyen de nullité; tantôt enfin comme
la bafe de la plus affreuJe confidence, & alors Mre. Marrinet lui redonne encore l'exiHence. Mais la claufe metu
marlis peut - elle être obreprice? Qu'elt- ce en effet que
l'obreption? C'ef!: l'expofé à un fupérieur d'un fair ·fdux ,
afin d'obtenir plus facilement la grace. La clalJfe metu martis
n'eH pas une de ces claufes illicires qui vicie un acre, qui
par fan exprelIion feule l'annulle à jamais; elle ef!: une claufe
permile, une cla:lfe de droir, une claufe qui a occaGoné LIn
arricle précis dans l'Ordonnance de 1637 que Mre. Martiner a invoqué lui-même. Il eH de Jurifprudence con/!:ante
dans le Royaume, que quiconque réGgne dans un état d'infirmiré, a la faculré de rencrer dans Ion bénéfice, lorfqu'il
dl: revenu en convalefcence; la claufe metu mortis lui laiife
ce droir; c'e/!:-là le regrès légal, fondé dès que la maladie
du réGgnant exif!:e, & qu'elle ef!: exprimée dans la procuration ad r~fignandum. Il n'eH pas nécelfaire que la maladie
foit mortelle pour qu'il air droir au regrés; il fuffit que la
procuration exprime un érar d'infirmité, fans en exprimer
la qualiré ni le degré, pour que le réfignam pui/fe fe maintenir dans fon bénéfice ou y rentrer, s'il en a déja été
dépoffédé. Un état vaporeux fuffir même, ainG que cela fue
jugé par un Arrêt du Parlement de Paris en 17',6, au rapport de Mt. l'Anglais, pour un Curé ~u diocele de Mans•
. La feconde pl'éfomprioll de confidence, rirée de la parenté du réfignant & du réfignataire, n'e/!: pas propofable
& ne demande aucune difcyffiotl. Celle de la négligence du
G1.
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réGgnataire & fon retard à prendre poffeffion ne l'ell: pas
plus; le réGgnant & le réGgnataire_font unis par les liens
du fang; le premier ell: un oncle impérieux qui trouVè dans
fa qualité qu'il tient de la nature, le premier fondement de
la dépendance fous laquelle il réduit l'autre. Un vieillard
difficile, toujours prêt par une incol1féquence de fon âge à
abufer de l'afcendant que donnent les années, & maî:re abfa lu du moyen qui doit intéreffer la foumilIion dont il faie
contraHer l'habitude, au moment1 même que les forces dLl
corps l'abandonnent, montre le plus grand attachement
pour la qualité dont li ef!: revêtu; c'eft avec regret qu'il renonce à une place dont il ne peut remplir les fonél:ions,
& ra pen fée interrog~ant encore l'avenir, flatte par fes projets
une ambition qui ne s'ef!: point éteinte avec l'âge. L'autre
ell: ut! neveu aveuglément fou mis , à qui les caprices & les
lumieres d'un vieillard n'ont jamais arraché le moindre murmure en préfence de celui qui fembloit en faire des épreuves
par fan obéiffance. Un courage aulIi héroïque doit fans doute
trouver fon aliment dans une caufe puiffante qui agite fans
ceffe; & lorfqu'on réfléchit que ce neveu poffédoit déja un
bénéfice important, capable de remplir les vues. d'une ambition modétée & qui le mettoit dans la polIibilité de fecouer
un joug que lès délires de la vieilleflè rendent infupporrable,
n'eH-on pas en droit de conclure que G la conf!:ance ne s'ef!:
jamais démentie, c'eH: qu'elle lui étoit néceffaire pour afpirer à une dignité plus élevée?
L'un a donc acquis le droit de tout exiger; l'autre a dû
fe taire une loi de tout promettre; l'un récompenfe, quand
il ell: dangereux de différer, mais par un bienfait qui peut
retourner à fan auteur; l'autre accepte un bien dont il ell:
privé fans reffource, s'il montre le moindre empreffement
de jouir. L'un renonce à fes droits extérieurement, mais il
les conferve en entier, lorfqu'il les cede; l'autre reçoit la
dépouille, mais il la perd s'il exerce les droits qu'elle lui
tranfmet; aulIi ce dernier ef!:-il enchaîné par la crainte; il
n'ofe même prévoir un événement polIible que les infirmités
du vieillard qu'il ménage peuvent malheureufement hâter;
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PAL AIS
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PRO VEN C E.
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il conno.1t la loi rigoureufe du public; réfignataire, il fait
qu'il fera le trifie fruit de fon imprudence, s'il ne- remplit
les obligations qu'elle lui ill)pofe dans les fix mois qui fuivent la date d'une réfignation. En vain dans l'ordre des récompenfes eccléGafiiques, doit-il s'empreifer de renoncer au
premier bénéfice comme étant un prix defiiné aux travaulC
de quelque autre Prêtre, & une reifource dans fan indigence; en vain le bien dn Service Divin' qui ne peut plus
être confié aux foins trop fouvent interrompus d'un vieil.
lard décrépir, réclame-t-il l'exemple & l'affiduité d'un chef
qui ayant plus de force puiife le fuivre avec plus de zele.
Ces morifs tous puiifans qu'ils paroiifent, font rrop foi.
bles pour lui; une loi plus impérieufe fans doute, l'obfiinarion de ce vieillard l'arrête. Mais ( dira-t-on) quel obftacle efi-il permis d'imaginer, quand on fait que taut l'invitait à ufer des droits que lui avait tranfmis la rélignation?
Quarorze mois fe pa Ife nt dans une entiere inaélion; & à la
vue de tant de ménagemens qui pouvaient devenir fi funefies
à celui qui les gardait, qui ne penfera que le réGgnant devoit avoir fàit conrraéler tacirement à fan réfignataire l'obligation de ne iamais le troubler dans la poifeffion du bénéfice réfigné, & qu'il avait dans fa crainte continuelle un
flIr garant de fa fidéliré?
Mais enfin le moment fatal arrive 'où le danger inféparable d'une complaifance plus longue l'emporte fur tautes'
les conlidérarions néceifaires que la crainte infpiroit. Mre. '
Souffin efi attaqué d'une indigefiion cruelle; accablé fous
la violence d'un mal que le tempérament d'une jeuneife
vigoureu[e aurait de la peine à [urmonrer, il efi étendu dans
fan lit, privé de connoiffance & fans mouvement; jamais
les approches de la mort ne s'annoncerent fous des fignes
plus certains. Voilà l'infiant favorable que Mre. Compian
choiGt pour [e faire metrre' eR poifeffion; infiant favorable
où il peur rromper [ans crainre un vieillard dont l'exifience
n'efi plus marquée que par les derniers [ouffies de la vie,
où la mort inévitable va brifer cette chaîne d'égards qui le
lie à fes caprices) où le [ouvenir s'ét,cinr, & les traces des
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JOURNAL
chofes paffées s'effacent, où la religion s'empare des momens que la fufpenuon du délire rend à l'homme; inllant
favorablé oÙ Mre. Compian eH: perfuadé que ceux qui entourene le lie de ce vieillard mourant, pénétrés des derniers
devoirs qu'i.!s ont à remplir vis-à-vis de lui, ne lui préfenterche pas des images vains & frivoles qui le rappellent au
monde qu'il ell prêt de quitter. Ainu Mre. Compian n'eLt
plus arrêté par la crainte de cerre curiouré inqui'ete qui
tourmentoie autrefois ce vieillard; & s'il montre enfin quelque courage après qua torze mois d'inaél:ion, n'ell-on pas
fondé à croire, qu'il n'eH foutenu que par la certitude où
il ell que la nouvelle de fa mife en' poifeffion ne parviendra pas aux oreilles de fon oncle, dont des objers plus importans doivent occuper les derni,ers momens.
Mais Mre. Compian. avoit mal calculé l'affoibliifement
des forces du corps & de l'efprie de fan oncle; l'indigeftian finit, & Mre. Souffin réparoit auffi vigoureufement que
fan âge pouvoir le permettre, & plus qu'on avoit ofé 'l'efpérer; rendu à la vie, il fe rend à fes fonél:ions. Ici Mre.
Compian ne peur cacher les craintes qui l'agitent; tour annonce qu'il fe repent d'une démarche qui ne peut reller
long-remps ignorée; mais une précaurion bien foutenue va
le fauver des {oupçons & des emporte mens de celui dont il a
rcrompé l'al tente. Lui a1;andonner tous les honneurs dom il ne
peut foupçonner d'être dépouillé, n'oppofer aucun obfiac1e
à l'exercice des fonélions qu'1l paraîr encore difpofé à remplir, lui marquer par la continuation des égards dus à {a
place, qu'il n'a point ceifé de jouir, ne profirer de fon
erreur que lorfqu'il n'eH point préfenr, l'y maintenir, par des
fi ures adroite's au moment qu'il paroîr: tels fone les moyens
'heureux par lefquels Mee. Compipn concilie des intérêts oppoCés; mais cette précaution elt meurtriere, & le funeHe
fruit qu'il retire de l'erreur de Mre. Souffin & de la complaif.lIlce à ne point le troubler d:ms {es fonélions, eH une
prélomprion de confidence qui fe tourne contre lui.
Sera-ce un dol, & pourra-t-on regarder comme une préfomprion de confidence l'ob[ervation des Loix du Royaume
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PALAIS
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PROVENCE.
{ continua Mr. l'Avocat-Général)? nullus videtur dolo fa cere
qui jure [UO utitur, dit la Loi SS ,if. de r~gulis juris. L'arr.
14 de l'Edit d'Henri II. de 1 Sso, l'Ordonnance de 1637,
la Déclaration de 1646, l'art. 12 de l'Edit de Décembre
'169 t, enfin la Déclaration du 10 Novembre 1748, toutes
ces Loix fe réuniifent pour le prouver; elles exigent feulement que les proviIions & la prife de poifeffion foient infinuées deux jours frallcs avant la mort du réfignanr; & fi
elles ne le font, ils font déchus de leurs droits, & le bénéfice vaque par mort; cette peine fut introduite pour affi.lrer les droits des Patrons & des Gradués, & faire cefler
leurs conteftations avec les réIignataires. Cette peine fuppofe donc aux réIignataires la liberté de prendre poifeffion
dans les trois ans, fans qu'on puiife leur en faire un cri!Ue
& les accu fer de confidence.
La quatrieme préfomption de confidence fe tire de la
maniere dont Mre. Corn pian a pris po1Teffion, & le moment
qu'il a choifi. On a prouvé que rien n'avoie été plus folemnel
que cette prife de po1Teffion ; que Mre. Corn pian avoie fuivi &
les Loix générales du Royaume, & les ufages particuliers
de la Cathédrale de Mar[eille; on a prouvé qu'il n'y avoit
point eu de c1andeftinité, & qu'il ne pouvoit pas même
y en avoir; on a démontré les circonftances qui avoient
occafioné la prife de po1Teffion. Quane à la conduite de Mre.
Corn pian après la prife de po1Teffion, c'eft-à-dire en ce que
Mre. Souffin a toujours logé dans la mai[on prévôtale, il dl:
prouvé que Mre. Compian y logeoit également depuis vingtfepe ans, & qu'ils mangeoient enfemble depuis cette longue
fuite d'années. Si Mre. Souffin continuoie par fois les fonctions de Prévôt, c'eft un égard que l'on doit à la vétérance
& qui n'eft pas fans exemple. Mre. Souffin n'a pas joui des
honneurs dus au Prévôt pal' un patte illicite & criminel de
confidence, mais par un ufage conHant & invariaùle qui a
fa [ource dans l'équité & la vénéraeion que l'on a pour la
vertu que de longs travaux ont couronnée; il n'était poi nt
néce1Taire de rapporter un atte de véeérance, parce que le
Chapitre n'en donne point. Enfin Mre. Cornpian recevoit les
•
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revenus, prélidoit "aux Chapitres, affiaoit l'Evéque à l'Autet,
l'allait chercher au bas du Chœur à la tête du Chapitre,
droits tous attachés
la qualité de Prév6t; il ea prouvé
que Mre. Souffin a vu [on neveu faire les fonéHons de
Prévôt fous [es yeux & fous ceux du Chapitre & de l'Evê.
que; [on état étoit donc public, [a poffeffion paiGble, &
fa dignité permanente. Il n'y avoit donc aucun vice ni dans
la. rélignation, ni dans la priee de pofleffion de Mre. Complan.
Mr. l'Avocat·Général" conclut à la confirmation de la Sentence.
Arrêt du 20 Mars 177S, prononcé par M. le Premier
Prélident, à l'Audienc'e du Rôle, confotme aux concluGons,
Mre. Martinet fut condamné aux dépens. Plaidant Mes. E[Trivier & Gaffier.
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1 V.
Sur la répétition du retrait lignager, attend~ la preflation de
nom.
Quels {am les faits qui peuvent étaDlir la preuve de la fraude?
AR acre du 12 Août 1769, Eloy Bernard, Négociant
du lieu de la Cadiere, acheta d'Antoine Deidier une
propriété de terre au prix de S462 IiI'. Michel Deidier, frere
du vendeur, fe pourvut en retrait Iignager, fous les offres
en pareil cas requi[es. Pour s'affurer la fomme qui lui éroit
néceffilire pour exercer le retrait, Michel Deidier paffa un
traité le 20 Oélobre avec Charles Brun. Ce dernil"r s'obligea
à lui prêter la (amme de 24-00 IiI'. lar[que Bernard lui dé[emparerait la propriété, & Deidier s'obligea de donner un
chemin à Charles Brun dans la même terre pour paffer à
la Genne; il fut dit que cet ufage ne dureroit qu'autant que
Brun ou fes enfans pofféderoient la terre. Eloy Bernard
Ctffigné en retrait, offrit à Michel Deidier de déièmparer,
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étan~
�57
'étant préalablement rembourfé des fommes qu'il avoir payées
à compte du prix, en jurant par Deidier qu'il retenoit cette
terre pour lui, & qu'il ne prêtait fan nom à perfonne, fauf
de répéter le retrait en cas de colluGon, fraude & accommodation de nom dans le temps de droit.
Michel Deidier fe fournit à routes ces obligations par
fan expédient. Bernard fit e-nfuite déclarer l'infl:ance en re·
trait périmée, n'ayant pas été pourfuivie pendant un mois.
Cette Sentence fut réformée par celle du Lieutenant de
Toulon du 8 Mars 1771 à laquelle il acquiefça.
Pendant la durée de ces conrefl:ations, Antoine Deidier
vendit à .Manin tout ce qu'il poffédoit d'une propriété de
terre, vigne &' oliviers au terroir de la Cadiere, confrontant
celle qu'il avoit vendue à Eloi Bernard, moyennant le prilC
de 102')0 liv. qu'il s'obligea de payer aux créanciers les plus
privilégiés du vendeur, fuivanr l'indication qu'il lui en feroit.
Eloi Bernard croyant que Michel Deidier retenoit la terre
pour Martin, offrit un expédient; il fournit Michel Deidier
à jurer qu'il retenait pour lui, & non pour autre, & notamment
pour Manin. Le Juge de la Cadiere adjugea le retrait à Michel
Deidier, en jurant de retenir pour lui, & non pour autre, &
en lui rembourfant les fommes par lui payées à compte du prix
de fon acquiGtion & les frais & loyaux-coûts. En exécution
de cette Sentence Michel Deidier prêta le ferment requis;
& par aéte du 23 Décembre 1771, Eloi Bernard défem.
para la propriété.
Le 16 Mû 1772, Michel Deidier vendit la propriété
re:enue par retrait à Martin; cette vente étant faite dans
l'an du retrait, Eloi Bernard déclara tant à Michel Deidier
qu'à Manin, être appellant de la Sentence du Juge de la
Cadiere, pour voir ordonner la répétition du retrait lignager
intenté, & qu'au moyen de ce', le retrait feroit déclaré
feint & fimulé; il fit ajourner Manin en défemparation de
la terre; Manin fit ajourner Michel Deidier en garantie, &
par Sentence du I I Août 1773, le Lieutenant de Toulon
déclara le retrait exercé par Michel Deidier feint & fimulé ,
ordonna que la Sentence d'adjudication du retrait feroit &;
DU
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Années 1775 & 177 6•
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demeure'roit rétraél:ée, & qu'Eloi Bernard ferait 'relaxé fur
la demande en retrait, & rétabli en la po/Teffion & jouiffance de la propriété. Appel pardevant la Cour de la part
de Michel Deidier & de Jacques Martin.
On difoit pour eux, qu'il s'agi/Toit uniquement de décider
fi en Provence, fuivant le Statut du Pays, la venre faite
dans l'an du rerrait donne ouverture à la répétition. Le
droit romàin forme le droit commun de la Provence; il
cede cependant aux Statuts qui y ont dérogé en certains
p·oinrs. Le retrait lignager ne nou~ eH: pas venu du droit
romain; il ef!: de pur drait fran~ois. En Provence il ef!:
établi par notre Statut; c'ef!: un droit que les parens du
vendeur ne tiennent que de la pure grace & du pur bénéfice de la Loi municipale du pays.
Les Loix colltumieres qui Ont' établi dans le Royaume le
retrait lignager, ayant pour objet de leurs difpofitions les
héritages qu'ils àifujerri/Tent au retrait, lorfqu'ils font vendus
à un étranger de la famille, font par conféquent de la
c1a/Te de celles qu'on appelle Statuts réels. Il eU. de la nature de ces Statuts qu'ils n'exercent leur empire que fur l~s
héritages qui font fitués dans l'étendue de leur terriroire;
delà il fù\t que c'en: la coutume où l'héritage eH fitué, qui
doit régler tout ce qui concerne le retrait Iignager de cet
héritage, parce qu'en France toutes les coutumes font
rée Iles.
C'eH donc fur la feule difpofition du Statut de Provence
à l'égard du retrait lignager, qu'il faut décider la quellion,
fi la vente dans l'~n du retrait donne ouverture à la répétition; toutes les autres coutumes qui ont des difpofirions
contraires à celles de notre Statut, font des Loix étrangeres
qui ne peuvent pas 'fervir de regle. Ce Statut accorde aux
parens du vendeur le droie de retenir par rétrait lignager
l'héritage vendu à lln étranger. ,Mourgues obferve à la page
I I I , que le motif de .la Loi Harutaire eH que les héritages
[oient confervés dans les familles.
Les parens doivent donc retraire pour eux, & non pour
autrui; & fi par fraude ils .accommodoiént leur nom à un
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'étranger, à qui dans la fuire ils remettroient le fonds priS
par 'retrait, il Y auroit lieu à la répétition du retrait, qui
feroit en ce cas déclaré feint, fimulé & frauduleux.
Les acquéreurs font reçus à prouver la fraude- & l'accommodation de nom, & peuvent la jufiifier par l'effet & l'événement après le retrait. Mais la preuve de la collufion dçit
être claire & fpécifique. Tous les Arrêts de ce Parlement
qui ont accordé la répétition du retrait, ont été rendus fur
la preuve par écrit ou par témoins de la fraude & de la
prel1:ation de nom à l'étranger; tels font ceux rapportés par
).\1ourgues, pag. 120; (Pal1:our, de jure feud. liv. 6, tit. 1 l ,
pag. 422; Bonnet, pag. 333,)
Tous les demandeurs en répétition de retrait ont toujours fondé leurs demandes ou fur la preuve par écrit par
eux rapportée <le la fraude & prefiation de nom du retrayant
à l'étranger à qui il avoit vendu dans la fuite le fonds pris
par retrait, Ou fur la preuve vocale par eux offerte des fàits
concluans & relevans de la preHation de nom. Jamais un_
acquéréur ne s'efl: avifé de demander la répéçition du retrait,
& de l'établir fur le feul aél:e de vente du fonds pris par
retrait à un étranger; cette' vente ne feroit que l'événement
de la fraude, & il faut prouver le deifein de frander & la
confommalion de la fraude, confilium & eveTltus. C'efi la
décifion de la Loi 4, §.' 19 ,if. de fideicomm. lihertat. fi
.conjilium & eventus fuerit fraudandorum creduorum. La Loi
79, ff. de regulis juris, dit: fraudis interpretatio in jure ci1Jili non ex eventu dumtaxat ,[ed ex conjilio quoque déjideratur.
Ce qui a fait dire à d'Antoine fur les regles du droit civil,
que pour favoir s'il y a de la fraude, il ne faut pas juger
des chofes par l'événement; mais il faut examiner s'il y a
eu deifein de frauder. C'el!: auffi le fenliment de Barnage
fur la coutume de· Normandie, lit. des retraits, art. 478,
rom. 2, pag. 376, 378 & 40), & de l'Auteur du Traité
des retraits, pag. 46 ~.
Ce n'eH pas la reve'nte qui fait la fraude, puifqu'on peut
revendre fans fraude à quelqu'un après le retrait ,exécuté.
Ce qui conHitue la fraude du retrayant, c'efi d'accommoder
H ..
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fon nom à un étranger, de paél:ifer de retrâire pour lui, & le
retrait exécuté, lui rep:1errre le bien; c'ell ainli que le décident
d'Argentré, des prom~ffis, art. 296in vO.Jànsfraude, col. 1262;
Catelan, tom. l, pag. 49'H Brodeau fur Louet, lett. R, fomm.
53 ,n. 8. Le retrait n'efl frauduleux qu'en tant qu'il y a un
traité verbal ou par écrit de la part du retrayant avec un
étranger,· de faire le retrait pour lui, & le retrait fait, de
lui remettre le bien: mais la revente fettle à un étranger,
fans traité précédent de retenir pour lui & de lui remettre
le bien, ne rend pas le retrait frauduleux, & ne donne
pas ouverture à la répétition, & la feule briéveté du temps
ne fuffir pas pour établir la fraude; c'ell ce qui nous ell
atteClé par Dumoulin, tit. du retrait, §. 20, glof. 1 in va.
le Seigneur féodal, n. 29.
Tous les Auteurs conviennent que le retrayant peut vendre
le bien par lui pris par rerrait, le lendemain du rerrait,
pour fon profit particulier, en le revendant plus chéremem,
fans être expofé à la répétirion, ainli qu'on le voit dans
Lepretre, cenr. 2, ch. 3, pag'. 348, dans Papon, liv. 1 l ,
l'il'. 7, n. 9 ,pag. 67), dans Boiffieu , ufage des fiefs, pag.
108, & dans Duperier, rom. 2, liv. l , n. 131. Si quelques Auteurs om tenu le cÇlnrraire, & ont penfé que c'eCl
llne préfomprion de fraude, lorfque le rerrayant vend à un
érranger peu de .temps après le retrait, ils l'ont décidé
de même fur la difpolition de quelques coutumes qui en
ont une difpofition exprelTe, laquelle n'a force ni loi que
dans fa Province.
Le Statut de Provence ne déclarant point le retrait frauduleux par la vente dans l'année du retrait, comme certaines coutumes du pays courumier, les chofes rellent à
cet égard dans· la difpolirion .du droit commun, fuivanc
lequel un aél:e n'efl: frauduleux qu'en ranI' qu'on prouve que
les parties contraél:anres ont eu deffein de frauder, & ont
exécuté ce defiein par l'événement & la confommation de
la fraude.
Michel Deidier a intenté fon retrait contre Eloi Bernard
pour fa propre utilité, pour fon profit particulier j c'eCl le vi\
,
�A. LAI S D E PRO VEN C Il.
'6 t
ll'rix qui l'a'déterminé à retenir la terre vendue; c'el! le bénéfice
de ~)38 liv. à faire fur cette vente. Il n'y a point de rehauŒement de prix dans la vente, puifque l'autre moitié de cette terre
a été achetée par Martin pour la fomme de I02~O liv. Il a pu
yendre ce fonds à Manin, dès qu'il ne le lui a pas cédé
en venu d'un traité précédent, par lequel il s'éwit obligé
de retenir ce fonds par retrait, & de le lui tranfporter enfuite; & il eH de regle qu'après le retrait, le retrayant peut
difpofer du fonds retrait, à l'inl!ar de fes autres biens. ( Charondas en fes Pandeél:es, chap. du retrait, pag. 227; Auzanet
fur la coutume de Paris aux arrêtés" n. 46, pag. 3 ~ 6 du
retrait lignager. )
On répondait pour Bernard, qu'il efl: établi par les principes que la prefl:ation de nom donne lieu à la répétition
du retrait. Ce point de doél:rine dérive eŒentiellement de
la nature même de l'aél:ion en retrait. Quel fut en effet le
motif de la Loi fl:atutaire qui donne le droit aux parens de
retenir aux mêmes prix & conditions la propriété ou l'immeuble aliéne par le parent? Ce motif en pleinement démontré dans la demande des Gens des Trois-Etats, & ne
fut autre que de conferver les b'iens dans les familles. Le
deur naturel de jouir du bien délaiŒé par nos peres, le
gOlÎt plus délicieux que l'on trouve au fruit cueilli à l'arbre
planté par nos aïeux; en un mot, la douce fatisfaél:ion que
l'on goûte à cultiver un champ qui a tant de fois nourri
ceux à qui l'on doit le jour, forment le germe puiŒant de
cette prédileél:ion qui mit en vigueur chez tous les peuples
policés la Loi du retrait lignager.
En Provence, cette Loi ne cede qu'll la Loi du retrait
féodal; encore fi ce dernier l'emporte, ce n'en point à
raifon de la faveur, mais à raifon de la loi de convention.
Dans l'aél:e de nouveau bail, le Seigneur direél: fe réf.~rve
la faculté de retenir; cette faculté ne peut lui devenir in'fruél:ueufe par le fait du parent de l'emphytéote. & pour
démontrer que la loi du retrait féodal n'efl: formée que pat
convention, & que celle du retrait lignager puife toute fa
force dans la feule qualité de parellt, il n'y a qu'à conli.
dérer 1°. que le Seigneur n'eft. préférable au lignager, que,
D U
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�'62
,..;, .
J.o U RNA t
' .'
quand il retieht pout -lui; fan 'céffion'naire -Ile jouit point dé
fon privilege, & le 'parent ex.clut ce dernier, 2°, Le retrait
féodal eH ceffible; le parem au contraire ne peut retenir que'
pour lui.
.
~ Il eH adçpté par 'tous les Auteurs, il ell: même de néteffiré que pour. prouver la preHation de nom, on n'exige
pas la preuve du fait pofitif de l'accord. Si pareille preuve
éroit requife, on éluderoit fans ceife la Loi. L'on fent parfairement que quand un parent promet .à un érranger de
ierenir pour lui,' pareils accords n'ont pour témoins que
éeux qui les fotment, & jamais on ne pourroir rempli.r les
preuves d'un fait auffi fecrer. En matiere de preHation de
nom, on admet en preuve probante tout ce qui fuffit à prouver des fairs que ·Ie grand jour n'éclaire jamais, c'eH-à-dire
ées préfomptions fortes qui ne font jamais cenfées exiHer
fans le fait qu'on cherche à prouver, & qui font toujours
auffi puiifanres aûx yeux du Juge que la preuve elle-même du
fair.
Ici tout fe réunit 'pour convaincre Michel Deidier & Jac<Jues Martin, que le premier a retenu la propriéré dont s'agit
pour le compte .& au feu! profir du dernier; la proximiré
.de la',vente, -pidfée à MaNin par Miche! Deidier de la propriété rerenue rur E,loy Bernara, le {ùrhauffcment de prix
fiipulé dans 'cerre revente, les emprunrs fairs par Michel
Deidier de Jacques Marrin pendant l'inHance en exercice
du rerrair, & pour' fournir aux frais d'icelle, enfin l'acquifirion faire dans le même remps par le même Martin
d'une prop'ri~ré a~renat;re â celle que Michel Deidier
vouloir fe faire défemparer par la 'voie du rerrait lignager. Quarre mois am vu 'naître & confommer les deux
aéles, Qc'efl: devenu dans fi peu de temps le defir cher &
prelTant d'acquérir le bien de fan frere, defir qui J'a engagé
de pourfuivre long-temps & à grands frais la défempara;-,
[i:>n IY.Jr Terrait? Dan quatre mois:oà a vu le manient de
Fa [ari5fa&iol1 & ~Iùi de fo~ dégoût; la 'L'oi' dé' fuppcffe p~
un (hangemenc fi fubit de'lvolorlré:;'elle voit les c/i.ofes ri
prochaines, lorfqu'elles fonc fi, oppofées, comme fi eUes
s'éroient p~ées ~an~ ~e m.~le jOli:. ,:'~( ~J ,,''1 • r 1~1'
�DU
PALAIS
DI!
PROVllNCll.
63
La proximité de la '{ente eil: fans contredit une preuve,
bien claire de b preHation de nom. Tous les Auteurs conviennent qu'il y a fraude au retrait, lorfque le relrayam a
remis dans l'an le fonds qu'il avait fait mblan~ de ret~nir,
à celui en faveur de qui on avait foupgon ~ qu'il intentait
le retrait. C'eil: aine? que le penfent Decormis, rom.
col. 837; PaO:our,deftudis, lib. 6, tit. II, n. 4; Tiraqueau , du retrait lignager; Brodeau fur Louet, vo. retrait,
n. S3; Defpeiffes, tom.
fea. 6, n. 7)'
Au court efpace de temps qui s'eil: écoulé entre la défemparation par retrait & la reveüte, on peut ajouter une
autre preuve non moins forte de la fimulation de nom, le
furhauffiment du prix flipulé dans la revente. Le prix de la
premiere acquifition n'eft que de ) 400 liv., ta,ndis que la
feconde, qui eO: faite quatre mois après, eil: de 11000 liv.
Ql;i pourrait ne pas voir que le fecond prix excédant le
premier de plus de la moitié, eil: véritablement fimulé?
Si la dilférencè des prix des deux ventes n'était pas confidérable, on pourroit l'attribuer' ou à la nécelIité où fe trou·
voit le premier vendeur d'aliéner, ou à l'envie qu'avait le
fecond acheteur. d'acquérir; mais un prix excédant le premier de plus de la moitié eil: un prix véritablement fimulé,
fur-tout fi on rapproche le furhauffement du prix, de la revente faite du fonds quatre mois après la défemparation par
retrait.
A ces deux circonŒances fe réunit une troifieme non moins
preffante. Pendant que Michel Deidier pourfuivoit Eloy Bernard pOllr fe faire adjuger le rerrait, & que ce dernier lui
dénonçait ouvertement qu'il prêtait fan nom à Jacques Martin,
ce dernier prêtait des femmes importantes au retrayant,
même pour fournir aux frais, du procès. Or, nul indice plus
fort, fuivant tous les principes, pour prouver la collufion &
l'accord relativement à la chofe contenée,. que la fourniture
des fommes pour frais d'inftance, & cet accord eil: démonftrativement établi. Quand par l'événement le prêteur devient po{fe{feur de la chofe acquife, il eil: alors ho rs de
doute que le prêteur a eu dans, le prêt la vue d'acquérir,
l,
l,
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JOURNAi
& que l'emprunteur n'a re<;u en prê't qu'après avoir promis
qu'il délivreroit la chofe, lorfqu'il l'auroit acquife. C'efi ainli
que le décide Imbert dans fon Enchiridion,
retrait li:"
gnager, n. 3.
L'acquifition de Jacqùes Martin d'une propriété attenante '
à celle qui devoit être retraire, & faite pendant l'infiance
en retrait, forme une quatrieme preuve de la fraude & de •
la collufion qui regnoit entre lui & Michel Deidier. Cet acquéreur avoit en vue alors d'acquérir dans fon temps la propriété attenante expofée au retrait, pour n'en faire qu'un feul
& même fonds.
Arrêt du 28 Mars 177), au rapport de Mr. le Confeiller,
de Fonfcolombe, qui confirme la Sentence, & condamne
Michel Deidier & Jacques Martin aux dépens folidairement.
Ecrivant Mes. Breffier, Colombon & Verdet•
,,0.
•
ARR Ê T
V.
La preuve de la paternité peut-elle être reçut; en faveur d'une
fille bâtarde?
La preuve de lafèduaion peut-elle être reçue contre un homme
marié, & après fa mort?
Pendant l'inflance en pat~rni!é." peut-on accorder une pro"ifion?
L
E lieur Leques, fils d'un Négociant de la ville de Marfeille, fit connoiifance à Aubagne de la Dlle. Deveze,
l'enleva le 22 Juillet 1767, & la déroba à fes parens pendant près de deux ans. Lors d'un voyage qu'il fit à Paris,
la Dlle. Deveze fut conduite à Gardanne" où elle accoucha
d'une fille; à [on retour il la fréquenta jufqu'après qu'il fe-fl,t
marié. Delà il la ramena à Marfeille, où il mourut, laiifant
la DUe. Deveze enceinte. Le 24 Janvier 1771, elle préfenta requête en qualité de pauvre, & demanda que le fieur
L,eques, aïeul de fon raviifeur, fût condamné ,à lui' payer
pn~
�DU
PALAIS
DE'
PROVENCE.
6)
une penfion annuelle & alimentaite de 200 liv. pour la petite,
jufqu'à ce qu'elle fût en âge d'être mariée, à laquelle époque il lui donnerait 2000 liv. pour lui fervir de dotation,
fauf à la Dlle. Deveze, quand elle auroit accouché, de pourvoir aux alimens & aux droits de l'enfant qu'elle mettroit
au monde, & qu'en outre le fleur Leques fût condamné à lui
payer 6000 liv. pour lui tenir lieu de dotation; elle demanda une provilion de 1000 liv.
La DIle. Deveze accoucha le 31 Mars 1771 d'une fille
qu'elle mit en nourrice-, & pendant procès la premiere fille
mourut. Elle offrit un expédient; elIe demanda à prouver
la féduél:ion, l'enlévement, les accouchemens & la filiarion
de fa fille. On difoit pour elle qu'on peut être admis à faire
preuve de tout ce qui ne tombe point en convention ou en
aél:e écrit. Il s'agit ici de juftifier que le fleur Leques fils
étoit le pere des enfans dont la DlIe. Deveze avait accouché, & que ces enfans éraient le fruit de fa féduél:ion. Il
eft cenain, quant à ce dernier objet, que la féduél:ion étant
un délit que l'on cherche à caçher, la preuve teftimoniale
en eft admiffible; on la reçoit toUS les jours, même par la
voie rigoureufe de l'information: la mort du fieur Leques a
privé la Dlle. Deveze de ce dernier moyen.
Il dl: des regiftres publics deHinés à faire la preuve de
l'âge, de la nai{fance & de la filiation des hommes, d'Oti
il femble s'enfuivre que dans ces matieres la preuve vocale
ne doit pas être adm-jfe; mais cette conféquence ferait trop
générale pour n'être pas injufte; & delà s'eft établie cette
diftinél:ion: ou on veut faire preuve contre les regiftres de
baprême, ou on veut fupp\éer à leur défaut.
Dans le premier cas, la preuve n'eH jamais admire. Tout
le monde connoît Je fameux Arrêt du Parlement de Paris
du 23 Mai 176), qui refufa au fieur de Rougemont & à
la veuve Hatte, malgré les préfomptions les plus fortes, de
prouver qu'il étoit fils du fieur Hatte; fan extrait baptiHere
qui le faifoir fils d'Etienne de Rougemont & de Jeanne
Morel, parut un obftacle infurmontable.
Dans le fecond cas, lorfque les regiftres manquent ou
Allllé~$ ln 5 & l77G.
l
�66
Jou
i
qu'ils font muets, la preuve par témoins ell: admife; il n'eft
pas jufle, dit Mr•. d'Agueffeau dans fan vingt-deuxieme Plaidoyer, que la TJégligence des parens, la prévarication d~ ceux
qui cOI/fervent des regiJlres publics, les maLheurs ({ l'injure
des temps, puif/ènt réduire !Ul homme d l'impoJJibilité de prouver {on 'état; cela eH fur-rout incontelbble pour les bâcards.
Qu'importe qu'on les ait méconnus plus ou moins? lis exifrem; & lorfqu'ils cherchent l'aureur de leur naiffance pour
lui demander des alimens, il eH illoui qu'on les ait repouffés, parce qu'ils n'éroient pas baptifés feluS le nom du
pere qu'ils réclametù. Pour le fils légitime, pater efl quem
71upriœ denzonflrant, qllelqlle défaveu que des époux aient pl!
Ol! voulu en faire. Mais pour le 15ârard, c'efl: b fréquentation qui indique fan pere; delà routes ces procédures en
rapt qui abou.tiffent à une dot pour la fille, & à des alimens
pour les enfans, lorfque la fréquentation el1: prouvée. La
preuve de fréquentation peut donc y être faite, & filppléer
au filence des regiltres baptil1:eres.
Il ne s'agit point ici d'enfans dont la naiffiJnce aie pu
faire époque parmi les parens & les amis de leur pere;
fruits d'une union que le fieur Leques voulait cacher ,ils
one été baptifés comme leurs parens étam inconnus. On ne
peut invoquer, pour attelter leur état, que la Sage-femme
qui les reçut, le Chirurgien qui préfida aux accouchemens,
& les nourrices auxquelles ils furent confiés. La Dlle. Deveze vient donc avec les feules preuves que l'on fait en draie
de lui demander, & ces preuves ne fauroient être regardées
comme fufpeé!:es.
Quant à la féduél:ion pratiquée contre la Dlle. Deveze,
on rappelloit tous les moyens auxquels le fieur Legues avoie
eu recours pour y parvenir, & l'on ajouroit que plus la Dlle.
Deveze fe ferait oubliée avec le fieur Leques, plus il feroie
coupab~ de l'avoir réduite à cet avilijfement. Le féduél:eur
répond des démarches auxquelles il a précipité une fille jeune
& innocente; autrement quelle femme pourrait être reçue 11
fe plaindre? n'y a-t-il pas toujours plus d'un moment où
el,le auroit pu repouffer [on [éduél:eur ou le fuir? Mais l'are
RNA
�D U PAL A l S D Il
PRO VEN C Il.
67
de celui-ci & fon crime font d'avoir a!foupi la pudeur & la
vertu, & d'a.voir corrompu la volonté. C'efi donc fur les
principes d'une liaifon entre un homme & une femme, que
J'on doit juger s'il y a eu ou non féduétion. Lorfqu'il n'eH
intervenu entr'eux que ce contrat honteux & trop commun
par lequel une femme fe vend ou fe livre à un homme, alors,
coupables tous les deux, ils n'ont aucune prétention à former
J'un contre J'autre; il fuffit que J'homme fourniffe aux alimens des enfans & aux frais que leur nai!fance occaGone;
la femme n'a pas à répéter une pudeur qu'elle n'avoit pas.
Mais quand on l'oit une fille, à peine fortie de l'enfance,
entourée de pieges par un féduéteur riche & adroit; quand
on fuit fes démarches; quand on voit que fon audace croiffant toujOUtS, il finit par arracher à fes parens la malheureure viétime de. fes deGrs, alors on penfe avec la Loi
qu'il y a eu féduétion; nifi, dit la Loi unique, cod. de raptll
virgil/um, virgùlem follicitaverit, I/ifi odiofis arrivus circu11lvel/erit, non faciet eam velle in tantùm dedecl/s fefe pro-
deJJè.
Croira-t-on qu'une fille à laquelle on n'avoit rien à reprocher, fè fera livrée de foh gré au fieur Leques, & qu'il
n'y aura eu enrr'eux qu'un commerce libre & volontaire?
Ce feroit bien peu connoÎtre les effets & les droits de la
pudeur. Avant que la corruption ait gagné un cœur innocent, la vertu y réGde encore dans toute fa force & dans
toUt fon éclat. Un fentil1lent inné de modefije & de ré.:.
ferve défend un fexe trop foible ; & c'efi précifément à ce
moment que le Geur Leques a commencé d'exécuter fes
projets fur la Dlle. Deveze. L'âge feul de cette fille, lorfque le fieur Leques a lié connoiffance avec elle, forme une
preuve complette de fa féduétion; on ne peut avoir que féduit une fille que l'on a fuivi depuis qu'elle a eu quatorze
ans, jufqu'au moment qu'elle en a eu dix-huit & qu'on l'a
enlevée. Si la Dlle. Deveze avoit été moins j une à l'époque de ton enlévement, la fédué1:ion dont elle fut viétime
pourroit être plus problématique; les certificats qu'elle rapporte auraient moins de force; mais ici la féduétion eH toute
12.
�~
JOURNAL
confl:atée par l'âge. Le fieur Leques enleva une fille de dix.;
huit ans, il vécut avec elle; il l'avoit donc féduite; c'efl:
une conféquence invincible du droit, ainfi que le remarque
Denifart, va. rapt. La Dlle. Deveze n'en pas Lenfée avoir
confenti, parce qu'on ne préfume pas qu'à dix-huit ans une
fille confente à devenir une vile concubine; d'ailleurs fon
confentement ne feroit pas libre; quand on le fuppoferoit
tel, il Y auroit toujours eu féduébon. S'il y a eu confentement, il eH l'effet de .la féduétion; s'il n'yen a pas eu, le
fieur Leques ne fut que plus coupable. Ainli la Dlle. Deveze
doit être admife à la preuve qu'elle demande; & en attendant qu'elle la rempliife , il lui faut une provifion.
On répondoit que la Dlle. Deveze étoit non recevable
en l'état fous deux rapports; rO. parce que la fille de laquelle
il s'agit n'en pas pourvue d'un tuteur; '2.°. parce que la preuve
oHerte eH imparfaite. D'ailleurs la Dlle. Deveze n'offre pas
de prouver l'accouchement, ni que l'enfant dont elle- dit avoir
accouché, foit le même que celui qu'elle préfente aujourd'hui. La preuve que la-Dlle. Deveze offre fur la féduétion
pratiquée par le fieur Leques eH non recevable, parce qu'il
paroÎt qu'il n'yen a jamais eu, & qu'on ne peut pas même
la fuppofer. Tout indique qu'il n'y a eu entre les parties,
qui étaient à-peu-près du même âge, qu'un commerce cri-nlinel auquel chacun s'ell: poné par l'appas du plaifir. Le
fieur Leques a plutôt acheté les faveurs de la Dlle. Deveze,
qu'il n'a abufé de fa foibleife. Dans l'un & l'autre cas, ce
n'eH-là qu'un /impIe Hupre dont les auteurs fone également
coupables, & duquel il ne peut réfulter aucune condamnaLion à des dommages-intérêts. D'ailleurs il eH convenu que
la Dlle. Deveze a vécu avec 1E; lieur Leques après le mariage de ce dernier, & il en de maxime que la plainte en
rapt n'eH jamais reçue contre un homme marié.
Me. Bovis, SubHitut, obferva que le pupille qui par lui
même dl: incapable de vouloir & d'agir, ne peut eHer en
jugement, & qu'il doit être néceifairement repréfenté par
lIll tuteur en qui réfide l'exercice de fes aétions. La mere
l)'ell:-elle pas de droit tutrice ~e fes enfans, lorfque le pere,
�nu
,pl! PROVENCIl;
'69
ell: mort? On ne fauroit fur-tout lui difputer ce titre & ce
caraètere, quand il dl: queflion d'un enfant naturel, parce
que cet enfant ne tenant à aucune famille par aucun lien
civil, il n'a nul parent qui pui!fe venir à fon fecours. La Loi
placuît ne parle que du cas où l'état de l'enfant eH en conteHation, & lorfqu'il s'agit de [avoir s'il eH libre ou efclave, légitime ou bâtard. Une queHion auffi importance qui
décide de l'exiHence morale & civile d'un homme, doit fans
contredit être traitée avec folemnité; il eH jufie alors
que l'enfant [oit affirté d'un tuteur ad hoc, de fes parens &
de touS ceux qui veulent bien le regarder comme tel. Alors
même, s'il ne [e préfente aucun parent, la mere peut agir
pour lui en qualité de tutrice. Ici on ne réclame pas un
état pour cette jeune fille; elle ne peut prétendre que des
alimens. Nul doute que la mere ne [oit recevable à les demander.
L'expédient offert par la DlIe. Deveze porte fur la preuve
de l'accouchement; la gro!felfe eil: donc bien articulée,
car la gro!fe!fe fuppofe néce!fairement un accouchement;
les foins d'une Sage-femme & d'un Chirurgien vis-à-vis une
femme enceinte ne peuvent être relatifs qu'à l'accouchenlenr. Quant à l'identité de la fille ,il eil: vrai qu'elle n'efl:
pas exprefTément nommée; mais ne peut-on pas dire qu'elle
y eil: implicitement comprife. S'il elr prouvé que la DlIe.
Deveze a accouché de deux filles, dont le fieur Leques s'eil:
avoué le pere, n'apparoi!fant pas que cette femme ait eu
d'autres enfans que celles-là, on ne peut, ce femble, révoquer en doute que ce ne foit ici une de ces deux filles.
D'ailleurs l'exiil:ence de cette fille n'eil: pas conteHée, elle
eH même prouvée par un extrait baptiil:ere; cet ilél:e feul
juHifie fuffifamment qu'il eil: né une fille de la Dlle. Deveze qui a été nommée Edouard-Marie-Apollonie fut les FOllts
de baptême; c'eH cette même fille pour laquelle on réclame
des alimens. La préfomption eil: toute pour elle; elle ell:
fortifiée & acquiert toure la force d'une preuve enriere par
les différentes pieces communiquées,' telles que les décbrafions du Chirurgien) de la Sage-femme) qui aneil:enc, ra..,
PALAIS
�70
Jou RNA L
tiqne rifficii, & fur-tout par la lettre de la nOUrrIce qui demande à la Dlle. Deveze' le paiement de ·la nourriture de
cet enfant' Ainli on ne peut pas dire que la preuve de pa,"
rernité foit non recevable.
Quoique la preuve de féduél:ion foit r-ecevable en thefe généraie, comme celle que la Dll.e. Deveze demande, n'aboutit qu'à
des dommages.intérêts, fi elle fe trouve dans une pofirion
qui ne lui permette pas de les prétendre, il n'y a pas lieu
d'ordonner la preuve, parce qu'elle feroit frulhacoire. Cette
fille va fans peine & rell:e tranquillement dans tous les différents. endroits où le fieur Leques trouve bon de la conduire; elle quitte la maifon paternelle fans témoigner la
moindre velléité d'y recourner; fes parens ne fongent pas
non plus à la réclamer; elle ne marque aucun regret; elle
n'exhale aucu.ne plainte fur 1'efpece de contraint.: où elle
filppofe qu'on la détenoit; on n'imagine pas de former aucune
demande en juHice; elle vit pendant plufieurs années avec
ce jeune homme; elle continue de cohabiter avec lui, même'
après fan mariage, qu'elle n'ignoroit vraifemblablement pas,
qu'elle n'écoit pas cenfée ignorer, parce qu'il avoit été publié: ell:-ce là la conduite d'une fille fédt;ite ?
Me. Bovis obferva néanmoins que quoique 1'aél:ion en rapt
ne compete pas contre un homme marié, filivanr l'Arrêt
rapporté par Boniface, tom. 2, part. 3, liv. l , tit. 6, chap.
1 l , on tient pour certain que quand la féduction a commencé avant le mariage, 1'accufation en rapt peut alors être
intentée contre un homme marié. Le même Arrêtifie rapporte
au chap. 13 un A rrêt qui le décida de même, & il ajoute qu'alors le mariage, bien-loin d'excufer le raviifeur, efi un nouveau
crime, une perfidie; dans ce cas, l'<jccufation en rapt ne peut
aboutir à Elire caifer Je mariage, ni à le fàire punir du der-,
nier fupplice, mais à le faire condamner à quelque peine &
aux dommages-intérêts. Telle efi, ce femble, la .fituation
de la D!le. Deveze. Cette fille a fouffert l'approche & la
fréquentation du fip.ur Leques après fon mariage; mais il ell:
pofTible que cette fille, que ce dernier tenoit reiferrée , ignorât q\l'il s'éwi[ marié; fi elle en étoit iull:ruite, l'on peut
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE:
7r
penfer qù'el:e co"ntinua de vivre avec lui, parce qu'il n.e lui
éroit plus pofIible de fe foufhaire ~ l'empire qu'il avcn Cur
elle; d'ailleLlrs le commerce ou la Ceduébon de là Dlle. Deveze avait une époque bien antérieure au mariage du fie, r
Leques. Si ce dernier était encore en vie" l~ Dlle. Deve~e
aurait pu, l'atta,qu~r en rapt; f~ m~rt a pnve ~ette ~lle( e
route aalOn cnmmelle; maIs Il lUI reHe couJours 1aébon
civile contre les héritiers.
Il dl: certain ( obCerva Me. Bovis fur la provifion) que
oUJnd une femme ou fille fait fon expofition de gro{fe{fe,
~Jle ef!: en droit de prétendre des provilions, tant pour les
frais de couche, que pour la nourrirure de l'enfant, contre
celui qu'elle affure en être le pere; mais s'enfuit-il qu'il ne
doive jamais être accordé des provilions ni d'alimens, foit
à l'enfant, fait à la mere, quand celle-ci n'a point fait d'expolition de gro{fe{fe? Il fam diHinguer le cas où au défJut
d'expolition Ce joint encore un détaut ahfolu de preuve, &
le cas où il exiUe quelque preuve équipollente à l'expofition. Une femme qui Ce préCente fans aucune eCpece de
preuve ni d'indice, ne doit pas être crue; Ca réclamation tardive devient fuCpeél:e; elle a routes les apparences d'une calomnie, & ne peut par cela Ceul donner lieu à une adjudication deprovilion; mais lorCque l'expofition de gi'o{feffe ef!:,
fuppléée par quelque chaCe d'équivalent, la rai Con dit a{fez,
fans le fecours des Loix ni des Doél:eurs, que les provifions doivent être accordées. Ici la DlIe. Deveze n'a point
fait d'expoGtion de gro{fe{fe; mais on trouve une premiere
requête qu'elle préfenta à la Cour le 24 Janvier 1.77 l , dans
laquelle, après avoir demandé des dommages-intérêts pour'
elle, des alimens & une dotation pour fa premiere fille
Chrifline, elle proref!:a de faire pourvoir aux alimens & à
la dotation de la fille dont elle était enceinte, quand elle
auroit accouché. Ne déclare-t-elle pas par-là qu'elle était
~rofl~ des œuvres du lieur Leques? n; le déclare-t-elle pas
Jundlquement? Il Y a au furplus la declaration de la Sagef~mm~ & celle du lieur Goiran, Chirurgien. Il y a donc préfor:nptlOn très-fo,rte &. plus que fen:i-preuve de paternité, ce
qUI fuffit pour faire adjuger la provluon.
.
�72
Jou
RNA
t
Me. Bovis conclut à la réception de l'expédient de la'
Dl1e. Deveze, en y ajoutant la claufe, fans préjudice du
droit des parties, ni attribution d'aucun nouveau, & à une
provifion de 600 liv.
Par Arrêt du 20 Mars 177'), prononcé par M. le Premier
Préfident, la Cour ayant aucunement égard à l'expédient
de la Dlle. Deveze, avant dire droit à fa requête, ordonna
qu'elle vérifieroit dans le mois que Leques s'érait avoué pour
être le pere des deux fil1es dont el1e avoit accouché, & partie
au contraire, les dépens réfervés; elle fut déboutée en l'état
de fa provifion. Plaidant Mes. Simeon & Colombon.
ARR Ê T
V J.
Preuve de la démence du teJlateur reçue.
L
E 6 Septembre 1773, Mt'. Rehuffat, Notaire royal
du lieu de Rians, fut appellé par les parens d'Anraine
Leth, Charbonnier du même lieu, vieillard infirme & aveugle,
pour recevoir fon re!lament. Le tefiareur lui ayant fail. entendre, le mieux qu'il pur, l'enfemble de fes difpofitions, il
les rédigea; mais lui en ayant fait la leélnre, & l'ayant interpellé de déclarer fi telles éraient fes volontés, ce vieillard fe rroubl'4 perdir de vue J'aéle important qu'il al1oitconfommer, & les dernieres formalités dont il falloit les
revêtir. Me. Rebuffat fe crut obligé d'attefl:er au bas du tertamenr imparfait l'incapacité du teHareur. Le lendemain Me.
Rebuffat fnt encore appellé; même inconvénient, qui fut également conHacé par écrir. Le re!lament d'Antoine Lech fut
reçu par un aurre Notaire de Rians; le frere du re!lareur
fur inHirué héritier. Honoré Pelas, demeuranr à Vinon, co- '
héririerab inteflat d'Antoine Leth, s'adreIra au Juge de Rians,
& à fan requis le Juge accéda chez Antoine Lerh, & prit
[es réponfes pour conHater fan imbécilliré. Deux jours après,
AntOine Lech mourut dans fa quatre-vingt-deuxieme année. '
Honoré,
,
..
�72
Jou
RNA
t
Me. Bovis conclut à la réception de l'expédient de la'
Dl1e. Deveze, en y ajoutant la claufe, fans préjudice du
droit des parties, ni attribution d'aucun nouveau, & à une
provifion de 600 liv.
Par Arrêt du 20 Mars 177'), prononcé par M. le Premier
Préfident, la Cour ayant aucunement égard à l'expédient
de la Dlle. Deveze, avant dire droit à fa requête, ordonna
qu'elle vérifieroit dans le mois que Leques s'érait avoué pour
être le pere des deux fil1es dont el1e avoit accouché, & partie
au contraire, les dépens réfervés; elle fut déboutée en l'état
de fa provifion. Plaidant Mes. Simeon & Colombon.
ARR Ê T
V J.
Preuve de la démence du teJlateur reçue.
L
E 6 Septembre 1773, Mt'. Rehuffat, Notaire royal
du lieu de Rians, fut appellé par les parens d'Anraine
Leth, Charbonnier du même lieu, vieillard infirme & aveugle,
pour recevoir fon re!lament. Le tefiareur lui ayant fail. entendre, le mieux qu'il pur, l'enfemble de fes difpofitions, il
les rédigea; mais lui en ayant fait la leélnre, & l'ayant interpellé de déclarer fi telles éraient fes volontés, ce vieillard fe rroubl'4 perdir de vue J'aéle important qu'il al1oitconfommer, & les dernieres formalités dont il falloit les
revêtir. Me. Rebuffat fe crut obligé d'attefl:er au bas du tertamenr imparfait l'incapacité du teHareur. Le lendemain Me.
Rebuffat fnt encore appellé; même inconvénient, qui fut également conHacé par écrir. Le re!lament d'Antoine Lech fut
reçu par un aurre Notaire de Rians; le frere du re!lareur
fur inHirué héritier. Honoré Pelas, demeuranr à Vinon, co- '
héririerab inteflat d'Antoine Leth, s'adreIra au Juge de Rians,
& à fan requis le Juge accéda chez Antoine Lerh, & prit
[es réponfes pour conHater fan imbécilliré. Deux jours après,
AntOine Lech mourut dans fa quatre-vingt-deuxieme année. '
Honoré,
,
..
�v B NeE.
73
Honoré Pelas u[ant du privilege des pauvres, demanda la
caffation du tefiament.
On di[oit pour lui, que le tefiament d'un homme tombé
en démence efi nul par un vice inhérent, & indépendamment de toutes les formalirés dont il peut être revêtu. Le
teHament efi le témoignage facré que rend un homme public des dernieres volontés d'un mourant. Les Loix, comme pour confoler c.elui-ci de l'arrêt funeHe qu'il ,;a fubir,
ont affuré à fes dernieres difpofitions une exécution immortelle; elles ont voulu que le témoignage de· celui qu'elles
en ont fait le dépofitaire, fît foi. Mais cette foi doit être
juHe & éclairée; on ne peut, fans accufer l'homme public
lui-même, attaquer l'a8:e qu'il allure avoir confom Olé de
la maniere que ces Loix le lui prefcrivoient; mais leur
confiance ne s'étend pas plus loin; il doit, pour la conferver, fe renfermer datis fan miniHere. Dépofiraire du
fecret & du deHin des familles, confident des fentimens &
des volontés des hommes dans le moment le plus intéreffant de leur vie, il n'eH pas Juge de leur état; & s'il ofe
en dépofer, il efi permis de diftinguer le témoignage de
l'homme public qui conlàcre la légalité du teftament, du
témoignage de l'homme privé qui n'allure pas Li capacité
du teHateur.
Ici que des preuves s'élevent contre ce témoignage! On
ne réclame point, comme on le pourrait, celui de tous les
concitoyens d'Antoine Leth, la publiéité de fan état; le
refus qu'Ont fait ·les témoins de ligner dans les premiers
reHamens, les fcrupules réitérés de Me. Rebuffat ,. forment
une preuve littérale & publique; tous font frappés de l'état
du teHateur; au lieu de devenir les confidens & les garans
de fa derniere volonté, ils atteftent qu'il eft incapable d'en
avoir une. D'ailleurs plufieurs voifins & concitoyens d'Antoine Leth lui imputent des traits d'imbécillité & de démence, antérieurs même de quelque temps à l'époque de fa
derniere maladie. Cinq des témoins qui accompagnent Me.
Rebuffat, ont déja motivé dans des certificats le jugement
Années 1775 6' 1776.
K
DU
PALAIS
DE
PRO
.-
�•
74
Jou
R ~ A L
qu'ils porrerent alors de l'érat du teHaréur. Le demandeur
offre une preuve plus forte encore. '
Les réponles qu'Antoine Leth prêra devant le Juge, conrtatent l'imbécillité. Ce tefiarellr, cet homme qui venoit
d'être honoré de toute la confiance & de route l'autorité
des Loix, ne fe rappelle ni fon nom, ni fan âge, ni ra
famille, ni les prétendus teflamens; il ne paraît revenir à
lui-même dans de certains momens, que pour s'égarer de
nouveau; tantôt il n'a point de parens, tantôt il a huit freres ;. tolites fes réponlès font ridicules, aucune n'el! exaél:e.
Quand on lui demande li on a voulu l'engager à faire un
teftament, les perfécutions qu'il a vraifemblablement effuyées
l'agirent encore; l'impreffion qu'elles ont faires fur fes organes , fupplée dans cetee occaGon à fa mémoire troublée.
Il a été en effet follicité, répond-il; mais il ne fait par
qui. Sa volonré en de ne laiffer fan bien à perronne.
Quand on lui lit les détails de fes réponfes, il ne les
reconnaît plus; de nouvelles rêveries l'occupenr; il avoit
refule d'aIlùrer par ferment qu'il alloit dire la vérité; il refufe également d'accefier qu'il l'a dire.
S'il étoit poffible d'articuler quelques faits d'après le témoignage' d'un homme qui dans ce moment n'en pouvait
rendre de valable que contre lui-même & conrre fa rairon,
l'imbécilliré d'Antoine Leth efl: confiarée avant & après le
tefiament. Or, fuivant l'opinion des Auteurs & la déciGon
des Loix, elle reflue au temps de l'aél:e même; dès-lors
l'aél:e efi nul dans fan principe & dans fes effets; & ce
feroit à celui qui voudrait en défendre la validité, à prouver
que le teflateur avoit des momens lucides, & que l'aél:e a
. été l'ouvrage heureux de certe raifon accidentelle & palfagere•. Mais d'abord le genre de démence dont Anroine
Leth érait atteint n'en fuppofe pas; c'était chez lui une
maladie habituelle, une foibleffe, une alcéralion d'organes,
fuire irréparable de l'âge & des infirmirés. Quelles preuves
J'héritier refiamentaire oppofe-r-il à ces préjugés irréGfiihies? La dépoGtion d'un N oraire, dépoGrion purement
�DU
PALAIS
DJ!
7)
PROVENCE.
privée, puifLJu'il dépofe d'une circonfiance dont la Loi ne
l'a pas établi le Juge; dépofition toujours recufable, toujours
fujette à être contredite; dépofition fufpeae dans cette occafion, puifqu'elle efi confignée dans un aae palfé deux jour3
après qu'un autre Notaire a déclaré pour la feconde fois
celui qui l'a palfé abfolument incapable de contraaer. Inutile~ent releveroit-on l'erpece de contradiaion qu'il y a à
ajouter foi au Notaire qui dépofe fur la démence, & à la
refufer à celui qui attefie la capacité du tefiateur.
On rent que cette différence efi fondée {ur la rai{on.
Quel dt en effet l'homme airez hardi pour décider de la
{agelfe d'un autre homme, {ur-tout s'il ne prononce que
{ur les apparences fugitives d'un {eul inftant? Ceux qui ont
inr~rêt que le tefiateur paroilfe dans fon bon {ens, ne peuvent-ils pas avoir choifi un moment de calme plurôt que
de rai{on , ou celui d'une treve trompeu{e, pendant laquelle
{a fureur s'alfoupit, & lailfe régler fa condui.te {ur les in{pirations de ceux qui l'entourent?· Ces inconvéniens, ces
erreurs ne {ont pas à craindre, lor{gue le Notaire attefte
la dé mence. Chaque inHant, chaque parole, chaque geHe,
chaque aaion la trahit, & tout homme, à moins qu'il n'en
foir lui-même accu{é, en peut être Juge. La gravité majeftueufe & {ombre du moment ne permet pas de pen{er
que le tellateur ait voulu {e jouer du dépofitaire de {es derniers {entimens. L'intérêt dans cette occafion ne peut Offll{quer les lumieres de celui-ci; il eH même intéreiré à ne
pas le juger trop rigoureu{ement, pui{qu'il rend dès - iors
fon miniftere inutile. Tout concourt alors il rendre {on
témoignage irréprochable. S'il étoit pofIible que tant de
preuves lailfalfent quelque doute fur la validité du teHament
qu'on attaque; fi {on nom {eul, ce nom fi grand & fi re{peaable chez nOLIs ccmme chez les Romains, le défendait;
on ne {auroit refu{er d'admettre le demandeur en cairation
à la preuve par témoins de l'imbécillité du teftateur. La
juri{prudence des Arrêts a décidé qu'il étoit recevable, {ans
qu'il fût nécelfairf de produire un commencement de preuve
par écrit. L'Arrêt du J'i Avril 1764, rendu fur les con-
K2
•
�•
76
Jou
R N- AL
c1ullons de Mr. l'Avocat-Général de Caftillon, défend am,
Avocats de l'invoquer à l'avenir; il abroge poor jamais ceue
erreur que quelques fuccès vraifemblablement dus à des circonfiances partÎculieres avoient accrédité; ici d'ailleurs ce
commencement de preuve littérale exiHe déja.
On répondoit pour Honoré Leth, que les Loix ordonnent que la volonté du teftateur foit immuable & refpeél:ée;
que le teftament foit comme une loi domefrique qu'elles
revêtent de toute leur autorité. Sans doute ces loix fdges
n'ont pas entendu confier un pouvoir formidable à un homme
incapable d'en ufer fagement. Par des confidérations qui
tiennent à l'ordre & au bonheur public, elles ferment les
yeux fur les abus qu'il peut en faire; elles exigent au moins
qu'il ait pu fentir -la grandeur du dépôt qui lui eft confié,
& qu'une main étrangere n'en' abufe pas fous fon nom. Mais
ici quelle foule de préfomptions & de preuves s'élevent .en
faveur du teftament gu'on attaque! l'aél:e feul en eft d'abord une prefque invincible; l'homme public qui l'a re~u,
les témoins qui ont promis d'en atteHer la vérité, dépofent tous de la capacité du tefrateur. S'il dl: permis de
combattre cette atteHation fans attaquer direél:ement leur
probité, il faudroit au moins lui oppofer le fufE'age unanime
des concitoyens d'Antoine Leth. Comment faire annuller
un teHament qui, indépendamment des formalités folemnelles dOl'lt il en: revêtu, refpire lui-même la fagelTe & la
jufrice? Il ne s'agit pas d'une difpolition que les Loix reprouvent, & pour la nullité defquelles' elles fuppofent même
dans l'homme fage qui en en: l'auteur; un moment d'erreur & de folie; c'eH le frere unique du refl:ateur qui efl:
infl:itué, un frere à qui la nature donnoit des droits plus
faims encore que ceux du demandeur, & à qui la reconI)oiifance en avoit aifuré d'autres fur le cœur du teftateur.
- Ici le défendeur fait ce que le demandeur auroit dtl
faire. Il offre la preuve- publique de l'état du refl:areur; elle
efl: déja conlignée dans l'aél:e & dans les formes de l'aél:e
même fur lequel on l'attaque; tous ceux qui l'ont vi lité t
fait dans fes dernieres années, foit dans fes derniers mo:;
-
1
�nu :PALAIS Dl! Ptl.OVllNCll.
77
mens; lui rendent la même juaice. Les Loix ordonnent
qu'on préfume roujours pour la JuGice & la raifon, parce
qu'un infenfé, un furieux ea une efpeçe de mon are dans
la nature; cependant celui qui forme dans cetre occaGon
l'accufarion de démence, ,ne l'appuye d'aucune preuve, &
celui qui défend la faO'elfe du re!lareur, c'eH-à-dire fon érat
b
,
1
narurel, l'érar dans lequel, faute de preuves comraltes, es
Loix veulent qu'on préfume qu'il a véçu , offre des preuves
en fa faveur.
'
S'il d~ juGe de ne pas éOn fondre la démence & la fureur,
fi la raifon & l'expérience journaliere démonrrent que celleci n'arraque & ne faiG, ordinairement les hommes que par
accès, au lieu que l'aucre établit fourdement fur eux. un
empire auquel ils ne peuvent plus fe fouaraire, n'eH-il pas
auffi naturel de difringuer pluGeurs forres de démence? Si un
homme né avec des organes rrop foibles ou rrop imparfaits, donne de bonne heure des marques d'imbécilliré ,
fans doute on doir peu efpérer que cerre foiblelfe originelle difparoilfe ; que certe imperfeétion fe corrige, & que
cet homme jouilfe de la raifon, même par inrervalles. Mais
parce que l'ame d'un vieillard infirme & plusqu'oétogenaire aura paru fuccomber pendant quelques momens à l'affoiblilfement général de la machine, faut-il l'accufer d'imbécilliré? Dans quel momem encore a-t-on voulu conftarer cette imbécillité prérendue? Lorfque la tombe d'Antoine Leth éroit déja entrlouverre, & dans ces momens
lugubres & terribles dont la tendrelfe & la nature détournent leurs regards avec une pitié douloureufe, & que la haine
mê~e T~.rpeéte. Un Juge vi;l1t interroger ce mourant qui Ce
crOIt deJa hors de la portee des Juges humains; & fur des
réponfes que la Curprife, la rerreur, ou, fi l'on veut le
délire d'une agonie fi indignement outragée lui arrach:nt
on veut érablir l'état habitue! de ce vieillard; tandis qu'outr~
la préfomption générale qui Cuffiroir pour maintenir fon
droir, l'héritier inHitué produit lui-même des preuves. Les
Juges fpirituels & temporels d'Antoine Leth en Ont dépofé
.d'une maniere également favorable; [a parrie enriere lui
�78
.:-
Jo 11 RNA L
rend la, même jùll:ice. Jamais dans le cours d'une longue
vie, un feul momenr, une feule aél:ion n'a pu donner le
moindre fondement à l'accufation odieufe qu'on intente
contre lui quand il n'ell: plus.
Mr. l'Avocat-Général d'Eymar de Montmeyan obfet:va que
celui qui eH devenu incapable de fe gouverner lui-même,
ne peut régler l'ordre invariable & éternel de fa famille.
Comment les Loix revêtiroient-elles de leur autorité celui
que la nature a dépouillé de [Ome influence dans la fociété, & de tout droit fur lui-même? Comment celui qui
n'a plus de volonté, en exerceroit-il à fa mort l'aél:e le plus
folemnél? & pour régler l'ordre des fucceffions qui eur dû
peur-êrre être inaltérable, lui ferait-il permis de mettre fa
folie à la place de la fageffe des Loix?
Vainement a - r - on prérendu ici que le re!l-ament éroit
déja une preuve de la fageffe de fan aureur, & qu'il étoit
a.lffi juHe que naturel de fuppofer qu'une inHirution qui
fuivoit le vœu de la nature, étoit l'ouvrage d'un homme
rai(orinable. Quelle porte n'ouvrirait - on pas par-là à la
fraude & à l'impofiure! Loin que de la bonré des difpofirions d'un infenfé -on doive en conclure fa propre fageffe ,
elles ne font foupc;onner qu'un crime de plus, la fùggeflion;
& s'il eft vrai que la fuggeftion ne fe préfume pas, & qu'on
n'eH pas rec;u à une 2ccufarion pareille fur des allégations
vagues & générales, parce qu'ici les nuances font tr·op
fixes, que tout ce qui n'eft pas même délicar & juHe à en
juger par les fentimens, n'efi pas criminel & puniffable
aux yeux de la Loi, il eH Hai encore que le caraél:ere de
celui dont on attaqu~ les volontés comme érrangeres &
fuggérées, doir influer fur le jugement qu'on doir en porter.
Les Loix romaines ne condamnaient pas [Out ce qu'elles
appelloient captation & fuggeflion; ces mots n'éraient pas
toujours odieux; ils exprimoienr quelquefois jufqu'à ces
foins tendres & prévenans par leCquels un fils, en s'acquirrant du plus doux devoir de la nature, trouvoir dans le
cœur paternel la Cource de nouveaux bienfairs; la rendreffe
du pere lui renoit compte de fes empreffemens, comme
�DU
PALAIS
DE
PROVENCll.
79
s'ils n'euffent pas éré dus, & il captoit aÏnli fa bienfaifance fans ceffer d'êrre jufie, en rempliffant même les premieres & les plus inviolables Loix de la Jufiice. On donnoir encore ce nom à la conduire de quelques hom mes
adroirs qui cherchaient à s'acquérir fur le cœur peur-êrre
rrop facile de quelques riches vieillards? les. draies de
'l'amitié & de la reconnoilfance. Les LOIX fermoi nt les
yeux fur cet art trop .vo!fin cependant de la fraude & des
abus mais qui prodUIfolr quelquefoIs de bons effets; les
circo~l1:ances feules Je faifoient fouvent juger injufie, &
l'éclat de quelques fuccès rrop répérés Je rendaient à coup
sûr odieux. Elles ne puniffoient que cerre fuggefiion injufie dans fan principe, lorfqu'elle tend à pervertir l'ordre
natu el des fuccelIions, & criminelle dans fa conduire, lorfqu'elle éroir accompagnée de violence ou même d'une obfelIion trop marquée. Les faits en étant dès-lors fenfibles,
elles demaudoient qu'on les articulât; elles ne devoient
pas admettre coorre ce délit qui n'en éroit un que dans
de certaines circonfiances, une accufation générale; il
falloit que l'accufateur prouvât d'abord que ces circonfiances
l'aggravaient, pour qu'il flit admis à le dénoncer à la vengeance publique. Norre langue, ordinairement plus févere
qoe nos mœurs, a profcrit ces diHinélions, mais nos
Loix les ont confervée~. Elles exigent les mêmes conditions de ceux qui leur déferent des aéles qu'ils prétendent
fuggérés ou captés, & fi elles ont gén:.i quelquefois de ce
qu'en refierrant les accufations de cerre nature, elles ont
confervé à la fraude le prix de fes infidieufes manœuvres,
elles ne s'applaudilfent pas moins d'avoir pourvu par la fageffe de leurs difpofitions à la tranquillité publique.
En effet, fi elles euffent renu une autre conduite, il auroit fallu difiinguer, d'après des apparences toujours trompeufes , . la fimple amitié, de l'hypocrifie diiiimulée & de
l~ frau~e artificieufe; il eut fallu marquer ou calculer, pour
al11fi dIre,
la force & la foibleffe des différens caraéleres.
,
.
enoncer ce qUI touche fimplement les uns, ce qui féduit
les autres, ce qui captive, ce qui maÎtrife les ames abfo~
,
�Jau RNA t
lu ment faibles & dépendantes. Malheur aux Loix qui éta';;
bli1fent des diftinél:iolls métaphyfiques; malheur aux citoyens
-dont l'innocence & la sCIreté ne dépendroient que du plus
ou du moins de fubtilité des Jilges. Il faut donc pourfuivre dans les accufations de fuggeHion, ou la violence qui
dédaigne de demander, ou la fraude audacieufe & découverte qui dérobe plutôt qu'elle n'obtient. Il faut ou que
celui qui a difpofé n'ait pas été libre, ou qu'il ait été forcé
de racheter fa liberté au prix même de fes difpofitions;
& dès qu'on éleve une aél:ion fi grave, route forte de
preuve, celle même par témoins doit être admife, parce
qu'il eft de l'intérêt, comme de l'ordre public, que ces
délits foient connus & punis. Dans route autre occafion,
la Loi qui juge feulement des aél:ions des hommes, & qui
ne peut connoître fi les fentimens & les motifs qui les
ont produites, les rendent criminelles, rejette toute pourluite. Tout efprit raifonnable doit fentir la juftice & la
fage1fe de ces regles; mais les circonHances peuvent en
changer l'application : ainfi dès que le caraél:ere de celui
qu'on accufe d'avoir éré féduit, eft connu, dès que fon
degré de foible1fe eH établi, & qu'il n'y a plus lieu par
conféquent à des diHinél:ions & à des eHimations arbitraires, le d~nger d'une acculàtion générale difparoît, ou
plutôt l'accufation eft par-là même .déterminée. Loin donc
que la fageffe du teftament d'un homme qu'on taxe de
démence, foir une raifon de juger favorablement de fon
état, j'On croiroit au conrraire qu'en arguant de fuggell:ion
le te!lament d'un homme infenfé, parce que fa difpofition eH raifonnable , le fait propofé de fuggefiion feroie
légitime.& concluant, & qu'on fuivroit autant, en agiffanc
aiufi, l'ordre judiciaire que la n~[Ure même des chofes &
les idées que nous en avons communément. Tel ell: le
fenriment de Barthole fur la Loi l, ff. fi 'luis ntg. §.
'luemadmod. reflan:. aper., d'Amie, conf. 127, n. 28, &
de Rubeus, ch. 17' n. 470.
On doit s'étendre moins fur cette préfomption , que quelques Auteurs ont pourtant admife en faveur du tell:amene
80
d'u~
�D U
PAL AIS
D E
PRO VEN C H.
8 r'
d'un homme infenfé. La faveur de l'inO:itucion, difent-ils ,
doit s'étendre fur J'atte même qui la porte, & l'on doit
préfumer que la raifon eO: la compagne ordinaire de la Juftice. Un Jugemem célebre a fetvi fans doute de fondement
à cette opinion. La queO:ion fut porcée devam les Centumvirs avec tout l'éclat & l'appareil qui environnoit d'ordinaire ce Tribunal, que les Empereurs avoiem laiffé aux
Romains comme une ombre de leur liberté, & en même
temps comme un fpettacle; elle y fut décidée en faveur du
tell:ament. Mais l'on fait que ce Tribunal fut plus célebre
par le concours des jeunes Orateurs qui y venoient déployer
leurs talens, que par celui des fages Juri[confultes qui y
portoiem leurs lumieres, par la hardieffe de fes décifiolls
que par leur fageffe, & ce Jugemem fi fouvent cité fut
peut-être un reHe de cette liberté plus que républicaine en
vertu de laquelle les premiers Juges du peuple Romain
croyoient pouvoir fe laiffer conduire fans crime aux impreffions impérieufes de l'éloquence. Les motifs même que
J'hill:oire donne ~ ce Jugement, annoncem l'erreur des Juges;
ils conIiderem plus la difpoIition que la perfonne, & cependant c'écoit fur la capacité du teftateur, & non fur Eéquité dn teO:amenr, qu'ils avoient à prononcer. Après des
conIidérations auffi effentielles, il eft prefque inutile d'obferver qu'il s'agiffoit dans les circonfiances de l'infiieuhion
q'un fils, unique qui, par la caffation du teftamem, n'en àemeuroit pas moins héritier.
_ La nullité des attes d'un infenfé eO: donc auffi univerlèlle qu'incontell:able; dans aucun cas, elle ne peut être couverte. L'erreur de ceux qui ont foutenu' l'opinion contraire
eO: venue de ce qu'ils n'ont raifonné que d'après le fecond
principe, au lieu de partir du premier. Il ne s'agit pas de
[avoir fi la jufiice de quelques difpoIitions a pu fuppléer à
leur illégalité, dès qu'il eH prouvé que le teftateur n'a pas
pu même avoir une volonté; c'efi, au nom de quelque héritier favorable, fuppofer un tefbmem à un homme mort
ah inteflat.
L'état de démence peut-il être prouvé par témoins? Dans
Années 1775 & 177 6•
L
�lh
JOURNAL
quelles circonf1:ances & à quelles conditions cette preuve
eH-elle admiffible? La quefl:ion de démence efl: une queftion d'état; & il fe,uble que l'on pourrait dire qu'elle les
embraffe route~, puifque la démence éteint ,- anéantit touS
les drQits de ceux donc elle s'empare, & qu?un infcnfé ceffe
par le fait d'être pere, fils, époux, ciroyen, puifqu'il celfe
même d'être homme. Cerre définition mal appliquée a produit des erreurs. On ne peut faire dépendre de la preuve
vocale & de la confcience de quelques témoins, l'état des
citoyens; la fagelfe prévoyante des Loix l'a juHement défendu; on en a conclu qu'il fallait auffi rejecter cerre e[pece
de preuve dans les accufations de démence.L'on aurait raifonné différemment, fi l'on eût difl:ingué
-dans l'homme deux fortes d'état: celui qui affilre la nature de
[on être; celui que lui ont donné les Loix de la fociéré au mi·
lieu de laquelle il vit. Ce dernier prend auffi le plus Couvent [a
[ource dans la nature; mais les Loix civiles l'onr perfectionné; elles lui ont ,\ffigné fes caraél:eres diHinS:ifs. Ainfi
l'on éroit pere, & l'on en avait les droics avant que les
-Loix particulieres eulfel)t déterminé à quels fignel' on reconnolcroit les mariages légitimes qui donnent [euls aujour-'
d'hui la puiffance paternelle. Elles ont configné dans de?'
manu mens publics nos engage mens & nos titres; èlles Ce,
chargent, elles répondent e.lles-mêmes de notre tranquillité.
Ainfi taUles les fois que l'on attaque l'état d'un ciroyen,
ce [ont, pour ainfi dire, les Loix elles-mêmes qu'on actaque; elles le défendent par les précautions qu'elles avaient
prifes d'avance pour lui; mais comme elles font impartiales ,_
elles ne repouifent pas l'accufateur, s'il [e préfence avec les
preuves publiques qu'elles exigent. Ainfi, comme avec le
p<lrticulier qu'on accufe, on attaque' l'ordre public dans les
difpofitions duquel il efl: encré, comme ces difpofitions font
confignées dans des regifl:res & dans des aél:es authentiques, il faut que l'accufateur produife des preuves pan;'illes à celles que la [aciété entiere offre en faveur de
l'accuré.
Toutes les fois qu'on veut privér un citoyen d'un draie
�DU
PALAIS
DE
83
PROVENCE.
dans lequel la fociété s'efl: engagée à le maintenir., quoique le contrat originaire de cet engagement récIproque
n'exille plus, cependant comme pluGeurs aétes pubhcs en
dépofent, il fam auffi produire contre lui des preuves écrites.
Mais quand il s'agit des faculcés qu'il a reçu de la nature, &
dont elle peut le priver, fans qu'il puiife même s'en plaindre,
de ce qu'il conHitue l'eifence. ou. la pe.rfeétl~n de fon ê:re;
comme il n'y a ni obligat!on ni tltr~, Il,rerOlt. Couvent lmpoffible de produire un titre contraIre; 1exerCice feul conftirue fa poifeffion; ce n'eH donc que fur l'exercice, que
fur la poifeffion, qu'on efl obligé de l'attaquer. On préfume
qu'un homme étoit raifonnable, parce que c'efl: l'ordre ordinaire de la nature. J)/:s qu'on produit contre lui des
aétes de folie, on le préfume infenfé, parce que dans tout
ce qui ·ne dépend pas des Loix, le fait porte fa preuve
avec lui-même, 'pourvu qu'il foit conllaté. Quelles autres
preuves que celles des faits, peur-on exiger pour établir la
démence? La preuve par écrit? Ou elle n'exille pas, ou ~
elle eH: aifément fupprimée par l'héritier intéreifé à la cacher.
_
La comparaifon que l'on fait de l'infenfé avec Je prodigue interdit, pour exiger la preuve écrite, ell inexaéte;
celui-ci eH capable phyGquement d'exer'cer tous les droits
dont fon indignité le fait dépouiller; & comme c'ell aux
Loix feules à décider du fon des citOyens, jufqu'à ce qu'elles
aient prononcé que la conduite d'un diffipateur mérite qu'on
l'affimile à l'homme infenfé qui ne peut fe gouverner luimême, il n'eU pas encore devenu incapable; c'eU par le
droit qu'il contraéte fon incapacité, plutôt que par le fait:
id.quad ante fecù ',.lJuam. ei. interdiBfo fiat, ratum eJl; au lieu
que la Sentence cl IIltercllétlOn porree contre un infenfé n'efl:
qu'une efpece de confirmation d'interdiétion réelle dans laquelle la nature l'a déja mis. C'eH par le fait qu'il elt devenu incapable, & cette incapacité date non pas du jour
où un jugement public l'a déclaré infenfé, mais de celui
où. les fa its ,ont établi fa fo!ie. Do~c toutes les preuves
qUI fervent a co~llater les faits. de folie, doivent être ad-
Lz.
�84
\
Jou
RNA L
mifes pour 'Ia prouver. La Loi elle-même a indiqué la diftinél:ion que l'on vient d'établir, en prononçant que le teframent d'un homme fain d'efprit ne feroit pas annullé par
la fureur fubféquente, quoique tout changement d'état du
refl:ateur ait ordinairement cet effet.
Il efl: donc certain qu'on peut demander à prouver par
témoins un état qui ne fe manifefl:e ordinairement que par
des paroles & par des aél:ions; la démence efl: un délie innocent, comme l'appelle l'illulhe d'Agueffeau, contre lequel
on fuit l'ordre ordinaire des procédures & des informations
judiciaires. Que de crimes échapperaient à l'animadvedion
des Loix, fi l'on exigeoit, pour autorifer leur pourfuite, un
commencement de preuve littérale! Il en efl: de même de
ce délit, qui n'efl: pas à la vérité celui de l'homme, mais celui
de la naeure. Que d'impofl:ures, que de fraudes on aucoriferoit, fi l'on pouvoit abufer de la docilité & de l'obfcurieé d'une démence tranquille pour en obtenir toute forre
d'aétes! L'intérêr attentif de ceux qui les diél:eroient, les
mettroit toujours à l'abri de touce cenfure; & po"ur avoir'
un commencement de preuve, il faudroit attendre qu'une
Sentence d'interdiél:ion la commençât & la confommât à
la fois; mais qu'il efl: rare que la JuHice foit dans le cas
d'en prononcer! Dans les familles confidérables on cache
ordinairement avec foin, ou du-moins on ne laiffe éclater
que bien tard cette efpece de maladie, à laquelle l'envie &
la malignité attribuent une contagion odieufe. Dans la c1affe
des citoyens obfcurs, toutes les fois que les accès de la
fureur ne troublent pas l'ordre & n'intéreffent pas la fûreté
publique, la ll:upidité, l'imbécillité paiGble d'un homme abfcur échappe à l'attention & aux précautions des Loix. Des
parens artentifs & intéreffés n'ont pas de peine à la cacher
aux yeux de ceux qui .n'ont au deffus d'elle que l'avantage infenfible d'une raifon groffiere.
Après avoir établi que la preuve vocale n'en: pas recufable, Mr. l'Avocat-Général s'attacha à déterm"iner dans quels
cas & dans qûelles circonfl:ances elle doit être accueillie••
Ici ( concinua-t-il ) les Loix ont été interprétées fucceffi~
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
8)
vement d'une maniere' différeRte, & le fentimenr des Auteurs eO: partagé j la Jurifprudence même des Arrêts a
varié; tantôt on a jugé qu'il ne fuffifoit pas d'accufer en
général un refiateur de démence, ni même avant & après
le teO:ament, qu'il falloit que la p~eu~e porr~t fur I~ tem~s
même de l'aél:e, autrement on fUIVOlt la prefomptlOn genérale & l'on croyoit que l'auteur d'une difpoLi.tion raifonnable jouilfoit réellement à cette époque de la raifon: tantôt on a prononcé, d'après les Loix elles-mêmes, qu'une fois
que l'état antérieur de démence du teHateur était établi,
une autre préfamp<ion aufli générale prenait la place. de
la premiere, & que c'était à l'héritier inftitué à prouver que
le tefiament qu'il défendait était l'ouvrage d'un moment
lucide.
Dans l'état ordinaire, on ne préfumoit jamais la démence,
on ne prefumait jamais la raifan. Les uns voulaient qu'on
coartât des faits, d'autres fe contentaient d'une accufation
générale.
Il n'efi pas befoin de retracer cette di!l:inél:ion célebre,
indiquée par la Loi même, entre la démence & la fureur,
entre ce mal tranquille & obfcur qui mine, qui travaille
'fourdement, mais qui travaille fans ceIfe , qui cache fes progrès, mais qui ne perd pas un feul inO:~nt, qui embarralfe,
pour ainLi. dire, le malade d'une multirude de liens dont il
ne fent pas même le poids; & ces accès violents qui ébranlent, qui tranfportent, mais qui bientôt fe détruifent euxmêmes, dont l'arriyée eH effrayante & impétueufe, mais
apr~s. lefquels !~ calme qui leur fuccede n'eO: que plus aifé
à dIfbn~uer, qU.1 Jettent,enfin fur le malheureux qu'ils attaquent,
une chame ternble, brulante, dans laquelle il rougit fans celfe
mais qui le lailfent en liberté, s'il pellt la brifer. La fureu;
fuppofe néceffairement des intervalles; il efi prefque de la
nature de la démence d'être continue j l'une dl: un trouble
fubit, un dérangement d'organes caufé par quelque accident ;
l'autre efi l'effet des progrès lents, mais irréparables d'un
affaiffement général ou d'une faibleffe habituelle.
Si l'on attaquait le teftamenc d'un furieux, il faudroit
�86'
Jou RNA i:.
obferver peut-être ,. fi les a&es qu'on lui reproche, font voi~ns. de l'épo~ue à .'a.~uelle l'aéle a été confom.iné; 9uelle
etolt la dtlFee- ordlOalre de ces aéles &;, celle des II1tervalles qui leur fuocédoient; & ce feroir d'après .ces oh(ervalions ,-qu'ou dérermineroit fi ce feroir 11: l'héritier te framentairè à ptouver la f~geffe du teHateur qui l'a infiitué,
ou à l'héririer légitime à établir qu'au momenr qu'il a fait
les difpofitions qui le ç1épouillenr, il en élOit incap~ble. L'accufarion de fureur eft en effet plus préciCe, plus momentanée, s'il eft permis de parler ainl1; renfermée dans une
carriere plus bornée, elle doit la parcourir entiérement.
Maisl'accufatibn de démence eft générale; elle s'érend à tous
les momens de la vie; une fois érablie dans fon p.rincipe, on
n'ell: pas obli&é d'en parcourir, d'en prouver r<:lUS les détails, & l'hériru!r eft d'~u.[dnr plus obligé de prouver l'exiCtence d'un intervalle lucide, qu'on le fuppofe plus difficilement; il n'eft pas même toujours nécefiàire que la preuve
de la démence s'érende jufqu'au temps antérieur à l'aéle
dont on attaque la validité. Si elle étoit une fois bien érahlie dans un remps voil1n, quoique poHérieur, elle auroit
par f~ narure un effer rélroaélif; c'ell: ce que la réflexion
feule f~ir femir ,'Iorfqu'on conl1dere la marche lenle & progreffive de ce mal dOn! le principe ell: ordinairement inlerne
& caché, & qui commence par altérer & obfcurcir la raifon avant dé la dérruire lout-a-fair. C'eil: une prélomption
qui ne remplir pas la preuve, mais qui fuffit pour la faire
admettre ;'& dans l'efpece de la êauCe jugée par l'Arrêt du
l S Avril 17.64, elle formoit un des pr-incipaux moyens; la
démence de Ma ~ie Pouffin, reHatrice, n'élOit prouvée qu'à
une époque poil:érieure de dix jours au reil:amenr.
Suffira-t-il cependant d'accu fer un homme d'êrre infenfé,
& dès-lOIS la preuve par témoins fera-t-elle admife? Ou
bien, fuivant une opinion plus rigoureufe encore, dès qu'on
citera d~s aéles qui expriment la vérité v~aie ou fuppofée,
& qui portent la l1gnature du reil:ateur, fera-r-il défendu de
fufpeéler & ·d'attaquer fon érat, & fera-t-on à ce cas par~
tjculier l'àpplicarion de la maxime générale, qui dit que
�DU
PAL.A.tS
Di!
PROVE~CR..
gr
,.
, . 1a preuve voca 1e- nfll
contre un cemOlgnage
eCrlr,
en nl'as recevabl ? C'eH entre ces deux exrrêmités fi dang, rrufes, que
le plus fage des Orateurs, le plus circonfpeél: d s i\1a.:;iHrats
•
nous a tracé la roure que l'on doir Cuivre.
Les circonllances parriculieres & les préComptions qu'on
peur en cirer, dOIvent nous éclaire~ & n~us condui~e. Les
Loix, qui ont {emi rout Je. danger .d u?e dec,.Gon ~éneral &
rigoureufe dans des. quell:Ions arbItral.res qUI {e Jugenr enciéremem par les faIts, {e {om repo{ees {ur la prudence des·
Juges, du foin d'appliquer aux différens· éas. ~e: principes
différens. C'ett ce que nous arrelte la conrrarlete apparente
des Arrêts, qui tantôt onr admis, & ralllôr Oli t refufé la
preuve par rémoins; COlllrariéré qui n'eft que {ageffe, li l'on
examine les morifs qui l'onr pro~uire, & qui dépo{e également & de la confiance de' la Loi, & de l'équiré de {es
Miniltres. Elle prouveroir feule la timifeté de l'opinIon dé
ceux qui {outiennenr que la preuve par témoins n'dt pas
admiffible; elle {emble n'être pas contraire à ceux qui pen~
Cent qu'il faut coaner des fairs; c'ell: par une efpece d'équivoque, c'ell: par une applicarion mal enrendue d'une maxime
générale, qu'on ell: rombé dans cerre erreur.
Dans les accufations ordinaires, & 10r{EJu'il s'agit d'un
délit parricul'ier, on fixe, pour ainli dire, à l'accu(ateur &
aux témoins les armes avec !e{quelles ils doivent combattre.
On di; 'à ceux-ci: c'eJl par-la Cllfe vous .attaClr;erei, afin de
pouvoir dire a i'accufè: c'eJl par-la Clue vous âvei â vous défendre; la matiere ell: circon{crire aux témoins par les fairs'
de l'accufatÎon, à l'accurateur par les' chefs de fa déoonciation
elle-même: mais la démence n'dt pas un délit parriculier;
c'elt un délit général; ce n'elt pas le délit d'un inltant,
c'elt celui de tous les ma mens ; il u'elt pas prouvé par un
feul fait, 'mais par l'en{emble de tous les faits. Er comment
po~rroir-on en coar~er de particuliers, {éparer, i{oler une
a'étJOn dé:a'c~~e ? Quelque in{en{ée qu'on la {up'polè, elle peut
être par~le il un homme {age; ce {ont les cll'tonftartces &
les morifs qui la décident. Si on ne la connoîr pas' on la
taxera peul-êrre injultement de folie.
'
/
/
�ilS
Jou RNA L
. On ne fera plus expofé à fe trompér, lorfqu'on pefera
les faits avec les circonfl:ances. qu'on les rapprochera les
uns des autres, qu'on difcurera les motifs qui les ont pu
produire, & le jugement qu'en ont porté ceux qui en ont été
témoins. Ici ce qu'on appelleroit improprement une inHigation gçnérale, ne peut être ni dangereux ni criminel, parce que
dans cet ce accufation, on ne pourfuit qu'un feul délit fur
lequel on ne peur prononcer avec confiance que fur l'en-,
femble du temps' qu'il a embra!fé & des faits qu'il a produits, Telle ell: la Jurifprudence du Parlement de Touloufe,
ai nu que l'attefl:ent pluGeurs Arrêts cités par Catelan & parj
Vedel; telle efl: auffi la Jucifprudence de ce Parlement, fuivant les Arrêts rapportés par Boniface & par Decorrriis ,
[om. 2, col. 24.
Monueur l'Avocat-Général examina enfu·ite fi l'on devoit recevoir <la preuve par témoins de la démence d'An[Oine Leth. Vhéritier que ce tef!:ament favorife ( obferva-t-il )
avoit reçu de la nature des droits fur les biens qu'il a ,recueillis; ceux que le tef!:ament dépouille avaient du-moins
celui de les partager: tels font les motifs de faveur que
l'on a fait valoi~. Il Cemble d'abord que cetFe caufe doit
être décidée par le fell! fait. L'imbécillité d'Antoine Leth
ef!: réelle ou fuppofée; dans l'un ou l'autre cas, la nullité
ou la validité du tef!:ament s'enfuit par une conféquence
néce!faire.
L'aéle le plus légal & le plus folemnel fe défend luimême, mais ne peut défendre la capacité de fon aureur;
les Loix & la Jurifprude,nce. des Arrêts l'ont jug~ ainf1; il'
fam s'infcrire en faux con_cre le Notaire, lorfbu'on at.taque
l'aéle même; mais s'il s'agit de la capacité de fon auteur
qu'il a peut-être trop légérement attef!:ée, il fuffit de lui
dire qu'il s'eH trompé. & d'offrir la preuve de fon erreur"
parce .que là il a été miniil:re lOujours préfumé in'faillib,1
de la Loi; ici il eil: l'homme privé [Oujours fujet à fe trom-.
pero La Doélrine des Auteurs eil: uniforme fur ce point.
IJ cil: inutile d'ajouter que pour exciper de la faveur que
méritent la fage1Te & la juf!:ice des dernieres volontés du.
teil:areur '-
�DU
PALAIS
DI!
89
PROVENCE.
tel1:ateur, il faut d'abord que la faculté de vouloir & de di[po[er lui [oit inconcefrablemenc affurée, parce que, [uivant
le langage des interpretes de la Loi, là où il n'exifre poin,t
de voloncé, il n'exil1:e rien, & dans ce cas toutes les di[pofiti,ons deviennent indifférences; l'aél:e qui donne eH auffi
nul que celui qui dépouille, pui[que le tefrateur incapable
d'aimer ou de hair, d'ordonner ou de défendre, n'efr ni
juge ni bienfaiteur. Il faut [eulement examiner l'état réel
d'Antoine Leth lors de la derniere époque de [a vie.
Les [crupules de Me. Rebuffat & des témoins qui l'accompagnoient, prouvent la démence réelle & exifrante du
teftAteur pendant les deux jours qui onL précédé immédiatemenc le teitament reçu; l'atteRation [olemnelle qu'il a
confignée au bas de ces deux aél:es imparfaits, & dans Je
lieu même oÙ il devoit porter un témoignage bien différenr,
la prouve d'une maniere inconteftable; l'accédit du Juge chez
Ancoine Leth & les réponfes qu'il lui a fait prêter, dénuées
de cet appui, pécheroient peut-être par quelque irrégularité;
mais elles empruntent 'une nouvelle force de ces premieres
preuves, & peuvenc leur fervir de continuation; s'il falloit
cependant juger au fonds dans l'état actuel de la caufe, l'on
balanceroit peut-être encore, & l'on ne croiroit pas avoir
dégagé la vérité de tous ces nuages à travers le[que!s l'on
ne fait encore que l'entrevoir. En prononçant [ur les certificats des témoins, qui n'ont encore aucun droit à la con" fiance de la Juftice, on pourrait prononcer [ur des probabilités, plutôt que fur des certitudes. C'eH: Fatte1l:ation d'un
homme public; c'eft le jugement qu'il a porté de l'état de
démence d'Antoine Leth, état frappant par lui-même; c'efi:
ce témoignage vêt jtablemellt importanc & qu'il a coniigné
dans [es regiftres, dépofitaires amhentiques de ia vérité, qui
fait une vive impreffion. On oppofe le témoignage contraire
d'un autre Notaire; mais l'on rent que l'un ayant déporé [ur
des apparences moins trompeufes & plus décifives que
l'autre, mérite plus de confiance. L'on doit cependant au
caraél:ere de tous les deux, de faire ceffer le doute dans
lequel ils ont plongé le Magiftrat; ce [ont ces doutes, ce
ArUlées l775 & l776.
1\1
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Jou
RNA L
font ces irréfolutions. elles-mêmes qui doivent amener la dé-.
cifion.
La Loi & la raifon décident également qu'il n'efl: pas né·
ceif.1ire que les. préfomptions qUé l'accufaœur en démence
fait valoir, foient décifives, autrement fa demande elle-même
feroit fuperflue; & fans qu'il filt befoin d'attendre les effets
de la preuve, la quell:ion fercit dès-lors jugée; il /ùlfit q~e
les préfomptions qu'il propofe puilfenc balancer celles du
défendeur; ql.e les raifons alléguées de part & d'autre laif·
fent le Juge dans le doute; & dès-lors le befoin qu'il a de
nouvelles preuves, pour entraîner fa déterminati-)I1, fuflit
feule pour faire admettre la preuve par témoins_ Ce font
ces maximes fi fages que l'illull:re d'Agueifeau invoque; c'eO::
à leur fagelfe qu'il dut enfin la jull:ice & le fuccès de fa
déci fion dans la ca jfe la plus éclatante & la plus étendue.
Ici ce doute, cet équilibre embarralfant de rairons exill:e j
les maximes qui furent le motif de l'Arrêt célebre du Parlement de Paris y doivent donc être appliquées..
Mr. l'Avocat-Général conclut à ce qu'avant dire droit à
l'exploit. libellé d'Honoré Pelas, fJns préjudice du droit
des Parties .& des preuves réfultantes du procès, il fût
reçu à vérifier dans le mois, par toute forte & maniere de
preuves, qu'Antoine Leth étoit imbécille avant, lors &
après le tell:ament, & partie au contraire, fi bon lui fembloit, dans femblable délai.
Par Arrêt du 30 Mars 177'), prononcé par Mr. le Préfident de Saint-Vincent, à l'Audience du Rôle, les conclufions furent fuivies, dépens réfervés. Plaidant Mes. GalIier
& Mougins-Roquefort.
•
�D t1
PAL AIS
DB
PRO
VEN C B.
9l
ARR Ê T. VII.
L'éducation d'une fille pupille doit-elle Ùre laifPe d la mere,
malgré la réclamation du tuteur qui demande que fa pupille
foit mife dans un Couvent?
E I3 Janvier 1773, Louis-François Martinenc de la viJIe
de Marfeille, mourut ah inteJlat, laiifant deux filles, dont
l'une âgée de huit ans. On lui nomma pour tuteur Jofeph
Sauvan, Chapelier de 'Marfeille,.qui fit régler par un rapport judiciaire les frais de fan entretien & nourriture, à 120
liv. pour la premiere année, & à 220 liv. pour les trois fuivantes. Elle fut auprès de fa mere, qui était Marchande Epiciere
à Avignon. Le 23 Mars IÎ74 Sauvan préfenra une requête au
Lieutenant de MarfeiJIe; il expofa que. la pupille ne pouvait
recevoir une éducation convenable dans la maifon de fa
mere, qui érait une femme fans bien, & qui vivait fans doute
en partie de la penlion de fa fille, & demanda qu'il lui fût
permis de la meure dans un Couvent de la ville d'Aubagne. Le Lieutenant rendit une Ordonnance conforme à fes
fins. Sufanne Roux en appella; eJIe réclama l'affeétion & les
droits d'une mere; le tuteur fit valoir l'il1tétêt de la fille.
Me. Bermond, Subfiirut, obferva que la mere a un droit
certain fur l'éducation de fes en fans , & fur-tout fur ceux de
fan fexe; ce droit ne lui eft j::mais contefié, pourvu qu'il
ne prenne pas fur l'intérêt des pupilles, qui l'emporte toujours fur toute 2LHre confidération. Les vues du rureur paroiffent honnêtes 1'>:. pures, on ne peur le diffimuler; mais
Sufanne Roux ne paraît point avoir perdu fes droits, & il
eH. juGe de, l'y maint nir, fi l'intérêt de fa fille ne s'y 01'pole pas.
Il .eH certain que la fille ne gagne pas tant, à l'égard
de l'epargne de fes, revenus, que du côté de l'éducation .
'
. d'
,
,
ce Il e qu on reçoit une mere' telldre & vertueufe, prévaut
L
Ml.
�9:1.
•
Jou
R. N A L
toujours à toutes les autres; & fi les attentions de ceux qui
font chargés d'y veiller, dépendent de l',lifeétion & de l'intérêt qu'ils prennent à nous, quelle éducation plus précieufe & plus à rechercher que celle des parens! Il ajouca
que cette fille avait déja étudié dans diverfes écoles; que
cela réfultoit des certificats & quittances des maÎtres. L'intérêt de là fille étant rempli, la mere ell fans contredit
dans le droit de prétendre à fan éducation, & cerce charge,
qui lui ell donnée par la nature, n'dt retirée par les Loix
que par des raifons graves & déterminantes.
Sufanne Roux, il ell vrai, avoit quitté fa fa mille pour
aller s'établir à Avignon, oÙ elle prit une boutique d'épicerie; mais cette féparation pouvoit avoir été convenue &
. arrêtée pOlir l'inrérêt commun. Son état de mifere~& de
pauvreté qu'on lui objeéte n'eH pas un moyen capable de
lui faire perclre l'éducation de h'l fille. Comment gagner fur
lIne penGon de 2.20 liv. qui doit fervir à la nourriture, à
l'entretien & à l'éducation d'une fille de dix ans? Dans
. cette fuppoGtion même, de quel droit le tuteur viendroit-il
s'y oppofer, dès qu'il ell prouvé d'ailleurs que rien ne manque à l'éducation de la pupille?
Me. Bremond conclut à ce que fans s'arrêter à la requête de Sauvan, la veuve Martinenc fût mife hors de Cour
& de procès.
Par Arrêt du 7 Avril 1775, prononcé par M. le Premier PréGdenc, les conclulions furent fuivies, & le tmeur
condamné aux dépens en propre. Plaidant Mes. Roubaud
& Mougins-Roquefore.
ARR Ê T· VII l.
La quarte tréhellianique doit être prohibée en termes exprès.
leur Balthafard-Jacques-Roch Perraud, par fon tell:ament du 1 Décembre 1755, inllitua fon héritier Jac-
S
�DU
PALAIS
Dl!
PROVENCl!:
93
ques-Balthafar"d Perraud fan fils unique, avec cette claufe
qu'en cas que [on fils héritier & tous [es fils pojlhumes
vinffint a mourir en pupillarité, ou en q~elque temps que c~
fût, fans laiffèr des enfans , & avant qu lis euffint accomph
leur vù/<1t-cÎnquieme année, il injlituoit & jùbjlituoit il 1:J tot.llité de !es biens, fans qu'il pût y être fait aucune détrac7ion,
Dame Dorothée de Perraud fa [œur, épouft de Me. Ra[paud Avocat en la Cour, demeurant a Ceirefle. JJcquesBalrh~fard Perraud mourut en puberté & avant l'âge de
vingt-cinq ans; de forte que la fubHitution n'était pas pupillaire, mais fidéicommiifaire. La Dame de Gaillard fa.
mere & fan héritiere demanda la quarte trébellianique
qui compétait à cet enfant, & fa "légitime. Le Lieutenant d'Aix par fa Sentence adjugea le taUt. Appel de la
part de Me. Rafpaud.
On difoit pour lui, que la quarte était prohibée par le
tefrateur en termes exprès , puifqu'il prohibait tau te détraél:ion ; qu'ou prohibait expreifémem quod verbis generalibus exprimitur ; que le Statut de la Province décidait que
la quarte était prohibée expreifément, lorfque le te!!ateur
voulait que fan hérédité fût refrituée fans .aucune détraction.
Me. Rafpaud invoquait la réponfe de Mr. l~ Chancelier
d'Agueifeau aux remontrances du Parlement de Prol'ence
tur l'article 60 de l'Ordonnance des teftamens. Mr. le
Chancelier ( difoit-il) déclare au Parlement que l'article Go
de l'Ordonnance, en voulant que la prohibition [oit faite en
termes exprès, efl conforme au Statut de la Province, qui
avoit exigé la prohibition expreffi, & qui n'avoit fait qu'autoriftr
/lne des manieres de l'exprimer.
On répondait pour la Dame de Gaillard, qu'il ell: certain que la difpofition du Statut ne s'étend poim aux fidéicommis dom les enfans étaient chargés par leur pere ou l
par leur mere. L'on tenait pour maxime avant J'Ordon~ance de" 173S , que la quarte trébellianique ne pouvait
etre probl~ee aux enfans par une prohibition expreife,
encore moms par une prohibition tacite & fous _ entendue.
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94
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Nous fuivons le droit canonique dans le chap. Raynutills t 6,
& le chap. Raynaldus t 8 extra de teflamentis, fuivant lef~
quels l'enfant chargé de, fidéicommis a dro'Ï't de prélever
en même temps la légitime & la quarre trébellianique; &
cette Jurifprudence a été confirmée par l'art. 56 de l'Ordonnance de 1735 , portant que ceux, qui ont droit de légitime & qui auront été infiirués héritiers, pourront faire
la dérraél:ion de la quarte rrébellianique fur les fidéicommis,
& rerenir en outre la légitime.
Comme par la Loi Jubemlls t6, cod. ad S. C. Tre'bellianllm, l'enfant infiitué héririer a droit de rerenir la
quarte trébellianique, nonobfiant la prohibition du pere ou
de la mere, & quand même le teHateur ou la reltatrice
auroit ordonné que les fruits feroient imputés à la quarte
trébellianique , il érait érabli par im urage conftant qui
avoit force de Loi" que les entàns infl:itllés héritiers par
leur pere ou par leur mere , avec' charge de fidéicommis,
avoient droit de retenir & la légitime, & la quarte trébellianique, nonobftant la prohibition du teitateur ou de
la tefiatrice. Les Arrêts font rapportés par Mr. de SaintJean, décif. 83 , & par Mourgues fur no~re Statut, pag.
147 & fuiv. Aillfi le Statllt efi vainement allégué par l'appellant; fa difpofition n'a jamais été étendue aux enfans
du refl:areur inllirués fes héritiers & chargés de fidéicommis.
L'appel efl également mal fondé, fuivant l'Ordonnance
de 1735" 11 eH vrai que l'art. 60 de cerre Ordonnance a
dérogé à la maxime établie en Provence, qui donnoit aux
enfans la quarre' rréb~lli3nique conjointement avec la légitime, nOrJobftànt route prohibition du teftareur. Cet ,article permet aux reitareurs de défendre par leur refl:ament
ou par un codicille poitérieur, de retenir les quarres falcidie &'trébellianique conjointement aveé la légitime; mais
le n,ême article ordonne que' l'on n'aura point d'égard à
la prohibition, fi elle n'efi faite en termes exprès. Toute
aurre proh, ilion elt fans effet.
11 f ut donc, f our priver les enfans de la, quarre rré11 Bîanique, que la prohibition en ait été faite nommément
•
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PALAIS
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PROVENCE.
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en termes formels, & c'efi ce qu'on ne voit pas èans le
tefl:ament dont s'agit; on n'y trouve que l'expr filon vague
<Jue le refl:ateur fubfl:itue à la totalité d~ r. s biens far,s
aucune détraélion, & c'elt précifément ce que l'Ordonnance n'a pas entendu; c'efl: la prohibition qu'Ile a déclarée infuflifanre, qu'elle a rejettée. Quelle eH la prohi.bit ion qui n'ell: pas faite en termes exprès, & que l'Ordonnance refufe d'admettre, en établi1fant cQntre le droit
qui éroit obfervé eu Provence, qu'on pui1fe prohiber la rrébellianique aux enfans du premier degré? C'eH celle qui
réfulte d'une difpofition générale, qu'on rendra route l'hérédité, qu'on la rendra fans aucune détraéllon. Cette Ordonnance fe garde bien d'admettre la prohibition tacite que
le Statut vouloit introduire; au contraire, elle la rejette formellement, lorfqu'elle ordonne qu10n n'aura aucun égard à.
la prohibition, fi elle n'efl: faite en termes exprès.
M. le Chancelier dans fa réponfe aux rel1)ontrances du
Parlement de Provence fur l'Ordonnance de 173), que Me.
Rafpaud oppofe, s'exprime de la forte: En effet, /lne défenJe précifl eJlle fèul moyen de prévenir toute conteflation à
ce fujte; & d'ailleurs on ne doit pas craindre que de pareilles"
quejlions puijJi:nt {e pré{ellter à l'avenir, parce .que les teJlateurs avertis par une Loi pub/ique, lie manqueront pas d'èxpliquer leur volonté dans les termes les plus expres. L'Auteur de l'explication de l'Ordonnance de 173 'Î s'en explique bien expre1fément; Il faut, dit-il, pour empêcher ceux
qui ont droit de légitime, de faire cette détraélion, que la
prohihition fait f:zite de la part des teJlateurs en termes exprès
& formels, & nOll par des termes équipollens. Tous les AuteurS qui ont écrit après l'Ordonnance, tiennent le même
langage. (Furgole dans fon Traité des tefiamens, tom. 'b
ch. 13, n. 3" pag. t 3 7 9· )
Arrêt du 8 Mai 177), au rapport de Mr. le Confeiller
de Lauris, qui confirme la Sentence avec dépens. Ecrivant
Mes. Pafcalis & Deforgues.
�JOURNAL
ARRÊT
IX.
La pdparation des cuirs n'en change point la nature, & ne
met point ohflacle au droit de fuite.
Circonflances qui peuvent étahlir la fraude d'un aae.
L
E 14 Féyrier 1774, Melan, Marchand Tanneur de la
ville de Brignoles, acheta des fie urs Vitalis & Comp.
Négocians de la ville de Marfeille, 300 cuirs en poil de
buenofaires p~ur la fomme de ) 440 liv. Il fit fon billet
payable par tout le mois de Mai fuivanr. A peu près dans
le même temps François Reymond, Négociant de la ville
de Marfeille, vendit à Melan 200 cuirs indiens en poil, montant 199) bv."; il fit également fon billet à ordre. Le 26
Février de la même année, Melan établit, par aéte public
en Cavell[ de Dominique Gueit, Bourgeois de Brignoles,
une conl1:i~ution de rente au capital de 4700 liv. pour valeur de trois billets privés, & il fut Hipulé que Melan pourroit fe libérer en deux paiemens égaux. Par un recond
aéte du 9 Avril fuivant, Melan infolu[Qndonna à Gueit les
300 cuirs qui étoient dans [a fabrique à demi ouvrés.
Comme ces cuirs étoient dans des pelins, couverts de
chaux, on ne put pas les déplacer, & l'on crut qu'il fuffifoit de déclarer que le lieur Gueit en demeureroit maître
pour les aâminiHrer à fon profit & péril. Vitalis n'étane
pas payé à l'échéance de fon billet, fe pourvut pardeVant les Juges - Confuls de Marfeille en condamnation des
1440 liv., & obtint Sentence de défaut. Sur la lignification de la Sentence on notifia à Vitalis un bilan remis au
greffe de Bri~noles depuis le 6 du même mois. Ce bilan
ay,ant appris à Vitalis & Reymond qu'il exil1:oit encore
d os la fabrique de leur" débiteur 300 cuirs, ils demanderent d'un commun accord l'adjUdication des cuirs, enfemble
de tOUS ceux qui fe trouveroient en fOll pouvoir, par droit
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PRO VEN C ll.
97
de fuite & réclamation, & cependam permis de les faire
faifir confervawiremenr""ce qui leur fut accordé. Il fut procédé à la faille, qui fut' intimée à Melan avec affignation
pardevanr les Juges-Confuls, pOUl' voir prononcer fur les
fins principales. Par une feconde Sentence du 2 AotIt,
Vitalis & Reymond rapponerenr condamnarion de leurs
créances, flns O'éminarion de la condamnation déja prononcée, & il l;ur fut adjugé, par droit de fuite & réclamation, les 300 cuirs à demi ouvrés, & cous ceux qui
avoienr été faifis.
Gueit fit alors ajourner Vitalis & Reymond pardevant
la Cour en appel du décret qui avoit permis la faille confervawire, & de~anda par une requête la main levée provifoire des cuirs faifis, en vertu de l'infolurondation qui
lui en avoit été faite par Melan. Il obtint un rour en état;
il amplia enfuite fon appel envers la Sentence qui avoit ad:JÎugé le droit de' fuite filr les cuirs. Vitalis & Reymond
préfenterent de leur côté une requête pour faire déclarer
les aé!es palTés en faveur de Gueit, nuls, frauduleux &
comme non obvenus à leur égard.
On difoit pour Vitalis & Reymond, que le droit de
fuite fi,r les marchandJfes en faveur de celui qui les a vendues fans être payé du prix, ell: femblable au précaire fur
les immenbles. L'un & l'autre dérivent du même principe
de jufiice & d'équité. Suivant les principes élémenraires
qu'on trouve érablis dans les inGir. de rer. divif. §. 4 t , il
n'y a que le paiement du prix qui puilTe tranfponer à l'acquéreur l'abfolue propriété de la chofe vendue. Tant que
le vendeur n'eft pas payé, il conferve un droit réel, un
privi!ege, une préférence fur le meuble, comme fur l'immeuble qu'il a vendu, parce qu'il ne doit pas carere re
.& pretio, & qu'il ne feroit ni juGe ni équitable qu'un tiers
profitât du bien d'autrui au préjudice du véritable maltre.
Toute la différence qu'il y a entre le précaire fur les immeubles & le droit de fuite fur les meubles & les marchandifes , confif1e en ce que le précaire [ur le fonds vendu
Années l775 & l77 6•
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n'engendre pas ordinairement des conteltations, âttendu
que les immeubles ne changent ni d'aBiette, ni de nature,
& qu'on n'a jamais de la peine à les reconnaître, lors
même qu'ils pa/fent d"as différentes mains, randis que les
meubles & les marchandifes peuvent aifément difparoître
& changer de' nature, ou être mêlés avec d'autres,' de
facron qu'on ne puiife plus les diHinguer. Mais le motif de la
Loi fubfill:e toujours dans un cas comme dans l'autre; il fuffit
que les marchandifes vendues à .crédit [e [[auvent en la
poHèffion de l'acquéreur [ans avoir changé de nature, de
maniere qu'on pui/fe les reconnaître, afin que le draie de
fuite foit acquis au vendeur fans aucune difficuIré.
Sans remonter à l'origine du droit de fuite qui a toujours été regardé comme très-néce/faire & rrès-favorable,
il fuffit de confidérer que la délibération prife le I I Août
1730 par la Chambre du Commerce, & homologuée par
la Cour, a fixé d'une maniere précife & invariable les cas
dans lefquels il doit être admis: Le droit de fuite, revendication ou riclamation des marchandifes vendues, dit cerre
délibération, n'aura lieu & ne pourra être exercé par le
1Jendeur non entiérement payé du prix,' que fur èelles qui
feront trouvées en nature & extantes entre les mains de l'aclle.teur & celles de fes commiffionna,ires, en cas pourtant que
'les commiffionnaires n'y aient pas fait des avances' ddfùs qui
en abfarbent toute la valeur, ou bien entre les mains d'un
fècond acheteur qui n'en aura point encore payé le prix au
premier; fait en argent comptant, en lettres de change Oll
billets a ordre.
Vitalis a 'vendu 300 cuirs de buénofaires à Melan débi•
. teur failli; fes livres le prouvent. La même quantité &
qualité de cuirs s'ell: trouvée au pèuvoir de ce débiteur
failli; perfonne ne lui en a vendu de cette efpece : auffi
per(onne ne les réclame. Ces cuirs ont été trouvés extans & en nature entre les mains de ce débiteur, puifque
de fait on a 'trouvé' des cuirs; voilà leur nature. On a
trouvé des cuirs de buénofaires; voilà leur qualité difiinc~
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PALAIS
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PROVHNCH.
99
rive. On en a trouvé 300 ; voilà leur même quantité. Enfin
on les a trouvés dans la fabrique du débiteur; ils éroient
donc extans entre [es mains.
Ces cuirs [ont dans la fabrique de [on débiteur, en
nature de cuirs, quoiqu'ils eulfenc rec;:u des manipulations
un commencement de préparation, & qu'ils fulfent à demi
ouvrés; ils n'éraient & ne font pas moins encore de véritables cuirs, & n'ont point acquis le nom & la nature
d'une autre marchandi[e. Ces 300 cuirs [Ont tellement faciles à diI1:inguer, qu'il n'yen a point d'autres dans. la
fabrique du débireur; & quand même il. Y en amoie
d'autres avec le[quels ils fulfe~t mêlés, il ne [eroit pas
moins facile de les reconnaître; car les cuirs de buéno[aires valent la à 12 liv. par quintal de plus que les cuirs
indiens. L'unique condition qu'on a toujours exigé pour
donner ouverrure au draie de [uite, a été que la marchandife réclamée entre les mains du débiteur du prix, puilfe
êrre facilement di!tinguée ; parce qu'en eff~t., une fois qu'il
eH certain que la marchandife arrêtée par le créancier du
prix, eIl: la fienne prop,re , tau tes les loix de la jufiice &
de l'équité s'~levent en fa faveur pour le rendré préfér,able à qui que ce [oit [ur [on propre bien; delà il faue
que la marchandife exifie en nature, & qu'elle ne fait po~ne
mêlée & confondue' avec d'autres de même qualité qui
appar.tiennene ail .débiteur, & qui ne [ont réclamées par
perfonne. C'efi à ce motif principal que [e rapportent
routes les doél:rines & tous les Arrêts qu'on trouve dans
Louet & Brodeau, leu. P, fomm. 19; dans d'Olive, liv,
4, ch. la; dans Boutaric en fes infiit. pag. 1)9; dans
Decormis, rom. 2, col. 12.38; dans Denifard , vo, revendication.
Avant la délibé,ration de 1730, le draie de fuite étaie
facilement accordé ccmme étant très - favorabl~, ce qui
donnait lieu à un plus grand nombre de contefiations; on
l'accordoie fur le bled cpnverri .en farine, [ur la laine
convertie en drap" & dans d'autres cas [emblables oÙ la
marchandife àvoit prtfque totalement perdu fa prem'iere
N2
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nature; c'ef1: ce qui nous ef1: arre/lé par De cormis, tom. '2 ~
col. 1238, & par Brodeau fur la courume de Paris, art.
176, n. )' Avant la nouvelle Loi, noi! feulement les
changemens furvenus à la marchandife n'éroient pas un
obl1acle au droit de· fuite, mais même un entier dénaturement n'empêchait pas qu'il ne fûr adjugé. La délibéraiion de 1730 ef1: plus rigoureufe , en ce qu'elle exige que
la march~ndife n'aie pas changé de nature; mais ni avant,
ni après cerre délibération, on n'a exigé que la m3rchandife fût trouvée fous balles ~ fous cordes, & qu'elle n'eût
recru aucune fane de changem~nt; ce ferait-là une- erreur
rnanifelle. Il pem bien fe renconrrer des cas parriculiers
.ctl l'on ne puiife- accorder le droit de fuire que fur la
marchandife trauvée fous cordes & fous balles; mais cela
n'a jamais fait une loi générale.
Si un débiteur failli avait acheté à crédie d'un Négociant
une certaine q~antité de marchandifes dont il eût mêlé une.
pa nie avec pluGeurs autres,. & do'nt l'aurre parrie eût demeuré fous balles & fous cordes, on n'adjugE:.l'Oit point au
réclamataire la parrie des marchandifes mêlée ave,c d'autres,
fi elle ne pouvait pas être reconnue, tandis qu'on lui adjugerait celle qui aurait demeuré fous balle & fous corde.
Et cela, parce que d.lns cetre occafion parriculiere, il n'y
aurait que la partie'des marchandifes demeurée fous balles
& fous cordes qui pÛt êrre difl:inguée; tandis que l'autre
partie mêlée & confondue avec des marchandifes de même
efpece & qualité appartenant en propre au débiteur, ne
pourraient pas l'être. Mais [Dutes les fois que fans le fecours de cette circonf1:ance, la marchandife réclamée peut
être dil1inguée, on ne l'exige pas & on ne' l'a jamais exigé.
Bien plus, quand même une rnarchandife [eroit toure mêlée
avec d'aurres de même efpece & qualité, le _droit de fuire
n'aurait pas moins lieu, fi ce mélange érait fait avec des
marchandifes vendues par d'autres Négocians, qui de leur
côté réclameraient leur contingenr. Il faut en effet dil1inguer un mêlange qui fait perdre à la marchandife fa prerniere exiflence, & qui empêche de la reconnaître, d'un
�u PAI:AIS DE PROVENCE.
'Ior
incHange qui ne fait que confondre des marchandifes de
même nature & même qualité qui appartiennent à dIvers
réclamataires. Pourvu que l'on foit affuré que les rédamataires ont vendu chacun une ponion de la mdrchandife mêlée, le droit de fuite eft acquis &. adjugé aux uns &
aux amres jufqu'à concurrence de leur ponion; c'el!: ce qui
arrive journellement à Marfeille, lorfque les Négocians en
bled font faillite. Si le débiteur failli a une grande quantiré de bled de même efpece à lui vendue par différem;
Marchands qui réclament chacun leur comingent, on adjuge aux uns & aux amres leur portion, quoique rout ce
ble foit mêle dans un grenier; il fuffit- pour cela que la
qualité foit conll:atée. La àoarine du Praticien des JugesConfuls , pag. 43 l , celle de Denifard, vO. revendication,
& l'Arrêt du 26 Juin l7S9 qu'il rapporte, intervenu fur un
droit de fuite demandé par des Marchands de bois, n'éta-'
bliffellt rien de contraire aux principes que l'on réclame.
Les motifs de. cet Arrêt furent que les bois étant mêlés
. dans le chantier, & le triage n'ayant pu en être fdit, il
n'y avoit pas lieu à la faiGe revendicatoire, qui exige roujours que la propriété des. effets fait bien conll:atée en
faveur des revendiquans.. Le même Au'teur rapporte au
n°. I l un amre Arrêt du 27 Oaobre 1769, qui adjugea
le droit de fuite à un- Négociant fur des étamines dont
il avoit déja reçu une partie du prix; ces étamines ne furem pas trouvées fous balles & fous cordes entre les mains
du débiteur, puifqu'elles avoi~nt déja pa!fé entre les mains
d'un tiers qui vouloit fe les approprier.
La Délibération de 1730 veut que les m:itchandifes foient
extaores & en nature. Or, qu'eft-ce qu'une marchandife extante & en nature? C'ell: , fuivant tous les principes, une marchandife qui a confervé fa propre fubll:aoce, fon exil!:ence phyfique, fon état naturel & fa vraie conllitution qui la dil!:ioo-uenr de
tomes les autres marchandifes, fans 'lue les modes ou l~s différens accidens qui y font furvenus, "lui fa!fenl perdre fon cffence particuliere qui la fait reconnaître & qui détermine
là dénomination. Ainfi la laiD~ , quoiqu'elle foit lavée & car-,
�t02.
Jou Ii N A i
dée; conferve fa premiere nature de laine; autre chofe -'ferait, fi elle avait été cohvêttie èn ·étoffe & en habir. Le
liais ne perd pas fa premierè nânite par le tirage de la rivieré & l'ell\~ili!ge dans le cllantier; mais il la perdroir,
dès qu'il fetoit converti en table. II doit en être de même
des ètlirs; il importe fort peu qu'ils fbient coupés, mis- dans
des folfes, dans l'eau ou dans la chaux pour commencer à
l~s préparer;, tant qu'ils reHent dans cet état, ils fone ell
nature de cuirs; la préparation qu'on leur a donnée, ne
éhange pas leur forme r~bfl:anrielle, & nè peut ni détruire ni altérer leur pr~miere & véritable nature: autre
chofe. feroit, fi ces cuirs avaient éré con~ertis en fouliers,
ou s'ils avaient reçu route autre forme étrangere qui fît
difparoltre leur propre exifl:ence.
On rrouve divers Jugemens acquiefcés & exécutés, rendus
par lès Juges-Confuls de Marfeille, qui ont décidé précifémenr la queHion. Charles Reynier, NégDcianr de Marfeille,
vendit le 2.4 Octobre 1769 dix bariques de fucre blanc à
Gilly, Marchand Raffineur, qui fit faillite. Reynier demanda
te droit de fuite fur le fucre extam & en narure, qui cependant avait éré rr3nfvafé des bariques dans un bac. Les
créanciers lùi oppofèrent que les bariques .avaient éte ouvertes, & que. le fl1cre n'exi!l:oit plus fous baHes &' fous
cordes. Les Juges-Confuls firent dépendre tbute la queIl:ion,
d'e la preuve de l'iderirÎté 'de la matchandife; le rapport fut
fait; & par aurre Sentènce 'du ) Avril 1770, il fut ordonné
que la partie de [ucre dont l'Iâentlté était rec()nlllle par les
Exp,em, feroit .expédiée à Reynier. 'La même chafe fut jùg-éele 2.9 Mars 1773 en faveur: de 'Jean-Hônore Ralrel, Négociant de la ville de Marfeil1e ,'rotitre les cré:anèiers de la
faif1ite de MUTet fils. Rolfel avait vendu doL'1ze balles ajamis 'd'Alep à Mltret; lors de la fail.!]te, elles étaient déballée's & con'fbf~s dà'ns h Hrlniqtle du failli; cependant le
droit de fUl'te fdt. adjugé.
('
.
Inutile'm~dt Êlne'tt dppdfe ( cbntinuoient Vhalis & Rey..
mond ) que les cuirs', Idrs Ile la faifie, n'étaient plus entre
les mains du débiteur; qu'ils avoient 'paffé '(jans celles d'un-
•
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PALAIS
DE
PROVENCE:
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fecond acheteur, parce que les claufes de l'aéte avaient opéré
une tradition réelle. On répondit que fi la tradition fèinte
fuffifoit, il n'efl: aucun débiteur failli qui, par le fecours de
quelques claufes arbitraires' inférées dans des aétes collufoires, ne fe dépouillât de raus fes effets, & ne trompât
la foi publique. Cerre tradition feinte peut fervir de titre
à l'acheteur contre fan vendeur, comme le remarque Boutarie fur le §. 4~ , injlit. de rer. divif.; mais elle ef.t inutile
contre le tiers qui ne peut point être privé par des .fiétions,
d'un droit qui lui efl: acquis.
Sur la fraude des âétes dont Gueit vOllloit fe fervir pour
exclure le droit de fuite, on difoit 1°. que les facultés de
Melan n'éraient pas alTez confidérables pour que Gueit fe
fût déterminé à lui prêter à confiirution de rente la fomme
imporrante de 4700 liv. 2°. Le premier aéte étoit du 26
Février 1774, c'efi-à-dire douze jours après que Melan ve-'
noit de cohtraéter une de.tte de ~440 liv. envers Vitalis
pour le prix de trois cents cuirs, & une autre dette de 1 99~
liv. envers le fieur Reymond pour le prix de deux cents cuirs
d'une autre efpece. 3°. Les parries, qui éraient domiciliées
l'une & l'autre à Brignoles, où il ne manque pas de Notaires, avaient néanmoins palTé cet aéte au lieu de BelTe, pour
confommer clandefiinement leur projet: ex oClIltaûQne /rails
prœfumitur, difent Barbofa fur la Loi ab anajlaJio, cod.
mandati, & Tir.aqueau, du retrait conventionnel in prœfat.,
n. 13. 4°. Cet aéte œexprimoit pas la réelle .numération ;
il Y eft parlé de billets privés; mais les billets privés, que
l'on fabrique encore plus facilement qu'un contrat public,
ne font pas des efpeces fonnantes. Or, le défaut de réelle
numération efl: une grande préfomption de fraude: re ipfli
prœfumitur fraus, cùm in injlrumento non continetur vera 1IUmeratio, ftd tantùm confe.lJio de recepto, difent les Auteurs
ci-delTus cités. ~o. En moins de deux mois après la conftitution de rerne, le débiteur, qui s'étoitmis à fan aife vis-1.vi~ de Gueit, auquel il ne devait pas même encore une pr _
mlere penfion, fe libere du principal & du prorata des intérêts, & même d'une prétendue dette privée, au moyen
�'1°4,
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de l'infolutondation patrée des cuirs. Cette variété d'aél:es;
cette contradiél:ion dans un fi court imervalle, ce paiement
anticipé, permettent-ils de douter de la fraude? Ex varietate
contra(tûs fraus prœfumitur, fuivanc Ma fca rd us , de prohat.,
conclut: 442. Le paiement anticipé, lor(que le ti~rs y a intérêt, prouve la fraude, difent Mornac fur la Loi 10, ff. de
condiél. indehit.; Olea, de ceflione jur., tit. 4, quefl:. l , n.
20; Deluca, de dote, difc. 1')9, n. 7, 6°. Ce paiement e{~
fait par un tranfport figuratif de I1Jarchandifes qui étoient
enfevelies dans la chaux, & dont le prix étoit dû à Vitalis.
Ce tranfport figuratif eH fait par un Marchand Tanneur à
un Bourgeois qui ne fe' propofoit certainement pas de devenir Tanneur. Ce Bourgeois ache te des cuirs enterrés dans
la chaux, fans les voir, fans les connaître, & même fans
les faire déplacer. 7°. A quel prix ces cuirs, qui ont aug. melHé de valeu-r par un commencement de préparation,
font- ils cédés à un créancier à conHitution de rente? A un
prix inférieur à celui qu'en a donné le Marchand en les prenant de la premiere main. 8°. Le dénouement de tout a été
. la faillite de ce Manhand & la rémiffion de fan bilan environ un mois après l'aél:e du 9 Avril. Voilà tout·à la fois
c.mfilium & eventus, qui, fuivant la Loi 79, if. de regul jur.,
manifefient la fraude' pratiquée contre le tiers. Joutre, fur
l'art. 4 du tit. des faillites de l'Ordonnance de 1673, obferve, d'aptès Savary, que le paiement d'une dene no.n encore échue) fait dans un temps voiftn de la faillite, elt
préfumé frauduleux, quoiqu'il foit fait en deniers comp- \
tans.
On répondait pour Gueit, que le droit de fuite n'ell: accordé qu'à celui qui prouve l'identité de la marchandife qu'il
réclame, avec celle qu'il a vendue. !:ci Vitalis a bien prouvé, .
fi l'on Veut, que cette idemitë étoit poffible, mais il n'a pas
prouvé qu'elle exiltât en effet; Gueit ne fauroit donc être
dépotrédé , parce qu'il ne peut l'être que par la force des preuoves, & que jamais on n'a préfenté comme preuve une fimpie polIibilité. Mais cerre preuve fût-elle même faite, ne
fûç-il pas même poffible de douter de l'identité de la marchandife,
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DE
PRO VEN C
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chandife réclamée, la forme en a été changée, & dès-lors
le droit de fuite ne peut plus avoir lieu..
La délibération de la Chambre du Commerce n'accorde
le dr,oit de fuite que fur les marchandif~s en nature: la
quefiion n'dt donc ici qGe de favoir ce qu'elle emend par
ce mot, el! nature. Ir eH dit dans le préambule de ce rte
délibération rapportée dans les aél:es de Notoriété, pag. 144,
que par le Statut de Marfeille, ~e droit de fuite éto.it ~c:
cordé fur les marchandlfes, qUOIque la forme en eut ere
changée; que par une exrenuon exorbitanre, on l'avait enfuite accordé, non feulemenr fur les marchandifes, mais encore fur le prix en provenant; non feulement entre les mains
d'un fecond acquéreur, lorfqu'il n'en avait poinr payé le prix,
mais encore quand il l'avait payé, mais encore encre les
mains d'un croiueme, d'un quatrieme, & jufqu'à l'infini;
que cette exrenuon vraiment abufive caufoit le plus grand
préjudice au public, produifoit toujours des procès infinis,
empêchait touS accommodemens, mettait tout en défordre,
& faifoit fouffrir tous les créanciers.
Il fallait donc une Loi précife, dont les difpolirions claires
& non ambigues, ôtant tout prétexte à une interprétation
arbitraire, pulfent prévenir à l'avenir toutes ces difficultés.
C'eH dans cet objet que la délibération !taruanr fur l'érendue qu'il convenait de donner au droit de .fuite, arrêta qu'il
ne pourrait êrre exercé à l'avenir que fur les marchandifes
trouvées en nature & extanres. Or, d'après les motifs de
cette Loi, tels qu'elle les a expofés elle-même, quel peut
êrre le fens du mot nature? La Jurifprudence anrérie)lre accordait ce droit fur les marchandifes dont la forme même
avait été changée; la Loi ne l'accorde que fur celles qui
feront trouvées en nature. Donc, & par une oonféquence
toute fimple, on ne peUt regarder comme en nature les mar.
chandifes dont la forme a été changée.
En appliquant cerre Loi à la caufe, qu'a vendu Vitalis à
Mtlan? Des cuirs en poil, entiers, fous balles & fous cordes'
ils ont été failis dans les folfes, coupés chacun en trois ~
Années l77 5 & l77 6•
0
�1
l:06
Jou RNA L
~ demi ouvrés; leur forme el1: donc changée; ils n'ont donc
point éré trouvés en nature; le droit de fuite ne fduroit donc
dans ce cas être (éclamé avec fuccès. Ce n'eH pdS le plus
(,lu Je moins de changement qui dérermine; un changemeno
<]ue!coQque fuffit, lo(fqu'au moyen de ce changèment ta
çhofe a ce1fé d'êrre ce qu'elle érair. Le droit de fuire, contrilir~ au droit commun, eH: de droit étroir; fa nature, la
raifon, les motifs de la Loi, tout dic qu'il ne peut être
étendu au delà des circonl1:ances prévues par la Loi. Cerre
Loi ne l'accorde au vendeur, que quand la marcha\ldife n'a
pas changé de nature; la moindre altération dans cetre nature fuffit donc pour le lui faire refufer. Mais au fonds, qu'importe que les cuirs fu1fent encore en nature, dès que par la
vente qui en avoit été faite à Gueit, ils avoient. paffé dèslors entre les mains d'un fecond acq,uéreur.
Qu'importe que les cuirs aient rel1:é dans la fabrique du
vendeur; Gueit n'avait point de fabrique à lui; s'il les eût
tranfporrés dans une fabrique étràngere qu'il etU loué ou
qu'on lui etlt prêté, on n'eut pas nié alors qu'il ne les eùt
:t:éellement poffédés. Pourquoi donc ne les auroit-il pas égal,ement poifédés, lorfque ne pouvant les avoir dans une fabrique à lui, il les a lai1fés dans celle que lui a offert le
vendeur? La circonHance du lieu ne· fait rien à la chofe,
iùr-tDut s'il paroît d'ailleurs que Gueit, acheteur des cuirs,
en ait efFeél:ivement joui & difpofé à fon gré. Or, à cet
égard, rien n'el1: plus certain. Il a· prélidé à leur préparat,ion; tous les jours à la tête des ouvriers qu'il avoit loués,
il a dirigé les opérations; il a difpofé comme vrai maître.
il a pofIédé, non par fiél:ion, mais de fair. Qu'un homme
achere du bled, qu'il le laiffe dans le magalin du vendeur,
mais que celui-ci lui en remette la clef, ce ferait contredire la Loi même, que de nier ..que cette rémiffion n'opere
en droit raut l'effet d'une vraie tradition. Donc & à plus
forte raifon cette tl'adit~on el1:-elle intervenue, lorfque la
marchandife, quoique reHée dans le magalin du vendeur,
cependant travaillée fous les yeux & par les Prépofés
.en
�DU
PAL AIS
DE
PRO VEN CIl.
107
de l'acheteur. Or, par la délibération de la Chambre du
Commerce, le droit de fuite n'aura point lieu & ne pourr
poim être exercé [ur les marchandi[es qui feront trouvées
entre les mains d'un [econd acquéreur.
On ne prouve point la fraude, en difant que Melan étoit
infolvabJe à l'époque de l'aae du '2.6 Février 1774, parce
que le prêt était déja fait à cette époque. L'objet de cet
aae ne fut qu~ de réunir dans une feule & même obligation pubique, différentes obligations privées & antérieures;
la premiere était dü 13 Mars 1770, la [econde de 1772,
& l,a troiiieme du 1'2. Avril 1773. A ces différentes époques Melan étoit rrès-folvable. Le défaut de biens fonds
conGdérables ef!: une cho[e commune à tous les Négocians,
par cela feul qu'ils [om Négocians.
L'époqne du rembourfement n'ef!: pas [u[peae; la Déclaration de 170'2. ne déclare nuls que les rranfports faits
dans les dix jours qui ont précédé la faillite. Notre u[age
eH encore moins [évere, à moins qu'il n'y ait d'aillëurs
pleuve de la fraude.
Arrêt de partage du 17 Mai 177), au rapport de Mc.'
le Confeil1er de Ventabren, Mr. le Con[eiller de Lauris
Compartiteur, vuidé le 22 du même mois en Grand'Chambre, par lequel l'avis de Mr. le Commiifaire fut fuivi, & la
Sentence confirmée avec dépens.
Le motif de l'Arrêt fut que la préparation n'avoit pas
changé la nature des cuirs. Ecrivant Mes. Pochet & Simeon fils.
02
�108
JOURNAL
ARRÊT
X.
Le mari Je colloquam pour /lne créance dotale dont il a pour.
fùivi le paiement comme mari & maître, le fonds pris en
collocation eJl dotal ,fi la créance n'a pas été exprimée dans
la conJlitution de dot, mais feulement compife dans la conftitution générale.
A Dlle. Latil de la ville de GralTe fe maria le 18 Octobre 1749 avec le lieur Cartier, fous une conftitution
de dot de 1 SOOO liv.; elle fe conflirua en outre, du confememem de fon pere, tous fes biens préfens & à venir.
Après la mort du lieur Latil, fa fille & [on héritiere trouva
dans fa filcceffion une créance de 2000 liv. fur la Dlle.
Dupont. Le lieur Çartier fan mari pourfuivit le paiement
de cette fomme, & en 17S8 il fit procéder à un rapport
de collocation; en qualité de mari & maître, fur deux propriétés appartenam à la Dlle. Dupont. Le 2 Juin 17'19,
te lieur Cartier, en la même qualité, vendit au lieur Seranon une de ces deux propriétés pour la fomme de 1600
liv., & celui-ci lui tranfporta en contre-échange un treuil,
une chambre & une boutique, qui furem eftimés 900 liv.,
les 700" liv. refiantes furent comptées en argent. Deux
ans après, le lieur Cartier remit ces trois articles au fleur
Seranon au même prix, qu'il garda entre fes mains. Le 7
Novembre 1769, Me. Seranon revendit le bien qu'il avoit
acquis du lieur Cartier au lieur Nicolas, au prix de sooo liv.
Le 4 Mars 1770, le lieur Cartier fe pourvut au Lieutenant
de Graife comre Me. Seranon, en calTation de l'aél:e du 2
Juin 17'19, & contre le lieur Nicolas en commune exécution. Me. Seranon prenant I,e fait & caufe du fleur Nicolas,
répondit que le lieur Cartier était non recevable, fait parce
qu'il ne s'agilToit pas d'un fonds dotal, mais feulemem fublidiaiJ"emenr dotal, fait parce que même ditns ce cas, l'aél:e,
L
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PAL AI S
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Pl!.O VEN C Il.
109
contenant un échange ne pouvoit êrre regardé comme une
aliénation. Le Lieurenant faifant droit à ces exceprions ,
déclara le rieur Carrier non recevable, & le condamna aux
dépens. En caufe d'appel, le fleur Cartier préfenra une requête incidente en reHirution des fruits depuis le jour de
l'aél:e; il offrit enruite un expédient, il fe débouta de cette
requête avec dépens; & de même fuite, il mit fon appellation & ce dont étoit appel au néant; & par nouveau jugement faifant droit à fa requête principale, & en lui concédant aél:e de ce qu'il conrentoit que Me. Sermon demeurât
quitte des 1600 liv. du prix du bien à lui vendu, & des intérêts depuis le jour de la requête, il déclara l'aél:e de vente
Dul, avec refiiturion des fruits depuis le jour de la demande, & l'Arrêt commun & exécutoire contre le fie ur
Nicolas.
.
On difoit pour le fieur Cartier, qu'il n'étoit pas néceffaire d'invoquer les grands principes qui veillent à la confervation des dots; ce patrimoine facré de la femme efi fous
la proteél:ion fpéciale des Loix, toute aliénation en eH abfolument interdite; la femme, fes héritiers, fon mari luimême, peuvent toujours en revenir & la faire calfer; l'acheteur qui a connu, Ol! dû connoître la qualité de ce bien,
ne peut prétendre aUCUllS dommages-illtérêts.
On oppofe que le bien dont s'agit n'eH que fubfidiairement dotal. Pour détruire cette objeél:ion, on n'a qu'à remarquer que fi le mari avoit reçu en argent la créance de
zooo liv., il ne fercit comptable à fa femme que de la fomme,
par~e qu'.il ,ne peut êrre comptable que de ce qu'il a reçu;
maIs obhge de [e colloquer, il prend du bien en paiement;
peur-il prétendre que ce bien lui appartienne, & ne donner
à ~a femme .que ,~ooo liv.? A .quel titre pourroit-il s'appropfler le profit qu II pourrolt faIre fur un bien qu'il n'a point
acheté?
Le mari, quoique mari & maî.'e, n'efl: cependant pas le
propriétaire de la dot; il n'agit que comme Procureur de
la .femme; ce qu'il acquiert en cerre qualiré n'efi pas acqUIs pour lui. Il faut difiinguer dans la dQt les fruits & le~
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0 V RNA
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. fort'ds, Les .fruits appartietinertt' au ma'ri, &' les fonds ap'::'
pa1'tienMnt à la femme; à l'égard des premiers, il eil: mari
& maître dans'toute la force du terme, parce qu'ils lui 'appartiennent en toute propriété; à l'égard des [econds, li 'n'dl:
qu'admîniil:rateur p & li à cet égard il [e qualifie encore dé
maître, ~e n'eil: que parte qlle (on pouvoir étant irréVocable', il ne Qépend pas de la fei11me, tant que le rnàriage
dure, de le gêner "dans [on atiminiHratiot). Mais quel que foit'
ce pouvoir, ce n'eH jamais que le pouvoir borné d'un fimpIe adminiil:rateur, relatif à l'intérêt de la femme, auquel il
ne peut jarn~is préjudiCier:
'
Le domaine de la dot réIide [ur la tête de la femme,
comme l'exfrcice des aétions [ur celle ou mari, admini[["rateur ibtéreIré, parce qu'il fait les fruits fiens; le mari eil:
à cet égard procuretar in rem fuam, & en ce. fens ce titre
lui donne toute, propriété; mais dès que, abftraétion faite
des fruits, il ne s\lgit pfus que des fonds eux-mêmes, le
domaine appartiem en entier à la femme, & à cet égard il,
n'eH plus que fimple .adminiftrateur.
Il n'eut été dû que 2000 liv. à la femme, fi ces 2000 liv,
euIrent pu être exigées en argent, parce qu'alors tout arrangemen't contraire étant perfonnel à fan mari, elle n'eut pu
en profiter: mais dès que par les circonHances la dette ne
pouvoit être payée en argent, qu'on ne pouvait exiger que
des biens, parce qu'il n f }' avoit pas autre cho[e, ce n'était'
'plus alors de l'argent qu'elle avait à prétendre, mais du bien
jufques à la concurrence des 2000 liv. Si elle-même avoie'
pourfuivi fon paiement, forcée de [e colloquer, efIe aurait'
eu non pas 2000' liv., mais un fonds. C'eH [on Inari, .il 'efl:
vrai, qui s'dl colloqué, mais il ne s'e(t colloqué q'ue pour'
elle, puifqu'il s'eH colloqué forcément; c'eH elle-même qui
s'eH colloquée en effet par fon miniftere. .
,
Mais, dit Me. Seranon, fi le mari avoit reçu les 2000 liv.,
& 'lue de cette fomme il tût aC'luis' lin fonds, ce fonds !ui eût
appartenu. Cela eH vrai; niais le mari dans ce cas n'aurait
reçu au nom de fa femme que 2000 liv. Il ne devroit donc
rendre que ce qu'il aurait reçu. Si enfuice employant. ,ette
•
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�nu PAL AIS D Il PRO V Il Nell;
II ];
fomme, il en avait fuit une acquifition, cette acqujfition' Iyi
aurait appartenu, parce qu'alors ce feroit en fon nom 'qu'il
l'aurait faite, ce ferait de fes -propres efpeces qu'il auroit
acheté; parce que, quoique devenu comptable de cette fomme,
il n'en devoit à fa femme que la valetlr, & non les efpeces
même, dont il pouvoit dès-lors difpofer à fon gré. Ici au
contraire, le mari a reçu au' nom de fa femme, non de l'arcrent mais du bien; c'eil: donc le bien qu'il doit rendre,
parc~ que ne l'ayant reçu qu'au nom de fa femme, il ne lui
a jamais appartenu.
Me. Seranon n'eil: pas mieux fondé, lorfqu'il oppofe que;
fi en paiement d'une créance dotale, le mari amit reçu du
bien, ce bien lui feroit propre, & qu'il pourroit l'aliénet.
Pour répondre à cette objeaion, il faut diil:inguer deux cas:
ou cette fomme aurait fait partie d'une conil:itution expre/fe
& particuliere, ou elle auroit été une dépendance d'une
conil:itution générale de rous les biens. Au _premier cas, la
difparité efl: fenfible. Lorfque le mari a il:ipulé une fomme,
cette il:ipulation fait partie du contrat; on ne peut donc le
forcer malgré lui à recevoir du bien à la place de l'argent.
S'il le reçoit, il n'eil: pas cenfé le recevoir comme dotal,
ni fe .priver par-là de la faculté de le convertir en argent,
puifque c'était de l'argent qu'il avoit f1:ipulé. Ainfi, qu'il 'le
reçoive volontairement, ou que,,_ forcé de fe colloquer fur les
bjens du 'débiteur de la dot, il fait Obligé de le prendre en
paiement, toujours efl:-il vrai qu'ayant f1:ipulé de l'argent,
on ne peut l'obliger à conferver le bien. Ici au contraire
, on avait promis au fieur Cartier l 'i 000 IiI'. d'argent; elles
lui OCjt été payées; en outre [a femme s'éroit conll:iruée rous
{es autres biens, & il ne paroît pas par le contrat qu'il eût
connu en quoi ces biens pouvaient confifl:er, ni qu'il eût
pris à cet égard aucune précaution. S'il a trouvé dans' ces
biens une créance de 2000 liv., il pouvoit n'y trouver que
des biens fonds. ,Dans ce cas, il n'aurait pas pu fe plaindre, parce qu'à cet égard on ne lui a\'oit pas pramis de
l'argent. II ne peut donc convertir le bien en argent.
Au fecond cas, nulle parité encore; le débiteur doit de
.
·
�'I12.
JOURNAL
-l'argent. Quand le mari veue bien recevoir des fonds e~
paiement, cet arrangement lui ef!: purement perfonnel; lui
feul doit donc en profiter. S'il agit comme mari & maître,
c'ef!: relativement à la detre elle-même. Les arrange mens
qu'il peut prendre fur la maniere du paiement lui font entiérement libres; il peut 11 fan gré les prendre ou ne pas
les prendre. Donc dans fes arrangemens, il ne repréfente
pas fa femme. Créanciere d'une fomme d'argent feulement,
fi elle eût pourfuivi elle-même, elle n'eut pu exiger que de
l'argent. Le débiteur eue pu lui refufer de lui donner en paiement les biens qu'il eut donné à fan mari. Elle ne peut
donc exiger de fan .mari que ce qu'elle eut pu exiger de fan
dél:iiteur, parce qu'au moyen de ces arrangemens, fon mari
repréfente fan débiteur, & qu'elle n'eut pu exiger de fan débiteur que de l'argent.
Lors au comraire que la collocation eH forcée, le minillere du mari l'ell auffi. Il fe paye en biens, -parce qu'il
ne peut pas lè payer autremenr; ainG fe fllt payée fa femme
elle-même, fi elle eût elle-même pourfuivi. Le mari ne
pellt donc jam:<is dire avoir agi en fon nom; il a toujours
égalemenr repréfenré fa femme, fait dans la pourfuite
de la detre, fait dans la maniere du paiement; tout ce
<ju'il a fait, il a été forcé de le faire; il a toujours agi
comme mari, jamais pour lui. Tout eH donc au profit de
fa femme, pour qui, au nom de qui rout a éré forcement
fair; elle doit donc recevoir de lui le bien même qu'il a
acquis, rour comme elle l'eur reçu du débireur, fi elle l'elit
elle-même pourlilivi. Quand la conftirurion eft particuliere,
le mari a fiipulé de l'argenr; c'ef!: la loi du comrat. Quand
.elle
générale, fi le paiemenr qu'il reçoit en biens ef!:
volonraire, alors il a agi pour lui, & conféquemmenr à fan
profit; G au contraire ce paiemenr ef~ forcé, alors il n'a plus
agi 9u'au nom de fa femme; c'ell donc pour elle qu'il a
acquIs.
Dans le cas d'une dot ellimée ,le mari n'acquierr pour
lui que parce qu'il devient débireur de la fomme: quela chofe jJérilfe, la Comme n'eH pas moins due, parce que
racheteu~
ea
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PALAIS
DE
PROVENCE.
113
l'achereur doir roujours le pnx, quoique la chofe vendue
vienne 11 périr: emptoris damnum efl cui neceJfe eJl pretium
falvere , §. 3" iaftir. de empt. & vendit. Si en paiement d'une
fomme donnée en dor, le mari reçoit un bien, c'ef!: un
achat qu'il fair en fan nom, & par l'effer duquel le profit &
la perre fonr également pour lui: œJlimatio emptio efl, dit la
Loi JO, §. S de jure dot., quis dubitet œJlimationem
te
mulieri deheri , cùm periculo tua res deteriores fiant, vel augmenta luero tua recipiantur. Il faut bien fe garder de croire que
l'on [air vérirablemenr au cas d'une dot e!timée, roures les
fois que le prix du bien ef!: fixé. Ce point elfenriel dépend
entiérement de la volonté des parties. Souvent on convient
dans le' conrrar que les effets, quoique enimés, re!teronr
doraux; ils [ont. réputés reIs encore, lorfque le m.ari reçoie
au nom de [a femme; la fixarion du prix en moins un effee
de la volonré ou de l'accord des parties, que du ha[ard ou
de la néceffité. Dans rous ces cas, Je mari n'acquiert po.ine
pour lui, parce que pour qu'il fe rende eHècrivement ache"
reur, il ne [ufllr pas que le bien foit ef!:imé; il f'lUr encore
que l'on puilfe induire des circonHances que telle a éré fa
volonré. C'ef!: ainli que J'obCervent Decormis, rom. J , col.
J 348 ; Sanleger, refalut. civil., cap. S2. & ) 3, & Henris, rom.
2., liv. 4, quen. )0.
Dans le cas préfenr, non feulement le lieur Cartier, en [e
colloquanr' forcément, n'a pu en droit acquérir que pour fa
femme, mais encore en acquérant, il a eu J'inrention d'~c
quérir pour elle. Commenr donc pourroir-il êrre propriéraire
d'un bien qu'il a déclaré n'avoir pas acquis pour lui? Cerre
-volonté eH manifefiée dans la collocation, en prenanr la qualité de mari & maî:re, & elle l'eH encore dans l'acre de
vente paflé avec Je lieur Seranon pere.
On trouve dans Boniface, rom. r, liv. 6, rit. 3, chap. J
un Arrêr bien précis du r8 Janvier 1646. Le nommé Fe~'
raporte avoir vendu un jardin [ur lequel [a femme avoir été
colloquée pendant le mariage; il revinr 1'i-même contre
~erre.vente; elle fut ca{f~e p.ar Sentence du Lieutenant, que
1 Arret confirma. Il fut luge par cet Arrêt que le mari, en
Années 1775 & 1776.
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a
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fe colloquant forcément au nom de fa femme, n'avoit pas
acquis pour lui. Il y a une grande différence entre cet Arrêt
& celui cité par Me. Seranon, qui efl: rapporté dans les,
notes de Duperier. Le fieur de La Tour, il ett vrai, s'érait
colloqué fur les biens du premier mari de la Dlle. de Pignet
[a femme; mais la Dlle. de Pignet lui avoit promis une dot
en argent: il fllt dit, dit Duperier, que la hile du prem1er
lit ne pouvoit prendre fa légitime que fur la dot de la mere
confiiruée en argent..
On répondait pour Me. Seranon que pour faire déclarer
la vente nulle, il fulloit établir la dotalité,. non une dotalité
fubfidiaire & d'indudion, mais une dotalité polit ive & di-·
rede; la dotalité blùblidiaire, qui n'efi établie par la Loi
que pour l'alfurance des defliers dotaux, ne fauroit empêcher la vente du fonds; & l'intérêt, les droits de cette dotalité repréfentative font raujours fuffifamment remplis par
la confervation des deniers dotaux.
Le fieur Cartier n'a rien diffimulé de fon état & de fa
qualité; il a vendu comme mari, mais fuivam [on contrat
de mariage; il a vendu non un fonds conll:irué comme dotal,
mais un fonds par lui pris en collocation pour le paiement
d'une Comme dotale; il l'a dit dans le contrat; & c'efi en
conféquence de cette déclaration jull:ifiée par les pieces &
par la vérité des fairs, que Me. Seranon s'efi déterminé à
acquérir, croyant de bonne foi qu'un fonds fubrogé à tlne
fomme dotale peur redevenir encore 'ce qu'il érait dans le
principe, c'efi-à-dire une créance dotale. Un mari colloqué
pour une créance dotale, peut vendre le fonds fur lequel il
s'eH colloqué, & une pareille vente n'eH point frappée par
les Loix qui prohibem une vente d'un fonds dotal.
Me. Seranon convenait que le manda.raire qui [e colloque,
acquiert le fonds à fan mandant qont il exerce les adions; mais
(difoit-il) cela n'eH bon qu'à l'égard du mandataire in rem alienam, qui n'eH qu'inlhument, & qui n'a rien de perfonnei
dans l'exercice de fan mandat. Il n'en eH pas de même
de ce mandataire qui efi confiirué proCllrator in rem jùam.
Le procès qu'il fouriem, les exécutions auxquelles il fai~
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1 ~'
P II 0 VEN C 11.
procéder, n'ont rien qui lui fait étraflger. Il fe colloque
autant pour lui que pour fon man~ant, ~ la collocation à
laquelle il procede par l'impuiQ'ance où la mauvaife volooté.
de fon débiteur, ne doit pas empirer fes droits, ni détériorer fa pofition. Ainfi le mari, porteur d'un titre pour
une créance dotale, doit conferver le droit de réduire en
créance ce qui n'eH devenu fonds que ex poft fac7o, &
par la néceflité d'aJTurer le paiemeL1t de la dor.
La collocation eH un état forcé pour le mari, qui tenetur
de dote negleetâ. Il vallt mieux qll'il fe colloque, que de
laiJTer perdre la dot. Mais cette collocation ne le gêne pas
au point qu'il foit ~al1Jais forcé de garder un fonds au lieu'
& place des deniers dotaux qu.i forment l'état primitif de
ia dot, & dont le fonds pris en collocation n'eH que le
repréfentatif. La caule n'dl: pas détériorée, qu.and le fonds
eH vendu. La femme n'avoit dans le principe qUé des
deniers; elle n'a pas à fe plaindre du ti_tre qui les lui rend ;
au lieu qu'il ne feroit pas jufie que le mati joignit à l'inconvénient de fubroger un fonds à d~s d~niers dotaux. ,
celui de ne p'ouvoir pas faire repréfenter les deniers par
le fonds qu'il a été forcé de pt endre par collocation. La
raifon qui fait que dans le cas de refl:itution, la femme
peut être forcée de re<;evoir le fOJ1~s à, la place des deniers dotaux, ne prend rieu fqr le dro~t qu'a, le mari de
réduire en argent ce qui figpre CG.l3lro·e argent dans la confticution.
.
Que la fomme fait exprimée dans la conHitution , ou
qu'elle fait <;omprife dans la généralité de cette con Hi tution, dans un, c~s comme dans l'~utre., il n'ell: jamais
queHion que d'une fomnne dotale; le mari n'eH: à ée titre
que créancier d'argent. S'i,) a droit dans un cas de réalifer
le fonds pr,is en collocation, & de le convertir en argent,
il doit aufli l'avoir dans l'autre, & l'intérêt de la dot bien
entendu ne fouffre pas plus dans un cas que dans l'amre,
c'eH-à-dire qu'il ne fouffre pas du tout, puifque la choIe
eH réd'uite au point oll elle auroit été, fi la fomme dotale elIt été payée en deniers dans le principe, comme
1'2.
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�lI6
•J O U R N A L
elle aurait dtl l'étre. Deux temps font e1Tentiel1ement à
confidérer pour ce qui concerne la dot, celui de lil conftitution, & celui de la reflitution. Les biens aventifs &
dotaux doivent être confidérés fuivant l'état où ils étaient
lorfqu'ils font venus à la fèmme. Ils n'exiltoient pao; pour
la femme lors de l'aél:e conU:itutif; mais ils ont commèncé
d'exifier 'pour elle, du moment où elle les a recueill is.
Il faut donc fe régler fuivant l'état" où les choCes étoien t
lors de la mort du fieur Latil à qui Ca fille a Cuccédé. Or
à cette époque la Dllè. Cartier érait créanciere d'Une Comme
en argent; la collocation intermédiaire faite par le mari
, fur les biens de la débitrice, n'opere pas le déuaturement
de la dot qui n'ell point détériorée pendant le mariage,
dès que les aél:es intermédiaires faits à cet égard n'aboutiffent qu'a la rendre telle qu'elle érait dans le prIncipe,
c'dl-à-dire, en deniers.
Le fieur Cartier convient, continuoit Me. Seranon, que
dans le cas d'une inColutondation volontâire, le fonds pris
en paiement n'eH dotal que par fubfide, parce que dans
ce cas le mari prend le fonds à fes rifques. Il convient
encore que lorfque les deniers dotaux font employés à
l'achat d'un fond'1 ce fonds n'eH dans ce cas que le repréfentatif des deniers, & qu'il n'dl conCéquemment frappé
que d'une dotalité de Cubfide, fuivant la Loi 12, cod. de
jure dotium; mais, ajoure-t-il, dans ce C(lS le tranCport efi
volonraire, au lieu que dans le cas de collocation le tranfport efi forcé. Dans le dernier cas, le mari n'agit pas
propriétair~ment, mais comme mari & maltre.
1°. (Répondoit Me. Seranon) le mari agit-il plus propriétairement, quand par un aéle libre & volontaire il reçoit le paiement de la dot au prix d'un immeuble? Ne
contraél:e - t - il pas alors égalemenr en qualité de mari &
maître de la dot? 2°, Peut-on propoCer férieufement. une
diflërence entre le cas où le mari fe colloque, parce que
le débiteur ne veut pas payer, & celui dans lequel le débiteur fe rendant juHice , prévient la collocation par la
défemparation d'un fonds? 3 0. Quelle efi la raifoll de dé-
�nu
PALAIS
DR
PROVENCE;
'II 7
~îder dans le cas où il s'agit d'lJne infolulOndation volontaire? C'eft que la dotalité n'eft que de fubfide, parce
que le fonds eH repréfentatif des deniers dotaux, parce
que dans ce cas le fonds eH dans les mains du mari, non
pour être dot proprement dite, mais pour en repréfenrer
les deniers & pour les affurer. Le vrai principe de la ma,tiere eft qu'il fuffit que la dot primitivement exiHante en
deniers foit confervée & affilrée dans le même état & nature. 4°. Par ce moyen, la caufe de la dot ne fouffre
aucun préjudice; elle eft toujours telle qu'elle étoit dans
le principe, & le mari dans ce cas remplit fes obligations,
qui confiftenr non à changer ni à améliorer, mais à conferver & à ne pas détériorer. 5°. Si pOl.r des droits dotaux le mari acquiert par rranfaétion un fonds non apprécié
dans le titré, dans ce cas la dotalité n'ef~ pas fubfidiaire.
Le fonds eft acquis comme fonds, & non CO(llme étant le
repréfentatif d'une fomme dotale. Si au contraire le mari
acquiert par tranfaél:ion un fonds apprécié dans 'l'aéte, &
qui réponde à des fommes dotales, dans ce cas le mot de
tranfaaion ne fait rien à la chofe; le fonds n'eft que lè repréfentatif d'une fomme dotale, & l'intérêt de la dot eil:
rempli, quand cette fomme eH payée.
C'eft parce que le mari exerce un miniftere forcé, dans
le cas où il fe colloque pour une fomme dotale, qu'il dpit
avoir le droit de la rétabl.ir en argent, puifque c'ef~ malgré
lui & par la néceffité de fe faire payer de la dot, qu'elle a
été convertie en immeuble : d'où il fuit toujours mieux
que cette cOllverfion ayant été faite contre fon gré, il lui
doit être permis de rétablir la dot dans fa premiere nature, & de la reftituer en argent; & s'il a le·droit. de reftirue"r la dot en argent telle qu'elle émit dans le principe,
il a conféquemment le droit de vendre le fonds, qui ne
remplit d'autre fonél:ion vis-à-vis la dot que celle d'en repré(enter & d'en affurer les deniers.
Vainement le fieur Cartier prétend-il que fon fy/lême
n'a jamais fait doute; il cite un Arrêt rapporté par Boniface, rom.
liv. 6, tit. 3 , ch.
dans l'efpece du,:
l,
l,
�ps.
JOURNAL
quel l'aél:ion du mari fut accueillie, quoique la cQlloc~tiôn
eût été f<lite pendant le mariage; mais la circonf!:ance de
cetre collocation n'ef!: pas alfez développée dans l'Arrêt.
Ce n'el!: pas ici li! premiere fois qu'on à difcuré au Par~
1ement de Provence le point de favoir fi le fonds pris en
collocation par le mari pour le paiement d'une fomme dotale, ef!: doraI principalement, ou par fubûde. Tout ce que les
Loix du Code & .du Digef!:e nous difent, routes les déciûons qu'elles nous donnent fur les tranfports des immeubles faits avec e{l;imation, annoncent de tous les côtés la
difficulté qui fait la matiere du procès, puifqu'on trouve partout 1°. que l'ef!:imation opere tranfport de la propriété;
2°. que dans ce cas, le fonds qui prend la place d'une
fomme dotale, n'ef!: dotal que par fubGde'; & les Loix
qui nous fournilfent ces principes, ne font aucune dif!:inGtion entre l'aliénation voloncaire , & celle qui devient forcée pour le _créan.cier obligé de fè colloqu~r. Le principe
qui gouverne la déci.Gon , frappe également fur l'un & l'autre
cas, parce qu'il eH vrai de dire que dans un cas comme
dans l'autre, le fonds repréfente & a,ffilre la fomme. Delà
ce paflàge elfentiel qu'on trouve dans les notes de Duperier, va. dot :l'eflime du fonds dotal non facit emptionem
in dubio, mais hien le hail en paiement fait ail mari; &
il rapporte un Arrêt, qui décida que la Dlle. de Brais, fille
du premier lit, ne pouvoit pre·nd~e fa légit~me que fur la
dot de la Dlle. P~g(let conf!:ituée en arge.nt, & non fur
les biens de la collocation qui avoie,nt augmenté de valeur.:
Il ef!: donc de principe que rout fonds acquis des denie~s dotaux pel)dant le mariage, ne remplit d'autre fO(lc-'
tion vis-à-vis la dot, que· celle d'en repréfenter & d?en
affurer les deniers. Voilà la regle générale que l'on peue'
préfenter avec confianc;e comm,e· le fuc de tolites les Loix.
& de tolites les doétrines de· la matiere. La circoll.!lance
tirée de ce que la co)location eth forqée, ne fen qu'à
donner un droit de plus au mari: c'ef!: celui de pouvoir
dire à, fa femme, quand il ne trouve pas à vendr,e le fonds,
qu'elle n'a qu'à le repr~ndre en nature en cas de. refl:itiJi
�DU
PAL AIS
DB PRO VEN C E:
TI 9
tion. I,è mari ne peut pas prendre de l'a.rgent, quand le
débiteur ne lui en donne point; il prend à défaut de paiemeQt un fonds qui reRréfente les deniers. Poffdfeur de ce
fonds repréfentatif de h fomme dotale, il n'a rieu à
craindre vis-à-vis fan époufe pour le moment. Il ne lui demande pas des deniers; mais il les trouve dans la valeur
du fonds pris en collocation. Le mari peut donc le vendre, pour, le cas de reHitution arrivant, rendre à la
femme ce qu'il lui doit en elfet, c'ef!:-à-dire, des deniers.
L'on convient que les 2000 lîv. dues par la Dlle. Du- .
pont n!étoient point in fPecie dans le contrat de conHitutian; mais eUes s'y trouvaient in genere. C'ef!: par ta
claufe générale de conf!:itution que la fomme de 2000 liv.
ef!: devenue dotale; fi la Dupont eÎlt payé, il n'aurait été
quef!:ion que d'une dot en deniers. En un mot, il ne s'agiflait que d'une créance, quand le droit fut dévolu à la
femme, & conféquemment à fan mari en fa qualité de
mari & maître de la dot. Le nom & la faveur de la dot
ne doivent point en impofer. C'ef!: une dot de quantité,
une dot qui ne peur pas fe perdre, puifque le fonds dotal
par ,fubfide doit à jamais la repréfenter & l'affurer; mais
ç'ef!: une dot qu'on voudrait accroître, qu'on voudrait
doubler. au préjudice du tiers. Le fieur Cartier & fa femme
plaident ici pro lucro captando. Ils veulent qu'une fomme
de 2000 liv. leur en produife 4000 liv., parce qu'ils veulent profiter du bénéfice du temps, de ·l'induf!:rje & des
peines de l'acquéreur; induf!:rie' & travail qui ne tombent
point en rembourfement.
Arrêt du 27 Mai 177), au rapport de Mr. le Confeiller
de Beauval, Commiffaire fubrogé, qui reçoit l'expédient
du fieur Cartier avec dépens. Ecrivant Mes. Dubreuil cadet
& Gaffier.
�JOUll.NAL
=
ARRÊT
XI.
Le Grdfier, Oll tout autre Officier fuhrogé à raifon d'une premiere procédure, n'a pas '!Jefoin d'un nouveau pouvoir à
raifon d'une plainte poflérieure, dépendante de la premiere.
L
E 9 Septembre 1773, Jofeph...... préfenta une requête
'de plainte aux Officiers de Callas en injures & outrages, contre Antoine...... Me. Verrion, Juge, abHint, & Me.
Maurel, Avocat de Draguignan, fut fubrogé. Le 2. OB:obre
[uivant, Antoine....... préfema à [on tour une requête de
plainte contre Jofeph ...... L'information fut commencée, &
Me. Auzelle, qui faifoit les fonB:ions de Greffier, abl1int.
Jofeph...... demanda la fubrogation d'un Greffier; Me. Caftagne, Notaire à Claviers, fut fubrogé; fur les charges de
la procédure, intervint un décret d'ajournement contre Antoin:...... iJ prêta fes réponfes; cette procédure n'eut pas d'autres fuites.
On procéda à l'éleélion des nouveaux Officiers pour l'année 1774. Me. MaJelpine fut nomme Juge, & le fieur Auzelle
Greffiér. Le 2.3 Juillet même aunée, Jofeph...... prefema lme
nouvelle requête a~x Officiers de Callas comre Antoine......
& demanda qu'il fût informé par continuation & additipn
de plainte. Me. Malefpine, pour lors Juge, ordonna l'information, & Me. Cafiagne, qui avoit été fubrogé pour la
premiere information, tiJ les fonélions de Greffier. Le lendemain Antoine...... préfema une requête de plainte contraire ,.
& fur les charges le Juge ordonna qu'Antoine...... feroit de
nouveau ajourné pour répondre fur les nouvelles charges.
A ppel de fa parr pardevant la .cour, & requête incidente
en caffation de la procédure.
On 'difoit pour l'appellam, que la procédure érait nulle;
parce qu'on avoit employé pour Greffier Me. Cafiagne, qui
n'avoiG
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
121
n'avoit aucun pouvoir, aucun caraé!:ere, qui avoit été véritablement fubrogé pour la premiere information, mais dont
le miniftere avoit ceffé, & qui n'avoit aucune foné!:ion à
remplir dans la feconde; que ce qui avoit donné lieu à fa
fubrogation lors de la premiere, c'étoit l'abfienrion que fit
le fieur Auzelle, ferva'm pour lors de Greffier, à caufe de
fa parenté avec Pierre...... l'un .des querellés de la part d'Antoine...... que dans la feconde lnformatlon, la plaInte n'étant
plûs dirigée contre Pierre...... ,~ontre. lequel. il n'y avoit
d'ailleurs aucune charge, & n etOlt Jl1tervenu aUCun décret lors de la premiere procédure, la fufpicion du fieur
Auzelle ceffoit, & qu'on étoit d'ducant plus obligé de l'employer, qu'il fe trou l'oit à cerre époque Greffier en chef dé
la Jurifdié!:ion; qu'en fuppo!ànt que le fieur Auzelle eût été
éO'alement fufpeé!: dans la feconde, à caufe de fa connexité
a~ec la premiere, il auroit d~-moins allu demander une
nouvelle fubrogation en faveur de Me. Caftagne, parce que
la premiere é rait cenfée éteinte par le renouvellement des
Officiers de Callas; que quoique la premiere information eùt
été prife par Me. Maure!, Juge fubrogé, on s'éroit pourtant
adreffé à Me. Malefpine, Juge en chef, lors de la feconde;
qu'on avoit reconnu par-là que la nouvelle éleé!:ion des Officiers avoit fàit tomber la fubrogation à l'égard du Juge,
& qu'elle avoit nécefiàirement dû avoir opéré Je même effet
à. l'égard du Greffier; il obferva enfuite qu'il n'y avoit pas
affez de c11arges pour décréter d'ajournement.
L'intimé foutint au conrraire que les charges étoient affez
forres, & qu'un Greffier fuLrogé dans une premiere procé-'
lédure n'a pas befoin d'un nouveau pouvoir pour une feconde
plainte conuexe.
Me. Bovis, Subftitue, obferva que la derniere procédure
érait connexe à la premiere. D'abord ( di fait-il ) ces deux
in forma rions regardent les mêmes parties; dans la prerniere
Jofeph
fe plaine d'in;ures graves & excès comre - An~
toine
dans la feconJe, il rappelle les mêmes fairs contenus dans la premiere, & en ajoute de nouveaux les deux
plaintes refpeé!:il'es & les deux informations qui ine~rvinrent
t:
Années 1775 & 1776.
P
,
�I27i
JOURNA'B
'
étaient donc entre les mêmes perfonnes, elles rouloient fur
les mêmes faits, ou fur ,des- faits femblables. Par cela feul,
ces deux procédures avoient bea ICOUP de rapport entr'elles.
D'ailleurs, par fa feconde requête, Jofeph...... demanda qu'il
fût informé par- continuation & addition de plainte, & le
Juge l'ordonna de même, en ces termes: fera par nOliS informé
par addition. ce n'était donc ici -qu'unè continuation d'information, ou une feconde information entée fur la premiere;
les deux procédures, quoique prifes en diflerens temps, étaient
relatives l'une à l'autre, liées par le fait, par la volonté des
parties, & par le décret du Juge.
Il y a plus: le Juge en ordonnant que lés accufés feroient
de nouveau ajournés pour répondre fur les nouvelles charges,
a annoncé que la feconde information n'était qu'une fuite,
une addition à la premiere, qu'elle en étoit inféparable, &
que ces deux informations ne formoient qu'une feule &
même procédure. Le fieur Auzelle, qui s'éroit déclaré fufpeB: dans celle-là, continuoit de l'être dans celle-ci, & Me.
Callagne, qui avoit été fubrogé dans celle de 1773, pouvoit & devoit même prêter fon minillere dans celle de 1774
qui n'en était que la continuation. Peu importe que Pierre......
qui avait été caufe de l'abll:ention du fieur Auzelle, n'eût
pas été \lécrété dans la premiere information, & qu'il n'eûtpas été nommé dans la feconde plainte. Dès que les deux informations font connexes, correlatives & liées entr'elles, Me;
Auzelle, qui était fufpeB: dans la premiere, ne pouvoit ceflèr
de l'être dans la feconde. Au furplus, Antoine...... s'ell: adreffé
à lui & a requis fon mini!l:ere, puifque la feconde information a été prife, tam fur fa requête que fur celle de Jofeph......
ce qui formeroit au befoin une fin de non-recevoir comre
lui.
Me. Bovis examina enfuite les charges de la procédure,
& obferva qu'elles étaient aJfez fortes pour avoir attiré des
décrets d'ajournement contre Antoine.....: Il conclut à ce
que fans s'àrrêter à la requête incidente d'Antoine...... les
décrets fuJfem confirmés, avec renvoi & amende.
Arrêt du 30 Mai 177), prononcé par Mr. le Préfident
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
123
de Regufre, conforme aux concluGons; Antoine...... fuc
condamné aux dépens. Plaidant Mes. Ga/Iier, Avocat, &
Gras, Procureur.
ARRÊT
XII.
En matiere d'ùnpitration de bénéfice, la clau[e alio quovis
modo inftrée dans la [upplù/ue, ne carac7érift pas eJ{clltiel/ement & par elle feule l'impétration par dévolut.
L'appel comme d'abus d'une collation, par défaut de pouvoir
du collateur ou par nullité ahfolue, Ile conJlitue point le
dévolutaire.
Date retenue vaut collation. Doit-elle être pOl/jfèe au regiflre
6· levée dans l'an?
L'effet rétroac7if inféré dans les lettres d'attache & dans l'tmrégifirement pur {,. fimple ,peut-il nuire au droit du tiers?
L'indult ne peut être étendu au-dela de [es jl/Jles homes.
E Prince Louis de Rohan, Abbé de Montmajor lèsArles, obtint du Pape en 1761 un indult, qui lui permit, pour quinze ans, de conférer une fois en commande
tous les bénéfices de [on Abbaye qui étoient érigés dans le
Royaume de France, dans le Dauphiné, dans les Comtés du
Diois & du Valentinois. Il voulut faire ufage de [on indult en
Provence; le Parlement lui en fit défenfes par un Arrêt rendu
en 1768.
.
Mre. Jaubert, Prêtre de la Doarine Chrétienne, impétra
le 18 Février 1770 le Prieuré de Roquefavour, vacant
per ohitum, de l'1re. de Blacas, dernier Tirulaire, décédé
depuis deux ou trois jours. Avant que le Courrier, porreur
de celle impétration, fût arrivé à Rome, & le 21 du même
mois, l'Archevêque d'Aix conféra le même bénéfice à Mre.
Savournin, qui en prit pofrdIion le 23. Le Courier arriva
à Rome le 27; & [uivaot la cornmi/Iiol1 dont il érait por-
L
Q2
�12.4
. Jou
RNA L'
teur, il fut retenu, à compter de ce jour, deux cents dlteS
confécutives pour Mre. Jaubert.
Le l'rince de Rohan inlhuit du décès de Mre. de B1acas,
conféra le même Prieuré en commande, & en venu de
fon indult, à Mre. de Chaifaignes, le ') Avril fuivanr, qui prit
poifeffion le 2.) du même mois. Il follicita enfu;tè & obtint le ) Mai des lettres d'arrache qui donnaifent un e fet
rétroaél:if à l'indult du Prince de Rohan, -& les fit enrégiarer au Parlement: Mre. de Chaifaignes fe démit le 2.
Août fuivant du bénéfice entre les mains du Prince de
Rohan, qui le transféra le 16 du même mois à l'ire. Des11Oulieres, qui prit poifeHion le 19 Septembre- lilivant. Mre.
Savournin, déja pourvu du bénéfice par l'Archevêque d'A ix ,
voulut s'y maintenir malgré la collation de Mre. Deshoulieres; il Y eut une inflance liée entr'eux devant le Lieurenant d'Aix. Mre. Jaubert, après avoir inutikment folliciré
fes provilions à Rome, fe fit expédier par fon Banquier, le
2.1 Avril 1771, un certificat du refus; il obtint un premier
Arrêt de la Cour qui l'autorifa à demander des provifions à
l'Ordinaire; & fur le nouveau refus de ce dernier, il obtint un Arrêt qui lui permit de prendre poifeHion civile du
Prieuré de Roquefàvour. Mre. Jaubert intervint alors dans
l'inHance en maintenue pendante au Siege, entre Mres. Savournin & Desholilieres, & appella enfuite comme d'abus
pardevant la Cour, tant de la collation faite à Mre. Savournin, qLle de celle faite à Mre. Deshoulieres; il demanda
en ourre la révocation de l'Arrêt d'enrégiHrement des lettres d'attache qui donnoient un effet rétroaél:if à l'indult du
Prince de Rohan, en tant' qu'il pourroit préjudicier au droit
qui lu.i étoit antérieurement acquis. Mre. Savournin fe défiHa de fa collation vis-à-vis Mre. Deshoulieres, & là feulement où ce dernier feroit fondé, & Mre. Desholilieres demanda l'évocation du fonds & principal , qui fut confentie
par Mre. Jaubert.
On difoit pour Mre. Jaubert, lIu'il n'étoit point dévoluraire à l'égard de Mre. Savournin, parce que celui-ci avoic
�OU.PALAÙ'OE
PROVENCR• •
us
eté pourvu d'un bénéfice réglilier par l'Archevêque d'A ix,
qui n'étoit point Abbé de Montmajor; il n'a jamais eu qu'un
titre radicalement nul, comme émané d'un collateur (ans
caraacte & fans pouvoir. Il n'a donc jamais rempli le bénéfice contenrieux, ni de droit, ,ni de fair. Ce bénéfice' dl:
toujours reHé vacant per obitum do mini de Blacas; c'eH (ur
cette e(pece de vacance que Mre. Jaubert en a été pourvu;
il eU donc un vrai obituaire préventionnaire; il n'eft & ne
peut donc pas être un dévolutaire. ( Van-Efpen l jus ecclef.
univ. p'arr. 2, tir. 23, n. 37; MélJloires du Clergé, tom. 10,
col. 820, 826, 83 r; Piales, des- provifions, tom. 1, pag.
283, 298; du dévolut, tom. l, pag. 600; Solier (ur P aftour, de beneficiis, lib. l , tit. 2 l , note 4; Arrêt de la Cour
rappellé dans Decormis, tom. 1, col. 696; autre Arrêt rendu
le 29 Avril 1728 en faveur de Mre. Jaubert, conrre le
pourvu par l'Evêqu'e de SiUeron d'un bénéfice dépendant de
l'Abbaye de St. Gilles. )
,
Le dévolut n'a lieu" & on ne peut être dévoluraire, que
lorfque la provifion per obiwm renant inutile, on vient, en
vertu d'un titre néce!fairement poHérieur, troubler un poffe!feur pailible, Ru'on ,folltient incapable ou indigne, ou donc
on querelle le tirre. Mre: de Cha!faignes, n'a été pourvu
qu'un mois & huit jours après Mre. Jaubert; Mre; peshoulieres, qui a fùccédé à Mre. de Cha!faignes, ne ra été que
long-temps après. Mre. Jaubert a donc trouvé je bénéfice
vacant per obitum , lorfqu'il a pris date; il l'a impétré comme
tel; il n'a dopc rencontré n! pourvu, ni 'po!fe!feur; il ne
peut donc pas être dévolutalte. Il' e~1 vrai que fan jmpétration porte ~a claufe de dévolut;" mais '11 'lui fuffit de' déclarer qu'il ne veut pas s'en fervir ; ·j'I eU' vr~ï àuffi que Mre. '
J-aubert a attaqué les titres de 'tous (es compétiteurs; mais
le véritable obituaire a ce droit; s'il a appellé comme d'abus
de tous' ces titres, 'c'ell: qu'il l'a pq, & il l'a' dû , pour
n'avoir 'qu'un procès au lieu ~e trois, & pour avoir l'avantage de faire juger ces titres par la Cour. IF ré(ulte donc
que Mre. Jaubert n'a été fournis à aucune forcriaiité de ri."
�n6
JOURNAL
gueur, &. qu'il a pu inv,oquer fan titre ,& fan droit mér;ne
après l'année.
L'indult du Prince de Rohan eU limité exprelfément·
au Royaume de France, au Dauphiné, au Diois, au Valentinois. Le Pape y met en réferve les bénéfices de Mont~
major qui feront érigés ailleurs. Il s'agit d'une grace qui
dépend entiérement de la volonté & de l'intention du Souverain qui l'a accordée: or, la lettre & l'efprit de l'indult
démontrent également que le Pape n'a point entendu faire
por~er l'indult du Prince Louis fur les bénéfices de Montmajor {itués en Provence: tantllm t;. non ·alibi ereaa & fund.ata. Il eH cerrain qu'à Rome, on ne fpéc.ifie par ces mots,
in regno Gailiœ, que les Provinces qui compofoient ce'
Royaume à l'époque de la pragmatique fanétion, & qu'on
n'entend jamais y comprendre la Provence, la Bretagne,
la Lorraine & autres Provinces poUérieurement réunies,
qui ont toujours été dans l'efprit des Papes pays d'obédience.
"
.
Il efl: de maxime parmi nous qu'un refcrit de Rome ne peut avoir aucun effet dans la Province, avant d'avoir été
annexé par la Cour. La maxime efl: attefrée par l'Arrêt de
1768, q.ui défendit au Prince de Rohan d'ufer de fan induit 'non annexé; le Prince de .Rohan n'a fait annexer fan
indult qu'en Juillet 1770. Dès-lors il eH vrai de dire que
la voie de l'impétration éwit encore ouverte à Rome dans
le mois de Février précédent, & que Mre. Jaubert a pu
prendre date dans un temps ptile & jugé tel p,ar la Copr,
& acquérir un droit f,!r le Priepré de Roguefavour.
En France, la date reœnue vaut co/lation. L'ilTIpétrant
a acquis un droit, parfait, >~ès le marnent qu~ le Courier
efl: arrivé; il eU inve/li; cout e}t confommé ; il peue . réfigner, & s'il décede, le bénéfice vaque de fan chef. ( Dumculin, ad reg. de infir. rejign., n. 308; L9uet & Vaillant
dans leurs nores fur bumouliQ, ad: reg. de infirmis refign. ,.
n. 48 & 338; Piales, des provi{jons, tom. 2, pag. 68; Co-.'
chin, tom. l , pilg. 3 1 3, 318; Boufaric fur l'arc. 4'1' des Li~
�DU
PALAIS
ng
PROVENCE.
1'2.7
bertés de l'Eglife Gallicane, pag. 79 & aurres.) Mre. Jaubert avoit déja pris trente-huit datés, lorfque le Prince de
Rohan a conféré pour la premiere fois à Mre. de Chaifaignes; Mre. Jaubert avoit donc acquis un droit certain.
Mre. Jaubert a fait folliciter fes provi(ions dans l'année
à Rome, où elles lui one été refufées, fuivant le certificat
de fon Banquier, qui feul fait la preuve du refus, fuivanr
Lacombe, 1'0. dates, n. 8; Cochin, rom. 1, pag. 368; Libertés de l'Eglife Gallicane, chap. 2, l , n. 2, & 3; Déclaration de 1646, art. 7; Arrêt précis dans Mr. de Bezieux ,
pag. 44, Il efi vrai q\,le ce refus n'efi point configné dans
les regiHres du Banquier; màis c'efi parce qu'il n'y a aucune Loi qui ait exigé l'expreffion du refus dans le regifire,
& que l'arr. 7 de la Déclaration. de 1646 n'a fait dépendre
la preuve du refus que du certificat du Banquier, qui efi ordinairemeni modelé fur fa correfpondance. Mais n'eût-il pas
rapporté la preuve du refus, n'eût-il pas même demandé
des provifions, fa date lui en eut tenu lieu, & l'eut aurorifé à demander fa maintenue daMS le bénéfice. ( Libertés
de l'Eglife Gallicane, art. 47; ,Cochin, rom. l ,pag. 313,
314, 31&; Piales, des provifions, rom. 2" pag. 68, 70 &
7 1• )
Au moment du décès de Mre. de Blacas, dernier Titulairè du Prieuré de Roquefavour, Mre. Jaubert ne pouvoit
pas favoir pofitivement quelle étoit l'efpece de ce bénéfice,
ni à quel titre il avoit été poiféde. Tout étant de rigueur
en matiere de date, foit dans l'expreffion, foit dans l'omiffion, Mre. Jaubert déclara fur le regifire de fon Banq~ier, .
qu'il impétrait le bénéfice tel qu'il étoit, c'efi-à-dire, foit qu'il
nit régulier, foit qu'il eût ceifé d'être conventuel au delà de
40 ans, fait qu'il ellt été poifédé en commande libre, foit
qu'il eût été poifédé en commande décrétée, auquel cas il
fe foumettoit à fe faire Religieux. Il s'agit donc de favoir
fi les deux dernieres expreffions ont été fuffifantes, pour que
le Pape ait été forcé d'accorder des provifions, ou pour que
Mre. Jaubert ait pu prendre une date utile.
Il eH: de principe que dès qu'un bénéfice a été une fois
�I~
JOURNAL
conféré en' commànde libre, le Pape ne peut pas'Ie'refufer
en commande au féculier qui l'imperre ;,que la date vaut collarion dans ce cas comme dans les aurres, & qu'on peut
fe pourvoir devant les Tribunaux féculiers en cas de refus
Cetre opinion dt celle de Louer, ad reg. de infirmis, n.
4'l.S; de 'Vaillant dans fa note fur le nO...... de l'Auteur du
·Diélionnaire des Arrêrs, au mot bénéfice, n. 1; de Fevrer,
de l'abus, lib. 6, çhap. 6, pag. J87; de Duperrai, rrairé de
la capacité, liv. 7, chap. 7; de Caltel fur les définitions canon.
au mor commande, 11. 17 ; Bibliorheque Canonique, pag. 314
in fille.
.
,
Il fuit de là que lorfqu'un bénéfi.ce aéré poffédé en com-'
mande libre par UJ1 féculier, ou, fuivant Pia1es, rnité des
commandes, rom, l , pag. 284, par trois fucce/Iiverilent, le
Pape efi collareur forcé envers le quatrieme qui l'imperre
en comm.wde libre, & que la dare de ce quarrieme im-.
pétrant vaUt collation ou provilion. Or, c'efi un fair vérifié
dans les regiftres des inlinuarions ~ccléfianiques qne le Prieuré
contentieux eH poffédé en commande libre depuis l6I2,
& que dans cer intervalle de temps cinq Tirubires particuliers en Ont fucce/Iivemenr joui. Il eH:- donc vrai de dire
que le Prieuré de Roquefavopr eft un de ces bénéfids que
1e Pape efl: forc.é de conférer à tour impétrant féculier.
La refc.rip ion des dates nori levées dans l'an dt une
vieille rreur. abfolument profcrite en France, où l'Os regiftres des anquiers font foi, à défaut de ceux :des dataires.
L'uhlge dans lequel on eft à Rome de brûkr les date.s après,
l'année, n'a jamais dérogé aux droits des Français, qui ayant
une fois éré invef1:is du .bénéfice par l'effer de la feule date,")
ne peuvent pas en être dépouillés par le f<lul fai t des Car- •
dinaux dataires. C'en ainli que le, décident Coc!ùn, tom.
pag. 3 t 3, 320; Piales , des provifions, to"m. 2, pag. 68 ,
70,83; Lacombe, au mot dates, n. 8; Mémoires dl! Clergé,
tom. t 2, col. 801; Duperray, f\lr le concordat, tom. 2,
quel!:. 62; Vaillanr fur Lou'et ,-ad reg. de publicalldis, n. 2;
Arrêr du Grand Confeil du 7 Décembre 172C; Arrêt du.
COl1(eil du Roi, confirmatif du précédent; Confultation délibérée
l,
�DU
PALAIS
DI!
PROVBNCB.
129
\ libérée par ordre de M. Je Chancellier, par Mes. Noner,
Lemere, Capon, Lemere le Jeune, le 23 Oaobre 1727,
fur l'in!l:ance en calTarion de l'Arrêt du Confeil qu'on vient
de cirer, & qui détermina l'Arrêr confirmatif rendu au Confeil du Roi; Arrêr du Parlement d'Aix en Juin 1750, en
faveur de Mre. Pafcalis. La feule que!l:ion du procès rouloir fur le point de favoir fi la date prife depuis dix-fept
mois, fans avoir été levée, avoit invefii l'impérrant.
Il en de Jurifprudence certaine, que la date non levée
furvit à l'année en faveur des collateurs & d'un dataire
poflérieur; elle doir donc furvivre en faveur du Français qui
l'a retenue; enfin la dare vaur provifion; le Droit Canon
Francais dônne rrois ans de durée à roures provifions de
Rom~ ou de l'Ordinaire. C'en le fentimenr de Louer ad
reg. de puhlicandis, n. 2 r. Il faur donc que la durée de la
dare foir de trois ans. Elle ne peur êrre périmée qu'après
ce rerme faral, le feul qui foir prefcrir par nos Loix. Les
opinions contraires de Paflour, de henef., lib. 2, rir. 1, n.
6, & de Cabalfur, tlzeor. & praxis, lib. 2, cap. 2 l , n. 32 ,
éroient reçues dans le remps où ils vivoienr ; mais elles ne
le font plus aujourd'hui; d'ailleurs ils fondoient la péremprion de la dare fur l'Edit des inlinuariolls d'Henri II. en
Mars 1) ~ 3, qui dans l'arr. 3 porte, que les provifions erz
Cour de Rome .feront infir1lJées dans /ix mois,
compter. dll
jour de la date des provifions, & qui, fuivanr eux, déclare les
provifions prefcrires après ce rerme. Cet Edir n'a jam<;is
entendu annuller les provifions non infinuées dans les fix
mois, & il n'a pas prononcé la peine de nulliré. Il e!l: de
maxime certaine parmi nous, que le défaut d'infinuarion peut
êrre réparé en rour lemps, rehus integris. Decormis, rom. 1,
col. 634, cire plufieurs Arréts de la Cour qui l'Ont ainfi
jugé, conformément à l'avis de Dumoulin & de l'Auteur des
définirions canoniques qu'il cire.
L'annexe d'un indulr ne peur pas lui donner un effer J étroaaif, au préjudice des dataires .antérieurs en Cour de
Rome. ( Diai~)l1naire des Arrêrs, au mot indult, n. 3; Piales
dans fon traite des commandes, tom. 1, pag. 410; Mourgue.,
Années z775 6- z776.
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a
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Jou
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pag. 8; Mr. d'Ague1feau, tom. 10, pag. 64:1.. ) S'il ell vrai
que l'annexe n'a pu donner un effet rétroaél:if au préjudice
du droit antérieurement acquis à Mre. Jaubert, il ell certain que -le Roi n'a pas entendu préjudicier à ce droit acquis, par [es lettres q'arrache , ni la Cour par fon Arrêt d'enrégiftrement.
La ptévention, IQin d'être regardée en "'Provence comme
une fervitude, y a toujours été maintenue comme un privilege national, jurques-là que lorrque le Vicé-Légat n'a pas
eu le pouvoir d'accorder les bénéfices par prévention, le
Parlement lui-même a invité l'Archevêque d'Arles à urer de
ce drdit en qualité de Vice-Légat né, lorfque le Comtat
fut réuni à la Provence. La prévention eH en Provence, où
les expeél:atives des graâués n'ont pas -lieu, toute la ref{ource des Eccléfiaftiques du fecond ordre; elle ell:, pour
ainfi dire, leur feul patrimoine. La conceffion n'étoit point
parfaite entre le Pape & le Prince Louis avant l'annexe,
parce qu'elle dérogeoit aux droits des Provençaux, & qu'une
pareille dérogation n"e pouvoit devenir légale que par le confentement de la Cour. Enfin l'indult n'a pu fervir de titre
avant l'annexe, malgré la prohibition prononcée par l'Arrêt
de 1768.
La lettre de l'indult profcrit abro!ument & annulle tolite
feconde collation en commande, fans une permiffion préalable; les termes de l'indult font précis; il s'agit d'une grace;
il faut qu'elle foit exécutée le plus rigoureurement. Le fens
que l'on donne à la claufe de l'indult, qui eft la bafe de la
défenfe de Mre. Jaubert, cft légitime, fuivant le Journal du
Palais, tom. 2, pag. 731 ; Perard; CaHel, matieres hénéf.,
pag. 484, n. 20, & Decormis, tom. l , col. 328.
On examinoit enfuite la prife de poffeffion de Mre. Deshoulieres, & l'on difoit que par l'Edit du mois de Décembre 169 l , le Roi a déclaré nuls tous aél:es de prire de poffeffion qui ne feroient pas reçus par des Notaires Apoll:oliques. Le Bureau diocérain eH: le feul Notaire Apoll:olique;
il a des Commis dill:ribués dans le diocefe, avec un reffort
limité expreffément par le titre de leur commiffion.. Me.
�D U
PAL AIS
D B
PRO VEN C E.
131
Ilillard, Notaire de Penuis, en un de ces Commis; il el!:
limité dans l'arrondiffemem de Pertuis au delà de la durance;
c'eft de ce Notaire que Mre. Desboulieres s'el!: fervi pour
fe faire mettre en poffeffion du Prieuré de Roquefavour, fitué à quatre lieues en decrà de cerre riviere. La prife de poffeffion de Mre. Deshüulieres efi donc nulle, parce que l'atte
n'a point éré recru par un Notaire qui fût Apofiolique en
decà de la durance. Dumoulin, fur l'Edit des petites dates,
art: 2, tom. S , pag. 368, col. l injine, parle non des limites du diocefe, mais des limites fixées par l'Evêque dans
le diocere.
On répondoit pour Mre. Deshoulieres~ que Mre. Jaubert
étoit fans tirre, fes dates caduques, & qu'elles re divifoient
en rrois c1afles. La premiere comprend celles qui Ont été
prires depuis le moment où le bénéfice a vaqué, jufqu'à la
collation de Mre. de Chaffaignes; la feconde embraffe celles
prires depuis la collation de Mre. de Chaffaignes, jurqu'à
celle de Mre. De,houlieres; la troifieme contient celles prifes
depuis la collation de Mre. Deshoulieres.
Celles de la traifieme clâIlè ne pouvoient faire aucune
impreffion. A cette époque Mre. Deshoulieres étoit pourvu,
puirque l'indult de M. le Prince de Rohan étoit annexé.
Celles de la feconde n'étÇlient pas plus valides. 1°. Elles
conflituoient Mre. Jaubert dévollltaire, & fous cette qualité
non recevable, pour n'avoir pas rempli les formalités prefCI ites à tout dévolutaire. 2°. La collation de Mre. Chaffaignes empêchait la prévention du Pape; elle n'érait point
ahfolument nulle, penitùs nulla; elle n'étoit nulle, qu'autant
qu'on lui opporeroit le défaut d'annexe, veniebat tantùm an/lul/allda; elle dérivait d'un titre coloré; & c'en était affez
fuivant le fentiment des Auteurs, pour empêcher la préven:
tian du Pape. Celles de la premiere claffe éroient également
nulles; elles étoient périmées, pour n'avoir pas été pouffées au
regiflre dans l'an. C'eflla décifion précife de Pafl:our, lib. 2,
tit. 1. Date .vaut co}la!Jon, en tant qu'elle donne à l'impétrant un droit au benefice, JUs ad rem; mais cette regle ne
difpenfe pas l'impétrant de pouffer fes dates au regifire &
R2.
�13 2
JOURNAL
de lever des proviiions pour obtenir le droit dans le bénéfice, jus in re. Cela ell: fi vrai, que ce n'ell: qu'à raifon du
refus des ·provifions que l'impétrant a droit de recourir au
Juge pour demander la poffeffion civile. Toures les aurprités
citées par Mre. Jaubert, pour prouver que les dates non pouffées au regiftre & non levées daus l'an n'éroient pas périmées, n'ont trait qu'au concours. Il eH bien vrai que des
dates non pouffées au regiftre fe détruifent mutuellement.
C'en ce qu'attenent Cochin dans la caufe fur laquelle intervint l'Arrêt de 1726, & Me. Piales. Or, il en évident qu'en
haine de la prévention, les dates non pouffées au regifl:re
& non levées dans l'an, doivent devenir caduques. Bien plus,
le fujet Français qui néglige de lever fes dates, e{~ cenfé
1
les biffer à l'abandon par une renonciation tacite. C'eft ce
qu'obfervoit encore Mr. Cochin, en diftinguant deux'càS,
quand on examinait l'effet d'une date; le premier, par rappore à celui qui a laiffé périr fa date; le fecond, par rapport au tiers; ce qui fignifie que cette péremption de date
efl: admife, quand elle ne bleffe que les droits de l'impétrant, & qu'elle ne, l'eft pas, quand elle doit bleffer le droit
d'un tiers.. L'Arrêt rendu en 17S7, au profit de Mre. Pafc::alis, n'a rien jugé de contraire; i'l .a décidé que l'impétrant qui avait pris date fur un bénéfice pendant la vie du
Bénéficier, s'était rendu indigne de pofféder, même après
la mort du Bénéficier, & dans cet objet on donna à fa
date une exifl:ence après l'année, parce qu'il fuffifoit que
cette date fùt confignée dans un des regifl:res du Banquier,
pour que fon indignité [Îlt à jamais connante.
. Le point de droit en donc incontefl:able. En fait, Mre.
Jaubert a-t-il pouffé fes dates au reginre & levé fes prcvifions dans l'année? Le certificat du Banquier ea fan unique appui: mais que peut ce certificat, quand il n'ell:- pas
relatif à ce qui eH contenu dans le regiftre du Banquier?
L'article S de l'Edit de 1637, concernant les Banquiers,
porte en termes exprès qu'ils feront tenus d'écrire en j'une
des pages de chacun feuillet de leur regi{tre, le jour d'envoi, &c., & en l'aurre page vis-à-vis de chacun areicle, le
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DU
PAlAIS
Dl!
PROVEN~E.
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jour de la réception, la date, le quamieme livre & feuillèt
du regiflrata de l'expédition, avec le jour du confens, fi
aucun y a, & le nom du Notaire qui j'aura étendu, ou la
fubftance ommaire du refus ou empêchemenr de l'expédition. C'eft à la fuite de ces diverfes obligations du Banquier que l'article dit, qu'en cas de refus en Cour de Rome
, ou empêchement, ils feront obligés d'en déliver aux parties
certificats. Le certificat, pour être re9u en Juftice, doit donc
être l'expreffion fidelle du regiHre du Banquier. Quand donc
le certificat du Banquier anefte que les provifions ont été
refufée,s à Mre. Jaubert, fon atreHation eft illégale, fi elle
n'eft extraire du regifhe même; & fi ce regiftre ne pO'rte
pas exprelfément que les dates ont été poulfées au regi!l:re
& levées, ce certificat n'eft plus qu'un témoignage de
l'homme privé ,--&-non un aél:e émané de l'Officier public.
Peu importe que l'on regarde à Rome la Provence comme
pays d'obédience; cette prétention de la Cour de Rome ne
difpenfe pas les imlJétrans de poulfer leurs dates au regiftre
& de faire conftater le refus. Ce refus n'eft poim un refus
de droit, mais un refus de fait; & cela eft fi vrai, que ce
n'eft que fur l'exhibition réelle du refus qu'on accorde la
polfeffion civile. L'Arrêt qui accorde la polfeffion civile
rien préjùgé; Mre. Deshoulieres en demande, en tant que
de beCoin, la révocation, parce qu'il a été rendu (ur l'infpeél:ion du certificat que la Cour a p,ré(umé conforme au regiftre.
Il ya plus: fÎlt-il vrai que le Pape à refufé des proyifions,
il y aurait été fondé. Le bénéfice impétré érait régulier
d'origine; Mre. Jaubert ne pouvoit le polféder qu'en commande. Le Pape n'érait collateur forcé de cette commande, qu'autant qu'elle eut été libre, & que l'impétration eut
défigné le I>énéfice (ou.5 cette qualification certaine. Le Pape
eU fondé à préfumer que tous les bénéfices réguliers d'originè ont refté dans cet état de régularité, & ont toujours,
été polfédés'/ècundt'Lm condecentiam jiatfls; & jufqu'à ce qu'on
lui ait prouvé par une impétration affirmative que le bénéfice
eft tombé en commande libre, çe qui eft une exception à
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la reg.te QU, d.nilit, co-lJ)omo, le, bénéfice eft régulier 'de fa'
natl!re, & i.I p.e..ut rew(er ou accorder la commande impétrée; il o!e& c@Hate.ur forcé de. la. comman.de, que quand
on lui eocpo{€, qll'ell.e, e~tr de· fait libre;, & s'il eH vrai que
route in)pé~ration dt; bénéfiçe, pour lier les mains au coI'lateur en G@U1: de Rome, doi~e e"primer le~éritable état
d:u bénéfiee- impétré, ainG qu'on ne peur en domer en principes, q.uelle peut être l'efficacité d'une impétration de commande d:an.s laquelle on voit l'impétrant vaguer dans une incertitude continuelle, ignoœr le véritable état du bénéfice,
& à p.lus forte raifoll l'état de la commande qu'il impetre,
dans laquelle, en un mot, il ne' fait pas fi le bénéfice eft
régulier ou féculier, où il fait fans ceife dépendre [on araifon d'un forfam, & où la commande n'eft point fpécifiée
te.lle? Mre. Jaubert n'a d@nc aucun titre; 'fes dates font toujours géjlé.ra)e.ment caduques.
Mre. Jauber~ eft de plus fans aétion,· parce qu'il dl: dévolmaire., &. qu'il n'a pas rempli les formalités établies concre
les dél'olutaires. JI eil dévolutaire, puifqu'il attaque un poffeifeur fur la nullité de fes titres; puifque malgré toure fa
répugna.nce, il elt- obligé de faire ufage de la c1aufe' alio
91lovis modo; clau.fe de dévolut, d'apr.ès fon propre· av~u. Il
eil enfin dévolutaiœ, puifqu'il appelle comme d'abus. S'il
étoit fimll1e_ préventionnaire, s'il n'avoit à faire valoir que
l'antériorité. <le. fon titre, pourquoi at'taquer de nullité &
d'abus le titre de Mre. De~houlieres? La pofiériorité de titre
ne fut jamais. un moyen d'abus; s'il a embraifé cetlte voie,
& s'il a cm y être. recevable,. il s'eil donc montré (lomme
dévoJutaÎre, &. non fimplem.ent c.omme-. prévencionnaire. Delà
quatre fins de n9n-rece.voir; 1°; LI. n'a p.as, mis en caufe Mre.
DeshQulier~s & Mre. ChaifaÎgnes d<ms l'an.,. &. l'art. 2.2: de
l'Edit d~ 1.637- l'y obligeait> 21°•• ll: n'al pas fournil une caution préalable. (Piale.s.,.lfajré.du,dévQlut, r.om. Il, flag. S·oS.)
3°. Avant qu'il intemat fa c.onlplairite.,.Mre: de~ Chaifaignes
s'étoit démis du béné,fic.e.,. &Mœ~ Deshoulieres en av.oit été
légalement pourvu. ( Cochin, tom. 4, pag; 43-1 &, 448. )
4°. Le vifa n'avoit point été refufé à Mre. Jaubert.'
�'D
l'!;
13 S
EÜt-i!' titre & aél:ion, fon appel comme d'abus n'en feroit pas mieux fondé. Mre. Jaubert abufe de la daufe du
décret irritant appofé aux indults, pour empêcher qu'après
trois commandes, le bénéfice tombe lui-même en commande
libre. Le Pape veut que les Bénéficiers commandataires
nommés en force de cet indult par le Prince de Rohan
venant à mourir ou à fe démettre, leurs bénéfices ne foient
plus conférés en commande, qu'ils retournent en regle, &
ne foient plus conférés qu'à des réguliers, à moins qu'il ne
déroge lui-même à cette prohibition en faveur des nouveaux pourvus. Telle e!!: la formule ordinaire du décret irritant qu'on trouve dans toutes les conceffions de commande
décrétées, & qui empêche qu'après trois collations libres,
le Pape devienne collateur forcé de la commande, comme
d'un bénéfice féculier; & c'eH conformément à cette daufe
que M. le Prince de Rohan a conféré en commande décrétée,
c'eH-à-dire avec le décret de retour en regle, le· bénéfice
en que!!:ion, & à Mre. de Cha1faignes, & à Mre. Deshou-:
lieres. Mais cette daufe ne lignifie pas que penda1Jt les
quinze ans de durée qui font donnés li l'indult, le Prince
de Rohan ne pui1fe conférer qu'une feule fois chaque bé-:néfice. Les commandes font favorables de leur nature en
France; il n'e!!: pas permis de les re!!:reindre contre ellesmêmes; & ce feroit manquer cet objet que d'imaginer qu'une
collation telle que celle de Mre. Cha1faignes, qui n'aura eu
que deux mois de durée, a confommé le droit du collateur
indultaire.
.
L'indult a été donné pour être exécuté in Regno Galliœ
& Delphinatu, & Comitatu Vienntifi. La Provence, que le
Pape regarde comme pays d'obédience, n'y eH pas éomprife; tel e!!: le fyHême de Mre. Jaubert. Mais il e!!: certain que le Pape nous regarde en vain comme pays d'obé.
dience; nous avons fans. ce1fe rélifié à fa prétention. Le
concordat efi re<;u & exécuté en Provence comme dans le
reHe du Royaume, quoiqu'il n'ait été donné que pour être
obfervé in Regno Gallii & Delphiriaru. C'e!!: le vœu ulÏiverfel
de nos maximes & de nos privileges. D'où il fuit que toutes
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PAL AIS
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PRO V B N C
�136
Jou RNA L '- •
les fois que le Pape accordera u'n indult pour être obfervé
in Regna Galliœ & Delphinatu, la.Provence y fera comprife.
Quand le Pape accorde un indult pour être exécuté in
Regna GaUiœ, il fe dit bien à lui-même que la Provence
profitera de cene conceffion, comme toutes les Provinces
du Royaume; & s'il Ile l'excepte nommément, c'eH qu'il approuve tacitement cerre extenfion. Comment fe perfuader
que le Pape n'a pas entendu comprendre la Provence dans
les limites de l'indult accordé à M. le Prince de Rohan,
lorfqu'on voit que cet indult ell: accordé à ce collateur comme
Abbé de Monrmaïour, dont l'abbaye, le chef-lieu d'où dépendent tous les autres bénéfices, fe trouve fitllé en Provence dans le diocefe d'Arles!
Il eH vrai que l'indult a dû être annexé & enrégiHré au
Parlemear, parce qu'il eil: à craindre que fous le voile fpécieux d'une conceffion, nos droirs ne foient en campra mis
par quelque claufe infidieufe; mais cetre précaution, une fois
prife, les craintes une fois diffipées après l'enrégiil:remenr,
il doir être exécuté, & cetre exécution doit être rétroaB:ive
à l'époque qui a précédé l'enrégiHrement, parce qu'il ne
faut pas qu'une formalité de pure précaution puifTe priv~r
un feul inHa'nt d'une grace auffi falutaire, d'un retour auffi
confolanr, d'un droit auffi précieux. C'eil: dans ce fens qu'une
Loi mémorable, une Déclaration de François Premier, avait
décidé que les indulrs accordés aux Cardinaux & autres Prélats du Royaume feraient gardés & ohfervés, tant avant la puhlication d'iceux, en nos Cours, 'lu'après leur publication.
Ainu un indult annexé devient de fa' nature exécutoire dès
l'infl:ant où il a été accordé. D'où il fuir que le tiers qui
impetre un bénéfice dépendant de l'indult, avant même
l'annexe, n'a aucua droit acquis.' D'ailleurs l'annexe qui retarde & tient en fufpeils l'exécurion de l'indult, n'a été éraoli que pour un morif d'intérêt public. L'indult eH une conceffion qui acquiert un droit de propriété à celui qui l'obtienr, du moment qu'il éniane. Ce' droit de propriété e!l:
feulement fufpendu dans fbn exécution jufqu'à l'enrégiil:remenr; il n'en
en titre de propriété; l'exer. exiHe pas moins
, .
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13 7
PRO V Il N C J!.
cice, l'ufage en font feuls rerardés , & c'efl ce que la Cour
a jugé par fan Arrêt, en inhibant au Prince de Rohan
d'ufer de fan indult jufqu'à l'annexe. te rerme ufer efi remarquable; il détermine que le ritre était acquis au Prince
de Rohan, que l'ufage du ritre était fubordonné à l'a'nn exe.
Or dans l'inrervalle du titre à l'exécurion du ritre, un tiers
peut-il acquérir quelque droir au préjudice du propriéraire ?
Un indult dt à l'inHar d'une donation; l'annexe en eH l'infinuation. Ainfi toute date acquife après la conceffion de
l'indult & avant fon enrégill:remenr ne peut nuire au droi t
du collateur propriétaire de la grace.
Mre. Jaubert ne pouvoir acquérir aucun droir en Co ur
de Rome, parce qu'elle s'étoir dépouillée de celui qu'e lie
pouvoir lui accorder; ~ Pape avoir confommé fan dr oit
de prévention, en accordanr au Prince de Rohan un ind ult
avec la daufe li6aè & licitè, porrant permiffion de 'conférer en commande; cet indult étoir enr,égiltré au GrandConfeil ; un Tribunal du Royaume l'avait vérifié; c'en était
alfez pour lier les mains au Pape & le priver de fan droit.
Mre. Jauberr fe plaint donc mal- à - propos de ce que les
lettres d'attache & l'enrégill:rement de ces lettres ont donné
atteinte à fan droit acquis; il n'en avoir poim. Il efi certain
que parmi nous les lettres _d'arrache porrent effet rétroaél:i(
aux indults; elles font comparées aux lettres de natllralité qui portenr la même daufe. C'eft le fentiment de Duperier, tom. 3 , pag. 2')7; ita Decormis, tam. 2, col. 847;
Pevret, de l'abus, tom.
pag. 249, & un Aél:e de Notoriété de MM. les Gens du Roi. Le Prince a donc pu
accorder des lettres d'attache à cet indult avec la daufe de
l'effet rérroaél:if; le Parlement a pu les enrégiHrer; cet enrégilhemenr n'a pas nui à Mre. Jauberr, qui n'avait pas &
qui ne pouvait pas avoir acquis un droit au préjudice de
l'indult.
,
Quant au moyen propre à la prife de po!feffion, Me.
Billard qui a procédé à cet aél:e elt un Notairé apoll:olique
du diocefe; c'en était airez à Mre. Deshoulieres pOlir fatisfaire au vœu de l'Edit. S'il a été fait un Réglement dans
l,
Années l775 & t 776.
S
�,
Jou RNA r.
13 8
le diocefe pour départir un difl:riél: à chaque Notaire apof..:
colique, Mre. Deshoulieres qui efl: étranger, n'efl: pas obligé
de le connoîrre ; il s'en rapporte avec bonne foi à ce
qui lui e1l: prefcrir par l'Edit de 1691, qui porte feulement
que le Notaire fera apoJlolique & du diocefe.
Mr. l'Avocar-Général d'Eymar de Montmeyan pofa deux
quefl:ions: la. Mre. Jaubert efl:-il dévolUlaire? 2 0 • L'effet
!étroaél:if porté par les Lettres-parenres & par l'enrégiftrement pent-il avoir lieu au préjudice du tiers? Il obferva fur
la premiere queHion, que l'on a regardé dans un remps les dévoluraires comme ces délateurs méprifables & cruels, qui s'enrichiifoient autrefois de l'infamie & des crimes des hommes, & comme les perturbateurs du bonheur public, de la
tranquillité domefl:ique. Ne font-ils pas du-moins les dénonciateurs des vices cilchés , les fucceifeurs d'un homme
vivant? Ne facrifient - ils pas fouvent à quelques morifs
d'intérêt perfonnel l'honneur & la réputarion de leurs freres?
Ne riennent-ils pas fans ceife dans les mains les armes empoifonnées de la médifance? Ne font-ils pas obligés par érat
d'en faire un ufage funeHe, & le dépir ou l'efpoir du fuccès
ne les obligent - ils pas fouvenr d'y joindre les traits plus
perçans encore de la calomnie?
Tels fonr pem-être en effet les hommes dont les Canonifl:es femblenr avoir enrrepris de délivrer Oll de venger
l'Eglife. Tantôt ils les appellent des raviifeurs de bénéfices; tanrôr ils les défignent fous le nom odieux de ces
oifeaux funebres & dévorans qui ne s'arrachent du-moins
qu'à des cadavres, & qui ne rongent pas comme eux des
proies vivantes.
_ Cependânt le titre de dévolu raire , toujours odieux, & fur
lequel même l'opinion des hommes a jetté avec raifon un
vernis de honte, pem êrre quelquefois mile à l'Eglife.
Comme la crainré de la dé~ollltion efl: l'aiguillon qui réveille l'attention & la diligence des collateurs ordinaires,
le dévolut eH le fléau des collareurs négligens & èorrompus, & des EccléfiaO:iques qui ufurpenr par ces voies indignes les biens confacrés au fervice des Autels. Les dévo~
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DE
13 9
PRO VEN C E.
lutaires font des furveillans contre l'avidité defquels l'Egli{e s'indigne, mais qu'elle a établi dans fan indignation
conrre fes mauvais ferviteurs. Pour maintenir l'ordre & la
difcipline, elle a créé, pour ainG dire, dans fan fein l'action publique, qui dans les beaux temps de la République
Romaine filt fa refiource & {on {ou tien. II faut en convenir: le retour {ur {oi-même, le motif d'intérêt per{onnel
qui {eul le rend accu{ateur, ~n ce qui avilit le plus le dévolutaire; mais fi, pour réprimer cet abus, on [upprimoit
les dévoluts, ce {croit autorifer & fortifier des abus plus
.
généraux & plus grands encore.
Mr. l'Avocat - Général eXlmina le titre en vertu duquel
Mre. Jaubert fe préfentoit; s'il s'eH conftitué dévolu taire ,
difoit-il, c'eft-à-dire, accufateur des titres & de la capacité de [es concurrens, il fam qu'il {oit pur & inattaquable
• lui-même, & qu'il rempliffe ce rôle avec l'exaél:itude &
dans les formes que les Loix lui ont prefcrites. Mre. Jaubert
a inféré dans [a fupplique la claufe a/io quovis modo, qui
eft une daufe de dévolut; il a appellé comme d'abus des
proviIions de fes concurrens; il il argué leurs titres de nullité : telle eft la conduite des dévolutaires.
La claufe a/io ql/ovis modo eft un de ces pieges qu'on a
rendu aux dévolutaires , puifqu'ils [ont tenus d'exprimer nommément & fpécifiquement la caufe du dévolut ; elle devient
cependant quelquefois leur reffource; elle doit avertir le
Juge que l'impétrant, dans la {uppJique duquel elle {e trouve,
eft prêt à devenir dévollitaire, & que fi le bénéfice qu'il
impetre ne fe trouve pas vacant, il {e prépare à quereller
les titres ou la perfonne du poff.. ffeur. Mais cette claufe fi
vague, fi indéterminée con!litue-t-elle effentiellement le dé.
valut? Et ne {eroit-ce pas aller contre l'efprit des principes, que de multiplier les dévoluts, ou plutôt d'en créer
qui n'exiftent pas, & de forcer à prendre ce titre ceux
mêmes qui s'en défendent.
Ces mots a/io qU01'ÎS modo n'expriment point un deffein
fixe & formé, ne déGgnent point une qualité déterminée.
Si quelque claufe reffemble à une fimple claufe de Hyle,
52
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JOURNAL
ce font ces expreffion5 générales & indécifes, qui par elles..;
mêmes n'ont aucun fens littéral, & n'expriment point in-,
trinféquement quelque volonté particuliere, mais qui fe prêtent à touS les fens, à to~utes les volontés, elle peut être
l'ouvrage du Banquier expéditionnaire, Si elle étoit l'ouvrage de la partie elle-même, elle porteroit un fens plus
clair, un but plus fixe, un projet plus déclaré; elle efi vraifemblablement ajoutée dans la plupart des fuppliques comme
une claufe furabondante. Son ancienneté l'a faite conferver;
peut- être elle défigne l'ancien ufage; pellt - être la vanité
de la Cour de Rome exige-t-elle qu'on la conferve par une
politique complaifance; elle lui rappelle ce temps où
elle difpofoit à tant de titres de nos béhéfices fur lefquels elle n'a fil faire valoir aujourd'hui que les droits
tri fies , mais peut-être meilleurs, de la dévolution & de la
prévention.
Cerre daufe annonce & .,prépare le dévolut; elle donne
le droit à celui qui s'en efi fervi, d'impétrer le bénéfice à
ce titre; elle efi par-là même une claufe dévoluraire, ou
qui peut du-moins le devenir. Elle le devient en effet intrinféquement, du moment que l'impétrant déclare vouloir
s'en fervir, ou s'en fert en effet; mais jufqu'alors il ferait
injul1e de regarder toute fupplique où elle ell: inférée,
comme caraaérifant effentiellement une impétration par
dévolut; parce qu'il feroit injul1e de donner à des expreffions qui n'ont pas toujours par elles-mêmes un effet certain,
un effet toujburs contraire à l'intérêt de celui qui les emploit;
parce qu'il ferait injufle d'imputer à l'impétrant la prolixité,.
ou , ·fi l'on veut, la négligence de fon rédaaeur; parce
qu'enfin une daufe qui n'exprime point fa volonté, n'exifie
point jufqu'à ce que fa volonté lui donne l'être & la vie.·
A plus fatte raifon n'exifie-t-elle pas, quand le premiet
aae de fa volonté el1 de la méconnoÎtre & d'y renollcer,
quand, loin de fe fervir de l'aaion qu'elle pouvoit lui
donner, il la repouffe, il déclare aimer mieux demeurer
fans aaion que de s'en fervir; quand au lieu de l'animer
& la rendre aaive en en f.1ifant ufage, il la l,tiffe 'réelle~
�DU
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PRO VEN C E.
141
mënt dans un 'état de mort &- d'obfcurité, dont la feule
attention de fon Adverfaire l'a retirée. Oppofc roit-on à un
héritiet refiamentaire la claufe coàicillaire inférée dans le
tefiament, & lui objeél:eroit-on que comme c'efi par un
codicille qu'il efi inCl:irué héritier univerfel, l'infiitution efi
nulle de plein droit?
Il e Cl: fi vrai que la claufe a/io 'luovis modo efi une claufe
purement de fiyle, que par elle feule, dans une impétration même par dévolut, elle ne ferviroit de rien, & qu'ajoutée à la caufe fpécifié~ ~u dévolut, elle n'exprimeroit
. rien de plus; elle n'ouvnrOlt pas une nouvelle porre au
dévolut; elle ne fourniroit pas une nouvelle arme au dévolmaire. L'ufage que le Banquier expéditionnaite en a fait
dans la fupplique, ne confiirue donc pas Mre. Ja.lbert dévolutaire.
Mais Mre. Jaubert appelle comme d'abus des provifions
de fes concurrens ( continua Mr. l'Avocat-Général); il argue
leurs titres de nullité. Ne reconnoît':on pas dans fes actions le dévoluraire qui prétendoit s'envelopper dans les expreffions équivoques de fon titre, dès qu'il a reconnu un
concurrent, dès qu'il l'a attaqué? Dès qu'il a efpéré de le
dépofféder filr l'illégitimité de fes droits, ne s'efi - il pas
annoncé, ne s'efi-il pas nommé lui-même dévolu taire ?
La voie de l'appel comme d'abus efi une voie extraordinaire. C'efi la derniere arme que l'on imagina contre les
entreprifes eccléfiafiiques, dans un temps où la fuperfiition avoit fu tOUt ufurper, parce que l'ignorance ,ne pouvoit s'en défendre , où la piété n'éroit prefque plus
chez les uns qu'orgueil & qu'ambition, & chez les autres
que lâcheté & que balfeffe, où ceux qui fe croyoient les
maîtres du ciel, s'éroienr aifémenr rendus les arbitres de
la terre; dans des fiecles enfin qui voyoient le peuple fervir, la nobleffe combattre, mais le Clergé jouir & regner
L'excès de la confufion rappella l'ordre; l'appel comme
d'abus devint alors le premier & le plus ferme rempart
des prérogatives du trône, des droits de la nobleife des
liber~és du peuple, du bonheur de l'Etat.
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�142
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L'appel comme d'abus dé ligne en général l'entreprife
fait contre
d'une Pui1fance fur une autre Pui1fance', ce qui
l'ufage, & virtuellement contre le droit, parce qu'on préfume
que l'ufage eil: toujours julte & fondé fur le droit. L'abus perpétuel peut bien dégénérer lui-même en ufage ; mais c'eIl:
un ufage injulte qui demeure toujours abus. Son exiltence
ne prefcrit jamais, parce qu'elle
contre les premiers
prîncipes des Loix qui font imprefcriptibles, & comre lef-'
quels rien ne prefcrit; fouvent il n'elt puni que bien tard,
& après avoir long remps regné. L'appel comme d'abus,
en matiere de provifions, dénonce le défaut de pouvoir
dans le collateur dont elles fon émanées, ou fon enrreprife
fur les droits & fur le pouvoir d'un autre collateur;' il eil:
auffi matiere e1fentielle de la Jurifdiaion des Parlemens
du Royaume, à meftlre que la Pui1fance féculiere fe trouve
inrére1fée & léfée elle-même da,ns [es entreprifes: mais il
ne car.aa~ri[e pas le dévolut; il ne conltitue pas le dénonciateur dévolu taire ; & cela eH néce1fairement & toujours
vrai, puifque s'il y a réellement abus ou défaut de pouvoir
dans le collateur, le bénéfice ne fait aucune· impreffion [ur
la tête du collataire; il eH ton jours vacanr de droit & de
fair, & ce n'eH poinr par dévolut que l'impétrant en eIl:
pourvu;' fi l'abus n'exiHe poinr, le dénonciateur demeure'
[ans titre comme [ans aaion, & il n'exiae véritablement.
aucun infiant où il ait eu celui ,de dévolutaire.
Il faut donc convenir que l'appel comme d'abus de la
collarion par défaut de pouvoir ne conaitue point le dévoluta ire ; cela efi vrai, quand même J'impérrarion du dénonciateur [eroit pofiérieure à la prétendue collation. Cela eIl:
bien plus vrai encore, quand devenu d,éja vrai titulaire du
bénéfice, il [e voit troublé par un concurrent dont Je titre
elt nul, parce qtl'il le tient d\m collatenr qui n'a pu lui en
donner, & que nol1 conrent de le repou1fer, ainli qu'il le
pourroir, comme prévenrionnaire, il appelle encore comme
d'abus de l' mreprife de celui de qui [on Adverfaire tient
[es prétendus droits. Tel elt l'avanrage de l'appel d'une
nullité abfolue, telle que celle qui naît du défaut entier de
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PROVENCE;
143
pouvoir de la part du collateur. D.ans quelque état, dans
quelque temps qu'il foit interjetté, il ne rend jamais l'appellant dévoluraire, parce que jamais le bénéfice ne fait
impreffion fur la tête de celui qui le poffede, parce que
toujours il demeure vacant de drait & de fait., L'incapacité
du poffeffeur au contraire ne forme qu'une nullité relative;
il ell toujours pourvu de fait, & même en partie de droit,
parce que le collateur a eu réellement le drait .de conférer,
& que ce n'ell que par un abus de fon droit qu'il a pourvu
un incapable. Un appel de cette nature émis par un impétrant poflérieur en date au poffeffeur incapable le rendrait
véritablerhent dévolutaire; mais l'on ell bien éloigné de
penfer que s'il écoit le premier pourvu, il devînt dévolutaire, même par un pareil appel. Les défenfeurs des parties
font également partis du principe que la nullité qui n'ell
pas abfolue, fed qllœ tantùm venit annllllanda, empêchoit
la prévention du Pape; ce principe feroit. bien erroné, &
produiroit un grand abus, puifqu'il ell certain que dès
qu'un impétrant n'aurait plus ni facilité ni intérêt à dénoncer ces nullités, elles demeureroient toujours inconnUeS. Il a d'ailleurs été jugé par les Arrêts de la Cour de
1767 & 1769, que la nullité des proviJions d'un Curé de
ville murée par défaut de grades, quoiqu'elle ne foit pas
une nullité ahfolue, n'empêchoit pas la préveniion du Pape.
'Il efl donc bien plus certain encore que l'appel comme
d'abus d'une nullité abfolue n'a point conllitué Mre. Jaubert
dévolu taire.
En droit & d'après les principes que l'on vient d'établir;
Mre. Jaubert pourroit peut-être abandonner fans conféquence
les dates dont on lui difpute l'exiflence aél:uelle; & s'il
étoit une fÇlis prouvé que le titre ou l'indult du Prince de
Rohan étoit nul, & par conféquent fa collation nulle,
toures les dates pollériéures au :1. ~ Avril jufqu'au 13 Juillet,
jour de l'enrégillremeut, lui feraient auffi utiles,
quoique po/lérieures à la prétendue collation, elles ne le rendraient pas dévoluraire; mais ce point ne peut être difcuté qu'avec la queltio~ de l'effet rétroaél:if qu'on a voul~
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arrribuer aux lettres d'attache de Sa Majell:é & 11 leur en':
régill:rement; effet dont ces premieres portent la c1aufe
expreffe. Il faut, examiner dans le inoment s'il ell: en effet
néceffaire abfolument & à peine de péremption, de pouffer
au regi!1:re dans l'année les dates retenues.
Si le courier chargé' de la lerrre du Banquier à fan cor·
refpondant arrive à Rome avant que la nuit foit avancée,
la dare demalldée par l'impérranr Fançais ell: à l'inll:ant
retenue, & elle vaut pour lui provilion. Loin que le Pape
fait libre de rejetter fa fupplique fous prétexte d'un meilleur
choix, il. n'~ll: pas même le maîrre de rerarder d'un feul
jour la dare des provilions qu'on lui demande; elles font
toujours da rées contré l'ufage que la Cour de Rome fuit
avec les autres Nations, dès l'inll:ant même _où fa date
retenue fur le regill:re a affuré & conll:até fan droit. Tel
eH le privilege de la France; il eH conligné dans le dépôt
facré des Libertés de l'Eglife Gallicane; il e!1: au deffus de
toute attaque & d'e taure prefcriprion. Telle en:, en paroiJTanr baiffer la tête, la maniere adroite dont la France
s'y ell: fou/haire. Ce droit des Papes, ce droit dangereux
pour la difcipline tut fans doute inconnu dans les premiers
fiecles de l'Eglife. Dans un temps où cous les Evêques
éroient égaux, où chaque Evêque réfiftoit à fon éleél:ion ,
fuyoit les empreffemens & les recherches de fon peuple, &
fe refufoit long temps au fardeau immenfe de l'Epifcopat, peu
fans doure écoient rentés de s'arroger les droirs ou plutôt les
obligarions des aurres Evêques; aucun fur-tout n'entreprit,
en prétendant' à la nomination générale des bénéfic~s, de
répondre à tout l'univers chrétien du Pafl:eur ou du modele
que l'Eglife lui doit fournir. Des temps d'ignorance & de
ténebres arriverent. La confulion fe gliffa par-cout; un
nouvel ordre devint Jléceffaire, & l'on vit paroître la fameure Loi (\ connue fous le nom de pragmatique fanél:ion.
Cependanr ,le Concile de BaIe s'écoit brouillé avec Eugene IV; cette querelle avoit produit un fchifme, & le
Concile s'étoit enfin réparé. La France conHamment atta,hée à fes groirs devint l'objet de la haine d~ la Cour
d~
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PALAIS
DB
I4~
PROVENCE.
de Rome; elle fut pouffée aux derniers excès entre
Louis XII & Jules II; elle menacoit d'avoir -les mêmes
fuites entre François Premier & Le'on X. Le Roi, qui avoit
alors toute l'Europe, & fur-tout le redoutable Charles V,
fur les bras, fut enfin forcé de facrifier la pragmatique
aux attaques redoublées de la Cour de Rome & du Concile de Latran. La rélHlance du Parlement de Paris fut
prefque invincible; celle du Parlement d'Aix ne fut pas moins
généreufe; fa condefcendance enfuite & le facrifice qu'il fit
d'une réliflance même jufle & fage aux infiances du Souverain, & fur-tout aux befoins de l'Etat; fut plus généreufe
encore; ce fut peur-être à la noble & courageufe fermeté
de fes Parle mens , fermeté qui effraya la Cour Romaine, que
François Premier dut la facilité qu'il trouva à fubfiimer le
concordat à la pragmatique. Par le concordat, les expeél:atives & les réferves furent abolies; mais le droit de prévenrion fut accordé au Pape; cette réferve fait un article
exprès du concordat; c'étoit à la vérité un abus qu'on fubftimoit à un autre abus; mais quand même la prévenrion
auroit fublillé fous cette premiere forme, fe trouvant inférée
dans une Loi nationale, elle n'en feroit pas moins devenue
aujourd'hui un article de notre droit commun. Ce droit,
tout odieux qu'on le fuppofe, fe trouvant fur-tout compris
dans une Loi qui fait contrat. enrre nous & la Cour de
Rome, ne pourroit être· aboli fans une grande injuHièe. Mais
il s'en faut de beaucoup aujourd'hui que ce droit foit toujours
fi odieux & li <ouilible.
Par la Loi qui rend tout étranger incapable de pofféder
aucun bénéfice dans ce Royaume, le Pape ne peut nomm~r
un érranger, ni fe réferver une vacance in curiâ. Par la Loi
qui lui impofe l'obligation de nommer le premier impétrant
le Pape ne peut choilir & [e faire par fon choix une créature:
Par la Loi qui le force à dater fes provilions du jour de
la date retenue, & qui fur-tout affimile enriéremeQt la date
retenue à une provifion réelle, le Pape, qui ne peut différer
fa nomination, ne peut auffi en abufer. Le droit de prévenrion refferré dans ces jufies bornes ( Oc ce font celles
Années 1775 & 177 6•
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'14-6
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que nos urages , nos libertés & la Jurirprudence des Cours
leur oor données); le droir de préveorion n'aJtirant plus les
Français à Rome, & rie les rendaor plus ni courtifans, ni
efclaves; le droit de prévention donnant un droit affuré au
premier Français qui fe préfente, &, ne donnaor au Pape
que le droit indéterminé de conférer à un inconnu qui ne
le reild' poior le juge & l'arbitre, mais le dépoliraire & le
témoin de fan droit; la préveorion ainli purifiée, n'e!l: point
. le privilege du Pape feul, mais du Pape & de la Nation
F rançaife. Il y a plus: la Cour Romaine e!l: bien éloignée
de l'envifager fous ce point de vue; elle le regarde en effet
comme un privilege pour les Français, mais comme une fervi rude pour elle~
.
Ainli la prévention n'e!l: plus que le remede que l'Eglife
Gallicane emploie coorre la négligence ou les eorreprifes
de fes l'acteurs. Le Pape n'e(~ plus fon Juge 'fouverain &
arbirre, mais feulement le moyen palliE. dont elle fe fert
pour fe corriger elle-même; c'e!l: un droit que tous les
Français oor de notifier, non pas au Pape qui reçoit, mais
qui ne juge pas leur appel, mais à l'Eglife Gallicane ellemême, & à la Jufiice féculiere qui furveil1e rout, l'oubli ou
l'ufurpation' des collateurs ordinaires.
Si la préveorion elt devenue, par la fageffe de nos ufages
& des Arrêts des Cours, prefque aurant un privilege des
Français que des Papes, il ferait injuHe de l'abandonner à
l'eoriere difpofition du Pape, qui feroit le maîrre de la régler à fan gré, de l'étendre ou de l'anéantir. Il.efi de maxime
parmi nous que date retenue vaut provifion, au point que le
dataire peut réfigner, & que s'il vient à mourir? le bénéfice vaque de fan cheE L'on ne penfe poior que ces maximes foieor conditionnelles, &. qu'elles ne doivent avoir leur
effet que pendaor l'année, parce que les Aureurs les cirent
fans condition & fans relhiél:ion, & que l'on ne trouve que
chez quelques-uns cetre opinion ifolée ou même appuyée
fur des erreurs, comme chez PaGour & chez CabalTur, parce
que telle paroît avoir été dans ce fiecle la Jurifprudence
con Hante des Cours du Royaume & du Grand-Confeil;
�1) ALAIS
147
parce que, dans la quellion du concours, le principe, tel
qu'il l'a établi, a été décidé favorablement dans une Confulration drelfée par ordre de M. le Chancelier pour fixer la
Juri(prudence, & con(acrée par un Arrêt du Con(eil & par
l'Arrêt célebre rendu par la Cour dans l'affaire de Mre.
Pa(calis.
Enfin il répugne à la rai (on & à la Jull:ice, qu'un droit
réel & enciérement acquis à un tiers,' un drait qui ell devenu véritablement fon bien, & donc il peue di(po(er, demeure cependant encore fous)a puiffance de celui-là même
donc il ne le tienc pas. Telle ell: la ficuation du préventionnaire; il ne tient pas (on droit du Pape, pui(que nos Loix,
nos u(ages, nos libertés n'ont pas voulu que le Pape pût le
lui refu(er.
Dans les circonllances de la cau(e, il (emble encore que
l'on peut faire une réflexion de plus en faveur Qe Mre. Jaubert, dans le cas même où l'onéreu(e obligation de demander des pro.vilions dans l'année fubfill:erait; il a retenu,
dit-il, 380 dates, & l'on a du-moins le certificat de 200.
Pourquoi commencerait-on malignemenc l'année du jour de
la premiere date retenue, & (éparerair-on les 50 premieres
dates que l'on prétendroit être les (eules utiles·, fous prétexte que le certificat du Banquier n'ell: daté que d'un an
préci(ément après la cinquance-unieme, pui(que coutes ces
dates (e (ont (uivies immédiatement & fans intervalle? L'on
fait que chacune de ces dates forme un tout (éparé; que
c'ell: une d'enrr'elles, & non leur réunion, qui fait le tirre
de Mre. Jaubert; mais il Cemble qu'on peut pen(er qu'une
fuite de dates, même inutiles, quand elles (uivenc immédiatement la dare utile, interrompt la péremption, fuppo(é
qu'elle doive avoir lieu, & que dans ce cas le terme fatal
d'une année ne doit courir que du jour de la derniere date;
car il ne faut jamais chercher à étendre l'exécution des
Loix ngoureufes.
11 y a d'ailleurs une e(pece de contradiaion à vouloir
d'un côté qu'il (oit impolIible que le Pape regude la Provence .comme ,pays d'obédience, & que par con(équent il
DU
DB
PROVENCE.
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refufe des proviftons fur une date retenue, & à ce!fer de
, l'autre de la regarder comme un pays de concordat, pour
exiger rigoureufement dans l'année une feconde provifton
, après cette premiere, que nos libertés affurent d'une maniere ·inconteftable à l'impétrant par la rétention de fa date
dans .les pays de concordat: c'eH prefque vouloir à la fois
que la Provence foit pays de concordat & d'obédience.
La Provence, foumife à des SO,uverains particuliers, Ifubit
. le fort de raus les Etats chrétiens de l'Europe; elle plia fous
les enrreprifes arbitraires des Papes. Tous les droits que la
Cour de Rome avoit imaginés y furent long-temps perçus
avec rigueur & {àns réclamation. Nos Souverains avoient des
raifons parriculieres de ménager le Saint Siege dont ils éraient
devenus féudataires par leurs conquêtes en Italie, & donc ils
avoienc à' craindre des obftacles plus dangerenx ,ou à attendre des fervices plus e!fentiels; ils abandonnerenc, avec
encore pIns de facilité que les autres Princes, leurs droIts
préfens & réels, pour acheter d'un prétendu Seigneur Suzerain des droits du-moins fort douteux fur deux Royaumes.
Malgré la condefcendance politique de nos Comtes, malgré
cette efpece de dépendance où les tenoit l'attenr~ d,es bienfaits de la Cour de Rome, l'hiGoire nous apprend, par des
monumens authentiques, que les premiers principes du droit
pnblic, l'indépendance des Nations & des Princes n'éraient
pas entiéremenc méconnus; les bulles & les refcrits de la
Cour de Rome n'étoient point exécuraires en Provence,
qu'ils n'eu!fenc été examinés & annexés par le Tribunal augufte qui a exiGé fous différentes dénominations: dès-lors
, on fit refpec1er ,aux Papes cette grande maxime, que les voloncés d'une Pui!fance étrangere doivent être adoptées &
annoncées aux peuples par la Pui!fance nationale, & que
c'eH cette adoption qui les rend coac1ives & exécuraires.
Mais rous les droits burfaux & utiles éraienc établis & aurorifés par nos ufages, & fur-roue par la complaifan'cè de nos
Princes.
.
.
Ce fut dans cet état des chofes que la Provencè revint
fous la domination des Rois de Francè en r48r à.titre d'ac-
,
�DU
PAL AIS
DE
!49
PRO VEN C E.
ceffion' toutefois, & non de réunion, cômme Province JOInte
& non incorporée. Il y avait près de cinquante ans que la
fameuCe pragmatique avoit été publiée à Bourges;' elle érait
même alors .dans' un état de Comme il & de mort dans le'quel la complaiCance politique de Louis XI l'avait plongée;
mais la France entiere y érait attachée, avec. cette conCtance & cette ferveur qu'on a toujours 'pour les inftitutions
[ages & néceifaires, fur-t~llt dans leur naiifaÇlce. Bientôt
fon rétablj.jfemenr demande & obtenu par les Et~lts'& les
Parlemens produÎGt entre la France & Rome ces diCcuC:lions longues & cruelles qui ne furent qu'à peine terminées
par le concordat: la réunion de la Provence, dit-on,. dl:
poftérieure à la pragmatique dont le concordat n'eft qu'une
fuite. Après la réunion, la Provence a conCervé [es uCages
& [es Loix particulieres.· Voilà fans dame les deux plus
fortes raiCons par leCquelles on ait pu enrreprendre de prouver que la Provence demeuroit pays d'obédience..
En droit, la réunion même par les armes d'un Etat à
un autre Etat plus conGdérable, n'opere pas l'anéanriifement
de fes Loix & de [es coutumes patticulieres, parce que
comme, Culvant l'expreffion d'un grand homme, l'objet de la
guerre, celui qui peut Ceul juftifier ceux qui l'enrreprennenr,
efl: leur [ûreté; l'objet de' la conquête doit être la' conCervation des peuples conquis; & certainement on ne peut rien
imaginer de plus deHruél:eur que le [yftême d'un changement [ubit & ab[olu dans l'e[prit & dans la conlhtution natio?ale; c'el!: un arbre nonrri des [ucs vigoureux d'un~ terre
lnculte dont on veut redreifer les défams, & qui périt [0 us
les efforts funeftes que l'on fait pour l'embellir; on doit
bien plus de ménagement aux peuples qui reviennent à nous,
qui furent autrefois nos freres, & qui le redeviennent encore
par la [ucceffion des temps & par un effet de ces grandes
révolutions qui, en réuniifant ou en faiCant diCparoître les [1milles Couveraines de l'Europe, forment & renouvellent l'Univers., AinG les ufages locaux, les coutumes qui peuvent
.tenir au ·c.limat particulier de certains pays, ou au génie
'- diftinélif de certains peûples, doivent refler; la tyrannie
1
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imprüdente cherche feule à les anéantir, parce qu'elle n'en
fair pas la ,néceffiré, parce qu'elle n'en prévoir pas les conféquences. Mais il dl: un efprit général qui doir animer
toures les parties d'un grand Empire; rous les membres dé ce COtpS immenfe, quoique defl:inés aux ufages fé,parés, quoiqpe fufceptibles d'une impreffion différente, doivent cependant vivre de la même vie. Ainli routes les Provinces d'une val1;e Monarchie doivent prendre, au moment
même de leur réunion, cet efprit d'indépendanc.~ qui convient à une grande Nation fûre d'elle-même, & qui connoît fes forces, & doivent participer à fa franchife & à fa
liberté.
'
Il el!: naturel, il el!: même quelquefois jul!:e que les Loix
civiles des différentes parties d'un même Etat foient différentes; il feroit abfurde & impoffible que le droit politiqu~ le fût. En fait, la Provence avoit encore confervé,
lors de fa réunion, le droit de réclamer des entreprifes de
la Cour de Rome; fa réunion el!: poltérieure à la pragmatiqt;e; mais la pragmatique elle-même, cette fage conltitution qui rétabliffoit dans l'Etat, & 'qui eut rérabli dans
.l'Eglife l'efprit & la difcipline des premiers fiecles, écoi,t
alors comme anéantie pour cou te la France, ce fut par un
réveil gé.néral, par un rerour univerfel aux grandes maximes, que cette Loi célebre fut redemandée & confacrée de
nouveau par les Etats, par les Parlemens & par le vœu de
tous les Ordres du Royaume, & la Provence put participer
& fe joindre à cet effort commun. En fait, tel fut fon efprit & fa conduite; les tegbltres du Parlement en font foi,
les premiers aél:es de fon exi{l:ence fu;ent confacrés à> défendre générellfement les droirs du Prince & les privileges
de la Nation; ce furel'lt fans doute routes ces raifons qui,
, lors d:'une premiere tentatrve, moins heureufe qu'elle ne devoit l'être, pour fecouer le ioug honteux & pénible qu'on
avoir remis fur la Proven.ce, firent. penfer au ravant Mr.
Brulard, que fa réclamation étai·t fondée.; les cFrconfl:ances
& la raifon d'Etat, toujours viél:orieufe, qui porterem François Premier à ufet envers les prétentions du ~aint Siège.
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<l'une complai{ance néceffaire, ont {ans doute retenu fes premiers fucceffeurs. Mais aujourd'hui que les deux Pui.ffances
fe craignent & {e re{peélent avec connoiffance & {ans foibletre, nul doute que la _Provence ne jouiffe de la franchi{e
& des libertés attachées par""excellence à l'Eglife Gallicane.
L'on a vu la Brétagne revenir de l'aRujettilfemenc le plus
timide où elle vivoit fous {es Souverains particuliers. L'on
a vu réclamer par fan Parlement le droit d'annexe qui fut
d'abord un droit véritablement local & national du Parlement de Provence. Rome n'en conferve pas moins le fouvenir de fes prétencions & de fa puiffance ralIée; c'ef!: ain11
qu'elle croit notifier {es décrets à toutes les Puiffances, en
les fai{ant publier dans {es places à l'Univers chrétien; c'eil:
ainfi qu'elle croit écrire encore à des pays d'obédience, lor{.
qu'elle en emploit le fl:yle & les formes dans les re{crits
qu'elle envoit.
Ainfi, {uivant les principes du droit public, la Provence
participa, par {a réunion, aux effets de la pragmatique gui en
rétabliifoir les premieres maximes. Ainli elle dut devenir
pays de concordat, parce qu'elle concourut aux efforts & aux
réclamations qui l'amenerent; ainfi par l'u{age elle eH devenue en effet pays de concordar; mais dans l'idée des Papes
elle efl: demeurée toujours pays d'obédience.
D'un côté, le Pape a· donc pu jouir, même après y avoir
renoncé, ou plutôt il a pu. être forcé d'u{er du droit de prévention qui, {elon le concordat, par nos u{ages & par nos
libertés, efi devenu pour nous, en quelque {orte, un privilege;
aïnli de l'autre, Mre. Jaubert infiruit des préjugés de la Cour
de Rome, n'étoit pas obligé d'y demander des provilions
qu'il {avoir qu'on lui refuferoit, mais qu'il favoir en même
temps lui être acqui{es, & qui d'ailleurs ont été demandées
dans un temps encore utile.
Mais, dit-on, Mre. Jaubert n'avoit pas inlhuit le Pape
·de la nature de la commande qu'il impétroit; le Pape a pu
croire qu'elle étoir décrétée, & qu'il n'était pas forcé de
l'accorder. Cette objeélion efl: d'abord démentie par la {upplique elle-même, qui porte toutes les alternatives; & l'on
�152
Jou
RNA L
penfe que tellê ell: la nature de la prévention & du droit
forcé du Pape, qu'elle le mettait dans la néceffité d'Jccorder
du-moins une provilion cànditionnelle. Décider aurrement,
ce feroit rendre le Pape Juge du mérite des préventions de
l'impétrant, & du titre mêlT'e de l'impétration, ce que
nos libertés défendent expreffément, fous quelque prétexte que ce puiffe être. 11 ell: d'ailleurs prouvé par les
piecès produites au procès, que fuivant la définition même
la plus' rigoureufe des commandes libres, ce bénéfice avait
pris cette nature. II el!: donc prouvé que Mre. Jaubert n'el!:
pag dévolutaire; qu'à l'époque de la collation faite en faveur de Mre. Deshoulieres, il avait pu acquérir un droit
fur le Prieuré de Roquefavour, & que ce droit étoit légitime.
Mr. l'Ayocat-Général examina enfuite fi l'effet rétroaél:if
porté dans les lettres d'attache de Sa Majel!:é, & l'enrégiHrement pur & fimple de ces lettres, avaient pu anéantir le
droit précédemment acquis à Mre. Jaubert. L'indult el!: une
Loi favora le; il contient un rerour à l'ordre & au droit
commun; i rend aux ordinaires leur pouvoir naturel; le Pape
s'y dépouille lui-même & de fon propre mouvement du droit
odieux & dangereux de la prévention contre laquelle le vœu
de là difcipline. réclame: ne feroit-il pas contradiél:oire de
le forcer à le reprendre? On doit étendre l'exil!:ence des
Loix favorables; elles font cenfées exilter même avant leur
nailIànce, parce qu'elles font l'expreffion des vœux -du peuple ,& de l'équité naturelle du Légillareur. A plus forte raifon
lorfqu'une Loi pareille exiGe déja, & que la promulgation
feulement en eH arrêtée pa.r quelque formalité effentiellé, le
bien d" fan exécution ne peut être fufpendu.
La prévention étoit par elle-même un droit odieux; mais
par le concordat fous la foi duquel nous vivons, il n'en étoic
pas moins devenu un article de notre droit commun; donc
toute renonciat ion à ce droit devait être publique & autorifée par la Puiffance féculiere devenue fa proteél:rice. Il y
a plus encore: par nos ufages & par nos Loix, ce droit
dangereux eH devenu en quelque forte un privilege de I~
Nation;
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'i3
Nation; privilege plus néceifaire encore d'ans cette Province,
où les mois des gradués ne [ont point établis, & où les
Eccléfiafiiques oubliés n'one poine d'autre reHource. Donc
le Pape n'a pas renoncé pour la Nation à l'approbation
de la puiifance nationale, à [on privi!ege. Sans doute il faut
étendre l'exécution, l'exiHence des Loix favorables; mais
outre qu'il n'efi pas prouvé, comme on l'a déja dit, que cette
Loi le [oit, ce qui n'efl: que la volonré d'une Pui{f.1nce étrangere, ne peut jamais être une Loi pour nous, & n'a pas
encore re'iu le moindre ,principe, le moindre commencement d'exifl:ence; d'ailleurs, quand on [e rend à l'équité générale de ces maximes & au [enriment dont elles na i Ife nt ,
on ne croit pas aller contre la jufiice particuliere que l'on
doit à chaque citoyen, & qui efi de rigueur.
Qu'on imagine en effet la Loi la plus favorable, qu'on la
faife déroger à une Loi de droit puremenr pofitif & rigo(Jrel1x,
le citoyen qui fous la foi de cette derniere Loi aura acquis
quelque droir, pourra toujO\lfS [e plaindre & réclamer, s'il
s'en voit dépouillé par la claufe de l'effet rétroaél:if attachée
à la Loi nouvelle, parce qu'il pourra toujours dire qu'il a
été trompé par la Loi elle-même, ce qui eH certainement
'l'injl1fiice la plus dangereufe & la plus tyrannique qu'on
puiife concevoir; mais ce que la nature de la Loi n'auroit
pu opérer par elle-même, le Prince peut-êrre l'a pu en
vertu de [a toute puiifance. Image de la Diviniré, qui n'a
point de plus nohle repré[entant [ur la terre, l'homme' du
peuple qui lui a tranfmis tous [es droits, il peut fufpendre
& changer même à fon gré l'ordre ordinaire des chofes;
il peut tout, hors l'inju{bce. Les droirs du tiers font véri:"
tablement [on bien, fa propriété; cerce efpece de bien dO,it
être même, ce femble, fous une proteél:ion plus fpéciale des
Loix, parçe qu'outre la fûreré générale qu'elles leur doivent, comme c'eH d'elles direél:ement qu'ils rirent leur exi[tenée , elies feroient dans une efpece de fraude & de mauvaife foi en les anéantiifant. Ce ne font point feulement
les droits formés & édfus du tiers qui doivent êrre refpeél:é<;, mais encore fes droits incertains & à écheoir. En
Années z 775 & z776.
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effet, leur incertitude même eH fufceptible d'une efiimation;
d'une valeur; & fous ce premier point de vue, c'ell: toujours'
un bien réel dont on le dépouille.
D'ailleurs, s'il a pu prévoir que les exécutions rendroient
fan titre & fes efpérances inutiles, il n'a pas dtI croire que
le fait du Priuce les anéantirait, & qu'il menroit à la
place de la fucceffion des temps & de la fonune qui pou voit
lui être favorable, une volonté arbitraire & décilive contre
lui. Auffi voit-on le Monarque obferver toujours ces principes d'équité dans les difpenfes & les refcrits de grace
qu'il accorde. Faut-il en effet qu'en exerçant fa clémence
& fa généroGté, qui font des venus, il bleffe la juHice &
fon devoir? _DMls les lettres de légitimation, les droits fucceffifs des parens fout toujours refpeétés. Quoi de plusjncertain cependant que ces droits qui ne doivent écheoir
que dans la fuite des tems, & qui dépendenr entiérement
jufqu'alors de la volonté arbitraire' & éaptieufe d'un homme!
Dônc les Loix du Prince n'ont jamais par elles-mêmes un
effet rétroaétif préjudiciellemenr aux dtoits acquis à un tiers.
Donc la claufe expreffe inférée dans les lenres d'attache
dont il s'agit n'a pas pu avoir cet effet. Donc cette claufe
a été furprife elle-même à la religion du Prince; ou plutôt,
innocence par elle-même, elle a a'ccordé une grace éten, due, mais pure, & qui laiffe les droits du tiers intaéts; ce
n'eH que par une fauffe application qu'on vellt la rendre injuHe & mal-faifante. Donc la claufe falvo jure quœjito tertii
ell: néceffairemenr fous-entendue dans toute conceffion du
Prince.
L'oubli de la Provence, dans l'énumération des Provinces
mentionnées par l'indult, ne fait pas par lui-même une preuve
auffi fone qu'on a voulu le repréfenter, de la réferve qu'en a
prétendu faire le Pape. Le Dauphiné fait un Etat diltinél
& féparé du Royàume; il doit conferver cerre nature, d'après
le titre même de fa réunion, ou plutôt de fan acceffion.
Cependant tous les Auteurs nous apprennent que le défaut
de dénomination précife ne forme pas une réferve de cette
Province, (oit. dans les refcrits de Rome, foit dans les Or-:
,
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PALAIS
D'l!
YROVENCE.
1)5
don-nances ~ nos Rois. Si nous avons fur. ce dernier arricle un privilege particulier auprès de nos Rois, 011 ne doit
pas l'interpréter contre nous dans les refcrits d'e Rome, furtout à l'effet de nous faire rentrer dans la claife des pays
d'obédience dont nous fommes heureufemenr tortis depuis
long~temps; mais il faut interpréter le fens d'une grace par
l'efprit & l'intention de celui qui l'accorde.
'
II dl: aifez difEcile d'imaginer que le Pape accordant un
indult à un Abbé commandataire pour conférer les bénéfices
d'une Abbaye fituée en Provence, fe fait réfervé ,tacitement
tous les bénéfices de cette Province qui en relevenr, dont
il fair qu'il ne pourra jamais difpofer, & ait rendu par-là fa
grace fi illufoire.
Le Prince de Rohan a agi contre fan propre titre, en
nommant deux fois en commande au mêsne bénéfice, ce
que l'indult lui défend expreifémenr. Il faut conve'nir que
ces mots, illa (lmpliùs, &c. reifemblent à la formule même
du décret, & ne paroiifenr au premier coup d'œil que des
précautions que le Pape prend communément, lorfqu'il confere en commande, pour que l'ancienne nature des bénéfices
ne fait pas entiérement intervertie; mais on trouve à la
fuite une volonté aufolue énoncée claiœment, & qui n'dl:
fufceptible d'aucune interprétation contraire: t;, ,fi ea com:"
nw!dari contigerit ahfque fPeciali mentione & derogati'one 110luntatis noJlrœ prœfèntis commendœ, ipfa 'nulla.fit eo ipfo.
Voilà une nullité prononcée d'une maniere décifive & irré, vocable; elle n'en pas comminative , mais aéluelle" préfen'te
& naiifant du. feuL fair; elle n'eil pas conditiontl.elle', ou
du-moins il n'y a qu'une feule 'condition exclufi,vement exprimée~ ExiHe-t-il une dérogation expreife & fpéciale de
la volonté du Souverain Pontife? Que le Prince de Rohan
la prodoife; elle peut feule jullifier fa feconde collation.
La Puiifallce féculiere elle-même n~ peur pas ici étendre
}~ouvr~ge de la, Puiifance eccléIiaHique; parce' que tout ce
qui r~garde la nature du ~itre même du bénéfice, eH purement
caL1o_niq~e & fpirituei. Le droit de conférer en commande
eH véritablement un droit pontifical, un droit dont le
V2
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J'o U RNA L
,Pape difp'ofe en vertu de la Pui1fance fouveraine des clefs;
il peut l'accorder aux Prélats; mais comme il difpofe véritablement pour lors de fon droit e1fentiel & exclufif, il
peut mettre toute forte de conditions & de limitations à
la grace. Une derniere preuve enfin que 'cette c1aufe reftriétive n'efl: pas fimplement de forme & de fi}de , c'eH:
que lorfque le Pape s'en eH fervi, on lui a toujours donné
l'effet que nous lui donnons aujourd'hui. L'on trouve dans
le Journal du Palais, tom. 2., pag. 73 l, la même queHion. Le
Pape avoit accordé à l'Abbé de Saint-Florens un indult avec
la même c1aufe; un Curé dépendant de cette Abbaye pourvu
en commande par le Pape lui-même ,mourut; un Bénédiétin
impétra fa Cure; le défenfeur dè l'Abbé de Saint-Florens
avouoit que l'indùltaire ne pouvoit pas nommer deux fois
en commande au même bénéfice, mais qu'il avoit le droit
de cooférer du-moins une fois même les commandes décrétées, & que la cclllation du . Pape ne compétait pas
contre lui, & pour diminuer J'effet de fon titre. On croit
donc la collation du Prince de Rohan nulle, quand même
fon indult ne l'auroit pas été à l'époque de cette collation,
& nulle par l'indult lu·i-même.
Mre.. Deshoulieres s'efi fèrvi, pour prendre poiIefIion ,
du miniHere d'un Notaire apofiolique', mais- qui n'avoit
plus de caraétere ni de pouvoir \ dans le re1fort dont fon
bénéfice fait par i ~; on lui a objeété qu'il était tombé précifément dans la contravention d'un homme qui employeroit un Notaire royal hors de fon diHriét, contravention
qui emporte pe:ne de nulliré. La. Chambre diocéfaine a
réuni lesj Offices de Notaire apoHolique; elle a pu par
conféquent régler les fonétions de ceux qu'elle commet
pour .les exercer; [es régIe mens leur fixent à chacun un
difiriét & un 'territoire, comme les Arrêts de la Cour les
fixent a}Jx Notaires royaux. Cependant parce que tomes ces
confidérations font rigoureufes, & parce que les réglemens de la _Chambre diocéfaine ne ponent pas. nommément peine .de 'nullité, on ne fe décideroit qu'avec peine
& à regret fur, ce feul motif: il y auroit d'ailleurs une' e[-,
,1
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PALA,IS
DE
PROVENCE.
151
pece de contradiaion dans la conduite de Mre. Jau ert ,
s'il pediftoit à fuire valoir un moyen de dévolut, après
avoir renoncé folemnellement à la qualité de dévolutaire.
On a objeaé à Mre. Jaubert le défaut de vifa ; le refus
des Grands-Vicaires dont il excipe n'était pas abfolu; il
écoit fondé, il provenoit du défaut de préfentation perfonnelle de [1 part. Ce vice efl: vraifemblablement le fondement des efpérances de Mre. Savournin, & ces efpérances l'ont retenu au procès; il s'eH flatté que fi le titre
de Mre. Deshoulieres était anéanti, ce vice fuffiroit pour
rendre nul celui de Mre. Jaubert. L'on peut obferver fur
cet objet particulier, que l'Arrêt de la Cour qui a aucorifé Mre. Jaubert à prendre poffeffion civile du Prieuré
de Roquefavour, a jugé qu'il avoit rempli pleinement &
valablement touteS les formalités préalables à la demande
& à l'obtention de cette grace. Mre. Jaubert avoit donc
un titre réel & légitime, & il n'a pas pu le perdre. Mre.
Deshoulie es n'en avoit point, & il n'a pas pu anéantir
celui de fon Adverfaire, pour lui en fubHituer un nouveau.
Mre. Savournin n'a jamais compté filr le fien ; il en a luimême reconnu la nullité; il a reconnu y avoir abus dans
fes provifions; il a offert à Mre. Deshoulieres le facrifice
d'un droit auffi illégal & auffi illégitime. Il prétend aujourd'hui fe fauver par des difi:inaions dont fon intérêt lui
cache fans doute la frivolité; il compare l'expédient de
condamnation qu'il a offert à Mre. Deshoulieres, à un
contrat dont Mre. Jaubert ,- comme tiers & étranger, ne
- peut tirer aucun avantage. Il ne lui refi:e plus, pour compléter un' fyfi:ême auffi Îlngulier, qu'à foutenir que l'abus
de fes provilions ell: relatif, que la nullité de fon titre
efi: condicionnelle. -On fent quelle feroit l'abfurdité de ces
propofitions; cependant s'il ne les a pas avancées ouvertement, elles paroiffent du-moins avoir été le principe de
la conduire affez bizarre qu'il a renu dans ce procès. L'on
voir en effet un homme qui fe dépouille d'un bénéfice, &
qui plaide encore po ur le conferver, qui veut fe réferver
�I~8
JOURNAL
_,
une aél:ion contre un de fes concurrens; après aVOlr reconnu la nullité de fon titre avec l'autre.
Mr. l'Avocat-Général con,c1ut à ce que fans s'arrêter aux
fins de non-recevoir propofées fur le barreau par Mres.
Deshoulieres & Savournin, ni aux conclulions auffi prifes
fur le barreau par Mre. Deshoulieres en révocation de
l'Arrêt qui permet à Mre. Jaubert de prendre poffeffion
civile du Prieuré, faifant droit aux lettres royaux d'appel
<i0mme d'abus impétrées par Mre. Jaubert, & à fa requête
incidente en ampliation dudit appel, tant de la collation
faite par feu M. l'Archevêque d'Aix dudjt Prieuré à Mre. Savournin, que de celles faites par le Prince de Rohan,
Abbé de Montmajour, du' même Prieuré à Mres. de Char·
faigne & Deshoulieres, enfemble à la requête incidente
dudit Deshoulieres en adhérence à l'appel comme d'abus
dudjt Jaubert envers la collation faite audit Savournin, il
fîlt dit y avoir abus dans lefdites collations; & de même
fuite il fût dit n'y avoir lieu de prononcer filr la requête
dudit Jaubert, tendante en oppolition envers l'Arrêt d"enrégiflrement des 1ettres d'attache rapportées par le Prince
de Rohan; & (ans s'arrêter aux fins prifes par lefdits
Deshoulieres, & Savournin dans leur expédi~nt, tendances
en évocation du fonds & principal, dont ils feraient démis
& déboutés, les parties pourfuivroient pardev3nr le Lieutenant ainfi que s'appartient.
Arrêt du 30 Mai 177~, prononcé par Mr. le Préfident.
d'Enrrecafleaux, conforme aux concluliot:Js,. & qui con-)
damne lefdits Deshoulieres & Savournin aux dépens envers
ledit Japberr des qualités chacùn les concernant, ceux
fairs entre lefdits Deshoulieres & Savournin compenfés.
Plaidant Mes. Roux & Alpheran.
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ARRÊT
XIII.
Le légataire qui a foufcrit l'inventaire des effets de la jùc-,
ceJJiorz, d'après lequel la compofitiorz des hierzs de l'hoirie
a été faite & la légitime fixée, peut-il alléguer des erreurs
& des omi/fiorzs, & denu1Ilder l'exhibition de l'irzverztaire
G' des titres de l'hoirie pour pouvoir obtenir un fupplément
de légitime fur les effets omis?
Ierre ;Peloux, Marchand de foie de la ville de Marfeille, décéda en Janvier 1770. Il fut ptocédé à l'inventaire domefl:ique de fa fucceffion, au bas 'duquel lesDlles. Peloux, l'une époufe du fieur Billet, & l'autre -de
Me. Armand, Notaire, déc1arerent avoir fait la plus exaéle
vérification, & l'approuver tant pour la quantité, la qualité
des effets qui y étaient rapportés, que pour l'appréciation,
fans pouvoir revenir' direélement ni indireélement. Peloux
héritier s'obligea de repréfe.nter & faire compte à fes fœurs
de taus autres effets que l'on pourroit découvrir. Sous la foi
de ces accords, & par aéle du 30 du même mois de Jal}vier, on liquida la légitime qui revenoit aux deux filles
fur les effets compris dans l'inventaire: on rappella en gros·
la conlifiance des effets & leur valeur, fur laquelle obvint
à la Dlle. Billet & à fa Cœur la fomme de 12') 00 liv. Après
cet aéle qui avoit fixé la confifiance de l'héritage & la légitime des filles, la DlIe. Billet eut connoilfance d'un grand
nombre de dettes aélives. Elle tint un aéle interpellatif à
fon frere; elle le requit de lui expédier le double de l'inventaire par lui figné & certifié véritable. Peloux répondit
qu'il ne pouvoit fatisfaire à l'interpellation, parce qu'il avoit
brûlé l'original. La Dlle. Billet préfenta une requête au
Lieutenant, aux fins qu'il fùt enjoint à fon frere de repréfenter l'inventaire, de lui en expédier un double, & de remenre riere un Notaire tous les livres de commerce du
P
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'10URNAL
pere, pour 'être par elle vus & examinés, âvec réferve d'en
prendre telles notes & extraits qu'elle trouveroit bon, pour
réclamer & pourfuivre le p~iement de fa légitime fur les
fommes non paifées dans l'inventaire; & faute de fatisfaire
à l'injonélion, elle demanda qu'il fôt condamné au paiemenr de 8000 liv. du montant de fa légitime fur 96000 liv.
à quoi elle fixa les diverfes créances non mentionnées
dans l'inventaire. Sur la fignificarion de cette requêtt, Peloux déclara perfiHer à fa réponfe, & par Sentence du
1 Décembre 177-2, le Lieutenant ordonna que Pelou x
remettroit dans la huitaine à fa fœur un double de l'inventa ire , & qu'il lui exhiberoit riere Notaire les livres &
papiers de l'hoiriê, & fame de ce faire, il le condamna au
paiement de la fomme de 4000 liv., jufqu'au concurrent
de laquelle il déféra le ferment en plaid , avec dépens.
Appel de la parr de Peloux.
On difoit pout lui, que la Dlle. Pelou x étoit non recevable à propofer des erreurs & omiffions conrre la compofirion qui avoit été faite de l'hoirie parernelle dans l'inventaire du 19 Janvier 1770, parce qu'il éroit fon ouvrage.,
& contre l'aéle de liquidation de fa légitime, parce qu'il
étoit relatif au même inventaire; elle l'étoit conféquemment à demander la repréfentarion des livres de commerce,
titre~ & documens de l'hoirie qu'elle avoit déja vus, & de
l'inventaire qu'elle a,voit parf"itement connu.
Il éroit prouvé par le rémoignage de plu lieurs parens
& amis, que lorfqu'il avoir été procédé à l'inventaire dès
biens de Pierre Peloux pere commun, tous les livres de
commerce, titres & documens de l'hoirie avoient éré repréfentés & mis fous les yeux tant de Me. Armand que de
'la veuve Billet; qu'ils avoient éré examinés par eux; que
le dépouillement en avoit éré fair en leur préfence & avec
leur {ecours; c'eH ce qu'ils ont, déclaré au bas de l'inventaire. Ces mêmes légirimaires l'ont approuvé de nouveau
& reconnu pour leur ouvrage ~J lorfqu'ils ont exigé de Peloux
qu'il)e ret;nît à Me. Porre leur confeil, pour qu'il fît luimême 1.'1 IiqlJid~rion de leurs légitip.1es; ils l'ont àpprouvé·
encore
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161
encore dans l'aél:e du
Janvier, où il étoit dit que les
parties avoient compofé l'héritage des effets mobiliers &
marchandifes qui avoient été trouvés dans la maifon d'habitation & magafin de leur pere fur le pied de l'état efiimatif qu'elles avoient fait encr'elles & leurs amis communs.
Si l'inventaire efi le propre ouvrage des légitimaires
autant que de l'héritier; s'il a été dre{fé fur les livres de
commerce, titres & documens de l'hoirie qui one été
vus & examinés par toutes les parties intéreffées pendant
plufieurs jours, la liquidation des légitimes, faite par leur
propre confeil fur ce même inventaire, efl: définitive en
rout fens, & l'aél:e du 30 Janvier 1770, ratificatif de ce
même inventaire, eH un aél:e final contre lequel les parties
ne peuvent plus revenir, & au préjudice duquel ils ne peuvent plus propofer des erreurs ou omiffions, pour obtenir
enfuite un fupplément de légitime fur les objets prétendus
celés ou oubliés. Chacun fait que tous les contrats, quels
qu'ils foient & quels qu'ils puilfent être, c'eH-à-dire ceux
mêmes qui ont porté fur des droits fucceffifs, font abfolu ment immuables, f,'i!s ont été pa{fés en majorité, vifis
& difPunc?is tahulis, & tout ce qui efi allégué contr'eux
ne fauroit leur porter la moindre aneince. Cene décifion
efl: fondée fur ce qu'il efr jufiifié pour iors ou que tous
les objets rappellés dans les documens de l'hoirie ont été
inférés d,ans la compofition, ou qu'ils en one été rejenés
par des motifs particuliers & refpeél:ivemene reconnus jufres,
& fur ce qu'il n'a tenn qu'à la partie plaignance de mieux
examiner les livres, titres & documens qu'elle a eu à fa
difpofition & fous fes yeux. Elle ne peut pas prétexter,
pour revenir cancre un pareil contrat, d'une erreur ou
omiffion , qui, fi elle avoit quelque réalité, lui ferait perfonnelle.
.
Ces raifons de décider font la bafe & l'ame de la Loi
J 2 , .If. de tranfaBionihus, où il efr dit que quand on a tranfigé filr tout ce qui nous étoit échu par tefl:amellt, on ne
peut pas dire qu'on n'a paél:ifé que fur la premiere partie
du refiamenc qu'on avait lue, & non [ur la feconde qu'on
Annùs l775 & l77 6•
X
�'162
J'OURNAL
ne conrioiifoit pas. Celui en effet qui a eu un tell:ament
en fon pouvoir & en a lu une partie, l'a certainement· lu
en entier, ou du-moins a eu la liberté de le faire. Dèslors ou il a rranligé avec connoiifance de caufe, ou il a
voulu ne pas être infrruir du furplus. Dès-lors il ne peut
'plus prétexter ou d'avoir ignoré ce qu'il a véritablement'
connu, ou d'avoir ignoré ce qu'il n'a pas voulu connoître.
Et en difant qu'il n'a pas lu la feconde partie du teHament,
ou il en impofe, ou il s'accufe d'une négligence volontaire
dont il mérite de fupportet la peine. C'efl: ce qui ef~
parfaitement développé par Vinnius fur la même Loi.
V AB:e de Notoriété de MM. les Gens du Roi de l'année
1738 dit que les aB:es de partage faits non vijis nec di[punais rationibus, font fujets' à refcilion; il fuit 'de là que
dans le cas çonrraire, ces aB:es lient irrévocablement ceux
qui les ont foufcrits en majorité. Decormis, tom. 2, col.
1 S93 , tient pour maxime que li un adulte forci à peine
de fa minorité tranlige avec fon tuteur ou curateur, après
avoir\ lu ou pu lire les pieces jufrificatives, il ne peur en
revenir. C'efr auŒ d'après ceere maxime, que par Arrêt
du 17 Mars 1769, rendu au rapport de Mr. de Gras fils,
Mre. de Boiifon de la ville de Marfeille fût débouté de
fa demande en refcilion envers l'approbation qu'il avoit
faite en majorité du compte que la Dame de Bo'iifon de
Pilles fa mere lui avoit rendu, quoiqu'il alléguât plulieurs omiŒons. Mre. de Boiffon avoit" eu le cotripre de
la Dame fa mere & les pieces jufrincatives en fon pouvoir pendant plu lieurs jours. Il n'avait approuvé le compte'
de la Dame fa mere, qu'après avoir bien lu ou pu lire
ces pieces jufiincatives, & il avoit contraélé vijis & di[punc7is rationibus.
.
La Dame veuve Billet eH en outre mal fondée (continuait l'héritier) parce que l'état des erreurs & omiŒons
prétendues faires dans la compolition de l'hoirie du lieur
Peloux pere eH trop conlidérable, pour pouvoir préfumer
même qu'elles exifrent. La veuve Billet a reçu fon droit
de légitime fur la plupart des articles inférés dans fon état,
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
163
parce qu'ils font entrés d,!ns la compofition de l'hoirie
parernelle. On lui offre en entier pour des fommès bien
modiques, le montant qe ceux qui ne font point entrés
dans cette compofirion. Elle n'a donc aucun fupplément
de légirime à demander, & elle efl: mal fondée à demander
une nouvelle exhibirion de l'inventaire., des livres de commerce , rirres & documens de l'hoirie.
On répondait pour la Dlle. Biller, que la fixation faite
par le Lieurenant éroit hafardée , n'y ayant que l'inventaire
& les papi~rs de l'hoirie qui puirent fixer quelles étoienc les
créances hérédiraires confignées dans l'état qu'elle avait
donné, qui avoient éré omifes dans la compofition de
l'hérirage, qui puirent même en indiquer d'aurres; elle
prorefl:a d'appeller ill quantzim cqntra de ce chef de la
Sentence, même après qu'elle aurait éré confirmée &
exécutée, parce qu'il ne s'agiiroir au procès que de la rémillion du double de l'inventaire & de l'exhibition des
livres de l'hoirie.
Le fieur Peloux (continuait - elle) a - t - il pu appeller
d'une Sentence qui l'oblige à remettre à fa fœur un double
de l'inventaire, & à lui exhiber les papiers de l'hoirie?
Elle obferva que ce refus étoit le fubterfuge qu'il avoit
employé, en difant qu'il avoit brôlé cet inventaire, quoique
dans la fuite il eôt avoué qu'il exifl:oit. L'appel qu'il avait
qéc1aré de la Semence & les faux prétextes fur lefquels il
l'étayait, étaient rout autant de titres & de motifs invincibles pour la confirmer, parce que le fieur Peloux
ne ferait. pas rous fes efforrs pour dérober à fa' fœur la
connoiirance d'un inventaire domefl:ique & des papiers de
l'hoirie paternelle, qui font des pieces communes à toute
la famille, s'il n'avait pas.-Un intérêt perfounel à les tenir
cachées. Quel peut êrre cet intérêt, fi ce n'efl: de mettre
fa fœur dans l'impuiirance de jufl:ifier qu'il y a effeétivement des créances dans l'hoirie, autres que celles qui one
c.ompofé la fucceffion fur laquelle elle a reçu fa légitime?
Il a été fait à la vérité un inventaire domefl:ique, qUi a
X2
�14
JOURNAi
été approuvé & ligné par la Dlle. Billet, quoiqu'elle n'aie
jamais parcouru les livres & papiers de fan pere; elle a
foufcrit aveuglément fan inventaire, &. fa qualité de f. mme,
fan ignorance & fa bonne foi l'ont expofée à toutes fortes
d'embùches. Néanmoins fallût-il filppofer qu'elle a fait la
plus exaél:e vérificltion des papiers, il n'en ferait pas
moins vrai que les divers. effets découverts ne font point
entrés dans la compofttion de l'héritage. Or, ft malgré
cette exaél:e vérification fur laquelle les plus habiles peuvent fe tromper, il eil: vrai qu'il exiite d'autres créances
de l'hoirie, faut-il que la Dlle. Billet fait fruil:rée de [a
légitime fur ces nouvelles créances, & que .pour l'en fruftrer, on lui ôte le moyen de prouver, après les avoir découvertes', qu'elles ne font point entrées dans la compofttian? La Dlle. Billet n'avait pas befoin de [e réferver [es
droits fur les autres effets héréditaires qui pourraient [e
découvrir dans la [uite; la Loi les lui réfervoit, parce
qu'un légitimaire n'eil: jamais cenfé renoncer à [es droits
fur des objets qu'il ne cannait pas ou qu'on lui cache.
Quand la Dlle. Billet s'ell: foumife, en fignant l'inventaire,
à ne pas revenir direél:ement ni indireél:emem fur la qualité, la quantité & l'appréciation des effets dont on lui
a préfenté le tableau, ce n'a pu être & ce n'a été que
relativement aux effets ral'portés dans l'inventaire.
Juin 177">, au rapport de Mr. le Confeiller
Arrêt du
de Robineau de Beaulieu, qui confirme la Sentence avec
dépens. Ecrivant Mes. Pochet & Roux.
�b U
PAL AIS
D E
ARR Ê T
PRO VEN C E.
16 Si
XIV.
Le Lieutenant de l'Amirauti ,peut-il informer jùr la plainte
d'un Courtier Royal qui dit avoir été infulti à raifon de
[es fonélions ?
E I I Mars 1774, le lieur Moreau, Courtier Royal de
la ville de j\1arfeille, expofa pardevant le Lieutenant de
l'Amirauté, qu'il avoit été arrêté dans la Loge par les Syndics de fon Corps, qui lui avoient demandé à voir fon carnet,
& qui lui avoient dit enfuite n'avoir fait cette vérification
qu'à la demande du lieur Jean Keller, qui s'étoit plaint de
ce que le traité concernant la vente faite par les lieurs Barri
& Compagnie érait faux & limulé; le lieur Moreau demanda l'informarion, qui fut prife, & au bas de laquelle il
intervint un décret d'ajournement contre le lieur Keller.
Celui-ci appella pardevant la Cour, tant du décret de foitinformé, que de celui d'ajournement.
On difoit pour lui, que le Juge de l'Amirauté étoit incompétent pour informer; que quand même il auroit été co mpétent, il n'exiil:oit point de délit, & qu'il n'y auroit jamais
matiere pour informer. L'Ordonnance de 1670 veut que la
connoilfance des crimes appartienne au Juge territorial;
pour dépouiller ce Juge, il faut un titre particulier qui l'attribue à une autre Jurifdiél:ion, fans quoi toutes le's procédures que ce Juge pourroit faire, feroient nulleli & caffées,
comme faites par un Juge incompétent.
Ici le Juge territorial, c'eil:-à-dire, le Juge du lieu où lë
délit a été commis, érait le Lieutenant Criminel au Siege
de Marfeille; il avoit feul le droit d'en connaître, d'après la
regle générale; & pour faire celfer ce droit au profit du
Lieutenant de l'Amirauté, il auroit fallu que ce dernier ellt
un titre exprès qui lui attribuât la connoilfance de la ma~iere, foit que ce privilege filt établi en faveur de l'accufé,
L
�l~
JOURNAL
à raifon de la matiere elle-même: or, ce privilege; ce
titre n'exi!1:e nulle part; la Jurifdiaion de l'Amirauté efl circonfcrite, fixée par l'Ordonnance de la Marine, & l'on n'a
jamais trouvé dans cette Ordonnance que la connoiiTance
des injures dites à un Courtier, par un Négociant, dût
lui appartenir. Le fieur Moreau n'a donc pu, par fa qualité
de Courtier, attirer cette conte!1:ation pardevant le Juge de
l'Amirauté; il n'a pas dépendu de lui d'augmenter à fan gré
cette Jurifqiaion cartulaire au préjudice de la Jurifdiaion
univerfelle.
On ajoutoit qu'il n'y avoit pas lieu d'informer, & que
dans la conduite du Sr. Keller, il n'y avait même aucune app:lCence de délit. Il avait, par ordre, & au nom de deux
Négocians de Roterdam ,.demandé pardevant le Lieutenant
de l'Amirauté la confignation d'un boucaud de girofle qui
étoit encore fur le navire; il fut débouté de fa demande,
& pendant procès les fieurs Barri & Compagnie, contre
qui il réclamait ce boucaud, avaient excipé d'un traité de
vente du même boucaud fait antérieurement à fa demande
pal" l'entremife du fieur Moreau; une telle piece devait lui
paroître fufpeae, ce qui lui fit dire qu'elle avait été concertée, & qu'elle ér.oit fimulée; ces termes n'avaient rien d'offenfant ni de flétriiTant pour le fieur Moreau, en confidél'am {ur-tout qu'ils avaient échappé dans un premier moment, & qu'ils avaient été prononcés fans réflexion.
On répondait pour le fieur Moreau, que le Lieutenant
de l'Amirauté était compétent, parce que c'e!1: lui qui con.
n.oît des délits commis par les Courriers dans l'exercice de
leurs charges. Les Courtiers font reçus par les Officiers de
l'A.nirauté , ce qui les rend enfuite ju!1:iciables de ce Tribunal pour roUI' ce qui touche à leurs fonaions, parce que
c'en au Juge qui reçoit un Officier, qu'il appartient principalement de veiller filr lui & fur (es démarches. Or, fi un
Courtier pourfuivi à raifon de quelque malver{ation doit l'être
pardevant le Juge de l'Amirauté, nul dÇlute qu'il ne puiffe
auIIi porrer fa plainte & agir pardevant lui, qU'and il dl: infulré, & qlle l'injure en un reproche de matverfatioD. Si le
OU
�Ne l!;
167
lieur Keller eût voulu rendre plainte contre Je Geur Moreau pour un délit commis dans les fonél:ions de [1 charge,
il n'eut pu fe pourvoir que pardevant l'Amiral: or la même
raifon autorife le fieur Moreau de faire comparoître patdevant lui le fieur Keller, parce qu'il faut décider s'il a
mal géré, s'il ef!: coupable de quelque malverration. Toute
la différence qui fe renconrre dans cette hypothefe, c'ef!:
qu'au lieu d'être querellé, le fieur Moreau ef!: plaignant ;
mais c'efi toujours par le fonds de la matiere que les poinrs
de compétence doivent fe décider. D'ailleurs, pour maintenir une procédure juHe au fonds, il fuffit de trouver quelque raifon qui jufiifie la conduite du Juge, & qui exclue
toute idée d'affeél:ation de fa part; enfin tout Juge efi compétenr pour informer; c'eH-la une maxime univetfellement
reconnue.
Quant à la jufiice de la plainte & du décret, le fieur Moreau s'en rapport oit à cet égard à ce qui devoit rérulrer de
l'information.
Me. Bermond, Subfiitut, obferva qu'il s'agiffoit de décider fi une information prife par le- Lieutenant de l'Ami·
rauté, à la requête d'un Courrier infulté à raifon de [on
état, étoit nulle, comme prire par un Juge incompétent.
Tout délit, diroit-il, doit être pourfuivi pardevant le Juge
du lieu où il efi commis. C'efi l'expreffe difpofition du premier titre de l'Ordonnance criminelle, & cette difpofition
eH généralement ()bfervée, excepté dans cerrains cas qui
font des exceptions à la regle. Ces exceptions font fondées
fur le privilege des accurés ou fur la qualité des délits; il
en efi qui ne peuvent être jugés par les Juges ordinaires;
tels font les cas Royaux ou Prévôtaux. Il eH des perfounes
qui ont leurs caures, tant civiles que criminelles, commifes
pardevant rel ou tel Juge. Tous ces délits font regardés
comme autant de délits donc la connoiffance efi ôtée au
Juge territorial; auffi a-t-il fallu des Ordonnances, des Déclarations particulieres pour en attribuer la connoiffance à
d'autres J urirdiél:ions.
L'Ordonnance de la Marine a affigné au Lieutenant de
,
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PAr. A IS
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PRO V Il
�I68
- Jou R N' A'L
J'Amirauté l'étendue de fa Jurifdiél:ion, & en a fixé les
bornes; on ne voit aucun titre, aucun article précis qui
permette aux Courtiers de fe plaindre pardevant ce Juge
des injures qui leur font f.1ites, foit qu'elles concernent ou
110n leurs fonétions. A la vérité ils font l'ecus & a/fermentés
dans ce Tribunal, & le fieur Moreau e~ conclut que les
accufations dirigées coafre eux à raifon de leurs fonél:ions,
doivent y être pourfuivies; mais même dans cette fuppofition, faudrait-il en conclure qu'ils peuvenE également y porter
leur plainte.
Si le Courtier qui eH accufé pou voit aller pardevant le
Juge de l'Amirauté, ce privilege ne feroit fondé que fur ce
qu'il s'agiroit alors de décider fi réellement le Courtier a
fuivi les regles, les loix de fon état; & dans ce cas,.le Juge
qui l'a a/fermenté, qui a lui-même diél:é les devoirs donc
on lui 'reproche de s'être écarté, pourroit paroÎtre plus ou
moins propre à en connoÎtre que tout autre Juge. Mais ici
il ne s'agit pas de juger la conduite & les démarches d'un
Courtier; le litige roul~. fur des propos tenus par un fimple
Négociant ahfolument étranger à l' Amirallté; le Heur Moreau fe plaint d'une diffamation contre le fieur Keller,
& la difficulté eH de favoir s'il y a réellement diffamation Ol!
non. Ce n'ell point par des argumentations, & en tirant des
conféquences, qu'il eH permis d'étendre ou de reHreindre des
Jurifdiél:ions; cet objet eH trop facré, trop précieux à l'ordre public, pour qu'on pui/fe en difpofer légérement; il faut
des titres exprès, formels, & qui ne pui/fent pas être contenés, pour fonder la compétence d'un TriBunal cartulaire. .
L'on dit bien que tout Juge eH compétent pour informer; mais dans l'efpece de cette çaufe, rien n'obligeoit le"
fieur Moreau d'aller au Lieutenant de l'Amirauté par préférence' au Juge ordinaire, qui étoit également fur les lieux,
& duquel il pouvoit attendre la même diligence que du Juge
de l'Amirauté; ainfi nulle raifon pour rendre compétenc le
Tribunal auquel on s'eH adre/fé.
Me. Bermond difçuta enfLlite les charges de la procédure;
~
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
169
& conclut à ce que l'appellation & ce dont étoit appel
fuirent mis au néant; & par nouveau jugement, le décret
de foit-informé & tout ce qui avoit fuivi, fÎlt déclaré nul, &
comme tel cairé, fauf & réfervé au fieur Moreau de fe pourvoir pardevant qui de droit.
Arrêt du 16 Juin 177'j, prononcé par Ml'. le Préfident de
Reguire, conforme aux conclufions; le fieur Moreau fut condamné aux dépens. Plaidant Mes. Leclerc & Mougins-Roquefort.
ARR É T
XV.
Le luge Eccléjiaflique ne peut connoÎtre du refus fait par un
Curé de célébre,- un mariage, lorique le refus tfl uniquement
motivé fur un fait contentieux.
E
N 177 2 , le fieu.r Jourdan requit le Curé de Valauris
fon Palleur de faire les publications de fon mariage,
& de procéder enfuite aux époufailles; le Curé--s'y refufa.
Le 24 OB:obre, exploit interpellatif de la part du fieur
Jourdan, pour le requérir de publier fes bans; & faute par
lui d'y procéder, il protefia de fe pourvoir contre lui au
Parlement par voie d'abus. Sur la fignification le Curé répondit qu'il ne pouvoit procéder à la publication, que le fleur
Jourdan n'eÎlt jufiifié de la mort de la femme qu'il avoit
époufé à Paris, comme il confioit par la lettre dont il lui
donna copie.
Le 4 Mars 1773, requête du fieur Jourdan au Lieutenant;
il demanda qu'il fÎlt enjoint au Curé de pairer outre à fon
mariage, & à cet effet de le publier fans délai, fous les
peines de droir. Le même jour l décret de foit-montré à
partie & au Procureur du Roi. Le Curé répondit que cette
requête étoit injulle, parce qu'on étoit en temps prohibé,
& qu'on ne lui produifoit point de difpenfe; il rappella ce
qu'il avoit déja répondu au fieur Jourdan, faufà Mr. le LieuAnnées ln 5 & ln 6•
y
�170
10
U R N .-\ LO
tenant d'brdonner ce qu'il trouveroit ju!l:e, 11 quoi il fe con~
formeroit, comme aux ordres de [es [upérieurs ecdéliafl:iques.
Le 13 du même mois de Mars, condulions du Procureur du Roi, qui n'empêche que le fleur Jourdan [e retire
pardevers l'Ordinaire pour en obteni.l' les fins requi[es. Le
1') , [('charge du fleur Jourdan, jqui, attendu la réponfe dLI
Heur Curé, demanda qu'il lui fur enjoint de paffcr outre à
la publication & célébration du mariage d'abord après la
quinzaine de Pâques. Décret conforme. Le 18, le décret fut
lignifié au Curé; le 9 Avril, le Curé, qui n'avait rien répondu, fit intimer un exploit au lieur Jourdan, par lequel,
[ans approuver le décret du Liemenant, nullement & incompétemment rendu, il déclara être prêt à paffer outre à la
célébration du mariage, en ju1l:ifiant par le fieur Jourdan du
décès de [on époufe.
Le 29 Juillet, aél:e du lieur Jourdan au Curé, & requi{jtion de fatisfaire à l'injonél:ion portée par le décret, &
de procéder à la- célébration du mariage. Le Curé répondit
que pour fatisfaire le fieur Jourdan, il procéderoit à la publication des bans, dans l'efpérance de troLlver de nouvelles
preuves de [on mariage contraél:é à Paris. Le 2) Août, nouvel aél:e du fieur Jourdan au Curé, & interpellation de fatisfaire au décret, en faifant les deux autres publications de
bans, & en lui adminiftrant le facrement, fi mieux il n'aimait déclarer par rout le jour être appellant du décret. Le
Curé répondit qu'il ne fauroit continuer la publication du
mariage du fieur Jourdan, après les déclarations qu'il avoi(
reçues, qui conftaroienr l'exifl:ence du mariageO que le fleur
Jourdan s'ohainait de l]ier, & donna enfuite copie du procèsverbal d'une vingtaineo de révélations, toutes fondées lùr des
oui-dires.
Le lendemain 26, requête du Syndic-général du diocefe
de Gralfe, qui forme oppolition au décret du Liemenanr, en
demande la révocation & le renvoi pardevant l'Evêque. Défenfes refpeé1:ives, & le la Juin 1774 Sentence qui, fans
s'arrêter à-la requête du Syndic-gênéral du diocefe de Graife,
�,
DU
PALAIS
DB
PROVENCE.,
171
.l'y déclare I)on rece\'able & ~'a~ fondé. Le 1'5: au même
mois 1 a~pel pardevant la Cour.
On difoi~ pour le Syn,dic-général dudiocefe de Graffe 1 que
toUS le~ Auteurs conviennent qu'en cas de refus du Curé,
c'ell: à l'Evêque qu'il faut recourir; fi le refus ell: arbitraire,
c'ell: au Juge féculier à le punir; s'il n'ell: que fcrupule, c'ell:
à l'Evêque à le lever.. Il ell: vrai que le mariage tient autant
à l'Etat qu'à la Religion, qu'il ell: temporel & fpirituel, &
c'ell: ce mêlange qui occalione les conflits de JurifCliétion .'
le Clergé a la fienne; il en refpeéte les limites tracées par
le Souverain, mais il doit les défendre. On eur pu G,os doute
donner aux Eccléfiafiiques plus ou moins de pouvoir. Mais
qu?on confulte' les Autorités & la Jurifprudence; rout prouve
que l'Evêque feul doit connaître du refus d'un Curé de célébrer un mariage; on a voulu prouver que l'on pOUl'oit au!Ii:
aller au Juge féclilier; mais dès que le Curé donne un motif
jufie, le Juge féculier. efi abfolument incompétent ,. & la
quell:ion ne peut point être appellée mixti lori; le mariage"
, dans notre légil1ation, réunit les deux objets de contrat &
de facrement.
Ce mêlange n"a pas permis d'enlever route connolffance'
aux Eccléfiall:illlles des caufes concernant le marilge, & nos,
Rois leur ont permis de '(;onnolue de la· validité ou invalidité, fuivant les Loix de l'Etat, entre les partiescontrac-,
.tantes; là le facrement l'a emporté; mais' fi des tiers interviennent, leur intérêt l'emporte" & le contrat c,Ïv.i1: pré-.
vaut.
Delà le principe <Lue le Juge ECc~liafl:iqUe' ne connoÎe
que de lœde" matrimonii; delà la confe uence qu'il ne peut
pas y avoir lieu à la prévention, parce
e ces caufes font
exdufivement dévolues par les Ordonnances à la Iurifdiétion,
Eccléfiall:ique. Si la femme du fieur Jourdan, avoir pam, l'Officiai feul pouvait en connaître; la cauk étant alors purement fpirituelle, puifqu'elle était entre conjoints. A pluS,
forte raifon dans cette caufe, 011 le Curé n'a nul intérêt
<:ivil, où il s'agit du lien, & où la fpiritualité doit l'em.-
y
2;,
l
,
�171
Jou Ii N A L
porter fur la temporalité. Il exill:e fans doute des conjectures probables du,mariage du lieur Jourdan; cela feul doit,
felon le Concile de Latran, arrêter le Curé; le Curé peut
donc retùfer; l'Evêque feul doir donc connoître du refus,
qui n'ell: ni arbitraire ni féditieux.
Ce refus n'ell:-il pas foute nu , n'ell:-il pas fortifié par les
révélations? Un feul témoin, dit Gibert, qui dépofe de la parenté, doit arrêter les fiançailles; à plus forte raifun une foule
de dépolit ions plus conlidérables les unes que les autres.
Le Juge d'Eglife ell: compétant pour juger, fi la preuve du
mariage exill:e; il peut décider li dans l'état des preuves, il
conGe d'un mariage valable. Le principe ell: que le Juge
Eccléfiilltique doit juger de l'oppolirion d'une partie qui fe
prétend mariée ou· munie d'une promeffe; à plus forte raifon
de celle d'un Curé. Le refus arbitraire ou féditieux peut feul
inveHir le Juge féculier. Oter à la Jurifditl:ion Eccléliaflique
tous les empêche mens qui tombent en fait, ce ferait lui
tout enlever, parce qu'il y a toujours le fait & le droit.
La connoiffance des caufes concernant l'adminiGration des
facremens eG effentiellement de la Jurifditl:ion EccléliaGique. L'article 4 de l'Ordonnance de François Premier du
mois d'Août 1)39, le décide expreffément, & ordonne que
la Jurifdic7ion Ecclé/iaJlique, en matieres de facremens & autres
prieres fPirituelles eccléjiaJliques , aura lieu, même contre lespurs
laïques, felon la forme du droit. L'arr. 4 de l'Edir de 1610
enjoint aux Cours Souveraines de laiffèr à la Jurifdiélion Ecclé/iaJlique les caufes qui font de leur connoiJ{ance, même celles
'lui concernent les facremens G' autres caufes fPiriwelles &
puremerlt ecclé/iaJliques, fans les attirer deux, fous prétexte
de poJfeJJoire, ou pour quelqu'autre occafton que ce [oit. Enfin
l'arr. 34 de l'Edit de 1695 ordonne que la connoiJ{ance des
caufes concemant les facremens, les vœux .de religion & autres purement fPirituelles, appartiendra aux Juges diEglife ,
{,. il enjoint aux Officiers du Roi, même à lès Cours de
Parlement, de leur en laiffèr, é? même de leur en renvoyer la
connoiJ{auce, fans prétendre aucune Jurifdic7ion ni connoUJanc!!
"
�nu
_PAL.A.IS
,n-E
PROVENCE.
t7~
- des affaires de cette- natnre ,fi ce n'tif! qu'il y eût appel comme
d'abus interjetté auxdites Cours de quelques Jugemens, Ordonnances ou procédures faites fur ce filjet.
Il fuit de ce principe -& de ces Loix, que le Supérieur
Eccléfiail:ique a feul droit d'enjoindre à un Curé de paifer
outre à Li célébration d'un mariage, & que les Juges Royau)(
n'en ont pas le pouvoir; c'ell: aufIi ce que les Parlemens
eux-mêmes ont décidé par les Arrêts les plus folemnels.
Î: Arrêt du Parlement de Paris du 29 Janvier 1716, rendu
fur le requifitoire cie Mr. le Procureur-Général, fait défenfes
aux Officiers du Bailliage de Belleme de rendre à l'avenir
des Sentences portant injonétion de célébrer mariage, à
peine de faifie du temporel; à eux enjoint, dans le c~s où
l'on fe pourvoiroit à leur Siege pour contraindre un Curé
de paifer otHre à la célébration d'un mariage, d'ordonner
que les parties fe retireront devant l'Evêque pour leur être
fur ce pourvu. Le 18 Juin 1749, le Parlement de Touloufe fit défenfe, tant au Sénéchal de Beziers, qu'à cous
autres, d'enjoindre aux Curés de célébrer des mariages. Le
Parlement de Paris en rendit un autre le 8 Janvier 1752,
qui infirma la Sentence du Bailliage de Noyon, qui ordonnoit qu'il feroit paifé outre à la célébration d'un mariage,
-nonobil:ant oppofition ou appellation quelconque.
On répondoit pour le lieur Jourdan, qu'en général la
queil:ion du refus public des facremens eil: de la compétence
du Juge laïque; l'Eglife eil: dans l'Etat, le Curé eil: le Miniil:re & non le maître; la connoiifance des facremens appartient aux fupérieurs ecc1éfiail:iques; ils ont même 11 cet
égard deux puiifances, celle qui vient de Dieu & celle qui
vient des hommes: la premiere leur eil: naturelle; la feconcie
eil: d'emprunt ou de conèefIion; le refus des facremens, quand
il eil: public, eil: a.éte de trouble & de guerre; il appartient
au Juge civil, & n'appartient qu'à lui de le punir. Donc il
n'appartient qu'à lui d'enjoindre pour le prévenir. L~s Ordonnances de 1539, 1606 font expliquées dans l'Edit de 1695,
les facremens & autres chofis purement JPirituelles. Mais le
refus public n'cft pas purement fpirituel. (Art. 3 de la Déc1a~
�,174
JOURNAL
I,\rio!1 du R9i ~e I.7 'i 6, enré~iQrée en ce Parlemenr, pour ~tre
exécuré en ç:onform,iré ges Sain.ts canons" Qrdonnapces & Libertés de l'Eglife Gallicane, rnodifiqltions confenries par le
SçlUveraip, qui n'a (ien dit, & qui n'a point envoyé cette Déclaration aux durres Parlemens. ) La quefiio[l ~eHe; l'Eglife eH
dqns l'Etar; le Juge Civil doir punir l'Ecelélialhque refufant
ou rroublanc; il peut donc lui enjoindre; il ne peut faire des
Loix nouvelles fur les facremens, mais il peur dire à l'Ecelé[IaHique : cOllduife'{-vous dalls vos foncliolls fuivant 1I0S Loix
A
"(" 1es volres.
De tous les facremens, il n'yen a point qui rouche mieux
~ l'ordre poli.rique que le mariage. Il efl: rou,C à la fois facrement & contrat, le Prince l'a voulu; ainG ce font fes
Loix qui ont deGré que le contrat ne pût exirter fans facrement; le Curé même, en adminqfiranr ce facremenc, a
deux caraél:e(es, il eH Minifire de la Loi de Dieu & de la
Loi politique; le Curé, Minilhe de la Loi civile, peur &
doit être enjoint en cas de refus. Suivant les Ordonnances,
le Juge d'Eglife a fa Jurifdiél:ion d'emprunt ou de conceffion,
quand il s'agit de prononcer fùper fœdere; mais quand il s'agit
de favoir Ji fœdus exiflil, c'efl: au Juge laïque d'en connoÎtre. ( Barder, [om. 2, Ev. S, chap. 22; Mémoires du Clergé,
tom. 6, rir. de la Jurifdiél:ion EceléGafiique, n°. 3 l , pag. 53;
Diél:iounaite Canonique de Durand de Maillane, vO. mariage,
pag. 282; Traité fur le mariage, pag. 326, n. 4 & fuiv.;.
Code marrimonial, vO. refus. ) D'ailleurs ici le fieur Jourdan·
a le poifelToir.e, & non efl fœdus. Voilà le vrai princlpe qui
explique le~. Arrêfs qui ont éré cirés.
On ajilu[Oir que le $yndic du Clergé ne pouvait être en.,
vifagé comme tiers, & qu'il n'avait pa,s plus de droir que
le Curé lui-même. Or" le fieur Jourdan lui a demandé fan
rninil1:ere pOlr fon ..ma(Îa.ge, minifiere importanr, minifiere
néçeifdire; il le lui a refufé, fOliS le prérexte qu'il el!; marié,
& qu'il n' J qu'à rapporter la 'preuve de la mort d~ fan époufe.
Mais comment veut-il qu'fi ~'l-pporte certe preuve, il n'a point
d'époufe, ill1'a poinr été marIé? EH-.ce fur une lettre écrite
par un Capucin, qui ne dit pas avoir vu Je ~egiltre. des
,
.'
�DU
PALAIS
Dll
P1\.OVllNCR.
17~
époufailles? EH-ce par une enqu.ête fur un fair donc la preuve
par rémoins n'eft point admilIible, fuivanc le Code matrimonial, tom. 2 , pag. 736 & 738 & l'Ordonnance de
1667?
L'Evêqlle n'eH Juge ni. de droit ni de fair; s'il y avait
un mariage, on en appellerait comme d'abus, & l'Evêque
n'en feroit point le luge; il ferait conrraire aux Loix du
Royaume, dont la man.utention a'ppartien~ au.x Juges féculiers; mais il n'y a POlOt de manage. QUI dOlr donc connoÎrre de cerce conceHarion de fair? Le Curé eH le Mi..
t1iltre des facremens, mais non le maître; il eH renu de les
adminiftrer fuivapt les Loix de l'Erar. Un refus defporique
eft un crime, un rrouble fair à la faciété; on pourfuir le
Curé féditieux qui refufe defporiquement": Si le refus eft un
crime, l'injonB:ion de ne pas refuier eH de droir dévolue au'
Juge Civil.
Mr. l'Avocat-Général de Califfanne pafa la quefiion de
[avoir fi le Juge EcclefiaHique eH compérenc pour juger le
refus que fair un Curé de célébrer un mariage, quand ce
refus porte fur une queHion de fait.
Qu'eH-ce que le miniftere ecc1éfiafiique ( obferva-r-il )?
Quelle dt fa nature & dans quelles n'tains eH-il dépofé?
Quels font fes rapports avec' la p'uiifance féouliere! Prier &
faire de bonnes œuvres d'un' côté; de l'atHre, enfeigner &
adminiHrer les [acremens: Tel efi en deux mots l'objer &
la mariere du miniftere eccléCraHique. Ramener & maintenir l'homme dans le devoir par un lib're ufage de fa liberré, quant à cerce partie de lui-même qui ne peut ce-ffer
d'être libre, c'efl: la parr du facerdoce; le ramener par la
perre de la liberté, quant à la partie de l'homme qui peu t
en êrre privé, & qu'il mérire de perdre, quand il en abufe ,
telle eH la parr de l'Empire. Ainfi, Puiffance fouveraine, &
qui peur êrre defpotique d'un côré; de l'aurre, Puiifance économique, & qui doit êrre paternelle.
Cette Eglife qui eH dans FE rat , a reçu de la bonté des
Souverains une porrion d'autoriré circonkrii:e & limirée: Les
Princes ont voulu qce ce qui étoir purement fpirilUel, ftit
�17 6
Jou
RNA 1.
laiffé à la Jurifdiainn des Minifl:res de Paix; delà une conféquence nécelfaire: tout ce qui n'eH pas exprimé eft exclu.
Le MagiHrat chargé de l'u~iverfalité de l'autorité du Prince
doit veiller fans celfe fur fes droits, & prendre garde qu'on
y porte la moindre atteinte. Le Clergé n'étant, comme difent les Saint Peres, que le voyageur qui demande permiffion de palfer fur les terres d'un étranger, ne peut pas
feul y faire des Loix proprement dites; il eft a!l:rein.r à
l'exécution de celles de l'Empire pour le temporel, & ne
jouit que de l'autorité que lui accorde le Prince.
Les facremens font fans doute l'objet principal de la Religion & de fes Minif!res; ils doivent en même temps être
celui de .l'attention des Magifl:rats; ils doivent donc en connaître, & pour leur refus arbitraire, comme d'un cas privilégié.
~,
.
Le mariage conferve & perpétue la fociété; il efl: donc
de l'elfence du Magifl:nit politique d'y avoir l'œil fous la
proteaion des Loix civiles; le mariage a été fanaifié par
Jefus-Chrifl:. Mais le mariage, qui n'eH: que l'union de l'homme
& de la -femme, exill:oit avant le !àcrement, qui ell: le rit
extérieur établi pour fanaifier cette union; l'Eglife a même
été long-temps fans que fes Minifl:res eulfent parr à la célébration; alors elle réclamoi~ contre ces ufàges. L'Empereur Leon, à la fin du neuvieme fiecle, fut le premier LégiHateur qui rendit la bénédiétion nécelfaire, en déclarant
nuls tous les al1lres mariages. Cette Loi fut enfin admife &
pratiquée par tous les Princes Chrétiens. Le Prêtre efl: le
Mini!l:re que la Loi a librement choili pour recevoir un aae
auffi eifentieJ; il ne peut refufer fan mini!l:ere que du confentement de cette même Loi, qui a remis la force coaaive
entre les mains du Magifl:rat féculier. L'Eglife n'a donc pas
le pouvoir d'apporer des empêchemens dirimans; ceux qu'elle
indique ne peuvent avoir de réalités, qu'adoptés par la Loi
civile. Mais le devoir du MiniHre eft d'examiner l'état de
ceux qui fe préfentent pour contraaer; fi, felon la Loi, ils
ont quelque incapacité perfonnelle, s'ils ont manqué à quelque
formalité, il doit refulèr fan minifiere.
Le
�\
D U
PAL AIS
D Il
PRO V Il NeIl.
. 177
Le mariage eH en même temps un contrat civil & un facremenr; il eH donc fournis aux deux Puiffances, même par
rapport à· la validité du'lien. Comme contrat, il dépend
uniquement de la Puiffance féculiere; comme Sacrement,
il dépend de la Puiffance eccléGaHique; & comme il n'y
a pas de mariage fans Sacrement, ni de Sacrement fans
confenremenr légirime, l'Eglife & l'Erat exercent leur autorité fur le mariage conGdéré comme contrat & comme
Sacremenr.
Mais ce contrat étant' le fondement du mariage, & en
ayant roujours éré confidéré comme la matiere, les minifhes de l'Eglife ne font pas les maîrres de refufer arbirrairemenr ce Sacrement; ils en font redevables au peuple;
& lorfqu'ils le conferent aux fideles qui le demaodent, ce
n'efl: ..point une grace qu'ils accordent; c'ell: un devoir
qu'ils rempliffent; le refùfer arbirrairemenr, ce ferait non
feuleme'nt être il1juf!:e envers les fideles, mais coupable
envers l'Etat dont ils violent les Loix.
Le pouvoir du Prince- efl: direél: fur le contrat, parce
que le Prince feul peur en régler' la narure & les conditions : indireél: quant au Sacrement, parce que le contrat
en érant la mariere, s'il eH nul, le Sacrement n?en a plus
à laquelle il puiffe s'appliquer.
Le pouvoir de l'Eglife eH de fa nature uniquement renfermé dans le Sacremenr, & c'ef!: une maxime univerfellement reCiue dans les Parlemens, que les Juges d'Eglife
ne peuvent concoîrre que de fœdere matrimonii. Tout ce
qui rient au fpiriruel, mais qui ne tient qu'à celi, efl: de
leur compérence ; il fufflt d'ouvrir les livres, pour voir que
les Juges féculiers fom fondés à connoîrre du poffeffoire
des cho(es les plus fpiriruelles; c'eH une maxime confacrée dans les preuves de nos Libertés, ch. 36, n. 17,
ch. 38 , arr. 8 , n. S. 'C'efl: le (entiment de tous les Aureurs
.I.es plus accrédirés. (Guipape dans (es décir. Ferrerius dans
fes nOIes; Van-E(pen, de recurfu ad prùicipem, chap. 4,
D. 3; Papon , liv. l , rir. 2,}, D. ~3 & 24,) Mr. Le
ain,
Années 1775 & 177 6•
Z
�17S
Jou
RNA
L
Avocat - Général, établilfoir en 17°9 les mémes prin-'
clpes.
Il dl: faux, difoit en 176 [ Mr. Lorry confillté pour la
fuppreffion d'une- thefe de droit qui avoit été [ou tenue à
Caen, que les caufes de mari.lge foient du relfort des
Juges eccléfiafl:iques. NOLlS croyons en France qu'ils ne
prononcent [ur le lien que par la conceffion de nos Rois.
C'eH ce qui faifoit dire à Mr. Joly de Fleury, AvocatGénéral, le 7 Janvier 170"9, que comme la Jurifdiél:ion
eccléfiaHique eH une exception du droit commun, il faut
la refl:reindre dans fes bornes légitimes. Les Eccléfiall:iques connoilfentdonc de ce Sacrement en tant que Sacrement, par rapport au lien du Sacrement, comme, par
exemple, par voie de nullité. Quand les perfonnes' qui
l'ont concraél:é veulent le faire annuller par morif de violence ou défaut de liberté, elles s'adrelfent à l'Official; c'eH
ce qu'établilfoit auffi Mr. Talon en Sorbonnè en 1677 an
fujet d'une thefe dénoncée, & qui fut fupprimée.
Dans les dixieme & onzieme fiecles, temps d'ignorance & de barbarie, l'abus de la Pui1fance des Clefs déféra les caufes de mariage au feul Tribunal eccléiia!l:ique;
mais ce n'était ni le droit ni la regle, c'étoit une yfurpation. Par degrés, la Pui1fance temporelle a recouvré une
partie de la Jurifdiél:ion primitive, malgré les oppofitions
des Eccléfiall:iques; mais ce n'efl:-là qu'un reto'ur imparfait
au droit primitif des Princes. Quand nous avançons, difoit
en 1736 Mr. de la Chalotais, que le Juge eccléfiaflique
connaît du lien de mariage, cela n'efl pas encore fi général
qu'il n'y ait des exceptions; par exemple, quand la queflion
de la validité d'ull mariage efl incidente d une affaire temporelle , le Juge eccléfiriflique n'en peut connaître. Cela efl:
ainfi réglé, 1°. pour prévenir l'abus par kquel, fous pré':'
texte de fpiricualité, les Juges d'Eglife s'étoient attribués
la connoi1fance de la plupart des canfes temporelles; 2°.
parce que le Souverain ne vetlt pas confier au Juge d'Eglife la connoi1fance des affa~r~s temporelles, & qu'il au-
...
�DU
PALAIS
Dl!
PROVENCE.
179
torife les féculiers à juger incidemment des fpirituelles.
L'autorité que refus-Chrill: a donné à fan Eglife n'a pas
diminué celle des Souverains fur le mariage. Jefus-Chrill:
n'ayant pas touché à ce privilege de la Souveraineté, il
doit rell:er inviolable. Or l'aurorité des Souverains ne le
feroit pas, fi l'Eglife avait auffi bien qu'eux uue autorité
fouveraine fur le mariage. L'autorité de Louis XVI. en
France ne feroir pas inviolable, fi une Puiffance fouveraine,
étrangere & indépendante y venait faire des loix fur les
mêmes objets fur lefquels notre Monarque les fait en vertu
de fa fouveraineté; le pouvoir de l'Eglife auireroit néceffaire ment celui du Prince, ce qui ell: cancre les principes
les plus inébranlables & les maximes les plus certaines du
Clergé de France fur l'autorité de nos Rois.
Si le Prince. veut faire une loi irritante fur le mariage,
& l'Eglire une autre, ou une loi qu'il regarde comme urile
pour Je bien temporel de fes fujets & le bon ordre de là
fociété civile, & que l'Eglife la regarde comme préjudiciable au bien des ames, quelle autorité l'emportera? qu'arrivera-l-il, fi les deux Puiffances ne s'accorde'nt pas? Nos
Théologiens en feignent qu'ils ne peuvent pas les accorder
toujours, puifqu'ils prétendent que fi les Princes aboliffoient
un empêchement approuvé par l'Eglife, celle-ci auroit droit
de s'en plaindre: à qui s'en plaindroit-elle? qui jugeroit?
où ferait l'autorité fupérieure à celle des Souverains & de
l'Eglire à laquelle il faudroit recourir? Si le Prince veut
retrancher une condition que le Juge d'Eglife trouve' néceŒ1ire dans le mariage, il ure du pouvoir que Dieu lui a
accordé; il prononce fur un fait de fon reffort; le Juge
d'Eglife ne peut le critiquer & entreprendre fur fa Jurifdiél:ion.
.
Les Evêques ne peuvent paffer les bornes des objets
purement fpirituels; leur but doit être le bien d'en haut,
leur pouvoir celui des ames; pouvoir de paix & de douceur, & non de contrainte.
En enet, tout ce qui n'eH pas effenciellement fpirituel,
eH de la compétence du Juge laïque. C'ell: ce qui ell: établi
Z2.
�Jou RNA L
par l'Ordonnance de François Premier de 1)39,
4-:
la J urifdic7ion ecclé{ia.Jli'lue ès matieres de Sacrement & autres pures !pirituelles a lieu. L'Edir de 1610 enjoinr aux
Cours de Parlement de laifier à la Jurifdiétion eccléfiafiique les caufes de leur connoilfance, même celles concernanr les Sacremens & aurres fpiriruelles & puremenr ecclé·
.fiaHiques. Enfin l'arr. 34 de l'Edir de 169'5 veur que la
connoilfance des caufes de Sacremens, Vœux de religion
& aurres purement fpirituelles, apparrienne à l'E gl ife.
Il efi donc cerrain & de principe que le pouvoir de la
Jurifdiétion eccléfiaHique efi limiré abfolUnlenr à ce qui efl:
puremenr fpiriruel, & que pour qu'elle foir compérenre fur
une caufe à l'exclullon des Juges féculiers, il faur, fdon
la lenre des Ordonnances, que cetre caufe foir purement
fpiriruelle, & même en ce cas les Magifirats fèculiers peuvenr en connoirre par la voie de l'appel comme" d'abus;
il faut en outre difiinguer les caufes elfentiellemenr fpiriruelles, d'avec celles qui ne le fonr pas; celles-là appartiennent exclullvement aux Juges d'Eglife , comme le démontrent roures les Ordonnances, excepté -par la voie de l'appel
'Comme d'abus; lu lieu 'que les aurres renfermant fouvent
.du temporel, fonc porrées aux deux Juges eccléfiafiiques
-Pc féculiers, chacun pour l'intérêt qu'il peut }' avoir.
Il ne fàut pas confondre non plus (continua Mr. l'Avoéar-Général) le principe de compérence enrre deux J urifdiél:ions- qui dérivent de la même Puilfance, & celles qui
dérivent de deux Puiffances indépendances. Si elles émaUent de la même Puiffapce, l'efience de la caufe & ce
qui domine. en elle, dérermine la Jurifdiétion où elle doit
être porrée; mais fi elle dérive des deux, chaque Jurifdiction conferve ce qui appartient à la Puiffance dont elle
émane. Ainfi lorfqu'une caufe effentiellemenr fpiriruelle a
rapport avec l'ordre public & le gouvernement de l'Erat,
là Puiffance remporelle en prend connoiffance; c'efl: la
difpofirion même de l'arr. 30 de l'Edit de 169'5, & cerre
différence efl: la caufe de l'erreur de plufieurs Auteurs:
une autre erreur efl: dans l'Arrêt de Vitri du la Juin 1691.,
Igo
arr.
�DU
PAL Al S
DE
PRO VEN
é 1!.
18 r
.rapporré fous un titre fautif au Journal des Audiences, &
qui n'a aucun rappo~t avec ce que l'Arrêt a véritablement jugé, & qJi en. cependant la bafe de la décifion de
Me. Coudert en fon Code eccléfiafiique; du Code des
Curés, rom. r, n. 293, pag. 487; de Pothier dans fOll
traité du contrat de. mariage, tom. l , pag. 437; de Duperray dans fon traité des diJPenfes de mariage; de Durand
de Maillane, va. mariage. Cet Arrêt ne jugea pas, comme
le dit le Rédaéteur du 'Journal des Audiences, que le JUbe
laïc ne pouvoit connoÎtre en aucun cas du refus du Sacrement de mariàge. Cet Arrêt ne juge pas non plus que
les Juges.Royaux ne pui1fenl pas ordonner à un Curé d'adminifirer le Sacrement de mariage; il a dé"idé qu'un Juge.
qui ne pou voit pas connoître des cas royaux, érait incom-'
pétenr dans une matiere de mariage; il a jugé qu'on ne
pouvoit enjoindre à un Curé de marier un fils mineur fans
le confentement de fot! pere, ni à des Notaires èe recevoir l'engagement des deux parties pour un mariage
contre les Loix de PEglife & de l'Etat. Le Parlemt>nt a
décidé que les Juges de Vitri mérit~el1t l'inrerdiétion
d'après les circonfrances, & non fur le fondement que
les Juges Royaux ne pouvoient 'enjoindre d'adminil1:rer le
Sacrement de mariage.
. Après avoir établi quelques principes généraux fur la
Jurifdiél:ion eccléfiafiique en général , foit en droit, (oit
en fait, Ml'. l'Avocat-Général patra àUX moyens p:.rticuliers de la caufe. Il doit être convenu (obferva-t-il) que
le Juge eccléfiafiique ne peut connoître du mariage que
de fcedere matrimonii, &. dans un cas purement fpiriruel.
Or ici de quoi s'agit-il? Le fieur Jourdan s'eH préfenté à
fol1' Curé pour le marier. Quel fut le motif du refus du'
Curé? Un empêchement dirimant : Vous êtes marié, lui
dit-jl; j'en ai la preuve; jufqu'à ce que vous la détruifie'{
par l'extrait mortuaire de l'otre ftmme, Je .'le puis pas VOIlS
maner.
Quelle tifl cette preuve, a répondu le fieur Jourdan? Le
,Curé la lui a communiquée; le .Geur Jourdan n'a pas cru
�181.
JOURNAL
qu'elle f!'Jt [u!1i[ante. Il a, pré[enté req\lête~ au Lieutenant
pour faire. injonction au Curé; il a été ordonné qu'elle
lui feroit montrée; alors a-t-il décliné la Jurifdiction du
Lieutenant? Non; il s'y eH [oumis, il a dit qu'il feroit
ce qu'ordonneroit)e Lieutenant; décret qui lui ordonne
de procéder après la quinzaim: de Pâques à la publication
des bans & à la célébration du mariage. Ainu il ne s'agit
dans cette caufe que de la vérité & de la preuve du motif
du refus du Curé; c'eH-là abfolument un point de fait qui
ne peut être de la compétence du Juge eccléGaHique.
La queflion , dit Lacombe, fi des parties ft font ou ne
ft font pas promis mariage, efl de la Jurifdic7ion. du Juge
fèculier, .:;. non de celle du Juge d'Eglift : il en efl de cette
fjueflion, ajome-t-il, comme de celle de [avoir fi un mariage
a été ail n'a pas été contrac7é; ce font des faits dont le Juge
d'Eglift ne .peut point connoîrre. Mr. Bourdin dans fa paraphrafe fur l'art. 1 de I~Edit de 1 S39 fur la feconde queftian; Expilly dans fes Arrêts, part. 2; Rehuffe, part. 12,
& les C.onférences de Paris, font auffi la même difiinctiQn. (Lacombe, Durand de Maillane, Mémoires du
Clergé, rom. 6, tit. de la Jurifdic7ion ecclij/aflique, n. 3 l ,
pag. n.) Enfin le célebre Mr. Talon dilüit en 1636, que
touchant les matieres & queHions de mariage, il s'agit du
fa,it ou du droit [ur fa validité. S'il s'agit d'un fait. con[tant [ur lequd on 'a appuyé la validité d'un mariage, alors
la connoiifdl)Ce en appartient à l'Official, parce qu'en ce
cas rien n'ell: en controverfe, que la feule validité que l'une
des parties foutient 'réfulrer de ce fait confiant, & l'autre
:(outient qu'il n'eH PilS, fuffifant pour établir la villidité d,'un
mariage, fur quoi le Juge d'Eglife, qui feul connaît de la
validité de ce Sacrement, interpofe fan jugement: fi au
contraire)1 s'agit de la. vérité du fait., alors la connoiifance
en appartient au Juge Royal, quia fjuafi de matrimonii paf
feffirio agitur.
",
.
'
Er; efFet, il ef1: néceifaire que le Curé donne [es motifs..
L'Arrêt de Réglemènt du Parlement de Paris dl: précis
[ur ce point; il fe trouve même daus les Mémoires, du
,
�DU
PALAIS
Dl!
PROVl!N'Cl!:
tg3
Clergé. Il f<lut que la nature du motif donné par le Ouré
& connu, détermine la compétence du Juge auquel il
faut s'adreffer; fi, par exemple, l'emp~chetnent dirimant
portoit [ur l'impuiffance, la parenté, ce [eroit à l'Official
qu'il faudroit s'adreffer, parce qu'alors il s'agirair de feedere
ml1trimonii. Mais lor[que l'empêchement dirimant dépend
d'un fait contentieux, alors c'efi au Juge féculier qu'il faut
recourir~ Pour établir la vérité du mariage fuppofé par le
Curé, il faulra peut-être recourir à une enquête; fi l'atle
de mariage [e rrouvoit dans des regifires perdus ou brûlés,
elle ne pourrait être faire par l'Evêque; ce n'efi donc pas
à lui qu'il faut recourir, mais au Juge féculier.
Mais le motif du refus du Curé étoit-il [uflifant (contioua Mr. l'Avocat-Général)? Ce refus n'étair-il pas illicite & fans cau[e? La preuve d'un mariage ne peut être
faite autrement que par un aél:e qui le confiirue. Ici la
preuve de [on exifience n'étoit donc pas faite. En eIFet, fi
le fleur Jourdan avoit été réellement marié à Paris, niefi_
il pas plus que vrai[emblable que l'on en auroir eu des
nouvelles ou des indices? L'enquête donnera - t - elle une
nouvelle force aux deux adminicules de preuve qui exil!oient
déja? La preuve par témoins fuflifoit autrefois pOlir vérifier un mariage; mais le Concile de Trente a dérogé à
l'ancien droit, & a établi que la preuve par écrit était
néccffaire : habeat parochus librum in quo conjugum & tertium nomina diem'lue & lOCllm colltraaï matrimonii deferibat,
quem diligenter apud Je cuflodiat (feR: 24, ch. 1.)
Nos Princes d'ailleurs y ont pourvu, & ont voulu que
cette preuvè -Ce fît par écrit. L'art. 40 de l'Ordonnance
de Blois, l'art. 12. de l'Ordonnance de 1606, l'arr.. 4°
de celle de 1629, l'art. 7 de l'Edit de 1639, défendent
de recevoir la preuve par .témoins des prameffes de mariage. L'arr. 9 du titre 6 du Statut fynoclal du dioce(e
d~ Grenoble. établit la même maxime. La preuve que
l'Ordonnance defire el! l'extrait des regil!res; & s'il n'y
en a jamais eu dans le lieu, alors on obtient la permi[fion du Juge Roya.l, ~our le faire vérifier tant par titres
�18~
.
temolOs
,
JOURNAL
que par
c'ell: dooc au Juge Royal qu'il faut
s'adreifer.
Le' cerrificat même du Curé figné par lui & fes témoins
ne fuffiroit pas pour prouver que le mariage a .été contraél:é; fi ces cerrificats éroient reçus en Jufl:ice, il n'y a point
de famille qui ne pût être troublée. Il pourroit fe trouver,
difent les Conférences eccléfiall:iques de Paris fur le mariage, IiI'. 2, pag. 63, des témoins & même des miniflres
qui, poujJès par un vil intérêt, fe proflitueroient jufqu'à
donner, des certificats pour 4ttefler qu'un fils de' famille fe
feroit marié, fans même qu'il y eût penfè. Auffi ce fut-là
le motif de l'Arrêt' de Régl()[l1enc de 1697 du Parlement
de Befançon.
'
Le Curé n'avoit donc pas des preuves; le refus de marier étoit donc fans motif; l'injonél:ion qui lui avoit été
faire, ér,oit donc. dans les regles, & ne pouvoit point le
bleifer, puifqu'il y avoit acquiefcé. Le Vicaire-Général éroit
également non recevable à venir revendiquer la matiere
auprès du Lieutenant, parce que tour ce qu'il pouvoit imagin).r, éroit de regarder la conteHarion comme mixti fori,
c'en-.à-dire, comme mêlée de temporel & de fpiriruel,
& dans ce cas la prévenrion auroit eu lieu conrre l'Official ;'
le Lieutenant avoir éré invèfli de la mariere le premier;
dès-lors il éroit devenu compétent, il ne pouvoit plus'
s'en deifaifir.
.
Mr. l'Avocat-Général conclut à ce qu'en concédant aél:e
au -fieur Jourdan de ce qu'il n'entendoit faire porter la fin
de non recevoir prononcée par le Lieutenant· ni fur la'
tierce-oppofitioll qu'il. reconpoilroit avoir lieu contre les
Sentences en faveur du tiers non oui, ni fur l'aél:ion du
Syndic du diocefe de Graife qu'il reconnoiifoit pouvoir
ir,t~rvenir dans les aftaites concernant le Clergé, .& de
ce que 'Ia fin d~, non receyoir ne pOrloit que fur l'incompétence du Juge ,d'Eglife , ,tomes les fois 'qu'il ne s'agit
pas du lien~, mais d'un e,mpêch~tpe_nt de fait je ta Semence
f~t to?firmee avec. ,renvoI" amende.
,',
_i
Am:t du 20·JulU 1775,;, prononcé iPat M,_~e(llremiej:,
,,
l?réfidenr ,
�i8~
PréGdent, q'ui concede aél:e à Jourdan' de ce 'qu'il ne conte He point au Syndic du diocefe de Gra{[e, ni le droit
,d'oppoGrion porté par l'Ordonnance de 1667, en faveur des
tiers non ouis, ni le droit d'intervention & d'aél:ion portée
dans l'arr. ~o de l'Edit de 169) ,en faveur des Syndics, foit
générau'x, foit parriculiers du Clergé, enfemble de ce qu'il a '
toujours entendu appliquer uniquement la fin de non-recevoir au cas dont il s'agit, du refus morivé par le Curé
fur un point de pur fail & de po{[e{[oire, & qui déboure le
Syndic du diocefe de fan appel, avec renvoi, amende & dépens. Plaidant Mes. Simeon & Gaffier.
DU
PALAIS
DE
ARRÊT
PROVENCE.
.
XVI.
La fuppref!ioll d'un bénéfice, l'union d'un bénéfice a un autre
[Ollt abufives, s'il n'y a Cattfè fuffifallte de fuppre.f!ion ou
d'union.
.
Peut-on appeller comme d'abus d'une Ordonnance du Juge
d'Eglife, quoique confirmée par Lettres-patentes?
L
E Chapirre de l'Eglife Carhédrale de la ville de Marfeille'avoit réglé en 1736 & 1738, par des rranfaél:ions,
le prix des difiributions en bled & en vin dévolues de droit
aux Bénéficiers. Des temps de cherté furvinrenr, & en 17)7
les Bénéficiers voulurent revenir contre ces rranfaél:ions ,
attertdu la léGon. Le Chapitre oppofoir des fins de nonrecevoir; ~rrêt en 17) 9 qui déboute les Chanoines, & quant
au fonds, déboute les Bénéficiers en l'érar. En 1772., les
Bénéficiers demanderent une noilvelle fixarion pour les diftributions, tant en bled qu'en vin. Pendant l'inftance parut
le Brevet de Sa MajeHé du 1) Mai 1773, adrelTé à M.
l'Evêque de Marfeille, pour procéder à la fuppreffioll des Bénéficiers.
Cependant le procès fur les rranfaél:iolls fe pourfuivoir,
& le 30 Juillet il fur ordonné un rapport fur la léGon. Le
Années 1775 & 177 6•
Aa
�IS6
Jou
R 'N A. L'
3 AOt\t~ délibératÎoh par laquelle le Chapitre déclare donner
tous les conlentemèns qui peuvenc le concerner à la fuppreffion des feite bénéficiatures dé fon' Eglife, & donne
pouvoir au fiéur AdminiHrateur de ptéfencer requête à M.
l'Evêquè à raifon de cette fuppreffion.
Le 4 AQùt la requête fllt préfentée, & le même jour intervint une Ordonnance de M. l'Evêque, qui nomme l'Abbé
de Mazan, CHanoine de St. Viél:or , pour prendre toures les
procédures req'uifes fur le fait de la fuppreffion. Le 14 Aoùt
les Syndiés des Bénéficiers demanderet1t communicarion
du Brevet de Sa Maj,elté. Le 2 l on leur fignifia l'Ordonnance de M. l'Evêque, & la requête du Chapitre pour com:paroître devanc le Comrni1faire. Ils fu,rent en rendus , & le
16 Septembre la Communauté de la ville de Marfeille forma
oppofit.ion, qui fut fuivie de celle des Bénéficiers.
Les Bénéficiers, fur plulieurs fommarions, remirent un
état de leurs' revenus. Enquête, procédure de commodo & incornmodo, jonél:ion de p1ufieurs Arrêts à la procédure, demande du Confeil municipal d'êrre elltendu, ce qui lui fut
accordé. Le 17 Décembre, requête du Chapirre pour fiatuer définitivemenc fur la procédure. Le 17 Août 1774,
conclu fions définitives du Promoteur. Le 30' décret de fuppreHion ,des feize bénéficiatures; un'ion de leurs revenus
<juelconques à la manre Capitulaire, à la cha,ge de remplacement par des Prêtres amovibles. Dans le courant du
mois de Septembre, le Roi dOfil'la des Lettres-pàtentes confirmatives de ce déHet, pourvu qu'il ne renfermât rien de
contraire aux faims décrets, confl:itutibns canoniques, priYileges, franchifes & l'ibertés de l'Eglife GaUicane & aux
droirs de la Couronne.
Le 1') Novembre, ks Bénéficiers fe rendirent appellans
comme d'abus de 1'0 rdo.nnance de M. l'Evêque de Marfeille, avant 1'enrégifhement des Lettres-patentes, qui ne
fe fit que le 2 l du même mois, & demanderent enfuice
par requête incidente la révocation de l'enrégiHrement.
On propofait pour les Bénéficiers trois moyens d'abus.
La procédure en fupprelIioll ( diraient-ils) eft ·a-tte'lltatoire
�DU
PAL AIS
D Il
PRO V :I! N C D.
( 187
ayx confiirutions canoniques & aux libertés de l'Eglife Gallicane. En effet, on doit confidétet les unions comme odieufes,
& il faut une caufe jufie & raifonnable pour y parvenir. Cela ell:
fondé furune .difpofition du Concile de Conll:;wce & du Concile
de Trente. Pour que la caufe fait juHe & raifonnable, il faut
qu'il y ait néceffité évidente & utilité; ce font-là des principes auxquels il faut rendre hommage; & en les appliquant
à la caufe, on voit que par la fupplique les Chanoines reconnoilfent la néceffité du nombre des Prêtres qui doivent
remplacer les Bénéficiers; & !lans les circonll:ances des
chofes, il n'y a point de né_c.effité de détruire, mais de conferver; l'on ne voit clans la démarche du Chapitre que des
motifs inadmiflïbles, qu'un prétexte pour terminer des procès
qui n'étaient intentés que pour fe procurer des alimens; que
ce moyen .d'abus ne fauroit être plus frappant & plus contraire
au droit pub-lic: car on ne pourroü retirer aucune urilité de
la fuppreffion; l'effet ne pourroit être que dangereux; la
,dignité du cuire ne pourroit qu'en fouffrir, par le fervice des
gens à gages qui pourroient n'être point des Minilhes vertueux, mais des gens qui ne fubIiHeroient que par intrigue.
Auffi c'ell: avec raifon que Furgole & Van-Efpen, en parlant des Vicaires perpétuels, difent qu'ils font gens fournis
à la Loi, & non aux hommes.
Le fecond moyen confinoit en ce que l'Ordonnance avoit
produit un renverfement de la confiiturion particuliere de
l'Eglife de Marfeille. Anciennement les Chanoines & Bénéficiers vivaient en commun; dans la fuite il fut formé
trois c1alTes; favoir, les Chanoines, les Bénéficiers & les
Serviteurs. Les Bénéficiers par leur dénomination font Clercs
intitulés; par ce moyen ilS peuvent réfigner leurs bénéfices;
par les Statuts ils avaient droit d'option, & les Chanoines
éraient fournis à montrer leur livre de dépenfe aux Bénéficiers ,'& à les appeller lorfqu'il s'agilfoit d'aliénation; ce qui
les conll:ituoit vrais membres & vrais titulaires de l'Eglife.
Les Chanoines, en obtenant une femblable Ordonnance, one
trompé le vœu des fondateurs, & ont diminué le lull:re épif.
copal., en. di~inuanr les collation~.
-
Aa
2.
�'188
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RNA L'
Le troilieme moyen d'abus réCulroit de l'opprelIion exer·
cée par le Chapitre, puifqu'il ne s'agiffoit point ici de fU[Jpreffion des Bénéficiers par roUt le Royaume, ni d'arrangement général à raifon de cet objet; la procédure en Cuppreffion' éroit abulive elle-même dans' Ces motifs & dans fes
moyens, parce que la religion du Roi avoit été filtprife,
en expoCant que les Bénéficiers étÇJient Prêtres du bas chœur;
tandis que rous les titres indiquoient qu'ils étaient C!"rcs
intitlllés, & en expofant que la Cuppreffion élOit nécèffJire
pour terminer les procès, dans un moment où il n'érait
quef!:ion que d'un procès d'alimens; abuGve en elle-même,
en ce. qu'on avoit perCuadé au Gommiffaire qui avait procédé, que la demande des Chanoines était chofe de {impie
arrangement; que le Roi avoit tout décidé à cet égard, &
qu'il n'y av,oit'plus rien à faire; en ce que les témoins qui
avoient été emendus, l'avoient été avec mélJageinem, & ,
c,hoi(is; en ce que toute communication avoir été refufée
aux Bénéficiers, & qu'on les' déclaroit non recevables, lorfqu'ils vouloient former oppolition; en ce que dans le temps
que l'on formoit cette procédure & que les Adminilhateurs
de la vïlle de MarCeille avoient préCenté requête pour s'opfloCer à l!i Cuppreffion, les Chanoines furprirent de l(religion
des Minif!:res une lettre qui leur impofoit filence,
.' A des moyens d'abus auffi puiffans, les Chanoines oppo.fene aux' Bénéficiers qu'ils Cone non recevables, & leur dilene qu'ils n'one d'autre voie à prendre que celle de recourir
'au Prince pour faire révoquer les Lettres-patenees confirmatives de l'Ordonnance, Mais ces fins de non-recevoir ne
fauroiene être fàvorablement accueillies, en diHinguant la
Loi particuliere d'avec la Loi générale. Lorfque la Loi inréreffe le tiers, & qu'elle a été accordée fur la demande
de quelque Corps, la voie de l'oppolition ef!: ouverte pardevant les Tribunaux; au lieu que cette voie éH fermée,
lorfqne la Loi ef!: émanée de la volonté du Roi, & pour
caufe publique. Tous les Auteurs font univoques à cet égard,
f!,.: pluiieurs Arrêts ont déclaré des, Lettres-patenres obtenues par des particuliers, obreptices & fubre.ptices., La ~é~
•
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE:
189
ferve contenne dans les Lettres-patentes en cas d'oppolltion
en: abuflve; les Chanoines ont eu foin de fe la ménager;
elle préfente coujours mieux l'excès de la furprife, & elle
viole le privilege des Proven<;aux, qui ne peuvent être difrrJits de leurs Juges naturels: cependant il ne s'agit point
ici d'oppofition, mais d'un appel comme d'abus; ils ont ufé
de cette voie; les Lettres-patentes la lui ont confervée &
lui en font une réferve, & par cette réfetve Sa Majeflé les
renvoit à leurs Juges narurels.
On répondait pour le Chapitre, qu'il ne percevoit aucune
dîme en la ville de Marfeille; que les difhibutions avaient
fuccédé à.la table commune, & par ce moyen le Chapitre
était obligé d'acheter le bled & le vin; COutes les fois qu'il
étoit queG:ion dê ces diG:ributions, les Bénéficiers élevaient
des conteG:ations, enfuite defquelles il fut paffé des tranfaélions en 1736; le bled fut-fixé à 2.8 liv., & le vin à trois
fols le pot; ces tranfaélions furent cimentées par le concours des deux Puiifances; néanmoins cinq Bénéficiers s'oppoferent à leur exécution; & reconnoiifant le peu de fondement de leur prétention, ils s'en départirent, & ofFrirent
à cet effet un expédient.
En 17 S9, les Bénéficiers ayant élevé les mêmes conteftations, ils en furent déboutés en l'érat par Arrêt de la
Cour. En 1773, les Bénéficiers vinrent demander une fixation nouvelle, & le Roi, informé de coutes ces conteG:arions ,
s'occupa dès-lors de l'état de cette Eglife. Les Bénéficiers
préfe~erent un r:némoire; cout ~ut dit pOl~r !es .Bénéficier~,
tout frappa l'oreille du' Souverain; les BenefiCiers pOl!rfulvirent néanmoins leur demande, fur laquelle il intervint un
avant dire droit. Depuis lors le Roi fit expédier, de fon
propre mouvement, un Brevet, dont le Chapitre fufpendit
l'exécution; il offre encore aux Bénéficiers la diHribution en
nature, & de terrer en l'état de 1736; c"eux·ci rerufent de
fe rendre à cette propofltion, fous prétexte que l'offre n'écoit
point fatisfaéloire. Le Chapitre alors exécute le Brevet.
Dès ce moment la Communauré vient former oppofition,
qui fut jointe à la procédure, & les Bénéficiers furent èn-,
�190
Jou
RNA L
tendus" nOn feulement en corps, mais encore en particu~
lier. Il intervint enfuite décret de fuppreffion des bénéficiatures, envers lequel les Bénéficiers ont oppofé des moyens
d'abus quill'ell fOQt point, mais bien de fimples confidérations & des moyens de forme.
Si on a joint à la procédure les oppolitions déclarées
par les Bénéficiers & par la Communauté, c'eH qu'on ne pouvoit faire autrement, attendu que toutes les procédures d'union & de fuppreffion font les mêmes, & que les Bénéficiers ne font appellés non ut cOllfentielltes, fed ut colltra. dicentes, & qu'ils n'ont que le droit de repréfemer, & non
celui d'e diriger la procédure; fi on les a déclarés non recevables, c'dl qu'OA n',a jamais cru que des titulaires s'oppofaŒellt à femblables procédures, & on a eu raifon de ne
point leur communiquer les pieces qu'ils demandoient; on
a entendu dans la procédure la NobleŒe , les Officiers de la
SénéchauŒée, les Notaires & Avocars, to,ut y a éré rempli;
& il en étrange que la Communauté fe foit oppofée; elle
n'avoi,t aucun inrérêr. Si les Communautés ne font point
éc-ourées lors des unions & ftlpprlffions des Cures, la Communauté' de Marfeille ne devoit pas J'êrre à plus forte raifon
dans ce ·cas-c-i; fléanmoins elle l'a été par la bouche de
fon Alfeffeur, & elle ne s'en plaint pas; ainli point d'abus
dans la forme.
Au -fonds, les Bénéficiers ne font pas plus fondés; il n'ell:
point d'un bénéfice comme d'un bien patrimonial; s'il étoit
queftion d'un bien patrimoni,Jl, aucune procédure ,Iégirime
ne pourrair le ravir au propriéra.ire; toures les parties qui
y. étoient illréreffées" ,même celles qui ne l'éroient pas., ont
éré allies; le Roi aéré furpris que la Communauté foit intervenue, fe foit oppofée, & elle aéré débourée de fan opporition avec raifon, parce qu'elle n"étoit ni patrone ni fondarriœ. Si fOUs les bénéfices peuvent ê,re fupprimés pour
le bien de l'Eglife, à plus forte raifon doivent ·l'être ceux
qui font en fous~ordre. De Luca dit, en parlant des Bénéficiers , 11011 /ùnt de Capitula; le Concile de Cologn'e, nOil
fullt Vicarii j Barbofa les confidere comme Minifires infé-
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE;
191
rieurs, & dit qu'ils font créés tels, & le Chapitre d'Aix
les regarde, fuivant les Statuts, comme jilii obedientiœ; rous
les Arrêtiiles décident qu'ils n'ont pas voix au Chapitre,
qu'ils font fournis à tous les Status émanés du Chapitre;
en forte que les Bénéficiers de routes les Eglifes du Royaume
font r~gardés comme Minifhes inférieurs, & ceux de Marfeille font comme les autres, attendu qu'ils n'ont aucun
titre précis pour les tirer de l'infériorité; ils font d'ailleurs
les Subfl:irus des Chanoines de Marfeille. Par le partage qui
fut fait en Il82, confirmé par des Bulles, il n'el!: pas queftion des Bénéficiers, & il n'y a que le Chapitre & l'Evêque qui y foient compris. Les Bénéficiers font déclarés, par
les Statllts, pofieriores ; il efl: vrai que ce mot a été eJfacé,
& les Bénéficiers y ont fubfl:irué. ceux-ci, prout pares. En
1364, il leur fut fait défenfes, par une Ordonnance, de s'ingérer dans les affaires du Chapitre fàns fan confehtement.
Ainu point d'égalité entr'eux & le Chapitre. D'ailleurs les
Bénéficiers ne fouJfrent rien par la fuppreffion; ils ne fan t
pas dépouillés pendant leur vie. Ainu s'évanouit ~eur premier
moyen d'abus.
Ils ont préfenté au Roi toutes leurs raifons, & le même
fyfiême qu'ils folltiennent aujourd'hui. Il manque aux Bépéficiers le défaut de caufe contre le Brevet qu'ils n'one
noine attaqué; & il Y a caufe à la fuppreffion, parce que le
Roi a dit clairement qu'elle y éroit pour terminer la fource
de tous les procès que les Bénéficiers ne ceffoient de fufciter au Chapitre; l'appel comme d'abus ne pouvoit leur
compéter, attendu que ce n'éroit qu'au Roi à qui jls de~
voient s'adreffer, en lui préfen,tant une requête en rappore
de Brevet; ce n'éwit pa's pour la premiere fois <que l'on
avoit fuppr-imé les titres de bénéfices, pour mettre fin à
toutes contefl:ations qui s'élevoient entre gens d'Eglife. Les
Bénéficiers des Accoules, ceux de Sr. Martin & autres l'ont
été en pareil -cas; il Y avoit néce.ffité de fupprimer, d'après
toutes -les conreüations élev.ées dans tous les temps fur leur
érat & fur leur elllifl:ence; la fuppreiIi.on a été 'un aae pur,
légitime & de pure néceffité; d'ailleurs dans le principe ils
�192.
.
Jou
RNA L
étoi~nt amovibles. Ainfi point d'abus dans l'amoviOilité;
au
contraire, utilité & avantage.
Mr. l'Avocat-Général de Calilfanne établit deux queflions:
le Prince a-t-il réfervé à fes Cours le droit d'examen des
Lettres-patentes fur la fuppreffion des Bénéficiers, ou n'y
a-t-il d'autre voie que celle du recours au Prince? La caufe
de la fuppreffion des Bénéficiers a-t-elle été juGe & raifonnable, ou plutôt exifie-t-il une caufe de fuppreffion des Bénéficiers ?
.
Sur la premiere, il obferva que l'union en général efi la
jonaion d'une Eglife ou d'un bénéfice à un autre fupérieur;
jonaion qui doit être légitime, & felon la forme prefcrite
par les Saints Canons & les Ordonnances des Souverains;
la Loi tranfporte ordinairement les biens & les revenus à
celui à qui il efi uni.
•
Tous les Canonifies en général difent que les unions font
odieufes en elles-mêmes; c'en néanmoins un moyen canonique; & dans l'ordre général, tOllt bénéfice peut être uni
ou fupprimé : cependant l'Eglife , dans ces fortes de fuppreffions, voit ordinairement de grands inconvéniens; el:e craine
la diminution du nombre des Miniflres établis pour chaque
bénéfice; c'efi une efpece d'aliénation à laquelle elle fe prête
difficilement, attendu que par l'union, le bénéfice uni efl:
en quelque façon fupprimé, ou du-moins altéré, tellemene
qu'il perd fa premiere nature & fan premier état.
Ces diverfes raifons codflituent les différentes forres d'unions examinées d'après les diffétens bénéfices fur lefquels
elles portent. Toujours contraires à l'efprit & à l'intention
des fonda teurs, elles troublent l'ordre extérieur de l'Eglife.
Tous les tirres de bénéfices, ceux même qui paroilfent les
moins confidérables aux yeux du monde, font tous précieux
à l'Eglife; elle ne les conGdere pas par les revenus, mais
par le fervice q(;i s'y fait ou qui doit s'y faire; auffi eut- •
elle grarid foin de les multiplier dans fa nailfance. Ils étoient
même tous peu conGdérables par les revenus. Dans la fuite,
les revenus de chaque Eglife furent divifés; les - bénéfices
furent érigés en titres; alors l'Eglife ne rejetta pa: les
,
unIons '-
�DU
P AL.ÙS
DE
PROVENCE.
I93'
unions, parce qu'elle les crut néceffaires; mais en les autorifant, l'Eglife, qui les regardoit toujours comme odieufes en
elles-mêmes, voulur que fes Minil1res y apportaffent roures les
précaurions néceffaires, afin qu'on ne s'y ponât point par
des vues d'inrérêt, mais uniquement par abfolue néceffiré
ou par la rrès-grande utiliré de l'Eglife. Ç'efl: ce qui a
inrroauit rant de formalités; c'el1 ce qui a f,1it exiger le
miniHere des Supérieurs EccléilaHiques & l'autoriré du Souverain. Entre ces formalités & ce pouvoir, l'Eglife exige
encore unè caufe; fans cela l'union ne peut 'avoir lieu. Tels
font les principes généraux des unions.
. Tout eJl jugé pLIr le Brevef, difent les Chanoines; tOllt
efl confirmé par les [I:'tttres-patentes; ninJi la Cour efi incompétente; ainJi il faut fe pourvoir en rapport. Mais' pourquoi fe pourvoir en rapport au Prince? Les Bénéficie rs ne
demandent que l'exécurion de tout ce qu'a fait le Prince-.
Les Lettres-patenres doivent être exécutée!! en entier; elles
onr nn motif, elles ont une bafe, on ne peut pas s'en écarter; conditionnelles jufqu'à ce moment, elles deviennent définitives pàr1'e-xécurion de la claufe effenrielle: pourvu qu'elles
ne .renferme.nt rien de contraire aux Saints Décrets, confiitutions canoniques, privileges ,franclzifes & lihertés de l'Eglifr
Gallican/:'." •.
1
_,. La Cour n'a pu être dépouillée par une c1aufe auffi précife & allffi effenrielle; dès le momenr où les Lerrres-patentes ont été rendues, le Prince a reconnu le pouvoir de
la Cour; il s'en dt repofé fur fan examen, il l'a inveHi de
touS les app~ls comme d'a.bus. Diroir-on qu'elles ont éré
enrégil1rées, mais elles ne l'ont été qu'après l'appel comme
d'-abuS; d'ailleurs' c'efifllne ,maxime inconrefiable que. la confirmation ne reétifie pas ce qlli el1 nul en lui-même.
Il ne faut paspenfer que {i le Roi eÎlt connu qu'il n'y
eût point, de caufe dans' la fuppreffion des Bénéficiers; s'il
eût connu.la nullité de leur union, il eut donné des Lettres-parentes pour la confirmer; le Sauverait! ne voulait
qu'une union jul1é; ·il ~eilroit qu'eUe fît dh bien à l'Eglife;.
loin qu'il voulût la confirmer, fi elle érait contraire aux
Anuées l775 G' lnG.
B Il
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�!94
J
PUR NA E
Saints Canons & aux droits du Royaume, il la condamn~
formellement en ce cas. A:illU bien-loin que l'appel des Bé..
néficiers arcaque les Letrres-p:ltentes, il ell: fondé fur l'e:cpre(fe intention de Sa Majefré, marquée par cette daufe
limitative, & les Bénéficiers n'on! pas befoill de fe pourvoio
en rapport.
En France, les Parle mens font établis pour examiner ft
dans les conceffions des Rois, il n'y a rien' de contraire
au droit public; en ce cas, non feulement ils ne doivent pas
les aUtorifer, mais ils doivenê les condamner, parce que
le Roi n'eH pas cenfé. avoir accordé, fuivanr le titre du code
fi contra jus) vel illi/ittltem publiéam, vel per mendacium
aliquidfuerit impetratum. ·La yoie de l'appel comme d'abus a
donc été o.uverte enve(s les Lettres-pàtentes.
La Loi eH toujours la volonté du Prince; mais toute
volonté du l'rince n'eü pas la Loi. Le Souverain ne veut
jamais le préjudice du tiers, il ne veut que ce qui eH juHe;
proteél:eur des Saints Canons, il ne doit pas y biffer porter
atteinte; vengeur des libertés de l'Eglife Gallicane, il ne doit
pas les laiifer intervertir; dépofitaires de fan autorité, les Magi{l:rats le deviennent de fes volontés, quand elles s'accordent
avec la Loi. S'écartent-elles de la juHice? Alors œ ne peut
être qu'une furprife; & quoiqu'elle porte l'empreinte de la
Majeil:é Royale, ils le lui repréfentent. Ne font-elles que
la volonté du Prince adreiféé avec quelque daufe provifoire? Les Cours l'examinent, les tiers pe.uvent s'oppofer
à fan enrégiHrement; s'ils ne le font pas, vérifiée làns
connoiifance de caufe" elle eH liljerce à l'appel comme
d'abus.
1 :
••
Ce n'eH pas la premiere fois que 'des unions ont été déclarées abufives après des Brevets. L'ulliôn de la Prévôté de:
Pignans fut pourfuivie par les Jéfuites eo Cour de Rome,
fur un Brevet de Louis XIV. L'union fut faite, confirmée
par Lettres-patentes, Qttaquée pardevant la Cour; &' par
Arrêt du 14 Janvier 1717, elle fut déclarée abufive. Le
Brevet ne peur donc pas fermer la vQie de l''a ppel com me
d'abus, il ne néceffire pas le recours au Prince. Les Let-
�DU
PALAIS
D.I!
PROVENCE.
T9S
tres-Patentes au contraIre, volonté nouvelle du Souverain,
volonté poHérieure à celle du Brevet, néceffite le recours
au Parlement, réferve l'appel comme d'abus pardevant les
Cours Souveraines.
Mr. l'AvocatTGénéral examina enlLlite fi dans l'union des
Bénéficiers de l'Eglife de Marfeille, il y avoit quelque chofe
de contraire aux Saints Décrets, aux conHitutions canoniques, aux privîleges, franchifes & libertés de l'Eglife Gallicane, enfin aux droits de lai Couronne.
Le Concile de Conflance (dit-il )révoque toutes l'es unions
faites, fi non ex rationabiliblls CaIifiS & vais faaœ fuerint. Le
Concile de Trente exige la même chofe. Le chap. 33 de
prœbendis & dignitatibus s'exprime aïnfi: fi evidens necejJitas
vel utilitas exigit.
.Les unions que fon entendra faire, dit l'art. 49 des Libertés de l'Eglife Gallicane, doivent l'être felr>n la forme contenu/!: au Concile de Confiance, & non au~'ement ; il faut nécejJité ou évidente utilité de l'EgliJo, -dit Fevrec, de l'abus,
liv. 2, chap. 4. Hors de ces deùx cas, toutes les autres
unions font abuÎlves. Tel l'la le fentiment de Barbofa, tit. de
unionibus, n. S2; de Lacombe, vo. unir>n, n. 2; d'Hericourt,
part. 2, chap. 2 l , n. 10.
Plus le bénéfice tient à l'Eglife & à des fonélions, pIns
la caufe doit être importante. Bien des Auteurs ont d'abord
été d'avis que l'on ne pouyoit. unir que des bénéfices fimpIes; plus récemment ils ont foutenu qu'ils étoient beaucoup plus faciles à unir que tous les autres: Ici les Bénéficiers de Marfeille, quoique fubordonnés aux Chanoines,
font vrais Titulaires de bénéfices inamovibles & réÎlgnables;
conféquemment il a fallu, pour les fupprimer, une caufe; ce
font des bénéfices, & conféquemmenr ils peuvent recevoirl'application des Loix de l'union. Les Bénéficiers font de
plus attachés au fervice divin; & ayant la faculté de réfigner, ils font Corps, & conféquemment il [lut, pour réuffir à leur union, des caufes plus fortes & plus majeures
que pour d'autres bénéfices.
Quelles font l,"s caufes que l'on a donné pour la fup..,
.
Bb2
�196
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RNA
ri
preffion des Bénéficiers? Les procès continuels contre le
Chapitre. EH-ce-là cette caufe jul1e & raifonoable delirée
par les Canoos & les Conciles? Se trouve-t-elle dans quelque Loi, dans quelque Auteur? RebuJFe & Van-Efpeo, qui
difent que" non invenitur jure ea cauJà approbata, décident
que les procès ne conltituent pas ces caufes raifonnables
de néceffité & d'utilité requife par les Saints Canons.
D'ailleurs la Jurifprudence el1 déciuve. L'Arrêt du Parlement de Paris du S Juillet 1760, rendu fur les conclufions de Mr. Seguier, ne laiffe rien à delirer fur cette matiere. Il s'agiffoit de l'union de deux Cures; union revêtue
de Lettres-Patenses, auxquelles les habitans formerent oppolition, & dont ils furent débolltés, parce qu'il n'étoit pas
naturel, leur diroit-on, de ladfer fubiifler les diffèntions 'lue
deux Curés dans la méme Eglife avoient prefiJue toujours occafionées. L'union des deux titres fut confirmée, parce que
" les unions qui. remettent les chofes dans le droit commun,
ne doivent pas être comprifes dans la regle que les unions
font peu favorables; les procès n'étoient pas d'ailleurs la
raifon principale de cette caufe.
Les Bénéficiers des Accoules fupprimés, l'ont été par
défallt de fubfiftance, & ceux qui ont refl:é ont été érigés
en Canonicats. Même raifôn à Digne; on y fupprima même
un Canonicat. Les deux feuls Bénéficiers de St. Martin furent fupprimés; l'un mourut, & l'autre fut fait ChanoineCuré.
Il femble donc que la caufe des pro~ès en général ne
foit pas un véritable motif de fuppreffion. Mais cette caufe
n'exîfl:e pas même ici. Quels procès y avoit-il entre les Bénéficiers &. les Chanoines? Un feul, qui n'étoit pas énoncé
dans le Brevet; c'étoit la nouvelle fixation des denrées,
des diftributions. Ils'agiffoit de favoir fi la fixation établie
en 1738 pouvoit encore filbfifter après quarante ans, & ce
procès étoit venu après quatorze ans de tranquillité. Le
Brevet ne peut porter fur cette fuite qe procès mentionnée
par-rout, & donnée pOlir caure de la fuppreffion des Bénéficiers; il n'y a donc point une calife vraie. Les Lettres-pa~
a
�bu 'pALÂI~
DE
PROVENCE:
197
tentes & le Brevet font danc conrraires aux conl1:itutions
canoniques, aux privileges & libertés de l'Eglif.: G'lllicane.
Quant aux droits de la Couronne, l'on pourrait dire fans
doute que cette union efl: contraire à la regle'; cependant
l'on croit que le Souverain 'paroitroit y avoir voulu renoncer, parce qu'il croyait faire le bien d'une Eglife .entiere,
& Y remettre la paix & la tranquillité.
Dirait-on que ce n'eH pas une véritable union, & que
conféquemment les principes des unions font inapplicables ,à
la caufe? Il eH cependant certain' qu'il exiGe des titres de
Bénéficiers dans l'Eglife de Marfeille,. & que du momene
de la fuppreffion, il n'en exifl:e plus; les reV2nus n'en font-ils
pas réunis à la manfe du Chapitre? Or, qu'efl:-ce qui conftitue le bénéfice? Le titre & le revenu. Les Bénéficiers
font donc réellement fupprimés. D'ailleurs l'amovibilité mife
à la place de la fl:abiliré du titre n'en détruit-elle pas ab-.
folument l'état? Des Bénéficiers à gage font le fervice peutêtre avec plus d'affiduicé; mais le motif qui les fait agir efl:
fouvent beaucoup plus bas & plus humiliant; la crainte y a
fouvent plus de part que la vertu; l'inamovible au contraire,
fûr de fan état, n'a d'intérêt que pour fan Eglife ; guidé par fan
devoir & par la crainte, il aime à le remplir. Il eH vrai' que
quelquefois il abufe de la place; mais il eft néanmoins un
principe: c'eH qu'entre l'inamovible & l'amovible vertueux,
le premier eft toujours plus attaché que le fecond ne peue
l'être. Jouiffant du ptivilege de la réfignation,abus à la vérité, mais reconnu & approuvé par l'Eglife, confirmé dans
ce droit par un Arrêt folemnel, les Bénéficiers de l'Eglife
Cathédrale de Marfeille s'en verraient privés dans un momene.
On a fait valoir encore ( continua Mr. l'Avocat-Général)
plufieurs moyens, tantôt comme moyens de forme, tantôt
comme moyens d'oppofition. Mais, obferva-t-il, les Bénéficiers olit été entendus & écoutés, parce qu'ils avaient pli
être appellés, non pour avoir leur confentemenr, mais pour
donner les raifons qui pouvoient contrarier l'opération. On
~
�'I~8.
Jou RNA i
a J01D~ leur oPPÇ>fi,tioQ iW fgnds , elle dev9ic récre';fans cetal
il n'y aUfqiç jamais ete fuppreffion; car tous les titulaires
fans doute formeroient oppolltion. On leur a refufé la çom·
munication des proçéd\lres, paFc~ qu'~lIe n~ devgit pas être
faite. On \l'il pas aqhéré ~ux requifiligns qu'ils ont faites dans
la proçégllre, parclê que le titulaire d'un bénéfice ne peut
~'arrÇ>ger l~ dfOit d~ ç\iriger une procédure, d'indiquer allJ
Supérieur eccléfiafiique les témoins qu'il doit faire entendre,.
pUlfque les r-egllês ne lui donne ne d'autre droit que d'êtré
~nlendu lui-meme.
On a, joint les oppofhions de l'a Commun~uté'; on le de"",
voit. E,n ~lfet, que les habitans [oient confultés, quand iL
s'agit de l'union des Cures, à la bonne heure;. mais, nOI1J
pas-quand il s'agit d'autres bénéfices auxquels i,ls n'ont aucul1J
intérêt, ~ dont ils ne font ni patrons ni fondateurs. Il n'Y'
<1 donc point d'oppreffion dans la procédure, mais il n'y avoit
p.oint de qufe pour fupprimer.
'
Mr.l'Avoçat-Général conclut à ce qu'il fût ordonné que'
faifant droit aux lemes d'appel comme d'abus, il fût dit
~ dédaré y avoir abus, tant en l'Ordonnance de l'Evêque de Marfeilk, portant fuppreffi'on des bénéficiatllres de·
l'Eglife Cathédrale, qu'en tout ce qui l'avoit précédé &
fuivi; l!c de mê,me fuite, que l'enrégifiremenr des Lerrrespate,nres,
,
, confirmatives de l'Ordonnance, fût & demeurât
revoqu~.
Arrêt du 2 l Juin '77S, prononcé par M. le Premier
Préfident 1 conforme aux condulions; l'Econome du ChaRitre fut cond'lmné aL(X dépens. Plaidant M.es., Portalis &
Gaffier.
�.r
-r
ARRÊT
XVII.
Sur la péremption d'inflance en madere de reCJuête civile.
A.rt.in, Boulanger d~1 lieu de Jouques, impétra requête
cIvile envers un Arret du 13 Avnl 1771, & la fit figliifier à Brignon, Ménager du même lieu, le 29 Oél:obre de
la même année, avec affignation pour la voir entériner. Les
deux parties préfenterent; Brignon fit des fommations à plaider, qui furent fuivies de deux Arrêts, portant que Martin
configneroit l'amende; elle le fut le 29 Février 1772 , &
depllis il n'y eut plus aùcune pourfuite. La caufe ne fut point
enrôlée. Le 19 Septembre, Brignon préfenta requête en
péremption d'inO:ance.
"
.
On difoit poùr Brignon, qu'il s'agilfoit de favoir fi les
deux parties ayant préfenté, & le défendeur a yane obtenu
des Arrêts comminatoires pour forcer le demandeur à configner l'amende, le défaut de pourfuites pendant fix mois
périmoit la requête civile. Il eH certain que l'on n'a que
fix mois poùr ineenter la requête civile; c'eH la difpofi[ion
de, l'Ordonnance. La péremption des aél:ions n'exige pas un
plus long délai qu'il n'èn faut pour le!! iQtroduire. C'eH la
doél:r.ine de Brodeau fin' Louet; de Builfon en fon Code; de
aoniface,tom. l , liv. 8, tit. l , chap. 9; de Decortnis, tom.
2.,.c01. 1710, 1112 & fuiv. Conformémeflt à ces prindpes,
il fut jugé en .la Chambre des Enquêtes, au rapport, de Mr.
de Camelin, qIJe l'e,xécution· d'u'ne Sentence en relrajt al'oit
ééé preCcrite par le }nlilisi .Il, eH vrai qUé la lilifcon~éO:ation
proroge la dllrée de l'aél:ion à trois ans. Ici·.y avoit~jl licif.
conteit'ation ?
"
J
La requête civile en une efpece d'appel.:Mais a~hèlle leS.
nlêmes' privileges que l'appel?' P~u~on cPl1,dure qu'elle lie
peut périmer. comme un ,appel. que par lrois ans? L'ilppel
fait revivre les quef1:ionsJ jugées; il. f<lUt pefer de nouveau
M
�Jou RNA i
les défenfes doçnées par les parties, & rejuger fur la litif.
contefiation formée entre elle.s;' le Juge d'appel a à prononcer fur la même aél:ion. Mais en matiere de requête civile, c'eH toute aurre chofe; la Cour a une quefiion toute
neuve à décider; loin qu'elle puiffe connoÎtre du mérite du
fonds fur lequel l'Arrêt attaqué a prononcé, l'art. 37 de l'Ordonnance de 1667, tit. des requêtes civiles, défend d'entrer
dans les moyens du fonds.
.
Suivant l'Ordonnance de Rouffillon, toute in fiance difcontinuée pendant trois ans ne peur proroger l'aél:ion, & la prefcription a fon cours. D'après cette Loi, an demaLlda, fi 11
raifon des aél:ions qui durent moins de Hois ans', il falloit
trois ans pour .opérer la péremption d'infiance.· Le dome
étoit fondé fur ce qu'il étoir ridicule que la péremption eût
plus de durée que l'aél:ion, & que Iqrs ·même que. la prefcriprion avoit été interrompue par une affignarion en JuHice,
on pûr avoir plus de temps après l'affignarion que l'on en
auroir eu auparavanr; & delà s'étoir introduire la maxime,
que dans toutes les aél:ions qui n'avoient qu'un mois (lU
qu'une année de durée, la ceffation des pourfuites pen:"
dant le' même rerme devoir néceffairemeor emporter péremption. L'on ne difiinguoir même pas fi l'infbnce avoit
ou n'avoir pas été conteltée, ·rparce que l'Ordonnance de
Rouffillon' vouloir que la prefc'riprion eôt fon cours, nonobftant .Ia oontefiation. On ctoyoir étrange qu'ii pùr encore
y avoir un 'procès, malgré la prefcripr.ion j'OU que' le procès
pûr continuer à raif0n d'une ,aél:ion qui fe trouvait prefcrite.
Auffi une foule d?AUleurs érabl.jffoi·ênr que-la difco'ntinuation
des pvûrfuitf"S!, mênle après Jaf'com;efiarion en caufe', pen":
(brir lë.. -tetn~SJ nécelfai"re ponr prefàire ,Jemportoit péremption, &- pat!'codféqi.Jêtir prefcdption.' ( Tiraqueau,.rl\eve.;>
neau, Grimaûçler.,.Bâfnage, Brodeau & Auzanet. )
Nous avons néanmoins adopté un rempérament qui paroÎ2
fondé fur 1'a trenie; héù:vieme .t'eg~e du aroir', qui dic: omnes ac-,
tione5iqul1! mortk'aut tetnp6ré-p reunt,rfemel inclufce judicio.,jàlVd!'
permanent; parce qU'eJ nouS' avon~ 'c~rtf quel'inHance produifoit
QU ua engagemenr, ou 'une novation' iudiçielle qui lui d0nnoit,
'2.00
�DU
PA:t A1S
DB
PROVENCE.
201
noit la durée ordinaire, & qui lui efi affignée par l'Ordonnance de Rouffillon; & delà nous a!l:reignant à la difpofition précife de la Loi, les aB:ions fwul inclufœ judicio
fonr celles qui non feulement font déférées en jugement,
mais qui ont fubi la conte!l:ation en ju!l:ice, ainfi que l'explique d'Anroine fur cette même regle; & par conféquent fi l'action qui aurait été prefcrite dans un mois ou dans fix, une fois
portée en juHice, a été conre!l:ée,falva permanet; & au lieu de
ne lui plus donner que le temps de la durée de la prefcription ,il faut lui donner celui que l'Ordonnance affigne à la
péremption; mais fi elle n'a pas été conre!l:ée, fi elle en efi:
re!l:ée au terme d'une fimple affignation, comme elle a été
- feulement déduite en jugement, fans y avoir été inclufa , dèslors la regle fubfille dans tout fon entier, & la péremption du procès ne peut pas être plus longue que la prefcription de l'aél:ion. C'eH ainli que l'obfervent Menelet,
pag. 130; Buiffon fur le titre du Code prœfcript. 30 vel 40
annor.; Decormis, tom. 2., col. 1710, 1712. & fuiv.; &
c'eH ce qui fut jugé par deux Arrêts que rapporte Boniface,
rom. l , liv. 8, tir. 1, chap. 9.
Toute la difficulté confiHe donc à favoir s'il y a eu ou
non conte!ration en caufe. Martin lui-même en convient;
mais il veut faire entendre que la conteHation fe forme par
la feule préfentation des parties, fur le fondement que parmi
nous, il ne peur y avoir de péremption, tant qu'il n'y a pas
préfen'ration /zinc inde; comme fi cette regle, qui nous eH
tracée par le Régfement de la Cour, fl'avoit pas un autre
motif; & fi le Réglemenr, plus conféquent, ne rejerroit
pas la péremption d'inflante, quand l'infiance, qui ne fe
forme que par la préfenration refpeél:ive, n'a pas été engagée.
Il ne faut pas confondre l'inHance & la conrefiation,
puifqu'on fut très-bien les diHinguer lors de l'Arrêr rapporté par Boniface. Ce n'e!l: pas de la feule interpellation
)udi<.iajre que -fe forme la conteHation, mais de la différence des fenrimens enrre les parries fur le fujet conteHé,
laquelle fe manife.lle par l'oppofition de leurs moyens, conAnT/Ùs 1775 & 1776•
Cc
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Jou
RNA L
traires les uns aux autres: ilinli le procès ne commencè
que lorfque le défendeur propafe fan exception comre
1'atrion du demandeur; c'ef!: la remarque de d'Antoine fur
la regle 86. L'article 13- du titre de la conreltation en
caufe de l'Ordonnance de 1667 porte que la caufe fera
tenue pour conteJlée par le premier réglement, appointement
ou jugement qui interviendra après les défenfes donné~s , encore qu'il n'ait pas été fignifié. Il fàut donc deux chofes ,
fuivanr l'Ordonnance, pour que la caure fait tenue pour
contef!:ée : la. les défenfes; 2,0. un jugement, ,quel qu'il
fait. On exige les défenfes, parce qu'elles conriennenr les
conclulions qui indiquent la conteltation, ainli que le
préfuppofent le Commenrateur d'Orléans fur l'art. 19 du
tit. 1 l , Bornier fur l'art. 13 du titre des comeJlations el!
caufe, Bolltaric & Radier [ur le même article.
Ici il n'y a jamais eu ni défenfes, ni appoinrement
ou jugement; il n'y a donc jamais eu conref!:ation; & fi
1'inf!:ance n'a jamais été conte fiée , elle a été périmée par
la ceffation des pourfuites pendant lix mois; la péremp"
tian dl: un moyen de droit, fagement imaginé pour
donner la paix au citoyen, & arrêter' les progrès de la
chicane. II eH à la vérité intervenu trois jugemens; mais
ils ne [ont relatifs qu'à l'affiglJation & à tout ce qui n'dl:
que préparatoire à la conreftation fonciere.
II peut y avoir deux infiances : l'une préparatoire, qui
peut très - bie n être fujerte à péremption, & l'amr fon~
ciere, qui peut fubir le même fort: mais de ce qu'il y
a eu contef!:ation [ur le préparatoire, peut-on dire qu'eUe
y a été [ur le fonds? C'ell: précifément l'hypothefe de
la caure préfenre. Suivant l'art. 16 du titre des Requêtes
civiles, les impétrans font tenus de, configner l'amende en
préfentant leur requête en entérinement; & dans l'ufage,
comme on ne préfente point de requête, an plus tard
avant qu'il fait queHion de faire la [ommation pour l'enrôlement; jufqu'à la confignation, filence efi impofé au demandeur dans le fyHême de l'Ordonnance; il ne peut pas
même affigner qu'il n'ait conligné; la confignation n'eft
�D U
PAL AIS
D E
PRO VEN C Il.
203
-donc qu'un préalable à la conteftation; le 'défaut opere
une fin de non recevoir péremptoire, qui empêche même
d'entrer en connoiffance de caufe, & qui par conféquent
ne permet pas d'entamer la conteftation en caufe. Martin
n'ayant par conféquent pas conugné, tout ce que l'on a
fait pour l'y obliger n'étoit que préparatoire, n'aboutilfoit
qu'à purger, pour ainu dire, fan affignation du vice dont
elle étoit infeél:ée, qu'à le mettre dans le cas de pouvoir
parler, & par conféquent de conteller.
On répondait pour Martin, que la caufe ayant été conteftée , la péremption ne pouvait être opérée que par le
laps de trois ans. Suivant les Doél:eurs, la litifconteHatiol1
·eH de l'elfence des jugemens; elle en eft le fondement
& la pierre angulaire, lapis angularis & fundamentum iJdicii. Les fonél:ions des MagiHrats celfenr, lorfqu'il n'y a
ni conteftation ni procès: inter confentientes mdlœ jùnt
judicis partes. Chez les Romains on diftinguoit trois chofes
pour la litifconteftation : la citation, l'édic7ion de l'ac7ion
& la litifconteJlation, Suivant la J urifprudence françaife, la
conreHatiou en caufe eH quand il y a régie ment fur les
demandes & défenfes des parties; c'eft ainli qu'il eft décidé par l'arr. 13 du tir. 14 de l'Ordonnance de 1667,
par les coutumes de Paris, art. 1°4, & d'Orléans, arr.
412; ita Dupleffis, tom. l, pag. 286, & tous les Commentateurs fur cet art. 13.
Les défenfes dont l'Ordonnance parle, manifefient l'efprit de contradiél:ion de la parr du défendeur. Or il fuffit
que cer efprÎt foit manifeHé pardevant le Juge, pour que
la litifconteflation foit opérée. Ainli toure défenfe qui
indique l'efprit de contredire la demande, li elle frappe
les oreilles du Juge,.fi caujàm audire cœperit, produit la
litifconteftation; car, comme dit Fagnan fur le chapitre
olim, extra de litif.:ontefiac. tom. 2, pag. 1°7, n. 39, la
litifconreftation dépend de l'efprit du défendeur qui témoigne
qu'il veut plaider contre fon Adverfaire. Un feul mot fuffit
pour dévoiler cet efprit de conreftation.
Il fuffit donc que la différence des lentimens entre les
CC2.
�204.
Jou RNA L
partIes fur le fujet contefié fait manifell:ée en jugement
de quelque maniere que ce fait, pour que la litifconteftation fait formée. Toute exception qui tend à exclure
l'aél:ion intentée pardevant le Juge compétent, ell: propofée contre l'aél:ion même. L'art. 17 du titre des Requêtes
civiles di t , qu'après que la requête civile aura été jignifiée
avec aJJignation & copie donnée tant des lettres que de la
Confidtation , la caufe fera mife au rôle & portée il l'audience fur deux ac7es, l'lm pour communiquer au parquet,
t,; l'autre pour vwir plaider fans autre procédure. Ces mots,
fans autre procédure, excluent la nécefIiré des défenfes;
l'ufage efi que le défendeur en requête civile n'en donne
point; on ne pourrait pas lui dénier PAudience, fous prétexte qu'il n'en a point fourni; elles feraient même fuperflues, parce qu'elles font préexifiantes, & qu'elles réfultent de la nature des chofes.
Brignon a porté la caufe à l'audience, & par fes étiquettes réitérées il a foufcrit lui-même, défendeur en requête civile. Voilà des défenfes non feulement communiquées de Procureur à Procureur, mais fournies pardevanc
la Cour, & fuivies d'une prononciation. Dès-lors la !irifcontel1:ation s'eH opérée; la caufe eH devenue procès. Une
novation judiciaire s'eH formée; un quali contrat a lié les
parties; la Cour a été failie du litige, dont la nature ell:
d'avoir trois ans de vie. Par deux fois Brignon a requis
la conlignation de l'amende; il conteHoit donc la requête
civile; il la contell:oit & par fes paroles, & par fes pourfuiees réitérées. Par dêux fois la Cour, après avoir oui &
les parties collitigantes & le minill:ere public, prononça
& ordonna que l'amende ferait conlignée. Cerre conlignatian fut faite; voilà le fPortula dont parle Alciat. L'argent
fut dépofé in cede facrâ , pour êtrè compté à celui qui fe-.
rait viél:orie~x.
Les Arrêts qui ont ordonné la conGgnation de l'amende;
n'éroient pas des Arrêts de {impie inHruél:ion & non portant profit, puifqu'ils tendaient à la déchéance de la requête civile, en cas que j'amende n'eùe pas été conlignée:
c'éroient donc d'efpeces d'Arrêts interlocutoires non fou~
�Du
P,UAIS
DE
PROVENCE:
1.0,\
mis à la péremption, ainfi que l'attefienr les Aél:~s de Notoriété, pag. 179; Mourgues, pag. 77; Mornac ad Leg.- l l ,
Cod. de judiciis, & comme l'ohferve Brodeau, lett.·P,
ch. 1 S. La Loi properandum & l'art. 1 S de l'Ordonnance
de Rouffillon ne parlent que des infiances, &. nullement
de ce qui concerne l'exécution d'un Arrêt:
Il eft certain que les requêtes civiles renferment dans
elles-mêmes 1a vertu de la litifcontefiation. Suivant le droit
romain, les refcrits de Jufiice étoient perpétuels, à moins
qu'ils ne renfermaffent un délai dans lequel ils duffent
être préfentés au Magil1:rat : .fi modo tempus, in quo allegari vel audiri deDent, non fit comprehenJum. L. 2, Cod. de
diverf. refcript. Voilà pourquoi les requêtes préfenrées à
l'Empereur & par lui répondues, formaient par elles-mêmes
conteftation en caufe, & rendaient perpétuelle l'aél:ion qui
de fa nature em été àe courre durée.
Parmi nous les letrres royaux adreffées au Juge dans les
procès des particuliers ne durent qu'un an; elles durent
moins en certains cas. II faut qu'elles foient lignifiées à la
partie dans le temps préfix, autrement elles deviennent
inutiles; mais li les lettres ont été lignifiées à la partie,
l'aél:ion qui en réfulte ell:. perpétuelle, fuivanr la regle générale. Les lettres royaux en forme de requête civile font
des refcrits de juftice. Elles doivent être obtenues & lignifiées, & les affignatiorls données dans les lix mois, à
compter à l'égard des majeurs du .jour de la lignification
qui leur aura été faite des Arrêts & Jugemens en dernier
l'effort. (Ordonnance de 1667, tit. 3 S, art. ').) Pareils
refcrits ne durent donc que lix mois depu'is la lignificat-ion de l'Arrêt juCqu'au jour que les lettres ont été lignifiées, & que l'affignation a été donnée à la partie. Mais
après, le terme fatal eft couvert. Un droit nouveau eft
acquis à l'impétrant; l'inftance qui dérive non de l'aél:ion
en requête civile, mais des lettres royaux, de l'entérinement deCquelles il s'agit, prend {on cours; l'Ordonnance
ne prononce aucune preCcription' ultérieure.
On diftinguoit au.trefois l'ioHance de :equête civile, de~
�-206
Jou
RNA L
lettres de requête civile. L'inHance de .requêté civile étoit
foumife à la pér~mption. de trois ans, ainli qu'on le voit
par les arrêtés de Mr. de Lamoignon, tit. de la péremptian, art. 4, Mais les requêtes civiles ohtenuçs & fignifiées nt!
demeurent péries par une ceJlàtion de trois ans, dit l'art. 12
du même titre. De forte que malgré b péremption de
l'iuftance, les lenres fublifioient & pouvaient produire une
inftance nouvelle. Les Arrêts de Provence confondant ces
deux objets, fou mirent à la péremption rriennale & l'inftance, & les lenres de requête civile. C'eft beaucoup que
d'avoir donné à une li mple ce/fation de pourfilites pendant
trois ans, la vertu d'anéanrir des lenres royaux Ggnifiées,
& de les avoir confondues avec l'inftance, qui feule fembloit alors devoir périr. Mais jufqu'aujourd'hui on n'avoit
pas encore imaginé de foumenre les lettres royaux de requête civile à une péremption de lix mois.
. Delà.)es inftances d'apl?el, quoiqu'il s'agi/fe d'une aélion
annale, . ne périifenr jama.is que par le laps de trois ans.
C'eft l'obfervation de Bafnage fur la coutume de Normandie, art. 499; de Brillon, rom. 5, pag. 159; de
Ferriere fur la coutume de Paris, tOI11. 2 • col. 6) 8 , n. 28.
L'infl:ance de reqllête civile ne peut donc jamais périr
que par trÇJis anS, parce que la caufe avait été auparavant
conteHée. C'efi fur ce principe que fut, rendu l'Arrêt rapporté par Boniface, rom. l " pag. 79, & le fenrimenr de
Rodier fur l'art. 17, pag. 717.
Mr. l'Avocat-Général d'Eimar de Montmeyan examina fi
13 péremption a lie.u dil:ns l'infia-nc~ en requête civ,ile. après
l'infiance liée, avant qp depuis la~ conrefiation en ,caufe ,.
. ~ quelle eH la formillité e/fenrielle qui caraélérife la contefiation en caufe. La" requête civile, difoit-il, peut être
regar.dée ou COJ!lflle le Rlus beau préfenr d'un Légiflateur
humain autant que philofophe, le vœ!J généreux des Magiftrats aufIi fag,es que. l1'1odeltes, ou comme ,·Ia. plus terrible invention de la chic'1ne, & ce .-qer~lier eJFort de la
fr:lUde qui ne pouvant vaincre la Jultic~, e/fay~..· du~moins
de la tàtiguer'j l'on penfe cépeodant que ,'eH l'érabliife-:o
�•
DU PAt AIS , DE PRO V Il NeIl':
'1°7
lllent le, ,plus udle, & dont l'abus peut être en même
temps le plus funeG:e. La péremption au contraire', comme la prefcription [a [œur, eG: la reffource néceffaire &
dangereu[e qu'imagina un raifonneur hardi & profond qui
réfléchit fur les be[oins & [ur les pallions des hommes,
filr la briéveté & la rapidité des jours de cet être, & furl'inquiéwde & l'immenuté des délires qui l'agitent; qui
combine la jufiice particuliere; qui protege la propriété
de chaque individu; qui veut le repos de tous; qui ,balance
l'équité relative & politique avec l'équité ab[olue & indépendante; qui ne voulut pas ,le mieux, afin de pouvoir
faire le bien; elles nous offrent de grands biens, elles réuniJTent de grands avantages; mais elles tranchent peut-être
d'une maniere trop ardente [ur les difficultés & [ur les
inconvéniens. C'eH au Légiflateur qui [ert les hommes-,
à corriger le philofophe qui les étudie; c'eG: au Magifirat
qui connoît & qui juge [es concitoyens, à leur appliquer à
propos les remedes ou les bienfaits ë1es Loix.
Pour profiter du remede qu/offre la requêre civile, &
prévenir en même temps les incon'léniens & les abus [ans
nombre qu'il pourroit entraîner, la Loi 'a vroulu qu'avant
que d'examiner de nouveau le fonds & de,rejuger le :jugement qu'on attaque, on examinât;[eulement' & [éparément
s'il y. àvoit lieu en effet à demànder ce nouv,el eximen &
ce nouveau jugement. L'importance de, cet' examen, qui,
quoique préliminaire & préparatoire, 1 peut cependant préjuger définitivement fur le fonds '& [ur le droit des ,parties,
a fait établir qu'une pareille inG:ance ne pourroit jamais
être portée aux ParJemens pendant le temps de leur.s vacations. Telles [ont, avec l'amende dont elle punit l'opiniâtreté du vaincu, les précautions que la Loi a pri[es,
en établiffant un dernier recours dont la foibleffe naturelle
des hommes lui a fait connoître la néceffité, mais dont
leurs paflions & leurs fraudes lui ont fait [en tir toutes les
conféquences. Elle a vu que d'après le caraélere avide &
'inflexible de la plupart des plaideurs, c'étoit perpétuer en
9.uelque fone les procès, & troubler à jamais la con[cienc~
�~o8
Jou
A N A'L
des Juges & le repos des· familles. Elle a établi que les
lettres royaux en forme de requête civile devaient' être
obtenues & lignifiées dans les fix mois de la notification
de l'Arrêt; elle a encore menacé d'une peine févere les
plaideurs obfl:inés; & de crainte que l'efpérance ne les
féduisît trop aifémem & ne la leur fît méprifer, elle ne
leur a pas offert une rétraaation prompte & aifée; elle
a 'fournis leurs moyens & leurs griefs à un jugemem préparatoire, avant de leur permenre de les propofer de nouveau au fonds. Si elle ·avoit de grands abus à craindre,
on voit qu'elle a pris de grandes précautions: ces abus
peuvenc:ils encrer en comparaifon avec ceux dont auroit
été fuivie une Loi contraire & abfolue? L'erreur une fois
adoptée eut donc toujours acquis dans ce cas tous les
droits & toute la force de la vérité; l'innocence trompée
ou mal défendue n'aurait plus eu aucune reffource. La Loi ellemême a donc -'tout prévu & tout corrigé; retrancher de
fes précautions, ce ferait fans doute ouvrir à une foule
d'abus une parce qu'elle, leur a fermée avec foin; mais
.en y ajoutant, on parviendroit à rendre prefque inutile à
des plaideurs qui n'am été que malhemeux, une refiource
que la Loi, a cru néceffàire.
De toutes' les exceptions qu'on peut oppofer, la plus
force, la plus viaorieufe fans doute ell: la prefcription en
matiere ord'inaire ,- & la péremption lorfqu'il s'agit d'inftances judiciaires; mai5 la prefcription a quelque chofe
d'odieux & même d'injufl:e dans la bouche de celui qui
s'en fert; <::'ell: le facrilice l le plus' hardi & le plus douloureux qué, la 'raifon géné'ra,le ait pu faire de la' ra'ifon &
même de l'équité .,pareiculie-re au bien & au repos de tous;
il étoit néceffaire <: l'homme dont les jours fane fi bornés,
n'a d'immenfes que·fes deCirs, fan ambition, fan avidité.
Il eut été ridicule'& dangereux de I~abandonner à fan inquiétude naturelle. & toujours renaiffame, de lui laiffer des
dro.ics mille foiS' plus éte'ndus. que ne le. peuvent jamais
être [es facultés' réelles, &. de perpétuer à jamais [es
prét ncions quand la nature eUe-même a refferré dans Ull
cercle
i
�,
DU
PALAIS
DI!
·PROVENCE.
~09
prefcrip~
cercle fi étroit fa jouiifance. Si l'on aboliifoit la
tian, on livreroit d'un feul coup à la difcorde & à la plus
afFreufe conEullon la génération préfence; il fembJe qu'on
bouleverferoit la cendre & le repos même de la génération paifée, & celle qui doit naître de nous, n'en hériteroit que trouble & que diJIèntions.
La péremption tranche fur un défordre plus réel ou dumoins plus frappant encore; & quoiqu'elle puiife auffi facrifier quelquefois l'intérêt parriculier à l'utilité univerfelle ,
c'e!l: un bien moins cerrain; ce font des droits moins sûrs
qn'elle facrifie, parce que tout ce qui peut être difpucé
par l'homme,.& fur-tout tout ce qUI doit être fournis au
jugement de l'homme, n'ell: jamais aifuré. Cependant il
faut toujours obferver que tout ce que la ju/tice nous peut
faire exiger, dl: auffi réellement notre bien que ce' que
nous pollëdons, foit par acquifition, fait" par fucceffion de
nos ancêtres, & que les droits que nous donne la Loi
étant un bien qu'elle crée en notre faveur, auquel elle nous
dit eJre-même de prétendre, doivent être fous fa protection fpéciale. Le Légiflateur a calculé lui-même à quelle
époque précife ce droit particulier de propriété devait être
facrifié au repos public; il a déterminé J'in/tant fatal où
tout procès doit fini r, où J'homme injlJf1:e ou l'ufurpateur
peut oppofer la Loi elle-même & fan VŒU de paix & de
tranquillité ulliverfelle, à la réclamation fondée, rntlis inlltile,
,du citoyen malheureux qu'elle immole, non -à fan coupable Adverfaire, mais à l'utilité générale.
La requête cjvile efl: ou le dernier effort de la chicane,
ou la derniere rellource de la vérité; il e!l: également néceifaire & de la reiferrer dans de juftes bornes, & de ne
la point anéantir enriérement. La péremption qui, dans
les inHances, a l'effet de la prefcriprion dans le cours
ordinaire des chofes, efl: un droit dangereux, quoique
utile &. néceffaire, mais toujours en quelque forte odieux.
Il ne faut jamais oublier qu'il n'e!l: que d'une ïull:ice politique & d'ordre public; le befoin l'a fa jt admettre; la
jufl:ice elle-même nous crie de le refferrer; le LégiDateuf')
D d
Années 1775"& 1776.
,
�~IO
YOU'RNAL
J'homme public a eu raifon -de 'l'établir, le Magifl:rat feroit
coupable de l'étendre.
On' ne conrefl:e point la fignificarion de la requêre civile; mais on fourient .que cerre formalité ne fuffit ·pas ;
GUi! la requête civile n'en demeure pas moins foumife à la
prefcription rapide des fix mois; qu'il faut., pour qu'elle
jouiffe de la péremption triennale, que non feulement l'inftance'foit liée, mais qu'il y ait encore conteüation en caufe.
Avant l'Ordonnance de 1667, quoique le droit commun eût
conilamment érabli dans tout le refte du .Royaume le fimpIe délai de fix mois pour les requêres civiles, fdon une
Jurifprudence parriculieFe &: confacrée, fuivant Boniface, par
l'ne multirude d'Arrêts., les requêtes civiles n'éraient [oumi.[es en Provence qu'à la prefcription de 30 ·ans. Mais
depuis l'Ordonnance, narre ufage efl: conforme à la Jurifprudence commune du Royaume. Cette Loi établit ( art.
S du ritre des requêtes ·civiles ) qu'elles doivent êrre obtenues, fignifiées, &. affignations données dans les fix mois de
l'Arrêt. On voit ici le délai fixé précifément & nommément.
Mais lorfqu'elle veut, arr. 17 du même ritre, qu'après l'affignation, la caufe [oit mife au tôle & portée à l'audience,
elle ne fixe point un terme précis & faral: l'ufage du Parlement de Paris, [ur cet article, efl: même, !orfque le nombre exceffif des requêres civiles empêche qu'elles ne [oient
.portées à l'audience, ·ce qui, dit Jouffe, arrive tous les ans,
.d'obtenir du Roi une Déclaration portant que les caufes
feront appointées &. renvoyées aux Chambres contre les
Arrêts defquelles on fe pourvoit.
L'article 20 dit généralement· encore que les requêtes civiles feront portées & plaidées aux mêmes Compagnies où
les Arrêts contre lefquels on fe pourvoit ont été rendus.
Enfin on trouve dans ,ce titre entier, que l'efprit & la lettre
de la Loi fixent le délai redoutable des fix mais pour l'impérratiop & la lignification des 'requêtes civiles & pour l'ar·
iignation; mais on ne voit, on ne' peur même conjeél:urer
nulle part qu'elle oblige à pourfuivre l'inilance, à contefl:er
la caufe dans le même délai. L'urage du Parlement de
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PAL AIS
D'E
PRO VEN CE.
21'l
Paris pl;Ouveroit plutôt le cèntraire, puifque les requête's
civiles, qui ne fone appointées qu'à la fin de l'année,
ont demeuré pendane tout ce temps fans pourfuite; on pourrait objeél:er, mais il.y a dans ce cas partieuliu empêchement;
& c'eft, précifément une des dérenfes de Martin; [es lenres
ne purene être préfeneées aux rôles qu'au commencement
d'Avril, c'efl-à-dire dans les temps où ils fone les plus
remplis. Faudra-t-il que parce qu'une Déclaration du Roi
n'aneHe pas toUS les. ans la multitude des foins imporrans
qui partagent la Cour, il fait puni d'un repos peut-être
forcé, & ne peut-il pas en appeller à la notoriété publique,
& à ce que fes Juges faveur eux-mêmes de l'ulàge conHant
& journalier du Palais?
On a oppofé d'abord ce principe antique &, fubtil de
quelq\les lurifconfultes, qui jugeant que l'inHance ne naît
que de l'aérion, croyoient qu'elle devoit toujours demeurer
foumife à la même prefcription qui pouvait éteindre l'aaion;
on l'a'livré enfuite à l'abandon général dans lequel il eH tombé
depuis long-temps. L'inHance ne naît pas en effet de l'action feule, comme le devaient croire ces Jurifconfultes dans
kurs fyHêmes. L'aél:ion eH le droit !impIe & naturel de chaque particulier; mais l'inflance n'eH pas feulement l'ufage
qu'il fait de ce droit; c'eH le droit du Prince lui-même qu'il
invoque à fan fecours, & qui lui confie une portion de fan
autorité, le droit de la fociété entiere qu'il appelle en témoignage & en garanrie du paél:e réciproque d'obéiffance
& de proteél:ion que chaque citoyen a contraél:é avec fon
Souverain.
On eH d'accord fur ces principes; mais les uns n'en fom
J'application qu'à la conreHation en caufe, d'aurres à la !impIe inl1ance. On cite en faveur de la premiere opinion
l'autorité de Buiffon & de Decormis, qui parlent toujours.
du principe, que l'inl1ance étant fille de l'aél:ion, ne peut
avoir plus de durée; & un Arrêt de Boniface qui, en prononçant dans l'efpece parriculiere d'nn retrait lignager, en
cite un/contraire fur la qlleHion de droit. On pourrait pelltêtre citer auffi des Amo~ités en faveur de la [econde. D'après
D d2
�1
~1:l,
JOURNAL
les di!1:inélions que l'on vient d'établir fur les Loix elles"
m'êmes, il e!1: difficile de deviner par quel motif on donne
fi peu d'effet à l'infl:ance civile, en accordant tout à la conteHation en caufe.
l! eH difficile de concevoir que le Réglement de la Cour
donnanc à la fimple préfentation des parties l'effet de lier
l'inHance, au point de la rendre fujette à la péremption,
ne lui donne pas auffi celui dè la fouGraire à la prefcription. Tous les motifs qu'on donne en faveur de la conteHation en caufe font applicables à l'in!1:ance; &. il en: bien
fingulier auffi que l'un des motifs privilégiés que ceux qui
faifoient cette difl:inélion donnerent lors de l'Arrêt cité par
Boniface, fût que la conteHation en caufe eH comme le
[el qui préferve l'aél:ion de la corruption; & c'ell réellement
un des plus plaulibles qu'on puilfe imaginer. La novation judiciaire a donc dû s'accomplir au moment que le demandeur a déclaré fan droir & fes prétentions au Juge, & qu'il
a fait notifier à fa partie le delfein qu'il a formé de s'en
f3ilir. Du moment qu'il invoque le fecours des Loix, qu'il
appelle [on Adverfaire aux pieds des Tribunaux, qu'il les
établit Juges de leurs conteHations, ces conrellations deviennent publiques. Cette efpece d'engagement qu'on contraél:e à la face de la Jufl:ice efl: confommé, quaji contrahitur
in judiciis. Cette novation, -ce contrat public paroi1fent devoir transformer l'aél:ion annale & celle qui n'a qu'une
exifl:ence plus courte encore, en une nouvelle efpece de
dro~t qui n'eH plus foumife qu'à la prefcription judiciaire
prononcée par le droit public du Royaume, c'efi-à-dire à la
péremption triennale.
Il dt inutile d'examiner ce que les Loix Romaines entendaient par la contella~ion en caufe, & par quelles formalités ces aél:ions, fujettes à une prefcription plus ou moins
rapide, n'étaient plus foumifes qu'à la péremption" includehantllr judicio & falvœ fiebant; on a fur ce point aes regles
[acrées & précifes. La caufe {era tenue pour conteJlé, dit
l'Ordonnance de. 1667, arr. 13, par le premier Rdglement,
appointemcnt ou jugement 'lui interviendra après les définfes
�3'
fournies, encore qu'il n'ait pas été jignifié. Cerre décifion
parolt claire & déterminée; cependanc les parties varient
fur fon interprétation. Le Légifiatenr explique dans cet article ce qui difiingue la licifcomefiation, de l'aél:ion, & même
de l'in fiance. L'aél:ion efi le droit de pourfuivre en jugement, jus perfefJuendi. L'infiance efi l'ufage public qu'on fait
de ce droit, en donnant connoi!fance aux Juges de fes prétentions & du de!fein qu'on a formé de les pourfuivre, dilatio ad Judicem ; il faut bien même qu'elle nous acquiere
une efpece de droit difiinél: & féparé de l'aél:ion, puifque
dans les aél:ions qui ne fe prefcrivent que par 20 ou 30
ans, la péremption de l'in fiance efi toujours triennale, &
eft indépendance de la prefcription de l'aél:ion. La litifcontefiation enfin, fi l'on vouloit la définir par étymologie,
ne feroit que la préfencation & la concradiél:ion de la parcie
adverfe; mais le Légifiateur a aj9uté une tormalité nouvelle
& néce!faire, l'inrerpofition de l'autorité du Juge, par quelque appointemenc, Réglement ou Jugement.
En droit originaire & commun, la plainte que form oit
le demandeur pardevant le Juge, devoit caraél:érifer feule
l'inftance_ ou fupplication qui paroi!fenc avoir dû être des
termes équivalens. Dès que le contradiél:eur paroi!foit, &
qu'aux pieds du Tribunal il rejerroit les demandes de
fon adverfaire, la litifconceHatioll étoit formée, lis cOI/tertata videbatur; parce qu'on devoit préfumer de fon obéi[fance pour les Loix & de fon re[peél: pour les Juges, que
du, momenc qu'il ne fe rendoit pas aux réclamations que [on
adver[aire leur adre!foit, fon filence feu! étoit une conte[tation. Auffi Rodier foutient que la caure eft concefiée, du
moment que le Juge a ordonné quelque cho[e, pourvu
que ce premier appoincémenc foit rendu contradiél:oire contre
les parties. Tel dl auffi le fenciment de Bornier & de
Boutaric.
Le Juge invefii par le droit du procès, puifqu'il n'efl:
établi par le Prince que pour maintenir l'ordre & la paix
pllrmi les citoyens, l'étoit encore par le fait, puifque ces
deux hommes n'étoient allés vers lui que pour être jugés,
D V
PAL AIS
D E
PR.O V
B NeE:
2t
•
�~I4
Jou RNA L
& qu'ils ne s'étoient pas jugés eux-~Jêmes. L'Ordonnance
décide qu'il [lut qu'il" fe faifiife réellement lui-même de la
caufe par quelque aél:e de fon autorité; & c'ef!: véritablement
une nouvelle formalité qlJ'elle a introduite pour mieux annoncer la litifconteflation, mais qui ne la caraél:érife pas
eifentiellement; l'inflance feule ,.delatio & fuppliaatio, ne pouvoit pas avoir cet eHet, parce qu'elle pouvoit fon bien être
[uivie de l'acquiefcement fimple & v010ntaire de la parrie
adverfe: mai.s du lPoment qu'à la voix' du demandeur, Je
défendeur accourt aux pieds de [es Juges, & que ce n'eH:
pas pour fe rendre à la juflice de fes demandes, que ce n'eH:
pas non plus pour méconnoître leur amorité & pour y jouer
un rôle abfolument paffif & tran-quille ; lorfque c'efl le défendeur lui-même qui prévient Je demandeur, qu'il le cite,
qu'il ·le pre1fe de fe mettre en état de fe préfenter au Tribunal pardevant lequel il l'a appellé ,- croit-il encore que
tou-s ces aél:es foient de {impIes formalités fans conféquence, qui n:engagent aucune conteihtion? II aura preifé fon
adverfaire de fe préparer. à former fa demande; il aura
cherché à l'e'n faire décheoir définitivement, fous prétexte
qu'il n'a pas rempli des formalités indifpel]fables, & il prétend ne l'av:oir pas contefrée. Ce n'efl ( dira-t-il) 'lu.e fur<
des préparatoires 'lue j'ai colltejlf; c'efl dans une eJPece d'inft'ilnce préliminaire, & fion pas dans l'injlance fonciere, que lai.
été contradic?eur.
Loin que Brignon puiffe foutenir (continua lVJ'r. l'AvocatGénéral) qu'il n'a pas agi comme contradiéleur & défendeur dans l'inflance préparlltoire, felon lui, fur la. c.onfigna-.
ri on de J'amende, & que pa.r confequent il n'a point formé,
de conteHation en caufe, il eH vrai au contraire qu'il. n'a
pu agir que comme contradiél:eur & défendeur; que fes préfentations & concllJ(jons l'ont conf1:itué fous ces, deux titres,
& ont établi la conteflation en caufe; que s'étant préfenté.,
enfin, il n'a pu fe préfenter que [O(lS· oette qUàlité; que ce
n'el!: que comme défendeur qu'jl a pu demander Jà configna-,
tion de l'amende ou la déchéance- définitive, pujfqu'il n'eH:
point le receveur des amendes, & qu'à ce même titre il
�n'u
-
PALAIS
DE
PROVENCE:
2T1
n'aurait eu ni droit ni intérêt à faire une pareille requifitian. On fent d'ailleurs combien il ferait ridicule & dangereux d'admettre une infl:ance péremptoire dans une inftance préparatoire d'elle-même. Peut-on appeller infl:ance
préparatoire celle dans laquelle on cherchait à faire prononcer" non pas fur de iimples 'fins de non-recevoir, nOI1
pas même un déboutement en l'état, mais une déchéance
définitive?
Peut-on, après avoir préfemé foi-mêm~après avoir pourfuivi le premier fan adverfaire, après avoir conclu à une
déchéance définitive, après l'avoir fait prononcer par un
dernier Arrêt 'comminatoire avec la claufe irritame, foure-nir qu'on n'a pas entamé la conrefl:ation en caufe? Peur-on,
,fous prétexte que l'adverfaire ne pouvait fournir des déJenfes valables qu'après la confignation de l'âmende, foutenir qu'on n'a pas défendu foi-même, foutenir qu'on n'a
'pas comefl:é, en avouam qu'on voulait le faire déclarer non
recevable, & peur-on perfuade'r que le' fonds n'étoit point
entamé, lorfqu'on a été fur le .point d'obtenir fur le fonds
même un jugement définitif & irî='évocable? Peut-on, furtout prelfé par fes propres faits, fe l'ejecter ftir fes intentians, & lorfque toUtes les drconfl:ances, lorfque les Arrêts qu'on 'a produit, prouvent que la conrefl:ation en caufe
était entamée, foutenir qu'on n'avoit pas' deffein de l'entamer? •
MI'. -l'Avocat-Général conclut à ce que fans s'nrrêter à
la requête de Brignon, tendante à faire déclarer l'inHance
périmée, les parties pourfuivilfent au fonds & principal
ainfi que de droit.
Arrêt conforme, du 27 Juin 177'), prononcé par M. le
Premier Préfidenr; Brignon fut condamné aux dépens. Plaidant Mes. Simeon & Gaffier.
�JOURNAL
•
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ARR Ê
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X VII I.
Sur les réparations des maifons curiale's.
1
A Communauté de Caba1Te ayant été obligée de faire
réparer la maifon curiale, il fut fair un rapport qui détermina les différentes efpeces de réparations. La Communauté y parfournit, & demanda :aux Darnes de la Celle, en
,leur qualité de Prieures & Décimatrices, le montant dé celles
d'entretien; le Lieutenant les y condamna; & pendant l'inftance d'appel, la Province intervint en faveur de la Communauté, & demanda que le Curé affifieroit au procès, pour
venir voir dire qu'en parfourni1Tant par la Communauté les
réparations fOllcieres, celles que l'on répute' n'être que d'entretien fer~ient fupportées par les Darnes de la Celle au
bénéfice de la confirmation de la Sentence, & que là où
elles en feroient foulagées, il feroit dit qu'elles [eroient à
la charge ,du Curé. Le Syndic du Clergé de Provence Inter~
vint d~ns l'infiance en faveur du Curé.
On diroit pour la Province, que la quefiion du procès
confilloit à [avoir fi les Communautés doivent fournir aux
maifons curiales d'autr~s réparations que celles que l'on
appelle gro1Tes ou foncieres. 'II efi indifférent à la Province
& aux communautés que celles d'entretien [oient à la charge
de's Décirnateurs ou des Curés.
Peu importe que la Communauté ait acquis la .maifon
curiale, qu'elle en ait payé le droit d'indemnité, & qu'elle
n'appartienne qu'à elle; il refie toujours à décider fi ne l'habitant pas & la fourni1Tant au Curé, qui n'ell: que Vicaire
perpétuel, puifque les Darnes de la Celle ont, en leur qualité de Prieure, la préfentation à la Cure, elle doit entretenir un logement qui n'efi defiiné qu'à l'u[age du tiers.
Les Loix de tous les temps ont chargé les ecc1éiiafiiques,
po1Te1Teurs des dîmes, de la confiruél:ion & réparation des
Eglifes
L
,
�DU·
PAL AIS
D E
PRO VEN C E.
217
Eglifes & des presbyteres qui en font une dépe'ndancè, Suivant Jes Loix de France, antérieures à l'Edit de 169'), ce
n'était poillt aux Communautés à fournir le logement, &
aucun décimateur ne l'avoit demandé. Quand les décimateurs fe foulagerenr àu foin des ames fur des Vicaires d'abord
amovibles, & enfuite perpétuels, ils leur fournirent le même
logement qu'ils fe fournifioient déja à eux-mêmes; ce n'a
été qu'à leur refus que la reconnoiffance des peuples a donné
à leurs Curés ce qu'ils ne pouvoient obtenir du décima'teur
qu'ils repréfentoient; les eccléfiafiiques fe font autorifés de
cet aae de bienfaifance pour invoquer une efpece de prefcription, & en conféquence l'on a regardé l'obligation de
fournir un logement au Curé comme dépendant de l'ufage ;
cet ufage ne fllt qu'une ufurpation des décimateurs fur le
peuple; celui de Cabaffe fut tel que l'Eglife & la maifon
curiale éroient confhuites aux dépens du peuple & du décimateur; le peuple y contribua pour les deux tiers, & le
décimateur pour le tiers refiant, Au lieu & place de cet
. ufage , l'Edit de 169') a établi la regle prefcrite par l'art.
22, La Loi n'obligeant donc les Communautés qu'à fournir,
elle n'a pas voulu par cela même les obliger à réparer, &
l'on doit fuivre à cet égard le droit commtln: or, de droit
commun, la Communauté ne jouiffarit ni n'habitant la maifon curiale, elle ne doit pas en faire les réparations d'en-.
tretien; il feroit d'alitant plus injufie de l'y condamner,
qu'on ne doit pas faire une regle particu!iere pour la Provence, & accorder au Clergé ce que le Légif1ateur lui a folemnellement refufé.
Le logement des Pall:eurs qui géroient dans différens lieux
le foin des ames, éroit-il anciennement & de droit commun à la charge des habitans? L'on ne voit pas quelle ell:
à cet égard la difpofition du. droit dans les fix pren,iers
fiecles de l'Eglife, époque après laquelle la levée des dîmes fut univerfelle, & dont on parr encore pour difcerner
la nature d'une dîme, & favoir fi elle eH inféodée ou eccléfiaHique. On convient néanmoins que dans ces retupS
Arwàs z775 & z77 6.
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�~l.1S.
1 0 U RNA L
heureux où les Minil1:res des Autels s'occupant moins de'
la poffeffion des biens terrel1:res & de la jouiffance de la
chofe temporelle, que du falut des ames, ne vivoient que
des oblations, c'étoit fans contredit la pie té & la religion
des fideles qui foumiffoient à la conHruCl:ion des temples &
des presbyteres qui y étaient adhérans, & qui n'en étoient
qu'une dépendance. Ces temps heureux s'éclipferent bientôt:
la perception des dîmes une fois établie, étoit-ce le peuple
ou le Minil1:re qui fourniffoit à la conHruél:ion & réparation
des Autels & des presbyteres?
S'il ne falloit décider la que Gion que par les lumieres de
la raifon, l'on pourrait dire que la dîme ayant été concédée
pour l'entretien & l'alimentation des Minil1:res, ils devaient
d'aurant mieux fe fOll! nir le logement qui leur etait néceffaire, que d'une part dans les alimens font compris l'ha bitatipn, & que de l'autre il n'étoit pas juGe qu'après avoir
reçu dans le produit des dîmes taut" ce que l'on comprend
fous le nom d'alimens, ils demandaffent encore jingulatim
les droits particuliers qui compofent l'alimentation: habitatio
efl pars alimentorum, difent Perezius, Baffet, &c.
Suivant les Canons, c'était aux E cc1éfial1:iques à bâtir
les temples & leurs demeures. Le chapitre premier aux décrétales, titre de Ecclef. œdificand. & reparand., fou met tout
Bénéficier ad tec7a Ecclejiœ reparanda vel ipfas Ecclejias emen·
dandas; parce que, comme dit la glofe, non ferendus eft
qui lucrurn arnplec7itur, onus autem fubire recufat. Les Eccléflafl:iques commençaient dès-lors de fecouer ce joug effentiellement dépendant de leurs bénéfices. Le chap. 4 parce la
même difpofition pour les Eglifes paroiffiales: duximus rcf
pondendum quoad reparationem & inftaurationem Eccle/iœ, cogi
debeant de bonis quœ funt ipjillS Eccl~/iœ. Le Concile de Trente,
chap. 7, feél:. 2, veut auffi que rpciantur & inftaurentur parochiales Eccle/iœ ex fruc7ibus & proventibus quibufcumque ad
eafdem Ecclejias qllomodocumque pertinentibus ; que s'ils font
in filf!ilà ns , on recoure au, Patron & à taus autres qui per- _
croivent quelques fruits, ex dic7is Ecclejiis prol/enientes; enfin
�DU
PALÂ1S
DE
PROVENCE,
219
à leur défaut fur les Paroiiiiens. Les Auteurs n'ont pas tenu
d'antre langage. Barbofa, cap. 13 de qlfic. & potefl. parroch.
en' rapporre une légénde.
'
L'on doit donc tenir pour certain, que dans aucun temps
les peuples qui payoient déja la dîme n'ont fourni un logement que le Miniil:re de l'Autel trouvoit dans la perception
de la dîme. Le presbytere ou la maifon curiale n'a jamais
écé regardée comme une dépendance de l'Eglife; &Îes mêmes Loix qui difpofoient pour l'Eglife, difpofoient aulIi pour
les maifons curiales. Piales en fon traité des réparations, &
reconflrllc7ions des' Egliies, tom . .2.-, chap. 24, rappelle l'origine des dîmes; les obligacions des décimateurs; tant .envers les Paroiffiens qu'envers leurs Curés, & Jlobferve que
quand les habitans avoient livré à un nouveau Curé le prefbycere en bon état de toute réparation, le Curé étoit obligé
de l'entrecenir, c'eil:-à-dire, qu'il étoit tenu des réparacions
Ilrufruitieres & même des groffes réparacions, fi elles écoienc
{ilrvenues par [a mauvaife adminiftration, ou faute par lui
d'avoir fait les réparatioris ufufruitieres.
Mais de'ce que dans le quinzieme fiecle l'ufage avoit prévalu fur le droit, & que les peuples, par bienveillance pour
leurs Pail:eurs, s'étoient fournis à loger 'le Curé & à remplir ainfi l'obligation du décimaceur, il ne faut pas en.conclure, ni qu'e tel étoit le droit primicif, ni que cet ufage eût
généralement prévalu, & que tel fût notre droit commun.
L'ancienne -difcipline de l'Eglife de France en chargeoit les:
Curés; c'eil: le Clergé lui-même qui l'atteil:e dans [es mémoires, tom. 3, col. 263' Dès que le Clergé convient luimême que telle é toit l'ancienne difcipline de l'Egli[e, que
ce n'écoit que par des ufages locaux que l'on pouvoit avoir'
perverti & corrompu la deftination primirive des dîmes, il
ne faut pas plus êcre furpris de la variécé qu'il y a dans les
différens Conciles Provinciaux, que dans la Jurifprudence
des Parlemens; c'ell: [uivant l'urage des lieux' que les Conciles nationaux rejettent la charge [lIr les habitans ou fur
les décimarenrs, & que les Arrêcs des différens Parlemens:
tamôc y foumettent les:, décimateurs, cantôt les exempcent)
'E e 2.
�2.2.0
Jou R N /l. L
& tànt6t les y condamnent en concours avec les Commu"':
.nautés, conformément à l'Ordonnance de Blois, art. S2.
( Abrégé des Mémoires du Clergé, va. presbyrere.) Barbofa,
de offic. & potefl. Pan·och., cap. 13, n. T2; Van-Efpen,jur.
Ecclef ulliv., part. 2, tir. 3'!-, cap. 8; Duperrai lilr l'arr. 22
de l'Edit de 169S; Decormis, corn. 1, col. 3) l , & Piales,
pag. 291, arteHent cous que c'eft l'ufage qui décide, ou- la
Loi particuliere de chaque Etat, & à défaut le droit commun.
/
Comme l'art. ) 2 de l'Ordonnance de Blois ne fut pas
abfolumene du goût du Clergé, l'Alfemblée générale qu'il
,tine à Melun, drelfa des remontrances, d'après lefquelles in.rervinc l'Edit que l'on appelle de Melun, donc l'arr. 3 confirma, nonobfl:ane coure réclamation, la difpofidon de l'art.
S2 de l'Ordonnance de Blois. Les Déclararions qu'obtint
le Clergé en 16S7, 1661 & 1666, & qui fembloient rejetter fur les habitans le rétablilfement des presbyteres,
nonç>bfl:ane cous Arrêts à Ct:: contraires, n'ayane été enrégilhées nulle parc, n'en conHarent cependant pas moins
qu'environ un fiecle après l'Ordonnance de Blois, ce prétendu droit commun n'éroit rien moins que certain. Le
Clergé n'aurait pas fait tant d'efforts, fi relle eùt éré la
regle. Ii eH donc 'cerrain que la conHruaion & les réparations des mai fous èuriales n'one jamais été à la charge
des habitans, & que cour ce qu'on y peut dire de plus favorable pour le Clergé, c'eH qu'à la faveur des ufages locaux, il écoit parvenu à y faire contribuer les habitans.
Tel éroit le droit commun du Royaume, puifque telle
écoit la difpofition de l'Ordonnance de Blois & de l'Edit
de Melun.
L'on ne doit pas difconvenir que quelques anciens Arrêts
Jejetterent la dépenfe fur les Commuuautés, & entr'autres
celui de 1626, rendu contre la Communauté de Camps, au
profit du MonaHere de la Celle; mais cette Jurifprudence
n'eut qu'un temps, & des Arrêts plus réfléchis établirent
.une reg!e qui en celle du tiers, c'eH-à-dire ,que la Comnlllnamé fournilfoit les deux tiers, & le Prieur le tiers,
•
�DU
PAL AIS
DE
PRO VEN' C E:
22 r
tellant. Ces Arrêts font rapportés par Pa!l:our, tit. de Ecclef.
œdificand. & reparand., lib. 2, tit. 1, n. 15. (Boniface, tom .
3, liv. 5, tir. 14, chap. 6, 7 & 8; Julien, vo. Eccléfiafi.•
pag. 10, lett. M; Decormis, rom. 1, col. 354; Lacombe,'
J urifprud. canon. vo. logement; le nouveau Commentateur
d'Orléans fur l'arr. 22 de l'Edit de 1695, in vo. fournir au
Curé un logement convenable; l'A uteur des Mémoires du
Clergé, tom. 3, pag. 263; Piales en l'endroit cité, pag.
3 1 4,)
.
La regle établie par l'Edit de 1695 applique à chacun les
charges qui lui font propres, fuivant l'ufage & la de!l:ination
naturelle. Comme c'e!l: la Communauté qui profite & qui
ufe de la nef des Eglifes & des cimetieres, la Loi non
feulement l'oblige de les fournir, .mais encore de les réparer; & d'autre parr, comme le fanél:uaire n'eH proprement
que pour les l\1ini!l:res, & qu'il ri'e!l: qu'à leur ufage , par
une conféquence de la difpofition qu'il a porté contre les
Communautés, il oblige les décimareurs à le fournir & à le
réparer. Il re!l:oit à la vériré la maifon curiale, qui devoit,
ce femble, fuivre le (ort du chœur, puifqu'elle n'étoit qu'à
l'ufage du Pa!l:eur; le Légil1ateur, foit qu'il flu affeél:é de
l'ufage où l'on étoit au Parlement de Paris, foit qu'il voulût donner une nouvelle preuve de bitnveillance au Clergé,
en rejette la four'nitllre fur les Communautés; mais il a l'artention de ne pas confondre cette difpofition avec celle de
la nef des Eglifes & de la clôture des cimetieres, & de
ne pas [ou mettre les habirans à l'entretenir, feulement à le
fournir:" feront pareillement renus les habitans defd. :ç>a" roiffes d'entretenir & réparer la nef des Eglifes & la clô" rure des cimetieres, & de fournir aux Curés un logement
" convenable."
Si le Légil1ateur avoit entendu qu'il n'y eût aucune différence entre la fourniture & l'entretien, & que les Communautés fuffent obligées à fournir & entretenir, tant la
nef des Paroiffes que le logement des Curés, il eut été
tour fimple que la Loi n'eut pas fait deux périodes, & qu'elle
eut dit: ferollt tenus d'entretenir & réparer la nef des Eglifes~.
•
�2.2.2.
Jou RNA L
la ci6ture des cimetieres & le logement du Curé. Mais il y
avoit trop de différence entre ces divers objets ,. pour
qu'on pilt les confondre. La difpofition de la Loi eH d'aurant plus fage, qu'elle eU conforme au droit commun. Si
la Communauté eU obligée de fournir la maifon curiale ,.
elle en eU propriétaire; mais fi .nonobUanr ce droit de propriété, c'eU un tiers qui l'habite, ce tiers en eU ufufruitier"
& il doit par conféquent payer les réparations d'entretien ou
ufufruitieres.
L'effet que produifit l'Edit de 169) fut celui de rejetter
roure la charge de la conf!:ruél:ion des maifons curiales fur
les Communautés. Dans plus d'un endroit le Clergé voulut
s'exempter des réparations, notamment en Normandie, Ol!
les Doyens rllraux en répondoient en propre, en cas d'infuffifance de "la part des Curés. Mais une Déclaration rendue
le 2.7 Janvier 1716 ordonna qu'après que le logement auroit
été fourni & mis en bon état par les, habitans, les Curés
pendant leur vie & les héritiers après leur. mort ferpient
tenus de routes les réparations dont les Curés doi'vent être
chargés dans les maifons presbyterales. Le Parlement de
Bretagne, par Arrêt du 2.4 Novembre 172. l, détermina
routes les réparations qui éraient à la charge des Curés,
& cet Arrêt a été exécuté nonobHant les réclamations du·
Clergé, ainG qu'on le voit dans Denifart in va. preshytere,.
n. 12.
L'Auteur des Mémoires du Clergé en abrégé, va. preJhytae, attefle que l'on regarde le logement du Curé comme
une dépendance de l'Eglife, & que les habitans ne doivent que les groffes réparations. Tous les Auteurs conviennent de la n.ême maxime; Goard, traité des bénéfices, rom.
2., pag. 394; le Commentateur d'Orléans, fur l'art. 22. de
l'Edit de 169); Decormis, tom. 1, col. 3)1; l'Auteur du
Diél:ionnaire canonique, va. logement; pag. 193 ; Denifart ,.
va. presbytere G' Màrguilliers, rapportent plufieurs Arrêts du
Parlement de Paris qui ont fournis les Curés aux répara-.
tions d'entretien, & enrr'aurres l'Arrét de Réglemenr du'
25 Mai 1H), qui fait défeofes aux Marguilliers d'employer
�DU
PALAIS
nE
PROVENCE:
223
les deniers de la fabrique aux réparations du presbyrere , fous
peine de radiation dans les comptes, & oblige les Curés
de faire faire exaél:ement les réparations locarives & .ufufruitieres, à peine de répondre des groffes répararions qui
{urviendroient fa ure de les avoir faites. Mr. de Bezieux ,
liv. l , tit. 2, chap. 3, §. 2, rapporte l'Arrêt du 26 Avril
1709, rendu au profit de la Communauté de St. Tropés.
Autre Arrêt du 'l Avril 1713, qui condamne la Communauté de Fuveau aux groffes réparations, & le Chapitre Sr.
Viél:or, gros décimateur, aux menues.
On répondait pour les Dames de la Celle, qu'elles tenoient le fief & l'Eglife de Cabaffe, non à titre d'aucun
Bénéfice-Cure, mais bien de la libéralité de nos anciens
Souverains, fuivant les Chartes d'Ildefons Premier en I I 67;
& d'Ildefons II en 1202. Delà elles n'ont jamais contribué
ni dtt contribuer à aucun loyer ni à aucunes réparations
de maifon curiale. Les habitans de Cabaffe ne recurent
leurs habitations avec différentes portions des fonds', qu'à
titre de tenue fervile, de la main du Souverain, & fucce{fivement des Dames, à la charge d'améliorer & non détériorer, ce qui comprenoit les réparations d'entretien de
bâtimens dont ces habitans ne pofféd.oient que le domaine
utile, à condition qu'ils payeroient la dîme; ils n'eurent garde
de demander à leur Souverain de conrribuer à conHruire
ou à réparer le logement dû par les habitans aux Prêtres que
chaque Souverain, Patron laïque, & à leur place les Dames
nommoient. Depuis l'Edit de 169'l , les vaffaux ont fait les
réparations de leur maifon curiale, & quelquefois en concours avec le Curé, felo{l les occurrences & les difculIions
furvenues entr'eu){; preuve bien- évidènte que les Dames
n'avoient jamais contribué ni dû contribuer à auct;ne réparation. La caufe du· vaffellage emphytéotique fubIiftant
toujours, les vilffaux ,. de leur aveu ,. font· redevables d'un
droit d'indemnité envers. les Dames; leur obligation 'dérive
du même principe de. leur poffelIion fervile , main mortable,
qui ne les difpenfe point du_ paéle prjmitif des mélioratiolls,
pOlIr empêcher les dégradations par les réparations d'emre-
�Jou R N .Jo. L
tien. Donc les vairallx ne peuvent point en rejetter la furcharge au préjudice des Darnes qui en po{fedent la Seigneurie & l'Eglife de Cabaire avec les dîmes inhérantes
aux droits feigneuriaux avant l'établiirement des BénéficesPrieurés-Cures.
S'il était queHion de Prieuré-Bénéfice-Cure, on s'arrêterait à rappeller par ordre de temps les divers Réglemens des Conciles provinciaux tenus en France concernant les maifolls presbytérales· dépendances des bénéfices. L'on trouverait que l'ancienne difcipline de France
comprit les Abbés, Prieurs, Curés & autres Bénéficiers
aux termes du Concile de Paris de l'an r 336, ch. ro:
Abbatibus, Priaratibus, Curatis & Benificiatis aliis, rle permittant Manafleria feu damas ruere. Auffi voit-on que fuivant les Ordonnances de 110S Rois & la jurifprudence du
Parlement de Paris, les habitans & biens tenant des Paroiires [ont tenus de donner un presbytere ou logement
convenable à leurs Curés, s'il n'y a ufage contraire. S'il
faut d'abord obferver la coutume des lieux, comme le dit
Van-Efpen, parr. 2, tir. 34, ch. 8, n. 20, l'autorité de
ce CanoniÜe fe tourne en faveur des Dames, relativement
à leurs titres & à l'ufage local prouvé par écrit, d'après
lequel ces Darnes n'ont jamais contribué à aucune réparation ni loyer de la maifon curiale acquife par les habitans fous la direél:e univerfelle du Monaaere.
On réponâoit pour le Syn,d ic du Clergé, qu'il importait peu d'examiner la doél:rine de Dccorinis, qui fixe
effeél:ivement trois claires de réparations, quant à ce qui
concerne les maifons foumifes en même temps à un
droit d'ufufruit & à un droir d'ufage. L'on convient ,
que dans ce cas, rO. les réparations foncieres feraient
à la charge du peuple; 2°. les ufufruitieres à celle du
décimatel1r; 3°. les menues ou locatives à celle du Curé.
Il exiHe dans ce cas trois différens droits. placés fur trois
têtes différentes, & chaque tête doit fupporrer les charges
relatives à fan titre. Mais Deçormis ne parle que du prin- .
cipe
124
�DU
l'ALAIS
DR
PROVEN-CIl.
225
cipe général, c'el1:-à-dire, du cas hypothétique où l'on
trouve dans le même -temps & fur le même fonds le concours des trois différens titres, d'où doit naître par raifon
de conféquence la divi(iQn de trois efpeces différentes de
réparations. Il n'el1: jamais entré dans la tête ni dans lesprincipes de· Decormis de foutenir que le décima te ur el1:
ufufruitier. Il ne le regarde comme tel que dans les maifans prieurales, qui font effèél:ivement attachées au tirre du
bénéfice, & fur lefquelles les Communautés n'ont abfolumenr. rien à voir. Mais les presbyteres fournis par les
Communautés fe régilfenr par d'aurres principes. Les Communautés en font les propriéraires; les Curés en font les
ul:lgers, & le décimateur n'ayant avec ces édifices aucune
efpce de rapport, ne contraél:e conféquemmenr à cet égard
aucune efpece de charge & d'obligation.
Les Communautés font propriétaires des presbyreres,
puifqu'elles les fournilfent ; elles les polfedenr, pu ifqu'elles
en payent les cen(ives & le droit d'indemnité, qui ne font
rien de plus que les charges de la polfefIion. Si les décimateurs en éroient les ufufruiriers, n'en devroient-ils pas
les charges anr.uelles? La Communauté payeroit - elle le
droit d'indemnité, les cenfives pour un fonds qui feroie
polfédé par tout autre? Delà dell1l; conféquences : - 1°. le
Curé, quoique habitant dans le presbyrere, n'en eft pas
même ufufruitier & le vrai poift,lfeut, puifque ce n'dl:
pas fut lui que les Loix rejettent les charges de la po(fefIion; 2°. bien moins encore le déeîmateur fera-t-il ufufruitier & polfeifeur, puifqu'il ne peut pas même entrer
dans cette maifon curiale dont le Curé n'eft que l'ufage!:.
Le titre du Curé, en tant qu'il eH réduit au fimple ufage,
peur d'aurant moins être conteflé, qu'il ell certain que le Curé doit habiter par lui-même la maifon curialë , fans pouvoir
la louer' à d'aurres, ni moins encore en faire _un autre
profit. Il a donc néceifairement un droit inférieur à celui
de l'ufufruitier; & (i le Curé qui prend fan logement dans
le presbytere, ne pèut pas en être confidéré comme l'ufuAfllléa l77 5 & 1776.
F f
�Z2.~
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fruitier, s'il n'en a pas les dl:oits & les privileges; corn";
ment pourra-t-on endoJrer au décimateur le rapport & les
charges de l'ufufruitier fur une maifon dans laquelle il n'a
pas même le droit d'encrer? Quel droit le décimateur a-t-il
fur le presbytere? quelle fonél:itln peut-il exercer dans cette
maifon? quel rapport peut - il avoir avec elle? C'eR: le
peuple qui le fournit, & la fourniture en dl: faite au Curé;
le décimateur n'encre pour rien, ni dans le fait de la Communauté qui fournit le presbytere, ni dans celui du Cur~
qui le reçoit; il n'y efi pas même appellé; le peuple &
le Curé s'arrangent encr'eux fans le confu!ter. Le Curé
jouit enfuite fans aucune participation de la part du décimateur; ce dernier ne peut infpeéler ni la fourniture faite
par le peuple, ni la poifeffion fubféquence du Curé; il ne
peut pas voir fi la maifon a b.efoill de ces réparations
locatives, qui faute d'être faites dans le rems, fe con vertiifent enfuite en réparations d'entretien; & l'on fent bien
qu'il n'efi pas toujours polIible de voir expérimenralement
fi les réparations d'entretien procedent ou non du défaut
d'avoir fait dans le temps les réparations locatives.
Inutilement voudroit-on perfuader que par cela feul que
le décimateur efi obligé à fournir les alimens au Curé, il
efi également obligé à lui fournir l'habitation qui fait partie
des alimens, puifque dans tous les cas le décimateur n'efi
pas fournis à la fourniture de cetre maifon; le principe
des alimens ne peut donc lui être appliqué. En empruntant cerre raifon des alirnens, puifée dans Van - Efpen ,
tom. 2., part. 2., feél:. 4, tit. 3, ch. 8, on auroit dû
dire que cet Auteur, après l'avoir propofée au na. 1 &
fuiv., la difcut,e & prouve que le décimateur n'eH foumis
qu'au paiement de la portion congrue, & non à la fourniture indéfinie des alimens eh faveur du Curé; d'où il
conclut que la fourniture de la maifon presbytérale ne fait
jamais partie des alimens dus au Curé.
Dans tous les temps connus, les peuples ont logé leurs
Pafieurs; ils ont donc dù dans tous les temps être nourris
�\ DU
PALAIS
DB
PROVENCE.
2'1.7
& logés aux dépens des peuples. On ne peut pas dire
qu'au moyen des dîmes, le PaHeur devoit {e loger luimême; on ne trouve depuis ceue époque aucur.e Loi ni
canonique, ni politique, qui ait fournis le décimateur à
fournir le logement, ou qui ait difpenfé le peuple de la
primitive obligation de loger (on Pacteur.
Les décioons, tant canoniques que politiques que l'on
connoît en France, s'accordent unanimement à rejetter la
charge de la fourniture fur le peuple. Le Concile de Lan<7res
de 14)), rapporté par Mr. Piales d'après Bouchel," n'a
béfoin que d'être médité, pour prouver qu'aux termes de fes
difpootions, il faut regarder comme une vérité de principe
l'obligation dans laquelle les habitans fe trouvoient de fournir le presbytere & de le réparer; rien de plus précis que
Je trait par lequel il débute: quia parrochiani ad œdificationem domûs presbyteralis tenentur. Aux termes du Concile,
l'obligation de fournir la maifon curiale tombe donc inconteHabJement fur le peuple. Il ne faut pas être étonné fi le
Concile de Bourges rapporté par Caba1rut, noti. & Ecclef.
pag. 662, n. 6, porte expreffément:.fi qui parrochi domus
non haoebunt, curent Epifcopi, ut.parrcc!zianorum expenjis
extruantur. Telle efl: donc l'ancienne pratique du Royaume;
Je peuple fourniffoit la maifon curiale, tant avant qu'après l'etabliffement des dîmes, & l'obligation de réparer
n'étOit qu'une conféquence de celle de fournir. De-là viennent les Loix françaifes. L'Ordonnance de Blois, art. ) 2,
l'art. 3 de l'Edit de Melun .n'étaient-i1s pas formels là-deffus? C'en Line vérité certaine que le décimateur n'étoie
fournis à rien fournir; & .quand l'Ordonnance de Blois &
l'Edit de Melun ont invité les Evêques & les Archevêques
à veiller à ce que les Curés fuffent convenablement logés,
ce n'eH certainement pas pour que les Curés fuffent contraints à fe loger eux-mêmes: l'obligation de fournir le
logement tomboit donc alors fur le peuple. Tel érait le
véritable état de la légiflation françaife à l'époque de l'Edit de 169)' Cet Edit, en foumeuant le peuple à fournir un logement convenable aux Curés, n'a fait que re-
F f2
,
�:1.2.8·
J 0 t1 RNA L
nouveller les Loix préexill:antes; toUS les inrerpretes l'at~
tell:ent de même. De-là avant l'Edit de I691' tous les
Parle mens -jugeaient qu'à défaut de titre & d'ùfage local,
l'obligation_ de loger le Palleur tombait fur le peuple.
On trouve ces Arrêts dans Brillon, va. preshyte!'e, va. décimat.:ur & va. Bénéfice.-Cure, n. 22, dans- Expilly, chap.
I 33, dans Chenu, réglem. tit. I, chap. I 4, & dans Chopin
de Monafl, lib. 3, tit. 24. L'art. 1 de l'Edit du mois de
Mai 1768 décharge le décimateur de toure autre preftation que celle des objets y énoncés; il d~ëide confé. quemment que les con ftruél:ion & réparations des presbyt-etes ne peuvent pas affeé1er le décimateur.
. Lors de l'Edit de 1691' la regle étoit établie de maniere que tous les objets étant confondus, le décimateur
contribuoit pour un tiers, & le peuple po).Wies deux tiers,
reHans. Mais cette jurifprudence avoit été précédée par
une autre qui rejettoit en entier fur le peuple les frais de
la conl1:rùél:ion & des réparations. On en trouve la preuve
dans Pal1:our, de Ecclef. œdif. & repar. n. 6 , dans Boniface
& dans Decormis, tom. l , col. 314. La contribution
pOUl' ,un riers n'a .pas fubûl1:é plus de rrente ans, fuivant
l'obfervation de Decormis. Au furplus, on ne peut pas
prendre droit de ce que Decormis obfe.rve, que fuiva'Jt
l'ancienne jurifprudence, la Communauté fournilfoit le presbyrere, & le Prieur étoit eufuire obligé de l'entretenir &
de le réparer. Cet Auteur parle des maifons prieurales
dont les Prieurs-Curés font vrais ufufruitiers, fuivant l'obfervarion de Mr. Debezieux, liv. I , tir. 2 , ch. 3, §. 2,
& de Decormis lui-même, pag. 3'Î 9. Mais quand la maifan n'el1: que presbytérale, il n'el1: pas poffible d'en rejetter les répararions fur le -décimateur, parce qu'en' vrais
principes l'obligation de réparer el1: une conféquence de
celle de fournir, foit' parce que le décimareur qui n'ell:
point Curé, ell en {Out fens érranger à ·Ia maifon curiale,
& l'on ne peut l'en conûdérer comme ufufruirier qu'en
faifant violence à tous les principes.,
_ D'ailleurs la quel1:ion concernant le décimateur s'el1: pré-
�l> u PAL AIS Dl! PRO VB NeE:
~19
[entée; mais dans un fens inverfe à celui que l'on traite.
On n'imaginait pas que le presbytere étant mis par nos
Loix à la charge du \ peuple, le décimateur pût êlre fournis à la moindre contefiation à cet égard; mais les décimateurs eux-mêmes ont au contrairè mis en queftion
s'ils devoient contribuer aux réparations à raifori des biens
fonciers qu'ils poffedent dans la Paroiffe & à l'égal des
autres poffédans-biens; fur quoi les Arrêts ont décidé qu'ils
devoient y entrer comme les autres poffédans - biens du
terroir'à raifon des biens fonds feulemènr. C'efi ce qu'bbferve Bafnage fur l'art. 55 de la coutume de Normalldie.
Routier dans fes Pratiques bénéficiales, pag. :2.11. Jouffe
établir auffi le même principe au fujet des réparations fUr
l'arr. :2.:2. de l'Edit de 1695'
La jurifprudence moderne veur que le peuple fupporte
toutes fes groffes réparations, &' les Curés ne fone fournis
qu'à payer les menues & locatives : il efi donc certain
que toutes les réparations qui ne font pas les menues &
locatives, font comprifes dans la claffe des groffes réparations. Il n'efi donc rien de plus contraire aux principes
& à l'ufage univerfel ,-que de. divifer les groffes réparations en réparations foncieres &~ de gros entretien, & de
former une troifieme claffe pour en faire fupporter la dépenfe au décimateur. L'ufage général efi confiant; Goard,
rom. 4, pag. 398, attefie la jurifprudence du Parlement
de Grenoble; celle du Parlement de Paris eH fuflifammenc
-,oRfiatée par Denifart, pag. 151, qui cite deux Arrêts
du Confeil du 8 Mai 1703 & l Février 173:2., revêtus
de Lettres-patentes, qui ont été rendus pour le Languedoc,
& par lefquels il a été décidé que les Paroiffiens devaient
être cotifés pour les cônfiruél:ions & réparations des maifans presbytérales.
,
Il eH convenu que l'Edit de 1695 a fait ceffer en Provence la reg~e du tiers ,qui s'y trouvoit précédemment
établie; il réfulte de la doél:rine de Decormis, que l'Edit
de 1695 fut re'iu en Provence, & qu'il fut exécuté comme
mettant les décirnateurs hors de toute charge [ur le loge-.
�30
]
0 UR NA L
ment du Curé. Gibert, corp, jur. canon. tom. 2., traél.
pojler. tit. 10, de rec1or. Ecclef. parroch. fea. 17, 8, 2,
pag. 222, atte!l:e la !l1.ême chore; il nous apprend que l'Edit
~e 169) a inlroduit parmi nous des regles nouvelles, &
que les habitans font chargés tout à la fois de fournir &
d'entretenir le presbytere. Un Arrêt a décidé que le presbneçe de la Paroiffe St. Laurent feroit réparé à la charge
du .peuple. L'Arrêt du 2 Mai 1737 y condamna la Communauté de Miramas. Ainli tout ell: en faveur des décimateùrs de Provence: principes généraux, loix particulieres
de la matiere, Arrêts de toutes les Cours, ufàge' tant
Î1niverfel que local; tout arreHe que le décimateur qui
n'efl: ni' propriétaire, ~ ni même ufager du presbytere, n'a
point de réparations ,à ftlpporter paUr raifon de cet objet.
S'il exifl:oit à cet égard un ufage local, il ferait comre
les Loix & contre les principes.
, Arrêt du 23 Juill 177) , au rapport de Mr. le Confeiller
de Fabri Borrilly, qui confirme la Semence avec dépens.
Ecrivant Mes. Pafcalis, Gaffier & Bonnaud Saint-Pons. La
Pr,ovince étoit intervenue au procès pour la Communauté:
La Déclaration du Roi du 1 1 Mars 1783 foumet les
Communautés de Provence à fournir un logement convenable aux Curés, qui feront enfuite tenus des réparations
purement locatives; & quant aux réparations groffes ou
fonCieres, & à celles d'entretien ou ufufruitieres, elles feront à la charge des décimateurs pour un tiers, & des
1
Communautés pour le~ autres deux tiers.
/
,
1
')
L
�.
ARRÊT
XIX.
Sur l'effet de la date qu contrôle d'une écrite privée.
'
Le pouvoir donné par 'le Seigneur direa
fan Procurwr
fondé, d'exiger les cenfes & les lods, de lionner l'invefÛture, même avec ceffions des droits, Ii be foin eU,
renftrme-t-il celui de céder le droit de prilation ?
a
Ar aae du l Mai 1772, Jean Reginel, Marchand
du lieu d'Eiragues, acquit de Pierre Fabre, Hôte dd
même lieu, une maifon & cour pour le prix de 300 liv.
Il rapporta ceffion du droit de prélation du Procureur fondé
du Seigneur, par écrire privée du l Juin d'après, qu'il fie
contrôler le 6 du même mois à fept heures du matin. Le
même jour après midi, affignation pardevant Notaire de
la parr de- Jean-Jofeph Fabre, Négocia'nt de Châteaurenard, en défemparation qe la maifon par retrait lignager.
Reginel répondit qu'il étoit préférable à Fabre, ayant acquis le droit de retrait féodal. Le Juge d'Eiragues fit droit
au retrait lignager. Appel au Lieutenant d'Arles qui réforma avec dépens. Appel au Parlemenr.
Suivant les Arrêts de la Cour (diCoit Fabre) le retrayant
lignager ne pem évincer l'acquéreur de fa po{felIion, lorfqu'elle eU Coutenu6 de la celIion du retrait féodal. Mais
cette ceffion ne pellt être utile & profitable à l'acquéreur,
qu'en tant qu.'elle a été faite avant que le retrayant lignager
fe foit préCen'té pour exercer Con aaion. L'acquéreur une
fois affigné en défemparation du fonds qu'on lui a tranfporté, toue ce qu'il entreprend, tout ce qu'il peut faire
pour fe maintenir dans fan acquifition, eU confidéré
comme une fraude à laquelle la Jufiice ne fauroit fe
prêter.
Il faut a'ailleurs difiinguer hl ceffion contenue dans un
aél:e public, de celle qui eft faite par un 'aae fous feing
P
�2.32.
JOURNAL""
privé. Da~s le premier cas, 1 il elt indifférent _que l'acquéreur contre lequel on exerce le retrait, repré[ente lOFs
de l'afiign~tion le titre par kquel le Seigneur lui a cédé [es
droits. L'autorité publique dont ce contrat elt revêtu, lui
affure d'une man~ere conflante & inébranlable la preuve
dont il a be[oin pour établir que la ceffion exiltoit au
temps de la demande. Dans le [econd cas au contraire,
l'acquéreur doit néceffairement manifefler la ceffion du retrait féodal dans l'in{bnt même qu'on lui fignifie la demande du retrayant, parce qu'il dl: de principe qu'un
aél:e fous [eing privé ne peut avoir une autre date que
celle' du 'jour auquel on le produit: De forte que fi l'acquéreur différoit de faire paroÎtre la" cefiion du retrait
féodal, il fourniroit au retrayant un moyen invi'ntible pour
foutenir qu'elle a été faite poHérieurement à la demande
& en fraude de l'aél:ion qu'il a intentée. C'clt ainfi qu'on
lè pratique à l'égard du débiteur qui al\egue d'avoir payé à
fon créaucier les Commes qu'un. tiers fait arrêter entre [es
mains : s'il repréfente lors de l'exploit de faifie la quittance juHificative du paiement, il acquiert par-là un titre
certain pour fe faire décharger de la demande en" expédition des fommes arrêtées; mais s'il néglige "cette précaution indifpenfable, on ne regarde alors la quittance qu'il
produit que comme une piece Ju[peél:e.
Le défam de repréfentation lors de l'affignation forme
donc contre Reginel une preuve évidente que l'aél:e a été
fabriqué dans la fuite pour éluder l'aél:ion du retrayant.
Par quelle raifon, par quel motif Reginel différa-t-il
pendzm" fix jours de faire contrôler cet aél:e? Peur - on
croire "que fi l'acquéreur avoit préparé d'avance le titre
qui devoit le mettre à l'abri du retrait lignager, il eut
négligé de lui donner la publicité, qui [eule pouvoit affurer
l'effet de fa vigilance?
La relation du contrôle eft concue en c;es termes: COIltr6lé il Eiragues le 6 J~i!l 1772,' R. quatorje fols a.fept
heures du matin, ainfi r~'luis . .Si on avoit écrit la déclaration de l'heure dans le même inftant du contrôle de
l'aél:e,
-
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
233
l'àél:e, on l'aurait inférée immédiatement après la date du
. jour du contrôle; elle a donc été ajoutée après coup, &
lor(qu'on eut connu, par la lignification de la demande,
la l1éceffité où l'on étoit de. conflater qu.e la ceffion exil:"
rOll' anparavant. La demande en retrû, a. été lignifiée le
même jour auquel on a contrôlé la ceffion. L'acquéreur
qui avoit tout prévu, qui connoilfoit tous les effets que
l'on tirre devoit produire, qui venoit de le rendre public,
parce qu'il [avoit qu'il devoit bientôt en faire ufage, demanda cependant un délai de vingt-qnatre fteures pour répondre, .ce qui prouve qu'il n'avait pas encore conçu le
projet de (e procurer par un aéte frauduleux le titre dont
il avoit be(oin pour [e maintenir dans [on acquilition. Tout
[e réunit pour démontrer que c'elt dans l'intervalle qu'il y
a eu de la iignification de la demande à la répon(e de
Reginel, qu'on fabriqua la ceffion dom on. [e [en an jourd'hui pour exclure le retrayam lignager.
Les Edits qui ont introduit la formalité du contr.ôle des
aél:~s, n'ont eu d'autre objet que celui d'en fixer la date;.
la formule que l'on dilhibue aux Contrôleurs, ne leur indique d'autre fonélion à remplir que celle de déclarer la
. date de l'année, du mois, du jour, le nom des' per[onnes
qui ont palfé les aéles, & les droits qu'ils ont exigé. L'expreffion de l'heure elt ab(olument indifférente & é.trangere
à l'objet du contrôle. On n'exige la [olemnité de l'in(cription de faux pour cOl11battre le témoignage d'un Officier
public t'lue parce qu'il s'agit d'altérer, d'ébranler la confiance que la Loi lui affure dans l'exercice du miniltere
dont elle l'a revêtu. Or, dès que la Loi n'a pas prépo(é
les Commis au contrôle pour conHater l'heure à laquelle
on donne aux aéles la publicité qu'elle delire, il s'enfuit
que toures les déclarations qu'ils peuvent faire 11 ce fujet ,
pe (auroient participer à l'autorité due aux aéles c;ue la
main d'un Officier public a formé : c'eH le témoignage
~'un !impIe particulier; c'eH: une atteitation viiiblemem
m,endiée., contre laquelle on n'a pas be(oin de palIèr à.
Années 1775 & 1776.
Gg
•
�~34
Jou RNA L
rinlèription de faux, pour établir le contraire de ce que le"
Contrôleur a attefié.
On ajouroit pour Fabre, que la procuration du fieur
Gilles l'aurorifoit fimplenlene d exiger les cenfts, d rece'Voir les lods, d 'donner l'ùlvejliture aux 1l0IlVi:nUX poflèffiurs,
faire reconnaître les emphytéotes, du reçu de tout donner'
quittance aux payeurs, talU publiques que privées, même avec
ceJlion de droits, fi befoin était. Le Procureur du Seigneur
s'eH: donc arrogé le droit de céder le retrait féodal. La
Loi veut que les procurations parriculieres foiene refireinees
& limitées aux objets qui y (one nommément exprimés,
& on n~ peut par de fimples induél:ions attribuer au Procureùr un pouvoir que le mandant n'a pas cru devoir lui
accorder. L'inveHiture efi un aél:e par lequel le Seigneur
dominant accorde à l'acquéreur la faculté de pofféder le
·fonds qu'on lui a vendu. Le retrait féodal au coneraire el!:
Je droit qu'a le Seigneur de retirer par la puiffance du
Fief le fonds que (on vaffal ou emphytéote a aliéné. Le
premier tend à confirmer la vente, à' en affurer l'exécution, tandis que le (econd en opere la réfolution. Le droit
de donner l'inveHiture, & la faculté d'exercer le retrait
féodal, forment donc dans leur objet & par les effets qu'ils
'produifene, deux droits abColumenc différens : comment
feroit-il poffible de les regarder comme dépendans l'un de
l'autre.?
La claufe de la procuration, qui porte que le Procureur
peur même faire ceJlion des droits, fi befoin ejl, ne (e rapporte & ne peut (e rapporter qu'à ce qui la précede immédiatement. Or le m:anda'ne n'a entendu permettre à fon
Procureur de céder fes droits que par rapport aux fommes
qu'il devoit exiger & recevoir en (on nom. Ftn-il permis
d'appliquer cette tlaufe à tout ce" qui précede, il eH certain que le droit de céder le retrait féodal ne pourroit
être confidéré comme une dépendance du droit de donn 7r
J'inveHirure. ,Peu importe que le Seigneur d'Eir<lgues ·alt
déclaré qu'il avoit entendu donner à fon Procmeur'le poû';
i'
'.\1
�DU
/
PALAIS
DE
231
PROVENCE.
voir de céder le retrait féodal. Il ne s'agit pas de' favoir
fi le Seigneur a eu véritablement l'intention de con,prendre ce droit dans le nombre de ceux qui ont f:1ir J'objet
de fa procuration, mais de décider fi cette volonté réfulte
clairement de 1a difpofition de l'aél:e. Or, élant certain q~e
le Procureur n'a pa,s reçu ce pouvoir, les déclarations que
l'on a pu faire dans la fuite ne fauroient en changer la nature & en étendre les effets.
On répondoit pour Reginel, que le rern!it lignager ell:
amant contraire au droit qu'à, la liberté du commerce; &
quoique quelques Auteurs, même du pays aiem dit qu'il
éroir favorable, comme tendant à conferver le bien dans
les familles, il ell: néanmoins certain q.u'en I\line Jurifprudence, il eH odieux & reHringible; au lieu que le retrait
féodal mérite toute faveur, tant dans fon principe que dans
fes effets: dans fon principe, parce qu'il eh: réfervé dans le
contr3t 'conf!:iturif de l'emphytéote; dans fes eflèts, parce
qu'en l'exerçant, le Seigneur réunit à fon fief, quand il exerce
pour lui-même, & il cboifir un emphytéote plus agréable,
qua'nd il exerce le retrair, med/ante cefJionario. C'eft l'obfervation que fair Mr. de Tboron , de laquelle il naît deux
conféquences: 1°. c'eil contre le droiç qu'on a déclaré le retrait lignager préférable à la ceffion du droit de prélarion; 2°. on
a retenu le droit commun & route la faveur Llu'il peut mériter, dans je cas où l'acheteur joint au' titre de fon acquifition la ceffion qu'il a rapportée du droit de prélation. Si
dans ce cas le ceffionnaire du Seigneur eH préféré,
c'ef!: moins à raifon de ce qlle dl/o vinCI/la {tlllt fortiora, que
parce que l'on " vu qu'au moins dans ce cas complexe, le
droit commun' devoit être gardé.
Cela pofé, l'écrite'de ceffion étant fous la date du l Juin,
il eft certain que cette date toute privée ne ponrrait ~voir
aucun effet contre le tiers, tant qu'elle reLte dans cet etat;
mais cette date eft affurée par le contrôle, dont le regiHre
fait foi, ex cOflfeJ1is, jufqu'à l'infcription de faux, pour ce qui
concerne la date du jour, comme celle de l'heure, Il eft trèscertain que la relation du contrôle étant du 6 Juin, Jo[eph
Gg
2.
�~36
' Jou RNA L
Fabre Ïle pourrait ~tre admis à dire que la piece a été con":
tr61ée le 7, qu'autant qu'il prendrait la voie de l'infcriptian en faux, & qu'il rapporteroit la preuve de cette antidate.
In'utilement objeél:e-t-on que l'expreffion de l'heure efl:
affeél:ée &. inulitée. Il fe préfente une foule de cas O~I il
efl: effentie! ,que l'heure, le moment, de l'aé1:e foient fixés
par l'aé1:e lui-même. Delà vient que dans tous les c-as, dans
tous les aé1:es où cette expreffion peut dèvenir utile & néceffaire, la mention de l'heure fe trouve exprimée fans
, difficulté', &. la main publique qui dl: chargée de la rédaction ne pourrait alors, fans prévariquer, fe refufer à cette
·énonciation. Il efl: en effet des cas dans lefquels le moment,
la minute décident du droit des parties; &. il eH: de maxime
que dans le concours des aé1:es du même jour, ceux qui
portent l'expreffion de l'heure font préférables, parce qu'on
les con.!idere comme faits avant les aucres portant la dace
du même jour: delà l'expreffion de l'heu re, loin de former
un vice dans le titre, ne fere au contraire qu'à le rendre plus
légal &. plus pur.
Les Loix ont établi le contrôle pour authentiquer une
écrite privée; c'eil: un moyen qu'elles ménagent à touS les
citoyens, pom manifeHer aux yeux de la fociété les titres
privés dont iis font porteurs, &. pour en affurer la date;
s'il avoir tté poffible d'aller pard6vant un Notaire, Reginel
n'aurait pas manqué d'y recourir, &. d'exiger de lui l'expreffion de l'heure. Le minifire de l'opération qu'il devoit remplir, pour donner dans le moment date & valeur à fan titre,
& pour en affurer l'exécution COIJtre tout d!mandeur en retrait, n'était pas un Notaire, mais le Contr6leur. Il a donc
pu, il a dû exiger de ce dernier la même énonciation qu'il
aurait exigée d'un Notaire, &.' que ce dernier i'l'auroit pas
pu lui ,refufer. L'expreffion de l'heure efi donc légale,
ufitée, elle écoit néceffaire au cas préfent; elle n'a donc
rien d'affeé1:é. Où efl: la preuve que l'écrite portant ceffion
du droit de prélation ne fut faite & contrôlée que dans
J.e temps intermédiaire de la lignification de l'exploit à la
�DU
PAI.AIS
DE
PROVENCJl:
237
'réponre de Reginel? Ne trouve-t-on pas la preuve contraIre
dans la relation du contrôle? Qu'on prenne donc la voie de
l'infcription en faux, ou que tout au moins 00 entreprenne
de prouver que le contrôle de la piece n'a pas été fait à
lèpt heures du matin, ainfi qu'il ell: dit dans la relation.. de
l'article; mais tant que cette relation fublitl:era, il f:1udra
tenir pour certain que la piece étoit contrôlée avant l'affignation. Si Reginel n'a point montré l'écrite portant ceffion du droit de prélation dans le moment de la lignification de l'exploit, c'etl: parce qu'il avoit une réponfe à faire,
comme il la fit rout de fuite le même jour après avoir pris
avis. Après cela, qui peut dire qu'il y a fraude dans le procédé de l'intimé, & faux dans la relation du Contrôleur?
A défaut de preuve, l'expreffion de l'he~:e fera toujours
aufIi bonne, au.fIi légale que l'expreffion du jour contre laquelle on ne pourroit s'élever, qu'en adminiJlrant la preuve
contraire. Ainfi il n'y a nulle rairon d'abandonner l'expref,fiot) de l'heure portée par la relation du contrôle, & de
conGdérer le contrôle de l'écrite & de l'exploit d'affignation
comme étant en concours du jour & de l'heure, puifqu'il
e{l: certain que l'affignation ne fut donnée qu'à dix heures
du matin, & que la piece avoit été contrôlée trois heures
auparavant. Il n'y a donc point de concours dans la date
des deux pieces; & s'il y avoit concours, il n'y auroit pas
lieu de fe déterminer en faveur du lignager, parce que la
véritable marche des principes feroit de préférer le ceCfionnaire du Seigneur au' parent qui veut retraire.
Sur le pouvoir du Procureur du Seigneur, on répondoit
que la procuration lui donnoit le droit d'exiger, &c.... mime
avec cefJion des droits, fi hefoin étoit, & généralement faire
ce que le cas requéroit, & ce que le Seigneur conflituant feroit lui-mime, hien que le cas requît un mandat plus fPécial.
La lettre de l'aél:e el!; formelle. D'abord la c1aufe, mime
avec cefJion des droits, fe trouve exprimée dans un Cens indéfini; elle etl: donc illimitée. D'autre part, la claufe, mime
avec celfion des droits, Ce rapporte à tout ce qui précede.
pn trouve dans ce qui précede la f:1culté de donner in-
�238
Jou
RNA L
vefriture-da c!aufe, avec cejjion des droits, eil atcolée à cette
faculté, comme à celle de recevoir le paiement des cenfives
& des lods, & de quittancer en conféquence. Au moyen de
quoi, il dt vrai de dire, en raifonnanr fur la teneur linérdle. dll titre, que le Procureur avait le pouvoir bien exPlicite, q'ir>veltir avec ceffion des droits du Seigneur. Il avait
donc indu,bitllblemelJt le pouvoir de céder le droit de prélati0n, puifque la ceffion des droits du Seigneur, relatifs
à l'inveHiture, n'eH & ne peut être autre cho{e que celle
du droit de prélation·. Suivant l'e{prit de l'atte, le pouvoir
du PrOçmelJr ea {ans bornes; il a droit de faire rout ce
qui reqLHhoit un mandat {pécial, & que le Seigneur pourrait
faire lili-mê01e ; cene claufe prouve affez que le Seigneur n'a
point voulu menlle de bornes à fa confiance, & qu'il a voulu
que fan Procureur le. repréfentât en toutes cho{es dans l'exercice de fes d'roi,ts feigneuriaux; il éroit d'autant plus naturel
de le vouloir" que des raifons dE'tat & de fervice obligent
le Seigneur à s''lbfenter pendant une grande partie de l'année. D'aill,e-urs il n'efi guere poffible d'imaginer qu'en accordant le droit d'inveHir, comme il l'51 fait par exprès, le
Seigneur ait voulu fe réferver le droit de céder le retrait,
dt0it 'qui n'aurait pu que lui devenir inutile, après l'inve{tirure donnée par fan Procureur.
IntltiIement avanc"e-t-on que RegineI s'eil jugé lllÏrmême
{ur le défiçit de fa proc.uration, puifqu'il a rapporté de la
part dl.l Seigneur qui Ce· trouvait {ur les lieux à cette époque, une dé.claration par laquelle ce. Seigneur attefie avoir
rranfflQrté à {on PrOCu(ellr la faculté d~ céde.r {es, droits
{eigneu;:iaux, dans. Ie{queJ§ il 'y efi(?~mpris celui du retraill
féodal, n ésoir en effet afftlz étrange que l'on come fiât les,
pouvoirs,' du L'rac.ureur', tandis q\le l'u{age que. ce Procureur.
en avoit fait, {e trouvoit avou.é- par le filence' du Seigneur,
lui-même; Glence qui da.ns cette partie v,aut {ans co.ntredir
con{entement. Mais cela devie);lt enQore'phis extra,ordinaire,
quand lé Seig,neur a parlé fi qu'il a déclaré neJtemenr:- que
la cel]ion du droit <le préla-tioll étoit C0l11pri{e dans le, titre.
Cette déclal'ation n'efi qu'explicative, & non conilitutive-d'illnl
�DU
DB PRO V B N C B.'
:t 39
bare de la décJaràtion ef!: dans l'aél:e.
177), au rapport de Mr. le Conf~iiler
confirme la Sentence du Lieutenant
Ecrivant Mes. Ailhaud & GalIier.
PAL AIS
jJouveau paél:e, & la
Arrêt du 27 Juin
âe St. Martin, qui
d'Ariès avec dépens.
é
ARR Ê T
XX.
Peut-on tratifiger fur la fucceffion d'un défun~, fans avoir Vil,
[on teJlament, quoique l'exiflence en [oit connue)&' qlfill'ée?
A Dame Thel'efe Porte, époufe du lieur Arnaud, Négociant de la ville' de Marfeille, fit un tef!:ament folemuel le 31 Mai 17'58, & décéda le 2 Septembre 1773'
Le 14 Septembre, la Dlle. F rançoife P.orte de la ville de
Saint-l\i]:aximin dema da l'ouverture du tef!:ament; l'alIigna"
rion fut donnée pour le lendemain. Le fair du mêm'e jour',
la Dlle. .Porte renonça' par écrit, au profit du lieur Arnaud,
à l'inf!:iturion teHamentaire, li elle éroir en [a faveur, moyennant une penCion viagere de 1600 liv. Après cet acco rd ,
le lieur Arnaud f<tit un aél:e proteH q ! if, fait contrôler le teframènr, impetre' lettres de' refcilion, fait ajourner la DlIe.
Porte,'pour vqir dire.que les panies feraient remifes au même
état où elles étoienr avant la tranfaél:ion. Sentence du Juge
de Saint-Maximin qui entérine [es fins. Appel au Siege de
Brignoles.; Semence qui réforme eelfe d\;l Juge de SaintMaximin; appel du -fIeur Amaud 'pardevant la Gour.
. 1
.Om diroir pGlur lui ~ qu~ les: clerriieres volontés des hommes
ont été en \lénérwon de. toUS les temps,; le tefl:areur vit
encore aprèS" fa mort; il donne des loix à Ces héritiers: dif
panat teJ1ator,1 &- erit lex. L'exécurion des teJl:amens ef!: de
droit public;..la Loi veille ,pour l'intérêt du citoyen; elle fait
exécuter' lès <volontés. Dellv la .Loi donne a6l:ion à toute
perCotlne pour demanded'ouver.rure de tef!:lldJens, s'ils font
folemnels," pCJUr le~ vo.ir r& len pr:endre'~s, extraies" s'jls f<Dnt
nuncupatifs, & cela quand même les tef!:amens font im-
L
,
�240
~
Jou
RNA L
parfaits ou devenus inutiles: puhlicè expedit, dit la Loi ~ ;
tejlam. 'luemad. aper., jùprema homirzum judicia exiwm habere.
Si l'exécurion des teil:amens tient au droit public, on ne
peut paél:ifer fur leur exécution fans connoiffance de caufe:'
delà vien.r que la Loi 6, if. de tranfac7.., prononce la nullité
de tous aél:es intervenus fur un teil:ament dont les difpofttions ne font pas éonnues: de llis controverjiis quœ ex tejlanzento proficifcuntur, neque tranfigi, neque eX'luiri veritas aliter
potef!, quam irlfPec7is, cognitis verDis teflamenti. Les Jurifconfuites qui ont commenté cette Loi, difent que ceux qui tranfigent, ne peuvent pas renoncer à la connoiflànce des termés d'u teHament, & que roure convention & renonciation
eil: contre le droit public, auquel 'il ne peut être dérogé.
(Perezius fur le titre du Code de tranfac7ionibus, n. la;
Faber fur le même titre, déf. 1; Catelan, tom. 2, chap. 46;
Defpeilfes, rom. 2, part. 3, tit. l, p:'g. 487; Peregrinus,
de fideicommiJlis, art. S2, n. 22 & 23; Urcealus fur cerre
Loi, n. l, queil:. 47, part. 3, & Fromental i va. tranfaction. y
On ne peut point en effet tranGger fur les difpofirions
d'un aél:e que l'on ne connoit pas. Cerre prohibition eH
conforme au droit commun, qui ne permet pas que les hommes fe lient par des obligations dOllt ils !;le connoiffent
pas l'étendue, & qu'ils renoncent à, des prétentions qu'ils ne
[avent point encore leur être acquifes. Un aél:e palfé fans
connoilfance de caufe ne mérite ni le nom, ni la fàveur,
ni l'autorité d'une tranfaél:ion. Delà, fi elle éH palfée fur un
blanc feing, ft elle eil: faite non vifis, non difPlInc7is rationi/JUs, elle dl: entachée du même vice. Une,hanfaél:ion paffée
fur un teil:ament qu'on ne connoit pas, renferme fans contredit le mépris le plus.formel à la volonté du défunt; elle
doit être également refpeél:ée, qUdnd il eH, décé:dé ab inteflat ou avec un tefl:ament : dans lé pr.emier:cas, ,il n'a VQulu
avoir d'autre héritier qne celui que la nature-lu.i.; a iloJ1né;
dans Je fecond cas, fa volonté n'en- eil: p.as rmoins refpeo~
table:
,'. 1 - . ) lu)
J•• :
Quelles
if.
�DU
PALAIS
DE
X4 f
PROVENCF.
Quelles font les difficultés qui peuvent s'élever fur les
difpoutions d'un teflament qu'on n'a point vu, & dont
l'exiflence efl cependant cerraine? Ce ne font & ce ne peuvent être que l'incertitude de ces mêmes difpoiitions; mais
le doute fur la tia.ftJre des difpoGtions du teftateur ne 'peut
être la matiere d'une tranfaél:ion. En fuppofant que la Loi
de his ,jJ. de tranfac7., ne prononce que la nullité des aél:es
concernant l'exécution des teflamens, dans le cas où les
contraél:ans n'auront point une' connoi1Tance entiere & parfaite du titre fur lequel il efl qneflion de s'arranger, la caufe
de la Dlle. Porre n'en efl que plus défavorable. En effet,
,,/' d'après fes propres principes, la Loi prooonceroit la caffati,on d'un aél:e qui n'auroit fait fraude qu'à une partie de
l'exécution des volontés du teflateur, & elle ne prononcel'oit pas la même peine contre un aél:e dans lequel on fe
feroit arrangé, tout de même que s'il n'exifioit aucun teframeur. Une perfonne qui faura avoir le titre d'héritier, ne
pourra tranGger avec un lég'Jtaire, avec un créancier,
fans avoir vu le teHament; & deux perfoJ,1I1es dédaignant
, de le voir, de s'informer de celui qui aura été l'objet des
vœux du tefiateur, pourront prendre enfemble tel arrangement qu'elles trouveront bOIl.
Quand le teHament eH connu, les motifs de la prohibition ceffent, la volonté dtl tefiateur efl accomplie, la
Loi efi fatisfaite ; l'héritier peut alors à fon gré difpofep des
biens qui lui on"t été tranfmis. Delà la Loi, qui ne permet
pas de traiter fur une'fucceffion dont le teflateur a difpofé,
avant de connoÎt re fes difpoGtions, permet d'en 'traiter,
lorfque le reHament a reCiu fon exécution par la connojffance qu'en a eu l'héritier.
,
En vain affimileroir-on la tranfaél:ion dont s'agit à celle
•
qui eH paffée après un jugement que les parries ignoraient.
Une pareille tranfaél:ion a eu dans fon principe une matiere légitime de tranfaé'tion; c'eft le procès lui-même que
les parties ont voulu terminer, dans l'ignorance qu'il eût été
jugé. Ce n'eH donc pas fur le jugelTleqt, ni pour le méprifer, Xju~ les pan)es [[aofigent, mais Fur leur procès &
Années l775 & l776.
H h
•
�"4~
J'o
II R N'A L
l-
Ieurs conteIl:ations qui éwiene réelles & fufceptiblès de
dome. Urceolus, dans fon traité des trallfaéliolls, quefl:. 47;
n. 3 l , parle ,d'un lirige formé fur l'exifl:ence 0 u la nonexiHence d'un teftament; ce litige peut arriver dans des cas
done nous a.vons des exemples: Le dépoutaire d'un teftament olographe ou folemnel peut être attaqué pour le
lepréfenter. Il fe défend. fur ce qu'il n'eft pas obligé. de
J1exhiber, ou' fur ce qu'il n'yen a point. Voilà le feul cas
où la doétrine d'Urceolus trouv~ fon applicâtion, & où la
tranfaétion peut être valable. Mais aucun Auteur n'a dir, ni
pu penfer, qu'à IJinfl:ant de la mort, de quelqu'un, & fans
qu'on v.eulÎlle fé donner la peine d'éclaircir s'il a fait un
tefl:amenq, ou s'il n'en a point fait, il fait permis de tranfiger pour' partager la fuccelIion entre un héritier ah inteflat
& un étranger, & de convenir gue foit qu'il ait tefl:é, foit
qu'il' n'ait pas tefl:é, la volonté qu'il a eu en_ne tefl:ant pas,
de tout'donner à fan héritier.de nature, ou celle qu'il aura
eu de donner à un étranger par un teltament qui exiHeroit,
n'ait aucun effet.
N'eft-ce pas porter encore plus de mépris aux morts,
que de tranuger fur leur fuccelIion', fàns vouloir connaître
leurs difpoutions? La doétrine d'Urceolus efl: inapplicable,
{oit parce qu'elle porte fur un litige formé fur l'exiGence ou
l'inexi!tence d'un tefl:ament, fait parce que quand même il fero(t vrai, d'après cet Ameur, que les parties peuvent tranuger
filr le doute &. fur J'incertitude d'un tefl:amenr, il ne s'en enfuivroit jamais qu'on pLIt en conclure que malgré la prohibition
filite par la Loi de partager & de paétifer fur un teftamenr
dont on ne connaît pas les' difpofitions, on pût paffer tel
aéte que J'on voudrait fur l'incertir-ude des difpoutions; 'ceferait rendre la prohibition de la Loi inutile; ce ferait détruire les motifs d'inrérêt public qui J'one diétée; ce feroit
permettre que la volonté des mourans. refl:ât fans exécution.
Il ·n'eH pas exaétement vrai qu'on puiffe, dans tous les.
cas, tranuger fur la certitude ou l'incéhitude d'un te'!tament. Fallût-H' admettre ce principe,'il ne ferait pas moins
inconteftable que quand l'exiHence du tefl:amené eft affu",;
�•
DU
PALAIS
DB
PROVENCÈ.
243
rée, il n'el! pas permis de tranGger fans en connoître les
difpofirions. Or, il ne faut pas confondre le cas où le teframent ell cerrain & connu, avec celui où fon exillence
ell incerraine & douteufe. Dans le premier, ou ne pem pas
rranGger valablement fans favoir ce qu'il porte; c'ell méprifer la" volonté du défunt que de traiter fur des difpolirions fans les connaître.
L'Arrêt rendu en 1764, entre le fieur Ifnard, Négociant
de la ville de Marfeille, & les hoirs d'André Marin, confirma la tranfaélion, parce que la reilitution pour dbl perfonnel ne compétait point àux héritiers, & qu'il n'y avoit
que la perfonne qui avait fou/fert ce dol qui pût s'en plaindre, à la différence du dol réel dont les héritiers peuvent
exciper. L'Arrêt rapporté par "Boniface, tom. ) , pag. 36 1,
ne peut également recevoir aucune application, parce que
la tranfaélion qui fut confirmée avait été paffée fur un teftament connu de toutes les parties.
On répondait pour la Dlle. Porte, que le dol & la furprife font des moyens très-décilifs pour l'enverfer les contrats les plus folemnels, même les tranfaélions ; mais il faut
prouver ce dol & cette furprife, car On ne les préfume pas.
Ici la tranfaélion ell l'ouvrage du fieur Arnaud; la Dlle.
Porre n'y fut que partie paffivement adhéra nte à toutes les'
loix qu'il trouva bon de diéler; elle confentit à tout, parce
qu'elie était réfolue dans tous les cas de fairé un fort à
fan beau-frere; ce fut le lieur Arnaud qui propofa le titre,
qni le préfenta tout dreffé, qui le remit au Notaire,
qui le fit paffer fous les yeux de Me. Silvy, fob ami, & qui
preffa la confommation & les fignatures. Le fieur Arnaud
eût-il éré malade & en. danger de mort, la tranfaélion n'en
feroit'pas moins légitime; il n'y avait pas à choilir fur le temps
de la paffer. LI! reltament. devait être ouvert vers les dix
heures du matin; il falloit prévenir le moment Oll les difpolirions de ce ritre· (eroient ,:onnues·, puifqu'il était queftian de tranGg-er fur l'incertitude de ces mêmes difpoIitions.
La tranfaêlion dont s'agit eil un contrat aléatoire; chaque .partie y vend (es efpérances fur la fucceffion de la
H h
2.
�•
:l44
Jou RN''' L
Dame Porte. La Loi décide que LI vente de l'efpérance
n'eH point interdite, fPei CfuaCfue ac7ia 1/. Elle confirme
la vente d'un jet de filet, jaaus retis, d'une fubHilUtion
dont la condition eH in pendula, & de tout droit que l'on
a in fPe G' in hel'bâ, comme difent les inrerpretes. Dans
cette efpece de contrat on ne conudere pas la 'Iéiion qui
peut provenir du développement de l'événement incenain
fur lequel on a tranugé. C'eft ce qu'artell:eqt tous les Auteurs, & notamment Faber, de inaffic. teflam. déf. derniere ; Mornac fur la Loi 4, cod. de aa. vel h.ued. vend.;
Buiffon fur le titre du code de l'efcind. vend. n. la, &
Decormis, tom. 2>, col. 1189, qui obferve que la léÎlon
ne fe mefure pas par le fuccès d'un événement incertain.
L'on peur ajouter que cela ell: encore plus vrai, lorfque
les parties ont voulu rranÎlger & s'affurer [ur l'incenitude
de cet événement. C'ell: enfuite de ce même principe qu'on
rienr pour maxime que. le !T'oyen de léuon ne peut pas
être propofé contre les aél:es ponant vente d'une hérédiré
ou des droits univerfels qui font fufceptibles d'accroiffement & de décroiffement, parce qu'il ell: de la nature de
ces contrats de porte r· avec eux des rifques auxquels les
parties fonr cenfées fe fou mettre en contraél:ant; ces
rifques venant enfuite à produire des pertes pofl:érieures ,
les parties fonr cenfées en avoir pris l'événemem fur leur
co mpte. D'ailleurs les tranfaél:ions font ii fortes, que les
majeurs n'en peuvent jamais revenir, pas même par léGon,
fût-elle énormiffime, ainÎl que l'obferve Decormis, tom. 2,
col. I I 08 , I I 68 , 1602; 16')) & fuiv. Le moyen de léÎlon
ell: encore frivole' dans les conditions aléatoires, & relativement aux événeinens qui peuvtlnt tourner de l'un ou de
l'autre côté. On fent bien que l'événement poHérieur met
rour l'avantage d'un côté, & tout le préjudice de l'autre;
il adoucit la perte d'uu côté., il diminue l'avantage de
l'autre. Tels font les motifs qui gouvernent les ritres de
cette efpece.
Le titre dont s'a~it, fair en bonne foi, dans l'ignorance des difpoGtions, fLlr l'incertitude' defqueIles on a.
•
�" D U
PAL AIS
D Il
PRO V Il Nep;;
:l.4f
voulu s'arranger, "eH-il prohibé par les Loix? Deux {ources
de prohibition fe trouvent dans le droit; aucune d'elles
ne peut convenir au cas préfent. Par LI premiere, il eH:
prohibé de tranGger fur la fuccellion d'un homme vivant.
Ce paél:e ell: indécent, inducit votum captandce mortis. On
poutroit ajoutet "que ce paél:e nuirait à la liberté de teHer
par cene efpece d'incapacité limitée que les comraélans
pourroienc s'impofer emr'eux. Mais tous ces motifs ceffent
après la mort du teHateur; le droit eH acquis dès ce moment; fa fuccellion en entier peut être vendue; elle eH:
conféquemment fufceptible de tranfaélion.
La feconde en eH un peu plus rapprochée; elle eftpuifée dans la Loi de his, if. de tranfaél. : de his cdntroverflis qllœ ex teflamento proficifcuntur, neqlle tranfigi, neque
exquiri, veritas aliter potefi, quam inJPec7is cognitifque verbis
teflamenti. En effet, veut - on exécuter un ceHament, y
a-c-il quelque conceHacion fur cette exécution, il n'y a
pas lieu de douter qu'une tranfaélion ne peut dans ce cas
intervenir légicimément entre les partieS'·, qu'autanc que
les difpoGtions du titre fonc parfaitemenc connues, vifis
& in/pec7is ta Dulis. Dans ce cas il ne peut y avoir tral1faél:ion, qu'autant qu'on connoÎc de parc & d'aLicre "le citre
fur lequel il eH queHion de s'arranger. La tranfaélion
exige la connoilfance entiere & parfaite du cirre fur lequel on veuc paélifer. Dans le cas de la Loi, le teHament, les difpoGcions qu'il renferme, forment la bafe de
la cranfaél:ion, qui dès-lors ne peuc être légicimée que par
l'afpeél & la connqilfance du cicre. Mais la connoiffance
du titre n'eH pas néceffaire, quand il s'agic de contraéler
fur fan incertimde & (ur le rifque de fes difpofitions. Au
contraire, le propre de cette tranfaélion, fa fubHance eH
d'exclur.e le teHament & la connoiffance qu'on peut en
avoir. En effet, fi le teHamenr avoic écé connu, il n'y
auroic pas eu lieu de paffer l'efpece de cranfaélion que les
parcies ont convenu d'arrêcer entr'elles. C'eH le cas prévu
par la Loi de his ci-deffus citée.
,
�•
246
Jou RNA L
Si la tranfaél:ion efl: fur le doute du titre, fur les rirques
que ce doure peut faire courir aux parties, alors la narure
de ce rirre exige non feulement que le tefiamenr ne fait
point manifefié, mais qu'il ne' fait pas connu des parries.
La connoiffance ,du teHamenr détruirait dans ce cas la bafe
& la fubHance de cerre efpece de rranraél:ion à laquelle les
parries n'accedent que par le defir de fe ménager un fort,
indépendamment du teHament & des difpofitions qu'il renferme. Delà naîr certe alternativ'e : ou il faut dire qu'on
lie peut pas tranuger fur les doutes d'un tefbmenr dont
on ignore la reoeur, ce qui n'eH ni dans l'ordre de la!
Fairon naturelle, ni dans les principes des Loix; ou convenir que' quand on veut rranGger fur ce doute, non feulement il n'ell: pas néceffaire de connoÎtre le tefiamenr,
mais il feroit abfurde d'en exiger la repréfenration , qui
f:lifant ceffer le doute, emporteroir conféquemment la
fubfiance & la mariere de cerre efpece de titre. Tous les
principes nous apprennent que tout doute quelconque, foit
de drair, foir de fait, peut fervir de matiere & d'aliment
à une rranfaél:ion légitime. Urceolus, de tranfac? qu. 2.,
n. 36, explique la chofe en termes bien précis : fufficit ,
dir-il, quod articulus juris fit dubius ",'el fac?um dubium.
Sabellus., va. tranfac7io, tient le même langage.
_ La quefiîon s'étanr préfenrée en 1764 entre le fieur
Ifnard, Négocianr de la ville de Marfeille & les hoirs
d'André Marin, la tranf.lél:ion fut confirmée par Arrêt du,
r S Mai 1764, au rapport de MI'. de Sr. Jean. Il étoit intervenu une rranfaél:ion au moment du décès de la Dame
Jaubert; André Martin étoit héritier ab inteJlat; la Dame
Ifnard fe flattoit d'être inHiruée, là où il y auroit un reftament; on ignoroit s'il y en avoit un. LeS' parties calculerent refpeél:ivemenr leurs efpérançes & leurs crainres;
elles firent un accord, & s'arrangerent par tranfaél:ion;
en convenant de partager la fucceffion. La même èhofe
avait. été jugée par un autre Arrêt rapporté par Boniface,
tom. 5 , pag. 3 61 •
}
�DU
PAt AJS
Dl!'"
Pa OVI!NC'I!:
247
Arrêt du 28 Juin 177) , au rapport de Mr. le Confc iller
oe Chenerilfes, qui caffe la tranfaébon avec dépens. Ecri~
vant Mes. Pafcalis & Gaffier.
ARRÊT
XXI.
Le porteur d'u!! mar/dat, l'ayant fait proteJler comie ,fon
cédant dans les dix jouts de l'échéance, & ayant enfûte
prorogé le paiement, perd-il fon ac1ion contre le tireur qui
a failli avant l'échéance, le cédant ayant failli avant l'expiration de la prorogation?
L
Es fieurs Arnoux, Négocians de la ville de Marfeille,remirenr au fieur Jofeph Silva un mandat de 4272 liv.
fur Me. Verdilhon, Courtier de change, payable au 30 Juin
1774. Le fieur Silva le céda au fieur Dallet, & celui-ci à
Me. Paul Courtier. Avant l'échéance de ce billet , les
tireurs & le Courtier fur lequel il était tiré firent faillite.
Me, Paul s'adreffa aufieur Silva fon cédant pour en recevoir le rembourfement fous efcompte, ou pour lui donner
bonne & fuffifante caution pèur le paiement à l'échéance;
cependant Me. Paul ne fit aucune pourfuite, il attendit
l'échéance, & dans les dix jOJrs de grace il reçut' à
compte du fieur Silva i 2 14 liv., & prerogea le folde pour
deux mois; il fit néanmoins proteJl:er le mandat le 10
Juillet, & le fit fignifier tant au fieur Dallet 'qu'au fieur
Silva. Ce dernier faillit avant l'expiration des deux mois.
dans cet état de dérangement de tous les débiteurs foli.
daires , Me. Paul reJl:a dans une inaél:ion forcée, & fut
obligé d'attendre l'événement de toutes ces faillites. Les
fieurs Arnqux furent les premiers à faire homologuer un
concordat qui promettait le )) pour c~nt à leurs créanciers. Me. Paul, comme porteur du mandat qu'ils avaient
tiré, & qui formoient pour eux une véritable obligation,
fe préfenra à' eux pour recevoir l~ '5 '5 pour cent qui lui
!
�DU
PAt AJS
Dl!'"
Pa OVI!NC'I!:
247
Arrêt du 28 Juin 177) , au rapport de Mr. le Confc iller
oe Chenerilfes, qui caffe la tranfaébon avec dépens. Ecri~
vant Mes. Pafcalis & Gaffier.
ARRÊT
XXI.
Le porteur d'u!! mar/dat, l'ayant fait proteJler comie ,fon
cédant dans les dix jouts de l'échéance, & ayant enfûte
prorogé le paiement, perd-il fon ac1ion contre le tireur qui
a failli avant l'échéance, le cédant ayant failli avant l'expiration de la prorogation?
L
Es fieurs Arnoux, Négocians de la ville de Marfeille,remirenr au fieur Jofeph Silva un mandat de 4272 liv.
fur Me. Verdilhon, Courtier de change, payable au 30 Juin
1774. Le fieur Silva le céda au fieur Dallet, & celui-ci à
Me. Paul Courtier. Avant l'échéance de ce billet , les
tireurs & le Courtier fur lequel il était tiré firent faillite.
Me, Paul s'adreffa aufieur Silva fon cédant pour en recevoir le rembourfement fous efcompte, ou pour lui donner
bonne & fuffifante caution pèur le paiement à l'échéance;
cependant Me. Paul ne fit aucune pourfuite, il attendit
l'échéance, & dans les dix jOJrs de grace il reçut' à
compte du fieur Silva i 2 14 liv., & prerogea le folde pour
deux mois; il fit néanmoins proteJl:er le mandat le 10
Juillet, & le fit fignifier tant au fieur Dallet 'qu'au fieur
Silva. Ce dernier faillit avant l'expiration des deux mois.
dans cet état de dérangement de tous les débiteurs foli.
daires , Me. Paul reJl:a dans une inaél:ion forcée, & fut
obligé d'attendre l'événement de toutes ces faillites. Les
fieurs Arnqux furent les premiers à faire homologuer un
concordat qui promettait le )) pour c~nt à leurs créanciers. Me. Paul, comme porteur du mandat qu'ils avaient
tiré, & qui formoient pour eux une véritable obligation,
fe préfenra à' eux pour recevoir l~ '5 '5 pour cent qui lui
!
�2~
JOURNAL
compétait fur les 30S8 liv. non payées; & fur lenr refus
il fe pourvut contre eux pardevant les Juges-Confuls, qui
pu leur Sentence firent droit à la demande de Me. PauL
Appel des fieurs Arnoux pardevant la Cour.
On oppofoit pour eux la proroga\ion faite au fieur Silva,
. & l'on difoit que fi le fie ur Paul l'eût preffé, il eut été
payé en entier: fi du-moins il eût donné connoilfance aUll:
fleurs Arnoux qu'il étoit porceur de ce mandat, ils l'auraient acquitté. L'arrangement qu'a pris le fie ur Paul à l'échéance du mandat, prouve qu'il a négligé fes droits envers les fieurs Arnoux, & torme une efpece de novation, par
laquelle il femble qu'il n'a voulu d'autre -débiteur que
le fieur Silva. On a beau dire que l'indulgence pour le gaI;ant ne doit pas libérer le débiteur principal. Me. Paul
avait à l'échéance de fan mandat trois débiteurs principaux & folidaires: s'il s'agilfoit d'une obligation ordinaire
_qui ne fût point alfujettie à des diligences dans un terme
fatal, à la bonne heure que l'on dît que la grace f:1ite à
un des carrées a pu profiter à l'autre pour lui donner le
même atermoiement, & non pour le libérer; mais il s'agit
~ci d'une dette réfultante d'un papier fournis à des regles
parriculieres.
La délibération de h Chambre du Commerrce fur les
mandats, homologuée par Arrêt de la Cour du 3 Avril
1759, porte que: tout porteur de mandat fera tenu de fommer par acte celui fur qui le mandat aura été tiré, d'en payer
le montant, laCJuelle fommotion jèra faite dans le delai de
tjuil/je jours. ( L'Arrêt d'homologation a limité à dix; conformément à ce qui fe pratique d'après l'Ordonnance pour
les lenres de change. ) En cas CJue le mandat ne foit pas
payé, le porteur fera obligé de faire jignifier dans trois
jours l'ac7e de fommation ci-deffis au tireur d!.l mandat, avec
interpellation de le payer, dans lequel délai de trois jours
celui de l'échéance f:ra compris; 1<$' faute de faire les fùfdites fommations G' jignifications dans lefdits délais, le tireur du.
mandat n'en fera plus garant.
Si l'on néglige de fignifier dans les ~rois. jours au tireur
a
. le
�24"9
le protefl: qu'on a fait contre celui fur qui le mandat éroit
tiré, on perd contre ce tireur l'aél:ion qu'on aurait eue.
Tout mandat non payé à fan échéance doit, après treize
jours, venir à la connoilIànce de, celui qui l'a tiré; fi on
Je lui dénonc~ plus tard, il n'efl: plus débiteur. D'après cela
Me. Paul s'arrangeant à l'échéance du mandat avec le fieur
Silva fan cédant, protefl:ant contre celui fur qui I~ mandat
était tiré, & ne difant rien de plus aux fieurs Arnoux, a
réellement, par fan traité avec le fieur Silva, perdu fan
aél:ion envers eux. Me. Paul a agi contre Me. Verdilhon
failli; il ne peut par conféquent exciper de fa faillite, encore
moins peut-il exciper de celle des fieur's Arnoux qui éroit
terminée; ils étaient rétablis depuis le 2) Juin, cinq jours
avaflt l'échéance du mandat; on pouvait donc agir utilement contr'eux; il Y a donc eu véritablement novation.
Me. Paul a fait fan unique affaire du mandat; il s'en ell:
chargé vis-à-vis du tireur contre lequel il a négligé d'exercer dans le temps déterminé une aébon qu'il eut pu intenter ptilemenr.
Qu'importe que les fieurs Arnoux ne pùffent pas pen fer
que Me. Verdilhon avait acquitté leur mandat: n'était-il
pas poffible qu'il" eût été acquitté par un des endoffeurs,
par le fieur Silva qui de fait en .avoit payé une partie? Il
leur fuffifoit de voir qu'ils n'étaient pas attaqués a raifop de
ce mandat dans le temps de droit, pour qu'ils fe cruffent
à l'abri fous la difpolition de la Loi. Ils font dans fes
termes, ce qui fuffit. Mais ils font encore v'éritablemenc
dans fan efprit; parce que en effet, ce n'ell: que par
l'infolvabilité 'dp lieur Silva, avec qui Me. Paul avait
traité, en négligeant fes droits contre les lieurs Arnoux,
qu'il a fongé à les attaquer près de deux mois après l'échéance du mandat. Si le lieur Silva n'eÎlt pas hilli, jamais les lieur.s Arnoux" euffent été attaqués "par Me. Paul:
mais puifqu'il a pris fur lui les rifques de la (olvabilité de
[es endciffèurs à qui il a prorogé, quand il aurait dÎl dénoncer aux tireurs, l'événement de ces rifques doit" être
pour fan compte.
Années z775 & l776.
1j
D U
PAL AIS
D E
PRO VEN C R.
�250
,,'
Jou
RNA L
On répondoit pour Me. Paul , que les lieurs Arnoux
écoient les débiteurs principaux par leur qualiré de tirems
du mandat; Silva & les aurres ne lui devoient rien; ils
étaient fes garans en qualité de cédant de ce même mandat.
Me. Paul en étoit le poneur, & en cene qualité il étoit le
créancier direél: des lieurs Arnoux, & il avoit de plus le droi t
de fe faire payer par les garans. Or qui peut iamais imaginer qu'un débiteur principal pui{fe prétendre être libéré
par l'indulgence que fon créancier aura pu avoir pour fon
garant? Qu'a de commun le droit de Me. Paul envers
Silva, avec l'obligation direél:e & primitive que les lieurs
Arnoux ont contraél:éenvers quiconque -feroit porreur de
leur mandat à fan échéance. Si Me. Paul avoit, de fon
pur mouvement & fans l'aveu de fes garans, prorogé aux
débiteurs principaux le terme du mandat; s'il avait tranfigé avec les tireurs, il n'ell: pas douteux que les garans
auroient droit de s'en formalifer, & de lui oppofer l'objeél:ion des lieurs Arnoux; mais dans la bouche de ceux-ci
elle ne [auroit être plus déplacée. Me. Paul a pu proroger
à fan garaht; il a pu renoncer même à la garantie, &
ilauroit été abfurde de prétendre que cette renonciation
eût libéré le débiteur principal.
- Lorfque l'Ordonnance exige les formalités qu'elle prefcrit, 'Clle [uppofe qu'elles peuvent être de quelque milité
aux .parties, & que leur omiffion peut nuire à quelqu'une.
Or dans le cas préfenr ces formalités étoient impraticables, inutiles, & leu{ omiffion ne pouvait nuire aux lieurs
Arnoux. Elles étoient impraticables, parce que l'état de
faillite dans lequel les lieurs Arnoux fe trouvoient, [u[pendoit de droi~ coutes les formalités à faire à cet égard.
Toute pourfuite eut été vaine & fans objet. Elles éraient
inutiles, parce que les droits des lieurs Arnoux font aujourd'hui les mêmes qu'ils eu{fent été, li les formalités
avoient été faires. Me. Verdilhon étoit leur débiteur, il
l'eH: encore pour toure la fomme qu'il leur devoit alors;
il eH failli, il l'étoit alors raut comme eux, & toutes les
diliv,ences que Me. Paul eut pu faire, n'auroient pas amélioré leur état, & ne leur aurait pas donné plus de droit
�DU
\
PAL AIS
D E
PRO VEN C 1!.
2') 1
plus de facilité pour être payé. Me. Verdilhon, fur qui
le mandat écoit tiré, faiBit le 2') Mai, & les fieurs Arnoux faillirent le 31. Comment pouvoient-ils penfe"r que ce
maQdat eût. été acquitté, puifqu'ils avaient porté dans leur
bilan du 3 t Mai, le fieur Silva pour créancier à raifon de
ce même mandat non payé?
L'Orc!onnance qui prefcrit les formalités dans les cas où
les chofes étant dans leur entier, elles font miles & praticables, déclare en même temps qu'on ne peut pas fe prévaloir de leur omifTion, lorfque le tireur n'a pas fait des
fonds entre les mains de ceux fur lefquels il a tiré, an temps
que le protêt a dû [être fait. Or, il eH certain que lors
de l'échéance du mandat dont il s'agir, Me. Verdilhon, qui
étoit failli, ne pouvoit pas être regardé comme ayant véritablement provifion fuflifanre pour payer la multiplicité des
mandats que les fieurs Arnoux avoient tiré fur lui. Me.
Verdilhon failli ne poJTédoit plus rien; cout fan avoir écoit
dans les mains de la maffe de [es créanciers. Or, puifque
Me. Verdilhon a failli à fes créanciers, c'eH fur ceux-ci,
& non fur Me. Paul, qui n'a rie.n de commun avec eux,
que doivent rejaillir les inconvéniens de fa faillite. Me. Paul
eH un tiers; il eH porteur d'un mandat des fieurs Arnoux;
il doit trouver lors de l'échéance des fonds libres pour acquitter ce mandat. Peu importe que ces fonds aient ceffé
d'être libres par la faute du tireur ou celle de COut autre;
c'écoit l'affaire des fieurs Arnoux d'y pourvoir.
La prorogation faite au garant profitera bien, fi l'on
veut, au débiteur principal, mais ne le libérera jamais d'une
obligation qui pefe fur lui jufqu'au temps qu'il en aura acquitté le montant; parce que tant Silva que les fieurs Arnoux étant ·<.lébiteurs folidaires du montant du billet, cout
ce que l'on peut conclure de l'atermoiement fait à l'un -des
débiteurs folidaires, c'en: qu'il profite i l'autre, & rien de
plus. L'objeél:ion pourroit avoir quelque 'fondement, fi les
fieurs Arnoux, cireurs, & Me. Verdilhon fur qui le billet
avoit été tiré n'avoient pas été en [1illite, parce qu'on pourtoit alors exciper de ce que Me. Paul n'agiffant pas utile1i 2
DI
�:l.~i
JOURNAL
ment vis-à-vis des fieurs Arnoux dans le temps de droit, avait
fait fan unique affaire du billet & s'en était chargé, comme
le fuppofe l'Ordonnance, tant vis-à-vis de celui fur qui il
était tiré, que vis-à-vis du garant qui l'avait remis. Tant
que les fieurs Arnoux & Me. Verdilhon étaient en faillite,
il eH taut fimple que la faillite emportant ce/fation des
paiemens, & opérant le concours des Héanciers, il n'e!l:
plus befoin ni de protêt, ni d'afIignation en garantie. Tout
droit fe réduit à former fa demande dans l'inHance généraIe, & à demander d'êrre admis au' conC0urs ; car il ferait
dérifoire de faire proteHer· vis-à-vis de quiconque a failli.
Quand l'Ordonnance exige que l'on fe pourvoie contre le
tireur dans LlO certain délai, ce n'e!l: jamais qu'autant qu'il
doit être aEpellé en garantie, & jamais lorfqu'il e!l: au cas
d'être attaqué par aél:ion principale; ce font deux procédures
dil1:inél:es qu'il ne faut pas confondre. Celui qui a re<;u le
billet, doit attaquer en garantie dans la quinzaine; c'e!l: l'Ordonnance: mais le porteur du billet qui a une aél:ion [olidaire contre le tireur, n'el1: obligé que de faire prorel1:er
. dans les dix jours; & fi ce n'eH pas le cas du protêt, au
'q1oyen de la faillite de celui fur qui le billet e!l: tiré, & à
plus forte raifon au moyen de la faillite de celui qui a
tiré le billet, il n'y a plus de négligence à imputer au porteur; on ne. peut pas lui dire: c'efl votre faute de n'avoir pas
agi dans le temps; & il faut par conféquent ou qu'on l'admette au [concours, s'il n'y a point de concordat, ou que
s'il y a un concordat, on· paye fur le pied d'icelui; il le faut,
parce que le tirre dont il eH porteur, quoique échu, n'ayant
été, ni n'ayant pu être payé, eH de la même nature que ceux
qui n'étaient pas encore échus.
Quand l'Ordonnance a refufé taut recours au porteur qui
n'a pas fait protel1:er, elle n'a pas entendt: que le tireur dû"
être libéré, ou pût oppofer une fin de non-recevoir; elle,! fup,pofé au contraire que le tireur avait déja payé par les fonds
qu'il avait fait entre les mains de celui fur qui le billet
était tiré; & alors elle dit au porteur: exiger dans un tel
temps, ou c'ef! votre faute; mais fi le tireur n'a pas fait les
�DU, ~ A LAI S ,~E, PRO VEN C E;
2. 53
fonds, ou fi à 1epoque de 1echeance le porteur ne pouvoit
pas fe promettre d'être payé, parce que celui fur qui le billet
étoit tiré, fe trouvoit en faillite, dès-lors l'obligation du
tireur fubfiHe dans tout fan entier, & il n'a aucune .fin de
non-recevoir à oppofer, parce que, dans le premier cas,
c'efl:-à-dire, fi les fonds n'one pas été' faits, le tireur n'a jamais payé, & il ne peut par conféquent jamais être libéré,
parce qu'il n'y a que le paiement qui faffe difparoÎtre l'obligation; & dans le-fecond, c'ei):-à-dire, fi celui fur qui le
billet eH tiré fait faillite avant l'échéance, la perte tombant_
fur le tireur, il efl: vrai de dire qu'à l'échéance les fonds
n'étaient pas faits; que le tireur n'a jamais été libéré, ~
qu'il faut par conféquent qu'il paye, puifque fan obligation
fubfifl:e.
Arrêt du 30 Juin 1775, au rapport de Mr. de Ballon,
qui confirme la Sentence avec dépens. Ecrivant Mes. Pafcalis & Simeon fils.
_
F7S
ARRÊT
XXII.
Le recours du compte d'un Tréforier d'une Communauté, &- \
l'appel de l'Ordonnance de clôture, doivent être portés
pardevant la Cour des Aides.
E Tréforier de la Communauté d'Eyguieres avait été
chargé de payer à Me. Etienne, Député de la Communauté, 90 liv. pour des mémoires prétendus fournis à fes
Confeils, & cette fomme fut palfée en compte par les
Auditeurs. M. l'Intendant, enfuite des plaintes qu'on lui
porta, rendit d'office une Ordonnance, qui enjoignit à' Me.
'Etienne de rembourfer les 90 liv. qu'il avait exigées,
au Tréforier de l'y contraindre, & aux Auditeurs de
palfer cette fomme dans le compte de ce dernier. Le
fleur Colique, alors Tréfotier, fit commandement à Me.
Etienne de payer. Ce dernier déclara être oPP?fant parde~
L
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�:tH
Jou
RNA L
vant la Cour des Aides. Requête de la part du lieur Colique en ajournemenr, pour venir voir déduire fes moyens
d'oppolitîon, & s'en voir débouter avec dépens, & même
ajournement contre la Communauté à qui il avoit payé les
90 liv., pour concourir avec lui à faire débouter Me. Etiennede fan oppoGtion , & en cas contraire, le relever de rout ce
qu'il pourroit fouJfrir à raifon de ce. Déclinaroire de la part
de la Communauté; le heur Colique en donna notice à Me.
Etienne, afin de légitimer le Tribunal qu'il avait indiqué,
& demanda les dépens contre la partie qui fuccomberait.
On difoit· pour la Communauté, que M. l'Intendant, ÇommiJfaire départi, avoit la police & infpeaion pour faire rentrer les deniers mal-à-propos payés par les Communautés;
il a ufé de ce droit coorre Me. Etienne par fan Ordonnance du mois d'Avril 1770. L'oppofition faite au commandement de payer la fomme mal exigée, ne pouvait
être portée qu'au Juge du titre: 'lui habet cognitionem, /zahet executionem. Comment la Cour des Aides prononceroitelle fur une Ordonnance rendue par M. l'Intendant? Elle
n'ell point fan fupérieur; elle ne pourroit donc caJfer ni
réformer. Si fan titre ell nul par incompétence ou autrement, il faut fe pourvoir au Roi. La Communauté n'a point
folliciré cerre Ordonnance; elle a été rendue d'office, elle
a été exécutée; fi on faifoit droit à l'oppoGtion, il faudrait détruire le titre ou fan exécution; dès-lors incompétence claire dans touS les cas, & il n'y a que le Confeil
qui puilfe réformer ou caJfer.
On répondait pour le fieur Colique, que les 90 liv. re- çues par Me. Etienne avaient été' paJfées en compte; ce
n'éroit donc qu'en appellant de l'Ordonnance de clôture,
qu'on pouvait les lui faire rembourfer, parce que les Audirètlts des Communautés rempliiIent à cet égard un premier TribunJI; leur Ordonnance ell un premier jugement
qui ne peut être réformé que par un Juge fupérieur: or, la
Cour eH ce Tribunal fupérieur qui a droit de prononcer fur
la validité ou la jufiice du jugs:ment des Auditeurs de
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PRO V Il NeIl:
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comptes; & il n'y a que la Cour qui puiffe en connolcre.
M. l'Intendant a fans contredit l'infpetl:ion fur l'adminill:ration des Communautés; il peut bien y veiller, empêcher même qu'on ne fa'ffe quelque chofe contre leur intérêt, & rendre telles Ordonnances qu'il croit nécellàires;
mais fan drOIt fe borne-là; il excite la vigilance des AdrniniHrateurs, il la force; mais le compte donné & clôturé, il n'a plus 'rien à y voir; c'en à Iii Cour que doivent
être portées toutes les contenations qui s'élevenr à ce fujet,
& c'efl elle qui y prononce tous les jours. Inutilement
excipe-t-on d'une Ordonnance de M. l'Intendant; cette Ordonnance a forcé la main aux Adminill:rateurs ; tout ce qui
vient enfuite n'ell: plus du reffort de M. l'Inten'dant. Peu
importe que ce foit en vertu de cette Ordonnance que le fieur
Colique ait exécuté Me. Etienne. On voit tous les jours
arriver la même chofe, non feulement vis-à-vis de la Cour,
lorfqu'il dl CJuell:ion de M. l'Intendant, mais encore toutes
les fois qu'il s'agit de l'exécution d'un jugement d'un Juge
d'attribution; ce jugement s'exécute; s'il furvient quelque
contell:ation qui ne foit pas préciCément compriCe dans l'attribution, on Ce pourvoit aux Juges ordinaires, quoiqu'il
s'agiffe de l'exécution d'un jugement rendu par un autre
Tribunal.
Le fieur Colique, qui a une garantie à prétend;e contre
la Communauté, ne peut l'obtenir qu'en appellanr de l'Ordonnance de clôture du compte qui lui a paffé ces 90 liv.
en chargement, parce que cette Ordonnance eil un jugement exécutoire par lui-même; tant qu'elle fubfille, le fieur
Colique n'a rien à prétendre :il fam' don<: qu'il la faffe
réformer pour obtenir fa garantie; il' ne peut le faire que
par' la voie de l'appel; & l'appel d1tnre -Ordonnanœ de clôture d'un compte ne fut jamais de la compétence de M.
l'Intendant. Le fieur C<Jlique ne p0uvoit donc & fl'e devait Ce pourvoi,r que pardevant la Cour; il ne pouvoit ostenir' jullice que d'elle; il Y écoit d'autant 'plus obligé, que
l'Ordonnance de M. l'Intendant était exécutée.
Arrêt du 12 J uilkt 177 'i, pcanoflcé par, Mr. le PJé!i~
•
�2')6
JOURNAL
dent de Mazenod fils, conforme aux condulions portées
par Me. Tùrrel, Suhfiitut, qui concede aél:e au fieur Colique
du rècours par lui formé de fon compte, en tant que de
hefoin feroît, & ordonne que f1ns s'arrêter aux moyens de
déclinatoire propofés par la Commnnauté, il fera pourfuivi
ail fonds pardevant la Cour; condamne la Communauté aux
dépens envers toutes les parties. Plaidant Mes. Gaffier, Gras
& Marin, Procureur.
ARRÊT
XXIII.
C'eJl d'après les circonJlances que doivent être taxés les frais
d'une capture.
En matiere criminelle, les dépens de la conveifion d'un décret
en un autre ,[ont contumacïaux, & ne doivent pas être joints
au fonds.
E, S Janvier 1770, Me. Marteau, Huiffier en la Sénéchauffée d'Arles, fe plaignit au Lieutenant des voies
de fait, excès & rébellion en juHice commifes par Jeanne
Conil , époure de Jean-Baptille Tardieu, Ménager du lieu de
Châteaurenard, dont il avoit dreffé procès-verbal. Sur cette
plainte, Jeanne Conil fut décrétée d'ajournement. Elle ne
comparut point, & le 2 Mars 1770, le décret fut converti
en prife de corps. Au mois de Juillet 1771, Me. Barridon,
Huiffier, affiHé de deux Records & d'un Cavalier de Maréchauffée, fe failit de Jeanne Conil, & la traduific aux prifons d'Arles; elle prêta fes réponfes , & préfenta requête en
élargiffement provifoire, fous l'offre de 72 liv. pour payer
les frais de la converfion des décrets & de la capture; ces
fins futent adoptées, & les 72 liv. confignées. Peu de tenips
après, Me. Marceau demanda, par une requête-, que Jeanne
Conil flit condamn6e à lui rembourfer la fomme de 224liv.; favoir, 24 liv. pour les frais de la converfion, & 200
li\'. pour la capture. Le Lieutenant, par fen décret du 7
Avril
L
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PALAIS
DE
PROVENCE.
257
Avril 1772, condamna Jeanne Conil au rembourfement des
224 liv. dans trois jours, autrement qu'elle fe remettrait en
l'état du décret de prife au corps. Appel de la pan de Jeanne
Conil.
On difoit pour elle, qu'il s'agiffoit de l'emprifonnement
d'une femme, & d'une fen.me qui n'étoit coupable d'aucun
crime; fan érat, )a foibleffe de fon fexe, annonçaient d'avance le peu d'obftac!e qu'elle avoit mis à fon emprifonnemenr; elle ne pouvait même faire aucune réfi!l:ance; il ne
devait s'en enfuivre aucune peine affiiB:ive, & 72 1iv. fuflifoient fans dame pour les frais de eonverfion & de capture.
On ne trouve à la vérité aucune regle pour le paiemept
de ces fortes de frais; ce font les c"irconftances qui les
rendent plus ou moins confidérables; mais quelque arbitraire
que puiffe être cetre taxe, la Cour s'eH toujours empreffée
de la réduire, dès qu'elle ne s'eft pas trouvée juHe.
D'ailleurs fÎlt-il dù quelques dépens à Me. Marteau, il ne
pourroit en pourfuivre la répétirion, attendu que les dépens néceilàires pour l'infiruB:ion d'une procédure fonr répé tés au fonds, & ne peuvent êrre rembourfés qu'après le
jugement. On prouvoit par les Autorités les plus précifes,
que les frais de la converfion d'un décret ne font autre
chofe que des dépens de pure inftruB:ion, & ne peuvent
être affimilés à ceux de la contllmace, attendu que l'accufé
qui le repréfente fait tomber le décret; dans le fait de la
contumace, on n'accorde les dépens qu'après le jugement;
& fi pendant l'inflruéfion pour parvenir à ce jugement, les
biens de l'accufé ont éré faifis & annotés avanr fa détention, la main-levée doir lui en être accordée fans aucune
déduB:ion quelconque, auffitôr qu'il efl: conftitué prifonnier,
pourvu qu'il fe reprérenre avant le jugement. La Dlle. Con il
protefl:a contre ce paiement, & fe réferva le droit d'en
demander le rembourfemem après l'Arrêt qui interviendrait.
Le décret rendu par le Lieutenant ( ajotltoir-on ) eft encore vicieux & tortionnaire; le Lieutenant n'a pu ordonAnnées l775 & l776.
K k
�·0
·i~S
JOURNAL
ner que faute par la Dlle. Conil de payer dans troIS Jours
la fomme de 224 liv., elle feroit réintégloée dans les prifons d'Arles; le Lieutenant a fait revivre le décret du 2
Mars 1770, décrer abfolument éteint, & qui eft cenré même
n'avoir jamais exiUé. Jeanne Con il n'a été décrétée de
prire au corps, que par fa dé[obéilfance à la Juftice; ce fait
n'eft point relatif ,à la plainte, il lui ell: totalement étranger, & fon effet celfe par la repréfentation de l'accufé, par
fes répon[es; l'interrogatoire fini, la Jull:ice lui rend [on
entiere liberté. Cette déciGon dt conforme à l'Ordonnance
& à tous les Commentareurs.
Me. Marteau fomenant le mérite de fa demande & le
décret du Lieutenant, détailla tous les frais qu'il avait éré
obligé de faire pour parvenir à exécuter la contrainte contre
Jeanne Conil ;il fir envifag'er l'éloignement du lieu, les
peines que l'on s'étoit donné pour faiGr une femme qui
dans toutes les occauons avoit donné des marques de fon
emportement; deux procès-verbaux joints au procès formaient
à cet égard la preuve la· plus complette. En 1769, Paulin,
Huiffier de Châteaurenard, fut chargé de faire une faiue à
Jean-Bapcilte Tardieu, mari de Jeanne Conil; il fe préfen.e dans la maifon de cet homme pour e:(éç,uter fa commillion; cette femme enleve la copie des mains de l'Huiffier, la déchire, l'injurie, lui faute au col, fouille dans fes
poches, enleve l'exploit en original & le lui déchire; l'Huiffier cireffe procès-verbal, & le Juge de Châteaurenard la
décrete d'ajournement. Me. Marteau fe préfente dans une
autre occafion, pour exécuter contre Tardieu des lettres
de clame; fa femme reproduit la même fcene, mêmes injures, mêmes menaces, même procès-verbal, qui a donné
lieu à la conteltation préfente.
~ Le Réglement de la Cour ne fixe aucun falaire aux Huiffiers pour les contraintes; ce font les circonitances qui les
augmentent ou qui les diminuent. Ici la fomme demandée
n'av~it rien de fort, attendu le ri[que qu'il y avoit à
. cou tIr.
Jeanne Conil ne fauroit être fondée ( continuait Me. Mar)
~
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
259
ceau) à répeter les 72. liv. après le jugement du procès.
La même queftion s'étant préfentée en 1767, elle fut jugée
contre fon Cyftême. L'accufé qui ne fe préfente pas, défobéit à la JuHice; les dépens font la moindre chofe pour
punir cette défobéiffance ; ils produifent le même effet que
ceux de la contumace que l'accufé eft obligé de payer a\'ant
toute autre défenfe; la converfion d'un décret - a roujours
été regardée comme un véritable jugement contumacial.
Quant à la contrainte par corps prononcée par le décret
du Lieutenant, elle a lieu pour les dépens en matiere criminelle. Duperier, nous manufl:rites, va. dépens, rapporte
des Arrêts qui l'ont jugé. L'Ordonnance de 1667, au titre
14, établit également la regle.
Me. Meriaud, Subftitut, obferva qu'aucune Loi, qu'aucun
Réglement n'ont fixé les falaires dus aux Huiffiers & Sergens à raifon des fiùfies qu'ils fônt obligés de faire en vertu
de contraintes par corps; les temps, les lieux, les circonltances en augmentent & diminuent les frais; il étoit fans
doute impoffible que le Légiflateur prévît tous les cas qui
ponvoient fe préfenter, & fît pour chacun d'eux une taxe
I~arriculiere; c'eH à railon de cecce difficulté que tous les
jours la parcie qui veut faire exécuter une contrainte, traite
avec l'Huiffier chargé de cette commiffion. Cet ufage n'<,fl:
pas fans abus; & quelque arbitraires qu'aient pu par<;>Ître ces
taxes, la Cour les a toujours réduites, dès qu'elles n'ont pas
été juftes.
_
-D'abord ( obferva- Me. Meriaud ) fi Me. Marceau avait
réellemept acquiné à Me. Barridon les 224 liv. pour la capture, ne l'aurait-il pas appellé aù procès, à -l'effet de fe
faire reftituer ce qu'il aurait donné de plus? Son filence
à cet égard doit fairé préfumer la plus parfaite intelligence
entre ces deux HuiJ1iers, que les mêmes fonétions réuniffent,
& qui fe prêtent mutuellement leurs offices.
Il eft certain ( continuoit-il ) que la Dlle. Coni! n'a fàit
:aucune réGHance, puifque - fes efforts auraient été bien impuiffans vis-à-vis de quatre hommes 'qui avaient colite force
& tout pouvoir. Dans de!!.x différens verb:lux, il eH fait
K k 2.
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JOURNAL
mentio11 de fa réfi1l:ance, de fes injures, de fes menaces
même; touS ces faits feront vrais" li l'on veut, mais ils ne
prouveront pas davantage. Dans le verbal de caprure de Me.
Barrido11 , 011 ne voit aucune réfi1l:ance de fa part; fa traduél:ion dans les prirons fe fit avec la plus grande tranquillité; elle connoi1foit fans doute que raut fon crime érait
de ne s'être pas repréfentée enfuire de fon décret d'ajournement, & qu'elle recouvrerait fa liberté après quelques
jours. Me. Marteau ne peut donc, fous ce titre, demander
'la fomme de 224 liv.
L'offre de la DlIe. Conil e1l: fatisfaél:oire; le Lieutenant
l'avoit reconnu dans un temps; il auroit dû. ne pas s'en
écarter à l'époque de fan décret; raus les jours on réduit
pareilles taxes. Dans l'affaire du fieur Verronet, le Lieutenant de Marfeille modéra les falaires de l'Huiffier à 48
liv. Dans celle du lieur Reynier, ils furent réduits à 96 liv.,
malgré les tentatives, les foins & les peines que l'Huiffier
prit pour faire la capture.
Me. Meriaud examina enfuite fi les dépens de la converlion
d'un décret font contumaciaux ou non, & fi le Lieutenant
pouvait ordonner la réintégrande en vertu du décret de
prife au corps; il obferva que cerre prononciation était vicieufe & contraire à tous les principes en màtiere criminelle. L'Ordonnance nous apprend que le décrété d'affigné
qui ne fe prérente pas, fait convertir fan décret en ajournement, celui d'ajournement fe convertit en prife de corps;
mais il e1l: dit auffi par la même Ordonnance, que l'accufé
qui fe repréfente enfuite de cerre converfion, fait tomber
fon décret. Les panies font remifes au même état qu'elles
'éraient. auparavant, & pourfuivent fur le décret originaire-'
ment rendu. Ainfi le Lieutenan& n'avoit jamais pu ordonner
que Jeanne Conil feroit réintégrée faute de paiement, en
venu de fan décret de prife au corps, attendu que ce décret était anéanti.
Me. Meriaud établit que les dépens de c011verfion éraient
dus, & devoient être payés fur le champ. Cerre décilion
( dit-il) e1l: fondée en regle d'équité & de ju1l:ice; Jeanne
�n u l ' ~ LAt 5
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PRO V Il NeIl;
2,6 l
C oni! l'a reconnu par l'offre qu'elle a faite. En vain Veutelle prouver que ce fut pour fe procurer fa liberté qu'elle employa ce moyen; elle ne pouvoit pas ignorer que dès qu'elle
auroit prêté fes réponfes, les prifons lui feroient om'erres.
D'ailleurs l'Arrêt rendu en 1761, au rapport de Mr. de
Banon, jugea que ces frais étoient contumaciaux, & qu'ils
devoient être payés filr le, champ par la partie qui les occafionoit, fans pouvoir être joints au fonds. On a obfervé
que cet Arrêt fut rendu fur la faulfe comparaifon de l'accuré qui ne fe repréfente pas, au témoin qui refufe de venir
rendre témoignage à la vérité; comparaifon 'non applicable,
a-t-on dit, attendu que l'un ne fait tort qu'à lui-même,
& que l'autre taifant la vérité, trahit les intérêts de la Juftice, porte un préjudice notable à celui qui invoque fou
témoignage; mais cette comparaifon n'ell pas auffi mauvaire qu'on a voulu le dire. L'accuré & le' témoin qui refurent de re reprérenter, dérobéilfent également à la JuHice;
& aux yeux de la Loi, il n'y a aucune différence, le préjudice qu'ils porrent ell égal; l'accuré porte également préjudice à fan accufateur; par fan abfen,ce, il fait dépérir
les preu\'es qui pourroient le convaincre, & il ell comparable au témoin qui par ra reprérentation refufe de rendte témoignage à la vérité; il occafionne des frais inutiles
que fa comparution auroi-r évité, des frais qui ne peuvent
être regardés de pure in!truél:ion, puifque le fait dont il
étoit accuré ne devoit produire aucune peine, qu'il n'en a
encouru dans le moment qu'à caufe de fa défobéilfance ;
le décret de converfion tombe de plein droit par la repréfentation de l'accuré, & les parries pourfuivent dans l'état
originaire de la caufe. Seroit-il]ùlle que ces frais pulfent
être perdus pour celui qui a été obligé de le's faire, & auxquels la défobéilfance de l'accufé a donné lieu; ils le feraient, s'ils étoient joints' au fonds, & fi l'accufé venoit à
être abfous.
La converfion du décret vaut jugement contumacial ; &
fi après le jugement qui prononce la contumace, l'accufé
aui fe repréfente doit cependant- les dépens auxquels il a.
,
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�262
Jou
RNA L
donné lieu, il les doit également dans le cas du décret de
converGon. L'accufé contumax qui fe repréfente, fait tom ber
la contum~ce; le décrété pilr fa préfence fait égale·men t
tomber le décret de converGon; ainli à cet égard nulle
dilférence dans le fait, même applicàtion dans la caufe ,
même motif dans la déciGon.
Me. Meriaud conclut à ce que l'appellation fÎlt mife au
néant, & qu'au bénéfice de la conGgnation de la fomme
de 72. liv. faite par Jeanne Conil, fans s'arrêter à la requête de Me. Marteau dont il ferait démis & débouté,
Jeanne Conil fût mife définitivement hors de Cour & de
procès, & fans réferve d'aucun droit filr la répétition de
la fomme de 72. liv.
Arrêt du 12 Août 177 ", , prononcé par Mr. le Prélident d'Albert, conforme aux concluGons; Me. Marteau fut
condamné aux 4épens. Plaidant Mes. Etl:rivier & Rambot
AR RÊT
XX 1 V.
Le Fermier des droits de la ·Régie a la préférence pour les
droits fur un refle de la marchandife, au vendeur qui la
réclame, & dont le prix lui efl encore dil.
L
E lieur Ro!folin, Marchand Tannenr de la ville de
Brignoles, avait fait au lieur Gafquet, Négociant de
Brne, le 6 Février 177", un billet à ordre de 42.4 liv.
payable en foire de Beaucaire, caufé p,our cie l'écorce de
chêne Nanc appelU tan. Ro!folin ne parut pas à Beaucaire;
le billet fut protefié, & Ro!folin fit faillite. Le Régilfeur
des cuirs, qui avait lai!fé accumuler les arrérages des
droits établis fur cerre marchandife, fit failir tout ce qui
fe trouva chez Roffolin. Le premier Aout le lieur Gafquet
fe pourvut au Lieutenant de Brignoles, en condamnation
tontre Rolfolin du billet, en préférence à tout autre cré.ancier, [ur ce qui refioit de tan qu'il avoit fourni, & en
�DU
PALAIS
Dl!
PROVENCE:
263
permiffion de le relTaifir, ce qui lui fut accordé. Le Régif1èùr réclama fan privilege de n'etre jugé en premier & d rnier- relTort que par la Cour des Aides; il demanda par réquête d'être déchargé de l'affignation donnée devant le
Lieutenant, & d'être autorifé, attendu le. privilege des deniers royaux, à pourfuivre fes exécutions, avec inhibitions
& défenfes au fieur Gafquet & à tous autres de le troubler.
Sur le foit montré le fieur GaCquet ne contefta pas les droits
du Fermier; mais il demanda la préférence fur le reilant du
tan qu'il .avait vendu au fieur RolT61in; il Y eut renvoi en jugement.
On difoit pour le fieur Gafquet, que c'eil un principe
reconnu, que le fourriilTeur d'une marchandife non payée
a le droit de la reprendre en cas de difcuffion ou d€ faillite entre les mains du débiteur, préférablement à tous autres créanciers. C'eil le tan qu'il a fourni qu'on a trouvé,
-mai" il dl: réduit à une rhoindre quantité; la preuve que
c'ef!: le même qu'il a fourni, è'eil que nul autre fourniffeur ne fe préfente; c'efl: que RùlTolin n'e n avait pas
acheté plus récemment d'aucun autre. N'importe qu'on
'n'ait trouvé dans la fabrique que 69 quintaux de tan, rene
·de 2 r S quintaux vendus à RolTolin; il fuffit, comme le veut
la délibération de la Chambre du Commerce, que les marchandifes foie nt en natllre & extantes, c'eil-à-dire qu'elles
n'aient fouffert aucun changement d ans leur qualité; la
diminution de quantité a feulement l'effet de réduire le droit
de fuite, mais elle ne l'éteint pas: il ne s'agit point ici
d'une piece de drap qui ferait déballée ou coupée; ce font
des morceaux d'écorce d'arbres exiHafls dans le même état
que le fieur Gafquet les avoit fournis, qui n'ont pas cefIë
d'être à lui, puifqu'il n'en avoit pas été payé. Il réclame
donc fa marchandife, fan propre bien; la faveur due uniquement par néceffité aux droits royaux va-t-elle jufqu'à faire
tomber le droit de fuite?
L'article 14 du tit. 8 de l'Ordonnance de 1680 donne
préférence au Fermier des droits d'àides fur les de'fiiers provenans des mel1bles faifis & vendus 1 à Eons ..réa.nciers, même
�2.6'1
Jou
R. N A L
au propriétaire de la maifon, excepté pour deux quartiers
de loyer, y compris le courant, pour lefquels le propriétaire
fera préféré, en affirmant qu'ils lui font dus. Voilà d'abord
une exception au privilege des deniers royaux; ils cedent
à celui qu'a de droie le locateur pour les loyers de fa maifon, fuper inveéla & illata, & ce privilege efi fans doute
moins favorable que celui d'un fourni{feur qui revendique la
marchandife dont il n'a pas été payé.
L'arcicle 1') porce : que le Fermier fera préféré d tous créanciers, même au vendeur, fur le prix du vin qu'il aura fait faifir
{,. vendre en vertu des contraintes pour [es droits d'aides;
& cetce difpofirion qui paroÎt contraire au privilege du vendeur efi fage, parce que fi le vendeur a lailIé vendre fon vin
fans Je revendiquer, il ne peut plus agir par droit de fuite,
il rerombe dans la cla{fe des créanciers ordinaires. Mais s'il
réclame, l'hyporhefe change. L'arc. 16 dit: pourra le juré vendeur ou marchand dclamer le vin avant la vente, & le reprendre en paienzent du prix qu'il affirmera lui êire dû,
pourvu & non autrement 'lue le vin réclamé ait été vendu
fur les places publiques, qu'il foit revendiqué dans le mois, &
qu'il ait été reconnu, le Fermier pré[ent ou duement appellé.
Voilà la Loi à laquelle les Lettres - Patentes de 1772.
renvoIent.
Le Fermier des droits fur le cuir doit, comme le Fermier du droit d'aides fur le vin, être préféré à tous créanciers fur la vence des cuirs, marchandifes & ingrédiens,
même aux fournilfeurs, s'ils 'n'ont pas réclamé avant la
vente; mais fi avant la vente ils réclament, ils ont droit
de reprendre leurs marchandifes. Ce qui efi ordonné par
l'Ordonnance des Aides en faveur des fourni{feurs, ell:
d'autant pl~s favorable dans l'hypothefe de la caufe, que
l'Ordonnance des Aides reconnoÎt le PJivilege des fourni{feurs dans une matiere où il y avoit plus de doute
contr'eux. En effet, le vin étant affiJjecci au droit d'aides,
fernble lui être fpécialement hypothéqué; il faut av~nt rout,
qu'il acquitte ce droit; mais le tan n'eH fournis à aucun
impôt, les cuirs [euls doivent des droits. Le propriétair~
qUI,
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PAL A J S
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ll. 0 V Il Nell.
265'
qui réclame un ingrédient qui ne doit rien, qui en fait
n'a pas même encore fubi la préparation par laquelle on
Je réduit en poudre pour s'en fervir dans la fabrication
des cuirs, ce propriétaire eft dans une fimation bien plus
avantageufe que le fourniffeur de vin.
Lorfque le Roi a dit que les vins faifis pour droits
d'aides, feraient repris par les fourniffeurs, s'ils avaient
été vendus en place publique, il a entendu reconnaître le
droit primitif des fourniffeurs routes les fois qu'il n'y a
point de fraude à craindre de leur par;; & il a défigné
cette circonltance par ces termes: fi les vins ont été vendus
en place pUblique, parce que c'eH-là la maniere ufitée de
les vendre dans les pays d'aides. Quand il a dit, en difpofant fur les cuirs, la préférence pour nos droits fera adjugée au RégiJfèur !ùr les marchandifes &' ingrédiens aux exceptions portées par notre Ordonnance de z 680 , il a entendu
que le fourniffeur d'ingrédient qni réclamait avant ]a vente,
ne ferait pas foumis à cette préférence, pourvu qu'on ne
pln pas le foupc;onner de fraude; c'eH-là une réferve de
drait: mais a-t-il pu entendre qu'il faudrait auffi que l'ingrédient eôt été vendu en pl.:e publique? Non fans doute,
parce que cette vente en place publique n'a lieu que pour
certaines marchandif~s , & que le Roi n'a pas voulu donnel)
des entraves au commerce, & exiger que l'on vende en
place publique la chaux & le tan néceffaires à la préparation des cuirs.
Que le Fermier pour fes droits courans, même pour
de légers arrérages, fait préféré aux créanciers qui n'orit
pas un privilege particulier à réclamer, à la bonne heure;
la Loi e!l: portée; fi elle eH dure, elle érait peur-être néceffaire; mais que le Fermier, au lieu de percevoir des
droits qui lui font dus à fùr & à Ule,ful'e de la fabrication'
des cuirs, laiffe accumuler de longs arrérages dont il vient
fe payer enfilire aux àépens des créanciers, telle n'a pas
été l'intention du Roi, lorfqu'il a donné préférence au RégilIeur pour les droits qui lui feraient dus. Cet article e!l:
relatif à la maniere donc les droits doivent être perc;us;
Années t775 & l776.
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ils doivent être payés à mefure de la fabrication ; aucun
cuir ne peut être vendu par.Je F:lbricant, qu'il n'ait été
marqué de la marque de perception, & le drbit doit être
payé, {elon les Lettres-patentes du 27 Février 1760, dans
les trois mois, à compter de cerre marque. Le"s Tanneurs
doivent en faire leurs {oumiffions.' C'elt pour le paiement
de ces droits courans que les Lettres-patentes de 1772 donnent préférence à tous créanciers, & non pour de longs
arrérages par le{quels on viendrait aggraver injufiement le
{art des créanciers.
On répondoir pour le Fermier, que {uivant l'arricle 12des Lettres-patentes du 2 Avril 1772, le Régilfeur a la
préférence fur les deniers provenus des "ffets par lui (;,iGs,
fait march:lndi{es, ingrédiens, meubles & effets mobiliers,
& préférence à tous créanciers. En effet, quand le vendeur vend à crédit des marchandi{es à un redevable des
droit royaux, il doit {avoir que le Roi aura la préférence
fur la cho{e , s'il n'e!t payé; c'eil: à lui de s'imputer d'avoir
vendu à crédit. Le vendeur d'un offic"e ne vient pour le
paiement du prix, qu'après le Roi pour les amendes encourues par l'Officier délinquJTJt, & même après la partie
civile qui a rapporté des dommages & intérêts, parce qu'il
eil: juHe que l'office réponde au public des fautes de J'Officier.
- Ce n'eil: pas le cas d'appliquer Je droit de filite, parce
que les loix de la régie s'y oppofent, ce ne {eroit pas
même le cas, d'après celles du commerce; car les mar-"
chandi{es dont s'agit ne {ont plus extantes & en nature
entre les mains de l'acheteur. La préférence ne peut en€ore être conteHée, {ur le fondement que le Fermier a:
fait crédit à celui qui devait le droit; cette excep"tion eil:
condamnée par les Ordonnances des fermes, arr. 6, "& par
Babalfaude dans {on traité des droits d'aides, n. 842.
Arrêt du 22 Novembre 1775 , prononcé par Mr. Je
Préfident d'Albert, conforme aux. concluGons portées par
Me. Paquet, SubHitut, qui accorde la préfërence au Régitfeur avec dépens. Plaidant Mes. Simeon fils & Leclerc.
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PALAIS
DE
ARR Ê T
267
PROVENCE.
X XV.
S'il n'y a claufe contraire dans l'ac7e de vente, facheteuf
peut expulfer le Fermier, [aU] les dommages-intérêts de ce
. dernier contre le vendeur.
Le cas requérant célérité, l'aflignation peut être donnée do
brie! délai, même fiu les fins principales.
Dans le même cas, le Juge obligé de renvoyer le fonds ,.
peut-il ordonner par prolJifion ce qui étoit démandé prmcipalement ?
P
Ar convention privée du 22 Juillet 1773, Me. Fran.:
cony, Confeiller au Siege d'Arles, afferma un couifoll
qu'il poifédoit en crau à Pierre Ailhaud, Baile Berger de
la même ville, pour le terme de fix années, moyennant
la renre annuelle de mille livres, à compte de laquelle
Me. Francony reçut 2lj-00 liv. imputables {ur les premieres
rentes. Le 24 Avril 17 74, Me. Francony vendit le couifou
à Me. Jean - François Viguier, Procureur au PréGdial &
Sénéchal de Nîmes; il fut dit dans l'aél:e que Me. Viguier
acheroit pour fan ami à élire dans le temps de dro1t; la
vente fut faite pour le prix de 25000 Iiv.
Ailhaud [e pourvut au Lieutenant par exploit du 8 Juillet
1775, en condamnation de la fomme de 2400 liv., &
en avération de l'aél:e d'arrentement; l'avéra tian fut ordonnée par défaut, & la convention fut enrégiHrée riere
.Notaire.
Par ac,'te du 26 Mai 1775, Me. Viguier déclara qu'il avait
acheté pour Me. de Royer, Lieutenant-Général au Siege·
d'Arles, & qu'au moyen de ce le couifoll lui appartenait.
Cet aél:e fùt fignifié à Ailhaud, ~vec déclararion qu'on
n'entendoit approuver ni exécuter le bail à ferme, & qu'alli
moyen de ce il n'avait qu'à Ce déGHer de route jouiifance
avenir, autrement qu'on [e pourvoirait par les voies de
-
LI
2.
�~68
J 0 V RNA L
droit. Les chores refierent en cet état jurqu'au ~1 Septembre, que Me. de Royer re pourvut au Siege d'Arles,
à l'effet de faire ordonner qu'il feroit enjoint à Ailhaud
de donner fon défifiement, aurremenr & en cas de refus,
qu'il feroit affigné à comparoir à jour & heure précis fous
un brief délai, pour yoir prononcer colltre lui des inhibi{ions & défenfes de s'immifcer dans la jouiffance du couffou
le jour de la St. Michel, à peine de dix mille livres d'ame,nde; dépens, dommages & intérêts, & en cas de contravention d'en .être informé, & que la Sentence qui interviendrait feroit exécutée par forme & maniere de provifion, en donnant. bonne & fuffifante, caution.
Ailhaud répondit fur cerre affignarion; il prétendic que
le défiHemenr ne pouvoit avoir lieu, artendu que l'avertiffement ne lui avoit pas éré donné dans les fix mois,
tomme il dl: d'ufage dans cous les acres d'arrente ment ; il
ajouta que le Siege d'Arles ne pouvait connoÎrre de la
mariere, parce que le fieur de Royer en étoie le principal
Officier, & demanda un délai pour s'adreffer au l'arlement " à l'effet de commercre un aurre Tribunal pour
en prendre connoiffance. Par Sentence du 28 du même
mois il fut' donné défaut concre Ailhaud, fauf l'audience,
pour le profit duquel, attendu la requifirion en renvoi, il
fut délaiffé à pourfuivre ainfi qu'il aviferoir; & cependant ,
{.lns préjudice du droit des parcies , à caufe que le cas
requéroit célérité, des inhibitions & défenfes provifoires
furent accordées à Me. de Royer contre Ailhaud de s'immifcer dans la jouiffance du couffou, à peine de 1000 l.
d'amende & d'en êffe informé; & il fur dit qu'en cas
d'appel, la Sentence feroit exécucée provifoirement, en
donnant caution. Ailhaud appella de cerce Semence pardevant la Cour, & demanda la furféance qui fut renvoyée en jugement. 11 demanda en oucre qu'il lui fût permis provifoirement d'introduire fon troupeau dans le couffou
a.ffermé.
On difoit pour Ailhaud, que la Sentence rendue par le
Lieutenant d'Arles était nulle fous plufie urs tappons: 1°.
�'by P ,;\LArs" nÉ' . PROVBNC,E:
2.-69
les délais prefcrits par J'Ordonllance n'avoienr p~s été obfervés ; 2.°. elle avoit été rendue par un Tr'ibunal fu[peél:' Les délais ne peuvent jamais être moindres de Irais
jours; l'intérêt public, l'intérêt particulier fe réuniffent pour
l'obfervation de cette regle;. chaque partie ayant la liberté
de fe défendre, doit avoir un terme fixe & déterminé
pour préparer [es moyens; 'elle doit à cet égard être à
l'abri de tout arbitraire; les Juges ordinaires fur-tout font
alheints à fuivre exaél:ement les regles que J'Ordonnance
leur prefcrit : il el!: des cas cependal)t où ils peuvent s'en
écarter, & où les circonl!:ances de la caufe exigent de
leur part une plus grande célérité; c'el!: à eux à juger de
ces cas; ils font dans l'Ordonnance. CRodier fur le tit. 3,
art. 2. de J'Ordonnance de r667.)
Ici Me. de Royer ne peut réclamer les exceptions prononcées par l'Ordonnance; il ne doit imputer qu'à· lui feul
Une négligence & un retardement fur lefquels il fonde la
célérité de la déciIion de [a caufe. L'interpellation qu'il
fit à Ailhaud à l'époque de fon contrat d'achat, étoit J'annonce d'une pourfuite juridique, dans le cas du refus de
la part du Fermier. Ailhaud ne répondit point; il femble
qu'il aurait dîl le mettre en caufe à cette époque; mais
il garde un profond !ilence, & ce n'eft que le 2) Septembre qu'il pourfuit les fins de fon aél:e interpella tif, dans
un temps où il auroit été impoffible de prendre des arrangemens pour l'hivernage du troupeau.
Cetre nullité, jointe à la fufpiciol1 du Tribunal, acquiert
plus de force. Me. de Royer fe trouve parcie & Lieutenant-Général; le lieur de Francony de qui il: a acheté,
-eft Confeiller au même Tribunal l auffi le Lieutenant-Particulier par fa Sentence l'a formellement reconnu, en changeant en fins provifoires des fins définitives, & en prononcrant fur toute autre chofe que ce qui lui avoit été
demandé. Si les pourfuites de Me. de Royer eu!lènt été
faites dans un temps plus utile, Ailhaud auroit -e-u -celui
de demander un autre Tribunal pour le juger.
. La ~en~enc~ eft encore injufie _C continlloi~ Ailhaud)
�'2.70
J
0 trll N A L
parce qu'il efl: de regle gue dans tous les aé1:es de vente,.
le Fermier doit être averti lix mois à l'avance, à l'effet
de [e procurer un autre logemenr. Il ne [eroir pas juGe
de dépofféder un Fermier, un locataire, fans l'avoir mis
à même de [e procurer une retra ite convenable; cerre
regle devait être obfervée dans' l'arrenrement donc s'agit;
l'intérêr ·n'en eH pas moins vif & [enfible que dans les
autres. Lés herb~s qu'on y recueille [ont defl:inées à l'u(age
des troupeaux qui reviennenr de la montagne. Le troupeau
d'Ailhaud érait à la montagne à l'époque de la venre du
couffou; li l'arrente ment eH diffous, le préjudice fera pour
lui irréparable; 'Ie lieur de Royer ne pouvait ignorer.
l'arrentement d'Ailhaud; il avait lui-même rendu Semence
par iléfaur, pôûr lui affurer [ur le fonds les 2400 li,-. qu'il
avoir donné en avance au lieur de Francony. Nouvelle
rai (on qui doit laiifer Ailhaud dans la jouiifance du COUifOll,
dont le fonds efl: aJreél:é à [on hypotheque. Le Fermier
qu'on veut expul(er, quand il efi hypothécaire, a droit
ÎI}cu'mbere pignori jufqu'à fan rembour[en:ent; ce principe
efl: retracé dans Duperier, vo. louage; Faber, déf. 19,
cod. locati ; Albert, lete. P, vo. préférence, ch. 34. Toutes
ces raifons éraient appuyées d'une foule de titres d'arrentemenr qui prouvaient que les cou!fous [ont arrentés un
ou deux ans à l'avance.
Me. de Royer répondait qu.e le délai efl: un temps accordé par la Loi au défendeur, tant pour conHiruer Procureur, que pour fe préparer à fe défendre coorre la demande
'lui lui eH faite. Ce principe efi certain, & le Juge ne peut
arbitrairement diminuer ou prolonger ,ces délais; il efl: des
cas cependa'm .Oll il jouit de cette faculté, comme s'il
faut nommer"' des Expert; pour vérifier un dommagt;'; S'ill
s'agit d'une levée de fceHé, ou d'une main levée des effets
qu'i pourraient dépérir, & dans d'autres cas 011 il Y aurait
péril dans. la' demeure; tous ces objets' [ont laiifés à la
prudence du Juge. Deux contendans, Me. dç Royer &.
Ailhaud, fe pré(entent pour iouir du couffou;. ils font tpus,
les deux porteurs de tùres;, on était à la v~ille de la St.
�DU)' At ~ t-s~ 'Ill! : FR qV.ENc.n:
2:7t"
-l.\1ièhel ;' il ,étoit preffani -Ie,quel, deS' deux- troupeaux con fu<rilerbit .les herbages; ,aucune Lo~ ne difoit au Juge de prononcer dans un délai de trois' jours. L'uGlge au contraire
de la Sénéchauffée d'Arles dl: de ne donner qu'un délai
-de deux jours dans toutes les matieres provjfoires. Il â donc
pu fuivre cette regle.
.
En vain dirait - oh que 'c'e!l: par le fait de Me. Royer
que la déciuon e!l: devenue prelfance, & qu'il aurait dû
fe pourvoir après la fignification de' fan aél:e de vence.
Mais pourquoi donner à ce filence une caufe différente de
-celle qui doit lui être appliquée? Ce temps, cet intermédiaire de tranquillité n'a été du côté de Me, de Rayet
qu'un aél:e d'honnêteté pour engager Ailhaud à prendre
des moyens sûrs & convenables.
La fllfpicion contre le Tribunal n'e!l: pas. mie\lx fondée;
cette fufpicion devait être jugée; le Tribunal. ne pouvait
êtrè dépouillé que par le renvoi. que la Cour aurait accordé; jufqll'à ce renvoi il pouvait inl.truire & fentencier.
:En vain Ailhaud oppofe-t-il qu'il demand.oit un délai pour
faire ordonner le renvoi; le temps & les circonl.!:ances ne
permettoient pas d'attendre plus long - temps; il' n'avait
qu'à prendre plutôt les voies de droit, &. faire juger la
fufpicion propofée.
Les fins définitives qu'on oppofe au Lieutenant d'avoir
changé en fins provifoires ne peuvent opérer un moyen
de nullité; le Juge n'excede jamais fan pouvoir, dès qu'il
accorde moins que c~ que les parties lui demandent. Mais
l.a Sentence fût-elle nulle, le Juge n'eut-il, pa's dû la prononcer? Elle el.!: ju/.):e au' fonds'; & fi. elle, venoit à' être
caffée par défaut de forme, la Cour s'emprelfèroit fans
doute à réparer cette erreur, & à prononcer ce que le
Lieutenant lui-même -a jugé. L'aél:e de vence calfe ,tout
hail à ferme, & l'acheteur peut ufer de la' chofe comme
hon lui femble. Le Fermier q!li a des droits à faire va':'
loir', peut agir contre fan vendeur pour lès dommages &
intérêts qui peuvent lui êmi adjugés; c'el.!:' ainu 'qu'on le
~rouve décidé dans 'la Loi 9 -,' cod. locata &. êOllduc7o.
l
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TOURNAi
( Domat, Loix civiles, liv. l , tit. 4, fetr. 3, n. 4, pag:
58; Decormis, tom. ~, col. 382 in fine; Catelan, liv. S,
chap. 63, L. 2') , §. l ,if. locati; Lapeirere, lett. F, n.
29; Coquille, queH. 202; Bretonnier fur Henris, tom. 4,
pag. 26i D,umoulin, Coutume de Paris, glofi: l , va. 'lui
dénie le fief, §. 43, n. 110; DefpeiiTes, tom. l , part. l ,
du louage, feél:. 3, n. 1 & fuiv.; Ferrieres (ur la quelL 480
de Guipape; Fromental, va. Fermier. )
L'hypotheque de 24°0 liv. qu'Ailhaud prétend avoir fur
le couiTou, ne valide pas mieux fon droit; tous les Auteurs
difent que. l'hypotheque général~ ou fpéciale n'empêche
l'effet de l'aliénation. Dumou~in, fur ta CotHurne de Paris,
glofi: l , §. 43, n. 110, dit que l'acheteur d'un fonds 'lui
veut expulftr un Fermier, eJl oMigé de donner bonne & fuffifante cau{ion pour lui répondre de fts dommages & intérêts,
ftuf d lui [on recours contre [on vendeur. Ici la caution a
été donnée, & d'ailleurs Ailhaud n'étoit point encore en
polfeffion; & de deux titres qu'on a préfenré, quel eH le
plus favorable, ou d'un aél:e d'achat, ou d'un a8:e d'arrentement? Le préjudice pour le troupeau eH égal aux ·deux
parties; leur Gtuatio n dl: la même. Me. de Royer eft vé.
ritablement poiTelfeur propriétaire; l'avertiiTement, fuppofé
n'avoir pas été fait dans le temps, eH ,un moyen inutile;
auc,une Loi' n'exige ce délai; une foule d'arrememens verfés au procès juHifie le contraire; la déclaration que les
particuliers en ont d~)l1née, en eft une autre preuve.
Me. Meriaud, Sub!l:itut, obferva qu'il eft certain que la
vente caiTe touS les arrenremens qui pourroient avoir été
faits. Cette ~egle générale a amené avec elle plufieurs dif':
tinél:.ions; la condition du Fermier ou locataire n'a pas paru
indifférente aux yeux de la Loi; elle eft venue à fon fecours, & lui a procuré les moyens fûrs & convenables pour
.le dédommager ·des pertes qu'il pourroit e1fuyer. Dans certaines ventes, on a inféré la c1aufe que l'acheteur maintiendrait dans le fonds vendu le locataire qui ft trouvoit en
poffiffion. ConnoiiTant cette' daufe, l'ayant 'approuvée par fa
volonté" il [e garde bien de ,l'enfreindre. Dans d'autres ocçafions)
�2.7'1
.tafions~ il a. éré rdécidé Aue l'acheteur ne_ pouvait exclure
le locataire ou fermier donc l'année étoit commencée"qu'après 'l'année révolue. 1 Ces principes fom jufl:es _& équira.bies ~ ,lUffi les rtrouve-t-on retracés dans les Aut urs qui ont
'trllité de ces matieres. Emptomn, dit la Loi 9, ~o'd. wear.
.lS' cond:, quidem jùndi necejJè non efi..flare 'c%no, cui lJriOIt
dpminu.$ /ocavit, niji eâ l.ege emit. CeHe çl'lu[e ,.eH ab[olunlllnt ·néceifaire, .&..l'a'chereur qui l'a conJenti'e elLobligé de
l'entretenir. Doroat, Loix civiles, liv. l ;,:tit. 4, {eél:. 3,
n. 4', pag. S8; ,Decormis, r·om. '2., col, 138;1>, 1'IOUS" retracenJ la même ma](ime. Bonnet rappo,rte un Arrê~i qui î.ugea
que, le locataire ou Jermier dont ]l'anné~ irQ-it c~mrnencée,
[Je pouvoit être ,exclu par·l'a'cheteùf qll,e l'année ellpirée, C'efl:
encore le cas, de l' I\rrêt rapporté par Mr. de St(· Jean,
décîf. 4, quelt.' 1-2, ,qui jugea 'en faveur du fermier concre
l'acquéreur; la vente fur regarc!éé comme nulle, arr~ndu que
le locateur da,nsYaél:e d'arrencemeQt s'étQit obligé· à ne pas.
vendre.
';( ,
,
. Me, de Royer achete, au mois de Juin 177), un cou[fou dans le terroir d' Arle~; cerre vente eH pure & fimple ;
aucune clau[e, aucune ré[erve ne s'y trauve inférée i la propriété & la polfeffion lui en [ont dévolues; il a donné connoilfance à Ailhaud de fon achat, avec interpellation
de fe défiGer du louage. D'après cette connoilfance légale, le temps, les délais, tout étoit en [a faveur;
il conuoilfoÎt le Tribun~ [ufpeél:, il 'n'avoit qu'à s'a-,
drelfer à la Cour pour fe faire nommer des Juges; là, il
auroit demandé des inhibitions & défenJes contre Me. de
Royer de mettre (on titre à exécution, attendu ,[on aél:e
d'arrente ment , & les quatre mois. auraient, ~té _plu.s que
fu$fans pour terminer la concefl:ation. Le fil;ut rd~, Royer
fe trouvoiç propriétaire à . l'époque, du 7 Juin; ·Ajlhaud ne.
devoit entrer en jouilfance .qu:à la.S.1.. Mic~el; .00 lui d.onne
cependant connoilfance du titre, pour l'eng'lger à prendre
d'autres artangemens ; & l'on ,peut dire qu~il en aproit cr'ouvé,
s'il r s'éraie donné des mouvemens. ·Aina l'avenilferoene
lui a été dOllQé _~n ~emps opportun; le lilence 'du, lieur
Années l775 & l776.
.
Mm
DU
PALAIS
DIl'
·PitovIlNCI!.
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, l '0 U R N 'A, LI •
ne Royer', qui a fuivi la fignification, ne fauroit lui être
imputé. .
. ';
Mais l'hypotheque de 2.400 liv. qu'Ailhaud avoit fur le
couffou N.endu, ne devoit..èlle p,\s' le maintenir'dans la: poffeflion & jouiffance, & pouvoit-il fe deffaiGr avant d'en avoir
été rembourfé? Cett.e quefl:ion eft également décidée par
des, Autorités précifes. Carelan, Lapeirere, Coquille, Breton nier '& Duperie'r, difenc- que quoique le fucceffeur particulier ou acheteur ne foit pas obligé de continuer la ferme,
mais feulement de 'payer au Fermier les dommages-intérêts, avant que de le pouvoir expulfer, & qu'il a pour cela
droit de rétention en la chofe, cependant l'ufage eft contraire; le fermier' eft explJlfé, faûf'à lui, fes dommages &
intérêts, & P9ur lefquels la chofe demeure aftet!:ée, fans
bénéfice de rétention avant l'expulGon..
Ainfi toutes les rfois que la Vente eft pure & fimple,
l'acheteur ne peur jamais être tenu envers le fermier; il ufe
de fon droit en l'expulfant de la ferme; ce fermier ne peut
s'adreffer qu'au vendeur, & c'eft vis-à-vis de lui qu'il peut
faire valoir fes droits.
La Sentence rendue par le Lieutenant efl:-elle réguliere
( continua Me.. Meriaud )? Les formalités de Juftice font
de rigueur; marquées par l'Ordonnance, le Juge ne peut s'en
écarter; chaque partie a le droit de les réclamer en fa faveur
& pour l'intérêt de fa caufe; l'ufage contraire les livreroit
à l'arbitraire le plus affreux. Toujours en butte à la volonté
de l'homme, au caprice des paflions, le remple de Themis,
le fant!:uaire de la Juftice deviendroient un féjour ténébreux
où la vérité ne pourroit jamais' faire entendre fa voix. Ainfi
dans toutes les caufes ,.les délais d'aflignations ont été fixes
& déterminés; l'éloignement-des lieux, les circonfl:ance~ des
matieres les ont plus ou moins rapprochés; il eft des cas'
cependant qui requierent.célérité, & où le' Juge peut abréger c;es délais. Le délai donné à Ailhaud n'a été que de
deux jours; aucune Loi, aucune Ordonnance ne prononce
ce délai, le moindre eft de trois· jours; le Lieutenant
ne pouvoit donc; l'ordonnet. Son décret eH nul, & la
,2.,4
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11!:
'~7~'
PRO V Il N C 'Il;
Sentence qui eG: intervenue fur ce décret eft également
__ . _ nulle.
Le Geur de Royer aurait pu demander par fa requête
ajournement conrre Ailhaud, fuivanr les délais de l'Ordonnance, & cependant, attendu l'urgence. de la caufe, demander des inhîbitions provifoires cBnrre Ailhaud, & affiJ
gnation précife à court délai; alors le Lieutènanr aurait pu
adopter ces dernieres fins, & délailfer les parties à pourfuivre fur le fonds pardevant qui de droit. Mais le fieur cie
Royer fe pourvoyoit en fins définitives; lé' Lieute~'anr ne
pouvoir que le débouter de ces fins, ou les enrériner; il n'a
jamais pu couper les fins princip'ales du fieur de Royer, !les
lailfer fubfifier pour les renvoyer pardevant qui de droir,
fe déclarant fufpeél:, & ajouter de fan autorité des fins provifoires que les parties ne requéraient pas.
Mé. Meriaud conclut à ce qu'ayanr tel égard que de ràifon
aux fins prifes par Ailhaud dans fa requête,' l'appellation
flIt mife au néant, & par nouveau jugement, la Sentence
du '2.8 Septembre fût déclarée nulle, & comme telle calfée;
& les parties délaiifées à pourfiIivre ainli & pardevant qui .il
appartiendroit; & de même fuite, à ce que fans s'arr'êt'er
à la requête incidenre d'Ailhaud, inhibitions ·ex: ·défenfès ·lùi'
fulfent faites d'introduire fon troupeau dans le' (:ou.1T6'u< ~donë
s'agit, fans préjudice du droit dés partî'é'S. : " Il . ' J! :J
Par Arrêt du 2. Décembre I77~, prononcé· par 'M~. \IJ
Préfident d'Enrrecafieaux, la Sentence fut confirmée,. &
Ailhaud fut condamné aux dépens. Pl'lidaat ..Mes. ro~talis
& GaŒer.
l'J
.J.
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,Ari.e Bifcaye, de la \lille de Marfeille, fut condamnée
rparl.4\.rrêt lt. v.ingç'fbls d,'.amende envers le Roi, à vingt
(a)l' 1~11V~);s'I~~, DlJe~. Flame(lq, pour i 0 jures.,.&·apx dépens,
Fg~1 1JttfsJJ.t:elje.s. adilliica.tio.ns e.l1e, feroit contrainte même;
~3r ·corps. M3fi~ )~i(caye fut emprifonnée, & préfenta requête-à!a "ollr' 0(10 ~ni[érable' ceffion, qui fut conteHée &
renvoyée en jugement.
,
:J:Marie') Bifs,ay,e, remonta~t aux p.rÎucipes de la ce(Iion,
paJ.GOu~ant.rûcc~ffiYlement tolites les Loix & les Ordonnanse~ qui 9ntl adopté ce cpoyen,' preuvoiç qu~, ce bénéfice
introduit p~r le droit romain, & reçu parmi nous po'ur furvenir aux befoins d'un débiçeur filrchargé de derres, devoit
s.'j1pp~iquer à elle, foic à caure de fa mi/ère 1 foit à raifon
cjes circo!\(1:ance.s de' la cau [e,.. Plus l1)alheureu[e' que coupal?I~" elle gél1)i!I:9it'fo,l,ls le poids d'une aq:.u(ation depuis au':',
delà de trois ans i,accufati()n plu~ aggrayame encore pa'r le.
féjout qu'~lle faifoit dan~ les ,horreurs deJa_pr.ifon depuis près
de fix mots. l "
•
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.' ~ous l~; AUJ;urs (jpt.4i!l:ingu~.h;s dépens, ç1~s domma-.
ges-intérêts, l'amende qui tient lieu de dommages-intérêts,
e!l: la peine du délit; elle ell prononcée propter crimerz; les
dépens au contraire ne font que l'intérêt purement civil,
& ne font adjugés que comme la rellitution propte,. litem.
Cerre diHinaion ell fuivie en matiere criminelle, & l'on
a toujours jugé en faveur de la miférable ceffion à raifon
des dépens. Fromental, Bouvot, Baffet, Lepretre & BrilIon, rapportent une foule d'Arrêts. Ceux que l'on trouve
dans Boniface & Bonnet arrellent la Juri[prudence de la
Cour.
M
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P A LAI 5 DRPR 0 V RN C l!:
277
La Sentence & le Jugement qui la confirme' ont diilülgué dans la prononciation l'amende & les dépens; MarieBifcaye a été condamnée à vingt fols; d'amende, pour ~enir
lieu" eil-i1 dit, de tous dommages & intéi-êts. Voilà la peine'
du délie, propter crimen; & aux dépens, voilà les frais de
l'inllruél:ion propter litem. Ain fi on ne peut pas dire que les
dépens a,Ïent été regardés comme dommages-intérêts; la
prononciation en eil: diHinél:e & féparée.
On foutenoit au contraire pour les Dlles. Flamenq, que
Marie Bifcaye ne fauroir être admife à la mîférable cellion,
fair que l'on confidérâr la nature de la créance, foit que;
l'on conficlérât la nature du dol pratiqué dans la procédure.
Les Arrêts cités attellem tout au plus la Jurifpruclence du'
Royaume, mais ne peuvent lien opérer fur celle de cette
Province, où l'on tient pour maxime que les dépens fOllt
de la nature du principal. Ainfi, fi la miférable cellion .n~eil:
point admife en mat'iere criminelle pour les amendes &
autres a.djudications, on doir également la refufer' pour les
dépens qui font un accelloire. L'Arrêr de Boniface'ne faul'oit atteHer la Jurifprudence de la Cour; il en feul, ifolé i
& rendu peut-être dans des circonilances particulieres.
Cette vérité fe prouve toujours mieux par' les Arrêts rendus en 1736, 1733, 174),'& par celui du m0Îs de Juin
.17'7), qui tous ont refufé la miférable cellion pour .les ,dé'pens en mariere criminelle.
Ici il-paraît que les dépens font la feule peine. infligée
à Marie Bilèaye. Qll'eft-ce en effet qu'une amende de vingt.
fols en faveur des Dlles. Flamenq,. fi les dépens qu'elles
font oDligées de faire ne font pas la peine attachée ,aux,
~xcès dont· elle s'ef!: rendue coupable? La conduite de,
Marie Bifcaye fuffiroit feule pour lui refufer le - pri:vileO'e
qu'elle réclame. Non contente d'inftilter les Dlles. Flamenq,
elle continue encore fa vexation par toutes les mfes & chi':
cànes pollibles: fe voit-elle fans re{fource? Elle prend la)
fuire; cette évafion eil le caraél:ere le plus frappantdè dol
& de fraude, & ces deux qualités ont toujours fait rejetterJ
les deman~e~ en miférable ceffioll. D'ailleurs Marie Bifcaye
�~8
JOURNAL
ell: Stiiffe de Nation; qpelque privilege qu'ils poiffent jouir
dans Jt,. Royaume, ils ne fauraient exciper d'u'ne faveur ordinairement réfervée aux naturels F ran~ais; les inconvéniens
du fyHême contraire feroient fans nombre, & on ouvrirait
par ce moyen la'porte à une foule d'abus qu'il ell: intéreffant
fans doute de détruire,
. Me. Meriaud, Subfl:itut, obferva qu'il ferait inutile de remonter aux temps les plus reculés. On auroit à fouffrir de
rappeller la dureté & la barbarie des premieres Loix des Romains contre les débiteurs, oll des créanciers érigés en vrais
defpotes avaient droit de difpofer fouverainement de leur vie
& de leur liberté; les mœurs s'adoucirent avec le temps, & à
l'aide de la raifon & de la réflexion; on jetta un coup-d'œil
favorable fur les' hafards du jugement humain, fur les erreurs & les iIIufions dont la Jufiice était environnée; & la
Loi par laquelle on fut admis à la miférable ceffion de fes
biens, devint un moyen favorable à celui dont les malheurs,
fouvent .imprévus & peu mérités,. aggravoient la fituation.
Ces avantages introduits par les Loix Romaines ont été
:t;e~us parmi nous, avec cette différence néanmoins qu'il efl:
des ·cas & des créances quj de leur nature excluent les débiteurs de cet avantage. Tels [ont les deniers proven ans
d'une adminifl:ration publique; telles font certaines fommes
pr:ivilégiées, ,notamment celles qui procedent d'amende &
d'intérêt civil pour crime & délit. Ces différences ne font
pas également adoptées dans tous les Parlemens ; à Dijon,
l'on efl: re~u à faire miférable ceffion'de fes biens pour
dommages-intérlts adjugés en rnatiere criminelle: il me paroît, dit Dupc(rjer dans fan recueil d'Arrêts, 'lue c'ifi la Ddnne
regle, malgré l'opinion .la plus commune des anciens Doc7eurs,
fuivie'dans la plus granile partie des Trihunaux du Royaume.
On"ne peut pas dire que l'adjudication des intérêts civils
fait un acceffoire de la peine; ces deux condamnations
ont deux objets différens; l'un intéreffe le public & la. ré,.
parati6n du crime, l'autre le dédommagement de la partie
civile; ce' [ont deux demandes principales & indépendantes
Ilune' de j'autre. La partie civile en France- ne peut con-:
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PALAIS
DI!
PROVENCl!:
2.79
clure ?t la peine publique, & la partie publique lié conclue
point ordinairement aux dommages-inrérêts de la partie civile: Le Parlement qe Grenoble a également adopté ce principe, & le débiteur pauvre & malheureux y en admis à
faire miférable ce/Ii.on, tant pour les dépens que pour les
intérêts <;ivils adjugés en matiere etiminelle.
Que peut-on exiger de plus d'un débiteur qui après avoir
fatisfait à la vengeance publique &' payé l'amende, abandonne tout ce qu'il a au créancier. Le Prélident Faber dans
fan Code, Iiv-. 7, tit: 3 l, déf. i, après avoir dit dans fa.
définition, qu'en matiere criminelle la ce/Ii.on des biens
l1'e{~ point admife, ajoute dans la note 3: intellige de pœnâ
, <jua! parti adj'udicata efi, tanquam pœna, non. de eâ ,quœ tarfquam illterejfe. Bien-loin qu'on trouve des Loix qui exceptent de la ce/Ii.on des biens, la dette caufée pour intérêts
civils en matiere criminelle, il femble au conrraire qu'il y
en a une qui décide pôlitivement qu'en pareil cas la ce/Ii.0\l
doit être admire. C'eH la Loi derniere, '§. 2 & 4, cod. de
cuJlodiâ reorum. Il y eH décidé que la condamnation à uné
amende pécuniaire n'empêche pas la ce/Ii.on miférable. C'eft
pourquoi Cujas, dans [es paratilles fur ce titre du Code,
dit: ex hac lege adnotaDis in crimirzali cal/fa ceflioni bonoram
locum ejfe. Le Parlement de Provence n'a point adopté ces
principes dans les miférables ce/Ii.ons qui lui ont été, demandées; il les a toujours refufées à rairon des dommages,intérêts; des Arrêts fucce/Ii.vement rendus ont fixé à cee
égard la Jurifprudence. Mais peut-on former le même raifonnement pour les dépens?
On oppofe que ~es dépens font une fuité & une dépendance du principal, qu'ils en font"comme un acce!foire , tellement liés avec la caufe qui les produit, qu'ils en font, poue
aioli dire, inféparables, puifque dans l'ufage ils fuivent l'hypotheque du principal; les dépens ont même fouvent plus de faveur. L'Ordonnance prononce la contrainte par corps après
les quatre mois, lorrqu'ils excedent deux cent livres; au lieu
qu'il y a bien peu de créancés à liégard defquelles cette
tegle compete. Si les dépens 'ne font qu'un acceifoire d~
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:p~i~cipal ;1 ~'ils [ujvent' fan' fort par rapport à l'hypotheque,
,on doit conclure .qu'ils font également de la même nature,
'.comm.e. dit Duperier, & que, comme la cellion n'a pas lieu
,en fair d'obligation procédant des dommages-intérêts en matier~,.criminelle, de même ,on doit refufer çe ·fecours au débiteur pour les dépens qui .ont été occafionés pour la même
pufe, & qui dépendent du même principe.
• Il eit des Tribunaux qui confondent dans leurs jugemens
ces deux adjudications, par une feule prononciati.on, en accordant au querellant une certaine fomme pour lui tenir lieu
de tous dépens, dommages-intérêts. Il eit décidé que -la cef':lion n:.iférable. n:,! pas lieu à l'égard d'une pareille adjudica.tion: il faût excepter, dir Serres dans fes initir. liv. 4, tir.
.6, §. 4, les cas où les dépens feroiellt joints aux dommagesintérêts~ Si telle eit la regle en matiere de dépeqs, lorfque
l'adjudication fe trouve confondue avec tes dommages-intérêts, il n'en eit pas de même lorfque ces deux adjudications
fe tro~vent diitinél:es & féparées. L'amende, les dommagesintjrêts & les dépeps procédant d'une caufe criminelle,
quelque relation qu'ils puiffent avoir, n'ont rien dans le fonds
d'abfolJment conforme. L'amende ell: la peine du délir; elle
eit prononcée propter crimen; les dommages-intérêts fom
la réparation du préjudice caufé par un délit, & conll:até irrévocablement par le jugemem. Les dépens font la peine
du téméraire. plaideur; l'objet en ell: purem~Dt civil, quoique la caufe foir criminelle; les dépens, à la difl:ërence des
dommages-intérêts, _font fufcepribles, du-moins dans les
grands Tribunaux, de modérati.on, & même de compenfation. La condamnation aux dépel)s n'a aucun des caraél:eres
exclufifs du bénéfice de la miférable cellion, (ur-tout quand
la plainte qui a donné lieu à cette adjudication ne d'énonce
pas un délit grave, mais une finlple injure pour(uivie au petit
~riminel.
.
L'article 29 du titre 13 de l'Ordonnance ct;iminelle a parfaitement fixé la nature des dépens, en les dill:inguanc de
J'amende & de l'intérêt civil. Cet article porte, que. ceux
~ui auront été condarnpés à des pein~s pécuniaires, ne pourront
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PALAIS
DB
PROVENCE.
28r
fOl1t étre élargis qu'en confignal1t les fommes adjugées pour
raifon de ce, & il ne veut pas que le défaut de paiement
d'épices foit un obUacle à leur élargiffement; à quoi l'arr.
20 du titre 2) de la même Ordonnance paroîr ajouter, en
décidant que tour ce qui a été ordonné pour les dépens en
matiere civile, fera exécuté en matiere criminelle; fur quoi
le Commentateur d'Orléans obferv~ que les dépens en mariere criminelle, ainfi qu'en matiere civile, ne fe payent
point par corps. BOl nier l'avoir remarqué bien avanr lui;'
c'eft auffi la Jurifprudence du Parlement de Paris. Barder
en rapporte p!ufieurs Arrêts; il. s'en tronve un grand nombre dans le Journal des Audiences; Mr. l'Avocat-Général
Talon avoit établi la maxime. Toutes les fois que la fomme
des dommage~-intérêts en diUinéte de celle des dépens, il
eU permis de faire ceffion. Boutaric, inflit. liv. 4, rit. 6,
§. 42, foutient qu'il n'y a que l'amende qui exclut le débiteur de la ceffion, & qu'il en en autrement, non feulement des dépens, mais encore. dés intérêts civils; les dé,.
pens en matiere criminelle n'ont pas plus de privilege que
ceux qui font adjugés en matiere civile, & l'on peut être
reçu à la ceffion des biens, comme il a été jugé par un
Arrêt célebre du Parlement de Touloufe du 28 Août 1716,
.& par un autre du 19 Septembre 1743. Telle eU égaiement la Jurifprudence de la Cour, attefiée par les Arrêts
rapportés par Boniface & par Bonnet. On oppofe cependant quatre 1 Arrêts rendus depuis 1730, qui ont jugé que
pour les dépens on ne pouvoir être admis à la ceffion miférable; mais des circonHan,ces particulieres ont fans doute
fervi de motif à 'ces Arrêts. Le Parlement de GrenobJe,
dont l'ufage eit d'admettre à la miférable ceffion, non feulement p'oLJr les dépens, mais même pour les intérêts civils
en matiere criminelle, s'eU cependant éloigné de cette regle
dans cerraines circonUances. Baffer, tom. l , liv. 2, au mot
cejJion, rappone trois Arrêts qui l'ont rejettée pour les dépens: dans le premier, il s'agiffoit d'une amende déja adjugée, & pour laquelle le débiteur avoit été emprifonné .•
dans le fecond, il s'agiffoit des dépeDs de contumace, tou-
Armées l775 & l77G.
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Jours défavorables en haine de la défobéifI'ance à la Juf.
lIce; dans le troi!ieme, il était que!1:ion de dépens adjugés dans une acculàtion d'incendie dont la gravité fut le
le [eul motif de l'Arrêt.
Me. Meriaud conclut à ce qu'en concédant aél:e à Marie
Bifcaye de la déclararion qu'elle fait de ne rien pofféder,
& de l'abandon qu'elle fait en tant que de befoin aux:
famrs Flamenq des droits & aél:ions qui peuvent ou pourroient lui compéter, au bénéfice d'icelui, faifant droit à
fa requête, elle flIt admife à faire abandon & miférable
ceffion de taus fes biens, & au moyen de .ce élargie des
prifons.,· [on écroue barrée par le Greffier de la Cour,
avec inhibitions & défenfês aux: fœurs Flamenq d'atrenter
fur [a perfonne , ni d'exercer contre elle aucune contrainte
par corps, à peine de 400 liv. d'amende, dommages &
intérêts, & d'en être informé de l'~utoriré de la Cour.
Arrêt du I I Décembre 177') , prononcé par Mr. le Pré!idem d'Entreca!1:eaux:, conforme aux conclu!ions ; les DUes.
Flamenq furent condamnées aux dépens. Plaidant Mes.
Selion & Pin.
ARRÊT
XXVII.
Le porteur d'un billet à ordre foufcrit par quelqu'un qui .n'efl
pas Négociant, & enfuite endoffi par un Négociant, peutil aiJigner le principal débiteur & l'endojJèur pardevant les
Juges-eonfuls?
L
E 4 Décembre 1773 Amant Gueit, Négociant de la
ville de Mar[eille, fit affigner pardevant les Juges-ConfuIs Laget valet de [avonniere, & Troteb..s Négociant,
·en condamnation [olidaire de 107~ liv. du montant d'un
billet à ordre [ouferit par Laget, & endofI'é en [a ·faveur
par Trotebas. Laget & Trotebas furent condamnés [oli.
daÎlement avec contrainte par corps, fauf un mois. Appel
�DU
PAL AIS
D JI!
PRO
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l!l NeE.
2'83
'de la part -de Laget, & requéte en furféa'nce qùi lui fut
accordée; Gueit en demanda la révocation; la caufe fut
renvoyée en jugement.
,
On difoit pour Laget, que le Tribunal des JugesCon fuIs étoit incompétent, parce que d'après toutes les
O:donnances & tolis les Edits concernant fa Jurifdi&ion,
il ne peut conno1tre entre toutes perfonnes que des lettres
de change avec remire d'argent de place en place. Le
Commentateur d'Orléans fur l'Ordonnance de 1673, tit. 12,
arr. 3, remarque que puifqu'ils font incompétens pour connoître d'un billet de change, dont un parriculier qui n'ef!:
pas Négociant, doit la valeur, à plus forte raifon doiventils l'être, quand il s'agit d'autres billets. On rappelloit
encore un grand nombre d'Autorités, pour prouver que les
billets à ordre pour valeur reçue comptanr, ne pouvoient
fou mettre ·que les Négocians à la Jurifdiaion confulaire.
Or un ouvrier employé dans une fabrique de favon, un
fimple valet ne peut être réputé Marchand ou Négociant.
Sa comparution devant les Juges-Confuls ne peUt l'empêcher aujourd'hui de quereller leur Jugement d'incompétence, parce qu'il ef!: recevable à faire valoir ces moyens
en tout temps & en tout érat de caufe, dès qu'il s'agie
d'une compétence ratiolle materiœ. L'endoITemem du billee
fait par un Marchand ne fauroit jamais en changer la
nature.
On répondoit pour Gueit, que Laget était réellement
N~gocianr. Il ne faut pas confondre Laget avec toute forte
d'ouvriers & travailleurs dans la fabrique. Le maitre-valet
dans une favonniere dirige les opérations; il eH Fabricant
lui-même, & l'imporrance de fa place eO: telle qu'il pourrait détruire dans très-peu de temps la fortune du propriétaire. C'eO: par cette confidérarion qu'on lui donne lme
prife ou intérêt fur chaque cuite. Il eO: véritablement le'
maitre, parce qu'il dirige tOllt; non feulement il veille
fur le travail des autres 0 vriers, mais encore il difpofe·
tous les maté! iaux néce1Tair 5 à la fabrication; tout pa1Te
par fes mains i il ef!: le chef & l'ame de la fabrique. Sa
Nn2.
•
�:184
Jou
Il. N A r ; '
qualité de maître-valet le conll:itue vraiment Négociant;
& il ne lui ell: pas libre de renoncer à cette qualiré arbitraire ment , & pour fe foull:raire à la Jurifdiélion confuJaire; d'ailleurs Laget a fait des aéles de Négociant, ainli
qu'il eLl: jufl:ifié au procès.
En fuppofant même qu'if ne fût pas Négociant, le billet
_ qu'il avoit foufcrit avoit éré endoffé par un Marchand; il
était devenu par-là un effet de commerce qui avoit pu le
faire aéhonner au Tribunal des Juges-Confuls, parce que
celui qui en était porteur, n'érait po,int obligé de divifer
fon aélioll & de faire deux procès, en attaquant l'endof(eur pardevant un Juge, & le foufcripteur pardevanr un
autre. Enfin fùt-il vrai que Laget ne fût point Négociant,
& que Gueit n'eût pu le faire alIigrier pardevanr la Jurifdiélion confulaire , il feroit non recevable aujourd'hui à attaquer la Sentenc qui le condamne, comme rendue par un
Juge incompétent, parce - qu'il a comparu, défendu &
demandé un délai pour payer, & que les moyens de dédînatoire
doivent êrre propofés avant que l'infl:ance foit
,
engagee.
Me. Bermond, Subfl:irut, obferva que les Juges-Confuls i
{uivant l'Edit de leur création & les Ordonnances rendues
enfuire, doivent connoÎrre de tOUS billets de. cha nge faits
entre Négocians & Marchands & entre routes perfonnes,
des lettres de change ou remifes d'a-rgent de place en
place. Le-s billets à ordre, quoique pour valeur- reçue comptant, font aulIi de leur compétence, quand ils font !ignés
par un Négociant. Radier, (ur l'arr. 4 du tir. 34 de l'Ordonnance de 1667, obferve qu'on condamne avec contrainte par corps touS ceux qui ont ligné, accepté ou en-l'égard
doffé des lettres de change. Mais, ajoute-r-il,
des autres hillets ordre ou au porteur pour valeur reçue en
argent ou en marchandiJes, ils ne foumettent à la contrainte par corps, qu'al/tam qu'ils font faits entre Marchands, ou par un Marchand pour raifon du commerce dont
il Je mêle au profit d'lIll particulier non Marchand.
L'achat & la vente des marchandifes font ce qui conf-_
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PALAÏs D Il PRO""
IlNCn:.
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'18.,'
tieue préci(ément le Marchand ou Négociant; mais pour
être réputé tel, fullit - il d'avoir fait dans (a vie quelque
aél:e de négoce, ou faut-il être dans l'ufage confianr de
faire pareils aéles, & d'en faire fa principale occupation?
Le commerce devant être une chofe libre, il en permis
à chacun de faire des aéles de commerçant, c'ell-à-dire,
d'acheter & de revendre. Il paroit pounant qu'on n'a jamais confondu le Négociant d'habitude & par état, avec
celui qui ayant déja une autre qualite ou un autre métier
connu, aura fait par ha(ard & (ans conrinuité quelque aéle
mercantille.. Le Négociant par état a prefque coujours des'
livres, une correfpondance déterminée; il faut au moins,
pour qu'il puiffe toujours être confidéré comme tel, qu'il
faffe de fréquens aéles de négoce. Tant que ces aéles de
négoce ne feront qu'accidentels, la qualité primitive (ubfine & fixe l'état. Or Laget n'ayant fait qu'un ou deux
aéles de commerce dans (a vie, ne peut être "confidéré
comme commercant.
,
,
En vain a-t-on dit que le billet (oufcrit par 'un part,iculiet non Marchand, quand il étoit endoffé par un Mar-)
chand ou Négociant, autorifoit le porteur à former fa demande pardevant les Juges-ConfiJ1s, que le porceur de ce'
billet ne pouvoit point divifer fon aélion, & avoir deux:
procès en attaquant l'un de ces débiteurs au Juge ordi-'
naire, & l'aucre au Tribunal des ConfuIs. L'endoffement
n'étant autre chofe qu'une cellion, il ne peut rien changer
à la nature de l'obligation; le cédant ne peut céder autre
chofe que ce qu~il ·a reçu, & ceiui, à qui il cede ne peut
rien avoir de plus. L'obliga.tion du premier débiteur ne
peut jamais changer de .nature fans (on confemement, (ans
fon propre fait :. c'efr pourtant ce qui arriverait, fi l'endoffemenr que feroient des lV).archands, p<luvoit 'transformer
en effet de commerce une obligation 'fimple & ordinaire.
Quanr à la fin de non recevoir prife de ce que Laget
n'avoit pas propofé [es moyens de déc1inatpire avanr la·
concefiation en caufe pardevant les premiers Juges, il faut
d.ifringue~ euç~e le~ fins de non-procéder, celles qui [ont
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il. N A L
fondées fur le privilege de la partie, &. celles qui le [ont
fur l'incompétence du Juge à raifon de la matiere. A
l'égard, des premieres, elles doivent être propofées avant
toute contefiation fur le fonds, c'eH-à-dire, in limine litis;
parce qu'étant libre à la partie de. plaider devant le Juge où
elle efi affignée, ou de demander le renvoi, elle efi cenfée'
renoncer à ce renvoi, dès qu'elle comefie au fonds. Le·
mot privilege fait affez entelldre qu'on ne la force pas à
plaider devant un Tribunal. Mais quant aux fins de non-'
prncéder fondées fur l'incompétence du Tribunal à raifon
de la matiere, elles peuvent être propofées en tout érat
de caufe; parce que , quoiqu'une partie ait contefié par
erreur ou volontairement devant un Juge qui ne peut connOÎtre de la matiere, elle peut toujours quereller fon Jugement d'incompétence, même en caufe d'appel; cette
incompétence étant ratione materiœ, le Juge auroit dû renvoyer les parties,. malgré leur confentement à procéder devant lui.
.
Me: Bermond conclut à ce que fans s'arrêter à la requête de Gueit,. Laget fût mis hors de Cour & de procès.
Arrêt du 3 Août 177'5,. prononcé par Mr. le Préfident
d'Albert, qui confirme la Sentence des Juges-Confuls avec
dépens. L'Arrêt fondé fur l'indivifibilité de l'aBion du porteur du billet.
·411
ARRÊT
XXVIII.
Sur une ajJignatioll donnée pardevant lin Juge Royal,. par.
un Sergent d'une Jurifdic7ioll feigneuriale.
Nfuite de l'appel d'une Sentence rendue par le Juge du.
lieu de St. André, porté au Siege de Cafl:elane,. Henri fit
'fignifier cet appel & l'ajournement au fieur Gibert par Ull
feul & même exploit, par le Sergent ordinaire de la Jurif.
diétion de Saint-André. Gibert préfenta fur cette affignation,
E
�DU
PAtAIS
DI!
PROVENCE.
287
.~ demanda par une requ'ète incidence la cafladon de l'ex-
plo-it -d'ajournement, comme ayant éré fair par un Huiffier
fans caraél:ere & dont il ne pouvait reconnaître les fonc'tians. Le Lieutenant par fa Sentence déclara l'exploit nul, &
'comme tel le calfa & tout ce qui s'en était enfuivi. Appel
du lieur Henri pardevant la Cour.
On difoit pour lui, que Gibert était tout à la fois non
recevable & mal fondé; non recevable, parce que la préfemation qu'il avait faire enfuire de l'affignation qui lui
avait été donnée, avait COL1Vert les, nullités dont, elle éwit
fufceptible, fuppofé qu'elle, en prefenrât quelqu'une; il a
prefenré fans proteftation, & cette formalité a été de
-fa part un aveu qu'il reconnoilfoit l'affignation valable.
Il écoit d'ailleurs fans intérêr; c'écoit aux Huiffiers à
réclamer; leur filence à cet égard prouve la validité
de l'opération; non feulement il était fans intérêt,
mais c'écoit contre fan intérêt propre; un exploit, feol
avait fuffi; l'Huiffier était fur les lieux; c'étoit des
frais qu'on lui évitait. Au fond ~e quoi s'agilfoit-il? Ce
n'écoit point en vertu d'un mandement du Juge-Royal que
l'Huiffier exécutait; c'écoit la volonté de la partie, l'appel
qu'eUe déclarait former envers une Sentence du même
Juge, qu'il lignifiait dans l'étendue de la 'même Jurifdiél:ion;
l'Huiffier en avait véritablement le caraél:ere, le pouvoir;
Joulfe, fur l'Ordonnance de l 667, lui donne le droit de pouvoir éxécurer un mandement du Juge-Royal; à plus forte
raifon dans cette caufe 00. il ne s'agilfoit que de faire connaître la volonté de la / partie, d'ajourner en appel pardevant le Lieutenant 1 fans mandement du même Liéutenant;
d'ailleurs c'eft l'ufage que toutes les demandes libellées, tous
les exploits d'ajournement, font fairs par les Huiffiers locaux.
On répondait pour Gibert, que puifque chaque Tribunal
a fes appariteurs, il eft naturel qu'ils n'entreprennent .pas
les uns filr les fonél:ions des autres, &1 qu'à moins de cer~
tains privileges particuliers & des c,irconftances prelfanres;
ils reftent chacun dans leur relfort & dans les fonél:ions
relarives à la jurifdiaion dont ils font Officiers. Ce prin~
�~S8
J 0 V RNA r.
cipe eft confirmé par tous les Auteurs & par un Arr~t de
réglement du 27 Juin 173 l, par lequel la Cour tàit inhibitions & défenfes à rous Sergens ordinaires, fans permiffion ou comrniffion du grand fceau, de s'ingérer dans les
fonaions des Buiffiers & Sergens royaux, ni d'exploirer
direaernent ni indireaerrent aucuns mandemens émanés
des Juges royaux, à peine de nullité de tous exploits, &
d'être même pourfuivis cômme fau1Taires.
Le fair donr s'agit eil relatif aux fonaions d'Huiffier
royal; il s'agit d'affigner pardevant le Juge royal; le Sergent banneret ne doit point le faire.
En vain diroit-on que la préfenrarion a couvert la nullité, & que Gibert dl: non recevable d'en exciper. Il y
a pluIieurs nullités qui font couvertes par la préfenrarion ;
telles font les affignations données à domicile à un brief
délai; toutes les affignations font validées par la préfenration de là 'partie; mais il n'en eftqas de même de celles
qui prennent leur origine dans l'exploit même, qui font
liées à fa nature. Elles ne fauroient fe couvrir par la préfentation; il eft même néce1Taire qu'on fe préfente; & ce
n'eft que lorfque cette formaliré eil remplie, qu'on peut
être recru à quereller les nullités & à les faire réformer.
Me. Me.riaud, Subftitut, obferva que Ferrieres dans fon
Diaionnaire de prarique dir que les Sergens royaux n'ont
droir que d'exploiter dans l'étendue de la Juftice royale à
laquelle ils fOQt nommés~ & les autres dans l'étendue de
la luftice du Seigneur qui les a pourvus de leur office.
Bonnet, lett. H, n. 4, dit que les Officiers royaux peu,·venr exécuter tous les mandemens des Juge~ royaux, ce
qui femble exclure les Officiers bannerets de pareils aaes.
,lou1Te fur l'Ordonnance; Papon, liv. 6, tit. 7 des HuijJiers,
n. 3 ; Rebuffe, trac? de liueris o{>ligat. arr. 2 , n.77 ; Imberr,
liv. l, ch. 3 , difent la même chofe. Cependant Denifarji
. au mot Huiffier., n. 8 , cite deux Arrêrs du, Parlemenr de
':Paris, l'un prov.ifionnel .du I I Janvier 17.66, & l'autre
définitif qu mois de' Mars 1767' qui jug~nr que les Ser.gens d'une JlIfiice feig'neuriale peuvebt' ~aire dans l'éreudu,e
,
d4
�DU
PAL AIS
D P:
PRO VEN C E:
289
relrort de cette juHice, concurremment avec les HuiŒers
Royaux, la fignification de tous les aaes faits fous le fcel
royal, & des jugemens rendus par les Juges Royaux. Rodier filr, l'Ordonnance adopte le même principe, & rapporre de~x Arrêts du Parlement de Toulou[e.
De cette difcuŒon il réfulte qu'il n'dt aucune Loi générale qui détermine le point contentieux; les Auteurs, tels
que Rebufle & Papon, paroilrene avoir exigé que coure
commiiiion ne Juge Royal foit fignifiée & exécutée par
l'HuiŒer Royal; Rebufle cependant s'en explique d'une maniere domeufe, puifqu'il dit: & Ji per alium fortè retrac7aretur executio, Ji pars adverfa opponeret; il efi vrai qu'il rapporte un Arrêt de Réglement du Parlemene de Paris, qui
fàit défenfes aux Baillifs & Sénéchaux de faire exécuter leurs
commiŒons par les Sergens des Seigneurs. Denifart & Rodier rapportent une .Jurifprudence plus récente, qui forme le
dernier état dans le reffort du Parlement de Paris.
Mais cous one parlé de l'exécution des mande mens des
Juges Royaux, qui ne peuvent être exécutés que par des
HuifIiers Royaux; aucun n'a trait à la véritable quefiion du
procès, qui eH de favoir fi un HuifIier banneret peut fignifier la déclaration d'appel devant le Lieutenant. Rodier
& Denifart, en accorda ne à l'HuifIier le droit d'exécuter des
commifIions des Juges Royaux, fuppofenc à plus forte raifon
celle de donner de fimples afIigna tions. Il faut donc diftinguer le mandement du Juge d'avec l'aŒgnation, qui ne
fone pas unum ê,- idem, qui peuvene être régis par des regles différentes. Toute partie a le droit, par l'Ordonnance,
de citer fa partie devant le Juge compétene; divers Auteurs
ont écrit que les parties doivent comparaître d'elles-mêmes
fans citation précédente; lorfqu'il intervient une citation,
J'obligation de comparaître vie ne de la Loi; le rninill:ere de
l'HuifIier n'interviene que pour la forme, pour rendre la
citation autheneique' aucun mandement, aucune commilijon
de Juge ne préCede; l'HuifIier ne fait que tranfcrire & notifier l'intention de la partie à qui le droit de citer eH ac~
. Années 1775 & 1776.
00
�/.2.90
Jou
RNA L
<juis par la Loi; le mininere d; l'Huiffier local doit donc
fuffire à cet effet.
Ici le Juge de St. André rend une Ordonnance; la partie
lérée en déclare appel ; cet .appel eO: fignifié par le Sergent
ordinaire, & par le même exploit on donne ajournement
pardevant le Lieutenant de CaHellane; cerre démarche n'a
rien qui blelTe l'ordre des Turifdiél:ions; elle en favorable
à la partie; l'intérêt de Gibert eH entiérément rempli;
on lui épargne des frais inutiles; on n'a rien fait de
contraire au Réglement de la Cour de 1742, ni à celui
de 173 1. L'Huiffier de St. Audré n'a point exécuté hors de
fa Jurirdiél:ion; il n'a point exécuté en vertu d'un mandemènt du Lietltenant; c'eH la fimple volonté, la déclaration
d'appel du fieur Henri, aél:e libre & volontaire qu'il a mis
en notice au fieur Gibert. On ne peut pas dire qu'il ait
dans ce fait excédé les bornes de fon pouvoir; l'eîlt-il fait?
Le fieur Gibert feroit fans intérêt pour fe plaindre ~ c'était
aux Huiffiers Royaux de CaHellane à réclamer de leur privilege; & tout ce qu'on auroit pu leur accorder, aurait été
en définitive une portion fur le falaire de l'Huiffier. C'eH
ce que porte la Déclaration de 17'12, & Radier ajoure
qu'on a cru au Parlement de Touloure que cerre Déclaration ne· faifoit qu'un Réglement entre les Huiffiers pour réclamer leur falaire; il cite pliJfieurs Arrêts qui ont affirmé
cette maxime, entr'aurres celui rendu à la Grand'Chambre
Je 13 luillet 1753, où il· s'dgilfoit d'un exploit inrr<;>duél:if
d'inHance au Sénéchal de Nîmes, par un Huiffier du Marqui fat de Deveze. VaineIPent· exciperait-on d'un ufage contraire établi en Provence; cet urage ne pourroit être qu'un
;ufage négatif qui ne fupplée point une' Loi prohibitive.
En fuppofant que l'exploit renfermât une nullité, la préfentation du fieur Gibert ne l'auroit - elle pas couve·rre?
10ulTe, fur l'Ordonnance de 1'667, dit, d'après Faber & Mafuer, que ,quand les· deuil: parties comparoilfent d'elles-mêmes en ·luft·ice·, il ne 'paroît pas quiil fait befoin d'une affignation.· C'eil: auffi la remar.que de MI'. de Lamoignon au
�DU
PALAIS- DE
PROVENCB;
2.9{
procès-verbal de l'article de cette Ordonnance. Ainli la com~
parution volontaire en Jultice doit couvrir la nullité de l'affignation, puifque tout l'objet de l'affignation étoit d'amener la partie devant le Juge; elle y vient, & c'efl: devant
fon Juge naturel. Comment pem-elle enfuite réclamer contre
l'exploit, dOllt tout l'objet étoit de le faire comparo1tre?
Commellt peut-elle rétraél:er, défavouer le fait de [a comparution? Ici la préfentation efi pure & fimple; dans le
moment même on jultifie la validité de l'affignation; ce
I}'efl: que que~que temps après qu'on [e pourvoit.
Me. Meriaud conclut à ce que l'appellation & ce dont
efl: appel fuirent mis au néant; & par· nouveau jugemen t,
làns s'arrêter à la requête inc1dente de Gibert, Henry fût
mis fùr icelle hors de Cour & de procès, avec renvoi.
Par Arrêt du l'Î Décembre I 77 'Î ,prononcé par Mr. Je
Préfident d'Entrecalteaux, les conclufions furent [uivies;
& Gibert condamné aux dépens. Plaidant Mes. Gaffier &
Simeon.
AR RÊ T
XXIX.
Dans les Jurifdiaions Seigneuriales, celle de la Police ap~
. partient aux Seigneurs, & efl comprife·dans la Jurifdic7ion
univerfelle.
L
E 22 Avril 1773, Me. Calvy, Notaire Royal, un des
Regardateurs de la ville de Vence" expofa au Bureau
de Police que les rues devaient être nettoyées à l'occa60n
de la proceffion générale qui devoit être faite le jour de
St. Marc; [ur quoi le Bureau rendit une Ordonna·nce, portant injonél:ion à chaque habitant riverain de nettoyer [a frontiere la veille du jour de la proceffion, à peine de vingt
fols d'amende, applicable à l'Hôpital; cecce Otdonnanœ
fut publiée par le Valet-de-Ville. Pareille Ordonnance fut
.tendue le IO Mai de la même année, pour une proceffioll
,0 0 ~
�,
292.
1 0 U RNA r.
qui devoit ~tre faite le l2.; il fut dit qu'il en. feroit ufé dé
même à l'avenir aux veilles de. chaque fêfe folemnelle, &
· de chaque jour de proceffion, fous pareille peine. L'Ordonnance pronon~a des inhibitions & défenfes de mettre dans
les rues des matieres à pourrir pour du fumier, & de les
y encalfer, & à tous Peigneurs & Peigneufes de ch?n~re
& lins de les peigner & accourrer datis les rues de la ville &
fon fauxbourg, fous les mêmes peines.
Les Seigneurs -de Vence inHruits de ces Ordonnances,
préfenterent une requête; ils demanderenc ajournement, tant
contre les Intendans du Bureau ~e Police, que concre les
Confuls, pour venir voir dire que les Arrêts préc.édemment
rendus entre les parties feroient exécutés fuivanr leur forme
& teneur; & au moyen de ce, les délibérations dont il
\s'agit feroient déclarées nulles', & comme telles calfées,
avec inhibitions de qualifier les délibérarious du Bureau,
· d'Ordonnances, & de les faire publier, à peine d'en être informé de l'autorité de la Cour.
On difoit pour les Seigneurs de Vence, que dans l'ordre
génér;.al du ,droit commun; la Jurif<!icrion de la Police eH
comprjfe dans les inféodations, comme coutes les Jutres
branches de' la Jufiice univerfelle. DeJà.la créarion des offices de Police faite en 169'/ ne combe que fur les Jull:ices
Royales que le Souveraiq pouvoit démembrer, parce qu'il
ne difpofoit que de fon bien, & non' f"'r les Jull:ices feigneuriales, qui fe trouvant polfédées par les Seigneurs à titre
de patrimonialiré, ne pou voient pas' être démembrées à
leur préjudice fans leur coofentemenr; de maniere que partout où l'on trouve inféodarion avec ceffion. de JuHice, la
Police appartient au Seigneur, comme comprife dans la
· prertjiere conceffion faite à fes auteurs, C'e(~ ainli que la
Cour l'a jugé par Arrêt du 7 Février 1760, ·en faveur de
M. le Prince de Monaco, contre la Communauré des Baux;
il fm fait des inhibitions & défenfes aux Confuis des Baux'
de fe qualifier Lieutenans - Généraux de Police, & d'en
faire aucune foncrion juriçlique, à peine d'amende & d'en
être informé, fauf néanmoins & réfervé aux Confuls de f~ire.
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE;
'2.91
par eux-mêmes ou par des Commi1faires ou Inrendalîs, des
vifites, dre1fer des procès-verbaux qu'ils référeroient au Greffe
de la Jurifdiaion, pour être pris par le Procureur Jurifdiaionnel telles concluGons, & être fiatué par le Juge ainli
qu'il appartiendroit. On trouve la même difpofition dans
!'Arrêt rendu en 172), en faveur des Seigneurs de Barbentane.
On connoit, il efi vrai, des Communautés feigneuriales,
daus lefquelles on trouve des Bureaux de Police établis;
mais on fait qu'ils n'exifient que par la conceffion ou con~
1ènremenr des Seigneurs; ils tournent prefque tous en fi m.'
pie aciminifiration; il n'en efi peut-être pas un feul qui foit
établi par conceffion antérieure à l'inféodation, & connue
direaemenr du Souverain. En bonne regle, les Bureaux de
.rolice qui exifient par la conceffion des Seigneurs, ne devraient. avoir que des fonaions de pure & fimple adminifiration, & non des fonaions de Jurifctiaion, les Seigneurs
n'étant pas les maitres d'érablir, ni des Tribunaux, ni des
Juges en plus grand nombre que ceux -qui foht déterminés
par les Ordonnances & Réglemens généraux.
Les Lettres-patentes de Franc;ois Il du 22 Septembre
1 )60, ne furent données qu'à l'occafion des prétentions
qu'avoit le Comte de Tende, Gouverneur & Grand Sénéchal de Provence, fur l'exercice de la Jufiice, & pour l'exclure de rout aae & de toures fonaiops,; elles ne difent
rien d'ailleurs des Communautés feigne\lriales; & quand elles
y feraient comprifes, la difpoûrion de ces Lettres-patentes
ne frapperoit jamais que fur les Communautés qui fe trouvoient fondées en privilege, c'efi-à-dire en titre fpécial,
émané du Souverain, & qui auroient enfuite confervé ce privilege par la po1feffion de tous les temps.
Delà viennent toures les Loix & tous les Arrêts qui fe
réuni1fenr à décider que tout le juridique de la Police doit
appartenir aux Juges ordinaires, & que les Confuis ne do~-.
vent en avoir que l'infpeaion & le droit de dénonciation.
Boniface, tom. l , tir, 7 , pag. ·21 , cite ~n Arrêt qui fir dé....
fenfes aux Confuls du MaJtigues de Ce qualifier Magifira~î
�~94
J
dUR' N'Il.'L
~ ~
de Police.;- îl -en cite' un autre qui enjoignit aux COl1fnJ~
de Sallon ete remettre aux Officiers de la Ville les poids
& les balances qu'ils avoiel1t faiGes à un particulier pour
caufe .de contraverHioll, Ces Arrêts déciderent que la coutume & ;Ia poffeffion ne pouvoient pas amorifer les Confills . à fe dire Officiers de Police, non plus qu'à exercer
les fonél:ions au judiciaire. C'e!l: d'apres le même principe
que toutes les 'Loix fubféquentes ont décidé ou fuppofé,
que 'Ia Police, dans la partie confi!l:ant en exercice de Jurifdiél:ion, n'appartenoit qu'aux Juges des lieux, & non aux
Communautés. Telle e!l: la difpofition de l'Arrêt du Confeil d'Etat du 1 Oél:obre 166 S, rapporté par Boniface;
celle de l'Edit du mois de Mars 1667, rapporté par Brillon,
vo. Police. On retrouve lecmêmes p,incipes dans l'Edit
du mois d'Oél:obre 1669, portant création des offices ·de·
Lieutenans-Généraux de Police 'dans tbutes les villes royales.
du Royaume, & dans les articles 71 & 72 de l'Ordonriance
de Moulins.
•
,.
Les délibérations que la Communauté de Vence pro'duit pour prouver qu'elle a de touS les temps exercé la Policé dans la ville, ne peuvent lui fervir de rien. Des délibérations rédigées dans fes regi!l:res, & dans lefquelles fes
Admini!l:rateurs ont fait inférer toUt ce qu'ils ont trouvébon, ne peuvent jamais faire preuve contre les Seigneurs.
Quand même ces délibérations feroient probantes, il ne
s'en enfuivroit rie'n' de pius, fi ce n'e!l: que dans l'e/pace
d'environ trois fiecles, les habitans de Vence avoient délibéré onze fois. 'fur des objets de police, mais délibérer
n'elt pas. juger.
1ï J (
Il fuit de là qu'à l'époque de l'Arrêt d'expédient de 1628·,
qui veut qu'jl foit établj 'un Bureau de I)olice " au lieu
" de Vence dans la maif6n commune; auquel affi!l:eront
.. le Juge ou fon Lieutenant, les Confuls & plus apparens
" de la ville qui feront-nommés & élus pàr le Confeil, qur
" touS enfemblèment auront voix délibérative, & jugeront
" des faits de la Police fur ·Ies plaintes. qui feront faites
!' par les Regardateurs, qui auronfauffi voixdêlibêrative, &c..,,,,
..
�DU
P ALX,l~
_DJ~
PR'OVBNC!i:
'X9)'
la Communauté de Vence _n'avoit' hi "titre ni"poffeffion légale pour exercer la Jurifdiaion de 'la Police; aûffi cela Te
trouvait-il jugé de même entre les mêmes parcies par les pré-'
cédens Ar·rêts. En 162.2, il fut jugé qu'en temps de pefl:e,
les billets feroient marqués à la marque des Seigneurs &
de la Communauté, que néanmoins la charge, adminifl:ra-:
tian & intendance de la Police feroit exercée par les Officiers des Seigneurs, appellés les Confuls & plus apparens
du lieu; fur quoi l'on doit obferver que les Confuls &
principaux habitans ne devaient être appellés que pour là
voix confulrative rant feulement, & que rout l'exercice
éraie concentré fur la tête des Officiers des Seigneurs,
ce qui érair conforme à l'arr. 72 de l'Ordonnance- de Mou"":
lins.
~
J
':1 \..~
Peu importe que l'Arrêt de' 1624 a it maintenu' la Corn:';
muuauté de Vence dans le droit d'éralilîr- un Valet~de4
Ville; cet établiffemem n'a rien de commun- avec lai Police..
On retro\.tve ,la:> même difpoIirion dans un Anê _ io'tervenu
entre les parties en r627' Les Seigneurs y furent maibi-'
teuus dans le droit excluIif de faire' faire. des pbb1ications
à fon de trompe; il Y fut inhibé ,à la CQmmuoguté dé
faire publier les convocations des Confeils, autremeut qu'à
voix d'homme ou au fon de la cloche, & de faire. faire
aucune criée au fan de. la trompette. On penfoit que les
publications renoient au - droir de poliçe, & la Cam munauté ne l'avoir pas. Ainfi l'Arrêt d'expédient de r628 efl:
une véritable conceffion de la part ~es 'Sejgrieur~ -dé Vence
en faveur de la Communauté, & le Bureau' de Police efl:
établi de novo pu ce ritre. '_
''T
'
Ce n'efi, pas fur des aaions ordinàires que- 'Ie~ BOreau
de Police pëut difpofer; e'efl:, fur' des plàîn~es-" cè~'q-ui
fuppofe néèeffairemènt, une c-ohtta':ve'n'tion.'Ge' n~fl: :p'a-s'.ful!
!-es plaintes de tout~' petfonne, mais fur -celle des' Regardateurs, & les Regardat-éurs n'ont que l'infpeaion 'des
vivres & viruailles. Le rao-x -des·, vivtes & v'Ïruailles' appartient à'.I'Aâmirlifl:fa,ti0fl,-&-non à la Jurifdiaion 'de la P~
lice. Ce drait appartient aUJ(' Communautés ,-qui 'Î>eûveiÎt le
�,'296
J Q' U 'R N Jo. L" ' • .
-faire exerc~r. par les Regardateurs; les mefures font "aufii
, •fou in ireS à 'I€lur infpeéliari, re}ativement à la vente des vi-vres & vituailles dont ils ont la furveillance: cela n'ell
pourtant pas indifférent; car fi l'attribution qui précede en
.faveur du Bureau de Police eÎlt été générale, fi l'on eÎlt en-tendu que touS les faits de la Police devaient appartenir au
.B"ureau, il eut été très-inutile de réferver aux Regardateurs
.le droit de mettre le taux aux vivres & viruailles, & celui
,de l'alloyemeut des poids & mefutes; tout aurait· été dit
pour la conceffion illimitée en faveur du Bureau; la ré[erve
n'ell donc llipulée que pour empêcher les Seigneurs de
conteller aux Regardateurs le droit qu'on leur attribue•
. .. Peu importe que le Bureau de Police de la ville de Vence
s'y trouve établi littéralement, en conformité de l'Ordon-Dance du Roi & du Bureau de Police de la ville d'Aix;
,car, [uivant les Réglemens qui [ont réfumés à la pag. 80
des privileges, art. )é, ce Bureau n'a certainement pas le
droit de faire des Reglemens généraux fur la police des
rues.
Arrêt 'du 26 Juin 177), qui fait droit 'aux fins priees par
les Seigneurs, avec dépens.
."
.
AR RÊT
xxx.
Récufation fondée fur le procès Cfue le Juge a avec une. partie.
'M
E~ Antoine Portal, Notaire Royal du lieu du Puget,
& Honoré Rollând, -Ca'rdeur à lain,e du lJ1ême lieu,
eurent ~n[emble quelques démêlés un peu vifs; ils s'en plaignirent réciproquement par des requêtes. Me. Long, Lieutenant de Juge,·prit l'information, & décréta Rolland d'ajournement, & Portal d'affigné. Les décrétés prêterent leurs
réponfes pardevant le même Juge, après lefquelles Rolland
appella du décret de fait informé & de tout ce qui s'en
étoit
eofuivi
pardevant le Lieutenant de Btigqoles. Il fou'i
.
.
tenol~
�/
DU
..
PALAIS
DE
PROVENCE.
291
tenoit que Me. Long n'auroit pas dù prendre la procédure,
attendu qu'ils étoient en procès, & qu'il étoit l'ami & le
confeil de Me. Portal, deux motifs qui devoient l'engager
à abfienir. Me. Portal mit en caufe Me. Long, & l'affigna
à l'effet de le relever & garantir de tout ce qu'il pourrait
fouffrir; par Sentence du 7 Juin 1774, le décret de
foit informé & tout ce qui l'avoit fuivi fut déclaré nul, &
comme tel calTé, Me. Long condamné à relever & garantir Me. Portal, & aux dépens- envers toutes les parties.
Appel de Me. Long & de Me. Ponal.
Me. Meriaud, Subititllt, obferva que les Juges font établis pour départir la JuHice à tous les fujets, fans diitinction d'état & de richelfes; leur filgelfe regle nos defiinées;
notre honneur, notre tranquillité, notre fortune, nos vies
font dans leurs mains. Il importe donc que les principes
les plus aufieres & les plus fermes les dirigent dans leurs
jugemens; qne l'animolité & le prévention ne puilfent jamais en être les motifs, & que tout y foit examiné avec
la plus grande impartialité. Les fonélions du Juge font auffi
augufies que fon état eit relevé; il eit l'ami du pauvre,
l'ange tutelaire des Cités, le prote&eur de la veuve & de
l'orphelin; fon zele eit pour tous les méchans une fentinelle infatigable qui prévient les crimes & les défordres auxquels ils pourroient fe livrer.
Voici ce que difoit l'immortel Mr. d'Aguelfeau, en parlant du MagiHrat vertueux: " Choifi entre tous les hommes
" pour rendre un témoignage fidele & incorruptible à la
" vérité, le titre précieux d'homme jufie le met en pof" feffion de la confiance publique. Libre de préjugés,
" exempt de paffions, & feul digne par-là de juger de
" celles de tous les hommes, il ne fort jamais de cerre
" noble indifférence & de cet équilibre parfait où tous
"les objets fe montrent à lui .. dans leur véritable point de
" vue, où, s'il permet encore à fon cœur l'ufage de quelque~
" fentimens, ce foht ceux que la raifon adopte, bien-loin
f, de les défavouer,.& que la nature nous donne p~JUr être
,. les initrumens & comme les Minifires de la vertu;
Années l77~ & l77 6•
P-p'
0
�'298
Jou RNA L
" une foif ardente de la Jufiice, une haine parfaite de
" l'iniquite, une compaJIion fage & éclairée pour le jufie
" perfécuté, une indignation verrueufe & raifonnable contre
" l'injufie perfécution. "
Telles font les maximes facrées qui doivent diriger la
conduite des Juges. Mais les hommes n'ont pas toujours
été- jufies, & il s'en dl: rencontré quelquefois qui n'ont
pas cra-int d'imrrjoler les regles reçues pour affouvir leur
reffentiment; la Loi eH venue au fecours de 11 partie injuHement opprimée, & a rendu le Juge garant des faures
qu'il a commifes par -haine, par prévention ou par autre
motif d'animofité. L'Ordonnance veut que le Juge qui faura
en lui des motifs de récuf<ltion, s'abHienne de tout jugement; cette difpofition efl: fage: elle veut auffi que ces
moyens foient propofés par la parrie; elle lui donne la
liberté de le faire en tout état de caufe, en affirmant que
les faits font venus depuis _peu à fa connoitrance. Les
caufes de récufation font la. la P'lrenré ou alliance; 2°. la _
reconnoiffance des bienfaits reçus ou à recevoir; 3 0 • la prévention ou la haine; 4°. l'intérêt perfonnel du Juge dans
la même affaire. ( titre 24 de l'Ordonnance de 1667 1
art. 7.) On y voit que le Juge fera récufable, qui aura
procès en [on nom dans une Chambre en laquelle l'une des
parties fera Juge; & enfuite 11 l'arr. 12 : n'entendons auJfi
exclure les autres moyens de fait & de droit pour lefquels un
Juge pourrait être valablement rtieuft.
Ainfi l'Ordonnance, après être entrée dans (Jn certain
détail, inglobe dans- cet article' tous les autres moyens
qui peuvent donner lieu à la récufation. De cerre difcuffion s'enfuit néceffaitement l'examen de la quefiion de favoir fi le Juge en procès avec la partie peut faire quelque aae de procédure à fan égard. L'Ordonnance n'en
parle pas à la vérité en termes exprès & formels; mais elle. le donne à entendre, lorfqu'elle met dans le nombre
des motifs de récufation la haine ou la prévention. 11 n'ell:
perfonne fans d'alite qui puiffe préfumer que les procès
âonnent de la tranquitlité daus l'efprit; l'animofité dure
�DU
PALAIS. DE
PROVENCE.
299
{auvent long-temps après le Jugement, & quelquefois même
il en eft réfulté des effets dangereux. Ce motif indique
donc tous les moyens pdr lefquels le Juge peut concevoir
de la haine; on le trouve encore dans la dénomination
générale que fait l'Ordonnance de touS les autres moyen$
de fait & de droit; & parmi les moyens de droit il n'en
cft pas de plus relevant que celui tiré de ce que la partie
eft en procès concre fon Juge. A l'article 8 du tit. 24 de
l'Ordonnance de 1667, il eft dit que l'inimitié capitale eft
préfianée, quand la partie eft en procès avec le Juge. Il ne
feroit fans doute pas raifonnahle de donner pour Juge à
uue partie celui qu'elle a elle-même pour partié dans une
autre caufe. Il eH même des Ameurs qui onc pouffé la
rigueur de cette regle plus loin, & qui ont voulu que le
Juge fe difpensât de juger durant fix mois après le jugement, les caufes de celui qui avoit plaidé contre lui, afin
de détruire & d'effacer tout motif de haine & d'animofité. Boniface, tom. l , liv. l , tir. 1, en rapporte un
Arrêr. Rodier, fur l'art. 12 du titre 14, pag. 2.86, cfl:
du même avis.
Les formalités que l'Ordonnance exige pour le civil, font
encore de plus de rigueur dans le criminel, attendu que
le Juge y jouir d'une plus grande autorité. Tous les Commentateurs, Serpil!on, Lacombe, veulem que le Juge qui
dans le civil doit déclarer les caufes de récufation, le
faffe avec plus' d'exaél:itude dans le criminel. Il eft incervenu des Arrêts qui ont cafTé des procédures, quoique les parties n'eufTent pas donné leurs motifs de récuration. Rolland intence procès à Me. Long à raifon des
différens de l'Hôpiral dont il étoit Tréforier; l'afiignation
eH donnée, le 27 Juin 1772. Me. Long propofe fa de-,
mande en rela,x; une année s'écoule, & ce n'eH que le
17 Juillet 1773 que l'Arrêt qui intervient fait droit à fon
relax. Jufqu'à cette époque Me. Long étoit en procès;
cependant le j 1 Mai Me. Portal préfente fa requête de
plainte. Le, 2 Juin Rolland préfente également la fienne ~
Pp2
�300
Jou
RNA
t
elles (ont décrétées, & l'information pri(e; le décret de
fait informé ell: donné pendant procès; la caufe d~ récufation était connue; elle exi!l:oit depuis un an entre les
parties. Le Juge ell: obligé par ,l'Ordonnance de fe récurer
toutes les fois qu'il connaît les morifs; il ne doit pas attendre que la partie les lui propofe. Me. Long avait
d'ailleurs fi bien fenti cerre nécefIité, que dans toures les
autres affaires dans le[quelles Rolland s'e!l: adrelfé à lui,
jl s'e!l: toujours fait un devoir d'abfl:enir, [oir avant, [oit
après l'intervention" du décret d'ajournement; les preuves
en font au procès.
Me. Long a prononcé lui-même fan jugement par ces
différentes abfienrions; il a reconnu qu'il ne' pouvait prendre aucune procédure, tant pendant le procès qu'après,
le jugement; il auroit dû tenir la même conduire dans
celle de Me.' I)orral ; & de ce qu'il ne l'a pas fait, n'eÜjl pas permis de préfumer que la haine & la prévention
ont éré caufe de cette démarche? La requête de plainte de
Rolland ne peut avoir été légitimée, parce qu'elle écoit
adrelfée au Tribunal qui n'était poim incompétellt, &
non à Me. Long; on ne [aurait dire que c'en: un acquie(:'
cernent de [a part; le criminel exige moins de lenteur que
le civil, & les parties ont befoin de ménager & de hârer
toutes les preuves qui peuvent rendre à ,fa jufiification.
C'étoit à Me., Long à fe fi,fpeS:er; il ne l'a pas fait, il
n'en efi que plus repréhenGble. Les Juges ne doivent jamais s'écarter de la di[poGtion de la Loi; établis pour la
faire exécuter, ils ne peuvent s'en fervir à leu!' gré, & l'accommoder à leur haine & à leur vengeance; il n'efi ja-.
mais permis d'être Juge, dès qu'on n'eH: pas convaincu
qu'on demeurera dans une exaS:e neutralité; la perfuaGon
intérieure doit régler feule les jugemens d'un Juge.
Me. ,Meriaud conclut à ce que l'appellation fùr mjfe au
néanr , & que ce dont étoit appel tînt & [orrÎt fon plein
& enrier eller, avec renvoi & amende•.
Arrêt du 18 Juillet 1775, prononcé par Mr. le Préfi-
�DU
PÂLAIS
DE
PROVENCE:.
3or'
({ent d'Albert, conforme aux conc1ulion's; Me. Long fut·
condamné aux dépens envers routes les parties. Plaidant
Mes. Gaffier & Mougins-Roquefort.
ARRÊT
XXXI.
Sur l'appel comme d'aDus de l'Qrdonnance rendue par 111:.
l'Archevêque d'EmDrun, qui é;ig-e-a une Cure amoviDle
dans la vallée de Barcelonette, avant fa réunion
la
France, & 'lui Chargea les lzaDitans, quoique de leur con[elllement, du paiemellt de la portion congrue; & de toutes
les réparations & fournitures de la nouvelle Parroiffè.
a
Es hameaux du Vernet & de Molanés éroient des dépendances de la Paroilfe de Sr. Pons lituée dans la
vallée de Barcelonerte. Cene Paroilfe aride & montueu[e
embraHè un territoire fort etendu; de ces deux hameaux
à la Paroilfe il y a une lieue en droite ligne; & lor[que
la fome des neiges, des pluyes abondantes ou guelque
orage rendent le palIage impollible ou dangereux, il faut
alonger la route d'une demi-lieue pour aller chercher le
pont le plus voifin. Une relfource li pénible ne remédiait
pas à rous les inconvéniens; il falloit Cuivre pendant près
d'une demi-lieue le torrent de Vachelac avant d'arriver au
pont de llarcelonerte ~ & le même accident qui obli"eoit
. à ce pont, rendoit en même temps ce bnoude recouflr
veau chemin ab[olument impraticable; à défaut de la route
ordinaire, il ne renoit plus que quelques [entiers e[carpés
& tortueux, entourés & coupés de précipices, hérif1es de
neige & de glace pendant la plus grande partie de l'année,
ou [ubmergés par les eaux.
Le 6 "Décembre 1697 , les habitans de ces hameaux préfenterenc à l'Archevêque d'Embrun une requête concenant
l'expoGrion de leur lituation. L'Official de Barcelonerte
commis par le Prélat [e porta [ur les lieux. Il ré[ulte de,
L
�DU
PÂLAIS
DE
PROVENCE:.
3or'
({ent d'Albert, conforme aux conc1ulion's; Me. Long fut·
condamné aux dépens envers routes les parties. Plaidant
Mes. Gaffier & Mougins-Roquefort.
ARRÊT
XXXI.
Sur l'appel comme d'aDus de l'Qrdonnance rendue par 111:.
l'Archevêque d'EmDrun, qui é;ig-e-a une Cure amoviDle
dans la vallée de Barcelonette, avant fa réunion
la
France, & 'lui Chargea les lzaDitans, quoique de leur con[elllement, du paiemellt de la portion congrue; & de toutes
les réparations & fournitures de la nouvelle Parroiffè.
a
Es hameaux du Vernet & de Molanés éroient des dépendances de la Paroilfe de Sr. Pons lituée dans la
vallée de Barcelonerte. Cene Paroilfe aride & montueu[e
embraHè un territoire fort etendu; de ces deux hameaux
à la Paroilfe il y a une lieue en droite ligne; & lor[que
la fome des neiges, des pluyes abondantes ou guelque
orage rendent le palIage impollible ou dangereux, il faut
alonger la route d'une demi-lieue pour aller chercher le
pont le plus voifin. Une relfource li pénible ne remédiait
pas à rous les inconvéniens; il falloit Cuivre pendant près
d'une demi-lieue le torrent de Vachelac avant d'arriver au
pont de llarcelonerte ~ & le même accident qui obli"eoit
. à ce pont, rendoit en même temps ce bnoude recouflr
veau chemin ab[olument impraticable; à défaut de la route
ordinaire, il ne renoit plus que quelques [entiers e[carpés
& tortueux, entourés & coupés de précipices, hérif1es de
neige & de glace pendant la plus grande partie de l'année,
ou [ubmergés par les eaux.
Le 6 "Décembre 1697 , les habitans de ces hameaux préfenterenc à l'Archevêque d'Embrun une requête concenant
l'expoGrion de leur lituation. L'Official de Barcelonerte
commis par le Prélat [e porta [ur les lieux. Il ré[ulte de,
L
�302
•
Jou
RNA L
]~ defcripti~>n qu'il en ·fir, que pendanr les deux riers de
l'.i\nn_~e, l'inrempérie des faifons, affreufe dans ces climars,
inrerceproir prefque enriéremenr cerce communicarion incerraine que les deux hameaux avoient pendant quatre' ou
cinq mois avec leur Paroiffe; il apprit par les dépolit ions
des témoins, que depuis environ vingt-cinq ans un nombre
conlidérable d'habita,ns étoit mort privé des derniers fecours de l'Eglife; que fouvent leurs cadavres même n'avpient reçu' que long remps après leur mort, & avec des
frais onéreux à leur famille, les honneurs funebres. Ces
habitans demanderent en conféquence un nouveau Pail:eur.
L~ Curé de Sr. Pons s'oppofa au démembrement de fa
Çure, & il n'y confentir enfin qu'en fe réfervant un droit
d'un écu mon noie de Piémont fur chaque chef de famille
qui viendroit à mourir, cinq fols même monnoie fur chaque autre" mort, & un quarr d'écu monnoie de ,France fur
tous les mariages; il fe réferva encore le droit d.e jouir
exclulive ment de toutes les terres,. legs pies , dons &
confrairies qui pouvoient avoir été annexés & affeél:és 11-la Paroiffe ou à la Cure de Sr. Pons en général, celui
de quête dans la nouvelle Paroiffe, fuivant l'ancien ufage,
& d'y officier en Pafl:eur, toutefois f.1ns rétribution, le
jour de la Fête. Il fut en conféquence paffé un aél:e pe
,fondation, par lequel les habirans Iè chargerenr des falaires
du nouveau Curé, & du dédommagemeur de l'ancien, des
frais de la confl:ruél:ion de l'Eglife & de ceux du fervi<::e;
on érigea une nouvelle Cure amovible, éligible fur la pré{entation des habitans, mais deftituable & dépendance de
la volonté du Prélat, qui, en vifant l'aél:e de fondation,
fpécifie toutes les conditions ci-deffus rapportées, & les
donne pour les caufes fOl,1damenrales & effenrielles de
l'éreél:ion de la nouvelle Cure.
Les habitans de Molanés & du Vernet appellerent com·
me d'abus de cerce Ordonnance. On difoit pour eux que
l'abus de l'autorité refpiroit dans les difpolirions de cet.te
Ordonnance, la vexation & la limonie dans fes conditions;
{on objet enfin, étoi,! d'une illégalité, d'une nullité évidente i.
�DU
PAtAd hE PROVENCl!~
,3°1
il blelfoit direél:emenr les Ordonnances du Royaume & la
difcipline de l'Eglife Gallicane. Pour fentir combien l'autorité a réellement abufé des temps & des perfonnes, il' n'y
a qu'à fe rappeller dans que'lIes circoof1:ances' fe t~ouv~ient
alors les habitans du Vernet & de Molanés , le befoin •effeél:ir
&: indi1penfable, Olt' ils éroient d'une nouvelle P~r'c;ilTê; ce
befoin 'réfulcoit du tableau de leur iituation qu'ils avoient
offërt au Prélat, & fur lequel il avoit reçu le témoignage
non fu/peél: de fan Official. Dans cet état des chofes, l'erec~
tion ·d'une nouvelle Cure éroit en effet un objet de néceffité~
& non de !impIe commodité pour les habitans. D'aprèS
quels principes & dans quels cas pouvoit - on leur faire
filpporter les frais & les engage mens de cene fondation;
dès qu'elle écoit abfolumene néce1f.,ire? Ici coures les Loix
de l'Eglife & de l'Etat fom claires & précifes; le peup1é
qui a deja tane donné pour s'a'lfurer les fecours fpirituels, &:
pour fubvenir, à l'entretien des Minifites .des chofes faintes~'
ne peut être obligé de prendre de nouVeau [ur fon déëeff-aire, que lorfque les richelfes' & même les relfources de
l'Eglife [Ollt epuifées. Le texte efi fur ce poini fi counu &
li vulgaire, qu'il n'eH"pas befoin de le rappeU~r. D~s que le
Prélat difpofoit dans lm cas de pure neceŒté, c"écojt donç
fur les fonds de l'Eglife, & non fur la fubfiance du peuple,
qu'il devoit prendre la dotation de l'Eglife nouvell~) fOQ
Ordonnance efi abu!ive & nulle fous ce premier rapport.
Mais fi l'on fent au prèmier inf1:anr qu~ ces difpolltions
font injufies, que peut on en dire lorfqu'oii les 'Voit 'r~pa
roÎtre làns celTe comme conditions e1fentieÜes fans I.:fquelles
il n'y eu~. ,point eu de' fond~tion, & 'Ù 'ne doit' plus
en avoir? Les 'habitans du Vernet & de Molânés n'écoient
obligés que de prouver la néceffité où ils é'toienr d~',de
mander une nouvelle PareilIè; on ne p':lllvoit conte,fief
avec ,ètix qû~ 'fur les fai,ts; la néceffité 'convenue, le droi
d'en avoir une .étoit des-lors âcquis; cependant non feulement ,on leur ~ fait 'acheter' cè droit qui écoit à' eux';
mais, comme fi on a.voit voulu les empêcher même de
réclamer concre cette vence nulle - & abufive, on à Hipulé
•
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•
. . . . . . . ,
J
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J. a 1.1 il. N A ,L
qu'ils ,ne pourraient refufer d'en payer le prix, ou le
réclamer fans perdre le droit; que ce n'ell: que parce qu'ils
l'ont acheté, qu'ils en jouiifent; on a enté une nullité fur
une autre, & fur un premier abus, un abus plus criant en·core. Le Pafteur a impofé ces conditions, & a eu intérêt
de les 'impofer comme décimateur, & a rejetté fur le
péuple un fardeau qu'il devait fupporrer à ce titre. Enfin
l'objet même de l'Ordonnance eft infeél:é d'un abus plus
{enfible & plus frappant encore, quoique moins préjudiciel
& moins funeil:e au peuple. Etablir une Cure amovible,
'c'eil: bleifer fi ouvertement les Loix de l'Etat & toures
les regles de la difcipline de l'Eglife , qu'indépendamment
des réclamations du peuple, qui fe voit ainfi livré à des
étrangers & à des mercenaires, on s'attire les reproches
de toUS les miniil:res des Loix, de tous les gardiens de
la conil:itution civile & de la hiérarchie eccléfiaHique, de
,tous les cenfeurs publics.
On répondait pour M. l'Archevêque d'Embrun, que ce
n'était pas, lui qui avait mis fur le peuple la charge accablante dont il fe plaint, puifque l'aél:e de fondation & fa
date le Jull:ifioient enciérement. On.y voit le peuple des
deux hameaux contraél:er volontairement & librement ces
mêmes, engagemens dont l'Ordonnance du Prélat, poHérieur~ de plûs de deux mois, ne comient que la ratification; il a accepté au nom de l'Eglife les dons que fan
peuple a veulu faire à l'Eglife. Ce peuple étoit libre fans
doute de rejercer fur elle qes engage mens dont il n'eil: plus
chargé.; mais, il a jugé qu'il y auroit d'autant plus de mérite à les fupport~r, qu'il y mettait plus de liberté; le
Pail:eur ne s'eH point oppofé à' la piété de fan peuple,
voilà fan feul crime. Mais il n'en a pojnr abufé; il ne l'a
point tyrannifé; le facrifice était confommé antérieurement
à fan Ordonnance, & il s'ell: fervi, en créant une nouvelle Paroiife, des fonds & des reifources que les habitans des 'deux hameaux lui avaient non feulement indiqué,
mais qu'ils avaient confacré à ce't objet deux mois auparavant. Le peuple n'ell: teni! des frais du fervice que lorfque
,
le!\
304
�DU
PALAIS
DI!
PROVENCE.
305
.les - iens de l'Eglife fpécialemenr obligée d'y fournir, foné
épuifés; mais lorfque Ile peuple veut donner" l'~glife n'dl:
point. tenue de rejener ce qu'il donne. C'eH le, defpotifme
& l'avarice des EccléÎtaHiques que les Loix ont' prétendu
refferrer & comenir; ce font les ,obligations onér~ufes au
peuple qu'on a voulu abolir; ce n'efl: point fa pieufe libéralité, ce n'eH point fa charité qu'on veut éteindre.
Comment l'Ordonnance qu'on attaque feroit - elle il1Î-uHe, oppreffive, abuuve? Elle n'a fait qu'accepter le don
du peuple, que ratifier fes difpoÎltioDs, que c onfacrer fes
engagemens. Que les deux ham'eaux fe pourvoient en refcifion de l'aél:e de fondation qu'ils Ont eux-mêmes paffé, qu'ils,
abjurent le zele de leurs ancêtres, qu'ils Je traitent d'imprudent & même d'injuHe & de téméraire; mais appeller
COmme d'abus d'une Ordonnance des difpofitions de la-,
quelle ils ont eux-rr.êmes fourni le modele dans leur aél:e
de fondation, c'eIl: appeller comme d'abus de leur propre'
fait & co-ntre eux-mêmes.
Quant à l'éreél:ion en elle-même, l'"amovibijité bk-fTe"
dit.-on, totltes les Loix;, oui, mais des Loix voiunes du
temps de l'éreél:ion,, étrangeres à cette époque à la Paroiffe pour laquelle la Cure était érigée ; des Loix qui
rappelloient en effet le véritable efprit des faints Callons ;,
mais ces Canons n'en étoient pas moins romb~s en, dé-·
fuétude ; les Conciles eux-mêmes n'avoient pas. tenu fur ce
,point un langage uniforme ni décilif. L'AfTemblée de'
,Trente, dont les Loix ad9ptées par la Savoie devoient
régir la nouvelle Paroiffe en J697 , en recommandant
l'inamovibilité des bénéfices', n'en fa ifoit pas une Loi
-expreffe & à laquelle on Re pÎlt dérog-er; la réclamation
univerfelle de tous les Princes vers le milieu du 1 dernier
fiécle prouve elle-même que l'ufage contr,aire avait pré-.
valu, & il n'y avoit à l'époque de l'Ordonnance dont il'
s'agit aucune Loi du Prince qui l'eî~ expreffément condamné & abrogé en Savoie.
Par la réunion ïl:ipulée dans le traité d'Utrech de la,
.vallée de Barcelonene à la France, l'Ordonnance de l'ArAnnéeS z 775 ç;, z776•
--Qq
�go6
1 0 u li N'.... r:
thevêque d'Embrun; Ou plutôt l'exécution de cette Otdon:.:
nance-eil:; devenue 'incompatible avec nos maximes, avec
'nos ufages; ~mais il fallait prendre l'abus fur' le fait, commè
l'exigent les Canoniil:es j préfenter, par exemple, à l'Archevêque . d'J;:mbrun' un fujet pour 'être, polJrvu en titte
-inamovible, & sl il ellt .refufé, denoncer fan refus; alors on
aurait· marché avet méthode, avec' sûreté; on aurait faifi
lIli abus réellement. exifhnt, au lieu qu'on en a voulu chercher un dans l'Ordonnance où il n'yen a point, p'uifqu'elle fe réfere à un aél:e extérieur & volontaire; puifqu'elle eil: rendue dans un temps & dans UA pays où nulle
Loi n'avoit· encore pr'ofcrit les difpofitions qu'elle énonce.
Les habitans des deux hameaux déferent à la )ufiice
'leur propre ouvrage, & prennent ainli une voie auffi ex:
-traordinaire que l'appel comme d'abus contre un aél:e dont
ils font eux-mêmes les auteurs, & dont l'Ordonnance qu'ils
attaquent n'eH que 'Ia copie. Cette- Ordonnance réformée',
ne feront-ils pas preffés & lié$ encore par leur fondation?
Au lieu qu'en v,enant par refcilion contre l'aél:e lui-même,
s'il en érait fufç,eptible, l'aél:e & l'Ordonnance qui portene
enriérement fur lui ramberoient à la fois j ils font -donc
fans intérêt & non recevables dans leur aél:ion. D'ailleurs
l'abus foncier qu'ils dénoncent & qu'ils regard~nt comme
un vice elfentiel, n'eil: réellement qu'un vice local & nouveau; & quoique l'établilfement d'une Cure amovible fe
trouve aujourd'hui abfolument contraire aux Loix de l'Eglife
& de l'Etat, l'Archevêque d'Embrun a pu dans un temps
& fous .un gouvernement qui n'avait point encore adopté
des maximes li féveres, croire fes difpolitions alfez juHifiées par .un ufage prefque univerfel.
Mr. l'Avocat-Général d'Eymar de Montmeyan examina
'deux qiJeHions : la. fi l'éreél:ion d'une Cure amovible étoit
en 1697 un abus local & particulier à la France, inconnu
fur-tout encore dans la Savoie; fi au moment de la réunion de la vallée de Barcelorierre à la France, &. depuis
lors, l'exécution de cette Ordonnance étoit devenue vicieufe
& abulive, &. fi l'abus avait pu remonter jufqu'à l'Or:'
�307
donnancp 2~. fi les conditions de'1'9rdonl)anc~ ce1fertt'P:êtce
abüG.ves; parce qu'elles [e réferent à l'aae de fondation; ce
qu'~l1: cet' aae de fondation lui-même, & ,s'il prévienttP<; em·
pêche l'abu;s.
, "
,'!. 1
Dès les prerniers'fiecles de [0[1 inl1:it4tjon, l',Eglife s'ap-·
perçut qu'un des abJus les plljs ,dangete\lx'& les p.lus funeHes
q\li s'éroie~t gliffés dans [a difcipl}ne, étoit l?auHjlvibilité des
1;>énéfices', & filr-rout des béoéfices' à charge d'ames;- ces
hénéfices foJppo[enr en effet, & établi{j:ent entre le PaHeur,
~ les Ouailles une relation do~ce, une- ..correfpg!1dance précieufe ,. une intlmit,é faCtée qoe le t~mpSr & l'a cpnfianc~ forlJleb t & entretiennent, que 1,\ religion ai intérêt de c.onferv_e~,,' qU,e l'~utorit,é ecoléfiaHique doi,t refp~a~r. !:oe 111ercenalre n'H1fplre pomt de confiance, & prend. dtfncllement les
(enrinllios d\Jn,véritable Pa Heur. Le Minifire, incertain de
[on eXIHe,nce &. de (a durée, ne s'attache point à, fon miniHere, & l'on ~raint de s'attac.he~ à,lui;,.!Lfe'mble-que l'on
expofer'oir. le peuple lui-même, à perdre du. 'refpea qu'il.il
& qu'il doit .avoir pour l'autel, .s'il Y. voyoi.t f,!ns c~ffe [acrifier des qJains étrangeres, par la modicité, & plus encore
par l'incertitude des [alaires qu'elles' reçoivent. Peu f:lit pour
s'élever julqu'aux idées fpirituelles' & pour juger des Mini[tr~s facrés, d'après l'éminence ~_la f.~b1j,miJé de ·leur caraaere, il ne l,es çonfi,dere qlje jproportionnellement à J'état
& à l'i~d~pendance dont il les voit joqir, & aux égards
que leurs fupérieur~ e~x-mêmes montrent pour.,eux.
Les Saints Conciles avoient prévu tous ces inconvéniens,.,
& vouloient les p.révenir, en faifal1t "de -l'inamovibiliçé des
~éné~c~s une loi précife, un poide effenti~l ,de difcipline.
J;.eur,) l~ngage ea uniforme [u! cet ar,ricle; t ils ne' veulens
point ·que le troupeau demeure fans Pafieur, ou marche. fous:
là garde incertaine d'un Pa1teur- qui ne le connaît point, &
q~'jl n'a pas le temps de connaître., Ils écartent de la conduite des ames, & même du fervice des amels, ces Prêtres.
Il'ercenaires que l'incertitude & l~ dépendance de leur état:
découragent & avililfent.
On ne retracera point ( continua Mr. l'Avocat-Général)
Q q 2.
DU
PALAIS
:DR
.PROVENCE.
�308
.:)
) J b..UÏ{'N A
L' .I
CJuels défordres ~lOnt~ux l!>f. fune(tes ,_quell~ c~rrnptio~,.quel]~
baiTeiTe, quel abandon du culte', 'quelmeprts du mlmHer,e;
Pabus de l'amovibilité avoit produit. L'Eglife touchoit à fa
ruine, fi elle eLIt dilf~r~ encore d~ le prévenir; fes biens,
fes.~'revèrills "déja employés u ufage étràn~er & dimine~,
êuffe!1t bientôt pa(fé' dans de~ mains étrang)res; les riches
Bénéfic ers qùi méçotlOoiffoient r~s obligations que leur poffeffion leur impofoit, n'avoient plus qu'un pas à faire pour
en méconnoÎt,re le titre; plus' he\lreufe encore fi elle avoit
été :dépounlée tout d'u'n coup par l'ufurpario~ cJe fes! enfiemis; 'c'2éfoieht fes, ~propre~ enfans qui âliénoienc, qui. dénatur'oïent~ ks richeffes, qui les tendoient lodieufes &
crim'irlel1es., & qui auroient -fini par les, lui ren9te abfolument étrangeres; elle' couroit par le défordre, par le mépris de fes propres loix, de fa propré difcipline, vers la pauvreté' & J'indigence'. Tous les Conciles tonnoient contre ce
renv~rfement de l'br re & des conH.itutions eccléliaHiq,ues,
qui mettoient 'le fen'Ice d'un côté &- les récompenfes de
J'autre, qui compromettoient la religion en e'n confiant les
imérêrs à' des Minill:res patiens, mais découragés, & l'honneur du minif!:ere en en mettant à prix, & à un prix méprifable & incertain les faimes fonérions.
.
. Mais ,l'abus ~tile a x prinélpaux me~b~es de •la. hiér~r
chie eccléfiaHique triomphait -pc toutes ces cpndaA1l1àtions,
& repouiToit ,'pout ainfi dire, de fes' propres ruines. L'e Concile de Rheims en parle comme, d'un abus déja ancien &
établi ; ~elui de Tours, comme d'u!) abus renaiffant, mal-'
gré- toûtes les barrieres 'que la fageiTe. des premiers'p,efes
de l'Eglife lui avoit oppafé; l'hommage que ce fecond Concile rend à la regle précieufe de l'inamovibilité eil: d'autant plus remarquable, qu'il fut tenu dans un de ces fiecles'
fufpeérs, où l'ambition des Papes franchiffant toures les bor-'
nes & confondant toures les Puiffances, fe ferait aifélnenc
accommodée dans le fein de l'Eglife, d'un defpotifme qu'elle
tâchoit d'établir au dehors avec les armes & les foudres ,ccc1éfiaHiques; & après avoir mél:onnu & foulé aux pieds les loi"
politiques confl:itutives des empires, effayoit d'iQJervertir & de
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PALAIS'
nll
PROVENCE:
309
faire oublier les anciennes loix, la premiere difcipline de
l'Eglife eUe-même.
On trouveroit aifément dans le recueil des aétes de tous
les aurres Conciles des difpofitions auffi rexruelles, auffi
énergiques que celles du Concile de/Rheims, & plus eUes
fe rapptocheroient de la pureré, de la ~érité des premiers
fiecles, ou de la correétion des lumieres des derniers,
plus fans doure eUes feroient précifes & décifives. On
verroit que fi quelques Miniflres avares & ambitieux ont
préféré l'amovibiliré d.ont leur orgueil & leur cupidiré profirent également, l'efprit des Minill:res de l'Eglife, réunis
& dépouil1és de tout intérêt, de toute paffion, a toujours
éré de la rejener & de la profcrire; mais on verroit peurêrre auffi que l'abus a toujours fubfill:é, a prévalu même jufqu'à un cerrain point par l'ufage, parce que ce que quelques-uns veulent pour leur inrérêt propre, eH fouvent plus fort
que ce que tous defirenr par amour du bien public feulement.
L'Affemblée de Trente femMe craindre & refpeéter méme
jufqu'à un cerrain poinr l'univerfalité de l'ufage ou de l'abus;
elle ne .proferit l'amovibiliré' qu'en général & dans les cas
où les Evêques ne la jugeront pas nécelTaire pour le plus
grand bien de 'Eglife. Il ferait inutile de dire que toures
les décilions de cette AITemblée, & notamment celles qui
dérogent, comme ceUe-ci, aux Canons des anciens Conéiles, n'ont pas été reçues en France, & n'y font d'aucune
autorité. Il s'agit ici de la Savoie qui l'a adopté, qui ('a reconnu, & chez laquelle le corps de fes décrers formait en
1697, & forme encore la derniere loi eecléliall:ique. A cerre
époque, en France les Loix civiles, l'autoriré du Prince
étoient venues. au fecours de ceUe des premiers Conciles,
que l'oubli intéreffé des' anciennes regles, & cerre dérogation apparente porrée dans une Loi étrangere au royaume,
mais connue & célebre, pouvaient & faifoient en elfet rrop
négliger. Mais en .Savoie, tout étoit alors dans l'érat
d'une défuéUlde tolérée des anciens Canons & de l'adoption ave\lgle d'une Loi nouveUe qui fembloir y déroger.
- {:e n'ell donc ni aux Loix politiques de la France, qui
"
�310
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O,U RNA L
ne l'obligeoiént pas encore fur ce point, & qui n'exillerent
pas en Savoie, ni aux Loix eccléfialliques que l'ufage & une
Loi nouvelle ~voient amolli & modifié, que l'Archevt!que
d'EmbrL1n a contrevenu. Nulle Loi ne faifoit revivre en Sa-voie la fageffe & la rigueur de l'ancienne difcipline eccléfiaHique, qui prefcrivoit l'amovibilité des bénéfices. C'ell:
ce qu'attelle l'impoflibilité d'en citer aucune. Cependant if
femble qu'on trouve dans Faber des rraces, des témoi-.
g?ages mt!me d'une Loi, finon écrire, du-moins racite &
Vivante.
Si l'amovibilité avoit éré d'un droir, ou du-moins d'un
ufage commun, un Eccléfiafiique n'eut pas pu rirer de fa
defiirution un moyen d'abus, & cette voie, vraiment extraordinaire pour lui, lui auroit éré toujours fermée; l'amovibilité autorifant indireél-emenr la defiirurion arbitraire, armanr les Pontifes d'une autorité defporique & irréformable "
l'appel comme d'abus n'eut pas été, i'ntroduit en Savoie,
ou y feroit devenu abfolument inutile. Cependant cet
appel y eH connu depuis long-temps; & entre les maîns des'
làges gardiens des Loix, il Y eH devenu, comme en France,
le fléau de l'ambition & du defpolifme ecc1ëfiaHique. Comment donc auroil-on pu laiffer un moyen indireél-, mais fÎlr
de s'y fou/traire, en continuant d'exercer par la voie, de
l'amovibilité une cenfure ou un defpotifme arbitraire. Après_
avoir rapporté plufieurs cas oll l'on peur appeller comme
d'abus, Faber parle expreffémenr, dans, (a vingt - troifieme
définition du titre de l'appel comme .d'abus, de rout ce
qui a été fait contre les Sainrs Canons, au fcandale des
laïques.
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Eil-il bien vrai que l'intention 'des peres de' )'Affemblée l
de Tr'ente ait éré de déroger fu! ~er article' à 'Ia' déciuon
des premiers Conciles, ou mt!me d'~l diminuer l'aurorité?
Ils recommandent, ils ordonnent d'abord l'inamovibilité
comme une Loi refpeél-able par fa fageffe, & précieufe par.
fôn antiquité. Il eil vrai qu'ils I~iffent enfui te au jugement,
ou plutôt à la confcience des Evt!ques, de décider fi dans
certains cas le plus grand biên' des EgEres peut exiger de~
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VEN C E:
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l'rétres âmo~ibles. Si les nouveaux décrets ont voulu permettre quelques dérogations aux anciens Canons, c'eH déja
-beaucoup, & certJinement ils n'ont pas prétendu que ces
dérogations fulfent obfcures & arbitraires. Tant qu'il fuit
la Loi commune, l'Evêque exerce une Jurifdiél:ion libre &
indépendante, & l'Eglife emiere fe repofe avec confiance
fur fa religion; mais lorfqu'il s'écarte des regles & des
-ufages ordinaires, il doit du-moins la ralfurer &-l'édifier,
en lui rendant compte de fes intentions & de fes motifs.
Il femble d'ailleurs que les décrets de l'Alfemblée de Trente
ne dérogent qu'en apparence aux anciens Canons. Cette dérogation n'eft que conditionnelle; & fi cette condition eft,
pour ainfi dire, abfurde & impoffible, la dérogation n'eHelle pas feulement apparente & fiél:ive ? Toute Loi dérogatoire à une Loi làge & utile doit être fondée fur une
fagelfe égale, fur une utilité du-moins équivalente; fi elle
n'e/r qu'abfolue, le défaut de motifs la rend fufpeél:e, ou la
foiblelfe de ceux fur lefquels elle s'app uye, doit la rendre
invalide & nulle; mais fi elle eft con ditionnelle, il faut
d'autant moins l'étendre, que les conditions qi/elle exige
font plus rares & plus contraires à la nature & à l'ordre
ordinaire des chofes;" & dès que les conditions n'exiftent
point, elle celfe elle-même d'exifter. Comment concevoir
en effet que le plus grand bien des Eglifes & des peuples
puilfe quelquefois fe trouver dans l'amovibilité des Miniftres 2 Peut-on jamais préférer à des Pretres attachés à leur
devoir par l'inClépendance & la certirude .même de leur
état, à des Pafteurs que l'habitude, le temps & la conti-l1uité de leurs fonél:ions paternelles attachent à leurs troupeaux, des Prêtres peu attentifs, peu zélés, parce que
l'avenir décourage leur zele, des Pafteurs toujours étrangers, toujours inconnus. Auffi depuis le Concile de Trente,
& dans les Etats même qui l'ont re'ru fans refiriél:ion,
l'amovibilité a-t-elle toujours été regardée comme un ufage
abufif & contraire aux véritables Loix canoniques; la réclamation univerfelle de tous les Souverains de l'Europe au
_commencement du ~ecle demie. le démontre. Peut-on peRo;
�312,
10U-RNAL.
fer qu'elle n.'ait pas été précédée par des réclamations pâl'';
ticulieres dans les Etats de chacun de fèS Souverains?
D'ailleurs il ferait difficile de prouver en fait que la Savoie a reçu le Concile de Tr~nte purelüent & fimplement;
on trouve au contraire dans Faber & dans plufienrs Auteurs
des preuves d'une réfifl:ance fage & éclairée de la part des
Souverains de ce pays. Comment auraient-ils fermé feuls les
yeux fur des entreprifes & des extenlions d'autorité contre
lefquelles tous les Princes de l'Europe fe fouleverent à cette
époque? Après avoir montré dans leurs principes & dans
leur conduite une fevmeté égale à celle des Rois de France,
d'Efpagne & de l'Empereur, ils ne durent pas [e piqueç
fans doute de plus de foumiffion, ou plurat. de plus de foihlelfe & d'aveuglement que les Rois de Naples eux-mêmes,
féudataires' du Saint Siege, qui cependant rélifl:erent toujours courageufement ·à ces prétentions;. ces nouvelles Loix
ne furent donc pas reçues dans tous les Etats, fans modification., fans relhiétion.
Ainfi il' n'efl: pas. fûr qu'en 1697' & fous la domination
du Duc de Savoie, on ne plU pas appeller comme d'abus
de l'éreétion d'une cure amovible; les Canons des anciens
Conciles, qui font la loi univerfelle de l'Eglife, y avoient
été reçus. Lès Loix civiles permettoient d'appeller com~e
d'abus de toute infraétion aux Saints Canons; les décrets
de l'Aflèmblée de Trente ne dérogeoient qu'en apparence
à ces Canons, puifqu'ils attachoiem cetle dérogation à· une
condition moralement impoffibl~; mais fuppofé même qu'il
n'y elu point d'abus dans l'Ordonnance lorfqu'elle fut rendue, n'eH-elle pas devenue abufive au moment même & Ear
le feul fait de la ré.union? .
Il efl: des ufages locaux & particuliers aux climats, an
ciel, pour ai-nfi dire, fous lequel ils fe font naturalifés, 211
caraétere & au' génie des peuples qui les adoptent & les
confervenr; le conquérant politiq~e doit les ménager.,. mais
le Souverain, qui n'acquiert de nouveaux EtalS que par la
voie pacifique & traétative. de. l'é.change ou de la réunion,
'eil: fur-tout obligé de les .tefpe&er·1' leur maintenue eft. to~·
lOU!§
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DE
PRO VEN C E.
3I:J
fours un des paél:es au moins tacite de la foumiffion des
nouveaux fujets. Mais dans tout ce qui tient au droit public, aux p incipes confiitutifs & effentiels de J'Etat, la regle
efl: fixe & invariable. COC1me ils fone, s'il efi permis de
parler ainli, la grande ame de l'EmpIre, il faut qu'elle
s'étende, qu'el e regne pH - tout, & que rous les membres de ce vacte corps, animés du même efprit, vivent de
la même vie; le projet de réunir & de rappeller toutes les
Loix, lOutes les coutumes particulieres à une feule, a tou;ours échoué jufqu'ici, & il faudroit que l'exécution en fôt
bien fàge, bien lente, bien modérée, pour n'être pas tyrannique; mais malheur à la Nation. dont le droit public
ne feroit pas uniforme; fes maximes, qui font les nerfs
de l'Etat, doivent s'étendre d'une extrêmité. du corps à
l'autre; il ne faut point qu'une partie demeure paralirique,
tandis que l'autr' lui paroîtroit & feroit en effet livrée à des
rnouvemeos convulfifs.
Parmi nous, une des maximes effentielles de l'Etat efi:
de demeurer exaél:ement arraché à l'ancienne difcipline eccléfiafiique, de rejettet les difpoGtions nouvelles qui y déragent, & notamment celles de l'Ailèmblée de Trente qui
n'y font pas entiéremene conformes. Les Loix & le Sou,verain, qui veillent ·fans ceffe fur les. entreprifes des Pon,tifes, veillent en même temps au maintien de l'autorité légitime & primirive de l'Eglife. La Vallée de Batcelonerre
dl devenue françaife en 1714; elle a pu l'être & conferver
.quelques-unes de es anciennes coutumes; elle n'a pu l'être
!5c rejetter les maximes publiques & fondamentales. Du monlent qu'elle a été réunie à la France, elle a dû refpirer
l' me & la liberté françaife; fa conftitlltion s'eft fondée &
incorporée dans la nôtre, & fes Eglifes ont dû participer
aux franchifes & aux droits des Eglifes de France. A la bonne
heure, dira-t-on; l'Achevéque d'Embrun ,l'auroit pas pu rendre, aprè.< la reunion, une Ordonnance pareille a ce7le 'lU'Oll
attaque; il faut bien même 'Il/on convienne que l'exéClJtion de
cette Ord nllallce efl dès-lors devenue ilblf!ive, mais l' bus n'a
pas dû remonter jufqu'a. l'Ordonnance j il nt: peut pas avoir
Années l77 5 & l77 6•
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un effet rétroaélif. Ce principe dl:~iJ bien certain? Et s'il etl:
iocontef1able ,comme on le penfe, qu'au moment qu'un Etat
acquiert une nouvelle Province, il lui communique les principes fondamentaux, les mal/imes conHitutives par lefquelles
il efi: régi, tout ce qui leur ell: direél:ement contraire ne
croule-t-il pas de fuite, tout ce qui les blelfe n'ef1-il pas
illégal & abulif? En fuppolànt que dans le fein de la France
il exiHât une Ordonnance Epjfcopale, portam éreél:ion d'une,
Cure amovibJe, antérieure même aux Ordonnances de Louis
XIV, qui ont profcrit pour jamais l'amovibilité, on, feroit
- fans doute fondé à appeller comme d'abus d'une pareille
Ordonnance; parce que dans tout ce qui appartient, aux Loix
publiques, rien n'empêche que leur volonté n'ait un effet
rétroaél:if, fauf le préjudice du tiers, & que quand ces Loix
ne fom qu'un retour au droit commun & naturel, le tiers
'lle pel1t jamais fe plaindre d'un préjudice réel, & qu'il puilfe
faire réparer.
La Vallée de Barcelonette efi: devenue, au moment de la
réunion, précifément une portion de la France; elle a été
parfaiteme-nt affimilée- au ref1e de la France; les Loix qui y
profcrivoient l'amovibilité des bénéfices ont été cenfées y
être promulguées alors, comme elles l'avaient dép été dans
les autres parties de l'Empire. Ces Loix font un retour aux
véritables Loix canoniques; & loin de préjudicier aux droits
légitimes de l'Archevêque d'Einbrun, elles ont fait celfer
le préjudice réel dont le peuple pouvait fe plaindre. C.omment donc efpere~t-il fe' fouHraire à leur autorité, fous prétexte qu'elle datait précifément du jour de la réunion, qu'e Iles
lle peuvent profcrire que les alnls à venir, fans pouvoir -s'étendre aux abus p-a1.fés, & que fan Ordonnance leur étoit
atuËrieure? Cependam tel eU le privilege de ce prétendu dr-oit
(l'ainelfe, que depuis plus de foixanre ans la réclamation de
nos Loix efi: inutile ,êonrr'elle. L'Archevêque, dit-on, a di[- pofè dans un temps oil [es diJPojitiolls n'émient ni abiifives ni réformahles; il falloitdepuis lors l'avertir de [e réformer lui-même,
'avant de crier la réformation & l'abus. Mais n'était-il pas
lui-même Prélat Franc;ais, même dans le temps que cette
a
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PAL AIS
D E
3l )
PRO VEN C E.
partie de fOI1 diocefe, où il exerçoit l'autorité abulive de
Prélat étranger, ne l'étoit pas? Ne l'dl-il pas encore? De- puis lors tout fon diocefe n'eH-il pas devenu Français?
Ignoroit-il 110S Loix, nos maximes, nos fages, auxquels
il ne s'étoit fouHrait jufqu'alors dans une partie de fon adminiftracion, que parce qu'il étoit fur ce point hors de leur
portée? N'a-t-il pas fu que dès ce moment elles le touchoient & !e lioient de toute part? Quoi! chacune de fes
nominations a été un abus volontaire & réflé~hi comre le.quel nos Loix murmuroiem, & les habit ans des' deux hameaux auroient pu s'élever hautement, & il ne leur aura pas
été permis de s'élever conere le principe de ces abus multipliés & progreffifs, fous prétexte que cette Ordonnance,
{ource féconde de tant d'abus, n'a pas d'abord été un abus
elle-même! Nos Loix publiques ont plus d'aél:ivité & de force;
& tel eH le bonheur des Etats qui pairent fous la domination françaife, qu'elles n'en réforment pas feulement leurs
vices & .leurs défauts, mais qu'elles remontent jufqu'à leur
caufe qu'elles anéantiirem. Donc, en fait, les habitans des
deux hameaux auroient pu, au moment même' de leur
réunion, appeller d'Une Ordonnance dont l'Archevêque d'Embrun ne fe départoit pas, & qui bleiroit toutes les Loix
fous lefque.lles· ils alloient vivre.
.
Sur la feconde queHion, Mr. l'Avocat-Général obferva qué
l'Ordonnance de l'Archevêque d'Embrun, en érigeant une
nouvelle Cure pour les hameaux du Vernet & de Molanés,
rejettoit tous les frais & toutes les charges de cette érection fur le peuple de ces hameaux. Cette Ordonnance ell:
donc abufive en ce chef, & certainement l'abus, ne fauroie
être plus univerfel ni plus inconrell:able. A parler, non fuivant les expreffions communes & reçues, mais d'après la
nature même des chofes, la propriété de l'Eglife n'ell: que
fiél:ive, & fur-toue conditionnelle; elle ne peue étre que fictive; car il feroit ditEciie de concevoir qu'une poction confidérable, ou plutôt une maire énorme des biens de la fociété, en forcît de drbie & de fait, qu'elle changeât rout
Q'Un coup & fucceffivement de nature 1 & qu'elle lui devîne
R
r 2.
�316
JOURNAL
ab[olument émngere & inutile; qu'elle fut po/Tédée contre
les regles & les conditions de la poffeffion, & tranfmife par
un ordre de [ucc ffion extraordinaire, uniquement parce qu'elle
tomberoit entre les mains d'une c1affe d'hoIT'mes qui exercent
un miniflere fpiriruel. Déja enlevés 11 la fociété par l'efprit
plus encore que par les fane ions de leur état, & n'y tenant
que par les relations ordinaires des citoyens, ils n'ont que
plus de befoin d'y être du-moins attac.hés par la relation
iJniverfelle & unique de pojJèJJèur. Ainu l'on dit que fous
ce premier point de vue, la propriété de.l'Eglife eft fic·
tive, parce qu'elle eO: cachée, polTédée. au nom de la fociété, plutôt qu'en [on propre nom. Mais elle eO: fur-tout
conditionnelle, & l'on ne peut'en difconvenir, fi l'on confidere quelle en a pu être & quelle en a été en e1Fet
l'origine.
L'Eglife, comme tous les Corps politiques, ne peut avoir
que' ce qu'on' lui a donné; elle n'a point de propriété primitive & narurelle; l'objet immédiat des dons que l'on
tait aux Corps politiques eft leur exiGence; l'objet médiat & effentiel eft leur utilité; car ils n'exiltent que parce
qu'ils [ont cenfés utiles; l'utilité dont l'Eglife eft aux hommes, quoique fpirituelle, & par conféquent ine{limable fous
ce rapport, a cependant dû être achetée par quelques facrinces'; il a fallu pourvoir à la fubfiftance décente de fes
Miniftres ; la' charité chrétienne a bien pu aller jufqu'lI la
magnificence, à la prodigalité. Songer à la pompe du culte,
après s'être occupé du foin des MiniO:res , à la bonne heure;
mais toujours l'œuvre elTentielle a dù palTer avant l'œuvre
furérogatoire, . & l'on a' pu, l'on a dû même appliquer aux
objets de néceffité ce' que la piété dés donateurs avoit deftiné -aux objets. d'un luxe religieux, parce qu'on a pu &
l'on a dù 'fuppofer qu'ils ont cru ces objets rem plis, & que
leur zele éclairé fe fetoit d'abord tourné de- ce côté, s'ils
l'eulTent cru néceffaire.
Il eO: impoffible en e1Fet de concevoir que la fociété donne
fans condition & fans objet à un ordre refpeétabJe & faint
à la- vérité, mais.' qui exilte enriérement I~ors d'elle, dès
•
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PAL AIS
D E
PRO VEN C
n:
3 r7
que cet ordre eft déja affez riche pour fubvenir à fes be-'
foins, & qu'eHe ait fait paffer fans ceffe de nouveaux biens
entre fes mains, fans qu'ils aient été cenfés applicables &
réellement affeaés à l'u ilité qu'elle en retire. A quel titre
le Clergé aurait-il reçu de la fociété, à quel titre pofféderoit-il? Il n'eH pas de l'effence de la fociété; il n'en
e[t pas une portion primitive & naturelle, il n'encre poin~
dans l'ordre,ordinaire de fa conHitution; il poffede donc
par un titre précis & particulier; ce titre eH fan utilité;
( L'on parle ici politiquement & humainemenr. ) Donc fes
biens fonr fpécialemenc affeGl:és à fan utilité, qui eH le titre
par lequel il les p6ffede. Ces principes font tous tirés du
droit naturel & politique; ils n'avaient pas befoin d'être
adoptés par le droit commun & par l'ufage, pour devenir
la Loi effentielle & fondamentale de tous les Etats. S'il,
était néceffaire d'en prouver l'application particuliere à la
conHitution & au Gouvernement de la Savoie, l'on trouverait cette preuve dans Faber, lib. l, tit. 3 de Epifcopis fj
Clericis, déf. 23..
Comment feroit-il poffible que l'Eglife, toujours gouvernée par l'efprit de fageffe & de vérité, eût méconnu
J'autoriré de ces principes, ou eût prétendu s'y foull:raire
en jugeant dans fa propre caufe, & dénaturant ou méconnoiffant le titre primitif ck la propriéré? Auffi tel n'a point
été l'efprit des Saints Conciles: & fi quelques Canons portent que le peuple pourra être impofé pour la dotation d'une'
Eglife nouvelle, c'eH fans dame dans le cas favorable d'une
dill:inél: on célebre adoptée par tous les Canonill:es, & autarifée par les mêmes Conciles. Si ce n'eft.que pour la facilité du fen'ice ou l'agrémen~ & la commodité du peuple
qu'on érige une nouvelle Paraiffe, le décimateur ne peut
être contrainr à la doter; car outre que ces. motifs affez arbitraires & difficiles à vérifier, pourraient' aifément être
élevés contre un décimateur haï & qu'on v~udroit vexer,
on ne peut érendre, même pour fa plus grande utilité, les
obligations d'aurrui, & celles du décimareur fe bornent au
fervice néceiT.lire & indifpenf.lble; d'ailleurs il y a encore
�'3 18
JOURNAL
pour 'l'en difpenfer une raifon d'équité générale; c'ell: que
le revenu qu'on lui réferve pourra êrre néce1faire & appliqué dans la fuite au cas d'une éreél:ion de 'néceffiré & de
rigueur; mais lorfqu'il s'agit de cerre feconde efpece, nul
doure, nulle incertitude, d'après les principes que l'on vient
d'établir, & l'on ne croit pas que les décilions contraires
.(les Conciles s'étendent jufqu'à elle & lui foient applicables.
L'Atremblée de Trente, a-t-on dir, ( & il ne faut pas ou~
bEer quelle était la Loi que l'Archevêque d'Embrun pou":
voit fuivre en 1697 ) Jaitre aux Evêques le choix de procéder dans les nouvelles éreél:ions, ou par union des bénéfices, ou par impofition fur le peuple; il a cité le texte lIvec
fa noble lincérité, mais il paroît l'avoir mal appliqué ou mal
entendu. Certainement ce choix, out(e qu'il déragerait, comme. on l'a déja fait voir, au droit naturel, n'en feroit prefque jamais un; l'alternative feroit prefque illuroire, & l'on
ferait bien éloigné de croire que certe Loi, fi elle était
ainli conçue, mt obligatoire même en Savoie; parce qu'enfin
il eft de grands principes qui font de taus les pays & de
tous les Gouvernemens: mais elle eH plus fage & plus
prudente; ce n'eH que lorfgu'on a éprouvé que les dîmes
ou les revenus eccléfiaHigues locaux font infuffifans, qu'elle
ordonne d'avoir recours à l'union des bénéfices; ce n'eH
que lorfgue l'union fera impoffible, qu'elle permet d'impofer
le peuple. En France on a éré plus réfervé encore, & le
"Légiflateur a ,,:oulu avec raifon que fa Loi concourant en pareil ca!; avec les Ordonnances eccléliafiiques, fervît de témoignage public & non fufpeél: du défaut abfolu de toutes
les reffources· de l'Eglire & de la néceffité indifpenfable
d'une ill)pofition que fon autorité feule peut rendre légale
& obligarolre. En Italie, il faut que les dîmes & les revenus locaux de la Paroiffe foient infuffifans pour la dotation de l'Eglife nouvelle; & l'Archevêgue d'Embrun, au lieu
de les épuifer dans cet emploi, n'a fongé qu'à les mettre à
couvert & en réferve; il faut que l'union des bénéfices foic
impoffible; & loin de faire conHer de l'impoffibilité & du
.Iéfaut de cette reffource locale, il paroît que le Prélat n'a
•
�DU
PAL AIS
DE
PRO VEN CE;
31'?
pas meme fongé à y recourir. L'Ordonnance qu'on attaque
a donc contrevenu aux Saints Canol1$, à la Loi mc!me, fur
l'interprétation de laquelle on a voulu la jull:ifier ; & toutes
ces Loix lui eulTent - elles été favorables, n'aurojenc pas
couvert fa contravention au droie naturel, au d)'Qit COl:Ill)Jun.:
Mr.l'Avocat-Général Dbferva enfuite, que lorCque le peUlpte demande une nom'elle Paroiife fans nécefiité réeHe,.
fans befoin preffant, il veut prévenir les diflicùltés & les
obHacles que le décimateur pourroit légitimément lui op-,
pofer, en fe chargeaut par atte exprès des frais & des dépenfes; fon obligation.eil: alors valable: mais lonque le ,be..'
foin d'une nouvelle Paroilfe ell: prouvé, iODfque la- néceffité
où l'on eil: d'en ériger une, ell: évidente & fenfible, il faul:
convenir que cette fondation p3roît moins favorable; elle
le feroit plus, fi elle étoit l'ouvrage d'un peuple riche, &
s'il avoit voulu prévenir par-là les réclamations & les plaiotes
d'un Bénéficier peu riche, &J que Iii cQn(huétiqn <& l'entre".
tien d'une nouvelle ParoilTe auroient achevé. de dipouiller.
fI elle avoit précédé de plùfieurs anuées l'érettioD de la .Il.OUvelle Cure; fi cette érettion n'avoit pas été conteaée, ou
fi elle ne l'avoit été que par des obje6lions fol ides contre
fon utilité, contre fa nécefiité; fi la fondation a'voJÎt .été 1
faite dans un temps non. fufpeél:, & non feulement avant
l'érettion, mais avant les con'tell:atjoms qu'elle avoit fait
naître & les difficultés qu'elle. aV0Ît éprouvées; fi celu1 de
qui dépendoit l'éreél:ion n'avoü pas ex'primé uo vœu cootraire par fes tergiverfations & fa lenteur; fi la fondation
n'étoit pas en fa faveur & ne l'exemptoit pas des charges
qui devoient naturellement retomber fur lui; s'il ne paroif.
foit pas que ce motif feul avoit décidé fon changement de'
conduite & fon acquiefcement à la demande des habitans
des deux hameaux; demande cependant d'une juŒice incontenable, & à laquelle, fuivaot toutes les Loix & les Ca.
nons, il ne pou voit lè reftlfer.
'
Ici au contraire rom es les préComptions, toutes les raifons fe réuni1fent contre l'Ordonnance de l'Archevêque
�'3"2<:>
Jou RNA L
d'Embrun, & l'aéèe de fondation fur lequel elle s'appuye.
La néceffiié d' Jne .nouvelle ParoilTe dans les deux hameaux
.efl: prouvée felon ·toutes les 1 egles & d'après cous les mo,tifs fpécifiés par les Saints Canons, conHatée par la pro<édure de l'O.fficial, du Prélat lui-même, & elle n'a jamais
-été conteŒée: C'el!:. cependanr un peuple. pauvre & indigent qu'on' pretend s'être fournis de lui-même à des charges onéreufes 'dans 'un' cas extrêmement favorable, &. où
toutes les Loix civiles & eccléllaHiques l'en déclaraient
~xempt. Cette fondation eH faite peu de temps avant l'érec-tion, & f1v<fnt urie' éreéèion foiblemenr conteHée. L'Archevêque d'Einbrun ne peut 'nier qu'il m'ait contefié J'éreéèion
'd'une nouvelle Cure, ou du-moins qu'il n'ait cherché à en
éluder la demande; des faits conftatés par des pie ces qu'il
n'a pu défavouer le prouvenr évidemment.
Il faut, pour qu'un Evêque puilTe prononcer fur un objet
contenrieux, ou qu'il n':)' ait '~ucun intérêt perfonnel, ou que
cet intérêt ait celTé avant fon 'jugement, réellement & d'une'
·maniere non fufpeél:e. Mre. de Genlis, Archevêque d'Embrun, a'voit rejetté fur le peuple, fans raifons & fans motifs, les charges de la nouvelle éreéèion qu'il aurait dû fupporter lui-même comme décimateur; fan Ordonnance eO:
donc abufive en ce chef. Ell: - ce en effet un trait d'une
piété bien fage & bien éclairée que de décharger gratuitement le décimateur de fes obligations pour les impofer
{ur le peuple, que de rejetter fur le pauvre la' charge du riche?
La convenrioti que les h.~bitans pafIerent avec le Curé .de
St. Pons le jour même que l'Ordonnance de l'Archevêque
d'Embrun fut rendue, & dans laquelle ils acheterent fi cher
de ce Curé fon déllHement à une oppofition réellement
illufoire & inutile, dl: également vicieufe &' inouie•
. Mr. l'Avocat-Général conclut à ce qu'il fllt dit Y avoir
abus dans l'Ordonnance. de l'Archevêque d'Embrun, aux
chefs qui déclaraient amovible la Cure érigée dans les quar_
tiers du Vernet & de' Molanés, & qui chargerenr les hapi ans des mêmes lieux du paiement de la portion congrue,
§i;
�D U
PAL AIS
D Il
PRO V B N C B.
32.t
& indifrinaement de toutes les réparations & fournitures de
la Paroiife.
_
Arrêt du 8 Février 1776, prononcé par Ml'. le Préfident de St. Vincent, conforme aux conc1ufions; M. l'Archevêque d'Embrun fut condamné aux dépens envers coutes les
parties. Plaidant Mes. Laget, Simeon & Gaffier.
ARRÊT
XXXII.
Le mmeur dl rdlitué envers l'acceptation d'une lettre de
change tirée fur lui par un mineur, lorfque le défaut de
formalités, ou des préfomptions légales font craindre que le
tireur ne puiffe lui-même être reflitué.
L
E 29 AOÛt 177 0 , le Marquis de Bargeme, encore mineur, préfenta requête au Lieutenant de Draguignan, &
demanda la permiffion de payer à [es freres, adE mineurs,
leurs droits maternels·; le Lieutenant ordonna un foit-montré
à partie, & fur le c<;>nfentement des freres, il intervint un
décret de permiffion. Après la fixation qui fut faite de ces
droits, ,le Chevalier de Tournon, un des freres, tira, en
faveur d'Ifaac- Ber, Négociant Juif de la ville de Nanci,
une lettre de change de 3000 liv. fur le Marquis de Bargeme, pour valeur reçue comptant; cerre lettre lui fut préfentée, & par lui acceptée; mais au terme du paiement, le
Marquis de Bargeme répondit qu'il écoit prêt à en compter
le montant, pourvu que l'on fe rendît garant de la valid.ité
des paiemens. Ifaac Ber refuGl la condition, & fit prctefier
la lettre de change. Le Marquis de Bargeme prit alors des
lettres de refcilion envers fon acceptation, fondée fur fa minorité & fur celle de fes [reres, & demanda le déboutement de la demande de Ber, fi mieux il n'aimoit donner
bonne & fuffifaoce caution en recevaut le montant de la
ieme. Le Lieutenant de Draguignan par fa Sentence fit droie
Années 1775 & l77 6 •
Ss
-
�31t
JOUltNAL
âux lettres èe refciIion, avec dépens. Appel de la part de
Ber.
. On diroit pour lui, que le mÎneur a la libre difpoIition
de fes revenus,. f,lOs qu'il ait befoin d'être affiHé de fOli
curateur, ni aurorifé par la JuHice, lorfqu'il en difpofe. TI
peut les exiger, les céder, & même les diffiper, fans efpoir
de reflirution. La Loi Sancimus, coJ. de adminiJlr. tulor. vel
cm·al. efl: expreffe; & telles, font nos m'aximes, i:mefl:ées par
Boniface, rom. r, liv. 4, tit. 6, chap. ).
La maxime qui défere au mineur la libre difpoIition de
fes revenus, fuffit pour mettre le titre de Ber à l'abri de
route atteinte, tant vis-à-vis le Chevalier de Tournon, que
vis-à-vis le Marquis de Bargeme. Celui-ci avoit en main, non
. feulement le fonds des droits maternels appartenans au Chevalier de Tournon fon frere, defquels il fupporroit les intérêts,
mais encoce il étOit débireur envers lui d'une penIion annuelle & viagere de 1000 liv. à lui léguée par fon pere,
ce qui formoit un revenu d'unvlron 1) 00 Iiv. donc le Marquis de B-argeme éroit nanti. Cette penllon viagere éroit
éclllIe,à l'époque de la lettre de change tirée par le Chevalier de Tournon, & acceptée par le Marquis de Bargeme.
Cette lettre ~e change ne dit pas que les 3000 liv. duffenr
êcre prires plutôt fur les fonds que fur les revenus. Il y efl:
dit fimplement que le Marquis de B-argeme la paflèra en
compte à fon frere. Rien n'émpêchoit donc ni ne pouvoit
empêcher le Marquis de Bargeme de faire l'application de
cette lettre de change, & de s'en payer fur les revenus du
Chevalier de Tournon échus & à écheoir, s'il croit que
fon frere ne pouvait pas difpo[er de [es fonds. Son acceptation ne 'peut pas avoir été faite en nin, dès qu'il avait
en main de quoi la remplir, fans fe porrer aucun préjudice.
Delà il ne dépendroit même pas du Marquis de Bargeme
de dire qu'il veut appliquer la letrre de change tirée fur lui,
& par lui acceptée, fur les fonds qu'il avoir en main apparcenans·à fan frere, -à l'effet de rendre l'obligation invalable,
�DU
PAL .U S
D E
32.3'
PRO VEN C ll.
fous prétexte que c'elui-ci était mineur; parce qu'ayant en
main les revenus de [on frere comme' les fonds, & ayant
a<:cepré purement & fimplement une lettre de change,
pour en paIrer la valeur dans [es comptes vis-à-vis de [on
frere, il faut nécelfairemenc que l'application s'en faIre [ur
les [ommes donc fon frere a pu valablement di[po[er, dès
qu'il s'en trouve de cette e[pece, & non [ur celles donc,
[uivant [on [yHême, [on frere n'auroit pas la libre di[pofition : car c'eft un des premiers principes, que j'on doit
toujours préfërer l'interprétation qui tend à [outenir l'aél:e,
à celle qui tendrait à le détruire, comme· l'établit Dumoulin [ur la coutume de Paris, tit. des Fiefs, §. l, glof. l,
n. 31. .
_
Le paiement d'un [art principal fait au mineur [ans l'affifiance de [on curareu-r
bon & valable, à moins qu'il
n'ait diffipé les deniers; relle efi la di(pofition de la Loi
27 , §. l , ff. de minaI'. Delà fuivant la jurifprudeuoe la plus
confiante, tour ce qui peut arriver de pis au créancier qui
a prêté de l'argent à un mineur ou au débiteur qui s'el!:
libéré envers lui, [ans l'affifiance de fan curateur & [ans
autorité de Jultiee, c'efi qu'on le [ou mette à jufiifier d'un
bon emploi, avant qu'aucun Juge puilfe ané~ntir [on titre,
L'acceptation faite par le Marquis de Bargeme ne pourrait
être nulle que dans le cas où l'obligatjoQ. contraél:ée par
fan frere envers Ber [eroit vicieu[e, étant d'ailleurs certain que l'acceptation de la ceffion opere novation, qu'elle
engendre une obligation perfonnelle, & que dans rous
le cas elle aurait vis-à-vis d'un majeur la force d'un cautionnement.
Le Chevalier de Tournon étoit à Nancy, lorfqu'il cern,..
prunta 3000 liv. de Ber. Les fournitures faites [oit à un
mineur, [oit à lin fils de famille qui efi expatrié, formene
un titre valable, dès qu'elles n'excedent pas legitimum madum,
& qu'elles font jultes & nécelfaires, parce que c'el!: remplir
un devoir naturel que de fecourir un étranger. La Loi rend
les parens refponfables des fournitures oécelfaires f:1ites à
leurs ,enfans, lors mc:me qu'elles pnt été faites' [ans leur
ea
Ss
2.
�32'1'
Jou
RNA L
con(entement. Cette regle fage qui tient 11 l'incérêt pu:'
blic , a été confacrée par plulieurs Arrêts, & notamment
par celui qui fut rendu le 22 Mai 1764 au rapport de Mr.
de Franc, en faveur de Crefp de la ville de Gralfe, contre
Chautard, qui fllt condamné à rembourfer la fomme d'environ soo liv. que Crefp avoit' fourni à fan fils étant à
Paris, pour furvenir à" fa nourriture & à fan 'entretien,
quoique Chautard foutint que fon fils éroit un dilIipateur.
Ici le prêt de 3000 liv. a été fait au Chev<ll'ier de
Tournon pour caufe jufie & nécelf<lire; il éroit éloigné
de Ca famille, fans relfource- & fans fecours, puifqu'il
n'éroit pas même payé de Ces penlions ,échues. ,II f~lloit
qu'il etÎt de quoi Ce nourrir & s'entretenir; 3000 li\'~'n'é
toient pas une fomme exceffive, eu égard à Con état, à
fan eKpatriation & aux circonfl:ances dans lefquelles il fe
trouvait; l'emploi de cerre modique fomme ne pouvoit
qu'être I~gitime- & indifpenCable. Le Marquis de Bargeme
qui avoit en main les fonds & les revenus de fan frere,
arrefl:a lui-même cette vérité, & s'en rendit garant, en
acceptant la lettre de change tirée fur lui.
Qu'importe donc que le Marquis de Bargeme ne fôt
figé que de vingt - quatre ans, 10rCqu'il approuva j ratifia
& adopta l'engagement de fan frere expatrié, des fonds
& des revenus dont il étoit nanti? S'il avoit fecouru fon
frere de fon propre bien, il ne feroit pas refiituable; à
plus force raiCon ne l'efl:-il pas, dès qu'il n'a fait qu'accepter l1l1 mandat que fan frere a tiré fur lui, pour lui
palfer en compte ce qu'il pa.yeroit à fon mandataire. Ce
mandataire n'a pas eu befoin de fuivre l'emploi de fan argent, dès que le Marquis de Bargeme l'alfuroit par fan
acceptation' que l'emploi étoit légitime, & qu'il érait approuvé par la famille.
'
Si l'on pouvait fuppofer que lor(qu~ le MarqUis de Bargeme accepta la lettre de change , il avait réellement
compté au Chevalier de Tournon ·une grande parcie de
fes draies maternels, & qu'il avoit connoilfance de fes
prétendues diffipations, il n'en feroit que plus condam-
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DE
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0 V B NeE.
31f
bable , puifqu'il auroit trompé Ber, en lui 'p<'rfu"adant par
fan acceptarion, que l'avance qu'il faifoit à fan frere de·
3 000 liv. avait une légitime deflination, & il f<'roit refponfable de fan dol vis-à-vis un étranger qui aurait fuivi
fa foi.
Le paiement fait au mineur enfuire d'un décr ~ du !"uge
dl: légi(ime, & met le créancier qui a prêté, ou le d~
biteur qui a payé, à l'abri de coure recherche. La Loi
fancùnus ne fauroit être plus exprelfe fur ce poim. Le Marquis de Bargeme a été autorifé par la Jul!:ice à fe libérer
envers fes freres de leurs droits maternels, & fes- freres
ont pareillement été autorifés à recevoir leur paiement. Ils
ont tranligé en conféquence affil!:és de leur curateur, & la
tranfaaion qu'ils one paflée a été exécutée vis-à-vis du
tiers, ce qui fufEt pour la rendre inviolable, d'aurant
mieux qu'elle n'el!: pas même anaquée.
.
, -Il eft certain & convenu que le paiement fait "au mineur fans l'affil!:ance de fon curateur & fans le mjnil!:ere
du Juge el!: bon & valable, pourvu qu'il. apparoilfe d'un
bon emploi des deniers. Il feroit donc fort inutile de recourir au Juge, fi malgré· fon imervention le débiteur demeuroit chargé de fuivre les deniers & de· jul!:ifier le bon
emploi. Au furplus, .quand même le déaet' du Lieutenant
feroit nul, ce ne feroit jamais. comre Ber que l'on pourrait fe prévaloir de Cene prétendue nullité, parce que ce
n'eft pas lui qui l'a fait rendre. "
On répondait pour le Marquis de Bargeme, qu'il faifoit
verfer la mefure à Ber, en fe foumenant à lui payer la
lenre de change moyennant caurion. La demande d'Un
cautionnement au porreur d'une lettre de change fera, fi
l'on veut, extraordinaire, lorfque l'on fera réellement débiteur de celui qui l'a tirée, & que l'on n'aura à craindre
aucune recherche; mais elle fera toujours regardée comme
.un trait de fagelfe, I?rfqu'il fera que~ion de payer pour
un' mineur dont le derangemene connu prouve d'avance le
mauvais emploi de l'argent que le porreur de la lettre lui a
remis, & fur-tout lorique ce porreur eft en coutume de
�326
J 0" U Il., N A L
s'avantager. S'il fàut en croire le Chevalier de Tournbb 1
il ~'a re~u de Ber qùe i800 IiI'. Si Ber était affuré que
le ChevaIrer de Tournon ne ,démentirait jamais [on ,obligation, il ne, rifquoit rien d'offrir la caurion que le Marquis de Bargeme lui demandait; & s'il a refufé ce cautionnement parc'è qu'il n'y avoie aucune sûreté pour lui dans
l'obliglltion q'ue le Chevalier de Tournon avait contraété
en fa fa~eu'r, il, était jufie que le Marquis de Bargeme
révoquât fan acceptation, pour ne pa~ s'expofer au même
danger que, Ber voulait éviter.
La lettre d~ change du 27 Novembre I770 prouve que
les ]000 IiI', furem re~ues pat leChevalier de Tourpon, dans.
le temps qu'il tira la letrre de change fllr le Marquis de
Barge'me; l'acceptation fut donc poG:érieure au paiement;
iJ eil: donc faux que Ber ait livré fon argent fur la foi
de cette acceptation.
Dans les principes,. généJi'aux, les mineurs font touJours
relevés" ,Iorfque pat; .f-oibJeffe ou 1par imprudence ils -font
léfés dans les ·a6l:és qu'·ils paffè nt. Tel efi le vœu de
touteS les Loix,; Ber en 'convient, dans le temps méme
qu'il ,cite une .foule de Loix pour prouver que les mineurs
ne font pas refiitués, q'uoique léfés, lorfqu'ils n'oot été
Hi furpris, ni trompés, & qu'ils ont agi fuivanc les 'regles
du droit commun, & à l'exemple des bons peres de famiJle~ ,Mais en 'adoprant ces exceptions, on dema.nde' à
Ber ft c'eil: par cas fortuit ou par fpn imprudence qu'un
mineur eil: léfé, lorfqu'il promet payer les fommes empruntées par un aurre mineur fans l'affifiançe d'un curateur,
fans qu\l.paroiJ[e d'llD ,emploi légitime, & da'ns des" ciorconfiances qui Ebnt JPréfumer que l'emprunteur en 'fera
mauvais ufilge, On Ipeut voi~ à ce fujet la Loi 48, if. de
fidejuJfà,.; DefpeiJfes, tom.
n. 6, fol. ') 97; Boniface,
tom. l , IiI'. '4, t,je. 8, ch. 2., pag. '326; le Journal des
Audiencès, l'Atfêt ,du 3q JpiQ, J70'L" & Savary, tom.
parere :l.IIl.' lln mineur)le Peutt pas s'obliger de payer la
de'[ te d'alltru\, &' eItcore moins 1 celle d'un aotre. mineur 1
IOJfque cellti-ci efl; lui-même.JJiu cas de la faire refc;inder,
I,·
2,
�DU
PALAIS
DB
PROVENCE.
327
pour' avoir emprumé fans l'affifrance d'un curateur, & d~ns
un temps où il fe livrait à taure forte de 'diffipations. La
Loi 12., §. fi adolefcens, If. mandati, décide même qu'un
pareil créancier n'en mérire pas le nom, ou que du-moins
il doit être regardé comme un créancier de mauvaife foi,
aina que l'obferve Buiffon dans fan code au titre fi adversùs creditorem. Delà le mineur qui, en acceptant une
lettre de change, s'oblige de payer pour le' tireur qui eft
mineur lui-même, une fomme qu'il a emptuntée pour la
diffiper, bien loin de fe conformer aux regles du droit
commun & à la pratique d'un bon pere de famille, fe
trouve léfé par [a propte fadlité & par la fOibleffe attachée à fan âge.
' J
L'acceptation' & le pàiement de la lett,re de change ne
pourraient êrre envifagés comme une nue execution du
décret du Lieutenant & de la -tranlaB:ion, qu'autam que
le Chevalier de Tournon aurait été affifl:é d'un curateur
10rf'1u'il fit à Ber la lettre de change de 3000 liv. qu'il
déclara avoir reçues; & c'eft précifément parce que cette
formalité manque, que te Marquis de Bargeme n'a jamais pu être obligé de payer ce qu'il ne devait acquitrer
au Cheyalier de Tournon fan frere que fous l'aurotifation de fon curateur. Bien plus, fuivam la remarque de
Serres en fes inftitucions au droit français, liv. 2., rit.
pag. 20 l , au lieu d'une Ordonnance du premier Juge;
on doit pour plus grande sûreté obtenir un' Arrêt qui permette le paiement.
On voit par-là que le Chevalier de Tournan, qui peut
revenir comre l'obligaJÎon qu')l ,a contraB:ée envers Ber
dans les dix années, à comp'ter du jour de ra majorité,
n'écoit obligé de faire ,des démarches à ce fujet que dans
le cas où Ber l'auroit appel1é en garantie enfuite des lettres royaux impétrées par le Marquis de Bargeme. Pourquoi Ber n'a-t-il pas eu recours à cette voie, depuis furtout que le Chevalier de TournoQ eft majeur, fi ce n'ell:
parce qu'il craint qu'il ne lui opporé les mêmes el'ceptions que le Marquis de Bargeme -fait valoir?
8;
"
�JU
328
U RNA L
En droit ~ le mineur qui a cautionné un prét, eH rell:irué, quoique le cautionnemenr ait engag~ le prêteur ~
comprer fon argent, & que par-là les choCes ne foient plus
dans leur entier; & fuivant la nouvelle jurifprudence ar-·
tell:ée par Brodeau filr Louer , I~rr. M, ch. 7, n. 4, par
le Praricien français, parr. l ; liv. 4, ch. 2 l , par Argou,
dans fes infiirutions au droir français, liv. l , ch. 7, ~
par Buiifon fur le rirre du code ji min. ft maj. dixer. Un
mineur qui s'ell déclaré majeur, eH reHiruable envers les
obligarions qu'il a conrraél:ées, ainli & de la même maniere qu'il le ferair, s'il" s'éroir déclaré mineur. Auffi Bel;
eH têllement convaincu que (es objeél:ions· ne font pas
propofables, qu'il revient encore à· fourenir que celui qui
paye enfuire d'un mandar e1l à l'abri de toute recherche,
quoique le mandant mineur imperre rell:iturion envers le
tirre de fon obligation. Duperier exige que le débiteur
cédé faife le paiement de bonne foi au ceffionnaire, c'eH~
à-dire dans un temps où il avait lieu de croire qu'il était
légitime créancier du mineur; & le Préiident Fab~r ,.00nobHaht l'Arrêt du Sénar de Chambery, eH d'avis que
le mineur a fon recours contre le ceffionnaire & le débiteur cédé: ima potiùs contra utrumCJue jimu/.
Arrêr du 8 Février 1776, au rapporr de Mr. le Çonfeiller· de Fonfcolombe, qui confirme la Sentence avec
renvoi , amende & dépens. Ecrivant ·Mes. Pochet &
Lager.
.
AR RÊ T .XXXiII.
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Un Chirurgien navigant efl juJliciaMe des Juges- Confuls à
. raifon- des billets par llli fol!fèr{ts yale ur reçue en mar..,
chao'difes. .
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'JOlèph FouganÎere '. Chirurgien navigant de la yil\e de
Marfeille, foufcrivit en- faveur d'lcard, Marchand Par.,
fumeur
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PALAIS
D·E
PROVENCE.
319
fumeur de la même ville, un billet à ordre de la (omme
de 324 liv. 1) (vale!Jr reçue en marchandifes. Fouganiere
fut a/Iigné pardevant les Juges-Con(uls en condamnation
du montant. Sentence qui le condamne; appel de Fouganiere pardevant la Cour, & 'requête en furféance ; décret
de renvoi en jugement.
On difoit pour Fouganiere, que cette Sentence était
incompétente & contraire à l'Ordonnance, qui .veut que les·
Juges-Confuls ne connoitfent que des billets à ordre patfés
entre Marc~ands & Négocians, & non point encre particuliers non Négocians. La qualité de Chirurgien navigant
ne fauroit être attributive de cette Jurifdiél:ion; ce titre ne
peut faire regarder celui qui le porte comme Négociant;
les liqueurs que Fouganiere a achetées n'ont point été revendues; on ne fauroit donner des preuves de leur defiination. D'ailleurs le fait flu-il vrai, cet aéle feul & ilolé
de commerce ne pourroit le faire regarder comme Négociant, à l'effet de le foumettre à la Jurifdiétion confu!aire.
La doétrine de Stracha dans fon traité de mercaturâ eft
précife fur ce point. Suivant cet Auteur, una mercatura non
facit mercalorem, fed profeJJio & exercitium. Rebuffe en: du
même avis, & l'Arrêt rendu le 18 lYlai 1771 a confirmé
cette maxime, & a décidé que l'on ne pouvoit être "réputé Négociant que par une fucceffion d'aétes de 'commerce.
En vain objeél:eroit - on à Fouganiere qu'il a comparu
pardevant les Juges-Conluls, & qu'il n'a propofé aucun déclinatoire; cette fin de non recevoir ne peut influer fur
la déci[Jon de cette caufe. En matiere de compétence,
les acquiefcemens des parties ne font point attributifs
de Jurifdiétion; elles font toujours re~ues à en appeller.
On répondoit pour Sicard, que l'appel de Fouganiere était
cout à la fois non recevab!e & mal fondé. Non recevabi e ~
la Semence a été ren0ue en contradiétoires défenfes; elle a
été rendue fauf le d 'lai de trois mois; cette prononciation
fe fdit ordîn.irement du confentement des parties; c'en:
pour' donner le temps au c"ondamné de fatisfaire dans ce
Annies 1775 & 177 6•
Tt
�330
JOURNAL
délai à fes engage mens ; aucun aéclinatoire n'a été propofé,
& on n'ell: plus reçu à fe plaindre d'un confentement donné
avec connoiiTance de caufe. Il eH mal fondé: les Juges-Confuis pouvoient conno/tre de la conteHation des parties; la
nature du billet, la qualité de Fouganiere le rendoient jufticiable de cette Jurifdiétion. Il ell: de notoriété publique à
Marfeille, que les Chirurgiens navigans embarquent tous
quelque pacotille, & qu'ils comptent plus fur le produit qu'ils
en retireront, que fur les gages qui leur font defiinés. Ce
fait eH· atteHé par le certificat qu'en ont donné toUS les
Capitaines de vaiiTeau. Fouganiere a acheté pour 324 liv.
d.e liqueurs; on ne peut pas dire que ce fût pour fon ufage,
ce né pouvoit être que pour les revendre, en faire un commerce, & cet aéte de commerce l'a rendu juHiciabJe des
Juges-Confuls. La maxime établie par Stracha eH détruite
par cet Auteur lui-même; il· veut une continuité d'aétes de
commerce pour celui dont l'état & la profeffion ne fera
point inlèrite dans le regifire des Marchands; ce font les
aétes qui le déterminent; mais dès que ce particulier par
le titre eH réputé Négociant, dès-lors cette continuité d'aétes
de commerce devient inutile; un feul le rend fournis à la
Jurifdiétion Confulaire.
Me. Meriaud, SubHitut, obferva que pour décider de la
compétence des Juges-Confuls, il .falloit examiner fi Fou.ganiere étoit Négociant, & fi le billet à ordre procédoit
d'un fait mercantille. Fouganiere étoit Chirurgien navigant
par fa qualité; c'efl: un titre qu'on ne peut contefier. Le
certificat produit au procès, & {igné par plufieurs Capitaines'
de vaiiTeau, prouvoit que les Chirurgiens navigans embarquent d'ordinaire quelques pacotilles pour leur compte, qu'ils
revendent enfuite à l'endroit de -leur defl:ination. Le billet
foufcrit en faveur de Sicard prouve que ce font des liqueurs
qu'il ache te pour une fomme aiTez confidérable. On préfumeroit difficilement qu'un particulier achetât une auffi
grande quantité de liqueurs pour fon ufage.
Sicard réclame le paiement d'un billet foufcrit par un
Chirurgien. navigant en fav.eur d'un Marchand, pour raifon
-
./
�PRO VEN C E.
33 l
de marchandifes; on ne peut difconvenir que les marchandifes n'aient été achetées, à l'effet de les revendre, & que
ce ne foit-là un aél:e de commerce qui ait rendu julliciable
des Juges-Confuls celui qui l'a conrraél:é; les perfonnes privilégiées renoncent à leur privilege, en s'immifceant dans
leur négoce, & deviennent fournis à cette Jurifdiél:ion; on
ne rapporre à la vérité aucune preuve d'autre aél:e de commerce conrre F ouganiere, Stracha dit il cet égard qu'un
feul aél:e de commerce ne caraél:érife pas le Négociant, à
moins que fon nom n'ait été infcrit dans les regiHres.
D'après cene diHinél:ion, Fouganiere, qui ell Chirurgien
navigant depuis quelque temps, ayant embarqué dans lès
différens voyages des pacotilles, fon état ell, pour ainu dire,
devenu celui d'un Négociant, & les billets qu'il a fait à des
Négocians pour l'achat defdites pacotilles, font des billets
de Marchand à Marchand, & le rendent jufiiciable de la
J uri Cdiél:ion des Juges-Confuls.
Me. Meriaud conclut à la confirmation de la Sentence.
Arrêt du l Mars 1776, prononcé par M. le Premier
PréCident, conforme aux conclufions; Fouganiere fut condamné aux dépens. Plaidant Mes. Laget & Sellon.
D U
PAL AIS
AR RÊT
DE
XXX 1 V.
Dans la pourfuite du crime d'ufure, la plainte du particulier
ne doit contenir 'lue des faits perfonnels, mais l'information peut être également pri[e fur etes faits étrangers.
L'ufurier peut être obligé de repré[enter [es livres.
La caution folidaire a la même a8ion contre l'ufurier que le
principal obligé.
E ueur de Flote avoit contraél:é diverfes obligations pOUt
prêt, en faveur des Beaucaire, Juifs, enfuiœ defquelles
fon époufe s'obligea, fous le cautionnement de fon mari; el!e
reviot .enfuite contre [es obligations par la voie du Vélleïen.
L
Tt
2
�331.
JOURNAL
Le I1. Août 1774, le lieur de Flote expofa au Lieute':
nant de Madèille divers faits d'ufure pratiqués par les
Beaucaire , Juifs; il en demanda l'information, qui lui
fut accordée; il joignit plufieurs pieces pour fervir d'information littéraire; le Lieutenant lui concéda aB:e de cette
rémiffion. Trente témoins fiJrent el)tendus; trois feulemen t
dépofent de quelques fairs contenus dans la plainte, & les
vingt-fept autres dépofent des faits perfonnels qui font
monter les ufures depuis le vingt jufqu'au cent cinquante pour
cent vis-à-vis des Ménagers, des fils de famille, des femmes, des Négocians,. & des gens de rout état.
L'information finie, le Procureur du Roi reCJuit, qu'en
vertu de la plainte qu'il déclara porter à raifon des faits
contenus dans la procédure, à fa requête & indication, les
nommés David Beaucâire & Coufins, Moïfe & Daniel Beaucaire fuffent décrétés de prife de corps. Le 10 Juin 177'1,
décret conforme. Le 12, les Beaucaire font conftitués
prifonniers à Marfeille ; ils font interrogés. Beaucaire l'ainé
nie le fait de négoce, avec le fleur de Flote; celui-ci
demande injonB:ion contre les Beaucaire de remettre leurs
livres; Sentence qui l'accorde.
Sur ces enrrefaites, le fleur Rapalli, l'un des témoins,
rend plainte de fon chef fur une foule d'ufures dont il a
été la viétime; il demande l'information. Vingt-cinq témoins
furent entendus"aucun ne parle' des f<lits perfonnels au fleur
Rapalli; ils dépofent feulement' des faits à eux perfonnels,
& conltatent l'habitude d'ufurer. Le Procureur du Roi requit la même chofe que fur l'information du fieur de Flote,
& le Lieutenant s'y conforma.
Le 5 Juillet, les nommés Beaucaire, qui le 20 Juin
avoient appellé de toute la procédure prife à la requête du
fieur de Flote & de la Sentence, renouvellerent leur appel
vis-à-vis du fleur Rapalli. Dès le 21 Juin, ils avoient même
demandé. leur transférence dans les prifons d'Aix, qui leur
fut permife le 3 Juiller. Ils préfenrerent le 17 du même
mois une requêre en élargiffement provifoire, de laquelle
ils furent débourés; le même décret ordonne leur traduB:ion
�•
DU PALAIS DB PROYBNCE;
333
~ Marfeille, fur le motif que le procès extraordinaire avoit
été ordonné.
Le fieur Rapalli préfenra une requête en contÎnuation
â'information; le Procureur du Roi demanda auffi de continuer d'informer de fon chef, parce que depuis la requête
du fieur Rapalli, il lui avoit été porté de nouvelles plaintes.
L'information fut prife en conféquence, pluGeurs témoins
furent entendus, & les accufés interrogés fur les charges.
Comme les procédures au fonds avoient été jointes à Marfeille à la Tequête de Beaucaire, le fleur de Flote préfenta
requête à la Çour, par laquelle il demanda la jonél:ion des
deux appels.
.
On difoit pour les Beaucaire, que dans les principes du
droit romain, 'pul doute qu'on ne pût intenter l'aél:ion civile & criminell~. Mais 'quoique pluGeurs Auteurs & plufieurs Arrêts aient admis cette décifion dans notre droit,
l'opinion dé ceux qui l'ont rejettée efl: évidemment préférable. Ceux qui fuivent la difpofition du droit romain,
font' Bonnet & Reboul. Julien, au mot accufatio, pag. 3,
lett. P, & Jouife dans fa JuHice criminelle, tom. 3, pag.
1 l , fou tiennent qne la maxime que l'on peut imenrer les
deux aél:ions civile & criminelle; qui dl: confl:ante dans
le droit romain, n'a pas lieu en France; & que dès qu'on
s'eH pourvu par l'aél:ion civile, on ne peut enfuite revenir
à la criminelle.
Ici la Darne de Flot~, qui s'était pourvue en refcifion
des aél:es qu'elle avait paifé avec les Beaucaire, n'auroit
pas pu prendre la voie criminelle; fan mari, qui n'eH que
fa caution, n'a pas plus de droit qu'elle. Le cautionnement ell: un engagement volontaire; la caution peut exciper dt; ce qu'elle s'efl: engagée au paiement, d'une fomme
indue par dol, force ou violence; mais elle ne peut faire "
informer fur ces moyens; l'exception pour ne pas payer
appartient à tous les obligés folidaires; l'aél:ion de fe plaindre appartient à celui contre qui le dol, la force, la vio- 1
lence ou l'ufure ont été pratiquées; en droit, on ne peUl
pas admettre qu'ils l'aient été envers la caution qui a .
•
�334
Jou RNA L
accédé volontairement à l'obligation du principal obligé.
Si le fieur de Flote qui,. d'après fon fyaême, écoit
d'abord le principal obligé, la feule partie léfée, a confenti
que cout fût rran[porté fur la têee de fa femme, dont il fe
rendoit caurion, il a par cetre délégation d'un aurre débireur, par cerre novation, renoncé aux exceptions qu'il pou":
voir avoir comme principal obligé. Il n'a plus que les aél:ions
qui competent à une caurion.
La Sentence qui ordonne la rém i/Tion des livres
injufl:e en droit & en fair. En droir, peut-on exiger de l'homme
confl:irué pri[onnier pour crime d'ufure, de fournir par l'exhibirion de [es livres des preuves comre lui? Nulle Loi ne
l'a ordonné; il faut fe [ervir de celles qu'on a. Il n'y a ft
cet égard que deux exceptions; que les livres de l'ururier
[oienr joinrs à la procédure, lorfque, comme dit Mornac [ur
la Loi l , cod. de edendo ,la Juaice s'en
emparée ex
abrupto atque il !imine jlldicii; rien n'efl: plus juae. Les livres font alors parti du. délit qui a été faili manu publicâ;
ils font acquis à l'accufareur; mais on' ne peut exiger de
l'homme conaitué prifonnier qu'il ajoure. lui - même aux
preuves.
Si l'accu[é
un Courtier public, obligé d'avoir des livres, on peut le forcer à les repréfenter, parce que ces livres font· au public; il ne peut pas l'en priver fans fe faire
foupçonner. Hors de là, la repréfentarion des livres ne peut
êrre demandée. La banqueroute frauduleufe ne s'induit pas
feulement du défaut de repréfenrarion des livres, il faut·
qu'il y ait une perre cau fée au créancier par la celfation
du commerce du. débiteur; cerre perte
regardée comme
tl.n vol, lor(que des livres ne ju(1:ifienr pas ~u'elle a été occafionée par des malheurs. Le créancier qui excipe de la
non repréfenrarion des livres a donc une preuve indépendanre.
Peut-on regarde'r les B,eaucaire, Négocians Juifs, comme
des .Négocjan~ Franc,oais attachés à nne Place de commerce"
& obligés pe fe foumeme aux Loix qui la régilfenr?· Etran-'
ger~ par les ~oix [éveres qui les banni1fenr, & même pa~
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33 ~
la fagè tolérance qui les a adoucies, on n"a pas droit d'exiger d!eux de livres; la nature même de leur commerce les
en difpenfe. Une feuille volante fur laquelle ils calculent, un
parce-feuille où ils placent les lettres de change qui leur
font données pour l'argent qu'ils prêcent, leur fuflifent.
L'Edit de 1769, qui ordonna aux Juifs d'avoir un livre
journal, prouve que jufqu'alors ils n'étaient pas en coutume de l'avoir. Cette Loi, inutile depuis que les Juifs du
Comtat ont été rendus avec ce pays au Pape, ne peut
fournir aucun argument contre les Beaucaire, n'ayant point
de domicile dans le Royaume, & difpenfés par les La ix
anciennes & aétuelles du pays où ils rélident d'avoir des livres; quand ils feroient obligés d'en tenir comme les Négocians ayant domicile en France, on ne pourrait argumenter des Ordonnances fur les banqueroutes frauduleufes,
qu'autant que l'on aurait quelqu'autre preuve que la non repréfentation des livres.
Sur la ,cafration de la procédure, on difoit qu'il efr reconnu que quoique. l'accufateur fe fait plaint d'un délit
grave, digne d'information, le décret qui la permet efr caifé
taures les fois que la plainte el!: exagérée, au point d'avoir
fuppofé un délit non exifrant, ou d'avoir travel!:i en délit
ce qui ne l'était pas. Il el!: donc un cas où le décret de foitinformé, jufre fur le limple afpeét de la plainte, peut être
cafré, vu le véritable état & le fonds des chofes. Ce cas
n'efr pas le feul: l'infertion des faits étrangers au plaignant,
dans une requête en information, change la plainte en une
dénonciation générale qui doit être p'rofcrite, & qui entraîne
le décret qui l'a adoptée.
Si la plainte, quoique relative feulement à' l'accufateur ,
a produit dans l'infrruétion, des dépoli~ion's fur faits étrangers, les regles générales veulent qu'on cafre ces dépolitians; mais fi ces dépolitions font multipliées, alors le
corps entier de l'information efr vicié, on cafre toute la
procédure. Serpillon rapporte un grand nombre d',Arrêts
qui prouvent cette Jurifprudence adoptée par la Cour.
L'Arrêt qu'elle rendit le 4- Septembre 1749, dans l'affaire
\
�336
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RNA L
des Pafcal pere & fils du lieu de Villars, contre Honnorat,.
caffa la procédure en entier, parce que la plupart des témoins avaient dépofé fur des faits étrangers. Ce vice de
l'information remonte à la plainte, ,même lorfqu'elle n'a pas
invité les témoins à vaguer fur des faits qui n'y font pas
relatifs.
Le fieur RapalIi & le lieur de Flote n'ont pu ignorer
que ceux qu'ils faifoieut affigner, n'avaient aucune connoiffance de ce qui s'écoit paffé entr'eux & les Beaucaire.
Quand ils ont été les rechercher, ce n'a donc pu être que·
pour les faire entendre fur de prétendues ufures dont il ne
s'agiffoit pas dans la plainte; ils ont donc fair fraude à la
Loi; fous le prétexte de ne s'occuper que de leur intérêt,.
ils ont fait informer fur le préjudice que d'autres avaient
fa uffe rr , & ils ont ainli élevé cette étrange procédure, où
les plaignans fans preuve ne s'appuyent que fur des allégations d'ufures qui leur fotH érrangeres.
L'ufure efl: un crime caché, il eH vrai, dont la réparation devient par-là même plus difficile. Tanr qu'il ne·
s'agira que d'argent, la Loi pourra fe décider par des conjeél:ures & des indices; mais fous prétexte que le crime ef!:
caché, viendrait-on auffi, fans autre preuve que l'habitude,.
en pourfuivre la vengeance & la punition? Voilà ce que
les Loix, ce que la raifon, ce que l'humanité ne peuvent
admettre. Lorfqu'il s'agir d'intérêr civil, la balance de la
Jufl:ice peur être déterminée par des femi-preuves, par des
conjeél:ures; mais quand il s'agit de l'honneur, du fang des
hommes, elle ne [ire l'épée qu'autanr qu'elle ef!: fûre
de trouver un coupable, de voir le crime dans loure fa n.
odieufe clarté; & avant 'examiner s'il y a un coupable,.
elle fe demande fi celui qui le dénonce il un, intérêr légitime, li, fous prétexte de pourfuivre Id vengeance d'un délit
qui lui en perfonne!, il ne vient pas exercer l'aélion publique & fameufe qui .Iui ell: inrèrdire. On peur, il ef!: vrai,
oppofer une foule dJAureurs qui admerrent, en mariere
d'ufure, des rémoins aépofant des fairs, perfonnels & finguliers; mais ces Auteurs; parmi lefquels fe rrojJveot les
.
Commentateurs
�DU
PALA'IS
DE
337
PROVENCE.
Commentateurs de l'Ordonnance criminelle, ne font pas
des Légifiateurs contre lefquels on ne peut pas s'élever. Nulle
Loi autorife le plaignant en ufure à fuivre, pour fa procédure, des regles taures différentes de celles qui font prefcrites pour l'infb uél:ion des autres délits.
L'ufure ef!: le reproche commun & bannaI que l'on fait aux
Juifs. On ef!: porté à les en accu fer prefque toujours fans examen. C'ef!: une raifon pour admettre plus difficilement contr'eux,
que contre un Chrétien, des faits étrangers au plaignant. L'habitude d'ufurer, du moment qu'elle ef!: un re\lroche fait à
la Nation, un préjugé répandu, n'a plus droit d'être préfentée comme le délit du particulier. Il feroit trop à craindre que le préjugé & la prévention ne priffent la place de
la vérité; il ef!: fi aifé de trouver des témoins contre des
gens qui ne peuvent faire que le commerce de l'argent, &
qui par cQnféquent prêtent beaucoup, que ce ferait les mettre
à la merci de tout dé,giteur qui voudrait fe libérer par une
calomnie. C'ef!: ce qui détermina le Parlement de Mets,
où ces accufations fe préfentoient quelquefois, de donner,
le 17 Mai 1747, après avoir confulté les Chambres, un
Arrêt par lequel il fit défenfes à tous Juges de fan reffort
de recevoir d'aucun particulier des plaintes générales" aux
fins de faire informer d'autres faits d'ufure que ce,ux qui concernent perfonnellement les plaignans. Cet Arrêt déclara
qu'il avait été mal, nullement informé, décrété & procédé
contre le Juif Cerf Moïfe, & caffa tout ce qui avait été
fait. La même chofe fut jugée par Arrêt du 28 Juin 17)1.
Jurifprudence prelfentie par la lumineufe diflinél:ion de Decormis; Jurifprudence humaine faite pour fubjuguer tout
homme fenfible que l'apparence d'une inf!:igation générale
doit faire frémir; Jurifptudence qui tient au bien public,
qui ne peu t varier d'un reffort à l'autre, parce qu'il s'y agit
du forr des hommes, qui eH également précieux par-tout.
On répondait pour le fieur de Flote, qu'il avait intérêt)
parce ,qu'il était eAcore obligé par le fait & par Je droit;
par le ~àit, il était t'aurioO' folidaire de fon époure, & les
Contrats qu'il avait paffés folidairemenc avec elle ne pourraient
Anllées l77 5 &- l77 6•
v
.v
�338
J ÔU
RNA LOO
opérer tout au plus qu'une efpece de novation qui ne laiflè
pas moins [ubliO:er [es premieres obligations, quoiqu'elles aient
changé de forme. Par le droit, en ce que la re[cifion impétrée par la Dame de Flote envers les obligations arrachées
à [a foiblefTe & à l'attachement qu'elle Forte à [on -mari,
ne peut avoir d'aJtre ifTue que de faire revivre les anciennes
obligations du 'lieur de Flote.
Mais, dit-on, le lieur de Flote eO: caution; il falloit attendre que le principal oblig-é [e plaignît. Ce raifonnement
ne pourroit avoir lieu que dans l'efpece d'un limple cautionnement, [ans renonciation à la Loi du principal. Alors
il [emble que la caution auroit dLÎ attendre qu'après la difcuffion du -principal débiteur, le créancier eLÎt étendu [on
àétion fur le cautionnement. Jufques à ce moment, celui
qui aurait cautionné n'auroit pas intérêt à [e plain dre,
quoiqu'il paroifTe très - juO:e que celui qui eft intervenu dans un contrat ufuraire ait la faculté de s'en plaindre,
quelque éloigné que paroifTe fon intérêt. Cette queHion
devient indifl:ërenre dans l'efpece d'un cautionnement folidaire où la caution peut être aétionnée avant même que
le débiteur le [oit. Le créalicier a la faculté de choilir entre
lui & la caution; il peut laifTer même à l'écart le principal
débiteur, & pourfuivre uniquement celui qui a cautionné.
Ici, à l'échéance du premier comrat, les Beaucaire ont actionné lolidairement & la Dame de Flore & fon mari, &
il Y a eu une failie [ur les biens de ce dernier.
La novation dans l'obligation du débiteur ne peut êtreregardée comme une tranfaétion, & on ne peut pas dire
que toutes les fois que le lieur de Flote a renouvellé fes'
engage mens envers les Beaucaire, il a fait tout autant de
tranfaétions. L'on convient qu'il n'eft rien de plus [acré
p rmi les hommes qu'une tranfaétion; mais une tran[aétion
n'eft point un aéte idéal; c'eft un aéte conitant, par lequel
les conventions [ont déterminées d'une maniere fixe & invariable.
_
S'il n'y a pOInt de tranfaétion, mais limplemenr- un renouvellement d'obligation, une obligation fous une forme
�DU
PAL A.T S
DE
PRO VEN C E.
339
différente, il efi inutile d'examiner les principes que les
accufés ont invoqués; il dl toujours cenain que tout aéle
qui ne pone pas le nom de tranfaélion, qui n'en a' aucun
des caraél'eres, aucune Hipulation qui donne lieu de penfer
que les panies ont voulu tranliger fur le fait de l'ufure,.
ne peut' pas être réputé tranfaélion; la fin de non recevoir
établie fur un pareil aéle ne montre que le défefpoir de la
caufe.
SurIa Sentence qui ordonne la rémiffion des livres, le fieur
de Flote obfervoit que l'ufure efi un crime caché, parce
qu'il n'y a fouvent, & prefque toujours, elltre l'ufurier & fa
malheureufe viélime, que le befoin .qui la conduit; delà les
preuves deviennent extrêmement difficiles; il faut des
moyens extraordinaires pour,-parvenir à découvrir un crime
qui produit d'auffi funeHes effets. Il efi une maxime facrée
dans la Jurirprudence, fondée f~r la difpolition des Loi"
Romaines, que perfonne n'eH obligé de prQduire des pièces
cQntre lui-même, nemo lenetur edere contrp fe. Mais la jufie
horréur qu'on a de l'urure & de l'impoffibilité qu'il y a de
la découvrir par d'autres voies, & fur-tout la facilité de
commettre ce crime, Qnt donrié lieu à l'exception à cette
regle. Une foule d'Auteurs décident que les prévenus d'ufure
font obligés d'exhiber leurs livres de raifon pour y trouver
des preuves de ce crime. D'Olive dans fes queHions de droit,.
chap. T 9; Brillon, va. u~re; Derpeiffes, tom. T, tit. du prêt"
[eél. 3, arr. 3'î; Fromental, va. intérêts; Jouvet dans fa
Bibliotheque d'Arrêts, va• .ufure; Denifart, pag. 38; Vouglans dans fes inHiturs criminels, pag. 600, difent que la
,rémiffion des livre.s doit être ordonnée en matiere crimi.nelle, & pour la preuve de l'accu fat ion.
Les Beaucaire folltiennent qu'ils n'ont point de livres:
mais y a-t-il l~ m.o\ndre vraifemblance que des banquiers
tels que .les acc,!Jfé~., faihlnt annuellement toute fone decommerce & tolite forté d'affaires, n'euffent., tenu a~cuns<
livres?: D'aiUeuq;;,_ qt{<lnd il feroit poffible de le penfer, nedevroient-ils, Pa..s),~'jmputei-.à.eux-mêmes la fallte de n'en
avoirdpas nfef\~) ,&" le~ cCl11f~quences qui ·4oive nt réfulter dlll
VV2.
�3~
JOURNAL
défaut de rémiffion? L'Ordonnance du Commercë n'im..:
pofe-t-elle pas à taut Négociant & Banquier la néce.ffité
de tenir des livres? L'art. 2 du tit. 3 énjoint aux Négocians & Agens de change & de banque de renir des livres,
& particuliérement aux Banquiers, à qui il ell:· enjoint
d'avoir un livre-journal dans lèquel feront inférées toures
les parties par eux négociées, pour y avoir recours en cas
de conceftation? Cette même Loi permet dans le cas con'traire, & par le feul défaut de rémiffion, d'en induire
llne preuve du dol. C'eft fur ces principes qu'elle répute
banqueroutiers frauduleux ceux qui auront fait faillite fans
avoir remis leurs livres.
Sur l'appel du décret de foit informé, de celui de prife
de corps & de ce qui avoit fuivi, on répondoit que toute
accufation grave méritoit d'être inftruire par la voie crimine Ile: ainfi toutes les fois qu'on défere à la Juftice un
délit puniŒable, le Juge doit ordonner l'informarion. On
ne peut certainement pas nier que l'ufure ne foit un crime
grave; les Romains le puniffoient avec plus de rigueur que
le vol.
Les Arrc~ts du Parlement de Mets qui ont carré dd
procédures entieres en ufure, font intervenus dans des
caufes où les accufateurs avoient demandé l'information
fur des fairs qui leur étaient étrangers, & les premiers
Juges l'avoient ordonnée; de forte que le vice de la procédure fe trouvoit dans la plainte même & dans le décret
qui avoit permis l'information; c'érait -là une inftigation
générale que les premiers Juges ne devoienc, pas permettre.
II eft vrai que dans l'efpece de l'un de ces Arrêts, le
plaignant avoit inféré dans fa plainte des faits perfonnels;
mais il y avoit joint en même temps des faits érrangers
fur lefquels les témoins avoient dépofé. Dans ce cas le
même vice fe trouvoit dans la plainte & dans le décret
qui permenoit J'information.
Ici li n'y a nul fait étranger dans la plainte; elle contient uniquement le dérail des différentes négociations,
des diJférens prêts uf\lraires qui ne concernent ahfolu-
�DU PALAIS DE PROVENCll:
341
ment que le fieur de Flote. Si le crime dont il fe plaint
efl: de nature à comporter l'information, s'il efl: partie
légitime à s'en plaindre, puifque ce n'efl: que fur des faits
perfonnels qu'il l'a demandée, l'appel des Beaucaire envers
le décret de foit informé efl: évidemment mal fondé.
Suivant l'Ordonnance le Juge doit avoir égard à la qualité du crime, des perfonnes & des charges. Quant aux
charges, il n'efl: pas nécelfaire qu'elles foient complettes
pour décerner un décret de prife au corps, lorfque le
crime efl: grave, & lorfque d'ailleurs l'accufé n'efl: pas domicilié. Les indices font alors fuffifans pour décréter; c'el!:
l'opinion des Criminalifl:es. (S,erpillon dans fon Commentaire fur "l'arr. 2 du tit. 10 de l'Ordonnance criminelle,
pag. 537; Vouglans dans fon, infiruél:ion criminelle, pag.
543 , & Mr. d'Aguelfeau dans fon dernier vohJme.)
, Quand même la preuve qui réfulte de la dépofition d'un
certain nombre de témoins feroit illégale; quand même le
fieu~ de Flote & le fieur Rapalli n'auroient pas dîl faire
entendre des témoins qui dépofent fur des circonftances
de la plainte du fieur de Flote, & quoique leur dépofition
n'embralfe pas tous les faits, il fuffiroit feulement qu'un
feul fùt prouvé, pOlir' que le décret de prife au corps
laxé contre l'accufé dùt être confirmé. On difcuta enfilite
les charges de la procédure & les réponfes des ~ccilfés.
. On ajouta que fi les preuves adminiftrées étoient en"core imparfaites, s'il n'yen avoit pas alfez pour la cOndamnation, le fieur de Flote avoit encore la relfource des
-livres des accu rés , qui ne 'devoient pas lui être refufé.,
Mais outre ces preuves d'une partie des faits de la plainte,
n'a-t-on pas prouvé par la dépofition d'une foule de témoins, que les accufés étoient des ufuriers publics? qu'en
matiere criminelle, I~ caraél:ere perfonnel de !'I\ccufé &;
fa réputation influent à aggraver ou à diminuer les charges? Il feroit en effet bien étonnant qu'un homme qui
'auro.it joui .i~fqu'al,l moment de l'accufation d'une réputa'tion i.ntaél:~, [ùt coupable d'ufures énormes; il fembJe que
4 foi ~ue au contrat -&; la réputation de l'accufé devroien~
�342.
.
J,ou RNA L
•
jercer quelque défiance fur la preuve, quand 1 méme elle
porreroit uniquement fur les faits de la plainte. La foi
de deux temoins peut étre facilement corrompue; mais
quand la voie publique accufe un homme de s'étre rendu
journellement coupable d'ufures, une pareille preuve dl:
moins fufpeél:e que celle qui ne porteroit que fur des faits
perfonnels au plaignant.
En matiere d'ufure, la commune renommée de l'accufé
efi une des dépendances de la plainte; ce n'dl: point-là
llne circonfiance étrangere; c'en un argument fuffifant
contre l'accufé à caufe de la diffieulté, de l'impoffibilité
méme qu'il y a de lè procurer des preuves direél:es. C'd!:
ainli que l'obfervent Mafcardus dans fan traité de prolJationiIJus, conduf. 424; Lacombe, matieres criminelles, pag.
8"]; Vouglans; inJlituts criminels, pag. 600, & Mr. de
Montvalon daus fon Pré.cis des Ordonnances, va. témoins.
Ainli la preuve de la coll!ume d'ufurer n'en condamnée
ni par les Auteurs, ni par les Arrêts. C'en un moyen
légal pour parvenir à la conviél:ion des ufuriers. Dès qu'à
cette preuve fe joint celle de quelques faits de la plainte,
des indices réfultans des réponfes des accufés, eofin les
moyens de s'en procurer de nouvel-les par la rémiffion
des livres ,. on ne peut attaquer les décrets de foit informé & de prife au corps.
.
La défenfe du fieur Rapalli roulait fur les mémes moyen's.
Mr. l'Avocat-Général de Califfanne examinà ce que c'éroit
que l'ufilre, quels moyens on pouvoit employer pour en
découvrir les auteurs, & fi l'on pouvoit obliger l'ufurier à
remettre fes livres.
.
L'ufure, dit-il,. efi un crime caché & odieux, q~l ré
paffe dans les ténebres, & n'a fouvent .d'aurres témoins
que les parties intéreffées; la preuve en dt extrêmement difficile.' L'ufurier public eH un des êtres le plus pernicieux à la
focié,é ;ÎI en en le fléau, il en efi l'ennemi,le plus cruelè jeuiffant du malheur de- fe? fembJables par l'efpece de bonheu~
qu'il y troûve, il mérite ll'aniâiadverfion publique;' j~ intér
reffe les mœurs pour !a -dépr~~f~i~n defque;les il doit 'tout'
�D V PAt AIS D Il Il R 0 v E Ne E.
.343
faire 'craindre; il nuït au bien de l'Etat. Aucun crIme,
quoiqu'il paroi/fe particulie.r, n'affeél:e davantage le public;
il embralfe tous les états, il immole des viél:imes dans
toutes les- conditions; le Gentilhomme, le Ménager, le fils
de famille, l'Agriql1teur, tout ea en bure à fes perfécutions; ni l'âge, ni la qualité, rien ne l'arrête; aucun qui
foit plus fréquent & plus répété; il ri[que tout, & l'intérêt feul eft la bafe de fes manœuvres.
Toures les Narions ont penfé comme nous fur un crime
mlffi affreux; combien de Loix dans le droit romain en
haine des ufuriers, in odium fœneratorum ! .Le plus philofophe & le plus vrai des Hiftoriens de la république romaine difoit que l'uftlre étoit un des plus anciens maux de
la république; c'efl pourquoi, ajoute-t-il, on a fait. tant de
Loix pour la réprimer dans le temps même où les mœurs
étoient le moins corrompues.
L'ufure eft donc un crime caché & public; d'après ces
principes, fi nos Loix, en érabli/fanr des peines pour.
l'ufure, n'ont pas fixé des formes particulieres pour parvenir à la prouver, c'el!: parce qu'elles n'ont pas pu exprimer tous les cas particuliers; .mais tous les Auteurs one
dit, l'ufage prouve, & la jurifprudence démontre que les
foins que l'on prend pour déguifer l'ufure, doivent tO.ue
faire admettre au Juge pour la découvrir; que l'on n'exige
pas dans la pourfuite de ce crime des preuves auffi fortes
que dans celles de tout autre : admittuntur & fufficiunt ,
dit Tiraqueau, prohationes quœ in aliis caujis eJfènt infufficientes ; que l'on admet même la preuve par témoins conrre
les contrats exiftans, quoique en général elle foit prohibée
contre des titres écrits; que l'ufure eft imprefcriptible; en
un mot, qu'il faut des moyens extraordinaires pour découvrir ce crime & remédier à fes funefrès effets; l'ufage,
les Auteurs, la jurifprudence one établi des principes en:'
core plus particuliers.
.
.
. Deux voies [one ouvertes, la yoie civile & la. voie crimine!1e ;' toutes deux peuvene avoir lieu; les 'circonfiances
�344
JOURNAL
paroi!fent cependant devoir nécellirer ou l'une ou l'autre
de ces pourfuÎtes.
Un homme aura ·éré ufuré une' fois dans nn contrat
particulier, par un homme ~ qui 1'011 ne doir pas encore
refufer le nom de ciroyen, qui n'eH peut - être pas un
ufurier public; il a des preuves littérales de cette ufure,
il veut faire' ca!fer fon comrat, il prend la voie civile.
Mais un particulier ufuré. dès fa minoriré & dans fes premiers engagemens·, ayant été obligé d'en contraél:er une
foule d'aLHres tous plus ufuraires, a été cruellement traité
par des. hommes qui font ufuriers publics. Il a été obligé
de payer L1ne foule de ces engagemens ufuraires; il lui en
refie encore beaucoup à acquitter; il veut avoir des dommages & intérêts; la preuve littérale n'eH pas complerte,
il n'en a même point: alors il a recours non à une enquête; mais il fe fert de la preuve teHimoniale par la
voie criminelle; il pem le faire fans doute fans s'arroger
les droits du miniHere public, fans faire revivre ces actions populaires qui ont été abrogées parmi nous: mais
jufqu'où peut-il le faire? comment doir-il fe fervir de cette
efpece d'aél:ion publique"?
D'abord il faut qu'il n'expofe que des faits qui lui foient
perfonnels; la pourfuire de rout ce qui ne le touche pas
~ui eH abfolument étrangere; il faut qu'il ne rende plainte
. que de ce qui lui eH abfolument particulier; fans cela fa
plainte ferait une déno.nciation publique, qui ne peut être
pourfuivie •par un particulier; il peut être dénonciateur,
s'il le veut; mais il faut qu'il remette entre le~ mains de
la partie publique le foin de pourfuivre l'aél:ion dom il a
été le moteur. Telle efi la Loi. En doit-il êrre de même
de l'information? EH-il néce!faire que tous les témoins ne
dépofenr que des fairs perfonllels au plaignant? L'unanimité des Auteurs ne permet pas d'adopter ce' fyHêmè.
D'un aurre côré, fuffit-il qu'il n'y ait dans· l'information
que des fairs érrangers à celui qui rend plainte? Les illconvéniens d'une pareille opinion ne permettent pas de la
'fuivre.
�D U
PAL AIS
D E
PRO VEN C E.
34~
fuivre. Il arriveroit en effet bien fOllvent qu'un homme
qui n'auroit été que très-Iégérement ufuré, qui même ne
l'auroit point été, articuleroit un nombre de faits quelconques, n'en prouveroit aucun, feroit affigner une foule
de témoins qui dépoferoient des faiJs à eux particnl iers,
& d'après ces a1fertions, obtiendroit des adjudications pour
la peine d'un crime qui n'auroit peur - être jamais exiflé
vis-à-vis de lui. Mais il ne paroît pas néce1faire que chaque
témoin depofe des fairs con lignés dans la plainte, en y
ajourant <les fairs érrangers.
Ce fyflême pourroit même paroître contradiél:oire; car
ou les faits étrangers font profcrits, ou ils ne le font pas:
ils le font, difent les Beaucaire. Si cela efl, comment
ne le feronr - ils pas, quand ils feront joints à des faits
contenus dans la plainte) Comment ce vice ne portera-t-il
pas fur chaque dépolit ion en particulier, & ne rendra-t-il
pas inutile la dépolit ion ? Comment ce vice qui fe trouvera dans chaque dépofition , n'annullera-r-il pas la procédure en entier? Si au contraire ils ne font pas profcrirs
en matiere d'ufure; s'ils fonr permis, pourquoi établir une
difl:inél:ion qui n'eH autorifée ni par les Aureurs , ni par
les ufages? Il fuffit feulement, pour que l'on pui1fe s'approprier le mérite de ces fairs, qu'il fe. trouve dans la
procédure une bafe quelconque qui pui1fe les faire admettre, c'eft-à-dire un commencement de preuve, foit
linéraire, foir teflimoniale, de quelques faits conlignés dans
la plainte; fans cela ce n'eft qu'une inftigarion générale,
qui ne peut être utile au particulier, & dont la pourfuire
ne peut êrre confiée qu'au miniHere public. Ce fyHême,
il eft vrai, paroîr s'éloigner un peu de l'Ordonnance & des
Arrêts de réglemmt, qui prohibenr' dans route' procédure
les fairs étrangers; il paroît contraire aux f\rrêts qui ont
ca1fé des dépolirions, parce qu'elles portoient fur d'aurres
fairs que ceux énoncés dans la plainte, qui même ont
cafTé les procédures entieres, quand les dépofirions de pareille nature en' formoient la plus grande partie, parce
'qu'elles ne démontrenc alors que la malice du rémoin ou
Années 1775 {j 177 6•
Xx
�346
Jou RNA L
celle de l'accufateur. Mais l'unanimité des Auteurs; qui
cous ont fourenu, les uns que les dépoLirions des faits
étrangers faifoient preuve enriere; d'autres que c'écoient les
témoins Linguliers; d'aurres enfin, que ces témoins équivaloient à une dépoLition, (;'el!-à-dire à la moitié de ta
preuve, mais qui variant fur la qualité de la preuve, ont
toujours éré unanimes, quand ils ont foute nu que les faits
étrangers étoient admis en mariere d'ufllre, atrendu la nature du crime; cette unanimité ne peur-elle pas réparer
une omi/Iion de la Loi, qui n'a pas excepté l'ufllre de la
regle générale? On ne retracera point la f~ire de leurs
doél:rines; mais on dira avec Danry, qu'en mariere 'd'ufure, la publique renommée & le témoignage de plùlieurs
particuliers, encore qu'ils dépofent des faits ufuraires dont
ils Ont été parties, & qui ne font point contenus dans
la plainte, ce qui forme les faits étrangers, ou des faits
finguliers & ifolés, mais qui peuvent regarder le plaignant,
fuffifent pour opérer la condamnation de l'accufé d'ufure.
On dira avec Julius-Clarus que les faits étrangers & finguliers non fù.fficiunt ad condemnationem, comme le prétendent une foule d'Auteurs qui le citent, fed fa/hm modo
grave faciunt indicium. Ce fenriment explique les différences qui peuvent fe trouver dans les divers Auteurs,
foit qu'ils aient pris ou l'un ou J'autre part~. Decormis que
l'on a cité ne détruit p-as J'unanimité des fencimens d'es
Auteurs, tels que Bouchel, Brillon, Stracha, Covarruvias ,
Tiraqueau; Lacombe, Serpillon, Vouglans, Jouife, Fromental, Le Camus, Mrs. de Montvalon & d'Agueifeau,
cous ont reconnu la nécelIité de ce fyflême.
En vain voudroit-on rell:reindre les principes que l'on
vient de. citer, aux t:1ÏtS finguliers, & non aux faits étrangers; c'efl-à-dire, foutenir qu'en fait d'ufure, la preuve
peut être faite par pluÎJeurs témoins, dont chacun dépofe
des faits différens, mais contenus dans la plainte, &
non par des témoins qui dépofent des faits à eux perfonnels. En fait, aucun des. Auteurs qui parlent des faits
finguliers n'ajoutent qu'il faut que ces faits regardent le
�347
plaignant, & c'eH ce qui fe prouve par ce qu'établit Mr.
d'Ague!feau, tom. 8, pag. 1')0, où il répond qu'il n'en
dl: pas en matiere de vol comme en matiere d'ufure; que
dix témoins de faits linguliers équipollent à deux témoins
du même fait; mais il n'ajoure point explicitement qu'il
faut que ces faits foient conlignés dans la plainte.
En réfumant les principes, li un plaignant qui n'expofe
que des faits perfonnels & qui le regardent, joint à un
commencement de preuve, foit tell:imoniale, foit littéraire,
des faits contenus dans fa plainte, la preuve de l'habitude
d'ufurer par une foule de témoins étrangers , il fait une
procédure valable & qui doit être entretenue. L'Arrêt du
Parlement de Mets du 17 Mai 1747 défend à tous Juges
de recevoir d'aucun particulier des plaintes générales, aux
. fins de faire informer d'autres faits d'ufure que de ceux
qui concernent perfonnellement le plaignant. Cet Arrêt
n'exclut pas l'admiffion des faits étrangers, il trouve le vice
dans la plainte, & tout croule avec elle; c'ell: une infl:igation générale prohibée par notre droit, une aélion populaire
& publique qui ne peut jamais être lai!fé entre les mains
des particuliers, & qui ell: confiée exclulivement au miniftere public. Le fecond Arrêt du même Parlement fous la
date du 28 Juin, 17')7 ordonne l'exécution de celui de
1747, & ca!fe en conféquence une dénonciation générale
& tout ce qui s'en étoit en[uivi, fauf aux particuliers qui
avoint foufcrit la dénonciation de fe pourvoir fur les faits qui
ppurroient les concerner.
En vain voudroit-on raifonner par analogie, du crime de
faux à celui d'ufure, dire qu'ils [ont auffi cachés l'un que
l'autre, & conclure de ce que l'on n'admet point les faits
étrangers en matiere de faux, qu'ils ne doivenr pas l'être
en fait d'u[ure. Tour le monde fent le peu de vérité de
cette comparaifon, & la repon[e ell le fenrimenc unanime
des Auteurs qui les admettent dans le fecond cas, & qui
n'ont pas même imaginé de dire qu'ils devoient être rejettés
dans le premier. D'dilleurs' on peur plutôt dire du crime de
faux, que c'ell: un abus de par iculi r à particulier, auquel
DU
PALAIS
DE
PRO V ENC Il.
XX2
,
�-318
•
Jou
RNA L
.le public ne peut pas prendre grande part, que de l'ufure
qui eH réellement un crime public & général, qui peut
être pourfuivi par la voie criminelle, qui doit l'êr re par
des moyens extraordinaires, c'eH-à-dire dans l'inlhuction de laquelle on peut employer les fairs étrangers,
parce qu'elle dl: aulIi facile à commeme que difficile à
découvrir.
L'ufure efl: un crime public; il ne peut conféquemment
pas fe prouver par un fait feul & ifolé , fllr-tout lorfque
l'on prend la \'oie criminelle; l'ufage le' veut ainG. AulIi deux
chofes font elles abfolument néceffaires à tout particulie-r
qui veut pourfuivre l'ufure. Il doit prouver rO. que celui qu'il
accufe efl: véritablement ufurier, 2°. qu'il l'a été en particulier vis-à-vis de lui. Ces deux affertions remplies, la preuve
dl: complette, parce que tout fait efl: conHaté par deux
temoins, & qu'en fait d'uÇure, la publique renommée &
conféquemment les faits étrangers tiennent lieu d'un témoin;
quoiqu'en général & dans toute information un feul temoin
puiffe faire décréter, fur-tout en matiere grave, il n'en eH pas
de même dans les circonfiances de l'ufure, parce que tout
particulier qui ne prouve que l'ufure publique, ne prouve
- rien pour lui, & fait une procédure abfolument nulle;
il faut donc même pour le décrét, que l'ufure particuliere
foit forrement indiquée, c'efl:.à-dire, que la feconde preuve
néceffaire contre l'ufurier foit prouvée littéralement ou par
témoins quand il s'agit de condamner, foit forrement préfumée quand il s'agit de décréter.
Mr. l'Avocat-Général examina enfuite Ii l'ufurier ell:
obligé de remettre fes livres: nemo tenetur edere contra ft,
difent les principes généraux. Pourquoi donc l'ufurier feroit-il
obligé d'aggraver fon fort par la repréfentation de fes livres, où peut-être l'on peut trouver des preuves du crime
dont il efl: accufé? Pourquoi ferait-il obligé ainG de fournir des armes contre lui même? Cependant on convient
que cette maxime générale n'a pas lieu en matiere d'ufure,
quand il s'agit d'une pourfuite; mais, à-t-on dit, elle doit
avoir lieu en matiere criminelle. Tous les Auteurs difent,
�DU
PALAB
Dl!
349
PB.OVl!NCIl;
cependant le contraire; d'Olive, Brillon, Fromental, Jouvet,
Denif.1rt, Serpillon, Vouglans, Defpeiffes, tous atteHent,
non qué l'on doive obliger l'ufurier à remenre fi s livrés
en mariere civile feulement, mais que ceux qui fonr accufés
d'ufure ou en prévention de ce crime, doivent êrre teDus
d'exhiber leurs, livres pour en tirer quelque preuve. Decormis ne dit même pas le comraire. Ainfi tour ufilrier,
même en mariere criminelle, efr obligé d'exhiber fes livres,
parce que dès qu'il eH Négociant, il eH obligé d'en avoir;
le refus, il ef!: vrai, de les exhiber n'eH pas une preuve
d'QÙ l'on puiffe conclure l'ufure; mais c'ef!: une indice de
plus. En vain diroir-on que les Juifs ne font pas obligés
d'en avoir, & conféquemment d'en remerrre; la Déclaration de 1769 rendue pour ceux du Comtat les y oblige
expreffémenr.
Mr. l'Avocat-Général difcuta les moyens de caffation
propofés par les Beaucaire; d'abord des fins de non recevoir vis-à-vis du fieur de Flote, une inltigarion générale vis-à-vis du fieur Rapalli, enfin le défaut de preuve
vis-à-vis de l'un & de l'autre, ce qui rend, fuivant les
accufés, la procédure nulle & oppreffive, & opere conféquemment la caffation du décret de foit informé & de
tout ce qui s'en eft enfui vi.
Le fieur de- Flote efr non recevable, a-t-on dit, parce
qu'il ef!: fans intérêt, & que fa femme feule eH obligée,
parce qu'il efr fans aél:ion & que l'on a tranfigé fur l'ufure.
Pourquoi donc le fieur de Flote efr - il fans intérêt?
N'ell:-il pas eUcore débiteur des Beaucaire, puifqu'il efr
caution folidaire dans un contrat public paffé conjoinrement avec fa femme pour la fomme de 38°33 liv. 16 f.?
N'efr-il pas obligé, puifqu'il renonce à la loi du principal?
Il peut êrre aél:ionné avec fa femme, il peut même l'êrre
feu!. Si les contrars font ufuraires, n'efr - il pas léfé, &.
dès-lors n'a-r-il pas droit de fe pourvoir comme tous les
coobligés? doir-il recevoir la loi du principal obligé, quand
il peut être attaqué? doit-il attendre que le créancier l'attaque comme
caution?
Cela
pourrait
avoir lieu, s'il n'était
L. .
_
__ _
_
_
_....
_
4
.~
,.
�3~o
JOURNAL
qu'une -caution ûmple qui doit attendre d'être attaqué pour
avoir la faculté de fe plaindre, parce que fon aél:ion &.
fon ,exception auraient une même fource; il ne pourroit
êrre attaqué qu'après le principal obligé; le moment où
il le feroit, deviendrait celui de fa défenfe, & en feroit
le principe; on pourroit lui dire qu'il n'a que les aè1ions
réelles, & non les perfonnelles, & que l'aél:ion criminelle
efl: du nombre de ces dernieres. Mais ici c'efl: un cautionnement folidaire qui fubrage à taus les droits & aél:ions
de l'obligé avec renonciation à la loi du principal, qui,
pour aÎnli dire, n'a que le nom de caution, & qui lai/Te le
choix au créancier de choilir entre la caution & l'obligé.
Mais la Dame de Flote avoit obtenu des lettres de refcilion (ajoutent les Juifs); il falloit attendre l'événement;
le principal obligé prenait la voie civile; la caution ne
pouvoit jamais prendre la voie criminelle. Sans doute la
Dame de Flote avoit obtenu des lettres de refcifion ; mais
quel que fût leur événement, fon mari n'en avoit pas
moins intérêt. Si elles étaient admifes, la femme qui
était obligée ne l'était plus; mais il l'était toujours en
vertu de fes premieres négociations; les lettres de refcifion ne complettoienc que l'intérêt de la Dame de Flote,
& jamais le fien, puifqu'elles anéantiifoient à la vérité des
titres, mais qu'elles laiifoienc fubfifier ceux auxquels ils
avoient été fubrogés, dont ils ne vicioient pas le principe. Si au contraire elles étaient rejettées, la Dame de
Flote refioit obligée, & le fieur de Flote l'était auffi,
puifqu'il étoit caution folidaire & principal payeur. L'événemene des lettres de refcilion ne pouvoit donc jamais
remplir l'intérêt du fieur de Flote. La voie civile n'avoit
donc jamais été prife vis-à-vis de fes contrats. Il prétendoit les 'comrats ufuraires. La Dame de Flote au conrraire prérendoit être mal obligée, mais ne demandoit
pas la caifation abfolue & définitive de ces comrats; l'acrion n'étoit donc pas la même.
En vain les Juifs oppofent que le fieur de Flote avoit.
une quittance générale. des Beaucaire j il. ne leu: devoi5
�DU
PAL AIS
D Il
PRO V Il Nell:
3~ l
donc plus rien; il n'evoit donc plus d'intérêr. Il avait une
<juittance générale, mais ce titre ne faifoit que prouver le
tranfport de toutes les créances fur la tête de fa femme;
il ne les détruifoit pas vis-à-vis de lui, puifqu'il refl:oit caution folidaire, ou pour mieux dire, principal obligé fous le
cautionnement de fa femme; il avait donc intérêt, parce
que débiteur des Beaucaire, ceux-ci avaient une fûreté de
plus; au lieu d'un obligé, ils en avaient deux, & c'ell: ce
qu'ils prouverent par les premiers pas qu'ils firent vers la
Jull:ice.
Une feconde fin de non recevoir que l'on oppofe au lieur
de Flote, c'eH qu'il a tranligé fur l'ufure, & la tranfaél:ion
ne con rient point d'ufures nouvelles. Il eH de maxime qu'une
tranfaél:ion détruit au moins l'aél:ion criminelle. Cimenté par
la bonne foi & le confentement des parties, cet aél:e religieux doit avoir fan effet & rendre non recevable à fe
plaindre; mais au moins ( continua Mr. l'Avocat-Général)
il faut que cet acre exifte; un aél:e équivoque ne peut pas
être regardé comme tel; il faut que la tranfaél:ion fait écrite,
ou au moins à l'abri de tout doute; il faut que les conventions foient déterminées d'une maniere fixe & iavariable ;
il faut qu'une tranfaél:ion fur l'ufure contienne les fommes
principales, 'leur réduél:ion & la rénonciation à toute acrion
au fujet de ces ufures. L'aél:e que l'on a préfenté comme.
une tranfaél:ion n'a du tout point les caraél:eres dont on
vient de parler; ce n'ell: qu'une ohligatioa pure & limple
de la Dame de Flote, fous le cautionnement folidaire de
fan mari; elle fe reconnaît débitrice des fommes qu'elle
confeffe avoir reçu en efpeces, quoiqu'elle s'oblige pour fan
mari, comme les Beaucaire l'ont avoué dans leurs réponfes;
elle y déclare devoir employer ces fommes au bien de fes
affaires perfonnelles, quoiqu'elles foient la fuite d'une foule
de négociations de fan mari. Inutilement cherche-t-on à
prouver qu'il exill:e llne tranfaél:ion par les di/férens comptes
qui font dans la procédure; aucun n'a la moindre authenticité, aucun n'ell: ligné.
Donc les fins de non recevoir ne font l'oint admiŒbles,
�351-
JOURNAL
Palfant enfuire aux moyens fonciers, Mr. l'Avocat-Général
obferva qu'une infiigation générale efi l'examen [uivi de la
conduite de quelqu'un que l'on veut accu fer d'une fuire de
malverfations, d'une continuité d'abus qne l'on releve &
que l'on dénonce à la Jufiice. Ce ne fonr pas là les caracteres de la plainte du fieur Rapalli; il ne parle dans fa plainte
que des faits 'qui lui [ont perfonnels; il Y retrace la fuire
des ufures qu'il prérend avoir éprouvé; il fair prelfentir le
danger d'un abus général, mais il fe le par.ricularife par une
expofirion fui vie contre des Juifs défignés, & où tour paroît conforme à l'efprir & à la lenre des Ordonnance. ,
parce qu'il n'y parle que des faits qui le regardenr perfonnellement. Les plaintes des fieurs de Flore & Rapalli ne
font pas viciées par elles-mêmes; le décret ne peut donc pas
être caifé fous ce rapporr.
S'il n'exifte point de délit, ou fi la plainte a été exagérée jufqu'à rraveftir en délir ce qui ne l'éroir pas, fi la
plainte dt abfolument calomnieufe, fi l'informarion ne
fournit aucune rrace d'ufure, fi elle ne porre que fur des
faits érrangers au plaignant, alors la procédure efi abfolument oppreffive ; dès-lors elle doir entraîner la caifarion du
décret de foie informé. Tout eft nul vis-à-vis des fieurs
de Flote & Rapalli, fi leur procédure, dénuée de roure
efpece de vraifemblance, n'a produit qu'une infiigarion
générale; ma is s'il exiHe quelque indice du crime dont
ils ont accufé les Beaucaire; Ii, fans l'avoir prouvé, ils
peuvent le faire foupçoiJl1er; fi leur informarion vocale ou
-linéraire fournit des indices violens, alors rout doit êrre
entretenu; le décret de foit informé efi valide par les circonftances; le décret de prife de corps devient néceifaire
par les indices; jugement prépararoire & d'infiruaion, il
n'influe en rien fur la condamnation. Des indices peuvent
ne pas devenir des preuves; les Beaucaire en fin de canfe
peuvent être mis hors de Cour; mais de ce qu'il n'y aura
pas aifez de preuves pour les condamner, on ne peut conclure qu'il n'yen avoit pas aifez pour les décréter de prife de
corps, qu'il n'y avoir pas lieu à informer. Souvent le tirre
feul
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•
DU
PAL'" 1 S
D E
PRO VEN C B.
3 ') 3
feul de la plainte amorife le décret de foit informé; des
indices, fur-tout en matiere d'ufure, néceffitent. celui de
prife de ·corps.
Mr. l'Avocat-Général examina enfin fi ces indices exiftoient ou non; il réduiut toutes les raifons alléguées en
trois genres de preuves; preuves négatives, c'eil:-à-dire, défaut de rémiifion de livres'; preuves poutives , c'eil:-à-dire,
les tÎtres écrits ou les dépofitions des témoins; preuves
avouées, c'eH-à-dire, les interrogatoires des accufés.
En général, l'ufurier eil: obligé- de remenre fes livres,
foit· en matiere civile, foit en matiere criminelle. ~n vain
les Juifs diroient-ils qu'ils ne devoient point en avoir. Des
Arrêts rendus prouvent' le contraire, & entr'autres _ceux
de 176) & .1767; ces Arrêts, civils à la vérité, fe font
contentés du défaut de rémiffion de ces livres, pour en conclure l'ufi.lre; ils ont jugé que le fait feul fuffifoit pour l'établir. L'on ne veut certainement pas ufer de principes auffi
rigoureux en matiere criminelle; le défaut de· rémiffion
peut prouver l'ufure au civil; au criminel, il ne fere que
d'indice; mais ces Arrêts établilfent au moins la Iléceffité
de ces livres: car, ou les Beaucaire font étravgers, c'eil:-àdire du Comtat, ou ils fe croyent domiciliés en France;
s'ils fe croyent domiciliés, alors ils font obligés d'en fuivre
les Loix; s'ils font du Comtac, ils doivent·, lîlivant l'arr. )
de la Déclaration du mois de Décembre 1769, aNo'ir un
livre journal !igné pdr premier & dernier feuillets, & ils '
font tenus de l'exhiber en JuHice à la req\li!ition des par:- .
ties.
Les mocifs d'une pareille Loi font exprimés dans le préambule: c'efl pour faire ceffir, dic Sa MajeHé, les ufùres les
plus o;ceflivn G' les plus crialltes par le(quelles les Juifs ruinoiem une il fi,dti de familles & colltriDuoient a appauvrir la
. généralité du pay" Comment pourroit- il arriver que cette
Loi tôt oublJée? EH-ce parce que le Comtat J palfé fous
\lne dominariotl diftërente? Mais la maxime en a-t-elle été
moins étal lie par nos Souveraios? Les Juifs ne font poiot
tolérés en Fr<lnce; voilà pourquoi de pareilles Loix ne font
Y Y
AlltléeS z775 & 777 6.
�;tH
.:'
l
0 U RNA L
.
pas néce1Taires; mais elles n'en font pas moins déclaratives
de l'ufage; elles manifèftem l'intention du Légiflwlur. Les
Beaucaire ont avoué qu'ils avaient un livre de caifIe & un
livre brouillard: pourquoi nè les ont-ils pas remis?'
.
Si les ileurs de Flote & Rapalli n'avoient p.as d'autres
preuves que le défaut de rémiffion des livres, leur procédure tèr-oit Dulie. Ce n'eit pas en effet fur de ilmpJe.s preuves
négatives que l'on peut établir une accufation criminelle,
a1Teoir un décret de prife de corps, condamner enfici à une
peine quelconque. De ce que les nommés Beaucaire n'auraient pas des livres, on ne pourroit pas conclure qu'ils
fu1Tent des ufuriers, & les en punir; mais fi les fieurs de
Flote & Rapalli ont d'autres preuves légitimes, ce défaut
de rémiffion en augmente le nombre, & les Beaucaire doivent être condamnés. Si les ileurs de Flote & Rapalli ont
d'autres indices légalement 'acquis, les induél:ions que l'on_
.doit tirer du défaut de rémiffio(l des livres peuvent leur
donner plus de force, & la procédure doit être confirmée.
Or ( ajouta-t-il) l'information, les pieces littéraires, les
réponfes des accufés, fourni1Te~t des indices, des préfomptians violentes de l'ufure.
Mr. l'Avocat-Général coqclut à la confirmation du décret
de foit informé, de tout ce qui avoit {ùivi, & de h Sentence
porcant injonél:ipn de remercre les livres.
Arrêt du 2.3 Mars 1''/76, prononcé par Mr, le Prélident
d'Arbaud de Jouques, conforme apx conclufions; les Juifs
furent condamnés aux dépens. Plaidant Mes. Simeon & SelJen
�DU
PALAIS
DE
PROVBNCl!~
E
ARR Ê T
3)')
2 ç
X X X V.
Le pere doit des alimens à fan fils & à fes petits-fils, quoique
le fils fe fait marié fans [on confente ment & après les aaes
refPeaueux; mais les doit-il hors de che~ lui?
Le fils ai1ifi marié ne peut être exhérédé.
Le heau-pere qui n'a ni approu1·é le mariage ni répondu la dot,
doit-il des alimens à fa helle-fille après la mort de fan
fils?
•.
E fils cadet de Flayofc, Maître Cordonnier de la ville
d'Aix, âgé de trente-trois ans, fit en I770 des fommations refpea.ùeufes- à fon pere; au fecond, le pere répond que bièn-Ioin de confentir au mariage de fon fils -aveè
la Dlle. Chaude, il le déshé-rite, s'il ofe pafler outre; lors
du rroifieme ,.il perfi.fre dans fa précédente réponfe; Flayofc
fils pa1Te Qutre,
marie, & reçoit en dot 2')0 IiI'.
Le peu de fortune qu'avoient les de,ux conjoints 'ne tarda
pas à leur préfenter la mirere pour tpme re1Tource; le mad
,<ouI ut tenter 'uo meilleur-fort dans les pays lointains; Il partit
.p'our le 'Cup letIO Oél:obre 1773, laiffant fa femtl1e'enceinte
de fept mois. D'abord, après fon dép<1rt, elle demanda -des
fecours à·lon beau-pere, & propofa l'arbitrage; Fbyofc pere
_confentit de ,donner à fa belle-fille une provifion de 1 ')0 li".
~pour·f:'rais -de couche & acée1Toires, & 40 IiI'. de penfion à
l'ènf.1nt à naître.
,
La Dne., Chaude ptéfenta' requête, & demanda -par fins
princjp-,n~s une penfioh annuelle de 200 IiI'. pour la nourriture & en'trétien de l'enfant, & une provifion de 400 IiI'.
'Rour fra is de couche. Flayorc la contefia, & par décret du
8 Oél:obre 1773, elle obtint une provifion de l'l0 Iiv., qui
lui fut payée; elle accoucha d'une fille, l'allaita pendant
quinze jours; & ne pouvant pas continuer, elle la mit en
nourrice; le b~au-pere paya pendant plus de dix-fept mois
L
re
X p.
�3~6
JOUANAL
pour cet enfant, & apprit enfuite que fon fils étoit mort.
Le i6 Juin 177~, la veuve demanda à fan beau-pere une
penlion alimentaire de 200 liv. pour elle, une penlion é~ale
pour fa fille, 100 liv. pour -les habits de deuil, & allignatian à jour précis pour Une provilion. Décret qui accorde
l'ajournement au fonds, & aŒgnarion pour la provilion..
Des Arbirres font nommés, & décident que Marguerite
Chaude doit être déboutée de fes prétentions propres, quant
aux alimens & an vidual; mais la quertion fur les habits de
deuil ne leur efl: pas propofée. Flayofc accepte les conditions portées par les Arbitres;' quant à fa petite fille, il
offre de la nourrir chez lui, ou de donner 6 liv. par mois
à fa Olere pour li nourriture jufqu'à l'âge de fept ans. Ces
offres n'ayant pas paru fatisfaétoires à Marguerite Chaude,
elle pourfuivit fa demande.
On difoit pour elle, que toutes les Loix érablilfent que
le pere doit les alimens aux enfans & à la femme de fan
fils; le titre entier dn digeHe de 'alendis & agnofcendis li6eris ac parenti6us en fournir la preuve affurée.
Flayofc pere oppofoit fon défaut de confentement au
mariage de fan fils, la menace de l'exhérédation, & une
forrune bien modique.
Mr. I~Avocar-Géoéral de Calilfanne examina, 1°. fi le
pere doit des aiimens 11 toure fa defcendance; s'il eH dû
des alimens au fils qui s'efl: marié fans le confentemenc
de fon pere, & en lui faifant des fommations refpec-.
meufes ; s'il a encouru l'exhérédation prononcée par fon pere
dans les fommations; fi les aiimens font dus par le pere
hors de chez lui; s'ils font dus aux petits-eofans nés d:un
mariage fait fans le confentement du pere: 2°. fi le beaupere en général doit des alimens à fa belle-fille; s'il lui en
. doit hors de chez lui; s'il lui en doit quand fon fils s'ell:
marié fans fon confentement, & quand il n'a point reçu
de dot, & s'il lui doit les habits de deuil.
Rien d'auŒ favorable faos doute que là quefl:ion des alimeM en général, rien d'aulli faeré; le droit naturel, les
premieres notions du. vr.ai nous apprennent que ce n'eH: pas
�D U
PAL AIS
D E
PRO VEN C E.
3 'i7
~lI'ez de donner l'exifience, il faut la confirmer.& la fou-
,
tenir. De pareils objets n'ont pas befoin de Loix pour être
fentis; l'homme ne jouit pas de fan être & de fa fortune,
s'il ne donne l'un & ne partage l'autre; il fam ,être homme
pour fentir ces vérités; il faut être pere pour les apprécier.
Nul Légiflateur ne les a méconnues dans les premiers fiedes, c'efi-à-dire au moment, pout ainfi dire, oÙ l'Univers
ne compofoit qu'une feule & même famille, où tout le
monde fe croyait f~ere, tout était commun; 'le partage des
biens fut une conféquence néceffaire des Loix pofitives &
civiles; la communauté générale fut divifée en autant de
communautés particulieres qui formerent les familles; le chef
fàns doute eut une autorité. Les Loix n'oublierent jamais
que fi c'étoit un bienfait d'avoir donné l'être, c'étoit un
crime bien plus grand que de l'ôter; c'étoit bien mériter de
la patrie que de lui donner des citoyens; _c'étoit fe rendre
coupable d'un crime affreux, c'était être homicide que de
refufer de les nourrir. Auffi nous voyons plufieurs titres du
digefie & du Code fur cette matiere; ceux de olendis ,;;,
agnofcendis liheris, de alendis liheris oc parentiSus; le pere
doit des aliinens; mais en doit-il, quand le fils s'efi marié
fans fan confentement ?
Il faut dift-inguer les mariages faits par des mineurs,
c'efi-à-dire avant l'âge de trente ans, & ceux des majeurs,
c'eH-à-dire célébrés après cette époque; un mineur fans
doute qui fe marie fans le confentement de fan pere, ne
doit pas attendre des alimens; il méprifè l'autorité paternelle, il doit en reffentir le poids. D'ailleurs /lOS Loix ont
voulu que ces fortes de mariages, fuffent nuls. Ainfi n'exiCtant point de caufe, il ne doit ni ne peut y avoir d'effets.
En vain citerait-on 'quelque Arrêt ifolé' qui aurait jugé le
contraire. Chaque caufe a fes circonfiances. La puiffance paterneIle , qu~ doi t avoir principalem,em en vue l'intérêt des,
enfans, a pu dans certains cas .dégénérer en injullice ; un
fentiment déréglé a pu prendre la place d'une affeélion lé-.
,gitime; dans ce cas, la fortune du pere éta!1t confidérable i
�3)8
Jou RNA L
les Tribunaux ont pu négliger la rigueur du principe; , pour
céder à des circon!l:ances d'équiré.
A l'égard du mariage du majeur, s'il n'a pas (atisfait à
ce qu'exige la Loi, il (emble que, doué de plus de connoi/fance, il mépri(e l'autorité patera'elle avec plus de
réflexion. Auffi nos Loix ont déclaré ces mariages inca pa..,
bles des, effets civil~, & il paraît que les. enfa'ns peuvent
être 'privés des aliniens. L'A rrêt du Parlement de Paris du
:2.2. Oétobre 1628, & une foule d'autres rapportés par tous
les Auteurs, viennent à l'appui de ce principe. Mais il ef!:
dû des alimens, lorfque l'enfant majeur de trente ans fait
des (ommations refpeél:ueufes. Les' Loix ont reconnu qu'il
était un âge où l'enfant pouvait librement fe marier. La
négligence des peres, l'abus qu'ils pouvoient faire de leur puiC(ance, le vœu de la nature, l'intérêt de la fociété, toutes
ces confldérations réunies ont paru légitimer l'atteinte que
recevait le pouvoir paternel par cette Loi. En re(peél:ant
l'autorité paternelle " on ne peut Ce diffimuler que les alimens tiènnent autant à l'état naturel qu'à l'état civil; qu'un
fils qui, parvenu à l'âge de trente ans, rend à l'autoriré paternelle tout ce que la Loi exige de lui, ne doit point être
privé des alimens; il n'a dans ce 010meru aucun reproche
à fe faire; des morifs particuliers, quelquefois même l'intérêt, peuvent engager un pere à s'oppô(er à l'établi/femenr
de (es enfans; & ces motifs, qui ne peuvent changer par
le mariage que fait (on fils, Cuivant la difpaÎltion de la Loi,
ne 'Peuvent pas lui faire iefu(er 'des alirnens.,
En vain oppoCe-t-ôn que FlayOfc pere, au bas de l'un des
aétes refpeétueùx, avoit menacé fon fils de l'exhérédation;
s'il fe marioit, canrre fon gré. Brodé.au [ur Louet, & une
infiniré d'autres Doétéurs (ernblent êrre d'avis que l'exhérédarion emporte le refus d'alirnens: ex 'lui6us cmifis filius
potefi. ex1zeredari, ex eifdem poj/imt alimenta denegari. Dumoulin eH:' éncore. plus fon: Ji pater poteJl exherdare, dit-il,
!orciùs potefi dénegare alimenta; parce que l'exhérédation
ronipt
'quelque rnaniere les liens .de la narure: ex1zere...
en
�DU
PAL A
~S
DE
PR 0 VEN C E,
3~9
'datio 'e>;tinguit jus filii, dit Cujas. fur la Novelle.22.. Mdis
~'un autre côté, l'exhérédation ne devant avoir fon effeç
qu'après la mort du pere, il ne peut pendant fa vie refufa
des alimens à fon fils; les regles de l'équité naturelle femblent favorifer cette prétention; les Loix civiles femblenc
concourir avec elles. Sans cela, il n'y aurait prefque plus
de différence enrre l'exhérédation & l'abdic<\tion dont l'ufage
a été aboli. Auffi Grotius dans fan traité de jure belli. &
pacis, chap. 7, n. 1, vent que fi l'exhérédation a lieu, le
pere ne puiife s'en fervir qu'en pourvoyanr ~ la fubfif!:ance
du fils déshérité.
Le fils peut-il même être exhérédé, p.arce qll'il fe marie
fans 1e .confenrement du pere ( continua Mf. l'AvocatGénéral) ? S'il ülloit décider cette quefiion d'après les
Loix romaines, il ferait mal aifé fans doute de décider
. en faveur du pere. Il efi bien vrai que la Loi des douze
Tables donnait le pouvoir arbitraire aux peres de déshériter leurs enfans; mais des abus réitérés firenr ouvrir
les yeux à ceux qui exerçaient l'at;torité, & ils modérerent la rigueur des Loix par les regles de l'équité, en
mettant des bornes à un pouvoir devenu cruel & tyrannique. On trouve à la vérité dans le Code & <jans le
Digefie le mariage fait contre la volonré des parens,
comme une caufe d'exhérédation; mais il fallait pour les
enfans mâles, comme nous l'apprend le §. fi emancipatus
de la' Loi 3, if. de bonorum pojJèjfzone contra Tabul., que
l'alliance de la perfonne déshonorât la famille : fi gràvem
& inhoneflam injuriam parentibus fuis fecerit; condition qui
(e trouve confirmée dans le chapitre 3 de la novelle 1 l 'i
de Jufiinien.. Telle était la Jurifprudence romaine;. Il
femble que nos Loix ont été plus féveres filr ce point.
·L'Ordonnance de Henri II. de 1 S) 6 veut que les enfans
de famille qui contraaeront des mariages clandeflins contre
la volonté de leurs peres & mere~, pui.ffent être déshérités,
fans efPérance de pouvoir quereller l'exhérédation. Point de
ref!:riél:ion dans cetce Ordonnance au cas feul de l'indignité
'de la p'erfonne;
.. elle comprend tous les mariages; elle y
�3~
JOURNAt
mer pourrant une exception portée dans l'arr. 4 : lorfqu~
le fils majeur de trente ans, y ell: - il dit, s'efl mis en
devoir de requérir l'avis & confeil de fes pere G' mere, avant
de pajJèr outre au mariage., Cette Ordonnance, il ell: vrai,
fut faite fur les in!l:ances d'un Connétable de France,
pour empêcher que fan fils ne contraél:ât un mariage déshonorant; mais elle n'en ell: pas moins une Loi générale-,
renouvellée par l'Ordonnance de Blois, arr. 41, confirmée
par celle de 1629, arr. 39, & clairement expliquée par
celle de 1639.
Nos Ordonnances font donc d'accord avec le droit
romain da'ns cette caufe, pour décider qu'il ne peut pas
y avoir lieu 11 l'exhérédation, quand le fils a fait- des fommations refpeél:ueufes après - l'âge de trenre ans; mais ces
mêmes Loix ne difent pas que d_ans ce cas le pere fera
fournis 11 donner des alimens. Les -Loix, en affranchiifant
de la peine d'exhérédation, pourraient néanmoins avoir
permis aux peres de refufer des alimens à fan fils, parce
que le pere qui lui laiife fa légitime ne le prive de rien
pendant fa vie; la Loi jugé feulement dans le cas déligné,
que le reifenriment paternel ne peut s'étendre au delà du
trepas; au lieu qu'en Toumerrant le pere 11 foùrnir des alimens à fan fils, c'ell: l'obliger en quelque forte de concourir 11 un mariage qu'il imprquve ; néanmoins les Loix
ne prononc;a-nt pas dans ce cas particulier fur le fait des
alimens, fe réferent par leur filence fur ce point 11 la difpofition du droit commun. Il faut donc conclure que le
fils marié après trenre ans avec des fommations refpectueufes ,ne peut ni êrre exhérédé, ni être privé des alimens. Ainli Flayofc pere a dit inutilemenr dans une des
fommations que fan fils lui tint, qu'il l'exhérédait, parce
qu'il ne pouvait pas l'être. Son pere lui davoit des alimens;
mais les lui devait-il hors de chez lui?
Tout le monde connaît la diftinél:ion célebre entre les
alimens dus
-lege aut ah homine. Ces derniers réfultant
d'une volonté certaine & dérerminée peuvent être fujets à
des conditions que l'on doit remplir; les autres ne tirent
de
a
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
361
de conditions que de la nature & de la Loi. La définition même des alimens, qui fous ce nom comprend l'habitation, eU une nouvelle preuve de cette vérité; d'ailleurs
le même toÎt & la même table femblent des occafions
de relferrer la tendrelfe naturelle entre un pere & un ~n
fant. _Un pere fouvent peut nourrir fon fils à fa table, &
ne le pourroit pas, s'il falloit lui donner des alimens hors
de chez lui; enfin le pere devenu aïeul par la nailfance de
fes petits-enfans, ne peut leur refufer des alimens, quoique nés d'un mariage auquel il n'a pas confenti ; c'eU ce
qu'établilfent la nature, l'équité & la Loi : hoc fjuofjue in
omni6us afcendenti6us & defcendemi6us, utriufque naturœ valere prœcipimus.
Mr. l'Avocat-Général palfa enfuite à la feconde quefiion.
Le beau-pere en général doit-il des alimens à fa belle·fille?
Sous quelque point de vue qu'on la confidere, il femble
qu'elle ne falfe plus qu'une feule & même perfonne avec
fon mari, jilll.t duo' in came unâ. Il femble que le même
devoir naturel qui oblige le 'pere à fournir des alimens à
fon fils, l'oblige également à nourrir fa belle-fille, au défaut de biens de ce fils, par la raifon que les Loix qui impofent au. pere cette néceffité,.le foumettent auffi à toutes
les charges que fon fils doit fupporter .nécelfb(irement: non
talltùm alimeTlta, verùm etiam cœtera fjuofjue one1<a liherorum,
pater de6et prœhere, dit la Loi. Le mari étant obligé de
nourrir fa femme, le pere ne peut refufer des alïmens à
fd belle-fille, lorfqu'il efi obligé de nourrir fon fils; le beaupere & le gendre, dit la Loi, paremum li6erorumve loco
funt; prefque touS les Auteurs conviennent en général de
cette maxime, & une foule d'Arrêts l'ont·confacrée. En effet
la femme du mari ell: la belle-fille légitime du pere, c;
qui cO,nll:irue l'oblig~tion natu,rell:; ~lle efl: fa belle ~ fil.le,
. fecundum JUs, ce qUI forme 1ob1JgatlOn legale; l'ob1JgatlOn
naturelle eil: indépendante des fentimens du pere; qu'il aime
ou non [es enfdns, il doit les nourrir; & dès que les alimens font dus au petit-fils, la même rai[on milite pour
leur mere; une belle-fille tient lieu de fille; & à défaut de
Z z
Années %775 & %77 6•
�361.
Jou il.
N A L
mari, le pere en: tenu de l'alimenter. AinÎl il parait qu'il
ne peut pas y avoir des doutes fur la queftioo générale;
le beau-pere, après la marc du fils, doit des alimens à (a
belle-fille, mais il ne les doit pas hors de citez lui.
En vain alléguerait-on qu'elle eft en procès avec fan beaupere. Si cette raifon pouvait pefer, ce ferait violer l'efprit de
la loi; ce ferait favorifer les mariages faits fans le confentement des peres, ce ferait laiifer fouftraire les enfans à leur autorité; ce ferait même nuire à leur fortune, fans augmenter
celle de leurs enfans; ce ferait même autorifer la défunion dans
les familles. Tout enfant marié fans le confentemcnt de fan
pere viendrait demander des alimens hors de fa maifon, parcè
qu'ils feraient en procès enfemble. Mais le pere doit-il ces
alimens, lorfqu'i 1 n'a point ~pprouvé le mariage, & quandiln'a
point reçu de dot? C'eft ce qui p.aroÎt plus difficile à décider.
Car. enfin la J urifprudence conftante, & notamment l'Arrêt de
la Cour·du 24 Janvier 177 S, nOLIs apprennent qu'une fille majeure qui·s'eH: mariée fans le confentement de fan pere, ne
peur prétendre aucune dot; c'e!t le droit commun, qui difpenfe
les peres olltragés par le mariage de leur fille, de l'obligation de fournir cette dot. Comment fe poun:oit-il que la
belle-fille fe trouvât dans une pofition plus avantageu[e?
L'aïeul doit [outenir, [elon la Loi, non tantùm alimenta,
verùm etiam ccetera ol/.era liDerorum. Or, tous les Auteurs
& la Loi nous atteftent que le mari reçoit la dot ad jùftinenda onera matrimol/ii. Donc, quand le beau-pere n'en a
point reçu, quaud il n'en eft pas re[pon[able, il ne peue
pas être forcé à [ou tenir cœtera onera /iDerorum; c'eft-àdire, il n'eft pas obligé de fournir des alimens à fa bellefille, cùm non haDet undè 1:a fuflineat. Il femble qu'il feroie
bien dur de forcer un beau·-pere à fournir des alimens à
celle qui el!: entrée dans [a famille malgré lui, . & qui a
porté [on fils à violer fes droits de la puiifance paternelle;
il [emble que l'on ne peut pas exiger plus du beau-pere
vis-à-vis [a belle-fille, que l'on exigerait de lui vis-à-vis fa
fille propre; on ne pourrait pas l'obliger à doter celle-ci,
fi elle s'était mariée [ans [on con[entement; on ne doit pas
�·.
DU
PALAIS
DR
PROVENCE.
363
le forcer vis-à-vis fa belle-fille à lui donner des alimens
qui lui tiennent lieu de dot. Cependant Ji l'on con fuIte une
foule d'Auteurs, l'on verra que le beau-pere doit des alimens
à fa belle-fille, quoiqu'elle fait mariée invita patre {,. indatata. Ce fyltême paraît bien rigoureux fans doute; mais ne
l'elt-il pas auffi de vouloir que les fommations refpeél:ueufes
aient leur effet vis-à-vis du fils, ne le privant pas des alimens, & qu'ils en privent la belle-fille, quoiqu'ils ne foient
qu'ulle feule & même perfon~? Il Y a néanmoins plulieurs
Arrêts qui ont accordé lies alimens au petit-fils, fans. nommer leur mere, & cela dans l'hypothefe où le mariage
s'était fait fans le confentement du pere. Dans l'Arrêt rapporté par Boniface, le pere avait entre les mains la dot
de fa belle-fille, & avait d'ailleurs approuvé le mariage; au
lieu que dans le cas préfent, le beau-pere n'a point reçu la
dot de fa belle-fille; il n'en a jamais répondu, puifqu'il n'a
pas affilté au contrat de mariage de [on fils; le fils s'dt
marié fans le confentement de fan pere, & le pere n'a
donné aucune approbation. Pourrait-on conclure, d'après
cette difcuffion', qRe la belle-fille ne doi.t efpérer de fan
beau-pere aucune forte d'alimens? Elle n'en efi pas moins
fa belle-fille; elle porte fan nom, elle eH, ou plutôt eUe
fut la femme légitime de fon fils. De même que le con~
fentement du pere n'a pas été requis pour la validité du
mariage, le défaut de ce confentement ne peut pas priver
la femme des droits de cette union & des alimens, qui ne
dépendent pas du poim de favoir fi les enfans ont été de~
firés par l'aïeul, fi la belle-fille a été chaifie de fan gré,
mais qui dérivent uniquement de la qualité d'enfant & de
belle-fille. Cependant il eH un autre point de vue fous
lequel cette caufe paraît moins favorable fans doute pour
la belle-fille. Si de pareilles demande.s étaient amorifées,
à quoi ferviroient les réclamations des peres? Quel fmit
pourraient avoir les oppolitions aux mariages les plus dan.
ge.reux? La' fé<;!uél:ion auroit un degré de force de pIns,
parce qu'elle ferait plus fûre de l'impunité; elle aurait même
un aV'!iltage, pour ainfi dire, certain. ,Une fille qui n'auroit
ZZ2.
�364
Jou
RNA L
rien, fe livrerait à un jeune-homme; elle Je meneroit jufqu'au moment f~tal pour lui où ayant acquis l'âge de trente
ans, il pourroit fe marier fans le confentement de fes parens & avec quelque vaine .formalité; & alors cette fille
n'ayant rien, & n'ayant peut-être que trop connu la débauche, feroit fÎlre d'avoir toute fa vie un pain affuré, plaideroit avec fon beau-pere, & le forceroit par-là à lui donner
des alimens: De pareilles maximes feroient contrai res au
bien de la fociété, puifqu'<,;lles an~antiroient, pour ainli
dire, l'autorité paternelle; elles nuiraient au bien public,
puifqu'elles confondraient tous les états; elles acheveroient
de porter atteinte aux mœurs, auxquelles le luxe & la débauche n'en ont déja que trop porté. Ces inconvéniens,
terribles fans doute, feraient capables de fixer une détermination; mais on trauve dans les circonftances d'autres
motifs faits pour perfuader: le peu d'aifance de Flayofc
pere.
Mr. l'AvocBt-Général examina enfuite fi la belle-fille a droit
d'exiger des habits de deuil; il obferva que la Jurifprudence
& l'ufage fur cet objet font différens dans les diverfes Cours
fouveraines du Royaume. Il paraît en Provence, comme
l'anefte Duperier, & au Parlement de Touloufe, comme
le dit Catelan, qu'ils fuivent le privilege des frais funéraires; dans d'autres Parlemens, ils n'ont pas plus d'avantage
que la dot; cependant il peut arriver des occafions où ils
ne foient pas pris fur les biens du mari, & à plus forte
raifon fur ceux du beau-pere, c'eft-à-dire, quand le mari n'en
a point, & que le beau-pere n'a point re~u de dor. Il filt
jugé, dit Catelan, en 1699 que le pere refponfable de la
dot, ne l'éroit ni des frais funéraires, ni de l'habit de deuil;
à plus forre raifon quand il n'a point re~u de dot. Il femhle, ajoute Catelan, que dans le cas où le pere doit répondre de la dot reçue par le fils, "il doit la payer en entier;
fju'ainji c'ejl d lui d payer les honneurs funebres de [on fils,
G' conft'luemmem les hahit§ de deuil. Ici le pere n'a ni approuvé le mariage, ni répondu la dot.
" En vain dirait-on que la femme dehet lugere fumptihus
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE;
365
hœreditatis mariti. Cette maxime en vraie en général, mais
elle fuppofe que le mari a laiffé quelque bien; quand
H n'a rien laiffé, elle doit pleurer à fes propres dépens.
Aucune Loi n'a dit qu'elle dôt pleurer aux d~pens de l'héritage de [on beau-pere, [ur-rout quand ce dernier n'.t
pas confemi au mariage, & qu'il n'a point reçu de dot.
I! n'el!: per[onne qui ne [ache que l'obligation où fe
trouve le pere de fournir des alimens, ne [oit [ubordonnée
à l'état de fes facultés. Or, il eil: prouvé en fait que
Flayofc fe trouve hors d'état de donner à [a belle-fille ce
qu'elle demande, & il è11: inconteHable qu'il doit être mis
hors de Cour.
Mr. l'Avocat-Général conclut à ce qu'ayant aucunement
égard à la requête de Marguerite Chaude du 16 Juin
1775' Flayofc fût condamné à fe charger de fa petitefille & à la retirer chez lui, fi mieux Marguerite Chaude
n'aimoit s'en charger elle-même jufqu'à l'âge de fept ans,
auquel cas Flayofc [eroit condamné à lui payer la Comme
de 10 liv. par mois & par avance; & à ce que [ans
s'arrêter au furplus des fins prifes par Marguerite Chaude,
Flayofc fût mis' hors de Cour & de procès.
Arrêt du 16 Février 1776, prononcé par Mr. le Préfident de St. Vincent, qui condamne Flayofc à fournir
les alimens à fa table à fa petite-fille, fi mieux il n'aimoit payer une penfion annuelle de 10 liv. jufqu'à l'âge
de fept ans, de trois en trois mois & par avance, &
déboute ~arguerite Chaude du furplus de fes fins, dépeQ~
compenfes.
�•
JOURNAL
ARRÊT
XXXVI.
Bâtard qui demande d'être déclaré jils légitime.
__
La légitimation par mariage fubftquent ne peut avoir lieu ,
fi le mariage n'a pu être contrac7é lors de la naif1ànce de
l'enfant.
Si lajiliation efl certaine, la légitimation efl opérée de plein droit
par le mariage fuhftquent, etiam invitis parentibus.
Efl-elle opérée, fi le mariage fuhftquent efl tenu fecret?
Quelles font les preuves de l'état des hommes? La preuve par
témoins peut-elle être reçue? .
Mars 1775, Pierre Mafvert préfenta une requête
à la Cour; il Y prit la qualité de fils naturel de Me.
Pierre Coye de la ville des Baux, vivant Avocat en la Cour.
Il expofa que le 20 Oétobre 1750, il nâquit des œuvres de
f~u Me. Pierre Coye, fut baptifé dans la Paroiffe Ste. Marthe
de la ville de Tarafcon, fous le nom de Jean Mafverr, fils
naturel de Pierre Mafvert; que Pierre étoit le nom de baptême de Me. Coye, & Mafvert celui d'un domaine qu'il
poffédoit; que Me. Coye lui avoir toujours donné des marques de prédileél:ion & de tendrelfe; qu'il ne fut pas plutôt
tiré des mains de la nourrice qu'il avoit choilie, qu'il le mit
à l'école, lui fit faire fes études & la philofophie, le plaça
enfuite en apprentiffage chez un maître Droguifie 11 Avignon,
où il le nourrit & l'entretint toujours' fort honnêtement;
qu'il lui avoit promiS' de lui laiffer un legs à titre d'alimens,
qui le mettroit à même de continuer de vivre dans l'état
où il l'avoit élevé, & de lui donner une boutique, 10rfqu'il ferait en âge de la régir; que ce n'était pas à lui feu!
que Me. Coye avoit tenu ce langage, mais à tous ceux qui
s'intéreffoi;)nt à fon fort; que Me. Coye fit en effet un teftament folemnel quelque temps ·avant fa morr, qui fut foufctit par Me. Dertes, Notaire; qu'il était affuré que M~.
L
E
22
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
367
Coye l'y trairoit en pere tendre, &c. Il demanda injonc-
tion aux héritiers de feu Me. Pierre Coye de faire procéder, dans cinq jours précifémenc, à l'ouverture du tefiament
folemneJ, autrement ajournés pour le voir ordonner. Décret
conforme. Le tefiament fut ouvert; Mafvert n'y éroit point
nommé. Le 3 Juin 177'), il fit affigner les héritiers de Me.
Coye au paiement de la fomme de 40000 liv. pour acheter
un fonds de boutique de droguifie qui le mît à même de
continuer le métier que Me. Coye fon pere lui avoit fait
prendre, & ce à titre de dotation, & à celle de 1000 liv.
par forme. de provifion. Le 19 Oél:obre fuivant, il préfema
une requête incidente, dans laquelle il fe qualifia fils légitime de feu Me. Pierre Coye, & de Petronille Lenfolat; il
produifit l'aél:e des époufailles de fon prétendu pere avec
elle, commua fes fins principales, abandonna la filiation
bâtarde, demanda d'être déclaré fils légitime de Me. Coye
& de Petronille Lenfolat, avec pouvoir de porter le nom
& armes, & demanda la calfation du tefiament pour caufe
de prétérition.
.
Le même jour Mafvert offrit un expédient; il offrit, fans
préjudice des preuves réfultantes_ du procès, de prouver par
toute forte & maniere de preuves, qu'il étoit fils de Me.
Pierre Coye & de PetroniJ1e Lenfolat, & notamment
la. que dans le mois de Septembre 17So, la Dlle. Petronille Lenfolat s'abfenta de la maifon de feu Me. Coye ,
où elle réfidoit, & Y revint enfuite après la nailfance de
0
Mafvert; 2. • qu'à la même époque, Jofeph Lenfolat, pere de
Petronille, infiruit _que Fran<;oife Daillan, époufe de Louis
Marrel, Ménager de la ville de Saint-Remy, cherchait un
enfant à allaiter, vint. lui en offrir un mâle, la priant infiemment de s'en charger, [ous la promelfe d'un honnête paiement; que Lauife Marrel voulant favoir à qui appartenait cet
enfant, Lenfolat refufa d'abord de l'éclaircir- fur ce point,
&, lui dit feulement que cet enfant teno"Ït à une- famille
honnête. Sur le refus obfiiné fait par Marrel & Françoife
Daillan de s'en charger fans connoÎtre le pere, Lenfolat leur
apprit qu'il étoit fils de Me. Pierre Cpye, réfidant aux Baux •
•
�368Jou RNA L
que par certaines conlidérations, on lui· avait donné le nom
fuppofé de Mafvert, & qu'on le feroir connaître enfuite pour
le. fils de Me. Coye; 3°. que ceux-ci s'étant chargés de cet
enfant, ils le foignerent pendant le temps que les enfans
font en nourrice; que les mois & les langes qui étaient néce1faires à l'entretien, leur étaient fournis par Me. Coye,
qui encou.rageoit fans ce1fe leur attention & leur amitié;
4°. que pendant tout le temps de la vie de l\Je. Coye, il
avait fourni la nourriture & l'entretien à Mafvert, lui avait
donné un maître à lire & à écrire, un autre de la latinité.
qu'il lui avait même fait faire fan cours de philo(ophie,
l'avait enfuite placé en apprenti1fage à Avignon chez un
Marchand Droguill:e; So. que lor(qu'il était en nourrice ou
chez les Maîtres, Me. Coye venait le voir très-Couvent ,
l'appelloit (on fils, l'exhortoit à être bien (age, & s'en difait le pere; 6°. que la Dlle. Petronille Lenfolat accompagnoit (auvent Me. Coye, venoit elle-même voir Ma(verr,
l'appelloit (on fils, & lui donnait toutes les marques de
maternité & de rendre1fe; 7°. que Celice Poncet, marraine
de Ma(vert, étoir, lors de la nai1fance de cet enfa-nt, au
fervice de Me. Coye; 8°. qu'il exill:oit une parfaite relfemblance entre Ma(vert & Me. Coye, (oit dans les traits, fait
dans le (on de voix; 9°. que Ma(vert était réputé publiquement pour être le fils de Me. Coye & de Perronille 'Lenfolat; 10°. qUe Petronille Lenfolat avait avoué êrre la mere
de Pierre Mafvert ; que taut le bien qu'elle po1fédoit appartenait à (on fils, & que pour plus d'a1furance, elle ferait
un tell:ament en fa faveur; Ilo. que Petronille Len(olat était
regardée par Me. Coye (ous la qualité qu'elle avait, c'eH-àdire, comme (on épou(e, vivant (ous le même toit & à la
même table; 12°. que dans les derniers momens .de fa vie,
Me. Coye demanda avec inHance de voir & de parler à
Mafvert fan fils, & à fan pere & à (a mere nourriciers, &
que ceux qui avaient foin de Me. Coye lui refuferent cette
fatisfaétion, & prirent tous les moyens convenables pour
écarter de lui toutes les perfonnes qu'il demandait.
Le 24- Février 1776, Mafvert préfenta .un nouvel expédient,
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
.
369
dient. Il fixa dans le fecond fait le moment de la naiff.1nce
au mois d'Oél:obre. II ajouta dans le quatrieme fair, que
les ldnges avaient été auffi fournis par Perronille Lenfotar. Le
8 Mars 1776, il donna un rédigé de conclulions, & conclut fublidiairement que là où la Cour trouverait ql;lelque
difficulré à recevoir fan expédient du 24 Février 1776, avant
dire droit à fan exploir libellé, il prouverait qu'il éroit
fils narurel de Me. Pierre Coye; il arricula enfuite dix faits
concernant Id filiarian bârarde, dont les trois premiers étaient r
les fecond, traifieme & quarrieme fairs de fan expédient;
les rroilieme & quarrieme érabliffaient que fan apprentiflàge
avait éré payé de l'ordre & de l'argent de Me. Coye par Me.
Moreau, qui pendant cet apprentiffage lui payait une penlion
de la part de Me. Coye. Les lixieme, feptieme & huitieme
éraienr les cinquieme, huirieme & dauzieme de l'expédient.
Le neuvieme établiffoit la cominuiré de la fublifiance fournie par le lieur Coye & fan fils après la more de leur
frere & oncle. Edin il rappelloit l'aveu réiréré du lieur
Coye fils, que le nommé Mafverr éroit fan parene. &, le
fils de fan oncle; il demanda une provilion de 30co liv.
On difoit. pour Mafvere,. que fan expédient étoit' fondé
fur les principes, appuyé fur des faits précis pour conItarel'
la filiation, adoptés par la Jurifprudence des Arrêts, enfin
à l'abri de rout autre tirre. II était fondé fur les principes,
parce que li rien n'efi plus effentiel à l'homme que fan élat,
il n'efl: rien en même temps qui lui pa,oiffe plus obfcur.
C'efl-, pour aioli dire, un myaere à expliquer, & fur lequel
les probabilirés & les' conjeél:ures doivent tenir lieu de
preuves authemiques; auffi la preuve par témoins ea-elle
admife en fait de filiarion. Les aél:es, les préfomptions, les
témoins, tels fom les trois genres de preuve qui peuvent
fe rencomrer dans les quefl:ions d'Erat. Les rémoins doivem être fourenus par la foi des aél:es ou par la force des
préfomprions ,& la preuve de la filiarion doit être 'accordée
<Juand elle ell: appuyée fur des préfomptions fol ides.
les commencemens de preuve pJr écrit deviennent des certirudes; ce fom l'éducation fournie au nommé Mafverc peu-
lei
Années l775 ç;, l77 6•
Aa a
�370
JOURNAL
dant la v~e ,de Me. Coye & de Petronillè Lenfolat, &.
depuis leur mort par leur .pa'renr; leur conerat de mariage;
le teftament de Me. Coye; l'aveu de Len(olat aïeul macernel de Mafve.rt; le témoignage écrit des pere & mere
nourricier», & prefque ulle poffeffion fuivie & une fuite de
reconnoiffance de la parc de ceux qui lui ont donné le jour.
Me. Pierre Coye & Petronille Lenfolat Ollt nourri &
élevé Mafverr depuis le moment de fon exiftence; ils 09t
fourni f()igneu(e~ent à fon entretien, lui ont fait apprendre
à lire, luj ont fait faire [es études, lui ont payé fon apprentilfage; J\1a(vert lui doit donc le jour. L'éducation,
fuivaot la Loi, la raifon & la nature, ell la preuve la plus
sûre de la filiation, parce que, fuivant les Auteurs, c'eft
une (econde naiffance, & qu'elle réiifte même au défaveu
de [es pere & mere.
COQferver l'être & le rendre utile avec autant de vivacité,
c'eft prouver infailliblement qu'on l'a d-onné. La conduite
de Me. Coye & de Petronille Lenfolar a trahi leur file Il ce ;
leur affeél:ion & leur tendreffe ne permettent pas de méçonnaître la voix de la nature. L'éducation ell prouvée de
la part de Me. Coye & de Petronille Lenfolat; elle l'ell
de la part des pa re ilS de Me. Coye, d'après les lettres
qui ont été produites; on y voit .qu'ils vouloient acheter
\ln fonds de boutique à Mafverc, qu'ils lui faifoient une
l1eniion annuelle, qu'ils s'inréreffoient à lui <comme à un
proche parenr. Tient-on cette conduite vis-à-vis d'un inconnu, & eft-on auffi gén~reux fans motif? Mafvert tient
donc à la famiHe du fieur Coye, parce que [es parens qui
l'ont reconnu 'pour le leur, l'ont éduqué, lui ont promis de
lui faire un fort, & ont établi fon état.
Outre l'éducation, Mafvert a un titre plus fort & plus
[olide que tous les, commence mens de preuve par écrit,
'e contrat de mariage de Me. Coye & de Petronille Len[O/at; <jÇ);e religieux & [acré, qui forme le titr~ conftitutif
de (on état. Muni de cet aél:e, ne doit-il pas lui· être permis de percer l'obfcurité de [a naiffance? Il n'a pas été
IeCOnnU , il eft vrai, lors. de ce contrat; mais la Loi qui
�DU
PAL AlLS
D li
P RJ? VEN C li.
311
a fixé les droits du mariage' fubféquene, veilloie pout lui,
& ce mence n'a pu lui préjudicier; il néceffire mé-me enc.ore plus la preuve. Ee refpetl: humain ou quelque autré
motif Pont occafioné; Me. Coye luttant à la fois entre
l'amour '. la nature & le préjugé, l'a oublié au momene
de fon mariage, comme il a méconnu fan' époufe dans fan
tell:amenr; nouvel aa.e qui érablit la néceffité d'admettre
la preuve de la filiation.
_
A lOutes ces préfomptions fe réunit l'artell:ation de fes
pere & mere nourricier-s, témoins néceifaires. & parlaIit
rorione cdficii de fairs graveS" & circonfranciés; attell:ant
l'aveu d.e· Bierre Lenfolae aïeul de Mafvere, au mOmene
de. fa' nailfance, & érant, pour ainfi dire, les feuls confi€lens de fon origine. La preuve de Ma.(vert ell: donc
fondée en principes, appuyée fu des aél:es, & ne préfentant que des faits conduans & décififs. Pen onille Lenfolat fuit qllelques momens avant la naiifance de Mafvere
la maifon de Me. Coye; elle accouche dans une de. fes
maifons de campagne; & dérobe ainu fan erreur & folt
accouchement à l'œil curieux àu public. Une femme- au fervice de- Me. Coye, Cecile Poucet, la fuir, ell:' fa feule confidente' , lui fere de fage~femrne, &. dl: marraine de l'enfant auquel Petronille r:enfolat donne le jour. P.ierre' Lenfolat, plein de zele pour' dérober le déshonnl!urde fa
famille, porte lui-même cet enfant en nourrice, le dédare'
fils de Me. Coye, ajoure que le nom de Mafvert. eft: fup"
pofé, & que de certaines, conudérarions le lui Ont f<fit
donner. Cer enfant avance en âge, & re~oit, des'fecours
de Me. Coye & de Petra nille Uenfolar; un âge aufE rendre'
ne peut inrérelfer'que ceux qui ont donné le jour à' celui'
qu'ils font élever. La' voix publique a fouvent répété que·
Me. Coye &' Petronille Eenfolat en étaient les feuls, auteurs. Me. Coye vient' voir cet enfant; alors tour préjugé
celfe, le refpeél: humain ell: fans force; il le reconnoit,
le carelfe, l'aime, l'exhorte, le nomme fan fils, & l'on
ne voudrait pas l'en croire! Dans ces mornens de vérité,
Petranille Lenfolat fe livre aux mêmes rranfports : eH - il
A a a 2.
�371.
Jou
R. N'A L
permis de croire qu'elIe en eut agi ainli, li elle n'eût pas
été fa mere? C'eH donc de fèS propres parens que Mafvere apprend fon état; aveu bien précieux, felon IOUS les
Aureurs & tous les principes.
La reifemhlance avec Me. Coye s'accorde .avec des aVEUX
3ufIi précis, pour inréreifer encore davantage en faveur de
Mafven. Tout le monde croir dire vrai en penf'lI1t d'après
{on pere; mais il femble que le malheur pourfuive cet enfant infortuné. Petronille Lenfolar là mere, donr le mariage ne fur jamais fecret, puifqu'il fur célébré avec roures
les formalirés prefcrires par l'Ordonnance de Blois, &
qu'elle vivait fous le même toÎt & à la même rable que
Me. Coye, lui promet tOUt fan bien, projette un reflament
en fa faveur; une more inopinée l'en empêche. Me. Coye
le demande dans fes derniers momens; il veur le voir, le
reconnoîrre, aiTurer 10n état; fes héririers s'y oppafent,
& rriomphent d'une volonté déja rrop afloiblie.
Telle eH la fuire des fairs conflans dont Mafvert derpande la preuve, qui doit être admife, parce qu'elle e!1:
d'accord avec les principes & ·la jurifprudence. Combien
d'Arrêrs l'one admife dans des cas bien moins favorables;
celui du lieur de Sainc-Vidal au Parlemenc de Touloufe,
conrre la déclararion expre!fe de fa mere à l'article de fa
mort, parce qu'il prouvait la filiation par l'éducarion , l'entrerien & le rrairemenr filial; celui de Tancrede de Rohan,
conrre le défaveu de fes parens , parce qu'il avait été élevé
dans la mai fan parernelle dès l'enfance; celui de Marie
Abel, rendu par la Grand'Chambre après un Arrêt de par-J
tage aux Enquêtes, contre le défaveu du pere, parce qu'il
y avait des préfomptions de parerniré, comme la re!femblance; celui de TriHan Ruffi, contre Je même morif,
parce qu'il y avait une éducarion, des lettres, & les lertres iniriales défignanc les nom~ de fan pere dans fan exrrait
baprifiere.
Lors de ces Arrêrs, il n'y' avait ni conrrat de mariage,
ni, des faits aufIi coucluanrs, ni une éducarion auffi fuivie
que celIe ci. On ne demandoir qu'une filiation bâtarde; &
�DU
PAL AIS
DB
PRO VI! N C n.
373
il s'agit ici d'une filiarion légirime. On ne pourroir f.1cilirer
la preuve de la baifdfe & de l'obfcuriré, & refJf~r cellt: de
l'éclat & de l'honnêreté, fans blelfer les lumieres de la raifan, le cri du cœur, l'inrérét de la fociéré, les vues du
Souverain & de la politique, l'efprit de nos Loix, les principes de l'équiré naturelle. Mafvert fera donc admis à prouver la légitimité de fan état, parce qu'il arricule des fairs
précis, qu'il a des commencemens de preuves par écrit, &
que rien ne contrarie la preuve qu'il offre. Son extrait baptiHere ne peut lui nuire, parce que cet aB:e ne prouve que
le moment de la naiifance, & non l'état de l'enfant; il demande la preuve de la filiation, & non celle de la naiifance;
d'ailleurs les pere & mere que l'aB:e baptifl:ere lui indique, font des noms fuppofés qu'il doit être admis à faire
connoÎrre.
.
MJfvert doit êrre admis à la preuve, parce qu'elle efl: utile,
recevable & concluante. Urile : parce que quand même le
mariage ferait fecret, Mafvert n'aurait pas moins droit à
une légitime de grace, parce qu'enfin}e mariage n'efl: pas
fecret, dès qu'il a été conrraété en face de l'Eglife avec les
folemnirés prefcrites par l'Ordonnance de Blois:. recevable:
Mafvert en: né hors le !TIariage, cela eH vrai, mais la preuve de cerre nailfance doit lui être plus facilement accordée,
parce qu'elle eH plus difficile à remplir, les regifl:res publics
formant pour lui un commencement de preuve par écrit,
puifqu'ils établiffent qu'il eil: né des parens inconnus &
fuppdfés; il doit donc lui être permis de démonrrer la
faulfeté conGgnée dans ces regifl:res; il n'a pas befoin de
prouver le concubinage; il lui fuffit de contefl:er que fa
mere a eu une foibleife, ce qui fe préfume par fa groifeffe,
par fa conduite, 'celle du fteur Coye & fes aveux. La preuve
eft concluante, parce que les fairs font décififs; m ais il ne
faut pas les fyncoper; il faut aù contraire en fuivre les rraces, les rapprocher les uns des autres, en former une efpece.
de chaine, les voir dans leur enfemble; c'eft de leur concours que fort une lumiere que l'on ne peut méconnoître;
,
�374
JI 0 U R, N ~ L
~ Iqrfque ces ~its fer.:QJ1t. pronv~? " il en. nahna. c~ ge.n~e dl:
prel!ve qui ne laiffeÎ'~ aucun doute.
Quant à, la provifion; elle eft jufl:e;. elle ne préjuge rien
~ n'eft. pas ex,orbit.a.nte. E!I~ eG:· juUt\, P'lJ~e qu'ihfaut. vivre,
&; que rien ne peut ellJP~cher de. pourvoir 'lU'X alim~ns .. Elle
lJ~ peut rien préjllger; c'eft. une rpaxime au 1?al';lis 'en ma~
t:er~ cj?Etat; ~lIe n'efl: pa..s, exorl:!iHI.llte, vu l'import,ance de la
(ucçeffio[1 qe Me. Coye, qU! monte· à plus· d~ 5000Qo,liv.
On répondoit pour Me. CQye, que le mariage eU l'aél:e le
p'lus ifllp.ortant de la vie civile;, il forme les 'fa:!1'lilles par.ti~
l;.ulieres ,. il les di(lingue, il foutienr l'ordre, il conferve l'harlppnie de la, foçi~té générale. Delà les Loix ont finguliérement furveillé. cet aél:e; Loil' religieufes, Loix politiques,
routes fe font occu.pées de cet obje,t majeur. Elles ont toutes
infpiré des précautions, tracé des regles & établi, des formes. La fin qu,e routes ces différentes Loix. fe fopt p.ropofées
n'eU peut être, pas la mçme•.Les Le,ix religieufes & canoni...
'lues 0lll eu Rdncipalemenr en vue.l,! filnél:itication ~s époux
dans l'uQion du mariage.
Les conféquences. de cette Union par rapport aux biens,
les avantages réciproques, rout ..ce qui a du, rapp.or,t à la
fiilmille, nouve)le, à c,elle dont elle. e/l: fO,rtie, à ce)1e qui doit
naître, te,ut cl'la regarde partil1.uliére,menr les .Loix civiles.
Mai.s comme dan,s le fyf\ême. pol.itique" un <tes. grands ob..
jets ,du mari'lge eU d}al{urec les mœur..s &, Hétat. des enfans,
en ô,tant toutes les, incertitlJdesJd,es conjollél:ions iUégitimes,
la religion y imprime [ail cacaélere, & les. Loix civil~s y joignent le leur, afinz'lulil, ajt, tOfl{ft l'al!J/zenlicité pojJible. (.Efprie
d"es Lojx., liv. 29J' c)1fIfl1. l'I..)
L'aurhen.ticité,,)3] p.ub.1icitéc fo.rm~nt. don.Cl dans, les' vœux,
de routes les Loix1, . le car.aél:ere effen tiel du.. contrae de,
mariage. Popr, q.ll'un,mari<\ge foit public, il ne fuffie pas l
q.u'il ait été célébré .avec roll.teSj les fo(malités pr.efcrires; ih
faut encpre qulil foie fuivi .dei la "parr ,des,deux .époUJII, d'une'
profeffiqn publi,qu~ d~ leur_ état; c'efi;lce qui dh décidé par
l'arç. ) de la,pédarat.,ion de 1639, qui condamne l'a9us in-,
•
�,/
D U t ' ·A L A J S
D!!
P IR "0 v 1l N C 1l.
37~
t"rddutt t'ar teux qui tiennent leurs mariages {ecrets & cachés
pendant leur vie. Cette Loi, en parlant de ces mariages, dit
qu'ils re1fenteoc plutôt la honte d'un concubinage, que la
dignité d'un mariage; les motifs qui ont fait exiger dans
le mariage cette publicité. fuivie & continue jufqu'à la mort
des époux,· ne fane pas moins frappants que ceuy. qui ont
fait établir coutes les foiemnités prefcrites pour la célébration.
On a craine .pour l'éducation des enfans nés d'une union te.,
flUe fecrece; on a craint m.ême ponr la certitude de leut
naillance; on a voulu prévenir ces allian ces honteufes qui
déshonorent les familles·, & que la facilité de tenir un mariage fecret favorife. On a voulu parer un fca ndale que peut
farre naître la vie commune de deux époux, qua nd le ·public
ne connaît pas le véritable lieh qui les unit & les r·approche;
on a penfé que des époux dont on ignore l'engagement;
peuvent plus aifémenc en violèr la foi, attendu la malheureufe facilité qu'ils ont d'être coupables fans le paraître;
enfin on a cru que l'honneur du mariage exigeait que le
mariage fue rendu public. Pourquoi montrer de la défiance
daus l'aél:e le plus faint & le plus facré? pourquoi couvrit
la vertu de cette honte qui ne doit accbmpagner que le
vice? pourquoi la compromettre jufqu'à l'expofer à être cen"
fondue avec le crime?
. Telles font les pui1fantes raifons qui orlt engagé nos
Rois à exiger une publicité oOdfiante dans le mariage. Ld
Loix canoniques ne diJferent pas fur ce point des. Loix
civiles: l'Eglift {,> l'Etat, dit l'Auteur dès Conférences de
Paris, tom. 1, liv. l , confér. 4, §. 3, pag 46, font parfaitement d'accord pour défendre' en général les mariages [ecfets. II
cite diJférents textes qui le prouvent. .
. Cependane comme le falut des époux efi l'objet prédominant des Loix EccléfiafiiqDes, quelques Ganmrifies laif~
fent entrevoir qu'il efl: des motifs jufies & raifonnables
qui dans certains cas enga"gent l'Eglife à tolérer les mal'iages fecrets. Pour prévenir aD faire ceffer un commerce
illicite, le Direél:eur de la' confcience entre f6UVe"nt en
4i:ompofition "avec des:.. époox qui confelltéll1t ~ légitime;
�I
37 6
Jou RNA L
leur union, fe refufent à la rendre publique. On ne "doit
point pronÇln{;er fur ce qui touche au for intérieur, ni difcurer une tolérance qui dlailleurs peut êrre bien dirigée
dans fan rapport avec la fanél:ification des hommes. Mais
il en: certain que l'ordre public demande une regle généraIe, & que la Loi civile, pour ce qui la concerne, ne
peut entrer dans des diltinél:ions qui b rendraient inurile.
Il ne faut pas toujours, difoit un Jurifconfulre, exa~JilZer les
aaions humaines pal' le point de théologie; il vaut mieux dans
ces rencontres envifager l'intérêt public.
Dans la matiere donc il s'agir, la Loi civile a condamné
fans exceprion les, mariages fecrets , & elle a prononcé les
peines les plus féveres conrre eux. L'art. S de la Déclaration de 1639 ordonne que les majeurs conrraél:ent leurs
mariages publiquement & en face de l'Eglife avec les folemnités prefc:rites par l'Ordonnance de Blois, & déclare
les ènfans qui naÎrront de ces mariages, que les parties
ont tenus'ou tiendront c'achés, pendant leur vie, incapables
de toures fucceffions, auffi bien que leur pofl:érité.
. La jllrifprudence des Arrêts ne s'efl: jamais écartée de
l'efprit & de la lettre de la Loi. Dans la caufe des enfans
des nommés René Tardif & de Françoife Mereau, rapportée dans le Code matrimonial au mot mariage fecret,
jugée au Parlement' de Paris au mois d'Août 1662, Mr•
.J'Avocat-Général Bignon difoit que le mariage éroit fuffi[amment établi, mais que René Tardif l'ayant 'tenu [eeret
pendant (;1 vie, il fJ1loit, en déclarant les enfans légitimes,
les exclure de la fi.,cceffion dont il s'agi1foir. Ce fynême
fur adopté par l'Alrêt. On en trouve un autre rapporté par
Brillon dans fan Diél:ionnaire des Arrêts', va. mariage. ..0
" Si les enfJns nés pendant le mariage font incapables de
tous effets civils, il faut à plus fane raifon regarder comme incapables ceux qui font nés hors le mariage, & qui
excipent de la ~égitimation par mariage, fllbréquenr. Il n'y
aurait aucun motif raifonllable pour qu.e ces derniers fufCent traités plus -favorablement que les autres; au cont(aire , le principe de leur nai!fance étant plus ob[cur &
plus
�DU
PAL AIS
Dl!
PRO V Il Ne Il.
377
plus fufpeél:' , ils ont à combattre plus de préfomptions ,
& à franchir plus d'obfiacles. Terminer un commerce illi-
cite par un mariage fecret, c'efi méprifer les Loix après
avoir violé les mœurs; c'e!l: employer un remede qui devient un nouveau mal. Les enfans demeurent toujours
condamnés à l'obfcurité; rien ne purifie le vice de "leur
origine; ils prétendroient inutilement recevoir du titre
qu'ils invoquent, une capacité que ce titre en foi ne fauroir pouvoir donner.
On douroir autrefois fi la légitimation par mariage fubréguent pouvoit êrre opérée par un mariage fecret. La
légitimation, difoit-on, fait partie des effets civils; conféquemment elle ne fauroit avoir lieu, quand le mariage ne
produit point d'effets civils. Le mariage tenu fecret ell de
cette efpece. On répondoit que les difpofitions pénales
doivent être plutôt adoucies qu'aggravées; que la Déclaration de 1639 ne déclare pas les enfans qui naiffent d'un
mariage tenu fecret, bâtards & illégitimes; qu'elle fe contente de les déclarer incapables de routes fucceŒons; qu'il
faut donc reareindre la peine à cerre incapacité; mais
ce qu'on n'a jamais révoqué en doute, c'ea cerre incapacité elle-même, & l'application qui en a toujours' été
faite, tant aux enfans nés pendant le mariage, qu'à ceux
nés antérieurement. C'efi le fenriment de Lebrlln dans fOll
Traité des 5ucceŒons, liv. l , ch. 2 , ·fea. l,. dia. l ,
o. 6 , pag. 21 ; Henris, tom. 3, pag. 788 & [uiv.; Terralfoll dans fes œuvres, pag. 594 & filiv.
Un mariage, lors de la célébration duquel on auroit
omis quelque forme fubaanrielle, feroit plus que fecret ;
il feroit clandeain. On appelle mariage clandiflùz celui qui
n'eH pas fait devant le propre Curé des parties, ou en
préfence de quelque Prêtre par lui commis; celui qui eit
contraél:é par des mineurs, à' l'iofu de ceux qui Ont droie
d'y préfider & d'y donner leur confenremenr i celui en un
mor lors duquel on a négligé quelqu'une des conditions .qu~
les Loix établiRent pour confiiruer un mariage légitime.
Telle ea la définirion qu'en donnent Ml'. le Ridant dans
Années 1775 & 1 ] 7 6 . '
Bbb
�378
.
Jou RNA L
fon Traité rur le mariage, pag. 278, &; Henris, tom. 3"
pag'783 & fu iv.
Le mariage fecret ell, aux termes de la Déclaration de
1639, celui que,les parries ont tenu caché l1endant leur
vie. C'ef!: donc principalement par la conduite des époux,
qu'il faut juger du fecret de leur union. Un mariage célébré dans les formes a toujours une certaine publicité; il
dt fait en Lee de l'Egli(e, en pré(ence de témoins; il
dt in(crit dans un regifhe; mais cerre publicité pa/làgere,
momentanée, s'évanouir bientôt, fi la m.miere de vivre des
époux ne la réveille. Circon(criee dans des bornes trèsétroites, une pareille publicité n'a prefque jamais d'autre
confident qu'un ,froid regiftre, témoin muet & inanimé,
qui ne dépofe qu'en (ecret de l'exif!:ence du mariage; elle
demeure (ans effet, fi les époux démentent 1'.1è1ed'un moment
par la conduite de toute leur vie. La Déclaration de r639
fuppo(e un mariage réel, un mariage valablement cO[lcrda-é,
pui(qu'elle fI"en prononce point la ca!fation. La publicité
que cette Loi exige, n'ef!: donc point cette publicité de
droit, qui (e pré(ume de l'obfervation des formes pre(crites, & (aos laquelle il ne (duroit y avoir de mariage aux
yeux de la Religion & des Loix; mais cette publicité de
fait, qui (uit la célébration qui eil: l'ouvrage des parries,
& qui éclaire route la conduite des époux. Dans l'e(pnit &
la lerrre de la Loi, 'un mariage eH: public, lorfgue les
époux ne rougi/lènr point de leur union; lorfqu'ils la maoifef!:enr par leur vie publique & privée; lorfqu'ils demeurent en(emble; lor(que la femme porte le nom de (00 mari;
lor(que les enfans portent le nom de leur pere; lor{que
h!s deux familles uni~s {ont re(peél:ivement infl:ruites du
hen qui les rapproche; lor(qu'enfin les relations d'état fonr
publiques & notoires. Tenir au contraire. fon mariage (ecret
& caché, c'ef!: le concentrer parmi le petit nombre de
témoins néce!faires à la célébration, & le dérober avec
foin aux regards des autres hommes, c'eil:-à-dire, à cerre
portion de la {ociété, qui, par rapport à chaque particulier, f<Jrme ce que l'on appelle le public; c'ef!: changtr de
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
379
!ituation; c'ell: vivre dans le mariage d'une maniere contraire au mariage; c'ell: lailfer ignorer l'union que l'on
vient de conrraél:er , à ceux à qui -il importe elfentiellement
de la connoître; c'ell: paroître ce qu'àn n'ell: plus; c'efl:
rougir de ce que l'on ell:; c'ell: prefque toujours regretter
ce que l'on éroit. Tels fOr;lt les caraél:eres auxquels la raifon, les Jurifconfultes veulent que l'on reconnoilfe le mariage fecret, c'ell:-à-dire, cette forte de mariage dont la
Déclaration de 1639 a voulu faire ceffer l'abus.
Le mariage de Me. Pierre Coye & Petronille Linfolat a
été célébré en face de l'Eglife le 14 Mai 1767, en préfence du nombre des témoins requis. 11 a été célébré par
le propre Curé des Parties; toutes les formes fubll:antielles
de l'aél:e ont été obtèrvées,oo eo convieot ; il faut en conclu te
que jufques-Ià le mariage ell: valable quoad fœdus; qu'il n'el!:
point clandell:in; que l'on ne doit point en prononcer la
ca{fation : mais d'après les loix & les principes établis, ce
mariage, quoique valable en foi, ne fauroit produire des
effets civils, s'il a été tenu fecret & caché pendant la vie
des époux, contre le refpeél: qui ell dû à. un Sacrement; or
les preuves du fecret réfultent ici de toutes parts.
D'abord, l'aél:e des époufai.1les fait foi que les Parties
avoi~nt· rapporté la difpenfe des trois bans; cette difpenfe
ell: infcrite rout au long dans l'aél:e; premiere preuve du
fecret & des précautions que l'on prenoit pour rendre ce
[ecret inviolable. Le mariage el!: célébré dans une Eglife
rurale; on chai lit l'heure à laqu.elle le devoir ou le befoin
appelloit tous les Payfans à la culture & aux travaux de la
campagne; tout fe palfe dans le filence; ft on appelle
.des témoins, ces témoins font des perfonnes de choix que
l'on rama{fe du dehors, & qui, à l'exception d'un feul, n'avaient point leur domicile dans le lieu de la célébration;
l'aél:e n'eH ligné par aucun" parent, par aucun ami; les familles qui alloient être alliées ne fe montrent pas; elles
ne fom pas plus inll:ruites de ce qui fe palfe, que s'il eût
B b b 2.
�380
JOURNAL
ahfolument
été quell:ion d'un événement qui leur
étranger.
D'autre part, on ne voit aucun arrangement domeftique
pour les intérêts civils, aucun contrat de mariage. Après la
célébration, les époux ne fe démentent point; ils fuivenr
le même plan de conduite. Quelquefois on peut avoir des
raifons pour hâter un mariage, pour précipiter le moment
décilif. On craint des réclamations importunes; on travaille à les prévenir en évitant de faire connaître: rout ce
qui pourrait les réveiller; mais le temps de contrainte paifé,
l'union une fois confommée , on avoue publiquemënt fan
nouvel état; on Lé montre fans honte comme fans gêne;
on ne rougit pas du titre "d'époux; on fe montre tel que
l'on eft, parce qu'on ne craint pas d'être tral'erfé dans ce
qu'on voulait être. Ici les époux ont roujours tenu une conduire myHérieufe ; ils one vécu après le mariage comme ils
vivaient avant; leur état.avoit changé; leur maniere de vivre
continuait d'être la même; la femme n'a jamais" pris le
nom de fan mari; celui-ci n'a jamais penfé à la faire jouir
des honneurs dus à fa qualité, à fa condition de femme légitime ; elle éroit dans fa maifon 'comme fervante ; jufqu'à la
mort de fan mari, elle a continué d'y vivre dans la même
relation; elle a" toujours été préfentée comme telle à la famille, au public; elle a roujours porté les mêmes habits,
elle a toujours paru fous le même accolltrement ; rien n'annonçait en elle fa nouvelle qualité; elle avait changé d'état
fans changer de rôle; un voile impénétrable 'couvroit le m)'frere de cerre union.
En 1769 & le la du mois d'Août, Me. Coye difpofe
de fes biens par un teftament folemnel. Il n'avait pas befoin de diffimuler dans cette occalion ; il pouvait fans danger confier ce lècret à un aél:e fecret par eifence ; chacun
fair qu'un telbmenr my(l:ique & folemnel eft cacheté, impénétrable; que le fceau n't;n e!1: rompu qu'après la mort
du te(l:areur. Que craignait - il dans un aél:e qui devait re!1:er
enfeveli.dans l'.obfcurité la plus profonde? Cependant l'on
�DU
PALAIS
DB
PROVENCE:
3SI'
voit Me. Coye dans' cet aél:e ne donner d'<\utre qualification
à Petronille Linfolat que celle de fa gouvernante, & s'il
lui fait un legs, c'e!l: à condition qu'elle ne pourra demander aucun compte de fes gages. Peut-on pouffer plus loin
·Ia précaution du fecrer? Jufqu'à préfent le mari fembloit
au moins ne fe méfier que des tiers & du public. Ici fes
craintes augmentent; il femble fe méfier de lui-même; les
ménagemens redoublent; tout lui devient fufpeél: ; un te fiament folemnel, tout ohfcur qu'il efi, ne paroît point encore l'être a{fez. On craint de rendre cet aél:e dépofitaire de
plus grandes confidences., ou, pour mieux dire, le tefiateur
femhle fuir l'occafioiJ de fe les avouer.
Quel e!l: donc le mariage que Mafvert invoque? Un titre
auJIi infruél:ueux qu'avili{fant pour lui, un "titre dont on craignoit qu'il ne relUt la moindre trace dans la mémoire des
hommes, un titre dont le prétendu pere ae Mafvert n'ofoit
avouer l'exifrence que dans la folicude profonde de fon ame.
Ce mariage étoit donc plus que fecret : c'étoit un aete purement facramentel, qui n'avoit rien de civil•
. L'extrait mortuaire de la Dlle. Linfolat, dans lequel elle
efr déclarée époufe de feu Me. ,Pierre Coye, Avocat en la
Cour, rie peut être d'aucun fecours à Mafvert, ' parce que
quand même pendant fon veuvage la DUe. Linfolar fe feroit annoncée comme époufe de feu Me. Coye, la chofe
feroit indiJrérente. Après la mort de l'un des conjoints, le
mariage n'exifre plus, il efr di{fous. Qu'importe alors. que
l'époux furvivant manifefre fa qualité & ne déguife plus fon
état: la publicité pofrérieure au mariage ne fauroit vivifier
le mariage; le mal dl: confommé, il ,devient irréparable,
quand les époux onr renu leur mariage caché pendant la
·vie du premier d'entr'eux qui décede. Il réfulte de la Jurifprudence des Arrêts, que les peines prononcées par la
Déclaration de 1639 ne frappent pas feulement' contre les
enfans, mais encore conrre les peres & meres. C'ejl ce que
la Cour a jugé, dit Cochin, rom. 2., pag. 7 S , par un Arrêt
éélehre du '2.6 Mars- 2705. Dans J'hypothefe de cet Arrêr,
],a veuve .venoit .après la mort -de fon mari ,demander la.
�3~h
Jou RN." L
reltitution de fa dot, fon douaire, & les autre~ conventions
matrimoniales; on la déclara privée des effets civils.
L'habitation commune des deux époux peut devenir une
preuve de publicité, quand cette habitation n'a point d'autre caufe que celle qui fe tir.e d'un mariage du-moins préfumé. Alors on peut argumenter de l'habitation pour juftifier deux conjoints à qui l'on reproche d'avoir tenu leur
union cachée. Il faut pour~ant convenir que ce fait feul n'dl:
jamais décilif, s'il n'eH lié à des circonHances qui puilfent
le rendre concluant; mais quand l'habitation a précédé le
mariage; quand elle a dans fon principe une caure connue,
publique, déterminée & certaine; quand cette caufe eil:
indépendante de tolite idée, de tout projet de mariage;
quand elle éloigne ou contrarie même une pareille idée,
un pareil projet, alors il efl: impo/Iible de {oup~onner le
mariage par l'habitation; jl faut au contraire un mariage
,déja connu & public, pour avertir que c"efl: à nouveau titre
que l'on continue l'habitation. La Dlle. Lin/olat habiroit
comme fervante la mai fan de Me. Coye depuis environ 30
ans; depuis long-temps l'habitation, ou , li l'on veut, la demeure de la Dlle. LinfoJat, avoit lIne caufe déterminée. Cette
caufe éroit naturellement exc1ulive du mariage poHérieurement contraété avec l'enfant de la maifon: des alliances
auffi inégales ne fe préfumem pas, elles choquent trop ouvertement les convenances & l'opinion; quand on a vu la
Dlle. Linfolat continuer à vivre chez Me. Coye, on a dû
pré fumer que c'étoit en force des mêmes relations.
Dire encore que la Dlle. Lenfolat vivait à la même
table, efl: un fait qùi n'efl: rien moins que décilif. Une
ancienne gouvernante obtient fouvent des égards que fa
qualité ne comporteroié pas, mais qu'un long lervice femhIe lui mériter; prefqlle toujours elle commande bien plus
qu'elle n'obéit; elle devient fur-rout dominante auprès d'un
homme ifolé, chez qui l'habitude peut quelquefois ce que
pourroir chez un autre l'affeétion. Dans l'hypothefe préfente,
la commenfa!ité, li elle éroit pr.ouvée, ne feroit élonc pas
fuffifante pour fonder la moindre préfomption d'un mariage
�DU
°
PALAIS
DE
PROVBNCl!:
383
public, puifqu'elle n'auroit rien d'incompatible aveC la quJ.lité connue & originaire de la DlIe. Linfoiat.
En principe, la preuve de l'état des hommes ell: la"
potrelIion; il n'yen avait pas d'autre dans l'état .de nature;
dans l'érar civil, on a porré les précautions plus loin; il fauc
une po/felIion publique, & que la nai/faonce foit confignée
dans des regi!1re'> publics. Ces deux preuves fuffifent même
féparémenr. Ainfi la po/felIion fuffit à celui qui a toujours
joui de fan érat; il n'a pas befoin de recourir aux moEJUmens publics, il po/fede; à ce feul titre, on ne peut fe
refufer à le maintenir.
D'autre parr, celui qui fe préfente avec fan extrait bapti!1ere pour réclamer un état done la palIion & l'inju!1ice
l'ont dépouillé, doit être écouté favorablement; le regill:re
de la nai/fance f:1it foi & pleine autorité en juHice, fuivant l'arr. 7 du tit. 20 de l'Ordonnance de 1667, C'ell:
une preuve à laquelle on ne peut fe refufer, qui ell: adoptée
par la Loi, qui feule doit fuffire, & qui ne pourrait ce/fer
que par l'évidence de l'impofl:ure de celui qui viendrait ou
invoquer un tirre faux, ou s'appliquer frauduleufemene un titre
vrai. Mais fi la preuve tirée du regill:re, & celle tirée deo
la po/felIion, fuffifent féparémene; fi elles exclue ne tout doute,
quand elles fane réunies, que faudra-t-il penfer du cas où
elles manquent toutes les deux? La que!1ion fur l'état d'un
homme qui n'ell: aidé d'aùcune de ces deux preuves, devient extrêmemene délicate, extrêmement épineufe. Il y
a pour lors deux grands intérêts à ménager, celui du particulier qui réclame, celui de la fociété, dont il ne fauc
pas troubler l'harmonie.
Des motifs d'ambition, d'avidité, de jaloufie, peuvent
quelquefois porrer des peres & des meres à oublier toUt fentiment humain fur le fort d'un enfant qu'ils veulent facrifier. Si l'on refufe tout fecours, tout appui à cet enfant,
on s'expofe au danger de couronner l'inhumanité & la plus
affreufe injull:ice. D'autre parr, fi l'on écoute tout, fi l'on
rec;oit avidemene toute réclamation, on courr le rifque de
favorifer fouvent l'impoftur:e, de troubler l'o,dre des fa~
�384
Jou
RNA L
milles, de compromettre le repos & la sûreté publiqùe.
Tels font les grands intérêts que l'on doit balancer, & les
inconveniens terribles que l'on doit prévenir.
Dans des conjeétures auffi embarraifantes, il faut pefer
avec attention les difficultés & les rirques; ne jamais féparer l'intérêt du particulier d'avec celui de l'ordre public;
être auffi éloigné de cette rigueur extrême Gui voudrait tout
r.ejetter, Gue .de cette indulgence dangereufe qui voudroit
tout admettre, & ne fe déterminer qu'avec la plu, .grande
connoiifance de caufe fur des queHions qui dépendent de
la variété de,s elpeces & des circonHances. La premiere
diHihétion. qu'il faut faire en cette matiere, ell: entre le
cas de la naiifance hors le mariage, & celui d'un enfant
qui prétend être né dans le fein du mariage. Ce dernier
n'a réguliéremenr qu'à prouver qu'il eH né de la femme
mariée. Ce fait établi', tout Je monde connaît la regle pater
eJl 'is 'quem Iluptiœ demonJlrant. Dans le cas au contraire
de la naiifancc antérieure au mariage, l'enfant doit prouver
qu'il doit fa naiifance à l'un & à J'autre des conjoints; il
ne lui fufliroit pas de juHiber qu'il eH né d'une telle femme;
il doit juHiber encore qu~ celui qu'il défigne pour fan pere,
l'eH véritablement.
'
Tour le monde fait combien dans tous les temps les Loi"
ont été réfervées fur la maniere d'appliquer la légüimarion
par mariage fubféquent. Cette légitimation, qui doit fon
origine aux conltirutions des derniers Empereurs, n'étoit
d'abord qu'une permiffion donnée à tous ceux qui n'étoient
pas mariés, & qui vivoient avec des concubines dont ils
avo,ient des enfans, de rendre leurs enfans légitimes en
époufant les meres. La preuve en eH dans une conHitution
de Zenon, rapportée au Code de natur. liher. AnaHafe ordonna enfuite ce qui n'avoit été que permis dans le principe.
Suivant la Loi de cet Empereur, la légitimation ne devoie
avoir lieu, qu'autant que les peres & meres n'auraient poine
d'enfans légitimes.
Ce n'eH que fous Jufl:inien que la légitimation par mariage, fubféquent devint un drQit général, & qu'elle s'opéra
.
.
1i
1
�DU
PALAIS
DE
PROVBNCB.
38)
·Yi legis f;' matrimonii poteJlate. Il y eut pourtant même alors
des conditions requifes pour cette forte de légitimation. Il
falloir que la mere fût une fimple concubine, entretenue
par un feul homme; les enfans nés d'une fille que l'on auroit
foupçonné être abandonnée à plulieurs, ne pouvoient pas
être légitimés par mariage fubféquent, parce que leur pere
étoit incertain: dicuntur fpurii 'luaji fine patre, cùm .(it incertus ( inilit. de nupt., §. ù ) & fPurii nullo modo jujli elficiuntur. ( Cujas fur le Code de nallLr. liher. )
Quoique le mariage flit parfait cbez les Romain.s par le
feul confentement des parties, cependa)1t pour opérer l'effet
de la légitimation par mariage fubféquent, on exigeoit qu'il
y eût un contrat écrit de mariage, datalihus inflrumentis
compajitis. ( inilit. de nupt. ,.§. dernier. ) Le concubinage étoit
requis, parce que dans le concubinage la paternité eH plus
facilement défignée que dans les conjonél:ions vagues. ( Cujas
filr la Novelle 18. ) Le contrat de mariage étoit nécelfaire
entr'autres rairons, 1°. àfin que j'on pÛt être certain que
celle qui avoit été jufqu'alors concubine, étoit devenue
époufe légitime, jujla uxar; 2°. afin que l'on vît li les enrans
étoient provenus du concubinage.
A l'exemple du Droit Romain, le Droit Canonique a
admis la légitimation par mariage fubféquenr: tanta eJl vis
matrimanii, ut 'lui antea funt geniti, pofl contrac7um matrimalIium legitimi haheant/!r ( cap. 1 & 6 aux décrétales , fJui filii
jint legît. ) Mais comme le Droit Canonique a toujours condamné le concubinage, il auroit craint de re contredire, s'il
D'avoit voulu fans diilinél:ion que les enfans fuffent légitimés,
pourvu qu'ils fuffent Dés ex fa/uta & fa/utâ.
En France, il n'y a point d'Ordonnance qui ait établi la
légitimation par mariage fubféquent, il en eil feulement
parlé dans l'arr. 41 de l'Ordonnance des donations; cette
légitimation eil parmi nous introduite'par une ancienne coutume. Mais nous avons pris plus de précautions que le Droit
Canonique, pour furveiller l'état des enfans qui prétendent'
être né.s avant le mariage, & qui afpirent à être légitimés.
La Junfprudence Françalfe a exaél:emem adopté les difp~Années t775 & t77 6•
Ccc
�•
386
Jou
RNA
r:
fitions du Droit Romain, felon lefquelles on ne légidmoit
'lue les enfans nés d'un concubinage notoire, & felon lefquelles encore la légitimation par mariage fubféquent n'avoit
lieu qu'autant que lors du' mariage on avoit rédigé un contrat civil. Outre ces précautions, on avait encore en France
la cérémonie du poêle, qui ef!: de toute ancienneté; il en
ef!: parlé dans Beaumanoir fur les contumes de Beanvoifis,
c;hap., 18; dans Loileau, inflitutions coutum., liy. l , tit. I,
§. 40; dans Racqnet, traité du droit de bâtardift, pag. 180;
dans Brillon, diétionnaire des Arrêts, au mot bâtard, n. 20;
dans Lapeirere , va. bâtard, n. 14.
Brodeau fur Louet veut qu'à défaut des céremonies du
poêle & d'un contrat écrit de .mariage, on produife un exIrait bapti(~ere en bonne forme, ou tOUt autre aéte valable;
. il exige encore, conformément au Droit Romain, que l'enfant foit né dans le concubinage. Mr. d'Aguelfeau, tom. 4,
pag. 272, en difant que l'omiffion des cérémonies dont il
s'agit ne fauroit mettre obf!:acle à la légitimation de l'enfant, exige auffi des preuves qui puilfent fuppléer le défaut de
ces cérémonies. Enfin l'Auteur des Conférences de Paris
fur le mariage, tom. 4, liv. 2, confér. 2, §. 5, demande
comment fe doit fdire la reconnoilfance des enfans naturels
par les perfonnes qui fe marient, & il décide que c'ef!:
de faire mettre deux aétes fur le regif!:te du Curé, l'un du
mariage, l'autre de la reconnoilfance de ces enfans, en fone
que l'on ne puilfe lever l'un fans l'autre. On a voulu dans
tous les temps rendre l'état des enfans nés avant le mariage fi certain & fi public, qu'il ne pût être contef!:é, &
que l'on ne courût pas le rifque d'introduire dans une famille des étrangers qui vin1fent en ufur'per le nom & en
dévorer le patrimoin'e- au préjudice des vrais parens, au
préjudice même des enfans véritables.
Quand il ne s'agit que de l'état d'un bâtard qui ne peut
prétendre que des alimens, c'éf!:-à-dire les droits qu'il tient
de la nature, on exige des préc:lUtions airez auf!:eres, des
preuves direétes de filiation, quoique la. chofe fait de moindre conféquence; à plus forre raifon les précautions doi-
�D U
PAL AI!r
DE
PRO VEN C E.
31!7
vent réào\lbler , quand l'intérêt en plus grand, quand il s'agit
de déclarer un enfant légitime, & de lui donner tous les
droirs qui naiifent de la légitimité.
,
La légitimité en un état civil, & non un état de nature;
elle tite toute fon eifence & toutes fes prérogatives de laLoi qui l'établit. On apperçoit au premier coup-d'œil que
le mot légitimité indique un état conforme Ir quelque Loi
pofitive. Un pareil état ne- doit donc pouvoir s'acquérir ou
fe perdre qu'aux conditions établies par les Loix civiles &
pour le bien de la fociéré. Ce n'elt, Ir proprement pa rler "
que par privilege, par une fiétion de droit, que des enfans nés avant le mariage font légitimés par le mariage
fubféquent.
Pierre Mafvert manque des preuves indiquées par les Loix
pour établir fon état; il n'en a jarllais eu la poifeffion ; le
regi!he de fa naiifance ne dépofe pas pour lui; il aéré
baptifé comme enfant de Marie Patin & de Piérre Mafven; ce tirre, au lieu d'aider fa réclamation, y forme au
contraire un nouvel obHac)e. Si la Dlle. Lin{olar & Me. Coyeavaient vécu dans un concubinage notoire, fi Mafven éroie'
né dans la mai fan pendant ce concubinage, s'il avait éré
élevé & éduqué, s'il avait été avoué depuis le mariage, il
{e trouverait dans des circonfiances aflez favorables; mais'
point du lout, la Dlle. Linforat n'en point entrée dans la
maifon fous une qualité fufpeéte; elle avait été appellée,
non par Me. Coye, mais par les pere & mere de Me.
Coye. On ne pouvait donc raifonnablement croire que la
Dlle. Linfolat _avait éte pL1cée dans la mai fan comme concubine du fis, lorlqu'elle avait éré demandée pour être au
fervice des pere & mere. La caufe connue de fon entrée dans
la maifon excluait rout loupçon de concubinage, ou du-moins
tout projet de concubinage public.
Ce n'eU pas tour: n'être pas né pendant un concubinage l\oroire, n'être point, né & n'avoir point éré élevé dans
l.t maifon , feraient fans dame des circonllflllces fuffifanres
pour [tire rejett r 1.1 légitima ion par mariage fubféquent,
parle que la pat r ité cl meureroie incenaine, & que fuiCCC2.
�388
Jou
Il. NAt
.
va nt 111 Doé1:rine de Cujas, fPurii nullo modo jllJli efficiuntllr:
Mais on eil: dans une hyporhefe bien plus exclufive encore
'de la légitimation; non (eulement Ma(vert ne peut nommer
un pere certain, certllm patrem hahere, mais il ne prouve pas
même qu'il (oit fils de la femme qu'il défigne pour fa
mere.
Dans les queil:ions d'état ordinaires, fi le pere. eil: incertain, la mere ell: du-moins certaine, mater certa, pater
incertus. Ici poine de preuve de filiation, même du côcé de
la mere. L'accouchement de la DBe. Lin(olat , ce fait majeur & principal eH làilfé de côté; il n'en exi!le point de
traces; on n'en ore pas même offrir la preuve. Ma(vert ell:
né en 17)0; dix-fept ans fe font écoulés depuis lors juf.
qu'au mariage de-ia Dlle. Linfolat & de Me. Pierre Coye.
Pendant rout (e long efpace de temps, pendant cette Ion.
gue fuite d'ant;lées, nulle trace, nul foup.'i0n, nul indice
quelconque de 'filiation, ni vis-à-vis de l'un, ni vis-à-vis de
J'autre des conjoiitts. L'extrait bapti!lere préfenre au contraire des preuves adverfatives au fy!lême de Mafvert, des.
preuves exclu lives de l'état qu'il veut fe donner.
Lors du mariage de la DBe. Linfolat & de Me. Coye,
il n'eil: fait non plus aucune efpece de mention de Mafvert,
il n'exifie en fa faveur aucune reconl1oilfance, ni publique, ni privée. Pendant la durée du mariage, même filence (ur Mafvert. En 1769, Me. Coye fait un refiament
[olemnel écrit de fa propre main; le frere du te!lateur ell:
infiirué héritier; Mafvert n'ell l'objet d'aucune difpofition ,
d'aucun le-gs, il n'eil: pas même nommé. La Dlle. Linfolat furvit près de deux ans à fan mari; Mafvert ne fixe
pas plus l'att~tion de ceue femme, qu'il n'avait fixé celle
du mari; la Dlle. Linfolat meurt, fan bien palfe à des col·
latéraux. Dans aucun temps Mafvert n'eil: ni avoué ni re- .
connu; aucune des formes 1 aucune des précautions que les
Loix & nos ufages ont aurorifé, ne dépofe en fa faveur.
En vain objeéteroit-on ql:e les peres & meres ne fauroient pouvoir çuire, par leur filence ou pat leur déclaration, à l'état de leurs enfans: cela eil: vrai, quand l'état des
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE;,
3S9
enfans ell: déja étJbli par des preuves que le filence ou le
défaveu des peres & des meres ne peur bJlan.cer: fi quis
ita fcripferît: ille quem fcio ex me natum non e.f1e exhœres eJlo:
hanc exhœredationem ita nullius momenti eJfe, fi probetur ex
eo natus. L. 14, §. 2, if. de liheris & poJlhumis. Mais quand'
un enfant fe prétend né hors le mariage, quand il ne juftifie point fon état, quand il n'apporte aucune efpece de
preuve, que peut-on faire de mieux que de s' n rapporter
à la déclaration des pere & mere, c'elt-à-dire de ceux qui
favent certainement mieux que tous autres ce qui en efi ?
Standum eJl verbo viri & mulieris ,niji certis indiciis & teJlibus
tibi conJliterit eJfe filium juvenem memoratum. L. tranfmiJJœ,
.If. 'lui filii legitimi. Dans le cas de la nai1fance conJlante
matrimonio, on n'a pas befoin du jugement de l'homme,
parce qu'on a celui de la Loi; mais dans le cas de la naiffance hors le mariage, la Loi n'intervient point entre le
pere & l'enfant, c'eH le pere qui demeure juge.
Quoique la déclaration du pere, lorfqu'elle efi favorable
à l'enfant , foit un grand préjugé pour lui, grande prejudicium affert pro filio confeJlio patris, dit la Loi l , §. 12 ,.If.
de agnofcendis & alendi liheris. Cependant il ne dépendroit
pas d'un' pere & d'une mere d'introduire des étrangers dans
nne famille; leurs déclarations font infruaueufes pour l'en.
fant qu'elles concernent, lorfque l'état de cet enfant eil:
combattu par des preuves. pofitives, ou par des préfomptions concluantes; & les Loix difent: non nudis affiverationibus, nec ementitâ profeflione...... ftd matrimonio legitimè
contraeto, yel adoptione folemni filii civili jure piltri, conjlituuntur. L. l'l:, cod. de probationibus. Parentes natales non
confeflio tiJlignat. Servi nafcuntur ratione certâ, non confeffione
conJlituuntur. L. 22, cod. de liberali causâ. Me. Coye dans
fon reHament a refufé à la Dlle. Linfolat la qualité d'époufe;
mais en lui refufant ce titre d'honneur, il a pourvu à çe
qui étoit de raifon .& d'humanité; il ne l'a point oubliée
dans fes, difpofitions. Pourquoi donc n'eÎlt-il été cruel qu'envers fon enfant? N'auroit-il pas eu plus de devoir à remplir à l'égard de ce dernier? A,uroit-il pu s'aveugler au point
�3'90
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U R N li. L
de.[e permettre. une' atrocité dans un aéle qui coolhte d'iilleurs. fil bien. [a jiJf!:ice'? Quand un homme Ce' détermine à
légitimer.' pan le mariage une union aulli peu honurable que
celle contraélée avec Petro'nille Linfolat, quand il s'y détermine fur te- déclin de [es années ,'il n'y a guere que des
raifons de confcience qui pui1fent l'y engager; c'eft la
religion [eule qui peut iofpirer le courage de braver auffi
ouverteme.nt l'opinion. Or comment feroit-il poffible que
là religion n'elÎt pas également parlé en faveur d'un enfant qui. [erolo né d'une union qu'on alloit légitimer aUlL
pie.cls des. .&utel's ? Me. Coye aurait-il renoncé au devoir de
p~re' dans un moment, où faifant le facrifice de fan amour
propre, il confentoit à devenir époux? La confcience de
cet. homme n'eîlt-elle pas défendu les droits de la nature
avec autant de force qu'elle défendait ceux de la vertu?
<l'eft fouvent l'exil!:ence d'un enfant, que l'on ne veut pas
rendrè viB:ime innocente d'un crime étra nger, qui dé termüle un pere à contraB:er de pareilles unions, de pareils
mariages. Et l'ail voudrait ici que Me. Coye eût pu fe réligner au mariage avec le projet déterminé de méc<illnoît~e
fon enfant !
Si Me..Coye eîlt eu véritablement un. enfant de {on
commerce avec b. Dlle. Linfolat, loin de méconnaître cet
enfant, il eut. mis plus de publicité à [on mariage; il elÎt
moins rougi d'une union à laquelle il eut été dès-lors invité par la,.nature" par la loi, par la religion, par toutes
lel>· confidérations lrofemble.. L'opinion publique peur bien \
ne\ p.as toujours avouer' des. r.aifon·s obfoures de confCÎ'ence',
qui ne frappene que les, per{àmles' chez qui la foi' el!: plus.
for.re que le préjugé; ma,i, lès femimens d'ug. pe're qui.
craint de vouer [on enfant à,: la honte & à l'infortune, &
qui veutle légitimer, font refpeélables pour tous les hommes.
En, fuppofant;, GOnrre tôure vraifemblarfae, un fy.l!:ême fuivi
de barbatie & de cruauté dans. tau te.la c'onduite de Mé. Coye,.'
faudrait-il pré{umer ~i.Jffi peù favorablement de la mere? C~lle
ci- a furvéou à fon mari. Si ju[ques-Ià elle était néceffitée de cacher fes [eotimens, elle po~voi~ ~lor~ le~ fa~re éc\a!er ~ un tems_
,
�DU
PALAIS
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PROVU~Cl!:
39t'
de liberté fuccédoit à un tems de contrainte; le mal palfé
n'étoir pas fans remede ; elle pouvoit le réparer par un aveu,
par un foupir. POl;lrquoi donc ne feroit-elle pas venue au fecours de fon enfant? Numquid ahlivifci pauJl mulier infanum fuum, lit non mifereatur flUa lIuri JilL Un pere peut avoir
des foupçons fur fa paternité; un trair de jaloulie, une imaginarion inquiete peuvent empaifoDner dans fon cœur le plus
doux des plailirs, les plus tendres feorimens; mais il ef!:
impolIible que ces craiores viennent jamais troubler l'ame
d'une mere: mater [Cil ,paur credit. Il lui dl: permis de fe
livrer à roure fa tendrelfe , elle ne redoute point une erreur qui lailfe des trifl:es imprelIions quand on peut la craindre. Les meres foor naturellement plus rendres, elles aiment
plus leurs enfans ; ouere la douceur & la fenfibiliré de leur
fexe, la nature lèmble leur avoir ménagé plus de motifs pour
s'attacher à ceux à qui elles ont donné le jour.
Toures les circonf!:ances de la caufe concourent à établir qu'il n'ef!: pas polIible de fe refufer au défaveu frap~
pant qui nair contre Marvert de toute la conduite de fes
prétendus pere & mere, de toures leurs aél:ions unies ou féparées. C'efl: donc le cas ou jamais d'en croire aux deule
époux ,Jlandum eJl ver60 viri & mulieris.
Mais, dir-on, la reconnoilfance des pere & mere ne
peur-elle pas exif!:er de plulieurs manieres ? Ne fulEt-il pas
qu'ils aient manifefl:é leur qualité par l'éducation donnée à
l'enfant, par le trairement filial? Cette reconnoilfance tacite n'équivaut-elle pas à une reconnoilfance direél:e ? Il
faut difl:inguer un traitement tel quel, un traitement qui con-'
viendroit à un étranger comme à un aurre ; un traitement de
pure charité ne feroit point un aél:e de reconnoilfance. On
peur avoir des rairons de fournir des alimens à un enfant &
de s'intérelfer à fon entretien, foit rairons de famille, foit
raifons d'égard pour la mere, foit raifons de générolité. Tout
cela ne prouve rien. Pour que le traitement puilfe faire
preuve de filiarion, il faut, felon Menoch, de ar6itrariis jll. dicum quœJl. & caufis, lib. 2., cent. l , cafu 89, n. 76 &:
69, & M. d'Aguelfeau, tom. 3 , pag. 183, que l'enfant ait
�392
Jou
RN Il L
été élevé dans la maifon, & qu'il ait été élevé comme enfant de la maifon.
D'abord, eil-i1 certain qu'en 17So, époque donnée à la
naiffance de Mafverc, il foit né un enfant de la DUe. Linfolat, ou, ce qui eilla même chofe, la DUe. Linfolat efl:elle accouchée? Il ne conile d'aucune preuve de ce fait.
L'accouchement eil un fait qui tombe fous les fens, un fait
fur lequel on ne peut fe méprendre ni fe tromper. La filiation au contraire eil un fait obfcur, un fait. que l'on ne
peut jamais entiérement éclaircir. L'accouchement fe prouve,
la filiation fe préfume; il faut avoir prouvé le premier de
ces faits avant que d'être autorifé à préfumer l'autre. Dans
-la fameufe affaire de la Dame de Bruis, rapportée dans les
Caufes célebres, tom. 17, il n'y avoit point d'accouchement
prouvé; on n'eut aucun égard aux faits d'éducation dont il y
avoit des preuves frappantes & littérales.
L'aél:e d'apprentiffage du 19 Août 176) & celui de cancellation du 18 Novembre 1767 ne prouvent rien, puifque Me. Coye n'y étoit point préfent, & que perfonne ne fiipuloit pour lui. La déclaration de Louis Marrel n'a été
imaginée que. pour rendre utiles ces aél:es qui n'avoient
aucun rapport ni de près ni de loin avec Me. Coye. Mafvert produit encore diverfes lettres dont aucune n'eil écrite
par fes prétendus pere & mere. S'il exiiloit déja au procès
des traces de la prétendue paternité de feu Me. Coye; fi
l'on avoit des preuves que celui-ci eût agi en pere pendant
fa vie, on pourroit alors avec quelque fondement regarder
les fecours adminiilrés par le Fleveu , comme une forre de
continuité de la conduite de l'oncle; mais il eil abfurde de
vouloir fans preuves & contre les preuves, induire la· pater.nité de feu Me. Coye des feuls témoignages de charité
donnés par le lieur Coye fon neveu à un enfant qui ne
juHifie d'aucun aél:e quelconque de reconnoiffance de la part
de Me. Coye lui-même.
,
Dans l'impoffibilité de produire aucuns aél:es jull:ificatifs
de fon état, Mafvert offre 'la preuve teilimoniale. Cette
preuve eil·elle admiffible ? Les faits que l'on oifre de prouver
•.
font",
. , _.
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PAL AIS
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PRO V li Nell.
393
font-ils conc!uans? Les Loix qui ont Je plus de rapport à
cette matiere, fone la Loi premiere , cod. de tejlibus, & la Loi
29, If. de probationibus. Elles décident l'une & l'autre que
la preuve par témoins ne /ùffit pas en matiere d'état. Si
tibi controverfia ingenuitatis fiat, dit la premiere de ces Loix,
defende caufam tuam inJlriImentis & argumentis quibus potes.
Soli etenim tejles, ad ingenuitatis probationem non fujficiunt.
Probationes, dit la feconde, quœ de filils dantur, non in fola
ajfirmatione tejlium confzflunt.
Il e/l: vrai que la Loi 1') , cod. de fide inJlrument., décide
indéfiniment que la preuve par témoins a autant de poids
dans les conteHacions que la preuve par citres: in exercendis
litibus eandem im obtinent, cam fides inJlrumentorum, quam
depolitiones teJlium. Mais cerre Loi e/l: générale, elle ne
difiingue point les matieres. La Loi du code de liberali caufd
eH bien relative, fi l'on. veut, aux quefiion d'état; elle dé.
cide que dans ces que fiions il faut, pour aller au vrai, admettre ou recevoir toutes preuves avouées par le droir. Nec
omijJà profeJlio probationem generis excludit, nec fa/fa jimulatio veritatem minuit. Cùm itaque ad examinationem veri,
omnis jure prœdita deheat admitti probatio. Mais cette Loi
e/l: encore très-indéfinie, & ne parlane en général que des
preuves avouées par le droit, fans en fpécifier aucune, elle
ne fauroit coneredire ce que des textes précis !lamene directement fur l'infuffifance de la preuve par témoins.
Pour ce qui e/l: de la Loi 9, cod. de nuptiis , il faut con~
venir qu'elle femble exclure la néceffité de rapporter dans
les queflions rl'écat des preuves par écrit. Mais cette Loi
parle dans le cas d'un concubinage noroire, & d'une po/feffion publique & con/l:ante.
Le Droit Canonique dans le chapicre tranfmijJœ paroîe
ne pas fe contenter de la feule preuve par témoins; il joint
indicia à la pr uve ce/l:imoniale: Jlandum ejl verbo viri &
mu/iuis qui neg. nt a/i'luem fi/ium, nifi indiciis & teJlibus coTltrarium probetur. Les Ordonnances du Royaume fe fone /ingu_
liérement occGpées des moyens d'élablir l'état des hommes
Armées 1775 & 177 6•
D dd
�394Jou lt N A L
par écrir, par preuves authentiques & folemnelles; relies
font les Ordonnances de 1639, de Blois, de 1667'
Dans les Caufes célebres, tom. 6, pag. )46, Id DlIe.
de Choifeul fut admife à la preuve par témoins, parce qu'elle
était aidée de preuves écrites. Au tome 13, pag. 381 , un
autre Arrêt admit la Dlie. Ferrand à la preuve qu'elle demandait.. Dans les Plaidoyers de M. d'Agueffeau, on en
trouve un autre qui. débouta la Coulon, parce qu'elle n'avait aucun commencement de preuve par écrit. Pareil Arrêt
rapporté par Soefve, tom. l , cent. l , chap. 34, pag. 37'
Autre Arrêt dans Cochin, tom. 4, pag. 348, & Caufes
célebres, tom. 17, pag. 2) 9 & fuiv.; Denifart au mot
état, .ri. "14 ; Boniface, tome 4, livre 9 , rit. 4, chap. 2 ,
pag. 6)) & 66).
La preuve teHimoniale n'ell: pas fuffifante par elle-même
pour opérer la preuve de l'état; elle peut feulement y concourir. La preuve refl:imoniale n'efl: donc en matiere d'état
qu'une partie de la preuve, & une partie qui a befoin d'être
précédée d'un commencement de preuve. Pour que la preuve
reHimoniale fait recevable, il faut qu'elle puilfe venir faire
corps avec les preuves déja exiHantes au procès; il faut
qu'elle puiffe venir former un même tout avec ces preuves.
Il ferait abfurde & contradiél:oire d'admettre la preuve teftimoniale, quand, au lieu d'être aidée par des commencemens de preuve, elle feroit combattue par des preuves contraires. En matiere d'état, la dépofition des témoins peue
bien fuppléer à la preuve légale qui manque; mais elle ne
fauroit prévaloir fur une preuve contraire qui exifie.
Dans les circonfl:ances de la caufe, non feulement Mafvert ne rapporte point des commencemens de preuve, mais
-il efl: combattu par des preuves contraires. Il a contre lui
la prélomption de droit, puifque les enfans nés hors le
mariage font plutôt préfumés JPurii quam naturales. Il a
contre lui les titres, puifque [on extrait de baptême lui donne·
des parens autres que ceux qu'il défigne. Il a contre lui les
monumens domefl:iques, puifqu'il n'efi pas même nommé
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE,
395
dans le tef!:ament folemnel de fon prétendu pére. Il a
contre lui le défaveu conf!:ant & uniforme de ceux auxquels
il prétend apparrenir. Il ef!: impoffible qu'on puiffe le recevoir à prouver fa prétendue filiation par témoins.
On difcma enfuite rous les faits dont Mafverr demandoie
à faire la preuve, & l'on fomenoit que cerre preuve éroie
irrécevable & inconcluante, parce qu'on ne pouvoit en tirer
aucune conféquence utile pour l'objee que l'on vouloie prouver, & que quand même rous ces faits feroient pronvés, la
filiation ne le feroit pas.
M. l'Avocat-Général de Califfanne examina, 1°. ce que
c'eH que la légitimation par mariage fubféquent ; quelle en
fue l'origine, & li elle s'opere fans une reconnoiffance expreffe des parens. '1.°, Ce que c'eft que le mariage fecret;
quelle en ef!: la peine, & s'il prive de la légitimation par
mariage fubféquent. 3°. Quelles font les différentes preuves
de l'état de l'homme; li à défaut de preuves primitives, des
préfomptions peuvent avoir lieu; li un commencement de
preuve par écrit ef!: néceffaire & fiJffifant ; fi la preuve
tef!:imoniale feule peur être admife, & dans ce dernier cas,
fi la précilion des faies & leur objet ne doivent pas la faire
accorder ou refufer.
La légitimation par mariage fubféquenc eft un privilege ,
une fiétion de la Loi par laquelle celui qui n'éroie pas légitime, le devient par le mariage pof!:érieur de fes pere
& mere ; cette fiétion de la Loi ne paroîe pas favorable,
pu ifqu'elle tend à entretenir la débauche & le liberrinage ,
~ féduire des mineures fous la promeffe de mariage, qu'elle
paroîç propre à favorifer la clandef!:inité ; en un mot,
qu'elle peut avoir des dangers : mais n'ef!:·il pas plus rai.
fonnable de dire que cette Loi fe rapproche du droit naturel, que le confentement fait l'effence du mariage; que la
Loi fuppofe que l'homme & la femme ont eu intention de
fe mârier (lès qu'ils fe font connus; que la' violence feule
de la pa1Iion leur en a faie prévenir le- moment; que leur
tbmmerce a été une efpece d'anricip'ation du mariage qu'its
ont depuis contraété ; que les eilfàris qui en font nés doivent
D d cl 1..
�3 96
.
Jou RNA L
donc être regardés comme des fruits anticipés de leur
union. Il femble que dans ce moment les Légiflateurs oublient les Loix politives & civiles pour faire vivre la Lo,
de la nature, qu'ils veulent réparer l'injure faite 11 l'honneur
par la fatisfaétion la plus agréable pour UD pere, celle de
revivre dans des enfans légitimes.
Les Empereurs Romains ont été les premiers à faire
jouir la fociété de ces Loix, comme on le voit dans une
conHitution de Zenon & d'AnaHafe; mais ils mirent des
reHriétions, ils diHinguerent des circonfl:ances ; ce n'étoit
que vis-à-vis des concubines que ce bienfait de la Loi
avoit lieu, c'étoit un droit particulier. Jufl:inien fentit davantage la néceffité de la légitimation; il en diminua les obfracles, il en augmenta les occalions, il en fit le droit généraI ; mais les bonnes mœurs furent la bafe de ces principes, le moindre foupçon de débauche rendoit indigne du
bénéfice de la Loi, comme il dl: aifé de le voir dans le
titre du Code de naturali6us liberis, & dans les Novelles
12., 18, 78 & 89, & comme le prouve le chapitre tanta
vis 'aux décrérales qui jiliï funt legitimi.
Le Droit Canonique étendit fur ce point les Loix Romaines, & l'ufage a introduit dans nos mœurs une auffi
belle infl:itution; car nous n'avons pas d'Ordonnance de
nos Rois fur ce point. Celle des donations en dit un mot
en l'article 41. Nombre de coutumes, comme celle de
froye, en parlent plus pertinemment, & le célebre Mr.
d'Agueffeau diHingue dans ces coutumes celles qui parlent
de la légitimation en général, de celles qui en font l'application aux cas particuliers. Mais nous n'avons point de Loi
publique qui l'établiffe ; il femble même que dans l'ufage
po us fuivons plus les principes retracés dans les décrétales,
non par leur autorité, car elles n'~n ont aucune en France,
fur-tout en matiere de légitimation, qui efl: toute d'ordre
politique, mais par leur, équité & la faveur; nous nous fo~
nIes écartés du droit ,Romain qui exigeait beaucoup de for,
malités ; nous ,avons pris la légitimation da!ls la force de la
Loi; nous l'avons regardée, c0!Dme UDe .conféqueno~ d~
l
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�DU
PALAIS
DB
P·ROV'BNCR:
391
mariage; nous avons réunis les motifs d -s Loix naturelles
& civiles.
Les conditions effentielles de la légitimation font la liberté des pere & mere au moment de la naiirance de l'enfant, folutus & foluta , & la célébration du mariage avec
routes les formalités utiles & prefcrites, matrimonium coram
proprio Parocho jaaum. La légitimation ne peut pas avoir
plus de force que le mariage lui-même, puifqu'il n'ef!: qu'une
fiétion de ce contrat; fans cela, loin de remédier aux abus,
elle autoriferoit le crime, elle en favoriferoit la continuité ; il faut donc que les perfonnes qui fe marient,
pour acquérir à leurs enfans le bienfait de la légitimation,
euirent pu fe marier au moment oÙ ces enfans font nés.
Mais la légitimation n'a-t-elle point d'effet, s'il n'y a une·
reconnoiirance publique ou particuliere des pere & mere
lors du mariage?
Il ne dépend pas du pere ou de la mere de priver de la
légitimité des enfans nés pendant le mariage; il n'en doit
pas dépendre non plus de leur enlever le privilege de la légitimation , dès qu'ils prouvent leur filiation; dès qu'elle
n'ef!: pas contef!:ée, la Loi leur affure leur état de légitimité, & l'aveu ou le défaveu de leur pere, la reconnoiffance ou le filence de leur mere ne peuvent les en prÎ\'er.
En vain voudroit-on regarder cette reconnoiJIànce comme
une formalité néce1faire, Mille motifs , le refpe& humain,
le préjugé, la jaloufie, un moment d'humeur peuvent l'empécher ; de pareilles caufes ne peuvent priver l'enfant de fon
état. Telle ef!: la Jurifprudence de la Cour;'jull:ifiée par la
nature & l'humanité; elle fut établie dans le plus grand
détail par Mr. Le Blanc de Caf!:illon, Avocat-Général;
dans la caufe de Mazet; il fou tint avec la plus grande force
que la légitimation par le mariage fubféquent légitimait de
plein droit, & etiam invitis parentihus ; il convainquit, &
l'Arrêt fut conforme à fes conclufions. Il avoit même devant les yeux un grand modele, Mr. de la Chalotais; ce
Magif!:rat auffi refpe&able par fon mérite & fes talens,
~u~. Pllr . [es per[~,utions. & [es ve:Eus, paraît Coutenir ait
�398
Jou RNA L
premier abord qu'il faut une reconnoiJrance expreJre; mais
quand on réfléchit fur les idées de ce profond Magifl:rat ,
on apperçoit aifément qu'il eût penfé autrement, s'il n'eût
pas été quefl:ion d'une preuve de filiation demandée, &
qu'il eût eu à traiter la !impie quefl:ion de favoir, fi un
enfant dont l'état n'efl: pas révoqué en doute, ell légitimé
par le mariage fubféquent de ceux qui lui ont donné l'être,
quoiqu'ils ne l'aient pas reconnu.
Si nous parcourons les Auteurs qui ont écrit fur cette
m'atiere, nous les verrons prefque tous exiger des c'onditions différentes. Coquille & Lebrun ne voyant que d'après
le Droit romain, exigent pour la légitimation un contrat
de Ir.ariage; mais cette néceffité ell abfo!ument abolie; le
contrat de mariage n'eH point une formalité nécelIàire dans
les mariages ordinaires; pourquoi en deviendrait-il une dans
le mariage fubféquellt? Rien ne to~che à la légitimité dllns
le conrt at de mariage; pourquoi la légitimation ne pourroit-elle Fa~ avoir lieu fans lui? Bacquet, Loyfel, La Peirere, Brillon, exigent la cérémonie du poêle comme uue
condirion néceJraire, & elle a lieu dans quelques Rituels,
comme dans celui de Paris.
M:iis quoique cet ufage air éré très-ancien en France,
comme il eH de beaucoup poHérieur à l'érabliJrement de
la légitimation, on ne peut pas dire qu'une telle formalité
fait néceJraire, & que l'omjffion puiffe donner la moindre
atteinte à l'état des enfans. Rien dans les Loix romaines
qui reJremble à cet ufage; cependant ce font ces Loix qui
ont établi la légitimation des enfans par mariage fubféquent.
Nulle Loi qui l'éta'bliffe dans notre droit français, conféquemment nulle n.éceffiré de l'exiger. D'aill~ut.$ fouvent la
honte, )a pudeur, l'éclat & d'alltres rai fans détournent les
parens de faire des femblables décla'ratior:Js. En vain au lieu
de 'la cérémonie du poêle exigemit-on celles qùi fe font
chez les Not-ires, d.llls l'afre des époufailles ou autres telles
ne font pas plus néceJraires, & l'on"peur tanchir~ avec 'Mr:
d'Agueffeau, que l'avis général'des Doél:eurs eH, qu'e pou;'~u
qU'Il fait confian~ que les enfan~ doj~eu~ ~é~i:âblem5nt là
�D U
PAL AIS
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PRO V Il NeIl;
399
baiifance "à ceux qui ont contraété dans la fuite un mariage,
ils font toujours légitimes fans aucune formalité.
Quelques Auteurs, en parlant en général de la légitimation, n'om pas même di!l:ingué celle qui s'opere par mariage fubféquenr, de celle qui e!l: fondée fur des lettres du
Prince, & ont foutenu qu'il falloit une reconnoiffance du
pere & de la mere. Ils ont raifon fans doute dès qu'il s'agit
de la-légitimation par lettres du Prince; alors il n'y a point
de mariage, point de bafe conféquemment de l'état de l'en:fant; il faut que cet état foit follicité par le pere.
Le pere & la mere étoienr libres quand ils ont eu l'enfant;
mais il ne fe font unis par aucun lien, ils ont reHés libres;
l'enfant de l'amour n'e!l: jamais devenu celui de l'himen; il faut
donc que quelque chofe opere ce changement) & c'e!l: ce
qui rend néceffaire la' reconnoiffance de la parr des parens:
mais il n'en e!l: pas de même, lorfqu'il y a un mariage fubféquent; alors tout e!l: approuvé, tout eH reconnu; le pere,
en fe mariant, légitime de plein droit les fruits de fon
amour; la Loi voit marier le pere; dès-lors fon fils e!l: à
la fociété.
Mais il faut (continua Mr. l'Avocat-Général) que le ma"';
riage ait été célébré felon toutes les formalités prefcrites ,
qu'il foit valablement conrraété, ou, pour mieux dire, qu'il
foit valable.
Toutes les Loix, [oit religieufes, [oit civiles ,.ont voulu, dit
"l'Auteur de leur Efprit, 'lue les mariages euj/ènt toute l'authenticitépoiJiDle , pour a.ffùrer l'état & l'éducation des enfans; l'honneur même des mariages l'exige, & nos Souverains qui ont
regardé cette publicité comme une des qualités effemielles
au contrat, ont infligé des peines aux mariages fecrets,
& les Ont privés de certains effets civils & précieux; ils
n'ont pas voulu que l'on rougît de l'union la plus fainte &
la plus fa crée.
Un mariage fecret e!l: également contraire aux droits de
la religion, de la nature & de l'Etat; il infulte à la fois
au facrement, à la fociété & à la nature. Au Cacremem:
,'e!l: le profaner; c'e!l: au moins l'avilir, en affoiblir la di:;
�~o
JOURN~L
gnité, attacher une· efpece de déshonneûr à un état auquel
le chrifiianifme attribue des graces qui le [anaifient; c'eft
càcher cet état de grace fous un extérieur de honte -& de
débauche. A la faciété, les mariages font fan bien & fon
patrimoine; les citoyens lui appartiennent ainG que leur
état. Ils doivent naître fous la foi & la notoriété publi<}ue; il ne doit pas dépendre des peres de répandre des
nuages fur la naiifance de leurs eofans ; membres de -la fociété , enfans des Loix, il faut qu'elle nous reconnoiife en
naiifant, fans être obligée de retourner en arriere, & d'éclaircir les doutes de notre éta~. A la nature: c'eft obfcurcir fes principes; l'habitude feule nourrit les fentimens,
entretient les liai fans , fortifie les liens des familles; fans
cerce reifource tout eft anéanti; les parens deviennent des
étrangers, & l'on oublie ces rapports faints & facrés de
pere, d'enfant & de parent, qui forment cout à la fois le
charme & le fourien de la fociété.
Des conGdérations auffi frappantes réveillerent l'œil vigilant
de nos Souverains, & l'art. S de la Déclaration de 1639
profcrit les mariages fecrets, en declarant les enfans incapables de t~ute fucceffion. Une des ârconflances les plus frappantes de la prelJ1le du mariage fecret, dit Pithon, efl lorf
qu'une fervante 'lui a époufè [on MaÎtre, a toujours coutume de
paraÎtre dans la maifon [ous [on état de domeJlique, parce 'lue
la déclaration a eu autant en vue de profcrire le déshonneur
du mariage 'lue le fecret. Le mariage fecret eft celui dont
l'exiHence demeure, pour ainfi dire, concentrée parmi un
petit nombre de témoins, qui eft un myHere pour le public.
Le mariage public au contraire eft celui qui eft fuivi de
la part des deux époux légitimement unis, & qui ne rougiffent pas de l'être, d'une profeffion publique de leur état.
En vain diroit-on qu'il fufEt que les mariages foient pu.
bliquement contraaés en face de l'Eglife, avec les folemnités prefcrites par l'Ordonnance de Blois, & que dès qu'il a
été célébré par le propre Curé, Ggné des témoins, dépofé
dans un regill:re public, il ne peut plus être fecret, ni exporer les enfans à la privation de~ ef!"ets c~viI~\
pour•
�PAL A'l s D l! PRO VEN C H.
40 l
Pour combattre un pareil fyil:ême, il n'y a qu'à fixer la
différence des mariages clandeil:ins & fecrets, & dire avec
Mr. Leredant que le mariage clandellin eH: celui qui n'ell:
pas comraél:é devant le propre Curé, & lors duquel on a
oublié quelqu'une des formalités prefcrites par la Loi lors
de la célébration; dire avec Mr. l'Avocat-Général Le-Nain en
170), que le défaut de fOlmalités rend le mariage clandeil:in
& le fait déclarer nul & abufif; mais celui qui eH: célébré
dans toutes les formes, peut être tenu fecret, & c'eH: ce fecret qui eil: puni par l'Ordonnance de la privation de toute
fuccellion, quoiqu'il foit volable; dire avec Henris que pour
que le mariage ne foit pas tenu fecret, il faut qu'il foit
connu dans la famille.
En examinant la Déclaration de 1639, l'on apperçoit que
le mariage fecret efl: cenré célébré avec toutes les formalités, puirque cette déclaration n'en prononce pas la caffation ;
il ne faut donc pas confondre-ce qui tient à la publicité du
mariage ou à fa validité, le recret & la clandeHinité.
Avant la Déclaration de 1639, pour jouir d'une legitimité
parfaite, il ne falloit d'autre condition que le mariage valablement célébré; la publicité de droit, qui étoit celle des
formalités, étoit la feule qui fut exigée; le facrement une
fois donné par le miniflre de l'Autel, le fait des parties
érait indifférent. Mais le Légiflateur frappé des inconvéniens inféparables du mariage fecret, a voulu, pour donber
à la fociété des Çitoyens pleinement légitimes, que le ma.riage fU·t régulier dans la célébration, & devînt plus· refpeél:able encore par le fceau de la publicité du fait.
C'efl: donc le fait des parties qu'il faut examiner: fi elles
ont vécu comme avant le mariage; fi la femme n'a pas
porté le nain de fon mari; fi elle n'a pas joui des honneurs
dus à (a qualité & à fa condi~ion; fi les familles Ont ignoré
cerre 'union; fi dans des aél:es les conjoints fe font donnés
d'autres qualités que celles de mari & de femme; fi enfin
il exiHoit un motif d'intérêt dans le fecret.
!
Lorfqu'il n'y a d'aurre vice que le fecret, le contrat civil
D U
Années x775 & z776.
Eee
�401
Jou
RNA L
formé par le cOl1fentement réciproque, acquiert, fous l'au..:
tarité du facremelilt, cette indiffolubilité que les hommes ne
peUV6.Llt pLus rompre. Les enfans nés de ces mariages font
légitimes; ils jouilfent des droits & des prérogatives qui,
dans la vie civile, font réfervés aux fe.uls citoyens. Une feule
peine ell: prononcée contre ces mariages; peine relative qui
n'a été érablie qlle par rapporr aux familles, & qu'en leur
confidératioD particuliere. Les enfans de ceux qui tiennenc
.leurs. mariages fec.rets" nailfent étrangers à ces familles; les
biens d'uDe famille ne peuvent être .déférés qu'à des titres
publics. Une union myfl:érieufe dont les parties elles-mêmes
ont rougi, qu'elles ont craint de faire fortir des ténébres
où elle fut formée, n'ell: donc point un rirre valable pour
recueillir ces biens. En un mot, le fecret d'un mariage emporte avec lui une exhérédation légale. L'honnêteté publique
a été violée, la famille méprifée; la Loi prend elle-même
le foin de la venger.
Ml'. l'Avocat-Général examina en fait, fi le mariage dont
s'agilfoit avait éré tenu fecret pendant la vie des deux conjoints. Il obferva qu'avant la célébrarion, point de fianciailles, point de contrat de mariage; objers qui, qu ique non
elfentiels dan! la validité du mariage, [e.rvent cependant
beaucoup à en établir la publicité. Lors de la célébration,
point d'amis, poiDt de parens, rémoins étrangers, difpenfe
de trois bans; circonll:ance très-forte, qui [auvent a fait déclarer des mariag<ls> abufifs, qui ell: açfolument contraire au
Concile de Trente & à l'Ordonnance de Blois, & qui, quoiqu'elle loir permife ·dans quelques rituels, n'a cependant lieu
que dans des circonll:ances très-prelfantes qui ne. [e trouvaient point dans cerre caure. Après la célébrarion & pendant la vie. de Me. Coye, même myll:ere dans la conduite
des deux époux. Au moment prefque de la mort de Me.
Coye, dans le temp~. où il érait, pour ainfi di.e, feul avec
lui-même, il hlit fan telbment [olemnel, & par con[équent
impénétrable jufqu'après lui, & il Y établit le fecret de [on
mariage; ces dernieres volon.tés font celles d'un homme qui
�. DU
PAL A l'S
DE
PRO VEN C B . .
403
meuft libre & fans engagêment; c'efl le feul aél:e qui exiHe;
il Y ·lai·ffe 400 liv. ae p~n(ioh viagere Il la nommée Petronille Linfol'at. Pourqüoi donc he l'appelle-l'-il pas fon époufe ?
Pourquoi .l'appelle-t-il fa gouvertianre? ,Il ajoute même qu'au
moyen 'du legs qu'elle reçoit, elle n'aura plus rien à prétendre fue fes gages. Il connoît- f..lhs 'doute l'érat du mariage qu'il avait contraél:é,·& il l'envlfagéoit du même Œil
que la Loi. Aprés la mort de Me. Gaye, rien qui découvre
que Perronille Linfolat étoit fan époufe. Enfin rien ne prouve
mieux ce fecret que la conduire du nommé Mafverr & la
défenfe qu'il a fournie. Il a ignbré, a-l'-il dit, les liens qui
uniffoient fa mere à Me. Coye jufqu'au mois de Juin 177') ;
& depuis le mariage, il y avait eu des époques fans doute
affez ·ihréreffance-s pour lui, pour ne pas l'ignorer; c~ux qu'il
prétend fes pere & mere étaient morts; il fréquentoit la maifon
de Me. Coye: comment, puifqu'il invoque la' publique renommée, eut-il été Je [eul dans la ville des Baux & dans toute
la contrée qui eût ignoré le mariage? Donc il avait été
tenu [ecret.
. Enfin, loin que l'extrait mor'tuaire dePetronille Linfolat
faffe preuve de la publicité de [on mariage avec Me. Coye,
il en établit encore davantage le [ecrer. Elle eH morte
deux ans après fan mari; cette mort avait diffous le mariage, il n'en exiHoit plus; le [ecret qui avait duré jufqu'alors était irréparable après la mort de l'un des deux conjoints. Si ·elle fût morte pendant la vie de Me. Coye, cet
aél:e [eroit ['aris doute un titre ·de publiciré. Après l'avoir
perdu, elle ne fut pas plus 'regardée comme femme de Me.
Coye, qu'avant fa mort, & la dénomination qui lui fut donnée
en· ce moment, eH au moins indifférente.
. Inutilement a'près cette -difcuffion offrirait-on la preuve·
du contraire. En général, on ne peut admettre la preuve
teftimoniale pour la publicité du mariage. Quelque [ecret qu'il
[oit., il a toujours quelque confident. Célebré dans toutes [es
formalités, il a la publicité de droit qui affocie plufieurs
perfonne.s à ce fecret; ainfi la preuve· teftimoniale aurait
fuujours qlÎelqiJe efpece de fondement. D'ailleurs la preuve
!efiimoniale eft la preuve des faits fugitifs & cachés, & non
.'
Eee2.
�~4
I
JOURNAL
celle de la p,ublicité d'un mariage; mais méme dans ce fait
particulier la preuve ferait non recevable, parce qll'il exifle
des titres qui établiffent le fecret, & contra fcriptum tèfii~
monil/nz non fcriptunz, non adnziuitur; elle ferait captieufe ,
parce que l'on viendrait préfenrer à la Juflice les confidens
de cette union comme témoins; enfin elle ferait inconchIante, -parce que la preuve des faits demandés n'établiroit
pas la publicité du mariage.
Le fecret de ce mariage fait fubir au nommé Mafvert la
peine de la Loi, & le déclare incapable de fuccelIion; mais
il n'en fera pas moins légitime; il n'auJa pas moins le droit
de porter le nom & armes de Me. Coye; il lui fera dû des
alimens confidérables, ou plutôt un fonds proportionné aux
biens de fes pere & mere; citoyen comme fon pere, qu'il n'aura pas à chercher dans la foule, le hafard n'aura pas
préfidé à fon exiHence, & il jouira de tous les avantages,
s'il peur prouver qu'il tient cette exiflence de Me. Coye &
de Petronille Linfolat. Né hors le mariage, la paternité devient prefque impolIible, ou au moins bien plus difficile à éta- /'
blir; placé dans la pofition la plus déf.wanrageufe, il doit
prouver qu'il eH fils d'un tel & d'une telle; la preuve d'un
feul feroit inutile & ne pourroit point opérer le bénéfice
qu'il demande,
Mr. l'Avocat-Général examina enfuite en principe quelles
font les preuves de l'état des hommes. ~a premiere fans
doute eH la poiTeffion d'état, fondée fur le droit naturel;
elle était la feule regle qui diflinguât les citoyens. Avant
que les Erats policés euffent établi des Loix fur une matiere auffi importante, les familles Ce formoient de mariages
publics; -les enfans étoient élevés dans la maiCon des pere
& mere, comme -les fruits -précieux de l'union conjugale.
Le rapport de différens membres d'une famille fe confirmoit
de jour en jour par la notoriété; ils fe connoiffoient &
éroient connus; la confiance & la bonne foi faifoient les
motifs & la bafe de leur état; troubler cette poiTeffion
en demandant une filiation contraire. à celle qui étoit annoncée par cett~ longue fuite de reconnoiffance, c'~ut -été
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�DU PALAIS
D,J! PROVENCI!:
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,houbler l'haqnçnie du genre humain. Auffi les Lêgi!lateurs .
en.fixant dr nçuyelles preuves de l'état de l'!>omm:e, ont
femblé refpeaer celle qui avoit été puifé~' daus leur innocence & .Ieur- franchife; ils ont voulu que l'on ne pùt détruire la polJeffion d'érat que par des titres précis & cortfticutifs. Çelui qui eft troublé dans un état dont. il jouit depuis qu'il ~xi~e" .~'a' rien à prouver. En vain'vient-on lui
dell\ander c9t!lPtlY : polJideo , quia pojJideo i'répon~-il; je porte
le nom de ma famille, j'ai été élevé dans [cm fein comme
fils de la maifon ; Jes foins les plus ajJidus, la tendreffi la
plus confiante, le traitement le plus filial & le. mojns. équivoque lTf'aJlùrent mon état, & vous ne p0!f.yer T[le l'e'Jlever. Si
je n'avois. point de poffijJion 1 n~;troit la pr4fo.'J1P~i~'lfCORvaire)
Je ferois ré'puté wc étranger l
1 ; ,
"
. La pr~uve la plus force de cette polTeffion, c'ell: que tous
les Auteurs appellent tracCatus & educatio; mais il fa ut pOur
çel,! que les traitemens aient pour pril1cipe l'affeaion paterne Ile, & qu'ils (oient tellernent propre~ à .un fils, qu'ils
ne puWent pas ~onvelJ.ir à un étranger; il rfJiu~ q\l~ ~e~ faits
aient une jufte proportion avec l'état qu'on en veut oonclure.
il 'ne faut pas confondre la pure charité avec la pitié tendre
d'un pere.
, Les Souverains ont regardé l'état des homtliles ,comme
1
~'objet le .plu~ i.nt.éfeirant é de l'ordre public; ils, ,ont voulu
d'autres p~euves qu~; .celles ,de la Loi n~turelle; ils o<;>nt. cru
gu'ils devoient porter $.'Ius loi~ les me(ures de leuT fagèlTe,
{X employer tou~ leurs foins pour que l'état. de, shaquJe,citoyen fe trouvât configné dans des regiftres publics qui puffent à perpétuité ~ffurer la preuve dè fa naiffance; que ce'
genre. <Je \preuvtj' ajoureroit) un ~npuveau,d~gré de force à
l'état qui d~_ roit être établi. par
la poffeffion,
ou que fi
•
l .
la po1feffio~ pouvoit deve~ir équivoque, le regifhe en répa- .
rerait les..virce~, viendrait au ,recours du citoyen privé' des
avantages d~une reconnoiffance folemnelle.
Le~ cè~fe~rs',' par~i. les')tQ;main~.,
tenoient des livres
.....l
qu'on appelloi~ cenfuales, ou les peres faifoient infcrire le
mo
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analllà"q"
e.:A'
Cujas
& Godefroy;
~... 1
-zt
IIü J.....
;,In cfè.ë:'..r's .~enfans:
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.. 1.14. ,_
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'JOURNAi
èifenr'qud'éhr des Ihommes fe prouvbir par ·Ie 'regiltre'àu
Cehfeür. Durer d·ans fon l Commentaire furl'art. F87 de l'Ordonnailce' de !BIois', obferveque PEmper"eur Anronin-IeFhiIofophe brdonna à Rome· que les citoyens filrent eorégillr~r dans ·Ie Temple de Saturôe la naiifance de leurs
~nfaÎ1s, :& qU'on eÎ1t recours 11- ces regiflres dans I~s caufes
cdnce'rha~n: l'état &:: la condition 'des perfonnes. (;et Empereur étabIlè 'auffi a'cer effet âes efpeces: de 'Notaires dans
les 'Province's. Nos Ordonnances, fuivant l'exemple des Romains., .ont exigé la néceffité des rêgifi'res. Quelques Aureurs, comme Dahty dans fon Commentaire fur l'art. SS
âe.l'Ordon'n"ancè de Moulins, prétendent que les regiftres
de' bàpfénié ne font foi que 'de la naiffance, & non de l'état
des perfonnes; m~is il fe trompe. Les' Talons &:: les d'Agueffeau arrellent le contraire; & d'ailleu'rs. l'Ordonnance de
1667 a donn.é encore plus de force aux regillres,. fait pour
la nai/T.1l1ce, fqit 'pour l'état. Le regillre eH le titre conftitutif de la' Loi civile; la poifeffion de l'état l'ell de la Loi
naturelle; celle-ci plus ancienne & moins fujerre à l'erreur,
J1a~rre plus nouvelle & plus authentique.
Ce 'n'dt pas que cerre preuve ne puiife être douteufe;
l'attention du L~ginateur pem quelquefois êçre trompée par
l'inobfe'rvation des regles' qu'il ,a prefcrites; mais fi l'on ne
l''adrriet 'pas, tour fera encor~ plus raollteux; fi on la rejette
fads â~s 'preuves cQuvaincaotes 'a~ fauifeté, c'dt ébranler
tous' les fondemens' de la fociétJ élvi1e'; il n"f' aura plus rien
ôe ceuain parmi les ciwyens :'Ia poifeffion d'état & les regillres fdnt ddnc les p'reuves'fondamèntales de l'état de
Fho'm'tni; mais font-elleS .Jles f~ules? exduent~enes 'toute'
forte 1re preuve? '~ fi 'un,lêtre fe trouvoit privé,.foir' de la
poffeŒoh . d'Etar, foir. de j"éxtrait. baptl/ler~" lIië pbil,roit-it
plus .bfoluménr1efpé'rwâe prouvet~la fili?ti'on'?' Si 'nos' Souverains 'ont fiJ(é d'es 'pfeuves"cerr.a:ines, pfécifes' & auffi folides qu'~uthen.tiql1es de ?l'édlr lies hpmrrles j 'il~f n'ont pas
manqué 'd'.in1d~{}.uer'.un'e lIl:\·tll "de,:rebjl~preüvés.i'.La"l'aide d~f
quelles -la' flliaii.o ' .pîft Vfémèntfe \}irérurn'~. ,1 :1
• ') )
_ A défaut dè regJifre5' tiu~licsl, 5 nëlfeut-o?1 f,pa . confâl'ié'i;
�DU
PAoLA.YS
DRy rPllOVBNCB.
407
les regiO:res ~ papiers dom,eO:iques des·p res & meres. d.é=
cédés? N'exiHe-t-il pas en droit une foule de préfomptiom.
de filia,tion q\li réu.nie-s, pe,uvent former un cor}~s de preuve?
Enfin la preuve. teHimoniale ne peut-elle pas tenir lieu de
regiHre,& de.po1felfioQ d'état.? Faut-il, pour y être admis,
des commencemens de preuves par écrit, Ou cet enchiline."
ment de faits lumineux & bien faits pour prouver la vérité ?
Chez les Romains, il Y avoit deux fanes de. livres ou
regiHrès, dit Godefroy; les publics dont le$ ·çenfe,urs ét'Üient
dépofitaires, les particuliers L qU.e les peres ·recn.o-ient e.l1Xmêmes, & à défaut des premiers, on recouroit aux livres
domeHiques. Nos Ordonnances, animées du même efprit,
ont voulu, dans le cas de. la perte des regiHres publics, que
l'on elÎt recours aux regilhes & papiers. domefiiq.l1es, des
peres & meres décédés; elles ont voulu que des trànfacrions, des contrars, des teHamens, des aél:es authe.nriq.ues·
ou des reconnoilfances parriculieres, à défaut 'de regifires
publics, fervilfent de bare à la filiation. La lurifprudence
la plus conHante, l'avis des plllS grands Magillrats, ont
rendu cerre propofttion certaine & à l'abri de coût, doute.
A défaut de tO,Ut aél:e, n'exille-t-il pas. des préfomptions
de droit qui réunies ,. pe.uvem fans doute prouver la filiaoion,
ou au maias foulever le voile qui pourroit la couvrir? Il.el!:
vrai que leur application en be.aucDup moins décifive vis-àvis 'de ceux qui demandent à prouver une filiation avant le
ma.riage '" maiS) cependant· elles peuvent être rrès-elfentielles; &.il n'eH pas même nécelfaire, dirent Lupus. &: P<fleotus, qu'elles fai~nt tau tes réunies ad prohant;l.am filiationem. Les préfomptions dont on parle, font le traitement ,
la commune renommée, la relfemblance, la reconnoifi'ance
des peres &. meres. Le concubinage eH une p.ré[omption par
analogie) &, pal' fimilitudé. ~. . .
'fil
.La regle, pater ejl.quem.nu.ptiœ. demonfirant, efl ûne preuve
fans reprique ,.quand il y·a.mariage. Une préfomptiotl ap[Jr.o;:;
chance, . dieoit Mt.: de ra. Chalotais, ell: celle qui 'ell: tirée
db c;onc;ubinag:e, pata- pr.efu}1ûtur q.uem. ron,uhinatu5 .demonf.,
'~.
1
.,
�408
Jou RNA L
trat. Un homme & une fille vivent enfemble in eleilo con~
'tuhernio; cette fille a même lit & même table que l'homme,
elle accouche dans la maifon, vieinis & aliis fl-ientihus; l'enfant y ell: élevé; il a été, ajoute ce grand homme, appellé
mon jils, & il a· dit mon pere & ma mere. Alors la Loi,
les Doél:eurs, le bon fens réfument qu'il ell: fils de l'un &
de l'autre, parce que c'ell: une préfomption juris & legis ;
c'ell: même la premiere de coutes, difent les Auteurs. Le
traitement ell: une aucre préfomption, mais équivoque.
• i Un .traitement' tel quel j un intérê( à l'éducation, des alimens fournis faf.ls proportion à l'état, ne forment pas, comme
on l'a ,dit, une preuve. Des raifons de famille, des égards
de charité, peuvent en être les motif.~; ce n'eH pas même
une préfomption de poffeffion d'état; mais fi l'éducation a
été vraiment filiale, ainfi que le traitement, alors c'ell: un
grand préjugé.
La commune renommée étant fort conjeél:urale, eH extrêmement équivoque: hoc prohationis genus, dit Cujas, fatis
deMle, Leve & injirmum efl. Nihil omnillà prohat, dit Mafcardus, 'luando contra famam extat negatio parentum. RaIde,
Jafon', Alexandre, Godefroy, font du même avis. Celle de
la reffemblance eH: fouvent trompeufe, & toujours le plus
léger adminicule de. préfompiion que l'on puiffe apporter à
la Jull:ice·; ce n'eR qu'un jeu de la nature. Ce que l'on croit
pouvoir dire de plus jull:e, c'el!: qu'en général les préfomptions font plus ou moins forres, dès qu'elles, établiffent &
démontrent mieux la poifeffion, ou qu'elles en affoihli1fent
]a valeur, parce que la pofièffion' ef!: la premiere de tout,es
les preuyes, & que les autnes ne fone bonnes, qu'autant
qu'elles fervent à Il démontrer.
Une pr.é[om.ptiop plus forte & plu~ intéreifante fans doute;
c;ell: là- ~éclara~ion 'des peres'& meres, qui en général efl:
un grand préjugé pour ou contre .là fili<irion; Il)ais qui n'eft.
cependant Iras une. preuve', gra'fde prœjuJicium non tamen. 7ume]!. Lercléfaveu des pere .& mere'ne pem.nuire,'à un :en:'
fànr dan,s le'cas du çoncubin.age, felbn le Dioit Canonique,
parce q\l'~lo~s il y ,a)UJle,_BréIQmp.t~on. de:-l.!l~Ls>i OOlltre l'al'..
,
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[e!Eior;
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PAL AIS
D H
PRO V B NeE.
409
fenion des pere & meres; mais les Loix oor-elles exclu
les déclarations des pere & mere en faveur des enfans ?
Quaor à la preuve tellimoniale (continua Mr. l'Avocat-Gé- ,
néral ), ne peut-elle pas tenir lieu de regiflre & de po1TelIion
d'état? Refpeéèable par fan ancienneté, cette preuve décide
de la vie des hommes: pourquoi ne pourrait-elle pas ilatuer fur leur état) Plus décifive que toutes les autres preuves,
doit-elle, pour être reçue, être accompagnée de commencement de preuves par écrit? Celui qui demande d'y être
admis, a-t-il befoin d'une fuite de circonllances frappantes
'& de faits lunlineux qui néceffitel1t la vérité?
II Y a trois fortes de Loix à dillingue! dans le Droit
Romain en rflatiere d'état. Les unes, indéfinies dans leur
objet, parlent des queflions d'état en général, & permettent toute forte de preuve avouée par le droit. Telle eil la
Loi 1), cod. de liber. cauf., & plufieurs autres. D'autres
parlent de la preuve teIDmoniale, & fuppofent la po1TelIion
d'état. Telle eH la Loi 9, cod. de. nuptiis, qui parle d'un
concubinage notoire. Tels font les deux titres entiers du
code de jlatu hominum, E: de fide irllrum. La Loi 6 de ce
dernier titre, fuppofe la pofielIion, puifqu'elle décide que
la pene du titre de la nai{fance ne peut ébranler l'étar.
La Loi 8, if. de flatu 11Ominum, décide que l'état ne peut
être attaqué, parce que le regifhe eH: mal conçu. Dans toutes
ces Loix, il ne s'agit que de conferver un état que l'on
po1Tede.
Enfin la troifieme efpece de Loi, eil lorfqu'on veut obtenir un état qu'on n'a point: probationes 'luœ de filiis dantur
non in fola affirmatione ti:flium conjiflunr ( Leg. 29, if. de
probat.) La Loi 2, cod. de teJlibus, n'eil pas moins précife : defende caufam tuam illflrumentis & argumemis 'luibus
potes, foli ellim tefles ad ingenuitatis probationem no,! fufficiun4.
La preu\'e teHimoniale était donc une des preuves de
filiation chez les Romains, & n'était pas la feule; mais
[uffifoit-elle? La glofe & Godefroy expliquent le mot foli
par folummodo, ce qui fait un fens tout oppofé à celui que
préfenre d'abord la Loi; mais, comme dit Mr. l'Auocat-Gé_
Années z775 & z776.
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nérill Gilbert, la note de Godefroy a encore plus befoin
d'interprétation que le texte même; & nous avons contre
fon opinion le texte précis, joli tefles non fù.fficiunt, qui
prouve direéèement l'infuffifance de la preuve reftimoniale.
Dans"le titre Cuivanr, au code de prodationilJUs injlrufll. domefl·, il Y eft dir: ad probationel7l fala non fufficùmt; fala non
ftfficÙlI1t, ne veut cercainemenr pas dire dans cet e Loi,
non falummodà f1ficùlI1t. Pourquoi, dans des- Loix fi voirines,
voudroit-on interpréter différemment les même~ mots? La
Loi qu'interpréte Godefroy, & oll il érablir que la preuve teflimoniale Cuffit, traduire en grec dans les bafiliques, l'eH dJns
le fens de l'infuffifance de cerre preuve. Cujas s'exprime
d'une maniere toute contraire à celle de Godefroy; & Celon
lui, la preuve tellimoniale ne fuffit poim , quia, dit-il, tefles
pecuniâ corrumj i pofJunt, indicia non item. Le Droit Romain, malgré route la faveur qu'il donnoit à la preuve teftimoniale, décide bien clairement qu'elle ne fuffit' pas pour
la preuve de la filiation.
Le Droit Canonique, plus favorable en général à cette
preuve, ne s'en contente cependant pas; dans le chapitre
où il eft convenu qu'il y a po1Teffion & concubinage, elle
joint les indices à la preuve tellimoniale, ni(z indiciis &
teflibus contrarium probetur. Suivant les principes de la Juri{prudence Fran~aife, l'autorité de la preuve reftimoniale
eut, dans les premiers ft.ecles, la plus grande force parmi
. nous; mais fan autorité diminue infenriblemenr; elle fut
remplacée par des épreuves fuperllitieufes, & l'on ne la
conferva, pour ainfi dire, que pour les cas où il étoit impofIible de connoÎtre la vérité par llne autre voie, fur les
matieres d'état.
Il ne faut point s'arrêter à l'Ordonnance de 1'>39, qui
n'établit <;les regif1:res que pour les matieres bénéficiales. Ex'!minons celles de Blois & de 1667, Pour éviter, dit celle
de Blois, le preuve par témoins que l'on efl obligé fauvent de
faire en juflice touchant les naiffances, mariages, les Greffiers en Chefs feront tenus de fe faire délivrer des doubles dès
regiflres de chaque annéé. Cerre Ordonnance prouve com;
�DU
PAL A 1 S
DB
PRO V B Nell.
4II
bien l'on ëraigi:lOit le danger de la preuve par témoins, &
combien l'on cherchait à l'éviter.
L'Orào_nna nce de 1667, dt. 20, arc. 7, porte que les preuves de l'âge, du mariage, & du temps du décès feron t reçues par des regifl:res en bonne forme, qui feront foi
& preuve en jufl:ice. L'article 14 ajoute: Ji lt:s regiJlres [ont
perdus, al! 'f1J'il n'yen ait jamais eu , la preuve en féra reç:Le,
amt par titres, 'lue par témoins; & en l'un ou l'aurre cas les
baptêmes, mariages ou tepu1tures pourront être jufl:ifiés,
tant par les l'eg.i!hes ou papiers domefbques des peres &
meres décédés, que par témoins.
Rien de li ciJir que l'ordre & le progrès des Ordonnances ; le regiltre eH la preuve à laquelle l'Ordonnance
attribue l'aûcorité propre à affurer Je fait de la naiffance;
c'eH par lui que chaque citoyen doit prouver fan état:
tel eH le droit commun, telle el!: la regle générale; elle
ne fouffre qu'une exception. Si les regill:res fane perdus,
la Loi cede alors, quoiqu'à regret, à la nécdIiré de chercher ailleurs des preuves d'une vérité au/Ii ineéreffante;
mais il ne fuffit pas d'alléguer l'exception, il faut la prouver, & dans ce cas l'Ordonnance exige l'union des p1piers
domeHiques, avec la preuve par témoins ;- elle n'admet ni
ne rejette aucun moyen, 'elle lJilre les chofes dans le droie
commun, car elle ne permet pas la preuve tel1imoniale
feule; Gt 'luoùju'elle n'ignorât pas., difoit Me. Gilbert, la
lJueJlion 'lui pouvait lIaüre de la réclamation d'état, elle n'a
pas· voulu étendre fa prél oyallce au cas Jingulier. Son defrein était apparemment <le lailler les Juges dans l'heureufe
firuation de pouvoir le déterminer par les différenres circonHances ; [Out ce que l'on peue dire, c'el1 que l'Ordonnance n'a pas v0nlu faire une regle précife; mais l'on
trouve [ons peine, difoit j Ir. Chauvelin, dans la JurifPrudence
dM AFFétS dt! 'IUal jixer les doutes & lu incertitudes.
, On a êhll'lng'~ dans 'cèux que l'on _a cirés différentes
époquè : la-naiffanc<, aYant ou pendane le mariage. On-a
préfenré différens points de vue'; favoir, la légitimation
fff2.
�'~n
Jou
RNA L'
bâtarde ou légitime; on a prouvé l'uniformité de la Jurif,;
prudence.
1
. Les Arrêts de Mademoifelle de Choifeul , de Mademoifelle Feraud, de la Cognot , de la Coufon, de Marie Damitié, de Soublot , du Sr. de SaGlly, de ·la Dame de Bouys ,
du Geur de la Francaidiere & de Catherine Bafane, ont
démontré jufqu'à l'évidence que jamais, dans aucune Cour
Souveraine, on avoit admis à la preuve tefiimoniale [lns un
commencement de preuve par écrit, dans le cas de la naiffance pendant le mariage, pour laquelle la Loi préfume plus
aifément, parce que ces enfans font le fruit d'un union autorifée par les Loix & fanél:ifiée par la religion; d'une union
enfin qui fait le fondement de la fociété.
Dans le cas de la naiffance avant le mariage, il Y a moins
,de difficulté lorfque l'enfant demande feulement des alimens,
que lorfqu'il demande d'être déclaré légitime, parce qu'alors
il vient troubler le repos de la famille dans laquelle il veut
entrer. Auffi la Jurifprudence a été bien plus févere fur ce
point.
Dans la caufe des fieurs Patru & Piagre, par exemple,
il Y avoit la reconnoiffance de la mere & une foule de lettres miffives du pere; mais le défaut de reconnoiffance de
fa part, empêcha néanmoins la légitimité. Dans la caufe
de 'Charles de la Rue en 1737 ,'la mere de l'enfanr écoit
convenue, les faits articulés, précis & circonfianciés. Mais
il n'y avoit point de commencement de preuve par écrit de la
paternité. Dans la caufe de Mazet en 17)7 & d'Arnaud
de Calavon , la preuve fue admi[e; mais il y avoit du côté
de la mere une filiation affurée, puifqu'elle venoit elle-même réclamer l'état de la' fille, & pour prouver la paternité
il y avoit une expolition de groffeffe , une efpece de reconnoiffance du pere, puifque le mariage ne fut con[enti
par lui qu'après \ln procès; qu'il autori[a même la DIte.
Arnaud à faire des [ommations re[pec,tueu[es à [t;S "parens,
& que, dans ces fùmmacions, la paternité y écoi~ énoncée
comme caure du mariage.
.
....
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PAL AIS
D B
PRO V B NeE:
4T3'
Cette Jurirprudence établit que l'cn a débouté de la preuve
tefl:imoniale taus ceux qui alléguant une nailTance avant le
mariage, n'étaient point en polTelEon de leur filiation, ou
n'avaient pas de forts commencemens de preuve p2r écrit.
Cetre Jurirprudence a pour garans les grands principes de
l'utilité & de l'honnêteté publique.
.
La Loi, dirait Mr. Bignon, ne dejire pas toujours une
preuve claire, certaine & concluante; elle fe contente de ./impies préfomptions, indices & conjec1ures, pour admettre
la
preuve teJlimoniale.
La feule preuve par témoins n'eJl pas [affifante dans les
queJlions d'état, dirait en 1686 le célebre Mr. Talon, les
diJjJlfitions du droit font formelles & précifès a cet effet, ce
feroit confier l'état la dépqfition de deux ou trois perfonnes,
& ce feroit d'une confèquence infinie dans le public, il n'y
auroit plus de jûreté dans les familles.
Nous ne difons pas, remarquait Mr. Gilbert dans l'affaire
de la DlIe. de Choi/eul, que pour admettre a la preuve par
témoins, il faille un commencement de preuve, mais il faut eTZ
fait de préfomptions tout ce qu'il y a de plus fort & de plus
capable d'entraîner.
Pour ouvrir la voie de la preuve teJlimoniale, dirait en
1737 Mr. Chauvelin, dans l'affaire du fieur de SoGlIy, il
faut un des commencemens de preuves par écrit qui frappent, ou des préfomptions violentes qui fe répandent fur un
affimblage de faits liés G' fuivis ; affimblage qui annonce la
vérité avec une e./pece de certitude, & qui ne peuvent être
propofès par l'impoflure. Les Bignons, les Joly de Fleury,
·les d'Ague!feau, tous ont parlé d'après les mêmes princIpes.
Mr. de la Chalotais, qui conclut au déboutement de la
,preuve en faveur de Charles de la Rue-Neuve, dirai t: on ne
doit jamais fe porter dans cette matiere admettre la preuve
,eJlimoniale, qui eJl, fuivant tous les Auteurs & fuivant la rai{on, la plus incertaine, qu'on n'y foit entraîné par la force
des ûrconJlances, & par des commeTlcemens de preuves co"
a
a
a
�~4
JOURNAL
pables de perfuader l'homme raifonnable, quoiqu'ils ne [oient
.
pas fulfifans pour déterminer le Juge.
Mr. Le Blanc de Cafbllon, aujourd'hui Procureur-Général, en concluant à l'admiffion de la preuve en faveur de la
Dlle. Arnaud de Calavon en 17)7, loin de s'écarter de ces
vérités, attefl:oit au contraire qu'il falloit des commencemens
(le preuve par écrit, & en trouvait dans l'expofition de groffeffe de la fille, dans l'aveu du pere., dans fa reconnoiffance
de l'enfant, dans les foins qu'il avoit eu au moment de la.
naiffance, dans les paiemens qu'il avoit fait pour lui; enfin
dans une foule de préfomptions toutes plus fortes les unes
que les autres.
Tels ont été les principes qu'ont établis MM. les Gens
du Roi dans toures les occafions ; tels ont été les motifs
jufl:es & rajfonnables des Arrêts qui ont admis ou rejecté la
preuve teflimoniale en matiere d'état. En admettant la preuve tefl:imoniale, on a toujours exigé que les f~its fuffenc
précis, circonfbnciés & concluans; on ne doit 'Pas s'écarter du principe il/"d probandam non admiuitur quod probatum non relevat. 11 faur que la filiation dépende abfdlument
de la preuve des faits allégués; fans cela ce feroit une demande dérifoire , inutile à obtenir, & fuperflue à accorder.
Quelle en: la preuve que Mafverr invoque? Regifl:res publics,
polfeffion d'é~at, papie.rs domefliques, préfomptions, enfin_
preuve teflimoniale, commencemens de preuve par écrit,
faits liés & fuivis.
D'abord les reg-ifl:res publics n'affurent pas _à Mafvert l'état
qu'il réclame. 11
dit dans fan extrait baptifiere qu'il efl:
fils de Pierre Mafi·err & de Marie Paeiil ; il demande ce~
pendant à prouver qu'il en fils de Me. Pierre Coye & de
Petronille Linfolat ; il n'efl: pas même dans cet extraie
baptifl:ere le fi-uie d'une union légitime; il en Jils' naturel
fimplement. Tant que cee extrait exinera, Mafverr. ne peut
pas être admis à la preuve qil'il eA: fils de Petronille, Lin.!.
folat, puifque dans fon extrait il eH dit fils de Marie .Pati'IJ.
Or il répu;;ne d'avoir deux meres ; un titre écrit &. «l'ui Celon
en
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PAL AIS
D B
PRO VEN C Eo'
4. T ~
l'Ordonnance fait pleine foi en JufHce , établit qu'il en fils
de Marie Patin: 10rfqu'ul1 enfant dans fon extrait baptiilere
efl: dit né de parens inconnus, c'efl: réellemem le cas de
-l'Ordonnance, & il n'a jamais exiflé de regiltre pour lui;
cependant ce filence, ce myfl:ere ne peuvent fervir de
commencement de preuve par écrir, parce que cela ne pourroit êrre regardé tout au plus que c"omme un indice négatif,
& qu'en fait de filiarion il faut des preuves poGrives. Mais lorfqu'un enfant eft baptifé comme bâtard, puifque
Jean Mafvert n'efl: nommé dans fon extrait baptifl:ere que
fils naturel; lorfque fa mere fe trouve énoncée dans cet
extrait; lorfque, loin d'y avoir du myfl:ere , tout en à découvert; lorfque, loin qu'il n'y ait poine de regiflre, il en
exiHe un qui n'affure d'autre éta t à celui qui en veut jouir
que celui de la bâtardife, & lorfque, malgré un titre auffi
·folemnel , l'enfant dénommé dans cet extrait veut être déclaré fils légitime & fe choiGr à fon gré une aurre mere
que celle que lui indique ce ritre primitif de fa naiffance;
lorfque cet enfant lui-même crée le myHere, abdique une
-mere qui lui efl: aifurée par ces titres & contre ces mêmes
tirres, c'eH bien le cas fans doute de chercher à dévoiler
le myilere; c'ef!: le cas, après l'avoir reconnu, d'être trèsdifficile à accorder la preuve; c'eft prefque le cas de la
refi.Jfer.
En vain releveroit-on des allégations fur le nom de Pierre
& fur celui de Mafvert ,- puifqu'elles ne font pas juHifiées,
& qu'elles font même contredites.
Mafvert a-t-il pour lui la poifeffion d'état? A-t-il porcé
le nom de la famille dans laquelle il veut entrer? Au contraire, il a toujours porcé celui que lui donne fan ex' rait
baptiHere ; II a confirmé des aveux qu'il voudroit affaiblir.
Il n'efl: pas né dans la maifon de Me. Coye, puifqu'il offre
de prouver que fa mere s'abfenta de cette maifon quelque
temps avant fan accoochement ; il n'a pas été élevé dans
le fein de la famille de Me. Coye & de Petronille Lin[olat ; il n'a pas été nourri dans leur maifon & fous leur
yeux ; il.. n'a pas éprouvé de la I>a~t de la mere <et~;
�r,p6
Jou
R If' A L
tendre1fe conllante , ces foins affidus que ne peut refufer la
namre ; il n'a pas re1fenti de la part de fon pere cette
attention aél:ive qui dévoile bientôt la vérité; il n'a pas été
regardé publiquement comme le fils de Me. Coye & de Petronille Linfolat avant leur mariage; depuis ce moment il
n'a pas été reconnu. L'on n'a vu aucune preuve de ces
fàits dans toutes les pieces qlli ont été remifes, & l'on
peut conclure que Mafvert n'a pas la po1feffion d'état
en fa faveur ; il Y a même plus, il a cette po1feffion
contre lui, puifque les fecours qu'il dit avoir reçu font ceux
que l'on donne à un bâtard, ou que la commifération &
la charité fournilTenr.
Dans les aél:es d'apprentilTage, le Curé Moreau itipule
purement & umplement ; l'on n'y voit rien qui foit fait de
l'ordre de Me. Coye. Dans le reHament folemnel, Mafvere
n'eit pas nommé. Uni depuis deux ans à Petranille Linfolai par les liens du mariage, l'époux la déf:woue, il infulte à la
religion, à l'honneur; Mafverr ne peut donc invoquer en fa
faveur les papiers domeltiques du pere. De la part de la
mere, point d'écrit, point de lettre, point de teitameI!t;
elle a cependant furvécu à fan mari, & elle a oublié fan enfant;
fi elle eût éré mere, combien de rraces ne trouverait-on pas
de fa tendrelTe pendant l'efpace de 17 ans? Devenue veuve
& dégagée alors de l'empire & du joug que l'on veut que
fan mari lui eût fJit fupporter, elle ne pouvait avoir aucun
morif pour ne pas dévoiler l'érat de fan fils; elle avoie
toute -forte de raifons pour lui en donner des preuves. Me.
Coye étoit mort fans lailTer aucune preuve de l'érat de cee
enfànt ; le langage de la narure ne devait fe faire entendre
que plus fortement chez elle, l'âge devait y donner encore
un nouveau reffort; les promelTes, la honte, rien ne devoit
l'arrêter; elle devait pe-nfer à alTurer l'érat de fan fils. Tout
prouve qUflle n'eft pas fa mere.
Quelle. conféquence peut-on tirer de tous les fairs ra":
menés par Mafverr ( continua Mr. l'Avocat-Général ), s'il
n'y a point de bafe pour les appuyer? Que prouvent des ca~
!effes, des aveux, une nômination vague, s'il n'y a que le
fi!encC;
�DU
PALA1'S
DE
cP'ROVENCl!;
417
(Jlence le plus profond fur les infians de l'accouchement &
'de la naijJance ? Il n'y a point de qufe; il ne peut donc
pas y a,'oir d'effet. Quand le fait de l'accouchement eH conftaté , alors tous les faits d9nt le nommé Mafvert offre la
preuve indiquem & font préfumer l'identité; mais ces mêmes
_faits ne peuvent jamais faire préfumer un accouchement,
,(PÛa in minori plus non' ineJl.
'
Mr. l'Avocat-Général conclut à ce que fans s'arrêter à
la requête en commuation des fins du nommé Mafvert du
19 Oélobre 1 77'S, non plus qu'à fes expédiens & à fes fins
provifoires, le, tOut tendant à la légitimation, dont il feroit
,démis ,&. déboyté, le fieur, Coye fôt' mis fur icelles hors de
.Cour & de P'rOfès;, & .de· même fuite, que le nommé Maf.vert f(1t renvoyé à pourli.livre au premie'r Mardi, tant fur
.les fins de (on exploit libellé du 23 Juin 1773., que fur les
.fins fubfidiaires.
~ Arrêt' du I l Mars 1776, prononcé par Mr. le Préfident
.de St.' Vincent., par lequel Id Cour, fans s'arrêter à la req~,ê.te incidente dry Jean Ma(vert du 19 Oélobre 177), a
mis lés hoirs de Pierre Coye hors de Cour & de procès, . avec depens de cette qualité, a fait défen(es à Mafvert de
.porter le nom & armes de la famille dé Coye, & fur les
,hns princ,ipales & provifoires de l'exploit libellé de Maf.vert du 23 Juin 177)" & fins fubfidiaires par lui prifes,
.o\'ljonne qu'il pcurfuivra ainfi qu'il appartient, les dépens
·de .cette qualité réfervés. Plaidant Mes. Mougins-Roquefort
& Portalis.
'
+<
.
.
,
ARRÈT
XXXVII.
Le teJlàment peut-il être rédigé, lu & puhlié dans deux temps
" & en .P''if~nce de témoins diffùens?
.
_ . cA
D}je. Ma ie Bauff~l.lJ fe trouva~t en rr3vail d'un accoue l<'ment dangereux, on ap dIa le Nota;re pour re,,:
lnnbi 1715 " 1776.
".
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�4r8
Jou
Il N A L
cevoir fes difpolirions. La tefratrice partagea fan bien entre
plulieurs fœurs qu'elle avait; elle en légua l'ufufruit à Ganinel
fon mari. Les difpolitions furent diél:ées & écrites aux formes
de droit; màis avant que de procéd'er à la leél:ure & publication du teframent, le Notaire ajoura: & a m(fure 'lue
nous allions faire la lec1ure & publication du préfent tejlament, ladite Bauffin, teflatrice, ferait tombée en défaillance,
nous ferions [Oufli~nés avec l(s témoins ci-deJJùs nommés, &
fait favoir 'lue nous retournerions pour' faire ladite puhlicatian, -ZorfiJuelü ferait revenue de fa défaillance.
Environ huit heures après, le Notaire revint, & ajoura
à la fuite de l'aél:e: dudit jour & an, fur environ les, onre
h(ur(s du [oir, ,en prefènce des témoins {àulJignés, noufdit Notaire ayant été averti 'lue ladite Bau.flàn, teflatrice, étoit re-venue de fa défaillance, & qu'elle avoit,repris l'ufage de fes fens,
vue, mémoire, ouie & entendement, nous nous ferions tranf
portés dans ladite chamhre où elle efl détenue malade, & elle
auroit déclaré, en pré[ence defdits témoins, haute & intelligihle voix, être mémorlltive de tout le contenu en [on Jùfdit
teJlament, dont lui avons fait leaure entiere, auquel ellf! ,a
déclaré infifler, ne voulant rim y ajouter ni diminuer; & ayant
effeaivement reconnu 'lu'elle était lihre de tous [es fens, vue,
mémoire, ouie & entendement, & ayant ferme & raifonnable
parole, nous lui aurions réitéré la leaure entiere, & a dé..
claré de nouveau y infzJler en préfence de....... Ces '1uatre derniers .témoins appellés en remplacement des autres ci-devant
jignés t} préfens au fufdit tfjlament.
AprèS la mort de ,Marie Baulfan, -deux de {es f~urs de'1llanderent la calfation du tefiament; le fieur G6fiinel la
conrefla; & par Sentence du Lieutenant de To'ulon, le ter..
tament fut calfé. Appel de la part du fieur Gafiinel.
On dirait pour les Dlles. Beaulfan, que l'art; ~ de l'Ornon...
llance de 1735, porte que lorfiJue le teJlateur voudra faire
un tejlament nuncupatif écrit, il en prononcera intelligiblement
toutes les difPoji-rions, en préfence au moins de fept témoins,
y compris l( Notaire ou Tahellion, lequel écrira les difPtljitians ameJim: fju'elles feront prononcét:s par le teflateur, aprel
a
�DU
PALAIS"
DE
PROVENCE:
,ifT?
ruai fera fait lec7ure du teflament entier au tej/ateur, de 10fjuelle lec7ure il fera fait mention par le Notaire ou Tahellion, & le uflament fera figné par le tej/areur, enfemhle par
le Notaire ou Tabellion, & par les autres témoins, le tout de
fuite & [ans divertir li d'autres ac7es. Toutes les difpolltions
de l'Ordonnance de 173 S doivent être obfervées, à peine
de nullité.
Les Loix Romaines, d'après la difpolltion defquelles cette
Ordonnance a été rendue, & notamment la Loi 28, cod.
de teflament., en exigeant que les tefiamens fuffent faits uno
& eodem conuxtu, admettoient cependant des cas où, fans
commettre ~ullité, on pouvoit fupercéder aux aéles de der'niere volonté. Suivant ces Loix, les interruptions qui pouvoient ne pas nuire aux difpolltions de derniere volonté, nedevoient pas être bien longues. La Loi 28 le fuppofe de·
même; car elle fe fert de ces mots, pour déligner les interruptions dont elle entend parler, brevi temporis intervallo::
paulis pero Détaillant enfuite les cas qui peuvent les occafloner, elle ne donne que des exemples qui prouvent toujours mieux que les interruptions ne doivent pas durer longtemps: Si Cjuis autem nece.Jfàrium evenerit, G' ipfum corpuS'
laDorant s: r4piciens i:onfigalt, id efl vel vic7us neceJfàrii, vel:
potionis oDlatio, ve.l medicamentÎ datio, vel impqfitio, quibus relic7is ipfa fanitas tej/atoris periclitetur. Le dérangement:'
occalioné par les befoins du malade ne pouvant pas faire
différer long' temps la continuation de !'aéle, & la Loi ne'
donnant pour exemple que des caS de cette efpece, il eH:·
évident qu'elle n'a entendu, admettre que ces interruptions;
momentanées qUt ne pouvaient faire perdre de vue, ni aux.,
témoins, ni al:! reftareur, l'objet qui, les reffemhloit..
Ce ne fut que dix. heures après que le Notaire & les témoins fe furent retirés, que le tefiamenr fut repris. 0.1', ce'
long irlterval:le peut-il. fouffru- l'application, de la Loi citée?!
Peur-on dire que l'inteFfuption n'a duré que brevi intervallo?:
Quand il ferait permis de faire fon. rellamen.r en. pl'ufieurs;
temps, pourroit-il l'être de ne pas ohferuer, dans les différentes parcies des aéles, les formalités établies par l'Ordon.-
.
G[g~
•
�10
r.
~ l ~
nance? Peut-il l'être d'appeller dans une féance des témoins
différens de ceux qui om éré préfens à l'atlne? Peur -.on
, remplir une formalité vis-'à-vis des premiers rémoins, en
ob[erver une autre vis-à-vis de nOllveaux? Peut-on avoir des
.témoins pour la publicarion, d'autres pour la nun~u .Irion?
Ces acres 'nuls en eux-mêmes peuvent-ils [e réunir, à l'e~fet
de former un rout qui ne [oit pas égalemen~' nul?
L'identité des témoins dans toutes & pour foures I<:'s
parties de l'acre en: li néceifaire, gue tous les Aureurs qUI
ont écrit [ur la matiere, [oit avant, [air après l'Ordonnance,
ont exigé, pour que les acres faits à différ,entes reprifes fe
réuniiTent, à l'effer de former un rour, qu'ils aient éré paiTés
pardevant les mêmes rémoins. Ita Dumoulin [ur le §. qui
prœfens de la Loi l, if. de' verh. oMig.; Reynerius en [on
traité de jure tel/am. (;;- ultimo volunt., cap" 28, n. 16; Decormis, rom. l , col. 1 )08.
L'Ordonnance exige que le tefl:ateur prononce inrelligiblement toures [es difpofitions en préfence des témoins. Il
faut que le rémoin les ait entendues, non feulement lire &
publier, mais prononcer par le tefl:ateur; cela eH Ii vrai,
que l'arr. 48 érablit des peines affiicrives ou infamantes conrre
celui qui a ligné l'acre, [ans avoir entendu prononcer:les difpolirions. Ici les témoins qui onr ente,ndu la publicarion , n'ont
pas entendu la prononciation, & les quarre rémoins qU1 one
été appellés à onze heures du foir n'ont pu arrefier que le
reHateur a prononcé inrelligiblement roures les di[poIitions
à une heme après midi. Il dl: donc impoffible de réunir les
deux acres, à l'effer de n'en faire qu'un.
L'acre fait à une heure après midi eH nul; les di[pofitions n'ont été ni lues ni publiées; celui fait à onze heures
du foir n'a pas les mêmes témoins, & efr pat' con[équene
nul. L'un péche par le défaut de publiciré, l'aurre par le
défaur de volonté. Dans le premier, la tefratrice a diél:é [es
difpolitions, mais on ne les a pas lues; dans le [econd, on
a lu les difpofirions, mais elles n'avoient pas éré prononcées. Dans l'un [e rrouve la nuncupation [ans publicarion,
dans l'autre la publicarion [ans nuncupation.
42.0
•
U Il N. A
�"
'Du P AI.Als :DJ!" I,l~ovENèt!:
42.1:'
• Djln!l' tOJ& 1e~ ~rnps;),alJan.cr corn!p~ .aprè.s ,'OI'4onnance
~e' [lr13' ,~ à 'fallu lire :l~~ difpoR!iofls j. à l'leine 'd I,Pllllité,
Quant à la néceffité de la proC\onç'ÎatioD., elle n'a ~ toU.jours été effentielle pour la valiçlüé-de l'aél:e, attendu que
lés manieres de ref!:er ont varié, fait chez lj's:Ron1pij1s, foif
parnji 'nous. Ma.is 'depuis, l'Ordcnnançe, <;le'purs que 1'00 a
fix~ le? différentes lÎlalJ'i~res de. difpofer de f~s biens, qu'on
a étab"li des formalités"qu'on a .p'rononcé la peine de nullité
contre les aél:es dan.s lefqueJs elles ne feraient pas remplies,
la néceffité où le tef!:ateur ef!: de prononcer intelligibleqlent
co\ltes l'es difpo[Jtions, ne peut plus être ré,voquée en doute~
. Inutilement youdroit-on faire envifager: le ref!:ament.dont
s'agit comt11e· cpdicille; puifqu~. ()~ tef!:ament ne pourroit
ê,tre confirmé comme codicille, qu'autant qu'il feroit nul
comme teftament. Or, s'il eH nul comrpe tef!:ament, ce ne
peut- être que par deux raifons, ou parc~ qu'il a été fait ex
intervallo', ou parce que les témoins qui ont été préfens à
la premiere féance, ne l'oor ,pas été à. la feconde: d'où il
fuit que dans un cas CQltHne d.ans. J'autre, on conlidereroit
les deux' aél:es comme deux tef!:amens, & qu'on les anéantiroit, parce qu'on n'a trouvé ni dans l'un ni dans l'autre
les formalités dont cout teframent doit être revêtll. Quel
eH doqc celui des deux .ceHamens. que le fjeur Gaftinel veut
faire devenir codicille? Il ne peut faire confirmer comme
codicille que J?aél:e dans iequel ef!: renfermé la claufe codicillaire, c'efr-à-dire, que celui qui a été fait à une heure
après midi. Il el!: ·de regle que pour que la claufe codicillaire produife fan effet, il faut que l'aél:e qui la contient l'oit
revêtu des formalités effentielles au cOdicille. Si le tef!:ament
manque de quelqu'une de celles. fans le(quelles un fimple
codicile ne peut pas exif!:er, la claufe codicillaire eft comme
oon advenue, & ne peut abfolumeor donner aucun avantage
11 celui qui ferait dans le cas de s'en fervir.
Le tef!:ament fait à une heure ne peut valoir comme co'dicille, Pilrce qu'il manque d'une formalité qu'on ne peut
pas omettre. dans un aél:e de cette .efpece fans nullité. L'on
pourrait dire qu'il n'e~ pas figné; la fignllture n'el!: appofée
/
�412;
10
V Il N A· 'f.
: -
qu'au verbal,. & non au tefl:ament; mais' !nllé:pendammenede cela, le tefl:ament n'a pas été <publié.•Cerce forlnalité
eft ellentielle au codicille comme au teHament. ( Ordonnance de 173), art. 23; Furgole, tom. 'b pag. 340, & Aymar fur l'art. 23. )
i
•
On répondoit que la Loi cum antiquitas 28', cod de te;:"
tamentis, que l'·arr: ) de l'Ordonnance de 173) a, pour ainli
dire, natura!ifée en France, e~ige la nuncupation labiale du,
tellateur & la publication du tefiamenr Ulla eadem contextu,
fans que le Notaire puilfe palfer à aucun autre aéle: nulle>
tlaU interveniente. Au moment de la publication du tefia-'
ment, dit-elle, & de la [oufcription des témoins Înfirumentaires, oil s'apperc;oit que leur nombre n'ell: pas complet, ou qu'il yen ·a, parmi eux qui n'ont pas l'âge requis,
ou qu'ils fone proches parens de l'héritier' écrit, ou il furvient au teHateur ou à l'un d'eux, ou à plulieurs, unaccident imprévu qui les oblige de fe retirer, qui fufpend par
conféquent la publication & la foufcription du teHament ,
faudra-t-il, après' qu'ils fe feront ralfemblés de nouveau, ou
avec les mêmes témoins, ou avec d'autres qui. auront été
fubrogés, cominue-t-elle de dire, croifer & rendre inutile
ce qui a été déja fait & éc rit, pour le tranfcrÎre de nouveau? Ou fuffit-il de faire conHater au tefiateur (es difpofitions en préfence des nouveaux témoins alfemblés, & palfer
enfuite à la publication & foufcription de l'aél:e? Ce dernier parti fûffit, dit-elle enfin, & on remplit par ce moyen
à la lettre routeS les formalités érabl~es ; parce que l'aél:e,.
quoique drelféen deux temps & ex interval/o<, ne forme qu'un
feul & même rout indivifible, quoiqu'on yair appellé un ou.
plufieurs nouveaux témoins.
Il ne faut pas perdre de vue que cerce Loi parle précifément du cas dans lequel on· a été dans l'indifpenfable néceffité d'appeller de nOUVeaUlC témoins, parce que les premiers 'éroient fufpeéls ou incapables, ou parce qu'ils av ient
été frappes d'lm accident. imprévu, & qu'elle déci e el1 termes exprès que ce qui a· été fait avec eux, ne forme u'un
feul & même tout avec ce qui avoit été fait a.uparavant ,
�1> U
PAt AIS' ,DE
Pao v E Ne s;
'P,l
fans qU'Il foit néceili ire de recomqlencer _un Jlouvel aéte.'
La raifon de cette décifion efl: tirée' de -ce que jufqu'à la publication & à la foufcri tian de l'aél:e, il efi permis dc le perfeél:ionner, ainG que le décide la glofe fur -la Loi 17, cod.
de lîde inflrum., comme nous l'apprenons de Perenus fur
la même Loi; de Dumoulin , conf. 13, n., 14; de Lepretre.,.
cent. 2, chap. 50; de Catelan, liv. 5, chap. 50; de Fromental au mot contrat; de Boutaric en fes inllitutions du
Droit François, pag. 470; de Bonifate, tom. 5, pag. 18.
Sur ce principe incontefl:able, qu'importe que les témoins
.n'aient pas été tOUS préfens 10rfque.Ie tefl:a'teur a prononcé
& diél:é fes di[pofitions finales? [on tefiament n'en fera pas
moins parfait, & la Loi établie par l'Ordonnance ne 'fera
pas moins remplie à la leure, li lors de la publication &
avant la foufcription, le tefl:ateur leur a a1furé que ce qui
était renfermé dans l'aél:e donc on vient de leur faire lec-ture, renferme fa volonté finale, & qu'il veut qu'e ce qui efl:
écrit fait ponél:uellement exécuté. C'efl: ce qui efi parfaitement bien établi par Dumoulin [ur le §. qui prafens de
la Loi l , if. de verhor. oMigat. ;. par Barri dans fon traité
des [uccejJions,. liv. 1 des teflamens, n. 37; par Reynerius en
fon traité des leflamens ; chap. 2"8, n. 10. Enfin Boniface,
tom. S, Iiv. l , tit. l , cllap.r3, pag. 17, rapporte un Arrêt
du 5 Juin'1678,pat,lequel,la Cour confirma un teHament
publié & foufcrit huit jours après qu'il avoir été drelTé.
La coutume de Paris exige aufii, à l'art. 229, que le tef.tateur prononce lui-même fa derniere volonté a\l Notaire
en préfence des témoins, & fans divertir à aucun autre aél:e,
li peine de '1lullité; & tous les Au'teurs 'lui ont commenté
la même coutume, conviennent qu'elle ell obfervée à la
lettre, quand on a rempli par équipollent fan efprit & [on
. intention; ainli que le dit Dumoulin far la coutume de
Paris, glol: 6, n. 2. C'eil: ce qu'il répete encore fur la Loi
l,if. de ver6or. oMigat., n. 8, & dans fes notes dans [on
Commentaire [ur les confeils 'de Dece, conf. 77, n. 8, &
fur ceux d'Alexandre, liv. 4, conf. 100, & Iiv. 5, conL 75 •
.( Brodeau fur Louet) litt. R., (omm. p J O. 7, )
,
�~P'4
V ') J 1fi U R~}/ A t
v ((
•. La! Loi. &.-les I-urifconfultes _qui.,-l'_o'ndntel1pr:étlée ; décident par conféqul"onqu'mi telhmenë fait u inm-vallo, ,ne
renferme qu'un [l'luI & même :léte, &' que les témoins qui
.ont été fubrogés aux prfirniers; qu'un accident imprévu a
forcés de fè retirer, doivçnt être préfumés préfens à la_ '11ufu.
cupa1ion. &. à, laT fj}u(cription, quoiqu'ils -n'alet.It:,pas _eotendll
qu.and le tellat.eun cliéfoit fes difpo1itions au -Notaire" pourvu
qu'il-ies' ait affurês -après; qlJe dX leéture'leur en a ,été_faite;
.qlTe _,ce qui était (déja; éarit, renfermoit.fa volonté, par la
rai[on que la'Jpéceffité ielp une loi qui commande en fouvei-ainel;)'1.'X :qui n:'afp;as ~oiQS-de dwit ,d'ériger en maxitlil.erê.e
·à .quoi"'el1e"obligeJ,JainMéquè :le r.décide la }ijoi?4b ~Jff d.~
l~gibus & .smablJ:r.Conjùlt.is~.~.Dumoulin fur ,la: coutume de
p,aris;,_ rii. 'Il,. §,' 9-, glof. 6, po. '7\ !
2,
- , L.a. g\ofe Iur~ la iLoi..28; cod.l de teflamentis; s'explique
d,'une iri'an-ieJe hietlnprécjfe :lfi. Je .térooinr'qu'ùn ,accIdent fâcheu~) o-blige, des' fe [étire.r/.né pee ~)pas r.evenir dans un brief
.délai,' &: -Aue l'l' ~efratéhr foi lelll d'loge ide Imort, on peut
Jui ·,en fubrQg.ep./un amre :1(ilJlOpUS. iJi:tl ei' iliu" abeffi ,. &. non
pàffit 'JVI:rti.<& teflator perù;litarëtur, tÏJ.;lc4Jù ,alius teflis fubrogandus: Dumollli~ fur le·iI. qui p.r1P[ens_, ,IJ.. I l , d,it auffi
,qu3il"IùH ~as néceJfajr~ de .r,e.fàire,le,\çeJit!t;lJe.nr dé.ja! com'n1_lltn:é, 1 quand les tFmoins .l!lnt1é:lié pbligés, de-Il~'#enter ,.
:& :q.l,I.':H:~u.ffit, de l~ur\ _en fubroper ?l~u,t.Il~~ c~.ve):.~~fqj.lels on
dOIt .bnevemenr Irefumer.ce"q~L'I-.• el.« l:.O~lt -en, prefençe de~
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. C'-eH un paradoxe fingulillr .:& _bifarre de -prétendre lqy'un
teHament fait· ex ùitecvalùNHCllfep-neodèllx 'll&te!iJ, & qlj?il
eH n,ul & in\';llable, U ~œs titilQins. ql)i; );pnt·; fou,nit n'ont .nas:, éf~·,préfells, qUllnd .I~ te.QilII:Yj', gn,a piété les,:,difpoulions'
auj ~Pl~ire-., C'eH caI9f;l'1lll,iè,r ,liI_ to· ; qui .nous; apprend qUè
.1 t~mQjJJ (ubr:ogé pren.d la Nacë..de :œlui qui s'eH abfenré,
& q~'il'J!ÏJffitLqlje Je tel~ateur.)ré(Urile <én fa préfe.nce c~ qu'il
,i~ li ~Qt;liJ.~, .<J\le -la:JeÇluce:; en f9it faite., & .qu',il, àffure
.• 3e._ qui-;eQ:'Wi re!)f~rni~ fils. v.é-Fi;ables difpqfiJ.Îofls., Me•
.fei~Q~Il·fI: tft~qe:de.<.Re(l)eJ.e-,ç;oJl\,e, en Art,ois,. ~eçut ·un
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PALJl.IS
DE
PROVENCE.
42)
fation, fur le prétexte qu'il avoit été fait en deux temps,
& que les témoins qui l'avoient foufcrit, n'avoient pas été
préfens à fa rédaél:ion ; le Notaire fut appellé au procès;
mais par l'Arrêt du Parlement de Paris, le tefiament fut
confirmé, & le Notaire mis hors d'inctance, !lvec dépens,
dommages-intérê ts.
Ici le tefiament fait foi qu'il a été écrit fous la diél:ée
de la tefiatrice, qui a enfuite réfumé fes intentions lors
de la publication, en alfurant aux nouveaux témoins fubrogés, que ce qui venoit de leur être lu, renfermoit fa véritable volonté, ainfi que les fix témoins préfens à la nuncupation l'avoient attefié.
On ajouroit que fi le tefiament ne valoit pas comme tel,
il vaudroit comme codicille. La tefiatrice avoit légué l'ufufruit
au fieur GaUinel, en préfence de fix témoins qui avoient foufcrit fon tefiament, dans lequel elle déclara que s'il ne pouvoit valoir comme tel, elle vouloit qu'il valût comme codicille, qui n'exige d'autre folemnité que celle d'être recru
par un Notaire, & attefié par quatre témoins. Aucune Loi
ne foumet le codicillant-à diéter fon codicille en préfence
des témoins infirumentaires de l'aéte; il fuiEt qu'il déclare
lors de la publication, en préfence de quatre témoins, que
ce qui vient d'être lu, renferme fa volonté, & qu'il veut
qu'un tel foit légataire de rous fes biens. En effet, de quel
fecours feroit cette claufe fi uGtée dans notre ufage, 'lue
le teflament vaudra comme codicille, s'il ne peut valoir comme
teJlal7lent, G toutes les formalités qui doivent être obfervées dans la rédaét ion d'un tenament, doivent l'être dans
celle d'un codicille? Ioutilement oppofe-t-on la Doétrine de
Furgole , qui dit que le codicille doit être lu au codicillant
& aux témoins, puifque le teHament dont s'agir, fait men..
tioo qu'il leur a éré- lu & relu.
. Arrêt du 2.9 Mars [776, au rapport de Mr. le Confeiller
de Forris, qui confirme la Sentence, avec dépens. Ecrivant
M s. Agl\illon & Aroulphy.
.
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'Annùs l77 5 & l77 6•
1
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�JOURNAL
ARRÊT
XXXVIII.
Un ujlament rédigé dans les fornze~ ohfervées dans le pays
où il 41:- fait, efl exécutoire par-tout.
,
EAN Fagegaltier, ,F,abricant d'écoffe en fiJpfelle & Anne
Marie Blet fon époufe, demeurant à Avignon, fe firent
un teftament mutuel; ils s'inHiwerent réciproquement héritiers, laiifant à chacun de leurs enfans la fomme de Iooliv.;
& en cas que la Dlle. Blet prédécédât fan mari, celui-ci inf·
titua Anne fa fille fan héritiere univerfelle. Fagegaltier pere
mourur & enfuite fan époufe; Etienne fan fils demanda la
çaifation du teftameor. La caufe renvoyée à des Arbitrès, il
intervint Sentence qui déclare nul le teHamenr, par rapport
aux biens fitués dans le Royaume. Appel de 1.1 parr du lieur
Forliuio, mari d'Anne Fagegaltier, heritiere de fa mere.
On di fait pour lui, qu'un tefiament revêtu des formes requifes dan.s le lieu où il efi fait, ell: bon, valable & exécutoire par-cout, lorfque le fOllds des difpolitions qu'il renferme n'efi pas contraire aux Loix & coutumes des pays
où on veut l'exécuter. La faculté dérive du droit des gens;
elle efi acquife à cout homme libre, parce qu'étant inféparable de fa perfonne, elle doit néceifairement l'accompagner par-tout. Les Légif1ateurs ont pu fans contredit, &
ont même dû prefcrire des formalités qui leur oor paru convenables pOlir donner aux dernieres difpolitions des hommes une conlifiance légale & en aifureda foi; ils ont même
pu aifujettir à des loix particulieres les biens fitués dan~ les
pays de leur domination, en étendant ou en lim'itant la
liberté qu'ont leurs fujets d'en difpofer; mais ils n'oor jamais voulu ni entendu porter la moindre atteinte à ce droie
précieux; qcquis à l'homme de, djfpofer de fes .biens dans>
quelque pays du mondé qu'il fe ,trouve; .iJs n'Qnt. ja~mais .eti
l'idée de ravir au citoyen ni à l'étranger une liberté qu'ils
tiennent de la nature; ce feroie la leur ravir, en les aifu~
. ,
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J
�-
427
jettiffant à des formes inulitées & inconnues dans les lieux
où ils difpofent. Il efi reçu chez roUies les Nations, que
pour donner aux tefiamens leur exécution pleine & enriere,.
ubique terrarum, il fuffit qu'ils foient revêtus des formes pratiquées dans le lieu où l'aél:e eH: paffé; cette loi doit être
d'autant plus inviolable, qu'elle efi réciproque parmi los différens Souverains. Il n'y a dans les tefiamens que les teftaleurs qui difpofent, & c'efi eux qui impriment à leurs
difpolitions le caraél:ere de la Loi. Dès qu'ils {uivent la
forme prefcrite en pareil cas dans le lieu où ils teHent,
leur teHament acquiert ce caraél:ere qui demeure ineffaçable,
& qui l'accompagne par-tour. Les formes n'ont été inventées que pour affurer la foi des aél:es aux yeux de la" [0ciéte; ils ne peuvent l'acquérir que par leur conformité aux:
Loix du pays où ils font paffés, parce que la foi publique
rélide dans la perfonne de ceux qui, en les recevant, ne
peuvent fuivre que les Loix de leurs pays qui les lient dans
l'exercice de leur minifiere.
Parmi les Auteurs qui ont approfondi cette matien:i, l'on
trouve B,rthole, fur la Loi l, cod. de [umm. trinit., n. 24;
Dumoulin fur la même Loi; Cujas, conf. 36, qui après
avoir difcuré à fonds cette quefiion, concluent qu'un teftament conforme à la coutume du lieu où il efi fait, efl:
bon par-tout. Furgole dans fan traité des tefiamens, tom.
3, pag. 6, n. 10; Louet & Brodeau, Defpeiffes, Henris;
Brillon, Lacombe, Loifel, Coutiennent unanimement que
dans les teHamens on ne confidere pas la forme requife dans
le lieu du domicile du tefiateur, ni celle du lieu oll les biens
font fitués, mais celle du pays oil le tefiament a été fait.
ita Ricard en fon traité des donations, part. 1,. chap. 5, feél:.
l, n. 1286 & fuiv., & dans fon traité du droit mutuel,.
traité 1, chap. 7, & Decormis, rom. l, col. 1412.
L'Ordonnance de 1735 a voulu maintenir cette regle inviolable, puifqu'il efi établi dans les articles 68, 69 &
fuiv., que le legs llniverfel dans un teftament fait en pays'
cOlltumier, vaudra comme inftirution univerfelle dans les..
pays de droit écrit, & vice versâ. Enfin pour ce qui conDU
PALAIS
DE
PROVENCll.
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2.
�4'2.8
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Jou
RNA r.
œrne lès re'ITamens faits dans Avignon, il Y a une Loi ~ é-'
ciale & bien authentique qui en _~fTure la plein~ exécu' ion
en France; ce font les Lettres-Parentes dLl mois de M,]:'s
16~ l, enrégi!trées le 2.4 Mai fuivanr; elles porce, t que les
re!lamens qui auront été faits à Avignon en g.lrdJllt Ls
formalités & ufages y reçus, feront bons tx: vaLl.>L:s, & fefont exécutés fur les biens firués en France en ce qui concerne la validité & folidité de l'aél:e, fauf les coutumes parriculieres de chaque Province pour les difpoutions.
Il s'agit ici d'un re!lament fait par le mari & la femme
qui ont été capables, l'oit dans le Comtat, l'oit en France,
foit par-tout ,i!illeurs, de difpofer de leurs biens l'un en faveur de l'autre. Toute la différence qu'il y a, c'e!l qu'en
France ils n'auroient pu en difpofer réciproquement que
par deux re!lamens di!linél:s & féparés, tandis qu'à Avignon ils ont pu le faire par un feul & même aél:e contenant leur volonté refpeél:ive. Cette différence ne tombe &
ne peur romber que' fur la forme de l'aél:e, & ne touche pas
au fond de la difpolirion qui eH permife en France comme
dans le Comrat.
Qu'un mari inHitue fa femme dans un ref1:amenr qui ne
renferme autre chofe que fa volonté, ou qu'il l'infiitue dans
un ref1:ament qui renferme également la volonté de fa femme, ]'inftitution eH la même dans l'un comme dans l'autre
cas; c'eH toujours en faveur de la femme que le mari difpofe. Au premier cas, l'aél:e qui renferme les d'ifpolitions du
mari eH revêtu de la forme d'un fimple ref1:ament nuncupatif. Au fecond cas, c'ef1: dans un aél:e fair dans la forme
d'un tef1:ament mutuel, que [es difpolitions font conlignées.
Il fufEt que cette derniere forme foit autorifée & en ufage
dans le lieu où 'le reHament a éré fait, afin qu'il air a
même authenticité & la même exécution dans tous les pays
du monde, que pourroit y avoir le fimple tef1:ament nunéupatif, ou tel autre tef1:ament revêru de toute autre forme
légale.
On ne peut pas contef1:er que Fagegaltier pere ne fût
habitant d'Avignon, puifqu'il ef1: prouvé & convenu qu'il y
�DB
PROVENCE.
'P'9
Ct famille, y exer<iant un métier end.wt
plus de cinquante ans; qu'il y a te é, & qu'il y efl mort.
DU
PALAIS
il demeuré avec
Tous les atl:es qu'il a palfé prouvent qu'il s'ell: regardé comme vrai citoyen d'Avignon.
Ce n'ell: pas feulement les teframens mutuels que le Roi
de France a déclaré nuls & de nul effet dans les pays de fa
domination; il a pareillement déclaré nuls les teframens olographes, quant aux difpolitions qui s'appliqueroient à toUS
autres qu'aux defcendans; il a pareillement déclaré nuls les
teframens nuncupatifs qui ne confteroient pas par écrit; ceux
qui feraient ,écrits de toute autre main que celle du Notaire; ceux qui ne ft!roient pas lignés par le tefrateur & les
témoins, s'ils favent ligner; ceux auxquels on n'employeroit
pas le nombre des témoins requis. En tout cela le Roi n'a
entendu & n'a voulu difpofer qu'à l'égard des teframens
reçus dans fes Erats, où fes Loix font connues & promulguées, & où elles doivent être exécutées; il n'a jamais
voulu interdire à fes fujets de voyager, d'habiter & de s'établir là où leurs affaires les demandent; par une conféquence
nécelfaire, il n'a pas voulu non plus leur interdire le droit
de tefler là ail ils fe trouveront. Si le teframent mutuel eft
nul & fans effet en France, c'efr parce que le Légiflateur
ayant défendu de fuivre cette forme dans les pays de fa domination, un tel aae fait en France ne peut pas y avoir le
vrai caraaere de teframent , ni par conféquent fon exécution;
mais cerre maniere de difpofer étant autorifée & en ufage
au Comtat, l'aae qui renferme les difpolilions mutuelles du
mari & de la femme, y eft un teframent légal & authentique.
Il efr inutile de pénétrer les motifs qui ont déterminé
le Roi d'abroger les teframens mutuels dans fes Etats; ce
ne peut' pourtant pas être la prétendue irrévocabilité des difpolirions mutuelles, puifqu'on a toujours tenu en maxime
dans le Royaume, que le teframent muruel pouvoit être ré.
voqué ad lihitum par l'un des conjoints, fans le confente- ,
ment de l'autre. C'eft aioli que l'oot décidé les Arrêts rap..,
�'lJO
Jou
RNA L
_
portéS dans le Journal du Palais, rom. l, pag. 140, & tom;
2., pag. 830 ; Henrys, rom. l , liv. )' chap. 4, que fi. 34 ;
Ricard fur la coutume d'Amiens, tit. ) , art. ID6 ; Lapeirere , lett. T, n. 61 ; Decormis, tom. l ,col. 1) 1 1; l'Aae
de Notoriété des Avocats d'Avignon, du 7 Juin 177).
Toutes les conféquences que Fagegaltier veut tirer de la
fituation des biens, & toutes les fpéculations qu'il fait fur
ce qui confl:itue la forme des aaes, ne font que la répétition des mêmes frivolités que l'on vient de détruire. En.
effet, qu'eH-ce qui conHitue le fond, la (ubfiance, l'effence
du teHament? C'el~ ce que nous apprennent les principes
élémentaires, la volonté, la difpofition du tefl:ateur , teJlamentum ex eo appellatur quod teJlatio mentis fit. Cette définition dl: générale & s'applique aux teftamens Ode toute efpece,
dans quelque forme qu'ils foient conçus. Il n'en efl: aucun
dont le fond & l'effence ne confifl:ent en la feule difpofition
du tefl:ateur. Delà vient qu'il fuffit que les Loix du pays où.
les biens font fi[llés, permettent au teHa:eur d'en difpOfer
librement, afin qu'il fait vrai de dire que fa difpofition efr
bonne &. valable dans le fond & en elle-m~e dans quel'lue pays qu'il la fa (f~.
Que faut-il pour donner une confiftance légale à cette
difpofition, qui eH l'effence de rout tefl:ament? Il faùt qu'elle
foit préfenrée aux yeux de la fociété & de la JuHice fous
la forme prefcrite par les Loix,jecundùm Leges ordinata.
Qu'eü-ce donc qui conftate la forme du tefl:ament ? La forme d'un être, uel qu'il foit, efl: ce qui le difl:ingue de toute
autre chofè. ( Domat, liv. "3 , tit. des Teflamens, fea. 3. )
AilJ{j quiconque veut faire un teüament, n'a d'abord qu'à
décldrer fa volomé; ce qui peut être fait en trois mots: Titius hœres eflo ; je 'Veux que Titius fait mon héritier. Voilà
le fond, l'dTence, la fubHance de la difpofition ; il ne s'agit
plus que de l'exprimer d'une maniere légale. Veut-on exprimer cette difpofition d:une maniere propre au ,efl:ament
folemnel ? Il faut que le teHateur l'écrive ou la faffe écrire
fur une feuille de papier, qu'il c-achette cette feuille, & qu'il
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la préfente au Notaire & aux témoins. Veut-on exprimer cette
difpolition dans la forme d'un tefbment nuncuparif? 11 faut
Gue le tefl:ateur le déclare en préfence des témoins & du
Notaire, & que celui-ci l'écrive lui-même, en obfervant toutes les formalités particulieres à cette efpece de telbment.
C'efl: donc la rédaél:ion de l'aél:e, pour exprimer la volonté,
Gui en conHitue la forme; c'eH en rédigeant cet aél:e, &
en y ajoutant toutes les folemnités confacrées à chaque efpece de teHament, qu'on lui donne la forme d'un véritable
teHament bon & valable par-tour.
Jean Fagegaltier en inHituant fa femme héritiere, a fait une
difpofition qui eH licite, bonne & valable en France comme
dans le Comtat. Il n'y a point en effet de Loi en France
qui prohibe au mari d'inHituer fa femme héritiere; l'abrogation faite par l'Ordonnance de 1731 des tellamens mutuels, ne peut porter fur le fond de la difpofition de Jean
Fagegaltier, tandis que le fond de la difpolition n'efl: autre
chofe que l'inllitution en faveur de la femme, & qu'il ell
permis en France au mari d'inllituer fa femme. Si Jean
Fagegaltier avoit fait cette difpolition en France, il n'auroit
pu la faire que fous la forme d'un tefiament dillinél: & féparé de celui de fa femme, fans le cumuler dans le même aél:e ; on n'auroit pas fait un feul" tefiament contenant
la volonté de deux perfonnes ;. on en auroit fait deux; mais
comme ce teHament a été fait dans le Comtat, on l'a
fait fous la forme d'un teaament mutuel, c'efi-à-dire, qu'au
lieu de faire deux aél:es féparés, on h'en a fait qu'un. Toute
la différence tombe fur la contexture, fur le mode de l'aCl:e,
fur la maniere d'exprimer la volonté. Or cette fbrme de
teHer n'eH point abrogée dans le Comtat, elle y efi conftamment pratiquée; le tefiament mutuel n'y elt point envifagé comme un contrat finallagmatique & irrévocable, ni comme un aél:e plus fufceptible de captation que tout autre; il a
autant.de force &' autant d'àlltorité dans le Comtat, & on
y ajou'te autant 'de foi qu'on peut en ajouter en France
au téfl:ament.le plus authentiqu'è & le plus [olemnel rédigé
dans la forme preftrite en· Fraace. Il faut donc convenir qu~
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B2
JOURNAL
le, vice tiré de la mutualité ne combe & ne peut tomber que
fur la forme de l'aél:e, & que comme cette forme de reHer
el!: en ufage dans le Comtar, le teil:ament mutuel fair dans
le Comrar -eH bon & exécutoire en France, & par- cout
ailleurs.
On répondoir pour Etienne Fagegalrier, qu'il ne s'agiffoie
paine de la capacité de la perfonne, puifqu'un mari peue
inf!:iruer fa femme ou en être héririer; ni de la qualité des
biens, puifqu'en pays de droit écrit on peut difpofer de cous
fes biens; il ne s'agilfoit donc que de la forme exrérieure de
la folemnité de l'aél:e. Trois chofes font à conlidérer dans
le refl:ament de Jean Fagegaltier : la perfonne, les biens,
la forme.
La perfonne : Jean Fagegalrier étaie domicilié à Châteaurenard en 176), 1766 & 1767; on peur même dire
qu'il n'avo~r jamais cfffé cl'y avoir fan domicile. Il y était
né, il s'y était marié, & il Y avait la plus grande partie de
fes biens. Lorf'Ju'il avait été réfider à Avignon, ce n'avait
été qu'à raifon de fan induftrie, & coujours anima redellndi,
puifque dès qu'il ne fur plus en état de la taire valoir, il
revint à Châteaurenard, y r~pporra fes meubles, s'y érablit
auprès de fan fils, y paya les charges publiques, & Y jouie
de taus les privileges locaux. En vain rapporre-r-on des
cerrificdrs portam que Jean Fagegalrier avait rélidé à Avignon pendant quaranre ans; cela ne prouve rien, parce que
nll//a rempora domicilium conflitllllnt aliud cogitanti. En vain
oppofe-t-on encore le féjour qu'il y avoit fait pendanr quelques mois après le leftamenr muruel: car ]orfqu'il y fuei
arriré par Forlivio fon gendre, il eH certain qu'il r,e comptoit pas y transférer {on domicile, puifqu'il ne rapporta
aucun des meubles qu'il avoir apportés en allant ,s'établir à·
Châreaurenard.
~
Où trouve-r-on que la difpo(ition de l'Ordonnance n'imprime pas aux F.rançois une incapaciré réelle de difpofer par
tefl:amen, I,Huruel de leurs biens foumis à la domin~rio.n .du'
Roi ?' Uq mari peur, à la vérité, inf!:iruer fa. femme héri,.,.
!ier.e, & il eH lui-même capable d'en héritér ; mais il n'ell:·
pii~
�DU
PALAIS
DB
PROVBNCB.
433
pas moins vrai que quand leurs difpofitions font mutuelles,
contenues ùz eiidem chartâ, & par conféquent la fuite l'une
de l'autre, elles fe nuifent & fe détruifent mutuellement ,
parce que la premiere difpofition imprime à celui qui donne,
une incapacité de recevoir, & à celui qui reçoir, une incapacité de donner; de forte qu'on peur dire que l'Ordonnance
déclare tout tefiateur François incapable de recevoir par le
même aél:e dans lequel il donne, ou de donner dans le même
aél:e dans lequel il reçoit. Cette incapacicé n'efi· que momentanée ; mais ce n'ell pas moins une incapacité. Er alors
n'importe que le tellament ait été fait en pays étranger;
cerre circonfiance ell même un motif de plus pour faire
annuller une pareille difpofition faite en fraude de la Loi.
n y a plus; & cette incapacité efi encore plus marquée entre un mari & une femme, attendu l'efpece d'irrévocabilité des tefiamens mutuels. L'on fait que le mati & la
femme font incapables de recevoir l'un de l'autre par aucun
.aél:e irrévocable. Or le caraél:ere du çefiament mutt;e!. ell
. de ne pouvoir être révoqué par l'un des co-tefiareurs filns
le confentement de l'autre. Ces forres de refiamens font
plutôt des paél:es réciproques de fucceffion, que des difpofit ions libres & volontaires; & fi à cette réciprocité [e
joint une inititution condi.rionnel!e, le tefiament n'ell plus
un aéFe volontaire & révocable; c'ell ,un contrat.
Dans le cas préfent, l'inL[jtll[ion de la fille, en cas de
prédécès de la mere ,ell un lien de plus qui enchaîne la
difpofition de Fagegalrier, & qui lui enleve cette liberté précieufe de changer de volonté jufqu'au dernier mqmenr de
fa vie; liberté qui eH même l'eifence des tefiamens, & que
rien au monde ne peur contra indre : libertaunz fupremis judiciis conjlringere quis pourif. Leg. ') 2, if. pro focio. D'après
ces principes, il efi certain que Fagegallier & fon époufe
éraient incapables de s'inHituer héritiers, & que cette incapacité a dû les fuivre par-raur.
Quant aux biens, Fagegaltier les poifédoit à Châteaure_
nard fous l'autorité du Roi, & par conféquenr fournis am:
Loix qu'il plaifoit au Roi d'y impofer. Or il dépend du
Annt!t:s l77 5 & l776.
Iii
�43~
Jou
RNA L
Souverain de refufer l'exécution de certains aél:es -fil' les
biens fitués dans tous les pays de fa 'dominarion , qllJnd
même ces aél:es feroient valables & auraient leur exécurion
dans d'aunes pays. L'on voit tous les jours que 1 s fu :titutions graduelles jufgu'à l'infini, guoigu'appof~e~ dam des
teHamens fairs dans les pays où elles fom permifes, fuot
de nul elfet fur les biens litués en France après gue les
deux degrés fixés par l'Ordonnance ont été remplis; de même
la prohibition des difpolitions réciproques alfeéle les biens lieués
dans le Royaume, à l'effet qu'ils ne puiifent pas êrre tranfmis d'une main à une autre par un te'ftament mutuel. Ainli
c'eU autant l'exécution que l'édition des reflamens mutuels
que la Loi a prohibée. Nul doute que cerre proh~birion ne
fait une Loi locale qui alfeéle tous les biens [hués dans tous
les pays de la domination du Roi, & qu'on n'a pu les
foulhaire à certe Loi, quoiqu'on ait fui, pour en difpofer,
les lieux où elle eU obfervée.
'
Sur la forme, on difoit: que la forme d'un teUament
eU la maniere dont le ceUateur a exprimé fa volonté, la
folemnité avec laquelle cet aél:e a été fait; elle dépend du
.nombre des témoins qui y one affil!é, du caraélere de la
perfonne qui l'a reçu, & enfin de tout ce qui. regarde les
figues extérieurs par lefquels on peut reconnoÎ<re l'expreffion de la volonté du tell:ateur. ( Dumoulin in Leg. l, de
ller!Jor. oMig. Ricard, du don mutuel, trait. l, chap'.7 ; Domat, liv. 3, tit. l , feél:. 2 ; Brodeau fur Louet, lett. C. )
D'après ce.rre définition, peut-on dire que le vice de la
mutualité ne' rélide que dans la forme, que ce n'el! qu'un
défaut extrinfeque, & qui ne touche pas du lOut au fonds
-de la difpolition? Perfonne n'ignore que la mutualité eU
un vice intrinfeque & radical qui alfeél:e le fonds, l'eifence
de la difpolitÎon; c'el! un vice indépendant des folemnirés
dont eU revêru l'aéle qui en eU infeél:é; vice qui a trait ·à
la capacité de la perfonne qui difpofe & de celle qui reçoit;
vice qui a trait à la nature de l'aél:e dont il empêche la révocabilité, & dont il prouve la captation. C'eU auill ce qui
a déterminé le Légiflateur a profcrire cette forte de teUa~
�DU
PALAIS
DE
PROVENez;
435
mens: car ce n'eO: point COqlme ne renfermant pas des folem ni rés fuffifantes que la Loi les a abrogés, mais comme
~enfermant des difpoliriont illégales. Ainli la Loi porre fur
le fonds même de 'ces difpolirions, qu'elle veur n'avoir aucun
effer, non pas parce qu'elles fone informes, mais parce qu'elles
font contraires à la narure même des reftamens, dont l'effence eft d'être libres & révocables jufqu'a\l dernier moment
de la vie.
,
Il ne s'agit pas ici de la maniere donr Fagegahier a exprimé fa volonté; il s'agir de cette volonté même que les
Loix de France' ne reconnoilfenr point, & à laquelle elles
ont réfufé toute exécution. C'eft donc fur cette volonté que
frappe direaement la Loi, & non fur la forme fous laquelle
elle fe préfenre. Deux objets onr déterminé le Légiflateuf
a prohiber les tefiamens mutuels. IO.La préfomption de la captarion: 2.°. L'irrévocabilité. Or ces deux inconvéniens ne fe
rencontrent" que dans les tefiamens faits in eâdem chartâ.
Ceux faits féparément' peuvent, à la vérité, être captés;
mais la fufpicion de'caprarion ne fauroit êrre li forte: I O• parce
que la liberté du teftateur n'y a point été gênée par la préfence
de l'héritier: 2.°. Parce qu'ils peuvent ne pas être'la condition
l'un de l'autre, & qu'il eft même poffible que les deux refi~teurs
ignorent leurs difpofirions réciproques. Mais dans ceux faits
in eâdem chartâ, on ne peut préfumer ni cerre liberté, ni cette
ignorance. Il eft clair que l'uo en fait à caufe de l'aurre:
do ut de., & c'en aux yeux du Ugahteur un çaraaere fuf.
fifant de captation, & par conféquenr de réprobarion.
Le fecond iuconvénienr que la Loi a voulu prévoir, ne· Ce
trouve pas non plu's dans les difpofirions mutuelles faites
féparément: 1°. parce qu'elles peuvent êrre révoquées en
tout érar de caufe. 2.°. Parce qu'elles font indépendances
l'une de l'aurre. 3°. Parce que la mort de l'un des reftareurs
a-néanrir la difpolirion de l'aurre. Les tefiàmens faits in eâdem chartâ, au contraire, forment un tout indivifible, dont.
les partle's ne peuvent pas fub!iHer l'une fans l'aurre, '& la
mort même d'un des co-refiarellfs ne fair que rendre plus
irrévocables les difpoficions du furvivanr, fur-tour lorfque ).
.I i i 2.
�,J
+36
.U Il' N A L " ,
comme dans celui-ci, on y a ap>pofé une inf!:itution conditionnelle..
,
Arrêt du 30 Mars 1776, au rapport de Ml'. le Confeiller
du Bourguet, qui réforme la Sentence & confirme le tel:'
k1menr, <lvec dépens. Ecrivant Mes. Pochet· IX Gibelin.
ARRÊT
XX XI X.
En matiere d'aJfùrance maritime, la clmife inji!rée dans la
police, portant qu'en cas de finiflre, ou perte, l'Affuré
'ne fera tenu de produire d'autres preuves ni juflification, que l'obligation à la groffe, efl licite, "fitée & va-
laMe,
~.
L
,1
E 3 1 Juin 177,1 , le lieur Fiquet donna a.ux lieurs Lambert, pere & fils, le premier Capitaine en fecond, &
l'autre. Li,?utenant & Ecrivain du vaiffeau L'Aigle, la fomme
de 8no liv. pour employer en marchandifes non prohibées, les charger .d'entlée, & recharger le produit
c;I~, fo,rti~ CUl' le vaiffeau qui. devoit aller aux Ifles de
l3ourbq~, &:: reyenir au Port· de l'Orient. 11 éta it dit dans la.
police, ,que cette fomme était au l'ifque , péril & fo.rrune
du lieur Figuet pendant le voyage, au change maritime de
deux pour cenr par mois, comptable du jour & heure que
le vaiffeau feroit forti du Port.
, Le 10 qaobre 1772., le lieur Fiquet fe fait affurer la
fomme de 8000 liv., à compter du premier Août précédent,
[ur la partie de 82.10 liv. fournies à la groffe, &affeaées ,
fur les facultés & marchandifes qui fe trouvoient chargées
fur le vaiff~au L'Aigle, par Lambert pere & fils; la police
portoit qu'en cas de linifire, ou perte., le lieur Fiquet ne
fèroit .ten\li p~llProdpire. d'a.utres pieces, ni jufiification, que
.
'
l;obl!galion 11 la groffe des Lambert, .
Le 'vaiffeau partit de Marfeille, & arriva h.eureufement
11 l'HIe de Bourbon; il Y déc/1argea fes marchandifes;
�nu PALAIS 'DE PROVENCE;
437
dIes y furent vendues; après quoi lé' Capit.pne lp.'3rrit ;
de retour au Port Louis, dans l'Ille de France, le' -navire
fut a1failli par un ouragan: qui .le fit naufrager. L'é.vénement furvenu , on tint diverfes, procédures propres à conftater le finillre, à jullifier ce queJe nayire allait., lX à'2voir,
]a permiffion d'en &uver les débris. La nouvelle 'àe .l'événement furvenue à Marfeille, les propriétaires dillOa~ire 6.reiu abandon aux a1fureurs. Le 'fieur Fiquet -fit ,fon délaiffement, & fe pourv,llt en paiement des fommes a1furées; les
a1fureurs lui oppoferent que J'Ordonnance ne perm~ttoit:'de
contraindre au paiement des J:àmmes affinées que r jufqu'à
concurrence des effets donr-.l'a1furé jufrifi.ero1t le -chargement & la perte. Le fieur Fiquet r.épondi.r que dès que le'
navire avait naufragé, il devenait indifférent que les efIèts
a1fures eu1fent ou n'eu1fent pas péri, qu'ils euIfent ou qu'ils
n'eu1fent pas éré chargés, & qu'étant porté par la ;polic.e,~
qu'en c~s de finifire ou perte, il ne ferait tenu de pro.-.
duire d'autre piece ni jullification que le hillet de gr'offe,
la feule exhibition qu'il en faifoit ,. valoit non feulement·
preuve du chargement des effets & la jullification qu'exige
l'Ordonnance, mais encore que ·Ies facultés étoient extanres
dans le navireJor,s du naufrage, & qu'elles avoient péri. Par
~entence du 22 Mars 177'i' les affilreurs furent condamnés
au paiement, avec intérêts, dépens & contrainte par, corps.
.
" "
Appel pardevant la Cour.
. . On difoit pour les a1fureurs, que le contrat à la groffe,
qui emporte toujours avec' lui des intérêts au deffus du
taux de l'qrdonnance, n'ell légitime qu'autant que le prix. a.
été. véritablement .expofé au rifque de ·la mer: c'efr la difpofition de la Loi l , if. de nautico Jœnore ;.il faut. :pour la.
validité du contrat, que tranfmare vehatur .àu rifque, péril
& fortune du prêteur, ainfi que le dit la Glofe?pecunia,
naviget periculo' creditoris. L'aullérité de' la matie.rél a été
portée fi loin., que la Loi prévoyant le ca~~ la.,confom-l
mation de J'argent ou des marchanqifes 'Prifes,A la 'groire
aurait été faite à. ~erI;~, décide que le prêt 'o'ayabt·pas.couru
le rifque de la mer, n'a Po r conféguenr pas les 'll\lllO'tagès du
.
'
�:.tJ8
JOUllNAL
contrat de groffe : fi in eodem Joca confumatlIT'; non erit
tTaje8itia.
C'eft d'apr~s le même principe, que le :~. de la Loi
7, if. de exercitoriâ ac1ione, ne donne pas le privilege du
contrat de. groffe au prêt fait pour acheter des voiles dans
un endroit où il n'yen a point; c'eft auffi ce que dit CafaRegis, difc. 7 l, n. 1). Le contrat de groffe eil: plus réel
que perfonnel; & comme il n'a pour unique objet que le
navire ou fa cargaifon, toue ce qui n'y eft pas fpécialement employé, ne peut en avoir le privilege; auffi pour conftituer le contrat de groffe, il ne fufEt pas qu'il foit confenti par deux perfonnes, dom l'une eil: donneur, & l'autre
prêteur; il faut cumulativemem le concours de ces deux
drconfl:a.nces; rifque de la mer, & rifque au péril du donneur. C'eft ainfi que le décident Targa, pag. 13 (; Loccenius, pag. 888; Stimanus, pag. 37~L Là où il n'y a point
de chargement, il n'y a donc point de contrat de groffe.
Tel ef!:' al1ffi le fyfl:ême de l'Ordonnance de la Marine;
puifql1e l'art. 3 du litre des contrats a la grrdfè fait défenfes de prendre deniers à la groffe fur le corps, quille dl!
navire, ou fur les marchandifes de fon chargement, au delà
de leur valeur, à peine d'être contraint, en cas de fraude,
au paiement des fommes entieres, nonobil:ant la perte du
vaiffeau. L'art. 14 porte, que le chargeur ne fera point libéré par la perte du navire & du chargement, s'il ne juftifie qu'il y avoit pour fon compte des effets jufqu'au concl)trent de pareille fomme; & l'art. 15 veut que, fi lors même
que le cont~at de groffe ~ été confemi, le preneur juftifie . n'avoir pu charger des effets pour la valeur des fommes
prifes à la groffe, le contrat, en cas de perte, fera diminué
à proportion de la valeur des effets, & ne fuhfiftera que pour
le furplus.
Ce n'eft pas feulement pour les contrats à la groffe que
IX>rdonnance porte une difpofition qui tient au plus grand
bien du commerce·& au plus grand intérêt çe .la navigation; ce qu'dIe a ordonné pour les contrats à la groffe ,
e!le l'ordonne pour Jes aIfurances; parce qu'il y a une 'ana-:-
�.
DU
PALAIS
DE
PROVENCE;
439
10gie nécelfaire entr'eux; & tout de même qu'il ne peut y
avoir de contrat à la groffe fans chargement, de même aufIi
fans chargement il n'y a point d'afiilrance, ou le contrat
dl: annullé. C'efr la diCpofition des art. 22, 23, 4- & 2~
de l'Ordonnance, titre des a.Uùmnces.
C'ef!: une erreur de croire que le contrat à la groffe CuffiCe pour prouver l'emploi des deniers. Le titre que le preneur tàit ainfi au donneur, jufrifie bien qu'il a compté Ces
deniers; mais il ne jul1ifie pas fi les deniers ont eu la deftination indiquée, & c'efr l'exécution de cette defiination
qui confiitue l'effence du contrat; auffi le titre de executoriâ
a8ione, qui efr le fiege de la matiere, impoCe .au donneur
l'obligation de veiller à l'emploi; & il en donne cette raiCon,
qui efr rappellée par les Auteurs: hoc exigimus, ut non fuerit
falfa caufa rogandœ pecuniœ ml!tuœ, ut mucuo non fuerit quœficus titulus falfus. C'en même le feul moyen de prévenir
l'ufure, parce qu'autrement il n'y auroit rien de plus fimpIe que de colorer un prêt ufuraire, en indiquant faulfement
une dellination maritime qui n'auroit abColument rien de
réel. Cujas ad africanum, traél:. 8 ad !eg. Stimanus, pag.
418 & ~44-, & Vinnius Cur les Loix Rhodiennes, pag.
18 4'
.
L'article 56 du tit. des alfurances, porte que les AJJureurs ne pourront être contraints au paiement des fommes af·[urées, que jufqu'à la concurrence de la valeur des effets dOfit
l'a.f!ùrt! juflifiera le chargement & la perte. Cette difpofition
efr d'autant plus remarquable, qu'elle [ert à difringuer notre
'Droit François d'avec celui des autres nations; ailleurs on
peut affurer, comme on dit communement, par gageure;
mais chez nous, on ne peut ni donner à la groffe, ni
affurer, que les deniers pris à la groffe, ou le montant
des Commes affurées, qui ont véritablement couru le riCque de
la mer; ailleurs, & principalement chez les Anglois, on peut
affurer, lors même que rien n'a été chargé•
. C'efr d'après ces principes que le Commentateur d'Orléans, Valin [ur l'art. ~7 du titre des affurances, & Po,tier en fes contrats maritimes, obfervenc. que rien n'e!l;
~
�~~
\
.JouRNAt
plus ,jufl:e':que la difp~lition de nos Loix Françoifes ~ Cet
égard; parce qu'à défaut de chargement, n'y ayant poiC\t
eu de rifque, néceŒ1irement· il n'y a point .eu de comrat.
f'Ordonnance exige au delà de la jufl:ification. du ch~rge
ment; car elle s'occupe encore des efpeces de preuvç~ qui
.doivent fervir à jufl:ifier le chargement. ( Articles 'iL, 63,
§4 &,6') du ticre des aifurances. ) Il efl: bien vrai que l'arr.
3, lailIe aux parties la liberté de fiipuler toute convention
dont elles voudront c.on~enir ; mais il ne fauc pas trop étendre un~ ~ife?g~iothqu~' n'dl générale que parce qu'elle efl:
.lim~tée \?a!" le ~roJf 1 gl}1mun. Sans doute toute F9ndiciç>n
,qu~ n',off~p'ferjl(p.'!~ ,les iP0!1nes mœurs, ou qt;i ne (era pas
contraire à) la, nature du. cpnrrat, doit fublifl:er; mais une
condicion qui g.érqgeJ oit à ç§ R.u:exige l'Ordonnance pour
confl:icuer le contr'a~ maritinle, ne, reroi~ qu'une condition
léprpwée" p'arce qu'~l\e ferpie conr.r~ire ~ 1'\ nature rnême
du co;n,cras~ Of. qu'elle tendroi,t à décruire d(yne main ce que
le~ pa~ti.es .,,:o.'tJd.roi~nt éflifier de l'au cre. Ainfi les. parties ne
peuvent pas faire porter les aiTurances fur les objets qui n'en
font pas fufcepcibles; ainli elles ne peuvent pas mieux affur~r ce 'lu!,' ne court pas les rifques de la ,mer; ainli elles
he peuvent valablement renoncer aux jufl:ifications qu'exige
l'O~~onnance, que' le conrrat maritime a reçu fa pletn t &
,eqciere juHification;. aurrelpem c.e ferait ~utorifer l'aiTura(l"y
par gageure, 0., l'Ordonnance l'a formellement prohibée, en
exigeant que l'aiTuré jufl:ifie du chargement. L'Auceur du craité
des contrats aléatoires, com. 3, citre ,du contrat d'aifurançe~
pag. 148, aneHe qoe nonobfl:ant, to~t, paé):e contraire) ,.o!!'
doit toujours jufl:ifier ,du cha,rgefT1enr, ~,
1 •
.:
"
Rien de plus ordin,\it~ que, la .fl:jpulaf.i,on de la clau[e, que
le donneur à la groiTe ne fera obligé, ,en cas de linifl:re,
à d'autre j~fl:ificacion que le ,c;ontrat de grotTe. Mais'que ,faut-il
ent,eodre par-l~, liJce n'efl: gu~ It,~.aiT'tfeuJ:f ne font paq~nl1S
de la f61vabilité .des Capitaines'l~ll qu~ ~a~ur~ur lJe r~pqn~
•d'llut r~s ri(ques que des cet;x procé9il.CV ~7j (or,ttlnes de gler;
l'on n'a jamais entendu qu'en difant, yoil~ ~ "hillet de grqjJc;
foie q\J'il ait ou qu'il n'ait pas été ~xécuté a (oit qu'lll'épaqu~
�DU
PAL AIS
D Il
PRO v Il Nell.
44 t
que de l'airurance il y eût ou qu'il n'y eût plus d'effets chargés, & que le Capitaine les eût ou ne les eût pas diffipés,
on feroit difpenfé de donner route ju/lification quelconque
du chargement. Que le fleur Fiquet voie fa police; il Y etl:
dit nommément que les AjJùrwrs prennent fur eux le rifque
de la sr1reté, du jour & heure que les facultés ont été ou feront emharqutes. Il faut donc au moins juHifier l'embarquement, puifque le contrat d'alfurance e/l relatif à cet événement; non feulement on ne le ju/lifie pas, mais il ell
prouvé que long temps après l'alfurance, il n'y avoit rien
dans le vailfeau. Suivant l'Ordonnance, il ne fuffit pas même
de juHifier le chargement; quand il s'agit d'alfurance fur le
chargement, il faut encore jufiifier la perte, & cette ju/lification qu'exige l'Ordonnance, eH fans doute quelque chofe
de plus que la préfomption réfultante du billet de grolfe.
Le donneur qui fe fait alfurer, figure fuh duplici refPec7u:comme donneur vis-à-vis du véritable preneur, & comme
preneur par fiaion vis-à-vis des alfureurs; puifque par fiction les alfureurs fuccédant à fon lieu & place, fODt cenfés
donneurs vis-à-vis de lui, dès-lors ce donneur alfuré fe trouve
entre le véritable preneur & les alfureurs;. mais au lieud'avoir une aaion direae contre rous, il n'", pour ainfi
dire, qu'une aaion exc1ufive; c'eH-à-djre, que s'il en a queLqu'une contre le preneur, pa r cela même il n'en a abfolument point conrre les alfureurs, & vice versâ. Mais avant
d'en venir à l'alfureur, il faut qu'il commence par prouver
que le preneur a été libéré vis-à-vis de lui. Ce n'eft que
par-là qu'il peut parve-a-ir aux alfureurs;, & il ne peut prouver la libération du preneur, qu''!utant qU.e ce même pre)'Jeur lui aura ju/lifié le chargement & la perre.
.
Or, fi les marcb.andifes fur lefquelles portoit l'alfura'ncen'étoient pas da ns le navire; fi le Capitaine Lamhert en avoirle prix e.ll poche, & fi le diverriiranr il eo- a privé h: fleurPiquet, quelle jullice y. a-t il que les alfureurs l'en dédom_
magent? S'il a tr p légéremenr fuivi la foi. du Capitaine·
l-amhert, efl-ce an.• a/fureurs à l'en indemnifer?- Le plU$;
Années t 775. & t 77 6•
K k k.
�442.
Jou RNA L
le moins de folvabilité du Capitaine Lamhert fait-il une
efpece de rifque dont les afIureurs fe foient chargés?
On répondait pour le fieur Fiquet, qu'il s'agiffoir de favoir
fi la c1aufe inférée dans la police d'affurance, portanr qu'en
cas de perte ou finifire, le fieur Fiquet ne ferait tenu de produire d'autre preuve & d'autre juflification pour parvenir Qll
paiement des [ommes ajJùrées, que [on obligation la grojJè,
dl: une c1aufe licite, valable & ufitée' dans la Place de Marfeille.
L'Ordonnance de la Marine, titre des affirances, art. 3,
après avoir prefcrit les différens objets que la police doie
contenir, porte cette difpofition expreffe; qu'elle pourra contenir généralement toutes les autres conditions dont les parties
voudront convenir. Cetre liberté d'inférer dans les contra rs
d'affurance taures les c1aufes & candirions dont on veue
convenir, efi pourtant fufcepribie de quelques refiriél:ions,
c'efi-à-dire qu'il n'ell: pas permis de la faire porter fur ce qui
peut êrreimpofIible ,COll traire aux Loix & aux bonnes mœurs.
Or le paél:e par lequel l'affuré efi difpenfé de juHifier de
fan rifque, aurremenr que par {on billet à la groffe, n'a rien
d'illicire, & a formé une Jurifprudence confiante dans le Tribunal de MarfeiIle, ainfi qu'on le voit par la Senrence du
9 Décembre 1749, en faveur du fieur Claude Bremond,
contre les réaffureurs fur le fchebech La Vierge de Conception & St. François de Paule: Autre Sentence du 9 Août
17)4, en faveur des fieurs Gilly freres de Cadix, contre
le fieur Guirand, réaifureur fur les facultés de Notre-Dame
du Rofaire, St. Jofeph & les Ames du Purgatoire. Aurre Sente~ce du 19 Avril 17S'j, entre les fieurs Simon Gilly &
Antoine Eydin, contre les afIilreurs de la tartane St. JeanBaptifie. Aurre Sentence du mois de Juin 17S8, en favenr
de Pierre Bouzige, donneur à la groffe fur les facultés du
vaiffeau la Ste. Trinité, contre les affureurs. Aurre Sentence
rendue en 176S, en faveur du fieur Jean-Baptifie Rotrou,
contte le fieur Jean Fefquee.
Cette Jurifprudence efi certaine. Le fieur Fiquet rappor~
OU
a
�DU
PALAIS
DB
PROVENCE.
,
443
toit 'd'ailleurs des certificats des Courriers, Négocians &
Noraires, qui [Ous artefterent que daos les polices d'affurances faires fur parties & données à la groffe, on a [OUjours [uivi l'ufage d'inférer la clau[e, qu'en cas de jinijlre ou
perte, l'aJlùré ne ferait tenu de jufiifier de [on rifque que par
la feule exhihition de [on hillet de grojJè, & dans les polices
de réaffurance,' celle par laquelle le réaffuré n'eH tenu de
produire.à [on réaffureur que l'acquit du paiement de la perte
au premier affuré.
Le donneur à la groffe n'eH pas obligé, il n'a même pas
be[oin de Cuivre l'emploi des deniers qu'il prête. L'Ordonnance de la Marine, au tirre des contrats la groJ/è, accorde privilege au donneur [ur le navire & le chargement"
[ans exiger la juHificarion de l'emploi. Par l'art. 1 de ce
titre, il eH permis de prêrer par contrat fait devant -Notaire, ou fous fignature privée. Par l'arr. 2, on peur prêrer
[ur le corps, armement & vituailles, conjoinrement, féparément & [ur le [Our ou partie du chargement. Par l'arr. 7,
le navire, fes agrêrs '& apparaux [ont affeél:és par privilege
au principal & intérêrs de l'argent donné fur le corps &le chargement au pajemenr des deniers pris pour le faire.
De la di[pofition de ces diflerens articles, il fuit qu'il [ulEt
que le donneur prouve par fon aél:e de groffe qu'j.) a réellement fourni une [omme, pour [e prétendre légitime créan-cier du 'preneur'& privilégié [ur l'objet pour lequel les deniers ont été pris.
Il eH vrai que fuivànt l'art. 14, le chargeur qui aura pris
de l'argent à la groffe [ur marchandi[es, ne fera poinr libéré par la perte du navire & de [on chargement, s'il ne
jufl:ifie qu'il y avôit pour [on 'Compte des effers ju/qu'à la
concurrence de pareille [omme; & par l'arr. 15, 11 eft dit
que fi routefois celui qui a pris deniers à la grotIe, juftifie n'avoir pu charger des effets pour la valeur des fommes
prifés à la groffe, le contrat, en cas de perte, fera diminué
à proportion de la valeur des effers chargés; il ne fubfifl:era
que pour le [urplus. Ces deux articles font uniquement relatifS au donneur & au -preneur à la groffe; il en réfulte
a
K.kk2l.
�444
Jou RNA L
néanmoins 'bien évidemment que c'efl au preneur feu] à qui
la charge efl impofée de rappporter la preuve de l'emploi
t:x du chargement des fommes prifes à la groJIe, & conféquemment que le donneur n'efl pas obligé d'en fuivre l'em~
ploi, moins encore de le juflifier. C'efl ainli que la Loi l'a
anciennement établi pour l'utilité du commerce. Loi 1 ,. §.
9, if. de exercitor. ac1. ,jintagma juris, lib. 29,'tit. 1, n. 18;
Cujas, ad affricanum, fur la Loi Llfcius Titius 7, if. de exerCÎtor. aa.; Cafa-Regis, difc. legal. de commercio & mercat.,
difc. 1, n. 37, difc. 7, n. 2, difc. la, n. 17.
C'efl un principe reconnu qu'en matiere d'affilrance, on doit
principalement s'arrêter aux clau[es de la police, & on ne
peut pas s'en éCârrer, parce que la volon.ré du comraaant
ne peut pas êrr~ mieux manifeflée; ce contrat d'aJIurance
efl: un contrat de bonne foi, datls lequel on doit plutôt
confulter les coutumes des Marchands & leur fJ'i0n de contraaer, que la rigueur du droit. D'ailleurs il efl: permis de
menre dans I~ comrat d'aifurance des paaes relatifs à la
<Jualité des preuves que l'on admet; il Y a des cas même
où le paae par lequel l'a JIu ré en difpenfé de produire le
connoiJIement, & [oumet [on aJIureur à payer fur [a limpie aJIertion, efl: valable. C'en ainfi que l'ob[erve CafaRegis, di[c. n. 1 & [eq., di[c. la, n. 17, di[c. l, n. 48,
12,72 & 127.
'
Le manifefl:e remis au Bureau de Mar[eille par le Capi:"
taine Bonnegrace, dans lequel il n'efl: pas. fait mention des
effets chargés à Marfeille pour le compte de Lambert pere
& fils, ne peut faire aucun degré de preuve contre le fieur
Fiquet, parce qu'il dl: notoire que les Officiers & paJIa-'
gers des navires qui chargent de,s effets pour leur compte"
n'en font jamais article dans les manifefl:es remis lors de leur
départ; mais indépendamment de la quantité d'effets que
Lambert pere & fils ont réellement chargé fur le vaiJIeau
l'Aigle, qui formaient la valeur de leur engagement à la
groJIe, il connoit par une déclaration du lieur Grenier,
propriétaire & armateur du navire, que les fleurs Lambert
éraient incéreJIés pour 21000 liv. aU corps & cargaifon du
�D tJ
PAL AIS
D B
PRO V B N C B.
44 ~
navire au voyage pour lequel l'a1furance du lieur Piquet
avoie éeé faite, & que même cet ineérêe avoie été fourni
pour les mêmes effees que le' lieur Fiquee leur avo.ie donné
en paiement & valeur du billet de gro1fe. Enfin la même'
queltion qui agite les parties, a éeé jugée par Arrêe du Ir
Mai 1764, au rapport de Mr. de Boutaffi, en faveur de
François Œuf, douneur à la grolfe.
Arrêt du 2.0 Avril 1776, au rapport de Mr. le Confeiller
de Mons, qui confirma la Sentence avec dépens. Ecrivant
Mes. Pafcalis & Meriaud.
ARRÊT
XL.
Litifconteflation formée pat les défimfes fournies.
L'échange frauduleux ifl fournis au retrait lignager•.
P
AR aéte du 2.1 Septembre 1773, lieur Paul Fournier"
Bourgeois du lieu de Comps, acquit du fieur Tripoul.
des biens fonds ftcués dans le terroir du même lieu, évalués
à l fU> liv., & en paiement du prix Fournier donna en,
contre-échange au lieur Tripoul d'autres biens fonds évalués 8) 0 liv.; le refiant fut indiqué à payer à la décharge.
du lieur Tripoul.
'
1
Le lieur Cauvin, beau-fils du lieur Tripoul, demeurant
au Bourguet, en qualieé de pere & légitime adminifirateur
de fan fils, exerçant les droits de fa mere, fe pourvut le
2.) Oél:obre même année contre le lieur Fournier en défemparation des biens par retrait ,Iignager. Le fleur Fournier fou tint que le retrait n'avoit pas lieu pour un échange,
lorfque les biens donnés en conrre-échange excédaient la
moitié du prix de ceux qu'on prenait en échange. Le lieurCauvin répondit qu'en admettant le principe du lieur Fournier, le. cetrait ferait toujours fondé, parce que le,'l biens
du fieur J'ripoul valant plus de 3000 liv., ceux du fieur
�446
JOUllNAL
Fournier, qui n'étaient efiimés qu'à 8,0 liv., ne pouvoient
acreindre à la moitié du prix. Il conclut à ce qu'avant dire
droit, il fllt fait par Experts rapport d'eltimation des biens
refpeél:ivement aliénés par l'aél:e. Le lieur Fournier prepofa
alors une fin de non-recevoir contre le lieur Cauvin, fondée fur ce que celui-ci ayant laiifé écouler un mois avant
de donner fes contredirs allx défenfes, faél:ion étoit prefcrite, & qu'il ne pouvait par conféqueot n'y avoir lieu au
retrait. Semence du Juge de Comps, qui fait droit à la fin
de non-recevoir, avec dépens. Appel au Lieutenant de Draguignan; l'inltance fut enfuite évoquée par'devant la Cour, &
le lieur Cauvin rapporta la ceffion du droit de prélation du
Seigneur direél:.
On difoit pour le .fleur Cauvin , qu'il s'agiffoit d'une vente
réelle, déguilee fous le nom d'échange, ou, li l'on veut,
d'un véritable échange fait de bonne foi ou frauduleufement. Dans tous les cas, le retrait était fondé. L'échange
eft fournis au retrait, lorfque les biens y font eltimés, parce
que l'eHimation feule fait préfumer la vente. Breyé en fan
traité du retrait, part. 2, pag. 6S ; Bomy fur nos Statuts,
pag. S4; Boutarie en fes inflitutions, 1iv. 3, rit. 24, §. 2,
& tous les Aureurs qu'il cire, fe réuniffent à dire que lorr'lu'unfonds eflimé a fomme d'argent ejl permuté avec un autre,
l'eflimation fait que le contrat Je réfout en vente. Il dl: encore inconreHable que le rerrait a lieu, toutes les fois qu'il
y a fraude ou flmu!ation dans l'échange. C'elt ainli que le
décident Breyé au lieu allégué, pag. 77 ; Livoniere, rraité'
des fiefs, pag. 433 & 434; l'Auteur du recueil de notre
Jnrifprutlence féodale, titre du retrait, n., 'P l & Decormis,'
rom•.1, col. 10p & fuiv.
Le prétendu échange n'dl: réellement .qu"une vente, &.'
la fraude y tranfpire de routes pans. Des biens qui valaient
plus. de }OOO liv., ne font eltimés que 1)20 Jiv., & ceu"
dont le prix n'était peut-être pas de 600 1iv., Je font
8')0 tiv. Pelit-il y avoir de fraude plus caraél:érifée? Le fleur'
Fournier à [<lÜlfé de laiifef. vérifier à des Experts le prix réel
�DU
PAL AIS
DB
PRO V B N C B.
441
de chacun des biens contenus dans l'atte, parce qu'il Cf Jlgnoit l'événemem du rapport, parce qu'il voyait fa fraudè
à découverr.
Sur la fin de non recevoir, on difcuta fi après la préfemation refpeaive des parties, après une fommation à donner défenfes, & après les défenfes données par le défendeur,
l'infiance peut être périmée dans le mois, lorfque le demandeur en retrait le laiffe paffer fans contredire ces défenfes,
ou fi toutes ces procédures lient l'infiance de façon qu'elle
ne pui1fe être périmée que par trois ans. Il n'el!: perfonne
qui ignore que d'après l'art. '), au titre des péremptions du
Réglement de la Cour de 167'1., l'infiance efl: liée par la préfemation refpeaive des parties & qu'elle ne périme que par
trois ans de ce1fation de poutfuites.
Les Loix romaines s'expliquent a1fez fur ce point: omnes
aaiones quœ rempore pereunt, Jèmel inclu[œ in judicio falvœ
permanent, dit la Loi 139, if. de regul. jur. Or y avait· il, n'y
avait-il pas conrefiation dans le cas préfent? Voilà la feule
quefiion qu'il y a à examiner, puifqu'il el!: convenu que la
conrefiation empêche la prefcription. Qu'efi-ce en effet que
contefier? C'efi témoigner que l'on veut plaider, & que l'on
n'accorde pas la demande qui a été faite; c'efi ainn que
s'explique Fagnan fur le chap. olim extra de litifconreJl.; la
litifcontefiation dépend donc de la façon de penfer du défendeur: !T'ais un mot fuffit pour dévoiler cette façon de penftr
& l'envie de conteJler, ajoute le mêmc Auteur. ( Sanleger,
de prœvent. judic. pag. 206, n. 2, & Cancerius, part. 3, cap.
16, n. ).)
La Loi du code décide que la contel!:ation el!: engagée,
lorfque la caufe à frappé les oreilles du Juge, cùm judex per,
narrationem negotii caufam audire cœpuit. Lors de cette Loi,
la partie appelloit fan adverfaire qui étoit obligé de la fuivre chez le prêteur. Là le demandeur expofoit fa demande,
& le défendeur l'accordait ou la déniait; la réponfe du défendeur réglait la conduite du prêteur: s'il accordait, tout
érait fini; s'il déniait, l'examen & la décifion du procès
étaient ren'ioyés à Un autre jour ~ mais dès. ce moment la
�4~
J~URNAL
caure émit conteflée, & le procès engagé. La différence dans
la forme de procéder rend la Loi romaine, en quelque
façon, inapplicable à la Jurjfprudence françoife. On ne trouve
des veŒges de la forme r9.maine, que dans l'exercice de
la jurifdiél:ion de la Police. Les deux parties comparoilfent
en pré/ence, donnent leur raifons &: leurs défenfes, & les
Juges {latuent : mais hors de là, rien de pareil dans les Tribunaux ordinaires; la demande eft donnée par écrit, & les
défenfes de même j ce n'eft donc pas d'après la Loi romaine qu'il faut fe decider; ou pour mieux dire, fi cette
Loi doit être appliquée à la forme françoife, ce n'efl que
parce que les parcies font toujours cenfées en préfence du
luge; celui-ci efl cenfé avoir enrendu la demande & les défenfes. Tout fe fait devanr lui, & dès lors il faut convenir que
la conteflation, efl engagée: caufam audire cœpit.
L'Ordonnance n'dl: pas plus favorable au fie ur Fournier.
Que l'on en confulte l'efprit & les Commentateurs, on verra
qu'un appoinremenc, une Ordonnance de renvoi au premier
jour, ou même une Ordonnance de donner défenfes, établi!fem la conreflarion; la prérentation même pourrait fuffire, parce qu'on ne préfente pas pour ne pas concefter.
Delà, dans le cas d'une affignation en, paiement d'un
billet, avec avérarion de ce même billet, fi le défendeur préfenre purement & fimplement, on ne peut
plus faire ordonner l'avération par. défaut, parce que la préfenration fuppofe la conteHation., Il faut alors ou faire procéder à une vérification d'écritures, ou que le défendeur,
déclare expre!fémenc qu'il tient fan obligation pour avérée &:
reconnue. Delà, en' matiere de requête civile, la préfentation
lie J'inftance &,Ia proroge à tr.ois ans, quoiqp'on n'air que fix
mais pour fe pourvoir. Il y a fur ce point de regle l'Arrée
du 27 Juin 1775, qui débouta le nommé Brignon de)ouques
de fa requête en péremption, fondée fur une difcQntinuation
de pourfuites pendant fix mois.
>
L'Ordonnance s'explique elle même" lorfqu'on veut en
failir l'efprit. L'art. 19 du tit. 1 l pade de l'appointement
des (onc1ulions, portant réglement de fournir g,iefs & réponfes ~
�D U
PAL A 1 S
D l!
PRO V g N C B.
449
'ponfes; le Commentateur remarque dans la note qu'il a
ajouté, que cet appointe ment , lorfque les deux parties concluent, forme la contel1:ation en caufe. Tous les Auceurs le
penfene dt: même: d'Antoine dans fes regles de droir, regle
86; Decormis, corn. 2, col. 1712, & fuiv.; Lange, tom. l,
pag. 30); Alberr, letr. P, chap. 2 1; l'Arrêt rapporté par
Boniface, tom. 1, liv. 8, tir. 1, chap. 9, n'el1: paine applicable
vû le fait qui y avait donné lieu; il s'était écoulé deux
mois après l'affignarion & avane la préfentarion, de forte qu'il
écoit vrai- de dire qu'il n'y avait point d'inl1:ance, & que la
prefcriprion avoir par conféquent couru.
On répondait pour le fieur Fournier, que la Seneence du
Juge de Comps érait jul1:e & réguliere, parce qu'au lieu de
trente jours, rerme ::près lequel le fieur Cauvin avance qu'en
regle générale, l'inHance en rerrait lignager el1: périmée,
il s'en était écoulé 38. Or l'Ordonnance, rir. 14, arr. 13,
décide que la caufe fera tenue pour conteflée par le premier
réglement, appointement ou jugement qui interviendra après
les défenfes fournies, encore qu'il n'ait pas été fignifié. Cette
difpofition paroÎr calquée furies loix 14, § l , cod. de judiciis,
& 1 cod. de litifcontefl.: lis enim tune conteflata videtul' cùm
judex pel' narl'ationem negotii caufam audire cœperit. Il fallait
à Rome que les parties fuffenr venues devane le Juge, &
qu'il eût fiatué par un renvoi à un autre jour ou aurrement.
Car on con<;oit qu'après qu'il avait entendu narrationem negotii,
il ne rel1:oit pas muet, & il ordonnait quelque chofe, ne fûrce qu'un renvoi; de même parmi nous, il faur que le Juge
ait rendu un appoinremenr ou Ordonnance quelconque, même
de fimple renvoi, néanmoins après des défenfes fournies.
Ici la requêre du fieur Cauvin ayant éré ûgnifiée au fie ur
Fournier par exploit du 2) Oél:obre 1773, & les parties ayant
préfenré, le fieur Cauvin lui fit fommation à donner fes défenfes le 13 Novembre fuivanr; le fieur fournier les donna
le 16, & depuis lors jufqu'au 23 Décembre, le ûeur Cauvin
ne fit aucune pourfuite; nul appoinremenr, nulle Ordon_
nan~e dans l'inrervalle; ~onc à cette d~rn~ere époque il n'y
avait pas eu de conte fia tian en caufe qUI put proroger à trois
Années z775 & z77 6•
LU
�:4~O
,
.
Jou ,R. N A L
ans l'inflao,ce fuhûflante alors encre les deux ·parties.
Nul douce qu'après les. préfentations des panies, il n'y ait
une inflance; mais nul doute auffi que cette infiance ne tombe
en litifconcefration q\.l'enfuite d'un appointemenc du Juge,
intervenu après les âéfenfes. L'Ordonndl1ce a dii1:ingué l'inftance, de la liti{conte{tatio.ll, & a voulu que la lirifconcefiation fût feulement formée, lorfq.u'il y auroit .eu un appointemene précédé de défenfes. Il y a irlfiance après les pré'femarions; litifconcefration, après les défènfes, & lin appoincement du Juge; mais aux inO:ances ordinaires, il n'eH befoin,
dit - on, fuivant le Réglement, pour les proroger à trois ans.,
'lue de la préfentation des deux panies; à la bonne hepre,
mais cette regle n'efr poine applicable aux inftances fur retrait.
Tous les Allteus conviennent que celles-ci périmene dans le
même délai que l'aél:ion, à moins qu'il n'y ait eu lirifconeefiation. Donc, quoique l'inflance foit formée pour les reeraits
comme pour coute autre. aél:ion, après les préfeneations, il
fuffit qU'lI n'y ait pas eu de litifcontefration, pour que la péremption foit acql1ife après un mois de ceifation de pourfuiees,
parce que l'aél:ion n'eH que d'un mois, & que l'infrance ne
dure pas plus que l'aél:ion. .En un moe, ce n'eH que par la
lieifconeefration ,que l'inftance de retrait peue être prorogée
jufqu'à trois ans. Auparavant 'c'efr une inftance, il efl vrai.,.
mais ce n'eft pas une infrance tombée en lirifcontefration;
& s'il eft cerrain Ique l'inftance en fait de retrait n'el!:
prorogée jufqu'à ce terme qu'après la Iitifconcel!:ation, il ,
faut néceifairement qu'avant la litifcomeftation elle fe périme dans le même temps que l'aél:ïon el!: prefcrice, c'el!:-à,;;
. dire .dans un mois;' tel eft le fentiment de Tiraqueau, fur la
coutume de Paris, vo. dedans l'an, gloC 10, n. ~ ') ; de
Grimaudet, liv. 9, chap. 2.3; de Brodeau fLlr Louet;· lett. J,
fomm. n. 3; de Ferrieres, injlit. COl/tum. tom. 3, liv. 4-, tir. 2,
arc. 136; & Dic1ionnaire de 'droit & de pratüjue vo. retrait
fur la fin; de Decormis, corn. 2, col. 1712, ita Boniface,
tOm. l , liv. 8, tit. l , chap. 9.
L'infrance étant formée par la préfentacion refpeél:ive des
parties, il faut que quand les Auteurs one parlé de l'inHa'nee
�DU
P ALAtS b Il PROVENCB;
451
contel1:ée, ils ai~nt entendu parler de quelque chaCe de plus
que d'une fimple inl!:ance. Or, rien n'ajoure à l'inl!:ance fimplemelJ[ liée par la ptéfentation, que l'intervention du Juge,
10rCqu'il a rendu quelque appointe ment ou ordonnance en
la caufe, pas même les défenfes qui expliquent bien le fujet
de la contel!:ation & les moyens, mais qui ne défignent pas
plus l'intention de contefter 'gue la jimple préfenration du
défendeur. Donc c'el!: de la litifconteftation qu'il s'agit, quand
ils parlent au fujet du retrait de l'inl!:ance contellée, c'el1:-à.
dire de cette lirifconteftation que l'Ordonnance de 1667 di.
1 fe former après un appointemenr précédé de défenfes. Donc,
fans litifconteflation formelle, l'in fiance de renait n'efi pas
cenfée conte née , &: fe trouve périmée par la cdfation des
pourfuites durant ùn mois.
•
S'il éroit poffible que le retrait féodal fîlt admis, le feur
Cauvin ne pourroit pas fe difpenfer d'accorder au fieur Fournier les dépens qui ont été, faits jufqu'au moment de l'exercice de ce nouveau retrait, parce que c'efi une aél:ion d'une
nature route différente que celle fur laquelle on a plaidé jufqu'alors; car il faut juger du méri.e de la Sentence en l'état
où fe trouvoit la caufe lorfqu'elle eH intervenue. D'ailleurs
les Auteurs conviennent que le rerrait féodal n'a pas lieu en
échange, lorfqu'il el!: fait fans fraude. Mais en cas de fraude,
doit-il avoir lieu pour le rour, ou feulement pour la portion
du fonds échangé, cQrrefpondante à l'argent donné pour
foulte? Quelques-uns font d'avis qu'il doit être re<;u pour
le tout, & d'autres feulement jufqu'à concurrence de la foulte.
( Larouloubre dans fes notes fur les matieres féodales, tit. du
retrait, art. 41. )
Arrêt du I l Mai 1776, au rapport de Mr. le Confeiner
de Sr. Martin, qui confirme la Sentence; & avant dire droit
à la demande de Cauvin, ordonne qu'il fera fait rapport des
biens dont s'agir, les dépens fairs pardevanr la Cour réfervés.
Ecrivant Mes. Gr.ls & Leclerc.
Cet Arrêt a jugé, tO. que les défenfes données par le défendeur en rerrair, forment la Iitifcomellarion, & empêchent
L Il
2.
�·H2.
.
JOURNAL
que l'inŒance foit périmée par une celfation de pourfuites
pendant un mois.
i!'. Que l'échange frauduleux eŒ fournis au retrait lignager.
ARRÊT
XL J.
En matiere de dîme, les gerberons une fois faits, e;. la par,..
tian du décimateur fèparù , on ne peut faire informer contre
le redevable qui s'oppofe
ce que les gerberons [oient rompus pour vérifier Ji le droit efl payé plein.
.
Le Lieutenant-Général-Civil, connaît, même par ac1ion criminelle, privativement au Lieutcnant-Criminel, des contraventions au droit de dî"rne.
a
a
,
E 21 Juillet 177'q., le Fermier de la d/me de Gemenos
préfenta au Lieutenant-Criminel au Siege d'Aix requête
de plainte contre Giraud, en contravention à la d/me; il expofa que voulant payer la' d/me arbitrairement, il avoit, par
une innovation- abufive, éloigné de fes gerberons les gerbes
qu'il deHinoit à ce paiement; que n'en ayant point' vu au
tour des gerberons, il alla avec un Huiffier & deux Records prier Giraud de les lui indiquer; que celui-ci feignant
de fe fou tenir fur un bâton, lui montra à cent cinquante pas
de fon gerberon un tas où fe trouvoient vingt mauvaifes
gerbes. Ils voulurent défaire les gerberons pour les vérifier;
Giraud s'y oppofa, & les obligea, par des menaces & des in-,
jures, de fortir de fa terre. Il demanda l'information, l'accédit, la faifie provifoire & le paraphement du procès-verbal
de l'Huiffier. Décret du même jour qui accorde ces fins.
L'information fut prife ; Giraud fut décrété de prife au corps.
Le même jour, le Fermier porta plainte contre Brefi, qui
s'oppofa fans rebeltion & fans menace à la vérification de
fon gerbier. Même verbal ,mêcl1e decret de foit-informé,
même faifie, même paraphement , & après l'information,
L
•
�·H2.
.
JOURNAL
que l'inŒance foit périmée par une celfation de pourfuites
pendant un mois.
i!'. Que l'échange frauduleux eŒ fournis au retrait lignager.
ARRÊT
XL J.
En matiere de dîme, les gerberons une fois faits, e;. la par,..
tian du décimateur fèparù , on ne peut faire informer contre
le redevable qui s'oppofe
ce que les gerberons [oient rompus pour vérifier Ji le droit efl payé plein.
.
Le Lieutenant-Général-Civil, connaît, même par ac1ion criminelle, privativement au Lieutcnant-Criminel, des contraventions au droit de dî"rne.
a
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,
E 21 Juillet 177'q., le Fermier de la d/me de Gemenos
préfenta au Lieutenant-Criminel au Siege d'Aix requête
de plainte contre Giraud, en contravention à la d/me; il expofa que voulant payer la' d/me arbitrairement, il avoit, par
une innovation- abufive, éloigné de fes gerberons les gerbes
qu'il deHinoit à ce paiement; que n'en ayant point' vu au
tour des gerberons, il alla avec un Huiffier & deux Records prier Giraud de les lui indiquer; que celui-ci feignant
de fe fou tenir fur un bâton, lui montra à cent cinquante pas
de fon gerberon un tas où fe trouvoient vingt mauvaifes
gerbes. Ils voulurent défaire les gerberons pour les vérifier;
Giraud s'y oppofa, & les obligea, par des menaces & des in-,
jures, de fortir de fa terre. Il demanda l'information, l'accédit, la faifie provifoire & le paraphement du procès-verbal
de l'Huiffier. Décret du même jour qui accorde ces fins.
L'information fut prife ; Giraud fut décrété de prife au corps.
Le même jour, le Fermier porta plainte contre Brefi, qui
s'oppofa fans rebeltion & fans menace à la vérification de
fon gerbier. Même verbal ,mêcl1e decret de foit-informé,
même faifie, même paraphement , & après l'information,
L
•
�DU
PALAIS
DE
PROVBNC B:
4B
décret d'ajournement contre Breil:. Le même jour 2 l Juillet,
autre plainte contre Lauzet & Giraud en contravention; même
fait, mêmes menaces, mêmes voies de fait, même verbal,
même décret de foit-informé & paraphement, & après l'inform~tion , ils font décrétés de prife au corps. Même plainte
contre Salette, même décret de prife de corps.
Le 14 Août, appel de la part des accufés des décrets de
foit-informé -& de prife de corps; & après s'être connitués
prifonniers & avoir prêté leurs réponfes, ils demanderent
leur élargiffement provifoire & la main levée provifoire, ce
qu'ils obtinrent, en donnant bonne & fuffifante caurion.
Le l Décembre, requête d'intervention de la Communauté; le 8 Février fuivant, requête incidente en caffation des
faifies, avec dommages-intérêts.
On difoit pour les accufés, que la procédure étoit nulle,
0
la. parce qu'il n'y avoit pas lieu d'informer; 2 • comme incompétente & a/fecrée; 3°. comme oppreffive. Le recélement de la dîme peut s'in!huire en Provence par 1 a voie
criminelle. C'en ce qui fut jugé par l'Arrêt rapporté par
Boniface, tom. l , liv. 2, tit.12, chap. 4. Mais fi l'on regarde en Provence le recélé de la dîme comme un délit;
fi fous ce rapport il en permis de 'le pourfuivre par la voie
criminelle, il n'en eU: pas de même du refus que fait le décimable de laiffer rompre fon gerberon, pour vérifier fi le décimateur a fa portion, au moyen des gerbes que le décimable a lai{fé fur la place, ou qu'il a placées à l'entrée de fon
champ. A cet égard, non feulement il n'y a pas délit, mais
de plus il n'y a pas même matiere à l'acrion civile. Quand
le décimable compofe fon gerberon, il compte les gerbes
de fuite & fans a/fecration; celle qui arrive fur le nombre
qui forme la quotité du décimateur, appartient 11 ce dernier;
elle en mife à l'écart, & le partage eil: fait. Le décimateur
doit être préfent, au moins il en a le droit; & l'on fent
bien que fi le- Fermier ne s'y trouve pas, le décimable ne
doit pas être obligé de refaire fon compte, & fur-tout fondre fon gerberon. L'habitant veille fur fa portion; le décimareur doit veiller fLlr la fic one. TI oe faut pas furcharger,
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l'obligation du décimable; ,il ne faut .donc pas le lOu mettrè
à garder (on champ ju(ques à ce qu'il plaife au décimateur
de venir prendre fa portion. Les Ordonnances ont dit, il
eil: vrai, qu'il faut avertir avant d'enlever; mais 1°. cela n'a
lieu que pour les dl mes qui fe prennent à l'aire & à grain
net; 2°. il a été jugé que l'avertiffement général fufl1foit ,
quand la dlme (e 'prend en gerbes fur le champ; 3°. le Fermier ne fe plaint pas du défaut d'avertilTement; parce qu'il
Cent bien que tous les propriéraires l'avertiroient en même
temps; & s'il vouloit êrre préfent à tout, il leroit obligé
de ,multiplier fes colleéleurs. Il eH: cerrain ,que le Fermier
doit s'arranger pour veiller fur (on droit lors de la fépa~
J'arion qui forme partage entre le propriéraire & lui. Ce
point de droit ne peut pas fouffrir le moindre doute, après
les Arrêts rendus en 1724 '& 20 Juin 1769, en faveur de
la Communauté d'Allauch, contre le Chapitre de Marfeille:
le premier condamna les vi!ires que le Chapitre voulait faire
dans les caves; le (econd ne lui permit pas même d'établir
un contrôleur à la Cave..de la dlmerie, pour y tenir état &
regillre des paie mens fairs par les redevables. .
En vain oppoferoit-on qu'on peut faire informer fur le recélement de la dlme; ce n'eil: point fur les preuves qu'il
faut juger de la validiré du décret; c'eil: fur l'expofé de
p plainte. Ici nul expofé de recélemenr. On expofe feulement que les accufés n'ont pas voulu permettre que leurs gerberons fuJfent rompus, qu'ils ont ré!illé avec menaces &
injures" tant au Fermier, qu'à l'Huiffier & aux Records; s'il
n'el!: pas permis de rompre les gerberons, il u'y a. poine
de crime dans le refus des accufés, La réliil:ance de ces derniers n'en qu'un aéle licite, vim vi repellere licet. La tenmrive du Fermier foutenue d'un Huiffier-, n'en qu'une voie
de, fait odieufe '1 pour laqueile cet Huiffier pouvoit être repOL
.
D'aillfeurs de tous les temps les contraventions· à la dlme'
ont été portées au Lieutenant-Civil, quand même les parties font venues par .voie d'information. Tel ell: l'ufage de
tous les Sieges de la P·rovince, & notamment celui de la'
�DU
PALAIS
D,B
PROVENCE.
455
Sénéchaulfée d'Aix. Une délibération prife par le Tribunal,
enfuire d'une décifion folemnelle, donne au Lieutenant-Civil
par préciput les informations pour fait de c.onrravenrion
à la dîme. Les voies de fait, les rébellions furvenues filr
cerre contravention, ne peuvent être que des délits aceef·
foires, dont la connoiifanée appartient au Juge du délit principal.
La Communauté propofoit les mêmes exceptions.
On répondoit que la dîme efi une matiere privilégiée fur
laquelle nos Rois ont rendu plufieurs Loix. En 1755, François Prem.ier défendit aux décimables d'enlever ni déplacer
leurs fruits, que le droit de dîme ne fût payé, fous peine
de confifcation & d'amende arbitraire. En 1)48, Henri II.
renouvella cette difpolition. Autre Ordonnance de Charles
IX. en rs 6 ( , & Lettres-patentes en 1568. En 1571 , le même
Roi en attribua la connoiifance aux Parlemens. Le Parlement de Paris fe réferva, en enrégiltranr l'Edit', de renvoyer
aux Juges Royaux, ainli qu'il aviferoit. L'Ordonnance de
Blois, arr. 49, rendit aux Juges Royaux la connoiifance des
dîmes; & après avoir Harué fur la maniere de l'acqqitter,
elle prononce confifcation & amende contre les frauàateurs;
elle veut encore qu'ils foient punis extraordinairement cqmme
infraél:eurs des Ordonnances.
Delà la contravention à la dîme efi -un cas royal, puif':
qu'elle -doit être pourfuivie- extraordinairement par les Juges
Royaux. La même difpofition efi i'enouvellée par l'arr. 28
de l'Edit de Melun. Delà la connoiifance des dîmes, (oit
au civil; foit au criminel, efi attribuée aux Lieutenans des
Sénéchaux. Delà l'Arrêt rapporté par Boniface, tom. l , liv;
2. ~ tit. 12, chap. 4, qui confirma la procédure criminelle faite
par un Lieutenant contre celui qui avoit tranfporré fes gerbes
fans payer le _droit de dîme.
En vain dit-on que la contravention n'exil1:oit pas, puifqu'elle n'eH pas prouvée; le défaut de preuve n'eH pas une
rairon de caifation du décret de foit informé; c'efi un moyen
de jufiification & d'abfolution. La contravention à la dîme
eft un vol; le Fermier ,s'en -plaint contre le redevable: que
•
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Jou RNA L
le redevable fe défende, en difant que la contravention n'eCl
,pas prouvée, qu'elle el!: imaginaire, à la bonne heure; l'accufation porcée con·tre lui pourra être jugée dénuée de fondement, & même fauffe; mais elle ne fera pas nulle, parce
que le Fermier peut rechercher par la voie de l'information
les conrrevenans à la dîme. Indépendamment de toute voie
de fait, de tout procès-verbal de l'HuiŒer, le décret de foitinformé ferait donc bien venu du moment que l'on a dénoncé une contravention.
Selon l'ufage général de cette Province, après que le bled
eCl coupé par les moiffonneurs, les gerbes laiffées fur la
place font enfuite ramaffées en divers tas, que l'on appelle
gerherons; en formant lès gerberons, on compte les gerbes,
& on jette à côté celles du décimateur, qui peuvent être
confrontées avec le gerberon, pour favoir s'il n'y a pas de·
fraude; le propriétaire qui veille à fes gerberons, peut &.
doit veiller en même temps à la ponion du décimaIeur. Le
voifinage de la portion du décimateur & du gerberon, affure
au décimateur la cotité qui lui el!: due, & le défend des vols;
le décimable qui n'indiquerait à côté de fon gerberon qu'une
quantité évidemment modique de gerbes, ne ferait pas favorablement re~u à prétendre qu'il a exaélement payé, &
qu'apparemment quelqu'un a volé le décimateur; on lui di~
roit qu'ayant l'œil ouvert fur fes gerberons, il devoit J'avoir
auŒ fur la portion du décimateur. Quand les Ordonnances
de Blois & de Melun, renouvellant la difpofition des Loix
plus -anciennes, ont défendu d'enlever ni déplacer les fruits
que les décimateurs n'euffent été avertis, elles ont condamné
ce prétexte· abufif de prétendus vols.,
,
Or, pourquoi les Loix veulent-elles que l'on ne puiffe em':
porter les fruirs, que le décimateur n'ait été averti? C'eil:
pour qu'il puiffe vérifier fi fan droit ell: rempli. S'il eil: en
demeure, ce n'eil: que trois jours après l'aveniffement, fe!on Lacombe dans fa Jurifprudenc;e canonique, va. dîml!s,
pag. '177, qll'il eil: permis d'enlever les fruits. Une pécla:'
ration de 1) 6 [ & des Lettres-patentes ~e 1) 68 , rappor-:
~ées par F omanou , pag. SI 6, &. )I 7, autorifent le décima-:teur
•
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DU
PALAIS
DE
PROVENCIl.
4~7
[eur à nombrer, cueillir & percevoir ce qui eil en contravention. Le prétexte de vol n'efl: donc pas toujours recevable; il ne peut commencer à l'êt(e que quand le décimateur eH en demeure, & quand le décimable détruifant fes
gerberons, va former fan gerbier.
La Communauté efl: non recevable dans fan intervention;
elle ne peur intervenir que pour foutenir qu'on ne doit pas
vérifier. Or, ce n'el!: pas feulement du refus de vérifier, accompagné de rébellion & de violence, que l'on s'efl: plaint;
on a accufé de contravention. La Communauté ne peut pas
nier que l'on puiffe pOllrfuivre extraordinairement les conrrevenans; elle efl: donc inutilement venue au procès pOUl"
{oueenir une quefiion qui eu~ mieux été trairée au fonds,
pour favoir jufqu'à quel degré les appellans font coupables;
il s'agit maintenant de juger uniquement s'ils ont pu êere
accufés: la Comnlunauré n'a point d'intérêr réel à cet incident; elle en a encore moins à l'autre moyen de caffatlOn.
L'Edit de r ~ ~ 4 fur l'attribution de la J ùrifdiél:ion des Lieutenans-Criminels (cet Edit recueilli pat Neron, tom. l ,
pag. 347 ) leur donne privativemenr, par l'art. 3, la connoif·
fance pardeffils tous autres des cas criminels attribués cidevant aux Baillifs par les Ordonnances; le Lieutenant-:Civil
n'a donc pas pu retenir en force de l'attribu.rion qui lui avoit
été faiee des dîmes, le cas criminel en réfulcam. L'art. 6
leur attribue l'exécution de tous juge mens & Arrêts donnés
en matiere criminelle, fans que les Lieurenans-Civils puiffent en prendre connoi{fance. L'art. 9 a même quelq,ue trait
à leur Jurifdiél:ion fur la dîme. En cas de délit, il les charge
de faire commandement à- toures perfonne~ oifives de s'employer à lamoilfon, & de leur défendre de glaner, que les
gens d'Eglife n'aient enlevé leur dîme; en cas de contraventian, il les c.harg,e de les punir. L'arr. n
plus décifif. il
v.eut que les Lieutenans- Criminels connoiffent & aient la
Jurifrliél:ion de tollS crimes, délits & olfenfès dont les Baillifs, Sénéchaux & Lieutenans-Civils avaient accoutumé deconnaître, privarivement aux Baillifs, Sénéchaux & Liel.lteAnnle.s l775 & l77b..
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nans-Civils. On n'e peut donc révoquer en doute la compé..;
tenee du Lieutenant-Criminel; l'ufage dont on excipe ne
peut point prévaloir fur. une Loi auffi précife que l'Edit de
'1'i 'i 4-, parce qu'on n'eLl: pas tenu de favoir que les membres de la 5énéchau/fée, par ufage ou par contravention, fe
font écartés de cette Loi; ils n'ont pas pu Hatuer fur la
compétence, & faire courir aux parties le danger d'une caffation par une dérogation obfcure à une Loi publique. Que
, leur ufage, que leurs conventions les lie entr'eux, à la bonne
heure; mais elles ne peuvent avoir d'effet contre le tiers qui
a fuivi la Loi, feule regle qu'il dôt connoître.
D'autre part; point d.'oppreffion: plainte grave fufceptihle
d'information, foit par fon titre, foit par fes circonrl:ances;
la queHion, fi elle eH prouvée, eft étrangere àu procès actuel; on difcutera au fonds fi la ré(jftance ne la prouve pas,
fi l'affeélarion de placer la dîme au bord des grands chetnins & loin des gerberons, n'eft pas puni/fable; il s'agit
lèulement de favoir maintenant s'il y a eu lieu à informer.
Le mot feul, contravention il la dîme, le décide. Le décret
de foit-informé étant julte, ceux d'ajournement & de prife
de corps ne font point exceffifs, vu la ré1;Jellion & les violences exercées contre l'Huiffier.
MI'. l'Avocat-Général de Cali/fane examina s'il y avoit
contravention à la dîme, oppreffion, incompétence; s'il fallait conféquemment ca/fer le décret de foit-informé & tout
ce qui s'en étoit enfuivi, ou réformer feulement les décrets
laxés comme trop rigoureux.
La dîme, qui n'étoit point en ufage dans les premiers-·
iiec1es, dut fa nai/fance aux oblations des fideles dont la libéralité compofoit alors le tréfor de l'~glire. Cette charité
fe refroidit, & les 55. Peres exhorterent les fideles à payer
la dîme; elle étoit encore offerte librement; bientôt on en'
fit une Loi; on y joignit la menace des foudres, de l'excommunication, & les Loix de cette matiere parvinrent au
degré de févérité où on les voit aujourd'hui. Il' n'y eut point
de regle fixe pour le paiement; .Ia coti té en fut différente
par-tout, ainli que la forme de la percevoir; perçue tantôt
�DU
PAL AIS
DE
PRO V Il Nell.
459
en deniers, tantôt' en fruirs, tantôt en grains, tantôt en
gerbes; l'ufage local de chaque Paroiffe ell: celui qui doit
faire preuve, & qui ne peut être conreflé.
Les Ordonnances de Blois & de Melun établiffent des
regles au fujet de la perception des dîmes; mais il faut les
appliquer aux différentes Loix locales. A Gemenos, par
exemple, la dîme efl querable, fe paye au l'i, & fe laiffe
en fajfant le gerbier ou gerberon; rien de contraire dans
cet ufage aux différentes Ordonnances qu'on vient de
cirer, qui déffendent aux détenteurs & poffeifeurs de mettre
en gerbe ou emporter leurs fruits, fans avoir préalablement
payé ou laiŒé fur le champ le droit de dîme;' ce qui emporte, comme l'on voit, une alternative de payer la dîme
avant que de mettre en gerbe, ou avant que d'enlever les
fruits. Il fuffit dOllc qu'elle fe paye avant ou après que le
gerbier ell: fait; l'une & l'aurre maniere efl également conforme à l'Ordonnance. Si l'on ne paye pas la quotiré, ou
que l'on ne paye point du raut, alors il y a fraude; les décimareurs peuvent la conflarer au momellt où le gerbier fe
fait; mais cet inflant paΎ, y fonr-i1s encore recevables?'
Nos Souverains voulant concourir avec la Cour de Rome,.
établirent aüffi des Loix particulieres pour les contrevenans
à la dîme; ce n'érait d'abord qu'un d~lit civil, mais leurzele eccléfia!l:ique les porta à croire qu'i'r fallait punir; ils
voulurent en conféquence que l'illlhuélion criminelle eûc
lieu, & qu'il fût procedé extraordinairement conrre les con.trevenants. Ces Loix furent portées dans des temps qui fe'
rapprochaient encore des fiecles d'ignorance; mais à mefure·
que les lettres & les arts ont pris le deŒus, à mefure que
.des principes de religion ont pris la place des pratiques:
fUIJerfl:irieufes, nous avons vu l'ufage faire ramber ces Loix.
en défuérude. Il eil: certain; quant à préfent, qu'il n'exiil:e·
que la Provence dans rout le Royaume où l'on prenne b·
voie ériminelle pour les contraventions à la dîme. Mais cette:
rigueur dans l'in!l:ruélion ne doit pas autori[er à créer aveugélmenr des contravenrions; Ct les peines font plus rigou-
Mmm2.
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r~ulès,
10
U RNA L
& l'inll:ruél:ion plus févere, elles ne doiv.ent auffi être
employées que quand il y il réellement fraude.
Le Fermier de la dime de Gemenos ne fe plaint pas d'une
fraude vérifiée; il s'ell: rendu dans les propriétés de plu lieurs
particuliers; il a trouvé la portion du décimateur feparée du
reHe des gerberons; il a jugé, en comparant cerce porrion
avec les gerberons des décimables, que la portion n'écoit
pas fixée avec exaél:itude; il a voulu défaire les gerberons,
pour vérifier s'il exil!:oit une contravention; les particuliers
qui s'y trouvaient, l'ont empêché de procéder à cette vérification, parce qu'ils ont cru qu'il n'en avait pas le droit;
delà il a cru la contravention encourue & formelle, & a
fait prendre quatre procédures criminelles contre les prétendus contrevenans.
L'habitant, en faifant fes gerbiers ou gerberons, a féparé
la portion du décimateur & l'a lailfée fur la place; le Fermier ou fes prépofés pouvaient dans cet inll:ant fe tranfporter dans la propriété, pour voir li on leur donnait ce qui
écoit dû; il ne l'a pas fait, il ne s'el!: préfencé que quand le
gerberon écoit fini; il devait fe contenter de ce qui lui
écoit acquis, parce qu'il ne pouvait plus conl!:ater fi fan
droit avait été fraudé; il a voulu défaire les gerberons du
décimable, & faire des perquilitions rigoureufes. Il femble
<jue cette prétenrion ,contrarie les véritables principes; les
gerberons ne font point lailfés fur le champ pour fervir de
pieces de comparaifon au décimateur qui voudra vérifier fi
le paiement de fan droit efr complet; ils font lailfés pour
la plus grande commodité du propriétaire, & non pour l'intérêt du décimateur. En effet, la vérification que le Fermier
voudrait s'arroger ferait-elle toujours fûre, & ne pourrait-elle
pas quelque-fois être inutile & inconcluante? Mille caufes
peuvent fe rencontrer, qui mettraient en difproporrion ce 'que
le décimable perçoit, ce qui fe trouve à fan gerberon, avec
ce que le décimareur recueille ôu doit recueillir pour la
portion qui lui compete; il n'efr pas julle que le décimable
{ouffre de ',ette poffibilité; les reifources des malfaiteurs
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PAt.AtS
DI!
PaOVBNCI!.
46t
trompent plus d'une fois la furveillance des proprietaires;
Je Fermier peut tromper, ou être trompé lui-même; le monceau deCliné au paiement de la dîme, peut n'être pas plus
cefpeélé qt:e le gerberon du maître; une réparrition jurl:e &
légitime peut donc celfer de l'être par le fait. Comment pouvoir utilement vérifier alors fi le décimateur eCl fruClré par
la faute du décimable, ou par tout autre fait? Le feul moment poffible pour vérifier, eCl celui où l'on fépare la portion deClinée à la dîme, de celle qui reCle au cultivateur;
cet inClant une fois palfé, une vérification tardive ne tendroit à rien moins qu'à compromettre les citoyens les plus
honnêtes & les mieux intentionnés; ce ne ferait qu'un moyen
de vexer & d'opprimer le peuple; moyen dont le foupçon
feul doit paroître odieux au MiniClre de l'Eglife, fait .pour
l'inClruire & le fecourir; il doit préfumer que le cultivateur
qui e!!: obligé de lui facrifier une partie de fes travaux, fuit
les loix de fa confcience; & s'il peut en douter, il doit la
lui fncrifier comme une aumône.
Mais, dit-on, le dicimateur ne peut pas ft trouver en même
temps dans toutes les propriétés, pour vérifier Ji on ne le trompe
pas. Si c'eCl pour l'acquittement de la confcience des particuliers, & pour éviter jufqu'à la moindre trace de fraude,
que le décimateur cherche à mettre tant de perfécutions pOUl"
·la perception de la dîme, il ·ne dépend que de lui d'avoir
un nombre fuffifant de Prépofés pour filrveiller cette perception; fi ce n'e!!: que poyr fan intérêt parriqllier, c'e!!: à
lui à y veiller, & s'il rencontre des difficultés & des embarras, il doit [avoir fe dire que ce font des inconvéniens
attachés à la nature de fan droit; chaqye efpece de bien a
fan utilité comme fes dangers; il faut Cavoi r fe réfigner
aUx inconvéniens, quand on perçoit le bénéfice. Ces prinCipes fans doute font gravés dans le cœur des décimateurs.
Pourquoi les Fermiers, par une févérité m",l entendue & des
vexations réitérées, c/lercheroient-ils à les rendre odieux?
Le vœu de toutes les Loix e!!: de ne pas aggr<lvc;r la condition du débiteur; en matiere de dîme fur-tout, on ne peut
impofer arbitrairement des fugge!tiops nOllvelles ; com!pe le~
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EccléfiaO:iques ne peuvent demander. des d1mes infolites ,
ils ne peuvent auffi introduire des formes inafitées. Le pouvoir que voudroient s'arroger le~, Fermiers de la dîme de
Gemenos, feroit évidemment préjudiciable à la liberté publiqne; il. feroit méme contr'àire à la. reneur des Ord~n
nances donc on a, rendu compte. L'ordre des chofes dans
la. percéptio n des droits, tels que la dîme, exige une préfortlption de bonne' foi refpettive; fi l'on détruit toU[ germe
de confiance entre celui qui ex'ge & celui qui doit, c'dl:
expôfer la fociété aux plus 'grands troubles ,li & ouvrir la
porte à une' foule' de. vexations. Il faut penfer, r comme le
dit un· grand homme, que pour le bien commun, il faut en
plus d'ul1e occafion 'fûppofer les hommes meilleurs qu'ils ne
fone.
On ne peut induire des Déclarations de 1,6 l & 1,68,
que le décilmateur. p'duv0il .nomhrer, cueillir & recevoir, &
qu~il luil'étdit permis de 'rompre les gerbiers pour vérifier
le nombre des gerbes. Henris au contrai're rapporte un Arrêt
du Parlement de Paris du 3 Juin 16,0, qui fit défenres aux
décimateurs & à Ces Fermiers de rompre ou faire rompre
les g~rbiers, à, peine de tous dépens, dommages & intérêts, Cauf à eux de Ce pourvoir par aaion, s'ils prérendent
qu'on .leur· ait fait frJude au paiement de la dîme. Cet Auteur ajoute: il ·efl vrai qu'il était rude de permettre li des
Fermiers de /ompre les gerhiers; car encore Cjue ce fût fous
une peine, il fouvoit y a lIoir de la vexation, &'.les Fermiers
pouvaient en ahufèr. En 1714, & plus récemment encore,
il Y eut des' conte Hat ions. entre Lt Communauté d'Allauch
& le Chapitre de La 'Major de la ville de Matfeille. Le Chapitre vouloit faire des perquifitions dans les cuves & dans
les maifons, établir des Prépofés auxporres des villes; il
futdébouré, parce que tout ce 'qui teff'ent la gên.e, doit être
profcrit
.matiere de d·îme.
'
,
, L'oppofÎt:ion que formerenr les habitans li ce que l'on
rompît lès' gerbérons,:,ne peut pas être regardé comme une
contravention à la dîme; il efi impoffible de regarder comme
uh indice le jugement '& :le coup-d'œil des valets des Fer~
·en
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.
463
miers; qui déciderent que la portion n'éroit pas faite a-::ec
exaél:imde, parce que le coup-d'œil peut trompt:r aifémem,
& que s'il eût fait preuve, les Fermiers n'eulfent pas cherché à faire rompre les gerberons. Il ne faut pas dire' que
ce défaut de vérification efi un moyen foncier qui ne peut
rien opérer pour la calfation de la procédure, puifque citte
oppolition à la vérification des gerberons ef1: la. feule' accufation de coneraveneion à la dîme que les Fermiers ont reproché aux habitans de Gemenos.
En vain dirait-on qu'il y a eu des injures & des menaces; le Fermier dans ce moment n'éroit qu'un particulier qui
commettait une enereprife vis-à-vis d'un habitam ; li ce dernier
ne s'y fllt oppofé, fes gerberons -éroient dérruirs; il pouvait donc repoutrer la force par la force. L'Huiffier au l'oit
pu dretrer procès-verbal de la rébellion, li lorfqu'on f:Iifoit
Je gerberon, le décimable n'eût pas donné au décimateur la
ponion qui lui revenoit, & li on s'érait oppofé à la vérification ; mais ici paine de coneraveocion, point de mandement de jufiice qui lui permît de rompre les gerbérons;'
Je décimateur ne pouvoit donc pas, avec Ja limple affilhnce
d'un Huiffier, fe permettre ce que le droit lui refufoir, ni
àcquérir lui-même le droit de rompre les gerberons. C'était
une voie de fait que l'on commettait vis-à-vis de l'habitant en voulant les compré; il lui était donc permis de
s'y 'oppofer, & ce n'était-là qu'une oppolirion de droit &
particuliere, & non, une voie de fait & une rébellion. C'était
un droit nouveau que le Fermier de la dîme voulait s'arroger en vérifiant les gerberons. La Communauté en donc
recevable à conrener cette innovation, comme un atrentat
à la liberté & à la tranquillité publique, une voie de fait qui '
ineéretre l'univerfaliré.
~a procédure efl oppreflive, a-t-on dit; lJuatre plaintes,
quatre informations, lJuatre accédits difJérens, lJuatre décrets
du m8me jour, tandis 'lue ce n'étoit 'lue le même délit commis par difJérens particuliers_, 1& qui confèlJuemment pouvoit
Je prouver dans la même information. On ne peut pas fe diffunuler ( obferva Mr. l'Avocat-Général) que l'on n'ait cher-;
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Jou RNA L
ché à multiplier les frais dans cette procédure, portanr;
pour ainfi dire, flfr le même délit; cependant s'il n'y avoir
que 'ce moyen, il n'y auroit pas lieu â cairer la procidure;
d'ailleurs fi la procédure ell: cafTée, ce feront les Fermiers
qui, fupporreront eux-mêmes. le réfultat de leur oppreffion.
Mr. l'Avocat-Général pafTa enfuite au moyen de compétence. Elt-ce, di<t-il, le Lieutenant-Civil, ou le Lieu-renantCrimi.nel, qui .doit connoître des contraventions à Id dîme t
Quoique ce point fût, pour ainfi dire, de furérogation, de
difcuffion dans cette caure, car dès qu'on avoit établi qu'il
ne pouvoit exilter de contravention à la dîme, il n'avoit pu
y avoir d'informàtion, & conféquemmenr d'incompétence,
cepen~ant il obferva que la dîme elt une matiere privilégiée, & qui a toujours' été régie par des attributions parriculieres.. Ainfi il ne faut pas raironner fur ce fait d'après
les princ;ipes généraux.. Sans doute l'Edi·t de création des Offices 'de Lieurenans-Ctiminels leur atrribue la connoifTance·
de tous les cas criminels arrribu.és ci· devant aux Baillifs &
Sénéchaux; mais cerre généralité n'inglobe pas les matietes
priv.ilégiées, & conféquemment les dîmes•.
Le Légiflateur en 1) 68 , dans (on Ordonnance de Boulogne 1 n.e veut·, pour la contravemion à la dîme ,. que des
peines purement ci:vile.s, & en arrribue la connoifTance aux
Juges Royau.x. Dans J'Ordonnance de 1 )71, art. 7, la con-.
noifTance en
donnée aux différens Parlemens qui ne voulurent point enrégi!l:rer cerre Loi, que fous la claufe ,[au!
à la Cour le· re/Ivoi des çaufes pardevant les Juges Royaux,
ainfi Cfu'elle verra être II faire.
L'Ordonnance de Blois ordonna· la pourfuite' extraordi..:.
JiJJlire comte les contre.veoans à la dîme, & en renvoya la
connoifTdnce aux Juges Royaux. L'arr. 29 de J'Edit de Melun
COllfimla cene diCpofition. Enfin la. derniere attribution pré-·
cife fe trouve dans l'Arrêt du Confeil du 1 Oél:obre 166),
où il elt dit: les Lieutenans de Sinéchal Civils connottront
fihamn dans leur Siege & rejJort en premiere injlance, des.
caufes de dîme de la Province, lettres royaux, bénéfices ,. (amplain.tes en f!/atiere bénéJiciale ,. &c..
Foinç
en
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PAL AIS
D Il
PRO V Il Nell;
46')
Point de dill:inaion entre la contravention & la police;
tout ce qui précede & ce qui accompagne, prouve que ces
difpolitions ne peuvent fe rapporter qu'à ce Lieutenant. Il
ne paroît aucun titre uprès en faveur du Lieutenant-Criminel.
Il ell: certain que le Lieutenant-Général, a, exclulivement
à tout 'autre, le droit de juger toutes les contell:ations qui
s'élevent au fujet de la cotité de la dîme, du taux, de la forme
de paiement, des biens qui doivent y être fournis ou en être
exempts; c'ell de fon autorité que la dîme fe perçoit, c'ell
à lui auquel on doit recourir pour les contraintes & les inhibitions & défenfes de contrevenir. Toutes ces attributions,
qui ne peuvent être conteHées, feroient ahfolument inutiles
& illufoires, s'il ne pouvoit pas connoître des contraventions. Toute contravention eH portée devant le Juge de
l'dutorité duquel fe perçoit le droit auquel on a contrevenu;
celui qui n'aurait que le droit d'ordonner des injonaions
générales, fans pouvoir connoître du refus ou de la COntravention, n'auroit qu'une autorité dérifoire & une Jurifdiaion
inutile.
Les anciennes Ordonnances, pour favorifer les Eccléliaftiques, ont permis de pourfuivre les contraventions et) matiere de dîme par aaion criminelle; le Parlement de Pro~
vence feul dans le Royaume a confervé cette difpolition.
Par-tout on a reconnu que la dîme étoit un droit pur &
, fimple comme les autres; que fon principe avoit été volontaire, & qu'il étoie bien dur fans doute que fon exécution
fût plus cruelle que celle de tous les autres droits, qui ne doivent le jour qu'à des impolitions fouvent néce1Taires, mais
toujours fâcheufes; on a fenti que le redevable qui voyoit
déja la dîme prife fur la femence, la voyoit avec regret prife
fur fa fubliHance & fa recolte, & qu'il [,!loit conféquem_
ment lui adoucir le joug d'un droit qu'il voyoit exercer prefque fans h~manité. Tels ont été les motifs qui ont éteint,
prefque dans tout le Royaume, ces Ordonnances qui permettent des pourfuites extraordinaires pour le fait de
dîme.
Annies 1775 & 1776.
N nn
�~6
JOURNAL
Mais cette forme, permiîe pour pourîuivre les conrt'evenans, a-t-elle pu changer quelque choîe à la nature de l'attribution ou à la compétence du Juge, qui é.tant autarifé à
, connaître des contraventions, doit 'les inHruire îous quelque
forme que ce îoit. S'il en était autrement & que l'on. pût
fe pourvoir pardevant le Lieutenant-Criminel, lorfqu'on viendrait par information, l'attribution faite au Lieutenant-Civil
. tomberait enriérement; le Lieutenant-Criminel connaîtrait
de toutes les conteilations qui s'éleveroient fur cette matiere; il déciderait du -taux ou de la forme de la perceptian, il alferviroit les biens à la dîme, ou les en affranchirait.
Enfin il eil prouvé par un Aél:e de Notoriété des Officiers de
la Sénéchaulfée d'Arles, du I I Mai 1776, que les contraventions en mariere de dîme font portées pardevant le Lieutenant-Civil, fait qu'on vienne par aél:ion ordinaire ou par
information, même lorîque les contraventions font accompagnées de menaces, réfiilances & voies de fait envers les
colleél:eurs de la dîme. L'uîage de la Sénéchaulfée d'Aix
n'eil pas contené ; il n'eH pas muet; il eil autorifé par les
délibérations de la Sénéchaulfée des 4 & 18 Novembre
I7 17, qui, après un avis arbitral fur des contelbtions de
la dîme, décide & érablit que c'eH pardevant le Lieutenant-GénéraI-Civil que l'on fe pourvoit par information &
aél:ion criminelle fur le recélement & les contraventions à
la dîme. Cet u·îage conltant & av-oué elt confirmé par un
Arrêt de la Cour du 5 Septembre 1715, re-ndu en faveur
de l'Econome du Chapitre St. Sauveur- de Ji ville d'Aix,
qui s'était pourvu en information pardevant le LieutenantGénéral-Civil, contre des particuliers, pour même contravention.
.
.
Ml'. l'Avocat-Général ne s'arrêta pas long temps fur les
décrets de prife d~ corps ou d'ajournement perîonnels, trop
forts, fait que l'on confidérât la nature du délit, la force
des charges, ou la qualité des perfonnes; la nature du délit,
il n'y avait point de fraude prouvée. Une contravention alléguée, un délit imaginaire, était tout ce qui exiltoit; l'in- .
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467
PRO V Il Nell.
formation ne confiatait rien de plus. Des menaces & des
injures avoient fuivi de la part des habitans la menace de
rompre les gerberons, faite de la part du Fermier; c'était
la menace d'une voie de fait qui avait été répondue par
une autre. Rien par conféquent de fi criminel & qui pût jamais autorifer des décrets de prife de corps contre des domiciliés, & entr'autres contre un premier Confu!.
Dès qu'il n'y avait point de délit, il ne pouvait donc y
avoir de faifie, parce qu'il n'y avait point de caufe. Les décrets du Lieutenant qui l'ont ordonnée, croulent donc avec
toute la procédure.
Mr. l'Avocat-Général conclut à ce que faifant droit à l'appel
émis par les accufés, enfemble à la requête d'interventio fi
de la Communauté, l'appellation & ce dont étoit appel
fufrent mis au néant; & par nouveau jugement, les décrets de foit-informé & roqt ce qui s'en était enfuivi fufrent
déclares nuls, incompétens & oppreŒfs.
Arrêt du 14 Mai 1776, prononcé par Mr. le Préfident
de Regufre, qui cafre les décrets de foit-informé & ceux
de prife de corps comme nuls, incompétens & oppref~
fifs; & faifant droit à la requête des décrétés, cafre les
faifies, condamne les Fermiers aux dommages & intérêts,
modérés à 100 liv, pour chacun, & aux dépens. Plaidant Mes.
Gaffie~, Portalis & Simeon.
ARRÊT
XLI I.
fi défaut d'aae des époufailles, peut-on prouver la légitimité
de l'enfant par l'aae baptifl~re, par d'aL/tres équivalens,
& par la poffiffion?
N 1693, Etienne Gimet & Elifabeth Vernet vivoient
enfemble à Avignon en qualité d'époux; ils eurent plufieurs en fans qui y moururent, & furent enfevelis fous le
nom commun de Gimet; Jean-Eti~ne fut le feul qui leur
furvécut. Elifabeth Vernet mourut à Saint-Andiol, où ELÏenne
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2,
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'1 0 U RNA L
Gimet était retourné; fan aél:e mortuaire lui donne le titre
de femme d'Etienne Gimet. Celui-ci fe remaria peu de mois
après avec Marie Bremond. En 17'2-3, Jean-Etienne Gimet,
âgé de vingt-iix ans, tint à fan pere, comme s'il eût été
majeur, des aél:es de refpeél:, & épo\,fa, enfuite de fan conlentement forcé, Jeanne Mijoul; quelque temps après,
Etienne Gimet fit fan te!l:ament, dans lequel il déclara que
fan fils ét'oit bâtard, qu'il s'éroit conduit comme un bâtard, en
fe mariant à fa fantaiÛe; il ne lui laiifa à ce titre que cinq fols
fur fa fucceffion; il atte!l:e même que ce fils dénaturé s'éroit
rendu indigne par les excès auxquels il s'éroit porté, d'exerter des droirs qui d'ailleurs ne lui appartenaient pas. En
l'année 1747, qui fut celle de fan décès, Etienne Gimet
fit un autre ce!l:ament, dans lequel il légua cinq fols à fon
fils à citre de légitime; il l'appella fon fils ainé du premier lit,
excufa ,même la modicité du legs qu'il lui faifoit, fur des prétendues donations parriculieres, & lui accorda encore J'honneur précieux & quelquefois utile de J'inHitution particuliere; il fit des legs à fes enfans du fecond lit, & inHicua
Marie Bremond fa feconde femme fan héritiere univerfelle.
En 1755, Jean-Etienne Gimet attaqua Marie Bremond en
paiement de ce qui lui était dû fur la fucceffion de fon
pere, & demanda que l'inHitution contenue en faveur de
ladite Bremond ferait réduite, à la valeur de la légitime aframe & compétente à fon pere fur les biens dudit Etienne Gimet, & le rell:ant de l'héritage de ce dernier à lui adlugé en la
qualité d'héritier de fon pere, avec reHitution des fruits tels
que de droit. Cette demande reHa long temps impourfuivie;
ce ne fut qu'en 1775, après la mort de Marie Bremond, qu'elle
fut reprife par Jacques Gimet, fils de Jean-Etienne, qui l'évoqua en qualité de pauvre pardevanr la Cour. Pierre Gimet,
héritier de Marie Bremond fa mere ,lui come!l:a fon état de
fils d'Etienne Gimet, & ce fut fur cette qualité que route la
comeHation roula.
On difoit Eour Jacques Gimet, que lui & fon pere avoient
joui depuis plus de quatre-vingt ans de leur état; que la
poffeffion commune qu'on leur difputoit, daroit de la naif•
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PRO VEN C E:
-469
rance méme de Jean-Etienne Gimet, & étoit fondée fur le
tit~e confritutif de la filiation. On vouloit troubler les cendres de Fauteur commun de la famille, on l'animoit encore
des mêmes pa/Iions qui l'agiterent, qui l'emporrerent peutêtre, mais qu'il abjura; on lui prêtoit ces fentimens dénaturés que fon cœur conçut un nlOmenr, mais dont il fe repentit enfuite, & qu'il expie peur-être encore, en donnant
à ce qui ne fut chez lui que l'erreur ou le crime d'un moment, une interprétation & une exécution qui la renouvellent; on l'expofoit à en répondre peut-être encore, puifque
les précautions qu'il a prifes pour les prévenir ne fuffifent
pas; on évoquoit du féjour des ombres ce vieillard qui fut
inju{le & cruel; & parce qu'il ofa, dans l'excès de fa colere,
défavouer fon fils, on vouloit que cet anathême funefte qu'il
retraéla, frappât cependant encore aujourd'hui fur la tête de
fon malheureux petit-fils.
Les titres de Jacques Gimet font inattaquables & invincibles par eux-mêmes; fa poffe/Iion ·eft un titre plus refpeélable encore & plus facré; fes titres font de tous les
genres, mais tous fondés filr la Loi; titres publics de la
part de la fociété; titres publics de la part de fa fam ille:
titres publics qui l'uniffent à la fociété, qui mettent, pour
ainfi dire, fon état fous fa foi & fous fa garde; tels [ont
les aéles de baptême & les extraits' mortuaires qu'il a pro-duit: titres domefiiques; tels font les deux tefiamens de
fon aïeul & le contrat de mariage de [on pere.· Les aéles
de baptême [ont préfentés par la· Loi & par le Légiflateur
lui-même à tous les citoyens, comme les preuves de leur
état les plus certaines & les plus inébranlables. La religion
s'en eft rendue la dépofitaire au nom de l'Etat. Ces aéles
dépofent donc à la fois· en faveur des chrétiens & des citoyens. De tous temps les regifires publics ont été regardés comme les plus [ûrs garans de l'état & du fort des
citoyens; c'efi une invention de la politique que l'Egli[e. a
adopté, & qui mérite à ce double titre plus de refpeél encore
IX plus de confiance.
Touces les précautions que le.LégiOateur a priees pou~
�·
476
'J
0
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en conltater la légalité & la fidélité, pour écarter ou pour
.prévenir tous les foupçons, tous les reproches qu'on pourroit leur oppofer, annoncent qu'il les a regardés comme
un des témoignages les plus importans & les plus décififs
que les citoyens puifent citer en leur faveur; c'eH auffi dans
ce fens qu'on a entendu {.1 loi conforme aux loix romaines,
qui voulaient que les regiltres des cenfeurs, profejfzo cenJualis, & les regifires de la naiffance, fijfent preuve de la
filiation, natalia ; c'efi l'effet que lui ont attribué l'autorité
des Arrêts, les Commentateurs & les lurifconfulres. L'immortel d'Agueifeau 1'a dit avec nobleife, & l'éloquent Cochin
âvec fentiment. Rien ne doit être plus facré que cet aél:e
augufie & folemnel dans lequel un pere dépofe & fanél:ifie
.la joie que lui infpire la naiffance d'un nouveau fils, gage
précie-ux de la bénédiél:ion célefie & de la tendreife conjugale; foupçonner fa reconnoiffance & fes tranfporrs, accufer -ou rejerrer le témoignage qu'il a rendu dans ces
premiers .momens d'ivreffe, de vérité, de piété, c'e!l être
à la fois 'injufie envers le pere, & barbare envers le fils;
,c'eH, en écoutant trop quelques doures fpécieux, quelques
foupçons légers, fe précipiter dans l'incertitude, dans la
confu!bn les plus affreufes.
Ici le témoignage de ceux qui ont affifié à cette cérémanie, celui du Curé, mini!lre commun dans cette fonction importance, de la religion & de l'Etat, efi fix fois
répécé, fix fois uniforme; la mere de ces fix enfans meurt
dans une autre Pai-oiffe ,& on lui rend à fa mort la même
jufiice qu'on lui avait rendu pendant ·fa vie. Si ·tous ces
titres lient, pour ainfi dire, la fociété à 1'état de Jacques
.Gimet, il en efi d'autres qui lui attachent fa famille &
fes Adve(faires eux-mêmes. Tel efi cet aél:e odie-ux où le
pere défavoue & déshérite cependant Con fils, parce qu'il
n'oCe compter fur ce défaveu que la nature & la confciencè
contrediCent a\l fond de fon ame, & contre lequel 'les
preuves -les plus Colemnelles & les plus publiques réclameront; c~ Cecond ceHament où rendu à lui-même, il répare fon crime fans réparer cependant fon injufiice; en fil!
r
�47I
le contrat de mariage du fils, qui rappelloit la rélillance
& le confentemenc, ou, fi l'on veut, la colere & !'anathême fùnelle du p'ere. Tous ces titres dépofent en faveur
de Jacques Gimet & de fon pere une poffelIion de près
de quàtre-vingt années.
Jean-Etienne Gimet a été élevé par l'aïeul commun,
placé dans un état au deffus même de fa condition natuTelle ; il a été obligé d'invoquer le fecours de la Loi
contre la rigueur de la puiffance paternelle pour pouvoir
fe matier. Quoique toujours irrité d'un établiffement trop
prompt, & qui n'avait pli lui plaire; quoique fujet à être
emporté par le reffenciment & la colere, le pere mourant
n'ofe plus l'exclure de la famille & le méconnaître; il
excufe même la modicité du legs qu'il lui laiffe; il l'infiitue
fon héritier parriculier; il défavoue donc folemnellement
cette déclaration injurieufe, dénaturée, que les premiers
mouve mens du dépit, & peut-êtte les dangereufes impreffions d'une marâtre ambitieufe & jaloufe, lui avaient diél:ées
contre fon fils.
, Cette poffelIion ell Li certaine, qu'il ell difficile de trouver
même âes prétextes pour la conceller. AulIi le langage
des Loix & des Ordonnances ell-il uniforme, & la jurifprudence des Arrêts confiance fur cet article. C'efr aulIi
contre le fait même de la poffelIion, que les Adverfaires
ont dirigé leurs principaux efforts. Le teHament de 1723
( difent-ils) l'a interrompue, l'a détruite; comme Li l'emportement , l'injufrice ou le crime d'un pere pouvaient nuire à fes
enfans. Cet aél:e n'exifre plus; quand même il exilleroit encore, il ne pourrait ébranler la légitimité de Jean-Etienne
Gimet; l'auteur lui-même de l'aél:e en a prononcé l'illégalité
& la fraude; les Loix l'auroienc prononcée fans lui.
On répondait qu'en fait, Jacques Gimet ne pouvait produire l'aél:e d'époufailles d'Elifabeth Vernet, qui prouverait
fon union légitime avec l'aïeul commun; qu'en droit la
pteuve du mariage ne peut fe faire que par écrit, à moins
qu'on ne prouve d'abord ou qu'il n'y a poinc de regifires ;
;ou qu'ils ?nt été perdus ~ la légitimité ne peut fe prouve,,:
DU
PALAIS
Dl!
PROVENCE.
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.
Jou
RNA
r.
.
que par le mariage, que par l'aél:~ des époufaillès qu1 prouv!
le mariage. Toutes ces préfomptions que le droit romain
admetroit fi facilement, ne font plus dans l'efprit de nos
Loix & de notre régime aél:ue\. Depuis que èe lien, qui
n'étoit qu'un contrat civil, a été confacré par l'Eglife &
élevé à la dignité du Sacrenlent, il ne faut plus que dàns
aucun cas la concubine puiJfe être confondue avec l'époufe
légitime, & que le libertipage & la débauche puiJfem cacher leur honte. fous le voile augufle de la religion.
C'ert pour prévenir un pareil abus, abus funefte, même
[elon les vues d'une politique toute humaine, que toutes
les Loix du Royaume ont pris des précautions fi [ages &
fi [ével'es, qu'il ne doif jamais être permis de s'en écarter.
Nos Monarques ont adopté le fage Réglement des Peres
de Trente; Réglement diél:é par une prudence chrétienne_
& politique tout en[emLle. Henri III, Henri IV, Louis XIII,
Louis XIV & Louis XV ont tenu un langage uniforme [ur
cet article. Aucun des Auteurs qui ont écrit fur le mariage,
ne révoque en doute des principes établis par toutes les
Loix, & s'ils en eutrent élevé quelques-uns, la jurifpruden ce coniiante & éclairée de toutes les Cours du Royaume
les auroit diffipés.
Jacques Gimet, pour éluder la Loi, réclame en vain les
avantages, la force de la poJfeffioll.
,
Il eft de principe que quoique la poJfeffion des deUJ'
époux puiJfe couvrir quelques abus [implement relatifs, les
abus abrolus ne peuvent être effacés par aucun laps de
temps. Or quel abus plus ab[olu que le défaut de célébration , c'efl-à-dire, ·Ia fimulation d'un Sacrement, d'un lien
vénérable qui a'exifie pas. Si l'on admetroit la pofi'effion
dans ces fones de caufes , elle y rameneroit des principes
qui en Ollt été pour toujours bannis par nos Loix; c'efi-àdire, sue ),1 preuve du mariage dépendroit encore de [impies' pré(çJrl1prions, puifque le principal effet de la poJfef~
[ion dépepd de cette opinion qù'elle fait naître, que deux
per(olll<eS .qui ~ive,lt comme époux, le [ont réellement.
L'effet .le cette poJfeffion appliqué aux enfans efi plus favo...
.
..l'able.,
�nll·I'R~vllNCE.
• 473
:table . fans doute, & doit être plus puilfanr, parce que, ii.
les Loix politiques adoptant les précautions féveres des
Loix religieufes, ont défendu qu'on préfumât les mariages
non prouvés par titres & par êcrit, la préfomption en
faveur' de la légitimité, quand il y a polfeŒon publique,
continue·& de bonne foi de la part des enfans, découle
immédiatement des Loix naturelles elles-mêmes, & de
tout ce qu'il y a de plus forr & de plus favorable en matiere de raifonnemenr & de vraifemblance. Cependant on.
ne les difpenfe de l'obligation de rapporrer le titre qui,
en légitimant l'union des auteurs de leurs jours, annonc~
la légitimité de leur naiffance, que quand ils obJeél:ent
que le mariage a été célébré dans un pays étranger ou
-inconnu. Si l'enfant ignore abfolument où il faudroit aller
chercher cet aél:e, s'il eil probable par les Loix & les
coutumes connues du pays où le mariage a été célébré,
que cet aél:e n'exiLle point, il ne peut être tenu ni de· fon
ignorance involontaire, ni..d'une chofe phyfiquemenr & ab.{olument impoŒble.
Ainfi les Cours équitables dans leurs juge mens ne profcrivent pas les malheureux fruits d'un lien conrraélé entre héréti'Gues, parce qu'il malique quèlques formalités que leur religion '
·néglige, ou que la patrie qu'ils habitent ignore. Mais dans
ces cas même, ce qu'on a cru pouvoir acéorder de plus fa/ vorable, c'était d'accorder la preuve par témoins qu'on ne
pouvoit guere refufer à des circonilances fi fingulieres & fi
délicates. Dans tout autre cas, lorfqu'on ne peut ni pro'duire cet aéle ~uthenrique & décifif, ni en jûHifier la perre,
en vain allegue-t-on une polfeffioll prefque toujours illufoite
en droit, & fouvent démentie en fait, comme élle l'eil à
l'égard de Jacques Gimet.
Cette polfeŒon .prétendue eil en effet contredite & interrompue par le défaut d'expreŒon dans les aél:es mortuaires de ceux que leurs aéles de baptême appellent enfans légitimes d'Etienne Gimet & d'Elifabeth Vernet, par
· loute la conduite d'Etienne Gimel époux 'prétendu , par la
.promptitude avec laquelle il époufa. Marie Bremond deux inoj:~
· An,!~'s 1775 ~ 177.6\
00 0
ny
PALAIS
�4'74-
J'o II Il. NA r:
.après -la mort d'EliCabeth Yernet, par l'éducation qu'Etienn~
;Cimet a âonpée à ce préteAdu fruit d'un ,premier himen;
. par [on tefl:ament de 17'2.3, par le contrat de mariage de
ce fils lui-même, enfin par le [econd tefl:ament de 1747.
Que prouvent d'ailleurs ces aé1:es? La naiffance, la filia';
tion, fi l'en veut; ma·is la légitimité ne [e prouve que par
.le mariage, &. le mariage ne [e prouve que par écrit. Les
.aé1:es de baptême portent [ur un fait dépendant, mais di[tiné1: du mariage, & qui peut être même regardé comme lui
étant étranger, pui[qu'enfin· on peut naltre d~ telles perfonnés, fans que ces perfonnes [oient époux. Ces aé1:es', ne
,p.ro!lvent donc pas ,le mariage. Comme'après l'iLé1:e d'époufailles
il reHe à prouver qu.e l'oh efl: jffu des époux que cet aéte
uniç, il refl:e à prouver après l'aé1:e de baptême que les pa'.
rens' que cet aé1:e IJOUS donne" ont été époux.
, L'aé1:e d'époufailles, a-t-on dit, eH perfonnel aux époux, &
l'aé1:e de baptême aux enfans. Voudrait-on conclure delà
qu'il leur efl: [eulnéceffaire, & prétendrait-on démontrer
cette affertion par ce qu'on voit, dit-on, pratiquer par toU.s
les corps .&. dans fous les ordres? L.or[qu'un Citoyen .demande d'y être admis, on [e concente de l'aé1:e du baptême
fans doute: mais il falloit ajouter que ce n'ell qu'une fimpIe formalité, & "que c'ell: fur l'opinion publique & la renommée qu'on compte principalement en pareillesLoccafions.
Si quelques doutes s'élev.o~nt,· fi quelques membres plus
jaloux de l'honneur du corps où l'o.n veut .encrer, moncroient
des Coup~ons, la confiance s'altérerait alors, & .des preuves
fi légeres ne fufliroient pas; le premier titre qu'on deman.de.roit, feroit celui qui auroit légitimé l'union de ceux à
qui l'on prétendroiç appaw~njr.
Ml'. I:Avocat-Général d'Eymar de Montmeyan obferva,;
.que l'êr:re infortuné que l'Qn voit dès fan berceau trahi par
Ja nature & perCécuté par la fortune, e1l: incéreffanr, lorfqu'au
défaut des pareos q.ue 1'incertitude & .l'obfcur.ité de fon fort
,)ui dérobent,,~ çhèilefqudsJa nature 1e' tair, il cherche. parmi
les Juges que les p.réfdmpti.o'ns & les iac.err:itudesmême qu'il
leur préfente, atlàchént &:ioquierenc., autant des peres dan_~
,)
�DU
PALAIS_ DRI
paOVENCE.
47'5
!Je cœur defquels la. juJ1ice & l'humanité parlenr' en fa faveu~
Mais le Citoyen honnête à qui l'on veut arracher tout d'UR
coup fon nom & fon état, à qui l'an oppofe qu'il s'dl: fait
la plus douce & la plus crueUe illulion, en appellant du
tendre nom de pere, celui fous les yeux de qui il a été
élevé & qu'il a tenu mourant entre fes bras, que l'on rejeue du nombre des Citoyens, de celui. des enfans avoués
par les Loh & par leurs familles, &, pour ainli dire, de celui
des hommes, éprouvant ainli tout d'un coup le changement
le plus horrible & le plus inattendu, fait plus qu'émouvoir
par fa fituation; il trouble, il effraye par fon exemple.
Ici ce n'ell pas feulement un Citoyen' en polfeffiol1 de
fan état·, que l'on veut en dépouiller; un fils qui a toujours
joui des honneurs & des avantages de fils légitime, qu'on veut
arracher du fein de fa famille; c'efi un fils qu'on attaque fur
l'état de fon pere: accufatian d'autant plus odieufe, qu'il efi
plus difficile de la repoulfen & de la défendre;. qu'elle traine
de nouveau aux pieds des Tribunaux ".celui qlle' la marc a
foufirait à tout pouvoir humain, e'n le':inettanr fou's la main
de la juftice divine; qu'elle contrifie & trouQle la cendre
, d'un .homme à qui le tombeau devrait du-moins fervir d'afyle;
qu'elle lui fait éprouver les agitations & les inquiétudes de
la vie même, lmfqu'il a. celfé d'en jouir; & .que dans le cas
aél:uel elle appelle le pere en témoignage contre le fils, elle
évoque leurs ombres ennemies, & les arme l'une ,contre
l'autre.; comme fi dans ce fombre féjour. de la paix & de la
.vérité, leurs divifions, leurs déguifements, leurs querelles ne
'devoient pas avoir fini depuis. long-temps•
. 'Celui doncdn attaque l'état, qui le polfede & qui le défend,
peut faire remonter fa défenfe. du moment même où on J'àt·t·aque, à celui où il a commencé de jouir, & alors il fe défend par la polfeffion; s'il doit la faire parcir du moment
où il a commencé d'être & de remplir dans l'ordre de la
{ociété la place qu'on lui difpute, alors il fe défend. par les
titres confiitucifs de fon état; il a fous fa main & il peut
employer à fon gré la preuve naturelle de la polfeffion, &
Ja pre~v~ légale des ~i:E~~ & ~~~ ~éte~ écriots, celle· que le,
1
00
2....
..J
�~6.
\
JOURNA~
QonCentement unanime des peuples a univerCellement reçue;
& celle que la fage/fe des Légifiateurs a par-tout ordonnée.
L'une & l'autre preuve ell: reCpeél:able & concluante; l'une
fait une imprelIion plus vive & plus générale; l'autre plus
fûre ,encore, & fur-tout; plus .inconteHable;' 'quelquefois la
premiere , quoiqu'incertaine & difputée, fait, au public une
efpece d'illulion, & alors fe~ ,jugeniens précipités ne font
point d'accord avec les oracles de la jufl:ice qu'ils ofent
prévenir; celui qui les rrunit en fa faveur, voit toujours fans
douce couronner dans les Tribunaux l'intérêt général qu'il
,.
.
mente. 1
l '
.' Jacques Gimet les invoque, & croit les raffembler; il appelle les Loix à fan fécours; les Loix qui ont pris avec raifon;
pour affurer l'érat des Citoyens, des précautions fi mulcipliées, que pour tout autre fujet elles pourraient' paraître
minutieufes; les Loix 'qui ont introduit des fortùes déterminées,. dont l'omilIiôn peut devenir funell:e à la vériré même,
quoiqu'elles ne foient defl:inées qu'à tromper.1a fraude &
l'impofiure dans leurs injufl:es eCpérances; ces Loix: fous }a
foi, [ails la prateél:/on deCq.uelles on doit du-moins eCpérer
de vivre en repos & en fiîreté, quand on a Catisfait à ce qu'elles exigent. De toute ancienneté ces Loix proteél:rices de
l'état & de la tranquillité des Citoyens, pour ne pas .prêter
indifl:inél:ement leurs feéoûrs à. la bonne foi & à l'ufurpatiori,
avoient exigé qu'.à leur nailfance , les enfans légitimes fulfenc
reconnus tant de leur famille que de la Cociété , à quelques
fignes particuliers, & fulfent marqués, pour ainli dire, du
fceau diHinél:if de la légitimité. Chez les Romains, le pere
infcrivoit [ur un regifire domefl:ique, mais Cacré, ê1épofitaire de l'état de la famille, le nouveau fils' qui lui étoit né;
il alloit encore chez le Juge fuprême des mœurs, chez l'Inf.
peél:eur univerCel des tréCors & des forces de l'Empire, 'annoncer à la République fa nouvelle richeffe, & l'avertir qu'elle
avait un Citoyen de plus. Pre[que raus les peuples poliéés
one adopté cette inl1:ieution judicieufe & politique.
, Nos Chefs de famille fe conforment encore pour la plupart à l'ufage où étoient,Jes Romains de tenir un _regil1re
(
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PALAIS
DB
PiOVENCE:
471
(le la nai1fance de leurs enfans, quoique ce ne foit plus chez
nous une obligation. La religion, qui ne peut condamner
que les écablilfemens vicieux, & qui perfeél:ionne les écabliffemens uciles, a confacré celui-ci, & peuc-êcre a-l'-elle la
gloire d'en avoir la premiere rappellé les avancages aux Gouvernemens modernes; auffi fes MiniHres ont-ils écé revêcus,
comme par reconnoilfance, d'un cal'aél:ere public & policique, & font-ils fur ce point dépoficaires de la confiance de'
la Nation & de la Loi, comme ils le font de celle de
l'Eglife. Ils nous accendent aux porces de la vie pour nous
infcrire luI' la liHe facrée des héritiers du Ciel, & {ur le
regifire authentique des cicoyens de la terre; dès qu'on nous
a préfentés à eux, ils ne difpofent pas feulement de nos
premiers niomens, ils s'emparent, pour aina dire, de tout
notre êcre; ils font nos feconds peres, puifqu'ils nous régénerent pour le Ciel; & nos premiers Magiftracs, nos premiers Juges, puifqu'ils décident de notre écat & de nocre·
fort fur la cerre; leur dépolicion refpeél:able repréfente celle.'
de la famille Gui a déclaré que nous lui appartenions, &
entraîne la foi de la fociécé.
Tel eft en effet le caraél:ere de certitude que lui attache
la Loi. Tel eft le vœu de tour~s les Ordonnances & de celle
1667; il eft aifé de le prouver par le décail où elle eO: entrée fur des formalicés qui, fans l'impol'lance qu'elle leur
a donnée, feraient minutieufes & indifférentes par ellesmêmes; par la na cure & la mulritude des précautions qu'elle
a prifes; par les Loix même après lefquelles elle eO: venue
& qu'elle a abrogé; par l'ufage qui fubaHoit avant elle & qu'elle
a voulu anéantir.
Avant cecce Ordonnance, avant même que l'Eglife flit
rendue la dépoficaire de ces regiftres qui dépofent de l'état
des citoyens, comme pour le~ ren~re plus refp;é1:ables &
plus facrés encore, on les aVaIt couJours regardes comme
des rémoins fûrs & irréprochables. PlliS le miniHere de ceux
à qui ils avoient écé confiés enfuite, écoit faint, plus ils avaient
encore acquis de confiance; auffi dès ce temps-là les regif.ues avoient-ils le plus grand poids & la plus grande influa~çl5 .
•
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dans les' caufes eù on les ciroit. AuRi l'Ordonnance de 1 S39J
avoit-elle voulu que ces regillres fuffent {<lits' en forme de.
preuve', & pou~ en fervir. L'Ordonnance de Blois prouve éga-,
lement qu'ils éteient regardés comme des preuves bien effentielles, par les précautions qu'elle prend pour en prévenirla perre; elle enjoint aux, Curés de les apporter & de le9'
dépofer eUlf-mêmes. aux Greffes royaux à la fin de chaque
~nnée.
_L;Ordonpance de 1667 a adopté toutes ces difpofitions,
elle les a perfeél:ionnées; le Légiflateur 'ne dédaigne pas de
s'occuper long temps & en détail de cet objet, parce qu'iL
le· regardë comme fort important, & qu'il n'y a rien en
effet de plus imporrant que ce qui fert à conllater l'état
des hommes. Il prend toutes les mefures poffibles pour
écarter les doutes & les foupçons, parce qu'il ne veut pas;
qu'on puiffe en oppofer aucun à ce titre: il l'a donc voulul
rendre véritablement le titre conllitutif & décifif de l'état
des hommes.
L'Ordonnance de 1736, qui explique fur ce.point celle de
1667, eft plus détaillée & plus précife encore. L'ordre des,
regillres qu'elle a réglé, les fGrmes dans lefquelles les aél:es
doivent être dreffés, qu'elle détermine, le fcrupule avec lequel
elle veut qu'èlles foient obfervées, la févérité dont elle'
ufe envers la moindre violation & même le moindre oubli,
tout prouve que le Légiflareur, toujours plein de grandes
idées, toujours occupé de grands intérêts, ne pefe & ne
s'étend fur cet article, qui paroît fi peu imporrant, que parce;
qu'il ell devenu un des points les plus. confidérables & les,
plus iméreffans de la légiflation, par la conCéquence dont;
il a voulu que fuffent les regiftres dans les queftions d'état.
\Voilà pourquoi elle enjoim aux Curés, fous de grieves.
peines, d'être exaél:s & fideles dans les fonél:ions qu'elle
leur attribu~. Si le but du Souverain, n'avoit été que d'avoir par leurs mains un tableau univerfel & détaillé du nombre d.e' fes fujets & des forces de fon empire, il n'auroie
pas prévu avec tant de foin, il n!auroit pas menacé de punir
~y~~. !an~ ~! ~igueJlE ~~~ s:rr,.e':l!- 'Q~: ~Q' ~~~~ d~nE l'effeE'
•
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PALAIS
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PaOVBNCE:
~9
reroit alors prefque infenfible; c'eft parce qu'une pareille erreur peut décider de la deftinée d'un citoyen, qu'il a fallu la
prévenir par tant de précautions & de menaces. C'eft dans
ce fens que tous les Interpretes, que tous les Auteurs ont
encendu la Loi. Avant elle, difent-ils, & depuis les Loix même
qu'elle renouvelle, la preuve par témoins de l'état des citoyens étoit facilement admife; aujourd'hui pour la faire recevoir, il faut d'abord prouver qu'il n'y a jamais eu de regillres, ou qu'ils ont été perdus.. Ce fentiment, cette .décifion ell devenue un principe univerfellement reconnu, une
maxime inconceflable; la conféquence en eft fimple & na. turelle. Puifque les regiilres excluent toute force de preuves,
ils doivent donc les fuppléer toutes.
Si J'on veut encore confuleer fur ce point la Jurifprudence
des Arrêts, on trouve que les Cours ont toujours regardé
cette efpece de dépolicion publique & ipcorruptible, conlignée dans les regillres, comme un titre effenciel, comme
le ticre conlticutif de J'écat des citoyens; elle eft recrue dans
un temps non fufpeél, recrue à la face des Autels par le Minilhe de l'Eglife & de J'Etat. C'elt le feul titre que cet'
être li foible & fi dépendant dans tout ce qui ·l'entoure, puiffe
exiger & produire 'pour prouver fan état; aéle unique & d~
cilif, dont l'infidélité ou J'inattenrion de ceux qui go\!verneQ.,t
fa deainée, peuvent le priver. Il n'a pas tenu à lui ·de s'affurer d'aucres preuves de fan état; il n'a pas tenu à lui de
's'affilrer celle-ci. Combien ferait-il :iniufte & cruel, lorfGu'il la produit, d'attaquer, de décruire la confiance qu'elle
infpire & qu'elle doit infpirer? Sans doute il n'eil pas impoffible que la fraude abufe même de ce qu'on a imaginé
concr~elle; il n'eft rien dont on ne puiffe abufer. Tous les
.jours l'enfant malheureux que J'ambicion ou la cruauté de
fes parens a défavoué, que la négligence d'un Min~lhe igno,rant & inexécutif a trahi, vit dans l'obfcuricé ou dans la
,honte d'une condition à laquelle un titre ·infidele l'a enchalné; on ne lui permet pas de réclamer contre ce titre;
on le regarde comme fi effencie1 & fi déciüf, qu'oQ croi•
..,-,oit l'entendre, pour ainfi dire, c?Qtr.e lui-même; ouJerm.e,
�~~
JOURNÀL
les yeux méme à des préfomptions graves, ~ des ind1c&.;
frappans; on le facrifie peut-être à l'interêt & au repos public. Le facrifiera-t-on auffi à l'avarice & à la haine domeftique Ce que cet aéle fi important peut contre la légitimité, il ne le pourra 'donc pas pour elle! Il décidera donc
toujours conrre l'état des citoyens, foit qu'ils le réclamenc,
fO,it qu'ils en joui/fene, toujours en faveur des pareils, des
collatéraux injufies & avides! Que refiera-t-il, fi l'on anéanrit
cette preuve? Sur quel témoignage pourra-t-on compter, fi
l'on rejetre le témoignage de la Loi?
Ce n'efi point ici une des moindres raifons qui démon'trene l'authenticité des regilhes & la confiance enriere qu'ils
doivene infpirer aux Minifl:res de la Jufiice. Nous l'avons
établie fur celle de la Loi, fur les précautions qu'elle a prifes
pour la leur mériter, fur les premiers principes de l'équité
-nàturelle, & fur l'injufl:ice qu'il y auroit à condamner un
·enfant dont la dépendanèe efl: fi grande pour fan exifience
phyfique, à vivre dans ia même fujétion & la même crainte
p,our fon exifience politique. On peut l'établir fur la néceffite même, fur le vœu combiné de la nature, de la Loi
& de la raifon. Depuis les nouvelles Ordonnances, on a
-{ouvent réduit en quefiion, fi la preuve de l'état par les
-acres de baptême pouvoit fe fuppléer par quelqu'autre, tant
'elles ont attaché 11 cette forte de preuve une confiance abfolue & prefque exc!ufive"
Si l'on doute aujourd'hui que cette preuve elle-méme foit
certaine & complerre, fi l'on regarde cerre propofition comme
une a/fertion hafardée, l'état des citoyens deviendra un vrai
problême, & l'on pourra fou tenir avec vérité cette a/fertioh
effrayanee, qu'il efl: impoffible de le prouver. n faut doll'C
que tous 'les citoyens vivene dans le trouble & l'incertitude.'
Si celui qui réclame ou qui jouit fans aéle de baptême-, efi
fufpeél d'ufurpation; fi celui qni le produit, l'efi d'impoHure,.
où feronc donc la bonne foi,. la vérité? Soupçonnera-t-on'
l'enfant, dont la defl:inée dépend entiérement de fes' parens~
de fes voifins, d~ les avoir trompé? Soupçonnera-t-on la
joie pu la confefIion du pere, la fuicériré ou la religion des
.
~émoins i
r
�DU
PAL AIS
DE
PRO VEN C Il.
481
témoins, la prudence ou I~ bonne foi du Minifhe qui remplit dans cet infiant une fonél:ion religieufe & publique?
Mais comme il n'eH rien que l'intérêt ou la haine ne puiffent foup~onner, quelle preuve la vérité pourra-t-elle employer, quelle reffource rell:era-t-il à l'innocence? Aucune,
fi l'on parvient une fois à écarter la preuve que nous offrent la Loi & le Légiflateur lui-même. Les preuves que
pourront produire les homlIles, feront-elles plus refpeél:ées
que celle que la Loi produit, & qui, felon l'immortel d'Agueffeau, tient à une efpece de droit des gens, commun à
routes les Nations?
Telle dl: celle que Jacques Gimet offre; fan pere a été
.baptifé fous le nom qu'il porre encore aujourd'hui, avant la
fin du dernier liecle; c'efl: ainli du premier infiant de la
.vie que dare la poffeffion d'un état dont ron pere & lui ont
joui pendant près de quatre-vingt ans.
L'aél:e de mariage conll:ate non feulement l'état des' pa.rens entr'eux & par rapport à leurs enfan~, mais auffi re.Iativement aux deux familles qui s'allient, en en formant une
troilieme qui leur appartieélt également. L'aél:e de baptême
conll:ate uniquement & indireél:emenr la defcendance & la
filiation légitime, c'efi-à-dire la tranfll)jffion de noms, d'état
& de fortune. Les époux ne peuvent prouver la légitimité
de leurs liens que par l'aél:e même qui les légitime; les deux
familles ne fe rapprochent & ne fe connoiffent que par ce
traité commun, qu'elles ont ligné. Les enfans, quoique in.téreffés dans ces différens aél:es" n'ont de réellement com.mun entr'eux & les auteurs de leur exiflence, que leur aél:e
de baptême & de filiation. A mefure qu'ils deviennent euxmêmes la génération préfenté, la génération paffée ne tient
plus, pour ainli dire, qu'une feule place & un feul point j
on conferve l'anneau principal qui prouve & qui fait la continuité de la chaîne; mais on néglige les liens particuliers, les
liens perfonnels à la génération qui paffe, & dont les rapportS s'éloignent ou ne fublitlent plus. Le titre de pere &
de mere futEt, il abforbe touS les autres, parce que "eit
Années I775 & InGo
Ppp
�4>82-
JOUllNAL
principalement par ce titre qu'elle tient à là génération pré- '
feme.
Il y a encore une raifon fenfible & naturelle, pour qu'on
donne après un certain temps à l'aéte de baptême le droit
de fuppléer l'aéte d'époufailles; c'ef!: qu'entre plufieurs aétes
fucceffifs, celui qLli eH: le réfLlltat & le dernier de rous, les
fait ordinairement négliger, {Llr-tout lorfque l'époque de ces
premiers aétes commence à s'éloigner. Or, tel eft l'aél:e de
baptême; il fuppofe l'aéte de mariage; & iôdépendam ment
-de ce qu'il en ell: une fuite naturelle, il le mentionne im/ plicitement, & fouvent, comme dans le cas préfent, en termes exprès.'
L'enfant qui voudroit prouver fa légitimité par l'aéte d'époufailles de ceux dont il ef!: iffu, ne prouveroit rien; la
preuve de la légitimité en général feroit route faite fans
doUte, mais celle de l'identité & de l'application de cene
légitimité lui refreroit à faire. L'aéte d'époufailles eH- perfonnel aux époux, puifqu'il prouve feulement que leur poCcérité fera légitime; l'aéte de baptême au contraire ef!: commun, puifqu'il prouve explicirement la légitimité des enfans,
& implicitement celle de l'union des parens dont elle ef!:
le réfultat, & qui en eH: le principe néceffaire. Telle eft la
différence effentielle qu'il y a entre l'aél:e d'époufailles &
l'aél:e de baptême.
On peut exiger que deux époux qui vivent dans la polfeffion
publique de leur état, en produifent le titre, pour étouffer des
foup~ons fcandaleux qui fe répandent; encore après un certain
temps, après trente ans, par exemple, quand leur réputacio'n p'arle d'àilleurs pour eux, ils' n'ont befoin que d'oppoCer
le bouclier impénétrable de la poffeffion aux traits de l'envie
& de la calomnie; & c'eft ainfi que le jugea l'Arrêt de 1676,
rapporté par Cochin dans l'affaire de Bougelat.
, _
A plus fo'rte raiCon la polfeffion peut-elle fuppléer en faveur des enfans à un citre qui ne leur eH pas perConnel, &
au défaut duquel ils fuppléent encore par un aéte poftérieur
qui s'y rapporte, qui le fuppofe, qui le repréCente. Cet a&e
�DU
PAL~l~
DE
PROVENCEo.
483
en l'aé1:~ de baptême, l'aé1:e de filiation & de de[cendance
légitime.
Poin~ de légitimité [ans mariage, cela e(l: vrai; point de
mariage [ans célébration, cela eH équivoque. Si l'on veut
dire que là où il o'y a réellemene paine eu de célébration,
il n'y a point eu de milriage, & que le facrement ne le fupplée paine, cela eH vrai encore; mais fi 1'00 v.ouloit conclure que le mariage ne filbfifte plus, ou l'atte de célébration n'exiHe plus, cela feroit faux, & contraire en .même
temps à la dignité du facrement, à la loi univerfelle de la
poifeffion, à tous les principes; cela ferait faux dans toutes fes
conféquences, on l'a déja vu; mais plus encore quand on voudroit les appliquer à l'état perfonnel des enfans. Aillfi le mariage ne fe préfuOle point, quand il n'y a point poifeffion. Cette maxime eH: j'lite & certaine; mais quand cette
PQifeffiom exifte, comme elle eft un titre, & que, felon la
Loi, elle équivaut à tous les titres, il n'dt plus quellion de
préfomplion, & cette maxime n'eH plus applicable.
Ici il y a plus que cette poifeffion, qui feule équivaudrait à
l'aé1:e de mariage; il exiGe un aae qui le remplace en quelque forte, I~ feul dont les enfans foient obligés de prouver
J'exillence ou de jufhfier le défaut, parce qu'il leur eft feul
perfpnneJ; l'atte de baptême. Cet atte eft fix fois répété,
.fix fois l'Eglife a reçu dans fan fein, fix fois elle a béni
comme légitimes les fruits d'une union qu'on foupçonne &
qu'on calomnie; chacun de ces aé1:es r<!ppelle & repré/ème
,1'aé1:e d'époufailles, puifque Je MiniHre de la religion y donne
de nom .d'époux à ceux done il régénere les enfans; puifqlJe,
comme 'MagiO:rat politique, il atteHe que ces enf.1ns doivent
tenir dans la fociété le ral1g de citoyens légitimes; puifque
la fociété les adopta en ce nom & fous cette qualité par
fa bouche & par celle des témoins qlJÏ, felon la Loi, doivent
appuyer fon arrefiation de leurs fuffrages.
Si la poifeffion, qui n'eft dans le langage de la Loi qu'une
fuite de reconnoiifances racites, mais imparf.1ites, eft un titre
fi puiifant, l'expreffion de la reconnoiifance publique tant de
.fois renouv~llée, recueillie dans des attes folemnels que le
Ppp2.
•
�4B4
Jou R N A L
Légiflateur a revétu en même temps d'une forme ft authen~
tigue & fi parfaire, qu'elle doit bannir tous les foup~ons, ell:
d'une autorité ft ab(olue, qu'elle ne les permet pas. Quelle
incertitude, quelle.obfcurité rell:era-t-il, quand .tOus les titres
qui confiatent l'état d'un ciroyen , quand la poffeffion qui équivaut à tous les titres fe réuniffent ? Faut-il à ceux qui produifent tous ces tirres perfonnels de leur légitimiré,.& qui en
jouiffent depuis près de quatre-vingt ans, des titres étrangers ? On en trouve de cette nature dans l'extrait mortuaire
d'Elifabeth Vernet, infinué fur le reginre funebre, avec la
qualité d'époufe d'Etienne Gimet. Ainu ·cette femme, qui
avoit toujours vécu d3ns l'état honorable d'époufe légitime,
qui fix fois avoit fait porter fous fon nom aux pieds des
Autels les fruits innocens d'une union avouée, qui venoit de
mourir dans la paix de fa confcience & de fon cœur, en enfevelie dans la paix de l'Eglife avec les honneurs qu'elle rend
à ceux de fes enfans fur la vie & la mort defguels elle ofe
c<?mpter. Jacques Gimet joint à tous ces titres la poffeffion
de, fon pere & la fienne, c'efi-à-dire la preuve naturelle à
la preuve légale, & à une p~uve diél:ée par la nature &
adoptée par la Loi. Il ne récbme pas feulement un état que
le témoignage de la Loi lui aiIùreroit; il défend un état dont
il doit jouir, fuivant l'autorité réunie des Loix naturelles &
écrites, qui veulent que tout ·cede à la poffeffion. Quelle
n'ef!: pas la puiffance de la poffeffion & de la prefcription
qu'elle produit? Les mêmes Auteurs qui l'appellent la bienfaitrice du genre humain, J'en appellent auffi avec raifon la
reine. Elle exerce en effet fon· pouvoir & fa bienfaifance
avec une-efpece de defpotifme; elle ne produit pas feulement
h paix, elle l'ordonne; il n'efi ni poffible de fe foufiraire _
aux Loix qu'elle diél:e, ni même néceffaire de demander ou
d'acheter les faveurs qu'elle accorde. Comme les motifs qui
J'ont introduite font d'un ordre fupérieur, fon empire dl: univerfe! & indépendant de toute confidérarion, de tout privilege particulier.
~
C'ef!: fur-tout dans les que!l:ions d'état, quefijons les plus
dangereufes & les plus difficiles de toutes, qu'il faut in",:
•
�v Il NeE.
48 'î
voquer éette prôteél:rice de l'ordre & du repos Pllblic. L'éçat
d'un citoyen eH la place où la nature & la forcun~ l'ont
'mis, le rang qu'elles lui ont donné dans la faciété. Nous naiffons par la volonté d'un être tout puiffant, impénétrable
dans fes juge mens & dans f~s voies; les hafards de la naiffance dépendent de lui feul; c'eH: lui qui donne en l)1êlpe
temps & par un choix dont il connoÎt feul les mo[~fs,
des héritiers au Souverain d'un puiffant Empire &. des confolateurs, des aides au laboureur obfcur qui gémit fous le
poids du travail & de l'indigence; le fucceffeur des tréfors,
le rejenon de la plus noble famille a couru cette terriblè ,al.,
ternative, & il ne dépendait pas 'alors de lui de s'affurer
ce précieux avantage dont il en aujourd'huj fi fier. Mais dè,s
que le nouvel être a échappé aux caprices de cette fatalité
aveugle, ou plutôt aux décrets myH:érieux de la provi,dence,
,dès qu'il a pris poffeffion par fa naiffance de,la place qu'elle
lui affigne, doit-il courir de nOUVeaux dangers & effuyer de
nouvelles incertitudes? Comme homme, il eH épcore' fous
la main de Dieu; mais comme citoyen ,- il ell: fOUSll'lJauvegarde, il vit fous la f?i de la fociété etitiere. L'état qu'il.
poffede eH: à lui, dès qu'il l'a poffédé, & pa~ce qu'il le pof.fede; il n'eH en effet cenfé pofféder cet éta.t, que 'Parce_,qu'il
lui appartient.
\.. c
_
r' ~
Quel dêfordre, quelle confufion ne mettrait-on pas dans
l'Etat & dans les familles! Combien on troub.leroit les, ef.prits & l'on attrifieroit , l'on refferreroit les cœurs, fi chaque homme pouvoit foupçonner la fource & la nature de
.fes plus tendres affeél:ions! L'ipcertitude ou la cqinte où il
feroit fans ceffe, l'obligeroieht.d"étouffer les plus doux mou-vemens de la nature, qu'il pourroiFregardet co mm!;' des im.poHeurs qu'il faud~oit un jour a?jurer: Get état péni~le &
violent redoublerOlt encore (es Illcertltudes & fes crall1tes ; ,
bienêôt il n'y -iuroit plus ,ni, paix ni. union da't!~, les familles;
-point 'de Iien.,général:dius; .l'état l.l'amour, l'intimité, la con,fiance qui re.ghen~ dait!!: l'intéri.eur .d'une maifon étant la
;fource .& 'l'image d~ celles, qui doivent, affurer le bonheur
& la' durée des Jodétés" dès
que les parens eux-mêmes fe.,
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raient de·venus éttange.rs les uns aux autres, 1t plus forte
raiCon les citoyens le Ceroient-ils, & la haCe de la confiituti0n Ceroit ren'verCée.
En effet, les LégiHateurs n'ont pas voulu que le citoyen
en po1feffion de fan état perdît le privilege naturel & politique de cette poffeffion. Ce moyen reCpeétable & Cacré
change donc ab'Colument la namre des que fiions d'état,
quand on l'oppo Ce à celui qui le réclame; il rend fa demande fufpeéte & défavorable; mais quand celui dont on
'Ittaqlle l'état en jouit, l'aétion de Con accufateur devient
odieuCe & dangereuCe. G'efi en effet une, véritable accu Ca~ionl & la plus cruelle de toutes qu'on intentç contre un citoyén, l'orCqu'on l'appelle & qu'on l'expoCe aux riCques d'un
jugement qui pimt le priver de tous Ces droits, &, pour ainli
dire, de tout fan être, non pour des délits, mais pour un
fimple défaut ·de formalités dom il femble qu'il n'écoit pas
perfonne~lement tenu., & qu'il n'a pas dépendu de lui de
rëmplir; r,,~~H alors qu'il peut & qu'il doit appeller à fan
f~c:'oursi' la poffeffion, .qui non Ceulemenr équivaut à rous les
• t~tres, puiCqu'elle les Cuppofe, mais qui eH au deffus d'eux,
puiCqu'elle peut les fuppléer.
La- poffeffipn. bannir la crainre & la défiance; elle efi un.
avanrage fi grand, & dont celui qui peut s'en prévaloir eH
fi pénét~é, qu'il" néglige Couvent rous les' autres; c'efi auffi
{ui cette négligence qu'il fait être un effet naturel de la po[feffion, que l'accuCateur compte fouvent en intentanr fan action. La Loi a pris plailir à tromper cette efpérance fraudu!e.tCt; elle n'a <.pas voulu qulil.pîu: .tirer' un avanrage in~
iùll'e & odit'ul' de cerce féeurité légitime que la poffeffioll
-inCpire à [roUf c1~6-yel1. Tel a éré un Jdes motifs de la puiffance & de l'effet- il1virHi:jble Jqu'elle a donné 1t la pOlfeffion; c'eH par ~t..(e .grallde & fage raifonqu'elle fuppofe
des titres 16gitimes Cur lefque,ls el1e.el1; fondée. , "
Il Y .1 plus 'è'nco"re; c@o n'é!~b pàs .feulement Jur l'urdre public gu'e (l: fon.dél'efFèc que :Iê~! L<ÙXE'àcclbrdejllD à la p0dfeCfion d'état; ('eH Cur, la .riéceffiré.ir.'e.1Jdl:f-le- felis. der ces L01x
fameufl:s : jlacum honijnis, natali profe}]ione perdita, .mlltilatUln.
�n JI PRO V II Nell.
14,87
non effi 'certi juris efi. Ce qu'on comprend,.fous le nom de
'preuves littérales de l'état, n'ell: pas toujours à l'abri des
événemens, des injures du temps & des révolurions humaines. Ces monumells publics, ces regifhes préçieux inventés par la polirique, confacrés par la religion, peyvent
~rre difperfés, murilés, anéantis par le feu, par la ruine
même des dépôrs qui en répond~nt ~)q fociéré i par quelqu'un de ces accidens qui nous environnent & nous menacent en foule.
Il eil en effet peu de fa,milles qui e'nrraînées tôt ou .tard
par les révolutions de ce,mond,e & l'inconil'3nce des. ch ores humaines, ne change quelquefois de forrpne i, de rang, de
parrie; la poffeffion devenue une fdis inurile , le- fils qui ne
pourrair êrre artaqué de fan chef, l'illl'oqùera en vain pOUl'
fon pere, qui repofe depuis un demi fiecle da os le feio d'uoe
terre fur laquelle il n'érait pas né; l'avarice, la haine, la
vengeance defcendronr fans crainre &:; faos remords ..dans le
fond des tombeaux; elles fouleront aux pieds les cendres
paifibles du pere, de l'aïeul, du bifaïeul, même de celui
qu'elles voudront flérrir; elles fouilleront dans le fein refpectable & facré de la mort, jufqu'à ce qu'elles aienr rrouvé
les reUes in[enubles du premier aureur de la fàmille de
celui, qui vint chercher fan tombeau dans une rerre érrangere jufqu'alors pour fes aureurs; & ce fera précifément celui
dont ils forceront le malheu~eux perit-fils d'éclaircir & de
dérailler la deflinée.
On trouve dans le Code matrimonial ( continua Mr. l'Avocat-Général) un Arrêt qui s'applique principalement au
traifleme effet que l'on a attribué à la poffeffion, celui de corriger même les titres de l'état. Cet Arrêt, rendu en 17 'i 6 fur les
concluuons de Mr. Seguier, paraît bien notable & hien déciflE La Dame Duhan avait été baptifée ,& mariée comme
fille naturelle de Me. Terraffon &:; de DUe. la Mure; il Y
avoit deux aU-Dres enfans des mêmes perfonnes baprifés comme
légitimes; mais le, pere, s'était mari~, du vivant de la mere,
. fans qu'elle eût reclame pendant dll! - fept .ans; la Dame
Duhan fut néanmoins dédarée légitime. Tout céda à la fa]) U
PAL AIS
�~8
JOURNAL
v~ur 'de la légitimité; & entre des préComptions également
fortes & également graves, on préféra celles qui décidoient
pour elle; on jugea enfin qu'y ayant deux enfans qui poffédoient & qui prouvoient l'état de légitimité, le troilieme
n'avoit pu le perdre, quoique plulieurs aél:es authentiques
'le lui rav-ilfent, quoique fa mere elle-même, dont le lilence
.f~m.bloit la condanl'ner, fe fôt Jailfée enlever le lien. Des
-circon!tances fi extraordinaires & li critiques écoient bien autre
chofe que le ,fimple défaut d'aél:é d'époufailles.
.
1 En. va"in l'on oppofe qu~ l'aél:e de baptême de Jean-Etienne
Gim.èt' n'eH, pas {igné par fon pere. S'il falloit rejetter au~jour.d'hui tous les aél:es de baptême que les peres n'ont pas
figàé, fous prétexte' qu'ils ne font que l'ouvrage erroné du
.Curé ;la c1affe la plus nombreufe de la fociété n'auroit plus
que des enfans illégitimes. Comment d'ailleurs pouvoir imaginer qu'EtIenne Gimet n'étoit pas préfent au baptême de fan
.fils' Le Curé ne-peut-il pas avoir raifonné d'après l'ufage général
_où font les perfonnes de cette c1affe & de cette condition, d'être
il1itérés, & ne l'avoir pas mêQ'le appellé pour figner? Ainfi dans
ces fix aél:es de b'aptême, l'on ne trouve jamais que le Curé
qui ait {igné, aucun des parrains, aucune des marraines qui
fache écrire. De quelle façon qu'on envifage ces aél:es, ils
prouvent dn-moins toujours que les deux époux vivoient dans
une poffeffion publique de leur état, que leurs enfans étoient
pubJiquement répurés légitimes. Douze témoins ralfemblés
dans ces fix aél:es forment certainement une efpece de pubJic, & conHituenr là publicité pour des perfonnes d'un rang
fi obfcur. Dès-lors cette polfeffion publique', qui commence
avec la vie des enfans qu'on attaque, & avant la fin du dernier {iecle , doi t fuffire.
Jacques Gimet joint à ces titres publics, qui mettent,
pour aïnli dire, fon état fous la garantie & la foi de la fociété, des titr,es privés, mais do.inefliques, qui lient irré'vocablement la famille qui veut le défavouer. Le premier
eH fon contrat .de mariage; le Notaire Y.,rappeJle que JeanEtienne: Gimet a été obligé de' <kmander .folemnellemenc
l'aveu de fan pere pour contraél:er; il étoit donc fous fa
puiffance.
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PRO VEN C ll.
489
pùiffance ; il fe crut autorifé à tenir à fon pere des aél:es de
refpeél:, quoiqu'il fût encore mineur, parce qu'il fe croyoie
émancipé de droit par l'émancipation tacire occafionée par
,une abfence de la maifon paternelle de plus de dix ans.
Le refiamene de l'aïeul, de l'année 172.3, rédigé dans l'année même du mariage de Jean - Erienne Gimet, le déclare bâtard, & le traite comme tel fans doure, puifqu'il ne
lui a/Iigne qu'un legs de cinq fols; mais il ~'infiitue fon héritier particulier par ce legs; il déclare ce fils incapable de
fuccéder, & cependane il le d'éshérite, Ainfi la haine s'dl:
rrompée, en entaffanr des énonciations incompatibles, & la
colere a pris rane de précamions pour être fûre d'être obéie,
qu'elle a oublié d'en prendre pour fe cacher; enfin cet aél:e
n'a plus aujourd'hui de force ni même d'exifience.
'
Un nouveau refiament a anéanti ce tefiament de la colere & de la vengeance paternelle. Ce tefiarnent étant la
loi naturelle de la fa,mille, en doit être le titre décifif; ft
Etienne Gimet n'y rend pas jufiice à la nature, il Y rend
du-moins hommage à la vérité, & ne méconnoît plus la légitimité de fon fils; cet aél:e, qui ne laiffoir rien contre l'état
& la légitimité de Jean-Etienne Gimet, prce que ni l'inhumanité ni la haine des peres ne peur nuire aux enfans ,
efi un ritre effentiel & décifif en fa faveur; il lui ruffiroie
feul peut-être; c'ell: du-moins ce que fair entendre la Novelle 117 , chap. 1. Le dernier titre qu'on a produit, prouve
également la légitimité de Jean-Eienne Gimet; defi l'aél:e
des f~condes époufailles d'Etienne Gimet; il Y déclare qu'il
ne contraél:e aux pieds des AlItels des nœuds 'légitimes, que
parce que la morr a-brifé fes premiers nœ'uds.
.
Ml'. l'Avocat· Général obferva enfuire, que la Loi qui condamne les inHitlltions' en faveur des recondes femmes' à
un retranchemenr qui les réduir à n'être pas plus avantagées
que les enfans les moins bien traités du premier lir, efl:
trop connue & trop irréfiflible; ce droit efr tranfmiffible;
il fut folemnellement difcllté '& jugé par la Cour en 1660.
Cette peine e(~ acquife au moment même & pa'r le feul
fait du fecond' m.ariage; & quoiqu'il femble qu'en géné-.
Années 1775 &. 177 6. Q q q
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JOURN~L
raI il ne -faut pas étendre & amplier les peines, on doit
obferver que 'c'efr en même temps un dédommagement- ac~
cordé aux enfans du premier mari ou de la premiere époufe,
& par conféquent à leur fa mille, puifque cette fJmille lui
appartient toujours, & que d'ailleurs, dans le langage des
Loix, le mot liberi employé par les Loix qui prononcent
cette forte de peine, comprend tous les defcendans. Quoique le pere de Jacques Gimet n'ait demandé que fa -légitimité, il n'a cependant pas renoncé à demander le ·retranchement, on ne peut regarder cela comme une renonciation tacite; car la demande en légitime de la part d'un fils
déshérité & maltraité par un .fecond mariage, n'eH pas ab~
folumene contraire à la demande en retranchement; comme
il pouvait les former toutes deux à la fois, rien n'empêche
qu'il les préfente fuccdIivemene, du-moins tane qu'en fatis[aifant à la premiere, l'on ne l'a pas mis dans le Cd, (je faire
croire par fan acceptation pure & fimple, & par fan filence,
qu'il renonçait à la (econde : Jean-Etienne Gimet n'avait d'abord demandé que fa légitime; mais la réfifl:ance injufle &
opiniâtre que lui & fan fils ont éprouvée, la quefl:ion odieufe
& téméraire qu'on a élevé fur leur état, one excité leur juHe
indignation; peut-être auraient-ils remis généreufement la
peine qu'ils réclament aujourd'hui, & qu'ils one droit de réclamer, fi on n'eÎlt pas voulu les dépouiller de leur état pour
retenir leur fortune.
Mr. l'Avocat-Général conclut à ce qu'il fût dit & ordonné
que faifant droit aux fins de l'exploit libellé d'ajournement
de Jacques Gimet, Pierre Gimet fôt condamné au paiement
de la légitime afféranee à Tean-Etienne fur les biens d'Etienne Gimet; & de même fuite, que l'inflitution d'héritiere
en faveur de Marie Bremond, c()ntenue dans le teflament
d'Etienne, fût réduite à la valeur de la légitime afférante &
èompétente à Jean-Etienne, & le refl:ant de l'héritage adjugé à Jacques Gimet, comme héritier de Jean-Etienne,
avec reHicution de fruits tels que de droit, fuivane la liqui~
dation faite par Explorts.
Arrêt du 23 Mars 177 6 , prononcé par Mr. le Préfidenc
�DU
1) ALAIS
DB-
P-ROVENCJO:.
4'91
de St. Vincent, conforme aux conclu fions ; Pierre Gimet
fut condamné aux dépens. Plaidant Mes. Portalis & Er,.
etlV1er.
•
ARRÊT
XLIII.
Le privilege des Chanoines abiens pour cauie d'étude eJl-il
applicable aux difirihutions manuelles & aux anlliverfaires?
Il y a ahus, lorfque l'ac7e efl contraire aux Saints Canons &
al/X Ordonnances du Royaume.
I
L Y a dllns le Chapitre de 5ixfours deux Chanoinies Cléricales, qui font reniplies ordinairement par deux jeunes
Clercs. Mre. Lardier fut pourvu d'une de ces Chanoinies
fort jeune; il s'abfenta pour continuer fes études. Le Chap.itre ne vit pas de bon œil fan abfe-nce & fon défaut d'affifiance aux Offices, & par délibératia'n du 2.2. Oél:obre 1772.,
il fut réfalu de faire entre les mains de l'exaél:eur un arrêtement. des difiributions & honoraires attribués à Mre.
Lardier. Celui-ci communiqua au Chapirre la permiffion qu'il
avoit obtenue de l'Evêque de Toulon pour continuer fes
études; il lui demanda refpeél:ueufement la fienne, n'attribl,iant qu'à quelque négligence, à .quelque oubli de fa part
les marques de mécontentement qu'il venait d'en recevoir.
Ces démarches furent inutiles; il fut obligé d'appeller comme
d'a~us de la délibération prife contre lui; cet appel forma
un, n.ouveau procès {ur le premier. Il y a dans le Chapitre de Sixfours deux Economes; l'un efi l'EGonome du" Chapitre, l'autre dl l'Econome des anniverfaires; de fone que
Mre. Lardier préfenca une ,requête incidente, aux fins de
faire ajourner l'Econome des anniverfaires en affifl:ance en
cau(e, pour venir voir déclarer commun & exécutoire contre
lui. l'Arrêt qui interviendroit.
'
- On Idifoit pour Mre. Lardier, qu'il n'y a rien de plus expr~{fément établi, de plus [olemnellemenc déclaré par les
/Q. q q
2.
�-492
1
Jou
R N Jo. L
Loix, que le privilege des Chanoines étudians. Il elt inutile
d'appuyer ce privilege fur des autorités; il n'y a de fufceptible de doute &c de controverfe que la maniere d'étendre
& d'appliquer ce privilege; lorfque les Loix ont voulu que
les Eccléfiafliques fuffent rega~dés comme préfens pendan~
le cours de leurs études, elles n'ont point cependant alli':
milé en tout cette réfidence fiaive à la réfidence réelle.
Le Chanoine émdianc, comme le Chanoine abfenc pour de
jufl:es caufes, ne doit gagner' que les gros fruits de fan bénéfice; il n'y a que quelques cas extrêmemenc privilégiés &
favorables, & ceux· d'abfolue nécefIité, 011 il puiffe g.agner
tous les fruitS. Il faut entendre par gros fruits du bénéfice,
fuivant la définition des Auteurs, toUt ce qui n'eH pas diftributions manuelles' ou quotidiennes.
Mais quel efl: le motif de cette difl:inaion que le texte
des Loix autorife, & du retranchemenc qu'elles permettent
de faire fouffrir même à l'abfent privilégié? 'Elles filppofenc
que la prébende 'ou ·les gros fruits peuvent fuffire pour fa
fubfifl:ance. En effet, dans les bénéfices donc les revenus confifl:enc tous en diHributioils, elles ne permettent que d'en
retrancher un tiers; c'efl: toujours la même raifon qui les
décide, c'efl:-à-dire qu'elles fuppofeQt les deux tiers fuffifans.
Si elles regardoienc les di(hibut;ons comme une portion affeaée (pécialement & par privilege'à la réfidence & aL; fervice perpétuel, pourquoi les deux tiers qu'elles abandonnent (eroienc-i1s moins facrés que le 'tiers qu'elles retranchent ?
L'abus de la délibération que l'appellant attaque vienc
donc à la fois de la violation de la Loi & de la fauffe application qu'on en a faite. On a violé la Loi, puifqu'on l'a
dépouillé par le fait d'un privilege qu'il tenait d'elle, & donc
il lffoit droit de jouir; on l'a privé comme abfenc de la
meilleure partie des revenus de (on oenéfice ; mais comme
ab(ent pour èaufe d'étude, il doit jouir au moins des gros
fruits. Si l'on objeae que le revenu des canonicats de Sixfours e fl: tout encier en difl:ributions, au moins dans le (ens
le plus rigoureux & le plus littéral de la Loi, on n'aurait
�DU
PAL-AIS
DB
PROVBNCE.
493
dG 'retrancher que le tiers de ces difiributions, mais on l'aurait encore mal appliquée, & dans le cas aallel on ne devait rien retrancher. Telle eH: la modicité des canonicats
de Sixfours, qu'à peine peuvent-ils fuffire dans leur intégrité pour l'entretien des titlliaires ; d'où il s'enfuit qu'après
le moindre retranchement, on ne pourrait pluS! reniptir le
bue de la Loi, qui veut que l'Eglife aide & fourienne des
jeunes Clercs dans des Etudes dont elle doit. p'rcifiter.
'
Quand la raifon feule ne nous apprend l'oit pas qUé iel eft
l'efprit & le fens naturel de la Loi, les Statuts particuliers
du Chapitre de Sixfours & fan ufage conftant prouve'ne qu'il
n'a jamais pris le change fur fa vraie application. Les anciennes délibérations & le5'attefiatiotrs 'produites au procès jufiifient qu'on n'a jamas faie fupporter aucun retranchement
aux Chanoines abfens pour caufe d'étude, parce qu'on a toujours refpeaé leur privilege, & qu'on a en même temps fenti
que le moindre retra'nchement le tendroit.illufoire.
On répondait pciur l'Econome du Chapitre, qu'il faut foigneufemene, difl:illguer les deux corps exiftans dans la Paraître Collégiale de Sixfours. Le Chapitre eft bien compris dans
l'agrégation des anniverfaires, m'ais il n'en efi qu'une partie;
elle embratre la totalité des Prêtres qui detrervent l'Eglife;
& delà viene le tirre général de vénérable Clergé qu'elle
porte, & qui la difl:ingue du Chapitre. La fociété des anniverfaires eft beaucoup plus antienne que le Chapirre; fui-.
vant un ufage antérieur à la naitrance de celui-ci, les revenus
des anniverfaires confifiant en di!l:ributions, éraient affeaés
par une Loi locale aux Prêtres originaires du lieu. Mais Celon
l'efprit d'une Loi générale, & fur-rau,t celui du fo~dateur,
il n'y avait que le fervice perfonnel & affidu qui pût donner
droit à ces difiriburions. Ces deux corps, la fociété des anniverfaires & le Chapitre, ont été réunis', mais non confondus. Tout le prouve, la di!l:inaion de leurs Officiers, la
différence de leur adminifl:ration, la diverfe compofition de
leurs atremblées, & les titres qu'elles prennent. Pourquoi
le Chapitre répondrait-il de l'adminiflration & de la conduite des ano.iverfaires 1. Ges cieux corps, ayane continué
,
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•
~ . . .
�'-t94,
J
cf U Jtl
N'k L.
>
d'exiGer qiflinéts &: f~parés- ~près leur réunion, les diGcibutions des annniverfaires. ont confervé leur privilege excluGf
de rout autre; celui de' la réGdence fiétive accordée aux Eccléfiafiiques étlldi,l1s ne fa.uroit l'anéilOtir. D~s"lors la déli. hémtiOl1> priee par cette focié~é eH auIl! légale que jufie.
:Olaus, .tÇlWs les cas, c'ef!: à elle" &: OOQ au Chapitre'l- dlen.
l'i,fiondre; qe~ deux ..oorll.s ne fOl)t l'las confondus-, ils ne peuvent p.i\~r.~lre; indépendamrnent de routes· les autres preuves,
FàÇl:e de fondation. &: de réunion le prouve feul démonfiratÎ.vemeIH·; cet aéte n'i\ttribue 'lu Ch;lpitre ·que la portion des
<w'l)iveJf~ires" qll·i pOllIroit compéter au non1bre des Prêtres
dQnQ il fera Ç:ompofé: c'éroit aonç la [ocié~é des anniver-'
[aires; que l'appell.ant devoit, atta"luer comme [a véritable
p.arcies 'c'ét0it l'Ec.onome détenteur des difl:ributions qu'il
c.r0iç lui -applanenir, qu'il devoit mettre en cau[e, & cet
Eco[1orne efi celui desal1niverfaires.
Il eH Î111\ïile. ,de dire que rous les Auteurs ont toujour~
di'fl'ingue .letS di(}ributions "Iu§ltidien.n.es que quelques ab[ens
privilégiés p,é,ullem gagner dans ,certains cas: les Obits & al'lniverfaires, parcè qu'ils ne [om point les véritables biens
<te la rnanfé &. la propriété du Chapitre; c'efi à l'Econorpe de l'agrégation. à faire valoir ces raifons, à défendre
fQn adrninifiration, [es réglernens &; [es difpofitions partic.uliere~. Il [uffit au .Cbapitre de dire & de prouve!: qu'il
n'eH ·p.oio u partie a.u, procès." qu~'l ne veut poin.t l'être., &
qu'il Ile doit p.as dépendre, du, cap.rice ou du dépit injufte
de 1'appellant de. lui"d.o.ntler c.e,tte q.ualité.
L'Econarr.'e des. a.n.nj~erfaires foute.no·it .que la délibération:
éroit jù.lle & uai(oJloab1e. '~ne le. fû.t,.elle i pas, n'etant jh
mais .ql/un aéte d'a.d:nJinifUa.ribo & d'Jé.co.Jlomie,. il· n!étort
befain .que d'employ,er l'-appeLfimplè .pour le' :faire réformer,
en admettan.t même to.us les pri1J9pes que l'appellant a étabJis &, dans, toute leur éiendue; il ~y al qu'à ob(erver [ur
quels objers p.o rte Je. rett'aoolMlmeo't dont il& ,plaint". p.oùr
reconlloître.qu'il.a fait uo.e. fa.ufIe '3ÎlpL-ica twn, d.e"èes principes:
L'Egllfe a vouJuAue,leslpréJ:iendes, .&,mên'1~ette pOFtJonl
des diftribLltions ql:li les repré(entenc, futferic lacquifes au~
o
�,
DU
P ALA~IS
:tl,B.
PROVBNCE:
49,
Chanoines alife'n'ts ,pour caufe 'd'étude, 1Lla' honne heu.~e; elle
l'a pu, elle 'difpofoit d.e fon bien, puifque ces revenLis [dm
de la malJfe du Chapitre, forment fa proprié<ér, :& )par~con~
féquent celle de l'Eglife; mais les obits" mais .,les anniver,(aires ne lui appartiennent 'pas;' elle n'en a ni -le f0nds,. ni
·même l'adminiHration & la jouiffance libre., .pui[<qué <lette
adrninillration, cette jouiffance foru déterminées, dans rle:pr-im.
cipe, & éternellement régies par la volonté des fondateurs:;
il ne dépend plus 9'el1e de déc:ider quel.genre d''Ùtilité el1e
en retirera, comme il n'en dépenà plus,·de 1es 'appliquer à
une autre efpece âe, fervice. Ce n'eH donc jamaisl fLl'~) cette
portion facrée des œvenu'S lecclèfiaHiques qlil~on,p,elit ctaire
porter le privi!ege de la réfidenœ fiél:ivtl ;aniordée ~àux ,ab..
,
'
fents pour caufe d'etude.
2, ;,. . <."
Tous les Auteurs., tous les Int'erpreres irlllrilils 'de:lh'efprit
& _du Cens de la Loi~ reconnoiffent' cet're ,dj,fiintt-ionrrfoll:uh!è
fur l'équité & fur les lumieres natureilesl; '&c(lomme irIsr.dlf'ltinguent d'abord dans les bénéfices Ja prébende des 'di~ci~
butions, ils diflinguent avec encore 'plus ,de f'oiti', même
dans les bénéfices qui n'ont point de .prébendes-1 les èli/lri..
butions quotidiennes, d~s di/lribmions manuelles', & de cel1es
des anniverfaires & des obits. 11a délibération que l'ap:peHant
dénonce, n'ell donc qu'une ju/l.e: application d'une iL;oi fage
& générale; mais fuppofé que cette délibération pût le blefféq
& qu'il fût fondé à en appel1er, ce n'érait point'1a voie, de
l'appel comme d'abus qui lui compérait. Cette d'élibératÏon
e/l raute d'admilliftration & d'économie; la fociéré qui 1"a
prife , n'a que le droit de veiller 'à fa confervation & à fon
avantage; mais el1e n'a ni pouvoir ni juHice; elle n'exil1:e ni
dans l'ordre de la hiérarchie, ni dans celui des' jurifdiél:ions
eccléfia/liques. Si el1e eût privé l'appel1ant de fes di/lribut'ions
en le notant & pour le punir" on auro,it pu anguer "eue délibération d'attentat, d'excès, ou plutôt de défaut abfolLL de
pouvoir; mais eile n'a fait que pourvoir à ce que l~ fervice
fùt ~it, & que les /Prêtres qui le rempliifent pbur J'es"ahlëms,
fuirent auffi payés pour eux: fi.d'ans 'fes ,yues' d'ordre &'d'éco~
nomie l'agrégation s'dl: trompée, rjon peut .retourir ;ituxjlfu,.
�'496
.
'J
0 U RNA L
...
pér.ieurs; mais rien de plus jufie & de plus légitime que cet
aéte d'adminif!:ration; rien fur-tout de moins fufc'eptible de
l'appel comme d'abus; l'aé1:ion principale tombant, la demande en commune exécution tombe auffi <\elle même; elle
ef!: encore fouverainement injuHe, en ce .qu étane introduite
avec dépens, elle tend à faire fupporter à la véritable par,tie ceux faits dans une mauvaife qualité-& pour une faulfe
attaque.
Mr. l'Avocat-Général d'Eymar de Montmeyan obferva que
è'efi pn privilege légalement utile & honorable à l'Eglife, que
celui que les Loix canoniques Ont. accordé aux jeunes clercs qui
{e confacrent aux études; elle leur c0IT!pte , pour ainfi dire, par
·avance les ferv,ices qu'ils fe mettent en état de lui rendre
avec plus de reffources & de lumieres; elle favorife des travau'x 'mom elle' fu'ppofe qu'un faiut zele eH le principe, &
dont .êlLeoèfpere que fonJ! avantage efi l'unique objet; elle
ell'irne Je/) 10UDS qu'ils 'confument dans la carriere pénible de
l'étude " comhle s'ils eulfene été' employés an miniilere facré
mais paifible des Autels. L'appellane fe préfenee comme le
défenfeur des fages Loix, des droits précieux de l'Eglife; on
lui oppofe fes regles, fa difcipline, \ & le privilege de la rifidehce & du fervic'e pèrfonnel qu'on prétend plus précieux
epcore; iLne'faut· p.oine fans-..doure qu'efcla\!.e & vié1:ime d'une
efpérance' ·foyvent trompée, l'Eglife voie fes Autels abandonnés' par de jeunes minjfires inquiets & inconilants, qui
dans la fuite abandonnant aulIi fon fervice, ont travaillé à
fes dépens ponr eux-mêmes, & non pour elle.
. L'Eglife a fané1:ifié juîqu'aux vertus les plus humaines;
jufqu'aux aé1:ions les plus indifférentes, qiJand un efprit réligieux leSt dIrige, & qu'un avantage fpirituel en eft le but; mais
ce n'ea pas ainfiqu'elle a approuvé, qu'elle a adopté l'étude des
fciences; elle .l'a propofée. elle l'a louée comme une des plug
inno.eentes, des plus nobles & des plus utiles occupations
de l'homme.'
.
Depuis' que la paix fut établie eorre l'Egl~fe & fes er';
fécuteurs, parce qu'il n'y avoit plus qu'elle qui pÛt fe venger
& qll'elle 'étoit montée fu~ le .trône, les fciences, les talents
dont
�D U PAL AIS
D l!:
PRO VEN C Il.
4
dont elle n'avoit mépri[é ni l'alliance, ni le [ecours, tàoJi~
même qu'ils [embloient réunis pour la repoulfer & pour la'
combattre, continuerent de fleurir fous fa domination équitable & paifible. Elle fit plus encore; elle ouvrit [on [eÏn à
ces ennemis reconciliés, qu'elle [çavoit aimer & efiimer "
mais qu'elle ne [çavoit pas craindre; elle les a ferrés. & retenus entre [es bras, pendant cette fecoulfe terrible qu'éprouva
le monde à la chûte de l'Empire Romain & dont elle fut le
feul témoin inébranlable. Les fciences timides &. fugitives
embralfoienr en tremblant cette colonne [acrée, pendant
que des flots de barbares qui les craignoient pour eux, qui
les méprifoient, qui les hailfoienr chez leurs ennemis, &
qui les pour[uivoient par - tout, mugilfoient en vain autour
de leur aryle.
A ne confidérer le Clergé que comme un corps politique ,ce ne [eroit point un des moindres [ervices qu'il auroit ren~
du à l'humanité, que de lui conferver avec le goût de l'étude.
-au moins quelques principes des [ciences & quelques monu_
mens de J'ancienne litté.rature; mais il faut _convenir_ aulfJ,.
qu'elles ont bien acquitté_ce qu'elles lui doivent. QueHe ,{llpériorité , quelle influence leur ombre (eule n'aflura:'t-elle
pas fur des hardis, .des [auvàges 'con~ué.Tailts à des- minifires
un peu moins barbares & moifls grolfJers qu'eux! Ce fut
alors que les EccléfiaHiques eurent dans leurs mûns une pui[fânce qui, fondée· {br une fupériorité .plus. réelle & [ur-rout
plus durable que celle de la force, ne ri[quoit point d'être
détruüe par la force. L'Eglife a retiré de tous les temps
de grands avantages de l'érude & de la culture des fciences;
elles lui [ervirent d'abord à combattre [es ennemis avec des
armes plus égales; elles lui ont en[uite attiré le re[peél: & li
çéférence des peuples grolfJers & barbares parmi le[quelsc
elle s'efi établie ou qu'elle a ramené fous fan empire. Elle
leur doit peut-être plufieurs des dons qu'elle a reçus, & m~me
une grande partie de [es richelfes•
. L'on n'attribuera cependant point à la reconnoilfance le
foin que l'Egji[e pritl dans les biens c:lnoniques, de pourvoir
à ce que les EccIéGafiiques fuffent toujours infiruits, & ql.!e
, Annees t775 & I77 6•
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�498
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le dépot de la vérité, le goût des fciences & de l'éloquence
qlii',en :relev.ent:le.prix, paifaffent entre leurs mains d'âge en
âge i) ce 'feroie 'prêter à'ces Loix un motif trop humain i
mais rien n'empêche de penfer que nar une innocente &
pieufe. politique, l'Egljfe n'ait cherche à fe mettre en état
de djfputer' rouj.ours avec fucces à fes ennemis un avantage
ftivole, fi· on le compare à la vérité, mais que ceux-ci cherchene roujours .il mettre de leur côté. '
"':)L'Eglife efi'ime l'étude & les talens pour les fervices
qu'ils lui ont déja rendus, & pour ceux qu'elle en peut
encore attendre, parce que ce font des chofes réellement
eilimables 'par 'elles-mêmes; parce que, s'ils ne font pas
un des principaux devoirs de fes miniHres:, ils en font dumoins un des prelI1iers befoins i il n'eH pas néceifaire de
détailler routes- les occafions importantes où des mifliHres
habiles & éclairés lui font abfolument nécelfaires. Le motif
de la faveur qu'elle accorde aux études eH donc aufIi judicieux que fenÏible, & quoiqu'il paroiffe tenir à des conlidérations humaines, il
fondé fur un zele religieux & folide.
Un des privileges les plus confidérables que les Loix
eanoniques aient accordé dans 'cet objet, c'eH celui en
ver~u duquel les jeunes Chanoines étudians' font regardés
comme préfens, & comme accompli'ifans les devoirs de
leur bénéfice i la Loi qui leur accorde ce privilege eH célebre; tous les Auteurs q.ui ont écrit fur cette matiere 1:1
rapportent. Il femble qu'il devroit fuffire, pour. décider la
queHion aél:uelle ,. d'en faifir l'efprit & d'en pefer les termes;
elle veut que les Chanoines abfens pour caufe d'étude gagnent les gros. fruits, & nol'l' les diHributions manuelles de
leurs bénéfices,; elle les, difpenfe ,donc du devoir de la réfiâence réelle ~ mais la 'réfidente 'fiétive qu'elle leur, accorde
limitée par quelques. reH:riél:ions.
"
, Quoiqu'en' génér<ll ç>n n'entende par. gros fruits l.que la
prébende, c'eH-à-dire, cetce'par:ie de la· manfe capitulaire
perfo,nnellement' affèétee' à chaque Chanoine,l par le titr'e de
1.On bénéfice, cependant !orfqu'il 'n?y a point de prébendes.,
0U qu'elles fone. trqp_ 'modiques " les' "d~aributionS. qui y,
ea
ea
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PRO V RNC E.
fuppléent, commu'nément appellées diJlrihutïolls quotidiennes,
fi elles fe payent de temps en temps, changent" •• pour
ainli dire, de nature, & deviennent une partie d~s gros
fruits du bénéfice.
•
Les dif1:ribucions manuelles fe payent aux Chanoines: ou
chaque jour, ou du-moins à proportion de leur affitlance;
au lieu que les diHributions quotidiennes font acquifes aux
Chanoines non privilégiés par leur feule réiidence; ce qui
eil: un abus réel, mais général. Lorfque la prébende fuflit
pour l'entretien du Chanoine étudiant, on a' toujours jugé
qu'il doit s'en contenter, que fon privilege ne lui fait gagner
que les gros fruits, & qu'il n'a rien à prétendre fur les
diil:ributions quotidiennes. Lorfqu'il n'y a point de' prébende , ou qu'elle paraît trop modique, la fageffe & l'équité
dèS Cours fuppléent à la rigueur littérale de la Loi; on
affigne à l'étudiant une portiori des ditlributions qui, comme
on l'a vu, participent dans certains cas à la nature des
gros fruits. L'efprit de ces Arrêts eil: conforme à l'efprit
naturel de la Loi, quoiqu'ils paroiffent en contre·d·ire la
lettre. L'Auteur des Mémoires du Clergé y met il peu dé
doute, qu'il prévoit une prétention affez' ilnguliere que
pourraient former les Chanoines étudians dans les Chapitres où il n'y a point de prébendes, & où ,elles ont
été converties en diil:ributions; c'etl que ces diil:ributions
repréfentant la prébende qui leur eil: affilrée toute emiere
par leur privilege, ils pourroient avoir, par raifon de parité,
le même droit aux diil:ributioils en entier. L'Auteur prétend qu'ils ne doivent point retIrer cet avantage exceffif
d'un arrangement il fage & il louable: combien .éioit-il
donc éloigné de penfer que cet arrangement pln les priver
de leur privilege, ou en anéantir l'effet, puifqu'il 'craint qu'ils
n'en veuillent profiter pour l'étendre!
Il Y a encore fur ce point une regle générale établie:
dans les Chapit·res où tous les revenus coniltlent en diil:ri, butions, on en retranche ordinairement le tiers aux Chanoines érudians; mais toutes ces loix, coutes ces regles,
a-t-on dit, ne font point applicables à cerre partie des
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20
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RNA L
rentes" capitulaires qu'on appelle proprement difiributions
manuelles, & qu'il faut diftinguer avec foin des diHributians quotidiennes; le privilege qui les fait dépendre non
de la réfidence, mais du fervice perfonne1, ef!: au de1Tus
de tout autre privilege.
Moneta diHingue judicieufement dans les revenus du bénéfice, les dif!:ributions qui, felop lui, en font les émolumens & les anniverfaires & obits, qui ne font pas même
compris fous le titre d'émolumens. JI paraît que felon
l'opinion de cet Auteur, il faut appeller revenus du bénéfice, ce qu'en vertu de fan titre feul le Chanoine a droit
de prétendre; émolumens du hénéfice, ce qu'il gagne par
la réfidence & fon affii1:ance au moins préfumée aux offices.
Les anniverfaires & obits font une troifieme efpece de
fruits qu'on ne gagne que par l'affiHance réelle & pa r le
fervice perfonnel. Il femble donc que fan autorité qu'il faudra pefer dans l'examen de la nature des anniverfaires, n'eH
point applicable aux dif!:ributions manuelles en général. Durand de Maillane, au mot difiri6utions, fait la même diHinctian, c'ef!:-à-dire, qu'il ne compare aux diHributions quotidiennes que les anniverfaires.
Il faut obferver encore que ces deux Auteurs parlent d'un
cas où l'on doit s'en tenir à l'interprétation la plus rigoureufe , c'ef!:-à-dire, d'un privilege particulier ?ccordé
par le Pape à un Chanoine abfent, dans un pays où le
Souverain pontife a ce droit peu favorable. Goard femble
parler d'une efpece de prébendes fingulieres & connues
dans quelques chapitres, qu'il appelle he6doniades ou fèr1litories; CES prébendes font affettées à cetre portion du
Chapitre, ou plutôt du chœur, obligée à une réfidence
exatte & plus pénible. Il en certain, fuivant la remarque
judicieufe de Lacombe, qu\m Statut ou Réglemenr par
.Iequel des Chànoines fe difpenferoient de l'affifl:ance aux
.Offices, ou feulemenr à quelques Offices , ferait abufif,
on pourrait auffi dire fcandaJeux. La plupart des autres
Auteurs ne fe décident fi févérement contre les abfens
même privilégiés., que fur l'article des, a.Aniverfaires &
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PAt A 15
D E,
PRO VEN C Il;
101
obits; plufteurs n'admettent même pas fur ce point la.
diltinél:ion de Moneta, & les comprennent fous le titre
général des diltributions quotidiennes.
Il ferait aifé d'oppofer à ces autorités, qui d'ailleurs n'e
_portent pas direél:ement fur les difhibutÏons manuelles,
des autorités contraires; c'elt un avantage qu'il n'elt malheureufement pas difficile de fe ménager dans les queflions un
peu délicates du droit, & fur- tout du dtoit canonique;
mais en raifonnant feulement fur les principes & fur les
Loix, ce qui elt peut-être le feul moyen d'éviter l'incer. titude & la confufion, & d'arriver bientôt à la vérité, il
faut voir quel peut être le motif & l'objet de ce privilege
imprefcriptible qu'on attribue aux difhibutions manuelles,
& qui patoît d'abord favorable. Ou les dilttibutions proviennent de la manfe du Chapitre, ou elles font> les biens &
le préfent 'de quelques fondateurs; dans le premier cas,
on eft obligé de convenir que les deux tiers des diflributions doivent appartenir aux Chanoines étlldians, quand il
n'y a point de prébende. On a peine à concevoir la raifon
de cetteréduél:ion arbitraire du privilege; car pourquoi les
deux tiers au jeune Chanoine feraient - ils moins facrés,
pourquoi le tiers qu'on lui ôte le feroit- il davantage? Il
faut donc chercher un autre motif à cette Loi.
Le vœu général des Loix canoniques efl: la rélidence de
touS ceux qui font appellés au faint minif!:ere & au fervice
des Autels; c'efl: pour les engager, pour les forcer à la
1"éGdence, qu'elles ont autorifé plufieurs Chapitres à fubdi-'
,\'ifer leurs revenus en un nombre infini de petites portions
qui ne fe trouvent plus ainli ajf~él:ées au titre feul de Chanoine, mais à la réfidence habituelle.
. Le privilege accordé aux Chanoines abfens pour caufe
d'études, femble contredire ce vœu général de réfidence;
mais c'ef!: pour la plu? grande utilité, au moins pré fumée ,
pe l'Eglife; au refle,,; c'eft une précaution fage & 'légale
que celle qu'on prend dans plulieuts Chapitres, comme dans
felui de Sixfours, de faire donner caution aux jeunes Eccléfiaftiques, pour que, les efpérances de l'Eglife, efpérance~
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U RNA L
qu'elle achete & qu'elle paye, pour ainli dire, d'avanc'e, 'ne
foient pas trompées; enfin lorrque l'Eglife s'dt réfolue à
leur accorder ce privilege, elle a calculé dans [1 prudence
& dans fa fageffe les fervices ordinaires que les minii1:res
lui euffent rendus, & qu'elle facrilie pour un temps , &
ceux qu~elle ei1: en droit d'attendre des jeunes Clercs dont
elle cultive les talens, & dont elle développe & nourrit
le génie. Il feroit inutile de retracer les raifons qùi euffent
pu la faire balancer, & celles qui l'ont décidée. Le choix
eH fait, l'Eglife a prononcé, en accordant aux Chanoines
étudians le privi!ege d'une rélidence fiétive; elle a réellement tU à fe déterminer entre la faveur de l'étùde & la
faveur de la rélidence.
Il faut que les jeunes Chanoines qui parcourent la carriere pénible des études, pour fe rendre pins dignes de
leur état & .plus capables de fervir l'Eglife, foient fecourus
& prévenus en quelque forte par fes bienfaits. Dans cette
contradiét·ion apparente (car au foud ces Loix vont toutes
au même but) l'Eglife a choili; elle préfere chez les
jeunes EccléliaHiques le mérite de l'érude & les efpérances
qu'elle en conçoit, au devoir de la réfidence & à J'utilité
qu'dIe pourroit en retirer. Donc les Loix qui n'ont d'autre
objet que d'affurer la rélidence des Chanoines, & de leur
en faire une néceffit~, ne font point applicables aux Chanoines érudians qui font difpenfés par une Loi de l'obligation de la rélidence. Il n'ei1: pas douteux que le motif
de la Loi qui, en partageant les' revenus des Chanoines
en dii1:ributions, & voulant qu'elles ne foient acquifes &
payées aux Chanoines qu'à proportion de leurs fervices,
ne foit de les forcer à rélider & à deffervir ; mais ce motif
ne peut plus 'exiHer COntre les Chanoines érudians, puifqu'il y aurait une contradiétion choquante à les difpenfer'
de rélider d'un côté, & à les y forcer de l'aurre: donc
la Loi .générale & rigoureufe des dii1:ributions manuelles
n'ei1: pas faite pour eux.'
L'Eglife regarde du même œil le Chanoine qui étudie.,
& celui qui travaille aétuellemenc pour elle ~ c'efr-à-dire ,
�v Il Ne B;
)03
qu'elle efiime autant les efpérances plus étendues qu'elle
conçoit de l'un, que les fervices préfens qu'elle reçoit de
l'aurre; cependant dans l'application de la regle & de la
pratique, il Y a des différences néceffaires. Tant qu'il ne
s'agit .que de cene. portion des revenus du bénéfice qui
appartIent au Chanoine en vertu de fon feul titre, il ne
peut y en avoir, & il n'yen a en effet aucune, parce que
le Chanoine étudiant & le Chanoine detrervant font tous
- deux également dans la c1atre des minifires utiles. Mais
pour les difiributions qui font le prix de l'affifiance & du
fervice perfonnel, comme il s'agit d'en dénarurer réellement l'objet, l'Eglife efi obligée de faire une nouvelle
eHime; elle conGdere le nouvel objet auquel elle applique
les rétributions, pour les y proportionner.
Ce n'efi que par l'efpérance & par une efpece d'anticipation & de fiél:ion, qu'elle jouit des travaux du Chanoine
étudiant; mais comme elle n'en reçoit aucuns fervices préfents
& réels, elle fatisfait à l'équité, & elle acquitte tout ce' qu'elle
lui doit, en contribuant de le mettre en état de remplir les
efpérances que fes talents & fon goût pour l'étude lui font
wncevoir; comme c'efi cout ce que lui doit l'Eglife, c'ell:
auffi tout ce qu'elle \leut lui donner. Tel eH donc le véritable efprit, & tel doit être l'effet des Loix çanooiques fur
cet article.
.
.
Le Chanoine étudiant & le Chanoine deffervant doivent
être regardés felUS le même point de vue, mais avec quelque
différence cependant; c'eft-à-dire, que comme cous deux travaillent pour la gloire & l'utilité de l'Eglife, tous deux doivent vivre & fubfifter fur fes biens; le fentiment feul nops
garantiroit de la certitude de cecce maxime. Mais c'en eH
une autre également fondée fur l'équité, que des biens dont
on change l'application,· quoique conformément à l'efprit.
général de leur defiination, doivent être ménagés avec plus
d'économie, & qu'encore qu'ils fuffent plus que fuffifans p.our
remplir leur. premier objet., on ne doit en détourner que ce.
qu'il. fau~réc.ifement pour pou~v~ir au fecond. Voi!~.comme
on peut exphquerJ la. cOnLradlcrlOQ. apparente qu Il Cemble.
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Jou R ~ A L
Y avoIr en effet à âccorder aux Chanoines étudiants le privilege de la réfidence , & à les priver cependant -en parcie
de [es effets; le [uperflu des revenus du canonicat n'appar. tient qu'au Chanoine qui deflert [on Eglife, parce qu'il ef!:
à la fois revêtu d'un titre légitime, & qu'il en remplie
exaétement les obligations littérales.
La portion des fruits du bénéfice néceflaire à fa fubfiLlance appartient toujours au Chanoine qui travaille en
s'inLlrui[ant pour le bien & l'utilité future de l'Eglife; mais
comm~ cepenélant il en change les véritables fonél:ions , il
n'a de droit légitime que [ur ce qu'il lui faut préci[émene
pour remplir celles qu'il leur [ubLlitue. L'ufage des Chapitres qui affignent en général une penCion honnête aux Chanoines étudiall$ , .paroît auffi le plus fage, le plus conforme à l'efprie des regles, & le plus propre à prévenir les
contefiations. Mais il faut toujours panir de cette loi généraie, que le Chanoine qui en cenfé étudier & travailler
pour 'l'Eglife, doie au moins vivre des fruits de fon bénéfice; Loi équitable qù'aucune aUfre ne [a uroi t anéantir,
que routes les Loix particulieres expliquent, & à laquelle
elles [ont [ubordonnées. Delà celles qui veulent que la prébende feule appan"enne au Chanoine étudiant, parce qu'on
fuppofe qu'elle fuilit 'pour [on entretien.. Delà les Arrêts:
qui lui Ont adjugé le tiers des diLlributions outre [a prébende qu'on trouvoit apparemment infuffifante. Delà la
maxime que la où il n'y a pas de prébende, le Chanoine
étudiant a les deux tiers des diflributions; ce qui· doit en'
elfet équivaloir en général à la prébende fans diLlrihutions,
c'eLl-à-dire, à une ponion des fruits honnête & [uffi[ante:
Delà les Chanoines étudians ne [ont tenus de fe contenter
des deux tiers des diLlributions, que lor[que ces deux tiers
font [uffifans eux-mêmes.
Il n'y a donc nul doute qu'il ne faille partir d'un poine
de vue \Inique dans ces fortes de queLlions, & que ce ne
foit les befo,ins du Chanoine que l'Eglife veut aider dans [es
études, & non la di,fférente nature des revenus du Chapitre, qu'il faille confidérer ~ la prébende eil la "porciou des
revenus,
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PALAIS
DE
PROVENCll.
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revenuS du Canonicat dont l'Eglife peut difpofer plus naturellement en faveJr du Chanoine étudiant; mais à fOIl défaut, elle peut prendre fur les dilhibutions même manuelles;
autrement, en appliquant aux abfens pour caufe d'éçude llne
loi qui leur efi inapplicable, elle contrediroit fes autres loix,
elle fe contrediroit elle-même, puifqu'après avoir décidé en
thefe générale que l'étude équivaudroit à la réfidence, elle
préféreroit injufiement dans l'application la réfidence à l'étude.
Il efi un autre moyen [ur lequel les intimés s'appuyent
avec plus de fermeté & de confiance; c'efi fur la nature
refpeél:able & facrée des anniverfaires ; cerre portion de biens
dont l'Eglife n'a qu'une jouiffance conditionnelle & perpétuellement gouvernée par la volonté des fondateurs, elle ne
peut pas, en en dénaturant l'ufage, en en changeant la deftination, trahir /1 la fois la confiance de fes bienfaiteurs &
fes engage mens tacites. C'efi auffi cette portion des fruits
du bénéfice que Moneta ne veut pas qu'on puiffe comprendre fous. le nom général de fruits; ita Durand de Maillane
fous le titre particulier de difirihutions; elle n'efi point le
re\'enU proprement dit du bénéfice, puifqu'elle n'efi que le
prix de l'affiduité & des prieres du Bénéficier. Elle n'entre
poiDt dans les diilributions de l'Eg1ife , puifque ce n'ell: poine
l'Eglife, mais lé Fondateur, dont la volonté toujours co!iftante donne toujours aux mêmes conditions; volonté d'autant plus reCpeél:able, d'aurant plus facrée, que c'eil du fonds
des tombeaux qu"'elle Ce· fait entendre, & peut-être au moment du p1us extrême befoin qu'elle réclame le prix de fa
pieufe libéralité. Ces confidérations font bien preffantes; elles
ont fans doute déterminé la plupart Ides Auteurs que l'on
v.ient de ciser , à diilinguer les anniverfaires, de toutes les autres efpeces de fruits ou émolumens du bénéfice, & à penfer
qu'ils ne doivent pas être fufceptibles de privilege.
Cependant Durand prétend que ce n'eH 'lu'à la rigueur
& dàns le cas où il faut s'en tenir firiétement à la lerrre,
ifl rTtG!eriâ j/ric1â., qu'il'faut diltinguer abfolument les anniv~rfajre's, des aurres difhibutions. Telle feroit, par exemple,
• Annr!(s 1775 & 1776.
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1'0pinio"n- qu'on devrait fuivre, s'il s'agi/foit de ce privilège
odieux ou dérogatoire au droit commun que le Pape peut
dans cerrains pays accorder aux Chanoines abfens; c'ef!: à
quoi paroit fe réduire auffi la décifion de Moneta. Ces deux
Autorités ne vont donc point au cas aétue!. Le privilege des
Chanoines étudians, loin d'être odieux, en au contraire extrêmement favorable; il forme lui-mêmé un droit commun.
Aucun des Arrêrs cités n'exclut formellement les Chanoines
écudians des dinributions des anniverfaires.
Les anniverfaires font à la fois une efpece de bien qui
n'dl: pas en propriété à l'Eglife, & dont l'objer n'en pas
libre, mais déterminé. Voilà toUt ce qu'on peut dire de
plus fort pour les founraire à toute forre de privilege; mais
le mérite du don, d'un legs pieux, eil: acqilis au moment
Gue l'on legue & que l'on donne; du-moins il ferait abfurde
d'imaginer que la récompenfe d'une bonne œuvre & la juftice de Dieu même dépendi/fent de la négligence de ceux
Gui négligent d'accomplir ce que le Fondateur a ordonné;
à plus forte raifon le feul changement dansl 'exécution d'une
fondation, lorfqu'on la fait toujours fervir à l'avantage de
la religion, ne fauroit-il priver le fondateur du juil:e avantage qu'il doit en retirer lui-même; l'Eglife ne s'oblige pas
feulement au moment qu'elle accepte & qu'elle reçoir; mais
elle remplir rout de fuite en quelque !orre fan obligation"
puifque fon bienfaiteur acquiert dès ce moment même la
participarion à fes rréfors fpiricuels & à fes graces. Ainfi,
fait qu'elle obferve fes difpofirions à la lettre, foit que les
biens qu'elle a reçus fe confondant dans la ma(fe de fes autres biens, ne fervent plus qu'à fon utilité générale, le mérite que le Fondateur peut retirer de fa libéralité eil: roujours le même, & ne doit pas dépenùre de cette alternative.
Dans l'aéte d'éreétion du Chapitre de Sixfours, on voit
figurer les anniverfaires au no'mbre des biens qui doivent
entrer dans la ma(fe capitulaire; on affigne au nouveau Chapitre la portion des anniverfaires qui pourrait compéter au
nombre des Prêtres dont il fera compofé. Cette attribution·
�P
P B P ~ 0 V B N C B.
S07
.ell: faite, yeU-il dit, fans préjudice des autres portions afféranFes aux autres Prêtres qui ne feront pas du corps du
. C4api~tre.i il y eH ajout.é; que le Chapitre réglera, comme
jl trouvera à propos, tout ce qui concerne le fervice divin
.qu'il y aura à faire pour les anniverfaires & meifes fondées
.in modo anniverfariorum, & que le Syndic de ceux qui ne
font pas Chanoines y fera alors appe)lé & donnera fan avis;
que les anniverfaires & autres légats pies faits dans la Paroiife appartiendront au Chapitre, fans préjudice de la portion afférante à ceux qui ne font pas Chanoines, & que
ceux-ci venant à le devenir, leur portion fera incorp'orée au
Chapitre, fans qu'ils puiifent prétend~e plus que les autres;
on veut encore que les .Chanoines qui ne feront p,\s Prêtres, aient la même part que .s'ils l'éraient aux anniverfaires.
L'agrégatipn & le Chapitre n'ont pas été unis pour jouir
des anniverfaires ~n cqmmun & par .indivis, ce qui lèroit
.~oujour.s ulle illcorporation abrolue .à cet égard, & reram.beroit dans l'abus que l'on prétend avoir été forcé d'éviter;
mais on a difl:rait du revenu général des anniverfaires une
.eert,!ine porçion, celle qui aurait compété, par exemple, au
nombre de Prêtres liant le Chapitre devait être comparé,
& on lui a a$gné cette portion comme faifant partie de
la manfe capitulaire; ce (01).t les propres difpolltions de
D U
PAL A
J'aél:e.
Les "nniverfaires éraient affeél:és aux Prêtres odginaires
de Sixfqurs, & en deifervaQt la Paroiife. Le Chapitre était
deHiné à deifervir cette même Paroiife; il diminuoit
donc le· n01Ilbre des Prêtres qui lui éipient nécelfaires; on
n'a donc faie aucun tort à la Paroilfe , & on a rendu jufiice
'au Chapitre, en !ui affignant une partie des aoniverfaires i
~n n'a pas même c.haogé leur deHination locale, puifque,
felon l'aél:e de fondation, les Chanoines doivent être originaires du lieu, du-moi:ls autant qu'il efl: poffible, comme
devaient l'être les !impIes agrégés qu'ils ont remplacés. On
a trouvé Ull revenu exillaoc, établi pour ceux qui delfer'liSSS2o,
�T
~Oa
JOI1RNA·I.
raient la Paroiffe de Sixfours; on en a attribué une partie
au Chapitre qu'on - créait pour deffervir cette Paroiffe. Rien
de plus jull:e, de plus légitime que cette opération. Ce n'efl:
point une union totale, mais elle ell: abfolue pour la portion des anniverfaires qu'on a uni à la manfe -capitulaire:
ainri, quoique J"adminifhation des anniverfaires puilfe quelquefois rouler fur les deux corps réunis, comme lorfqu'il s'agie
d'un procès, ou de déterminer tout ce qui en regarde le fervice, l'adminifl:ration particuliere de la portion affignée au
Chapitre lui appartient inconteHablement & fans partage.
Ces deux fociétés' peuvent avoir lin intérêt commun, parce
qu'elles fonr- portionnaires du même revenu; mais comme
portionnaires même, elles ont des draies très-difl:inè1s &
féparés. Donc bien-loin que'J'agrégation ait eu le draie de
priver Mre. Lardier de fes diO:ribütions, & qu'il doive s'en
prendre à elle, il eO: démontré qu'elle manquerait à la fois
fur ce point de pouvoir'& d'intérêt; en voilà plus qu'il n'en
faut fur un relax trop légérement propofé, & dont l'unique
<:[fet a été de mettre les raifons de la véritable partie dans
la bouche d'une efpece de partie volontaire au procès.
C'eO: principalement la nature de l'acre ( continua Mr. l'Avocat-Général ) qui détermine la voie qu'on doit prendre
pour J'attaquer. Par-tout où il y a abus, on doit pouvoir
le déférer, & il Y a toujours abus dans un acre abfolument
contraire, comme celui-ci, aux Saints Canons & aux Ordonnances du Royaume; fans douce il feroit également tombé
par la voie de l'appel fimple, parce qu'aucun corps ne peut
fans motif faire le préjudice du tiers, même pour [on propre avantage; & il fuffit que Mre. Lardier ait eu le choix,
pour qu'il ait pu légîtimément préférer l'appel comme d'abus.MI'. l'Avocat-Général conclut à ce que faifant droit aux
lettres d'appel comme d'abus de Mre. Lardier & à [e requête incidente, [ans s'arrêter aux fins en relax de l'Econome
du Chapitre, il fCIt dit Y avoir abus dans la délibération
dont s'agit, & que l'Arrêt qui interviendrait fCIt déclaré commun &', exécutoire contre l'Econome des anniverfaires; &
,
�·
DU. PAt AIS . DE
PROVENCE:
~09
au moyen de 'ce, il lui fût enjoint de payer ou faire payer
toutes lés fommes & rétributions provenant des anniverf.1ires affeél:és au Chapitre, & qui avoient été arrêtés.
Arrêt du 17 Mai 1776, prononcé par M. le Premier Préfident, conforme aux conclufions; les Economes furent con~
damnés aux dépens. Plaidant Mes. Gailler & Portalis.
AR RÊT
XL l V.
On peut faire informer au nom & pour l'intérêt d'une Communauté fans délibération précédente, pour ne pas donner à
l'accuft connoijJânce de la plainte.
L'erreur commune valide tout ce qui a été fait.
ES plaintes réitérées fur J(~s fraudes & contraventions
qui fe commettoient dans la vente de différences denrées, obligerent les Maîtres de Police de Quinfon de faire
des vifites dans les différences boutiques. Ils trouverent dans
la boutique de Baudilfon, Revendeur, deux balances dont le
poids n'érait pas conforme à celui de la Communauté; ils
en drelferent leur procès-vetbcl le 16 Juin 1760. Quinze
jours après, ils fe tranfporrerent encore chez Baudilfon, &
trouverent le même abus; ils faifirent les-,mefures, drelferent procès-verbal, & remirent le tout riere le Greffe; ils
préfenterent enfuite une requête de plainte au Juge du lieu
au nom des ConfuIs ; l'information fut ordonnée, & fur les
charges Baudilfon fut décrété d'ajournement. Il appella de ce
décret & de ce qui l'avoit précédé & fùivi; les pourfuites
furent difcontinuées pendant quinze ans, & furent reprifes
en 1776.
On difoit pour Baudilfon, que la procédure érait nulle,
parce que les Confuls avoient agi fans pouvoir; il dl: défendu par ·Ies Loix de plaider, fur-tout en demandant, au
nom d'une Communauté fans un pouvoir exprès du Confeil
de la ..Communauté.
'...... - ... L. nulli 3, .If.. fjuod çujufcum(jue univ.
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nom. fta l'Arrêt du Co.nfeil d'Etat ~u 18 Novembre 1,6g~,
fait en particuLier pour la Provence', la Déclaration du- Roi
du 2, Oél:obre 1703, &: Bonnet, leu. C, n. ~, qui rapporte
des Arrêts qui coodamnerent les Confuls de Quinfon qui
avaient plaidé au nom de la Communauté fans un pouvoir de
fa part. Il faut encore rapporter une Confultation qui doit
être communiquée à un autre Confèil de la Communauté,
&: avoir la permiffion de M. l'Intendant; ce qui dl: établi.
par les Arrêts de Réglement de la Cour des Aides, rapportés par Bonifaee, rom. 4, liv. 10, tit. 3, chJlp. 2" &:
par Bonnet, leu. C, n. ~.
La délibération dont s'agit el!: donc nulle, & celle qui <l'
été prife enfuite, portant ratification de la procédure, I:efi:
auffi, puifque ce qui el!: nul ne peut fe ratifier, fur-rou,t au,
préjudice du droit acquis au tiers. ( Silvecane dans fan
Commentaire fut les infiit., liv. r ,. tit•. ro; Duperier, liv.
4, quefi. 8. )
De droit commun, route délibération fur procès do,it être
précédée d'un Confeil de tous chefs de famille, fuivanc l'arr•.
ro de l'Arrêt du Confeil de r68r, la Déclaration. du 2, Octobre 170}, &: ce que dit Froment'!l, pag. 78•. Dans le Confeil dont s'agir, il n'y a eu que douze délibérans., compris
les rrois ConfuIs , tandis que le Réglement en exige dix-huie
aux Confeils généraux.
Il y a plus:. 1.'1 plainte anroit d{i être portée à tout autre
Juge, parce qu'il s'agiffoit de faux poids & fauffes me[ures.,.
qui eH un crime de haute Police.
On répondoit .pour la Communauté ,·que le défaut de délibération ne couvrirait pas le crime; il pourroit feulement
faire condamner les délibérilnS aux dépens en ,propre en,cas.
de fuccombence. D'ailleurs dans le ,fait aél:uel,. il Y a dix délibérations qui parlent de ce procès, qui l'adoptent, ,qui djfpofent, foit pour le finir à l'amiable, fi les offres font fatisfaél:oires, foit pour le pOj1rfuivre; ces pélib~ratiQns font
légales j elles [Ont conforcpes au Réglemet:lt, Hui veut qu'il
y ait dix-huit délibérans, y c;ompris l~s Confu\s, pour les C.9llfeils ,généraux, &: douze pour les. Conlkils particuliers, 'Or "
�D,U PA~AtS
n~ ~ltOVI!NCI!.
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enes [dot prlfes par douze deliberans, parce que lorfqu'il
s'agit de plaider dans un procès criminel pour fraude, ce qui
el!: un cas preifanc, il n'el!: pas néceifaire de convoquer un
Con{eil général.
Le cas 'dont s'agit n'étoir point de haute police; les faits
n'éroie~t pas aifez graves: d'ailleurs il n'y avoit point de
Juge Royal; le Juge du PrévÔt connoiffoit de tous les cas
qui lui éroient po nés. L'Arrêt du 6 Mai 1768 après regiftre, au rapport de Mr. de St. Jean, confirma la procédure
prife dans l'affaire de Me. Cherin, parce qu'en fait il fut
prouvé que le Juge du Seigneur avoit toujours tout fait, que
jamais Juge Royal n'avoit été nommé. En droit, error communis facit jus; l'ufage & la bonne foi font un Officier de celui qui ne l'el!: pas & qui ne peut pas l'être; cet Arrêt renvoit
au Juge Royal pour ce qui el!: à faire, & confirme ce qui
éroir fait.
Me. Meriaud, Subl!:itut, examina d'abord la procédure;
il trouva que la contravention de Baudiifon étoit conl!:atée
par des preuves complettes, & que le décret d'ajournement
étoit relatif & conforme aux charges.
Le crime de faux commis dans les poids & mefures a
toujours été regardé comme un crime grave; ceux qui les
fallifient ou qui en emploient de faux ,.font punis févérement.
Serpillon dans fon Code criminel examinant la quenion ,
dit que ceux qui vendent à faux poids ou' à faufIe me{ure de
deifein prémédité, doivent être punis de la peine du banniffement, ou amende honorable, ou du blâme, & toujours
avec quelques aumônes, à caufe du vol fait au public. Il
rapporte deux Arrêts du Parlement de Paris. Muya"rt de Vou':
glans, dans fes ~nl!:ituts ,criminels, le d,écide de même. ,
Mais fi le decret d'ajournement dOIt fublil!:er, peut-JI en
~tre de même du décret de foit informé? xo, (dit-on) aucune
délibération de la Communauté qui autorife les Confuls dans
leur p'ourfuite: 2°, incompétence' du Juge qui a prononcé;'
c'etoit un cas de haute police, ,il falloit s'adreifer au Juge
Royal: 3°, La Délibération qui paraît avoir ratifié le défaut
•
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d'aaion de la part des Confuls efl: nulle, én ce qu'eUe n'efi:
pas compofée d'un nombre fuffifant de délibérans.
Il n'efl: pas de maxime plus certaine que celle qui veut
que couee aaion foit légitimée par l'intérêt & le pouvoir
de la perfonne qui la pourfu-ir; les Confuls , en leur qualité
d'adminif1:rateurs, de peres de la patrie, doivent pourvoir à
fes befoins, trouver des relfources dans les néceffités , & foutenir [es privileges; l'intérêrêt public, l'intérêt particulier
leur font également confiés; cone ce qui peut tendre à conferver la liberté du cicoyen ,à maintenir la paix & l'union
dans la fociété, doit être l'objet de leurs [oins. Tel devroit être
le but de tout AdminiHrateur; tels font les motifs fans
doute qui ont engagé les Con fuIs de QuinCon dans leur pourfuite; on leur déférait des abus révoltans, des fraudes réité.
rées, qu'une fage adminiHrarion ne pouvait laiifer impunies;
leur pouvoir limité dans des bornes étroites, ils ne pouvaient prononcer des peines proportionnées au délit; gémiffant en fecret de ce défaur d'extenfion , craignant ,.avec raifan, qu'une négligence trop ttlarquée de leur part n'amorifât la licence, ils fe pourvurent au Juge du lieu, dont les fonctions pouvoient cout-à-la-fois fatisfaire les droits de la Communauté, & ceux de la J~IHice. Pourroit-on les rendre re[ponfables de trop de zele, de trop d'aaivité? Sans doute
ce même zele, cecce.même aaivité ne pouvoient jamais faire
oublier aux Con fuIs de QuinCon quelle écoit leur qualité;
que fimples 'adminiftrateurs de la Communauté, ils ne pouvaient agir en [on nom [ans l'avoir préalablement confultée,
fans avoir obtenu [on amorifation; les régleinens de co.ute
Communauté impofent cette obligation; la crainte dLl pouvoir arbjtra.ire a diaé la [ageife de ce's Réglemens ; une
malheureufe expérience n'a que trop Couvent appris qu'il s'dl:
trouvé des per[onnes qui, plus jaloufes de [atisfaire leur ambition, n'ont pas craint de [acrifier l'intérêt général à l'intérêt particulier; d'ailleurs il eH naturel que 'ceILli au nom
du_quel on agit connoiife les défenfes', les exceptions qu'on
.
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�D U PAL AIS D E PRO VEN C E.
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lu·i oppoCe j les Confuls ne font que des adminifirateurs;
ils doivent compte de toutes leurs opérations j tout ce qu'ils
font fans le confentement de la Communauté, contre l'intérêt
de la Communauté, doit leur être imputé.
Mais fi la forme a paru être oubliée dans la pourtuite du
délit qu'on défere à la Juftice, quoique les Confuls de Quinfon fu1Tent fans pouvoir de la part de la Communauté, fautil lai1Ter le délit impuni, autorifer la fraude & la mauvaife
foi? Les dépens font la peine du téméraire plaideur; les
Confuls les fupporreroient en propre, fi le délit qu'ils pourfuivoient, éroit un délit imaginaire; l'intérêr de la Communauté feroit confervé, l'intérêt public ne fouffriroit pas.'
Mais fi I,eurs pourfuites ont éré légirimes, fi Baudi1Ton eH
un prévaricareur, un fau1Taire. la Communauré a à fe .féliciter de la fage1Te de fes AdminiHrateurs, de ,leur atremion
à veiller auffi e1Tentiellement à fes droits. Le délit qu'on a
défé·ré ell: grave, confl:até par la procédure, réprimé par des
peines féveres j des Confuls ne pouvoient le lai1Ter impuni;
ils ont reconnu avec raifon la néceffiré de le pourfuivre , il
faut donc rendre hommage à une conduite érayée fur d'auffi
bons motifs, & dont J'événement doit produire un fi grand
avantage pour le bon ordre & pour la tranquillité du cifoyen.
.
Le Juge de Quinfon eH-il compétent ( continua Me.
Meriaud )? Il.obferva qu'à Quinfon la JuHice ell: divifée
en haute, moyenne & ba1Te; la haute-Jufl:ice y·appartient au
Roi, & la moyenne & ba1Te au Prévôt de Barjols, qui nomme à cet effet fes Officiers. Il efl: de maxime que c'efl: la
nature du crime, fes circonfiances , qui doivent décider de
la compétence des Tribunaux en matiere criminelle; il ne
peut être au choix des partie~. de, ~e donner des Juges au
_
préjudice des regles & des !OIX generales. .
Le crime de faux commIs dans les pOIds & mefures a
toujours été régardé comme un crime gra~e.,.pun~ des peines
les plus féveres. Bonnet dans fon RecueIl d Arrets, dJr que
les Juges de Police fom en droit de connoître des fairs
de police, ram pour le civil que pour le crimineh, & il
Années l775 & l77 6•
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rapp.orre· ':-UJJI Arrét> du I I .Eévrie.r 17t ~ qui confir~ la
prooMlU'e -PJlife,(tar, le Jùge d.UJ lie.u <te Vlliauris. ki la queftian fe' tro.u·ve. différente; les Seigneurs renferment fouvent
la haute, moyenne & baffe Julbce ; nul doute alors que la
connoiffançe" des faits de police ne leur foie attribuée, &
eell-Ià fans doute le motif de l'Arrêt rapporté par Bonnet;
mais 10rfq.ue1<~ans une' Jurifdiél:ion les fonél:ions des Officiers
fe trouvent ~diyifées , les raifons de décider ne peuvent être
les mêmes ,. & il efl: néceffaire alors d'examiner la compéten(!e des uns & des autres.
• Quels. fom les cui mes, dO.nt· lâ· connoiffance appartient à
la- ~aute·-Jufl:ic.e? Un Arr.êt de régLement rendu le t t Mai
1:.6 H, rappoDté par Boniface, & rappellé par M. de la
Touloubne' dans. fan Recueil de Jurifprudence féodale, en
fait le détail.: les meurtres, aj)âffinats, agrejJions, vols,
hlejJures a1'ec effufion de fang, adulteres , rapts, incefles ,fèditions, monopoles, facrilege ,pécl!lat & autres qualifiés, &
tous crimes puMics &. autres pour la punition defquels, par dif
pefition de droit, d'ordonnance Oll de coutume, il Y a peine
de mort naturelle Oll civile, mutilation Oll abciJJioTl de membre, amende honoraMe , fouà, bannijJèment, & toute -autre
peine corporelle avec infamie, fom de la connoiffance des
Officiers du Seigneur haut-Juflicier. Le moyen JuHicier con-"
n.oÎt des aU~Fes crimes qui ne fe vengem pas paF ces peines,
& de rour.es les autres matieres & aétions. civiles, réelles,
perfonnelles & mixtes.
. Le Juge du Prévôt de Qilinfon n'étoit donc pa.s compétent , & on n'héfiteroit pas 1v conclure à la calfation. de la
procédure fi un moyen plus apparent n'érait préfenté par la
Commllnauté. Quoique la; Juflice fe trouve divifée à Quinfon, il elt de fait cependant que le Roi n'a nommé aucun
Juge pour remplir les fonél:ious qui concernent la haute-Juftice, & que toutes les procédures 6nt été portées pardevant le
Juge du Seigneur; cette erreur a engagé les Confuls à porter la plainte pardevant ce Juge; l'erreur érait commune; per(onne n'ignore quelle eH la force & quel doit être l'effet
d'une pareille erreUt; elle valide les aél:es les plus nuls.
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PAL Ail S
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VEN C Il.
Lorfque les Loix font demeurées fans exécution, & qu'un
ufage contraire a prévalu, on ne peut plus invoquer leur
fageife ni leur puilfance ; on peut bien les renouveller ponr
l'avenir', & arrêter le cours des contraventions par une attention exaél:e à les faire exécuter; mais tout ce qui à été
fait auparavant, fubfi!l:e & demeure inébranlable, comme s'il
érait· mU,ni du fceau même .de la Loi. Çe; fut.d'après ce principe que la Cour, par fon Arrêt du 6 Mai 1768, confirma
le d.écret & la procédure prife à la requête de Me. Cherin,
! par tes Officiers de "Qulnfon, cont~e ,quel,!ues particuliers du
lieu" 'iufqu'au ionr.de-la réclarnat'Ïon.
Quant au moyen tiré du défaut 'de nombre des délibérans,
il eH auffi peu fondé que 1(:s autres,; l'art. 1 du Réglemen t
de la Communauté de' 1730 porte que le Gonfeil de la Communauté fera 'compofélde dix-huit Confetllers compris 'les
Con fuIs vieuxc& nouveaux [pour' les Gonfeils généraux;' &
l'art. 2, veut· que 'dans les Confeilsl p'articuliers douze, Con.
feillers, y compris les Confuls " fuffifent pour y délibérer;
· quand même le ,nombre des d~libérans ne fe' trouveroit pas
· dans la délibération dont s'agit, elle auroit été confirmée
-par. celle. qui fuivit.après, &.qui.fut.compofée du. nombre' d.es
délibérans requis pour le Confeil général.
Me. Meriaud _conclut à ce que l'appellation fût mire au
. néant , & que ce 'dont était 'appel tînt,& fonît fan plein &
· entier effet, avec 'fenvoi. & amende.
Arrêt du 18 "Mai 1776, prononcé" par M. le Prélident de
.Regulfe , conforme amr conclufions ; Baud'ilfon fut condamné
~auJ(Jdépens.IPlaidanr Mes. beclerc & Gaffier.
Le . motif de JI Arrêt fut qu'il falloit une délibération pour
-plaider fur l'appel, ~Sç-qule? 1774. il en a.voit été· p.ris deux
.contena.nt approbation' tacIte, malS que .pour faIre IOformer
il n'en falloit point, pour ne pas donner connoilfance à la
partie. du projet de plainte.
Tt t
2,
�JOURNAL
,-,
ARRÊT
XL V.
Au·préjudice de l'appel d'une Ordonnance préparatoire ou
d'injlruc7ion, on peut continuer une procédure en faux Weldent•.
P
Ierre Parat de la Ville des B"ux fut affigné, par exploit
du 3 l Oétobre 1774, pour comparoirre le 2 Dhembre
chez un , Notaire, pour défemparer à Catherine Parat, par
· la voie du n!trait, la partie de maifon qu'il avoit acquife de
· Calixte Parat fon fr~re. Pierre Parat ne comparut pas. Le 4
Decembre nouvelle affignation à l'Audience pour faire la
· défemparation; on communiqua l'aéte de comparution chez
-le' Notaire contrôlé; la copie de l'exploit f.ifoit mention
qu'ilavoit été en même temps donné copie de l'aéte de
comparution; cet aéte n'avoit été enrégif1:ré que le 3 Décembre ; Pierre Parat crut que l'aéte de comparution n'ayant
été contrôlé que le 1'l Décembre, n'avoit pu être communiqué le 4,
Pierre Parat s'infcrivit en faux incident envers cet exploit;
il conGgna l'amende, il préfenta fa requête en permiffion de
s'infcrire en faux; le même jour il fit fommation à Cathe, rine Parat, pour déclarer fi elle entendoit Je fervir de la
piece. Catherine Parat demanda le renvoi''<!e, la caufe à des
Arbitres, attendu la parenté des. parties; fur leurs défenfes
refpeétives, le Juge des Baux déclara la caufe entamée, or· donna -le ·paraphement de l'exploit & la rémiffion riere le
· Greffe; & par aucre Ordonnance, il ordonna qu'attendu l'infceiption en faux, il ferait furfis au renvoi à des Arbicres ;
jufqu'à ce que les moyens de faux eulfent éte jugés. Catherine Parat déclara appel de cetce Ordonnance; Pierre Parat
demanda & obtint que nonobilant l'appel, il ferait pourfuivi
fur fon infcription de faux incident.
Pierre Parat fit fignifier le décret. La caufe fut audiençée;
�.
DU
PALAIS
DIl
PROVIlNCIl.
)77
le Procureur de Catherine Parat contefia la requête 'eo ine:
crip.tion de faux, parce que Pierre P.arat n'avait pas formé
fan }n~cription dans les vingt-quatre heures, à compter de
la rer,t1Iffion au GrefFe de la piece maintenue fauffe, conformement à l'art. 1 S d!J titre qu faux illcidmt de l'Ordonnance de 1737, Pierre Parat fomint au contraire que toutes
les procédures faites par Catherine Pa rat depuis fa déclaration d'appel, & avant que le nonobfiant appel eût_ été ordonné, étoient nulles, attentatoires, & qu'elles devoient
être calfées, & que là. où ces procédures viendraient à être
jugées légitimes, il fallait, fuivant l'art. 12; ç1u même titre;
rejetter la piece arguée de faux, faute par Catherine Parat
de n'avoir pas fait une déclaration précife fi elle vouloit fe
fervir ou non de l'exploit maintenu faux. Le Juge par fa Sentence du 26 Avril prononlj'a la ca1Iàtion des procédures faites
depuis la déclaration d'appel, ordonna qu'elles feraient rejettées du faux incident; celles faites avant la déclaration
d'appel, & depuis le décret qui ordonnait' le nonobfiant
appel, furent maintenues; & en conféquence il fut enjoine
à Catherine Parat de déclarer dans trois jours, d'une maniere précife , fi elle entendait ou non fe fervir de l'exploit
argué de faux. Appel de la part de Catherine Parat, & requête incidente en révoçation du décree qui permettait ~e nonobfiant appel.
On difoit pour Catherine Parat qu'au préjudic,e d'un appel,
on ne pouvoie continuer une procédure en faux incidenr. Tout
appel a de [a nature un effee fufpenfif; ce principe général
préfente plufieurs exceptions dans lefquelles les Juges doi.vene fe renfermer, lorfqu'ils ordonnene le nonobfiant appel;
ces exceptions font marquées par l'Ordonnance. En matiere civile, routes les affaires fommaires y font exprefféme ne . affeél:ées ; les Juges ne peuvent s'en écarter, fur-tout
depuis l'Arrêt de Réglement du 2), Février 1699, qui, leur
en faie une loi expreffe, en I~ur defendant de les apphquer
.à d'autres cas que ceux marqués par l'Ordonnance,
Pierre Pa rat ne fe trouvoit dans aucune de ces exceptions:
qui dit aÇle (1'i~jlruc7ion, dit ac7e préparatoire ait Jugement;
'-
.
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'J
0
U R N FA r.
"m'ais, 'lés aél:es préparatoire's 'lfèuvènt qtle'lquefbis 'préjudicier;
les Ordonnanéès' de 'pièc'es mifés, tes Arrêts à écrire 'au
Grèffe, les diHributiolls 'à lin COinrtlilTàire fone des aêtes de
'Pure infiruàion; è'ep'éi\d<lnt 'l'appel l'envers ces'Ordonnances,
,la 'révocation envers ces Yl.rrêts operent un effét fufpenfif.
On d'oit liiflinguèr les'Ordonnah~es d'inHtuél:ion rendues dans
lès caufes fommairès, d'av'ec celles tendues dans les procès
'Ôrè!inaires Hone l'appel a toujours un effet fufpenûf.
Pierre 'Parat a-t-il pu s'infcrire en faux contre l'exploit
libeUé fur lequel 'il a été ajourné en défemparation de la
terre à lui vendue FIaI' voie de retrait? Cette infcription de
faux' étant légitime, ne dOit-il pas en être déchu faute de
l'avoir formée dans 'le délai que l'Ordonna'nce lui prefcrivoit?
-Pierre Parat préfente fa requête en infcript,io'n de faux; il
fait fommation à Catherine Parat à l'effet de l'obliger à dé'c1arer fi eUe vouloit ,fe fervir ou non de la piece arguée
ae faux; la déclaration efl faite, l'infcription devait l'être dans
les vingt~~uatre heures; ( arr. 1 S de i'Ordonnance au titre
(Je l'infcription du faux incident) Pierre Parat ne l'a point
fait; Catherine Parat demande le déboutement de la requête,
à l'effet 'd'être procédé au jugement,du fonds; Je Juge, par
fon Ordonnance, bien loin de s'arrêter à fa requifition, prollohce la nullité des procédures faites depuis l'infcription de
faux.
TeHès font les Ordonnances dont Catherine Parat a appellé pardèvanc la Cour; on) rie peut pas dire que ce foient
des Ordonnances 'de' pu're infhuél:ion, & ,dont l'appel n'a
pas un effet fufpenfif. On ne fauroit comparer une demande
èn faux incident à urie' demande en enquête que Cour ordonne quelquefois pour l'inté'rêt des·'parties pendant l'appel de la
Sentence interlocutoire. Là, les' parties n'intervienrient pas;
ici, la procédure fe' fait en contradiél:oire défenfe : là, la prd.
êé'dure peut être prife par tel Juge qu'il plaît au Parlement de
commettre ;' dans celui'-ci, c'eH [toujours le"même Juge fllifi
du fonds qui doit en cobrioître.·11 en eH de' même de' l'ajomnêment auqûel l,a demande de faux incidènc ne faurait être
éomp'arée, puifqu'une a/lignat'ion Jpeut être donnée par un
la
�DU PAL A 1.5, D Il ~ R 0 V Il N C B.
~(t9
Qmple r ~1'P..J9i~ 'Iib~llé faps autor.ifat.ion du Juge; au Ij~u que
la dem,!nde en infcription de faux dl. foumifè à' des [ormilités. qfle le demanqe4r ne lieue méprifer t~~s' ~n. être d'édiü.
L'OrdonD'lnce qui permet l'infcription de fa4x n'ef~ dpne
point une Ordqnnance de Rure infiruél:ion; d'ail)"u!s elle s'accord.e ou fe refufe, felon les circon-flances ; ce (ont les motifs qui la d,éterminent ou la rej~t;.ent.
'.
,
,.
Suppofé que l'Ordonnance qui permet l'infcripti.on de fa,llx
ipcident ,fût une Ordont;lance de pure infiru,~ion ,. &: d.o.nt
~ appel n auroit ~ucun ejfe~ fufpenGf, 1?ierre Par~t (e~oi.~ touJours mal foncie dans l~ lI~nob(l:ant appel qu'~1 fÇllli.cite,- P'lr
l'appel que Catherine Pa!:\u a re.Iev,é env~rs la, ~e.ll;t~1}çe du
26 Avril. Ce~te Ordonna.nçe lie Jleut pa,~ ê.t~~ ~~ga,rd~~ c.o,mme de pure infiruél:ion, pl)i(que Cat~e~ine P~r\l,ç. denJfln<:Je
pardevant la Cour que la Sentence foit mire al,l, n,~D,t, &
que par nouvea.u jugemenç, Piene J?\lrat (ç>it déçh.u. de fa
demande en infcripti.on de faux, .sç qu'il fait p.roçéd~ au
jggement d,éfiniti~. La Cou~, efl confirn~a,t;l,t. cette Q,ljd.onn,al),ce,
juger-oit que Pierre Par\lt feroi,t r~ç~vabJe ~_ font.\er fotl, infcription cie faux après le délai p,or\é p,ar l'Ordonna,nce; ceçte
Ordonna.nce efi une Ordonnaç,ce Jlo,rtanç pra,f,i,r.
On répondoit pour Pierre Par\l~ 1 q\le les :l.él:es p.réparatoires au juge~ent fçl1'1,t des aél(es d'infiruél:ion dan~ l'ordre
de la pro.c~dure, & les aél:es prépar<J,toires ne pe\!.ve~r préj\!dicier à perfonne ; il ferait dangereux, quelqu~fo\s irrép'lrable d'en arrêter le cours, ne fût-ce que pour prévenir le
dépéri!fement des preuves, ne probationes pareant. En fait,
Catherine Puat a appellé pardevant la Couç des jugetrje ns
d'infiruél:ion dans une pracé~ure préparatoire à une infçr!ption de f~ux:, & il Y aurait le plus grand péril d'en fufH.e 0.dre l'exécution; le dépéri!felTJent, ou plutl'lt la perre entlere
_ des preuves, en ferait la fuite in~vitable. La Çpur le reconnoît touS les jours, lorfqu'el!e ordonne Rendant l'appel d'une
Sentençe interlocutoire qu'il fera procédé à l'enquête de~andée, afin que 'l'in'fé~çç des' Parties pui{fe' ~tre confervé•
. L~ pr~r;nier jugernenç dont Olltherine Pqr'lt a appell~ pardeva,Jlt 1'1 G9Ur, po.rtoi~ p,ermiflion de s'in[çrire en fqUlSi c~lte
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.
.
permiffion ne peut jamais être refufée. La vç>ie de l'infcrip.
tion de faux dl: une voie légale; il fuffit qu'une panie à laquelle on oppofe un acre le fourienne faux, pour devoir lui
permettre la procédure qui doit en fixer l'état; ce n'dl: point
lors de la permiffion de s'infcrire en faux, qu'on pere l'intérêe
& les moyens du plaignant; c'efl: en jugeant b validité de ces
moyens qui font donnés enfui te en la forme prefcrite par
l'Ordonnance.
La permiffion de s'infcrire en faux n'dl: donc que le pre·
miel' des acres préparatoires à l'infcription de la procédure
en faux, & conlequemment l'appel d'un pareil décret n'a pas
plus d'effet fufpenfif que l'appel d'un décret de foit-informé,
ou de tout autre décret de pure procédure & infiruél:ion. Catherine Para! a exécuté le jugement dont elle fe plaint; elle
a palTé fa procuration, fait fa déclaration au Greffe; elle ferait à cet égard non recevable & mal fondée.
Le recoud jugement dont Catherine pàrae fe plaint, n'efi
ég~lemellt qu'un jugement de pure infhucrion relatif à la procédure préparatoire de l'infcription de faux. Ce jugement
calTe les procédures qui ont été faites depuis la déclaration
d'appel, & avant que le nonobHant appel eôt été ordonné,
& enjcint à Catherine Parat de .déclarer précifément dans
trois jours, fi eHe entend fe fervir ou non de la piece arguée
<te faux; les parties font remifes au même état oll elles étoient
auparavant; & Catherine Parat bien-loin d'avoir à s'en plaindre, y trouve au contraire le plus grand avantage, puifqu'elle
a la faculté de réparer les vices de fa procédure.
Me. Meriaud, Subfiirut, obferva que le crime de faux dl:
une fuppofition frauduleufe pour obfcurcir la vérité & faire
paroître les chofes autrement qu'elles ne font; le préjudice
irréparable que ce crime porte à la fociété, les conféquences
dangereufes qu'une tolérance trop marquée à fan égard pourrait produire, ont fervi de motif aux Ordonnances de nos
Rois, conformes à la prulience & à la ragelTe des Loix Romaines dans les peines féveres qu'elles ont prononcées. On
ne fauroit veiller avec trop de foin à l'exécution de ces re~
gles. Le Magiarat, obligé par devoir à réprimer les abuS'
qu'on
')20
�1
'p. 1
t;u'on luïdéfere', doit être attentifà les prévenir; il.ne peut
y reuffir que par des exemples rigoureux & déterminés par
les circonGances.
\
On diGingue deux fortes de procédure da~s l'infcription.
de faux; celle en infcription de faux principal, & celle en
faux incident; dans la derniere, il fuffit qu'une piece foie.
fignifiée, produite ou communiquée, pour autorifer la partie,
qui la prétend fauffe, à prendre les voies qui doivent la
mener à la faire déclarer telle. L'infcription de faux n'ell:
pas une aél:ion qui doive- être formée légérement; les parties, animées quelquefois par un efprit de mauvaife foi & de
chicane, pourraient fe fervir de cette voie pour éloigner
un jugement qui profcriroit leurs inju!l:es prétentions; les
circon!l:ances en déterminent ordinairement le forr, & le Juge
peut l'admettre ou la refufer, relativement aux objets q~'on
foumet à fa décifion.
Mais lorfque la caufe par fa nature exige cette précaution,
lorfqu'il e!l: de l'intérêt abfolu de la partie de prouver la
fauffeté d'une piece, dès-lors rien ne peut en arrêter l'exécution; l'in!l:ruél:ion doit en êtr;e faite avant de paffer-au jugement du fonds. Le dépériffement des preuves, l'intérêt de
la partie à prouver cette fauffeté, exige cette célérité. Le
citoyen ne peut être privé de la faculté de faire valoir fes
aél:ions en ju!l:ice: faculté précieufe & qu'on ne peut anéantir
fans porter atteinte au droit le plus facré de la défenfe.
Les formalités pour l'infcription de faux font de rigueur~
le demandeur en faux ne peut s'en écarter, fans infeéler fa
procédure d'un vice irréparable; ces formalités nous font,
marquées par l'Ordonnance de 1737: celui 'lui voudra former
fa demande en faux incident, porte l'arr. 3, préfentera une
refluéte tendante à ce qu'il lui [oit permis de s'infcrire en faux
contre les pieces qui y feront indiquées, & à ce flue le défendeur [oit twu de déclarer s'il entend fe fervir des pieces; la
déclaration faite & la piece arguée de faux remife au Greffe,
le demandeur formera [on infcription de faux dans les vingtquatre heures; & faute par lui de le faire dans ce temps, il
en fera déchu.
Af/nées 1775 & 1776.
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: S".ils,t!Œî vrai :en 1 pdncipe"$énéra.\ ·que tout appel: a' de'
fîâfpré' .un ~ff~t- fu~eilfif; 'ce.1prinçipe re'{Oit des 'exceptions
qui nous font marquées par l'Ordonnançe, & defquelles le
Jugés' nè peuvent s'écàrter dàliS les nonobHant appei qu'ils
ordonnent. En maÎiere civile, les affaires fommaires font>
exécutées no'ilob,fl:ant l'appel qu'e la partie condamnée en a:
l'elevé.; oil .a 'reconnu avec raifei'i ''qu:il ne conviendroit pas
clé foumenre Je9-- partiês. à des .longueurs de procédures, à
des chicanes, à' des véxaÎions poul' des objets de petite valeur & qui feraient bientôt anéantis pai les frais immenfes
auxquels leur pourfuite donnerait 'lieu.
, Dans toutes matieres de pure in1l:ruél:ion, & qui tendent à
procurer des éclairciifemens au jugement de la caufe, la
po~rfuite ne fauroit être difcontinuée. S'agit-il d'une Ordonnance interlocutoire? On ordonne la confeél:ion de l'enquête pour demeurer c10fe & cachetée, à l'effet d'obvier au
dépériifernent des preuves qui pourroient dépérir pendant
l'infiruél:ion de l'appèl. :La partie qui demande de s'infcrire
en faux', ne fauroit être' ârrêtée dans l'inftruél:ion par un appel
fouven~ ldénué de fondement ," & que' la mauvaife foi de folt
àdverfaire ne manqueroit pas toujours dé lut oppofer. Quelle
ferait alors fa fituatron? On le pourfuivrait filr le fonds, &
on le pdveroit en .même temps des exceptions les plus fa·
vorables, les plus avilOtageufes qu'il pourroit produire pour
fa défenfe, en-lui interdifan't toute pourfuite fur fan înfcripfion; tandis que fouvent c'eH le feul moyen qu'il puiife faire.
valoir pour anéantir la demande injufte qu'on forme contre
lui.
~ Pierre Parat reconnaît une fauifeté dans l'exploit libellé
d'aiour'nemem; il s!en plaint, il veu~' ia faire conftater; fan
intérêt étoit prelfa nt , les circanf1:ances déc,javes; le Juge ne'
poul/oit \fahs inju.fiice fe débouter de ,fa, demande. D'ai'lleurs
ce n'ell: j-ama·fs d'ans le principe, & lorf{ju'ofl .forme une de~
mande en inftrip'tion de' fau){,-~~'dait juger de fon m~rite
& de foll' fondement; c'e!l: en· jugeailt 1é fonds.& les moyens
qlle.1a partie 'a fourni '" qu'Ol'l juge' s'il- l'a bien ou mal in-'
tentée.
'
•
1
�Ill{ OVBNCB.
$2>3'
• La préfe,nJâriej}·ae :BieÜè.JJ?,ïlrit fllr ile~ ~xplo)tè~ ;~;I\i
valide.r.q.ue les viçes. .(wÙiellr.s i;i01"iPJJpffqv?llni,~,Gl:e ~§ ~\tI,
& que fa nullité ,e! intrinfllqll~_t~qll'ell~~ t91-l<;h~na.uJW!ài py.
DU
PAL A: $. nDBu
bJic ,.çès-Iors.la: p.réfemaJioJlqde:h :pà.r§ÏeJ!n.e p.e IA~~1';
mer ":&. il :dt rou~0urs :reç à"~ quere!l~l:) ..4.1l5{lU.tLit~~~~~
leuis, pouFlformer :fun. io[~ripfion .dé iiitultJ .j~:~.n.1P~ç~Œ~)j;
de préfenrer. L'Ordonnance donc Catherine' ~l1rat'(t:.:<p~aÎ,l!ç
n'en donc qu'une Ordonoaiice de pure.~in{lt1lai.on,'4 qui ne
pouvoit être ,refufée ;ll'appel qu~elle en a';-elevé Ile [au1;Qit en
. . l' executwp
' '"
arreter
,) .
1
1
~
')J~"'• • Jl . . . idir.c:.n.J
.Mé. M~tiaud' examina tenfuite fi l'll.IWelt .relevé- tnY.er$ 1",
Sentence .du. .26 Avril"he deyojt p,as ;ll/O)r yp ~ffet li fpJ:!JM. Il obfervJ que) I~Qcrl.ônlÎance porte ql,l~ l'infcriptibjJ de
faux fera fnrmée.dans le's·ving't-.quat·re heures; mais (ajouta-t-il)
Pierre Parat pouvoitt'il ;tef!lpJirlicett.e fQtQJaJili. d'l1lsi le.s..ëi,rr
confiances..?: .Ca:rherin~Par.at :à\1'Qit a:~ileJlé.tdeJ'Ord,Qn!1'a.ilce
du 1..9 A\iràf.. QUoiqli'èrJe tè Joj Aé(iHé~dF cetc appel "il !le'tl
exifl:oit PaSJ moins à .l~épnque~qtl'pb\~pp6l1<t;: e\le, j'ait. fa
déclararion Je '21 ; à €e~tehip,dquede :IlQ)l~fl:.aji<l@pp.eLtl'étQi!:
,.
pas ordonn.é; ,le Juge. ét6it· dépo\!illé.r;~~Jo.ljNes IgtlrrproPi.,.
dures qui étoienc faites, étoienc infeél.ées de nulliré. Cerce
déclara~ion_n'é(oiLp'olnt ,:.o':lformeA_ ~~ ~YQ.r.:dG.n.
nance. L'art. XI porte que la déclaration que le détendeur
~oit faire, s'il enterid...ou.n'enrencL .pas Fe fervir de la piece
maintenue fallife, doit êrre précife, c'eH-à-dire, formelle)
claire, fans équivoque, ni réferve, ni cO\ldit.ioQ p.a! oui OP
par non. C'eH ce qui a été jugé par l'Arrêt. rappnrté par
, ..
. • • • , . ' ~ ,-aux.
1 1
B rI'11 on, 'V0 " fi'
Il s'en faut bien' que la ,déclar,ation de Catherine' J~'l.!'lt
ait les qualités réquif.:s par, l'Ordonnance; elle 'entend fe
{ervir de l'explo1t argué dé faux du 4. Décembre ,. à l'ex.ception de l'endroit ?~ il fait ,?~nt}?,n d~ }'atl:e .de- comparution, dans le cas ou li en aU1101t rete: falC mentIon..dans la
copie. Cette déclaracion n'ell: clade .point claire &"précife;
d'ailleurs quand elle le ferait ,,;,el1e ne lui ;{erviroit pas
davantage, pour avoir été faite dans-un ·temps où elle n'en
V v v 2.
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. . " i ~~r ~, rl]: 0 Û iR.":N A r;. J 1. ~
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:avolt l'âs'le: pouvoir ni l~lfaculté, & où. te: Juge fe' trou":
~oi~ dépoutilé1'par>'llappel.. .de' la Sentence;' cette Semence
ne, f-aDmit pr6duire plus ,q~etfet que la permiffion de s'infcr.J~Jlehl faux-; elle :caffe des 'procédures- qui ne font pas léiidibh;,-&; ·remetl les"parties ilu même état qu'elles étoient
auparav~rit. L'appel' 'ui'en acété relevé ne peut ,donc arrêter
\'
l'
les .pOurfu:ites. .; _. ~ J ,
~:-'
Me. Meriaud .conclut.,à ce qu'il ftIt ordonné que fur l'appel ·de L{i;atherine. iParat. envers l'Ordonnance du 26 Avril,
enfemble fur fa requête en ampliation d'appel envers le dé..
-èréè1âû 19'rA ril,lil (eroit pourCuivi aioli qu!il appartiendroit,
-&~aepen'd"llft que faàs ptéjudice au· droit des'parties, & fou's
1a réferve' expreffe de· leurs défenfes & exceptions 'refpeai'ves dans les Inftancll"s d'appel,-Ies décret5.L& Ordonnances'
fllffent. provifoit'emertt ~e'Xécutée~,. & en conféquence p.ermis
'à' Pier.re Fa'ratli'dèi~onrinû·er. fa procédure en infcription de
[faux incident ,:.jufques, au -jugement définitif inc1ufivemenr.
. Arrê't-du :1:liIM"lij l77:6; prononcé par Mr. le Préfident ide
Reguffe, conforme>~ux condufions; ,.Catherine Parat fut
conda~l\ée aux ·dép~ns. Plaidant Mes. Simeon & Gaffiei.
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::- ~ ' .
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.5.1u
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~i.l1J 11
ARR Ê T
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1
.X L V J.
Tou! Juge efl compétent pour informer, déèréter & interroger.
'L
E 13' Avril 1774, André Rougier, Ménage!' du lieu'
d'Ollioules, fe plaignit aù Juge du lieu fur le décachetement 'd'une lettre dont il accufoit Loubon, Commis à la
-Pofte•. L'information fut prife, & Loubon fut décrété d'a'journement; il appella-parde,vant le Lieutenant de Toulon,
!<Iifanf-que s'agiffailil. d'un ·fait·de .Pofte, Je Juge-Royal POllNoit feul en ·cCmnoître. ~Le'jLieu.tenant confirma la procé.dure., fauf àLoubon, lo'tfqU;il fe feroit mis en l'état du décret'
..& qu'il auroit prê.té fes' réponfes, à propofer & faire valoi~
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�DU
PALAIS
DE
PROVENCl!~
_ ~11
fes griefs d'incompétence. Loubon appella de cette Sentence,
. & prêta fes réponfes pardevant un Commilfaire de la Cour.
On difoit pour Loubon, que le titre & le fujet de la plainte
attefloient l'incompétence des Officiers d'Ollioules.
Rougier accufoit Loubon d'avoir décacheté & enlevé un~
lettre; cette accufation portoit fur les fonélions de Loubon
& fur fon état.
'
Inutilement diroit-on que tout Juge efi compétent pour
informer, fuivant l'art. 16 du titre de la compétence des Juges
de l'Ordonnance de 1670, & la Déclaration de 1731. Mr.
~'Aguetfeau, auteur de cette Déclaration, attefle, lom. ~,
pag. H7, que le vrai cas de la maxime, qui veut que tout
Juge foit compétent pour informer, efi celui du flagrant délit.·
En effet, lorfqu'il n'y a ni flagrance, ni péril dans la demeure, poùrquoi permettre que l'on s'adretfe à un Juge qui
n'efl pas celui du délit ou de l'accufé? Hors du cas où l'on
doit un fecours prompt à l'accufateur, pourquoi lui permettroit-on une interverfion de Tribunal dont il feroit !efponfable
en matiere civile? L'urgence du cas exceptée, la compétence
n'efi-elle pas plus importante, plus précieufe, & par conféquent plus refpeélable au criminel qu'au civil?
On répondoit pour Rougier, qu'il n'y avoit point d'incompétence: 1°. l'Edit de 17'1) établit des Intendans-GénéraulC
des pofles qui doivent connoître de toutes les affaires des
pofles, à l'exception des délits & crimes dont la connoitfance
appartient aux Sénéchautfées, ou aux Lieurenans de Prévôts
des Maréchaulfées, fuivant la nature des cas : 2.°. la .Qéclaration du 2.) Septemhre 1742. ne dit rien fur la compétence,
mais feulement fur les peines qui fo.nt de la mort ou des
'galeres, fui'(ant l'énormité des cas.
y eût-il incompétence, il ne faudroit point calfer, parce
'que tout Juge efl compétent pour informer. Autrefois le Juge
.du lieu du délit ne pouvoit informer que fur le cas de flagrant délit. A préfent, dans tous les cas, il peut .informer,
décréter & interroger. (Ordonnance de 1670, titre de la
compétence des Juges, art. _16; Déclaration de 173 l, art.
�'f1.6
l'OURNAL
2. r; Lacombe; matieres criminelles, pan. 2., ch. l, 'n. 3;
Vouglans, patt. l ,tit. r, §. 1':2, , n. 3; Serpillon, tom. l ,
tir. l , arr. 1.)
Me. Meriaud, Subltitut, obferva que la Jurirdiaion eft
le pouvpir" l'autoriré de rendrer·à chacun ce, qui lui appartient. '·Mais 'ce droit de Jurifdiaion qui appartient à uri
Officier public, ne fuffit pas pour l'autorifer à connaître
indifiinaemenc de route forte d'affaires'; Il faut ,_ pour le
rendre Juge compétenr en cetre matiere , qu'il ait par fan
titre le droit de juger des affaires criminelles, & que le
cas donr s'àg'it fait de ceux dont il peut conooÎcre. La
compétence 'en mariere criminellë peur 'donc être définie,
le pouvoir qu'a un Juge de cannoîife d'un critne, foit privativement li tout autre, [oit IOancurremment avec d'autres Juges;
c'en le li u où le crime a-été commis, qui regle principalemenr la compétence en matiere c.riminelle; la qualité dll
'crime & la 'qualité de l'accuré formenr exception à cette
reglè, & la pourruire ne peUt en être faite ~lle p-ardevant
le Juge auquel la' èonnoi1Tance en eH attribùée par les
Edits & Ordonnances; ce' font des privileges précieux qn'ort
ne peut anéantir fans porter tout à la fois un préjudice
confidérable à l'accufé & au J.uge, donr les fonaions font
déterminées par la plainte & le délit qu'on lui' dêfere.
Tout Juge ef!: compérent pour informer. La néceffité
d'a1Tu,rer promptement, les preuves, la crainte qulelles ne
dépéri1Tenr ,fonr des motifs Junes pour accélérer l'inltruction & pour maintenir tout à la fois les droits du citoyen
& ceux de la jultice. La jurifprudence n'étoit pas cependant
uniforme à cet égard. On trouvoit des Arrêts de part &
d'autre qui avaient r~ntôt confirmé, tantôt réformé de~
procédures prifes par des Juges ordinaires à raifon des cas
royaux. Ce' fut pour fixer la regle, gue fut donnée la Déclaration de 1731 concernanr les cas prévôtaux & préfi<diaux. L'art. u porte que tous les Juges du lieu du délit,
royaux ou autres, peuvenr informer, décréter & interroger
tous les accufés', qnand même il s'agirait de cas royaux ou
prévôtaux; il leur eft enjoint d'y procéder auffi - tôt qu'ils
�,
DU .PALAIS
DE
PROVENCE:
'f',7.
auront eu connoI1fance des crimes, à la charge d'en avertir
inceffamqlent les Baillifs & Sénéchaux dans le l'effort defquels ils exercent leur juftice , lefquels feront tenus d'envoyer quérir inceffammenc les procédures & les accufés.
Le-renvoi au Juge compérent doit être fait fans aucune
requifirion des parries. L'inrérêt public exige la pourfuite prompte des crimes, pour ne pas laiffer dépérir les preuves
& éVjlder les coupables; ce préalable rempli, l'ordre dès
Jurifdiél:ions que l'on ne peut inrervertir, réclame fes privileges, & le Juge qui doit en connoÎtre, continue l'inftruc-.
tion de la procédure jufqu'au jugement définitif.
, Un délit grave, dangereux à la fociéré, forme la matière
~e la plainre que Rougier préfente au Juge d'Ollioules; il
fe plaint d'un décachetemenr de lettre qu'il impute au Commis de la polle; il en demande la preuve, & s'adreffe ail
luge d'Ollioules, c'éroÏt le Eeu du délit; l'information eft
prife, Loubon eft décrété d'ajournement; il appelle de fon
décrer. Il fonde 'l'incompérence du Juge fur fa qualité de
commis à la pofte, fur le privilege dont il jouit, fur l'ilt,tribmion qui eft donnée aux Lieutenans de la connoilfance de
tous les délirs qui fe commetrent à raifon de fes fonél:ions,
en verru de l'Edit du mois deSeptembre I7IS' Mais la Dé..
c1ararion dè 1731, pollérieure à.I'Edit, a fupprimé tous les
privileges qu'il pouvoit renfermer, &. a rendu fon exécution
de nul effet & valeur, à l'effet de ne p0uvoir plus l'oppofée
l'alablement. Il a éré décidé que le Juge du délit était com-.
pétenr pour informer, décréter & inrerroger un accufé à raifon d'un crime commis dans fa jurifdiél:ion, quoique I.e délie
par fa nature, l'accufé par fa qualité, fuifent. juHiciables des
Juges royaux.
,.
,
.
Me. Meriaud conclut à ce que 1appellatIon filc mlfe ail>
néant & que ce dont érait appel dnt & fortît fon plein &
enrier' effet; & attendu les réponlès. prêtées pardevanr la
Cour par Loubon, les parties & matieres fuf,fe:nt renvoyées
au Lieutenant de Toulon, pour être pourfulvL fuI' le fonds
jufqu'à Sentence définitive. •
'
Arrée du. 2.40 Mai 177'6" prononcé par Mr. le Préfidenj
�'~18
Jou RNA L
de Regufl"e, conforme aux conclullons; Loubon fut con":
damné aux dépens. Plaidant Mes. Simeon & Gaffier.
ARR Ê T
X L V II.
Une Communauté peut-elle aliéner les eaux puMiques en tout
ou en partie l'
La concejJzon faite à la perfonne pour la perfonne ne paffi
point a~ {ucceJJeur quelconque.
L
A Communauté de Draguignan ayant établi un Couvent de Religieufes Urfulines, délibéra en 1633 qu'il
feroit difiribué aux mai fans defd. Dames une quantité des
eaux de la ville de la largeur d'un liard, & dont elle n'avait pas
hefoin, à la charge que les Dames feroient. faire & entretiendroient les aqueducs à leurs dépens, & que la Communauté ne
leur feroit tenue de rien. L'établi1Temenr des Urfulines fut fupprimé en 1751. Le Couvent fut vendu par M. l'Evêque de
Fréjus à Latn par .aae du 30 Janvier 177-3, fans lui être
de rien tenu, & fur-tout de l'eau donnée par la ville.
Le 8 Avril fuivant Ladl tint un aae aux Confuls; il
les requit de lui faire remettre fous trois jou~s l'une des
clefs de la ferve commune, pour pouvoir introduire la
portion d'eau qui lui compétoit dans f(ln canal, & s'en
fervir à l'ufage de fa maifon. Sur le refus de la Communauté , Latil demanda qu'il fût confirmé dans la propriété
du liard d'eau concédé à fes auteurs, & dont ils avoient
joui fans trouble depuis cent cinquante ans. Requête incidente de la Communauté, en maintenue dans la po1Teffion & joui1Tance de l'eau, avec inhibitions & défenfes à
Ladl de l'y troubler., à peine de 1000 Iiv. d'amende, &
p.our faire ôter du canal la portiôn d'eau dont il avoit joui
pendant procès enfuite d'un décret provifoire, avec dommages & intérêts. Sentence qui accorde les fins de la
çommunauté; appel de la part de Laeil pardevant la,Cour.
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PRO V .Il Nell.
f:L9"
, 'On 'difoie~ pour Latil, que la Communauté eroit tbut 11>
la fois non recevable & mal fondee; non recevable, foi t
pour n'avoir pas réclamé' les eaux lors de la procédùre
d'union, fait pour avoir laiffé accomplir le cours de la prefcri pt ion ; mal fondée, parce que la Communauté ayant une
fois concédé l'ufage des eaux, e11è' eH cenfée s'en être à
jamais départie; elle ell: cenfée les avoir incorporées' au
domaine des Re1igieufes, les avoirrabdiquées, & ne pouvoir par conféquenc pas les réclam'er. La conceffion efl:
réelle; 'il fuffiroie que la Communauté n'eût", pas Hipulé le
draie de retour, pour que fa donation en fût irifufceptible ;
la conçeffion ne porta ne que, fur' des eaux fuperflues, ces
tnêmes eaux n'avoient pas le privilege de la publicité; il
faut les comparer à un' domaine partic'ùliér ,. & conven-ir
q'ue la Communauté a pu les aliéner.
On répondoit pour la Communauté, 1 9 • qu'elle n'avoit
jamais départi la propriété des e;1UX, ql:J'elle ne le 'pouvoit
même pas; 2°. qU''(I,lIe n'avpit fait qu'en 'départlr' l'ufage
proportionnellement aux J;efoins du MeHlaiter.e ,,&1 conime
une juGe compenfation.. de.s divers avantages querd'éra,bliffement du MonaHere procuroit à la ville. 3°. Cerce' conceffion n'étoit gue conditionnelle, perfonnelle au Monafiere,
& telle en un mot que le MonaHere ceffant d'exiHer, la
Communauté rentrait de droit dans la libre .adminiHration
de fes' eaux. Enfi'n il' n'y a ni fins de non r cevoir, ni
prefcription à, opporer à'}a 'Communauté ;'. d'où il e'{l: vrai
de conclure. que quand même l'urage de ces eaux ne feroi.
pas atilli e1fentiellement. néceifaire 9u~eJle l'ef~ aux diver~
quaniers de la v.llle 'lUt en o~t be{oJn, ·la Communaute
feroit toçjaurs \ en droit de ".les. réclamer. 1'1 ' , . /
Il Ea,Com'munauté n'a jamais départ·i'la propriété des eaux
H:eligieufes ;"el1e ne le pouvoie pas, pan;e, que les
eaux. publiques ferva.nt au beroin de l'habjrarion, n'~tan.t
point' dan, le dO~lalne.partl(uher' de.. ~; Communaute, .Ji
n'~toit pqint .:en '{on pouvOIr' de les ahener·; l<'s eaux publi'lues, fpét ialementfous là proceB:io'O des Loix, font l10rs du
commerce, & ne peuvent que Templir la deHinati.on qu'elles
au;,
Annüs 1775 & 177 6•
X xx
�~~o
"
Jou R. N A L
ont naturellement. Les .-différentes Loix qui font fous le
ritr~ ,du CQ,de de afjllœdu8u_, fe recrienr conrre quiconque'
ofe toucqer. aux aqueducs publics, planter des arbres à
moins de quinze p,ieds de .d.ifian'ce; elles profcrivent route
çonceffionco[11)!l1e fubreptice; elles défendent de dériver
l'eau, à peine de .confifcation du foneds pour le.quel elle auT.oit été déniv.ée ; .elles prononcent une punition corporelle
pro condiJiol!e perfonarum; -elles prohibent expreJTément ,
n.e alifjuid Wltetur dir.eél:ement -ni indireél:ement; elles obligent à la T.efiirution, foit que la polTeffion foit publique
ou c1andefrine.
Les c.omlpunautés ne peuvent v.endre ,les eaux publiques
li des .particuli.er-s., Les eaux publiques ne font à perfonne,
~Qrs même..que,i'.ufage .en dl: à .rout ie rilOnde; il efi certain
gu'on ne peut pas vendre ce qui ne nous appartient pas, &
nUiJins encor.e ce qui n'dt .point dans .le commerce; l'on
pmmoit mê.me dire que les eaux publiques fervanr à l'ufage
d'une ,ville, foot <pir.tie des régales, qui Q'étanc dans le domaine ,de 'p~r[onne., ne font à ·la difp.oGtion de perfonne,
.\O.l1S même 'que rour le monde .peut en .ufer; route difpoutio.n que .pOUI.r.O~t en f.l.Îre une communauté, ne feroit ja.
mais q.u'une conceffion précaire, ,réduél:ible à une fimple faculté., .& réMocabJe toties .fjuoûes, dès.que l'intérêt .de la communauté 'pour.roit dPexiger.
~i une .communauté .ne peut v~ndre .des _eaux publiques,
on l{leNt encore moins fuppofer que dans 'l"hl'pothefe pani'Culiere., la ,CliJ11ununauté de D.raguignan l\it' vendu ou .donné
fes .eaux aux Rèligieufes; ,il n'y a qu'à yo.ir la .délibération de
'1633" lp.0.lrr .fe iCQnvainore qll'il,n'eft pas lquefl:ion de ,vente.
Toute vente emporte us, pr.etium I~ .confenJùs.; ,quant'à ·la
donation, ,la lqJême rléJibération en préfente ,tellement _peu
l'·iëée , qu'~ml:épendalpment ,de ce que la ,fQrme y .rélilte, la
prétention des .IReligieufes 'n'a'<loit iPas .été ,jufques.-là. Tout
prouve dans 'la .délibération "que II'0n ,ne fit .alor,s que fe
pr'êter aux 'bef.oins ·des :Religieufes.,.& ,Ieur>rendre .l'ufage des
eaux publiques .plus commode,.:en leur lpermettant.d~en ,c.Qnduire .une pouion,dans lellr .moniJltere. lLa :Co01lT1unallcé ,n~a
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
-~3'I
'poilit concédé -de propriété, p'ui[qué la" délibédficJO porte,
qu'ayimt les fontaines -de la ville de l?eau fÙjfifamment, du
refld~t
qùi fe
trouv~ra
il en fera diflr'ibue aux Dames Religieufes.
Or dilhibuer du reftant de l'eau à un monall:ere, n'ell: pas
le lUI donner i ce n'ell: que lui en départir ~'u[age'; ce n'ell:
que [e prêter aUx be[bins du mànaHei'e, & prévenir rous
les incoilvéhiens qui pou voient [è renewntrer; en obligeant
le mon'af1:ere d'aBer cHen:her .ae l'eau aux fbntaines publiques;
parej.l\e conceilloii des eaux publiques n'eH qde C011ditionnelle
.& p~rfdnnene au mon3>frere; comme oet u[age n'a été al!:'
èora~ qIJ'au fuOA3'll:ere,illlé d'oit êiré que pOllr le monall.ere r
il eit plus qu'évident que tle. n'ea ,pas llU fol dè la n\àifon
[ervant de mona{terep~ pOlJf'!e grand intérêt de Gette .niaiton,
que 13 cohceffion 3' été fai~e; mais uni'luement pour. le mbnallere.; q'où il faùt e.<llnC!ure (;jue le monafiere n'ellifiant
.plus·; la ë&mmnilal;lté doit repr.i:nd're l'ul'ir,ge de' les eaux,
d'autant mieux q'u'èllé 'ne redre plus Je- béri'éficede l'étàhliifement.
.
. Ainfi d'e. deux cho{es l'urre: ou l'es 'Concefficilns Conf accordées li la per[onhe pour la per[onne; ou el-lés [oin a"cord~es
à la ,perfunne à call[e 'de la dîofe. Dans le .prelnier e·a5, I~
conceffioneH perfoennellé, & TlufrJuam 'egreeditar per:fimann. Dahs
le fecond, comme elle dt infiérantè à la cho[e, eUe s'ihèorpore ·aVec dIe" & en faiin nél!~ifairéinent paîitie\ ~u'oo> COIl{ulre la fe'gle du mroit 196; elle rrem denhe Jal (\é-cilio'n des
deux poillts: pr{vife;gia qU'IEdam 'cau[œ .{un( ~ (juœdam pèrfonœ,
ft idlô 'qcrœ eàufet [unt, dd hœredes' l'rarr[mittU:1ttûr<;. quœ p'er.fonœ
jùnt ad fuuèaes ndrz tranfeuru. D'Antoine ,flir: cette regle noU'S
déûgne fart biell à -quels caFa'éteres on reèonno1t les' COftceffions perf6nneUes bu réelIes; tout Vielle aboutir à ce Inor:
ou là concelIion ea faite per.fon-œ proyi'e'r pe-rfilnan't, vel
perjOnœ prO'pter:' caufam~
.
Si la conceffion en per[onnelle, fi l'QQ • .n'a vo'tllu lq6~ fairè
l'avantage de la per[onne, ~a pe,t Conne morte, les e!fets de
la conceffion .ceifent de droIt; c efi le cas de la LOI 68 de
reg. jur.; l'on ne pellt p.as qonner à llne ~onceffion plus ~'é
tendue que n'a voulu lUI donner le concedant. Au [eul litre
.
Xxx~
�n2.
JOUR.NAL
de conceffion, la faculté' efr infufceptible d'extenûon & de
_prorogation t ,c'eft un contrat purement gratuit qu'il faudroit
,plutôt re!l:reindre: caufâ datâ, caufâ non fecutâ vel ceJfelflte,
,refolvitur contraélus. 1 ._
Toutes les concelIions faites à des monafreres, fait en
don, fait en immunités, fait en privileges, fait en franchifes
de tailles, fait en droit d'ufage fur les eaux publiques, font
des privileges 'perfon-nels qui n'ayant été accordés qu'au monafrere & pour le monaftere, ne peuvent fervir q,l'au monaf·tere; de maniere q.ue le monaftere étant éteint ou fupprimé
priAegium evanefcit. D'après le §. r de la Loi 3, if. de
cenfibus; le priVilege perfonnel meurt avec la perfonne. Ita
Boniface, rom. )' pag. 600; Soefve, tom. r, pag. 23 ;
Henris,' rom. r , pag. 8 13; Fagnan , tam.' 2, chap. 7 du
rroifieme livre des. Décrétales , . pag. 628, n. 37 : crude'litati proximum efl, /itienti/ius agris no/Iris , alios irrigari.
Toute 'concelIiori
lorfque les be(oins du propriétaire
l'exigent, & cela foit qu'il s'agiffe de bois, d'eau ou de pâtu·rage. (Duperier, ·rom. 2, pâg. r83'; Julien, va. interpreratio, pag. 60 , lèCt. K ; Mr. de St. Jean, déci!. 9,) Quand
la Communaut~ donne le rellant ..des eaux fuperflues, elle
<n'en. permet l'ufage qu'autant, .qu'elles ne lui font pas .né-ceffaires ; fi la néceffité" renaît, la concelIion reducirur ad
'non ac1um', & il lf'en efr ni plus ni moins que fi elle n'a",oit pas exillé. Peu importe que le Monaftere dllt entretenir 'les aqueducs; c'éroit bien le moins que jouiffant, il
foumÎt lui-même,· aux dépe'nfes qu'exigeait fa jouiffance.
Peu importel,encore' que.. le même MonaHere dût répondre
des-dommages & intérêts; l'un n'était que la conféquence
de l'autre; 1 s1jl Jdevoit, entretenir, ,il devoit répondre.
• .AFêt du, 24: Ma! r 776, au rapport de Mr. le Confeiller
de Mons, qui confirme la Sentence avec' dépens. Ecrivant
Mes. <Pafcalis'·&i..... IIP' il , ' , ' ;
.. J~ ,
cerre,
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ocn'c
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r'J).()l.~
�DU
PALA~S .DE· PROVENCE:
A.RRÊT
533
XLVIII.
L'une des Parties contr{1c7antes n'exéc~tant pas le titre, .ou
violant la condition, fautre partie peut être reJlituée.
E
\
N 17 6 4, Pierre ....• préfenta au Procureur du Roi'
,
de la 'ville de .... un comparant contenant dénonciation:
très-détaillée contre Jacques..•.. Officier public,' & donna
Jerôme .... pour caution. Le Procureur du Roi fit informer d'après des- Ql'dres fupérieurs. Jacques .••• fut décrété
_.
.
d'ajournemen't per/onnel.
Il ,prêtil fes répo,n(es" & il préfenta une requête en injonélion à l'infiigateur de donner dans la hl.litilÎtle uce p,lus
ample caution, bonne, fuffifante & folvable ; aurrement qu'il
fût déclaré non-recevable dans fon accufarion, fi mieux
n'aimoit le Procureur du Roi répondre de la folvabilité de
la caution préfentée. Le 19 Mars fuivant , le ProçJjreur .du.
Roi conclut à ce que la requête fût jointe à la ,procéc;lure,..
fauf d'y être fiatué dans le cours de l'infiruélion. Décret conforme du Juge.
Pierre fe plaignit enfuite au Procureur du Roi que Jacques...;
avoit mis à exécution contre lui une Sentence fans en avoit
l~vé l'extrait, & lui avoit fait payer le montant de la condamnation, intérêts, dépens, épices du Juge, émolumens du
Greffier & droits du contrôle. Le Procureur du Roi requit
le: Juge le 8 Juillet 1768 de faire injonélion au Greffje.r de
déclarer s'il avoit délivré extrait de la Sentence, & à.
quelle, époque. Le Greffier répondit qu'il l'avoit délivré le,
jpur même; elle. avo}t. c~p.enQant. ~t~ qg~ifiée le 29 !an:vier .précédent, & ex~cute~ pat '~Ole de (aille le. 2,,4 Mal; 'lI
requit même injonélipn au Cp(fi,nlis.,du Conttôle'de. déclarer
.liJa Sente,uce avoit été [ç'ellée,dl réRonc;lit que nort j)e Pro~
<0.
, . .
~
.
-
�Blt-
J
U R N l.; L
cureur du Roi prit extrait de cene Sentence, & Y trouva
dès différences coniidéràl>Ïes avec la copjë; il rendit p!aintè
en addition des faits, pour la procédure être inilruite en
-même temps qué cellé fur les plaintes primitives, aux frais
du Domaine. Décret conforme, & l'information fut prife.
Dès-lors il n'y eut plus lieu de ilatuer fur la requête en plus
ample éautlOÏl; puifque le Prticureur du Rdi pourfuivoit à
fa requ'ête & aUx- frâis du Domaine.
Le 4 Juillet 177'-, Jacques •... fut déchargé de l'accufatÎan , fauf à loi de fe poûrV'oir Gontre qui de droit pour
fes t16rriftià.ges:'iht'ét'êts. Il ne. fut point dit que les accufatiolis intenté'es ctintre lui futrent téméraires, moins encore
calornniéùfes.
. Jac'qilés .'... requit le Protureur du Roi de· d'éclarer quels
étaient les inHigateurs, & quelle étoit la câqtibrf. Le Pr'ocur'eur d~ Rdi ré}5'6bclit que Fier're ..... étoit j1irilligâ'teur,
& Jer,ôrtie . ~ .. la caufion. Jacq-ues p'réfenta rèquête , & demanda l'ajoutne.ment contre Pierre & les h'étltiers dé la
éauriàn ~n dommà-ges & intérêts, &. attendu l'iÎlfolqabilité
!lotoire de l'infl:igatèu'r & de là ca ur·i'o ri , il demanda là pérrtli/Il6'1'ïtle fàÎre j'mimer & affigl'Jer le Frocureur dû Roi, p'ùur
r-épotl'clre ~b rori pr.opre de cette inf6Ival:rilité, & vbir déclarer l'Arrêt qui i'liter ieri'dr6it carrtre l'inft;gat'eut & la
caution commun & exécutoire contre lui. D~cret, qui :rccorde les firis l'équiTes; le PY6èùI'eôr du Roi Iot:mâ oppàfidon ;' cet iricldef.it fut renvoyé' eh f~-geme-tlt; i:I tut dônn'ê
des tléfehf'cs i'éfp'etiivès., ~es ProcuYe'!Jrs da Rôi' "dés Cli1férentes SêhëëMutrées i'iJ.te?villtênt dMis l'iBfhirca f & énfuife
àe la médiatIon dé fY1Ü1ie'br's pè'rfonnes re'fI5é'thb1es., JâCqu'es. ; .. fiC;' le t'(5 Nt>ve·mbïe l
le déparremeîft fui'V'ànt : ·Jé ilùld e me d6partir ênvers le PlôÎ:lïreur du R6i ile
rtitt r'éqrJ~te ~ du décret i1ù H - AMi! l7'12 , aux fins qui rite
p~rfiL t \'de ri~tï1he't t> i? 'tortjdis .:q'ti'JI falt 'teta'rdl êOfI1.'!fe nol'i,
o'dvefIü " me dêp'drs a.l!fli 'lÀfJ'1'lnflan'cèl:liée e"irjùilé du dicTet &,
(lê's d6pdlS' d''it~tte ~ am!;' (/lÙ"tteQci1Js, 'litfl!ks , YfO'i7tttl'l1gèS & lin:.. r
z#êts qur:je poflr'l.ôis répéter 'écitftiir1ùl 'y./Udatant i'élio1u~r: &l
-rn,
�3"
DU PAL AIS • D. B. Pli. ~ V B N C B';
$
défapprouypr tQ/lS 1'$ termes Z,!}.UrleUX 'lul ft trou1'ent ripallcjys
dans lp Mirngirc ll14e laifg.ft ùTJwfmer, le'liJe/ ~'q pqs'feçfi.
gIJifié.
La yeill.e _d~ c~ départem.eoJ, le Procur~ur du 1}oi ayoit
fait à Mr.c. JofeRh .... Çhaoqine , un !:>ill~t p~ ;00 louis,
payables;, fayoir, +$)0 liv. d'lns l],n an, & 'H50 liv. daps
deux ans. la.cques .... contipua re~ p.ourfuite~ coorre l'infiigareur & la cautioll, & obtipr cqn.tr'eux la sppdamnation
;lUX domages .& iot,érêts à dire d'~~p'erts , lefquels ~n procédant aurqi,enr égard a,Ul' 4800 Ijy., moy~.n'!Qt lefquelles
Jacques .... s'étoi.t llrraogé av,Cc le Procure!.!f du R.oj.
Cette claufe ioféré.e ,dans 111 c.QQdllO}nation proooQcé51 con-:
tre l'inftigateur &. la ,cautÎ,pA, eJ.lgagea le Prq,c!\rJ~.ur pu 1}oj d'impétrer, le 9 Mars 177.) , d.es I~Jtr.e~ de rel.'c#.ion .COl)tre fon
obligation; & demanda ajQ.urQ,eme(lt con.tre lac.ql!es.... & Mre.
Jofeph .... pOLJr qu?elle fflt .l(l,éGlaré,e nulle, .& qU/1i1.l moy.en
de la refiiturion, les patties f\lffe.nr ~ert,1i(e~ au ll)ê.nJe ~é.tilt
qu'elles étoient avant le départe,me.nt .de Jacqu.es .••• D~.,
cret qui accorde l'ajourn.ewe.nt. L-e).4 M.lIi .1776, te.qu,ête
incidente de Jacques ..• pa.r IJl.quelLe, e.n ,pt:e)1a\l.t le fa.lt IX
caure de Mre. Jofe.p.h, jl .d~l?nda la l;O,n4'II,U9at.ion .d.es·
4800 livres contenue.s ,dans ~'Qbliga.tion d\! PrO,c.u.ceur,du 'R.qi.
Décret du même jour quj 9Q.nue !lae de c,etre' de(llauç\e, &
ordonne qu'elle fera figll,ifiC:e•
. Jacques foute.no.it qu'il Il'y ayoit .pas lie,u ~ la tefii(\ltiQIl;
parce que robligation aVO,ir été ,contraac:e .par .un Jt1i1jevr
fans dol ni fraude. Le PrOCUreu.r du Roi ré.polldoÎt .qu'il
devoit être refiitué, parce que hcql,les •••.• aVQir vioJi la
çondition elfentielle dè .I:engagemellt.
Mr. l'Avocat-Génér ql de ~alilfanne examinfl .quelle étojt
l'efpece de téclamation fur ,iaquelle la Cour devoit .p(ononcer.
Efr-ce, dit-il, une .refiitution en .entier? Eft-ce une fimple
refcifion? '.Efr-ce un majeur qui vient de,manlkr la ,l1lJ.Hiçé
d'un aae qu'il ,a contraaé en connoi/f;lOce de.caufe ? li fa~t
310r~ .parrir d'après llG>rdonnance de Charles IX du ~10JS
d'Anil 156.0., gui n'.admet .de JUoy-en 'alabie ,de rd'ctlioll
�)36
Jou
,
RNA L
•
,
que le dol, la fraude ou la violence; il faut les reconnoltre
dans l'aéte que l'on veut faire déclarer nul. Pour prouver
cette nullité, il faut que le 'vice frappe le tirre, & que ce
titre fair artaqué. Ici le Procureur du Roi n'attaque pas le
titre. Il demande d'être refiitué attendu fa non-exécution;
c'éroit un 'paéte conditionnel dont la condition n'avoir pas
été remplie, & qui avait même été méprifée; c'éroit une
obligation réciproquement contraél:ée, mais qui renfermoir
d.es 'conditio"ns particulieres; la Loi veut, il efi vrai, que l'on
fait délié d'une obligation conditionnelle, lorfqu'on a faie
tout ce qu'on a pu pour remplir la condition: ici, Jacques...
loin de la remplir, l'a contrariée, & dès-lors cette condition
n'a pu avoir' fan effet; c'éroir une rranfaétion dom l'objet
<levait Ure (rempli de part & d'autre, ou qui ce!foie par le
défaur ',d'exécution. C'érair une obiigation qui dès le momeht qu'elle avait exiité, avoir été vicieufe, parce que jamais les contraél:ans n'aveient pu imaginer ce qui arrivoir,
& qu?une obligation ne va jamais au delà de ce qu'on aurait ,pu penfer. Aina ce n'eH pas précifément d'après les
principes féveres des Loix de la refciaon, qu'il f<lut examiner la caufe dont s'agir, parce que ce n'efi point le titre
que l'on àrtaqûe, mais fan inexécution.
D'abord ce tirre en lui-même n'efi-il pas le fruit de la
crainte & d'une crainte forte ? Que dir la Loi fur certe
circonflance ? Quod vi metufve causâ geJlam erit , ratum non
habebo. Ici qu'avait à craindre le Procurèur. du Roi ?
Eroit-ce 'fa conduite ou fes Juges? Sa conduite étaie irréprochable, puifqu'e.lle était appuyée fur des ordres fupérieurs J
il avait pris la caution· de' fa dénonciation; elle éroit fol_
vable 'a~ momènr' où il l'avait recue ; .s'il avait été follicité
par l'aècufé J 'lui-même d'en prendre une plus fuffifante &
plus Colvable , & s'il ne l'avoir pas fait, c'eft qu'il avoir continué la· procédure aux frais dt. Domaine, & dès-lors une
éaution plus fufEfante érair inutile; il favoit qu'on ne lui
prollveroir jamais cette infolvabilité noroire , néce!faire pour
autorifer la-garantie JO il:'avoit à craindre la prévention; des
motifs
0
0
,
.
�DU
PA4AIS
DI!
PROVI!NCB.
~5J7
motifs "lluffi prelfans le .firent foufcr.ire des arrangemens qui
n'eurerrt pour bafe qu_e la crainte la plus forre.
Mais fi les.arrangemens ont eu la crainte 'ppur principe, la
lélion l~ plus éI;1orme n'ep 'a-t-elle ,pas été .i'ex,écution? En
eff-et, la clauCe portant 'lue les EXFer,ts auront égard, dans la
fixation des ·dommages & intérêts, aux ;1.0,0 IQuis <'lP'{1voit pa,yé
le Procun,eur du Roi, le léCait, énormep~ent. Son honneur, fa
réputation, fa fortune, tout il' était intérelfé ; l'in!l:igateur &'
la caution font cpndamnés à des dommages.& intérêts ;
conféquemmept l'açcufat!on qu'ils ,avaient "jnte/ltée, e!l: calomnieufe : (l},a;is le font-ils fe,\lls ? Le Brocuryur Àu Roi a déja
fubi une conda;mnation ,ou ill-diciaiœ ou vplonta'ir,e, ,& il faut
y avoir égard dans la fixation \~es ,dommag~ & i\ltérêts;
le: Procureur du Roi .e!l:',idonc au(li ,conda;;nné 'à ~es dommages & .ÎQtérêts ,.& même avant la caUtion ,&, J'inftigateur ;
l'accommodement ,du 'Procur~ur d.l.! Roi lui pe.vien't .mille
fois plus funefie'& plus lélif que rout~ condamnation quelconque; les prétentions de l'accufé même n'allqient qu'à le
faire répondre de la folvabilité de l'in!l:igateur & ,de Ja cau_tian, la claufe du jugement fait entr~r l'arraQg.eme,nt fàit
par le Procureur du Roi' & par Jacques.... cQmCl')e une dé,dua.ion fur aes·dQmmages. &. intérêts; ,claufe illi,cite &, in_jufie. qui compromet l'honneur du mini!l:ere public. {\infi,
fait lé{jon~-fQit crainte, l'aéte en lui;même, s'il,étoit attaqué "pourreit être anéarai. lci c'e~ l'inexécution de l'aére
que réclame le Procureur du Roi;, c'dl: la condition qui
,èxi!l:oit, & qui n'a pas été exéeutée. Trois (ortes de conditions : la protefiative, la ca(uelle , la mixte; il eJl cerrain
que ces différentes conditions venant à Jll~nquer, il n'exifie
plus d'aére. Ici quelle e!l: ,la condition? Elle eH le fai,t de
la partie, elle a tenu aux clrconHances; elle eH donc mixte;
le défaut de fan accomplilfement ne peut donc pas lailfer
fublifier l'aére auquel elle avait été appofée.
Tout eH fecret, tout dl: obfcur dans cet accommodement;
le 9, il eH fait des billets fans ,cau,fe à Mre: Jofeph .... le
lendemain, un département partlcuher e!l: faIt par Jacques....
Années t775 & t77 6 •
Y YY
/
�H8
.
~
.1 0
U Il N A
r:
Point de copie de ce département, point de déclaration;
fe paffe dans le plus grand fecret ; il eG: regardé même
comme fi elfentiel, que l'on ne veut pas lailfer à Jacques...•
le pouvoir de faire conG:er judiciairement de cet accommodement ; point de ùanfaCl:ion entr'eùx, point d'aéte commun. J;.e fecret étoit la bafe de l'arrangement; il n'étoit
pas dit, mais il érait prouvé par les faits; leur fuite, leur
enchaînement en démontrait l'exifience. Voilà quelle, érait
la condition 'effentielle ; elle n'a pas eté remplie; & l'inexécution des conventions de la part de l'un des contraélans,
dit Dornat, peut donner lieu
fa réfalution, fait qu'il ne
puiffè ou qu'il ne veuille exécuter fan 'engagement, encore qu'il
n':t ait pas Je clat/Je réfalutoire.
Jàè'ques.••. n'a plus vouiu exécuter fon engagement; il
ne peut donc plus le' faire vaioir, & il doit être réfi. lié; il ne l'a plus voulu, puifqu'il a lui - même déclaré
judiciairemént les conditions de l'arrangement qui a 'été
la caufe médiate ou immédiate de la daufe inférée dans le
Jugement. .
Mr. l'Avocat-Général conclut 11 ce que faifant droit aux
lettres de refiitution, les biUets fuff'ent déclarés de nul
effet & valeur , Ja'cques ...•• condatrjné 11 les reG:itllt;r
\ par toui: Je jour de la fignifica.tion d.e l'Arrêt, & qu'ail, trem-ent l'Arrêt lui fervÎt de déc~arge ; & au moyen de ce,
les parties fulferÎt remifes au même état où eUes étaient
avant le département.
Arrêt du 3 l l\1ai 1776, prononcé par M. le premier Préfident, conforme ail)' conclufions ; Jacques fut cQndamné aUll;
dépens: Ecrivant Mes. Portalis &...
J
tout
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')
1
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�DU
PALAH.
DI!
PROVENCE,
/
ARRÊT
XLIX.
Le teJlament doit être interprété dans le Jens le plus droit &
le plus correc?
La déclaration contenue dans le teflament de l'héritier qui a
été enfuite révoCjué, peut - elle établir un fidéicommis non
écrit & prétendu fait plJ.r, le premIer teJlateur'?
,
L
E fieur Couture de la ville d'Hieres fit 'fan teftament
le 8 Juillet '1748; il inHirua l'Hôp,ital d'Hieres pour fan
héritier. Par un fecond du :u Oél:obre' 1749, il inftitua la
Dame Feral)d fon époufe fon héritiere",.avec, claufe d'e fubf. titurion en faveur de l'Hôpital. Par un·1trpifieme du 22 Mars
SI,' iJ innitua fon époufe foo Hér:tieré fans fubftirution.
· La Dame Feraud fit fOll t'e!hrne~r l'è ~S Janvier 1,770;
elle inftitua l'Hôpital de la ville, d'Hj~res, pou~ employer les
fonds, rentes & revenus au foulage ment ·des p<luvres, & fe
conformer, quant à ce, aux inrentiqns du fieur Gourure fan
époux, prohibant expreifément l'aliénation des fonds de terre.
Elle. en fit un fecond fe 1 S Janvier 177,2; elle y fait q,uelque changement dans les legs, & confirme l'inftitution en
faveur de l'Hôpital. Quelqûe temps après la Darne Feraud
ven,dit fes biens immeubles à fonds perdu au fieur Ma.nin
fan neveu, & fit enfuite fan tefl:ament le 28 Février 1774,
, dans lequel elle inflitua le fieur Martin fori héritier univerfel.
• l'ar exploit du 22 Mars 177 S' , les Reél:eurs de l'Hôpital
demanderent pardevant la Cour
la caifation.de l'aél:e à fonds
,
perdu & du teftament, & offrirent un expédient, portant
qu'avant dire droit, ils vérifieraient que laDame Feraud érait,
avant, lors & après la pa/f"tion des deux aél:es, dans un état
d'imbécillité.
.
,
.
· 6n difait pour l'Hôpital.,' que les. confeffions' ou déclarations de dettes contenues dans les teftamens ne font pas
toujours mifes 'dans la cla!fe des difpofitions. Il, ferait in.,
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jufl:c de rendre toutes les confeffions révocables, à raifon de
ce qu'elles.. fbnt faires dans un tefl:ament qui efl: révocable de'
fa nature, & on ne doit pas être re~u à rérraél:er les aveux
libres & volonraires par lefquels on a voulu fe lier. Il efl:
vrai qu'il y a là-deffus des, difl:inél:ions à faire. L'aveu fait
en faveur d'Line perfonne prohibée ne pourroir pas faire'
impreffion; on le rejetteroit avec raifon, comme rendant à
frauder la Loi ,. &. à faire une donation prohibée fous l'é-'
coree d'une confeillon; c'efl:' le cas & le fens de là regle:
qui non potefl donare, non potefl confiteri; mais' l'aveu libre
& volontaire qui forr. d'une bouche non prohibée, forme
un tirre dans Un tefl:amenr, comme dans rout autre' aél:e.
, S'il falloit d1écider la quefl:ion d'après les Auteurs qui n'ont
con:fulté que la· raifon civile & l'honnêteté, il efl: cerrain
qu'un aveu libre &. volontaire porté, foit dans un teHamenr,
foit dans tout autre titre, établit conrre la parrie qui l'a
fa'Ït, •une preuve légale, un point de fait & de vérité contre
lequel il. n'efl:' plos poffible de revenir; parce qu'on ne fait
aucun tort à' une partie, quand on la juge fur fes propres
aveux & fur la déclaration' réfléchie & 'volomàire qu'elle a
éonfignée dans un aéte folemnel ': Nimis indignum judicamus ,dit la Loi, proprio teflùnonio rifzflere.
.
D'autres·-A'ure li rs plus' relâché~ ont. prévu que dans un
moment de chaleur, un refl:ateur fe livrant trop au fentiment
du morilent, peut vouloir donner' à fes difpofitions le' fceau
de l'irrévocabilité, IX qu'il ne faut pas que par les dérours
d'un aveu les citoyens puiffent renoncer à jamais à la liberré de. tefl:er. Delà la' difiirl&ion qu'on trouve dans les
Auteurs, & notamment dans Décormis; tom. l, col. 1607,
qui dit qu'il fa.ut confidérer fi vraifemblablement la fomme
a été due. Alors la fomme & Iii declaration de devoir a plus
de force, & un pareil legs n'efl: pas préfumé fuffifamment
révoqué par 'une révocation générale dè touS tefl:amens &
codiçilles précédemment faits. Si au contraire l'on voit que
la' fommè n'érait pas doe', ée n'eH plus alors qu'un fimple
legs qui efl: révoqué de lui-même par la révocation du teflament ou du codicille oÙ il étoit contenu. Ita Rîcard, des
�D U
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l' A
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PRO V B NeE.
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aonations, parr. 3, chap. 2" fe&. 1, n. 106; Danti fur Boiffeau, chap. 16, n. 14; Duperier dans fes déci lions , liv. 4,
D. 2, l '1-, & Furgole, des tdfamens, - rom. 4, chap. 1 l , pag.
206.
Ainft l'on concilie les différens Arrêts intervenus fur cette
'lueftion. Une confeffion qui ne tient à rie'n, eH regardée
comme participant à la nature' des dernieres difpofttions;
une confeffion annoncée ou [outenue par d'autres titres, eLl:
entretenue jure contraaûs.
Ici la déclaration de la Dame Feraud tient à deux précédens teftamens du fieur COUlure, portant inHitution ou
fubftitution univerfelle en faveur de l'Hôpital; la déclaration
qu'elle en a fait dans fon teftament de 1770 éroit donc irrévocable, puirqu'elle fe' lie parfaitement avec les deux teftamens du lieur Couture. Il eft vrai que les tellamens. de
ce dernier, portant inllitlltion & [ubllilUtion en faveur de
l'Hôpital, étoient révocables, & qu'ils avoient élé révoqué~
par le dernier, portant inllilUtion pure & ftmple en faveur
de la Dame Feraud. Mais en révoquant [es précédens teftamens pour complaire à [on époufe, le tellateur a pu' charger la confcience de cette derniere. La révocation des di[politions faites en faveur de l'Hôpital ne tient ,certainelQent
pas-à des prinoipes d'aliénation contre cette œuvre favorable,
qui n'avoit ni démérité ni pu démériter. Le tellateur ne
parut changer dans [on. dernier tellament que .pour donner
à [a femme une adminill:ration plus libre & plus tranquille;
mais il n'en exigea pas moins fa promeffe, en lui déclarant
fon intention. Ainft la déclaration du tell:ament de 17 70 tehant à d'autres titres qui n'étoient pas l'ouvrage de la Darne
.
...
,
,
Feraud, ne POUVOlt pas etre revoquee.
L'aél:e de vente à fonds perdu & le tell:ament qui l'a fuivi,
'doivent' être déclarés nuls, s'il conlle en fait que la
Dame Feraud élOil dans l'imbécillité avant, lors & après
ces deux titres. Il feroit injuHe de refùfer dans tous .les cas
la preuve par témoins fur des faits effentiels, & qui ne tombent pas en convention. On reje~le co.mme d~ngereuf~
& peu vrai[emblable une preuve 'lut ne tient à Clen, qu,
.
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JO'URNAL
n'eH appuyée (ur aucun fait. On admet au contraire comme
légitime & favorable une prenve déja commencée par des
faits ou notoires, ou prouvés, ou établis par écrit. Ce (eroit une erreur de prétendre qu'il faut un commencement
de preuve par écrit pour faire admettre la prenve vocale de
la démence, ou de l'imbécillité, ou des autres faits qui tendent à détruire les titres de derniere volonté; mais la preuve
par témoins eH inconteHable , quand les faits qu'on veut prouver (ont (outenus par un commencement de preuve par écrit;
& quand ce commencement -de pre,uve n'exiHe pas ,.il fuffit
qu'on ait d'ailleurs des faits ou des circonll:ances graves, ca~
pables d'annoncer ceux qu'on veut faire tomber en preuve.
C'ef!: ninfi que l'ob(ervent Danti (ur Boiffeau, chap. 16, n.
107 & 111; Denifarr, Va. fugeJlon; Ricard, des donations,
parr. 3, chap. 1, n. 1.
C'ell dans de pareilles circonfiances que font intervenus
les' Arrêts multipliés qu'on trouve dans les livres. ( Boniface,
tom. )' liv. 1, tit. 18; Journal des Audiences, tom. 1, liv.
9, chJp. ,)0; Mr. de Bezieux, liv. 6, chap. 1,. §. 4, pag.
40r. ) En 1764, lors du fameux Arrêt qui, fur la requilition
de Mr. l'Avocnt-Génér:11 de CaHillon, avertit les Avocats de
ne plus cirer la prétendue maxime, que la preuve par témoins
ne pouvoit être admire qu'avec un commencement de preuve
par écrit, la Cour reçut la preU\'e, par cela [eul qu'il confrait que les parens s'étoient affernblés du vivant du teHateur
pour délibérer fur fon .i'nterdiéèion. Par un aurre Arrêt rendu
au rappor~ de Mr. d'Anrouis, les hoirs du fieur Saugey de
Marreille furent admis à faire preuve par témoins de la démence ,de leur parent, avant, lors & après le reflamenr; le
feul fait [ur lequel cetre preuve fut admire, étoit riré de ce
'qu'on avoit trouvé le défunt morc d'un coup de fufil, & le
fulil ~. (es côtés. L'Arrêt du 30 M.ars 177) admit égalemeqt la preuv~ de l'imbéçillité; cet Arrêt fut rendu en faveur d~Honoré Pellas du" lieu deI Vinon.'.
. _ .
Ici il-,eH conyenu que la Dame Feraud fut attaquée d'un·
accident; ce n'ell que ,de cerre époque qu'cin apperçoit un
'llangement de volonté dans le~ aéles- par elle· pa1fés. Il
-.
�D U PAL AIS D Il PRO V Il li C E.
H3
confl:e par un aéte drefTé, que le fieur Martin voulant faire
faire une donation à la Dame Feraud, l'Officier de Jul1ice
déclare [on incapacité. Le fieur Martin prit alors le parti
de rapporter un aéte de vente, avec perte du fonds. Un
aéte entiérement dirigé vers l'inrérêt du fieur Martin, qu'on
a néanmoins la mal-adrefTe de pré[enter comme plus offrant,
tandis qu'il efl: certai(l que les biens de la Dame Feraud
n'avaient jamais été mis' en vente, un aéte .qui porte qu'en
cas de retrait, [oit lignager, [oit féodal, la ve.nte fera tenue
pour non faite, annonce clairement que la Dame Feraud
voulait tran[porter les biens au fieur Martin; & non à 'tout
autre.
Dès-lors on voit que le te'f1:ament doit 'être jugé fur les
mêmes principes. Il ef1: bien vrai que les per[onnes dont la
raifon eH: attaquée, peuvent djfpofer & contraéter dans les
intervalles lucides. Mais 1°. il n'y a poinr d'intervalle lucide
pour les perfonnes que l'âge & les fecoufTes d'un accident
d'apoplexie ont jettées dans l'imbécillité. La fureur ef1: Un
état d'effervefce(lce; elle a fes 'paufes & [es accès; mais l'im.,.
bécilliré produite en pareil cas par l'.affoiblifTement des or~
ganes, opere un vice permanent & qui ne fouffre point d'in.,.
termiffion. fta Zachias dans fes quef1:ions médicolégales;
lib. 2, tit. 3, quef1:. 2., n. 7,' & Mr. d'AguefTeau, tom: 3,
·pag. 623.
•
Il efl: donc difficile de penfer que la Dame Feral!d., qt1e
le Lieurenant trouva très-incapable de donner quelques jours
avant les aétes attaqués, & qui l'était en effet pour caufe
d'imbécillité, ait eu quelques jours après des intervalles lu:cides à l'effet de pouvoir vendre valablement & de pou.,.
voir :ef1:er. La preuve que l'on offre, porte d'ailleurs /ilr les
trois temps, avant, lors & après. Peu importe q~'on n'aie
point articulé des ~aits. Dans le fyfl:ême d~. la preuve [u~
fidiaire [DUS les hvres nous apprennent qu Ils n ont befom
.d'être ~rticulés que dans le cas de fugef1:ion, & non quan<;l'
'il s'agit de démenc~ & cL'imbé~ill~té. ~i~fi, d{lns l)ffai,re
rapportée par Mr. d ~guefTe.au, Il fut. de:lde que ~e~ fa!ls
de démenée ne devolent pOI~t être articules. Ailla Juge pal;
�'H4JOU'RNAL.
les Arrêts rapportés au Journal des Audienaes, par Boniface, & par celui rendu en 177') 'en faveur d'Honoré
, Pellas.
On répondoit pour le lieur Martin, qu'en fait les termes
d'où l'HôpÏtal prétend induire. un fidéicommis, Ont un autre
fens; qu'en droit, le fieurJCouture' n'a pu faire qu'un fidéicommis dans les formeS; & la déclaration de la Dame fon
époufe ne fauroit fuppléer la difpofition folemnelle que les
Loix defirent. En ,effet, qu'a voulu dire la Dame Feraud
par ces mms, & ROUI' me conformer, quant a ce, aux, intentions de .mon ,pou~? Faut-il conjoindre cette oraifon avec
la précédente, comme fait l'Hôpital, & fuppofer que la teftatrice a voulu fe déclarer chargée de l'inHiruer héritier?
Ou faut-il la .féparer de l'autre, & fuppofer qu'elle a voulu
feulement prohiber à l'Hôpital l'aliénatioqdes hiens donc elle
di1})ofoit en -fa faveur?
On doit interpréter les teflamens de la maniere que pré{ente le fens le plus droit & le plus correét. ( Domat, pag.
419, arr.' 1.6. ) ,Po\lr exprimer ici ce prétendu fidéicommis,
il auroit fallu placer les rer,mes, & pour me 'conformer., avant
i~infliturion, & dire, & 'pour me conformer aux intentions de
{eufieur Couture mon époux, j'injlitll~ l'H6pital; au. lieu qu'en
les .plaçant après, & en difant ,./inJlitlle l'H6pital1 rpour l~en
tretien des pauvres malades, & pour me conformer flUX inten'tians de m~n mal'i, je 'vêux exprejJèment ''Jue les fonds ·de ~erre
demeurent.inaliénables; on s'éloigne du fens .qui tend à les
appliquer ,à ·I~inll:iturion ,:;& 'on fe. r-ap.proche au eontrair.e de
-celu'j qui ,je.s.applique a,la .p1'ohibirion .d?aliéner. Oe.l1u:ne au.tre
Tegle fur cet~ê matiere.,1 qulil faut juger Jdu ,fens d'.llne .phnifu
iJar111en"feh1hle de'toutejl'oraifon,~,comme dit la~Loj,.totn
Lege perfPec1li. '<Dn peUt ldcrnner pour une .troifieme ,ragle fur
i'itHerprétation delt aétes -& tel1amens,' que lorfqlle la difpofition qui précede lia par-oicule:& fe ,tl'€luve pleine, & q:u'elle
forme 'un fens parfait, ilu lieu (de paffer ,p:our cQujomfrive
die ne doit "'être regardée
:que comme (lQnoinuati'le- du '-du.
:Cours. •
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D'ailleurs cette c1aufe n'ell: point dans le fecond tefiamém
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DU
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ne' la ;Dàrri.e· Couture, quoique l'Hôpital y fo'it encore inftimé héritier; la teftatrice ne l'y etH pas vraifemblablernent
ornife, fi tlle avoit prétendu, lors du premier, acquérir parlà un droit.irrévocable à l'Hôpital. Il paroît au contraire, par
le preroier 'tellament, qu'elle avoit feulement voulu empêch.er l'Hôpital d'aliéne~ " & que n'ayant plus cerre volonté
lors du Cecond, elle ,crut inutile de rappeller la daufe.
· E~lfin l'Ordonnance des tefiamens refufe à l'Hôpital la réclamation .& même la preuve de ce prétendu fidéicommis•
.Elle prefcrit en l'arr. l, que toute difpofition teaamentaire, ou à caufe de mort, de quelque nature qu'elle fait,
fera faite par écrit; elle déclare nulles toutes celles qui ne
. feront faites que verbalement, & défend d'en admettre la
preuve par témoins. L'Hôpital demande l'exécution d'un fidéicommis verbal dont il prétend que le fieur Couture avait
.char~é fa femme. Le fidéicommis
nul, & la confeffion
de l'héritier ne peut le valider. ( Aymar, fur l'arr. 1 de 1'0rdonnan.çe des teaamens. ) La prohibition impofée à l'Hôpital d'alién(jr auroit dû être faite par le mari. Le tefiament de la femme ne lui donne aucune force, parce que
chaclln doit difpofer foi-même.
.
· Il e!r convenu de part & d'autre, qu'il n'ea pas befoin
{}'articuler dans un expédient les traits de folie dont la preuve
demandée; il faut laiIfer auy. témoins la liberté de dépofer fur tous les faits d'imbécillité qui peuvent être parvenus à leur connoilI"ance; fi l'on en articuloit un certain
nombre dans le jugement qui ordonnerait la preuve, ces téoins ne pourroient dépofer que fur ceux-là; ce qui dimi.nueroit les moyens' de découvrir l'état de fagefie ou de folie
du tellateur, & ne rempliroit pas les vues de jufiice, qui
font d'aller au vrai par toutes les voies poffibles. Mais auill
l'Hôpital doit convenir qu'il ne fufEt pas de demander' à
faire la preuve de l'imbécillité du teaateur, avant, lors &
après fon teaament, pour y être reçu. Si l'allégation de folie
.& la preuve que l'on oJFre d'en faire ne font accompagnées
&. foutenues d'une annonce de faits graves, capables d'indi~
Années z775 & z776.
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., 1 0. U·R 'N A .r: ,
'quer ·que, fi la preuve en eft' fournie., l'im6ëcillité ràl1éguée
,
1 •
fera pleinement etablie, on rejette la preuve.
J
Il n'eft rien dans la nature des difpofitions de .Ia Dame
:Couture, qui !lui1fe la faire fuppofe.r folle. Elle infiitue p0ur
fon héritier un de fes plus proches,' habile à lui' [uccéder ,
fon neveu; elle'·fait quelques legs; te font des legs pi-es à
l'Hôpital, à des pauvres, à fa fervanre. 'La Dame Couture a
fait quatre tefl:amens; dans les deux premiers, l'Hôpital eft
-inftitué héritier umverfel; dans les deux derniers, c'eft fon
neveu Martin; nulle folie dans 'ce changllment; un Hôpital '
fie doit point 1\emporter fur rhéririer du-fang." 1
Un aél:e de donation 'commencé & écrit dans la main cou'ran'te du Notaire, qui ,le termine par un vacat, annonce-t-il
'un aél:e de folie? JI eft fort extraordinaire que le Juge ait
hilfé par fon filence une forte de doute fur ce point. Obligé,
'quand il aurorife une donation·, de déclarer qu'il n'a inter-pofé 'fon miniftere qu'après avoir interrogé le donateur, il
'devoit déclarer les motifs de .fan refus; il ~voit faire mell-'tion des interrogats & des réponfes, afin que l'on l'lit juger
'fi ces -motifs étoient juftes. Ce n'eft pas un aél:e arbitraire
au Juge que d'accorder ou refu(er une autorifation. Ainli.,
-avec des interrogats & réponfes qui annoncerOlenr l'imbécillité du donateur, ,il Y en auroit 'a1fez pOlir fonder une 'delnande en preuve de folie; le vacat feul au pied d'une donation, -qui n!eft accompagné ni de l'expreffion d'une caufe)
'ni de la preuve de cette expreffion , el!: infuffifant pour amenr[
'celle de la folie. Le lieur ·Martin ajoutoit une foule de cer:'
'tificats, du Curé, du SacriHain·, du Confe1feur, du Médecin",
du Chirurgien, du No'taire, & de tous les voifins, qui at'tèfl:oient que la Dame 'Feralld joui1foit de fon bon fens, &
vaquoit comme auparavant à fes affaires domelliques. On la
voyoit agir & être admife à 'conrraél:er depuis fon apoplexie
·comme auparavant·; elle affifia, -au cont'l'<tt:'de -mariage d~ fa
:fervante, & lui lfit'dona'tion {je '1000- li\'. , 'rilbyenoant l iaquelle
'elle vdulut que GuilIaùme Andriou (Ob 'frere-ne pût préten-cire lin legs de. &00 liVô l'qu'elle. ·Iui avait fait; circodft\mc'e
. ,
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PALAI.s
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ER"OVBNCB.
)47
lrès-(orte, puifqu'elle pr9uve qu'elle était notoirement regflrdée par le Notaire & les témoins comme jouilfanc. de
fa raifon.
.
,.
On ne doit jamais perdre de vue ce principe, que la
preuve vocale contre des difpoutions de deroiere volonté,
fur-toll,t quand elies font en faveur du plus proche parent
du défunt, ne doit être admife qu'avec la plus grande réferve, & en conféquence de faits graves & frappans, clairs
& non équivoqùes, d'où il doive nécelfaii-ement réfulter
Gue le teilateur était imbécille. Ici la preuve offerte par
l'Hôpital ne promet rien de pareil, puifqu'il ne cite aucun
fait.
Arrêt du 14 Juin 1776, au rapport de Mr. Je Confeiller
de Beauval, qui confirme Je teilament, & condamne l'Hôpital aux dépens. Ecrivant Mes. Gafiier & Leclerc.
ARRÊT
L.
Le tiers diffamé dans une requête de plainte peut faire informer fur la diffamation, fans attendre que la premiere
procédure foit décrétée, & que la plainte foit communùjué!:.
ou rendue puhlique.
E premier Février 177), Agathe Audibert du lieu
d'Ollioules fit fon expofition de grolfelfe contre Louis
Laugier du même lieu. Celui-ci préfenra requête en complot
& cabale de famille. Il dévoila aux yeux de la juilice la
conduite & les mœurs de cerre fille; il parla de la famille
d'Agathe Audibert dans des termes peu mefuré's. Il les. préfenta comme des parens qui ne veilloient pas à la conduite
de fes enfans, & rappella le trait de Marianne Audibert
mariée à Jofeph Mariny, qui avoit été décrétée d'ajournement à la fuite d'une procédure en prafritution. L'information fut ordonnée fur la requête de Laugier. Jofeph
~ariny & fon époufe firent informer fur la diffamation
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que Laugier répandoit contr'eux, & fournirent pour 'preuvE!
la requête de plainte- de Laugier. Sur- les- éharges de la
procédure, Laugier fut décrété d'ajournement; il appella
pardevant la Cour, & demanda l'évocation du fonds; il
attaqua même le décret de foit-informl.
On difoit pour lui, que la procédure étoit nulle, parce
que l'on n'avoit pu employer pour preuve littéraire l'extrait d'une requête de plainte qui devoit être une piece
fecrete, & qui ne pouvoit fervir de bafe à une autre procédure. Si cette requête devoit être préfentée à des rémoins;
ce n'étoit pas publiquemenr;_ ils ne devoient pas aller ,divulguer le fecret de l'information dont la requête fait partie.
Si la requêre devoit être communiquéè dans la fuirei cerre
communicarion non encore faire ne la rendoit pas publique, à l'effet de former diffamarion. D'ailleurs ce qui- conf~
ritue principalement l'injure, c'eft le de1fein d'offenfer; le
reproche d'un fait vrai, que l'on fe permet dans ce de1fein,
devient punifIable ; mais fi l'on n'a rien allégué que pour
la défenfe, fi on n'a pas cherché à donner à une alléga-.
tion cruelle, mais punilfable, une publiciré qu'elle n'exigeoié pas, il n'y a pas d'injure, puifqu'il n'y a rien qui
n'ait pu êrre fait. Le bien de. la défenfe de Laugier exigeoit
qu'il rapppellât les torts de la fœur ainée d'Agathe Audibert.
On répondoit pour les intimés, que l'injure fe rrouvoi~
dans la requête qui étoit dépofée au greffe; elle pouvait donc
en être tirée pour fervir de bafe à la plainte qu'ils devaient
porter; ce n'étoit point une piece fecrere , pu ifqu'elle avoit
été lue à tous les témoins qui avaient dépofé, & qui
avaient divulgué dans le village tout ce qui y étoit contenu; d'ailleurs il eft permis " même à 'la partie contre laquelle on fait informer, ..de demander extrait de la requête
de plainte; à plus forte raifon le peut-on, quand on n'eft
point partie. 0.0 n'a pas befoin d'attendre auc!lne efpecede gradation. On peut fe plaindre dès' le momenr 'qu'on
en a connoi1fance; les gradations de la procédure font
bonnes pour l'accuré·, mais inutiles- au· tiers. Il n'y a aucune
�DU
PALAIS :.l111
PR.OVIlNCll;
'~49
loi 'qui àéfende d'a.g.rr; au contraire,. céllê de néaeffiré, &
le danger du dépériffement. des preuves permettent la plu~
grande célérité.
Me. Meriaud, SubG:itut, examina la quefl:ion _en elle..
même; il la concilia avec .Ies circonG:ances dont la nouveauté la rendait iaréreffante., 11· fit voir tout ce qu'a d'affreux l'injure qui' touche à I:i réputatidn du tiers, & la néceffité qu'il y avait de la .réprimer par des peines publiques. Il obferva enfuite que touees les formalités ront de
rigueur dans le droit criminel; qu'on ne pouvait fous aucun
prétexte s'en écarter" fans fe livrer à l'arbitraire; les accufés ne peuvent avoir connoiffance des pieces feèretes de'
la procédure ; la requêre de plainre n'efl: communiquée
qu'après le décret ,,- & lorfque l'accufé doit donner fes
moyens de jull:jfication; il eG: néceffaire qu'il connoiffe alors
ce dont on l'accufe : mais les mêmes formalités doivent-elles
être obfervées contre celui qui n'eG: point partie dans la
plainte, & qui fe trouve incidemment amené dans la pro~
cédure? L'on n'a à la vérité à cet égard aucune lei précife..
L'Ordonnanee, les Comm~ntateurs, les C riminalil!:es ne
traitent pas cette quel!:ion ; tout ce que l'on peut dire, 'c'efl:
que l'intervention du tiers n'eG: pas recevable au criminel.
SerpillQn ob[erve qu'on ne reçoit pas l'intervention d'un
tiers qui prétend que la procédure qui lui el!: érrangere "
prouve qu'il aéré infulté" diffamé 04 maltraité, Cauf ~ lui
11 fe pourvoir par information en fon nom; il rapporte un.
Arrêt du Parlement de Dijon du 13 Février 1737.
La plainte de Mariny & de fon époufe fe trouve dans
ces circonl!:ances;, l'accufation n'était pas dirigée contr'eux;
ils y ont été incidemm.~nt amenés. Laugier. ~ , conligné'
dans une requête des injures graves, caraél:enfees, peu·
faites fans doute pour demeurer .dans un éternel filence,
puifqu'on devoit en fair~. la .leél:u~e ,a~x .t~m?ins lors .de
l'information, que l'extraIt en aurolt ete dehvre à la partIe,
lorfque le temps de [a défenfe ferait arrivé; le bruit qui
s'en efl: répandu dans le public el!: un nouvel outrage, une
nouvelle injure qui Re peut qu'ajouter à la calomnie. Si cette'
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piec.e· :Ôev.oit ~tre fecret~, fuivant .. l~ fyfiême de La'ugie'r;
on pe,peut' dire;~qu'elle; ne lla'p~1 é:té', {<Ins accufe... ·le Juge.
de prévarication. La Loi 'préfume au contraire pou; auteuQ
du crime 'rl'elili, qui. a eli intérêt à 'Ie-'com/TIertre. Laug'ier
guidé par ulj,e paffion aveugle., entraîné par ,des mouve"'!
mens que la, raifo,n 'ne rete'lloi. plus, venoi,t de fe livrer Ir
tous les éc;arts' de fan imaginati(Hl dans fa rè§juête de plainte.
contre Agathe Audibe,rt; tollS' l'es; obiers préfens à fà mémoire l'ont fans -doute continuelleme'nt occupê, &. vraifemblablement. il en a fait le fujet de fes entretiens particuliers, qui répétés plulieurs fois, fe font bientôt répandus
da,ns le public; c'efi un,',double.r csnime dont Laugier s'elh
1'è'lldu l'oupable; non- content de la diffamation & de la
calomnie qu'il' avait préfe:ntée·à la Jufiice, & dont on aurait
demandé la réparation dans tous les temps, il s'en efi glor.ifié,. & [es difcours n'one fai.t que hâter 1'infiruétion d'une
procédure qui·'dans tous les. terrips aurait eu fan effet. ,
. Laugier ne .peut pas. direl'que ces faits n'one, été amenés
incidemment' dans' fil" requête que pour appuyer le mérite
de fa demande, & 1 fer.vir' à fa défenfe., L'Ordonnance de
1667 dit, que, s'iLeit- avancsé:des reproéhes, porrant que les
témoins ont été, empFiforrnés , déerét.és ou repris de jufiice,
les faits fe.rom réputés c'alomnieux'1- s'ils ne font. juHifiés
avapt le jugemene:dil procès.. Id faut donc que les' reproches
fo.ient fp'ndfs [ufl'des piec.es, &. qu'ils. ne [oient pas fournis
anima injuriandi; celui: qui propafe', des reproches évidemment calomnieux, doit être condamné à une réparation.
Les mêmes rairons-" les mêmes motifs qui affurent au
témoin CAlomnié une' réparation .prompte 1 s'appliquent
également & à plus forte' raifon au. tiers qui n'ell:' en> aucun
Cens incorporé dans la, chaîne, de la procédure.
,
Les faits que· Laugiec:a avancé one été diétés anima in:
juriandi. Quel intérêt pou.voit-i1 avait à préfenter aux yeux
de la Ju!l:ice la famille Audibert comme. abandonnée à toure
forte' de vices & comme' uœ exemple de mauvaifes"mœurs?
Quel intérêt av,oir':'il de rappeller le fàit de la Cœur 'd'Agathe
4udibett, qui,fe rr.ouyoit anéaori,& détruir;d~puis au delà de
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tept ans, & de répandre le 'trouble & -le défordre -dans u!!
ménage'? Cette requête éIl: un vrai libelle diffamatoire; l'intérêt de Mariny & de fan épouCe eIl: fenlible; le bruit public
a excité leur plarml:i, la ,témérité de Laugier a été pou1fée
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•
•
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à l ,exces.
Me. Meriaud léonc1llt à.ce qlJe l'appellarion fût mife au
néant & ce dont était appel tînt & forrit fan plein & entier
effer, avec renvoi & amende.
Arrêt du 1 ~ Juin 1776, prononcé par M. le Préfident de
.Jouques, confacme aux cQDclufions; Laugier fut condamné aux
,dépens. P.laidam Mes. Simeon & Gaffier.
t 1J
..
ARRÊT
LI.
-Celui qui tl fourni la prime, a une préférence fur la c!wfe
ajJùrée vis-a-vis' les créanciers de l'AjJùré.
E 2~ Janvier 10/74, le fleur JJofep~ Maurel, Armateur,
fit en fav-eur . du lieur Gafan un bIller à ordre de 3243
liv: la fols', payable len Oél:obre-mêm'e année, caufé ,pour
valeur.en -prlme~ d'ajJuran'ces-.; le, fleur' Gafan céda ce billet
·au fieur Olive., Bourgeois de I<i ville de Marfeille..Avant
-l'échéance de ce biller, les lieurs Maurel & Garan -firent
faillire. Le 9 Seprembre .cuivanc, le fleur Olive Ce pourvlit
.aux Juges.ConCuls. conrre les débireurs folidaires en con.damnarion des 31.43 liv. la fols, avec déclararion qu~il
-feroir .privilégié & préférable à tous créanciers fur le corps
· & facultés de la Polacre. L'Heureufe Therefe, t& .requit 'Ia
commune exécution oontre la· ma1fe des créanciers de .l'un
.' & de l'autre. Senrence de défaut qui enrérine .ces fins, en
· verru de laquelle il fur fait un arrêcement des marchandifes
· chargées fur le bâtimenr. Maurel s~tant a-rrangé ,avec ..[es
'-créanciers, fe pouTvLft en rabattement du .défallt., fur le fon! dément que ·cerre fomme lle -àev.oit 'P0ine avoir la prëférence
que le ueur Olive -lui attribuait., & .qu'il devoit feulelJleJl~
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entrer "dans .l'arrangement fait àvec: les autres créa.ndeis•
.seconde Sentence qui pérmet au Lieur Olive de continuer fes
exécutions. Apper de la part de Mauret.
:
, On, difoit pour lUI qu'un billet con4u( pour valeur en primes
d'aJfùrance n'emporte avec foi aucun privilege ni préféréOl.:e
fut les 'effets du oâtimént 'affuré ; qu'~Léto1t kle la nature des
limples obligations, & ne :pouvoit'avoir un:autre ·fort. '-,
On répondoit que par-tout le paiement de la prime procure 11 celui à qui appartiennent les deniers une préférence
'indifpurable, & .ce 'privilege eil: équitable. Celui qui affure,
reçoit un prix ou une indemnité de ~l'événement qu'il court,
pour balancer les rifques de la refponfton. Ce prix, que l'on
connaît fous la dénomination de la prime, e!l: payé ou ~n
argent ou en billets, & par avance; tel ell: l'ufage de Mar~,
feille atre!l:é par Valin fui.l'Ordonnance de la Marine,liv.
4 , tir., '6 des aJfùrances; arr. [, pag. 26. L'effet de l'affu· rance donne à l'âffureurune a&ililn dire&e fur la chofe affuréé, parce que. de ipême .qu'il eH,tenu à repréfenrer la valeur du bâtiment, s'il vient à périr, ainLi ce même vaiffeau
doit .répondre de la' valeur de' la prime qui fait partie des
néceffirés de fon voyage /3( fur lequel tombe le paiement
de fon affurance ; ainli les Matelors 'font préférables à tous
autres créanciers 'de l'Armateur; les,deniers pris à la groffe
· durantle cours du voyage fonr préférés à ceux qui ont été
prêtés avant le liéparr du bâtimenr,' parce que fans ce fecours, il n'auroit Pll achever fon -voyage. ,
'
La prime 'd'affurance e!l: payable par avance dans la Place
de Marfeille en efpeces ·ou en billets. En fuppofanr, qu'ellé a
été payée' en billets, il eil: naturel de conclure <j,ue l'affureur faift de ce biller conçu en prime, conferve un privilege fur le, navire & fa cargaifon. Cerre préférenc,e dérive
de la nature de la dette; en forre que fi le bâtiment arrive
à port & fans perte, l'affureur ,comparoîr pour recevgir la
valeur de fon billet qui eH le ~rix de fon affurance; & faute
,par l'armareur ou les' inréreffés à luj en rembourfer le montanr, il porte auffi-tôt !ès exécutions fur ce navire & fur fa
· cargaifon, comme foqniis à liquider le gage de ,la [ûreté
fou~
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�· DU
PALAIS
DE
PROVENCI!.
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fous laqJel1e il a vogué, & nul créancier ne peur lui difpurer
la .préférence ;' c'efi la faveur de la créance & la nature
des deniers qui lui réTervent ceUe fupériorité fur tous les au.'
.
.
Ires non privilégiés.
Si l'armateur veut payer la prime en argent, foit parce
qu'il ne trouveroit aucun affu.reur .fur fa fimple fignature,
à laquelle bn ne donne ~ucune 'foi, foit parce qu'il a des
raifons' pour 'embraffer cette forme· de paiement, & qu'il fe
foumeue à cet eff~t d'emprunter pour y fatisfaire l'argent
du 'tiers defiiné 11. l'acquirtement de la prime, le tiers participe à.ce privilege ; que ce foit l'affureur ou le tters, ces deniers
ont une égale appli"cation, ,'efi-à-dire, qll'ayant fervi à
acquitter envers l'affureur le montant de fa prime, ils ne
font pas moins réputés dus par les atrurés. Que ceux-ci
en doivent faire le rembourfement à l'affureur lui-même, ou
qu'ils le faffent à tout autre qui le repréfente, cette repréfeotation ne change pas la nature de la créance qui efi toujours établie fur le bâtiment, parce que c'eH le bâtiment
qui la doit ;. le ceŒonnaire exerce les mêmes droits que fon
cédant.
Par le compte courant communiquê eotre les fieurs Maurel & Garan , il conHe que ce dernier atruroit pour le compte
du premier, & qu'en filÎfant les atrurances, le fieur Gafan
a payé toutes les' primes aux Notaires & aux Courtiers; on
ne voit nulle part le fieur Maurel figurer comme fairant
lui-même les affilrances ; il ell: donc inco.nreHable que 1'0bliO'ation des 3243 liv. 10 f. puifoit fon' exill:ence dans la.
val~ur des primes. Maurel, a·rmateur, fàit un billet à ordre·
à Gafan qu'il concroit pour la valeur des primes payées par ce
dernier; & après. avoir ainli atteHé l'emploi des deniers, il fe
ravife de diIe que la taufe efi fauffe: où en efl: la preuve ?'
Une rétraéhtion auffi frappante n'eH pas admife juridiquement avec une facilité qui anéantitre des engage mens' auŒ
elrentiels; un homme obligé ne peut Ce délier en difant
qu'il s'dt trompé ou qu'il n'a pas recru la fomme deHinée
à- ce't ufage. Il y a pl~s ; s'il ét~it probable,
,m.oralement
certain que les 3243 hv. 10 f. n eutrent pas ete veritablement'
I!'
.Années 7775 & I77 6•
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employées ;au paiement des primes, il ne faudroit pas moins
lai1fer au billet donc, s'agit le caraétere & le privilege que
le débiteur lui a affigné; le lieur Olive n'auroit point tremré
dans le complot ni dans la fabrication de cette piece; il
l'a acceptée fous la foi que l'écrit avoit une caufe de préférence ; le manege., s'il en exifioit aucun, n'eût j!lmais été
concerté qu'entre Maurel & Cafan: Pourquoi vouloir rejetter fur l'endo1feur, homme paffif, & qui a confenti avec
- bonne foi à la négociation, le danger d'une caufe limulée?
vraie ou fau1fe , elle doit être entretenue: nemini fraus [ua pa-
trocinari deDet.
Inutilement Maurel oppofe que le privilege accordé aux
billets de prime ne fe communiquant qu'à l'affureur ,. le lieur
91ive qui ell: un tiers ne peut pas prétendre d'être fubrogé
.~ fe~ droits; il n'y a aucune loi qui prohibe cette forte
de billets en primes; ils deviennent plutôt néce1faires pour
faciliter· les aŒurances. Ces billets fone à l'inll:ar pes lettres
de change & aut.res billets limples ou à ordre qui par l'endo1fement & la remife faite au tiers lui tranfportent les
mêmes droits qu'avoit celui au profit duquel ils avoient été
d'abord paffés. Le pouvoir de la négociation ell: conligné
dans l'ordre qui procure au porteur la liberté de le céder
àun autre; & par l'effet légal & conféquenr de c~ tranfport, l'endoŒeur, qui ell: le ceffionnaire dans les aétes ordinaires, devient maître abfolu de la chafe cédée ou du
billet endo1fé fans aucune rell:riétion; ce qui donne à cet
endoŒeur ou à ce 'ceffionnaire la plénitude des a6l:ions que
le premier créancier pouvoit exercer. Jamais maxime plus
certaine. Il y a donc fubrogatibn en force .de laquelle le
lieur Olive a pu aétionner le débiteur & arrêter fes efIets.
·Pour fe foull:raire à cette regle générale, il faut que Maurel indique la Loi qui excepte' les billets de prime de cette
regle: Jufqu'alors on fera toujours fondé à foutenir que fuivanr les regles du commerce, le porteur d'un billet a la
même préférence que celui auquel il a été primitivement
remis; que la fubrogation de tous' les droits, privileges &
préférences s'aeçomplit par la fignature & la tradition.
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PAI..A.IS
DB
PROVENC·E.
~~~
Arrét du ü Juin 1776, au rapport de M. le Confeiller
de St. Marrin, qui confirme la Semence avec dépens. Ecri.
vant Mes. Reynaud & Alpheran.
ARRÊT
LII.
En mariere criminelle, lorique les Officiers Royaux préviennent ,ceux du Seign.eur, les frais de procédure ne /oflt répétés vis-à-vis du Seigneur, que fur le taux qu'ils doivent
être payés par le Domaùié, lorique la ,procédure efl prift
à la requête du Procureur du Roi. .
D
Ans-le mois d'Oél:obre 1773, les Cavaliers de la Maréchau1fée arrêrerem & conHituerent prifonniers au Luc
deux filles & un garçon fOl1p~onnés de vol 'de châtaignes;
huit .jours après, & avant l'information, le garçon s'évada
des prifons, & fut repris. Ces prifonniers furent conduits
à Aix, & delà renvoyés aux prifons de Draguignan, Siege
du re1fort. Le Procu"reur du RoL en la Sénéchau1fée de
Draguignan requit l'information par prévemion contre ces
prifonniers fur le vol des châtaignes & le bris des prifons ; la procédure fut infhuite, & la Semence rendue. Me.
Hênri ,Greffier au Siege de Draguignan, fit un état & rôle
des frais de la procédure, qui monrerent à 196 liv. 19 fols,.
pour laquelle fomme le Lieutenam décerna contrainte; &
par exploit du 16 Mai 1774, elle fut lignifiée au Sr. Gaucher,
Fermier général de la terre du Luc, avec commandement de
.payer. Gaucher appella pardevant la Cour du décret de contrainte ,pour obtenir la réduél:ion à ce qui feroit à la charge
du Domaine, fi la procedure avoit été renvoyée au Lieutenant; & cependant comme la prévention ,des Officiers de
la Sénéchau1fée de Draguignan n'avoit eu lieu que par la
faute du Procureur fifcal, le fleur Gaucher le fit affigner
pour. affifter dans. l'inHance, & fe voir conddmner à le reAaaa2.
�'H6
.
JOURN~L
,
.
lever /Sc g;Jrantir de tout ce qu'il ,pourrait foullHr à difon
de la contrainte.
On dlfoit pour le !leur Gaucher, que l'Edit de 1772, qui
leur fert de prétexte, fuffit pour faire rejetter leur prétention.
Le premier objet du Roi a été de foulager les Seigneurs
d'une charge pefaqte qu'en~raîooit la pourfuite des délits
commis dans l'étendue des Juflices feigneuriales; le fecond
a été d'empêcher que cette charge ne fi'tt un motif de fa..
yorifer l'impunité; c'~fl dans cette vue que le Roi vouLant
de plus en plus affurer le repos de fes fujets; le maintien de l'ordre public /le: la punition des crimes, voulut faire
trouver aux Seignêurs hauts-juHiciers leur. avantage particulier
dans [la pourfuite des 'coupables , & leur fournir les
moyens de fe décharger des frais des procédûres criminelles.
; Pour remplir cet objet, le Roi a poCé le- cas auquel
les Juge~ des Seigneurs informent & décrerent avanr les
luges Royaux, & alors l'inll:ruél:ion en premieN infiance
doit être faite aux frais du Domaine, & les Procureurs
jurifdiél:ionnels peuvent incontinent après l'information &
les décrets, envoyer la groffe aux Procureurs du Roi, POUE:
la procédure être continuée par les Officiers .Royaux.. Lorfque les Juges des Seigneurs informent '& décretent avant
les Officiers Royau" dans une procédure prife .à la requête
du Procureur juri[diél:ionnel , cette inHruél:ion en premiere
ioll:ance devant être faite aux dépens du Domaine, on
ne pourrait pas prétendre que les -frais de cerre -procédure
fuffent payés par le Domaine, .comme fi elle étair prife à
la requête d'une partie civile, quoiqu'elle foitllne furcharge
pour eux.
L'Edit pofe enfuite le cas auquel les' Officiers Royaux
. préviennent ceux des Seigneurs, & il veut qu'alors l'infrruél:ion en premiere in!l:ance fo.it faite a'u" frais des Seigneurs'; c'ell:-à-dire, qu'alors les ,Seigneurs font privés de
1'.lVantage particulier que le Roi leur faie, en leur ôtant
la charge qu'entraîne la pourfuite des délits commis dans l'é-
�.•
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p ~ t ~lU ~: J) Ill. ?Ptll, 0 V B N,e E.
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terrdiw·de' leurs JufilCéS'; &, en l~u 'fourhif1ànt ·léJ rfttJJetpde-.jè
décharger des frais des procédures crim;nelles.'L'eJFet.de.cettè
privation elt qu'au .lieu que ,ce.feroit le Domaine,·qui. paye'•.
roit .les frais des': pwcéaures, fi Jes Juges des' fS'eJgneu~s
avôient prévenu, lorfqu'ill\ [Ce .Abo't. lailfés 1 prévepir, IparJ.les
Officiers Royaux, ce1fo'oc îcos ·Seigneilrs. quirliaivélltinpayer
ces frais ;miais ce fone to!!jburs l'ès mêmes frais ;II'Rdit' n'y
met aucune d.ifférence i il n'y eil pas, dit .que lorfque les
Officiers Royaux aurout prévenu ," alors les Üais, feront payéspar les Seigneurs, commeo·fi la procédurè écait prife.àJine.
quête d'une partie' cjvile.. L'Edit parle'toujours :fans ~ifl:inc .
tion; les frais qui 'doivent .être payés, par les Seigneurs', len'
cas que -leurs Juges ·fe lailfent prévènir , If~no précrfément
les mêmes; & conime étant fubrogés àJ ceuXJ que Je Bomaine·
devroit ·pàyer aux Officiers Rby.au,,? ft les Juges des:Seigneurs'
a'loienr: plévenu:
ri 1:,) ':;' 1,1 d .1
ur' . r'
~ .1.2
1
, L'article fecond de ,1'F;dir acheveTde démontrellquétle,.RGi.>
n'a' pas 'voulu aggra>J.er la conditiom des 'S:éigneurs~.iAÎJantl
cd Edit, lorfque les procédures étoient prifes. par leurs
Juges, en cas d'appel les inlhuél:ions néce1fàires, les frais de
t-ranfport , de l'envoi, ;od'exocution', écaieni à la' charge des
Seigneurs,' fauf leurs .recours conrre.les. coupablesJlcondam,'
• nés, recours qui· ne. lèur 'donnoit fouV'cnt ,'qulune .re1fource.
inutile & infru&ueûfe: .Le fe'c(nfd article de l'Edit décharge.
totalem~nt 'les Seigne~rs'\de ces' frais. pe forte que, lors.
même .qùi les Juges des Seigneurs fe') ftint faiffés prévenir,
les frilÎs. ~Il '~a:ufe .d'appel doiveqt êtte Laux; dépens:du' Roi.'
Or s'il falloit fuppo/è: que lei'lSeign"èurs payalféncl .alors .les ~
frais', comm~ fi la. procédure 'Iétoit~ poqrfuivie ~.la requ'ête
d'une partiê crivjlel; "ueUe' ahfurliité. n'.én. réfuitèroit-il pas ~)
Les fràis' de pre.mierè inilance' feroient. payés .le double,
& ceux faits en caufe d'appel ne feroie,nt payés que fur le
taùx de',celles- qui'j lOii't"prifes~,à: la requête d~ Procureur,
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du·'R·'·
Il réfulte du ~ fecond artiCle de' ,l'Edit , qude Roi' y fuppofe que; quand' mêmé les Juges- des' Seigneurs ne préviendr.oienr pas..,. & que .les Juges.iRuyaux .prendroient.la pro~
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cédure aux dépens des .Seigneurs, ils recevraient ',toujours
leur p.aiement de la part du Domaine qui aurait une action de répétition. Cet Edit n'aurait pas parlé de répétitian, s'iJ n'eût fuppofé un cas où elle pLIt avoir lieu, & ce ne
peut être que' celui auquel. les Juges des Seigneurs fe lailfent
préqenir; il réfulte auffi que le Roi n'a rien voulu innover par
rapport à l'ufage qui étoit fuivi , lorfque les Officiers Royaux
prévenaient ceux des Seigneurs, c'efi-à-dire ~ que dans le cas
où les Officiers Royaux prpcéderoient par prévention aux
procédures qui•. doivent être faites aux dépens des Sei.
gneùrs, ils feraient toujours payés par le Domaine, fauf
la .répétitioJi .COntre les Seigneurs. Si le Roi a ei1tendu que
le Domaine payerait, fauf de répéter, il a entendu que le
paiement fe'roit, toujours le même dans les deux cas, fair'
qu'il fût ,à fa charge, fait. qu'~1 fût li. .celle des Seigneurs.
M. le Garde des Sceaux, par fa lettre du mois d',Août 1774, dé..
cida qu,e la prévention des Juges royaux fur 'ceux des Seigneurs,
ne, changerait, rien dansl la regle primitive, qui veut qu'il ne
fait reç,u ?lucuris 'émolumens ni àucunes vacations' par les Juges ,toutes 'I~s fôis qu'jl~ agiffent à la requête du minifiere
public, fauE leurs jufies! débourféNaxés fur le pied des Réglemens du .GonfeiJ".quand ils font obligés de fe iranfporter'
au.) dehors; 1 encore, ·faut.il 'que la néceffité' de ce tranfport'
fait pleinement' co'cfiatée. D'ailleurs le. LieutenilOt de Dra-'
guignan ne pouvait pas dédder en fa faveur, & H n'y. avoit'
que' la Cour q'ui pût: déCerner ùne pareille contrainte. Ainfi <l'
le véulent· )/.ate•. 7 ldu. tit. '1.d.e l'Ordonnance de 1667, & '\
l'arr. 7.de PEdit ~U; mois'de'Mars 1673- J', •
.ï
On a 'toujoursliegar~éJen :-Prilll.en,c.e c!,m'rtie ulle maxime
certaine, éJablie par, lès Arrêts,. que . les. luges fubalrerne~' '
ne peuvent poin~.,~écerner des contraintes pour les épices;
( Boniface, tom•• 1 , pag. 4. ) On trouve ·dans le Rècueil des
Arrêts de Réglemeht. de Mr. de. Re,gulfe, pag. 22. , un.1rrêt.
du 29 Juillet 1638, qui reçoit l'appel incidemment interjetté
par, le Procureur-Général du -Roi' de la coiitràinte génér'ale
laxée. pour 'Ie paiement des épices, & qui fait défenfes au'
Lieutenllnt de Forcalquier & autres de la Province d'en.fàircL
\
�PA.tAH liE l'ltOVBNCll.
1~9
de femblables,'~:peine de nullité, ,dépens, dommages & intér~t~. On en trouve un autre dans·le.même Recueil, pag. 92.
D11
/
On répondoit pour Me. Henry, que l'Edit du mois de
_ . Mars 1772 eil introduél:if d'un droit nouveau; de pareils
changemens deviennent fouvent nécelIaires. Ainli le temps
& l'équité, fans l'intervention d'aucune Loi, font qu'on adjuge des dépens aux Procureurs Jurifdiél:ionnels contre cette
maxime, regardée autrefois ~omme facrée: Fifcus nec dat,
nec accipit.
L'Edit de 1772 eil clair; il s'agit de déterminer quels
font les frais qui, dans les cas de la prévention des Juges
Royaux, font ~ la cha.rge des Seigneurs. Si ces frais n'étoient autres que ceux auxquels donnent lieu la traduélîon
des prifonniers, l'ex~cution des jugemens & les falaires des
témoins, frais néce1faires, frais indifpenfables dans tous les
cas, foit qu'il y ait prévention ou non, le Légiilateur n'auroit pas eu befoin, par une difpolition expre1fe, d'en charger les S~igneurs; ils les devoient déja par le droit commun" par des principes fondés fur les premieres notions de
l'équité, fur les Loix du titre du Digeile & du Code de
negotiis gejlis. Car avant l'Edit de 1772, lorfque les Juge.s
Seigneuriaux étoient prévenus, le Domaine répétoit contre
lés Seigneurs qui avoient confié l'exercice de leur. JuCHce
à des Officiers négligens, les frais dont il n'avoit fait que
les avances, & les Seigneurs taxés fans injufiice payoient
fans difficulté. Si cette derniere Loi n~avoit pas eu d'autre
objet, elle fe feroit référée aux anciens Arrêts du Confeil,
& elle en auroit ordonné l'exécution.
D'ailleurs, fi le Légiilateur s'étoit contenté d'exciter lesSeigneurS ~ la vigilance, par la .confidération du foulagement'
des frais de procédure, fans les détourner en même temps
de favorifer l'impunité par la crainte d'une augmentation de
ces mêmes frais, fon ouvrage eut été imparfait. Récompe~fer & punir font les deux grands re1forts de la politique; & lorfqu'ils font réunis, ils produifent des effets plus
fûrs & plus pui1fans. TOlites les fois qu'il y a une récompenfe atrachée à une certaine aétion, il faut qu'il y ait une
�,
S60
JOURNAL
ea
peine prononcée contre l'aél:ion contraire; 'le frein'
au
moins aulIi néceifaire pour rt::tenir): que l'aiguillon pour el(citer.
1
Ces motifs font preff"nts, & \lue lettre circulaire de M.
Turgot, Conrrôleur-Général, du 27 Mars 1773, les met à
l'abri de toute r conrradiél:iom " Il refloit. également a déci/> der, dt-il dit dans cette letrre, Ji d<lns le cas de pré" vention·,'les. Officiers RoyaùX,devoient Ùre jimplement payés
" comme dans les procédures où le. Roi efl feul .partie, ou
" comme dans celles qui font pourfüi.vies la r.equête> des par" ties civiles. II a été décidé, en èonfèquence qu'en matierè
" de prévemionde· la part, d'el" Officie"s de -Sa Majeflé fùl'
" ceux des 'Seigneurs, les exécutoires d~!I> frais de tran'!port
" fur les lieux, & ,de tous autres frais généralement que}con" ques, à, 1'exception des feu/s falaires 'des témoins, doivent
" être décernés direc1ement fur les Seigneurs. dont les Officiers>
" Je fe·roient laiJfès prévenir. Un des principaux motifs de
" cette· décifion efl que Ji les exécutoires étoient décernés fur,
" le domaine'; les Officiers du Roi ne pourroient 'être alors
.. payés 'que fur le pied des Réglemens du Couftil, pour les
" frais d'es procès aiminels où le Roi efl feul partie; au lieu.
" qu'on entend, qu'ils puiJfènt ft taxer comme dans les pro~
" cédure'! p'ourfuivies la requête déS parties civiles, lorfqu'ils
" travaillent pour le' compte des Seigneu"s•. "
.
,
"
Le 'même rnÇ>tifs qui ;faic. récompenfer la vigilance, ne!
doit-il pas' faire punir; la: négtigence? Les Seignèurs, fi leurs
Officiers p.réviennent, ne payeroienr rien; & s'ils font pré-'
venus, ils ne payeroient que ce .qu'ils étaient obligés depayer fans la plus~légere~furcltarge; leur fort fer.oit.amélioré
dans un cas, & .ne ferotlf. détérioré dans aucun;:' ils' pour-'.
roient 1 gagne·r,. fans pouv:cir perdre;. ils confe'rlleroienc les'
émolumens de la Jullice',r,fans en. avoir' les charges;·.ils.fe
roient généreufement foula'gés des frais des procédures, &
les Officiers Royaux qui lie' leur doivent rien, feroient du-.'
rement chargés du travai,~ .qu?elles, exigent.
.'
CeH un pr.incipe fondé en raifon & confacré par.. une
pratique auffi' ancienne qu'univerfelle, que _les exéc.utoires!
doivent
aé
a
�DU
PAL4.IS
DE
PROVENCE:
561
doivènt étre. décernés' p"ar ceux qui nt connoi1Tance des
frais qui y donnent lieu; qui font en état de les apprécier & d'empêcher qu'ils ne foie ne fraudllleu(ement enflés.
Sans cette connoi/Tance, on (eroit ai(émènt fllrpris; ou pour
ne pas l'être, il faudrait avoir fous l"s yeux toures les
pieces. En un mot; pour apprécier les fr"is, il faudrait refaire en quelque façon le- même ouvrage.
D'ailleurs, lor(que les Officiers Royaux fane des defcentes
pour des procédures qui fane à la charge du Domaine, ne
décernent-ils pas eux-mêmes les' exécutoires pour tous les
frais? L'in(peétion de M. l'Intend-ant qui, en(uite d'une Loi
f!loderne, vife ces exécutoires, ef!: bornée à voir fi la de(çente était néceilaire. Ainfi les Officiers Royaux Ont pour
euxJ'ufage & la rai(on.
Le fieur Gaucher, en citant l'arr. 7 de l'Edit du mois de
Mars 1673, (ervanr de Réglement pour les épices & vacatioils, a omis la claufe e/Tentielle qui s'y trouve': pourront
néar,moins les exécutoires être délivrés aux parties intéreJfèes aux
proces, G' qui les auront, déhourfès. Ainlï, lor(que les parries
intére1Tées font les Juges eux-mêmes} lorfqu'il n'yen a pas
d'aurres, faut-il bien que les exécutoires foient' décernés en
leurs noms ou de' leurs Greffiers? F am-il bien que les frais
foient payés à leur pour fuite , ou qu'ils ne le (oieôt jamais?
De' quelle autre main peur venir l'impulGon?
. On obferva pour le Procureur Jurifdiétiaonel, que les
Offièiers de Jufiice ne répondent jamais. d'une erreur de
fait, à moins qu'elle ne fait groffiere, conGdérable, & telle'
qU'Oli pui{fe l'affimiler au dol, '1uia latâ culpâ dola œquiparatur.. Loi 226, 1[ de verhor. jignif. C.'efi en car.aét.ér}fa~t .
les cas qui prêtent ~ cette garantie, qUI dans celUI-Cl eqUlvaut à la vraie prire à partie; que les Loix prefcrivene les
regles propres à faire diftinguer ceux Oll l'on peur les ren_
dre refpon(ables de la conduite irrégnliere qu'ils tiennent,
ou de la négligence inexcufable qui les fait réputer coupables
du dol ou d'un oubli volontaire. Les Loix J S, §. Judex &
40 §. J, if. de Judiciis, nous enfeignent qu'il n'y a que la
fra~de) une faveur repréhenGble, l'inimitié & le dol qui auto. Bbbb
Années z775 & z77G•
�~~i
1'0 UR N A t
rifent la' g~t :Bfjë~fi perfraudem ,gratiam , inimicitias, alltfardes;
aut dola mata. Les Officiers de JuHlee doive rit apporrer des précaurions d'autaht plu~ grandes, qu'ils peuvent être pourfuivis
perfonnelie~.eïlt, fi l'inforrtlation dirigée contre des ac-
cufés vient à' être déclarée calomnieufe. ( Ordonnance de
i670, tit, 7, arr. 7, )
.
Ce milieu délicat qui I~s tient flottant enrre une aétivité
inconGdérée & une lenteur fufceprible de blàme, opere toujours cette dHl:inétion fage & équitable que les Cri mlnaliGes ont univerfellement établi; elle porte fur ce que dans
l'une & l'autre hyporhefe, il taut apprécîer l'intention de
I:Officier, s'il a' agi avec Illmieres ou conrre fes connoi(fances. Mais dès ;qu'il y a 'en lui cettè bonne foi, cette diI.igence, ce zele & cette probité que fes fonél:ions exigent,
il Y aurait de l'injufiic,e, l'on ofe mê~l1e dire de la cruauté,
à vouloir le faire garant d'une chofe qu'il n'a pu prévoir, &
à laquelle fa volonré 'rie .participe poin. Delà les Autetlr3"\
qui ont difcuté cètt~ q'u1eltion, affurent que le vengeur public ne doit fournl~ro:n qliniil:ére p'our faire punir le délit" oule
crime, qu'après qiil 'eH 'conffareà feS' yeux d'une maniere à ne
pouvoir lui faire préfumer le contraire; mais il ne doit pas
légérement embraffer un 'témoignage fragile & dangereux;
il rifqueroir d'agir ca'lomnieufeipent, & d'être fournis aux
dommages & intérêts que. l'Ordonnance réferve à I:acèufë:
La crainte de· tomber clans le cas d'une calomnie excufe
donc valablement I~ Procufeur du Roi, s'il fait ceffer l'exer-'
cice de fon minifiere dans des- circonHances douteufes. De
même que fa bonne foi & la droiture de [es démarches le
mettent à couvert de tburè rechercHe 'dans une accufation
mal-fondée, airiG cetre bonne foi & ce~te droiture doivent
le prémunir contre toure att<fque, lol-'fque des accufés ont
été reconnus criminels, lors même qu'Hies a crus innocens
à la fuite de [es perquifitiol1s, & qu'il n'â point agi pour les
pourfuiv~
1
Les frais de Jufiicedans une Jurifdiétion bannerele font
à la charge du Seigneur, fi dans l'examen des preuves le
Procureur fifcal ne 's'efi pas conduit par dol ou par fraude,
�D U
PAL Ars
D E
PRO VEN C Il.
~ 63
ou par concuffion. C'el!: le vœu de tous les Jurifconfultes
( Bacquet, des droits de Jullice, .chap. 17; Domat &
Denifart, leu. S, pag. 497.) Nous avons en Provence
des Arrêts de Réglemenr, entr'aut~s celui du 7 Février 173')' qui oblige le Seigneur de prendre le fait &
caufe du Procureur Jurifdiaionnel, lorfqu'il el!: intimé. Il y
en a même de plus récents, qui défendent de faire entrer
dans· les baux le paiement de ces frais inféparables de la pelfonne du Seigneur.
L'Edit de 1772 ne rejette pas fur le Procureur Jurifdictionnel les dépens de la procédure inl!:ruite préventionnellement par les Officiers Royaux; mais il en impofe la charge
aux Seigneurs eux-mêmes, comme étant les feuls à avoir
les avantages des àmendes & autres droits de la Jurifdiètion, & qui doivent pJr réciprocité en courir les rirques.&
les pertes.
.
.
Ici il el!: certain que le Procureur Jurifdiaionnel a pris
des inl!:ruaions fur le vol qu'on impurait aux accufés. Il a
voulu fe conv'1incre de la vérité du vol; il devait ce préalable à l'intérêt du Fermier, il le devoit à lui-même; une
procédure hafardée le metrait à découvert. Il a donc voulu
fàire le bieh du Seigneur ou de fan Fermier, fans facrifier
les devoirs de 10n état.
Arrêt du ...... Juillet 1776, au rapport de Mr. le Confeiller
de la C?npr~ue, ,qui en concédant aae au fleur Gaucher de
fan offre «;le .payer le montanr de la contrainte au f1mple
débourfé, en conformité de ce que-paye le Domaine dans le
. cas: d,'une. prôc~dure prife à la requête de Mr. le Procureur. Général .du Roi 1ou .~e fon ~ubfiitut, reforme la contrainte
jufql1es au concurrent de. ce que le domaine paye, le furplus rejetté en matiere' de prévention; n.et le Procureur Jurifdiaionnel hors de Cour & de procès fur la garantie; &
condamne la Sénéchau1féè aux dépens envers toutes les parties. Ecrivant Mes. Ve~de.t, Portalis & Reynaud.
.
Bbbb2.
�JOURNAL
ARRÊT
LIlI.
Quejlion de compétence fur un prétendu fait de Police.
L
E 13 Août 177 2 , Jean-BaptiHe Pafcalet,'Tonnelier du
lieu de. la Valere, expofa au Lieutenant - Général au
Siege de Toulon, que fans avoir commis la moindre faute,
il avoit été emprifonné 'de l'ordre du premier Conful de la
'Valere dans les prifons de l'Hôrel-de-Ville, & de la maniere .
'. la plus ignominieufe ; qu'il y était encore détenu; que c'était-' .
là un abus d'autarité de la part de cet Officier municipal,
& un trouble à la fûreté publique; il requit l'accédit pour recevojr fon expofition.
Le 'Lieutenant .accéda le même jour, trouva la porte ouverte, & le Concierge lui dit que le .Maire avoit donné ordre
dès le- ma~in de l'ouvrir; Pafcalet expota que la veille vers
les dix heures du matin, étant à .1'1 'boutique du nommé
Hon!1orat, Cordonnie.r, il vit venir un faucon ayant trois
grelots attachés au col; il voulut le manier par curiofiré; il
fut ,mordu & le lâcha. A l'heur.e de midi, le....premier Confui le manda, il obéit; il rencontra le Maire fur la place,
avec celui qui prétendoit que Pafcalet avait pris fon faucon.
Dans le premier moment de fenfibilité, il demanda à cet
homme, du côté duquel il était tourné, fi c'était lui qui
l'accufoit d'avoir voulu voler fon faucon; le -Maire ,jetta par
terre le chapeau de Pafcalet qui ne l'avait pas ençorè ôté,' &
donna ordre de le mener en prifon. Le faucon. fut retrouvé
un momeur après; Pafcalet pa1fe la nuit fans ljt, paille, ni
matelas, 'par la cruauté du Maire. A neuf heures il avait entendu ouvrir les porces de (a prifon; il Y était refié, n'ayant
point eu d'ordre d'en forcir. Il demanda & obtint aéle de
fon expofition, l'information & fon elargi1femenr.
Le même jour le Maire fit a1fembler le Confeil de la.
Communauté; il expofa les faits qui s'éraient pa1fés; on dé-
.
'
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PAt AIS
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D B
P 1l. 0
V 1! NeE;
"~ 6')
libéra de prendre fon fait & caufe, .de quelque maniere qu'il
fût attaqué, attendu qu'il avoit été infulré dans fes fonél:ions,
& il fut· donné pouvoir de confulter.
'
Le 18, le MaIre rendit plainte pardevanr le Lieutenant; il
expofa les mêmes faits; il demanda l'information. Quarantequatre témoins furent entendus de part ou d'autre, & le 20
AolÎt le Maire fut décrété d'àffigné. La veille, la Commu':'
namé avoit préfemé requête & demandé l'information fur
le même expofé; information qui fe'roit prife par le Juge
Royal le plus prochain de la Valete; elle demanda aél:e de
l'appel du décret de foit-informé rendu par le Lieutenant
de Toulon, & de ta'ut ce qui s'en était enruivi, & cependam tout en état, attendu l'incompétence notoire, ce qui lui
fut accordé. Le 23 Août, nouvelle délibération qui détermine de pourfuivre. !,e 27, requête de Pafcalet, dans laquelle il expore
que les Confuls avoient demandé l'information fur un fait
qui leur érait étranger, & à rairon duquel le Lieutenant
de Toulon avoit déja refpeél:ivement informé ~ décrété;
que le Maire, étoit feul coupable; que la Communauté était
non recevable à appeller du décret de foÎt-informé; qu'il
, n'y avoit que le Maire querellé & décrété qui plÎt le faire;
• qu'enfin la Communauté l'avoit fait fans lever des lettres
en chancellerie. Il ,demanda de' requérir au premier jour
'la révocation ,du décret, demeurant tout en état jufqu'alors.
Décret du même jour, qui porce : le requerra en jugement,
& foit montré partie, demeurant, tout en état.
Requête contraire de la Communauté, fur laquelle intervint' décret portant qu'il feroit pourfuivi fur la demande en
révocatiou ainfi qu'il apparciént ,- & cependant le tout en
état foulevé. En conféquence le Lieutenant d'Hieres entendit vingt-deux témoins à la requête de b Communauté.
Le 21 Mars 1773, délibération de la Communauté, qui
après avoir entendu le' compte le plus exaél: de l'affaire,
; ayant confidéré qu'elle n'y a,voit aucu~ ~mé;ê,t réel" &
qu'elle n'étoit au fon~ que celle du Malr~, delIb:re de fe
,pépartir de l'affoml:tlon en caufe" fauf au Mme de fe,
a
�~66
Jou Il. N A L
rendre lui-même appellane. Le 9 Juin, le Maire demanda
ajournement cOlltre les Confuls, pour voir cafl'er la délibération, ce qui lui fut .accordé" & en même temps des
inhibitions '& défenfes co.ntre Pafcalet d'exécuter le décret
d'affigné. Décret de foit montré à par~ie.
Le 22 Juin, .requête de Pafcalet en foulevement des inhi, bitions & défenfes. Décret de foit montré à partie. Le
19 Décembre Délibération de la Communauté, qui porte
d'offrir Arrêt d'expédient fur l'oppofition à la délibération
du 21 Mars dernier, fauf à la Communauté de pourfuivre
de nouveau l'affaire conformiment au pouvoir du 23 Août
1772. Au -mois de Février 1774, fur l'information prife
par le Juge d'Hieres, il intervint un décret d'ajournemedt
contre Laurent Pafcalet.
Le Maire qui dès le 26 Juin 1773 avoit appellé du décret d'affigné rendu contre lui, amplia fon appel envers le
décret de foit informé; la Communauté, en prenant les
mêmes fins, demanda la confirmation de la procédure
prife par le Lieutenant d'Hieres. Pafcalet , en demandant
la confirmation -de ·la procédure prife par le Lieutenant de
Toulon, appella du décret d'ajournement rendu contre lui,
ainfi que de celui de ·foit informé. Le 16 Mai 1776 il
demanda la -jonél:ion des, infiances ,qui lui .fut accordée.
On difoit pour Pafcalet, que ,·les .Lieutenans - Généraux
- de Police font appellables au Lieutenant .d~ns les Judicatures & Châtellenies J'oyales; fans cela il faudrait leur
donner le pas fur les JJlges -ro.yaux, puifqu'.ils feroient nuement appellables au' Parlement; tandis .que les Sentences
des J,uges ordinaires fQnt po nées par t appel ,lUX ·Baillifs .&
Sénéchaux;, cela eH d'autant -pJus jufre, que l'Edit de 1699
a ajouté de nouvelles matieres, 11 la compétence des Officiers de Police. Le Roi auraitql voulu priver les titulaires
de ces JuHices royales, des droits qu'ils. avoient aupaqvant
fur ces matieres? & la.Déclaration de 1701 n'elt-elle pas
bien favorable, là
elle réduit l'a.ppellation direél:e _à la
Go.ur aux Sentences rendues par les Officiers de. Police
dans les yilles. o~ il y. CL ~ailliage ~~ ~énéchawré.e? __ Celi\
où
�"
D U
PAL A ~ S· n B
PRO V 1! N C R.
~67
devient encore plus vrai, quand les parties fane ?l la diftance de plus de dix lieues dt:! la féance de la Cour. Cette
exception eU fondée' en raifon, tirée de la nature même
des Jurifdiélions. Les matieres de Police exigene fouvent
& prefque toujours le remede le plus pre1Tane de la part
du Tribunal fupérieur.
,Ici il Y a plus: il n'a jamais eXIUé Bureau de Police'
à la Valete; cetre Jurifdiéliou n'a jamais été détachée d~
la Jurifdiélion univerfelle. Toutes les fonélions du minifcere public font remplies par le Procu.reu, du Roi de la
Jurifdiélion ordinaire; la Jurifdiélion de la Police eH exercée
par le même Juge.
Qu'importe d'ailleurs que le Conful de la Valete fait
ou nou Lieutenanc-Généràl de Police, fi le Maire n'a pas
agi & ne pouvait pas agir en cette qualité, fait qu'on en
juge par la ·forme ,fait qu'on en décide par le fonds: .dans
la forme, tout jugement de Police s'écrit; ce![e Jurifdictian eil: fommaire , mais non defpotique; elle. s'exerce fine
formâ &Jlrepitu judicü. Mais les conditions fuhil:aneielles de
cout jugement quelconque n'y peuvent pas être am ifes. Dans
le fonds, le fait donc s'agit ne pouvait compéter à la Police, parce qu'on s'y plaignoit d'un vol, d'une filouterie.
Il relle ·à examiner, coneinua Pafcalet, qui doit connaître ô'bn délit concernant l'honneur des fonélions confulaires. EU-ce la Cour, le Lieutenant ou le Juge local?
L'excès du Confui ,ou l'infulte qui lui eil: faite, mérirenc l'atteneion de la Cour ou celle du Lieutenane, fuivanc les cir~on{tances & la gravité du cas. A raifon des conféquences
de ces délits, les deux Tribunaux peuvent en conno!tre par
prévention; & fi le cas peut être de haute Police, il .eil:
conféque'ltiment cas royal. Les excès de cette nature 10térelfent l'ordre & la tranquillité publique; 11s ne peuvent
lIonc appartenir qu'à l'autorité. royale. ~'ailleurs les C~JO
fuis de la Province ne font - ds pas MaIres? Les Maires
ne [ont-ils pas Officiers. royaux? L'Ordonnance de 167 0 ,
tit. l , art. I I , n'dl-elle pas déciuve.à ,),~ffet de porter
au Lieutenant comme cas royal la connollfance de tou~
"
\
�5~
JOURNAi
ce qui concerne la correélion des Officiers royaux? Ainû
le délit éroit royal; & quand il ne l'aurait pas été, <:e
n'éroit point au Juge de la Valete qu'il fallait porter le
délit du Conful, parce que le Conful aéluel devient Juge
l'année d'après, & qu'il ferait à craindre que le Juge aéluel
ne fût pas libre, que fan miniHere ne flit pas pur & dégagé de toute préyention.
On répondait pour le Maire & pour la Communauté;
que les Lieutenans- Généraux de Police connoiffent fommairement, fans forme ni figure de procès, des délits
légers; qu'ils ont une prifon correél:ionnelle dans 'Iaquelle
ils fom enfermer fans décret, & qu'a.pr~s les vingt-quatre
heures ils mettent en liberté ceux qu'ils y tant conduire,
fi le délit ne mérite point d'in{lruélion férieufe; s'il y a
lieu à information, ils envoient le coupable aux prifons
royaux.
Si' un Lieutenant-Général de Police fait emprifonnel"'
quelqu'un trop légéreinent, il abufe de fa Jurifdiél:ion ;
il el~ repréhenlible; mais il faut que l'excès foit conlidé. rable, que la vexation foit évidente; s'il n'y a qu'un peu
.trop de rigueur, le Juge n'eH refponfable ni de fes erreurs,
ni de fa févérité ; il n'el!: comptable que de ce qu'il a fait
par dol ou fraude, par haine ou vengeance. Ici le Maire ne
s'eH conduit ni par paffion, ni par animalité; il a ufé d'un.
pouvoir qui appartient aux Lieutenans-Généraux de Police;
s'il a été trop féve~e, il n'y a pas eu lieu à le poûrfuivre
par la voie de l'information. Pafcalet avoit deux voies
ouverres; la voie civile par prife à partie, '& la voiè cr.i~
minelle par information. Dans le éas de la voie civile" il
faut la permiffion de III Cour pour l'intenter; à plus forte
raifon un Juge ne doit-il J pas être !égérement accufé par,
voie criminelle.
.,
La prife à partie, encore moins l'information" ne compéteroient . pa~ contre un Lieurenant de Police qui auroit
fait mettre pour viqgt-quatre heures à la charbonniere. un
gar~on Tonn~ier qui ,avoit pris à un paffant 'endormi un
,
oifeaq
o
�.'
n,1.1.1' A~AIS
DB
,P~~V~N,CE.
'5 69
'oJlèau de priX, & qUI à cela aurolt JOint une conduite peu
refpeétueufe & des infolences.
Il s'agit ici d'un Maire Lielltenant - Géneral de Police
relfonilfant nuement en la Cour. La Valete eU un lieu
royal j la police y appùt.ient par conféquene aux Confuls
par la réunion que la Province en a faite. D'ailleurs il ne
peut jamais y avoir en police trois degrés de JUl'ifdiétion~
donc le fait n'étoit appellable que pardevant la Cour.
L'art. II de l'Ordonnance de 1670, tit. l , donne, il
eU vrai, aux Baillifs & Sénéchaux la connoilfance de la
correétion des Officiers royaux, & des malverfations par
eux commifes dans leurs charges. Mais Joulfe remarque
que cet article ne s'applique pas aux Juges d'une Sénéchauffée royale, ni aux Officiers des Jurifdiétions extraordinaires, lefquels ne peuvent être jugés que par leurs fupérieurs. fla l'Auteur des Loix criminelles, tom. l , pag. 67.
Mr. l'Avocat - Général de Calilfanne examina plufieurs
gueHions. EU-ce un fait de police dont il s'agit? Y a-t-il
ell jugement de police, & par conféquent y a-t-il appel
d'un Juge de Police ~ Quels fom les Juges auxquels relfortiffent les appels des Lieutenans-Généraux de Police? Ces
Juges font-ils exclufifs & de privilege, & rendent-ils notoirement incompétent, même pour informer &' décréter,
tout autre Juge- qui prendrait connoiffance de ces fones
de délits?
Les Lieutenans.Généraux de, Police ont {ans doute une
Jurifdiétion, mais très-bornée, & néanmoins ils cherchent
fans celfe à l'étendre. Pour ce qui n'eH pas précifément
de leur Jurifdiétion, ils cherchent, comme peres de la
patrie, à concilier ~es diJférens qui pe~vent .s'élev:r entre
des particuliers j vraIs peres du peuple, Ils dOlvenr etre admirés j-mais du moment qu'il y a conteflation, c'efl-à-dire,
du moment qu'il faut punir, ils doivene renvoyer pardevant les JuO'es ordinaires; jufqu'à l'inUane où ils infligent
une peine 0 ils font peres; dès le moment qu'ils la décernent, ils fone les fonaions de Juge, & conféquemmenE
ils ne doivent plus connoÎtre de la matiere. Ce n'eft donc
Années f775 & 1776.
Ccc c
�'70
Jou RNA ~
_
.
l'as leur 'lu,alité _d~ Liemenans-Généraux de Police qui leur
laiffe exercer cerre efpece de droit; ils l'avaient avant la
réunion. Premiers médiateurs. de leurs concitoyens, jls ont
toujoues été jaloux de les a,ppaifer & de les faire jouir de
la tranquillité. Mais Quand il faut punir, ,ils doivent ren,voyer à l'autorité jndiciaire; ils ont une prifon corretl:ionne Ile , ruais réfervée aux gens de ,la lie du peuple, à ce qui
'a perdu, pou~ ainfi dire, Ja qualité de citoyen, jamais à
·des· domiciliés•. Le droi,t de priver un citoyeN de la liberté
eft refufé aux perfonnes les plus confidérables:
Le délit dont s'~git peut êt,re confidéré fous deux rapports: ou comme vol., ou comme infulte faite à Officier puplic; dans les deux cas peut-on le regarder comme fait de
police? Si c'el1: un vol, _il étoit de la cqmpétence du JugS!
ordinaire; fi l'on prétendait que le vol cft de la compétence
des Juges d~ police, parce qu'il trouble la police, il n'y aura
:pas de fait pour lequel elle ne fait compétente; on fubl1:itueroit bi.entôt le mot d'ordre à celui de police; tput feroit
contre l'ordre, & dès-lors contre la police, &,conféquemment
.la jurifditl:ion oe la police terQit la jurifdiél:ion univerfelle. Ou
a fenri que le vol en général ne pouvait gueres être 'regardé
.co91me fait de police, & l'on s'cfl: replié fur ce que c'étoit
plutôt une filouterie & une efcroquerie, qu'un vol réel & ca"raél:érifé. Mais en vain l'çm foutiendroit que le vol d'un
faucon el!: une efcroquerie; en feroit-il plus du reffort _de la
police? Et quand même on. pourroit le regarder comme. tel
_en général, les circonl1:an,ces parricu!je;es. de la, caufe ne
permettroient pa~ de l'imagjner i -Il l;l\ifte une foule de macierès qui fom de la jurifdicri9n univ,erfelle ,,& dom les Q;on.,.
fuIs conqoiffent cçpe!1daht ,d.ans ,les prel'Qiers momeqs, ,parce
gue l'on vient Il.el)rj e,n pqrrer,lpla:inte; fllr tous ces différents
points, la jurifdiél:ion, l'auro'rité des -Lieutenans-Généraux de
Police ne peut être abfolument regardée que comme -gracieufe, ou plutôt ce n'eCl pas une jurifdiél:ion; ils s'en occupent paternelle,ment Hour le ,bon ordre; mais dès qu'il peùt
y avoir peine quelconÇjue, punition même {l1omenranée, alors
plus rien de 19raçie/lx; il faqt punir., il faut ufer d',autorité 1
�DU
PALA'IS
DE
PROVENCE.
~7r
& les Lieutenans-Généraux de Police n'en ont aucune fur
tout ce qui ell: étranger à leur attribution; aina le fait dont
s'agit, regardé comme vol, ne peut être réputé fait d~
police.
L'infulte faite à l'Officier public, au Conful, au LieutenaocGénéral de Police, eft encore moins un- aéte de police inférieure; c'eft ·au contraire le réfultat de plufieurs attriburiôns.
le Juge de Police ne pellt pas lui-même prononcer fur la
prétendue infuite qu'on lui a faite; il ne peut pas être Juge
& partie; il faut qu'un Tribunal [upérieur venge l'injure faire
à l'inférieur; fe punir foi-même, c'ef~ être arbitraire. Le Juge
eft infulré, il doit être vengé; mais il ne peut que dreifer
procès-verbal, & pour/ùivre la vengeance, ou remettre [es
intérêts entre les mains de ceux qui [ont chargés de la vindiéte publique.
J
y a-t-il même eu un Jugement de Police (continua Ml'.
l'Avocat-Général )? Un Charretier fe plaint au Viguier de ce
qu'on lui a volé fon faucon; le Viguier le conduit au Maire.
ju[qu'à ce moment rien qui regarde la police, & l'on doit
être étonné du délaiffement du Viguier pour une caufe qui
le regardait feul. Le Maire envoit chercher Pafcalet pour
un v0l d'un faucon qui n'eft point un fait de police; il n'affemble pas le bureaù; il ne demande pas l'avis de [on confrere; il interroge Pa[caletà la place publique; Pafcalet repond
négativement, & , fi l'on veut, infolemment all Charretier. Le
Maire ordonne qu'on le mette en prifon ;'Ie faucon fe ret,rouve, & la vengeance d'un prétendu propoS tenu par Pafcalet
engage le Maire à ne ~a~ :e laiffer forri~. '~'rauve-t-on dans
cette conduite l'impartial ne du Juge, la Jufilce du Jugement,
le bureau de police, les traces. de fa jurifdiébon? On ne voir
qu'abus & qll'atte~tat; l'autorité feule par.!e; point de convocation, point d Ordonnance, pamt de ~ec~.et; p~ur la mariere la plus léO'ere on attente à la bberre d un citoyen; la
volonté arbitraire d'un Officier municipal, d'un Lieutenant
de Police décide de fan fort, & fans clameur publique, fans
fbgrand délir le fait jetter dans les fers. En vain dirait-on
qu'il a défend~ l'honneur de fon Tribunal, & qu'un Juge peut.
Cccc 2.
.
�~~7t
Jou
RNA L
le ·faire fa~s fe déplacer, qu'il a même le dmit de faire em~
prifonner. Cela efi vrai, quand le Juge efi infulté fur fan
Tribunal & troublé dans fes fonél:ions, mais jamais au milieu de la rue. Le Maire porte-t-il par-tout fon Tribunal
avec lui? D'ailleurs daus cerre caufe y a-t-il la p(euve du
vol & de l'infulte? Il efi prouvé au contraire que l'épervier
s'envola dans la boutique d'un Cordonnier où le propriétaire
étoit, & qu'il le cacha pour le faire chercher; il efl: prouvé
qu'il avoit [on chapeau fur la têre quand il étoit fur la ~place
devant le Maire: mais efi-ce là un délit confiant·, un vol
caraél:érifé & une injure bien forte? De pareils faits pouvoientils mériter un emprifonnement vis-à-vis d'un domicil!é ?
La queHion que l'on a élevée fur ce que l'appel des Jugemens, Décrets & Ordonnances rendus par les Lieute nans-Généraux de Police vient direél:ement à la Cour,
ea abfolument indifférente & totalement étrangere à la
contefiation ptéfente , obferva Mr. l'Avocat-Général; il pa":
roÎt con[acré par l'u[age, par l'autorité générale des divers
Jurifconfultes & par une Jurifprudence la plus confiante,
que les appels des Lieutenans-Généraux de Police viennent
au Parlement omiJfo medio, parce que dans l'Edit de leur
création, feul titre formel daas toute la Provence, aux
villes Royales les Lieutenans-Généraux; de Police font affimilés aux Baillis & Lieuteaans de Sénéchaux, & ne fane
conféquemmenc appellables qu'aux Parlemens , que d'ailleurs
il ne peut y avoir en Police trois degrés de jurifdiél:ion. :Le
droit commun paroît cependant être plus jufie ; car l.a jurifdiél:ion de la Police a été démembrée de celle des Juges
Royaux qui relfonilfent aux Lieutenans; mais l'ufage , qui
efi la feule regle fur cerre matiere, l'emporte dans cerce
Province.
Quand même toùt ce que l'on a dit fur cette compétence n'auroit jamais été douteux, quand même c'eût été
un fait de Police, quand un Lieutenant de "1?olice en
aurait connu, on n'en aurait pas dû pour cela venir au
Parlement. Ici il n'y a point de Jugement, point d'Ordonnance, point d'apparence même de décret. Dès-lors il ne
�DU PALAIS I)l! PROVI!NCll.
~73
peut y avoir aucune apparence d'appel, & conCéquemmènc
point de compétence du Parlement; c'efl feulement un délit
concernant les fonél:ions confulaires. Qui pouvoit en conno1cre? Etoit-ce le- Juge local, la Cour ou le Lieutenant?
Ce n'était point le Juge' local, parce que l'injure faite à
un Conful, le mépris de l'autorité eft plutôt un cas royal,
qu'un délit ordinaire. 00 pourroit dire auffi que le privilege
du Maire porte fes caufes ailleurs que pardevant le premier
Juge; mais une raifon fans replique, c'efl la fufpicion momentanée & accidentelle de telle ou telle perronn~: Surpic ion fonciere, conflante & certaine, dès qu'il s'agit de
l'affaire d'un Conrul en propre; furpicion fondée fur la formation même du Tribunal. Le Conrul de cette année eft
Juge l'année d'après; le Juge du moment fait donc que
dans quelques mois il deviendra le jufliciable du Conful actuel. La rufpicion ne pourroit donc pas être plus forte;
c'était donc la Cour ou le Lieutenant. Les conféquences de
ces délits ont quelquefois obligé la Cour d'en connoÎtre,
parce que les excès de cette nature intéreifent l'ordre & la
tranquillité publique, mais plus fouvent encore c'eU le Lieutenant. Ici l'infulte n'étoit pas bien grave; elle alloit par
conféquent au Lieurenant ; toutes les parties l'avoient invelli
par prévention; il était compétent de droit.
Mr. l'Avocat-Général conclut à la confirmation du décret
de foit informé rendu par le Lieutenant au Siege de Toulon & de tout ce qui s'en étoit enfuivi , & à ce que le décret attaqué par Pafcalet fût révoqué comme nul & incom,
petent.
Par Arrêt du 27 Juin 1776, prononcé par M. le premier.
P.réfident, les conclufions furent fuivies, & les pa.rties condamnées aux dépens chacune les concernant. Plaidant Mes.
G.afiier) Simeon & Portalis.
�~74
JOURNAL
ARR Ê T
LI V.
Les ouvrages cfor- & d'argent fahriqués à Marfeille ne {ont·
point {oumis au droit de marque & de contrôle.
Les mêmes ouvrages venant de i' Etranger à Marfeille, ne fiJ/it
{ou'mis à aucun impôt ni à aucune efPece de gêne ou de
, déclatation.
L
,
A Communauté de Marfeille fe pourvut à la Cour des
Aides; elle demanda des inhibitions & défènfes au Régiffeur d'exiger le droit de marque & de contrôle fur les
ouvrages d'or & d'argent fabriqués à Marfeille, & fubfidiairement que les parties fuffent renvoyées au Roi. Par une
feconde requête, elle demanda des inhibitions & défenfes
au Régiffeur d'affervir à aucune efpece d'impôt ni à aucune
efpece de gêne ou de déclaration, l'orfévrerie érrangere que
le commerce ramene à Marfeille" quelle qu'en foit la deftinarion. La Chambre du Commerce intervint dans l'inftance.
On difoit pour la Communauté de Marfeille, 1°. que
quand le Fermier avoit voulu a1fervir les Orfevres de Marfeille à payer le droit de marque, il n'avoir ceffé de [oppofer que le même droit ne pouvoit pas concerner le commerce , parce que le commerce de MarfeiHe' ne 's?occupoit
pas de tout ce qui r~étoit que dépendance de l'~rfévrerie.
2°. Que les Orfevres de Marfeille une fois' a'ffervis, le
Régiffeur avait publiquèment affiché l'aifervif1'ement 'du commerce. Or la ville de Marfeille a toujours éré exempte de
toute efpece de droit. Les diflërenres impofitions don't elle
avait été furchargée avaient porté le coup le plus terrible
au commerce, & ce ne fut que pour lui redonner fon luChe,
qu'intervint l'Edit du port franc. Cet Edit, en con.firmant
la ville de Marfeille dans fes anciens privileges, ne trouva
pas de meilleur' moyen po~r. donner un nouvel acc:oiiTe;
�DU
PA. L A. 1 S
D E
PB. 0 V" EN C E:
'~7)
ment à fon commerce, que de lui accorder avec la franchife de fon port, l'exemption de toute efpece d'impofition
& de toute gêne; conformément à l'Edit du port fr,!nc ,
ta ville de Mar[eille a été déclarée exempte de rous droits
domaniaux & autres quelconques établis poftérieuremenr à
cet Edit; tels [ont les droits de marque [ur l'or & l'argent,
.& le droit [ur l'étain; cerre exemptIon ne [auroit tenir de
plus près, tant au bien général du commerce , qu'à la
foi publique que l'on a engagée en invitant l'Etranger à
fréquenter le port de Mar[eille, & à Y faire fleurir le commerce. Enfin fi les ouvrages d'orfévrerie étrangere [ont aulli
.exempts à Mar[eille de rout autre droit que route autre e[_pece de marchandi[es, il n'eft ni pollible ni concevable que
.l'orfévrerie de Mar[eille paye des droits que n'acquitteroit
pas l'orfévrerie étrangere.
Par l'article premier de l'Ordonnance de 1681 , le droit
de marque éroit impofé [ur rous les ouvrages d'or & d'ar.gent. fabriqué$ & mis en œuvre dans rout le Royaume. Par
l'arr. 2, le Fermier pouvoit établir dans routes les Villes de
Jurande un' Commis chargé de contre-marquer & d'appo[er
le poinçon; l'art. 18' [oumetroit les ouvrages d'or & d'argent venant des pays étrangeçs, à la nécelIité de la- déclaratipn au premier Bureau d'entrée, pour être marqués, & les
droits de marque .payés..
L'article 23 de la Déclaration de 1749 aifervit les ouvrages étrangers d'orfévrerie au même droit de marque que
les ouvrages nationaux, du moment qu'ils entreront dans-Ie
Royaùm~ ; il [oumet au mêm,e droit de ~a~que, non [eulement les ouvrages d'or & cl argent fabrIques dans les pays
étrangers que l'on veut introduire dans le Royaume, mais
~ncore ceux qui auroient été fabdqués dans les Provinces
réput.ées étrang;r~s & l'o~ n'a ja,mais mis en, do~të que Mar:
feille ne fût repute ProvlOce e.crangere..L article 26, qUI
~'eft qu'une con[équence du précédent, n'a pour objet que
9'aifurer la perception du droit de marque fur ~es ouvrages étrangers ~ntrant dan~ lé Rd~au~e, &, venant, [Olt des, pa}:s
~trangers ,. [Olt des Provinces reputees etrangeres.; & s; etolt
r
�-')76
JOUR.N'AL
fans doute un nouveau titre d'exemption pour les Orfevres
de Marfeille.
D'après ces différentes Loix, le droit de marque n'étoit
dû, comme le difoit l'Ordonnance de 1681, & comme le
fuppofoit la Déclaration de '1749, que fur les ouvrages fabriqu'és dans le Royaume ,& le Fermier ne pouvoit
l'exiger ni dans les Provinces réputées étrangeres, ni fur les
ouvrages étrangers qui, fans entrer dans le Royaume, n'entraient que dans les Provinces réputées étrangeres. Marfeille étant réputée Province étrang~le, il Y avait deux r;lifans pour ne point exiger le droit de marque fur les ouvrages étrangers; d'abord celle que le droit de marque n'était impofé par les Ordonnances que fUr les ouvrages étrangers entrant dans le Royaume, & enfuite l'Edit du por-t
franc, exemptant toute efpece de rnarchandifes de toure
cfpece de droit, ne pouvait pas comporter une irnpofition
pour le commerce de l'orfévrerie.
L'inticulation de l'Arrêt du Confefl du 7 Mai 177 1 obtenu par le Fermier annonce, il eil: vrai, qu'il n'y a que les
Orfevres de Marfeille qui foient aifervis au -droit; mais file Régiifeur n'eût pas fuppofé que le commerce de Marfeille ne
portoit pas fes fpéculations fur les objets dépendans de
l'orfévrerie , cet Arrêt en difpo[1nt contre les Orfevres de
Marfeille ou fur les ouvrages fortant de MarfeilIe, n'eût pas
manqué de difpofer auffi fur les ouvrages d'orfévrerie étrangere. Cet Arrêt ne fe réfe"re qu'à l'Ordonnance de 168 l , qui
n'impofe que fur les ouvrages fabriqués dans le Royaume
ou fur les ouvrages venànt- des pays étrangers; mais il ne
permet pas au Régiifeur de rien -exiger, ou d'aifervÎr en aucune façon les vaiifèan~ étrangers 0].1 natiànaux faifant le
commerce de l'orfévretiè; 1- _J
1
1
II..'
- . Cependant dans !'étatlde. déÎ0rdre qu'~l y avait à Mar'feilIè
al].. fujet de la perception du droit-de marque & de contrôle,
la Cour des Aides rendit un Arrêt provifoire le -22 Oél:obre 1775:, qdi p~rmit aQ Régiifeur de percevo·ir pendant
procès le. droit~rde marque fur les ouvrages d'or, & d'ar",:
gent fabriqués à Marfeille ; ~le 1tégiifeur fit imprimer- cet
Arrêt
�""
.
D:'.
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R 0 VEN C Il.
571
Arrêt, 11 Y etolt dit, ou amvant a Marfeille, ce qui obligea
la Communauté & la Chambre du Commerce à réclamer
contre les entreprifes du Régi1feur.
Le traite de paix de la ville de Mar(eille avec Charles
d'Anjou renferme les conditions (ous lefquelles Mar(eille pa1fa
fous fa domination. Ce traité eil rapporté en entier dans
l'hifioire de Marfeilie, pag.Î 26; il fut (c~llé de l'autorité
du ferme ni: par le même Charles d'Anjou, confirmé par fon
fucce1feur & par nos Souverains, qui fe font contentés de
demand"er des fecours à la ville de Marfeille, fans jamais
en exiger. Cette ville J;le connoît" point de droit domanial qu'elle n'ait confenti; c'eil [on droit public; c'efi la
Loi de nos Souverains. Ce pa/:te eH donc [acré & inviolable, & l'exemption" oe la ville de Marfeille ne fauroit être
contefiée. A cette premiere Loi l'on pourroit ajouter toutes
celles d"ont parle l'Edit du Port franc, & cet Edit lui-même;
l'Auteur du Diél:ionnaire du Commerce, vo. commerce général,"
qui a pénétré la profondeur des vues du commerce, fait le
détail des avantages Gue cet Edit devoit lui procurer. Ce
n'ell: donc qù?à cet Edit que l'on doit la 'confervation du
commerce de "Marfeille; ce n'efi que par la" franchife du
port, par l'exemption de tolite impofirion, par la fuppref.
fion dés im"pofiiions" jà établies, par les privileges & avantages' èxtracirdinaires qlÏi furent nouvellement concédés ,que
l'on parvint àrappélle"r le commerce qùi fuyoit de. Marfeille;.
& ce furent ces motifs que l'on trolive dans le préambule,
qui dorinerènt lieu à "l'Edit dU"~brt franc. "
.
" "
Cet Edit 'veut que le port" & havre de Marfe/Ile fou franc
& li6re polir 'tozitefori~ de marchandi.(ès, de quelque qualité
fju'ellù"puijfèrzt être; l';.xt"!P.te deS droItS les plus fa~orakres,
même de ceux dont 1mteret du commerce [emblOlt necerfiter l'exaB:ion, tels que le curage du- port & les affaires du
commercé" & enfin de tous autres droits domaniaux, de quel'lue qualité ~u'ilS" puijfènt ,être: Après lI,ne difpofi~ion génér?le ,
il e{~ naturel que pour etabhr le momdre drOIt à MarfeJUe)il faut nécelfaireriJent que la loi confiitutive du droit di~
Années l775 & l776.
D d li d
�.~79
1 0 U Il N A ~
roge .à l'Edit du Porr franc, parce que MarCeille, quant à
ce qui concerne le commerce, eft réputée véritablement
pays ou Province étrangere. Or, non [eulement l'Edit de
1672., conHitutif du droit de marque [ur l'or & l'argent,
l'Arrêt du Confeil de 1676, portant imp()fition fur l'étain,
l'Ordonnance de 168 l , & la Déclaration du 2.6 Janvier
1749, n'ont point dérogé à l'Edit du Port franc, mais il a
été au contraire jugé que la ville de Marfeille devoit être
confirmée dans fon exemption.
En vertu de l'Ordonnance de 168 1, qui établiffoit des
droits fur l'étain entrant dans le Royaume par mer ou par
rerre, & qui devoient être payés au Bureau d'entrée, le
Fermier voulut y foumettre la ville de Marfeille; mais parArrêt de là Cour des Aides, il fur débouté; il attaqua cet
Arrêt au Confeil; & _par Arrêt du 3 Ma~s 1693, celui
de la Cour des Aides fut confirmé; il fut décidé par-là
que tant l'Arrêt du Confeil de 1676, que l'Ordonnance
de 168 l , n'ayant pas dérogé à l'Edit du Port franc, Mar-[eille jouit de toute la franchife qu'il lui affure, & que l'exac,ion de rout droit ne pouvant [e faire qu'au Bureau qu'il
faudroit établir à Marfeille, le commerce eH trop intéreffa nt pour lui impofer cette gêne ou cet affervi1fement. L'Arrêt
du Confeil du 10 Juillet 1703 renouvelle la difpofition du
Port franc, cimente les franchifes qu'il a\tGÏ-t déja accordées,
!X expulfe à jamais de Marfeille les Bureaux, pour les tranfporter à l'extrêmité de fon terroir.
Les Orfevres de Marfeille ont payé à la vérité par abonnement; mais que fait à la ville & au commerce l'affujettilrement volontaire d'une partie de fes artiftes qui n'ont
pas connu fes droits, ou qui ont été atterrés par la crainte
que favent infpirer les Régiffeurs, ou peu touchés de la minimité d'une perception qu'on exigeoit de leur zele dans
des remps de crife & de calamité? L'intérêt général peut-il
en fou/frir? Toutes les Loix pollibles, le titre de vec7igalih.
& commij{., cet autre vec7igal. nov. inJl. non pojJ:, & mieux
encore le droit public, ne concourent-ils pas à attefter qu'il
�DU
PAL-AIS
DB
PROVENCE.
S79'
De peut y avoir d'impôt fans Loi, & que toute exaélion fans
Loi n'dl: que conculIion. La ville elle-même, le commerce
qui n'a jamais été affervi, peuvent-ils l'être, & faut-il ou affervir l'étranger contre notre propre intérêt & contre la difpolition de toutes nos Loix, ou affervir l'ouvrier national
quand l'ouvrier étranger ne le fera point?
'
Si les Loix introduél:ives dl) droit de marque avoient corn.
pris Marfeille dans leurs difpolitions, pourquoi n'auroientelles pas dérogé à l'Edit du Porc franc? Pourquoi les baux
n'euffent-ils jamais compris que la généralité d'Aix, & n'euffent-ils pas parlé de Marf@ille, donc il n'a été quefiion qu'en
1770? Pourquoi Marfeille eût-elle été déclarée exempte du
droit fur l'étain, qui n'étoit établi que fur des Loix poltérieures à l'Edit du Porc franc, mais qui n'y dérogeoient pas
mieux que lès titres conHitutifs du droit de marque? Par
quelle inconconféquence eût-on affervi l'ouvrier national ,
quand les ouvr.ages étrangers euffenr éeé déclarés exempts?
En vain oppofe-e-on qu'une Province n'eH réputée écrangere, & fur-tout Marfeille, que quant aux droits de traite &
de fortie, & que fon exemption ne s'étend ni ne peut s'étendre aux marchandifes fabriquées dans fon enceinte. On
voudroit donc que Marfeille ne fÎlt exempte que des droits
de traite & de foraine; mais que deviendroit dès-lors la
franchi{e du port? Que deviendroit la libercé du commerce?
Ql·e deviendroit cecce prohibition d'établir aucune forte de
Bureaux à Mar{eille, qui feule jufqu'à pré{ent a attire l'érranger dans le Port & fait fleurir le commerce? Que deviendra l'Arrêt de la Cour fur l'éeain, & l'Arrêe du Confeil
qui le confirme? Que deviendront tous. les Régl;n?ens qui
cnt rélégué roue ce qui eH ferme, Fermiers ou Reglffeurs, à
}'ex[rêmité dn eerroir? Si Mar{eille eH réputée Province éerangere, pourquoi fera-t-elle affujettie ~u droit de marqu~?
Le Régiffeur a furpris deux Arrets du Confell qUI foumettent les Orfevres de Marfeille au droit de marque & de
contrôle fUr les ouvrages d'or & d'argent fabriqués à Marfeille' & celui du 7 Mai 1771 a condamné les Orfevres de
,
Dddd~
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MarCeille à ·dix mille livres de domniages-intéréts, pour tenir
lieu au Régjlfeur des droits qu'il n'avoit pas perçus. Mais
ql!~ font ces Arrêts à h Commun~uf{de MarCeille, qui n'étant point partie, n'a pas été entendue?' S'il ei1: vrai que ces
mêmes·· Arrêts pàriént 'atteinte à Ces privileges; à la franchiCe de Con port, à la liberté de Con commerce & aux
Loix conUirutives de Con exiHence, ce ne Cont que des titres étrangers qu'on ne peut lui oppoCer, ou qu'il faut au
moins ju!1:ifier vis-à-vis d'elle. Si les Orfevres n'om pas connu
ou n'ont pas Cu développer quels étoient leurs droits & ceux:
de la ville de M.arCeille, MarCeille ne peut en Couffrir.
On rappelloit pour la Chambre du Commerce les mêmes
principes; l'on diCcutoit 'de quels droits l'Edit du Port
franc avoit affranèhi la ville de MarCeille & les étrangers
qui y abordent, & l'on finilfoit par dire que MarCeille avoit
touj9urs .été exempte de toute efpece de droit; que l'Edit
du Port franc n'avoit fait que confirmer COll ancienne exemption; qu'il ne pduvoit y avoir à MarCeille que les quatre
Bureaux que l'on y_connoît ; què dans aucun temps le commerce de l'orfévrerie n'a été impoCé; que toutes les Loix
_COllnues l'ont CuppoCé de même, en renvoyant la perception
du droit Cur les ouvrages d'orfévrerie étrangere en delà du
premier Bureau J'entrée du Royaume; que la franchiCe de
Marfeille é;3nt encore plus pléniere que celle de tout autre
Port franc, les vailfeaux qui y abordent ne doivent pas jouir
d'une moindre liberté que ceux qui arrivent à Dunkerque, ou à
tout alltre port également franc; & enfin que la di!1:inél:ion
de Province étrangere à la ferme, ou de Province étrangere à la ferme du -droit de marque, n'ei1:qu'une Cubtilité
du Régilfeur, condam née par la Loi, puifque le droit fur
l'orfévrerie étrangere ne naît qu'à l'inHant où l'on fe préfente au premier Bureau d'entrée du Royaume, & il ne peut
point y avoir de Bureaux à MarCeille.
On répondoit pour le Régilfeur, que par des Letères-parentes du 6 Août 1774, Me. Jean-B~ptiHè Fouache avoir
été chargé de faire, pour le compte· du Roi,' la régie, reU RNA
�DU
PAL.US-'DB
PROVENCE.
~81
cette & exploitation des droits de contrôle & de marque d'or
& d'argent qui avait été précédemment donnée à ferme à
fan Adjudicataire général. Avant d'établir fa perceprion dans
la ville de Mar[eille, le Régiffeur a vu que l'Ordonnance
des Fermes du 22 Juillet 168 l , ritre des droits de marfJue
fur l'or & l'argent, en avait ordonné la levée dans tout le
Royaume, & qu'il n'y avait été fait d'exception qu'en faveur
de la Lorraine, la Flandre, la Franche-Comté, l'Alface &
le Rouffillon.
Per[onne n'ignore que le bail des fermes générales ell:
totalement difl:inét de la régie; les fermes [ont données à
forfait, & moyennant le prix du bail elles ,deviennent le bien
du Fermier, qui difpofe du produit à {on profit. La Régie
au contraire n'ell: qu'une commiffion donnée par le Roi aux
per(onnes qu'il honore de fa confiance, pour percevoir à
fan profit, & non au leur. Auffi le Régiffeur compte au Roi
rnêmê ou à fon Minifl:re, & le Fermier ne compte à perfonne, parce qu'il fait les fruits liens. Par conféquent, autant le Fermier peut êrre tenté d'étendre {a perception,
autant le Régifièur qui ne perçoit pas pour {on compte
comme le Fermier, ell:-il porté à fe contenir dans les bornes
les plus étroites. Nulle correfpondance, du-moins néceffaire,
du Fermier au Roi, pour-l'ordre & la manutention de la
ferme. Les Employés {ont nommés par la ferme; ils correfpondent pour l'exercice avec le Fermier; & à moins de
quelque plainte ou réclamation auprès du Souverain, Sa Majefié ne fe mêle point de la perception ni des moyens. Dans
]a Régie, rien ne fe fait que par ordre du Minill:re, ou donc
il ne {oIt informé.
- L'Ordonnance de 168 l , tit. 1, arr. 3, fait la difiinétion
des Provinces étrangeres à la ferme, de celles qui ne le {ont
pas; à l'exception de celles de Normandie, Picardie, Champagne, Bourgogne, Breffe, Bourbonnais, Berry ,Poitou, le
pays d'Aunis, Anjou, le Maine, &: -de celles qui y {ont renfermées, toutes les autres ont éré par cet arricle déclarées
éttangeres1-.en ce.quiconcerne les droits d'entré'e·& de {orcie.-·
�~82
Jou RNA r.
Pour la Régie, c'eil: tout autre chofe. Le Languedoc, le
Dauphiné, la Provence, & tant d'autres, ne font point Provinces écrangeres; ce fom la Lorraine, l'Alface, la Flandre,
le Hainault, la Franche-Comté, le Rouffillon & le Bearn,
ainfi qu'on peut s'en convaincre par la remarque de l'Auteur du DiCtionnaire des Aides, parr. 3 , pag. 108, & par
les inJlruél:ions imprimées que le Régiffeur a envoyées, de
l'aveu du Miniil:re, à fes Employés, pag. 3. Il s'enfuit que
ces Provinces exceptées, attendu leurs titres ,particuliers
d?exemption, rout le refie du Royaume efi a/fujetti à la Régie , même les Provinces étrangeres à la ferme générale,
parce que cette qualité ne leur eft donnée qu'en ce qui concerne les droits d'entrée & de fortie, & que ceux de la
Régie font des droits dus à la f~bricarion, & non à la circulation. Delà Marfeille, quoique réputée étrangere pour 'la
ferme, .ne l'efi pas pour la Régie.
Qu'un Orfev.re faffe paffer fes ouvrages à l'étranger, ou
qu'il les vel!de dans le lieu de Ion établiffement, cda dl:
égal pour la Régie; les droits en font dus, uniquement parce
qu'il a fabriqué, & non point parce qu'il commerce. La ferme
au contraire n'a rien à exiger, s'ils ne circulent pas de
Province en Province, ou de Royaume en Royaume. Quelque part qu'ils foiem fabriqués, les droits de ferme font dus
à l'eorrée comme à la fortie.
L'Edit de Porr franc & l'Arrêt du Confeil de 1703 font
les titres d'exemption que la Communauté de Marfeille op,.
pofe. Cet. Edit difpenfe les étrangers de payer aucun droit
d'eorrée.& {(;)ftie par mer; il ajoute enfuite qu'à. cet effet les
droits de demi pour cent pour la penfion de l'Ambaffadeur à .
ConHan'tinople & autres droits.domaniaux, de quelque nature
&. qualité qu'ils puiffenr être, demeureront fnpprimés. Une
exemption de rous droits domaniaux n'a jamais rapporrqu'à
ce.s: droits; ap ,lieu .qu'une exemption de tops droits que!coQ- ,
ques, domaQiiu!, & 'autres " .comprend .tant les droits dom~';'
niaux, que. ceux qui ne le' font. pas. Pourquoi! ces~dFQits· do~niaux font-ils fuppriniés? Oefl:. afin 1 que;;les étr"ngers nê-
�DU
PALAIS
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PllOVENC1!~
·~83
roient plus tenus de payer aucun droit d'entrée & de rortie.
Donc les droits de fabrication ne peuvent pas être' compris
dans la difpofition qui porte fur les autres droits domaniaux,
de quelque nature & qualité qu'ils puijJènt être.
Suivant les termes de l'Arrêt du Confeil de 1703, les
droits dont la franchife efi confirmée, ne font autres que
ceux qui fe levent à la circulation dans les Bureaux des fermes, c'efi-à-dire, les droirs d'entrée & de fortie, ce qui
ne fauroit comprendre les droirs de fabrication, qui font des
objers bien différens. Cet Arrêr ordonne que les Bureaux des
fermes de Sa iViajeHé feront ôrés de la ville de Marfeille,
à l'exceprion de quarre, qui font le Bureau des chairs &
poiffons falés, le Bureau du poids & caffe, celui de la ferme
du Domaine d'occident, & celui du tabac; mais cerre exceprion ne peut exclure d'autres Bureaux que ceux où l'on
percevroir des droits d'entrée & de fçlttie, parce que ce
n'efi que de ceux-là qu'il s'agit dans l'Arrêt, & non des
Bureaux établis pour la fabrication. Cela eH fi vrai, que depuis lors il exiHe dans la ville de Marfeille d'autres Bureaux
que les quatre ci-deffus nommés. Tels font le Bureau pour
la perception des droits fur les cuirs, les amidons, les papiers, & celui du droit fur les cartes.
L'Ordonnance de 168 l , tit. des droits de marque fur l'or
& l'argent, art. 1, ordonne que ces droits fur l'or & l'argent qui feront fabriqués ou mis en œuvre par les Orfevres,
Batteurs & tireurs d'or; FourbifIeurs, Horlogers & autres
ouvriers en or & argent, feront levés dans cout le Royaume·.
Nulle exception dans cette Loi pour aucune ville ni Province; Marfeille y efi donc comprife. D'ailleurs il y a plus
de cent ans que les Orfevres de Marfeille payent ce droir.
Peu importe que ce fait par abonnement; la ville' ne peut
pas ignorer ce paiement, & ce réavifé après plus de cent
ans ne peut que paroître fufpe&.
L'Arrêt fur l'étain confirme le fyfiême du Régiffeur; car
l'Ordonnance de 1681 n'en parle qu'à raifon de l'entrée dans
le Royaume. Quand il eH quefiion au contraire des droits
�'~94
Jou R. N A L ,
fur l'or & l'argent, cette Ordonnance en établit la per.;
ception fur, la, fa.brication. Là conféquemment il y a lieu d'en
exempter la vllle de MarfeiHe; comme affranêbie des droits
d'entrée par l'Edit de, 1669: ici point d'exemption, parce
que cet Edit ne l'affranchit pas des droits de fabrication.
Il dl: vrai que la Communauté de Marfeille n'était poiot
en qualité lors"des Arrêts de 1770 & 1771, rendus contre
les Orfe,vies. Mais prétend-elle faire juger à la' Cour la tierce
oppoGtion. enversèes 'Arrêts'? L'ordre' des procédures &
cduï<ies Jùrifdiaions y rélifl:e; c'efl: néanmoins à quoi tend
fon entrèprife, puifque fublidiairement elle a conclu à être
renvoyée 'lU Roi, & cependant qu'il foit inhibé au Régiffeur de -percevoir le droit fur les Orfevres. Le renvoi au Roi
fur une quefiion déja jugée par le Roi, feroit une dérifioo.
Si la Communauté croit le recours à Sa Majefié néce1Taire,
pourquoi veut-elle plaider pardevant la Cour?
Les ouvrages d'or & d'argent arrivant à Marfeille par
mer, doivent être a1Tujettis au droit de marque & contrôle.
L'Ordonnance' de 168 r porte que les Marcbands Merciers,
Joailliers, feront tenus de déclarer au Bureau du Fermier des
droits, les ouvrages d'or & d'argent qu'ils feront venir des
pays étrangers, dans les vingt-quatre heures de leur arrivée,
pour être n.arqués, & les droits de marqu~ payés, à peine
de confifcation' & de 100 liv. d'amende pour cbaque piece. Le
Roi connoi{fant l'inconv,énient de lai1Ter entrer en France
des ouvrages d'orfévrerie en francbife des droits de marque, les a voulu foumettre à l'impôt, comme ceux qui feraient fabriqués dans (on Royaume, & il en a fait une Loi
expre1fe. Tous ceux qui (ont apportés de, dehors, font regardés par Sa Majefié comme nationaux, parce qu'afin de
ne pas nuire à cerre branche- d'indullrie en France, il a
fallu les mettre à nivèau & à l'égal les uns des autres.
L'art. 23 de la Déclaration de 1749 difpofe vis-à-vis toutes
perCannes, de que1"lue qualité & .condition qu'elles (oient. La
diflinétion des deux fermes dl: e1Tentielle en finance,; on la
tl'Owe f orqlelle1I1ent rappelIée. dans l'Arrêt du Confeil du
l'Août
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PAL AIS
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V Il NeIl.
s8)
Août 1733, que l'Auteur des droits d'Aides rapporte, liv.
3, pag. 1I8, au fujet des marchandifes d'orfévrerie fonant
du Royaume. Ceue Loi établit diverfes formalités, dont
les unes doivent être remplies au Bureau du droit de marque, & les autres au Bureau des fermes générôles, à dé~
faU[ defquelles l'arr. I l veut que les amendes & confifcalions qui feront prononcées, foient appliquées; favoir, un
üers au dénonciateur, un tiers au Fermier général, & l'autre
tiers au Fermier de la marque d'or & d'argent. On conçoit,
par la nature des objers, que le droit de marque & ceux
d'entrée exigent deux fortes de manutention; il a tàllu en
faire deux fermes: non que la ferme générale n'ait pu être
chargée des deux, mais de maniere pourtant à former une
régie féparée pour chacune, comme on l'a toujours fair.
Arrêt du 28 Juin 1776, au rapport de Mr. le Confeiller
de la Brillanne, qui fait droit aux requêtes de la Communauté
de Mar{eille & à celle d'intervention de la Chambre du Commerce, & condamne le Régiffeur aux dépens. Ecrivant Mes.
Pafcalis & Meiffret.
l
ARR Ê T
LV.
La rêve établie fur fa denrée étrangere qui fera introduite dans.
un lieu ou /on terroir, ejl due jùr la denrée étrangere intro~
duite & wndlle doms le lieu ou [on terroir il des étrangers
Ijui la tranJPor~nt ailléurs•.
N l'année 177 1 , la Communauté de Draguignan dé...
livra aux freres Cabaffe la ferme de l'impofirion fur les'
vins élr•. ngers. Par l'an. 17, le Fermier exigeait 12 fols,
par loupe du vin ou quintal de raifins qu.e les par.ticuliers
€cran"" rs pourraient introduire dans la \'ille & fan terroir;:
CeptL~1dnr il:: fermier ne pouvoir exiger I.e droir d'entrée fur'
les vin~ üuel~s parriculiers de Draguignan percevraient dao:;;
Ail/le,; l775 li l776.
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Jou RNA L '
,leurs propres fonds ntués hors du terroir, qui feraient exempts,
en faifant la déclaration de l'entrée du vin au bureau du FermIer.
Les Geurs Roux, du lieu du Val, établirent un entrepôt de
'Vin étranger à la porte de la ville, & l'y débitaient fans en
payer les droits, fous prétexte que ce vin étranger était vendll
à des Muletiers qui le tranfportoient dans les villages voifins. Le 6 Juillet 1774, il fut faiG aux Geurs Roux, chez
Boyer, Aubergill:e, dix- neuf coupes de vin étranger que
Roux fils faifoit mefurer dans l'écurie de l'auberge par la
femme du Cenfal public, & qu'il vendait à trois Muletiers du
lieu de la Garde-Iès-Call:elane, & un tonneau plein de vin contenant environ dix-neuf coupes repofé dans l'écurie. Les Fermiers affignerene les fieurs Roux pardevane le Lieu,enant
de Draguignan, pour voir prononcer la confifcation des
chofes faifies, & la condamnation de J'amende de 30 liv.;
l'inll:ance fut évoquée pardevant la Cour des Aides, & les
Fermiers appellerent la Communauté de Draguignan au
procès.
On di(oit pour les lieurs Roux, que les Communautés
de Provence one le droit d'établir des impoGtions fur les
fruits, denrées & marchaodifes qui foDt apportées dans leur
terroir; cette faculté leur ell: attribuée par les Statuts de la
Province de 1432 & 144-2., rapportés par, Mourgues, pag.
364 & fuiv.; elles ont été maintenues dans cette prérogative par les Arrêts du Confeil du 16 Mai 1640, 30 Juillet
1652, dernier Mars 1643, & par les Arrêts de la Cour des
Aides du ~ OB:obre 1633, 16 4'9, 1753 &' 17)). Les denrées & marchandi(es étrangeres app.ortées ,confommées &
'vendues dans l'étendue du lieu ou du terroir où la rêve eft
érilblie, font fo~mifes au paiement de l'impoGtion. Jean
Roux réclame uniquement l'exercice d'un droit accordé à
tous les citoyens, la liberté du tranfit, & qu'il lui fait permis de faire paffer par le terroir de Draguignan le vin qu'il
:1 déja vendu, ou qu'il fera dans le cas de vendre aux village$
de la Haute-Provence.
'
�PROVBNC~.
S87
Suivant le droit public, il efl permis à tous les citoyens
de commercer, d'exporter & d'importer les fruits, denrées
& marchandifes dans toutes les parties de la Province. Pendant leur tranfport, ces marchandifes font affranchies de
toute forte de droit d'entrée & autres impolltions établies
par les Communautés; elles peuvent même s'arrêter & féjouroer dans le lieu de l'impolltion, fans être foumifes à
aucun droit; il n'y a que la vente & la confommation qui
donnent lieu au paiement de l'impolltion, parce que dans
ce cas la denrée étrangere acquérant la faveur de la localité,
doit participer aux charges de la localité, & parce qu'il ell:
jufle que l'habitant, dont la denrée territoriale reçoit un
préjudice par le concours de la denrée étrangere foit indemnifé de cette perte par le moyen de l'mpoGtion & par
la perception de la rêve impofée fur la denrée étrangere ,
ce qui diminue d'autant les impolltions de la Communauté;
mais les cas de la veore & de la confommation exceptés,
la denrée jouit de la franchife la plus entiere. Elle peut
paffer dans le pays de l'impofition; elle peut même s'y arrêter en tranfit, & Y féjourner fans payer aucun droit, &
quelque long que foir le remps du féjour , elle eH toujours cenfée in viâ, & fous ce rapport exempte de l'impôt.
La liberté & le privilege du tranfit font fondés fur l'utilité de la {ociété, fur le bien général & fur la faveur du
commerce, dont l'objet inréreflànt dans cette partie confifie dans l'exportation & l'imporration d'un lieu dans un
autre, des denrées qui font recueillies dans l'étendue de la
Province; ,,'efi ce qui a fait dire à l'Auteur de l'Efprit
des Loix, liv. 20, chàp. 13, que l'objet du commerce e!l:
l'exportation & l'imponation des marchandifes en faveur
' '
, de l'Etat.
La ville de M~rfeille excipant de la difpoGtion de fes
Statllts particuliers, &' des Arrêts qu'elle avoit obtenu ell
1686 & 1717' avoit tenté de fe foufiraire à certe regle
générale ; fa prétention fut condamnée par Arrêt du Con·
•
DU
PALAIS
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Eeee z.
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JOURNAL
~38
feil du 16 Aoûr 1740. II fur jugé que les vins recueillis dans
la Province auraient la [1cu!té de pa1Ter dans le rerroir de
la ville de Marfeille, pour être tranCponés hors de fan Port.
Il n'y a donc rien de plus cerrain que la réalité & la franchife du traTifie; les chemins [am des dé!vJuchés publics
qui doivent êrre ouverts au, commerce, & qu'il n'appartient à
aucune Communauté de gêner par des impôrs. Tous les
Auteurs conviennent que les marchandifes qui [onr en
tranfit [onr affranchies de roure Corce d'impofltions ,& qu'il
n'y auroir aucune équité à les impoCer. ( MafLardus, de jure
mercatorurn; Loccenius, de jure maritirno ; Grotius, de jure
belii & pacis; Puffendorlf en [on Traité du droit des gens,
& le Cardinal de Luca, de regalihus, diCe. 63.
Les Communautés oe peuvent pas même par aucune
délibérarion, & par leurs baux à ferme, faire en lone que
certe impofition foir encourue, lor[que les marchandifes &
, denrées auront féjourné pendant un cerrain remps dans leurs
terroirs. Un Arrêt de la Coyr des Aides, du 14 Llin 17P,
caira le bail de la Communauté du Val, au chef ponant
,que les huiles étrangeres & enrrepofées deux fois vingtquatre heures, [eroient foumifes au droit de cenfelage. Un
l'econd Arrêt rendu en 17H caira un [emblable bail pairé
par la Com,munauré du Bar, au chef portanr qu'il [eroit
perçu deux [ols par quintal d'huile qui auroit féjourné plus
de vingt-quarre heures dans le lieu. Ces baux tendoient à
limiter la durée du tranjie. Mais le tranjit ell: un droit ft
libre, fi privilégié & ft néce1Taire au commerce, que tous
les aaes qui peuvent l'anéantir, ou limiter fa durée, ou affoiblir fa liberté & [on privilege, font nuls & réprouvés par
les Loix.
La Communauté de Draguignan n'a voulu érablir un
droit de rêve que fur la denrée étrangere qui feroit apportée dans fon terroir, qui viendroit à acquérir la faveur de
la localité, qui feroit mife en concours avec celle du pays;
enfin qui feroit vendue & confommée dans le pays. Son bail
l'.e renferme & ne peut pas renfermer ,une difpofition plus
�DU PALAIS DE -PROVENCE:
~g9
ltendué; {es "Fermiers n'ont pas de plus grands droits. Jean
Roux nla contrevenu ni aux regles du tral!1.lù, ni aux difpa~
fitians du bail. Il n'a jamais vendu ni confommé du vin dans
-la ville de Draguignan & fan terroir j les Freres Cabaffe ne
,préfentent aucune efpece de preuve de cette vente & de cetre
t:onfammatian, qui feules peuvent donner lieu à la peine
de la confifcation & de l'amel'lde ; la faifie ell: donc nulle
& doit être caffée a\'ec dommages-intérêts.
On répondait pour les Freres Cabaffe & la Communauté,
que de droit commun, & fuivant le bail qui régit la ferme
.de la rêve fu-r le vin étranger, paffée aux Freres Cabaffe par
]a Communauté de Draguignan, les fieurs Roux n'ont pu
introduiTe dans -cette Ville & fan terroir du vin étranger,
même pOllr -l'y vendre uniquement à des étrangers qui l'emportaient chez eux ou ailleurs, fans en payer la rêve, &
fans s'expofer à la confifcation & à l'a mende.
Quant
droit commun, il gît dans nos Statuts, dans les
Arrêts du Confeil & de la Cour des Aides. Perfonne n'ignore
ces tit-res qui autorifent les Comm unautés de Provence à
établir des rêves & autres droits d'entrée fur les marchandifes & denrées étrangeres qu'on apporte chez eUes. Ce
droit, général pOUT tautes les Communautés, ne confifl:e
pas à prohiber ,l'entrée abfolue de la denrée étrangere,
comme le font celles d'Aix & de Marfeille, fondées, quant
à ce, [ur des privi!eges particuliers j il [e réduit à une taxe
quelconq~e , dont l'effet procure à la Communauté le double avantage de diminuer -la maffe de [es charges par le
produit de la rêve, & de favori fer la denrée du lieu, à laquelle on conferve" tous les avantages de la localité, par
!'efpece d'impôt que l'étrangere paye, fi elle veut en venir
profiter. Serait-il" jufl:e qu'une Communauté affouagée à raifon des avantages de fa pofition qui lui facilite la vente
des denrées de fon crû; une Communauté, qui Couvent a
fait des dépenfes locales pour augmenter ou fou tenir le
débit de ces denrées, fût forcée de faire part à tout venant
au
�~90
Jou
RNA L
de ces mêmes avantages, de partager, pour ainli dire, fon
commerce aveé' .'t,out le monde, au rifque évident de le
rendre moins lucratif par le concours, & qu'elle ne pût
pas a/feaer la denrée érr'angere d'une rêve, afin de l'éloigner
& fou tenir la fienne , ou du moins de fe récupérer en corps,
par la taxe, de la perte qu'elle fou/frira infailliblement
en dé~ail par le moindre profit que fes habirans feront. '
.
La Communauté de Draguignan a donc pu de droit
commun établir chez elle une rêve fur le vin étranger, dans.
. le double objet d'en retirer un bénéfice par le prix de la
ferme, & de favorifer ou fomenir le vin de fan crû; c'eft ce
qu'elle a fait par fan bail. Auffi d'après les termes de ce
bail, les fieurs Roux repofant chez Boyer l'Aubergifte aux
porres de Draguignan, du vin étranger, & l'y vendant, quoiqu'à des Muletiers étrangers auffi, avoient-ils introduit du
vin au tens du bail? Introduire, introducere ou ducere intra, en
fait de marchandifes, de denrées, de fermes & de reves, fignifi e voiturer, tranCporter, amener enfin de quelque façon
que ce Coir, cette marchandife ou ces denrées, dans le lieu
où la ferme, la rêve ou la prohibition a lieu. Peut-on concevoir que du vin dépoCé & emmagafiné au Fauxbourg de
Draguignan pour y attendre l'occafion de le vend.re, vendu
enfilite impunément dans cet entrepôt, ne fut pas voitulé ,.
tranCporté , ou amené d·ans l'enclave de la rêve?
Peu importe que ce vin fût vendu à des étrangers ou ?l
'des habitans du lieu; ce commerce que les Roux en faifoient publiquement, ne portait pas moins de préjudice aux
Fermiers, en ce qu'à défaut de ce vin érranger, ces Muletiers de la Garde ou autres lieux auraient acheté celui que
le douzain en fruits, dont ils font également Fermiers , leur
a produit; ce commerce, ne nuifoit pas 'moins aux habitans de Draguignan en général & en particulier, en ce
qu'augmentant la maffe du vin à vendre,. il en faifoit néceffairemenr baijfer le prix.
.'
Les Fermiers de Draguignan conviennent que ,cette Corn":
munauté & toutes les autres de la Province ne peuvent im..,
�DU PAt AIS DJ! PROV1!NCIl.
~91
poCer r~ve fur les denrées étrangeres , qu~en tant qu'elles
f.;ronr confommées dans fon terroir, & ils conviennenr que
leJr bail' ayam dit qu'ils exigeroient 12. f. par coupe de
vin qui fera introduit dans la ville & fon terroir, c'eH tout
comme s'il avoit dit qui fera confommé. Or, 00 confomme
non feulemem par def!:ruél:ion en buvant & mangeant une
denrée, mais encore en la vendant & commerçanr. Les
fieurs Roux qui le niem en défenfe, l'ont pourrant avoué
eux-mêmes tacitement, puifqu'en vendant leur vin, ils
l'om fait mefurer par le mefureur public, & en om payé le
droit de cenfelage. Si le vin commercé à Draguignon étoit
en tranfit ,pourquoi en payer le cenfelage? S'ils om reconnu qu'il n'étoit pas en tranfit en payam le cenfelage,
pourquoi refufer d'en payer la rêve ? L'Arrêt de 17') 2 &
celui de 17)4, qui calferent les baux des Communautés du
Val & du Bar, déciderem que féjourner dans un lieu quelconque fans vendre ni commercer, n'ef!: pas confommer,
mais feulement palfer en tranfit, quelque long que foit le
temps du féjour, & que le tranfit fans lequel le commerce
ne pourroit s'exercer, efl: & fut toujours libre & privilégié.
C'ef!: pour maimenir ce tranfit que la Province s'éleva en
177 l en faveur des Communautés du Baulfet, Cuges &
Aubagne, comre celle de la Seyne. L'Arrêt du Confeil du 17
Décembre 17)4, qui calfa l'Arrêt de la Cour des Aides de
cette Province, déclara les faiGes bonnes, &. en ordonna la.
confifcation, fur le fondemem que vendre dans Je lieu de
la rêve, quoique pour porrer dehors, c'étoit confommer, à.
l'effet d'être fournis à la rêve.
Le tranfit fe dit d'une marchandife venant d'un lieu quel.
conque, allant à un autre pour lequel elle ef!: def!:inée, pour
l'y vendre, ou l'y porrer déja vendue, & palfam par un froi..;
fieme où elle n'efl: ni verfée, ni commercée, mais umplement & tranuroiremem repofée. Cette marchandife, quelque long que foit le féjour qu'elle fait in /oco gabellœ, efl:
toujours cenfée in viâ, & elle ef!: exempte du droit, fauf
au Colleéteur de cette gabelle de prendre les précautions né~
�~92.
Jo V RNA t
ceffaires pour éviter les abus. Mais fi au lieu de pairer ain/i
&: repofer rout au plus momentanemenc, cefui qui apporte
la denrée in loco gahellœ, l'y verfe, l'y vend ou l'y conram_
me, le droit efi infailliblement dû ; c'eU ainli que le décide
le Cardinal de Luea en fan Traité de regolihus, dire. 63_
Arrêt du 2.8 Juin 1776, au rapport de Mr. le Canfeilb
de la Calade pere, qui confirme la faifie avec dépens envers touces les parties. Ecrivant Mes. Bremond & Turrel.
FIN.
TABLE;
�DU
PAL .\.15
II B
l'Ut 0 V l! Ne R.
ls-·)'rl
tept ans, & de répandre le 'trouble & -le défordre -dans u!!
ménage'? Cette requête éIl: un vrai libelle diffamatoire; l'intérêt de Mariny & de fan épouCe eIl: fenlible; le bruit public
a excité leur plarml:i, la ,témérité de Laugier a été pou1fée
t
1
•
•
1(
à l ,exces.
Me. Meriaud léonc1llt à.ce qlJe l'appellarion fût mife au
néant & ce dont était appel tînt & forrit fan plein & entier
effer, avec renvoi & amende.
Arrêt du 1 ~ Juin 1776, prononcé par M. le Préfident de
.Jouques, confacme aux cQDclufions; Laugier fut condamné aux
,dépens. P.laidam Mes. Simeon & Gaffier.
t 1J
..
ARRÊT
LI.
-Celui qui tl fourni la prime, a une préférence fur la c!wfe
ajJùrée vis-a-vis' les créanciers de l'AjJùré.
E 2~ Janvier 10/74, le fleur JJofep~ Maurel, Armateur,
fit en fav-eur . du lieur Gafan un bIller à ordre de 3243
liv: la fols', payable len Oél:obre-mêm'e année, caufé ,pour
valeur.en -prlme~ d'ajJuran'ces-.; le, fleur' Gafan céda ce billet
·au fieur Olive., Bourgeois de I<i ville de Marfeille..Avant
-l'échéance de ce biller, les lieurs Maurel & Garan -firent
faillire. Le 9 Seprembre .cuivanc, le fleur Olive Ce pourvlit
.aux Juges.ConCuls. conrre les débireurs folidaires en con.damnarion des 31.43 liv. la fols, avec déclararion qu~il
-feroir .privilégié & préférable à tous créanciers fur le corps
· & facultés de la Polacre. L'Heureufe Therefe, t& .requit 'Ia
commune exécution oontre la· ma1fe des créanciers de .l'un
.' & de l'autre. Senrence de défaut qui enrérine .ces fins, en
· verru de laquelle il fur fait un arrêcement des marchandifes
· chargées fur le bâtimenr. Maurel s~tant a-rrangé ,avec ..[es
'-créanciers, fe pouTvLft en rabattement du .défallt., fur le fon! dément que ·cerre fomme lle -àev.oit 'P0ine avoir la prëférence
que le ueur Olive -lui attribuait., & .qu'il devoit feulelJleJl~
L
<.
•
�'Ii 5'2.
."::J •
-J
0 U R: NA
r '}
entrer "dans .l'arrangement fait àvec: les autres créa.ndeis•
.seconde Sentence qui pérmet au Lieur Olive de continuer fes
exécutions. Apper de la part de Mauret.
:
, On, difoit pour lUI qu'un billet con4u( pour valeur en primes
d'aJfùrance n'emporte avec foi aucun privilege ni préféréOl.:e
fut les 'effets du oâtimént 'affuré ; qu'~Léto1t kle la nature des
limples obligations, & ne :pouvoit'avoir un:autre ·fort. '-,
On répondoit que par-tout le paiement de la prime procure 11 celui à qui appartiennent les deniers une préférence
'indifpurable, & .ce 'privilege eil: équitable. Celui qui affure,
reçoit un prix ou une indemnité de ~l'événement qu'il court,
pour balancer les rifques de la refponfton. Ce prix, que l'on
connaît fous la dénomination de la prime, e!l: payé ou ~n
argent ou en billets, & par avance; tel ell: l'ufage de Mar~,
feille atre!l:é par Valin fui.l'Ordonnance de la Marine,liv.
4 , tir., '6 des aJfùrances; arr. [, pag. 26. L'effet de l'affu· rance donne à l'âffureurune a&ililn dire&e fur la chofe affuréé, parce que. de ipême .qu'il eH,tenu à repréfenrer la valeur du bâtiment, s'il vient à périr, ainLi ce même vaiffeau
doit .répondre de la' valeur de' la prime qui fait partie des
néceffirés de fon voyage /3( fur lequel tombe le paiement
de fon affurance ; ainli les Matelors 'font préférables à tous
autres créanciers 'de l'Armateur; les,deniers pris à la groffe
· durantle cours du voyage fonr préférés à ceux qui ont été
prêtés avant le liéparr du bâtimenr,' parce que fans ce fecours, il n'auroit Pll achever fon -voyage. ,
'
La prime 'd'affurance e!l: payable par avance dans la Place
de Marfeille en efpeces ·ou en billets. En fuppofanr, qu'ellé a
été payée' en billets, il eil: naturel de conclure <j,ue l'affureur faift de ce biller conçu en prime, conferve un privilege fur le, navire & fa cargaifon. Cerre préférenc,e dérive
de la nature de la dette; en forre que fi le bâtiment arrive
à port & fans perte, l'affureur ,comparoîr pour recevgir la
valeur de fon billet qui eH le ~rix de fon affurance; & faute
,par l'armareur ou les' inréreffés à luj en rembourfer le montanr, il porte auffi-tôt !ès exécutions fur ce navire & fur fa
· cargaifon, comme foqniis à liquider le gage de ,la [ûreté
fou~
-
,r
�· DU
PALAIS
DE
PROVENCI!.
Hl
fous laqJel1e il a vogué, & nul créancier ne peur lui difpurer
la .préférence ;' c'efi la faveur de la créance & la nature
des deniers qui lui réTervent ceUe fupériorité fur tous les au.'
.
.
Ires non privilégiés.
Si l'armateur veut payer la prime en argent, foit parce
qu'il ne trouveroit aucun affu.reur .fur fa fimple fignature,
à laquelle bn ne donne ~ucune 'foi, foit parce qu'il a des
raifons' pour 'embraffer cette forme· de paiement, & qu'il fe
foumeue à cet eff~t d'emprunter pour y fatisfaire l'argent
du 'tiers defiiné 11. l'acquirtement de la prime, le tiers participe à.ce privilege ; que ce foit l'affureur ou le tters, ces deniers
ont une égale appli"cation, ,'efi-à-dire, qll'ayant fervi à
acquitter envers l'affureur le montant de fa prime, ils ne
font pas moins réputés dus par les atrurés. Que ceux-ci
en doivent faire le rembourfement à l'affureur lui-même, ou
qu'ils le faffent à tout autre qui le repréfente, cette repréfeotation ne change pas la nature de la créance qui efi toujours établie fur le bâtiment, parce que c'eH le bâtiment
qui la doit ;. le ceŒonnaire exerce les mêmes droits que fon
cédant.
Par le compte courant communiquê eotre les fieurs Maurel & Garan , il conHe que ce dernier atruroit pour le compte
du premier, & qu'en filÎfant les atrurances, le fieur Gafan
a payé toutes les' primes aux Notaires & aux Courtiers; on
ne voit nulle part le fieur Maurel figurer comme fairant
lui-même les affilrances ; il ell: donc inco.nreHable que 1'0bliO'ation des 3243 liv. 10 f. puifoit fon' exill:ence dans la.
val~ur des primes. Maurel, a·rmateur, fàit un billet à ordre·
à Gafan qu'il concroit pour la valeur des primes payées par ce
dernier; & après. avoir ainli atteHé l'emploi des deniers, il fe
ravife de diIe que la taufe efi fauffe: où en efl: la preuve ?'
Une rétraéhtion auffi frappante n'eH pas admife juridiquement avec une facilité qui anéantitre des engage mens' auŒ
elrentiels; un homme obligé ne peut Ce délier en difant
qu'il s'dt trompé ou qu'il n'a pas recru la fomme deHinée
à- ce't ufage. Il y a pl~s ; s'il ét~it probable,
,m.oralement
certain que les 3243 hv. 10 f. n eutrent pas ete veritablement'
I!'
.Années 7775 & I77 6•
.
A a a a.
�· H4-
Jou
R. N A t
•
employées ;au paiement des primes, il ne faudroit pas moins
lai1fer au billet donc, s'agit le caraétere & le privilege que
le débiteur lui a affigné; le lieur Olive n'auroit point tremré
dans le complot ni dans la fabrication de cette piece; il
l'a acceptée fous la foi que l'écrit avoit une caufe de préférence ; le manege., s'il en exifioit aucun, n'eût j!lmais été
concerté qu'entre Maurel & Cafan: Pourquoi vouloir rejetter fur l'endo1feur, homme paffif, & qui a confenti avec
- bonne foi à la négociation, le danger d'une caufe limulée?
vraie ou fau1fe , elle doit être entretenue: nemini fraus [ua pa-
trocinari deDet.
Inutilement Maurel oppofe que le privilege accordé aux
billets de prime ne fe communiquant qu'à l'affureur ,. le lieur
91ive qui ell: un tiers ne peut pas prétendre d'être fubrogé
.~ fe~ droits; il n'y a aucune loi qui prohibe cette forte
de billets en primes; ils deviennent plutôt néce1faires pour
faciliter· les aŒurances. Ces billets fone à l'inll:ar pes lettres
de change & aut.res billets limples ou à ordre qui par l'endo1fement & la remife faite au tiers lui tranfportent les
mêmes droits qu'avoit celui au profit duquel ils avoient été
d'abord paffés. Le pouvoir de la négociation ell: conligné
dans l'ordre qui procure au porteur la liberté de le céder
àun autre; & par l'effet légal & conféquenr de c~ tranfport, l'endoŒeur, qui ell: le ceffionnaire dans les aétes ordinaires, devient maître abfolu de la chafe cédée ou du
billet endo1fé fans aucune rell:riétion; ce qui donne à cet
endoŒeur ou à ce 'ceffionnaire la plénitude des a6l:ions que
le premier créancier pouvoit exercer. Jamais maxime plus
certaine. Il y a donc fubrogatibn en force .de laquelle le
lieur Olive a pu aétionner le débiteur & arrêter fes efIets.
·Pour fe foull:raire à cette regle générale, il faut que Maurel indique la Loi qui excepte' les billets de prime de cette
regle: Jufqu'alors on fera toujours fondé à foutenir que fuivanr les regles du commerce, le porteur d'un billet a la
même préférence que celui auquel il a été primitivement
remis; que la fubrogation de tous' les droits, privileges &
préférences s'aeçomplit par la fignature & la tradition.
�DU
PAI..A.IS
DB
PROVENC·E.
~~~
Arrét du ü Juin 1776, au rapport de M. le Confeiller
de St. Marrin, qui confirme la Semence avec dépens. Ecri.
vant Mes. Reynaud & Alpheran.
ARRÊT
LII.
En mariere criminelle, lorique les Officiers Royaux préviennent ,ceux du Seign.eur, les frais de procédure ne /oflt répétés vis-à-vis du Seigneur, que fur le taux qu'ils doivent
être payés par le Domaùié, lorique la ,procédure efl prift
à la requête du Procureur du Roi. .
D
Ans-le mois d'Oél:obre 1773, les Cavaliers de la Maréchau1fée arrêrerem & conHituerent prifonniers au Luc
deux filles & un garçon fOl1p~onnés de vol 'de châtaignes;
huit .jours après, & avant l'information, le garçon s'évada
des prifons, & fut repris. Ces prifonniers furent conduits
à Aix, & delà renvoyés aux prifons de Draguignan, Siege
du re1fort. Le Procu"reur du RoL en la Sénéchau1fée de
Draguignan requit l'information par prévemion contre ces
prifonniers fur le vol des châtaignes & le bris des prifons ; la procédure fut infhuite, & la Semence rendue. Me.
Hênri ,Greffier au Siege de Draguignan, fit un état & rôle
des frais de la procédure, qui monrerent à 196 liv. 19 fols,.
pour laquelle fomme le Lieutenam décerna contrainte; &
par exploit du 16 Mai 1774, elle fut lignifiée au Sr. Gaucher,
Fermier général de la terre du Luc, avec commandement de
.payer. Gaucher appella pardevant la Cour du décret de contrainte ,pour obtenir la réduél:ion à ce qui feroit à la charge
du Domaine, fi la procedure avoit été renvoyée au Lieutenant; & cependant comme la prévention ,des Officiers de
la Sénéchau1fée de Draguignan n'avoit eu lieu que par la
faute du Procureur fifcal, le fleur Gaucher le fit affigner
pour. affifter dans. l'inHance, & fe voir conddmner à le reAaaa2.
�'H6
.
JOURN~L
,
.
lever /Sc g;Jrantir de tout ce qu'il ,pourrait foullHr à difon
de la contrainte.
On dlfoit pour le !leur Gaucher, que l'Edit de 1772, qui
leur fert de prétexte, fuffit pour faire rejetter leur prétention.
Le premier objet du Roi a été de foulager les Seigneurs
d'une charge pefaqte qu'en~raîooit la pourfuite des délits
commis dans l'étendue des Juflices feigneuriales; le fecond
a été d'empêcher que cette charge ne fi'tt un motif de fa..
yorifer l'impunité; c'~fl dans cette vue que le Roi vouLant
de plus en plus affurer le repos de fes fujets; le maintien de l'ordre public /le: la punition des crimes, voulut faire
trouver aux Seignêurs hauts-juHiciers leur. avantage particulier
dans [la pourfuite des 'coupables , & leur fournir les
moyens de fe décharger des frais des procédûres criminelles.
; Pour remplir cet objet, le Roi a poCé le- cas auquel
les Juge~ des Seigneurs informent & décrerent avanr les
luges Royaux, & alors l'inll:ruél:ion en premieN infiance
doit être faite aux frais du Domaine, & les Procureurs
jurifdiél:ionnels peuvent incontinent après l'information &
les décrets, envoyer la groffe aux Procureurs du Roi, POUE:
la procédure être continuée par les Officiers .Royaux.. Lorfque les Juges des Seigneurs informent '& décretent avant
les Officiers Royau" dans une procédure prife .à la requête
du Procureur juri[diél:ionnel , cette inHruél:ion en premiere
ioll:ance devant être faite aux dépens du Domaine, on
ne pourrait pas prétendre que les -frais de cerre -procédure
fuffent payés par le Domaine, .comme fi elle étair prife à
la requête d'une partie civile, quoiqu'elle foitllne furcharge
pour eux.
L'Edit pofe enfuite le cas auquel les' Officiers Royaux
. préviennent ceux des Seigneurs, & il veut qu'alors l'infrruél:ion en premiere in!l:ance fo.it faite a'u" frais des Seigneurs'; c'ell:-à-dire, qu'alors les ,Seigneurs font privés de
1'.lVantage particulier que le Roi leur faie, en leur ôtant
la charge qu'entraîne la pourfuite des délits commis dans l'é-
�.•
J} ~
p ~ t ~lU ~: J) Ill. ?Ptll, 0 V B N,e E.
')1
terrdiw·de' leurs JufilCéS'; &, en l~u 'fourhif1ànt ·léJ rfttJJetpde-.jè
décharger des frais des procédures crim;nelles.'L'eJFet.de.cettè
privation elt qu'au .lieu que ,ce.feroit le Domaine,·qui. paye'•.
roit .les frais des': pwcéaures, fi Jes Juges des' fS'eJgneu~s
avôient prévenu, lorfqu'ill\ [Ce .Abo't. lailfés 1 prévepir, IparJ.les
Officiers Royaux, ce1fo'oc îcos ·Seigneilrs. quirliaivélltinpayer
ces frais ;miais ce fone to!!jburs l'ès mêmes frais ;II'Rdit' n'y
met aucune d.ifférence i il n'y eil pas, dit .que lorfque les
Officiers Royaux aurout prévenu ," alors les Üais, feront payéspar les Seigneurs, commeo·fi la procédurè écait prife.àJine.
quête d'une partie' cjvile.. L'Edit parle'toujours :fans ~ifl:inc .
tion; les frais qui 'doivent .être payés, par les Seigneurs', len'
cas que -leurs Juges ·fe lailfent prévènir , If~no précrfément
les mêmes; & conime étant fubrogés àJ ceuXJ que Je Bomaine·
devroit ·pàyer aux Officiers Rby.au,,? ft les Juges des:Seigneurs'
a'loienr: plévenu:
ri 1:,) ':;' 1,1 d .1
ur' . r'
~ .1.2
1
, L'article fecond de ,1'F;dir acheveTde démontrellquétle,.RGi.>
n'a' pas 'voulu aggra>J.er la conditiom des 'S:éigneurs~.iAÎJantl
cd Edit, lorfque les procédures étoient prifes. par leurs
Juges, en cas d'appel les inlhuél:ions néce1fàires, les frais de
t-ranfport , de l'envoi, ;od'exocution', écaieni à la' charge des
Seigneurs,' fauf leurs .recours conrre.les. coupablesJlcondam,'
• nés, recours qui· ne. lèur 'donnoit fouV'cnt ,'qulune .re1fource.
inutile & infru&ueûfe: .Le fe'c(nfd article de l'Edit décharge.
totalem~nt 'les Seigne~rs'\de ces' frais. pe forte que, lors.
même .qùi les Juges des Seigneurs fe') ftint faiffés prévenir,
les frilÎs. ~Il '~a:ufe .d'appel doiveqt êtte Laux; dépens:du' Roi.'
Or s'il falloit fuppo/è: que lei'lSeign"èurs payalféncl .alors .les ~
frais', comm~ fi la. procédure 'Iétoit~ poqrfuivie ~.la requ'ête
d'une partiê crivjlel; "ueUe' ahfurliité. n'.én. réfuitèroit-il pas ~)
Les fràis' de pre.mierè inilance' feroient. payés .le double,
& ceux faits en caufe d'appel ne feroie,nt payés que fur le
taùx de',celles- qui'j lOii't"prifes~,à: la requête d~ Procureur,
,·r
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. 01. . . -,1 , JI
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Il réfulte du ~ fecond artiCle de' ,l'Edit , qude Roi' y fuppofe que; quand' mêmé les Juges- des' Seigneurs ne préviendr.oienr pas..,. & que .les Juges.iRuyaux .prendroient.la pro~
0
J.
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,.L,OURNAL
cédure aux dépens des .Seigneurs, ils recevraient ',toujours
leur p.aiement de la part du Domaine qui aurait une action de répétition. Cet Edit n'aurait pas parlé de répétitian, s'iJ n'eût fuppofé un cas où elle pLIt avoir lieu, & ce ne
peut être que' celui auquel. les Juges des Seigneurs fe lailfent
préqenir; il réfulte auffi que le Roi n'a rien voulu innover par
rapport à l'ufage qui étoit fuivi , lorfque les Officiers Royaux
prévenaient ceux des Seigneurs, c'efi-à-dire ~ que dans le cas
où les Officiers Royaux prpcéderoient par prévention aux
procédures qui•. doivent être faites aux dépens des Sei.
gneùrs, ils feraient toujours payés par le Domaine, fauf
la .répétitioJi .COntre les Seigneurs. Si le Roi a ei1tendu que
le Domaine payerait, fauf de répéter, il a entendu que le
paiement fe'roit, toujours le même dans les deux cas, fair'
qu'il fût ,à fa charge, fait. qu'~1 fût li. .celle des Seigneurs.
M. le Garde des Sceaux, par fa lettre du mois d',Août 1774, dé..
cida qu,e la prévention des Juges royaux fur 'ceux des Seigneurs,
ne, changerait, rien dansl la regle primitive, qui veut qu'il ne
fait reç,u ?lucuris 'émolumens ni àucunes vacations' par les Juges ,toutes 'I~s fôis qu'jl~ agiffent à la requête du minifiere
public, fauE leurs jufies! débourféNaxés fur le pied des Réglemens du .GonfeiJ".quand ils font obligés de fe iranfporter'
au.) dehors; 1 encore, ·faut.il 'que la néceffité' de ce tranfport'
fait pleinement' co'cfiatée. D'ailleurs le. LieutenilOt de Dra-'
guignan ne pouvait pas dédder en fa faveur, & H n'y. avoit'
que' la Cour q'ui pût: déCerner ùne pareille contrainte. Ainfi <l'
le véulent· )/.ate•. 7 ldu. tit. '1.d.e l'Ordonnance de 1667, & '\
l'arr. 7.de PEdit ~U; mois'de'Mars 1673- J', •
.ï
On a 'toujoursliegar~éJen :-Prilll.en,c.e c!,m'rtie ulle maxime
certaine, éJablie par, lès Arrêts,. que . les. luges fubalrerne~' '
ne peuvent poin~.,~écerner des contraintes pour les épices;
( Boniface, tom•• 1 , pag. 4. ) On trouve ·dans le Rècueil des
Arrêts de Réglemeht. de Mr. de. Re,gulfe, pag. 22. , un.1rrêt.
du 29 Juillet 1638, qui reçoit l'appel incidemment interjetté
par, le Procureur-Général du -Roi' de la coiitràinte génér'ale
laxée. pour 'Ie paiement des épices, & qui fait défenfes au'
Lieutenllnt de Forcalquier & autres de la Province d'en.fàircL
\
�PA.tAH liE l'ltOVBNCll.
1~9
de femblables,'~:peine de nullité, ,dépens, dommages & intér~t~. On en trouve un autre dans·le.même Recueil, pag. 92.
D11
/
On répondoit pour Me. Henry, que l'Edit du mois de
_ . Mars 1772 eil introduél:if d'un droit nouveau; de pareils
changemens deviennent fouvent nécelIaires. Ainli le temps
& l'équité, fans l'intervention d'aucune Loi, font qu'on adjuge des dépens aux Procureurs Jurifdiél:ionnels contre cette
maxime, regardée autrefois ~omme facrée: Fifcus nec dat,
nec accipit.
L'Edit de 1772 eil clair; il s'agit de déterminer quels
font les frais qui, dans les cas de la prévention des Juges
Royaux, font ~ la cha.rge des Seigneurs. Si ces frais n'étoient autres que ceux auxquels donnent lieu la traduélîon
des prifonniers, l'ex~cution des jugemens & les falaires des
témoins, frais néce1faires, frais indifpenfables dans tous les
cas, foit qu'il y ait prévention ou non, le Légiilateur n'auroit pas eu befoin, par une difpolition expre1fe, d'en charger les S~igneurs; ils les devoient déja par le droit commun" par des principes fondés fur les premieres notions de
l'équité, fur les Loix du titre du Digeile & du Code de
negotiis gejlis. Car avant l'Edit de 1772, lorfque les Juge.s
Seigneuriaux étoient prévenus, le Domaine répétoit contre
lés Seigneurs qui avoient confié l'exercice de leur. JuCHce
à des Officiers négligens, les frais dont il n'avoit fait que
les avances, & les Seigneurs taxés fans injufiice payoient
fans difficulté. Si cette derniere Loi n~avoit pas eu d'autre
objet, elle fe feroit référée aux anciens Arrêts du Confeil,
& elle en auroit ordonné l'exécution.
D'ailleurs, fi le Légiilateur s'étoit contenté d'exciter lesSeigneurS ~ la vigilance, par la .confidération du foulagement'
des frais de procédure, fans les détourner en même temps
de favorifer l'impunité par la crainte d'une augmentation de
ces mêmes frais, fon ouvrage eut été imparfait. Récompe~fer & punir font les deux grands re1forts de la politique; & lorfqu'ils font réunis, ils produifent des effets plus
fûrs & plus pui1fans. TOlites les fois qu'il y a une récompenfe atrachée à une certaine aétion, il faut qu'il y ait une
�,
S60
JOURNAL
ea
peine prononcée contre l'aél:ion contraire; 'le frein'
au
moins aulIi néceifaire pour rt::tenir): que l'aiguillon pour el(citer.
1
Ces motifs font preff"nts, & \lue lettre circulaire de M.
Turgot, Conrrôleur-Général, du 27 Mars 1773, les met à
l'abri de toute r conrradiél:iom " Il refloit. également a déci/> der, dt-il dit dans cette letrre, Ji d<lns le cas de pré" vention·,'les. Officiers RoyaùX,devoient Ùre jimplement payés
" comme dans les procédures où le. Roi efl feul .partie, ou
" comme dans celles qui font pourfüi.vies la r.equête> des par" ties civiles. II a été décidé, en èonfèquence qu'en matierè
" de prévemionde· la part, d'el" Officie"s de -Sa Majeflé fùl'
" ceux des 'Seigneurs, les exécutoires d~!I> frais de tran'!port
" fur les lieux, & ,de tous autres frais généralement que}con" ques, à, 1'exception des feu/s falaires 'des témoins, doivent
" être décernés direc1ement fur les Seigneurs. dont les Officiers>
" Je fe·roient laiJfès prévenir. Un des principaux motifs de
" cette· décifion efl que Ji les exécutoires étoient décernés fur,
" le domaine'; les Officiers du Roi ne pourroient 'être alors
.. payés 'que fur le pied des Réglemens du Couftil, pour les
" frais d'es procès aiminels où le Roi efl feul partie; au lieu.
" qu'on entend, qu'ils puiJfènt ft taxer comme dans les pro~
" cédure'! p'ourfuivies la requête déS parties civiles, lorfqu'ils
" travaillent pour le' compte des Seigneu"s•. "
.
,
"
Le 'même rnÇ>tifs qui ;faic. récompenfer la vigilance, ne!
doit-il pas' faire punir; la: négtigence? Les Seignèurs, fi leurs
Officiers p.réviennent, ne payeroienr rien; & s'ils font pré-'
venus, ils ne payeroient que ce .qu'ils étaient obligés depayer fans la plus~légere~furcltarge; leur fort fer.oit.amélioré
dans un cas, & .ne ferotlf. détérioré dans aucun;:' ils' pour-'.
roient 1 gagne·r,. fans pouv:cir perdre;. ils confe'rlleroienc les'
émolumens de la Jullice',r,fans en. avoir' les charges;·.ils.fe
roient généreufement foula'gés des frais des procédures, &
les Officiers Royaux qui lie' leur doivent rien, feroient du-.'
rement chargés du travai,~ .qu?elles, exigent.
.'
CeH un pr.incipe fondé en raifon & confacré par.. une
pratique auffi' ancienne qu'univerfelle, que _les exéc.utoires!
doivent
aé
a
�DU
PAL4.IS
DE
PROVENCE:
561
doivènt étre. décernés' p"ar ceux qui nt connoi1Tance des
frais qui y donnent lieu; qui font en état de les apprécier & d'empêcher qu'ils ne foie ne fraudllleu(ement enflés.
Sans cette connoi/Tance, on (eroit ai(émènt fllrpris; ou pour
ne pas l'être, il faudrait avoir fous l"s yeux toures les
pieces. En un mot; pour apprécier les fr"is, il faudrait refaire en quelque façon le- même ouvrage.
D'ailleurs, lor(que les Officiers Royaux fane des defcentes
pour des procédures qui fane à la charge du Domaine, ne
décernent-ils pas eux-mêmes les' exécutoires pour tous les
frais? L'in(peétion de M. l'Intend-ant qui, en(uite d'une Loi
f!loderne, vife ces exécutoires, ef!: bornée à voir fi la de(çente était néceilaire. Ainfi les Officiers Royaux Ont pour
euxJ'ufage & la rai(on.
Le fieur Gaucher, en citant l'arr. 7 de l'Edit du mois de
Mars 1673, (ervanr de Réglement pour les épices & vacatioils, a omis la claufe e/Tentielle qui s'y trouve': pourront
néar,moins les exécutoires être délivrés aux parties intéreJfèes aux
proces, G' qui les auront, déhourfès. Ainlï, lor(que les parries
intére1Tées font les Juges eux-mêmes} lorfqu'il n'yen a pas
d'aurres, faut-il bien que les exécutoires foient' décernés en
leurs noms ou de' leurs Greffiers? F am-il bien que les frais
foient payés à leur pour fuite , ou qu'ils ne le (oieôt jamais?
De' quelle autre main peur venir l'impulGon?
. On obferva pour le Procureur Jurifdiétiaonel, que les
Offièiers de Jufiice ne répondent jamais. d'une erreur de
fait, à moins qu'elle ne fait groffiere, conGdérable, & telle'
qU'Oli pui{fe l'affimiler au dol, '1uia latâ culpâ dola œquiparatur.. Loi 226, 1[ de verhor. jignif. C.'efi en car.aét.ér}fa~t .
les cas qui prêtent ~ cette garantie, qUI dans celUI-Cl eqUlvaut à la vraie prire à partie; que les Loix prefcrivene les
regles propres à faire diftinguer ceux Oll l'on peur les ren_
dre refpon(ables de la conduite irrégnliere qu'ils tiennent,
ou de la négligence inexcufable qui les fait réputer coupables
du dol ou d'un oubli volontaire. Les Loix J S, §. Judex &
40 §. J, if. de Judiciis, nous enfeignent qu'il n'y a que la
fra~de) une faveur repréhenGble, l'inimitié & le dol qui auto. Bbbb
Années z775 & z77G•
�~~i
1'0 UR N A t
rifent la' g~t :Bfjë~fi perfraudem ,gratiam , inimicitias, alltfardes;
aut dola mata. Les Officiers de JuHlee doive rit apporrer des précaurions d'autaht plu~ grandes, qu'ils peuvent être pourfuivis
perfonnelie~.eïlt, fi l'inforrtlation dirigée contre des ac-
cufés vient à' être déclarée calomnieufe. ( Ordonnance de
i670, tit, 7, arr. 7, )
.
Ce milieu délicat qui I~s tient flottant enrre une aétivité
inconGdérée & une lenteur fufceprible de blàme, opere toujours cette dHl:inétion fage & équitable que les Cri mlnaliGes ont univerfellement établi; elle porte fur ce que dans
l'une & l'autre hyporhefe, il taut apprécîer l'intention de
I:Officier, s'il a' agi avec Illmieres ou conrre fes connoi(fances. Mais dès ;qu'il y a 'en lui cettè bonne foi, cette diI.igence, ce zele & cette probité que fes fonél:ions exigent,
il Y aurait de l'injufiic,e, l'on ofe mê~l1e dire de la cruauté,
à vouloir le faire garant d'une chofe qu'il n'a pu prévoir, &
à laquelle fa volonré 'rie .participe poin. Delà les Autetlr3"\
qui ont difcuté cètt~ q'u1eltion, affurent que le vengeur public ne doit fournl~ro:n qliniil:ére p'our faire punir le délit" oule
crime, qu'après qiil 'eH 'conffareà feS' yeux d'une maniere à ne
pouvoir lui faire préfumer le contraire; mais il ne doit pas
légérement embraffer un 'témoignage fragile & dangereux;
il rifqueroir d'agir ca'lomnieufeipent, & d'être fournis aux
dommages & intérêts que. l'Ordonnance réferve à I:acèufë:
La crainte de· tomber clans le cas d'une calomnie excufe
donc valablement I~ Procufeur du Roi, s'il fait ceffer l'exer-'
cice de fon minifiere dans des- circonHances douteufes. De
même que fa bonne foi & la droiture de [es démarches le
mettent à couvert de tburè rechercHe 'dans une accufation
mal-fondée, airiG cetre bonne foi & ce~te droiture doivent
le prémunir contre toure att<fque, lol-'fque des accufés ont
été reconnus criminels, lors même qu'Hies a crus innocens
à la fuite de [es perquifitiol1s, & qu'il n'â point agi pour les
pourfuiv~
1
Les frais de Jufiicedans une Jurifdiétion bannerele font
à la charge du Seigneur, fi dans l'examen des preuves le
Procureur fifcal ne 's'efi pas conduit par dol ou par fraude,
�D U
PAL Ars
D E
PRO VEN C Il.
~ 63
ou par concuffion. C'el!: le vœu de tous les Jurifconfultes
( Bacquet, des droits de Jullice, .chap. 17; Domat &
Denifart, leu. S, pag. 497.) Nous avons en Provence
des Arrêts de Réglemenr, entr'aut~s celui du 7 Février 173')' qui oblige le Seigneur de prendre le fait &
caufe du Procureur Jurifdiaionnel, lorfqu'il el!: intimé. Il y
en a même de plus récents, qui défendent de faire entrer
dans· les baux le paiement de ces frais inféparables de la pelfonne du Seigneur.
L'Edit de 1772 ne rejette pas fur le Procureur Jurifdictionnel les dépens de la procédure inl!:ruite préventionnellement par les Officiers Royaux; mais il en impofe la charge
aux Seigneurs eux-mêmes, comme étant les feuls à avoir
les avantages des àmendes & autres droits de la Jurifdiètion, & qui doivent pJr réciprocité en courir les rirques.&
les pertes.
.
.
Ici il el!: certain que le Procureur Jurifdiaionnel a pris
des inl!:ruaions fur le vol qu'on impurait aux accufés. Il a
voulu fe conv'1incre de la vérité du vol; il devait ce préalable à l'intérêt du Fermier, il le devoit à lui-même; une
procédure hafardée le metrait à découvert. Il a donc voulu
fàire le bieh du Seigneur ou de fan Fermier, fans facrifier
les devoirs de 10n état.
Arrêt du ...... Juillet 1776, au rapport de Mr. le Confeiller
de la C?npr~ue, ,qui en concédant aae au fleur Gaucher de
fan offre «;le .payer le montanr de la contrainte au f1mple
débourfé, en conformité de ce que-paye le Domaine dans le
. cas: d,'une. prôc~dure prife à la requête de Mr. le Procureur. Général .du Roi 1ou .~e fon ~ubfiitut, reforme la contrainte
jufql1es au concurrent de. ce que le domaine paye, le furplus rejetté en matiere' de prévention; n.et le Procureur Jurifdiaionnel hors de Cour & de procès fur la garantie; &
condamne la Sénéchau1féè aux dépens envers toutes les parties. Ecrivant Mes. Ve~de.t, Portalis & Reynaud.
.
Bbbb2.
�JOURNAL
ARRÊT
LIlI.
Quejlion de compétence fur un prétendu fait de Police.
L
E 13 Août 177 2 , Jean-BaptiHe Pafcalet,'Tonnelier du
lieu de. la Valere, expofa au Lieutenant - Général au
Siege de Toulon, que fans avoir commis la moindre faute,
il avoit été emprifonné 'de l'ordre du premier Conful de la
'Valere dans les prifons de l'Hôrel-de-Ville, & de la maniere .
'. la plus ignominieufe ; qu'il y était encore détenu; que c'était-' .
là un abus d'autarité de la part de cet Officier municipal,
& un trouble à la fûreté publique; il requit l'accédit pour recevojr fon expofition.
Le 'Lieutenant .accéda le même jour, trouva la porte ouverte, & le Concierge lui dit que le .Maire avoit donné ordre
dès le- ma~in de l'ouvrir; Pafcalet expota que la veille vers
les dix heures du matin, étant à .1'1 'boutique du nommé
Hon!1orat, Cordonnie.r, il vit venir un faucon ayant trois
grelots attachés au col; il voulut le manier par curiofiré; il
fut ,mordu & le lâcha. A l'heur.e de midi, le....premier Confui le manda, il obéit; il rencontra le Maire fur la place,
avec celui qui prétendoit que Pafcalet avait pris fon faucon.
Dans le premier moment de fenfibilité, il demanda à cet
homme, du côté duquel il était tourné, fi c'était lui qui
l'accufoit d'avoir voulu voler fon faucon; le -Maire ,jetta par
terre le chapeau de Pafcalet qui ne l'avait pas ençorè ôté,' &
donna ordre de le mener en prifon. Le faucon. fut retrouvé
un momeur après; Pafcalet pa1fe la nuit fans ljt, paille, ni
matelas, 'par la cruauté du Maire. A neuf heures il avait entendu ouvrir les porces de (a prifon; il Y était refié, n'ayant
point eu d'ordre d'en forcir. Il demanda & obtint aéle de
fon expofition, l'information & fon elargi1femenr.
Le même jour le Maire fit a1fembler le Confeil de la.
Communauté; il expofa les faits qui s'éraient pa1fés; on dé-
.
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P 1l. 0
V 1! NeE;
"~ 6')
libéra de prendre fon fait & caufe, .de quelque maniere qu'il
fût attaqué, attendu qu'il avoit été infulré dans fes fonél:ions,
& il fut· donné pouvoir de confulter.
'
Le 18, le MaIre rendit plainte pardevanr le Lieutenant; il
expofa les mêmes faits; il demanda l'information. Quarantequatre témoins furent entendus de part ou d'autre, & le 20
AolÎt le Maire fut décrété d'àffigné. La veille, la Commu':'
namé avoit préfemé requête & demandé l'information fur
le même expofé; information qui fe'roit prife par le Juge
Royal le plus prochain de la Valete; elle demanda aél:e de
l'appel du décret de foit-informé rendu par le Lieutenant
de Toulon, & de ta'ut ce qui s'en était enruivi, & cependam tout en état, attendu l'incompétence notoire, ce qui lui
fut accordé. Le 23 Août, nouvelle délibération qui détermine de pourfuivre. !,e 27, requête de Pafcalet, dans laquelle il expore
que les Confuls avoient demandé l'information fur un fait
qui leur érait étranger, & à rairon duquel le Lieutenant
de Toulon avoit déja refpeél:ivement informé ~ décrété;
que le Maire, étoit feul coupable; que la Communauté était
non recevable à appeller du décret de foÎt-informé; qu'il
, n'y avoit que le Maire querellé & décrété qui plÎt le faire;
• qu'enfin la Communauté l'avoit fait fans lever des lettres
en chancellerie. Il ,demanda de' requérir au premier jour
'la révocation ,du décret, demeurant tout en état jufqu'alors.
Décret du même jour, qui porce : le requerra en jugement,
& foit montré partie, demeurant, tout en état.
Requête contraire de la Communauté, fur laquelle intervint' décret portant qu'il feroit pourfuivi fur la demande en
révocatiou ainfi qu'il apparciént ,- & cependant le tout en
état foulevé. En conféquence le Lieutenant d'Hieres entendit vingt-deux témoins à la requête de b Communauté.
Le 21 Mars 1773, délibération de la Communauté, qui
après avoir entendu le' compte le plus exaél: de l'affaire,
; ayant confidéré qu'elle n'y a,voit aucu~ ~mé;ê,t réel" &
qu'elle n'étoit au fon~ que celle du Malr~, delIb:re de fe
,pépartir de l'affoml:tlon en caufe" fauf au Mme de fe,
a
�~66
Jou Il. N A L
rendre lui-même appellane. Le 9 Juin, le Maire demanda
ajournement cOlltre les Confuls, pour voir cafl'er la délibération, ce qui lui fut .accordé" & en même temps des
inhibitions '& défenfes co.ntre Pafcalet d'exécuter le décret
d'affigné. Décret de foit montré à par~ie.
Le 22 Juin, .requête de Pafcalet en foulevement des inhi, bitions & défenfes. Décret de foit montré à partie. Le
19 Décembre Délibération de la Communauté, qui porte
d'offrir Arrêt d'expédient fur l'oppofition à la délibération
du 21 Mars dernier, fauf à la Communauté de pourfuivre
de nouveau l'affaire conformiment au pouvoir du 23 Août
1772. Au -mois de Février 1774, fur l'information prife
par le Juge d'Hieres, il intervint un décret d'ajournemedt
contre Laurent Pafcalet.
Le Maire qui dès le 26 Juin 1773 avoit appellé du décret d'affigné rendu contre lui, amplia fon appel envers le
décret de foit informé; la Communauté, en prenant les
mêmes fins, demanda la confirmation de la procédure
prife par le Lieutenant d'Hieres. Pafcalet , en demandant
la confirmation -de ·la procédure prife par le Lieutenant de
Toulon, appella du décret d'ajournement rendu contre lui,
ainfi que de celui de ·foit informé. Le 16 Mai 1776 il
demanda la -jonél:ion des, infiances ,qui lui .fut accordée.
On difoit pour Pafcalet, que ,·les .Lieutenans - Généraux
- de Police font appellables au Lieutenant .d~ns les Judicatures & Châtellenies J'oyales; fans cela il faudrait leur
donner le pas fur les JJlges -ro.yaux, puifqu'.ils feroient nuement appellables au' Parlement; tandis .que les Sentences
des J,uges ordinaires fQnt po nées par t appel ,lUX ·Baillifs .&
Sénéchaux;, cela eH d'autant -pJus jufre, que l'Edit de 1699
a ajouté de nouvelles matieres, 11 la compétence des Officiers de Police. Le Roi auraitql voulu priver les titulaires
de ces JuHices royales, des droits qu'ils. avoient aupaqvant
fur ces matieres? & la.Déclaration de 1701 n'elt-elle pas
bien favorable, là
elle réduit l'a.ppellation direél:e _à la
Go.ur aux Sentences rendues par les Officiers de. Police
dans les yilles. o~ il y. CL ~ailliage ~~ ~énéchawré.e? __ Celi\
où
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PAL A ~ S· n B
PRO V 1! N C R.
~67
devient encore plus vrai, quand les parties fane ?l la diftance de plus de dix lieues dt:! la féance de la Cour. Cette
exception eU fondée' en raifon, tirée de la nature même
des Jurifdiélions. Les matieres de Police exigene fouvent
& prefque toujours le remede le plus pre1Tane de la part
du Tribunal fupérieur.
,Ici il Y a plus: il n'a jamais eXIUé Bureau de Police'
à la Valete; cetre Jurifdiéliou n'a jamais été détachée d~
la Jurifdiélion univerfelle. Toutes les fonélions du minifcere public font remplies par le Procu.reu, du Roi de la
Jurifdiélion ordinaire; la Jurifdiélion de la Police eH exercée
par le même Juge.
Qu'importe d'ailleurs que le Conful de la Valete fait
ou nou Lieutenanc-Généràl de Police, fi le Maire n'a pas
agi & ne pouvait pas agir en cette qualité, fait qu'on en
juge par la ·forme ,fait qu'on en décide par le fonds: .dans
la forme, tout jugement de Police s'écrit; ce![e Jurifdictian eil: fommaire , mais non defpotique; elle. s'exerce fine
formâ &Jlrepitu judicü. Mais les conditions fuhil:aneielles de
cout jugement quelconque n'y peuvent pas être am ifes. Dans
le fonds, le fait donc s'agit ne pouvait compéter à la Police, parce qu'on s'y plaignoit d'un vol, d'une filouterie.
Il relle ·à examiner, coneinua Pafcalet, qui doit connaître ô'bn délit concernant l'honneur des fonélions confulaires. EU-ce la Cour, le Lieutenant ou le Juge local?
L'excès du Confui ,ou l'infulte qui lui eil: faite, mérirenc l'atteneion de la Cour ou celle du Lieutenane, fuivanc les cir~on{tances & la gravité du cas. A raifon des conféquences
de ces délits, les deux Tribunaux peuvent en conno!tre par
prévention; & fi le cas peut être de haute Police, il .eil:
conféque'ltiment cas royal. Les excès de cette nature 10térelfent l'ordre & la tranquillité publique; 11s ne peuvent
lIonc appartenir qu'à l'autorité. royale. ~'ailleurs les C~JO
fuis de la Province ne font - ds pas MaIres? Les Maires
ne [ont-ils pas Officiers. royaux? L'Ordonnance de 167 0 ,
tit. l , art. I I , n'dl-elle pas déciuve.à ,),~ffet de porter
au Lieutenant comme cas royal la connollfance de tou~
"
\
�5~
JOURNAi
ce qui concerne la correélion des Officiers royaux? Ainû
le délit éroit royal; & quand il ne l'aurait pas été, <:e
n'éroit point au Juge de la Valete qu'il fallait porter le
délit du Conful, parce que le Conful aéluel devient Juge
l'année d'après, & qu'il ferait à craindre que le Juge aéluel
ne fût pas libre, que fan miniHere ne flit pas pur & dégagé de toute préyention.
On répondait pour le Maire & pour la Communauté;
que les Lieutenans- Généraux de Police connoiffent fommairement, fans forme ni figure de procès, des délits
légers; qu'ils ont une prifon correél:ionnelle dans 'Iaquelle
ils fom enfermer fans décret, & qu'a.pr~s les vingt-quatre
heures ils mettent en liberté ceux qu'ils y tant conduire,
fi le délit ne mérite point d'in{lruélion férieufe; s'il y a
lieu à information, ils envoient le coupable aux prifons
royaux.
Si' un Lieutenant-Général de Police fait emprifonnel"'
quelqu'un trop légéreinent, il abufe de fa Jurifdiél:ion ;
il el~ repréhenlible; mais il faut que l'excès foit conlidé. rable, que la vexation foit évidente; s'il n'y a qu'un peu
.trop de rigueur, le Juge n'eH refponfable ni de fes erreurs,
ni de fa févérité ; il n'el!: comptable que de ce qu'il a fait
par dol ou fraude, par haine ou vengeance. Ici le Maire ne
s'eH conduit ni par paffion, ni par animalité; il a ufé d'un.
pouvoir qui appartient aux Lieutenans-Généraux de Police;
s'il a été trop féve~e, il n'y a pas eu lieu à le poûrfuivre
par la voie de l'information. Pafcalet avoit deux voies
ouverres; la voie civile par prife à partie, '& la voiè cr.i~
minelle par information. Dans le éas de la voie civile" il
faut la permiffion de III Cour pour l'intenter; à plus forte
raifon un Juge ne doit-il J pas être !égérement accufé par,
voie criminelle.
.,
La prife à partie, encore moins l'information" ne compéteroient . pa~ contre un Lieurenant de Police qui auroit
fait mettre pour viqgt-quatre heures à la charbonniere. un
gar~on Tonn~ier qui ,avoit pris à un paffant 'endormi un
,
oifeaq
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n,1.1.1' A~AIS
DB
,P~~V~N,CE.
'5 69
'oJlèau de priX, & qUI à cela aurolt JOint une conduite peu
refpeétueufe & des infolences.
Il s'agit ici d'un Maire Lielltenant - Géneral de Police
relfonilfant nuement en la Cour. La Valete eU un lieu
royal j la police y appùt.ient par conféquene aux Confuls
par la réunion que la Province en a faite. D'ailleurs il ne
peut jamais y avoir en police trois degrés de JUl'ifdiétion~
donc le fait n'étoit appellable que pardevant la Cour.
L'art. II de l'Ordonnance de 1670, tit. l , donne, il
eU vrai, aux Baillifs & Sénéchaux la connoilfance de la
correétion des Officiers royaux, & des malverfations par
eux commifes dans leurs charges. Mais Joulfe remarque
que cet article ne s'applique pas aux Juges d'une Sénéchauffée royale, ni aux Officiers des Jurifdiétions extraordinaires, lefquels ne peuvent être jugés que par leurs fupérieurs. fla l'Auteur des Loix criminelles, tom. l , pag. 67.
Mr. l'Avocat - Général de Calilfanne examina plufieurs
gueHions. EU-ce un fait de police dont il s'agit? Y a-t-il
ell jugement de police, & par conféquent y a-t-il appel
d'un Juge de Police ~ Quels fom les Juges auxquels relfortiffent les appels des Lieutenans-Généraux de Police? Ces
Juges font-ils exclufifs & de privilege, & rendent-ils notoirement incompétent, même pour informer &' décréter,
tout autre Juge- qui prendrait connoiffance de ces fones
de délits?
Les Lieutenans.Généraux de, Police ont {ans doute une
Jurifdiétion, mais très-bornée, & néanmoins ils cherchent
fans celfe à l'étendre. Pour ce qui n'eH pas précifément
de leur Jurifdiétion, ils cherchent, comme peres de la
patrie, à concilier ~es diJférens qui pe~vent .s'élev:r entre
des particuliers j vraIs peres du peuple, Ils dOlvenr etre admirés j-mais du moment qu'il y a conteflation, c'efl-à-dire,
du moment qu'il faut punir, ils doivene renvoyer pardevant les JuO'es ordinaires; jufqu'à l'inUane où ils infligent
une peine 0 ils font peres; dès le moment qu'ils la décernent, ils fone les fonaions de Juge, & conféquemmenE
ils ne doivent plus connoÎtre de la matiere. Ce n'eft donc
Années f775 & 1776.
Ccc c
�'70
Jou RNA ~
_
.
l'as leur 'lu,alité _d~ Liemenans-Généraux de Police qui leur
laiffe exercer cerre efpece de droit; ils l'avaient avant la
réunion. Premiers médiateurs. de leurs concitoyens, jls ont
toujoues été jaloux de les a,ppaifer & de les faire jouir de
la tranquillité. Mais Quand il faut punir, ,ils doivent ren,voyer à l'autorité jndiciaire; ils ont une prifon corretl:ionne Ile , ruais réfervée aux gens de ,la lie du peuple, à ce qui
'a perdu, pou~ ainfi dire, Ja qualité de citoyen, jamais à
·des· domiciliés•. Le droi,t de priver un citoyeN de la liberté
eft refufé aux perfonnes les plus confidérables:
Le délit dont s'~git peut êt,re confidéré fous deux rapports: ou comme vol., ou comme infulte faite à Officier puplic; dans les deux cas peut-on le regarder comme fait de
police? Si c'el1: un vol, _il étoit de la cqmpétence du JugS!
ordinaire; fi l'on prétendait que le vol cft de la compétence
des Juges d~ police, parce qu'il trouble la police, il n'y aura
:pas de fait pour lequel elle ne fait compétente; on fubl1:itueroit bi.entôt le mot d'ordre à celui de police; tput feroit
contre l'ordre, & dès-lors contre la police, &,conféquemment
.la jurifditl:ion oe la police terQit la jurifdiél:ion univerfelle. Ou
a fenri que le vol en général ne pouvait gueres être 'regardé
.co91me fait de police, & l'on s'cfl: replié fur ce que c'étoit
plutôt une filouterie & une efcroquerie, qu'un vol réel & ca"raél:érifé. Mais en vain l'çm foutiendroit que le vol d'un
faucon el!: une efcroquerie; en feroit-il plus du reffort _de la
police? Et quand même on. pourroit le regarder comme. tel
_en général, les circonl1:an,ces parricu!je;es. de la, caufe ne
permettroient pa~ de l'imagjner i -Il l;l\ifte une foule de macierès qui fom de la jurifdicri9n univ,erfelle ,,& dom les Q;on.,.
fuIs conqoiffent cçpe!1daht ,d.ans ,les prel'Qiers momeqs, ,parce
gue l'on vient Il.el)rj e,n pqrrer,lpla:inte; fllr tous ces différents
points, la jurifdiél:ion, l'auro'rité des -Lieutenans-Généraux de
Police ne peut être abfolument regardée que comme -gracieufe, ou plutôt ce n'eCl pas une jurifdiél:ion; ils s'en occupent paternelle,ment Hour le ,bon ordre; mais dès qu'il peùt
y avoir peine quelconÇjue, punition même {l1omenranée, alors
plus rien de 19raçie/lx; il faqt punir., il faut ufer d',autorité 1
�DU
PALA'IS
DE
PROVENCE.
~7r
& les Lieutenans-Généraux de Police n'en ont aucune fur
tout ce qui ell: étranger à leur attribution; aina le fait dont
s'agit, regardé comme vol, ne peut être réputé fait d~
police.
L'infulte faite à l'Officier public, au Conful, au LieutenaocGénéral de Police, eft encore moins un- aéte de police inférieure; c'eft ·au contraire le réfultat de plufieurs attriburiôns.
le Juge de Police ne pellt pas lui-même prononcer fur la
prétendue infuite qu'on lui a faite; il ne peut pas être Juge
& partie; il faut qu'un Tribunal [upérieur venge l'injure faire
à l'inférieur; fe punir foi-même, c'ef~ être arbitraire. Le Juge
eft infulré, il doit être vengé; mais il ne peut que dreifer
procès-verbal, & pour/ùivre la vengeance, ou remettre [es
intérêts entre les mains de ceux qui [ont chargés de la vindiéte publique.
J
y a-t-il même eu un Jugement de Police (continua Ml'.
l'Avocat-Général )? Un Charretier fe plaint au Viguier de ce
qu'on lui a volé fon faucon; le Viguier le conduit au Maire.
ju[qu'à ce moment rien qui regarde la police, & l'on doit
être étonné du délaiffement du Viguier pour une caufe qui
le regardait feul. Le Maire envoit chercher Pafcalet pour
un v0l d'un faucon qui n'eft point un fait de police; il n'affemble pas le bureaù; il ne demande pas l'avis de [on confrere; il interroge Pa[caletà la place publique; Pafcalet repond
négativement, & , fi l'on veut, infolemment all Charretier. Le
Maire ordonne qu'on le mette en prifon ;'Ie faucon fe ret,rouve, & la vengeance d'un prétendu propoS tenu par Pafcalet
engage le Maire à ne ~a~ :e laiffer forri~. '~'rauve-t-on dans
cette conduite l'impartial ne du Juge, la Jufilce du Jugement,
le bureau de police, les traces. de fa jurifdiébon? On ne voir
qu'abus & qll'atte~tat; l'autorité feule par.!e; point de convocation, point d Ordonnance, pamt de ~ec~.et; p~ur la mariere la plus léO'ere on attente à la bberre d un citoyen; la
volonté arbitraire d'un Officier municipal, d'un Lieutenant
de Police décide de fan fort, & fans clameur publique, fans
fbgrand délir le fait jetter dans les fers. En vain dirait-on
qu'il a défend~ l'honneur de fon Tribunal, & qu'un Juge peut.
Cccc 2.
.
�~~7t
Jou
RNA L
le ·faire fa~s fe déplacer, qu'il a même le dmit de faire em~
prifonner. Cela efi vrai, quand le Juge efi infulté fur fan
Tribunal & troublé dans fes fonél:ions, mais jamais au milieu de la rue. Le Maire porte-t-il par-tout fon Tribunal
avec lui? D'ailleurs daus cerre caufe y a-t-il la p(euve du
vol & de l'infulte? Il efi prouvé au contraire que l'épervier
s'envola dans la boutique d'un Cordonnier où le propriétaire
étoit, & qu'il le cacha pour le faire chercher; il efl: prouvé
qu'il avoit [on chapeau fur la têre quand il étoit fur la ~place
devant le Maire: mais efi-ce là un délit confiant·, un vol
caraél:érifé & une injure bien forte? De pareils faits pouvoientils mériter un emprifonnement vis-à-vis d'un domicil!é ?
La queHion que l'on a élevée fur ce que l'appel des Jugemens, Décrets & Ordonnances rendus par les Lieute nans-Généraux de Police vient direél:ement à la Cour,
ea abfolument indifférente & totalement étrangere à la
contefiation ptéfente , obferva Mr. l'Avocat-Général; il pa":
roÎt con[acré par l'u[age, par l'autorité générale des divers
Jurifconfultes & par une Jurifprudence la plus confiante,
que les appels des Lieutenans-Généraux de Police viennent
au Parlement omiJfo medio, parce que dans l'Edit de leur
création, feul titre formel daas toute la Provence, aux
villes Royales les Lieutenans-Généraux; de Police font affimilés aux Baillis & Lieuteaans de Sénéchaux, & ne fane
conféquemmenc appellables qu'aux Parlemens , que d'ailleurs
il ne peut y avoir en Police trois degrés de jurifdiél:ion. :Le
droit commun paroît cependant être plus jufie ; car l.a jurifdiél:ion de la Police a été démembrée de celle des Juges
Royaux qui relfonilfent aux Lieutenans; mais l'ufage , qui
efi la feule regle fur cerre matiere, l'emporte dans cerce
Province.
Quand même toùt ce que l'on a dit fur cette compétence n'auroit jamais été douteux, quand même c'eût été
un fait de Police, quand un Lieutenant de "1?olice en
aurait connu, on n'en aurait pas dû pour cela venir au
Parlement. Ici il n'y a point de Jugement, point d'Ordonnance, point d'apparence même de décret. Dès-lors il ne
�DU PALAIS I)l! PROVI!NCll.
~73
peut y avoir aucune apparence d'appel, & conCéquemmènc
point de compétence du Parlement; c'efl feulement un délit
concernant les fonél:ions confulaires. Qui pouvoit en conno1cre? Etoit-ce le- Juge local, la Cour ou le Lieutenant?
Ce n'était point le Juge' local, parce que l'injure faite à
un Conful, le mépris de l'autorité eft plutôt un cas royal,
qu'un délit ordinaire. 00 pourroit dire auffi que le privilege
du Maire porte fes caufes ailleurs que pardevant le premier
Juge; mais une raifon fans replique, c'efl la fufpicion momentanée & accidentelle de telle ou telle perronn~: Surpic ion fonciere, conflante & certaine, dès qu'il s'agit de
l'affaire d'un Conrul en propre; furpicion fondée fur la formation même du Tribunal. Le Conrul de cette année eft
Juge l'année d'après; le Juge du moment fait donc que
dans quelques mois il deviendra le jufliciable du Conful actuel. La rufpicion ne pourroit donc pas être plus forte;
c'était donc la Cour ou le Lieutenant. Les conféquences de
ces délits ont quelquefois obligé la Cour d'en connoÎtre,
parce que les excès de cette nature intéreifent l'ordre & la
tranquillité publique, mais plus fouvent encore c'eU le Lieutenant. Ici l'infulte n'étoit pas bien grave; elle alloit par
conféquent au Lieurenant ; toutes les parties l'avoient invelli
par prévention; il était compétent de droit.
Mr. l'Avocat-Général conclut à la confirmation du décret
de foit informé rendu par le Lieutenant au Siege de Toulon & de tout ce qui s'en étoit enfuivi , & à ce que le décret attaqué par Pafcalet fût révoqué comme nul & incom,
petent.
Par Arrêt du 27 Juin 1776, prononcé par M. le premier.
P.réfident, les conclufions furent fuivies, & les pa.rties condamnées aux dépens chacune les concernant. Plaidant Mes.
G.afiier) Simeon & Portalis.
�~74
JOURNAL
ARR Ê T
LI V.
Les ouvrages cfor- & d'argent fahriqués à Marfeille ne {ont·
point {oumis au droit de marque & de contrôle.
Les mêmes ouvrages venant de i' Etranger à Marfeille, ne fiJ/it
{ou'mis à aucun impôt ni à aucune efPece de gêne ou de
, déclatation.
L
,
A Communauté de Marfeille fe pourvut à la Cour des
Aides; elle demanda des inhibitions & défènfes au Régiffeur d'exiger le droit de marque & de contrôle fur les
ouvrages d'or & d'argent fabriqués à Marfeille, & fubfidiairement que les parties fuffent renvoyées au Roi. Par une
feconde requête, elle demanda des inhibitions & défenfes
au Régiffeur d'affervir à aucune efpece d'impôt ni à aucune
efpece de gêne ou de déclaration, l'orfévrerie érrangere que
le commerce ramene à Marfeille" quelle qu'en foit la deftinarion. La Chambre du Commerce intervint dans l'inftance.
On difoit pour la Communauté de Marfeille, 1°. que
quand le Fermier avoit voulu a1fervir les Orfevres de Marfeille à payer le droit de marque, il n'avoir ceffé de [oppofer que le même droit ne pouvoit pas concerner le commerce , parce que le commerce de MarfeiHe' ne 's?occupoit
pas de tout ce qui r~étoit que dépendance de l'~rfévrerie.
2°. Que les Orfevres de Marfeille une fois' a'ffervis, le
Régiffeur avait publiquèment affiché l'aifervif1'ement 'du commerce. Or la ville de Marfeille a toujours éré exempte de
toute efpece de droit. Les diflërenres impofitions don't elle
avait été furchargée avaient porté le coup le plus terrible
au commerce, & ce ne fut que pour lui redonner fon luChe,
qu'intervint l'Edit du port franc. Cet Edit, en con.firmant
la ville de Marfeille dans fes anciens privileges, ne trouva
pas de meilleur' moyen po~r. donner un nouvel acc:oiiTe;
�DU
PA. L A. 1 S
D E
PB. 0 V" EN C E:
'~7)
ment à fon commerce, que de lui accorder avec la franchife de fon port, l'exemption de toute efpece d'impofition
& de toute gêne; conformément à l'Edit du port fr,!nc ,
ta ville de Mar[eille a été déclarée exempte de rous droits
domaniaux & autres quelconques établis poftérieuremenr à
cet Edit; tels [ont les droits de marque [ur l'or & l'argent,
.& le droit [ur l'étain; cerre exemptIon ne [auroit tenir de
plus près, tant au bien général du commerce , qu'à la
foi publique que l'on a engagée en invitant l'Etranger à
fréquenter le port de Mar[eille, & à Y faire fleurir le commerce. Enfin fi les ouvrages d'orfévrerie étrangere [ont aulli
.exempts à Mar[eille de rout autre droit que route autre e[_pece de marchandi[es, il n'eft ni pollible ni concevable que
.l'orfévrerie de Mar[eille paye des droits que n'acquitteroit
pas l'orfévrerie étrangere.
Par l'article premier de l'Ordonnance de 1681 , le droit
de marque éroit impofé [ur rous les ouvrages d'or & d'ar.gent. fabriqué$ & mis en œuvre dans rout le Royaume. Par
l'arr. 2, le Fermier pouvoit établir dans routes les Villes de
Jurande un' Commis chargé de contre-marquer & d'appo[er
le poinçon; l'art. 18' [oumetroit les ouvrages d'or & d'argent venant des pays étrangeçs, à la nécelIité de la- déclaratipn au premier Bureau d'entrée, pour être marqués, & les
droits de marque .payés..
L'article 23 de la Déclaration de 1749 aifervit les ouvrages étrangers d'orfévrerie au même droit de marque que
les ouvrages nationaux, du moment qu'ils entreront dans-Ie
Royaùm~ ; il [oumet au mêm,e droit de ~a~que, non [eulement les ouvrages d'or & cl argent fabrIques dans les pays
étrangers que l'on veut introduire dans le Royaume, mais
~ncore ceux qui auroient été fabdqués dans les Provinces
réput.ées étrang;r~s & l'o~ n'a ja,mais mis en, do~të que Mar:
feille ne fût repute ProvlOce e.crangere..L article 26, qUI
~'eft qu'une con[équence du précédent, n'a pour objet que
9'aifurer la perception du droit de marque fur ~es ouvrages étrangers ~ntrant dan~ lé Rd~au~e, &, venant, [Olt des, pa}:s
~trangers ,. [Olt des Provinces reputees etrangeres.; & s; etolt
r
�-')76
JOUR.N'AL
fans doute un nouveau titre d'exemption pour les Orfevres
de Marfeille.
D'après ces différentes Loix, le droit de marque n'étoit
dû, comme le difoit l'Ordonnance de 1681, & comme le
fuppofoit la Déclaration de '1749, que fur les ouvrages fabriqu'és dans le Royaume ,& le Fermier ne pouvoit
l'exiger ni dans les Provinces réputées étrangeres, ni fur les
ouvrages étrangers qui, fans entrer dans le Royaume, n'entraient que dans les Provinces réputées étrangeres. Marfeille étant réputée Province étrang~le, il Y avait deux r;lifans pour ne point exiger le droit de marque fur les ouvrages étrangers; d'abord celle que le droit de marque n'était impofé par les Ordonnances que fUr les ouvrages étrangers entrant dans le Royaume, & enfuite l'Edit du por-t
franc, exemptant toute efpece de rnarchandifes de toure
cfpece de droit, ne pouvait pas comporter une irnpofition
pour le commerce de l'orfévrerie.
L'inticulation de l'Arrêt du Confefl du 7 Mai 177 1 obtenu par le Fermier annonce, il eil: vrai, qu'il n'y a que les
Orfevres de Marfeille qui foient aifervis au -droit; mais file Régiifeur n'eût pas fuppofé que le commerce de Marfeille ne
portoit pas fes fpéculations fur les objets dépendans de
l'orfévrerie , cet Arrêt en difpo[1nt contre les Orfevres de
Marfeille ou fur les ouvrages fortant de MarfeilIe, n'eût pas
manqué de difpofer auffi fur les ouvrages d'orfévrerie étrangere. Cet Arrêt ne fe réfe"re qu'à l'Ordonnance de 168 l , qui
n'impofe que fur les ouvrages fabriqués dans le Royaume
ou fur les ouvrages venànt- des pays étrangers; mais il ne
permet pas au Régiifeur de rien -exiger, ou d'aifervÎr en aucune façon les vaiifèan~ étrangers 0].1 natiànaux faifant le
commerce de l'orfévretiè; 1- _J
1
1
II..'
- . Cependant dans !'étatlde. déÎ0rdre qu'~l y avait à Mar'feilIè
al].. fujet de la perception du droit-de marque & de contrôle,
la Cour des Aides rendit un Arrêt provifoire le -22 Oél:obre 1775:, qdi p~rmit aQ Régiifeur de percevo·ir pendant
procès le. droit~rde marque fur les ouvrages d'or, & d'ar",:
gent fabriqués à Marfeille ; ~le 1tégiifeur fit imprimer- cet
Arrêt
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571
Arrêt, 11 Y etolt dit, ou amvant a Marfeille, ce qui obligea
la Communauté & la Chambre du Commerce à réclamer
contre les entreprifes du Régi1feur.
Le traite de paix de la ville de Mar(eille avec Charles
d'Anjou renferme les conditions (ous lefquelles Mar(eille pa1fa
fous fa domination. Ce traité eil rapporté en entier dans
l'hifioire de Marfeilie, pag.Î 26; il fut (c~llé de l'autorité
du ferme ni: par le même Charles d'Anjou, confirmé par fon
fucce1feur & par nos Souverains, qui fe font contentés de
demand"er des fecours à la ville de Marfeille, fans jamais
en exiger. Cette ville J;le connoît" point de droit domanial qu'elle n'ait confenti; c'eil [on droit public; c'efi la
Loi de nos Souverains. Ce pa/:te eH donc [acré & inviolable, & l'exemption" oe la ville de Marfeille ne fauroit être
contefiée. A cette premiere Loi l'on pourroit ajouter toutes
celles d"ont parle l'Edit du Port franc, & cet Edit lui-même;
l'Auteur du Diél:ionnaire du Commerce, vo. commerce général,"
qui a pénétré la profondeur des vues du commerce, fait le
détail des avantages Gue cet Edit devoit lui procurer. Ce
n'ell: donc qù?à cet Edit que l'on doit la 'confervation du
commerce de "Marfeille; ce n'efi que par la" franchife du
port, par l'exemption de tolite impofirion, par la fuppref.
fion dés im"pofiiions" jà établies, par les privileges & avantages' èxtracirdinaires qlÏi furent nouvellement concédés ,que
l'on parvint àrappélle"r le commerce qùi fuyoit de. Marfeille;.
& ce furent ces motifs que l'on trolive dans le préambule,
qui dorinerènt lieu à "l'Edit dU"~brt franc. "
.
" "
Cet Edit 'veut que le port" & havre de Marfe/Ile fou franc
& li6re polir 'tozitefori~ de marchandi.(ès, de quelque qualité
fju'ellù"puijfèrzt être; l';.xt"!P.te deS droItS les plus fa~orakres,
même de ceux dont 1mteret du commerce [emblOlt necerfiter l'exaB:ion, tels que le curage du- port & les affaires du
commercé" & enfin de tous autres droits domaniaux, de quel'lue qualité ~u'ilS" puijfènt ,être: Après lI,ne difpofi~ion génér?le ,
il e{~ naturel que pour etabhr le momdre drOIt à MarfeJUe)il faut nécelfaireriJent que la loi confiitutive du droit di~
Années l775 & l776.
D d li d
�.~79
1 0 U Il N A ~
roge .à l'Edit du Porr franc, parce que MarCeille, quant à
ce qui concerne le commerce, eft réputée véritablement
pays ou Province étrangere. Or, non [eulement l'Edit de
1672., conHitutif du droit de marque [ur l'or & l'argent,
l'Arrêt du Confeil de 1676, portant imp()fition fur l'étain,
l'Ordonnance de 168 l , & la Déclaration du 2.6 Janvier
1749, n'ont point dérogé à l'Edit du Port franc, mais il a
été au contraire jugé que la ville de Marfeille devoit être
confirmée dans fon exemption.
En vertu de l'Ordonnance de 168 1, qui établiffoit des
droits fur l'étain entrant dans le Royaume par mer ou par
rerre, & qui devoient être payés au Bureau d'entrée, le
Fermier voulut y foumettre la ville de Marfeille; mais parArrêt de là Cour des Aides, il fur débouté; il attaqua cet
Arrêt au Confeil; & _par Arrêt du 3 Ma~s 1693, celui
de la Cour des Aides fut confirmé; il fut décidé par-là
que tant l'Arrêt du Confeil de 1676, que l'Ordonnance
de 168 l , n'ayant pas dérogé à l'Edit du Port franc, Mar-[eille jouit de toute la franchife qu'il lui affure, & que l'exac,ion de rout droit ne pouvant [e faire qu'au Bureau qu'il
faudroit établir à Marfeille, le commerce eH trop intéreffa nt pour lui impofer cette gêne ou cet affervi1fement. L'Arrêt
du Confeil du 10 Juillet 1703 renouvelle la difpofition du
Port franc, cimente les franchifes qu'il a\tGÏ-t déja accordées,
!X expulfe à jamais de Marfeille les Bureaux, pour les tranfporter à l'extrêmité de fon terroir.
Les Orfevres de Marfeille ont payé à la vérité par abonnement; mais que fait à la ville & au commerce l'affujettilrement volontaire d'une partie de fes artiftes qui n'ont
pas connu fes droits, ou qui ont été atterrés par la crainte
que favent infpirer les Régiffeurs, ou peu touchés de la minimité d'une perception qu'on exigeoit de leur zele dans
des remps de crife & de calamité? L'intérêt général peut-il
en fou/frir? Toutes les Loix pollibles, le titre de vec7igalih.
& commij{., cet autre vec7igal. nov. inJl. non pojJ:, & mieux
encore le droit public, ne concourent-ils pas à attefter qu'il
�DU
PAL-AIS
DB
PROVENCE.
S79'
De peut y avoir d'impôt fans Loi, & que toute exaélion fans
Loi n'dl: que conculIion. La ville elle-même, le commerce
qui n'a jamais été affervi, peuvent-ils l'être, & faut-il ou affervir l'étranger contre notre propre intérêt & contre la difpolition de toutes nos Loix, ou affervir l'ouvrier national
quand l'ouvrier étranger ne le fera point?
'
Si les Loix introduél:ives dl) droit de marque avoient corn.
pris Marfeille dans leurs difpolitions, pourquoi n'auroientelles pas dérogé à l'Edit du Porc franc? Pourquoi les baux
n'euffent-ils jamais compris que la généralité d'Aix, & n'euffent-ils pas parlé de Marf@ille, donc il n'a été quefiion qu'en
1770? Pourquoi Marfeille eût-elle été déclarée exempte du
droit fur l'étain, qui n'étoit établi que fur des Loix poltérieures à l'Edit du Porc franc, mais qui n'y dérogeoient pas
mieux que lès titres conHitutifs du droit de marque? Par
quelle inconconféquence eût-on affervi l'ouvrier national ,
quand les ouvr.ages étrangers euffenr éeé déclarés exempts?
En vain oppofe-e-on qu'une Province n'eH réputée écrangere, & fur-tout Marfeille, que quant aux droits de traite &
de fortie, & que fon exemption ne s'étend ni ne peut s'étendre aux marchandifes fabriquées dans fon enceinte. On
voudroit donc que Marfeille ne fÎlt exempte que des droits
de traite & de foraine; mais que deviendroit dès-lors la
franchi{e du port? Que deviendroit la libercé du commerce?
Ql·e deviendroit cecce prohibition d'établir aucune forte de
Bureaux à Mar{eille, qui feule jufqu'à pré{ent a attire l'érranger dans le Port & fait fleurir le commerce? Que deviendra l'Arrêt de la Cour fur l'éeain, & l'Arrêe du Confeil
qui le confirme? Que deviendront tous. les Régl;n?ens qui
cnt rélégué roue ce qui eH ferme, Fermiers ou Reglffeurs, à
}'ex[rêmité dn eerroir? Si Mar{eille eH réputée Province éerangere, pourquoi fera-t-elle affujettie ~u droit de marqu~?
Le Régiffeur a furpris deux Arrets du Confell qUI foumettent les Orfevres de Marfeille au droit de marque & de
contrôle fUr les ouvrages d'or & d'argent fabriqués à Marfeille' & celui du 7 Mai 1771 a condamné les Orfevres de
,
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MarCeille à ·dix mille livres de domniages-intéréts, pour tenir
lieu au Régjlfeur des droits qu'il n'avoit pas perçus. Mais
ql!~ font ces Arrêts à h Commun~uf{de MarCeille, qui n'étant point partie, n'a pas été entendue?' S'il ei1: vrai que ces
mêmes·· Arrêts pàriént 'atteinte à Ces privileges; à la franchiCe de Con port, à la liberté de Con commerce & aux
Loix conUirutives de Con exiHence, ce ne Cont que des titres étrangers qu'on ne peut lui oppoCer, ou qu'il faut au
moins ju!1:ifier vis-à-vis d'elle. Si les Orfevres n'om pas connu
ou n'ont pas Cu développer quels étoient leurs droits & ceux:
de la ville de M.arCeille, MarCeille ne peut en Couffrir.
On rappelloit pour la Chambre du Commerce les mêmes
principes; l'on diCcutoit 'de quels droits l'Edit du Port
franc avoit affranèhi la ville de MarCeille & les étrangers
qui y abordent, & l'on finilfoit par dire que MarCeille avoit
touj9urs .été exempte de toute efpece de droit; que l'Edit
du Port franc n'avoit fait que confirmer COll ancienne exemption; qu'il ne pduvoit y avoir à MarCeille que les quatre
Bureaux que l'on y_connoît ; què dans aucun temps le commerce de l'orfévrerie n'a été impoCé; que toutes les Loix
_COllnues l'ont CuppoCé de même, en renvoyant la perception
du droit Cur les ouvrages d'orfévrerie étrangere en delà du
premier Bureau J'entrée du Royaume; que la franchiCe de
Marfeille é;3nt encore plus pléniere que celle de tout autre
Port franc, les vailfeaux qui y abordent ne doivent pas jouir
d'une moindre liberté que ceux qui arrivent à Dunkerque, ou à
tout alltre port également franc; & enfin que la di!1:inél:ion
de Province étrangere à la ferme, ou de Province étrangere à la ferme du -droit de marque, n'ei1:qu'une Cubtilité
du Régilfeur, condam née par la Loi, puifque le droit fur
l'orfévrerie étrangere ne naît qu'à l'inHant où l'on fe préfente au premier Bureau d'entrée du Royaume, & il ne peut
point y avoir de Bureaux à MarCeille.
On répondoit pour le Régilfeur, que par des Letères-parentes du 6 Août 1774, Me. Jean-B~ptiHè Fouache avoir
été chargé de faire, pour le compte· du Roi,' la régie, reU RNA
�DU
PAL.US-'DB
PROVENCE.
~81
cette & exploitation des droits de contrôle & de marque d'or
& d'argent qui avait été précédemment donnée à ferme à
fan Adjudicataire général. Avant d'établir fa perceprion dans
la ville de Mar[eille, le Régiffeur a vu que l'Ordonnance
des Fermes du 22 Juillet 168 l , ritre des droits de marfJue
fur l'or & l'argent, en avait ordonné la levée dans tout le
Royaume, & qu'il n'y avait été fait d'exception qu'en faveur
de la Lorraine, la Flandre, la Franche-Comté, l'Alface &
le Rouffillon.
Per[onne n'ignore que le bail des fermes générales ell:
totalement difl:inét de la régie; les fermes [ont données à
forfait, & moyennant le prix du bail elles ,deviennent le bien
du Fermier, qui difpofe du produit à {on profit. La Régie
au contraire n'ell: qu'une commiffion donnée par le Roi aux
per(onnes qu'il honore de fa confiance, pour percevoir à
fan profit, & non au leur. Auffi le Régiffeur compte au Roi
rnêmê ou à fon Minifl:re, & le Fermier ne compte à perfonne, parce qu'il fait les fruits liens. Par conféquent, autant le Fermier peut êrre tenté d'étendre {a perception,
autant le Régifièur qui ne perçoit pas pour {on compte
comme le Fermier, ell:-il porté à fe contenir dans les bornes
les plus étroites. Nulle correfpondance, du-moins néceffaire,
du Fermier au Roi, pour-l'ordre & la manutention de la
ferme. Les Employés {ont nommés par la ferme; ils correfpondent pour l'exercice avec le Fermier; & à moins de
quelque plainte ou réclamation auprès du Souverain, Sa Majefié ne fe mêle point de la perception ni des moyens. Dans
]a Régie, rien ne fe fait que par ordre du Minill:re, ou donc
il ne {oIt informé.
- L'Ordonnance de 168 l , tit. 1, arr. 3, fait la difiinétion
des Provinces étrangeres à la ferme, de celles qui ne le {ont
pas; à l'exception de celles de Normandie, Picardie, Champagne, Bourgogne, Breffe, Bourbonnais, Berry ,Poitou, le
pays d'Aunis, Anjou, le Maine, &: -de celles qui y {ont renfermées, toutes les autres ont éré par cet arricle déclarées
éttangeres1-.en ce.quiconcerne les droits d'entré'e·& de {orcie.-·
�~82
Jou RNA r.
Pour la Régie, c'eil: tout autre chofe. Le Languedoc, le
Dauphiné, la Provence, & tant d'autres, ne font point Provinces écrangeres; ce fom la Lorraine, l'Alface, la Flandre,
le Hainault, la Franche-Comté, le Rouffillon & le Bearn,
ainfi qu'on peut s'en convaincre par la remarque de l'Auteur du DiCtionnaire des Aides, parr. 3 , pag. 108, & par
les inJlruél:ions imprimées que le Régiffeur a envoyées, de
l'aveu du Miniil:re, à fes Employés, pag. 3. Il s'enfuit que
ces Provinces exceptées, attendu leurs titres ,particuliers
d?exemption, rout le refie du Royaume efi a/fujetti à la Régie , même les Provinces étrangeres à la ferme générale,
parce que cette qualité ne leur eft donnée qu'en ce qui concerne les droits d'entrée & de fortie, & que ceux de la
Régie font des droits dus à la f~bricarion, & non à la circulation. Delà Marfeille, quoique réputée étrangere pour 'la
ferme, .ne l'efi pas pour la Régie.
Qu'un Orfev.re faffe paffer fes ouvrages à l'étranger, ou
qu'il les vel!de dans le lieu de Ion établiffement, cda dl:
égal pour la Régie; les droits en font dus, uniquement parce
qu'il a fabriqué, & non point parce qu'il commerce. La ferme
au contraire n'a rien à exiger, s'ils ne circulent pas de
Province en Province, ou de Royaume en Royaume. Quelque part qu'ils foiem fabriqués, les droits de ferme font dus
à l'eorrée comme à la fortie.
L'Edit de Porr franc & l'Arrêt du Confeil de 1703 font
les titres d'exemption que la Communauté de Marfeille op,.
pofe. Cet. Edit difpenfe les étrangers de payer aucun droit
d'eorrée.& {(;)ftie par mer; il ajoute enfuite qu'à. cet effet les
droits de demi pour cent pour la penfion de l'Ambaffadeur à .
ConHan'tinople & autres droits.domaniaux, de quelque nature
&. qualité qu'ils puiffenr être, demeureront fnpprimés. Une
exemption de rous droits domaniaux n'a jamais rapporrqu'à
ce.s: droits; ap ,lieu .qu'une exemption de tops droits que!coQ- ,
ques, domaQiiu!, & 'autres " .comprend .tant les droits dom~';'
niaux, que. ceux qui ne le' font. pas. Pourquoi! ces~dFQits· do~niaux font-ils fuppriniés? Oefl:. afin 1 que;;les étr"ngers nê-
�DU
PALAIS
DB
PllOVENC1!~
·~83
roient plus tenus de payer aucun droit d'entrée & de rortie.
Donc les droits de fabrication ne peuvent pas être' compris
dans la difpofition qui porte fur les autres droits domaniaux,
de quelque nature & qualité qu'ils puijJènt être.
Suivant les termes de l'Arrêt du Confeil de 1703, les
droits dont la franchife efi confirmée, ne font autres que
ceux qui fe levent à la circulation dans les Bureaux des fermes, c'efi-à-dire, les droirs d'entrée & de fortie, ce qui
ne fauroit comprendre les droirs de fabrication, qui font des
objers bien différens. Cet Arrêr ordonne que les Bureaux des
fermes de Sa iViajeHé feront ôrés de la ville de Marfeille,
à l'exceprion de quarre, qui font le Bureau des chairs &
poiffons falés, le Bureau du poids & caffe, celui de la ferme
du Domaine d'occident, & celui du tabac; mais cerre exceprion ne peut exclure d'autres Bureaux que ceux où l'on
percevroir des droits d'entrée & de fçlttie, parce que ce
n'efi que de ceux-là qu'il s'agit dans l'Arrêt, & non des
Bureaux établis pour la fabrication. Cela eH fi vrai, que depuis lors il exiHe dans la ville de Marfeille d'autres Bureaux
que les quatre ci-deffus nommés. Tels font le Bureau pour
la perception des droits fur les cuirs, les amidons, les papiers, & celui du droit fur les cartes.
L'Ordonnance de 168 l , tit. des droits de marque fur l'or
& l'argent, art. 1, ordonne que ces droits fur l'or & l'argent qui feront fabriqués ou mis en œuvre par les Orfevres,
Batteurs & tireurs d'or; FourbifIeurs, Horlogers & autres
ouvriers en or & argent, feront levés dans cout le Royaume·.
Nulle exception dans cette Loi pour aucune ville ni Province; Marfeille y efi donc comprife. D'ailleurs il y a plus
de cent ans que les Orfevres de Marfeille payent ce droir.
Peu importe que ce fait par abonnement; la ville' ne peut
pas ignorer ce paiement, & ce réavifé après plus de cent
ans ne peut que paroître fufpe&.
L'Arrêt fur l'étain confirme le fyfiême du Régiffeur; car
l'Ordonnance de 1681 n'en parle qu'à raifon de l'entrée dans
le Royaume. Quand il eH quefiion au contraire des droits
�'~94
Jou R. N A L ,
fur l'or & l'argent, cette Ordonnance en établit la per.;
ception fur, la, fa.brication. Là conféquemment il y a lieu d'en
exempter la vllle de MarfeiHe; comme affranêbie des droits
d'entrée par l'Edit de, 1669: ici point d'exemption, parce
que cet Edit ne l'affranchit pas des droits de fabrication.
Il dl: vrai que la Communauté de Marfeille n'était poiot
en qualité lors"des Arrêts de 1770 & 1771, rendus contre
les Orfe,vies. Mais prétend-elle faire juger à la' Cour la tierce
oppoGtion. enversèes 'Arrêts'? L'ordre' des procédures &
cduï<ies Jùrifdiaions y rélifl:e; c'efl: néanmoins à quoi tend
fon entrèprife, puifque fublidiairement elle a conclu à être
renvoyée 'lU Roi, & cependant qu'il foit inhibé au Régiffeur de -percevoir le droit fur les Orfevres. Le renvoi au Roi
fur une quefiion déja jugée par le Roi, feroit une dérifioo.
Si la Communauté croit le recours à Sa Majefié néce1Taire,
pourquoi veut-elle plaider pardevant la Cour?
Les ouvrages d'or & d'argent arrivant à Marfeille par
mer, doivent être a1Tujettis au droit de marque & contrôle.
L'Ordonnance' de 168 r porte que les Marcbands Merciers,
Joailliers, feront tenus de déclarer au Bureau du Fermier des
droits, les ouvrages d'or & d'argent qu'ils feront venir des
pays étrangers, dans les vingt-quatre heures de leur arrivée,
pour être n.arqués, & les droits de marqu~ payés, à peine
de confifcation' & de 100 liv. d'amende pour cbaque piece. Le
Roi connoi{fant l'inconv,énient de lai1Ter entrer en France
des ouvrages d'orfévrerie en francbife des droits de marque, les a voulu foumettre à l'impôt, comme ceux qui feraient fabriqués dans (on Royaume, & il en a fait une Loi
expre1fe. Tous ceux qui (ont apportés de, dehors, font regardés par Sa Majefié comme nationaux, parce qu'afin de
ne pas nuire à cerre branche- d'indullrie en France, il a
fallu les mettre à nivèau & à l'égal les uns des autres.
L'art. 23 de la Déclaration de 1749 difpofe vis-à-vis toutes
perCannes, de que1"lue qualité & .condition qu'elles (oient. La
diflinétion des deux fermes dl: e1Tentielle en finance,; on la
tl'Owe f orqlelle1I1ent rappelIée. dans l'Arrêt du Confeil du
l'Août
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Août 1733, que l'Auteur des droits d'Aides rapporte, liv.
3, pag. 1I8, au fujet des marchandifes d'orfévrerie fonant
du Royaume. Ceue Loi établit diverfes formalités, dont
les unes doivent être remplies au Bureau du droit de marque, & les autres au Bureau des fermes générôles, à dé~
faU[ defquelles l'arr. I l veut que les amendes & confifcalions qui feront prononcées, foient appliquées; favoir, un
üers au dénonciateur, un tiers au Fermier général, & l'autre
tiers au Fermier de la marque d'or & d'argent. On conçoit,
par la nature des objers, que le droit de marque & ceux
d'entrée exigent deux fortes de manutention; il a tàllu en
faire deux fermes: non que la ferme générale n'ait pu être
chargée des deux, mais de maniere pourtant à former une
régie féparée pour chacune, comme on l'a toujours fair.
Arrêt du 28 Juin 1776, au rapport de Mr. le Confeiller
de la Brillanne, qui fait droit aux requêtes de la Communauté
de Mar{eille & à celle d'intervention de la Chambre du Commerce, & condamne le Régiffeur aux dépens. Ecrivant Mes.
Pafcalis & Meiffret.
l
ARR Ê T
LV.
La rêve établie fur fa denrée étrangere qui fera introduite dans.
un lieu ou /on terroir, ejl due jùr la denrée étrangere intro~
duite & wndlle doms le lieu ou [on terroir il des étrangers
Ijui la tranJPor~nt ailléurs•.
N l'année 177 1 , la Communauté de Draguignan dé...
livra aux freres Cabaffe la ferme de l'impofirion fur les'
vins élr•. ngers. Par l'an. 17, le Fermier exigeait 12 fols,
par loupe du vin ou quintal de raifins qu.e les par.ticuliers
€cran"" rs pourraient introduire dans la \'ille & fan terroir;:
CeptL~1dnr il:: fermier ne pouvoir exiger I.e droir d'entrée fur'
les vin~ üuel~s parriculiers de Draguignan percevraient dao:;;
Ail/le,; l775 li l776.
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,leurs propres fonds ntués hors du terroir, qui feraient exempts,
en faifant la déclaration de l'entrée du vin au bureau du FermIer.
Les Geurs Roux, du lieu du Val, établirent un entrepôt de
'Vin étranger à la porte de la ville, & l'y débitaient fans en
payer les droits, fous prétexte que ce vin étranger était vendll
à des Muletiers qui le tranfportoient dans les villages voifins. Le 6 Juillet 1774, il fut faiG aux Geurs Roux, chez
Boyer, Aubergill:e, dix- neuf coupes de vin étranger que
Roux fils faifoit mefurer dans l'écurie de l'auberge par la
femme du Cenfal public, & qu'il vendait à trois Muletiers du
lieu de la Garde-Iès-Call:elane, & un tonneau plein de vin contenant environ dix-neuf coupes repofé dans l'écurie. Les Fermiers affignerene les fieurs Roux pardevane le Lieu,enant
de Draguignan, pour voir prononcer la confifcation des
chofes faifies, & la condamnation de J'amende de 30 liv.;
l'inll:ance fut évoquée pardevant la Cour des Aides, & les
Fermiers appellerent la Communauté de Draguignan au
procès.
On di(oit pour les lieurs Roux, que les Communautés
de Provence one le droit d'établir des impoGtions fur les
fruits, denrées & marchaodifes qui foDt apportées dans leur
terroir; cette faculté leur ell: attribuée par les Statuts de la
Province de 1432 & 144-2., rapportés par, Mourgues, pag.
364 & fuiv.; elles ont été maintenues dans cette prérogative par les Arrêts du Confeil du 16 Mai 1640, 30 Juillet
1652, dernier Mars 1643, & par les Arrêts de la Cour des
Aides du ~ OB:obre 1633, 16 4'9, 1753 &' 17)). Les denrées & marchandi(es étrangeres app.ortées ,confommées &
'vendues dans l'étendue du lieu ou du terroir où la rêve eft
érilblie, font fo~mifes au paiement de l'impoGtion. Jean
Roux réclame uniquement l'exercice d'un droit accordé à
tous les citoyens, la liberté du tranfit, & qu'il lui fait permis de faire paffer par le terroir de Draguignan le vin qu'il
:1 déja vendu, ou qu'il fera dans le cas de vendre aux village$
de la Haute-Provence.
'
�PROVBNC~.
S87
Suivant le droit public, il efl permis à tous les citoyens
de commercer, d'exporter & d'importer les fruits, denrées
& marchandifes dans toutes les parties de la Province. Pendant leur tranfport, ces marchandifes font affranchies de
toute forte de droit d'entrée & autres impolltions établies
par les Communautés; elles peuvent même s'arrêter & féjouroer dans le lieu de l'impolltion, fans être foumifes à
aucun droit; il n'y a que la vente & la confommation qui
donnent lieu au paiement de l'impolltion, parce que dans
ce cas la denrée étrangere acquérant la faveur de la localité,
doit participer aux charges de la localité, & parce qu'il ell:
jufle que l'habitant, dont la denrée territoriale reçoit un
préjudice par le concours de la denrée étrangere foit indemnifé de cette perte par le moyen de l'mpoGtion & par
la perception de la rêve impofée fur la denrée étrangere ,
ce qui diminue d'autant les impolltions de la Communauté;
mais les cas de la veore & de la confommation exceptés,
la denrée jouit de la franchife la plus entiere. Elle peut
paffer dans le pays de l'impofition; elle peut même s'y arrêter en tranfit, & Y féjourner fans payer aucun droit, &
quelque long que foir le remps du féjour , elle eH toujours cenfée in viâ, & fous ce rapport exempte de l'impôt.
La liberté & le privilege du tranfit font fondés fur l'utilité de la {ociété, fur le bien général & fur la faveur du
commerce, dont l'objet inréreflànt dans cette partie confifie dans l'exportation & l'imporration d'un lieu dans un
autre, des denrées qui font recueillies dans l'étendue de la
Province; ,,'efi ce qui a fait dire à l'Auteur de l'Efprit
des Loix, liv. 20, chàp. 13, que l'objet du commerce e!l:
l'exportation & l'imponation des marchandifes en faveur
' '
, de l'Etat.
La ville de M~rfeille excipant de la difpoGtion de fes
Statllts particuliers, &' des Arrêts qu'elle avoit obtenu ell
1686 & 1717' avoit tenté de fe foufiraire à certe regle
générale ; fa prétention fut condamnée par Arrêt du Con·
•
DU
PALAIS
DB
Eeee z.
�•
JOURNAL
~38
feil du 16 Aoûr 1740. II fur jugé que les vins recueillis dans
la Province auraient la [1cu!té de pa1Ter dans le rerroir de
la ville de Marfeille, pour être tranCponés hors de fan Port.
Il n'y a donc rien de plus cerrain que la réalité & la franchife du traTifie; les chemins [am des dé!vJuchés publics
qui doivent êrre ouverts au, commerce, & qu'il n'appartient à
aucune Communauté de gêner par des impôrs. Tous les
Auteurs conviennent que les marchandifes qui [onr en
tranfit [onr affranchies de roure Corce d'impofltions ,& qu'il
n'y auroir aucune équité à les impoCer. ( MafLardus, de jure
mercatorurn; Loccenius, de jure maritirno ; Grotius, de jure
belii & pacis; Puffendorlf en [on Traité du droit des gens,
& le Cardinal de Luca, de regalihus, diCe. 63.
Les Communautés oe peuvent pas même par aucune
délibérarion, & par leurs baux à ferme, faire en lone que
certe impofition foir encourue, lor[que les marchandifes &
, denrées auront féjourné pendant un cerrain remps dans leurs
terroirs. Un Arrêt de la Coyr des Aides, du 14 Llin 17P,
caira le bail de la Communauté du Val, au chef ponant
,que les huiles étrangeres & enrrepofées deux fois vingtquatre heures, [eroient foumifes au droit de cenfelage. Un
l'econd Arrêt rendu en 17H caira un [emblable bail pairé
par la Com,munauré du Bar, au chef portanr qu'il [eroit
perçu deux [ols par quintal d'huile qui auroit féjourné plus
de vingt-quarre heures dans le lieu. Ces baux tendoient à
limiter la durée du tranjie. Mais le tranjit ell: un droit ft
libre, fi privilégié & ft néce1Taire au commerce, que tous
les aaes qui peuvent l'anéantir, ou limiter fa durée, ou affoiblir fa liberté & [on privilege, font nuls & réprouvés par
les Loix.
La Communauté de Draguignan n'a voulu érablir un
droit de rêve que fur la denrée étrangere qui feroit apportée dans fon terroir, qui viendroit à acquérir la faveur de
la localité, qui feroit mife en concours avec celle du pays;
enfin qui feroit vendue & confommée dans le pays. Son bail
l'.e renferme & ne peut pas renfermer ,une difpofition plus
�DU PALAIS DE -PROVENCE:
~g9
ltendué; {es "Fermiers n'ont pas de plus grands droits. Jean
Roux nla contrevenu ni aux regles du tral!1.lù, ni aux difpa~
fitians du bail. Il n'a jamais vendu ni confommé du vin dans
-la ville de Draguignan & fan terroir j les Freres Cabaffe ne
,préfentent aucune efpece de preuve de cette vente & de cetre
t:onfammatian, qui feules peuvent donner lieu à la peine
de la confifcation & de l'amel'lde ; la faifie ell: donc nulle
& doit être caffée a\'ec dommages-intérêts.
On répondait pour les Freres Cabaffe & la Communauté,
que de droit commun, & fuivant le bail qui régit la ferme
.de la rêve fu-r le vin étranger, paffée aux Freres Cabaffe par
]a Communauté de Draguignan, les fieurs Roux n'ont pu
introduiTe dans -cette Ville & fan terroir du vin étranger,
même pOllr -l'y vendre uniquement à des étrangers qui l'emportaient chez eux ou ailleurs, fans en payer la rêve, &
fans s'expofer à la confifcation & à l'a mende.
Quant
droit commun, il gît dans nos Statuts, dans les
Arrêts du Confeil & de la Cour des Aides. Perfonne n'ignore
ces tit-res qui autorifent les Comm unautés de Provence à
établir des rêves & autres droits d'entrée fur les marchandifes & denrées étrangeres qu'on apporte chez eUes. Ce
droit, général pOUT tautes les Communautés, ne confifl:e
pas à prohiber ,l'entrée abfolue de la denrée étrangere,
comme le font celles d'Aix & de Marfeille, fondées, quant
à ce, [ur des privi!eges particuliers j il [e réduit à une taxe
quelconq~e , dont l'effet procure à la Communauté le double avantage de diminuer -la maffe de [es charges par le
produit de la rêve, & de favori fer la denrée du lieu, à laquelle on conferve" tous les avantages de la localité, par
!'efpece d'impôt que l'étrangere paye, fi elle veut en venir
profiter. Serait-il" jufl:e qu'une Communauté affouagée à raifon des avantages de fa pofition qui lui facilite la vente
des denrées de fon crû; une Communauté, qui Couvent a
fait des dépenfes locales pour augmenter ou fou tenir le
débit de ces denrées, fût forcée de faire part à tout venant
au
�~90
Jou
RNA L
de ces mêmes avantages, de partager, pour ainli dire, fon
commerce aveé' .'t,out le monde, au rifque évident de le
rendre moins lucratif par le concours, & qu'elle ne pût
pas a/feaer la denrée érr'angere d'une rêve, afin de l'éloigner
& fou tenir la fienne , ou du moins de fe récupérer en corps,
par la taxe, de la perte qu'elle fou/frira infailliblement
en dé~ail par le moindre profit que fes habirans feront. '
.
La Communauté de Draguignan a donc pu de droit
commun établir chez elle une rêve fur le vin étranger, dans.
. le double objet d'en retirer un bénéfice par le prix de la
ferme, & de favorifer ou fomenir le vin de fan crû; c'eft ce
qu'elle a fait par fan bail. Auffi d'après les termes de ce
bail, les fieurs Roux repofant chez Boyer l'Aubergifte aux
porres de Draguignan, du vin étranger, & l'y vendant, quoiqu'à des Muletiers étrangers auffi, avoient-ils introduit du
vin au tens du bail? Introduire, introducere ou ducere intra, en
fait de marchandifes, de denrées, de fermes & de reves, fignifi e voiturer, tranCporter, amener enfin de quelque façon
que ce Coir, cette marchandife ou ces denrées, dans le lieu
où la ferme, la rêve ou la prohibition a lieu. Peut-on concevoir que du vin dépoCé & emmagafiné au Fauxbourg de
Draguignan pour y attendre l'occafion de le vend.re, vendu
enfilite impunément dans cet entrepôt, ne fut pas voitulé ,.
tranCporté , ou amené d·ans l'enclave de la rêve?
Peu importe que ce vin fût vendu à des étrangers ou ?l
'des habitans du lieu; ce commerce que les Roux en faifoient publiquement, ne portait pas moins de préjudice aux
Fermiers, en ce qu'à défaut de ce vin érranger, ces Muletiers de la Garde ou autres lieux auraient acheté celui que
le douzain en fruits, dont ils font également Fermiers , leur
a produit; ce commerce, ne nuifoit pas 'moins aux habitans de Draguignan en général & en particulier, en ce
qu'augmentant la maffe du vin à vendre,. il en faifoit néceffairemenr baijfer le prix.
.'
Les Fermiers de Draguignan conviennent que ,cette Corn":
munauté & toutes les autres de la Province ne peuvent im..,
�DU PAt AIS DJ! PROV1!NCIl.
~91
poCer r~ve fur les denrées étrangeres , qu~en tant qu'elles
f.;ronr confommées dans fon terroir, & ils conviennenr que
leJr bail' ayam dit qu'ils exigeroient 12. f. par coupe de
vin qui fera introduit dans la ville & fon terroir, c'eH tout
comme s'il avoit dit qui fera confommé. Or, 00 confomme
non feulemem par def!:ruél:ion en buvant & mangeant une
denrée, mais encore en la vendant & commerçanr. Les
fieurs Roux qui le niem en défenfe, l'ont pourrant avoué
eux-mêmes tacitement, puifqu'en vendant leur vin, ils
l'om fait mefurer par le mefureur public, & en om payé le
droit de cenfelage. Si le vin commercé à Draguignon étoit
en tranfit ,pourquoi en payer le cenfelage? S'ils om reconnu qu'il n'étoit pas en tranfit en payam le cenfelage,
pourquoi refufer d'en payer la rêve ? L'Arrêt de 17') 2 &
celui de 17)4, qui calferent les baux des Communautés du
Val & du Bar, déciderem que féjourner dans un lieu quelconque fans vendre ni commercer, n'ef!: pas confommer,
mais feulement palfer en tranfit, quelque long que foit le
temps du féjour, & que le tranfit fans lequel le commerce
ne pourroit s'exercer, efl: & fut toujours libre & privilégié.
C'ef!: pour maimenir ce tranfit que la Province s'éleva en
177 l en faveur des Communautés du Baulfet, Cuges &
Aubagne, comre celle de la Seyne. L'Arrêt du Confeil du 17
Décembre 17)4, qui calfa l'Arrêt de la Cour des Aides de
cette Province, déclara les faiGes bonnes, &. en ordonna la.
confifcation, fur le fondemem que vendre dans Je lieu de
la rêve, quoique pour porrer dehors, c'étoit confommer, à.
l'effet d'être fournis à la rêve.
Le tranfit fe dit d'une marchandife venant d'un lieu quel.
conque, allant à un autre pour lequel elle ef!: def!:inée, pour
l'y vendre, ou l'y porrer déja vendue, & palfam par un froi..;
fieme où elle n'efl: ni verfée, ni commercée, mais umplement & tranuroiremem repofée. Cette marchandife, quelque long que foit le féjour qu'elle fait in /oco gabellœ, efl:
toujours cenfée in viâ, & elle ef!: exempte du droit, fauf
au Colleéteur de cette gabelle de prendre les précautions né~
�~92.
Jo V RNA t
ceffaires pour éviter les abus. Mais fi au lieu de pairer ain/i
&: repofer rout au plus momentanemenc, cefui qui apporte
la denrée in loco gahellœ, l'y verfe, l'y vend ou l'y conram_
me, le droit efi infailliblement dû ; c'eU ainli que le décide
le Cardinal de Luea en fan Traité de regolihus, dire. 63_
Arrêt du 2.8 Juin 1776, au rapport de Mr. le Canfeilb
de la Calade pere, qui confirme la faifie avec dépens envers touces les parties. Ecrivant Mes. Bremond & Turrel.
FIN.
TABLE;
�
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JOURNAL
D U
DE
PALAIS
PROVENCE,
o u
A
RECUEIL - DES ARRETS
RE N DUS depuis les derniers Journalifies, par le-.
Parlement & la Cour des Aides de cette Province.,
Par Me.
JANETY•.
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ANNEES 177';' 177 6 , 1777 & 177 8•
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AIX ,
A
Chez,
Imprimeur du Roi, vis-à.-vis;
le College.
ANDRÉ AD IBERT,
M.
DCC.
L X X X V:.
Avec APJ'robation, PermifJi.on &
Plivile~e
du. Roi;.
�•
�TABLE
TABLE
DJËS· SO.JJlMlAJfJR.JES
CONTENUS DANS CE VOLUME.
ARRÊT
1. Dans les villes royales, les Confuls, en qua-
liti de Lieutenans-Généraux de Police, jouijfent les premiers
P~g. 3
des honneurs dépendans de cette jurifdiceion.
ARRÊT II. L'ahus qui ne touche point il l'ordre puMic ou aux
loix générales, & qui efl jimplement relatif à l'intérêt particulier, peut être couvert par l'acquiefcement des parties ou
par le laps du temps.
6
ARRÊT III. Le droit d'offrir peut être exercé pendant trente
.ans contre le créancier colloqué, & le créancier perdant ne
29
peut être forcé à l'exercer plutôt.
ARRÊT IV. Les hiens d'Eglift ne peuvent être aliénés fans
formalités.
Pareille aliénation peut - elle être attaquée après quarante
ans?
.
31
ARRÊT V. Le mari connoijfànt le commerce de fa femme, mariée fous une con.flitution générale, efl cenft l'autorifer par
fonjilence, & e.fl tenu même par corps des oMigations qu'elle
contracee..
44
ARRÊT VI. Les Employés à la régie du. Piquet de la ville
de Marfeille ne peuvent faire leurs 11ifites pendant la
nuit.
47.
'ARRÊT VII. Dans l'Eglife Con-Cathédrale d, Forcalquier i
.
k
�DES
SOM M A-I RES.
593
le Capifcol ne peut opter au préjudic~ du pfus ancie~.
48
ARRÊT VIII. Incompétenc:: des Jyges-Confuls, fondée fur la
fauffité de la caufe de l'obligation.
Celui qùi en pareil cas Je Dorne à propofer l'incompétence"
n'a pas befoin d'impétrer des lettres de refcifion envers fon
obligation.
)2ARRÊT IX. Un afcendant conflituant une dot, t;, inflituant en
outre l'époufe [on héritiere dans une portion de {es biens,
la dot doit être rapportée lors du partage dans la maffi
56
des biens héréditaires.
ARRÊT X. Les Juges-Confuls ne peuvent rendre un décret
de main mife contre un, débiteur étranger, & pour une
dette contraélée en pays étranger, de laquelle ils ne peuvent c o n n o z t r e . ,
59
ARRÊT XI. Le Curé 'lui a préparé & inflruit l'adulte " a droit
de le baptifer., fi l'Evêque ne le Daptife lui-même, G' l'Evêque ne peut déléguer un autre MiniJlre, pas même le Curé
de l'Eglifè Catlzédrale.
'73
ARRÊT XII. Le Juge d'Eglife érigeam une Succurfale, ne peut
en fixer l'emplacement.
JO 3
ARRÊT XIII. Les Receveurs des CommunautéS peuvent-ils être
Receveurs des Vigueries?
J09
ARRÊT XIV. Le tiers qui en fait d'a.J!ùrance maritime a payé
la prime, & qui eJl porteur d'un billet caup, valeur reçue
en prime ,d'affurance, a 'privilege pour [on paiement fur les
effits aJJùrés.
JI 6
ARRÊT XV. Le mari peut, en qualité de mari & maître, retraire au profit de la femme le fonds aliéné par le parent
de celle-ci:
Le parent du débiteur eJl admis au retrait, quoique le fonds
,
[oit vendu par la maJJé des créanciers,
L'ac/zeteur peut-il oppofer au retrayant la cejJion du droit de:
prélation, s'il ne l'a rapportée qu'après la demande en reJ 20
, traù?
. ARRÊT XVI. La femme étant mariée fous une conflitution générale , la prefcription ne court pas contr'elle à raifon d'/If/.
finnées z775 & !iJiv.
Ff ff
"
A
�Ù4
.
TA 13 L E
fupplément de légitime, &' le mari n'eft reJPollfbhle qu'en
tant qu'il auroit négligé la pourfuite d'un droit connu.
126
ARRÊT XVII. Dans les afjz'gnations q.o.nnùs au domicile élu,
les délais doivent. être réglés d'après le domicile réel, même
pardevant les Tribunaux Con/iLlaires.
Le commandement pellt-il être fait au domiCile élu ?
L'emprifonnement doit êtr.e caffi, s'il efl fait contr.e la difPo~
tian de l'Ordonnance, fi toutes les formalités n'y font pas
remplies.
Sur le privilege prétendu par les Huiffiers Royaux, en force
de leurs prov!fions, d'exploiter dans .tout le Royaume.
L'Hui/fier pracédam a u,ne faifiè de marcltandife,· , doit eIl faire
le détail dans [on verbaJ.
L'Huif1ier requis par la partie efi-il tenu de la, garan tie à
raifon d'une nullité opérée par le défaul de pouyoir. de l'Huiffier?
'.
132
ARRÊT XVIII. La Cour des. 4id~s connoît en premier & der
nier rejJort de la comravention aux rêves.
149
ARRÊT XIX. Le mari, adminiflrateur d'e la dot, eft tenu de
remplir les conditions renfermées dans le contrat civil tf.e
manage.
1'5 "'.
ARR~T XX. Le corps procédant en difeipline & fur une plainte
portée contre l'un des membres, peut-il infiruire & juger verbalement fans avoir cité légalement l'accuft?
. -1'57
ARRÊT XXI. L'original d'un titre étant égaré, l'extrait fur
. extrait peut faire pleine & elltiere foi.
167
ARRÊT XXII. L'exemption du paiement de la dîme peut être·
acquife. par la poffijJiqrz iTT}m4moriale..
171
ARRÊT XXIII. Le fonds dotal peut être aliéné. & échangé
en cas de néceflité ou d'utilité évidente pour la femme.
F aut~il alors ohtenir la permiJIion du Juge?
181
ARRÊT XXIV. En matiere bénéficiale, le réfignant 'lui exerce
l'ac7ion eIl regrès, obtient la reflitution des fruits depuis la
demande. JufèJu'a ce.tte époque le réJignataire fait les fruits.
jiens, 6' ne peut prétendre le rembourfement des frais de provifions & accejJoires.
183
4
�'ARRÊT
DES sb l'vi l'vi AIR E S.
~9)
XXV. En matiere bénéficiale , les provijions doivent
être rapportées ou [ollicitées dans l'année de la date re193
tenue.
ARRÊT XXVI. Le débiteur exerçant le rachat fiatutaire, ne
199
peut prétendre la reflitution des fruits,
ARRÊT XXVII. La mere s'oppofant à la,yrofeJlion religieufè
de fa fille,' peut demander' que fa 1'ocafion [oit éprouvée:
200
L'épreuve doit être faite dans une maifon neutre.
ARRÊT XXVIII. En matiefe de dénonce'~ le1firment Il'efl pas
décifoire, & on efl reçu à la preuve du contraire.
21.3
ARRtr XXIX. Les livres des Marchands font-ils pleine &
• entiere foi?
La femme, ayant niême des biens libres, commerçant au vu
· & fu de [Oli marï, ce dernier répond civilement des dettes
· qu'elle contracte à rai[on de 'fan commerce, . comme étant
1
. cenfè l'autorifer & en {rojiter. .
Les exceptions dilatoires ·doivent" être propojèes avant les dé,fenfes'au fonds.
Peut-on agir éontre l'infenjè tant qu'il n'eJl pas interdit & que
l'on n~ l'a pas pourw d'ull curateur? .
219
ARRÊT XXX. En matiere bénéficiale., le collateur ordinaire
• a.yant conféré dans le ·temps de droit, le collataire a trois
. ans .'pour accepter ou refufer, & pendant ce temps le Pape
ou tout· autre fupérieur quelconquè ne' peut conférer par dé227
volution.. .
.
.
ARRÊT ~Xr.· TranfPort à fonds pehiu & à rentc< viagere;
1
2 3~
fait in è'xtreinis, caJJè.
ARRh XXXII. Le défendeùrp'réfentahi fitr l'explôit d'ajournement) ne peut plus oppofer une nullité extônfeque à ce
mêni'e' exploit.
242
ARRÊT XXXIII. Le décret de main mife peut être décerné
par le; Juges-Confuls contre un débiteur fufPec1 de fuite. 243
ARRÊT' XXXIV. Le [ImpIe, trouDle fait dans l'Eglifè, fans
• [candale & fans tumulte, qui ne con[zJle qu'en jimples irrç· vérences, & qui ne tend pas à interrompre le fervice divin,
n'cfi pas cas royal.
2 ~7
Fffh,
�'~9~
ARRÊT
, T A 13L E
XXXV. En fait d'ajJùtance maritime /ur les facultés
d'un Navire, il n'y a lieu il l'abandon des eff7ls ajJùrés,
gu'en tant qu'il y a perte entiere ou preique entiere des
mêmes effets, &, l'i,!navigaD.ilit~ du vaiflèal/ ne donne pas
lieu il rabandon ,fi, les' effets affirés viennent il bon fau,vement.,
(
. .'
"\ ",
264ARRÊT XXXVI. " ,Qui. Juge que l;endojJèment en blanc d'un
billet de commerce n'en opere pqs le tranfPort, f,' qu'en
cas de faillite le propriétaire ,pellt'le réclamer par droit de
{uite.
'\_ . ) '
"
•
"
276
'ARRÊT XXXY!r . '.[.;e _~us-Pfltronat J!,u[le J::hapellenie devant
pajJèr {ucceJlivement à l'ainé mâle defcendant d'jlfle, maifon ,
& en défaut d'hoirs mâles' aux filles ainées de la même.
maifon, les mâles de la branclze cadete font appellés préférable-me~t aux filles.. de la bran,clze ainée.
2.82ARRÊT X~VIII. Le Curé" a droit d>Jlifler dans taUles les
ajJèmbléeSJ4e.sj1qrguil{i~rs.de là Pa..roijfe', , . " '29)_
ARR~T XXXIX. L'a'élion criminelle ne comR,ete "p~-.contreJa
veuve- accuJèe q"expilations dans la fiiccejJion. de fan maÛ;.
ARRÊT
.
,',
3,1 r
XL. Les OjJi;iers de l'4mirautt né co,nnoiffènt pa~_
J
de la, dema.'ldr ~n paiemept de lalreIlte des b91!'i4igu8,.s. '(3)..7
~RRÊT XLI. Lg r~volte. de negre.s {ur le vgiJfè,au q~i ;{lv(Jit
été expédié RO,!r en faire la !rgite, .e./l:, un cas fortuit dont
l'affireur eft tenu.
"
,
,La permiflion donnee au. Capitaine' de toucher &- faire échelles
, èn taus lieux que bon luï femblera"l'autorifè il r~trograder,
. pourvu qu'il ne chang~ Ptl.s le voyage & lef 4ej1ination da,
,navire.
"
:.'
'\
' ;.
33)
ARRÊT XLII. Le coaclzeteur ayànt pour lui la pojJèjJion réelle
. de l'effet vendu falidairement ,il deux, acquiert l'entiere propriété contre l'autre coacheteur par le laps de trellte ans.
La prefcription de trente an.s, cO(Jrt contre les mineurs.. 344.
ARRÊT XLIII. Un Jugement· définitif accordant IIne option'
pour être faite dans un temps déterminé, avec la claufe
autrement d.échu i 'l'opti~n doit être faite dans le délai,
,
�DES SoM MAI RES.
~91
paffi lequel les exécutions peuvent hre continuées, fans
efPoir de retour à l'option.
3S0
ARRÊT XLIV. L'Artifan qui veut être reçu Matire, dpit
jtiflifier de l'ac7e d'âpprentiJ!àge.,
3') S
ARRÊT XLV. Le canal d'arrofage fervant à l'utilité publique peut être conflruit dan,. le fonds du particulier, il ltl
3) 8
charge 4e l'indemnifer.
ARRÊT XLVI. Sur l'appel d'une Ordonnance qui fur[eoit à
toutes pourfaites , attendu la liti/pendance.
En matiere d'appel l'on ne peut pemander l'évocation du fonds
. & principal, fi le premier Juge n'a rendu fur le fOllds
- quelque .déc!fion qui [oit ,attaquée.
ARRÊT XLVII. Sur la demande en maintenue d'un bénéfice.
- ARRÊT
377
XLVIII. SUI' le droit qu'ont .les Religieux d'avoir
, des cimetieres publics.
387
:ARRÊT XLIX. La collocation faite par la femme, marira
.vergenre ad. inopiam, tombe & devient caduque, fi elle
394
',. prédécedefon mari.
ARRÊT L. Quoique l'aïeul ait [es petits-fils fous fa puiJ/ànce,
: il Ile peut pas aliéner leurs immeubles fans néce/fité.
L'aïeul 'lui n'a pas .l'uli/fruit des biens de [es petits-fils qui
,jiJnt fous"fa puiJ!ànce, n'ell a pas .l'adminifiration légale. Il
,;ne peut les adminifirer qu'à l'infiar du 'tuteur.
406
ARRÊT LI. Le. .vaiJfèau affrété à mois étant arrêté par ordre
fouverain, le paiement du nolis rfl-il fu/pelldu pendant
, la durée de l'Arrêt?
En efl-il de même-s'il s'agit d'une prife?'
420
ARRÊT LU. E~ matjere de prefcription acqui[e par la poffiflioll,
on ne prefcrit qu'autant qu'onpoffide, & une premiere.•œuvre
prefcrite ne peut poini en autori[er une [econde, la [er- "
vitude n'attribuant poillt la propriété du fonds qui la jùp~~.
43 I
LIll. Sur la maniere de [éparer & d'encadaJlrer les
biens roturiers poJlèdés par le Seigneur dans l'étendue de
fo'! Fief, & qui ne peuvent être emplaéés d'après les titres
. 'ARRÊT
�~9g
TA BLE
'
d'acquifition qui [e trouvent égarés.
437
ARRÊT LIV. Le droit d'offrir n'a que dix ans de durée contre
des acquéreurs qui, au lieu de compter au vendeur le prix
payer plufieurs de
'de leurs acquifitions, l'ont employé
[es créanciers.
4) r
ARRÊT LV. L'achtteur menacé de trouDle ou d'ivic7iàn peut
foumettre le vendeur qui veut exiger le pr-ix, a donner
caution.
A) 9
A'RRÊT LVI. La compenfation de tailles entre les Seigneurs
& les Communautés ne peut être opérée de plein droit, même
antérieurement a.f' Arrêt du Con[eil de z 668 , & la demande
dOlt en être libellée, jujlifiée par l'état des biens, & fou464
tenue par U{l rapport efiimatif.
ARRÊT LVII. En matiere de fraude ou de délit, le maitre
n'efl pas tenu du fait perfonnel fon domeflique ,& qui
n'efl pas relatif aux fonctions qui lui font confiées.
480
ARRÊT LVIII.' Les donneurs la grojJe fur facultés ne fom
. pas obligés de [uivre une inflance de' bénéfice' d'inventaire
pour y faire valoir l'hypotheque [péciale qu'ils ont fur ces
facul{6s.
Des afficiés a ,!uelques pacotilles 'lui n'ont ni hypothe,!ue ni
frivilege filr les marchandi[es [pécialement affectées aux don~
neurs 4 la grojJe, ne peuvem venir en concours avec 'è!lx
pour leur paiement.
-488
ARRÊT LIX. En matiere criminelle on peut", même pour in~
jures, & fuivant ,!u'elles font graves, procéder contre l'accufè
par rçcolement & confrontation.
498
ARRÊT LX. La contraiilte par corps, en m'atiere mucantille,
omi[e lors du jugement- définirif,' ne pellt pas être rèquife
in execlllione· judicati.
S·03
"ARRÊT LXil-. La preuve par témoins peut-elle être admife
pour prouver la filiation bâtarde, fims commencement de
preuve par écrit , . ou' fans le concours d'autres préfomp'so&
tions?
.
ARRÊT l..XU.· L'acce.ptaiion d'un mandat opere novation.
ft: Lieutenant de 1'4mlrauté peut~il ordonner le nono~an~
a
a
a
�'9)
DES SOM MAI RES.,
appel Jans donner cautliin r Peut.-il r en pron-onçlJ1lt fa c-on·
damnation d'une famme trop forte pour Ùre au cas, du
nonobJlant appel, la fyncoper ,. & ordMner le /lonobflant
appel jufqu'au concurrent de la partie de la. ftmme t.fui peut
être provifairement exécutée?
'.
~ 2. 2ARRÊT LXIII. Si toute commiflion adreffie au Juge Royal
le plus prochain regarde le Lieutenant le plus prochain. 52.6
ARRÊT LXIV. Mineur & fils de famille non Négociant reftitué envers une obligation conçue valeur reçue en mar-
chandifes.
ARRÊT LXV. Quanti min.oris refufé
532-
a
l'acquéreur qui lors
dè l'acquifition a connu la fervitude, 'luoù/u'elle n'ait pas
été déclarée.
.
L'énonciation d'un titre fujJit-elle pour faire préfumer qu'on en
539
a connu les difP9fitions?
ARRÊT LXVI. Qui confirme une procédure en complainte raifort
du trouble fait dans la pojJè(Jion des eaux publiques;
544ARRÊT LXVII. Le porteur d'un billet de commerce peut-il,
au préjudice des autres créanciers, acquérir hypotheque au
moyen de la converjion du billet en contrat, faite avant
l'expiration du terme auquel le paiement doit être fait, le
débiteur venant
faillir quelque temps après l'époque dit
contrat?
550
. ARRÊT LXVIII. Si la forme e;. non la fubjlance carac7érifè
une lettre de change.
,
. Si la lettre de change n'efi réputée teUe, même
l'égard du
tiers, qu'autant qu'eUe a été faite animo cambiandi.
55:z.
'ARRÊT LXIX. .On ne peut prefcrire contre les Hôpitaux que
par le laps dr quarante ans.
On ne peut oppofer le bénéfice d'inventaire prefcrit ou apuré
à un créancier certain & connu qui n'y a pas été appeUé.·
575
'ARRÊT LXX. Sur la demande en reflitution d'une famme
donnée pour porter
Beaucaire, & volée celui qui on
l'avait confiée~
57 9
'ARRÊT LXXI. La prife jufie ou injujledu Navire donne-t-eUe
a
a
a
a
a
a
�~oo
/
TABLE
lieu à l'abandon du Vaij/èau & au 'paiement des ·fommes
affirées?
La deflination du chargement eJl prouvée par le ·connoiffèment
& par la police d'affirance, [au! la preuve légale de la
fimulatïon.
S8.4
Fin de la Table des Sommaires.
, .
..
.
�JOURl~AL
,
DU
PALAI-S
JDJE lP JE?. 0
VE Ne Je~.
E
N l'année i77 2 , le Procureur du Roi de la Police de
la ville de Brignoles requi~ le Bureau d'ordonnel"'
qu'injonél:ion fût faice aux Marguilliers ou Prieurs des Con-.
~rairies , de donner les pre.lllieres aubades aux Confuls, avec
l,nhibitions & défenfes d'intervertir l'ufage exiftant à ce~
egard, à peine de S00 liv. d'amende; ce qui fut aïnli or~.
donné & publié à fon de trompe.
L~ lIMai 1773, les Prieurs de la Confrairie Sc, Eloy.ayant demandé & obtenu la pèrmiffion de faire battre I~
tambour, donnerent les premieres aubades aux Conruls 1 1$';
A
2.
�4
JOURNAL
e'tlfuite par ordre & fucceffivemenr au,x Officiers de la Sé..:
néchautrée. Me. Bellon, Lieutenant-Général, Civil & Cri.
minel, dreffa procès.verbal qu'il fit intimer aux Prieurs de
Sc. Eloy; ceux-ci donneretlt en réponfe les raifons qu'ils
avoient eues de donner les premieres aubades aux Officiers municipaux, & ajoucerent qu'ils alloi~nt faire intimer
le procès-verbal aux Confuls pour qu'ils pulfent s'arranger
avec les Officiers de la Sénéchaulfée. Il y eut des réponfes
& des contre-réponfes. Les Confuls fe pourvurent à l'effet
d'êcre maintengs dans l'exercice de la Jurifdiétion de la Police & des droits en dépendans; & ce faifant, voir dire qu'ils
continueroient de donner la permiffion de banré la caiffe ,
& qu'en conféquence ils demeureroient maintenus dans le
droit & ufagede recevoir la premiere aubade. Ils demanderent en même temps la fuppreffion du procès-verbal, des
réponfes & contre-réponfes de Me. Bellon, qui demanda
d'être maintenu dans la prefféance.
,
On difoit pour les Confu!s" que les Officiers de la Séné.
chaulfée, qui ne pouvoiellt donner la permiffion de battre
le tambour, ne pouvoient prétendre à aucun honorifique à
raifon de' cette permiffion. Comment pourroient-ils obtenir la préférence fur les Officiers qui repréfentent la Police,
&, avec.lefquels' ils ne font pas, en concours? Qu,and les
les deux Corps concourent, la quefiion de la prefféance peut
& doit naturellement fe' former; niais quand ils' ne font point
enfemble , chaque Corps jouit à parr des honneurs propres
à la portioJ'l de la Jufiice qui lui ef!:. confiée.,
..
Me. Belhw obfervoit' que -les' Loix ordonl)éni;~ touS les
Officier§ d~affifier aux aétions publiques; que les,''''pretniers
honn~grs font dus à la .Ju!lice univerfelle: mais on répQndoit' qge. dans les Villes !,oyales, les ConfuIs ~faht Lieutel1ans_Gé,néraux de Police, marchent fur la même l,igne que
les Offici,e'rs de la Sénéc.hauffé~·; ils' reprëf~nt~nr:Jes uns &
les autr~s .deux -Tribunaux égaux en puiffançe, & qui font
appellables nuement & fans moyen pardeviu)t la Cour. On
convenait que dans le concours, la' Jufiice univerfell~ &
le Tribunal qui la repréfente a les honneurs & la pref-
�DU
-
PAL Ais
DB
'.
~
PRO" E NeE.
.,
tèaoce fur le Tribunal de la Police, & fur les Officiers qui
le rempli1fent.; mais cela n'a lieu que quand les deux Corps
'fe trouvent enfemble. Hors ·de ce cas chaque Corps jouit en
particulier des honneurs qui lui [ont propres; la pre1féance
îuppofe la préfence des dellx 'Corps. Que l'aubade foit un
:honneur ou un hommage, cela eft indifférent;' il fuffit d'obferver que ·c'eft le premier aél:e qui fuit apI:ès la permiflion
de battre le tambour; or il [eroit inconféquent que ce premier aél:e fût dû à toute autre pui1fance qu'à celle qui a donné
la permiflion.
.
Suivant Me. Bellon, ce n'eft pàS le Tribunal de Police
qui donne la permiflion; ce [ont les Confuls, & même un
feul des Confuls, puifqu'il n'y a qu'un Con[ul qui foit
Maire; les autres ne le deviennent qu'en cas d'abfence ou
d'empêchement; d'ailleurs [uivant l'Edit' de création des
Juges de Police, il n'y a qu'un Lieutena!)t-Général de Folice, qui eft le premier Conful; ce n'eft donc qu'à lui, &
non à tout le Corps confulaire, que la premiere aubade pour-roit être donnée. On répondoit qu'il étoit inutile d'examiner
. les titres des Maires dont il ne s'agi1foit pas; qu'il falloit [eulemènt difcuter ceux qui concernent la Police. Le
Roi' n'avoit créé ,. fi l'on veLjt, qu'un Office de Lieutenant
de Police pour chaque Communauté ;, mais. au moyen
de la. réunion faite par la Province, cet. Office' s'eft reparti -[ur la. tlhe de tous les Confuls des Villes royales. Il
n'y â> qu'un Office de Lieutenant-Général de Police dans
chaque Communauté, & néanmoins 'tous les Confuls font
Lieuterians-Généraux de Police; ils ont ùonc tous le même
droit, & .c'eft comme Lieutenans-Généraux de Police qu'ils
donnent la permiflion de battre le tambour. En vain dil'oit-on que cette permillion n'eft pas donnée par le Bureau
de Polîce a1femblé ; il feroit ab[urde de convoquer le Bureau, & de lui faire rendre un Jugement pour des objets qui
tombent en jurifdiél:ion gracieufe, & qui [ont au pouvoir
des Con(uls. Ils repré[entent , quant à .ce, le Tribunal; &
comme ils partagent également les fonél:ions du Lieute~
�·6
Jou
r.
nant-Général de Police, ils doivent en partager également
les droies & les honneurs.
.
Arrêe du 1) Mai 177), au rapport de Mr. le Confeiller
~e Monevallon, qui main rient les Confuls de Brignoles dans
l'exercice de la jürifdiélion de la Police, & dans le droit
de permeeere de baeere la caiife, & de recevoir I~ premiere
aubade, avec dépens. Ecrivant Mes. Gaffier & ..•.•
RNA
ARRÊT
II.
L'abUS qui ne touche point a fard" puMic ou aux loix gê:...
nérales, & qui if! fimplement relatif a fintérêt particulier,
peut ~tre couvert par l'acquiefcement des parties, ou par le
laps du temps.
Uivant une charte de l'année 852., l'an 8 du regne de
Loehaire, poreane échange encre Bon, Evêque de Sifieron, & Paul, Evêqué d'Apt, le Clergé d'Apt éeoit compofé de l'Evêque , d'un Prépofé ou Prévôt, de Prêtres, d'un
ArchidiaCre, de Di'}tres & de Sous-Diacres. L'Evêque ti. rait de ce corps d'Eccléliafliques ceux qu'il defi·inoie à la
de.1feree des Eglifes du. Diocefe.. Les donaeions faiees dans
ces premiers eemps. font couees faites à l'Evêque ou au Siege
de l'Eglife Caehédrale, qui éraie compofé de l'Eglife dédiée
à la Vierge, & de la Chapelle dédiée à Sr. Cafior_ 'Ces
deux Temples formoiene en:femble l'Eglife d'Apt. Dans la
fuite des eemps, le Culee divin éeant négligé, &: les Offices
ne fe célébrane plus avec la décence convenable., l'Evêque
Teuderic voulut ramener fan Clergé à la vie commune;. il
inHieua & établit en 991 dans l'EgJjfe de Ste. Marie douze
Clercs, pour y vivre felQn les conll:itutions can'oniques; il
leur affigna des dîmes & des domaines, & pourvut ainf! à
leur fubIiHance;, cet aéle de réforme fut foLlfctit par trr:lce
Clercs.
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PAL AIS
D Il ... PRO V Il Nell;
,
.,
Les douze Clerès réformés furent tirés de l'ancien Clergé,
fans former aucune menfe, puifque la propriété & l'adminiftration des biens eccléfiaHiques continuerent d'appartenil'
à l'Evéque. Il y eut bierr quelque difiinél:ion entre ceux qui
embraffoient la vie commune, & ceux qui ne l'embraffnient
pas; mais les uns & les autres ne furent difiingu~s que
par' la maniere de vivre _; ils Jurent toujours appellés indiC·
tinél:ement Chanoines ou Clercs; ils. continuerenc- tous' de
former le même corps de CJergé, & d'avoir part aux mêmes biens. Les douze Clercs réformés exercerent d'abord leurs
fonél:ions dans une ancienne. Eglife dédiée à St. Pierre, que
l'on- venait de rétablir pour [uppléer celle de Ste, Marie, détruire par les Sarrafins; les autres Clercs de1Tervirent l'E.
gli[e St. Cafl:or. Cette ébauche de réforme eut bientôt befoin de réformation; l'Evêque Laugier, II. d'Agout, jetta
les fondemens d'une infl:itution plus folide. Il donna d'abord aux Chanoines de Ste. Marie 1& de St. Cailar les revenus- de différentes Eglifes de fan Diocefe, fans aucune
réferve. Le même Evêque céda enfuire toutes les autres
Eglifes à la Communauté de fan Clergé, fous la réferve des
droits de quarte, de [ynode, d'hofpice & de jurifdiél:ion ;
il ne difl:ingua point dans cet aél:e de donation les douze
Chanoines qui vivaient- en commun, de ceux qui n'y vivaient
pas; il s'adreffa généralement à tous, omnibUS Canonicis;
ce qui fuppofe que les douze pre'miers réformés n'éraient
pas le feul objet de fes libéralirés. Ce fut dans ce temps
que tous les Clercs, tant. ceux qui déffervoient l'Eglife Ste.
Marie, que ceux qui deffervoient celle de St. Cailar, furent réduits à la vie commune, & que le Clergé d'A pt prit
une forme capitulaire, une' confifianoe canonique, une menfe;
l'Evêque par fan Ordonnance foumet tout fan Clergé à filivre
le régime clérical & régulier.
L'on voit par les titres, que le Chapitre, dès fa formation,
eut un Prévôt qui avait toujours figuré à la têtç de la Communau-té du Clergé cathédral. Il y avait encore dans le Cha.pitre un Sacrifiain, un Oùvrier, des Chanoines & des Clercs;
·la vie commune fut 'en u[?ge dans l'Eglife d'Apt jufques
•
�B
JOURNAL'
vers le milieu du treiZieme fiecle, ainli qu'on le 'voit parun Réglement fait en 1230 pour le réfe8:oire, & par la Sen~
tenée arbitrale rendue le 8 Janvier 126) par Vice Dominus, Archevêque d'Aix. C'eft dans le temps intermédiaire
de ces deux aél:es que fut fait le partage des biens de l'EgliCe ,& qu'on abandonna la vie commune; il falloit alors
donner aux Clercs de 'quoi fournir' 11 leur nourriture ;1 le
Chapitre leur affigna quatre prébendes ou, ponions de biens,
qui furent d'abord divifées en huit, & enfuite en treize por"
tions, à mefure que le nombre des Clercs eut été augmenté·,
& cette a.rrribution de prébendes leur fit donner. le titre. de:
Clercs- bénéficiés, ou Clercs pr.ébendés.
L'augmentation que le Chapitre avoit fait du. nombre dœ
€es Clercs, fans augmenter. leurs prébendes, effi1ya des
conrradiél:ions de leur part·; ils mirentle Chapitre en caufe..,
& formerent contre lui plufieurs. demandes, qui furent coo1promifes 11 la déci fion de l'Archevêque d'Aix; c~ Prélat
rendit fa Sentence arbitrale, par laquelle il ordonna <Jue les
quatre prébendes cléricales établies dans cette Eglife, ou
les fruits, feroient partagés par égales portions entre les
treize Clercs inàitués & à inftituer 11 1'avenir; il caire le
Réglement portant établiffement de huit "Oercs qui devoient jou.ir des quatre prébendes ;. il le caire encore quant
:iU nombre des Clercs & au partage des prébendes, & en'
c.e qu'il obligeoit les Chanoin.es 11 payer 11 chacun des treize
Clercs-) 0 fols pour leur pitance ; mais il confirme', ce
'même Régle,ment qui avoit porté le nombre ~es Clercs à
treize.
En ~3.27, 'les ChanOines de, I~Eglife' d/Apr., ayant .leur
:E;vêque à leur tête, dreff'erent des ftariltS pour,Je régime.
de leur Eglife & pour.1~a.dmihi{hat,ion ,des. biens. du.·Oba~'
pitre. Ces ftatuts furent 'augmentés en 1337 ~ iLy aV,l:iÎ.ralorS'
dans l'Eglife d'Apt, outre l~s Chanpines &, les: Bénéficiés,
quantité de Chapelains, des Pr~tres :du b~s: è-h'œùr", & d'au,.
tres ferviteurs, qui fe Cou01ire.nr tous 'aux fi,atu'ts du Chapitre.
Ell J 372, Jean Sabateri, l)oél-eur en,.Théologie ,. arrive. à
~.pt porteur d'une Bulle d.u fape, p~r la'lu~Ue il.. hü eJl, en~
,
j.oint
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PAL AIS
DE
PR
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0 V B Nell.
Jomt de doter l'Office de la Sacriaie, de réformer .le
Clergé d'Apt. dans le Chef & dans les membres, & de finir
les conreftations mues eorre l'E-vêque & le Chapitre. Ce
réformateur fit, à la requifirion des parties & de leur confentement, la divifion de la dlme d'Apt & de Saignon,
& des huit prébendes au quartier de Roquefalieres, & rédigea enfuite à Avignon, après en avoir c.onféré avec les
Auditeurs du facré Palais, des nouveaux Hatuts par lefquels il donne aux Chanoines les Clercs prébendés pour adjoints dans. l'adminiltration des biens.. Il eH porté par l'ar~
ticle 1 i, que le jus-patronat des quatre offices & des prében-.
des canoniciles & cléticdles appartiendroit aU Prévôt & au
Chapitre, & l'inftitlltion ou collation à l'Evêque. Par l'ar~
ricle 6r ,.les Chanoines réfidans & fervans leurs bénéfices,
gagnent neuf pains & deux qllartons de· vin. par jour, &
les Clercs fix pains & un quarron & demi de vin.. L'arT'
ricle 97 ordonne que tous les fruits & rev·enus des Clercs.
appatrel1ans à leurs bénéfic.es:, foit colkçlivement, foit in-.
dividuellemenr, en quoi qu'ils puiffent confiner·, en fervices.
QU aurre.s chofes femblables ,. excepté· les gros fruits de leurs
prébendes, feroient incorporés. au Chapitre ,& unis défor,.
mais aux a.utres biens du Chapitre, & que pour ce qui re-.
garde les prébendrs divifées., ainfi qu'eUes le. font, elles.
refieroiellt à. chacun d'eux pour. groffe.
En 1373, le même Commiffaire fit des a.dditions & des·
cprreé\-ions aux !taruts, rant dans les arricles 1 c.o ncern ant
les Chanoines: que da.os Ceux concernant les Clercs, qui fu ..
,reor confirmés. par Sentence du 13 Janvier· 1374, prononcée·
par le Cardinal El'ê.que d'Albane ,.nommé Commi![aire à C61\
effer par. Gregoire. XI. E.n r 374, l'on modifia en.core trois.
a rr.i cles· des Hatllts, & l~on.décida. que. les Chapeh]ins l1'a-.
v.o!ent pas le droit de fe faire' repréfemer. par des Vi-.
ca.lres.. En 1L1,'57, Bulle du Cardinal de. Fojx, Légat à Avi_
gnon, qui confirme l'union de toutes les p.rébendes faites
à, la menfe capitplaire.. En. 148" délibération.du Chapitre"
par.- la~uelle J'ohfervation du Hatut efl: portée jufgurau fcru._
p\Jle, ad II-ngllem. E.n l '36, Sentence d.u. Lieutepan,t de FQI~
Anné,es 1775 & fii/v..
B..
�"lé
Jou
RNA L
'Calquier, rendue de conJenfu, par ,laq~elle les Cler,cs p,rébe~~
dés font maintenus dans 'le drOit d aflifter & d avoIr V01X
en Chapitre lol1S de l'éleél:ion de~ Curés & aurres 0fficiers
tlu Chapitre, d'ailifl:er aux correél:lOns des .me[l1bres du Clrapitre. En 1639, tranfaél:ion ent;e, les ,Chanoines & les Béiléficiers, qui porte que les BenefiCIes entreront, comme
de coutume, dans toutes les atremblées, excepté dans celles
oll il s'agit de conférer les bénéfices. Vingt ans après, il
s'éleva encore une contefiarion au fujet de l'éleél:ion des Of~
ficiers du Chapitre; les Chanoines furent condamnés dans
leur appel; l'éleél:ion dont ils fe plaignoient fut çonfirmée par
Arrêt de la Cour du 23 Juin 16) 6. Il s'éleva encore de
nouvelles contefiations entre les Chanoines & les Bénéficiés , fur lefquelles il fut patré, le 24 Février 1691, une
tranfaél:ion confirmative de celle de 1639 pour !'afliftance
des Bénéficiés aux atremblées capirulaires, & pour la qnalité
qu'ils ont de domillus & de prebendé.
Le 14 Décembre 1770, les Chanoines délibérerent de
confulter fur divers objets concernant les Bénéficiés, & d'après la confultation, ils appellerent comme d'abus de l'union
faite en t 372 des Bénéficiés au Chapitre.
Les Chanoines faifoient valoir fix moyens d'abus: 1°.
Union abufive dans [,1 fubfiance & fa teneur. 2°. Union
abufive par le défaut de pouvoir du Commitraire ex parte tituli. 3°. Union fans forme. 4°. Union fans caufe légitime.
)0. Union faite pour une caufé illégitime & fautre. 6°. Abus
dans tous les effets progreflifs de l'union•
. Cette union efi ( difoient-ils ) abufive dans fon principe,
par l'enchainement des aél:es, leur combinaifon , l'objer du
tout enfemble, les liaifons du Prévôt avec le réformateur,
la communication du pouvoir de ce dernier, l'objet où tout_
vient aboutir, les liaifons même du Prévôt avec les Bénéficiés; il n'eH befoin que de voir & de com.biner touS ces
objets, pour fe convaincre que cette union fur le fruit d'un
projet concerré par le Prévôt. Ce fur un coup de crédit &
d'autorité, revêtu d'une vaine couleur de droit & d'un fi:..
mulacre de forme. Le Commitraire fut choifi fuivant feli
1
�n
vues; il vint loger chez lui dans la ville d'Apt, pour étre
à fes ordres, & tout fut fait de même, lorfque la procédure
fut continuée à Avignon. Toutes les procédures, routes les
ordonnances forte nt alors, com.me auparavant, de la maifon
du Prévôt; il devient le réformateur lui-même; toutes les
opérations font faites pour fon avanrage & fuivant fes vues;
il double arbitrairement fes revenus au préjudice de la menfe
& des Réglemens antérieurement faits pour les di(hibutions.
Pour réu/Iir dans fon projet, Je Prévôr inréreffe les Bénéficiés, en les incroduifant dans le Chapitre, & en les uniffant aux Chanoines, dans l'objet de fe procurer, dans le
rein même du Chapitre, une maffe de fufE'ages capable ~e
lui donner la prépondérance affurée fur les Chanoines dans
routes les délibérations capitulaires; & fi cette union ne fut
portée que fur le temporel, c'ef!: parce qu'on ne pouvoir pas.
fe di/Iimnler que les conf!:itutions canoniques ne pom'oient
Jamais la comporter au fpirituel. Il falloir donc fe procarer·
l'union, quant au temporel, pour enfuite, par le fait & par·
des ufurpations, acquérir Je fpirirueJ.
L'union ef!: encore abufive daus fes motifs: le Pape déclare dans fa Bulle, qu'il vi~nt d'apprendre que l'Eglife Cathédrale d'Apt & routes les autres du diocefe éroient enliéremenr déréglées, tant dans le fpirituel que dans le temporel; que tous les Reél:eurs & titulaires de ces Eglifes
étaient notés par des raches & même par les crimes & les.
excès les plus graves; que le Chapitre & quelques Chanoines'
vendoient & di/Iipoient rous les biens dépendan.5 de leur&
titres: la bulle ajoute que plu lieurs EccléliaHiques, tant de
la ville, que du diocefe d'Apt, avoient éré pourvus de· leurs.
titres par limonie. Telle ef!: la bafe, & tels font les motifs.
de la réformation.
Le réformateur ne trouve cependant rien à corriger dans;
l'Eglife d'Apt, ni dans le diocefe; il ne réforma rien; il ne
trouva point de fimoniaques, poinr de déprédateurs; il ne
fit rien renrrer dans le patrimoine de l'Eglife, à l'exceptioI1>
néanmoins de foixante florins d'or que le Bénéficié Monet~'
dénon<;a lui-même. Si de pareils exçès avoient été véritables"
DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
B2..
�JOURNAL
Sabateri n'auroit pas manqué de prendre une informâtion à
ce fujee, & d'en conllaeer la preuve; il ne s'eH pourtant
pas du com occupé de ce foin; d'où il faue conclure que
quand même les abus dénoncés dans la bulle auraient .été
réels, le commiffilire réformaeeur auroie évidemn~ene prévariqué, puifque dans coue le cours de fa commiffion, il ne
s'occupa du coue point des motifs & des objets exprimés
dans la bulle. Si ces prétendus abus, fi ces défordres n'avoient aucune confiaance, les pouvoirs du Commiffaire avoient
donc pour bafe des motifs controuvés & fauffement fuppofés. Les bulles étoient donc obreptices & fubreptices.
11 en écoit du remporel comme du (pirituel; on n'avoit
pas plus befoin de réforme pour cet objee que pour ,'autre;
car outre que Sabateri ne fie rien rentrer dans le domaine
de l'Eglife d'Apt, ce qui prouve clairement qu'il n'en étoie
rien foni , le Chapitre poffède encore à préfent coutes les
Eglifes, coutes les donaei0ns & coutes les libéralités qui lui
Clnt été faites depuis fa fondation.
Le premier article des nouveaux Statuts renferme la dif.
pofieion de l'union. Il prélude par un traie de hauteur &
d'injure anquel le Chapitre n'écoie pas au cas de s'attendre:
Lex, y eH·il die, prapter traTlfgreifores & duras cervice pajita
efi. Le réformateur ajoute qu'il a entendu & vu la mauvaife
adminiHration du Chapiere d'Apt, que l'expérience des chofes
paffées & préfentes lui apprend l'énorme dilapidation des
biens du Chapiere faite autrefois par les Chanoines; & c'efi:
par ce feul moeif que le réformateur trouve bon d'unir les
Bé!,Jéficiés aux Chanoine-s, donnant à entendre qu'au moyen
de cene unioll, les biens de l'Eglife d'Apt feroient à l'avenir
mieux adminiarés. Tel eH le feul motif de l'union, de cette
union qui forme b bafe du nouveau Corps, des loix que Sabateri trouve bon de donner au Chapitre.
i\his fuffie-il à un Commiffaire de dire qu'il a vu & connu,
fans indiquer les fources dans lefquelles il puire les conlloiffances qui fervent de bafe à fon opéraeion? Les aél:es de
déprédation, s'il en fue trouvé quelqu'un, exercés par les
Chanoir!'5, n'euffent pas manqué d'êere inférés, ou tout au
I2.
�.
j) U
PAL AIS • D Il
PRO V Il.N C
lt:
l
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moins cités avec précifion dijns hl, procédure de l'union.
Pourquoi, connoiifant les dilapidations énormes' vaguement
h1emionnées dans fa procédure & fervant de bafe à l'union, ne
les a-t-il pas détaillées, pour ni~ttre au moins le Chapitre
fur. les voies, 11 l'effet de faire reüimer à l'Eglife les domaines
aliénés?
Le défaut d'annexe dl: encore uu moyen 'd'abus,. Il dl:
bien vrai -qu'à 'l'époque de l'union, le Parlement ·de Provence n'étoit pas établi; mais il eil également vrai que l'an, nexe ,date d'un t~mps amérieur à l'établiflement du Parlement. De touS les temps nos anciens Souve-rains & leurs
Officiers ont joui du droit d'annexe; nulle bulle, nul refcrit,
foit de Rome, foit d'Avignon, n'a ja!jlais pu recevoir fon
exécution en Provence, faBs l'annexe & l'approbation des
Juges locaux. GeU un point d'hinoire que perfonne n'ignore.
Or, lors de l'union dont s'agit, le pays étoit gouverné par
lll1 'de l'lOS anciens Comtes, qui ont toujours joui du droit
d'annexe, & qui n'ont jamais manqué de le foutenir contre
les contradiél:ions de la Cour de Rome. L'union a été faite
fans pouvoir, foit du Prince féculier, foit de la Puiifance
eccléGall:ique.
. II en vrai que pour les unions des bénéfices Gmples &
ordiQaires, les Lettres-patentes ne font devenues néceifaires
que pat la Déclaration de 1718; mais il n'en ell: pas de
même des unions relatives aux Eglifes majeures, fondées
ou approuvées par le Souverain, & qui par cette raifon font
conG.dérées comme étant de fondation royale. Les Lettrespatentes & la permiffion du Souverain ont toujours été néceflàires, quand il a été quell:ion de changer, par des unions
eu autrement, l'état de ces Eglifes, ainli qu'on le trouve décidé par l'Arrêt du 7 Juin 1621h rapporté dans le Journal des
Audiences, tom. l, liv. 1, chap. 26.
.
Le Com01iifaire Sabatery avoit bien, par la bulle conl1:itut ive de fes pouvoirs, ie droit ·de réformer l'Eglife d'Apt,
tam in capite, quam in membris, dans le fpirituel & dans le
temporel; il avoit, li l'on veut encore, le même droit d'infpe8:iOfl [ur toutes les Eglifes du ~iocefe : mais il n'avoit pas
�14
JOUR.NA.L
le pouvoir d'unir 2J & ce pouvoir dl: exorbitant, fingulier;
extraordinain:;. les, claufes les plus générales ne peuve nt pas
le comprendre; il a befoin d'une exprelIion particuliere.. En
effet, toute union porte avec foi aliénation; delà Rebuffe
in prax. .vicariat., n. 102., & ,Cabaffut, jus camll. theor. {,>
prax., lib. 2., n. 12., arrell:ent que I.e Vicaire-Général de l'Evêque, quoique muni des· pouvoirs les plus amples, n'a pas
néanmoins celui de procéder aux unions. Ce cas ne peut
être compris, dans le mandat, qu'autant qu'il s'y trouve ex-·
primé, ou qu'autant qu'il vient à titre de conféquence néceffaire aux expreffions que le titre renferme. En fuppofanr
que Sabateri ellt été revêtu du pouvoir d'unir, pouvoit-il jamais proc.éder à cette union & faire un corps des Statllts
fans le confentement de l'Evêque & de fon Chapitre? Les
unions ordinaires apparriennenr à l'Evêque. Ici l'Evêque
d'Apr étoit fondateur du Chapitre, il en avoit réglè la forme
& la conUitution;. il avoir voulu que le nombre des Capirulans 'ne pùt jamais être· augmenté. Telle étoit la fonda,..
tion dont le Co.mmiffaire renverfe les loix facrées. Il cite
l'Evêque ,à fon tribunal, & l'Evêque devient partie dans
l'union dont il delloit être le feul Juge. D'autre part, l'union
fut faite fans confulter les Chanoines;. elle fur faite malgré
eux. Le C,ommiffaire leur propofa l'alternative, ou de recevoir en filence & fans murmure le corps de loix qu'il
trouvait bon de leur donner, & qui avoit l'union pour bafe,
ou d'être expulfés de l'Eglife comme excommuniés, d'être
privés de leurs titres.
L'union. a été faite tout, à la fois fans forme & fans cau fe( continuoient les Chanoines. ) Quelle dl: en effet la caufe
de l'union? Le befoin de la réforme ne pouvoir pas faire
caufe d'union;. la réforme ell: le' retour de la regle & de
l'éta~ primitif. L'union, dans l'ordre général, ell: le renverfement de cet état originaire. Dans le cas particulier, l'union
des Bénéficiés & des Chanoines eH le renverfement de toue
l'ordre ~ & le germe de <iifcorde fans fin. En fuppofant que.
le n:onf .o~ l'obligation de réformer l'Eglife pût être une
ça\lle legltlme d'union, il faud.roit 'lu moins que dans ce
�DU
PAL Al S
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PRO V 1l N C n;
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-tas cètte réforme fût légicimé~ .&; j confiatée par la proeé. <iure. Il ell: de prinoipe, 1°. qoe' nulle union légitime fans
<caufe légitime; 2.°. que la caufe ,de ,l'union doit être eonCtatée par la procédure d'uni@n. Ici l'on ne trouve rien ,de'
pareil.
En vain diroit-on que les ,bulles de Gregoire XI f@l1t
rendues proprio motu. En France, on n'a j<lmais adm:is les
unions en forme gracieufe & ,de .pur mouvement; le Pape
ne peur un·ir qu'en forme 'commiffoire, & fèr1/otis fè"'lIa~ldi'S ,
-c'eil:~à-dire, pour juüe caufe, & eh faifant conlier de la caufe
dans la procédure d'union. Ce' principe ell: atttefié par Fevret, de l'ahus, liv. 2, chap. 4; par' les Commentateurs de
l'los Libenés, fur l'art. 42.; par l'Auteur du Diél:ionnaire Canonique, \,0. ullion; par Cabalfur, jllr. canon. theor. & prax.,
lib. 2., cap. I I , n. '12.; pH d'Hericourt, Loix eccléf., char.
21 , n. 2.0; par Van~Efpen, tom. 1 , part..2., fe&. 3, tit. 12.,
D.
3-
\
.
L'union fut faite' fans regle & fans forme; elle fut faite
arbitrairement, par pure faveur pour ,le iPrév0t & les ,Bénéficiés. La forme ef!: réglée pour établir 1& confl:ater la caufe,
& cette caufe efi l'utilité de l'Egl-ife. La premiere caufe
·d'union, la plus effentielle de toutes, celle fans laquelle toute
union ne peut être qu'abuGve, eil: puifée dans l'objet de
l'utilité. La forme la plus indifpenfable eil: denc le rapport
d'! commodo & incommodo, qui doit c0nfiater & mett·re au
jour cette utilité. La forme qui confiate la caufe· éil: donc
l'effence 'du t'itre, & la nue expr,effion de 13 caufene fuffit
'pas pour'l~établir; les Loix e~ig~nt une prooédure juil:ificative
du fa·if.. li'
•
.
Cede '!un,ien efi encore àbuGve da·nis fes eH"ets. On fent
'bien que l'union des Chs'nomes & des :Bénéficiés ne pou·voit jamais ttr.e ,pour l'avenir qu'un germe ,de d·ivifions. Les
Bénéficiés, ligués avec 1e Prévet, ne p.ouvoient que donner
1a loi au Chapitre cl/Apt) 'en fa'ifal'lt préva~bi·r leurs fuffrages
2l ceux des dOll!le f Oha~ojnes/ IQù~iqu'il (oit ~it par ,les Au-teurs, & entr'auttes par de Luoa ~é.'fllinollicis, dife. 20, n. 1'2,
-que les :Eénéficiés -peuvent aoquérir -l!entrée ,au Chapitre, -e«
�16
J~ 0 U'R N A·~
titlllo'. veZ con[uewdirze, l'Eglife d'Ap.t ell néanmoins la feuledu Royaume où l'on trouve 'un. pareil établilfemenr. L'union
des Bénéficiés aux Chanoines a défiguré l'état de cerre Eglife.;
elle y a fait une bigarrure infupportable & deftruél:ive· de
toute fubordim.tion; elle a ouvert la porte à rau~ les. abus.,
t-ant dans le fpir.iruel· que dans le temporel.. N'dl-il. pas· biel}
étrange que .des Bénéficié·!; foient JtJges des· Dignitdires &
des Chanoines? L'abus d'un, pareil. état peut-il. être toléré-?
Le temps peut-il jamais e.n effacer la· difformité?
Cet~e introduél:ion dan.s le Chapitre n'eft pas limitée au
cas où· il fera. queftion de délibérer fur l'économique; elle
ne peut pa.s même porter fur cet objet. Les Bénéficiés éraient
appellés peur P'économique dans !DUS· les cas, par la pre,.
miere difpofition du Statut;, la difpofition ultérieure qui leur
donne un nouveau titre d'intrOG4él:ion., lorfqu?il n'y aura pas
plus, de. deux Cha,noines, doit donc. porter fur tout autre
cas & fur tout autre objet. Le Statût donne donc titre aux
Bénéficiés, à Eeffet d'entrer en Chapitré fjuoad jUl'ifdiélionalia"
& il renferme·, qua,nt à ce, une véritable union.
Inutilement oppoferoit-on le Concile de Conftance & la
Déclaration de Franc;ois Premier, confirmative de la difpo,.
!ition de ce. Concile; ce Concile déclare nulles les unions
faites depuis le clécès de. Gregoire XI , qui n'auront pas été
faites ex ratÎonahilihus caufis & vais. Cerre di{polition du Con~
cile eut pour objet celui de remédier aux défordres qu'avait
occ.alioné le fchifme des Antipapes, & parmi lefquels étoient
les unions fans caufe. C'en l'obfervatÏ,on de·t-ous les A\lteurS'•.
Le Coo.cile n'a pas voulu dire q\le les, unions aFltérje~res au
décès de Gregoire XI, & faitës fans caufe, devoie,flt êtrê
maintenues; il a-vpulu feulement exiger la'preuve de.la caufe
ju!l:e & raifonnable, quant aux unions faite.s après le décès
de Gregoire XI-, & dans·le temps des Antipapes. Il y a donc
~ela de remarquable-, quant- au){-run-Îons faites dans- ce temps
de trouble & de fca,ndale, qu'po n p.eu,t ]e.s valider" qu'au~
tant qu'il conne q~ la ca.ufe légitime qui· leur fert de bafe;
nu lieu que, les autres·,uniqns., quand elles ont une certaine
vé{uHé 1 font r~Pl!tées légitimes, fi le tit~e, ne paraît pas",
ql/za.
�nu PALAIS DE PROVENCE. .
17
1uia in antiquis amnia prœfumuntur ritè ac folemniter ac1a. Mais
q~and le tirre paroît & qu'il confie de l'abus, ce .titre doit
êrre profcrit, quelque ancien qu'il puiffe être, riel} ne pouvant effacer le vice d'une union abufive.
Dans l'ordre général, qu'efi-ce qu'un Bénéficié, fi ce n'ell:
un Minifire de fubfide & fervitorial, établi dans l'Eglife pour'
fupporrer le poids de la chaleur & du jour. Dans le principe, . il n'exifioit que des Chanoines;. dans la fuire, le3
Chanoines, oblig.és de fervir les Patoi!fes données à l'Eglife~
occupés au fervice paroiffial, furent obligés de fe faire repréfenrer par des minif1res fubalternes, qui furent artachés
au fervice canonical;. delà la dénomination d'ajJz/ii qui leur
eH donnée dans le rexte du droit canonique, dans le Concile d'Aix & dans rous les' Aureurs, aJ!zfii quaji aiJidui. AufIi
les Bénéficiés font-ils regardés par-tour, non eomme mem'bres, maïs comme fervireurs du Chapirre : non fimt de capitula, fed iflius nudi miniflri ac fervitores. (De Lllca, de parr-och., dik. 23, n. 13, & rir. de canon., difc. 7, n, 7, difc.
20, n. 6, & difc•. 32;, n. II;' Goard', rom. 1 , pag. 711 ;
Van-Efpen, ro.m. l , parr. 1, feél:. 3, rir. 1, cap. 4;. Barbofa,
de canon. & dignit. Bede!, cap. 4, n. 36;. Bou,hel, Bihliatheque
canon. rom,. 1, pag. ,)70;' Lacombe, va. préhende ;. & Fagnan
fur le chap. nul/us de dec? ) Detà les Arrêts ont décidé que
les Bénéficiés, par la nature de leur tirre, n'entrenr point·
en Chapirre;. qu'ils. n'ont ancun tirre d'aciminifiration fur les
biens communs;. qu'ils n'am' pas même 13 facnlté de s'afkmbler pour l'adminifiration de leurs biens propres, attendu
qu'ils les tiennent du Chapirre, qui continue d'en' être le modérateur & l'adminiHrateur. Delà les Arrêts .qui enjoignent'
aux Bénéficiés de porrer honneur & refpeél: aux Chanoines,"
& d'o~éir au Chapitre avec foumiffion en tour cequi concernele fervice de l'Eglife & du ChœuL
, On oppoCe enfin au Cbapitre, que cette union dure àepuis'
quatre fieCles, qu'elle eil: cimenrée par une foule d'aél:es
exécutifs;. aél:es judiciaires qui ont l'union pour bafe. Mais iL
eHde principe que jamais on n'a congu de prefcription en,
mati.ere' d'union;. J'abus en cette matiere eil ab[olu , & l'abus;
Anl/é.es ln 5 & /Ui'llL
C
�IS
JOU R N.A L
abfolu efi imprefcriprible , etiam per mille annos. (Lacombe,.
va. union, feél:. 9, n. I ; d'Hericourr, part. I , ch.' 21, n.
2') ; Catelan, liv. r, ch. 67') Ce dernier Auteur rapp~rre
des Arrêts qui ont déclare y aVOIr abus dans des umons
fjites long temps auparavant le ~oncile de Confiance; 1'0 n
en trouve plufieurs autres rapporres dans le Journal des Audiences, & enfin celui du Parlement d'Aix du 26 Juillet
I 683 déclara y avoir abus dans l'union de la Cure de Draguignan à l'Archidiaconé d'Aix. Quand le titre ne paroît
pas, on préfume pour fa validité. Le laps du temps donne
lieu de fuppofer que toutes les formalités ont été remplies,
& que le titre qui a long temps fiJbfifié, ne renfermoit
point de vice. Quand le titre paroît, quand l'abus en efi
conHaté, le laps du temps ne peut qu'en aggraver les vices,
& rendre la néceffité de les réparer tOujours plus favorable
& plus prelfante ; c'eH ainfi que l'obferve Decormis, tom. 1,
col. 280.
On répondait pour les Bénéficiés, que fuivant tous les Tu.
rifconfultes, l'union efi la jonB:ion d'une Eglife ou d'un
bénéfice à un autre, faite par l'Evêque pu autre fupérieur
légitime, & felon la forme prefcrite par les Canons & par
les Ordonnances du Souve'rain. L'on connaît trois forres
d'unions; l'une. faite avec fuppreffion d'une des Eglifes QU
d'un des bénéfices que l'on unit; l'autre avec confervation
des deux titres, mais pour demeurer dépendans l'un de
l'autre; la troifieme fe fait avec confervation des deux titres,
pour fub(jfier œquè prirlcipaliter, à la charge néanmoins que
les deux tirres réunis ne pourront à l'avenir être polfédés
que par un feul & même Bénéficié.
En général, les unions font odieufes; elles diminuent le
nombre des Minifires établis pour chaque bénéfice. Elles
font contraires à la èommune utili té des Eglifes; elles peuvent être préfenrées comme une efpece d'aliénation,. attendu
que par l'union, le bénéfice efi en quelque forte fupprimé,
ou du-moins réellement altéré, & qu'il perd fa premiere
nature & fon premier état. Comme les unions troublent
l'ordre extérieur des Eglifes, on a voulu qu'elles ne pulfen~_
�DU
PAL AIS
D II
PRO VEN C E.
J
C)
étre faites fans les plus grandes précautions. Delà toutes
les formalités fans nombre qui font établies par nos Loix;
mais ici il n'y a aucune union.
.
Quelle union a fait Sabateri? Celle des Clercs au Chapiere difent les Chanoines; mais bn n'unit pas ce qui l'dl:
déja. 'De toUS les temps les Clercs ont été dans le Chapitre; ils ont toujours participé à la menfe. commune. Les
Chauoines n'avoient qu'un quart de pain de plus qu'eux
dans les di!lriburions; pour ce qui eH de l'argent, ils le
parrageoient également. Aucune grace ne pouvait fe faire
fans le concours de treize Chanoines & de treize Clercs.
prébendés; ceux-ci étoient Ii bien unis au Chapitre, qu'ils
étaient obligés, comme les Chanoines, à défendre de leurs.
propres deniers les droits, les libertés de l'Egljfe, du Chapitre & des prébendes canoniales, quand les revenus de la
Communauté ne fuffjfoient pas. Donc Saba te ri n'a ni uni,
ni pu unir ce qui étoit déja uni, ce qui ne formoit déja
qu'uu feût tout. Les Bénéficiés n'ont éprouvé aucune ré-.
volurion par rapport auil: titres, ni par ropport. aux titulaires;:
les titres & les titulaires ont rené en même nombre &
dans le même état.. Donc il n'y a aucune union de bénéfice s.
Sabate ri n'a fait que deux opérations fubféquentes l'une
à .l'autre ; il a Ofdonné qué tous les fruits & revenus des.
Clercs appartenans à leurs béné6.ces, canjllllélim veZ divifùn ,.
à l'exception des gros fruits de leurs prébendes, feroient
incorporés aux autres biens du Chapitre, & verfés dans la
menfe commune; & il a décidé qu'à l'avenir les Clercs ne·
pourroient rien délibérer fur la temporaJ-ité fans les Chh
naines, & les Chanoines fans les Clercs. La premiere de.
ces opératio.ns n'eH point préfenrée comme une union ca ...
nonique; elle ne peut l'être. On ne voit dans cette iacor.."
poration qu'une loi d'économie, .qu'une loi d'admini!lration
qu'une affociatiùn fraternelle des recours & des forces corn~
rnunes, qu'une communion temporelle, & non une union
. canonique. Sabateri n'affocie point indéfiniment les Clercs..
aux Chanoines, mais feulement fitper eanis, redditiDILS' ~
C4<.
"
�-/
2:0
JOURNAL
proventis, & dans l'unique vue d'empêcher que les Chanoinès
puilfent difpofer des biens fans les Clercs, & les Cl' res
fans les Chanoines.
En fuppofant que les Clercs avant SaQateri n'eulfent pas
le droit de voter avec les Chanoines' dans les affaires temporelles, les Chanoines auraient pu les appeller eux-mêmes
dans leurs confeils, & les faire voter avec eux. Il eft convenu que par le feul ufage ex conJùetudine, les Bénéficiés
peuvent voter in remporalibus. Or ce droit de voter avec
les Chanoines, qui peut être acquis par le feul laps du
temps, ne peut être regardé 'Comme une union canonique,
à l'effet d'avoir befoin, pour le légitimer, de routes les
formalités qui font requifes par les Loix.
Il eil vrai qu'il dl: des Bénéficiés qui ne font pas membres du Chapitre, & qui n'en font que les ferviteurs,
comme ayant été fondés par le Cnilpitre·& pour aider les
Chanoines. C'eft dans ce fens que les Auteurs difent avec
raifon, & que les Arrêts ont jugé que Beneftcïati qui non
funt Canonici, non vocantur' ad communes trac7atus cum Canonicïs. Mais il eH des Bénéficiés d'une autre efpece. Tels
font ceux qui éroient Clercs prébendés ou décimateurs, &
qui' ont été annexés au Chapitre afin d'en augmenter les revenus, & dont l'entretien n'a par conféquent point furchargé la menfe. De la différence des titres devoit néceffairement fuivre la différence des prérogatives: delà fi les
Bénéficiés établis feulement pour le foulagement des Chanoines ont été exclus du Chapitre, les autres qui one augmenté les biens y ont été admis. C'ef!: la remarque de
Lotherius , de re beneftciariâ, lib. l , quo 1'), n. 14; ita Gonzalés fur la regle de menfibus, glof. 4') , n. 39, & la glofe
fur le chap. pénult. de Claie. non reJidentibus. Le Concile
du Me:xique, de erec7. Ecclef. Mexiq. §. 7 & 33 , donne
également I~ droit aux prébendés de voter en Chapitre dans'
toutes les affairès tant fpirituelles que temporelles, excepté
dans les éleB:ions. D'autres Auteurs ajoutent que les Bénéficiers-Clercs peuvent acquérir le droit de voter par la
coutume o.ll par titre particulier. (De Luca, de Canonicis):
�bu
lIb. a, pan.
PA LA 15
Dl!
2r
PROVENCE:
difc. 20, n. S & {eq.; Van.Efpen, tom. l ,
'parr. l,. tir. 7, cap. S de congregationihus Capitul. n. 3;
Fagnan in cap. nul/us 1 extra de ele8. n. 37, & fur le chap.
-cùm Ecclejia extra de callf poj[. fI propr. n. 24; Barbofa,
de officia & poteflate Epifcopi, part. 3, allég. 72, n. 10;
!Farinacius , decif Rotœ, part. l, déc if. 2.96, n.
Lacombe, Juri'/p. cano vO • fiiffrages.)
Mais q.u'enrend-ob par abus? Quand il s'agit de juger
la procédure d'un Official, on -appelle abus, la contravention
·aux Ordonnances. Quand il el} queilion de juger la conftirmion d'un Corps, les Loix ilatutaires d'un Chapirre, il
faut confronte.r les Statuts ou le régime de ce Corps,
10. avec les principes de la Loi naturelle, fource de toutes
0
les Loix; 2. • avec les bonnes mœurs. On appelle coniliturion abufive, celle qui choque ou les Loix pofitives, divines ou humaines, ou les bonnes mœurs, ou les Loix nat~relles. Voilà le feul abus intolérable, le feul abus qui puilfe
êrre dénoncé aux Tribunaux, & qui puilfe renverfer une
conilirution ou régime vicieux. Appeller les Bénéficiés dans
les alfemblées capitulaires, leur donner le droie d'y voeer ,
les alfocier aux Chanoines dans l'adminiilration des biens,
n' dl: pas choquer le droie naturel ou les bonnes mœurs, ou
les Loix pofitives, divines ou humaînes.
Il y a plus : non feulement le Statue n'eil point ahufif,'
il ef!: juf!:e. Les Bénéficiés d'Apt ne font point ferviteurs;
Hs font Ciers prébendés. La prébende, fuivant tous les Canoniiles, eil un vrai titre, un vrai titre fpirituel, efl alirjuid
fPirituale. Cela a été jugé en 177 1 d.ans une affaire qui
s'écoie élevée dans le Chapitre de Sill:eron, au fujee d'un
Chanoine à qui l'on avoie réfigné· un autre Canonicat plus
forcement prébendé. On difoie à ce réfignataire : votre titre
efl vicieux; VOliS étier déja Chanoine; on ne vous li donc
donné 'lue quel<jue clwfe de temporel, c'efl-a-dire, une plus
forte prébende. Le réfignaraire répondoit: la prébende efl
un titre ./pirituel ; j'ai donc un titre qui réunit le '/piritlle! f;'
le temporel. L'Arrêt fut prononcé en fa faveur. Les Béoébciés d'Ape fone prébendés i· ils fOGt vrais "titulaires dans le
2,
s;
....
~
:'1.
•
••
�Jou RNA L
Chapitre; rien n'empêche donc qu'ils aient part, non feule~
ment à l'admini{hation temporelle, mais encore aux cJ:ofes.
fpiriruelles, quoad fPiritualia. Le concours des biens dans
la menfe commune ne doir-il pas autorifer le concours des.
fuffrages dans l'adminifirarion ?
Sur le moyen d'abus tiré du manque de pouvoir, l'on'
répond oit que la Bulle, après avoir déraillé quelques opérations, donne pouvoir au Commiffaire de faire tout ce qui
lui paroîtra néceffaire ou utile : omnia aUa quœ ti6i videhuntur nece./faria feu utilia in reformatio-ne. Ces expreffions
annoncent le pouvoir le plus parfait & le plus étendu. Le
Pape ne commer pas Sabareri pour unir, mais pour réformer; il ne pouvait favoir de fa place quels étoient les
moyens' qu'il falloir prendre pour réformer l'Eglife d'Apr•.
Ils dépendoient de la nature du mal, des circonftances,
des reffources locales. 'Conféquemmenr le Pape ne pouvoit
prefcrire en dérail ce qu'il ignorair; tous les moyens poffihIes .de réforme entroient dans le plan de la miffion, & le
pouvoir ne manqnoir pas.
.
Sur les moyens d'abus tirés' du manque de form:es, l'on'
obfervoit qu'il ne s'agiffoit point d'un aél:e privé de JlIrifdiaion pour lequel il faudroir une requifition ,,& une partie
requéranrè : il s'agiffoit d'un aél:e de gouvernement, d'un.
aéte de cette folliciwde générale qui veille pour tous &
contre tous. C'efl: un principe qu'aucun établiffement ne peut
être forme dans un Etat fans l'alltorifation de cet Etat.
Cependant l'Edit de 1666 confirme touS les établiffemens
qui, quoique dénués de Lettres-patentes, remontent à une
certaine époque; parce que, quoique le principe fût préexiftant à tomes les époques., le Roi n'en avoit pO'int encore
fait une applicarion auffi précife; parce que, nonobfrant
l'Edit de 1666, on ne fe pourvoyoit de Lewes - patentes
que quand il s'agiffoit de gr<;Qdes fondations, & parc.e
qu'avant l'Edi.t de 1749, l'application du principe qui requiert l'intervention du Souverain n'avolt pas éré faite préçifément à tous les établiffemens quelconques. Le principe
elli(toÎt; mais il n'a,voit point encore re~u fon développe..,_
''1'1
,
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PALAIS
DE
PROVENCE:
~3
tlient. Or nulle loi qui, à l'époque dom s'agie, aie requIs
des Lecrres-pa(enees, & l'intervention de l'autorité féculiere pour les unions. On ne peut donc exciper du défaur de
cette intervention, ainli que l'obferve Mr. Cochin, tom. 3,
pag. 46).
L'annexe était fans dame connue en Provence avant l'Înftitution du Parlement tel qu'il eft. Dans le temps que la
Provence f9rmoit un Etat féparé , fes premiers Magiftrats ne
laiffoient rien exécurer dans leur reffore fans leur permiffion,-qu'on appelloit placet, paréatis ou annexe. Le premier eiere
que l'on préfenfe feus les Comtes de Provence, corn me renfermant le germe du droit d'annexe, eU un Edie du Roi Louis
III. donné à Averfe dans le Royaume de Naples le 20 Novembre 1424. Cet Edit n'établit pas le droit d'annexe, tel
que nous l'entendons. n n'eU relatif qu'aux formalités à
obferver, avant de pouv.oir exécuter les lettres du Prince luimême; ce n'eH que dans une Ordonnance du Confeil éminent, rendue le 19 Mars 1) 82 , que l'on erouve l'origine développée du droit d'annexe. Jr le fratue de Sabate ri efr antérieur à l'une & à l'autre '.~; ne peue donc le juger
fur ces Ordonnances.
Quant à l'informaeion ,..: commodo & incommodo, ellè a
été faite; Sabaeeri déclare hautement qu'il a vu & entendu:
audivimus & prœ{entialiter vidimus inordinatum reginem Capituli. Pour entendre & voir, il faut néceffairemenc s'enquérir;
c'eU ce qu'il a fait; il a parcouru les eieres du Chapitre,
il a écoueé les plaintes & les prieres, il les a pefées; il déclare qu'il a rempli toutes les folemnités , omnibus folemniter
aais. Que falloit-il de plus? In anti'luis enunciativa probant.
D'ailleurs la formalité de l'information de commodo & incommodo a moins éeé introduite par une loi que par un
ufage. L'on trouve dans l'Abrégé des Mémoires du Clergé,
au mot poffiifion , que ces informations peuvene être préfuruées après un long efNce de temps. Formalitates prœfumuntur, dit pu moulin fur la coutume de Paris, tir. 6 des {ervitudes, §. 80. Le Concile de Trente paroÎt ne demander
que 40 ans pour prefcrire ces forres de formalités, & les J u-
�24
Jou- RNA
L
rifconfultes les plus rigoureux n'exigent que -cent ans. ' Id
les opérations de Sabateri fone faites depuis quafre fiecles.
Le confentem~nt des parties- ef!: exprès, vocatis vocandis,\
porte le f!:atur. On lir même dans un acre pof!:érieur, que roue
a éré fair à la priere des parties, poflulan-tibus Jùpra dic1is
partibus. Avant route opération., des lettres ciraroires· furene
expédiées & affichées aux portes de l'Eglife. Les Chanoines
comparurent. On attendit les abfens au delà même du temps
de droir. L'Evêque & les Chanoines pérorerenr, foir avant,.
foit après le f!:arut; ils fe répaRdirent en éloges fur le Pape,
le Commilfaire & le Statut. Rilè , fanBe & legitimè fac1a.
Peut-on avoir la preuve d'un confentement plus réfléchi &.
plus folemnel? Depuis que les {btuts ont été donnés, chaq~e année a fourni la preuve d'un nouveau conlèntement. Les·
excommunicarions & les. cenfures éroient à l'époque des fia(litS, des claufes de Hyle , des claufes ordinaires dans le. lan- .
gage du temps.
La caufe qui a donné lieu aux f!:atuts done s'agit, fe trouvedans le réglemenr de 1 J27 , fair pour la reHitution des ritres & des biens du Chapitre, dans l'article 43 des ftatuts
faits en 1337, qui prohib~ les ventes colorées des biens du
Chapitre; dans la fupplique préfentée par les Chanoines à·
l'Evêque en 1369, pour lui demander l'union· de. l'office de
Sacrjftain à une prébende- cléricale, attendu l'extrême pauvreté du Chapitre, auentis exiguitate, tenuitate & egeflate;,. on.
expofe dans le même acre que les mœurs fom dans le plus
grand délabrement ;. que le Culte divin. ne' fe fair plus avec.
décen'cè ; que l'honnêteté s'affoiblit, & que l'on en. gouverné.
de la maniere la plus indécente. Ces preuves fonr frappantes;.
ce n'ell point Sabareri qui les donne; elles ont précédé fa
miffion, on les tient des Chanoines eux-mêmes.. Donc la.
prérendue union. a été faite avec caufe•. La difcuffion de ce·
mOy'en fair tomber celui que l'union. a éré faite pour caufe:
faulfe & illégitime.
Sur l'abus dans les effets progreffifs de l'union, on ob..:
fr:rvoit que .les Bénéfiçiés, fuivant rous les Auteurs ,. font:
capable~
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PALAIS
DB
PROVBNCB.
'-;
capables de voter 'dans les Chapitres; le droit commun ne
leur attribue pas cette faculté, mais il ne la leur interdit
pas. Il s'agit ici, non d'une infiittltion qui fait contre le
droit, mais feulement d'une inilitution prœter jus. Les Bénéficiés d'Apt ont donc pu f2ns abus acquérir le droit de
voter in fPiritualihùs & quoad juri[diaionalia. Si une colltume
immémoriale, fi un titre certain leur affure!)t ce droit, ils
doivent en jouir fans trouble. Dans certaines Cathédrales,
les Bénéficiés onr été fondés par le Chapitre; ils font l'ouvrage du Chapitre dans l'EgliCe d'Apt; les Bénéficiers font
contemporains aux Chanoines; ils exiftenr & ont exiilé de
tous les temps; avant la loi de Sabateri , ils adminiilroient
leur propre bien; ils contratl:oient, ils tranligeoienr 1'ice fi
nomine Ecclefzœ. Ils formaient donc un corps indépendant, &
non un corps fournis. Dans l'EgliCe d'Apt, les Bénéficiés peuvent réligller leurs bénéfices; ils ne reconnoiffenr aUC'lne inC·
tirution purement fervile; ils peuvent s'abfenrer' fans la permillion des Chanoines; ils fom Cous la dépendance de la loi,
& non fous celle de J'homme. De tous les temps les Bénéficiés ont été repréCentés comme CuCçeptibles de toutes les
dignités, de tous les honneurs Ecclélialtiques ; s'il y a capacité, il ne fauroit y avoir abus; donc il n'y a point abus dans
les effets progreffifs de l'union.
D'après la diCcullion des moyens d'abus, plulieurs fins de
non-recevoir viennent au Cecours des Bénéficiés. JO. Les Chanoines font non-recevables à appell r comme d'abus d'une,
union qui n'exiHe pas. Sabateri n'a fait que deux opérations:
recomblemenc des revenus dans la men Ce commune, & voil(
en Chapitre donnée aux Bénéficiés dans les affaires temporelles. '2,0. Les parties ont confolidé par leur confentemenc
toutes les opérations de Sabateri ; un jugeme,nt acquieCçé ac_
quiert la force & l'autorité d'un jugeme,nr fouverain & irré.
formable. En matiere de Loix EccléliaHiques, dès qu'une loi
eil acceptée, elle eft inattaquable. Par l'acceptation, elle re_
coit la derniere forme; elle eH conCommée ; leges fiP!1Jontur't
~ùm marihus utentillm approhanrur, Canon Cllm iflis, dift. 4;li y a plus: 1<:: ilarut qu'on attaque il (ervj de baCe & de p,Î(o-
.dnrlées 1775 & jùiv:
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, ] 0 V R 2;' A L
cipe de décilion lors des Arrc~ts qui ont été rendus; les deu"
parties l'invoquoient ég-alement pour leur défènfe; la Cour &
les alltres Tribunaux l'ont pris pour fondement de leurs oracles; des tranfaélioll,s fone enfilite intervenues; ce font des
aéles folemnels contre lefquels les Ordonnances ne permettent pas de revenir, & qui ont toute l'autorité de la Lhofe
iugée, larfque fur-tout elles font luivies de l'exéCUtion la
plus conHame & la "plus tranquille. .
La derniere fin de non-recevoir eH tirée de la prefcriptian. L'on fait que l'abus ne prefcrit pas, abufus femper cla- .
mat; mais il faut diltinguer l'abus abfolu, de l'abus relatif:
L'abus ahfolu eH celui dont le vice fe perpétue dans l'effet,
celui qui concerne le droit public, qui intérefle l'autorité
royale, qui va contre la police générale de l'Eglife , contre les mœurs ou contre le droit naturel. L'abus relatif ou
refpeélif eH celui qui ne touche qu'à l'intérêt des particuliers , ou à des chofes de pur accident. La premiere efpece
d'abus ne peut être couverte, ni par le laps du temps, ni
pat la convention des parties, ni par aucun autre aéle. Un
abus, quoiqu'ancien, n'en eft pas moins un abus. Mais l'abus
de la feconde efpece, c'efl-à-dire, J'abus refpeélif, fe couvr-e &. par le laps du témps, & par la convention des par. ties; cette diftinélion eft établie par touS les Auteurs, & notamment dans le fecond tome du Journal du Palais, par Mr.
de St. Martin, Avocat-Général du Parlement de cette Rravince: or l'abus prétendu n'ea point abfolu, mais feulement relatif. Il y a plus: le Concile de ConHance' n'a révoqué que les unions faites depuis la mort de Gregoire XI.
fJns aucune caufe jufie & raifonnable. Donc les Chanoines
fùnt non-recevables à attaquer la prétendue union, puirqu'elle
a une julJ:e caure, & qu'elle a précédé d'environ 40 ans le Concile de ConHance.
On dirait pour le Prévôt, que dans les premiers temps,
l'Eglire d'Apt, à l'exemple de toutes les Cathédrales, étoit
deffervie par une Communauté d'Eccléllai1:iques vivant en
commun avec l'Evêque. Ce dernier jouiffbit des dlmes., des
oblations, des prémices' & autres libéralités des Fideles, donG
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
'27
il formoit une menfe pour la fubfiltance de la Communauté.
Cet alfemblage des Clercs éloit une efpece de Séminaire,
où ceux qui.fe dellinoient au Sacerdoce faifoient leurs épreuves & -s'inHruifoient. L'Evêque, que les foins du Diocefe
empêchaient fauve nt d~ veill~r par lui-même fur fes Clercs
& de pourvoir à 'leurs befoins, s'en déchargeait fur un
de fes Prêtres, qu'il mettoit à la tête de fan Clergé; &
ce Supérieur, à raifon des pouvoirs de l'Evêque dont il
était revêtu, s'appelloit Prépo[é ou Prévôt, c'efi-à-dire
le Vicaire de l'Evêque, pour veiller à fon défaut fur la
Communauté des Clercs. Ainfi, à ne confuiter que cet ordre
général. cene maniere d'être des Eglifes Cathedrales,
avant que chacune d'elles eût acquis une conHitution particuliere, il efi indubitable que l'Eglife d'Apt avait, indépendamment de l'Evêque, & fotJs fan infpeélion, un Chef,
un Supérieur, en un mot un Prévôt, avant la création
des dàuze Chanoines en 991. Une Charte de l'an' 8) 2
nous apprend que le Clergé de cette Cathédrale était
compofé de l'Evêque, du .Prévôt, d'un Archidiacre, de
Prêtres, de Diacres, de Sous-Diacres & de Lévites; on
y voit figné Raymol/dus Prœpofzws. '
On trauve dans un cartulaire du Chapitre un aéle fous
la date du 7 des Ides de Juillet de l'an 38 du regne
de Conrad, indiélion XI, par lequel Agilbert, Prévôt de
Cette Eglife, fit donation à un Prêtre appellé Framberws,
d'une terre inculte, fous la condition qu'après 'fa mort
elle appartiendrait à l'Eglife d'Apt, fous le nom de Ste.
Marie & de St. Callor. La dignité du Prévôt avait donc
dans l'Eglife d'Apt une exillence antérieure à 991 , époque
de l'érabliffement de douze Chanoines pour vivre en commun. Dans un aél:e de l'an 1 12.2., portant inféodation du
Châreau de Crugiere de Saignon, fous la direéle de l'Eglife
d'Apt, le Prévôr elt déligné fous le nom de Chanoine
Majeur, Major Ca nOl/iCI/s. La préémi)lence, la fupùiorité
du Prévôr, [ont encore mieux prouvées par les Statuts anté.
rieurs à ceux de I372.
En 12.30, le Chapitre fit un Réglemenc {ur la table
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commune; le Prévôt y efr reprélenté comme ayàne, 11 cau(è' ,
de fa dignité, le droit de rour régler avec l'autorité d'un
Supérieur. Ce Réglement ne mer aucune diJférence entre
les Chanoines & les Clercs qui vivcÏ-nt à la table commune, mais il établit des diHinél:ions pour le Prévôt. On
fit des Statuts en 1277. La fupériorité du Prévôt y dl:
marquée à des traits non équivoques, puifque l'arr. 18 porre
que les Chanoines & les' Clercs lui doivent obéiffance.
L'art. 20 lui donne la premiere voix en Chapitre. Aux
termes de ces Statuts, c'ell en la perfonne du Prévôt gue
réCident toutes les aél:ions du Chapitre. Les difpoCirions du
Statut de 1337 renouvellent, à l'égard du Prévôt, routes
les 'difpolitions de ceux de 1277.
Du côté des revenus, ceux dont le Prévôt jouiffoir répondoient à la dignité & à la prééminence de fan Béné.,.
fice.; fa Prébende étoit très-conlidérable, & excédait bien
au-delà du double celles des autres Chanoines; & indépendamment de fa Prébende, il avoit encore à lui feul la
huirieme portion des fruits des huir Prébendes qui appartenaient à la menfe capitulaire. Il étoit jufle que le Chef
du Chapitre, qui devait pourvoir 11 rout, eût un revenu
prus conlidérable que les autres Chanoines. Tel étaie l'érat
de la prépolirure dans les temps antérieurs aux Statuts de
1372. Le Prévôt était donc, c'omme il efl aujourd'hui, le
Chef, le Supérieur de fan Chapitre; les Chanoines & les
Clercs lui devaient obéilfance; il avait donc la prééminence des prérogatives : en un mot fan Bénéfice était,
& du côté de l'honorifique, & du côté du temporel, dans
le même etat qu'on le voit aujourd'hui; dans la difcuffion
des moyens propofés par les Chanoines contre les Statuts
de 1372, on fe fervoit pour la défenfe du Prévôt des mêmes
raifons gue les Bénéficiés leur oppofoient.
Arrêt du 2 Juin 1775, au rapport de Mr. le Confeiller
de Ba1lon, qui déclare l'Econome du Chapitre non-recevable'
en fan appel comme d'abus; & le cond,amne à l'amende &
aux dépens envers toutes les parties. Ecrivant Mes. Gaffier,
Portalis & Barlet.
�nu
PAt,ÙS
DR
ARRÊT
PlI.OVRNCB:
III.
Le droit d'offrir peut Ùre exercé pendant trente ans contre
le Créancier colloqué, & le Créancier perdant ne peut être
forcé à l'exercer plutôt.
A Dame Lesbros, obligée de Ce colloquer pOUI fa
dot & droits, prit une maifon pour le prix de 1730b
liv. Elle fut déclarée créanciere perdante de 1243° liv.
que le fieur Brignol, comme repréfentant fan pere qui
avoit répondu la dot, fut obligé de payer. Le 3 l Mai
1770 Sentence qui le condamne à ce paiement, fauf à lui
d'ufer du droit d'offrir fur les "biens pris en collocation par
la Dame Lesbros; elle demanda enfuite permiffion à la
Cour de vendre cette maifon pour en payer les créanciers
hypothécaires d'une bail:ide que fan mari avait acquife. Arrêt
du 13 Mars 1771, qui permet la vente de la maifon am:
encheres.
"
Le défaut d'encheres obligea la Dame Lesbros de tenir
un ~ae au fieur Brignol; elle l'interpella de déclarer s'il
vouloit ufer dans le moment de fon droit d'offrir; il ne
répondit rien: le 13 Juin la Dame Lesbros préfenta Uile
Requête à la Cour; elle demanda injonaion au fieur Brignol d'exerce'r 'fan droit d'offrir dans huitaine, ou de s'en,
départir. Décret qui accorde les fins. Le fieur Brignol demande la révocation de ce décret; renvoi en jugement.
On di fait pour le fieur Brignol, que le droit d'offrir ea:
donné in folatium amijfi debiti; la durée eil: de 30 ans;
on ne peur jamais abréger çe ce ms de droit, fur-tout quand
le droit forme un patrimoine & un bien réel; en regle
ordinaire, l'aaion feroit odieufe. Dans le cas préfent la Dame
Lesbros eft colloquée pour caufe de vergence; la loi lui
défend l'aaion de vente jufqu'au moment où la collocation
devient définitive. C'eft aÏnli que le décident Boniface, rom.
L
•
•
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R N_A L
l , liv. 6, tit• .5, chap. 2.; Decormis, tom. 2., col. 1283;
Mr. de Bezieux, liv. 3 , chap. 12, §. 3 , col. 2. 1 3 ; & Faber,
déf. !., cod. de jur. dotium. Le Décret renferme donc deux
vices; la. il veut faire exercer une aél:ion dans huit jours,
0
tandis que fa durée a 30 ans; 2. • il la fait exercer dans
un temps prohibé, puifque la collocation ne devient définicive qu'après la mort du mari.
On répondait pour la Dame Lesbros, que le droit qu'avait
le fieur J3rignol éloignait tous enchéri!feurs, & rendait la
vence de la baClide impoffible. Cette vente était néanmoins
néce!faire pour pouvoir acquitter une créance légitime.
Mr. PAvocat-Géhéral de Cali!fàne examina quel eCl en
.général le motif du droit d'offrir: folatium, dit-il, amijJi
dehiti; il faut être Créancier perdant pour l'exercer; la
loi a voulu que .l'aélion ne fût prefcrite qu'après 30 ans,
mais on peut comminer celui qui a droit de l'exercer; le
Seig,neur a 30 ans pour exercer le retrait féodal; mais fi
le Va!fal lui fignifie fan aéle, il n'a plus qu'un court délai;
après lequel fan droit eCl perdu.
Le fieur Brignol efi Créancier perdant; il peur exercer
le droit d'offrir. Mai quel efl: le motif de la loi? un
motif fage qui dérive de la raifon & de l'équité; un motif qui ne détruit pas l'intérêt du tiers. Ici le fleur Brignol
doit ou ufer de fan droit d'offrir, ou Jaiifer vendre la
.maifon. La Dame Lesbros ferait expofée au préjudice le
plus irréFarabJe, fi le fyHême du fieur Brignol était admis.
S'il ufe du droit d'offrir, il jouira de fes fonds; il~erdra
d'autant moins; il faut donc qu'il s"explique dans un court
délai. Mr. l'Avocat-Général conclut à la confirmation du
Déciet.
Arrêt du 22 Juin 1776 ,à l'audience des pauvres, qui
fait droit à la dèmande en révocation du Décret avec dé~
pens. Plaidant Mes. Gaffier & Meyffret.
J
�DU
PALAIS
pI!
ARR Ê T
PROVENCE;
J'l'
IV.
Les biens d'Eglife ne peuvent être aliénés [ans formalités.
Pareille aliénation peut-elle être attaquée après quarallte ans?
P
Ar aél:e du 9 Décembre 172.6, le Procureur fondé des
Dames de J'Abbaye Ste. Catherine 'de la ville d'Apt'
défempara à Jo{eph Lazare, à tirre de locaterie perpétuelle,
un domaine, fous la rente fonciere & perpétuelle de huit
charges & demi froment, rachetable au prix de 3000 liv.
dans le cas que le Monaltere celferoit de la polféder. Le
3 Janvier fuivant, les Dames de cette Abbaye foufcrivirent & l'atifierent cet aél:e, auquel M. l'Evêque d'Apt donna
fon confentement & fon approbation. Par un Arrêt du
Confeil du 3 Juin 174), qui fut fuivi d'un Décret rendu
par l'Ordinaire le 1) Juillet 1748., & par des Lettrespatentes du mois de Septembre de la même année, l'Abbaye & la convenrualité furent 'éteintes & fupprimées, &
les biens qu'elles polfédpient, furent unis & incorporés,
partie à l'Hôpital St. Caftar, partie aux Dames du Monaftere de la Viûtation, & partie aux Religieufes Ste. Urfule
de la même ville, à la portion defquelles échut la rente
dont s'agit.
Le 14 Mars 1772., Lazate remit la fomme de 3000
liv. à la Dame Supérieure Ste. Urfule, & la fomma &
toutes les Religieufes en fa perfonne, de lui en concéder
quittance, & de le décharger de la rente fiipulée dans
l'aél:e du 9 Décembre 1726. La Supérieure répondit n'avoir reçu les déniers qu'en dépôt; & par exploit libellé
du 14 JuiIlec fuivant, elle affigoa Lazare pardevaot le Lieutenant de Forcalquier, en condamnation de la rente échue
t;, ftmel pro jÎ:mper de toutes celles qui écherroient à l'avenir. Lazare requit au contraire, qu'au bénéfice de fon
offre de payer le prorata de la même rente jufqu'au 1{.
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Il. li' A L
Mars, jour du paiement du fort principal, il feroit libéré
à perpétuité, & il réitéra la même offre le 16 Janvier 1773.
Par une Requête du 2. Mars 1774, la Dame Économe,
inul1:anr aux fins principales de {on exploit d'ajournemenc,
demanda fubfidiairemenc que là où Lazare feroit fondé au
rachat, l'aéte de locaterie perpétuelle fut déclaré nul, &
comme tel caffé, & qu'elle fUt réincégrée dans la poffeffion & jouiffance du domaine. par Sentence du 19
Juillet, le Lieutenant, au bénéfice des ofFres de Lazare,
le mit hors d'inl1:ance fur la demande en condamnation des.,
arrérages de la rence, & le déchargea de la rente fonciere,
dont il le déclara libéré par la paiemel)t des 3000 liv. que
le Monal1ere avoit reçu. La Dame Econome appella de
ce jugemenc; & par une Requête incidence du ra Novembre 1775, elle convertit fes fins fubfidiaires en principales.
On obfervoh pour Lazare, qu'il ne s'agiffoit point d'un
bien de l'Eglife_, mais d'un bien temporel, qui n'avait jamais
été mis au nombre des biens confacrés à perpétuité à
l'Eglife; que dans le cas même où il s'agiroit d'un domaine Eccléfial1:ique, qui auroit formé la dotation & le,
parrimoine d'un bénéfice, les folemnités introduites pOUl'
en valider l'aliénation avaient éte obCervées; que quand même
elles auroient été omiCes, l'Économe feroit non-recevable
& mal fondée d'exciper de leurs omiffions après 40 ans.
Sur le premier moyen, il difoit que la coutume & l'ufage
des Chapitres, Colleges & Communautés Religieufes, {uiant Dunod dans fon Traité de l'Aliénation des biens de
l'Eglife, chap. 22, leur permet d'emprunter valablement à
rente ou autrement, fans preuve de caufe & fans aucune
folernnité', quoique l'emprunt foit une véritable aliénation,
pourvu que ce fait par délibération en bonne forme, ou
avec là permiffion des Supérieurs, laquelle délibération ou permiffion tient lieu de la preuve de la cauCe &
de l'obCervatiotl des formalités: mais les autres Bénéficiés
ne peuvent emprunter à la charge de leurs bénéfices, fans
c;au[e &. fans formalité, fuivant Mr. d'Hericourt en [es
Loix
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.
,DU. PALAH
DE
PROVENCll.
.
., 33
LOlX Ecc1eGalhques, parr. 4,' chap. 7, n. 16. Covarru
vias, var. refol. lib. 1, cap. 3, n. 9, tient à-peu-près lé
même langage; en ajoutant toutefois, que le confentemenc
du Monafiere & du Supérieur clauftral ferait infuffifam pOUl"'
valider l'aliénation des biens des Religieux, s'il n'étoié
accompagné de celui de l'E\'êque. Mais notre Jurifprudence
n'exige pas cette derniere formalité, ainli qu'il fut jugé
par Arrêt du Parlemem de Paris, du 9 Janvier 16~7, rapporté au Journal des Audiences, au fujet de la vente d'une
maifon dom le Chapitre de Soilfons réclamoit. Dans le
fait aauel, M. l'Evêque d'Apt, Supérieur immédiat de l'Abbaye, a autorifé l'aliénation du domaine,; les formalités
ont donc été obfervées.
,
SUI' le fecond moyen, on convenoit que les IJiens de
l'Eglife Conf inaliénables; qu'ils ne peuvent pas fortir de
fes mains fans une caufe légitime ,. qui doit être confta- "tée par ,un rapport de commodo r;. incommodo; & que li!.
vente qui efi faite ,doit êlre précédée d'encheres,' & <llltorifée par le concours des deux puilfances.'
J
,
Ce fut dans le quatrieme 'fiecle, que les Conciles Provinciaux en défendirent l'aliénation; mais cette prohibitioll
étoit imparfaite, parce qu'elle n'avoit ni publicité, ni autorité dans l'Erat. Les Empereurs, Leon & AnthemÏus
défendirent. eri 470', d'aliéner de quelque maniere qué ce~
fùt les héritages de .l'Eglife Cathédrate cleo Confiantinople.
Anafiafe, fuccefIrur immédia~ de Leon, éi ndit cette défer& aux irn1neubles de. tomes 'les Eglifes de 'la même vllle;~
& Ju/l:iniljt:l, -en renouvellù,t pn '5.33 ,la '!,1.ême Loi, éten-'
•
dit la prohibition à routes les Eglifes de, l'Empire.
c' iJi'elles fui'ene 'ces conHirurions, qui OBt confervé 11 l'Eglife, les biens dom elle jouit'. Le Dr0'it iCafJoniqt\c', e'n
a)[:l6rmam la même 'prohibition & Ja même défenfe, l'é....
t.endit .. aull imeubles préeieux de l'Eglife, fuivant la remarq-ueJ de <k>l~fales, filr le chapitre l du titre de his 'luœ fiunt
il' Pr;tltltis>~ par 'la raifon que nous -en donne l'extravagante'
ambitiojà ~ e>!tra de rehus Ecclejiœ non alienandis : que l'Eglife
ne péut fllblifh'll' & entretenir fes Minifl:res.,. {a·ns le feçours'
hn~ln5&~~
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R N ~ L
•
{!e~, biens lemporek M.lis comme elle n'a été établie que
p~:lUr'
1'1Itili,té; de l'Eglife, elle ne doit pas' tourner à fan
ç1éfavanrage. AinG il lui efl: permis d'aliéner fèS biens fans
aucune formalité, quand elle améliore fa condition, comme
nous l'apprend le Canon Terrulas S'L, caufe 12., queH. 'L,
. ~iré du Canon 4) , du Concile d'Agde en )06.
Les Canonilles conviennel1r, que l'Eglife dl: difpenfée
de toute folemnité, quand le fonds qu'elle Vellt alIéner dl:
de peu de valeur, & que la dépenfe qu'il faudroit faire
pour les remplir" abforberoit une panie conGdérable du
1 prix '. &, empêcheroit l'Eglife d'améliorer fa .condition; la
gl.o(e",Ju,r c~ Canon, en rapporte pluGeurs qui ét'abliifenc
cette exception. C'efl: encore la doél:rine de Pa{tour, de.
privile.gio· Ecc:leJiœ ùi bonis /ùis alien. tir. 6, n. 6; de d'He{icou'rt, tir. de l'gliénation des biens d'Eglife, n. 13; de'
. Guipape & Ferriere, décif. 100 & 1 S4; de Zerola dans
fon rraisé. praxis Epifcoporum.' verb. alienatio, n..1; de
Moco5c fur l'authentique flOC lUS porrec{lIm , cod. ide.facroj.
Ecclej:; de Barbofa fur le même Canon Termlas.
'
. Mais de quel prix doit êrre le fonds vendu, pour être
r;éputé termla aut vine.ola? Barbofa, fur le même Canon,.
f~utief1t 9y'il f~lJcl avo~r égard'J .non à la valeur efFeél:ive du
tpnds .a!lén(, mais 11 la condition & aux facultés de l'Eglife
aliénante. RebufFe, dans fon traité' de alienatione rei Ecch34J dit qq'i) [uffir que l'aliénatjon fait utile à l'Eglife,
pOJr être au cas, d,u Canori Termlas. L'AlIteUr de la Pra~q~e de la Gour de Naples, chap. ) 0 , n. -3, veut que
l~ queIti0C!.. fait ·pljre.~e,nt. arbitr(ljre ,,& qu'elle dépende. des
l
"
cJrconftances de l'illlenatlOn.. ,
;.: ~'Abbilye <lui a· donné à locaterie) perpétuelle le fonds
do'J1'
t t s'agit, étoit 'des plus rjches de la 'coorrée; cette alié•
nation lui fut très-avanrageufe, puifque la Dame Eoonome,
n'en a demandé la caifation que fublidiairemenr, & dans
le cas oll Lazare teroit reçu à s'affranchir de la fente fQO-.
ciere qui en fut le ptix. La dépenfe qu'il auroir fallu faire,
pour remplir les folemnités introduites par le Droit Civil,
& Canonique, aurait rendu l'aliénation difpendieufe &
Ji#, n:
J
,
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PAL AIS
D E
35
PRO VEN C E.
onéreufe à toutes 'les panies, puifqu'elle auroit di'minué le
taux de la rente fonciere qu'elle vouloit établir.'
Enfin, touçe formalité éoit ceifer dans le cas de néceffité; & il Y a toujours néceflité, quand la formalité, tourne
au préjudice de celui en fdveur duquel elle a été introduite.
La confiitlltion de l'Empereur Anafiafe, en la Loi 2 l ;
cod. de facrofanélis Eccl~(iis, en fournit un exemple qui
s'applique naturellement au procès, puifqu'après avoir rendu
les biens de l'Eglife inaliénables" elle permet de les ven"dre, de même que les vafes facrés deHinés au Service
Divin, dans une néceffité preifante, pour racheter .les
Chrétiens détenus en captivité par les Infideles, Ol! pour
fecourir les pauvres da,ns un temps de difene & de calamité publique.
'
Il eft vrai que l'Abbaye n'étoit point, lors de la vente,
.dans le cas d'une Çléceffité aufli abfolue; mais il s'agifIoic
d'tine néceffité refpeétive, eu égard à' la qualité du fonds
vendu, & aux dépens des formalités à remplir', laque]le
JJéceffité n~ ,commande pas moins en fouveraine, & n'a
pas moins le droit d'ériger en loi, & en maxime, ce à
quoi elTe oblige., ainG que le décide .Ia Loi 40, If. de !egi.
hus & Senatus - Confultis. Elle donne, fuivanr Dumoulin fur
la Coutume de Paris, tit. l, §. 9, 'glof. 6" n. 7, Juri[.,
diétion, même' à celui' qui n'eA a aUlune; & non feulement elle nous' difpenfe de çoutes les formalités .introduites
par le Droit, mais elle, nous aurorife à faire ce qui ef~
e'Pt(;,ifém~rit défendu par la Loi. Les. formalités introduites
pou,~ l'av.,![)tjlge' dit l'Eglife ~tourneroie.ot à fan préjudice,
~.'lcay~- de Ja ft~rilit.é, ou. de la modiçité ,du fonds qu'elle
veut _aliém;r ; die en dl: pa~ conféquent difpenfée : tune remrttitur juris di(jHifitio etiam prohibitivo.
" S~r le tro,ifi"me moyen -' Lazare obfervoit qu'un des
premiers princip'es, ~n' matiere d'aliénation des biens Ec~
<:..~fiaHiques, e.l~ j:e).ui ~ui rend l'Eglift: non-~cevable 11 allég\!er l'omiqiqA cl.>s formalités après quarante ans. C'efi la
<!é~jfiqn'(du1ÇanOJ1"Ji Sacerdoces de la caufe 16, queH. 3
dll.t;h~p."'eùnb ,fj,. aliter) extra de in integrt/ll~ reflitutione) &
E
~
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Y'OURN'At
de )'.authentique quas ac:7ione3, cod. de facrofanc1is Ecclefiis. Cuj<iS obferve fur la Novelle 32, que perfonne n'ef~
affranchi de cette prefcriprion quarantenaire; pas même le
Prince. Chopin de facrd politid, liv. 3, tir. 8, n. 23, [outjent qu'elle a alitant de ferce pour ce qui concerne 1'0miffion des. formalités " que ,la centenaire pour ce qui regarde la léfion & le défaut de calife; Guipape déci fion r6r;
Dunod', de l'aliénation des biens d'Eglife, pag. 26; Vanefpen, -parr. 2, tit. 136, cap. 4, n, 46; Fromental au mot
Eglife, pag. 268; l'al1:our, de revocandis alien. rei Beclef.
.tin. 8, n~ 3; Loifel en fes iriflitutions, liv. 2, tit. 3, art.
a ; Tiraqueau, des privileges de la caufe pie, privil. 13-9;
Rehulfe, de pacificis poffij}ôribus, n. 46; Lacolhbe, Jurifprudence Canonique, .u mot prefcription, n.' r; Lepretre,
cent. r, char'. 2, atlel1:ent tOUS cette maxime.
La Jurifprudence des Arrêts, ell conforme à cette regle:
reIs font ceux rapportés par Baffet) tom;' l, liv. 2, chàp.
l , pag. 163; par be[peiffes, tom. 1, pag. 726; par Boniface, tom. l , liv. '), tit. 6, chap. 7; par Brodeau fur
Louer, lett. P, fomm.
n. 34. L'acre dont il s'agit el1:
du 9 Décembre 1726, & la réclamation de' l'Économe
ell du 14 Juillet 1772, c'eil-à-dire quarante-Î1x ans après
la vente. .
•
•
La Dame Econome fuppo[e que Lazare el1: nori-recevable
au rachar, pàrce que l'Abbaye Ste. Catherine n'a pas été
eteinte, & que les Dames' donc elle étoit compofée, ont
été agrégées & unies au Monal1:ere Ste. Vrfule. L'uniol1
~'l'ill.corporation dont parle la Dame Economè", bien
loin de fuppofer que l'Abbaye fîlt unie' '& incorporée.)ali
Mona!rere, fuppof6 précifémenc le conrr'aire; puifqlJe "les
Religieufes profeffes n'y fùrent agrégées, que par cetie feule'
& unique raifon, que leur Ahbay.e ne fubfiltoir plus, &
qu'il fàlloit par conféqllent leur affigner une retraite honorable, dans laquelle elles devoient jouir .(les privileges &
des honneurs des Religiellfes qui comporoient la C::ommu-'
nauté qui les reçut; & pour les en faire jOllir, il' falloit'
néceffairemenc les unir, & les inëorporer avec elles, 'fan's'
1,
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37
elles auroien~ été étrangeres & incapables d'aucun
emploi, d'aùcune charge, & même d'avoir voix en Chapitre.
L'union d'une Eglife 11 une aurre', fans fllppreffion & extinél:ion de l'une des deux, laiffe les chofes au même érat
qu'elles éraient avant l'union; mais l'extj.flél:ion d'une Eglife
avec adjudication de fes biens 11 un aurre, forme un vérÎ"table tranfport & un nouveau tirre, puifqu'elle forme un
nouveau polfelfeur & une nouvelle polfeffion, par cerre
raifon fans replique que l'Eglife fupprimée celfe de pofféder au moment où commence la polfeffion de celle à qui
fes biens ont éré attribués. Le Monafiere Ste. Urfule ne fut
par conféquent qu'un afyle volontaire accordé aux Dames
de l'Abbaye, fi elles trouvaient 11 propos de s'y retirer,
ainfi qu'il eH dit dans le décret de fuppreffion, non une
prifon
forcée où elles devaient être détenues contre leur
,
gre.
L'Abbaye Ste. Catherine a été unie & incorporée cout à
la fois & en même temps 11 l'Hôpital St. Cai1:or, aux Urfulines & aux Dames de la Vifitation. Comment donc cerre
Abbaye qui, felon l'Econome, fubfii1:e encore auio~rd'hui ,
auroit-elle formé lin corps partie laïque & fécuHèr, &
partie régulier & eccléfiai1:ique, ce qui feroit un monlhe
dans l'Eglife? Le MOI13i1:ere à qui la rente fonciere appartenait, a été éteint & fupprimé; le paél:e d'amortiffement'
doit par conféquem avoir lieu contre celui qui en a été
gratifié, -& entre les mains de qui la rente eil: paffée cum
[uil causâ & cum [cIO onere.
On répondait pour la Dàme Econome, que les baux: à
locaterie perpétuelle des biens d'Eglife font très-défavorables en eux-mêmes; ils ne font déterminés que pllr l'état
de ruine dans lequel on fuppofe coujours le fonds -baillé ;
& comme il y a plufieurs autres moyens pour faire rétablir
un fonds eccléfiai1:ique, fans l'aliéner à perpétuité, on ne
les colere point dans le droit romain, ou on ne les perinet
que pour trois générations. (Novelle 7, cap. 3,)' On ne
les entretient en France que lorfqu'ils oIlt été faits avec
�JOURN_~L~
toutes les formalités de droit, fans dol & fraude de la' part
du preneur. Le bail à locateJie perpétuelle .dont s'agit
manque des formalités de. droit, & porte avec lui tous les
caraél:eres de la fraude.
n n'y a point de différence à établir entre les biens qui
forment le patrimoine d'un Chapitre, College ou autre
Communauté ecclélial1:ique, & ceux qui compofent la dot
d'un bénéfice. Tous font également des biens ecelélial1:iques dont l'aliénation ne peut être faite fans formalités.
Jul1:inien les a littéralement confondus dans la prohibition
d'aliéner les biens d'Eglife qu'il prononce dans (a novelle 7,
cap. I. Il leur a appliqué avec la même expreffioll l'obfervance des formalités qu'il a confacrées dans fes autres
Loix. Nous les confondons également en France; les
regles prefcrites pour l'aliénation des biens d'un bénéfice
y font étendues aux biens des Ch~pitres, Monal1:eres, Hôpitaux & Confrairies. C'el1: ce qui el1: attel1:é par Chopin,
de facrd politid, liv. 3, tit. 6, n. ,6.' Mr.de Fleury, inflit.
ecclef. tom. I, pag. 347, rappelle les formalités que les
Chapitres doivent remplir en aliénant leurs biens. Le
Chapitre fait une conclulion , l'Evéque l'approuve; le Chapirre obtient des Lettres-patentes, par lefquelles le Roi
confirme la conclulion, permet ~aliénation. Il en demande
l'homologation au Parlement, qui, 'avant faire droit, ordonne ,. fur les condulions du Procureur-Général du Roi,
qu'il fera informé de commodo & incommodo, & çommet
à cet effet le Juge royal des lieux: l'aliénation doit 'être
faire au plus offrant, après des publications & des enchere~.
D'?ericourt en [es Loix ecclijiafl-i'1ues, & Serres, jnfiit:
pag. 497, .preférjven; à pel] près les mêmes fQrmalités.
L'on troljve.·dans Boniface, tom. I., liv. 2, tit. 6, ch. 2,
un Arrêt. gui,' jugea que l'aliénation des biens des. Confrairjes étqit ,0 njife à ces fçrmalités, & caffa un ,a& de bail
à., ~e~re p~rpéruelle., Jors dyquel elles n'avoient pas .été gardees. ~r. de _Be,zieux, pag. 104) §. I , ch. 6, en rapporte
un' aucr'e qui, jugea q~e les aliénations faj~es par le,s Hôpitaux étaient' founü(es .aux mêmes formalités. Tous le's:
38
�DU
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D 11
PRO VEN C E.
39
Auteurs fou tiennent h. même chofe: reis font l'Ameur
des définitions canoniques, au mot biens d'Eglife, n. 6 ;
Giberr, inflit. ecelef. tom. 2., tit. 1') ') , pag. 2.81 ; Caba1Tut,
tlLeoria & praxis jur. cano liv. 8 , ch. 30; Tournel, lelt. A,
n. 415:; Cochin, tom. 2., pag. 147 ; Pallour, de bonis tempo
ecelef. tit. 6, n. ').
.
Le fonds aliéné ne peut pas être qualifié -ni termla, ni
vineola exigua. Cette qualification ne peut convenir qu'amc
terres en friche ou fort peu conGdérJbles. (Jurifprudence
, canonique de Lacombe, va. aliénation, feét. 4, n. 3,) 11
s'agir ici d'une ballide entourée de jardins, prés & terres
dont la contenance ell: de plus de cinquanre - une mille
cannes; c'ell le domaine le plus conlidérable que l'Abbaye
po/fédoit, ainG qu'il ell prouvé par le rappo rt d'ellime de
{es biens, qui fut fait· lors de la fuppre/Iion de cette même
Abbaye. Ce domaine n'a jamais éré ni pu être à chàrge
à l'Ab'bayé, puifqu'il éroit conllamment arrenté de quatorze à quinze charges froment; il ne fupporroit ni cens,
ni .droit d'indemniré; il produifoit bien' a/fez pour payer les
cailles: il n'y a donc pas eu, aux termes du Canon, neèejJitas
diflralzendi.
La condition de l'Abbaye Ste. Catherine n'ell pas devenue meilleure par cette aliénation. Outre que Ion revenu
diminua tout à coup de lix charge.s & demi bled, la· rente
perpétuelle convenue fut grevée d'Lme faculté de rachat
qui ne lui lai1Toit pas la liberté, en cas de befoin, de la
céder, ou du - moins de la céder à fan' véritable prix.
L'Abbaye e1Tuya donc un double préjudice; elle diminua
dé revenus; elle fit un capiral dont -la valeur réelle n'étoit
t-out au plus que de 3000 liv. Jufques-Ià on ne peut appliquer en aucune maniere le Canon terru/as à cette' aliénation. En fuppofant même cette application auffi exaéte qu'elle
l'ell' peu, Lazare invoquerait inutilement ce Canon, parce
qu'il s'en faut bien qu'il fait fuivi à la lettre parmi, nous,
& qu'on y accorde aux corps eccléCialliques, ni aux' Bédénciés, la liberté de vendre, fans aucune efpece dé f<Jrmalités, les fonds de peu de conlidération, lSç d1ail1eurs oné~
r§ux à la Communauté qui les poifede.
�~
JOURNAL
Nous avons des Loix poHérieures à ce Canon que l'on
efi obligé de (uivre. Ces Loix font le Canon fjllicumfjue 1,
cauf. 17, quefi. 4, qui prononce la dépofition de celui
qui aliene un fonds ecc1éliaO:ique, eliam exiguum; le Capon fine exceptione, cauf. r 2, queH. 2, qui a prohibé fine
exceplione, toute aliénarion quelconque, (ans les formalités; l'au rh. item prœdium, cod. de facros Ecclef. qui (oumet aux formalirés la vence d'un fonds inutile à l'Egli(e j
egfin la N ovelle 7, cap. 3, dont la difpofitiori eH auffi
précieufe que décifiye, qui défend d'aliéner fans formalirés
tes biens eccléfiafiiques, même ceux qui (ont dans un érat
de ruine & de defhuél:ion. Le Canon Terrulas dj(pen(e
des formalités qui étoient alors en u(age; il ne peut pas
difpen(er des poHérieures; c'dt ce que nous apprennent
Duaren, lib. 7, de facrof. Bcclef. cap. 9; Rebu/fe in ·compend. alienat. rer. Beclef. n. 63; Gibert inflit. Ecclef. rom.
2., cap. ~.,
PaHour, de bonis tempor. Ecc/ef. rit. 6, n.
6; & Decormis tom. 1, col. 17) & (uiv. obCerve que le~
Arrêts de Réglement de la Cour n'ont admis aucune
eCpece de diftinél:ion entre les biens Eccléfiail:iques de peœ
de confi'dération, & les autres.
La premiere démarche que doit faire un Chapitre ou
Ulle Abbaye, aV'1nt de vendre un fonds dépendant de (on'
domaine, ef!: d'en délibérer la vente dans un Ch.apitre affemblé à la maniere accpuwmée, c'efi-à-dire, au (on de la
cloche. Cette délibération préalable eil: le traaatus dont
tous les GanoniHes exigent l'exi!rence, comme la plus im.
portant'e de tomes les formalités, artendu qu'il doit renferme.r le vœu de {DUS oies membres' d'un Chapitre, -ou de'
toute autre Communauré E.cclé.fiaitique, & les üai(>OllS pour& conçre l'aliénation.·( TouI11et, lert. A, n. <}il; Sanleger,1
l'cfpl. JJenef. :part. 3, cap. 1 S), Il. 2.) Tous ceux qui .0Rt)
intérêt. ~ ce qu'une. aliénation foit, 011 ne foit pas faiie
eo dQi~ent être les premiers :Tuges. C'eU ce qui, n'a pa
ér~ ~it, pal' l'Ahbaye Ste. Catherine, puifqu'il n 1exil1e .àu-'
c.u~ 4élibérarion préalable- dans le regiibre oapiolll.aire ,_ &'
ql}e de fai& la procuration n'en parle pas. Non '[ellletl1ent[
• ·cettel
s;
;r
�DU
PAL.l·IS
DE
41
PR'OVENCE;
cerre procuration, pour vendre, n'a point été pa/fée par
la majeure partie de la Communauté, dont chaque membre
étoit prHem, mais encore elle n'a été conclue & foufcrite que par fept Religieufes fur dix-huit, c'ell:-à-dire, à
peine par le tiers de la Communauté. Il eH donc vrai de
dire que l'Abbaye Ste. Catherine n'a jamais donné pou':
voir de vendre le domaine que L~zare po/fede. L'aél:e de
ratificarion n'a été paffé que par les mêmes fept Religieufes, fans convocation faire aux formes ordinaires; il efl:
donc aulIi nul que la procuration donnée pour la vente.
Il eH vrai que l'Evêque d'Apt a figné l'exrrait du contrat; 'mais étoit-ce l'aél:e de vente· que l'Evêque devoit' approuver? L'autorifarion de l'Ordinaire, qui ell: indifpenfablement requife dans les aliénarions des biens des' Chapitres & des autres Communautés, ell: un décret par lequel, après avoir vu la délibération capitulaire, & les ma:'
tifs fur lefquels elle ell: fondée, il en autorife l'exécution;
il ell: Juge de la délibération, ou du trac1atus dans lequel
ces objets ont été difcurés. Il ne l'ell: pas, il ne peut pas
l'être de la vente qui ell: toujours bonne par elle-même,
attendu qu'elle n'eH & ne pem être faite qu'après que toutes
les formalités ont été obfervées.
On convenoit que la prefcription de quarante ans a lieu
contre l'Eglife. Il ell: en effet de principe que l'ufuf\,ateur
ell: -à l'abri de taure recherche par le laps de tem,ps, de
même que celui qui a acquis un bien Eccléliafl:i 1ue, fims
que les formalirés aient· été gardées, lorfque fon rirre ne
paroit 'pas; mais il s'agit ici de favoir fi cerre prefcripfion 'Peur aVoir lieu " quand le rirre vicieux parolr. Il eH:
des 'premier principes en matiere d'aliénarion des bien."
Eccléliall:iques, & fur-tout en Provence, que l'Eglife e:H'
recevable à oppofer l'omilIion des formalirés aprè~ quaranre
ans. C'eU la doélrin de d'Hericourt en (es Loix Ecclé_
fiaHique's, rir. de l'aliénation des biens d'Eglife, n. r) , pag.
7 ta; de Lacom be, Jl1rifPradence Canonique, .verb. a/iena_
tion, fecl:. 3' n. 17; de Gibet[, iriflit. Ecclef rom, 2. ,. tir,
I 'i)' pag. 281.; ainli jugé par les Arrêts rapportés dans'
Années 177 S. & fuiv,
F
�42.
J
0 11 RNA L-
les arrêtés de Mr. de Lamoignon, arr. 4 l , tir. des pref
criptions. (Mourgues. pag. 408 ; BonifJlce, rom. l, liv. 2, tit. 6,
chap. l ; Decormis, rom. l , col. 173; Mr. de Bezieux, liv.
J l tit. 2, chap. 4, §. S; Builfon en (on' Code de facrof.
Ecclifiis; Julien, collee? manuf. rom. l , pag. 160, lett. C.)
Arrêt de la Cour du premier Février 1740, en faveur de
),\'Ire. Mercurin, coorre Pierre Cre(pin, qui calfa une alié!]ation faite depuis plus de quarante ans. Autre Arrêc du
.J6 Février 1761, qui fit droit à la Requête civile du Curé
d'Allauch, contre l'Arrêt d'expédient con(enti depuis bien
au delà de quarante ans par un de (es préciécelfeurs, au
[ujet d'une aliénation faite (ans formalités, au profit du
Chapitre La Major.
On obfervoir enfin, pour la Dame Econome, que le
paél:e de rachat avoir été illégalement Hipulé dans l'aél:e de
172.6, & qu'il n'avoit point été ratifié par l'Abbaye Ste.
Catherine, ni (uf!ifamment approuvé par l'Evêque. Le pouvoir prétendu donné par l'Abbaye Ste. Catherine, pour
bailler à rente perpétuelle les biens fonds de l'Abbaye,
portait expreffémem que la rente perpétuelle ferait non
extinguible, non amorrible-, & non rachetable; c'eft cependant en vertu de ce pouvoir, que le fleur Moulin,' en ven-,
dant le fonds contentieux à fon neveu, fiipula le paél:e de
rachat moyennant 3000 liv. payables en trois paies de
1000 liv. chacune" dans le cas où l'Abbaye viendroit à
- céder la rente perpétuelle de huit charges & demi bled
ftoment, ou que cette rente fortiroit du Monafiere : cette
fiipulatiotl fut faite ultra vires mandati, & eft par conféquent nulle & comme non écrite; la ratification a été
f.1ite par furprife & fans connoiffance de cau(e, puifqu'il
n'y efl pas même dit, ni que les fept Religieufes ont
pris leél:ure de l'aél:e, ni qu'elles approuvent le paél:e de
rachat contenu dans l'aél:e de vente.
Quand même ce paél:e feroit valable, le cas où le rachat devoit ~voir lieu n'dl point arrivé. II faut d'abord
examiner quel a été l'objeç & l'effet de la procédure tenue
-p.ar l'Evêque d'Apt en 1748, vis-à-vis l'Abbaye Ste. Catherine
�DU
PALAIS,
DE
43
PiovENCi!.
& le Monaftere Ste. Urfule; il fera facile enfuite de
juUifier que l'union des Religieufes de cette Abbaye au
MonaUere Ste. U rfule n'a pas donné lieu au prétendu
rachat. La partie publique Eccléfiaf1:ique requiert" entr'autres.
chofes , la fuppreffion de la conventualité ,de l'Abbaye Ste.
Catherine, & fon union avec les biens, rentes & reve~
nus au MonaHere de la Vifitation" ou- à celui de' Ste.
Urfule; on prend une information, & il en réfulte que
cette Abbaye eH hors d'état de fe fouten!r & de fatisfaire aux exercices de la Regle; qu'il feroit mile & avantageux de fupprimer cette Abbaye ou Conventualité, &
d'uuir & incorporer ces Religieufes dans la Communauté,
ou de SJe. Urfule, 'Ou de la ,Viiitatiôn,,, avec leurs &iens,
rentes & revenus. Le CommilTaire député entend' leS
Da'mes de l'Abbaye de Ste. Càtherine, qui confentent à leur
union, tranüation & incorporation requifë; on affigne les·
Dames de Ste. Urftlle à l'effet. de confentir à cettè union;
& enfuite de leur confentement l'Evêque ordonne Yincorporation, Or, d'après ce rableau, il ne s'agit ppinr ae la
fuppreffion proprement dite de l'Abbaye Ste. Catheritie,
niais feulement de fan union au Monafl:ere Ste. Urfule,
avec extinél:ion; de_ titre, pour y exiUer &' reprélenter' à'
perpétuité l'Abb'We Ste. Catherine, qUoique fous, un nouo(
veau; titre. Dans<le cas d'une fuppreffiorl ablolue, les droits·
&: les prérogatives du MonaHere fuppiimé font éteints;
avec le titre. Dans le caS d'une fimple 'fuppreffion de titre,.
QU de Conventualité· avec union_, on ne fâit pas une ex;,
tinél:.ioll totale du, Monafreré' ùni;' qU0iqu'il r ne •reUe plus;"
que'r le- titre dlL MonaUere' alrquel l'union eLl: fai,te. Les;
çeux Mo'oaUetes éxiflent intégralement dâns (l'union avec:
leurs drpits &, privileges.
' .
, Arrêt du 2.6 Juin 1776, au rapport de Mr. le Con(eit~
1er de Ventabren, qui calTe le pacre de rachat, & co.n~
damne Lazare-à
tous les. dépens. Ecrivant
Mes, AlOulph,V'
&: •
•
1
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�:44
i ~ ~ ~F
(".1 a
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U RNA L
•.1
A R RÊ T
.
V.
Le mari connoif1àut le commerce de fa femme, marié~ fous une
corjlitlltlon générale~ efl c;enft. l'autorifer par fon/ilena, &
efl tenu même par corps des obligations qu'elle contrilc7e.
.
ES lieurs Ginoux, .Fabric?ns .d'in·diennes della. ville d'A:ix,
li'lrerent à la femme de Gafpard Bariatier, Ménager du
lieu de Trets, u.ne qu'tntité de. inarchandiCes; ceux-ci n'étant
paS tlntiérement P'lyé s ' dti.!fl;ix fe; pOJlryu.:érnt oparde'lant 'Ie
Lieutenant d'Ai,," .cpntre 'Bar!atier, en' condamnation de ce
qui. leur refl:oit dù. Barlarier demanda fon relax, fur le fondement qu'il n'h,ab.iroit'Jpoj,n,t 'l'lep fon;époufe ;,& qu'il n~avoit
~ucune col)noil{'<l-nc~ l<le: fon: commerce. Le 'Lieutenant fit
droit au r;el~){.d\ppel: de la part des liêprs :.Ginou .
On djfoit p;ouf,e\1x, quelle mari"qui coprioi/foit le commerce de, (a femme, étoit valablement obligé, & cOlltraaoic
[es, même.s ellgage!R~/1s. ,Ce principe, utile à la bonne foi du
sommesce, ?tla,.sùte.ré.,publique, adopié dans les coutumes,~ft '{l,i'li ep.f.rov.ençe. IçÎ;111"étQif p.r.ouvé par les èerrificats
des ).,€ qn fu 1;; # qulLCuré.; .qqeiiBarlatier vi voit avec f~ femme;
n'aJ!anr qU'Alpe' mê;qJe habitation, un même ménage.
.. 1
':JOn répop,dQic pogr .B~rlaJier, que les 1 principes reçus dans
I~~, PêYs d~ C9J.lt.ume ce, ppuvoient être :.appliqués dans cet<te
~~lltl'inc~., Ollan<)!J1> fq,m.m~s.:régis: par,~&aut~(!s I,oix &. d'~utre:§
uCages i. Ill! ne :}pe!Jt,. lêllrJ donner ~une : eJitenfion .qu?i1s· n'ont>
p'~s:El), fai~, ~:jr!atjer éroit,v..éritablemehbféparé de fa femme,
vivant toujours à la campagne, n'ayanl! av.ec elle' aucune·
li,a~fon 'depui$ ,.longues années" ,.& par·. éonféquenr ne
pouvant connoître fon com'merce. Il produifoit le cereifieut de l'exaaeur de la raille.; celui, du Ghirurgiel1 'qui !lavait,
traité à la campagne, celui du 'propriétaire qui avoit'·loué.
une bomique à fa femme, & celui des particuliers qui avaient
L
�DU
PALAIS
DB
P Il.
a v Il Nell.
4 'Î
acheté des marchandifes. Tous ces faits s'étaient paffés à
fon infu & fans fâ participation.
Me. Meriaud, Subfl:itut, ob[erva que la Marchande publique efl: celle qui fait u'n négoce réparé de celui de [on mari J
à fon vu & fu; pour raifon des dettes qu'elle contraél:e à
l'occalion de fon commerce, elle oblige par corps elle &
[oh mari. Quand les Marchandes publiques [ont mariées,
elles n'ont pas befoin d'erre autorifées par leurs maris, pour
être tenu.es des dettes & obligations qu'elles contraétent pour
raifon du commerce; bien plus, elles engagent dans ce cas
leurs maris comme elles, & même par corps. La femme eH:
cenfée agir du confentement de· fon mari pour rout ce Hui
regarde fan commerce, dès qu'il a [ouffert qu'elle en nt un
féparé du lien. D'ailleurs comme il en profite, il femble
qu'il doir être tenu des dettes que là femme contraél:e p041'
ce fujer. Tous les Auteurs coutumiers, d'accord fur ce principe, [ouriennent la même déciGon. Tous les Arrêts intervenus
[ur ce [ujet ont formé une Jurifprudence confl:ame; 6n en
tt0uve dans Brillon, dans le Journal du Palais' & dans celui
des Audiences.
'
En pays de droit écrit les obligations de la femme y [ont
beaucoup moins étendues, & elles [ont rell:reintes à. beaucoup de formalités que l'on ne cannait pas dans les pays
coutuiniers.- La femme mariée fous une confritution générale ne peur agir fans. l'autorité de fon mari. Sans certe
autorité, fon obligation [eroit nulle,.& ne produirait aucun
effet. Toutes les aél:ions rélident [ur la rête du mari; il
efl: feul "adminifl:ratèùr des hiens de [a femme: celle qui en:
mariée fous lIne confriturion particuliere, peut par elle-même
agir; contraéter pour rout ce qui efr bien adventif ou para"
phernal ; elle en a l'entiere & libre adminifl:rarion. Cependant Decormis déèide que la femme marchande oblige
fort mari; le Praticien des luges-Confuls fourient la même
chofe.
' ;
Les motifs qui ont diél:é' cette maxime, ont été produits
pour conferver cette bOnne foi du commerce qui en corifiitl1~
l'effence, & qui en main rient la durée & la tranquillité.
l
�~.
JOURNAL
Pourquoi ne pas les adoprer dans les pays de droit écrit?
Quelles aurorirés contrairès peut-on rapporter ? Quelles
raifons peut-on alléguer po.ur détruire ce principe de route
sûreté dans la f9ciété? L'autorité de Decormis efi précife ;
la queHion foumife à fa déci (ion ne lui lai1Ta entrevoir aucun
doute; il connoiffàie le draie; il favoie qu'il ne renfermait
aucun eèxte précis pour la mariere; il n'hélita pas çependant
de décider contre le mari.
Il n'y auroir que le cas d'une féparation juridique, 011 les
aél:ions des deux époux divifées peuvent être régies par tous
les deux féparément, à l'effet de leur.profiter à chacun d'eux;
daQs ce cas, nulle difficuleé. Il en feroie de même de la
femme lI)ariée fous une conflirution particuliere qui pourroit
agir retaeivement aux biens dom elle aurait la lib.re admi.
niflration ; mais lorfque ces circonHances ne fe renconrrent
pas, que l'on ne peut connoÎtre quelle en la connitution
de dot, il faut décider contre le mari. On remédie à des
abus conlidérables ; la bonne foi du commerce feroit détruite
& anéantie; le Marchand roujours dans la crainte de perdre
,fon argene, lorfqu'il feroie queilion de vendre fes marchandifes, fe verroit dans la néceffiré de ne phJS donner à crédit, ce qui porterait un préjudice conlidéral1!e à fan intérêt. Le mari doit donc être refponfable des dettes de fa
femme qui commerce à fan ·vu & fu;, fan ftlence prouve fO.1l
autorifation. Il eil vraifemblable qu'il participe au profit;
& dès-lors pourquoi ne pas le foumettre aux pertes qu'elle
peut e1Tuyer ?
.
Ici les pa~ties avoient produit réciproq\lement des t.ertificats pour la preuve des faies qu'elles foutenoient. Me. Meriaud obferva qu'ils étaient néc,eifaires dans cerre caufe, puif.
qu'ils fervoient à décider li Barlatier habitait avec fa· femme,
& que ceux rapport.és par 1e.s .lieurs Ginoux méritoient plus
de faveur & d'autorité, parce qu'ils paroiifQient· s'appliquer
~aux circonfiances de la caure, ne paroiifam d'aucune fé"
paration juridique, d'aucune conHitmiol1 parricüliere qui ne
fe préfume pas dans cette c1aŒe çle citayens.·D'ailleurs le~
!ivre~ de çommerce -des {ic\l,S Gihoux démont,oient qu:· Bar...
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PAL AIS
D l!
PRO VEN C ll.
4'
!atier avoir lui-même recu des marchandifes des Geurs Gi- ,
noux, & donné des à-co~ptes lors de la livraifon.
Me. Meriaud conclut à ce que l'appellation & ce dont ell:
appel fuffent mis au néant, & que faifant droit aux fins de l'expiait d'ajournement des fleurs Ginoux, Barlatier fût con-::
damné au paiement de la fomme de 1 S02 Ev. pour reUe &
entier paiement des marchandifes livrées à fan époufe, avec
intérêts tels que de droit, & contrainte par corps.
Par Arrêt du 5 Juillet 1776, prononcé par M. le Premier Préfident, les _conc1ufions furent fuivies, & Barlatier fut
condamné aux dépens. Plaidant Mes. Ell:rivier & Gailler.
ARR Ê T
V J.
Les Employés à la régie du Piquet de la ville de Marfeille
ne peuvent faire leurs vifites pendant la nuit.
Es Employés à la régie du Piquet de la ville de Marfeille firent trois vifites confécutives chez Lavagne Meû.
nier, & dreiferent leurs procès-verbaux qui conll:aroient que
le foleil étoit couché lors de leurs viBtes , .& que Lavagne
n'avoit pas voulu les laiifer entrer dans fon moulin. La Communauté de Marfeille demanda l'amende de 100 liv. contre
Lavagne qui s'éroit oppofé à la vilire. Le corps des MeÎmiers
prit le fait & caufe de Lavagne; & par une requête incidente, il demanda que l'article 2 S du Réglement du Piquet, qui défend aux Employés de faire des vifites pendant
la nuit ou· d'ufer de violence, fût exécuté fuivant fa forme
& teneur, à peine de 3000 liv. d'amende & d'en être informé. Le procès fut d'abord introduit pardevant le Lieutenant
de Marfeille, & enfuiré évoqué pardevant la Cour des Aides.
Et par Arrêt du '4 Juillet 1776, au rapport de Mr. le
Confeiller de Fontienne, la Communauté de Marfeille fut déboutée de fa demande, avec dépens.
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!atier avoir lui-même recu des marchandifes des Geurs Gi- ,
noux, & donné des à-co~ptes lors de la livraifon.
Me. Meriaud conclut à ce que l'appellation & ce dont ell:
appel fuffent mis au néant, & que faifant droit aux fins de l'expiait d'ajournement des fleurs Ginoux, Barlatier fût con-::
damné au paiement de la fomme de 1 S02 Ev. pour reUe &
entier paiement des marchandifes livrées à fan époufe, avec
intérêts tels que de droit, & contrainte par corps.
Par Arrêt du 5 Juillet 1776, prononcé par M. le Premier Préfident, les _conc1ufions furent fuivies, & Barlatier fut
condamné aux dépens. Plaidant Mes. Ell:rivier & Gailler.
ARR Ê T
V J.
Les Employés à la régie du Piquet de la ville de Marfeille
ne peuvent faire leurs vifites pendant la nuit.
Es Employés à la régie du Piquet de la ville de Marfeille firent trois vifites confécutives chez Lavagne Meû.
nier, & dreiferent leurs procès-verbaux qui conll:aroient que
le foleil étoit couché lors de leurs viBtes , .& que Lavagne
n'avoit pas voulu les laiifer entrer dans fon moulin. La Communauté de Marfeille demanda l'amende de 100 liv. contre
Lavagne qui s'éroit oppofé à la vilire. Le corps des MeÎmiers
prit le fait & caufe de Lavagne; & par une requête incidente, il demanda que l'article 2 S du Réglement du Piquet, qui défend aux Employés de faire des vifites pendant
la nuit ou· d'ufer de violence, fût exécuté fuivant fa forme
& teneur, à peine de 3000 liv. d'amende & d'en être informé. Le procès fut d'abord introduit pardevant le Lieutenant
de Marfeille, & enfuiré évoqué pardevant la Cour des Aides.
Et par Arrêt du '4 Juillet 1776, au rapport de Mr. le
Confeiller de Fontienne, la Communauté de Marfeille fut déboutée de fa demande, avec dépens.
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�84-
JOURNAL
ARRÊT
VII.
Dans l'Eglife Con-Catlzédrale de Forcalquier, le Capifcol ne
peut opter arl prijudice du plus ancien.
E 2? Janvier 177 2 , après la mort de Mre. Tirani,
Chanoine de l'Eglife de Forcalquier, qui avoit la prébende de Limans, il fut procédé aux options établies
par l'ufage du Chapitre, dans le cas de vacance par mort.
Mre. Laugier, Chanoine Sacrifl:ain, déclara ne vouloir
pas opter; Mre. Decorio, Capifcol, prétendit que fon tour
devoit venir d'abord après celui du Sacrifl:ain, non tanquam antiquior, mais tamquam dignior. Le Chapitre décida
qu'il ne pouvoit oprer qu'à fon tour, fuivant l'ordre de fa
réception. Mre. Chenut, plus ancien Chanoine, op'ta fur
la prébende de Limans; Mre. Decorio forma op POUtion ,
& fe pourvut al! Lieutenant de Forcalquier, à l'effet d'être
maintenu dans cette prébende & dans le droit d'opter le
troiueme, & après le Sacrifl:ain; le Chapitre intervint
dans l'inflance. Mre. ,Petit, Chanoine Théologal, étant
mort le 12 AOÙt 1772, il Y eut la même contefl:ation
entre Mre. Decorio & Mre. G3r.nier; ce dernier intervint
au procès; le Lieutenant rendit 'une Ordonnance de pieces
mifes; Mre. Decorio en appella avec claufe d'évocation
du fonds & principal; le Chapitre renouvella pardevanc
la Cour fon adhérence', & demanda des inhibitions.&
défenfescontre Mre. Decorio, de donner à fon Office de
Capifcol la qualité de dignité' du Chapitre. Les Parties
confenrirent à l'arbitrage; & pa'r la Sentence rendue par
Mes. Arnulphy ,Simeon & Pazery, il fut déClaré n'y avoir
lieu à l'évocation; Mre. Decorio 'Fu.t débouté de fes oppoutions, avec inhibitions & défenfes' de qualifier fon
Office de Capifcol, d~ ütre de dignité. Appel de la part de
Mre.
L
�DU
PAL AIS
D B
PRO V B Nell.
.
49
Mre. Decorio, qui foucenoit'être le plus digne' après le' Sa..;'
crifiain, & devoir opter .après lui.
On répondoit pour le Chapitre & pour Mre. de Chenut
& Garnier, que le Capifcolat n'était qu'un fimple office dans
'l'Eglife de Forcalquier. Dans une Charte de l'an 142.3, on
, trouve la Prévôté & la SacriLbe déugnées comme dignités, le
CapiCcolat comme fimple office; 11 étojc alors d'ufage de donner
le Capifcolac à un Chanoine; mais c'était une place dont le
Chapitre pouvoic difpofer en faveur de taut autre qu'un Chanoine: au/Ii rrouve-r-on que lors du Staruc"le"Capifcol
n'était point Chanoine; les fonél:ions du Gapifcolat n'éraient
'qu'un office donc le Chapitré difpofoir à fan K!:é. Ilén, était
de ces fonél:ions comme de celles des Théologaux qui exiftoient dans plufieurs Chapirres avant le Côncile de .Trente
& l'Ordonnance de BIois, & qui ne confiftoient qu'en fonctions départies par le Chapirre, même à des étrangers, &
quelquefois ,à des Réguliers. On leur donnoir un falaire, quelquefois caCuel, Celon l'ufage de chaque EgliCe;J mais cette
place ne pou voit former qu'un .fiinple office, & non un per[onnat, moins encore une dignité. Airlu le Capifcolat n'efl:
par les titres de l'EgliCe de Forcalquier qu'un fimple office;
il ne peut être rien de plus par la nature du tirre, & relaùvemenc à fon établi[femenr:,
'
.
La nature .de cet office n'a pas changé. Quand le Capifc(}1
vient à mourtr, le Chapitre fail, quand il le trouve bon,
deux collations, l'une du Capifcolat, & l'a,utre de la Chanoinie vacante par. le décè.s du Capilèol; alors il confere la
,Chanoinie en faveur eJ.'un fujet, & le Capifcolat en faveur
'd'un autre.. Ainu l'office de CapiCcol n'eft pas anl1exé à un
-citre paruiculier de Chanoinie. Auffi trouve-c-on que lors de
-la démiffion 'de Mre. Rouit, Chanoine Capifcol, le Cha-pitre conféra la Chana/nie vacance à Mre. Tirani, & le Ca.
piCcolat à Mre. Antoine Decorio, oncle IX· prédécefieur de
l'appellant. E.n 1632., .le Chapirre tI anligea avec le CapiCcol,
,à raiCon de la rétribution que <;e dernier eil: en droit d'exi.
ger pour fôn office, & q,Ui fut de nouveau fixéé par ce titre.
On y trouve qu'il étQiÇ' jugé & convenu entre les parties.)
Années t 77$ & fuiv.
G
�'0
Jou R'N A ~ J
que la' charge~ de tenir les tables pour ranger l'office divin
& le livre de ponéluarion, appartenoir à l'office de Précenteur; le Capifcolat n'écoir donc qu'un office; ce qui fur ainli
jugé par l'Arrêt rendu de conJenfu en 1662.
En vain obferve-t-on que la diil:inélion des dignirés, perfonnars & offices difparoît dans l'urage; en vain a-t-on ciré
Loifeau, des offices, liv. '), chap. 26, qui dit qu'on mer au
rang des dignités les Cbal10ines qui onc quelque office pardelfus les autres. On auroir pu citer p!ufieurs autres Auteurs,
.qui difent la même chofe, & noramment Faber fur les déné raies , cap. cùm accejfzffint de conflit. n. 3. Mais cet Au'teur, & ceux qui ont voulu p~rler. avec précifion, obfervent
-<Iùe ces qualifications ne fe confondent que largè fumpto vocabulo, fèd in firic7iori fignificatione diJferunl. ( Durand de
Maillane, va. dignité. )
Delà viennent les regles que nos Auteurs nous tracent
fur ce .qui confl:itue les dignités, les perfonnars & les offi'ces; on. a coujours fah en Provence la diftinélion de ces
,trois efpeces de places. Delà viennent 'Ies Staruts de coures
les Eglifes, tam Carhédrales qu~ Collégiales du pays, Staturs
qui palfent cous les jours fous les yeux de la Cour, & dans
lefquels on rrouve la diHinélion des dignirés, perfonnats &
offices. Delà viennent encore les rirres particuliers de l'Eglife
'de Forcalquier, où l'on voit cerre difl:inélion Ce reproduire
& Ce Coutenjr avec uniformité dans les titres de [oos les
temps.
Mre. 'Decotio dit qu'il eil: Précenteur., & que Pail:our, de
'henificii> ,lib. l , tit. 3, n. 7, obCerve que le Précenteur,
'comme les autres o.ffices qui çnt fèdem honorificam ù! clzoro
.& munus annexum, dignitaus dicuntur.: mais Pail:our commence par convenir qu'en prenant il:riélement la qualifica..
tian de digniré, elle ne convient qu'aux places quœ jurifilictionem hahent annexam. Tel eH effeélivement le principe de
tous les Auteurs, & notammem de l'Auteur des additions
fur Pail:our, n. 6: Primicerius autem Diaconibus quidem prœefl,
fed fine jurifdic7ione in foro externo. Voilà ce qu'eil: le Capi[col dad l'ordre & la vérité du principe. 'Cet Auteur ajoute
�. n u
P
A L-A 1: S,
D B
PRO
v :Il NeE.
.'
~,!
.qu'on pourroit l'appeller perfonnqt, & en quelque maniere
dignité, mai~ que ce ne feroit qu'autant qu'ol) voudro)t confondre les .I)uanç.es ~e ces trois érats, de .4.ignir.é, d'ojfjce
& de per{onnat; en provence on ne fai,t pa.s cette con:
fufion, puifque les Statuts de -toutes les Eglires y repro
duifent 1'1 diHinélion des dignités & office~. Ita d'Hericourt
dans fes Loix Ecc1éfiaHiques, pag. 417, & da,ns {es ,Œuvre~
PoHhumes, tom. 4, pag. 164,
.
11 eH inurile d'obferver, d'après Sanleger, réfol. hénéf,
·parr. 2, cap. 3, §. 1 l , ni 22 & 23, que le Capifcol en primus in choro t;, caput chori; .que d'après Berl;eus, de benef,
n. 6, §. 16, il eH [clzolœ cantorum caput, &. que d'après Barbofa, de Carzonicis, cap. 9, il eH le premier ratione cantus,
quia cœteros docet, & que fon nom de prémicier dérive à
primario, qua/i primus in eo officii genere. Ces autorirés 'prou_
vent feulement que de droit, le Capifcol'ou Précenteur a une
efpece d'adminiHration; mais certe ad~iniHration fans ju.
rifdiélion eH incapable de conftiruer une dignité.
Sur le droit d'oprer, on répondoit que l'opric;ln ne peut
êrre légitime & favorable, qu'aurant qu'on la regarde comms
l'attribut de l'ancienneté & la récompenfe du fervice, &
qu'autant qu'elle eft érablie en faveur des plus ancien.s dans
l'ordre & le rang des réceptions. C'eft dans ce fens que la
courume fur l'oprion fe rrouve confirmée par le Chapirre
cùm in tuâ EccleJiâ 4, de confuetudine in 6".: pocerunt, y eH-il
dit, ipfi antiquiores juxta confuetudinem eamdem optare, cùm
prœbenda vocabit. La glofe fur ce texte & fur le mot antiquiores, ajoute: non œtafe, fed .rempore quo in Ecclefia milita.
verunt..,... confuetudo ifla inititur œquitati Canonicœ quœ vult
antiquiores prœferri Canonicos. C'ef! ce qu'obfervent Gibert,
trac? de Ecclef., tit. 8, feél. 24, regle 2, & Duperray dans
fon traité de la capacité des Eccléfiafliques, liv. 4, chap. 8.)
n.
1.
Les places éminentes, [ans en excepter les dignités, ont
,uelquefois des prébendes fixes; les titulaires dans ce cas ne
fone pas roumis à la Loi de l'option i mais quand ils n'Qut
(;20
,
•
�"5'2.
.-
Jou
11. N A'1i
•
J>oint de prébenqes filles, ils 'optent à leur rour de réc,eption;
-& non à leùr cour oe plàce; Ils ne poffedent les prebendes
que comme Chanoines; ce n'dl: qu'à. ce tirre de Chanoine
qu'ils enrrenr dans la' ch~îne ~es op.~lons:. Ils y me;rent I~s
prébendes qu'ils poffedent comme ,Cha nomes ; ce n eft qu à
ce ritre qu'ils peuvent opter pour les p~ébendes vaCan!~5 par
le délaifIème'iH ou'' lé <lécès des Chanoines plus ancÎens. Id,
Moneta dans fan traité
de
optionibus, cap. 4,' conc!uf. 17,
..
6
& Durand de Maillane, v . option.
Arrêt' du l'i Juillet 1776) au rapport de Mr. le ConCeiller
de Chenerilles, qui confirme la Sentence arbitrale avec dépens.
J
ARR Ê T
VIII.
Incompétence des Juges-Confuls, fondée fur la fauffité de la
'
caufè de l'obligation.
Celui qui en pareil cas fè borne à propofèr l'incompétence, n'a
pas befoin d'impétrer des lettres de refcifiol/ envers Ion obligation.
.
P
AR aél:e public du 9 Févder 1774, Pierre Samar, Maître
Cordier de la ville de Marfeille; déclara devoir à
Me; Ponfard, Notaire, la Comme de 214 liv. 12 f., valeur
reçue en marchandifès relatives à Ion commerce. Cet aél:e porroit la claufe de foumillion à, coutes Cours, & notamment
à la Jurifdiél:ion Confulaire. Le terme du paiement expiré,
allignation pardevanr les Juges-Confuls ; déclinatoire de la part
de Samat, dont il fut débouté. Appel pardevant la COllr.
On difoit pour Samat, que la caufe pour laquelle il s'écoit
obligé, était abColument fauffe, n'ayant jamais reçu aucune
forte de marchandiCes de Me. PonCard; il était créancier de
fa femme de 132. liv. 14 fols pour les frais d'une cellion
qu'il avait reçue en fa qualité de Notaire, & pour la prife
�DU
PALAIS
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PROVllNCl!;
'i3
& l'extrait d'un te!l:ament; il la fit affigner, obtinfcontr'elle
une condamnation; mais voyant la difficulré d'êlre payé, il
fit palIer au mari l'aél:e d'obligatinn do~t s'agir.
"
Les Juges-Confuls ne peuvent connoltre que des dJfferens
furvenus entre Marchands pour faits de marchandi(es, afin
de les revendr~ ou employer dans leur travail; ils (ont compétens encore, quand le vendeur, quoique no? Marc~all? '
a recueilli dans (on fonds les marchandl(es qUi font loblet
de la vence. Me. PonÎard n'eH: ni Marchand ni Négociant,
il ne poJrede aucune campagne. Lor(qu'il s'agira de plaider
[ur le fonds, Samar prendra des lettres dé re(cifion; mais
il n'en a pas befoin à pré(enr pour être reIevédu paél:e de
la foumiffion au Tribunal des Juges-Con(uls. La voie des
lettres de re(cilion n'eH pas néceJfaire, quand il s'agit de
quelque nullité de, droit public, ou de quelque nullité porrée
p'ar les Ordonnances; la foumifi!.on au Tribunal Confulaire touche au droit public en intervertiJfant l'ordre des
Juri(diél:ions; elle eH contraire aux Ordonnances, pui(que
celle de 1667 défend expreJfément de Hipuler la contrainte
par cprps pour dette civile & ordinaire.
On répondait pour Me. Pon(ard que le déclinatoire de
Samar ne pouvoir être accueilli, parce que la livrai(on des
marchandi(es qu'il fai(oir profeffion de revendre, (uffi(oit pour
-le foumetrre à la Juri(diél:ion Confulaire. Il exifl:oil d'ailleurs
ll[) aél:e pnblic, un aél:e authentique qui le lioit à cette J urifdiél:ion. Il ne peut oppo(er la limulation .de l'aél:e, qu'après
'avoir impétré des letrre_s de re(cilion; le renvoi ne peut avoir
'lieu que quand l'aél:e aura été anéanti. On ne peur dépouiller
le Tribunal Con(ulaire au mépris d'un titre formel qui l'inveHir.
e : Bremond, SubHirut, obferva que pour fonder la Jun(dJél:lOn ConÎulaire, il faur le concours de la perÎonne &
de la ,chofe; le créancier & le débiteur du billet doivent être
Marchands, & la dette doir être contraél:ée pour fait & pour
caufe de marchandi(es. ( Edir de Charles IX. de 1 S63, portant érabliJfemenr de cette Jurifdiél:ion.} Deux Marchànds
~'obligeant pour autre chofe que pour marchandi[es ou po~r
, l':i
•
�1
'H
.,
10,uRNAL
•
argent qui elt cen(e.e~p~oye 11 leur ~ommerc~, ne [ont pO lOt
ju(ticiables de la Jurt[dH~bon .C?n(ula~:e. ~e bIller ~ ordre ne
fou mer point à cetre Jun(d.ébon, sIl n eH [ou(cnt par un.
Marchand en faveur d'un Marchand.
Il elt vrai ( a jouta Me. Bremond) que l'Ordonnance veut
que rous citoyens, Gentilshommes, Bourgeois, Laboureurs,
Notaires, ayenr la faculté de fe pourvoir ou aux Juges ordinaires, ou aux luges-Confuls pour vente de denrées pra, venant de leuT crû, li elles ont éré vendues à Marchands ou
arri(ans faiîanr profeffion de les revendre.
S'il s'agirfoir ici d'un vendeur dom l'état ne fôt" pas connu,
on pourrair pré(umer que les marchandi(es qu'il a livrées, (ont
des marchandifes donc il fe mêle & dont il fait trafic, furrour dans une ville adonnée au commerce, & dans l'incertitude tout le monde peur êrre fuppofé Négocianr, mais cette
fuppofition ne peut avoir lieu à l'égard de Me. Ponfard,
dont l'état eH èonnu; il fe trouve dans le cas des perfonnes
qui ne peuvent affigner pardevanr les Juges-Confuls que pour
lettres de change ou pour denrées recueillies dans leur fonds,
vend'les à celui qui fair profeffion de les.revendre. Ainfi quand
l'obligation feroit lincere, quand la caure de l'obligation ne
paroÎtroir pas, l'énonciation vague d'une valeur en marchandifes non fpécifiées dans l'q,bligation, & qui ne pourroient êire pFéfumées du nombre de celles que le débiteur fabrique & revend, ni du .nombre de celles que le
créancier recueille & tire de fon nC!, 'ne feroir point attributive de la Jurifdiélion Confulaire enrre deux perfonnes dont
une feulement a la qualité de Marchand ou anifan, & dont
l'autre elt un fimple citoyen. Outre que cette regle importe
à l'ordre des lurifdiélions, elle imporre encme à la bonne
foi, parce qu'on pa1feroir en fraude des lurifdiélions, des
obligations pour caufe f.au1fe & avec contrainre par corps, 'à
la faveur de ce terme vague & indéterminé.,.pour valeur reçue
en marchandifts.
Il faur difl:inguer deux chofes dans la fimularion dont il
s'agit ( concinua Me. Bremond.): 1°. l'obligation de Samat
envers Me. Ponfard au lieu & place de fcr femme; 2.u. la
•
�DU PAr. AIS il B PRO" li Nell:
5'5
foumiffion à la Jurifdiélion des Juges-'Confuls & à la contrainre par corps. Si Silmat vouloit revenir contre le premier
objet, c'eft-à-dire contre l'obligation qù'il a paffée pour fa
femme, il faudrait fans doute qu'il impétrât reCcifion, puifqu'il attaqueroit un paéle valable en lui-même, & qui n'a
rien de' contraire à nos Loix. Mais il ne réclame contre la
fimulation de l'aéle qu'en ce qu'elle le foumet à une Jurifdiélion étrangere & rigoureufe. Il avait deman.dé fan renvoi
pardevant les Jug.es ordinaires, & pardevant la C.our il fe
borne à le fou tenir ; fa demande n'eft donc dans le moment
qu'une propofition d'incompétence & de déclinatoire. Les
lettres de refcifion font néceflàires, quaod on veut attaquer
un aéle ou une c1aufe valable en foi,.& dont en a iotérê.t
de fe faire relever; l'effet de ces for.Les .de te,ttres n'dl pas
d'anéantir & de faire tomber tout de fuite J';j6l:..e .daDt on
fe plaint, mais feurement de faire .paffer cet aéle fo.us les
yeux du Juge qui examine s'il y a lOU 1100 null:ité, & qui
·en prononce la validité ou la caffation {ur les "o.nte.Ra tians
refpeélives des panies.
1
Les Jurifdiélions font une 'portion .effentielle de notre droit
public; les parcies ne peuvent, ,par leur reconnoiffance ni
par leur foumiffion, les rendre compétentes. Il n'a donc pas
.été au pouvoir de Samat de donner aux .Juges.Confuls un
caraélere & une autorité publique pour le juger, quand le
Souverain ne leur a pas confié ce pouvoir.L~obligation de
Samat, quant à ce, eft nulle de plein droit, & il n'a pas
.hefoin d'en faire prononcer la caffation.
Me. Bremond conclut à ce que faifant droit au déclina~oire propofé par Samat, les parcies & matiere fuffent ren"\Ioyées pardevant qui il appartenoit.
.
Arrêt du 18 Décembre 1776, prononcé par Ml'. le Pré1ident d'Enrrecafteaux, conforme aux.conc1ufions; Me. Ponfard fut condamné aux dépens. Blaidant Mes. Gaffier & Rao:
man-Tributiis.
•
�JOURNAL
ARRÊT
IX.
Un afcendant conJlituant une dot, & inflituant en outre l'époufe
[on héritiere dans une portion de [es hiens, la dot doit être
rapportée lors du partage dans la ma.f!è des hièns héréditaires.
.
P
AR les articles de mariage de Mr. le Baron de Boades
avec la Dlle. d'Albert de Sillans, il fut conl1:irué en doc
à l'époufe la fomme de 32000 liv., dont 2000 liv. en robes &
ameublemens, 20000 liv. conl1:iruées du chef du pere, & 10000
liv. du chef de la Daine de Caumont fa mere. Le pere promit en outre d'infiituer la Dame d'Albert pour fan héritiere, à partager par égales portions avec fes deux autres
fœurs. Après le décès du pere, le Baron de Boades fe pourVUt au Lieutenant d'Aix cOlltre la Dame de Caumont, comme
ufufruitiere, & comme héritiere d'une de fes filles entrée en
religion, & contre la Dlle. d'Albert, autre cohéritiere, pour
voir ordonner le partage de la fu'cceffion du fieur d'Albert,
après avoir totitefois pr.élevé du comble cle la fucceffion la
dot conl1:iruée du chef paternel. La Dame de Caumont &
la Dlle. d'Albert prétendirent que le partage devait fe faire
fans aucun prélevement. Le procès fut compromis à Mes.
Serraire , Mougins-Roquefort & Portalis, qui débouterent le
Baron de Boades de fa demande. Appel au Parlement.
L'app.ellant foutenoit que la_troifieme. portion de~ biens
héréditaires devait ki appartenir, indépendamment de la
.preiniere èonHirution, & fans que l'une de ces. libéralités prît
rien fur l'autre. Tel eft le fens naturel du mot outre. Que
Caïus promette par contrat à Titius trois cent livres dans
un temps, & en outre fix cent livres dans un autre; chacun
jugera que Titius doit avoir 900 liv., & que la premiere
fomme ne peut fervir à libérl:1r Caïus de la moitié de la
derniere. Plufieurs Loix confirmenr cette regle ~ & notam-ment
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
~7
ment la Loi IJ, if. de Legat..'l. Si un uflauur, y ea-i1 dit,
leuue a Se/us la moitié d'un fonds de urre, {; de plus une
[ac:nme d'argent, ce légataire doit avoir le fonds & la Jamme.
La Loi la, §. uxori, if. de ann. legat., renfer~e l'expr.effi?n
la plus propre à rendre le mot en outre: UXOrl, y dl-II dIt,
prœur id 'luod a me vivo annui nomine accipiebat, aureos
centllm dari 1'0/0; annuum videtur & fème! centum aureos reli'lui.f!è. C'eft ce qu'établit auffi le Préfident Faber en fon
code de coLlationib. déf. 2.
La Dame de Boades doit donc jouir de fa conftitution de
dot de 32000 liv. & de fan inaitution contraéluelle, fans
être obligée de rapporter la premiere, en fe prévalanc de la
feconde. C'eft la dilpofition textuelle du chap. 6 de la Novelle 18 de trienu & fèmifce, & la décifion de l'authentique
ex ujlamento, cod. de coLlationibus, qui difpenfenc du rapport tomes les fois que le pere a défigné que fa volonté y
ferait contraire: fi exprejJi.m deJignaverit ipfè fè non velle collationem fieri. Les Auteurs fe font agités fur le mot expreffim, & ils fe font réunis pour convenir que la défigoJtion
étoit expre1fe, quand Iii volonté du pere pouvait être préfumée par les expreffions donc il s'était' fervi dans la conftitution de dot. Id Domat, Loix civiles, liv.
tit. 4 du
rapport, feél. 3, n. 6, & Bouvot, rom. 2, va. mariage, quefr.
la.
On répondait que tout cohéritier teaamentaire ou ab inujlat d'un afcendanc, eH obligé de recombler, lors du partage de fa fucceffion ce qu'il a reçu pendant fa vie, à moins
qu'il n'ait été difpenfé du rapport par une difpofition expreffément équipollente, c'eft-à-dire incompatible avec cette
obligation. C'ea ce que décide la Novelle 18, cap. 6,
où après l'avoir établi, l'Empereur Jufiinien n'y apporte
~'autre excepti~n que celle-ci: nifi expr"./fim (en parlant de
1 afcendant à qUI on fuccede ) difignavit ipji: ft velle non fieri
coLlationem. Ita ftntiunt prefque taus les Auteurs.
Le mot outre inféré dans les articles de mariage du
Baron de Boades, ne peut lui être d'aucune utilité. Il en
réfulte à la vérité que nonobHant la confiitution dotale q!Ji
Annùs ln 5 & fuiv.
.El
2,
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Jou
RNA L
lui a été faite, l'époufe doit avoir la quàlité de cohéritiere~
Mais il n'en réfulte pas que fa portion héréditaire doive lui
appartenir franche & exempte d'une obligation qui y ell:
inhérente de droit, hors le feul cas d'une difpenfe, ou,
comme difent la plupart des Auteurs, d'une prohibition ex.
preffe à laquelle ce mot n'a aucun rapport.
Qu'on fuppofe un pere qui faie une donation entre-vifs à
fon fils d'une certaine fomme, & qùi enfuite par fon te!1:ament l'inllicue héritier pour une moitié, pour un tiers ou
pour une autre quotité. On ne peue pas douter dans ce cas
que l'infritution ne foit faite en outre & pardeffus la donation; car pourquoi l'inll:ituer cohéritier, s'il n'avoit voulu
le faire profiter que de cette derniere? Or, quoique la c1aufe
en outre exifl:e ici, non dans le mot & d'après le Il:yle du
Notaire, mais dans la ,nature même des titre~ & par la vo- .
lonté expreffe d'un afcendant qui. a voulu être à la fois donateur & tefrateur, le fils envers qui il a exercé cette double
libéralité, efr obligé de recombler la premiere, lorfqu'il veut
dans un partage faire valoir la feconde. Le mot en outre
pat lui-même n'induit donc pas la difpenfe de l'obliga.tion
impofée par la Loi à l'héritier de rapporter à la maffe commune de l'héritage d'un afcendant dont il ell: portionnaire,
ce qu'il en a reçu entre-vifs & en avancement d'hoirie. L'expreffion en outre ne dit pas plus que celle-ci, comme au.fJi,
indépendamment de quoi, & autres femblables. EIIe n'a pas
même plus de force que la conjonaion &, comme on peut
voir par cet exemple: je donne à Titius ma maifon & ma
haflide; ce qui opere certainement une donation de l'un &
àe l'autre immeuble. Or, la conjonaion &, & 'toutes celles
qu'on vient d'indiquer, ne difpenfent pas un héricier du
rapport de ce qu'il a reçu entre-vifs & en avancement d'hoirie; l'expreffion en outre ne l'en difpenfe pas non plus.
La Loi a impofé l'obligation du recomblement, à moins
qu'il n'yen ait une défenfe ou one difpenfe expreffe ; comme
fi un pere qui après avoir confritué en dot à fa fille une
fomme d'argent, & l'avoir inll:ituée fon héritiere. pour un
tiers, ajoute cette c1aufe: fans néanmoins qu'elle foit ohligie
�DU
PAL AIS
DE
59
PRO VEN C B.
de rapporter la fufdite [omme lors du partage de mes biens;
ou cette autre, la difpenfant du rapport de fa dot, & entendant qu'elle lui appartienne titre de préciput. On citoit J ulien en fan Code manufcrit, va. hœres, cap. 2 de collationih.,
lett. S; Catelan, liv. 2, chap. 91; Pàpon, liv. 21, du rapport entre les héritiers; Maynard, liv. 8 , chap. 57.
En vain a-t-on cité la Loi 13, ff. de legatis 3°. Les. fimpIes légataires ne font pas fujets aux loix du rapport, qui
n'ell: fait que pour des héritiers, ainli que l'obferve Domat
en fes Loix civiles, liv. 2, tir. l , feél:.. 2. II ne s'agit pas
dans la Loi citée d'une prérogative exclufivement arrachée
au mot ho'c ampliùs. SeÏus, qui ell: le légataire, n'aurait pas.
tiré moins d'avantage de,la conjonél:ion &, ou de tout aUtre
terme propre à déligner deux droits difiinél:s. La feconde
Loi citée du §. uxori, .If. de annuis ,legatis, efi également
détruite par les induél:ions que l'on a tiré de la premiere; il
eu efi de même de la Doél:rine du Préfident Faber.
Arrêt rendu en 1776, au rapport de Mr. le Confeiller de·
Vitrolles, qui confirme la Sentence arbitrale avec dépens.
Ecrivant Mes. Gaffier & Arnulphy.
a
ARRÈT
X.
Les Juges-Confuls ne peuvent rendre un décret de main mifecontre un débiteur étranger, & pour une dette contraBée en·
pays étranger, de laquelle ils ne peuvent connaître.
Ean-Bernard Morando, Italien de nation, établi depuis:
long-temps à Cadix, en qualité de Négociaot, ayant effuyé des revers, dans fan commerce, Dom Grivet & Dom
Chalamel, Négocians de la même ville, lui fournirent diverfes ma rchandifes, pour le montant defquel.les Morand!)
leur fit des billets. Ne les pouvant acquitter, Morando vint
fe réfugier en France, & débarqua à la Ciotat. Gr-ivet fils,.
chargé de la procqration de fon pere & de Dom Chalamel,
J
.
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�~
JOURNAL
arriva à Marfeille prefque dans le méme temps; il expora
aux Juges-Confuls que Morando arrivé au Parr de Marfeille,
étoit un débiteur de mauvaife foi; il demanda qu'il fûr ordonné en fublide de jufiice, que ce débireur feroir rraduit
& emmené par main mife devant .leur Tribunal, pour voir
dire qu'il payerair fur le champ les fommes dues à Dom
Grivet & à Dom Chalam el , autremenr condamné à tenir
prifon jufqu'à enrier paiemenr. Ces fins furenr accordée s.
Morando fur arrêré à la Ciotar & conduit devanr les JugesCon fuis de Marfeille. Il répondit que loin d'êrre un débi.
teur de mauvaife h)i, il n'éroit forci d'Efpagne que de l'aveu
de fa famille, & dans l'objer de venir en France tenter la
fortune, & parvenir à payer fes créanciers; il fe plaig'lit
contre Dom Grivet de ce qu'il lui demandait le paiement
d'une lettre de change acquirtée depuis plus de dix - huit
mois; il réclama la Jurifdiél:ion d'Efpagne, feuie compérente
pour le. condamner au paiement des billets & lettres de
change fairs à Cadix par un Italien en faveur de Négocians
Efpagnols; il invoqua le drair d'afyle que chaque Gouvernemen~ accorde à tous étrangers réfugiés pour derres, &
dont aucun Tribunal ne peur les priver, fans / déclararion
exprelfe du Souverain; il obferva que s'il étoir poffible que
le Roi de France eÎIt lailfé à fes Tribunaux le foin de juger
eux-mêmes dans quels. cas le drait d'afyle doit être accordé
ou refufé, il n'aurait cenainement pas déparri ce privilege
à une Jurifdiél:ion carrulaire & fans territoire, qui n'eH pas
même furveillée par un Subfl:itut de Mr. le Procureur-Général du Roi. Dom Grivet repliqua que Morando étoit un
fourbe, qui de tous les temps avoit trompé fes créanciers,
& qui avait eu la précaution de déguifer fan nom en prenant la fuite.
.
Les Juges. Con fuis délailferent les parties à pourfuivre
ainli & pardevanr qui il appartiendrait, & néanmoins ils
ordonnerent en fubfide de Jufrice, que Morando donneroit
fur le champ bonne & fuffifante caution pour les fommes
qui pnurroient êrre dues. à Grivet & Chalamel, qu'autrement il palferoir le guichet. Morando n'ayant pu donner
�nu
PAL A YS
nE
6r
PRO VEN C E.
camion, fut emprifonné le même jour. Il appella pardevant
la Cour de ce jugemem; il en demanda la caffari~n, ai.nfi
que de fan emprifonnement ; la caufe fut renvoyee en JUgemenr.
On difoit pour Morando , la. qu'il s'agiffoit de ravoir s'il
y avait en France des Tribunaux de JuHice qui, à la r~
quête d'un étranger, puffent faire emprifonner par mam
0
mife un autre étranger débireur qui y aurait .pris afyle; 2 • fi
'en fuppofanr qu'il y ait en France des Tribunaux auxquels
le Roi air départi le privilege de refufer aryle à l'étranger
en certains cas, celui des Juges - Confuis peut être du
nombre.
"Tous les Gouvernemens om des maximes politiques qui
leur fom propres: omnes populi fùo proprio jure utuntur; ils
en ont cependant de communes elltr'eux qui dérivent du
drQit des gens: omnes populi communi omnium hominum jure
Uluntur. Une des maximes communes à tous les Etats, efi:
de donner afyle à tous étrangers réfugiés dans leurs refforrs,
& de - défendre toute emreprife contre le réfugié, fans le
confentement du Souverain qui l'a mis fous fa proreél:ion.
Chaque Piince, chaque Etat tient ce privilege de fan territoire, 'dont les bornes font toujours celles de toute autre
Puilfance.
C'ef!: d'après cerre maxime politique que chaque Fran'fois jouit de ce droit d'afyle en Efpagne, & par-tout ailleurs; il Y vit tranquillement à l'abri de toutes pourfuites
civiles ou criminelles de la part de tout François quelconque; il n'y peur être faiu que de l'ordre exprès du Souverain du lieu où il s'eH réfugié, & encore cet ordre n'a-r·il jamais été expédié comre les débiteurs fuyards. Ce droir d'afyle
ef!: plus parriculiéremem accordé en France aux érrangers qui
.s'y font réfugiés. ( Mornac ad leg. l , cod. de fana. trinitate ,
& fur l'Authen:ique quâ in provinciâ, cod. u6i de crimine agi
opporteat! Bodm dans ra République, liv. l , ch.
Barder,
tom. 2, bv. 1, chap. 42 ;.Bourarîc fu'!' les InHüuts, pag. 31;
Serres, ibid. pag. 2'); Boniface, tom. 3, liv. 1, tit. l ,
,çhap.· 1 ; Julien en fes Colleél:ions. manufcrices, tir. Judex,
s;
/
�61.
]
OUR NA L
cap. :l., §.:l., pag. '- ~ , letc. M.; Aira~lt en fan ordre judiciaire, liv. l, n. 8 ; le Journal du Pa~als , tom. l , pag. 70;
Bornier fur l'Ordonnance de 1670, tir. l , arr. l ; Lacombe
en fes Marieres Criminelles, pag. l ~ '-; Reboul, ihid. tit. 1,
chap. 1 , n. I~. Tous ces Aureurs rendent un hommage
formel à ce droir d'afyle, en décidant que l'Etranger n'efl:
puni en France que quand il y a délinqué, ou que fon crime
y a eu de fuire, ou quand il a délinqué en pays étranger contre un Fran'lois.
L'Er ranger criminel ou débiteur n'a aucun compte à ren-dre aux Tribunaux, François des crimes qu'il acommis ou des
dettes qu'il a coor~aél:ées dans un aurre Gouvernementenvers
des érrangers. Il n'efl & ne peut être leur jufticiable, quelques
inftances que les parties ioréreffées faffenr auprès d'e'ux, &;
cela, non feulement parce qu'ils n'oor point de million pour
connaître des délits commis ou des dettes coorraél:ées entre
étrangers dans un aurre Royaume, mais encore parce qu'ils
ne peuvent pas confidérer comme criminel ou débiteur, l'Erranger que le Roi tient, pour ainfi dire, enrre fes hras &;
fous fa proreél:ion ; il n'y a que le Souverain qùi puiffe difpofer de la perfonne de ce réfugié.
Sur le fecond moyen on difoir, que fût-il vrai que le Négociant François, érabli tranfitoirement en Efpagne, eût le
droit de faire arrêter par mai n mife fon débiteur Efpagnol
& réfugié en France, il n'auroit certainement pas celui de
l'y faire condamner au paiement de ce qu'il lui doit pour
obligations paffées en Efpagne. Tous les principes fe réuniffent pour lier les mains aux Tribunaux François. Il efl:
certain en elfet qu'un débiteur n'a & ne peut avoir d'autre
Juge que celui de fon domicile, ou du lieu du comrat, ou
celui à la juiifdiél:ion duquel il s'eft expreffément foumis.
Ces vérités om été reconnues par les Juges-Confuls qui déIaifferent les parties à fe pourvoir ainli & pardevanr qui il ap.,
partiendroit.
. Il eft donc vrai que Dom Grivet & Chalamel, en les
fuppofam Franc;ois tranfiroiremenr établis en Efpagne, & autorifés à faire arrêter leur débiteur en France, n'auraient eu
,
�J) U
PAr. AIS
D E
p~O V B NeE;
.
03
que le droit de l'y faire failir par main mife & en fublide de
juftice. A quel Tribunal pouvoient-ils & devoient-ils s'adreffer pour obtenir une pareille permiffion? N'y ayant en France
aucun Tribunal de jufiice qui eût une jurifdiél:ion fpécialemeut
fondée fur Morando, le décret de main mife n'aurait pu être
décerné que"Par le Juge Royal & ordinaire du territoire où
il avoit pris afyle. La Ciotat, où Moraudo avoit débarqué,
-& où il féjourna , écoit le lieu du domicile qu'il avoit choifi
en France. Le Juge de la Ciotat écoit le feul qui eût jurifdiél:ion filr ce domicile. A lui feul écoit donc réfervé de
rendre un décret de main mife contre un habitant de fon
difiriél:, qui ne s'écoit rendu ~ufiiciable d'aucun autre Tribunal de France, ni par délit, l)i par contrat. Des Officiers
carculaires, qui n'ont point de--t-érricoire, qui ne peuvent prononcer que contre d'es Négocians qui contraél:ent à Marfeille ,
ne peuvent être a,urorifJ!s à étendre leur jurifdiél:ion contre un
homme qui n'y a ,e6ntraél:é aucune obligation de comInerce, & qui-~.fi domicilié dans le territoire d'un Juge
Royal.·
..
En fuppofant que la feule defiination pour Marfeille du Navire fur lequel le fleur Morando s'écoit embarqué eût fixé fon
domicile à Marfeille , le décret de main mife n'auroit pas
pu être rendu' par les Juges-Confuls de Marfeille. Morando
ne pouvoit y être faiu en fublide de jufiice que de l'aucorité
du Juge qui, avec une jurifdiél:ion univerfelle & territoriale
fur la ville de Marfeille, y écoit le plus éminent en dignité,
.c'~fi-à-dire, du Lieutenant-Général qui avoit un département plus confidérable de l'autorité Royale, chargé de veiller
dans fon difiriél: à l'intérêt général & particulier de tous les
François tranucoirement établis hors du Royaume, & d'y
accorder proteél:ion aux étrangers. Tous ces attributs convienn.enr à lui feul dans fan reffort, quand il n'y efi en concours qu'avec des Juges fubalrernes.
L'on ne connaît en effet que trois décrets de mai,n mife
_ rendus en Provence; l'un, contre Jaufem, Hollandais; l'autre,
contre Laurent Surie, Gênois; & le trailieme, contre Auguf_~in Carminaci. Tous avaient été rendus par le Lieutenant
�~
JOU~NAL
de Marfeille. 'L'on voit dans le Journal dès Audiences,. à
l'époque du 2 Septembre 1684, que pour faire arrêter en
France, & par \Jn coup d'autorité, un étranger qui s'y étoit
obligé pour alimens, & qui étoit fur le point de fortir du
Royaume, le créancier fe pourvut devant le Lieutenant-Général-Civil. Brillon dans fon Diétionnaire rapporte ce même
Arrêt, va. Etranger, n. 9. Or, fi un étranger qui a contraété en France, ne peut y être .raifi d'autorité qu'en vertu
du décret du Lieutenant, à plus forte raifon un étranger ne
peut être faiu par main mife en France pour dèttes contractées hors le Royaume que de la même autorité.
Les Juges-Confuls ont une jurifdiétion expre!fément bornée
aux contrats & faits de négoce dont le lieu de leur établiffement a été le fiege & le' témoin. Ceux de Marfeille ne font
donc établis Juges que dans le cercle des Négocians qui
trafiquent & s'obligent dans cette Place. Ils n'ont & ne
'peuvent pas avoir le caraétere de Juges hors de ce cerete,
parce que la pui!fance publique pour d'autres cas dl: confiée à
d'autres mains. Ayant recoilDu qu'ils ne pouvoient pas connoirre des obligations contraétées en Efpagne par MOl'ando,
& aYdnt renvoyé les parties devant les Juges d'Efpagne, les
Juges-Confuis de Marfeil1e fe font eux-mêmes jugés incompétens pour rendre un décret de main mife.
'
Si on dit communément que tout Juge ell: compétent dans
certaines circon!tances, on n'entend & on ne peut pas entendre parler d'un Juge fondé en jurifdiétion limitée, qui ne peut
connoÎtre que d'une efpece d'affaires, & qui n'a plus de caraétere hors de cette efpece , mais au, contraire d'un Juge
fondé en jurifdiétion univerfel1e, qui a dans fon territoire
l'exercice général de la puilfance publique, & qui en conféquence, lorfqu'il eH incompétent à raifon du fonds, conferve
néanmoins un caraétere pour veiller au bon ordre, à l'intérêt
général & particulier de tous les fujels du Roi, de tous les
étrangers qui vivent dans le Royaume.
, Si fuivant l'Ordonnance d'Henri IV, rapportée par Gue..:
n~is, llv. 7, tit. 1:2., pag. 692, on'peut arrêter, même fans
decret du Juge, le banqueroutier frauduleux; fi fuivant Bonnet,
�D U
PAL AIS
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1! R
6)
0 VEN C Il.
'net, lett. E , fomm. 2; Covarruvi.s, 'luœjl. prac?, cap. I I ,
n. 10; Dumoulin, cout. de Paris, §. 9, glo1f. 6, va. Rendre
compte, le créancier peut lui-même arrêter fan débiteur, cecce
Loi & ces Auteurs fuppoferu: tous que ce débiteur efl: dans la
Monarchie où il s'eH obligé; aioli ces autorités ne fauroient
être valablemene oppofées, parce que Dom Grivet & Cha13JTlel n'auroient pas pu faifir de le~lr autorité privée leur débiteur réfugié en France; il Y avait pris un afyle fous la'
foi du droit des gens, & il n'y aurait pu être faifi qu'avec le
concours de la puiJTance publique.
Inutilement Grivet & Chalamel oppoferoient-ils qu'ils
avaient pu faire faifir Morando dans un lieu Fran'i0is où il
avait pris' afyle, parce qu'ils écoient Fran'i0is, malgré leur
établilfemenc en Efpagne ; parce que, quand même ils feraient Efpagnols, ils jouiraient du privilege des Fran'i0is en
vertu du paél:e de famille; parce que, quand même ce paél:e
- de famille n'exifieroit pas, on ne pourroit pas leur oppofer
un prétendu droit d'afyle qui, loin d"être fondé fur le droit
des gens, en ferait lui-même le defiruél:eur.
Il eH vrai que les créanciers de Morando fane Fran'i0is
d'origine; mais ils font établis en Efpagne depuis au delà de
dix ans; ils fane forcis du Royaume fans permiŒon du Roi;
ils n'y font plus retournés depuis leur tranfmigration; ils ne
polfedent aucun bien en France; ils vivent aél:uellement à
Cadix en vrais Efpagnols, & Y font flubliquement réputés
tels. Des originaires de France peuvent-ils dans cecce polition fe dire Fran'iois, & s'arroger les privileges acquis à
ceux qui am touc-à-Ia-fois l'avantage & le droit de porter
le titre de François?
~n ne peut révoqu,er en doute que le François qui va s'établir dans un Royaume étranger avec l'intention de ne
plus re~enir en France, celfe d'êcce réputé Fran'i0is, & devien~
même etranger; cecce vérité eU fondée fur la loi poJllirninii, §.
captivus, fE de capt. & poJllirnin. Mais à quoi reconnaît-on
l'intention de' ne plus revenir clans le Royaume dont on ell:
forci? La même loi l'indique dans certains faits qu'elle rap_
pelle. On elt cenfé n'a'o:oir plus l'intention de revenir dan.s.
Anné~s
ln 5 & fuiv.
l
�66
J
0 t1 R N' A r,
le lieu d'où on elt forri, fi on établit fan féjour & le liege de
fa fonune" dans le pays étranger; fi on y a pris un genre de
vie, un état qui nous lie perpétuellement. Si maluerit apud
exteros perpetua manere ; ihi fedem fixerit , jùmmam rerum
jùarum conjlituerit, iDi ge/lUS vitre, jlatum & conditionem perpetuœ morœ carisâ detexerit. Voilà les traits auxquels le tranffuge d'un Royaume ell: caraél:érifé par la loi. On ell: alors devenu étranger, parce qu'on ne" peut être en même temps
citoyen de deux Villes foumifes à diverfes dominations. Ces
prinéipes font adoptés par Bacquet dans fan Traité du
Droit d'Auhaine, part. S , chap. 38, n. 2 , & par Lebret,
décif. ..,.
On a demandé autrefois: ID. fi le François foni du
Royaume pouvoit, en revenant en France, y être rétabli
dans fon état & dans rous fes droits paŒés & futurs : 2°. fi
après la mort d'un pareil transfuge,' fes enfal15, en revenant
en Francè, pouvaient demander & obtenir la même faveur. On trouve des Arrêts & des Auteurs qui ont égaIement refufé ce 'privilege à tous, fur le fondement que la
pene du droit de cité étoit irréparable pour le patré. ( Bacquet du Droit d'Auhaine, part. S, chap. 39, n°. l, 2, 3,
4; chap. 41, n. la; Chopin, du Domaille , lib. 1-, tit. II,
n. 16; Louet, fomm. l S, n. l , 4, n. .12. ) On en trouve
d'autres qui ont accordé ce privilege au pere ou aux enfans, lorfqu'il conltoit par écrit que le pere avait roujoJrs
confervé l'intention de rerou"rner en France. ( Bacquet 'eod.,
chap. 38, n. 8 & 9, chap. 4 l, n. 7 & 8; Bouguier, leu. F, '
n.. l S; Brodeau fur Louet eod. , n. S ; Bouvot, rom. 2 , verb.
Auhainl!. ) On en, trouve d'autres enfin qui ont rétabli le pere
ou fes enfuns dans rous leurs droits, par cela feul qu'étant
revenus en France, ils éroient ce'nfés n'avoir jamais ceŒé
d'être ciroyens. ( Bacquet eod. , 'ch. 39, n. '), chap. 40, n.
la ,& 2') in fille; Journal des Audiences, rom. l , liv. ') ,
chap. 8 ; Boërius, décif. ,13 ; Cambolas , liv. 3', chap. 27;
Bodin, liv. l, de la Républi'lue, chap. 6, pag. 64; P:lll:0llr,
de Jeudis, lib. l, tit. 9' n. 3 ; Dupineau, liv. 7 , chap. l S;
Bardet, tom. 2, liv. 3; chap. 24; Soefve, [<lm. l', .cent.
�PALAI~
67
't, cbàp. 72" c~nt. ih Çhilp. 87 ; Bafn.age fur l'art, 148 de
la coutume de Normandie, & fur l'art. 452-•
• Dom Grivet (X Dom Chalamel ne peuvent s'appliquer
cett~ derniere décifion, puifqu'ils font encore domiciliés en
E(pagne , &. (ans aucune intention de revenir en France.
D'ailleurs .les cho(es font hien changées depuis l'Edit de 1669,
pofiérieur à touteS les autorités qué l'on vient de cirer; le
Roi y a déclaré que le droit de ciré feroir perdu pour tout
Françoi~ qui fortiroir du Royaume fans fa permilIion, &
fe marieroir en pays érranger; le Parlement de Provence
décida, fi,r la propofirion qui lui fut faite par M. le Chancelier d'Ague1Teau, que les fils des François qui n'avoient
pas obrenu permilIion particuliere de Sa MajeHé de rélider
en pays étranger, feroient ahfolument exclus des (uccelIions
& fujets à l'aubaine. Il n'efi intervenu depuis lors aucune loi
qui air dérogé à- cer Edir.
Le paél:e de famille du 1') Aoûr 1761 a affranchi les François établis en Efpagne du droir d'aubaine Efpagnol, & les
E(pagnols érablis en France du droit d'aubaine François;
mais conclure delà que les François qui fonr devenus Efpagnols ne ce1Tent pas d'être François, c'ef! tirer une conféquence qui efi en oppolition direél:e avec tous les principes
& avec le paéte de famille lui-même.
Le décret n'el! ni n:J1 ni incompérent, répondo ienr les
{ieurs Grivet & Chalamel j ils ont pu faire faiur Marando par
inain mife dans le lieu François où il avoir pris a(yle, parce
qu'ils /Pnt François malgré leur érabli1Temenr en Efpagne
depuis trois ou quarre ans, & qu'ils n'ont pas perdu l'e(·
poir.de retour; parce que quand même ils (eroienr Elpagnols, ils jouiroient d\'! privilege de François en venu du
paéte de famille fair entre la mai(on de Bourbon; parce
que quand même le paéte de famille n'exifieroir pas, on ne
pourroir pas leur oppofer un prérendu droit d'alyle qui, loin
d'êrre fondé fur le droit des gens, en (eroir lui-même-Ie
defiruéleur , de même que de roures les loix civiles; enfin.
parce qu'un débiteur fuyard ne mérite aucune faveur ni pro,teél:ion dans aucun Etat j parce que Moraudo, érranger luiDU
D1!
PROVENCE.
1 i
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JOURNAL
même, n'e!1: pas recevable à contelter l'état des fieurs Grivel
& Chalame!.
On a pu faire failir Marando dans la ville de la Ciotat en
vertu du décret de main mife rendu par les Juges-Confuls
de la ville de Marfeille, parce que les Jugemens des JugesConfuls font exécutoire,s par-tour fans vifa ni paréatis; &
qu'en matiere de fublide de Juftice, tout Juge elt compé, tent; que d'ailleurs le débiteur fuyard ne peut pas oppofer
, l'incompétence, qu'il peur être arrêté par [on créancier; à
plus forte raifon peut-il l'être après' le mandement d'un Juge
quelconque.
Mr. l'Avocat-Général de Cali{fanne examina d'abord fi Morando avait dtî trouver un afyle en France contre les pourfuites des lieurs Grivet & Chalamel; en [econd lieu) li, n'en
ayant pas pu trouver, il avait pu être [aili, & li c'étoit de
l'autorité des Juges-Con[uls qu'il avait dtî l'être.
Il obferva fur la premiere queltion, qu'il n'y avait rien
en général de li [acré que le droit d'afyle, que le bénéfice de
la loi ou des conventions expre{fes ou tacites ont autorifé.
Comme la DivlOité , a dit un grand homme, elt le réfuge
des malheureux, & qu'il n'y a pas des gens plus malheureux
'que les criminels, on a été naturellement porté à pen fer que
les Temples étoient 't1O afyle pour eux, & l'on croyait par
ces aryles honorer la Divinité. Tout devint bientôt afyle; cependant nos Rois [encirent que ce qui alfuroit l'impunité
aux crimes, ne pouvait que contribuer à les multiplier; &
, les Temples qui, dit Tacite, n'étoienc remplis que de débiC'eurs infolvables ou d'efclaves méchans, furent rendus à la
divinité. De ces afyles particuliers fe formerenc les afyles généraux, droit qui a befoin d'être difcuré d'après cert...ms principe~ qui tiennent' au droit des gens, & dont la ba{e n'dl:
que l'autorité exclullve de chaque Prince dans [es Etats.
Il dl: de principe politique, que chaque Prince dans fon
territoire donne afyle à tour étranger, & que dès-lors, fans
le confentement du Souverain, on ne peut agir contre cee
étranger; ce droit eH refpeB:if vis-à-vis de chaque Etat;'
& s'il en étoit un qui refusât le droit d'alyle à quelqu'étranger~
,
�Dy
P.ROVBNCJi~
D9
tous les fujets de cet état feroient privés du même droit
chez tous les autres Princes, parce qu'il eH', bien plus
que le droit d'aubaine, fondé' fur la réciprocité; la France
efl:, pour aioli dire, un des Etats où ce droit a le plus de
force: fit liher, dit la Loi, quifquis falum Galliœ cum afili
vice contigerit; tout étranger coupable qui fe réfugie en
France eH à l'abri de toute pourfuite; fa perfonne efl:, pour
ainli dire, facrée; il ne reconoît que la JurifdiB:ion immédiate du Souverain.
Mais ne faue-il pas une permiffion parciculiere du Souverain pour attenter à Ca p~fonne? PuiCque lui [eul donne
un aCyle, ne dépend-il pas de lui feul de lerefufer? La
loi aUfoie manqué Con but', fi le crime pouvait ref1:er impuni; elle fembleroit l'autorifer. Il exifl:e donc toûjours des
voies de droie; le recours au Prince n'ef1: jamais inutile;
& cés grandes maximes ont été atteHées par tous ceux qui,
chargés du minifl:ere public, ont défendu les draies du
Souverain. Du crime à la dette il ya bien loin; l'un anéantit & détruie la [ociéeé; l'autre ne fait que la tendre plus
difficile. L'afyle n'elt cependant pas refufé' au crime '; dès
lors peue-il l'êere à la dettè? Peut-on mettre en comparai[on la Cûrelé de la vie des citoyens, & l'avantage du com-merce? Si le débiteur fe fouItrait aux principes du. draie
des gens, le criminel attaque entiérerrie~t ceux da droit_
naturel; il exiHe des exemples des débiteurs qui ont joui
du droit d'aCyle; ce droit elt donc acquis, & le ~ débiteur de mauvaife foi ne peut le perdre. L'aCyle ef1: du draie
des gens; -la mauvaife foi du débieeur n'elt qu'un fJlit particulier, qui' ne peut faire obllacle à des principes généraux. La bonne foi violée cauCe, il efl: vrai, dans un Eeae
les plus violentes fecou/fes. Le droit commun, l'intérêe
général doit s'accorder fur ce point avec liineérêt particulier de chaque Eeat; mais néanmoins le droit d'afyle peue
& doit êere accordé au débiteur fuyard.
• Le François (continua Mr. l'Avocat -Général) peut-il
être privé du droit que lui accorde fa qualité de citoyen,
~js-à.vis d'un étranger quelconque, qui a contraB:é avec
PALAIS
DB
•
�JO-URN'AL
10
peur-il,
contre -un François, oppofer te
lui? Cet étranger
droit ·d'afyle ?
Les fieurs Grivet & Chalamel font~i1s Fran90is ou écran.
gers? Ces faits ont été contefiés entre les parties '; eHes
n'ont pas été d'accord fur le temps de leur demeure en
pays étranger, fur le fait de leu'r établilfemenc; ils font
mariés avec des Efpagnoles & des Lyonnoifes; aucune des
parties n'a rien jufiifié; les circonHances femblent plutôt
prouver un~ partie des faits' avancés par Morando, que·
ceux qui ont été atteHés par Grivet & Chalamel; du-moins
ont-ils été avancés, foit pardeyant les Juges-Confuls, fait
pardevant la Cour, fans être contefiés. Mais ces faits,
quels qu'ils [oient, prouvent-ils que ces Négocians font
étrangers? Il eH convenu qu'ils font Fran90is d'origine;
& dès-lors faut-il de {impIes confentémens tacites pour
dépouiller de la qualité de François? Ne faut-il que de
fimples préfomptions pour perdre des droits de cité auffi
précieux?
On ne peut être en même-temps citoyen de deux Empires; mais le Fran9ois, <Juoiqu'il vive fous un fol étranger, refie toujo\lrs tel, s'il n'a pas acquis publiquement
& d'une maniere légale le titre de lùjet d'un autre Souverain. Le domic,ile, le commerce, le mariage même, ne '
conHiruent pas l'ét,ra'l'1ger vis-à-yis d'un François; le cri de
la patrie fe fait toujours entendre; & fi des circonltances
le retie,nnent, ce n'dl, pour ainfi dire, que malgré lui.
Aiofi ,l'alyle eH a1Turé à l'étranger qui vient fe réfugier en
France, mais conc·r,e Pétranger, & jamais Goncre le national. ,Seroit.il poŒble que le Sou.verai!) François fournit à
ceux qui vivent fo.us ,\,ln autre ciel" des armes contre [es
Sujets?
Les dleurs Grivet & ,chalamel font -f:ncore Fraillçois,
parce 'que dès qu'un François n'a pa,s renoncé expre1Tément à [a patrie, il lui fuflit ,de ,dire qu'~.J -veut la rejoindre
pour en ~rre cru fur [a ,pilrole; ils ,ré.c1ament dOllc aujourd'hui cette patrie; ils ,négocient, ilell: ,vrai, ~ors de ,fon
{ein; ils [e [ont peut~être établis loin d'eUe; ils o-n,[ pci$
�DU
PALAIS
DB
PllOVENCE;"
71"
<les engagemens chez une aurre narion; mais ils cedent au
defir de Ce dire Fran~ois, &' la parrie ne peur leur refufer un C-:cours qu'ils demandent; ils n'ont point pris des
lettres de naruraliré d'un Prince érranger au nôrre; ils
commercent pour la Narion Fran~oiCe; ils travaillent pour
kur parrie. Ainli le fieur Morando, qui en rheCe générale
eut rrouvé dans le fein de la France un aCyle conrre les
pourCuires de Ces créanciers étrangers, ne le peur plus aujourd'hui, puifque ces mêmes créanciers font des Fran~ois,
conrre lefquels le droit d'afyle ne peut êrre accordé en
France en faveur d'aucun érranger.
•
Mr. l'Avocat-Général diCcurant le Cecond moyen, obCerva
que la maxime générale ef!: connue; tout Juge Fran~ois
ef!: compérent dans le cas de néceffiré, tel que le fubfide
de Juf!:ice; mais il faur que ce foit un Juge local, naturel, rerritorial, & non un Juge li miré ; ce n'ef!: qu'en fubfide de juftice que les fieurs Griver & Chalamel fe font
adre!Tés aux Juges-Confuls de MarCeille. Rien d'auffi facré
que les JuriCdiél:ions; elles font ou univerCelles, ou circonC·
crires; ces dernieres n'ont précifémenr que ce qui leur a
éré départi; rour ce qui n'ef!: pas exprimé dans les loix
de leor érabli!Temenr ou dans celles de leur ampliarion de
pouvoir, leur eH abColumenr étranger; ils n'en peuvent
connoître fans renverCer la parrimonialiré des Jurifdictians.
Tout le monde connolr l'érablilfement des Juges-Confuis à MarCeille. Sans territoire 'Çuelconque, ils ne peuvenr connolrre que du fair du commerce entre les Négocians de Marfeille. Juges circonfcrifs & carrulair~s , -ils ne
peuvent pas connolrre, ni des grandes maximes, ni des
privileges accordés aux érrangers. Juges particuliers, ils n'ont
rien qui rienne à l'adminiltrarion publique; ils n'onr point
d'Officiers chargés de veiller aux droirs de la Souveraineré;
n'ayant qu'une portion de Jurifdiél:ion circonfcrite & limitée, ils font incompétents pour tout ce qui ne regarde
pas fon objer particulier. Sous 'ce point de ,vue Morando
ne paroi!Toit pas pouvoir êrre ju!!:iciable des Juges-Con[uls
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7'2.
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de Marfeille; les titres' étoient faies en pays érrangèrs; il
l'étoit lui-même; ce qui confl:icue le Juge de fubfide de
juUice, c'eU le Juge local, le Juge du domicile' aél:uel ;
on pouvoit demander le fuhfide de juUice au Juge Royal
de la Ciotat, où Morando avoit d 'barqué. Si l'on vouloit
avoir fubfide de jufl:ice à Marfeille, accendu que le vaiffeau y étoit def!:iné, on pouvbit s'adrefrer au Lieutenant;,
on le devoit, puifque c'étoit dans le reffort du Juge Royal
qu'on devoit exécuter. Ces deux Juges avoient la Jurifdiél:ion u'niverfelle; ils avoient par conféquent territoire. On
a follicitél'aurorité' des Juges-Confuls qui n'ont point de
territoire, & qui cependant donnent un décret de' main
mife, exécutoire même hors de Marfeille & à la Ciotat;.
qne pareille conduite ef!: inouie, & il feroit de la plus
grande conféquence de la foueenir; ce feroit remettre toure
Jurifdiél:ion entre les mains des Juges-Confuls, & ne fixer
aucune borne à une autorité que des loix précifes ont circonfcri te. Ce feroit dépouiller les Juges fpécialement chargés de veiller à l'intérêt 'gêné rai & particulier du citoyen,
- & d'accorder proreél:ion à l'étranger ; ce feroit aurorifet'
une procédure attentatoire à la, Jurifdiél:ion unjverfelle. Il
n'exif!:e point de loi qui attribue certe forte, de pouvoit'
aqx Juges-Confuls; au contraire, une foule d'Auteurs les
en dép'ouillent exprefrément, &, un ufage conf!:ant prouve,
la folidité 'de leur avis.
Mr. l'Avocat-Général con0lut à ce que lé décret des
Juges-Confuls, l'exploit de caprure, l'Ordonnance & l'emprifonnement fufreIl,t déclarés nuls, incompétenrs, & comme tels cafrés fans dommages & inrérêt.s, & Mo~al)do élargi
des prifons.
,
l
'
Arrêt du '2.9 Janvier 1777, prononcé par Mr. le Préfident de Cabre, conforme aux' conclufions; Grivet & Chalame! furent co.ndamnés aux dépens. Plaidant Mes. Roux &
Roman 3."ributiis.
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• 1
'ARRÊT X1~
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P-ROVBNCll.
73
•
ARR Ê T
X J.
Le Curé qui a préparé & iriflruit l'Adulte, a droit de le hap~
tifer, fi l'Evêque ne, le haptife lui-même; & l'Evêque ne
peut déléguer un. autre MiniJlre, pa.s même le Curé de
l'Eglife Cathédrale.
N 177), Jofeph Mufulman, originaire d'Egypte, témoigna le deur d'embraifer la Religion Chrétienne;
Mre. Olive, Curé de St. Ferréol, le prépara à recevoir
le Baptême; il en fit part au ueur de Ponrleroi, GrandVicaire de l'Evêque de Marfeille, & le pria de procéder
à l'examen qui doit toujours précéder indifpenfablement le
baptême des Adultes. Le Grand-Vicaire cépondit qu'il s'en
rapportoit à l'inHruél:ion & ilux difpou0 ns de .l'Adulte, à
la prudence & à h piété éclairée du Curé de St. Ferréol;
mais il le prévint- en même-temps qu'il ne devoit point
efpérer de le baptifer lui-même, parce que les Curés de
la Cathédrale en avaient le droit excluuf; ce droit était
principalement fondé fur une Ordonnance de M. de Belfunce, Evêque de MarfeilIe, rendue en 1742, qui défend
expreifément à tous les Curés de baptifer les Adultes au
mépris de l'ufage établi, & du dr9it excluuf des Curés
de la Cathédrale; l'Evêque fe réferve néanmoins celui de
permettre aux Curés particuliers, pour des conudérations
très-preifantes, d'adminiHrer ce baptême; il <,>rdonne enfin"
que ces défenfes feront lignifiées à tous les Curés, afin qu'ils.
n'en ignorent. Cerre ûgnification fut oubiiée ou négligée)
& le Curé de St. Ferréol ne connoiifoit point cette Or_
donnance; il en demanda ·la communication, proteHanr d~
paffer outre, G on la lui refufoit; & au cas qu'on produisît
un ri re contraire à fes droits, de fe pourvoir pour le fair~
anéanrir.
L'Evêque de Marfeille rendit, pOlJr l'arr~ter, une nou...,
Anll"s t 775 &Juiv.
.K
E
�,11-
10
UR N A
r.
veUe Ordonnance, qui défendit provifàirement au Guré dé
St. Fer·réQI de baptifer l'Adulee, & lui enjoignit de le ren~
voyer pour être examiné. Sur la fig.nificarion de cette Ordonnance, le Curé tépo"ndit qu'il ne comeHoit point à fan
Evêque le droit d'examen; qu'il avait déja préfenté fan
cathécumeneà cette épreuve, & qu'il offroit de l'y préfenter eucore; mais que fi l'on faifoit porrer les défenfes
fUr le droit ordinaire & âbfolu de baptifer, il en appelleroit comme d'abus. L'Evêque [ur cette réponfe leva les
défenfes. Mre. Olive interpella alors les Curés de la Ca·thédrale, de déclarer s'ils prétendaient [outenir l'Ordonnance de M. l'JEvêque; ils répondirent qu'oui : Mre. Olive
en appella comme d'abus.
On difoit pour Mre. Olive, que l'Ordonnance de M.
l'Evêque de "Marfeille était abufive, 1°. en œ qu'elle ref.
treignoit la Jurifdiétion des Curés, auxquels elle inr.erdifoit
fI'admini!1:ration du baptême des Adultes; 2°. en ce qu'elle
,donnait une Jurifdiétion plus étendue, & même une forte
de .[upériorité hiérarchique à ceux auxquels elle attribuait
exc1ufivement cerre adminiHration; 3°. en ca qu'elle tendait à déterminer les Paroi/fes, moins par les bornes de
leurs rerritoires , que par la qualité des perfonnes•
. Les Curés ne tiénnent pas leur autorité des hommes,
(difoit Mre. Olive fur le premier moyen); ils la tiennent
immédiatement de Dieu même. Tous 'les Auteurs ont vu
J'infiirution des paHeurs du fecond ordre, dans la vocation
des [oixante & douze Difciples, appellés, non par les Apôtres, mais par celui même qui avait chaifi les Apôtres:
<ecce ego mitto lIOS. C'eH: cette origine que l'Evêque leur
rappelle, lorfqu'ils font a/femblés en Synode : frau'es dilectiflimi, leur 9it-il, [acerdous Domini, cooperatores ordinis
noftri eflis.... nos vices Apoflolorum fungimur, vos ad formam Difcipulorum eflis. Il eH: écrit par-tout, que les Curés
font Prélats & hiérarchiques inférieurs dans l'Eglife ; qu'ils
fane de droit divin 'les Pafrellrs ,Iles peuples fournis à 'leur
Jurifdiétion; qu'ils fane cha:gés par état d'adminiRrer les
Bacremens, ex Statu & Qrdinat'io lure·; & qu!enfin le même
�DU
PALAIS
DI!
7,)
PROVENCE.
principe qUI rend les Evêques Ordinaires dans leurs Diocefes, affure aux Curés cette prérogative dans leurs Paroiffes.
Il dl: vrai que le territoire des Paroiffes, aina que celui des Diocefes, a été fixé par l'Eglife; mais fi le parrage des Paroiffes a une origine humaine, la Jurifdiétion
des Curés ell: de droit divin, comme celle des premiers
Parleurs. AinÎl l'obfervenr Gerfon dans fes queH. de conf.
Evang. Boffuer dans la déCenfe des quarre articles du Clergé ô
le Concile de Trente, feff. 23, cano 26; le continuateur
de Fleury, liv. 115, n. 98 & 99, & liv. 125, n. 43; &
Je Recueil des cenfures & concluÎlons de la Faculté de
Théologie de Paris, touchanr la Souveraineté des Rois-,
imprimé à Paris en 1720, pag. 382.
De ce que les Curés fonr de droir divin, de ce qu'ils
font Ordinaires dans leurs Paroiffes, il !ùit qu'ils ont par
leur rirre la charge des ames & le droit d'exercer routes
les fonétions qui dépendent de cerre charge; il fllJt encore
que l'on ne peur limiter leur Jurifdiétion, fi ce n'ell: dans
les cas de droit, & en obfervant les formes canoniques.
En effet, on entend par un Ordinaire, celui qui n'a pas
une aurorité précaire & empruntée, qui rient de fon tirre
le pouvoir qu'il exerce, & qui ne peut perdre ce pouvoir
fans êrre dépouillé de fon tirre même; c'eH la doétrioe de
Van-Efpen, part. 3, rit. S, cap. l , n. 36. S'il a été jugé
que les Curés' ont le droit de choifir leurs Vicaires, &
qu'on ne peur leur donner des coopérateurs malgré eux,
fuivant l'obfervarion de Mr. Camus dans fon T'airé des
portions congrues, ou Commentaire jùr l'Edit du mois de
Mai 1768, tom. l , pag. 271 fur l'arr. 2; s'il a éré déterminé par les Conciles, & notamment par le Canon om~
T1is utriufque [exus du Concile de Larran, qu'aucun Prêtre
ne peut exercer les fonétions Curiales dans une Paroi{fe
fans la délégation du propre pafleur; fi les loix arreltenr
que les Curés font feuls chargés du foin d~s ames dans
leurs Paroiffes, fuivant la Déclaration du 5 Oétobre 1726;
fi les Parlemens, en donnant par leur enregiHrement la fanc~
K
~
�76
Jou RNA L
tian publique à l'établilfement des Ordres Religie ùx, ou de!!
Congrégations féculieres·, ont appofé la condition elfen~
tielle, que les membres de ces Ordres ou de ces Congrégations ne pourront' exeréer les fonébons Curiales, ou
adminiltrer les Sacremens dans les Parailfes, fans le con{ente ment exprès des Curés, fuivant les M~moires du Clergé
tom. 4, pag. 488; enfin., fi rous les .Auteurs Ont foutenu
qu'aucune Puilfance fur la terre ne peut ni détru.ire, ni affaiblir, ni démembrer l'état des PaHeurs du fecond ordre,
c'eil: que l'on eil: parti du principe que les Pdfteurs du fecand ordre font de droit divin, qu'ils font vrais Ordinaires '; que par conféquent l'on Ile.. peut les priver arbitrairement de leurs fonétions, & qu'il n'e!t pas au pouvoir
des hommes de détruire l'ordre établi par Dieu même.
Dans ces circonfl:ances, il faut de deux chofes l'une :
ou foueenir que le pouvoir de baprifer les Adultes n'ell:
point une fonétion Curiale; ou reconnaître que l'on ne
peut priver les Curés de cerre fonétion dans leurs Para if(es. Dira-t-on que le pouvoir de baptifer les Adultes n'eil:
point une fonétian Curiale? Mais d'abord le pouvoir de
baptifer ea général appartient inconteltablement aux Curés;
cela ell: arreHé par le Pere Thamaffin, dans fan Traité
de la. difcipline Eccléfiail:ique, rom. 2., part. 3, liv. l,
chap. 13) n; 4, pag. 4 1; par l'Abbé Fleury, dans fan
Infl:itution au Droit Eccléfiafl:ique, tom. l ,_ part. 2.,
chap. 3.
I! ell: même fi vrai que le pouvoir d'adminiHrer le baptême eH un droit Paroiffial, que fuivant les Auteurs, l'Eglife Paroiffiale n'dl: appellée telle que parce qu'elle eil:
Eglife ba1?tifmal~; (Gibert, corpus Juris, rom. 2., tit. la,
§. 5, art. l , pag. 2.5 l ; les Conférences d'Angers, fur le
Sacrement de Baptême, pag. 2.2.2.)
, Le baptême des Adultes & celui des eofans nouveaux
nés ne dilferent point par leur fubil:ance;. ils diJferent
uniquement par l'âge des perfonnes qui fe préfenrent à
l'Eglife, & par quelques cérémonies. Nas Peres retardaient
la cérémonie du baptême jufqu'à un certain âge, parce
�Il U PAL AIS D Il PRO v il Nell:
77
qu'ils penfoient que les Loix Religieufes, qui font des Loix
de choix & de perfuafion, ne devaient compter au nombre de leurs fujets que ceux qui les embra!foient par per·fuufion & par choix. Dans la fuite les dangers d'un retardemént, qu'une marc imprévue ou prématurée pouvait ren.dre irrréparable, filent établir la courume de baptifer les
enfans au moment même de leur nai!fance;-Mais c'efi roujours le même facrement, le même baptême, dont l'effet
efi de régénérer en Jefus-ChriH les perfonnes auxquelles
Qn l'applique. Pourquoi donc les Curés, qui ont inconref'tablemenr, & par lin droit propre, le pouvoir de baptifer
les entans, n'auroient-ils pas également, par un droit· propre, le pouvoir de baptifer les Adultes? S'agilfant toujours
slu même fucrement, pourquoi l'adminifiration ceŒlroit-elle
d'en appartenir au même [\1ini{he.
Dans l'enfance de l'Eglife, l'Evêque exerçoit par luimême beaucoup plus de fonéhons qu'il n'en a exercé dans
la fuite. Il faifoit toutes les infiruaions; il adminifiroie
tous les facremen·s. Le troupeau éroit alors peu nombreux;
il fe ralfembloit tour entier fous les yeux du premier Paf·reur. Faudra-t-il conclure delà qu'il n'y a aucune différence à faire entre les fonaion Sacerdotales & les fonctions Epifcopales ou Pontificales? Faudra-t-·il conclure que
les Curés ne font que les délégués des Evêques, attendu
que les Evêques remplilfoient alors par eux-mêmes prefque
toutes,les fonaions que les. Curés remplilfent aujourd'hui?
Une pareille conféquence renverferoit la hiérarchie fondamentale de l'Eglife; elle confondroit les différents 'ordres
des MiniHres, dont tous les monumens de l'Eglife prouvent évidemment & l'exiilence, & la diainaion. Le Pere
Thomaffin, rom. l , part. l , liv. l , chap. 23" n. 3, die
que, comme on ne féparoit point ordinairement, dans les
premiers fiecles, les trois lacremens du baptême, de la
confirmation & de l'euchariHie, l'Evêque étant le feul qui
pût régulieremenc donner la confirmation, auffi éroit-il le
plus fouvent le Minifire du baptême. Ce n'eil donc poine
à titre de fonèlion Epifcopale que l'admioifiratioo du bap~
�~
JOURNAL
têrne appartenoit à l'Evêque, :maiS' pa"r "ure convenance";'
parce que le baptême fe conféroit alors en même-temps
avec la confirmation. Tous les textes ne nous repréfentent
jamais l'adminiftration du baptême que comme une fonction Sacerdotale: conflat bapû[mum folis Sacerdotibus effi
trac7andum, difent le Canon 17 de confec. diH:. 4; le chap.
unique de la Clémentine de baptifino; le cbap. placuit 7,
quefl:. 1; le chap. jicut "9, quelt. 2, chap. 1; les chap.
majores c,' debitum, au titre des décrétales de bapû[mo;
St. Paul, premiere Epître aux C"orillthiens, chap. l , y. 17;
aél:es des Ap6tues, chap. 10, "y. 48; l'Abbé Fleury, dans
fon Hictoire Eccléliaftique, liv. 23, n. 3 ';'Il eH vrai que les Loix eccléfialbques , les Ordonnances
fynodales des Diocefes défendent aux Curés de bapt(fer
l'adulte qui fe préfenre, fans avoir fait p<lrt à l'Evêque des
difpofitions de cet adulte; mais cerre infpeél:ion réfervée
à l'Evêque n'efl: qu'ùne précaution de police qui n'altere en
rien le droit foncier du Curé; ces Ordonnances -ne font
qu'en furfeoir l'exercice jufqu'à ce que l'Evêque ait pris les
informations néceffaires pour éviter les furprifes & les facrileges. Les cérémonies qui précedent ou. qui accompagnent l'adminiHration du baptême, n'ajoutenr'rien à la fubfrance de l'aél:e; elles ne font que d'infl:itution humaine;
elles ne fauroient dénarurer une fonél:ion qui eH facerdotale
par fon in{l:itution divine.
En foutenant que l'admini{l:ration du baptême des adultes
n'eH point une fonél:ion épi/èopale, l'on ne conte{l:e point
à l'Evêque le droit d'adminifl:rer en perfonne ce Sacrement,
quand il le trouve bon. L'Evêque e{l: le premier P'afieur.
En lui réfide éminemment le gouvernement de toutes les
Paroi/fes du Diocefe ; à ce titre il peut, quand il le" juge
à propos, adminifirer par lui-même les Sacremens dans
toures les Eglifes paroiffi"ales, & fuppléer au défaut ou à la
négligence des Curés dans tous les cas de droit ou de dévolution : mais ces prérogatives certaines ne renferment point
celle de COfl1mettre arbitrairement les fonéhons curiales aq
a
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PAL AIS
>
DE
PRO VEN
CÈ:
19
préjudice: du Curé. C'efr ce Gui eit décidé par le Rituel
Romain, tit. de hapti[mo adultorum, pag. 36. .
Si l'Ordonnance de l'Evê.gue de Marfeille efl: ab.uGve, en'
ce qu'elle refl:rejnt la JurifdiB:ion des Curés aux.quels elle
interdit l'adminiHration du baptême des adultes, Ile l'eHelle. pas également .en ce qu'eUe affure une Jurifdiéhon plus
étendue & une.forte de fupériorité hiérarchique auCurés de la
Cathédrale ( difoit. Mre. Olive fur les .autres moyens? ) Les
Curés, Vkaires perpéruels de la Cathédrale, ne [ODt·à ce lirre
che.fs, ni membres de la Cathédrale; .ce {ont 1.0.u.t au .p1us
des délégués que le .chapitre Carhédral pr:ép.ofe pour exer~
'cer ,non les dr.oits de cathédralité, mais ,les {anaions
curiales dans le difl:riB: paroiŒal réfervé à la pr~miere Eglife
du Diocefe lors de la diHribution .des .te.rritoires. Or, donner
aux Vicaires perpéruels de la Cathédrale l'aclmini{kation ex~
c\ullve du baptême des adultes, .c'eH leur ,donner une j.ur.ifdiB:ion indéfinie au préjudice de la Juri[diB:ion .terri.toriale
des auO'es Curés; c'eH déterminer leur pouvoir, non pa.r
l'étendue du territoire., .majs 'par'la qualité des .perfonnes,
renverfer toute l'économie du gouvernement eccléfiaHigue.
Les adultes, dit-on, ne font d'aucune Paroiffe., on en
convient; mais ces étrangers, en venant habiter à Marfeille.,
fe fixent ,néceffaire.ment dans 'Huelgue Paroiffe; cette demeure fuffit pour les confl:ituer paroiffièns en matiere eccléfiaHigue. Les Canonïfl:es convienne.nt qu'(i)n .eH fuffifammenc
domicilié dans- une Paroi'ffe pour 'y r.ecevoir 'les Sacremens,
~uand on n'y feroit qu'en paifant, ,po.uryu .qu:(i)n y fojt dans
le moment OÎI il dl: .opportun de les recev.oir. Il ri'.y a que
les ,Sacre mens de l'onlre .& ,du mariage pour lefquels les
Ordonnances ayent fixé un tems néceŒi.ire .p.our 'faire préfumer le domicile, comme rl'obferv.ent Dmand de .Maillane
dans fan Diélionnaire canonique, va. domicile, & Lacombe,
Jurifpr-udence caamnique au même mot. E{~-il bien vrai
qu'avant l'admioifl:rarion du -baptême., un adulte. ne puiffe
~tre' foumis'.en :aüoune ,maniere ,à la JutifdiB:-ion d'!<lucun
fafleur? La >voJpmé'de recev,Qir 'le baptêm.e me' pré~édé).
~-ellé' Fas,·iIéeeIfairernent.l~zbap.i~meG.mêm~;J.&Lc:éocé, oYo",
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JéluR:NA'L
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loncé manifellée au Curé dans la Paroiffe duquel l'adulte'
demeure, n'eH-elle pas une reconnoiŒlnce volontaire de
la Jurifdiébon de 'ce Curé? dès ce moment l'adulte ne commence-t-il pas d'appartenir à l'Eglife, & fi fa demeure le
rend déja habitant du terri[Qire, fes difpofitions ne
commencent-elles pas à le lier moralement à la ParoilTe?
Pourquoi donc, au moment du baptême, voudroit-on arracher .cet adulte d'entre les mains du P;illeur d:lns le territoire duquel il fe trouve, fous les ailes duquel il s'eH rangé
volontairement, & dont il a journellement reçu les inftructions? Une pareille opération que l'Ordonnance attaquée
transforme en droit & en fyHême, feroit tout à la fois dangereufe & .abulive, & par rapport au Curé, & par rapport à
l'adulte, & par rapport .aux P droi/Iiens, & enfin par rapport
à la religion. Les mêmes raifons qui donnent au Curé le
droit d'inftruire, ·lui garantilTent celui de baptifer; ce font là
deux chofes que l'on ne peur féparer, & qui font indivifiblement unies par la parole de Dieu même: el/ntes do cet/!
omnes gentes, haptifantes eos. ( Evangile de St. Mathieu,
chap. 28, verf. 19.)
Ne feroit-il pas injulle d'enlever à un Curé le drait de
baptifer l'infidele dont il a opéré la Gllnverfion ? Ne feroirce pas priver ce Curé du prix & de la plus noble récompenfe de fon travail? Jufq.u'au moment de l'admÎllillration
du baptême, Je minillre inHrué1:eur n'a travaillé que dans
l'ob(cu.rité; il n'a fair le bien que dans le ~i1ence, & en
préfence de Dieu. Choilira-r-on l'inHant où il vie!)t alTurer
fa viaoire, pour l.ui envier l'éclat du rriomphe? Voudra...
t-on lui ravir le drait jal'Oux de conduire aux pieds de
nos Autels, & d'oJfrir lui-même. à la religion la vié1:ime
qu'il vient d'arrache.r aux puilTances de l'enfer? La gloire du
Pafl:eur peur accroîrr'e la confiance des ouailles; & ce qui
paroît 'd'abord n:êrre que perfonnel- au miniHre, peut
réfléchir fur le minifiere même,
Quant au. prérendu ufage immémorial réclamé par les
.curés' de la Chathédrale, il eft cerwin qu'il n'exifte .pas,
~r. dLdérnenti par les regiflres de tome.s" es .ParoilTes de
Marfeille)
�8t
Marfeille, & par les Ordonnances fynodales du diocefe;
les extraits de baptême communiqués par les Curés de la
Cathédrale, en combinant les époques, ne fuppoferoienr
tout au plus qu'une poffeffion de 8') ans; cela ferait encore bien éloigné d'un ufage annoncé comme immémorial: d'ailleurs le,s extraits one été mal choifis, il n'en efi:
aucun qui foit concluant. Et quand l'ufage feroit établi,
n'eH-il pas certain que par l'ufage, on ne peut acquérir des
droits utiles, des droits honorifiques, & même certains droits
jurifdiétionnels? L'ufage ne peut changer la 'hiérarchie fondamentale de l'Eglife, fuivant Dunod, traité des prefcriptions,
chap. 12, pag. 71, & l'art. l Q de la Déclaration du· 1)
J~nvier 1731.
'
On répondait pour les Curés de la Cathédrale, qu'ils
"étaient devenus après le feprieme fiecle les Minifires ordinaires du baptême. Jurques alors l'Evêque avoir feul le
droit d'adminiHrer, ou dé déléguer pour l'adminiHration de
ce Sacrement. Aucun Prêtre, aucun Curé n'aurait ofé fe
donner la licence dans les premiers temps de conférer le
Sacrem.ent de Baptême fille mandata vel jufJione Epifcopi.
Nous en avons des 8arans bien refpeétabJes dans les textes
& les doétrines que cite Van.Efpen, tom. l , part. 2 , feét.
l , rir. 3 , n. 1. C'efi ce qu'on voit encore très-doétement
établi dans l'Hilloire des Sacremens du pere Chardon, tom.
I , ch. 9 & ch. II. Ce point d'HiHoire eH également
att~fié par le pere Thomaffin dans fon Traité de la difcipljne eccléfiaHique, part. 1, liv. 2, ,h. 23, n. 14- Ce~
Auteur dit bien comme touS les autres, que le Sacrement.
de Confirmation étoit communément confhé à la fuite de
celui de Baptême; mais il ne dit pas que ce fur par cet~e
rajfan 'que l'Evéq~e étoit le Minilhe ordinaire du Sacremenc
de Baptême. Ce Sacrement, en tant que co.nféré à de~
adultes, paraitrait un objet grave & digne de l'interpofiri0l\.
du miniŒere épifcopal.
'
'Les Curés ne font donc devenus MinilHes ordinaires. dll
baptême, qu'à mefure que l'urage s'eH établi de le donne('
aux nouveaux nés. Dès-lors l'adminiIlratiQD de ce Sacremeut
.Af![lé~s i77$ & jùiv.
L
DU
PAL AIS
D Il
PRO V Il NeIl.
�'"li.
JOURNAL
ell: devenue, pour ainli dire, avengle &. forcée. On a vu que
l'Evêque ne pourroit pas fuffire à tout, parce qu'il faut adrninifirer le Sacrement à chaque inHam & dans rout un
diocefe; au lieu qu'auparavant les catéchumenes fe rendoient
à la Cathédrale aux temps de l'année' marqués pour l'ad minif!:ration de ce Sacrement. Delà les motifs qui ont fait
paffer aux Curés la qualité & les droits des MiniHres ordinaires du Sacrement de baptême, ne fubfif!:ent pas &. ne
peuvent pas fublifier pour le· baptême des adultes, qui exige les mêmes foins, les mêmes attentions, le même
examen & les mêmes folemnités réfervés à l'Evêque, fui-.
vant l'antiljue difcipJine de l'Eglife. Ainfi nul texte, nulle
raifon, nulle poffeffion pour tranfporter aux Curés ce Sacrement, dont l'importance exigeoit dans les premiers temps
& dans les plus beaux jours de l'Eglife, l'interpoGtion du
minif!:ere épifcopal. Des aél:es moins graves, moins férieux,
moins folemnel~, font réfervés aux Evêques. Telle efi, par
exemple~ l'abjuration qui, par les Loix de l'Etat & de l'Eglife, ne peut être reçue que par les Evêques & Archevêques. Telle ef!: la réconciliation des pécheurs publics., qui ,
n'appartient également qu'au minifiere ~pifcopal, comme il
e[l: obfervé dans Je traité du droit dèS Evêques, rom.
pag. S3, & par le Cardinal TufèllS, va. Epifèopus, con-
2,
.dur. 238.
.
.
. Le baptême des adultes dl: un aél:e au moins auffi gravè
que J'abjuration & la réconciliation; il a de plus l'avantage
d'avoir appartenu aux Evêques exc1ulivement dans les premiers fiec1es de l'Eglife; de maniere qu'il ne s'agit en cela
que d'un Foim d'ancienne difcipline à conferver. D'ailleurs
quel droit pourraient avoir les Curés à ces baptêmes extraordinaires & plus folemnels que les autres? C'eH principalement dans les Eglifes Métropolitaines & Cathédrales
qu'il im,pone de ,les célébrer. C'efl: dans ces Eglifes qu'il eil:
eifemiel, d'après le Rituel Romain cité par Van-Efpen, n.
22., dé retlOuveller autant qu'il fe peut, les exemples & les
traits de l'ancienne difcipline de l'Eglife ; c'eil: dans cet objet,
ajoute ce même Auteur, hoc deJiderio retinendi primi ritlls;
�DU
PALAIS
DE
83
PROVENCE.
que le Concile tenu en Angletetre en 1279, déclara qu'il
convenait de garder les enfans nouveaux nés aux approches
.de Pâques & de Pentecôte, pour leur adminifirer le baptême
au temps de ces fêtes, in folli Ecd~fiâ Cathedrali, feu Epifcopali. Delà Chardon obferve que c'eH principalemenr dans
les Cathédrales que les baptêmes extraordinaires & [olem_ nels doivenr être célébrés; & la Bulle d'Honoré III, donnée
en 1217, indique la Carhédrale Ecclifzam matricem, pour y :ldmini{her les baptêmes généraux, qui ne (ont autres que
ceux qu'on confere aél:uellemenr aux adulres. Tous ces textes
font poHérieurs à l'établilfement des Chapitres & des Paroitres (ubordonnées.
Dès qu'il efi convenu que l'Evêque efi le premier Curé de
fon dioce(e, ,il ne (auroir y avoir abüs dans une Ordonnance
porram que touS les baptêmes des adultes, comme extraordinalres, comme plus (olemnels que touS les autres, foit pourl'urilité, (oit pour le triomphe 'de la religion, (eront célébrés à la Cathédrale. Si l'Evêque a le droit de tran(porter
le baptême des adultes dans (a Cathédrale, il a conféquemment celui d'affigner dans cerre Eglife, qui efi la fienne, tel
Minifire qu'il trouve bon; & quand il donne cerre délégation aux Cnrés de la Carhédrale, il ne fair qu'un aél:e de
jufiice,
. de raifon & de droit dans l'ordre des Loix canOOlques.
Les Curés de la Cathédrale ajouraient, 1°. que les adultes
n'érant d'auèune Paroitre, on avoir pu leur donner le droit
de les baptifer [ans dépouiller les autres Curés;' 2.°. qu'ils
avoienr la potreHion immémoriale de baprifer les adultes;
& pour le (amien de certe potreffion, ils rapportaient 160
extraits de baptême de di/férens adultes; 3°. qu'ils devoient
avoir le droir de baprifer les adultes de routes les Paroitres,
qui [ont ordinairemenr érrangers, puifqu'ils avoient celui
d'en(évelir les érrangers qui déçédoienr dans roures les au_
tres Pa roiffi s.
Mr. l'Avocar-Général d'Eymar de Montmeyan ob(erva que
l'infiirurion des Curés efi auffi refpeél:able que celle des Pon.,
,tifes même. La foi çonÜaore de l'Eglife 'efi aujourd'hui que
.
.
L2.
�84
f
Jou
RN." L
c'eH la main de Dieu même qui les a. placés dans le rang
qu'ils occupent, quoique moins élevé & moins parfait que
celui des Evêques. Cetre maxime conflante a trouvé des con·
tradiél:eurs; mais elle a eu aulIi des défenfeurs li zélés, &
elle a été li folemnellement vengée, qu'elle n'en eH devenue
que plus inébranlable pour l'avenir.
.
Quelques Evêques des derniers fiecles voulurent méconnoirre dans leurs Curés les coopérateUls du miniHere divin,
les Vicaires de Jefus-Chrifl: même; la propofirion contraire
fut avancée & foutenue par quelques membres de ces troupes auxiliaires de l'Eglife, qui ne font quelquefois que celles
d'un Pontife hardi & entreprenant. La Faculté de Théologie
s'éleva avec force contre ces novateurs; elle dédara leur
doél:rine hérétique & pernicieufe.
Le Chef de l'Eglife, furpris fans doute par des rapports
Înfideles, regarda comme d.angereufes pour la dignité épifco pale , des difputes fi publiques fur fa nature & fur fon
étendue. Il condamna la cenfure folemnelle· de la Faculté;
mais la puilfance temporelle vint alors au fecours de la dif·
cipline de l'Eglife, d'autant plus violemment attaquée, que
l'erreur fembloit vouloir s'autorifer d'une décilion & d'un
nom refpeél:able. Sur le requifitoire du célebre Talon, le
Parlement rétablit par Arrêt les cenfures imprudemment
condamnées; il défendit même d'ofer fuppofer de doute à
cette quenion. .Le Concile de Trente en a fait depuis une
regle précife de foi: fi quis dixerit, eH-il dit dans le fixieme
Canon de la felIion 23, in Ecclejid Cat/w/icd non eJfe hierarchiam divind ordinatione infiitutam, qUa! rOT/fiat ex Epifcapis, Prœsbiteris & MiT/ifiris , anathema fit. Voilà l'infiitution divine des Curés érigée en point fondamental de la
difcipline, en principe elfenriel de la doél:rine. Si le mot
~énérique de Prêtres ex Prœsbiteris femble s'étendre à tous
ceux qui ont reçu le caraél:ere augu!l:e âu facerdoce, à plus
forte raifon les Curés, à qui une portion du troupeau en fpé.
cialement confiée, & qui font à la fois Prêtres & Paneurs,
tiennent-ils un rang diHingué & imprefcriptible dans la hié~
r.archie eccléfiafl:ique.
�r s DB PRO VEN CE;
8S
-Le Concile de Trente n'a fait que i-elîouveller dans ce
Canon une tradition, une foi ancienne. Si l'on remonte vers
çes Decles reculés dont les ufages, dont les exprdlïons même
font d'autanr plus vénérables, qu'ils étoienr plus voi[jns du
divin fondateur de l'Eglife, l'on trouve gue dans le Concile
d'Aix-Ia-Chapelle, tenu en 836, les Curés font appellés in
confec7ione divini corporis & fanguinis, confortes c/lm Epifcopis
& cooperatores operum. Dans des temps plus anciens enco,re,
Theodulphe, Evêque d'Orléans, leur dit qu'ils tiennent le fecond rang dans J'Eglife, qu'ils ont fuccédé aux di!ciples,
comme les Evêques ont remplacé les Apôtres; qu'ils repré...l
[entent les fils d'Araon, & les Evêques ce grand Prêtre luimême. On les appelle enfuite aux Conciles concurremment
avec les Evêques, & après de longues conte!l:ations, il ell:
décidé, fur la réclamation même de plufieurs faints Evêques,
que tous ceux qui font pourvus de bénéfice à charge d'ames,
y doivent avoir voix définitive.
Dans le Concile d'Avignon, tenu à la fin d'un long féhi(me;'
ils reçoivent ce témoignage glorieux, qu'ils ont été les principaux défenfeufs de l'Eglife. Les voilà donc reconnus à la
fois, par le droit & par le fait, membres effentiels & intégraux du gouvernement de l'Eglife, affifiants ainfi que les,
Evêques, & par conféquent non pas comme leurs délégués,
mais comme les délégués de Dieu dans ces affemblées 'où
Die'u même' préfide, où le Saint Efprit décidè .& parle au
milieu de ceux qui ont reçu de lui la plénitude du minifiere
& du pouvoir.
.
,
Dans les iiedes les plus voifins des Apôtres, l'on votoit
une multitude de diocefes déja établis; la plus _petite lProvince de l'Empire Romain fournit une foule d'Evêqlles, lorfqu'il elt befoin d'affembler quelqu'un de çes Conciles alors
li fréquens, & leur nombre paroît prefque incroyable. Mais
fans rien diminuer du juGe étonnement qu'infpirenr les progrès miraculeux de J'Eglife encore combattue & fouffranie,
il eH aifé de jufiifier les Aureurs eccléfiafiiques fur ce point;
les diocefes étoiellt alors, auffi refferrés que nombreux; la plupart étoient, ,ir,oof,rits dans l'enceinte -d'une feule ville,
DU
PAL).
�86
J·o
U RNA L·
L'Evéque pouvoie ainli exe"rcer, & exerçoit en elfet, dans
route l'étendue de fon diocefe, qui n'était qu'une grande
ParoiJfe, le double minil!ere de Pontife éminent & de Paf·
teur ordinaire, excepté dans les Métropoles 0(\ la population
écoit immenfe; il n'y avoit dans toutes les villes, du-moins
~ans les deux ou trois premiers liecles de l'Ere chrétienne,
qu'une feule Eglife à la fois paroiffiale & diocefaine, un feul
~utel, & Couvent un feul facrilice que l'Evêque lui-mê-me offrait ou qu'il faifoit olfrir par un.Prêtre à qui il en donnoit
la coinmiflion paJfagere; l'Evêque était donc alors en même
remps Evêque de fon diocefe, & Pafl:eur ou véritable Curé
de fa Pa'roiJfe nombreufe, mais llllique qui le compofuit
!out emier.. . L'Evêque, par l'exercice confl:ant & perfonnel des foncrions ordinaires-du facerdoce, repréfentoit parfairement les
Curés aél:uels, abfiraébon fàire de cene pOri ion importante
& privilégiée du minifl:ere qui o'efl: réfervé qu'à lui feul; & ces
prêlreos qui de1fervoienr roujours conjointement'avec lui la même
Eglife, & dans lefquels on ne trouve qu'une imaKe incomplel te des Curés qui dellervent à la décharge de l'E.vêque, mais.feuls & indépendamment de lui, les Paroiffes qui leur font
confiées, re.ffembloient plutôt à ces Prêtres habirués aujourd'hu.i dans les Paroilles pour partager, avec l'agrément
des Curés, leurs pénibles fonêtions.
. .La révolution des temps a .produit une révolution nécef.
faire dans le minifl:ere des Evêques;. les fonél:ions épifcopales font devenues plus fréquenres; le gouvernement des
diocefes plus pénible ,. plus compliqué-, plus capable de les
occuper ~ plein; eh. même remps les devoirs curiaux qu'ils
rempliRoient au/Ii fe font tellement multipliés·& étendus, qu'à
peine· une rnuJrimde d'hommes peur-elle fuffire aujourd'hui à
ce qui n'occupoit autrefois qu'une panie de temps d'un
feu!. Ainli les Evêques ont été obligés de féparer ce double.
minifl:er.e .qu'ils avoient concentré (ur leurs têtes, qu'ils peuvent encore réunir quelquefois aujourd'hui, comme Pa Heurs
unîverfels, mais qui fut réeltem.èm établi l'un & l'autre par
Dieu mê.me,- lorfqu'il a dit à. la fois à fes A~ôrre.s &! à (es
�nu PAL.Al'S nB PROVENCE:
g11
Vi(ciple: allef' je vous e-nvois en mOIl Ilom: ec~ mitto VOS.'
On pem voir une image de celte confofioti [!lomenta-'
née & de la divifion réelle & imprefciptible qui l'a fuivie;
dans ce qui s'el1: paffé dans l'Eglife par rapport aux Evêques eux-mêmes, avant que le troupeau naiffant des fideles
etlt été partagé & confié à différens Pa!l:eurs; les Evêques
ou les Apôtres qu'ils.repréfetitent, exerççient indiHinétement
leur minil1:ere & leur Jurifdiétion épifcopale; l'on en voit
des exemples fréquens dans les aétes des Apôtres. Mais depuisque la dil1inél:ion des diocefes a été connue, que des mainS'
facrées en ont pofé les différentes bornes, en ont circonfcrit les différentes Jurifc\iétions, on a refpeété cet ordi'e immuable & néceffaire au bien de l'Eglife, à la confiance .des
peuples, ,à la tendreffe & à la charité pa!l:orale des Pontifes.
C'e!l: ainu qu'avant que chaque diocefe RIt divifé en différentes Paroiffes, & lorfque le diocele entier fe tr0uvoi~
raffemblé & réuni dans une feule, l'Evêque occupé de moins'
d'objets dans un temps oll de deux Sacremens épifco l'aux,
l'un s'adminil1:roit toujours avec le baptême, & j'autre élOit
extrêmement rare, exerçoit lui-même les fonétions cùriales' dan~'
toute leur étendue &. dans lOute celle de fa Paroiffe. Ainu on en
a vu dans des temps plus modernes, malgré leurs follicituqes
perpétuelles, les exercer encore dans leur Cathédrale, & êtrè 11.
la fois Pafteurs immédIats & ordinaires de cette ,Eg'life qui'eŒ
la véritable Paroiffe de l'Evêque, & Pal1eurs uÎüverfels & êmi::
nens de leur diocefe~ Mais depuis que le troupeau de chaque
Evêque a été mis fous la' con'duite de dilfé'tehs Pâ.freufs,
comme d'abord on mit fuus dHféYens EVêqués,le'r'troù'peàû
de Jefus-Chri!l:' même, d'Evêque n'a plùs 'que llaàmirtifiration & la furveillancé ul:îiv,erfèlle '; il n~' dé' 'iéîerve'& de
perfonnel que l'exercice de's fonétions vérirablement épifco,..
~
..
pales.
. Les motifs de 'ceue' nouvelle' c1iviuon font précifément les
mêmes que ceu'x .de la 'p'remiere;' li faut 'que ies' brebis con~
floiffent leur Pa!l:eur, '& que de fon èMê le; Fafieu'r puiffe
les connaître & s'y attacher .uniquement> Il ne faut . rie~
�J 0 V RNA i
mettre d'étranger entre leur confiance & leur amour réci':
proqiles. Qu'on ne dife pas que la divifio~ des Paroiffes ell:
,moins néceffilire & leur confllfion moins dangereufe, parce
qu'il s'agit d'un troupeau moins nombreux; il Y a aujourd'hui des Paroiffes qui renferment dans leur fein un auffi
grand nombre de fideJes qu'on en eut pu trouver dans plufleurs diocefes, 10rfqIJ'on jugea leur diviJion fi importante
& fi indîfpenfable. Aujourd'hui les Parolffes reffemblent aux.
diocefes de la primitive Eglife, & les diocefes eux-mêmes
l'a1femblant, dans une moindre étendue, une multirude immenfe' de chrétiens, font ce qu'était alors l'univers chrétien·
tout entier, au miliçu duquel l'Evêque, comme les Apôtres._
t:,px-mêmes avant leur difper.fion, exerce par-tout le minif1:ere·
épifcbpal, les fonaions délicates & infinies de l'adminiHration & de la furveill;lnce univerfelle. Libte d'y joindre,
quand il le veur, & dans la Paroi1fe qu'il choifit, qu.elquesunes des fonaions curiales, mais I.e pl~s. fouvent [e con"entanr, comme St. Paul,. d'éclairer & de conduire [es coopérateurs, d'inil:ruire & d'édifier fon peuple, en annonçant ,.
comme ce grand Apôtre, qu'il eil: envoyé pour' convertir,. &
non pour baptilèr : evangelifare, & no.n haptifare.
L'autorité ecc1éfiaftique & temporelle fe· réuni1fent pOUl"
nous obliger de croire & de fou tenir que les Curés ont:
été établis par Pi.eu même, COmme membres intégraux dt1;
t'l lliérarchie, comme nécefThires al! gouvernement de l'Eglife, & Y participanr eJfenriellement fans autre délégation.
que celle de Dieu m,ême; que malgré leur anéal1liffement:
apparent fous ces' FO.ritifes· Curés de la primitive Egli[e, ils.
n'one ce1fé,tl'exiHer'l& font,IOti!. de fui.te, & par eu'x-rnêmes,
dans; leurs 1fonél'ions/ db que çeJles d,e l'épifcopat .foot devenues trOp· immenfe,s ,po;ur, ne pas, abforber l'Evêque tout
entier. que quoiqu'il oe dépe.nd,e qije' du Pall:eur univerfd
de dêvenir FaHeur direél: & immédiat daos quelques occafion~, ,1$< que fa- p~ér.elfce 'paroiffe éc1ipfer .alors les autres
Pafieurs, ce n.'ell; qu'en perd·am ,Jeur titre qu'ils peuvent être
privés de leurs fona\oQs pa,r l'Evêque même qu'ils repréren~
ten~) mais Q.Q.Qt il"& /;le fQu.~ iji 1r;:> C;QJ;J;IU)i:> u.i tes délégués.
enfilA
88
�v 1! NeE.
89
enlin, qu'ils font Ordinaires dans leur Paroi/fe. comme
l'Evêque l'efl: dans rour fon Diocefe, & que perfonne au'"
tre qu'eux ne l'dl: dans l'écendue de leur JurifdiB:ion.
Tel elt le droit & le pouvoir de l'Ordinaire, annoncé
& défini par le feul titre que lui donnent les Canons. Tout
Ordinaire exclut, par cel.1 même qu'il l'efl:, la concurrence
de toure JurifdiB:ion, de toure adminiltrarion égale ou
rivale de la {jenne. L'Evêque, comme Ordinaire univerfel
& fupérieur, peur bien fe reprélèncer; mais il ne pourroir. fans intervertir la nature de fan ritre, & celle des
Eonétions qui y font arrachées, fe faire repréfenter luimême dans cetce parrie de fon miniflere qui tient à fa fupériorifé & à fan caraB:ere perfonnel ; car alors l'Ordinaire
ne le ferait plus; il deviendrait l'égal du !impie Délégué
de l'Evêque, du Prêtre chargé par commiffion, & pour un
temps, d'une partie de fèS fonaions, dont l'Evêque ne fuf·
pendrait pas feulement les pouvoirs par fa préfence, mais dont
il pourrait anéantir l'exilt~nce par la délégation. Or, telle efl:
la différence elfentielle & conltitutive qu'il y a entre l'Ordinaire & celui qui ne l'efl: pas; tous deux repréfenrent l'Evêque; tous deux exercent à fa décharge; mais l'un eH: Dé.
légué par Dieu même, & l'autre ne l'dl: que par le Pontife; il peut changer à fon gré celui-ci j il ne peut que
remplacer lui-même l'autre dans quelques fonB:ions; tous
deux lui font foumis, mais- l'un ne l'eH que dans l'ordre
général, & par rapport à la difcipline; l'aurre l'efl dans
l'ordre particulier, & par rapport à fan exiflence & à fes
bienfaits.
L'Ordinaire a' une JurifdiB:ion perfonnelle, & qui lui efl:
propre; celui qui ne l'eH pas. n'en peut avoir qu'une commife & arbirraire; c'ell: ce que les Curés de la Cathédrale n'ont pu défavouer; il Y va trop de leur propre intérêt, & ce principe efl trop inconteflable, mais ils ont
défini eux - mêmes cerre Jurifdiélion; ou plurôt, en affectaDt de ne la pas définir en entier, & de n'en donner
que quelques norions éparfes & confufes, ils ont cru à dé-montrer que l'adminiHration du baptême aux Adultes n'en
DU
PA I. AIS
D B
Années '775 & f u i v . ·
PR 0
M
�0
1dépendoit
JOURNAL
.
que
J'Evêque
a'
pu
en
difpofer
en leur fapas, &
.veur.
Le caraétere, comme l'fnfiitution des Curés, e!1: de la
même nature que celui des Evêques; tous deux exercent
une Jurifdiétipn & des fonétions qui leur Jont propres; tous
deux font Ordinaires, non dans un degré, mais dans tin
rang différent; l'un ne l'ell: que dans une feule Paroiffe,
l'autre dans toute l'étendue d'un grand Diocefe; celui·ci
·J'efl: virtuellement dans la Paroiffe même , qui y e/l:
comprife, & peut l'y devenir réellement; alors le Pa/l:eur
unive·rfel abforbe, par fa préfence momentanée, les droits
& les fonétions du Pafieur particulier; mais dès que celui.là fe retire, celui·ci reprend toute fon aétivité, toute fon
exifience. Telle efi Id nature de' fon pouvoir, qu'il n'efi
départi qu'à lui feul, quoiqu'il fe trouve concentré dans
toute fa plénitude en la perfonne de J'Evêque; l'Evêque le
nomme, mais Dieu l'inveHit. L'Evêque peut exercer lui.
même les fonétions qu'il lui a confiées, mais non .pas en
difpofer. Le Curé, comme J'Evêque, a une place fixe &
·immuable; il le repréfenre par la délégation de Dieu; en
un mot, il n'y a & ne pe~t y avoir que lui ,de Pafteur
<Ians fa Paroiffe avec le Palleur univerfel; il faut. même
'remarquer que celui·ci n'eH pas Ordinaire dans. la Paroiffe,
dans le même fens que le Pafl:eur' immédiat; il ne J'efl:
que comme Pafieur fupérieur. Il n'y a point concours de
deux Ordinaires; J'Evêque ne le devient que par dévolu,rion; il ne l'ell: que par fan droit de furveillance; fan
pouvoir efi au deffus de celui des Curés, mais il les laiJre
agir, & ne doit que fuppléer à leur négligence; car c~ell:
une regle connue de tous les Canonifies, que le fupérieur
EccléJiafiique ne doit s'immifcer dans' les fonétions . des
Ordinaires qu'à leur défaut; il n'y a que les fonétions Pon"tificales qui raient les fan étions immédiates d~ J'Evêque.
Le Curé ell: Prélat inférieur" & li .charge d'ames i c'ell:
'ainG qu'il ell: défini par pluJieurs Concil~s; il ell: Pafteur .
'fpéc,ialemenr llhargé de la conduire d'une partie du crau..
.peau: de \'Evêque ou de Jefus.Chri~, Minime' orqinaire de
�•
DU
PAL AIS
D:Il
9~
PRO V:Il N C'E.
la parole, Reél:eur légitime de l'Eglife; c'eil encore le lan-·
gage des Conciles & des Auteurs; comme Prélat, comme
Curé, il doit avoir J urifditl:ion fur toutes les ames qui font
fous fa garde; comme Pail:eur, il doit jouir de tout le pou-voir qui lui eH nécetraire pour conduire & pour fauver fan,
tToupeau; l'adminiil:ration des facremens dépend etrentiellement, de cette double qualité.
Quel autre peut mieux connoltre ce qui convient à feS'
Paroiffiens, & ce qùi leur ferait nuifible? qui doit plus que
lui fuivre & hâter leurs progrès, lui qui n'encrera dans les
régions céleil:es où il les conduit, qu'après que le dernier
de ,ceux qui fe ferant égarés par fa faute y fera encré?
Quelle ferait donc la fonél:ion de celui qui adminifheroit
les facremens à ceux dont il n'eil pas Pail:eur? ou plutôt,
que ferai, le Pail:eur, fi un autre que lui les adminiilroit
fans fa permiffion dans fa Paraitre ,- fi un autre que lui paiflàit fes brebis? ,Que ferait fa Jurifdiél:ion, s'il était fi aifé
de l'intervertir & de la rendre inutile? Seroit.il juil:e
qu'il répondit des erreurs de celui qu'il n'a pas commis &
des profanations qu'il n'a pu empêcher?
L'obligation & le droit de baptifer, de porter le Viatique & l'Extrême-Onél:ion aux malades, font les principales
marques de l'Eglife Paroiffiale, dit Giberr. L'Eglife où l'on
n'adminif!:re point les facremens, n'eH: point une vérira'ble Paroitre; donc le Curé qui ne les adminifl:reroir point,
ne ferait paine un véritable PaHeur. C'ef!: entreprendre à
la fois fur les droits de l'Eglife & de fan Minifl:re, que
d'intervertir l'ordre de l'adminiHrarion des facremens; c'eH
réduire l'une au rang des fimples Chapelles, qu'un ordre
de l'Evêque peut incerdire, & l'aurre à celui de fes Délégués, qu'une nouvelle commiffion peut remplacer.
Autrefois l'Evêque adminiilroit tous les facremens, difent les Curés de la Cathédrale; donc l'adminiftration de
tous les facremens lui eH perfonnelle & réfervée. Cette
c~nféquence efl: trop étendue: fi les Evêques ont concinué
d'adminiilrer eux-mêmes le baptême plus long-temps que
les aut.es facremens, ,'eil: qu'ordinairement le baptême
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etait immédiatement fuivi de la confirmation; & l'Ev~que'
étant le Miniflre néceifaire de l'un, écoit communément
le Minilhe occafionel de l'autre. On ne peut' donc pas
conclure de .l'ufage où les Evêques furent d'abord de baptifer eux-mêmes, que l'adminiflration de ce facrement leur
fût fpécialement réfervée. Dès leur infl:itution, les facrecremens épifcopaux font bien diltingués d'un maniere certaine &. marquée; à peine l'Eglife fe forma par la difperfion & la prédication des Apôtres & des Difciples, que
l'on voit le droit de bàptifer au nom du Fils de l'Homme,
commun aux feconds, & celui de faire defcendre le Saint
Efprit fur les nouveaux Chrétiens, réfervé aux premiers;
il Y a vingt paifages différents dans les aél:es des Apôtre~,
qui conHatem cette diHinél:ion; par-tout il efl: marqué qu'on
les attend, qu'on les prie de [e hâter pour répandre [ur
les fideles la grace de la confirmation: il en efl: de même
du facrement de l'ordre. L'on voit par-tout, dans l'ancienne
Eglife, le droit de perpétuer le Sacerdoce, de renouveller
la miffion de Jefus-Chrifl:, réfervé aux feuls Pontifes, comme le plus augufl:e & le plus relevé de tous.
Tous les autres facremens ont été, il efl: vrai, adminiftrés d'abord par les Evêques, mais comme Curés; & depuis que les Curés les adminiarent à la place des Evêques,
& comme les Evêques eux-mêmes, par ,une miffion divine,
il n'y a que les Evêques-qui aient le droit de les adminiftrer préférablement, ou même concurremment avec eux,
(Van-Efpen jur. can.) Pour échapper aux déci fions fi pref[antes de cet Auteur, les Curés de la Cathédrale obfervent qu'ils n'ont pas conclu de ce que les Evêques ai:lminifl:roient eux-mêmes le baptême, que ce facremenc fût
toujours épifcopal; mais ils ont feulement établi que ce
facrement devenait quelquefois épifcopal, relativement aux
perfonnes auxquelles on le conférait. Il ne l'éroit .pas lor[qu'on le donnait aux enfans; il l'étoit lorfqu'on l'adminiftrait aux Adultes. Cette diHinél:ion efl: nouvelle, & tend à établir un troi-'
lieme ordre peu connu de facremens; cependant on la
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�DU
PALAIS
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PROVBNCE;
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'àéfend non feulement par l'ufage antique, mais' par' les·
changemens même de l'ufage qui paroiffent la~coniredtrè.
Ainli on peut obferver en fa faveur, que tant que les
Evêques ont haptifé eux-mêmes, ils ne baptifoient que
des Adultes, &. hors les cas de néceffité, à certaines fêtes,
de l'année feulement; lorfqu'ils ont ceffé de baptifer, la
falutaire coutume de baptifer les enfans s'étoit introduite,
&. le ChriHianifme ayant fait de plus rapides progrès, on'
ne baptifoit prefque plus que des enfants; d'où l'on peut
conclure que les Evêques n'ont point abandonné l'adminiftration du baptême df.s Adultes.
Mais les facreme,ns fe difiinguent entr'eux par les MiniC':'
tres à qui il appartient de les conférer; il Y en a deux
dont l'adminifiration exclulive , du-moins en France, eO:
réfervée aux Evêques; les Prêtres font les Minifires ordl~
na ires des autres; &. quoique dans un cas d'extrême nécefficé, tout Chrétien, ou même tout homme infiruit &.
de bonne foi, fuivant plulieurs Auteurs, puiffe conférer le
baptême, cela ne le fait point fortir du rang des facrements face l'dotaux.
.
Quelle fera la nature de ces facremens, qui feront tantôt
épifcopaux &. tantôt faëerdotaux, relativement aux perfonnes à qui on les confùera, c'efi-à-dire relativement à
quelque chofe d'abfolument extrinfeque &. étranger à la
nature du facremeric; de ces facremens qui feront non feulement à la fois, &. s'il cf!: permis de parler aÏnli, felon
les circoll!l:ances, face l'dotaux &. épifcopaux, mais qui dans
les cas même où ils deviendront épifcopaux, ne le feront
pas comme les autres &. pourront êcre délégués, ce qui.
répugne à la nacure d'un [acrement épifcopal? Telles fone
les contraditlions que les Curés de la Cathédrale ont entaffé pour défendre l'Ordonnance de l'Evêque de Mar[eille.
C'el!: par le temps, le Minil!:re, le lieu, qu'on a dil!:ingué différentes fortes de baptêmes. C'étoit, par exemple, un.
ufage univerfeI dans les premiers fiecles de l'Eglife, de
ne baptifer que la veille des deux fêtes les plus folemoelJes
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di' l'année '; fa Pàques & la Pentecôte; la bénédiél:ion des
fonts bapti(maux noils rètrace encore de nos jours quelque
image de. cet ufage aiuique; un Concile tenu en Angleterre, dans le neuvieme fiecle, en voulut auHi conferver le
fouvenir, 'en' or~onpant que le baptême des enfans qui na1troient dans .la J femaine qui précede immédiatement ces
deux'fêtes,' feroit différé jiJfqu'au famedi, autant qu'on pourfai're fans danger;' voilà pour la folemnité du
roit
temps.
Il Y'avoit autrefois, entre les Eglifes, une diftinél:ioll de
plus qu'aujourd'hui; toutes les Paroiffes n'étaient pas baptifmales; fouvent dans lés villes épifcopales, les Cathédrales feules âvoient 'des fonrs baptifmaux; l'Evêque les béniffoit folemnellement deux fois l'année', & Y baptifoit
taut de fuite les Catéchumenes difpofés à recevoir la grace'
de ce facremenr; voilà pour la folemniré du lieu. On a
renoncé dans l'ufage à· ces deux genres dè folemnités,
depuis qu'on a retonnu com/lien il efr plus avanrageux &
plus fùr de baptifer les enfans.
. Le Catéchumene en âge de raifon pouvait attendre avec
moins de rifque le lieu' & Je temps Je plus favorable; il
était déja jultifié .pat fes' difpofitions à la grace, & par
le defir fincere 'de 1a recevoir. Mais il n'en efr pas ainli
d'un' enfant che~ qui" Dieu' né peut fuppléer le f.1'crement
fuatériel, & dont· le f.llut ·éternel dépend prefque 'toujours
d'un feul infra nt. Nous n'avons donc confervé que cette forte .
de folemnité, qui confine dans la dignité du Minifire qui
c.onfere le baptême, & dans la pompe qui l'accompagne;
ainfi, quelquefois pour célébrer avec. plus d'éclat le triomphe âe la Religion dans la converfion des Infideles, ou
fon empire & [a majelté dans l'hommàgè public que viennent lui rendre les enfanrs des Rois & des Grands de la
terre, l'Evêque lui-même baptife ou l'Adulte que la grace
VÎent d'arracher à l'empire du démon & de l'erreur, ou
l'enfant qui, né pour commander [ur' la terre, demande
humblement d'être admis parmi les [erviteurs de Dieu.
Mre. Olive eft bien éloigné de conteHer cette préro~
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PAL AIS .' D :&
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gative à fan Evêque; il peut, quand tllE; Lt!gera ,à prop9 s;
prendre part à la gloire de la Religion,••~, de' l'Eglife;
,'efi fan droit, ,'d!: celui de la Religion même., qui ile
peut fol,emnifer ce jour avec trop de ppmpe & de dignité.
Nous en avons vu des e>,:emples nous-mért)es, ,& l'on en
trouve de fréquents dans l'ancien 'temps; .vpiJà ce ,qu'on
appelle le baptême extraordinaire & folelt}ne.\, par rapport
~ celui qui le confere. Dans ce baptême l'Evêqge el!: le
Minil!:re préférable pour la plus grande folemnité du facrement, mais non pas le MiniGre eifentiel & excluilf;
& comme on fent par les motifs même .!lui ,ét.ab1iifent fan
droit, qu'il el!: attaché à fa perfonne, il el!: .cerçqin, qu'il
pe peut le déléguer, ni le tranfmettre. .
,
.
. Voilà l'ancienne dil!:inél:ioQ ~u baptê,me ordinaire & fa
lemnel , telle que tous, les anciens CanoniJ;les la défini4fent ;
jamais cette diHinél:ion n'a porté [ur l'âge des catéchuQ.lenes,
& l'on voit fouvent le baptême~ folempel1emellt "dmin.iflFé
par les Evêques eUll-mêmes à des, enfa ris. La. pluparJ· des
Auteurs entendent plus. généralement enCOl:e p"r lei baptême
folemnel, celui qu'on reçoit dans l'EgliCe avec, ralltes -les cé~
rémonies accoutumées, & l'appellent ai nu par .opp@ution au
baptême de néceffité que toute perfoQne peut admini!.l:rer en
toJt temps & en tout lieu dans les dangèrs pr;ejfans.'! _'J
. On ne lit nulle part que par le baptéme Coleinnel, pj:r[Qooe
ait jamais entendu un baptême excluuvement J;éfervé.- à l'Evêque, un ~acrement épifcopal ; le baptême conféré' par l'E~
véque n'érait que la troiileme forte de baptême folemnel'; le
'jour auquel on l1aqminil!:roit" le lieu de la~,cérérnonic_qy,i
depuis que toutes'Ies. Eglifes ont des·lionts baptiCmaÙX1<fl.e
peut être que la Paroilfe, donnaient, auffi ceLte qualité a~
'baptême; mais il n'érait jal\lais, il ne :pouvait être de fan
-elfence que le Curé n'eD 'fût pas le MiniGre. Si on le' voit
adminil!:ré [auvent par l'Evêque, deG pour des rairons de
bienCéanèe & de dignité .qui ne peuvent s:appliquer. à.fa dé'légation ; c'eG comlUe .P.afreur éminent & imiv.erfel, .qualit'é
- perConnelle qu'il De peut communiquer; c'ei!: comme Minil!:re préférable, & non pas comme Minifire exc1ufif,:
�-96
1 0 U R. N A r.
Il n'y a point de Sacrement qui foie en méme temps épif1
copal & facerdoeal ; il n'y a que deux Sacremens épifcopaux.
infiitués fous cette qualité, & l'Evêque ne peut déléguer en
France pour les Sacre mens vraimene épifcopaux. Enfin,
l'ufage d'adminiltrer le baptême aux adultes d'une maniere
plus foleinnelle; de choiur l'Eglife principale & le Minifire
fuprême de la religion' pour le conférer', n'a paine changé
la naeure de ce Sacremene , . n'a paine exclu les MiniHres
ordinaires du droit de l'adminiltrer, & n'affure à l'Evêque
qu'un droit de préférence qu'on ne lui contefie pas, & qui
efi auffi le feul en faveur duquel on puiffe invoquer l'ufage ,&
les Auteurs.
Il aurait fallu, pour le foutien du fyfl:ême des Curés de la'
Carhédrale, qu'ils euffent prouvé trois chofes bien différentes; qu'il y avoir une différence elfeniielle & intrinfeque
entre le baptême commun & le baptême extraordinaire des
adlfltés; que celui-ci érait un Sacrement Epifcopal , quoique
le premier ne le fût pas, & que quoiqu'il fût un Sacrement
épifcopal , l'Evêque pouvoir déléguer; enfin, qu'il s'érait
·toujours réfervé dans le fait l'adminifiration' & même la'
délégation de ce baptême elitraordinaire. De ces trois points
l'on vient de voir que pour établir les deux premiers, il faudrait
hleffer ouvertement la pratique & même la doélrine conf'tante de l'Eglife ; rene le dernier qu'il faut appuyer fur l'hiftaire & fur des exemples fréquens ,& en faveur duquel il faut
faire'voir une prefcription générale & parriculiere.
Mais les Curés de la Cathédrale font-ils en effet tenus
de faire la preuve qu'on leur demande, & doivent-ils fuccomber à (on défaut? Ne peuvent-ils pas dire à Mre. Olive:
prouver d'ahord que vous êtes Pafieur psr rapport il l'adulte
encore infidele ; vous comhatter, dites-vous, pour l'honneur' &
pour la juri[dic7ion de votre Paroi.f]è,; mais commencer par ùaI>lirque les infideles ont une Paroi.f]è. Vous n'êtes pas plus
Pafleut' de l'adulte qui demande le haptême, que le Curé de
lp Cathédrale qui réclame le droit excluJifde le haptifer; vous
fêtes moins eT/core que lui.
La jurifdiétion fpirituelle n'efi point néceffaire & forcée;
comme
�97
comme la jurifdiéhon temporelle ( continuent-ils de lui oppofer ) ; il fuffit de naître homme pour naître citoyen, pour
naître dans l'Etat & être fournis aux Loix de l'Etat; mais tout
homme, tout citoyen ne naît point dans l'Eglife ; on fuccede
aux préjugés & aux erreurs, comme aux vertus & à la religion de fes peres. La jurifdiétion de l'Eglife ell: volontaire;
,ou plutôt il ne ulffit pas même de confentir à s'y foumettre,
il faut le mériter, il faut y être appellé , & commencer par
embraffer fa foi avant de vivre fous fa difcipline. Avant l'heureux inll:ant où il ouvre les yeux à la lumiere, il ferait âbfurde d'imaginer même que l'infidele pÛt avoir un Paneur,
que quelque Curé pût réclamer fur lui la jurifdiétion paHorale.
Quand le moment du triomphe de la religion efl: arrivé,
toutes les portes de l'Eglife font ouvertes au catéchumene.
qui en demande l'entrée; mais il n'en encore d'aucune Eglife
particuliere, aucune n'a le droit de le réclamer i il faut qu'il
fait rec;u dans fan fein, avant qu'il puiffe prendre le titre de
fan enfant, & donner à quelqu'un de [es Minifires celui de
pere. Toute l'Eglife n'dl encore qu'ùne pour lui, parce qu'il
n'efl: encore qu'innruit de fa foi, & non pas affujetti à fa dif.
cipline ; le centre de cette unité en pour lui dans la Cathé.
draIe, qui, par les prérogatives d.e mere, de reine & de fan.
datrice , repréfente parfaitement l'Egljfe t:niverfelle & réunie
du Diocefe. Enfin, il n'a pas été compris dans la diftribu.
tian que l'Eglife a faite des différentes parties de fan trou·
peau à différens Paneurs, comme on peur le dire des enfans
eux-mêmes lorfql)'ils font nés de parens Chrétiens; il faut
donc qu'il fait rec;u par le PaHeur univerfel, ou du.moins
dans fan berçail, & par ceux qui le repréfentent ; le temps,
Jes loix civiles & les régie mens de la difcipline Ec~léJialhque
pourront le faire paffer enfuite fous la jurifdié.l:ion de ql\elque
Paneur paniculier ; il a commencé par être Chrétien, il de.
vielldra Paroiffien ; voilà la marche & l'orc;lre Qrdinaire; mai~
on ne doit ni on ne peut l'intervertir.
Mais en comparant les droits de Mre. Olive 11 ceux des Cl\rés
de la Cathédrale, On a entiérement oublié ceux de follicite\lr)
d'évangéli1te, d'inll:ruéteur: droits précieux, droits relpeé.\:a.
DU
PAL AIS
. Années l775 & fuiv.
DB
PRO VEN C :Il.
N
�98
Jou RNA L
bles, contre le[quels on s'dt contenté de lancer, pour toure
réfllcation, une efpece d'anathême. On a trop ifolé l'aéle de la
1:onverfion de l'infidele ; on en a fait un point, un inftant
métaphyfique, toujours pour anéantir les droits du Curé inftruéleur; droits au moins fondés fur une bienréance &. une
reconnoilfance chrétienne, en anéantilfant la mémoire de fes
inHruélions, de fes bienfaits.
.
N'eft-il pas plus !impie & plus airé de le faire baptifer
dans l'Eglife & par le Palleur qu'il a accoutumé, comme
dans l'Eglire & par le' Minilhe de Dieu en général? L'adulte
infidele n'eft d'aucune Paroilfe; à la rig.ueur, cela peut être
vrai; mais à la rigueur auffi il n'eft d'aucùn Diocefe ; & fuivant
les principes des Curés de la Cathédrale, il ne pourrait être
'baptifé qu'à Rome, le véritable cenrre de l'Eglife univerfelle,
dans laquelle, difenr-ils, il faut qu'il entre avanr que de devenir Paroiffien. Peut-être même, en examinanr de bien près
la eompétence 'du Souverain Pontife, on pourroit la con~
refter, & il faudroit qu'un Ange defcendît du Ciel exprès
& vînt baptifer l'adulte, pour qui il !J'Y a réellement ni Curé,
lli Evêque, ni Pape, ni ParoifIè, ni Métropole.
L'adulte n'eft d'aucune Paraiffe avant le baptême; mais le
Baptême eft l'aél:e même par lequel il devient Paroiffien ;
dans l'inftant où il eft baptifé, touS les réglemens fpirituels &
politiques del'Eglife s'étendent jufqu'1i lui & l'enveloppenr ;
& par l'effet contraire de deux loix, en inrerverrilfant ainfi
l'ordre & le lieu de fon baptême, il va devenir Paroiffien
de deux Paroilfes différentes; fon domicile annonce & conftitue d'un côté fa Parailfe naturelle, de l;autre le ~acrement
même qui lui a affuré la qualité de C!Jrétien & de Paroiffien;
l'attache ,à' une feconde Paroilfe ; car le baptême conféré
par un' !impie MiniHre, fa'ns permiffion & fans délégation du
Palleur ordinaire, le conftitue Pa1l:eur lui-même, & l'Eglife
où il a été adminilhé , devient véritablement l'Eglife Paroiffiale de l'adulte; il eft vrai qu'elle ne le fera qu'un in1l:ant,
fuivant l'opinion même des Curés de la CarhéMàle ~ ~ que
l'adulte palfera rout de fuite dans la Paroifl"e qui doit être
la fieune : pourquoi donc ne le pas baptifer "dans celle-(;i?
�DU
PAL AIS
D_1l
99
PRO V Il Nell.
Pourquoi y a-t-il un feul infiant où il appartient en effet à
deux Paroitres?
Non, diront peut-être les Curés de la Cathédrale, parce
'lu'avant [on baptême, il ne pou voit être Paroiffien; le Sacrement l'affilie il une Paroijfe; la loi du domicile le fait enfuite
paffir dans une autre , ou plut6t il commence par devenir
'membre de l'Eglife univerfelle dans la Cathédrale, G' Paroif
fiell enfuite dans fa Paroijfe ; il ne cumule point deux qualités
incompatibles; mais il commence par aC'luérir celle 'lui doit (
néc~[fàirement précéder & produire l'autre. Mais pourquoi ne
les' pas acquérir toutes deux à la fois? Pourquoi, puifqu'il
peur ,devenir Chrérien & Paroiffien dans le même temps &
daos 'Je même lieu, le baptifer dans une Eglife, l'incorporel"
~ l'innaller dans une aurre, & lui faire en quelque forte
connoîrre _deux baprêmes, ou du-moins deux initiations
différentes?
,II n'efi d'aucune Paroitre, il n'a encore aucun Paneur;
mais n'en a-r-il pas choiG & deGré, un? mais n'a-r-il pas
témoigné [a confiance & fa prédileél:ion pour un Pafieur
particulier? & fi le defir le plus libre & le plus ,efficace
des fentimens peur fuppléer le baptême même, pourquoi
ne [upplééroir-il pas la Paroiffialiré? S'il nous fait participer d'avance aux graces & aux- 1réfors de l'Eglife, pourquoi rie -nous rangeroil-Jl pas auffi fous fes loix & fous [a
difcipline? Il [emble qu'il y a it'i une pari ré parfaire; fi
toutes les démarches que fair le Catéchumene pour obrenir
& pour mérirer le baptême, lui donnenr déja par une
efpece d'aOlicipalion cette qualité précieufe , fes affiduirés
à une certaine Paroitre,. les épreuves qu'il y a fubi, les
prieres qu'il y a faires; les péni'rences qu'il y a accomplies, l'arrachent auffi déja à cette Eglife. Ce Paneur
,qu'il a écouré, à qui 'il a obéi, &. fous la conduire duquel il a roujours marché, eH déja fan Pa Heur ; & ce droit
d'inftruélion, de vigilence , de follicirude particuliere & conrinuelle doir bien valoir fans cloute le droir de direél:ion,
générale qu'il a fur tous fes Paroiffi~ns. L'on voir les plus
anciêns Conciles chercher, à répandre une pieufe émula~
N
2.
�100
JoU' RNA L
tion parmi les Minilhes de FEvangile, en dédarant que
'les Intideles convertis pourront être de routes les. Paroiffes; c'ef!:-à-dire, qu'ils feront de celle d'où ef!: partie la
vive lumiere qui les a frappés. Les Intideles font, pour
ainli dire, un Etat & un Peuple abandonné, fur lequel
tous les Curés peuvent conquérir; & il efl: bien plus jufie
& plus naturel de les donner pour Paroiffiens aux Curés
qui les ont rendus Chrétiens.
Si la conquête doit être libre, & l'émulation échauffée
par cette liberté m'ême, que ne peut-on pas dire encore
en faveur de la liberté des Caréchumenes eux-mêmes, bien
plus délicate & bienphis néceifaire? Le titre de P~roiffien
peut & doit s'acquérir comme le titre de Chrétien même,
par le delir, par les follicitations, par les _prieres qui en
précedent l'obtention & qui tendent à la mériter. A regarder même les Adultes infideles comme abfolument étrangers & ifolés au milieu de routes les Paroiifes, ils doivent
appartenir à celui qui les conquiert à Dieu, & ce droit de
conquête a été admis dans des circonf!:ances biens moins
favorables, puifque c'éroit de Paroitre a Paroitre; enfin,
ce doit être au moins dans, ce cas à l'Adulte à choilir, &
fa confiance déugne le Minifire le plus digne de l'amener
à Dieu, en déugnant celui qu'il a cru le plus capable.
La potreffion confiante où l'Eglife Cathédrale de Marfeille a
toujours été de baptifer les Adultes, ef!:-elle confiatée dans
cette foule d'extraits baptif!:aires qu'elle a produit, & qui
remomént à près d'un uecle? Rien de plus impofant au
premier coup d'œil; mais l'étonnement diminue beaucoup,
lorfqu'on réfléchit que les baptêmes de ceux dont on a
donné extrait, ne font pas tous des Adultes, que la plupart font des efclaves employés fur les galeres du Roi, &
qu'enfin la Propagande étant enclavée dans le territoire de
la Cathédrale, doit néceifairement procurer à cette Paroiife
un nombre de Catéchumenes plus conudérable que celui des
autres Eglifes.
.
L'ufage où ef!: l'Evêque, & le droit qu'il a de faire
furfoir au ba tême de l'Adulte, afin d'avoir le temps de
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PRO V Il N Cl!.
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J1examiner lui-même, & de prendre les inllruélions néceffaires pour prévenir la profanation du facrement, s'infere
naturellement des Qrdonnances fynodales, qui défendent aux
Curés de baptifer les Adultes fans la permiffion de l'Evêque. On peut en induire encore, fi l'on veut, le droit de
préférence de l'Evêque comme Pall:eur univerfel, fur les
Pall:eurs ordinaires; mais on n'y trouve ni le germe, ni
l'ombre du droit extraordinaire de délégation.
La Cathédrale ell: la preiniere des Paroiffes en honneur
& en dignité, cela ell: incontefiable; la chaire apofioli':'
que, la préfence habituelle de l'Evêque & de fon' Sénat
l'élévent à ce degré éminent. Mais delà peut-on en conclure que les Curés de la Paroiffe, annexés à la Cathédrale elle-même, ont une efpece de Jurifdiélion univerfelle
fur taures les autres Paroiffes? qu'ils jouiffent d'un rang
dill:ingué dans la hiérarchie, & fon,t élevés d'un degré au
deffus des autres Curés? Cela ferait contre tous les faits,
contre toutes les Loix, contre la poffibilité même; car
c'ell: Dieu, 'dit d'Hericourt, qui a voulu que fon Eglife fôt
gouvernée par deux différents ordres de PaHeurs, & qui
n'a établi que ces deux ordres; c'eH· lui qui a imprimé
à la Religion qu'il a fondé, ce caraél:ere augull:e de fimplicité & d'unité; qui a ordonné que, comme il ell:, le
feul époux de l'Eglife, il n'y auroit 11. fa têté 'lu'·un feul
"hef dans chaque Diocefe, qu'un Ponrife dans-chaque' Paroiffe, qu'un Pafieur.
. .
1.Relativement aux autres Paroiffes, la Cathédralé· n'el!:
Eglife mere, qu'aJtanr qu'elle el!: fondatrice, & qu'elle
les a prod'uites de fon fein; à œ titre, elle pourroit jouir
de quelques droits exclulifs qu'elle fe feroit réfervés·; mais
il faut-qu'elle prouve la fondation, la réferve & la jouiffance perpétuelle; encore la plupart de ces réferves fontelles condamnées, pour peu qu'elles reue-b.ent aux droits
• facrés des Pall:eurs ordinaires, & qu'elles tendenr à introduire des difiinélions odieufes entre les fideles ,& à confondre la territorialité des Par?iffes.
,Quoique l'Ordonnance attaquée préfenre d'abord l'image
�10
102.
U·R N'AL
"r
d'un' Réglemem, gn voit qu'e!le, a été requife par
u.n.e Partie plaignante, 1 qui, ne fonde pas feulement r.';
réclamation (ur ,le droi~, mais (ur l'ufage; que l'Evêql!e
prononce à la ~ois (ur l'u(age & (ur le droit; & qu'enfin,
à l'époque, de cette Ordonnance, ce droit était contefté,
& cet u('1ge méconnu & trav~r(é par des aél:es ~ontraires
qui c.onHiruç(ieLJt ceux, qui ,avoient cru pouvoir It;s invoquer,
véritables pa1;ties; la fig.nification qui, eH annoncée ~ la Jin:
de l'Ordopnance eut été trop tardive; ell~ .dl:. ordonnée
dans un~ fO'f!n~ irréguliere ; ,on en (ençojt pouna,nt la néce1Iitg; eJle I1~a jama}s été faite.
,_
_ Pourquoi:>clllui q't;li _a déja rigénéré cet infid~le en e(pri~
& en ~é~i~é~, !ie ve1;(llrpir-il,pâ~ (ut lui l'eal) jufl:rale? Quand
les main,s (~cré~s'lçl\Ï Po!}tife, s'itendronr (ur la tête du
CatécQul1),en.e ,: i,t .retirera les Jie.n,nes avec;. re(peél:; il verra
avec joie (on fils devenir celui; du Paftel!r ,,(u!trême, qu
Frince de l'Egli(e &, le triolPP!).e de la Religion" célébré
'Ivec plus, de' pompt;, & d'éçlat; mflis à '(on défaut, il
pourr.a teclamer, les droi}s; de Minifl:re de· l'Eg,li(e &' de)
Pafl:eur ogli!)~ire. Il pourra dire à tous, ,les aurres Curés:
Entre MiniJlres égaux, je fuis feul Pajleur; vous ne mettrier ni plus de dignité, ni ,plus de majejlé que moi dans
/!qdlJ1iJliJlraJjpn J de ceJàcre1Jzent, & pourrier-vous) y.r;épandre
.
~
la, fnême' joie" 'la mênie-onélign ,é( la' même confia/1,Ce}
. ,l~Jr. liAvpçpt,-:-GéClfri\l:c<;>nt/hH.à ce qU,'iL fîlt,siit y avair,
•
abus dans l'Ordonnance de l'Evêque d!,!, Marfeille: }
. Arrêtc<lu J, Février 171"7,"prononcé par Mr.)e premier
PréGdenL, copforme auJ' conduGons. ,.J..es Cwés de. la
Ç,'!.tpéçl(ale (ur~.n~ condampés ,aux dépens. PlaidanF Mes.
PQ.Œl1i,s, & G9tIi~r.
Z " - <.' "._
ûi . ~ . . VI.
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PRO V,B Ne B.
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ARRÊT
-
,tol
XII.
Le Juge d'IIglife érigeafl! une Succurfale, ne p~ut en fixer
l'emplacement.
-les habitans ~u hameau de Chauvet fe p~u~
1'9fficial ,de R}ez,. contre tous le,s> Cl?-?epmateurs, &' contre les Conlills~ & CommUnaute c!u IJeu de
C1tâteaun~l1f " pour' voit ordonner qu'il feroit érigé unt?
EgliCe Succurfale au quartier, à tel endroit le plus 'd~lIn':
mode qui feroit délégué par l'Official, aux frais & dé~ns
de qui il appartiendroit. La Communauté conCentit, par un
expédient, à l'éreél:ion de la Succurfale; il intervint Sentenc·é
contre les Co-Décimateurs, qui ordonna cette éreél:ion aU~
dépens de qui de droit, à Y~ndroit le p'lus convenable, q?Î'
feroit défigné par l'Officiat Les' Habitans de Chauvet requirent l'Official d'accéder fur les lieux, & de fixer l'em.J
placement: Verbal d'accédit, qùi porre cette fixation. Signi":
ncation du ve'rbal aux Coriflils de Châteauneuf, avec inc'er
pellation -de' l'exécuter; on p'ropofe des Arbitres qui! fLlrén~
choifis par \es Parties', ·Iefquels rendirent leur avis arbitral i
portant que la Commun·aut-é (lèvoit pourvoir à la conChuc';
tÏon de.,la nef, du presbytere & du cimetiere; mais que fi elle
craignoit d'être obligée par d'autre.s 'hameaux à la même
dépenfe., elle devoir demander l'alfemb1ee' de )tous,'chefs
(le famille, & déterminer la 1 èonftruél:ion l de 'la Parbl1fe' ~
un endroit à portée de tbut le terroir. Peu dé temps après
les Habitans de plufieurs -quartiers de' la 1mêmè Commu-'
nauté fe pourvurent à l'Officlal, pour dem{lnder auffi Pérec-'
tion d'une Succurfale ;·'tes Habitans de Chauvet préfenterent· requête- au Lieute6:ant de Carces l' pour Y·faire homoraguer l'avi arbitrai. La Communauté'appélta 'comme d'abus
de la Semence de l'Official;' en· tai1t'-qu'elle~ fixoit Ijempla~
~ement, & du verbal d'accédit, & les lettres -d'appél con-
E
N 177 0
,
vuren~ ~
•
�1.04
Jou
RNA L
tlOrent la' c1aufe de rel!:icucion en entier, contre tous les
acquiefcements qu'elle pouvait avoir donné.
Elle foutenoit que le Juge Eccléliaftique commet abus
toutes les fois qu'il ~ntreprend fur le Juge féculier; le feul
Juge laïque a le droit de connolrre de la conftruél:ion &
des réparations des Eglifes; l'emplacement eft la premiere
chofe à conlidérer dans la conllruél:ion; ks Auteurs. s'accordent fur ce point, & une loi fixe vient d'établir ce
droit, par;la modification de l'enrégillrement de l'arc. 7
de l'Edit des Inhumations.
L
, En fait, ,la Communauté n'a "point confenti à l'emplaceQ~em fixé par l'Official, puifqu'ell~ n'a point été appellée ,,lors du 'verbal d'accédit; & quand elle y liuroit confenti, dépend-t-il des particuliers de proroger les Jurifdiaons? quand elle ,acroit contraél:é un eng,agement, ne devroi!-elle pas être reHituée, puifqu'elle efi mjneu~e? D'ailleurs, c'eH llne nullité de dço,ü public, & non matiere d'acqu,jefmem.
,
0t1, répondoit que c'éroit à l'Official à fixer l'emplacement de la Succur(ale ; le Juge féculier doit être Juge des
cooreHarions, parce qu'dies ne peuvent rouler que fur la
temppraliré j l'Evêque a le_d.roi,t de refufer l'emplacement
qu'on lui • re; il, n'eH donc pas incpmpétent pour le fixer,
& ,il elt .~r<;, que le Juge féculier ait été appellé pour un
pareil obj.:t. Les Novelles 13 & 67, une foule d'Auteurs
& d' l\,rré s établiifent unanimement ces maximes; dès
qu'il n'y a <l'vcune comeftation., dès que les Parties font
d'accord. 'elle.s s'adreifem ~ l'Evê'que, qui par, une conféquenœ de, l'ireÇlifln qu:il a prdonn,ée d.'uLle, Succurfale, fix~
en mê-rne- temps l'etT)fllacemeqt qui fera le plu~ décenç &
le plus lon·venatlle : d'ailleurs la Commun·auté el!: non-recev'lble, p'lrce qu'elle eH fans intérêt à conceller l'emplacement; cerre Succurfale lui eH abfolume'Ot indifférente; elle
,n'en peut> ni, Il'en doitJjouir; fi elle n'a pas été appellée;
c'eft qu'elle ne l'a pas voulu; d'ait\eurs elle avoit p'uremenc
& limplement acquief.:é à la fixation de l'emplacement faite
par l'Officia,l.
Mr.
�DU
PAIrAIS
Dl!
PltOVl!NCl!.
1:0~
, Mr. -l'Avocat-Général de Califfanne ob(erva qu'i1.y a· plulieurs
fortes d'abus, le relatif & l'ab(olu.le premier, qui n'ell abus
que vis.-à-vis d\l particulier, peut ceffer, il peut être couverr ;
on peut être non-recevable 11 le propo(er, parce que dès qu'il
ne bleffe que le tiers, & que ce tiers ne [e plaint pas, Ol1
plutôt qu'il y 'con(eor, il ne peur plus, après y avoir (péciale~enr con[enti., revenir comre .l'acquie(cemenr. L'autre, au
comraire, efl: de droit public; il Y tienr effentiellemenr, &
il ne dépend pas du particulier d'en fixer la durée; il n'ell
pas en fon pouvoir d'en affoiblir l'exifl:ence, & la voix au
.minifiere public, attentive à la con(ervation de nos libertés,
peut toujours fe faire enrendre.
Il efl: certain que celui qui a acquiefcé 11 un jugement;
qui l'a approuvé, ne peut l'attaquer ni s'en plaindre; celui·
qui a renoncé 11 [es droits, ne peut plus levenir contre
cette renonciation. La Communauté de Châteauneuf, affignée
par les habitans de Chauvet pour con(enrir·1I l'éreél:ion d'une
Succur(ale qui fera conn mite 11 tel endroit plus commode
qui fera indiqué par l'Official, délibere d'acco.der la Succur~
[ale fans aucune conrefl:ation , & offre en con[équence un
~xpédient ; mais tous les aél:es qui (uivenr (ont fa ils fans que
la Communa\lté (oit a-ppellé~; ainli on ne peut p,as dire qu'elley ait con(enri ; elle n'étoit plus en ·qualité. Le çonfentement
t;lcite ne fd'liroit point; il faudroit pour cela que la fjxa~
tion du local. par l'Official fût une con(équence néceffaire du
confenremenr 11 l'éreél:ion. La Communauté a acquieké à
l'éreél:ion de la Succur(ale puremenr & fimplemenr, mais jamais au local (ur lequel elle devoit être bâtie, jamais 11 fon
emplacement; l'appel comme d'abus n~ porte que fur l'emplacement: donc elle eH reçev'\ble.
D'ail1eurs ( continua Mr. l'Avocat-Général) o'eH-ce pas
l1ne quefiion d'incompétence qu'il s'agir de décider ? La
juri(diél:ion de l'Offici"1 n'eH-elle pas c;ircollfcrire dans des:
bornes fixes & limirées ? Pourroir-il dépendre des parties
de lui attribuer la connoiffance de quelque matiere qui ne
feroit pas de fon reffort? Les jurifdiél:ions font de droit pu~
bJic, & il n'eH pJS permis aU parric\llier d'y déroger & d'ea.
/innées 1775 & fiiv.
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lntervùtir l'ofdr!;!' l-Ies acq~ierceme!ls ne pel1vel'lHèndre Ûlt
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JlIge compétent, s'il ne l'eH pas. J>l y a l'l'liS: une partie,
dit l'Ameur des maximes- fiir l'abus, peut interjeuer appel
comme' d'aDus- des jugemens eecléfiafliques, même après avoir
procédé volontairemend, & ap'rès trais Sentences conformes. Dès
qu'uÇle partie récla·fne fan propre lüge., ne felOit-il pas contre le droit na·turel de le lll"i refufer? P'eur-on la·'fo-rcer de
fubir la loi d'un autre, des qu'elle dèma'ode une jurifdittiorl
qui lui eH acquife ? Elle peut toU'jeurs revenir' au TIibunal
véritablement <;:<ilmpétent, (lflS 'Lue- fen acquiefcement puilfe
t:aire le moindre eblhible ; elle' n'a pas même befoin de prendre à ce fujet des lettres de ref~ilUti·on·.
'.
, Si ces priqq·ci·pes font vrais en thefe générale, ne le fontils pas bien plus vis-à-·vis d'une Communauté toujours mineuve, dès qu'elle eH: léfée , dont les inréTêrs, fouvent confiés' à des adminilhateurs peu éclairés, feroient perdus, s'il
ne lu·v érait pàs p0iIibie de revenir conrre des démarches fouv.enr ha{;ltdées ? Or, on ne peut pas diiIimuler l'intérêt quJa_
vo-it la Communauté de Châteauneuf, 10rfqu'eHe confentic
à l'érettiofl de la Succurfale, à connoltre, à conreHer, ouau moins li approuver fon emplacement ,,fur-tout dans un
cemps où l'éta~ des chofes avait changé; ce n'el! plus le feul"
hameau de· Chauvet qui demande une Succurfale '; plufieu.r!i
autres croyant aVOIr beCoill' des mêmes fecours, fe fo·nt réunis pour les. folliciter & les ebtenir. La Communauté fe
voit LIane expofée à f<lire conltruire- l'luGeurs Succurfales ; s'il'
eH poiIible qu'une feule ferve pour pl'uGeurs qllartiers , n'e!til pas bien elfenriel à \;i Communauté d'e le faire ordonner?'
SlIt le· fonds, Mr; l'Avocat-Général ob[erva qu'il n'exilta
jamais abu~ plus abfô!u que celui dont il s'agiffoi'r. Abus de
pouvait': il tient elTentiellemenr à Pordre public. Abus
de compétence: il tient effentiellement à l'ordre des jurlf.
di8:ions. Qu'eH-ce dans le principe que la jurifdi8:ion eccléfiaHique ? L'Eglife l'a'" reçue' de Jefus-Chrilt-; fon aurorité efl:
reCpe8:able, mais pllremenr fpirituelle ; elle ne s'érend que'
. fllr les conCciences., & n'agit que dans l'ordre' du mérite &: de
la libené; eHe- l'l'a p<tl' fen inffitution/ ni Tribunal extérieur J.
"
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PRO V Il Ne!!.
IIi ,otEe,ier de fufbee ; ,ni droit,de 'c0aB:ion l'our fai re exéJ.
cuter'fes jugernens; tout If é~oit àbfolument de jurifdiélion gracieufe, .& le tribuml des E-vê:,ques pOlar les .affaires temporelles
& conrentieu{es n'a d'autŒ"e litre .de fon établi-ffement .que
la libér.alité de nos Rois, & 'leur refpeél pour la >religion.
D'abord Jfimples ar.bitres & commi1faires .dans Ile-s aftiJ.ires
où ,les 'veuves, Œes orphefins, où les ,ele.reséwien( illtéreifés';
cet arbitrage, cq.ui n'étoit t]ue [unple com-l:niffion., fut' changé
dans la fuite en jurifdiélion .ordinaire, qui, I(uiva-nc Iles circont!:a:nces , a depuis ét.é é~endlue ou reiferrée , '& rC"ef!; IAr[que les Eccléfiafliques p.aifent ,ces litlllite's dans les jugemens
qui éma'nent de leur rr~bunal ,.IorIqu' i.Is. 'encreprennent J fur. la
jurifdiélion féculiere, lorfqu'ils attÎ"rehi des .ca\Jfes 'dortt \Ia 'COI1~
noiifance leu.r dl:".imerdi.te ,qu'il y a '>abus ,d:lI1s"leur 'Sell~
tence ; abus 'flJui ,vient' du> 'défaut ,de pouv<o.ir,. Il donnè à PEc"
cléfiafiique Ulte plus grapde étendue. de 1u.rifdiaion que celle
que.le P.r.!ncipe lui'.. a prefcrit,~ ••il :tend.\ à orroubler •.dao:s le
Royaume. l'ordre & la tranquillité qui doivent regner ·'da.ns
les .deux 'pui1fances ;" iLco'rltrellient 9auX: 'Jf'eg(es de '. la difci~
pline ecc1é'fiaiJ;ique. 'Il <:if!: égalemeru: ,o.ppofé aux .m'aximes·dè
l'Egli/è., à fon -intérêt, aux floix de l'Eiat, lX li l'autorité llil
Prillce.
. , t
' "'
Il :e.fl:' certain 'que: le Juge ;d'.Eglife ne .peut .col'Hioît~e :que
(Je cie Gui. eH cpureme'lIt fpiritIJel,. défi: ce qui et!: établi pa·r
tOlfS >les Ganens., p:ar les -0rdoamrnces Je:s plus Ilrécifes , &.
notammenr par ;l'Edit de 169'5< Or t'emplacemem d'un~
Eghfe li'eJt pas !Un objet 'Flllremenr fpir.ituel; c'et!: à l'Evé~
que qu',il 'faut s"adl'etrer pOllr, l'ereélion ,dlune' 'Sllcçurfale ~
parce '<ju'alurs ':le f"lut. des 'peuflles, >leur ;befàin.~ le,ur 'aV~'A~
tag:é fait le [eul motif Be lIa. ~emanlle ; t,out 'et!: alo·rs fpi..
ritu.?1 ; il 'efl: (eul luge de la néce1lité cdes befoins du peuplè
fournis à fa }unifdiélion ; mais une fais qu'il en a décidé l'u"
t.iliné, <qù'il cen ,:a r.eçonnu Je.~beroin,. fon mlniHere eQ filli~.
& iil qui:t Jaiflh au Juge fécul.ier le lif(jin de' l'~hJ~hlce~
,.
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" .
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...J_.J
- L'Ev~q~e en vi'fir.é &'lë'n jurifdiB:ion gracieufe' peur quel..:
~uefojs, d'après le confenwl.1'Ie·nt. des. pa(ctles., hxer cdoçaJ!~
Q~
�«08
JOU.llNAL
,
.en appéllant les Juges de's lieux; des loix particulieres occa":
lionnées par ,de forres conIidérarions leur ont accordé ce
moment de jurifdiaion; mais il n'en eH pas de même des
Officiaux qui n'ont point de jurifdialOn gracieufe, & où
tout eit contenrieux. On a cité les Novell-es 13 & 67, qui
difent que l'on ne peut commencer une Eglife avant que l'Evêque y ait planté la croix: mais ces deux loix ne peuvent
s'appliquer à l'emplacemenr & à la conHruaion, mais feulement à l'éreaion & à la confécrarion ; en les lifant atlentivement, il n'eH pas poffible de former le moindre doute;
fien de fpirieueLdans l'emplacemenr d'une Egl"fe, & dans la
façon .de la confiruIre_M. Talon, dans [on Trairé Je l'Autorité ç/es Loix, ai donné.fur' ce point une doarine précife'; il
efl vrai.l-.dir-il, 'Ive' 'luant au choix des lieux où ft doivent
hâtir les Eglifts, comme ce font chofts qui ne concernent pas
moins' la cQ(Tirrwdité :&JL'iotùêt particulier de.s peuples, que leur
falf4, .cela d4ÏJ_ dépendre rie la fouveraineté: du lVlagiJlrat politique.
,t
,.
1 ••
_. JQua!ld il. s~agit <de l'ér.eaion d'une Succurfale qui ne tend
qu'à l'augmentation desfecours fpirieuels, c'eH à l'Evêque
.al} à fon Official que la .demande 'doit êrre formé~; mais
là finit fon minifiere; là celfe fa jurifdiaion ; il a rempli tout
ce qui etait purement fpirieuël; il a'.cni le recours nééelfaire,
il, l'a accordé; mais é.'efi au Jtige féculier à fixer l'empJace'~ent où les fideles doivent venir chercher ce mêm.e fecours,
parce qu'il y a une foule de motifs temporels à con[ulter:
la commodité ·d,u peuple, l'adminiHration, l'économie de la
conHruB:ion & [à folidité • le choix du local n'dt dans le vrai
relatif qu'à la commodité ·des Paroiffiens, & à la plus grande
ou moindre dépenfe ; les regles de la confiruaion' [om donc
celles que l'on doit Cuivre pour l'emplacement des Egli[es ;
c'efi donc l'autorité féculiere & non la jurifdiaiori eccIé(J~fiiq!le qui. doit en connoîtr~. L'Evêque, 1 il eH vrai, a le
droit d'in[pe~jon';' il 'pèuu!éâde fi l'eroplaéement .que l'an
a fixé·eH décem & convenable; mais tout cela n'el!: que de
, jlJrifdiaion graci~u[e, '& jl Ii'a point d'autorité ni de jurifcllaion ; c'eH à ~a_CoJUmun.auté à.c;onvenir de l'e~plac~ment 1
J
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pûiCqu'elle fait les frais de la conHruél:ion , ou au Juge ~écu
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P.U..\tS
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1?n.OVIlNCI!:
lier à le fixer; l'Evêque doit intervenir pqur l'approbatIOn.,
il peut même refufer ; mais fon refus ne faUrOIt être arbitraire, il doit être motivé.
.
Mr. l'Avocat-Général conclut à ce que faifant droIt aux
lettres .d'appel comme d'abus, &. en t~nt que de befoin à
celles de ref!:itution, il fût dit y aVOIr abus dans la Se~;
cence de l'Official de Riez, porrant que la Succurfale ferOIt
conUruite à l'endroit par lui défigné, enfemhle dans le verbal
d'accédit & d'emplacement. '
Arrêt du 25 Février 1777, prononcé par M. le Premier
Prélident, conforme aux conclulions; les Syndics du hameau
de Chauvet furent condamnés aux dépens. Plaidant Mes. AIpheran & Lecler<:.
ARRÊT
XIII.
Les Receveurs des Communautés peuvent-ils Ùre R"eveurs
des Vigueries?
L
A Viguerie de Digne fait une impofition particuliérè
pour le paiement des charges & pour les réparations
des chemins. Pour l'exaél:ion de cette impofition', on' nom'me
un Receveur parriculier à qui on paffe un contrat de bail ;
il ef!: obligé de donner caution, &
fournis à la contrain~e par corps. En 1773, le fieur Soffy, Bourgeois, fut
nommé à cette exaél:ion pour trois ans. Dans l'intervalle il
fit ~r~er un Office de Procureur à la Sénéchauffée de Digne,
obtlOt des provilions, fut reçu dans le mois d'Avril 1776;
il déclara qu'il ne voulait pas pof!:uler d'une année, attend~
qu'il fe trouvait chargé de la tréforerie de la Communauté
de Digne; le 9 Novembre fuivant ;'Me. Soffy fu.t ~ontil\ué
dans cette exaél:ion' par une délibération de I~ Viguerie; a~x
mêmes gages de 5a liv. Le fieur Peauttier fe plaignit ~a·r.·
~a comparan~ de ,~ùe norni.nation, &.fi~'offre de [e ,hàrge~
ea
�lIO
JOU'RNAL
de cette recette .moyefl.Oant 40 liv. La Communauté n:ayane
rien répondu, le lieur Peautrier fe pourvut à la Cour des
Aides; il demanda lllue la délibération pOl'Caht nomination
de Me. Snify fût déclarée nulle & caifée , :&. que la place
de Receveur particulier fût mife .aux encheres" paur être
délivrée au 'plus .offrant & .dernier enchériffeur.
On difoit pour le .lieur Peaucrier" que les délibérations
des Corps & Communautés font foumifes à des Loix dont
l'omiffion en oper.e la nullité; les Lojx les plus eifemielles
confiftem à n'y admettre que des délibérans impartiaux qui
n'aient aucun -iocérêt di·reél: & ,perfonnel pour eux ou pour
leurs parens. Si dans les Confeils ou aifemhlées on y traitè
plulieurs 0bjets, .cç.ux qui y font préfens .& qui' fom iDtéreifés dans quelqu'un des objets mis en délibération, ne
peuvent refter dans la falle de l'aifemblée , & on peut les
obliger à rarcir, afin. que les délibérans foient libres, &
que les fuffrages ne foient pas gênés.
trouve dans Boniface, tom. I, liv. '2., tit. 3, ch. '2., un Arrêt qui caifa
une délibération du Chapitre d'Hit:res, & fit inhibitions &
4éfenfes aux ca,pitulans d'opiner dans les affaires où Itmrs.
parens y auraient intérêt, à peine de nùllité.
Ici Me. Soify a affiné à la délibération; ,le fieur Boyer
fan beall-fr.ere " & .r~un «les chefs de la Viguerie., ,a ,o.piné
en fa fa-veu.r.. Le Rece:veur -particulier doit .paifer un contrat., ,donner caution, & ,eft fournis à la contrainte pal;
corps; cependaot on a nommé Me. Soify fans .contrat"
fans fOllmiffion, ce qui ,. en' dérogeant au dn;>it Cornmulli.
{k"à .J'.ufage~ fait pel'dpe à la Viguer-ie fes ~(lretés.
J
. ~es .Corps & Communautés jouiIrem [ans -contredit dll
pri.v,ilege des minéu.rs; ils peuv,en~ reven}r fur leurs pas,
& acçeprer 'tpus les -avafltages qUi 'Ce .p-refentent .pour ,eux'
dans la huitaine .<l,près ..que leurs biens -& leurs fe11l1les ont.
été délivr~s. D'après .ces prj,nc\pes., les phefs de Viguerie
ne tP0uvoient pas ;re.~r~rr ~'pffre. du.fte-jlJ Pealltl'ier Qui était)
ljvanra.geufe, fait .;par ,la .diminùtion des gages, {oit par leS)
•
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qu ,.\J 0,,"0it.
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.. Me. SoifY ~t rd'aill~urs ~llca-p.able ,d''OlXuper la'Ela~ db
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PRO VEN C Il.
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!{eeeve;;r, p~rce qu'il eft pourvu d'u.n Office foyal dans une
Sénéchaulfée; il eft au nombre des Officiers auxquels les
Ordonnances & les Arrêrs de Réglemenr défendenr de
mêler de commer.ce, & de s'immifcer dans l'es fermes. 011
eitoir le Codè Henri., Iiv-. 3, rir.
arr. l S,. & liv. 6, rir.
13, arr. 3.
.
. C'eft d'après la difpofirion de ces Ordonnances, que la
Cour a défendu par plufieurs Réglemens aux Noraires
d'exercer aucune tréforerie, non feulement dans' les lieux
où ils font établis, mais même en quelque Ji-eu de la Province que ce foit. Il y a un Arrêt de la Cour de Parlement'·
de cerre Province, rapporté par Boniface, tom. l, liv. l,
tir. l , n. 29, qui fit défenfes au Procureur du Roi en la
Judicar'ure de Sainr.Remi & à- tous les aurres Officiers de,
la Province, de prendre des fermes publiques. Ces loix
générales & parrjculieres affe·aenr roU1i les pourvus des offices
royaux, depuis les premiers M'agifrrars jufqu'aux Huiffiers.;
ils doivent s'arracher uniquemenr aux fonaions de leur érar,
&ne pas s'immifcer dans les' négoces & rrafics qui le.s avifiroient, & d)où il pourroit réfulrer des abus que l'Ordonnance & les Arrêrs ont voulu prévenir.
Me. Solfy eft Procureur en la Sénédlaulfée de Digne~
Dira-r-il qu'il ne poCrule p.as? Mais il a éré reçu; il a prêré
ferment; fes provifions font enrégifrrées; il affifre en rohe
aux Audiences, j.J a ptêrê le' f-erment annuel à la Sr. Marrin;.
ce fonr-Ià des fonaiûns d'un Procureur pofrulanr ; & s'il'
avoit renoncé à ta pofrulation, il n'eut pas renouvellé fon
ferment.
. .'
L'incapacité à raifon de fcm état n'ert' pas la feule qui
exclue Me. Solfy de cetre recette; il en eft encore incapable par rapport à la mulriplicité des recettes & rréforeries dom il fe trouve furchaTgé. Par l'Arrêt du 27 Mars 1743;
encre fieu'r Jean-Anruine Savournin, Bourgeois d'Aix', &
fleur Mathieu-Jofeph Bofc, Commis au' bure.au du conrrôle
de la même ville, la Cour ayant aucunement égùd à la
requête d'inrervention des 'Proc;ureurs des Gens des Trois
ptats de ce~te- Pr.oY'ince , fit inhibi~ions & défenfes aux Rej'
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ceveurs des Vigueriès & aux Tréforiers , Fermiers & Exac':
teurs des Communautés de fe charger d'aucun autre recouvrement ·de deniers à faire fur' les Communautés &
particuliers, direél:ement ni indireél:ement, pendant le tems
de leur exercice, à peine d'être fur le champ deftitués de
leur' emploi, & d'en être informé.
.
Dans la requête de la Province, fur laquelle l'Arrêt de
Réglemellt du 24 Mai 1764 intervint, MM. les Procureurs
du Pays expoferent que par les diŒérens Arrêts rendus par
la Cour, il eft prohibé à tout Officier public & à toute
perfonne chargée d'un recouvrement de deniers, de fe
rendre délivrataire de la taille, ni d'en faire l'exaél:ion direél:ement ni indireél:emenr. Ces Arrêts ont un double
motif: ils ont voulu empêcher que celui auquel les fonctions publiques qu'il a âéja donnent un certain empire fur
les habitans, n"en abufe dans le recouvrement de la taille;
& ils ont eu' encore pour objet d'éviter toute occauon de
divertir les deniers des Communautés. D'après ce double
motif, ils ont même prohibé à ceux qui n'étant encore
chargés d'aucune recette, s'étoient rendus délivra ta ires de
la taille, d'accepter aucun recouvrement de deniers pendant
le temps de leur exercice, à peine de deftitution & d'en
être informé.
On répond oit pour Me. SolTy, que les Vigueries, à. la
différence des Communautés, s'atrembleot [ans avoir befoin de l'autorifation d'un Officier de Juftice ; elles déliberent des impofitions , [ans être obligées de faire homolo~
guer leurs délibérations, & enfin elles font des dépenfes,
fans être dépendantes. de la permiffion de M. ·l'Inrendanr.
La raifon de cette diŒérence dt frappante; les .,tremblées
des Vigueries foot formées par des repréfentans; les Confi ils des Communautés ne [ont formés que par des partÎluliers; les uns y apportent un vœu commun, les autres
f<,.ulement leur vœu particulier; ceux-ci ne [ont cenfés mefyrer & ne mefurent eŒeél:ivement leur fuŒrage que fur leur
intérêt propre; al! lierl que les premiers le me[ureot [ur
l'intérêt de la Communauté q~'ils repré[entent 2 ~ d,e!i
habitans
�'n v PAL A, l S D E Pït 0 YEN C E;
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habitan's à la tête defquels ils fe trOUVent. L'àdmini!hation
des Vigueries cft une adminiilration politique, tandis que
celle des Communautés n'eft qu'une adminifiration purement
civile; J'une a fa fource dans le droit des gens, J'autre n'a
la fienne que dans le droit civil; l'une eil entiérement libre
par l'elfence de fon état politique, tandis que J'autre eil foujours réputée mineure, étant circonfcrite par le concours des
formes & de l'aurorité. Ainfi par l'elfence même de fon
érat; l'adminiHration des Vigueries n'dl: pas différente de
celle de la Province.
Elle ne l'eit pas non plus par l'objet de l'impofition recueillie par le Receveur particulier. La recette confifte à la
cotifation de 1000 liv. que chaque Viguerie eft, obligée de
payer rollS les cinq ans à la cailfe de la Province pour l'entretien des pones & chemins, à l'impofition de 8 liv. par
feu' que chaque Communauté efi obligée de payer à la Viguerie, fuivant la fixation faite dans l'Alfemblée générale de
, 1753, pour fervir aux conilruél:ions & réparations des pones
& chemins de, Viguerie. De forte qu'on ne peut coneefier
que la recette particuliere ne tienne à l'adminiilration du
pays, dès qu'elle a pour objet unique la confiruél:ion & les
réparations des chemins.
On retraçoit pour la Communauté les mêmes principes
établis par Me. Solfy au ,fujet des Receveurs particuliers des
'vigueries. La Province nommoit autrefois ces Receveurs;
mais comme elle voulut en 1708 les rendre refponfables de
la banqueroute du Tréforier ,général, elle fut privée' de leurs
fecours & des avances qu'ils faifoient pour les Tréforiers
des Communautés. A leur place, elle fubrogep des ,Commis
Receveurs; mais ceux-ci, au lieu des avances fuffifantes pour
le fervice, nè compterent à la cailfe générale que les deniers qu'ils exigeaient à grands frais par de violentes exécutions. Pour ramener l'ordre, elle laiffa aux Vigueries la
liberté de fe choifir elles-mêmes leurs Receveurs; & fau'te par
elles de faire ce choix dans un temps déterminé, le Tréforier
général de la Province fut chargé d'y pourvoir lui-même &
de répondre de fon Commis.
,
) ,Années t 775 &fuiv.
;P.
�fl4 .
'.
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11 RNA ri
.
Cet urage a toujours fubliflé' depuis. Les Vigueries ont
nommé &: élu leur Receveur, .& leur choix a toujours été
libre. Si quelquefois., fous l'offre d'un bénéfice apparent ou
réel, on a voulu gêner leur nominaaon, la Cour s'elt_toujo.urs emprelfée de maintenir leur _privilege à cet égard.
L'exemple de Me. Bovis, qui voulut forcer le choix de la
Viguerie de MouA:iers, & dont les prétentions furent .rejetrées en 1770, conA:ate le droit des Vigueries.
En difpofant de Ja recette, l'aifemblée ufe d'un droit ac"
quis & incontef!:able; 'fon choix, quel q.u'il foit, dépendant
\lDiquehient de. fa voloiHé , & ne pouvant.intéreifer qu'elle,
qui répond à la Viguerie de la folvabilité du Prépofé, elli
libre comme la confiance qui le détermine; il ne peut ni
bleifer ni compromettre l'mtérêt de perfonne, parce que
perfonne n'a le droit de le forcer, &,encore moins. de s'en
plaindre. La commiŒon dans laquelle on propofa de continuer Me. Soify , ef!: une commiffion de confiance, .& fa
nomination ne doit être coniidérée que comme la récompenfe de fon exaaitude & de fa fidélité pendant les trois
années qu'il avoit géré, & un témoignage précieux de la
fatisfaaion générale.
L'intérêt de l'adminif!:ration confiae moins dans Îes fa..
cuités pécuniaires, qûe .dans, les quali~és perfonne,lles_du fujet
élu, ,& il.lui importe .uniquement de confier .cette cpmmiG
f?on à un Préllofé aaif, doux, intelligent & .fiicile ,. fur le";
quel ellè puiife fe repofd ahfoJument de cette panie de fon
adminif!:ration.' L'intérêt des Adminif!:rateors ao comràire
peut conliller à ne préférer dans le choix que le plus riche;
parce que répondant à la Viguerie de la folvabilité du fujet
qu'ils propofent, il leur impDne de confulter leur fûreté
particuliere, en ne confiant cette recette qu'à celui dont
les facultés puiifent garantir la gef!:ion. Sous ce point de
vue, Me. Soify mérite à' tous égards la confiance qu'on lui
a .tt5moigné; & en fuppofant que Sa fortune dût lel1r laiifér
craindre l'effçt de la refponlion, peut-on les blâmer d'en
~vo,ir,voulu courir les, r\fques, &, d'avoir moins confuité leur
Interet p,ropre que l'avantage général? Pourroit-on les, force~
�h u P A 1': A 1 ç 1) È l'Il 0 VEN C E;
ï r~
à,"prEindre' flOull.,èyx"o.1ême's 'des ,.fûretés donf ~ls ént jùgé ~
propos de ne pas v0ùloi'p?'
.
.
~ ,
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, ' li éiF prohibé' aux Offiders royaux ou des Seigneurs d'étre
Fermiers ni aifoeiés au fermes. Voilà la difpofition des Loil(
du Royaume., Mais:.la tommillion t0rifiée à Me. SoifY eHelle uqe' ferme ~ Les; ,Atrêts "de Régl'ement font inappliea!Jles à, la: eaufe;;,!ils "prohlben~; .flUX. Notaires de sl imm;feer
dans"aucune fepm~ puhliq~le. Me, 5éJify -n'dt p6irif ;Notàire,
& la r~cetie de la Viguerie n'et!: point un~ ferme. Celui
rappotté par J30niface étend à 103 vérité! la prohibi-ti6n' à tous
les Officiers royaux; mais cette prohibition ne porte f en'"
core que fur les fermes publiques. Combien dans la Pro.vi'nce ,ie 1{e-ceveurs" généraux ou parricuÏiers des Vigueries
font Officiers royaul\? Çpmqien d~ Not,aires même font ou
Ollt été' chargés de pàreilles 'commiffians? Le fieur Jaubert
iguit fous l~s yeux de la Cour de Ja receue de. cette. Viguerie, & Id-- fié"ur Pin êŒ' ':Préforier" de,s .Eèars:' ,m, 'fone
pout,tant l'ùn! & 'l'autre pOlltvus 'd'un"officé':dè! Sécréraire: "l'hfonne' .s'éfl:-il 'jamais' avifé cre I.quëfeHu 'leu'!, nomimition?
Ainfi lorfqu'il n'dl: qu~fl:ion_ pi de ferme,s, pi d'encheres.
lur[qu'il' s;agi.r d'une fimple.· conimiffi~Jll, d'brie ~.<lommiffion
de·'confianee·; lorfque le' concèdrs n'a 1Jo1nt lièU, les ineon~
vénién's prevus par 'lè!i' ~rh~ts n'ét~nt ;po.i:nt a'll.'rai'riQfe·, p'burquoi' l'Officier' pulJlic. fèroit~11 exèlu,? '5' tOti't~J(rfôr~é~ dans
l'es.èdeherès'j' tdût- efl: volobrairè 'dans les ·tbn\&.i.Œons~,~C'eŒ
la;péri'oéïn~; &. nô~' -r~ offre~'fqtfe J'hn "èonGaJ!'Ft!,~?'tfftè' l?olÎ
dei~· princip.a-lem,ent L eônfidér~r. Si la ~daH\éLit'Ofl!t~e( 'I!~
peut' exclure Me-.~ SOfiy·) de )i're.ë~rteipa'hreullere' 9U,i"ll1i "~
ét~' eoÎrim ifeJ; '1 éi l différenf-llS' z exîiHjo~~ tlb'ilt' if -efl: tfrnrp,é
éOB~ pas dlî gên'ei;lat -confi'iince·'des Adtn njît~at~i.l'rs' dil Vi.... "&'r.me.t
"'t"e 0 b";':
ru, ...
(.al ... , <'-""-:".
guerJe,
l'['de'lë '<"r'
a 'ron "'1
e ecoou.
. .,
• ILes Arré-'ts-['dJ êR'égle~ntHe ~I74j &'11164 cn'otlt~:e'U
pullr' ob;et "4de~les'Re-eevèur & Cbm'rni's des"i!rbi'ts ~oyau1(--:
qùi, ~our. r~.?dr~ v'ain~"~P p~évoyance de.s 'Procure~,rs ,d.u
Pays·, 'falfOlentOpardltre··url 'P'I'~te'l.norrr qUI Jfe'f:l'endJJ( deh':
vrat.aire 1 & après le b~.il .leur {ai fait procuration, pour faire
,le -recbùvrement; & pour rendre çompte' 1r fa' CommuOlluré ;
.
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jl n'y a dans les Arréts aucune difpofirion dont le lieur Peau.
trier puilfe fe prévaloir contre Me. Solfy.
Arrêt du 2.0 Mars 1777' qui déclare le fieur Peautrier non~
recevable & mal-fondé, & ord.onne qu'il fera fait un Réglement P9ur inhiber aux Tréforiers des Communaurés de
fe charger des recettes des Vigueries, rant grolfes que petires. Me. Turrel avoir conclu à la cal1arion de la délibé.·
rarion, fur le fondement que Me. Soify étoit incapable
comme Tréforier de Communauté; il éroit auffi frappé du
défaut de camion. Plaidant Mes. G~ffier, Efpariar & Simeon.
ARR Ê T
X I"V.
Le tiers qui ln fait d'ajfurance T1}aritime a payé la prime, &
_ qui efl porteur d'un hil~et caufè, valeur reçue en(prime d'af•
.furance, a 'privilege pou~ fa'} paiem~nt fur les effets' ajfurés.
N 1773 ,llô fIeur B,:uis, Nég~ciant de la ville de Marfeille, chargea le fieur Efcalon, auffi.Négocianr, de ·faire
pour fon comp}e des aifurances f~r le. corps & facutté du
'vailfeau La Comteffi de Provence. Le. fieur Efcalon paya les
primes,
le fieur Bouis lui fir deux billers caufés, valeur
en primes d'ajfurances, le' premier d'erÎr.rée aux HIes Frans:aifes de l'Amérique, & le (econd de forcie. Le lieur Bouis
fit faillite; fes biens.Jurent mis en régie. Les lieurs Franc
& Lartigues furent pommés adjoints.,A l'époque de la fail-.
lite, le Navire La ComteJfe de Prov,ence, & une parcie de fa
cargaifon, fubfiftoir .en nature; les a~joinrs s'en emparerent ,
& refuferent de payer au fieur Efcalon fes billers de prime.
Celui-ci fe pourvut aux Juges-Confuls, &,obtint ·une Sen-tence le 14 Août 177'), qui les con~amna au paiemenr des
_ ~eux billers, avec intérêrs & conrrain.te par corps. Appel par~
devant la Cour. .
On çli[oir pour les lieurs F ranc ~ Lartigues, que i~. prim9.
E
&
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�'il"
nE
bu PALAIS
PaOVBNc:t;
qUÎ n'eG: pas payée, peut de fa nature donner un prÎvilege
à l'affureur fur les effets affurés, & une hypotheque générale fur cous les biens 'de la perfonne affurée, parce que
l'affureur fufcipit in ft periculum navigationis; i.I court perfdnnellement un rifqu~ de mer; mais une fois qu'il eG: payé
de cette prime, il n'exil!:e plus de privilege, parce qu'alors
la créance de l'affureur eH éteinte, & avec elle le prix dll
rifque de mer qu'il court. Peu' importe alors que pour le
paiement de l'affureur, la perfonne affurée ait puifé dans fan
coffre ou dans celui d'un tiers. Le prêteur n'el! rien de plus
en pareil cas qu'un créancier ordinaire, hypotMcaire, s'il y
a un contrat; chirographaire, ft c'el!: par un ftmple biller.
El!:-ce par un billet caufé pour prime d'a.f!ùrance que le fteu~
Bouis, de connivence avec fan créancier, a pu foufcrire à
telle date ou fous telle dénomination qu'il a voulu, & dans
lèquel l'affureur n'eH point intervenu, qu'on peur donner un
p.rivilege à un écrit privé? Tous les Auteurs conviennent que,
pour avoir ce privilege, il faut qu'on juHifie de l'emploi des
deniers; il faut que cette jul!:ification fait fondée fu'r, une_
fubrogation e~reffe & légale du débiteur, ou fur une cef.
fion des droits du créancier payé. Ce privilege étant mefuré
fur la caufe, il faut qu'il conHe de cette caufe d'une maDiere légale, & il n'en el!: pas' d'autre que celle de l'intervention des parties intérelfées.
. Comment pourrait-on regarder dans le cas préfent comme
fubrogation légale du débiteur, J'énonciation vague, pour,
prime d'a.f!ùrance, ajoutée à un billet privé? Accorderait-on·
le privilege des Maçons, des aviruailleurs, à celui qui fe préfenterait avec un /impie billet du propriétaire, de l'armateur 00 cette caufe ferait vaguement énoncée? Le fleur Efealon fe flatte en vain d'obtenir le privilege de l'affureur,
qui nlel!: dû qu'aqx primes 'réelles d'affurance, & non à celles
qui n'en ont que le nom.
. On répondait pour le fieur Efcalon, que d'après l'ufage
'dè Marfeille, la prime, en fait d'a{furance, a un privilege
& une préférence à beaucoup de créanciers. Les Négoçians,
pe foot ceofés .conrraéler des engageJ;llens, en fait dl: prir{le"
"
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JOURRAL
que fur la foi du p'pivilege 'que '\'ufage 'général du commerc~
leur accorde. Quand 1e fleur Efcalon a contraél:é avec le
lieur Bouis, il n'a pas uniquement fuivi fa fOl; ce n'dl: pas
un finîple prêt qu'il a entendu lui faire, & pour l'affunince
duquel il n'eut que fa parole & fon billet; mais' en lui prê·tant, il a exigé la déclaration de l'emploi, valeur en prime
d'ajJitrance; & en déclarant n'avoir prêté que pour prime
d'affurance, il s'eH par cela même réfervé tous ,leS droitS'
attachés 11 cette nature de créance; on doit d'autant mieux
en convenir, que toutes les obligations, & fur-tout celles
de commerce, doivent être telles que l'ufage les irndique"
puifque'les .ufages r.eçus dans le commerce font une 10Lj;11~'
violable pour tout commerçapt.
Tous les Auteurs qui ont écrie fur la mariece des primes ,i.
ont reconnu la néceffité de leur donner un privilege, parcCi
qu'il n'y a aucune différence entre l'argent pris à la gioffe;
& la prime non payée, ou l'argent emFJrunté pour payer:d'es'
l'rimes', & dom il a été concédé obliga~ion'poEJr valeur repll:~
en prime. Dans tbus les cas, c'eil: un contrat <:oncernan~'te'
commerce maritime. Les fonds 'ou l'iDbligation bDt facilite!
'I~ commerce de la mer '; la marchandife a au~menté de va:'
leur par l'affurance; la prime a facilité l'aŒirafilce; l'affurane-é'
pignoris caufam falvam fecit; p-ar 'elfe le.Négociant n'a 'couiu
les rifques de la mer que jufqu'.a:u concurrelit' de ,ce qulil vo'u:'
lait',}' expofer; le corps ou', les fa(mltés' ont '.profité <du bénéfice de l'a'ffurance.' Pourquoi. donc .le \:orps &: les faculte~
ne feroient-ils pas auffi fpécialel1'lent affeél:és qu'ils peuvent
Pêr.re au paiement des primes? Auffi l'affureur du navire a.
fa·ns 'difficulté un privilegé fur 'le·! M"irél pO'lw'le paiem'ênt
de' fa prime, comme .il l'a 'fur le. 'chargement, 'S'il a' affu t&
fut le même -chargé ment. (,iVàlin "fur l'Or.ôohtladcel dë ,là>
Marine, tit. 1:4, art. 1 6.pag:; !i'~3; ,'&1 '(ur !?a~r.J 2,6\ ,J1tit. de~
ajJùrances; Pothier en fan traité du C'ontrael d'alfurance), pag.
~
191 ,'n. 192.) ."!,.,,....
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Il, 'ell vm,i que: fuiv'il·iiù 'Va Ft'•. 6 ddu titré dd:J affi;tmces, fa
pr-inie( doit être payéé GÔR1piàrftJ~'j l'in/bnt 'ùeJ'loi fignawre
dé- ,ta- poliCé. Mais. J'Ordobnilt1çe< n~n; .fait cPllP ~une ôbliga~
.'
�'nu P ÂLAU .l'l! J'âOVllNCI!;
'119
tiqn l!:rié1:e, & une condition, P9ur ainH::dit:~, (Ju. (;QntrllJ
d'afiurance; c'el!: plutôt un confeil qu'une difpolition,. un
moyen pour faciliter les affurances que.l'afpeé1: de la pnme
payée comptant rend toujours plus facile, mais un moye~
qüi n'eH pas de néceffité. Cela el!: Î1 vrai, qll'en France,
plus qu'ailleurs, la prime ne fe paye pas comptant, comme
l'obferve Va!in, tom. 2, pag. 26 & 44, Or, la prime n'étant
pas payée comptant pour l'affuré, pourquoi ne lui accorderoit-on point de privilege ?
Que le lieur ECcalpn ait payé le montant des affurances
direél:ement aux affureurs, ou par le canal du Courfier, rien
de plus indifférent; il a payé, & c'eft tout ce qu'il faut à
[on privilege. La preuve 'qu'il a payé aux affureurs , quoique
par le miniflere du Courtier, Ce tire 10. des propres billets
du fieur Bouis, cauCés pour valeur en prime d'affirance; 2 0 • de
l'extrait des livres du fieur ECcalon; 30. des propres livres
du lieur Bouis, qui viennent à l'appui de ceux du lieur Efcalon. On pourroit enfin invoquer les propres comptes des
Courtiers & du Notaire qui ont dreffé ces polices, & qui
doivent juGifier que n'ayant pas payé les primes eux-mémes,
elles l'ont été par le fieur Efcalon•
. L'Arrét du 22, Mai 177), rendu au rapport de Mr. de
Ballon, entre les lieurs Arrroux & le fieur Claver, ne peut
point fervir de préjugé, 10. parce que les primes d'affurance
avoient été payées par un Courtier avec lequel les fieurs
Arnoux étoient en compte, & qui leur fitl'avance des primes, comme il leur eut fait l'avance de tout autre article; 2,". parce que l'on prétendoit que ce billet de prime
qui avoit paffé dans le commerce·, .emportoit hypotheque ;
30. parce que fi à défaut d'hypotheque, on réclamoit ce
privilege, on convenoit de ce méme privilege, & on ne s'en
défendoit que Cur ce que les effets n'exinant plus, il n'étoit
plus poffible de réclamer le privilege. Ainli ce préjugé ne
change rien a':l procès; il en au contraire un nouveau garant
de fa juflice.
Arrêt du 9' Avril 1777' ail rapport de Mr. le Confeiller
Cle Beaurecueil, qui confirme la Sentence, avee dépens. Ecri.
vant Mes. Pafcalis & Alpheran.
.
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'i!t
A R RÊ T
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XV.
Le mari peut, en qualité de mari & maître, retraire au profit
de la femme le fonds aliéné par le parent de celle-ci.
Le parent du débiteur ifl admis au retrait, quoù/ue le fonds
foit vendu par la malfè des créanciers.
L'acht;teur peut-il oppofer au retrayant la ceffion du droit de
prélarion, s'il ne l'a rapportée qu'après ,la demande en
retrait ?
E 8 Février
177~,
le fieur de Leglire, de la ville de
Marfeille, acheta une maifon de la maire des créanciers
du fieur Tefiel, au prix de- 12000 liv. Le fieur Laurenzi,
en qualité de mari & maître, de la dot & droits de ,la Dame
Ifnard, coufine germaine du fieur Tefiel,' fomma le fieur
de Leglire de lui déremparer la maifon, fous l'offre de
jufiifier de la parenté, & de lui rembourfer 'les frais &
loyaux-coûts. Le fieur Laurenzi confentit à la défemparation "
en juftifiant par le fieur de Leglife de la parenté, en le déchargeant des obligations qu'il avoit contraél:ées, & en af_ firmant à ferment qu'il ne prêtoit fon nom à perfonne. Le
fieur Laurenzi confentit à tout; & fur le refus du fieur de
Leglife de défemparer, il fe pourvut au Lieutenant contre
le fieur de Leglife pour voir prêter le ferment & pour défemparer. Le Lieutenant accorda l'affignation;' le fieur de
Leglife prote fia de la nullité de l'exploit, & ne dit 'rien de
la ceffion du droit de prélati0!1 qu'il rapporta le même jour.
Le fieur Laurenzi & fon époufe furent admis au ferment.
L'infl:ance liée, le fieur de Leglife oppofa que la Dame
Laurenzi n'avait eu que ~ 000 liv. de dot, en y comprenant fon trouifeau, & 2000 Ev. en compenfatiol), & que
cette fomme ne fuflifoit pas pour faire face au retrait; que
la Dame Laurenzi fe trouvant mariée fous une conltirution
générale', & fa dot ne fuflifant pas pour pay.er la maifon;
le retrait ne feroit que pour le mari, fous le nom de fa
,
,...femme ~
L
�Il A LAI S
12.
lèm'ine; que la venté ayant éré palfée- par les créallciers
du fieur Tefiel, la Dame Laurenzi, qui certainement n'étoir pas parente de la malfe, ne pouvait exercer le rerrair;
& enfin, que le fieur de Leglife, du moment qu'on lui
eut dénoncé le retrait, & qu'il eut exigé la jufiificarion
de la parenté & la preltation du ferment, avait rapporté
ceffion du droit de prélation de l'un des trois Seigneurs
direél:s , qui avaient chacun des droirs difiinél:s & féparés
fur cerre maifon. Le Lieurenanr de Marfeille, par fa Sentence
du 8 Janvier 1776, avant dire droir à la demande du fieur
Laurenzi, ordonna qu'il jufiifieroit dans la quinzaint;, que
la Dame Ifnard fon époufe avait recueilli environ 12.odo
liv. après le décès de fa mere , dépens réfervés.
_ Le fieur Laurenzi fir intimer cette Sentence au Geur de
Leglife, & lui donna copie de l'inventaire domefiique de
la fucceffion de fa belle-mere, fe montant au delfus de
100GO liv., d'un aél:e du 6 Août 1774, porrant placement
de 2000 liv., d'un billet à ordre de la fomme de 6000
liv., & de l'extrait du bilan du fieur Tiran, fervant à jurcifier que la Dame Laurenzi érait créanciere; il interpella
le fieur de Leglire de s'expliquer fi par les mots, recueilli
environ 12000 liv. après le décès de la Dame fa mere, il
enrendoit que la Dame Laurenzi, ne pùr compofer cetre fomme que de ce qu't:lle pouvait avoir recueilli par fucceffion,
&. s'il adoptait les jufiifications portées dans les pieces
communiquées, avec déclaration qu'en cas d'explication'&
d'adoption, on pourfuivroit en exécution de la Sentence;
& qu'en cas de lilel1ce ,_ ou de refus, le fieur Laurenzi s'en
rendrait appellapt. Poil1t de réllonre de la parr du fieur
qe Leglife; app.el du' fieur Laurenzi, & in ,/uantùm contra
de la parr ·du fieur de Leglife.
~n difoit. pour le fieur Lauren7:i, 1/ que la femmè ,.
qU01que manee, peut. ~xercer le rerrair; 2.°•• qu'il était ind)/férent qu'elle crouv.ât ou ne trouvâr pas dans le montant.
de fa dor de quoi faire cerre acquifirion; 3°. que le rerrait
çOlJlpétair, fait parce. que la vente avait éré vérirablement
confentie Rar un patent de la Dame Laurenzi, fait parce
DU
Années 1775 & fuiv.
D Il
PRO VEN C E.
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,
•
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r;
que là ceffion du droit de prélation qu'avait rapporte le lieur
de Leglife, n'y avoit mis aucun obfiacle; & enfin, que les:
offres éroient légitimes & .relIes que le fieur de Leglife ne
pouvoit rien exiger de plus.
Le Sratut de la Province qui appelle les plus proches:
en affiniré & parenrelle, & qui les admet à retenir les
biens vendus par leurs parens, el!: général dans fa di(pofirion; le Statut comprend également les deux fexes; n'importe qu'une femme fait mariée fous une confiitution générale , ou que d'après fa conHitution, elle n'ait pas de quoi
payer le prix du fonds qu'elle veut retenir. Quoiqu'une
femme fait mariée fous une confiitution générale, elle
n'en eH pas moins" ciroyenne; elle ne doit donc pas moins
jouir de rous les privileges de fa Cité; on ne peut fuppofer que, par cela feul qu'elle a contraél:é un lien, elle a
perdu quelqu'un des droits qui pouvoient lui compéter; la
confl:itution dont elle s'efl: impofée le joug, bien loid de
la priver d'aucune efpece de droit, ne fait qu'en transférer
l'exercice au mari, qui Jlexerçant alOrs pour elle, & à fon
nom, l'exerce avec autant de fuccès que ft la femme l'exerçoit elle-même; tOute la différence qu'il y a, c'eit que la
femme, au lieu d'agir par elle-même, agit par le miniftere du Procureur qu'elle s'eit confl:ituée; mais il eit roujours vrai qu'elle agit, parce que 'lui per alium lacit, per'
ftipfum lacere videtur. Auffi la femme mariée peut exercer
le retrait, ou le mari peut l'intenter pour elle. (Tiraqueau
en fon Traité du Retrait Lignager, §. 10, glofe unique,
n. l, 2. & 3; Grimaudet, liv. 2., chap. 16; Dunod, des
o Retraits, chap. 4; Breyé, part. l , quo 9, §. 1 & 4; Mr.
de Saint-Jean, décif. 34; Decormis ,.,tom. 2., col. 172.3
& fuiv.; Paitour, lib. 6, de jure emphyuutico, tir. 8, n. 1.~
Julien, va. venditio, cap. 4, §. 2.)
Qu'imporre à l'acheteur que la femmé ait ou n'ait pas
de quoi payer? qu'elle emprunte où qu'elle n'emprUnte·
pas, pourvu qu'il retire fes "efpeces, & que aheat indemnis?
on citoit l'Arrêt rapporté par Boniface, rom." l , liv. 8, tit.
7, chap. 2., qui adjugea le retratt à la femme.
122.
0 Ù RNA
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PAI:A'I.S
DE
12
PROVENCE.
3
Le fiéur l.aurenzi a déclaré formellement qu'il n'exerçoit pas le retrait pour lui, mai.s pour fa fe~~e; il ~
pris en tout, & dans toutes les pleces, ,~a quallte de m~n
& maitre; l'aae interpellatif annonce qu Il ne veut retraire
que pour fa femme, icelle coufine germaine .du fieur Teftel; lorfqu'il s'agit du ferment, c'eH le man & la femme
qui fupplient enfemble" & la femme le prête;. c'ell: enfin
fous la qualité de mari, & par conféquenc toujours pour
la femme, que le mari agit & demande la révendication.
On n'a nul intérêt d'examiner, fi le mari retenant en qualité de mari & maitre, ell: plutôt cenfé retenir pour luique pour là femme, & fi le mot mari & maÎtre ne défigne feulement que l'alliance du mari, ou qu'il exerce une
aaion .compétence à fa femme. Le fieur Laurenzi a formellement déclaré qu'il retenoit pour fa femme, & qu'en
acquérant il entendoit acquérir pour elle.
Il ell: de principe que le fonds acquis des deniers de la
dot n'ell: point dotal; de même auffi le fonds acquis par
la femme, quoique des deniers du mari, ne doit appartenir qu'à la femme. Or, dès que dans l'un il n'y a pas
fubrogation de prix à la chofe, dans l'autre elle ne s'y
trouve pas non plus, & par conféquent le tirre de pro.priéré ne réfide jamais que fur la rêre de celui au nom
duquel l'acquifition a été faite, fauf à ,:elui qui a fourni
les deniers, d'en êrre créancier précaire ou privilégié;
mais il ne fera jamais que créancier, & l'Arrêt de Boniface
l'a formellemenr jugé.
La Déclararion de r 770 n'a fait que confirmer l'idée
où l'on étoit déja, que les alliés étoient exclus du rerrair;
mais l'exclufion qu'elle peut avoir prononcé contre le mari
~n cas de vence de la part de la femme, ne s'efi pas
erendue cO,ntre la femme elle-même; il faudroit, quant à
ce, une derogarion expre/fe à notre Sratur, pour priver la
femme d'un droit acquis à rout ciroyen; il faudroit qu'elle
fÎlt fondée fur cela feul qu'elle s'eft mar~ée. Cette loi ne
pro~once l'exclu!ion ~lIe dans· le feul & unique cas où le
man a vendu; elle ladre donc tout autre cas dans le droit
(;OmmUD.
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Quoique ce ne foit pas lé fieur Tell:el qui' àit vendu;
mais la maire de (es créanciers (continuoit-on) la Dame
Laurenzi doit être admire au retrait. La maire exerce
les aaions de -(on débiteur, & vend (es biens; le retrait
compere donc aux parens. La maire vendant _comme -exer.
çant les droits & les aaions du fieur Teilel, il en ell:
tout de même que fi le fieur Teilel avoit vendu perfonne Ile ment. Il ell: de maxime que lors même qu'il y a difcullion qui équivaut la déconfiture ré(ulrante de la faillite,
quoique le débiteur foit dépouillé de l'exercice de fes actions, fes biens ne font pas devenus propres à (es créan.
ciers, au point qu'en vendant, le retrait ne compete pas
à (es parens; ainli la maire, le curateur ad Dona, le tureur, font en poirellion & -ne poiredent pas; ils ont, fi
l'on veut, les aaions du tiers, mais le rirre de la pro~
priété de fes biens n'eil point radiq'Jé fur leur tête.
, Si l'acheteur, qui ell: cellionnaire du droit de prélation,
-l'emporte fur le retrayant lignager, ce n'eil qu'autatlt qu'il
a réuni (on double titre avant que le lignager ait déclaré
fa volonté, ~ fe (oie mis en droit d'exercer le rerrair; mais
fi ce rerrait eil intenré avant l'obtention de la cellion, la
demande en retrait empêche la jonaion des deux extrêmes
qui l'excluroienr; & comme le droit ~ll: acquis du moment
que la demande en retrait eU intentée, dès cet- inUant le
retrayant ell: entré in loeum emptoris; il eil cen(é inveUi,
quoique l'acheteur ne lui ait pas fait la défempararion, &
alors la qualité d'acheteur fe trouvant éclipfée par la demande en rerrait, l'acheteur ne reile plus qu'avec la qualiré de ceffionnaire, qui de notoriéré ne lui donne pas la
préférence fur le Iignager. Ce principe ell: attell:é par Bonllet, lett. R. fomm. 1, & con(acré par les Arrêts du 18
Avril 1741, rendus au rapport de Mr. d'Antoine, & du
23 Mars 1763, au rapport de Mr. de Bouraffi, au profit
des fieurs Jean d'Eiguieres, éontre le fieur Richard, ceffionnaire du Seigneur.
On répondoit pour le fieur de Leglife, que la DécIara~
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE;
):2.~,
lion du 4 Avril 1770 exclut le fieur,Laurenzi dù _retrait,
attendu qu'il n'dl: ,qu'allié du vendeur; le-'.lJlasi, qui exerce
le retrait e.n qualité de mari & maltre, n'ell: pas cenfé
l'exercer pOLIr & au nom de fa femme, fuivan't Pallour;
de jure emphyteutico, lib. 6, tit. 8; 'Iainfi jugé par Arrêt
du 2.3 Décembre 1776, à "l'audience des pauvres; au-erement on ferait fraude à la loi, qui exclut le mari du retrait, parce qu'après la di{folution du mariage, le mari
pourroie garder le bien en refiituant les deniers dotaux;
jl' eil:" de principe que emptum ex pecuniâ dotali non ejl dotale; ita Duperier, Buiffon & Fromental.
f
Toute femme mariée qui n'a poine de biens paraphernaux, ne peue. pas aujourd'hui profiter du bénéfice ,du Sra~
tut; c'ell par cairon d'intérêt public que l'on a prohibé le
retrait au mari; il faue donc auffi en priver la femme,
afin que le même bien qu'elle pouvait retenir, ne paffe
pas fur la tête du mari en -fraude de la Ibi; plJifque, fuivanr Mourgues" pag. 12.2., ,les femmes mjlriées fQne exclues du retrait, fi elles n'one des biens avenrjfs., La Décla;
ration de 1770 veut que le mari ne puiffe pas intenter le
retrait fur les biens aliénés par les parens de fa femme,
done il n'ell qu'allié, & qu'il pourra néanmoins l'exerter
fur les biens que fa femme aura vendu, comme la femme
fur les biens aliénés pa'r lê mâri ,'fi elle a des biens aventifs.
• D'ailleurs la vente a été faite par la maffe, & la maffe
n'a point dé parenrs; elle avoit. été irivellie nudo confenfu;
elle écoit devenue propriétaire des biens du fieur. TeHel
ipfo f 9 ; c'eft.: elle, qui venda ne ,'a trai~~ avec le fitur
de Leglife; or, dès que ce n'eil: pas "le fieur Telle! qui
a vendu, ·le retrait ne peut 'point être exercé i-Ie- fieur de
Leg1ife réunie encOte en fa faveur la ceffion du. droie de
prélation qu'il a rapportée de la part du Chapitre de St:
Viél:or; & il efi de maxime que l'acheteur, qui ell rout
à la fois ceffionnaire du dréit de prélarion, l'emporte fur
le retrayant; le fieur de Leglire n'avoir été que fommé de
)a part dn fieur Laur..enzi, ,de lui défemparer le fonds vendu:
or une r0!Umarion n'interrompt pa~ la prefcript!on; c'eft
aa
�126
Jou II.
N
AL.
r
un a8:e inutil:e, & dans ce cas il a é.té permis au fieur
de Leglife de rapporter utilement la cellion du droit de
prélation•.
. Les offres faites par le fieur Laurenzi ne font point farisfa8:oires (c;ontinuoit le lieur de Leglife) puifqu'il ne fe
foumet pas à faire' décharger le· fieur de Leglife des obli~
garions qu'il avoir' connraél:ées pour les 3400 liv. qu'il avoit
en main; & il eft de principe que l'acheteur dehet ahire
indemnis, & qu'en le dépouillant, il ne fam pas l'expofer
aux coups du vendeur; au furplus, l'inventaire domeftique
fait 11 la mort de la mere de la Dame Laurenzi, dont
le montant s'éleve 11 plus de 10000 livres, ne fait pas
foi; on y fait mention de billets dont on ne donne point
de détail, & l'inventaire n'a été contrôlé que depuis la
Sentence rendue fur la demande en retrait..
Arrêt du 23 Avril 1777, au rapport de Mr. le Confeiller
de Routret, qui réforme la Sentence, accorde le rerrait,
& condamne le fieur de Leglife aux dépens. Ecrivant Mes.
Pafcalis & ......
ARR Ê T
X V J.
La femme étant mariée fous une conflitution générale, la
prefcription lie court pas contr'ale
raifon d'un fupplément de légitime, & le mari n'efl refPonfahle qu'autant
qu'il aurait négligé la pourfuite d'un droit connu.
a
.
)
Ean Beralld', Cardeur 1t laine' du lieu de Jouques, par
fon teftametlt du 9 Février 1727, légua soo liv. 11
Marie Beraud fa fille, & inllirua Jean Beraud fon fils, fon
héritier; il mourut le S Mars fuivant. Le 21 Novembre
1741 , Marie Beraud fe maria avec Mongés, du lieu de
Peirolles ; .fa mere lui confl'ièua en 1 dot la fomme de 12.00
liv. , [avoir 600 liv. du chef de fon pere & 600 liv. de fon chef.
;La mere de Marie Beraud moyt;!"t en J 77 ~, & Mangés mouru t
J
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Jou II.
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un a8:e inutil:e, & dans ce cas il a é.té permis au fieur
de Leglife de rapporter utilement la cellion du droit de
prélation•.
. Les offres faites par le fieur Laurenzi ne font point farisfa8:oires (c;ontinuoit le lieur de Leglife) puifqu'il ne fe
foumet pas à faire' décharger le· fieur de Leglife des obli~
garions qu'il avoir' connraél:ées pour les 3400 liv. qu'il avoit
en main; & il eft de principe que l'acheteur dehet ahire
indemnis, & qu'en le dépouillant, il ne fam pas l'expofer
aux coups du vendeur; au furplus, l'inventaire domeftique
fait 11 la mort de la mere de la Dame Laurenzi, dont
le montant s'éleve 11 plus de 10000 livres, ne fait pas
foi; on y fait mention de billets dont on ne donne point
de détail, & l'inventaire n'a été contrôlé que depuis la
Sentence rendue fur la demande en retrait..
Arrêt du 23 Avril 1777, au rapport de Mr. le Confeiller
de Routret, qui réforme la Sentence, accorde le rerrait,
& condamne le fieur de Leglife aux dépens. Ecrivant Mes.
Pafcalis & ......
ARR Ê T
X V J.
La femme étant mariée fous une conflitution générale, la
prefcription lie court pas contr'ale
raifon d'un fupplément de légitime, & le mari n'efl refPonfahle qu'autant
qu'il aurait négligé la pourfuite d'un droit connu.
a
.
)
Ean Beralld', Cardeur 1t laine' du lieu de Jouques, par
fon teftametlt du 9 Février 1727, légua soo liv. 11
Marie Beraud fa fille, & inllirua Jean Beraud fon fils, fon
héritier; il mourut le S Mars fuivant. Le 21 Novembre
1741 , Marie Beraud fe maria avec Mongés, du lieu de
Peirolles ; .fa mere lui confl'ièua en 1 dot la fomme de 12.00
liv. , [avoir 600 liv. du chef de fon pere & 600 liv. de fon chef.
;La mere de Marie Beraud moyt;!"t en J 77 ~, & Mangés mouru t
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à li m~me époque. Le 2.7 D&erribre,'i77.'î i ~ Marie'Beramt
fit affigner fOR frere en paiement du. fupp'lérn(lnt de légi.
rime fur les biens de fes' pere &: mere; le frere répon~
dic que fa fœut était mal fondée, & il opp'Dfa de plus la
ptefcription. Le 8 Mars 1776, S'entence arbitrale qui, fans
s'arrêter aux exceptions de ,Beraud, ordonna qu'avant dire
droit, fa {œur donnerait parcelle 'de compofition des deulC
fucceffions. Appel de la part de Beraud. '
.
On diCoit pour lui, que la preCcription des biens dotaux pe'
colirt pas pendant la durée du mariage, mais que celle' des
droirs & des actions court au profit des débireurs , non contre
la femme qui ne peut agir, mais c'Dntre le mari qui y a
donné lieu par fa négligence, Cauf à la femme, fi fan mari
inColl'able, d'agir contre le débiteur, qui dans ce cas
ne peut plas oppoCer la preCcription.
Comme parmi les droits de la femme il peut en être
qui foient inconnus au mari, on' a ,établi que dans ce cai
la preCcriptioIl ne courrait, ni ,contre elle, ni cQntte' ciE!
mari. Il, (ln elfentiel d'obferver que cette maxime a étl!
établie contre la pureté, du droit, fuival1t laql:lelle l'ignorance n'a jamais été un obilacle à la, prefcriptiori d'e 3t>o
ans,. Leg. fielit, cod. de prttfcript. /1'0' allnor. Celte eXGep'"
tion n'eut donc été d'-a-uGun recours à laTeinme ,elle-même; fr
elle ne f~ fût pas mariée; or, le ma'ri eil ndA' feulemem 'fon
procureur, il eG: mahre de la dot, dominus dotis. La 1 pr(!f.
cription devrait donc courir, contre la femme qu'il repré:fente, ou au moins contre lui, fans diG:inél:ion des droits
é6nnils ou ihconnus.,' Elle ne court pasri cependaQ,t -pOlit' les>
droits inconnus; mais' del~ 'au; moinS aIl peut ccnl;lufe>
que ce privilege contraire au ,droit cqmmtm.
.pe'u, fa-)
vorable, & qu'il doit être 're~reinr préciférnent"llahs le tàs>
d'un droit abfolument inconnu.
G'eG: encme contre hi pureté du droit, & par upe 1ul'ifprudeftce qui fiOUs ;èfi"pattiizuliere, que ,l~on a "do1itié là1
la ferrirrië', uh' retourS' contre' "le débiteur én 4>as 'd'inlbl'
vabilitê -du, mài:i. Quel.que 'étrange que. foü -ce pri.vilege,
il eU du-moins cercain que fes deoits écatit par ce moyen:
en
en:
�J .0
IJ 2.8
U R.~N A L ,
("
toujours à l'abri, l'intérêt de' la dot el!: toujours égalè-"
ment fauvé; il Y a même plus, puifque par-là on donne à
la femme deux débiteurs au lieu d'un.
En convenant Jque .le mari n'el!: 'pas refponfable de la
prefcriprion des' droits inconnus, il faut exan,iner fi l'on
peut ranger dans cecce cla1fe celui dont il s'agit. Tout ,enfant a une légitime >.t prendre fur les biens ·de fes parens.
Cetce légitime' el!: une portion fixée par la loi, qu'aucune
difpofition du pere ne peut diminuer. Quelque fpmme qu'il
ait reçu pour cet objet, fi cette fomme ne remplit pas
fes droits, rien ne peue le priver du fupplémenc qUÎ lui
el!: encore dÎl. En fuppofant qu'il foie,dÎl un fupplémenc à fa
femme, 1 Mangés a donc connu le droit qu'il avait de le
demander; il el!: donc refponfable de ne l'av.oir pas demandé.
, ,Le mari devemi, par de contrat de mariage, ma1tre des
biens & droits dotaux, db devenu par cela même adminiftrateur it)tére1fé ,parce qu'il-fait les fruits fiens : adm.inifirateur forcé·;.<parce. que fa -femme dépouillée. par la .confiitutiollgénérale ,1 n'a plus ni droit' ni 'aaion, & quel la procuration,
comme le mand'lt , libre dans fan origioe , devient, par l'accept.ation .du EroJ:nr.eur, forcée dans, [6n exécutio)J: initia
valuo.tatis, p: pojJ faao. llecejJit~tis: Or, comme adnîinillrll-.
ceur ,r&rfurr..fo\lt'H;o.mme.adQlinil!:rateu; inrére1fé, le mari dl,
tï:n\l' de prenôrll ·foin 'de~' biens de' fa femme, d'apporter à·
cecce .adminifiration le même foin qu'à fes altàires propres.
La loi le déclare refponfable, l10n feulement de ce qu'il peue
aVQir fait ,Far d.ol, .mais ej1co;re ~de ce quli] peut avoir omis
de ,f~ire pa!r.rnégligeuc.e :.• in ·re{;it/ dotali/;us Viru/J/. prœJlare.
0JÙl.O~t§l, t:'âm do.lurn :'lllflm c/llpafll" tjuia, causâ suâ .doum aceepit, frd éfitl[Ji; diliggutiami'p.rajlfl,bitJfjuain 'rebus fuis adhibet;
L. 17, JE de jure dot.
,'h.• _ .•
,
_ Le, premier_.deYQir de cer'te. admioiijration .c'el!: de veiller
:lJ.l ~liecojJvreinwit ·des drQir,sIJI;!:ot,lllX.;lft k mari .Ie :négljge:,.
1'4yant ,Pli. fair~, jLetiJ.'d'el11.fÎur~'Je(pQnfable·: ii 'l0'! peâait
n;zaritus., telle~itwrll1ljusl cuJp~ nomme, Ji dos,lexigi potu~rit., L.
la ,,§.
Jf.de 'Paa~ dotal. . 't
.,
•
'
Q.ùaqd
2.,
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PAL AIS
DE
PRO VEN C E.
I2.9
Quand le droit el1: abfolument inconnu, le mari n'el1: tenu
de rien, parce qu'il n'y a pas de négligence là où il y a impoffibilité d'agir; mais quand le droit el1: cettain & connu,
quand il ne s'agit que d'examiner en fait s'il el1: fondé,
l'inaétion du mari n'dl: alors qu'un effet d~ fa négligence;
fa femme, fi elle avait pu agir, n'aurait pas re!l:é dans
cette inaétion ; il fe fut Ipi-même conduit différemment pOUr
fes propres intérêts. I! doit donc en être refponfable.
Si la veuve Mangés avait été libre d'agir, fans doute elle
n'aurait pas manqué d'examiner fi ,ce qu'elle avait re<;u, remplilfoit ce qui lui écoit dû. SOl1' 'mari fe trouvant dans le
même cas, réduit à une légitime, n'Jurait pas manqué de
faire le même examen. Ce'lui qui ignore la conGl1:ance des
biens, ne manque pas de s'en inl1:ruire; s'il néglige de le
fàire, ce ne peut être que parce qu'il préfere fa tranquillité
aux foins pénibles d'une vérification incertaine; mais cette.
préférence fuppofe un facrifice, & le mari, fimple adminiftrateur, n'a aucun pouvoir fur la difpofition des biens fonds :,
loin d'abandonner les droits de [a femme, il e{l: obligé de
les faire valoir. Pourquoi la Loi lui aurait-elle çléféré u!\
pouvoir auffi étendu, fans l'obliger de prendre en coute oc-.
cafion le parti que l'intérêt de fa femme pe\lt exiger? Si
les [oins qu'il el1: fournis de donner, l'obligent ~ des avances,
il ne peut refufer de les faire, fait p~rce que jouilfant des
fruits, il doit veiller à [es fr'lis à la confervation de la dot.,
Tuai res dotales vir [ua [umptu depw; L. 4S , if. de impenf..
in rem dot. fac?; fait parce qu'il e{l: affilré de recouvrer des
débiteurs ces avances en cas de réuffite, ou de fa femme même
en cas de fuccombance; parce que fi, comme l'ont jugé
les Arrêts rapportés par Boniface, corn. 4, pag. 370 , 'lè
mari doit [upporter les dépens des conrel1:ations vifiblemen~
injul1:es ou déplacées, celle-ci doit au contraire l'en indemnifer, quand l'aétion étojt apparente dans fan principe. Ita
Defpeilfes , tir. de la dor, [e8:. 3,
7 S , §. 3.
I! e{l: donc certain que quand on dit que la prefcription n~
court point à l'égard des draies inconnus au mari, on n'a
pu entendre par-là que les QtQits dont il n'avqit abfoluqJeClç
n.
Armùs l77S & [uiv.
F.
�130
JOURNAL
aucune connoiifance, & non ceux à l'égard deCquels il con':
noiifoit le droit en lui-même, quoiqu'il ne connCu pas encore les faits nécelfaires pour juger fi ces droits étaient
fondés; parce qu'il n~ tiene qu'à lui de les connohre, &
que rout l'oblige à fe donner, pour l'ineérêt de fa femme,
des foins qu'il ne manquerait pas de fe donner pour fan propre intérêt. Lorfque les Arrêts ont jugé d'un côté que le mari
n'éroit pas tenu d'exercer les aél:ions refcifoires de la femme,
de l'autre ils ont expreffément jugé qu'il était tenu de pourfuivre le fupplément de léllitime qu'elle pouvait avoir à prétendre, fous peine d'en répondre en leur propre. Boniface
en rapporte deux Arrêts au tome 4, pag. 3 69, & au rom. 5 ,
pag. 197 ; Catelan, liv. 4, chap. 45 , en rapporte un
autre.
Au furplus, ajouroit-on, fallût-il prouver dans le mari
une connoiifance précife du fupplément qu'il a laiffé pref. crire , la preuve éroit route faite, puifqu'elle réfulroit des
cene livres de fupplémene reçues par la femme à l'époque
de fan mariage. En effet, ou ces cent livres ont été données·
en connoiifance de caufe, & après due vérification, ou elles
n'ont été qu'à compte d'un plus grand fupplément. Au premier cas, on a donc vérifié à cette époque qu'il n'éroit dû
à la femme que fix cent livres; elle ne peue donc plus
rien demander aujourd'hui. Au fecond, cet à-compte fuppofoit de plus gr<;nds droits ; le mari a donc été inf!:ruit &
averti de l'exif!:ence de ces droits; il eft inexcufable de ne
les avoir pas pourfuivis.
On répondait que c'eft une maxime en Provencè que là
prefcription des droits dotaux ne court .poinr au profit du
débiteur, lorfque le mari n'ef!: pas coupable 'd'avoir négligé
de les faire valoir; l'on n'y doute point auŒ que Je ma·ri
n'ef!: coupable de négligence qu'aut.anr qu'il a connu le droit
de fa femme, & que ce droit était certain & réel ; de
maniere qu'il pourrait l'exiger fans peine & fans aucune forte
de rifque. La loi fi fundum, ff. de fundo dotali, ne parle en
effet ni d'une recherche à faire, ni d'une conref!:ation à élever ; elle parle d'un fonds conf!:itué en dot, & par confé-
�DU
PALAIS
Dl!
P-ROVENCi!.
13'1
quent d'un droit connu au mari, comme le dit Duperier
dans [es maximes; la négligence du mari au cas de la loi
écoit formelle; il devait donc en être refponfable vis-à· vis
fan épou[e, & par conféquent le détenteur. du fonds étoit
à l'abri de ioute recherche. Il n'ef!:' pas poffible de raifonner de même, lorfque le droit réclamé par la femme après
la féparation de biens, on après la dilTolution· du mariage,
n'avoit pas été confiieué én dot. On juge au contraire que
le mari n'efi point coupable de négligence,' par cela feul
que la loi ne Pinculpe & ne le rend refponfable qu'au [eul
cas où la réalité du droit efl: confl:atée par fon ·contrat de
marIage.
Il en vrai que le mari peur être confiieué en demeure, fi
le droit n'érant pas exprimé dans le contrat, il en connaît
d'ailleurs l'exifl:ence & la réalité; mais à cet effet il faut
une preuve claire, lumineufe, fol ide , & telle, en nn mot,
que celle qui réfulte de l'expreffion du droit dans la confiitution
dotale. Ces principes ont été adoptés par les deux Arrêts
rapportés par Boniface, tom. 4, pag. 369, & tom. 5 , pag.
197·
En fait, le mari efl: cenfé avoir ignoré que le fupplément
dont s'agit fût dû à fon époufe, parce qu'il n'écoÏt poine
exprimé dans le contrat de mariage; les cent livres ne furent données ni pour entier fupplément, ni à compte d'un
plus grand fupplément; l'aél:e ne parle ni de légitime ni de
fupplément. Or, il n'efl: pas permis de donner aux aél:es une
extenûon au delà des termes dans lefquels ils font conçus.
Les lrois Arrêts rapportés par Boniface & par Catelan n'one
pas jugé contre la maxime, qui veut que nulle prefcription
n'ait lieu, quand il s'agit d'un droit qui pouvoit être ignoré
par le mari.
Arrêt du 29 Avril 1777' au rapport de Mr. le Confeiller
de la Beaume, qui confirme la Sentence, avec dépens. Ecri,
vaut Mes. Efl:rivier & Dubreuil cadet.
�JOURNAL
ARRÊT
XVII.
-Dans les ajJignations données au domicile élu, les délais doi·
vent être réglès d'apres le domicile réel, même pardevant
les Tribunaux Confùlaires.
Le commandement peut-il être fait au domicile élu?
L'empri[onnement doit être caffi, s'il efl fait contre la -di/po.
jùion de l'Ordonnance, fi toutes les formalités n'y [ont pas
remplies.
Sur le privilege prétendu par les HuiJIiers Royaux, en force .de
leurs provifions , d'exploiter dans tout le Royaume.
L'Huiffier procédant -a une faifie de marchandifes doit en faire
le détail dans [on verbal.L'Hui(Jier requis par la partie efl-il tenu de la garantie il raifon
d'une nullité opérée par le défaut de pouvoir de l'Huilfier ?
L
E Geur Solliers, Marchand de la ville diApt, fit, au nom
de la (ociété de Solliers & [œur, un- billet aux fleurs
G.uerin pere & fils de la (omme de 48 S3 lilT., payable à
leur ordre dans le domicile des fleurs Bochard & Vaillant,
Négocians à Lyon. A l'échéance, on obtint une condamna~
lion à la Gonfervation de Lyon contre les Geu~s Solliers
& fœur, avec contrainte par corps; on fit emprifonner la
DlIe. Solliers le 7 Août 1776 à neuf heures du (oir dans
une rue de la ville d'Apt. Le lendemain elle fut refermée
à la requête des fieurs Julien, Négoci'ans d'Aix, qui firent
procéder le même jour à la faifie de (es marchandifes. Les
fleurs Conflans & Pilot les firent relfaifir, & le 13 du même
moi~ Je fleur Solliers obtint de la Cour un Arrêt ponant
permiiliùn de livrer les marchandifes aux lieurs ConHans
&. Pilot. Le 20, la Dlle. Solliers forma oppofirion à cet
Arrêt, en demanda la révocation, & cependant un [Out en
ét~t qui lui fut accordé; par une requête incidente elle appella des Sentences en vertu defquelles on avait exécuté (ur
fa perfonne & fur fes biens; cet appel fut réglé; elle de~
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NeE.
133
manda enfuite la caIfation de l'emprifonnement, des failies,
& la -révocation de l'Arrêc fur requête qui permettoit provifoiremenr la vente des marchandifes; l'Huiffier fut appellé
en garantIe.
On difoit pour la Dlle. Solliers, que le billet fait à Apt,
payable à Lyon le 12. Juin 1776, au domicile des lieurs Bochard & Vaillant, avoit été protefté le 2.0; le 1') J·Jillet il
y eut une Sentence concre la Dlle. Solliers qui rélidoit à
Apt, à cinquante lieues de Lyon, & qui fuc définitivement
condamnée avant l'expiration du. premier délai légitime qui
eût dû lui être accordé, & avant qu'on eût pu prendre un
premier défaur.
On obferve, dans les J urifdiél:ions Contulaires, comme dans
toutes les autres, la diftance des lieux; le procès-verbal de
l'Ordonnance de 1667, pag. 102. & lOS, le prouve. L'obligation de payer à Lyon fondoit la JL1tifdiétion de la Confervation, à ralfon du choix que le demandeur a dans ces
matieres d'affigner au lieu où la promeIfe a éré faite, ou à
celui où la marchandife a écé fournie, ou à celui où le paiement doit être fait; mais cette obligation n'autorifoit pas
à abréger les délais.
Le Réglement de la Cour de 1672. porte, que fi l'affignati.on eft donnée à un domicile élu, le délai fera réglé
fuivant la diHance du véritable domicile de la partie affignée. En vain dirait-on que cette Loi ne lioit point I~s
lieurs ConHans & Pilot; ce n'eft pas fur un ufage particulier aux Tribunaux de la Province que le Réglement dl:
fondé; il a pour bafe l'Ordonnance de 1667, qui, au titre
des dtlais, a toujours en vue, non le domicile élu des parties, mais leur rélidence, & qui regle les délais felon la
diftance des lieux où les défendeurs demeurent. On peut
avoir au domicile élu quelqu'un qui re<;oive les affignations j
mais il faut lui donner le temps de les faire parvenir au
véritable domicile, à la réfidence de la perfonne affignée,
à moins que la Jurifdiél:ion à Lyon n'eût à cet égard un
privilege particulier. La Sentence en vertu de laquelle la
Dlle. Solliers a été emprifonnée el!: donc évidemment ~~I!e i
�134
Jou RNA L
pour avoir été rendue avant les délais néceifaires. Ita Denifart, va. ajournement, n. 19.
La Dlle. Solliers a été arrêtée fans aucune fignification
de la Sentence, & fans aucun commande'ment préalable.
En point de droit, une fignification & un commandement
de payer dans un domicile élu ne font point fuffifans puur
conHituer en demeure & aurorifer des exécutions perfonnelles. En point de fait, y avoit-il ici une éleaion de domicile fuffifante ? Les Ordonnances & les Auteurs difent tous
que le commandement doit être fait à partie ou domicile:
mais on doit entendre par-là le véritable domicile, & non
le domicile élu, parce que celui-là n'eft pas, à proprement
parler, le domicile de la partie; c'eH feulement un lieu de
choix iluquel elle confent d'être· affi~née & pourfuivie; mais
POUt rout ce qui doit entrainer une exécution contr'elle, il
[alH aller. la chercher dans fan vrai domicile. C'eft pour cela·
que l'arr. la de l'Ordonnance de 1667, au titre de la contrainte par corps, prefcrit de lignifier à la perfonne ou au
domicile de la panie; c'eft pour cela qu'il eH établi que la
fignification au Procureur n'emporte aucune exécution ultérieure contre la partie, qu'on ne lui ait fait à elle-même en perfonne ou dans fon domicile lignification ou commandement. Un
domicile élu ne peU! certainement pas avoir plus de privilege
que le domicile' du Procureur ad lites, où rélide l'homme
en qui on a mis fa confiance, & que l'on a conllitué le
maîtr~ de fa caufe. Le domicile élu n'eft que celui que l'on
a indiqué pour l'exécution d'un contrat, & quelquefois pour
la confèaion d'une procédure & la pourfuite d'un procès. Les
affignations données dans ce domicile, les fignifications qui
y feront faites pour l'inHruaion, feront valables, pourvu
qu'on accorde le délai néce1Taire fuivant la diftance des lieux;
mais lorfque le jugement eft obtenu, lor[qu'il faut aller exécurer au domicile réel.& y chercher le débiteur, pourquoi
fignifier & commander au domicile élu? Ce ne pEiut être·
que dans un objet de fraude, pour dérober à la partie la
connoi1Tance des adjudications rapportées contr'elle, & l'exé~
CUter fans qu'elle -connoiife la condamnation.
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Nell:
13 ')
Le commandement fait à un coobligé /olidaire n'autoriferoit pas la faiue des biens, & moins encore celle de la
perfonne de l'autre coobligé non commandé. Il faut, dit
le Praticien des Juges-Confuls, ]iv. 4-, chap. 3, pag. 4)6,
que le faifi foit averti & mis effec7ivement en demeure par
un exploit fait en parlant- à fa perfonne oa
fon domiâle.
Que fera-ce donc du commandement fait à un domicile élu"
bien plus aifé à dérober que celui fait à un a/focié folidaire, qui a un intérêt bien plus vif, bien plus pre/fant que
les mandataires que l'on peut fuppofer réfidans au domicile
élu? _
Ce fut à neuf heures du foir que la Dlle. Solliers fut arrêtée. Le principe des Loix Romaines, folis occafils fuprema
tempefias efio, efl: néanmoins généralement adopté. On' fufpend après le foleil couché route exécution qui n'a pas la
pourfuite du crime pour objet. Le voile de la nuit en encore plus refpeété que les foyers du citoyen; fi on -ne peut
arrêter perfonne dans fa maifon, on peut encore moins arrêter dans les rues, lorfque le foleil n'éclaire plus. Arrêter
dans la maifon n'eH qu'un attentat à la liberté particuliere.
Arrêter dans les rues pendant la nuit, c'eH violer la fÎlreté
& la tranquillité publique; c'efl: troubler l'ordre qui ne peut
tolérer des exécutions noéturnes que pour des cas extraordinaires. ( Praticien des Juges-Confuls, pag. 347. )
Il en vrai que la Confervation de Lyon a le privilège
de forcer l'afyle que chaque citoyen devroit trouver dans
fa maifon. Un Edit du mois d'Août 1714 le lui attribue;
il a déclaré les jugemens émanés de ce Tribunal exécutoires
par tout le Royaume, même dans les maifons; mais la dérogation à la regle générale n'a pas porré fur l'heure indue.
T ouces les fois qu'il n'y a pas fufpicion de fuite, quel rifque
court le créancier d'attendre au lendemain le moment où
le foleil édairera l'aéte de juHice qu'il fe propofe d'exercer?
Ç'a été là le principe de l'Arrêt de Réglemetit du Parlement
de Paris de 1702., qui fait défenfes d'arrêter les particuliers
dans leurs maifons à heure indue, & de les arrêter même de
j.our fans permiffion du Juge. pe forte que le Juge ne peut per~
a
�136
Jou
RNA L
mettre d'arrérer dans les maifons qu'à heure non indue. C'efi:
la remarque de Denifarr, au mot prifan , n. I l . Son pouvoir
ne va pas jufqu'à permettre d'y entrer la nuit. L'Edit de
1714 n'ell pour la Jurifdiél:ion de Lyon qu'une permiffion
générale qui difpenfe de celle qu'il auroit fallu rapporter de
chaque Juge pour arrêter dans les maifons. Certe Loi, en
difpenfant fur cet objet, n'a rien fiatué fur l'autre; elle
l'a laiffé par conféquent dans les termes du droit commun,
& n'a pas étendu les privileges de la Jurifdiétion de Lyon
au delà des bornes prefcrites aux Juges, même dans les
décrets forcés; cette extenfion aurait d'ailleurs donné liea
à bien plus d'abus, qu'elle n'aurait pu fournir d'utilité. Point
de néceffité d'arrêter à neuf heures du fair quelqu'un que
l'on pourra arrêter le lendemain à midi dans fa mairon. Aina
lettre de la Loi, elprit de la Loi, tout s'éleve contre l'em~
prifonnemenr fdit à neuf heures.
Les privileges extraordinaires accordés au Tribunal" de
Lyon orft toujours été maintenus comme favorables au commerce; mais ils ont été refireints avec encore plus de foin,
comme trop contraires à la liberté & aux principes géné~
raux qui régiffent le Royaume dans cette matiere. Delà l'on
. juge conltamme~t au Confeil & au Parlement de Paris,
Juge du reffort de la Confervation de Lyon, que le droit
qu'ont les porteurs de ces Sentences de forcer les maifons,
n'exiGe que dans les cas 011 il s'agit d'un paiement promis
en foire de Lyon. Les quatre foires de cette ville ont dé~
terminé le tirre & les privileges de la Confervation. Quand
il s'agit d'autre chofe, la Confervation n'dt plus qu'une Jurifdiél:ion Confulaire ordinaire, prononçant avec contrainte
par corps, mais f,ms cette exécution violente que le refpeél:
du domicile n'arrêre pas. C'e!l: ce qu'atte!l:e Denifart, va.
Confervation de Lyon.
ea
En matiere d'emprifonnement, tout
de rigueur ( conrinuoit la Dlle. Solliers ); Denifart cite fous ce mot des
Arrêts qui ont calTé des procès-verbaux de capture fur des
erreurs de date du titre en vertu duquel ils étaient faits,
ou du commandement qui les avoit précédés i à plus forte
"
raifon
�D U
PAL AIS D E PRO VEN C E.
137
raifon doit-on caJrer le procès-verbal où l'HuilIier ne déclare
fa qualité que d'une maniere imparfaite & frauduleu[e. Heraud s'dl déclaré premier HuilIier audiencier reçu au Siege
d'Aix, tandis qu'il n'e!!: premier HuilIier audiencier qu'en
l'Hôtel·de-Ville & Communauté de Saine-Cannat. Aux termes de l'Ordonnance, il ne fuffit pas que l'HuilIier ait le
pouvior d'exploiter dans le lieu où il fe porte; il faut encore, à peine de nullité, qu'il faJre mention de ce pouvoir ;
c'eCl: pour cela qu'il e!!: fournis à déclarer fon immatriculation. L'immatriculation dans le reffort lui donne pouvoir
& caraétere; mais lorfqu'il fe port-e hors de ce reffort, la
déclaration de [a matricule ne [ert plus qu'à connaler qu'il
e!!: [ans pouvoir & fans caraétere. S'il a un' privilege particulier, il doit le déclarer, & le défaut de déclaration emporte la même nullité que l'omilIion de la matricule.
Il n'y a prefque point d'HuilIier qui ne prétende au droie
d'exploiter par tOut le Royaume, foit en vertu de [es. provinons, où. il n'eH que trop facile de faire gliffer une àlUfe
à ce fujet, fait en force d'un titre plus refpeétable, quoique
bannaI, les Edits de criation d'Offices; mais la Cour n'a jamais reconnu ce privilege, qui tendroit à confondre tous les
poJreJreurs d'office diHinétement créés en un certain nombre
pour chaque Tribunal. Delà beaucoup d'Arrêts de Réglement qui enjoignent à tous les HuilIiers exploitant dans: toue
le Royaume de fe renfermer dans ce qui a trait à la Ju:rifdiétion à laquelle ils font attachés; il Y en a un du 29
Mars 1623 qui fe rapporte même à d'aneérieurs; il a été
fuivi d'autres en 1628, 1632 & 1684.
En 1699 le nommé Gilly, qui par la création de fon
office de premier Huiffier de la Communauté de Marfeille
avait le droir d'exploiter par tout le Royaume, fur re!!:reine
·aux m.andemens d.e Police, & défenfes lui furent faites, ainli
qu'à touS autres, de contrevenir à l'Arrêt de Régl~ment de
1684' Le 27 Juin '724 Arrêt qui vifant touS les anciens
Arrêts, défend aux. Huiffiers de l'Amirauté & de la Police
de Marreille d'exploiter aucuns mandemens que ceux de leur
lurifdiétions. E.nfin· le 15 Février 1771 Mr. le Procureur"!
,Anrlùs 1775 & [uiv,
S.
�t
3S
Jou
RNA L
-Général frappé de l'abus par lequel les Huiffiers exploitant
par rout le Royaume ufurpoient les fonél:ions refferrées aux:
HuilIiers attachés au fervice des Tribunaux, requit la Cour
d'y pourvoir par un' Réglement; & en conféquence il fut
enjoint aux HuifIiers -& Sergens foi-difanr exploitans dans
tout le Royaume, de fe retirer clans huit jours aux villes
& lieux où ils ont été établis, pour y exercer les fonél:ions
de leurs charges, à peine de 3000 IiI'. d'amende & d'en
être informé j fait inhibitipns & défenfes, fous les mêmes
peiues, à rous HuilIiers, autres que ceux du Châtelet de Paris,
de fa ire valoir dans cette Province le privjJege prétendu
d'exploiter dans' tout le Royaume, s'ils n'y font aurorifés
par Lettres-patentes & Déclarations du Roi duement enrégi!hées en la Cour.
Cet Arrêt ne permet pas à Heraud de s'appuyer de
l'erreur dans laquelle fes provilions auroient pu le jetter.
Un Arrêt de Réglement eft une loi publique que perfonne
n'eft cenfé ignorer; il n'éroit vraifemblablement pas dans
un ufage affez' fréquent de fortir ainli du reffort de la Sénéchauffée d'Aix, pour qu'il puiffe s'excufer fur fon habitude
dans ce genre de contravention. II eft inoui que les Huiffiers fe foient jamais portés dans une Sénéchauffée étrangere où leurs provilions n'ont point été enrégiftrées, où
ils n'ont pas prêté le ferment. L'emprifonnement de la
Dlle. Solliers efi donc nul par le défaut' de pouvoir de
l'HuilIier qui l'a fait; par la fraude avec laquelle il a mentionné fes qualités; par l'heure à laquelle il a exécuté;
par le défaut de lignification & de commandement préalable ; enfin par le vice même du jugement exécuté, lequel
a été rendu à des délais trop courts & fur une alIignation
nulle. La nullité de tout emprifonnement emporte des
dommages & intérêts; parce que ce n'eft pas impunément
que l'on prive illégalement un citoyen 4e fa liberté;' &
que l'on viole les formes qui la protegent. Que {èra-ce,
fi l'on y joint routes les préfomptions de fraude que manifeHent le billet en vertu duquel la Dlle. Solliers a été emprifonnée) & la conduite tenue par fan frere.
�DU
PALAIS
DI!
139
PROVENCE.
BiTTer fait à fon infu par fon frere au profit de fes parens avec qui il a pu s'enrendre; :irgenr dont elle n'a pas
profité; paiement promis à Lyon fans néceffité, uniquement pour obtenir obfcurément la condamnation & la faire
exécuter plus violemmenr; lignification faite à un domicile
étranger à Lyon, pour autorifer à Apt des exécutions imprévues fur fa pe.rfonlle; exécutions faites avec précipitation
à neuf heures du foir; choix affeél:é de la perfonne à emprifonner; le frere qui a re<;u l'argent, laiffé libre.
Jamais caufe ne préfenra plus d'a-pparence & de préfomption de dol. Jamais on ne rencontra plus de motifs
de caffer un emprifonnemenr avec les dédommage mens les
plus complets.
Quant aux faiues des marchandifes, on di fait . qu'elles
avoient été faites par le même Heraud, HuilIier fans paréatis, pour menre à exécution une Ordonnance du Lieu~enant d'Aix, quo.ique jugeant confulairement: Ces faifies
fant faites, ef1: - il dit dans l'exploit, en continuation des
pourfuites & diligenceü ci-devant faites. Mais il falloit y rappelle~
le commandement fans lequel on n'auroit pU' failir; &
quand même on l'auroit rappellé, on n'auroit pu failir en
vertu du commandement fuivi de. paiement, linon entiérement parfait, du - moins prefque total. Ne devoit-on pas
préalablement réitérer le commandement? Une autre llullité
réfulte de ce que l'HuilIier n'a pas détaillé dans fon procès_
verbal tous les meubles & effets failis.
On difoit pour le lieur Solliers, que fa qualité de frere
& d'Affocié doit naturellement détruire l'imputation calomnieufe qui lui a été faite par fa fœur, d'avoir agi de
concert avec les lieurs Conftans & Pilot pour détruire &
ruiner la fociété. L'Arrêt rendu le 14 AoÎlt 1776 étoit de
route iuf1:ice; l'intérêt de la Dlle. Solliers étoit confervé
par cet Arrât; le moyen qu'il adoptoit, éroie .le feul.favo_
rable à la fociété; le confentement de fes créanciers, en
fe prêtant à fes vues, étoit une grace & une faveur qu'il
devoit faiur avec empreJTement, parce que les marchandjfes
avoient été eftimées juridiquement & à leur jufte prix, ce
qu'on pouvoir vérifier par les faél:ures.
S:t
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JOUANAL
On répondoit pour les fieurs Julien, Conflans & Pilot;
que leur ,titre écoit un titre de bonne foi, concédé par la
fociété; que- c'écoit aux Affociés à fe difputer fur la nature
de la decce; mais en accendant, ils ne devoient fouffrir
aucun retard pour leur paiement; le billet efr figné par le
fieur Solliers; la qualité d'Affocié ne fauroit être concefrée,
& cette fignature feule a pu obliger fa fœur.
Sur la validité du titre, l'a/Iignarion efr valable, difoiron; elle a éré donnée au domicile élu de la Dlle. Solllers
dans le billet foufcrit par fon frere; la. Confervarion de
Lyon étoit le feul Tribunal compétent; les délais de l'af·
fignation ont été déterminés par ce domicile; le commandement eH également valable; il a eté fair fur les mêmes
motifs, fignifié au domicile de Lyon que la Bile. Solliers
avoit adopté pour le paiement du biller.. D'ailleurs la nature du paiement qui devoit être fait en Juin, temps de
Foire; rendoit encore plus compérente la Confervation de
Lyon. S'il avoit fallu fuivre les délais du domicile perfonnel de la Dlle. Solliers, que feroit devenu le privilege
des Foires de Lyon? Le porteur du paiement en Foire
peut encore en temps de Foire en rappo.rrer la condamnation, autrement l'éleaion de domicile feroit ruineufe.
La Confervarion de Lyon a le privilege & le droit de
faire arrêrer & faifir même dans les maifons; à combien
plus forte raifon ce privilege a-t-il lieu, lorfque le débiteur
efr rrouvé hors de chez lui, quoique pendant la nuit;
l'Hui/Iier avoit tirre & caraaere; il avoit le droit d'exploiter par rout le Royaume par fes provifions; il exécurait le mandement d'un Juge forain; fur le cour, la garancieintroduite contre lui le rend refponfable des nullités qui
pourroient fe rencontrer dans fes procédures.
Quant à la caffation de la faiÎ1e, les fieurs Julien, Conftans & Pilot éroient porteurs d'une Sentence du Lieutenant d'Aix, en vertu de laquelle ils avoient le droit de
fàire procéder à une faifie. Inutilement foutiendroit - on
qu'ils ne font plus créanciers de la faciété, ou que dumoins ils ne le font que pour une perire fomme; ce fera
�DU
PAtAlS
DE
PROVENCE:
lifi
'èn jugeant le fonds, -que l'on p~onQncera, fur la validité de
leurs créances; mais pour le moment, il fyffic qu'ils puilfent
paroître créanciers, pou)' qu'iJs aient pu être autol:ifés à
faire faifir.
La révoca.tion de l'Arrêt ne fauroit avoir lieu; il ell: de
l'intérêt de la Dlle. Solliers & de tous les créanciers qu'i'[
·ait fon exécution; c'ell: le feul moyen qu'on eût pu.jem)
,ployer dans la lituation où fe trouvoit la fociéré , poyr 1 I~
.réparer des perces qu'elle avoit eifuyées,. &: pour p,rot:urer
-à la
, . Dlle. Solliers une liberté qu'elle fe refufoit d'qçGuerIr.
r:
,On fomenait pour l'Huiffier, qu'il n'y avoit. p·oi,n.r, d~
nullité, foit dans .l'empl',ifonnement, foit dans,)a faifi~"
& que quand même il y auroit nullité, la garantie ne, pourroit avoir lieu. On rappelloit les privileges de· la .coçfervation de Lyon, les provifions de Me. Heraud, qui lui don,
noient le pouvoir d'exploiter par cout le Royaume, comme
le tirre le plus certain de fon caraél:ere & de fon pouvoir.
On difcucoit enfuite .les Réglemens iutervenus p!Jur éviter
-que les Huiffiers n'exécutent hors de leur reifort. On difoit
qu'Heraud n'étoit point au cas de c.es Arrêts; qu'il avoit
titre; qu'il exécucoit les mandemens des Juges forains;
que l'Arrêt de' 177 l ne prononçoit pas la peine de nu.\lité,
& que les Loix étant de rigueur, on ne pouvoit le,s étendre
<lU delà de te qu'elles avoient entengu prononcer; mais y
eût-il nullité, Heraud ne feroit jamais tenu à aucune garantie; les lieurs Julien & Compagnie ont été le chercher
à Lambefc, ils favoient qu'il n'étoit point de la JlIrif4iction d'Apt; c'ell: donc de leur propre fait, ~ à leur folli..,
citation qu'il a agi.
.
.'
.
Me. Meriaug, Subltitut, opferva que fOUS les aifoc.iés font
'également obligés envers leurs créanciers. L'un des aifociés
peut compromettre [ans l'autre; un feul a droit de faire les
aifaires de la fociété, bien qu'il n'en ait pas charge fpéciale.
çe [es alfociés; il peut [an~ mandement [pécial vendre les
cho[es vénales pour lefquelles ils ont contraél:é fociété.
~omme un [eul des alfoci~s p~ut agir pour les ~etles' de
!
.;
�)~
J~~~NAt
la [ociété, ainG pour la dette de la [ociété un [eul d'eux
peut être convenu ·(olidairertlènt. Les alfodés (om cenCés
refpeél:ifs agens, faél:eurs & entremetteurs l'un de l'autre;
& par !à chacun .en [olidairemem ob!i$é . pou.r, l'autre. '"
.bël fleur Sollters & [a Cœur ont contràéte une [ocJete
ver\)alè·; ce point de fait n'eH 'point cante né. Les dettes,
les - engagemen~ contraél:és par 1:U0 d'eux' les' ont folidai.
i'en\enê ebligés;l & quelque ïgdorance que la Dlle. Solliers
. pui1fé oppo[er [ur le bille't dont s'agit, elle ne peut [e re:.
fufer à: le payer, dès qu'il en flgAé par le fleur Solliers [on
a1focié, qui a agi ta.nt pour lui, que pour le compte de
la [écïéï:é. - M;als' quelle [ufpicion, quël doute Ife préfente
pas 'é~ billèt!' il liel! [oufcrit à une- époque O~l les affaires
dé la fOèiété" ecoledt dérangées, le fleur Solliers ne pouvait l'izrtorh>0n avait obtenu deux' Sentences de condamnation p~ùr différentes [ommes; on ne pouvait contniél:er dé' 'nou'velles: dettes, [ans: aug-menret les' pertes de
la [6'ciété. Aucune mention ne fut faite de la Comme aux
Arbitres'-alfemblés; ·ï'1s b'en ont eu aucune connoi1fance.
(rn· compte a été arrêté, l'article de cette dette n'y a point
été' -menrtionné; "jamaiS la DUe: Sblliers 'en a été infhuite;
& ce n'en que lorfqu'e!le en arrêtée, qu'elle connolt la
caù[e des a8judications contr'elle prononcées; motifs intete1fans, :mais qui ne [iluroient être oppo[és aux fleurs Julien
& Compagnie, qui; porteurs au billet, OAt été en droit de
fe pourvoir, pour en obtenir la condamnation.
La dette ainG épurée 11 l'égard des fleurs Julien & Corn, pagnie, Me. Meriaud examiha les vices qui portoiem [ur hl:
Sentence de la Con[ervaiiéil a~-Lyon. Pàde billet, di[oit-il,
ligné par le fleur Solliers, le~ paieme.n~ .. dl: 'indiqué devoir
être' fait à 'Lyon à l'époque dù premier 'Juin. {)r, l'Ordon;nance du COl]1merce, tit. 12, 'art. 17, dit que dans les ma·
tiet-es attribuées aux Juges-Confuls, le créancier poprra
dopner l'affignation à [on choix, 'ou au lieu du .domicile du
débiteur, ou au lieu auquel la promeffe aété faite & la marchandife fournie, ou au lieu' auquel le' paiement doit être
fait. Rodier exàminant ce que ,'eH -que le domicile d'urre
�DU
PALAI'S .. DE' ,P",aOVENCE;
143
·pàrtiè, dit qu'on difiingue trois fones. de' aomicile, l'aélûel
ou de fait, celui de dignité & celui d'éleél:ion.
,
• Le lieu du paiement fait partie de l'obligation,· en telle
forte que le débiteur peut être convenu au lieu auquel le
paiement a été defiiné, quoique ce ne foit pas le lieu de
fon domicile, comme il a été décidé par la Loi premiere
.& derniere, ff. de .eb. quod certo Loco. Le contrat efi cenfé
fait au lieu Olt ,le paiement doit être fait, fuivant ce qui èft
dit dans la Loi 3, ff. de reDUS Quél. Judie. Le billet dont
's'agit porte éleél:ion de domicile à Lyon. Or, fous ce titre
& fous cerre condition, les !leurs Confians & Pilot ont valablement affigné pardevalît les Juges-Confervateurs de Lyon.;
l'Ordonnance leur en donnoi:t le droit; ils en avoient la faculté. Mais ne fe feroient-ils pas trompés dans leurs pourfuites? Et fi l'affignation avoit été valablement donnée, leur
procédure ne feroit-elle pas viciellfe pour n'avoir pas été
fui vie des délais compétens ?
',.
L'article 14 du titre 14 de l'Ordonnance de 1667 porte
" qu'aux Sieges des maîrrifes particulieres des Eaux & Fo" rêts, Connétablies, Eleél:ions ,Grenier à fel, Traites,
" Foraines, confervation des privileges de foire, lorfque
" le défendeur fera domicilié ou préfent au lieu de l'éta" blilfemenr du Siege, le délai des affignations ne pourra
" être moindre de vingt-quarre heures, s'il n'y a péril en
" la demeure, ni plus long de trois jours & de huitaine au
" plus pour ceux qui font demeurans ailleurs dans la dif" tance de dix lieues; & fi le défendeur eft demeurant en
:;, lieux plus éloignés, le délai fera augmenté à, 'proportion
~, Q~un jour par dix lieues. "
.'
La lettre de change a été protefiée le 20 ,Juin; la 'Sen-Tence eG: interv'enue le l'S Juillet; l'affignation n'a point été
-donnée au domicile réel de la Dlle. Solliers ;, c'e!!: li celui
des fieurs Bochard & Vaillant, c'eq à un .domicile d'élec-t.lOn; les neurs Ju)ien & Compagnie en ayoi;en't le ,droit,
·mais. ils ~u~Qie.nt dû. obferver les_rdélais éoonOO:s dans l'arr.
~I41. de ·l'Or'.don~ance."Ge'te' LoiJle.fI: formelle; elle s"qpplique
-à tous
'I:rij.ru!1iùJG,.laux.·Juges-~nretvateur..s._Le:> 4élais
~_
.... v
les:
�144
'JOUR'NAL
dans les affignations ont été fagement prévus par le Légiflateur; ils ont été réglés par la diHance des lieux; aucune
circonftance n'a pu les abréger; le Juge lui-même n'en a pas
le pouvoir. Ce feroit nuire au privilege du défendeur; ce feroit lui interdire le moyen de fe défendre. L'on ne voit pas
que le privi!'ege de la Confervation de Lyon puiffe couvrir cette
nullité.; fon Edit de création ne fût nulle mention de l'abréviation des délais, & cette Ju.rifdiéhon doit dès-lors être foumife aux regles ordinaires pour ce qui concerne les délais
fur les affignations. Dès-lors nul doute que les fieurs Conftans & Pilot n'eu1fent dû obfervet les délais fixés par l'Ordonnance. D'ailleurs il ne s'agi1foit point d'un billet en foire
de Lyon, puifque les quatre foires qui y font établies~ & qui
durent chacune quinze jours, font fixées, la premiere au
lundi d'après les Rois, la feconde au lundi après Qualimodo,
la troifieme au 4 Août, & la quatrieme au 3 Novembre.
Le Réglement de 1667, rapporté dans le Praticien des JugesConfu1s', regle l'ouverture & I<\. forine de ces paie mens. Le
billet en queftion ne portoit pas paiement en foire de Lyon:
le mot foire n'y était point exprimé, ce qui feul pouvoit le
rendre fournis aux r!gueurs du \privilege de la Confervation;
le terme du paiement étoit hxé au 12. Juin; il érait fpécialement marqué que l'intention des parties n'avoit pas été de
le rendre payable en temps de foire, puifque par Part. l du
Réglement de 1667, il cft dit que l'ouverture de chaque
paiement fe fera le. premier jour des quatre paiemens de
l'année.
Dans l'hypothefe pré fente , il auroit fallu que le paiement
eût été ouvert le premier Juin;. ,il I2e pouvoit pas l'être,
puifque l'époque en érait fixée au 12..
Le commandement eft la fuite de la condamnation ( con':
tinua Me. Meriaud) c'dl la notice qu'on en donne au dé,biteur; c'eft un aél:e préparatoire, imaginé pour lui éviter
des 'exécutions plus rigoureufes; le créancier .avertit [on dé;biteur qu'il le ~mettra à même ,d'exécuter Je. titre ,qu'il a ob,.
tenu, s'il ne farisfait au paiement pmnoncé pa.r l'li condam-nation; ce detnier fongè ·à'Jéviter de.s,·frais,. & le. ply!> fou!vent
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
14)
vent il n'attend pas une feconde injonél:ion. Quelle nécefficé n'y:
a-r-il donc pas qu'il fache d'une maniere pofirive les condamna,rions que l'on a obrenues contre lui, & les voies de rigueur
auxquelles on peur le foumerrre? Qui en-ce qui lui en donnera connoi1fance, fi le commandemenr ne lui en en fait
à perfonne dans fan' domicile réel, fur-rour fi l'on c,onfidere
que la Sentence a éré rendue fur cles délais infuffifans, &
fans que la Dlle. Solliers air eu le remps de fe défendre?
L'einprifonnemenr en: une voie de rigueur dans laquelle
on ne peur omerrre aucune des formalirés prefcrites par
les' Ordonnances. Par les Loix Romaines, le débiteur pour
derces civiles ne pouvoit être arrêté dans fa maifon; éloigné
d'une fociété done il n'écoit plus membre, il goûcoit encore
le bonheur domeilique, & cet afyle devenoit refpe.:rable aux:
exécutions de fes créanciers. Nous avons adopté la fagelfe
de cerre Loi, en établi1fane qu'il teroit défendu d'arrêter
aucunes perfonnes à heure indue, ou dans lems maifons l
pour detres civiles, fans permiffion du Juge. Denifarc rapporte plufieurs Arrêts qui one ca1fé des emprifQnnemens faits
dans les rues après le foleil couché.
Le créancier a cependant le droit de faire arrêter le débiteur contraine par corps les jours de fête & de dimanche,
dans fa maifon, lorfqu'il en: fufpeél: de fuite & qu'il eH à
craindre qu'il ne rrompe les exécucions de la Jultice. Dès
lors cour privilege celfe; le dol & la fraude qu'il en: prêt à
commertre le rendene criminel aux yeux de la Loi. Mais ces
motifs ne peuvent être appliqués à la Dlle. Solliers; elle
ignoroir que les fieurs Julien & Compagnie fulfent fes créanciers; elle ne connoilfoit pas la Sentence qui la déclaroit
débitrice & concraignable par corps; nulle affignation ne
lui avoit éré donnée; on n'avoir obfervé aucun délai; aucuQ
commandement ne lui avoit éré fair; on ne peut PijS din~
qu'elle fût dans un érat de fuire.
'
Sur le défaut de pouvoir de l'Huiffier, Me. Meriaud ob~
ferva qu'Heraud érair premier Huiffier audiencicr à la Police
de Saint-Cannat; il ne prir pas çetre qualiré dans [on e)(~
Années l77 5 & fuiv.
.
T
�146
1
0
U R N ~ L
'ploit de capture, mais feulement premier Huiffier audien~
cier reçu au Siege d'Aix. Sous cerre apparence de titre, il
cache fon véritable caraél:ere; ce défaut d'expreffion donnetoit lieu à la nulliré de l'exploit; l'emprifonnement efl: de
rigueur, & les moindres circonHances font faifies avec avidité, pour procurer la liberté à un débiteur malheureux qui
fe croit quelquefois réduit à la dure néceffité de manquer
à fes créanciers, de ne pouvoir faire honneur à fes engagemens par des circonHances encore plus fâcheufes pour lui.
Des emprifonnemens ont été caffés par la {imple omiffion
de date, ou fur la !impie erreur de qualité.
Les provifions d'Heraud lui donnent à la vérité le pouvoir d'exploiter par tout le Royaume; mais cerre claufe,
qu'il en fans doute aifé de faire inférer dans lin titre burfal ,
efl: toujours fubordonnée aux Réglemens locaux, aux Loix
émanées des Compagnies fouveraines, & dont leurs difpofitions ont eu dans tous les temps pour objet de maintenir
le privilege & les droits des corps fournis à leur Jurifdicrion. Plufieurs Arrêts de èe Parlement ont fait inhibitions
& défenfes à tous Huiffiers de s'immifcer dans des fonél:ions
.qui ne font pas de leur reffort. Celui de 177 l fait injonction aux Huiffiers & Sergens fe difant exploitant dans tout
le Royaume, de fe retirer dans huit jours aux ~illes & lieux
où ils ont été établis, pour y exercer les fonél:ions de leur
charge, à peine de 3000 liv. d'amende, & d'en être informé.
Il fait inhibitions & défenfes, fous les mêmes peines, à tous
Huiffiers, aunes que ceux du Châtelet de Paris, de faire
valoir dans cerre Province le privilege prétendu d'exploiter
dans tout le Royaume, s'ils n'y font autorifés par Lerrrespatentes ou nouvelles Déclarations du Roi duemeI1t enrégiftrées en la Cour. Telle étoit la loi, rendue publique dans
toute la Province, & au mépris de laquelle Heraud ne pouvait exploiter dans une J urifdiél:ion qui n'étoit pas dans fon
reffort. Les mandemens d'un Juge forain pouvoient être
exécutés par les Huiffiers d'Apt, &: jamais il ne pouvoit être
poné .atteinte auu privileges de la Province. Heraud ne pou-
�r47'
voit ignorer les défenfes ; l'Arrêt de 177 l avoit été envoyé
dans routes les Sénéchauffées & dans routes les Jurifdictions.
L'emprifonnement de la Dl1e. Solliers étant nul par les
moyens que l'on .vient de relever, la récommandation faite
à la, requête des fieurs Julien doit être également caffée.
Sur la faifie des marchandifes de la Dl1e. Solliers, Me.
Meriaud obferva qu'elle fut faite à la requête des Geurs Julien, enfuite d'une Sentence du Lieutenant d'Aix, tandis
qu'ils avoient été payés en partie de leurs créances, ainli
qu'il confioit par les quittances produites au procès; il paroiffoit bien extraordinaire que pour une fomme de 100 liv.
ils euffent fait procéder à une faiGe générale; faifie qui participe aux vices de l'emprifonnement, puifqu'elle a été faite
par Heraud, qui ne pouvoit pas plus exécuter la Sentence
du Lieutenant d'Aix, que celle rendue par la Confervation
de Lyon. Elle a de plus une nullité qui lui efi particuliere:
défaut d'énonciation des marchandifes faifies ;, l'Ordolinance
eH -expreffe fur ce point: détailleront les Huiffiers ta qualité
& le nombre des marchandifes faifies. On a voulu par-là éviter
des inconvéniens fans nombre que la mauvaife foi ou la
fraude de ceux qui font commis à l'exécution de pareilles
f'aiGes auroient pu faire naître, & l'intérêt refpeélif des par-.
ries a fait imaginer ce moyen, qui conferve à l'une le nom-,
bre & la qualité des marchandifes, & à l'autre une qualité
dont l'eHimation. plus forte lui affure toujours mieux le mon-,
tant de fa créance.. Les faifies dont s'agit étant caffées, que·
devient l'Arrêt qui permettoit de payer en marchandifes les;
c,réanciers faifilfans? La révocation n'efi qu'une fuite, qu'une·
conféquence de la caffation des failles•• Plus de faifies, plus',
de paie men t en marchandifes"
Quant à la garantie introduite contre Heraud, Huiffi'er,
Me. Meriaud difiinglla deux forres de nullités ;- la nulLité dépendante du caraélere & du pouvoir de l'Huiffier; la nul1icédes aéles fournis à, fon miniHere. A-t-il manqué à quelque'
formalité relative aux fonélions de fon état;. dès-lors c'e!h
fp.IJ l!rop're fait; dès-loss iL doit en.être garant. Tel fut fans.-.
DU
PAL AIS
DR
PRO VENCE.
'I ~.
�- 1 48
Jou
RNA
t
doute le motif de l'Arrt~t du 28 Mars 16~9, rapporté par
Boniface, par lequel un Huiffier fut déclaré refponfable des
nullités qu'il avoir commifes; mais s'il eH que!l:ion au con{raire d'un défaut de pouvoir, d'un défaut de caraél:ere, ce
vice eH commun à toutes les parties; elles l'ont refpeél:ivement
connu; le Juge incompétent à raifon de fa perfonne, devient compétent par le fait des parties qui fe font adreffées à lui, & qui ne peuvent plus lui oppofer ce moyen, à
moius que l'incompétence loit notoire & ratione materiœ. Ici on
ne peut oppofer à Heraud aucune nullité procédant de fon fait;
c'eH l'ouvrage des fleurs Con Hans & Pilot; on ne fauroit
le rendre refponfable envers eux de ce qll'il a été trop crédule a leur égard; c'eH eux qui ont été chercher Heraud,
& qui ont couvere fan défaut de caraél:ere & de pouvoir.
S'il n'a point détaillé les marchandifes, feule nullité qu'on
pourrait lui oppofer avec fuccès, c'eH que les fleurs Julien
s'y font opporés:
Me. Meri.ltld conclut à ce.que ftlr les appels de la Sentence
de la Confervation de Lyon & de celle du Lieutenant d'Aix,
il fût poul:ruivi ainG que s'appartiendrait, & cependant que
faifant droit à la requête de la DlIe. Solliers, en oppolition
envers l'Arrêt du 14 du mois d'Août , l'Arrêt fôt révoqué;
& de même fuite, que l'exploit de caprure de la perfonne
de la DlIe. Solliers, le~ failies, reffaifies & avtres exécu{ions faites fur fes biens, & {Qut ce qui avoit fuivi, fuffent
décla rés nuls, & comme tels caffés, avec dommages-intérêts,
{ilivant la liquidation qui en feroit faite par Experts; qu'inhibitions & défenfes fuffent faites aux fleurs Con Hans ,
Julien & Pilot de mettre à exécution les Sentences de la
Confervation & du Lieutenant d'Aix, jufqu'à ce qu'autremerl! fin dit & ordonné, à la charge par la DlIe. Solfiers
de donner bonne & fuffifante caution jufqu'au concurrent de
la romme de 70)2 livres, prix de l'eHimation des marchandires à elle failies, & à ce que fans s'arrêter à la requête
en garantie de Julien, Conflans & Pilot, Heraud fût mis
hors de Cour & de procès.
Arrêt du 22 Avril 1777, prononcé par M. le Pre~ier
�DU
PALAIS
DB
PROVENCIl;
149
PréGdenr, conforme aux çonc1ufions, & qui condamne Julien,
Conl1:ans & Pilor aux dépens envers toutes les parties.
Plaidant Mes. Gaffier, Simeon, Portalis, Roman & EflrivIer.
ARRÊT
XVIII.
La Cour des Aides connaît en premier éj. dernier reJfort de
la contravention aux rêves.
L
E fieur Antoine Daniel, Fermier du piquet fur la farine de la Communauté de Saint-Nazaire, tir procéder
à une faifie de deux fa cs de farine de Trotebas, Boulanger,
& l'ajourna pardevanr la Cour des Aides en confifcarion & en
condamnation à l'amende portée par fon bail due ment
llOmoJogué. Trotebas déclina la Jurifdiaion de la Cour.
I! foute noir qu'il faut diftinguer l'établiffement d'un impôt,
d'avec la perception;'que le premier tient au tirre, & le
recond à l'exécurion du tirre. Les rêves & impolltions ont la
même nature que les tailles. Réelles comme elles, ayant même
objer qu'elles, les paiemens de ces charges foulagent les fonds,
& elles leur font fubrogées. Delà divers Tribunaux pour la
commodité des fujets, & pour la plus prompte expédition; les
Cours font premiers Tribunaux, quand la néceffité l'exige,
comme pour fixer ce qui doir être fait, c'el1:-à-dire, Pérabliffement. Delà trois Arrêts du Confeil fur cette matiere,
rendus en 1608, 16)) & 1672; les deux premiers pour
régler les contefiarions pendantes eorre le Parlement & la
Çour des Aides, & le troifieme pour régler l'ordre des Jurifdiaions entre la Cour des Aides & les Sénéchauffées.
Tous les trois difent: caufes de tailles, Aides fI Gabelles en.
premiere .infiance appartiendront aux Lieutenans, & par appel
la Cour, lorfquelles excéderont) liv., & jufqu'à ) liv. aux
Lieutenans e,n 'premier & dernier reffort.
. Si les caufes .des gabelles appartiennent
aux Lieutenans
•
1;
• ,
a
J
�'lfo
JOURNAF.
'par \lart. 10 de l'Arrêt du Confeil de 16)), il n'efl: pas
'poffible que dans l'arr. 1 [ le Roi les eût données à la Cour
-des Aides; car rêves, gahelles & impojitions font fynonymes
avec 'tailles en Provence; tout cela y efl: impofition réelle,
fubrogée à la taille, & la repréfentant. Dans l'origine, avant
que la Cour eût le titre & attribution de Cotir des Comptes,
âides & Finances, eUe exifl:oit en Provence fous le titre de
Chambre Royale des Maîtres Rationaux; il exifl:oit alors un
Juge Mage, ' qui connoilloit des 'matieres ordinaires, & la
Cour Royale des Mahres Rationaux connoiffoit en premier &
dernier reffort des caufes du Domaine, d'impofitions &,
autres matiere~ fifcales. L'Edit d'Henri II. en Août 1)))
COmmua cette "Cour Royale en Cour des Aides & Chambre des Comptes. Cet 'Edit ,renferme deux difpofitions contradiél:oires; d'abord il attribua à ,la Cour toute la Jurift1iél:ion dont elle avoit joui ju'fqu'à ce jour, & dont elle devoit jouir en vertu de fes titres; enfuite il efl: dit: pour
l'exètc(r de la même maniere que les autres Cours des Aides
& Chaml;,'re des Co.mptes du Royaume.
, . Parties Edits ne création de la 'CDur des Aides de Paris,
eile n'avoit que 'je dernier reffort fur 'les tailles & impofitions, & non le premier; ces Edits font rapportés dans le·
Code Henry, liv. 13, tit. l, arr. 1. Cette attribution excita
le's plaimes 'des Sénéchauffées établies en Provence par Edit
de Septembre 1) 3) i il' intervint' en l') 66 des Lettres-pafentes qui attribu,erent la connoiffance du fait des Aides aUlC
S'énéchauffées en ,premiefe infl:ance , .. & par appel à la Cour
des Aides. En 1')'71 la Cour des Aide~ obtint des Lettres-,
patentes contraires', & le 12 Août 1)81 a'utres I;ettres~pa-.
tentes qui,orçonnent l'exécution,-de cdles de 1.)66, révoquent cèlles -de 1.),-71, -& font défenfes, à l-a Cour de troubler les O,fficiers' des' S~néchauffées en la conO'Oiffance el!
premiere inlbnce des caofes '& matieres des Aides.
Nonobfl:ant tous ces Arrèts, il. furvinr de nouveaux troubles 'qui occ,afioRerent les Réglemens généraux de 1608;_
1,6)) & .1672, rapportés par Bbhif~ce, tom. '3, liv.l, tit•.
c.1tlIJ·. 2i. & 3, .'&,
6, .cMp. 3.. Ce -qui <lvatt -été 'ell--
i"
tn.
�DU
PAL AIS
DB
PRO VEN CE',
'y .~ l
primé par le mot d'Aides en général dans le feizieme fiecle,
fut plus amplement exprimé dans le dix-fep tieme par les,
mots tailles, aides & gahelles; c'éroit avec la taille, cous
les droies d'octrois ou cous droies d'impofieions; car gabelles,
fignifie en général rous droits fur marchandifes & denrées"
& aides eU un terme générique qui comporee cous fubfides.
Il efl: cereain que par le mot aides, on n'entendoit pas
les impofitions royales, puifqu'on voie que lors de ces Ré.
glemens il exi!l:oit des Maîtres des Porcs, qui. conooiifoient,
depuis 1)46 de l'impofieion foraine, traite domaniale & haue
paifage, qui fom des droies royaux, & non les Lieutenans,
Ce qui arriva dans la fuite le prouve toujours mieux. Le 1 l
Mars 1684 incervint Arrêt du Confeil qui, fur les plaintes
de la Sénéchauifée d'Arles; ordonna l'exécution des Réglemens. Le corps des Sénéchauifées ayant demandé que ces
Réglemens fuifent exécueés, par Arrêt du 26 Avril 1687,
rapporté par Boniface, tom. ') , liv. 6, cil'. l , chap. 2, elles
furent mainrenues dans l'arcribueion de la connoiifance de
toutes les macieres des tailles & aueres irnpoficions.
Quoiqu'il parût bien décidé que les Sénéchauifées connOÎtroient des tailles & autres impofirions en premiete inftance, les conteltaeions anciennes fe renouvellerent encore,
En 1690, il Y eut procès au Confeil entre les Secreraires
en Chancellerie près la Cour, Ml'. le Procureur-Général d'une
part,,& le corps des Sénéchauifées d'autre. Arrêt du Confeildu,
18 Janvier 1690 ,qui ordonne que les Lieuten-ans conn(}Îrrone
des cau(eS' des tailles-, aides, gabelles, lates, inquancs, &c.
D'après cous ces Arrêts, il efi évident que fous les mats
tailles, aides & ga/gUes, on a entendu cvrnprendre les rêves:
voilà le vérieable fens des Arrêts généraux de 1608, 16') ')
& 167'2; car fans cette difiinction il y aurqit conerariété
formelle encre ces articles & ceux qui difenr: caufes des
zailles, aides [,. gahellés, appartiendront en ptemiere inJlance
a/Jx Lieutenans. Il n'y a pas de raifon de difl:inguer les unes,
des autres; rêves & tailles foDt Uflum ti idem: en effet les
Jêves tiepnent lieu de t,ailles par.le,l:lr objer.
�1)2.
JOURNAL
On répondoit que lorfque les Rois de France donnercnt 11
la Cour, qui plus -anciennement étoit la Cour royale de nos
Comtes, le nom de Chambre des Compus & Cour des Aides,
toutes les caufes fifcales lui furent attribuées; que les Lieutenans les réclamerent pour les juger en premiere inO:ance;
qu'il y eut 11 cet égard des déciflons différentes & contraires, & que les variations ne commencerent guere 11 fe
fixer qu'en 16 SS par l'Arrêt du Confeil, qui eut cependant
encore befoin d'être fuivi de p1ufleurs autres. Cet Arrêt déclara, en l'arr. la, que ,les caufes des tailles, aides & gabelles, lates & inquants, iraient au Lieutenant en premiere inftance. L'arr. I I porre que les rêves, gabelles &
autres impofitions fur les denrées feraient levées par la perrniffion de la Cour, & qu'elle connaîtrait de toutes les
oppofitions & différens qui naîtroient en exécutio'n des
baux.
En 167'1. parut un nouveau Rég1ement. Par l'art. l,
la Cou r des Aides doit juger en premier & deI nier reffort
des péages du fel. Par le fecond elle connaît en premier
& dernier reffort des caufes de fa Jurifdiétion qui concernent le Couvent de Saint-Maximin, Par l'arr. 3 elle a la
connoiffance des comptes. Pa'r l'art. 4, le premier &. dernier refforr fur les différends procédant des contrats faits
pour chofes dent la connoiifance lui apparrient. L'art. S lui
donne premier & dernier reffort fur les cinquains, dixains,
vingtains. L'arr. 6, premier & dernier reifort fur les différens qui naît~ont lors de la reddition des comptes. L'art.
7-, premier & d'ernier reifort fur les oppofition qui feront
faites aux failles des héritages des comptables. L'arr. 8,
premier & dernier reffort fur toutes les oppofitions & diE.
férens qui naîtront en exécution des baux des rêves & autres impofitiens faites fur le vin, poiRon, farine & autres
denrées.
Il n'eO: q'ueO:ion dans cet Arrêt des droits des Lieutenans, qu'après que tous ceux de la Cour font déduits,·.&
au dix-feptieme arricle la difpolltion des précédens Arrêts
y eO: rapportée: les caufts d,es tailles, aides & gabelle ,
laus
�DU
PAL AIS
D:Il
P Il. 0 VEN C E.
l
H
lates & inquantS, feront jugées en dernier relfort par, les Lieutenans jufqu'a cent fols, fil/on ils n'm connoùrottt '{!J'en prcmiere infiance, & la Cour par appel.
La généralité de cet article dix-fept, à laquelle on s'artachait, fans faire arcention aux difpofirions précédences qui
le limitoient, donnerenE lieu encore à bien des conreHatians; les Lieutenans ,voulaient connaître des différens fur
rêves; la Cour le leu.r difputoit ~ .v.ouloit même ne.leu~
laiffer que la taille courance; elle demandait. à cet effet
l'interprétation de l'Arrêt de 167'2. & de l'arr. 1-7; cerce interprétation lui ·fut refufée; l'exécution pure & ûmple fut
ordonnée, avec inhibjtiQ.ns de troubler .les Sénéchauffée~
dans les droits qu'il lui accribuoit: mais quels étaient ces
droits?'
, ,
1
. C'el!: d'après le principe que la Cour connaît en premier &
dernier reffore des contraventions aux rêves au criminel
comme au civil, que y ltyant eu Jieu d'iJ1former en 1761
contre des contrevenans à la rêve du vin de la Penne-IèsAubagne, la procédure prife- pàr le .LieLl t'€ na nt d'Aix fut
caffée comme incompé,enre, fur_les ,conc)ufions de Me.
Turrel, Subll:irut. En 176 S , fur les mêmes conclulions, une
procédure pour le même fait, prife par (e mçme Lieutenant
à la requête de la Communauté du'Marrigues, fut calTée.
Cependant l'arr. 16 du Réglemenr de 16) S porte que l,t
Cour connoîtra feulement par appel des féditions, émotion~
populair-es, excès & violences 'au fujet des établiffemens des
impoûtions & levées de ..deniers; mais Me. Turrel remarqua qu'il falloit dill:inguer les impofitions ordinaires qui font
les tailles, des impQfitions ,extraordinaires .qui font les rêves,
& que le Réglement d~ 1672 "I!·yant attribué exclufivement
les rêves à la- Cour., a,voit dérogé à Harr: 16 de l'Arrêt de
16SS & l'avoit' expliqué; on r~pp~J]oit pluGeurs procédures
prifes de l'autorité de la CO~l'"' fui' des contraventions ou
des rébellions, & notamment celle de.,Tourve.s en 1734, &:
celle de .Seyn~ en 1764'
l, .
Jnutilement.diroit-Otl qu'autre chQfe
de connoître de la
rébellion, ~utre cho.r~. de. li iimplè c.ontraveocion ;' car en
Années i 775 & fuiv.
V
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�lB
JOURNAL
point de' droit & de procédure, COut Jugé qui ell: compétent
rour conhoÎue au' c~vil d'une contenation, peu~ en connoÎtre au criminel, & notamment des rébellions; & en point
de fait, la Cour la'itre '}aux Lieutenans les informations
prifes au fujet dès tailles. Ce n'en donc pas la plainte criminel~e, c'en la mat1ere'èjui êtabli~r'la Jurifdiél:ioll, foit que
l'on prenne la voie civi!elou la ,voie criminelle. Or la rêve
ayant béfoi,'n d'etré -levée [ous- F'alfcorifation de la Cour, les
éonèraventions ;'à"cé droit, fa confervarion, fa fauve-garde
ont dtf rener fours [€ln. infpeél:ion. Toute contravention en
une rébellion à ·1'Attêt qui. permet· de, mettre aux encheres
la rêve '. & à éèlui·. qùi. g'~rami{fant en(uite 'le dernier ènèhé6ffeup, homologué fo'nJ111âil. 1" • r
'. "
Ar.rêt de regifhe du 16 Mai 1777, vuidé le 24 du'même
mois, conJotmle l~bj( conclufions portées par Me. Turrel,
Subltitut, qui déboute du décJinatoire, avec dépens. Plaidant
Mes. Leclerc! & Simeon. 1
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."
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XIX.
"
le ,mari, adminiflra~eflr, de. l,a dot, eJl tenu de remplir fef
conditions TenfeTmée~ dan,s,le cqntrat civil de mariage.
J -
D
1
Ans lé contrat de fuàriage 'patré emre Pierre Cauffe';
mille, Cordonnier de la ville de Marfeille, & Rofe
Thomas du lieu de Saime-Tulle, le fleur Vachier fit: donation à Rofe Thomas1d ta fbmme de Sooo ,Iiv., à prendre funfon hoirie uue anncie 'après '[on déoès. 11 fut dit, que
pour la- 'plus grande stlreté"'du fon·ds,.Oauffemille en Je te"
éouvrant fercit renu de le l'lacer tOut, d y fuite fans divertiffement de deniers fur un cotIfs' ou communauté, ou un particulier folvable & folide. Après la mort du' fleur Vachier,
Cautremille confemit, ~ar•.aél:~ d~ 9 Avril 176~, 'que. cen,è
(omme reftât entre les mams' de la DUe. Bremond fbn he.itjere~ à conHitution de; réhre. aUJ dênie~ Yingt•. Après :la
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PAL A'T S
D E
PRO VEN C E.
1) )
mort de Cauiremille, fa veuve fit lignifier l'on contrat de
mariage à la DUe. Bremond, & l'interpella de lui payer les
8000 liv.; celle-ci répondit que cette fomme avoit ceiré
d'être exigible depuis le placement à conil:inHiob de rente
qui en avoit été fait fur fa tête par Cauiremille fon mari.
Rofe Thomas, en qualité de pauvre, fe pourvut pàrdevant
la Cour.
La DlIe. Bremond fe fondoit fur la pleine adminiil:ration
de la dot que la Loi donne au mari. On répondoit pour
Rofe Thoulas, que le droit q~e le mariage donne au mari
{e borne à une fimple adminiil:ration; il exerce tous les-droits
qui en dépendent, comme s'il en étoit le maître-; )nais il
n'agit jamais qu'en vertu de la procuration que la femme·
lui fait dans fon contrat de mariage. Tout fon droit lui vient
de cette derniere, qui conferve toujours la propriété de fes
fonds dotaux: cùm eœdem res ah initio uxoris fuerint, & naturaliter in ejuspermanftrint dominio , quamvis in bonis mariridos fit, mulieris ta17len efl. Leg. 7), ff. de jure' dotium, Leg•.
30 du cod. fous le même titre.
_
De ce principe dérive néceirairement la prohibition qu~.
a été faite au mari de les aliéner ou d'en difpofer définitivement de quelque maniere que ce foit. Le placement à
conHirution de rente renferme une vraie aliénation des deniers; ce n'eil: qu'à cette condition que ce contrat a éré
déclaré légitime & fauvé du reproche d'ufure, ainli qu'on
peut le voir dans le chapitre regi17lini 1 - & 2 de e17lpt. ê~
vend. in extrav. comm. Dans la prohibition d'aliéuer fe trouve·
comprife ceUe de placer à conil:itution de reore; & le mar~
excéderoit fes droits, s'il difpo[oit ainfi définitivement des.
biens de fa femme.
La c1aufe contenue dans la donation annon-ce que le do~
nateur avoit bien peu de confiance à la fo!vabi!ité du mari
de fa donataire; & la précaution qu'il prend pour lui
déterminer tous les emplois poffibles, prouve qu'il f~ déJ.
fioit de fan adminiil:ration; les termes de cet aéte prou\lent que le donateur n'a voulu pourvoir à la sûreté de la.
dot, que tant que le mariage fubfifteroit ,. & que l'admin.if,
V •.
�I~.
JOURNAL
(ration ferait à la difpofition de Cauffemille; le placement
qu'il prefcrivoit, étoit le même que celui prefcrit aux tuteurs
ou autres adoiiniftrateurs pour les fommes dont ils peuvent
avoir befoin dans un temps fixé, le même que paffe tout
particulier pour une fomme qui elt payable 1t une époque
certaine & determinée. Ce contrat, qui pourroit être difficile dans une ville dépourvue de commerce, eft très-poffible & trèS-permis 1t Marfeille, où l'on ne garde fes deniers oiGfs que lorfqu'on ne veut pas les employer. C'eft
l'intention des parties qui doit aider l'interprétation de touS
les aél:es qu'elles paffent, jufque's-l1t même que cette intMtian doi,t être plutô't. confultée' que les termes dont ils ft!
font fervis pour l'expliquer: contrahentium 1Joluntas potù'ts
quàm wroa JPe8ari placuit, dit Papinien en la Loi 2 19, if.
de.
fignif.
1
En fuppofant même que le donareur eût eu en vue' une
cQllflitution. de rente, Cauffemille n'auroit pas moins contrevenu 1t fa volonté, parce qu'il avoit dit que la fomme
feroit mife entre les mains d'un particulier folvable & folide. Or, quelqu'un efl folvable, dès qu'il a du bien de quelque nature qu'il puiffe être; il elt conGdéré comme tel,
pourvu que fes facultés foient fuffifantes aux engage mens qu'il
a contraélés; mais il n'eH: folide que lorfque les biens qu'il
pofiede font de la nature de ceux fur lefquels on peut affeoir une hypotheque utile, tels que des immeubles. Ainli
un particulier, quelque riche qu'il foit en billets, rentes &
autres effets qui n'ont aucune fuite par hypotheque, n'e{l;
pas folide, quoiqu'il foit très-folvable, parce que fi des affaites malheureufes ou fimulées l'en dépouillent réellement
ou en apparence, le créancier n'a plus aucun droit fur des
fonds qui changent de nature en changeant de maître. Sous
ce point de vue Cauffemille aurait manqué 1t l'exécution des
volontés du. fieur Vacher, en plaçant fur la tête de la Dlle.
Bremond,' parce que, quoique enrichie des libéralités du fieur
Vachier, cette femme ne préfentoit aucune folidité, n'ayant
reçu dans cette fucceffion que des billets 1t ordre, des let~
tres de change & autres effets de cette nature.
vero.
�Il U
PAL AIS
D J!
PRO VEN C J!;
157
Non feulement la Dlle. Bremond ne devoit pas être choifie,
parce que fa fortune ne préfentoit aucune folidité, mais encore parce que le fieur Vachier avoit prohibé que cette
fomme fût lailfée dans fa fuccelIion, en ordonnant qu'elle
en feroit féparée tout de fuite après fa mort. S'il n'avoit été
convaincu du peu de sôreté qu'elle préfenroit, il auroit dumoins permis à Caulfemille de l'y lailfer. On difcuta enfuite
les facultés & le peu de folvabilité de la Dlle. Bremond, &
on s'aida d'une tranfac1ion palfée enrr'elle & fon fils, qui
la dépouilloit de tout ce qu'elle avait à prétendre dans la
fuccefIion de fon mari, moyennant une penfion viagere de
400 liv.
Par Arrêt du 3 Mars 1777, au rapport de Mr. le Confeiller de Chenerilles, l'aéle de confl:itution de rente fut déclaré nul & de nul effet & valeur; la Dlle. Bremond fut
condamnée au paiement des 8000 liv., avec intérêts & dépens. Ecrivant Mes. Verdç:t & ......
ARRÊT
XX.
Le Corps procédant en difeipline 6' fur une plaillte portée colltre
l'un des Mem/;res, peut-il infiruire & juger verhalement [ans
avoir cité légalement l'accufè?
E
NI 774 le College des Notaires de la ville de.....:
s'alfembla & délibéra de nommer deux Commilfaires
pour prendre connoilfance d'une plainte portée contre Me.
Jerôme...... Notaire de la même ville, & informer en difcipline. Nouvelle alfemblée dans laquelle les Commilfaires
nommés demanderent des adjoints. L'un des Syndics ajouta
qu'il avoit été porté d'autres plaintes contre le même, non
moins graves que la premiere; qu'il paroilfoit être de l'honneur
du College de les approfondir & d'en faire matiere dans
la même information. On délibéra de nommer des adjoints;
douze futent d'avis d'informer auffi en difcipline fur les nou-;
�158
JOURNAL
veaux faits, & fix opinerent de fe borner aux premiers.
L'information commenera le 19 Août; fix 'témoins furent
entendus fur le fait du placet, & un témoin [ur chacun des
autres faits.
Le 2.2. Septembre l'accufé préfenta un comparant aux
Syndics des Notaires; il les requit de déclarer la caufe pour
laquelle il n'avoit point été convoqué; il leur. déclara qu'il
regarderoit leur filence comme un aveu de ne l'avoir pas
convoqué à deffein, & protefia de [e pourvoir pardevant
qui de droit. Le 2.9 il préfenta requête au Lieutenant, en
injonaion aux Notaires de déclarer fi c'étoit par oubli ·qu'ils
ne l'avoient pas convoqué, de faire une réponfe précife pour
fe foumettre à cette convocation, autrement & faute de
réponfe, il demanda qu'ils fuffent affignés pour le voir ainfi
düe & ordonner. Décret du même jour qui accorde l'injonaion, & en cas de refus l'affignation.
Le même jour délibération du Corps, qui prenant en main
le fait & caufe des Syndics, leur donne pouvoir de pourfuivre
contre la requête par routes [or tes de voies, & d'agir dans
cette affaire, même en faifant ufage des infiruaions prifes en
difcipline. Cette délibération fut fignée par quarorze Notaires. Le' S Oaobre requête incidente de Me. Jerôme......
en oppofition & caffation de la délibération du 2.9 Septembre,
comme nulle & injurieufe.
Le 6, défenfes des Notaires fur la requête principale, par
lefquelles, en demand~nt le déboutement de la requête de
M'e. Jerôme...... ils offrent de remettre entre les mains du
minifiere publrc les infiruaions prifes contre lui en difcipline, s'il offre de fe jull:ifier aux yeux de la Jufiice. Le
fnêrne jour défenfes [ur la reqùête incidente dom les Notaires demandent le déboiltement pur & fimple. Le 9, réponfe de Me. Jerôme...... qui, fans .approuver l'infiruaion en
difcipline qu'il fe propofe de faire déclarer nulle & attentatoire, offre de fe juHifier devant les Magifirats de toutes
les imputations. Le lendemain le Procureur des Notaires
demanda, attendu l'option de Me. Jerôme...... de fe jufiifier
(levant le Tribunal; aéle de la rémiflion des injlruélions prifts
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
159
tn difcipline par ordre fupùieur, [e rendant pour [es parties
dénonciateur contre Me. Jer6me ........
Le même jour Sentence qui concede aél:e de cette rémiffion & déclaration de Ce rendre dénonciateur; déclare
la délibération dont s'agit irréguliere, attentatoire à I~au
corité du Tribunal, nulle, & comme telle la cafre; ordonne
aux Syndics de convoquer Me. Jerôme........ routes les fois
qu'il y ama licu , à peine de 1000 liv. d'amende.
Me. Jerôme........, fit fignifier cette Sentence, fans approbation de la rémiffion & dénonciation faites, & fauf d'en
appeller en ce chef.
>
Le jour même de la Sentence, délibération des Notaires, qui défavouent la conduite de leur Procureur & la
dénonciation par lui faite à l'Audience, ainfi que la rémiffion
faite dans cet objet, donnant pouvoir aux Syndics de notifier cette délibération & défaveu ta,nt à Me. Jerôme........
qu'à leur Procureur & au Procureur du Roi. Sur la fignifi.
catio'n ,le Procureur notifie à Mr. le Procureur du Roi &
à Me. Jerôme........ le défil1:ement de la dénonciation, &.
promet de retirer les pieces du greffe. Les Notaires levenc
des lettres d'appel qu'ils font lignifier, & le '7 Novembre
requête de Me. Jerôme........ par laquelle il demande qu'il foit
pourfi.livi fur l'appel ainfi qu'il appartient, & cependant in",
jonél:ion aux Notaires de le convoquer, fauf & réfervé fan,
appel in quantùm .contra. Décret de fait mQ(1tr~ à partie; &.
après des requêtes contraire~ intervient Arrêt qui accorde
les fins prifes par Me. Jerôme........
Sur l'appel de I~ Sentence, on difoit pour les Notaires,
qu'il n'y avoit dans la délibération rien que de régulier, &.
rien qui pùt attenter à l'autorité du MagiGrat. Ils éroient,
quand ils ,ont délibéré" beauco(lp plus que n'exigllnt les
Arrêts de la Cour. La délibération n'a rien décidé, quant
à la convocation de Me. Jerôme.......... Il ,était exclu des
ijfremblées par une délibération verbale, & alors le Lieutenant n'étoit jnvefii de rien. Il n'y avoit donc dans la,
délibiration verbale rien qui pùç attenter à l'autorité du
Lieutenant. L'ell:C!uft.QU Jle Me. Ierôm~ ..,..... étQit up~ cop.~
�I~
JOURNAL
féquence nécetraire de la procédure eo difcipline qui avait
été prife par ordre fupérieur. La délibération qui était attaquée pardevant le Lieutenant, ne faifoit que prendre en
main le fait & caufe des Syndics, leur donnait toUt pouvoir & approuvait leur conduite.
Les Notaires ne viennent point incriminer Me.,Jerôme.......
(continuoient-ils); ils ne demandent que fa jufiificatioD.
En vain dirait-il que c'eft la jaloufie qui les fait agir; toutes
leurs démarches prouvent le contraire. Me. Jerôme
doit
favoir combien les fonétions des Notaires font précieufes &
délicates; il fait qu'une ville entiere a les yeux fur eux, qu'ils
d'oivent écarter jufqu'au moindre foup~on. Me. Jerôme........
n'en eil: pas exempt. Des dénonciations Ont éte faites; des
placets ont été adretrés; une procédure en difcipline faite
par fes Collegues contient des inculpations fones. Qu'il
diffipe les nuages qui fone fur fa conduite, & on le reverra
avec plaifir rentrer dans les afièmblées; qu'il prouve à la
J uftice qu'il eft il;lOocent, & dès-lors il eH: sûr de l'être
dans le College des Notaires.
On répondoit pour Me. Jerôme
que les Notaires lui
offrent de fe jul1:ifier, & ils femblenr le défier de pouvoir
le faire. Leurs plaintes graves ne fone que des fuppofitions;
& fi leur procédure en difcipline avoit eu la moindre réalité, auroient - ils défavoué la dénonciation faite par leur
défenfeur? l'impuiffance feule de la pourfuivre a été caufe
du défaveu. Ces inl1:ruétions en difcipline étaient des aétes
nuls & monfirueux, inconnus à Me. Jerôme........ qui n'avoit
pas été entendu, que l'on n'avoit pas même requis de comparollre.
Les Notaires qui ont fenti toute l'inutilité, tout le, danger
d'une condamnation verbale, -auffi impollible à connoÎtre'
qu'à attaquer, ont voulu réparer leur fautre démarche, en
prenant pendant procès la délibération dont s'agit; mais les
parcies étaient liées pardevant les Juges ordinaires; il ne
dépendait plus du College' d'attenter au procès p<lr cene
délibérarion. C'en donc un aéte nul, irrégulier & attentatoire à l'autorité du Magiil:rat qui était inveili.
.
-
,
Un
�DU
PALAIS
Dl!
PROVENCE.
lOI
Un Officier public ne jouit -·il pas de fon état jùfqu'à
ce qu'un juge meut l'ait déclaré coupable? L'innocence fe
préfume toujours. 11 ne fuffit pas d'être accufé; il faut des
preuves, & jufqu'à ce moment il jouit de toute l'intégrité de
fon Office. D'ailleurs même après cette procédure, Me. Jerôme....... a été convoqué; il étoit donc exclu & non exclu;
il difcutoit enfuire l'imputation contenue dans la plainte.
Mr. l'Avocat-Général de Caliifanne obferva que tous les
Membres de la fociété ont pour furveillans & p.our protecteurs, s'ils en font dignes, ou pour réformateurs, s'ils le
méritent, les Tribunaux ordinaire!; mais il efl des Corps
qui trouvent ce même fecours ou cette même févérité dans
le fein de leur Ordre, College ou Communamé. Toue
COlpS établi fous les Loix de la Jociété généralè a des
droits à fa proteétion. Chacun a des Loix particulieres;
mais chacun en même tems eft fournis aux générales. Delà
toutes Communautés ont des chefs; routes ont une autorité
précieufe fur chacun de leurs membres, mais non une auto~
rité de force, de violence, de tyrannie & de defpotifme.
Elles ont une autorité douce, correétionnelle, ~micale & de
conciliation, dont l'honneur fait la bafe, dont la paix faie
le motif, dont la jaloufie peut feule être l'ennemi. Plus
l'état doit fe rapprocher de la confiance publique; plus
cette autorité correétionnelle efl: néceifaire; .plus cependant
l'exécution doit en être ménagée; car alors plus l'honneur
eH néceifaire dans une profe/Iion, moins il doit être atta~
qué légéremenr. Le Corps eH tenu de s'aifujettir, non aUl(
formes prefcrites par les Loix, mais à des regles générales
qui puiifent le garantir de furprife, & qu'on ne peut en..
freindre fans violer les premiers principes. S'il exiHoit dans
un Royaume policé une Compagnie qui fe prétendlt indé..
pendante de tout pouvoir, où le Corps crût ne rien de~
voir aux membres, tandis que les membres devroient roue
au Corps, où la rivalité pùt être le motif d'exc1ufion, Oll
j'innocence calomniée ne pût point avoir de reifource, c~
feroit. fouffrir le défordre au milieu de l'Etat.
S'il eU une "profeŒon e1Tentielle ~ ~ui fe rapproche plU3
.Alinéa 1771 & fuiv,
X
�Ilh
Jou RNA r. "
de l'honneur; s'il en eCl: une qui ait befoin de la confiance
publique, c'eG: celle du Notaire. Lui feul eH maître de la
fortune .des humains au moment où celfe leur exiHence.
Tout doit être verbal en fait d'inHrutlion en difcipline
(difent les Notaires). Mais d'après le principe & d'après
la conduite des Notaires (obferva Mr. l'Avocat-Général) il
n'y aurait eu de verbal que ce qui pouvoit avoir trait à
l'innocence de Me. Jerôme........ Tout ce qui pouvoit l'incriminer était écrit; au lieu de tout conHater par des délIbérations, le Corps des Notaires a confommé des irrégularités par une irrégularité plus grande encore, en prenant
une délibération verbale, par laquelle il enlevait à Me. Jerô.
me........ les prérogatives communes à tous les membres.
L'inilrutlion contre Me. Jerôme........ a été écrite; celle qoi
pouvoit être pour lui, n'a été que verbale, -ainli que le
jugement qui a fuivi, & les fignifications qui ont pu lui être
faites. Ainli la conduite des Notaires a été irréguliere, fi
en la confidere au moment de l'inHrutlion; elle ne l'a pas
été moins au moment du jugement. Par cet atle il ell:
exclu des prérogatives de fon état; il eil écarté du fein
de fa Communauté, & 'il n'en conHe que verbalement.
N'eil-ce pas enlever à un accufé tous les moyens poŒbles
de fe juHifi"er? N'eft-ce pas le frapper du plus grand coup,
en lui lailfant méconnoltre la main qui l'a frappé? N'eH-ce
pas en un mot le comble de la vexation & de la tyrannie,
que de condamner quelqu'un [ans l'entendre, & faJJs conligner le jugement que l'on porte contre lui dans un dépôt
quelconque? Efr-ce donc là une maxime qui puilfe avoir
lieu dans une Monarchie? Fondée fur l'autorité abfolue, &
ne connoiffant d'autres bornes que celle que peur fixer le
defp6tifme, c'eil-à-dire, fa néceŒté, elle détruirait bientôt
l'elfence d'un Gouvernement auŒ vrai & aufli naturel que
le monarchique. Toutes les [ociétés particulieres d'un Gouvernement ne peuvent pas être formées fur des loix diffé.
rentes elfentiellement de celles du Gouvernement lui-même.
Ainfi il ne peut y avoir de République dans une Monarchie.
En vain dirait-on qu'on peut imiter ces infritutions admi-:
�DU
PALAIS
DE
PROVENçn.,
163
rables, ~ moins'; dehinées à aifurer les propriéraires, qu'à
régler les mœurs, & où les Légifiareurs pouvoient néglîgei
de marquer la peine dont on devoit punir les grands crimes,
parce qu'ils avoienr tracé des moyens de les prévenir. La
nature de notre Gouvernement excluait cet établiifement
meurtrier; le citoyen ne peut s'y défendr~ que par des
voies légales, & le Souverain d! garant de fon é.rar. On
cherche toujours à nous rapprocher de Rome. On a' voulu
a-ffimiler la difcipline intérieure des Corps aux Cenfeurs
publics: Sans en faire fentir ici roure la différence, on fe
bornera à dire ce que nous apprend Tite-Live: qUé les,
Cenfeurs ne pouvoient exclure - perfonne du Sénat fans en
écrire les raifons. Il faut remarquer qu'il n'y avoit que deux
Cenfeurs pour rout le peuple romain, & qu'ici ce font rou·
jours les Corps qui cherchenr à jouir de ce droit contre le
fimple particulier. Toute fociéré particuliere a" dont> des Loix
primitives qui font les Loix eifentielles du Gouvernement.
Dès-lors la conduire des Notaires a été irtéguliere; ils
ne devoient pas oublier fans doute que leur jugement pou.'
voir être attaqué; il ne pouvoir l'être, s'il éroit verbal; l'exécution a pour ainfi dire précédé le titre; car de deux
l'hofes l'une: ou Me. Jerôme........ érait innocenr des imputations qu'on lui faifoit , ou il érait coupable. S'il était in.
nocent, pourquoi craindre de conligner dans les regifires
du Corps les preuves de fon innocence & de la calomnie?
S'il était coupable, le Corps n'était pas moins inréreifé à
donner au public un exemple rigoureux de fa jufiice & de
fa févérité. Dans route fociété la vraie gloire n'dl: point
de cacher les prévarications & les vices des fléaux qui peu.
vent _exiHer , & de couvrir par-là au Pllblic l'écueil q'ui l'en~
vironne; le Corps doit publiquement e,~ef(;er rome fa force 1
contre' le membre qui le déshonore.
Les Noraires devoient , comme le leur avoit ordonné le
vengeur public " prendre cohnoijJance de la plainre en corps
de Communauté, faire une procédure en difcipline & ell
rendre 'compte en re[lvoyanr le placet; ils devoient, pour
fe ,fatisfaife 'à eux-mêmes & rendre hommage à ce qu'ils
X:l.
�l~
JOURNAt
devoient 11 la fociété, ne point garder le liIence vis-li-vi!!;
le rniniftere public; fo!licirer la Jullice conrre \In de leur,
Col1egue; exciter fon zele & lui demander d'exiger une juf.
tificarion devenue néceffaire; ils l'euffent obrenu fans doute;
& dès-lors ils euffenr été fatisfaits.
Me. Jerâme.,.... eH inculpé griévement dans la .procédure
en difcipline 1 Ion honneur el1: conféquemment dans .Ia potrî'op la' plus' dangereufe, la plus délicare, la plus facile à
foupçonner, 1; plus aifée à abufer peur-êrre. Tout el1: délicar dans les fonél:ions des Notaires; rout el1: fournis à leur
empire: conrrat, venre, achar, échange, ceffion, tranfport,
toyer, P,rocuratio,n, tel1:amenr; ils ont .t9ut entre leurs mains.
Un ciroyen ne peur pas faire un pas dans la fociéré qui ne
touche à liintérêr, fans' avoir befoin de fecou-rs; ce n'el1: pas
un érar libre, il a une exécution néceifaire & fous l'autoriré
parriculiere de nos Souverains; fon importance ne -permet
pas de dourer un feul infrant qu'il a le droit de faire contre
\,ln de fes membres une procédure en difcipline ; ils doivent
éviter j,ufqu'au moindre foupçon ; il ne leur (ullir pas de n'êrre
pas coupables '. ils doivent encore en convaincre le public,
aimer à le leur prouver pour en obrenir fa confiance. C'el1:
le'feul morif qui doit exciter leur zele, rout autre but fel'oit horrible & reromberoit fur eux-mêmes, & l'on n'imagine pas que la jaloulie & la rivaliré' puiffent êrre admifes
dans une affociation dont l'honneur & 1" délicareffe femblent
devoir être le lien par effence._
L'érar d'un ciroyen el1: la portion la plus précieufe de fon
exifl:ence; & quand cet état tien,r 11 fan honneur, quand on
ne peut le lui enlever fans le couvrir d'opprobre, il devient
bien aurrement intéreffant pour lui & plus refpeél:able pour
quiconque feroit' renté d'y porter atteinte.
"
L'état de Me. Jerôme...... aéré atraqué; il a é~é déféré
par le miniHere public à fes confreres, comme un fait dont
il falloir éclaircir la conduire; ils y ont éré forcés, ils fe
font affemblés, ils ont délibéré, I,~!:!r honneur ne leur a pas
permis de garder le lilence; celui ,de leur collegue éroit ,cpmpromis; celui du corps érait compromis; s'ils ne donnoient
�nul? A ù:c s 'n Il P Ii 0 V Il NC E~
16)
pas un libre 'cours à la vérité; leur zele & leur délicatelfe
ne leur permettoi ent pas même de lailfer dans l'oubli d'autres faits étrangers aux premiers; ils nomment des Commilfaires qui informellt en difcipline. Jufqu'à ce moment tout
eft régulier, tout eH fraternel; point de trait de defpotifme,
point d'aéte de tyrannie; le vengeur de la Loi a parlé, la
Loi a agi, 'c'eft à elle à prononcer. Mais la procédure finie,
quelle eH la conduite des Notaires? Un an fe palfe fans qu'on
en voie aucune trace.
Quoique des exemples récents aient paru confirmer non
abfolument, mais fous certa in rapport, cene procédure verbale, les conféquences font frémir, & il eft elfentiel de favoir
les modifier. Il eH de ces regles que la raifon feule & l'équité
prefcrivent, de ces regles qu'on ne peut enfreindre fans violer
les premiers principes de la juftice naurelle. Peut-on, par
exemple, concevoir l'idée d'un Tribunal poffible, excepté le
Tribunal à jamais cruel & prefque aboli de l'inquifition, où l'on
juge un accufé peut-être innocent, peut-être auffi éloigné da
ctime après qu'il aurait parlé, qu'il parolt en être rapproché
avant que de s'être défendu, fans le citer & l'entendre?:
C'ell cependant ce que l'on voit dans la procédure en di(-.
cipline des Notaires.
Mais Me. Jerôme...... a été cité, difent les Notaires; il a
refufe de comparo1rre; ce n'eft pas lui que l'on a jugé, c'dl:
fon refus. On l'a cité verbalement; fan refus a été verbal,
on l'a jugé de même. Tels font les droits du Corps, telle
e!j: la conféquence de la procédure verbale. Lè code de la
procédure en difcipline dt écrit dans le cœur de l'homme
vertueux; il n'eft aftreint à aucune formalité, & la convic-.
tian fuflit pour alllorifer fa févérité. Si cela étoit vrai ( obferva Mr. l'Avocat-Général) il faudroit abolir à jamai? cette
procédure; cette procédure verbale ne reroit autre chofe' que
1,\ plus terrible anarchie, le defpotifme le plus affreux, l'oc-cafion de fervir les moindres mouve mens du fanarirme,
enfin la' fource de toUS les abus; dégagée de tolite efpece
de formalité, difpenfée de rendre compte, affnnchie de toute
efpeçe de repréf,!illes, fes vengeances fer.oieot terribles, &
�166
Jou RNA L
fes injufiices éternelles, & iJ n'y aurait pas plus de moyens
de fe garantir des unes que -d'obtenir la réparation des autres. Si l'on peut foutenir le jugement verbal, au moins fautil qu'il ait été précédé de formalités préalables qui jufiifient
fa néceffité & la fageffe de ceux qui l'ont rendu, L'accufation ne fit jamais un coupable; la juHification que ne craigniront pas de fubir les plus grands hommes accufés, a
prouvé plus d'une fois l'innocence de leur conduire & la
calomnie de leurs dénonciateurs; il faut donc que Me. Jerôme...... foit entendu avant d'être jugé. On pré fume trop
bien de lui. On a pour garant de fes fenrimens l'honnêteté
du minifiere qu'il. remplit, & l'on efi perfuadé qu'il ne réfifiera pas plus long-temps à l'envie qu'il doit avoir de fe
jufiifier. Ses Collegues lui rendront des fonél:ions que le
foupc;:on feul avoit pu lui faire enlever, & il jouira avec un
nouvel éclat des prérogatives attachées à fon état.
Mr. l'Avocat-Général conclut à ce qu'ayant tel égard que
de raifon à l'appel émis par les Syndics des Notaires, l'appellation & ce dont efi appel fuffent mis au néant, quant
à ce; & de même fuite, qu'ayant tel égard que de raifon
aux fins & conclufions prifes par Me. Jerôme...... la délibération du. 19 Sepremhre fût déclarée nulle & irréguliere, &
comme telle caffée, fatlf aux Syndics des Notaires de pourfuivrè 'éux-mêmes j'inCtruél:ion en difcipline Celon les forma'lités requifes, ou d'<~n remettre la pourfuite au minifiere
public.
Arrêt du 2-7 ,Mai 1 77, prononcé par M. le Premier
Préfident·, qui ca{fe la éHbérarion du -College de Notaires
comme nulle & irréguliere, 'fauf allX Syndics de pourfilivre_
eux":m'êmes l'infiru&ion en difcipl:ine, ou d'en remettre la
pourfuite à Mt. le Procureur~GéDéra'l du Roi, dépens 'com,;
penfés. Plaidant Mes. 'Gaffier & Simeon.
�DU
PALAIS
bB
ARRÊT
PRt>VB NeE;
167
XXI.
L'original d'ull titre étant égaré, l'extrait fur extrait peut faire
pleine & entiere foi.
N l'année i 62') , fut fait un Réglement concernant l'ufage
des eaux de la foure appellée Arconte, dans le terroir
des Baux; ce Réglement détermine l'ufage des eaux, l'entretien du canal, & fixe la forme & la concribution aux réparations. Le procès-verbal , le rapport, le Réglement provifoire, le Réglement définitif renfermés dans un même
cahier, furent dépofés au Greffe de la Jurifdiél:ion des
Baux.
Le lieur de Coye & fes conforts fommerent le Greffier,
le '5 Janvier 1773, de leur en expédier un extrait; celui-ci
répondit que les minutes n'éraient point au Greffe, mais
qu'il en avoit trouvé un extrait collationné par Viaud, Notaire. Enfuite de cette réponfe, ils affignerent Mre. de Fonta nille & Mé. Frachier devant le Juge des Baux le 12
Février, pour voir dire que cet extrait tiendrait lieu d'original, & qu'il ferviroit de regle à ceux qui avoient l'ufage
des eaux.
Le lienr de Fontanille confentit que l'extrait remplaçât
les originaux. Le Juge accéda enfuite au Greffe, chercha les
originaux, trouva le déficit d'un regiftre qui devoit contenir
les Sentences rendues depuis 1622 jufqu'en 1675,.& .rendit .
fa Sentence le 1'5 Février 1774, par laquelle il ordonna que
l'extrait qui [e trouvoit entre les mains de Me. Porcellet,
Greffièr, [eroit mis au Greffe, pour y tenir lieu des originaux,
~ condamne Me. Frachier aux dépens.
. Me. Frachier en appella pardevant la Cour, & préfenta
une requête en garantie contre Me. Porcellet. Il coarroit
deux mo~ens 4e nullité, & un autre d'injuftice. .
On, difoit pour l'appellant, qu'on ns: peut rien ordonnj:r
E
�168
Jou
RNA L
en jull:ice contre une partie fans l'entendre ou fans la cirer.
L'omiffion de cerre formaliré elfentielle enrraîne la nullité
de la Sentence: in concedendo, dit la Loi 8,.ff. de aquâ &
aquœ pluvi.-e arcendœ, non tantùm eorum in quorum loco aqua
oritur, verum etiam eorum ad quos ejus aquœ 'ufus pertinet
voluntas reCJuiritllr, id efl, eorum quibus aquœ fervitus d eheatur.
.
La demande du fieur de Coye & conforts intérelfoit effentiellemet la Communauré des Baux & divers propriéra-ires
riverains; ils auroient dÎl êrre appellés au procès, parce qu'un
jugement n'a de force & d'effet que contre ceux entre qui
il a éré rendu.
On foutenoit d'ailleurs que dans taures les caufes O~I le
Roi, l'Eglife où le public ont inrérêt, on ne les peut juger
fans communication préalable au miniHere public. ( Arrêt
de Réglement du 14 Mai 1696, rapporté par Mr. de Regulfe, rom. 1, pag. 195. ) D'après l'art. 3 du Réglement
de la Cour de 1672, titre des Audiences, on ne peut pas
même les porrer à l'Audience fans cette communicarion.
D'après l'Ordonnance de 1667, tÎt. des Req,rêtes civiles, art.
34, l'omiffion de cette formalité elt un moyen de requêre
civile.
La caufe que le Juge des Baux a jugé fans cette communication intérelfoit elfentiellement le public; la. parce
que la Communauré y avait un inrérêt réel, comme propriéraire de la fource; 2 0 • parce qu'il fallait donner force
de Loi à un extrait qui n'en avait point de lui-même;
30 • parce qu'il fallait fraruer fur la foull:raél:ion des Sentences
dans le maintien defquelles le public fe trouvait intére1Té.
Sur l'injull:ice de la Sentence, on difoit que l'extrait qu'on
préfenroit pour remplacer les originaux, érait Iln exrrait fUl'
extrair. Or, ,un extrait fur extrait ne fait point foi en juf..
tice. Ce principe ne fauroit êrre conteHé ; il efl: appuyé fur
l'authentique fi CJuid, cod. de edendo; fur.la Loi fancimus ,
cod. de diverjis refcript. Il eH artefté par numoulin (ur cette
authentique. Il eH érabli pàr Paul de CaHro fur la même
Loi fançimus; par Mornac fur la Loi CJuibufcul]lCJue; par' le
Préfident
�DU
PALAIS
DE
169
PROVENCE.
Prélident Faber, cod. defide infirum., déf. 1; par Boerills,
décif. 3 6 ; par Guipape, quefl:. 118 i & c'efl: ainli ,que la Cour
le jugea par Arrée du 3 Juillet 174?,' prononc~ par ~1r. le
Prélident de Peynier, en faveur du lIeur"Marquls de 1 rans,
contre la Communauté du Muy. Cee Arrêt rejecca du procès
un extrait fur extrait que la Communauté avoie produit.
Si l'on donnoit à un extrait fur extrait 'la force d'un ju~
gemenr ligné par le Juge, ou d'un acre ligné par les parcies,
on mettroie l'état & la fortune des citoyens enrre les mains
d'un homme dont l'oubli de (es devoirs entraîneroie des
maux funefles. S'il eH imporcant de donner aux perfonnes
publiques un cer.cain degré de confiance, il l'ell: encore plus
de refufer de les rendre les Arbitres fouverains de notre def~
tinée & de nos forcunes.
Pour fixer la foi due à la copie d'nn acre donr l'original
efl: perdu, il faut, fuivanr les Auteurs qui 0nt approfondi
cecce queflion, en diHinguer trois efpeces: 1°. celle .faite
par le Notaire qui a re,;u l'original; '2°. celle qui a été tirée
de l'original par un autre Notaire; 3'" enfin celle que l'on a.
faite fur une autre copie.
La premiere fait une pleine & entiere foi, tant à l'é'''ard
des parties qui ont patfé l'acre, qu'à l'égard des tiers ~ux~
quels on l'oppofe. C'efl: ce qu'on appelle. une copie en
forme. ( Dumoulin , fur la coutume de Paris, §. 8, glof. l ,
n. 41. )
La feconde ne peut mériter la confiance de la Jufl:ice ,
qu'en tant qu'on y a obfervé les formalités que la Loi delire
p~JU~ lui imprimer l'authenticité publique, c'efl:-à-dire, lorf~
qu'elle a été faite enCuüe de l'Ordonnance du Juge & el\
pré,cence des 'parties intéretfées. C'efl ainli que s'exprime le
Prelident Fab.er, déf. '2 & 1 l , cod. de fide injlrum., &. Mr.
de Bezleux, Itv. T, tit. 2., chap. 2., §. '2.
La copie de la troifieme eCpece, c'efl-à-dire l'extrait fur
eX1.rait, ne' fait p~ foi. C'e~ la décifion de l'authentique fi
qUlS', cod. deeqendQ, des LOlx & des Auteurs ci-devant cités
& de l'Arrêt rapporté par Boniface, tom. T, pag. ')49.
,.
. On r~pondoit pour le Îleur de Coye & conforts l qn'il n'étQi~
Annees
ln 5 & fuiv.
y.
•
�170
Jou
R N Il t
_
pas néce!raire d'appeller au procès la Communauté des Baux;
parce que [on droit de propriété des eaux n'étoÎt point con·
tefié, & que dès le moment que la [ource entre dans le
canal des propriétaires des moulins, elle devient toute privée, & elle appartient à ces partit:lIliers. Or, les Réglemens
dont la Sentence remplace les originaux, ne concernent
précifément que les obligations refpeaives des mêmes particuliers; il allroit donc été abfurde d'appeller la Communauté dans une contefiation qui lui eft ab[olument étrangere. Pour ce qui eft des particuliers riverains, il eût été
également ab[urde de les appeller, parce qu'on ne pouvoit
les forcer de plaider malgré eux. Le défaut d'intérêt de la
Communauté rendoit inutile la communication du mini!lere'
Rublic.
Sur le fonds, on difoit que le moyen de remplacer la
minute d'un aae par extrait, efr autorifé en droit. Le Notaire, dit Fromental, vo. Notaire, qui après avoir livré une
expédition perd la minute, peut faire ajfigner celui auquel il
l'a livrée, & la copie 'lui lui en fera donnée lui tiendra lieu
d'original. ( Danty, de la preuve par témoins, pag. 330. )
Brillon dans [on Diaionnaire des Arrêts, au mot minute,
n. 2, rapporte, d'après Papon , liv. 4, tit. 14, un Arrêt du
2 l Juillet Ï 164, qui condamna un Notaire à faire gro!royer
un contrat dont le Clerc avoit égaré la minute. Cet Auteur cite trois autres Arrêts qui l'ont jugé de même.
C'efi une maxime certaine que quand l'original d'un aae
perdu, & qu'on ne peut pas imputer à celui qui produit
l'extrait d'avoir concouru à cacher-ou à perdre l'original, J'extrait, fait pleine foi. Ainu jugé par Arrêt-du 24 Juillet 1771;
dans un procés qui s'éleva entre deux compétiteurs à la cure
de Lambefc, & qui fut jugé au Parlement de Grenoble,
entre M. l'Archevêque d'Aix & le Chapitre St. Sauveur de
la même ville.
Quand un extrait fur extrait a été approuvé en jugement;
in judicio approDatllm; quand il eft [outenu par des préfomprions & par des preuves concluantes, il lie inconteHablement la foi publique. C'eft la Doarine de Decormis, tom.
en
�DU
PALAIS
DE'
PROVENCE.
17 1
r
col. la 1:2., qui dit que l'on a une preuve parfaite, quand
o~ a un extrait qui ne peut être contené, ou dont on voie
quelque exécution. Tous I:s Auteurs e?fe:gnen~ ég;al;mene
qu'une piece produire en Jugement, qUI n a palOt e re contenée, qui a [ervi de morif & de bafe à la décifion des Tribunaux, acquiert par cerre épreuve toute la force légale qui
lui ea néceffaire pour fixer la vériré.
Par Arrêt du 6 Juillet lin, au rapport de Mr. le Con[eiller de Thorame fils, la Sentence fut confirmée, la de':'
mande en garanrie fut rejetée, & Me. Frachier fut condamné
aux dépens envers coures les parties. Ecrivaor Mes. Portalis
& Sauvere.
ARRÊT
XXII.
L'exemption du paiemeut de la dîme peut être acquife par la
po.ffèJlion immémoriale.
L
E Curé d'Unis jouiffoit de la dîme de fa Paroiffe, pOUl'
lui tenir lieu de porrion congrue; l'Evêque de Gap avait
une parrie de celle des vignes du terroir. En 1768 la par.
tian congrue des Curés ayant été panée à ) 00 liv., Mre.
Maximin, pour lors Curé, eo fit l''lbandon à M. l'Evêque
de Gap, qui p.erçut la totalité de la dîme jufqu'en 1770.
A cerre époque ce dernier abandonna à fan tour cous les
revenus de la Cure à Mre. Robert, qui en éroir alors pourvu,
pour en jouir comme il l'auroir pu lui-même. Devenu dé.
cirnateur de fa Pareille, Mre. Roberr forma demande contre
Me. Vial, poffeffeur du fief de Sr. Pons, pour l'obliger à
payer la dîme; les panies convinrent de Mes. Arnulphy &
Pafcalis pour Arbitres, lefquels rendirent leur Sentence le
23 Avril 1774, par laquelle, fans s'arrêter aux exceptionsde Me. Vial, ils le condarnnerem avec dépens à payer les
groffes & menues. dîmes à la même coriré qu'on les payaitdans toute la Paroiffe d'Urtis. Appel de Me. Vial.
)-
~
�171.
JOURNAL
On diroit pour I~i, qu'il s'agiffoit de favoir fi un fief inha.;
biré, dont le rerriraire a rrop peu d'érendue pour avoir jamais eu des habitans, & dont les héritages n'ont dans aucun
temps éré fournis au paiement de la dîme, doit y êrre fournis
en faveur du Curé de l'une des Paroiffes voiGnes, lors même
que ce Curé eH dans l'impuiffance de prouver q~e ce fief
ell: enclavé dans la fienne.
. Dans des temps où l'ignorance & la [upernirion avaient
jerré un voile épais fur les vérités les plus inréreffanres, il
n'avoit pas été difficile de perfuader aux peuples que l'obligation de payer la dînle érait de droit naturel & divin.
Les Papes avaient profité de ce temps d'obfcurité pour
répandre cerre erreur ayec plus de fuccès: delà une foule
de textes du droit canonique qui le décident. Le Concile
de Trente même l'avoit enfeigné; il fut alors plus aifé de
'conduire les efprits à cetre conféquence, qu'on' ne pouvoit
acquérir l'exemption de la dîme par la pnffeffion de n'en
point payer; ce qui ell: droit naturel & divin, eH fans contredit imprefcriptible. Mais depuis que les nations plus
éclairées ont appris à remonter aux fources & à fe nourrir
dans l'étude des véritables principes, le préjugé de conGdérer les dîmes comme procédant du droit naturel ou du droit
divin, n'a plus pam qu'une fauire illuGon; on s'eH convaincu
que le paiement. des dîmes éroit d'inHitution purement humaine, & que le Clergé avoit fu profiter de la ferveur des
peuples & de fon crédit auprès des Souverains, pour changer en obligarion ce qu'il n'avait d'abord obtenu que de la
libérali~é des peuples.
, En effet, en remontant aux premiers temps du Chrinia~
nifme, on trouve que les dîmes avaient été raut-à-fait inconnues pendant les trois premiers fiecles : on en voit la
preuve dans les écrits de Sr.Ciprien.& de St. Augull:in;
ce qui a fait dire à Rigault dans [es notes [ur ceux du
premier de ces Peres de l'Eglife , que depuis le remps des
Apôrres jufqu'à ceux de Sr. Ciprien, on ne trouve aucune
mentiç>n des dîmes. Les offrandes des fideles avaient enl'jchi l'Eglife, & fourni des fonds plus que [uffifans pour
�1
DU
PAL AIS
D E
PRO VEN CI!;
173
a fublifl:ance de fes Minifhes ; mais infenfiblement , au lieu
de continuer d'employer' ces oblations à la fubfifbnce du
Clergé & des pauvres, elles furent appliquées aux Evêques
& aux Bénéfitiers, qui ne jouiffoienr auparavant des terrl;s
de l'Eglife qu'à la charge d'en rendre compte. Les MInillres chargés du poids du fervice & de l'in!lruélion ,des
peuples, demeurerent fans fubfiflance fixe: pour y fuppleer,
on- commença d'exhorter les fideles au paiement de Id dîme.
L'exemple de la Loi ancienne fervit de texte à ces exhorrations ;, cependant les peuples ne payerent d'abord la dîme
que comme une oblation purement volontaire; mais avec
le temps, le Clergé prétendit Fexiger à titre d'obligation;
il en fit une loi <jrmée de reus les foudres de l'Egiife, les
excommunications furent employées pour la mettre en vigueur; il fallut des Loix de la part de la puiffance féculiere
pour mettre des bornes à fes entreprifes.
La Loi 39, au Code de Epifcopis & Clericis, fournit la
preuve de ces vérités. On y voit que les Empereurs défendirent au Clergé d'exiger à titre d'obligation une partie
des fruits des fideles, & d'ufer de vexations & d'excommunications pour leur arracher leurs offrandes: non opporUt
Epifcopos aut Clericos cogere CJuofllam ad fruc7us offerendos ,
aut angarias dandas, aut alio modo vexare , aut excommunicnre , aut anathemçztifare, aut denegare communionem, aut
idcirco non haptifare, CJuamvis u/iLs ita ohtinuit. Cete Loi
faite dans le fixieme liecle démontre que jufqu'alors la perception des dîmes n'avoit point été aurorifée à titre d'obligation : il eft même conftant que les peuples de l'Eglife
greque s'en font toujours fait un titre pour fe fouHraire à
ce joug, & qu'ils n'one jamais été foumis au paiement de
la dîme. Ceux de l'Eglife Latine ne furent pas fi heureux:
les inllances du Clergé foutenues par la crainte des excommunications y érouffere'nt là voix de la puiffance temporeIle; les Evêques y devinrent même affez puilIàns fur
l'efprit des Souverains pour les engager à faire d'autres
Loix en faveur des dîmes; & l'obligation de les payer
devint enfin générale dans les Eglifes de la communionRomaine.,
�lM
JOURNAL
Telle efi la véritable origine des dlmes; elle ne tient
certainement ni au droir naturel, ni au droit divin; auffi la
déciaon contraire du Concile de Trente a-t-elle été univerfellement rejetée. Lacombe, dans fan Recueil de Jurifprudence canonique, va. dîme, fea. 3, n. l , dit que Mr. de
la Faye, Avocat-Général au Parlement de Paris, dans fan
Mémoire contre la réception de ce Concile, la met au
nombre des erreurs qu'on y avoit approuvées. Le favant
Dumoulin dit auffi en pluaeurs endroirs de fes ouvrages que
la dîme eA: un droir purement temporel.
Or, fi la dîme n'e1l: ni de droit' naturel, ni de droit
'E1ivin; s'il e{l: vrai qu'elle e{l: d'in{l:itution purement humaine, de ample droit pofitif; s'il e1l: vrai de plus que
l'obligation de la payer a une 'origine qui n'efi rien moins
que favorable, comm ent fe pOllrroit - il que la po1feffion
confiante de ne l'avoir j,amais payée ne fût pas un titre
d'exemption légitime? Tout ce qui eLl: de droit naturel ou
de droit divin e1l: fans contredit imprefcriptible; mais les
dîmes n'étant que de fimple droit poficif, il faudrait donc
une Loi _exprefTe pour les déclarer imprefcriptihles. Pour ce
qui ell: des Loix des Papes, quoiqu'elles foient très - fufpeaes en mariere de dlmes, parce qu'elles ont toujours
préfuppofé fau!fement que leur étahli!fement éroit de droit
divin, il fuffit de parcourir les Décrétales, pour fe convaincre qu'indépendamment de plufieurs textes qui po~tent
que la cout·ume décide fi la dîme doit être payée ou non,
le chapitre· in aliquibu,s, tit. de decimis, reconnaît formelle.,
ment qu'il 'j a dans la communion de l'Eglife plufieurs
peuples qui font légitimément en po!feffion de ne point
payer de dlme. Ce chapitre ne condamne point cet ufage ;
il fe contente de répr.imer l'abus. qui s'était introduit de
donner des héritages à' cultiver aux perfonnes de ces Natians, pour ne point payer de dîme. Auffi Covarruvias,
v.ariar. refolut. liv. î , l'h. 17, n. 10, convient-il de bonne
fbi qu'il n'a trouvé nulle pa-r-t dans le Droit Canon que
les Laïques fu!fenr incapables d'acquérir par la po1fellion
l?exemption de payer la dîme.; car cerre exemption bien dif~
�DU
PALAIS
DE
PRovENCJi:
175
férente du droit de percevoir les dîmes dues aux Curés, ne
conulle qu'en celui de recueillir fes propres fruits fans déuaaion de dîme.
Le Cardinal de Luca, traité de beneficiis, difc. 32, n. 8,
avoue que l'exemption de payer la dîme s'acquiert par la
prefcription, & dit qu'il faut feulement difringuer le cas
où il s'aO'it de prefcrire l'exemption totale de la dîme,
de celui ~ù il n'dl queHion que de prefcrire la quotité;
que dans le premier, l'exemption n'e~ acquife qu'en
vertu d'une po!feffion immémoriale; au heu .que quarante
ans fuflifent dans le fecond. Cet Auteur atteHe la mêrr.e
maxime dans fon traité des dtmes, difc. 14, n. 9.
Gonzales dans fon Commentaire fur les Décrétales & fur
le chapitre in aliquibus, enfeigne auffi que la coutume &.
l'ufage font des moyens légitimes pour acquétir l'exemption
de la dîme, ou une diminution de quotité. F ontanella, de
paais nuptîalibus, traite la queHion ave.c plus d'étendue &
de netteté. lta Moneta, traité de decimis, chap. 4, n. IOp
Sanleger, refol bene! part. l, chap. 72.
Que difent les Ordonnances du Royaume? Les art. 49
& ')0 de l'Ordonnance de Blois ordonnent que les dîmes
fe leveront fuivant li coutume des lieux & la cote accoutumée en iceux; que les propriétaires, poffeLfeBrs, Fermiers
& autres tenanciers de terres, vignes & autres héritages
fujets au droit de dime, ne pourront enlever les fruits
qu'après avoir averti les décimateurs , qu'ils ne pourront
alléguer le droit de dîme n'être dû qu'à volonté, ni alléguer poffeffion ou prefcription autre que celle de droit.
Or bien-loin de contrarier les principes pofés ci-deffus,
les difpofitions de cette Ordonnance· n'en font que desGonféquences ; elles admettent que la prefcription & la pof.
feffion de droit peuvent être valablement alléguées contre
un moyen valable d'exemption des dîmes qui ne font que
de droit pofitif & d'infiitution purement hum~ine. Enfin
la coutume conHante de n'avoir jamais payé de dîme, &:
qui, lor[qu'elle eft immémori.ale, équivaut au ptus fort de
�'Î'76
Jou RNA L
tous les titres & al: privilege le mi~ux établi, ell: elle-méme
un titre légitime d'exemption. Dunod en fan traité de la
dîme & comment elle Je prefi:rit, attell:e que telle eH la
jurifprudence conll:ante du Parlemnnt de Befanc;on.
Il eft certain qu'il peut exill:er des terres fans alTujettiffement 11 la dîme. Me. Vial n'eH point un !impIe particulier dont les héritages enclavés dans une dîmerie peuvent
avoir échappé aux recherches du décimateur; les terres
qu'il poCTede comme exemptes, forment la totalité d'un
Fief & d'un territoire diHinél: & féparé de tous les territoires des' Communautés voi!ines. Me. Vial les poCTede avec
tous les dtoits de la haute, moyenne & balTe Jull:ice, &
de la direél:e univerfelle. Cet état des chofes favorife l'exemption qu'il réclame. En effet, on trouve dans le Recueil
d'Arrêts notables du Parlement de Dijon, par Me. Perrier,
& dans les notes de Mr. Raviot, tom. 1 ; quo 279, n. 10,
un Arrêt de ce Parlement qui jugea qu'un Seigneur laïc
avait prefcrit l'exemption de la dîme par la pofièffion d'un
temps immémorial.
.
A la force de ces moyens, Me. Vial réuniffoit une fin
de non recevoir infurmontable contre la prétention d.e Mre.
Robert. Ce Curé ne jufiifioit point que le fief de SaintPons fût enclavé dans fa ParoilTe. En fait, il eH conHant
& prouvé que le Fief. de Saint-Pons avoir formé de rous
les temps un territoire auHi difiingué & auffi indépendant
de celui d'Urtis que des autres territoires circonvoifins.
C'efi une erreur g.'offiere de [outenir qo'il n'y a point de
fonds fans ParoilTe. Les textes du Droir Canon & la' notoriété publique démentent cette alTertLon. Qu'on jette les
yeux fur le chapitre quoniam aux Décrétalés, tit. de decimis;
on y verra que le Pape Alexandre III. reconnoît formellement qu'il y a des territoires qui ne dépendent d'aucune
ParoilTe; car confulté par un Evêque pour favoir l'emploi
qu'il de'voit faire des dîmes novales de fon diocefe, ce
Pape répond que fi ces dîmes font perc;ues dans des terres
dépendances de quelque ParoilTe, il faut en lailTer le produit
b.
�DU·
PAL AIS \
~ JI ,~~ 0 V Il NeE.
f71i
?l cettè EghJ~ pilroiffiale; mais que fi elles· fO,ne pe(çues.daps
des terres Hui ne foient d'aucune Paroilfe", il efi ,au ·,choi",
de J'Evêque de les dilhibuer en faveur d'autres Eglifes, où.,
c;!'en garder le produit pour lui-même. 11 y a donc des,
terres qui ne font d'aucune Paroilfe. Le :fief de Taillas,
la rerre de Sanes, Lagneros, la Salle" le) Fief de Pilles à.
'lne lieue d'Unis n'one jamais d~pendu p'aucyne ParQilfe.
Tous ces Fiefs font exen!pts dei dJl11e~. 'Ieurs habitans. vont
affifier aux offices divins dans les Parojlfes circonvoifines j
iJs y récloment les fecours fpirituels.
,. •
Me. Vial ajoutoit que quand la P8.lfeffion feule. ne ft:roit
pas un titre d'exemption; q{la.nd fI / fe~9j~ çt:J9'.qup .f0A Fil;~
t;fi enclavé dans la Paroilfe d'U~till, fa- <jlJalité qe Seigpt;ur
haut jufiicier & direél: ~niver~l!l, fe,roit )rPTéI~mer' 1 que la)
dîme de fon territoire. fut arrcienttemenr 'inféo,dée à fes
auteurs. Depuis l'Edir de 17~8', les Seigneurs n'onç plus
befoin d'alléguer un titre d'inféodation;, lawqffèffiQn immé~
moriale leur fuffit.
.
.,'"t'
·,·f
On répondoit pour le Curé, que de droit: ççmlllun. 'it
n'y a aucun fonds qui ne.l foit fujet 4 la dîme" qUlllle 'lufl,
fuit la perronne qui le polfede, & qu'on ne pellt a)léguer.
aucune po!feffion ni prefcription , quelque longue qu'elle
foit, pour fI" difp~nfer de la payer. Celte. regl~., ,comme
toutes les autres, a néanmoins fes exceptions; il peut .Y1
avoir des fonds exempts de la dîme: majs il fayt c~nfi~éret.
que ceux qui po!fedent ces fonds & à .qui ces exemption!F.•
font perfonnelles, doivent jufiifier des titres fur lefqueIs
elles font fondées, c'efi-à-dire, d::s Bulles expédiées par·
le Saint Siege, & confirmées par Lettres-patentes de nos,
Souverains, parce que pour la validité d'uq !itre d'e"emption , il faut nécelfairemene le concours .de.s deux Puillances.
Anciennement ces titres d'exemptions a\'~ient éfé exrrêIl!elt)ent multipliés; prefque tous les Religieux avoient obtenu dans le onzierne & douzieme liede des privileges. des;
Papes, pour ne pas payer la dîme. des terre~ qp'i.'s cultiveroient par leurs mains, ou qu'ils feroien,c cultiver à, leurs;
Années 1775 & fuiv.
Z
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1\7&
0- U R N A-L
dépens. Mais co(tlme par l'abus que Ii00i l fit dans la fuite
de ces eonce/fIons, il ne refioit plus rien à· l'Eglife, les
Fapes les, refireiglliren~ aux:. Religieux de Citeaux, à ceux
de St. Jean de Jerl:lfalem & aux Templiers qui feuls y furent
maintenus, encore ~r-- il dit dans le Concile de IJatran
ténu' fous Innocebt lU. que les biens que ces privilégiés
acquerraient dans la fuite, feroient fujets à la· dîme, quand
même ils les fer6ient cultiver à lems dépens; & fi du
depuis ces biens ont été 'également alfranéhis , e'ell parce
que les privil~giés ont' obtenu des Bulles des' Papes & des
de nos Rois. Auffi tous les Auteurs, &
Lettres-pat'!ntes..
T
.
notamlnent·J~'Herico!!rt·,· parr. 2, ·pag. 172, n. I l , difent
que tou!l-·leS' fdM:!'s :.font t fujets à la dîme, excepté ceux qui
ôpt -u!p tilrè;,légitiméO d'exélnptio~. lta d'Argentré, coutume
de Bretagne ,', àrt.. i66; Dupetr-ay dans fan Trailé des
dîmes 1. to'm. 1; pag. 101 & fùiv. 442 & fuiv. 494 & fuiv.
&- ~·66; r.Simoil''-tIans fes Ma·ximes du Droit cano'nique de
France, pag.. 8~ & fuiv.; Boutaric fur l'artIcle 49 de
l'Q~donnance de Blois; Mr. de Fleury dans (es Infiirutions
au Drql~ eccléfiafi ique ~ rom. l , chal" des dîmes; Lacombe
dans. fan Recueil de Jurifprudence canonique, va. dîm:!s ,
quo 10.
ç En France toutes les' ParoiŒes font limitées, & tous les
Curés circoilV(:lifins de St. Pons ont reconnu que ce fief
ne faifoit pas partie, de leur terriroi're; il faut donc qu'il fait
enclavé dans '1a ParoiŒe d'Unis. Quand il exiHe un endroit
qui n'e(l d'aucune ParoiŒe, ce qui, comme on le voit dans
le code des Curés, page 8, ritre il qui l:z dûneejl due,
ne peut pas fe rencontrer en France; la dîme de cet endroit appartient à l'Evêque, qui <:li le PaHeur de fan diocefe.
Ici' Me. Vial eH d'autant moins 'fondé 1\. conreller à Mre.
Robert Iâ dîme qu'il lui demande, que d'un côté ce Curé el!:
nanti d'une permiffion de M. l'Evêque de Gap pour venir
pourfuiv.re ce procès, & que d'autre part· il' el!: ici l'image
de ce Prélat, qui -lui a cédé [on droit. JI el!: jufiifié par les
anciens èada{l'res -de- la Communauté d'Unis, que ce fief?
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79
"& celuI de St' Pons n'ont jamais' f-àié qu~if f~l & rrl'êin~
t-erritoire. D'un cQte, tln Y ttou\te enta'dafiré tout le domaine utile de ce fief, qai dans ce remps étQit poffédé pat
divers particuliers. D'autre part, la manie·re dont 'les cotes
font concues, ne permet pas de douter que Sr. Pons a toujours éré' regardé comme un des quart·iers dû territoire
d'Unis. Enfin on peut d'aut-ant moins en douter, que les
Curés d'Urtis onr toujours été en polfe1Iion -d'adminiHrer
les facreroens de l'Eglife à ceux qui ont habité Sr. Pons, &
cerre polfeffion fuffiroit (eale, fuivant Iâ Doélriiîe d-e hiero~
nimus de monte, rraél. de jinihlls .regendis', cap: i 3, n. '3,
Inutilement Me. Vial oppofe que St. Pons & Urtis (ont
deux fiefs abfolument féparés, &; que l'in(ercion dans le
cadafire d'Urtis des fonds qu'aurcie"nt pu polféder quel.
ques particuliers à St. Pons, prouverait tour au plus que n'y
ayant poim de Communauté à St. Pons, on avait éré obligé
de les encadafirer dans une Communauré voifine; mais qu'il
n'en réfulreroit jamais que le fief de Sr. Pons flr parti'e 'dq
territoire de celui d'Unis. On lui répond qu'il efH indiJfé.
rem que le fief dè Sr. Pons & celui d'Unis foie nt difiin8:s
& féparés; il en réfulre feulement .que chacun de ces 'fiefs
a & doit avoir néceffairement [Ol\ re'tciwire diHinél & (é.
paré, [oit pour l'exercice de la JùrifdiéliolJ, [oit .pour les
droirs [eigneuriaux; mais il n'en eft pas moins vrai que ces>
deux terrirai l'es ont toujours éré, doivent être, & [ont en.
core un [eul & même corps de Communauré; que la divi.
fion du fief n'efi pas incompatible avec la' réunion ·des territoires pour ce qui ne touche pas le fief. 'C'elt ainli qu'on
le voit à Ventabren, où Coudou ,. quoique faifant uh fièf
diHinél & féparé pour là Juri[diélion & pour les droits (ei.
gneuriaux, lie forme pas moius avec Venrabren un (eul corps
de Communauté. Les anciens cadafires d'Unis renfermen;
la preuve de la réunion, puifque c'ecl' par les cadaltres que
(om communément fixées les limites du rerritoire d'une
Communauté. Il r.éfuIre d'ailleurs d'une reconnoilfance de
1612., que Sr. Pons n'eil: qu'une dépendance & un quartier
du terroir d'Unis.
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"
c; Quant ~Ja prétendue inféodation de 1:1 d~me au fief què
l'1e.. ViaJ LilPPQfe par le long efpace de 'temps pendant legu~l on n:~ pas 'payé la dîme pour le fief de St. Pons, on
n'a be(oin qUl; d~ lui oppofer qlle Jes inféodations des dîmes
fai\~s p'l.r Çharly~ 1 Marcel, Ch~rlen;lagne, Louis-Ie-D.~b.on
paire &, a\l,u-es_" ~'9nt été faiçe;s que ppur .:les grands fiefs
'" pour le,s,g,rand~ fervices rendus .à l'Etat & à l'Egli[e~ Or"
quelle app<fn~ne.t; qu'il en .ait été fait -une pour ceUe d'u",
fief auffi p~!lvcqnfidé.ra.bJe que celui ,de St. PoIlS, qui ne pro..'
d,uit que,.,3Go li~1 d~fren.c~?' OQ pept d'autant moins [e livrer à. çetçe pré(omp'çio!\ ,. qlle ·J!pn voit qIJ'anc.ienne.ment le,
fief. de. $ç: i,'qQ? lk cel~i d'V!rcis avpie,nt. ét'é poifédés par
le même Seigneur, & il eff bien éviden~ que fi les anciens·
Seigneurs d~ ce .fief avoient été du nombre de ceux qui
av,\nt, le Concile de Latran av oient o):)[.~ou des inféodations
de dîmes, on ,le4r. eût Jout aU -moins inféodé ceUe d'Urcis
~n'" mçm,e tem2~ que. ceUe. de. St... Pons., Me.! Vial ne rap-'
I/.V'te . P.!lS la, quitrance des deux apnées. de revenu qu'il aurqi, dtl.payer;au Tré[or Royal en veitu de l'Edit de 1708,
pour pouvç>}r jouir· de cene exemptiqn, & les dénombreI,!'l~ns qu}il a 1 produits ne font aucune mention de la préte.ndjle inféodoaçion. Henris, liv. l, chap. 3, quefi. 5, attefie
que pour Ce dir~ Seigneur décimant, il faut avoir plutôt un
droit aalf .que paffif; que l'on doit plutôt le prendre [ur
autrui que [ur foi-même; qu'autrement ce n'elt pas lever la,
dlme, mais s'en exempter; que c'eH une marque d'aIFranchiffemC';nt, & non pas d'inféodation.
"
•
. Arrêt du 7 Juin: 1777' au rapport de Mr. le C9n[eiller
de RamatueUe, rendu en Grand'Chambre, après parcage aux .'
Enquêtes, Mr. .le Con[eiller de Fabry Compartiteur, qui,
fans. s'arrêter à la demande de l'1re. Robert, en !aqueUe il,
ef!: déclaré non recevable & mal fondé, réforme la Sentence arbitrale, avec dépens. Ecrivant Mes. Badet & Lager.
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PALAIS
nB
ARRÊT
PROVBNCE.
113['
XXIII.
Le fonds dotal peut être aliéné [; échangé en cas de néc1Jité
ou d'utilité évidente pour la femme.Faut-il alors ohtenir la permiJIion du luge?
AR atle du 7 Août 172.8, Jean-Hiacinthe Darbon de
la ville d'Aix, en qualité de mari & maître de la doc
de Therefe Jauffret, vendit à François Bonnet une terre
faifant parcie de cene dot, au prix de 1060 liv. Il retira
60 liv.; l'acheteur fut chargé de payer 375 liv. à Daumas
créancier du pere de Therefe Jauffret, & il fut convenu qu'il
garderait les 62.5 liv. rell:antes jufqu'à ce que Darbon pllt
les placer fur un fonds folvable. Peu de temps après Darhon
acheta une propriété de la ~Cl1e contenance, & Bonnet
- compta les 62. 5 liv. qu'il avait en main. Après la mort de
Therefe Jauffret, Simon Fenouil, en qualité de mari &
maître de la dot & droits de Françoife Darbon fa fille, fe.
pourvut contre Bannec en défemparation de la tecre, foutenant que ce 'fonds dépendant de la 'dot de fa mere n'avait
pu être aliéné. Sentence ql;i le déboute de fa demande. Fenouil en appelIa, & préfenta une requête incidente en caffation de l'atle de vente ,pa1Té à Bonnet; celui-ci demanda
que dans le cas où l'atle ferait calfé, Fenouil fût condamné
à lui rell:ituer les fommes payées à l'indication du vendeur,
& à l'indemnifer des améliorations & accelfoires.
Pour le foutien de la Sentence, on convenoic que la doc
ell: le patrimoine des femmes; qu'elle ell: d'ailleurs dell:inée .
exprelfément.à partager les charges du mariage, qui ell: de
tous les contrats le plus favorable & le plus néce1Taire à
la 'fociété. A ce double titre les Loix l'ont prife, pour
ainli dire. fous leur pratetlion, préfumant avec raifon que
l'avide ufurpateur pourrait facilement abufer de la foible/fe
des femmes pour les dépouiller. Mais comme une pral ibi~
P
�Jth
JOURNAL
tian trop générale auroit pu être contraire au prin.cipe qui
Je' déterminait, & nuire à celles-même que la LOI voulort
protéger, elle établit en même temps quelques exceptions
qul aucorifent cette aliénation, lorfqu'elle. peut tourner à
l'avantage de la dot.
Lorfque Jean-Hia-cinthe Darbon, en fa qualité de mari \
& maître, fe détermina à vendre la terre dont s'agit, Daumas,
créancier du pere de fa femme, demandait le paiement des
300 liv. qui lui étaient dues; ,& ce ne fiJl qu'en fe chargeant de les acquitter, que Bonnet devint propriétaire du'
fonds dotal. La Loi derniere, .ff. de jure dotium, permet
dans ce cas l'aliénation de la dot. D'ailleurs outre que la
vente n'avoit été faile que pour payer une créance privilégiée, la propriété vendue avoit été remplacée COOt de fuite par
une aucre au moins d'une égale valeur. Or l'échange de la dot
eU: permis 'Par la Loi ira confiante,.ff. fod. La feule condition
qu'elle exige, c'eH que cet échange foit utile à la femme;
il n'ea pas néceffaire que "le créancier ait fait procéder à des
exécutions. Pourrait-on fou tenir que parce que la femme
ou fes repréfentans auroient obtenu quelque faveur du créancier qui auroit accordé à leurs infiances de ne pas augmenter
[a créance par des .procédJres, la vente ne fût pas faite valablement? Ce fyftêrne feroit meurrrier pour les dots qu'i"l
fi iméreffant au bien public de conferver, puifque la femme
ne pourroit fe libérec que lorfquelle auroit été accablée de
frai!.
rLorfque l'aliénation de la dot ea néceffitée par u.n de ces
cas où elle doit être enrié-remeoc abforbée, comme il feroit
dangereux de fe tro~per, & qu'il .n'y a que l'extrême fa..
veur ou l'extrême néceffité qui puillè alors autorifer la vente, '
on doit avoir recours au Jllge ,-'pour qu'il examine fi la fèmme
qui lui demande la 'permiffion de vendre, eH réellement au
cas; mais lorfqu'il ne s'agit que d'échang.er un eflèt dorai
& de le remplacer pa'r lin autre cie même valeur" il n'eil:
pa.s befoin de l'intervention du Juge, parce qu'-alors rout fe
fait au plus grand profit de la femme.
Arrêt du 10 Juin 17777 aù rapport de Mr. le Confeiller
ea
�DU
PALAIS
DB
PROVENCP:":
19
1
il'Anrouis, qui confirme la Sentence avec dépens, & au'
moyen de ce déclare n'y avoir lie~ de prononcer, fur la rc- /
/quête incidente des hoirs de FrançOIs Bonnet. Ecnvant' Mes,.
Verdet & ......
•
ARR Ê T
XXI V.
En matiere hénéficiale, le réjignant qui exerce faélion en regr~s,
ohtiellt la refiiturion des fruits depuis la demande. JufiJues
cette époque le rijignataire fait les fruits. fiens, & ne· peut
prétendre le remhourfement des frais de provifùms & ac-'
ceJ{oires.
a
RE. Allier, Eccléfiallique d'Orgon, ancien Chanoine
. de St. Didier d'Avignon, polfédoit le Prieur& fimple
& rural érigé dans le lieu de Roquefeuil fous le titre de
St..Barthelemi; il- fur- malade en 1774, & réfigna, metll
morris, fon bén~fice 11 Mre. Fort le 3 Juin 177~,' Mre. Allier
reveOl<l en famé fe pourvut le 9 Novembre 1776, intenta'
l'"B:ion en regrès, & demanda la rellirution- deo fon Prieuré
& des fruits, & la jouilfance pmvifoire & pendant procès'
des fruir,s du bénéfice. Le Lieutenant d~Ailt le débouta des
fins: provifoires; il appella' avec daulè d'évocation du- fonds
& principal.
On difoit pour lui, que la c1aufe conditionnelle metu mortis
inférée dans la réfignation lui donnoit le droit d'intenter
l'aB:ion en regrès; fa fituation fuffifait pour rendre fon aB:ion
nécelfaire & favorable; cette aB:ion ell toujaur-s favorable,
quoique quelques Auteurs aient femblé vouloir infinuer le
contraire, parce que c'eft un remede falutatre & bienfai-fant que l'humanité des Cours a voulù méftager aUl( réfignans contre l'ingratitude trop commune de- leurs réfign:t-'
raires, & fur-tout contre les fur~rifes' & les' fraudes que 1
l'am6ition peut avoir fuggéré-/î ceult~ci, & aux'EJuelles: ceux-11l'!
n1étoient que trop ellpofés dans cet <:lat de foiblefiè &: d'a~-'
M
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Jou RNA L
néantilfement que les feules clau (es de la réfignatidn Indl~
quent. Ces claufes renden.t la réfigllation conditionnelle;
eJles l'affimilent entiérement à tout autre aél:e conditionnel
que le défaut de la conêlition anéamit; à la donation à
caufe de mort, par exemple, avec· cerre différence feulement
que les bénéfices n'étant point héréditaires, comme le font
, les biens d'un donateur, la réfignation metu morris ell: révoquée par le fait au retour à la fanté du ré{jgn~nt &. le
fimple dellr manifeae de réavoir fan bénéfice.
Cette condition affeél:e le bénéfice; elle lui €la intrinfeque & inhérente, de rr.aniere qu'elle le fuit dans quelques
mains qu'il paffe; cerre condition €la une charge fans dou,te.
Mais peut-on blâmer un bienfaiteur d'en attacher quelqu'une
à fes préfens? Ell-ce celui qui réclame (on propr~ bien, pu
celui qui refufe de le lui rendre, qui ell odieux? Mre. Allier
réclamait les fruits perçus, parce, di(oit-il, que l'aél:ion en
reg~ès anéantit la réllgnation qui doit être tirée du milieu,
& qui ne peut produire aucun effet.
.
La premiere fin de non-recevoir qu'on m'oppo(e, con'-,
tinuoiç-il, tirée du laps du temps, ea une double injuaice"
une 'double fraude; elle manque en droit & en fait. En
droit, c'eH l'a\'arice & l',ingratitude de Me. Fort qui lui ont
fait imaginer & créer une Loi 'qui n'exiHe pas, & qui réduit, (eJon lui, au terme fatal & péremptoire d'une an!1.ée,
la durée de l'aél:ion en reg-rès. Si l'on veut raifonner par
analogie ,les deux Canons de pacificis pojJèJforihus, & .de
trÏennali pojJèJfore, font les feuls qui aient introduit & fixé
la prefcription dans les matieres canoniques, & ils donnent'
trois ans. L'Arrêt célebre rendu par Henri II. lui-même,
qui inrroduifit l'itHon· en regrès, & qui a depuis été enrégillré pour {crvir ,de Loi fur cerre matiere., admit le regl'ès
après. deux' ans•
. En fait J Mre. Fort peut-il décemment propofer le moyen
de péremption, fuppofé même qu'il dût avoir lieu, après
fe l'être' frauduleuCemenc, ménagé, en abufant Mre. Allier:
par fes promeffes? Au moins elles ne devraient courir que
depuis la conva!efcence parfaite. Or, celle de Mre. Allier ne,;
.
.
~re
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P A LATS
DE
P IlO VEN CE.
18 5
'€late que de la fin d'Avril 1776, fUlvant les attefiatiolls '&
'les preuves qu'il a produit,.& fa demande a été formée
moins de fept mois après.
.
On ajouroit que la feconde fin de non-recevoir tirée de
fl'approbation expreife & tacite de Mre. Allier n'éroit pa~
plus honnête. Les pieces que Mre. Fort produirait, & dans
lefquelles Mre. AHier lui donnait la qualité de Prieur de
Roquefeuil, éroienr intervenues dans un temps où Mre. Allier
éroit encore malade, c'ell-à-dire, dans un temps où rout
acquiefcement, en fuppofant .qu'elles en reotèrmaifeot quel-,
qu'un, était encore inutile.
On répondait que la nature de l'aélion de regrès éroit
route défavorable, toute contraire au droit commun & à la
pureté des anciens Canons, qui ne veulent pas qu'on puifIè
paélifer fur les bénéfices, 'de quelque maniere que ce fait,
& fur-rout à l'effet de les rendre' fucceffifs entre deux perfonnes, & de les fixer à la fois ou tour à tour fur deux
têtes. Auffi cette aélion ext'-Jordinaire éroit-elle autrefois
inconnue, fur-rout en France, où l'on a roujours été plus
attachés que par-tout ailleurs à la vraie difcipline de l'Eglife.
Peu à peu elle s'ell introduite, il ell vrai, & on l'a admire
par pitié pour la foihleife de quelques réfignaos, en haine
de la perfidie de quelques réfignataires.
Si on la conudere fous le premier point de vue, fa durée
doit être courte & déterminée, parèe que la moindre perfévérance contredit formellement la fo'blelfe & l'efpece de
contrainte qu'on allegue. Sous Je fecond rapport, ce n'ell:
pas feulement une aaion défavorable, mais une aélion ri.
goureufe & pénale. Or, en matiere de délit & de peine, il
faut rout prouver, il faut [Que démontrer. Il ne ferait pas
cependant il1lpoffible que dans ce fecond cas, quand les
circonllances Ont paru aeroces, on cieât quelque exemple o~
. Pan a étendu en .faveur du réfignant, & fur-toue en haine
du réfignataire, la durée de l'aaion en regrès; mais vouloir
la déterminer d'après la regle de pacificis poffijfàrilms, &:
celle de la poifeffioo triennale, c'ell vouloir s'abufer foi.
même, puifqu'il ell: fenuble au premier coup-d'œil que ces
Années l775 & fuiv.
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,
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RNA L
deux Loix 'prononcent Cur des eCpeces bien diJl'érenies, &:
que l'analogie ne peut avoir lieu que d'après la parité.
C'eO: d'après la JuriCprudence des Cours qui ont Cuppléé
par humanité l'aaion en regrès, qu'il faut en fixer la durée;
c'eO: d'après le Centiment des Auteurs qui ont connu & qui
ont défini cerre aaion. Or, que l'on parcoure les Arrêts &
les livres; on verra que cerre aaion, quelquefois néce!faire;
fouvene dangereufe, a toujours été bornée à un Ceul an de
vie; la raifon en eH fenCible. Un an fuŒe pour conferver aij
réCignane furpris ou trompé, tous les fecours, touees les reC.
fources done il peue avoir befoib; & fi l'on prolongeoit ce
terme, touS les bénéfices deviendraient à la fois toujours
illc,ertains fur la tête de chaque titulaire, toujours hérédi.taires entre pluCieurs.
Le regrès eO: une efpece de refcifion que prend le réfignane contre fa démiffion, Cur le fondemene qu'il ra faiee
par la crainte de la mort, fans laquelle il ne [e feroit paS
dépouillé. Quelques Auteurs ont très-mal comparé la réfignation à une donacion à caufe de more, qui ne vaut que
par lé trepas du donateur. Le donaeetlr à caufe de mort ne
{e dépouille pas; le donataire n'eH pas 'mis en po!feffion;
en forte que le donareur furvivant relte nanci de l'objet
donné. G'efl: pourquoi fans formalité, fans reCcilian, par le
feul effet de fa volonté, la donaeion ell: révoquée; mais, le
rélignant fe démet, il eft dépouillé; le réCigna,taire elt mis
en po!feffion; le réCignant ne peut plus le dépo!féder qu'en
fe faifaqt adjuger le regrès.; aaïon litigieufe que l'on refufe
ou que l'on admet felon les circonHancesj dans laquelle on
a toujours quelque exception, quelque fin de nod-recevoir
à pefer. Il faut donc la juger; & pendant l'inltruaion, la
provifoire doit fans doute être pour celui qui a le tinré, fui-,
vant Paltour au titre de regr~lJit.
L'on voit au procès une réfignation pure & fimple, faite'
dans un temps qui n'étoit plus celui de c~s perfécutions
dont Mre. AHier fe plaine, & avec cette feule c1<I'Ufe metu
marlis; ·Ia condition impofée, fi l'on veut, par cette c1aufe,
a prefcrit dans l'an de (auté parfaite que Mre. Alber a lai!fé
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181
pafI'er fans réclamer. Ce n'eU: poïnt la fimpl~ idée, le finlp.le defir de réclamer que la Loi exige dans l'an de la péremptiQn pour l'interrompre; c'eil: une réclamation réelle &
judiciaire. Mre. Fort offrit enfuite un expédie ut ; il confentic
de rendre le bénéfiçe que Mre. l).fiier réclamoit, mais il
demanda les frais de provifio", ~ de mife en poflèfIion que
la générofité trompeufe ~ l'inconHance Qe Mn:. AUier lui
avoient coôté. Il conclut à la confirmation p\lr~ & fimple de
1;1 SenteQce provifoire dont l'Are. Allier a appellé, parce q\le,
qu'elle qu'eôt é{é Ja faveur, la jufi:ice ge fon aél:ion & de
fa demande, & outre GIle le réfignalaire fàje .les frllits {Jens,
Mre. Aftier .auroit toujours ell tort p'eJ{iger la poifeffion
provifoire, qlli eO: toujours lldjllgée au tjtre le plus coloré. Il
efl vrai, ajoutoit-il., que quelques Arrêts ont accordé la
refrit\!tion des fruirs~ qlle Mre. MUer aCe deroa.nger; mais
ils ont toujours dépendu des circonfrances, & lorfque le ré.
fignataire paroiifoit être réellement injuO:e.
Mr. l'Avocat-Général d'Eymar çe Montmeyan obferva
que Mre. Fort avoit d'abord comefré les trois ans de durée
que Mre. Aftier donnait à l'aél:ion d!,! regrès; qu'il avait pro~
pofé & fouteJ;lu la péremption annale, fur le fondement qu'il
importoit à la fainteté .des regles & de la difciplilile de·
l'Eglife, IX même au bien de fan fervice, que l'état des bé~
néfices ne fût PilS long-temps incertain; qu'il ne s'établît
point entre les poifeifeurs & les préte.nclans une eCpece de
fuccetlion mutuelle & confidellliaire; que chaque titulaire filt
anaché de bonne heure à fa place & à fes fonél:iol1s par la
c.ertitude de fa poiJeffion.
On pourrQit répondre, çootinua Mr. l'Avocat-Général,
que l'incertÎtude ne porta t point fur la poifeffion, mais fuI'
la propriété, parce que jufq\l'à la réclamation du rélignapr,
le réfignaraire poifede légirimén1enr & fùrement, & fait,
fans une efpece de doute, les truits (iens, cette incertitude
ne devoit po.int être po))r les titll!>lires UJle caufe direél:e &.
néceffaire de négligence & qle tiédeur dans l'accomplilfe.
ment de leur devoir & du fervice du bénéfice. On pourrait
ajouter que la certitude de la polfdlipo doit fu$re, & qllll
A
a:l.
�188
JOUltNAL
l'incertitude de la propriété ne doit produire aucun mauvais
effet, parce que l'efprie du propriéeaire ne doit point être
l'efprit eccléliaHiqne, & que les bénéfices ne font paine de
vraies propriétés.
Mre. Fore s'eH rendu, & a aband,onné fon fyGême de péremption annale; mais il s'eft rendu en murmurant, Gnon contre
fan bIenfaiteur lui-même, du-moins contre le·drolt odieux qu'il
exerce, dir-il, par une tolérance dangereufe & nouvelle,
coneraire à la pureté des regles & des Saines Canons; il a
reproché au miniftere public d'avoir laiffé introduire un ufa!?e
abulif en lui-même, quelque refpeél:able qu'en ait été le principe. Mre. Altier a foutenu au contraire que cet ufage, que
cette aétion nouvelle, li l'on veut, mais précieufe & fouvent
néceffaire, faifoit honneur à l'humanité du Roi qui l'a introduire & à la fageffe des Cours qui l'one autorifée & établie.
.
Mr. l'Avocat.Général examina li l'aétion en regrès efi favorablê ou défavorable: voilà, die-il, Je point de droit, peut-être
plus effeneiel en lui-même que pour la caufe que l'on doie éclaircir. On s'eH appuyé fur des autorités; on a invoqué la rigueur
falutai!e, la fainte aul1:érieé des anciens. Canons; on a cité la
Doéhine plus moderne de Mrs. Talon & Bignon. Commene
ell·il poffible d'oppofer que l'aétion en regrès ait éeé trouvée
défavorable par les Parlemens, quand on les voie tous juger
pe concert qu'il faut l'étendre & la. perfeétionner comme
.une heureufe découverte de la piété royale d'Henri II. envers fes fujees eccléfiaHiques; quand on la voie en effet appliquée fans ceffe à des cas noùveaux, à tous les cas; quand
on voit Mr. Bignon avancer qu'elle eH encore plus favorable dans les réfignatiohs pures & fimples que dans les réfignations in favorem, ce qui prouve qu'elle a été fUcceffivernent adrnj{è par les Cours dans ces deux efpeces -de réfignaeion? Soutenir après cela la défaveur de l'aétion en regrès, comme le réfultae du droie commun & de l'opinion
géné.r,1Ie, n'eH-ce pas lutter en quelque fortè conere l'évidence & la notoriété publique?
On ne voit P,IS ce qu'on peue trouver de révoltant dans
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE;
18 9"
la conduite d'un Bénéficier, qlli ayant bien voulu que .(on
réfignataire profitât de (a ?'l0rt, ~ime cep;nd~nt. mieux
vivre, & ne veut pas moum de faim 'p~ur 1, ennc~~r. ?n
ne voit pas qu'on puiffe l'accu(er de legerete & d Inqule·
tude, uniquement parce qu'il n'efl: pas mort, après s'être
. cru près de mourir. On ne croit pas non plus qu'un homme
de l'avantage duquel il s'eH occupé, lot(qu'il a cru lOucher
au terme de la vie, ait le droit de lui faire ce reproche
auffi ab(urde que cruel. On ne voit pas enfin ce qu'il y a
de contradiél:oire à penfu différemment dans un état de
famé & d'efpérance, de ce qu'on a pen(é dans un état de
maladie & de mort, quand cette différence fe réduit à
préférer fèS propres befoins à la' plus grande aifance de
. (on réfignataire. Qui ne fait pas du·moins combien font
trifles & indifférens les derniers regards qu'on jette (ur la
vie & fur les chofes frivoles de ce monde? Qui ne (ait
pas avec combien de facilité on (e dépouille dans ces
derniers momens, ou en (e réfignant à ce dépouillement
général & forcé que l'on croit fi prochain, ou par un effet
de cerce conviél:ion intime que l'on reffent de l'inutilité de
toutes cho(es, ou par un dernier aél:e de générofité & d~
grandeur d'ame, dont on (e croit sûr de n'avoir pas le,
temps de (e repentir, ni même de pe(er l'étendue? Qui.
ne (ait que ce n'eH que par toures les gradations du délire,
de la foibleffe, de l'anéantiffement, que l'on arrive par
une efpece de (ucceffion au dernier aél:e de la diffolution &
du [repas? que de toures les volontés, de tous' les (enrimens qu'q,n nous prête dans .cette luguhre cri(e, la Itlus
grande partie appartient aux pe,fonnes qui nous entourent,
le. re{!:e aux affeél:ions & aux (ecoulfes phyfiques 'qui nous
agHent, & la plus' petite portion (ans doute à notre volonté, à notre liberté, à ce qui nous con{!:itue véritablement nous-mêmes?
Telles (ont les vérités que le Légiflateur a (enties, en
établiffant l'aél:ion en regrès. Tels (ont les abus qu'il a
voulu prévenir; la Loi qui l'établit eft nouvelle (ans doute'
.
,
'
mal~ ce reproche de nouveaute n'eft ni une preuve, ni
•
,
�190
JOURNAL
même une injure. L'exp.érience, amie des hommes &
mere de la fageffe, découvre & .confeille tard les bonnes
Loix; le defpotifme imprudent ou peu fouciane des fuites
les enhardit aifément & de bonne heure. La Loi nouvelle
a pour eIle I~ préfomption d'un long ex~men & d'une maturité parfaite, comme l'ancienne a l'épreuve d\ltlc ]engue
vie. Souvent on ne refpeae .celle-ci que parce qu'eH exille
dep.uis long temps; au iieu qu'on n'a fongé à l'aune, qu'on
ne l'a établie que parce qu'on en a femi la néceffiré. Tout
c.oncourt donc à établir que l'aaian .en regrès.ell favorable:
la maniere dont elle a été açcueillie /51. confidérée par les
Tribunaux & ju[qu'à fa nouveauté même, teL autorités
refpeaables & fur-tout la raifon & l'équité fur lefquelles
·elle ell: fondée.
Mr. l'Avocat - Général difcl)!a enfuite ·fi le ré6gnant ell:
tenu, lorfqu'il exerce l'aaion en regrès, de rembourfer les
frais des provifions, & généralement 10US ceux qu'il a occauonés à fon rélignataire j {i la Semence du Lieutenant
qui déboute Mee. Aflierde fa deman.de en po1fefIion pro.
vi [0 ire , doit être conmrmée purement & fimplemenr.
_ C'el!: un principe de droit ( dit-il) que toures les fois que
l'on caufe une perte légere , un pommage quelco.nque à quelqu'un, on eH tenu de le réparer j ce feroit faire tort à
cette jullice, à celte droiture naturelle que Dieu lui-même
a gravé dans nos cœurs, que de s'arrêter à démontrer ou
à prouver une pareille maxime. Quelque inoocent qU.e foit
Fauteur de la perte ou du dOD)m;Jge involontaire même,que
l'on dénonce à la JuHice , fon innocence l'ahfout, s'il dl:
permis d'employer cetre elltpreffion théologique, de la
coulpe, mais noo de la peine du délit, mais noo de la
répilration. Le mot de riparation eH ici beau.coup plus
propre que celui de peine j .car ce n'el!: pas comme une
peine que l'on el!: condamné 11 inoemni[er quelqu'un de la
perte qu'on lui a occafionée ; deH comme uoe {impie cornFenfation.
.
Sans Mre. Allier, fans [on amitié que Mre. Fort ne veüt
point çfoire hy.pocrite) mais qu1il peut du-maina ap.peller
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19-1
fatale, fans fa fauife ou ,du-moins fans fon inconfl:ante
généroûré, Mre. Fort n'eût poinr été engagé dans des
dépenfes conlldérables & aujourd'hui inutiles; il n'eût point
ache ré des provifions; il n'eûr point voyagé fur les lieut
pour fe faire mettre en poifeffion, & n'eC!r point payé les
frais que coûte cetre cérémonie. Mais Mte. Forr peut - ~l
être rembourfé du prix qu'il a payé pouFIa jouiifance?
car payer d'un côré & jouir de l'aurre, cela fe compenfe
naturellement, lorfqu'il s'agit d'une même perfonne, & il
n'dl: pas naturel· d'imaginer que celui qui donne, paye
encore pour faire jouir celui à qui il, a donné; ce paIement ferair au moins un fecond bienfait, fort diHin..él:, [Olt
indépendant du premier. Coinmertt mêm'è imaginer qu'un
pareil bienfair fait un accelfoire héceifaire ou narurel du
premier, c'eft-à-dire, que celui qui réfigne un bénéfice,
fgit cenfé avoir youlu s'impofer en mêroe temps l'obligation de payer à fan réfignataire les frais que fan, bienfait
lui occafione ?
. •
Mais, dir Mre. Fort, ce n'eft pas des frais que le réû.
gnant occalione à fan réfignataire par le fair de la réûgnation qui eft fan bienfait, qu'il eft tenu; mais il l'eft de
Ceux qui i'éfulrent de fan aél:ion en regrès qui eft fan repentir. A cela on répond qùe ce n'dl: pas le fait de l'action en regrès qu'on appelle repentir, qui occafione les
dépenfes du réfignataire ; le fait de la r.éfigllation qu'on efr
obligé de convenir êrre un bienfait, les avoit déja néèeffiré.
Il efl: vrai que ce n'eft qu'à l'époque de l'a&ion en regrès
<tue ces frais deviennllnt inutiles; mais ils ét.oient nécef"
faires & même faits auparavant.
. Le regrès, fuivanr fon fens littéral, ell: urt retollr à la
premiere place, une rencrée dans le premier droit, regrejJùs.
Or le retour n'étant pas reçu pour touS les droits dont OD
s'ell: dépouillé', ou il ell: de droit commun dans le cas
particulier où on l'exerce, ou il ell: réfervé expreifément
dans l'ai9:e en vertu duquel on agir. l'Ci il eft tout à la foi~
& de droit commun, & de réferve expreife. La réfignation ell: un bienfait) on ne peut pa.s le. nier. OE tou~
�192.
Jou
RNA L
1
'bienfair peut êrre condirionnel; on ne peur raifonnalJle';
Went foueenir le c-oniraire: donc rien n'e,npêche que le
rélignant n'air mis c~mme condirion à fa réfignacîon, que
le relignaraire courait le rifque des frais fruitrés, en cas
qu'il v,inr à exercer l'aérion en regrès. _Il fuffir que le réfi.
,gnaraire air éré averti qu'il cauroir ce péril; il fuffir que
roure - rélignarion porre néceffairement avec elle & dans
elle un avis racire à raus les rélignaraires, qu'elle dl: révocable en vertu du regrès, & qu'ils font par conféquent
expofés à perdre leurs avances, pour rendre injufie & ridicule leur demande en indemniré. Mais qu'a payé le rélignaraire pour recevoir? De quoi a· r-il à fe plaindre quand
il ceffe de jouir? Ne favoir - il pas que cerre jouiffance
exigeoir un prix qu'il a éré obligé d'en d,onner? Ne favoiril 'pas qu'elle n'érair ni certaine, ni perpéruelle? Ne favoiril pas qu'elle étoir révocable? Ne .ravoir-il pas qu'en cas
de révocarion, il lui feroir auill impoffible d'obrenir le rembourfement de ce qU'Il auroir payé pour jouir, que de retenir ou de difpurer cene jo'uiffance?
'
Car li Mre. Fort, après avoir joui pailiblemenr un an
& demi du Prieuré de Mre. AGier, après le lui avoir dif·
purél pendanè deux ans, obrienr la refiicurion illégale qu'il
demande, il Li difpure & lui enleve encore, par le fair,
près de deux ans de" jouiffance; enfin le réfignaraire, en
s'expofant à un danger 'connu, pour jouir d'un avantage
<Ju'il efpéroir auffi , a palfé une efpece dé convention dont
il feroir inju!l:e qu'il voulôr faire reromber le mauvais fuccès
fur fon rélignanr" pùifqu'il de~oit lui. même profirer, feu} ,
dans le cas contluire.
, Sur l'appel dé la Senren'ce provifoirè, Mr. l'Avocar-Gé.
néral obferva que le Lieutenant auroir dû joindre la demande au fonds, & non pas d 'bourer Mre. Afiie~, furtout avec dépens. Il conclur à ce que fans s'arrêter à J'expédient offert par Mre. Fort, fairanr droit) aux fins prrn,!;:
cipales conrenues dans l'el<p1oit de Mre. Afl:ier, au béné-~cè
de J'aérion en regrès qu'il av.oit déclaré inrenrer, il fût ,rétabli en- poffeffion du Prieuré dont s'agir, avec refliru tian
de
�DU
PALAIS
DE
PRoOVENCI!.
193
d'es fruiis depuis la demande; au moyen de' ce', qu'il fût
enjoint am, Fermiers du Prieuré de le reconnoître, en
cette qualité; défenfes à eux faites, à Mre. Forc & à tous
autres de l'y troubler, à peine d'amende & d'en être informé; & de même fuite, à ce que faifant droit à l'appel
de Mre. Al1:ier, l'appellation fût mife au néant, & il fût di.
n'y avoir lieu de prononcer fur les fins provifoires prifes en
premiere inl1:ance par Mre. Al1:ier.
Arrêt du 13 Juin 1777, prononcé par M. le Premier
Préfident, conforme aux conc1ufions; Mre. Fort fut con-,
damné aux trois quarcs des dépens, l'autre quart fut compenfé. Plaidant Mes. Gras & SimeOI1.
AR R Ê T
X X V.
En matiere bénéficiale, les provifions doivent être rapportées
ou follicitées dans l'armée de la date retenue.
L
E 19 Avril 1774, M.I'Evêque de Riez conféra au fieur
Abbé Daudeux la Prévôté de St. Jurs, Prieuré fimple,
& le ., Mai' Mre. Daudeux en prit po/feffion; le lendemain
Mre. Daudeux fit ctftel1ir une date [ur le même bénéfice en
la légation d'Avignon, avec la daufe, five fecularis, five
regularis, in commendam. Le 10 du même mois, Mre. Bourret,
Curé de Trigance, impétra le même bénéfice en la Légation
d'Avignon, avec la même daufe. L'Archevêque d'Avign,on,
qui rempliRoit la Légation per interim, décéda avant qu'aucun
des deux contendans eût [ollicité des provifions fur [a date.
Le ) Mai 177." Mre. Daudeux fQllicita le Banquier par .Ie
minifiere duquel fa date avoit été retenue, de faire e-xpédier [es prov~fions. Mre. Bourret imagina de [uppléer
~.
gnature du VIce-Legat 'par celle de, l'un de fes Grands~ VIcaires, qui prit la qualité de pro-dataire. Les deux Banquier~
fe réunirent à allefier à chacune des parcies le refus que
faifoit la Cour d'Avignon d'expédier des provifions fur Ulle
Années l77) & fuiv.,
B bJ
fa
�f94
Jou Il N A r.
date non lignée; chacune des parties demanda de fe retirer
au Diocefain ou au Métropolitain pour en obtenir des ptOvifions, & prit en conféquence po/feffion du même Prieuré,
fur le nouveau titre réfultant de la date. D'après cette prife
de po/feffion refpeaîve, l'inHance en complainte fut li~e pardevant le Lieutenant de Digne.
Mre. Bourret prétendit que le bénéfice étoit régulier, &
que fuivanr la regle regularia regularibus, la collation qu'en
avoit fait M. l'Evêque de Riez érait radicalement nulle;
que d'autre part Mre. Daudeux n'ayant pas fait pouffer au
regiH:re dans l'année la date qu'il avait obtenue le S Mai
1774 en la Légation d'Avignon, cette date ne pouvoit lui
profiter, & qu'il n'y avoit par conféquent que la fienne qui
pût produire fan eHer.
Mre. Daudeux prétendit au contraire qu'il lui fuffifoic
d'avoir follicité fes provifions du Banquier fran<;ois, &' que
le refus de la Cour d'Avignon que lui avoit atteHé le Bani:juier Fra'nCfois, valant provifion, il érait cenfé avoir rapporcé -fes provilions dans l'année, & avoir par conféqueoc
Lln titre fupérieur à celUI de Mre. Bourret. Sur ces raifons,
le Lieutenant rendit Sentence le 23 Août 1776, qui maintint Mre. Daudeux dans la po/feffion du bénéfice. Appel de
la part de Mre. Bourret pardevant la Cour.
On difoit -pour lui, qu'il eH bien vrai que le Pape eŒ
Collateur forcé; que nous 'ne connoi/fons aucune des formes
pratiquées dans la daterie; que nous regardons au contraire
comme un des plus grands boulevards de nos libertés, que
dare vaut impétration; que le Pape eH: en conféquence obligé
d'expédier les provlfions de datâ currenti; que rautes les dif~
tinél:iolls que l'on fait à Rome, entre date retenue, date poujJèe
nu regi/Zre ou expéditioll, viennent fe brifer cqntre ce mot:
date -vaut impétration. Le Pape n'a que la prévention donc
il n'l!Ife que par fouffrance; il ne peut refufer le bénéfice au
Fran<;ois qui l'a demandé; mais·il peut cependant l'en priver,
fi les provifiolls ne font .pas levées dans l'année. Tel eH:
l'ufage, la Jurifprudence, le fentiment des Auteurs & le
vœu de la difciprine 'eccféfiaH:ique. Si quelques Auteurs ont
�DU
PALAIS
DE
195
:eiOVENCIl..
OUlenu que la dat·e a encore quelque vie après l'année, ce
n'elt que dans le cas où l'on en réclame l'effet pour le béInéfice du concours au profit de l'Ordinaire.
A l'appui de l'ufage, on invoquait la pratique de la Courde Rome, fuivant un Arrêt du Confeil de 1714, & le Centiment de Perard-CaHel, de Goard, de d'Hericourt, de Re.,.
buffe, de DeniCart, & telle doit être la regle, non feulement parce qu'elle eH tolérée par le mence des Loix, mais
encore parce qu'il importe à la difcipline de l'Eglilè que:
les bénéfices foient remplis. Toute vacance fait languir le
fervice, elle laiffe les titres fans miniltres; elle auroriferoit
les Ecc1éliaHiques à fpéculer fur différens bénéfices qui feraient à leur portée; & l'on voit au contraire que le vœu
de toures les 1.{oix eH que les bénéfices foient remplis le
plutôt' poffible. Ainli l'on doit lever les bulles des bénéfices
conliHoriaux dans les neuf mois de la date du brevet; ainli
l'on doit' dans l'année fe démenre de l'un des deux bénéfices incompatibles, quoique la Chancellerie Romaine ne
donne que deux mois; ainli la réfignation doit être admife
dans les fix mois; ainli le dévolutàire doit prendre poffeffion
dans l'année. La levée ,des provilions fur date ne doit pas
être arbitraire, & elle le feroit fi la date ne périffoit pas
dans l'année. Auffi ce n'eH-exactement que quand il s'agit
de conferver le concours au profit de l'Ordinaire, que 1'011
peut encore fe prévaloir.d'une date qui dans l'année n'a pas
été. pouffée au r~giHre.
Mre. Daudeux n'a follicité la levée ·de fes proviGons qu'a.
près l'année, & ole regiHre du Banquier de France Ile fe
référant à aucune lettre qe 'fon correfpohdant à Avignon,
ne peut faire foi; dès-lors il en vrai de dire que Mre. Daudeux a laiffé paffer l'an, que fa date a été par conféquent
caduque, qu'il ne lui a pas été permis de fuppléer aux provilions de la Cour de Rome, par les provifions qui lui furent
accordées enfui te de l'Arrêt de la Cour fur le refus de fes
provilions à Avignon; que dès-lors Mre. Daudeux n'a en.
là faveur que la collation de l'Evêque de Riez; mais qUI:
Rb
~
.
�196
Jou
RNA L
ceere collation ne Cauroit lui profiter, parce que le bénéfice
était régulier.
On .répondoit pour Mre. Daudeux, 1°. qu'il étoit égal
que la prévôté de Sr. Jurs fôt ou ne fôt pas réguliere i
'2.°. qu'il avoit réclamé fes provilions dans l'année de la date;
3°. qu'il était indifl~rent qu'il ne les eôt pas follicitées ,
puifqu'en France nous n'avons jamais adopté la pratique des
Officiers de la darerie, donc l'avarice a imaginé de fuppoCer
la Cuppreffion des dates après l'année, parce qu'elle contrarie les véri(ables incérêts de la nation, anéantit l'art. 47
de nos libertés, & tranfporte au' Pape la diCpolition d'une
partie de nos bénéfices françois.
Si Mre. Daudeux ne Ce prévaloit que de la collation de
l'Evêque de Riez, ce feroit le cas d'examiner li le bénéfice
efl: régulier ou féculier. Mais dès qu'il ajoute droit fur droit,
& que le titre qu'il a rapporté du Vice-Legat efl: ancérieur
11 celui de Mre. Bourret, ou il faut que Mre. Bourret trouve
le moyen d'exclure Mre. Daudeux, ou il faut qu'il convienne qu'ayanc été pourvu antérieurement 11 lui, fon titre
doit l'emporter fur le fien. Dès-lors de deux chofes l'une: ou
la prévôré de Sr. Jurs. efl: féculiere, ou elle efl: réguliere;.
ft elle efl: féculiere, Mre. Bourret, qui n'a été pourvu par
le Pape qu'après que l'Ordinaire avoit déja prévenu, eH inc:ontefl:ablemenc fans titre; li au contraire elle eH réguliere,
le Pape a pu & même dû la conférer en commande, puif-qu'elle était décrétée; & dans ce cas même, dès qu'il l'avoit
une fois conférée à Mre. Daudeux, il ne pouvoit plus la
conférer à Mre. Bourret.
Peu importe que le Banquier, inHruit de la pratique de
la Cour de Rome, ait cru inutile de folliciter des' provifions qu'il favoit bien qu'on ne lui expédieroit point, dès'
que la date n'avoit pas été pouffée au regifl:re du vivant de,
M. l'Archevêque d'Avignon. Peu importe encore que l'on ofe
fufpeé\oer la foi de cet Officier public; il eH. fi notoire que
les Banquiers expépitionnaires en Couf de Rome ont fermenc en jufl:i.:e, que' ce n'eil que par leur canal que l~on
!àiè ce qui fe paffe à li Cour de Rome; que leur regifire
�Ai: :u s
'0 u P
Ii Il PRO VEN C li
197
cfr, pour ainli dire, le miroir de ce qu'~n fait dans-. cene
Cour étrangere, & qu'enfin il n'y a, finvant le~ LOIX du
Royaume, qu'une voie ouverte contre leur~ a{fertlOnS, ce.lle
de l'infcription de faux. Dès que le regJflre du BanqUIer
arrefre que Mre. Daudeux a réclamé fes provilions dans
l'année, il n'dl: plus poffible de lui imputer cette négligence,
qui doit priver l'impétrant du droit qui lui a été acquis par
la date.
En fuppofanr que les provilions n'euffent pas été follicitées
dans l'année, Mre. Daudeux feroit-il non recevable à les
demander, & feroit-il déchu du droit de les folliciter? Li
prévention une fois accordée au P2pe, on ne lui a pas permis
d'en urer arbitrairement; au contraire, fuivant l'art. 55 de
nos libertés, il n'en ufe que par fouffrance; mais en lui accordant le droit de prévenir les collateurs français, on ne
lui a pas laiffé celui de difpofer arbitrairement de nos bé-néfices, de faire acception de perfonne, & d'accorder. à l'un
ce qu'il refuferoit à l'autre; on le répute collateur forcé,
afin qu'il n'ait pas la liberté de difpofer des bénéfices.
Delà on conclut avec raifon que le Pape ne POUVant pas
refufer le bénéfice qu'un français lui demande, la demande
ou la date vaut impétration; l'in!l:ant de la date réunit routes
les opérations fucceffives qui doivent fe vérifier lors de la.
levée des provilions. Auffi e!l:-il de principe inconte!l:able
que le Pape, en expédiant les provifions, doit les expédier du
jour de la date; c'e!l: la difpofition formelle de l'art. 47 des
libertés de l'Eglife Gallicane.
.
Ce n'e!l: pas tout: le même article a prévu que ce fyfrême, date vaut impétrption, fouffriroit des difficultés à la
Cour de Rome, & qu'elle porteroit peut-être l'abus jufqu'à
refufer des provifions; jl Y a pourvu en ces termes: Et en
cas de refus fait en Cour de Rome, peut celui qui y prétend
intérêt, préfenter fa requête à la Cour, qui commet l'Ordinaire
ou tout autre pour filppléer aux provifions que les Officiers de
la Daterie. ont refuft. Cet ?rticle de n?s libertés ne laiffe pas
aux OffiCIers de la Datene la faculte de refùfer les provifions en aucun temps; l\ difpofirion ell: générale. Que l'im-,
�'19 8
J
0 t1 -R "N A L
pétrant follicire ou ne follicice pas fes provifions dans l'année;
ce n'ea donc jamais_à la Cour de Rome à s'en faire un
prétexre pour refufe-r les provifions. De ce ,que la Cour de
Rome ne veur pas accorder des provifions après l'anuée,
s'enfuir-il que le François qui a obrenu un bénéfice, ne puiife
plus l'avoir faure de provifions? Ce feroir accorder au Pape
une aurorité fur les bénéfices frauçois que l'arr. 47 de nos
libertés lui a refufé; ce que les Commentateurs ont crèsbien difcuré:
'S'il ea vrai que ladare vaut provifions, ou li les provifions ,ne font, -comme ledir Louer fur la regle de infirmis,
n. 308, que la preuve de la conceffien, la dare doir donc
durer .aurant que les provifions; & puifque les provifions ne
fonr périmées que dans rrois années, fuivant les Loix de
France, il faur donc que la dare ne le foir que dans le
même temps. L'Edir de 1637, art. 20, & la Déclararion de
1646, art. i14, lailfenr aux Eccléfial1:iques trois années
pour fe décider s'ils accepteront ou s'ils refuferonr le bénéfice. Ita les Mémoires du Clergé, rom. 12, pag. 802 ;
l'Aureur de l'Abrégé des Mémoires du Clergé, va. date, n.
4; Diél:ionnaire Canonique-, va. date; Lacombe, Jurifprudence Canonique, va. date; Piales en fan rrairé des provifions, rom. 2, pag. 82.-; Decormis, rom. l , col. 376. Or
donc, ·fuivant ces Auteurs, coures les fois qu'un Eccléfial1:ique français aura rrois années pour prendre polfeffion d'un
hénéfice impétré en Cour de Rome, il aura par conféquent
trois années pour rapporter fes provifions.
_ Arrêt du 23 Juin 1777, au rapport de Mr. le Confeiller
de Ballon, qui réforme lIa Sentence -avec dépens. Ecrivant
"
Mes. Pafcalis & ..."
·.
"
�DU
PAL AIS
DE
ARRÊT
PRO VEN' C B;
'199
XXVI.
Le déhiteur exerçant le rachat flaWtaire, ne peut prùendre
la reflùution "des fruits.
L fe préfenta à la Chambre des Enquétes la quelliol) de
favoir fi un créancier colloqué ell: fournis à rell:ituer les
fruits au débiteur qui vient dans l'année exerçer <le rach!lt
fiacuraire. Il y ,eut partage, Mr. de l:horame fils Commiffaire, & Mr. çe la Baume Compqrtiteyr ,. qui fllt vl,!idé. en
Grand'Chambre par Arrét du 18 Juin 1777. Il fut décidé
que le créancier n'était pas tenu à cette rdl:itution.. Le,s
parties éroient ,Mr,e. de Roux des ComteJi de Laric, &
Honoré Gaifend.
,
,
On difoit pOlir Mre. de ~OUX;, ,créancier cqlloqué , .qu'en
regk générale, tout pofieifeur de bonne foi fait le} frlli\s
fiens, & n'efl: jamais tenu de les r~L!:icuer: fruc7us omne$
fuos facit, nec un'luam rdiituit cpn[ump~os, fl!ivant )11 ;~O!
Dona: jidei 48, ff. de aC'luir. rer. domin., & lç~ ]çmar<j~.e~
du droit franc;ois, va. poffijJion, n. 10 & fLiiv. Or, un créancier colloqué efl: certainement un poifeifeur de .bonne foi.
Suivant la rigueur du droit, toute réfolutiofi de' -contraE
emporte une entiere refl:itution des fruits; !llais on n'obferve
point cette rigueur en France, pour éviter la difficulté de
la liquidation des fruits, & on les çqeppenfe, avec les in,.
~érêts. CeL!: ainfi que l'ob(e~ve, D~perier, Jorn. ~, liv.
n'348. Cerre maxime a lieu à plus.fort,~ rai(on 'pa,ns I~ .cas,du
retrait, où la reHitution des fruits n'eH jamais adjugée au
tet~ayant que du jour qu'il a configné les deniers, quoiqu'il
les ait offert,; car l'offre ne fU,ffir point, a!lrrement le retrayant jouir~i,t ,du bien ,& <9P prix.,( l30niface ,JOep. 1 , liv.
~,rit .. l , chap. 1, ,n.•4') ~I n'y F:à,çetlégar~ aucune d,ifficuité .p~lJr I~ r'Jc!Iat fl:at,llt.a\re" f,u.i~~nt I~ m~rpe .!,m:.êtifre ,
toglo. 2., liv. th f~it•• ~9., spa,p. ,1 •.• ;ç.~ ~ta~llt fie rpar\apt fl.u~
I
o
4;
.
.
·
�'2,06
JOU RNA
r.
'T
du rachat des fonds, l'exercice doit en étre reClreint à ce
feul objet, & ne pas être étendu fur les fruits d.ont il ne. parle pas. Le créanciercoHoqué eCl un acquéreur Judiciaire,
& fan titre ea auffi refpeé1:able que s'il le tenait de la main
même du qébiteur. Ita Mqurgues, pag. 8, , & MI'. de. Montvalon dans fod P~écis des Ordonnànèes, va. rachat.
Au moment de la collocation, le liafard de la bonne ou
mauvaife récolte regarde le créancier. Si la tempête ou tout
autre accident' vient à l'empatter, il ne fe'roit pas en droit
d'en rejetter la perte fur le débiteur ufant du rachat. Par
réciprocité, le ,débiteur ne doit pas pouvoir Jlr-ofiter du bénéfice, s'il y en'a. C'ell:, comme l'on èllt·, jaBus retis. Le
raéhat ll:atutaire n'ea certainement pas plus favorable que
le- rachat conventionnel. Or, pt:.i'fonne n'a prétendu que l'acquéreur fait tenu à la refritbtion des fruits, quand le vendeur ufe de la faculté qu'il s'était réfervée.
'
Ç;affend, ~,n rac.hetant les biens de la collocation, les
trouye ld~ns le, même :état que lorfgu'il en a été dépouillé;
de forte que s'il fa·Hoit que Mre. de Roux lui reCliruât les
fruits pendans lors' de la collocation, & qu'il lui lai/fât ceUl!:
exiHans lors du' rachat, il les aurait deux fois. Ecrivant Mes.
,Verdollin & .......
-
J
ARRÊT
)'
XXVII.
La mere ~'oppofant à la profeffio,j' religieu[e . de fa fille, pellt
demander 'lue fa: vocation hit 'éprouvée. lNpreuve doit être
faite dans /ide maifon neu,eJ.e. ,. l" l
""1. ~
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1
•
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A DUe. Devieux de la ville de Ma'rreille, ayant de..;
. meuré d<>puis fa tendre enfanc~ da,ns le Couvent de )a
VIÎlrarion de la même ville,. avait pris du goût 'pour l'état
de Religieufe; fa mere la _retir~ du Couvent- à l'-âge' de,dixhuir ans, & la garda près,de tro'is ans' avec 'elle. Elle 'quitta
la maifon paternelle ~ pour venir fe retirer 'dan~ le- Couvent
.,
~
de
�DU
.>
PAÇA1S
DE
PR"OVENCE.
201
"de la Vj(jtation. Enfin dix mois après, & le 19 Novembre.
1776, l'Econome du Monafl:ere fit fignifier un aéle ext.rajudiciaire à la Dame Devieux; elle lui notifia les i tentions
de fa fille, & lui déclara qu'elle prendrait l'habit'~e Novice
le 26 du même mois, libre à elle d'y affill:er fi bon lui
fembloit, lui ohfervant que les fi'ais de veStllre & autres
d'ufage fe monroient à 1000 li,,La Dame Devieux répondit être oppofante à la profeffion
religieufe de fa fille. Le 22 elle préfenta requête au Lieutenant, en injonél:ion à l'Econome du Couvent de lui remettre fa fille, autrement permis à elle de la faire cond[;ire
dans fa maifon par main mife. Décret qui renvoit en jugement, avec défenfe de paffer outre à la vêture de la DlIe.
Devieux.
Le 27, requête de l'Econome, qui demande la révocation
du rour en état, & au moyen de ce permis de paffer
outre. Décret qui renvoit en jugemenr. Le 4 Décembre,
la DlIe. Devieux demanda au Lieutenant la nomination d'un
curat~ur, & le requit d'accéder au Monafiere à cet effet;
le Lieutenant accéda le même jour. Elle préfenra enfuite
une requête d'intervention, & le lendemain') Sentence du
Lieutenant qui ordonna que la DlI~. Devieux renrreroit dans
la maifon paternelle par rout le jour de la lignification, au~
trement permis à la rnere de l'y contraindre par main mife l.
il ordonna le nonobfl:anr appel.
Le 6, la DlIe. Devieux appella de cerre Sentence, & de~
manda le rout en état, qui lui fut accordé jufqu'à la réponfe, & après des requêtes refpeél:ives, le rout en état fut:
confirmé par Arrêt du 7 Janvier 1777.
•
On difoit pour la DlIe Devieux, qu'il ne falloir paine
d'épreuve, & fubfidiairement que cette épreuve devoir être
faite hors de la maifon de la mere. Point d'épreuve, parce
qu'elle avait l'âge requis par les Ordonnances; qu'elle éraie
préfilmée connoître les obligations qu'elle vouloit contra..'ter.
La feule épreuve légale eH celle du noviciat; le Légiflaleur a combiné roures les confidéralions, quand il a porté fa
Loi fur l'âge des vœux. Le con[entemem des pareos n'dl {las
Années z 775 & fuiv.
Cc
�~Ol
Jou
JI. N
A L'
néceifaire, n'étant pas requis par les Ordonnances. Quet..:
que Capitulaire de Charlemagne ou quelque Concile parle
de ce confentement; mais ce n'efl: que pour les en fans
au delfous de l'âge requis par la Loi. Les Arrêts d'accord
avec elle n'ont jamais exigé ce confentement.
L'autorité paternelle e!,!: refpeél:able fans doute; mais
elle doit être limitée par la nature. Il faut difringuer les
objets qui tiennent à l'intérêt de la famille, de ceux qui
ne tiennent qu'à l'intérêt de la perfonne. Dans le premier
cas, comme dans le mariage, les parens doivent avoir la
plus grande influence ~ parce que cet intérêt leur
commun; cependant dans cet aél:e le plus important pour la
famille, l'autorité paternelle re'i0it des bornes, comme le
prouvent une foule d'Arrêts & l'autorité des plus grands
Magiarats; elle celfe même en grande majorité. Mais dans
les objets qui ne tiennent qu'à l'intérêt de la pe:rfonne, le
pouvoir paternel finit avec la foiblelfe de l'enfant, & la
premiere Loi pour lui eH de veiller à fon bonheur; tout
tient ici à l'intérêt de la perfonne. Les aéèions purement
morales ne font que du relI'ort de la cenfcience; le choix
d'un état doit onc ~tre abfolument libre, & l'enfant
doit être feul Juge de fa vocation. AinG tout p'rouve qu'il
ne doit y avoir aucune épreuve; au moins doit-elle être
hors de la maifon maternelle. Pendant procès entre femme
& mari, la femme doit être libre; entre le pere & le fils,
le fils n'ell: plus obligé d'aller prendre des alimens chez
fon pere. Ici il s'agit de la deainée de la Dlle. Devieux;
c'e'il: le plus grand procès qui puilfe exifl:er entre fa mere
& elle; elle craint fes contradiéèions , parce qu'elles auroient
pour bafe fa tendrelfe, & elle efl: trop fenGble pour être
jufie.
On répondoit pour la Dame Devieux, que tous les principes condamnent également le refus de toute épreuve, &
celle que fa fille s'étoit déterminée à offrir. L'autorité des
peres
la premiere de toutes les Loix; l'obéilfance des
e~faos . le plus elfentiel de tous les devoirs. Ils ne peuvent
nen faIre fans le concours de cette autorité : pourroit-ellè
ea
ea
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
2.03
étte étrangere au plus faint des engagemens? Les Loix
romaines nous apprennent le contraire; la fainteté de notre
religion eft d'accord avec les principes de ces Loix; des
Conciles prononcent anathême contre l'enfant qui quine
fan pere fOlls prétexte du culte divin. Les Capitulaires
de Charlemagne font une néceffité de ce confenremenr.
Aucune Loi pofiérieure n'en a aJfranchi les enfans. Il importe à la Républ ique que perfonne n'abufe de ce qui lui
appartient. Connaît-on ce que c'eH que la liberté dont on
fe prive' par les Vœux que l'on fait, & qui font la plupare
la fuite de quelque dégoût, de 1'0 ifive té , ou de l'efprie·
d'inconHance? Les Arrêts des Cours fouveraines ont été
toujours fur ce point d'accord avec les Loix.
La Dlle. Devieux offre cette épreuve dan! une maifon
neutre; offre inadmiffible en draie & injurieufe en fair.
Quelques Arrêts ont adopté ce parti; mais tous ceux que
l'on a cités, Ont ordonné que les enfans feraient rendus à
leurs parens; des circonllances particulieres & quelques
exceptions ont feules aurorifé ceux qui ont été cités par la
Dlle. Devieux. Le confente ment en nécelfaire ; il fe fupplée
par une épreuve qui doie donc être faite fous les yeux du
pere & de la mere. En Fecond lieu, ce parti eft injurieux
à la Dame Devieux; fa fille craint-elle de n'être pas en
sÎlreté dans fa maifon? Craint-elle fes freres? La Darne
Devieux confent d'être feule avec fa fille dans un~ maifon
paniculiere. La Dame Devieux veut fe facrifier aux pieux:
delfeins de fa fille; mais elle veut s'affurer que ce n'dit
ni un caprice, ni une Infpiration étrangere.
Contre l'Econome la Darne Devieux fomenoit qu'ell~
-devait les dépens de fa qualiré, parce qu'elle les avait
occafionés, qu'elle devait être condamnée encore à !DUS
ceux de l'appel, parce que les Religieufes du Monaftere
de la Vifitarion avaient violé toutes les Loix; qu'elles
étaient convaincües de féduaion, & qu'elles avaient excité
la Dlle. Devieux à enfreindre le plus faim des devoirs.
L'Econome répondait qu'en ne prenant aucune parr aux:
concefrations de la Dame & de la DUe. Devieux, elle ne:
Cc
2..
�2.04
JOU RNA L
devait àucuns dépens; que la Sentence lui avoit donné
"ain de caufe fur le fonds, en ne la condamnant pas à re~letrre elle - même la Dlle. Devieux, ainG que fa mere" le
demandoit; que cette prononciation devoit exclure tout
foupçon de féduél:ion & de violence; que conféquemment
ce n'étoit qu'une pure queHion de forme fur laquelle elle
àevoit êrre mife hors de Cour avec dépens, parce que la
Darne Devieux avoit néceffité fa préfenration , en l'appellanr dans l'inHance d'appel pour voir ordonner la commune
exécution de l'Arrêt conrr'elle.
Mr. l'Avocat-Général de Califfane rappella que l'autorité
paternelle ell: la plus ancienne de routes les puiffances
établies fur la terre, aèlmife par le droit des gens, & plus
ou moins étendue felon que les Loix fe {ont plus ou
moins conformées à la loi naturelle. Mais comme les en i
fans ne réll:enc pas toujours dans )e mêllle état, & que
l'homme a fes difFérens âges, l'autorité des peres & meres
a fes différens degrés. On peut même diHinguer crois âges.
Dans le premier, qui ell: l'enfance, l'homme n'e!l: pas
encore capable de difcernement. Les peres & meres ont
une autorité entiere, & cette puilfance ell: un pouvoir de
prote3-ion & de défenfe.
Dans le fecond, qui ell: la puberté, l'enfant commence
à être" capable de réflexion; mais il ell: encore fi volage,
qu'il a befoin d'être d"irigé. La puiffance des peres & meres
devient alors un pouvoir d'adminill:ration domeHi'1ue.
Le croiGeme âge, qui ell: celui où les enfans ont coutume de s'établir, ne doit jamais f~ur faire oublier qu'ils
doivent à lems peres & meres la naiffance & l'éducation.
C'eU fur le refpeél: & l'affeél:ion qu'ils leur doivent, qu'ell:
fondé le pO\lvoir que confervent" alors encore les peres &
meres fur leurs enfans.
Le droit naturel, le droit des gens, le droit divin même
ne donnent pas aux peres & meres d'autres puiffilnces fur
leurs enfans que celles que l'on vient d'expliquer; ~out ce qui
eH "au delà, provient de la difpofition des hommes & ell:
arbitraire.
�1) U
PAL AIS
D-Il
PRO VEN C J!; "
~o1
La dépendance des enfans & l'autorité des peres eH la
premiere de toutes les Loix. L'on doit tout à ceux qui
nous ont donné la vie. Leur droit dl: auffi ancien que le
monde; il dl: fait pour protéger ceux qui doivent le perpétuer. C'ef!: une Loi écrite dans tous les cœurs en caractere de fang, difoit un Orateur, de la main même de la
nature, & le fang qui circule dans nos veines, doi y unimet Cans cefIè l'amour, le refpeél: & la reconnoiffance
-due à ceux qui nous l'ont fourni. Ainfi la Loi naturelle
avait établi par des principes fixes & invariables le droit
de [ubordination, cerre comparaifon d'autorité & d'obéiffance que les Loix pofitives & civiles, d'abord barbares
& cruelles, mais enfiJitè plus rapprochées de )a douceur
des Loix naturelles, n'ont fait que confirmer. AinÎ1 l'autorité civile efl: venue fouremr les droits de la puiffance
naturelle; mais elle a prévu des abus, elle a cherché à y
apporter remede. On peut dire avec M. d'Agueffeau, que
l'autorité des peres & meres, quelque grande qu'elle fait,
doit cependant reconnaître une autorité fupérieure., celle"
de la Loi. On peut dire auffi avec Ml'. de Fleury, qu'il
feroit difficile de concevoir que les Loix puffent favoriCer
l'autorité paternelle en faveur d'un pere qui en abuCeroit.
Ml'. l'Avocat - Général conÎ1déra enfuite chaque individu
au moment, pour ainfi dire, qu'il peut réfléchir. Il faut
qu'il choifiitè un état de vie quelconque; il va d'un mot
faire fan bonheur ou fan malheur à jamais. Doit-il dans"
ce moment critique ne confulrer que la foumiffion & l'obéiffance qu'il doit à ceux qui lui ont donné le jour? Il leur
dl: redevable de fan exifl:ence; pourrait-il en difpofer fans
leur aveu? C'ef!: le plus important" de tous les engagemens qu'il doit prendre; il va facrifier fa liberté. Ne peutil donc pas en faire ufage? Un moment, un infl:ant va le
dépouiller de tout, va le priver pour toujours de lui-même,
& faire plier fans retour fa volonté fous le joug d'une
obéiffance aveugle. Efl:-il un moment où cette autorité paroiffe lui être plus néceffaire? Tels font les principes &
11:5 réflexiçns qu~ la nature femble diél:er; ma!s quaQd c'e!l:
�2.06
J 0 Il R N li. L
fan auteur lui-même qui parle, quand c'eO: celui qui forme
les droits & les engagemens du fang, quand c'ell: celui
dont les peres empruntent l'autorité, qui fait entendre fa
voix, leur pouvoir ne doit-il pas ceffer quand il commande?
Ce feroit mettre à trop haut prix le bienfait que nous recevons d'eux à notre naiffance; leur autorité doit finir aux
pieds des Autels; là les peres doivenr l'abandonner à celui
,qui la leur a prêtée, & le choix de notre vocation doie être
enriéremenr libre.
La puiffance des peres ne leur ell: donnée que pour faire
refpetter les droits' du créateur; il femble qu'il n'a communiqué aux peres' fon autorité fur les enfans, qu'avec la réferve de difpofer de leur vocation comme un droit jaloux
dont il ne peut pas fe priver. En vain l'autorité paternelle voudroit-elle élever fa voix. Le pere n'a plus de droit
fur fon fils, dès qu'il a plu à Dieu de fe l'arracher. Tels
font les principes que nous dittenr la nature & la raifon ;
telles font les voix refpettives de l'homme & du chrétien.
Confultons d'un autre côté le droit pofitif, fuivons -le
'dês fon origine (continua Mr. l'Avocat - Général) : filiusfamilias fine patris auBoritate voto non ob/ig:ltur. Tel érait
le priucipe général établi chez les Romains; les Capitulaires de Charlemagne exigent le même confenrement des
parens, & ne fonc que confirmer les difpofitions d'un ancien Concile d'Afrique; mais le Capitulaire 107 du même
livre femhle indiquer que ce confentemenr n'étoit néceffaire
que jufqu'au moment de l'tige requis par les Loix, qui étoit
alors vingt-cinq ans, & que depuis ce moment il devenoit inutile, pu ifque fur la requifition des parens , ante
1!iginti-qllinqlle annos t'Ïrginem votare poterat EpifcofUS, ce
qui ne fe pourrait pas à préfent, puifque l'Ordonnance
d'Orléans le défend'it nommément par l'art. 19. Celle de
Blois avoit fixé l'âge des vœux à feize ans.
DiCl:inguons à préfent les différences époques dont nous
venons de citer les Loix; des Conciles ont exigé ce confentement comme'nécdfaire'; d'autres en ont difcuté !,inuS~lité : non ejl- pote.fiâs par~ntilms prohib~ndi 'l'dam en qfjûm-çre-;
-
.
••
_
-.....J__
__..
__
�'D u P Â t AIS D B PRO V B N C :E.
"107
airent celui de Tolede & quelques aurres. Si l'on confuhe
les Loix Romaines, on y rrouvera auffi des exemples qui
femblenc annuller l'aurorité des peres, quand il s'agit de
la profeffion de leurs enfans : interdicimus, dir la Novelle
12.3 , parentibus filios monaflicam vitam eligentes ex vmera6ilibus Monafleriis abflralzere. D'après nos Loix & nos principes, cela paroîr devoir être encore plus pofitif, puifque
la puiffance parernelle y a reçu des bornes.
Les Capitulaires feuls de Charlemagne fonr une néceffité
de ce confenremenr; toutes nos aurres Loix fe taifent;
toures parlenr de l'âge, il varie fouvent: mais jamais, quel
qu'il fait, le confentement n'efl: ajouré comme une condition effenrielle de l'émiffion des vœux. Une foule d'Arrêrs
confacre le fyltême que l'on vient de difcurer. Aujourd'hui,
fi les circonftances particulieres en oqt fair rendre quelques-uns qui femblenc fe êonrredire, c'efl: une exception
qui ne fair qu'affurer encore plus la vériré de ces principes. Celui de 1686 laiffe dans le cloîrre Marie Vernar;
elle avoir paffé l'âge requis par les Ordonnances; elle approchait de fa majorité. Ceux de 1714 & 1739 permettent de paffer outre à la profeffion. Comparons pour un
infl:ant les vœux & le mariage, & ne confultons que nos
Loix; le droit romain ne nous offre que des incertitudes.
Le mariage efl: nul, s'il efl: fait fans le confentement des
peres & des meres; mais il efl: un âge où J'autorité cede
aux circonfl:ances, où elle celfe, quia in pietate, non in
atrocÎtate, debet corif'zflere. S'il efl:" permis aux enfans de fe
marier à un certain âge malg-ré leurs parens, ne doit-il pas
leur être permis de fe jetter dans Je cloître dans un âge
moins avancé? La puiffance paternelle doit avoir des bornes
bien plus érroites dans cette mariere que dans l'autre. Par
le mariage une fille donne à fon pere des héririers; le vœLl
de la religion n'a point de fuite. Le pere toujours maÎrre
des biens peut fe choillr les héritiers qu'il lui plait; d'ailleurs
une fille qui fe marie malgré fes parens, n'a pour excufe
que fa paffion ou fan caprice; .au lieu que celle qui embraffe
~ vie religieufe) a pour Faifon la néceffité & l'importance
�2.08.
Jou
'R N A L
de fon falut qui fe trouve attaché à cette condition.
Dans le mariage tOllt tient à la famille; tout eCl e1Tentiel
pour elle; fon intérêt eCl commun avec l'être qui peut y
porter préjudice: l'autorité eft donc ahfolumenr e1Temielle;
elle eCl cependant limitée à l'âge fixé par la Loi.
Dans l'état religieux au contraire, tout eCl perfonnel; il
femble que la foibleffè- des enfans, l'incertitude de leur
raifon & le peu d'expérience foient les motifs qui néceffitent l'autorité des parens & leur pouvoir. Il doit donc
ce1Ter avec le défaut des motifs dont on vient de parler.
Ce n'ell pas que dès qu'il a l'âge de raifon il devienne fon
maltre & feul Juge de fon bonheur ou de l'idée qu'il peut
s'en être formé; ce feroit tendre à l'indépendance, & méprifer une autorité éclairée, pour fe laiiIèr fouvent aller à
des lueurs foibles & pa1Tageres. Mais les Loix ne parlent
que de l'âge; le confenremenr du pere n'eCl pas exprimé
comme une condition e1Tentielle. L'autorité que les Loix
du Royaume, donnent aux peres dans le mariage, ne peut
avoir une entiere application aux vœux folemnels de religion,.
Avant que Jefus-ChriCl eût élevé le mariage à la dignité de
Sacrement, ce n'étoit qu'un contrat civil dont les conditions pour fa validité étoient réglées par les Loix des Souverains ; mais dans les vœux, la promelfe foJemnelle fàite à
Dieu, qui ell: comme la fubftance & le principal engagement de la profeffion religieufe, eft un exercice purement
de religion; fouvent quand des parens one prétendu que
leurs enfans n'avoient pas lIne véritable vocation, on les
leur a rendus pour l'éprouver; mais ces Arrêts ne 'démontrent pas, dit l'Auteur des Mémoires du Clergé, flue les Magif/rats qlli les Ollt rendus, aient ejl.imé le confentement des
parens /lécejJaire pour la validité des l'œux de lellrs enfans,
dès qu'ils avaient l'âge requis par les Ordonnances.
11 De faut pas regarder le confentement qu'exigent les
Loix dans plufieurs occafions, & nommément dans le mariage & les vœux, quoique ce confentement foit requis
dans les deux objets, comme un eJfet de la puilfance paternelle. Ce n'ejl. pas fur elle, nous dit Serres, fJlle la néceJlité
,.
de
�•
DU
PALAIS
D Il
PROVllNC Il.
209
de ce conJentement eJl fondé 1 mais fur l'honnêteté puMi'lue, /!Jr
ce 'lue le mariage efl l'affaire la plus important: de la. l'le,
tjni intéreffi l'honneur des époux & leur parente, la paix &
le repos des familles, enfin fur la Loi divine l 'lui en commandant le re/peR & fohéiJfànce envers ceux dont on a reçu la
vie 1 renferme implicitement une défenJe précife de Je marier
contre leur gré. Auffi ce confentement ell également néceffaire, foit que l'enfant fair émancipé, fait qu'il palfe à des
fecondes noces; mais arrivé 11 un certain âge, la néceffiré de
ce confentement celfe; il en eH de même du confeorement
requ is po.ur les vœax.
.
Ainfi le fils qui reconnolt combien eil puilfaore & précieufe 1'autorité d'un pere, doit fans doute fuivre fidélement
la voix du Ciel, quand elle l'appelle 1 & embralfer ardemment fes confeils, évangéliques lorfqu'ils n'oDt rien d'incompatible avec l'obéilfance qu'il doit à fes parens; mais lorfque
le précepte fe trouve en concurrence, il ne doit pas héfirer
à lailfer le confeil pour fuivre le précepte, ni abandonner ce
qui eH nécelfaire' pour faire ce qui .n'ell que de volonté.
Quelque faint que fait le defir de fe confacrer à DielJ
par des vœux de religion, que celui qui veut fe jerrer dans
le ëloître n'oublie jamais que l'obéitrance ell préférable' aux
facrifices ; quelque fone inclination qu'il feore de renoncer
au monde 1 fi fon pere 's'y oppofi;, qu'il obéilfe. Mais au$
les peres fenfibles & ratrurés fur nos principes, doivent favoir que s'il ne leur ell pas permis de dévouer leurs enfans
à la vie monallique, s'ils ne veulent. l'embralfer, ils ne peuvent pas plus en arracher ceux qui veulent s'y confacrer.
Que penfer dans pareille circonftance du confelltement de
la mere ( continua Mr. l'Avocat-Général)? Il eH fans doute
des préfomptious bien forres coorre cerre aurarité, & bien
difficiles à furmoorer. Par le droit romain, fan confentement
n'érair point néceifaire pour I.e mariage. Il ell vrai que daris
nos mœurs une Loi précife a changé ces difpo!itions, mais
elles n'ont été changées que pom le mariage; ce COntrat Ile
les vœux forment deux objets abfolument différens; les defniers paroiifenr, à défaut d'lme Loi précife, êrre renés fou~
Années l775 & [uiv.
Dd
�~ro
lo'liRNAt·
la regle du droit commun. Les Loix, diroit Mr. d' A~uetreàll;
ont donné moins de puijJànce il la mere, parce gue les Loix
préJùment fon [exe plus foiMe &'Plus Jùjet li être trompé. D'ailleurs elle n'a pas les enfans folls .fa plliJlànce.,. ni folls fon autorité; le droit civil la lui refu[e. Son confentement ne parait
donc pas nécelfaire. Mais cela ne pOLIrroit être vrai, qu'en
tant que ce confentement ne devroit fon origine qu'à la
puilfance paternelle; le contraire vient d'être démontré; &
un Arrêt rapporté dans Boniface du 13 Décembre 1649, ne
lailfe plus aucun doute fur cet oIljet.
Si la mere n'a point' d'autorité, l'obéiŒ1nce filiale peut'elle celfer un inHant? Si le pouvoir du pere & de la mere
n'ell: pas égal, le même refpeét ne leur eH-il pas dû? Les
bienfaits de l'exiHence, de l'entretien, de l'éducation, n'ontils pas été les mêmes? Quelle des deux volontés doit
être préférable? Celle de la mere ou de la fille, fur-tout
quand la premiere n'ef]; guidée que par le zele & la tendre{fe. Si la Loi refufoit une autorité quelconque à la mere
en contrariant la nature, la fille ne devrait-elle Fas remettre
entre fes mains une autorité fans biomes., & fe livrer au
pouvoir maternel dont tous-les fentimens font plus affectueux, parce qu'ils nailfent dans la douleur & les fouffrànces,
& fe perpétuent dans l'inquiétude? Ei1:-ce courir à la perte.,
& n'ef];-ce pas bien plutôt voler au bonheur? St. A.ugui1:in
nous dit même que lorfqu'il s'agit de voiler une fille, la
volonté de fa mere doit, par les regles de la nature, l'em-porter fur tout le re-i1:,e.
.
Il ne paroie pourtant pas que la mere p.uilfe, faute dé fan
confentement 011 par fan oppofition, empêcher fa fille d'entrer dans une religion où elle fe croit appellée; & l'on voit
<]1.!e fur ce point l'on met une grande différence entre l'autorité du pere &. de la mere.· Toutes deux fans doute ont
leur fource dans la nature; mais les Loix civiles, le droit
po!itif & le droit des gens ont'fixé des bornes différentes
à l'une & à l'autre. L'une 'ef]; toute de tendrelfe, de foins
& de fentiment, d'agrémetrt & de c;onvenance; & dès-lors
fan confentement n'eH pas lléceffaire, foit avant, ~qit après
�.
DU
PAL AIS
D Il
PRO VEN C E.
2. 1 1
tige requis par les Loix. L'autre au cont~a~re a trouvé ?ans
les Loix un titre de plus, & cette autorlte devenue neceCfaire, le conCenrement l'dl: devenu auffi avant l'ige requis
par les Ordonnances;
Mais l'épreuve de la vocation ne dépend pas abColument
de l'autorité des peres & meres; elle eH plutôt due à
leur tendrelfe & à leur conColation. C'eft ce que l'on trouve
démontré par la Jurifprudence la plus confiante. L'Arrêt
d'Heraud, rendu le 20 Mai 1 S86, contre les JéCuites; celui
de Laurens du premier AoÎlt 1601, contre les Feuillans;
celui de Ripeau du 24 Mars_ 1602, contre les Capucins,
ne lailfent plus aucun doure; les eofans ont roujours été condamnés à des temps d'épreuve; & quoique quelques-uns euC.
fen~ palfé l'âge fixé par l'Ordonnance de Blois, tous furene
rendus à leurs parens. Celui de 168'î Cequeftr-a pour fix mois
dans une communauté particuliere la Dlle. d'Epernon; fes
pere & mere demandaient cette épreuve.
Ce n'eft pas pour empêcher la vocation, qu'un pere ten.
dre ou une mere éplorée defirent un~ épreuve nécelfaire à
leur cœur & à la tranquillité de leur conCcience; c'eft pour
concourir au bonheur de celui auquel ils ont donné l'êrre.
ConCéquence non d'une autorité cruelle, mais d'un miniftere
de douceur, d'un zele tel)dre & inconnu à tous ceux qui
n'ont pas eu le bonheur de l'éprouver. D'ailleurs cette épreuve
n'eft qu'un temps palfager; ce n'eft qu'un infianr auprès de
la continuité des momens qui vont Cuivre. Car le pere n'a
pas le droir, après un certain temps, de s'oppoCer obHiné.
ment à une vocation ferme & confiante.
Une mere veut que fa fille goÎlre encore les plaiGrs dumonde. Ah! fi elle efi bien appellée, fi la vocation eft fin.
tere, elle en Centira tout le vuide & la futilité; elle les dé.
teftera avec mépris, & devra à celle qui lui a donné le jour
de lè voir plus affermie encore dans le parti qu'elle voulait
prendre.
En effet, quel eft le véritable but de l'épreuve? Elle en
a deuxl elle affermit la vocation, & infiruit les parens qu'elle
canCale. C'eft ce qui arrivera, -fi la DUe. Devieux per/ine.
D d 2,
�21~
10URNAL
Sa mere éplorée s'armera de toute, ceHe force étrangere ~
fon fexe; elle conduira elle-même la viél:ime à l'autel, dès
qu'elle fera réellement perfuadée que Dieu la denlande; elle
immolera elle-même cette nlle chérie, lorfqu'elle ne pourra
plus douter, lorCqu'elle fera convaincue qu'elle eO: véritablement
appellée. Mais ~u moins elle veut éprouver fa vocation, juger
fi elle eH bonne, ~ la raffermir. Elle va fe dépouiller de
l'efpece de propriété qu'elle avait fur fa fille; il va s'élever
entr'elles un mur de féparation 'inébranlable; elle va lui
devenir étrangere; elle va la perdre & s'enJéparer pour jamais; & elle ne pourra pas l'éprouver, elle à qui elle a coûté
taot de foins, de peines & de larmes! Elle veut s'infiruire
& fe conroler; & fa fille pourroit lui refufer de lire une
derniere fois dans fon cœur! & fa fille ne voudroit pas. lui
donner,pour dernieres marques de tendrelfe, de fe rapprocher d'elle encore une fois!
Telles font les fources ,des épreuves; tels ~n font tes motifs. Ainli quand même l'autorité paternelle feroit -étrangere
à l'émiffion des vœux, quand le confentement de la mere
ne ferait pas nécefiaire. pour faire profeffion, la fille devroit
toujou'rs fe réfoudre à faire une épreuve pour rendre ho'ml1l<!ge à la tendrelfe, & n'avoir rien à fe I;eprocher fur fon
,obéilfance.
•
La Dlle. Devieux l'a fi bien feoti, qu'elle a elle-même
offect cette épreuve; ,mais elle y met une côndition; elle
ne veut pas la faire chez fa mere. Elle craint, elle redoute
la maifon maternelle. Mais ne devroit-elle pas furmomer
cette craime? Si la vocation eH réelle, li elle eH volontaire,
celui qui l'appelle lui donneroit' la force de franchir 'toute,s
les difficulrés. Mr. l'Avocat-Général obferva néanmoins que
pour lailfer une entiere liberté à la Dlle. Devieux, relativement au choix de fon état, l'épreuve devoit être faite dans
une maifon neutre.
Il conclut à ce qu'en concédant aél:e à la DIle. Devieux des offres par elle faites fur le barreau, de ne
confommer fa profeffion religienfe qu'à l'âge de vingtcinq ans, l'appell..tion & ce dont était appel fillfent
�• nu PALAIS na PRovaNC~;
2.13'
mis au néant; & par nouveau jugemenr, à ce que }a Dlle.
Devieux fe retirât dans telle maifon religieufe qu'elle rrou.
veroit à propos, pour y palfer une année de temps d'épreuve.;
pendant lequel temps fa· mere feroie obligée de lui fournir
le loyer de la maifoô & une penlion convenable pour fa
nourrirure & entrerien, & palfé ce temps la mere feroit
condamnée à lui payer les frais de prife d'habit) dotation
& autres accelfoires.
Arrêt du 2.~ Juin 1777, prononcé par Mr. Je Prélident
de Lauris, qui ordonne que la DUe. Devieux fe retirera 'dans
une maitOn réguliere ou autre à fon choix, pour y faire pen-.
dant un an l'épreuve de fa vocation, palfé lequel temps
il lui permet d'entrer en noviciat au Couvent de la Vilirationj
auquel cas condamne la Darne Devieux mere à payer les frais
de vêture & de dotation, imputables fur fes droits, dépens
compenfés; déboute la Darne Devieux de fa requête contre
f'Econome du Monafiere, avec dépens. Plaidanr Mes. GaBier,
Ponalis & Roman Tributiis.
L
ARRÊT
XXVIII.
En matiae de dénonce, le ferment
recu d la preuve du contraire.
Tl'
rjl pas décifoire, & on eJJ
.
Rançois Cafi~, Ménager de la ville des Baux, expofa
dénonce au Greffe de la Jurifdiél:ion le 2.4 Aoûr 177 6 ,
~ontre Marie Laugier & une autre fille inconnue qu'il avoit
trouvées le marin du même· jour dans une de fes rerres à
cueillir des railins. Le rapport fair en conféquence du man- ,
dement du Juge le 2.7 du même mois, porra le dommage
à ~ 0 • fols; la dénonce avoit été lignifiée le 2.6 à Jofeph
Laugler pere; le rappore le fut le 2.8, avec commandement
de p~yer le dommage liquidé & les frais, & à défaut de
paiement on l'ajourne devant le Juge pour l'y faire con.
damner.
. •
F
�i f,4
Jou RNA L
r
,
,
'~" L'e len(!emain Laugier donne1des défenfes, & conclut ~
(dn. relax "d'infiance, ~ fubIidiairement i1 offrit de prouver
la rau1Tet~ Ile' la dénonce. Le 3 Septembre il.' intervient
Sentence gui admet Laugier à proùver que fa' &lle étant
partie' de Mouriés le 24 Aotit, en compagnie ,de ph)fieurs
Jle'rfo'nn;es, &:, ityant p'â1Té ,environ' Tor les. qjJàtre heures
& demie {fa '.rRa in- a'uprh d'une te~re complanféen éd vignes
~~partenrns à ~afie," celu}-~i" l'auroit -d~lrb'nc'€é>l.dall~"· urte
draye ou che'mm 'qm C'Oqdlllt au mas 'dé P'ay,an, fans qup
fa fille fiit ént'rée dans ta vligrle~(le 'Cafte", &'; üins même
qu'ellè y eilt cuelIti aucdn raiRn. Vèliqllêt'e fut 1àite~&:rrl:ôm~
munf~ué~
le, "2.,3 'dti mê'nle îrl'è!s. LCaite"; avoit ,priSlBes' letr)'es
~).f 1. ,.trl " t '
IP'"
,
1 ;t,· lfJP
•
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. ... , ..,.., .)(1 " ' ,
- 1 n - 1 i'" ri, '" M
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"
: 'qn .. tlI~oit 'p'oU ' \...<ift'é, -qu'aux, termes, du gtarut, la p'eine
1
aù bll'h 'potit l'infraaion
du. terfoir', & celle du Qom mage
iaufé d-!ti;s 'le fona~ d'autrui', doivent être adjugées fur le
féi-merlt <lu 1 propriéta'irè, eu égard pour toutes preuves, y
eft-il dit, au ferment de l'endo'mmag~. Cette djfpofition a eu
divers objet~ d'utilité publique: la. d'abréger les formes de
l~ procédure dans une matiere fommaire, & qui ne roule
ordinairement que fur des intérêts minutieux en eux-mêmes,
mais qui devieilClroient importans, s'ils étoient multipliés;
2. 0. de contenir par-là des contraventions qui renouvellerêiéht à ;~hàque 'infiant, s'il fallait' apporter dans leurs pourfuites les mêmes précautions, & obferver les mêmes for~alites qu'entraîne la pourfuite des aaions ordinaires. Le
Statut, n'a pas cru qu'un propriétaire fe {endlt coupable d'un
~éli,t auffi ~rave ~ue le parjüre, pour Ur! objet qui n'efi pas
~pable 'd,e ,lênfei fa cupidité. " /
-, ,
'.
. 'A' l'appui de cette di(poIition di! Statut vlent celle du
Réilerhent municipal. do' 8 Fé~tie(j. 1574, rendu com,trfun &.
exécutoir,e dans foute la -Province par 'Arrêt du 7 Avril 1601,
rapporté'daris le Reêueil âes privileges dè la vine a'Aix,~pag.
143, art. 3 , ' ,
.
.'Il Jfi vrai quffuivant ll'Çlbfervatiân de Mourgues fur le
Statut, pag. 2.89, la preuve par témoins peüt être're9ue en
certains cas coarre le ,oarenu en la dénonce, ce qu'il au-,
t"
.
�D U
PAL AIS
D E
PRO VEN C E.
2..1 S
tpriee pa,~ l~ décilion de Dumoulin fur la coutume de Paris,
tir. l, §. 9, glof. 6 in va. rendre compte, n. 19: ubicumque
Statuto. vél confuetudine flandum efl juramento alicujus, hoc
intelligitur, dummodo v,er!f1imilia affirat, ftcùs fi prœfulflptio jit
in contrariul1J..
.
Mais indépendamment de ce que cette opinion fut concjamnée par l'Arrêt intervenu en 163 l, en la caufe du fieur'
André Aube, Seigneur de Roquemartifle, contre J~a,n Contard, qui jugea bien expreifément qu'on ne peut pas c.o.m-.
batJre par la pr,euve contraire la dénonce faire .~vec 15rtlJen
par le G.arde-rerre, ·il dl: fenlihle, d'après J;'opinion ~,e ~çur
gues, qùe pour adrperrre une pareille preuve, il faut qu'elle
porte fur des' fa Ir s- ~récis & relevans, qui emportent aveé
~ux une forte préfom.pjÎon contre la vérité de la dénolj1ce!
Tel eH, par exemple ~ .le cas où des anit1Jofités. ~'}técfi
rlentes en~re voiÛ;ns !·aijJj:roient entrevoir qu'un efpd~ 1 d~
,vengeance a .pu dérert1iille.l'lla dénonce; tel fero\t, ~ncore' .l~
èas où l'Qlloffriroir de .p)'Ç1uver un alibi ·q~i. ne Jle,rmettroit pas de' penfer qu'au .jour & à l'heure indiqués, le dénoncé eût' pu fe rendr.e & fe, trouver dans le domaine du
dénonçant, ou qu'on offriroit de prouver q]J'jl y Ja eu' équivoque dans les .perfonJ;ies". en~ ce gue le d,ommage 'furoit
,été cauré par tOUt autre. C'eil ..d'après, c~tt~ dillinéti0!1 q~
la derniere Jurifprllp.epce a. admis ou rejetté la preuve con~
traire.
1 j
.
Encore ne fulEt-il pas 9.ge la preuve porte fur des fait~
circonqanciés & rlelevan~lél.9i iflduifent ,411e forte p'réfo~p
t.ion de fau/feté, ,poqr e;51-si.#.rerminer l'adq:lÎqion; i~ ,faut,
fuivant les Arrêts de Ja. Cour, que ces faits aient ere op..
'pofés lors de la figni~cat(~n de 'la dénonce, fans quo.i op.
regarde ces faits comme le frui~ de la réflexion, & .cprIJme
ayant été fuggérés par' la néceffité de. fe défendre. Il efl:
fenfible e,n effet.lll-l qlorfque quelqu'un été fa~ifement ,dé.
noncé "il fe. (qulev cpotre le premier aéte ,qui~lui efr (Ignifié; s'il fe tait., <efl: un aveu tacite qu'il n'a rien à op.,
pofer, & qu'il reconnoît la vérité de l~· dénonce, qu'il ne
doit plus être reçu à débattre par la preuve con.traire. Tel~e
a
,
,
-
�'~16
JOURNAL
ell: l'efpece de l'Arrêt r,apporté par Boniface, tom. l, liv.
1, tit. 39, pag. 106.
,
.
Ici la preuve ell: en,core ,ina~miffible, parce qu'elle porte
évidemment fur des faits negatlfs. Or, cette preuve ne peut
être reçue, parce qu'elle ne peut être remplie. Il ell: évident qu'une négation n'ayant rien de réel par elle-m~me,
& qui tombe fo?s ,les fens,' e!le ne peut, fe prou~er ,111 pal:
témoins, ni par ecnt. On cltOlt le temOlgnage d, AnO:ote :
nulla negationis fubefi caujà? nulla direc1a probat~o. Ceil: encore l'obfervation de l'Abbe Fagnan fur le chapitre cum Ecclefifl, n. 2 [, où il donne pour une regte certaine quod ne~
gativa fit improbabilis pel' re~um. natu~am. "
..
Suivant les Auteurs, le pnnclpe qUi a éte etahJ1 ne fouffre
qu'une feule exception ,-·qui dt lorfque la négative eil: tellement re{heinte 'à des circonil:anc:es de temps & de lieu,
qu'elle préfente un fait réel & poûtif. Telle eil: l'exception
tirée de l'alibi. Un tel jour Pierre n'était pas a un tel en).
droit, il était ailleurs. Voilà la négative refireinte à des circonfiances de temps & de lieu donc la preuve peut être admife, parce que le fait, il était ailleur§, préfence un fait po--.
fitif cfui peut être prouvé.
On ajouroit que la voie de l'appel eil: un moyen iêgitime
que les Loix naturelle & civile ont incrodùit. On ne préfume jamais la renonciation à un droit. L'acquiefcemenc à
une Se.ntence qui ôte le droit d'en appeller, doit être exprès & formel; il faut un acquiefcement aaif; l'acquiefcement paffif n'eil: pas fuffifant. Calle a pris fes lettres d'appel
le 19 Septembre 1776; l'enqutte ne lui a été communiquée
que le 24. Il n'y a donc aucun ,acquiefcemént à oppofer--,
& confég.uemment aucune fin de non-recevoir.
On répondoit pour Laugier, que les Légiflateurs Romains
& Franc;ois, jalQux avec· raifon d'affurer la tranquillité des
familles, que l~ renotlV"e!lement des procès déja décidés ne
pourrait que troubler, ont fait tour à tour des LoiJ! qui décident qué l'acquiefcernent. à une Sentence en rend l'appel
Don recevable. ( L.
cod. de re judicatâ; Ordonnance de
1667, tit. '2.7' art. 5. )
,
s,
La
•
•
�DU
PALAIS
DB
PROVENCE.
.
217
La Loi Francoife femble exiger un acquiefcement formel;
mais interprété~ par l'exécution qu'elle a eu, elle n'.exige
. plus qu'un acquiefcemem tacite, à l'exemple de la LOI Romaine, qui ne veut qu'un acquiefcemem quolihet mod~. Joutre
& Rodier fur cet art. ) difent qu'il n'ef!: pas ~efoJn po~r
cela d'un acquiefcemem formel; il fuffit 'lu Il ptlltre fe prefumer par la conduite de la partie.
Il y a des Loix ·au digef!:e de jurejllraudo, qui décident
que 'quand le ferment ef!:prêté, le procès elt irrévocablement décidé. Telles font encore la Loi )6,.if. de re }udicatâ, & les Loix 8 & II, cod. de rehus creditis & jurejurando.
Si le ferment affure lé fort du différent d'une maniere
irrévocable, il fui; delà que quand il, elt une fois prê.é,
la partie due!TIent appellée, l'appel envers la Sentence qui
l'ordonne ne fauroit êHe reçu. La preltation du ferment
opere donc l'extinélion de l'appel. C'ert ainli que les Arrêts
l'ont jugé; tels fom ceux rapportés !Jar Boniface, tom, 3,
pag. 324, & celui du 2 Décembre 1727' rendu fur les conclulions de Me. Bayon, Subltitut.
Sur la preuve oHerte, on répondoit que les Loix générales appercevant le danger de rendre un citoyen à la fois
accufateur, témoin & Juge c.l_ans fa propre caufe, & voulant
en prévenir les injuHes' effets, om précifément dé.cidé que
perfonne ne pourroit dépofer en fa propre caufe: omnihus
in re propriâ .dicendi teflimonii facultatem jura fuhmoveruut.
L. la; cod. de teflihus. Elles vont plus loin; elles rejettent
la dépofition d'un feul témoin, lors même qu'il feroie élevé
à la plus haute dignité. L. 9, cod. eod.
Cependant par une exception à ces Loix, la déclaration
alrermenrée d'un citoyen honnête d'en avoir trouvé un au,re
dans fan fonds fait foi, fi le contraire n'elt pas prouvé, ou
fi des circonltances. n'ôtent pas à cette déc1ar'ation un caraélere de vérité qu'on lui donne.
La Loi fl:atutaire a cru que pour la conferv3tion des fruits,
le ferment du propriétaire étoit fuffifant pour s'écarter des
Loix générales dans de petits objets, &; introduire une nau...
(ln nées 1775 & fuiv.
E e
�~I8
JOURNAL'
velle regle, qui par cela feul qu'elle dt contraire ~ l'équité,
ne fouffre point d'extenlion. Mais cetre Loi n'a pas entendu
rendre le ferment décifol e, & exclure route preuve con.
traIre.
Nous rrouvons bien dans le Statut rapporré par Mourgues,
pag. 284, ces mors: eu égard pour toute preuve au ferment
de l'endommagé. Mais le Sratut ajoure, taxé préalahlement
par le luge. L'on trouve ,des expreffions' fynonymes à la
page (uivante, étant préalahlement l,,!!t ferment modéré par
le l u g e . .
.
Si le ferment n'ell: pas décifoire, li le Juge peur admettre
ou rejetter la déclararion alfermentée d'unJJomme, il parait
évident que la preuve du contraire de la . déclaration doit
êrre admife. C'ell: ainli que l'obferve Mourgues, pag. '289.
Pour êrre admis à la preuve de la fau(feté de la dénonce,
il n'ell: pas néce(faire"de fourenir qu'elle a été expofée par
animalité; cela n'ell: néceffaire que quand on en demande
le rejet par le feul fait d'animoliré. Ainli, li deu>: ci~oyens
font en procès fur ,un objet important, l'animalité qui ell:
alors préfumée, fuffir feule pour rendre la dénonce inutile,
quoiqu'elle fait affermentée. Mais lorfqu'il ell: quell:ion
d'anéantir une dénonce, par le fait de l'alibi, ou de toute
~utre pF-euve péremptoire, il n'ell: pas néceffaire de Ce prévaloir de l'animalité.
L'art. 3 du Réglement municipal, en difant que le propriétaire fera cru à fan ferment, tle rejerte pas l'admiffion
de la preuve contraire. Mourgues & Bomy', qui ont écrit
:lprès ce Réglement, le penfent de même. Les Arrêts rapportés par Duperier, tom. 2., vo. ban, n. l , pag. 43 S,
& Boniface, tom. l , l.iv. l , tir. 39, pag. 106, ne fone
point appliéables au fait préfent.
Parmi les preuves négatives, ajoutait-on, il faut diainguer celles qui font vagues & indéfinies, de celles qui renferment en elles-mêmes l'affirmation du contraire de ce qui
ell: expofé.
La dénégalion de Laugier renferme l'affirmation du contraire de la dénonce; elle ell: rell:reinre par les,circonfiances
�•
DU
PALA1:S
DB
PiOVBNCI!.
2.19
OU temps, du lieu & des perfonnes; elle celfe conféquemment· d'être vague, & doit avoir autant de force qu'une affirmation. En effet, les témoins confiateilt que Marie Laugier ne s'dl: pas tirée du milieu d'eux, & qu'elle n'a pas
quiné le chemin. Cene dénégation prouvée renferme l'p.f- _
firmation du contraire à la dénonce. L'affertion de la dénonce efi par-là détruite; la preuve efi refireinte par les
circonfiances du temps, puifque l'on dit que c'efi dans la
matinée; elle l'ef!: par les circonf!:ances du lieu, puifqu'on
alfure que c'ef!: dans le chemin; elle l'efi enfin'par les circonfiances dt:s perfonnes, puifqu'il efi prouvé que Marie Laugier n'a jamais celfé d'être avec trois perfonnes.
'
Par Arrêtdu 2.8 Juin 1777, au rapport de Mr.le Confeiller
de Momvallon, la Sentence fut confirmée, avec dépens.
EclÎvant Mes. Graffan & Sauvere.
ARRÊT
XXIX.
Les livres des Marchands fom-ils pleine & entiere foi?
La femme, ayant même des hiens lihres, commerçant au vu
& fit de [on mari, ce dernier répond civilement des dettes
rai[on de [on commerce, comme étant
fju'elle contraae
cenfè l'autoriftr & en prefzter.
Les exceptions dilatoires doivent être propojèes avant les déftnfes au fonds.
Peut-on agir contre l'infenjè, tant fju'il n'efl pas interdit ()
que l'on ne l'a pas pourvu d'un curateur?
a
,
ES fieurs Pontés & Juglas, Marchands de la ville de
Manofque, livrerent à la Dlle. Franeroife Durand, époufe
de Jacques Richard de la ville de Barjols, diverfes muchandifes pour en faire des bonnets d'enfant & autres objets de
cette nature. Le 10.Décembre 1776, les fleurs Pontés &
Compagnie firent alIigner Richard pardevam le Juge de
Barjols en condamnation de 303 liv. 18 f. qui leur reltoient
L
•
Ee2.
�~iO
Jou a N A L
dues. 'Sentence de défaut du- S Janvier 1774 qui fait droit
à cette demande.
Richard en appella pardevant le Lieutenant de Brignoles;
il avanc;a. que la dette erait perfonnelle à fa femme, &
qu'étant détenu à la maifon des infenfés 'à l'époque de l'affignarion & de la Sentence, on n'avait pas pu agir contre
lui, & qu'il aurait fallu lui faire" nommer un curareur. Le
Lieutenant de Brignoles ne s'arrêta point à ces moyens;
& par Sentence du 7 ·Novembre 177S, il confirma celle du
premier Juge. Richard en appella paldevanr la Cour.
On difoit pour lui, qu'il el!: peu de queClions plus conrroverfées que celle qui conlH!:e à favoir fi les livres des Marchands font foi; on ofe dire qu'il n'en el!: pas qui dîzr moins
fêrre. La raifon indique affe'z que perforrne ne peur fe faire
lm titre pour foi-même, ni fe conl!:iruer à fon gré un débiteur.
Qu'un Marchand reconnu honnête affirme d'après fes Ii-'
vres,. qui font en regle, avoir livré des marchandifes à un
_ particulier accoutumé à fe fervir chez lui, ,ce fait n'a rien
que de vraifemblable; il el!: même prouvé par l'ufage de
ce particulier, par la néceiIité où l'on d!: de recourir à des
Marchands; & fi ces preuves ne font pas regardées par ellesmêmes comme décifives, au moins peuvent-elles avoir affez
de poids pour faire condamner le particulier, quand le demandeur offre de les fortifier par la religion du ferment.
Mais fi ce Marchand veut porter la foi de ce livre conrre
le tiers, s'il veut s'en fervir pour prouver que la marchandife a été livrée de l'ordre de ce tiers qui ne l'a pas reçue
lui-même, ce feroit étendre trop .Ioin une· faveur daogereufe qui dans ce cas n'aurait pas les mêmes motifs. La livraifon de la makhandife tient à la néceiIité de l'habillement: elle peut donc être plus aifément préfumée; l'ordre
d'un tiers ne peut l'êrre de même, parce que cet ordre fe-'
roi.t un cautionnement, & un cautionnement ne fe préfume
POlOt.
Perfonnne ne douu que les livres des Marchands ne foient
d'es écritures purement privées, dit Boiceau, parr.
chap. 8.
2.,
�u P A i A 15 .1> Il P Ii 0 V Il Nell:
h'i'
Or; la Loi inflmmenta., cod. de probat., décide que ces écri[ures ne fane pas foi: inflrumenta domeflica, fi non aliis quoque admù/iculis adiuventur, .ad.. probationem Jola non fufficiunt.
Parmi les Auteurs qui ont difcuté cette matiere, on trouve
Danti fur le chap. 8 de Boiceau, n. Sa; Dumoulin fur le
tir. du code de probat.; Ferrieres & Denifarr, vo. livres des
Marchands; Mourgues fur le Srarur, pag. 313 , & Mr. de
Monrv~lon, vo. livres des Marchands.
•
Il ell: donc cerrain parmi nous que ces livres ne fonr pas
foi par eux-mêmes, & que ce n'ell: que dans le cas que
l'on rrouve réunies roures les préfomptions indiqLéçs par
Dumoulin, que l'on défere au Marchand le fermenr qui
dans le cas contraire doit être déféré au demandeur.
On ajourait que le mari n'ell: pas renu des obligations
conrraél:ées par fa femme à raifon de fon commerce,
quaJld ell~ a des biens à l'égard defquels elle ea libreldans
l'exercice de fes aél:ions. Tel ell: le cas où fe trouvent les ,
fieurs Pontés & Juglas, puifque la femme Richard, mariée
fous une conl1:itution parriculiere, a d'ailleurs' des biens li-bres ou paraphernaux.
L'aurorité marirale donne fans doute au mari un pouvoir
fur fa femme auffi étendu que légirime. Mais il faut dillinguer à cet égard deux forres de pouvoirs: 'pouvoir fur la
perfonne; pouvoir fur les biens ou fur la perfonne à raifon:
des biens.
Pouvoir fur la perfomie: tel ea l'infpeél:ion du mari fur
les mœurs ou fur la conduite perfonnelle de fa femme; tel
el1: l'obligation qu'il peut lui impofer t de venir le joindre
dans le domicile qu'il lui plait de choifir. Certe efpece de
'pouvoir ell relative à un genre d'obligaticm .dont lé mari
ne fauroit être civilement refponfable. Tels font les· délits
commis par la femme, à raifon defquels1les adjudications
rapporrées conrr'elle ne peuvent.être pourfuivies- fur fe~ biens
al! préjudice de l'ufufruit dévolu au mari.
.,
. Pouvoir fuv les biens: rel en· la libre adminil1:ration. des
biens dotaux. Tel l'exercice des aél:ions à raifon de ces
~iens ! I:e pouvoir n'a guere d'autre effet en ce g~Dre, que,
b
•
0-
•
�11.2.'1.
} 0 U R "N A: t.
d'ineerilire à la femme route efpece de difpofition de {es
hiens.
.
Enfin le pouvoir. fur Ja perfDnne par rappoIt aux biens
cooillle dan,s l'aut:orifurion ou la toléranc.e du mari dans
l'emploi que la fecn:rtle. peut faire de fes biens. Ce pO\lVoir
e1l: d.onc le feul qui p.ui!T.e reodte re mari refponfable~ parce
que l'adOlinilhation de ces ,biens lui érant eXc!Ullvement
dévolue, tout ufage que la femme peur en faire à fon vu
& fu, eH néceJ1àiremeoc faie de fon con[enremenr , & <tu'en
çe la femUle qui p.ar elle-même n'a aucun pouvoir, ne peut
être ;r~ardée que comme [on repréfeneanr ou fO.n prépDfé.
Mais
pouvoir fuppofe des biens ·fur lefquels le mari
ait des .droies. Sj.la .fèmme ne s'efi confiiruée aucune dor,
ou fi mariée fous une con!l:irution particuliere, elle efi,
quant à [es autres biens, libre dans l'exercice de fes aélions ,
l!i difpootio.l'l '<le ces biens lui appartient fans réferve; elle
peut .~ibnemeru. les :admini{her, eA percevoir & confumer
les fruits" les engager, l'endre ou donner. L'autorité de
!Qn mar~ ell à aet égard auffi impuilfanre, (on autorifarion
efi auffi inutile, que l'autorité ou l'autorifation du pere font
impuilfantes' ou il\uti16 à l'égàrd de's biens cafirenfes, ou
à l'égard du 61s émancipé. En un mor, la femme libre
dans fes. aélions .efi regardée "en ce fens comme n'érant
PilS même.• rmariée;. fi le mari adminiHre fes biens,. ce ne
peut êrre qu'en vertu d'une procuration expre!Te & toujours
révocable; s'il profire des fruits, ce n'eil: que par la tolérance de la femme; enfin il n'a pas fur c.et objet plus de
pouvoir fur elle ,que n'en auroit' un érranger.·
Di! ces priocJpes il fuit qu'autant le mari doir êrre Tefponfable du commerce que fà femme fair fous fes yeux,
quand elle efi mariée .{ous une conHitution générale, aurant
il feroit a,bfurde & injufie ·de le foumétrre à cene refponfion, J quand elle .a. des hiens donc 'Ia libre difpofitÎon lui
'/
appartient.
"
r
Les Auteurs, ont examiné lt qui; lJililarrenoienr les acquilirions ~aires par une ,femme openfumt la duIée du trulriage.
La rçgle générale" :fondé.e fur la Loi QuintU's -: Mll.cius, eft
)
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A LAI S _ DB' l' R 0 V B :Il' C Ji:
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qlle rour ce que la femme poffede, fans pouvoir indique
unde hahuerit, eO: cenfé appartenir au mari; ad vitandam
turpis quœ.flûs fufPicionem. De cene regle il fuit que quand
la femme peut indiquer unde hahuerit, il ne reHe plus qu'à. '
juger la validiré du titre en venu duquel elle prétend avoir
acquis.
.
Parmi les difficultés auxquelles cene difcuffion a fouvènt
donné lieu, les Auteurs om toujours convenu que les acquilitions faites par la femme ne peuvent être fufpeélées;
quand elle a fait ùn négoce dont le profit a pu fervir à ces
acquifitions. Aliud., dit Godefroy fur la Loi etiam fi, wd.
de donat. inter vir. & uxo,:., fi uxori bona paraphernalia multa
fuerint, aut fi negociatrix 'mulier erat. Mornac ad Leg. Qui,!tus:'
Mucius, if. eod. , affure qu'on a toujours excepté de la reglë
negociatrices puMicas. Catelan & Vedel, liv. 4, ch. S, difem la même chofe.
Si la femme libre qui a des 'biens- adventifs acquiert pour
elle', la p~éfàmprion' légale eO: dOnc dans ce cas, -que le
négoce qu'elle a fait, a éré fait de ces biens adventifs.
Le màri ne fauroit donc être tenu d'un commerce auquel il
n'a aucun intérêt, puifqu'il eH fair d'un bien filr lequ.el il
n'a aucun droir.
- On répondoit pour les lieurs Pontés & Juglas, que norrè
Starut rapporté par Mourgues, ·,pag. 3°2, décide, précifément que les livres des Marchands font foi' en- Ju(tice ,
quand ils contiennent les livraifons & les paiemens. C'eG:
auffi le fenriment de PaHour en fon rraité jur. feud., liv. 2,
tir. 15, n. 2;, & de Mr. de Montvalon en fon Précis des
Ordonnances, pag. 2;416. Jouffe, fur l'Ordonnance du Corn'"
merce de 1673, t'ir. 3,' arr. i , penfe que 'les livres- des
Marchands fonr foi en Juflice. Toubeau dans fes inl1:itutions
du droit. confitl~ire , liv. 2 ~ prouve par un rrès - grand
,nombre d'autorités & pa-r l'ufage, la néceffité- qu'il y à
d'ajouter foi aux livres des Marchands. 'Boniface, tom, 4,
liv. 9, 'tir. 6, ch. 2, rapporte un Arrêt ·du :; Juill r683 ,
qui confacra la maxime. Lors de ce( Arrêt les Avocats de
çe
Parlement av-oient
expédié uq
acte de
ooc9!iécé qui actef..t
•
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�'h.'l
Jou Il NAt
eoit que les livres des Marchands faifoient foi en Jull:ice ;
tant contre celui à qui la marchandife ell: livrée, que contre
celui du confentement de qui elle l'a été.
Sur la refponuon du mari, on difoit que la femme marchande publique oblige fan mari; plufieurs coutumes, & notamment celle de Pa ris, en ont fait une difpofition ex- '.
pre/fe; elles fane r~pportées par Brillon, vo. Marchande
puhlique & femme marchande. Bredeau fur Louet, letl. F,
fomm. I I ; Journal des Audiences, tom. (, Iiv. l , ch. 7 i
Denifart, vo. Marchande publique; Decormis, tom. 2,
col. 1309..
.
'
On avait tenté dans le procès des lieurs Ginoux, Marchands d'indienne de la ville de Marfeille, & du fieur .Gafpa rd Barlatier du lieu de Trets', de propofer une exce,ption
à ·cette regle, qui ell: que lorfque la femme .~ des biens
à l'égard defquels elle ell: libre dans l'exercice de fes aétions,'
le mari' n'ell: pas refponfable des obligations qu'elle contraéte; mais l't\'rrêt du ') Juillet 177') ou 1776, prononcé
par M. de La Tour, réforma la Seme.nce qui l'avait adoptée.
La femme efl: en la pui/fance du mari; la patience du
mari qui ne peut ignorer fan état public de Marchande,
& qui pourrait l'empêher, vaut prépoution; c'efl: d'après
ce princiJi'e que la regle a été portée; c'ell: ainu que s'explique D .. cor111;5. en l'endroit cité. . .
\
-",
Le ["ul cas qui, d'après les vrais motifs de la regle,
pourro.it ell ':rre tiré, ce ferait celui où le' mari n'au.rçit
pas le pouvoir d'empêcher le négoce de fa femme. Le caS
de' féparation juridique ell: en effe~ le feul excepté par la
coutume de P dris- de qui. on a adopté comme une regle
exprdfe, une décï;on qui étoit implicitement dans les
principes du droir romain. .
Mai.s il y a plus: que la femmel ait ·eu, ou non à ern"
ployer dans fan commer e des biens à elle propres & libres ,.
peut_on ne pas voir que le mari n'a PY,{:onfentir à lui laiffeli
faire un c;ommerce particulier, qu'en vue de l'intérêt qu'il
en retire, & que par cela même qu'il l'a permis, il eH;,
ceolé en avoir_ profité, av'oir lui-même p.répofé fa femn:e
dans le commen;e?, .
Lit
�DU
PALAIS
DE
YROVBNCB.
22)
La pui1fancè maritale & la puiffance paternelle ont des
effets différens. Le pere & le fils ne font une feule &'
même perfonne que relativement aux fonél:ions.. civiles,
aux biens. Le pere efi plutôt proteél:eur que maître. Le
mari & la femme fonr duo in carne una, par une liaifon plus
intime que celle qui identifie en une [eule perfonne le pere
& le fils. La puilfance maritale emporte dans un fens la
propriété de la perfonne de la femme.
Si la femme commerce, elle engage fa perfonne, puifqu'elle eH contraignable par corps; elle engage la propriété
de [on mari. Si elle, commerce publiquement, le mari efi
cenfé approuver fon négoce.
Il ef! un autre principe fondé en droit comme en raifon.
La femme dans les conditions ou J'airance ne fait pas de
l'oifiveté un honneur, un principe d'état; die doit ,à fOI\
mari, à fon ménage, fes foins, fon travail. In omnibus,
dit le Préfident Faber, liv. 4, tit. 14, déf. 41, mulier negotiari debet ma.rito. Si la femme eit indufirieufe & laborieufe, il faut croire qu'il I;a ainli choifie pour fùpporrer les
charges du mariage, & qu'il a compté fur ce travail & fur
cette indufirie pour fonds & pour re\'enu. Si elle com..merce, elle emploit à ce commerce les foins, le travail,
J'indufirie qu'elle ,doit à fon ménage, & le lTIari eH cenfé
avoir au négoce un intérêt, fans lequel il ne confenriroit
pas à cette difiraél:ion du ménage, à ce diverriffement des
foins domefiiques.
Ainli, quand même la regle feroit établie fur la préfomp'lion, que les profits du commerce de la femme font verfés
dans la ma ifon du mari, la regle vaudroit dans le cas même où
la femme aurait des biens libres à employer à fon commerce;
dans ce cas, quoiqu'elle négocie avec fan bien, elle engage
fa perfonne , qui ef! à [on mari, & elle négocie par une induUrie & un travail qu'elle doit au ménage : d'O~l il ef!
évident que le mari n'a approuvé ce négoce qu'en vue du
profit qui lui en revient.
La regle que l'on invoque efi fondée [ur l'ordre public &
]a nature des chofes. Si le mari en pareil cas n'était pas
,Années 1775 {; fùiv~
F f
�ü6
Jou
RNA
L
tenu de pay.er les dettes de fa femme marchande, le public
feroit trompé facilement par "l'accord fraüduleux qui exifreroit cntr'eux. La femme achetetoit de toute main; le
mati en recevroit.le prix, & le Marchand qui aurait livré
[a marchandife n'auroit aucun débiteur, ou n'en aurait fouvent qu'un infolvable.
Sur la régularité de la Sentence on obfervoit que l'on
connaît en pratique trois fortes d'exceptions; les unes déÇ.linatoires, les autres dilatoires, & les troiiiemes péremptoires ou défenfes au fonds.
Les exceptions déclinatoires font celles qui tendent à faire
renvoyer l'aaion devant tout autre Juge que celui devane
qui on
affigné..
Les· exceptions dilatoires' [ont celles qui fe propofent
contre la demande, & qui ne tendent pas à exclure l'a"crion, mais feulement à en différer la pourfuite.
Les exceptions -péremptoires ou défenfes au fonds font
les moyens que le défendeur oppofe contre le fonds de la
deniande , & qui ne tendent qu'à en exclure l'aaion.
Les deux premieres efpeces d'exceptions doivent être
propofées avallt celles de la derniere eCfjece; elles forment
[eu les. une efpece d'incident [ur lequel le Juge doit préalablement fratuer. Mais quand on a une fois donné des défenfes fur le fonds, on ne peut plus revenir fur les autres
exceptions, à moins que le Tribunal ne fût incompétent
ratione materiœ.
Richarfi- a donné fes premieres défenfes devant le Lieutenant; il a attaqué formellement l'aaion des fieurs PoMés
& Juglas; dès ce moment il a perdu le droit de propofer
[es exceptions dilatoires.
D'ailleuts l'homme eH préfumé jouir de fan bon fens &
avoir alfez de jugement pour fe conduire; tant qu'un~ Sentence ne l'a pas déclaré fou & ne l'a pas. déclaré féparé de
la faciété, il peut agir & on peut agir contre lui.
Par Arrêt du 1) Juillet 1777, au rapport de Mr.le Con[eiller de Nicolaï, la Sentence fur confirmée avec dépens,
fauf 11 Richard fan recours contre fa femme. Ecrivant Mes.
Sauvere & Dubreuil.
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-.
;
�DU
5
1
P.AL,fIS
DE
PROVENCE.
:
'A R R Ê T
.
xx X.
En matiere hénéficiale le collateur ordinaire ayant conféré
dans le temps de droit, le collataire a trois ans pour accepter
ou refufer, G' pendant ce temps le Pape ou tout autre Supérieur quelconque ne peut conférer par dévolution.
E 3° O&obre 177 0 , la Chapellenie érigée fous l'Im'o-.
cation de tous les Saints dans l'Eglife paroiffiale de
Barcelonette vint à vaquer par le décès de Mre. Derbezi
-dernier litulaire. Le lendemain le Grand-Vicaire de l'Archevêque d'Embrun en pourvut Mre. DurantÎ', Clerc tonfuré, qui fe trouvoit abfent. Le 9 Oél:obre 1771 M. l'Archevêque d'Embrun ne voyant plus paroitre Mre. Duranti,
en pourvut M.re. Gafiinel, Curé de la Paroiife des Crotés;
celui-ci en prit poifeffion &. remplit Je felvice. Mre. d'Audilfret, Clerc tonfuré pourvu par le Pape, fe pourvut par
requête du 6 Novembre 1772 pardevant le Juge de
Barcelonette, & demanda contre Mre. GaHinel - la
maintenue définitive en· la p.oifeffion du bénéfice, &
provifoirement la récréance. Mre. Gafiinel lui oppofa la
nullité de fes provifions obteèi1Je~ en' Cour de Rome,
dans un temps où le Pape avoit les mains liées par la col':
lat ion de l'Ordinaire, puifgu'à l'époque où Mre. d'Audiffrer
avoit été pourvu par le Pape, le bénéfice était rempli, &
le fieur DLranti en était pourvu depuis un an; & quoiq\l'il
n'en eût pas pris po/Teffion, il était encore dans le délai
pr.efcrit pour l'acceptation ou pour la ·répudiation. Mre.
GaHinel requ(r la maintenue & la récréance. Sur ces entrefaites Mre. Duranti douna fa démiiiion le 30 Décembre
1772 entre les mains de M. l'Archevêque d'Embrun, gui
en pourvut de nouveau Mre. GafiineJ. Sentence gui accorcle
à ce dernier la maintenue définitive. Appel au Préfet gui
confirme celle du Juge de Barcelonette. Appel de .'Ml'e.
d'Audiffret pardevanc la Cour.
L
Ff2,
\
�2.1a
Jou
Il. N A
i
On diroit pour lui, que la quefiion du procès conlHl:oie
11 ravoir li le Pape avait pu .conf~rer par dévolution un
bénéfice ql!e l'Ordinaire .n'avoit pas rempli cum effic7u dans
les fix mois. Il obrerva que quoique l'Ordinaire eût conféré
Ja Chapelle le lendemain de la mort du .dernier titulaire,
cette même collation avoit refté fans effet par défaut d'acceptation de la part du pourvu plus de lix mois après, &.
par conféquent quand la dévolution étoit déja acquife. Mre.
d'Audiffret impétra le bénéfice-en Cour de Rome, comme
vaquant par le décès du dernier titulaire, & avec les
clau (es ordinaires & ulitées. M. l'Archevêque. d'Embrun
voyant l'inlltilité de fa premiere collation, & voulant empêcher route dévolution, conféra encore le même bénéfice
comme vaqu'lnt par le· déces du dernier titulaire ,,& enfin,
le litige intenté, on rapporta du premier pourvu par l'Ordinaire un aae' de démiffion ou de renonciation à la fuite
dnquel M. l'Archevêque d'Embrun conféra une feconde fois
à Mre. GaHinel fur la démiffion de Mre. Duranri.
Rien de plus indifférenr que Mre. d'Audiffret. n'eôt pas
encore atteint fa q~atorzieme année quand il impétra Je bénéfice. Il eH de pr~ncipe que pour polféder u~ bénéfice
fimple, tel que celpi dont s'agilfoit, l'âge de fept ans
fuffit, ainfi que l'établiifent Louet fur la regle de puDlicandis,
n. 32.7' Goard, tom. l , pag. 2'i3 , Paftour, liv. 3 , tit. 22. ,
n. 1 & 3,'& Decormis, tom. l , col. 190. JI en feroit
autrement, s'il s'agiifoit de quelque dignité, de quelque
bénéfice à charge d'ames, ou même (d'un per(onnat, ainli
que le décide le chap. in decorum; extra de œtate & qualitate.
Que le Pape ait le droit de conférer par dévolution en
cas de négligence de la part des collateurs, c'eft ce. dont
on ne (auroit douter. La dévolution la été introduite, dit le
Pere Thomaffin, avec beaucoup de fagejJè, comme un remede néceJJàire pour corriger & punir tout enfemDle la négligeT1ce des puij/auces ù1érielues, ou le mauvais ufage qu'elles
pourraient faire de leur autorité. Aufii tous les textes du droit
canonique nOl~s apprennent que dès qu'il y a quelque bénéfice vaqu'ant, ne ditl mafle.1t i;l fùfFenfo 7 il faut le confére.r
,
�DV
PALAIS
DI!
PROVIlNCE:
229
dans les fix mois: intra [ex men[es perfonis quœ dignè adminiflrare va/eant, conferantur; & fi le premier collateur
néglige de con(érer, le droit dl: acquis au Supérieur; c'ef!:
ce -que l'on appelle la dévolution.
.
La feule collation faite par l'Ordinaire ne remplit pas le
bénéfice. Il faut que la collation foit acceptée par le
pourvu, tacitement ou expreffément, pour que l'on puiffe
dire que J'Ordinaire a véritablement conféré, & qu'if n'y
a pas lieu à la dév.oJution. La collation, qui de foi ef!: un
aae de Jurifdiaion volontaire , ne fe vérifie qu'autant q.J'il
y a en quelque fac;:on .un juniciable, c'e(l:-à-dire, un Eccléfiafl:ique qui veut fe charger du bénéfice, & qui contractant avec le collateur, fe lie à lui par l'acceptation, comme le collateur. fe lie au collataire par la collation. Ainfi,
quand il n'y a point d'acceptation, il n'y a point de collat ion , & le bénéfice efi réputé vaquant, puifqu'il n'ef!:
rempli ni de droit ni de fait, & que le même bénéfice fe
trouve fans titulaire, & fans que l'on fache .'il y en aura
un: il en e!!: comme de la' donation, qui n'efl: parfaite
que par l'acceptation. Cene Loi d'acceptalion dans le's fi""
mois regatde fi particuliérement le collateur, que tant que
le bénéfice conféré n'e!!: pas accepté, la collation demeure '
en fufpens; le collateur ne peut conférer à un autre; il doit
notifier fa .collation au pourvu, & exiger de lui une répudiation expreffe, s'il refufe de l'accepter. C'ef!: le fenriment de Louet; de Duperray' en fes moyens qnoniques,
tom. l , pag. 702; de l'Auteur du Diaionnaire canonique,
vo. acceptation; de Lacombe, JurifPrud. canonique, vo. acceptation.
L'Ordinaire ell: obligé d'avertir l'abfent; le chap. fi ti[,i
a[,[enti en avertit le collateur; & la glofe obferve qu'après
le terme expiré, le c!Jllateur peut conférer. Le pourvu ne
peut plus accepter, li la chofe n'ef!: dans fon entier, &
elle ne l'el!: plus, quand le Pape a conféré par. dévolution.
(Duperray à l'endroit cité, pag. 70S; Lacombe & le Dictionnaire canonique, vo. acceptation; Pall:our, liv. l , tit. 2 l,
& Boniface, tom. ,3, pag. 672, n. 6. )
�~30
Jou RNA L
_
Inutilement on confondrait 15 tems d~1 ·l'on peut prendre
poffeffiot'1, avec le temps què 1'6n a pour accepter le bénéfice; ce font deux chofes bien différentes que quelques Auteurs ont confondu, & qu'il faut cependànt bien difiinguer.
On peut réfigner un bénéfice avant d'en avoir pris poffeCfion; mais on ne peut pas le téfigner avant que de Favoir
accepté, parce que la réfignation fuppofé jus ad rem, & l'on
n'a pas tlroit au bénéfice, tant qu'on ne s'efi pas 1ié avec
le collateur. Auffi Duperray en Ces moyens canoniques, pag.
70'1-> prévient & réfout l'objeél:ion : il ya une diflinc1ion à
faire, dit-il, entre l'acceptation .:;, la prife de poffiflion; il efl
vrai que dans le dernier cas il faut trois ans pour exclure
1 lin pourvu çJe bénéfice. il1.ais pour bien établir Pacceptation en
droit & le temps néce1fàire auquel elle doit être faite, le. Concile de Latran, tenu en 1179 du temps d'Alexandre III., dans
le Canon 8 inféré dans le chapitre 2., décide que comme
il n'y avoit aucun temps limité pour conférer, non plus que
.pour accept~r, pour empêcher la, lpngue vacance des bénéfices, on fix·a le temps des collateurs à fix mois. Duperray
Eite deux Arrêts qui maintinrent les pourvus en Cour de
Rome 'au préjudice du pourvu par l'Ordinaire, p<lrce que lel;
collations n'ayant pas forri leur elFet dans les fix mois, étaient
Eenfées comme non obvenues. ( Journal des Audiences, Arrêe
du 12 Août 162'), ) Tous les Auteurs le décident de même';
Lacotnbe Sc le Diélionnaire canonique, va. acceptation; PiaTes
en fon trltiré de la prévelirion, tom. l , parr. l , chaI'. l'h
& en' [on traité des collatidns, tom. 2, pag. 256, chaI" 8. .
La collation faite à un abfent qui n'a point accepté dans
les fix mois, laiffe donc au Pape le droit de c'onférer lihremènt & de remplir ~n béliéfice. auquel le collateur n'a
pas pourvu' dans le même temps. M. l' Arcliev~que d'Embrun a conféré lui-même à Mre. GafHnel fur vacance par
décès de Mre. Derbezi, comme s'il n'avoit pas déja conféré à Mre. Duranri, & que Mre. d'Audiffret ne l'eût pas
déja préventl en Cour de Rome. Or, fi l'Ordinaire a con.reré une feconde foi~' d'après le décès de Mre. Derbezi, &
oJnobHanr le titre de' Mre Duranti, il a' donc, regardé ce
�DU
PALAIS, DB .. PROVENCE.
2.31
nH~me titre comme inutile J comme n'ayant fait aucune im-
p.
preffion fur la tête de .Mre. l)u~an~i, co~me le b~n~fice
éroit encore vaquant; & li l'OnlinaJre a repute le benefice
encore vaquant, le Pape a donc pu le conférer commetel,
& fur-tàut quand les fix mois:~lla vacarlce avoient inconteftablement acquis le droit de dévolution.
On répondoit pour Mre. Gaftinel, que la préfére nce lui
étoit due, foit que le Pape en conférant ce hénéfice eût
ufé d'un droit de prévention, foit qu'il l'eût conféré .par
droit' de dé:volllti",n. Suivânt les véritables maximes, 'Ia prévention en un .droit Ddieux; elle' n'ell: que tolérée, -t'le J'DlI
-n'oublie pien. po'ur en renreindre l'effet. ,Pour lier les mains
au Pape, il fulEt que -'Ies chofes ne foient plus en leur .entier; & les chofes celfent d'être entieres par le moïndr~
aél:'e émané du collateur ordirraire avant. la PIQvifioh du.
Pape; foit dans les> collations libres, foit d.ans-'les coi1a.·tions forcées. Dans' les premieres, pae exemple, l'elfemblée
du Chapitre, le' fon même de 'la 'Cloche pour alfembler &
le moin'dre aél:e prép'araroire, & dans les fecondes, la fimpIe préfentation du Patron, modo pulfaverit aures Ordinarü ,
empêchent la prévention; & dans le doute la colIation de
l'Ordinaire j'emporte roujours fur celIe du Pape•..
. L'on n'a'lQucun intéI:êt de contefter. ou d.e convenir que
le Pape a 'IElI pouvoir 'de conférer par dévolution un bénéfice que l'Ordinaire n'a' pas réelIement rempli dans les fix
mois, parce· qu'en effet la dévolution n'a été introduite que
pour punir la, néglige.ncè de l'Ordinaire. Mais en efr-il' de
It]ême, lorfq,ue, l'Ordinaire ayant fait ce qui dépendoit de
lui p6ur rémpljr le bénéfice dans -les fi" mois, c'en-à-di~e
l'ayant conféré dans ce dé.lai, le collataire abfent n'a point
accepté cette collation dans cet efpace dé temps. La quef~
tion du procès' fe réduit à connoître l'intervalle de 'temps'
qui eft attribué à un çollalaire abfent pour accepter le bénéfice; de maniere que s'il n'a que fi" -mois à dater du jour
de la vacance, arrivée par le décès du dernier titulaire pour
accepter, le Pape QU rout Supérieur quelconque a pu, après
les fix mois expirés fans acceptation, conférer le bénéfice
�,-
Jou. Il. N A L
~
par droit de dévolution; li au contraire le collataiie a troIS
ans pour accepter ou, répudier, l'e Pape ni lout autre Supérieur quelconque n'a pu u/er de ce droit de dévolution
avant ce terme.
. L'intérêt, le droit de deux perfoones en à conlidérer, à
ménager da,os 1a- collalÎoo d'un béo,éfice; telui du collateur
& celui du collataire. Le droit de. Fun efl auffi facré &
mérite autant d'égards que celui de l'autre. Le droit du collateur, li l'on veut, fublil1:e jufqu'à ce qu'il s'en foit dépouillé I<n,. faveur du collataire. Il lend vers fa fin & fon ' ,-exéculion, là où celui du collalaire commence à exiller;
mais celui-ci, qui n'eH: parfait que lorfque l'autre en totalement éteint, en néanmoins aple à parvenir à cette entiere
,perfeél:ion, du moment ~ue le collaleur a porté fon vœu &
, fixé,fon cho'ix ; .c'e.fi ce qu'on appelle jus ad rem, qui s'opere
.par le' tranfporr feul, différent du jus in re, qui ne. s'opere
que' par l'entiere .acceplation & la confommalÎon du rranfport: le droit au bénéfice, jus' ad rem, ell tellement un droit •
,réel, quoique moindre -que jus in re, qu'un. Bénéficier peut
.en cet état réfigner foo bénéfice.
La peine du Concile de Latran n'affeél:e que les collateurs négligens, contra negligentes .tantùm fuit promlligata ;'
dit.le c!Jap. quia de concelf. prœb. C'eH: une peine'perfonnelle
qui ne fouffre point d'exlenfion d'une perfonne à l'autre;
elle n'en fouffre d'aucune efpece. odia reJlringenda ,favores
ampltandi. TOUl collaI aire acquiert un droit' au b..énéfice, jus
àd rem. Mllis comme il n'eût p'as ,élé julle ,: comme il y
:auroit eu àutant d'inconvéniens de laiffer lrop long-lemps
le Bénéficier libre d'ac~epler ou de ne pas, accepler le bé_' néfice, qu'il y en avoit de laiffer le coHaleur libre dans la
durée du. temps pbur conférer, les Canons ont voulu établir
'une regle envers le collalaire. Le' ch.apilre Ji tibi ahfenti,
rit. de prœh. in 6°., décide d'abo(d que fi l'Qrdinaire a conféré un bénéfice à un abfent, celui·ci n'acquiert ·aucun droie
au bénéfice, qu'il n'ait agréé la collalion; mais que néanmoins ni l'Ordinaire, ni fon fupérieur quelconque ne pourroiem conférer le béoèfice à un liers dans l'intervalle de
la
2. 32,
�DU
PALAIS
DI!
PROVI!NCI!;
233
la nomination à l'acceptation, à moins qu'il ne conlle d'un
refus formel: fi tihi ahftnti, per tuum' Epifcopum eonferatur
henefieium , lice! per eollationem huju[modi ( donee eam ratam
hahueris ) jus in ipfo henefleio ut umm diei valeat, non ae:"
fjuiratur; ipfe tamen Epifcopus, wl quicumque olius de ipfo
henefieio ( f/ili eonfentire reCl/fts ) in perfonam a!terius ordinare nequihit. Quod fi feeerit, ejus ordinatio foaa de hwefleio non lihero, virihus flon fuhJiflet.
Cette premiere partie du texte prohibe donc à l'Evêque de
conférer de nouveau jufqu'à ce que le collataire abfent ait répudié le bénéfice, n!fi eonfentire reeufet. Elle donne à ce collataire, dès l'inllam de fa nomination, non jus in ipfo henefleio., qu'il ne peut acquérir que par l'acceptation expreffe,
donee eam ra/am hahueris', mais un droit au bénéfice tel
qu'il ne peut plus être conféré à autrui; elle a voulu garanrir le
coHataire abfent des enrreprifes ou d'une rétraél:ation de l'Ordinaire. Mais voici enfuite, non un précepte, mais un confeil qu'on donne à l'Ordinaire pour fe procurer le droit de
conférer de nouveau. Qn lui fuggere de notifier la collation
à l'abfenr, & de lui prefcrire un terme pour accepter ou
ref~fer le bénéfice; fed fi Epifcopus notificatâ tihi collatione,
[ad conftntiendum, terminum eompetentem affigne!, n!fi eOf/~
ftnferis, poterit eo lapfo, heneficium liherè, cui viderit expedire,
eoiiferre; & même après ce terme écoulé, le .collataire efi:
encore reçu à l'acceptation, li l'Ordinaire n'a pas fait urage
de la cIaufe irritante: antequam tamen ipfum contulerit, tuum
poteris, nonohflante quod. lapfus fit .terminus, prœfiare eQn~
enfum.
Ce texte a donc prévu le cas où l'Ordinaire veut forcer
l'abfent à re déterminer promptement, ou à accepter,' ou à
répùdier le bénéfice, pour ne pas le laiffer long-temps fans
fervice; il lui fuggere de faire notifier la collation au collaraire,
avec interpellarion d'acceprer ou répudier dans un terme pré.fix; mais il n'a pas fiatué fur le c~s où aucun délai n'a
été fixé par l'Ordinaire. De droit commun, quel terme a
donc le coHataire pour accepter ou répudier, lorfgue le c;Ql~
Annùs {775 & fuiv.
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10
r.
lateur n'a pas cru devoir le fixer dans la collation, & lorrqu'il ne l'a pas faite notifier? C'eil: ce qui n'éroit pas en·
core décidé. Denifarr in va. bénéfice, dit qu'il n'y a pas de.
terme préfix .par le ,Droit Canon. Louet fur la regle de in.
jirmis refignantilms, n. 72, dit que le collataire eil: reçu à
J'acceptation avant les trois ans: trium arlnorum fPatium
datur , & il n'en eH exclu que pofl triennium. Ita Rebuffe
dans fes confeils, rép. 186; Aloycius Riccius' dans fa pratique bénéfiCiaire, réfol. 474; Flaminius Pariûus, de refign•.
henef., liv. la, queil:. 8, n. 18; Denifarr, va. hénéfice;
Lacombe, va. collation, feél:. 2, & au mot acceptation, n.
9; Duperray, moyens canoniques, !om. 1, chap. 29 , n. 7 ;
l'Auteur du Diél:ionnaire canonique, vo. acceptation; Piales
dans fan traité de la prévention, part. l , chap. 14, n. 4,
Les deux Arrêts rapporrés par Duperray furent rendus dans
des circonil:anëes où il y avoit frauge évidente de la part
du collateur. La doél:rine de PaftOl;r, liv. 1, tit. 2 l , n. 4,
bien entendue, n'eil: pas contraire à la regle du trienU RNA
nlllm.
En vain le fieur d'Aucliffret voudroit-il aujourd'hui perfuader que fous le mot acceptation, les Auteurs ont entendu
parler de la prife de poffeffian pour laquelle les Edits ont
donné trois ans' ail pourvu; les Auteurs ont très-bien fu
diil:inguer l'un de l'autre. Autre chofe eft le droit du collateur, & autre choCe cH celui du collataire. Celui du collateur
n'a que fix mois de durée, & fa négligence à en ufer el
aifeél:ée d'une peine: de celle de la dévolution. Au côntraire
celui du collataire fe- perpétue pendant trois ans, & il n'en
eft dépouillé qu'après ce terme. D'où il fuir qiJe le Pape
ou tout fupérieur quelconque ayant droit de dévolution, n'en
peut ufer qu'autant que le collateur n'aura pas conféré pendant les fix mois de la vacance, ou qu'aurant que le collateur ayant conféré, le collataire aura négligé pendant trois
ans d'accepter; il ne faut pas que la peine impoCée à la
l1égligence du collateur affeél:e la perfonne du collataire., en-vers qui les regles en ont prononcé une autre toute diflé~
�D U
PAL A J S
D E
PRO VEN C
!!:
13 ')
rente, à rai fan de ce que celui-ci n'dl: cenfé négligent qu'au
bout de trois années, tandis que l'autre l'dl: réellement après
fix mois.
Refte à examiner fi Mre. Duranti a acèepté le bénéfice
que M. l'Archevêque d'Embrun lui avait conféré, s'il l'a
accepté dans. un .temps opportun. Or fur ce point, il n'y
a qu'à examiner la dérniffion qu'il a faite entre les mains
de l'Ordinaire: cJemi/fzo nihil alilld eJl qllam ceffio, difent les
Auteurs; la dérnifIion eH: elle-même un aél:e de poifeffion;
elle en: définie, une réfignation pure & firnple elHre les
mains du collateur; enfin la démifIion en: ·un genre de vacance qui fùppofe que le bénéfice étoit rempli. 11 fuit donc
que l'aél:e de démifIion ou reIignation contient en foi une
véritable acceptation; le pourvu ne fe démet qu'après avoir
été inve{l:i; il rend ce qu'il a reçu; en un mo.t ,. ces mots,
nifi confentire recufes, employés par le chap. fi tihi ahfenti ,
indiquent un refus d'accepter, & non un aél:e d'abdication
qui nécefIite l'acceptation préalable. Mre. Duranti a donc
accepté le bénéfice par ce m~me titre qui l'en a dépouillé i.
·il l'a accepté avant l'expiration du triemiium.
Arrêt du 16 Juillet 1777, au rapport de Mr. le Confeiller
de Thorame, qui c9nfirme la Sentence, avec dépens. Ecri~
va nt Mes. Pafcalis & Alpheran. .
ARR Ê T
T.ranJPort a fonds perdu
caJ[è.
e·
X X X J.
à rente viagere, fait in extremis,
Ierre...... Maitre Palfementier ~ fit fon te{l:ament le 29,
Janvier 1768; il légua 1'11fufruit de fa fucceffion à fon
époufe, & inftirua pout fes héritiers les enfans de Jacques......
Quelque temps après il fut attaqué d'une maladie de langueur qui dllr.a fort long-temps. Le 29 Avril 1776, Pierre......
compta à André...... la fomme de 6000 liv., & ce de.rnie.t
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rente, à rai fan de ce que celui-ci n'dl: cenfé négligent qu'au
bout de trois années, tandis que l'autre l'dl: réellement après
fix mois.
Refte à examiner fi Mre. Duranti a acèepté le bénéfice
que M. l'Archevêque d'Embrun lui avait conféré, s'il l'a
accepté dans. un .temps opportun. Or fur ce point, il n'y
a qu'à examiner la dérniffion qu'il a faite entre les mains
de l'Ordinaire: cJemi/fzo nihil alilld eJl qllam ceffio, difent les
Auteurs; la dérnifIion eH: elle-même un aél:e de poifeffion;
elle en: définie, une réfignation pure & firnple elHre les
mains du collateur; enfin la démifIion en: ·un genre de vacance qui fùppofe que le bénéfice étoit rempli. 11 fuit donc
que l'aél:e de démifIion ou reIignation contient en foi une
véritable acceptation; le pourvu ne fe démet qu'après avoir
été inve{l:i; il rend ce qu'il a reçu; en un mo.t ,. ces mots,
nifi confentire recufes, employés par le chap. fi tihi ahfenti ,
indiquent un refus d'accepter, & non un aél:e d'abdication
qui nécefIite l'acceptation préalable. Mre. Duranti a donc
accepté le bénéfice par ce m~me titre qui l'en a dépouillé i.
·il l'a accepté avant l'expiration du triemiium.
Arrêt du 16 Juillet 1777, au rapport de Mr. le Confeiller
de Thorame, qui c9nfirme la Sentence, avec dépens. Ecri~
va nt Mes. Pafcalis & Alpheran. .
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à rente viagere, fait in extremis,
Ierre...... Maitre Palfementier ~ fit fon te{l:ament le 29,
Janvier 1768; il légua 1'11fufruit de fa fucceffion à fon
époufe, & inftirua pout fes héritiers les enfans de Jacques......
Quelque temps après il fut attaqué d'une maladie de langueur qui dllr.a fort long-temps. Le 29 Avril 1776, Pierre......
compta à André...... la fomme de 6000 liv., & ce de.rnie.t
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L
fournit par ecrit privé à rupporrer une peo/ion viagere de
liv. à Pierre
& après lui celle de 300 liv. en faveur
de ra femme Pierre
re retint par avance la fomme de
600 liv. pour la penGon de la premiere année 1 & mourut
quelques jours après. Les héritiers de Pierre...... fe pourvurent
en caifation de ce tranfporr. La caure comJ>romife à des
Arbitres, il intervint Sente'nce, portant qu'avant dire droit,
les héritiers vérifieroient dans quinzaine, par toutes fortes
& manieres de preuves, qu'à l'époqu.e de la convention
Pierre...... érait réputé dangereufement malade, & dans un
état à faire préfumer que le temps de fa mort n'étoit pas
éloigné. Appel de la part d'André......
On diroit pour lui, qu'il eH permis à un homme même
,mourant, & qui jouir du libre u'fage de fa volonté, de faire
une pareille convention. L~s contrats viagers forment une
efpece de jeu du hafard autorifé par les Loix. Dans les prinéipes & l'ordre de ce contrat, le débiteur proroge [on obligation jufqu'au décès de fon créancier. A ne juger que par
fon intérêt, il c6nfpire contre la vie de ce dernier, qui d'un
autre côté met fon argent au jeu, fur J'erpoir d'un intérêt
à percevoir pendant longues années. L'un met fan argent,
l'autre met fon obligation. L'événement de ce cOlltrat aléatoire ell gouverné, régi par la mort du confiituant. Ce n'eŒ
qu'à ceere époque qu'il appartient de fixer les avantages ou
.les' pertes de ce contrar; & comme ces avantages ou ces
perres dépendent du harard, d'un événement incertain, ce
contrat' n'ell: pas fournis aux regles de la refciGon pour caufe
de la léGon même énormiffime.
Ces comrats font légitimes & aurarifés dans le droit. Un
mourant peut & doit s'arranger d'après les calculs ~ & les
combina irons qu'il a formés. Qui peut l'empêcher de compter
avec lui-même, de facrifieç. une fomme qui lui devient inutile
en cas de mort prochaine, pour fe procurer un revenu plus
confidérable, une exifience plus. douce en cas de retour en
fanté? Il n'y' a certainement rien de prohibé, rien d'injufie,
rien de contraire à la raifon civile' dabS les vues. & l'exécution d'un arrallgemenr de' cerre efpece', Les Loix difent
600'
,
�DU
PALAIS
DE
PROVEN{;l!;
237
au contraire que le citoyen, quoique accablé d'années &
d'infirmités, efr capable de toute forte d'aél:es & de contrats. Le malade, le mourant même peuvent donner ~ntre
vifS, fuivant la difpofition de la Loi Jeja 42, §. 1,. if. de
mort. cauf. donat.
,
Il eH certain que le contrat
à
fonds
perdu
n'eH
point
,
,
. .,
refcindable par voie de lefion même d outre-mOItie, parce
qu'on ne peut pas en appliquer les regles & les principes
dans les contrats aléatoires, dont l'événement eH incertain.
Telle eH la maxime atteHée par Defpeilfes, rir. de l'achat,
feél:. 4, n. 6; par Faber, de inoffic. teflam., déf. derniere; par
Mornac fur la Loi 4, cod. de hœred. v;l aB. vend. _ C'efr
auffi ce qu'on trouve dans les Commentaires manufcrits de
Me. Buillon, cod. de refcind. vend., n. 10.
Par l'événement aéluel, la léfion eH bien petite, parce
que., même après avoir franchi les rifques c!'une plus longue
vi,e du conHituant, André...... fe trouvoit encore à fupporter
pendant peut-être cinquante ans l'intérêt de _390 liv. fur le
capital de Hoo liv. Qu'on ne dife pas que la rente au delfus
du dix pour cent éroit illufoire, vu l'état du malade; elle
le fut fi peu, que dès le moment du début, elle fut exécutée par la.rétention ou la défalcation de 600 liv. Si Pierre....:.
eût vécu plus long-tems, elle auroit. été très-onéreufe.
Le contrat viager à perte du fonds peut être exceffif du
côté de la penfion.. Dans ce cas on ne l'annulle pas, mais
on \e réduit feulement, fuivant les obfervatioos- de Leotardus, traél:.- de ujùris, quefr. 49; hors ce cas, & quand le
débiteur de la penfion, loin d'être furchargé, t'rouve au contraire de douceur dans le prétendu titre, il n'y a dès - 10 rs '
ni raifon de calfer , ni motif de réduire. Ces réflexions laiff~nt fans aucune efpece d'effet la Doélrine de Cafa-Regis,
dJfc. 96, pag. 31~. Cet Auteur dit qule la queftion de la
validité des titres de cette efpece dépend des circonHances.
Pothier, traité des rentes, au n. 22), pag. 22~, pofe le
cas où l'on a placé la penfion fur une perfonne dangereu-'
fement malade, mais dont la maladie étoit ignorée; au nombre ptécédent, il avait poré le cas d'une penfion confiituée
�~38
.'
JOURNAL
fur la tête d'une perfonne morte & dont le décès était ignoré;
Il a dit, il a dÜ dire, dàns un cas comme dans l'autre, que
le contrat étoit nul, par la regle· erranlis & ignorantis non dl
confel/fus, parce qu'il étoit entré dans l'intention des parties
de placer la JSenfion fur la tête d'une perfonne vivante &
jouiffant d'une pleine fanré; mais cela n'a rien de commun
avec le cas dont s'agit. Ici Pierre...... -malade a conHieué,
a pofé fur fa tête, & progreffivement fur celle de fon époufe;
on a pofé la rente volontairement & fciemment fur la tête
d'un malade qui fe trouvait conHiruant lui-même, qui connoiffoit fan état, & progreffivement fur celle de fan époufe
qui fe trouvait dans la vigueur de l'âge, qui jouilfoit & qui
jouit encore d'une pleine famé.
Il efi de principe, en mat.iere de léfion, que _vis-à-vis le
créancier de la penfion; l'inégalité ne doit pas être confidérée. On ne la pefe vis-à-vis du créancier qu'à raifon du
vice d'ufure, ainfi (Iu'on ·le voit par les Arrêts du 29 Avril
166 l , qu'on trouve a~ Journal des Audiences, & du 26 Août
1687 au Journal du Palais. Mais il n'a jamais été dit que
la vente à fonds perdu pùt être caffée, parce que le débiteur de la renre s'y trouvait trop bien traité. L'Aùteur du
traité des rentes obferve au contraire, §. 2, que les rentes
viagerès peuvent être créées fur un pied arbitraire, à caufe
de l'int<:ertirude de leur durée, fait par rapport à l'âge, la:
fanté ou l'état .des perfonnes. Delà vient que fuivant Dumoulin, que fi. 72, les penfions' viage"r-es· font teujo,urs entretenues au profit du débiteur, GEand· on ne peut pas
les quereller par le vice d'ufure, pour peu qu'elles excedent
l'intérêt de la Loi. Delà l'Arrêt rapporté par Mr. de Bezieux,
liv. 6, chap. 8, §. ')" Cet Arrêt déclara valable l'abandon
<lU le département d'un capital de 400 liv., moyennant la
penfion viagere de 20 liv. Delà la Cour par fan Arrêt du
2') Juin 17')9, rendu au rapport' de Mr. le Confeiller de
Gras pete, cO'nfirma ·deux aaes de vente fai1'5 ·à fonds perdu
par' Michel Blanc du lieu du Luc}, en faveur de fa fœur.
Michel 'Blanc revenait lùi-même comre ces titres; il prou,voit que les fonds tranfportés fous une penfion viagere pra-
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239
(luiroient l'intérêt qui lui avoit été promis. On pera les
foins de l'exploitation, la qualité du débiteur, celle du
créancier, la facilité de la perception, en un mot tout ce
qui peut être pefé & contemplé dans les a8:es de cette
efpece. C'éroit Michel Blanc lui-même qui exer<,:oit l'a8:10n;
il en fut néanmoins débouté avec dépens.
Ici l'a8:ion ef!: exercée par un héritier qui vient demander
la calTation fans ,en avoir aucun moyen; il fe fonde fur les
principes de la lélion, qui. manquent tant par le fait que
par le droit, & qui fil,r-rollt ne pourroient être propofés
que par la voie de la refcilion. Dans les contrats de cette
efpece les moyens de droit manquent, quand il n'ef!: pas
permis de remettre les parties dans leur premier état, quand
le temps du rirque ef!: paffé, & que celui qui exerce l'action, \·jent avec cerricucle ad pararas epu!as. Ainli toute
interlocurion ne peut. être qu'inutile & contraire aux vrais
principes de la matiere.
On répondoit qu'il n'ef!: ni honnête,. ni légitime de
faire de pareils accords. Le défaut de raifon honnête
fe puife dans les circonf!:ances du traité; 01'1 Y trouve un
homme au lit de la mort, fuccombant au mal qui le travaille, & condamné par les gens de l'art. C'ef!: à .cet
homme à qui il. ne rene plus que de très-foibl:es mouve~ens de végétation, que l'on propofe un pareil trairé.
Entre-t-il dans les regles de la convenance de faire courir
des rifques fur la vie de celui qui va certainement la perdre?
Quel en le danger de l'acheteur? Ses intentions peu",entelles paroÎtre bonnes, quand il agit à coup sûr? Il n'ell:
aucun être doué d'intelligence & d'un raifonnement le moins
capable de fcrupule, qui ne fe fît néanmoins une peine de
propoCer à un particulier, dont la finté feroit même légérement dérangée, de remettre fon bien à rente -viager.e. La
répugnance en produite par la préfomption vraifemblable
que cetui qui fait cette propolition, femble :vouloir tirer
parti de la maladie, en voyant qu'elle le déchargera bientôt
du fardeau qu'il embraffe. Or, fi ce de1Tein eH coupable,
.que fera - ce lorfque le malade, comme dans l'hypothefe
�~~
JOURNAL
préfente ,à l'infiar d'un automate organifé, ne rend que
des fans mourans, que fans reffource & fans retour il
précipite fes pas vers le tombeau, que la crife du mal
parvenue à fon dernier période n'offre que l'afpea d'un cadavre, & que l'efpr!t & la matiere touchent ~ leur partage?
Qu'efi-ce qu'un contrat viager? C'efi un a8.e par lequel
chacune des parties cour~ un rifque perfonnel. Les Loix,
en le plaçant da'ns la c1alfe des contrars aléatoires, ont
fuffifamment indiqué le fore incertain qui devait refpeaivement être attaché à chacun des contraaans. Ainu la nature du rifque conufie à faire dépendre l'intérêt réciproque
du plus ou moins de vie, de celui qui a conilitué le capital. Il, faut -Gue le hafard pui/fe frapper fur la tête de
l'un comme fur celle de l'autre. C'e/l: cette juile balance
qui forme à l'époque de la conv,ention une égaJité entre
les parties. Le te ms vient enfuite manife!l:er leur lor.
Quant au contraire ce niveau du danger ne fubufie
pas, on ne fauroit dire qu~ le contrat foiç aléatoire. Lorfqlle
l'un des contraaans efi affuré'· de fan. fait par la connoiff:lOce de l'événement qui doit, fuivre les accords, c'efi une
différence qui les vicie. Le rifque n'entre point alors dans
les pilaes ; il en eil néanmoins la hafe unique. Tels font
le caraaere & l'attribut du conrrat aléatoire. Si le rifque
ne s'y rrouve point, les difpofttions de l'aae doivént
crouler al! même inHant qù'il en reconnu que le motif
qui lui a donné le jour, n'a jamais exiilé.
Dans 1'1 ypothefe préfenre, André.......... a convenu en
tome alfurance, & Pierre
n'a pas eu pour lui cette
sûreté; l'un fa voir que le malade étoit en danger, & que
le rerpps de fa mort n'é! ie pas éloigné; l'autre fe flattant
for fa propre ,ftwatiot), ne pouvait appercevcir fa .dellinée
prochaine & le péril qui le mena<joir. Delà l'inégalité des
rifques, puifque André......... ér it convaincu de furmer des
engage mens qui n'auraient aucun durée. Tout était donc
pour le premier, & rien pour le (econd. Le danger de
mort produit un vice qui change la fubfiance des daufes.
La
,
�DU
P ALAI.!l
DE
--24 1
"PROVENCE.
.La fécurité dans l'événement ell: le contral!:e de l'aél:e qui,
.pàr les regles qui- le régiffent, veut en l'un & en l'autre
des contraél:ans cet é~at douteux & vacillant qui ne leur
laiffe voir aucune perfpeél:ive quelconque, qui ne leur offre
_en repréfemation que la voie ordinaire de la nature, &
non un fait affuré.
Avanc~r que Pierre
qu fes héritiers ne peuvent être
reerus à la refiitmion , parce que par un principe corrélatif
dans les obligalions, André
n'y auroil pas élé écouté,
c'ef!: une évafion miférabJe. L'on rend hommage à .ce que
difenl les AUleurs touchant les aéles aléalOires; mais ces
doéhines n'ont aucune ap·plication à la caufe. Elles parlentuniquement de la léfion _que foulfre l'un des comraélans
par le (impie elfet du Hafard, .& non par un fait certain
& prévu; elles mettent à Pécart tome raifon de dol & de
lùrprife , qui, fuivam les Jurifcoufultes , ouvrent à jamais la
porte de la ref!:itution. Cafa-Regis, tom. 1, difc. 96 ,
pag. 3 l '), réfume d'après une fdule de Doéleurs Ic;s regles
& les circonHances fur lefquelles il faut décider de la validité ou invalidité. d'une! vente à fonds perdu; il confie ·à
l'arbil'rage du Juge & à la comume locale, l'admi1Iion des
indices qui influ~nc à fouleOlr ou à annuller l'aéle; fi la
coutume el!: muerte, c'el!: du tempérament & de la fanré
de, celui qui contraéle que l'on induit le fort du traité•.
Pothier en fon traité des rentes, ch. 8, arc. l, n. 22'),
embraffe le même fentÎment. Denifart, va. vente, n. 5Q
& 5 l, rapporte deux Arrêts qui ordonnerenc un interlocutoire.
1
Il efi donc incontellable & comme une maxime univer.
fellemenc reconnue, qu'on -ne peut valablem~nc faire un
contrat viager avec une perfonne en danger de marc
.
r. d'
,
molOs
par 1a caUle
une lefion
quelconque, que parce que,
le malade y ell facrifié à plein. Les doélrines & les
A~rêts q~' André:........ a~legue, ~e s'appliquent qu'au cas géneral; c eft-à-dlre, qu en matlere de contrat aléaroire Je
~llIs ou le. moins de léfion furvenue après le comrac' ne
l alfeél:e palOt en aucune faeron. L'on traÎte ici au contrain/
Années
ln 5 & [uiv.
Hh
.-.
�:2.4"
Jou
11. N A L
le cas particulier où à l'époque de l'aél:e, l'un des con':
rraél:ans écoit frappé de cerre incapacité qui ne le rendait
point ilpte à des accords -incompatibles avec fa licuation.
Arrêt du 19 Juillet 1777', au rappore de Mr. le ConJeiller du Bo.urguet, qui confirme la Sentence avec dépens.
Ecrivant Mes. Reinaud & GalIier.-
XXXlI.
ARRÊT
-Lt: défendeur préfentant fur l'exploit d'ajournement, ne pwt
plus oppofer uru: nullité extrinfeque a ce mêmt: exploit.
E fleur Mouaiers, Bourgeois du lieù de Cotignac,
demandait contre fa fœur la caffation ~'ljn exploit, fur
le fondement que Me. Gras, Procureur conflicué, n'avait
,pas ligné fur la copie; il fut débouté par Ar.rêt du 23
Décembre 1777, conformément aux conclufions de Mr.
l'Avocat-Général de Califfanne. Plaidant Mes. Simeon &
Lager.
-Taures les fois qu'il y a eu préfentation fur un exploit
nul d'une nullité eXtrinlèque, la pré(encation couvre le
.vice de I~expl.oit, & on
non recevable à l'attaquer. Ç'dl:
ce qu'éta.blit Radier fur l'arI, 1,6 du rÎr. :2. de l'Ordflnnance
de 1667, pag. 46, obferv. 13.
.
Le défaut de lignacure du Procurèur
une nullité du
genre de celles qui ne couchent pas à la fubaance de l'ex.ploit ; elle ne peut être ra.ngée qu'avec celles qui dérivent
,du défaut d'énonciation pu domicile de l'Huiffier, de la
partie, &c.
Cette regleque les défauts exrrinfeques des exploirs fe
couvrent par la préfentation,
fondée fur ce que l'J
.pnrie affignée
regardée valablement avereie, puifqu'elle
.3 préfenté, & dès-lors cout ce qui touche aux formalités
extérieures, ell: préfumé fuffifarnmenc 'rempl\ ou fIlPl:rflu; il
ne s'agit plus que d'examiner le fonds & la nature de 1'1
L
ea
ea
ea
s'ea
•
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
243
demande. Delà l'affignation donnée à un faux domicile ne
peut être débattue de nullité après la préfentation., quoi- qu'on ait dans la préfentation même protefl:é de la nullité.
Celui qui fe prétend nullement affigné , ne doit pas comparoîrre; il doit fe laiirer condamner par défaut. Se pré- .
{enter pour dire que l'affignation eH nulle d'une nullité de
forme, c'efl: prouver que la nullité omife n'éroit pas bien
eirentielle , pllifque bien qu'elle manquât, on a pu fe pté{enter ,& fe défendre.
Il n'appartient pas aux par'ries de réclamer' l'exécution' de
l'Arrêt de Réglement ,du. 23 Février 1770: Le motif de
cet Arrêt n'a été que l'intérêt des Procureurs; on a voulu
empêcher que les Huiffiers ne les 'fraudairent du droit qui
leur efl: acquis fur l'exploit 'par . lequel ils (ont confl:îrués.
On a voulu empêcher un plus grand abus, c'efl:-à-dlre, que
les Procureurs ne fuirent pas- conllitués à leu't in(u, & {ouvent pour des parties contre lefquelles i1s"éroiem chargés
d'occuper. Dès-lors les reines attachées à la non-exécution du Régie ment intéreirenr les Procureurs en faveur de
qui elles (one établies, & non les parties. Si celles - ci
pouvoient exciper de la nullité', ce ne feroit que quand
elle auroit été véritablement encourue par la fraude cam-'
mire, par l'Huiffier ; mais lor(qu'il n'y aura point de fraude,
le motif de la nullité ceffant, la nullité ne pourra être prononcée.
,
ARR Ê T
X X X 1 J J.
Le décret de main mife peut être décerné par les Juges,Confuls' contre un' déhiteur fufPec1 de fuite.
, 1
Es lieurs Tyrnon & Chaudiere, Négocians de la ville
de; M'ar(eille, avoient été engagés d'accepter quelques
troites que:! le lieur Roiry tiroit (ur l'Italie, & qui avoient
~té exatl:erilenr payé~s; ce qui avoit attiré à ce dernier
L
.
H h:z.
�1 0 :u
2.44
RNA L
Une forte de confiance qu'il avoir augmentée pai' fon ex'':
périence dans le commerce; cene confiance tomba enfuite
par le nombre de 'protêts & par l'importance des fommes
(lont le fieur Ro1i'y était devenu débiteur envers les fieurs
Tymon & Chaudiere, ce qui les ayant engagés à prendre
des informations fur fan compte, ils avoient reconnu qu'il
était fans 'fonds & fans crédit;. ils parvinrent à un arrêté
oe compte, par lequel il conHoit que Roffy devait 3d: 283
liv. D'après ce compte arrêté, Roffy écrit aux fieurs Tymon
& Chaudiere, que fe,trouvant'èébiteùr envers un Négociant
<Je la fomme de :l.l·oo liv., il n'avoir pas la force d'anen-ore une citation, & qu'il ne pouvoit, faire face à une auffi
petite fomme ; cette lenre effraya les fieurs Tymon & Chau-· ,
diere; ils fe déterminerent cependant à lui envoyer les 2100
lîv., afin qu'il ne prît pas la fuite, & réfolurent en même
te,mps de pourvoir à leur sûreté; ils préfenrerent le premier
Se~ptembre fuivant· une requête aux luges-Confuls en main
mire contre le fieur Roffy, qui leur fut accordé,e & exécutée le même jour à onze heures' du foir. Le lendemain il
fut préfenré aux Juges-Confuls) on exhjba le compte arrêté, le débiteur le reconnut pour véritable; il fut condamné
t~ut' de fuite; & faute par 'lui de payer ou de caLitionner,
il fut empriConné. Le fieur Roffy appella du décret du pre,mier Septembre & de b Sentence d'u )e_ndemain.
,
On diroit pour lui, qué lé décret de main mife ne préfente que l'idée d'une fimple affignation. On fait que les JugesC.onfuls , obligés de refpeél:er les regles écrites dans le .citre
r6 de l'Ordonnance de 1667, n'ont q\l~ le. droit de permettre des affignations ordinaires; 'ils peuvent feulemenr en
abréger les délais, parce qu'en effet il importe ,au bien du
commerce de terminer avec aél:ivité les coneeHation qui s'éleVent entre Négocians. Ceux qui fone appellés 'pardevant les
Jl1ges-Confuls, doivent comparaître à leur premiere audience; mais il n'y a poim de texte qui permette à ces
J~ges de les faire faifir, de les faire amener" de force; c'efè
aux défendeurs à fe préfenter; leur refus ou leur inaél:ion
en: a{fez pLmie par les conda~nations qui peuvent ê!re pro~'
"
,
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DU
PAL AIS
D Il
PRO V Il Nell.
14f
~mncées en leur abfence; un créancier obtient tout ce qu'il
peut delirer, fans que le débiteur doh'e être témoin de fa
condamnation. Il feroit donc inutile, & même odieux, d'en~
lever un Négociant à fon commerce, à fa famille; rien
n'exige, rien n'autorife cette maniere de procéder; & fous
ce premier point de vue, il eH impoffible de fe diffimuler
la nullité du décret rendu par les Juges-Confuls.
Mais s'agit-il ici d'un Arrêt de privilege? Les citoyens
'de Marfeille ont-ils le droit de faire arrêter des étrangers
fur leur !impIe réclamation? C'efi par une exception ex*
preffe à notre droit commun, que les habitans. de quelques
villes de France .ont le privilege de procéder d'abord par
fdilie contre leurs débiteurs étrangers; & ces privileges
émanés de nos Rois confervent encore toute leur force.
L'Ordonnancé de 1667, tit. XI, art. XI, les laiffa fubfilter.
Louis XIV. en abrogeant ü:s irlJlruRiollS à la harre & lés renvois ajOllr , lieu & hwre extraordinaires, excepta formellement
de cette abrogation les comparutions fur les arrêts des per[arilles ou des hiens en vertu des privilt:ges des villes & des
foires. La même Loi, en prononçant la décharge d~ la contrainte par corps, déclara ne pas déroger au pril'ilege des
deniers royaux, ni celui des foires, po~ts, étapes & marchés,
& des villes d'arrêts.
Ces privileges exiGent donc tels qu'ils étaient Mns les
commencemens; mais il y en a de deux fortes, comme l'indique l'Ordonnance d,e 1667; & les habitans de chaque
ville privilégiée n'ont d'autres droits que ceux qui leur ont
été expreffément accordés par les Souverains dans quelques
villes, comme à Rheims, à Dunkerque, à Montpellier, à
Arras & dans le Cambrelis, 'comme l'obferver.t Ferrieres,
va. ville d'arrêts; Jouffe fur l'Ordonnance de 1667, pag. 31,
& ) 99; Denifart, va. ville d' Arrêts; Bor~ier fllr l'Ordonnance
de 1667, pag. 66; Radier fur le tit. XI, art. XI; ceux qui
y fone domiciliés, peuvent y faire arrêt.er, fur une Ordonnance du Juge rendue à leur !impie requilition, les perfonnes
& les effets de leurs débiteurs forains ou étrangers. Dans
d'autres, telles que Paris,' Orlé4ns, Rennes, Bourges &;
a
�'~46
Jou RNA L
Melun, les habitans peuvent feulement arréter les biens, &
non les ·perfonnes des débiteurs étrangers. Ainû nul doute'
qu'en l'état de ces conceffions, les débiteurs forains ou étrangers ne puiffent fobir dans les villes d'arrêt les exécutions
que noS Souverains ont cru utiles aux intérêts de leurs habitans;.
mais ces privileges font évidemment contraires au droit
commun; ils doivent donc être fuiuis à la lettre, & ne·
peuvent fouifrir aucune fone d'extenûon.
Auffi [DUS les Auteurs attefient.que les habitans des villes
d'arrêt ne peuvent ufer de leurs privileges que coorre les
vrais forains & étrangers, c'efi-à-dire, contre ·les regnicoles
deme-urant dans d'autres reffons que celui du Juge du pri-'
vilege, & contre c~ux qui n'ont ni domicile ni demeure•.
dans le Royaume. Les julbciables du Juge du privilege ne
font pas réputés forains,. alium forum non habent, & ne
peuvent par conféquene être affujettis·à la rigueur de ces
forres de .conceffions; bien plus, une demeure d'an & jour
avec érabliffemene de fortune efface le caraélere de forain
ou d'étranger, & le nouvel habitant acquierr alors lui-même
le droit du privilege, ainli que l'enCeignent Dumoulin fur
l'arr. 173 de la coumme de Paris, . 6, & Brodeau, pag.
4 2r •
Enfin les Négocians, les Banquiers, les Marchands, n'ont
à cee égard ni d'autre droir, ni d'autres Juges que ceux de.s
Bourgeois; ces [orres de privileges ne regardent point 'le
commerce, ils [ont propres aux. villes qui les one obrenus;
les Négocians & les Marchands ne peuvene donc en jouir,
& doivent ab[olument s'adreffer aux Tribunaux ordinaires,
. feuls Juges compérens pour la manutention, l'application &
l'exécution du privilege.
Les habirans de MarfeiIle n'ont pas le droit de faire arrérer fur leurs ûmples demandes leurs débiteurs forains ou
étrangers; on ne voit dans le recueil de "leurs privileges &de leurs Sratuts, que la permiffion de faire faiûr les effets
de ces forres de débiteurs, & cette conceffion de rigueur
n'efi [o[ceptible d'aucune forte d'extenfion. Ce privi!ege par..
,ticulier ea rappor~é pa~ Me. d' ~ix, liv. 2, tir. 6, pag. 217."
#
�D li PAt A t S D Il PRO V Il Nell;
~4j'
Le décret dont il s'agit efi donc évidemment oppreffif & tortionnaire; d'ailleurs les Juges-Confuls n'étaient pas n~ême
compétens à cet égard. Les lieurs Tymon & Chaudiere,
s'ils avoient eu le droit de faire arrêter le fieur Roffy, étoient
obligés de s'adreffer au Lieutenant de Marfeille, qui fe!ll
repréfence aujourd'hui les anciens Juges de cette ville; enfin
le décret dont fe plaint le' lieur Roffy feroit évidemment
nul, incompétent & attentatoire, dans le cas même où les
lieurs Tymon & Chaudiere auroient attaqué un homme qu'ils
pourroient dire forain ou étranger.
Le .lieur Roffy efl: né à Gênes; mais il avoit fixé à Mar- .
[eiIle fon commerce depuis le mois de Mai 1772; il Y avoit
amené fa femme & fes enfans depllis 1773; il avoit donc
à M:arfeille un domicile, un établiffement proprement dit;
il avoit donc acquis le droit d'être jugé par nos Loix, &
ces Loix en effet ne le difiinguoient pas des' Négocians na.
tionaux.
Dira-t-on que les Juges-Confuls ont pu décerner une con.
trainte perfonl\elle contre le Geur Ro!Iy avant de l'entendre,
avant de le condamner? Dalls les premiers tems, les créanciers eurent le droit de contraindre leurs débiteurs par
corps, fans difiinél:ioll de la nature de la dette; mais ce droit
n'étoit acquis qu'après la condamnation prononcée; jamais
pn ne permit aux créanciers d'employer cette rigueur fur
la foi d'une fimple réclamation. Une Ordonnance de St.
Louis, de l'an 1274, abolit cet ufage dangereux par fa. trop
grande étendue; il crut ne devoir punir par des contraintes
perfonnelles que les débiteurs de fon domaine. Philipe IX.
permit à fes fujets d'obliger leurs perfonnes, & dans ce cas
feulement les créanciers avoient la liberté de faire faifir leurs.
débiteurs; mais toujours le jugement de condamnation devoit porter l'infliél:ion de cette peine; toujours le titre dl!
créancier eut befoin' d'être ép.uré & d'être déclaré exécutoire.
On s'apperçut enfuite qu'il étoit e1fentiel de forcer les
Négocjans à refpeaer leurs traités par la .crainte d'une peine
fé~ere. La ~ille de Lyon, dans le feizieme tiede, demand~
�2.48
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U Il. N A
L'
- -
ce frein util e au fou tien & à '!?importance de fes foires~
Par une Ordonnance de Fran<;ois Premier du mois de Février 1 5 ~ '), rapportée par Fontanon, corn. 1, liv. 5, tit.
2.5, il fut ordonné que le confervateur pour dettes faites
pour raifon de marchandifes ou autres faits lors des foires
de Lyon, procéderoit contre les débiteurs jufques à,Sentence
& exécution de garnifon par prife de corps & - de leurs
biens; celle d'Orléans, art. 143, confirma la contrainte par
corps enrre Marchands, & non autres, ce qui eft conforme·
à l'Edir du mois de Novembre 1')63, & à l'arr. 1 du ritre
12 de l'Ordonnance de 1673. Mais dans coures ces Lo.ix
la contrainte perfonnelle efl: une peine que les Juges-ConfuIs ne peuvent infliger que par les jugemens de condamnarion.
Ici J'excès eft plus violent; il attaque le te,xte même de
nos Loix j par une interverfion injuHe & cruelle, il fait
perdre à la contrainte pat corps ce caraél:e,re diftinél:if, effentiel & commun à coute efp~ce de peine, de ne pouvoir
êrre infligée qu~ dans le cas où la, Loi même décide que
le citoyen l'a encourue. Il ne préfente que le fpeél:acle
odieux de ces otdres violens que l'on déteftoit autrefois
fous le nom de coups d'autorité. Eh! quelle efpece de fûreré les Négocians conferveroient-ils donc à l'avenir, fi les
.Jùges-Confuls, maitres fouverains de leur fort, pou~oient
lés enlever à leur famille, à leur commerce, avec violence
& ignominie? A· quels abus ne verroit-on pas l'envie, la
haine, la vengeance fe porter rour à rour, s'il fulEfoit à
un Négociant d'élever fa voix pour déshonorer & pour per'cire fes égaux? Exifte-t-il ..à Marfeille un feul Négociant qui
ne foit lié par quelque forte d'engagement? Les Juges-Confuis pourront ponc, par des permiffions données à l'aveugle,
porter à la probité des coups d'autanr plus cruels, que· fouvent ils feroient irréparables. La fuite réelle d'un Négociant
pourroit. cout au plus former un cas d'excrption à .Ia Lo'i
générale; parce que la fuite ell: néceffairement un fait connu,
indubitable, & elle efi..en foi une preuve légale du c·hangement d'état.
On
1
•
�DU' PAL AIS
D B p' R 0 V B N C B.
2.49
. On répondoit , qu'il faut néceffairement un moyen de pren-
dre des fûretés contre un étranger qui lui-même avoue fon
impuiffance à payer & à réfifier à L1ne affignarion. _Si la
- main n"!.iCe eG: la Ceule voie, elle a dû être prife, elle eG:
légale.
_
LorCqu'un Négociant en a fait condamner un autre avec
contrainte par corps à la Jurifdiaion Confulaire, les. JugesConCuls Ont rempli leur charge, funai funt '1Jicio; eur mandemc.'}[ eft exécuté fans paréaris dans tout _le Royaume, li
le débiteur condamné fe- monrre; mais s'il refie dans Ca
maifon, ce lieu d'afyle dans lequel la Loi a défendu d'exécuter les contraintes civiles, ne peut être violé de leur aurorité; ils ne peuvent pas ordonner que la mai Con fera
.forcée; ils excéderoÎ(;nt leur compétence. DeniCart aneHe
qu!à Paris on va dans ce cas au' Lieutenant-Civil, qui a en
premier reffort l'inCpeaion des mai Cons , & qui, après plulieurs formalités, donne ou refufe la permiffion, felon .les
circonfiances.
.
Quoiqu'à Marfeille !'es' Juges-Confuls aient été en po/fef..
fion d'accorder les décrets forcés, on a tenté dans cette
Province d'intr<;>duire les principes de Denifart. Deux Arrêts, l'~n de 177) & l'autre de 1776, ont ca/fé des décrets
forcés; mais quoique les débiteurs arrêtés eu/fenr fait valoir
l'incompétence des Juges-Confuls, il n'efi pas certain que
la Cour ne fe foit déterminée par les circonftances du fait
- qui ne comportaient pas des décrets f~)'rcés. Quoi qu'il en .,
foit, il ne s'agit pas -ici de décret forcé; autre chofe efl:
d'arracher UQ débiteur condamné à fa maifon pour le mettre
en prifon, autre chofe de l'y prendre pour le conduire au
Juge-, l'y faire inJerroger, lui donner moyen de fe défendre,
& fur-rout d'éluder la prifon en donnant .caution.
Le décret forcé efl: l'exécution violente d'un jugement
rendu, contre iequel les Loix générales ont lai/fé au dé-_
biteur la trifie reffource de s'enfermer dans fa maifon.
La main mife n'eH qu'une citation en juf1:ice; extraordinaire,
il ef1: vrai', & dont les fuites peuvent être .fâcheufes; mais
on peut s'y foufiraire par de jufies défenfes ou- par le cau,,;
Années t775 & fuiv.
Ii
1
�2.~O
Jou RNA 1;
(Jonnement; au lieu que dans le-décret forcé, rien ne rauve
de la prifon -qu'un paiement effeélif; l'o1fre -d'un cautionnement ne fuffit pas. Le Juge-Conful qui a condamné avec
contrainte par corps un Négociant, a exercé fur lui toure
Jurifdi~ion. Ce jugement doit-il être exécuté par privilege
& exemption comre les Loix du Royaume? Cene queftion femble être au delfus de leur relforr. Mais ce feroit
abufer étrangement des bornes qui reil:reignent le Tribunal
Confulaire, que de foutenir qu'il ne pourroit abrég~r les
alIignations données devant lui, ou les faire exécuter par
main mife & fe faire amener le débiteur fufpeél qu'il doit
entendre & juger; puifqu'il peut, quoique fans territoire,
faire failir même provifoirement des marchandifes, pourquoi ne pourrait-il pas, lorfque le cas le requiert, faire
faifir provifoirerr,ent un débireur ?
Qu'eil:-ce qui eil: imerdit aux Juges-Coofuls? Toute exécurion violente qui ne peut être faite en vertu d'un premier jugement rendu, & qui en exige un fecond, telle que
l'ouve l'tU re- des pones pour une faifie; ils ne connoilfent
pas de l'exécution de leurs jugemens; mais lorfqu'il ne s'agira point d'exécuter, lorfqu'il faudra feulement menre nn
homme fous la main de la Juil:ice, il- feroit abfurde que le
Tribunal qui doir le juger, ne pût pas ordonner de l'amener.
Si cet homme eH fufpeél de fuite, il faut ou fe réfoudre
-~ le voir fuir fur une alIignation ordinaire, ou fe détetlniner
~ le traduire par main mife en jugement. La même nécelIité
qui a fait entretenir la contrainte par corps pour les affaires mercantilles, exige, pour que cette contrainte ne- foit
pas éludée, que l'on donne quelquefois cette permilIioo.
Toubeau, inJlit. con[., chap. 2, liv. 2, tit. 12, obferve que
les Juges-Confuls ont le pouvoir de donner permilIion- d'arrêter les débiteurs fufpeéls qui font leurs juil:iciables, &
cela nonobl1:ant tout privilege de foir_e, & de jour de fête,
parce qu'en ce cas tout privilege celfe, dit Mafcardus; {!,comme on le dîfoit lors de l'Arrêt de Boniface, il vaut mieu
que le débiteur foit en prifon, que fi la dette venoit à {
perdre par la fuite du débiteur.
�DU
PAL AIS
DB
PRO VEN C B.
'2.~ 1
" La Loi, dit Mr. de Montefquieu, ne doit point aifé" ment contraindre par corps, parce qu'elle fait plus de
" cas de la liberté, d'un citoyen que de l'aifance d'un autre;
" mais dans les conventions qui dérivent du commerce,
" la Loi doit faire plus de cas de l'aifance publique que
" de 1a- liberté du ciroyen. " C'eCl: ce principe qui a fait
entretenir la contrainte par corps dans les affaires mercantilles; c'eft la néceffité de ceere contrainte & le befoirt
qu'on ne l'éludât pas, qui ooc fait introduire la main mife.
Belordeau, liv. r, art. '1-, obferve qu'à Saint-Malo un débireur étranger ou autre n'érânt pas de la Province, peut
être arrêté & fes marchandifes faifies jufqu'à ce qu'il ait
payé & fatisfait fon créancier.
La glofe fur la Loi 'luœjitum z4, ff. de pignorih. & hypotec.
dit que le créancier peut faifir de fes propres mains fon
débiteur, non feulement lorfqu'il fuit, mais encore lorfqu'il
eft à craindre qu'il ne fuye. Papon, liv. 18, tir. 5 des exécutians, arr. '2.9, rapporte un Arrêt qui jugea que le créancier ayant faifi de fa feule autorité fon débiteur. fugitif,
celui.ci ne pouvoit obtenit fon élargiffement qu'en baillant
caution. L'Edit de 1609 permet à chacun, même fans
décret !li permiffion, d'arrêter les banqueroutiers fugitifs,
& de les repréfenter à Jufiice. Bonnet rapporte un Arrêt
rendu en 1727, qui confirma l'emprifonnement d'un dé- biteur arrêté par fon créancier fans déclet ni permiffion,
au jeu de mail de la ville d'Aix. Boniface, rom. l, liv. 1;
lit. 17, en rapporte un autre qui confirma l'emprifonnement d'un débiteur fufpeél: de fuite, fait un Dimanche.
. Dans le fait aél:uel, le fieur Ro{fy n'a été arrêté que
'pour être préfenré aux Juges-Confuls; il n'a pu difconvenir
qu'il étoit débiteur des fieurs Tymon & Chaudiere; ce
n'eft que par le défaut de paiement ou de donner caution
qu'il a été emprifonné. Par cè moyen le débiteur n'eft
conHirué prifonnier qu'en force de la condamnation; 011
lui ôte feulement le moyen de fe-dérober & à l'affignation,
& à l'exécution du jugement; cela eH aurorifé, parce que,
comme le dit Ferriere, coutume de Paris, tom. '2., pag.
Ii2.
�/
10
2~2
vaN A
L
on ne prend pa$ un lievre au {on du tam!Jour;
, Si quand un homme ne rient à rien' dans' un pays, on lui
donnoir une aqignarion ordinaire, ce ne feroit faire amre
chofe que de l'avertir de s'enfuir & de laiŒer fon créancier fariguer inutilement les Tribunaux' de fes plainres.
Ainli deux. [orres de main mire; celle qui fe fair de l'autorité privée du créal1cier fans permiffion du Juge, & par
laquelle le débiteur fe trouve emprifonné avant même que
!i'êrre affigné;. éelle-Ià n'a lieu réguliérement que quand le
débiteur eft en fuite ou dans un état de la prendre à tout
moment, en un mot quand on ne pourroit pas fans rifque
recourir au Juge: La feconde efpece de main mife eft lorfque les Juges aurorifent 'à amener devant eux & fans lui
donner le temps de fuir, undébiteur pour l'entendre, le' condamner, s'il y échoir, & lui faire exécuter, à peine d'une
contrainte fubite, le jugement. La main mife. eft donc
ufitée en fait de commerce; c'eft l'opinion de Caccialupus
en fon traité du déhiteur fufPec1, ch. l , n. 12, & de
Peckius, de jure fiflendi" ch. 7, n. 9. Ces Auteurs pofent
en principe qu'il eft des cas où la néceffité exige que l'on
commence par .exécuter; c'eH auffi ce que dit Toubeau dans
fes inHitbtes du droit confulaÎte, tom. 2, ch. de$ déhiteur$
fùfPec1$ de fuite.'
. Que ferviroit d'affigner .devant les Jug~s-Confuls un dé~
biteur qui a déclaré par écrit qu'il n'attendrait pas dans
fon comptoir une citation en Juftice? Quand il :y auroit
lieu d'abroger à fon égard les délais, il feroit défaut; &
pendant le temps que lui donneroit le rabattement, peutêtre avant même' de laiŒer prononcer le défaut fe feroit-il
évadé ;~ c'eft pour cela que le bien du commerce a fait introduire la main mife. Comme les Loix romaines & nos/
Ordonnances permettent d'au-rorité privée d'arrêrer le débiteur en fuite" ou prêt à la prendre, 0,0 en a déduit que
dans des cas 'un peu moins utgens, mais non moins périlleux pour les créanciers, on pouvoit aller au Juge lui
expofer fes titres de créance ,. fes craintes, & Ce' faire'
autorifer 11 arrêter le débiteur fufpeél:; la main mife eft donc
t 291 , n. 14,
/
�DU
PALAIS
Dl!
PROVllNCl!:
213
lion feulement l'effet de la néceffité confacré par l'ufage ,
mais elle efi encore une fuite des Loix qui permettent
d'arrêter le débiteur qui efi en fuite ou qui peut la méditer.
Me. Meriaud, SubHirut, obferva que les bornes de la
Jurifdiél:ion confulaire font fixées par fon Edit de création;
les détails qu'il renferme touchant les perfonnes & les
objers qui la compofeAt, paroilfent devoir éviter toute inceqitude & toute contefiation. Le Prince dans la publication de cette Loi s'ell: également occupé de la gloire de
fon Etat & de l'avantage de fes fujets; toutes ces précau~
tions font néanmoins devenues inutiles; la fraude & la
mauvaife foi fe font efforcées de les détruire, pour parvenir
plus aifément à leur but intérelfé.
Perfonne n'ignore les avantages du commerce & la fave~r
dont il a joui dans touS les temps, fur - tout aujourd'hui
.qu'il eH regardé comme le fuc vivifiant. des Etats, le nerf
des guerres, l'équilibre desPuilfances, l'in!l:rument de la
fortune publique. L'efPrit du commerce, dit Montefquieu,
produit dans les hommes un certain [entiment de Juflice exac7e,
,oppofl d'un côté au hrigandage, & de l'autre il ces vertus
morales 'lui font 'lu)n ne difcute pas toujours [es intérêts
avec rigidité, & 'lu'on peut les négliger pour ceux des autres.
, Les Légiilateurs reconnoilfant l'avantage du commerce,
fe font efforcés de le favorifer par leurs Loix & par leurs
Ordonnances; la contrainte par corps abolie dans les dettes
civiles a été maintenue dans les affaires de commerce. Dans
les affaires qui dérivent des contrats civils ordi.naires, la
Loi ne doit point donner la contrainte par cO,rps , parce
qu'elle fait plus de cas de la liberté d'un citoyen que de
l'aifance d'un autre; mais dans les conventions qui dérivent
du commerce, la Loi doit faire plus de cas de l'aifance
publique que de la liberté d'un citoyen. Délà vient auffi la,
caufe de l'établilfement de la Jurifdiél:ion Confulaire, de la'
briéveté de' fon infiruétion & de la rigueur, de fon exécution. La contrainte par corps e!l: donc une fuite des obligati.ons mercantilles, fa prononciation efi de 'la compétence des Juges - Confuls; mais quelque néceifaire qu'elle
�"'S4
JOURNAL
puiffe êrre, quelque érendue' qu'elle re<;:oive, fon exécurion
e!l: néanmo.ins foumife à des regles qu'on ne peut rranfgreffer. Le débiteur ne peur êrre arrêré de nuir, dans fa
maifon, les jour~ de Fère & de Dimanche; il jouit en-core d'un re!l:e de liberté dom on ne peut le priver qu'à
raifon de fortes circonHances. Tout emprifonnemenr fait
au préjudice de ces regles e!l: déclaré .nul par la Loi.
Cependanr il arrive des cas où les créanciers fe verraient
pour roujours privés de jouir du bénéfice des Sentences
de condamnation qu'ils auroient obrenues après beaucoup de
, frais; on peut alors faifir le débireur à roure heure, même
dans fa maifon; mais il faut à raifon de ce, s'adreffer aux
Juges ordinaires pour en obrenir la permiffion, attendu, dit
Denifart, 'lue ces fortes d'Ordonnances ne font pas de la
compétence des Juges d'attribution, & fur-tout des Jurifdictions Confulaires. L'empriformement & la capture du débiteur en faillite, aioure-r-il, faite dans fa maifon eT! vertu
de l'Ordonnance des Juges-Confuls de Langres, a été déclaré
nul par Arrêt rendu le l z Avril z 764 ,fondé fur la feule.
incompétence des Juges-Confuls.
•
D'après ces ref!exions, le fieur Roffy a-t-il fans doute
eu raifon de fe plaindre des voies rigoureufes que l'on a
. exercées contre lui? C'eU dans fa maifon, à dix heures du
foir qu'il a été arrêté; le droit le plus précieux, le droit
d'afyle a' éré violé; dès ce moment il a été privé de tout.e
liberté, avant m,ème de coÎlOoître ·le ritre de ·fa condamnarion; il n'yen avoit même. encore aucune prononcée
contre lui. Les Juges-Confuls n'avoient décerné qu'un décret de main mife; ce décret néceffaire dans le commerce, .
& qui paroît fans doure moins rigoureux que la contraintepar corps, puifque le_débiteur ainli arrêré peut le faire
romber en rempliffant fes obligarions, ne laiffe pas cependant que d'êrre fort dangereux, attendu qu'il prive le débireur de toute reffource; qu'il commence par lui, enlever
toure liberré; qu'il l'empêche d'éviter la contrainte par corps
(j'l'il ell: bien difficile de ne pouvoir encourir dans une
pareill.e ficuatioD, fur-tout vis-à-vis d'un érranger dont le
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
2.H
. crédit & le commerce ne font pas alfez étendus pour lui
procurer fur le champ de quoi fournir à fon engagement
ou par argent, ou par caution. Ces déctets ne peuvent
donc s'accorder. que rarement & dans des circonflances
elfenriel1es; leur prononciation & leur exécution touchent
à l'honneur & à la liberté du citoyen qu'il eH toujours
dangereux de vouloir détruire.
Mais ces motifs d'équité, ces principes qui dérivent du
àroit naturel, celfent lorfque le débiteur efi fufpeél: de
fuite; fa conduite le rend indigne.... de toure faveur; l'in-·
tétêt de [es créanciers efl: fenfible; tous les momens leur
deviennent ·précieux; un inllant plus tard ils perdent leurs
droits;' lui feul peut lui procurer le recouvrement de leur
créance; le moindre retardement peut détruire toures leurs
efpérances. S'ils s'adretrent aux Tri6unaux, s'ils invoquent
le bras vengeur de la Jullice, ils obtiendront fans peine
ce fecours; mais la condamnation leur devient inutile, fon
.exécution ell éludée, & rien ne peut réparer 'une perte
, d'autant plus fâcheuCe, qu'i1 ne leur relle aucune retrource.
,En pareille circonfiance le créancier a le droit de faifir
fon débiteur de fa feule autorité & de fes pro~res mains,
quand il le trouve en fuite. (L. la, §. 6 fi dçhitorem ait
Prœtor, ff. quœ in ftaudem creditorum, & la gloCe marginale
fur la Loi quœfirum l4, ff. de pignorih. & hyporhec.) Ce
feroit perdre toute efpece de droit fur la perfonne de fon
débiteur, s'il n'étoit pas permis de l'arrêter lorfqu'il s'enfuit; car il vaut beaucoup mieux empêcher ou interrompre
fa fuite, que de courir enfuite inutilement après lui: meliùs
enim eft occurrere in rempore, quam poft exitum vindicare.
L. l , cod. qualldo licee unicui'lue fille judic. fi: vindic. En
pareil cas le décret du Juge efi fuperfiu. Peu importe
donc qu'il ait été rendu par un Juge incompétent, ou dont
la compétence efi douteufe, comme dit Mynfinger , cent. :lr,
obferv. 65.
Le débiteur fufpeél: de fuite ne peut exciper de l'incompétence du Juge pour faire déclarer nul fon emprifonnement; les Juges-Confuls peuvent prononcer le décret qe
1
�2.)6
Jou
B. N
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L
main mife; il ell: naturel, pour obtenir ce décret, de s'a.drelfer
au Juge compétent de connaître de la demande au fonds.
Toubaud dans fes inll:itutes au droit confu!aire, tom. 2,
dit que les Juges-Confuls oor le pouvoir de donner permiffion d'arrêter des débiteurs fufpeél:s de fuite & de ban~ue
route. Cette maxime a été confirmée par un Arrêt de la
Cour du 7 Février 1741, & par un autre rapporté par Bonnet fous la date du 29 Janvier 1727.
,
Le lieur Rolfy érait - il en état de fûite? Les lieurs
Tymon & Chaudiere l'ont repréfeoté comme un Négociant
étranger avec lequel ils avaient eu le malheur d'avoir affaire.
Domicilié depuis peu à Marfeille, ils oor communiqué un
compte· arrêté, de même qu'une lellre à eux écrite par
RolfY , qui leur annon~oit le dérangement le. plus grand
dans fes affaires. Cette letlre prouve la fltuationl critique
dans laqu~le il (e trouvait·, les· fuites malhel!reufes qu'il
pourrait elfuyer, s'il ne payoit pas la traite tirée fur lui
par les lieurs Bruno & Balbino; elle· prouve auffi la c1>nfiance que le lieur Rolfy avoit aux lieurs TYlUon & Chaudiere, puifqu'il ne craint pas de leur· décollvrir l'état
de fes affaires. Il ell: bien difficile d'imaginer. qu'on puilfe
fournir des armes contre foi- même, & que, fl véritablement le fleur Rolfy projerait, llne fuite qui le mît à l'abri
des pourfuites de fes créanciers, il communiquât fes projets
aux pelfonnes· même les plus imérelfées, & qu'il fe privât
d'une liberté d'autant plus précieufe , que c'était la feule
relfource qui lui rerloit en pareille occalion. Telle ell: l'idée naturelle qui doit fe prétemer à la leél:ure de cètle lellre; mais il
n'en efi pas de même fans doute de ceux qui fe trouvaient liés d'intérêt, & qu'une confiance aveugle & peu
réfléchie avaient engagé dans des affaires plus impmtantes
qu'ils n'auraient voulu. Le lieur Rolfy, étranger de natiofl ,
ne polfédoit rien à Marfeille; il n'y jouilfoit même que d'un
domicile momentané, & qu'il lui était aifé de transférer
à fon choix & à fa volonté. Il annonce, dans fa lellre ,
aux fleurs Tymon &'-Chaudiere d'une maniere formelle',
que s'il ne paye pas la traite des fleurs Bruno & Balbina,
il
,
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~ALAIS
DE
PROVENCE.
2'f7
il n'a pas la force & le cœur d'attendre dans le comptOIr
un~ citation faute de paiement; c'elt-à-dire, qu'il, prendra la
fuitè & qu'il évitera par-là les fuites fâcheufes auxquelles il
fe trouverait expofé.
Me. Meriaud difcuta enfuite les facultés du fieur RolTy,
& trouva que l'offre qu'il fairoit de céder fes marchaudifes
n'étoit pas fatisfaél:oire, parce qu'il n'en polTédoit point à
Marfeille. II. conclm à c'e que fans s'arrêter à l'appel du
fieur RolTy, dont il feroit démis & débouté, ce donc étaie
appel tînt & fortit fan plein & entier effet, & en cet étae
les parcies & mariere renvoyées aux Juges-Confuls de Marfeille, pour pourfuivre ainli qu'il, appartiendrait, & au moyen
de ce qu'il n'y avoie lieu de prononcer fur la 'requête en
élargiITemene prO\;ifoire. '
,
.
Arrêe du 16 Janvier 1778, prononcé par Mr, le Premier
Prélidenr, conforme aux condulions, & 'qui condamne le
fieur RolTy aux dépens. Plaiqant Mes. Eltrivier & Simeon.
ARR È T
X X XIV.
Le /impIe trouble fait dans l'Eglife, fans fcandale & fans tumulte, flui ne confrfle flu'ell ./impIes irrévérences, & 'lui ne
,tend pas à faire interrompre le fervice divin, n'efl pas cas
rOJral.
•
E l S Décembre 177 6 , les Confuls du lieu de Camps
_ s'étant placés à leur banc pour aflilter aux Vêpres, la
"femme de Me. Bardel, Lieutenant de Juge du même lieu ,.
vine fe pl.acer au même banc & à la tête des Con fuIs. En
vain on lui repréfènta que ce n'étoie pas [a place; elle
infilta à y ,relter, fur le fondement que c'étoit celle de fon
ma.ri, & qu'elle étoie par conféquenr en droit de l'occuper;
fon entêtemenr obligeaJes Confuis de fe placer à un autre
banc. Le 27 Janvier fuivanr, les Confuls préfenterenr une
requête' en information au Lieutenant de Brignoles; & fu~
4nnées Ins & fuiv.
Kk
L
•
•
�2.SS
.-
10
U RNA L
le vu des charges, la Dame Bardel fut décrérée d'ajourne;;
ment. Le '2.i Février, elle prêta fes réponfes; enfuite
elle appella du décret de fait informé & de ce qui avoiu
fuivi.
Le même jour elle tint un aél:e aux Con fuIs ; elle leur
notifia que <t'avoit été fans affe él:at ion , fans prétenti.on de fa' .
parc qu'elle avait pris fa place à Vêpres avec eux; que· ce '
fùt parce qu'elle ne trouva point d'autre place, l'Eglife fe
trouvant remplie.
On di fait pour la Dame Bardel, qu'il n'y avoit aUCUll
délit; que quand même il y en aurait un, ce ne fetoit jamais un cas royal. 1°. La prife. de la place au bar.c des ConfuIs ne rambe qu'en· inhibitions & défenfes, n'y ayant point
d'injure réelle; '2.0. l'injure faile aux. Confuls nl: peu-t être
segardée cbmme cas royal, parce qu'ils ne font pas Offi0
<:i\rs royaux; 3 • le trouble public fait au fervice divin forme
à la vérité un cas royal; mais le fervice divin n'a pas été
interrompu, comme le defirene les Commentateurs de l'OrdmlIlance; ce n'eH pas le local, c'eft le fait qui fixe le délit.
'"
Ici il dt' atreHé qu'il n'y a pas eu d'interruption; & s'il y
a eu quelque troubre, ce fooc les Confuls qui l'one occafioné.
.
- On répondait pour les .Confuls·, que la procédure devait
être confirmée, & que le Liemenane érait compétent;
la. parce qu'il y avoit eu un ~érLtable trouble au fervice
divin, feule condition qu'exige l'Ordonnance; l'interruption
n'eH pas néce!faire, & le fcandale lIvoit été a!fez grand
pour établir un cas royal & rendre le Lieutenant de Brignoles compétene. '2.°. Quand il ne. l'eût' pas été de droit,
il le .devenoit de fait, par l'incompétence des Juges du Sei.
rrneur. Les Eglilès fooc fous la proteél:ion immédiate du
Roi; dès-lors raur ce qui y arrive doit être de la connoif1ànce. du Juge. ropl , & non de celui du Seigneur.
Mr. l'Avocat-Général de Cali!fanne obferva que les cas
royaux dans leur 'principe étaient les feuls, délirs où le Roi
avait intérêt, comme Roi, pourla confervacion de fes droits
& la manutention de fan alltoi-ité.
�D U
PAL AIS
D E
PRO VEN CE.
2
'Î 9
Les cas royaux ne furent point d'abord nettement fpécifiés par aucune Ordonnance; quelques Réglemens en énon-:
çoient quelques-uns, mais ces Réglemens ne furent pas généraux.
On craignait dans les premiers temps que les grands
va{faux n'ufurpa{fent aux Rois ce qui leur reHoie de la fouveraineté en leur Province, qui ne confiLtoit qu'en la conIloi{fance de la JuHice que l'on cherchait fans celle à augmenter en faveur des grands va{faux. Dans ces temps, tout
étaie erouble, toue éeoit divifion; le peuple tenait encore 11 la
fëodalité j & fous .l'apparence d'une liberté vaine & frivole, il
étoit réduiç à l'efclavage le plus dur. Le Souverain avait befoin, pour foutenir fan autorité, d'en donner des preuves fréquentes; il- en faifoit naître lui-même les occafions; aulli,l.
Roi envoyoit-il des Députés dans les terres des Seigneurs
pour juger tous les cas royaux, ce qui comprenait routes
les caufes où le Roi avait quelque efpece d'intérêt, quelque
éloigné qu'il felt; ces établif!èmens, ces dijlinc1ions avaient
plutôt pour hafe, d~t Loifeau, la néceJJité que la raifon.
La néceffieé ce{fa par la réunion des l\nciens Duchés &
Comtés à la Couronne. La raifon devenant le feul moeif
dè la Loi, .plufieurs cas redevinrent de la Jurifdiél:ion ordinaire, & en diminuant les cas royaux, ou' plutôt en n'y
foumettant plus l'univerfalité des délies, ce ne furent plus
~ue les crimes qui intére{fent l'aueorité ou la pui{fance royale,
qui ble{fent la forme & les regles du Gouvernement, l'ordre
polieique établi dans l'Eeat, ou les Loix de la difcipline
publique. Plus les fiecles s'éloignerent de la 'barbarie, moins
les cas royaux devinrent fréquens; ils dimimlerent en raifon
de l'augmentarion de l'autorieé :royale & du déclin des différentes portions d'autorieé féodale & particuliere. A me[ure
qu'elle fe porto"it plus naturellement vers le cencre, elle [e
faifoit bien plus refpeél:er par elle-même que .par les occaiions qu'on faifoit nalere de [e faire craindre. Quelqlles fiecles après, on ne craignit plus les grands va{faux,
mais on avoit encore des inquiéeudes [ur les Juflices des
Seigneurs. Nos Rois fouJfroienr avec peine les reUes de l'au-
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torité féodale j elle étoit bien affaiblie fans doute, elle était
même prefque fans exil1:~nce; mais on craignait de lui en
rendre. On voit la preuve de ce fyl1:ême dans quelques Auteurs politiqu'es poltérieurs à l'époque dont on vient. de' ,
parler.
'
Ces Auteurs n'attribu.ent plus en géné·ral. tous les ca~ aux
Juges royaux; mais quand il peut y avoir du doute, difentils, il faut toujours pencher en faveur' des Juges royaux. On .
[ene alfez d'après cette courte difcuffion quelle" différenèe il
faut faire entre les cas royaux au moment de" leur origine,
& tels qu'ils exifient aujourd'hui dans des fiecles de paix &
·de tranquillité que l'on doit peut-êrre à la force, nlais qui
exil1:e d'une maniere inaltérable.
_ Le Roi n'a plus .qu'à protéger les Seigneurs & leur Juftice, il craignait l~ur Jurifdiétion; elle eH cl'evenue néceffaire; indifpenlàble à l'Etat; il ne faut .donc pas trop les
avilir; l'intérêt public & particulier .en font également une
Loi. Autant l'intérêt politique deman.doit qu'on étendît les
cas_royaux, autant il exige qu'on les renreigne aujourd'hui, &
c'el1: ce qui eil néceffairement arrivé par la fuite des temps.
Anciennement tout rapt, tout port ,d'armes était cas royal;
aujourd'hui il faut violence & attroupement, il faut que le
fait nuife à l'autorité, non publique, mais royale; on ne doit
pas confondre l'intérêt du Roi, qui eil la bafe des cas
royaux, avec l'intérêt public, qui de néceffité dépend de la
haute jul1:ice, & dont la pourfuite eil dévolue 'au minifiere
public.' L'intérêt par.ticulier n'dl pas moins intéreffé à la:
diminution des cas royaux, lqui fans faire' gagner au particulier le 1Jlpi,ndre degré de Jurifdiétion, le furchargent d'une
foule de frais ruineux; ainG avec la' caufe & le temps la définition des .cas royaux a changé. .
.
.
Qu'eft-ce donc aujourd'hui que le cas royal? C'efr ce,lui
qui n~ceffité une autorit.é plus forte que la locale, '& p6ur
lequel c::lle devi,en_l impuilfante & n'en impolè pas affez;
~o.ut ce qui tient, au 'trpuble, à la fédition , à l'anroupement,
tout ce' qui nuit à l'autorité & qui l'attaque vlve.ment, ainfr
~ue ce'ux qui la repréfel1lenr.,. .reIs paroiffent avoir été. les
�.....
,h u PAL A t S DE PRO VEN C B.
16r
motifs des différens cas énoncés dans les Ordonnancès, & /
le réfultat de tous les avis que l'on trouve dans le procès-'
verbll des conférences. S'il fallait- apcjennement, comme le
difait Mr, Talon, donner quelque extenfion 11 l'autorité des
Juges royaux, il faut le contraire aujourd'hui; & en raifon..
nant d'après la lettre firiél:e de l'Ordonnance, chaque fait
doit fe décider par les circonl1:ances particulieres; il faut,
pour que le cas fait royal, que toutes les candirions exi- gées par l'Ordonnance s'y trouvent préciCément établies.
La plus légere circonf!:ance qui viendrait 11 manquer, en laiCferait néceifairemerit la connoiifance aux Juges ordinaires.
D'après ces principes généraux, Mr. l'Avocar-Général paifa
à la difcuffion des différens points de vue que préfentoit cerre
caufe. Y a-t-il injure ou non ( continua-t-il ) & conféquem:.
ment y a-t-il un corps de délit ou non, & dès-lors peuton dire qu'il y ait eu lieu d'informer? Il obferva qu'on avait
cherché ~ prêrer 11 la 'Dame Bardel des intentions toutes
plus criminelles, mais qu'on n'en devait décider que d'après
ce qui étoit contenu dans la proçéd'ure.
La Dame Bardel étoit venue fe mettre' à Vêpres au banc
des Confuls ; e,lle n'avait pas VOlliu s'~n aller ;~ils lui avaient
cédé la place; il Y avait eu affeélar,ion de fa part 11 venir
s'y placer & 11 ne pas pre.ndre fa place ordinaire. Il y avait
donc eu le projet de faire injure, il Y avait eu obaination
à ne pas céder la place; on ne peut pas Ce diffimuler que
ce fait ne puiife "être regardé comme une injure. Il n'y eut
à la vérité point d'injure ni de part ni d'autre; il' n'y eut
rien que d'honnête dans l~s propos;, mais c'étoit faire injure aux Con fuis qui étaient en chaperons. Le peu d'empreifément que la Dame Bardel eut 11 faire fignifier fan
aéle extrajudiciaire, eH une circonfl:ance qui aggrave fes
torts; elle craignoit une procédure: pourquoi dès le premier pas n'avait-elle pas cherché 11 fe jufl:ifier & à fatisfaire
les Gonfuls? Il femble qu'elle ne s'avoue coupable que lorf.
qu'elle ne pe.ut pas faire autrement, & que la requête en
jnformation efl:' pré[entée; il Y avait donc une- efpece de
délit public qui demagdoic une réplICation authentique. L'aél:<J
�Jou 'R N A r.
~
extrajud.jdair~ ne fuffifolt pas; des inhibitions & défenfes'
ne pouvaient avoir lieu; on a donc pu faire informer dèslors, dès qu'il y avoit.m"tiere ~ information.
"
L'arr. II de l'Ordonnance criminelle, tir. de la compé-.
tence, met le trou~le public fait au fervice divin au nombre
des cas royaux. Mais il faut qu'il s'agiffe d'un fait qui nuiîe
à la célébration du fervice, ou qui retienne ceux qui doivent le faire; c'eil: alors le véritable cas de l'Ordonnance.
Pourvu que ce trouble foit public, il ell: cas royal, parce
qu'il cauîe réellement du îcandale. Si c'efiun f.1it qui arrive
enrr_e deux particuliers, fait abfolumenr étranger au fetvice
divin, qui îemble îortir de la diîpofition de l'Ordonnance,
qui peut occafioner du mouvement, de la curiofité, mais
qui peut ne pas caufer du îcandale, & qui, pour être cas
royal, a beîoin, outre· la publicité, d'être un trouble effentiel, confidérable, & qui même pour rentrer dans la diîpofttion de l'Ordonnance, a beîoin de troubler le îervice :divin,
c'efi-à-dire de tendre à fon inrerruption, dans ce cas il faut
plutôt juger du trouble par l'effet qu'il a, que par le fait en
lui-même.
D'après cette dillinB:ion, tous les Auteurs non anciens;
dom la plupart ne parlent pas nom.mémenr de ce cas royal,
mais modernes, dont les Commenrateurs forment une bonne
partie, Vouglans, Serpillon, Bornier & Jouffe, diîent qu'il
faut que ce trouble foit accompagné 'de îcandale & de tu- multe; il ne doit pas s'entendre d'une fimple irrévérence
commiîe pendant l'office, mais feulement lorîque cela va à
faire abandonner ou interrompre lè îervice.
Denirart ,-l'Auteur du Code pénal, & celui du. Répertoire
dé Juriîprudence, difent qu'il faut que ce trouble foit fait
avec bruit & fcandale, & qu'il tende à faire diîcontinuer
l'office. L'Abbé de Foix, Auteur des maximes fur l'abus,
après avoir rapporté la Novelle 123, & le chap. II du liv.
6 des Capit"ulaires de Chademagne, obferve qu'il faut, fui.
vant l'eîprit de ces Loix, que le trouble- au fervice divin
foit -accompagné de fcandale, -d'émotion publique & d'autres
circonfiances graves;. alors
. il eil: cas privilégié. Si au con-,
':I.6:z.
�DU
PAL'US
nI!
PIl,OVI!NCI!;
i63
traire le trouble confilte en fimples irrévérences, ce n'eU
plus qu'un délit commun.
Or, il faut certainement, pour caraél:érifer le vrai cas
royal elltre perfGnnes laïques, ce qu'il faut pour caraÇl:érifer
le vrai cas p6vilégié, quand il s'agit de perfonnes eccléfialtiques. Il faut donc, pour qu'il y 'lit c~s royal, que l'on
puilfe appliquer la vraie définition de cas royal, ce qui a
lieu toutes les fois qu'il ya fcandale public lk trouble bruyant,
parce qu'alors l'autorité locale celfe, & elt obligée de céder.
Elle n7 peut pas fe faire alfez rerpeél:er, & l'autorité du
Juge royal devient nécelfaire; l'interruption n'dt pas même
nécelfaire, l'Ordonnance ne l'exige pas; cependant d'après
la diHinél:ion ci-devant faite, elle femble, pour ainfi dire,
être un~ condition elfentielle- du trouble qui arrive entre
deux particuliers par un ~ait abJolument étra:'lger à tOIl.t ce
qui tiellt à l'Autel, & la proteél:ion (péciale que le Roi accorde à toutes les Egiif~s' ne peut pas établir que tout ce qui
s'y paITe foit cas royal. _
Dans la procédure prife contre la Dame Bardel, des témoins dépofent qu'il y ·eut un bourdonnement, du' mouvement & un changement de places de quelques perfoilnes,
du murmure, de l'agitation, fans néanmoins que le chant
des Vêpres ni le fervice fulIènt interrompus; quelques peFfonnes' même monterent fur des chaifes pour voir la Dam~
Bardel; d'autres difent que ce qui ocçafiona le plus de mou.vement, fut le changement de' banc des Confuls, plufieurs
perfonnes s'étant levées de leur place pour voir de quoi il
était quefiion, &' ayant parlé entr'elles à ce fujet.
Sont_ce donc là ces faits graves qu'exigent les Çommen- '
rateurs? EH-ce là ce trouble public excité ouvertement &
volontairement? La Darne Bardel n'excite rien ni publiquement ni tacitement; elle fe place au banc des Confuls fans
rien dire; le mouvement -n'efr occafionné que par le changement de place des Confuls.
, Mr. l'Avocat-Général conclue à ce que fairant drqit ?il
l'appel de la Dame Bardel, le décret de fait inforn:té &
~oute la procédure fuffe..llt déclarés' nuls ~ jQÇ,01'l1pétens, &1.
�,-64
" Jou
RNA L
comme tels caffés, fauf & réfervé aux Confuls du lieu deCa'mps de faire informer de nouveau pardevant le Juge
du lieu, avec permiffion de faire reouir les mêmes cén101OS.
Arrêt du 13 Juin 1777, prononcé par Mr. le Préfldent
de St. Vincent, conforme aux conclufions , & qui condamne
les' Confuls & Communauté de Camps aux dépens: Plaidant
Mes. Gaffier & Simeon.
,
AR RÊ T
X X XV.
En fait d'affirance maritime fur les facultés d'un Navire, il
n'y a lieu a- l'abandon des effets aJJurés , qu'en tant qu'il y
a peue entiére ou prefilue entiere des mêmes effets, & l'innavigabilité du vaiJfeau ne donne pas lieu a l'abandon", fi
les effets affirés viennent
bon faUl'ement.
a
L
E fleur Gautier fils, Négociant au Cap, chargea le 10
,
AOÎlt 177 i , fur le vaiffeau les Deux Amis, commandé
par le Capitaine Rouden, trente-quatre bariques fucre, à
l'adreffe de Madame Devoulx, Négocian'te à Marfeille. Par
deux polices' clofes par Me. Efcalon, Courrier royal,~les 6
& 2:0 Septembre 177 l , la mflifon Devoulx fic affurer fur, les
facultés de ce vaiffeau, & pour compte du fieur Gautier fils,
18000 liv.de forrie des Ifles Françoifes de l'Amérique jufqu'à MarfeilI.e. Les fieurs, Simon Gill.y, Lazare Peirier &
Crudere ;y prirent intérêt pour les 180,00 liv., & affurerent
llvec la claufe franc d'avarie', & la promeffe de payer, en cas
de perte, la livre des HIes [ur le pied de la livre tournois;
ceux-ci fe firent> réaffurer par les fleurs Millet, Lincola,
d'Ar'rache ~ A!noux, Négoeians de Nantes. Le vaiffeau
parrit du Cap le 20 Août, en cQmpagnie du navire le Teterni/que, &' ils cO'ntin,uerènt leur route enCeftlble ju[qu'au 4
Septembre" jour auqll.el ils [e quirrerem. Quelques jours après,
le navire effuy..i 'UO oJiragan qyi obligea le Capitaine à jerrer,
,
"
~~
�DU
PALAIS
DE
P"ROVENCE.
26)
les canons à la mer & retrograder. II arriva au Fort Sr.
Pierre le 25 Oél:obre; jl y préfenta une requête au Lieutenant de l'Amirauté, pour faire conllater les avaries furvenues
ranr au navire qu'aux marchandifes; la vente de celles qui
éraienr avariées fut faite juridiquement; les Experfs nommés
pour viurer le navire & évaluer la dépenfe du radoub l'ayant
portée à une fomme confidérable, le Capitaine Rouden demanda, par une requête, que le bâtiment fût déclaré innavigable, ce qui fut ordonné par Sentence du 26 Novembre 177[. Les marchandifes qui n'avaient pa~ été avariées,
fLirent rechargées fur divers navires.
Dès que la veuve Devoùlx eut connoiffance du untfl:re ,
elle le notifia à fes affureurs, fous la 'réferve & protellation
expreffe de leur faire le délaiffement en remps & lieu. Un
mois après elle fit à la Chambre du Commerce la déclaration du finillre arrivé au Capitaine Rouden, & par aurre
autre aél:e du 24 Février 1772 elle notifia à fes affureul's
roures les procédures faites au Fort Sr. Pierre, & leur fit
abandon des facultés affurées, avec interpellarion de lui payer
les fommes affurées. Le ·fieur· Crudere, affureur pour 2000
liv., accepra l'abandon, &:: fe foumlt au paiement de la perte;
les ueurs Gilly & Peirier s'y oppoferenr. Huit des bariques
affurées étant arrivées à MarfeilIe, la Dame Devoulx préfenta une requêre au Lieutenant de l'Amirauré, dans laquelle,
en déclarant perfill:er à l'abandon par elle ,fair, elle demanda
aŒgnation contre les fieurs Simon Gilly & Lazare Peirier,
pour qu'ils fuffenr obligés de fe concilier avec elle pour raifon des f'lcuItés alTurées & abandonnées, tanr de celles venues, que pour celles qui pourroient arriver dans la fuire ,
.& à défaur qu'elle flÎt, elle-même autorifée à faire le recoume'nr des marchandifes, pour le prix qui en provi(lndroir,
toutes légitimes déduél:ions faites, reller encre fes mains,
comme feque!he & dépofiraire de juHice. Le fieur Gilly con~
rella ce~ fins, qui furent cependant adoptées par Senrence
pu 28 Février 1772.
, En exécution de ce jugemenr, les trente-quatre bariques
fùcre qui étaienr fucceŒvemenr arrivées à MarfeiIle, furent
Années 1775 G' jÎJiv.
L'I
�,
.~66
JOUR.NAL
. vendues aux encheres; la Dame Devoulx fit affigner les a1fu~
reurs en paiement des fommes affurées, fous la déduél:ion de la
portion leur compétant fur le net produit des facultés affurées'
&vendues aux encheres judiciaires. Le fieur Simon Gilly, qui
s'écoit fait réaffurer, appell'l les réaffureurs au procès; &
par Sentence du 16 Juillet 1773, le Lieutenant accorda provifoirement les fins de la demande de la Dame Devoulx.
Appel des fieurs Gilly & Peir~er,'& requête en tout en état
qui leur fut accordé; la Dame Devoulx pourfuivi"t au fonds;
& par autre Sentence .du 11 Février 1774, fes fins lui furent définitivement accordées; autre appel de la part (des
fieurs Simon Gilly & Peirier•.
On di fait pour eux, que l'in navigabilité en: véritablement
un unifire qui donne lieu à l'abandon, lorfqll'elle procede
d'une fortune de mer; mais cèt abandon ne doit être admis
que pour l'affurance fur le corps & 'quille du vaiffeau, &
null~ment pour les facultés, parce que l'art. 46 de l'Ordonnance de la Marine, tit. des a./furances" exige, pour l'abandon des effets ou facultés, une perte entiere.
Suivant la difpofition de l'Ordonnance, il Y a deux manieres d'obtenir l'indemnité, mais l'une ou l'autre ont lieu
dans des cas différens; la premiere ef1: par voie d'abahdon,
lorfqu'il y a perte entiere & prefque totale des effets affurés; la feconde en: par la voie du réglement d'avarie,
lorfque la perte' n'eH point totalej c'ef1: la différence qu'il
fàut nécelfairement admettre, autrement on ne fauroinians
que,l cas il y auroi~ lieu à l'abandon ou au réglemene d'a·
varie.
Dans le cas préfent, il n'y a pas le plus léger dommage
à rép'arer; y en eût-il, il ne feroit que dans la clalfe de ceux
qui donnent lieu au réglement d'avarie; & quoiqu'on ait f1:i. pulé la claufe franc d'avarie,. l'art. 40 du tirre des alfurances
porte: ne pourra le délaiflemene être fait qu'en .cas de prife,
naufrage, bris, échouement ou perte entiere des effets affurés, & cous autres dommages ne ferone réputés qu'avarie,
qui fe ra réglée entre les alfureurs & les alfurés, à proportion de leurs intérêts. Le fieur Gautier donne à cet article
•
�D U
PAL AIS
D E
PRO VEN C E. •
267
lIne faulfe interprétation; il prétend qu'il fuffit de l'événement
d'un des cas déugnés, pour donner lieu indillinaement à
l'abandon du Navire & des facultés. L'on dit au comraire
que le vrai fens de cet article de l'Ordonnance dt que
l'abandon des effets· alfurés ne doit avoit lieu dans les cas
exprimés, que lorfqu'il y a perte entiere ou prefque entiere,
.& tous autres dommages ne font réputés qu'avarie.
Cette explication eH fi vraie, que l'art. S du. titre des
avaries écane toute équivoque fur la difpofition de l'art. 46,
puitqu'il po ne que les dommages arrivés aux marchandifes
par leur vice propre,- tempête, prife, rtaufrage ou échouement, les frais faits pour les fauver, & les droits, impofitions & coutumes, font auffi avarie fimple pour le
compte des propriétaires; il n'eR donc pas vraÏ" que le feul
cas du naufrage ou échouement du. Navire donne lieu au
. délailfement,' puifque cet article S ne rép,ute qu'avarie fimple
les dommages & les frais de fauvetage.
La faine raifon ne dit-elle pas auffi bien que l'Ordonnance, que lorfque l'échouement rie caufe qu'un léger dom/liage, ou n'en caufe pas du tollt à la marchandife, il eO:
abfurde d'en propofer l'abandon? L'événement qui donne
lieu au dommage peut - il én déterminer la nature? Si
l'échouement caufe une pene eIitiere ou prefque entiere de
la marchandife, il Y a lieu au délailfement; s'il ne caufe
qu'une perte peu conudérable, c'efl: fimplemeÏJt le cas
d'avarie. Valin & Pothier, Commentateurs de l'Ordonnance, l'ont penfé de même; il' n'efl: pas douteux qué leur
opinion impartiale & fondée fur une connoilfance approfondie de l'Ordonnance, doit prévaloir fans doute fur le
[yllême de quelques Négocians intérdfés ou féduits. Ainu.
que l'on cite des Auteurs pour comparer l'inna vigabilité
au naufrage ou à l'échouement'; que l'on [outienne tant
qu'on voudra ce ,paradoxe étrange, qu'il ne peut y avoir
d'innavigabilité fans bris, il demeurera toujours pOllr certain qu'au cas même de l'échouement avec bris, il ne
peut y avoir lieu au délai/fement, s'il n'y a perte prefque
rota le , parce que tous autres dommages ne font réputés
qu'avarie.
L 1 2,
�z~
JOURNAi
On doit convemr qu'il y a des Arrêts dont on pourrait
faire quelÇJue application à l'efpece préfenre; mais un dernier Arrêt rendu l'e 17 Mai 1776 dans l'affaire du lieur
Hermite a ramené les i\.ffurel./rs aux vrais principes, & a
fixé fans doute pour- coujours un point de jurifprudence que
le bien du commerce & la bonne foi réclainent depuis
long temps. Le fieur Hermite, Négociant de Marfeille,
_affure aux fieurs Reynoard & Cafl:ellan divers effets chargés
-au Port au Prince fur.le vajffeau L'Adelaïde. Le vaiffeau
effuye de~ tempêtes; il ne pellt arriver à Marfeille, & relâche au Fayal où il efl: déclaré innavigable. Les effets
affurés font tranfportés à Marfeille [ur d'autres bâtlmens,& parviennent aux lieurs Reynoarg & Cafl:ellan en trésbon état. Ceux-ci refufent de les recevoir, & font leur
délaiffemenr fur le fondement de l'ionavigabilité. Le Lieutenant de Marfeille adopte ce fyf1:ême; le fieur Hermite
appelle de la Sentence, & par Arrêt au rapport de Mr. de
la Boulie, la Sentence fut réformée; le fieur Hermlte
avait également fl:ipulé la claufe de franc d'avarie, & la
promeffe de payer en livres tournois.
•
_
On peut dire avec fondement qu'il rélif1:e à coute jllftice que l'affuré qui n'a aucune indemnifation à demander,
veuille cependant prétendre un profit certain, & éluder
une c1aufe particuliere à la faveur de laquelle l'affurance a
ét~ fig;lée. En effet, n'en - il- pas odieux qu'après avoir
:Il ipulé la claufe franc d'avarie, on veuille cependant la faire,
fupporter aux, Affureurs d'une maniere indireél:e, & que
par l'abandon on veuille obtenir un profit qu'on n'auroit
pas eu, fi le Navire écoit heureu[ement arrivé? L'ufage de
-la Place de Marfeille autorifera tant qu'on 'voudra cette
claufe, par laquelle il eH fl:ipulé que la livre des iJ;les fera
payée en livres cou mois ; mais il ne faut pas que cet ufage
fait abufif, & qu'il faffe paffer induemene à l'affuré un
bénéfice injufl:e.
Cet ufage contraite cependant à l'Ordonnance fera moins
IÎnjufte lorfque la perte fera réelle, parce que la fl:ipula~
tian de ta cIaufe ayane eu pour objet_ la valeur préfumée
�'n u PAL AIS n B Pa 0 v B N C:I:
'269
/:ie ,la marchandiCe, au de1fus de l'évaluation portée par la
faél:ure, il Y a quelque raiCon pour croire que l'a1furé Ceroit
privé d'une partie de cette valeur" en cas de perte, s'il ne
fiipuloir la c1aufe que .J'ufage du commerce a auroriCé; mais'
'lorfque la marchandiCe ell rendue entre les mains de l'aCfuré dans toute fa valeur, on ne Cauroit donner effet à
certe c1auCe au moyen du délai1fement.
Qu'eH-ce qu'un, uCage qui a l'effet' de porter "atteinte à
la Loi? C'ell un ufage généralement adopté, & qui n'effuye point de contradiél:ion,: diutarna confuetudo, dit la
Loi 12., if. de legihus, moribus utentium comprobata, 'laie
omnium confenfu legem ahrogat. lta- Faber fur le Code,
pag, 41 aux notes, On trouve à la v.érité quelques Arrêts
qui avoient établi 'une JuriCprudence que les abus forcent
enfin de ré'rraél:er; mais jamais & dans aucun temps l'ufage
qu'on veut faire réfulter de quelques Arrêts furpris à la
rel-igion de la Cour, n'a été adopté par une approbation
générale, & telle qu'il la faut pour établir un ufage qui
pui1fe faire oublier la Loi. Les Arrêts qui Ont' été rendus,
font par eux-mêmes une preuve exc1ufive de l'approbation
générale; ils prouvent au conti'aire une réclamation conftante, propofée, à la vérité, fans fuccès, mais qui n'en eLl:
pas moins une réclamation: d'ailleurs les circonHances
font-elles les mêmes? Dans l'efpece de tous ces Arrêts
y éroit-îl quellion de la c1aufe qui donne à l'a1furé en cas
de perte un tiers en fus de l'~valuation? Cell précifément
cette c1aufe qui ren"d ici la prétention des a1furés plus
odieufe. La nouvelle Jurifprudence rétablit enfin une regle
,de l'équité naturelle, puifqu'il réfille en effet à toute jufri ce que l'affuré puiffe être aurorifé à faire abandon des
effe.Js qu'il a reçu au lieu de leur deHination fans dommage quelconque, & cela non par le motif qu'il fera indemnifé de la perte, puifqu'il n'yen a poinr, mais parce
qu'il' trouvera dans le délaiffernen't un bénéfice d'un tiers
à la faveur de la c1aufe fiipulée. Les réa1fureurs fuivirenc
le même fyllême de défenfe.
'
- On répondoit pour la Da'me Devou!x, qu'en droit tous,
•
�Jou RNA L
les abus qui pourro-ient réfulcer d'un ufage univerfellement
établi, ne fauroient rendre illufoires les aéles & les convcptions auxquelles il a donné lieu; ce ne Fourroir être
tout al! plus qu'un motif pour un Réglement à l'avenir,
mais jamais un prétexte qui pût autori/èr le Négociant qui
a connu cet ufage, qui a concouru même .à l'établir, à manquer à' fa parole. Les affureurs ont eux-mêmes {tipulé la
c;Iaufe contre laquelle ils s'élevenc aujourd'hui, & qu'ils
traitent de frauduleufe; ils ont par conféquenc jugé ah œvo
l'affurance licite.' La prime I.e m' a d'ailleurs été payée fur
le pied de l'efiimation portée en la faélure; ils ne parlent
Pils de la rendre à concurrence de la valeur' intrinfeque des
-effets affurés: l'offriraient - i-Is pour donner plus de poids
en apparence à leur réclamation? Ils ne pourraient être
écoutés, attendu J'ufage notoire qui a fervi de hafe "Ù
~ontrat, & 'dont ils ont eux-mêmes reconnu la légicimité
& recueilli J'avantage.
Ne pourra, porte l'arr. 46 du titre des affurances, le
délaijJèment être fait qu'en cas de prife, naufrage, hris,
échouement, Arrêt de Prince, ou perte 1 entiere des effets,
ajJùrés. Cette difpofition porte, comme on le voit, fur une
alternative. Le naufrage, l'échouement peuvent donc feuls
donner 'Iieu à l'abandon, tout comme une perte entiere
des effets affurés. Ce font-là des événemens indépendans
les uns des autres, qui peuvent arriver féparément, qui
produifent tous le même' effet, & dont la Loi n'exige' pas
le concours pour légitimer J'abandon.
_
L'innavigahilité efl comparée <7 un véritaDle naufrage, dit
Cafa-Regis , difc. l , n. 142. Si donc aux termes de l'Ordonnance, le naufrage, l'échouement peuvent feuls autorifer
Pabandon des effets affurés, il doit fans contredit en être
de même dans le cas de l'innavigabi!ité, quoique l'Ordonnance n'en ait rien dit. Inutilement diHingue-t-on l'alfurance fur corps & quille, & l'a!furance fur fimples facultés;
ee n'efi-Ià qu'un germe de procès qui vont toujOUts. au
détriment du commerce. Il réfulte de la combinaifon de
~ivers. articles de l'Ordonnance., qu'elle n'a pas. voulu ad-:
'''70
•
�DU
PALAIS
Di!
PROVENCE:
271'
hleme cette dilHnélién inconnue de tous les temps, &
même qu'eHe fuppofe le plus intime rapport entre le corps
& quille & les facultés. Ne ré[ulte-t-il pas bien clairement de l'art. 32. & des obfervations du Commentateur,
que du fort du vaiffeau [ur lequel on charge les marchandifes, peut & doit feul dépendre. le fort de ces mêmes
marchandi[es; que tout ce qui .frappe le contenant, affeéle
néceffairemenc le-contenu; que par conféquent fi l'innavigabilité du vaiffeau donne lieu à'l'abandon pour le corps &
quille, il doit en être de même pour fes facultés.?
La jufiice de cene conféquence eCl reconnue, en fai[an~
attention la. qu'en cas d'innavigabilité, ,comme ·en cas de
naufrage & d'échouement, la perte des marchandifes eCl
pré[umée de droit; 2. 0 • que l'intérêt du commerce. exige
que les affurés recouvrent au plutôt leurs f~nds pour en
faire de nouvelles entreprifes, ce qu'ils ne pourroient faire,
s'il leur falloit attendre la vérification du fort des mar"
chandj[es après que le vaiffeau a été déclaré innavigable.
Un vaiffeau qui, comme on dit en ter!l)es de marine,
~ ne fait que toucher & talonner, qui fe dégage par le feul
feèours & travail de l'équipage, n'eCl pas cen[é avoir échoué:
~
il n'y a pas conféquemment lieu à l'abandon; mais li le
vaiffeau ceffe d'être à lui-mêmé, s'il ne fe releve enfin, &
n'eCl remis à flots qu'à l'aide d'un· recours étranger, l'échouement dès-lors, eCl complet, quoiqu'il n'y ait ni bris ni
naufrage, & cet échouement donne lieu à l'abandon, [uivant les Arrêts de la Cour & contre l'opinion de Pothier.
Peu importe que le vaiffeau continue [a route; cette remire à flots n'eCl rien âe plus qu'un fauvetage pour le compte
de l'affureur, incapable d'effacer le ftniClre arrivé, plus in,capable encore de fermer l'aélion en délaiffement 0llverte
dès l'inClant même de l'échouement: or quel ftniClre particulier éprouvent dans cet échouement les facultés affurées? Aucun [ans doute. Le finiClre qu'a éprouvé le vaiffeau,
. finiHre qui n'a pour ainfi dire été que momentané, autorife
cependant le délaiffement des effets affurés.. Concluons
~onc qu'il ne faut pas un finilire particulier pour les effets
�'17'1
Jou RNA L
qui' dans ce cas, comme dans les cinq premiers dont parte
l'art. 46 ,s'identifient fiél:ivement avec le corps du vaiffeau.
Une derniere preuve qu'il ne faut pas pour légitimer
l'abandon des effets affurés, qu'ils aient effuyés une perte
entiere, c'ea que l'Ordonnance, au titre des alfùrances ,
art. 58, per]11et l'abandon, fi après l'an expiré l'affuré n'a
aucune nouvelle du vaiffeau. Or, fi la préfomption ,ea
reçue dans ce cas-là, pourquoi ne pas l'.admettre, lorfqu'un
vaiffeau ell: déclaré innavigable, & qu'il ell: par cooféquent
certain qu'il a effuyé diverfes fortunes de mer? L'article
45 permet à l'affuré de travailler au recouvrement des
effets. L'article 47 lui prohibe de divi(er fon abandon; &'
'l'article 60 veut que l'affureur paye les effets, nooobll:antle retour du vaiffeau : donc l'abandon peut avoir lieu, bien
que les effets affurés exiaent; donc le finiare qui frappe
fur le vaiffeau, doit auffi porter fur les effets. Vainement
voudrait-on expliquer l'arr. 46 du titre des aJfurances par
Farr. 26 du même titre. Ce dernier article rend, il ea
vrai, les affilreurs refponfables des changemens de roure,
de voyage ou de vaiifeau; mais c'eH: s'abufer d'en induire
que' l'in navigabilité du navire ne termine pas les -engagemens portés par la police d'affurance, fi l'affuré le juge à
propos. En effet, fi l'on admettoit ce fyfiême, il Y aurait
une contradiél:ion frappante entre l'art. 26 & l'arr:, 46 qui
autorife l'abaçdon dans le cas du naufrage, du bris, de
_. l'échouement, événemens qui tous donnent lieu à un changement de vaiffeau.
L'abandon n'ell: pas de néceffité, mais dépend de la volonté du Marchand chargeur; ainfi quoique l'arr. 46 le
prefcrive en cas de naufragé, cependant cerre difpofition
el!: toute en faveur de l'affuré, & il ne s'enfuit nullement
d-e là que dans le même cas il ne puiffe réduire fa demande
,à la fimple contribution aux avaries. Il peut donc arriver
qu'en divers cas où l'affuré pourrait valablement faire
abandon, il ne profite pas de cerre faculté. Or dans cette
. hypothefe, les obligations de l'aifureur ne font pas rompues
par le finill:re arrivé, cOmme elles l'au~oieDt été de, fait &
de
,
�DU
PAL AIS
DE
PR 0
273
VEN CE.
(Je droit, 'fi l)aifuré avoit fait abandon; mais comme il
répond à l'aifuré de toutes les fortunes de mer, comme
'1 lui garantit merces falvas jufqu'à leur arrivée ad loeum
dejlinatum, comme enfin le changement de vaiifeau occa:lioné par l'innavigabilité du premier eH lIti finiHre qui
donne lieu à l'abandon,
fortiori à une avarie, il
naturel qu'en pareil cas l'atTureur foit refponfable de cet événement, u au lieu de faire abandon, l'atTuré préfere de faire
recharger fes marchandifes fur un autre vaiifeau, En effet,
dès-lors le voyage qui a fait la matiere de l'aifurance,
continue. Mais !Out eft confommé enrre l'aifureùr & l'affuré', fi celui-ci, à la nouvelle du uniare, conformément à
l'art. 4), profite de la faculté qu'il a de faire abandon;
dès-lors le voyage eH rompu, & cooféquemmenc l'aifurance, qui ne s'étend que de primo 1'iagio & de tali nal'i.
L'aifuré peut dire qu'il o'a chargé fur tel vaiifeau que
parce qu'il en connoiffoit l'armateur & le Capitaine. Cette
confian.ce fera, fi l'on veut, déplacée, n'importe; elle
été la bafe du contrat. Si des circonHances malheureufes
empêchent l'affuré d'en recueillir le fruit, l'aifureurne fauroit encore empirer fon forr, en voulant l'obliger de fuivre
la foi de tout' autre Capitaine; l'difuré le pem ,. parce que
l'abandon ea Un droit tout en fa faveur, & s'il}' renGnce,
l'aifureur lui répond de ce fecond vbyagf:l; mais celui - ci
ne peue le forcer à fuivre ce rechargemenr; en un mm,
s'il y a abandon en vertu d'un véritable uoilhe, tour eft
dit, & l'affureur n'd! plus garant de la chofe -aifurée,
'
puifqu'il en devient le prop<'-riétaire.
Aiou donc, par cela feul qu'en droit l'ionavlgabilité opérée
par fortune de mer ea comparée. à '~n véritable naufrage,
& que dans ce dernier cas l'aba'ndon ea permis à l'aifuré,
on ,doit tenir pour certain que l'innavigabilité d'un navire
donne lieu à l'abandon des facultés, malgré leur retour
ad loeum dejlinatum. Qu'importe 1 en effet 4 l'aifuré l'arrivée. de fes 'marcbandiLès,' s'il les 'reçoit. dans un temps od
elles' ne lui font plus néceifaires pour la fpéculation donc
elles ont été l'objet? N'en eifuye-r-il pas moins un domAnn"s t 775 &fuiv.
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mage réel dans la vence, & par le retard de leur produIt
fur lequel il avoir fait fonds. Targa en fes pondérations
fur la concraél:ion maritime, ch. ~ 4, difcute tous les points
relatifs ~ la conduite que doit tenir un Capitaine dont le
vailTeau elt déclaré innavigable, & il réfout que dans ce
cas les alTureurs font tenus au paiemenc des fommes alTurées, fi les alTurés venlent' leur' faire abandon. Telle elt
encore' la dirpolition du Guidon. de la mer, ch. 7 de$
délai$ ,. art. 1 ; AjJ"rance$ d'Amflerdarrz, n. 8, & de. CafaRegis, difc. 1, n. 103.
o
En fuppofanc cependant contre l'évidence des chofes,
qu'en cas d'innavigabilité l'abandon des effets alTurés qui
n'ont foufferc aucune perte, elt reçu cancre toutes les regles, l'ufage l'a cependant introduit à Marfeille : or,' perfonne n'ignore les effets & l'autorité de· l'urage; il a force
deLoi, même pourfixer1es doutes, L. 32, §. 1,jJ. de Legibus,
. itçft la Loi elle-même, fuivanr Cara-Regis, difc. 19I, n. 4-2;
:Qunod, des prercriptions, parc. l , chal'. 13, pag. 1°3;'
& Barbeyrac fur Grotius, liv. 2, chal'. 4, §. ~, n. ~. Cet
urage elt tellement confiant, qu'il a été conracré par neuf
Arrêts de ce Parlement; le premier du 19 Avril 1712, àu
rapport de Mr. de Lubieres, condamne les Affurelirs à paye r •
les (ommes 1 par eux affurées~ tant· (ur le, .corps que fur
les facultés du vaiffe2u l'Ama,one, déclaré inn\lvigable 11.
Saint-Domingue. Le (econd, du 28 Jilin 1726, au rapport
de Mr. de Fau.con, pour le fieur Granet de Toulon, contre
les Affureurs du VailTeau le Saint-Marc, déclaré innavigable
à la Canée. Le troilieme, du 27 Mars 1726, en faveur du
fieur Dieudé. Le qUâtrieme, du 16 Juin 1730, au rapport
de l\1r. de Roquemartine, contre les Affureurs du VailTeau
l'Hirondelle, déclaré innaviga'ble au Cap français. Même
Arrêt en Mars 17~ l, pour Abraham Francia 'fils de Bor"'d~aux, contre les AlTureurs du Vaiffeau le Salomon, déclaré
innavigables a~x Ca:res. Enfin "quatre autres Arrêts des JO
Juin I7S3, 2, Mars 17~9, 30 luin 1764 & 2.6 Juin [17 67,
qui Ollt tous admis l'abandon des facultés affurées, par cela
1èu\ que les Vaiffeal;lx avoie.nt été déclarés innavigables. '
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PALAIS
DI!
2.7~
PROVENCE.
Nonob!l:ane ces raifons & l'ancienne Jurifprudence, Arrêe
du 16 Juillet 1777, au rapport de Mr. le Confeiller de Mons,
qui réforme la Sentence avec dépens. Ecrivant Mes. Garein,
Sellon & Perrin.
Cet Arrêe & celui du 17 Mai 1776 rendu en faveur du
lieur Hermite one établi, à la grande fatisfaél:ion des Places
de commerc~, un nouvel ordre de chofes. Il efl: aujourd'hui de principe que l'innavigabilité du Navire ne donne
pas lieu à l'abandon des effets affurés, s'ils reviennene fur
un autre Vaiffeau.
Voici, fur ce fujet, la difpoGtion de la Déclaration du
Roi concernant les aJfurances, du 17 Aotit 1779, enrégifirée
en ce Parlement le ~ Otlobre fuivanr.
Art. 7, Lorfque le Navire aura été condamné comme
étant hors d'état de continuer fa navigation, les affurés (ur
les marchandifes feront tenus de le faire inceffarnment fignifier aux affureurs, lefquels, ainfi que les affurés, ferone
leurs diligences pour trouver un autre Navire fur lequel lefdites marchandifes fe,ont chargées, à l'elfet de les cranf.
porter à leur Àefiination.
.
Art. 8. Dans le cas où il ne fe feroit pas trouvé de Navire pour charger leCdites marchandiCes & les conduire au
lieu de leur deflination dans les délais portés par les articles 49 & SO du titre des aJfùrances de l'Ordonnance du
mois d'AOl'lt 1681, les affurés poùrront en faire le délaiffement, en fe conformant. aux diCpofitions de ladite Ordonnance fur les délaiffemens.
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X X'X V I.
Qui juge 'lue l?endoffiment en Manc d'un billet de commerce
n'en opere pas le tran!ÈJOrt, & qu'en cas de' faillite le propriétaire 'peut le réclamer par droit de fuite.
Ieur Jean-Baptill:e Tardivy foufcrivit quatre billets à orGre
en faveur des Geurs Pifcatoris & Compagnie de la v, lé
de Marfeille. Le furl~ndemain' les fleurs Pifcaroris firent une
contre~lettre" & p.romirent de faire les fonds des quatre
billets; ils 'en endofferent un dans la fuice de 2700 liv. en
faveur de Me. Camoin, Courtier royal. Au mois d'Avril
1774, Me. Carpoin fit une feconde négociation avec les Geurs
Pifcatoris, & leur rendit ce billet qu'il endoffa en. blanc;
Ces derniers fir.ent f~illite, & déclaterent dans leur bilan
qu'un des billets du fleur Tardivy de 2700 liv. exill:oit en
nature dans leur porce-feuille. Cette déclaration autorifa le·
fleur Tardivy de Thorenc, repréfemant Jean-Baptill:e Tardivy, de fe pourvoir pardevant les Juges-Confuls contre les
fleurs ;.Pifcatoris, pour obtenir le recouvrement de ce billet;
Me. Camoin intervint dans' l'inll:ance, & demanda que le
billet lui fût remi's. Sentence qui déboute Me. Camoin de
fori intervention, & adjuge le billet au fleur Tardivy. Appel
de ce jugement de la parc de Me. Camoin.
On dirait pour lui, que quelque refpeél:able que foit la déciGon de la lettre de Mr. d'Agueffeau, inférée dans le rect:eil de Jurifprudence du Parlement de Touloufe, pag. ) ,
portant que l'endoffement opere tranfport, quoiqu'il foit en
blanc & non daté, elle doit céder à la difpoGtion expreffe de
1'art. 23 du tit. 'î de l'Ordonnance de 1673, qui vèur que les
ugnatures au dos des lettres de change ne fervent que d'endolrement, & non d'ordre, s'il n'ell: daté & ne contient le
nom de celui qui a payé la valeur en argent, marchandifes .
ou autrement. Le Commentateur d'Orléans obferve fur ce~
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PAL AIS
il il
PRO VEN C E:'
1.77
'article qu'il en eft de même des billets de change & autres billets de commerce; il rapporte l'Arrêt du premier Septembre 168 l , qui a jugé que les fimples fignatures ne peuvent fervir que d'endoffement, & non d'ordre. Il obferve
encore que quand on met fimplement fa fignature au dos
d'une lettre de change, fans rien écrire deffus, on n'eft
cenfé ne l'avoi5 mife que pour être remplie d'un reçu par
celui qu'on a chargé de recevoir le montant de la lettre,
& pour lui tenir lieu de procuration. Il rapporte encore
l'Arrêt du Parlement de Paris du 2. 1 Mai 168 l , qui jugea
qu'un ordre qui n'eft point d~té, quoique cilUfé pour valeur
reçue comptant, ou en marchandiCes ou autrement, n'eft regardé que comme u,ne fimple procuration pour recevoir le
·montant de la "lettre ou billet.
L'art. 2.') du même titre de l'Ordonnance veut qu'au cas
que l'endoffement ne foit p'as dans les formes preftrites par
l'art. 2.3, les lettres foient réputées appartenir à celui qui
les aura endoffées, & qu'elles puiffent être faifies par fes
créanciers & compenCées par fes redevables. Savari, liv. 3;
chap. '), obferve que ces arçicles de l'Ordonnance doivent
être exécutés. La lettre de Mr. Cl'Agueffeau n'eH & ne peut
étre qu'approbativê d'une Jurifprudence particuliere du Parlement de Touloufe, mais elle ne peut être dérogative de
la difpofition de l'Ordonnance. Si cette lettre pouvoit avoir
force de Loi, elle aurait été adreffée à tous le,s Parlemens.
Celui de Provence ne s'eft jamais écarté de l'cfprit de cette
Ordonnànce, ainfi qu'on le voir par le Précis des Ordon-'
nances recueill.ies par Mr. de Montvalon, au mot change,
n. 7 & fuiv. Ce Magifl:rat, qui a eu l'attention de difl:inguer les Ordonnances qui font exécutées en Provence, de
celles qui ne le font -pas, n'auroit pas manqué de rapporter
la lettre de Mr. d'Aguetfeau, fi elle eût force de Loi., &
que le Parlement dont il etait membre eût adopté la Jurifprudence du Parlement de Touloufe.
Après avoir prouvé que le billet dont s'agit n'a jamais
ceffé d'apparténir au fieur Camoin, il faut examiner s'il a pu
le récl~mer par droit de fuire. Le lieur Taçdivy avoir donné
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JOUR N A L
au li eur Pi(catoris le billet pour le paiement des marchan';
dires qu'il lui avoir livrées; ce' billet a donc apparcen6 en
ptopre au fieur Pi(catoris au moment que la rémiflion lui
en a été faite. Si la contre~lettre que le lieur Tardivy produit étoit vraie, elle (eroit datée du même jour; mais étant
faite après coup, elle ne (auroit alFoiblir la foi de la déclaration qui eil contenue dans le billet, fur-tout au préjudice du tiers. Dans aucun. cas, le lieur Tardivy' ne pourroit ufer du droit de (uite, parce qu'il ne peut (e dire créancier du lieur Pifcaroris qu'en force de fa déclaration du '2.7
Seprembre, randis qu'il eil. prouvé débireur par [on obligation du '2. ') ;. & comme dans une di(cuflion un créancier ne
peut pas compenfer ce qu'il doit avec ce qui lui eft dû, il
ef!: certain que le fieur Târdivy, débiteur d'une obligation
du '2.1 Septembre, caufée pour valeur re~ue, ne peut pas
compen(er (a derre àvec [a déclaration du '2.7, qui le rend
créancier de celui donc il eft débiteur. Ce principe éil conligné dans le quatre-vingr-troifieme aél:e de notoriété de
MM. les' Gens du Roi du 14 Mai 1694.
Le droit de [ui[e ne peur avoir lieu que 'pour celui qui
n'a. pas reçu le paiement de [a marchalidife; & lorfqu'il paroît qu'die a été payée, le vendeur n'a 'plus une hypothe'lue fpéciale fur l'elFet vendu. Le fieur Tardivy en donnant·
fon billet & par la déclararion qu'il a. faire d'en avoir reçu
.le montant en marchandifes, n'a con(ervé aucune hypothe'lue fpéciale fur l'elFet qu'il a ponné; la conrre-lettre du lieur
Yifcatoris étant pofiérieure de deux 'jours, ne peut faire re-'
vivre cette hypotheque; elle n'a pu lui donner qu'une hyporheque générale, le rendre créancier du lieur Pifcatoris;,
mais il éroit [on débiteur, & ces deux créances ne pouvoient
pas être compenfées.
Me. Camoin a pu .former oppolirion au droit de filire réclamé par· le fieur Tardivy; & il a pu lui-même l'exercer
envers ce biller, puifque le propriéraire d'un billet de commerce peut ufer du droit de fuire, li après avoir cédé' ce billet,
il le rrouve enc'ore en narure encre les mains de celui à qui
il l'avoit cédé, & do.n~ il n'~~o~t l'a~ reçu le paiement. En
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PaOVENCI!:
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'279
lie· conlidérant le premier feing du fleur Camoin mis fur le
billet dont s'agit que comme une procuration, il eft certain
qu'il n'a 'jamais perdu la pr"opriété du biliet, & que conféquemment les créanciers du fleur Pifcatoris n'ont jamais eu des
droits, & Me. Oamoin a pu le réclamer fans qu'ils ayent
pu s'y oppofer. Les billets de commerce font compris au
nombre des effets mobiliers: or, aucune Loi particuliere du
commerce n'a dérogé aux Loix générales, qui veulent que
le propriétaire d'une chofe en foit le maître, tant qu'il n'en
a P\ls fait le tranfport à un autre & qu'îl n'en a pas re<j'u
le montant. Le motif de la Loi du commerce, qui auto'rire le droit de fuite .fur les marchandifes, eft le même que
'celui que l'on réclame en faveur des papiers de commerce;
les papiers .de commerce ne tendent pas moins à le favorifer que la vente des marchandifes, puifque les papiers peuvent fervir au Négociant pour faire des achats ou des paiemens, Le jugemeriF de la Boutfe de Montpellier ne peut être
oppofé, puifqu'il eft démontté qu'à Marfeille il y a des Statuts & des délibérations de commerce particuliers; il en eft de,
même de l'autorité de Dupuy de la Serre, qui n'a pas écrit
d'après nos principes; '& l'Arrêt de Réglement, du Parlement
de Paris fait fi peu Loi dans cette Province, qu'il prouve au
contraire en faveur du fieur Camo in , pu ifqu'avant ce Réglement le Parlement de Paris jugeoit conformément à nos
principes; & fi des circonftances particulieres ont pu porter
le Parlement de Paris â faire ce Réglement, l'on ne peut
pas dire qu'il foit exécutoire dans·tout le Royaume, il pourl'oit feulement engager le Parlement de Provence à en faire
un pareil; mais il n'auroit pas un effet rétroaétif, & il fau.,.
droit toujours que la ~emande du fleur Camoin fût jugée
en l'état de la Loi· vivante.
On répondait qu'il eft aujourd'hui reconnu que l'endoffement en blanc rend propriétaire du billet celui qui en eft le
porteur, puifqu'il peut remplir l'ordre de fa main & à fan
profit. Un billet payable au porteur, un billet endoffé en
blanc, peuvent paqèr de main en main, fans qu'il refte auç~n.~ ~race de leu~ négocja~ion; ils peuvent aufii ,être en~
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Jou RNA L
levés, détournés, li l'on veut en abufer. Malgré ces conIidé..
rations, les uns & les aocres font permis par la facilité-qu'ils
procurent dans les affaires. Peu importe en un mot la difpolition de l'Edit de 1673; le bien & l'avantage du commerce ont introduit un ufage contraire, qui ef!: aujourd'hui
général dans tout le Royaume. Savari lui-même, tom.
parere 49, pag. 416 & 426, étoir obligé en 1679 d'avouer
'ce fair, & conféquemment de rétraél:er ce qu'il avoir, dit
d'après l'Ordonnance. On trouve effeél:ivement dans fes ouvrages, tom. 3, parere 8 & 62, une Confultation, dans
laquelle, conrre le vœu de la Loi, il établiJIoir que l'endof- '
fement en blanc opéroit tranfmiffion de propriété.
On fe replie donc inutilement fur la difpoIition de l'Edit
de 1673. Cette Loi 'a été faite pour le commerce, & non
le commerce pour elle. Or, qui ignore, combien ef!: imparfait tout ce qui eft du l'effort de la prudence & de la juf!:ice
humaine; ainfi tout ce qui pouvoir être fage, utile, il y a
cent ans, peut être dàns la fuite des temps préjudiciable;
cela fait qu'en matie,re de commerce fur-tout, on fe plie
aux circonf!:ances, & que dans les principales Places on
a des ufages qui prévalent toujollrs. C'ef!: fur ces motifs
d'utilité publique qu'oll donne à l'ufage la force d'abroger
une Loi, comme dit Dunod, des prefcriptiolls, part. l , chap.
13, pag. 103, fur-tout lorfqu'il eft, comme au cas préfent,
autorifé par des jugemens foûverains rendus en contradictoires défenfes. Tels font les Arrêts rendus par ce Parlement, en f~veur des créanciers de la fociété d'Ignace Careffe & Chaffaud, contre les créanciers particuliers de Cal'elfe; celui des freres Salomon, contre Jean-François Salomon.
_
On comLÏent que les endoffemens en blanc peuvent occalioner des fraudes, & qu'il y a ÔU l'ifque pour ceux qui
les reçoivent, fi le billet vient 'à s'égarer. Mais les. légers
inconvéniens que pr'éfellte la négociation e'n blanc lont bien
emportés par l'avantage que le commerce en retire. Chacun
fait en effet que le myHere ef!: ami du commerce, & qu'il
cf!: utile, convenable, & même néceifaire dans une infinité
.
d'opération~
2,
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PAt Al S
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PRO VEN CE.
281
d'opérations & de négociations; ainli on ne peut fe prévaloir de l'Edit de 1673, dès que fur lm objet pareil le Légil1ateur a reconnu que l'expérience rendait cerre Loi meurtriere. Quelle contrariété n'yauroit-il pas en effet dans la
Loi, li pendant que les billets au porteur font autorifés par
le Souverain, les endoffemens en blanc étoient défendus?
11 faut donc convenir que la Déclaration de 172 l ,qui rétablit les billets au porteur, a tout au moins reconnu la néceffité de déroger à l'Edit de 1673, a autorifé par conféquent l'ufage & la Jurifprudence contraire à cette derniere
Loi; on fent la jufieffe de cerre conféquence, fi on envifage que cette Jurifprudence, diamétralement oppofée à
l'Edit, a été approuvée par Mr. d'Agueffeau par fa lerrre
écrite le. 8 Septembre 1747. à Mr. Je Procureur-Général au
Parlement de Touloufe. Le Parlement de Provence s'efl:
conformé à l'intention· du Souverain, manifeHée dans la
lettre de fon Chancelier, par fes Arrêts de 1732 & 176'), /
qui ont jugé que les billets endoffés en blanc appartenoient
au porteur. .
Il eH efTentiel d'obferver que fi l'Edit du commerce a
preTerit la forme des endoffemens, il n'a pas ordonné qu'ils
feroient remplis de la propre main de l'endoffeur; cela eŒ
fi vrai, que l'ordre eil: bon & vatable, lors même qu'il eil:
écrit de main étrangere; on peut enfin le remplir à fon
profit, & celui qui a donné fon endofTement en blanc, eil:
due ment obligé, parce que la feule lignature oblige dans
le commerce. Or, tout fut confommé entre les parties par
le débet dont Me. Camoin chargea fon comptt; courant ;
ce débet valant de l'argent .comptant, en ce qu'un. compte
courant eH toujours exigible pour celui qui fe trouve créancier, fuivant le témoignage de Bo-rnier fur' l'Edit de 1673,
rit, '), art. 23, vo. ou autrement. Propriétaires ou billet de
2700 liv., ·Ies lieurs Pifcatoris le remirent à Me. Camoin
le 2 Décembre 1773, fans en exiger le .paiement en efpeces fonances; cdui-ci les en crédita fe~lement, ce qui
valoit du comptant. Seconde négociation le 27 Avril' 1774,
ils fe remettent refpetlivemenc divers papiers,. & Me. Ca~
Annrfes 1775 & fuiv.N n
,
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~OURNAL
main, qui n'avoit pas eu occaGon de négocie'r ce billet;
le rétrocede à cerce époque aux fieurs Pifcatoris, en les
débitant de la va1eur. Voilà donc ceux-ci de nouveau propriétaires de cet eJfet de commerce; tout intérêt du tiers
eft mis à l'écart; perfonne en eJfet, la négociation du '27
Avril 'une fois confommée, n'avoit -droit fur ce billet. Nul
douce par conféquent que le fieur T:lrdivy, qui ne l'avoit
foufcrir en faveur des fieurs Pifc~toris que pour les obliger,
ne puilfe le réclamer en force de la conrre-lercre, dès qu'il
s'en trouvé dans le porte-feuille de ceux-ci à l'époque de
leur faillite.
Arrêt du 19 Juillet 1777, au rapport de Mr. le Confeiller d'Arnaud de Roulfet, qui faifant droit-à. l'appel de
Me. Camoin, lui accorde le billet dànt s'agit par droit de
fuite. Ecrivant Mes. Guis & Perrin.
Cet Arrêt, fondé filr la lettre de l'Edit de r673 , eCl:
contraire à ce qui fe pratique dans toutes les Places de
commerce & à la J urifprudence univerfelle du Royaume,
& même à dive,rs Arrêts du Parlement d'Aix, d'après leCquels on a toujours tenu pour maxime que l'endolfemens
en blanc d'un ellet de commerce en tranfJJorte la propriété.
ARR Ê T
X X X V 1 J.
le Jus-patronat d'une Chapellenie dev.ant palfèr fucceflivemem d l'ainé mâle defcendant d'une maifon, & en défaut
d'/LOirs mâles aux filles ainées de la m~me maifon, les mâles
de /.1 hranche cadette fom appellés préférahlement aux filles
de la Manche ainée.
.
E
N r)4') le fieur Gauchet de Quiquerand fut alfaffiné
• près de la ville de Novon ; les auteurs de ce crime furem décou~e'rts & condam'nés par le Parlement de Paris.à
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
28"3
one peine capirale ; l'Arrêt ordonna qu'en l'une des Chapelles
àe l'Eglife dont le défunt éroit paroiffien, il fût mis & attaché une table au lieu le plus commode, & que le fait
y fûr infcrir; que· cette Chapelle fercit fondée dans ladite
Eglife, & dotée fur les biens des coupables, la préfentation
de laquelle Chapelle feroit & appartiendroit à Antoi·ne de
.Quiquerand, fils mineur du défunt, &. fucceffivement au fils
ainé defcendanc d.e la maifon Qe Beaujeu, &. en défaut
d'hoirs mâles aux filles ainees de la même maifon, la collation de la Chapelle appartenant à l'Archevêque d'Arles. Cet
Arrêt efl: du 24.J uillflE 1548.
. Mre. Delorc, dernier tirulaire, fut nommé par Pierre de
Quiquerand, oncle paternel de la Dame de Beaujeu, époufe
du Geur de Barras. Pierre de Quiqllerand mourut bientôt
après, ainfi que Mre. Delort qu'il avoit nommé dans le
temps de droir. Nicolas de Quiquerand de Beaujeu nomma
le 26 Mai ITi3 l'Abbé Vetan. Dès Je 9 du même mois,
. ,
la Dame de. Barras, en qualité de niece de Pierre de Quiquerand, avoit nommé pour Reéleur de cerre chapellenie
l'Abbéde Lamanon; celui-ci fit fignifier fori tirre à l'Abbé
Veran, en le fommanc de fe déliller de celui qu'il avoit rapporré. L'Abbé Veran, qui avoit pris poffeffion, repondit à
l'Abbé de Lamanon qu'il vouloit fou tenir fan droir. L'Abbé
Veran mourut au mois d'Oélobre 1773; le fieur Nicolas
de Quiquerand qui l'avoit nommé, pourvut le 21 du même
mois le fleur Abbé Clallre, Chanoine de La Major. Ce
nouveau pourvu prit poffeffion le 15 Novembre d'après; il
s'adreffa au débiteur chargé d'acquirrer la fondation. Le 20
Juillet 1774 le débiteur répondit que tout avait été compré
à l'Abbé de Lamanon, qui jouiffoit des revenus. du bénéfice.
En conféquence le 9 MarS 1775, oppofition du fleur Abbé
Clafl:re à la jouiffance de l'Abbé de Lamanon; cerre op-,
poLition fut bienrôt fignifiée, mais elle laiflà les parties dans
Je même érat où elles étaient' auparavant. Enfin par exploit
libellé du 28 Juin de la même année, le fieur Abbé Clafire
demanda la maintenue définitive, avec refiiturion d.es fruits,
&'Iamaincenue pr~vi[oire pendant procès. Le 19 Avril 1776,
N n 2 1
�2.84
Ordonn~nce
•
J
0, U RNA L
qui joint le fins provifoires au fonds; & le I I
Avril 17éJ7, Ordonnance de pieces mifes, & qui ordonne
que les fruits & revenus du bénéfice feront' retenus par les
débiteurs, pour les garder en qualité de feque!lres, [lUf aux
parties de fe pourvoir pardevJnt l'Archevêque d'Arles pour
le fervice divin. Le fieur Abbé Cla!lré appella de cette Or~
c!onnance, & par requête incigente du 3 ·Juillet 1777 if demanda l'évqcation du fonds & principal, & la maintenue définÏtive, avec reflitution des fruits & inhibitions de le troubler. Le fieur Abbé de Lamanon ne s'oppofa point à J'appel
de l'Ordonnance de pieces mifes & de feqve!lriltion, ni à
l'évocation du fonds & principal. Ainli la mainte'nue définitive fur la feule que!lion qui divifa les parties.
On difoit pour Mre. ClaHre, que c'était un patronage
. 111afculin auquel les mâles avoient toujo\1rs préfemé (.lns difcontinuation; on ne peut pas dire que le patronage fait héréditaire, & qu'il faut· difcuter la préfomption de la Loi;
le patronage· eH: familier, de primogéniture ~ de préférence pour les mâles; tant qu'il en exi!lera, les filles ne
peuvent être appellées; c'ell: ce que prouve la Semence de
164 r , la tranfaétion qui confemit ~'exécution de cette Sentence. La Darne de Barras 'peut être héritiere de celui qui
avoit nommé l'Abbé Lord, ancien titulaire; il a pu lui cranfmettre fes biens, mais non le droit de patronage qui appartenait à cous les mâles. La defcendance de Nicolas. de
Quiquerand ell: con!latée par les preuves de fan [rere dans
l'Ordre de Malthe, par la poffeffion de la mai fan de Gaucher
de Quiquerand qui fut affaffiné. La Darne de Barras ne pouvait donc nommer à ladite chapellenie à l'exèlufion des
mâles à qui ce droit écoit dévolu avant elle; elle a d'ailleurs' nommé un incapable, & qui a abandonné l'habit de
l'état eccléliafbque; aihli Mre. Cla!lre devait être màintenu
définitivemenr.
Deux /points fo'nt reconnus dans ce procès: familiariÛ {;
majèulinité. L'Abbé Veran n'avait jamais abandonné fes pourfuites; l'Arrêt dl! Parlement de Paris eH clair & précis; &
s'il y a LlOe queHion que l'on puiffe examiner, c'e!l fi dans
�1> U PAL AIS D Il PR.O V Il Nell.
2.8,
le cas de cet Arrêt qui établit mafculinité, primogéniture, fiat tranJitus il lineâ in' lineam. Dans le teHament il
y a prédileél:ion; dans les contrats il y a précaLltion.
Aucun motif dans l'Arrêt du Parlement. de Paris; il ne
diHingue point de ligne dans la famille de Beaujeu; tous
les mâles de la maifon font appellés 'par préfërence à
toutes les filles! il Y a donc motif d'agnation , & dèslors non fit tranjitus de lineâ ad lineam , comme l'établi[fent de Luca, Fonranella. Ainu' en fait & en droit, le
fleur Abbé Clafl:re doit être ma,intenu par les conféquences
abfurdes du fyfl:ême de la Dame de Barras, qui, quoiqu'il
y eÎIt encore des mâles de la famille..ne Beaujeu, feroit
paifer ce droit de patronage dans une famille abfolument
étrangere; la difl:inél:ion des lignes contrediroit l'Arrêt. En
vain a-t-on voulu oppofer les nominations, de deux (œurs
de Gauchet fecond affaffiné; on ne trouve la preuve de'
,ces nominations que dans un regifl:re aifez informe , qui
porte avec lui-même fa réfutation, puifque cette nomination avait paffé aux enfans de Marguerite, c'efl:-à-dire , •
à une famille étrangere aux Beaujeu, quoiqu'il en exiHât
'encore beaucoup, abus qui 'fut bientôt -!"econnu ; enfin une'
foule de preuves toutes également déciuves prouvent &
démontrent d'une rnaniere invincible que ce jus-patronat
appartient aux mâles, de quelque ligne qu'ils (oient, à l'exc!uuon des filles, qui ne peuvent les remplacer qu'à l'extiné1:ion totale des mâles.
, On répondait pour Mre. de Lamanon, qu'il avait pour
lui le dernier état des cho(es & l'exécution du titre; ce
titre efl: le feul légitime, parce qu'il repréfente un oncle
,paternel dernier nominateur, & il faudroit que celui qui a
pourvu Mre. Clafl:re,. fe préfentàt avec une defcendance
auffi bien prouvée que la uenne; le nom & les armes ne
fuffifent point•• Vous ne, démonrrez ,point (difait-il à Nièolas de Quiquerand), que vous êtes iffu de Gauchet de
Quiquerand mort affaffiné; les preuves que vous alléguez,
ne vous font qu'indireé1:es, & lorfqu'il s'agit de donner à
l'E;glife un patron laïque, les principes doivent être encor~
,
,.
�~96
Jou RNA L
plus. rigoureufemellt fuivis. Rien de fi confiaté que la def~
cendance 'de la. Dame de Barras; rien au contraire qui
con!l:ate bien précifément l'origine & la defcendance du
nominateur du· fieur Abbé ClaHre. Le titre de la Dame
de Barras e!l: donc le feul légitime; mais quand même ce
Dominateur fercit 'ilfu d'une des bran.ches de Gauchet premier' ou fecond, fa prétention n'en feroit pas moins hafardée; le patronage n'e!l: pas mafculin, mais familier; l.a •
ligne la plus proche de l'alfaffiné doit jouir de la réparation, & il faut qu'elle foit épuifée, foit pour les mâles,
foit pour les filles, pour qu~ le droit de patronage. puilfe
palfer à une autre -branche. Telle eH la lertre & l'efprie
de l'Arrêt; la ligne en entier e!l: appellée,' & l'on peue
(l'autant moins éluder la difpofition de cet Arrêt, que de
droit commun la préférence des mâles d'une ligne ne
s'étend point à ceux d\we autre, au préjudice des filles
dont la ligne D'dl: point épuifée. C'eH ce qu'enfeignent
une foule .d'Auteurs, tels que Fufarius, Peregrinus & Molina. Toute autre interprétation de l'Arrêt feroit contraire
au droit commun; il faudroit donc, pour y déroger, une
énonciation bien précife du contraire. Le Parlement de
Paris a eu bien plus en vue la propre famille du défunt
que fon nom. La Dame de Barras a donc en fa faveur le
dernier état des chofes; enfin l'exéc.ution du titre efl: formelle ; la Sentence de 1641 ne prouve rien, puifqu'elle
fue rendue fur les contefl:ations refpeél:ives de deux Qui. querand; mais l'exécution que l'on réclame dl: frappante &
bien voifine de. l'époque de la fondation, puifque les deux
filles d'Antoine de Gauchet nommerent à cette Chapellenie,
quoiqu'il y eût des mâles dans les autres branches; enfin •
point d'incapacité de la part de l'Abbé de Lamanon, .
quand il auroit changé d'habit; fon bénéfice n'auroit pas
été vâcanc, l'uifqu'il n'y avoit point eu de citation en Juftice; on n'ignoroit pas ce qu'il étoit devenu: d'ailleurs
quand cela feraie, l'Abbé Cla!l:re n'en feroit pas plus
avancé, parce que le patron rentreroit dans fOI) droit, &
préfenceroie un autre flljet. Il n'y a donc de titre légi~
�nu
PAt AIS
J)
Il
PRO VEN C l!:.
2.S7
lime que celui qui. éman~ de lIa Dame de Barras. Les'
preuves de la defcendance du nominateur de l'Abbé Clafire
manquent du caraétere d'exaétitude defiré par les Loix en
pareille mariere. Ainfi d'un côté filiation & defcendance
précife, de l'autre, parenté non jufi'ifiée; cependant en
matiere de jus-patronat tous les degrés doivent être clairement prouvés; & pour difputer le droit de patronage,
le fieur de Beaujeu devroit fe préfenter avec des titres
;:uffi peu équivoques que ceux de la Dame de Barras;
d'aiUeurs en les fuppofant prouvés, en matiere de fucceffion un bien qui efi entré dans une ligne, ne peut en
fortir que lorfqu'~lIe ea épuifée, lorfqu'il y a primogéniture; mais fi le fleur Abbé Clall:re a difiingué le cas de
l'agnation, la femme qui defcend du fexe mafculin, difent
lès ALiteurs, y ea nécelfairement comprife; il n'y a ~u de
queaion que pour favoi~ fi les enfans des femmes devoient
y être appellés; & dans ce cas la vocation particuliere du
fexe mafculin eH entiérement dearuétive de toute préfomption du motif d'agnation. L'Arrêt du Parlement de Paris
ne dit point formellement que le droit de patronage paffera à routes les branches de la famille, ·avan t que de fe
repofer fur la tête des filles; la' 9érogatiolî au droit commun n'efi pas expreffe; il doit donc être fuivi. Il faut
parcourir les degrés & épuifer une ligne avant que de
- palfer à une autre; il faut que les defcendans ou les plus
proches parens jouilfent du droit de' la réparation; & ce
feroit une injure pour les filles, que de fuppofer dans les
parens les plus proches une moindre fenhbilité que dans
ceux qui feroienè éloignés. Il s'agiffoit de la rép'lration d'un
alfaffinat, d'un monument élevé non en l'honneur, mais au
fang du -défunt qui demandoit ·vengeance. Ainli le droit
commun, le motif & la lettre de l'Arrêt font pour la nomination faite par la Dame de Barras; c'ea comme fi une
fille de Gauchet fecond étoit obligée de le cjifputer avec
qn parent mâle d'une faniille éloignée. La Dame de Barras
efi au même droit qu'eulfent été les filles de Gaucher;
perfonne ne pe1.!t préfumer que ce parent éloigné eût été
J
"
�/
,
288
1'0 U RNA L
préféré 11 celle qui tenoit de fi près à celui qui n'étoit plus;
Même con[équence vis-à-vis la Dame de Barras; & l'affeélion que les Auteurs alleguent dans un teftateur pour
une ligne particuliere, [e trouve dans l'Arrêt du Parlement
de Paris pour la ligne de Gauchet. La préférence attribuée
au mâle n'eft donc que de juftice & de décence; il faudroit parcourir la ligne, fi la difpofition étoit en faveur
des ainés préférablement aux puînés; pourquoi ne le faut'il pas parce qu'elle eft pour les mâles préférablement aux
filles?
.
Mr: l'Avocat-Général de Califiarte examina deux queftions.
Le fieur Nicolas de Quiq'uerand a-t-il pu, a-t·il dû nommer à la Chapellenie du St. Sepulchre, fondée dans l'Eglife
paroiffial~ de St. Martin de la ville d'A rles? L'a-t-il pu ,
fa defcendance & fa parenté des fieurs de Quiquerand eftelle pleinement prouvée? L'a-t-il dû, c'efl:-à-dire, dans te
cas où il feroit réellement parent & defcendanr de la
famille de Barras, la collation qu"il a faite doit-elle l'emporter fur celle de la Dame de Barras, attendu la p'référence en faveur des mâles dans le titre de fondation?
En fait (obferv'a-t-il) le ;fieur de Quiquerand qui a
nommé l'Abbé Claftre, eft .réellement de la maifon de
Beaujeu; il en a fourni les preuves. D'abord il porte le
même nom & les mêmes armes, & a .conféquemment
pour lui la polfeffion publique; il eft reconnu pour être de
la famille; il a produit des extraits baptifteres, des contrats de m;lriage, des tranfaélions, les preuves de noble1fe
de fon .frere 11 Malte, & une' Sentence rendue en 1678'
entre deux pourvus par deux Quiquerand: Déclarant, y
eft-il dit, le jus-patronat de la Chapellenie fondée dans
l'Eglifè de St. Martin appartenir feulement au fils ainé de[eendant de la maifon ,de Qui'luerand de Beaujeu ~ conformément a l'Arrêt du Parlement de Paris, & le fieur Honoré
de Qui'luerand {ie Beaujeu', fils de Pierre, 'lui a nommé
Mre. Honoré dè Qui'llurand de Beaujeu, être le fils ainé
de ladite maifon, pour être dçfcendu de la branche de Marc
de Qui'luerand ,fils de Gauchet, attendu le prédécès d'An.
toine.;
�DU
PALAIS DR
PROVENCE.
289
ioine, fe'ul fils d'autre Gauclzet ainé d'Aimard. -Ledit Mre.
Honoré de Quiquerand y eil: maintenu dans la poffeffion
& jouiffance de la Chapellenie, avec inhibitions au pourvu
par le {jeur Charles de Quiquerand defcendu de Jean, troilierne fils d'Antoine, de l'y troubler. Ain{j le {jeur de
Quiquerand a pu nommer, parce qu'il étoit -de la famille.
Mais l'a-t-il dû?
En droit commun, quels font les principes fur cette
, rnatiere? Aucune Loi précife, aucun titre du droit civil,
ni du droit canonique qui parle du jus-patronat fur la queftion .qui divife aujourd'hui les parties; aucun Auteur même
qui ait traité précifément la quefiion. On n'a donc pu raifonner que par analogie & d'après quelques Auteurs iraliens
ou efpagnols qui ont .diffené fur les fidéicommis, les fubftitutions, les teil:amens, les contrats , les fiefs même;
mais en général le droit de fucëeffion diverfement envifagé dans les divers pays, a donné lieu à divers principes.
D'ailleurs toujours quelque motif particulier en a occafioné
les conféquences; motif de tendreffe dans les- refiamens,
de sûreté dans les fidéicommis, de vanité dans les fubüitU[ions, d'intérêt dans les contrats, d'urilité dans les fiefs;
mais toujours motif clair, néceffaire & énoncé dans les
difpoGtions qui faifoient le titre. 0n laiffoit à une famille,
mais on préféroit une branche panicu.liere; il étoit naturel,
il était même néceffaire que cette branche ftît épuifée ,
avant que de paffer à une aU[re; il falloit que l'alfeélion
de celui qui avoit donné, eût fon elfet; il falloit que fan
intention fût remplie. Prefqlle toujours le bien & la fortune faifoieoc la matiere de l'objet donné, & le bien une
fois acquis, même par une fille, à un poIfeffeur quelconque
ne pouvait retourner à des mâles collatéraux, mais éraie
acquis aux enfans à perpétuité. Il n'en ell: pas de même
du jus-patronat; & fi nous voulions diHinguer dans les
fiefs les droits utiles & honorifiques, nous pourrions_ peurêtre nous rapprocher un peu plus des principes qui paroiffent devoir diriger le jus-parronat. En matiere de droirs,
il en efi d'uriles, il en eil: d'honorifiques; les droits utiles,
A@~lns &ft~
00
�~90
Jou RNA L
plus UniS à cout ce qui ell: bien & fortune; [uivene les
Loix des filcceffions & des fidéicommis; les draies hono~
rifiques s'éloignent peur-être moins des Loix du jus-pa.rronat j
d'ailleurs le rapprochement de ces principes peut en'core
dépendre des différentes efpeces de jus-patronat,.
Il ,efl: convenu que celui dont il s'agit n'eH point héréditaire ; dès-lors toutes les Loix qui regardent les fucceffions & les fidéicommis, doivent, pour àinfi dire, être mifes
à l'écart; les autorités, qui en ont _parlé, doivent être comparées avec les circonHances de la caufe. Le jus-patronat
n'étant donc point hé?édita-ire, il faut qu'if fait linéaire ou
familier; car il paraît, pour ainfi dire, ,convenu que les mâles
font préférés aux filles; s'il efl: familier, & que le citre ait
eu l'agnation en vue, la préférence des mâles paraît dev,?ir
_ être univerfellej & s'il efl: linéaire, c'efl:-à-dire, s'il ne peut
paffer dans une fèconde ligne qu'après qiJe la premiere a
été épuifée, il refl:e deux points à examiner, qui fe réduifent
cependant à une feule obfervati0!l'
S'il eH nécetfaire que le fidéicommis palfe d'une ligne à
l'aurre, l'on obfervera que ce paffage n'a lieu que )ors de
la vocation graduelle des lignes, & non d'après des difpofitions qui frappent également fur coures les têtes d'une maifan; ce ferait confondre vocationem gentis cum vocatione lineœ j
mais quel doit être le moment de ce paffage? efl:-ce celui
où il n'y aura plus d'enfans mâles? Mais les filles font appèllées au défaut des mâles: dl-ce l'infl:ant où l'exiHence
de .ces filles patfées dans d'aurres maifons ceffera d'être
pour la fociété? Mais cous les Auteurs qui veulent que l'on
épuife la defcendance, appellent non feulement les filles,
mais les enfans des filles ,à perpétuité. Enfin faudra-t-il attendre que les enfans des filles foient entiérement épuifés?
Mais fi les ainés des mâles font appellés à la nomination
de ce jus-patronat, les en fans des filles, quoique ain,ées, ontils donc plus de droit que les autres filles & les mâles
eux-mêmes? Non fans doute; les mâles même des filles
ne peuvent jamais s'appliquer cerre vocation, parce qu'ils
font rnâles, fans être du nom & de l'agnation. Auffi on a
1
�DU
PA-LAIS
DB
PROVENCE.
~9[
fenti combien les conféquences de ces principes pourraient
nuire à la difcuffion de la caufe; on a pallié les principes,
'& on a fait un fyHême moyen. Les filles des branches
ainées, a-t-on dit, dqivent être_ appellées au préjudice de
mâles des branches cadettes; le jus-patronat en général ne
peut palfer à une feconde ligne gue lorfque la premiere en:
enciérement- éteinte; la primogéniture étant une fois dans
, une ligne, -doit y demeurer; il falloit fixer le temps: auffi
a-t-on établi que femme ex mafculis deft'endens, éroit néceffairement comprife dans l'agnation; 9ue le mariage ne lui
faifoit -point perdre ce droit; qu'elle ne pouvoit être exclue
du fidéicommis, & 'conféquemment Of) il vu fixer· l'époque
du changement de ligne après' la.mort de la fille, pa'rce
que le' fidéicommis devoit repofer -rur tous ceu~ qui com~
pofoient cette ligne; que la femme était finis G' caput familiœ, que l'on pouvait, pour ainfi dire ,fcinder, divifer
ces deux qualités. Elle eH finis fqmiliœ; ainfi dORC fous ce
titre elle doit jouir des privileges de fa mai fan ; elle eil: la
derniere de la branche ainée ; elle doit en avoir les prérogatives, mais en même tems elle eH caput familiœ; encree
daHs une famille étrangere, 'elle ne doit pas y porter des
droits & des honneurs qui font particuliers à la [Jenne. Ce
n'eil: pas ici comme en fait de fucceffion; ce n'eH pas d'a'près une adition d'hérédité, on une donation de biens, qu'il
faut raifonner; c'eil: nn droit honorifique ahfolument· dégagé
de tout préjugé, & moins fujet, pour ail1fi dire, à quelqùe
·affeébon 'particulierè; ce n'eH 'ni une convention drlns laquelle on eil:. cenfé il:ipuler .pour les héritiers, ni une pif.pofition finale dans laquelle on a en vue le gr~vé & fa
defcendance; c'eU ur- monument éternel de réparation
.pour une famille.
.
Ainfi en raifonnant d'après d'autres principes que ceux
des fucceffions & des ·fidéicommis, la collûtion de. ce' patronage pourroit être accordée aux filles & celfer avec elles;
alors le titre femble être littéralement exécuté. Tel érait
le fyUême qui pouvait être préfencé; mais on n'a jamais
Taifonné quë d'après ceux des fuççetIions & des fidéicommis
00:1.
1
•
•
�:2.92.
entiér~ment
Jou RNA L
étrangers à ceue matiere. On Il cru que l'au"::
torité de Peregrinus écoir ropique dans cette caufe, & elle
y eft abfolument inapplicable. La raifon de l'agnarion confiderée par le teHateur s'entend par rapport aux defcendans
de chaque ligne, & eft 'refrrieore au' cas exprimé par fa
'volonté; peûr-il donc y avoir quelque chofe de commun
eorre cerre autorité & la caufe 'préfeore? On a voulu encore exclure cour morif d'agnarion par la vocarion des filles
au défaut des males, & cette réflexion femble être une
preuve de plus, que ce jus-parronat eft plutôt familier que
linéaire. L'aucorité de Vivianus fur les patronats ne peut
être entendue que de mâle à mâle, ain[jque celle de Duperray; ils n'eulfent cerrainemenr pas dit de même, s'il
eû~ été quefrion d'un jus-patronar linéaire, comme on veut
foutenir. qu'eH celui dont il s'agir. Il n'y avait point alors
d'ordre de fucceffion à garder, point de premier degré qui
dût être préféré au fecond. L'Arrêt du Parlement de Paris
dit que la pré(ent'lrion de la chapeIle appartiendra à Quiquerand mineur fils du défunt, & fucceffivement au fils ainé
de(cendant de ladite mai(on de Beaujeu, & en défaut d'hoirs
mâles aux filles ainées de ladite maifon. La leccre de cet
Arrêt pré (ente un droit de .patronage perpétue.! .dans la
lnaifon de Beaujeau, fans difrinél:ion d'aucune ligne ni
branche féparée en faveur des mâles, & à défaut d'hoirs
mâles, en faveur des filltis de ladite maifon, & non de teHe
ou telle ligne, & le droit de primogéniture eft confervé, foit
, pour les mâles, fait pour les filles. Quand eH-ce que l'Arrêt appelle les filles? C'en à défaut d'hoirs mâles; le mot
feul d'hoirs à la premiere infpeél:ion pouvoit préfenter quelque difficulré, mais un inHant de réflexion le fait évanouir.
Ce mQt d'hoirs pouvait faire imaginer que ce jus-patronat
pouvoi,t être regardé comme héréditaire; mais les biens ne
!llivent pas toujours le fang, & c~pendant le jus-patronat
devait êrre fucceffivement à rOlls les mâles, en gardant
l'ordre de primogéniture. Une fOllle d'oécafions & de circonfrances pouvaient même dès les premiers infrant transférer
ce droit dans llOe famille étrangere; & cependant fuivant
�. DU
PALA1S
DE
PROVENCE;
~93'
la difpofition précife & formelle de l'Arrêt, il fallait que
tOUS les Beaujeu mâles & femelles fulfenr épuifés, pour
qu'il pllt palfer dans une autre maifon. Rien dopc de. plus
.formel que la difpâfition de l'Arrêt; point de proximité de
degrés.. Elle efi de droit quant aux hoirs mâles; elle devient nécelfaire à défaut de ces hoirs quant_aux femelles;
point de difiinél:ion de ligne ni de branche; tous les mâles,
toutes les femelles font appellées fuccelIive'lnent à défaut
les uns des autres; donc c1aufe expreife, qui, quand elle
dérogerait au droit comrr.un, devrait être exécutée. Ce n'eLl:
point ici la volonté d'un parciculier aulIi changeante qu'inter'prétatil'e, c'eil: une décifion folide, u-n Arrêr. r
Pa'r cet Arrêt on voit que c'eil: en figne de perpétuelle
mémoire du crime de l'aifalIinat de Gauchet de Beaujeu;
c'elf ,une réparation authentique & publique de l'injure qu'il
avait foufferr. Qui pouvait mieux.. perpétuer cette réparation
que la vocation fuccelIive des mâles? C'écoit la maifon de
Beaujeu qu'il fallait venger; les mâles pouvoiene en. faire
une réparation plusédarante & plus sûre, puifqu'ils porcoiene . fan nom. Le Pdrlemene de Paris n'avoie aucune
affeél:ion pour une ligne plulôt que pour l'autre; c'eH la ,
vengeance de l'injure faire à un particulier qu'il veut réparer, non par la vocation de tel ou tel particulier, non
par celle d'une ligne diftinél:e & définie; il ne met al:lcune
borne 11 la durée de. cette vengeance; il veue qu'elle fait
aulIi perpétuelle qu'elle puilfe l'être; il embralfe la progrelIion & l'enfemble de toutes les lignes, & il appelle
tous les hoirs en général, coute la famille, en un mot. taure
la maifon de Beaujeu; maÎs quoiqu'il n'aie aucune affeél:ion
parriculiere, il femble qu'il croie encore' la vengeance plus
éClatante, fi c'eil: l'ainé de toute la maifon qui en foie
toujours chargé.
Si le fang de Gauchee parlait encore dans fes defcendans de la branche même femelle, on héfireroic peutêtre un inHant fur l'interprétation de l'Arrêt; mais ce' font
deux particuliers d'une branche collatérale, & qui defcendene• tou~• d~ux_ .d'un
frere
de Gauçhet.atraffiné,
qui réda-J
....
_ .... '.
. ,
•
�~94
,
.
Jou RNA 1.
ment aujourd'hui l'exécution du titre; tous deux ont b
même origine, & ne font féparés que depuis le milieu du
rlix-feptieme ftecle. La Dame de Barras el1 à la vérité le
dernier hoir femelle d'une branche ainée dans cette ligne..
Nicolas de Beaujeu au contraire efl: un hoir mâle de la
même branche cadette: ainft [DUS deux feroi'ent, pour
.ainll dire, en droit de réclamer le foin précieux èle venger
un de leurs aïeux; & quand on connoît le titre de cette
vengeance & fes motifs, on ne peut plus héliter fans doute
entre Nicolas de Quiquerand & la Dame de' Barras, qui
.n'dl: appellée qu'à défaut de lOut hoir mâle,. & qui réclameroit en vain le prétendu.. droit de primogéniture des
fèmelles ainées fur les mâles d'une branche cadette.
Mr. l'Avocat - Général, après avoir difcuté les divers
titres communiqués par la Dame de Barras, qui ne pouvaient détruire ceux de Nicolas- de Quiquerand, conclut à
'Ce. que l'appellation & ce dont efl: appel fuirent mis au
néant, & par nouveau jugement que l'Ordonnanèe de pieces
.mifes fût déclarée nulle & comme telle cairée; & de même
fuite que faifant droit à la requête incidente de. Mre. Clafire,
Tetenant le fond,s & principal, & fur icelui fialUant, fairant
·droit aux fins principales dudit Mre. Clall:re, il flït maintenu en la polfeffion & jouiirance de la Chapellenie dont
s'agit, Mre. de Lamanon condamné à la refiitution des
fruits, avec injonétion au fequefire de vuider fes mqins en
faveur de l\1"re. Cla{jre, &c.
Arrêt du 20 Mars 1778, prononcé par Mr. le Préfident
de la Tour - d'Aigues, conforme aux concluGons, & qui
condamne Mre. de Lamanon aux dépens. Plaidant Mes.......
1
�,
DB
ARR 'Ê T
X X X Vl II.
Le c,!ré a droit d'alJzfter dans touteS les ajJemUées des
Marguilliers de fa ParoijJè.
L
'Eglife St. Ferréol de la ville de Marfeille Iut érigée
en Paroilfe en 1673. Mre. Geoffroy, premier Curé,
tint en I694 un comparant à M. l'Evêque. Il lui demanda
la permiffion de convoquer rous les Paroiffiens,' afin de procéder à l'élettion d'un nombre fuffifant de Marguilliers.
M. l'Evêque accorda la permiffion, & ,les Marguilliers y
furent nommés par l'Evêque', faut à l'avenir, dt-il dit dans
le procès-verbal, d'y être 'proc;édé felon l'ufage & coutume
des autres ParoijJès. Quelques années après l'Evêque de Marfeille, à la requilirion des Marguilliere, les érigea en Confrerie fous le tirre de Corpus Domini; après quoi ils délibêrerent que comme ils éroient en droit de conno1rre de
tous les érablilfemens qui fe feraient à l'avenir dans cette
Paroilfe, & qu'il ne refl:oit plus que de permertre au
Curé d'en faire 'la publicarion, la permiffion lui ferqit
donnée, ajoutant qu'ils auraient la direttion & l'adminif(rarion de la Confrerie, de fes revenus, rentes & aumônes,
'& que la qualiré de' diretteur & d'adminifl:rateur de la
Confrerie feroit joinre à celle de Marguillier à perpéruiré;
qu'il ne feroit permis à aucune perfonne privée ou publique d'établir aucune Confrerie fans leur aveu & confentement.' Ils demanderent enfuite des Réglemens qui furent
faits par l'Evêque. Il y efl: dit que l'életti0!1 des Marguilliers
fe fera en préfence du Cure, &- que pour le courant des
'affaires les fieurs Marguilliers pourront difpofer de tour ce
-" qùi fera nécelfaire , & pour routes les autres affaires de la.
Paroi1fe où il fera befoin de délibérer, lefdirs fieurs Marguilliers a1fembleront les fieurs. Syndics, pour, conjoinre~ènt avec eux, ordonner cé qu'il conviendra d~ faire. Ce~
,
�f#
10U~NAi'
Statuts furent homologués par Arrêt du 4 Févrièr 1707:
En 1699 la Confrerie du Très - Saint Sacrement fut
établie dans la même EgliCe par une Ordonnance de
l'Evêque, qui l'annexa en tant que de beCoin à celle de la
Cathédrale. L'art. ~ du Réglemene porte que les Marguilliers de la Paroilfe Ceront pareillement Marguilliers ou
Prieurs de 'la Confrerie du Très-Saine Sacrement, autremen.t de Corpus Domini, érigée dans la même EgliCe,
fans qu'on puilfe à l'avenir, pour quelque raiCon ou cauCe
<J.ue ce Coit, diviCer lelaites qualités.
Après plufieurs aaes extrajudiciaires tenus-aux Marguilliers
par Mre. Olive, Curé de St. Ferréol, il préCenta le 24
Mars 1774 une requête au Lieutenant de MarCeiIle, par laquelle il demanda, en Ca qualité de Curé, d'être appellé
à coutes les alfemblées de5 Marguilliers de la Paroilfe. On
demanda deux ans de délai au Curé qu'il accorda, & le
14 Avril 1777 il fut pris une délibération d'accorder au
fieur Curé le droit d'affill:er à la redditio,n des comptes
tréCoraires aux termes de l'Edit de 169'1, & de s'oppoCer
au droit qu'il vouloit s'attribuer d'affilter à coutes les autres alfemblées , tant générales que particulieres. L'affaire fut
portée à l'Audience; le Lieutenant rendit une Ordonnance
de pieces miCes. Mre. Olive e,n appella, avec c1auCe d'évocation du.fonds & principal; il offrit enCuite un expédient,
portal.!t que faiCant droit à Ca requête & à Con oppofition
envers les Réglemens & Statuts, au chef où il n'eil pas
dit que le Curé affiHera; fi bon lui Cemble, à toutes les
alIèmblées des Marguilliers, &' quant à ce à l'Arrêt qui
les 'homologue, les Statuts &. Réglemens, enCemble l'Arrêt
qui les homologue, Ceroient & demeureroient révoqués
quant à ce, & que le Curé de la paroilfe St. Ferréol
affifieroit, fi, bon lui Cembloit, à coures les alfemblées des
Marguilliers, ou Coit de la paroilfe; & de même Cuite, que
l'appellation & ce dont écoit appel fulfent mis au néant;
& faiCa'nt droit à la c1auCe d'év.ocation, évoquant '& retenane le fonds & principal, faiCant droit à la requête de
,Mre. Olive, il fût maintenu dans le droit & faculté d'affiHer
en
�DU
:eALAIS
DE
297
PROVENCE.
eri fa qualiré- de Curé à roures les a'/femblées de la Con.frerie pour l'adminiftrarion & reddition des compres d'icelle,
comme auffi dans le droit d'arrêrer les compres annuels de
la, dépenfe & revenus de la Confrairie, lorfque le compre
n'en auroit pas été rendu pardevane M. l'Evêque & dans le
cours de la vifite-- paftorale, ~ l'effet de quoi les Marguilliers
·feroient renus d'appeller & faire convoquer Mre. Olive à
routes les a/femblées en la forme ordinaire, à peine de
cene livres d'aumône envers les pauvres de la paroi/fe encas de coorravemioti, & d'en êrre informé.
On difoit pour Mre. Olive, qu'il ne falloir pas confondre
les Confrairies avec les Fabriques. Une Confrairie eft une
[ociété de plulieurs perfonnes, érablie pour quelque fin
pieufe. Une Fabrique au, cooriaire lignifie le rem parei 01ll
le revenu affeél:é à l'eorretien d'une Eglife paroilIiale, rane
pour les répararions que pour la célébrarion cl,u fer'iice
divin. L'érabli/femeoc des Confrairies eH un aél:e ,de j,urif.
diél:ion eccléliaftique, réfervé à l'Evêque chargé principalemenr du foin des ames. L'érabli/femenI des Fabriques eil:
un aél:e qui n'exige que l'aveu de l'aurorire temporelle. Vne
Confrerie èft tin corps particulier dans la paroi/fe. La Fa.
brique eft le corps même d~s paroilIil:'ns.
,On comprend qu'il ne feroir pas' raifonnahle de.v,ouloir
'régir par les mêmes regles, par les mêmes prin,cipl:'s,
des inftiturions qui font d'un ordre li différenr. Des Statuts
donnés à une ConfraiJie de Corpus Domini [ont donc naxurellemenecrès-étrangers à la conftirution d'une Fabrique.
En effer, la charge de Marguillier d'une Fabrique dl: Ull
emploi civil, une charge publique à laquelle on ne l'eue
fe fouHra1re, quand .on eH de l'état requis pour ta reinplir, fi on 'n'eH fondé, en rirre particulier d',exemption.
L'on voir dans les Mémoires du Clergé, tom. 3, col. 1190,
,qu'il fallut un Arrêt pour dé.clarer les Doél:eurs Régents
de l'Univerfiré d'Orléans exemprs des charges de Gagei's
:ou Marguilliers en leurs, paroi/fes. L'enrôlemeoc ,dans un<l
.confrerie eft au cO,orraire un aél:e eJI'emiel1emeor libre d{l
fa ,nature,.
Anné,s t775 & ftiv~
Pp
�2.9 8
10
V 11. N Jo. L
C'eG à la faveur' 'de la réuni.on apparellte que' l'op faifoir
,de la qualité de Marguilliers de la Paraiif~, avec ce!le de
Confi-ere ou de Pri~ur de l'œuvre du Sr. Sacrement, fur
~es mêmes têtes, q.ue l'on s'dt permis de glilfer furtivement dam un réglement eccléfiJH.ique, qui n'avoir pour ,
-objet direél & priocipà:I que la cond.uire d'une confrairie,
quelques difpofiiti.ons llenlporelles .que l'.nn vou droit préfenter
aujou.rd'hui comme la conHitutlon, comme la loi fondamentale de Ja fabrique. Si œ fyLt.ême pouvoit prévaloir,
qui ne voit que oe mêlange de difpoGtions bizarres & incompaübJe-s, que certe confuLion de la Jconfrairie & de la
fabrique., que c~.t alliage de maiieres' fpirituelles & féculieres
ferait un .F'rét:eKte .éternel aux .entr.eprit:ès de l'autoriré eccléGaHique 1uTla temporalité? qui ne voit.que la confrairie
abforb\roit tout gouvernement, loute aliminiHrarion, & que
Je dévouement à quelques ,pratiques de dé.votion mal obfervées dev,iendroit' un principe général d'attraélion qui o(;on_centremit dans la fociété réduire .de quelques lConfreres des
draits qui n'appartiennent & ne peuvent app:trtenir qu'à l'univerfaliré des paroifliens ?
C'elt bien dan~ cet efprit particulier de .domination que
les régleme!ls avoient été rédigés; car dès les premiers pas
le .pieux defpotifme de quelqu'es dominans,fe .décele par les
précautions que l'on prend pour. écarrer raus les .notables
de la Paro'Îlfe appellés par-tout dans les aŒrmhlées tabricie'nnes; il n'ell: jamais queltion d'eux dans les ,Statuts ;.on
. ne les appelle d~ns aucune occaGoQ. S'ils ·ne .marchent .pas
fous l'étendard de Paul ur; s'ils, ne> fdnt pas rConfr,eres:"
on les Haite comme s'ils n'étoient pas habitans. !Le.Cur'é eH:
également. écarté., maigre les Loix généralesr&(les titres pa·r..
.ticuliers de la 'Paroiffe qui l'appeHenr. La fredrlition des
comptes peut fe ~faire fans lui, çonrre l'exprelfe ,difpofition
de l'Edit de 169)' auquel le 'Réglemenr efl: plll{lérieur. 10n
méconnoîr, ou du-moins -on paife fous menre fan draie
d'affiftance aux a!femblées; il. nly a que 'ceux qui one l put'
aux indulgences. qui' peuvent concourjr Jà l'a:dmin-ifl:ra~ion.
Auffi voit-on que le 2, Septembre 1706 le ProcllrelifEdu. 'Roi
,
-
,
..-
�DU PALAIS' DI! PROVENCE.
299
en la SéoéchauŒée de Marfeille requit qu'il fût enjoint aux
Marguillie.rs de remettre par tout le jour leurs .Staru.lS pardevers le Greffe, avec inhibitions & défeofes de les exécuter; à peine de fufpen(.i.on & de )00 liv. d'amende, fauf
à eux de _fe pourvoir par les voies de droit. L'homologatiol] des Réglemens qui fut faite enfuite' en 1707, efi une
furprife faite à la ,religion de la Cour par un expofé .no·toirement frauduleux; d'ailleurs iJ-s n'ont po_int été exécutés,
puifqu'0n -trouve dans les regifires la preuve que les Curés
ont fréquemment affilté aux alfemblées.
Qband même le Réglemenc .donc il s'agit ferait _aél:uelle-ment en vigueur, quand il n'auroit jamais été contredit,
quand par un urage cooll:anc & non inteFcompu le Curé
n'auroit jamais affifié- aux alfemblées de la fabrique, on ne
-pourr<>it en conclure que l'on _a acquis cootre lui le droit
-de J'exélure de ces alfemblées. Notre Religion, en confacrant un culte extérieur & le devoir de bâtir à Dieu des
te'mples oÙ nom; puiffions l'adorer & I:aller chercher dans
nos ,craintes & 'nos efpérances, a rendu néce!faire la deihnation de cerr,ains fonds pour pourvoir à l'exercice de ce
culce, ,'à, la conf!:ruél:icYn L& à l'entretien de ces temples.
Sans douce 'la Ipartiaipation à l'adminifiration des fabriques
.n'efi 'pas inhérente an facerdoce; elle n'efl pas inféparable
·dans la .,perfonne df~,Curé, de fa qualité de Pafieur; mais
-l'on 1 peut affurer. auffi qu'elle n'efi pas étrangere à fa fol.1iciiude.
,La miffion ::d'un Curé, telle qu'il l'a :reçue de Jefus-··Chüfi, .fe borne au .faiut des ames. -Mais le (alut .des
;amès, objet purement fpjricuel, tient à. u-ne foule d'objets
..extérie.urs, <tels que l'e'Otreti'en du. temple; la, décence du
fervice divin, l'adminiHratjon de's ficre-mens; & pour tous
,ces 'Objets,_ il fà'Ut -des fecours remporels.. Qui mieux que
-le Curé peut c0,OnoÎtre les befoin5- de fa Paroi-!fe? Qui
.mieux -.que lui peUt; diriger-llapplicavion des libéralités des
fideles? '
1
Tous les Auteurs. atteftent que le Curé a la premlere
Pp2
�,
300
JOURNAL
el.1 tOlite aITemblée générale tenue pour les a /fa ires de
la Paroilfe. Loifeau, trairé des feigneuries, chap. [[ , pag.
64, 11. 68; 'd'Hericourt, Loix eccléjiaJliques, pag. 2.4S; Lacombe, Jurifprudence canonique, va. fabrifJues, Cect. 4; l'A ute ut' du gouvernement fpirituel des Paroilfes, pag. 1:1.2.;
Gibert dans fes Inltitutions canoniqlJes, rom. l, pag. 182;
Denifarr, au mot Marguilliers; lè vocabulaire, au mot 1l1arguillier-s, pag. Y('7, col. 1. A la Doctrine des Auteurs fe
joint" la Jurifprudence des Arrêts. Augeard, rom. l , pag.
483, rapporte un Arrêt du Parlement de Paris du 2.3 Juillet
1700; rendu entre les Marguilliers de Sr. 'J<lcques de la
Boucherie de la ville de Paris, & le Curé de ladi te Paroilfe, qui ordonne que le Curé affillera à roules les affemblées générales & particulieres de l'œuvre & 'fabrique,
aura la p,remiere place dans les alfemblées, lignera le premier les délibérations, & donnera fa voix immédiatement
avant celui qui prélidera, lequel opinera le dernier, fans
préjudice au Curé de repréfenter avant la défibération ce qu'il
trouvera à propos pour le bien de l'Eglife & de la fabrique,
par forme de limple propolition.
L'arr. X de la Déclaration du 1) Janvier 1731 porte
que les Curés primitifs, ne pourront, fous quelque prétexte
que ce puiITe. être, préJider ou affiHer aux ,conférences ou
'alfemblées que le Curés- Vicaires pe(~<étuel& ~iennent avec
les Prêtres qui delfervent leur Parojlfe pa.r rapport aux fonctions ou devoirs auxquels ils font obligés " ou autres ma~
tieres femblables. Leuç défend pareillement de Ce trouver
,lUX alfemblées des Curés-Vicaires perpétuels & Marguilliers
qui regardent la fabrique" ou le droit 'd'en conferyer les
,clefs entre leurs mains, & ,ce nonobllant tous actes, Sentences & Arrêts ou urages à ce contraires.
Cette Loi ell: précife. De la maniere dont. elle el!: conçue;
elie fuppore le droit qu'a le Curé d'affifl:er aux illfemblées,
comme uo droit général & commun à routes les, Paroilfes.
Joulfe dans fan Commentaite fur l'Edit de 169) ; Coudet:t
dans fon Code ecèléfiafl:ique fur l'art. '17; du même Edit i
VOIX
�,
,
DU
PALAIS
DE
PR.OVENCE:
3o-r'
Denifart au mot fahrique, rapportent pluiieurs Arrées de
Réglemenç du Parlement de Paris, rendus après la.Déclaratian de 173 l qui lui ont rendu hom mage..
On répondait pour les Marguilliers, qu'il n'y a pas abus
dans un Réglement, par cela feul qu'il efl: contraire aux
Loix générales. Il efl: reçu qu'un fimple ufage déroge' aux
Loix, fuivant la remarque de Dunod, traité des pre[c:riptions, lit. 13" Les Marguilliers ont plus qu'une fimple couturne; ils ont un Réglement particulier ~ntervenu à la falisfaél:ion de coutes les parties intére1Tées, approuvé par l'Evêque, homologué par le Parlement, & confl:amment exéclllé,
confirmé & mainrenu, malgré la vaine tentative qu'un des
prédéce1Teurs de Mre. Olive avait fait pour l'abroger.
Quand on ne l'affimiliroit qu'à une fimple coutume, le
Réglement devrait être mainrenuou réformé, non felon qu'il'
feroit conforme ou conlraire à des Loix, mais ,felon que lés'
Loix defquelles il pourrait s'éloigner, porteroienl ou non une
dérogalion expreflè à, COUles cou lU mes & Réglemens contrait(~s. D'après. ce principe, les Marguilliers ne peuvent fe
prévaloir du Réglement', à l'effet de ne pas rendre les
CO~l1pleS en préJence du Cure dans les cas marqués par
l'Edit de 169'5, parce qu'il eH en ce point conlraire à cet
Edit, par lequel le Légiflateur a expre1Tément dérogé à tous
,Réglemens & 'ufages contraires. Mais en ce que' par ce
Réglemené le Curé appellé feulement aux a1femblées pour
l'éleél:ion des Marguilliers, elt exclu de taUles les autres, il
faudrait, pour faire juger cette excluiion abuiive, montrer
qu'une Loi dérogaloire à cous Réglemens & ufages contraires donne au Curé le droit d?affilter à comes les af·
femblées de la' fàbrique; & il fuffiroil aux Marguilliers,
pour repoutrer l'altaque de Mre. Olive, qu'il n'indiquât poinr
une Loi pareille, comme en effet il ne l'indique pas.
Mre. Olive réclame le droit d'affifl:er à COUles les a1femblées
de la' fabrique comme un droit de fa place, un devoir même
de fan minifl:ere; ce droil (dit.il) ce devoir (ont imprefcripli.
bles; fi ce droit, ce devoir efl: allaché,à la qualilé de Curé, coue
~afieur doit en jouir, ou efi tenu de le remplir, par cela feul qu'il
�,
joi
J
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t7 R. N ~ L
efi PaMur. Et quelque ancien que puiJre être l'ufagè contraIre en -Con Eglilè; nul Curé. ne peut être privé de ce
droit, ni difpenfé de ce devoir. Il en feroit de même, fi
des Loix générales imp'ofoient aux Curés cette obligation,
ou leur attribuoient cette prérogative. Si au contraire les
Corés n'affifrent aux aifemblées des fabriques qu'en certains lieux en force' des Réglemens locaux, ce droit n'efi
réelldnent imprefcr'iptible, fi toutefois il l'efi, que pour les
Curés qui l'ont, q~e dans les lieux où les Réglemens locaux
le leur attribuent.
Il fera aifé de. démontrer 1°. que le droit réclamé par
Mre. Olive n'e/l nullement fondé 'fur la nature des chofes;'
'2°. que les Loix e'ccléfiaf!:iques n'ont aucun rapport à rérat préfent des fabriques; 3°.·que les Loix du Prince font muettes fur
'ce point; 4°. qU'e la 'Doél:rine des Auteurs eH relarive aux
ufages des lieux où ils ont écrit; (. que Mre. Olive n'a
invoqué que des Réglemens particuliers.
Dans la primirive Eglife, tous les biens dekhaque Eglife
étoiertt communs; l'Evêque en avoit l'intend2n~e l!i. la direél:iob, & ordonnoit cO!):lme il le jugeoit à propos de l'em'ploi du remporel, foit pour la fabrique, foit pour la fubfifiance des Miniihes. Dans prefque touS les lieux, les Evêques :avorent fous eux des Economes qûi fouvent étoient des
Prêtres ou des Diacres auxquels its confioient l'adminiHra-.tion du temporel, & tes Economes leur en rend oient compte. Ils touchoient les revenus de l'Eglife, avoient foin de pourvoir à fes néceffirés, pour lefquelles ils prenoient fur les revenus ce qui étoit néce!f.1ire ; ils faifoient vraimènt la fquction de fabrki e'ns.
. Dans le quatrieme fiecle , les chofes changerent de forme
'1lans l'Eglife d'occident; les revenus de chaque Eglife ou
Evêché .furent partagés en quatre lots ou parts égales; la
'premiere pour_ l'Evêqùe, la feconde pour {Cln -Clergé, la
troilieme pour les pauVres, & L1 quattieme pour la fabrique, c'ell:-à-dire pour l'entrètien & 'la réparation des
temples. Dans les Phidifles, les Curés,- fous l'autorifation
néanmoins des Evêques; toucherent la portion Jqui ·dans le
�'n 11
PAL AIS
D II
PR.O V II NeE.
303
partage des hiens ~c~léfiafiiques av()it été aflèél:ée aux Ji:vê':'
ques ou à leurs Archidiacre~; les Evêques, afin de fe décharger des emharras que ce foin leur caufoit, lai1feren~
V'admini/lraiion de cett~ portion aux Curés, pour e'n faire'
tel emploi que la pnrdence & le zele leur infpireroient; Ol,l
.ne fouffrit point alors que les laïque~ s'immifça1fent en .aucune maniere dans cene adminiHration, quelque zele, quel- ~
que piété qu'ils pu1fent avoir d'ailleurs. J-,a négligence avec
laquelle .Ia plupart des Curés du treizi~nie Jiec1 e s'acquL[[(~
·rem fur ce point de leur devoir, ohlige51 le.s pui.ifa:t;I,çç.s de
-l'Eglife & de l'Etat de Jéur joindre .des laïq\l~J <;...u,i Yeillaffent, conjointement avec eux, à )â cO!1ferva.tio~n ste ç~J>
'biens & à l''ac'luit des charges. Ce fut If! même raif9n' qui
vers ce temps-là fit dépouiller les Ecclélia/liqu.es, 9i1nS le
Concile génétal de Vienne, de l'adminiflri\tion 9.>S' hô.
pitaux lX autres mairons de charité, & tnettre ,çes .q;:uvres
. fous la direél:ion des laïques ve)'rueux & capilb1es.
Depuis deux fiecles l'autorité des Cur~s, pan,s l';ldminirtration des fabriques, e/l déchue encore en France, & celle
des Marguilliers- s'efl: conlidéraplement accrlle. :Cette dimi.
nution d'une part & cet accroi1fement de l'auue ~toient
comme une fuite néceifaire des ch.angemens furv~nll,s $lans
.l'ordre des chofes. Les paroiffiens pOllr qui la 1?aroi1fe i.roit:
fondée, avoient le droit d'exiger que le quart des pj~,ns P
l'Eglife fervÎt à l'entretien & au.x répar.ations des bârÎmeQ.$';
. delà il fut jugé néce1faire d'appeller .à l'adminiflra,io.n. de \;l
.fabrique les laïques, quoique .juCqu'alors il leur. e,lÎt ,éc,é Wê.!tte
inhibé de s'y immifcer. Ce quart ne fut plus (uffif(l.lJc PQ,uj:
remplir les obiéts de ,fa de/linatîon; les parpiffiensJ"ucent
.tenus d'y fuppléer. 'Il s'établit, mçme encore un nPllve! ordrë:.
,l'obligation primitive des Bé.néficiers fur t'enrre.rien &' !es
.répar.ations des_Paroi1fes ne .fut .plus _re.mplie moyennancJe .
,quart lai1fé en réferve pour cecobj.ec, & co.nfié..à Àes A.dr
.minifirateurs ,particuliers; ,mais elle fut rempile :À'u..oe . ma·riiere ,différente•. Pes Loix [églerent quelles patries.,dJ-l tl/m,..
'ple 'feraient emretenues -& réparées fur les ,bi.e']> e.e.cléCIilktiques, ~ ..qu~elles le fer.oieot. pat:. les paroiffiens; il p'y..ellt
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304
Jou RNA L
plus une portion des biens de l'Eg!ife alfeél:ée à fon entre~
tien, & remife à des adminilhate.urs particuliers; le Bénéficier eut la difpoûtion de tous les revenus de ces biens,
à la charge, le cas de befoin de l'Eglife arrivant, d'y pourvoi'r de la maniere dont il étoit réglé; les paroiffiens de
leur côté remplirent leurs obligations dans quelques lieux
en corps, de Communautés, comme en Provepce, où les
Communautés font fabriciennes, & où, à l'exception de la
ville de- Marfeille, il n'y a point proprement âe fabrique;
en d'autres lieux en remettant leurs pouvoir~ aux Marguilliers déja établis; dans d'autres enfin en établiffant des fa-briques fur le modele des anciennes. Il y a des Paroiffes
d'ancienne conftruél:ïon auxquelles les Curés peuvent avoir
quelques drpits, parce qu'elles ont été bâries aux dépens
des biens ecc\éûaftiques; mais quant à celles de nouvelle
con!l:ruél:ion, ils n'ont certainement aucun droit fur la partie
qui a été édifiée aux dépens des paroiffienJ> & fur les t>bjets
que ceux-ci font t'enus de fournir. En l'état aél:uel, eH-il
donc étonnant' que l'autorité des Curés fllr les fabriques fait dééhue, & que celle des Marguilliers ait augmenté? Les Marguilliers ne font plus adjoints à l'admîni!l:ration de la dot de là Paroiffe; ils font prépo(és pour
avifer les moyens par lefquels les habitans doivent rem'plir leurs obl.igations env~rs elle; ils (ont les Syndics, non
~'e la Paroiffe, mais des habitans: que le Curé veille à
ce que, la fabrique pourvoie - .aux néceffités qui font à fa
charge, cela eU dans'l'ordre; c'eH cout le droit qu'il tient
de la' nature des chofes.
Mre. Olive veut que le Curé fait adminiHrateur de la
,fabrique en fa qualité d'époux de fon Eglife ; mais fi l'on
pefe le principe & la nature des chofes, ne doit-on pas
voir que cette qualité d'époux de l'Eglife eH inconciliable
'dans l'ordre aél:uel avec celle'd'adminiHrateur de la fabrique? Celle-ci eH établie p'our remplir au nom des habitans leurs obligations envers la Paraiffe; l'époux doit veiller 'à 'ce, .que les! P"roiffiens rempliffent ces obligations;
il ne peut être en même tc:mps celui à qui l'qbligatÎon efl:
, due ~
�P A. LAI S
30)
<lue, & un des repréfentans de ceux qui la doivent; les
Loix nouvelles l'appellent à l'audition des comptes; s'jl écoit '
lui-même Marguillier, s'il était adminii1:rateur de l'œuvre,
il arrêteroit fon propre 'compte; en arrêtant celui des autres Marguilliers qui feraient fes confreres, il ferait Juge
en fa propre caufe, ce qui répugne à la nature des chofes.
Dans l'état aél:uel des chofes, les Curés ont moins encore un droit propre dans l'-adminifl:ration des fabriques.
Cette adminil1:ration eH étrangere aux biens eccléfiaftiques.
Les Marguilliers font, proprement, quant à l'obligation des
habirans, pour l'entretien & les réparations des Paroilfes,
les Syndics des habitans; ils n'adminiltrent que ce que les
habitans donnent, foit pour s'acquitter de 'tette obligation,
fait au'delfus de cette obligation; auffi nos Loix n'ont pendant long-temps déféré aux Curés que le, droit d'être appellés, & de dire leur avis, lorfqu'il s'agit d'accepter de nouvelles fondations: ne pourront, porte l'art. S3 de l'Ord()nnance de Blois, les Marguilliers & Fabriqueurs des Eglifes
accepter QI~cune fondation, fans appeller les Curés, fans avoir
fur ce, leur avis.
Les devoirs proprement dits des Curés font de rélider'
dans'leurs Paroilfes, d'y faire des inftruél:ions, d'y' célébrer
l'office divin, d'adminiltrer les facremens, de vifiter & con.
foler les malades, de foulager les pauvres, d'édifier les 6deles par les difcours & par .l'exemple. Aucun des objets
qui font la matiere des délibérations des fabriques n'a de
rapport même éloigné avec ces devoirs, li ç,e n'eft l'accep, ration des nouvelles fondations; parce que pOlir les fondarions -le rhiniHere du Curé eft requis, comme pour come
autre 'matiere à laquelle ce miniHere eft égalemem inré.
relfé. C'eH la remarque de 'Fheveneau, 'Iiv. l , tit. 12. Ce
droit qu'a 'le Curé d'être appellé pour l'accepratio'n des nou_'
velles fondations & de donner fon a"is, n'eH pas Identifié
avec les fonél:ions de lon miniüere; il ne tient que par UQ
fimple rapport.
La conceffion des bancs & des fépulrures', n'appartient
'de droit cOll(mun, fuivam les Doél:eurs, qu'aux MarguilliefS
.Almées z 775 ,t;;. fuil'.
QIl
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D U
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PRO VEN C E.
•
�306
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fell'Is, parce qu'il ne s'agit que d'un pUt temporel dont ils
fOnt les adminifirateurs. L'uniq.ue droit du Curé à cet. égard
eH de s'oppofer à la. conf!:ruél:ion des bancs & fépultures,
lorfqu'elle nuit au fervice divin qu'il en: en droit de régler.
Si c'ef!: à lui à régler dans 1es Eglifes le fervice divin,
c'ef!: aux Marguil1iers d'ordonner du temporel; l'avis du
Curé n'dl: requis. fur les matieres qui font' fous la dir~c
tian des Marguilliers que pour les objets où fon miniaere
ef!: intéreif~, & il a le droit d'oppofition, lorfque ce qui
ef!: ordonné par les MarguiIfiers nuit au fervice divin.
Quoique le Curé de St. Ferréol n'aic jamais affifté à
l'audition des comptes de la fabrique, les Marguil1iers
confenroienc néanmoins à fe conformer li. fon égard pour
l'avenir à l'article 17 de l'Edit de 1691' fa difpoficion
étant générale, & dérogeant à tous régie mens & ufages
coimaires. Le. Curé ef!: appellé par les réglemens de la
fabrique aux éleél:ions des Marguilliers; il Y a tojours affiHé.
La feule queHion qui divife les parties', eH- de favoir s'il
. ef!: Marguillier né ,ayant comme tel le droit
ffill:er à
rol,(tes les délibérations de la fabrique; le Curé réclame ce
droit; on lui oppofe les réglemèns & un ufage de plus de quatre-vingt ans.
La fàbrique fut établie & fondée par les paroiffiens pour les
repréfentei-; les Marguilliers furent nommés pour être Marguilliers & vrais fabriciens. L'objet de leur écabliifemenc eH la
confiruél:ion de la nouvelle Eglife pour le préfent ,.&. tout ce
qu'il conviendra de faire à l'avenjr pour l'eotiere perfeél:ion.
de ce g.ra-nd ouvrage. C'ea dans cet objet, que le Curé
avoit requis l'aifemblée. des paroiffiens. Lés premiers ·Mar-.
guilliers font nommés par l'Evêque, non en force d'un
droit à· lui propre, mais fur les inaances des paroiffiens;
ils ne lui reconnoiifent aucun droit; ils lui témoignent feu-.
lement leur confiance. Il n~alfeél:e lui-même aucun droit;
il cede à leurs prieres, & leur prom.et qu'à .l'avenir les
éleél:ions feront faites filivant l'ufage & coutume des autres.
paroiifes. Indllire de cette promeife que la fabrique de St.
Ferréol a été établie fur le l1}odele çles fabriques des aucres'
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PAL AIS
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307
VEN C E.
paroilfes, pour être régie par leurs ufages & coutumes, &
que dans prefque toutes les fabriques de l'intérieur du
Royaume l'ufage étant. que 'Ie Curé eLl Iè" premier M.arguillier, le Curé de St. Ferréol a la même -prérogative par
la fondation même de la fabrique, c'eH donner aux termes
de cette promeife un fens qu'elle n'a pas. Tout Ge que
l'Evêque entendoit exprimer, c'eLl qu'à l'avenir la nomination des 'Marguilliers feroit faite 'comme par-tout par les
Marguilliers, & qu'il ne prétendoit pas ériger en titre pour
lui' la confiance que les paroifliens lui avoie.nt marquée à
raifon de la premiere é1eélion. A quels ufages & coutumes
, fe feroient-ils d'ailleurs fournis? A ceux feulement qui dans
les autres paroiffes régiifent les éleél:ions, & tout au plus
.à ce que, comme dans les, autres paroiffes, les éleél:ions
fuifent f<tites en préfence du Curé. L'on ne difpute pas
au Curé de St. Ferréol ce droit que les réglemens lui
donnent & dont il a joui; on lui oppofe feulement qu'il
n'eH: point premier· Marguillier, puifque l'Eglife étant édifiée,
. les Marguilliers la pourvurent de tous les vafes, meubles
& effets néceifaires; ils eurent & ont encore la nomination du Prédicateur pour l'avent & le carême; ils en ODt
toujours réglé les honoraÎres.
On ajouta que les Marguilliers de St. Ferréol .n'admi.
niChent aucun bien qui foit propre à la paroiffe, qui 1Lli
ait été attaché anciennement & avant l'établiifement de la
fabrique, ni aucune portion des biens ecc1éftaH:iques. Leurs
moyens conGLlent en quelques fondations en petit nombre,
faites à la fabriqùe, quelques aumônes, quelques legs, dans
le produit des chapelles, des tombeaux & des bancs, dans
cel.ui des chaifes , &' en cas d'infuffifance de ces moyens
dans la bourfe des paroiffiens. Voi'là. fur quoi roulent les
délibérations de la fabrique. Le Curé, ce fè.mble, ne fauroit être Jldmis à voter dans ces délibérations qu'à un feul
titre, la confiance des paroiJ!iens. Il a pour les droits ci·
deifus énumérés les aél:ions nécelfaires; mais ces droits réfidans en fa perfonne nécefiitent tellement peu qu'il foit
membre de la fabrique, que s'il y étoit appellé par la
Qq
2.
�3~
JOURNAL
,confiance des paroiffiens, & qu'il exerçât quelqu'une des /
aél:ions qui dérivent de ce's droits, il devroit s'abClenir,
comme fufpeél:, ,oe donner fon fuffrage dans les délibérations relatives. La qualité de Marguillier qu'il ne pourroit
te nir qtJe, de fes droits' comme Curé , cefferoit du moment qu'il les exerceroit.,
Mr. l'Avocat-Gériéral de Califfane obferva 'que dans les
premiers temps, les MiniClres de l'Eglife ne vivoient que
des offrandes volontaires des fideles; elle's, leur fourniffoient
des fonds plus que fuffifants pour leur filbfifl:ance. Le nom
de propriété paniculiere étoit étranger à ces prem iers moments; toutes chofes étoient communes, & les offrandes
furent bientôt fi conlidérables', que l'àn fut obI igé de choifiç
quelques perfonnes pour en faire la di(hibution. Les Evêques des premiers fiec1es confierent l'adminifl:ration des
biens à d,es Prêtres particuliers; mais ils éroient comprables
à l'Evêque, & .ces biens étoient defl:inés, foit à l'enrrerien
du Clergé, foit aux. réparations des Eglifes .& au foula.gement des pauvres. Ces différents objets occafionnerent
vers la fin du cinquieme fiec1e le panage des biens eccléfiaHique's; on fit quatre ponions, celle de l'Evêque, celle
des Ecc1éfiaCliques, celle de la Fabrique de l'Eglife, & celle
des Pauvres; tels en, furent les différents objers : mais les
Evêques conferverent roujours la plus grande autorité fur
la difpofition des biens ecc1éfiafl:iques, qui s'étendait fur
tous ceux de leur diocefe. Le pe'tlple fe mulriplia, les Par,oi{fes devinrent plus conliMrables, & alors les Curés, fous
l'autoriré des Evêques, devinrent les principaux adminifl:rateurs d~s revenus de leurs paroiifes; les Evêques, leur
laiiferent le droit. Cette adminjfl:rarion fut q~elque temps
roure eccléfiafl:ique; les 'offrandes diminuerent; on voulut
faire contribuer plus volontÎers les Paroiffiens; on les affacia avec les Curés à l'adminifl:rarion des biens des Paroiifes; mais ceux~ci avaient la principale direél:ion, & les
Laïques ne pouvaient rien faire fans leur agrément. La révolution qui fit joindre -les Laïques aux Curés ne fut pas·
générale. Dans le principe les Curés feuls eurent la nomi~
en
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PAt AIS
DE
PRO V Il Nell:
3°9'
nation des aàmini!trateuts. L'autorité ecc1éfia!tique diminua
infenfiblement dans l'adminifirarion des Fabriques; 'les
Curés 'p'erdirent le choix des admini!trateurs, mais non pas
celui d'affi!ter à toutes les affemblées. Les Fabriques ad-'
mini!troient les revenus alfeél:és à l'entretien de l'Eglife,
tant pour les réparations;. que pour la célébration du fervice
divin; elles jouiffent aujourd'hui des. privi!eges eccléfia!tiques; foit qu'elles acquierenr, fait qu.'elles alienent, foit
enfin qu'elles jouiffent, rout doit fe faire avec des formalités
parrlculieres -: mais 'les Marguilliers n'acquirent point de qualité 'exclufive; ils n'éroient point admini!trateurs naturels
des Fabriques; c'était aux Eccléfia!tiques 'à admini!trer les
biens qui avaient été de!tinés à. l'Eglife; ils ne le font pas'
devenus; ils, font les membres d'un corps dont le Curé e!t le
Chef. Il s'y 'agite des affaires purement eccléfiaQiques, ou
qui au moins, en tenant au temporel, ne peuyent pas être
regardés comme étrangeres au fpirituel.
Les affemblées Ont lieu au banc de l'œuvre, ou dans,
quelque endroit attenant à l'Eglife, & les Curés affi!tent à
toutes ces affemblées, comme le 'prouvent la conHitution
àe' routes les Fabriques, l'univerfalité des Aureu~s, & la
Jurifprudence la plus cQn!tante. Ils arrêtent les comptes des
Marguilliers, affi!tent à leur éleél:ion, & enfin c'dl: le Curé
'qui admini!tre avec les principaux Paroiffiens.
Toutes les Eglifes doivent à la lil~éralité des fideles les
biens qu'elles poffedenr, & la différence' n'ell: que dan~
les· époques. En droit commun les Curés font par-tout ré'putés membres des Fabriques, fait dans les nouvelles, fait.
dans les anciennes paroiffes; fait qu'elles poffedent ·des
·biens eccléfiafiiques, ou qû'elles ne fubfi!tent que par la
libéralité des Paroiffiens; fait, enfin que les Curés roient
décimateurs, ou qu'ils ne le foient pas. L'origine des 'biens
des Paroiffes n'en change pas la deHination; elle e!t toute
religieufe; elle prouve donc que les Curés ont, droit de
participer à leur admini!tration. Comment e!t-il poffible d'imaginer que le Curé puiffe être étranger à ce qui coocerl)e
l'entretien ~es yafe~ fac~és-7 l'açha~ des ornemens, l'acqui~"J
(
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tement des 'fondations, l'emplacement des bancs, l'heure
.des .Offices, le choix ~es Prédicateurs, la' police de l'Egli[e
& autres objets dépend~ns du culte de la r_eligion? Tels
.fonc.eependant les objers donc ell: ,chargée la Fabrique de
la.:P-aro11fe Sr. ,Ferréol; fi le Curé étoit e·xc1u. des affem.b1ées, ,il,[eroit ,plus .étraljger dans [a ·Paroiife que le moindre
.des fideles. ,Ainli quoique cerre Paroiife ne poffede point_
de biens ,eccléfiafl:iques, I-a de11:inarion des libéralirés jour.nalieres 'eR: toure religi,eu[e. Donc le Curé de St•. Ferréol
..doir affiner au~ aifemblées de la Fabrique.
On efl: -conV'lenu gu'il 'doit arrêter les comptes, qu'il peut
.
,affi11:~r au,x a.lfemblées géoér<rles_; pourquo"i lui refu[eroit.on
,ce droit dans I(s affemblées parriculieres? U affi.fie à l'élec,tian des Marguilliers; il faut que ce [oit comme admini[trateur, ou comme Curé; il ne demande point d'y affiner
,comme Curé" c'e11:.à-dire, d'y être le premier delibérant
& d'avoir une preiféance qui efl: auffi étrangere à fes droits
su'à [on ,devoir); il ne -réclame que les droits qu'ont tous
Jes fideles., ce\lX de 'fimple adminiHrateur; il e11: reconnu
«ju'il a .lSe droit ,dans quelques occafions : pourquoi fa qualiré ,d'admini11:rateur n'auroit-elle qu'une. exi11:ence de quel·gues jours, quan<! les princjpes la lui donnent continuelle?
;Ainfi rien dans la confiituriop de la Paroiffe St. Ferréol
qui puiife éloigner le Curé de -l'affinance aux atremblées
;de la 'Fabrique, Le-,d;qit f:ommun, l'exé.clltion la .plus .conf-.'
.t"ore .dans routes Je.s .Fabriques du RoyalJme l'y aurorifenc;
fan devoir ,de,Curé l'y -oblige, & il ,doit êne maineen.u dans
un droit auffi 'naturel ,que précieux, foit.pour Jui, Joit pour
fes fucceifeurs.
/
Les Staturs -& ,Réglemens aurorifés par la Cour 'ne peu·vent tpaine rê~re oppofés au :CuI;é, parce qulil n'y a pas
,concouru; d'ailleurs c·es Statuts rfont infufEfans pour auro,.
rifer une dérogation, auffi expreffe au droit commun. Ce
n'efi pas l'intérêt particulier du Curé qui doit le faire adlnetlre aux àffemblées de la Fabrique; c'e11: l'inr'érêt public
de [on Eglife & de ·fa paroiff:e cOfl!re lequel .on ne peut
.pre[crire. -Et feroit-il pQffible. de fépar.er par un .ufage &
�·un
_ 'Du
PALAtS'
DE;
~plj
PROVENCB:
traité particulier,. quand même il pourroit être . reg<lrd~
comItJe tel, ce que les Loix publiques ont uni d'une ma::'
,Diere fi authentique?'
Mr. l'Avocat-Général conclut à ce que l'expédient' offert
par Mre. Olive fût re~u & mis au greffe".pour être' eJré:cuté·
fuivant fa forme & teneur.
_
-'
Arrêt du 2lj. Mars 1778 , pronon'cé par' Mr. le Preirlier
Prélident , 'conforme aux conclulions',. & qui condamne' les
Marguilliers aux dépens. Plaidant Mes. Simeon> &; Roma'nTriburiis.
l,
J
o
- ARR Ê T
H
X' X, X l'X.
L'ac7ioll criminelle ne compete pas' contre, ln. 1'I?uve' accufée
_
. d'expilations dans la fucceffion de fon'Lntari.
A
Ntoine Roquefeuil, Aubergine de. la' ville 'de .Tarafcon,
mourut dans la nuit du· 3' au 4- Juillet: 170/6. Sufanne
Rey fa mere, étoit ~ l'agonie. dans.le.même' temps;; elle
mourut le 4 Juillet après midi; ma.is ayant furvécu de quèl~
ques heures' à fon fils qui mouroit fans enfahs, elle avoit
gagné une légitirne. Roqliefeail avoit inftitué, par un teftament du 18 Mars 1773 la DlIe; Martin fa femme pour
fon- héririere. On demanda la. mife de- fcellé. 'La veuve
allégua le teftament qui ·l'inllituoit. 'Les fcellés furent mis;
ils furent enfuite levés f01]s un inventaire',que le Juge trouva
bon de' faire) Sieur Jean'-Bierre: Peire, N:,égo'ôaht: de Tarafcon, en qualité de. mari & maîti'e de la dot &: droirs
de fon époufe,. héritiere,de' Sufunne' Rey, _traita avec la
veuve' pour la. légitime compétente à fa. belle-mere. Oei
préleva- une créance importante, de, 200'00 Ilv. que le Heur
Lagier avoit fur la.. fucceŒoni; on difpura long-temps fur
la quotité de la légitime, &. enfin le fieur Peire' préfenta
une' requête ~ en . inform'ation fur des expilat,ions commifes
par la' veuve, & fûr. fa connivence avec le fie ur Lagie~
�•
311'
JOUllNAL
'T
pour lui fabriquer des titres de créance. L'inform~tion fUt
prife; la veuve & le lieur Lagier furent décrétés de prife
de corps; ils appellerent de ce décret pardevqnt la Cour,
'demanderent l'élargiffement provifoire qui leur fut accordé,
& amplierent enfuite leur appel fur le décret de foit informe.
"
'
, On difojtpour la 'veuve, que l'héritier ell: le maître de
la. fucceffion; il ell: faili par la mort du défunt. ,S'il cache
ql,lelqu'un de fes effets, il ne dérobe rien' à perfonne, puif.
que ce qu'il caèhe Jui appartient. Le préjudice qu'il fait à
des tiers par fes latilations peut être une fraude, fans être
un vol, & fans donner lieu à l'aérion criminelle. C'eH par
ce principe qu'entre cohéritiers l'information ne compete
pas. Il ell: vrai qu'on a di!lingué Jes cas de fraudes graves
entre cohérjtiers, & ceux fur-tout ot1 les expilations ont
précédé Ja morL de celui de la fucceffion de qui il s'agir.
Cette dernieie ,hypothefe ell: celle de l'Arcêt de' Bonnet,
Gui jugea que It: cohéritier avoit pu être, pourfuivi criminellement,. parce qu'il avoit expilé du vivant du défunt, &
avant d'êrre faift par la mort, par conféqu'ent [ans aucun
droit. Mais ce principe de décifion n'a pas lieu contre une
veuve, qui, indépendamment de tout titre d'héritiere, efi
quali propriétaire de ce qui apparrient à [on mari. Elle
efi une perfonne privilégiée que la Loi a permis de cO,ntenir, non de pourfuivre avec rigueur.
.
Ainfi dé deux chofes l'une : ou le fieur l'eire fe regardera comme cohéritier, ob comme ,créancier. S'il prétend
être créancier, jamais qéanoier n'a eu droit de faire informer fur ce que f011 débite.ur cache' & [ouflrait [es effets.
L'information dans ce eas n'ell rtolérée qu'en faveur du
commerce dans les banquerolltes frauduleùfes. Si au contraire il prétend être cohéritier, il ell: conflamment jugé
que le cohéritier ne peut Jnformer' comre fOll cohéri~r que
pour expilatiolls très-graves; le peu de meubles qu'indiquent les dépofitions ne formeroit pas une expitation de
cerre efpeee. De plus', le cohéritier a un droit égal à tous
Jes biens jufqu'au partaze. Le créancier;:lU COntrilire, le
légitimai~e ,
'.
,
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
3I3'
légitimaire n'a· qu'une fomme à prendre fur la fucceffiQn.
Rien de ce qui a été foufirait ne lui apP,artient; cela ne'
,doit entrer qu'en compte, pour favoir ce qui lui reviendra.
Il fulEt donc qu'il demande le recomblement; il ne peut
p.as lui être permis de prendre la voie criminelle. Louet,
letr. C, fomm. 36, rapporte un Arrêt qui caffa la procédure prife contre une veuve à la requêre des créancier's
de la' fucceffion de fan mari, fauf à eùx de f~ pourvoir
par aétion civile.
Dans cette' Province OÙ le droit romain fait notre loi,
on peut invoquer pour les veuves de's déci Gans 'plus ref,peél:ables _encore que celles de la ,jurifprudence. JI
vrai
que par une fuite des formes établies chez les Romains,
l'a~ion furti & èelle expilatœ hœrediratis, qui était moins
rigoureufe, ne co'mpétoient pas, tant que l'héritage n'avait
pas été accepré" on même tant que l'héritier n'était pas
en poffeffion, quia, dit le droit romain, rei nondilm poffè.ffie non fit fartl/m. Ce morif de décifion ne femit pas
applicable même dans les pays de droit écrit, Qll l'on a
admis cette maxime du droit fra nçois, le mort fai/it le l'if;
'mais l'on ne s'dl: pas départi q'une autre raifon de décider , qui avoir également diété les titres de reTllm amo·
tarum aélione & expilatœ hœreditatis; raifon que les pays
coutumiers ont même adoptée, & qui eH fondée fur le
refpeél: dû au mariage, fur les égards dus à une veuve:
Rerum amotarum judicium fingujare introdliélum 11 adverSÙ9
r.am quœ tlxor fuit, quia non placuit cum eâ fUl:ti agere pojJè ,
quilJUfdam' exiJlimantilms ne quidem furium eam jacere, quia
focietas vita 'juoc/ammodo dominam eam ftiaret ; aliis, jiutum
- quidem eam facere , ficuti fi/ia patri faciat ; fèd fil/Ii 1/on4le
aaionem conflituto jure, in qua SeTltentia lIdian,us ReélifJimJ '
1'. L. l ,if. de
rel'. amot. La rai fan en eH donnée par
la feconde Loi: nam in honorem matrimonii turpis (léiio ad~
yersus uxorem negatur.
,
Jl.elt indifférent que l'expiladon ait été faite pendant Je
,rri~riage, ou après fa dilTolution : in utroqu~ ca/ù 1 dit la
Loi 3 , §. 2. , proptcr reverentiam per{ollarum filrflvam t(lllflim
Annùs ln 5 & fuiv.
Rr
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.
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cO!lditiofl~m
10URNAL
compeUre, non etipm furti ac1ion~m dicimus. 1:,a
Loi 22 , §. 2 , a prévu le cas. où la femme aurait enlevé
pendant l'agonie de Fon mari; elle ne la déclare pas moins
exempte de l'aél:ion criminelle:.fi mulier mortis caufa res
amoverit, deindè mortuus eJl maritus, hœreditatis petitione
vel aaione ad exhihendum confe'lui poterit hœres. Même décifion dans 'la Loi 4, cod. de expilat. hœred.
L'on reconnoÎt que par' un efprit d'équité qui n'a pas
permis que l'on privât des hériti~rs des preuves importantes
-d'expilations qui auraient pu leur échapper, s'ils n'avoient
recouru à la voie prompte' de l'informatioil, on a, en civilifant , paffé auffi Fouvent fur la rigueur des principes qui
la défendent , qu'on les a Hriél:emené fuivis en caffant; mais
de la civilifation à un décret de prife de corps il y a encore
fi loin, qu.e Peire doit attendre bien peu de cette réflexion,'
qu'aujourd'hui ,on a moins d'égards pour les veuves. Aujourd'hui comme autrefois la Loi rougit de permettre l'information contre une veuve , tom atrocem ac1ionem dore
eruhuit ; & le' réfultat de fes difpofitions combiné avec
l'équité qui défend de protéger la fraude & de la laiffer
impunie, fous le prétexte des égards dus à celui qui l'a
commife, el!: de caffer les informations, fi elles ne. font
pas autorifées par la gravité des faits, & fur-tout par la
nature ,des preuves qui demandoient .d'être promptement
recueillies, de les conferver au contraire ,. mais de les civilifer, fi l'information a été prife par néceffité pour fixer
des preuves fllgitives, non pour vexer la veuve. Le dol
de la veuve dan? la fu'cceffion de fan mari ne pouvant
jamais fe punir rigoureufemen.t, il feroit inutile d'entretenir
l'aél:ion criminelle. Tels font les vrais principes. Le feul
Arrêt que I~on trouve dans le cinquieme tome du Journal
des Audiences, fut rendu contre une veuve dont les mœurS
étoient totalement déréglées.
Mr. d'Agueffeau, dans Fon plaidoyer de l'année 1698, attelle que l'aél:ion en recelé ne pou voit être pourfuivie criminellement contre la veuve, & qu'à l'égard des complices,
il penfoit qu'il falloit civilifer auffi, s'il~ n'avaient fait qu'obéir
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PA. L A. l S
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PRO VEN CE.
•
3[S
à la veuvé; que s'ils s'étaient appropriés quelque chore,
on civiliCoit pour la veuve, mais que la prqcédure criminelle attirait la civile, & qu'on continuait comme on avoit
commencé. On trouve dans le cinquieme tome de Boniface
un Arrêt qui confirma une Sentence au chef qui civilifa
une procédure prife contre une femme, la réforma en ce
qu'elle avoit également civiliré contre des complices, &
ordonna que la procédure criminelle feroit continuée contr'eux. Jouffe, dans fa juHice criminelle, tom. 2, pag. S02,
met en maxime, que quand il y a plufieurs accufés dans
un même procès, on ~e peut inHruire criminellement à
l'égard des \.lns, & civilirer à 'l'égard des autres, excepté
dans le cas de recelé fait par une veuve. Serpillon, pag.
94S, FàtteHe de même. Muyart de' Vouglans, fur le titre
la de l'Ordonnance de 1670, art. 3, dit qu'après que la
veuve a répondu, on civilife, & qüe s'il y a lieu d'inHruire
criminellement contre les complices, on procede féparément.
On' répondait pour Peir que le vol ell la foufiraaion
frauduleufe d'une chofe au préjudice du tiers à qui elle appartient. FJrtum ,ejl contreaatio rei fraudulosa, lucri faciendi
gratiâ........ quod lege naturali prohiDitum efi admittere. L. l ,
§. 3, if. de furtis. Dans les principes du droit romain, le
recelé étoit un véritable vol, quel qu'en fût le coupable:
in writate furtum fit, eifi leviùs coercetur mulù:r. L. 29, if.
de aaione rerum amotarum.
'
, Les Loix difiinguoient deux hypothefes principales: le
, recelé fait des chores d'une perfonne vivante, & le 'recelé
ou le, divertiffemeot d'une hoirie. S'agilfoit-il du recelé ou
du diverriffemeot des chofes d'une perronne vivante? L'aaion
de vol compétait contre les étrangers qui fe rendoient coupables de ce délit, tenehantur furti. Mais fi la femme avait
commis le recelé, on diÙinguoit trois 'cas: fi elle l'avait
commis pendant le mariage;.fi elle l'avoit' commis dans.la
vue d'un divorce prochain ou projené; finalem,eoc, fi elle
l'avait commis après le divorce confommé.
Le recelé commis par la femme pendant le mariage
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�.3 16
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n'érait pourfuivi que civilement; le mari n'avait que l'aClion
de damno, in faqum; c'ell la déci fion de la Loi 2, cod.
rerum amotar.; conftante matrimonio neutri eorum n~'lue, pœ~
nalis, ne'lue famojà aRio competit, fi:d de damno in fac7um
datur aRio. L'honneur du mariage ne paroitroit pas pouvoir
c"emporter une aéhon plus rigoureufe; nam irz honorem ma.
trimonii turpis ac7io adversùs uxorem negatur. L. 2, ff. de
ac7ione rerum af71.otarum. La Loi ellt rougi de donner au
mari conrre fa femme une attion qui eûr repugné au li,en
intime & religieux qui unir deux- époux. Apertiflimi juris 1f
non poffi maritum conJlante matrimonio furti ac1ionem contra
'fuam uxorem haDere, 'luia Lex ita atrocém ac7ionem dare in
perfonnam itajibi conjuj1c7am eruDuit. L. 22, cod. de furtis.
Quand au contraire la femme avoit recelé Ol! diverti;
divortii causâ, dans la vue d'un divorce projerré, alors ce
n'érait plus fimplement l'aél:ion de damno ill fac71lm qui compétàit au mari, mais l'aél:ion rerum amotarum : divortii causli
z:eDus uxoris a marito amotis, l'el aD uxore mariti, T;érum amotarumedic?o perpetuo permittitur aRio. L. 2, cod. rerum
amotarum. Et cerre attion de recelé & de diverriiTement
,n'était point une aél:ion enciérement civile; elle était fans
doure moitis fâcheufe que l'att,ion de vol; mais elle éroi,t
toujours dans la claiTe des attions ,qui fuppofent un vrai
délit; hœc aaio ex de/iao nafcitur. L. 2 l , §. 4-, if. de ac?
rel'. amot. Enfin quand la femme receloit après le divorcç
confommé, l'aél:ion de vol compétait contr'elle;Ji pojl di1/ortium, l'es contreRat, ,etiam furti teneDitur. L. 3 ,if. de ac?
rer.. ampt.
Telle était la marche du droit romain. Le rece1é ou le
divertiffement d'une hoirie étoit. également réputé cri~e
par le p.1Sme droit. Il en ell deux rirres exprès dans le
digefre & dans le code, qui font les rirres de crimine expilatœ
7zœreditatis. Ce crime fe pourfuivoir par la voie extraordinaire, par accufarion : Ji 'luis .alineam hœreditatem expilaverit, extra ordùzem folet coerceri pel' accufationem expilatœ
hœreditatis. L. l , if. de crimine expil. hœred. On en avoir
fait une aél:ion dillinél:e de celle du vol; mais cette difrinc-
/
�•
'Du
PALAiS
DE
PROVENCE;
317
tian, comme dit ])omat dans fan fupplément au droit public, pag. 212" n'était qu'une limple formule qui n'influait
pas fur le fonds, puifque celui qui avait pillé une fuccefiion;
éroit pourfuivi & puni de même que les voleuts.
L'aél:ion expilatœ hœreditatis était donc véritablement une
aél:ion fameufe & criminelle; elle ne compéroit pas contre
la femme, par la même raifon que l'aél:ion de vol. ne corn. péroit pas ,concr'elle. Uxor expilatœ. hœreditatis crimine id
circo non accufatur, quia nec farti cum eâ agitur. L. ~, if.
. de crim. expil. hœred. La même chofe réfulte de Id Loi 4,
au code du même tirre : adversùs Ilxorem quœ foeia rei humanœ atque divinœ' domus Jufcipitur, mariti Jucceifores expilatœ
hœreditatis crimen intendere non poJJimt. L'on trouve les
mêmes vues & le même développemenc dans la 'Loi 17,
cod. dé furtis. Cette Loi ne donne égalemenc aux héritiers
& aux enfans que 1'aél:iàn in rem cancre la veuve, Juper
his quœ de patris honis poffidet.
,
La veuve avait-elle recelé ou diverti, pour fruitrer un
tiers qui n'éroit ni enfant ni fucceffeur du inari, qui ne"
tenait pas [on droit de lui? C'était autre chofe. L'on ne
trouve aucun texte qui refufe l'aél:ion à ce tiers. Il eit dair,
au contraire, que dans ce cas l'aél:ion fameufe devoit compéter cancre la veuve, puifque même pendant le mariage,
conjlante matrimonio, l'aél:ion de vol compéroit au tiers contre la femme" quœ rem viri Juhripuerat, au préjudice du
tiers, cui eam vil' commodaverat; c'eit la déci lion de la
Loi 28, if. de ac7ione rel'. amot. Ainli tout ce qui réfulte
des Loix romaines, c'eit que les fucce1feurs & les enfans
du mari n'avaient point l'aél:ion expilatœ hœreditatis contré
ia femme, attendu qu'étant l'image du mari) ils ne devaient pas pouvpir ·ce que n'àuroit pli le mari lui~même.
Les mêmes rai fans 'd'ho~nêteté & de convenance n'exiftoieht pas pour les tiers qui n'étaient pas le mari, & qui
ne le repréfencoienc pas.
,
En France nous penfogs également comme les Romains,
.que tout recelé eH: un, vol, & mérjte d'être' innruit pa~
-
�:P~
Jou RNA L,
la voie criminelle. L'ancienne jurifprudence diO:inguoit deux
cas: l'un, lorfque l'aél:ion de recelé étaie uniquement di·
rigée contre la veuve; . l'autre , lorfque l'aél:ion de recelé
étoit intentée indéfiniment fans défignation d'allcun coupable. Dans le premier cas, on calToit la procédure, fauf
à fe pourvoir par la voie civile, ainfi' que cela fut jugé
par l'Arrêt de 1600 rapponé par Louet. Dans le feC<lnd
cas, c'eO:-à-dire, quand, l'aél:ion de recelé étoit intentée
indéfiniment fans défignation d'aucun coupable paniculier,
on jugeoit qlÏe J'aél:ion crjminelle' compétait. Mais il arrivoie de deu" chofes l'une '; ou que la veuve fe trQuvoie
chargée par les informatio'ns ~ ou que l:on découvrait des
Clomplices ; fi les informations t;I'incriminoient que la veuve,
on con~ertilToie les informations en enquête; fi on découvrait des çomplices, alors' ou ces complices avoient recelé de l'ordre de la veuve & à fOQ profit, ou ils avaient
recelé pour leur ~ompte particulier. Les complices avoientils reéelé de l'ordre de la veuve. & à fon profit? On .
civilifoit quelquefois envers toutes les parties, & c'eO:.
l'hypothefe d'un Açrêt du 19 Avril 1698, rapponé dans.
le Journal des Audiences, & rendu fur les concluÎlons de
Mr. l'Avocat-Général d'AguelTeau. Cet Arrêt civilifa envers
'toutes les panies, attendu, difoit ce' grand Magilhae, que
les complices n'avoient fait qu'exécuter les ordres de la veuve,
n'avoient de rien profité, (,. n'en étaient accujès. Etaie - il
prouvé au contraire que les complices avoient diverti des
effets à leur profit particulier? La 'procédure, était continuée contre eux, & li on la' civilifoit, ce n'était qu'à l'égard'
de la veuve ou de la femme; c'eO: ce que jugea l'Arrêt
rapporté par Boniface, tom. ~, pag. 433.
.
Ainli dans le dernier état de la jurifprudence françoife,
deux chofes font certaines: 1°. la voie criminelle compete toujours, même lorfque la plainte n'el! dirigée que
contre la veuve, fauf 'dans 'ce cas la converlion des informations en enquête; 2.°. non feulement la voie criminelle
compete, mais elle en, fuivie & continuée fans efpoir de
�.
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PAL AIS
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PRO V Il N C l!.
3 r \)
<:ivilifation , lorfque les, faits font très - graves contre la
veuve, ou lorfqu'elle a des complices qui ont recelé pour
leur compte. Dans le fait aél:uel l'on réclame les deux eXT
ceptions marquées par la jurifprudence; faits graves qui autarifoient l'information contre la veuve, quand la pl~inte
porteroit uniquement contre elle, enfuÎte complices étrangers
contre lefquels l'aél:ion criminelle compete de droit, &
dont l'adionél:ion ne permet pas de divifer l'infiruél:ion, fi.
l'on ajoute à cela que l'accufateur n'efi ni l'enfant du mari,
ni fon image, ni fon fucce1feur. C'eH un collatéral, un légitimaire qui ne tient rien du défont, qui tient tous fes
droits de la Loi, un vrai tiers qui eH à l'inHar d'un limple
créancier de l'hoirie que l'on a voulu tromper & frauder.
. On difoit pour le lieur Lagier, que les titres dont il étoie
muni ne pouvoient être attaqués que par la voie de l'infcription de faux, parce que pour tout ce qui touche aux
c1aufes des conventions, pour tout ce qui y eH fpeci é &
déterminé, la preuve par témoins efi toujours irrécevable.
Or l'accufation d'expilation, efl: une accufation compliquée
. de faux & de fuggefl:ion, à la faveur de laquelle- on a cru
fe ménager une preuve toujours illégale: quels inconvenients,
quels dangers ne réfulteroit-il pas d'une telle preuve? Lorf.qu'il s'agit d'une plainte en fuggefl:ion, il faut articuler des
,faits; lorfqu'il s'agit d'une infcription de faux, il y a des
regles prefcrites ~ l'accufation, & des peines prononcées
,d'avance contre fa témérité. Ici fans articuler même des
f~its, on attaque direél:ement des titres écrits; on ne s'expofe à aucun- danger; on s'éleve contre ce que la fociété a
-de plus refpeél:àble; on n'a pas même préfenté .d'abord
cette aél:ion comme une plainte 'en fuppofition de créance;
c'étoit une fuhtilifation d'aél:e, c'eH-à-dire, une véritable
.[uppoGtiolT de volonté, fi l'on veut, qui a été dénoncée.
Si l'on eût préfenté l'aél:ian au civil, fi l'on eût attaqué
:les aél:es mêmes, on aurait été tenu de produire des indice.s graves, des préfomptions violentes; on n'a pas même
()bfervé les regles; après c~la qu'importent les charges de.
•
�"3 20
JOU RNA L
la procédure? Leur prétendue importance ne pourrait compenfer leur irrégularité; du reile, indépendamment des citres du fieur Lagier, l'état de rai fan & de liberté du fieur
Roquefeuil, & la légitimicé des créances qu'il a reconnues
au fieur Lagier, font évidemment prouvés, foit, par l'information, foit par l'inventaire.
Mr: l'Avocat-Général de Moncmeyan obferva que la veuve
Martin fut l'époufe d'Antoine Roquefeuil; & c'eft la, plus
proche parente de Roquefeuil qui la pourfuit, & c'efl: en
,quelque forte au nom d'Antoine Rçquefeuil, au nom tie
fan époux qu'on la po~rfuic; c'eil d'av'oir trahi la confiance
de cet époux après fa mort, c'efl: d'avo~r diverti les effets
de fa fucceffion qu'on l'accufe. Mais que n'a pas fait cet
époux bienfaifant pour mettre fa femme à l'abr,i, on oe
dit pas feulement des pourfuites qu'il n; pas pu prévoir,
mais des impucacions & des foupçons même! Il ne lui a pas
laiJré fimplement le droit qu'a toute veuve de réclamer
,tout l'honneur qu'elle peut tirer de fa mémoire & de la,
dutée d'une union que la mort feule a pu diJroudre, & qu'i
n'a jamais été troublée p'ar aucun nuage; il l'a préférée à
toute' fa famille qui ore aujourd'hui la petfécucer à fan occafion; il l'a inilicuée' fon hériciere univedèlle; en forre que
c'eil à la fois la veuve & l'héritiere d'Ull homme qui' n'dt
plus, à qui celle qui fut aucrefois fa plus proche alliée,
reproche aujourd'hui d'avoir trahi la probité,Ia bonne foi
conjugale, & qu'elle POUt fuit au nom, d'une hoirie qui
n'exiHe plus' que fur fa têce.
La ,poficion dujieur Lagier n'eil 'pas moins extraordipaire:
dl-ce parce qu'il fùt le plus incime, ami d'Antoine Roque.:
feuil, qu'il n'a pas aujoutd'hui de plus cruel ennemi que fa.
famille, qu'il eil 'à leurs yeux un impoileur? EH-ce parce
qu'il eil créancier de cene hoiriè :qu'il feroit attaqué crimi>,nellemenr par celle qui n'auroit après tout qu1un incérêt fe,condaire'f 'un tiers d'iJ]térêc aux frippopneries précendues
qu'on ofe lui reproch~r,' & qui \\'a pas' même le droit d'ën
e-xercer les aaiou~? ,Cornmeut a1Ieou: le. deçret 'le. plus rigoureux:
�DU
[
PALAIS
DE
P'itOVENCE.
321
goureux fur unè procédure ha(ardée? Comment ce qu'on
ne doir pas même regarder comme un délir, peur-il être
pour(uivi à la maniere des grands crimes?
Tous les jours, quand il s'agir de décrérer, on n'a pas
feulement égard à la qualité de l'accu(é, mais aux rappons
& aux relarions qui peuvent exifter enrre l'accu(é & l'accu(areur lui-même. Ainli les décrets lonr moinq (éveres entre parens, efltre alliés, entre amis même, parce qu'on (uppore que quelque vive que (oir la paffion qui fait paffer le
}?laignant pardeffils les nœuds qui- Ifuniffoienr à celui qu'il
pour(uir, c'eft plutôt une réparation qu'une peine qu'il demande, & que parmi celles-ci il ne doir jam~is choifir la
_plus arroce.
Autrefois l'autorité barbare qe quelqu.es criminaliftes avoir
établi cette maxime, que plus un crime érair grave & même
atroce, plus l',accu(ation & les preuves devoienc en être facilement & même légéremenr admifes, & par con[équenc
plus i'inftruétion en étoit (évere. La raifon & la philo(ophie
- donr les progrès (one encore' plus tardifs, ce femble, dans
les fociétés que dans les individus, onr enfin deffillé les y~ux
fur toute l'horreur de ce principe, & l'on a découvert avec
un étonnement donc on devoir rougir, que la propofition inverre étoir préciféchenc la vraie. AujollCd'hui l'invrai(emblance
de la pÎainre doir toujours rendre le Juge plus circonfI)eét,
& (ur-tout plus modéré, quand il s'agir de prononcer contre
l'ac'cu(é: or, eft-il qu~lque accu(arion qui en préfence de plus
frappantes?
Eil-ce affez pour colorer uné accu(lition invrai(emblable,
poui expliquer un fair étonnanr & difficile à croire, que de
pré(enter des (oupçons & même des idées fur un fait, finon
plus extraordinaire, du-moins plus criminel, (ur une' açcu- .
fation beaucoup plus grave encore? Il e!f peur-être pey d'accu(ations en expilation dans lefquelles on n'ait pu auffi la
reprocher à la veuve ou à l'héritier; elle n'eft pas plus cri.
minelle que le fait, parce que fe fuppo(er des ritres de
propriéré ou agir en propriétaire, q;lOiqu'on ne le foit pas,
,'eil à-peu-près la m,ême chofe; elle eil moins dangereu(e
Années t 77 5 & fuiv.
S 5,
.
,
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que lé' fait qui peut demeurer fouvent caché; au lieu qu'ul\
titre fuppofé Ce décele & fe dénonce prefque toujours luimême. Ici l'on a de plus ql!e dans tous les autres cas,
qui n'one cependant pas produit de décret auHi rigoureux que
celui dont Anne Martin fe plaint, l'invraifemblance préliminaire & frappante de la fuppolition dont on l'accufe: rienne paroiifoit donc devoir Di pouvoir même amener ce rerrible décret, ni dans la qualité des perfonnes, nï" daus le
titre & l'énonciation de la plainre elle-même.
;
Mr. l'Avocat-Général difcu-ta enfuite les charges de la procédure, & rrouva qu'il y avoit des invraifemblances choquantes
dans le fonds même & dans les détails-des dépolit ions les plus
importants; il paifa enfuire à l'examen des griefs de nullité propofés conrre le corps enrier de la p.rocédure. Dans les Loix
Romaines, obferva-t-lI, c'en. avec une forre de refpeél: & de
_ vénération qu'elles parlent d~s nœuds facrés quilient les époux;
par-tout elles les conliderent comme ne formant qu'une
feule perfonne, & leurs droits comme fe confondant pour
ne former qu'une propriété commune & indivife. Ce qui
efl: à l'un 'doit être conlidéré comme appartenant à l'autre,
même dans l'ordre ,civil , ainli que dans l'ordre fpirirue1,
& c'eH de ce principe que part la Loi Romaine, pour éta~
blir que la femme pe'ut avoir contracté pendant- la vie de
. fan époux, quoique celui-ci fait le vérirable maître, l'habirude de l'empire & un fentiment de propriété qui peuvent.lui furvivre; que l'un & l'aurre peuvent être aifez forts pour
excufer des fouHraél:ions réellement injufl:es, mais fur la narure
defquelles la veuve eorraînée par un long ufage a pu fe faire
illulion.
,
Le premier fentiment qui s'éleve dans. l'ame en pefant
les motifs' de la Loi, reIs que l'on vieor de les rapporter,
& reis qu'on les y trouve réellement; porte à penfer que
fous quelque point que la Loi préfente ces dérraél:ions prétèndues de la veuve, elles foor pourtant un peu fortes
& un peu fâcheufes, & que l'on pourrait ainli- excufer
bien de larcins & jufl:ifier pluliellrs fortes de voleurs. Il y
a donc plus de fubtilité peut-être que de jufl:eife qans ce
�.
DU
~ALfIS DE. PROVENCll• . ·3!.3
motif que la LOI pretend aVOIr d'excuf~r les expltations
dont on accufe les veuves; cependant il ri'a pas laiffé 'que
de nous toucher par un air de fimplicité & de bonne foi
antiques. T. Ile eft l'idée que paraît s'être formée le Légi!lateur de l'union conjugale, apparemment dans.des temps
plus heureux, qu'il la regarde comme furvivant en quelque
forte aux ~tteintes terribles du trépas, & qué la veU\'e habitant encore les mêmes lieux où elle a vécu avec fon époux,
& 'toujours remplie de fon idée, lui parott devoir quelque-'
fois fe livrer naturellement à cette douce & cruelle illullon
qu'elle n'a· encore rien perdu de fOll bonheur & de fes
. droits. La Loi repréfenre la veuve dans les premiers mouvemens de fon déféfpeir, étendant les mains vers tout ce
qui a appartenu à fan époux, comme vers foo époux luimême, cherchant à fe déguifer toure l'étendue de fa perte,
& 'à oublier, en l'environnant encore de tout ce dont fon
époux la faifoit jouir, qt.;'elle l'a perdu lui-mê,me.
-.
Cette confidération eft pleine, de douceur & d'humanité;
cependant quoiqu'elle puiife gagner à être préfentée fous ce
fecond point de vue, on ne peut nier qu'elle ne fatisfait point
eoriérement, & il ne feroir point impoffible, ni méme difficile
de J'attaquer auffi av'ec l'arme dangereufe du ridicule; on. pourrait dire, par exemple, que la douleur qui s'arrête ainfi en chemin, & qui fair fe choifir, meme dans fan plus gràud égarement,
dès confolations Ii lolides, n'ell pas une douleur infenfée ; que
le plus fûr moyen d'oublier réellement & même affez vÎte tlO
époux, eft de s'arracher fortem nt aux biens qu'il nous laiife, &
que les héritiers, qui doivent coujours être les perfonnes les
plus affligées du monde, puifqù'ils pleurent leurs bienfaiteurs,
fe confolent en effet ainÎJ. Auffi ne fom-ce pas.là les feuls
ni n,éme les vrais motifs de la Loi Romaine dans cette
efpece de faveur qu'elle témoigne aux veuves; elle eH fondée
fur une connoiffance plus profonde & plus raifonnable du
véritable état d'une veuve, fur la compa'taifon de ce qu'elle
a été du vivant de fon époux, & de ce qu'elle eH après lui,
Pendant fa vie, .elle écoit l'être le plus privilégié, comme le
plLls cher de la nature.; elle étoit fous fa pro[eél:ion immé.
.
S s ..
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.
J
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t1 RNA L
,
diare & indéfinie; après fa morl: perd-elle tous fes privi~
leges, & n'a-t-elle plus que celui de fa foibleire qui IU'Î affure
la commifél:il!io{l ges Loix?
Quoique l'aérion plL\s rigolireufe, connue chez les Romains fous le nom de rerum amotarum, foir donùée contre
la femme qui a, .exp'ilé à une époque voillne du divorce &
. en s'y préparant" on ne peur en rien conclure concre la
veuve, & la polirion de ceJle-ci efl: toujours plus f"vorable ;
car la femme qui fouitrait des effers dans le voilinage &
dans l'idée du divorce, les founrait pour en jouir Cns fon
mari & conrre le dro 't de propriété de celui-ci qui ~a devenir exclulif; au lieu que-celle qui n'expile qu'après fa, more,
veut feulement continuer d'en jouir après. lui; & ne paroÎt
pas avoir entiérement perdu encore fon droit de co-propriété apparenre. L'l décilion de la Loi Romaine n'efl: pas
feulemènt une décil10n induire ou cO,mmentée par la raifon,
mais une décifion précife & rextuelle.
,
Il paroît d'abord bien fingulier que nos mœurs, plus douces
que celles des Romains, comporrent des Loix plus aufl:eres
-,oorre la parrie la plus foible du genre humain. S'il faue
compter de part & d'aurre le nombre des Arrt~rs, qu'on
compare les uns aux aurres; & fi des Arrêts plus multipliés femblent annoncer une Jurifprudeqce plus, cerraine .&:
plus conitante, une infiniré d'Arrêrs calTent des procédures
en expilation prifes contre des veuves ou des héritiers;
peu même ont adopté le parri moyen de les converrir en
.enquêtes. ' L'Arrêt qui intervint fur les conclulions, de Mr.
Lenain, réferva feulement l'aérion civile; celui de 1715
confirma une procédure eQ. expilation prire conrre une veuve;
mais ces deux Arrêts ne peuvènt l'emporter fur l'autorité
de tanr d'autres contraires. Dans la contrarié ré évidente des
décilions, celle qui a le plus fouvent triomphé, doit triompher eocore aujourd'hui, & 1'00 doit chercher du-moins à
découvrir dans les circonfiances particulieres du fait les motifs de cette' contrariété qui n'efl: fouvent qu'apparenre; c'ef!:
ce
ea arrivé précifément dans l'hypothefe de l'Arrêe
unique de 17 l 5; l'on 'apprend par les' détails qui one été
qUÎ
.
/
.
-
.
~
�h u PAL AIS t D~ PRO v il Nell;
~'25'
'tratïfniis· fur' la-·cond;itede·1:étre· veuve, aux privilegc! 'dè
-laquelle.l'Arrê l' piiruf 1n!avé·ir auclHi'~égara, 'qu'elle' "avoir, réellement mérité d'en être privée par' fan indignité .perfon
- • .J r
~
n.') lW"
ne 11 e.' "
Les Arrêts. que l'intimé a cités, com~1e paroijfar;rV êrl.l~
-blir une opinion c~nt{a~r~: font tous inter'venus en J é1fef'ti1Jns
des l':Ïrconfiances bren-' différentes, Les uns - ont 'confit1l\~
des procédure prifes'ëont~~ des pêrfonn'è'!;" qui 'avoie'n'r e,,.pilé fans présexte '. fans titre; & n'étant' point héritiers,
rien ne diflinguoit leur expilation des 1--arcins ordinaires; ces
ftnêts o'nr tous) fiJg'elhenr prononcé ,'lfuais leur am,cirité efi:
inapplicable. D'autres -olrr:·permis ,de p'ourfuivre criIn'inelle·ment. des foufhaélions faires du ,":iv3nt· de 'eelUl' auquelYexpilate'ur a ehfûire'CLiccé'dé, é'efl'là-dlre dans'un temps où 'il
nlét·oit- encore invefii d.'aucun ·titre '€le propriété même partielle. Cela efi encore bien différen r ; la qualité de coHéritier
ne peut pas- aVbir 'un effel' rérroaélif, & ce q'o'pn a'voit pris
ifi: toujours très-difi:ihél & crès-féparé de .cf! à quoi' on a
fuccédé: Mais après la mort du teClateur, le cbhéririer pu~
& fimple étant co-propriétaire de tous lès effets de la fuc- ceilion, 'n'en peut foufiraire aucun fans fe voler en quelque
r .forte lui-même; de forte q'u'il y a dans toutes fes. expilatians "s'il efi permis de s'exprime~ ainfi,- une certaine portion de .jufliae & d'innocence à laquelle les Loix. o"nt attribué l'effet, non pas de l'excufer _entiérement de dol &
de fraude pour tout ce qu'il foufirait au droit de propriéré
des autres cohéritiers, mais de le mettre du-moins à l'abri
de la voie rigoureufe & extraordinaire de l'information; car
il femble qu'il répugne en effet ô'êrre en même temps propriétaire d'une partie d'un même effet-, & voleur de l'aurre;'
. il convient au contraire à la douceur na:turelle ·de nos
Loix, dans une 'aélion mi-partie en quelque force de droit &
de dol, de fe décider pour le parti le plus doux, & de
vouloir qu'il ne l fait permis de pourfuivre que comme une
extenfion & un abus de droit, ce qu'on peut conlidérer Cil
partie fous ce point de vue. D'ailleurs le .tirre de co-pro-'
priétaire n'efi pas feulement un moyetl de jufiificiltion ~ oq
v
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...
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du-moins uDè eCpece cj~~xcpC~j>Ql1r çe:luientre' leS) mains de
qui on' trpuve un 'effe,,;,fur lequel BluHeurs cohéritiers ont
des droirs concurrens; il efi d'ailleurs un rirre d'union entre
ceux qui le portent égalèmeDr; il équivaut, fuivant la Loi, à
UDe véritable fociéré.
;
On s'en quelqllefois contenté de civiliCer -des procédures prife~ contr~ des, vc;uv~s accuCées d'expilations, & c'efi
la moindre faveur, à laquelle elles pui1fent s'attendre; mais
ell~s n'éroient point héritie~es jllftit~ées ge la fucceffion
qu'on leur reprochait d'avoir dilapidé. On a pu quelquefois
lai1fer fublifter comme preuves civiles les informations prifes
contre des héritiers trop ardens & trop habile~ à s'aVilntager
a,u.x,d~'pens de leurs, rivaux, quand leurs fa firaélions on't furtout paru énormes; mais ils ne· pouvoient pas exciper d'un
privilege auffi favorable &. auffi étendu que celui que la
veuve' tire de la fociété dans laquelle elle a vécu avec fan
mari ,. &, de -la polition dans laquelle elle Ce trouve encore
vis-à-vis de la famille qui la pourfuit; ces deux qualités de
veuve & d'héritiere fe prêtent mutuellement une nouvelle
force; & leur effet f~paré étant prefque toujours d'anéantir
les procédures prifes cancre les perfonnes' qui Ont feulement
l'une d'entr'elles, leur effet combiné doit être immanquablement, de I<'s anéamir, fans qu'on puiffe leur oppofer aucun
prétexte, & quelles que foitP.t, les circonftances. ,
Mr. l'Avocat-Général cenclut à ce que faifant droit aux
appels du fieur Lagi(>r & de la veuve Mar,cin, les décrets
de prife de corpst~ollènt déclarés oppreffifs, & celui de
foit-info'rmé caffé, comme nul,& mal obvenu, avec dommages-intérêts, en faveur des .accllfés, tels qu'il plairait à la
Cour de les fixer, fauf à Jean Peire de fe pourvoir ainli &
pardevant qui il appartiendroir.
Arrêt du 26 Mars 1778, prononcé par Mr. le Prélident
de Sr. Vincent, qui déclare le décret de fait-informé nul,
& comme rel le ca1fe, [ans dommages & intérêts, fauf audit
Peire de [e pourvoir ainli qu'il app,arriendroit; le condamne
en ourre aux dépens. Plaidant Mes. Simeon J. Gaffier' &;
Portal.~s.
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P 10 VEN CI!:
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ARRÊT
XL.
Les Officiers de l'Amirauté ne connoij/ènt pas de la demande
en paiement de la f rente des hourdigues.
. 1• ....•
•
P
Ar aéle public du 24 Mars 1774, le Marquis de Marignane donna en arremement au lieur Graner, Bourgeois,
fous le cautionnement du lieur Mouren, Cafétier, tous .les
deux du lieu de Marignane, les deux bourdigues placés entre les
deux étangs qui l'avoilinent,· moye.nnant le prix de 12S 0liv. par an; cet aéle portoit la c1aufe de foumiffion à toutes
Cours. Ce Fermier éc'ant en arrérages, le Marquis de Ma·
rignane .le fit affigner pardevant le Lieutenant-Général ail
Siege d'Aix, & obtint contre lui une Sentence ,par défaur.
Le lieur Granet en appella pardevant la Cour, & le Tribunal de l'Amirauté de Martigues intervint dans l'inUance.
On difoit pour le fieur Granet, que le point principal de
la quefrion & du doute confiUoit à favoir li les contefia_
tions qui s'élevent entre le' propriétaire & le Fermier d'un
droit à percevoir ou Il recueillir fur la me.r, doivent néceffairement être, jugées par les Officiers de J'Amirauté. Les
Sieges d'Amirauté font des Tril:iunaux privilégiés qui, fuivant la nature même de' leur inHitution & la Loi qui fixe
leur Jurifdiélion, qui en détermine l'étendue, doivent con- noit're-de l'exécution de-tous les contrats maritimes, à plus
forte raifon des droits qu'on réclame & qu'on exerce actuellement fur unè partie de la mer; & leur compétence fur
ce point n'dt pas feulement déduite par voie d'extenlion 011
de conféquence de leur compétence fur d'autre~ objets relatifs ou même moins déterminés; elle efi textuellement
établie par l'Ordonnance de la Marine dans le titre qui' dé':'
taille & qui définit .les matieres dont ils connoitront pri111ativement à tous autres' luges.
.
.
'.. Connoînont encore. ( lefd{ts Officier~) des droits de
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cr
U 't
" congé & de ceux qui feront levés ou prétendus par les
" Seigneurs ou autres particuliers voilins de la mer fur les
" pêcheries ou poiifons, &c. " Ces deux derniers droits
fane précifémenr ceux que le Marquis de Marignane a arrellré, & dont il veut aujourd'hui fouflraire.1a connoiifance
au Tribunal de l'Amirauté, contre la teneur expreife de cet
article. Les deux autres expreffiotis du même article, levés
ou prétendus, préviennent l'unique. exception qui pourrait
refler au Marqùis de Marignane, & prouvent' que ce n'~l!:
pas feulement de l,a nature & de la légitimité de ces droits
que des Officiers de l'AmÎrauté doivent connaître, mais des
contel!:a.cions légeres même qui peuvent s'élever filr leur
régie & fur: leur perception autorifée. 'Valin le décide bien
formellement, lorfqu'il obferve fur ce même) article, que
tou'tes les caufes de cerre nature font de la compétence
de l'Amirauté, fait pour décider fi c~s droits font' légitimément. dus. pu, non, fait pour cohtll1mn~r au:paicinem ceux
qui en! font; ·redevables.
• (10
•
Quand on étab1i-t un droit auffi conflant, quand on a des
téxtes fi formels, il 'paraît aifez inutile de recourir à la
J uiifprudence & à la pratique: Les fleurs Granet & Mouren'
t)e fonl- poin't cependant privés d~ c'e'tHavamage .frivole dans
les èirconflances; ils peuvent oppofer oe' qu'on a conflamment pratiqué..
_1 •
Le~: moyens d'intervention que prop0foient les Officiers
de l'Amirauté, fe confondoiene avec ceux d'incompétence allégués' par les fleurs Granet & Mouren. Leur intérêt ( difpicne-ils ). n'ell: pas fufceptihle .de doure;. les.Juges en ont
tQujours un .très'-preifant.à fe cdéf~ndre 'des ufurpat.ions de
leûrs rivaùx; le titre même de lIugès careufui'rèS donC on cherche à leur faire un reproche, efl leur dcure'; & plus leur' Ju- .
rifdiél:ion ell: reiferrée , plu~ chaqu,e ufurpation les appa'uvr,it;
plus leur réclamation, q~elque ,vive'qu'ellè fait, devien't jufle
& favorable: Un intérêt public 'du .premier ordre~ & bien
différent de celuiTlà même qui' el!:' à coup fûr toujours bJeifé,
dès que l'ordre {acré des Jurifdiél:ions·.ell: interverti, fe' joint
encore à l'intérêt
particulier' qu'bot
les Offièiers de l'A 01 i..
1 raute
~.
1
,
�,DY PA.LAIS DIl PRov.Il'NeE..
329
t-aùté' ~ 'défendre leurs propres limites; ils font les gardiens,
les défenfeurs privilégiés & natureLs eux-mêmes de ce principe du droit naturel ,qui rend la mer libre, indépendante,
& l'ufage de fes eaux '&' de fes. rivages commun à tous.
L'ufurpation peut fe déguifer plus aifément" auprès des
autres Tribunaux moins inHruits des maximes gui la 'profcrivent & qui la repoulfent. D'ailleurs ceux - ci ne peuvent pas merire comme eux une gloire perfonnelle &
locale à' maintenir les privileges de cet élément, qu'ils
ne font pas a'ccoutumés à, 'comprendre dans l'érendue de
leur relfort, & done la noblelfe & la liberté rehauITent en
quelque forte l'exiGence des Sieges de 1'4mirauté qui la dé':
fendent & la gouvernent. Enfin le texte précis de la Loi
leur ',ltlribu,e bien exprelfément la connoilfance de la pêche
qui fe fait fait en mer, foit dans les érangs falés, ou à l'embouchure des rivieres, coml11e auffi celle des parc's & pêcheries."
•
: On répondoit pour Mr>lle' Marquis 'tle ·Ma~jgnane, qu'il'
ne faut pas confo.ndre lès êon'teHations qui peuvent s'élever
fur la légitimité, la nacore, & niême l'ér~ndue de ce que
les' fieurs Granet, &. Moùren appellent un droit maritim~, &
ce q~i ne touche qu'à l'exercice paifible de ,ce droit, ce qui
n'éH fur-wut, que l'exécution d'un conrrat 6rdir;1I-ire, d'où
n~ .peùt naîrré qu'une aétion ordinaire" ce qui 'he s'agire
q'u'encre le, propriétaire & fon fermier, c'eH-à-dire; .tin autre,
lui-mêml1. A, la bonne heure, ,fi les valfaux du Marquis de'
Marignane~fe révôlroierit aujourd'hui conrre ce privilege donc'
_ jls one enduté fi long-tems la gêne &' refpeété le" 'caraétere
'exC!ufif9 tjuerfes":6flllSers.de l'Amirauté, filrveillanrs particultierSl ~rigl>uretfX i1ec Ia~Plajlfandè & de l'illégalité immortelle'
clèllces[,l~ro.Îrs"l.'ptGtetgellfs nés de: la liherré de l'élernenc
le,..plus lib're .de' lOllS, & chargés de défendre nos nvages
conc1<t .Ies1,ufurp'a:tjons ·de l'amb-hion & de l'avidiré, pulfent
rét!a~rrlalcOt:lntli4li:lil'c8'''de'céJ~e, Importante querèllè'; q~'ils
le pulfellr. encore da':l~ le cas 011 le marq)lis de M~rjgnan\t
donneroÎLuoe ,tl»tênfion~miufie à uni droit légitime en 'lt1j~
même ~ danS' ~elùi,-fuNout ,oÙ fun exerciœfûrieHe & 't)'nin~"
.Annics t775 & fuiv.
Tt
�~o
-,
10UR~Ai
mque anéantiroit le dr:.oit naturel que les ~clieüis ~& Jd
)loifins ,de la mer tiennent de leur polltion, de leur indu[hie, de la nature. Alors s'ils voyoi~nt facrifié 'à ,l'utilité
d'un feul ce qui peut fervir de re1fource à une multitude
d'hommes qui n'en ont fouvene paine d'autre fur la terre,
ils pourraient fans doute employer leur zele & Jeur pouvait
à faire revenir la paix, l'égalité, ou du-moins une concurrence fupporeable .fur ,la mer, comme fur feur véritable
territoire.'
, ,
Mais dans le procès aaQel il ne s'agie ni du draie malieime lui-même, ni de fes excè~, ni de fes abus. Quel
r~ppore peue avoir .l'exécution d'un bail à ferme, d'un con~rae foumiffioné, avec ce qui ell: ~u re1fon ordinaire & naturel du tribunal de l'Amirauté? Le Fermier du Marquis de
~arignane ,en qualité de fan repréfencant, de fan mandatilire, ne peut même élever aucuge de ces quell:ions-' qui
rendrait l'intervencion de ce tribunal néce1faire ou feulement
~onvenable: d'ailleurs en fait, il n'en a élevé aUC.I,me; il s'.ell:
~'o.~da~né lui-même par- fOflJ filence, avant d'avoir été condamné par fan Juge ,naturel.
Les Officiers d~ l'Amirauté interpretent mal les textes qu'ils'
one cités; s'il§ penfene que ,ces texteS fuffifene pour fonder
Îeur compétence, & jull:i{ier 1a précipitaeion un peu bafardée
avec .!aquelle ils font vepus, fe mêler d;lns la .querelle, la
!-oi ne leur attribye gU'!Jne compétence déterminée &;
gouvernée parles. pril)cipes que l'on vient d'établir, & Ces.
expreffions ne difent rien de plus; elles les conll:ituent
{eulemene gardi~ns privilégiés ,des. franèhifes de la mer &;
<le fes rivages, Juges, fi l'Qn veut, des .réclamati<ins que
peuvent ex~irer des droits trop légéremept établis',. ou trop'
rigoureufement perçus, mais jamais des mauv,aifes difficultés
que peut élever l'homme chargé de )es' percevo.ir, ou. qui
en a abqnné le produi~ avec un propriétaire légitime, paUli /
(e di(penfer d'en rendre compte, al! d'en bire pàre à. cèluÏl •
!,Ll nom de qui il a jp'ui. 1 •
'J.
.1
Mr. l'Avocat-Général 4'~ymar de Montmeyan .commença,
t'ar difcucet !e.s· eirr~~ pro_Q!ljc~ par I.es Officiers de l'Ami~
.\ .
/
�nu PALK1,~ DEl: P'RovENCE.,
'33-1
nbtê';lèonfrHan't'en deux Ahéts du Confeil des'7 Juiçn657
tic 2.2. Sep~embre 1768, & dans les Lettres-patentes de l'année
1712.', par leCquels il réfuhe' feulement le droit' qu'a ,le
TTibunal de l'Amirauté de· vérifier les don,s qu'il plait à Sa
Mâjefie de faire à différents Seigneurs de quelques' droits
& privileges particuliers fu'r des portions limirées de la mer
& de Ces rivages, & de veiller égaiement à ce que le defpotifme, privé de ceux qui ont obrenu de pareilles faveurs,
ne leur donnent point une extenûon dangereufe & -funelle-,
càmme auffi à ce que l'efprit de jaloufie & de mutinerie
des valfaux' ne le.s portât pas, fous le prétexte fpécieuf
que de pareils privileges reiferrent leur liberté, & les ·pri.:.
vent d'une partie eifenrielle de leur relfource, à méconnclÎlre
l'autorité augulle & fouveraine dont ils font émanés.
En effet, depuis que la liberté de la mer & de Ces rivages n'a pu être defendue par le droit naturel & par Pefpece de ridicule même qu'il y a à prérendre un domainê
. réel, une poifeffiori connante fur l'élément le plus mobile
& le plus impétueux; depuis que 'les Empereurs romains
ont donné d'une maniere fi éclatante & pour un frivole intérêt; l'èxemple de violer cene Loi facrée à laquelle .ils
avôient rendu eux-mêmes l'hommage le plus foleinnel, &
qui veut que l'ufage des rivages de la mer fait commun
à tous, que les tributs de fes eaux foient comprés au nombre
de' ces richeifes que l'indufirie & l'aaivité perfonnelle peuvent puifer encore au fein de la nature; depuis que nos
,Rois eux-mêmes, bien plus tlompés par leur généroûré &
par leùr bienfaifance naturelle, que par ce' principe équivoque du droit public qui veut que les bords de la mer leur
appll·rtietinent, ée qui ne peut être vrai que pour 1e haut
qômaine, & dev'ant chercher avec d'aurant moins ·de peine
à étendre & à conoohre leur droit de propriété, qu'ils ne
-cherchent par là qu'à -multiplier l'objet de leurs ,dons &
de leurs 1argeifes, ont partagé le domaine honorifique, incertain '& Cur-tout toujours libre de la mer' en une multitude de domaines particuliers abColument ellC!uûfs & def..'
'potiques, ç'a été fans doute un grand bien que fur ce point
.
Tn.
�331.
• 10
U R. N A Il
.,
k
....
t:om me - filr . rous les autres, ils aient voulu. prendrel. de'
précautions contre leur- bonté & leur magnifiéence même;
que des Officiers de juilice aient été chargés' du foin exprçs
de veiller avec' une attention dont répond, leuN fènmènt.,
& plus- encor~ avec c~[[e efpece. &attaChemènt.'& "de 'ja__
Joufie avec laquelle les' çorps de 'magi{~rature s'occupent des
objets plus fpécialement fournis ~ leur infpeéhcin, à conferver te qui relie encore à la liberté & :.aux befoilis du
peuple, parmi r~ut ce que nos Rois 'ont accordé ,aux.fervices, & quelquefois auffi à l'affiduité & aux' prieres de
la noblelfe, à défendre les drqits pr'eCqu(! [QU'jours méconnus
de' celui-là, coorre les privileges toujours armés de ce'lle-ci,
à Cou tenir la foiblelfe de l'un, à contenir la force de
l'autre, à la réduire aufant qu'il el!: 'poffible à l'intention
du Souverain ,. qui- el!: toujours que fes bienfaits foient .pilrs
& ne nuiCent à perConne., à empêcher qu'on ne les. empoiConne par l'uCage qu'on en pobrroit fair'e',''& fur - touc
en ofant prévenir & empêcher qu'on ne s'arroge d'une auto-.
rité privée ce qu'on ne peut obtenir que par la plus grande
éreé1:ion de l'autorité publique.
.
.',
': Mais e.n défini1Tant eutilité dont les Sieges d'Amirauté
ont~ pu,.~tre depuis leur inililution, en par.coUfânt tÔUS les
pifferens genres de fervices qu'ils Ont fans doute 'rendu, à
l'Etat, à la Cociété, tout leur droit fe réd iit. à la police 'de
,la mer & de fes rivages j encore faut:il que la 'localité des
aé1:ions ou des délits ne Coit pas purement accidétiteUe; à
ta furve'lUance' de's droits maritimes, ce' qui embra{fe 'feur,
~égitimité & leur exercice, enfin à la garde & iau :foih 'de
çe. qui rene encore de fon indépendance paturelle à cet
élément que des mains monelles .prétendent" pofféil'ee &
gouverner, tandis qu'une main divine a befoin de plôyer la
Henne pour le contenir.
-,
.. r
Or rien de cela n'a rapport à une contel!:atiort qlfi's'éleve
entre le propriétaire de deljx bourdigues & fon' Fermier,
& fur-tout à une contell:ation auffi !impie que' cellê qui
ne con dl:e qu'à demander d'un côté le pai:menr.-de deux
1
�M'J'
, ' . DÙ P AL Hg- Di PRO ~ il ~ ci; " .
i1nnée$ .d)arrérages , .& .. à' cle- refufer -de 1 rautt-e ,:.oqù6i9.ij~iot
exiGe entre les deux ilardes "'lin r à&'e l ti'arrefi!e'ïiteM" qui
femble devoir les juger feul '& . faR9 ]Jinter~entioll d',aucun
Œ'ribunal. L'aaion en venu ',de .laq'uel1e le propriétaire le
.poureuit ,. ell: une 'àa·ion ~perfonnélle '-une, àai~n:~li ;ne R~rt
pas feulement de '-ce· que celui '-1.i~~~eul'· él<etcét mi fdrb-i,.
fpatlitime-,. mais d~ ce que lé" Eef-mler l'à' er'c,ê-':el'i:nfo~
nom & pour fon compte; une aaion' qui rêfidè 'rôtlfé 'ënl. .
tiere dans )è contrat folJm'iffionrré';-dë·!forte' l4uê'-l1érf.Il-i->ap'pella nt la furveil1ancè, 'rién n'intéi'e1fant 1Ié5',dt'{)l~slGI<;6aulc
~e l' Artlirallié', ~ién"au~ !ne pâi'O!-t:lft?bil'e,r lf<P«~te"e\!,
lèdroit 'en l\ui-mêri'le! h'-e!l: pa§l'c'OtnproITl-I , c@ qU'ij'rnffirbÎt
pour excitér le~r z~le; l'exercice 1 :'Q"è'nl; ~Il:' pas~rdirpu'çé ;:Oc'e
qui fonderoit leur jurifdiaion.
f' •
• '! 'l"
':
Quand le Marq~is de Marignane' fe' '{e\o1! fiàùr pilféil
cas pourvu' autrefois au Tribunal' deJY.~miriut~\ tèéla ne
feroit point uhe raifon de continu.er à s1' }ÎourvJ5ii- ,'-pme
qu'ayant ..pu fe tromper fur les' yéritltb1'esr.b'6rries:1Bë:l.la jù
rifdiaion de .l'Amirauté, il ne feroit paS'Jobligé '<ièf'fe' trom"
per toujours; l'erreur des partie~, nori p,lus'qùë' leur1cèln!:
vention exprelfe; n'intervertit' point l'o'fare natÎlrëf ·déS' ,uP
fièes; '& comme -éneson'bnr pas lé1aroiè ae·1iFchoifir des
Juges, èllès n'b'nt '·pis ,le pouvoil'Jno'8 1'lu3J dè!J dé'pbltÎl1ed
ceux' ~ qui ellès ont négligé de s;àdrelfer: .q. LI: 'l~rHf'-h
Quant 'à l'O'rCrondànce "'de, fa 'MâTihe')I& :Rlr1'ar't! 4, 'qUl
}Jorre la réunion de ces ,deux expr~ffiolls 1 Id 'a!oits Pfi.. ,
tenaus" où' lt;vës par lès Sei~eurs, Mtl" 1 A'v<1ea -,téhéra~
bb(erva que q&Oiq'lllf~ces~"terrt1es puilfebt prê.r~hrêr qkelqù~
équivocj~e lé~e~e;. il e~:':~e p.rj~èiife; guè: t'c511s~.I.e,~~n\o,~s
employes dans ùne tO! dOIvent' ~tre'l~1fefit~ers ~t m.als l'extenfil?,n exceffiv'e ~è ëe, priiîcjp'e, rguoi~ue 'fi.ge ,G,:féroir' dan!
gereùfe ; 'd'aîllèurs il faudfait'; l'ôte. qù'on' èri:'JjÛt lexc'iper,.
que lé' m'ot- iiont il- ·S1agic ici hé ' pll~ rècevoir':'(\'autl'e'lfigri!;:
ficarian que celle qu'on lui donne. Ce mot lévl's< ,fjOur éi 'à"
ter aù{re~h16i:~pï:~êenjùs'au'~ùel if"èll:l' joint~. célùi :;:Ci·hll~
paroltfoit donnéi' à' '1'Alilii~lI{é'-quell.la 'ConQdi1faQce~d'e' 1
l'
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,.
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,'. ~ "01: ~u ~ Il A(~' 1
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l'''.
~gitiPlitél -des. 4r~i~ ~du-{jfs~ 'rél:lamés p.ar· .Iès ~ejg.rieur'
c'
•
va,lIi!!s. de)~ .,..er·j l'aunre r I~ur ,aŒ~~e celle des con tellations
C)l,ie; ~u~. f'lire. naître liexercice .de ces droits une fojs fup"
po~s l~gitimes" foit. à raifgn, .des extenûons inj!Jll:es. ~ue
pe!!v~ntie1fa,y~r?-c;le~ lel.ur ,qonner desc Seigpeurs trop ·avides t
(oic p r,lif~n ,desJl1lu4es''pu' des entrep~fes auxquelles, leur
exillel!~ej. to
u~s [eflyié~, p,eut' feule porter des .vaffaux trop
inquiets. OU 'trop jaloux.
-~'A!l1irauté a droit, de'connoÎtre de toutes les contella~ion~ 1auxq~Jle5.:peut donner lieu la p.~rceptjon d'un droit
1llariti!l;lef';;J c'ça· çerta!nement )!Ji accorder tout ce qu'elle
p,eut exig~1\ dç plus fav9rable & de,ptus étendu; & cep.end'lntcelle; ne ,pelJt arr}ver., 'même' d'une déeilion li généraIe, à ra réc1âmation particuliere dont il s'agit ici, Là demande., que le· Mar9Pis de Marignane a formée contre fon
fermi~r "ne peut même; ~tre .comptife fous ·cette dénominalj.OI) û":vagl!e. & ..li, llniverfelle. de contellation produite par
la, . p~rception d',Ub. droit maritime..Quelque fecours qu'on
ilie.prétendu .tirer,de l'~P!nion .de 'Valin, quelque favorable
ql\~Oll. la' prétende & qu'elle foit en effet à 'Ia compétence
ge.s: Sieg~ d'Amirauté ~ Valin n'a ni prévu. ce cas parti.
{ulier, p.i. ,prononcé . ~ans. de p,areilles circonllances; .il ne
. p~~e .que du. dt!Ji,t g#qéral qu'ODt ces .Tribunaux de con'"
damner au pai~ment des. droits maritimes ceux qui en
font .re<!evables,i aucun fie· ces motifs n'exille' dans l'hypolh~[e ,a'étuelle.,
. •.
Mr. l'Avocat-Géréral conclut à ce que [ans s'arrêter à
l'appe,I;.de~; .lieyrs Gr!l~et & l'1oujen ,eqvers l,a Semence du
r..ieptena[llt7Gé;né,~·:j" a~"Siege 41Aix" non p!us' qu'aux fins
de),la requ~t<~< en intetveontion. des 1 Officiers ,de l'Amirauté
dt,l.,Ma,rûg9,Cs, y,ppellation fût )mife au néant", & ce dont
rapp~l ,lÎnt &r [ortJt .. fon plein. &] entier' effet, &, au
mor~n ...dl;; çe)IJfû~,,'di~. n'x- 'ayoir~ lieu:~ de PJ~1lQncer [ur.
l:.i!!,ter,vem,ion.\. '1 _
•
J: 1 ; ••••
,.
l
~rr~ du, 2.~. Av,!il, J778, ,prononçé p~r Mr•. Iè ,Premier,
'reflde~., 'lUI, (aIlS. s'arférer à l'appt;~'de Grane~ '& MouJeD t
en
�•
b t1 P At At~ . ~. ,p Jt 0 YB If C .~
.)3,,.
qu'~ l'interv~ntion de 'l'Aft'!irauté, ordpnJ]e ·que
ce dont eLl: àppel tiendra & ·.fortira fon plein :& entier
effet;" condamne Granet, Mouren. & les Officiers de -l'Amiraute aux depens chacun les concernanr. Plaidant Mes._...
IlqD plus
•
(
,
ÂR R·Ë T
.
• 1
'
XLI.'
r- •
La révolu des negres fur -le flaijfèau <Jui aVQi~ -été expédii.Mur
/fIL . faire la traite,. eJl un CQ§ - fo,:tuit d~'Il. a.f!ùreti~ ejl
.tenu.
;
J
_..
~L
r
'-"....
•
10~" ~
L(1 permiffion dl}~lnée- au Cap'itaine de touclzerr.&-fofr,e {dzrUes
en tous lieux <Jlle hon lui ftmMerar, fliutorijè à; rérro- grqder, .pourvu 'l't'il ne change pas;Je voyqge: G- lfil tkftination du Navire.
• ,
' . ' .. H.
..._1.. _1[1':'>
E lieur Salles' expéqia de. Marfe.ille le .1Jfig<lftt.itt; .1'.lJ
- Comte fi' EjlfJÎng, pour a!ler fur, les côtes qe ~j1illée y
,
L
"
~
...
~.
. ......
.r
--
_,~
faire la tra.ire des Degres, & fe rendre delà aux iiles de
l'Amérique. Les 17, 21 & 2'4 Mars 1772 il fe fit affurer
!a fomme de 723°0 liv. ·de, forrie du pert de Marfeille
j,ufqu;aux ifles ,,tr-ançoi[es_de. l' .ç\.m~rique 1; permis .de touçhel'
~)jl r#>çe l.de Gpigée pO,ur filire la -tra!t~('Qe$ negrèS, de
~o~cher ~,f~i~~' échelles ~n t!?~~)es lieqx que bon, (empl:~
rolt au C~pltalDeo & ce- moiti!! fur le ·.corps, agr.êts, avt::o
tuamemenc, falaires, &co & moirié fur les facultés & marçhandifes -cotl)pofant,la qrgaifon du ,Qrig~Qtin ç~mandé
par le Capitaine Jean-JactJ!les, Oll.ivie~ " 9\,1 -aufre pour lui,
prenant les"a.ffi!r.és ~e fikue ~'cet~ ajfitr,tié fU;f k. corps, G'c.
~ {urj!.çs facultés apr~s <Jue le tout a§lra été hW à tert:~ li
hon fauvement, ~.c. ,~e navire partit ,de Macfeille ~e ;6 du '
!l'ème iq9Îll', 'l'éq\lipage ~tant CQI1JP9fé. de dix.r. ~ellf..per
~W1es. .JI Je ,rendit le fl ·M-ai fllr Ja ~~fe ;il!': GlIioée , 6èc1
G
féjouma·j~fqÙ!J p ~~PJern~re, e4l. fàif~t ~i'{)ed~s .échelles.
C,pi~i~_, 1 l~ Çpllrr!!-JTIaîu'e ,4 de'_~aitm(~'~ipjlge
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f'œo.ur~~~f le ti~Ul:.~,u'
cfeçon~i:Ç~pitai~', prit.lp
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ce dont eLl: àppel tiendra & ·.fortira fon plein :& entier
effet;" condamne Granet, Mouren. & les Officiers de -l'Amiraute aux depens chacun les concernanr. Plaidant Mes._...
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La révolu des negres fur -le flaijfèau <Jui aVQi~ -été expédii.Mur
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.tenu.
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L(1 permiffion dl}~lnée- au Cap'itaine de touclzerr.&-fofr,e {dzrUes
en tous lieux <Jlle hon lui ftmMerar, fliutorijè à; rérro- grqder, .pourvu 'l't'il ne change pas;Je voyqge: G- lfil tkftination du Navire.
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E lieur Salles' expéqia de. Marfe.ille le .1Jfig<lftt.itt; .1'.lJ
- Comte fi' EjlfJÎng, pour a!ler fur, les côtes qe ~j1illée y
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faire la tra.ire des Degres, & fe rendre delà aux iiles de
l'Amérique. Les 17, 21 & 2'4 Mars 1772 il fe fit affurer
!a fomme de 723°0 liv. ·de, forrie du pert de Marfeille
j,ufqu;aux ifles ,,tr-ançoi[es_de. l' .ç\.m~rique 1; permis .de touçhel'
~)jl r#>çe l.de Gpigée pO,ur filire la -tra!t~('Qe$ negrèS, de
~o~cher ~,f~i~~' échelles ~n t!?~~)es lieqx que bon, (empl:~
rolt au C~pltalDeo & ce- moiti!! fur le ·.corps, agr.êts, avt::o
tuamemenc, falaires, &co & moirié fur les facultés & marçhandifes -cotl)pofant,la qrgaifon du ,Qrig~Qtin ç~mandé
par le Capitaine Jean-JactJ!les, Oll.ivie~ " 9\,1 -aufre pour lui,
prenant les"a.ffi!r.és ~e fikue ~'cet~ ajfitr,tié fU;f k. corps, G'c.
~ {urj!.çs facultés apr~s <Jue le tout a§lra été hW à tert:~ li
hon fauvement, ~.c. ,~e navire partit ,de Macfeille ~e ;6 du '
!l'ème iq9Îll', 'l'éq\lipage ~tant CQI1JP9fé. de dix.r. ~ellf..per
~W1es. .JI Je ,rendit le fl ·M-ai fllr Ja ~~fe ;il!': GlIioée , 6èc1
G
féjouma·j~fqÙ!J p ~~PJern~re, e4l. fàif~t ~i'{)ed~s .échelles.
C,pi~i~_, 1 l~ Çpllrr!!-JTIaîu'e ,4 de'_~aitm(~'~ipjlge
te ,
f'œo.ur~~~f le ti~Ul:.~,u'
cfeçon~i:Ç~pitai~', prit.lp
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',W;'(ll~ouil:1;A~j,' ,-
t,
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~O.!llmaÔaeJrteIlf 'en·thèfl Jil'col\tin~a la-trai e ;:qui (e mlinta
en tout·-à (j1lile~gres1 quatrè ·negre4fes, dix..nu-ir ne'grillaos
&.,aegrilles ,"& partit de' Gorée le I I 'Septembre. Le
voyage fut heureux jufqu'au 7 Oaobre, lorfque IOUl-à-coup
les negres fe révolterent, lUerent plufieurs perfannes du
bord,. &~m:ire.n.t..::.tD.uLle-relte de.-I'équipage dans- le danger
le plus évident de perqr.e la vie, en l'embarquant dans le
canot pour aller joind·re un bâtîme'nt qui palfoit devant
eux; le Brigantin reHa au pouvoir des negres, fans en avoi!
aucqne nouvelle. Le lieur· Salles .inHniir de ce finiHre fit
à!,add'oiJ. au'~ â-fi'ureurs\'le '30 lanvie'r 1773; ·plufieurs fe rendirent , ju~i~e; les autr~s n'ayant pas voul~ payer, il f~
p~à'f~t ~rr'é\liè eti' paiemenr des fommes alfUl·ées., avec intéN!f§,~dépens &: co'ntinintd pitr' corps;' Sentence du Lieut~nànt. àe? l''ânürauté qui fair droi-[· à fa demande, & Ordonne l'exééution provifoire. Sur la lignificarion de cetre
Sente!!ce ~e}}x ~lfur~LJ.rs réfra.aaires payerfn~; trois ,aurre~
en apptmèrè-Elt ':par-devAnt' la :QOllT; -'.
"~I, ,
,. ,l
'{ OiillllifoiiJ JT6trr-Iès à-ppelJ:9ns ,rqülils c'étoi/o'nt -pa'!;' tenus'da Eay-e,r les affitrances-, parce qu'il ~ avoit eu chan-gement
flèFt1IJlé· voIG'nraÎré, puifqll'jÎ c-anRoit, l>ar'le confutàr que
lerrÙa~~ainè fur';d!abord' à~ Goréë ,1 enfllire à -la rivière de
Gartto:tj ; ~~uédeltl il ~reviht· .'e'l1cbre:-~1iUG/jrée aii ;j1' ·'trana
neuf~!ltft~fsrOllR~ ~ pbrdefÎlls 'Cèux~q\l;il;)avoit .déta :' or
tolrtlHe~~i'r§!jrÎe'Pq/ll-~tr1:l1k~~1,I'foitJ'p'é~ ~i'fifér~ Wbro'n
comme.r-c~" (o-ic' pèu-r' ]!in,têlét 'dè Tes· arlnate-!lrs, -..qlla~d· ée
n?eili fias;:p.aI'~fQrce lnlajeure; ih-3nge· de.~route ; il opere 'Pâl'
èàl1fél.Jü@ là};a-~I\' gel) de§l affilfeu;sl, 'comale le ,dit '11aer.
e.Ï1' driJ 'trré &5 liiJfù'à'fi'i:~NJelV(lFÉiorina-d€:&lrlill,iûRle;' Re~
lI'éilif''-f:\rr):>f~ 'tsà\ ~l~~ r~iiÉÎuV:~l~\~~ iRju~sI.!'dê}a palfés~
i:'eft ,"fi~ônl~'hail-ger::Që:>\'byàgè' :a\f rilbiiis ch'Jilgél- ôJ r0ucè'~
&> è<!fbp<tr'lc-onféquefit ,délièr- lè5> f affilr-elH'S>' t *.\~". '1.:-1. IIC.
-l"~uel; quel fbit~llj~~t.• di! I?apritat'èur .ici Ie'fi àil~nlté-ltable
~~t\ ;)fieuJci"tjatM~ Je lPénllplK fàrni ~~i1s d'e''cela~ e~
ll'fflW~br~.G~H-·
~ itierÎl~fe~f!Jnl~7é1fu1ges. desJD}tf.1u@s 'o~
è'
~1~~IJpârQeG~'~1t :)eutJ'~lffutti;
~:iljj. rr'e:alf(joohoiéb~
~e '\de ~tellé-oU)tlll1e1n~cule, oLtceux-qui .fQI1tde ~dtôil; L'mfe-rê ~
. '
de.
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DU
PAL AIS
DE
PR 0 YEN CE.
337
(le l'armateur exige-t-il que fon vaiifeau en courre d'autres,
li la bonne heure; mais il ne peut pas y expofer les affureurs qui n'ont pas voulu s'en charger, & qui n'en ont
pas été payés par une plus forte prime. Ainli quel que
foit l'intérêt. de l'armateur, il ne peut jamais s'éloigner de
la police; c'eil: à lui à fe confulter, à balancer les divers
intérêts, & à voir s'il lui convient mieux de s'en tenir à
la police en facrifianr l'intérêt qu'il a à s'en éloigner, ou
à fervir ce même intérêt en facritlanr celui. qu'il trouve
dans les aifurances.
.
Il faut bien diftinguer le changement de voyage, du changement de route. On peut ne pas perdre de vue fa deil:in:,.
tion; & c'eil: ce qu'on appelle ne pas changer de voyage;
mais on peut auffi, en fuivant toujours fa deltination, fe dévoyer; c'ef!: alors changement de' route. C'eU l'obfervation
que fait Cafa-Regis, difc. 67, n. 24. L'Ordonnance eil:
tellemenr entrée dans l'objet de cette deil:ination, que l'art.
27 fait mention de l'un & de l'autre en cès termes: fi toutefois le .Çhangement de route, de voyage, G'c. Rétrograder,
c'eil: changer de voyage; le Capitaine doit toujours pour~
fuivre fon chemin rec1â viâ; il ne lui ell pas permis de faire
échelle, s'il n'en a pas la permiffion par la police. En ré.
trogradant, le Capitaine .prolonge le temps du rifque des
'aifureurs, & leur en fait courir de nouveaux dont ils ont déja
été garantis.
'
La permiffion de faire échelle emporte tellement peu celle
de rétrograder, que lors. même que la police perme~ de na.
viguer à droite & à gauche; le Capitaine n'a cependant pas
la faculté de changer de route, & à plus forte raifon de
~étrog'rader'; elle ne lui laiife au contraire que le droit iter
divertire, non pour le feul intérêt de l'armateur, fed 'luantùm
ittfervit faciliori & tutiori navigationi, pour arriver au port de
dellioation, ainli que le difent Cafa-Regis, dife. l " n. 131,
&·difc. 134 & l ~J; Stipmanus, de jure maritimo, cap. 7, n.
4: l 3; Pothier, traité des aJ1ùrallces, pag. 77, & Valin fur
l'art. '-7 du titre des aJ1ùrances. Ce dernier obferve que 1"
claufe de' faire échelle n'emporte que la façulté ·de déto\lr~
Années l775 & jùil'.
VV
�338
\
1
0 V Il. N A L
ner un peu de la raute; pour toucher 11. quelque port ~
droite ou à gauche fur la roure, ce qui eH toujours exc\ulif
de la rétrogradation. Cela en li vrai ,_que dans l'ufage à Marfeille on fait très-Qien dininguer la faculté de faire échelle,
de la faculté de faire la' caravane OL! même de rétrograder, &
que dans telle police on met la faculté de faire échelle, &.
dans telle autre la faculté de retourner, ce qui prouve tOujours mieux que par la faculté de faire échelle, 00 n'entend
pas la faculté de dércuter.
Le lioiltre qui arrive par le vice propre de la marchandife, ou par la faure des affurés, ne fauroit concerner .les
alfureurs. C'eH la difpofition des arr. 28 & 29 de l'Ordonnance maritime, tit. des aJJùrances. Or, dès qu'il y avoit dans
- le charge!1;1ent cinq Negres de pacotilles fur lefquelles' les
alfureurs ne devoient pas compter, il en évident que l'événement n'efi furvenu que parce que les pacotilleurs ont
furchargé le navire d'une matiere combuHible ou trop facikà
s'embrafer. Sur onze têtes Negres, il Y en avoit cinq de pacotilles, & lès Officiers pacotilleurs acheJant pour l'armateur &
pour eux, ne choifiifent pas ce qu'il ya de plus mauvais. On efi
donc au cas de dire: rO. le chargement a été mal fait, ou on
ne l'a pas proportionné à la porrée du bâtiment; 2°. il en arrivé par le vice de la marchandife; 3°. le finlfl:re n'ell: furvenu
que par l'effet d'une marchandife qui n'étoit po-int. du chargement, que l'on n'auroit par conféquent pas dû charger,
& donc il eH impoffible que les alfureurs répondelH, puiequ'au vrai ils ne répondent que de ce qui en fortune de
mer, & non d'aucu.n événement dont on puiife attribuer la
caufe 00 au chargement, ou au Capitaine, ou fQÏJ à l'équipage: fùfcepit in Je a.Jfècurator periculum fortunœ, 1/on culpœ;
. ils ne doivent pas répondre fi le navire a été' furchargé, •
& il eH indifférent qu'il le foit en quantité Ol) en qua-:
lité.
L'on convient que l'on peut èonfenrir une /lililra-nce de
Negres, foit en exprimant le nombre qu'il y en aura fur
le navire, foit en ne l'-exprimant pas; mais rien de plus indifférent à 1'6bjeél:ion. La police doit contenir le détail de~
�1
.
D U
PAL A l !
l> Il
PRO VEN C E.
339
'effets affurés, & ils doivent être toujours proportionnés aux:
fommes qui [()Ot affurées. Si par conféquent dans le navire
il y en a davantage, & qu'il furvienne un événement par le
fait des Negres, il en arrive que l'on a trompé les aifureurs, f1non fur la qualité, au moins fur la quantité du chargement, & qu'ils ne doivent pas par conféquent en répondre. Il ell: permis, il ell: vrai, de faire dés pacotilles; mais
fi la marchandife de pacotille eH la caufe de l'événement,
ou y contribue; l'afl'ureur qui ne l'a pas a'ifurée ne peut pas
en être tenu. D'ailleurs quel que fait l'ufage de faire des
pacotilles, il faut diUinguer les marchandifes proprement'
dites, de celles qui ne le font que par une efpece de fictian; quand on charge en Negres, on doit fe dire qu'il y
a tout à craindre de l'amour de la liberté & du défefpoir,
qu'on ne fauroit par conféquent urer de trop de prudence'
même dans le chargement; & quand on dit aux aifureurs:
je charge en Negres, on ne leur parle que des Negres du .
chargement, & non des Negr~s de pacotille. Il dt donc vrai
que les Negreg de pacotille font un furcroit au chargement
qui leur ell: éttanger, & que le .cas de révolte ·arrivant.,
comirfe on ne peut pas fuppofer que 'les Negres de pacotille n'y ont pa's coopéré, on ne peut pas non plus conclure que le finifhe n'eH pas arrivé par une caufe étrangere .au chargement, & dont les a1fureurs ne doivent pal'
conféquent pas répondre.
D'ailleurs il y a une difproportion du chargement avec
l'équipage, puifque le nombre des Negres éloit de trentetrois, que celui de l'Equipage n'était que de quatorze, &
'que l'équipage en partant de Gorée étoit' malade çu fcorbut,
Dans une pa·reille f1tuation, il était à tous égards imprudent de ·permettre la pacotille, & de ne pas conferver cette
fupériorité de force' qui fert à maintenir la fupériorité d'autorité; & de fait, il n'ell: perfonne qui ne convienne que
s'il y avait eu cinq Negres de moins, 'ou il n'y eût point
eu de révolte, ou elle eût été bientôt aifoupie. La révolte
ne procédant donc que du chargement de pacotille, étranV v 1.
�340
'.
Jou
RNA L
gere 'au chargement lui-même, d'un chargement peu pro J
porrionné au nombre de l'équipage & .au peu de famé dc;nt
il jouifioit, le finiilre n'eH furvenu que par le vice du cbar~
gement ou de la marèbandife, ou par, la faute du cbargeul":,
& les affureurs ne doivent pas en être ten~s.
La révolte des Negres que l'on' tranfporte- aux HIes n'HI:
pas fortune de mer; ce n'eil pas' même un ·cas fortuit qu i
ne foit précédé d'aucune faùte; il ef!: impolIible qu'elle ne
fe :'vérifie, fi l'on n'a pris vis-à-vis d'eux les précautions
d'ufage. Ici non feulement on ne les a pas prifes, mais il
eil·encore prouvé par le confular qu'il ya eu négligence de.
la parr du Capitaine, & fame & même trabifon de la pare
des mariniers. Or, il eH inconteilable en droie que les affureurs, ,qui ne f09t cbargés que des fortunes de mer, ne
ré'popdent ni du fait du maître & de l'équipage, s'ils ne s'en
font cbargés p'ar ra police, ni de rout ce qui n'eil pas événement ca fuel qui pèue fe vérifier fur mer. Là fuite des
.efcla,ves qui c1!.flodiri ,(oIent, n'eil pas un cas fortuit; par c.ela
feul que cuflodirz' debene, le Capitaine en répond: ficut,vim
. majorem, dit la Loi, preeflare non Izabet neceffi , ita dolum
& culpam, fed & euflodiam exhibere cogitur. Le Capitai ne
n'eil donc pas moins garant de la garde que du dol & de
la fraude; il en eil bien mieux garant; lorfqu'il n'a pas emplové exac1ifJimam drtigentiam, diligentiJ!imi Izominis, qu'il fuut
.à la Côreté d'une cargaifon eJl Negres; ou, pour fe fervir
des termes de Cujas, lorfqu'il n'a pas fait généralement tout
ce qu'i~ deyoit faire, ou lorf(lu'il a fait quelque cbofe qu'il
ne devait pas faire. _'
, .
On répondoit pour lè fieur Salés, que l'affurance 'ma6-rime. en' un, contrat par lequel on promet à celui qui a un
intérêr dans un vaiif~au ou dans fon chargement, de pren-.
d re fur foi le péril moyennant le prix f1:ipulé. La Loi 2:3 ,
if. de regulis juris, fair l'énumération des différens cas fortuits, qui font: animalium caJus, mortes queequefine culpà accidunt, fuga fervorum qui cuflodiri non[oIent, l'apinee, tumultus,
incendia, aquarum magnitudines, impews prœdonum; il faut
�1
nu
PALAIS
DB
PROVI!NCrf.'
34t
.âil1:inguer avec la Loi la !impie fuire d'avec la révolte, fuga
,& tumu/tus; ce font-là deux événemens qui ont chacun leur
caufe, leurs caraél:eres & leurs effers.
La !impie fuite confidérée indépendamment de toute autre
circonfiance, efl: un fair ordinaire que-l'on peut naturellement prévenir ou empêcher. Delà vient que la Loi ne range
dans ,la claire de cas fortuir, que la fuite des efclaves 'lui
cuflodiri non [oIent; mais la révolte, tumu/tus, eH inféparable
de l'idée de force majeure; elle efl: de, fa nature préfumée càs
fortuit, tumultus li nullo prœflatur: il el!: fi vrai que la révolte 'el!: de foi réputée cas fortuit, que 'les Jurifconfultes
enfeignent expreirémen~ que les a{fureurs en font tenus. C'ell:
la Doél:rine de Targa, cap. 6-8. La chofe a même étE jugée
par deux Arrêts' de la Cour, l'un rendu en 1767 en faveur
du fieur Efcalon l'ai né , & l'aurre. rendu en faveur du !ieur
Raphael, armareur du vai{feau, Capitaine Rigordi. Ces deux
Arrêts ont décidé que la rupture du. voyage pccafionée par
la révolre de l'équipage étoit un cas fortuit dont les a{fureurs étoient garans.
La révolre des Negres doit être de fa nature rép.utée
cas fortuit, comme celle de l'équipage; elle eH même. avec
d'autant plus de raifon à la charge des airureurs, qu'elle
, tient de plus près à l'objet & à la matiere de l'airurance.
Au,ffi Valin, en plufieurs~ndroirs de fon Commentaire fur
l'Ordonnance de la màrine, parle fpécifiquement de la révoire des N:egres. C'eH fur 'les arr. II & 1') âu rirre des
ajJilrances. En effet, quand un événement n'eft pas cas foro tuit. de fa nature, il faut
jufilfier qu'il l'eH devenu par les
circonHances. Quand au conrraire un événement efl: cas .fortuit de fa narure, il faut, pour lui faire perdre, fes privileges, prouver que par tes circon(lances il' a ceiré de 'l'être.
On fent que dans la premiere hyporhefe, la preuve doie
êrre à la charge de l'affilré, & qj.Je dans la feconde elle
doit être à la charge de l'airureur, parce que dans l'une &
dans l'autre la preuve doit naturellement être à la charge
de éelui qui a befoin de combattre la préfomprion contraire.
Auffi en matiere d'alIurances, 'les principes fon.t que quan4.
�~~
JOURN~L
il s'agit d'un événement qui eG: de fa nature réputé cas for':
cuit, l'alfuré' a rempli taure fa tâche en jul1:ifiant du finiG:re.
Si l'alfureur prétend enfuite que ce finiG:re eG: arrivé par des
caufes qui doivent lui faire perdre les privileges du cas fortuit, c'eG: à lui à jul1:ifier de fan exception, excipiendo fit ac7or.
La préfomprion qui, naît de la nature du fait, fubfiHe jufqu'à
la preuve contraire.
Par la police d'alfurance, il était permis au Capitaine
'de toucher & faire échelle en tous les lieux qne bon ·lui
fembleroit. Or Valin, en parlant de cette claufe fur l'art.
'"7 "du titre 6, liv. 3 de l'Ordonnance de la Marine, a bien
remarqué qu'elle n'emportait pas Pl faculté de changer -le
voyage & la deG:ination annoncée du navire; mais il a dit
qu'elle fuppofoit la permiffion <le rétrograder. Cafa-Regis
difiingue aüffi, comme Valin, le changement de route proprement dit, d'avec la fimple aétion de détourner. Il eG:
donc évident, d'après ces Auteurs, qu'on ne fauroit faire
un reproche -fondé au Capitaine d'avoir été à la Gorée, à
la riviere de Gamby, & d'être retourné de la riviere de
Gamby à Gorée, La faculté qui lui érait donnée par la police, de toucher Jx: faire échelles en tous lieux, jointe à la'
béceffité de faire la traite des Negres , emport~it ce léger
changement. Du moment que le Capitaine ne perd pas de
vue la deG:ination principale du navire, on doit s'en rapporter à lui pour les réfolu.tions accelfoires; car. fauve-nt pour
remplir la deHination direéte & principale d'un navire, il
fa'ut ,de néceffité in acceJ{oriis iter mutal'e, prout exigunt neceJlitas & opportunitas. C'eG: ce qui a fait établir, pour le
,grand bien du commerce, la c1aufe pGlrtant permiffion de
toucher & faire échelle en tous lieux.
On efl: obligé de convenir que Gotée & la riviete de
.Gamby font des endroits qu'il peut être très-mile & très'nécefiàire de toucher pour la traite ces Negres; on ne peut
donc pas dire'qu'en aI-lant de Gorée à la riviere de Gamby,
& en retournant de la riviere de Gamby à Gorée, le Capitaine ait parcouru des pays ou des lieux étrangers au bue
Ce
s'être
,de fan e-xpédition.
.
-. Capitaine
_.. . eft donc préfumé
- , '.
•
�DU
P<iLAIS
DE
PROVENCE':
341-
conduit prout congruum erat necejJitati & opportun/tati. Il n'a
donc point excédé les bornes de la faculté qui lui avoit été
donnée pa,r la police.
En vain oppofe-t-on qu'il y avait dans le ch.argement cinq
Negres de pacotille fur lefquels les affureurs ne devaient pas
compter, 'puifque la pacotille dl: une chofe très~licite, permife par l'Ordonnance & par l'ufage univerfel. Quand un
vaiffeau fait la traite des Negres, il eH naturel que' des Negres foient la matiere des pacotilles; c'eH Ilne fuite de la
nature de l'expédition; c'eH une fuite de la deflination principale du navire; aucune loi ne prohibe de prendre des
Negres à pacotille. Or, les aifureurs ont dû compter fll[ llne
chore qu'il n'était pas prohibé au Capitaine de faire, &
dans 'laquelle au contraire l'ufage l'autorifoit. La circonll:ance '
des cinq, Negres de pacotille ell: donc une 'circonCl:ance parfaitement indifférente, du moment qu'on ne. peut fo,utenir
en point de fait, que la totalité du chargement excédait la
portée du navire ou les forces de l'équipage. Au furplus.,
ce qu'il y a de certain, c'eH que les Negres., quoique réputés marchand ires , ne ceifent pas d'être hommes; la qualité d'efclave ne doit pas les foumettre à ·tous nos caprices.
Il ne faut pas du-moins ajouter la perte de la fûreté à celle
de la liberté. On a beau dire qu'il faut fe méfier des Neg~es & les traiter comme des bêtes féroces, pour les réduire dans l'impoffibilité de po.uvoi'é fecoller le joug dont
on les'furcharge; la cruauté ell: prefque toujours plus dangereufe que la douceur. L'hl,lmanité que l'on a pour les
efclaves peut prévenir les dangers qùe 1'06 peut craindre
de leur utuation. Les hommes, dit un homme célebre, s'accoutument tout, la fervitude même, pourvu que le maître
ne [oit pas plus dur que la ferllitude. On ne fauroit donc
faire un crime à un Capitaine de n'avoir pas maltraité des
hommes. On ne fauroit l'a'ppeller imprudent, parce qu'il
n'aura point été atroce. Quand .on ne ferait pas doux par
humanité, il faudrait l'être par intérêt. L'efdave ell: au
moins précieux à fan maître, en raif0t! de l'argent qu'il lui
a çotÎté. L'~fp.rit de propriété efi un efprit de cQnferv.a:ion~
a
a
'.
�'344'
JOURNAL
l'efpérance du fervice, la néceffité d'entretenir des forces
qui nous appartiennent, & que nous avons chére ment achetées, nous empêcheroient d'être' cruels, fi les fenrimens
de la nature ne fufEf6ient pas pour nous rendre -humains.
. Sans dome il faut /urveiller des efclaves, mais il ne faut pas
les vexer; ils font airez abilttuS par la fervirude, fans qu'on
ait befoiQ de les écrafer fous le poids des chaînes ou des
mauvais traitemens. Une clôture douce· & exaél:e peut gé-'
néralement fuffire pour conteni.r des perfonnes défarmées &
ordinaire'ment découragées par-leur' propre fituatÎon. Des
précautions plus bar~ares ne feroient Couvent pas plusefficaces, & feroient certainement moins légitimes.· Or le feul
moyen de faire envifager dans les circonHances la révolte
arrivée des Négres comme un événement dont les alfureurs
" Ile doivent poinj ré~ondre, feroit de prouver que cette ré',volte eH furvenue par la fame ou haraterie du Patron.
Arrêt du 12 Mai 1778, au rapport de Mr. le Confeiller
'(le Thorame, qui confirme la Sentence, avec dépens. Ecrivant Mes. Portalis & PafcalÎs.
.
ARR É T
.
XL J J.
1
Le co-acheteur ayant pour lui feulla poflèffion féelle de l'effet
vendu folidairement deux, acquiert l'entiere propriété contre
l'autre co-ac!zeteur par le laps de trente ans.
La prefcription de trente ans court contre les minwrs.
a
P
Ar aél:e du 14 Janvier 1732, riere Me. Defmarés, Notaire à Avignon, Mre. Jultamond, Prêtre, vend folidairement à Franc;ois Bon & Michel- Ginoux fon gendre, procédant ledit Ginoux enfuite du confeotement verbal &. exprès qu'il a de fon pere, & par lequel il promet de fe faire
donner un' confLotement public à la premiere requifition
de Mre. Juftamond, une terre de dix émines & demi, ter!:oir de Rognonas, moyennant la fomme de 100 liv. que.
,.
- , ~~es
�,
DU
PALAIS
DE
P-ROVENC!!.
34)
les acheteurs pourront garder à confiirU[ion 'de fente, en
fupportant l'intérêt au denier vingr.
Michel Ginoux fe mit feul en poifeffion de la terre acquife, feul il la défricha, en paya les intérêrs pendant dixneuf ans " fuivant les quittances qu'il rapporta; il acquitta la
taille, & rembourfa les 400 liv. du prix' de l'acquifition, ainli
qu'il conll:oit par la quittance publique du 2.1 Août 1751.
Fran'çoi~ 'Bon, acquéreur 'folidaire de 1a terre, a furvécu
,vingt-deux ans à l'acquilition', fans avoir conrribué en rien'
à aucun pai~ment.
Dix ans après la mort de François Bon, & le 18 Février
1764, Mâthieu & François Bon freres, fes petirs-fils fe
. pourvurent d'abord en partage pardevant les Officiers de
Châteaurenard, & laiiferent périmer cette infiance; ils fe
pourvurent de nouveau pardevant les mêmes Officiers par
requête du 11 Septembre 1767,' & demanderent la défemparation de la moitié de la terre acquife, fuivant le partage
-qui en feroit fait, avec refiirurion des fruits depuis l'indue
occupa;ion. Ginoux a.yant oppofé la prefcription trentenaire,
les freres Bon impétrerent des lettres royau]' Ol!r fe faire
refiimer comme mineurs du laps du temps ;:.,& .par Sentence
du ) Mars 1773, les Officiers de Châteaurenard firent droit
à leur demande. Ginoux en appella, & elle fut confirmée
par alltr~ Sentence du Lieutenant d'Arles du 28 Février 1776.
Il en appella pardevant la Cour.
On difoit pour Ginoux, que fa longue & pailihle poifeffion dans la totaliré de la terre acquife de Mre. Jullamond,
fans réclamario'n de' partage' de la part du beau-pere pendant vingr-deux ans qu'il a furvécu à cette acquifirion, fuffiroit feule pour le maintenir dans cette, poifeffion.
Il ell: de principe que celui qui achere fous le nom d'autrui pourvu qu'il prenne poifeffion du bien acheré & qu'il
. s'y maintienne, eft cenfé être le véritable acquéreur, & le
nom de celui fous lequel il a acheté, ell: cenfé un nom fup. pofé. Ce principe efi fondé fur la Loi 4, cod.Ji" quis aluri
,1'elfibi, qui, veut que la femme ne puiife réclamer la pra, Ann'tes 177') & [ujv,
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�346
10
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priété d'un bien acquis fous fan nom, pourvu que lè man
s'en fait mis en polfeffion.
C'eH de cette Loi qu'eft tirée cette maxime généralement
reçue, que l'on examine plutôt la vérité de l'aéle que la fi.
mutation contenue en l'aéle: magis inJPicitur quod in veritùtt:
ac1um efi, quam quod jimulatè eoneeptum efl. La Loi ~ & 6
du même .titre prouvent cette maxime d'une maniere encore
plus étendue. Il eH dit dans la Loi 6, que la polfeffion vaut
mieux que le titre, & que dans le doute on accorde la propriété à celui -qui a pris polfeffion.
Ginoux a acquis la totalité de la terre par la PQlfeffion
de trente ans; la prefcription trentenaire court contre les rt,ineurs; ils ne peuvent être reHirués envers cette prefcription.
La Loijieut, cod. de prœfcript. 30 vel 40 annar., déciJe .préeifément que les ,aélions, tant réelles que perfonnelles, Ce
prefcrivent .par le laps de trente ans. Cette prefcription court
/
contre les femmes, les abfens, les foldats; dIe ·demeUre
'. feulement en fufpensà l'égard des pupilles; mais elle court
conrre les mineurs: nam eùm ad eos annos pervenerint, qui
ad follicitudinem pertinent euratoris., neceJfàrio eis jimiliter
ut aliis, annorum triginta intervalla {ervanda [unt.
.Pour prouver que les mineurs ne fOllt pas ref1:itués envers la prefüiption trentenaire, il fuffit .de rapporter la Lôi
& )a Jurifprudence de ce Parlement. ·On ·trouve dans la JL, i
derniere, cod. in quipus cauf. in integ. reflit., que l'Empereur
Juf1:inien corrigeant les anciennes loix 'qui favorifoient les prefcriptions dans divers cas, mais .qui accordaient la rel1itution
aux mineurs, ordotlne que la prefcription ne (lourra plus
COntre les mineurs .dans tous les cas où .ils .étoient ref1:itués
par les Loix anciennes, par la raifon, dit l'Empereur, qu';j)
vaut mieux empêcher le mal que d'en chercher le remede
après l'avoir' toléré; mais -que quant à )a prefc.ription trentenalre, elle refiera dans le même état: videlieet exeeptionipus triginta vel quadraginta a;znorum in [UO fiaru remanentipus. Decormis, rom. 2, col. l ~ 20, rapporte divers Arrêts
qui ont refufé aux mineurs la relliturion envers la prefcrip•
•
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PAt A IS-
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PRO V Il Ne B.
347
tion trentenaire. Duperiet, Boniface, tom. 2., liv. 9, pag.
62.2., & ·Mr. de Bezieux, pag. H9, en rapportent plulieurs
autres. Les aél:es de notoriété de MM. les Gens du Roi
des 19 0él:obre.1682., 9 Août Ï7 0 7, & 13 Janvier ITl.O,
rapportés par Mr. de la Touloubre, pag. 2.7 & 187' atte(lent ql!e (uivant la Loi & l'u(age de ce Parlement, les
mineurs ne font point relevés de la pre(cription de trente
ans qui court contr'eux.
.
On répondoir pour les freres Bon, que Michel Ginoux,
quoique fils· de famille, n'avoit pas befoin de caution pour
contraél:er valablement. Perfonne n'ignore que le fils de
fa ille eH capable de tous. contrats, excepté de celui du
prêt, (uivant le §. 6, infiit. de inutilihus Jlipulat., la Loi
39 , ff.. de oMigat. & ac7ion. & tous les Auteurs. Mre. Jull:amo~d vendoit donc valablement il Jean-Michel Ginollx, &
n'avoit pqS he(oie ·de faire atrurer (a vente. par un tiers•
.Le fils pouvoit faire une acquilition fans le confentement
de (on 'pere; & fi d'ailleurs ce çonfentement fut requis,
c'ell: apparemment qu'on vouloit que le pere devint refponfable des. obligatio{ls du fils, ce qui, ne: feroÎt propre qu'à
exclure encore mieux l'idée que Fran~ois Bon, ne fût intervenu al! contrat que· comme caution. Or les contrats étant
dé dfoit étroit, & n'étant point fufcep"tibles d'un~ inter,prétation érra'ngere de ce qui aur-oit été dit ou fait avant
ou après, c'eft une ridiculité d'avancer qu'Lme partie qui
e:ft préfenre, acce.pMnte & fiipulante dans un aél:e d'achat
fait folidairement avec un a'utre'" n'elt pas & n'entend pas
être acheteur: cùm in llerhis null'a amhiguitas. eJl, non dehet
~dmitti lIoluntatis fjuœJlio.
Que décid:e la Loi 4 q.ue 1'011 a citée" fi ce n'eft que
malgré que la· femme ait pardevers elle l'inftrument d'ac...
quilition, cepèndant comme I?al:quilition eft faite par le
.mari, c'ell: à lui que le foods doit appartenir. Les Loi" S
& 6 ne font relatives qu'à ce que perfoDne De peut con. fTaél:er p(!)ur' autrui & au nom d'autrui. .
Pour qu'une potreffion opere, il faut que celui à qui elle
~ été livrée, foit olkle vrai a,hereur & ait droit en la
X X:l.
�r;' •. ~
chore-, 'quam comparavit !lamine [ua, ou que perîonne n'aU
aucun droit & ne puilfe faire valoir un titre valable d'ac~
quifition. Ainfi quand deUl( corrèèS ont folidairehlent le
même 'aél:e d'acquifition; quand Pun & l'autre fom ill[er~
\'enus en leur nom dans le contrat; quand ils ont acheté
fans: divifion, tant pour l'un que .pol'r l'autre' & pour les
leurs; quand la polfelIion civile leur a été également livrée
fans diviuon dans ce contrat, la polfelIion réelle que l'uu
. d'ellx oppore, loin de déroger à ce titre indivifible & co'mmun, loin de fuppofer contre la teneur du contrat, que l'un
a acquis & l'autre non) en efl: au· contraire la confirmatian, & doit être interprétée par ce même titre•
. Il efl: de maxime que la fo!idité peut avoir lieu non
feulement entre divers débiteurs ou diV'ers créanciers d'une
même dette, mais encore dans tous les autres comtats,
& nommément dans ce·IOi d'achat & de vente; enforte
que plufieurs peuvent acheter comme vendre folidairement
1
•
,
la même chofe. L.. 9,.if. de duoDus reis. .
Il eH encore de maxime, eh matie~e de folidité ,que ce
que l'un' fait, l'autre eft cenfé le faire; & quoiqu'il y ait
plufieurs débiteurs ou plufieurs créanciers, plufieurs acheteurs ou plufieurs vendeurs, c'~H tout comme s'il n'yt.en
avoit qu'un. L. ult. cod. de dUODUS' reis. La raifon -qu'en
donne cette Loi, è'efl: qu'il n'y' a qu'une racine, qù'unë
fource', qu'un contrat, qu'une caufe, qu'une feule aél:ion à
laquelle tout doit fe rapporter. Delà Duperier dit, liv. 3:'
quefl:.· '7 aux additions, pag. 304, que les folidaires ne repréfentent proprement qu'une feule perfonne'. •
La polfeffion de Ginoux ne peut être que relative au titre"
le titre eH commun 'à l'un & à l'autre acqué'reurfolidaire; il leur .
tra nfporte également à chacun & indivifiblement la polfelIion
civile; & quanq. enfuite l'un d'eux oècupe la polfelIion "'réelle;
il le fait en: .vertu de ce titre,' & ne peut qu'invefl:ir fon
co.-acquél'el,U'. folidaire. Or, tant,~qu'il n'a rien falt de con- .
traire à ce titre, tarit qu~il n'a .pas, par un aél:e contraire,
interverti :ou dénié'
poJFelIion qu~i1 n'avait qu'en vertu
. de ce titre.) il n'a pas pu prefcr~re conlre fon ~'~'acquéreu~
3'la
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349
folidaire, parce qu'il n'a pas' changé la caufe de fa poffeî- •
{ion indivilible, qui n'a jamais été que relative à un titre
indivilible. C'efi une des gràndes -maximes du droit établie
en la Loi cùm nemo cod. de acquirend. & reLÏnend. poJfèj[.
Catelan & Vedel, liv. 7, chap. 8, rapportent un Arrêt qui·
jugea que de deux Seigneurs qui <\.voient originairement des
rentes par indivis, l'un d'eux n'avoit pas pu prefcrir ces
rentes contre l'autre, quoiqu'il eût joui des rentes en entier
pendant deux liecles.
La bonne foi de la fociété, l'union qui efi entre les
affociés qui les fait veiller l'un pour l'autre, s'oppofent à
cerre prefcriprion; c'ef! ainli -Gue s'expliQue Catelan au lieu
allégué, & Dunod, traité des preferiptions, part. l, chap.l:z.
des chofes imprefcriptihles.
Par Arrêt du 18 Mai 177.8, au rapport de Mt. le Con':
feil1ier de Fabry Borril1y, les fins principales de l'expédient
de Ginoux, porrann que l'appellation & ce dont était appél
feraient mis au néant, & que fans s'arrêter à la requête
'principale des freres' Bon, o.i à leur lettres de iefl:itution
dont ils feroient demis & deboures, ledit Ginoux feroit
mis fur le tout hors de Cour & de procès, les amendes
refl:ituées, & les freres Bon condamnés aux dépens, furent
'accueillies; au moyen de quoi il ne fut rien prononcé fur
la preuve offerte par Ginoux, que depuis l'aéle d'ac.quiution
jufqu'à _l'époque de la requête principale des freres Bon;
il avait toujours joui feul de la terre. -Ecrivant Mes. Gafioo 1
Sauvere & P a f c a l i s . '
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0 t1 11. N A-f:
ARRÊT
XLI II.
,Un Jugemelfl définitif accordant une option pour être faite
dan~ urr temps déterminé, avec la claufe autrement déchu,
reption doit ém fa.ite .dans le ailai, pajJè lequel, les
exécutions peuvent être continuées fans eJPoir de retour-à
eptio'll.
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L
A DUe. Anne Giraud, âgée de pius de vingt - cinq
,ans, fe maria avel; le fieur Auoane~ ,. Chirurgien du lieu
'd'Auriol, après avoir tenu 11 fan pere 1es aéles de refpeél:
requ,is. Après ce mariage la DIle. Giraud aucorifée de fan
ma·ri Ce pourvut contre fan pere, pour qu'il lui fût conf- •
:titué une do~ de 20000 liv. Le pere contefl:a cette demande, fous le prétexte que fa fille s'écoit mariée contre
fon gré. Le Lieutenatlt d:e Marfeille, par fa Sentence du
:J.7 Juin 1768, confirmée par Arrêt du 22. Juin 1769,
'con,damna le neur Giraud- au paiement de b Comme dè
'6000 Jiv-. par forme de' dOfatiQn, fi mieux il n'aimor!payer 11 fa fine: ulle penÎlon alimentaire de 400- liv. , ce
qu'il déclarerait fur la fignification de IaSencence & Arrêt,
autrement déchu. ,
La DUe. Giraud fit fignifier cet Arrêt à fon pere, avec
injonélion d'opter ou pour les 6000 liv. de dotation, ou
pour les 400 liv. de penlion, autrement qu'il fercit patré
outre en conformité du fufdit Arrêt. Après fix jours de
délai la -DUe. Giraud fit faire commandement de payer
les 6000 liv. de la dotation adjugée, enfemhle les frais
exécutifs: -L'Huiffier parla au lieur Giraud lui-même qui ne
fit aucune réponfe. Une maifon fut failie, le procès exécuforial pourfuivi; 00 fit courir les inquants; la rnaifon. fut
eHimée, l'efiirnation fignifiée, les inqua ms faits, les affiches
mifes, & la d'élivraoce faiie 11 la Dlle. Giraud faut~ d'enché~itreurs. Le fieur Giraud efi affigné pour voir procéder à
�'n u P At AI,S J) Il Pll'O V Il tf C Il:
3 ~'t
la liquidation des fommes dues à fa fille, & de fuite à Ü
€ollocation. Elle ef!: mife en po/feffion, & déclarée débirrice de 194 liv. 3 f. Elle offrit cette fomme à fan pere,
avec injontbon de vuider la maifon. Pendant ce te,nps la
DUe. Giraud meurt; fon mari fut mis en po/feffion' de Iii
mairon. Le 1 Mai 1776 le fieur Giraud prétendant dj:
n'avoir pas I?erdu le droit d'opter -ou pour une dotatiov,
de 6000 liv., ou pour une pen(ion <Je 400 liv., demandii
de reorrer en po1feffion de fa maifol;!; cette demande fu,t
accueillie par Sentence du ~I Janvier 1177' Appel du fiel.l,1'
Aubanel pardevant la Cour. .
On difoit pour lui, qu'une collocation eil une 'procédure d'exécution, un atte juridique que le Juge ne ·peut
rendre vain & iIlufoire, qu'il ne peut anéantir qu'aut·al\tqu'affetté de quelque nullité, il ·lui eH dé·noncé c{)mm~
'. tel; qu'autant en. un mot que par ùne ,demande r.égulierl=
on lui en demande la calfatlon. Or ici. ,la demande du
lieur Giraud ne tendoit pas à faire prpnoncer li\. catfatipn
de la cl?lIocationdont il s'agilfoir; il ne prétendoit pas qu'elle
fût nulle; il ne l'attaquoit pas direttemenr; il demilndoit
qu'elle fût déclarée comme non .obvenue. Le Lieutenant a
d'autant moins regardé la cpllocation comme nul.le, que, ete
l'aveu du fieur Giraud, il a fec.onnu que celui-Ci en !levoit
rembourfer les dépens.
L'on fait que les fimples juge mens ,d'innrutt~9n qui -Ce
rendent dans le cou.rs d~unj: inf!:ançe pour obliger quelqu1un
à fe metrre en regfe, IQrfqu~il.el.l: en deme\lre de' rempljr
une obligation qui lui cf!: ,impj)~e, o~ ;d'ufcr d'un dro;Ït
qui lui eH acquis., ne fonc que .de fimp!es ç(lmminations.
L'on fait encorè que .ce n~efr qu'apr.ès aV,oir fait précéder
plufieurs de ce!! jugemens comminatoires, dans lefquels on
',emploit communément ces expreffipns, qJJi oe ;difent rien
de déterminé & de définitif., autrement p.ourVJI........ autrement définitivement pourvu, que les TribJ,lnaQX .pr:ononcent
des déchéances définitives d.ans leJquelles on fe fert de .la
c1aufe irritante, autrement .dès maintenant comme pour lors,
&c. Ma.is .quelle différen.c.e n'.y a-t-il pas de ces iugt:mell~
�'3'~2;
•
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•
JOURN.~L
de fimple infirllél:ion, enfuite defquels la déchéance efi pro!:
Doncée comme une peine, & en eH ejfeél:ivement une,
avec un jugement d~finitif tel que celui dont il s'agit, dans
lequel la déchéance de l'option ne laiife à celui en faveur
duquel elle eH prononcée, que la liberté d'exécuter 'contre
le condamné la prononciation' la moins rig-oureufe. La
(:aufe de celui qui à titre dé peine eft fournis à la dé(:héance de fon droit, efi toute favorable; cette déchéanée
pénale ne doit être ordonnée contre lui qu'après qu'on lui
a fait verfer les mefures; on ne peut la regarder comme
'définitivement prononcée, qu'autane- que la prononciation
eH devenue néceifaire, & que conçue d'une maniere claire,
précife , elle annonce que telle a été l'intention du Juge;
autrement on doit croire que le Juge a plutôt voulu comminer que juger, comme dirent les Loix: voluntas poiilts
comminanlis 'ludm Sententia judicamis efl. Mais il n'en eH,
pas de n)ême de celui à qui par un jugement définitif on
· accorde une opt ion avec \,a c1aufe que paifé le temps -qui
lui dl: do'nné il fera déchu, & qui faute par lui d'aVOir
fait un choix, efi exécuté pour l'adjudication la moins rig6ureufe; fon droit eH confommé, dès que le délai qui
lui a été donné pour opter fe trou've expiré, foit parce que'
par fon filence il efi cenfé n'avoir pas voulu de l'option, à
laquelle il lui était facultatif de renoncer pour fe foumettre à la condamnation prononcée, fO,it parce qu'un jugement .définitif ne peut pas être un jugement de pure
(:ommination. En un mot ,. l'un a un droit certain, ,la
· déchéance efi prononcée contre lui à. titre de peine; l'autre
, n'a .point de droit acquis, l'aél:ion qu'on lui accorde n'ell:
qu'une faveur; la déchéance ne rend pas fa condition plus
· onéreufe.
Cette di!l:inél:ion fondée en raifon, établie par les. Auteurs, a êté confacrée par les Arrê[s , & notamment pal'
'celui du 7 Décembre 1743. Me. Sauveur Vial ,Avocat de
Pertuis, vendit au lieur Pierre Vial, Bourgeois, plulieurs
propriétés, avec c1aùfe de prééaire jufgu'à entier paiement~
Le lieur Vial en a,liéna un~ partie avant d'avoir payé. Me;'
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Sàuveur Vial révoqua le précaire, & demanda d'être mis
en polfeffion des biens vendus, en rembourfant à l'acheteur ce qu'il en avait reçu. Le Lieutenant de Forcalquier
le lui permit par Sentence. Le ·fieur Vial en appella, &
Me. Vial offrit pardevant la Cour un expédient ponan't la
défemparation en fe fou mettant à rembourfer r fi mieux
l'acheteur n'aimait le payer lui-même totalement, ce qu'i 1
déclarerait dans 'la huitaine, autrement déchu. La Cour.
reçut cet expédienr. Le fieur Vial ne fit aucune déclaration dans la huitai\le, & Me. Vial fe fit en conféquence
metttre en polfeffion de la partie des biens qui n'avait pas
été vendue. Alors le fieur Vial vinr offrir le paiement à
deniers découverts;' fan offre fut refufée; il préfenta' requête à la Cour, pour demander <!'être reçu à purger la
de'meure; il en fut débouté.
Il eH donc abfurde de vouloir que le' fie'ur Aubanel,
après avoir obtenu une Sentence l!:,. tlLl Arrêt définitif qui
lui adjugeaient 6000 liv, de dotation ,. fi nlieuX"le lieur
Giraud n'aimait payer une penfion de 400 liv. eût été
ob1igé de le convenir de nouveau en jufiice, & d'obten.ir comre
lui diverfes Semences comminatoires, un nouveau jugement
définitif & un nouvel Arrêt pour le' faire décheoirlde l'option qui lui avait été donnée. Ainfi il- n'efi pas ''luefiion
d'un fimple jugement commin,ltoire i mais d'un jugement
définitif. D'ailleurs le fyfiême du fieur Giraud manque par
le fair, 'en ce que tout concourt à démontrer qu'il s'dl
rega'rdé lui-même 7cortime déchu de l'option, & qu'il a
préféré d'être com.raint pour les ,6000 'liv. de la dotation
adjugée à fa fille:, à lui' fairê une penfion annuelle de 400
liv. Il dl: évident qu'en prenant ce pani, le fieur Giraud
avait pris celui qui paroi/foit le plus avantageux, Or qui
pOJ.lrroit douter que c'eCi-là le calcul .que le fieur' Giraud
li fait, quand on voit la maniere dont il s'eCi conduir dans
tette affaire? Il a' confemi à la collocation" qu'il veut
rendre inutile fans ofer l'attaquer; il l'a formellement approuvée; il a renoncé à l'option qui lùi avait éré accordée ; il était majeur quand il a fait tOl,ltes ces démarchesl
Ann(es z775 e;, fuiv..
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il les a faites., parce qu~alors elles rempfHTbiene fon întérén
il dt donc auffi ind~"ent qu'injufte qu'il s'él~ve colure [on
propre fait.
,
.
L'on répondojt, pour .le fleur Giraud, qu'il n'y a· pas de
reg,le plus cerr;:line &.; plus c9nfbnte dans le, droit & cjans
·l'prdçe jud.iciair~, que,; dans les jugemens, S~nrences ou
Arrêrs les clau [es comminatoires n'oor pas l'autoriré de
la chofe jugée. Cela elt érabli par le tirre du Code: ,Cor!z.
,minaliones, I:pifiolas, programmata, fubfcripliones auroritatem
.l'à, judjcarœ non /zabere; & c; l eft ainG que l'obf~rveor les
,doae~rs & les <.interpretes· furq le mêmé tirre. Ainli coures
.leS' foiS',,"<Jue Je ',Juge ordonQe qu'une relle panie 'fera rEille
chofe dans un tel temps, autremeor condamnée à'une
peine, ou' autrem.eor déchue" ou à peine' d'être déchue,
làn5 ajouter la claufe , dès maintenant comme pour lors, fi
fd.ns qu'il [oit befoin .d'alitre Senunce, la clau[e autrement
ddflzyel{ri'ef± palot Ul) juge01enr; ce n'elt qu'une commi-.
'll~ri.pn~..quL ;j'a pas,l'aut.oriré de la chofe' jugée. Et popr
f~ire déchëoir la, partie, il faut faire prononcer la 'déchémce avec"connoiffance de caufe & avec la c1au[e irri.,
Jllnr-e ;'JIJ~e -n'e.fi qulalors qU,e l'l, claufe n'eft plus une cOm'
m,io'àtlQO";lqu'elle ~èqtiÏe(t le caraél:.ere, de la choCe 'jugée,
:& .~l'alors la partie eft.• da os tOUS; [es' droits, 'J;elle eft la
.pratjque conf~.ante du Palais, l'ainli que l'ooferve Builfon
'filf1 le titre du Code comminationes, epifiolas" & Mr. de
Bezietlx " liv. 3" ch, 5 ,.h. ''lI\'
. ;J'm,ut ~èe {juï ,eft ,cQlTJmir!atif &' aocompagné de la c1auCe
auueméJltréoafial7lai pJ<tôs ,unel Sente.t1c-e ou \10 Arrçç, n~
do't }Jm:rlis pafrer-pourrune ,caoCe jugée'. Mé'.. 'Builfon ajoute
ue' la ·clau[e Iportée par les .Jugemens [ouve'rains & [ubalterne.s 1 dès maintf:nant comme pOlir lors, femMe ne devoir pas
Ë:oce regacdée_ comme une' fimple comminiltion, Il y a
autallt de ~ug.ènîerJs dans une Senrenaè ql!l'il Iy a ,de chefs:
rot 'capiw " tot; Sententiœ. Le ~lilgemeor fera (définitif pour
ce .qui .ef!:' ordonné d,éfinitivement; il 'ne fera que comminatoire en la claufe qui y eft ajoutée dans la forme & les
t~rmes ulités pour une commination.
�D U
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PAL AIS
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VEN C E.
3~ ~
Le filence du fieur Giraud lors des exécutions du lieur
Aubanel n'en en certainement pas l'approbation ni l'option;
tout a été fait par défaut & conire le gré & la volonté
'du fieur Giraud; il conne d'ailleurs par [a répon[e au bas
de l'exploit, portant affignation pardevant les eHimateurs
pour voir procéder à la liquidation des Commes & à la
collocation, u'il -déclara être oppo[ant aux fins de cette
affignation. On pellt juger .par-Ià fi le fieur Giraud a j<lmais
approuvé la prétendue collocation dont il s'agir. Or le
fieur Aubanel ayant fait une collocation qu'il n'avoit pas
droit de faire pour les 6000 liv., les dépel)s qui ne [ont
que l'accéffoire, doivent Cuivre à cet égard le fort du principal; cela eH d'autant plus vrai, que par les fi'uits & les
rentes que le fieur Aubanel li perçus de la mai [on , il e{~
payé de ces dépeJls, & qu'à tout événement le fieur Giraud
a toujours offert de parfournir le paiement du tout, ce qui
eH même expreffément porté par la Sentence. _
Par Arrêt du 20 Mai 1778, rendu au rapport de Ml'. le
Con[eiller de la Beaume, aux Enquêtes, tout d'une voix,
la Sentence fut réformée avec dépens. Ecriv'ant Mes. Julien
& Lag.et.
1
x
AR R Ê T
XLIV.
L'Artifan qui .veut être reçu Maître, doit juflifù:r de .l'aRe
d'apprentijJàge.
,
AR une Ordonnance rendue par les Lieutenans-Géné~
l'aux de Police de la ville de Toulon le 30 Juillet 177 1,
il fut enjoint à tous ceux qui voudroient travaÏller du métier
de Maçon & -Tailleur de pierre dans la ,ville, de fe pré[enrer
préalablement pardevant eux, pour être reçus maîtres aux
formes de droit, en préCence des Syndics, après néanmoins
'fu'ils auroient juHifié de leur capacité en conformité des
Ordonnances du Royaum.e, & en payant par eux les droil$
P
Yy2.
�3~6
10
URNAL
légitimément dus; 11 défaut d'obéir 11 cette injonél:ion 1 il
leur ell fait inhibitions & défenfes de travailler des métiers
de Maçon & Tailleur de pierre, 11 peine de tOO liv. d'amende, de faiGe & de confifcation des ourils; permis aux
Syndics de faire' des vifites en çompaguie d'un Huiffier,
& d'én' drelfer procès-verbal aux formes de droir.
Honoré Vacon prétendir qu'il pouvait travailler comme
érant au cas de la maîrrife; il produiGt un aél:e pré,endu
d'apprentilfage, qu'il difoit tenir d'Anroine Senés, MJçQn
de Solliers; & fur le refus que firent les Syndics de l'admettre ,dans leur corps, il fe préfenta pour être reçu par
les Maçons & Tailleurs de pierre de la ville d'Aix, qui le
reçurent moyennant 50 liv. du droit d'entrée, & il fut •
dit dans la délibération que Vacon av~it fait fan appren-'
tilfage avec Jofeph Borrely l'un des Syndics.
'
Muni de ce tirre, Vacqn fe préf"nra aux Syndics des
Maçbns & Tailleurs de pierre de Toulon pour être admis
dans leurs corps; ceux-ci refuferenr, & fe pourvurent 11 la
Cour par requête du 8 Oél:obre 1777, par laquelle ils demanderent ajournement contre Vacon, à l'effet de venir
voir dire & ordonner que fans s'arrêter à la prétendue réception, elle feroit déclarée nulle & de nul effet & valeur,
aV.ec inhibitions & défenfes à Vacon. de travailler du métier
de Maçon dans la yjlle de Toulon & fan terroir, fans avoir
été préalablement reçu maître aux formes de droit, à
peine de 100 liv., d'amende, de faifie & confifcation des
ourils, dép'ens, dommages & intérêts, & d'en être informé,
& que Vacon ferait condamné aux dépens.' Vacon fit valoir fa réception dans le corps des maîtres Maçons &'
Tailleurs de .pierre de la Capitale.
'
On répondait pour les Maçons de Toulon, que la réception de Vacon avait été faite fans qu'il confiât d'aucun
apprenrilfage. Il ell: bien vrai que la délibérarion des Maçons & Tailleurs de pierre de la ville d'Aix renferme
J',dTerrion d'un apprentilfage fait chez Borrely l'un des
prieurs; mais une Gmple a1fercion peut-elle fuffire en pareil cas? Il faut, lùivant l'arc. 3 du titre 1 de l'Edit
�_ nu PAL AH !l B PRO V B NeIl;
3) 7
(Je 1673, rapporter le brevet & le certificat d'apprentiifage-.
Dans l'ufage, il faut rapporter l'aéte d'obligation, & celui
de cancellation. Si l'on fupprime cet ufage, autant vaudrat-il fupprimer l'obligation & la loi des apprentiifages; tout
afpirant en fuppofera l'exifl:ence; il ne lui en coûtera que
la peine de l'affirmer; on fera difpenfé de l'obligation de
la remplir; l'apprentiifage n'efl: pas un fait indifférent; les
conGdérations -d'ordre & d'intérêt public qui le rendent
néceffaire, font affez con,nues.
A la bonne heure que les ouvriers reçus mairres dans
la ville de l'établiffement du Parlement, aient auffi le droit
d'exercer dans tout le reffort; mais "Cette réception doit être
faite dans l'ordre & dans les regles. La -loi de l'apprentiffage n'efl: point locale; elle eH d'Ordonnance & de
droit général; fans cerre loi, on recevroit le premier venu;
l'induHrie feroit déprimée, & le public feroit trompé. Qr,
Vacon ne rapportant aucun aéte légal d'apprentiffage, ne
peut fe fervir de la délibération qui le reçoit maître dans
la ville d'Aix ,_ parce que, s'il en étoit autrement, les ré:ceptions feroi-ent des aétes de brigandage & de -menfonge;
il fam donc obvier à cet abus, qui ne tendroit qu'à faire
dégénérer les réceptions en pure formalité, à engraiffer
les Jurandes & Communautés d'artifans des villes principales
aux dépens de touS ceux qui voudroient être admis, en fe
mettant aU-deffus des regles & des entraves impofées aux'
artifans par les loix d'ordre & d'intérêt public, & en faifant ainG le préjudice de ~toutes les jurandes & communautés locales qui feroient par ce moyen privées de to_ut
droit dé réception quelconque, paree que tous les afpiran_s
ne manqueraient pas de courir aux jurandes des villes principales, qui préfenreroient la facilité dangereuCe d'une réception fans forme, fans regles, fans examen.
Arrêt du 2) Mai 1778, au rapport de Mr. le ConCeiller
de Fortis, conforme aux fins priCes par les Syndics des
Maçons -& Tailleurs de pierre de la ville de Toulon, &
qui condamne Va~on aux dépens. Ecrivant Mes. Gaffi~~
& ....."...
�JOURNAL
ARR Ê T
XLV.
Le canal d'arrofage fervant a l'utilité pub/i'lue peut être conf
truit dans le fonds du particulier, a la charge de l'illdemnifer.
.
E 20 Mai 1693 le confeil général de la Communauté
de Fugeiret délibéra de dériver l'eau de la riviere de
Lavaire daps lesquarriers de Bouentes-Ie-Harlet & autres
qui forment une paTtie du tèrroir.
Le canal qu'on déter01ina alors, & pour lequel -la Communauté devait fournir un encouragement, ne fut point
confiruit; on s'apperçut apparemment qu'on avoir mal pris
le niveau, & que l'entreprife échoueroit; elle fut abandonnée.
Quelques~uns des po1fédans biens aux mêmes quartiers
crurent qu'en prenant de meilleures combit)aifoils qu'en
1693, il ne femit pas impollible d'exécuter ,cet ancien projet,
qui n'avoit jamais été perdu de vue dans le lieu. Ils s'affemblerent au nombre de quinze chez Me. Blanc, Notaire,
& ils pa1ferent un aéle de fociété le 28 Février. 1768 , de
Yaveu pourtant de prefque la totalité des autres po1fédansbiens, à l'effet de conHruire ce canal d'arrofage à frais
communs; & comme on étoit néce1fairement obligé de traverfer les propriétés &' de caufer quelques dommages" il fut
convenu d'en indemnifel' les propriétaires, fuivant l'eHima·don qui en femit faite' par Experts.,
•
En conféquence de cet aéle de fociété, non feulement les
quinze particuliers' qui y avoient fiipulé, mais encore cous
ceux qui devoient profiter de l'arrofage, travaillerenr à la
conflruélion du canâl. Il fut con<luit à fa perfeélion, fans què
perfon'ne y mît le moindre ob{hcle, & Peau y fur dérivée
dans le -courant de l'année 1770.
, ;'
Il fut queHion de p;océder alors à l'eftimation des dom~
L
-
-
,
�'r> u F A LAI S D B PRO V B N C B:
3)9
b'lages, pour fixer à chacun l'indemn)té qui lui revenait;
elle fut remplie à la fatisfaaion de tous les intére1I'és; trois
-feulement D'en furent pas conrens; ils détruilirent le canal
fur leur fronriere:Leur voie de fail fut déférée à la Jultice;
une Sentence interlocutoire ordonna la preuve des acquiefcemens & aél:es approbatifs qu'ils avoient fait du canal;
mais au moment que l'enquête allait être prife, deux reconnur'ent leur tort, rra'tlligerent avec les intére1I'és, & résurent leur indemnité, ainli qu'elle avoit été réglée.
Le 28 Décembre 1776, Jean David, le feul qui rell:ait t
préfenta une requête 'à la. Cour, pour faire ordonner que le
canal conn,ruit dans fa propriété ferait comblé; que les chores
feroient rernifes dans leur premier état, & que les inrére1I'és feroiènt condamnés aux dommages & intérêts foufferts
.& à fouffrir, & aux dépens.
La Communauté de Fugeiret crut devoir intervenir dans
l'inll:ance, à l'effet d'y r~quérir de fon chef le déboutement,
de la demande de Jean
David. ,
,
On difoit pour celui qui demandait le comblement, qu'on
n'avoit pu établir un canal dans fa propriété, & qu'enfuppofant qu'on en eût le droit, on ne pouvait, l'exercer- à 'défaut de fan ,confentement que 'de l'a\ltorité de la Jufl:ice ,
& après .la' fixation, de la valeur de ,la, fervitude que l'on
vouloit impofer' fur cette propriété, & même après le paie,mem.
Quand l'intérêt public exige l'établitre,rnent d'un canal dans
Je fè;>pds d'tfn particulier, & que ce particu,lier ne veut point
fouffrir une -pareille fervitude, on n'ei!: p,as aurorjfé à le confnuire; on s'adre1I'e au Juge pI/ur en obtenir la permiffio,l1,
en payant l'indemnité qui lui ell:- due. Pour parvenir à la
fixer, le Juge nomme d'office des Experts. & ces Experts
y procedent; la valeur de la fervitude ell: fixée; ce pdx .eil:
offert au propriétaire du domaine rendu fervile; s'il 'le refufe, il efl: dépofé; il Y a alors une vente forc~e; il ell: de
la nature d'une vente que l'acquéreur compte le prix avant
de recevoir la chofe. C'eft détruire tous les principes que
.
�'366
Jou RNA L
de s'emparer militairement d'un bien & d'en dépouiller dé
voie de fait le vrai propriétaire.
Chaque citoyen eft maître de fan bien; il ne peut être
forcé ni à l'aliéner ni à l'aifervir. Telle eH la regle géné-,
raIe; elle n'eft cependant pas fans exception. QU,and un particulier poifédera un bien néceifaire .à la Communauté dont
, il eft membre, foit pO!lr confhuire un édifice, foit pour
y établir un fcÎifé pour la conduite de~ eaux deftinées à une
fontaine, fait enfin pour un chemin public, il eft obligé /
alors de le céder ou de fouifrir u-ne fervitude. Mais une poi-gnée d'habitans n'a ce droit _que dans le cas unique où elle
eH obligée de conlhuire des foifés dans les fonds voiGjJS
pour la conduite de l'eau néceifaire à faire tourner un moulin;
encore ce droit ne prend pas fa fource dans le droit commun. La liberté d'établir des foifés traverfant les fonds d'autrui, ne compete, fuivant l'Edit du 20 Mai 1 )47 porré pour
la Provence, rapporté par Mourgues, pag. 22.8, qu'à ceux
qui. ont fàculté de moulins & engins. Ce cas excepté, des
poifédans-biens ne peuvent conlhuire des foifés que du conféntement des particuliers· dont il faut _traverfer les propriétés.
Quand "il· s'agit d'un moulin, d'un ~ngin, la totalité. des
habitans eft iméreifée à leur établiffement & à leur cohfervation; leur exiftence dt néceŒ1ire à la vie. Mais il en
eft bien autrement, lorlqu'il n'dt queftion que d'un arrofage.
I;'eut-être priyera-t-on le poifédant-bien d'une augmentation
de revenu; mais cette privatiol1 eH étrangere à l'univer(alité
des habitans. Dès qu'il ne peut (e la procurer qu'en a(ferviifant le bien d'autrui, il dOlt avoir fan con(entement ,
fan approbation. S'il ne parvient point à' l'obtenir, il ne
fauroit être autorifé à s'en emparer de voie de fait.
On répondoit pour les poifédans-biens, que le foifé fuç
ouvert dans le fonds de Jean David (ans aucune réclamation de la part de (a mere ni de fon curateur, qui certai.
,nement n'auroient pas manqué de (e plaindre -d'une pareille
eotreprife, fi elle n'avait pas été faite de fon aveu. Ce
coofememenç
�•
DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
'361
corifentenient, pour être obligatoire, n'a pas befoin d'êr re
exprè~. C'eft un principe certain que celui qui ne s'oppofe
pas, lorfqu'il eft en droit de le faire, ou qui du-moins ne
fait aucune proteftation, eH: préfumé confentir. Patientia,
dit la Loi 2, §. 2, Joluto matrimonio, ejl non nol/e, non
contradicere, non proteflari , qui enim non cont[adicit evidenter,
videtur confentire. Suivant un autre axiome du droit, eadem
efl vis tacitorum qute expreffirum. L'approbarion tacite ré1 fulrante du filence de la tutrice lors de l'ouverture du foiré
dans fon fonds formait contr'elle une fin de non-recevoil:
infurmontable ; fa réclamation eil: d'autant plu~ mal fondée,
que parmi quarante·fix parriculiers donc,le canal traverfe les
terres, il eft le feul à fe plaindre. '
D'ailleurs on ne peut pas mieux approuver un ouvrage
que quand on s'en ferr; car l'approbation d'une chofe qui
gît en fait, eft bien moins fufceptible d'équivoque & de
fauire interprétation, que celle qui réfulte par écrit: nam
confenfus Jaélo, comme dit Mantica, de tacit. & amD. co/:vent., lib. 13, tit. 8, n. 16: non mùzùs quàm verDis dec!slratur ,& confenfùs tacitus & exprejJùs ejufdem Junt potejlatis.
On convient que le Juge ~'avoit point nommé des Ex- .
perts; mais .il n'eH pas dit que leur pouvoir fût par cela
même illégal. Cha'cun fait que iflter confentientes nul/œ fun~
ludicis partes. On n'a befoin du miniil:ere du Juge que quand
il y a' conteflation. Dans l'hypothefe préfente, toutes les
parties avoient donné leur confiance à ces Experts; les uns
.exprelfémenc & par écrit dans l'aéle de fociété de 1768;
les autres verbalement & tacitement, en adhérant 'par le
fait à la réfolution prife par les premiers & en l'exécutant.
Si quelqu'un s'étoit plaint, à la bonne heure alors de re,courir au Juge pour faire celfer fa réclamation; mais dès
qu'il n'yen eut pas plus (ur cet objet que fur l'exécution
du projet, qu'eût-il été befoin d'en venir à des formalités
judiciaires?
Pour repoulf~r le fyHême ,de David,' ,fur ce q~e chaque
citoyen ell: maltre de fan bIen, o,n dl!"olt que fUIvant Denifart, vo. vente, ~. 8.' la regle qUI eXIge le c0i,fenrement'
Allnél:s t 775 & jillV.
' ~
\
�361.
Jou
RNA L
du propriétaire poùr rendre la vente légitime; n'a pas lieu'
dans le cas de l'milité publique pour laquelle il efl: ju!l:e
de faire céder l'intérêt du particulier en l'indemnifant. C'eil:
auŒ ce qu'établiffent Boniface, tom. 4, pag. 4') 6, Covarruvias, var. refol., liv. 3, chap. 14, n. 8, & Domat, liv. l,
tit. 2, feél:. 13.
Lorfque la Province fait faire un chemin public, on le
trace; on coupe les fonds qu'il doit traverfer, & quelque-fois
il eH fini avant que les propriétaires foie nt payés de leur
indemnité, ou n)ême qu'elle ait été liquidée. A-t-on jamais
vu qu'on fe fait adreffe au Juge pour nommer des Experts,
ni avant, ni après? Les ouvrages d'utilité publique ne font
point fournis à ces formalités; elles ne font néceffaires que
quand le particulier y met des ob!l:acles perfonnels, parce
C]u'il fauc alors les faire foulever; mais hors de là on va fan
rrain, parce que l'on peut tout ce qui e!l: honnête, comme
dit André Gail, liv. 2, obfervat. 66, n. 6: id enim dicimllr
poffi, Cjllod hO'!eflè poifùmlls.
La JuHice n'ordonne jamais la del1:ruél:ion d'un ouvrage
reconnu utile, fou's prétexte qu'on a manqué à' la forme;
il fuffit qu'il ait pu être fait légitimément, pour être affuré
qu'elle le protege, quand il eil: fait, fans égard à la maniere
donc, on s'y eil: pris pour y parvenir.
Il -eH certain que le Statut, en accordant le droit -aux
propriétaires des moulins & engins de conduire les eaux,
faire foffés, levées & reclufes par les propriétés de leurs
voiGns, a eu l'intérêt public en vue. Or, pour déterminer
cet intérêt public, il n'eil: pas néceffilire que tous les habitans d'une Communauté y participent ut fingllli; mais .il
fuffit qu'ils y foient intéreffés ut llnivep. Ainli en regardant ce principe comme inconteHable, il ne l'eil: pas moins
en point de fait que l'univerfalité des habitans eH intéreffée
à ce qu'une partie du terroir qui ne fupportoit prefque rien
des impolitions communes, fait en état, par fa fécondité,.
d'en partager le poids pour tous les temps à venir.
On difoit pour la Communauté, qu'il eH vrai gue chaque
citoyen en maître de fon bien; ..que la propriété & la vie
�DU
PALAIS
Dl!
PR OVEN C E.
36'3
<lès citoyens doivent être affurées & fixes comme la conf-
titution de l'Etat. C'ef!: ainfi que s'explique le plus grand
génie du fiecle. Mais ce refpea pour le droit de propriéré
a fes bornes. La fociéré dans laquelle nous vivons nous artache les uns aux autres, & nous impofe des obligarions
& des devoirs réciproques. ConGdéré dans cet état civil,
le citoyen ~a pas une exiflence abfolue, mais bien rela~
rive; il ef!: tranfporré, pour ainG dire, dans l'unité commune. Il doit contribuer au bien public, dit Puftèndorff, du
• droit de la nature & des gens, liv. 7, chap. 9, §. 3, qui
efi le" but naturel de l'établif!èment des faciétés civiles.
Delà vient ce principe de droit public, que l'intérêt par~
rieulier doit céder à l'inrér§:t général: quod communiter om~
nibu.s prodefl, hoc rei privatœ, nof/rœ utilitati prœferenJu/n
effi cenfemus. Delà vient que 'Ie ciroyen, qlloique maîrre de
fon bien, ef!: néanmoins forcé de' le vendre, Jorfq'ue l'uri~
liré p\lblique l'exige, pourvu qu'on lui en paye Je julte prix.
Cer~e vente forcée a lieu, non fe-ulement 'Iorfgu'il s'agit
d'une utilité premiere, comme dans le cas de néceffiré pu~
hlique, mais encore lorfqu'il s'agit d'une utilité fecondaire,
comme pour l'embelliffement & la décoration des villes,
pour l'agr.andiffement des rues, des chemins, d'une Eglife,
d'un cimetiere, & pour la commodité des citoyens. Boni~
face, tom. 3 & 4, pag. 4); , rapporte des Arrêts qui l'ont
décidé de même. Ces Arrêts font conformes à la doéhine
de Domat, dans fan traité des Loix civiles, rit. du COl1lr(lt
de vente, pag. ;3; de Buiffon dans fon code., liv. 4, tir.
17; de Covarruvias, var. refal., lib. 3, cap. 4, n. 8, & de
Denifart, vo. vente, n. 8.
L'agriculture ef!: fans doute l'objet le plus important dans
la fociété, parce qu'elle fournit à nos premiers befoins;
il eH: de l'intérêt public que les terres foient bien cultivées,
& de favorifer conféquemment tour ce qui rend à les ferrilifer, à les améliorer, à augmenter leur pro.duit, & à encourager le cultivateur. On ne peut pas douter que l'arro~
{age des terres ne foit la caufe premiere de leur fertili(ation & de letlr produit. L'eau ef!: ce p'rincipe de vie & de
Z?:2.
,
�34
loURNAi
fécondité, cet agent univerfel de la nature, fans lequel rien
ne pel:t croître &' fe reproduire; elle eH, pour ainfi dire,
l'ame de l'agriculture; elle en vivifie tous les retrorrs; elle
change en prairies les terres les plus arides; les prairies
multiplient les' beltiaux, les be/liaux procurent les engrais.
Tous ces différens objers, indépendamment de leur utiliré
particuliere, rendent tous à un feul & même b.ut, à rendre
plus facile au laboureur l'exploitation' des terres, & à augmenter leurs produél:ions de prerniere néceffité.
.
..
Or, fi le canal d'arro[aie qui traverre la propriété de
Jean David e/l une fource. de feniliration & d'abondance
pour les différens quartiers de Fugeiret, aurrefois improduc~.
ribles, il ne peut êrre confidéré·, par les avantages réels
qu'il procure, que comme un ouvrage utile & avanrageux
au public, non pas d'une utiliré fecondaire, mais d'une
utilité premiere, parce' qu'il tend au bien & au progrès de
l'agriculrure, qui dl: la fource de tous les biens, & qui
verfe dans la fociéré les denrées les plus précieufes & les
plus néce1fa ires à tous les citoyens.
'Par Arrêt du 30 Mai 1778, rendu au rapport de Mr. le
Confeiller de Beauval, Jean David fur débouté de fa demande, avec dépens envers toutes les parties. Ecrivant ·Mes.
'
Sàuvere , Verdollin & Rambot.
ARR Ê T
XL V J.
Sur' l'appel d'une Ordonnance qui [urftoit à toutes pour[uites 'attendu la litifPendance.
En matiere d'appel, l'on ne peut demander l'évocation du fonds
& principal ,fi le premier Juge n'a rendu [ur le fonds quelque .décifion qui [oit attaquée.
)
Près trois aétes de refpeél:, la DUe. ~e Led~non, penfion na ire dans un mona/lere à Paris, fait affigner [on
pere pardevaot le Sénéchal de Nîmes, en déboutement de
A
�34
loURNAi
fécondité, cet agent univerfel de la nature, fans lequel rien
ne pel:t croître &' fe reproduire; elle eH, pour ainfi dire,
l'ame de l'agriculture; elle en vivifie tous les retrorrs; elle
change en prairies les terres les plus arides; les prairies
multiplient les' beltiaux, les be/liaux procurent les engrais.
Tous ces différens objers, indépendamment de leur utiliré
particuliere, rendent tous à un feul & même b.ut, à rendre
plus facile au laboureur l'exploitation' des terres, & à augmenter leurs produél:ions de prerniere néceffité.
.
..
Or, fi le canal d'arro[aie qui traverre la propriété de
Jean David e/l une fource. de feniliration & d'abondance
pour les différens quartiers de Fugeiret, aurrefois improduc~.
ribles, il ne peut êrre confidéré·, par les avantages réels
qu'il procure, que comme un ouvrage utile & avanrageux
au public, non pas d'une utiliré fecondaire, mais d'une
utilité premiere, parce' qu'il tend au bien & au progrès de
l'agriculrure, qui dl: la fource de tous les biens, & qui
verfe dans la fociéré les denrées les plus précieufes & les
plus néce1fa ires à tous les citoyens.
'Par Arrêt du 30 Mai 1778, rendu au rapport de Mr. le
Confeiller de Beauval, Jean David fur débouté de fa demande, avec dépens envers toutes les parties. Ecrivant ·Mes.
'
Sàuvere , Verdollin & Rambot.
ARR Ê T
XL V J.
Sur' l'appel d'une Ordonnance qui [urftoit à toutes pour[uites 'attendu la litifPendance.
En matiere d'appel, l'on ne peut demander l'évocation du fonds
& principal ,fi le premier Juge n'a rendu [ur le fonds quelque .décifion qui [oit attaquée.
)
Près trois aétes de refpeél:, la DUe. ~e Led~non, penfion na ire dans un mona/lere à Paris, fait affigner [on
pere pardevaot le Sénéchal de Nîmes, en déboutement de
A
�DU
1
PAtAlS
DI!
PROVIlNCli;
36')
l'oppofition 11. fan mariage; le fieur de Ledenon demande
fan renvoi pardevant les Juges compétens. La Dlle. de Ledenon fe départ de· fon affignation. Nonobf1:allt ce. département, Sentence qui déboute le fleur de Ledenon de fon
oppoGtion. Signification au Procureur de la Dlle. de Le'denon, avec déclaration de la part du pere d'en appeller
·au Parlement de Touloufe. Le Procureur répond que cette
déclaration d'~ppel e!l: inutile, attendu que la Sentence avoit
été nullement rendue, puifque par le déGfl:ement il n'y avoit
plus d'inHance, & en ratH que de befoin le Procureur s'en
départ :de nouveau. Signification des lettres d'appel du fienr.
de Lepenon au Parlement de Touloufe. Avant cet aél:e, la
Dlle. de Ledenon l'av{)it fait affigner au Siege d'Arles; le
fleur de Ledenon y comparoît, pour faire dire qu'il doit être
furlis" aux poÎJrfuites jufqu'à ce que .le Parlement de TOll·loufe ait jugé fon appel en déni de renvoi, ce qui lui fut
.accordé par le Lieutenant d'Arles. Appel de la Dlle. de ,
Ledenon, avec c1aufe d'évocation du fonds & principal.
On difoit pour elle, qu'il eH: imporrant de maintenir la
pui1Tance des peres, de prêter de l'appui 11. leur autorité,
d'écouter favorablement leur réclamation; mais il n'efl: pas
.moins néce1Taire d'avoir égard aux plaintes refpeél:ueufes des
enfans, de les protége~ contre des droits d'autant plus dangereux, qse fous l'appareu{:e de la tendre1Te, ils peuvent
quelquefois dégénérer en abus & en tyrannie. Concilier les
devoirs refpeél:ifs, décider jufqu'à quel point doit aller la
:liberté naturelle de difpofer de foi, & dans quelles bornes elle
doirêtre reHreinte, la route eH tracée depuis long-temps. La
Loi a pérmis aux enfans majeurs de fe marier, après avoir
requis refpeél:ueufement par trois fois le confenremeot de leurs
peres. Ces aél:es de déférence une fois remplis, ils font affranchis 11. cet égard d'une autorité qui ne peut plus être
que de confeil. S'ils peuvent encore être arrêtés, des exemples multipliés nous apprennent que les oppoGrions ne font
guere qu'un obHacle .. momentané, une derniere r~1TourL'e
prefque toujours infrutl:ueufe, parce qu'il eH difficile de rencontrer des raifons .a1Tez fortes pour inhiber 11. un majeur
�'366
Jou
RNA Ir J.
'1
une alliance qu'il defire, un contrat d9n~ le, confelltemefit
.mutuel des parries fait l'effence, une fociété dont les. con;venances les plus à con fuiter étant celles de goOt & de ra.pport de- caraél:erè, 'perfonne n'a droit de fe croire plus en
état de bien choifir que ceux qui veulent la c9ntraB:er. )
Les Romains, ce peuple fi jaloux de la puiffance paternelle, ne l'avoient étendue fur les mariages, qu'autant que
les enfans n'étoient pas émancipés; ils n'avoient connu qu~,
l'autorité civile & faétice de leurs Loix; ils avoienc oublié
;dans ~ette occ~fion l'autorité fi douce &, fi puiffante que
.mériie la tendreffe des pare(ls, & que la. recOflO.oiffance des
enfans leur affure; ils n'avoient pas apperçu que la déférenc.e
des enfans efl: du re!lort des mœurs; qu'elle eH indépen:dante du lien de la famille civile, parce qu'elle tient aux
droits du fang & de la nature. Nous avons mieux vu parmi
nous: le pere, proteéteur de fes enfans, ,do)c toujours être
confulté tant qu'ils font mineurs; la Loi fe. repofe filr lui
de leur établiffemenr. On préfume que pendant leur minorité,
il leur prodigue fes foins; que fon affe.él:ion croiffant avec
eux, l'a fans cdfe occupé de leur plus grand bien; on ne
les écoute pas, s'ils veulent fe marier fans fon confentement;
on les regarde comme de jeunes infenfés qù'égarenç leurs
pallions, & qui ne peuvent point avoir à cet égard de volonté.
Mais à la majorité accomplie, le goint de vue change.
Si des mineurs peilvent être féduits, fi la foibleffe de leur
âge, fi l'importance du mariage ne permet pas de les laiffer
contraéter fans Je confentement de leur pere, il efl: impoffible aulli que des peres illjufl:es, durs, infoucians, avares
ou prévenus, fe refufenc à des mariages convên<ibles; leur
négligence, leur obllinarion donnent droit aux en fans de fe
[ervir de la liberté que la nature leur donna dès leur nubilité, & que la loi civjle avoit enchaînée. Alors cerre li..
berté prend tout fon refforr; le fils peut fe' choifir une
époufe,. la fille un mari; il.n'y a plus qu'une formalit~
de décence à remplir: la requifition juridique & répétée
du confentemenc du pere. C'efi la difpo!üion de nos 'Or:;
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE:
367
donnances; après le con[entement du pere n'eH plus nécetraire.
Tous les publiciiles à qui cette quefrion appartient, Grotius, Puffendorff , Valff le décident ainG. Ce dernier établit, dans [es inH:itutions du droit de la nature & des gens,
que les enfan~ devant toute leur vie s'étudier à plaire à
leurs parens, ne doivent point coorraél:er mariage fans requérir leur confentement; mais quand leur téte ea- mtÎrie
par l'âge, il vaut mieux ·s'en tenir à leur propre jugement
qiJ'à celui' de [on pere; c'efr pourguoi le con[entement du
pere eH: alors d'honnêteté, & non de néceffité. '
Il eH un âge OÙ l'homme doit avoir la libre difpoGtion
de lui.:méme, où touS les contrats doivent lui étre permis, fur~
tout le mariage, qui eil: le premier, le plus fimple &. re
plus' néceifaire de tous. A cet âge on eil: juge de [a p'ropre:
utilité; l'on peut la placer où l'on veut, facrifier des. avan-'
tages pour s'en procurer d'autres que l'on eHime em;ore
plus. Si la plupart font trop de cas des richeifes, fera-ce
un mal de les méprifer? Si l'on voit aifez [auvent des hommes préférer une époufe [elon leur cœur avec une dot modique à des biens plus confidérables ,une, fille ne pourra-telle pas avoir le méme défintéreifement? Qu'on tâche de
la diffilader , qu'on lui faife des repréfentations', à la bonn e
heure; mais fi elle a perfifré plufieurs années, pourquoi l'empêcheroir-on de Cuivre [on deifein? Pourquoi la forcerai ton à préférer la fortune au bonheur, un établilfement de
pure' convenance à un mariage qu'ellé defire, où elle trouveta encore cette heureu[e médiocrité qui fait plus de bons
ménages que les grandes fortunes, oÙ elle paroÎt~a à [on
époux riche de tout ce qu'elle aura facrifié pour lui?
Que le fieur de Ledenon ne dife pas que la [atisfaél:ion
que fa fille recherche ne fera que momentanée & illufoire,
qu'elle fe diffipera avec le temps. Tous les raifonnemens
de ce genre, bons contre une mineu·re qui n'eil: [tire ni de
fa tête ni de [on cœur, ne font p~as recévablés à l'égard
d/une majeure dans laquelle la Loi reconnoÎt une volon'té
ferme & conil:ante; tane pis pour elle fi ce qu'elle a voulu.
fi· ouvertement & avec.taot de force, touroe à foo malhèur; .
�'368
•
Jou
RNA L
,il fulEt de le lui avoir fait envifager; les repréfentations
faites, le pere ell: déchargé. Entre une autorité qui n'ell:
plus que de confeil, & la liberté qui n'en vem pojnt en~
tendre, entre les malheurs fmurs qui pem-être n'arriveront
pas, que le pere ne fou/frira qu'indireél:ement, & des maUX
préfens dont la fille ferait la vié}ime, il' n'y a pas à balancer; & telle eH la pofition de t.oute fille majeure qui
plaide pour fe marier.
Dira-t-il que l'époux n'eH pas auffi riche' que fa fille?
C'eH donc pour qu'elle f6it plus r'iche que le fieur de Ledenon veut rendre fa fille malheureufe. En-il permis de
mettre ainG en balance la fortune & le bonheur? Faut-il
priver la Dlle. de Ledenon de fa liberté, parce qu'on, veut
lui donner cL;,s fers dorés' La Loi qui lui permet de fe marier, pourvu qu'en fe mariant elle ne fe déshonore pas,
fera-t-elle impuilfante pour elle, parce que l'époux qu'elle
veut choiGr n'eH. pas opulent?
.
Sur les moyens de compétence, 'on difoit que l'on connOÎt, en matiere de Jurifdiél:ion, cinq fortes d'exceptions:
le renvoi, l'incompétence, le déc1inaroire, la révendication
& la lirifpendance. ,On confond fouvent ces chofes; voici
leurs véritables définitions. Le renv'oi a lieu, lorfque l'aff)gné fe prérend domicilié dans une q,tltre jurifdiél:ion; l'inçompétence fe rencontre, 10rf'Jue le J~e n'eH pas en droit
de connaître de la matiere ,. attendu les bornes de fa Jurjfdiél:inp, qui n'eH pas univerfelle; le déclinatoire, ,'efl:
19rfqu'on a un privilege dont 00 excipe pour être renvoyér
au Juge de privilege; la révendication fe fait par le Tribunal qui fe plaint qu'on lui enleve fes juHiciables; la litifpendance eH une exception propofée par une des· parties
qui obferve qu'elle eH en procès pour la même caufe devant
uo autre Tribunal.
.
Le fieur de Ledenon n'a pas pu dire à Arles, au Lieutenant: vous êtes incompétent; il lui a dit: vous hes mon
Juge; mais vous ne pouve t connoÎtre encore de mon affaire,
parce que j'.;zi en Languedoc un procès pour [avoir fi je n'y
plaiderai pas'. Si ce fyll:ême étoit vrai, le fieur de Ledenon
pourroi~
..
�DU
PALAIS
DE
PRO'VENCli.
369
pourr,oit a(rêter quiconque auroit à lui donner une affignation; on ne lui a pas contefié fon renvoi à Arles, fa fille
s'étant délifiée de fon appel à Nîmes, & du prétendu profit
que lui a voulu adjuger malgré. élie une Sentence qu'elle
ne follicitoit pas. 'il n'efi pas permis de fe donner -des
Juges, il efi permis de fe défifier d'une affignation. Le Sénéchal de Nîmes pouvoit, fi l'on veut, regarder ce renvoi comme préjudiciable à fa Jurifdiétion, il pouvoit le refufer; mais la Dlle. de Ledenon n'étoit pas obligée de foutenir un déni de renvoi prononcé malgré elle & évidemment injufie;. elle a déclaré qu'elle ne vouloit pas le [outenir; elle s'efi départie, en tane que de befoin [eroit, _de
la Sentence; elle n'a pas dû préfeneer au Parlement un
expédient de réformation, parce que par [oil défifiement
antérieur à la Septence elle n'étoit pas partie, parce qu'on
peut fe départir d'une Sentence fans expédient de réformation; il n'y a que les lettres d'appel qui invefiiifem le Tri,.
bunal fupérieur. .
.
Le Lieutenant d'Arles n'a pu fe déterminer au furfeoi
qu'à raifon, . ou de la litifcontefiation , ou de conflit de Ju·rifdiétion; de litifconeefiation il n'yen avoit point; elle
n'exifl:e que lorfqu'on eH pour la même demande devant
deux Juges 9iffërens; le déboutement d'oppolition demandé
par la Dlle. de Ledenon n'étoit pendant qu'à Arles, puifqu'elle s'en étoit départie à Nîmes; le Sénéchal de Nîmes
n'avoit pu ordonner que l'on contefl:eroit devant lui .fur une
demande qui n'exifl:oit plus.
Sur l'évocation, on difoit que l'art. 2. du tit. des fins. de
non procéd.er de l'Ordonnance de 1667, défend à tous Juges
d'évoquer les caufes & procès pendans aux Sieges inférieurs
ou autres Jurifdiétions, fous prétexte d'appel ou de connexité,
fi ce n'efl: pour juger définitivement en l'audience & fur le
champ par un feul & même jugement. Donc toutes les fois t]ue
la Cour peur fiatuer par un même jugement & à l'audi·ence,
elle peut évoquer; c'eH la feule condition qu'exige l'Ordon~
nance. Dans l'ufage, on n'en demande pas d'autres. Nous
en avons un Aéte de NotOfiété du Parquet, imprimé dani
Années l77 5 & fuiv.
A aa
�370
10
1J~ RNA L-
Ie RecueH de Me. La Touloubre., pag; 97. IL n'eft pa!
nécelfaire que l'affaire ait été traitée devant le premier Juge,
puifque cous les jours on évoque au criminel en iugeant
l'appel, fans que le fonds ait été traité devant le premier
Juge, & cela ne fe fait point par un prlvilege de la matiere
criminelle; toute accufation au petit criminel devant s'inf'rruire felon les regles des procès. civils, il n'y a pas de
raifon d'exception. Ce n'dl: que par un motif d'expédition
& de célérité qu'on' évoque; motif qui exille toutes les fois
que la Cour voit le fonds des chofes &; trouve fà religion
infl:ruite. Il y a même cet avantage pour les matieres civiles, qu'une des parties devant y demauder l'évocation,
pour l'obtenir .elle force l'autre à déduire fes moyens fur
le fonds, à les faire connoître, ou à prouver qu'ils ne font
pas [ufceptibles d'un jugement à l'audience. Ici le furfeoi
prononcé par le LietHenanc d'Arles ell d'une injuffice évi·
dente; il a recardé le jugeme~t d'une oppofitiQn; jugement
qui ne peut pas exiger une grande inllruél:ion, & qui doit
être prompr, vu ce donc il s'agit. La liberté d'une majeuren'a-t-elle pas dans un pareil cas une aél:ivité à laquelle rie n
ne réliàe, une force qui brife tous les obllacles qu'on veut
. lui oppofer, & qui ne fouffre aucun doute?
On réppndoit pour le lieur de Ledenon, gu'i1 exillo;t une
inllance. pendante au Parlem.enc de Touloufe; le minill:ere
public écoit partie. Le Lieutenant d'Arles n'avoit donc pas
pu dépouiller un Tribunal fouverain. Les parties ne· peuvent fe donner des luges; ainli le défill:emenc de la Dlle.
de Lèdenon écoit inutile; il ne pouvoit intervertir l'ordre
des Jurifdiél:ions; il fallait que J'affaire fe finît où élie s'écoit
engagée. La requifition du Procureur du Roi de NiOles &
tout ce qui avoi,Ç fuivi liait irrévoeablemenc les parcies. Ce
n'était plus la caufe d'un particulier; c'était l'intérêt de la
Jurifdiél:ion dV Parlement de Touloufe qui fe trouvait compromis. Mais la DUe: de Ledenon voulait fe ménager un
moyen d'inco~pétence & de calfation; le lieur de Ledenon
avait donc)'ln intérêt précis à faire valider fa procédure;
le Procuréur du Roi avoit cru devoir retenir la matiere;
.
-
1
1
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DU
PAL AIS
D B
PRO V B N C B.
_
37 J
Je Sénéchal avoit prononcé; dès-lors toutes les parties étoient
iiées j la Dlle. de Ledenon devoit faire ceffer cet obilacJe.
en préfentant un expédient fur l'appel, parce qu'inveili par
l'appel, le Parlement :Je peut être dépouillé que par le con~
fentement des parties; ainli rien. d'auffi juGe que la Sen~
tence du Lieutenant d'Arles, rien d'auffi néceffaire; elle doit
donc être confirmée.
L'évocation f<:roit encore plus injuile; pour qu'elle
ait lieu, il faut, d'aprèg. l'Ordonnance, que la màtiere y fait
difpofée, c'eil-à-dire, qu'on pui/fe juger à l'audience. C'eŒ
ce qu'établiç un Arrêt en 1720, rendu (ur les cpncJulions'
de Me. Bayon, Subilitut. Ici le fond,s n'a jamais exifl:é devanr le SénéChal de Nîmes, puifque le lieur de Ledenon n'a.
.préfenté qu'à fins de renvoi, & que le Lieutenant n'a ftatué
que fur ce chef; pardevant le Lieutenant d'Arles, on n'a
cherché- qu'à légitimer le Tribunal.· L'évocation n'eil donç
pas poffible, puilqu'aucun Tribunal n'e-il' invefti du fonds dl\!
la conteftation. Si le Sénéchal de Nîmes. eût été inveili ,
le P~r1ement de Touloufe', par droit de reffort, pourroit feul
évoquer. Ainli l'évocation ne peur avoir .lieu; d'ailleurs un
feul & unique jugement ne doit pas être définitif; les dif_
férens degrés de jurifdiB:ion doivent être fuivis; l'on nç
doit pas les interyertir pour une fille rébe\Je, & contr~
un pere qui s'afflige & s'oppofe à lln mariage qui ·va ré_
_pandre l'opprobre & l'amertume dans fa famille. L'oppo_ ,
fition d'un pere eH toujours 'favorable, & l'on doit vis- àvis dè lui refpeB:er les formes & fuivre les délais, Le mo.
ment où il doive fe pJaindre du genre de féduB:ion le plus
lIffreux n'ell pas encore arrivé; le délit n'ell que trop conf~
Jant; l'époux .deliré par la fille n'eH qu'un raviffeur; il eft
fauteur d'un- crime de rapt, & l'on efpere l'en convaincre
IX le faire déclarer indigne de jamais prétendre à la m,!În d@
la Dlle: de Ledenon.
• Mr. l'Avocat-Général ge Cali./fane obferv(l que le Lieu.
tenant d~Arles, invelli de fait & de droit, auroit deI, Gnon
réclamer, du-moins défendre (a JurifdiB:ion; il s'étoit lll!
Aaa
1.
�37;'
,
10
U R 'N A L
contraire dépouillé: & quoiqu'il ne pût y. àvoir aucune con::
teHation réelle pardevant quelque Tribunal que ce fût, il
avoit furlis toutes les pourfuites qui devoient être faites
pardevant lui, jufqu'après la déci lion de l'appel porté au
Parlement de Touloufe; appel illufoire & inutile, fait fans"
comradiél:eur, n'ayal)t point de partie réelle, & n'en ayant"
de fiél:ive que l'appellant; car il Q'y avoit point de révendication de la" part du Tribunal, point 4e réclamation d'office du miniHere public, point de requilition de la part
du lieur de Ledenon: Le Lieutenant d'Arles érait invelti
de droit; il érait Juge naturel des parties, il érait celui
de leur domicile; la révendication de fon Tribunal avoit
feul occalioné les fins de non procéder du" lieur de Ledenon;
lui feul érait l'objet, le motif, la caufe de la conteHation;
il devoit donc p.rononcer. Il érait invefii de fait, puifque
le lieur de Ledenon n.'avoi"t relevé fon appel au Parlement
de Touloufe que poHérieurement à l'affignation qui lui avait
été donnée pardevant le Lieutenant d'A~les, long-temps
après la déclaration de regarder comme non advenue l'Ordonnance du Sénéchal de Nîmes, rendue concre le confentement de la Dlle. de Ledenon, au préjudice de fon défiHement d'affignation & de l'abandon qu'elle avoit fait de
toute procédure faite pardevant le Sénéchal de Nîmes; il
ne. pouvoit d'ailleurs y avoir, il n'y avoit" réellement de
conteHation que pardevant le Lieutenant d'Arles. Comment
avoit-il pu (urfeoir? comment imaginer "qu'il eût voulu forcer
les parties de ne s'adreJrer à lui qu'après' avoir completté
une procédure nulle qui n'avait exiHé qu'un inHant?
Il n'y avait point de lili(pendance, parce que la DIte.
de Ledenon s'étoit délillée, & le Procureur du Roi pourrait feul être régardé comme (outenant fa jurifdiél:ion; la"
conceHation, les demandes avoient changé; plus de déboutement d'oppofition à Nîmes, puifque la Dlle. de Ledenon
s'en érait délillée, & avoit fur cette qualité fait affigner
fon pere pardevant le Lieutenant d'Arles. La contellation
n'éroit plus entre les mêmes parties; elle étoit ab(olument
�DU
PALAIS
nE
PROVENCE:
373'
'étrangere à la DlIe. de Ledenon; elle ne pou voit avoir lieu
qu'entre le Procureur du Roi, s'il e{lt agi d'office, & le fleur
de Ledenon. Le Tribunal légitime de-droit &.reconnu de fait
par toures les parties était donc le Lieutenant d'Arles:
pouvoir-il jamais être arrêré par l'entreprife d'un Tribunal
incompétent? Il était invefii avant que ,le Tribunal fouverain l'eût éré; il pouvoit & il devoir prononcer; le Tribunal fouverain de fon reffort l'aurait vengé de l'entreprjfe
faite à fa jurifdiél:ion; & alors, ou l'incompétence auroit
été reconnue, ou il y aurait eu une infiance en régIe ment
de Juges; jufqu'alors le Lieutenant d'Arles ne Eouvoit ni
-ne devait fe dépouiller, d'après l'article précis de l'Or-donnance. '
Sur la feconde quel!:ion Mr. l'Avocat-Général obferva'
qu'en principe d'évocation par droit de reffort, car c'etl:
la feule dont il puiffe être quefiion dans la caufe , le premier
Juge ne peut & ne doit être privé de la matiere, qu'iln'ait rendu quelque déci fion fur le fonds contraire aux regles
& à la Jul!:ice; tel el!: le motif de l'Ordonnance qui permet
l'évocation. Il faut que la quefiion fait prête à juger, car
. il ne paroltroit pas jul!:e de dépouiller les premiers Juges du
jugement d'un procès qu'ils n'ont pas pu juger, puifqu'il n'a pas
éré défendu pardevant eux. Il el!: certain que l'évocation 'en
tout état de caufe pourroit avoir les plus grands incon- veniens; ce ferait le plus fouvent s'expofer à juger' les parties, pour ainÎl dire, fans les entendre. L'intérêt des jurifdiél:ions même, aurant que celui des parries, demande que
quand ~lIes font d'accord fur l'évocation, le miniHere public
intervienne, pour examiner Îl elle peut être néceffaire ou
utile. Il faur, d'après l'art. 2. du titre 6 de l'Ordonnance
-de 1667, que la caufe fait inl!:ruite fur le fonds;' ici le
fonds n'était pas infiruir, puifqu'on était encore incertain
fur la compétence du Tribunal qui devoit juger le fonds:
quel efi le Tribuqal qui a fait l'infiruél:ion? Il n'en exiHe
aucun; l'évocarion eil donc· non recevable, parce que la
caufe n'efi pas en état d'êrre jugée; les moyens d'op pofition n'ont pa~.~ncore été difcutés, & n'ont pas mêm~
�'~74-
Jou
RNA. L
été propofés; comment d'après cela feroit-il 'poffible de
les juger à l'audience? On ne peut pas par droit de reffort
évoquer pour l'inHruél:ion;, on n'évoque que pour le jugement. Defendons il tous Juges, dit l'Ordonnance, JOus
peine de nullité des jugemens qui interviendront, G' en cas
de .contral1ention d'être pris il partie, d'évoquer les caufes,
inflances & procès pendants aux Juges inférieurs & autres jurifdiaions fous prétexte d'appel ou connexité,ji ce n'èfi pour juger
4éfinitivement il l'audience é: fur le champ par un feul & même
Jugement.
.
Les Commentateurs donnent des motifs. QCland l'af..
faire ne P'lroÎt fuffifamment éclaircie à~x Juges d'appel,
difent-ils, .il faut, fans s'arrêter à la requêre en évocation
.du principal, -confirmer l'appoint~ment. Il y a cependant
des cas, ajoutent-ils, dans lefquels il eH abfolument néceffaire & plus avantageux pour le bien des' parries d'évoquer., comme lorfque le premier Juge a appointé fur la
maintenue d'un bénéfice & a adjugé la récréance; ce' ne
feroit pas de l'intérêt des IJarries de ne juger que la récréance, & leur réferver un procès fur la maintenue. Quand,
.,par exemple, une partie a formé diverfes demandes, &
.que les unes ont éré jugées définitivement, & les autres
inte'rloquées, qu'on a inrerjerré appel de la Semence, &
que cependant l'interloclltion s'infiruit, il eH permis d'évoquer. Ainfi fait· d'après l'Ordonnance, foit d'après le
commentateurs', rien dans l'Ordonnance qui néceffite les
évocations; elles font ahfolument facultatives & permifes,
•mais prohibées dans tous res cas poffibles, excepté aux
condiri~ns portées par l'Ordonnance de pouvoir être jugées
fur Je champ par un feul & même jugement, ce qui emporre 1.1 néceffiré de l'infiruél:ion faîte & entiere pardevant
le premier Juge.
.
Mr. l'Avocat-Général examina enfuite fi les circon/lances
,de la caufe pouvoierit faire' changer çes principes, ou au
moin's, fi la faveur ne pourroit pas .abréger quelques délais
dans une affaire fi inœreffanr.e. D'un côré ( dir-il) là liberté
d'une majeure qui veut fe marier femble devoir brifer toUS
les obfiacles qu'on voudroir lui oppofer; de l'autre il efi:
•
\
�DU
PALAIS
DE
PR.OVENCE:
j~'
iinpoffible que l'autorité paternelle perde enriéreme!)t {es
droits. La Dlle. de Ledenon ef!: majeure & libre, cela ef!:
vrai; mais peut-être ce qu'elle regarde comme l'tlfet de
la raifon & de la réflexion, n'eU qu'une continuité de {éduction à laquelle le fleur de Ledenon peut s'oppoftr {ans
doute. Les mœurs doivent veiller à l'honnêteté du plus {aint
des engage mens; les Loix doivent venir au recours d'un
pere qui {e croit outragé, le délai n'eU pas irréparable;
au contraire, le mariage fait, fi le .déshon,neur exiUe, il
ef!: é~ernel.
00 doit faire une grande différence, faos doute, encre
l'oppoG'tiqn d'un tiers & celle d'un pere; rien de la part
-du tiers ne doit arrêter la célébration de cet _aél:e; des
dommages & intérêts ou moins encore ,font fouvent tout
l'objet de ces oppoGtions; on peut palfer outre, mais jamais vis-à-vis d'un pere; tout eU facré, & au moment où
il perd fon autorité, il {emble reunir toutes {es forces pour
n'en pas {acrifier l'ell11?loi , & vis-à-vis de lui l'oppoGtîon
eU toujours trop :elfent,ielle pour ne pas la juger a",ant le
mariage. Il eU des circonilances urgences; mais il n'en ef!:
jamais qui puiffent f\lire évanouir les égards & les confidérations dues à l'autorité d'un pere., par la rai{on qu'il
eil des cas où l'on peut s'empêcher de faire droit à {on
oppoGtion; on n'anticipe rien contre lui, & il Y a longtems que l'on a dit : c'efl peut-être à l'acccmpliJlèment des
formes & aux délais qu'elles entraînent; que la providence
attache fouvent le changement de volonté de l'êtn: à l'union
dUfiuel on s'ôppofe.
_
Que la Dlle. de Ledenon falfe attention (concinua Mf.
l'Avocat-Général) que les Ordonnances de nos Rois qui
lui permettent de {e mader à l'tige de vingt-cinq ans {ans
le confentement de fon pere, ne paroiffent pas être faites
pour elle; elles n'ont eu pour objet que de prêter leurs
fecours à des enfans dont les peres écartoient l'établiffement par caprice ou par des raifons d'intérêt: qui lifJeros
quos havent in poteflate, dit la Loi, injuriâ prolzihuerint
ducere uxores. Ces termes injuriâ prohihuerint démontrent
\
�376
Jou
R If A L
_
le motif de la Loi, & font v6ir en méme temps qu'ellè
n'a pas été faite pour le pere de la DlIe. de Ledenon.
Ce pere qui n'a des yeux que pour fa fille unique ,. ne
s'oppofe pas à fan établilrement. par caprice, non prohiba
ducere uxorem injuriâ, mais par des rairons de bienféance
& d'équité, qui peut-être fourniront des moyens relevans
quand elles feront approfondies. La DHe. de Ledenon
oublierait bientôt peut-être ce qu'elle idolâtre à préfent,
fi elle venoit à le polréder. Quels reproches n'auroit-elle
pas alors à faire à fon pere d'avoir prêté fes mains à une
union fi peu convenable! Tout femble donc exiger la rigueur des formes; toutes les circonfiances femblent fàire
une loi févere du droit le plus étroit, & il n'ell: pas poffible de s'en écarter. Si le dernier foupir du pere doit
être accompagné du mot d'oppofition, la fuite des démarches du Magiarat doit être l'exécution la plus ponctuelle des regles. La faveur fatisfait bien plus, qùand elle
remplie pat l'exécution de la loi; & quelle faveur ne
mérite pas un pere qui prend en main la caufe des mœurs,
·5a !ienne propre, celle de fa fille " & vient demander à la
JNflice de fuivre vis-à-vis d'elle toutes les formalités pour
retarder fon déshonneur, PClur l'empêcher peut - être, s'il
poffible! C'ef!: la caure de l'honneur g.énéral, des
mœurs publiques; c'eH celle des peres de famille,' des
.citoyens; c'ef!: celle de la DlIe. de Ledenon elle-même.
Mais pourquoi chercher à· difcuter plus long temps une.
caufe jugée in terminis abfolument dans les mêmes circonfiances, '& peut - être "moins favorable encore par
l'Arrêt du ~ Février 1737, prononcé par M. le Premier
.préfident de La Tour, eorre' les fieurs Marin pere & fils?
Mr. l'Avocat - Général conclut au déboutement du furlis
& de l'évocation demandés.
Arrêt du 2. Juïn 1778, prononcé par M. le Premier
Prélident , conforme aux conclulions , qui déboute du furlis
& de l'évo~ation; ordonne qu'il fera pourfui\'i pardevant
le Lieutenant d'Arles' fur l'oppolition ainli qu'il appartient ,
dépens compenfés. PI;lidant Mes. Simeon & l\'[eiffret.
ea
ea
ARRET XLVII.
�DU
PAL AIS
ARR È
D B
PRO V B Nell:
377
T x L V II.
Sur la demande en maintwue d'un Bénpce.
L
A chapellenie N'otre-Dame de Sede étant vacante en
1772 par le décès de Mre. Jean·Pierre de Caux, Chanoine de l'Eglife carhédrale de. la ville de Marfeille, M.
de Delfunce, Evêque de cette ville, unit cette ch~pelle au
canonicat donr la prébende ne con{j(loit qu'aux fruits des
prieurés Sr. Martin & St. Jaumes. Cette union fut faite
de maniere à Iailfer fub{j{ler le bénéfice uni œqllè princi• paliter , c'eH - à - dire, fans extinétion de titre. Ces trois
bénéfices furent donnés le même jour 26 Août 1742 à Mre.
Pierre de Caux, oncle du précédent titulaire, av.=c la chanoin;e dont ils étoient l'annexe. Ce Chanoine prit polfdIion
de fa chanoinie & prébende, &. féparémenr des trois bénéfices. Après fon décès arrivé en 1,744, ces bénéfices furent conférés à Mre. de DeJfunce qui en prit polIeiIion. En
1746 il fut fait par, les Chanoines de l'Eglife cathédrale
un Statut portant que toutes les prébendes feroient recom.
blées dans la manfe, & que cha:que Chanoine retirëroit annuellement de cerre manfe la fomme conveJjue & proportionn~e à fa dignité & a'ncienneté. Depuis 1<.. rs, l'option
érablie dans J'Eg1ife de Marfeille celfa d'avoir lieu. Mre.
de BeJfunee réfigna en 17S7 fa chanoinie & prébende à
Mre. de Bad.le ; celui-ci les réGgna en 176 l à Mre. Niquou, & ce dernier à Mre. Micaly. En 1776 Mre. Solliers,
Prêtre, impérra la chapellenie Notre-Dame de Sede, comme
vacante ex ohitrl ultimi FoffijJàris, attendu la nulliré de l'union
qui "en avoit. éré faite en 1742. Avanr que Mre. Solliers eût
f.iÏi aucun ufJge de fon rirre, M. l'Evêque de Marfeille
conféra la même chapellenie oh nullitatem unionis à Mre.
de Robin?3u, qui prit polfeffion de ce bénéfice; il rint
enfuite un aél:e au Chapitre, par lequel il l'interpella de
.dnné.:s 1775 & fuiv.
B bb
�37 9
10
U RNA-L
lui en remettre les titres; il fut délibéré d'en lai/fer pren';:
dre des extraits. Mre. de Robineau fit notifier cette délibération, fes 'provifions, fon innitution canonique & fa
prife de poffeHion à Mre. Solliers. C.elui-ci préfenta requête
au Lieutenant de Marfeille contre Mre. de Robineau, pour
venir voir dire qu'il ferait maintenu en la .poffeffion & jouiffance de la chapellenie dont s'agit; contre le Chapitre,
qu'injonél:ion lui feroit faite de lui remettre dans trois jours
.les titres du bénéfice, & de déclarer dans le même délai
qu'il ne prenait aucune part à la· cOl;te/htion, autrement
& à défaut qu'il feroit condamné à la rémiffion, & à fubir
la commune exécution du jugement qui [eroit rendu contre
Mre. de Robineau. Le 29 Janvier 1777 Mre. Micaly, vrai
. fucceffeur de' Mre. dé taux, & feul poffeffeur de la chapellenie unie fans formalités, s'en démit entre les mains
de l'Evêque; & le Chapitre en fit -autant. Ce. fut fur ces
démiffions que M. l'Evêque. de Marfeille la conféra à Mre.
de Ponderoy; ce dernier intervint dan. l'in/l:ance, & demanda contre Mre. Solliers & Mre. de Robineau la maintenue définitive, comme feul fondé en titre, pour. demeurer
pourvu du bénéfice contentieux. Mre. de Robineau fe dé..
fi/l:a, & Mre. Solliers foutint le procès, fur lequel intervint
Sentence qui débouta Mre. de Pontleroy des fins de fa
req':1ête avec dépens; appel de fa part au Parlement.
On difoit pour lui, qu'il ne s'agiffoit point de favoir fi
le poffeffeur d'un bénéfice mal uni & impétré en cette
qualité peut réparer le vice de fa poffeffion aÏTant -q4e le
dévolmaire ait atteint ce vice fur fon front par fa demande
en complainte; mais' bien de favoir fi le Chapitré avoit
ét~_ ou depuis l'union, ou depuis le Statut de recomblement, le vrai titulaire -du bénéfice ûni à la prébende de Sr.
Martin ou de St. Jaumes; ou fi au- contraire depuis l'une'
& l'a'utre époque Mre. Pierre de . C~ux & fes fucceffeurs
avoient été les véritables titulaires de ce bénéfice.
• Il en ju/l:ifié qu'en ufant du droit d'option, les Chanoines
n'opraient pas pour une nouvelle chanoinie, mais feulement
.pour un nouvel affignat prébendal; ils joignoient donc fuc~
.
.
�DU
PAtAIS
DE
379
PROVENCE.
ceffivement à la même chanoinie raut autane d'affignats
difFérens qu'ils faifoient d'options. Il n'dl: donc point d'affignae prébendal qui foit indivifiblèment attaché aux Chanoines de Marfeille. L'affignat prébendal peut être annexé
de deux manieres au canonicat; il peut l'être à perpétuité,
à· l'effet d'en être inféparable, & de former avec la chanoinie prébendée un feul corps individu. L'annexion peut
être faite auffi d?unè maniere révocab}e, en forte. qu'elle
puiffe s'àccorder avec l'option établie dans certaines Eglifes,
& dans ce cas l'affignat prébendal a une connexion avec
la chanoinie prébendée; mais il n'y efl: point annexé perpétuellement; il peut. en être détaché par l'option: voil1t
·ce qui efl: attefié par Lotherius, de re beneficiariâ, liv. l,
l.Juefi. 19 & feq.
Si d'un côté, lorfque l'affignat prébendal efi annexé à perpétuité au canonicat préhendé, il faut en cas d'option
abdiquer la chanoinie, la prébende & l'affignae dont on
eH pourvu, & Opter pour une nouvelle chanoinie prébendée
& fon affignac. prébendal; fi de l'autre, l'ufage conllant de
l'Eglife de Marfeille éraie de n'opter que pour _un nouvel
affigllat, & fi encore le nouvel affignae qui érait poffédé
par le cinquieme Chanoine pouvoit devenir le lot du dernier, & celui du dernier le lot du pénultieme, &c. il doit
être convenu que dans l'Eglife de Marfeille l'affign'at prébendal q'ell: joint aux chanoinies que par annexion révocable; & qu'il en eH divifib!e.
Quel a été l'objet du recomblement? Les prébendes.
Que faut-il entendre par ces préb odes? Ce que les Auteurs
appellent prébende temp'ordle, c'eft-à-dire, les fruits dont
le Chanoines jouiffent en VeHU de leur droit de .prébende ;
fruits auxquels certains Auteurs plus exaéts refufent le nOln
de prébende, pour l~ur appliquer celui de prœbendalia.·
(Lotherius,' de re heneficiariâ, liv. l ,-quo 19, n. 14 & 2.0;
.Sanleger, queJI. bénéf. parr. 2, ch. l , §. 9, n. 9 & I l ;
Barbofa " de eanonicis, ch. 12., n. 14-; Mr. de Selva dans
fon traité des bénéfices, part. l, quo 2.; Lacombe, jurifp.
canon. & Durand de Maillane.) En renonl1ant donc ail
Bbb
2.
�380
•
JOURNAL
droit de percevoir tels fruirs, en confentant que l'Econome
du Chapitre les perc;6c lui· même 'pour faire la dilèribut ion
aux Chanoines, ceux-ci n'onc pas renoncé ni au canonicat,
ni 'au droit de prébende ·d'oll dérivoic leur ancien droit de
les percevoir eux-mêmes. Y aoc-il donc quelque incompatibiliré' entre Il renonciation que chaque Chanoine a fait à
la percepcion des. fruics de Ca chanoinie, & la réren ion
du ticre qui les produiCoit? Les Chanoines onr pu établir
un Econome colleél:eur des fruirs de leurs bénéfices, pour
les leur diltribuer enCuice par portions convenues. Il elt
arrivé deià qu~ les Chanoines plus riches en rev~nus en
ont Cacrifié une partie en faveur d'autres Chanoines plus
pauvres. Or tout cela a pu êrre faic (ans que les Chanoines aient été obligés ce renoncer à leurs cicres de bénéfices.
.
La chapellenie litigieu(e a été unie à la chanoinie &
aux citres de Sr. Martin & de Sc. Jaumes formant un bénéfice canonial; elle a donc été polTédée par le èhanoine
titulaire de' ces deux prieurés juCqu'à l'époque' du reco\Ublemenc.. Les titres de ces. deux prieurés qui ont radiqué
fpt la rête du Chanoine le droic de prébende, n'ont pas
été réunis dans la, mahfè capitulaire par le {htut de recomblement; ils onc coujours relté (ur la têce du polTe(feur de la chanoinie à laquJ:lle ils étoient annexés. La
chapellenie dont il s'agit, devenue indivilible de ces-deux
prieurés, a dolle écé conltamment fur la cêre du' ticulaire
de ces même~ bénéfices; elle n'a donc jamais écé nI avant
11i après le recomblement (ur la têre du Chapitre.
L'union d'un bénéfice à 'un aucre peu'c êc~e faice de quatre
manieres différences, dont· une feule opere l'el{tinél:ion. La
.premiere, quand de deux bénéfices on n'en a fait qu'un
fans extinéHon locale du bénéfice uni. La (econde fe fait
, par la fuppreffion tocale d'un bénéfice dont on unit les revenus à un autre. La croilieme, quand on lailTe fublilter
ce c.irre de bélléfice uni, mais avec fubordinarion à l'autr~.
Et la qua crie me , quand on lailTe Cublilter les cirres' des
bénéfices unis, mais œquè principaliter, & fans dépeudance
C
�nu
l'AI.AIS Dl!
PRQV'IlNCl!;
'381'
l'un de l'autre. C'efi la remarque de Lacombe dans fan
Reéueil de jurifprudence canonique, va. union, fecr. 2,
n. 3 , & 'des 'Mémoires du Clergé, tom. la, col. 18 t 3.
De forre donc que l'union avec extincrion de titre opere
cet effet que non feulement ce tirre n'exif1e plus, mais
encore que tous les droits & prérogatives honorifiques de
ce même titre fone abfolumene,anéantis pour toujours, &
que le titulaire du bénéfice auquel l'union a été faire,
n'eft abfolument invefti que du droit de rerirer les fruits
du bénéfice uni. Or J'uniç>n qui a été faire de la chapelle
Norre-Dame de Sede à la prebende St., Martin, a expref-,
fément départi au prébendé les prérogatives honorifiques
arrachées au tirre de cette chapelle; elle ne peut donc pas
avoir été faite avec extint1ion du tirre:
Un- bénéfice eft uni œquè principaliter, 10rCqu'il n'a été
apporté aucun changement ni à l'érat du bénéfice uni, ni
à celui du bénéfice auquel l'union a été faite, lorfque les
deux bénéfices reftent diftincrs, & lorfque le même Eccléfiaftique doit être Recreur, de l'un & de J'aurre. C'eft 'la
remarque de Van-Efpen, jur. ef\clef. univ. parr.' 2, tit. 29,
ch. l, n. 12, & de Lacombe, va. union. Or quel changement/ l'acre d'union de 1742 a-t-il fair au titrè uni?
Aucun. La fuppreffion n'y eft point prononcée; Mre. de
Caux prit poffeffioa féparée des trois bénéfices; bientôt
après le Chapitre conféra la chanoinie & 'la prébende ave'c
l'affignat Sr. Martin, St. Jaumes & la chapelle Notre-Dame
de Sede. Le Chapitre reconnut donc que cette chapelle'
n'éroit pas fupprimée.
,
On répondait pour Mre. Solliers, que Mre. Micaly n'était
point & n'avait jamais été titulaire, & qu'aucun autre '
Chanoine ne pouvait fe qualifier tel. D'abord c'eft une
erreur de préœndre que la prébende du Prieur de St.
Marrin & de Sr. Jacques de Corrigeriâ, dit de St. Jaumes,fût un bénéfice dont le Chanoine à qui cette prébende eft
-affecrée, eft titulaire,.& c'en eft un alllre d'en conclure
que la chapelle unie à cette prébende fOrme ou a form~,
�3lh
,
Jou
RNA L
un titre exifl:ant fur la tête de -celui qui poffédoit le cancini"at'à qui cette prébende efl attachée.
Quoiqu'en France l'on confonde affez le canonicat & la
prébende, il Y a cependant une différence effemielle entre
l'un & l;autre•. Le canonicat efl un 'tiçre fpiritùel & incorporel, indépendant du revenu quj y efl attaché, mais' qui
en e.fl inféparable. La prébende au contraire, quoiqu'elle,
fait affeél:ée à une chanoinie, n'eH point un titre; elle efl:
purement & fimplement le droit de percevoir certains revenus dans une Eglife cathédrale ou collégiale, attaèhé à
certaines fonél:ions. C'efl la définition qu'en- donnent d'Hericourt, L.combe & Durand de Maillane in va. prébende•
. Or ce droi.t de percevoir certains revenus à raifon des fonctions & 11: tirre de portion, ne forme pas un bénéfice fur
la têt'e de celj)i qui les pe.r~ojt; les prébendes appartiennent' toujours au corps auquel la prébende tienr.
Dès qu'il eH reconnu que le Chanoine, à qui la prébende
des prieurés de Sr. Martin & de St. Iaumes érait affeéèée,
ne pouvoit pas fe dire titulaire~ de ce prieuré, & qu'il
n'avoit d'autre droit à cet égard que de jouir des revenus
de ce prieuré affignés à fa portion & prébende, il dt
évidenr qu'à l'époque Oll la chapellenie de Notre - Dame
de Sede aéré unie à cette même pribende ,le Chanoine
qui en jouilToit, n'a pu en être confidéré comme le titulaire; foit parce qu'une pareille union dénature le titre,
en établiff'ant une fiJcceffion pour la jouiffance des fruits;
fair pdrce que réguliérement on ne peur unir un bénéfice
quelcO'nque à un autre, & en incorporer dans cet autre
les revenus, fans fupprimer le titre; f"it parce que de
fàit, lors de cette union, le Chanoine à la prébende de
qui' elle étoit faite, n'a pas été chargé du fervice de cetce
chapellenie ,. & qu'aucun de fes fucceff'eurs ne l'a été ni
par l'Evêque, ni par le Chapitre; foit enfiil parce que
l'union faite à une prébende qui appartient au Chapitre, ne
peut être confidérée que comme une union faire au Chapitre lui-même, comme étant faite aux biens de fon Eglifè.
�·DU
PALAIS
DB
PROVBNCl!:
jE)
Il fuit delà que quand toutes chofes feroient encore dans
•
le même état, Mre. Solliers auroit pu impétrer le bénétice
per ohitum ultimi poffiJforis, & qu'il ne pourroit être conlidéré comme dévolutaire, parce qu'il faudroit juger de cette
qualité, non contre Mre. Sarrebourfe, non concre celui qui
auroit joui des fruits de cette chapellenie, mais contre Je
Chapitre lui-même " qui ne peut pas être titùlaire, parce
qu'un corps moral Olt politique ne peut être pourvu d'aucun
bénéfice, & qu'il ne préfente point conféquem(Jlent un pof-,
felfeur dont le titre eil: vicieux, & fur le fro)lt de qui il faille
atteindre le vice. .
,
, Mr. l'Avocat-Général de Calilfane obferva qu'il y avo'it
dans ce procès deux propolitions' à difcuter: 1°. la Sentence du Lieutenant de Marfeille doit-elle être confirmée,
c'eH-à-d'ire, Mre. Solliers doit-il être' maintenu dans la poffeffion définitive qu'elle lui accorde? 2°. Ea-ce' à, titre de
,dévolutaire ou d'obituaire que Mre. Solliers a impétré, c'ea-àdire, le bénéfice étoit- il vacant de droit & rempli de fait,
& Mre. Solliers a-t-il dû trouver le vice fur le front du poffelfeur} _ ..
+,
' •
f
On. ne peut pas conteller à l'Evêque le droit d'unir un
bénéfice à l'autre, pour de deux n't'ln fajre qu'un dont le
revenu foit fuffifant à lientretien d'un, Chanoine ou de tout
autre Bénéficier. Le Concile ·de. Trente le lui' attribue ex"
prelTément dans la feff. 24 de reformatione, liv. 1') , ainli
que l'Ordonnance de Blois, 'art. 22, & une foule d'Auteurs
attell:ent l'ufage le plus' conftant ; mais' EEvêque eil: obligé
d'obferver fpécifiquenient toutes les formalités prefcrites pour
les unions; l'enquête ·d~ commodo & 'incommodo,; l'audition
& les concluLions du. Promoteur'; le cOl1f~ntement du mi-'
niaere public; enfin l'Ordonnance portant union .rendue en
forme de véritable jugement. lei rien n'a été obfervé.
.
_ L~union fajte contre routes les regles', ou plutôt fans aucune.
formalité, étoit donc abfolument nulle & abulive; elle l'étoit·
encore, parce que l'Evêque de Marf~ille n'obtint pas des
Lettres-patentes, formalité indifpenfable, d'après la Déclaration de 17 1 9; parce qu'enfin il ne pour'{ut pas à l'exéçu,:;
�•
'3 84'
Jou
R N'A L
'
tion de- la fondation du bénéfice 'Unl; nouve:.u vicé dans
J'union qui s'étend même fut fon exécution, & prouve qu'il
n'y avoit point de véritable titulaire. Elle l'était, parce qu'il
n'y leut réellement point d'Ordonnance d'union, mais une
limple délibér'!tion portant que l'union avoit été faite. Cerre
prétendue union lai1Toit donc le bénéfice vacant de droit,
dès que le bénéfice erait uni: le titre éroit donc éteint; &
dès-lors nouveau motif de 'vacance. Ce qui n'exilloit plus
comme titre, ne pouvoit plus être po1Téde comme tel'; &
conféquemmimt cette chapelle, quoique unie à la prébende,
ne pouvoit jamais former un titre particulier exillant fur la
tête de celqi' qui po1Tédoit le canonicat auquel cerre prébende é.roit arrachée, mais le confonduit avec la prébende;
car quoiqu'en France l'on confonde fou,vent le canonicat &
la prébende, il Y a cependant, d'apr~s les Auteurs, une différence e1Tèntielle.
Le canonicat (lll un titre fpirituel & incorporel, indépendant du revenu qui y eft arraché, mais qui en ell inféparable, & qui ell )a prébend.e; celle-ci, quoiqu'elle foit affecrée à une chanoinie, n'eft point un titre; elle dt purement & Gmplement le droit de percevoir certains reveniJ~
dans une Eglife Cathédrale ou Collégiale" attaché à certaines
foncrions; elle eft l'acce1Toire dont le canonicat eft, le principal, le temporel dont le titre de la thanoinie forme le fpi::
rinfe!, e,n un mot, tous deux indiviGbles. Tous les Auteurs les
dillinguent & les défini!lènr ainfr.
",'
_Or) ce droit de ,percevoir €ertains revenus à raifon de
certaines foncrions; & 'à titre de ,portion-, ,'ne forme pas un
bénéfice fur. la tête d'e telui qui 'les per~bi[ ;~on ·ne peut unir
un titne de bénéf1ce à quelque -èhofe de temporel, c'eft-àdire ce qui' ne, forme pas titre; c'eH, un principe général,
indépendant de rous les différens genres d'union; car il n'y,'
auroit point en c'e cas de I:ténéfice uni, puifqu'il ne pelH faire
impreffion, fur la tête d'aueu'n POUl\vu. Jq'après ces défini.,.
[jons; il doit être reconnu que le Chanoine à qu' la prébende du Prieuré de St.. Maitin & de Sr. Jaumes & de lachapelle de Notre-Darne de &de étoit affecré.e, ne pou voit
'rielle~nt
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
38')
réellement pas s'en dire Prieur ni Ifiru!aire; & quand l'union
eût été valide, il n'avoit d'autres droits que de jouir des revenus affignés à fa portion & prébende, que lors même de'
l'union de la chapelle de Notre-Dame de Sède; le Chanoine qui en joui/Toit, n'a pu être regardé comme le rilulaire, fair parce que pareille union dénarure'le ritre en établi/Tant une fucceffion pour la joui/Tance des. fruits; foit
parce que réguliéremenr on ne peut unir un bénéfice quelconque à un autre & en incorporer dans cet autre les revenus, fans (upprimer les lirres; fair parce que de fait lors
- -de cene union, le Chanoine à 12 prébende de qui elle écoit
faite, n'a pas été chargé du fervice de cette chapellenie,
& qu'aucun de fes fucce/Teu~s ne l'a ét,é ni par l'Evêque ni
par le Chapitre; foit. enfin parce que l'union faite à une
prébende qui appartient au Chapitre, ne peut êrre confidérée que comme Une union faire au Chapitre lui-même,
comme éranr faire aux biens de (on Eglife; union irréguliere & profcrite. Ainfi ce bénéfice n'écoit rempli de droit ni
de fair.
Mre. Solliers ne peut donc. jamais êrre regardé commé
dévolutaire, parce qu'il faud\oit juger de cene qualiré, non,
contre le lieur de Pontleroy, non conrre celui qui auroit
joui de cetre chapellenie, mais contre le Chapirre lui-même
qui ne pourroit l''as' ê '-e riruhir~, parce qu'un corps moral
ou politique ne peut (tre ~ü.l '\'li d'aucun bénéfice, & ne
préfenre point confé uemment un po/Tem~ur dont le ritre
puiffe êrre vicieux, & fUl:- l~ front de qui il aille arreindre
le vice. Ain{i fous ce prerpicr point de vue, quant à la nullité de l'union, le béne.lt:( érait vacant de droit.
Le Harut de recombler'nent dei 1776, fait fans l'autori. farion de l'Evêque, & enlilite revêtu de Lettres-patentes, a
dénaturé les prébendes à perpétuité; & depuis ce !latur,
ni collarions, ni réfig-narions ne fonr mention de la prébende de Sr. Martin & de Sr. humes, ni de la chapelle
unie, ni d'aucune autre prébende particuliere, parce qu'il
n'y a jàmais eu de prife de po/TelIion d'aucun de ces· tirres
de bénélices, parce qu'enlin toutes les prifes de poifelIion
Anné~s l77S & fuiv.
C c, c '
.
�386
•
Jou
RNA L
des cononicats ne pnrlenl'- que du canonicat & de la pré'"
bend~ fdns titre quelconque. En effet, depuis le moment de
ce l1:atut, comment pourroit-il y avoir eu un titulaire de
la chapellenie done il s'agit? Quel a été l'effet du recomblemenc? Celui de rell1errre dans la manfe capitulaire les
prébendes des divers prieurés qui" en éroient forcis, & d'y
,incârporer néceffiiremenc la chapellenie dont s'agit, comme
unie à la prébende du Prieuré de St. Marc.in & de St.
Jaumes dont elle-fuivoit le fort; & li tel a éré l'effet du
recomblement, parce que chacun des Chanoines capirulans
s'étoit démis à toujours de la prébende- qui lui étoit affignée; li dès-lors le Chapitre a dû jouir invariablemènt des
truirs, re.venus, droirs & aétions· defdites prébendes; li de fait
il en a joui, & nommément des revenus de là chapelle dont
s'agir, puifque c'eH le Chapitre qui a toujours donné à bail,
il eft nécelfalrement vrai que la prébende de Sr. Martin &
de St. Jaumes & la chapellenie n'ont pu réfider fur la tête
d'aucun Chanoine particulier, à l'effet d'y former l'ombre
d'un titre, mais fone entrés dans la manfe. Mre. Solliers ne
peur donc être regardé comme dévoluraire & fournis aux
Loix du ·dévolut; il eft au contraire obituaire. Il doit donc
être maintenu jure prœventionis, parce qu'il ne peut être dépouillé par une collation pofl:érieure.
Mais y a-t-il eu vacance. de fait ( coneinua MI'. l'AvocatGénéral)? A n'examiner que la quefl:ion principale, & fans
pen fer aux quefl:ions ftlblidiaires qui établilTene cependane qù'il
n'y a jamais eu de poifelTeur de fait clans aucun temps, il n'y a
pas eu' de vacan·ce néanmoins jufqu'au moment du fl:atut de
recomblemenr. Qu'eft-i1 arrivé alors? Toures les prébendes
ont demeuré recomblées dans la manfe générale; tous les
·Chanoines fe fone trouvés dépouillés. A quoi avoit été unie
la Chapellenie ae Notre-Dame de Sede? A la prébende de St.
Martin; la prébende de St. Martin a été recomblée comme
les aûtres: donc la chapellenIe de Notre-Dame de Sede,
unie à la prébende de St. Manin, ne faifanr, felon le lieur
de Ponderoy, qu'un feul &. même corps avec elle, a été
recomblée & efl: refié_e dans la manfe capitulaire. La cha~
�•
DU
PAL AIS
DE
PR a
387
VEN C E._
pellenie de Notre-Dame de Sede eH donc renée vacante
de fait. Le Chanoine poifetreur de la prébende de Sr.
Manin fe démet de cetce pFébende; donc il fe démét de
la ch;pelle de Notre-DaIne de Sede en faveur du Chapitre;
donc plus de dome, plus de litre, plus de prébende entre
les mains d'aucun Chanoine; ils s'en font dépouillés, & conféquemment la chapellenie de Norre-Dame de Sede e{~ vacante
de fait depuis le framt de recomblemenr; les Chanoines
d'ailleurs fe démettent de la prefenracion & nomination à
tous les bénéfices qui en dépendent.
Mr. l'AvQcat-Général conclue à ce gue fans s'arrêter aux
lettres d'appel de Mre. -de Pontleroy, dont il fero-it démis
& débouté, l'appel1-atioll fût miCe; au néant, & ce dont
écoit appel tînt & forCÎt fon plein & entier effet-, avec renvoi & amende.
Arrêt du 2.6 Juin 1778, prononcé par M. le Premier -Pré/idenr, conforme aux conclul1ons; Mre. de P,ontleroy" fut
condamné aux dépens. Plaidant Mes""."
ARRÊT
Sur le droit qu'ont
l~s
XLVIII.
Re/;gieux d'avoir des cim_etieres public!_,
Es Dominicains de Barcelonette avoient un cloÎtre_ fermé
__ & couvert par ùn fimple toir qui fervoit de cimetiere
'à leur maifon; les rombeaux des Religieux titoient attendns;
& ce local érant béni, les habitans de Barcelonene étoient
dans l'uCage d'y faire, pour 13 plupart, leur choix de
pulture. Cependant pour Ce conformer aux Lettres-patentes
du l S Mai 1776, ils firent choix d'un loçal au- boùc de leur
encl0s, fiwé hors la ville. Mre. Rivier, Curé, fut choifi par
M. l'Archevêque d'Embrun pour vifiter cec empla,cemenc,
l'approuver ov le déCa prouver, & pour le bénir, le cas échéant;
il refufa dè remplir cette comrnïffion. Mre. Colaud" Vicaire.
Général, fc trouvant en de!èente fur les lieux, v-ifica le local,
L
ré-
Ccc
:l.
�388
J.o UR NA L
& bénit 'ce cimetiere. Mre. Rivier préfenta une requête 11.
la Cour, appella' comme d'abus des Ordonnances rendues
par M. l'Archevêque d'Embrun à raifon de ce cimetiere,
& demanda d'être provifoirement maintenu dans le droit·
d'enfevelir les fideles dans le citnetiere de fa Paroifle, &,
au moyen de ce qu'inhibitions & défenfes feraient faites aux Religieux Dominicain's d'enfevelir aucune perfonne érrangere à leur ordre dans le cimetiere de leur enclos, nouveHement béni pour la fépulrure de ·Ieurs Religieux, 'ou dans
leur cloîrre, à peine de 1000 liv. d'amende. Les Dominicains
de loeur chef préfenterent une requêre incidence, aux fins
d'être maintenus <dans le droit & faculté d'enterrer dans lé
clmetiere du couvent les cadavres -de ceux qui y auraient
fair éleél:ion de fépulture, fauf & réfervé audit cas à Mre.
Rivier fes droits & prérogatives en {a qualité de Curé, avec
inhibitions & défenfesde les troubler.
On di fait pour .le Curé, que· c'étoit toue à la fois par
le droir 'commun & par les Lettres-parentes de 1776 qu'il
éroit fondé à prétendre que les Dominicains de Barcelonette
ne fiJffent pas autorifés à enterrer les ndeles dans le cimetiere
qui leur avait été accordé & béni pour la fépulrure de leurs
Religieux; qu'en fait les Dominicains de Barcelonette n'avaient jamais eu de cimeri~re avant les Lettres-patentes de
1776, ni pour la fépulrure des fideles, ni même pour la Iépulture de leurs Religieux.
. De droit commun, les Paroiffes font le feullieu de la
fépulrure des fideles, parce que la même Eglife qui a enfanté.fes enfans à Jefus-Chrifr par le facrement de baptême,
10rfqu'ilsviennel1t au monde, doit les recevoir dans {Oll
fein, en leur donnant la fépulture lorfqu'ils en fartent. C'efr
encore-ce que l'on réfume de tous les Canons qui font fous
le titre de fepu/curis .
. Dans les premiers uecles de l'Eglife, ces droits des paroiffes ne recurent ni conref!:ation ni atteinte. On n1enfevelifoit perfonne 'dans les Eglifes; cela éroi't expreffément défendu;
les cimetieres éroient les. feuls lieux defrinés à la fépulture
~es fideles, & les feules Eglifes paroiffiales éraient en draie
�'pu PALAIS IH PROVENCll;
'389
a'avoir des cimetieres. Cet ordre des chofes reçut da'ns la
fuite divers changemens; Fufage s'introduilit d'abord d'enterrer les pérfonnes illuftres dans les portiques des Eglifes.
quelque temps après on commença à les enfevelir dans les
Eglifes elles-mêmes, & infenliblement ce droit devint celui
de quiconque voulut y prétendre & l'acquérir.
Les ordres religieux 'S'étant établis enfuite., plulieurs d'entr'eux, jaloux, de partager avec les Curés le droit d'enfevelir dans',leurs Eglifes les corps des .fideles, en obt inrent
le privilege do Pape Boniface VIII. dans le commencement
du treizieme fiecle, Clement V. le leur confii'ma. Mais par
ces privileges particuliers, ces ordres religieux n'obtinrent
la faculté d'enterrer ceux qui {eroient éleél:ion de fépulture
'chez eux que dans leu'rs Eglifes & dans leurs chapelles; il
.ne fut pas touché au droit exclùlif des Paroiffes d'avoir des
cimerieres, & pu réferva aux Curés la quarte funéraire fur
toures les fépultures qui fe feroient hors de leurs Eglifes ou
des cimetieres de leurs Paroiffes. C'etl: ce qui fe trouve établi par Goard dans fon traitê des bénéfices, tom. 2, pag. 334;
par d'Hericourt, parr. 2, chap. I l , pag. 12.9; par Durand
de Maillane dans fon Diél:ionnaire cafJonique, va. cimetiere;
pag. 'Î 10 , & Va. fèpultu.re, pag. 466 & fuiv,; par Denifart,
va. cimerieres, n. 3, & vo. fèpultures, n. 13. Tous cÈs 1\ureurs
'fe réuniffent pour attetl:er, 1°. que les Paroiffes font le lieu
de la fépulture de tous les fideles; 2°. que ce n'eft qu'en
vertu d'un privilege parriculier, & enfuite du relâchement qui
s'iiltrodui(it dans la difcipline eccléliatl:ique & temporelle àu
fujet deF. inhum,ations, que les Moines obtinrent la faculté
d'enfev.elir dans leurs Eglifes les étrangers qui y feroient
éleél:ion de fépulture; ,3°. enfin que le droit d'avoir des ci.
metieres n'appartient de droit commun qu'aux feules Eglifes
paroiffiales, & que les aUlres Eglifes n'en peuvent avoir qu'en
vertu des privileges particuliers. C'etl: l'obfervation que fait
Barbofa dans fon traité de vOlis, vot. 103, n. 27.
Ce n'etl: qu'en vertu d'un privilege particulier, circonfçrit
& limité, qU,e les Dominicains de Barcelonette pouvoiel1~
,
�'390
Jou
RNA L
enfevelir des externes; ils ne pouvoient leur donner la . fepul~
TUre que dan~ leurs Eglifes & dans leus chapelles, in fuis
Ecclifiis' & lacis memoratÎs. Or, ce privilege a été anéanti,
ou du-moins il a été rendu inutile par les Lettres-patentes
de 1776, qui leur ont défendu de taire des inhumations dans
ces lieux où ils étaient en droir & en poifeffion d'enfevelir;
il ne leur l'eUe donc plus rien; rautes chofes font rentrées
dans le droit commun. Si on leur a accordé le cimetiere
qu'ils ont aéluellement, c'eU parce qu'ils éraient fondés,
,par la difpofition du chapitre dernier de [epulruris in 6°.,
auquel les Lerrres-parentes de 1776 n'ont pas dérogé, à
demander la bénédiélion d'un endroit d~ns l'enceinte de
leur Monafiere pour l'inhumation de leurs Religieux qUlont le
droit dé n'étre enfevelis que chez eux; mais ils ne pouvaient
prétendre à rien de plus. On ne pouvait leur accorder un
cimetiere que pour cer ufage. S'il' en étoir autrement, bienloin .que les Lettres - parentes de 1776 euifent ramené
toutes chofes au droit commun, elles y auroient confidérablement. dérogé. Au lieu qu'anciennement il n'y avoit que
les Paroiifes qui fulIènt en droit d'avoir des cimetieres publics , taus les corps religieux & autres qui éraient -en poffeffion de éon-ner la fépulture dans leurs Eglifes, feraient
aéluellement en droit d'en demander & d'en obtenir; il n'y
aurait plus déformais de différence entre les Eglifes paroiffiales & les autres Eglifes. Le privilege accordé aux _Religieux érait une dérogation au droit commun; ils ne peuvent donc pas l'exercer aujourd'hui par extenfion'; il ne leur
en pas permis de fubUiruer aux tombeaux de leurs Eglifes,
dans lefquelles il·s ne doive,nt plus enfevelir, les cimetieres
particuliers qui leur font accordés pour la fépulture de leurs.Re·ligieux. Si un cimeriere accordé à des Religieux pouvait étre
un cimetiere public, toutes perfonnes, fans difii:télion de
fçxe, pourraient s'y faire enfevelir; & les Loix canoniques
ne permettent pas que les femmes & les filles foien~ enterrées dans le mémé lieu où font enfevelis des Religieux.
Bonnec dans fon recueil d'Arrêrs., litt. S, fomm.
pag.
2.,
�DU
PALAIS
DI!
PIlO VI!NCE.
339" rapporte un Arrêt du 14 Mai
39t-
171~, qui le jugea
ainfi contre l'Econome des Carmes de la ville de Marfeille.
L'article 4 des Lenres-patentes de 1776 porte que" les
" perfonnes, qui ont droit d'être enfevelies dans les Eglifes
-" dont dépendent des cloîtres, pourront être enterrées dans
" les cloîtres & chapelles auvents y attenantes, fi aucuns
" y en a, pourvu toutefois que les cloîtres ne foient pas
" clos & fermés, &" à condition pareillement d'y faire
" confiruire" des caveaux fuivant la form.e & dimenlion
" indiquées par l'article 2, & ,que l'inhumatien fe fera
" .fix pieds en rerre au" deffous du fol intérieur des caveaux,
" & ne pourront de pareilles concelIions être accordées, à
" "quelque titre que ce fait, qu'à ceux qui ont aél:uellerr\ent
" droit, par titre' légitime, & non autrement, d'être en" terrés dans les Eglifes dont lefdits cloîtres & chapelles
" y attenantes font dépendants, "
L'article 6 porte que " les Religieux & Religieufes
" exempts ou non exempts, même les Chevaliers & Reli" gieux de l'Ordre de Malthe, feront tenus de choifir dans
" leurs cloîtres, ou dans telle autre partie de l'enceinte
" de leurs monafieres ou maifons, un lieu convenable,
" autre que leurs Eglifes, diltinél: & féparé pour leur fé" pulrure, à la charge toutefois d'y" faire conltruire les
" caveaux indiqués par l'art. 2, & proportionnés au nombre
" de ceux qui doivent y. être eÎlterrés. "
Or en raifonnant d'après ces deux articles, il efi facile _
de fe convaincre que tout le droit que le Souverain a voulu
laiffer aux Communautés rellgieufes, en leur défendant d'enfevelir dans leurs Eglifes, ell: cdui d'enterrer dans leurs
cloîtres & dans leurs chapelles ceux qui à l'époqlle de
1776 avoient droit & titre légitime pour être enterrés chez
eux.
On répondoit pour les Dominicains, que les Réguliers
ayant le droit d'inhumer chez eux enfilire d'un choix déclaré de 'fépuJture, ce droit ancien confirmé par plulieurs
~extes & par l'ufage, général de la chrétienté, -.ce droit
�'392.
Jou
RNA L
non touché par les Lenres-patentes de .1776 fub(Hl:e en';
core dans route fa" plénitude. La difpoution' qui défend
)~s inhumations dans les lieux clos & fèrmés comprend
aurant les paroiffes que les Eglifes des Réguliers. Elle n',efi
donc pas portée dans l'objer de rien innover fur les droits
refpeé1:ifs des paroiffes & des Réguliers. A plus forte raifon
elle ne prend riep & ne peur rien prendre fur le droir précieux, inaltérable &, pour ainfi dire, facré qu'a t0ut fidele
de difpofer fur le lieu de fa fépulrure. Voici comme s'exprime le chapitre fraternitatem 3 extra de fep.lturis : mortuorum ftpulclzra é;. cœmeteria apud i!las Ecclefias & Monafte&ià ex antiquo poJfùnt eJ{e diJP!fita, in qui/JUS religioforum
frairum COnl'elZtuS Junt conjlituti & orationes atque miffarum
folemnia, tam pro 1'ivis quam pro defunais freqllentiùs celebrantur, undè ipforum devotioni & extremœ voluntati qui
apud hlljllfmodi Eéclejias fèpe/iri defiderant, minimè contràdicendum efl.
.
Rien n'efi en effer plus refpeé1:able que cette volonté,
qui n'l'fi qu'une émanarion du droit de tefl:er. Les mêmes
principes font rapportés dans la Clémentine dudhm 3 de
fepulturis. Ce n'eH pas un privilege; c'efl: la fuite & l'application ilu droir commun, comme l'obferve Pafiour, de
bonis tempor. rir. 3, n. S. .
Delà trois conféqnences: 1°. le droit qu'onr à cet égard
les Réguliers efl: moins un privilege que la fj.lire & l'application du droit commun. 2°. On ne pourroir cOl1lrarier
. les droits des Réguliers fur cer objer, fans contrarier en
même temps celui de tous les citoyens dont il faur refpeé1:er le choix & la voJomé. 30. Le droir q~'ont les Ré. guliers d'inhumer, le droit plus précieux encore qu'ont les
fideles de choifir le lieu de leur fépulture, n'efi pas limité
aux Eglifes, Chapelles & Oraroires des Réguliers; il comprend encore leurs cimetieres, c'efl: - à - dire, les endroirs
annexés à leurs couVents ou monaHeres , & propres à l'inhumation dans l'ordre des difpofitions canoniques.
Mais comment pourroit - il fe faire que ce droit fût
anéanti?,
•
�DU
PAL A l'S
D Il
rr R
0 V Il NeIl.
39~
anéanti? Les Lettres-patentes du 4 Mai 1742, données
pour le diocefe d'Embrun, difpofent en l'article 3 fur le
cas où , fuivant la volonté du défunt, la fépulture doit être
faite dans les Eglifes des Réguliers ou dans les lieux qui
en dépendent. Voilà donc que d'après ce texte, les fideles
ont droit de choillr & d'indiquer le local de leur fépulcure,
fait dans les Eglifes , fait dans les cimetieres des Réguliers.
Les mêmes termes font exaaement reproduits dans l'art. 3
..des Lettres-patente;- données pour la Provence en 17'l6. Or
trouve-t-on rien dan's celles du 1') Mai 1776, qui ren~
ferme direaement ou indireaement l'abrogation & la révocation, fait des Lettres-patentes de 1742, fait deo celles
de 1746? Peut-on imaginer que lors des dernieres Lettrespatences, le Prince ait voulu renverfer tous les principes
de la matiere, & priver les Réguliers du droit qu'ils avaient
auparavant, gêner en conféquence les droits & la liberté
des fideles? 11 n'en ell: pas dit un mot dans cerre der.niere loi. Ce droit précieux n'ell: 'donc pas anéanti par les
Lettres-patentes de 1776; l'efprit & les principes de cette
loi font connus de tout le monde; elles tiennent uniquement à des motifs de falubrité.
.Le cimetiere des Dominicains exifie; Mre. Rivier dl:
bien éloigné d'en conte lier l'exifience, & d'attaquer les
titres d'ou elle dérive; ce cimetiere efi hors de la ville;
il peut exi(l:er fans iorérelTer la falubriîé. Les Coufuls, les
-Officiers de juHice, tous les citoyens enfemble fotH d'accord là-delTus. La puiffance eccléfiafiique & la politique
.font réunies pour fourenir cet établillèment, qui n'dl: pas
même arraqué par Mre. Rivier, qui fe replie feulement à
fourenir que ce cimetiere ne doit fervir que pour l'inhumation des Religieu)(.
Arrêt du 30 Juin t778, a'u rapport de Mr. le Confeiller
de la Boulie, qui déboute Mre. Rivier de fa demande, &
fait droit à celle des Dominicains, avec dépens. Ecrivant
Mes. Laget & Ga ffie r.
Annùs l775 & fuiv.
D cl d -
�ARR Ê T
XLI X.
La collocation faite par la femme marira vergente ad inopiam
tombe & devient caduque, fi elle prédécede [on mari.
P
AR contrat de mariage du 4 M:ri 1743, entre Me.
Meynier, Avocat du Roi au Siege d'Aix: & la Dame
Capuffy, il fut confrimé ,en dot à l'époufe la (omme de
2000';' liv. dU,chef du pere, & 3000 liv. du chef d~ la merej
les 20000 liv. furent payées, favoir, 2000 liv. au prix des
coffres, 9000 liv. en deniers comptants, & 9000 Iiv. au
prix d'une ballide limée au terroir de Marfeille, avec pacte
que Me. Meynier pourroit la vendre & aliéner, nonobfl:an~
qu'elle fût dotide. En vertu de ce, pacte la ballide fut vendue au fleur- B.ô'noit, au prix de 7000 li\'. payées comptanr.
En 1762 les affaires' de Me. Meyn'ier fe trouvant dérangées, la Dame Capuffy répéta fa dot, & obtim, un décret
de vergence le 4 Février de la même année; en 1763 il
fur procédé à la liquidation de la dot, & p~r un rapport
du 24 Septembre elle fut déclarée créanciere' perdanre
de 'la (omme de 16000 liv. Ce f-ut à raifon de ce reliquat
qu'elle intènta l'action en regrès contre le fieur Benoit, tiers
poffeffeur de la oafiide (oumi[e à [on hypotheqlle. La Dame
Capuffy décéda peu de te ms après l'introduction de cette
inltance en regrès. La Dame Meynier [a fille & (on héritiere', époufe de Me. Caire, Avocat en la Cour, envi[ageaDt la collocation faite, par fa mere comme un titre
fllbfifranr & irréfragable, reprit l'inftance en regrès qui
érait pendante pardevant le L}eurenant de Marfeille, &
par Sentence du 6 Juillet 1772 le 'regrès Jui fut adjugé.
Appel de la. parr du fieur Benoit. ,
On. dirait pour lui, qu'il s'agiffoit de (avoir fi la collocation
faite par la Ifame Cap~lffy érait tombée & devenue caduque,
�DU
-P-ALAIS
DE
PROVENC!!.
-39)
à caufe que la Dame Capulfyavoir prédécédé fon mari; ou fi
cette collocation fuhfifroit & pouvoit fervir de tirre à la Dame
Meynier fa fille - & héririere. En reRle générale, l'adminifrration & l'ufufruit de la dot conHituée à la femme, appartiennent au mari pendant toute la durée du mariage, fans que
la femme ni perfonne air droit de l'en dépouiller; ce n'eH:
qu'à l'époque de la dilfolurion du mariage que la vérirable
refriruriQn doit en êrre faite. 'Cette regle eft fondée fur la
Loi 2, if. fa/ut. matrim.; fur la Loi -l , cod. _fi dos co!if/an.
matrim., & fur une foule d'aurres rextes rapportés par Bo~
niface, tom. l, Iiv. 6, rit. 3, chap. 1), n. 2.
Cependant la Loi a fait une exception à cert~ regle
générale; elle a voulu que quoique le mariage ne foit pas
dilfous, le mari puilfe êrre dépouillé de l'adminifrration de
la dot, li .fa pauvreté Ou fes dilIipations [ont craindre qu'elle
ne foit perdue. Ce cas particulier n'a rien d~- commun avec
celui où les biens du mari tombellt en générale difculIion
à la pourfuite de fes créanciens, auquel cas le mari perd
. l'exercice de fes aél:ions, & toute forre de créances deviennent exigibles; c'efr pourquoi la femme a les mêmes droits,
que les autres créanciers, & elle les exerce ainG & de la
même maniere que fi le mariage éroit dilfous.
L'aél:ion donnée ,à la ferpme aD ùlOpiam ,?writi efr de
toute autre natur~; -elle lui compere pendant la durée du
mariage, & lors même que le mari conferve le libre exercice de fes aél:ions. C'eH principalement par la Loi uDi
ad/lUc, cod. de jur. dot. que ce privilege lui en accordé. Mais
cette ,Loi qui a eu en vue l'intérêt du mari & celui des
enfans, autant que celui. de la femme, n'a voulu, donner
en pareilcas à celle-ci, que le droitde pourvoir à fon alfuraœe,
fiDi profPicere. Elle n'a pas dilfous la puilfance maritale;
bien loin de là, elle l'a laiffée fublilter, puifqu'elle a interdît à la femme toute efpece d'aliénation' pendant la- vie
de fan mari, & qu'elle ne lui a permis d'affurer fa dot que
pour en appliquer les fruits à leur deHination narurelle ,
c'eft-à-dire, à fa propre nourriture, à celle de fon mari &::
D d d 1.
�396
J
0 V RNA
r;
de (es enfans : ita tamen ut eadem mulier lIullam JzaDeat li·
cential1t eas l'es alienandi 'vivente marito & matrimonlo inter
eos conJlituto, Id f':uc7ibus earum ad [ubflentationem cam fùi,
'iuam mariti filiorumque, .fi quos lzabet, aburatur.
Cette Loi a prévu le cas otl la femme répécée en' dot,
ob inopiam mariti, auroit des enfans" puifqu'elle l'oblige à
les nourrir, en quoi elle n'a fait que renouveller les Loix
préexifl:ances & naturelles qui impofem cene obligacion réciproque au mari, à la femme & aux enfans. Cerce Loi n'a
point eorendu que la femme acquerroit la propriécé des biens
qui lui feroient affignés pour fon affurance; elle n'a fait
que lui en ·déférer la fimple adminifl:ration pendant la durée
du mariage, en réfervanr coure fois de la maniere la plus
expreffe, rant au mari qu'à la femme, cous les draies qui
leur compéteront ,-Ior(que le mariage fera diffous: Ipjis etiam
marito & uxore, poil matrimonii diffolutionem, fùper dote &
ante lIuplias donatione pro dotalium infirumentorum tenort! ,
integro [uo jure potituris. De forte qu'il eH évident que cerce
loi n'a rien innové en ce qui concerne la refl:itution de la
dot après la diffolucion du mariage, & qu'elle n'a pas pré.
tendu porter à cet égard le moindre préjudice aux droits
du mari, ni à ceux de la femme.
C'eft '(ur la difpofition de cerce. loi que les Auteurs d'un
commun accord n'ont confidéré la collocacion faite par là
femme confiante matrimonio, qu'e comme. une affurance proviCoire, un !impie gage abfolument incapable de lui tran(.
poner la propriété des biens fur lefquel? elle a écé colloquée, & plus incapable encore de l'aucorifer à tranfmercre
cene propriécé à fes hériciers. On· peut même dire que fi,
fuivanr nos ufages, cene collacacion devient. définirive ,
lorfque la femme furvic au mari, c'efl: -là une véritable,
faveur qui lui a éte accordée, (ous précexce qu'en ce cas
elle a à précendre les mêmes droics que ceux pour lefquels
la collocation avait écé faite, fans qu'il fait néceffaire d'y
rien changer, & que l'on pourvoit d'ailleurs à l'incérêt des
créallciers, en leur permettant de faire procéder à. une
�_
. ' nu PALAIS DI! PROVENCI!:
397
nouvelle ellimation des biens, ou d'exercer le droit d'offrir
Gui eil: ouvert à cette époGue. Ce n'eil:-là Gu'une faveur Gui
même parait contraire aux vrais principes &. à la difpofition formelle de ladite loi u1Ji adhuc, Gui 'leur Gu'à l'époGue de la dilfolmion du mariage chacun des conjoints
renrre dans la plénitude de fes droits.
Mais fi notre jurifprudence -ell encore plus favorable- à
la femme que ne Teil: le droit romain, cette faveur doit
du-moins deme-urer renfermée dans [es bornes; c'eil: une
raifon de plus pour maintenir nos maximes telles qu'elles
font, [ans qu'il [oit permis de s'en écarter; & [uivant nos
maximes il eH indubitable Gue, fi la femme prédécede le
mari, la collocation par elle faite en vertu du décret de
vergence devient caduque & de nul e1fet, à caufe' Gu'une
tel·le collocation n'efl: par elle-m~me qu'un fimple gage,
ou, (i l'on 'leur, un tranfport conditionnel abfolumenr anéanti
par le prédécès de la femme. C'eH-là ce qui forme vé~
ritablement une maxime d'aura nt plus inviolable, qu'elle dl:
atteHée par Ml'. de Clapiers, cauf: 1'02., quo uniGue, n. -5
& 10; par Ml'. de St.' Jean, décif. 41, n. 5; par Duperiel', titre de la collocation; par Decormis-, corn. 2, col.
128 4; par Pail:our, de Jeudis, liv. 5, tit. 15 , n. 4; par
Boniface, corn. 3 , liv. 3, tir. 4, ch: S, n. 4; par Julien
en [op code rit. matrimonium, ch. 7 de feparatîone bonorum
ex causâ paupertatîs , litt. L; par l'Aureur de la jurifprudence féodale, tir. du lods, n. 34, & pH Faber, cod. de
hon. mater. déf. S.
Quand même la loi & les Auteurs n'auraient pas fait
une exp l'elfe menrion des enfans, il ne faudrait pas moins
. les y comprendre. Il ne [eroit pas poffible qu'il en fût aurre- .
ment, puifGue la collocation devenant abfQlumeot caduGue
par le prédécès de la femme, elle ne' peut pas revivre filr
la tête des enf.1l1s en faveur defquels il n'a point été fait.
d'exceprion. Il eil: même certain qu'une telle exceprion ferait abfolument inconciliable avec les maximes, & qu'on
ne pourrait l'établir fans les déttuire. En effet, fi l'on [ou~
�•
3~
,
-
JOURNAL
tenait que nonobl1:ant le prédécès de la femme, fa collocation fubfiHe, & qu'elle pa!fe fur la tête de fes enfans
héritiers, à quelque titre que ce fait, on ne pourrait plus
dire qu'une telle collocation fÎlt tombée de plein droit,
qu'elle eût~ demeuré fans elFet, qu'elle eût été pour non
faite; de forte qu'il faut néce!fairemenu convenir qu'une
fois que la femme a prédécédé le mari, fa collocat10n
e!l: tombée, qu'elle e!l: demeurée fans effer, qu'elle e!l:
devenue pour non faite, & que par- conféquenr ni les enfans ni perfonne ne peùt en tirer avanrage.
_
S'il pouvait être étahli que la femme a pu tranfmfCtre
une pareille collocation à fes enfans, il ~'enfuivrait qu'elle
ferait devenue elle-même proprié:aire des biens fur lefquels
elle s'était colloquée par {impIe aflïJrance, & qu'elle en
avait entié<ement dépouillé fan mari, puique l'on ne peut
tranfmettre à qui' qué ce fait ce qu'on' ne po!fede pas foimême; il s'enfuivroit que cette collocation auroit été un
paiement réel & abfolu de la dàt, quoique: le mariage ne
, rut pas di!fous, & que le mari eût confervé fa pui!fance
maritale; il s'enfuivroit que la perte ou la détérioration
des biens, fUrvenue' par cas fortuit ou autremenr, retomberait fur la femme, & non' fur lë mari, parce que res
perit domino; il s'enfuivroit que le lods ferait dû ipfo faBo
au Seigneur dire4, & qu'il y aLiroit ouverture au retrait
féodal, parce que la femme étant étrangere,· ces droits
font acquis, dès que les biens de fan mari pa!fent fur fa
tête à titre de propriétaire. Tout cela efi néanmoins dia'métralement oppofé aux maxitnes qui viennent d'être établies.
Quelle injuflice en effet ne ferait-on pas au tiers, & quel
préjudice ne porterait-on pas au public?
Quel eH le, droit d~ la Dame Meynier, & qu'a-t-elle
à prétendre? Rien de plus que la dot de fa mere. A cee
égard il eH jufle de lui conferver fes droits, même au préjudice du tiers. Ce n'eli pas ce qu'on lui conte rte. Mais
fi cette dot ne confiHe qu'à 16000 IiI'. pourquoi faudrait-il
lui en donner 40 mille, en, prenant l'~xcédant fur le bien
�DU l"AiA:Ï'S
DB .PROVENC,;:';
399
. à'auirui? Cene dot auroit été plus importante, fi la femme
avoit furvécu au mari; mais la providence en ayant difpofé
autrement, faut-il que des tiers en foie nt la viél:ime, &
qu'ils bonifient. aux héritiers d'une femme ce que la loi
de la nature, le droit cqmmun & les paél:es du contrat
leur ont ravi? En déclarant la collocation caduque, & en
.confervant à la Dame Meynier tous les droits & aél:ions qui
lui competent & qui peuvent lui compéter contre les tiers
acquéreurs dans le cas où les biens de fon pere feront infuffifans pour faire face à la véritable dot & aux frais que
fa mere avoit fait pour pourvoir à 'fon affurance, on ne lui
fait aucun torr. Que difpute-t~elle donc ici? Ce n'el! pas
fon propre bien, puifqu'on le lui réferve, qu'on le lui
affure" & qu'elle ne peut pas le perdre. Elle difpute le
. bien propre du heur Benoit qui ne lui doit rien par luimême; elle cherche donc à gagner .fur un tiers; certat de
luera captando. Le fieur Benoit cherche au contraire à [e
foul1:raire à une perte; certat de damna vitando.
On répondoit pour la Dame Meynier Caire, que deux
loix formelles dans le droit écabliffent que, quoiqu'en regle
générale la dot ne doive point ètre reHituée à la femme
pendant la durée du mariage, elle a cependant aBl:ion pour
]a ,répéter, lorfque fon Inari commence à déranger [es
affaires, & à plus forte raifon lorfqù'il ell: tombé dans un .
état d'infolvabilité notoire. La· premiere
la loi fi conf,tante matrimania , if. fallita matrimania, & la feconde dl.
la loi IIbi adhuc, cod. de jure datillm. Il dl: décidé par
d'autres textes également précis, que les privileges de la
dot paffent de la mere fur la tête des enfans, à la diffé1"ence .des héritiers étrangers ou de fes .créanciers à qui il
n'eil pas permis de les exercer: Nec enim , dit la Novelle
9 l , a!iis dedimus dudùm hoc privilegium, aut hœredibus, aut
creditoriIJus , fed faUs filiis. Parmi ces privileges dOllt les
enfans jouiffent .apr.ès la, mort de leur. mere, eH celui de
pouvoir, comme elle l'auroit pu de f(;lll vivant, répéter [a
dot, patl'e verg,ente ad inapiam. Les Dciaeurs [ont unanimes
en
�10
>4,00
U RNA L
fur cerre derniere vérité. Defpeiffes, tom, l , pag. fi7; Catetan & Vedel, rom. 2, liv, 6, chap. 14; Bouraric & Serres
dans leurs inHi[Utions au droir français.
S'il el!: vrai que la femme peur répéter fa dpr, marito
'1'ergence ad inopiam; s'il eH vrai qu'après fa mort les enfans entrent d'abord dans tous les droits de leur mere, &
peuvent, comme elle aurait fair, répéter fes droirs doraux,
il doit êrre vrai auffi que fi leur mere avoir déja fair des
pourfuites, fair contre fan mari, (oit cancre les riérs poe.
fe{feurs de (es biens, il leur dl: permis de les cOl1(inuer.
Er en effer, (ur quel étrange fondemenr, en leur donnant
la même aél:ion qu'à leur mere pour répéter la dor, patre
vergente ad inopiam, leur refuferoir-on le droit fi naturel, fi
jufie, fi légal de conrinuer les proèédures qu'elle avoir
commencées? Pourquoi voudroit-on les obliger- de lai{fer
ces procédures infruél:fl,eufes, d'abandonner les tir'res que
leur mere àvoir déja obtenus à grands frais, & les fOllmettre, en les forçant de recommencer, à de nouvelles dépenfes auxqu'elles prefque toujours leur firuation ne permertroit pas de fournir.
Une femme s'épui(e pour parvenir à la répétition de (a
doc; il el!: très-rare qu'elle ne (oit obligée de recourir à des
emprunts pour faire l'avanc-e des frais de l'in{l:ruél:ion, ceux
du contrôle, centieme denier, fepr & demi pour cent, &
autres de pareille nature. Comment donc fe pourroir-il qu'après (a mort on flH 'aurorifé à dire à .fes enfans: tous ces
frais deviennent dès apréfént inutiles; ils neférvent 'lu'a groffir
vos créances fur les biens de votre pere; ceux 'lue votre mere
avait pris en collocation retournent dans [on patrimoine; il VOI/S
dl défendu d'en jouir, & il ne 1'OUS refle plus 'lûe la reJ[ource
de r(commencer fur nouveàux frpis pOl/r arriver au même but,
c'eJl-a-dire
une collation fémblable a aile 'lue votre mere
. avait faite; G'.fi vous êtes dans l'impuijJànce d':Jvanéer une
féconde fois tOI/tes les [ommes nécejJàires, c'efl un malheur dont
votre pere ou fés créanciers doivent profiter. Ce langage pourroit-il être celui de la Loi?
a
La
:
•
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PAL AIS
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ii 0
VEN C E.
"4"0 l
La Loi Ji conjlante, ff. faluto matrim., en parlant de la répétition de la dot, ne dit rien d'où l'on puiife conclure
qu'elle n'entend donner à la femme qu'une !impie aifurance;
au contraire, en lui donnant le ,pouvoir d'exiger fa dot, ad
dotis exac7ionem agere, fans .re!l:riérion quelconque, elle annonce une répétition définitive. La Loi uhi adhuc, cod. de
jure dotium, décide, comme l'autre, que la décadence des
affaires du mari donne à la ferpme l'aérion en répétition
de fa dot, non feulement contre le mari, mais cOntre les
tiers poifeifeurs; elle décide auffi que la femme a' dans ce
cas, tant fur les biens encore poifédés par fon mari, que
fur ceux qui fe trouvent dans les mains des tiers poifeifeurs,
la même aérion qu'elle a après la diffolution du mariage.
Les feules conditions que cette Loi impofe à la femme,
en lui donnant le droit de répéter fa dot, font de ne pouvoir l'aliéner pendant le relle de la durée du mariage, &
d'en eœployer les revenus à l'entretien de fon mari & de
leurs enfans.
Si, comme le dit cette Loi, le 'délabrement de'la fortune du mari donne à la' femme l:l même aêl:ion pour répéter fa aot, qu'elle a après la diifolution du mariage, ou fi
elle peut agir de la même maniere dans un cas comme dans
l'autre, il ell: évident que la répétition ell: définitive dans
le cas de la décadence des affaires du mari, comme elle
l'e!l: dans le cas de la diifolution du mariage: fed ita ut
potlliJlet, fi matrimonium eo modo diJlàllltum effit; quo doris &
ante nuptias donarionis exac7io ei competere POtlliJfèt. La Loi
compare les deux hypothefes, elle les alIimile l'une à l'autre;
elle veut donc que la répétition de la dot produife le même
effet que dans les deux cas. La Loi n'impofe à la femme qui
a exigé fa dot pendant le marià~e, que l'obligation d'en
employer les revenus à l'entretien de fa famille, & de ne
pouvoir ~liéner les biens qu'elle a pris en paiement, qu'après
la rport de fon mari ou après la diifolution du mariage ~
ira ut nullam lzaheat licelltiam eas res àlienandi vivente maTitO, & matrimonio inter eos conJlituto. Cette prohibition ainu
Années 1775 G' jùiv.,
Eee
�, 402.
/
10
,
t1 RNA
i
limitée fi.lppofe néceffairement que l'aliénation des biens ell:
permife à la femme ou à fes héritiers, du moment que le
mariage en: dilfollS, & par conféquent que la répétition de
la dot ef!: irrévocable. Cetre vérité n'eH point altérée par
la derniere difpofirion de la Loi, qui réferve au mari & à
la femme, au moment de la diffolution du mariage, leurs
droits .refpeél:ifs fur la donarion à caufe de nôces & /ùr la
dot.
Suivant le.Droit Romain, ainfi que l'attel1:e Duperier dans
fes maximes du droit, tit. de fa dot, pag. SoS, les maris
gagnoiel}t touce la dot par leur furvie, & en récompenfe
de cet avantage ils faifoient à leurs femmes des donations
équivalentes pour le cas oll elles furvivroienr, qu'on appellait d'abord ante nuptias donaeiones, parce qu'il n'était 'permis de les faire qu'avant le mariage, & que l'Empereur
JuHinien voulut qu'on appellât à l'avenir donationes propter
nuptias, en permettant de les fdire en tout temps. C'ef1 ce
qu'on trouve alfez bien expliqué dans le Commentaire manufcrit de Me. 'Builfon, fur le rit. dü code de donationiDus'
ante l'el propter nuptias, & dans le traité des gains nuptiaux
par Boucher d'Urgis, chap. 2, pag. 16 & 17,
Il eH vrai que malgré la clarté des Loix fur cette matiere, les Doél:eurs fe font vivement agités fur la queflion
de favoir fi la répétition de la dot faite par la femme pendant lè mariage, à caufe du délabrement des affaires de fan
mari, était abfolue, définitive ,. ou fi elle n'était que pour
affiJrance & à titre de gage pour la confervation de la dor.
La glofe d'Accurfe fur la Loi uDi adhuc confidere la ré~
pétition de la dot comme tellement définitive, qu'elle décide
que bien gue le mari revienne en bonne fortune, il ne peut
plus reprendre la polfeffion des biens pris en paiement par fa
tèmme: dos
vira repaita, conflante matrimonio, aD ejus
Înopiam, diviti poflea· faRo, reddi. non deDet. Cette opinion
eH fuivie par BofIius dans fan rraité de dote, cap. 17, §. l,
n. 3; par Barbofa, fur la Loi fi confiante, n. 6 & (eq.; par
Giurba dans fan recueil dedécifions nouvelles, décif. .16;
a
�DU
PALAIS
DB
PlfOVENC E.
403
.
par Builfon fur le titre du code de pignoribus & hypotlzecis,
& par Cujas fur le même titre.
Ainll, quand même la répétition de la dot faite vergence
marito ad inopiam, au lieu d'être irrévocable, ferait jure pignoris tantùm & a.lfecurationis, il n'en ferait pa~ moins abfurde & contre toute juHice de foutenir que du moment'
que la femme colloquée meurt avant fan mari, fes enfans
poivent être dépouillés des bjen~ par elle pris en collocation,
pour n'avoir plus que la reffource de formg une nouvelle
demande 'en répétition' de la dot. Dans cette hypothefe les
enfans auraient au moins le droit de les retenir jufqu'au rembourfement· effeétif de leurs créances; ce droit ferait inhérem
à la nature de leur titre; ils l'auraient par cela feul que le titre
de leur mere ferait un titre d'engagement ,jus pignoris. Auffi
les Auteurs qui ont été d'avis que la répétition de la dot
ob inopiam mariti n'opérait en faveur de la femme qu'un
e'ngagement, enfeignent que les enfans ont, comme leur
mere, le droit de rétention jufqu'à l'entier paiement de la
dot. Tels font Rodrigues dans fan traité de concur/ù &
privilegiis creditorum, & Mr. de Clapiers dans fes décifions.
Il efl: donc également vrai dans les deux fyilêmes, c'eil-àdire lors même qu'on regarde comme de maxime que la collocation de la femme, marito wrgente ad inopiam, n'eil faite
qu'à titre de ,gage, qu'après fa m.ort lès· enfans ne peuvent
pas être dépouillés des biens par elle prfS en paiement, à.
moins qu'on ne leur rembourfe la dôt en· principal, intérêts
& dépens; & delà cette autre conféquence non moins certaine,
que fi leur pere ou fes créanciers ne les mettent pas hors
d'intérêt par un rembourfemen't effeétif, & que les biens
fur lefquels leur me.re s'était colloquée ne fuffifent pas papr
les payer de fes draits, ils peuvent, ayant le même privilege, continuer fes exéclltions, jufqu'à ce qu'ils foient fatisfaits pI.einemenr. 11 ya encore moins de doute ft fe former'
fur les' droits des enfàns, lorfque leur mere a commencé
les po,ur(uites, parce que bien qu'on reconnoiffe dam le droit
.
Eee
1.
�•
401
1 0 v no -N A. t ' I
des aélions tellement perfonnelles, qu'elles në piffent pas
aux héritiers, comme la querelle d'inofficicifité, il eU cer~
tain néanmoins que quand la perfonne à qui elles appartiennent a commencé de les intenter, elle tranfmet à fes
fucceifeurs, même étrangers, le droit de les continuer, ainli
-que le décide Duperier, tom. l , Iiv. 2, quell: 12.
Il ell: vrai qùe plufieurs de nos Doéleurs, tels que Mr.
de St. Jean, Boniface, Decormis, Julien, La Touloubre,
s'attachant à prouver que pèndant la durée du mariage, ces
fortes de collocat'ions ne font fuie tee!' ni au lods, ni au
droit d'offrir de la part des créanciers perdans du mari,
dif.:nt qu'elles ne [ont faites que in ajJècuratianem dalis &
par forme de gag.:; mals ces Auteurs, uniquement occupés
du [ujet qu'ils traitent, ne font pas toujours un choix exaél:
d'expreffions. Ce feroit s'expofer à mille erreurs_, que de
prendre à la lettre touS les termes qu'ils employent' dans
leurs difcours. C'ell: par la maniere dont [e fom ces fortes
de collocations & par les effets qu'elles produifent parmi nous,
qu'il faut juger de leur vérita~le nature. Or, il fuffit· de connoî.re notre forme de procéder en pareille matiere, & les
effëts que produit la collocation de la femme marita vergente ad inopiam, pour [e convaincre qu'elle forme un vrai
_titre de propriété.
Une femme qui veut répéter [a dot ob inopiam mariti,
ell: obligée de conll:ater le dérangement de fon rr.ari par
une information, & d'obtenir la liberté d'intenter [on aélion;
il faut enfuite Qu'à l'inUar de rout créancier quï veut parvenir au paiement de [a créance, elle_ faife ajourner fan
mari en condamnation de [a dot; qu'elle fe la faife adjuger
par une Sentence définitive, & qu'après avoir fait procéder
à une liquidation exaéle de [es droits, elle -faife eflit!1er les
biens de fon mari, [uive pas à pas routes les procédures
que l'on appelle le droit exécurorial, ju[qu'à fa collocaüon;
il fattt qu'elle paye le centieme denier & le fept & demi
pour cént des biens fur lefquels elle a été colloquée. Or"
toutes ces procédures & le paiement de ces droits n'indi~
�DU PALAIS DB PROVB~CI!;
~o)
que nt-ils pas un vrai tranfport de propriété? Faudroit-il
tant de formalités & tant de dépenfes, s'il n'étoit queHion
que de bailler à la femme- un fimple gage pour l'affurance
de fa dot? Le cemieme denier ell: un droit dÎl à l'oc cafion
des mutations de propriété: il n'y auroit donc pas lieu à ce
droit, fi la collocation de la femme marito vergente, n'étoit
faite que jure pignoris.
Arrêt du 3 Juillet 1778, "lIU rapport de Mr. le Confeiller
de Ballon ~ qui réforme Ja Sentençe, condamne Me. Meynier pere au paiement de 21000 liv. du montant de la dot
conllituée à la Dame çapucy, & permet à la Dame Mey, nier Caire de fe faire colloquer pour les fommes à elle
dues & frais exécutifs par un feul exploit fur les biens immeubles apparrenans à Me. Meynier fon pere & fournis à
fes hypotheques, ellime ~éalable·ment faite, ledit Benoit appellé, fauf & réfervé à ladite Meynier, après lefdites opérations parachevées.&:; due difcuffion fàite, d'agir, s'il y éèheoit,
rontre ledit Benoit & les autres tiers poffeffeurs ainli qu'elle
verra bon être, & auxdits tiers poffeffeurs de faire valoir
leurs droits au fujet de la jouiffance légalement acqqife
'audit Meynier des .légitimes afférantes à fes eofans fur le
bien de leur mere; condamne ladite Meynier Caire à tous
"les dépens envers ledit Benoit. Ecrivant Mes. Pochet &
Barlet. .
/
�JOURNAL
•
ccc
ARRÊT
L.
Quoique l'aïeul ait [es petits-fils fous fa puif!ànce, il ne peut
pas aliéner leurs immeubles fans nécefJité.
L'aïeul qui n'a pas l'ufiifruit des biens de [es petits-fils qui
font fous fa puijfànce, n'en a pas l'adminiJlration légale. Il
ne péat les adminiJlrer· qu'a l'injlar du tuteur.
N l'anné~ 173 2 , Mre, Jean-Jofeph-Françojs de Belliere _
... de la ville de Perruis, fut m'arié à Dame Catherine de
Gautier de la vi.lle de Marfeille, fous une conHitution de
pot de 30009 IiI'. D'Iris le contrac de mariage, fan pere l'habilica, 1t)i défempara en fonds & fruics rous les biens procéx:lanc de l'hâricilge de fa mere, & lui fic de fo~ chef une
donation générale, fous la réferve d'une penfion viagere de
1000 liv,., & de pouvoir [ubfl:itu~r. L~ fieur de Belliere mourut
le 2 Oél:obr~ 1741 , Re lai1I'qnc qu'une fille appellée Therefe
de' Belliere; un mois & demi après ja Dame de Gautier réclama (on 'ln de deuil & fes habits lugubres. Me. Philippe
de ,Belliere fOll bea\l-pere, qui étoic alors forc âgé & apopleél:ique, telle,rnenc qu'il décéda dans moins de trois mois,
rranfigea avec elle, non feulemenc fur ce qui faifoic l'objet
de la fufdite demande, mais encore fur le paiement de fa
dot, payable en argenc, & donc il n'étoic pas queHion. Par
une tranfaél:ion du 28 Novembre de la même année, il défempara à la Dame. de Gautier, en paiemenc de la doc &
droits liquidés à 322)0 liv., la. une maifon à Mar[eille qui,
avoic été comprj{è dans fa doc, pour la fomme de 1 S000
0
IiI'. ; 2 • le domaine de St. Jo[eph, qu'on évalua à -I 61 S0 IiI'. ,
& le furplus en argent. La Dame de Gautier époufa enfuite
l~ fieur Gombert, fans pa/fer aucun contrat civil. de mariage; celui-ci, en vertou d'une procuration que lui donna
fan épou[e, vendit la maifon de Marfeille au prix de 1 S)00 li v.,
E
�DU
P'AL-AIS
DB
PROVBNCI!:
401
, Le 6 Novembre 1~~ 3, Noble Fran~ois,Jofephde Pochet,
Avocat'en la Cour, epoufa la Dlle. Th.erefe de BeHiere fous
une confiitution générale; la Danie de Gaurier ne conftitua
·rien de fon chef à fa fille, & dans le contrat on fit inférer
vaguement que Me. de Pochet approuvoit la tranfaélion
pa/fée entre la Dame de Gautier & Me. Philippe de Beffiere, portant paiement de fa dot. Le 7 Oélobre 1761 la
Dame de Gautier démembra & vendit une partie du domaine de St. Jofeph à la Dame de Gaudemard, repréfentée
par le Chevalier de Ga/faud, au prix de 1650 liv. Huit jours
après cette vente, Me. de Pochet fe pot;rvut au Lieutenant~néral au Siege d'Aix- contre fa belle-mere, en caffation
de l'aéle du 28 Novembre 1745, & en révendication des
fonds, avec reHitu~ion des fruits, fauf de compenfer fur
iceux les intérêts, & enfuite le principal de la dot, & d'en
rembourfer le furplus, le cas échéant. Cette· demande
rena impourfuivie, & pendant cet intervalle la Dame de
GalH!er aliéna prefque tout le reftant du domaine de St.
Jofeplz à divers particuliers. Me. de Pochet continua fes pourfuites contre la Dame de Gautier, & demanda la coinmune
exécmion contre les acquéreurs. Les chofes en cet état, il
fm propofé un arbitrage; cinq Avocats furent clioifis, & par
~eur Sentence arbitrale du 15 Février 1776, il fut ordonné
qu'avant dire droit à la demande de Me. de Pochet, il fercit
procédé par Experts à un rapport de vérifièatioh, prifée &
eftimation de 11 bafiidè, affa rd , terres & vignes défemparées à la Dame de Gautier par la tranfaélion dw 28 Novembre 174~, pour, ledit rapport fait, être définitivement
dit droit. Appel de cette Sentence de la part 'de Me. de
Pochet, & appel' if! qU!lntùm contra. de la part des àcquéreurs. Pendant l'infiance la Dame de Gautier offrit un expédient, pottànt ca/fation de l'atl'e du 28 Novembre 174"5 1
avec reltitutian de fruits, f.auf·ll.udit Me. de Pothet de pourCuivre la ctommune' exécution par. lui intentée contre les tiers
détenteurs; cèux-ci attaquerent cet expédient par tierce OP"
fJofition, & demanderent leur garantie contre la Dame de
Gautier.
�'408
,
J ou
R. N A L
On di fait pour Me. de Pochet, que la nullité de la tran'" '
faélion du 28 Novembre 174') éroit fondée fur deux principaux moyens; le premier', en envifageanc Me. Philippe de
Beffie.re comme légitime adl1liniftrateur des biens de fa petitefille mineure, l'aliénation du domaine de St. Jofeph qui appartenait à celle-ci en qualité de fille unique & d'hé6tiere
légitime de fan pere, ne [eroit pas moins radicalement nulle,
pour avoir été faite fans aucune néceffité; 2°. maigre fa
qualité· d'aïeul, il n'avoit pas l'ufufniit des biens de fa petitefille, & par conféquenc il ne pouvait pas en avoir l'ad miniftration légale. On ne peue pas conte(l:er qu'en regle générale les immeubles des mineurs ne peuvent être valablement aliénés en quelque fac;on que ce fait, que dans des cas
de néceffité & en vertu du décret du JL!ge, d'affernblée des
parens, d'eHimation, d'affiches, d'encheres publiques.., & de
toutes les formalités inféparables des ventes publiques &
judiciaires; La rubrique du code de prœdiis fI aliis rehus
minorumfine deereto, non' alienandis, vel oMigandis, & routes
les Loix de ce titre one établi cette maxime. La Loi 4 a
prévu tous les cas; ~l1e défend l'aliénation des biens des
mineurs, non feulement par aae de vence, mais encore
par cranfaaion, 'par échange, par donacion, & par quelque autre voie que ce foit: non folùm per venditionem ruftica prœdia, wl fuhurhana pupilli, vel adolefcentis alienare
prohihentur: fed neque tranfoélionis ratione, neque permutatione fi mullà magis donatione vel alio quoquomodà ea transferre fine decreto a dominio fuo polfunt. La Loi 2') du même
titre parle plus paniculiéremenc de l'infolutondation, qui n'ell
pas moins_ prohibée que toutes les autres efpeces d'aliénatians: fi minaI' viginti quinque annis prœdium 1'lIflicum, cùni
aliud deheres, fine decreto in .folulum dedifli, dominium a te
difcedere non permittit Senatus Confulti auc10ritas.
Il ne fuffit pas de remplir les fo,rmalit,és prefcrites par
les Loix pour la yen te , des piens des mineurs, du .fifc, de
l'Eglife ou des Communautés. Il faut, avant coutes chofes,
qu'il y ait néceffité de vendre & qu'il en confte, fans quoi
l'obfervaDc~
..
,
�D U
PAL A-I S • D E
P- R a VEN C E.
409
l'obfervance la pfus exaéte & la plus rigoureufe des formalités feroit inutile pour valider les aliéimions faites [ans
caufe juGe & néceffaire. Ce ri'cf!: qu'à regret que la Loi
permet qu'on dép,ouille les mineurs de leur patrimoine, parce
qu'ils n'ont pas moins: à craindre de l'avidite d'atltrui que
de leur propre foibleffe: quid enim, dit la novelle 72 in pnef.,
homo malitiœ ftrnel dediws, non ùlveniat ut -rninorum res, pro.
prias faciat. C'eH pour cela- que la Loi a pouffé jufqu'au
[crupule fon attention à conferver' aux mineurs la propriété
de leur bien. Pour aurorifer l'aliénation, 'elle exige 1°. que
non. feulement il y ait des _dettes à pay.ef\, & que ces dett'es
[oient échues, mais encore que les créanciers po.mfuivent·
des exécutions, ou qu'il faille faire ceffer des intérêts à
un taux exceffif: tune permiuet difi,rahi ,fi modo urgeat creditor, aut ufurarum, modus parendum œri alieno fuadeat; ce
[ont les termes de la Loi mag~s puto, §. 9,.ff de re!ms-eor.
fjui fub ·tut. vel Clira funt Jine deaet. nomoa1ien. Cette Loi, §.
14, défend d'aliéner pour tout ,autre mol if,- fût-ce même pout'
l'évidente utilité du mineur. Il faut que la dette fait urgente, fans quoi le Juge n'a pas le droit de permenre
l'aliénation: non enim paffim diJlralzi jubere, prœtori tributum
ejl, fed ita demùm,.fi Ilrgeat tes al,ienuin.
'"
2 0. Cette même. Loi, §. '9, exige, qu'avant de fe déterminer à aliéner des immeubles pour fur·venir au \ paiement
des dettes urgentes, on difC'ute avec anention les différentes
efpeces de biens du -mineur, tels que peuvent être l'argent
comptant, les dettes aétives, les denrées, & même les revenus qui pourrojel1t 1L)i, obv.enir; .qu'à défaut de route ref·
[ource, on préfere l'aliénation des immeubles les moins produétifs & les moins utiles, à celle des plus' précieux & des
plus importans: ù,:primis lzdc 'cQ{lvenit difcutere ml aliundêJ
poffit pecunia ad extenuandurTl œs alienuzn expediri. Quœrere
ergà deIJet an pecuniam pupi1l1/s lzabeat, vel in nlll1w·ata., vel
in nomirzihus fjuœ cànveniri p,djJiiJ1t ~ fV(j inlfr,!,7ibIlS ,èonditis,
vel etiam in reddicuum [pe atqtl.e flbVe.Jf.i;({!tium. Item requirat
7ZUin aliœ res jiflt prœtef .prœdia, 'fjtl~ diflralzi pa1fznt, ex qua> Annees t775 & fili....
.'
F ff
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�"41'0
Jou
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.
l'um prœtio œri alieno fatisfieri poffit....... Sed,fi fit a]ia pof.
feiJio minaI' l'el minus utilior pupillo , magis eam jubere di[tralti, quam majorem & utiliorem.
3°. La même Lo.i exige pareillement qu'on "ait une par,ticuliere attentioM à ne permettre d'hypothéquer ou de vendre
,gue ce' qui fera l1éceffaire pour payer Ja. dette urgente, &
non au delà Lafln gue'pour le pàiement d'une modique fomme
on ne puiffe pas, dépouiller le mineur d'un domaine important: nec non illud vigilanter obfervare, ne plus accipiatur
fub obligatione prœdiorum fœnoris, ,quam quod opus fit ad folvendum 'œs alienu1[!, aut diflraltendum arbitrahitur. Ne propter
modicum œs aliUlum,· magna pojJejJio diflrahMur.
'
4°. Enfin la Loi s'eG tellement attachée à empêcher l'alién,Hion des biens des mineurs, hors des cas d'abfolue néceffité, qu'elle veut gue fi la religion du Juge a été furprife
par de fallffes allégations, quand il a permis la vente, le _
pupille ou fon tu.teur foient en droit d'en revenir: tamen
ac7ionem pupilla, dit-la Loi S, cod. de prœdiis, fi falfis alleg:ztioni/ms cireumventam religionem ejus prohare pojfit, Se!latus refervavit: ,
Les Tribunau," de Ju!1:ice ont toujours fecondé rigoureufement l'intention des Loix, en ,caffant les aliénations des biens
des minetÙ"s, 10rfqu'indépel1da(ntl).ent des. décre tS du Juge,
l'efrimation, & fu-~-tobt les,encheFes, & routes les'autres formalités prefcrines, n'ont pas été fpécifiquement obfervées.
Tels fone les Arrêts rapportés' par Boniface, tom. 1, liv.
4, tit. 9, chap. 1; dans le Journal des audieQces, tom. '1,
pag.• 13-3 , & tom. :J" 'pag. ,663 , & par Denifat, vo. mineur,
n. 43 & flliv.·
l'
.
,
li é~ vr~i qu'eQ ce q,u:i con~eri\e,des ,fG;malités, on a
\loulu etabhr une exceptlon.à la regle generale en üveur
du pere & de l'ai:eul, par rapport aux biens des enfans qu'ils
ont fous leur. puiffacrce '; on prétend qù'ils font difpenfés des
formalités, 100f'1u'il ya caufe jull:e & néceffaire pour faire"
des' aliénarrons, attendu- que la -L6j donnant au pere l'ufufruit, & par conféqllent 'l'a\inlini{hation légale des biens de
,
�D U
PAL AIS
DE'
l' R
0 VEN C E.
41 l
fes enfans fournis à fa puilfance, il elt perfonnellement intérefle à les conferver. On a voulu fonder cette eX'Ception
parriCllliere fur la difpofition des Loix qui font fous le titre
du code de honis 'luœ liheris. On y voit que la Loi cùrtr.
oportet 6 de ce tirre a corrigé l'ancien droit qui adjugeait
au pere la pleine propriété de tous les biens de fes enfans
qui font fous fa puilfance; elle né lui en a adjugé que le
fimpie ufufruit, & elle en a excepté plufieurs fortes de
bi~ns ,. tels que les caltren(es ou quafi caHren[es & autres
dont le pere perd l'ufufruit, fair par la difpofition de la Loi,
fait par celle de l'ho!nme. C'efl: en confidénirion de l'ufufruir dévolu de plein droir au. pere fur les biens aventifs des
fils de famille" que lia Loi 8 du même titre, §. 4 & S , lu·i
. en a donné la pleine admini{hation, & qu'elle le difpenfe
de rendre compte des fruits, de donner caution,· & de
toutes les autres obligations impofées aux ufufruitiers étrangers, pourvu qu'il ne touche point à la propriété. Cettè
même Loi permer au pere ufufruitier d'aliéner les biens pour
furvenir au paiement des dettes de l'héritage; & c'e·n de
cetre difpofition qu'on.a voulu conclure que le pere elt difpenfé de remplir les f6rmalirés de droit, lorfqu'il fàit des,
aliénarions pour le paiement des dettes urgentes.
On pourroit fourenir néanmoins que cette Loi ne l'a pas
entendu de même, ·puifqu'indépendamment qu'il n'yen pas
parlé exprelfément des biens du fils de famiIle mineur, il
femble que le §. S a voulu foumettre le pere à l'obfervance
des formalités dans les cas de droit, en ces termes: fed
pater. 'luidem in prœdù:7is tantummodà cauJis haheat licentiam
RITÈ res filiomm familias vendue filii nomine; vel Ji emptorem no/! iJzwniat, ,.itJ pignori jùpponere: nullomodo licentia
concedenda filiis ea[dem ·venditiones wl hypothecas retraRare.
En ordonnant ainfi que les venres feront faites ritè, il femble que la Loi a entendu que le pere obferveroir les formalirés prefcrites pour valider l'aliénation du bien de fes eofans mineurs. C'eH ainfi que Godefroy dans fa glofe fur le
mot 'ritè l'a interprété, adhihitis folemnitatihus, die-il. C'efl:
F fh
•
'
�4a.
10VR~Ai
auffi ce qu'ont penfé Lacombe, va. puiJfànce paternelle, fe&:
2, n. 8, & Fachineus, controv. juris, lib. 6, ca p. 40.
Cependaor il faut convenir que plufieurs autres Auteurs
oor tru que le pere & l'aïeul qui joui/fent en vertu de leur
pui/fance paternelle du bien de leurs enfaus, font difpenfés
de remplir les mêmes formalités prefcrites aux tuteurs &
autres adminifirareurs, lorfqu'il eH néce/faire d'aliéner les
biens des pupilles & des mineurs pour le paiement de leurs
dettes. Ils ont penfé que le pere étant perfonnellement
intére/fé tI conferver le bien de fes enfans à caufe de l'ufufruit qui lui C0mpete, on ne doit pas préfumer qu'il les
ealiene mal-à-pr,opos & à .vil prix, & que fur ce fondement
il mérite, plus qué rous le.s autres la confiance des loix ;
,c'eH Ce que dic enrr'aLHres le Préfident Faber en fon code
fur le ~itre de bonis quœ liber. déf. 3.
Quoi qu'il en foic de cette queHion qui eH fort contro.verfée,,'q: en admettant que le pere qui, le cas échéant,
aliene les biens prop,rés de fes enfans pupilles ou mineurs,
dqit être difpenfé des formalités prefcrites par la loi pour.
pareilles aliénations, il demeure roujours ceHain & indubitable que le pere, malgré Croute fa pui/fance & fon autorité, ne peut fàire aucune aliénation fans caufe jufre &
tléce/faire. La fufdire loi 8, cod. de bo'nis quœ liber. fur laquelle on veut (onder en fa faveur le privilege particulier
de pouvoir aliéner fans formalités de jufrice, lui impofe expre/férhent l'obligation de· ne jamais fonir des bornes d'un
bon adminiHrareur &. d'un ufufruitier: omnia circa ufumfruc7llm facere 1"œ nullomodo proprietatem polJint deteriorem
facere. Elle lui impofe fur-rour' l'obligation de ne vendre
le bien de fes enfans qu'avec la plus grande circonfpeétion,
& dans le cas feulement d'une abfoJue néceffiré pour le
paiement des dette$ urgentes. Dans ce cas elle exige de
lui, comme de rous aurres adminifrrateurs, qu'il difcute
les meubles, les fruirs, les revenus & autres effets de
cene nature, avant de roucher aux immeubles; & s'il n'y
a pas d'autre moyen ni d'autre re/fource que la vente des
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PAL At s
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PRO V Il Ne B.
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immeubles, elle lui enjoint de préférer les maifons & autre s
fonds qui font moins précieux & moins utiles, jleriles
'1uidem, non tamen inutiles" veluti dom us. Enfuite la loi
prévient le pere que s'il franchir les borll~s qui lui font
prefcrires, il tambera dans les mêmes pieges que rous
autres admini{hateurs, lorfqu'ils contreviennent aux défenfes
qui leur font fa,ires en pareille matiere. Decormis, tom. 2,
, col. x416, reHreinr pareillement aux feuls cas de lIécejJité
la liberté de vendre donnée al! pere ufufruitier. ita Duperier
en fes maximes, rir. de la prefcription de dix ans; Mr. de
Regulfe dans fes Arrêrs nora~les, &c.
En appliquant ces principes à la caufe, l'on voit qu'il
n'y avait aucune néceŒré de défemparer à la Dame de
Gautier le domaine de Sr. Jofeph un mois après la mort
du fieur de BeŒere fan premier mari, pour le paiement de
fa dor qui n'était point urgent, & - qui ne pouvait pas
même être échu; rellement bi~n que la Dame de Gaucher
n'avait pas imaginé de la demander; elle favoit <Jue fa dot
énoncée dans le contrat de mariage pour 30000 liv. érait
con!l:iruée en argent, & que par confé<Juent elle ne pouvait échoir qu'après l'an & jour du décès de fon mari; elle
favoit que tOll[ ce qu'elle PQuvoit prérendre 'en Novembre
174') , confi!l:oir en fan an vidual & fes habirs de deuil; ,
:luŒ n'en demanda - t - elle pas davantage, lorfque douze
• jours~après le dé~ès de fan mari, c'e!l:-à-dire le x') Oaobre
I74'), elle fe POUIvut en ju!l:ice. N'e!l:-il pas étonnant qu'lm
mois après on ait fabriqué une tranfaaion Pilr laquelle on
a liquidé fa dot & droits, & qu'on lui ait défemparé nullo
jure cogente, pour le principal d'une, dot non échue, les
immeubles précieux qui appartenaient à une mineure?
Sur le fecond moyen on diroi~ que Me. Philipe de Beffiere n'avoir aucun pouvoir de faire l'aliénarion du domaine
de St. Jofeph de fa propre autorité, par' deux rairons: xo.
parce que malgré fa qualiré d'aïeul, il n'avait pas l'ufufruit
0
des biens de fa petire:-fille ; 2 • parce <Jue n'en ayant pas
l'ufufruit, il ne pouvoit pas en avoir l'admini!l:ration légale.
�'4I<t
JOURNAL'
En premier lieu, l'on a déja ohfervé que la loi a adjugé au pere" à l'aïeul & aux autres afcendans paternels
l'ufufruit légal des biens de leurs enfans qui font fous leur
puilfance, mais que cette regle généralé fouffre plulieurs
,exceptions. Ainli, par exemple, le pere n'a pas l'ufufruic
des biens cafirenfes ou quali cafirenfes, non plus que de
ceux qui procedem de hl fucceffion des Freres & fœurs
ou de rous autres, quand elle efi recueillie en commun
par le pere & le fils. Le pere n'a pas non plus l'ufufruic
des biens qui font donnés au fils par le Prince, ni de ceux
qui lui font donnés par la mere, par des parens ou par
des étrangers, avec prohibition, exprelfe de l'ufufruit' au
pere; la Cour a même jugé, par un -1rrêt du 7 ,MaIs 1769
au rapport de Mr. de Perier, que la prohibition tacite
fuffit pour priver le pere de la jouiiIànce. ,Enfin le pere
ne peut jamais recouvrer l'ufufruit des biens qu'il a donnés
lui-même, ou qu'il a défempatés à fan fils, tant en propriété qu'en jouiifance.
Ce dernier cas, qui efi celui où les parties fe trouvent,
fe vérifie lorfque le pere' mariant fan fils, lui fait donation
de [on chef, ou lui d~[empare en' fonds & en fruits des
biens maternels ou autres quelconques, ce qui emporte une
renonciation à l'ufufruit que la loi lui avait déféré. Si le
fils qui a reçu la défemparation décede, laiffant des enfans qui rentrent fous la puiifance de leur aïeul, celui-ci
ne recouvre pas l'ufufruit des biens qu'il avait donnés ou
défemparés à fan fils lors de fan mariage. Ces biens appartiennent aux petits-fils en propriété & en ufufruit; au paine
que li l'aïeul les adminifire , il efi tenu de rendre compte
des fruits, & de remplir les mêmes obligations que rous
autres adminifirateurs étrangers. C'efl:-Ià un' principe certain; il efi fondé filr la Loi 37, §. pater, ff. de negotiis
geflis; fur la doél:rine de Cujas in leg. cùm oportet, cod,.
de honis qua? liheris; fur celle de Decor.mis, rom. l , col;
1760, ch. 8, & rom. -2" col. 8 1).
.
Il faut donc tenir pour maxime que J'aïeul n'a pas l'ufu-;.
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PR.O VEN C Il;
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fruit des biens qu'il avoit défemparés à fon fils, lorfqu'après
le décès de celui-ci fes perits-fils les recueillenr. Le. département qu'il en a fait par le moyen de la défempara-.
tian ef!: irrévocable. Cela el1: encore plus indubitable au
cas préfenr, attendu que le domaine de Sr. Jofeph appartenait au lieur de Beffie re fils, en qualité. d'héritier de la
Dame de Garnier fa mere.
En fecond lieu, par cela feul que Me. Philipe de Beffiere n'avoir pas l'ufufruir des biens de fa petite - fille, il
n'en éroit pas le I~gitime adminif!:rareur. Le premier & le
principat effer de la puiifance paternelle ef!: l'ufi,fruit acquis
'aU pere fur les biens propres de fes enfans. Dès que cet
ufufruir lui ef!: interdit pour quelque caufe que ce foit, &
fur-tout dès qu'il y a renoncé, il n'ef!: envifagé à· l'égard
de ces biens que comme un étraQger; & delà vient que
s'il les adfi1inifl:re, il eH fournis à rendre compte comme
[out autre adrniniUrareur, ainli que le jugea formellement
l'Arrêt de la Cour du 23 Mars 1669, en la caufe d'Eyriés,
rapporté par Boniface, rom. 2 aux' additions, ch. 3"
C'eU pour cela que l'authentique excipitur exige qu'on
donne un curateur au fils pour les biens caHrenfes ~ll
quali ca!l:renfes. La novelle 119, ch. l , établit la même
c'hofe. Elle regarde le pere cOmme déchu de route forte
de _droits fur les biens de fan fils, dont l'ufufruit lui ef!:
interdir , quoiqu'il rienne fan fils fous fa pui1Jance. 'Elle
ordonne que' fi le fils eil majeur, il en difpofe comme boa
lui femble, & que s'il eft mineur, on pui1Je lui donner un
curareur autre que le pere. C'eH encore en partant de ce
- principe, que rous les Auteurs établi1Jenr que dès que le pere
n'a pas l'ufufruit, il ne peut pas avoir l'admini!l:rarion légale. C'e!l: ce que décident la glofe fur - l'au rh. excipitur,
cod. de bonis quœ liber. Barrhole fur la Loi nonnulla ,- if. de
judie. le Préfidenc Faber, déf. 4-, cod. de bonis quœ liber.
Pafcaljs en fon trairé de virib. patr. poteft: part. l , ch. 2,
n. 88; Cujas fur la loi eùm oporrec; Boerius, décif. 61,
11. 19. Bonnet 7 lett. P, Arr. 2 ,. retrace les mêmes prin,,:
DE
�'4 16
JouRNAL'
cipes; & c'efl: (ur iceux que fur fondé l'Am~r du 7 AOlie
1734 qu'il rapporte, par lequel le lieur Jean-Bapriile Savy
fur condamné à donner caurion comme un étranger, pour
pouvoir exiger la fomme de 3000 liv. due à fa fi'lle, parce
. qu'il n'en avait pas l'ufojfmir. _
'Pour (e convaincre toujours mieux de cette vérité, il
n'y a qu'à conlidérer que les Loix & les. Aureurs conviennent unanimemenr que l'on peur & que même l'ôn doit donner
au fils de famille toUt àlHre curateu·r que le pere, pour
les biens donr celui-ci n'a pas l'ufufruir.. Or, fi l'on peur
donner au fils de famille tour autre adminiHra't~ur que le
pere, il eil impoffible que le pere foit l'adminilhateur
légitime des mêmes biens, parce que ce font là deux extrêmes incompatibles. L'adminiilrateur légitime dl: celui
que la Loi invel1:it de fa propre autorité exclulivement à
fOut autre; &-c'e(l préci(ement ce qui fe vérifie en la perfonne du pere & de l'aïeul, relativement aux biens de lems
enfans dont l'ufufruit leur efl: acquis. Il ne feroir pas permis de leur donner un tuteur 'ou un curateur. étranger par
rapporr à ces biens ;' voilà pourquoi le pere & l'aïeul en
fonr vérirablement les adminil1:rareurs légitimes: Mais il n'en
, efl: pas de même pour les biens donr ils n'onr pas l'ufufruir;
on peur en confier l'adminiHration à tour autre. Or il fuffic
qu'à l'égard de ces biens on puifi"e donner aux 'enfans un
adminifirateur étranger, afin qu?on ne puifi"e pas dire, fans
contrarier la raifon naturelle, que le pere ou l'aïeul en fonr
les adminifirareurs légirimes.
On répondoit pour les acquéreurs, que le lieur de Beffiere n'avoir point émancipé fon fils, & que par conféquenr (
la Dame de Pocher fa perire.fille, de même que (on pere,
avaient toujours été (ou mis à fa puifi"ance parernelle. C'efi:
une maxime inconteHable, que dans les pays où le mariage
J)'émancipe pas, l'aïeul a également en fa puifi"ance fan fils
& (on petit fils, parce que le pere ne peur avoir fes enfans.
e.n fa puifIance, qu'au cas qu'il air été émancipé avan.t leur
n'liJfance, ou que l'aïeul foit décédé fans avoir émancipé
[on
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417
{on fils, ni fes petits-fils; c'ell: 'l'obfervat'ion que fait Boutarie dans fes inll:itutes, tit. 12, qui/JUS modis jus patriœ poteflatis falvitur.
C'ef!: une autre maxime également inconrefiable, que le
pere a l'adminif!:ration impunie des biens de fes enfdns non
émancipés, & qu'il peut, en cas de néceffité, les aliéner
& les vendre fans aucune fo.rmalité " & fans avoir befoin de
la permiffion du Juge, parce que la Loi préfume que les
enfans ne peuvent avoir un meilleur confeil & un meilleur
adminillrateur que leur pere : nullum efl melius cOlljilium
qI/am paternllm; cette maxime efl: établie par la glofe fur
la Loi quœcumque, cod. de bonis quœ liberis, & elle nous
ell: enfeignée par Covarruvias, var. refal., lib. l, cap. 6, n. 6;, '
par Pilfcalis, de patrid potefl., part. l , cap. 2, n. 5; par
Sabellus, in fummd va. pater, n. 41 ; par le Préfident Faber,
déf. ID, lib. 2, tit. 39; & par Cambolas, liN. l , chap. 3.
L'on a affeél:é de confondre te.cas de la prohibition faite
au pere de jouir de l'ufufruit des biens dOOln€S à fes enfans, al'ec celui dans lequel le pere s'efi départi du même
llfufruit, pour donner à fes enfans de plùs fortes preuves de
fan amoùr & de fa tendreffe paternelle. Une mere, par'
exemple, infiitue fan fils héritier de toUS fes biens, avec'
prohibition à fon pere d'en percevoir les fruits; dans cé cas
les Auteurs ont décidé que cette prohibition exprelfe de
l'ufufruit renfermoit une prohibition tacite d'adrninif!:rer
les biens fonds; on ne peut conclure de là que le pere qui
a donné tous fes biens à fes enfans, ef!: inhibé de les admini{l:rer dans 'le cas qu'ils le prédécedent, en ne dé1a'iffanr
qu.e des pupilles ou,des mineurs, dans un lems fur-tour que·
la donation qu'il'a faite à ,leur pere, 'renferme une réferve
expreffe de pouvoir les fubltituer.
Il ell: vrai que la Darne de Gautier ne pouvoir forcer fa>
fille au paiement de fa dot & droits qu'une année après la,
djffolutio ll du mariage; mais il fallait, en, attendant, Ju.i payer
un an vidual, & elle s'étoit déja pourvue en juHice pour
d,emander une p~ovifion de 1000 liv.; fon beau - pere eu
4nnées t 775 & jùiv.
Ggg
�'418
•
JOURNAL
la payant fit ceffer cette demande, & coupa COurs aux in':
térêts de la dor. Quelle utilité plus grande pouvait-il y avoir
que celle de faire ceirer un procès déja intenté par la veuve,
& d'empêcher qu'elle fe colloquât fur les biens de fa fille
qu'elle auro)t emportés en -enrier? Il fallait par conféquent
convenir avec elle & la faire confentir, à défaut d'argent
comptant, de fe' payer fur des biens fonds traél:ativemem
& fans frais. Il y avait donc néceffiré de fortir d'iJfaire avec
elle; néceIIiré qui rend inévitable ce qu'elle oblige de faire:
ingens ulum quo ni/lii fortius .. Il étoir par conféquent d'une néceffiré indifpenfable de la faire confentir à fe payer fur des
biens fonds, fuivant l'eltimation qui en mt faite par deux a"mis
communs; au moyen de quoi elle fubit la loi que fan beau.
pere voulut lui impofer, dans un tems que la Loi l'autorifoit à la donner elle-même : d'où il fuit qu'en fuppofant
que l'inf:olucondation qui lui en fut faite, ne fût pas dans
ce moment indifpenfable, on ne peut pas difconvenir qu'elle
ne fût grandement utile à f~ fille. La Loi n'a introduit les
formalités que pour réprimer la' chicane, non pour lui four1)ir des alimens & 'des armes pour vexer & pour molefier
le tiers; pour faire réparer les torts & les injuf!:ices, non
pour en faire fouffrir. Celui qui ne peut pas fe plaindre
d'une léfion, ou de quelque autre préjudice, ne peut pas
demander par conféquenQ la cairation d'un aèl:e fur le feul
défaut des formalités, fur-tout quand elles auraient tourné
à fon préjudice. Et quel préjudice plus grand pouvait fouffrir la Dame de Pochet que celui d'une collocation forcée,
qui, par les frais immenfes des prqcédures ,juridiques, aurait emporté les débris d'une fucceffion que fan aïeul lui
a confervés!
Me. ,de Pochet ne peut d'ailleurs oppofer le 'vil prix
'après une efiimarion préalable, des fonds ruraux infolutondonnés à ra belle-mere, & après s'être rendu appellant de l'interlocution q.ui l'a reçu à la preuve de la prétendue léfion qui
formoit fan dernier retranchement.
Sur la feconde· nullité tirée du défa'ut de pouvoir, on
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
419
répon'doit que le pere qui donne fan bien à fan fils, lui
cede, s'il ne s'en réferve pas l'ufufruit, tous les droits
qu'il avait fur iceux, & s'interdit par conféquent le droit
de les adminifl:rer, fans quoi fan fils ne fauroit en' jouir.
En lui accordant la jouiffance aéèuelle fans réferve de
l'ufufmit, il lui attribue par une conféquence indifpenfable
le droit & la faculté de les aqminiLtrer dont il fe dépouille
en fa faveur; mais de ce principe s'enfuit-il que li fan fils
le prédécede en délaiffant des enfans pupilles ou mineurs,
qui n'ont jamais ceffé d'être fous la puilTance d~ leur aïeul,
ce même aïeul ne fait leur adminifirateur légitime, fans
qu'il [oit néceffaire de les pourvoir d'un tuteur ou d'un
) curateur étranger, qui ne font donnés qu'à ceux qui ne [ont
pas, fournis à la puiffance d'autrui? Le fyfl:ême de Me. de
Pochet tend au contraire à fuppofer qu'il faut dans ce cas
punir leur aïeul d'avoir donné fan bien à leur pere, les
[uppoCer émancipés, & les foufiraire par conféquent à fa .
puiffance, pour les foumettre à celle d'un étranger.
.
Arrêt du 7 Juillet 1778, au rapport de Mr. le Confeiller
de Beauval, qui déboute la Dame de RaCpaud, Je lieur de
Gaffaud & Me. Robert tiers-acquéreurs, de leur ,appel in
quantùm contrà envers 1:1 Sentence arbitrale, ainli que de
leur requête en tierce oppolition envers l'Arrêt d'expédient
offert par la Dame de Gautier; fait droit à l'appel de Me.
de Pochet envers la Sentence arbitrale; ordonne la commune
exécution de l'Arrêt d'expédient contre la Dame RaCpaud &
les lieurs de Gaffaud & Robert, tant en principal qlie fur la
refritution des fruits des biens reCpeéèivement acquis, depuis
le jour de leurs acquifitions & fur les détériorations, compen fables avec les améliorations, li aucunes y en avait;
au moyen de ce, les aéèes de vente font déclarés comme
non obvenus & de nul ,effet à l'égard de Me. de Pochet;
ordonne la' défemparation des biens acquis,.à la charge
néanmoins par Me. de Pochet de payer fuivant fes offres
ce qui pourra refler dû en principal & intérêts aux acquéreurs, déduéèion préalablement faite des détériorations, C0111G g g 2.
�] 0 11 11. N Ji. L
42.0
penrables avec les améliorations, s'il y échoit, laquëlle dé.;
duétion aura également lieu pour la refiitution des fruits
ci-deffus ordonnée; condamne la Dame de Champclos, époure
du fleur de Rafpaud, & les fleurs de Gaffaud & Robert
aux dépens. Ecrivant Mes. Barlet & Caire. La Dame de
Rafpaud & les fleurs de Gaffaud & Robert s'étant pourvus
au Conreil de Sa Majefié en caffation de cet Arrêt, Ont été
,déboutés par Arrêt dü 14 Février 1780.
ARRÊT
LI.
a
Le va!f}è;u affrété mois étant arrêtiL par ordre fou verain ,
le paiement du nolis efl-il !UJPendu pendant la durée de
l'Arrêt?
En efl-il de même s'il s'agit d'une prife?
Ans le mois de Septembre 177~ le Capitaine Seren
affréta le vaiffeau Le Septimane aux fieurs Dangaliere
& Compagnie, au nolis de 6000 Iiv. par mois. Par le
concrat d'affrétement le Capitaine s'obligea de faire voile
pour Alger, & delà à Conf1:antinople, pour y configner
les marchandifes, èffets & paffagers que les correfpondans
des affréteurs jugeroient à propos d'embarquer. Le Capitaine Semz reçut dans fon bord l'Envoyé du Dey d'Alger,
chargé de porcer les préfens au Grand Seigneur; il fit enfuite voile pour Conf1:ancin-ople. Lorfqu'il fut quef1:ion de
faire fon retour, l'Envoyé voulut le charger de munitions
de guerre; le Capitaine s'y refufa, à caufe de la guerre déclarée encre l'Efpagne & la Régence d'Alger; il confentit
à charger de mâtures, ainfi qu'il l'avoit promis par le
contrat d'affrétement; mais ce ne fut que fur un ordre,
<Ju'il chargea du fer, du fil & de toile, quoique ces marchandifes puffenc être regardées comme effets de commerce.
Ce bâtiment fut rencontté par deux frégates efpagnoles
D
�] 0 11 11. N Ji. L
42.0
penrables avec les améliorations, s'il y échoit, laquëlle dé.;
duétion aura également lieu pour la refiitution des fruits
ci-deffus ordonnée; condamne la Dame de Champclos, époure
du fleur de Rafpaud, & les fleurs de Gaffaud & Robert
aux dépens. Ecrivant Mes. Barlet & Caire. La Dame de
Rafpaud & les fleurs de Gaffaud & Robert s'étant pourvus
au Conreil de Sa Majefié en caffation de cet Arrêt, Ont été
,déboutés par Arrêt dü 14 Février 1780.
ARRÊT
LI.
a
Le va!f}è;u affrété mois étant arrêtiL par ordre fou verain ,
le paiement du nolis efl-il !UJPendu pendant la durée de
l'Arrêt?
En efl-il de même s'il s'agit d'une prife?
Ans le mois de Septembre 177~ le Capitaine Seren
affréta le vaiffeau Le Septimane aux fieurs Dangaliere
& Compagnie, au nolis de 6000 Iiv. par mois. Par le
concrat d'affrétement le Capitaine s'obligea de faire voile
pour Alger, & delà à Conf1:antinople, pour y configner
les marchandifes, èffets & paffagers que les correfpondans
des affréteurs jugeroient à propos d'embarquer. Le Capitaine Semz reçut dans fon bord l'Envoyé du Dey d'Alger,
chargé de porcer les préfens au Grand Seigneur; il fit enfuite voile pour Conf1:ancin-ople. Lorfqu'il fut quef1:ion de
faire fon retour, l'Envoyé voulut le charger de munitions
de guerre; le Capitaine s'y refufa, à caufe de la guerre déclarée encre l'Efpagne & la Régence d'Alger; il confentit
à charger de mâtures, ainfi qu'il l'avoit promis par le
contrat d'affrétement; mais ce ne fut que fur un ordre,
<Ju'il chargea du fer, du fil & de toile, quoique ces marchandifes puffenc être regardées comme effets de commerce.
Ce bâtiment fut rencontté par deux frégates efpagnoles
D
�nu
PALAIS
DE
PROVENCll.
'421
'qui s'en emparerent, y mirent garni fan , & le conduifirent
à Carthagene où l'on fit décharger la cargaifon. Le Capitaine réclama le,navire & la cargaifon comme n'étant pas
de bonne prife; ils lui furent rendus après quelques mois
de détention. Il tranfporca fa cargaifon à Alger, & fit fon
.retour à Marfeflle. Plufieurs ·matelots de l'équipage demanderent le paiement de leurs falaires; le Capitaine Seren
s'y refufa, :filr le fondement que la veuve Dangaliere &
,Compagnie lui contefioient fon fret pèndant tout le te ms
de la détention du navire à Carthage ne. François Rouffoulin , un des matelots, fe pourvut au Lieutenant de l'Amirauté de Marfeille par requête du 16 Décembre 1776, &
demanda contre le Capitaine Seren la condamnation de la
fomme dè 378 liv. pour le montant de quatorze mois de
fes falaires , avec intérêts tels que de droit, dépens & cont-rainte par corps; il demanda auHi le paiement du viq.
dont il avoit été privé pendant trois mois & cinq jours,.
& des journées employées à un travail auquel l'équipage
n'étoit pas obligé. Le Capitaine Seren crut devoir faire
dépendre la demande de l'équipage de celle qu'il forma
comre la veuve Dangaliere & Compagnie en paiement du
fret convenu à 6000 liv. par mois, depuis le jour du départ jufqu'au jour du déchargement à Alger. Plufieurs matelots au nombre de vingt intervinrent dans l'infiance, &
. par Sentence du 16 Mai 1777 le Lieutenant fit droit à la
demande des matelots contre le· Capitaine, & à celle du
Capitaine envers la veuve"'Dangaliere & Compagnie, le
tout avec dépens. Appel de la part de la veuve Daogaliere.
On difoit pour elle, qu'il s'agilfoit d'un Arrêt de Prince,
& nullement d'une prife, & conféquemment qu'on fe trouvoit dans la dirpofition littérale de l'art. 16, titre du fret.
La décifion de cet article dt générale, & comprend tous
les cas où par le fait d'une puilfance humaine, le voyage
a été fufpendu. L'Arrêt de Princ.e s'opere dès que le
vaifreau efi arrêté par ordre fouverain dans le cours de fon
,voyage. Ce fut ici l'aèie d'un Prince ami qui n'avoit pas
�·p.:l.
"
Jou RNA L
dejfein de faire tort à fon allié, mais feulement de prendre
les effets de fon ennemi contenus dans le navire neutre.
La navigation du Septimane ne fut dÇlOC fufpendue que par
un umple Arrét de Prince, & le cours du nolis fiipulé à
6000 liv.par mois fut également fufpendu en conformité
de l'arc. 16 , tit. du fret. Ce nolis n'avoit été promis que
pour le temps d'une navigation libre & ordinaire, & non
pour le temps d'un .Arrét occafibné par force majeure.
Le Capitaine Seren &. les ueurs Grenier fes armateurs
s'étoient comme attendus à un pareil' événement. Voilà
pourquoi ils avoient Hipulé un nolis à raifon de 6000 jiv.
par mois, & voilà encore pourquoi, lorfque le Capitaine
fut à Confiantinople, il eîlt voulu réiilier [on contrat par
la crainte d'un danger qu'il n'avoit pas bien envifagé dans
le principe., mais qui avoit cependant fait la matiere de la
convention; danger qui lui étoit propre, en vue duquel on
lui avoit promis un bénéfi,ce confidérable, & qu'il ne pouvoit par conféquent rejetter filr autrui. Le Capitaine Seren
étoit obligé par la force de fOI) engagement de s'expofer
à up uniftre dont il n'avoit d'autre garantie que l'efpoir
de la récompenfe promife. Ce unifire efi arrivé en pljrcie;
il efi donc pour le compte du Capitaine Seren, qui dl:
~on recevable à le rejecter fur autrui, parce qu'il étoit payé
pour l'ejfuyer. Ce fut une grace qu'on \ui fit à ConUantinople, lotfque l'Eqvoyé confentit de borner le chargement
à des marchandifes qui n'étoient pas de contrebande proprement dite; car s'il eût thargé de poudre, des canons
& autres armes, ainu qu'il y étoit obligé, fon voyage eût
été rompu fans retour & fans efpoir' d'aucune efpece de
nolis en tout ni en parcie.
L'article 16 du. titre du fret porte que u le vai1feau dl:
arrété par ordre fouverain dans le cours du voyage, il ne
•fera dû ni fret pour le temps' de fa détention, s'il dl:
affrété au mois, ni augmentation de fret, s'il eH loué au
voyage; mais la nourriture & les loyers des matelots pendant le temps de la détention fe~ont réputés avaries. Il
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE;
'423
e!l: aifé de comprendre que cet article ne renferme pas une
décifion particuliere qui doive fe borner au feul cas de
J.'arrêt de Prince proprement dit. Le, principe qui a diaé
cet article comprend tous les autres cas où dans le cou rs du
voyage, - la navigation e!l: arrêtée, retardée ou em pêchée
par le fait d'une pui1fance humaine.
Dans tous ces cas, dont l'effet e!l: le même, & qui doivent par conféquent être tégis par la même regle, il n'e!l:
dÎl aucun fret pour le temps de la détention. Ces dernieres
paroles, dont l'art. 16 fe fert, font génériques. Le vai1feau
n'eU pas moins détenu par la prife que par le fimple arrêt.
S'il eU enfuite relâché, peu importe que la pui1fance qui
avoit fufpendu, retardé ou interrompu le voyage, l'eÎlt fait
dans l'idée de prendre le navire ou de l'arrêter feulement.,
S'agi1fant ici d'une interruption de navigation par le fait
d'une pui1fance humaine, le Capitaine n'a aucun fret à demander, fi l'inte-rdiaion a eu lieu avànt le départ, & il doit
fe contenter de la demi, fi l'imerdiaion eU furvenue de- ,
puis le départ du navire; mais cette demi fera déterminée,
foit d'après la fomme totale fiipulé~ dans la charte. partie
-pour le navire loué au voyage, foit d'après l'efpace de temps
qu'il eût fallu employer pour que le navire affrété au mois
pùvînt 'au lieu où il devoit aller.
_
Les mots par forc~ majeure qu'on trouve dans l'art. 8, tit.
,des chartes parties, doivent s'entendre d'une force majeure
opérée par la pui1fance humaine, &. nullément par venes &
tempêtes. C'eU de quoi on eU convaincu, en conférant cet
art. 8 avec l'art. S du titre des loyers des Matelots, & avec
l'art. 7 du titre des avaries, lefquels parlent du navire arrêté en voyage par ordre fouverain, c'eU-à-dire pàr puiffance
11Umaine. S'il e!l: vrai que le maître & le Marchand foient
alors réciproquement tenus d'attendre, l'ouverture des ports
& la liberté' des vai1feaux, fans dommages & intérêts de
part ni d'autre, il s'enfuit que la charte partie doit ~gale
ment attendre & demeurer en l'état; ce qui peut très-fore
s'opérer, fans-qu'elle ce1fe de fLlbfifter en fon entier. La
�42.4
Jou RNA
L
chofe elt fimple dans le cas où le navire a été loué au:'
voyage; mais s'il a été affrété au mois, il faut néceffairement que le nolis foit fufpendu, autrement la progreffiou
du nolis ltipulé par mois ferait indéfinie; tOUt le dommage
ramberoit fur le Marchand chargeur;. le nolis aurait cours
& fe multiplierait pendant dix ans, fi pendant .dix ans le
parr était fermé ou le vaiffeau arrêté. Tel n'elt pas l'efprit de
cet arr. 8; il décide qué le cours des nolis du navire afFrété au
mois doit être fufpendu pendant le même temps. Les arr.
9 & [0 du tit. du fret font une fuite' de J'art. 8, tit. des
[harles parties, qui vient d'être expliqué. Si l'arrêt du navire' .
procede du fait du Capitaine, le Capitaine fera tenu des
pommages & intérêts du maître; mais fi l'arrêt ne procede
du fait ni de l'un ni de l'amre, ils n'ont aucun dommage
à fe demander refpeél:ivemenr. Le fr~t entiér fera dîz prout
juris efl, c'eft-à-dire, relativement à la diltinél:ion établie
par l'art. [6 du même titre.
Suivant le fyHême du Capitaine, il faudrait que l'affréteur
à mois qui ne voudrait pas attendre la fin du radoub, payât
le fret enrier pour amant de mois qui s'écouleraient, fait
pendant tout le temps du radoub, fait dans le relte du
voyage que le navire ferait pour parvenir au lieu deltiné.
Il faudrait que l'affréteur à mois qui voudrait attendre ·Ie
radoub du navire, continuât de payer le nolis pendant tout
le temps que le radoub dureroit. Le délabrement du navire,
ferait ruineux pour lui, & immenfement lucratif pour le Capitaine , qui aurait intérêt de traîner le radoub en longueur.
Mais fi le vaiffeau ne peut j;1as être raccoinlUodé, & que·
le maître ne trouve à louer aucun autre nàvire, .comment
fera-t-il payé de fon nolis flipulé à mois? L'arr. I I du
titre du fret réduit le fret à proportion de ce que le voyage
fera avancé, ce qui indique que le fret à mois aura ceffé
de courir dès le moment de la relâche pour caufe de ra-·
doub, & que le Capitaine ne pourra prétendre que le free
dû jufqll'alors. Le retard qu'on effuye en pareille occafion
dl; çonlidéré proçédec du fait de l'homme i par la même.
.
cai[Qu
�•
•
DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
41)
raifon, fi le vaHfeau ne peut être raccommodé, le Capitaine
en obligé d'en louer ioceffamment un autre; s'il n'en peut
trouver un autre, c'en. par grace que l'Ordonnance lui accorde le fret à proportion de ce que le voyage fera avancé;
- mais cette proportion ne doit excéder ni Je- lieu ni l'epoque
de la relâche.
Lorfque la chofe en fauvée du naufrage, lorfque le navire
arrêté recouvre fa liberté, lorfque le navire pris en racheté
ou gratuitement relâché, le contrat de nolifement qui avoit
été rompu ou interrompu par le !inifire fe renouvelle, in[tauratur, fuivant les termes de la loi ')1,ff. mandati ; il reprend
fa premiere nature; mais l'interfiice n'efi pas effacé; la lacune rene pour le compte de qui il appartient. Le cha rgeur en privé de fa man;handifequi a dépéri dans l'imervalle.
Le maître en efi pour (on temps perdu & dépenfes acce(foires .qui peuvent former la matiere d'une avarie groffe ,
(uivant les textes & les principes rappellés par Me. Pothier
dans fan traité des chartes parties, tom. i , pag. 398.
On répondait pour le Capitaine Seren , qu'il étoit quefiion
d'une véritable prife, & non d'un arrêt de Prince, & que le
relâchement de la prife opere cet effet, que le fret doit ê tr~
payé en entier. Quand le Capitaine a refié à Carrhagene,
ce n'a été que pour l'intérêt de la cargaifon; il eH par
~con(équent jufie que fan (éjour à_ Carrhagene ayant profiré
à la cargaifon, la cargaifon le dédommage des frais de fan
féjour. La prife jufle ou injufie n'ayant été opérée que fur
le foupçon que la marchandife appartenait à la Régence
d'Alger, & par conféquent en haine de la cargaifon, c'en:
à la cargaifon à payer tout le dommage.
- Qu'eH-ce que l'arrêt de Prince? C'efi une !impie détention dans un port fournis à la domination d'un Souverain;
c'efi la défenfe de forrir d'un port; mais une défenfe qui
n'enleve au Capitaine ni le commandement de (on navire,
ni (on autorité fur fon équipage, ni Je droit de continuer
fa roUle, quand l'obnaéle fera une fois levé; c'efi proprem~nt la fetmature d'un port & un danger de la terre proAnnées t 775 & fuiv.
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1 0 t1 11. N A L
cédant du vouloir du Prince, qui fe vérifie dans cette partie d!
la mer foumife à fa domination. C'eft enfin la fermature d'ua
POrt qui, fans rompre le voyage, ne fait que le fufpendr~.
L'arrêt de Prince procede ou de l'intérêt même du Princé
qui forme l'arrêt, ou de cet intérêt de fUr\'eillance & de
prot~étion qu'il doit à fes fujets. Aina le Prince dans le port
duquel on fe trouve, craint qu'on n'aille donner des avis;
il a befoin du chargement ou· du navire; le Capitaine n'dl:
pas muni de toutes les pieces qu'il faut à fa navigation; il
manque aux formalités néceffaires à fan arrivée; il porre des
marchandifes prohibées; il trouve dans le port un vaiffeaù
ennemi qui veut pourfuivre..[a fonie; il n'a pas acquitté le
droit d'.ancrage, ou il a malverfé: dans tous ces cas il y a
arrêt fouverain' ou détention, qui eft un véritable cas fortuit, fi l'on veut; mais cette détention n'a rien qui fe ref.
lènte de l'hoftiiité ou de la guerre; il ne faut donc pas la
comparer à la prife.
La prife au contraire, c'eft l'appréhenfion d'un navire
qui appartient ou que l'on croit appartenir à nos ennnemis;
c'eH un aéte d'hoHiliré, un fait de guerre qui, au lieu de
fe vérifier dans le po'rt, comme l'arrêt ou la détention,
fe vérifie au contraire en pleine mer. Que la prife fait juHe
ou injuHe, par cela feul que l'on s'empare du navire, &
qu'au lieu de n'employer que l'autorité, on n'emploie que
la force fur le domaine de la mer, il y a néceffairement
prire. Aina, quand l'Ordonnance parle d'arrêt, fait avant le
départ, fait pendant la route, elle n'entend jamais parler
que de cet arrêt fouverain qui fe fait fans guerre & dans
les' ports. Cela eH fi vrai, que l'on voit que l'art. fI-, tir.
des alfùrances, dit: Ji le vaijJèau dl arrêté dans un de nos
ports; l'arr. 8 du tir. des chartes parties affimile l'arrêt
de' Prince à la 'fermature des ports, & tous les ,Commentareurs parIane de l'arrêt de Prince fe réferent· à l'arr.
8 du tir. des chartes parties, qui dit:Ji les ports font fttilement
fermés. Aina, quand l'art. 16 du tit. du fret dit: fi le vaijJèau
t:jl arrêté par ordre fouverain dans le ,ours du voyage, ces mots, ,
�DU
PALA~S'
D-B
PROVENCE.
427
Jlahs le coursdiJ voyage, ne s'entendent & ne peuvent s'entendre
que lorrque le navire eR détenu dans un port où il a touché
pendant le cours de fa navigation. C'eR auffi l'obrervation
que l'on trouve dans le Guidon de la mer, chap. 7, n. 6;
dans le Coutumier fur les alfurances d'Amlterdam, n. 8 ;
dans Valin rur l'art. 16 du tir. du fret, & tom. 2, pag. 103.
Il Y a cette difFérence entre l'arrêt & la prire, que l'arrêt
ne fait que furpendre la navigation, & la prire rompt le
voyage; que l'arrêt' ne dépouille ni le Capitaine ni l'affréteur, .& la prire invefl:it la puilfance {aililfante; que l'arrêt
de P.rince ne. fe vérifie que pendant la 'paix & dans des intentio!ls de paix; au lieu que la prire efl: un fait de guerre,
& qui ne fe vérifie que par rapport il la guerre. Que la prire
foit jufte ou injufte, rien de plus indifférent; c'eH. roujoms
.une prife. C'eR pour cela que l'on vort dans toutes les polices d'alfurance, qu'en prévoyant le cas de prire, on ne
manque jamais d'ajouter: foit jufl:e ou injuHe; que les
Auteurs remarquent le cas 011 la prire a été fJite ab amicis.
( Cara-Regis, dirc. 1., n. i [8; Targa, pag. 223; le Guidon
de la mer, chap. 7, n. 1; Roccus, de navi6us & naulâ, pag.
333 & 33)' )
Il eR donc vrai que le vailfeau Le Septirnane ayant été
arrêté en pleine mer par deux frégutes erpagnoles, fur le
fondemene que la cargairon étoit de contrebande, ou dumoins qu'elle étoit defl:inée à la Régence d'Alger, a été
véritablement pris plutôt qu'il n'a été détenu, & que quoique la failie ait été enruite fou levée , la prife n'en avoit pas
moins été complette, & que par conféquent c'eR une dérifion de la confondre avec l'arrêt de Prince.
On doit le diœ avec d'autant plus _de confiance, que le
Parlement de Provence avoit, par deux' Arrêts folemnels, fixé
cette différence. Suivane l'Ordonnance, en fait de prife, on
doit faire l'abandon dans les quatre mois portés par l'arr.
48; & en fait de prife, ne pas fàire Je".délailfemem dans ce
délai, c'eft y renoncer:; quand au contraire il n'y a qu'arrêt
de Prince, l'on a fix mois pour faire Je délailfemept, ruivant l'arr. 49.
H h h 2,
�42S
10U~NAi
D'après ces deux difpoutions, voici ce qui en arrive:
On fait affurer des effets fur un vaiffeau Hollandois appar~
tenant à un Fran'i0is en Novembre 1756, c'ell:-à-dire dans
le .temps de la guerre; le navire ef!: pris par les Anglois;
les Etats généraux le réclament, ainu que la cargaifon, &
en attendant l'affuré laiffe paffer les quatre mois de l'arr. 48 j
il vient cependant dans les fix mois de l'arr. 49 faire fon
délaiffemenr. Delà s'éleve la quef!:ion, u les Anglais s'étant
'emparés du vaiffeau hollandois, avec lefquels ils n'étoiènt
point en guerre, il Y avoit prife ou arrêt de Prince. Deux
Arrêts de la Cour rapporrés par Valin, rom. 2,' pag. 113
& 117' rendus les 28 & 30 Jqin 1759, déciderent que cerre
,eÎpece de détention de la part des Anglais, faite en pleine
mer & pour caufe d'hoHiliré, dégénéroit en prife, & que
faute d'avoir fait le délaiffemellt dans les quatre mois, l'af·
furé n'y éroit plus recevable.
Il ef!: cerrain qu'à raifonner principe, toute prife qui eil:
déclarée injufl:e, devroit donner lieu à des dommages & intérêts, & que l'on devroit retrouver dans ces dorpmages &
intérêts la juGe indemnité du ma1tre & du chargeur; mais
malheureufement il l'eil: auffi que non feulement les puiffances dont les vaiffeaux ont arrêté des vaiffeaux neutres
injufl:ement, n'accordent ni dommages & intérêts, ni indemnité; mais que même lorfque les prifes n'ont été faites
que par les armateurs, on n'en accorde, comme le dit Valin,
rom. 2, pag. 31 L , que dans le feul cas qu'il n'y a abfolument rien qui foit capable d'excufer le corfaire; l'intérêt ou
la politique des Nations a diél:é cette regle fâcheufe, fi l'on
veur, pour le commer'iant, mais nécelfaire à l'intérêt général des Rois. Soumettre les armateurs à des dommages
& intérêts, ce feroit ralentir leur zele; ce ne feroit plus
porter au commerce de l'ennemi le préjudice qu'ils leur cau-{ent.
Dès 'que l'on ne peut rien arrendre de la puiffance fai.
iiffante, quelle regle doit-on prendre pour le- fret? Fapt-il
cominuer de le payer pour .les mois de détention? Il eil:
�nu
PALAIS
DE
419
P;6VENCIi:
tettain qu'il faut le payer, rO. parce que le contrat d'alfré.
cement ayant été fait au mois, on doit payer amant de
mois qu'a duré le voyage;
parce qu'il n'y a aucune
Loi, aucun article de l'Ordonnance qui dife qu'en fait dê
prife, enfuite relâchée, le fret au mois ceffera de courir,
comme en fait d'arrêt de Prince; 3°.' parce que le faie
d'arrêt de Prince qui opere la fufpenfion du fret, fe détermine par toute autre regle & par tout autre principe que
la prife: on ne fait pas fi l'arrêt de Prince
déterminé
à rai fan de la cargaifon ou à rai fan du navire, & dans
le doute tout doit être fufpendu; aujourd'hui il ell: convenu que la prife n'eut lieu que par rapport à la cargaifon.
,L'<lrrêe de Prince' opere une fufpenlion de voyage; & la
prife, quand elle
enfuite relâchée, ne' fait que le pro•
longer. Enfin il y a un article précis aans l'Ordonnance,
qui dit que quand la prife fera relâchée 1 le prêt fera relâché en entler;- c'ea· l'art. 19 du tir. du fret: Ji le navire
& les marchandifes, dit cet article, [ont rachetées, le. maître
fera payé de [on fret jufqu'au lieu de la prife, & même de
[on fret en emier, s'il les conduit au lieu de leur ddlination,
en contribuant au rachat.
Quand le Capiraine a reaé à Carthagene, ce n'a été que
poue l'intérêt de la cargaifon. Il
donc juile que fan féjoue à Carthagene ayam profité à la cargaifon, la cargaifan le dédommage des frais de fan féjour. Si le Capitaine
Seren n'avait confulté que fan intérêt du moment que le
navire fut rendu à Carthagene, il eût demandé fan free
qu'on ne lui aurait pas comeHé, ferait revenu à Marfeille,
& aurait laiffé à la veuve Dangaliere ou au Dey d'Alger le
foin de s'arranger avec la Cour, de Madrid. Que les Efpagnols
lui euffem payé fan fret, c'eil ce qui ne peut pas être contefl:é ,
parce que dès qu'un vaiffeau neutre ne porte point de màrchandife de contrebande, & qu'il n'ell: par conféquent pas au cas
de la faiûe, la failie que l'on fait des marchandifes 'dépofées
dans fan bord ne doit jamais lui oecafioner la perte de
fan fret. C'ea ce qui
attefié par Valin fUr l'arr. 7 7 au
2:.
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�430
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RNA L
titre des prifes; par le Confulat de la mer, arr. '2.76, & pa:r
Bouchaud en fa théorie des traités de commerce, pag. 358.
En fait, 1°. le C.apitaine n'avoit rien à faire à Carthagene, fi l'intérêt de la cargaifon ne l'y avoit retenu; '2.0. il'
importoit à l'honneur du pavillon de ne pas laiffer entamer
c'ette partié de notre commerce avec la Régence d'Alger;
3°. fouffrir une avanie de cette nature & fans en réclamer,
c!étoit renoncer à l'exécution de nos traités; 4°. il Y av oit
à craindre une rupture entre nous & la Régence d'Alger"
tellement bien que' le Conful de France à Alger ne ceffoit
de l'écrire ;5°. gui peut douter que fi le navire avoit une fois
quitté Car.thagene, la reaitution de la carg~ifon n'eût éte
beaucoup plus difficile, pulfque la Cour de Madrid n'auroit plus
été affeél:ée de l'intérêt d'un Franc;ois réclamant dans l'un
de fes ports, & n'auroit plus vu qu'une cargaifon appartenant à fon ennemi? ennn c'étoit une fatisfaél:ion que l'on
devoit à la Régence d'Alger, & que le Gouvernement lui
avoit probablement promis, puifque M:- de Sartines avoit
donné ordre au Con fuI Franc;ois à Carthagene de ne pas
laiffer partir le Capitaine Seren fans la cargaifon, & qu'il
était néêeffaire qu'il la portât lui-même à Alger. Or, d'une
part. le 'Capitaine n'ayant reaé à Carthagene que pour
l'intérêt de la cargaifon; de l'autre, le Capitaine n'ayant
pas m~me la faculté d'en fortir fans la cargaifon, n'eH-ce pas
,une dériiion que la' préfence du navire à Carthage ne ayant
ou .déterminé ou du-moins a<:céléré la refiitution de la cargaifon, la veuve Dangaliere ne veuille pas payer le fret pendant ie féjour à Carthagene?
La prife ayant été opérée en haine de la cargai(on, c'ea
à la cargaifon à payer le .dommage. Tel, ea Je drojt commun : flui damni caufam dat, damn,um dedif{e videtur; & delà
j'obligation de le réparer. C'eH en(uite de çeprincipe que
les Auteurs maritimes nous di[ent: Ji propter inimicitias Magif/ri, mercatores dam'nuIT/. fenferint, c'ea au maître li le réparer. ( Roccus, de navihus '& naul., pag. 69; Str.acha, de
navib., par,t. 3, n. 40,,) Tel en e)Jcore le principe rappellé
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PALAIS
DB
PROVENCE;
& 10 de l'Ordonnance au litre du
4-3t
tIans les art. 9
fret. Si le
navire efi arrêté par le fait du marchand afFréteur; s'il l'efl: par.
Je fait du maître, il efl: jufie que le dommage caufé en
haine de quelqu'un foit fupporté par celui en haine de qui
il a été occafioné, parce qu'au vrai c'efi moins à celui qui
Je foufFre qu'en vouloit l'ennemi, qu'à celui qui en élOit
l'objet. On trouve ce principe établi dans la Loi merces, §.
culpœ, if. locati; dans le Préfident Faber, déf. 24, cod. eod.;
dans Mr. de Clapiers, cauf. 14; dans Mr. de St. Jean,
décif. 7, & dans Boniface, tom. 2 , parr. 2>, liv. 2, chap.
t, pag. 221. On ne peut contelter que la prife , lOute in'"
jufie qu'eI(e élOit, n'ait été occalionée que par rapport à
la cargaifon,.& que par conféquent le dommage qu'a fouffert le Capitaine n'ait été en haine du propriétaire de la car"
gaifon.
L'équipage propofoit les mêmes moyens de défenfe que
le Capitaine Seren.
Par Arrêt du 7 Juillet 1778, au rapport de" Mr: le Con[eiller de Pazery de Thorame, la Sentence fut confirmée,
avec dépens. Ecrivant Mes. Emerigon, Pafcalis & Selion.
ri!
'
.
"".
ARRÊT
LI!.
En matiere de prefcription acquife par la poffiffion, on ne preferit qu'autant qu'on poffide, & une premiere œuvre prefcrite
l!e peut point en autorifer une feconde, la fervitude n'attri1JUant point la propriété du fonds qui la fupporte.
'F-
Rançois Truc potrédoit dans le lieu du L~deux maifans contigues, ayant l'une un jardin clos de murailles,
& l'autre .un relarguier; dit vulgairement patio En .I 108 ,
François Truc ma-riant un de fes fils, lüi donna dans fort
comrat de mariagè" la maifon & le relarguier en dépendant,
avec claufe exprelfe que le pere fe réfervoit la fa,ollé d'ex~
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�'432
Jou
RNA L
hauffer le mur diviroire, lequel lui appartiendroit en pleine
propriété. En 17 I I , Jore-ph Truc, fils & donataire de François, vendit à la DlIe. De more la m'liron & le relarguier
entouré de murailles que fon pere IUT avoit défemparé par
fon contrat de mariage, avec fes droits & appartenances.
Quelques années après cette vente la DlIe. Demore fit bâtir
& ·appuya fes poutres fur la muraille du jardin de François
Truc; elle exhauffa même ce mur d'environ un pan de hauteur, & l'occupa jufqu'à une certaine longueur. En 1764 le
fleur Soleilhet, repréfentant la Dlle. Demore, prenant pour
!Jn aél:e de propriété l'édifice confiruit, crut qu'il avpit la
faculté de l'accroître & de pouffer l'élevation & la longueur
du mur qu'il y pratiqua. François Truc forma oppofition fur
les œuvres, tant anciennes, qu~ nouvelles; il fe départit enfuite des anciennes, & fe borna aux nouvelles, attendu le
long efpace de temps. Le Bailli du Luc par fa Sentence
ordonna un rapport de l'état ancien & nouveau, à l'effet
de vérifier e'l quoi confilloient les œuvres anciennes faites
depuis au delà de trente ans avant la demande, & en quoi .
confilloient celles faites depuis moins de trente années. Appel de la part du fieur Soleilher.
,
On difoit pour lui, que l'aél:e de vente fair à la DUe.
Demore portoit que Jofeph Truc vend une maifon & fueille
parderriere entourée de mur'lilles', fans aucune réferve. Les
murailles faifoient donc partie de la vente; les murailles
foric vendues comme la fueille & la maifon. Tous les jours
on vend un jardin clos, un jardin entouré de mu.railles, une
propriété entourée d'une haie; la haie, les murailles font
partie de la vente; jamais perfonne ne -1''1 conte né. Jamais
dans la vente d'un objet entouré de murnilles, on n'a regardé l'énonciation en(our4 de murailles comme dénotant les
confronts.
En donnant à fon' fils la m'liron voj[jne de celle qu'il occupoit, confronta ne fon jardin, Franc;ois Truc a l'attention
de fe rérerver le pouvoir de r~haulfer la muraille qui fait
la réparation de la m~ifon & jardin, & de déclarer qu'eUe 'lu~
appartieo~
�DU
PAL AIS
D H PRO V Elie E.
433
lippàrtient en propre, parce que fans cette réferve; cette
muraille devenoit propre à fon... fils, attendu que c'étoit le
jardin qui étoit donné pour confront. Par cela même que
Jofeph Truc donne pour éoilfron~s des objets qu'il vend, le
jardin de fon' pere, il eil: prouvé que le mur de féparation eil: vendu; ce mur eft dans l'objet confronté, & en
fait partie.. Les contrats (ont de droit étroit; on n'y peut
rien (uppléer. Ces mots entourée de murailles (eroient inutiles & vuides de fens, s'ils ne qualifioient pas la cloaque
vendue, & n'y comprenoient pas les murailles; il faut
toujours expliquer les aél:es, ut aliquid operentur.
. S'il falloit recourir à quelque interprétation, pénétrer
l'intention des parties, c'eCt dans l'exécution de l'aél:e qu'il
faudroit les chercher, comme 'dit Decormis, tom. 2 ,
_ col. 940 & 989. La DlIe. Demore jouit des murailles qui
entouroient (a cloaque, comme de· la cloaque même & de
la maifon- qu'elle avoit achetés. Elle jouit du tout comme
lui étant propre; elle fit bâti r en 1720 (ur la muraille
litigieufe Si elle n'étendit pas fon édifice fur toute la muraille, c'eft qu'elle n'en avoit pas befoin, ou qu'elle ne
le voulut pas; mais elle n'agit pas moins en maÎtreffe, en
propriétaire de toute la muraille; fes fucceffeurs ont toujours
<Igi comme tels; ils ont fait fur cette muraille tous les aél:es
de véritables propriétaires; jamais perfonne n'avoit formé
la moindre plainte. La DlIe. Demore avoit dpnc acheté
& eu l'i'ntentlon d'acheter la muraille dont il s'agir. Les
lieurs Truc reconnoiffoient tellement la vente de celte
muraille, qu'aucun d'eux n'y a' exercé des' aétes de propriétaire, & que pendant cinquante-trois ans aucun d'eux
n'a ofé réclamer. Tout concourt à prouver la vente de la
muraille litigieufe & l'intention des parties, quia Jlipulatori
liberum fuit verba latè concipere, dit la loi quidquid ad/lringendœ 99, if. de verbor. jignif.
La poJfeffion de la Dile. Demore & de ceux qui la repréfentent,1 jointe au titre, mérite certainement faveur.
Rien n'efl plus facré ,dit Cochin, tom.
pag. 18, que la
Ann~~s 1775 G~ jùiv.
Iii
,
l,
�•
:434
Jou lt N A. L
prefcription qui tend il mettre un titre légitime à l'ahri de touté
atteinte'. Un poJ{eJ{eur de Donne foi, dit d'Antoine , pag.
314, mérite d'être favorifè. La maxime Cantflm prœfcriptum
'luantùm poJlèifum n'a lieu qu'en matiere de fervitude, &
vls~à-vis du po1feffeur de mauvaife foi; ce font les obfervations de Mr. de Clapiers; de Decormis, tom. l , col.
869, & toln. 2 , col. 890; de Boniface, tom. 1, liv. 2,
ch. 12, & d'Antoine fur la i-egle 136 du droit, pag. 336.
Jofeph Truc a poffédé la muraille corpore & animo; il a
réuni la po1feffion naturelle à la po!fellion civile; il a titre;
il a poffellion; il eH: donc à l'abri de toute attaque. Comme propriétaire & po1feffeur depuis 177 l , Soleilh~t a pu
difpofer ,de fa mur"iIle à fon gré, bâtir fur taure fan
étendue, & élever l'édifice qu'il avoit conflruit en 172.0 ; fi
le fieur Truc en fouffre un préjudice qui puiffe exciter fes
plaintes, c'efl: l'aéHon en dommages-intérêts qui lui compete, & non celle en démo'lition, fuivant Dunod, des prefcriptions, part. 2, ch. 2, pag. 129.
On répondait que la réferve , ou, pb ur mieux' dire, le
droit de propriété efl: clairement fiipulé- dans le contrat de
mariage de 1708. C'eH le pere qui difpofe ; c'efl lui à qui
appartiennent les deux maifons yoifilleS féparées par une
muraille divifoire qui laiffe d'un côté le relarguier ou fueille,
& renferme de l'autre un jardin contigu à la maifon refrante au fieur Franc;ois Truc pere. Comme maître abfolu,
il étoit en fan pouvoir de faire le partage fuivant fes defirs:
c'efl à la fuite de cerre faculté pléniere ,qu'il confentit à
donner la maifon & le relarguier. Rif'n ne juHifie mieux:
fon intention de p-révenir lesdi,fficultés qui pourroient' naître'
au fujet de cette muraille qui féparoit le relarguier du
jardin, que celle de faire inférer & clairement diflinguer
dans le même contrat, qu'elle continueroit d'appartenir à
la mai.fon ou au jardin que lè pere garda.
Dàns l'atte de vente de 171 l il\ efl: dit que le fieur Jofeph
Truc vend une maifol1 & fueille entourée de m:lraiIles; &
aprè~ avoir défigl1é le quartier de l'emplacement, 'le ven,:,:
�'D"U
PAL'AIS
DE
PROVENCE.
435
(Jeur qui ne veilt pas aliéner plus que ce qui lui appartient,
déclare que c'eO: la même que fon pere lui a défemparé
par fon contrat de mariage. Il y a pJus: les confronts indiqués font pour la maifon, la riviere, la rue, maifon de
François Truc fon pere. Pour la cloaque, elle eO: confrontée
de cette maniere, ladite fueille parderriere & jardin de fondit
pere, &c. Les mots, maifon & jùeille entourée de murailles,
ne fervent qu'à marquer l'état de la fueille, pour en indiquer les confronts, & pour atfurèr que cette cloaque étant
le feul objet défigné, il étoit conféquemment le feul qui
/lût participer à la vente; mais les murailles devenant yifiblement les confronts, ne peuvent faire partie de l'objée
confronté, finon touS les confronts fer'oient cenfés compris dans la vente.
Il eO: de principe que les œuvres déja prefcrites ne fauroient aurorifer & faire maintenir l'exi!l:ence des nouvelles.
Il y a deux fortes de po!feffion qui ope~ent la pre(cripcion, la civile & la naturelle: la civile eO: définie par Cujas,
detemptio quœ co;iflat jure & animo domùzi, quand celui qui
po!fede tient la chofe en force d'un titre qui lui en dévolute le domaine. La naturelle confiHe à l'appréhenfion
corporelle & au faifi!fement de l'effet, quœ corJ':fiit in corpore. La po!feffion civile, dépendante d'un titre, eH préfilmée par la volonté de 'vouloir po!féàer "animo eas 7LaDendi ,
& par ce de!fein de conferver la chofe, quoiqu'il n'en joui!fe
point ac1u par des faits extérieurs & yifiblès. Le feul titre interprete là volonté qui équipolle à la po!feffion. C'eH de ces
deux branches que dérive l'aaion de' po!féder & de prefcrire, animo poflidendi. '
Il ne faut pas confondre les 301:iennes & les nouvelles
œuvres faites filr la même muraille; On convient que la
DlIe, Dernore ayant poffédé corporellement deux cannes
longueur, & environ deux pans hauteur de la muraille ,pendant le laps de trente années, elle en a prefcrit 'la propriété reHreinte à l'objet de fa pofftffion, tantltm prœf- .
criplllm 'luantùm poffijJùm. Mais n'ayarit aucun titre, le
1 i i 2.
...
�436
Jou RNA L'
_
fleur Soleilhet ell-i1 cenfé avoir poifédé animo vel corpord
les quatre cannes du mur reHantes libres? S'il parole certain que les quatre cannes dè la muraille libres n'ont été
occupées que depuis peu, il s'enfuivra néceifairement qu'il
n'a jamais exiflé de poifeffion corporelle, ou qu'il n'a point
prefcric cette partie nouvelle.
Faire fervi.r les anciens ouvrages pour en induire de èlOU'"
veaux, c'eH heurter les principes les plus fains. Une -(ervirude n'arrribue' p(}inc la propriété du fonds, qui re/1:e à
celui qui la fupporre, & une premiere fervitude ne fauroit
en produire une feconde, odiofa funt reJlringenda. Il faut,
pour que la feconde foit égale à la premiere, qu'elle paroiife fous le même efpace de trente années requifes par
la loi. Tout ce qui n'a pas acquis ce terme de la prefcri pt ion , ne peur fubfifter, & la premiere ne peut favorifer
la feconde; les loix & les Auteurs font unanimes fur ce
point. (L. fi chm meus, if. fi fervüus vindicetur; Paul de
CaHro fur cette loi; Surdus, conf. 387; Dun,od, des pret:
criptions, pag. 23 & 299; Boniface, tom. l , ,pag. 146 &
fuiv.; Decormis, tom. 2, pag. 280.) Parmi les Arrêts qui,
ont confirmé cette maxime, il filffic de citer celui du 26
Juin' '1766, rendu au rapport de Mr. de Boades, contre
le fieur' de Rouafe de CanlJe~, qui avbit fait ouvrir une
feconde fenêtre en la rpêrne forme qu'il en polfédoit une;
vifant fur un fonds voifin, avec des accoudoirs à hauteur
d'appui & des- contre-yens en dehors. L'Arrêt décida que
l'exiHence de la premiere fenêtre étant une fervitude recpnnue, ne pouvait autoritèr le propriétaire à en introduire
une feconde, & il fut fournis à ferm.er. Il n'y a peut-être
pas dans le droit une regle plus con Hante & mieux fuivie.'
,Envifager la premiere œuvre capable d'en autorifer. une
feconde, c'eH une erreur démontrée; ce font-là autant de
faits diHinél:s qui fe régiifent féparémenr.
Arrêt du 14 Juillet 1778, au rapport de Mr. le Con-'
feiller de la Beaume, qui confirme la Sentence avec dé,,;
pens. Ecrivant Mes. Pellicot de Seillans & Reinaud.
"
�ARRÊT
L J J J.
Sur la maniere de fèparer & d'encadajlrer les Mens- roturiers
polfèdés par le Seigneur dans' l'étendue de [on Fief, & qui
Ile peuvent être emplacés d'après les titres d'acquifition qui
[e trouvent égarés. '
.
-LA maifon de Call:elane poŒedoie en r '>37 le fief de la
Marere, & le cancon ou devens appellé Taulanne qui
en écoie une dépendance.
Le ri Novembre r )88 Antoine de Cal1:elane vendit le fief
de Taulanne à Guilhen de Lyle au prix de 9000 liv. Un rapporc de future précaution fut faie coue de fuite; on y trouve
que dans ce nouveau fief, des emphytéotes poffédoiene des
biens roturiers. Guilhen de Lyle avoit commencé avant
1600 d" faire des aC!JuiGtions dans fon fief de Taulanne;
les biens qu'il acheta furent fucceffivement allivrés dans les
cadall:res de 1600 & de 1633, avec ceux que fes li.lcceŒeurs
acquirent de leur côté.
Des contel1:ations étant furvenues, elles furent terminées
par une tranfaétion -du 4 Sepeembre r 600, & le Seigneur
de Taulanne qui à cette époque' ne poffédoie des biens que
dans fon fief, déclara que pour tous les arrérages de tailles
par lui dues à la Communauté, impofées jufqu'd la pré[ente
année exclure, il payeroit la fomme de ro écus dans quinze
jours prochains, & promit de payer à l'égal 'des autres pour
les tailles impofées l'année d'alors. Il paroî~ par l'Arrêe de
la Cour des Aides du 13 Décembre 1639, que le Seigneur
de Taulanne avoie acquitté très-exaétement les tailles dues
à la Communauté depuis r610 jufqu'en r6'2.7' En r633
ayant été faie un nouveau cadâfire, le fleur de Taulanne en
demanda la caŒation;. mais par Arrê~ du '2.) Février r634
il en fut débouté, & il fut ordonné que le nouvel allivre"i
/
�438.
•
1
•
(0 U
l\:
N A: L
.
/
menr fait par les Experrs tiendroit, fauf à lui d'en rëcourir,
fi bon lui femblair; le recours fut déclaré immédiatement
après l'Arrét; & par une rranfaéliQn du 10 Septembre 1634,
on réduifit la core du derni~!" ~,!lIivremePt fur le pied du
cadaftre de l'année 1600, en y ajoutant, à proportion des
livres, l'augment qui fe trouve de I?un à l'autre cadaftre•..
La Communauté de la Manre, enfuit~ des divers comPlandemens & faines faires au lieur de Taulanne pour le
m~ntant des tailles qu'il devoit, prit de$ lettres de refcifion
envers la rranfaélion de 1634, cpmme contenant l'abonnemel'lt ou l'alli\lreQlent en bloc; mais par Arrêt du 13 Dé:.
j:elllbre 1939 elle filr deboutée, & l'allivrernent en bloc
fut maintenu. Comme le fieur de Taulanne ne vouloit pas
,convenir, & il n'étoit pas même prouvé que les biens féodam, qui avoient été inférés dans le cadafl:rè fùffent roturiers,
le même Arrêt ordonna un p.lus amplement oui fur la reql,lête préfentée à ce fujet par la Communauré le 2 l Mai.
Ce fur fur cer objer qu'eUe rapporta gain de caufe par
un aurre Arrêr dU'30 Juin 1'640, qui déclara les biens nobles
& féodaux- de. .la terre & Signeurie de Taulanne francs &
immunes de raille, & ordonna à cet effet qu'ils feraient
rayés du cadaClre de la Communauté, avec défenfes aux
;Idminifirateurs d'icelle de les y comprendre, à peine de
3000 liv. d'amende & autres arbitraires.
Après cet I\rrêt tie 1640, la Communauté demanda à
Pierre de L'yle de contribuer aux tailles négociales à proportion des livres cadaftrales parlées dans fon allivrement
eo bloc. Pierre .de Lyle paya pendant quelques années,
mais il fit bientôt revivre ies droits:. Guill;lume de Lyle
annonça qu'iJ oe vouloit plus contribuer aux tailles négociales; - .
& par une tranfaélion qui fur paffée le 22 AoÎlr 1648, il
, renonça à la répéti.rion des railles négociales qu'il avoit payé,
& la Communauté luï quitta le tiers de toures les impolitians qui fe feraient à l'pvenir.
Quelques années fe paffer.enr fous l'empir.e de cette rran{aél:ion, ~ le 9 Oél:obre 16,6 le Confeil délibéra de re~
�PRovENëE~
439
-nouveller le cadallre de r633, & de nommer des Ex peris
pour liquider les arrérages de raille dus par le fi~ur Guill a,.ume
de Lyle qui étair préfent à cette délibération, & qui y
opina. Par autre délibération du 18 Avril 1660, il fut
arrêté qu'avant de faire procéder par les Experts étrangers
qui avoient été nommés le 23 Novembre 16)9, il falloit faire
limiter & féparer le bien noble d'avëc le bien rorurier, & le
Confeil députa quel'J,ues partic.uliers pour 'Voir fut cela le
fieur de Taulanne. Autre délibérarion du 2f du même mois
d'Avril, contenant rapporr des Députes, qui expOferérit que
le fieur de Taulanne élevoit des difficultés fur la féparation
de fes biens nôbles & de fes biens rotu'riers, pretendant què
les premiers étoient plus conlidérables que les derniers,.
tandis que la Communauté foutenoir le contraire. Ces conrefiations furent caufe que la cote du fieur de Lyle fut
'encore portée en bloc fur le cadafire de 1660" avec cette
.différence que les acquifitions qu'il avoir faites dahs l'inler-valle, la groffirent & la porterent jufqu'à huit livres, demi
quart & demi quarts cadafirales.
Après avoir ainfi exécuté pendant plus de cinquànte ans
ce dernier allivrement des biens roturiers du fief de Taulanne, il. fut procédé à la confeaion d'un nouveàu cadafire
en 1727; quelques biens que le lieur de Lyle l'0ffédoit dans
le terroir de la Martre y furent inférés & allivres à l'infiat
de ceux des autres hahitans; mais quant à ceux de fon fief
de Taulanne, on fuivit encore d'un commun accord la méthode d'un allivrement en bloc, & le' fieur de Lyle paya
confiamment depuis 1727, fur le pied du fufdit allivrement
en bloc jufqu'en 1770, tems auquel s'éfi trouvée périmée
& prefcrite une procédure prife à la requête de la Commu. nauté contre Jacques Peliffier, ancien Lieutenant de Juge
du. lieu de la Martre, qui lui avoir énlevé [es anciens cadaf1:res, & taus les titres & documens qui étoient da!:!s
[es archives.
Ce fut à cette époque qùe Mr. de Lyle refufa pour
la premiere fois de payer les tailles dues fur les biens roo;
DU P Ai1'rs ni
•
�~~
JOURNAL
turiers qu'il polfédoit à Taulanne, ce qui obligea la. Com~
munauté de préfenter requête le 30 Avril 1773, pàr laquelle elle demanda la calfation de l'allivremenr du lieur
de Taulanne fait en bloc, & l'encadaftremenr de -Ies biens
roturiers; le 26 Février 1777, elle préfeora une feconde
.requête en condamnation & en paiemenr provifoire des tailles;
:& par une troifieme du 14 Juillet même année, elle conclut
à ce qu'il fût procédé à la vérification des enlévemens, mutilations & altérations des pieces énoncées dans fa requête
principale, & dans les fix comparants par elle communiqués.
Sur ces demandes il intervint Arrêt le 19 Juillet même
année, qui déclara nul l'aJlivremenr en bloc & le calfa, debouta la Communauté de fa demande en paiemenr provifoire
des tailles, & ordonna filr les autres fins & conelufions des
parties, qu'elles feroient plus amplement ouies pour leur
être dit droit, les dépens de cette qualiré réfervés; la Province intervinr dans cerre inftance, & les Syndics des poffédants fiefs intervinrent auffi.
'
On diroit pour la Communauté de la Ma~tre, que l'Arrêt
'du Conreil du 1 S Décembre 15 S6, & celui du 6 Juin 1643 ont
jugé francs, quittes & immunes de romes railles, charges &
impofirions, les biens que les Seigneurs polfédoierir à la. premiere de ces époques. On doit donc convenir, & comme
.le difent Mr. de Clapiers, Mourgues, Boniface, Decorrnis,
que pour prouver la rorure des biens poifédés par un Seigneur de fief, iJ fau't faire apparoir que lui o~ fes auteurs
les ont acquis après. l'A rrêr du Confeil de 1 S56.
.
D'abord on ne fait pas li le fief de Taulanne exiftoit en
1556; c'était peur-être encore un fimple quartier dépendant
du fief de la Martre, & dans ce quartier exifl:oient des biens
ou des poifeffions roturieres; le dénombremenr .fourni en
1537 par le Seigneur de ·la Martre en ojfre une prerniere
preuve. Alexis de Caflelane y déclara qu'il avoit dans fon
fief un devens appellé Taulanne, dans lequel iJ y avoit plu~eurs terres & preds des particuliers, ou à lui' propres.
AUCUD,
�D U
PAL AIS
DE
PRO VEN C E.
441
- Aucun ~hangement n'éroit furvenu en 1 ~82.; pl~s de quatre-vingt particuliers po1fédoient des biens dans le canton
de Taulanne; le rôle en fue préfenté à la Cour lors de l'Arrêt
du 13 Décembre 1639. Le fief de Taulanne étoit érigé,
mais la' qualité des biens étoit toujours la même; la vente
de ce fief faire en 1 ~ 88, le rapport qui fuivit de près,
confiaterent encore la vériré de ce fair. Alexis & Antoine
de CaHelane n'avoient pas réuni les biens po1fédés par les
'particuliers; la vente défigge les confronts du fief; 'le clos
de Jacques Peliffier étoit une des limites marquées dans
l'inféodarion.
~r. de Lyle po1fede lui feul, avec les biens nobles qui
lui furent vendus en 1688, toures les terres roturieres qui
à cette époque, & en 1 ~82, exiHoient dans fon fief de Taulanne. La tranfaél:ion du 4 Septembre 1600 prouve que
Guillaume de LyJe s'obligea de payer dans la quinzaine la
écus pour les arrérages de tailles dont il éroit débiteur, &
promit de payer à l'égal dés autres les railles qui feroient
impofées. Il pc1fédoit donc déja es biens roturiers dans
fon fief; il les avoit donc acquis de fes emphytéotes, pu;(qu'Alexis de Catlelane ne lui en vendit point en 1 ~88.
Enfin il ne les avoit point à titre de déguerpilfement & de
réunion en nobilité.
Pierre de Lyle lors de la rranfaél:ion du 10 Sept,embre
1634 traira avec la Communauré; auroit-il fait des procès,
~ormé un recours, & confenti à pa1fer cette tranfaél:ion,
s'il n'avoit po1fédé dans fon fief que des biens déguerpis
& réunis en nobilité? Il demanda la ca1fation de fon aHivrement fait dans le cadafire de 1633; il [ur débouté, fauf
à lui de recourir; fon recours fm déclaré immédiarement
après l'Arrêt; la Communauté délibéra, lui propora de payer
fes, tailles fur le pied du cadaHre de 1600, en y ajourant,
à proportion des livres, l'augmenr qui fe trouve de l'un à
l'autre cadaflre. Cet arrangemenr fut accepté le jour même,
& tout de fuite une rranfaél:ion devint la prem'e authentique
des engagemens refpeél:ifs. Les Seigneurs de Taulanne avoient
.Ann'es ~ 775 & fuiv. '
_
K kk
�'44-1.
10
1.7 11. N A t'
donc acquis une parrie des biens de leurs emphytéotes, Dans
l'Arrêt du 30 Juin 1740, l'on trouve la preuve que Pierre
de Lyle & fan pere avaient acquis des biens roturiers da-ns
leur fief en 1607 & 1610. Depuis ce remps Pierre de Lyle
paya des tailles plus fortes que celles qu'il payoit auparavant•.
En 1637, avant l'Arrêt du Confeil fur les formes à fuivre
pour la réunion des biens abandonnés ou déguerpis, Pierre
de Lyle s'étoit lailfé arrérager; le Tréforier de la Communauté lui ayant fait commandement de payer, loin de s'oppo fer à ce commandement & aux exécutions qui fuivirent,
il acquitta. les tailles dont il favqit· -être débiteur à raifon
des acquifitions qu'il avoit faites.
Les acres de partage & de tranfacrion palfés en 1642.,
1648 & 1662., prouvent invinciblement qu'à ces diffétentes
époques, toures po!térie'ures à l'Arrêt du Confeil de 1637,
de fimples particuliers, emphyréotes du Seigneur de Taulanne, avaient encore dans 10n fief des polfeffions rotuflcres..
,
Suivant le cadaGre de 1633, le fieur de Lyle ne pàyoic
la taille que fur le pied de trois livres un-quart, comme la
Cour le déclara elle-même dans fon Arrêt de 1639, &
après le cadalhe de 1660 il paya fur le pied de huit livres,..
demi quart & demi quarre; & cerre augmentation dans l'allivrement en bloc n'étoit rien moins qu'un attentat de la
Communauté. En 172.7 le mên1e allivremenc en bloc fuc
porté 11 1760 écus.
On voit dans une tranfacrion palfée le 24 Juin 1660, entre'
Guillaume de Lyle, le Décimateur de Taulanne & le Curé
de la Martre, que le premier s'obligea de payer la dîme de
[es biens roturiers à raifon du feizain, quoique fes biens nobles ne la payalfent qu'au vingtain.
La Communauté produifoit enfuite divers procès-verbaux
faits par des Juges & des Notaires des lieux circonvoifins
de la Marrre, qui con/latoient l'enlévement de deux cent
qt;inze acres concernant les .ancêtres de Ml'. de lyÎe; les
�DU
PAL-Ais
.'44').
IfE - PR'OVENCE.
i-econnoiirances paffées' par leurs emphytéote's" les acha;{
qu'ils ont faits, les baux en paie qu'ils ont reçu, -les aél:es
d'échange, les baux à ferme, les contrats de mégerie, ont également difparu; & ces excès ont été pouffés au point qu'un
cahier entier a été détaché de l'un des regiHres de Me. Aune,
Notaire à Bargeme, & un autre déchiré à moitié, parce
qu'il renfermait la tranfaélion longue & volumineufe du II
Novembre I6'j8. Il eft donc împoffibJe de s'y tromper;
des mains audacieufes ont ravi, foufirait, dénaturé touS les
titres qui ponvoient être utiles à la Communauté, & fervir
de regle dans l'emplacement des biens roturiers de Taulanne. La perte de ces titres n'eH:' point un-e raifon d'afll'anchir les biens de Mr. de Lyle; ils doivent refier affujettis
à l'acquittement ges impofitions; nulle autorité ne peut faire
que des biens qui font fciemment romriers, foient cependant poffé?és en nobilité, & l'on dO,it remplat.er, par un
autre regle de jufiice celles qu'il ef!: impoffible' ôe filivre.
Quelle ed: donc la regle que la Cour doit fui,vre pour
l'allivrement des biens roturiers de~ Taulanne? On trouve
dans la tranfaél:ion paffée en 1660 entre le Seigneur de
Taulanne & le Décimateur, un moyen facile de ré~ablir avec
juHice les droits de' laJCommunauté. Les: deux tiers' des bien}~
~ue poffede Mr: de Lyle f'Ont roturiers; ils étoÎent' fournis
au pate'ment de lâ dîme fur le pied du qùatorzieme, & Us
6nt acquis le droit de ne la payer qu'au feize; mais comme
parmi ces biens roturiers il y en avait d~ fitués au terroir
de la Martre, la Communauté confent qne [ur les denx
tiers du nef dont elle dem"nde !\ncadalheme1ht" il fait déduit une étendue ou quantité de terr.es' égale 11 celle que
Mr. de Lye poffédoit dans le terroir' de la [l,13rtre.
La Province, qui étoit intervenue dans 'l'infbnce, étaya
fa défenfe fur les mêmes titres employés par la Communauté; elle obferva "cepend~nt qu'une fois qu'n,ne Comr:nu~
naufé il jufiifié l'qd'un Seigneu r poffede des bi~ris rot,ùriers,
ta principàle obligation efi remplie. La taille de ces biens
roturiers efi acquife à l'Et-at; il faut qü'elle 'foit payée; il
K kk
2
�\t.44
,
Jou RNA L
ne dépend ni de la Province ni de qui que ce foit de les
en exempter: il n'y a qu'un feul moyen; c'ef!: celui de 'la
compenfation. L',Arrêt de 1702., qui forme la loi conftitu,tive du pays [ur cette matiete, n'en lailfe point d'autre.
L'on, convient que [uivant les regles du droit commun,
.une' Communauté qui prétend que le Seigneur a acquis quel:..
que propriété' roturiere dans l'étendue de [on fief, [,lOS en
avoir payé la taille, ne doit pas fe borner à exhiber le
titre d'acquifition, mais qu'elle doit encore en indiquer
l'emplacement, fi elle vellt l'inférer dan~ fon cadaHre, f!lrtout· fi ce~te Commu~auté ne peut op,pofer aucun légitime
motif qui la difpellfe de remplir cette obligation; mais cette
regle n'eH pas faite pour le cas où iJ s'agi~ de l'ernplace-.
ment de la malfe entiere des biens roturiers qui formene
une portion confidérable d'un fief dont le Seigneur a reconnu -de tous les temps la roture, & d,?,l}t il a payé la
'taille enfuite d'un allivrement en bloc, qui dans la fuite d~s
temps à opéré' une 'confulÎon' & 'fait perdt'e le~ titres de
vue. Ce feroit une injuHice de la part d'un Seigneur d'abufer .
en pareil cas d'une confufion qu'il doit s'imputer à lui-même,
dès qu'il a voulu vivre pendant des fiecles fous la loi d'un
allivrement
en bloc. _
Alors
fàute eH: tout au moins com)
. . .la
J
mu ne au Seigneur & à la Cpmmunauté; &, il fe.roit. odi~ll)(
que l'on \'oulôt é~ ,profit~r au préjudice de cette derniere. J
Ici l'on ,peut dirê qu'abfhaél:ion faite de l'enlévement, de
l'altération, de l'engloutilfement des titres, c'eH au lieur de
Lyle que toute la fàute doit être imputée, li l'on n'eH: pas
en. ém de fairé l'emplacemel)t pe cette im}llenGté de biens,
roturiers qu'il polfede dans fon fief de Taulanne. Lorfqu'en
1639 la Communauté voulut revenir de la tranfaél:ion du:
10 Septembre, qui avoit fixé l'allivrement en bloc de [es
biens _roturiers, pourquoi s'y oppofa - t - il? La conGftance & la Gcuation de ces biens étaient connues alors;
l'emplacement eôt éçé très-facile, & il aùroit été permanent; le Geur de Lyle ne voulut pas qu"on y procédât. Il
obtint un Arrêt qui y mit obJhcle, & qui main~int l'alli-.
~
..
�DU
PALAU
DB
,PROVBNCB.
~rement en bloc; la conduire du fieur de Lyle
4H
& l'Arrêt de
la Cour ont mis la Communauré à l'abri de rout reproche.
11 ell: de maxime dans tout le Royaume, qu'il fuffir qu'un
Seigneur ait payé pendant trenre ans la raille de fes biens,
afin qu'il n'y ait plus de moyens pour les en affranchir. Dèslors toure. nobilité ell: effacée. Ce n'ell: pas en difant qu'on
a'payé par erreur, ni en fuppofant que ces biens avoienr anciennement été déguerpis, ni en imaginant tour autre prétexte,
qu'on peur fe flatter de la faire revivre. Cetre maxime dl:
atteHée. par Philipi, par Guipape, par Defpei1fes, par Decormis, cités dans la Jurifprudence féodale, rit. des biens
!loMes, art. 8. Il Y a d'ailleurs une loi parriculiere à cette
Province, d'ap'rès laquelle il fuffir que le Seigneur air payé
pendant dix ans la taille de fes biens, afin qu'il ne pui1fe
plus les y fouaraire. C'ea l'Arrêr général du 6 Juin 1643,
rendu entre le Seigneur & la Communauté d'Ollioules. Il
importe forr peu que cet Arrêt, qui ell: rapporté dans celui
-de 1702, parle des biens acquis avant le 1') Septembre
1 S56; il Y a majoriré de raifon pour· l'appliquer au paiement
des tailles fait après cette époque.'
Le fief de Ners & Pechauris, appartennanr à Mr. d'AIbertas, étoit affouagé un huitieme de feu; le Seigneur po1fédoit depuis long-temps tous les' biens du terroir, tant les
nobles que les roturiers; il ne reHoit plus aucun veHigé de
l'em'placemenç de ces derniers; ce Magiltrat ne ce1fa jamais
de payer les impolitions fur le pied de l'affouagemenr ; il
vint lui- nlême audevant des Adminiltrateurs' de la Province
demander l'emplacement de ce huitieme de feu fur tels biens
de fon fief qui feroient refpeélivement convenus & choilis, fans
abus, ce qui fut exécuté en 1767, La même chofe fut obfervée
avec Mi-. de de Chenerilles, Seigneur de Roquefeuil; ce fief
étoit affouagé un tiers de feu. Il y avoir deux fiecles qu'il n'avoit
point été fait de cadaltte dans cetre Communauté. Tous les emphytéotes avoieht déguerpi. Par une tranfaétion du 29 Janvier
il fut convenu qu'il feroit procédé à l'elnplacement.. d'un quart
.~
�~t46
Jou RNA L
de feu fur des biens d'une valeur réelle litués dans led. fief
de Roquefeuil.
,
Le fieur de Lyle, Seigneur de Taulanne, répondoit que
fuivant les loix féodales, conCacrées par une JuriCprudence
ancienne & conGante, tout eG préCumé noble entre les
mains du Seigneur; que c'eG aux Communautés à prouver
par les titres les moins fufpeél:s, les biens qu'elle fuppofe
entachés du vice de roture, à les emplacer par la défignation
des quarre confronrs; que rien ne peur fuppléer à ces formalités érablies fur des principes immuables & d'ordre public. Il difoit que l'Arrêt du 30 Juin 1640 avoit déclaré les
biens nobles & féodaux de la feigneurie de Taulanne. francs
& immunes de taille, &c. La Communauré de la Marrre,
au lieu de tirer de la cote des aureurs du fieur de Lyle
les biens nobles qu'elle y avoit inférés, fe perpétua dans
fes infraél:ions; & profitant de la débonnaireré des auteurs
du fieur de Lyle & de leur négligence, on parvint à leur
former une eCpece de core, fans défignation des biens, fans
les emplacer, fans les fixer; les Adminifhateurs difoient feu~
lemenr que la core étoit compoCée d'une telle fomme; ils
en changerent la forme dans différens cadaGres, ils l'augmenterent
fucceffi.vement, & la ponerent au dernier à 1760
,
ecus.
Sur la forme de l'encadalhement, il difoit qu'il eG de
principe inconreGable que les. biens poffédés par les Seigneurs féudaraires dans l'érendue de leurs fiefs, [ont préfumés nobles & francs de raille dans' leurs mains, tant que
les Communautés ne prouvent pas la rorure de ces mêmes
biens, c'efl-à-dire, que les Seigneurs les aient acquis depuis
le 15 Déc.embre 1 SS6. Il n'ell: pas permis aux Corn mUna~tés de poner leur recherche. avant cette époque. Quant
aux acquifirions poGérieures, elles en ont la faculté; mais elles
font obligées d'en jufiifier la roture par- les titres les plus
aurhentiques, de les emplalier aux formes de droir.. Tel
eH le fentiment de Mr. de Clapiers, cauf." S0, queG, 2., &
de Mourgues, pag. 355. Telle eH la difpofition de la Dé-:
�D t1
PAL AIS
ri !l
PRO V B N C B:
44:7
c1aration du Roi du mois de JIlin 164-3, de celle du mOIs
de Février 1666, de l'Arrêt du ConfeH du 15 Juin 1668, &
de celui du 7 Février 1702..
La Communauté convient,que c'efi à elle à jufiifier qu'il
y a à Taulanne des biens roturiers, que c'elt à elle à les
emplacer; mais elle ajoute qu'elle fe trouve dans un cas
particulier; pluueurs titres qui doivent fervir à prononcer la
roture de ces biens, font mutilés, enlevés; & dès-Jors les
ancêtres du fleur de Lyle étant préfumés. ~tre les auteurs
d'un pareil délit, parce qu'eux feuls peuvent en avoir profité, ils doivent en fupporter la peine, & la plus grande parti~
de lori fief doit être préfumée roturiere fans jufiification. •
Ce n'eH pas par l'imputation des atrocités que l'oc parvient à
entacher la réputation des citoyens honnêtes; il faut fe préfenter avec la preuve faite, autrement' on ne doit pas être
écouté: pourquoi vouloir faire fupporrer au fleur de Lyle
la peine d'un délit imaginaire, le faire juger coupable d'avoir
enlevé, foufhait des titres indicatifs de la prétendue romre des
biens de fon fief, fans ofer l'attaquer fur ce fait? Des titres 'lui
c.0ncernoient ma famille, difoit-il, font perdus j,prOUVer que
Je les ai enlevés, ou que mes auteurs Je font permis ces fouftraélions; c'ejlun malheur duquel je gémis moi-même; ce n'efl
pas d mes allcêtres 'lue je le dois, mais d nos ennemis qui,
ont voulu Je foufiraire à des obligations qu'ils avoient contractées elzwrs nous ,. ou nous enlever des preuves confiitutives de
nos droits; c'efl vous-même que j'accuJe, & vous ofer retorfjuer l'accufation contre' moi! La différence qui exifle entre
votre délation & la mienne efi pourtant très-frappante; la vôtre
efi fondée fur la calomnie la plus atroce, f;' la mienne efi
étayée fur la préfomption la plus forte & la plus terrible. La
preuve que je rapporte, c'eJll'Arrêt du 30 Juin z640'
Les titres que la Communauté prétend être perdus ou
mutilés ( continuait-il) remontent à des époques antérieùres
à l'Arrêt de 1640' C'eO: dans les répertoires des àfll1ées
1581,1)85, 1588, 1589,~601, 1602., r604, qu'elle la'
été fouiller; c'efi la preuve de fon propre délit qu'elle vien~
�~~
•
"
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J6URNAL
chercher; elle l'avoue elle-même, lorfqu'clle avance que tes
anciens cadallres font perdus. C'ell dans ces mêmes cadallres qu'elle avoit inféré des énonciations contre le droit
du fief que l'Arrêt profcrivit; tout.l'accufe conféquemmenr, '
& elle voudroit f:1ire rejaillir fur les autres fon délit: donc
la prétendue (oullraél:ion ne peut frapper contre le fieur de
Lyle ni contre fes auteurs.
L'Arrêt du 12. Mai 1717, rendu en faveur du fieur d'Agoult,
Seigneur de Roquefeuil; celui en dernier reifort rendu
par les Commiifaires délégués au profit de Mr. le Préfidenc
de Coriolis, contre la Communauté de Corbieres; celui du
6 Juillet 1772., au rapport de Mr. de GaHaud, en faveur
du Seigneur d'Entrevenès, contre la Communauté; celui du
'1) Mai 17)), au rapport de Mr. de Maillane, en faveur
'du Marquis de Volx, ont décidé que les cadaHres ne faifoient aucune preuve contre le Seigneur, qu'aucune exception, quelconque n'éroit capable de filppléer au titre conllitutif de la roture, & que l'encadaHrement ne pouvoit être
ordonné qu'en juflifiant par les Communautés {pte les biens
avaient été acquis par le Seigneur depuis le, 75 Décembre
7556, par ac1es publics, autrement que par jes cadqJlres,
commifes, cOTlfifcations & caducité.
Le fieur ue Lyle convenoit qu'il avoit des emphytéotes'
à Taulanne, & que les lods qu'il pouvoit percevoir par les
mutations fixés dans le rapport de 1588, prouvent que leur
poifeffion éroit d'une petite valeur; mais if foutenoit ,que fi
l'on prétendoit qu'il en eût lui-même d,!ns fon fief, on devoit en rapporter la preuve.
Les cadallres n'ont jamais fait titre contre les Seigneurs;
à moins qu'ils ne' ,les euifent approuvés par leur fignature,
ainfi que le jugerent l'Arrêt rendu dans la caufe du Mar-'
quis de Simiane le 25 Avril 1755, & celui du 12 Février
1769, qui ordonna que l'encadallrement feroit fait fuivanr
les, confroms ,& la contenance portés tan~ par les aétes,
que par les anciens cadallres de 1599 & 1631 que les Con{uls de Simiane leur repréfemoient, parce que les auteurs
du
�449
du lieur de Simiane avoient- appofé eux-mêmes leur lignature à ces cadaHres. Mais dès que ces cas ne fe rencontrent
point, les cadaHres font regardés comme des titres fortis
des propres archives des Communautés, fur lefquels elles
ont pu opérer fans la participation des Seigneurs;- & on
les juge incapables de former aucune preuve comre leùrs
droits.
•
Si dans la tranfaB:ion du 4 Septembre 1634 l'on' trouve
que Guillaume de Lyle payoit des tailles, c'érait pour les
biens qu'il Roffédoit dans le terroir de la Martre; & la
preuve qu'il n'avoir point de biens roturiers dans' le lieu de
Taulanne fe trouve dans l'Arrêt de 1640. L'accord de 1660
paffé avec le décimateur, outre qu'il eH informe, ne dit
rien de plus; il ne préfenre aucune délignation des biens
prétendus roturiers lirués à Taulanne.
'. Les ancêtres du lieur de Lyle ont réuni. au fief de Taulanne certains biens par déguerpilfement; mais c'en: avane
l'Arrêt du Confeil du ,,0 Aoùt 1637, temps auquel on n'ob,
fervoit aucune formalité, ainfi que le dit La Touloubre, rom.
l , tir. des biens /lobles, arr. 14, pag. 199.
Le fieur de Lyle a offert à la Communauté de lui payer
les tailles des biens qu'elle juHifiera roturiers; mais les produél:ions qu'elle fait maintenant font inutiles; c'eH aux Experts qu'il faut les préfenrer; ces opérations ne font pas
du reffort de la Cour, & on ne les lui préfeme que pour
[urcharger la caufe de faits abfolument étrangers. Ce feroit,
il eH vrai, éviter cette peine aux Experts, s'il falloit, ainfi
que la Communamé le prétend, fixer la taille que le fieur
de Lyle lui doit fur le pied des deux tiers de la terre qu'elle
vellt qu'on fuppofe être ,roturiers', funs connoÎtre s'ils le fone
ou s'ils ne le font pas.
La Communauté de la Martre ne peut être admife à la
demande en vérification des enlévemens, murilations & altérations énoncées dans fes requêtes des 26· Février, 30
Avril & 14 Juillet 1777, parce qu'elle en: irrécevable & inconcluante. La vérificarion qu'elle demande a déja été faite,
Almées 1775 6' fuiv.
L 11
DU
PAL A l S
D E
PRO VEN C E.
�4~O
.. 1 0 t1 li. N A t'
elle
produite au procès; toute preuve doit préCenter dës
faits pertinens & relatifs à l'objet contentieux, "autrerr.ent
elle efl: regardée comme fruHratoire; nam frujlra prablllUr,
quad prabalUm nan relevat, dit la loi, ad prabatiam:m, cod.
de prabat. La concordance de~ faits fur lefquels la preuve doit
porrer, forme la condition fans laquelle celle des parties qui
fe charge de la rapporter, ne peur pas être écoutée. C'ef!
ce qu'oblèrve Oltogradus, conf. 92, & Barbofa, de axiamat.
jur. ufufreCfuent. axiom. 19 r , n. 3; prabatia debet eJJè certa ,
clara & necd/aria cancludells; & même fur cette matiere tous
les doutes font en faveur de la partie contre laquelle la
preuve doit être rapportée. C'ef!: la doél:rine de Rehuffe,
de reprabal. tefl. n. 9. "On peut voir Jouffe fur l'art. l du
tit. 20 de l'Ordonnance de 1667,
Or, quels faits direél:s préfente au procès la preuve que
la Communauté réclame? Aucuns; elle excipe de la perte,
de la foul.l:raél:ion des aél:es i mais demander à prouver ces
faits, & ne pas offrir à prouver que le lieur de Lyle ou
fes auteurs font les artifans de ces prétendus délits, c'eil:
préfenter des traits de hardieffe & de témérité , & rien de
concluant pour la caufe. Les poffèdans fiefs fe fervoient. des
mêmes moyens.
Arrêt du 16 Juillet 1778, au rapport de Mr. l'Abbé de
Cpriolis, qui ordonna qu'il feroit procédé par Experts à
l'encàdaHrement des deux tiers en valeur du terroir du fief
de Tay.lanne, dont ils feraient l'emplacement, en commençant par l'endroit qui leur ferait indiqué par le fieur de
Lyle, & en continuant jufqu'au complement des deux tiers,
fous la déduél:ion toutefois de la valeur des terres que led.
,. fieur de Lyle poffede aél:uellement dans le terroir de la
Martre, lequel lieur de Lyle ferait tenu de faire ladite indication dans trois jours, comptables de la premiere fommation qui lui en ferait faite par la Communauté," autrement déchu, & audit cas permis aux Confuls de lad. Communauté de faire eux-mêmes ladite indication, lefquels Ex·
perts en proc"édant fe feroient affifler d'un Arpenteur, & fe"';
ea
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PAL A J S
D E
PRO VEN t
l!.
4')
l
raient la féparation defdits deux tiers des biens roturiers d'avec
le tiers reftant, compofant les biens nobles, planreroienc
les bornes & limites requifes & néceifaites, & procéderaient enfuite à l'allivrement defdits deux ciers ainli féparés,
à l'égal des autres biens roturiers de pareille narure & qualité, fur la mette fuivie par les Experts qui avoie'nr procédé
au cadaftre en J 727; condamna le fieur de Lyle aux arrérages de taille courus depuis la ceifation du paiement',
avec' intérêts du jour de la clôture de chaque compte, &aux dépens. Les Syndics des polfédans fiefs le furelle aux dépens les concernant. Ecrivant Mes. Pochet, Eftrivier, Mougins-Roquefort & Gaffier.
.-
A 11 R Ê T
LIV.
Le droit d'offrir n'a 'lue dix ans de durée contre des acquéreurs
'lui, au lieu de compter au vendeur le prix de leurs aC'luiflrions, l'o;u employé 'à payer plufleurs de [es créanciers.
Es fieurs Hugues, Négocians de 'la villë de MarfeiHe,
porteurs d'un billet à ordre de la fomme de 1260 liv.
foufcrit par J~an-Claude Maure\, Droguifle du lieu de Limans, le firent aŒ-gner en J 7 S9 pardevant les Juges-Confuls
en paiement de cette fomme , & obtinrent conrre lui une Sentence de condamnation le 17 Septembre; ils la firent fignifier
au débiteur, & demeurerenr dans l'inaétion. En 177') ils voulureor prendre les voies nécelfaires pour fe fàire payer', mais
ils trouverent que Maurel éroit mort, qu'il avoit laiifê deux'
filles pupilles dolic. la [Utelle avait été confiée à Jofeph Jean,
~ & que celui-ci avait aliéné tous les immeubles de la .ftICceffion. Dans cet état les fieurs Hugl)es dï(cuterent le refle
des biens de leur débiteur; mais ils étoient de fi peu de
valeur, que- par le rapport de collocation ils furent déclarés
créanciers perdans de la fomme de 27°0 liv. Cette difcuf.
L
L Il
2.
•
�/
'4')"
Jou RNA t'
fion faite, ils voulurent ufer du droir que leur donnoit la
loi d'atraquer les riers-acquéreurs; les principaux étoient
Antoine Jean, frere du mreur, & André Giraud, auxquels
les fonds de l'hoirie avoienr éré livrés, & les prix délégués
à des créanciers antérieurs, auxquels par là même ils avoient
été fubrogés. Alors les lieurs Hugues inrenrerent l'aél:ion en
droir d'offrir; & par exploir du 1.) Seprembre 177) ils fi.
rent alligner Jean & Giraud pardevanr le JUg'e de Limans
en défempararion des fonds par eux acquis, fous l'offre de
leur rembourfer ce qu'ils ~voient payé du prix, de payer aux
créanciers. antérieurs indiqués ce qui leur renoit d~ en principal, & de rembourfer tour ce que de droir.
Les tiers-acquéreurs leur oppoferenr que les acquilitions
ayant été faites aux encheres, toutes les hypotheques avoient
été purgées, & que dix ans s'étanr écoulés depuis les
aliénations, l'aél:ion en droit d'offrir n'étoit plus recel'able.
Les lieurs Hugues au contraire répondirènr ,que les encheres
Ij'avoienr pas- pu purger les hypotheques par rapport à des
créanciers qui n'avoienr été ni préfens. ni appellés; que fe
trouvant domiciliés' à Marfeille, diflant de dix-huit lieues,
où de'meuroient ces acquéreurs, & dans une' au~re Sénéchauffée, on pouvoit les regarder comme abfens, ce qui
prorogeoit leur aétion au moins jufqu'à. vingt ans, & que
quant à la pre(cription, les acquéreurs tenant immédiare':
ment de la main du débiteur, & repréfenrant les. créanciers auxquels ils av oient 'été fubrogés, l'aétion en droit
d'offrir avoit à leur ég,!~d rrente ans de durée. Sur ces raifons le Juge de Limans mit les acquéreurs hors d'in flan ce
& de procès; les lieurs Hugues en appellerent pardevant le
Lieutenant de Forcalquier qui, par fa Sentence du 9 Avril
1777, confirma celle du premier Juge. ApPel pardevant la
Cour. 'Ce fut alors que les lieurs Hugues de.mande.rem, par
une requête incidente, la caffarion des aliéhatioos, pour avoir.
été faites faos formalirés.
On difoit pour les fleurs Hugues: le droir d'offrir com~
pete-t-il comre le tiers 'qui a acquis du débiteur? Sur ce
�1JU
PAtAIS
D-E
PROVENCE.
4~.3
point, deux cas font à difiinguer: 1°. ou le riers a acquIs
avant que l'immeuble f.ît hypothéqué au créancier' perdant,
& dans ce cas il n'eU foumis à aucune forte d'aél:ion; car
ce créancier ne peut prétendre aucun droit fur un fonds
qui n'étoit plus dans les-biens de fo"ll débireur, lorCqu'il a
acquis fon hyporheque. 2°. Ou l'immeuble étoit déja fournis
, aux hyporheques de ce créancier, 10rCque le tiers 1'8 acquis, &
dans ce cas il faut difiinguer encore; car fi ce riers n'a pris
aucune précaution, s'il ne s'eU fair fubr~ger à quelque
créancier antérieur, fi imprudemmenr il a payé fan vendeur,
QU quelque créancier dont l'hypotheque trop moderne ne
puiife lui être d'aucùn ufage, dès-lors il demeure COjlmis à
l'aél:ion rigoureufe du regrès, qui rend le droit d'offrir inutile,
Mais fi au contraire en acquérant il a été délégué à quelque
créancier antérieur, auquel par ce moyen il a été fubrogé,
dès-lors il n'efi plus foumis qu'aux aél:ions qui competent
contre le créancier qu'il repréfente. Or .comme ce créancier antérieur n'efi fournis envers les poll:érieurs qu'à l'acrion en droit d'offrir-, cetre aél:ion fera la feule auffi qui
pui{fe leur compéter contre ce tiers-acquéreur. Tels font
les vr'!1is pri.ncipes de la mariere.
Il ell: donc fans contredit un cas oà le droit d'offrir
compete contre l'étranger qui a acquis du débiteur; & c'e!!: comme dans l'eCpece de cette caufe, lorfqu'il a payé un
c~éancier antérieur auquel-il a été fubrogé. C'eU ainli que'
le décident la Loi 3, §. l, if. de diflr. plgnor.; Neguzanrius,
part.- ') , memb. 3, n. 2; Merlil1us, de pignàf. liv. 4, quo 6S;
d'Olive, liv. 4, ch. 1 l ; Care1an, liv. 6 , ch. l , & Buiffon ,
cod. fi ant. credo
'
Il dt bien vrai que ce droit d'offrir a pour fondement
l'hypotheque; mais cependant il ne faut pas le confondre
avec ce qu'on appelle proprement en droit l'aél:ion hypothécaire, qui n'dt autre chofe que ce qtie nous appelions
parmi nous l'aél:ion en regrès. Celle-ci efi une \lél:ion dure,
rigoureufe; elle tend à dépouiller un malheure\lx a'cquéreur,
fans lui donner la -moindre indemnité. L'autre au contraire
�414-
\
J
0 ,U RNA L
ne pl'éfente rien à fouffrir' ,pour celui contré qui on l'intente;
elle le dépouille, il ef!: vrai; mais c'eH après qu'il a été
re.mbourfé de tout ce 'qu'il lui en avoit cOÎlté, qu'il a été
payé de tout ce qui lui étoit dÎl, & qu'enfin on l'a parfaitement indemnifé. Des effets fi différens ne permettent pas fans doute de regarder du même œil ces déux 'aaions ,
& de mefurer la durée de l'une fur celle de l'aurre.
L'aaion en rëgrès " il ef!: 'vrai, ne dure que dix ans
concre tout tiers-poffeffeur. Qu'un créancier pof!:érieur fe
foit colloqué, qù'un étranger ait ac~uis, dix ans d'une poffelIlon pailible le mettent à l'abri de cette aaion; mais
pour ce qui ef!: du droit d'offrir, il mérite trop de faveur,
pour qu'on ait donné les mêmes bornés à fa durée. Si
l'on cherche ce qu'en ont penfé les anciens Jurifconfultes,
l'on trouvera d'abord qq'ils ont mis en quef!:ion, fi le droit
d'offrit étoit imprefcriptible. C'ef!: une pUle faculté, difoient
les l,lllS : or on ne prefcrit jamais contre une faculté. D'autres au contraire, & c'ef!: le plus grand nombre, foute-- ,
noient qu'à l'exception de quelque cail, le droit d'offrir ,1
n'étoit pas une fimple faculté, mais un véritable droit d'où
ils concluoient qu'il ef!: prefcriptible. Mais à quel temps
fixoient-ils fa durée? Tous fans exception, & fans dihinguer aucun cas, la portoient jufqu'à trente ans. Telle ef!:
la doarine. de Balbus, trac? prœfl. quart. p. quint. princ. &
Neguzantius, memb. 3, p<lrt, 1 , quoique Boniface, tom. l,
liv. 8, tit. 2, ch. 1 , -rapporte un' Arrêt qui jugea pour la
prefcription de dix ans.
,
Quoi qu'il en foit, la jurifprudence & la doarine des
'Auteurs s'ef!: enfin fixée à une dif!:inaion bien fimple.
S'agit-il d'un premier acquéreur qui tient immédiatement
de la main du débiteur? L~ droit d'offrir dure trente ans.
Mais au contraire, ef!:-il quef!:ion d'un fecond acquéreur,
qui tient non du débiteur, mais du créancier colloqué,
on d'un premier achéteur? Alors il n'a que dix ans de
durée. Cene dif!:inaion, qui n'ef!: pas abfolucr:ent nouvelle,
puifqu'on la trouve dans Thefaurus, décif. 157, nous cft
�.lJ \1
1
l"A tAIS
D Il
Pao v 1! Nell;
"H ~
:nettement marquée dans Boniface, rom. 4, liv. 9, tir. l ,
ch. 19 , dans l'aél:e de nororiété de MM. les Gens du Roi
du 12., Juillet
1726, & dans les obfervations fur cet aél:e de
,
noronete.
De - quelle maniere faut-il confidérer le riers q,ui acquiert
du débiteur, en payant un créancier antérieur? S'il doit
être ;regardé comme ce fecond acquéreur, qui tient d'Ull
premier acheteur ou d'un créancier colloqué" à la. bonne
heure; dix ans le. mettent à l'abri du droit d'offrir; mais
qui pourroit le regarder de cen!" maniere? C'ell: du débi..
reur lui-même 'qu'il rienr : donc il ell: le premier achereur;
donc le droir d'offrir à fan égard a rrenre ans de durée:
voilà ce qui réfulte des principes & de la doél:rine des
Auteurs.
.
Il ell: certain que hors le cas d'une inll:a,nce. générale "
il n'y a aucune forte d'aél:ion perfonnelle encre les créanciers qui nailfe de cene feule qualité; hors le cas de cetre
infrance, le droit d'offrir n'a, comme le regrès, que l'hyporheque pour principe, foir contre un créancier, foir contre
un poffelfeur quelconque, &' que s'il dure rrente ans, il ne
faut pas en chercher d'autre raifon que la nature de fes
effets & la faveur qu'il mérite. En fuppofant que le droit
d'ofFrir foit accompagné d'un<; aél:ion perfonnelle vis-à-vis
du créancier, qu'il foit une aél:ion mixte, une aél:ion fcripta
in rem, de la même maniere qu'il compete conrre ce créancier, il doit compéter contre celui qui a acquis immédiatement du débiteur en payant la "créance. En effet, celui
qui acquiert ainli en payant 'un créancier antérieur, ell:
par-là même fubrogé à ce Créancier, & ce n'dl:' même
qu:en vertu de cette fubrogation qu'il ell: à l'abri de l'action en regrès de la part des créanciers intermédiaires.
Or quel ell: l'objet de la fubrogation? C'ell: de mettre une
perron ne à la place de l'autre , de telle maniere qu'elle
fuccede à fes droits & à fes obligations. Si donc le droit
d'offrir compéroit comme aél:ion perfonnelle coorre le créancier, il doit compéter de même contre l'acquéreur qui lui
-
�'4'î 6
Jou RNA L
a [uccédé. Si contre l'un il aurait trente ans, il doit avoir
contre l'autre la même durée. Cet acquéteur n'efi plus un
tiers qui n'ait 'aucun rapport avec les ~utres créanciers du
débiteur; il el!: un créancier lui-même, & ,il ne doit pas
prétendre de pouvoir figurer tantôt [ous une qualité, &
tantôt fous une autre. On di[cutoit en[uite la requête incidente concernant le défaut des formalités prefcrites dans
la vente des biens des pupilles & mineurs, & on concluait
que l'aliénation écoit nulle.
, On répondoit' pour les tiers-acquéreurs, que le demandeur
en droit d'oifrir eH tenu d'indemnifer en entier celui qu'il
veut évincer; le poffeffeur doit recevoir le rembour[ement
de coutes les réparations qu'il a- faites, de tous les frais &
loyaux-coûts, dehet ahire omllinà indemnis; la regle efl: la
même qu'en matiere de retrait lignager.
Le droit d'oifrir accordé aux créanciers perdans, in [0tatilJm amiJJi dehiti, n'a lieu réguliérement, & ne peu't être
exercé que contre les créanciers antérieurs qui ont pris ou
reçu en paiement de leurs créances les immeubles de leur
débiteur, ou qui les ont achetés; dans ce cas l'aérion en
droit d'oifrir a une durée de frente ans. Les créanciers colloqués ou illvefiis, foit par un bail' en paie, foit par un _
a,chat ordinaire, one à leur tour la liberté de vendre dès le
lendemain même les immeubles dont ils fone devenus propriétaires,;& dans ce cas le droit d'oifrir compete contre
le tiers-acquéreur. Mais le changement de poffeffeur ame[1e
une' diflecence dans la' durée d'une aérion qui o'a d'àutre
principe ou d'autre caufe que l'ypotheque de celùi qui l'exerce;
dix années fuf!ifent pour la prefcrire, pour l'éteindre, & pour
raffurer le tiers-acquéreur contre toute efpece d'attaque.
Si le débiteur, au lieu d'elTuyer une collocation, au lieu
de vendre à quelqu'uo de fes créanciers les' iJnmeubles qu'il
poffede, les vend à un tiers, en reçoit le prix, ou le laiffe
dans les mains de l'acquéreur, il n'y a plus lieu au droit
d'offrir. Cet étranger, ce tiers-acquéreur ne peut être évincé
que par [impie aérion hypothécaire ou de regrès. Il y en a
une
J
�DU
PALAIS
DE
"4)7
PROVENCE.
une décifi:on, -exprelfe dans les œuvres de Mi". de St. Jean,
déc. 27. Il Y en a des Arrêts dans celles de Duperier
tom. 2, pag. 381 ; la maxime efl: 'a-trefl:ée par Decormis ,
,tom. 2, col. 1281, & par Mr.: de Bezieux,' pag. 2_14, c'ol. 2<. ,Donc le tiers qui acquiert du débiteur, qui lui compte.le
prix de fqn acquifition, ou qui le garde pour le payer dans
d'autres temps, ne peut abfolument être évincé que par
aél:ion de regr,ès, & il efl: à l'abri de toute recherche au
moment où s'accomplilfent les dix années accordées par la
loi & par la maxime générale du Roy'aume.
Si le débiteur en vendant fes immeubles à un tiers, n'en
reçoit pas le prix, ne le lailfe .pas dans fes mains, & l'emploie au contraire. à, payer quelqu'un de fes créanciers an-,
térièurs , il Y a lieu au droit d'offrü; d~ forte que les créanciets pofl:érieurs à ceux qui ont reçu le prix des immeu- •
bles, peuvent évincer le tiers-acquéreur & le dépofféder;
mais dans ce dernier cas, qui eH: exaél:emenc celui où les
parties fe trouvent, les créanciers pofl:érieurs peuvenr - ils
évincerp'endani: trenre années le tiers-acquéreur qui a compté
fes deniers à des créanciers plus anciens? ou la prefcriptian de dix aps fuffit- elle pour éteindre leur :rél:ion? La
prefcription de dix ans eH le terme infurmonrable de toutes
les aél:ions hypothcéaires;' le droit d'offrj~ n'efl: dans tous
les cas qlle le fruie de l'hypotheque acquife au créancier,
comme l'ont cbfervé Mrs. de Bezieux, pag. 210 , Defpeiffes ,
d'Olive, Balfet , Vedel & Decormis, tom. 2, col. 1237,
Il efl: donc naturel que l'aél:jon ,en d"roit d'offrir fait éreinte
aptès le laps de dix ans. L'Arrêt rapporté par Boniface,
tom. 1, liv. 8, tit 2., ch. )' jugea que l'~él:ion en (droit
d'oJfrir d'un créanci r perdant érait pre(crite par le laps
de dix années, quoique formée contre une femme colloquée (ur les biens de (on mari.
Ainn il efl: çooibnt que la durée du droit d'offrir n'a
été porrée jufqu'à trente ans qu'à raifon même de cene
aél:ion' panictiliere que fait naÎr e' le concours des créanciers. La Cour n?a donc pas interverti ces maximes, que
Annùs 1]75 & fuiv.
,
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Jou
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L
l'aél:ion hypothécaire s'éteint après le laps de dix années;
& .que l'aél:ion perfonnelle & celle' en rév~ndicatio-n font
les feules à avoir une durée de trente ans. Si les créanciers
invel1:is d'un immeuble de fon débiteur par collocation,
par bail en paie, ou par tout autre tranfport volontaire,
l'alienent le lendemain de leur acquifition, il ne reUe d'autre
re1fource contre le tiers-acquéreur qu'un~ aél:ion à exercer
dans les dix années. Sur ce point les Arr.êts de la Cour
n'ont point varié; Duperier l'attelle dans fes maximes,
tom. l , pag. S6S, & MM. les Gens du Roi en ont donné
un aél:e de notoriété en 1726. Pourquoi donc ce changement dans la durée de l'atl:ion? Pourquoi les créanciers
perdans, qui au moment du tranfport fdit au créancier antérieur avoiem acquis le droit d'agir pendant trente années,
le perdent-ils immédiatement après par la vente faite à un
tiers? Peut-on en donner d'autre raifon, fi ce n'ell que
le créancier antérieur po1fédoit à titre de gage, jure
pignoris ; au lieu que le tiers-acquéreur ell invelli par un
tranfport pur & !impie, en force .d'un titre qui ell de foi
irrévocable, & qui ne lai1fe au créa~cier perdant que b.
re1fource d'agir en vertu de fon hypotheque.
Sur la demande incidente & fubfidiaire les tiers-acquéreurs rapportoient le rappo.rt d 1el1:imation, le procès-verbal
. d'enc..l-jeres dans lequel il ·étoit fait mention du décret du
Juge, & les autres pieces qui conl1:atoient que les formalités avoient été remplies.
_.
.
. Arrêt du 20 Juillet 1778, au rapport de Mr. le Confeiller de Vitroles, qui confjrme la Sentence, déboute les
fleurs Hugues de leur requête inçidente, & les condamne
aux dépens. Ecrivant Mes. Jacob & Eftrivier.
••
�'DU
PALA1'S
DE
ARRÊT
459
P'll.OVENCE.
LV.
1
L'acheteur menacé de trouMe ou d'é viélion peut foumettre le
vendeur 'lui veut exiger le prix,
donner caution.
a
P
Ar aéte dn 15 Février 1770, Jean Roubaud, Négociant du lieu d'Orgon, vendit à Jofeph JuHamen dn
lieu de Malemort deux domaines arrenans,' dont l'un de
douze éminées, & l'autre de quatre, pour le prix de 138o
liv. payables, favoir, 18o liv. à Me. Bicheiron Notaire
d'Allenc, 300 liv. lors de l'aéte, 300 liv. au jour de la
Magdeleine- lors 'prochaine', 300 liv. à St. Michel lors prochain, & 300 liv. à la fête de la Magdeleine 1774.
En I7.74 Jufiamen tint un aÇl:e à RÔl)baud, dans lequel
11 lui expofil que Jean-BaptiHe Jourdan, ménager de Mal<:;mort , l'avoit empêché jufqu'alors de jouir de la terre de
quatre éminées; qu'il ,en avoit enlevé. les {j'uirs, & prétendoit_ continuer d'en jbuir; en conféquence il l'interpell<,! de
lui faire refiituer les fruits qui lui avoient éré enlevés, de
. faire mefurer la terre vendue, & de lui donner un quallti
minoris.
Roubaud ne fit aucun cas de cet aéte ; il prit des lettres
de clameur, fit faiiir par affurance quelques effets mobiliers, & fit ajourner JuHamen pardevant le Lieurenant des
Sou,millions de la ville d'Aix, en condamnation 'des 300 liv.
gui lui refioient dues.
.
Ju(lam~n préfenta une requête incidente, tend ante 1°. à
la caflàtion de la faifie provifoire, avec dépens, dommages & intérêts; 2.0. à faire ordonner que Roubaud le
mettrait en poffellioll de la partie de fon acquiiition, qui
avoit eu pour. objet la terre de quatre éminées; 3°. à le
f ire ccnd,lmner à lui refiitLler les fruits perçus par Jourdan
~ c9nnoil apce "d'Experts; 4°. à faire dire qu'au cas où la
Mm m2
�f
1
~~
JOURNAi
propriété de quatre éminées feroit déclarée appartenir ~
Jourdan, Roubaud feroit condamné à lui payer un quanti
minoris à corinoiffance d'Experts, & il offrit le paiement
des 300 liv. à deniers découverts, en donllant par Roubaud
(;aution de le faire jouir. Il préfenta enfilite un expédient,
par lequel, après, avoir rappellé les mêmes fins, il demanda
de vérifier par une preuve vocale qu'à l'époque du contrat
dt: vente Jdurdan poffédoit paifihlement les quatre éminées
de terre donc s'agit, ainfi & de la même maniere qu'un
propriétaire incommutable.
Le Lieutenant des SoumifIions, par fa Sentence du 4 Mai
1776 , fans s'arrêter en .l'érat à la requêre incidente de
Juflamen, faifant droit à la clameur, le condamna au paiement des 300 liv. pour 'Ia deroiere paie Hipulée dans le
contrat du 13 Février' i773 , échue le 22 Juillet 1774,
avec intérêts tels que de droit & dépens.
J
J ufl:amen appella de cette Sentence pardevant l'!, Cour;
,& tint le 14 Juin 1776 un aél:e extrajudiciairl! à Jean-Baptifle Jourdan, par lequel il l'interpella de ceffer le trouble
donné à la i9uiffance des quarre éminées de terre, & d'en
percevoir les fruirs. Jourdan répondit à cet aél:e que lu~ /
& fes aureurs ayant roujours poffédé les quatre éminées
, de terre dont il s'agiffoit avant, lors & après l'aél:e de
vente faire à JuHamen, il ne pouvoit êrre en l'érat en
qualité au procès. Cependant Jultamen, par une requête du'
S. Juillet 1777, amena J(;JUrdan en caufe.
Pour le fou tien de fon appel, Juflamen difoit que la
Loi 24, cod. de eviélionibus, ordonne d'abord que fi après
que la vente elt parfaite, il s'éleve avant le paiement du
prix quelque difficulté. qui affeél:e la chofe vendue, comme
s'il' y a à craindre quelque éviél:ion, dès - lors l'acheteur
. fera autorifé à refufer le paiement de la totalité ou du relte
du prix, fi le vendeur ne donne pas bonne & fuffifante
caution : Ji pofl perfec1am vendirionem 1 ante pretium numeratum rei venundatœ, mota fuerit fJuœflio, vel mancipia vendira proclamant in libertatem: cùm in ipfo limine contraaûs
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PRO V Il Nell..
'4"6'1'
lmmineat evic7io: emptorem, Ji [otis ei non oJferatllr, ad
totius vel rifidui pretii folutionem non compelli JI/ris au'éloritate
rnonJlratur. Elle ajoure que fi après avoir payé une partie du
prix du fonds acheté, il arrive que ce même fonds foit
fournis à quelque hypotheque-, le Juge doit fur la dénonciation qui lui en eft faite par l'acheteur, venir à fon fecours,
..lx. lui accorder toute forte de sûreté: Undè, cum parte
pretii Tlumeratâ -domr1s 'Iuam emifli, tibi velut pignoris jure
obligatœ -, _ne ad emptionem accederes, denunciatum ab aliquo
proponas : judex" tibi 'juœ ex emptione veniunt prœJlari pro• videbit.
_
_
Mr. le Préfident Faber en fon code fur le titre de evic7ionibus, déf. 5, fraite cette quefl:ion d'une maniere à ne
laiffer rien à defirer. Defpeiffes, tom: l, pag. 22; Ferriere en fa jurifprudebce du code, liv. 9, tir. 45 , n: 24.
Buiffon en fon code manufcrit fur le rirre de evic7iollibllS •
0
Duperier, -rom. !. in 'V • vendeur, & Julien en fes colleél:ions
manufcrites, liv. - 2, tir. venditio, ch. 4, §. 3 , litt. D, ne_
font pas moins formels fur cette- m-ariere.
Le Lieutenant a violé ces principes invariables par fa
Senrence du 4 Mai 1776-, en confirmant des exécutions
oppreffives & tortionnaires, & en condamnant Ju{lamen
mtllo cautiollis opere injllllc70 au paiement des 300 liv. au
mépris des offres faites à deniers découverts, dont il lui
a concédé aél:e dans fon ordonnance du 7 Février 1775.
S'il s'etl: arrêré à fon obligation de faire ce dernier paiement le 22 Juillet 1 774J" n'avoit-il pas fous les yeux l'-engagement de Roubaud e le faire avoir', jouir, tenir, ~a
rantir & défendre? N'avoit-il pas de plus l'acte extrajudiciaire du 9 Août 1774, lignifié à Roubâud, portant dénonciation juridique de ·l'empêchemenr formé par Jourdan
à l'immifcion de polfeffion des quarre éminées de rerre.
Roubaudrépondoit qu'il n'avoit rien vendu à Juftamen
-dont il ne rut incontefl:ablemenr propriétaire. Les feize
éminées de rerre par lui vendues apparrenoient ancienne~ent à Jean Jourd~n.- Le fieur ·Bonnaud " Marchand de
-
-
�~~
JOURNAL
Salon, fe colloqua filr fix ·des éminées par rapport du 10
Mars 1760. Le fieur Jo(eph Jourdan, un des enfans de
Jean, iiltenta contre le .fieur Bonnaud une demande en
retrait, & la terre lui fut défemparée le 18 Novembre de
la même année. Jofeph Jourdan obtint enfuite des adjudications corme fes freres, & fe fit colloquer le '2.7 Sep.tembre 176'3 fur les '2.0 éminées reftantes qui avoient
.appartenu à Jean. Jaurdall' pere commun. Jofepp Jourpan maria fa ·fille unique avec Roubaud, & lui fit donation de tous fes biens préfens par aél:è du '2.7 Décembre
1769. Dès' ce moment Roubaud devint propriétair-e des
feize éminées de terre qu'cil a. en(uite vendues à JuHamen.
)ean-Baprifte Jourdan' ne peut avoir fil; ce domaine ni
titre ,. ni potreffion;. car à l'égard des tirres, la défemparation de 1760 & la collocation de 1763 n'ont jamais été
attaqués, .& Jourdan n'en alleglle même aucun dans l'aél:e
-extrajudiciaire qu'il a tenll à Junarp~n>
. Qu~nt à la potreffion, çomment .pourroiç-il en avoir ac.quis, fur - totlt à l'effet de prefcriré, contre des tiers auffi
récens que le .font cetJx .de Jo(eph Jourdan, & dans un
temps oll celui - ci a été chargé de totlt le domaine en
queHion fur le cadaftre de la Communauté de Malemort,
& <;n a payé les tailles?
Le contrat d'acquifition du 1't Févtier, 1773 permet à
Juftamen de prendre potreffion du doma,ine vendu dès le
jour même; il efi certain & convenu 'lu~il a acqùitté poftérieuremenr au prérendu trouble les deux paies échues,
l'une à la 'Magdeleine, & l'autre à la Sr. Michel 1773.
Ses exc(jptions ne. font donc qu'un pr~texre recherché, &
donr il s'eH ménagé l'occafi9n par la colluGon de Jqurdan,_
quand il a fallu acquitter la pai<; ~chue en 17.74 ,ou chercher des moyens propres pour (e' fouf1:raire à une condamnation de' dépens, trop' jiJ(lernent méritée.
Les allégations de Juftamen futrenr-elles auffi vraies qu'elles.
font fautres, il n'auroit pu (e les rendre utiles qu'e!1 appellanr Jourdan au prod? La loi Mci}ie qu'une nlAme caufej
�;DU, PALAIS' DE
.4°'3
'PROVENCE;
~uoique defendue par plulieurs di~rentes pa~ties, ne doit
"
pas être divifée: nulli prorsùs audientia prœ6eatlll' qui cal/ftE
continentiamdividat. L. 10, cod. de judiciis. La raifon, ~inli que
les regles, nous apprennent que I~ caufe d'un'vendeur & d'un
acheteur contre un tiers qui fe prétehd propriétaire en tout
ou en partié de l'effet'vendu, efl: la même caufe., .;, .
En effet, le vendeur tenu d'éviélion e~ eertainement ga'- .
tant formel d'un acheteur, & la caufe d'un garant formel à
l'égard du tiers qui veut évincer· le garanti efl: tellement la.
même, que l'Ordonnance de 1667, tit. des ggranties, art.
la, permet au premier de prendre le fait & c'allfe en maih
du fecond, & de le faire meùre hors de caufe.
Roubaud a vendu à Junam'en un domaine de [eize éminées en contenance; cet acquéreur fe prétend. troublé par
Jourdan dans la po1feffion de quatre éminées; & il excipe
tellement de ce que 'Roubaud efl: ·[on garant ,'qlle par fa
requête incidente du 28 Janvier 177), il demande contre lui
'un quanti 'Qinoris &. des dommages-intérêts pout raifon de
l'eviélion qu'il dit avoir foufferte. Il ne doit donc pas être
quenion entre les parties d'avoir deux différens procès,
l'un entre Roubaud & Jufiamen, & l'autre 'entre ce dernier
& Jourdan.
,
Il rene li examiiler qui de Roubaud ou de Juframen a dlÎ
mettre Jourdan en caufe. Or, il efl: tout {impie que c'efl: ce
dernier; .car 1°. Roubaud n'a perfonnellement rien à démêler avec JOllrdan. Il ne peut pas fe plaindre qu'il l'ait
privé d'aucun effet qui lui appartienne; 2°. il ne ,pourrait
être obligé d'appeller ee tiers au procès, qu'autant que fa
préfence lui ferolt néce1faire pour jufl:ifier la demande qu'il
a formée contre Jufl:amen; 3°. c'efi à Juflamen à faire les
procédures néce1faires pour faire confiater légalement le pré~
tendu trouble; car tout demandeur doit jufiifier fes demandes,
& tout défendeur fes exceptions. Jufiame.n a tellement re'"
connu que c'étoit à lui, qu'il a amené dans la fuit~ Jourdan.
1
au procès.
)?ar Arrêt du 21 Juillet 1778, rendu aU'rapp'ort de Mr~
#
,
�'464.
J O:U RNA L
T
le Confeiller de Moilfac, la Sentence fut réformée, en 'con':
cédant aél:e à Jufiamen des dénonciations par lui faites fur
le défaut de polfeffion, ainfi que de fes offres & du refus
de Jean Roubaud de donner caution; la Cour déclara la faifie
nulle, injufie & tortionnaire, & comme tell~ la calfa, avec
dommages-intérêts, à dire d'Experts; ordonna que Roubaud
ferait jouir Ju(tamen de .la terre' dont. s'agit, avec refiitution de fruits; co.ndamna Roubaud à une indemllité ou quanti
minori$ à dire cj'Experts, & aux dépe.ns. Ecriyant Mes......
.'.
ARRÊT
LVI.
,
'La compenfation de tailles 'entre les Seigneurs & les Communautés ne peut être opérée de plein droii, même antérieurement il l'Arrêt du Confeil de l Gfi8 , & la demande doit en
être libellée, jufiifiée par l'état des biens, & [outenue par
un rapport efiimatif.
"'
N ~année 1735 la Communaut,é de la Tour-d'Aigues
fe pourvut contre fon Seigneur, pour faire ordonn~r que
les biens qui étaient âvant "I71.7 fur fa cote, & qrri en avoient
été tirés par .erreur, y feroient remis, & qu'il feroit con,damné aux arrérages de tailles depuis vingl;neuf ans avant la
demande. En la' même année le Baron de la Tour~d' Aigues
forma une detl:]ande en compenfation, dans laquelle néan'moins ~I n'obferva pas tol!res les formalités requifes. Le
proc~s demeura impourfuivi pendant long-temps. I,.e 24 Janvier 1757, les pourfuires en furent r~prifes; le Baron de la
Tour-d'Aigues appella les' hoirs de Mr. le Duc de Villeroy
fo'n vendeur en affifiance de caufe & garantie pour les_arrérages de tailles courus jufqu'au 7 Juillet 1719, jour'de la
, vente de la baronnie. Le 6 Juin il intervint Arrêr, qui déclara nurle la demâ~de en compenfarion, ordonna qu'il fe!oir procédé par .Experts à l'eftimation, allivrement & encadafirement,
E
�'464.
J O:U RNA L
T
le Confeiller de Moilfac, la Sentence fut réformée, en 'con':
cédant aél:e à Jufiamen des dénonciations par lui faites fur
le défaut de polfeffion, ainfi que de fes offres & du refus
de Jean Roubaud de donner caution; la Cour déclara la faifie
nulle, injufie & tortionnaire, & comme tell~ la calfa, avec
dommages-intérêts, à dire d'Experts; ordonna que Roubaud
ferait jouir Ju(tamen de .la terre' dont. s'agit, avec refiitution de fruits; co.ndamna Roubaud à une indemllité ou quanti
minori$ à dire cj'Experts, & aux dépe.ns. Ecriyant Mes......
.'.
ARRÊT
LVI.
,
'La compenfation de tailles 'entre les Seigneurs & les Communautés ne peut être opérée de plein droii, même antérieurement il l'Arrêt du Confeil de l Gfi8 , & la demande doit en
être libellée, jufiifiée par l'état des biens, & [outenue par
un rapport efiimatif.
"'
N ~année 1735 la Communaut,é de la Tour-d'Aigues
fe pourvut contre fon Seigneur, pour faire ordonn~r que
les biens qui étaient âvant "I71.7 fur fa cote, & qrri en avoient
été tirés par .erreur, y feroient remis, & qu'il feroit con,damné aux arrérages de tailles depuis vingl;neuf ans avant la
demande. En la' même année le Baron de la Tour~d' Aigues
forma une detl:]ande en compenfation, dans laquelle néan'moins ~I n'obferva pas tol!res les formalités requifes. Le
proc~s demeura impourfuivi pendant long-temps. I,.e 24 Janvier 1757, les pourfuires en furent r~prifes; le Baron de la
Tour-d'Aigues appella les' hoirs de Mr. le Duc de Villeroy
fo'n vendeur en affifiance de caufe & garantie pour les_arrérages de tailles courus jufqu'au 7 Juillet 1719, jour'de la
, vente de la baronnie. Le 6 Juin il intervint Arrêr, qui déclara nurle la demâ~de en compenfarion, ordonna qu'il fe!oir procédé par .Experts à l'eftimation, allivrement & encadafirement,
E
�'n u
PAL AIS
nE
PR 0 VEN CE.
-46')
cada!l:rement des' biens roturiers .poifédés par lé {jeur de
.Bruny, & le condamna à en payer la taille à raifon de l'allivre ment qui en feroit fait, enfemble les arrérages depuis
vingt-neuf ans avant la demande, avec intérêts depLiis, la
clôture de chaque compte, fauf & fans préjuâice au {jeur
de Bruny de faire valoir fa compenfation aux formes de droit.
Le même Arrêt fit droit à la garantie._
Après cet Arrêt, il renoit à vérifier {j 'le Seigneur poffédoit effeélivement des biens roturiers dans la baronnie de
la Tour-d'Aigues, & en quoi ils confinoient. La Communauté fit procéder à un rapport qui contenoit une multitude
d'articles. MI'. le Baron de Bruny foutint que parmi ces différens articles, les uns avoient été affranchis de la taille
.par une compenfation faite anciennement, & que ·les autres
.n',\yoient jamais contraélé la tâche de la roture. Ces exceptions furent propofées lors d'un arbitrage, & MI'. le Barpn de
J3runy n'ayant pas été fat.isfait de 1 la Sentence, l''ourfilivü:
pardevant la Cour ron recours en droit envers le rapport ,
& ce fut dans cette innance que les hoirs de Mr. le Duc
de Villeroy furoot affignés le 11 Janvier 177""
.
_ On difoit pour Mr. le Bar9n de la Tour-d'Aigues, qu'en
l'année 1618 le Seigneur commença à témoigner qu'il vouloit jouir de l'exemption des tailles pour les biens roturiers
par lui àcquis; on eo trouve la preuve dans une délibéra_
tion <je la èommunauté du 2. 1 Oélobre 1618: les fi,eurs
Confuls ont remontré, y eH-il dit, que Madame lwr a communiqué que tout le bien qu'elle poffide doit être exempt de
taille. Cette exemption, relative à touS les biens., s'entendoit
certainement, [oit par la nobleife des biens, [oit par compenfation des roturiers acquis par le Seigneur depuis l 'î ", 6,
avec les noblés par lui aliénés depuis le l]'lême temps. Dans
la délibération du 13 Ot1:obre 1619, le confei\ de la Communauté nomme des Députés' pour traiter & accorder à
l'amiable le différent qui en entre Madame & la Corn mU~auté pour le fait des tailles, & dans celle du 3 N6~embre
même année il fut délibéré néanmoins que le Trélorier ferait déchargé de la taille concernant'lad. Dame.
4nntcs l77 5 & fuiv.
N n fi
�~6
louRNAi
- Outre le deffein de compenfer, ces pieces prou.vent enj
·core que lors du 3 Novembre 1.6 [9, le Seigneur avait beaucoup plus aliéné de fan domain.e feigneurial qu'il n'avait acquis des biens rocuriers. Et en effet, -la feule bafiicle de
Real était un effet de plus de tro;s cene faumées, fans compter
lOures les aurres aliénations, & notamment les échanges;
auffi prétend-il que la compenfation fe faiTe & pour les biens
i"oturiers acquis, & pour ceux qu'il acquerra jufqu'à concurl'ence des nobles aliénés; qu'après toutes ces démarches,
-ces initances réitérées & ces aél:es préparatoires pour compenfer, la compenfdtion n'ait été réellement opérée, il n'en faut
plus douter, fi l'on fait atteneion fur-tout que dans ce temps là il
ne s'agiffoit que de vérifier les biens nobles qui avoienc aug'menté le cadaflre, & fuffifammenc indemnifé la Commu1l2uré des roturiers qui en fortoient, pour encrer avec exemption des tailles eorre les mains du Seigneur. Cette exemption étoit de droit pour les échanges, parce que .l'égalité
en v'a1>.ur réparoit tout dans le ,même .infiant, fi l'on con'fidere fur-tout que le Seigneur avoit fpécifiquernent formé
fa demande en compenfatiàn, & déGgné des corps fOropenfables de grande confidération. Dans les autres acquifitions & veores féparées, il n'y avait qu'un point faç.ile' à
éclaircir" qui étoit de voir la fomme d'allivremene forcie du
cadafire par acquiGtions faites par le Seigneur, & la (omme
d'allivremene gui y étoit entrée par l'encadalhemene des biens
'uobles par lui aliénés.
Il efi évident que le Seigneur obtint ou eut plein droit
oe prétendre à 'l'entiere exemption de tailles pour tous les
·biens roturiers par lui acquis, & même à acquérir ·jufqu'à
concurrence des biens nobles aliénés, dès qu'en 16[8
& 1619 il eut manifefié à diverfes reprifes qu'il eneendoit
jouir de cette exemprion par le bénéfice de la compenfatian. Il l'obtint, parce que l'état des regifires lacérés préciCément pendant un intervalle de rrais mois poll:érieurs à
cette manifdl:ation de volonté, & enfuite à diverfes époques,
donne droit de conclure que la ·Communauté avoit effectivement f<lit çe qu'dIe avait, dû faire; qu'elle avait déclaré
�'Il u P.;.. L' AIS D Il PRO V Il Ne n.
461
la compenfation pour le temps antérieur à 1619, & qu'enfilite à mefure que le Seigneur acquerroit des biens roturiers,
elle vérifierait & déclareroit également les compenfations felon
le vœu ûgnifié du Seigneur, qui portait pour l'avenir comme
pour le paifé, puifqu'en 1619 il avait déja aliéné beaucoup
plus des biens nobles qu'il 'n'en avait acquis de roturiers.
Les Seigneurs de la Tour-d'Aigues ont joui depuis cerre
époque de l'exemption demandée. Ils n'ont jamais payé la
taille, parce qu'en effet la Communauté ne pouvait fe difûmuler que les biens nobles entrés au cadaHre abforberoient
les roturiers pris. par le Seigneur. Que la Communauté ait
continué ou non de comprendre le Seigneur dans fes cadaHres, il n'en réfulte certainement pas qu'il p,lyât la taille
pour cela; la Communauté pouvoit écrire fur fes cadaflres
ce qu'elle trouvoit bon, fans que le Seigneur, qui l'ignorait, pût s'en formalifer, puifqu'il ne payait point de raille.
En 1725 la Cour des Aides fait un Arrêt général, par
lequel elle ordonne que les Con fuIs de toutes les Communautés feront comprendre dans les cazernets des Tréforiers
tous les biens roturiers que les Seigneurs poifedent dans
l'étendue dè leurs fiefs; qu'ils leur en feront payer la cailfe;
qu'il 'ne fera rien paifé en reprife flour raifon de ce, même
pour compenfations prétendues par les Seigneurs, fi ce n"eH:
qu'ils les faifent recevoir à la forme de l'Arrêt du Confeil
de 1702. La Communauté incerpréta cet Arrêt felon [ou
véritable fens; elle fic faire une vérification de cous les
biens poifédés par le Seigneur; & n'ayant rrouvé que des
biens anciennement acquis & compenfés avant 1668 &
17°2, felon la forme qui fe pratiquait en ce temps-là, elle
ne fit pas comprendre le Seigneur dans fes cazernets, &
deux ans après faifant procéder à tin nouveau cadalhe, con'nincue que tous les biens poifédés par le Seigneur devaient
être exempts de caiJIes, & qu'il n'y avait rien ,de plus inutile que de lui donner UDe cote, puifqu'on avait de rout
temps reconnu fa franchife dans l'exécution, elie ne fit rien
mettre fous fan nom dans ce cada{he.
N nn
2.
�1
~s
JOURNAL
On
obCervoit
pour
les
hoirs de Ml'. le Duc de Villeroy~
•
qu'il .ne pouvoit être dû aucuns arrérages de raille pour les
biens acquis dans la baronnie de la Tour-d'Aigues avant
.l'époque de l'Arrêr du Confeil dUJ .! ') Juin 1668 , parce que
routes les acquifitipns des' auteurs de Mr. le, Duc de Vil.
leroi remontent à Iln temps .antérieur à cet Arrêr; Or, les
fufdits biens ne font pas roturiers, par deux raifons égalen:ent décifives;. 1°. parce ',Jue la majeure partie des acqui!itions a été faite par la voie de· l'échange qui a opéré une
competifaribn légale de droit & de fair; 2°. parce qùe roures
les acquifirions. 'en général ont é~é .l'objet d'une compenfa:'
tian demandée par le Seigneur, & confeÎltie par la Communanté avec connoj{jànce de caufe, & qui a .opéré & dù opérer
néceifairement fon effer.
Le véritable objer des loi" qui a difpofé fur la mariere
.des compenfQtions'a toujours éré d'érablid'équilibre, & qe conJenver les inrérêts refp'eéJ:ifs des Communautés & des Seigneurs. C'ef!: pour remplir cet obj'er, qu'on a voulu que les
biens nobles aliénés par les Seigneurs fuifent capables de,
remplacer fur les cadaHres la valeur des biens rotur·iers qui
en font fortis par leurs acquifirions, & de fupporrer les
mêmes charges. C'efb ce 'remplacemenr , cerre équipollence,
cet équilibre qui ont' toujours formé la fubf!:ance de route
compenfation légitime. C'eH pourquoi dans le principe on
n'exige oit rien de plus que la preuve de ce point de fair.
Tour éroit confommé, lorfqu'il apparoiifoit que le Seigneur
Ile faifoit qu'échanger~des biens nobles avec des biens roturiers de la même valeur. Telle éroit la difpofition de l'Arrêt
du Confeil du 1') Décembre 1') ') 6, qui cf!: la preroiere loi
intervenue [ur cette matiere.
Cerre loi) auffi fimple dans fes difpofirions que dans fon
objer, ne l'éroit pas, moins dans fon exécution. Il fuffifoit
qu'à mefure que les Seigneurs fajfoienr des échanges, 0/1
eûr foin d'impafer [ur les biens nobles par eux donnés en
contre-échange les mêmes charges que fupportoienr les biens
roturiers qu'ils acquéroient, afin que la compenfarion ,fôt
�DU
PAL AIS
J)
E
PRO VEN C E;
469'
rég,uliere 1 & légitime. Il fuffifoit pareillement qu'~ l'égard
des autres acquifitions faites par les Seigneurs, il conflât •
qu'ils avoient démembré de leur fief & fait inférer dans les
cadaftres des biens nobles capables de remplacer leurs
.biens roturiers, & qu'ils euITent témoigné leur intention de
-compenCer les uns avec les autres, afin que la compenfacion par eux propofée, foit par aébon , foit par fimple exception, opérât de plein droit en leur faveur l'affranchiITe- •
ment de la taille de leurs biens roturiers. L'objet de la loi
étoit rempli, dès qu'il y avoir aITez de matiere pour établir l'équilibre entre les biens nobles aliénés, & les biens
roturiers acquis. Dès-lors la jufle proportion' qui étoic gardée, devenoit le citre d'une entiere bonne foi, fans qu'on fût
efclave de certaines formalités qui· étoient alors inconnues.
Celles qui ont été prefcrites par les Arrêts poflérieurs
de 1668 & 1702 n'ont été imaginées que pour mieux affurer cet équilibre, qui a toujours été l'objet principal &
dominant; mais ces nouvelles loix ne pouvoient pas avoir
leur effet rétroaél:if, & porter atteinte à ce qui avoit été fait,
dans la bonne foi, l'orfqu'elles étoient inconnue;. Delà vient
que la Cour a toujours diflingué avec foin les vices fubfr.antiels dont. pouvoient etre infeél:ées les compenfations
faites, ou les demandes en compenfation antérieures aux:
Arrêts de 1668 & 1702, des vices qui ne tenoient qu'à la
forme extérieure. Toutes les fois qu'il lui a paru que les Seigneurs avoient. voûlu s'a·vantager fur les Communauté's par
des compenfations faites fans connoilTance de caufe, en
bloc ou de toute autre rnaniere propre à perfuader que les
Communautés avoient .été furprifes & léfées, elle les a carfées & n'y a eu aucun égard. Mais lorfqu'elle s'eft convaincue
que les compenfations avoient été faites avec connoiffance
de caufe, avec juHice & bonne foi, la Cour ne s'dt poine
arrêtée au défallt des formalités prefcrites par des loix pof.
térieures qui ne pouvoient pas être exécutées avant qu'on
les connût; elle a toujours maintenu de telles cornpenfà,rions, ou du-moins elle leur:'1 coujours donné effet du jour,
�-~70
-Jo u a-N A!L
que l'i~tention' d'en ufet" avoit' éré fuffifammenr manifeGée:
Les Arrêts fono rapporrés dans la jurifpnldence féodale, arr.
32, rir. des. biens nobles. I:,'Airrêt rendu le I~ Juin 1746,
eorre le Seigneur & la Commun au ré du Bar, condamna
le Seigneur aux arrérages de railles; ma'is il diftingua les
acqui:lirions faires avanr 1668, à l'égard defquelles les arrérages de tailles ne furenr poinr adjugés; elle les fit dépend're d'e l'événemenr du rapport de compenfarion qu'elle
ordonna, à l'elfer de vérifier fi l'ors defd. acquificions il y avoit
mariere à compe'nfarion, al1<juel cas il ne pouvoit plus lirre
<juel1:i0r1 d'arrérages.
Il paroî·t en prem;ell lieu urt nombre confidérable d'échanges fairs avant 1668 par les Seigneurs de la Tourd'Aigues,. lil dl: jultifié que l0rs de ces échanges on a eu
l'acrenrion d'inférer fur le champ dans le cadafl:r~ les biens
nobles donnés en comre-échange par Je Seigneur, & d'y
appliquer la même corifarion, & fouvent même une plus forte
que celle des biens roturiers pris en échange. En parrant
de ce point de fait, prouvé par pie ces , peut-il y avoir quelque légirime prétexre pour conrel1:er la régularité & la validité d'une telle compenfarion? N'el1:-elle pas là une exécution de l'Arrêt du 1 ~ Décembre l 'i ~ 6, qui étoit la feule
loi, en vigueur à cette époque? N'en-il pas vrai de dire qu'une
telIe compenfarion a' éré faire de corps à corps, puifque cha<jue propriété échangtfe a éré balancée & fpécialemenc remplacée par la propriéré donnée en conrre-échange? N'a-t-on
pas pleinemem rempli tout ce que les loix anciennes avoient
prefcrir, puifqu'elles fe bornoient à exiger que les biens
baillés en conrre-échange fulfent capables de fupporrer les
mêmes charges que fupport0ienc les biens pris en échange?
L'Arrêt de 1S'S6 & celui de 1643 ne parlenr, ni directement" ni indireétement, de rappore d'Experts; ils exigent
feulement que les biens pris (l'n échange fupporrent les mêmes
charges que ceux donnés en (!Cnrre-échange. Or, ce point
d'e fait eH: prouvé aurhentiquement pat le tranfport de la
cotifation des biens roturiers fur les biens nobles. Peut-on
�DU
P AtA IS
D'E
P Il av Il Nell:
4711
trouver un rapport d'.eltimation plus exaa & plus -énergiqu.e
que .celui qui réfulte de la foumiiIion que l'emp'hytéote a
·paffé vis-à-vis.de la c.ommuna.uté, de fUppo.Tter fur le bien
noble les mêmes charges que fupportoit fon roturier, foumiiIion accepté.e par la Communauté & conltammenr exécutée? On .peut dire q.ue .dans ces circonHances ce n'ea:
pas feulement par deùx Exp.erls que l'eB.-ima~ion a .été faire ?
mais que c'eH par le corps en:tier .des hah-icans, ce qui la
rend bien plus amh.entique.
Les hoirs de Mr. le Duc .de Villem-y font à l'abri de
toute recherche pour .de p,rfte.odus .ar.rérages :de tam.es fous ,
un autre point de .vu.e. Ils en font 11 l'abri, non (eule~ent
à raifon des fufdits échanges, mais .encore à .raiEou de Ioute's
les autres acquilitions quel.conques faire·s par le.urs auteurs
avant l'Arrêt de 1702, & cela parce qu'.en 'IcG19 leuTs auteurs formerent leur demande en corn.pen[ataon:; .que t:ette
demande fut foleinneUement acceptée & mife à exéëution.
Cela conlte par les délibéra tions de la (Communauté du
21 Oélobre 1618,13 Oélobre.& 3 Novembre 16.19. LOaf-.
fereion de dix Députés qui rendirent cpmple. au .Confeil
général d'une commiiIion dont ils avoient été Chargés par
une délibération précédente, vallt .bien ceUe .d'un HuiiIier,
dont le minrltere n'étoit pas néçe.ffaïr.e .à cette ép.oque,
puifqu'il ne Helt de\loon qlle .par- 1:Arrêt de èJ.7.0'J., ainli que
la demande Iibe11ée & 1a nOlification -aux Procureurs du
Pays. Il fuffifoit auparavant que l'intention d'ufer de la CompenfatiOl) fût manifeHée en ..quelque rnaniere que ,ce fÎlt, .afin
qu'eUe opérât fon effet, dès qu'il y a.V.ojt rnatie.re à cornpen fer. Ce ne fut que cinquante .am; a:piès .que l'Arrêt de
1668 impofa l'ohligation aux S.eigneul's 'd'.offrir en plein
L.onfeil la compenfation, afin de 'mettœ en demeure les
Communautés qui n'auroient pas fait inférer dans -leurs ca'claltres les biens nobles aLiénés. Il eU: de maxime -qu'a.vant
1702 le minÏ'fiere de la Jullic.e n'.étoit pas néce1faire ni pour
'les .demandes .en cornpen!àoion, ni !pour leur tConlfornma;~ioD. C'ef!: .arnfi .que.la Cour Jl'a. décidé par !'Atrêt du 27
\
.
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~z
J6URNAL
Juin 170') , en faveur du' Seigneur de Neoules, par celui
'du la Juin 171 r, en faveur du Seigneur de Gaubert, &
par celui du laMai 1731, en faveur du Seigneur d'Auribeau..
On ne pourrait fe former au cas préfent qu'une feule
difficulté raifonnable: ce feroit de favpir fi lorfque Mr. le
Duc de Crequy forma fa de,mande en compenfarion en r 6 1 9.,
à laquelle la Coq:munauté fit droit provifoirem.enr, il Y avoic
ou non aifez de mariere pour el'l faire l'application; mais
là-deifus il dl:' prouvé par titres que le feul domaine du
Réal démembré du fief avant 1619, & inféré dans 'Ie cadailre, abforboit alors, & a blàrbe encore auTourd'hui fix fois
plus de biens, fait en valeur, fait en contenance, que' n'en
comportent tous' ceux que la Communauté veuc faire dé·clarer roturiers. Si malgré cela il falloic f9Ppofer qu'il n'e!l:
pas, prouvé qu'il y eût en 1619 une matiere fuffifante pour
]a 'compenfation, il faudrait attendre que l'application en
fi'!t faite, pour décider s'il peut être dû des arrérages de
tailles, ainfi que la Cour l'ordonna par J'Arrêt du Bar. .
On. ajoutait que le domaine appellé le Tourre!, compris
'dans l'article IZ du rapport, ne pouvait y fubfifter, parce
que ce domaine fut repris par Mr. le Duc de Crequi par
aae du 9 Juillet 16z'), comme ayant été démembré par
la ,Dame de Lefdiguieres qui n'avait aucun pouvoir; la
Communauté a rendu un témoignage éclatant de la \ fin-.
cérité de l'aae qui a déclaré l'aliénation nulle, en laiffant
reprendre fa nobilité primitive au domaine qui en était
l'objet, & qui effeaivement ne pouvait pas J'avoir perdue
par une <iliénation faite fans. pouvoir. ,Elle a perfévéré
dans cerre reconnoiifance publique pendant des fiecles. Il
en eil de même des deux ferrages qui compofent les articles
14, 18 & 19.
- ,
On répondait pour la Communauté, qu'il ell de l'eifence
de la compenfation en matiere de tailles, que la demande
.en foit libellée, eeft-à-dire qu'elle fait appuyée d'un-état que
~a Communauté puilfe admettre ou comeHer, relativement à
•
la
�DU
PALAIS
DE
PRO'VENCE.
473
la légitimité des objets compenfables. Cecce formalité n'a
pas été feulement introduite par l'Arrêt de 1702, elle étoit
-néceffitée par la nature même de la chofe; il falloit prévenir les inconvéniens d'une demande qui ellt été formée
en bloc, & il ellt été fouverainement injuO:e que l'on ellt
obligé une Communauté à vérifier quels étoienc les biens
que le Seigneur pouvoit compenfer, & ceux auxquels la
compenfation devoit être appliquée; cecce obligation ne
devoit & ne pouvoir être impofée qu'au Seigneur lui-même;
la demande en compenfation de fa part a toujours été
regardée comme une forre d'exception. Or, comme la Communauié eH foumife à prouver la juO:ice de fa demande,
'il a fallu dans rous les temps que le Seig'neur [ufiifiât à
'fon tour fon exception, c'efi-à-dire, qu'il préfencât un érat
libellé contenant les biens roturiers auxquels la compenfation devoit être appliquée. On ne voir pourtant rien de
fer:pblable dans la prétendue compenfatio'n du Seigneur; il
fuppofe qùe la feule infertion dans le cadafire des biens
échangés renfermoit le vœu de jouir de la compenfation &
l'admiffion à icelle; c'efl:-àdire, fuivant ce fyfiême, que
quoique la compenfarion foit une forte d'exception introdLlite en faveur des Seigneurs, elle n'avait pas befoin d'être
propofée pour être admife. Si l'intention peur opérer quelque eJFeè, ce n'eO: pas fans contredit dans un Tribunal
humain, où le feul fait peut faire la matiere d'un jugement. Tout ce qui ne fe manifeHe pas par des aétes, toLlt
ce qui n'appartient qu'au domaine de la penfée, n'dt point
du relTort des Tribunaux.
En fait, il eO: conHaré au procès par une foule de comptes tréforaires, que le Seigneur écoit allivré, qu'il payoit
la taille pour divers biens roturiers qu'il pofTédâir. Il dt
'vrai que l'on trouve quelquefois dans ces mêmes comptes
une décharge en faveur du Tréforier pour les tailles dues
par le Seigneur; mais il eH en même temps à remarquer
que cette fufpenfion de paiement n'écoit occaiionée que par
,quel,gues procès pendants fur cet objet entre le Seigneur &
de
Années
ln)
& jùiv.
000
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t
la Communauté. Quand même il feroit vrai que Mr. le Baron
de la Tour-d'Aigues Ii'eût point été fournis au paiement de
la taille, il n'en feroit pas moins certain en droit, que la
négligence 'des adminiftrateurs n'a pu tourner à fon profir.
L'intérêt de la Communauté, la nature de la créance qui
fe reriouvelle tOlires les années, les difpoutions des loix
particulieres fur certe matiere, qui déclarent imprefcriptible
le droit des Communaurés à cet égard malgré tout le laps
dû tems, tout cela rendroit néceilàirement inutile l'obfervation de Mr. le Baron, fi d'ailleurs elle n'étoit inexaél:e
en 'fait.
Pour ce qui ellde l'égalité de valeur que le Seigneur fuppofe avoir exifl:é dans tous les échanges, on doit obferver
que cette prétendue égalité ell: démentie par une foule de
pieces verfées au procès; on y \'oit que les biens donnés
par les prédéceJTeurs de Mr. le Baron font fouvent inférieurs en valeur à ceux qu'ils avoient reçus. D'ailleurs quelfe
foule d'abus n'eût pas préfenté cette méthode, s~il avoix, été
permis aux Seigneurs féodaraires de procéder à une compenfat ion dans cette forme! Il ellt dépendu d'eux de qualifier
du mot .d'échange toue aél:e d'acquifition; J'égalité en valeur
fuppofée auroit dans tous les temps [auvé les vices d'une
compenfation frauduleufe & illégale.
Il n'eH pas poffible d'après la difpofition même de, l' Am~t
de 1556, de fuppofer que les compenfations aient pu [e
faire fans les avoir préalablenient jull:ifiées par Ull état. Une
ellimation préalable, une vérification de valeur faite par
des gens à ce connoiJTans a toujours été nécefTaire, foit
poll:érieurement à l'A rrêt de 1668, foit lorfqu'il n'exiŒoit
d'autre loi que l'Arrêt de 1556. En confultant ce dernier
Arrêt, on y voit que les compenfations ne pouvoiént avoir
lieu que de corps à corps, & non in confufo, enfuite d'un
rapport expérimental, qu'il falloit que J'écu valllt J'écu, &
le [olle [01. Il Y eU dit que les Seigneurs payeroient la taille
des biens roturiers par eux acquis, fi ce n'el!: qu'au lieu &
place de ceux-là ils euJTent baillé aUtres biens par eux pof,,;
�DU
P ALÀ1S
DE
PR.OVENCE.
47~
Cédés, francs & qùittes defdites tailles: lefquels 6iens feront
fuffifants & tenus de porter pareilles c!zarges. Une efrir;1l3tion
préalable des fonds nobles & des biens rotoriers a toujours
été néceffaire, comme tenant à l'effence de la compenfation,
qui de fa nature réquiert une parfaite égalité. Or, commene
eût-il été poffible de gatder entre les fonds échangés ce
jufte équilibre, s'il eût été permis aux parties contraétantes
de fixer elIes-mêmes arbitrairement le prix de la valeur de
chaque fonds?
Le nombre des Arrêts qui font intervenus filr cette ma- 1
tiere, ne laiffent aucun <loure' fur cet objet.. La Cour des
Aides a toujours caffé les aétes portant affranchiffement de
tailles, même par voie de compenfation, lorfqu'elle n'avoit
point été précédée d'un rapport efiimatif. II eft encore à
remarquer que ce n'ellt poim été affez que les Experts euffent eux-mêmes prononcé fur la vakur des fonds, tanr nobles
que roruriers, s'ils ne s'étaient portés fur les lieux pour en \
faire l'eftime & la prifée. II efl: inutile d'alIéguer que l'<Jbjet
de la loi eil rempli dans les contrars d'échange, vu que le
bien noble qui paffe fur le cadafire, eH d'égale valeur avec
le bien qui en eft retiré. On ne conte fie point que dans un
aéte d'échange il ne puiIfe y avoir accidentellement entre
le fonds noble donné par le 'Seigneur, & le fonds roturier
donné par le vaffal, une parfaite égalité; mais il ne fuit
point qu'on doive négliger les formalités qui ,ont eu pour
objet de s'affurer de la vérité, en prévenant l'inarrention
ou la fraude. II fuffit au conrraire que l'intérêt de la Communauté puiffe êrre léfé par une fixarion arbirraire, pour
qu'on doive regarder le rapporr d'experts porrant vérification
de la valeur des fonds, comme indifpenfable, comme renant
à la nature de la chofe, c'efi-à-dire, comme effentiel à la'
compenfation elle même. Auffi voit-on que les Syndics de
la nobleIfe dans leurs défenfes, fur lefquelles efi intervenu
l'Arrêt de 1702., ne difiinguoient point le cas d'échange de
roure autre acquiution. L'une & l'autre forte de contrats
fe trouvent confondues dans la dénomination générique du
0 0 0 2.'
•
�'47~
70
V Il N A, t
mot aliénation. Cette exprelIion n'a été employée par les
Syndics. de la oobleife & par le Souverain que pour déligner
un remplacement, une fubrogation d'un fonds à un autre.
Le contrat d'échange fpécifiquemént n'ell pas d'une nature
_ privilégiée; les mêmes formalités qui rendent yalide une
compenfation pour les biens vendus, doivent être obfervées
pour les bieQs échangés.
.
Le laps du temps n'ell du tout point à conlidérer. Cette
maxime eft renouvellée par l'Arrêt de, I702. En effet, il n'a
jamais dépendu des Communautés d'affranchir illégalement
à leur gré les Seigneurs de la taille par voie de cômpenfation Oou autrement. Le Roi feul, dit Ml'. Lebrer-- en foo_
aaion 22, en a le droit, parce que la taille eH au Roi, &
qu'elle ell, ainfi que l'obferve Mr. de Clapiers, au nombre
des l'egaIes, inter regalia. D'après ce principe ,'le grief étant
perpétuel & fe renbuvellant tous les jours, la Communauté
de la Tour-d'Aigues 'n'aurait pas befoin de prendre des lettres de refcilion contre la prétendue compenfation ancienne
qu'on lui oppo[e. Le laps de temps, le lilence, la prétendue
adhélion, tout cela ne [eroit d'aucune conlidération dans
une matiere de droit public, où la nullité eil: _déclarée 'de
plein droit, avec la c1aufe nonobjlant tout laps de temps,
ainli qu'il eil: porté par l'Arrêt de l 702; & c'eil: ce qui a
été jugé par les Arrêts rendus contre les Seigneurs de Greoux
& de Neoules; il en ef!: un troifieme rendu au rapport de
Mr. de Marguaillet le 6 Mars l 706, en faveur de la Communamé de Seillans, qui caifa un affranchiifement de tailles
nonobf!:ant plufieurs Arrêts, tant du Parlement de cette Province, que du Parlement de Paris.
Il eft donc de maxime certaine que tous aaes ou jugemens porrant affranchiifement de tailles, même par voie de
compenfation, lorfqu'elle n'a pas été précédée d'un rapport
ei1:imatif, font déclarés nuls & invalides. Dans ce cas,
fi les Seigneurs one quelque compenfation à faire, ils doiVent en former la demande fuivant les regles prefcrites par
l'Arrêt de I702. C'eH précifémem la réfetve portée en
�~ B.
_
471
faveur de Mr. le Baron de la Tour-d'Aigues par l'Arrét de
1758. Si quelques Arrêts ont jugé qu'un affranchilfement
de tailles' fait par voie de compenfation devoit être entretenu, ce n'efi que parce qu'il exifioit un rapport d'Experts
qui confiacoit -la prifée & l'efiimation des biens nobles &
des biens roturiers. Tels font les Arrêts du Seigneur de
Gaubert contre fa Commnnauté, du 10 Juin 1711, &
celui du fieur d'Eymini Seigneur d'Auribeau, rendu au rapport de Mr: de Bœuf le 10 Mai 1731.
Sur quelle preuve le Seigneur de la Tour-d'Aigues fonde-t-il fa compenfation? Sur diverfes délibérations de la
Communauté, dans lefquelles on rapporte 'que le Seigneur,
ou la Dame de Crequi fa procuratrice , defireroit compenfer fes biens roturiers. Ces délibérations forit en date
du 21 Oaobre 1618, 13 Oaobre 1619, & 13 Novembre
de la même année; l'on y verra fi les diverfes énonciations qui s'y trouvent inférées, peuvent renir lieu d'une
demande légale, de la rérniffion d'un état des biens nobles
aliénés, & d'une efiimation préalable faire par un rapport
d'Experts. Tant que ces objets n'auront point précédé la '
prétendue ~ompenfation dont il s'agit, il fera vrai de dire
qu'il n'e'n exifie point.
La lacération des regifires & l'inexifience de certains
c.adalhes ne font pas pour Mr. le Baron un moyen plus
viaorieux. Ce n'efi point par de tels faits que l'on établit
une compenfation légitime. Les regi/ires ont été en effet'
lacérés; quelques cadafires manquent; il exifie même au
procès des pieces communiquées par la Communauté, def.
quelles il réfulte qu'elle s'écoit pourvue contre divers particuliers pour en obtenir le rétablilfement ; ce qui démontre
que la foufiraaion qu'on lui impute n'écoit point fon ouvrage.
Mais de ces citconfiances il ne fuit point que la. prétendue
compenfation dont le Seigneur de la Tour-d'Aigues excipe,
exiflât ni dans ces délibérations, ni dans ces regiflres•.
D'ailleurs depuis quand une compenfatiotl efl-elle inférée
~ans les regiftres des délibérations? Depuis quand la Corn,;
DU
1
PAL A t S
]) B
PR.O V B N
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J ô U RNA L
r , Ci
,
munauté doit-elle fournir au Seigneur des preuves' de fon
el\ception? De toutes èes réflexions il réfulte que Mr. le
Baron, de la Tour-d',Aigues n'el]; point recevable il: s'élever
contre 'l'Ar,rêt ~ui erdohne l'en,èadaGrement des biens roturiers qu'il polfede; q.u'il ne peut à la faveur d'un fyGême
erroné en élu,der les C1ges difpofitions; qu'il n'y a jamais
eu de fa part, antétieurement à l'Arrêt du Confeil de
1668, au'Cune compenfadon; qu'eût.elle 'exi{té, il faudroit
aujourd'hui la calfer, p·arcè qu'elle ..n'avoit été précédée ni
d'un ét-at des bieris nobles aliénés, ni d'lm rapport d'ExpertS' qui à l'~poque du 1) Décembre 1')) 6 étoit de l'ef{enGe de tElme c(lmpe~lfation.
On dik:lltoit enfilite tous les arricles qui devoient entrer
'dans l'alIivrement du Seigneur; & l'on difoit fur les articles 12, 14', 18 & 19, que la Dame de Bonne, procuratrice 'du D~c de Crequi fon époux, donna à nouveau bail
le domaine, du-· TOl/rret qui éroit d'une mince utilité par
l'infertiliré du fol; tout y étoit en friche; quelques chênes
en formoient la principale valeur. L'énonciation de l'aae
de nouveau bail défigne :Ilfez. quel érait en 1619 l'état de
ce domaine; ce fut l'augmentation que les déti-ichemens
procurerent à ce domaine, qui obligea le Duc de Cr.equi de
rentrer daris fa potfeffioh; en conféquence il attaqua l'aae
par défaut de pouvoir & par léfion, & en obrint la caffation. Il eft à obferver que ce nouveau tranfpon ne fut fait
qu'après unè jouiffunce de fept ans, c'elJ:-à-dire, gue ce
ne. fut qu'après un efpace de temps auffi confidérable que.
'la Dame de Lefdiguieres, en qualité de procurarrice du
Seigneur, prérendit 'qué ce domaine avoit éré aliéné fans
pouvoir; qu'il n'avoit point perdu le caraaere de nobilité
qui lui était propre, & qu'à ce rirre il devait êrre affranchi
de la raille.
La Communauté a pOllr elle le fait énoncé dans l'aae,
c'elJ:-à-dire, le corps matériel de la ratificarion; c'eft au
Seigneur à prouver qu'elle manque du caraaere qui doit
la rendre fans effet; s'il eft hors d'état de rapporter cetre,
•
\
�DU ·PALAIS
.DE
4'9'
PROVENCE;
preuve; il faut nécelfairement qu'il reconnoilfe que la
Communauté a non feulement en fa faveur l'atte primordial, mais encore l'atte de 1620, qui confia te une ratification exprelfe. Le Duc de Crequi n'avoit été grev"é d'aucune fubfiitution capable de le faire annuller. Et il n'efi
pas raifonnable de penfer que lorfque le Duc de Crequi
permettoit à fa procuratrice. d'emprunter telle fomme de
deniers qu'elle aviCeroit nécelfaire, il n'eût pas voulu lui
lailfer la liberté de faire des améliorations qu'elle jugeroit
profitables au fief; l'abus du pouvoir eût été fans contredit
beaucoup plus à redouter dans les aaes d'emprunt que dans
ceux des nouveaux baux.
;
. :J;'ar Arrêt du 21 Juillet 1778, -au .rapport qe Mr. le Confeiller de Miolis, la Cour des Aides rejetta les nns ou
moyens en compenfations prétendues par le Baron de la
Tour-d'Aigues, anciennement opérées tant par voie d'échange & de la chafe av.ec elle-m.ême, qu'en vertu de la
délibération du 3 Nov.embre 161'9, fauf à lui de pourfuivre
.en conformité de l'Arrêt du 6 Juin 17)8, & en exécution
d'icelui faire valoir fa prétention aux formes de droit; condamna les hoirs du Duc de Villeroy à la garantie à raifon
des arrérages de taille courus & échus avant l'atte de
vente de la terre .de la Tour-d'Aigues paffé le 7 Juillet
I7T9, avec intérêts depuis le 31 Janv·ier 177) , & condamna chaque partie aux dépens la concernant, Ecrivant,
.Mes. Aude, Pochee & Meiffret.
,
�JOt1RN'AL
ARR Ê T
LV J J.
En matiere de fraude ou de délit, le maître n'eJl pas tenll
du fait perfonnel il fon domejlique, & 'lui n'ejl pas relatif
aux fonaions qui lui font confiées.
L
Es fieurs Fanuccy & Bourre de la ville de Marfeille
potrédoient en' commun plufieurs magafins dans cette
ville, rue Sainte, & étoiént dans l'ufage de les louer aux
commerçans' pour l'entrepôt de leurs marchandifes; ils
avaient un concierge chargé de veiller à leur sûreté, de
louer ces magafins à fur & à meÎure qu'ils fe trouvaient
vacans, d'en retirer les loyers & de leur èn rendre comple,
moyennant les gages dont ils étaient ,CODvenus. Les Employ~s ayant f'iu qu'on avait tranfporcé dans ces magaiins
du fel de Sicile, y firl'(nt vifite affinés d'un Officier de ville, &,
trouverent en eff~t 'quarante-feptquincaux de faux fel,
dont ils déclarerelit la faifie au nommé Gras, concierge,
parlant à fa femme; il en fut dretré procès-verbal, donc
copie fut délivrée à Gras, avec affignation pardevant_ le
Vifiteur des Gabelles, pour voir prononcer la confi[cation
du faux fel, & (e voir condamner aux amendes, porcées...
par les Réglemens. Le Fermier préfenta enfuite une req-uête
incidente' cancre lés fieurs Fanuccy & Bourre, pour voir
dire & ordonner que les adjudications qu'il rapporterait
concre Gras, feraient communes & exécutoires concr'eux,
comme étanç civilement refponfables des faits & aél:ions
de Gras leur concierge & domeHique. Les lieurs Fanuccy
& Bourre préfencerent.de leur côté une requête en affiftance de caufe & garancie cancre la Dame Barbier à qui
Gras avait arrenté le magalin où le fel fur trouvé. Ils foutinrent enfuÎte que Gras ne pouvait être regardé comme
~omeHique à gages, du fait duquel ils dutrent répondre,'
attendu
�D U
PAL AIS
D Il
PRO v Il N C R.
48 l'
attendu que les magalins éroient arrentés à différentes per(onnes dans le cours de l'année, tantôt pour un mois, quel.que fois moins, & qu'enfin ils feroient bien malheureux, ft
ces divers locataires venant à y entrepofer de la contrebande " ils en devenoient refponfables. La Dame Barbier
ayant prouvé qu'elle ne ten.oit plus le magalin, qu'elle en
avoit remis les clefs à Gras & qu'elle l'avoit payé, ne
pouvait être aéHonnée, d'autant mieux que Gras avoit convenu qu'il l'avait loué au nommé Aufias, homme inCOllOU
& dont il ignoroit le domicile. Sur ces défenfes il intervint Sentence· qui prononce la confifcation du faux fel;
condamne Gras à l'amende de 100 IiI'. & aux dépens de
celte qualité; déboute l'Adjudicaraire de fa requête en commune exécution contre les lieurs Fanuccy & Bourre, &
ceux-ci de celle en garantie contre la Darne Barbier, &
condamne l'Adjudicaraire aux dépens de ces qualités. Appel
de l'Adjudicataire pardevant la Cour des Aides.
.
On difoit pour le Fermier, que fuivaot roures les loix
civiles, les maîtres font- tenus civilement de rous les délits
ou dommages caufés par leurs domefliques, commis ou
prépofés dans les fonttions où ils les emploient. La Loi·
Aquilia en contient la difpolition expreffe. Ferrieres dans
-fes ouvrages la rapporte commè: pratiquée dans le Royaume,
& faifant partie du droit françois. Imbert la cite également
dans fes infiicuts, & Bugnion dans fes' traités:-- Elle eH:
également rapportée comme faifant partie de la jurifprudence françoife, dans le commentaire fur l'Ordonnance de
• 1670 par Jouffe. L'Ordonnance du Roi François Premier
de J'année 1') ') 4 en contient la difpoIition expreffe, en
difant que les maîtres nobles ou r'oruriers feront teous des
délits de leurs valets pou r les peines pécuniaires prononcées
contr'eux. Den'ifan dans fes collettions de jurifprudence.,
aux mots délits & maîtres, rapporte encore ces mêmes
difpolitions , & citè à cet égard plufieurs Arrêts qui y font
conformes. Potier de Livoniere dans fan traité des obligatians, & Serres dans fes inftituts du dtoit françois, IiI'. 4 ,
Ppp
Années 1775 & fuiv.
�~I
]OURNAt
tir. 8 de noxali~us ac7ioni1ms, tiennent le méme langage:
Les lieurs Fanuccy & Bourre étoient obligés de convenir
que Gras leur concierge ou leur domef1:ique agi1Toit en leur
nom; qu'il étoit leur prépofé; qu'il affermoit pour eux les
magafins ; qu'il en retiroit le prix des loyers, & qu'il leur
en tenoit compte. Il réfultoit delà que Gras agi1Toit au
nom des lieurs Fanuccy & Bourre qui éroient obligés de
tenir les engagemens faits par leur préporé en leur nom,
comme il les obligeoit pour raifon des baux qu'il pa1Toit ,
ils étoient devenus refponfables de toutes les aél:ions relarives à l'objet de la commifiion dont il étoit chargé.
Ce n'eH pas feulement en contraél:ant que. les prépofés , .
.obligent leurs commettans. Quiconque a commis quelqu'un
à quelque fonél:ion, efl: refponfable des délits que fon préporé a commis dans l'exercice des fonél:ions auxquelles il
eft pré po ré. L. ~ , §. 8, ff. de inJl.
Cette obligation
des commettans eH une obligation acce1Toire à l'obligation
principale du préporé qui a commis le délit. Telle eH la
jurifprudence adoptée & fuivie dans, tout le Royaume; elle
eft prefcrite par les Ordonnances de 1680, 168 l & 1687,
rendues fur le fait des fermes & gabelles du Roi. Ces
difpolitions ont été renouvellées par plufieurs Arrêts du
Confeil , notamment par l'art. 'î de la Déclaration du Roi
du 30 Janvier 1714, qui déclare les maîtres des maifons,
enfemble les peres & meres, refponfables c.ivilement &
folidairement des condamnations qui feront prononcées
contre leurs domeHiques ou enfans mineurs, pour fraude
ou complicité. L'exé'curion de cet article a été enfuite ,renouvellée par Arrêt du Confeil du t6 Novembre 1.734,
& confirmée par autre Arrêt du Confeil du 22 Janvier
177 1, qui condamne le lieur Beaumartin, Courtier royal
à Bordeaux, & le nommé la Lanne fon domeftique, chargé
de la garde de la mairon· où il fut trouvé du tabac, chacun
folidairemenr en iooo liv. d'amenùe. Par autre Arrêt du
Confeil du I I Août 1772, Sa MajeHé ordonne que tous
propriétaires ou locataires, fans exception, & abftraél:ion
aa.
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PAL A -1 S
D :Il
PRO v Il rl" C E.
483
faite de toutes confidétations, feront re(porirables de la
fraude trouvée dans leurs domiciles, ,&, roumis à la confircation & à l'amende.
D'après des autorités auffi précires, les {jeurs Fanuccy
& Bourre n'ont pu être déchargés de la garantie à rairon
des failS de leur dome!1:ique ou préporé à la garde & régie
de leurs magafins., d'autant plus que Gras leur concierge
ou dome!1:iqlle n'a pu juHifier d'aucun bail qui pÎle faire
·co.nnoÎlre un locataire. Le magafin étoie donc alors entre
les mains des {jeurs Fanuccy & Bourre, ou 11 leu"r difpofition, ou à celle de leur agent qui leur efr identifié. Les
intérêts de Gras n'ont donc pli être féparés de ceux des
fieurs F annucy & Bourre, propriétaires du magafin où la
contrebande a été faifiè; on n'a pu condamner Gras, fans
foumettre [es maitres ou commerrans aux condamnations
prononcées contre lui, comme garant des délits qu'il peur
comn1ettre. Par une fuire de cette conréquence, l'Adjudicataire, en gagnant le premier chef de la Sentence, n'a pu
être condamné par le recond, & n'a pas dîl fupporter les
frais de ce fecond chef qui devoie fuivre le premier.
On répondoit pour les fieurs Fanuccy & Bourre, que chez
les Romains le maître était tenn du délit de fan efclave,
c'e!1:-à-dire du dommage que fon efclave avoit caufé par fon
délie, 'fi mieux il·n'aimoit l'abandonner; mais nos demefliques étant libres, les a8:ions noxales qui s'exer~oient chez
les Romains ne font pas re~ues parmi nous. 11 répugne à
la raifon, à l'équité & à toute idée de jdl:ice de punir quelqu'un pour le délie d'autrui. Ce principe, gravé dans le cq;:ur
de tous les hommes, efl d'ailleurs établi par une belle loi
des Empereurs Arcadius & Honorius, que l'on trouve fous
la rubrique du code de pœnis. C'e!1: la loi 22 qui s'exprime
en ces termes: fancimus ihi effi pœnam, uhi & noxia efl.
Propinquos notos, familiares proClll a calumniâ f'uhmovemus,
quos réos fi.:eleris focietas non facit. Nec enim adjùlüas vel
amicitia nefarium crimen admittunt. [Jeccata igitur fuos teneant auRores, neC ulterius progrediatur metus qi/am repePpp2
,
,
�494
10UIlNA!: -
riatur ddic7um. Hoc fingulis qui6ufque judici6us intimetur:
Il efl: vrai qu'il ne fuffit pas de n'avoir pas commis foi.1
même le délit & de n'y avoir pas participé direél:ement,
pour êlre irrépréhenfible. On efi en faute, quand on y participe indireél:emeilt; & quoique moins coupable, il dt'jufie
que l'on répare autant qu'il efl: poffible le mal qu'on auroit
pu empêcher; le bon ordre l'exige. Delà vient qu'en certains cas les maltres font civilement refponfables, [uivant
nos ufages, des dommages & des délits commis par leurs
domeHiques; delà vient que les peres [ont civilement tenus
- des dommages & des délits commis par leurs enfans mineurs. Le maître a un droit d'infpeétion [ur [es domeili'lues, le pere [ur [es enfans mineurs; ils doivent en u[er
:pour veiller· fur lellrs aél:ions; s'ils ne le font pas, leur négligence eU: condamnable.
On vient de dire que ce n'cil qu'en c~rtains cas que le
maître dl:. civilement re[ponfable .du dommage ou dù délit
commis par fes domeHiques; & l'on n'a- pas fait cette diftinél:ion pour le pere, à raifon du délit ou du domm~ge caufé
par [on enfant mineur. Cette différence eil fondée fur ce
que le maître a moins d'auforité [ur [on domeltique que
n'en a le pere [ur l'enfant mineur. Celui-ci eH entiérement
fous la puiifance & la difcipline de fon pere. Le domeHique au contraire eH en" quelque maniere libre & indépendant. Le pere peut & doit veiller toujours fur la conduite
de [on enfant. Le maître' ne peut veiller ,fur [on domefiique, qu'autant que les aél:ions de celui-ci [e paifent fous
[es yeux. La reg!e [ur ce point efi donc que le maître répond civilement des aél:ions & des délits de [on domefiique
ou de fon prépo(é, lorfqu'ils manquent en remplilfant les
fonél:ions qui leur (Ont affignées, lor(que leur délit a un rapport direél: & eifentiel avec ces fonél:ions; mais dans tout
autre cas, c'eH-à-dire, lorfque le délit ou le dommage
commis par le domefiique lui el!: enriérement per[onnel ,
lor(qu'on ne peut pas même pré(umer que le maître en a
eu connoiifance & l'a amori(e ou toléré, celui-ci n'en efi
�DU
PALAIS
DB
PROVENCE:
48,
& ne peut pas en être tenu. Mornac fur la loi 32., if. de
noxali1Jus ac7ioni1Jus, s'exprime en ces termes: adverte tamen
teneri hodiè dominum de fac10 & ddic10 fèrvi, fi fèrvus deliquerit in eo officio ac miniflerio cui illum prœpojùit; in aliis
non tenetur. Cet Auteur ajoute que telle ell: l'opinion de
Bilrtole. & la regle que l'on fuit en France. La regle qui
déch~rge les peres de route recherche pour les délits de
leurs enfans majeurs, nous eH arrefiée par Mr. de Bezieux ,
liv. 7, chap. 4-, §. 2, pag. 556, & par Boniface, rom. 1,
liv. 8, tit. 15, chap. 1, pag. 558.'
L'Ordonnance de 1680 filr le fait des gabelles, art. 6;
tit. 17, pane que les peres & meres feront refponfables.civilement & folidairement de leurs enfans mineurs demeuraLlt avec eux & non mariés qui feront le faux - faunage.
Celle de ,68 l ne renferme aucune difpofition relative à la
queftion. Celle de 1687 fur le fait des cinq groifes fermes,
art. 19, tit. 14, porte que" les marchands & propriétaires
" dèS marchandifes) feront refponfables civilement du fait
" de leurs faél:eurs, ferviteurs & voituriers, en ce qui con!, cerne les droits du Roi, les confifcations, les amendes
" & les dépens. "
La premiere loi ne condamne les peres & meres à répondre civilement du faux-faunage de leurs enfans , qu'en
tant" qu'ils feront mineurs, non mariés & demeurans avec
eux; de forte que fi les enfans font majeurs, s'ils font mariés, & fi, quoique mariés, ils ne demeurent pas avec leurs
peres & meres, le Légiilateur ne veut pils qu'il y ait lieu
à la garantie contre 'teux-ci , parce que dans ces divers cas
les peres & meres. n'ont plus le pouvoir 'ou la liberté de
veiller fur la conduite de leurs enfans, & ne peuvent être
préfumés complices de leur fraude. Il ne réfulte autre chofe
de la feconde, fi ce n'eH que les maîtres ou propriétaires
des marchandifes répondent du fait de leurs prépofés, fervireurs ou voituriers, fi ceux-ci fone trouvés avec des marchandifes prohibées ou dont ils n'auraient pas payé les
proits, parce que dans ce cas le ferviteur, prépafé ou voi-;
..
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JOURNAL
tuner· délinque dans l'exercice des fo nél:ions qui lui [onc
confiées; qu'i.! dl: cenfé agir de l'aveu & par les ordres du
maître ou propriétaire à qui la fraude profitait, fi elle n'écoit
pas découverte.
Une Déclaration de 1688 rend les maris, qui auparavant
n'étaient pas fou mis à cette garantie, civilement refponfa- .
bles des condamnations prononcées contre leurs femmes
pour faux-G1u)1age. L'arr. 4 de la Déclaration du 12 Juin
1722 renouvelle la difpofition de l'Ordonnance de 1680, qui
condamne les peres & nieres à la commune exécution des
amendes prononcées comre leurs enfans roineurs non mariés
& demeurant avec eux; tout cela eil: conforme à nos prin':
cipes. L'arr. 5 de la Déclaration du 30 Janvier 1714 ne doit.
s'entendre à l'égard du maître que .prout juris efl, c'eft-à. dire que comme rendant le maltre garant du fait de [on
dàmeil:ique, lorfqu'il fait la contrebande fous [es yeux Olt
dans fa maifon,' & de maniere que le maître ait au moins
à fe reprocher, finon fon approbation,. du-moins fa négligence. Les difpofitions des Arrêts du Confei! des 22 Janvier 1771 & r I Août 1772, font déterminées par les mêmes
motifs. Celui qui habite une maifon, [oit qu'if en foit propriétaire, fait qu'il en foit locataire, efl: dans le cas d'être
recherché pour la contrebande qu'on y trouve J parce qu'il eil:
le chef de cene maifon, parce qu'il e~ a la police intérieure
& qu'il. a droit de furveillanc.e & d'infpeél:ion fur fa femme,
fur fes en fans , fur fes domell:iques; cela ell: dans l'ordre.
C'ell: le véritable fens qu~ l'on doit donner à l'Arrêt du Confeil du I I AmÎt 1772..'
Ainfi point de loi qui autorife le fyll:ême de l'Adjudicataire. Il a été trouvé de la contrebande dans un des magafins apparrenans aux fleurs Fannucy & Bourre; cela efl:
.vrai : mais ce magafin ne fait pas parrie de leur domicile, il
en ell: indépendant & éloigné; il écoit arrenté par eux depuis
long-temps à la DlIe. Barbier, par celle-ci au nommé Aufias,
qui y a remifé le faux fel dont il s'agit, fans qu'ils pui1Tent
avoir rien à fe reprocher fur ce point. Il eil: donc fouve\
�DT!
PALAIS
Dl!
PROVB.NCH;
487
Tainement injufie de vouloir les rendre refponfables de ce
fait qui leur eil: & ne peut que leur être parfaitement étranOger. L'emploi qu'ils ont confié à Gras confifie à louer
ces magafins à ceux qui en demandent, à leur en donner
les clefs, à reprendre ces' clefs lorfque les baux font finis.
Voilà à quoi fe réduifent les fonétions de Gras. Or, ces
deux confidérations ne donnent aucune prife fur les fieurs
Fannucy & Bourre, quand même il feroit prouvé que Gras
a lui-même repofé le faux fel dans le magafin dont il
s'agit.
En effer, d'un côté cet homme, fur la conduite duquel
les fieurs Fannucy & Bourre n'avoient aucune infpeétion i
n'auroit pas délinqué fous leurs yeux & dans leur domicile;
tout aurait été fait à leur infu & fans qu'on pût leur imputer la moindre négligence, la moindre faute. D'autre part,
le délit de Gras n'auroit pas un rapport direél: & effentiel
avec fes fonél:ions, a~ec l'emploi dont il était chargé. Ce
délit ferait un fait particulier entiérement propre & perfonnel à, cet homme. Les fieurs Fannucy & Bourre ne
l'avoient pas chargé de faire dans leurs magafins un commerce pour leur compte; fa commiffion n'alloit pas au delà
d'arrenter ces magafins, d'en donner les clefs en les ar-.
rentant, & de les retirer à l'expiration de chaque bail.
Arrêt du 2 Août 1778, au rapport de MI'. le Confeiller
de Miollis, qui confirme la Sente~ce, avec dépens. Ecrivant
Me. Laget, Avocat, & Me. Berenger, Procureur.
�JOURNAL
ARRÊT
LVIII.
Les donneurs il la gro.JJè fur facultés ne {ont pas oMigés de
fuivre. une infiance de Mnpce d'inventaire pour y faire
valoir l'hypotheque' fPéciale qu'ils ont fur ces facultés.
Des a.!foâés il quelques pacotilles qui n'ont ni hypotheque ni
privilege fùr li:s marchandifès fPécialement affeélées aux don.neurs il la gro.JJè, ne peuvent venir en concours avec eux
pour leur paiement.
E
N 1771 le Capitaine Jean-Baptille Mourardou de la
ville de marfeille, propriétaire & commandant le [enau
La Vierge de la Garde, entreprit un voyage en caravane pour
les· échelles du levanr. Les fleurs Faudrin & Bourlier, Jacqu~s Ventre & Jean-Pierre Franc lui donnerent de l'argent
à la groffe fùr facultés. Les lieurs Jean-BaptiHe Fabre &
Jean-Pierre Plalfe lui prêterent de l'argent [ur le corps, armement & derniere expédition du navire. Le lieur Fabre
chargea en outre diver[es marchandifes auxquelles le CapItaine Mourardou fut intéreffé pour la moitié; ce dernier chargea auffi pour (on compte des /llarchandifes filr lefquelles
il intéreffa le lieur Piaffe 'pour un lixieme; le Capitaine
Mourardou- conrraél:a d'autres engagemens; il fe rendit aux
échelles du levant, & mourut à Satalie.
Dans le cours de cette caravane, il vendit ·Ies marchandifes de fon chargement; il en acheta d'autres, les revendit,
& enfin à l'époque de fa mon il fe trouva quelques marchandiCes fur le navire & une plus grande quantité enrre les
mains des Srs. Roubin, Provençal &. compagnie, Négocians
françois, rélidans à Satalie, de!1inées à faire fan chargement.
Le lieur Gilly, Capitaine en fecond, ramena le navire à
en qualité de tutrice de fes
Marfeille
; la veuve Mourardou,
L
_.
.
enfans l
�,
DU
PALAIS
DI!
PROVI!NCI!.
489
'enfa ris j vendit pour payer les frais du défarmement; elle
promit de remplacer aux donneurs fur facultés les fommes
qu'elle avoit prifes pour payer le défarmement; elle vendit
quelque temps après le navire & leur donna des à-comptes.
r La DlIe. Mourardou avoit donné pouvoir au Capitaine Dauphin de retirer des fieurs Roubin, Provençal & compagnie
les march~ndifes qui étaient entre leurs mains, affeè1ées aux
donneurs fur facultés•
. Les donneurs fur facultés avertis de l'arrivée des marchandifes à Marfeille, préfenterent une requête au Lieute~ nant de l'Amirauté, par laquelle ils demanderent la condamnationdes Commes qui leur reHoient dues, avec des inhibitions .au Capitaine Dauphin de fe de/fail1r des marchandifes. Le Lieutenant accorda ces fins, & l'arrête ment flle
fait en conféquence. La DUe. Mourardou avoit déja préfenté une requête en bénéfice d'inventaire; elle impétra alors
des lettres, en vertu defquelles elle fit a/ligner tous les créanciers, & leur fit faire d"éfenfes de pa/fer outre à. aucunes
•
exécutions.
Les donneurs fiir facultés qui avaient déja formé demande
de leurs créances pardevant le Lieutenant de l'Amirauté,
·pourfuivirent & obtinrent une Sentence de condamnation.ils vinrent .enfuite dans le bénéfice d'inventaire pour y demander la diHraél:ion des marchandifes fpécialement affectées à leur privilege. Les lieurs Fabre & Pla/fe préfenrerent.
chacun de leur chef requête en diHn:él:ion tOut à la fois
du corps & des facultés; du corps, comme donneurs à la
gro/fe fur corps, armement & derniere expédition du navire i
des facf!ltés, comme a/focié~ fur les pacotilles. La diJ:tracrion demandée par les donneurs à la gro/fe fur facultés étaie
fondée fur la difpo.(itiol,l de l'Ordonnance de la Marine, rit.
des contrats il la groffi, art. 7, qui porte que le chargement
fera fpécialen.ent ail:i::él:é ao paiement des deniers pris pour
le faire. Les donneurs fur corps avaient le rpême privilege
fur le navire; mais comme affociés fur les pacotilles, il$
n'avaient aucun drai , aucun privilege fur les marchandifes
4nné~s c77 $ & j ù i l ' . Q q ~
�4~o
•\ ,
J~o t1 RNA L ,
,
qUI avaient été fan,cnées p<tr 'le. Capitaine Dauphin; ils ex':
:
; cipoient d'unel, p(j~tendl.\e propriété dont ils n'avoient point
de preuve; ils alléguaient que le produit de leurs pacotilles
a voit été confol1Ou avec les marehandifes qui apparte'noient
.au Cap,icaine MOIJrardou; les donneurs.j//r façultés,conteH~
rent cette de.manGe.; & par Sentence, du 17, Juillet 177P
le, Lieutenant,fit ,drait"lt la., c!ill:<;él:ion du, coip.s du navir,e.,
& débouta tant les donneurs fur facultés qbe les fieurs Fabre
& PlalTe, alTociés Iur les pacotilles, -de leur demande en dif_traél:ion, fauf li eux, de former leur demande ainfi qu'ils aviferqier1t dans: J!);lHahce. de rangement, & ,d'ê.tce ,pourvu fur
Jeu~ privilege. Appel dés donneurs [ur facultés, & intimation
contre la .véuve Mourardou.& .les 'fieurs Fabre & Pl3Jfe;
ceux-ci appellerent auffi in 'luantùm contrà dn' chef de lâ
Sentence qui les déboutoit de lenr demande en diUraél:ion
:fur les facultés, & déclarerent que le produit des facultés
.ferp-iç partagé entr'eux ,. tous 'au [01 la livrè de ce qui' leur
étQit qû, pour le furplus, s'il yen a.voit, réfl:er pour le c.ompte
<lu bénéfice d'inventaire', & la ve~ve Mourardou.comefl:a la
. difl:raél:ion.
,",
On' difoit pour les appellans, que la quefl:ion qui s'étoit
- élevée entre les donneurs à la groffe [ur facultés, & la veuve
.Moura,rdou, étoit toute décidée par l'Ordonnance, qui fixe d'une
maniere évidente b :'nà.ture, les effets & les privileges du
contrat à la 'grolTe. L'arr. 7 du titre S de l'Ordonnance~de
la Marine porte que le navire, fes agrêts & apparaux, ar-mement & 'lIituaille, même le fret, . feront affec7és par priviJege au princip.al 1& intùêt de l'argent donné fur corps & 'Il/Ille
.du vailfeau pour les Tl,éceJ/ités du voyage, ,6' le chargement au
paiement ·dés deniers 'Pris pour le faire.
Il efl: clair, d'après la difpofition de cet article, que les danneurs à la groffe fur facultés ont le même privilege [urles marchandifes, que les dOlJneurs [ur corps l'ont fur le navire, agrêts
&',apparaux, .armement '& vituailles. Mais le privilege' -des
uns & des autres affeél:e-t-il par hypotheque le navire'& les
marchahdifes? C'efl: ce qu'on induit aifément de l'auticle
,
�DU
PAL-Ars
n-R 1 PR:OVENCR.
491
fuivant, qui efi conçu en ces termes: ceux qui doimerollt deniers d la groffè au maître dans -le lieu de la demeure des propriétaires. fans leur confentement, n'auront hypotlzeque ni prilIiiege que fur la portion que le maÎtre pourra avoir au vai.f!eau
& au fret.
.
.,'
,.
Si le .donneur à 'Ia groffe dans cette efpece parriculiere
a une hyporheque privilégiée fur la. ponion' d maîrre, il
efl: également certain dans l'hypothefe générale qu'il a la
même hypotheque fur le navire ou les marchandifes, filivant ce qu'il a prêté fur coprs ou fur facultés, ce qui efl:
également développé dans les us. & couru mes de la mer i
chap. 20, arr. 1. Le~privilege des donneurs à la ~groffe fuv
le navire ou fur les facultés efl: donc une hypothlique fpéciale qui affeél:e fpécialeinent les effets mobiliers, rout de
même que l'hypotheque fpéciale du vendeur affeél:e fpécialemen.t l'immeuble q4'il a vendu. Tous les iAuc.eurs· qui Ont·
écrit fur cette matie.re, & enrr'autres. Toubeaudans fes infiituts
au droJt· ConCiliaire, liv., 2, tit. 8, pag. 3°2., établiffent les
mêmes principes.
•
.Le donneur à la groffe fur facultés a fans contredit une
hypétheque où privilege fpécial, puifque les denieIis fourni9
à ra groffe [ont employés à 'l'achat. des marchandifes qui
doi.vent f lui 'reHer fpécialement .hypothéquées, c'omme l'irnmeulilé reHe·-.fpécialemenr affeél:é. 'au vendeur pour l'acquit~enient 'du prix; il conferve jllfqu'alors une efpece de· propriété. Celle du donneur à la groffe eH fi évidente fur le'!>
effets qui ont' fa·it la matiere du contrat, qu'eh C<lS de perte
par cas (forruit, e'ne eH. à fa chatge, res perit, domino. C'efi:
las difpofition préoife de l'Ordonnance. Or, fi le donneur. à
la. gioffe "eH répuré propriétaire (j~s,"eff<Hs' perdus, il feroie
abfurde de fou tenir que cette 'proprié~é.ceffe, lorfqu'il s!agit
du paiement des deniers fournis a.la gro,lfe,.& que le prêreur .nla" iplus 1 qu'lm privilegè 'ordinaire .,' comme le prétend
Lic veuve 'Mourardou. Il:'e~ ,céri:ain' qùe ··!lomonnaYlce 'portant erp rermes exprès :qoe (les l'navires 'ou les' m~tè;hnodifes
{èrciient
affeél:és par 'privilege aux donneurs à' la groffe, u'a
...
•.Qqq2
.
,
�49~
10
U RNA L
pas ,entendu donner un privilege général qui aIfeél:àc .éga';
lement tous les biens fans en affeéler aucun en particulie.r,.
mais une hYPo,~heque privilégiée & fpéciale fur la chofe.
Pourquoi. les contefia(ions qui peuvent naître fur le pri- vilege ne doivent-elles être traitées que lorfqu'il eil quefiion
du rangement de tous les créanciers? Pourquoi différer jufqu'alors de fiatuer fur un privilege qui n'affeéle que la chofe,
& qui n'a rien de commun avec les biens de la difcu!Iion
ou du· bénéfice d'inventaire? En effet, de quelle coate{bHion
le privilege peut-il être fufceptible? Ou l'on agit en vertu
d'un privilege général, ou d'un privilege particulier; Si l'on
agit en vertu d'un _privilege général, alors il n'y a point de
diaraél:ion à demander, & l'on renvoit avec raifon dans le
bénéfice d'inventaire ou dans la difcuffion, parce que'le pri- vilege général affeéle la matre des biens. Mais fi l'on agit
en force d'un privilege fpécial, ce privilege n'a rien de
commun avec les biens de la difcu!Iion ou du bénéfice d'invel1taire; & dès-lors il faut fratuer féparément fur la demande en difiraélion, parce que le privilegé porte fur des
effets qui ne font point partie des biens de la maffe, &
qui. doivent être vendus féparémenr. L'on ne peut donc
j'envoyer que dahs le cas où il fera quefiion d'un créancier.
f.1ns privi!ege, ou n'ayant qu'un privilegè général. Lorfque
le créancier .a une hypotheque ou - un privi1ege fpécial, il
faut le lui adjuger rout de fuite. Si le créancier a une hyporheque fpéciale, le fonds fournis à l'hypotheque ne fait
point partie des biens du bénéfice d'inventaire. Il réfifl:e
,c;lonc à toute juaice & à rous les principes qu'un bien qui
ne fait point parcie de ceux de la maffe, ferve néanmoins
d'aliment aux frais d'une infiance générale, qui font toujours
payés par préférence aux créanciers même privilégiés' qui.
n'ont qu'un privilege général.
On obfervoit encore d'après Valin dans fon Commentaire
fur l'Ordonnance de la marine, qu'il y avoit de plein droit
une fociété entre les donneurs à la groffe, & celui qui empruntoit les deniers. Le donneur à la groffe participe telle...
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493
au profit & à la perte, qu'en cas de perte entiefe des
elfets, fon capital & les intérêts font perdus, comme il
gagne un change conlidérable lorfque ces effets arrivent au
lieu de leur dellihation; & dans ce cas le preneur a gagné
·par l'emploi des -deniers, tandis que le donneur gagne le
change. Le péril ell donc commun, tout de même que les
avamages; il Y a donc entre l'un & l'autre une communion
qui ell fenfible & qui ne peut être regardée que comme une
vraie fociété. Il ell de principe que l'affocié n'ell poillt obligé
de fuivre le bénéfice d'inventaire, & que la fociété doit être
liquidée avant tour. Les donneurs fur facultés, affociés de
plein droit avec le Capitaine Mourardou par la nature de
leur contrat ,n'ont donc point dû être obligés de fuivre le
bénéfice d'inventaire.; ils ont donc pu demander la dillraél:ion
. des effets fociaux.
Si Je Capitaine Mourardou avait eu à Marfeille d'autres
marchandifes que celles qui auraient compofé fon chargement, fi après fon arrivée i1 les avoit confondues de maniere
qu'il fût de toute impoffibilité de les féparer, on convient
qu'il n'y auroit pas eu lieu d'ordonner une chofe impoffible;
mais n'y ayant aucune confufion des marchandifes fpécialement alfeél:ées à l'hypotheque des donneurs à la groffe, avec
des marchandifes appartenantes à l'hoirie, & dans les circonllances ne pouvant y en avoir aucune, c'ell une 'dérilion
d'invoquer des principes dont on auroit dû femir l'inapplication.
Mais, dit-on, il Y a confulion _des marchandifes alfeél:ées
aux donneurs à la groffe, avec celles des affociés aux pacotilles. Pour qu'on puiffe dire qu'il y a confufion, il faut
prouver que parmi les marchand ifes alfeél:ées aux donneurs
·à la groffe, il y" en avoit appartenant aux affociés fur les
pacotilles; ces derniers ont été toujours,en défaut fur 'ce point;
mais euffent-ils prouvé 1eu'r propriété, la confulion de ces_différentes marchandifes ne devoit jamais fervir de motif au
Lieutenant pour renvoyer les uns & les autres dans le bénéfice d'inventaire;. ,'étoit une c,onrefiation pareiculiete à
�494
,
: Jou
RNA L
vuider entr'eux, de laquelle l'hoirie ne devoit profiter 'dans
aucun cas, puifque les effets confondus ne faifoient point
partie des biens de cette hoirie, & qu'ils en étoient abfolument diflinéts & féparés.
Sur la feconde qualité du procès on difoit qu'il étoit
dé,nontré que le donneur à la groffe avoit une hypotheque
fpéciale & privilégiée fur le navire ou les marchandi[es qui
lui avoient été àffeétées par le contrat à la groffe. Un [econd
principe nOn moins inconteflable, c'ea que le donneur à
la greffe n'a pas be[oin de fuivre l'emploi de [e's deniers.
S'il prête fur le navire, il ne lui ef!: pas moins affeété, quoi~
que l'argent n'ait point été employé: il en eH de même
~'jl prê,e fur facultés; le chargement eH fpécialement hy,pothéq:lé, quoi-que le preneur fe foit fervi des deniers à la
greffe pour tout autre objet que 'c,elui du chargement. Cette
maxime fut confacrée par, un Arrêt rapporté _par Boniface,
tom. 4, pag. 'lOI. -'
Ainfi tout comr}1c, le donneur fur corps, armement, avituaillement & dernieres expéditions n'eH pas obligé de
prouver que l'argent fourni à la groffe a été employé à ées
objets" le donneur fur' facult~s n'eH pas obligé de prouver
fpécifiquement que fe's deniers ont été, employés à telle oU
'telle autre marchandife; .il fuffit qu'il y ait des marchandifes
appartenantes au 'preneur, POUt que le donneur fur facultés
puiffe y appliquer fon privilege, & ces marchandifes font
cenfées appartenir au preneur lorfqu'il les a payées; car le
donneur à la groffe fur-facultés n'a de concurrence à craindre
)
que celle dll vendeur. _ .,
Comme-nt dire .avec, ',quelque fondement que les fieurs
Fabre & Piaffe ont ,un d-toit .de pr:opriété -fur les marchan.J
difes dont il s'agit.? Ce ne font pas .les mêmes qui ont
compofé la, pacotille..,<,puifqu'il eft convenu qu'elles ont été
vendues, & que le Oapitaine Mourardou en ,a -retiré le mon..l
tant: dès-lors t'ouce a1frion de.<propriété eH perdue. Ces mar~ .
cha'ndifes ont été vendues pour' Ie;"compte- de- la [ociéte;
il ne leur cOOlpétoit plus qu'une' aaion pétfonnelle contre
�DU P AL AIS
Dl! PRO V l! N C ~;
~Ieur,atrocié,.qui:s'exerce fur la perfonne, & non fur la
49f
chofe.
En fuppofant que le Capitaine Mourardou eût acheté du produit de la pacotille les mârchandifes fur lefquelles les fieurs
Fabre & Piaffe demandoient d'être payés en concours, leùrpropriété fur ces marchandifes ne feroit pas mieux conftatée~
pa-rce que non feulement ils ont à prouver qu'elles ont été
achet~es du produit des pacotilles, mais encore au nom de
la fociété. La loi décide formellement que la chofe qui ell:
acquife des deniers d'autrui !le lui appartient. pas, mais à
celui en faveur de qui la vente a été paffée. L. 8, cod. fi
quis a/teri veZ fibi fubalterius nomine. /ta Serres, initit. liv,. 3,'
tit. 20, pag. 474; Buiffon en fon code fur la même loi; ,
On répondoit pour la veùve Mourardou, qu'il n'y avoit
pas lieu à la diftraétion : 1°. parce que le privilege des don- neurs fur facultés ne leur donne qu'une aétion pour faire
valoir leur préférence, & non une aél:ion en diitraétion..2?'
Les marchandifes qui leur éraient aJfeél:éesétam confondues
. avec celles appartenances aux affociés fur. les pacotilles, &
ceux-çi demandanc ~galement la diitraél:ion, il falloit renvoyer les uns & les autres dans le bénéfice d'inventaire pour
y faire valoir leur préférence.
,
S'il s'agiffoit ici de faire diHraire un immeuble, & même
une marchandife qui ftlt exifiance entre les mains de l'acheteur
ou de fan commiffionnaire qui n'aurait acquis fur elle aucun
droit de gage, la demande de pareils 'vendeurs ne ferait pas
fufceptible de conteHation. Si le Capitaine Mourardou n'avait
embarqué des marchandifes que pour fan compte propre,
l'on pourrait dire que celles laiffées aux fieurs Roubin &
Prbvénc;:al procédoieot des fommes par lui prifes à la groffe,
que les donneurs avaient un privilege particulier fur ces marchandifes , comme procédant de leur argent, & qu'ayant
drOit de conferver leur privilege, ils étaient aurarifés à faire
réparer de la maffe des biens ces marchandifes qui font particuliérement aJfeétées à leur paiement.
Le droit des donneurs fur les marchandifes étant certain;
Valin mêm~ regardant comme fraude puniffable la vente
�496
~
Jou RNA L
qui en eil: faire frauduleufement à leur préjudice & pour lés
priver de l'exercice de leur privilege , comme il s'en explique
{ur l'article 3, ritre des navires, & étant fondé à {e payer
{ur le.s marchandifes dont ils ont fourni l'aliment, à l'exclllr
fion de tout aurre créancier, au vendeur de la marchandife
près, il ne pêur y avoir à difpurer {ur le droit des donneurs
qui réclament un privi!ege· particulier {ur une chofe déterminée, & roure la queftion fe trouve réduire à examiner
en fair, fi les marchandifes envoyées de Saralie procedent
de celles porrées par le Capiraine Mourardou pour fon propre
compre. Le privilégié peur êrre expofé à des conreftarions;
il peut faire porter fon privilege fur des objers fur lefquels
il n'a rien à voir; & par cela feul qu'il peut donne lieu. à
des conreftarions, il eft aHreint à demander rang dans la
Sentence d'ordre. Le privilege ne donne .pas toujours le droit
de dema:1der, la dift'raél:ion, tels que, par exemple, un
Maçon qui a confl:rnit une parrie de mairori, le MenuiÎler
qui a fourni le bois, le Chaufournier la chaux, & autres privilégiés de cette efpece.
On convient de la 111axime que l'affocié n'eJl: point obligé
de fuivre le bénéfice d'inventaire,. & que la fociété do·ie
êrre liquidée avant rout; mais Valin s'eH rrompé, lorfqu'il
a cru que le contrat à la groffe érabliffoit une laciéré
entre le donneur- & le preneùr : les a!fociés ont parr aux
profits & aux pertes; au lieu que le donneur à la gro!fe n"a
rien à demander que le principal & le change maririme, .
& fous ce rapport le contrar à la' groffe ne peut êrre re-,
gardé que comme un fimple prêr.
.
Les marchandifes afleél:ées aux donneurs fur facultés one
éré confondues avec celles appartenances aux affociés fu·r
les pacotilles; de maniere qu'il n'efl: pas poffible de difiinguer celles qui ont éré ache rées des deniers des donneurs
li la gro!fe, & celles qui l'Ont éré du produit des pacorilles j,
& dans cet érat des chofes la fépararion érant impolIible,.
il n'y avoit pas lieu à ordonner la difiraél:ïon qùi éroit den.andée tout à la fois par les donneurs à la ~roffe & par
le~
1
�nu PALAIS DE PROVENCE.
497
les pacotille urs. Si les viens, dit Domat, Je trouvent con-
fondus, de [orte qu'il y en ait qu'il ne [oit tas polJihle de
di inguer & faire voir qu'ils [oient a la fuccejfion, la fèparation a cet égard n'aura pas lieu, car la confujion en empêche l'effit. C'efl: ce qu'attefient auffi Defpeiffes & Julien
,
dans [on code manufcrit.
On répondait pour les ueurs Fabre & PIaffe, que les
marchandifes que les donneurs [ur facultés réclamaient,
étaient le produit de leurs pacotilles, & qu'à ce titre ils
avaient un droit de propriété fupérieur à toUS les privileges.
Le vendeur de la marchandife qui n'efl: point payé du prix
des marchandifes qui ont compofé le chargement, & qui
ont été affeélées au donneur à la grolre, doit être payé
de préférence ou en concours avec lui. On ne conreHe
point la demande des donneurs à la grolre, en tant qu'elle
• a pour objet de faire ordonner la difh:Jélion; mais les
ueurs Fabre & Plaire doivent venir en concours avec eux
fur les effets qui feront difirairs; c'el1-là le motif de leur
appel in quantùm contra. Le Capitaine Mourardou a acheté
du produit de la pacotille les marchandifes fur lef,guelles les
'fleurs Fabre & Piaffe demandent d'être payés en concotlrs.
Il efi prouvé par les titre;; qu'ils avaient participé à l'achac
des pàcotilles; or ces pacotilles ayant été vendues par le
Capitaine Mourardou, les marchandifes qui fe font trouvées
forment la repréfentation de ces mêmes pacotilles, & il
el1 de priucipe que lorfqu'il s'agit de deux privileges égaux,
l'un ne peur point l'emporter fur l'autre.
Par Arrêt du 6 Juillet 1778 , au rapport de Mr. le Confeiller de Beauval, la Cour, fans s'arrêter à l'appel in quant/lm
contra de F:Jbre \X,Plaife, ayant égard à la requête incidente
de Ventre & confons , enjoignit d'abondant,' au Capitaine'
Dauphib , commandant la goulette La Vierge de la Garde,
d'expédier en vertu de la Sentence du 17 Février 1776
entre les mains de Grolron, Courtier royal, les monnoies
étrangeres & le folde du compte par lui donné de la vente
des marchandifes appartenam au Capitaine Moural'dou, &
Années t 775 & jùiv.
R
,
r r
�4~
JouaNA~
enjoignit 11 GrolI'on de procéder par tout le jour aux en":
cheres & aux formes de droie à la vente des monnoie~
étrangeres, & d'en eX7'édier le produit, de même que
celui des marchandifes par lui vendues, tout premiérement
auxdies Ventre, Franc, Faudrin, Bourbier & Gilly jufqu'au
concurrent des fommes qui leur refioiènt dues, & adjugées
par le Liemenant de l'Amirauté en principal, intérêt,
change maritime & dépens, enfemble des 'dépens par eux
faits dans l'inHance bénéficiaire, pour le ren~nt, s'il y en
avoit, être expédié par Greffon auxdies Fabre & PIaffe;
condamna lefdits Fabre & PIaffe à l'amende du fol appel,
& tant eu," que la veuve Mourardou aux dépens ch~cul1
les concernant. Ecrivant Mes. Sellon & .......
ARRÈT
LIX.
En matiere criminelle on peut, même pour injures, & [uivant
qu'ellçs [ont graves, procéder contre l'accufè par recolement & confrontation. '
L
E 6 Juin 1774 Antoine Michel, Confireur de la ville
d'Apt, porta plainte au Juge de la même ville fur des
injures graves que Claire Rey, femme de Noel Suan, avoit
proférées contre Therefe Roman fon époufe, & qui tendoie!!t à troubler la paix du mariage. Claire Rey fe plaignit
de fon roté que Therefe Roman l'avoit injuriée. L'information
fut prife hlnc & indè, fur laquelle intervint un décret d'ajournement contre Claire Rey, & un d'affigné contre Therefe
Eoman. Après leurs réponfes prêtées, le Juge ordonna le
procès extraordinaire contre Claire Rey, & qu'à l'égard
de Therefe Roman le procès femit jugé en l'état fans
infiruél:ion à l'extraordinaire. Claire Rey fit lignifier cette
Sentence à Therefe Roman, avec protellation de n'y donner
aucune approbation, fans préjudice d'en appeller; cepen-
�DU
PALAIS
DB
PROVBNC~.
499
dane elle (uivit cette procédure fans fe plaindre, après laquelle intervint Sentence définitive 'lui mit Therefe Roman
hors d'inll:ance & de procès, condamna Claire Rey au
défaveu, à 10 liv. d~a:nende pour tenir lieu de dommages
& intérêts à la Dlle. Michel, à 20 fols envers le Roi &
aux dépens. Sur la fignification de cette Sentence Claire
Rey en déclara appel, & demanda enfuite incidemment la
calfatioll de la Sentence 'lui ordonnoit le' procès extraordinaire.
On difoit pour elle, qu'il n'y a p'às de maxill.le plus
affilrée au Palais que celle qui interdit la voie de l'information pour fimples injures verbales,' fur-tout entre plebées.
Ici il~nes'agit que de limples injures proférées entre perfonnes du même, état & condition, puifq~e l'une ell: la
femme d'un Confifeur ,.& l'autre d'un Fabricant de bas.
Quelque atroce que foit la plainte, il n'eH pas à l'arbitrage
du Ju/(e de régler à' l'extraordinaire Jur le fimple ritre de
l'accufation; il fauc qu'elle emporte de fa nature peine
affiiél:ive ou infamante, & pour cela -il faut qu'elle tienne
du délit. Bornier (ur l'art. i: du tit. 1) de l'Ordonnance
criminelle ohferve que l'accufation~ ne mérite pas d'être
inll:ruite , quand il ne s'agit que d'injures, rixes & autres
matieres légeres; il rapporte un Arrêt du 28 Novembre
169) , qui fit défenfes au Lieutenant-Criminel d'Obbecirte
d'informer pour limples injures, & de procéder extraordinairement pour matierés légeres. Joulfe (ur le même article fait
la même obfervation, & rapporte un Arrêt du 13 Mai 1709
qui le ju/(ea ainli. Boniface, tom. 2, part. 3, Iiv. l , tit. 3,
ch. t, rapporte un Arrêt qui infirma l'ordonnance de procès
extraordinaire, condamna le Juge & le Greffier de remettre
au greffe de la Cour les frais du procès extraordinaire.
Augea,d, rom. 2, ch. 2'), rapporte un Arrêt dans l'efpece
duquel on voit qu'une femme en avoir injurié une autre,
en lui difant qo'elle avoir un mauvais commerce avec un
Prêrre; cependant il fut décidé 'lue ce n'écoit pas le cas
d'ordonner le procès -extraordinaire, ,mais feulement celui
Rr r'2
�~oo
Jou
R. N A L
de l'information, puifque la Cour fur la demande en calfa';'
tion de la procédure la confirma, & en émendant le fonds
& principal condamna l'injuriante à ,[0 liv..d'amende envers
l'injuriée, & à 3 liv. envers le Roi. Cet Arrêt décida qu'il
}' avoit lieu à l'information par la gravité de l'injure, mais
qu'elle n'étoit pas 'aIrez atroce ni aIrez caraél:érifée pour
ordonner le procès extraordinaire•. Si on avoit pu croire que
ce fût le cas de prqcéder extraordinairement, le Parlement
n'auroi't . pas retenu la matiere.,
Il n'eft perfonne qui ignore qu'une procédure, quoiqué
prife !zinc, & indè fur les requêtes refpeél:ives de plainte, ne
forme néanmoins qu'un corps indivilible, ce qui eft fi vrai,
que les Arrêts de Réglement rapportés par Mr. le Préfident de Reguffe défendent, à peine de nullité, de faire
- deux cahiers diHinél:s & féparés. La divifion faite. par le
Juge d'Apt en conféquecpnlent un moyen de nullité contre
la. Sentence de procès. extraordinaire, qui ne peut fouJfrir
aucune légitime contradiél:ion.
Il. eil d'ailleurs ,.de maxime inviolable que toutes les fois
que le procès a été inftruit pat récolement & confrontation, le Juge ne peut fe difpenfer de fe faire affiiler au
mbinsde deux Gradués lors du jugement du fonds. C'el!:
la difpolition de l'arr. 10 du titre 2) de l'Ordonnance de
1670, qui porte q'ù'aux procès qui feront jugés à la charge
de l'appel par le$ Juges Royaux ou ceu.:' des Seigneurs, auxquels il y aura desconclulions à peine aflliél:ive, affineront au
moins trois Juges qui feront officiers, li tant il y en a dans
le Siege. Jouffe fur cet article rapporte deux Krrêts du
Confeil qu.i l'ont ainG jugé. Serpillon, fur le même article
10, obferve qu'il doit y avoir également trois Juges, fi les
concJulions tendent à une peine infamante; il rapporte un
Arrêt du Parlement de Paris du 22 Décembre 17)-[, qui
fait défenfes au Lieutenant-Criminel de Limoux de rendre
feul les Sentences fur des procès infl:ruits par récolement
& confrontation. Le défaut de cette formalite eil fi effentiel, qu'il emporte de droit la nullité de la Sentence.
.
�DU
On
PALAIS
DI!
PROVENCE:
'sor'
-r~pondoit que Claire Rey était non recevable, parce
qu'il n'y a pas de fin de non-recevoir plus forte que. celle
qui eH tirée du pro.pre fait de la partie, de fon adhéfion,
ç1e fan confente ment précis, fera. efl appellatio pojl confenfum. L'arr. S, du rir. 27 de l'Ordonnance de 1667 pone que
les Sentences & jugemens qui doivent paITer en force de
chofe jugée, font ceux rendus en dernier reITort & donr il
y a' appel, ou ·dont l'appel n'~~ 'pas recevable, comme fi les
parties y ont formellement acquiefcé. Sur ces derniers
mots, le Commentareur dit qu'il n'eG pas befoin pour cela
d'un acquiefcement formel; il filffit qu'i puiffe fe prélilmer
par la' conduite de la partie. Les loix vont même plus loin;
elles veulent que le fimple acquiefcemeot racire, fans être
exprès, fuffife pour que la partie ,ne puiITe pas même implorer le fecours du Prince, parce que fan appel intenté
ou renouvellé ,après-coup démafque 'le deITein qu'elle a de
tergiverfer.
.
La Sentence dont eH appel a été fignifiée à Claire Rey,.
avèc injonél:ion de fe mertre en l'érat du décrer; elle l'a
adoptée pendant le cours du procès exrraordinaire ; & lorfqu'il
aéré queGion de fe défendre au fonds, elle a préfenté fa requête en fins civiles: il y a plus; à peine la Sentence définitive
a-r-elle été rendue, que fon appel, dirigé contre ce jugement,
final, aéré fuivi pardevant la Cour d'une inHruél:ion fon'ciere. Le procès a été réglé; les produél:ipns fournies &
tous les, aél:es de l'inHruél:ion remplis, fans qu'il y eût d'au ..
tres griefs que ceux réfultans des peines irnpofées par la Sentence définitive.
La proreHation mife au bas de l'exploir de fignification
de la Sentence du procès extraordinaire feroit bonne, fi elle
n'avolt point été fuivie des faits ulrérieurs qui l'anéantilTent.
Il eH de maxime que la prpreGarion conferve les droits de
celui qui proteHe; mais cela n'a lieu, dit la loi, qu'en tan,t
qu'elle n'eH pas enfuire oppofée à la fubHance des aél:es
que l'on fait: fJuoties enim proteflatio efl aaui contraria 'lui
geritur, tune illa non relevat.
,
•
�)02.
Jou
R. N A L
Quand les injures font graves & atroces; difent les lu..;
rirconrulres, qu'elles rerombent fur toure une famille, offenrent l'honneur du mariage, provoquent les perfonnes en
caraél:ere, attaquent l'homme public fur la drpirure qu'il doie'
à fes fonél:ions, qu'elles tendene enfin à l'exrIOél:ion des fentimens de la perronne injuriée; on peut en ce cas, dirent-ils,
agir criminellement, & ils nous fourniffene des préjugés qui
ont enrretenu les procès extraordinaires ordonnés par les
Juges. Tel eU l'Arrêt rapporté par Bonnet, va. injure, pag.
22). L'arr. 1 du tir. 1) de l'Ordonnance de 1670 ne difpore rien de précis fur la conduire des' Juges; il renvoie à
l;'examen des circonO:ances du délie ou à la force de l'injure
la détermination qui doit être prife.
Le moyen tiré de ce que la Sentence définirive
nulle,
pour n'avoir pas été rendue avec l'avis de deux AtI:effeurs,
n'a aucune affinité avec la caffarion de la Sentence qui or-'
donne le procès extraordinaire, parce que c'eH en difcutant
le fonds qu'on doit feulement s'y fixer. On remarquera en
paffant que l'art. la du tir. 2) de l'Ordonnance de 1670
n'exige !'afiifl:ance de rrois Gradués, que lorrqu'il y a condufions, ou que la mariere
difpofée à une peine afflictive ;. d'où l'on peut conclure que n'y ayant pas lieu à une
peine offliél:ive, le concours de trois Juges n'cO: pas néceffaire. C'eU ce qu'arrelle très,.expreffément Jouffe dans fon
Commenroire fur cet article. Il cire des Arrêcs qui l'one
ainfi jugé. L'Arrêt du Parlement d'Aix, rendu en faveur de
Tamifier d'Apt, cancre Raoux, qui avoit requis la caffation de la Semence définitive après le procès extraordinaire,
fur le fondement 'que le Juge n'avait pu juger feul, a confirmé la même r.egle.
.
Quant à la derl)ier.e nullité tirée de ce que le Juge n'avoie
pu fcinder. l'inO:ruél:ion, en ordonnant que la Dlle. Michel
ferait jugée en l'écat, il eO: de regle qùe c'ef!: la nature &
la gravité des charges qui décident le Juge à onjonn,:! le
procès extraordinaire. Ici il ne pouvait y avoir qu'un accufateur & un accufé. Le Juge voyant que la plainte 'de Claire
ea
ea
�DU
PAtAIS
DE
PROVENCE.
)01
Rey écoit récriminative, a pu faire cette fciffion; il n'y avoit
donc ni inconvénient ni irrégularité, & même c'eH un point
d,e jullice que chacun foit· traité fuivant les charges de ·Ia
procédure. La caufe préfente ell celle des mœurs; il n'eri
. el!: pas de plus inréreffante, parce qu'il n'eo ea pas qui
offre des excès fi multipliés. L'attentat de Claire Rey frappe
fur l'honneur du marjage, fur le caraétere des perfonnes,
fur le repos des familles, fur cette fùrete commune & publique qui réclament à l'envi que ·l'infulte ne relle pas dans
l'impunité.
Arrêt du IJ Aoùt 1778, prononcé par Mr. Je Préfident
,de Cabre, conforme aux conclulions portées par Me. Aguillon,
Subftitut, qui confirme la Sentence de procès extraordinaire,
ordonne qu'il fera .pourfuivi fur le fonds, & condamne Claire
Rey aux dépens. Plaidant Mes. Pellicot & Reillaud.
'ç
ARRÈT
LX.
La contrainte par corps, en matiere mercantille, omife lors
da jagement définitif, ne peut pas être requife crn executione iudicati.
E~is Declay, Cuifinier de la ville d'~ix, prêta le 28
. JUIllet 1769 à Jacques Achard, Aubergille & commerçant en huile, foie, &c. au lieu de Lauris, 3000 IiI'; il en rap·porte une obligation conçue,en ces termes:" J'ai reçu du fieur
" Denis Declay la fomme de 3000 IiI'. , valeur 'reçue comp" tant dudit lieur, que je promets les lui ·payer à lui, ou
" à'Jàn ordre, dans deux 'années, eo paies égales; favoir,
,~ 1)00 IiI'. à la Magdeleine prochaine 1770, & 1)00 IiI'.
,
.
" l annee 1771. "
Declay ne fut pas payé de cette fomme aux époques convenues; il en rapporta une Sentence de condamnation du
Jugé'de Lauris, & cette Sentence fut confirmée le 23 Dé~
,embre 1772.
D
�Jou 'R N A L . _
Decby n'avoit pas demandé la contrainte par corps;
quand il voulut exécuter les jugemens qu'il avoit obtenus,
. il s'apperçut que fon débiteur avoit mis fes biens à couvert.
1 Il préfenta requête en obtention de la contrainte par corps
pour les 3000 IiI'. & les intérêts. Achard préfenta une requête contraire; fur le concours des requêtes refpeéti~es intervint un décret qui refufa la contrainte par corps.
La requête en révocation de ce décret amena une difcuffion plus ampl~ de la quellion de favoir fi la contrainte
par corps pouvait, en' matiere civile, être requife in execu, 504-
lione judicati.
Le fieur Declay di fait que les loix des Douze Tables
permettaient au créancier de' failir fan débiteur, de le tenir
en fervitude, ou de le vendre; quand celui-ci était infolvaole, les 'créanciers pouvaient, après le troifieme. jour de
marché, mettre fan corps en pieces & le partager entr'eux.
( Terraffon, pag. 113 ; l'Auteur de l'Efprit des Loix, chap.
21. ) Delà en venu ce brocard: 'lui nonfolvit in œre ,folvit
in cute. .La loi Pœtilia-Papyria, f~ite l'an de Rome 427 ,
ôta aux créanciers le droit de réduire leurs débiteurs en
fervirude. reg. 12, cod. de ohlig. & ac7ioniq. Mais il leur
était permis -de détenîc leur débiteur dans les prifons publiques, jufqu'à ce qu'il leur plût de' faifir fes biellS, .de . les
cod.
vendre aux encheres, ou d'en faire la feélion. Leg.
'lui bonis cd. poi!"
'•
,
l,
Nos premieres loix françoifes ne s'écarterent pas de l'ef~
prit des loix romaines. L'art. 48 de l'Ordonnance de Moulins autorife les créanciers li. contraindre les débiteurs par
corps pour dettes purement civiles. L'art. l du' tir. 34 de
l'Ordonnance de 1667, dérogeant partiellement à celle de
Moulins, en a reHreint la difpoficion à certains cas qu'elle
mentionne, parmi lefquels l'article 4 de ce titre place les
matieres mercantilles pour lefquelles, comme le dit Bornier fur ce titre, on 7le fàuroit apporter trop de fojn &. de
facilité.
'
•
Dans une loi portée uniquement fur le commerce, l'Or":
/'
donnance
•
�Du
PALAIS
DR
P1l.0VENCE
~o~
(fonnance du: mois de Mars 1673, on voit en' l'arr. 1 du
tir. 7, que tous ceux qui fe mêlent du commerce, fe fou'mettenr, par la feule nature .de l'aél:e qu'ils contraél:ent, à •
la contrainte par corps".
Après avoir dit: ceux qui auront jigné des lettres ou billets
de change, pourront être contraints par corps, l'article cité
ci·delfus ajoute: entre tous Négocians ou Marchands qui
auront jigné des billets pour valeur reçlle comptant ou en m.archàndifes, fait qu'ils doivent être acquittés à un particulier y
nommé, ou à fan ordre, ail au porteur.
,
Joulfe & Radier dans leur Col'ilmenraire fur l'arr. 4 du tir.
34 de l'Ordonnance. de 1667, obfervent avec raifon qu
quoique l'Ordonnance dife, dettes entre Marchands, cependant
elle n,e s'enterrd pas feulement des dettes qui fant dues par un
Marchand à un'autre Marchand; mais il faut' comprendre
aulJi dans la' difPqfition tOlites les dettes & billets contrac7és
par un Marchand pour raifan du commerce dont il fe "mêle,
au profit des particuliers qui ne fant pas Marchands. '
C'dt-Ià une maxime certaine en Provence; plu lieurs Arrêts l'ont confacrée; ils ont conféquemmenr décidé que le
citoyen non commerçant qui avait prêté à un Négociant de
l'argent verfé dans f0ll. commerce, pouvoit réclamer la con.trainte par corps; on fe contenrera de citer celui rendu en
'faveur du fieur Mouton, Bourgeois, contre le lieur Mercurin,
Négociant de Graffe.
'
'Or, l'argent prêté el1: toujours préfumé avoir été verfé
daris le commerce du" Négociant, toutes les fois que d'un
côté il ne paraît pas que cet argent ,ait reçu un autre em~
ploi, & que de l'autre le Négociant a foufcr;t un billet à
ordre, c'eH-à-dire, une de ,ces obligations qui caraél:érifent
les çommerçans.
Deday avoit donc la contrainte par corps avant les ju, gemens qu'il a obtenus; ces ju.gemens ne peuvent pas' avoir
attenté à· fes droits; ils ne forment point une preuve qu'il
y ait renoncé, p'uce que les renonciations ne le préfumen~
poinr; elles doivent ou être écrice" ou réfulter nécelfaiteAllflÜS t 775 6' fuiv.
S5 S
•
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RNA t'
.
ment des aaes que l'on' fai~. Or, l'omiffion d'un droit n'en
entraîne poine avec elle la privation; il fuffit qu'on l'exerce
dans les trente aonées de fon ouverture: telle paroîe être la
. .'
,
Jurifprudence du Parlement.
Jer6me Remuzat obtint des adjudications conere deux particuliers de Roquevaire; il avoit omis de demander la [0lidaire & les arrêts de la ville; il les obtint après l'Arrêt
[u,r une requête qu'il préfenta à cee effet. Jean-Joferh Brefl:.
demanda 'la révocation du décret; il fourine qu'il devoit j-ouir
du bénéfic~ de l'bmiffion, gaudeat Donâ forillnâ; mais par
Arrêe du 13 Juin 1769, prononcé par Ml'. le PréGdent
d'Efpinoufe, conformément aux concluGons portées par Me.
Hovis, Subfrirut, le décret fu't confirmé.
Le heur Garnièr, Marchand 'gdrnilfeur de chapeaux de
Marfeille, avoit obtenu en pre1TIiere inflance une adjudication au criminel, avec contrainte par corps. Sur l'appel, il
omit de demander cene contrainte, il la requie in execlltione
judicati. Le lieur Canton s'y oppofa; il fourine, comme Breil:,'
qu'il devoit jouir du' bénéfice de l'omiffion; il invoquoit furtout la regle nOIl Dis in idem; niais paF Arrêe du 17 Mars
1776, au rapport de Ml'. de Forcis, l'oppolition de Can-ron
fut profcrite.
'Ces Arrêes ont donc décidé que l'omiffion d'avoir requÎs
'la contrainte par corps n'en faifoit pas préfumer l'abandon
& n'en pquvoit pas priver le créancier. Point de différenc~
à faire à cee égard entre le civil & le criminel; s'il .y en
avoit une, elle feroit en faveur de l'accufé déja condamné,
& point du tout en faveur du débiteur. ordinaire.
La contrainte par corps' doit d'autant mains être refufée dans le. cas préfene, que le débiteur a mis fes -b~ns
à couvert, qu'il n'offre plus que fa perfonne, & que- quand
en dernier lieu on a obtenu la contrainte perfonnelle pour
les dépens, il les a· payés, ce qu'il n'avoit point fait jufqu'alors, ce qu'il n'auroit jamais fait fans la conrrainte par
corps.
Achard répondoit qu'il ne vouloit point dl[cuter la quef~
-
�b~
PALAIS
DE
PROVENCIl.
507
'tion de favoir fi avanr le jugement fon créancier auroir pu
requérir fa contrainte par corps contre lui; qu'en fuppofanr
même cette contrainte incontefiaole alors, elle ne pouvoit
plus être requife, parce que ce jugement formoir la feule,
l'unique loi des parties, & qu'elle renfermoit" tous. leurs droits.
Il n'efl: pas permis à un créancier de revenir d'une remife
qu'}1 a faire en majoriré & avec connqi1Tance de caufe. Les
loix fonr précifes fur certe matiere; il efl: inmile de les
citer, parce qu'elles font univerfellement connues. Or, l'omiffion d'avoir requis la contrainte perfonnelle en fait préfumer l'abandon; & l'abandon tacite, fuivanr les principes,
a la même force que .l'abancion, exprès. Cette préfo~tion
de remife doit être d'aura nt plus facilement accueillie, qu'il
s'agit dè l'exercice d'un droit rigoureux; droir conféquemment défavorable-. Les Arrêts cités ne {ont relatifs qu'aux
matieres criminellés; l'accufateur efl: beaucoup plusfavo.fable qu'un créancier ordinaire; la folidaire, les arrêrs de
la ville, la contrainte par corps [one d'ailleurs de droit; il
n'y a donc aucun incoOlréniene qu'ils pui1Tenr être requis in
executione judicati; mais jamais on n'a vu, jamais on ne·
\ verra obtenir cerre contrainte in fxecutione judicati dans les
·matieres mercantilles.
Arrêt du 17 Juillet l776, au rapport de Mr. le Con{eiller
de Mons, qui confirme le décret qui avoit refufé la contrainte par corps, avec dépens. Ecriyànt Mes.~ Jaubett &
Sauvaire.
SSS:l.
J
•
�.,
ARR Ê, T
LX J.
La preuve par témoins peut-èlle être qdmife pour prouver
la filiation.. hâtarde, fans commencement de preuve pa~
écrit, ou fans le concours d'autres préfomptions?
L
E 22 Mars 1775, Pierre Mafverr, fe difant fils naturel,
de feu Me. Pierre Coye, Avocat en la Cour, expofa
dans une requête, que le 20' Oélobre 17'50 il nâquit des
œuvres de feu Me. Pierre Coye, fur baptifé dans la Paroiffe de SIe. Marthe de Tarafcon fous le nom de Jean
Mafverr, fils naturel de Pierre Mafverr; que Pierre était le
nom de baprême de Me. Coye, & Mafverr celui d'un domaine qu'il poffédoit; que Me. Coye avoit taujour-s eu pour lui·
des marques de prédileélion & de rendreffe; qu'il ne fur pas
plutôt' tiré des mains de la nourrice, qu'lI lui avoit choili un
maître de latinité; qu'il le mit à l'école, lui fir faire fes érudes,
fa philofophie, le plaça enfuite en apprentiffage chez un maître
C.onfifeur à Avignon, où il le nourrir & l'en'rretinr roujours
forr honnêtement; qu'il lui avoit promis de lui laiffer un legs
à tirre d'alimens, qui le mettrpit à portée de continuer de
vivre honnêtement, dans l'état où il -l'avoit élevé, & de lui
donner' une boutique lorfqu'il feroit en âge de la régir; que
ce n'était pas à lui feul que Me. Coye avoit renu ce langage, mais à taus ceux· qui s'intéreffoienr à lui; que Me.
Coye fir en effet un teflamenr folemnel avanr fa mort, qui
fut' foufcrir par Me. Derres, Noraire; qu'il l'y rraire en pere
rendre; qu'il lui auroit tenu les promelfes qu'il lui avoit
fouvent réitéré,es, mais que les freres du fie'ur Coye, qui
1ànr fes héririers, en recueillant fon importante fucceffion,
s'éraient emparés du teflamenr, qu'ils ont foigneufement' caché, quoiqu'ils en aient avoué f'exiflence, en refufanr néanmoins de le repréfemer, fous le frivole prétexte qu'il ne
�-
/
-
DU PALAIS DI! P'itOVENCl!;
(~69
contenait rien en fa faveur. Il demanda i~jonÈtion ~ Me".
Coye de faire proc~"der dans cinq jours à J'ouverture de ce
teftament en fa préfence, autrement ajourné parJnant la
Cour pour donner les motifs de fan refus. Décret con·
forme. Sur la" fignification qui en fut faite au lieur Coye,
il répondit qu'il était extraordinaire que Mafvert vînt .fans
preuve fe qualifier fils naturel de Me. Coye; qu'il y avait
quelque myllere dans la" précaution 'lu'il avait prife de cacher le nom de fa mere, & de ne lui avoir pas communi"qué fan extrait baptillere, qui paroiffoit avoir été joint à la
nquêtê"; qu'il avait tort d'alléguer que Me. Coye eût un
domaine appellé Mafvert; cepenqant pour fatisfaire à l'in~
jonél:ion, il demanda le 6 Mai au Juge des Baux de lui
donner "jour pour procéder à l'ouverture du tellament de fon
frere.
L'affignation fut donnée le 1 ~, Mafvert y affil1a; le ter.
rament fut lu, & il n'y fut queHion en aucune maniere de
lui. Néanmoins le "23 Juin 177'5, il fit ajourner les héritiers
de Me. ·Coye pardevant la Cour, en vertu du privilege des
pauvres, pour fe voir condamner au paiement de 40000 liv.,
fomme modique, eu égard aux facultés de fan pere, pour
'acheter un fonds de boutique de droguille qui le mit à même
de continuer le métier qu'il lui avait fait prendre, & ce
_ à titre de dotation, & il demanda en 'outre une provifion de
. 1000, liv.
Le fie ur de Coye défendit fur cet exploit; le 4 Oél:obre
il fou tint que la fomme de 40000 liv. était une vraie chimere, qu'il favoit qui il était, connoiffoit ceux à qui il devait le jour, & que s'il s'abufoit alfez pour fe méconnaître, les loix le rappelleroient à fan devoir, & lui' feraient refpeél:er le repos d'une famille qu?il outrageait.
Mafvert recouvra de nouvelles pieces ; il crut en avoir
'affez pour afpirer à la légitimité, & le 19 Oél:obre il préfenta une -requête" dans ·laquelle. il fe prétendit fils de PetroniLle Lenfolat; if produifit l'aél:e 'd'époufailles dé fan pré~endu pere aveç elle, çommua fe~ fins principales i aban;
,
�F~t.O
1
JOURNAL
panna la filiation Mtarde, demanda d'étre <jéclaré fils lêglt1me qe Me. Coye & de Petronille ~enfolat, avec ROu·
voir de porter le nom & armes, & demanda en, même
tetÎlps là' caIT:ation du teftament de fan pere, attendu la
p~étérition. Il offrit le même jour un expédiem pour, avant
dire drojt ~ fe"l> fins principales, & fans préjudice des preuves
. l:éfulcantes du procès, prouver la filiation légitime. Le 4
Mars' 1776, 'craignane pOlir [on fyfiême de légitimité, il
fit .r~vivre .celui de bâtardife, fans cependant àbandonner
l'idée de fe pré[encer comme légitime; & par des fins fublidiaires, il revine à la preuve ofl:erte d'après [on exploit li.be1Ié'du2.3 Juin.
.
Enfin le t [ Mars t776, Arrêt [ur les conclulions de Mr.
- l'Avocat-Général de CalilTanne, qui déboute Ma[vert de tOUt
ce qui tendait à la légirimiltion, met [ur cerce qualité le
[Jeur de Coye hors de Cour & de procès, avec dépens; le
nommé .Mafvert eft, renvoyé à pourfuivre, tane fur les fins
de [on exploit libe11é du 23,Juin, 1775 , que fur les fins [ub·
fidiaires priees [ur le .barreau, rendâmes à la preuve.
Après cet Arrêr,. Ma[vert offrit un expédiene, par lequel
il conclut à, ce qu'avant dire droit aux fins principales de
f~1l exploit du 23 Juin, [ans préjudice des preuves - ré[ul~an~es du procés, il pràuveroir 1°. qu'il était fils naturel de
Me. Piefre Coye, Avocat en, la Çour, réliqane au lieu· des
Baux'; 2°. que dans le mois d'Oél:obre 1750, Jo[eph LenfoIat qui rélidoit dans la JPaif~n de 'Me. Coye, infhuit que
Françoi[e Dalles, épQu[e de Lquis Marr~t '. Ménager de
1a- ville de Sc. Remy, cherchait un· enfant·à all~irer, vint lui
~n ~J:ff~ir on mâle, le; priant ÎQi!àmment de s'en charger)
f9Ps; la pro~e{Je .d'un h'onnêç~ paiement; que Louis Marret
fan époux voul~!1~ [avoir '?bfolume"'t ~ Ç\ui apparrepoit cet
enfant, Lenfolat i~fu[a d'abord de les éclaircir [ur ce point,
en' fe contemane de dire que cet· enEint tenait à une famille hopn~te; que [ut, le: r~fus fàit Par Marret & Françoj[e
~al1es de ne point fe ~charger de I:cpfijpç lqu'i1S n'en connuifene Is:' p~~e., !-en[olilC I~u~ apprit q)j'jl :.éJopls de Me.
�DU PAL A-rS bB
PRO VEN C E:
.
~ r:r
,pierre Coye ;'Avocat , réfidant aux Baux, & que'par de certaines confidérations on lui avait donné le nom fuppofé 'de Mafvert, & qu'on le ferait reconnoltre enfuite pour le fils de
Me. Coye. 3°. Que ceux-ci s'étant chargés de cet enfant,
ils le foignerent pendant le temps que les enfans rcllent
en nourrice; que les mois & les langes néce1Taires à. fott
entretien éraient Tournis' par Me. Coye,' qui encourageait
fans ceffe leur attention & leur amitié. '4°. Que Mc. Coye
pendant fa vie avait fourni la nourriture & l'entretien à
Mafvert, lui avait donné un maître à lire '& à éCrire;. un
dej latinité; qu'il Jui avait fait faire [on coups de philofb-.
phie, l'ayant enfùite placé en, appJent.îffage chez un Dtoguifte à Avignon. (. Que l'apprentilfage fut payé p.ar Mre.
Moreau, Curé, de l'ordre de Me. Coye, pere de Mafvert',
& de fan argent. 6°. Que lorfqu'il étoit en ap'prentiifdge, feu
Me. Coye lui faifoit parvenir, par le miniHere de Mre_ Moreau, unè penfion pôur fan entretien.. 7°.• Que lorfque MafNert ·~toit. -en nourrice ou chez des maîtres,. Me. Coye ve'noit le voir très-fouvent, l'appelloit fan fils, l'exhôrtoit·à
être bien. fage, s'en difant le pere, & lui donnant roures
les marques de paternité & de tendrelfe. 8°. Qu'il exif1:e
une parfaite relfemblance entre led. Mafvert' & led. feu Me.
Coye, fait dans les traits de fa figure, fait dans. le 10n de
fa voix. 9~" Que dans les derniers momens de la v.ie de
Me. Coye, il demanda avec inf1:ance de voir & de parler
à Mafverr fan fils, de même qu'à fan pere & à fa mere
nourriciers, & que ceux qui avaient foin dudit l.\1e. Coye
ldi refuferent cette fatisfatiion, & prirent tous les moyens
convenahles pour écarter de lui routes les perfonnes qu'il
demandoir. 10°. Qu'aprè~ la mort dudit feu Me. Coye, fan
trere, quiéroit fan héritier, & le fils aîné d'icelui, avaient
continué de fournir à la· nourriture & à la fubfif1:ance dud.
Ma[verr pendant quelque temps. 11°. Enfin que le lieur
Coye fils avait avoué à bien de per[onnes ,que Mafv,ert érait
fan parent & le fils de feu Me. Coye fan oncle. Il de~
manda en même temps une provifio~de 3oo01iv, .
,
�J~ri
JOURNAL
- Cet e"xpédient fut conteité, & enfuite le fieur de Coye
offrit fur le barreau la fomme de 4000 liv. en fonds, ou
250 liv. de penuon viagere qui furent refufées.
Mafvert
chercha à prouver qu'on ne pou voit lui oppofer aucune fin
de n.on recevoir, que la preuve étoit concluante & ne
pouvoit lui être refufée.
Mr. l'Avocat-Général de Cali/fane examina d'apord quelles
font les preuves de l'état de l'homme: la premiere fans doute,
dit-il, eft la po/fellion d'état fondee fur le droit naturel. Elle /,
efl: la feule regle qui diHingue les citoyens; avant que les
états policés eu/fent fait des loix fur une mariere auili imporrante, la notoriété, la"bonne foi f~ifoienc la bafe de leur
état, & troubler cette po/fellion en demandant une filiation contraire à celle qui étoit annoncée par cerre longue
. fuite de reconnoiffances, c'eût été troubler l'harmonie du
genre humain.
.
'
Auffi les Légil1ateurs, en fixant de nouvelles preuves
'de l'état de l'homme. ont refpeél:é celle qui· prenoit fon
origine dans leur innocence & leur franchife; ils ont vo'ulu
qu'elle ne pût être détruite que par les titres les plus précis;
il faut cependant que cette po/feffion qu'une foule d'Auteurs
appellent traRatus & educatio, aie pour principe l'affeél:ion
paternelle, & ne pui/fe convenir qu'à un fils; la préfomption ne s'établit que par la proporrion entre les foins, la
dépenfe, les diflinél:ions & celles que l'on eùt eu pour fon
enfàm propre; car il ne faut pas confondre la pure charité d'un étranger avec la piété tendre d'u'n pere.
De's regiHres publics viennent à l'appui de la po/fellion.
d'état & du citoyen privé d'une reconnoi/fance folemnelle;
le regiitre eH Je/titre -conflitUlif de la loi civile; la poffèffion
d'état l'ell: ete la loi 'naturelle;, l'une plus ·ancienne & moins
fujeue à l'erreur, l'autre plus nouvelle & plus authentique.
L'être inferluné privé de ces deux preuves n'el~ pourra nt
pas abfoJument dénué de tout fecours ; il peut-- recourir aux:
papiers domefl:iques , faire valoir une foule de préfomptions,
enfin employer la preuve teitimoniale, pourvu qu'elle foit
,
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51 3
aidée de commence mens de preuves par écrit, ou d'un
enchaînement de fairs lumineux.
.
Voici quelles fone les différentes préfomptions de droit.
Faire valoir le concubinage, efi prœfùmptio juris & legis ;
prouver des alimens fournis & une éducation, efl grande
prœjudicium filiationis; s'aider de la publicité, de la· réputation , de la commune renommée, quoique Jit fatis debile
probationis genus, Celon les Aureurs; examiner s'il y a une
parf.lite reffemblance, quoique Jit reputàtio ex mente in quâ
nulla fortuità eveniunt; rapporter quelque reconnoiifance de
la parr de ceux que l'on prétend Ces auteurs, grande prœjudicium , non tamen lumen.
Telles font les circollfl:ances que peut faire valoir l'étre
infortuné qui cherche à percer le my!lere que ceux qui lui
~nt donné le jour ont cherché à mettre fur le moment de
fa naiffance. Vnt: feule fans doute ne fuffit pas pour prouvér
la filiation; il faut au moins c=n réunir deux ou rrois. M3'is
la preuve renrmoniale ne peur-elle pas fuffiie? Refpeél:able
par fon ancienne ré , elle décide de la vie des hommes;
pourquoi ne pourroit-elle pas {latuer filr leur érat? Peutelle. être reçue feule & ifolée? Toures les loix romaines
nous apprennent le contraire, & la fi ceŒon de nos loi)[
n'a rien changé à ces principes: fali tefies ad jiliationis
probationenz non fi1ficiunt. Tdle efi la maxime inviolable,
faCtée lX déciuve dans celte matÎere. D'après nos loix,
"nos Ordonnances, d'après la jurifprudence la plas conffante ,
d'après l'o()pinion précieufe & uniforme des grands hommes
Gui fe font "acquis tant de gloire dans le barreau, il faur,
ont dit ces grands Magifirats, pour accorder la preuve
tefiimoniale," des préfomprions forres, d,es indices violens,
enfin tOUt ce qu'il y a de plus fort & de plus capable d'entraîner; il faut des fairs qui ne puiffi nr convenir à l'im·poHure. Tous ont en même.remps exigé que les fairs quê
l'on demandoit à prouver, fuffenr clairs, précis, circonf-tanciés & concJuans; on ne peut s'écaner du principe
il/ud probandunz non adrnittitllr, quod prohatum lion relevat 1
AI/nées t 775 & fuiv.
".
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il faut que la preuve de la filiation dépende abfolu01ent de
celle des faits allégués; fans cela ce feroie une demande
dérifoire, inutile à obtenir, & plus fuperf!ue encore à
. accorder.
.
D'après ce tableau plmôt que cette difcuffion des prin.:..
cipes, Mr. l'Avocat-Général patra aux circonil:ances de la
caufe. Le nommé Mafverr a-t-il en fa faveur les preuves
ou les pré'fomptio.ns de la loi? Il fam le déclarer jouitrant
de l'état qu'on veut inutilement lui refufer. N'a - t- il que
des préfomptions' faibles, des .commencemens de preuves,
& les faits dont il offre la preuve fom-ils concIuans?
faue l'admettre.
D'abord a· t-il pour lui les regiilres publics? Son extrait
b'1pcinere en fous le nom de ·Pierre Mafve'rr. Rien de
plus contraire à [on fynême que cee aél:e. Rélégué dans
.Ja cIatre de ceux que l'on nomme 1lUlgà 'luœfiti, il n'elt
,die que fils naturel de Pierre Mafv~rt & de Marie Patin;
·rien
qui indique Me. Coye pour fan pere; perfonne n'y
•
paraît pou'r lui, il n'affine 'pas , perfonne même ne Ggne;tous les parens font abfens. En vain le nommé Mafvert
.invoquerait-il cet aél:e en fa faveur; i~ a cherché lui-même
à le dérruire, en défàvouant la mere que cet aél:e lui donne,
en produifant des titres juridiques qui venaient à l'appui
de ce défaveu, mais qui loin d'êrre 'déciGfs pour lui, n'ont
fervi qu'à prouver que cerre Marie'Patin n'était point un
être imaginaire.
Il faut avouer que lorfqu'un enfant ell: dit né de parens •
inconnus, c'eil: le cas de l'Ordonnance; il n'a jamais exifl:é
de regiil:re pour lui : cependant ce file.f1!=e feul ne pourrait
fervir de commencement de preuve par écrie; ce ne ferait tom au plus qu'un indice négatif; & en fait de filiation il
, faut de~ preuves pofitives. Mais lorfque l'enfant ell: baptifê
comme fils naturel, que la mere fe trouve dans cet extrait,
que malgré cet aél:e cet enfant femble la repoutrer & exiger
de ceux qu'il attaque de lui nommell celle qui lui a réellement donné le jour; lorfque l'être crée lui-même le my.f~
n
�DU
,
PALAI-S
DE
5[)
PROVENCE,
tere, ne peut - on pas dire que c'ef!: le cas de la lui
, refurer)
,
En vain dOl)ne-t-on comme preuve de paternité que le
nom de Pierre qui dl: celui de-Me. Coye, fe trouve dans
l'extrait baptifiere; ce nom très - commun peut auffi bien
être l'effet du hafard'; ce n'en: pas même Mafverr fils qui
ell nommé Pierre, c'e!l: le pere. Cette dénomination ell:'
donc étrangere à la. filiation; rien donc pour lui' dans fon
extrait baptillere. D'après la Loi de flatu liberorum ob
tenorem inJlrumenli male cOllcepti, il n'a pas même pour
lui la pofieffion d'état;' il ne l'allègue même pas; il n'a
point été élevé dans la maifon "il n'y ell pas né; ainli
ni poifeffion, ni extrait baptifiere. On ne doit pas cependant diffimuler qu'il a reçu des fecours ; mais pour voir ce
qu'il en faut conclure, on doit fuivre la progreffion des
titres, l!f confulrer les papiers domefiiques.
Inutilement placel'Oir-on dans cette claife les aél:es d'apprenriifage que l'on a communiqué. Le Curé Moreau fiipule
purement & ,limplement; rien qui fait fait de l'ordre de
Me. Coye; rien qui puiife le regarder; rien qui change
l'état que lui donne fan extrair baptiHere : l~on remarqueni feulement que dans l'aél:e d'apprenriifage il eH nommé
han-Pierre Morvert, quoiqu'il ne fait que Pierre Mafvert
dans fan extrai, baptiHere, & que dans fan extrait de
cancellation le nom de Pierre y eH feul. L'on ne peut ce-'
pendant rien conclure de bien précis de ces changemens;
apparemment l'on n'avait pas l'exrrait baptifiere de Mafvert
fous les yeux.
Quanr au tellamenr folemnel de feu Me. Coye, cet
aél:e intérelfant où l'harr.me fe dépouille, pour ainu dire,
de rour ce qui tienr au préfent, pout ne s'occuper que
de l'avenir; où il oublie l'humaniré, pour ne fonger qu'à
'celUI qui la lui a' donnée; où il écarte rom préjugé, roure
idée d'injuftice pour ne peRfer qu'à la vérité, doit être pour
le nommé Mafvert un indice éclara-nr de filiation, ou une.
pteuve accablante conrre [011 fyHême. Si Me. Coye n'ayant
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point d'autre enfant l'a inltirué fan héritier; s'il lui a faie
un legs confidérable; s'il lui a fait part de quelque libéra.
lité; fi au moins il lui a donné une marque de fonvenir;
s'il l'a nommé, alors il pourra dire: laif{ej-moi déchirer le
voile que celui qui m'a donné le jour a cherché d jetter [IX
le moment de ma naif1ànce; mais il n'ell pas nommé;
l'oubli le plus grand devient le partage de celui dont le
tellateur ell le pere.
Dans l'aél:e le plus folemnel, dans ce momenr où l'homme
n':! d'aurre témoin, d'aurre confeil que fa confcience , comment imaginer qne Me. Coye aura méconnu la iloix de
la narure? Comment croire qu'un cœur paternel a méprifé
les accens tendres d'un fils qu'il devoir [e repréfenter lui
tendant encore les bras dans ceux de fa mere qu'il avait
réduite, & lui reprochant le jour' qu'il lui avoir donné,
puifqu'il le lui enlevait en le réduifant 11 la plus affreufe
mifere? Me. Coye ne pouvoir avoir aucun morif; pouvoirce être le préjugé? II n'érait pas polIible qu'il exiHât un
. feul inllant, puifque l'aél:e que Me. Coye créait lui-même,
relloit enfeveli dans l'oubli jufqu'après fa morr. Quoi! ce
pere veur êrre. barbare jufqu'au delll du rombeau!· C'ell peu
d'avoir donné au plus inforruné des êrres une fâcheufe
exi!lence; c'ell peu de la lui avoir fait acherer 'pendant,
qu'il refpiroit ; il veut que fan dernier foupir éleve chez fan
fils le cri de la m ifere. Il meurr, & il veut que rout périlre
avec lui! Pourquoi avoir donné l'exillence à un êrre inno.
cenr.. puifqu'il veur la lui enlever? De pareils [entimens
[ont bien invrai[elT\blables, & l'aél:e qui en ell la preuve,
[emble démontrer que le nommé Ma[vert n'ell pas le fils
de Me. Coye. Donc point de papiers domelliques en [a
faveur.
A-t-il 11 défaut de tous aél:es des préComptions de droit?
Point de concubinage public & noroire avec la mere que
lui indique [on extrait baptillere. Quant à l'éducarion , qui
ne prouve que l'idenrité de l'enfane, il en donne des indices du côté de Me. Coye que l'on verra avec un peu plu~
/
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PA-LAIS
DI!
PllOVI!NC
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'de détail dans les commenceOlens de preuve par écrir. La
commune renommée l'l'eO: qu'alléguée, & femhle même
peu s'accorder a...ec les variarions du nommé Mafverr.
Quant à la reffemhlance, elle n'dl: qu'alléguée & impoffible à prouver, puifqu'il dl: mort depuis fepr ans. D'ailleurs
point de reconnoiffance, ni -publique, ni privée, ni écrite "
ni même verbale. Mais (conrinua Mr. l'Avocat-Général)
il offre la preuve teHimoniale; il allegue des commencemens de preuve par écrit qu'il faut examiner. Il f~ut ohferver que l'aéte qui feH de commencement de preuve par
écrit, doie émaner des parens que l'on veue Ce donner;
c'ell: le fil néceffaire pour conduire à la recherche de la
vérité d-ans le labyrinthe des dépolirions des témoins; c'eCl:
la bafe d'un fyHème; c'eil: le premier anneau de la chaîne'
de tous les faits, qui fans cela ne peut avoir aucune force,
fi ce n'eil: que l'écrit d'un tiers, fon affertion, comme le
dir Pot hier , ne peut équipoller qu'à une preuve teil:imoniale.
Mafvert fait valoir comme un commencement' de preuve
. par écrit l'arreil:arion de fes pere & mere nourriciers, dont
les dépolieions font toutes rapportées dàns l'expédient qu'il
a offert ,. & qui en forment même la plus grande partie,'
Cette aneil:arion eil: faite d'office & extrajudiciaire; fauril la regarder à ces deux cirres comme un limple certificat
ou une arreHation fufpeél:e? EH-ce là, comme le diroit
Mr. d'Agueffeau , un témoin néceffaire auque1-il femble que
la juHice doive déférer, parce que ceux qui dépofent, font
en quelque maniere les feuls confidens de la naiffance, &
les feuls dépofiraires de ceux qui l'ont donnée? L'on avoue
que s'ils avaient alIiil:é à l'accouchemenr, s'ils -avaient tenu
l'enfant des. mains du pere, de la mere, de la fage-femme
même; leur déclararion feroit ttès-effentielle : mais il leur
eH remis par un riers qui leur a dit ce qu'ils déclarent; le
moment de la naiffance', ,le nom de celle qui la lui a
donnée font reil:és fous un voile impénétrable; elle conHate
cepe.ndan~ des fecours prefquel con!,inuels donnés par' Me~
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çoye;' recours diff~r~ns fuivaoc les âges; des màrques cfe
rendreffe, des aV,is '. des "çonfeils qui dénot'eoc plutôt quelquè
motif particulier- qu'un- m,otit général.de charité. Cepend<lnt çe "'eft· qu'une d~polition q.ui I)e peut avoir de force
qu'après rla,<I'll)e~lkVe àd11Jiiè>;' ct; n'ell: pas un~ commencement dé weùv~J p~r écrit ql\i vienne de ceux qui lui ont
qonné 1 _jo\lr,;" & ,c'eft ici le cas de ces loi x fameufes:
non nudis: affiverationiDus llec ementitâ, profeJlione, fed n.ata~
lifJus '\Iïciffitud.o" cOllfanguinitatis cOlÎj~hgitur. Enfin les, lettres
'ler[ées au-· proc;ès font1' feloEl lVl'<jfver.; un commencement
de preu\le pat é~rir. Q~e1ques e~preffiQns, éparfes dans quelques lerrres 'lleuveOheIle:; ,affurer )jétas 'd'un enfânt? Quelqui(ois là loi fouffre, difoit Mr. l'A.vocat-Général -Talon,
que les lettres fuppléent aux 'aéles publics; mais alors la
loi exig.e des conditions nécelTaires; il fàut que ces lettres
{oient éçrites par les peres &' autres, qu'elles ne le foient
pas dans ug"temps fufpeél & volfin de la c.ontefiation; qu'enfin
elles contiennent des faits précis., Ici aucune n'eH: écrite
Far Me.,:Coye; toutes font écrites après fa mort. Il en efi
çepeJ1P9nt qui font de fes parens; peuvent::;elles être affez
'fortes po'ur démontrer la paternité de quelqû'un auquel elles
{Qnt étrang~res},' Qlie prouvent d'ailleurs celles du fleur
Coye fil ?'.D.e l'il,mitié, de l'intérêt même; on y voit dans
le plus graoQdr détail l'éclat de fes fen[jmens ; iliparle reli_
g,ion, piété; i,lexhorte, il donne des avis; il marque de
l'illtérêt, ~ ,c'efi,J'anachelJ1ent qui le fait agir; il montre
èu refpe.s:r , paree) qu'il en a" pour l'infortuné; il donne
f&lo,n [es facultés, .mais il femble ,donner avec intérêt; ce
u'eil: pas fimplement, de cha~ité,., puifq~e c'efi pour, payer
èes mllît:res.,: ç'eH, donc quelque c.hofe de plus. 11 ,femble
ne pas les donner feul. ,Vous trouveref ell nous, dit - il ,
tcms les, jèlltimells q.ue vous êt(st en droit d?en attendri:; il
le voit 'av·ec plaifir;,., illJ regrette de ne pas jouir, pour
rendre Ma[vert plusH heureux,,; mais' c.es fenTimens. paroi1fent' che:/{ _lui -bièn'~plus; na.Turels 'qùé F1éteŒtés; il
avoue 'les fecoürs 'que [on:: pere fatc ,pal'Nenir à cet infqr•
•
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PALA-!5
DI!" ,poR 0 VEN C
'H:
...lU ne;
, 1'1 fpécifie même un envoi de lix louis par lé
Moreau.
Les lettres de ce Curé prouvent que le lieur Coye pere
étoit bienfaiteur de Mafverr, qu'il l'aimoit, lui faifoit
pairer de remps en temps des fecgurs ; qu'il lui avoit laiiré
en mourant une peolion dt; 144 liv, fomme modique., qui
femble plutô"c faite pour appaifer des doutes ,& des inœrtitudes fur la .paternité, que de la confrater.. Iil a·trure le
nommé Mafvert qu'il cherche à lui rendre fervice auprès.
·de fes parens, fans lui nommer perfonne. Il en en: de
. m ême ·de celle' du Pere Cherubin Capucin.'
1
Que cooHatent coures ces lettres? De l'intérêt marqué
par des.- bienfaits., prouvé pa'r une continuiré 'de fec<!lars;
on pourroit même en conclure peu d'intervalle entre "le
nommé Mafvert & ceux de la famille du lieur Coye. Peut,être même pourroit-oo en foapçonner cette efpece de p~
renté qui révolte la hauteur, mais que fupporte la piér-é',
'que foulft'e la religion, que feco\.l1't l'humanité; mais malgré
cela, il efl im.poffibl.e de les regarder comme la bafe de la
pre'uve de 1'état d'un homme; une. partie doit être regardée
·comme des titres émanés de Mafve!"t, puifque ce n'étoit
que des répoofes aux importunit.és de cet infortuné. Difons
~vec les plus célébres Magi{j rats., qu.e l'honneur des familles,
..l a fortune des enfans, ·le repos de la fociété, l'état des
perfonnes~..doivent aV<!lir des preuves Flus' folides, & roi'!
ne peur pas fans ·d'autres indices les laitrer à la merci de
.quelques témoins prefque tous de la lie du peuple &, fuf-ceptibles de féduaion.
. . ..
On pourroit dire à Ma[vert, 'qu'il efl dénué de tom com.mencement de preuve. On femble trouver, il eH vrai " un
,indice de fecours modiques commencés dès 1J naiJfance de
cet enfant, & cClntinués m~me après la mort de Me. Coye.
Mais l'identité n'eH point prou,vée; tout efi: ob{cur a.u moment de la naitrance, ou plutôt on ne fait pas par les
preuves qui font au procès, s'il en 'exifle une; même iilellce
fur l'accouchement, même conrradiaion fur la materniié.
)
�po
Jou
Il. N A L
.Jl refie à voir ( obferv3 Mr. l'Avocat-Général) fi le nommé
Mafvert a préfenté des faits précis, & fi la preuve dl: recevable, admilfible & concluante.
.
Il demande d'abord à prouver en général qu'il efi fils
de Me". Coye; mais la filiation n'efi pas un fait à prouver
·djre..9:er,nent comme un dépôt; c'ell un droit incorporel,
-une qualité perfonnelle qui peut feulement .s'induire & lè
èonclure d'une chaîne de faies {uivis & prouvés que l'on doit
,·articuler. Demander' à faite entendre .des témoins {ur le
fait direél: qu'on ell fils d'un cel, c'ell confondre le miniftere du témoi'nav~c l'autorité du Juge, en référant à l'opinion du témoin la filiarion même qui fait l'objet de la con·tellation. Ce premier fait ell donc inadmiffible. Rien dans
tout le refie de l'expédient qui puiife avoir trait à la maternité; elle efi abfolument ou.J:>liée; il femble qu"il fuffife
à Mafvert de n'avoir point de titre de l'état qu'il réclame, /
pour avoir la permiffion d'en faire la preuve. Mafvert n'ell:
cepenaant pas non recevable en tout état de caufe, d'après.
l'Arrêt qui lui en a fpécialement réfervé le dwit. En vain
a-t-on oppofé fes variations, foit fur la filiatiol\. légitime
ou bâtarde. Sans dome ori ne doit point arbitrairement
- - prendre & abandonner une aél:ion; mais celle dont il s'agit
lui a été précifement réfervée; ainfi nul doute qu'il ne puilfe
la proporer. Mais quand même les faits contenus dans l'expédient feroient. prouvés, il n'en réfulreroit jamais que Ma{.
verc. ell le fils de Me. Coye, parce que cous ces faits n'ont
pour bare que le plus léger adminicule en matiere de filiation, des foins & des marques d'intérêt qui n'ont peut-êrre
d'autre caufe que les fenrimens çharirables & la confcience
timorée de Me. Coye, florrant au moment de fa mort, où
toures lés craintes fe réveillent dans une foule d'incertitudes.
.
On ignore fi le nommé Mafvert ell: né ex [olmo {; ex
j'allita , s'il doit la vie à une {impie concubine, meretrici,
s'il doit le jour à un crime, adulterio; & le nommé M.af;;ert veut que la Jufiic~ l'ignore à jamais. Peut~el1e lui affurer
�DU
PALAIS
DE -PROVENCB.
:plt
furer [on fecours? peut - elle l'admettre à la preuve?
Le fieur de Coye doit donc être mis hors de Cour fur
cette qualiré, ainfi que fur la provillon., qui ne pourroit êere
accordée que comme une conféquence de la preuve,. admire.
Mais le fieur de Coye doie-il êere mis purement ,& fimplement .hors de Cour? TI s'elt rendu au cri de l'inforruné;
fi. a faie des offres, il a mis (ous les yeux de la Cour le
relevé de la [ucceffion de [on frere, fucceffion confidérable
au premier coup d'œil; elle ne l'elt plus, lor[qu'on envifage la foule de dérra8:ions qu'il y a à faire. Mr. l'AvocatGénéral pen(a que les 4000 liv. qui avoient été offertes à
Ma[vert, [uffifoienr pour lever une boutique.
.
Il conclur Il ce qu'au bénéfice des offres faires par le
fieur de Coye fur le barreau, & s'obligeant à les réali(er dans
le mois, icelui fûe mis, fur la demande <lu nommé Ma[verr,
hors de Cour & de procès.
Arrêt du 29 Avril 1777, prononcé par Mr. le Pré!ident
de Lauris, qui déboure Ma(vert de [on exploit libellé, de
fa demande en provillori & de [on expédient; & né..nmoins, conformément aux offteS faites (ur 'ie barreau par
les hoirs du fie ur de Coye, les condamne au paiement de
la Comme de )000 liv., dér'ens compell(és. Plaidant Mes.
Mougins-Roquefort & Portalis.
Voyez le Journal du Palais de Provence, années 177) &
1779, pag. 366•
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'Années t 775 & juiv.
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ARR·Ê T - 'L X l 1.
'L'acc:eptation d'un mandat opae novatüm..
Le Lieutenant de l'Amù:arité "perit-il .ordonner le nonobJlant
appel fans donner caution? rPeut-il, en prononçant la condamnation ti'une famme trop fotte pour être au cas du
nonobflant ,appe!, la fync{J'per, .& ordonner le llollobf/ant
'appél.}jufqu'au cof//lurrmt de ,la l'mtie de hl famme.qui peut
être provifairement -.exricutée ?
L
E 'Capitaine Jaubat-, pattant de -Smyrne pour fe rendre
. - fi Marfeille~ reçut .des fieurs -Noyanne tk Compagnie,
Négocians françois de cerre échelle, t(.ois 'balles-coton filé
- 'fouge, '& vingt-n'euf fa:es 'fil de chevre., -avec ordre de les
LconGgn'er aux IhlUrs IPeller{fn Freres. IGes marchan"difes -<lr-l'i'/lies -à leur dell:ination., le5 fieurs lPelletan lfirlll1t ·avec le
'Capitaine 'Jau6en le compte des nolis 'qui lui éroielit dus,
'& .qui [e montoi-el1t à .120'8 IiI'. 13 tols; il e'n n?çut le 'paie,'ment!:(!n ·un m'nnd'ut .fuoMe. 'Collavier, 'Gourtier royal. Ge
mandat, tiré par le fieur Gaudran ainé, 'av-Oit 'palfé daos·les
-mains -des 'fieurs Pelleran à titre de 'tranfport; le Capitaine
Jaubert le reçut à fon tour par le mini{t.ere du fieur Jofeph-George Melon, qui ne manqua pas de concéder quittance en faveur des fieurs Pelletan des 1208 liv. montant
du fret ou nolis. Le Capitaine Jaûbàt difpofa en fuite de ce
mandat en faveur du lieur Antoine-Jofeph Gautier.
Six jours après la réception du mandat; le Capitaine Jal/hert fit affigner les lieurs Pelletan pardevant le Lieutenant
de l'Amirauté en condamnation des nolis, & obtint une
Sentence _qui lui permet la faifie des balles de coton & des
facs ·de fil de chevre. Appel de cerre Sentence pardevant la_.
Cour; requête en nonobftant appel jufqu'à la concurrence
de 1000 liv.; fignification aux fieurs Pelletan de la part d~
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PAL'; l l'
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fleur Gautier du· protêt du .mandat qui lui avoit é-té . t-ranfponé par le Capitaine Jaubert, avec interpellation de lui.
en payer le montant. 1.es fieu rI' .l?elletan oppofe.:rent au fieu!'
Gautier ~ qu'avant de ~el)ir ~ontr'eux, il [aUQit fe p.ourvoir.
c.ontre le Capitaine Jaubert., fuivant le, texte cre la ddlibération de la Chambre du Commerce, homolQguée par Ja,
Cour le 3 Avril 17) 9. Sur. cene réponfe , le fieur Ga.utiel"'
garda le filence. Pendant cet intervalle, le .Capitaine JaubertJ
obtint du 1.ieurenant de l'Amirauté le nonobHant appel ~
ce qUI obligea les fieurs Pelletan à payer comme cQn,traiurs
& forcés, Ils amplie.ren~ enfujte leur 'lppel envers l'exécution
provifoire.
On diroit pour eux fur l'ordonnance de tlonobfl'lnt appel ~
qu~ l'Ordonnance de la Marine de 168 l oblige les Juges
de l'Amirau~é de fuivre, dans c~s fortes de ma'tieres, le!i
difpofitions de l'Ordonnance de 1667;' elle ne dit pas même
que [es jugemens rendus ftlr les demandes en paiement de
fret ou nol,is feront exécutoires nonobHant l'appel; touQ
ce qu?elle a fait à l'et égard, c'eH de vouloir que l'Ordonnance de 1667 foit exécutée fuivant fa forme & teneur,
comme on le voit da.ns le liy. l , tir. r 3 ; arr. 7' Ainfi les
1.ieutena,ns & les Sieges d'Amirauté, en oràonn;;nt l'ellécu..
tion provifOire de lellrs juge mens en matiere de fret ou
nolis, ne font que fe conforn1er .aux d.ifpofirions de l'Ordon..,
nacce de 160; & il fa.ut avouer qu'il en eH du loyer des
navires comme du loyer des maifons; ces mati.eres font Iépu nées fommaires, pourvu que ce qui eft demandé n'excede
la fomme. ou, valeur de IQO.o liv. Ce font. les expreffions de cette loi" tit. 17 ,._~rt. 3. Mais dans le cas: même
où les Juges peuvent prononcer par provifion& ordonne!"
l'exécution provifoire de leurs jugemens définitifs, ils fonr
arrêtés par l'importance de la fomme demanélée; s'il y a
contrats, obligations ou autres titres, l'exécution du jugement de provilion peut être ordonoée, nonobHant l'appel', Il'quelque fômme que fe monte l'adjudication p.rononcée. C'efl:.
la dilpoG.tioo_ de la mçme Ordonnanœ de l '667, tit. r 7 )
v v.2.
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a~r. I~. Si au contraire il n'y a, ni contrat ni obligation;
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nI aurre rirre, l'exécution proviCoire ne peur être ordonnée
que d~ns le cas oll la mariere ef~ véritablement fommaire,
& que la fomme dont il s'agit n'excede pas 1000 liv. C'eŒ
ce- que prefcrit, l'arr. 14 du rir. 17. Voilà les vrais principes de la mariere. Le Lieutenant de l'Amirauré, fans les
méconnaître, en a abufé dans l'applicarion, & il a cru fe'
rapprocher de la difpofirion de l'Ordonna,nce,' en ne permettanr le nOllobHant appel que jufqu'à la concurrence de 1000
liv. Ce CyHême dt évidemment injuHe, n'y ayant aucune
loi 'qui pôr ,aurorifer 'le Lieurenant à divifer la fomme demandée par le Capiraine Jauhert, la fomme demandée étant
la mariere contenrieufe. Or, cerre matiere né pouvoir être
ré purée fommaire, dès que la fomme excédoir 1000 liv.
Il n'y avoir donc pas lieu d'accorer le nonobftant appel.
, Ce jugement dl encore infourenable, parce que le Lieurenant éroir nécefficé d'obliger Je Capicaine Jauhert 11 donner
bonne & fuffifanre caution. L'Ordonnance de 1667, art. 3,
rir. 13, liv. l , ordonne que les Sentel1ces concernant les
chu[es déprédées ou pillées dans les naufrages feront exécurées nonobllant & [ans préjudice de l'appel, & elle ajoure
cetce cla'ufe inréreifanre, en donnant caution. C'eŒ ce qu'on
voit encore dans -l"arr. 4 du même ritre, & dans l'arr. 14
du ritre des ajJùrances, IiI/>. 3, rir" 6. Suivant l'arr. 12 de
l'Ordonnance de 1667, au rirre des matieres fommaires, raus
les, jugemens rendus en fair de police font exécuroires
nonobllant l'appel, en baillant caurion~-D'après l'arr. 13 ,les
jugemens définirifs donn~s en rnariere fornmaire font exécuraires par provifion en donnant caurion. L'on rerrouve certe
clau[e dans les articles '14, I~ & 17 du rilême rirre, &'
dans tous ceux oll la loi parle des exécurions p.rovifoires.
Il I)'y a aucun rexce qui permette aux Officiers' de l'AmiTauté d'ordonner' le nonobfl:anc appel, 'fans obliger le demandeur à donner caution.
.
Au fonds, on difoit iO. que la Sentence du Lieutenant
avait été rend e avant même que la figniflcation du Ca~,
�D U
PAL At S
D E
P Ji 0 V E Il CE.
') 1. ')
pitain'e fauhert parvInt aux lieurs Pelletan. 2-0. Que le Capitaine Jauhert avoit demandé aux lieurs Pelletan le paiement
d'une fomme qu'il avoit déja reçue. On convenoit que fuivant
l'Ordonnance de la Marine, Iiv. 1, tit. 1 l , arr. 2-, les affignations peuvent être données de jour à jour & d'heure à
hellre, pour çe qui concerne les matieres provi(oires, &
qu'une demande en paiement du fret ou' nolis eft répurée
matiere provifoire;' mais l'Ordonnance, en pem,ettant les affignations à un délai fort court, n'a voulu que faciliter la
jllHe expédition des affaires de commerée, fans interdire
aux Négocians la liberté de [e défendre. C'était donc tll\e
néceffité que les fleurs Pellecan fuifent inftrùics de la demande du Capitaine JauDert avant l'heure, marquée pour le
jugement; & loin de leur offrir cet avantage, il les fit condamner fans qu'ils eu{fent pu fe faire entendre.
On a vu que le Capitaine JauDer.t demanda l'adjudication
d'une fomme de 12-08 liv. 13 r. pour le fret ou nolis de trois
balles coton & vingt-neuf [acs de fil de chevre; fa requête
eft du IJa'nvier 1774, mais le Capitaine JauDert avoit été
payé le 2-7 Mai ptécédent; la quittance que le fieur 1'1 Ion'
concéda pour lui ea claire.&: formelle. Les lieurs Pelletan s"aeqllitrerenr par un mandatriré fur Me. Colavier; mandat qu'ils
avoient reçu en paiement des mains du fleur Gaudran ainé;
mandat gui tenoit lieu d'un paiement réel & effeétif., Le
paiement du nolis étoit conllaté' par la quittance du lieur
Melon, & pa r conféquent ce nolis ne pouvait plus fàire la
matiere d'une demande en J ullice. La ceffion du mandat
avait opéré une novation très-fortl)elle; l'exillence de ce papier dans les mains du Capitaine JauDert avoit éteint &
[es droits & [es aél:ions à raifon du fret ou, nolis j' c'eH l'effet.
naturel & Fléceifaire de toure efpece de nova'tion: novatione
extinguitur ohligatio, dit la Loi. Il ne- relloit doné au Capitaine JauDert ni raifon ni prétexte honnête de demander
le paiement de fon nolis; il le poùvoit d'2utant moins,
qu'avant le premier de Juin, époque de fa requête, il avoit
négocié le mandat reçu le 2-7 Mai précedent, & eu avoir
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·s 2.6
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W li.
L
re<;u la valeur. Le fieur Anroine-Jofeph Gautier en étClit de~
venu le propriétaire; c'efit lui qui le fit proteffer en fon
nom le même jour que le Capitaine Jaubert préfenta fa requête ao Lieutenaflt.
Le fieur Gautier, propriétaire du mandat, en faifant fig..:
nifier le' protêt aux; fieurs Pelletan, avec injonél:ion' de lui
" en payer le montagt, a démontré que le Capitaine Jaubert
avoit négocié le mandat & en avoit recru la valeur. Il avoit
d0nG été payé de fan fret & nolis; fa demande ao Lieutenant émit donc injulte & infoutenable. Si le Capitaine Jaubert, après avoir recru le mandat, l'avoit gardé en main,
il auroit pu fans doute en faire uf,1ge, & en cas de protêt
l'éveni~ fur les Î1eors Pelletan, qui 11 leur tour fe feroient
adrelfés au fleur Gaudran, qui en éroit le tireur & le principal débiteur. Mais dans ce cas- même le Capitaine Jauhut n'aurait pu former aucune demande à raifon de fan
nolis; il ilauroit pu réclamer le paiement d'un louage ac-quitté d'une maniere très-exprelTe; il n'aurait pu traduire les
fieurs Pelletan parde.vant le Lieutenant de l'Amirauté; mais.
• il aurait fallu qu'il s'adrefsât aUX Juges-Confuls, comme campétans de connaître do protêt du mandat.
Sur ceg- raifol)s j par Arrêt du 2. 1 Mai 1778., au rapport'
de Mr. le Confeiller de Fabry Borrilly, les Sentences furent'
l'éformées, avec dépens. Ecrivant Me,s. Eftrivier &.......
.
ARRÈT
LXI l J.
Si toute commiffion adreffie au Juge Royal le plus prochain'
rogarde le Lieutenant le plus prochain.
L
A Communauté de Bayons ayant ohtenu des Lettres";
pauentes pour être aurorifée à acquévir la terre & fei•
.gneurie de Bayon~, les fit enrégi/1rer au Parlement. Lorfqu'il fut quefiion de vendre les immellb-les, la Communauté,
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PAL AIS
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PRO V B R.C Il;
"P"7
tlemandà la perLniffion à la Cour, qui l'accorda, & qui
commit le Juge Royal le plus prochain du lieu qui accéaeroit à Icet effet à Bayons. La Communallté s'adreffa au J"ge
Royal de Seyne, wmme étant le Juge le plus prochain. Le
Procureur du Roi en la Sénéchauffée de Sifleron préfellta une
requête à la Coar en révendication de jurifdiél:ion, & en caffation
de tout ce qui avoit été fait .par .le Juge de Seyne, & il
demanda que défenfes lui feroient ·faites de connoîrre des
caufes de la Communauté & des particuliers de Bayons,
& à ceux-ci de lui porter leurs caufes, fous telles peines que
la Cqur fiarueroit. Sar cetre requête, il Y eut un foit,momFé
à partie, demeurant tout en érat jufqu'à la 'réponfe; le Juge
Royal de Seyne préfenta une requête contraire, qui fit renvoyer la c'aufe à l'audience.
On difoit pour le Procurel)r du Roi au Siege de Sifieron,
qu'en confultant les principes qui gouvernent les Jurifdictions en général, on voit d'abord que les Ordonnances. du
Royaume veulent indiftinél:ement que l'exécution des 'Arrêts
des Cours ne foit confiée qu'aux Juges de.s lieux; le principe
ne. peut pas. être contefié. Donc le décret de la Cour ne
peut poiet· s'appliquer au Juge de Seyne. Le Juge des lieux
· efl: cel~i .que le Souverain place p.o.ur tous les aél:es de juHiee
qu'on doit fai~e dans l'étendue de fon difiriél:; le Juge étran,gel', c'omme le Juge des lieux, ont leur territoire circonfcrit
·& limité; leurs provifions & l'ufage leur donnent des bornes
qu'ils ne peuvent point excéder. La Cour n'a docc jamais
entendu nommer â\autre 'Juge.que letJuge des. lieux; en dé.fignant le Juge le plus prochain, elle efi cenfée s'être conformée au vœu des Ordonnances; elle n'a donc filmais en· rendu -appeller le luge Royal -de Seyne.
\
~'Lo'ifeau, qui a li bien fi:onnu des droits des offices, re.
Cc0nnoît ,que les conlmiffions en général s'adreffent oi'dinai·rement aux 0fficiers des lieux ( liv. 4, chap. S, .n. 69. ) Les
,Auteuros vont même .plus loin 1 car ils traitent la queHion de
cfawir ,qui 'des luges Royaux du reffott {loit connoÎrFe'
.des commHlions .adreffées par -les lCOUFS ,(uus le nom g~.,
)
�'52.8 .
Jou RNA L
nérique de Juges-Royaux les plus prochains. Joulre, .traité de
l'adminiftration de la juJlice civile, tom. l , pag. 2.S 2, dit qüe
cela s'entend toujours ·du Bailli & Sénéchal, & non du Prévôt
Royal, à moins que ce dernier ne [oit nommé exprelrément
par l'Arrêt; cet Auteur ajoute que cette maxime efl: établie
par Ml'. Talan, Avocat-Général, dans une caure plaidée à
l'audience de la Tournelle le 4 Janvier 1680, & par les
Arrêts des 30 Juillet 1678, & 14 Janvier 1681. Boniface,
tom. 3, liv. l , tit. 2, pag. 9, rapporte un Arrêt qui décida
que_l'Arrêt du Confeil de l'an 1660 n'avoit pu contrevenir
aux Ordonnances & Réglemens de la Cour, qui défendent
aux Juges de procéder hors les lieux de leur établilrement.
Julien rapporte cet Arrêt avec les mêmes motifs dans [es
colleétions, va. delegatio, chap. 2, litt. V. On doit donc,
d'après les principes de ce préjugé, calrer les procédures
faites par le J llge de Seyre; il eO:, [ous tette qualité, étranger
au di{hiét de la SénéchaulTée de SiO:eron. On ne doit donc
pas tolérer qu'il vienne procéder à l'exécution d'uo décret
qui ne peut pas le regarder.
On répondqit qu'il efl: bien vrai qu'en 1602 des encheres
avoient été faites à Bayons par ie Jllge de SiHeron ; mais
dans ce temps la Sénéchall{fée de Sifleron n'étoit pas encore créée, puilqu'elle ne le fut qu'en 1632; il n'y avoit'
pas non plus de'Juge Royal à Seyne. en 1602.; de forte que
le Juge Royal le plus prochain .fut commis, lorfqll'on commit le J ug~ de Si Heron ; & fi, comme on le prétend par le
mot Juge Royal., il fàlloit entendre un Lieutenant, ç'aurait
été au Liemenanr de Digne à venir faire les em:heres à
Bayon~
"
lierpillol1 dit bien que quand les Ordonnances, Edits ou
'Arrêts fe fervent de ces termeS, nos Juges, cela ne doit s'entendre que des Ba!llifs & Sénéchaux, &. jamais des Prév6ts &
Châtelaias Royaux; cela eH vrai pour touS les cas qui exigent une étendue de Jllrifdiétion que le Juge Royal n'a pas.;
parce que le Juge Royal ne remplit qu'un premier degré de
jurifdiétion, & ne repréfeQte q~e le Juge du Seigneur; mais.
tOUteS-'
,
�D'U
PALAIS
DE
PiOVENCE.
S19
toutes les fois que ce premier Juge aura capacité de remplacer certaines" foné1:ions, comme" il n'efl: pas moins Juge
ROYdl que' les Lieutenans qui ont feulement uo titre plus'
éminent- & une jurifdiétion plus étendue, il pourra s'en acquitter fous le titre de Juge Royal, qui alors le défigne véritaQlement. Serpillon fe fonde fur ce que Mr. Talon établÏ'l!'
en 1680 à l'audience Tournelle de Paris, que c'eH une
chofe certaine &" décidée par les Arrêts d.e Réglement intervenus entre le{i Baillis & Sénéchaux & les Prév6ts Royaux,
:qùe quand la Cour commet en général le pius prochain
~Juge Royal, cela doit s'enrendre 'premiérement & principalement des Baillis & Sénéchaux, & que ces (ortes de
.commiffions ne s'adreJTenr aux Prévôts Royaux que quand
ils font nommés expreJTémenr par l'Arrêt, C'e!l: apparemment là un u(age parriculier au Parlement de Paris, qui loin
-<le pouvoir faire regle your nous, n'a pas même été remarqué. par les Ameurs autres que Ferrieres & Serpillon.
Or donc quelle eH la Loi qui a (pécialemenr attribué aux
Baillis & Sénéchaux les procédures d'encheres? Quelfe efl:
la Loi qui a dit que le mot Jlige Royal Îlgnifieroit Bailli
Oll Sénéchal, tandis que les Ordonnances, lorfqu'elles veulent attribuer quelque cho(e de particulier aux Baillis ou
Sénéchaux, di(ent: connoÎtront priv3tivement J nos autres
Juges. Les autres Juges font donc auffi Juges Royaux; & li
l'Ordonnance défign"e quelquefois les Baillis par ces mots,
nos J'uges, il e!l: à remarquer que l'expreffion e!l: alors refferrée & refl:reirne par la rnatiere dont l'Ordonnance traite,
qui efl: .toujours un cos royal, & dans ce cas le mot, nos
Juges, défigne fpécialement, comme l'a remarqué Vouglans,
l'objet parricuJi~r de l'infl:itution des Baillis & Sénéchaux,
qui efl: de connoÎtre des chofes qui regardent la perfoune
du Roi, fa dignité & fon office, c'efl:-à-dire le maintien
de la sùreté publique contre les délits graves qui la trou_
blent. Hors de ces cas, le mot Juge. Royal a toure la généralité. de (on acception, & s'applique à tout Juge Royal indé•
.fiuimenr. P'Oll l'on ,peut conclure que par Je mot Jl/g~
Années z77) & flliv.
X 11 x
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Jou
R. N Ji. L
Royal, od ne peut entendre le Bailli & Sénéchal que lod:'
<tue la matiere eH: de fa compétence exc1ulive; car toutes
'les fois qu'elle eH de la compétence d'un Juge Royal or.dinaire, il n'y aurait pas de raifon d'exclure CI; Juge Royal,
pour appeller à plus grands frais & fans néceffité un Lieutenant.
Me. Bermond, Subll:itnt, obferva que t'intérêt des jurifdiaions a donné lieu à t'établiffement des Réglemens qui
ont fixé ($' déterminé leurs privileges. Le feu 1 moyen de
conferver les droits refpeaifs de chaque Tribunal étoit de
fixer des bornes à leur pouvoir. Auffi les droits des Juges
inférieurs fur les commiffions émanées de la Cour fOllt-ils
déterminés par les loix '& par la jurifprudence. La Cour peu.t
en général commettre tel Juge qu'elle trouve à propos, r~lativement aux circonGances particuli~res qui peuvent la détermin.er ; elle o~ferve cependant d'attribu.er les c0mmiffions dont elle charge. les/ Juges inférieurs, à celui qui fe
tro.uvant le plus prochain des parties,' peut s'en acquitter fans
cau fer des frais conlidérables.
/
Il Y a des Auteurs qui ont prétendl,l que les Juges des
lieux étoient les feuls .qui duIrent recevoir & exécuter les
commiffions de la Cour; d'autres ont penfé qu'elles appartenaient 'aux Lieutenans exclufivement à tous autres. L'api.
nion de ces derniers ne s'accorde ni avec les Ordonnances
ni avec les Réglemens; elle pourrait être adoptée da,ns les
cas où le J ùge commis doit avoir une certain,.e dignité &.
une étendue de p0uvoir que n'ont point les Juges Royaux
ordinaires. Mais quand les. procédures confiées' au, Juge
Royal fe trouvent être de fa compétence &' de nature à
ne pas. exiger plus de capacité & de pouvoirs plus étendus que
n'en a ce Juge, la commiffion donnée indéfiniment au Juge
le plùs prochain peut 'Iui être appliquée en fa qualité de Juge
Royal.
. Le mot de Juge Royal pris dans fon vérItable fens ne
lignifie point le chef d'urie SénéchauIrée; il s'applique indifférqnmerit à tOUS les Juges Royaux, &. t'on ne peut paS'
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PALAIS
Dl!
P"ROVENCll.
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llire que les commiJÈons qui leur fom vaguement atiribuées
& fa ns déGgnation plus particuliere, ne puiffent être exécutées que -par les Lieutenans; ce ferait '. fans y être autorifé par aucune loi, donner une interprétation forcée à un mot
dont la fignification n'e!l: point équivoqul'. Il n'-e!l: pas doutellx qu'il ne faudra entendre que les Baillis & Sénéchaux,
quand il s'agira d'une, matiere dont ils pourront feuls con.
noître; & quoique le décret de la Cour ne porte alors que
le mot de Juge Royal indéfiniment, le Lieutenant fera le
feul à qui les parries pourront s'adreffer. L'anribution qui
lui e!l: donnée excluGvement à tous autres, tient alors à la
mariere mêine & à la nature de la commiffion.
. L'inco'mpérence des Juges Royaux e!l: le motif de leur
excluGon; mais dans tous les autres cas, & !orfque 11\ mariere. ne réli!l:e point, le mor fimple de Juge Royal déligne
rout Juge Royal 'fans diHinél:iorJ. L'intérêt des parties a toujours déterminé la Cour à commettre les Juges les plus
prochains préfér4blemenr aux Juges d'un reffort étranger;
de· ,forre qu'en s'adreffanr aux Juges des lieux, on ne fait
que fe conformer aux Arrêts de la Cour. Le Juge des lieux
eH communément le plus prochain, & c'eH à lui par conféquem
que les commiffions font communémenr adrefféeç, Mais cà
ufdge, uniquement établi pour l'intérêr des parties, ne rtn~
ferme aucune obligation pour la Cour de commenre les
Juges du n:ffort par préférence à tous les autres Juges
dont la proximité du lie.u des parries peut former le ti:::
tre, & qui tiennent! leur pouvoir de la Cour; ils agiffent
au nom dt! Tribunal fouyerain qui les a commis j & pourvu
.qu'ils procedent dans l'étendue du reffort, leurs opérations
[o::rt .légales & valahles. Le Juge du reffort {eroit léfé, fi
les procédures. dont .Ia. Caur- charge un Juge étranger apparrenoi~nt à fa Jurifdiél:ion; mais quand elles apparriennent' puremeni & fimplemenr à la Cour, il 'lui ell: fJcultarif d'en cOBnec.l'exécu<îoll au ,Juge qj:j'èlle veur j la. no~}baoion de'la Cour.e!l:,fon rirre, &.'fa proximité lui donne
• ~roi~'à .èeHe {Iom.ination.
.J
x x X 2.
'.
�'B1.
J0
F.. L
Le Juge de Seyne fe trouve encore dans des circorif.
tances plus favorables, puifqu'il ea par Lettres - patentes
Juge-Royal de Bayons. On peut dire qu'en cerre qualiré il
a procédé dans fan territoire, & qu'il était lui-même Juge
du reffort, ce qui rend fes opérations valables, même en
fuppofant que la commiffion de la Cour ne pouvoir; pas
compéter à un Juge d'un reffort étranger; à, ce double
titre la commiffion lui appartenait & ne pouvait appartenir,
qu'à lui. Le défaut' de réception à la Sénéchauffée- de Sifteron ne-peut être d'aucune conudération dàns le fait dont
il s'agit, parce que ce fait eH: étranger à la jurifdiéèion de
ce Tribunal, & que le Juge commis par la Cour ne le
reconnaît point dans le fait de fa commiffion cbmme fon
_}
Juge d'appeL
"
Me. Bermond' conclut à ce qu'en concédant aéèe aux ConfiJls
& Communauté de Bayons d~ ce qu'ils n'avoient jamais .voulu
fe di!haire en caufe d'appel du reffort de la Sénéchauffée çJe
Siaeron, fans s'arrêter à la requête du Procureur du ,Roi,
là C6mmunauté de Bayons ftIt mife fllr icelle hors de- Œour & de procès, & qu'il rut permis de faire procéder auX'
encheres pardevanr -Je Juge de Seyne;
_
Arrêt prononcé à l'Audience du 16 Juin 1778, conforme
aux concluuons, avec dépens: Plaidant Mes. Simeon_ &
Colomban.
Ù 11. N
7,
"
t .... \.J •
ARR È T
LXIV..
,1
- \: 1I1in~IV: ~ fil}" de famille /Zon N-egociant reflitués envers .une
• obligation conçtIe valeur reçue en maTchandifes. " .!
.
M
.
-
.
"
E. Auguflin Boyer, Médecin de la ville de BMjnls,
.
'Jc!1eta pour 207 liv. de rn~(c1ian,djfes du fieur Jo[eph
Praye , ~1àrchaI1d Colporteur" & ic'6t Jè:ù) bille .à 'ordre.
Le fieur Praye donna ce billet alll' fteJlrs:.I'omés.& 'lug'lar, •
�'
nu, p
. A L -A t s. ·np
Î!
_ R 0,V B Ne}!.
...
n
'1
n-)
Marchands 'de'la ville de'ManofqlleJ, én pai~ment des mâf<:handifd qu'ils lui aVQi~nt vendues: Le jour- de lléchéil'nce
du billet étant arrivé, Me. Boyer demanda' un délai pout'
'le paiement, qui lui fut accordé; mais n'ayant pas remFli
.fa promeffe, les fleurs Juglar. & Po'nr'és 'le firent affigne1"
pardevant les Officiers de-Barjols .en cbndafn~atiofl:de cette
:fomme. Le fieur BOYer'liere :. en qualité de-per~ & !égi;'
time adminifirateur' -de fon fils, prit- des 'Iertres de reTeifion, & demanda la -caffation de l'obligation de fôn fils,
-fur le fondement de· fa minorité. &. de fa qualité -,de'j fils
de famille.,- Lê Juge de BaFi~ls ~t dwit ami !ëttresL{ler.r~T
titution, & 'déboura les fleurs - Pt>ntés- & 'Jug.lat' de: I~ùt'
c<\eman<:le avec dépens. A-ppel pal1devant te· Liéuteriant de
Brignoles, qui. confirma la Sentence du Juge' de Barjols.
Aurre appel pardevant la COUF.· On diroit pour les fleurs Pontés & Juglar', JO. que Me.
Boyer, 'quoique fils.' de famille, éraie capable de !j?obliger;
2°•• parce qu'il avait un' éràt proprement dit " & qu'ils· ne
'demandoiént de p'oner 'Ieurs . ex~eutions·ql1e fur fan pécule ~
qui certainement lui' appartenait en roure propriété.. Me.
'Boyer efi fils· dé faniille , ilJ efl: v:,ai; mais Li loi ro-maine & les Arrêts des Cours fouveraines ·n'interdifent
poine 'aux fils [de fa'mille-l,\ liberrÏS- de s'obliger vaiablech~nt-;
'il y~ en a une' infinité) de textes.' r La Loi fi qtiis patrem
fantil. .1, §. is autent 3 ;.If. ad -Sendtus Confultum Maced.
& la Loi 3, cod.- eod. font expreffes , & cette maxime dl
-fur-tout clairement écrite, d.ins la Loi filius fflmilias 39,
.If. de -ohligationi1Jus &. ac7ioni1Jus. Le, fils de famille, y 'efi~
-il dié, peut s'obliger pour tout.e forre de caufes auffi valà·blement quel ce'ux qui font affranchis de la puiffanée pater,nelle; & l'on :peur agir contre lui en force & à raifon' de
fes oblig,Hlons, comme>" s'il étéit pere de famille: filius
familias cr: omni1Jus' caufis tan'luam pater familias o61igatur,
lf{. 06 id ugi cum ~ri tàll~uam c;;~ pat~e familias pote/? T-elle~
.font" lesl ~pteŒons..de cerre :JO\, qUI eH edeore aUJourd'huI
hi .teg1e qe toUs ,)es jogemens; on peut en juger.. par le~
-.
�'~'~'H
.ap~ltations
,
f
de pefp~iffes ~n fon traité des contratS, de
Decormis '- de, Duperier, de Bonnet en fon Recueil d'Arrêts
au m'Or fils cfe Jo,mit/~, pag. 166.
D'autres Loix & les Arrêts n'ex.ceptenr d,e cette maxime
généra,le) qué ks obliga.tiqns p.our caufe de p.r'c e.n 'argent.
~Rien n:e.t;llpêgq!l Le fils d~ fam}lIe q'acheter des effets 010.bil'iers, cie~ 'lT!~rch,\ndi.fes" des penré,es" ou.' de les recevoir
11 titra 'de .prêf; la ,prohibition ne potte abfolumenr que fur
le pr~t d~arge!.Jt·" foit) parce .qu'il tend ouvertement à.filvo,:fler. lei!. çliŒp'ltiops qes fils d!l 'fal!lille, foit parce que
.trop Jo~Y~m 1i~ dpt)Il~, lieu ~ des ufl!r.es- énor!J:les.. Les Loix
,ont reffeH(d@ns de iulk~ b9!1lleS un~ c:Qtiflitution qui elf en
{9,i ~igqureufe'& pén~le, puifqoe- c~lui ·ql!i prête fen argent,
.efi ·pri\·é. du drQit même de le:redem1in er. Il y en a une
prelniere difpofition dans I.a Loi 3 ,j[. de Senatl{s Conful.to
,l'y17fcedon{'al}o; celui:,-Ià feyl ,'yI efi-ih.lih, enfreint le Sénatus.çoofulêe~ ~ac~t1onien 1 qui (PJiê~e de~ J'atgegt à un fils de
fô\rnille. Il n'ell efi pas de même ,de cetui qui[a fait un autre
coiJtr,ac ,avéc lui" foit par vel}te l ,fçit par louage: is autem
Jolus SenatlJ,s Confùltum offendit, qui mutuam pecuniam filio
familia$ dedit, non qui alias contraxit, put.a, vendùjit, local'it
vel alio modo contraxit. < 1
" L~' ÏJoi 7 <lu m(m~. tjtre .s;eQ. explique encore bien forroell!;mént. dans <' le §. 3. Il faut èX3n}iner , porte cettll'
, oj, fi nOllS d~vens câmpren:O're daM la prohibition' du
Sénatùs-Confulte Macéqonien l~ prêE d:aurres chofes que
Jo des, fommés en àrge~t: mu~i dationem non-folùm numeratil!.
jJ,~ç,uniœ ". ve";!.m~. omnium qI/te "J{tuà~ dgri, jJoJfitnt, qn accipere; 4e~t!amq~ evisfen.sll/Iil, fid lverkal vid,ef]tJlJ miAi ad T)lJ.111!!~atam_IP~Œniaf7l rdetri: ail.. eJ]ini Senpt:ps.,j mu,{uq'll peçlJ~
nùlm, dediffeJ. n ne rS'-agic: dO!l~:labfollltl1enr ,E;jlJ~ des. prçts
,en arge[)t dans la .p"rohibit.i9n . prononcée par III SélJ;atus(;ofl~ulte. M!lcédorrien. Il, n'~ a do~ç '!'li· viCe ni nl!lIit~ dan~
,l'lilbhga.ttÇ>A -d'uli.EI~' <te ,f~mIHe '''lm .n~ pas ,PQU~, pble-t tU1
prêt .en ·.ar~nt k,& c'e~' dQnt; àJ.cehlhfeul~~II5~ Ce' ~qtner:.fa
-pt:<>4ibition: écri_Ee d~s .la Hoj,. Unei ob.llgal.ÏSJp _q.uelcon.qu.ê,
�n
PAL.U 'S- .n B )
a 0 VEN C i. ~n')'
foi ,'& fe foutie.n~ paè Ca propre fOl'ce, fuie
qu'il s'agiife d'une vente, d'un louage, d'~n prêt de ma1;-
ii 11
·eu: valable 'e':l
diandifes " de denrées 'ou de 'wute autre 'efpece de trairé.
Or il, ne s'agit ici de ricn moins que d'un prêt, 1fait èn
'argent. L'obli~atiôn du fleur BOfer'
pour .valeur reçue
'en marchandiJés; elle n'eH .doncJ pas comdamnée par' le
Sénaws - Confulte Macedonien: .Me., Boyerl Îl'{(i)ie' c.apa:cité
p~ur la' cOlltraCler; & après'.l'avoir faite ave'C libe'Dté &
connoilfan'ce de cal\fe, il l'a ratifi~e très-ellpreffém:em par
-la promeife qu'il fit a~x, Lieurs Pbntés & Juglar de l'<tt:,quitter dans leu"rs maiJ;ls, comme on lè .voit- a: has ete
fon billet [.wt en fa.veur.du fleur PLOye. ,,'
'1
Les Arrêts rapporrés par l':Ionifàce, ,tom. 1 , :HV'-4, Ot"'71,
- ch. 1, pag. 297, ne marquent d'autres regles que ,édllés
que l'on doit fuivre envers les peres 'èle fàmilte à raifon
·des fournitures faites à leurs enfans; jls fone fondés comme
'celui que rapporte Honnet, .Iett. F ~.fomm.J 7, {ur le ,t,dte
-même des loix qui fone,[ous le titre du digeIleJ de $e~atus
'ConJùlto Macedoniano. Or ces loix qui renflent le pere ref:.
"ponfable des dettes contraCl:ées par fon fils, lorfqil'e11és Olle
ét,~ forcées par fes befoins, ou lorfqu'i! les a connues, 011
,. enfin lor[qu'il les a approu'lées, le dé'Charg~rie rrè's-exprëffément de cette obligation, Li le fils a conrraCl:é à fon
infu , fans' (on approbation IX fans une abfolue néceffité:
mais tout cela ne regarde que les peres de famille, les
loix n'éteignent point l'obligation perfonnelle du fils; il
,doit acquitter fes dettes fur fes biens propres, en exceptant
le feul cas du (impie prêt en argent. Bonrret au lien ci,devant cité s'en explique ave'c un'e el'at\e ,préciLioll. Il rap,pelle en effet les vrais, les fe,uls principes ,de la matiere,
&' rapporte l'Arrêt du 2:8 Juillet 172), qui jugea que les
trente-deux pianres prêtées à Cadix à Bremond fils par le
fleur Deidier ne pou.voient !l0int être ,réclamées contre I~
lieur Bremond pe'te, parce que c'étoit un fimple prê,t ql~e
}'Arrêt de régle~eilt rapporté par Bonifaœ prphibe e'xpreffement, & .parce que le fils ~étant pas. dans iJ.e lfefoin- i
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ne pouvoit obliger fon pere que 'tde fon exprès confenie..;
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Mais ce Réglemem ne dit pas que le fils de famille (oit
, incapable <;le s'obliger pour caure d'achat de marchandi(es;
il ne renver(e & ne détru.jt pas les Idix du digefle, ni 'Celles
_du code ·;.llil 'ne, veille qu/aux julles intérêts. des peres de
'famille à' qui les, créanciers du fils ne peuvent. s'adre1fer
que dans le 'cas où" leurs fournirures (ont juitifiées par les
.be(oins du -fils, ou par le con(entem~nt du pere. C'ell
-etlcore une m.axime indubitable, que le fils de famille capable de~ toute (one de contra.ts, ~xcepté celui du prêt,
relle invinciblement obligé de remplir.•perfonnellemenr [es
(PtQrite1fes, & que rien ,n'empêc11e (es créanciers de s'adre1fer
-à lui.
.
r .L'on ne conrelle pas ·que le prêt fait. à un mineur ne
l'oblige à reititution qu'autant que l'argent prêté a été em:ployé à fon, Hrofit: ùz. quantùm loeupletior fac7us efl. Il ne
s?agit 'point ici d'un prêt d'argelù, mais d'un achat de mar:chandifes ;. & quand il s'agiroit d'un' fimple ptêt, il dl:
indubitable que Me; Boyer étant Médecin., & ayant par
con(équent un état dont les· profits quelconques lui appar-tiennent & lui appar'tiendrpnLen propre, auroit pu s'obliger
valab'lemem , & feroit teOli de prendre fur fon pécule la
10mme quj lui ell ·demandée.. Le fieur Proye n'a point
. donné de l'argent à Me. Boye~, il ne lui a pas même fait un
prêt quelconque; il hli a vendu d~s marchàndi(es, le fieur Boyer
en 'a convenu ·dans fes écrits. Or que voit·on-à ce't égard
èans le' texIe même de la Loi? Les denrées, 'Ies marcha'ndjfes doivent être. payées -par le fils de famille. Si
celui-ci ne prouve que lalcaufe de fon obligation efl fimulée,
ou qu'il a recù des march-anaifes< qu'il a aufE·tôt revendues"
-,avec perte', 'jufques-là lâ càufe de l'obligation "en: réputée
pure & fans tache.; & comme la deflination ordinaire des
• marchandifes n'efl pas de fervir d'alimens à des diffipations
quelconques, l!acheteur'efl ceMé en avoir profité ·très-réelle.ment, s'il~ne prouve la' fraude ~ fitI)ulatiol1 1 Si fraus .fit
SenatTLs:
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
B7
'Senatus - Confulto adhibita, dit la 'Loi 7, §. 3, ff. eod. :
P/lta frumento , veZ vino, veZ oleo mutuo data, ut his di[traais fruc1ibus uteretur pecunia, fubverziendum eft filio familias. La préfomption eU donc pour l'obligation en foi jufqu'à la preuve du fair contraire, & l'on fene bien que dèslors ce n'eft point au porceur de l'obligation à ajouter une
preuve à la préfomption de droit qu'il a pour lui; c'eU donc
au fils de famille qui prétend n'avoir pas profiré des marchandifes, & les avoir revendues pour en diffiper le prix"" à
juftifier d'un fait que la loi juge nécelTaire à fa défenfe, &
.qu'il eU le feul à connaître.
Les lieurs Pontés & Juglar, quoique fubrogés aux droits
du fleur Praye par le tranfporr du billet à ordre, ne peuvent
fou/frir aucune (orr6 de préjudice des délits que l'on impute
au lieur Praye; ces délits font poltérieurs au tranfpon du
billet " du-moins ils n'ont été publics & punis que depuis
ce tranfpon; il n'y avait donc rien en 1774 qui les empêchât de faire des ventes au lieur Praye, & de recevoir
un .billet à ordre en paiement ou à compte de leurs livraifans. On ne- difpute pas que le ceffionnaire ne (oit dans
tous les cas le repréfentant· & l'image du cédant; mais
cette fubrogation ne pane ab(olument que fur les droits &
aétions du 'Cédant; & dès-lors le débiteur ne peut "eppofer
au ceffionnaire que les exceptions qui concernent direétement les droits & aétions exercées cancre lui. Les qualités
perfonnelles (oot incommunIcables; elles ne peuvent donc
.faire matiere de fubrogation " ni palTer de la perfonne du
cédant à telle du .ceffionnaire. Les fieurs Pontés & Juglar
lle repréfentcnt point la perfonne du lieur Praye; ils {ont
fimplemenc porteurs d'un tirre qu'ils ont reçu en paiement
de leurs marchandifes. Il ne s'agit donc abfolumenc que de
juger ce tine. Or ce titre ne peut être ébranlé que par la
preuve claire & formelle des faits que le lieur Boye~ annonce pour fou tenir les incérêts de fon fils.
Me. Boyer aura, fi l'on veut, revendu les marchandifes
on fuppofera encore que le fieur Praye lui a fait un fimple
Années 1775 & fuiv.
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prêt" d'argent; la demande des fleurs Pontés & 1uglar n'en
.fera ni moins jufl:e ni moins favorable. Me. Boyer efl: Medecin, il a donc un état proprement dit, & dont les profits
·lui appaniennent en roure propriété; ces profits forment
.dans fes mains un pécule dont il a pu difpofer avec la plus
grande libené, & fur lequel n'ont jamais poné ni la prohibition du Sénaçus-Confulte Macédonien, ni celle des Arrêts
de Réglement: ufiJue ad quantitatern caflrenfis peculii, dit la
loi 2, if. ad Senatus-Co-nfult. Maced., cù"' filius familias in
caJlrenfi peculio vice patrum familiarum fungantur. Or le pécule quafi cafirenfe, c'eft-à-dire, les profits quelconques du
:fils de famille qui a une profeffion publique, font de même
nature que ceux que les Soldats romains pouvoient faire
dans les armées; ils font également propres au fils de famille
'qui peut donc en difpofer librement, & qui doit par conféquent les employer à l'acquittement de fes dettes.
, On répondait pour le fieur Boyer, que fan ,fils était mineur & fils de famille, & non Négociant, ce qui rendait
.fon obligation nulle fuivant les loix du Royaume, & fur-tout
fuivant l'Arrêt de Réglement de la Cour du IS Avril 1636,
rapporté par Boniface, ,tom. l , liv. 4, tit. '7, chap. l , pag.
297, & un Arrêt particulier du 12 Février 16,8. Me.
'Boyer joignant à fa qualité de fils de famille. celle de mineur,
il efl: incontefl:able que le prêt fait à un mineur ne l'oblige
à refl:itution qu'autant que l'argent prêté a été employé 11.
fon profit, in quantùm locupletior faRus 1/. D'ailleurs il efl:
certaia que les marchandifes vendues à Me. Boyer n'ont
pas tourné à fan profit, puifqn'elles ont été revendues tout
de fuite à une Courtiere, & que l'argent qui efl: provenu
de cette revente, n'a [ervi qu'à [es diffipations.
Arrêt du...... Juin 1778, au rapport de Mr. le Confeiller
de Neoules, qui confirme 'les Sentences' avec dépens; Ecri-::
vant Mes. Efrrivier & ......
�. ,
.
DU
PALAIS
DE
ARR Ê T
S39
PROVENCB.
LXV.
Quanti minoris refufè il l'acquéreur qui lors de l'acquifition a
connu la fcrvitude, quoiqu'elle n'ait pas été déclarée.
L'énonciatipn d'un titre f4fit-elle pour faire préfumer qu'on en
a connu Les difPc!fitions ?
.
Rophime Cofie de la ville des Baux acheta en ~740
de Me. Manfon une faumée deux éminées & cinq civadiers terre fa1fànt partie d'une plus grande quantité que
Me. Manfon poifédoit au terroir des Baux, fous la redevance
de fept civadiers bled par faumée. En 17')8 Cofte vendit
cette terre à André Moulin, Ménager, & la déclara atfujettie
aux charges, cenfes & fervitudes portées par les reconnoiffances. André, Moulin acquitta pendant ·Jong·temps la. cenfe
de fept .civadiers bled par' faumée de contenance. En 1776
ayant découvert que lès reconnoiifances ne portaient qu'une
cenfe de trois fauUlées bl~d fur quatre-vingt fauméés de contenance , revenant à près de deux civadiers par faumée, il
affigna les hoirs de Colle pardevant le' Lieutenant d'appeaux
des Baux, en répétition' de ce qu'il avait payé de cen(es
au delà de la quantité portée par les reconnoiifances, &
lui donna le choix d'affranchir fa terre de l'efpece de fureens établi par l'aéle de 1740, pour ne I<liifer .fubfiller que
la cenfe portée par les reconnoitfances, al! de lui payer
'la moins-value à raifon de cette redevance inconnue &
non déclarée dans l'aéle. Semence par défaùt qui condamne
les hoirs de Cafte à la rellitution du furcens & à la moinsvalue du fonds, avec dépens.. Appel pardevant la Cour.
On difoit pour les hoirs de Colle, que Moulin' avait
acheté la terre dont s'agit fur le pied de l'aéle de 1740 ,
aux mêmes. 'conditions & aux mêmes charges que Cafte la
tenoit de Me•.'~t}fon. L'aéle de 17') 8 porte que cette terre
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éraie la même que celle acquife parColle de Me. Manfon par
aae du 9 Mai 1740, Notaire Me. Aubert, foul1l1fe aulC
mêmes charges & fervitudes portées par les reconnoiffances. Cet aae ne fllt donc pas caché à Moulin; il régla les
parties & pour l'étendue de la propriété, & pbur (~voir
comment Colle. la poffédoit. La partie qui ach te en ans
une néceffité abfolue 'd'examiner comment, à quel titre &
à quelle condition cette propriéte a paffé au pouvoir de celui
qui la lui vend, parce que ce n'el!: que d'après cet examen
qu'il peut calculer ce qu'elle vaut, & quelle fûreré il y a à
acheter; cela eH inhérent à la chofe & à la narure de la
chore. Colle ignoroit qu'il y eût des reconnoiffances, 'Moulin
ouffi; il lui vendit la pro·priété telle qu'il l'avoit acquife par
l'aae de 1740. Que pouvoit-il faire de plus que de dire à
Moulin: je vous indique cet aae comme mon titre, comme
un titre qui déformais fera le vôtre. C'efl de lui 'lue je tiens
mon droit; c'efl de lui 'lUI! Vous tiendre1 1e vôtre; c'efl [ur lui
que vous dever vous régler pour ajJùrer votre achat avant Cfue
vous le fa.iJier, & calculer quel prix vous pouver donner de cette
propriété d'après fa contenance & les charges Cfu'elle [upporll:.
Vous aver [uivi cette regle, vous l'ave, exécutée pendant dix-huit
ans confècUlifs fans vous plaindre, preuve non éCfuivoque que
1/0US vous y étier foumis avec la plus grande connoijJànce de caufe.
Lorfque le Notaire fpécifiant la qualité & la quantité des,
cenfes, dit que la propriété vendue eH foumife aux cenfes
de fept à huit civadiers, &c. cette expreffion fait la loi des
parriès; & fi la cenfe eH plus forte, le vendeur eH fournis
au quanti minoris. Voilà le cas prévu par les loix; mais lorfque le Notaire fait une confuGon de drait & renvoit génériquement aux charges, ceDfes & fervirudes portées par
les recoDDoiffances, il ne fe fert que d'une c1aufe de fiyle
qui n'oblige ni l'une ni l'autre des parties à faire bon, ou à
payer une quantité limitée. Si le· Notaire avoit pu fixer par
là cette quantité, fi les parties l'avoient entendu ainli, elles
n'auraient pas manqué de la fpécifier & limiter; mais point
du tout; ce ne fut pa~ là leur bU,t, puifqu'elles ignoroien~
•
�DU
PAL AIS
DE
PRO VEN C E.
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qu'il y eûc eu des reconnoiifances , puifqu'en y en ayànt, elles
ne devoient jamais fe rapporter qu'à l'aél:e de 1740, & ne
pouvoienc jamais êcre relatives vis-à-vis elles aux baux antérieurs qu'elles ne. connoiffoienc pas.
On répondoit pour Moulin, que 13'1oi, jaloufe de faire
regner la bonne foi dans les conventions des citoyens,
d'écarter les fraudes & de rarir la fource des procès, oblige
le vendeur à déclarer précifément coutes !œs charges, les cenfes
& les fervitudes dont efr chargée la propriété qu'il aliene ; elle
punir fa réticence volontaire ou involontaire, cantôc en accordant l'aél:ion rédhibitoire, rantôt l'âél:ion en pleine garantie, tantôt feulement l'aél:ion eHimaroire, fu·ivant les différentes circonfrances. Il ell cependant des charges que le
vendeur n'efr pas tenu de déclarer à l'acheteur, comme, par
exemple, la dîme, la raille, les droits & devoirs feigneuriaux dans les cerres inféodées, parce qu'il n'efr aucun citoyen qui ne fache que les rerres fupporcent la dîme, la
raille, &c. Mais quand l'hérirage efr affujerci à d'aucres redevances, l'obligation de les déclarer ïmpofée au vendeur
refre dans couce fon étendue. Cofre n'a déclaré la terre
qu'il aliénoir foumife qu'à la cenfe portée par les reconnoiffances relarives à l'aél:e de nouveau bail, & ces reconnoiffances n'en créant qu'une d'environ deux civadiers, il
n'a déclaré .d'autre charge que celle de deux civadiers. Or,
dès que la propriécé efr foumife à une redevance de [epe
civadiers., il fuit qu'il a trompé [on acheteur; il eH: précifément' au cas de la loi 9, cod. de aaion. empt. & vend. ,
qui accorde !'aétion en moins value à l'acheceur à qui le
vendeur n'a déclaré qu'une partie de la cen[e que fupportoie
la terre aliénée: fi minor à venditore, five fciente, five ignorante dicehatur capitatio prœdii venditi, & major inventa ./it;
in tantùm convenitut, ia quaTltùm fi fcijJèt, empior ah ini(io,
mirzùs daret prœtii. Cerce Loi accorde également l'aélion e[timacoire contre le vendeur, {oic qu'il ait connu, foit qu'il
aic ignoré cette portion de redevance qu'il n'a pas déclaré,
five fciente ,five ignorante. L'ignorance peue le founra~re aux
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JOURNAL
dommages-intéréts, & jamais au quanti minoris, parce que,
comme dit le §. 2 de la loi l,if. œdilitio œdic7o; il n'eH pas
moins dû une indemnité à l'acheteur léfé, fait qu'il l'ait été
par l~ignorance ou par le dol du vendeur: neque enim intereJl emptori, an fallatur ignorantiâ venditoris, an calliditate.
Le vendeur eH donc tenu de rendre à l'acquéreur ce qu'il
eût payé de moins, s'il ellt connu la vérité.
,
La' forte redevance qui d'abord avait diminué la valeur
réelle de la propriété, l'auroit encore diminuée lors de la
revente. ,Ce que l'acquéreur en eût donné 'de moins, forme
pour Jui un objet de reHitution qui ne fauroit lui être refufé. Le vendeur veut-il fe foufiraire à cette reHitution, qu'il
falfe valoir fa convention; qu'il ne lailfe fupporter à l'acquéreur que la redevance porcée par les reconnoilfances;
qu'il affranchilfe la terre aliénée de l'efpece de Curcens établi
par l'aél:e de 1740; il a ce choix; il lui a été accordé par
la Sentence: mais s'il ne fait point d'option, Moulin, tenu
d'acquitter cette efpece de furcens, doit être indemnifé. La
Sentence qui accorde cette indemnité efr donc jufre.
En vain oppofe.:t-on <'Ille Moulin a connu l'aél:e de, 1740;
qui écablit la regle qu'il devait fuivre, qu'il n'était pas reçu
à y revenir. Efr-il bien vrai que cet aél:e ait été exhibé
au Notaire en ,préfence des parcies. Cette rémi/Iion, n'efr
pas prouvée, elle n'eH pas vraifemblable. Si Cafre l'eût
montré, Moulin l'auroit retenu, & il n'auroit pas été obligé
de payer l'expédition d'un fecond extrait. Le procès qui natt
d'un aél:e doit êcre jugé fur les paél:es qu'il renferme, fur fan
contenu, & point du tout fur les connoilfances que pouvait avoir le Notaire; indiquer un aél:e à un homme, n'efr
pas lui en faire connoître taut fein contenn. En fuppofant
que l'énonciation de l'aél:e de 1740 prouve par elle feule
h connoilfance parfaite de ce qu'il contient, l'énonciation
.de~ reconnoilfances doit auffi prouver la connoilfance de ce
qu'elles renferment. Or, fi Cofre était in(huit des reconnoi(fances, il l'éroit qu'elles n'établilfoient qu'une cenfe d'en;viron deux civadiers par fauOlée de contenance; & n'ayan~
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DU
PALAIS
DB
PROVENCB;
i43'
éléclaré la terre vendue foumïfe qu'à celte redevance, il faut
conclure qu'en traitant du prix, on n'a eu égard qu'à cefte
redevance, & point du tollt au filrcens établi par l'aél:e de
1740, & que l'un n'a entendu aliéner & l'autre' acquérir
qu'une terre foumife à la redevance de deux civadiers, &
point du tout à une de fept. Le paiement volontaire ou
forcé ne fauroit priver Moulin de l'aél:ion en moins value,
puifqu'il la lui a a1Jignée; fans ce paiement, il n'auroit au'cu ne aél:ion. Comment donc ce paiement pourroit-il la lui
enlever? Un filence de dix-huit ans n'a pas l'elFet d'Qter à
l'acquéreur l'atl:ion ex empto, puifque la loi a affigné à cetre
atl:ion trente ans de durée; la caufe de l'inatl:ion eG indifférente. Il n'eG pas rare, il n'eG pas étonnant qu'un Ménager iIlitéré ne falfe pas valoir fes droits au moment même
de leur nailfance. Il ne découvre pas tout d'un coup les
titres fur lefquels il doit les étayer; il fuffit qu'il fe préfente
aux Tribunaux dans le temps prefcrir.
.
Arrêt du 9 Juillet 1778, au rapport de Mr. I~ Confeiller
du Bourguet, qui réforme la Sentence, avec dépens. Ecri-:
vant Mes. Arbaud & Sauvere. .
Le motif de l'Arrêt fut que l'acquéreur qui lors de l'ac.;
qui!ition connoît la fervitude, quoiqu'elle ne foit pas énoncée
dans l'atl:e, ne peut point demander un quanti 'mirzoris, &
que l'énonciation dans l'atl:e d'acqui{ition, de l'aél:e qui établit la fervitude, fuffit pour 'faire préfumer qu'on l'a connue. On peut -voir Decormis, tom. 20, col. 180 l ,qui le
penfe de même.
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,
.
�JOURNAL
AR RÊ T
LXVI.
Qui confirme une procédure en .complainte à raifon du trouble
fait dans la poffiflion des eaux puhliques.
I
L y a dans le terroir de Graffe une fource appellée La.
ffJUX, jailliffant dans un fonds appartenant à la Commu-
munauré, & que l'on répute publique; les eaux de ct:tte
fource fervent. indiffétemment au travail de nombre d'engins'
que les propriétaires dont elle traverfe le fonds ont canfIruit, & en même temps à l'arrofage de quelques propriétés.
Il a été fait un Réglemenl qui détermine les jours & les
heures auxquels les eaux feront defiinées, foit à l'arrofage,
fair au travail des engins. Jean & Claude Bonafoux, Marchands, avaient des engins qui rravaillpient d~s eaux de la
fource, & .ils éroienr emplacés précifément entre un éguifoir
qui éroir fupérieur, & le fieur Lemore qui fe 'rrouve inférieur; de fàçon que les eaux paffoienr premiérement à l'éguifoir, enfuite aux engins des fieurs Bonafoux, & delà au moulin à farine du fieur Lemore.
Les fleurs Bonafoux; dans l'idée de tirer meilleur parti
€le leurs engins, en avaient fair deux au lieu d'un; ils
avaient établi dans le canal-mere llO réfervoir où taures les
.~aux de la fource venoienr fe ramaffer; ce réfervoir avait,
tomme tout al1lre, fon coup-perdu, par lequel paffoit
lé furvers qui venait encore fe rejetter dans le canal-merej
mais à ce même réfervoir fe rrouvent deux robinets, dont
l'un fait aller un mOlJlin à farine, l'autre un moulin à huile,
& touS les deux fe dégorgent dans une efpece de marre qui
n'efi qu'une continuation du cana\-mere qui conduit enfin
les eaux dans le fonds & à l'engin du fieur Lemore. Les
fieurs Bonafoux achererenr l'epgin fervanr à l'éguifoir, & voulurent le convertir en moulin à recenfe. La narure de cet
engIn
�DU
PALAIS
DE
-PROVENC E.
54~
'engin exige non feulement de l'eau pour le travail des roues,
mais encore. dans des efpeces de marres particulieres Oll fe
forme le dépôt de l'huile que l'on parvient à extraire du
marc des olives. Pour remplir c.et objet, les fieurs Bonafoux firent un trou au canal-mere qui dégorgeoit la portion
d'eau néceifaire au travail de la roue qui recenfe le marc,
& qui delà va conduire cette eau, ainfi empreinte de l'huile,
dans les différens réfervoirs où fe forme le dépôt, & où l'on
trouve enfin l'huile.
Le fieur Lemore prétendit que la converfion de l'éguifoir
en moulin de recenfe lui portoir préjudice; que l'engin &
les différens réfervoirs par lefquels l'eau pa!foit, formaient
une diminution de fan volume.; que la qualité en étoit même
altérée par les matieres craifes dont l'eau fe trouvait encore
furchargée au fortir des réfervoirs, & enfin que l'eau qui
fervoit à l'engin de recenfe ne paifant plus par le canalmere & par le réfervoir inférieur des lieurs Bonafoux qu'en
deifous du même réfervoir, il en réfultoit pour lui un préjudice immenfe. Il prit la voie de la complainte, fit accéder le Lieutenant fur les lieux, & fit procéder à une defcription, enfui te de laquelle il intervint une Sentence fur
les lieux le 12 Juillet 1776, par laquelle le Lieutenant, fans
s'arrêter aux fins de non-recevoir des lieurs Bonafoux, faifant droit à la requête en réintégrande du lieur Lemore ,
le réintégra en la poifeffion & joui!fance des eaux deHinées
aux ufages de fes moulins, ainli qu'il en avoit joui ou dû
jouir avant la nouvelle té commife par Bonafoux au canal
qui dérive les eaux, ordonna que le trou feroit bouché &
remis dans fon premier état, & condamna les lieurs Bonafoux à 3 liv. q'amende envers le fieur Lemore, avec défenfes de récidiver.
Appel de cette 'Sentence de la part des fie urs Bonafoux.
On difoit pour eux, que le fieur Lemore ne pouvoit ufer
de la voie de la complaïnte. La complainte n'ell: autre chofe
qu'une aélion poife!foire dont le profit & le bénéfice tendent à conférver la poifeffion li ~elui qui l'a déja; on la
Années t 775 & fuiv.
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10 UR N AL
compare à l'interdit uri polfidetis, ou 11 l'interdit retinendte
poffilfionis que connoiffoiem les Romains; mais comme elle
n'a pour objet que la poffeffion, & que' ce n'ell: qu'une ac·tion pure poffeffoire, il faut .<J'une part jufiifier de la poffellion à tit,re de maître, & de l'autre ne pas la confondre
avec le droit foncier. Ainfi il peut très-bien arriver que qui
a raifon au pollèfloire, aie cependant tort au pétitoire; mais
il ne peut jamais arriver que l'on aie raifon au poffeffoire,
quand on ne jouit pas à titre de maître, & que l'on n'a
•pas un droit réel fur la chafe que l'on réclame, du-moins
à titre de poffeffion. C'efi précifément ce qui réfulte de
l'art. l de l'Ordonnance de 1667, tit. des complaintes, &
ce qui efl: attefl:é par tous les Commentateurs, & par Ferrieres, va. complainte.
.
La Sentence maintient le Geur Lemore, non feulement
dans la jouiffance des eaux, ainfi qu'il en a ufè & joui, mais
encore ainji qu'il a dû en uftr & jouir: or certainement on
ne vit jamais rien de plus étrange en matiere de complainre.
La complainte ne compete que pour fe maintenir dans la
poffellion. Ce n'.eH en quelque fa~on qu'une procédure préparatoire, qui n'a pour objet que de réprimer une voie de
fait, en attendant que la jufiice prenne connoiffance du
fonds. Ici le Lieutenant ne fe contente pas d'ordonner la
maintenue comme le Geue Lemore a joui, mais encore
comme il a dû jouir. Si le Lieutenant a voulu conferver au
fleur Lemore le droit de jouir des eaux autrement que de
la maniere dont il en a joui, il n'a pu faire une procédure
djl complairtte; & s'il n'a voulu que le maintenir dans fa
poffellion, la difpofition comme il a dû jouir & /lftr, contredit ce qu'il a ordonné; il devoit au moins renvoyer ce
chef au pétitoire.
.
Ce n'efl: pas le principal' vice que .préfente la Sentence;
il en efl: un aurre qui infeél:e toure la procédure. Le Lieutenant a préjugé que le Geur Lemore avoit droit' [ur les
.eaux avant qu'elles parvinffent à fon fonds, & qu'il en jouiffoit à titre de fervitude vis.à-vis du fupérieur, lors même
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PALA-1S
DB
PROVENC!!.
-~47
qu'elles couloient encore dans fa propri'étê. Céla efi li vrai,
que le Lieutenant a accueilli une action en complainte qui
de foi [uppo[e une poifeffion anima domini, pui[qu'i! inhibe
aux lieurs Bonafoux d'u[er des eaux comme ils, jugeront à
propos, & qu'il les oblige enfin de les conduire toutes en
maife & autrement que dans l'état de divilion qu'exige leur
moulin à recenfe dans le canal-mere, qui les conduit chez
le lieur Lemore. Or, juger pareille chofe au poifeifoire,
c'eH: néceifairemenc [uppofer que le lieur Lemore avoit un
droit acquis fur les eaux & fur la maniere de les faire découler avant même qu'elles parvinifent chez lui, puifq.ue c'ell:
juger qu'il étoit en poifeffion de les recevoir anima damini.
Ainfi le Lieutenant a fuppo[é que parce qu'il n'y avoit point
de moulin à recenfe', le fieur Lemore avoit acquis le droit
de l'empêcher.
Or en droit, le propriétaire inférieur qui ne reçoit les
eaux que parce que leur cours ordinaire les conduit chez
lui, peut-il inhiber au propriétaire filpérieur d'en ufer fecundùm jus fi œquum, lors même que l'efpece d'u[age qu'il
en fait lui porterait préjudice? Peut-il jamais prendre la voie
de la complainte? L'ufage des eaux publiques appartient à
tout le monde, & il 'y a d'autre regle que celle de lil
préoccupation. L'intérêt de l'un n'efi pas plus cher aux yeux
de la loi. que l'intérêt de Paucre; & c'efi afin de ne témoigner aucune efpece de p~il ction pour perfonne, qu'a été
établie la regle de. la préoccupa on: aquœ puhlicœ cedunt primo
occupanti.
La faculté d'u[ee, qui efi inhérente à la nature des eaux,
emporte le droit de faire des moulins & des engins, &
le droit de fàire un moulin emporte celui ou de faire des
éc1ufes, ou de {e garantir d'un volume d'eau trop confidérab le. Ainfi par cela feul que l'on a droit d'employer les
eaux à l'u[age d'un moulin, on a également le droit ou
d'arrêter les eaux, ou .de les divi[er, fi l'intérêt du moulin
l'exige. C'efiainfi que Je décident Gobius en [on traité
de aquis, quefi. 13, 14- & 1) ; Salll [ur les Ordonnances
ZZZ2
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JouttNAt
de Savoie, tir. de la pêche & de la c!zajJe, glof. 2; n. 40,
& Henris, tom. 2, liv. 4, queft. 49. Or, fi l'intérêt du moulin
permet de faire des éclufes, il doit également permettre
de féparer les eaux, fi elles font trop confidérables, ou fi
l'intérêt & le travail de l'engin n'exigent pas que l'on en
prenne la totalité. Peu importe que le propriétaIre inférieur qui n'a fLlr les eaux que le même droit que le fupérieur, c'efr-à-dire le droit d'en ufer quand elles parviennent
chez lui, en foulfre quelque préjudice. Efr-ce que le propriétaire fupérieur qui n'ufe des eaux que pour fon avantage,
& auquel on ne peut pas imputer de l'émulation, n'a pas
le droit d'ufer des eaux, même au préjudice de l'inférieur?
. Le cas n'eft-il pas expreff~ment décidé par la loi 2, if. de
a'lu. pluv. arcend., & par la loi 2" if. de rivis. Ob magnam
utilitatem, dit cette derniere, poteft a'lua à [alito curJu diwrti, cùm conjlat oh majorem utilitatem fuam id feciffe. C'ell:
auffi le fentiment des Auteurs. ( Mourgues, pag. 390; Cancerius, cap. 4 de fervitut.; Gobius, queft. 12 & IS; Peckius
en fon traité de a~uœduau, cap. 7, queft. 4; Cœpola, Faber
& autres. )
La loi a'luam, cod. de fervitut., la loi fi in meo ,if. de
D'luâ & a'luœ pluviœ, & les Auteurs, fe réunilfenr à conclure
que l'eau qui n'a fait que fuivre fon cours naturel, n'a jamais été acquife à l'inférieur à titre de fervitude, parce que
le feul décours de l'eau non conjlituit aliquem in pojJejfzonem
fervitutis; parce qu'il faut, pour l'établilfement d'une fervirude, quelque chofe de plus qu'une caufe naturelle; parce que
le droit d'alfervir exige le fait de l'homme, l'intention de
pofféder, la polTeffion réelle, & on ne polTede pas les eaux
que la nature nous départ dans leur cours ordinaire; auffi
nul doute que les eaux ne coulent alors jure facultatis, non
jure fervitutis, & que le propriétaire fupérieur ne puilTe toujours ufer des eaux comme il le trouve à propos. C'eH le
langage de Peckius de a'luœduc1u, cap. 7, queft. 4, n. 20
& fuiv.; de Gobius de a'luis, queft. I l ; de Cœpola de fervieU(. urhan. prœd., cap. 4 & 22 j de Boutaric fur les inftir·.,
�'n u PAL A 15 D E P ti. 0 VEN C E;
H9
pàg. 12.7; de Sanleger, refol. cïv., pag. 48, n. 3. Il n'y
a d'excepté que le cas oÙ l'inférieur auroit fair quelque
ouvrage à main d'homme dans le fonds du fupérieur, ou
qu'il y auroir prohibirion, & que le fupérieur auroit acquiefcé
à la prohibition. Boniface, .tom. 4, liv. 9, lir. 2, chap. 4,
rapporte l'Arrêt rendu contre Mr. le Confeiller d'Efpagner,
qui jouiIfoit depuis deux fiec1es de l'eau d'une fontaine découlant lout le long du vallat des Pinchinats; il en arrofoit
fes preds & fes jardins; le fieur de Tournon la dériva & en
{).riva Mr. d'Efpagnet.
L'objet du régIe ment fait pour les eaux de la [ource dont
il s'agit a été de' divifer les eaux [uivant l'intérêt des propriétaires des engins & des fonds arrofables; il applique à
chacune de ces deux efpeces de propriétaires les heures
qui leur font deftinées; mais ce même régie ment , qui ne
fait que concilier des intérêts également chers à la Communauté, ne touche point à tout ce qui a trait aux regles
générales qu'on a établies; il ne prohibe ni de faire des
éc1ufes, ni d'établir des coups-perdus, ni de divifer les
eaux relativement à l'intérêt de chaque engin; c'eut été
prohiber la confiruaion des engins, & la Communauté
trouvoit fon intérêt à les faciliter. Le réglement ne parlant donc pas de la maniere dont les engins uferont des
eaux, s'en réfere au droit commun; & de droit commun,
chacun ufe des eaux publiques Ji fan gré & fuivant fan intérê~
.
Arrêt du 12 Mai 1777, au rapport de Mr. le Confeiller
de Chenerilles, qui confirme la Sentence, avec dépens.
Ecrivant Mes. Pafcalis & .......
�Jou
RNA" L
ARRÊT
LXVII.
Le porteur tf'un billet de commerce peut-il, au préjudice des
autres créanciers, acquérir hypotlieque au moyen de la COIlveifzon du billet ell contrat, faite avant l'expiration du terme
auquel le paiement doit être fait, le débiteur venant à faillir
quelque temps apres Npoque du contrat?
J
O[eph Maurel, Négociant de la ville de Mar[eille, porteur d'un billet foufcrit par Michel le J') Mars J774 de
la Comme de 6084 liv., qui n'éraie payable qu'à la fin de
Juillet, conçoit des doutes fur la ftruation de [on débiteur,
& en rapporte un contrat le 4 Avril, par lequel il lui proroge le terme du paiement d'une année. Il fut dit dans le
contrat que les 6084 liv. procédaient, [avoir, ')794 liv. J 3
fols du montant du billet fait le J S Mars, payable en Juillet,
& 289 liv. 7 [ols pour argent reçu le jour d'auparavant.
Michel faillit au mois de Juillet J776. Maure! réclama [on
hypotheque; les créanciers la lui contef1:erent, & par Sentence des Juges-Conruls, il fut placé dans la c1affe des créanciers chirographaires. Appel de fa part.
On dirait pour les créanciers, que la Déclaration de J7 J7
veut " qu'aucuns porteurs de billets ou lettres de change
l> ne puiffent à l'avenir, & en aucun cas, prétendre avoir
" acquis, par le protêt ftgnifié ou dénoncé, une hypotheque
" fur les biens des tireurs & endoffeurs, ni des particuliers
" [ur qui les billets ou lettres de change ont été tirées;
" déclare pareillement qu'aucune hypotheque n'a pu & ne
" pourra à l'avenir être valablement acquife par aucun aél:e
" de reconl1oiffance fait pardevant Notaires, aux greffes,
" ni autrement en quelque forme que ce fait, des billets,
" lettres & promeffes avant l'expiration "du temps auquel le
" paiement doit en être fait; ceux qui anoru t obtenu les
�il 0 V B Ne B.
) ~1
" Sentences, Jugemens, Arrêts ou aél:es de reconnoilfance,
,. ne pourront être employés que comme créanciers chi" rographaires dans les ordres, inH:ances de préférence &
" diil:ribution des deniers, fauf à eux, après l'échéance des
" billets & promelfes paffés pour fait de commerce & mar" chandifes, d'ufer des voies que les Ordonnances ont pref" cri tes pour acquérir une hypotheque fur les biens des dé" biteurs ou endoffeurs. "
La loi ne permet donc pas que le Négociant qui n'eil:
que créancier d'un papier de commerce, puiffe fe ménager
avant l'échéance une hyporheque que n'emporee pas ce même
papier. En effet, quand les arrangemens font une fois confommés encre Négocians, il faut que chacune des parties
en fubiffe la loi, fans qu'il leur foit permis d'y déroger;
autrement ce feroit le moyen de faire à coup-fûr le préjudice du débireur, de le décréditer, d'afficher fan déningement fur la place, & de nuire à fes autres créanciers;
le commerce ne feroit--plus qu'un brigandage, & le débiteur lèroit inconteltablement le maltre de difpofer de fes
biens, puifqu'il ne lui en coûterait que la peine de confeotir au proht de l'un le contrat qu'il refuferoit à l'autre;
-Ja préférence réfultant de l'hypotheque, & par conféquent
du contrat, ne feroit plus acquife qu'au plus hardi, qu'à
celui que le débiteur voudrait favorifer. La loi veut au contraire qu'ayant tous fuivi la foi qu débiteur jufqu'aux échéances, ils courent tous le rifque des événemens jufqu'à cette
époque, & que de même qu'en cas de faillite l'un ne peut
pas fe payer au préjudice de l'autre, on ne puiffe pas mieux,
en cas de faillite imminente, intervertir l'ordre général,
fe diltraire de la mafre dont on doit faire panie, dénaturer
le contrat originaire, & par l'événement acquérir fur les autres créanciers une préférence qui n'a pas été fiipulée lors
du traité primitif.
.
On répondait pour Maure!, qu'il avait pu acquérir une
hypotheque lég.ale; que le contrat avait été paffé de bonne
foi, & bien avant la faillite du débiteur; qu'au moy~n du
D t7
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JOURNAL
, contrat,
le terme du paiement avoit été prorogé d'unè
,
•
annee.
Arrêt de partage du .••.. Juin 1777, vuidé le 27 du
même mois, au rapport de Mr. le Confeiller de Thorame,
qui réforme le Sentence, avec dépens. Ecrivant Mes. Pa[calis & ......
ARRÊT
LXVIII.
Si la forme & non la fubfiance carac1érife une lettre de
change.
Si la lettre de change n'efi réputée telle, même a l'égard du
tiers, qu'autant qu'elle a été faite anima cambiandi.
L
E l Mai 1777, l'1re. Jean-Paul-Germain d'Eyguelier
des Tourres, Chevalier de Sr. Louis, Lieutenant des
vaiire~ux du Roi, fit une lettre de change tirée de Marfeille
fur le fleur Mirande, Négociant à Nîmes, de la fomme de
9960 liv., payable à [on ordre au l Mai lors prochain, caufée
valeur en foi-même, qu'il paireroit fur [on compte. Le fleur
des Tourres endoira cerre lettre à l'ordre de Moyfe de Carcaironne & David de Beaucaire pour valeur reçue comptant;
elle paira en[uite au Sr. Bifcarrat fils, Négociant de la ville
cl' Avignon. Certe lettre fut protefiée, & donna lieu au fleur
Bifcarrat de [e pourvoir pardevant les Juges-Con[uls contre
L lieur des Tourres, en condamnation du montant de la
lettre de change, avec contrainte par corps, ce qui lui fut
accordé par Sentence du 18 Mai 1778. Sur la fignification
qui en fut faite au fleur des Tourres, il en déclara appel.
On propofoit pour le fleur des Tourres trois moyens
contre certe.Sentence. On difoit ID. que ce n'éwit pas la
forme, mais la fubfiance qui caraél:érifoit & confiituoir une lettre
de change; 2 0 • que la lettre de change n'éroit réellement
réputée telle, qu'autant que l'aél:e avoit été fait anima cam-,
hiandi,
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Mandi, & qu'il était un vrai contrat de change, & que dans
tout autre cas l'obligation n'annonçoit qu'une dette ordinaire
qui n'autarifoit ni le recours à la Jurifdiél:ion des Juges-Confuis, ni la condamnation avec contrainte par corps.
Sur le premier moyen, on difoit que ce n'el! pas la
forme, mais la fubHance, qui conUitue & difl ingue "un aél:e;
lorfqu'elle parolt, malgré les voiles dont on a voulu la couvrir, rout doit lui rendre hommage. C'eU ainli que le décide Dancy dans fon traité de la preuve par témoins. Cela
eft encore plus néceifaire, lorfqu'elle n'a été cachée que
pour frauder les loix ou 'en éluder les difpolitions; s'il en
éroit autrement, elles feroient impuilfantes, puifqu'on pourrait toujours fe fouUraire à leur empire, en fauvant les apparences. '
Sur le fecond moyen, on difoit qu'une écrirure qui a la
forme d'une lettre de change, peut bien n'en être pas une;
il en eU plulieurs dans le commerce qui n'en ont que l'apparence, & donc perfonne n'eH dupe. Les Italiens appellent cette maniere de lettre de change camhio fecco; & ce
change fec, c'eH-à-dire fait fans argent, n'ell: point regardé comme vrai contrat de change, & ne jouit pas des
mêmes privi!eges. Scaccia, dans fon traité de commercio,
pag. ~ 03, rapporte une conUitution de Pie Premier, qui condamne ces lettres de change limulées.
Pour donner au fimple prêt le privilege de la lettre de
change, on fait tirer par l'emprunteur URe lettre de change
fur une place, d'où chacune des parties fait que la lettre
, reviendra à protêt, ce qui n'eH pas un véritable contrat de
change pour lequel intentione camhiandi opus efl, fuivanc toUS
les Auteurs qui appliquent aux lettres de change la regle
aliud infirumentum, aliud colltraaus. ( Scaccia, pag. 295, n.
2 & ~ 5; Cafa-Regis, difc. 148, n. 18, difc. 2.7, n. 5 &
10, & dire. 28 , n. ~ & 9. )
Il faut donc, pour qu'une écriture qui a la forme d'une
lettre de change foit réputée telle, qu'elle fair la fuite d'un
vrai cOl\trat de chan~e; que celui à qui on la donne fait en
Années
t 775 & fillv.
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bonne foi; qu'il puifI'e préfumer qu'elle en faite pour ~trè,.
& non pour donner un privilege à la créance qu'on lui
conHitue. La lettre de change {imulée n'eH point une lettre
de change; elle ne prouve pas cet aéte de co'mmerce qui
a des regles fpéci"les, & auquel l'intérêt du commerce a fait
attribuer des privileges particuliers. La forme de lettre de
change qui a été dgnnée à un aéte qui n'ell qu'un flmple
_prêt, eH une fraude; la fraude ne fait pas droit, & il ne
peut être de l'intérêt du commerce que la fraude foit confacrée. Il ne dépend pas même des parties de donner à un
{impIe prêt la forme & le privilege des lettres de change,
_parce qu'il n'eH pas au pouvoir des parties de déroger par
leur convention au droit public.
L'ordre des jurifdiétions elt de droit public; la lettre de
change efl: attributive de la jurifdiétion confulair€, & la forme
de la l~ttre de change donnée à un {impIe prêt, dont la connoilfance appartiendroit aux Juges ordinaires, tend à inter.vertir cet ordre des jurifdiétions. Les parties qui conviennent
de déguifer un prêt fous cette forme, fe foumettent à la
jurifdiétion confulaire; elles veulent attribuer à ce tribunal
lurifdiétion fur un fait qui n'efl: pàs de fa compétence, ce
qu'elles ne peuvent faire, & ce qui ~H une raifon de plus
pour appliquer aux lettres de change les principes généraux
du droit: plus valet quod agitur, quam ql/od fimulatè conci-
pitur.
Les loix de droit public ont aboli la fiipulation de la
contrainte par corps, à raifon des obligations ordinaires;
elles n'ont pas- voulu qu'on pût engager fa perfonne pour
un peu d'argent. La lettre de change ~fl: un des engagemens
exceptés par la loi. Exiger pour un {impIe prêt une obligation en forme de lettre de change, c'eH vouloir foumettre quelqu'un à la contrainte par corps pour {impie prêt;
c'efi ce qu'on ne peut pas faire; c'efl: à quoi les parties qui
ont la foiblelfe de foufcrire une pareille obligation ne peuVent pas confentir. Elles n'ont pas le droit de difpofer ainû
de leurs perfonnes; il ne leur efl: pas permis de l'hypo~
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rhéquer pour une pareille créance; & cette conlidération
eH une nouvelle raifon pour appliquer aux lerrres de change
. fimulées le 'principe de droit fùr la fimulation des aEtes.
On doit d'autant plus ufer de févérité à cet égard, que la
fraude eO: plus facile à commettre, & l'abus eft plus général. C'eH par ce fâcheux moyen d'obliger les perfonnes
même de touS ceux qui recourent aux emprunts, que tous
les jours on voit opérec la ruine de ceot familles. C'eH par
ce moyen qu'il n'elt plus aucun patrimoine refpeél:é par les
ufuriers; c'eO: par cette porte, ou plutôt par ce gouffre, que
s'engloutiffent les biens même que la loi regarde comme
[acrés. Les femmes [ont fouvent autorifées à aliéner leur
dot, pour décharger leurs maris de la contrainte par corps
à laquelle ils n'euffent pas été foumis par des prêts ufùraires. Les enfans font privés par-là des reffources que la
loi leur av'oit ménagées, & les ufuriers s'enrichiffent rapidement aux dépens des familles qui ont eu le malheur
d'avoir dans leur fein ull dilTipaceur. Le mal eH d'aurant
plus grand, qu'ordinairement les étrangers ne le connoiffent
que lorfqu'il elt 'au comble. Le porteur d'une de ces lettres
de change fimulées ne met pas .à exécution la contrainte,'
quand on veut lui donner une nouvelle lettre de change, avec
l'augmentation du change, rechange, & encore d'une ufure
proportionnée à la crainte qui fait foufcrire une pareille
obligation; ou, fi on le trouve trop cher, on le paye de l'argent d'un autre ufurier, obtenu avec une pareille obligation;
cependant la dette augmente tous les jours, le crédit diminue à proportion, & les chofes viennent à un point qu'il
faut qu'elles éclatent, & que l'ufurier, armé de la contrainte
par corps, retire les profits excelTifs de fa manœuvre. Le
màl eH ancien. Mathieu Aleman, Auteur Efpagnol, traduit
par le Sage, & qui 'écrivoit fous le regne de Philippe II.,
avouoit que cette Îlmulation de lettres de change étoit une
véritable infamie.
Inutilement obfervoit-on que l'an. 1 du tir. 3 de l'Ordonnance de 167~ porte que ceux qui auront figné des letAaa a 2.
�556
JOURNAL
-
tres de change ou g,i1lets de change, pourront être contraints
par corps. Il faut difiinguer les lettres de change confenties par des Négocians en faveur d'autres Négocians, de
celles qui font confentie par des particuliers non Négocians. S'agit-il des premieres? La contrainte par corps efi de
néceffité; elle· efi une lùite, un acceffoire du titre; un texte
précis. la prononce.· S'agit-il au contraire d'une lettre de
change confentie par un fimple particulier non Négociant?
La contrainte n'eH pas de néceffité ; l'Ordonnance de 1673
dit feulement qu'ils pourront être contrainrs. Or, Joulfe a
très-hien obferv~que ce mot pourront fait voir qu'il dépend de la prudence des Juges de condamner par corps ou
!Jan.
,
Dans le fait préfent; une lettre de change tirée par un
genrilhomme dillipateur en faveur de deux Juifs, ne pem
pas être préfumée faite anima camDiandi. Ce n'eH pas un
aCte de change ni un aCte de commerce, mais la fuite d'un,
prêt. Il n'eH pas néceffaire de tracer Je tableau réuni de
routes les circonHances qui peuvent prouver la fimulation
d'une lettre de change. La fraude eH un protée que l'œil
de la JuHice peut.feul appercevoir, & qu'il n'appartient qu'à
elle d'a rrêter. Les détours qu'on a pris pour dérober la fraude
à la vigilence des loix, n'empêchent pas qu'elle ne foit connue.
L'affeCtation de faire ftlppofer ~un compte courant entre le
fienr des Tourres & le fieur Mirande de Nlmes, que ce dernier ne conn.olt pas, & qu'on lui a dit être un correfpondant des Juifs, celle de faire tirer la leltre> au fieur des
.Tourres & à fan ordre, 11aleur en lui-même, & de ne donner
qu'un endoffement aux Juifs pour. valeur reçue comptant,
ne font qu'un étalage mal-adroit pour plâtrer la fraude.
Dës qu'il fera reconnu qu'il n'y a pas eu entr'eux un vrai
contrat de change; que la lettre n'a pas été faite anima
cam6iandi; .que malgré fa forme elle n'eH point une véritable lettre· de change, alors rout rentre dans l'ordre, &
alors l'obligation n'étant plus qu'une· dette ordinaire-, n'autorife ni le recoutS à la jurifdiCtion des Juges-Confuls, ni
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'551
condamnation avec contrainte par corps, parce que fllivant les Ordonnances de 1667 & 1673, & la jurifprudence
des Arrêts, la fimple foufcription ~'une lercre de change ne
fuffit pas pour rendre. raut homme ju!l:iciable des Juges-çonfuIs, & le faire condamner avec conrrainte par corps. Ce
principe e!l: tellement vrai, que malgré que l'Ordonnance
n'ait fair aucune di!l:inél:ion, ies Juges-Confuls ont Couvent
renvoyé aux J~ges ordinaires les fils de famille, les mineurs;
les femmes & autres per{onnes pour{uivies pour le paiement
des lettres de change par elles {oufcrites, lorfque ces perfonnes ne faifoiem aucun commerce. Ce trib'unal rigoureux
a jugé lui-même que la fimple foufcriprion d'une lettre de
change ne lui attribuoir pas jurifdiél:ion, & n'érair pas. preuve
d'unconrrat de change, qui ell: un aél:e de" commerce. Les fils
de famille, le~ femmes, les mineurs peuvent commercer;
fi la foufcriprion d'une lettre de change étoit un aél:e certain de commerce, les Cours n'auroient pas déclaré exemptes
de la contrainte par corps & non jul1:iciables. de ce tribunal; les perfonnes de cette qualité qui "avoient foufcrits des
lettres de change, & les Juges-Con{uls ne les auroient pas
renvoyées aux Juges ordinaires. Cela prouve que lor{que la
lettre de change ne procede que d'une dette ordinaire, &
non d'un contrat de change, elle ne doit jouir d'aucun des
privileges accordés aux aél:es de commerce.
.
Quand nos Ordonnahces ont excepté les lettres de change
de la regle qui abroge les contraintes par corps en matiere
civile, elles n'om entendu difpofer qu'en faveur des lettres
de change véritables & ftnceres, & non en faveur de celles
qui fous une forme privilégiée cachem un aél:e qui ne l'ell:
pas. Suppofer qu'il ne faut que la forme pour affurer le privilege, c'ell: refpeél:er la fraude faite à la .Ioi, comme la
loi même; c'ef~ réduire la contravention en {yHême, & contre
l'axiome qui dit que l'exception confirme la regle, ce feroit
dérruire la regle par l'exception.
L'exception {uppo{e une hypothefe difiinél:e de la regle;
mais elle ne doit pas être un moyen de la frauder. On ne peùc
�°S)8
Jou
RNA L
pas fupporer fans abfurdité qu'un Légiflateur en notifiant fà
loi, ait travaillé dans le même moment à la rendre inutile,
en traçant une voie flIre & facile d'y contrevenir impunément;
ce feroit vouloir faire violer la loi par la loi. Si ce fyfiême
pouvait n'être pas févérement réprimé, il arriverait que
contre le vœu de la morale & de tolites les loix, la
fraude profiterait 1i fan auteur; elle aurait même plus d'avantage que la bonne foi. Un créancier honnête qui prêtera
fes deniers dans la forme commune n'aura que les flIretés
ordinaires, t'andis que le créancier peu délicat qui faura fe
mettre illl deffus .des regles & abufer de l'empire que lui affure la malheureufe firu3tion de fan débiteur, fera protégé
par la loi qu'jl viole, & fe ménagera pa.r fa contravention
des privileges qu'il n'dit pas obtenu par [a fidélité à obferver les loix. Ort fent qu'avec un tel encouragement la
fraude ne refpeél:eroit plus rien, & qu'il n'y aurait plus ni
vérité ni fincérité dans les engage mens civils ordinaires.
Les' Ordonnances de 1.667 & 1673 Y ont affez pourvu,
en annonçanr qu'elles n'exceptent les lettres de change de
la regle générale qui abroge les conrrainres par corps, que
quand il y aura remife de place en place, c'ea-a-dire ~ quand
la lettre fera véritablement faite pour un vrai tranft art d'argent de place en place, -quand elle aura pour objet cette.
circulation & cette communication que les loix ont voulu
protéger. Quand on' rega-rde une lettre de change comme
un titre privilégié., on [uppofe qu'elle
véritable & lincere. Ce n'ea pas uniquement a la forme, mai~ a la nature
attaché. Ce
même que
du contrat, que le privilege
la nature du comrat qui peut en <lutorifer & en juaifier la
démentie par la fubf·
forme. La' forme [eule, 10rfqu'e1le
tance de l'aél:e, n'ea qu'un déguifement mal-honnête, un
confrat faux, une contravention formelle aux loix , "une machina tian caraérérirée, pour s'affurer des avantages illicites
& injufies, uue nérion frauduleufe qui ne [aurait prévaloir [ur
la vérité.
Par les articles 6 & 7 du titre 34 de l'Ordonnance de
°
ea
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n'ea
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�D tl PAL A IS D B P 11. 0 v Il Nep:;
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1667, il eH défendu aux Juges de prononcer des contraintes
par corps en mariere civile, & aux Noraires de recevoir
des aél:es porrant foumi/Iion à la conrrainre par corps pour
femblable mariere. Les Commenrareurs obfervent fur ces
arricles, qu'il n'ell: jamais permis de fiipuler la contrainte
par corps, & que s'il arrivoit qu'un débireur fe fût foumis
à cerre condition par quelque contrat ou autre aél:e, cette
claufe feroit nulle, d'après l'Ordonnance. Il ne dépend donc
pas des parties d'engager dans les aflàires qui ne le comportent pas leur liberté perfonnelle, parce que l'objet èfi
importanr. La liberté perfonnelle de chaque citoyen fait
partie de la liberté publique; elle appartient à l'état, à la
[ociété; le citoyen ne peut en traiter arbitrairement; il ne
peut le faire que felon les loix qui ont marqué les cas rares
où il ell: permis d'en difpofer. Hors de ces cas, toute fiipulation portant contrainte par corps ell: nulle. Donc par
une néceffité de conféquence, il ne doit pas être permis,
en affaires qui ne comporrent la cont,rainte par corps, de
choilir une forme d'obligation qui puitre foumettreà cette
contrainte; car le choix de cerre forme ell: une véritable
fiipularion de la contrainte par corps, & par con(équent
un patte prohibé, profcrit par toutes nos loix. Ces princi-..
pes fone reconnus par Joutre fur l'art. 4 du titre 3'1e de-l'Or...
donnance de 1667; par Rodier fur le même article; par
Bornier fur le tirre 7 de l'Ordonnance de 1673; & c'ell:
ainfi que J'ont décidé les Arrêis que Rodier rapporte, &
ceux qui fe trouvent dans le Journal du Palais, tom. 2.,
pag. 187 & 188.
Quand il eH arrivé que des Arrêts déterminés par des
circonfiances particulieres ont confirmé des contraintes par
corps dans des hyporhefes qui fe rapprochent' de la caufe .
préfente, les COJ:l.1pilateurs ont eu grand foin d'<,>bferver qu'il
faUoit fe garder d'en tire"r des conféquences trop -étendues.
C'ell: ainfi que s'explique Me. PouUain du Parc dans fon
Journal de Bretagne, tom. 3,. pag. 399.'
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On voit par-tout qué rien n'ell: moins t'olérable , !D0iO$)
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honnête & moins permis qu'une lettre dé change fimulée.
Le change fec ou u!ùre, dit l'Aureur des obfervations fur le
change & rechange inférées dans l'exercice des commerçans, pag. 44'; , ejl défendu, parce qu'on ne peut prêter à
intérêt. ( Conférences d'Angers, rom. 2 des comrats, pag.
60. ) Toubeau, liv.
pag.
0 & fuiv., rapporte quel':lues cas où il penfe que cela peur être permis; mais il n'y
auroit pas de sûreté le faire, ajoure-t-il. 'Savari, tom. 2,
parere 37, pag. 290, ne s'éleve pas moins contre cet abus,
& rapporte un réglemem du Châtelet qui le profcrit. Fromemal, vo. Négociant, rapporte un A rrêt du Parlement de
Touloufe du '2'; Février 1727, qui caffa un appoimement
de la Bourfe qui condamnait le fieur Moulon à payer avec
contrainte par corps une fomme pour laquelle il avoit tiré
une lettre de change, parce que cette lettre de change provenait d'intérêts arréragés d'une fomme due par obligation,
& même cet Arrêt cait! la lettre de' change, fauf au créancier d'agir ainu qu'i~ aviferoit bon être pour l'exécution de
fan obligation.
.
Le Tr.ibunal Confulaire de Marfeille adopta les mêmes principes le 26 Février 17)3, dans ces circonfiances : Marianne
Reyne tire une lecrre de change, datée de la ville d'Aix, de la
valeur de 't0o liv. fur Lagard, à l'ordre de la Dite. Feraud
famere.,La Feraud palfe fan ordre à Ricard, valeur reçue en
marclzandifes. 'Protêt, Semence par laquelle, attendu que la
lecrre de change avait été en la ville de Marfeille, pour
des marchandifes livrées par Ricard à ladite Reyne, fous
le cautionnement de Garein, la caufe eft renvoyée au premier jour ,dans lequel temps Ricard 'communiquera la facture des marchandifes. Autre Sentence du 26 du même mois,
qui condamne Mariaqne Garein au paiement· folidaire des
400 liv., fauf le terme de trois mois, & qui met la Feraud
mere hor.s de Cour & de procès, attendu qu'elle n'écoit que
caution du biller.
Ainu routes les. fois .que la. lettre de change n'eft que
'Color qurejitus, elle manque
en fait. .d'une
,ondition
qui conf-""
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PALAIS
DE
P·,ROVENCE.
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tleue cette efpéce de contrat; lorfque la conditio~ a été fup.
'Pofée par ftmulation, elle n'ell: point une lettre de change.
Ce voile n'dl: point facré; il ell: permis de le foulever. On '
trouve dans le Praticien des Juges-Confuls, pag. 84, deux
Sentences des Juges-Confuls de Marfeille, l'une du 30 Octobre 1753, & l'aurre du 3 Septembre 1754, qui délaiffe
les parties à fe' pourvoir pardevant qui il appartient; ces
Sentences prouvent le principe que l'oa fou tient , qui ell: que
la foufcription d'une lettre de change par quelqu'un qui n?eft
pas Négociant, ne fou met pas toujours à la contrainte par
corps, mais feulement lorfqu'elle a été faite anima cambiandi,
& qu'il y a un véritable contrat de change; autrement elle
n'eH: regardée que comme une obligation ordinaire, pour
laquelle on ne peut pas ufer des privileges accordés aux
lettres de change. Il a pareillement été jugé dans tous les
temps que les femmes non marchandes publiques n'éraient
point foumifes à la contrainte par corps pour lettres de change.
On trouve un Arrêt dans le Journal de Touloufe, pag. 44
du fupplément, qui l'a ainft décidé. On voir donc que dans
toutes les occaftons où la forme de la lettre de change n'eft
qu'un déguifement pour frauder la loi, les tribunaux ne s'arrêtent point à ceue forme, & ils font obferver la loi que
l'on voulait éluder.
Qu'on ceffe d'exciper de l'intérêt pu commerce; il exige
que de pareilles obligations foient décriées, en attendant
qu'on rrouve le moyen de les profcrire entiérement, fuivanr
Je vœu de tous les bons citoyens. Il ell: de l'intérêt public,
il importe au repos des familles que les ufuriers ne puiffent
fe fouHraire à la vigilence des loix, en obligeanr la perfonne même de ceux· qui ont recours à eux. Ces fortes d'obligations font d'autanf plus dangereufes, que l'aél:e en demeure caché, qu'on a moins de honte à le foufcrire, & que
ceux qui l'exigent préviennent les réclamations en creufant
de plus en plus l'abyme où ils trouvent le moyen de pré.
cipiter leurs viél:imes. On s'eH élevé de toute part contre
cet abus. On peur voir ce qu'en dit l'hifiorien Villaret, tom.
Annùs 177S & fuiv.
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JOURNAL
7 de l'édition in-4°., pag. 32.7, & tom. 14; pag. :l. q dè
J'édition ÙI-l2, pour femir la néceffité qu'il y a de la profcnre.
.
_
On répondoit pour le fieur Bifcaq'ar, qu'on avoir voulu
répapdr(;' des doutes fur la nature. du c'on,trat de chan.ge, & '
faire dépendre Ion effènce de fa fupftance: On avoit ramené
à l'appui de ce fyrtême tous les principes qui s'appli<ijuent
à la fimulation, à la fraude, à la fàuffeté <j'un ac1e; & fans
examiner fi la lerrre de change donc s'agir étoit fauffe, frauduleufe ou fimulée, on avoir raifotlné d'après ces principes J
comme fi tous les viè~S qu.i font la bafe .de ce r,aifonnemenr, fe trouvoient réunis dans le tirre qu'on attaquo'ir. l '
. L'on convient qu'en droit les aél:es Iimulés ne font:'pas
obligatoires, parce qu'ils ne fOllt fondés' que fur le menfonge, & que lorfque la vérité paroîr, tout doit lui rendre
homm'lge. Mais l'on eft bien éloigné de convenir de la fimulation d'un ltitr\: dont la vérité fé manifeGe par lui-même,
& qui, loin d'avoir été fait pour frauder les loix & en
éluder les difpofitions, n'a été fait au contraire que dans
l'elprit de fe foumettre à ces mêmes loix, & de re conformer à leur difpofition.
Sur le fecond moyen, on difoit ' ue dans le commerce,
ce qu'on appelle co/ltrat de clzange fe ait de deux manieres 7ou d'une monnoie contre une aut·re, c'eH-à-dire , lorfque
l'on donne une forte de monnoie pour en avoir d'u'ne autre
forte dans le même pays, ou d'une monnoie contre une
autre femblable, payable dans. un lieu différent, & cerre
derniere efpece, de change fe fait par lettres. C'eG la définition qu'en ont donné Scaccia dans fon trai,té de commercio; Cambolas, §. l , queH. '5, n. :l. & 3, & Heinecius dans fon trai~é de elementis juriscambialis, cap. l,
§. 9. Le change eH le commerce qui fe fait par letrres ,
appellées de change, parce qu'elles font conçues dans une
forme qui le4r eH confacrée; d'où il fuit que toutes les fois
qu'il exifte une lettre de change., le contrat du change en
dt une fuite inféparable: c'dt pourquoi, dit Bonnet, Arrê~
•
�DU PA.LA'"'rS
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16j
·r r, de la compétence des Juges-Confuls, toutes les contef·
tations qui nailfent à l'occalion des lettres de change font
de la compétence des Juges-Confi.rls, fait que celui qui l'a
foufcrite fait Bourgeois, Eccléliafl:iql1e ou Gentilhomme.
Quoique le change puilfe fe faire làns lettres, les lettres
ne peuvent fe faire fans le change. La raifon en eft fenfible. Une lettre de change fuppofe toujours unIe valeur rec;ue,
fait en ma.rchandifes ou en argent, & cette valeur eft précifément ce qui fait la matiere du change pour la lettre qui
en efl: comme la contre valeur. Ainli il dl: impoffible de
fuppofer une lettre de change, fans fuppofer l'inrenrion d'avoir
voulu faire le change, puifque le fait ne peut pas exifter
fans l'intention" & que la lettre étant,Je fait du change,
l'intention efl: manifeHée par ce même fair ,. par cette lettre
de change; & dès-lors il n'dl: pas poffible qu'une lettre de
change ne fait pas répmée & préfumée faîte anima cambiandi. L'ufage rec;u en France eft qu'une lettre de change
qui eŒ' conc;ue dans . les- "formes prefcrites par les regles du
éommerce, eft réellement une lettre de change rec;ue &
réputée telle, & il eft indifférent qu'elle vienne ou non à
protêr, que celui à qui on la donne fait en bonne ou matlvaife foi, & qu'il croit ou non qu'elle fera payée à fan
écl1éance au lieu de fa deflination; il fuflit que cette lettre
de. change Ülit concue comme elle doit l'être. Qu'elle fait
faüe ou non par u~, Gentilhomme ou par un Négc;>ciant,
peu importe., pour qu'elle fuit.réputée faite anima cambiandi,
p.our qu'elle fait rec;ue dans le commerce.
.Le change que les Iraliens appellent cambio fecco, n'dl:
point connu en FraRce; & ne peut être appliqué aux lettres
de change de l'efpeee' dom il s'agir. Il n'y a qu'h lire ce
que dit Scaccia" cÎr~ par le Geur d{;s -Tourres, pag. 291'
& fur la inême quen. 7, limitat. )-, n. 7. Peu importe,
pour qu'il y ait un vrai contrat de change, & pOUl' que la
lettre de change foit réputée telle, qu'elle doive être protefiée ou acquirrée, que le~ panies foient ou non dans la
bonne foi qu'elle fera payée au)ieu de fa deftinatÎon; il
Bbbb::.
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loURNAt
fuffit qu'elle ait été. confentie, comme dit Radier, pour ar~
gent ou marchandifes véritablement reçues, pour que touS
les privileges de fa nature y foient attachés; s'il éraie néceifaire d~ connoître les intentions des parties pour juger
de la validité d'une lettre de change, & [avoir fi elle doit
être ou non réputée telle, ce genre de commerce, qui eH:
le plus coulant & le plus aifé, deviendroit Je plus difficile,
le plus épineux; il ferait même impofIibJe de ne pas s'y
tromper, vu que l'intention des parcies ne pourrait jamais
être connue. Si la réalité d'une lettre de change dépendoit
de l'intention, qu'elle fùt foufcrite .par un Gentilhomme, un
Bourgeois ou un Négociant, l'intention pourroit également
ne pas s'y rencontrer, & dès-lors le change n'y exill:eroit
pas, & la lettre de change n'auroit plus de privilege. On
fent combien ce fyll:ême feroit étrange, & combien il ell:
oppofé aux vrais principes qui régiifent la matiere des lettres de change.
Quel rapport y a-t-il encre la lettre de change faite par
le fieur des Tourres, & ce qu'on entend par cambio fecco?
Ce change fec n'eH autre chofe , fuivant Heinecius & Scaccia,
qu'un change fimulé, c'ell:-à-dire, un prêt flit à un certain
lieu pour être rendu au même lieu, avec intérêt à proportion du temps; c'en une dette à jour de laquelle on étoit
autorifé à réclamer à l'échéance le principal avec les intérêts; & c'en cette efpece de prêt qui a été profcrite par
la cbnaitution de Pie Premier. Il.faudroit donc, fuivant cet
Auteur, pour que cette lettre de change pût être confidérée
comme un COntrat de change nommé cambio fecco, qu'elle
ftIt tirée de Ma-rfeille fur Marfeille; & l'on convient que
ces lettres de change .n'en auroient pas l'effet & ne pourraient jouir des privileges des lettres de change. Voilà pourquoi l'Ordonnance a exigé qu'elles fuifent tirée! de ·place
en place. Cette lettre de change pourroit encore être réputée cambium feccum, fi elle avait été tirée réellement de
Nîmes, quoique datée de Marfeille fur Nîmes; fi elle avoit
été tirée réellement de Marfeille & datée de Nîmes fur
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DU
PALAIS
,
DE
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Marfe-il1e. Voilà le cas du change pro fic70 loco. Dans tous
ces cas, il eH évident qu'il n'y auroir poinr de change, &
que le change feroir imaginaire; ce feroir un conrrar puremenr ufuraire; lll1 comrar prohibé; mais dans ce dernier
cas, il feroit roujours impoffible de connoître fi une lettre
de change feroir de ce genre, puifqu'elle porreroir avec
elle la preuve du contraire; il feroir roujours vrai de dire
que même une lettre de change de cette efpece feroir reçue
dans le commerce & répurée avoir éré faire anima camhiandi, parce qu'en pareil cas la fimularion ne fe préfume
jamais; que d'ailleurs cerre preuve de vériré que fourniroit
la reneur même de la lenre, feroit au defI'us de la fimu!arion, & dérruiroit route efpece de préfomprion, la préfomprion ne pouvant jamais exilter contre des chofes certaines : vera prohatio prœvalet fic7ioni {; tollit prœfumptionem ,
nec in cenis ullus efi prœfumptioni jive conjec7urlZ locus. L.
cominuus 12.7, §. eùm ita, de verh. oblig. On ne pourroir s'arrêrer à cerre fimulation, qu'en s'éloignant de ce qui feroit
certain, de ce qui feroit évident, & cerre idée de fimulation ne feroir fondée que fur des doures. Or, en pareil cas,
on ne doit jamais s'écarrer de ce qui eH certain, de ce
qui Ce manifeile par lui-même, pour fuivre l'incertain: à
arto propter incertum non eJl recedendum , cod. de rei vind.
D'après ces principes, on feroit donc forcé de croire cerre
lettre fincere & vérirable, & elle femit répurée avoir éré
faire animo camhiandi, jufqu'à ce que cerr~ fimulation fût
prouvée, qu'on en flit convaincu.
Le commerce des lettres de change aéré confidéré dans
tous les temps, depuis leur invenrion & dans tous les Erars,
comme l'arne & la fubfiance du commerce en général; ce
n'eH que par la voie des lettres de change qu'on eH parvenu à faci1irer la circulàrion des efpeces; c'eH par cerre forme
de conrrat qu'on a trouvé le moyen de tranfporrer fans
peine & prefque fans danger des fommes importantes dans
les parties du monde les plus reculées; & dès-lors on s'eH
procuré les plus riches produétions de la- nature qui nai.tfent
�'5°6
Jou
RNA L
dans les différens climats, [ans être obligés de faire fonir
l'or du Royaume. Les Négocians [e [one entendus entr'~ux,
& ces mêmes lettre, de change envoyées au bout du monde
ont fervi aux différens peuples pour fe procurer les produétions de notre [01; par ce moyen on a eu le double
avantage de conferver l'argent dans l'Etat, d'y attirer ce
qni nous manquait, & de le décharger feulement du [uperflu.
Auparavaot il fallait [e borner au commerce intérieur, ou
tranfporter ailleurs les tréfors du Roya~me; & comme il
érait dangereux d'épuifer les re{fources de l'Etat en tranfpor(ant les e[peces hors de la Monarchie, les Souverains 1
tain de favorifer ce commerce, puni{foient [évérement ceux
qui donnoieot de l'or pour des marchandifes, & évitaient
par-là les communications avec les autres peuples. L'on
trouve dans le Code une Loi expre{fe qui prohibait ce
çommerce: Si ulterius au mm pro mancipiis vel quioufèumque
fPecieous ad harharicum fiœrit tranflatum
mercatorious,
non jam damnis, /èd fuppliciis [uojugentur. L. 2., cod. de
commerciis & mercatorihus. En [one que le commerce ne
pouvait avoir lieu que par les échanges d'une marchandife
pour une autre, ce gui était de difficile opération.
Depuis gue les befoins & l'induHrie ont fait imaginer
cette forme de contrat, ces paiemens faétices qui [e font
par la voie des Jerrres çle change; on a vu infenGblement
fleurir les arts & le commerce, les Etats s'enrichir; & on
a tellement reconnu la nécefIité des lettres de change,
qu'on n'a rien oublié pour en conferver & accréditer l'u[age.
Scaccia dans [on traité de commercio, §. l, quo 6, n. 14in fine, dit que ft elles éroient fllpprimées, elles entraîneroient la ruine du commerce. Des confidérations auffi pu iffantes ont fait attribuer à cette forme d'obligation des privileges particuliers; les lerrres de change ayant été envi[agées comme une piece de monooie, il falloit néce{fairement donner une force coaétive à ceux gui en [eroient
porteurs, pour pouvoir les réalifer en monnoie à la pre·,
miere requi{icion, & [ans être expo[és à des longueurs qui.
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PALAIS
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PROVIlNCE:
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e\JfI'ent .été ruilieufes par leur conféquence. Auffi voit-on
que la contrainte par corps a toujours été ordonnée col1tre
ceux qui les avaient fignées ou acceptées. Chopin, de morio.
parif. liv. l , tit. l , 11. 17, rapporte un Arrêt du 20 Janvier
IS84 qui le juge de même. Autre Arrêt du 8 Février J6B.
Joli, liv. l , ch. 16, rapporte d'autres Arrêts femblables,
& notamment un du 17 Décembre l 6r 'î, qui ordonna
qu'une lettre de change proteilée était exécutoire par proviGon contre celui qui l'avait foufcrite comme principal
débiteur, quoique le protêt ne lui eût été fignifié que fix
mois après l'avoir fait; la raifon qu'il en donne, c'eil que
le public a intérêt que la foi .des lettres de change ne foit
point violée, & que l'ufage qui a lieu prefque parmi toutes
les Nations, .eil foutenu inviolable par le droit des gens.
On ferait infini, fi l'on vouloit rapporter tous les exemples antérieurs aux Ordonnances de J667 & 1673, qui
ont ordonné la contrainte par corps en matiere de lettres
de change, quoiqu'il n'y eût alors aucune loi qui la prononçât fpécialement, & que ce ne fût que par les con!i~
dérations de l'intérêt du commerce. Depuis que le Souverain a manifeilé fes intentions d'une maniere auffi ptécife
par .Ies Ordonnances de 1667 & 1673, il ell: difficile de
pouvoir oppofer une raifon .plauGble pour fe fouilraire à la
contrainte ordonnée en mariere des lettres de change;
L'article 4 du titre 34 de l'Ordonnance de 1667 défend
expreifémenc aux Cours & à tous autres Juges de condamner par corps en matiere civile, excepté en cas de
réintégrande, pour délaiifer un héritage en exécution des'
}ugemens; pour frellionàt, pour dépôt néceifaire, pour
confignation faite par ordonnance de juilice, pour lettres
de change, quand il y aura remife de place en place, pour dettes
e·ntre Marchands pour fait de marchandifes dont ils fe mêlent. Cerre loi eil générale, univerfelle; elle frappe indiftinél:ement fur le noble comme fur le roturier, fur le Bourgeois comme fur le Marchand, fans diHinél:ion d'état;
aucun n'en e!l: excepté. Il fufilt qu'on fe trouve dans un·
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des cas exprimés, pour qu'on foit fournis à cerre voie
rigoureufe d'exécution, à la contrainte par corps. Que ce
foit le dol ou la fraude, ou la fuire de quelque délir, qui
aient dérerminé le Légiflareur à prononcer, que ce ne foir,
fi l'on veur, aucun de ces morifs, il l'a voulu, il faur s'y
foumertre; donc fi un Gentilhomme, Bourgeois, Négociant ou autre ell: condamné en réintégrande~ pour Hellionar,
pour dépôr néceifaire, pour confignarion faire par ordre
de jufl:ice, ou pour lerrres de change rirées de place en place,
il doir être contraint corps. Cerre difpofirion n'eH point
équivoque; elle fe manifeHe encore mieux par l'Ordonnance de 1673, rit. 7, arr. 1. Ceux qui auront jigné, y
,efr-il dit, des lettres de change ou hillets de clzange, pourront
être contraints par corps. Qu'on ne dife pas que par le rerme
pourront on a enrendu réferver aux Juges la faculté de condamner par 'corps, ou non, fuivant les occurrences; cerre
faculté a été laiffée plutôt à la parrie, qui a la liberté
d'ufer de cerre conrrainte, fi elle le rrouve bon; mais il
ne dépend pas du Juge de la refufer. Ce rerme pourront
dans cerre difpofition eH impératif; il fuppofe le cas du
refus de paiement; il n'étoir pas poffible qu'on pronon~âc
autrement. On r. roir plus fondé à élever des doures, fi au
lieu de pourront être contraints, il érôir dir, pourronr êrre
condamnés; alors il fembleroit que la condamnation érant
du fait du Juge, il feroir réfervé à fa prudence de condamner
ou non par corps. Ainfi rien ne peur exempter le fieur
des Tourres de la contrainte par corps fous ce point de
vue. Le principe efl: cerrain; il a foufcrir une le me de
change rirée de place en place; il doir la payer, ou à défaur il peur être contrainr par corps.
Si les Juifs eux-mêmes qui onr rrairé avec le fieur des
Tourres, étoienr demandeurs dans ce procès, ne feroienrils pas fondés à lui dire que la fraude par lui fuppofée dl:
un être de raifon, une pure allégation de fa parr, dénuée
de route efpece de fondemem? que s'ils lui one prêté la
fomme contenue dans la lerrre de çhange', ce n'a éré qu'à
condition'
.
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
569
condition qu'il la leur feroit payer à Nîmes? Et dès-lors
voilà le change. Ne lui diroient-ils pas qu'ils, ne lui one
prêté que fur. la bonne foi de fa lettre, que dans l'intention de la négocier, que parce qu'ils taifoient en cela le
çommerce du change? .Leur intention ne fe trouverait-elle
pas jufbfiée par la lettre elle - ,même, par la -négociation
qu'ils en ont faite? Au furplus, quand il foufcrit cette
lettre de change, a-t-il ignoré, a-t-il pu ignorer qu'il fe
foumettoit par-là même à la contrainte par corps? D'ailleurs
la loi eil: générale, elle ell: publique; perfonne n'eil: re~u
à ignorer les loix publiques du Royaume.
Le fieur des Tourres a pu foufcrire une lettre de change
tirée de placé en place, & s'expofer à la contrainte par
corps. Bien loin que la loi ait pu y faire obllacle, elle a
voulu au contraire laiiTer à chacun la liberté d'en faire
ufage; elle a prévu que dans tous les Etats on pourroit
avoir befoln de recourir à cette voie pour profiter des
avantages qu'elle procure; & fi les privileges -qui y font,
attachés avoier.t été reHreints à l'égard de certaines perfonnes, fi la comrainte par. corps n'avoit pas eu lieu contre
elles, dès-lors ces mêmes perfonnes n'auroient pu en faire
ufage; leurs lenres de change n'auroient pu avoir cours ,attendu que la contrainte par corps ell, pour ainG dire,
le reiTon qui les fait circuler. Heinetius, §. 1', ch. 5,
atteil:e que coute perfonne qui eil: -capable de contraél:er , eil: capable de foufcrire une lettre de change; il ajoure
que comme les Princes, Gentilshommes & alllres Nobles
iont capables de contraél:er, ils peuvent par conféquent
foufcrire des lenres de change, &. être pourfuivis comme
les autres pour le paiemem.
La contrainte n'eil: exercée contre un· débiteur, qu'autant qu'il eH con Hi rué en mauvaife foi, qu'il refure de
payer ce qu'il dojt légitimémenr. Il dépend donc de lui
de l'éviter quand il le juge à propos:· il n'a qu'à payer, il,
n'a qu'à [atisfaire au jugement qui' le condamne, & dèslors fa liberté ne fe ra plus com.promife; la contrainte paf
Années l775 t;. fuiv. .
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corps n'aia'a polus lieu: mais s'il a voulu aburer de la bonne
foi du. commerce, de la facilité qu'il a eu de trouver de
J'argent en foufcrivanl des lettres de change; s'il a cru
pouvoir impunément s'emparer de la fortune du tiers pour
favorifer fes di/Iipations, pour fatisfaire à fes p1JiGrs, fans
être' tenu de rendre, fan's être obligé de faire face à fes
engage mens , dans ce cas il cll: de mauvaife foi; il ell:
coupable de dol, & il ell: jull:e qu'on ufe contre lui du
remede de la loi, qu'on puiife.le contraindre par corps.
Quoique la lette de change fait attributive de jurifdictian, quoiqu'elle rende juHiciable. des J uges-Confuls un
ju!l:rciable: deS" Juges ordinaires·, il ne s'enfuit· p'as que ce
[oit déroger au droit public que de foufcrire une lettre de
change; il fuffie que ce foie-là un aéle licite, un aéle permis, autorifé par la loi, un contrat de change, pour que
chaque paniculier, de quelle qualité qu'il fait, puiffe le
faire fans intervertir l'ordre des jurifdiétions, fans déroger
au droit. public; il fe foumet par-là même à la loi qui
régit cette efpece' de contrat, & qui en arcrieue la connoi[fance aux Juges-ConCills.
Une des différences eifentielles, difent les Auteurs, qu'il
y a du change réel qui fe fait par lettres ,. avec le prêt pur
& flmple, c'eft que dans le change il eH néceffaire que'
J'argent d'un lieu fait changé pour l'argent d'un autl"e lieu;
au lieu que dans le prêt il doit être rendu dans le même
jjeu qu'il a; été prêté. lta Scaccia, §; l, queft. 4, n. 14Dans le cas préfent, les Juifs ont donné de l'argent· à Marfeille pour le recevoir à Nîmes, & ils ne p0uvoient le demander à Marfeille qu'autant qu'il ne leur feroit pas' payé
à Nlmes. Le lieur de Tourres n'était plus le principal débiteur', il n'étoi, que garant du paiement de la lettre à
Nîmes; ce n'était qu'au refus du lieur Mirande qu'il pouvait
être recherché; ce n'érait que p'ar l'effet du protêt qu'il pouvait être fournis au rembourfe-menr.
Jouffe fur l'art. 4"du titre 34 de l'Ordonnance de 1667;
après avoir cité divers Arrêts qui prouvent qu'on' prononce
�DÛ
·PAL.AIS
DE
PROVENC Il.
~71
indifféremment la condamnation par corps contre des Marqui.'i,
des Confeil1ers, des Procureurs, en mariere de lettres de
change, obferve qu'il faut cependant que ces forres d'obligations foient faites de bonne foi & fans fraude ·pour éluder
la difpofitioo de l'Ordonnance. Il faut d9nc qu'îl paroifftl
qu'on a pris une voie indireél:e, & qu'il pflroiife à tel point
qu'on ne puiffe en douter, qu'on. ne puiffe pas s'y méprendre;
il ne faut rien moins qu'un' aveu de 13 panie, ou une preuve
complete. Radier fur le même article, que ft. 2, 'vo lettre
de change, obferve que fi une lettre de change ,d'un particulier n'a pas été con(enti.e pour argent ou marchandifes 'véritablement reçues, on ne la regarde que comme une obligation ordinaire, & on le décharge de la contrainte par
corps. Donc fi la lettre de change a été confentie pour arge'nt
réellement reçu, on ne doit pas être déchargé de la contrainte par corps. Donc le fieur des Tourres doit être contraint par corps, pui(qu'il a réellement reçu en argent Je
montant de la lettre, pui(qu'il ne le nie pas, pui(qu'il fe
replie feulement à dire que ç'a été un prêt, & qu'il déclare
qu'il ne regr'ete que fur le montant, puifqu'enfin la preuve
en exifte dans fon endoffement.
, L'Arrêt rapporré par Radier ne déchargea le heur Tiffon
de St. ·Sauveur de la contrainte p.ar <?orps qui avait été
pr<>noncée par les Juges-Confuls pour le paiement d'une
lettre de change qu'il avait confentie en faveur du fieur la
Croix pour valellr reçue comptant, que parce que, dans le
~rai, ,comme la Croix l'a.voit avoué, elle n'était que la repréfentation des ar.rérages de rrente. Ce fut l'aveu de la parrie
qui détermina la Cour, .& qui manifeHa d'une façon fan~
replique que ,l'on avait pris une voie indireél:e pour frauder
la loi, & opérer la contrainte par corps.
Bornier met fi peu de doute à la contrainte par corps
qui doit être ordonnée en matiere.de lettre de change contre
toute forre de perfonnes, qu'il cite un Arrêt du'9 Aoùt 1707,
qui jugea qu'un Eccléliafrique qui .3:.oit figné une lettre de
change, était contraignable par .corps. Il en rapporte un
Ccc C 2
�~72.
JOURNAL
autre contre un mineur non Négociant dlJ 30 AoÎle 1701;
qui fut confirmé par Arrêt du Con{eil du n Août 1704.
Tous les Arrêts cités par le fieur des Tourres ont été rendus
dans des tems reculés où la Juri{prudence n'étoit pas encore
parvenue à (a perfeéèion; ce· n'eH: qu'en déèouvrant les abus
qu'on a pu y remédier; on croyait alors que les abus les
plus dangereux étaient ceux de pouvoir emprunter la forme
d'une lettre de change pour marquer une obligation d'un
autre genre, & on s'écartait quelquefois de la regle pour
prévenir ces abus: mais depuis lors on a reconnu que pour
remédier à un abus. qui n'inl'éreffoit jamais que le particulier
obéré', one donnoit lieu à <de plus grands qui intéreffoient
toute la {ociété; on encourageoit par-là tous les mauvais payeurs
à élever des conreftations, quand il étoit qlleaion de fatisfaire
à leurs engage mens ; la chicane toujours profcrite dans les
mlltieres de commerce reprenoit fon empire, & le titre le
plus' p-rivilégié devenait de là plus difficile exaéèion. Cette JlIrifprudence n'exifte .plus; la loi, les Ordonnances (ont en vigueur, elles font toujours obfervées à la lettre.
Si par événement des Arrêts déterminés par des circonftances parriculieres ont déchargé dans certains cas de la
contrail1te . par corps, ce n'a été que lorfque la partie a
avoué que la lettre de change avait été faite pour tout
.lutre objet que celui ,du change. Tels font ceux rapportés
pa!" Radier & par Je Journal de Touloufe. Mais s'il étoit
intervenu un tiers dans ces différentes caufes , les Arrêts
n'auroient pas été rendus de même. L'Arrêt rendu contre
Mr. de Saint-Andiol le 1.3 Janvier 1746, pour. des fommes
empruntées par fon époufe en vertu de fa procuration, &
qui le fournit au paiement de ces mêmes (ommes avec
contrainte par corps, quoiqu'il ne fût quefiion que de
!impIe prêt, prouve combien peu on s'arrête à des diHinctians captieufes, qui ne font jamais (uggérées que par le
défaut de volonté de fe libérer, & par la mauvaife foi.
Celui rendu par le Patlement de Bretagne le 26 Juinet
1742 fert toujours mieux à confirmer la regle; l'opinion
�DU
l'ALAIS
DI!
PROVBNCE,
S73
du Journalif1:e nl! 1 peut en détruire l'elprit. Le Réglement
du Châtelet de Paris que rapporte Savari, n'dl autre chofe
qu'un Réglemenè contre les lettres de change faulfes.
Si la fubfiançe doit feule difiinguer une lenre de change;
& qu'on ne doive pas s'en rapporter à la forme extérieure,
quel fera le Négociant alfez clair-voyant qui pourra conholcre fi la fubfiance a onné l'être à la lettre de change
qu'on lui préfeniera? Qui pourra s'aifurer de la réalité de
celle qui fous les apparences de vérité lailfera des doutes
auffi impénétrables à éclaircir? Si on ne doit en juger pa,r
fa forme extérieure, par les termes dont elle fera conçue,
par fa conformité aux regles qui font pre[crites, mais
uniquement par fa fubllance, qui pourra fe flaner d'avoir
allez de pénétration pour découvrir un myllere dont les
-feules parties qui ont traité, qui ont concouru à la fabrication de la lenre, peuvent avoir connoiifance? Comment
fera-t-il poffible à un Négociant, lor[qu'on lui préfentera
une lenre de change, de deviner fi elle a eté réellement
faite anima cambiandi, fi elle efi un vrai contrat de change,
ou fi elle
un ouvrage de fimulation , fi elle n'dl qu'un
mafque dont les apparences trompent, fi l'on doit s'en
méfier? Quel fera le mortel qui pourra pénétrer dans le
fond de l'ame de ceux qui auront fabriqué une lettre de
change, pour y lire fi elle a été faite anima cambiandi,
& cela fans les voir, le plus [auvent fans les connaître?
Enfin qui pourra démêler fi une lettre de change renferme
un vrai contrat de ch,lI1ge, fi on ne doit pas en juger par
la te'neur de la lettre? Si une lettre de change dont l'exiftence ferait, fiJfceptible de tant de difficultés, donc les
doutes [eroient auffi multipliés qu'impoffibles à éclaircir,
pouvait n'être confidérée que comme une dette ordinaire,
que comme une obligation pure & fimple dans certains
cas, & ne devait pas opérer la contrainte par corps, quel
feroit le Négociant qui voudrait s'en charger? qui donnerait cours à un papier auffi dangereux? La méfiance en
pareil cas fetoit toujours fondée, ferait un obHacle p-er--:
ea
�'574
JOURNÂL
péruel Il ~ négocIation des lerrres de change. ta contraince
par corps n'a éré imaginée, dit Heinerius, cap. 5, §. l ,
.qu'afin que les Marchands pulfenc fans ~anger fuivre la foi
d'aurrui.
.
Que deviendroit alors le commerce? que deviendrait l'induftrie? La circulation des lerrres de change n'ayant plus
lieu, la .communicarion feroit interrompue, parce que les paiemens ne feraient' plus poffibles; on feroit obligé de confumer
les 'produtlions du fol, fans pouvoir fe défaire du fuperf1u,
IX l'on ne pourroit fe procurer celles de l'érranger, fans tranfporter hors de la monarchie les rréfors de l'Erat, fans courir
mêl\le une infiniré d'événemens qui rendroient ces rranfpons
,difficiles & da!)gereux; les ans & les métiers languiraient
dans l'enceinre du Royaume, & la (ociéré en re1fenriroit
les plus grands préjudièes, les plus vives atteinces. Voilà les
fuires d'un fyHême auffi érrange, s'il pouvoir s'appliquer vis-zvis du tiers. Ce n'eH donc que vis-à-vis l'auteur de la fraude
donr le fieur des Tourres fe plaint, qu'il peut s'exempter de
la contrainte par corps à laquelle il s'eH foumis en fignant
la lettre de .change donc il s'agir. Or, fi le lieur BitCarrat
n'eft pas l'auteur de la fraude, s'il n'y a & ne peur y avoir
eu aucune parr, cerre même fraude ne peut opérer aucun.
eJfer conrre lui, & alors les chofes relient dans leur entier,
& la contrainte par corps doit avoir lieu.
Dès que la lettre de change limulée .ou ,frauduleufe a
palfé dans les mains du riers., dès qu'elle a circulé da s le
commerce, elle devient untÎrre privilégié; elle celfe d'avoir
une exiHence fiélive, elle acquiert une nouvelle force, elle
opere la contrainte par corps -en fave.ur du tiers, rant contre
celui qui l'a fignée, que contre celui qui l'a faire circuler;
la fra,ude, la fimulation n'exiftent qu'entre le tireur & celui
qui a trairé avec lui; l'une &;. l'autre font un délit perfonne!
qui ne frappe que fur leur aureur; c'eft par le fait du fieur
des Tourres lui-même que cette .lim.ulation a été pratiquée;
c'ell lui qui a fabriqué ce tir,re limulé, de concert avec les
luifs; c'eft donc à lui feul & aux Juifs fes .complices que doi~
�nu
P'ALAIS
DB
PROVBNCE.
'57'-
pouvoir nuire cette fimulation, & non h t'intérét dli tiers:
fa8um cui!Jue fuum, non adverfario nocere de6et. L. l 'l 'l de
regul. jur. Cette lettre de change doit donc opérer la contrainte par corps en faveur du tiers, puifque c'ef!: un privilege qui ef!: inféparable de fa forme, de fan effence; &
ce ferait un dommage réel, un préjudice év.ident à l'intérêt
du tiers, fi elle n'avait pas lieu.
'
Arrêt du 21 Juillet 1779, au rappon de Mr. le Confeillel"
'de St. Mar,c, qui confirme la Sentence, avec dépens. Ecri-·
vant Mes. Portalis & Imbert.
ARRÈT
LXIX.
On ne peut prefcrire contre les Hôpitaux. que par le laps de
quarante ans.
On ne peut oppofer le bénéfice d'inveniaire prefcrit ou apuré'
lin créancier certain & connu qui n'y a pas été appellé.
a
Re. Jofeph de Simiane, Marquis de Rians, légua ànnuellemenc & à perpétuité la fomme de Ibo liv. ,'pour
être diHribuée aux pauvres du lieu de Rians.. Ce' tef!:ateur
décéda en 1728. Son fils prit des lettres de bénéfice d'inventaire, & fit affigner quelques créanciers'; mais' les Recteurs de l'Hôpital de Rians ne furent point appellés à raifon du legs fait aux pauvres. Les procédures du Marquis, de
Simiane' furent pourfuivies contre les deux ou' trois créanciers qu'il avoit fait, affigner; il Y' eüt des Sentences de
rangement qui donnerenc lieu à: un appel au Parlement de
Grenoble, qui fut terminé par un Arrêt de confenfù, par
lequel' le Marquis de Simiane fe fournit à payer les créanciers qu'il avait fait affigner, moyennant un abandon de
quatre années d'intérêt. En 1741, Me. Garnier', Procureur
fondé de Mr. de' Simiane, paya le droit d'infinuation' du
M
�176
Jou
RNA L
legs fait aux pauvres. Les Reél:eurs de l'Hôpital de Rians
devaient au Marquis de Simiane un droit de demi lods de dix
en dix ans, qu'il ne leur demandait pas, ce qui fut caufe
qu'ils négligerenc de demander le paiement du legs de 100
liv. Le Marquis de Simiane s'étant pourvu pour fe faire
adjuger les lods dus, les Reél:eurs demanderent la compenfation; mais fur le refus de Mr. de Simiane ils payerent,
& fe pourvurent au Lieutenant d'Aix en condamnation du
paiement du legs, avec intérêts, temps pour temps, & obtinrent une Sentence conforme le 16 Février 1771. Appel
de la parc de Mr. de Simiane.
L'appellant foutenoit que le legs étoit prefcrit, & qu'en
fuppofànt qu'il ne le fût pas, les Reéleurs de l'Hôpital auraient dû former leur demande dans le bénéfice d'inventaIre.
On répondait POUt les Reaeurs, qu'il eil de principe que
la caufe pie jouit du privilege des Eglifes, & qu'on ne peut
prefcrire contr'elle que par quarante ans. Voici ce que dit
la Novelle 131 pro temporalibus, cap. 6: pro temporalibus
(Iuum prœfèl'iptionibus decem, & 1!igiflti & (r'iginta allllOrum,
facrofanRis Ecclefiis é: aliis IIniverfis veneralilms locis, falam
ljlladraginta annorum prœfèriptionem oponi prœcipimus. Hoc
ipfo ferl'ando in exaRione legatorum & Izœreditatum, quœ ad
pias caufas relic1a jùnt.
Tous les Auteurs raifonnant d'après les principes de la
NovelJe, ont unanimement décidé, 1°. que les legs en faveur des caufes pies n'étaient prefcrits que par quarante
ans; '2,0. que les Hôpitaux étoient la plus favorable de toutes
les caufes pies, en faveur defquelles la Novelle avait prorogé la preÎcription jufqu'à quarante ans. Tels font Duperier
dans fes notes manufcrites, l'0. Hôpital; Lapeirere 'len. P,
n. 69; Dunod, traité de la prejàiplion des biens eccleJ., pag.
8; Defpeiifes, tom. '2" pag. 298, & Boniface, tom. 3, pag._
804-, n. 1'2..
Dire que la Novelle ne parle que des établifl'èmens pies .
qui tiennent à d'autres établiifemens eccléfiall:iqlles, c'ef!:,
faire
�D U
.
PAL AIS
D l'!
PRO V l'! N C l'!.
S77
'faire dire à la Loi ce qu'elle ne dit pas; c'ef!: créer une
diHinél:ion qu'elle condamne, foit parce qu'elle ne l'a fait
pas, foit parce qùe la loi contrarie cette diHinél:ion ; car
elle parle des caufes pies par forme d'a m pliarion ; &
d'ailleurs il eût été très-inutile de donner une difpofition
particuliere au fujet des Hôpitaux unis à des Eglifes, puifqu'ils étoie,nt déja compris dans la difpolition précédente
donnée en fayeur de l'Eglife. La quef!:ion de favoir fi les
Hôpitaux étoient fournis à la. prefcription de trente ans, ot!
s'il falloit la proroger jufqu'à quarante, fut agitée dans l'efpece de l'Arrêt du 4 Mai 171 r. Il s'agiifoit d'une penGon
dont les arrérages furent adjugés à l'Hôpital d'Aups pour
trente-neuf ans; Auffi l'Hôpital' de cette ville a 'toujours regardé comme un principe fondamental, que fes droits ne
pouvoient être éteints que par la prefcription de quarante
ans.
• En fuppofant même que la prefcription plIt être acquife
par trente ans, elle ferqit inrerrompue par la déClaration
faite au bureâu du contrôle. Cetre déclaration ef!: poHérieure
à toutes les procédures du prétendu bénéfice d'inventaire
dont le Marquis de Simiane excipe. Il paya les droits réfulrans du legs fait à J'Hôpital; il déclara donc vouloir
acquitter ce legs.; fa déclaration eft d'autant plus puiifanre,
qu'on rrouve tOut de fuite dans la même piece, qu'ii ne
veüt pas acquitter, & qu'il n'acquitte pàs les droits des legs
faits ltUX domefl:iques & gens-d'affaires, parce, dit-il, que
ces legs deviennent inutiles par les dettes de l'hoirie. Aina
donè cette déclaration·, quoiqu'on ait pu dire, contient la
reconnoiifance expreife de la derre dont il s'agit; .reconnoiifance qui., felon toutes les loix & les Auteurs, opere
l'interruption de la prefcription.
t
La nature de la derte formerait encore un ob!l:acle infurmontable à la prefcription; c'ef!: une penfion. Aina les
,
legs annuels ne fe prefcrivent pas: tot legata,' tot anni. On
peut bien prendre des arrangemens, mais le fonds eH im-.
prefcriptible; la renaiifance annuelle de l'aél:ion dl: un obf-
Années l775 & fuiv.
D d cl cl
�~7g
JOV.-RNAL
tacle infilrmontable contr.:: toute prefcription qùekonqüe;
d'ailleurs il n'y avait point de dettes en fonds à Je faire
adjuger. Le Marquis de Simiane excipe du bénéfice d'inventaire qui a, dit-il, ouvert les voies à la prefcription.
Mais 1°. le bénéfice d'inventaire n'exiHe pas. 2°. Le bénéfice d'inventaire exiftât-i[ effeél:ivement, il ferait étranger
à l'Hôpital, qui n'y aurait pas été appellé. La prefcriprion
pourrait-elle commencer! à courir à raifon d'un bénéfice
d'inventaire vis-à-vis d'un créancier connu à qui le bénéfice
d'inventaire aurait été conHamment caché? Ici le bénéfice
d'inventaire ne pouvait rien' opérer; l'Hôpital, créancier
d'une- pen Gan , n'avait point ,de fonds à exiger: la· pre[-J
cri pt ion ne peut donc avoir couru contre lui dans aucun
cas.
Il ell: certain que la même ,perfonne peut être héritiere
pure ex {imple vis-à-vis certains créanciers, & héritiere par
inventaire vis-à-vis d'autres. Un hérrtier par inventaire veut
traiter favorablement quelques créanciers de l'hoiriè; i1.[e
départ à leur égard du bénéfice d'inventaire; il devient,
quant à ce, héritier pur & {impie, & le bénéfice d'inventaire. exill:e quant aux autres créanclers en faveur defquels
l'héritier ne s'eH pas départi. Il ell: également de principe
que les créanciers. certains doivent être ,appellés, & que
le bénéfice d'inventaire ne peut pas nuire.à ceux qui ne
l'ont pas été; de maniere que quand on voit un bénéfice
d'jnventai e pourfuivi .& apuré, [ans que l'héritier ait fait
appeller cerrains créanciers dont il ne pouvait ignorer les
titres, il eH à préfumer que l'héritier qui n'a pas mis ce
créancier en caufe, n'a pas prob'ablement voulu [e [ervil'
du bénéfice d'inventaire à [on égard. C'eH ainG que l'one
décidé tous les Auteurs. Ita ,Faber, déf. 17 de jur. deliber.;
Serres dans {ès inHituts, pag. 314; Breronnier [ur Henris,
liv. 6, chap. 14, queH. I l , n. 4; Barry, lilt. I l , tit. 18;
Decormis, tom. 2, col. 1438; Defpeiffes, rom. 2" pag. 427; ,
Duperier, tom. 3, pag. 149.
Enfin le bénéfice d'inventa,ire [e t[ouve abandonné depui~
�D U
l> A LAI
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PRO VEN C E.
579
plus de trente ans, & le Marquis de Sjmian~ ayant dirpofé
du tout purement & librement, il n'en plus rems de faire
valoir cerre exception, puirque le concours des créanciers
a celfé par le fàir du Marquis de Simian.e. On produiroit,
divers aEtes de vente f~its purement & !implement en qualité d'héritier, fans parler du bénéfice d'inventaire. Il étaie
donc héritier pur & umple, & le renvoi au bénéfice "d'inventaire ne paroit pas mieux fondé que le' déboutement.
Arrêt du 9 Juin 1775, au rapport de Mr. le Conreiller
,de Nibles, qui confirme la Sentence, avec dépens. Ecrivant
Mes. Gaffier & Verdet.
ARRÊT
LXX.
Sur la demande en reflitution d'une fomme donnée pour porter
Beaucaire, & volée celui qui ail l'avait confiée.
a
a
a
E 19 Juillet 1777, Touiraint Vial, Cordonniér de la
ville de Forcalquies:., devant partir pour la foire de Beaucaire, fut prié par les flettrs Jofeph Berlue & Petit, Marchands de la même ville, ,de leur porter à Beaucaire une
fomme, partie" en or, partie en argent, pour en faire l'emploi q.u'ils lui indiquerent. Vial mit cet argent dans f.1 valife, & partit le même jour à onze heures & demie du matin.
Il fut joint en route par deux inconnus bien montés & airez
. bien mis, qui l'accompagner'ent jufqu'au cabaret d'it la Garde'
de. Dieu, utué fur le grand chemin, dans le terroir de Reillanne, où ils fe repoferént.
Vial étant forti un inftant, trouva fa valire au pouvoir des
deûx inconnus, qui l'avaient ouverte, & qui, le l'oyant, prirent la fuite, après s'être faifis d'une grande partie de l'argent & avoir mis le piHolet à la main.
• . Vial fit courir après eux inutilement; & ne pouvant con..
tinuer fa route, il remit le refiaut de la fomme à Antoine
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Paris, Cordonnier de' CeireHe, qui allait 11 Beaucaire, &
qui fe chargea de l'employer à fa defiination.
Vial fit enfuite fan expoGtion pardevam les Officiers de
Reillanne; il déclara fe rendre partie; il fit informer; le
vol fut conHaté, & les deux inconnus. furem décrétés de
prife au corps.
"
Les Geurs Berlue & Petit s'étaient pourvus contre Vi~l
pardevam le Lieutenam de Forcalquier, pour le faire condamner à leu.r rembourfer l'argent, avec intérêts & contrainte
par corps; ils le confidérerenc comme un violateur de dépôt,
& foutinrent que le vol ll'éroit qu'un prétexte. Vial verfa
dans le procès l'expqGtion & les décrets de prife au corps;
les lieurs Berluc & Petit demanderem l'apport au greffe de
la Sénéchauifée, de la groffe de la procédure prife à ReilJan"ne, pour être vue en jugeam le procès, ce qui fut exécuté.
.
Le Lieute'nant, par fà Sentence du 2 Août r779' ordonna
que la procédure demeurerait jointe au procès, pour fervir
lors du jugement définitif, les preuves réfultantes de la procÎ!dure tenant. Il admit les lieurs Berluc & Petit à prouver,
rO. qu'à l'inHant du vol excipé par \T.ial, celui-ci ne fe plaignit ni d'enlévement ni de fraéÇ.!on de fa valife, mais limplement d'un jeu, au moyen ducjuelles deux inconnus, (ous
le prétexte d'emprunter un louis d'or, lui avoiem attrapé
rout fon argent, tellement gue la valife ni le cadenat qui
la fermoit n'a\'oient foufferc ni fraél:ion ni altération; 2°.' que
Vial, ,à l'époque du prétendu vol, dans l'intention de s'approprier tout l'argem, avait dit hautement, ainG qu'à (on
arrivée à Forcalquier, qu'on l'avait volé, & qu'on ne lui
a\'oÎt rien Jaiffé, ni du lien ni de, c.elui des lieurs Berluc &
Petit; 3°. qu'à la même époque on s'éroit apperçu de quelque" connivence entre Vial & les prétendus voleurs. Le
Lieutenant réferva à Vial la preuve concraire.
Avant la lignification de cette Sentence, les fieur,s Berluc
& Petit pré(entetenr requête au Lieutenant, tendame ,à Eiire
!épondre Vial [ur \lne foule de fairs, qui furent admis [an~
�DU
PAL A 15
Dl!
PRO V l! N C E.
~ 81
()u)r partié: Vial leur fit lignifier LHle déc1arat'ion d"àppel de
la Sentence, & de ce qui pouvoit s'en être enfuivi. Il demanda enfuire incidemment pardevanc la Cour une réparation légitime, l'amende, les, dommages & intérêts, l'affiche & l'imprelIion de l'Arrêt.
!
• On dirait pour Vial, que la Sentence étoit irréguliere' &
nulle, en ce que le Lieutenant avoit ordonné, d'offi,e "la
jonél:ion de la procédure, quoiqu'elle n'eîit été reRuife ni
par la partie, ni par le Procureur du R~i. Il efi bien "vra,i
que les lieurs Berluc &, Petit avaient demandé l'apport de
,la groffe de la procédure, pour être vue en jugeant le pr.ocès,
& c'ef!: ce que le Lieutenant avait ordonné par fan déêreç
au bas de la requête.. Dès-Idrs coût éroit confommé 1à' ce,[
égard; il n'y avoit plus rien à Hawer.{ur cette reqüête, dans
laquelle il-n'étoit pas' queftion de jonél:ion. Qu~nd' m'ênle la,
jonétion aurait é'té dert:Iàndée, lé Lieucénant n'aurait' pas pu
l'ordonner, parce que la' jonél:ion d'un, procès criminel'avric;;
lln procès civjl,' quand même 'ils' feroient .pendans t'un &
l'autre devant le même Tribunal, eH un monfire dans l'ordre •
,judiciaire.
'
Il ajoutoit que la preuve des faits contenus dans !a Sen....
tence interlocutoire abolitiiToiè direél:erùeot à combattre, à
affoiblir, & mêmé' à ..dér~tJire les charges réfi.lltànt~s 'de
l'information contre les auteurs du vol ;.c1eft-à-dire, que cetce
Sentence en préparant des faits jufl:ificarifs aux accufés contumax, donnait aux lieurs Berluc & 'Petit tout le bénéfice
de la civilifarion, quoiqu'elle ne fût. pas ordonnée, en leur
fourtiiffant le moyen de balancer & d'anéantir pat voie ci:vile & par une limple' enquête les. preuves confignées' dans
une procédure criminelle; il Y a pourra nt une extrême différence de l'une à l'autre. La preuve rHultante d'une ...procédure criminelle efi toujours moins critique & plus affurée;
parce qu'elle efl:. purifiée par le reéolement, & la confron'tation, tandis que la preuve réfultante d'une enquête eH ill'finiment dangereufe, équivoque par elle-même, &" fujett~
à une infinité d'inconvéniens & d'abus.
. .; ..
�S82.
Jou
RNA L
Sur l'injufiice -de la Semence, on diroit que fi l'on confulre les principes relatifs au dépôt volontaire, il elt certaÎn
que le dépofitaire ne peut pas être refponfable des cas fortuits, & fur-tout du vol du dépôt. Il ne pourroit être tenu
qu~ de fon d.ol ou d'une faute grave: dolum Jolum & lmam
culpam' prœflare debet. C'eft la difpofition -de la loi l, cod.
depqfiti. Il n'dt pas refponfable d'u'ne faute légere ni de fa
négligence; parce que, 'comme. dit Juftinien, §. prœterea
3, iQftit. quib. modo re cQntrah. oblig. Securus efl, qui parum
diligenter çujloditam r..em furto amiferit; quia qui negligenti
amica rem cuflodiendam- tradit, non el, fed Juœ facilitati id im.,.
pl/tare debet. La loi 1,_ §. ult.,jJ. depojiti, ne veut pas même
'que le dépofitaire foit tenu d'une faute grave. C'efl auffi ce
.que, décide la loi 2-:3, ,ff. de regulis juris. Ces textes' ne le
rendellt refpo,ElfaRle. q.u~ de fO ll dol, ce qui eft fondé,
comme, l'a rëmarqYé Expilly, P1aidoy,er 1, 1., ,fur ce que Je
llépôt n'ell fait ,que pour 1'[ijt\Jité 911 dépofa.nt, fit tantùrn ad
utilitatenz· dalltis. ous les périls doivent donc retomber fur
1.
lui.
D'apres ces principes, l'on POUfroit foutenir que lorfque le dépofitaire. eJcipe du vol à lui fait, fon afferrion de,vroit ,fuffi.re pa.r :elle-m_êj1le fans .le fecours d'autre preuve.
Le dép6J' voloQtaire a po[Jr titre..& pour bafe la. probité
connue du dépôliu'tire & la confianc:e que le dépofant a eue
en,lui.
• Louet, va. dépr3t, fomient que celui qui n'a pour toute
preuve tle fot} dépôt que la foi de celui à Iqui il l'a donné,
doit f~iv(e cette même foi en l<t reftitution du dépôt. Danti,
preuve par témpi(Js, ,chap. 3, & ,B.odier (ur l'art., 2. du tit;
1.0 de l'Ordonnance de 1667, tiennent le même langage•
. Il dt en effet, dans l'ordre natll~el des chofes que tous
les engagemens roient diffous de la 'même maniere qu'ils
(ont contraélés. C'eH"Jà ,une. des premieres regles du droie
.civil. Or, ppifque ,la fQi du dépofi,tai.re a été le lien de l'en-,
gag~inent qu'il a cOlltraélé aV~Q' le dépofant, cette même
foi doit le gouverner.& le diJfo!ldre. \
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�DU
PALAIS
DE
PitOVIlNCl!.
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• Toubeau dans [es injlitutions confulairés, liv. 2, rit. 4-,
chap. 3, pag. t 2.6, rapporre un jugement de la Rote de
Gênes, qui décida qu'un mandataire à qui on avoit volé
une fomme d'argent n'en répondait point; il n'y avait feulement qu'un témoin qui difoit avoir vu mettre cet argent
dans des ballots, & im autre avoir, \'.Il lorfqu'il fut volé~
La même chofe fut jugée par l'Arrêt que Boniface rapporte,
tom. 2, liv. 4, tir. 15, chap. 1.
On r~pondoit pour les lieurs Berlue & Petit, que l'Ordonnance permet aux parries de fe faire interroger en tout.
érat de caufe fur faits & articles pertinens. fur la matiere
dont efl: quefl:ion. Ici les faits Cont-ils pertinens?
Vi'al prétend avoir été volé 11 force, ouve~te par i'enléve~
n ..ent de [a valife qui a ét'é forcée: ori prétend au contraire
qu'elle n'a éré ouverre qu'avec la clef, & que fi au forrir
du cabaret Vi:;} n'avait plus, la même .quantité d'efpeces
qu'en. y arrivant, c'dt parce q'u'il avait joué avec deux inconnus qui -probablement l'avoient filouté. Oi-, il n'y a pis ~
un des faits 'coarrés dans la requête .qui ne tende direétement ou indireél:ement à l'éclaircÎffement de ce point effentiel.
L Oh fo~tenoit etifuite 'que ViaL n'étoit, pas dépolitaire 'i
mais: J mal)dataire. Le dépolitaire reçoit l'argent. pour le
garder " le mandataire pO'Ur le r<;ndre· ou poùr en faire' la
dèfl:ination qui lui a été indiquée. Cette diflinél:ion du mandat
au dépôt efi non feulement dans la 'nature des chofes, mais
encore da~s la loi. II efi ,dans la nature des chofes, parce
qu'il eG: de la nature du dépôt, ut rft fJUœ. cujlodien'rla tradiwr' ea ipfa bonâ jide reddaiur. 'I1' elt dans la nature du
mandat, ut quis bonâ jide negotium a/uri gratuito gerendum
committat. Vial. a recru l'argeoc pour le reHiruer à Beaucaire, ou pour y acheter des marchandifes qui lui avaient
été indiquées; il efi donc mandataire. On en trouveJa décilion formelle dans la. loi l ,.If. depofitî, §. I l : fi te rogavero ut rem meam perleras ad Titium, ut is' eam. férvet ,
kçum aaione mandati experiri. po.lfùm.
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\. '\
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R-N At'
,
-
De :ce qu'on (n'eXige pas une. preuve complette du vol
fait au dépolitaire ou au mandataire; de ce qu'au. befoin on
s'en référeroir même, ftdvant les circonHances, à fa 'feule
parole, s'enfuit,il que pour l'en croire on doive forcer toute
vraifemblance ,.fermerdes yeux fur l~s menfoi'1ges multipliés
qu'il s'dl: permis, &. que quand il fera évident qu'il aura
jpué I~argent qui lui '\ \ été 'confié', ou qu'ii aura voulu fe
l'approprier, la jufl:ice & les, hommes doivent l'en croire
tilr fan hifl:oire? La loi 1, cod. ,Jepofiti vel contra, dit: fi
pretextu latrocinii. commjfli , .vel alterilfs fortuiti cafus res 'luce
in poteJlate -M.redis "funt; 'liéL 'luas dolo difiit poflidere, non
reJlituuntur; ·tam· depofiti 'luam adoexhihenduin ac7io, fed (;
in rém/vindicatio"competii: Vial fuppofe d'avoir été volé;
d'aprè's cette fuppofition il veut s'approprier le dépôt. La
loi donbe aél:ion pçJur. le répéte'r, &' pour prouver que le
vol n.'efl qu'un prétexte..
., 1
i, .
, L.es Aute.urs difenbque .:depofitar{lis 'lui conjign,atal1! pecu,:
Tllam ufiJepat, furtum:committit. -c Tuldenus fur' le tir. depofiti. )
Qu'en·'excipanr..dù 'vol, le dépofitaire doit le conf!:ater.
ç Rote de Gênes, décif. 177, Bouvot in vO. dépôt, quef!:. 7.)
Que l'on n'en ctoit à la parole du dépolitaire, qu'autant
qu'il y a force ou,; effratlioii" ainfi qtie- le jùgea. l'Arrêt du
Parlemenc de Paris du 14' Septembre 17.1)., ,rapporté par
Denif<lrt in VOl 1'01; mais t.que quand ,il n'y a'pas d'e1fraél:ion,
le commifliônnaire, le rnandataire. ou le dépofitaire en 'répondent. Il ef!: de regle &. de jufliœ que li par dol ou par
mauvaife tfQi Jle dépolirairellailfe périr le dépôt, il doit en
être refpanfable. l' ,,,.'\ " ,
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j , ",'
"Lesdie.urs Berlu€' & Petir"difcutoieht enfuite l'expofition
. de Vial, & obfer\loienLqu"il ·étoit imprudt:ni de lailfer une'
vali(e dans 'laquelle il y a de l'or dans une écurie de cam- .
-pagne, où tout le monde entre' & fort, &. qui peut être
emportée' (ans que..per[onl1é ts'en apperçoive;; -que l'impru-'
dt:nce en ext;rêri~e~; quana (é. propriétaire. va fur-tout manger
une (alade au delà du.' bârimenr ; , & ce qu'on ne concevra
jamais, c'dl: que les deux inconnu_s a)!ant profité- du mo-,
ment
,
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PALAIS
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PROVENCB.
"585
fnent d'abfence de Vial pour aller prendre la valife à l'écurie,
'la rapporter fur la table où ils favoient qu'il devoit revenir,
&. là la fouiller, au hafard d'être découverts par Vial, qui
ne pouvait pas tarder. De vér.icahles voleurs en prenant
la valife euIrent monté à cheval, & tout étoit dit. Comment
efl-il poffible que les voleurs ayant ouvert le cadenas fans
fraB:ion, [e foient bornés à prendre \quelques rouleaux qu'il
y avoit dans le's chemifès, & aient laiIré le ceinturon qui
,étoit rempli d'argent, {$ç quelques écus épars dans la même
valife? Rien de plus repréhenfible que la conduire -de Vial,
foit avant, foit après le prétendu vol. Tous les fàits que
l'on vient de difcuter prouvent une connivence entre Vial
& les voleurs.
'
Par Arrêt du 21 Juillet 1780, au rapport de Mr. le
Confeiller de St. Mar~ la Cour faifant droit à la requête
incidente -de Vial, a caIré le décret portant les réponfes
cathégoriques,. & a déclaré n'y avoir lieu à ordonner les
réponfes; a déclaré le. ~proçès-verbal fait ·en conféquenee
nul & comme non obvenu; a révoqué le. décret de la Cour
qui ordonnait l'exécution provifoire du décret du Lieutenant;
& fans s'arrêter à l'appel in quantùm contra de Berlue &
hoits Petit, faifant droit à l'appel principal de Vial, & fans
s'arrêter à l'exploit de Berlue & .hoirs Petit, a mis Vial hors
de Cour, avec dépens des qualités, tant de premiere inftance, que de celle d'appeI:'Ecrivant Mes. Barlet & .Pafcalis.
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d.nnées 1775 &fuiv.
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La prife jufle ou injujle...du Navil'e '<1onne-tL elle lieu à l~a,handon
du VaijJeau &. aU) puieroen{ des'; Jammes aJfùrées?
"
La deflination du chargement: ejl prouvé, .par le connQijJement
& par la police' d'aJfùrance, [au! la preuve légale de la
fimulation.
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Ar trois différentes polie.es des I2 Janvier, 16 & 30
Mars 1779, le fieur Thomaffini, Négociant à 'Marfeil1e,
correfpondant du fieur Marchio, 'N êgocian.t à Liyourne, Ce
fit alfu~er pour compte du fieur Marchio la fomme de
919°1 liv. fur les facultés' du Senau La Conception, Capi:'
taine Mitrovik Ragufois. Par la p.remieré police le tifqu,e
fut pris de fortie dé Marfeille ju[qu'à Livourn,e ,,& delà à
Salonique, & par les aeux autres de .fortie ,de Livourne
jufqu'à Salonique.
'
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.
Ce vailfeau arriva heureufernent à Liv6urnê, d'où le' .fieur
Marchio l'expédia pour 'Saloniqué [ur la foi des' trois dif'férentes polices d'aJfurance. Quelques jours laprès fan. dé>part de Livourne il fut rencontré· par un corfaire aDgJlois.;
Gui, fans égard pour le pavillon, neutre, s'en e.qJp~ra, le
conduifit à Mahon, y fit décharger les marchandi[es ,l:ompofant la cargaifon, fous prétexte qu'elles appartenoient à
des Fran~àis, & rendit la liberté au navire ragufois. Sur la
nouvelle que le fieur Thomaffini re~ut de l'événerr.ent, il
le no.rifia aux alfureurs par aél:e du 19 Mai 1779, avec
protefiarion de leur faire le délailfernent en temps & lieu, &
à l'échéance des trois mois il réclama le paiement de la
perte. Le 6 Oél:obre il les fit affigner pardevant le Lieutenant
de l'Amirauté de Marfeille, pour les faire condamner au paiement des fommes par chacun d'eux priees en rifque, avec
intérêts & dépens, & provifoirement pour' voir ordonne~
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contrainte', en donnant par lui bonne & fu"lEfante caution, en conformité de l'Ordonnance & ,du paéte du contrat, ce qui lui fut accordé par Sentence du 16 Novembre
fuivanr.
,
l
Les affureurs en appellerent pardevant la Cour, & demanderent la furféarice qui fut contefiée.. Dans le cours
des débats, 00 reçut' la .nouvlllI'è qtle .ll&mirauré de Mahon
avoit déclaré la cargaifon ,de Banné prife; alors les a1fureurs
Ce départirent de la furféance, ofFrirent de' payer comme
contraints & forcés, fauf de conte flet fur le fonds. Ils
payerent...eo effet, &. dans le 'cours du procès ils fe départirent de leur appel. On pourfuivit. dès-lors fur le fonds
pardevant le Lieutenant' de l'Amirauté" & l'on demanda
qu'il fût [urfis au jugement définitif fur ,deux moyen!\; le
premier, fur ce qu'il fallait préalablement Hatller fur l'appel
de la Sentence qui les d.ebolJtoit. de leur, requifition en
exhibition de la correfpondance du fleur Thomafiini avec
le fleur Marchio; & le fecon.cl, :fur oe qu'à tout événeme!1t on devoit leur affiguer un délai compétent .pour, Ce
procurer les aétes & procédures de prifes, faites pardevant
l'Amirauté
de Mahon:
.
,
Le ,fleur )Thomafiini porte.ur ,des polices d'affilrance étant
tombé en faillite, le' fleur Marshio pourfuivit lui-même;
il prodllifit la protédui.:è faite ;pardevant l'Amirauté de Mahon,
les défenfes du corfaire capteur, & celles qu'il avait four- '
nies de fon chef. Les a1fureurs offrirent alors un, expédient, par lequel ils fe fournirent à faire la preuve contraire aux atteHations, ,-'efi - à - dire, que le chargement
n'étoit pas pour compte ;neutre; que le fleur ThomafTini
avoit fait de~ traités particuliers avec divers Négocians qui
voulurent charger fur le vai1feau La Conception; que cela
étoit fl vrai, que le' fleur Thomaffini iJ'avoir fait' aucune
mention de ces .achats dans fes livres, & qu'il s'étoit contenté de les porter au débit du fleur. Marchio dans fon
-compte courant. Mais par Sentence du 4 Avril 1780, 'ils /
furent déboutés de leur demande, & condamnés, au paieEeee2.,
•
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·ment des fommes atrurées ~ avec intéréts, dépens & con-"
trainte par corps. Les affureurs en appellerent pardeVant la
our.
On difoit pour eux, qu'ils avoient atru'ré pour compte
neutre, & n'avoient pas voulll courir les rifques d'un chargement fran'rois.,
j
,
On répondoié pour rIe fleur. Marchio, la. que la prife
jufl:e ou injufl:e donne lieu à l'abandon, & par conCéquent
à l'o,uverture des affurances; 2 0 • que le chargement é,oic
pour compte neutre, '& qu'il éroit jufl:ifié tel non feule·ment par les preuves qu'exige "l'Ordonnance, mais encore
par routes les preuves poffibles.•
Sur le premïèr moyen, il diroit que la prire juGe ou
injuHe efl une fortune de mer qui ne peut être qu'au rirque
des affureurs. Telle eH la difpofirion formelle des articles
26 & 46 de l'Orélonnance ,de la Marine au, titre. des. affurances.
'"
. L'article 26 porte: feront au rifiJue des ajJùreurs toutes
pertes & dommages 'lui arriveront :[ur. mer par tempête, naufrage ........ prife , & généralement par toutes autres fortunes de
Til el'. D'après l'article 46: ne pourra le délaiffiment être fait
qu'eu cas de prife, naufrage:....... ou 'perte elltiere des effets
.
e
~J7urés.-
,
~
De: la difpofition He ces deux articles il en réfulre donc
que route perte & dommage qui arrive fur mer efl:
au rirque des affureurs; 2". que toure fortune de mer efl:
0
.également à leur, rirque; 3 • que la prife, fans difl:inguer
-fi. elle efl: juHe ou injuHe, eH fortune de mer ou dommjlge arrivé [u,r mer; 'enfin que la prife 'emportant la perte
'entiere des dfen affurés, donne également lieu à l'abandon,
. & par conféquent' à l'ouverture des affilrances. e'efl:-là le
fentiment de Valin 'fur l'arr. 26 iu va. prife.
Sur le [econd moyen, il fontenoit que pour la preuve du
chargement, J'Or.donnance s'en réfere au connoiffemenr.
L'art. 2; titre des connoiffemens, porte qu'ils contiendront
.,la qualité, qUilntité & marque des marchandifes, le nom du.
'1
0
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PAt .. \1 S
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t:bargeur & dè celui auquel elles doivent être confiées. Les
Auteurs maritimes l'avoient dit avant l'Ordonnance, tels
que AnCaldus, dire. a, n. 5 l I. Stracca, de a1fecurat. glof.
IO,
n. 50 (;
Jeq.
Quand nn connoiiTement efl: tel que l'exige l'Otdonnance,
il fait"preu,ve, parce qu'en effet le connoiiTemen~ n'a été
imaginé que pour indiquer le -nom du chargeur & le nom
du propriétaire; en Corre qu'en exhibant le connoiiTement,
l'on exhibe la preuve que la loi exige. L'art. 3 du titre des
aJJùrances veut que la police contienne le nom & le domicile
de celui qui [e fait aiTurer, la qualité de propriétaire ou
de commiffionnaire. Quand on exhibe une police d'affurance,
portant que les marchandiCes [ont pour c·ompte. d'un tel,
on exhibe encore la preuve de la loi. En effet, comment
prouver que I.es marchandiCes chargées appartiennent à tel
Négàciant plutôt qu'à rel autre, fi ce n'efl: en exhibant le
connoiifement & la police?
Il eH vrai que l'Ordonnance préruppoCant qu'il peut y
avoir fimulation tant dans le connoiifement que dans la police, ne donne pas une foi ab[olument aveugle à ces deux
pieces, & qu'elle n'exclut pas la preuve contraire. Mais
du-moins eH-il certain que jurqu'à la preuve conrraire, le
connoiiTemenc & la police d'aifurance [ont les preuves de
.la loi. AinfJ quand la fimulation du chargement a été ou n'a
pas été jufl:ifiée aux tribunaux françois, nonobHant les jugemens de confi[cation prononcés par les Amirautés angloires, les Aifureurs ont été ou condamnés ou déchargés.
En I743 des Négocians de Bayonne, les fieurs Arnaud
le majeur & Bernard la Parade, font afIilrer 8000 liv. à
MarCeille [ur les facultés du vaiiTeau le Saint-Bernard. Le
fenau efl: chargé 11 Saint-Sebafl:ieQ porc d'Erpagne ; un corfaire anglois l'enleve dans [a route, & le conduit à.Gibraltar;
la ViGe-Amirauté de cette ville déclare le navire & le chargement de bonne prire, comme le rout appartenant à de.s
.François: demande des affurés en paiement d;) la perte; les
;Affure urs e'xcipent du jugement de l'Amirauté de Gibraltar~
,
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0 V Il: N A L
on leut répond que ce jugement' ne prouve rien; Sentence
de)'Amirauté de Marfeille qui condamne. Arrêt du q Juin
1746, au-rapport de Mr. des Grotes, qui confirme.
En la même année les lieurs Michel, Grou & Sibot, Négociants de Hambourg, firent affilrer à Marfeille 18)000Iiv.
de fortie des HIes Canaries jufqu'au Havre-de-Grace fur les
facultés de la Goulette Notre-Dame d'Olivieirat Cap-Ga rel ,
Portugais. Ce navire ell pris par deux corfaires anglois qui
le conduirent à Mahon le 60él:obre 1743. Sentence de l'Amirauté de. cette place, qui déclare la prire légitime: demande des #urés en condamnation de la perte; ils jullifient le chargé par le connoiifemenr, & la perte par le jugem~nt de confifcation. Arrêt du 22 Juill 1746, au rapport
de Mr. de Coriolis, .qui çonfirmanr la Semence de l'Amirauté de Marreille, condamne les Aifureurs à payer la perre~
En 17)7 les lieurs Remuzat de M.arfeilIe y font affilrer
30000 Iiv. de fortie de Bayonne jufques aux HIes françoifes
de l'Amérique 'fur les facultés du vaiffeau l'Amfierdam, Capitaine Gerben Annés Hollandois, & pour compte des lieurs
Abraham '& Daniel Lundl' Lavarell d'Amfl:erdam; il fut:
fait fur le mênre navire des affurances à Au';Uerdam, à
Cadix, à Hambourg, à Londres même; un corfaire anglais
l'arr:êre dans le cours de fon voyage, & le conduit à Corck
en Irlande; les affurés réclament lé navire & la cargaifon,
. les Etats-Généraux s'en mêlent; jugement de l'Amirauté de
Corck du 21 Décembre 17)7, qui prononce la confifcation.
Les lieurs Remuzat attaquent les A{fureurs; ils leur répon;(lent qu'ils ont entendu affurer un' neutre, & non pas- un
françois : ·on leur replique que la cargaifon était neutre, juftifiée telle par les connoiffemens & par la police d'affurance.,
& qu'ils ne fauroient profirer de l'injuH:ice des Tribunaux
.anglois. Sentence du 19 Juillet 17)8, qui les condamne;
/ -& fur l'appel il intervient Arrêt, au rapport de Mr. de Coriolis, du 20 Juin 17) 9, qui confirma.
Le lie-ur Marchio a prouvé par fa lettre écrite au lieur
:rhomaffini du 14 Avril 1778, que celui-ci n'avoit fait les
•
�'~9t'
achats que ponr fon compte, & qu'à cet effet il lui avolt
fait pa1Ter la fomme importante de 131000 liv. Or, li le
chargement avoit été pour le lieur ThomalIini, le lieur
Marchio lui auroit-il fait pa1Ter des remifes aulIi importantes?
Lui ;Iuroit-il payé les primes? L'auroit-il rembourfé du montant de la cargaifon? L'on a produit la faél:ure & tous les
comptes originaux qui ont été extraits du livre du lieur
Marchio. L'Amirauté de Mahon n'a prononcé la confifcation
qu'après avoir reconnu que les preuves de propriété françoife adminifirées par le corfaire étoient tellemens infuffifantes, qu'il lui fut adjugé un delai de quatre mois pour en
rapporter d'autres; cecce preuve n'ayant pas été adminifirée,
le même Juge qui avoit cru devoir fubordonner la confifcation à l'événement d'un interlocutoire, n'en ordonna pas
moins la confifcation.
Par Arrêt du IS Juin 1781, au rapport de Mr. le Con..;
feiller de ..•... la Sentence fut confirmée, avec dépe.ns. Ecri-:
,vant Mes""uI
nu
PALAU
DI!
Paovl!Nci;
FIN.
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https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/2/88/Janety-V3.pdf
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PDF Text
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JOU RN A L
DU PALAIS
DE P R~O;'~V'E N'C-E,
ou
RECUEIL DES ARRETS
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.
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RE ND US, depuis les derniers Journalifles , par le
Parlement & la Cour des Aides de çette Province.
~A~
ME.
AIX ,
'A
Chez -la Veuve
JAN,ETY.
n'AUGUSTIN ADIBERT,
Imprimeur du ROl;
Rue du College.
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M.
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DCC.
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L X X X J J.
Jl.VEC .APPROBATION ET PERMisSION.
\
l'II
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�.~====~~+===~===========~.
TABLE
DES. SOMMAIRES
. CON T E NUS DAN S CE VOL UME..
R Ê T I. Le Chanoine de l'Eglife des A ccoules perd
[es diflribut"ons & fon cafuel, s'il s'abfente de iaJ7ille
de Marfeille , même pour caufe de maladie, fans prendre
congé du Chapitre. Page
3
ARRÊT II. En matiere cÎv/{e , & lorfqu'il s'agit de l'avéral'ion
d'une piece privée, les Experts fànt feuls Juges de la vérite
ou de la fauffeté de l'écriture, fOuf l'infcription en faux.
Celui qui dénie [on feing, n'efl condamné, depuis l'Edit de
1684, qu'à l'amende de 100 liv. au profit du Roi, & auX"
dommages-intédts de la partie..
Le fils de famille majeur ne peut invoquer te Macédonien au
préjudice- d'un mineur.
.
"
La donation faite à uae Concubine efl confirmée, lorfqu'elle'
9'.
n'eft pas exuffive, eu égard à l'état des perfonnes.
ARR.ÊT III. Les Apothicaires gagnants Maîtrife à l'8&pital
St. Jacques & à celui de ta Miféricorde· de la ville d'A ix "
ne fint tenus. de contribuer. qu'aux' charges de la. Pf>..ar-·
AR
•
ma~~
ARRÊT
22·
IV.. La reve établie fur te vin territorial', comme étaM
objet de confommation, ne peut porter fur le Yin de' liqueur
ou étranger faifant objet de commerce.
27
ARRÊT V. En matière d'infcription de faux, les témoin-s peuvent être ouis en tout état de caufe.
1
Suivant la nature des moyens de faux, le Juge peut les admettre, les rejetter, ou les joindre au fOflds~
�~82
T A BLE
En cas de refus ou de négligence de la partie civile, l'inftruction de la procédure peut être faite au requis de la partie
publique.
40
ARRÊT VI. Teftament attaqué pour caufe de captation.
48
ARRÊT VII. Un teftament folemnel [ans date ne rév,oque point
un teftament antérieur parfait, quoiqu'il fe foit écoulé un
intervalle de dix ans entre l'un & l'autre.
68
ARRÊT VIII. Le fonds dégl/erpi eft réuni au domaine direê1,
franc de toute hypotheque & de toute fervitude.
73
ARRÊT IX. Le pere qui autorift fa fille à faire une donation
à caufe de mort, renonce au droit de retour qu'il avoit [ur
la dot qu'il lui avoit conftituée.
Le fils inftitué héritier contraéluel & uniyerfel ne peut point
attaquer cette renonciation, parce que la dot qui devoit
faire retour ne peut être cpmpri(è dans l'inftitucion.
79
ARRÊT X. L'héritier u[ufruitier doit donner à l'héritier foncier
un état détaillé, & par lui ,affirmé véritable , de l'argent
monnayé, billets & autres titres de créance, faifant partie
de la fucceffioll , de leur valeur, & du nom des débiteurs,
avec déclaration fi les créances exiflent encore, ou fi elles
ont été rembourfées.
Cet état & cette déclaration doivent être fournis provi[oirement '
& fans préjudice du droit ,des parties, lors même que l'u[ufruitier oppofe la tradition à lui faite des billets, & qu'il a
difpofé des fonds relativement aux intentions feeretes du
Défunt.
L'u[ufruitier ne fatisfaifant pas & ne donnant pas caution,
l'héritier foncier peut obtenir des inhibitions & défenfes
contre les créanciers de l'hoirie" de faire am:ims t'embourfe"1nens, {ans qu'il foit légalement averti.
8)
ARRÊT XI. Sur une demande en biffement.
94ARRÊT XII. Sur une queftion de' compétence.
97
ARRÊT XIII. Le Cens roturier ne peut être encadaftré ni foumii 'au paiemellt de la taille.
.
101
ARRÊT XIV. Quand eft-ce qu'un mariage eft cenfé fait in
extremis?
Un enfant conçu eu adultere, mais né dans ,un temps auquel
�~83
[es pere & màe pouvoient devenir époux, efi-il légitimé
par le mariage fubjèquent?
Efi-il poflible, dans l'ordre de la nature, qu'un enfant naiffi
viable 172. jours après fa conception?
1°7
ARRÊT XV. Vn enfant peut demander d'être foufirait aux
mauvais traitemens deJon pere, & d'hre{éparé d'avec.lJ.li,
lorique celui-ci excede les bornes de fa puijJance & de la
correaion.
12.3
ARRÊT XVI. Sur ulle révocation de précaire.
140
ARRÊT XVII: Si les revenus des annates & autres de pareille nature font deflinés aux ornemens & aux réparationS"
de l'Egli~.
Les ponauations font-elles confacrées aux mlmes u{ages? 144
ARRÊT XVIII. L'appel comme d'abus incident doit être joint'
au fonds, lorique la décifion des moyens d'abus peut pré.'
juger la queftiort' fonciere..
162'
ARR ÊT XIX. Sur une plainte en rapt.
169;
ARRÊT XX. Le propriétaire fupérieur d'un moulin peut conftruire un autre engin, & fi fervir des eaux en les remettant'
dans le canal mere.
1 78~
ARRÊT XXI. Le propriétaire eft' tenu des réparations nécef-'
faires, nonobftant la daufe expreflè d'être' difpenfé d'enfaire.
18)'
ARRÊT XXII. Si lé failli qui eft obligé par un cMcordat à '
payer fes dettes dans dix ans à raifan d'un dixieme pat an"
ayant enfuite fait. un' nouvel arrangement avec l'un de feS'
créanciers, 'iJu'il a exécuté'en partie, peut demander' de' re·"
venir à l'exéèurion du concordat..
.
190"
ARRÊT XXIII. En' Provence, à raifan du ttanfport' des
denrées & marchandifes dans les quatte lieues limitrophes'du pays étranger, on n'eft'point' obligé de· prendre. dés ac·'
quiu à caution.,
.
19&:
ARRÊT, XXIV; Le premier aaè pajJ1. entre coh'éritiers à' raiJon'
de la fucceffion, eft le fëulqui falt regardé comme'aa~ de'
pa,rtage, & la tranfaaion pafleé fur ce premier aaè, n'efl·~
point jùjette à' refcifion .pour caufe di léfton.
On.· ne .peUl. obtenir des. fecondes. lemes, de" refcifiôff: p,our ['.:
b E S
SOM MAI RES.
�594
r
TA B L K
. mlme fait & entre mêmes parties, quoiqu'il s'agijJè d'un
nouveau contrat.
2.09
ARRÊT XXV. Le mari, quoiqu'infolvable, peut exiger les detm
de ra femme ,. mariée fous une conftitution générale, fans
. donner caution.
Le fonds dotal peut être aliéné en cas de néceifité ou d'uti.
lité évidente fla ur la femme.
2. l 2.
ARRÊT XXVI. Le vendeur du cabal de fabrique de tuiles &
de briques a une préférence fur tous les effets qui Je trouvent dans la fabrique lors de la faillite du débiteur.
2. 1 7
ARRÊT XXVII. Quand eft-ce que lors d'un contrat d'échange
le Seigneur peut exercer le retrait féodal?
.
2.2.)
ARRÊT XXVIII. Après l'ouverture de la requête civile, l'inftance fur le refcifoire eft fujeue à péremption, s'il ny a
1.
2.3)
diftribution à un CommifJàire.
ARRÊT XXIX. Le Sénatus-Confulte Velleyen eft rigoureufe239
ment obfervé en Provence.
ARRÊT XXX. Le retrait lignager exercé fur la vente de droits
fucceffifs ne peu.t pas porter (ur les meubles.
Un cohéritier ne peut exercer le rachat fur la vente faite par
l' autr~ cohéritier à un étranger, d'une partie des "droits fucceffifs qui ne font point en litige.
2.44
'ARRÊT XXXI. Le décret d'union de deux Cures dans la même
Eglife n'eft point abufif, lorfqu'il y a néceffité ou utilité pour
l'Eglife·
Pour la diflribution du cafuel & des offrandes, il faut con2. 5 l
fuIter l'ufage particulier de chaque Eglife.
ARRÊT XXXII. L'A1Jùreur fupporte la .perte ou dommage
arrivé au Navire fur mer, par tempête, naufrage ou autre
cas fortuit de mer, en gardant' contre lui les formalités
requifes.
264
ARRÊT XXXIII. Le ferment en plaideft déféré arbirrio Judicis contre le tuteur qui n'a point fait inventaire, ou qui
refuJe de repréfenter & de remettrt: les titres & effets du pu2.7'pille.
ARRÊT XXXIV. Les lurés-Prifeurs ne peuvent prétendre les
quatre
�DES
SOM MAI RES.
S8)
çuatre deniers pour livre fur la vente volontaire ou' privée
276
des meubles~ .
ARRÊT XXXV. Le chef-d'œuvre ordonné par les Juges de Police
doit hre examiné CIl leur préfince & celle des Jurés du Corps.
Lorj"que le rapport rejette le chef-d'œuvre, on n'a pas befoin
d'en déclarer recours, on peut demander un ftcond exa- .
281
men. .
ARRÊT XXXVI. Le parent n'eft pas reçu à retraire lorfque
l'aae de vente préftnte un objet que le vendeur a eu fpt. cialement en vue, & que le 'retrait ferait cefler.
286
ARRÊT XXXVII. Les Médecins ne. formant pas Corps, peuvent-ils s'oppofer à ce que quelqu'un exerce la Médecine-,
.
fur-tout ailleurs qu'au lieu de leur domicile?
Une Univerjité peur-elle troubler dans l'exercice de la Médecine celui qui a obtenu [es degrés dans une autre?
Peut-on exiger les certificat! du temps d'étude de celui qui pré289
[ente [es degrés? .
ARRÊT XXXVIII. La naifJàa"e- périt-elle lm prouvé, par témoins,.ft dans quel' cas?
299
ARRÊT XXXIX. Si l'éleaion faite dans un téftamem qui a été
enfuite révoqué par un autreteflament, fans parler de l'électian, efi révoquée de- plein drair.
.
Si l:acceptation du legs empêche de réilamer la' fubflitution:
307
appofée dans un précédent teftament.·
~RRÊT XXXX. Les aliérrations faires par le mineur affifié de
[an curateur doivent ~tre attaquées. dans les dix ans du jour
de la majorité.
.
3l 6
ARRÊT XXXXI. En Frol'ence l'Ordre de Malte efi (ou mis àu
paiement des reves &- impojitions établies par les Commu.
nautés fur les fruits ,. denrées. & marc.handife:s de co-nfom. mation..
.
.
.
3 X2
ARRÊT XXXXII. l.,e créanâerqui'a reçu defon débiteur failli
des lettres de change en· paiement· de ce qui- lui' était dlÎ, ne
peut être [aumis.' qu'à' recomlJl&r ces mImes' lettres de change
s'il les a encore en fon pouvoir, pourvu qu'il n'ait ûen négligé pour s'en procurer te paiement;
. " " ' . . 34-7
ARRÊT. XXXXIII.. Les COTTllTlUnautés eeuvent· 'cfl.an'geil l'çurs-i
EClee:
�~86
TA BLE
Réglemens quand le bien public l'exige.
3P'
ARRftT XXXXIV. Un Courtier entre les mains duquel on a
fait un dép~t en vertu d'un Jugement, venant à faite faillite , ne peut obliger celui qui a dépofé à,Juivre le fort de
{es autres'créanciers.
3~6
ARRÊT XXXXV. Le créancier a une aaion direae contre le
débiteur de fon débiteur qui a accepté la délégation & a
promis de p a y e r . ' ,
364
ARRÊT XXXXVI. L'héritier par inventaire efl obligé, d'appeller dans l'inftance tous les créanciers connus & les légataires.
367
ARRÊT XXXXVII. On peut demander la ,licitation d'un effet
qui eft commun à' plufieurs, lorfqu'il y a impoffibilité ou
incom'modité fuffifàn,te dans le partage, ou dans la poffiffion
en commun.
,
374
ARRÊT XXXXVIII. Dans quel rems le domicile defait efl acquis!.
Dans quel cas l'acquiefcement à une Sentence incompétente
n'eft pas un obftacle à l'appel?
'
38:2.
ARRtT XXXXIX. A défaut de titre, la quotité de la dtme
dOlt,~tre réglée d'après l'ufàge local, & à défaut, d'après
388
l'ufage des lieux circonvoifins.
ARRET L. Un Pdteur à la grojJe fur marchafldifes ne perd
pas fon capital, fi lors du naufrage le Vaiffiau n'eft pas
39q.
chargé de ces mimes marchandifes.
ARRET LI. Dans la vente des biens des pupilles & mineurs,
il faut qu'il y ait néceffité, permiffion du Juge, eftimation ,
affiches & encheres.
Les tuteurs & les curateurs ne peuvent acquérir les biens de
leurs pupilles ou mineurs, m~me par perfonnes interpofées.
399
ARRET LII. Quelles font les caufes qui peUllent donner lieu
d la féparation de corps entre mari & femme?
408'
ARRBT LIlI. Caraaeres d'une banqueroute.frauduleufe·
41J
AIl.RET LIV. Sur le droit de rachat accordé aux Commu417
naqtéi.
.
ARRliT LV. Si la lettre du Roi du 10 Juillet 1778, écrite à
t'Amiral tle France, forme une vraie déclaration de -guerre.,
capable de donner lieu à une augmentation de prime.
•
�DES SOM MAr RES.
~8?
Que valent les termes de déclaration de guerre , hofl:ilités ou
repréfailles mis dans' les polices d'a.Dùrance?
422.
ARRET LVI. Le, Mandataire eft tenu vis-à-vis [on Mandant,.
lorfqu'il agit contre ou outre la loi du mandat.
441
• ARRET LVII. Donation faite en fraude d'une créance, déclarée nulle & de nul effet à l'égard ~u créancier.
445
:t\RRET LVIII. Si les Notaires peuvent prétendre (Ntre élus
aux charges de Greffier de la Communauté exclufivemenr à
tous autres.
Le Greffier de la Communauté doit-il recevo~r les délibérations des Corps & Communautés d'Artifans lorfqu'elles [ont
autorifées par les Juges de' Police?
Dans quel Greffe doit-on dépofer les collocations, les Se~ten.
ces arbitrales, les comptes ~utélaires, & les 'délibérations
prifes par les créanciers?
_
4') 7 ARR ET LIX. Les Juges peuvent interloquer d'offic.e ,fi la ma-,
tiere y eft difpofée. .
. .1'" .
Dans un Jugement qui ordonne un rapport proyifoire. ou, in';'
urlocutoire, àUX frais de . ••• la daufe 'fauf d'en faire eft
[uppléée de drôit lorfqu'elle 'eft omife.
464
ARRET LX. Si celui qui prétend avoir été originairement propriétaire du fol d'un chemin peut en réclamer la propriété en
cas de fupprejJion ou changement dll ~hernilÏ, •. ;
!l-69
ARR ET LXI. Le membre d'lin Çorp~ O!1~C0.(1lmup4uté nC"peut
agir ou répondre valablement au nom de 'la. géneralité., 'S'if
ny efl expreffémenr autorifé·
474,
ARRHT LXII. Si, lorfqu'on veut faire rendr! compte à un
Adtninijlrateur, à un- CommijJionnaire, il faut fe'pourvoir
pardevanr le ,Juge du li§u où .Ja Jfeftio~ a été faite.
.
Si' la maxime ll!fr-or \ fequttu_~ fonrm .!.~i:. n'a 'Pt1.S lieu à l'égard,
des FraTl,çois, 6' s'ils nè [o(lt pas obligés de plaider, hors du
Royaume.
'..
.
- -,.'
1
·Si la reconnoiffance de la JurifdiBion emp~che que L:q,n puiffè
enfuite la dlclin~r.' ,- : ~- \ ~ \ ,\' r ) ' , .
'
• • 478
ARRET _~JUn. ',SW j.un~" opppfiti9,1J J0i'f!l~e.,p.ar.. 'le pere ,au
.mariage de fa fille.
. • 'li '. :'. 491
ARRET LXIV. Le pere ~Jl'fellt 6PJdr19it;.de choifir la Nourrict:
de [on enfant.
�588
,
,.. , ,
7T A BLE',
La belle~mere e(l' unueIubfidiairement' à fournir des alimens à
. fa bell~-fille, Ji feS' facultés le pùmetûnt.
.
497
ARRET LXV. En demandant la cafJation d'une procédure
• oppreifive & évidemmen,t calomnieufe, on peut demander la
, réfe'rv'ede j'e p'ourvoir 'endommages-intérêts.
On. ne p'e,lItïnformer fur' les faits- qui n,f: fint plU comprzs dàn.r
, ·la jJlainre-. :..' ','.. . ,,' .
t
On<'ne peut-formèr urte- pl'difl'tl:' 'q!t~ pa~ Requ!te:.
)03
ARRET .LXVI. Celui qu,i a cautionné pa~ aae public, même
en mar~er,e de cOllimèrce" n'eft' point par-là foum'is à la IuriF
',diélioft'Cdli[u'làire.· .' . .
~2r
ARRE,!, LfCVII., La.. yoie 'de l' informatio[1- ~fl ouverte ent~e.
r.àrens, ld'rfque·!a plaint~ préfente des faits graves.
.,
Le proûs extraorainaire ne 'peut être refufé 'à i' accufé quii le ' .
, dem.ar,zde.
.
.
P9
ÂRRET LXVIII/Les parens dQivent être confuliés fur le mtr~iage dun ,mineur, s'il y a foupçon fùffifa'nt 'd~ fédl{aio,fl ou
- de'èontraftiie•. "
,." ,
•
On ri~ 'peut'fe' pl~intfre iqef 'wme,s' trtju,i~ux', lorfqu'une jufte'
; 'défenft l~s q ,renduJ ne'CCfJ'aireJ• . '\ "
)3 6,
ARRET LXIX. l'4rtifan . ne peut év,o'qtLer' pardevant ta Cour
,en nrlU' dJ privi[ege,cles' Pauvres.
\' '
_'.
.) n
J\RitET LXX.. '8'j,'ùfr-fits de fam~-eut .J'obliger valable/ilene.
, .pâ.url'le~IIm'çrclfti,!}Jijê':r·:'tuiFreiêes en, forrè. ,-'.
'
.
Si les lugei-e.ohfups' p'ëuJient~ dé'c'erner des- décrets f(Jrcés~
Si un léeret forcé efl nul quand- il n'à,pas. été précéâl' de trois'
verbaù~ d~ pU'1 uifition•. 1
.' ,
.
~ ')4
AB<RET <J:,X-?il. Le Fàprieanr p'ar p~ivilege'eJf oliligé cfe contri,bl;e;'a;::,.lIJute.r r'es.·éliafgeJ"!iù'Corps~ -:., . - : '
,s6
A~~F"P !LXXII. 'C'éjt aux r(j'ofp~, '& CommùHautér d' Arts &~
1'~·M'éder''''J;;'ifd{queh~éhéf-â'tëu.vie·(i I~Afpjran1' à la MatÛi.fe.
(!l!elle efl. relativement. à cet ~bjet Pa,utorité du' Juges' de
~', fl-iJJiééJ ~ • 1 ~.. ." l :\< ,j" 1 • ,
. . . • ) 60K~jtET LXXIU.., P'rocédur~prijè' ffir ta: réiniffion d'un Mél\t}m'iJfre. l'itjui<Ï'èil:xfo;~lfait.e. 'ê'iti\J<ertu d'une' Déli.bération:' d'line
'~~i.B
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' .•J,160•
- 'iiammunallté~
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Le Chanoine de l'Eglife des Accoules perd [es diftributions &
- [on cafuel s'il s'ab[ente de la ville de Marfeille, même pour
.caufe demaladie, fans prendre congé du Chapitre.
L E 9 Décembre 1777, Mre. Bouge ,'Fondé de procuration
~e Mre. Prat, Chanoine de l'Eglife Collégiale des Accoules
de la ~ilIe de Marfeille, tint un aCte interpeUatif à l'Adminiil:rateur du Chapitre; il y exp,ofa que Mre. Prat était iîÎ:taqué. depuis long-temps d'une maladi:e de poitrine connue de
tout le monde; que [on C~,irurgien l'avait déterminé d'aller
.changer d'air à Lyon; qu'-il. était parti le 7 Juin muni de
l'exeat de l'Ev.êque de Marfeille ad recuperandam fanitatem ;
qu'arri~é à 1 ~yon il, avoj,t chargé ·Mr~. BC!uge [on confrerli'
d~ -not!fier au Chapitre le motif de [on départ &,de [on (éjou,r 11 Lyon, & l'avait cqnfiitue [on :Procureur fondé pour
reDlrer Lès revenus; qu'il avait. été traité dans le mois de
.
A2.
�4
TOURNkL
.
Juin comme abfent fans caufe; qu'en Juillet on lui avoit payé'
Iout ce qui lui étoit dû, & que du depuis on l'avoit privé
dl,! revenu. de fa prébende & de fes difiributions; Mre. Bouge
interpella l'Adminifirateur de lui faire payer par tout le jour
ce qui pouvoit être dû à Mre. Prat, & lui déclara qu'à défaut il fe pourvoiroit airrfi & pardevant qui de droit. Il joignit à l'atte interpellatif la copie de deux certificats de Chirurgiens &. de l'exeat de l'Evêque de Marfeille.
Le Chapitre ajfemblé délibéra qtie d'après les loix du
Chapitre & la délibération du 9 Décembre 1777, Mre. Prat
ne pouvoit percevoir ni fes diHriburions ni fon c;Jfuei tant
que fon 'ab,fence dureroit•.
Le 3 l Mars' fuivant , Mre. Prat fe pourvoit à la Cour ,.
de·mande aéle de fon oppofition à la délibération du 9 Déli:embre· 1.777'; ajournement contre l'Adminiltrateur' pour la
voir cairer & annuller, & fe voir condamner à lui payer fes.
diHriburions depuis qu'il, db abfent , & tant que fan abfence'
pour caufe de m~ladie durera. Deux Chanoines fe joignent à
Mre. Prat ,& forment" également oppofition à la délibération•.
La caufe portée à l'Audience, Mte. Prat fou tint qu'il s'étoit
abfenté pour caufe· de milladie connue, confultée & attefiée·
par·.des Chirurgiens; que d 1après les premiers pl'incipes &
touS les Jurifcpnfultes cytte caufe étoit c~nonique..&. légitime;
que conféquemment il ne pouvoit être privé de fes difiributions; que {uivant l'article 'i 9 des Statuts de l'Eglife des Accoulès, le Chanoine malade. devoit être regardé comme' préfent, fans être fournis à' demander aucun. congé j'que 'l'-atteftation.âu Médecin fuffifoit j qu'un Arrêt rendu 'en 'l7oS'avoit
décidé que le Chapitre ne pouvoir donner aucun cçingé; que
les d'élibêr'!tions prifes en .1709 j'uffifioient qué" le: Chapitre
avoit' exécuté.. cet Arrêt ,.puifqu"il. avoic-reÎU'oyç au~, VicairesGénéraux. ceux qlJi demandoient.,del'> congés j que Mre.> Prat
jufi.itioit de fon exeat de l'Evêque de Marfeille ; que toutes .les
_èlémarches vis'-à'-vis du. Chapitre rrç devoieo.t êtré regardées
.que comm'e démarches dé' bîenféance:, & non' d'obligation.
Le Chapit~e répondit qu'en. prinèipe le bénéfice <efi dopné
li caure de l'Office j:. q~e' le 13ênéfiçier ,q'!i ne'remplit"pas' fon.
�D
~ PAL AIS D Il PRO V Il NeIl.
~
ohfigation , doi,t être privé du revenu; qu'à la vérité l'équité
vient au fecours du Chanoine malade; mais qu'à cet égard
on doit confulter les ufages particuliers des Chapitres; que
la Sentence d'éreétion de celui des Accoules veut que les
diflributions foiène payées au prorata de l'affiflance, & qu'on
ne puiffe s'abfeneer fans le congé du Chapitre; que le Statut
renferme la même regle. Que d'après cette loi le Chanoine
malade à Marfeille penioit [es difhibutions, mais qu'il les
perd s'il fort de la Ville fans avoir obtenu le "Congé du Chapitre; 'lue Mre. Prat n'ayant demandé aucun congé, devoit
être pointé tout le temps de fon abfence , fans examiner fi
elle' a été néceffaire , parce que l'exiffence de la caufe ne
difpenfe pa~ de la néceffité du congé. Tel eft, ajoutoit le
Chapitre, l'ufage conflant de cette Egli(e, atteflé par une'
foule de délIbérations, confirmé par plufieurs exemples, &
irrévocablement fixé par l'Arrêt folemnel de I708., qui loin
d'avoir établi que l'exeat de l'Evêque pouvoit fuffire, avoit
au contraire ordonné l'exéGution, des Statuts; exécution du
depuis conltante & reconnue par Mre. l'dit lui-même dans
la lettre qu'il avoit écrit au Chap.irre j. exécution feule çapable de prévenir les abus & les dangers qu'occafionneroient
de pareilles ab[ences fans l'aveu du. Chapitre..,
,
Manfieur l'Avocat-.Général de Calliffane, porrant la pal'Ole, crut· qu'il étoit· inutile de. remonter à la formation d_es
Chapitres, & de retracer les loix qui y étoient obfervées,
lorfque renfermés dans un même Cloître, les Chanoines
poffédoient rout en. commun; iL s'arrêta au temps auquel
fuccéda· à' la- vie commune la divifion des. biens.. Il obferva
qu'on alfetta alors aux Dignités & auX' fimples Chanoines
d~s pOFlions- à prendre fl\r la maffe qommunel, qui forme-.
r-ent des titres, & qu'on connoît fous le nom de Prébendes.
Que d'ailleurs la~célébration de.l'Office divin en commun
citant la feule obligation imppfée aux ChaQoines, on Crut
devoir attadier~ à, Haffiftance ~aux OlEc.es', des :récompenfes
journalieres qui devinrent le priK' de la. pr#e9c.e; la loi fut
générale & n'admit aucune exception; il faUoicl.i\ffij! er ou
ne percevoir.. aucune diftribution;;
uy
�6
JroU'RNAL
Le' Chanoine malad~ parut enfuite mériJe.r des égards; on,
crut devoir lui préparer des relfources, lui ménager des foulagemens néceifaires; mais fur cet objet, ainfi que fur plufieurs al1lres, chaque Ch'apitre fe forma des loix particulieres
qui tendirent -à maintenir la difcipline, à prévenir les abus,
& qui mainçenuesl Rar les différents Tribunaux du Royaume,
lierent également & le Corps & les Membres. Tel cfl: le
régie ment de l'Eglife de Paris, qui n'admet aucune excufe de
maladie pour le défaut d'affifiance à Matines.
Il obferva que ces Idix: particulieres doivent d'autant plus
fervir de regle, qu'elles diminuent plus les regrets du Magiil:rat fur l'ancienne difcipline; que ces loix font fouvent différenres dans les différents Chapitres, pa.rce qu'elles font
adaptées aux mœurs, aux temps, ou aux lieux: pour lefquels
elles font faites. Il faut conféquemment confulter pour chaque
Chapitre les loix: qui y font obfervées.
'. Examinant enfuî-te quelles font les loix prppreS au Chapitre
des Accoules, fi leur exécution étoit confiante, & fi Mre.
Prat n'y avoir pas contrevenu, il établit qu'on ne doit pas
confondre les loix de réiidence avec celles d'affifiance; que
l'article 3 S des Statuts de ce Chapitre defend l'abfence de
la ville de Marfeille fous les peines les plus fortes, fi on n'a
obtenu congé du Chapitre, nisi obtineat quilibet liceruiam.
Cette loi ef!: générale, le malade y efi compris, & le congé
doit être demandé, quoique Je Chapitr.e ne foir pas dans le
cas de le refufer.
Il démontra que cette 'loi du Chapitre des Accoulcs cfi
conforme ·au,x: ,Loix: Canoniques & 11. la déciiion des Auteurs.
Le glore, en expliquant le ritre des Décrétales de Clericis
non refiden1ibus, dit expreffément qu'en. vain la cau[é de l'abfenc;, feroit jufie, fi on avoit manqué de demander congé.
Sanleger le décide de même, &. exige, d'<\près les Conciles
& les Canons, ut fit juffa caufa & licentia ; Goard veut. que
le beroin qai néceffite l'abCence du Chanoi'ne foit examiné,
par [es Confreres; celui qui eft au .cas du hefoin ne peut ·le
juger lui-même. 1 ~
,
Cette loi ne [e trouve pas feulement dans le Statut du
�•
v E N' C E. '
7
Chapitre, elle efi formelle dans la Sentence d'éreétion, confratée par des tranfaétions, & une foule de délibérations prifes depuis 1S90 jufques en 1676, renouvellée en 1679, reconnue par la tranfa6l:ion de '168 Î, regardée comme une loi
précife dans une compilation faite en 1696 fur le réglemenc
du Chapitre des Accoules; prou'lée ellcore par le refus fait
en, 17°1 à'l'Evêque de Marfeille, qui. cl.einandoir' un congé
& les dilhibutions pour quelques Chanoi11es .Miffionnaires ,
& à qui le Chapitre répondit avec une fel'meté décente, que
l'on ne pouvait avoir part aux difi:riburions, fans réfider &
fans _affiner aux Offices: refidenres & divinis' inrere1Jètires ';
enfin révêtue de nouvelles forces·ldrs de -l'Arrêt de 1608,
elle a' eu d~ depuis J-lex,écution la plus confiante''
,Il en efi: autrement de la loi d'affifi:ance; on peut être difpenfé d'affifier à l'Office, & n'être point aurorifé à s'abfellter
de la Ville fans congé. Une maladie grave', imprévue, qui
(~fpend cout-à-coup 'les fonétions du Chanoine ~ qui l'arrache
.? [es- travaux l<:>cfqu'il s'y attend le moins, le difpenre fans
d<:>ute de l'aBifl:ancé au Chœur fans le priver de res dilhibutians, même avant que le Chapitre en fait inftruit, parce
que le danger eft réel & preffant. La loi du Chapitre l'autorire mêlf1e à fortir de la maiCon . Capitulaire , & à Ce faire
tran(porter chez fes parens, s'il 'cfi aittii jugé néceffaire par
le Médecin; mais elle r,e lui permet poim, elle défen-d
;nêll,1e indifi:inaement de s'abfenter de la Ville fans congé.
Ainfi Ce trouve ~onoamnée la conduite de Mre. Prat. D'a. près lui-n":ême, il étoit attaqué depuis long-temps d'une
maladie' de poîtrine, & deptlis trois ans fan Chirurgien ·lui
con[eilloit d'aller changer d'air à 'Lyon. Sa maladie he fut
donc point un accident' fullit, mais un état habituel qui ne
l'empêchait point d'affiHer aux Offices; on le vit à Matines
le jour même de fan départ; il poil voit donc en prévenir
le Chapitre. Il a eu tout le temps néceffaire pour prendre
des arrangemens relatifs. à foq voyage; il prend l'exeat de
l'Evêque de Marfeille j il ne demande aucun congé au Chapitre; il viole donc fciemment une loi confi:anre & connue.
En vain il im'oque les cert1'ficats des Chirurgiens, qui
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attellent que fa fanté exigeoit qu'il allât c·hanger d'air. Ces
certificats devoient êtr.e communiqués au Chapitre antérieurement au départ, & en demandant le congé; la communication poltérieure ne peut être d'aucune conGdération, ni
-d'aucune utilité pour lui.
Inutilement encore il appelle à fan fecours la délibération
de 1709 ; elle maintient au contraire la regle & les droits
du Chapitre; le Curé des Accoules, muni de ce-rrificats de
,Médecins, expofe au Chapitre que fes infirmités ne lui per-'
menent pas de continuer fes fO,naions , & demandent qu'il
aille changer d'air.; il offre de me,me quelqu'un à fa place;
le. Chap,içre <jélibere que le Curé s'adreifera aux Grands-Vicaires pour, s'abfenrer jufqu'au mois de Septembre & pour
fe faire remplacer par un Prêtre approuvé. Le Chapitre accorda le congé, il en fixa le terme; mais s'agiifant d'une
Cure, il dut exiger que le Curé lui préfentât lapermiffion
.de l'Evêqué & le Prêtre qui feroit fubil:irué, que le Cha;pitre fe réferva de refufer ou de renvoyer. Enfin .l'Arrêt de
_I708 confirme expreifément l'article ) 9 des Statuts, p,uifque non feulement il refufe à Mre. Marti les diltriburions
qu'il demandoit, & qu'il ne pouvoit .prétendre parce qu'il
qu'il s'érait abfenté, pour caure de maladie, fans congé;
mais il .ordonne en .outre la reltitution de celles qu'on avoit
eu la facilité de payer à d'autres Chano.ines qui fe trouvoient
dans .le même cas que Mre. Marti.
MonGeur l'Avocat-Général conclut à ce que, [ans s'arrê.rer à l'oppofition de Mre. Prat, la délibération du Chapitre
. du neuf Décembre mil fept cent foixante & dix -Jept fût
exécutée fuivant fa forme & teneur.
Arrêt conforme prononcé. par Monfieur.le Pr.emier Préfident, à l'Audience du rolle du 2I Janvier I779, plaidants
Mes. Simeon & Larguier; Mre. Prat fut condamné aux dépens.•
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ARRÊT
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'En matiere civile, &"'lor/tjll'il s'agit, de "l'avûarion ''d'llnè
piea privée, les' 'Experts' [oht feuls Juges 1 de Id vùité
1
ou de la fauffité' de zrécriture; fauf finjèription en 'faux.
Celui qui dénie fon feing n'eft condamné, dep'uis l'E,dit 'de
1684-, qu'à l'amend..e de 100'liv. au profit du Roi, &
aux dommages-intédis de la Partie.
Le fils de familÛ1màjeur -ne peut invoqlW le Macédpnien àll
préjudice d'un ,"!ineur.'·
)-'." Il, . '<,'~' .- 1 [r
,
La donation faite à une Concubine//! y:ohfirmée Ji Ildrfqu'e,W
n'eft pas exceffive, eu egard à l'état des perfonnes.' '
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OUIS ,JEAN CIe; la ville ~e St: Remy, -fit le ~ pl'em'ler
:JiI...tlNoveml:ire' 1766 u'i\.'biUet de 6'000 liv. en' fave-ur' ,de
Lucrece' -Baud de la mêt11e 'Vllle ; le ~illet' ftit -cohçu' va.!.
leur"reçue comp'tam' j il étoit paY,able trois jours aprè - fa
mort de Jean pet:e; fans intérêtS~jufqu'alors. -Lê"7 du
même, mois Lucrece'j Baud fit une déclaration de gr-olfe$:
contre Louis J-ean' pour "remplit"' Je )vœu des OrdÔ:nnaôces'~
&. fe mettre ·à couver{ ides peilles~{j '~et:élemel\r.:I"f ,"- :,
> Le 1,4 Janvier-hG7 -le' perè dë Lm:rece 'Balld foï-rha une
plainte en ;'apt "contre Louis Jëan , 'Be' le 1 14 , Févrie'c fU'lvant
le pe'r~ d-e Louis Jean r demanda ,à r~n rour, de faÎre infor:
mer ,contre Bucrece Baud, tam fur fa ll}aii,vaife con'dulte
que fur' le r~c'élemell't' des de;nrées ;.~ lirlge,~ &,ç'effet,s '''qu'ii
fuppofoi que"fbn fi1s~:t~îavoit '·PQr1:é. ües deux pro<;édurès
fu~el1t inflr,uites Rar un~ )nforrna'tiofi! 'h'lllc'iAclè !; ·&'les Parties furent ~e[p'eaivément èlécrétées "d'ajournçmelft.
Lucrece Baud de'manda d/'fon chef le 2.8 <Février l'éduc~tion de fa fille, qu'e le pere: ,i:l~"Dliuîs Jéan a' die. confiée
., nournce,
" & ' p;arr Sentene,,~
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, lLbuis' Jèall:-& H6è el:e"Baud JigitenrJ1refpeaivemeno.'auprès
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de leurs peres ., & parvinrent à les faire départir de leur!!
plaintes par ,a§ie -Gu,~ .Avril-même ..année.
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Ail préjudice de ce département réciproque, Jean pere
demanda.,.1es 30 Avr!! ~ 6~'M-ai fui'?all~, la permiffion de
continuer d'informer, tant fur la plainte anéantie par le.
département,. que-fur les ~a1.ts de dilap,iùation & <!e dépradation di fon bien ,9u~il impl;ltGit~ à Lucrefe Baud.;.. "
. Jean pere voulant ~ d,an~ \a Juitlf .,.npriel' [on fi!s, :L,ucrece
Baud forma OPPO"fitIOO a ce manage ';, Jean pere' fe pourvut à la 'çouren débout~m'ent " & cependant qu'iI:fut enjoint au Curé de pro~~,defï à ',la c~l~br'!1.tio~ .du ,marüge ,
. onobUant,.Po,ppofirion. J,a, Cour le ...délaifla à :pourfuivre;,
a'infi "qi?il appartenoit'. 'Il fe pourvut, au J~ge de Sç. Remy;
!,uHcce}Baud pécli~ laJuûfdiél,ioo j .~é?mJtée ,.du déclin",:
toire .', elle appella de.la Sentence pardeva'l'!t,. -la ,Cour, &
ce fut dans le cours de cetre inHance , & lé 4 Août i768"
gqe Jean .pere dé,céda: Après fan, décès fon 11ls Teprit l'inf.
tapce, & obfit:t;.dc: la ëour .~e 19, Novembre .un décret
9,ui I~i_.pe!~·~ d~ wa1fer outr~, à la c~lélmtiqn de {Op Dl'!...
r~ag~.; po~ob4anF & 1àp'~. Pféjudice J~e 1IoRP~.G.tion.;, .il. fi;
~g01fierce ,décret au èUJe, ~ [e, rtIan~. " _ 1
. Lucfcce· Baud ne- 'p,?uv.anr pilll~ .avoir Jean -pour. époux,
f~ ·P'ilUrvut à la Cour cC;l,mme r pau~PI_' &. I~ fit ·ajour,p~.r
par exploit. du 14 AOÛ~;I79~ ~n av~raqoPJ & ~ec~~f\OÏifance
?U bjll.e.t;, -& pour fe, .voiL fondammF .all .paiement -des
9poO liv. d,u montant de fa prorpefl'e , . fans .préjudice :des
autres fommes à elle dues par Jean )f ..dont· elle proteHa de
, Je paiement
, , & le rembour-fement en tems-& lieu.
Pourfuivre
L'Huiffier J>a,rJa à la p~rfo.g~e ,de Jean, qui n~ ,foproit au~une réponflE ; l'avératiSJq du biU~t fut, 'Ordonn§e Bill. Arrêt
r.·'
1
de défaut ftu .2.4.0a'Obre fuivant.
Jean ~t une procuration I~ 2) -No:v.enrbre méme .année,
portant pouv~)ir de défavoue,r fa. fignature appofçe ,au billet,
d'en requé.cir- rapp-ort .Ae vérification fur pi~ces ,de comfla,
rairon à la. forme de
~g?nnaqce,. &) .d~ i fe ~pourvoir
même par la voie du faux incident.. Il préfç.nça u,nc:, Reg1J~
à 'ce fujet ~e 27 9-u.mê-~ '~;o!s._Jr&roq~jnj unpAsrêt' ~~ a
ir
�DU PALA.l'S,n:EJP'RTOVENCE.
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Dckettibr-e , qu~ lui coneéd31 aae de ce qU'il Hclfl1v.oudlt d'avoir figné le billet; révoqua ,au moyen, de ce I1Al'rêt d'avération , & ordonna qu'ih feroit pourfui,vi ,fur la vérifl,cation, de la fignature à Iii formo;: de, l'Ed,it. Le 27' Jaflvier 1711:, la (l;0ut. commit le Juge de St. Remy pout
~tre procédé' pailde;y'ant ,lui pai Experts, & par compa
Faifon d'écritures à l'avération , tant de' la pro,me1fe uea
contefrée, qùe de la fignarure 'déf~vouée', en t'OUt partie pré!!l'
fente ou duement appellée.
En exécution de ce décret les. Parties, . cO[l,vinrenE:'d'Ex'l
perts , qui par leur rapport du 3 Août .1'7'7.6 ;' déc-larefent
que la ~rome1fe & !e, feing. y ,al>poré ", 'étoien~ do; l'ééc-iwre
& le femg de LOUIS Jean.
.
Louis Jean demanda à la CQUr le 28 Février 1777 d'être
re~u recourant de ce rapport à d'autt~s Exper~s , pour être
par eux procédé à une 'nouvelle véritleation fu t les·· mêmes
pieces de comparaifon qui avoient été adnÎifes. ' &. autres
qui pourroient êt're fournies. La Cour le reçut au recour-s ;
il fut nommé d'autres Experts, qui par leur rapport du 2 I
Juillet 1777, confirmetent le prémier: Le 4 Février 1778
Jean préfenra une nouvelle Requête à la Cour, & demanda
d'êtte .re~u recourano ,à fa jufiice" tOmme Arbitre de ,droit
de la déclaration l des Experrsl'tlUt avoien't procédé aux deux
rapports; . porrill).t ladite ~ d!Sclâration que nonobfiallt la contrefaaion par eux reconnue dans: l'é~rlnure du billet, il éwit
néanmoins écrit &' figné par' I!.ouis Jean, & que faifant
droit au recours en droit "')a') d'édaration I)feroit, ann,ullée.;
& au-moyen de ce; il'fevoit définitivemettt.relaxe d'infiance
•
fut la 'demande de Lucrece ·Bilud."
- }Lucrecé IBaud oppota a-Ioys à Louis Jéan' qu'il ne pouvoit pàS cu'muler le recours fimple & le recours en droit.
Louis Jean fe fit .çonc~der aB:e de . ce qu'il renon~oit au
rèèou·rs) !Impie. ,er;ét aae futJ1 accepté pal' 'LU'crece Baud,
~ui <Ientanda ,':,parJ unéJnollv~lle 'Requêtè ,'que Jean, en
peine--dé la dénégation" de .(ran ·feing, fût condamné au
J'~iementAu gouble\ de la fommè '-poctée par· fon obliga~
cio.a.· ~~..
J • ... p . . ,,;.)..
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Ué'Jt"N ~ L.1 1.
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Jean,fe :îrtéfiâ"ri.Opdlnfoo réc,ours ~Il droit ,. fondé fur fori
afferrign de n'avoir ..pus !igné ,le, billet" impétra le I2. du
même mois'I des' le.rtres-royaux de~fef<;Î!ion pour. le f~ire
.r~fcin~er ~ fous .prétex!eJ que.!e premie.x Nove;nàre o 'q64:,
flR99u~ de fa. date, jl étolt fils '-d.e~ famille ,.1 qlle, le ,Senarus-Confulte' Macédonien le re1ev.oio de;;..Ilobligàtiol) pour
faMe de prê.r , '& que' d'ailleurs cettepromeffe· ~ér-oit une,
Llonation. ~égui{ée , faite' turp.i perflmœ.. ! . '
,.
Pour foutenir fon recours en drojt', Louis J,l:an difoit qU'DA
j;<Jnnoît· en,IErov.ence :deux, différ<:ùtes, elpeces ide recours;
le re.c;@r); lj.niple.& 'Ie reCOllJ,J,en dmit. , " 1 '
.,1"
~. ;P,ar J~ premi.er, ~on porte .le rapport 'à.des nouveaux Experts, pour leur faire corriger' I~s, omiffions" les' erreurs
enJait que les.prémiers 'Experts :orlt faites. Par le fecond,
!Jl} v,<\ au Juge, on,lui"défere des erxeurs en droit, des
J ugeqwns~inconcJuans,i" erronés.,·Op tui! demande. ·de réforP1er .de.) opér..ations que le.5, Experts ont fai,es , & qui n'étoient. pas de kur!.gi.ftief~, .comme dit Mourgues, p. 163'
" Si, un fait en mal, p:ofé , On va ~ de no(l)veaux Experts.
" Si ce fait a • donné lieu à.l de faux raifonnemens, à' des
,., inconféquences, OU ,:va ilul'Juge. L~s, Juges, dit Je mê'me
." A.uteur, s'ils t.rOllv!;.!}t que les; QiffituJtés '~nt dû; êtFe, par
" eux. jugéJ;;s ou réglcie~, re.çqiv ot le ~ r,llç,Q,u.rs &. Y font
" droit ,; trQ1,lVill1'tl aUjjcontrair.e!, (jIJe ,ltjs,r El\Pli r-ts n'~nt: poiQt
" excédé Leur p.ou\j<1!it " Qi rie,n d~c1'aré! par leur: rapport
" q.lJÎ ne fi:Je 4e .Ieur, COl);n9i®pc~t;:'jil déboutent le.s reWll-:
". rans du recour~',à leux 'Î.!)tq,IljeF~i'; "~1
1
J' _ "J
PourAYol. & .1t, quell~s' tin~~i:fh:~fiHl,'1is t~~pert, ajou;toit
Louis Jean t EH-ce pour. jlJg~r ~?jJZH'ce poùr,tirér .les' in':.:
duétions d-es fa,~t?? EH.ce lJU_çoJ~tr:aire f~ule.rnen~ p~ur .:dé,cric,e, P.9ur décl,ar~t ce qu'iL voir Lpgit-:il (~.berl1~r.,?,dir.e;
le.s lettre~ (fun: ter corps- g.'ür~tu-r§ JOJl.t, faite.s de felle .ou _d~
telle maniere,;? IPetlt·il .çencJure, qe te.tt~/vr~qJ,ierë; op;fe~~a'T
tion , &_ ül.rJde~ çOl1jeé}~rlts!~ qR~ c'ell:J u_Q(rel. ou rlln fÇ,l qJ.!i
a. écr,it,Ja pieee ? Cerre ql,lef!i6,n ,Jui;val)t Iu.i') ng; pJ:ut,fairll
la ma[i~re\d'un douce rai{~n!)able. :Jb.
. ' ,; f1.
Les ExperTs font les' Juges de la llueHion de fait lor[qu'it
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PAL Ji. l' S
D E
PRO VEN C E.
13
s'agit de la vérification d'une chofe qui ne peut être éclaircie
que par la pratique journaliere de l'Art qu'il.s exercent; ils
font preuve de l'état d'une chofe de la même maniere que les
tçm'oins font preuve de la vériré d'une atlion pa1fée.
Quel éroit le fait que les Experts devoient vérifier dans
.leur r\lpport l ~'é,tat de l'.écriture des pieces. Ils devoient
dire: il y a dans les pieces comparées telle re1femblance,
telle diftërence. Les liai[ons des unes font faites de telle
fa~Qn, & celles des autres de telle maniere différente. Les
unes [ont coulantes, aifées ; les autres forcées, faites 'lentement & avec .affetlation. Voilà l'opération des Experts.
Mais il faut lai1fer au Juge la queHion de lavoir fi de
telle différence ou de telle conformité on peut conclure, on
peut juger que c'efl: un tel qui a figné& écrit k billet. Ce
n'efl: plus un fait; ce n'efl: plus une opération expérimentale,
c'efl: un J:ugenient qu'il y a à porter; ce [ont des raifonnemens qu'il ya à faire; & dès-lors le Juge feul eH perfonne
capable de décider. Le Juge ne commet à l'Expert que ce
qu'il ne peut pas faire lui-même. Il faut un ufage habituel
pour découvrir les difterences fouvent fi difficiles à failir dans
les écritures: mais ces différences une fois fixées & décrites,
les conféquences que l'on peut en tirer [ont ,l'office du Juge,
lui feul petit s'en occuper. C'eH ainli que s'explique Bornier,
pag. 74, "Les Experts, dit-il, regardent les écritures &
'" jugent encr'eux, felon leur Art, fi le feing eft [embbble &
" fait des mêmes lettres, traits & caratleres defquels [ont
" compo[és les [eings produits pour faire comparaifon des
." 'autres ; & s'il réful.te de la relation que ce foient les
." 'feings de celui qui les av.oit déniés, il doit être con" damné. "
Dancy dans fon Traité de la preuve par témoim, p. 649,
,dit la même chofe: " Il Y a une grande différence entre .dé•
." c1arer q1)',une telle écriture re1femble à telle autre, ou qu'die
" en differe ,. ou déclarer que telle écriture efl: l'ouvrage d'un
" tel. Dans une déclaration l'Ex.pert dit ce qu'il voit ;, dans
" J:autre. '- il déclare ce qu'il ne fait que croire par. conjcc-
�14
JOUR.NAL
-r
.. ture; dans l'une il fait l'Expert, & dans l'autre il fai~ le
" Juge. "
Louis Jean foutenoit devoir être admis à fon recours -en
droit, non feulement parce que les Experts avoient fait ~e
qu'ils ne devoient pas faire, mais encore parce qu'ils avaient
mal fait ce qu'ils avoient fait. Comment, après avoir re'marqué toutes les dilFére-nces qu'il y avoit entre les pieces
de comparaifon & le billet de Louis Jean, avoient-i1s pu affurer que l'écriture étoit contrefaite! Avoient-ils pu prendre
fur eux-mêmes de déclarer que malgré ces diflerences, le
billet avoit été écrit & ligné par Jean? C'ef!: peut être une
des opérations les plus difficiles, & en même temps les plus
incertaines & le;Plus conjeélu raies , que de vouloir décider à
l'infpeélion & à la comparaifon de deux écritures, fi c'efl: la
même main qui les a faites.
Combien de caures peuvent produire la difparité ou la ref·
femblance de deux écritures! Un FauJTaire ne peut-il pas
imiter une écriture? Le hafard ne peut-il pas faire que deux
perfonnes écrivent de la même maniere ? Scriptura ex qua
fit comftaratio, dit Balde, ad feq. comparat., nO. 34, nihil
aliud eft nifi argumentum à Jimili & verifimili. Or quel degré
de certitude peut-on donner à une opération qui n'a pour
bafe que des vraiièmblances? C'efl: ce qu'obferve encore Danty,
pag. 6)3.
Cochin, tom. 2, pag. 462 , rapporte qu'en travaillant à la
rédaél:ion du titre 8 de l'Ordonnance Criminelle, & après
avoir établi la forme de procéder à la reconnoiJTance des écri·
tures, on avoit ajouté un article conçu en ces termes :ISur la
feule dépoJition des Experts, & fàns autres preuves, adminicules ou préfomptions, ne pourra intervenir aucune èondamnation de peine -afflic7ive ou infamante. -II efl: aifé de jugeJ d'après
cet article combien on f.1ifoit peu de cas de la preuve tirée
de la comparaifon d'écritures. MM. les Commiifaires firent unl:
obfervation qui èonduifit à le retrancher. Cet Auteur finit par
dire que la comparaifon d'écritures n'dt qu'un indice trèsléger & très-peu décifif. Dancy dans [on petit Traité de la
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PAL AIS
D Jl
PRO V II Nell.
15
preuv.e par compar<lifon d'écritures ~ traite à fond .quel degré
de preuve il faut donner à la .preuve réfultante de la comparaifon d'écritures; il 'cite Mornac fur la loi comparat., cod.
de fide injlr:um.
S'il eH vrai que la comparaifon d'écritures ne peut fournir qu.e des indices, même dan~ le cas -d'Lll1e reffemhlance
parfaite, ou prefque parfaite, quelle foi faudra-t-il y ajouter,
quand les Exp.errs f.erorrt forl::és, .comme au cas préfent, de
reconnoître des diJjJa,ités frapp,antes, & qu'ils fe.,rout réduits
à dire que l'écriture eH connefaice ? C'.eH fur-tout,dans ce cas
particulier, J'emarqué par les Auteurs" que les conjeétures des
Experts font' fautives, & qu'il importe de ne leur donner
aucune efpece de force. Et en effet, J'Expert n'dl porté à
c~oire qu'une <écriture eH: contrefaite, que parce qu'il y trouve
des difterences ,effentielles avec celle de la piece de corn paraifon : & qui dl·ce qui peut affurer l'Expert que certe difIèmblance provient plutôt de J'effort de celui qui .écrit pour contrefaire fon écriture, gue de J'impuiffance 011 fe trouve ·le
Fauffaire de J'im.ite.r parfaitement? Qui eH-ce qui peur J',affurer que l'écriture n'eH pas plutôt mal imitée, que forcée.
& déguifée? Louis Jean citait enfuite le rapport fait par les
Experts dans l'affaire de M. de la Chalotais comme un exem-·
pIe bien applicable à fa cau[e, & ce qui fur ob[ervé dans ·une·
caufe célebre jugée au Parlement de Paris en 1763'
Paffill1t enfuite à J'autre branche de fa défenfe , il foutenoit
que, s'il étoit poffible que la Cour ne fît pas droit à fon
recours, [on obligation ne pouvoit manquer d',être anéantie
au bénéfice des lettres de refcifion. Quoique le Macédonien
lui fourniffe un moyen infaillihle, plufieurs autres cau[es ·.en
néceffitoient J'aneantifIèment. D'abord ce prêt ne feroit qu'une
donation déguifée. Lucrce Baud n'ayant rien au monde n'a'
pas pu prêt.er une fomme auffi importante. Cetce donation
ne peut d'aille.ursavoir qu'une caufe honceu[e , elle feroit faire
wrpi perfonœ; ~lle ne peut être ,regardée que corn me le fruit.
du libertinage de Lucrece Baud. Ces libéralités [Ont reprouvées par les Ordonnanas du Royaume, ~ conda.mnées par
les Arrêts rapportés :par D~[pei1fes, tom. 1 , pag. 343; par
�16
Jou RNA L
l '
Cochin, tom. l, pag. 327, & rom. 2 , pag. 402, ,& par Ba.'
niface, rom. 2, part. 2., liv. 4, titre 4, chàp. l , pag. 16,8.
·En vain Lucrece Baud invoqueroit le privilege de fa minorité, le §. 7 de la loi 1 l , ff. de minorib., porte qu'un mineur qui a 'contraél:é avec un fils de famille peut être relevé,
mais die ne dit pas que le fils de famille ne doive pas jouir
de ce même avantage vis-à-vis le mineur lorfqu'il s'agit d'un
prêt. Planè fi minor annis cum filio familiœ contraxerit ; Julian~ls lib. 4 digejlorum fèribit poJJè in integmm rejlitui lit
magis œtatis ratio quam SenatiJ.s-Confulti habeatur.
Lucrece Baud répondait que les Experts des deux rapports
avaient déclaré que le billet du premier Novembre 1766,
dont Jean avoit dénié la fignature, étoit'un billet à lui. Ont-ils
par cette décifion excédé leur pouvoir, jugé & réglé quelque chofe qui ne fût de leur connoiIIance, & dont ils dufiènt renvoyer le Jugement à la Cour? C'ef!: de cette queftian que dépend le mérite du recours en droit de Louis Jean.
Le principe eH: certain, il,eO: établi par Mourgues, pag, 163,
Edit de 16')8; en'forte que:p.oui réfoudre cetre quefbon, il
ne [lut qu'éclaircir à' qui du Juge .ou des Experts il appartient de vérifier & de 'fixer en matiere civilé .l'état ,& la 'vérité d'une écriture conteHée. On doit 'à (::'et 'ég~a' difi.inguer
avec les Ordonnances l'écriture 'dénié~ en marjere-êivile, de
la piece arguée de faux en matiere criminelle; dans là premiere, l'Expert juge du fait, légitim'e 'ou condamne la.piece
déniée que le Juge ef!: obligé de reconnflître & d'avérer, ou
de rejetter du proc~s; au lieu que dans l'autre l'Expert n'eil:
confulté que comme témoin, & ef!: obligé~ de délaiirer au
Juge le droit de fixer le fort ou l'état de la piece aJguée, &
de décider fi elle eH vraie ou fauire•.
Le procès dont s'agit ef!: purement civil. Lucrece Baud
a demandé à la Cour que J eau fût condamné au paiement,
des 6000 liv. , valeur de fa promeife privée; elle en avoit
requis l'avération préa~able pour fixer le tlere de fon aél:ion;
la Cour l'avait ordonnée par un, Arrêt de défaut; Jean a
obtenu la révocation de cet Arrêt; & en a fufpendu l'effet
à la faveur du déni de fa fignature. Les'Ordonnances- civiles,.
notamment
�DU
PAL AIS - DB,
PRO V Il Nell.
17
notamment l'Edit du mois de Décembre 16134, avaient
prefcrit les moyens d'éclaircir cette_contefiation, pour inftruire la Cour ~ le billet, dont la fignature était déniée, était
vrai ou fuppofé, & s'il fallait qu'eUe en rétablît l'avération
fufpendue, ou qu'elle le rejettât du procès. En cas de déni,
l'article 7 du titre l2. de l'Ordonnance de 1667, veut" qu'il
" foit procédé par Experrs à la vérification de la piece fur
" des écritures publiques & authentiq.ues. L'article 8 oru donne que les Parties conviendront à cet effet d'Experts
" & de pieces de comparaifon. C'eH ainfi que la Cour l'a
" ordonné. "
.
Vérifier en général, c'd1: examiner & fixer la vérité d'un
fait on d'une .chofe incerraine. Les Experts , Juges de b
quell:ion de fait, font, {uivanr Botnier, p.reuve de l'état d;une
chofe de .la même maniere que les témoins font preuve dans
l'enquête d'une aél:ion palfée ; ils en fil'ent également la certitude : auffi, ajoute Cet Auteur, les rappores des Experts
fervent de regle pour les J ugemens.
Depuis que l'Edit de 1684 a réformé l'art. 7 du titre l2.
de l'Ordonnance de 1667, ce n'ell: plus que par Experts &
par 'comparaifo!1 d'écritures que la vériré d'une piece conte(lée peut être fi,xée. " Si Je Défendeur, dit l'art. 4 , dénie
" la vérité de la piece , la vérification en fera faite par Ex" perts. Vérifier des écritures' & fignatures , dit Denifart ,
" lete. V., c'el! examiner fi elles font de la main de la .per" Conne à laquelle elles font attribuées.."
Ainfi les Experts font par état, en matie.re civile, les feuls
Vérificateuts, les véritables Juges de la,piec-:e contell:ée, feriprurarum Probatores. lis font, dit Vedel fur Catelan , liv. 9,
chap. l , pag. 263, naturellement compétens pour juger de
la vérité ,ou faulfeté d'une écriture par la comparaifon des
autres. C'eft la main de Jean, d.fent-ils ""lui a formé la Jignature qu:il déaie. Leur affertion ne pOfte que fur une que(tian de fait <jopt Jean' conv)enr avec Borni,er qu'ils font .vé,
ritablernent Juges. Vérification ordonnée, dit Denifart., lete.
P., quatre Experts dirent que t'éroit la Jignature; & plus bas,
n. 7, comparaifon faite par tr:.o.is Experts, ils déciderent que
,
'C
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Jou RNA L
c' étai! 'la m!me écriture. On 'ne pelit donc [e former' 'aucun'
·doute rai[onnable [ur le pouvoir qu'avaient les Experts, &
par l'autorité de l'Edit de 1684, & par Ill< miffion de la
Cour, de déclarer & de juger en fàit, fi la fignature déniée
par Louis Jean était à lui ou à tout autre.
Bien loin- que Bornier ait adopté ce qu'on lui fait dire,
cet Au.reur conclud que celui dont les Experts Ont vérifié la
fignature déniée, doit être condamné, par l'Ordonnance de
Charles IX, de l'an 1563, art. 8, au double de la Comme
,portée par les cédules ou promeifes, propter inficiationem
ex quâ condemnatio.
Poier le [y[lême d'un recours en d.roit [ur ce qu'en matiere civile les Experts chargés de vérifier une piece conte[··
tée, pour déterminer le Juge à la recevoir ou à la rejeterdu procès, ne peuvent que répandre des doutes [ur l'état de
'cette piece, afin de replonger le Juge dan~ une ob[curité
'plus forte encore que celle d'ol!' il a voulu [ortir; c'ef!:, on:
le peut 'dire, conrraf!:er ·Ia rai[on & les principes. Car, fi
les Experts ne peuvent en matiere civile juger enrr'eux felon.
leu.r arr, & faire une relation ·d'où il pUlffe réfulter qu,e le
{eing conref!:é ell de- celui qui l'al d'énié, pourquoi le Juge
les commet-il à vérifier ce fait? Pourquoi les Ordonnances
lui prefcrivent-elles de recourir à leur fcienc.e & à leur connoiifance particuliere en fait d'écritures, fi' ce n'ef!: pour le
,t·ire.r de l'état d'incertitude où la contrariété des part·ies l'a
réduit? N'ef!:.-ce pas auffi pour. éclai.rer le Juge fur tous les.
:faits, qu'il ne peut voi,r de fa. place qu'il charge des Experts
'de lui en donner une connoiffance certaine qui puiife lui[ervir ·de regle fur le j,ugement du fond! Enfin., ·fi le minif!:ere de l'Expert'n!ét01t pas néceifaire pour fixer la· vérité
d'un.e, écriture. en matÎere civile, le Juge " à qui Jean veut en.
attribuer le droit exc1ufif, épargnerait fans doute aux. parties
les longueurs & les frais de divers rapports, qu'iL n'exige des
-Experts que parce qu'il ne peut lui-même ,faire, la vé.rifica-·
'tion qu'il leur commet..
Les autorités de Danty ,'de·Cujas." de Mornac, la Novelle 73:
de. J ufiini~n, attribuent' aux Experts-vérificateurs le droit de-
�PaovENcE.
19
,juger le -,point de fait. L'autorité de CochIn, celle des fameux Avocats qui confulterent dans l'affaire de M. de la
Chalotais ; l'Arrêt que ie Parlement de Paris rendit dans une
.caufe célebre, & le dernier trait de force par lequel Dancy,
dans fa Partie criminelle, pag. 64, entache de faux témoignage
les Experts qui ofent affirmer à vérité la f~lU{feté d'une piece
arguée de faux; toutes ces autorités portent à faux dans cette
caufe, & n'y ont été amenées que pour prouver -ce qu'on ne
'Conre!l:e pas; c'e!l:.à-dire, qu'en matiere criminelle, la vétification par Experrs fur pieces de comparaifon, ne fuffit pas
pour convaincre un accllfé de faux, & qu'il faut que la confcience & la religion du Juge foient en outre éclairées par la
-dépofition des témoins qui ont vu figner l'aéte argué de faux,
ou par des circonfl:ances graves qui puiifent y fuppléer &
'Corroborer la dépofition des Experts.
L'art. 8 de l'Ordonnance de Charles IX en 1 S63, veut
" que celui qui déniera fon billet, fait condamné au double" ment de la fomme qui yefl: énoncée, propter inficiatio" nem; & l'art. 1 l de l'Edit de 1684 prefcrit la condamnation à l'amende de lOG liv. au profit du Roi, & à tous les
dépens, dommages & intérêts de la partie, & ne révoque
point l'ancienne Loi.
1
Sur la feconde queHion, Lucrece Baud -obfervoit que III
Loi 1 l , if. de minor. retrace quelques exceptions au privilege de refl:itlltion que les précédentes loi x accordent aux
mineurS. Elle pore divers cas dans lefquels il doit ceffer,
& où fe trouvant en concours avec d'autres privileges, notamment ceux du Velleyen & du Macédonien, il doit céder
ou l'emporter fur eux. Elle examine, §. 6, s'il doit avoir lieu
de mineur à mineur dont le fort dl: égal, & décide que non,
parce que, dit la Glofe, privilegium contrà privilegium non
.admit/ieur. Cependant fi l'un d'eux a été furpris, féduit ou
léfé par l'autre, fi quis captus fit, elle lui accorde le privilege
dé refl:itution, quia prœfereur ille qui certat de damno vitando;
& fi tous lès deux ont été furpris, pro!ndè Ji ambo capti funt ,
comme fi l'un a donné de l'argent à l'autre, que celui-ci ait
diffipé ou perdu, la condition de ce dernier paroilfant pluG
DU
PALAIS
DlB
C2.
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Jou
RNA L
inrérelfante, la loi lui donne la préférence, eft potior cauflz
rci, à moins, dit la Glofe, qu'i-l apparût qu'il eût employé
l'argent reçu à Fon. utilité, ou' qu'il. en fût devenu plus riche,
cùm fit locupletior. Mais, ajoute-t-elle, §. 7-, fi le mineur a
contraél:é avec le fils de famille majeur, plclIlc fi minor annis cum .filio-familias majore contraxerit, ou ce qui eH égal;
dit la Glofe, fi le mineur a prêté de l'arg'ent au fils de famille m-ajeur, mutuando pecuniam· contrà Macedon., dans ce
cas le mineur fera reHirué en entier, poOè in integrum "eftitui,
parce que le privilege de la illinorité, qui ceIre dans le fils
Je famille majeur, eH' préférable au privilege du Senatus-Confuite Macédonien: lit magis, œta:tis ratio quàm SenatlÎs-ConfuIti ([cilicet Macedoniani, dit la Glofe) habeacur.
A.près une déc;ifion auffi ex.preIre, il feroit indifférent que
la Loi du Senatus-Confulte Macédonien n'eîlt pas établi la
même exception en. faveur du mineur crontn I.e fils de famille majeur. Cepllndant on trouve dans le §. 2. de la Loi
3 de ce titre, la même exception pofée au troifieme cas du
texte, en faveur du minellt qui a pr.éré au fils de famille
majeur:: proindè ut in eo qui [cire non potuit- an filius-fami~
lias Jit, Julil1nuS'.libro duodecÎmo c.effare Senatûs-Confidtum
aït, ut puta in pupillo, vel minore viginti quinque annis;
& la raifon qu'en donne la Clofe, eil la même que celle de
la précédente loi, c'efr-à-d ire, le privilege de la minoriré,
fupérieur à celui du Macédonien: œtatis magis. habetur ·ratio
'luàm poteftatis. Ainfi la refcifion impétrée par Louis-Jean,
qui éroit 'majeur à l'époque de fon obligation, ne feroit pas
fondée vis-à-vis d'un mineur quelconque, cui jus ignorare
permif}ùm eft'; elle J1eil encore moins vis-à-vis de Lucrece
Baud. La fragilité de: fon fexe mérite encore plus de faveur,
fuiRant la Loi Regula. 9, if. de jur. & fna. ignor. Elle eil de
plus non-re.cevable., parce que toute· aél:ion refcifoire prefcrir
par dix ans, & doir êtr.e intentée avant l'accomplilfement
de la, 3 'ime. année:" fuiv<lnt tes Ordonnances du Royaume.
:Il ef!:. vrai qu'on ne peur donner univerfellernent à uge
Concubine ;.'Ies hbéralités qu'onJui fair font nulles lorfqu'el.,.
les font ex.ceffives;) mais, Louis. Jean eil obligé de pr.ouver eu
�D U
PAL A 1< 5
D B.i ;p a 0 v Il Nell.
2. l
fait que fon bilJe-t n'ell: que le m'afque d'une donation; que
Lucrece Baud a été & écoit eO'core fa Concubine le premier
Novembre 1766, & que cette prétendue donation. eft exceffive, refpeél:ivement aux circonft'lnces, à l'état des partié.
& à leurs facultés. Le défaut de l'une de ces preuves enleve
à LOllis. Jean_ toute .relf04rce, & condamne cette prétendue
préfom ption,.à la: rfaveup de laquelle il, veut. inconféquemment
établir une donation déguifée fous la forme d'un billet.
" Une fille, dit Lacombe, Jurifprudence civile, let. C. p. 97,
" débauchée par le donateur ou teftateur, fans que depuis
" ellc ait été fa concub,ine; peut ,recevoir légitimement pour
" fa dot & pour le prix de fon honneur, une fomme mo" dérée & propottionnéé 1( fa qùalité. Il'cite Brodeàu fur
Louet, lett. D, qui le certifie de même" & qui ajoute que
le ravilfeur y, e.ft obligé en confcience, fuivant les loix divines, in pretium amiffœ pudicitiœ: " Lorfque les donations
" de Concubin à Concubin l)e font pas immodérées, dit
Rouffilhe dans fa Jur.i.fprud, des DQn~tions ,. t0m:. l,
130, " elles fone exceptées de la rigueur des Loix." C>n
ne peut appliquer à Lucrece Baud ce que d ifent la Loi 27,
Cod. de inoffic. te(fam. & le §. l, du titre 18 des InHituts,
wrpibus, perfonis fcriptis hœredibus. Son incapacité momentanée a celfé avec la. cohabitation qui la cara8érifoit.
Par Arrêt du, 10 Février. 1779, rendn à l'extraordinaire
au rapport de M. de St. Marc pere, Préfident Mr. de la
Tour, la Cour, en concédant aéle à Jean de ce qu'il renonçait à fan recours fimple , fauf fan recours en droit, & de
ce q.u'il confencoit d'êrre jugé en l'état fur coutes les qualités, fans s'arrêter à fa requête en recpurs de droit, non plus
q.u'à fes lettres de refcifion fur les deux moyens, & requête
d'emploi, fajfanc dr.oit à .l'exploit libellé d'ajournement de
Lucrece Baud, & ayant tel égilrd ql1t: de ràifon à fa requête incidente, reçut les deux rapports" tint la promeifé
puur avérée, cond,amna Jean" au paiement ,des 6000 livres,
avee intérêts depuis la demande, à une amende de 100 liv•.
envers le Roi, & aux dommages & imér.êts de ladite Baud
fixés à. 1001iv. en. p.eine de fan, déni; & fur la demande en
rag.
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-
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J '0
U'1t: N A, L
doublement des 6000 liv. du hillet, mit Jeari hors de Cour,
condamna chaque partie aux dépe'ns 'des qualités la concernant, Ecrivains Mes. Barlet & J. Bernard.
o "La fin de non-recevoir propofée par Lucrece Baud n'étoit
pas fondée, la prefcriptio11 n'avoit pu courir contre Louis
Jean pendant la vie de fon pere, & il avoit , impétré des
Lettres de refcifion dans les dix ans du décès.
•
1
-.'
u
AIR R.Ê T
nI.
Les Apothicaires"'gagnans Mattrife à l'Hdpital St. Jacques &
à celui de la Miféricorde de la ville d'Aix, ne font tenus
de colltribuer qu'aux charges de la Profeffion de Pharmacie.
n
AR des Lettres-Patentes accordées à l'Hôpital St. Jacques de la· ville d'Ail{ au mois de Janvier 1694, & à
celui de la Miféricorde au mois de Mai 1747, la place d'Apothicaire doit y être mife tous les fil{ ans au concours &
~ la difpute. Celui à qui elle en adjugée , fert l'Hôpital
pendant fix années, & après ce terme, il fubit un el{amen
en préfence d'un Commiifaire de la Cour & de Mt. le Procureur-Général. Si le Médecin, le Chirurgien & les Maîtres
Apothicaires choiGs par l'Hôpital le jugent capable, le
CommiŒ1ire de.la Cour & Mr.. le Procureur-Général, en·
fuite du procès-verbal qui dl: dreifé, lui el{pédient des Lettres de Provifion pour el{ercer la Maîtrife , tenir dans cette
Ville 'Boutique ouverte, faire fonél:ion publique de Pharmacie, & jouir de tous les autres privileges, droits & prérogatives dont jouiifent & doivent jouir les autres Maîtres
jurés Apothicaires, nonobLl:ant les Statuts, Ordonnances &
Réglemens à ce contraires.
Ce fut dans cette forme, qu'après avoir fervi pendant fix
ans, l'un à l'Hôpital St. Jacques & l'autre à l'Hôpital la
Miféricorde, les fieurs Brun & Reynaud re~urent leurs
provifioas & la faculté d'exercer la Pharmacie .dans la ville
d'Ail{,
E
�DU
PALA·IS
Dll' P&OVENCIl.
;23
Depuis 1760 & 1762, époques de ~eurs commilIions, il~
-jouirent de la qualité de Maîtres privilég-iés. Les Maît,res
Apothicaires les regardant comme féparés de leur Corps , n~
les comprenoient point dans les cotifations, &, ne les' convoquoient point à leurs Affemblées. Les fleurs Bru'n & Reynaud ne demandoient point. d'être agrégés, & ne voterent
ni comme abfens, 'ni 'comm~ préfens, dans les divêrfe délibérations qui autoriferent les emprunts.
,
Le 17 Août 1776, les Maîtres Apothicairesp,r.éfenterent
requête à la Cour, & demanderenf qu'injon8:ion fût Ja'ite
aux' fleurs Brun1 .& Réynaud de payer letr' qubte fur' lë' pied
de la cotifation générale qui feroi-r faite l'Pari le'(;orps.,r éh
leur préfence ou eux duement appellés, al1trern~nt & 'à- faure
de ce faire, qu'ils y feroient contraints par toutes ·Ies voie's
de droit.
•
•
Cette requête avoit! été ~récédée d'un aél-e' extrajüdiciàire,
par lequel les ·Maîtres oflroient de les 'agréger dans 'leur
Corps à, leur premiere requilition. !' • ';,
.
:JI
Les fleurs Brun & Reynaud préfenterent une requête
contraire; ils Y conclurent à ce qu'en leur concédant aél:e
de ce qu'ils n'avoient jamais refufé de contribuer aux charges de la I)rofeJIion de la Pharmacie feulement" 's'il y en
avoit, fuivant la cotifa'tion qui en feroit faite ,en sieur pr&.
fence, avant dire droit aux requêtés-refpeél-ives des Parties,
les Syndics donneroient l'état des fommes qui étoient payées
r.elativemeo-t à cet objet, tant en principal qu'en intérêts, &
i<ndiqueroient la caufe d'où eUes procédoient, dans 11e -délai
qu'il ·plairoit· à la' Cour d'indiquer, pour ce fait,1 'u faute
de ce faire {être définitivement fiarué [ur cerre conteflatiQn.
r Suivant le~ Maîtres Apothicaires, les gagnans Maînife dans
les Hôpitaux. ne font pas privilégiés; ils~font Me.n-\bres· du
Corps, & doivent con~ribuer aux charges.· T?ut privilege
fornle dé foi une dérogation au 'drort' commun; il ,fam donc
à cet égard un, titre exp~ès & formel.> Ils fOBt d~\lenus égaux
aux autres Apothiéair.es, fans avoir acquis auéu-ll 'droit parfil.
eulier dans l'e.xercicê de....leur profelÉon. Si 'lès! néur-s Brun &
Reynaud n'om pas été agrégés, e'efi leur :faûre ;J"c:éroit 11
�01.4
)"
,J
0
UR N,A L ' ,
,
e\lX à fe-préfeQter &'11 témoigner qu'ils vouloient jouir de touS
les droits que leur donnent leurs titres & l'exercice de leur
profeffion. Les Edits ne les déclarent pas privilégiés j & fi le
,privilege dO,nt ils ,cl(cipent tes exeg:lptoit des charges du
Corps, dans peu d'ann~es'les Apothicaires privilégiés des
:Bôpitaux [ur,p-aiTeroient les Maîtres Apothicaires, & in[enfi,blement la Communauté. [eroit détruite, Les fieurs Brun &
Reynaud [e [oumettent à contribuer aux impoutions royales,
ils..r.econ'noiiTent p~r.là qu'ils [ont mçmbres du Corps, pourquoi refufelJ.t-jls)'çkupayet: les dettes, de C(j même Corps?
JJJs'iPtPfj.çenJ de~ ~mprums faits pour. amqrt,ir & réunir au
!GOtRS"ÀJÏ'y.èrS! fQnds de boutique, au moyen defquels il y a
une; diminution i d'Ouvriers ',les gaigs [ont conféquemment
plu". abplldalls, ',La maniere dont les. fieurs Brun & Reynaud ont gagné leurs MaÎtrifes, ne les affranchit point des
~P1poiitiQqs 1 e)(igéesnpe l'jndufhie ;J le d4faut d'agr,égation
,à 1.;1 çOtJll\lun.a.uté n'jlfl:.qu'un fait très;;indi,fFérent, & l'Arrêt
de la Cour doit leur enjqindre de contribuer à des charges
qui ·[ont eiTentiellement celles de l'indufl:rie & du travail.
Les fieurs Brun & Reynaud répol~doient que tenant la
-facuJté d;exerct:;~ la Phartpaéie. des mains 'de Sa Majeilé,. ils
n.e ~eVbient contribL)j:r~qu'aux; impofitions ql}'Elle a établi [ur
.l'exerc,ice <;le leur Arr., Cette efpece de charge n'eil point
l'ouvrage ni le ·fait du Corps; elle ne dérive ni d'un emprunr,
ni d'une caufe dont les Maîtres aient retiré excluuvemem le
béné,fice. Inutilement les Syndics des Apothicaires imaginent
'PQuyoir -appelle'ïdjan~ ,ce Corps & dans leurs· 4iTemblées ,
ces mêmes ApQch,icaires des Hôpita\lx qu'ils en.om jufqu'i<;i
exç1l1s, &' cc;l,!) pour les. aiTujettir au _ paie!!len,t de leurs
charges., tandis qu'ils les om méconnus dans les cas où il
a été queflion de partager des profits; ce~te prétention dl:
,vrailflent inique.. ,
1 Le Roi ( ajo\.!toienr-ils ) dans, les I.,ettres;..Paten~es"4<:
:1694 veut qudes Aps:>t,hica~res .& Chi~urgiens quj aur9nt éc:é
choifis par le~I1IReél:eurs, de· l'Hôpital St. Jacq!Jes pour ~e
.ferv~ce & foulagelJ1er.t des malades de l'Hôpital, & l!jui,avec
leur apRrqbatioJl:{X dl,je affiduité, auront ferv-i l'Hôpital pendant
,
j
•
�DU PAL AIS DI!
2)
PRO VEN C E.
dant l'efpace de' fix années confécurives, [oient, après l'expiration de ce terme, reçus Maîtres Apothicaires & Chi:..
rurgiens, fans qu'ils foient obligés de faire aucun chef-d'œuvre, ni payer aucuns frais pour leur réception; qu'ils foient
feulement tenus de fubir da·ns l'Hôpital l'examen d'un Médecin, d'un Apothicaire & d'un Chirurgien choiGs par les
Reél:eurs, & en leur préfence, & celle d'un Confeiller en la'.
Cour de Parlement, qui fera à cet effet député, & de M. le
Procureur-Général; qu'ils puiifent en conféquence tenir boutique ouverte, faire fonél:ion publique de Pharmacie & de
Chirurgie, & jouir de tous les privileges, droits & prérogàtives dont jouiifent & doivent jouir les autres Maîtres
jurés Apothicaires & Chirurgiens de la même ville, nonobP
tant tous .Statuts, Ordonnances & Réglemens des Arts de
Pharmacie & de Chirurgie àce contraires, à la charge
néanmoins qu'avant de faire aucune fonél:ion Dll exercice de
Ja Maîtrife ils prennent lettres de proviGon du fieur Com.(Iliifaire & de M. le Proc'ureur-Général, & prêtent en leurs
mains le ferment requis.
.
D'où ils concluoient qu'il Téfûlte des Lettres-Patentes que
les Garçons Apothicaires qui ont fervi les Hôpitaux pendant fix ans, deviennent Maîtres Apothicai·res, non en vertu
d'une réception admife par la Communauté .des Apothicaires,
mais. en vertu. des proviGons de Sa Majefré qui en a confié
le pouvoir à. un Gommiifaire de la Cour, à M. le ProcureurGénéral. Ces Garçons font reçus Maîtres, non dans le Gorps
des Apothicaires, mais dans l'Hôpital, fUl\ l'examen, non
des Maîtres Apothicaires, ainfi qu'on le pra 'que dans les
réceptions ordinaires, mais d'un Médecin, d'un pothicaJre,
d'un 'Chirurgien choifis par les Reél:eurs. Sa Maje é a d~nc
entendu diHinguer les Maîtrifes particulieres, des' Maîtrifes
.
générales accordées par le Corps.
Depuis l'établiifement de ce privi!ege, nul Apothicaire
reçu en l'un des Hôpitaux n'a été fournis au paiement des
quotes & n'a p'Jrticipé au'x bénéfices i ils font confl:.lmment
·regardés comme étrangers au Corps.
1
D.
�:2.6
JOU· ll, N
A L
Suivant les Lettres-Patentes, les Mahrires créées en fa-·
veur des Gar90ns Apothicaires qui ont fervi dans les Hôpi-·
taux ,. fom indépendantes de l'agrégation. C'eft d'après ce
titre que les fieurs Brun & Reynaud. fouciennen.t qu'il eH. ab.
furde de vouloir les foumettre au paiement des charges d'un
Corps dom ils ne font pas membres. Il dt prouvé en fait
qu'ils n'ont jamais été unis avec les Maîtres Apothicaires,
qu'ils en om toujours été féparés; qu'ils n'ont jamais été
convoqués aux Affemblées; qu'ils n'ont jamais voté dans les
délib.!rations , ni alIiné aux cérémonies publiques avec le
Corps; qu'ils n'ont jamais eu. part aux honneurs.
L'Arrêt-du 24 Février 1736, rapporté par Bonnet', & rendu;
en, f~lVeUl' du fieur Maille, Chirurgien,. eft ( difoient-ils )~
une confirmation du' privilege des Chirurgiens & Apothi-·
cair~s fondé fur' les Lettres-Patentes de 169.4, dom il. or..,·
donne l'exécution, &. fur· la poffelIion. Cet Arrêtifte corn..,·
menée par r.endre compte du difpofitif d.es Lettres-Patentes,.
& ill ajoute: Eïz conformité de .ces Lettres-Patentes, lé Bureau'
de l'Hôtel-Dieu donne des lettres de Maîtrife, & l'Apothicaire:
ou le Chirurgien qu.i les a ob'tenues, peut exerc.er fon. Art dans;
la Ville ave.c les mêmes prérogatives que les autres Maîtres•.
Mais, cominue-t-il., sJil ne Je fait· pas agréger au. Corps &.
Communautl, il n'en efL qu'un membre externe, & le privilege de· là Maîirife· efi non feulement borné dans cette Ville,
mais. il s'éteint. encore t·otalement· à fa mort, au lieu que les·
autres Maîtres peuvent exercer leurs proftffions dans tQute la Pro-·
vince; &. s'ils laiffint'des enfans, leurs veuves ont droit' de fairr:'
régir la bo!/tiqUl: par des Garçolls, jufqu'à ce que leurs. enfans.
[oient en état de la [outenir eux-mêmes & de fe faite recevoir.
Maîtres, pour laquelle réception ils ne. paiellt que. la moitié,
des droits ordinaires.
L'Arrêt ( ajoutoiem-ils) décide qu'il. dépend des Apothicaires gagnans Maîtrife de s'exempter des charges du Corps,
& de ne pas c.oncourir aux dépenfes communes, en demeurant
fimples Maîtres de privilege &.' toujours étrangers au-Corps;.
l'agrégation eft fimplement facultative.
Les Re.éteurs des HÔEitaux. St. Jacques & la Miféricorde
�D U
PAL A. 1 S
DE
PRO V E FI C
''1.7
n.
~toient intervenus 'en faveur des fleurs Brun &
Reynaud;
ils propofoient des mêmes moyens de défenfe.
Par Arrêt du 2.6 Février 1. 779 , au rapport de M. de
Fortis, après partage ( M. de ThorameComparriteu-r étaQj: dé
}'a:vis de.}'Arrêt) la Cour en concédant aéte aux fleurs Brun &
Reynaud de ce qu'ils n'avaient jamais refufé de contribuer
,aux charges de la profeffion de la Pharmacie feulement, s'il
y en avait, fuivant la ,cotifation qui en feroit faite en leur
préfence ,ordonna qu'avant dire droit aux requêtes ,princi,pale & d'intervention, les Syndics du Corps des Apothicaires
donneraient dans le mois état des fommes à acquitter en
;principal & intérêts, & indiqueraient ,les caufes d'où elles
procédaient, dépens jufqu'au jour de l'offre des fieurs BruA,
&' Reynaud réfervés; les Syndics furent condamnés à ceux
faits depuis lors.
ARR ET
1 V.
La reve établie [ur le vin territorial comme étant objet de
confommation, ne peLlt porter [ur le vin de liqueur ou
étranger [aifant objet de commerce.
LE
19 Novembre l 77 if , Ad;ien Savouret, Adjudicataire
des Fermes-l:Jn.Îes de la Communauté de Marfeill!;, fit
faire une vifite chez Jacques-Rob'ert Journu, Marchand Liquorifte , pour procéder à la vérification des vins étranger~
qu'il avoit dans [on magafin, exiger l'acquittement des d,raits,
ou vérifier fi les droits avaient' été payés.
Journu s'oppofa à la vérification & au r!;cenfement dejl
vins, .fous le prétexte qu'il ne devait aucun. droit, & qu'il
n'en avoit jamais payé aucun. Vingt-ônq Particuliers" Mar~
chands <:lU Négocians, refufetent également la même vérifi>tation & l'acquittement des droits. Les, Employés de li!
,
D
20
�28
Jou
R: N A L
Ferme conflaterent leur prétendue fraude & leur refus, &
dreiferent à cet efftt vingt-cinq procès-verbaux.
Le Fermier préfenta requête à la Cour des Aides -le 14
Mars 177'Î ; il demanda la confifcatio,n des tonneaux de vin
[1ifis à divers particuliers, & que les contrevenans fulfent
condampés, pour le refus de vifice & la vente frauduleufe,
à soo liv. d'ameode chacun envers le Fermier pour lui tenir
lieu de dommages & intérêts, & à 100 livres d'ameFlde auffi
chacun relativement au Réglernent de la Communauté;, &
de même fuite qu'il fût ordonné que tous Commerçâns en
vins, LiquoriHes & autres qui en reCevraient fait pour
vendre en gros ou en détail, fait qu'ils les deflinaifent pour
l'étranger, feraient tenus d'en faire leur déclaration àu Bureau du Fermier, vingr-quatre hellFes après leur- al:rivée-, pour
en être perçu les drok, conformémen-t au Réglement de kt
Communauté; & dans· le cas de déclaration de tranGt, que
les vins ainfi déclarés ne pourraient être débarqués qu'en préfence des Employés, pour être mis & enuepofés dans un
magaGn à deux clefs, dont l'une reHeroit au pouvoir du Propriétaire, & l'autre entre les mains du Fermier, & être rembarqués en la même préfence fous un acquit à_ caution qui
ferait expédié' fa·ns frais, pour juHifier de leur defcenre au lieu
de leur de!l:ination; que défen-fes fuifent faites· aux Capitaines
de na'{ire de débarquer leurs viils fans les dédarer; & cependant, attendu que les fieurs Maire, Confuls & Communauté
font tenus de le faire jouir du fruit & effet de fon bail,
le Fermier· demanda aél:e de ce qu'il déclar-oit former contr'eux 1?aél:ion en garantie pour le relever. & indemnifer.
Sur cette requête, décret de foit montré à partie; requête
contraire de la· part des MarchaFlds de vin le 13 Avril fuivant ;: la Communauté communiqua de fan chef une requête,
dans laqu~lIe prenant le- fait & caufe des biquorifles ,-ellc
s'efforça d'établir l'injuHice de la prétention· du Fermier.
Dans {es défenfes le Fermier commença par écarter· la
'défaveur que l'on- avoit voulu répandre fur fa caufe•
. - Rien de moins odieux, difoit-il, que nos impofitions mu'nicipales i c'eft la liberté qui les établit, ç'eft la liberté
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PAL AIS - D Il
P R' 0 VEN C Il.
29
qui les paie. il vaudroit üins doute mieux - que l'on n'eût.
pas befoin d'impôt. Mais l'état des fociétés ne permeftant
pas de fupprimer rout impôt, nous devons du !!Joins aimer
& refpeél:er notre conf!:itution 'nationale, qui nous lailfe à
nous-mêmes le foin de fixèr la maniere dont' nous devons
porter les charges communes. C'ef!: pour la premiere fois
que l'on a dit au nom d'une Communauré, que l'établilfement des reves .n'ef!: pas favorable, qu'il ef!: 'même odieux.
Np. voit-on pas que nous devons à cerre forte d'impolition,
li néce!faire dans les grandes Villes, le foulagement d~ rios
fonds & le principal foutien de la chofe publiq'ue ? Ne voiton pas qu'à Marfeille· fur-tout, (Je n'ef!: que par l'établilfement
des reves que la Cité peut fuffire au pOfds de fes charges r&
remplir fes engagemens avec l'Etat? Il faut donc écarter des.
idées que la Communauté défavoue fans doute elle-même,
& raifonner fur le Réglemellt que nous difc,utons, comme-fur
une inl1:itlltion fage que des' vues de bie-n général olie' infpirée ,. '& qui- fe tfouve liée' aVec le 'bonheur & le [aJu!
public.
.
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Savouret fondait enruite fa prétention fur les articles .du
Réglement de la Communauté, qui portent au titre des reves
&. gabelles, 'article premier: que le droit de< r{'ye & gabelle
du vin eji impofé à raifon de cinq florins pat' millerole fur les
Cabaretiers, Chambrijfes , Cafetiers, Gargotiers & autres filr
t-out le vin qu'ils débiterom cher eux.
L'article ') veut que le RégiJJèur fa.Dè lever le droit de reve
fur les Efcandaliers à raifon d'un florin par millerole' de tout
le vin qu'ils vendront ou feront. vendre 4 millerole, éfcandal
ou demi efcandal, Jaus pouvoir le vendre à POt ni' à pinie 'cher
eux ni au de-hors, {Ii teni~ bouchon ou gargote, &,feront tenus
aux m~mes déclarations que les Hi3tes, Gargotius ;' ce m~me
droit fera levé- fur les vins de liqueur.
De~ difpeGtions de ces deux articles, te Fermier c'oncluoie
que les Liquorif!:es devoienG être fournis au paiement des
d,oits impofés fur les vins de liqueur qu'ils débitent chez
eux.
Il. eil bien. vr-ai, difcit-:il, 1°, que dans l'énumération faite
�30.
_
Jou RNA L
danS le premier article, des perfonnes qui doivent étre foumifes à l'impoution portée par le Réglement, telles que
les Hôtes, les Cabaretiers, ChambriHes , Cafetiers & Gargotiets , les Liquorifl:es ne fone pas fpécialeme.ntdénommés ; mais par la claufe générale qui fuit, il efl: évident
que l'on a entendu foumettre au paiement. du droit, non
feulemene ceux qui font nommément. déugnés dans le Réglemene, mais encore tous ceux qui font le débit d.e la
marchandife foumife au droit. Il réfl:llte précifément de l'art.
S que le droit fera également levé fur l.es vins de Equeur ;
cette difpoution exprelTe aJFeél:ant la marchandife elle-même,
{oumetnécelTairement au paiement du droit, tous ceux qui
en font un débit conudé-rable.
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,
2. 0. Le Fermier fe fondoit fur l'ufage confl:amment obfervé. La Communauté dans le tems de fon exploitation
avoit elle-même per~u le droit réclamé par le Fermier. Le
Fermier dans les premieres années de fon exploitation, l'ayoir: également per~u, ainli qu'il con!l:oit par l'état qu'il pro·
duifoit , & par l'extrait des regifl:res dépofés aux archives de
l'Hôtel-de-Ville.
_
Il concluoit de ces faits, que fans une injuil:ice intolérable, les Liquoriftes ne peuvel,t fe refufer au paiement d'ull
droit qu'ils aVQient toujours payé, fans réclamation. La têneur du Réglement qui les fO\lmet implicitement au droit établi dans l'article premier; les difpolitions de l'arr. S qui
impofe exprelTément le droit fur les vins de liqueuc; la
conduite des MarchaBds, tant à l'égard de la Communauté dans le temps de fon exploitation , que yis-à-vis le
Fermier lui~mêll1e j tous ces motifs - réunis donnoient à la
prétention de ce dernier le degré de jufl:ice & de fondement
qui deyoit la faire accueillir.
Les Liquorifl:es ont voulu préfenter comme une prétention qui tendroit à mett·re des elltraves à la circulation,
-& à alTervir le commer.ce , une. d.emande qui n'eH: dans le,
fond relative qu'aux. vins qui feconfomment' dans l'intérieur de la Ville. II faut diHinguer le commerce de luxe,
&. le commerce .d'économie, Le:: premie.r importe la denrée
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3~
PAL AIS - DE;'P-R 0 VEN C :Il.
é'trangere pour la confommation de la Ville, l'autre va
chercher les denrées & -les marchandifes pour les porter
ailleurs. Or, quiconque importe pour la confommation de
la Ville, pour vendre en gros &en détail ',au confommateur , dl ce1ui~là même , quel qu'il foit , dom le trafic dl:
l'objet de la reve.'
.
Le Fermier ne diHingue pas deux fort.es de vin : les vins
de luxe & le vin ordinaire ; l'indemité ,du droit porté par
ces mots: le même droit fera levé fitr vins" de liqueur, eft
le fondement de fa prétention. Or, quel eH ~e droit? N'eHce pas, quam au' in ordinaire, une impofnion qui porte fur
le vin vendu en, gros ou en détail pour la confommatio.n?
Donc, quiconque vend.. du vin de liqueur dt; la même maniere , doit être fournis à l'impofition. Les LiquoriHes font
Ge trafic; certains Négocians le font auffi , ils font conféquemmellt fous le joug de la même loi..
. C'eH en vain que les LiquoriHes réclament la' préérili'nence de leur état. Ils ne veulent pas être confondus' avec
les Hôtes, Gargotiers, &c. Perfonne ne leur difpute la
fupériorité de leur condition; mais ce n'eH pas ici la perf'Onne qui eH impofée , c'efl: la marcbandife vendue en gros
ou en détail pour la confom mation. Les reves font réelles
en Provence : imponitur perfonis pro rebus. On 'impofe l'état,
& on ne, foumet la perfonne qu'à raifon de rétat.
On a voulu par des conféquences exagérées , perfuader
qu'en, accueillant les précautions que le Fermier follicite pom
la fûreté de la perception, on aiferviroit tout le commerce
à fon infpeélion, on gêneroit la .circulation en vexant le'
Commerça!H. Ces craimes font pouifées trop loin; le Fermier, dont l'intérêt feul doit diriger les démarches dans la
perception du droit, ne s'attachera qu'à, ces Négocians, qui
par le genre de, leurs opérations. feront fournis à l'impofition.
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Le fyfiême de hr C6mmunauté ne porte fuI' rien de folide ; le prétexte de la liberté du, commerce, I;Edit du port
franc, tous les raifonnernens fur la' différence de la confummation intérieure. de luxe, & .de la confommation el(~
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�32.
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térieure ,de commerce , ne font que détourner la qUeRion~
Le vrai point eH: de [avoir fi les LiquoriH:es ou autres qui
font à Mar[eille , en gros ou en détail, le débit du vin de
liqueur pour la confommation de la Ville, doivent payer
un droit qui dl: établi imperfonnellement & indéfiniment
moins fur la per[onne que, fur le genre de trafic.
'C'eR par; Ilné pétition de principe que' l'on veut perfuader
qu'il n'y a que l'Hôte, le Gargotier, le Chambrill:e, &c. qui
foientaffervis limitativement, tandis que le Réglement impofe
furie' débit en gros comme fur le débit en détaiL; tandis qu'il,
emploit le mot.& autres.pour faire fentir 'qu'e quiconque
f.ait de déb:it dl: impofé; ,tandis qu'enfin l'impofition érant'
fur le vin de liqueur, Ie Liquorifle , & gén.éralement tous
ceux qui débitent en gros ou en détail pour la confommation , font néceffairement ceux qui doivent être plus particuliérement taxés à.. cet égard. 1
..Le FernlÎer a lé droicdeJevèr l'imp.olltion ,; tallt. fur le
vin de liqueur que fur les :autres vins; le droit .lui eR acquis dès le moment qu'il fe confomme dans "la. Ville en
gros ou en détail; le réduire à ne percevoir le dtoit. que
fur je vin qui Ce .confomme chez les Hôtes, &c. c'eR renouveller une équivoque àéja détruite.
"L'article, premier du Rég\eméntdifpofe, tant pour c'euX:
qui débitent le vin au-dehors que pour ceux qui le débitent
çhez. eux , tels' que' les Hôtes, les Gargotiers, &c. ; & l'art.
~ porte fur ceux qui débitent également du vin, mais qui
ne doit p~s .être confommé chez celui qui le vend. Le droit
n'dl donc pas limité à 'la, confommation qui fe fait au cabaret, il porte également fur deux claffes de Marchands.
Si les Liquorifles fe trouvent dans l'une de ces dalfes , ils
font néceffairement fournis à 1'impofitioù. Or, quiconque
doiç la reve des autres vins , doi~ celle des vins de liqueur. Le Liquorifle qui vendroit du vin ordinaire qui ne'
fèroit pas' de ,fon cru , devroit la reve; La Comn1unaùté
foutient que non', fur le fondement que les Hôtes feuls la
doivent: pour le .vin qui fe con[omme chéz eux; n.éanmoins
les E[çandaliers chez lefquels le vin ne fe confomme pas,
font
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PAL AIS
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PRO V Il NeIl.
33
font fournis à l'impofition; donc quiconque agit comme
Efcandalier eH fournis à la loi que fubitce dernier.
11 n'dl pas à craindre que le Fermie. perc;oive un double
droit; quand le Liquorifte vend au Cafetier, Gargotier ,
&c. il vend en gros, il paie un droit différent , c'e!t celui
d'un Borin par millerole porté par l'art. J' Lorfquele Gargotier revend en détail la marchandife dont il s'eH pourvu
chez le Liquoriil:e, il paie un autre droit, .c'eft celui de
cinq florins par millerole, porté par l'art. premier. Les difpO,litions du Règlement font les regles de conduite du FerRlJer.
C'eil: en vain qu'on veut ~xempter de la reve la confommation locale, fous le prétexte qu\l faut refp.eé1:er le commerce étranger. Cette .reve exiil:e-t-elle .ou non fur le vin
de liqueur, lorfqu'il eft vendu pou.r la confommation de la
Ville, quoiqu'il ne doive pas être confommé cbez le Vendeur. L'art. ~ après avoir fournis au droit la vente ·en gros
du vin ordinaire, & qui conféquemment ne fe confomme
pas chez le Vendeur, ajoute: le mJme droit fera levé fur le
Yin de liqueur.
La raifon tirée de la prétendue liberté. du commerce ,
n'eft d'aucune conlidération , ne fût-ce que parce qu'elle
prouveroit trop. Avec deux ou trois généralités pareilles,
on détruiroit \;Oute regle, tout ordre, toute bonne .p.olice.
Le Fermier .convient que la liberté du commerce doit ·être
entiere. Elle eH garantie par l'Edit du port-franc. Mais .cette
1iberté doit êt.re hien ordont:lée. Il eft un paé1:e néceffaire,
facré & fondamental entre le éomme.rce ,.& la Ville qui
lui ouvre [es murs, & qui lui donne afyle.. Dans ce paé1:e,
fi le commerce a traité pour fa franchife, la Ville a traité
ROUI' fa fûreté , & des obligations réciproques font réfultées
de cette forte d'alliance qui doit opérer le bonheur
commun.
Les Liquor.ifles répondoien·t que la prérention du Fermier
étoit infoutenable. L'Adjudicataire eil: forcé de convenir qu'ils
ne font pas dénommés dans un titre ·où il dt obligé de
Jè renfermer, & auquel il ne lui eH: pas permis de donner
E
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Jou RNA L
la moindre extenfion. Il fou tient que quiconque fe - mêle
de vendre du 9in d~ns Marfeille, fait en gros ou en dé....
tail, efi fufllfamment défigné fous les qualités exprimées
dans le Réglement , d'Hôtes, Cabaretiers, Çhambrif!:es ,
Efcandaliers & autres, & que d'ailleurs la qualification d'Er.
candalier ef!: une défignation générale qui comprend en foi
quiconque fait le commerce du vin en gros, à la millerole,
efcandal ou dem i-efcandal.
Si telle avait été J'intention de la Communauté, elle auroit commencé par dire qu'elle établiifoit .um.e impofition généralement fur tous les vins qui feroient vendus en gros ou
en détail, ea.mettant dans la premiereclafife , &. pour, la plus
forte taxe, les Hôtes , Gargotiers, &c.., & dans la feconde·
les ~fcandaliiers & Commer'ians. Dans ce cas les LiquoriUes
y auraient également figurés. Ce n'étoit pas là l'objet de·
la Communauté, & dès-lors il ne· faut pas être furpris
qu'elle fe foit expliquée d'une. fa'ion toute différente, & qu'al:1
lieu d'imp.ofer indifrinél:emem fur le trafic du vin, elle ait:
borné fon intention au uafic qui s'en feroit taxativement
par certaines voies qui ne préfentoiem que des objets de
luxe, ou qui aftèél:oient bien plus l'Etranger que le Citoyen.
En vain le Fermier veut fe fervir du mot & autres-qui ef!:
à la fuite de l'énumération des perfonnes foumi[es à l'impo-.
fition, pour· en induire la mention tacite des Liquorif!:es,il feroit inconféquent qu'on eût voulu comprendre, fous
cette dénomination vague, les Liquor.if!:es qui font d'une.
profeffion bien plus diftinguée. Ce mot écrit au hafard, fut
d'ailleurs fupprimé dans les trois articles fuhféquens où les.
mêmes profeffions font également énumérées. Enfin, ce qui
prouve encore plus l'.abus que l'on feroit de ce mot, c'eO:.
que ces quatre premiers articles n'affeél:ent que les Arri{ans
qui font c.onfommer le 'vin d1ez eux, & auxquels il ef!: dé.
fendu d'en. vendre- unt: bouteille au dehors, comme le porte.
l'art. 4 , à moins qu'ils ne le fiifent porter avec les vian":
des qu'ils fourniifent aux perfonnes qu'ils nourriifem ; or,
les Liquorifl:es. ne l10urriifent abfolument p.er[onne, & ne.
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PA LA.I S
DB
PRO VEN C 11.
3'i
font confommer aucune forte de vin chez eux; il ne peut
donc y avoit nmilitude nans les obligations, dès qu'il n'y
.a aucune efpece de rapport entre les profeffions., fuffifam'ment dill:inguées par la qualité des perfonnes qui les exer·cent.
L'article'i dénomme encore les Efcandaliers comme fou.mis au paiement du droit; mais il eH inconcevable qu'on ait
voulu comprendre fous cene dénomination tous les Com.merçans en vin, & même les LiquoriHes qui trafiquent
en gros pour 'l'étranger le vin qu'ils tirent de l'étranger.
Cette expreffion n'affe&eroit que ceux qui vendent le vin de
.liqueur territorial, tel que le vin blanc, mu[cat, &.c. L'entrée des .vins de liqueur étrangers , 'étoit prohibée lors de
.la rédaéèion du Réglement. Depuis qu'elle dl: libre, on ne
.,fauroit .étendre fans abus fur .les vins .étrangers une difpolition qui n'a dû frapper que fut le vin rer.ritorial.
On ne pourroit fans gêner le commerce, '& mettre des
·entraves à la ·circulation , foumettre les Liquorill:es à: une
,redevan.ce qui n'e.ll: pas établie pour eux; les vintes des
prépoCés du Fermier nuiraient 'elfentiellem~nt à la fabrication; on ,exerceroit contre .les Liquorill:es une impoÎltion ty·rannique, deO:ru&ive de la liberté que doivent avoi·r
toutes les .opérations des Commeryal1s.
.En. exigeant un .droit de reve fur .le vin débité par les
Liquori!l:es, .le Fermier exigerait immanquablement un dou.ble droit·,.ce qui feroit d'une injufrice ·révoltante. En effet,
.les Gargotiers étant foumis à payer un droit, ils le paie·roient fur un Vill déja fOu mis à l'impofit.ion , .puifqu'i~sne
fe pr.ocurent c.es .denrées qu'en. les preÇlant c.hez les Liquo.riO:es.; l'augmentation de J',impofition opéreroit l'augmentation du prix de la marchandife; on op.primeroit le particulier
.confommateur, 'en vexanr les Marchands qui débitent
graduellement de l'un à .l'autre la marchandifeconfommée.
L'état communiqué qui prouv.eque fcize Liquoriftes
avoient payé le ~roit impofé dans le re-m~ que ·la Communauté avoit la régie de fes Fermes, n'eO:. pas plus favorable au Fermier'; feize Nlembre.s Ont pu ,par ignorance QU
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par foibIeffe payer un droit modique pour fe délivrer des
rrnporcunités des prépofés. Mais que peuvent prouver d~s
aRes ifolés d'u·n petit nombre de Marchand's , qui n'ont
cédé qu'aux infl:ances d'un prépofé avide? Leur exemple nia
pu nuire à la générali,té , If! conduite feule d~ tout le Corps
fe foumettant volontairement au paiement de l'impofition,
pourrait faire quelque impreffion ; c'efi ce que le Fermier
n'a pas prouvé, &- ce· qu'il ne prouvera jamais.
Savouret à force de menaces parvint à corn prend re quarante-trois LiquoriHes ou Marchands de vin dans l'abon, nement , qui ne mon toit qu'à douze livres, tandis que d'aurre parc il fe contentait de verbalifer fans ofe1' pdurftiivre
les réfraétaires. (ReC<'lnnoilfance I-a p1us for(e de l'i"llégitimité
du droit. Preuve évidente que les Liquorifies fe· font toujours maintenus dans la plénitude de leur droit primitif.
Preuve' qui d0it prévaloir fur les acres contraifes que PfClduirait le Fermie,r , paFCe que pour la coofervation d'un
'dtoit quelconque, l'oppofitiofl a wujours pa'ru fuffifante;)
I/ex:écurion' dont le Fermier fe prévaut· efi l'ouvrage de
quelques particuliers, puifque tout le' Corps a rédamé'lorl- qu'on a \'oulu contraindre la généralité'.
La Ccmmunallté appellée en garantie, obfèrvoit que le
Réglemel1t n'a, pas impofé les Liquorifles ni les Négo~ians ea vin. l'u. Elle ne l'a pas voulu. 2 u. Elle ne l'auroit
pas pu.
En premier Heu', elle ne l'a pas voul'u: en regle on n'au, roit à: invoquer que le filence du Réglement, omifJùm habaur pro omifJà,- d'ailleurs, fi telle eût éré fon intention,
n'en auroit-elle, pas fait une· mention expreffe , ' quand elle
rappelloit en détail nombre d'autreS' états· inférieurs, qui
clans le filence' du Réglement n'y feroient pas fournis? Le
. mot & autres ne fe trouve que, dans le premier arride , &
à la fuite de' ceux qui par état vendent du vin' en détail
chez eux. On ne le rNrouve pas dans j?arcicle ~., qui parle
de la vente en gros. Le 'Réglemen·t fous cene. dénomina, cion géhérale , a' compris ceux qui-vendoient du vin chez
e:ux , parc.e qu'on peut ea, vendre dans les Guinguêttes:,
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37'
PAL 1< 1 SuD: E PRO VEN C E.
dans les Billards, & par-tobt où les Citoyens fe raffemblent. Ce mot doit envelopper tous ceux qui vendent du
vin 611 dé.tail, & qui ne font pas énoncés dans l'art. premier; mais 011 né l'a pas mis à la fuite .de l'article S, qui
difpofe contre les Efcandaliers, c'elt-à-dire, 'contre ceux
qui vendent du vin en gros.' Ce qui le prouve encore mieux,
e'ell: l'analyfe du RéglemeQt ;.)1 n'impofe que fur les états
qui occauonnen,t le débit du vin, moins comme objet de
commerce, que comme objet d~ confommation..
Quel dl: en effet le droit .çta.b1i ? C'el1:,une r~ve .. SU! quoi
porre-t-elle'? 'Sur des objets de c.onfort.Jmatio~l lielle parc,e
que le confommateuJ fupp.lée ij.ipfj.. ~,l,a. taille H,!e ne paie pas
.fonJonds. Le dro;it n'a donc. pu . po~ter .que fUl ~es. obje.ts
de confommatiol!1 ; & non fur' de~ objets de commerce.
Dans l'article preQ1Ïer , on 'voit l'énumération des perfonnes qui doiv:eJ}t «endre chez eux, le vin fournis à:;)'impofi,tion; ce n'ell: d.onç, p s [ur ,lq, ç!enrée ,jJ]lais fur ljl p,erfon\le
q,ue .porte lé prp,ie. JI j ' , .
Il' .~
L'article ') porte fur une autre claffe de Jy.Iarchands ap,pellée E[candaliers ; c'éit encore (ur la perfonne . à ,rai(on
de (on état, & non (ur la denré~ que. le d~oit_ ell: impo(é.
.Si par une c\,erniere difp.QJ.iJÎdp " l'~rri'il~ porté q\l~J Iq.l'lêm,e
.droit fera levç (ur lej. vin ,de .lj.ql/Çu~ 'li cerre, pi(P9firion pe
concerne que les Ef6anqaLi~rs, lesjlj6tes., &ç. :Mja dél1om•
,
.més' dans les articles précédens. J . !
La Communauté n'a. jam,ais vO,ulu [e nU,ire; Eimpofition
:portant fur des pbjets de conrn;erc.e nliner9icl~~.Elus chers
:imé~êts:, Çe 1n:.el~ p~s. fav,pr-i[er l,~ 'lpel!ré.e natipnale., Deuf
.delbd-atlQÎlS des Vins etr.ang~rs : .c.on{9mrpanop. ÇH/. ç mme~se,;
s'il efl: con(ommé , il paie le. drqit ,: pqi,fqy'iL) pffl~ par,.;l,e
canal des Hôtes ,:Gargptiers, &c.,; s'il cefte fans'Je C0111.merce, il efl: abfurde de l'y foumet~re.'1 - ,
n _
La Communauté l1'auroit pas pu impo[er.,fu;Jlt; son~qJe.:~lij
.l'Edit du POft· franc ~'y oppufe. paps tou_ves)es C1Jmmunautés on .ne· peut impofe.r, fl1 r )'ippuihie..,.à plH~ fortsraifop.
MarfeilIe, doit-elle. la !e!p<lél:.er~ ~i 1~9n jri9i~t)Ot\J eû~ é~é
d'il?pofer. le. Commer~ant c.orome le.s:.au.;œ~ états, e~e e~t
l'
�'3~.
'JOUR.'NAt.
priS des précautions pour affurer la perception du droit.
En vain le Fermier prétend refpeél:er le commerce, en laiffant la faculté du t-fanlir ; l'entrepôt, les acquits à caution,
les vilites font autant d'ent,raves qui le gênem.
'La conduite de la Communauté dans le temps de fa
régie ne fait pas urie 'regle ; feize Liq:uorif!:es affervis fur le
nombre de' foixante ne conüatent pas le droit; d"ailleurs les
Liquorif!:es fe font conf!:amment refufés à le payer, & l'on
n'a fait aucune pourfuite pour les y fdumettre.
• La prétention du Fermier à l'égard de la Communauté
''eH donc'fouverainement injuf!:e ; on ne lui doit rien parce
'qu'il n~a' rién: à prétendt'e. 'Le Réglemenc ne 'prononce 'pas
fur les prétendus. redévaolés' qu'il voudroit affervir; il. jouit
de ce que la Communauté lui: a arrenté; en paffant le bail,
il connoiffoit la rélif!:ance de la plupart des Commerçans en
vin à fe foumecrré à Pimp0fition; il jouit' fans trouble de
tout ce'.que fon bâil. lui affure; ce qu'iL voudroit prétendre
au delà, ~n: une t;xtenlion condamnable, une 'llfurpatïon qu'il
faut' réprimer:
Quand 'On a établi la reve, c'ef!:-à-dire, une impolitiou au
moyen de laquelle- ·un vin pourroit circuler dans la Ville, il
-exiHoit un priviLege qui p~ohiboit l'entrée des vins étrangers. L'iliipolition n'a donc pu 'pc;lrter [ur ,un, vin ,qui ne
pouvoit être' introduit; ,elle a -dû' nécelfairement frapper [ur
une denrée territoriale. Ç'e p.tivilege étant détruit, la Communauté mit en délibérat·ion fi elle étabLiroit une reve [ur
les vins étrangers; donc il n'en exiHoit point; d'onc ce n'ef!:
pas [ur les vins qui-entrent ou qui forcent que la-reve établie
devoit porter, tÎl'ais [ur ·les éta~s qui revendent le vin relative..
ment à la cO'nfommation.
. '.
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•
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L'article,) ap-rès avoir ilatué Iur le d,roit que doit payer
\'Efcandalier [ur les. vins ordinaires, porte que le même droit
'fera levé thr :lês vins de liqueur; ce mot 'le mgme eil déc.ifif;
il prouve que, ;le" dr~it ef!: le même, de même nature " de
même qualité; le Réglement 'd~clare que [oit'~ue les Efcandaflers' vendent·.ou faffent vendre le vin de tiqueur, ils
paieront le même droit; or le droit étant .le même pour
�DU
PALA.I,S
DEùP'ROVENCE.
39
les vins de liqueur & pour les vins ordinaires, on ne peut
pas plus affervir le commerce pour les vins de liqueur qu'on
ne pourroit l'affervir pour les vins ordinaire" qui ne paient
le droit qu'à raifon de la cOJ;JfommatÎon.
Par Arrêt du 26 Février 1779, rendu au rapport de M.
de Michel t Préfident M. de Matenod, la Cour des Aides,
fans s'arrêter aux requêtes d'Adrien Savol:uet , Adjodicataire
des fermes de la ville de Marfeille, ayant rel égar.d qué
de raifon à cefle des SyndiCl:s des Marchands Liquorifres de
la ville de Ma>rfeme, à celle' de Sian; punatrt le fait &
caure du CapitalÎ tre' Gabllid &ulet & autFeS,. Ir celle de la
Communauté de Marfeille , en concédant aéfe aux neurs
Maire, Echevins, Affeffeur & Communauté de Marfeille de
kur inrerverrrion,. & de ce qu'ils pTel1(i)ienr le fait & caure de
divers Négociams Liquorii\e's , dédara les divers procès-verbaux de fame' & de refas de viG.te nuls" Jnjufies , cbnrraires
au RégIe me ru: de lal Comml!lnamé " attenmmires' 'à' la liberté
du CiOmmerœ f fit main-levée du vin rtrufcat filin ;,corrdamna
Savouret aux dommages-in.rérêts foufferts par Sian & Ro'uftan, fixés à 20 liv.. jYour chacun d'eux, & à: ceux foufferts
par Couture, Henri & R~l1and" fixés à 10 livres auffi p'our
chacun d'eu~; fic défenfes au Fermie'r, de fe rtJêl~. de: l'enlrée
des vins étrangers, foir' de 'liqueur & aut'res., fauf fes dro'irs le
cas échéant, & d'exiger 1'impofirion de la reve du vin fur
les Marchauds LiquoriHes, à peine de 1000 liv. d'amende &
d'en être, informé; condamna Savouret aux dépens envers
toutes les Parties "écrivans Mes. Pafcalis , Portalis &
Goujan•.
�JOURNAL
A R.R Ê T V.
,
En matiere d1infcription de faux, les. témoins peuvent ftre ouis
en tout état de caufe.
Suivant la nature des moyens de faux, le Juge peut les admettre, les rejeter, on les joindre au fonds.
El! cas de refus ou de négligence de la partie civile, l'ill/trllRion de la procéd.ure peut être faite ail requis de la
• partie publique.
,
n
r
Ar aéte du 27 Novembre 177), Me. Barbaroux, Notaire.royal du lieu de Tourv'Os, acquiert d'Antoine
BeJron du même Lieu, une terre & jardin arrofable que ce
dernier avoit acquis d'André Touchon par aél:e du 20 Novembre 1767, J.:an-Jofeph BeJron, frere d'Antoine, fe pourvoit au Juge du Lieu, & exerce le retrait lignager vis-à-vis
Me. Barbaroux. Ce dernier 1ulhfie qu'il avoit acquis en
force du droit de prélation qui lui avoit été cédé, & produit une déclaration privée fous la date du 29 Décembre
'1767 , & contrôlée le même jour, par laquelle Me Sallier,
Procureur fondé de Ml'. le Comte de Valbelle, lui cede ce
droit; déclaration qui avoit été paraphée par le Lieutenant
de Brignoles le 30 Décembre 177 l , dans l'infl:anc-e en déLèm.pararion qu~ .avoit duré plufieurs années, ,entre Me. Barbaroux & Antoine BeJron.
.
Le 17 Avril 1776 le Juge de Tourves déboute BeJron de
fa demande en retrait; appel pardevant le Lieutenant de
Brignoles p.endant l'infl:ance d'appel; & le 30 Seprem br-e
1776 BeJron demande permiffion .de s'infcrire en faux contre la déclaration privée de Me. Sallier, fut le fondement
que ce dernier n'avoit écrit ni ligné ladite déclaration. La
permiffion lui fut accordée par décret du même jour.
Le décret dt lignfié à Me. Barbaroux, il déclare vouloir
fe fervir de la piece.
Il
�DU
-
PALAIS
DI!
PROVENCB.
41
Il fut procédé au'verbal de paraphe ment & de defcription,
~ l'on trouva au bas d'un extrait d'aél:e de vente confenti
·par André
uchon au profit d'Antoine Beffon, en date du
'J.7 Novembre 1767, collationné par Dafl:ros Notaire, &
.à la fuite de la fignature une écriture privée contenant ceffion du droit de prélation , datée d'Aix le 29 Décembre
1767 , lignée Sallier.
Le 30 Oél:ob;e 1776, Sentence du Lieutenant de Bri.
:gnoles qui reçoit le moyen de faux propofé , qui ordonne
.qu'il fera informé, tant par titres que par témoins, & pa·r
-comparaifon d'écritures , & qui nomme' deux Experts pour
procéder aux opérations néceffaires.
Me. Dafl:ros Notaire, qui avoit reçu dans [es tegifires
plu lieurs aél:es , au bas defque1s Me. Sallier avoit appofé fa
ugnature , remet riere le Greffe, à la requifition ·de Beffon,
·deux de fes regifl:res pour être procédé à la comparaifon
..d'écritures; & lors du verbal de paraphe ment &. de def.-eription ·des aél:es , Me. Barba-roux déclare que la fignature
au bas était de la main de Me. Sallier, qu'il con[entoit
qu'ils ferviffent de pieces de comparaifon, & demande que
Me. Sallier foit a1lignê pour être entendu en témoin dalls
l'information ordonnée le 30 Oél:obre.
Le Il. 1 Avril 1777 le Lieutenant ordonne que Me. Sallier
fera affignéen témoin dans la huitaine précifément à la
Requête de Jean-Jofeph Bellon, qu'à défaut, dès maintenant,
-comme pour lors, & fans qu'il foit befoin d'autre Sentence,
.il le fera à la Requête du Procureur du Roi aux frais de
Beffon , & nomme un Expert à la place de l'un des pre·
miers quj avoit déclaré abftenir.
Nouvelle Requête .de Jean-Jofeph Beffon le 3'0 Juin en
.infcription de faux, envers l'extrait de l'aél:e de vente pa.ffé
p.ar André Touchon à Antoine Beffon, au bas duquel [e
tNuvoit la déclaration privée arguée de faux, fur le fondement que ·Me. Dafiros n'avoit point collationné ni figné
l'extrait , & que la relation du contrôle ne fe trouvoit également point écrite ni fignée par Me. Duremple. Me. Barbaroux déclara encore vouloir fe fervir .de cet extrait , &
F
�4'.2. .
Jou
R, N A L , '.
les formalirés furent obfervées fur cette feconde infcription "
comme fur la premiere.
Me. Sallier fut entendu en rémoin à la requ tion du Procureur du Roi , & par Senrence du I I Août 1-777, le
premier moyen, de faux propofé par Beifon .fur la feconde
infcription , conlifiant en ce, que l'exrrair de l'aé1:e de défempararion de la terre & jardin dont s'agit, comlt)uniqué
par Me. Barbaroux, n'avoit pas eré fait ni collarionné , ni
figné par Me. Dafiros Noraire, fut rejetté. L'aurre moyen
confifiant en ce qu~ Me. Duremple n'avoir pas fair ni ligoé la
rell\,rion çlu contrôle de la ceffion privée du droir de prélation, joint au fonds & principal, pour, en jugeant l,e
procès , y êrre fiarué, ainli qu'il appartiendra.
Beifon releva: appel pardevant la Cour de cerre Senrence"
.& de celle du 2. 1 Avril, & propofa des moyens de nullité
& d'injuHice.
Il riroit le moyen de nulliré, de la différence; qui fe rrouvoit enrre le vœu de la Chambre & le rédigé de la Senrence du 2.1 Avril. La requifirion du' Procureur du Roi,.
tendanre- à la nominarion d"un fecond Expert à la place:
de celui qui avait abHenu,. & en injonEtion contre Beifon
de faire affigner Me. Sallier pour dépofer dans la huirainti ,
paifé laquelle, dès maintenanr , comme PQur lors, il ferait
affigné 11 la diligence du Procureur du Roi, ayant éré référée dans la Chambre, l'avis ( difoit BeJfon.) ,ne porroit
conrre lui qu'une comminarion de faire affigner Me. Sallier
fans fixer le délai; .au lieu que par la rédaé1:ion de la Sentence " ce délai fe trouvoit fixé; il porroir d'ailleurs une déchéance; il pouvoir arriver quelqu'.inconvénienc quil1jl1pêchât
1?affignarion dans le délài porté. Le Lieutenant ne pouvait
point s'écarter du vœu de la Chambre, il était obligé ,de
Cuivre la roure qui lui éroir rracée ; pourquoi fe ferait-il fournis à confulrer fes Cellegues , s'il. n.e devait pas ·fuivre leur
, avis? Le Lieurenant a donc excédé [on pou,voir.
Quant à l'injuHice , Beffon fourenoit qu'on ne pOllvoit
point le forcer à faire affigner Me. Sallier, rant que le [econd Expert n'avait point confommé [on opération; que
�DU
PALAIS
DE
Pa'ovENCE.
43
ce préalable étoir néceffaire; que le Procureur du Roi n'étant
point partie , ne devoit pas requérir l'audition d'un témoin,
tout-à-fait indifférente dans les circonltances; que ce n'é-:
toit que dans' le cas d'une négligence caraaérifée qu'il pou.'voit forcer les parties civiles à produire les témoins , & à
leur défaut les produire lui-même; que l'audition de Me.'
Sallier lui avoit 'caufé un préjudice irréparable, puifque de:.
puis lors il n'avoit pu trouver aucun Expert, qui eût voulu
remplacer celui qui avoit abflenu.
'
Envers la Sentence du ,II Août qui prononç.oit le rejet du
premier moyen de faux, & la. jonaion du fecondau fonds,
Beffon propofoit égale ment grief d'injullice.
,
Il obfervoit que Me. Barbaroux était devenu poffeffeur d'UA
bien apparcenant aux ancêtres de Beffon à la faveur de la'cef.
fion du retrait féodal qu'il avoit eue de Me. Sallier, Procureut;
fondé du Seigneur; que cette piece était priv~e & flb trouvoit au bas de l'extrait de l'aél:e du '1,,7 Novembre 1767 ; què
cet extrait était faux ; que la fignature y appofée de Me.
Dallros n'étoit point la fienne ; qu'il avoit demandé la permillion de s'in[crire en faux; qu'elle lui avoit été accordée,
les formalités remplies; que cependant le Lieutenant avoit
rejetté fan moyen- de faux. Fut-il jamais de difpoGtion plus
injulle? Ce rejet renferme une contradiél:ion manifelle en
ce qu'un premier décret lui permet de s'infcrire en faux en·
vers un extrait qu'il fou tient n'avoir été ni tait, ni collationné"
ni figné par Me. Dallros , & enfuite une Sentence, en rejettant le moyen de faux, ne veut pas qu'il prouve que ledit
extrait /l'a été ni fait, ni co\Jationné , ni figné par Me.
Dallros.
Il étoit de fon intérêt de faire déclarer faux le {ufdit.
extrait; il prouverait par-là que Me. Barbaroux avoit pris un
premier extrait de l'aél:e du '1,,7 Novembre 1767, au bas
duquel Me. Sal1ier lui avait fait la cellion du droit de prélation
qui fut contrôlée le même jour; que cette ceffian avoit été
anéantie ou renfermoit des conditions que. Me. Barbaroux ne
voulait pas exécuter; & que c~lui-ci, ne pouvant pas prendre
un nouvel extrait après la date & .le contrôte de la cellion
F
1.
�4+
JO'URNAL
fans fournir au moins un témoignage de ce fait -en'fa p.er-·
fonne· du Notaire qui l'auroit expédié, fut néceffité de faire
un extrait faux, & enfuite une fauffe relation du contrôle',
d'où réfulte par çOlljeéture la preuve· de· la· fa'llffeté· de la
ceffion.
Sur la feconde difpofition de la Sentence qui renvoyait au
fond le fecond moyen de faux, Beffon prétendoit être. intéreffé à la- faire réformer, parce que toutes les formalités,
étoient remplies, la permiffion étoit accordée, Me.. Barbaroux avoit déclaré vouloir fe fervir de la piece', & la
jonétion au fon-d lui portait un- ptéjudice confidérable. 1 0 • La
preuve de la fauffeté de la relation du contrôle a·u·roie fortHié' la fàuJfeté de la ceffion fur laquelle l'eue relation a été
fabriquée. 2 0 ,. Il auroit infiruit e.n même temps toute la procédure, il n'aurait plus été fournis à des longueurs & à de
nouveaux frais..
Me. Barbaroux ré'pondoit qu'ii n'y avoit atlcune différence
entre le référé de la Chambre & la rédaétien· de la Sén-tence du 21 Avril; qu'il y avoit néceffité de faire entendr~
Me. Samer'; que l'Ordonnance de' faux veut qu'il fait informé
tant par titres que par' témoins, comme auffi par Experts &
par comparaifon d'écritl:lre. Ces opérations' peuvent marcher
enfemble "l'une n'empêche pas Faurre ;' ici· Fon peut dire
que le témoignage de Me. Sallier étoit néceffaire, pliifqu'i}
s'agiffoit de vérifier fi la fignature mife au bas de l'aéte de
ceffion du droit de prélation< était réellement la- fienne;' fa
dépofition étoit un préalable à toute autre opération, puifqu'elle devoir. opérer. ou anéantir Fex.if!:ence· dl!, délit. Beffon
a été forcé de. faire entendre Me. Sallier_, le Procureur du Roi
Ven.a fommé ;'ainfi inutilement fe plaint-il de cette requifition.
La Sentence du I l Août ef!: d'une juf!:ice évidente ; le
premier moyen de faux a été rejené, parce que le Lieutenant l'a reconnu mauvais & inadmiffih-le, n'ayant pas voulu
qu'un objet dénué de toute' preuve, de toute vraifemblance,'
arrêtât le JL!gement du procès. Beffon fourenoit, que Me.
Daf!:ros n'avait ni figné ni collationné l'extrait de· l'aéte de'
1767' Cette piece~ a é.té EaraEhée ,. elle a été mife fous' les
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
4~-
yeux 1 du J u'ge , & c'efi avec la plus grande, connoiffance
qu'il a prononcé le rejet du moyen de faux, parce qu'il a
réellement reconnu que le collationné & la fignature étoient
écrits de la main de Me. DaHros.
Quant à la jonétion du fecond moyen au fond, il foutenoit qu'il étoit indifférent de vérifier le contrôle de la cefllon, parce que le contrôle n'eH pas néceffaire à. récriture
privée; que pour vérifier la .date ,Beffon étoit fans intérêt
à quereller le contrôle; cette ceffion lui avoit été produite
dès l'année 1767; le Lieutenant de Brignoles l'avait paraphée le 30 Décembre 1771 , long-temps avant que Beffon
intentât le retrait; l'eJ'trait de l'aél:e & du contrôle pouvaient être faux fans que.la ceffion le fût; il a donc fallu
réduire Beffon à· prouvet la fauffeté de la ceffion , & le Lieutenant a pu rejeter les moyens qui lui étoient propofés ,
tant envers l'extrait de l'aéle qu'envers le contrôle, parce
qu'ils n'étaient que l'annonce de la tergiverfation & ,de la
chicane..
•
Me. Meriaud , SubHitut, obferva que l'infcription de faux
en une voie ouverte à la partie à qui on oppofe une piece
qu'elle prétend fauffe ou falfifiée; il n'eH point de piece
d'écriture, iL ,n!efi. point d'aéle public ou privé qu'on ne
puiffe attaquer par cette voie. Le faux eH un crime fi dangereux pour la fociété, qu'on doit s'empreffer de le découvrir, dès. qu'on peut en (oupçonner l'exiHence. Le fauffaire ea un coupable iOllifible, déguifé fous mille formes,
revêtu. du mafque de la vérité ;, il peut dans un mot, & d'un
feul; tra.ie. de plume, ruiner. vingt familles, ravir les biens
& ·l'honmur des Citoyens; Delà l'empreffemem des Loilli
& des, MagiHrats à pourfuivre ce crime dès la premiere
fufPicion" qui. leur efi fuggérée. ; delà le principe que rien'
ne peu~ arrêter Vipfcription de faux., & qu'il n'y a point
de fin. de non-recevoir en pareille matiere. Mais il n'eH que
trop fouvent arrivé que le Plaideur de mauvaife foi. s'eH
[ervi de cette voie 'pour a~rêt.er le Jugement d'un procès ou
pour rergiverfer fa Partie. La Loi a introduit des formali.
tés rigoure.ufes., à l'effet.d'êt~e reçu àiormer une infcriBtion ,
�46
J'O. U
Il N A L
& a puni par une amende infamante ceux qui s'y expofent
témérairemeQt.
Il dl: inutile de rappeller les faits qui ont donné lieu . à
Be1fon de former fol,1 infcriprion de faux, il fuffit de dire
qu'51 paroi1foit avoir un intérêt fenfible' à prendre cette
VOle.
l.N~
Nul doute que le Juge qui réfere à ia 'Chambre les requifirions ;' les demandes qui lui' f('lnt adre1fées; ne foit
obligé de fuivre l'avis qui lui eil: diél:é par la même Cham-.
bre; autrement que deviendroit cette précaution de fa pari?
pourquoi' demanderoit-il un avis qu',il fau"roit ne devoir pas
, .'
!
,.
fuivfë t
Mais y eut-il dans la.Sentence la:diJFérence q~'on fuppofe ,
elle ne confiHe que dans le délai que le référé de la Chambre ne renfermoit pas; le fonds eil: le même. Me. Sallier
doit être affigné en témoin à la diligence du Procureur du
Roi en cas de demeure \de la part de Be1fon,. il étoit
même intére1fant pour ce dernier de faire conil:ater la vé-.
rité ou la fau1feté de la ceffion; & 'dire que' le MiniHere
public n'avoit pas le droit de faire cette requifition, c.'eil:
détruire routes les regles; Le Miniil:ere public eH cenfé veiller
à l'intérêt de toutes ·les Parties , même lorfqu'il n'eil:
pas en qualité. Les circonHances n'empêchent pas qu'il ne
puiIre agir, & il dl:' quelquefois très-e1femiel qu'il agi1fe.
C'eil: le devoir le plus important du Miniil:ere public d'éviter que les formalités inutiles ne fervent d'aliment à la
m.auvaife foi, d'en abréger les longueurs , & de donner
par une rigidité néce1faire l'efpoir à l'innocence de voir bientôt arriver la· tin de (es peines & de fes .inqu.iétudes.
Bé1fon avoit: été reçu à fon infcript'ion de faux depuis le
mois d'Oél:obre, ce n'eil: cependant qu'au mois d'Avril qu'intervient la Semence dom il fe plaint. Me. Barbaroux avoit
été obligé de préfenrer plufieurs Requêtes pour lui enjoindre de continuer fa procédure, il avoit même demandé
que Me: Sallier fût entendu; ce' .qui excita le MiniHere public à requérir ce que .la Partie i av.oit elle-même demandé;
ainn le Procureur du Roi n'a. point agi de .fon pur }llou:""
�DU
PA LA 1 S.
DE
P ft. 0
V B NeE.
47
-vement, quoiqu'il fût en drOit de le faire, & fa requifirion conforme 11 celle de Me. Barbaroux doit être entretenue. La claufe irritante renfermée dans la Sentence
n'eU point contraire aux regles , & la négligence de Beffon ,
reconnue par les différentes Requêtes dé Me'. Barbaroux,
-J'avait rendue néceffaire, parce que 'l'on voyait qu'il ne
fongeoit point à continuer fa procédure.
Quant à J'audition de Me. Sallier , ,Me. Meriaud obferva
que l'arr. 3 de l'Ordonnance de 1737, portait que fur la Requête de plainte il fera informé-, tant par titres que par témoins, comme aulli pat Experts, enfemble par ·comparaifon d'écritures ou fignatures, le rout ainli que le cas le
requerra. L'art. 24- veut qu'on puiffe entendre, comme témoins, ceux qui auront connoiffance de la fabrication, altération , & en .générii,l de la .fauffeté des pieces ou des
faits qui pourront fervir à en établir la preuve. Quoiqu'il
[oit défendu, ajoute le Commentateur, par l'art. 7 , d'entendre des témoins avant que les pieces arguées de faux [oient
dépoféesau Greffe, il eft cependant important d'entendre prompte ment les témoins , dans la crainte que les preuves ne dé. périj]ènt pend,ant le tems des autres ÎTlftru8ions; il eft réftrvé
au Juge, par le mlme article., ,p'ordQnner.Jlors de la plainte,
ou par ur. Jugement poflérieur, que les témoins feront 'entendus avant le dépôt des prétendues pieces JauJJès.
Telle eH la Loi qui a fervi de--bafe à la difpofition de la
Sentence; il ne paraît nulle part ,que J'audition des témoins puiffe être éloignée-; il eU décidé qu'on peut au contraire la recevoir en rout état de caufe; il eH de l'intérêt
de routes les Parties-de s'affurèr un témoignage dont la
perte deviendroit irréparable. Tel a été fans doure le motif
du Lieutenant pour recevoir la dépofition de Me. Sallier ,
elle était la plus effentielle, lui feul devait décider du Olé·
rite de la fignature.
La fe.conde infcription de faux annonce de -la part de
. Beffon une tergiverfation dont' il n'dl: guere poffible de
trouver d'exemple. Quand même il confieroit de la fauîfeté de J'extrait de l'aae, la cellion ne ferait pas moins
�48
J
p
U :R. N A L .
recohnue vraie & légitime; Me. B.arbaroux lui oppoferoit
toujours avec force cette piece privée, fignée par Me. Sallier,
que la Jull:ice ne pourroit faire autrement' que 'd'entretenir.
L'art. 29" du titre 2 de l'Ordonnance de 1737, veut que
fur les conclullons·du Procureur du Roi, ou ceux des Seineurs hauts-Ju!!:iciers, il foit rendu tel Jugement qu'il appartiendra pour admettre ou pour rejetter les moyens de faux
en tout ou en partie, ou pour ordonner, s'il y échoit, que
les moyens demeureront joints, foit à l'incident de faux fi
quelques-yn~ defdits moyens ont été admis, foit à ·Ia caufe
ou procès principal, le tout felon la qualité de moyens ou
·l'exigence- ges cas.
Le Juge a donc la faculté d'ad mettre ou de rejeter les
moyens de faux propofés , & la Sentence attaquée n'e!!:
point contradiél:oire avec celle qui permet l'infcription
de faux.
Me. Meriaùd conclut à ce que les appellations de Beffon
fuffent mires an néant, & que ce dont e!!: appel fortit fon
plein & entier effet.
Arrêt conforme prononcé par M. le premier Préfident à
l'Auc\ien.ce du 2 Mars 1779, Beffon fut condamné à l'amende
du fol appel & aux ~épens, plaidans Mes.' Simeon fils. &
Efi'rivier.
'=====~===:=='-=~
ARRÊT VI.
E.
Teflament .attaqué pour caufe de captation.
N 17)7 le fieur Fournier -de la ville de Cuers marie fa
, .fille unique avec le fieur Montagne , Marchand de la
même ville; il lui con!!:itue une dot de 20000 liv.; il avoit
fait un premier reframem en 17') -) , il; en fait un fecond en
.1762; dans l'lJn & dans l'autre fa fille eft in!!:iruée héritiere.
En 1766 il fait un troifiem~ te!!:ament qui ne renferme
.que quelques legs en faveur de fa .fille; il Y inHirue héritiere
. '
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recohnue vraie & légitime; Me. B.arbaroux lui oppoferoit
toujours avec force cette piece privée, fignée par Me. Sallier,
que la Jull:ice ne pourroit faire autrement' que 'd'entretenir.
L'art. 29" du titre 2 de l'Ordonnance de 1737, veut que
fur les conclullons·du Procureur du Roi, ou ceux des Seineurs hauts-Ju!!:iciers, il foit rendu tel Jugement qu'il appartiendra pour admettre ou pour rejetter les moyens de faux
en tout ou en partie, ou pour ordonner, s'il y échoit, que
les moyens demeureront joints, foit à l'incident de faux fi
quelques-yn~ defdits moyens ont été admis, foit à ·Ia caufe
ou procès principal, le tout felon la qualité de moyens ou
·l'exigence- ges cas.
Le Juge a donc la faculté d'ad mettre ou de rejeter les
moyens de faux propofés , & la Sentence attaquée n'e!!:
point contradiél:oire avec celle qui permet l'infcription
de faux.
Me. Meriaùd conclut à ce que les appellations de Beffon
fuffent mires an néant, & que ce dont e!!: appel fortit fon
plein & entier effet.
Arrêt conforme prononcé par M. le premier Préfident à
l'Auc\ien.ce du 2 Mars 1779, Beffon fut condamné à l'amende
du fol appel & aux ~épens, plaidans Mes.' Simeon fils. &
Efi'rivier.
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ARRÊT VI.
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Teflament .attaqué pour caufe de captation.
N 17)7 le fieur Fournier -de la ville de Cuers marie fa
, .fille unique avec le fieur Montagne , Marchand de la
même ville; il lui con!!:itue une dot de 20000 liv.; il avoit
fait un premier reframem en 17') -) , il; en fait un fecond en
.1762; dans l'lJn & dans l'autre fa fille eft in!!:iruée héritiere.
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,un ten-e ment appartenant à lU I ,re.Cb teur, nppa rrl ~ nn e . Ion
.héririer. Il in!1: irue Pierrc- DomlOlque Blanc , pc tlt-~ ls du S:.
Fournier, chez 1~9ue l il étoit l?gé, fon h ~ rIt lcr ~,l1Ivc,rfe l? IL
veut que fon héritier ne pu,ffe Jouir de
Jens qll Il lUI ladfe
-<lue 10r{qu'iJ aura atteint 1 :îge de 22. nns , & . que juf9u:à ce
momeut fes biens meubles & immcu 1 fO lent ad nllnJfhés
par le lieur Mey ri er, J\rbîrre ApOlhic :l ire, qu' il nomme pour
[on exécuteur reH:a menrai re i il le charge de nou rr ir, habiller,
·.entreten ir foo hérit ie r & le faire élever , le difpenfe de faire
.aUcun io'ventaire & de rendre compte de fo n adm inifl: racion.
,Enfin prévoyant le cas où [on héritier viendro it à mourir
a~ant l'âge de u ans, il fu bHirue en faveu r du heur Meyr!er .fils les deu x propriétés de terre qu'il poffede au quartier du MO,ulin à Papier, & dOllt il legue l'u[ufruit à fa fille
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n en JouIr gu apr s la mort de celle-ci; il oblige Meyner fil~, au cas que cene fubi1:itution ait lieu de payer
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e dé~s dit fieur Fournier, & le 14 Février 177 8 ,
• Fourmer <iemanda la caffation de ces teH:amens
captés; le ~ur Blanc) en qualité de pere & légi-
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d'uo e volonté libre: unus aBus donatwnLs a CLt a Lam 0 11 tioflem prœfumi.
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Ol! eH donc le prétexte de 1 inj ufi ice & de ~~ fu gg~ {bon?
Le pere n' a pas fait pou~ f~ fil,le rout .ce ql~ II ~uroJt p u ,
mais il a fa it pl us que n eX lgeOlt la L OI, qUI lUI a do nn é
la liberté de difpo[er, & qu i l'eût laiffé ma1c re de la réduire à la dot im po rtante qu' il lui avoit co n{1ituée; ce
n'ef!: pas par des imp reITions ' tran geres q u' il s'cft détcmi nç.
·On ne peut pas [up po[er qu'u n hom me q ui n o urriffoit depuis on ze ans le p rojet d'avo ir un autre hc: ritier que [1 fi ll e ,
, aic été penda nt ce rem s [ubjugué par la volonté d'autrui,
[ur-tout qu and on voit cet homm e jouir d e fa rai[on jufqu'à
[on dernier mom ent,
Ce , n'e~ point le ueur Meyrier. qui eft [ubfiicué , c'eft un
enfa nt qUi n'a auc une incapacité par lui-même, fur lequel
on tente feulement de faire réfléchir celle que l'on [uppo[e
- à [on pere; cet enfant n'efi point fon prête-nom fou s le
prétexte d'une adminifiration, d'une libéralité indireéte.
Le, uelü Meyrier étoit, oher au lieur Fournier bien plus
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/ es v~lo~és ; Il · le chargea d'être le tuteur de fon héri1er P.u~lle, de '9'eiUe.r D6AJ, feulement à fon 4ducation, à
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rGes biens ",'il lui laiff'oit; mais même fon
IOQ, Qlarquée pa~ Je: ~t Qe fun tefiament éait de
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fille unique, depuis fon m ari age , n, aVOIt pmals v cu avec
Con pere. Depuis 1766, é poque . ou on ne p,rétendra ~~s
que le tef\:ateur fût fubju gué par le fieur Meyner, elle netait plus héritiere; elle a continué à ne pas l'être par l'eifet
d'ljne ré[olurion coof\:ante de plus de onze années; elle a
été exclue du titre d'hé ritiere univerfe1le par trois refiamens
myl1iques, genre de tef\:ament moins fufpet\: , dont le modele écrit de la m ain mê me du fieur Fournier a été trouvé
parmi [es papiers. Peut-elle fe plaindre d ' être déshéritée
, pa~ les manœuvres de ceux qui ont obfédé fon pe-re, ene
qUI n'a ceffé de le voir dans fa derniere maladie , qui lui
a fo~rni tous les alimens délicats dont il pouvait avoir
be[olll ~ On lui a fi peu caché que fon pere ' tefioie , qu'ell'e
a fourni les rubans defrinés à fermer ce tefl:ament, ainli
qu'il con{\:~ d'un compte écrit de fa main" dont elle a
reç.u le paiement des mains du fieur Meyrier. Cette fem me
qUI fe prétend exclue par un enfant pris fans choix è media
zurba , l'ef\: par un enfant que le tefrateur préfentoit par~OUt) ~epuis fà naiffance, comme fon hénrier , qu'illllacrotC
~e titre à côté de lui dans tous les repas où il fe [1"0\1VOlt. Enfin cette femme qui préfente comme fi forte
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veut cet lomme
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le [eHament que, [on capnce blJ\ IL., ~I but lailfer fubeH fans doure fUJeere à des a us , maIS) • ,
liHer ces abus, quand ils ne font pas exeeIIifs , fi on ne
veu t détruire la liberré elle-mê':le.,
,
•
Tel eft le langage qll il faudrolt tenIr" 11 le caprice
avo it ii1fpiré les difpofirion du Geur Fournle~' ,; mais il cfl:
certain qu'elles furent di ées par d'aurres motIfs dont il eil:
aifé de rendre compte.
La DlIe, Fournier :lVoit eu une d o t importante ; elle n'avoit pu vivre ni avec fon mari ni avec fon pere . J u[qu'au
mo ment de fa féparation d'a cc [on mari, [on pere la
rega rda comme fon hérieiere. Delà le teilame nt de 176'2...
Q uand le pere perdit l'efpoir de {e voir renaît re dans des
per ies-fils, il changea de volonté. Delà le teHament de
' 17 66 .
-,
'
L' intérêt du fa ng eH bien fort Gîns do ute; mais a-t-il
la force de détru ire norre confiitution ?
Les premi ers pr-i ncipes nous apprenn en t qu'il n'y a rien
d~ fi refpe él:able qu' un te !l:ament. La Loi a promis aux
clt0y'ens de faire exécute r après leur mort. leurs volontés
dermeres, & de ne pas trouver injuHe qu'ils u[aiI'ent,
même contre leurs enfans d'urie lib'erté qui ne [ubfifieroit
plus, s'ils étoient aflrei;cs à les in!l:ituer leurs héritiers
Un iverfels.
, Les Loix ont laiffé au pere ' une entiere liberté dans (es
dlfpofitions , elles ne l'ont fournis envers [es enfans qu'~
une légitime; elles n'ont pas' permis que la volonté d'ua.
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Ul remIt avant
{on pOuvoClr It:~écuteur tefiamentaire a fu fe procurer ainli. ,
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avoir rémoigné du regret d'aVOir fait les . teftaments attaqués; qu'il ,di[oit publiquement qu'i~ avoit fait ,le t~!l:a
mènt d'un fou, mais qu'il ava it été obligé de le faire 3 111 fi ,
fans quoi il 'aurait été abandonné, & feroit m o rt fans le
fecours d' un verre d'eau. 4°. Que la nommée Fournier,
époufe de Blanc, s'était jattée que fi la DUe. Montagne
Fournier [e plaignait des trois tefl:amens faits par fan
pere, ,elle lui en feroit faire un quat ri eme qui la dépouil.1el'Oit même de la jouiffance qui lui émi t léguée •
Que
le ~eur ,Fo~rnier avoit en comptant peu avant fa mort 170
lOUIS qÛl lUI furent enlevés; ce qui excita [es plaintes &
. [~ colere ao poim qu'il dit à ha!1te voix: ce voleur de Meyner n,e paroÎt ~lus depuis qu'il a mon argent. 6°. Que le Geur '
Meyner, deux Jours avant la mort du Sr. Fournier, fut chez la
DUe. Montagne avec deux Porteurs réclamer deux malles
remplies d'effets précie~x qu'il fit porter d'aos la chambre
du malade.
ue faut-it de plliS pour faire annuller une difpofition
~U1 port~, pour ainli. dire, ,avec ellé tant de caraéteres de
probation? Un étranger acquiert une fucceffion au pré'-
..,0.
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& BI' c en appellent pard vOnt le
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. 17 0 IOll l'5 ., le fle ur Mcyrie!' co t.: na~ol t reçu e d Licutenant de To ul on qui cooc~d :l e
VIe nt. SenteFnce ,u d l'~veu du fleur Meyricr, rdorme la
à 1 Dlle ou rnler e "
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IT.a tl'OI1 . Ap pel de celle-c I pal evaot a
là deman d e en cau;
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La Dlle. Fourn ier pré{ento le dIvers moyens e captllt)?".
tefb mcn s ( d ifo it-elle ) o ne été foies dans lc court /fiT l 'o's
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terv:llle de troi s {ema ine s. U n ét range r, un pUpl e qUi n a
inO:itllé héritier ; une
jamais pu mérieer du edbltCu r, y
fille qu i n'a jama is dérn rir,é , y eft flétrie cl~ L1 l1e t~che d'~x
héréda eion; [on pere ne d l.:tc de pareJ!les dlfpoGt lons qu en
1777 , & à me[ure, q ue l' ~l gC ~ les infi;m!t~s le me n ace n~
. d' une mort prochaine. FOlble Jouet de 1 aVId ité de ceux qUI
l'entourent, il ne peut exprimer que les volontés qu'ils lui
. diél:en t ; aufIi donne-t- il à fon Apothicaire l'admini O:ratio o
de fon h~ricage. Cette ad miniHration eH: li bre , in dépendante,
point de compte à rendre ; une [ubO:itutioll eO: fa ite ,en faveur du fil s de cet AdminiHrateur defpotique , q ui trouve ainll
le I?oyen de s'app roprier pendant long-temps, & ju[q u'à la
majorité de l'héritier inH:itué, li n legs d'û fu fruit ~ de proliter
même, la mort d u pupille arrivant , d'un autre legs confl dérab,le. A pareils traits, comment ,ne pas r'eco'nnoître la captatIOn ?
L'héritier n'dl: que le prête-notn de Meyrier ; on a mafqué fous la forme d'une adminifiration une libéralité jnd~
rea e ; l'Adminifirateur peut s'entendre avec l'héritier Ou {es
p,arens, & affurer 'une libéralité déguifée ; il faut juger Meyner, non d'après les regles du droit, mais d'après l'iotentioll.
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dé'" nérer en abus, & q
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cxan1~n trop f1g~ufieux~e ar extenuon que les Apothic ire
PUlfque ce ne q
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de l'Ordonnance, qu Ile
font compris d.ms la pro c~r~1~~1tte excenfion fur l' admin if-
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Ricard des Donations, page 40 ~, n. 70, Lont u m me
. Qu'ert-ce qu'on a à redouter ? Les fraudes, les avantages
aVIS,
d . 'fi'
indiCcrets? Mais dans le cas d'une a mini u:aclOn , ~e t te
' crain té eH: puérile; la reddition du compte, couJou rs eXigée,
en efl: un sûr garant.
.
..
Tout ce que le fieur Fournier a ladfé à fon héntler , confille en des biens arrentés par aae public à 308 liv res, fu r
quoi il fa ut prélever la pen uon de 60 liv. due à l'Hôp ital , ~
40 liv. à la DUe. Aulan; il faut joindre 2,100 liv. de capitaux, dont 800 liv. au cinq pour cent , & 13 0 0 li ... à trois
& qu atre po ur ce nt; de forte que cette adminiHration d l
Cout au plus de '2..)8 liv. de revenu qui d o it ièrvi r à la nourriture & à l'entretien de l'héritier. Après ce tableau, comment peut-on crier à l'excès, & di re que le lieur Meyrier n'a
f.~é ?ommé adm iniftrateur que poùr frauder . la loi qui interdlfot en fa- faveur toute libéralité di.reél:e?
. Les peres doivent beaucoup à !t'lUrs e~1fans; mais les eofans ne doivent - ils rien à leur pere? Auront-ils le droit
de les
her de tefl:er? Et quand la Loi a\jtorife ceux-ci
à ne .
à ceux-là que leur lég-itime, regarde
comme odieufes dès difpofitions quj leur fone un bita
leur traitement? Nos Loix ORt ôté aux d1"Oics du i na
iiu'elles Ont accordé à la lib.e ret; -eUes ont mis li
�PRO V B N C R.
~7
l'homme à leur place. Un teftament rigoureux & (évere n'ef!:_
pas un teftament nul; 11 ne peut pas même être regardé
cQmme dur, vu le (art laifle à la fille, & le peu de compatibilité qu'il y avait entre (on caraél:ere & celui de (on
pere.
La force du (ang eft moindre que celle de l'habitude; on
eft plus attaché à (es enfans par les (oins qu'on'a d'eux &
par ceux qu'ils rendent, que par leur nailfance; il ne faut
excepter de cette regle que quelques perfonnes chez qui
J'ambition & le deue de perpétuer leur nom, (uppléent ou
augmentent la tendrelfe ,& qui voyent leur fils comme la plus
chere de leur propriété, comme la plus pré<:ieufe partie d'euxmême, parce qu'elle perpétuera leue mémoire; mais ce fentiment , moiAscommun dans les claIres inférieures de la
focieté, n'ell: pas applicable à une 'fille qui n'a pasd"enfant
& qui n'eft plus en âge d'en avoir. li n'y a donc rieo. d'étonnant qu'un pere qui au lieu de vivre avec fa fille féparée de
fan mari, lui a préféré pendant vingt-deux ans des étrangers,
les lui préfere dans fon teftamen~
Sur les fins fubfidiair~s, le fleur Meyrier difoit qu'en regle
générale le teftament a pour lui la préfomption de hi loi.
Quand un te{l:ament paraît revêcu de toutes les formes re<]uifes , on peut & on doit fe livrer à cette croyance légale,
qu'il e{l: l'ouvrage de la volonté du teflateur, jufqu'à ce qu'une
preuve contraire enleve le ma(que, s'il cache une difpofition
étrangere ; delà vient qu'on n'admet pas facilement cette
preuve; & quand nos Loix n'ollt P4S cr~ devoir confier
~ la foi de deux témoins l'exécution d'un engagement excéàant cent livres, à plus forte raifon n'auront-elles pas aveuglément fubordonné !l. cette dépofition la validité d'un aél:e.
auffi folemnel que le teflament, qui porte déja avec lui,
fous les au(pices de l'appareil & de la (olemnité qui l'accompagnent, l'empreinte d'une volonté entiere. Dans le
fJHême de nos Loix, la preuve te{l:imouiale el!: trûp fu(peél:e pour ne pas l'accueillir avec la plus grande circon(peél:ion; & il Y aurait plus d'inconvéniens de trop donner:
.?da foi ~e~ témoins, que de trop compter Tuc la foi des,
fi u P A LA 15
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J o.
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a8:es. Anciennement if faUoitun cO.lùméntemept de preu\\e
par- écri~ pour être aGimis à la pTeljve tefhn.lOni'alè'. Ce principe éto;j~ outré ; on a cru 'q,ue la l're,uv~ étoit aq miffible ,
iliiwm· la faveur ou -la force d'es cÎTtonnanc'~s" c'eU ail}Î1
que s''Cxprime- Danty; mais il fiut que CCoS ci,PéOnfi'ance5
foie nt probatoires & relevant~s, q,u'elles. préfentcnt" at:S
f-aits graves, tels' en un mot que, la preu<ze faite, la ca1fafion ne puiffe qu'être pronol'lcé'e. Dans là caufe du fI.eur
M-a·lefpine ile- k ville de :Drag'lligoon-" jogé'e le' '\ l 'M~i, -17.76
au rapport de ,M'. le 'Confe'illçr d~ Ba<~fon, o,rl.vouloit fâi'~e
Mëpendre la "aridité d'u teftamem de ta Ulle L'amanoid;
tfulle preuve 'tef!:imoni'ale j .on articut'oit de's faits en apparence preffams & très-relevants. La COOl' rejerra la preuve
ùfferte, parce que les faits, bien analifés, parurent OIJ
faux:, ou invraifembla1?les , Olj nb,n' d'écififs~ La Dlle:
Foumier qffre une ~preuve, au mépris àes indices' frappants
'ltli' réful~ent d'(I' teH'amenr de 1766 , de. la minute de ceux,
de 1'777 écrire -de 'la main du refl:ateur, & de tources les
circonf!:ances qui maintiennent 'ces trois derniers tefiamens.
Mais que peuvenç cQntre trois tefiamens., dont 'l'enfem1?le forme uh cdrps de, preuve irréfifiible dl: la volonté du
teftateu'r, des' faits vagues, peu circonfbnciés', dénués de
vérité, même' de vraifemblance ; inconc1uants en' fait &
' ,
en droit?
, M. l'Avocat-Général de Magalbn portant la parole, ob{t'l'va qu'en principe la fuggeftion opere la nullité des difj'ou,ions telhmentaire's , lorfqu'elle eft accompagnée de
dol &-dè'fraudè. Tel eH: l'efprit des Loix Romaines j c'e!j,
boix" atrtorifent h:s difpofitions qui ont été attirées par des
Careifes , des prieres &. des {ervices , elles préfument que
ces démarches n'influent pas d'une maniere dangereufe fur
la ~ol,onté du te.(l:ateur; mais elles prohib,ent d'une maniere
élJ;prcffe , la violen<;e, la rufe, l'artifice; ces moyens illi-'
é.Î1es fu!Jüituent à la volonté du teftareur une volonté étran,
gere; ils privent le teHateur de l'état de liberté que les
Loix l\i:'la raifon exigent de lui i fouvent même ils le' fOf->
c'e~t à diél,er (,tes difpofitions que fon cœur défavoue. : '.
'
�P AL A rs
5:f)
A quels indices peut-on reconnoltre fi ces moyens Gdieux
ont été employés? Il en dl: d~ deux: efpec~s : les d~(pofi
tions en elles-mêmes ; les démarches de ceux qui font
acclifés d'avoir fuggéré. Il ell: vrai que de ces deux genres
de preuve, le premier dl: quelquefois peu sûr.; une difpofition qui contrarie la raifon & la nature, n'eH pas taujour,s
fuggérée. Quelque finguliere, quelqu'étrange que foit une
volonté , il eH poffible qu'elle ait été celle du tefiateuf.
Il eH néanmoins des difpofitions qui s'élevent contre l'aél:e
qui les renferme; on voit même dans la difpofirion le motif qnï l'a faite diéter; & fi le bienfait laiffe dans le d.ome
pendant quelques momens; fi l'on cherche pendant quelques
infl:ants le motif du tefiateur, le nom de celui qui relioit le
bienfait, dilIipe bientôt ce doute, .& fait connaître la véri.
table caufe de la difpofi{ion. Auffi dans certaines cirçonftances la Loi ne demande point d'autre preuve de fugge(tion; une libéralité dl: déclarée nulle à caufe de la perfonne
qui la recroit. Telles font les di(pofitions faites en faveq,r
des perfonnes prohibées. La copfiqération des autres indices
dl: plus certaine, mais elle demande un examen plus réflé.chi; l'interprétation en eH plus difficile j il eH des circQnftances où la démarche la plus innocente en elle-même, ,a
une apparence çriminelle.;- de fi de fimples indices peuvent
[ervir à prouver'la fuggeHion, il 'fa~t du' moins , çomm~
dit la Loi " des indices clairs.
Pt:fant enfuite les circonfl:ances de la caufe , M. I~Avocaç
Général examina fi, pour faire caffer le tefl:ament de fon
pere, la Dlle. Foumier pouvoit préfenter avec [ucd:s I,a
narure Je la difpofit-ion, le temps prochain des trois refl:ainens ,-l'âge du tefl:ateur., les divers faits qu'elJe reprochoit
lin fieur Meyrier.
Il lui partH étonnant qu'un -pere pendant fes gerniers mbmens .elle préféré à fa fille un eufant qui lui était étranger,
.qu'il eût femi dans fon cœur s'élever un fecond fenriment
:qui combattît le fenriment paternel, &. que moins [enfible
j. ce fentiment facré , il n'eût donné à' fa fille qu'une légere
poreion. de fa foreune, tandis que d'une main prodigue" il
DU
DB
PRO V EN1:l!.
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~
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enrichilfoit celui qu'un choix lingulier lui avait. déftgné•.
En vain voulait - On jufl:ifier les motifs du lieur
Fournier, en difant que fa fille, ,réparée de fan mari, ne
lui laiffoit pas l'efpoir de fe voir renaîhe dans {es. petits-fits.
Il ef!: vrai que la douce fatisfaél:ion de fe voir ~ntourer d'une
nombreufe poHérité, aj6ùte à la piété filiale; mais parce
que cet efpoir eH éteint, la nature n'a-t-elle pas fes droits?
Parce que la Demoifdle Fournier ne devoit plus- avoir d'enfans, devait-elle être moins chere à fon pere?
Les anciennes loix d'Athenes qui ne laiffoient point la libertéde tefl:er à ceux qui avaient des enfans' ,. etaient plus fages
que les nôtres ; elles prévenoient ces abus. De femblables
difpofuions n'y auraient pas été' tolérées; mais nos loix qui,
font une fuite de ce principe c.ruel, ad'opté par les Romains,.
'1l1'un pere pouvoit' vendre fon fils, qu'il pouvait fâns mo· tif laiifer fon bien 1t un Etranger au préjudice d:e ce même'
fils, nos loix ne' demandent au pere qu'une modique portion de fes biens pour fes enfants, & lui laiifent la liberté.
de difpofer du reHe .de fa fortune.
Ses enfans fournis à fes ordres n'auront jamais excité fa
· colere; ( n'imporee ); il peut impunément laiflèr à des·Etran.·gers la· plus grande' partie de fes bi-ens•. Les Ibix ne préfument pas même' que cette difpofition hJi ait été {uggérée;.
·elles cToyent qu'il a pu la diél:er lui-mème; elles fuppofent
'q!l,)me pareille volonté a pu fe concilier avec les fentimens
de la nature; que le. p~re a fatisfait à. ce q~ ces. mêmes
· fentimens exigeoient d'e lui;; qu'il' a pu affeél:ionner' égale·ment celui à qui il a donné le iour & . celui. 'l.ui lui dl
é~n~~.
.
La fecon.d~ dïfJ:'oli'tion contre' làquelle là .DIIe. Fournier
s'éleve, efl:·l'adminiHration des biens donnée au Sr. Meyrier_
Nos )oix, par d~ fages motifs, rejettent les libéralités,
fuites aux· Tuteurs :: les Arrêts' dtterminés par les inêmes;
principes Ont étendu cette prohibition aux Confeffeurs ,.
·Médecins, Apot·hicaires, Chirurgiens. Les .premiers 'Peuvent:
'exercer un empire' dangereux ;: les fèconds .peuvent abufer:
1?'~n~ ~onfiàn'ce qu'une trop foible crédulité
rend I~uy.en1;:.
·illimitee;.
60
�1.'
"
prohi\>itiQh peut-eIlé
r:P il 0 V Il NeE.
~1
" • Cette
être' appliquée ;à ,la caufe ?
r
Le Teftateur n'a laiffé au lieur .Meyrier que l'adminiftration
de fes biens. Charger quelqu'un, du foin d'une, adminiHratian, eft-ce lui faire une libéralité? C'eft un honneur, un
témoignage de confiance; mais une pareille difpolition, loin
de préfenter quelque jdée de libéralité "n,e préfente au'con~
traire que celle d'un foin p,énible. :. la. claufe iqulle difpetife
.de rendre: cOl1)pte & ,de {<lire aucunjnv.entaire(:, .eft fans
force aux yeùx de 'la ,1!5i: qu~un ,TeHateur, fe [erve.de:,cett~
•expreffion vague pour' faire conno'ître fe's fentimens' d'e confiance envers celui qu'il appelle à. l'adminil:liration; qu'il
prétende par-I~ tranfmettre rfes fj:ntimens ~àI fes 'hëritiers ';
qu'il veuille jufl:ifi~r fon choix "aux .yeux·dè' Ia.fociété; 'c'eft
ce qui refulte de c,ette c1aufe ; mais .les loix ':coofervatriltes
des droits' du Cit()yen:, qui ne jugent pas ..l'es fentiméfls
des hommes, mais qui pefent leurs aérions, exigent que
cet Admioifirateur rende compte de fa régie, quelle que
:f?it la confiance ,que le Teftate;l[, luL ..a it témoigné.. L'adminiftr;ttion étant foumife à une reddition: 'de ~'-Ompte n'eft
pas u~ libéralit~.: on peut donc la donner..à une perfonne
.incapable de rec.evoir aucun legs. .l.~'
. . . ,': '1
Si la fucceffion du lieur Fournier était importante;, s?il
'rût laiffé au Sr. Meyrier l'adminiftration d'une 'fortune fi;on,ficiérable, on, pourr9it c;rQire que le: ,deffein'Jdu TeHateur
,étoit de faire un, don au lieur Meyrier., & ,: 0{1 _ pqwroilr
',l'accufer de fraude;, mais cetre fortune 'dt bien.modique-:
.).es deux propriétés ne font affermées 'que 3 t8 'livres, &. il
faue déduire fur cette fQmme 1 1.0 Iiv. En conve'nanc même
,que,le prQduit ep çtl plus confid~rable , il .dL cercain...q'ue
le foin, l'entretien, l'éducation d'un enfant i ahforbe . cé
.revenu ".~ .qul: gAqminiHrate,llt., ti'eût~il, aucun ~:compte à
rl\ndr~ ", ~e pourrojt en attçndre aUC;,1J.n .ayantage ,fi ,qu'and
le Sr., Fotirnier a dit dans f.qn teftamént ,. que le Sr. Meyrier
iouiroic. des. fruits, q,u'iL aur~oit fO,ill âe l'héritier & qp'il
feroit Ghargé dé fou,.éduçaiibn., l~ c,ond-itioAJqu'iI. impofe,
,Çompenfe l'av~ntilg!l qu'il lui "fait ;.l'obligatlon. eH 'aufli forle
que le d9n; on ne peut dpnÇ,}~as dite que.ce foit:u,ne)ibéralitê..,
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, .:Urn: tfoiliellle .tlifp.o{iorol'l femble renélre les f0upçons, plus
légiI1m:es 'lI 'c'lla. çeHe de la . (llbfl:iout~on fait{: 'en faveur' d'e
Ml::yriet ,fils. J. , • " .. ~
".' ",
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. La pr0Arh'ition 'p'foboncée cO'âtre les T,tlteU'rs &J.Adminifna~~u'!'s, & d·ans ;Iaque.lle 'oh ta 'Com pris les Médecins',
.(';llirur.giens & ,Apmhicai:r,e:s., .:s'Jét~-l1~ auffi aux -d1fpofitioIts
faites 'en..ifàyeur}de.'ieurs: etlffit1s. Mais (qtlelquefe'is 'oil tolere
;:des l~gs <peu::·~otl.fidérables ,J :fait's. eà 'faveur d'es "'perfonne's
~rol1ÎbDes.' fia: Yub!bitution ·uniVèrfét·H: taitë 'en Jfa&ett1· dtl Sr•
•Meycier" ohms Je fecond tefl:am'ent ,·..eut été meins favotllb}e ; mais' Icelle -dont il e{il; -q ue1l:ien·, e~t peu imp'ortanre;
·i .1Îllù)~dgitllqJ.e 'derJdeUl{ pN,itèS j>'l'0p·ri6tés·; elle 'dépend
~':dtlle!l1\Ld1ud 'éVénem'ellt ·,inc~ttàin ~ lel1e'·ne doit avoir Heu
:9.JI~ l~jlnsld'e;"Cas,ioù Fh~rhier mourra· avàht -1'·âge de 22 ans.
Raft'n rdi eŒp. 'a" Ihfu " le fubfiimé -efil: 'ebligéde "paye'r
o{·ooo,liv. ·à l'H'Ô'plta'l de Cuê:r-s. !foures ces cirCO'l1fl:ilnces la
<l'ellde.nt moins défavorable ; die paroÎt ne '<i'evo'i'r pas être
.r!J\f~ allil,pombre 'tles dif.politiens ~Ejue lés loüc rejettent:
<l'âilleu.rsl fMr~elle?ÎI1ü~k, 'èrll{-~1Ie été Jwggérée ,il n'efl: au-'
çUJlJtt'appo~cJ en'tl'e, tettë Ûfbfl:~tution' & l'-in!lit,Uf'foIl' 'd'héritier : la preuve de la luggefl:ion de ''Cette derniere difpo!ilion n'dt p-a:~ u'O'e im!uve de la fl1ggeflio'n de l'autre.
.., Quam: ·à l'âge du ,Sr. Fournier, -fans -cloute un vieillarèl
<ilél:o.genaire ,'paJl701\:'l'lus f~cjle à 'céder à furie'. infpiration
éh:angere {,>là ;'ètr~ ',la' vitrime des cufes qu'on émploie pour
()lIirtillernfal~vo'o'Oré r mnis il "ne 'fl1ffit p-as âe dire: L'âge
liu .TeJfateilr ~ rendu ,la juggeflitm 'Plus fdcile, il fàuc prouve'r
qu'bn a abl1féde cette f-acilit-é; l'âg'e ne prouve rien en
Ju~~mêin'e~"c'dJl:" un il'ldice qui ajoute un degré de certitude
à,unlautre; indice.. J , .
., ~ . •
bes:nois rt'eülÎh:llin~\ filits .dans -un iniê1m-e ·mois " .ne préreh~
f~ !.l'une '.!"'1êLlf,le [lie fugie'lliio[\ (Men ëquiveltue.':'!s"ils
euŒent 'co'ntenû~"'desdifp(Hitions différem-es,. .ces variations
fi proc'hailles -pohrrcOient .faire préfumec -que-lque foibldfe
dans ,'l'efJ\ ic' d'l1l' tel1ratèur l mais· 'ces Jtr-ois :te'Hamehs étant
coufbrmes', sref\lllfe<l~li.nlc·toujgu'rs J~-peu-p'r-è'slqes ''tt1ê'meS Jij.(2.
polic.ioo\lli51 ,HJpr~lNem :Jltlt !.(l~'hé1'alre' iu'fle - ..vblbnt' blteh a~t~
.'
�~ . .n,-[- J! l' VEN C E.
~3
;cl.ç, c~ll .te4~e4"\~ -é.cr,i~e ,de tg ~lljl.\ du
tellateu~ ,. &; t~Q4v.ec; p,lltlW fe.s, pap~eri', éloig,lle ~I}cqre tti~
çoù~P'[I§. ,\u"l~~elr, ~;'ge' ,du: tt;~lat'e4 pep,urfoi. do~n~.l: Jiti\!. i
, l-e 'rep.rQ,c1j,e. fll,if . ~u
~eyri~r de. ~'a oi r .~H~irlt f.ai:l:
~'ililvelf.ç~ire ;'i1,'eH \~lalif ,~u'~,(on aRrIninifi:r3tio.n;, i,\ n',! ,\\1.7
'(1un r~p'port :a.vc;c,kJuggçL;iol,l,; il fIt d'9~le",rf' p;ÇlH~f-jeu)' ll'1jl
tellanie·l1t. La rémifl10n des .17.'1 \oJlis 9Ut;,Jî ~~•.-PolJwier
a faj~ ~IJ. SI': Mertie!-~,:&.q\le PtlH\.. ~i '! qit 'ly,~i~.1.ie~':J &f dévôt ~ n'il é~aleme~t ,nel). d:~. r~rpet;,~ il: a. r~, 1,lJ: ,MW@fn§1}
~)çftinc~, d:un ti~!:~ 'J.,&;' il·.a,;re.l)4~ F8m:p,t~,: ~e(!I't;Ai~i~;lI:T
t.lOn qu I~ eq;lavoltJalte~
.rpf\l~~
~.€frAJfl'lr-:rs~{'llsi!·ql#,e
le teftateur a...oi~ llne confi,àpce. a,vfugl,e '!I}' pr.'.Jlr1l1>}5ti,e.ft
(lelui-ci a NU, ':),bufer de ce~le;, ·,,()..,n~l\nC;\il-.; ~'1oj"l ç;lt, n'eU-là
q~'ll,ne ~?ffibiht~.i ,3[UCUll.?.e clis .Jf~jGSl p~ ,lel)~' ?il'q&eJil:l;li\t
~ J~r,ouver qll:Wl, a. ·~w,ploy.e qUt}\51uesj'moX~\ls,I1.t!C}.t'Çs ~~ q1;l qn
'1 faIt que!qu~ dém'\r.che pOUF. cap,ter ~9- \\0lonJe â\lc teHiI,. .
teur, que les difp,o{jt~ons coocenl,les Q.aljls .~~~ tYLt\l;m~\ls cj;e\l~
il s'agit n'ont pas été ceUes du, Sr. ff1urnie.f- i <$:' ~\l.oiq!l:~
la nature de ces difpofirions falfe I\aîr~e des [OU,P~~Il§ d~'1
çiJes. ~ diffiper, quoique 1':1ge du ,efraje\lr "doliln~ ~ çes
foupçons une- nouveJle force, quoiqu'eflfi,!!: 1'~1VIpj.r~. 91,1 $5.
Meyrier ajout.e à une apparence de ,vé.Jjit,é'iju'il~ rOfI,t d~ja, jl
~e paroît pas qU ces di{pofitions puj,{[~l}t â,F;"e ,dé~ll\(ées
nulles, & que la, preuv.e de fuggeftlen ~u~ dpir ·en <:lpéfl:r
la nullité, foit complette.
.
.•.M;a-is d_oit-on admettre la preuv"e de- l,liJfér-ens faits ·q.Q1l la
Upe. FÇlurnier offre de puou\(er- pa,r fe-s tills {uhfid~air"es?
p:eu.t .ê,tre dangereux de foumecrre à, Iii foi d~~ témoibs
la validité d'ù~ .aftequj ~le COJ1,ticl)ç d''lijlelll>S a~cp1lJl JUIl,.
ijré 'en lui-même ;. c'efi expofer des MrilieJs;qe;fl:a.nlftltaiF.fS
li 'la vexation &"à III calomnie; Il1'ais, il imp,orte ,auffi à la
(ociéré ,que c~s, 9ifpofirions c;oJ1tnair, s ,au d,toit de la na..
tUre'", q,u'lInc avidi~é impoJtuq~ &: ,ej"pç\,ie.ux ar1lÎfi~es .pbtien..
n,eJ;J.t fouven,r d:un t ftaceur, foicpt :lllléaptics; :.que CeJ; fug, gefl:iQns qiminelles 'lui a'ppone,?~ ~1L rroJlQlt & J.a,diliifion
. dans les familles foient foumi{&S
la difçullion fé-vere &
qu jug.ement rig9~mll' ges. loix•
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Il 'eft de maxime inconteltable qu'un commencement
de preuve par écrit n'eft pas néCe1faire pour être admis à
la 'preuve' des faits de, fuggeftion~ Si éelui qui demande à
,'être admis à cette preuve préfente dés faits 'graves: s'il a
en fa fàveur des circonftances qui font foupçonner la' fur,;'
prife ou la fuggeftion , la preuve doit être ordonnée; c'eft
l'opinion de tous les Auteurs.
'
Potier dit que.la fuggeftion peut être prouvée par écrit,
comme par lettres J'écrites au tell:ateur 'que l'on aura trouvé.
parmi' fes !papiers: on pèut 'auffi, ajoute-Î:-il,. en admettre
la preuve· par témoins,. lorfque les faits de 'fuggeftion articulés par l'héritier font bien circonfianciés:
Les Auteurs quïconnoi1fent notre Jurifprudence foutiennent
la même maxime. Si un tenament eft le fruie de la féduction & de l'artifice.,. il peut être annullé comme fait par
une perfonne qui n'eft pas cenfée avoir eu la liberté de
jugement néce1faire pour tefter; & la p.reuve par témoin$'
de pareils moyens doit être' admife fuivant les circohftances
'qui peuvent y déterminer la religion des Juges.
D'après Furgole,. la preuve des fa:its de fuggeftion eft
recevable toutes les fois que ces faits tendent' à prouver que
les d'ifpolitions ont été furprifes par dol, fraude, artifice,
inftigations frauduleufes, capables d'avoir déterminé le teftateur à difpofer contre fa volonté j & cettè preuve peut
être faite par témoins.
Ces principes ainli établis" Monlieur l'Avocat - Général
examina Ji les circonftances de la caufe rendoient la preuve
admiffible, & fi les faits que la Dlle. Fournier offroit de
pro1,lver, étoient! concluans. Il eft certain que les moyens
de droit,. tels que l'incapacité de l'héritier, la nature de
la difpolition, &c. pouvoient dans certains cas ne pas
fuffire aux yeux de la Loi,. pour former une preuve com-,
plette de captation. Mais li on ajoute la preuve de faits
graves,. fi on réurlit les moyens de droit & les moyens'
de fait, il naitra de leur enCemble une preuve eotiere qui
s'élev.era contre l'aél:e,. & qui le détruira.
Parmi les différentes circonfiances ql;li rendent la preuve
p.~S
�PA L.i.l S'~ IJUlU IbR{O VEN C E;
,t~
" paf! témoins: rec'èvame~)J 1 m'en, eü hptiirit lle)pllls:'guVll [que
,ce.lle'J~f,"ne ,.difFofitinn' qui crintralnie:.les ddcilits Ge: la o~tllrè.
J.e? J,~~lb .rejeJl;llnt à. <la~vérité, les, plainteS" d'iii!) eitfirlf-t "qui
nu
a ceçu fa légitime, lo~fque fa réclamatiolJ)i~glrel Il"ieil: fbRd'4e
J.i,g; ) aljCun 1n9tUI ...: JIWIis~a~rfqilil.;.>adnanHe~Jp prodvë"
ue
.cç~ cljJp,ofitiap'~j:ÎJljuaè5' .qu~ lell priMnt •de lla'(rfuH:effib'ID.>ljlaernelle , ;n'Qi'lt ~gjnt bété' br; v~wnté ')de "fdnrl:pe'llè ,~lVelïès
fopt Je frl4it EPi:( l'$ibfeBion &3 . de'llirrtrigué>; finies. tfiicr ~11~1
~r~içl4eo~follt graves, itouJ_eJdi~ilque'1a'preuvè cenlofo:iO adrori-fll,iritP\l:Ç-· r,eclame 11:0ÎJ fal Lfavcmr ,ïFlam;atmle noncj:J6sOIl&.iic
6,flCzd#i iatqesJ 1)1<1 fQ.Ciété J4QnllJli'à(ljtéi:13EBfex.ige~U"lJnaspdiK
[91itJ:'~~J1[e.rvé!;: <ta (ts de.s u{aroillcs";il&'; ql3'e::1' ardnt rles l: p~GL
l'riÇJ~slne. (Q,i,t ;'Pcditlt lint~r~«e.ti. ,)fl~: b ~')J :Jb Jopiloiq i)
.':L'a~mj.piitJia~ioÀ d~ér~eJ:,àuu8r.LMeY!l'je!; fufpe4l: <pa lfo~
:.éF~lJfJ qéçlaré, B'li' l)a sLoi .inl:ap.ah~)rdli'lf~œvoir:1 auqllteilH(:
pof!ti
~Ï!i IUl).~inq iQl:)froapp.àfolt( de:diJ~èlil:ian :J;cil \lft.. d!Qitl.
leurs étranger 'à :Ja fi.\rrti.!lè~4QOtefiaièuf,.:àl cilIle1,denllhéri;ûill'• •
QLJel, m~ltif '! ')PUjrq~~)ljl!ll\iberbleiathoi~ dw !il. 2Eouriüer ?
Pourquoi le 'Sr.' B.lan:é·~, ,ps:r<' de '1IM.diaer;~ ·.adliürliJlllatoeur
<le fa pçrfonne:,& .dpl"f~s)-bi~~ "IJPloJll[ltordreflqulind:i~erit
~e~ r.:ç.,.q' xn :l.n:a-t,il1rp'qs "çt6 J (cJ;iar;g/i·.de'j çetteuaHmi;ni1Uatïan !
<:;e 'ie préfé!ie,nc~ ·é).;ogpe of eJ~ 'Fafooki~!a~rfl1rtllgulieœ , ;e~~
fuite",.eIJ!'4ait Il:llrrf ·.qes, fPPP~<m~? I.iIlJi} , viS Ij'up i'.~m
,.Si VP'q, w,Çlfi,ger!" l~éW 't~\k r5r~~Cf.rice. ,~iarJdhbflit1lllioiJ.
faite en faveur dè fan fils, quelque modique, quelqu'illce'r~
taiqe. qq'ell~ [pit,' ;re~d 'lés', fO.ùF~OIl9 eti<l0,felcplus ~v.io'lfn5.
5~ ~o~; R~, cqu,rt, tc;.t\ab:l.e~,u"1e q:~\<1i.Jfé.~nt~ di,'p~tJons..!
on 'l,' It,
ply,s.,gr-il'Pc!,e " p~,rtte \d:UQIl ..fort\#le;, \eu~vc:el [a""
caifon à la fille au tefl:ateuç ,;,dotln..ééH~ \.!,nlll'l\.e... ('~noe é'mn.,.
~5re,,!.& 'rJgie,r.pend.~nt'l n.,à *3 ans;lpal<()~e)'j~r"H'MeYofi~r;
~trangt.r ...~tl teLl:ateur ~ à l'héritier·;' & ,û\ l'Mri~i.ei meurt
,!t~~, ,~H efe ace de teins, utlè poction l' da bc9tteicf9i'fun~
1a-l~Jie l~ ~a,. fille., ep:! fi.ID pie" io~ i!f.ance ,:' !eH~JpellJ .prop.ri4ré
a }v~fyrIRr
qUi pt4 s, favon(é q~ 1" ,i1 lll<J ;ç\",ltll.ft~t~:Yr
pour~~;., après iP.;oi;~, 'J~ui" teÇl .difpefer ~, fsm: grék SI:l).,'51fi
joiot les préfomption~rqui .ré(ult~nt de rétjlç .qll
~yrWjj;
&' de t'fige du teLl:at~ri Cl 11'0n . ré}mitJ)~s .l5!i~ç;e!J,§ f~iC$
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~'flIl'~~(I~E([.édttqdaltgllnux Iqq 'Ie:"Sr~" Meyri'er ~VOlt
,f1j1j;[(i)11'é[pJl.it., j.il elP réfulre des iapices,qui,.oort-. [é~lement
ifeJld~.ntl}~ pré\lve ;.adrrlifIiblè ,; mais 1 qui ,fo;n,t ~ême dell:r-e~
di~;t:I:li: fOl
~mp'}ie:.v;" WIJ ':l~ll ;} ~fJrjlnoI t ~rr ilig!ll f' 1J 111
~lJpLe5v&j1~ qù't:~ 'la ~1J)lle. ~Epbmiieeil;rllticu'l't' ,nfont-j[~· cën-
~l:Pa:tl.s;?'3J)eb~1foot ~llanvepusl~"
te;f lJ;tiH~fItli)à:cdJifcut~
"{fe'fè peffda~t
;[a~~ernii:re>::Jmal~djS7" ap'rlèsrqll'y,i,l ;eu~ ;f.àit. fon'fdl:-amentl()l
.!,r.ûÙ<:ilop-p;oG:1 ID1CF _faiop qll~Il:, eihoJinfuffillm~ :;.<béa'nm~{n~
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tient ~[àr.fëffim'!l nferrn'éè'
,qhqz s!luiufd!.c :l"!J-txdaiffè: 1p:olntHapptoè~i-l cl eUe2 'tes'p<irebsJfI&
.1èsq amis prlun'.ëtrep picf[C(rRsj[itltlf:qu~Ueëfai fon, JteHllmê~'i;",.
fi. profitant de cet éloigneraient' ihmJiloie 'to~té 7foFtè- l de·
~.âreJfe~ fpuiir'Ja 'I!'orter à..l'inllituti~~lèrt hérîtle'''l llf!e'l:l'r ré·
21,Y,~'I!J1e,htte:cha&rée~ëebI8l,èham.lJrè 1jdeilr~1)
Imam
1
.:j.~tliC«I~')!M~dan~,:lCJ.u'il~}les~rnpêch~)de. fa. oir;~~ f0i~)o.u~~:
.ti:inll:lllfl, rOtt. fe:creN,melUb ,JIe
e ,c~s HlldJlJvl'i!ies t cl IlioU4.(lcù:lh'xl(!nllbib Ifu Gr ,fJfO'tiè~fllfpea~s! de Lllel.·j~"glILll~ G "~I
~ 'l:$,indaos :00 oaS œ;ç,rlmriûefl!~1foup~oti-nêJ'klél f'pàîid ,"&
{lloa~B.jlcir!if.tre J,15fÏ'fk d'U :ltefralêl;lr tef.l:M éf6ig"rfée~! &- quéJ~
:J.Cl(}1têulli~ct{hlintO~r.éJI~~1l ~d~' .~érlb~ès:?ét'r~tiJgh~s? ::.
'. n~I1f;I:,e;:S.r~ ili1011mre-r::Jfem;~ng:n<>ICllfl.u ?Mgt:~ l[U-r r\ç ttefPafnept
"lh.quli~
,1
JllU'Q'Îl\. qlf~ '(::iëltiii:l rlé :èJIl:'àmê.iir''&''iln~·fq'ù;,
mais qu'il· avoit fallu qlf'~Jr'~ ({<fi à-.Jfi ~J.s'iF 1ÎouI6i' ,>o. ~l
:lal1Î)i'Ç;<
'1'
.éuieua1fàddbnirlé &in~ifas'l?noU~r 'f~ri~ ,te'ffcours ~J . me
-dlellu'~lIp[?lJp t ~ • .i ,om ::IL -l'~I' . : '., '(1,1:'" " ,~.'
-. 1 •
•- 3P 1 L3?lJnptl:\lft1~e~ FbllîUlë di[lhJv :"~l Ira' Dile: Mon~);he
[6!.:'fiài'!îr,des 'itèjtOOz'.e;,ii fiât;; p~r ~p)zlpef'''J ?l;'P~/J{lil efzOfm!i.
PÛt} uJz.V(fua~riefrJe -,:dr -l6qùél ib· '!RS lo/i·qàïjèFa rien i,l& Jzfi
-6sMM& ~ar.ioui.Dà'RêeJ ~tPifj..rttw)a' Ugù'êe.::Jl • :. .
. ' . LI j; co 15'1
{ 'l~epdèuJélcpr~pos[~t<ibfi:l1tfnt leS 1 règrets~,odu:ldenàt"èur-c "&
JeS'~rn.dialsi·.dt!'1fûg-gé-fl:iQo.; Fer'neJ'~ ~ 'dans' fan Diél:ionnair,e
d«[JDtoitlj&:)dc! 'Prâr~ûê"; Vf':'SuggeftioH-;' p'~.rlan'~ ges ~àif~
féren(s>lfàits~q~~);eu",é'tj:EII~~re\Japtîl~:à' \11' p:re~ve', p~e1ib~'i!
fa~t>' :ÔUllrli~lfs .aP1;'e~~voi~: 'l:lu·· 6Œ(!,~: rtèl~:JÙr :1 . ~ib "e~
d:lt Aelt).... ~&u:tén~ri'trlilr&(WIYx rm (P.O.fitl0 ns' ,:,qtl'tl: l! l'faitt's l;-:&lati .l;ôt~ d·... eeuxrllgllqli\!.~s: oôl 1rjHl]Jlft'c.)là fl WŒliil} ~
tige aer"\;ët-~artificé ;qUil 1 fdnla~rrfe;,L' L
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�D U PAL AIS .r D EU 1/ R 0 VEN C B.
~
.. Ici, d'une part ,.Jes· difp.o.ficians du- t~fbament follt~f.ll(..
J'etl:e!i 'par leur na.ture lj les perfonnes' qui .ont' entou-f-é ~
t~f!:ateur dans fes derniers mdmens , dOnrlént liel,l al,lX plus
.grands foupçons par l'empire ahfolu qu'éllè'S ont pc êxer.cer fur fan efprit ; [oupçons que 1a Loi même aurorifc ,. .&
auxquels la nature des difpofitions & pluCieurs faits .donne"nt
Ulle nouvelle force; de J'autre, la preuve des faits ef!: ad.1l1iiJible & concluante. L'intérêt de la {aciété, la tran'.quillité des familles réclament contre ce tdl:ament; les cir;cpn{!:ances ~e la caufe ne font pas fuffifantes aux yeux des
Loix pour les anéantir, mais .elles le font .pou les foumettre ,aux recherches les. plus exaS:es... • If "
.. :;
M•.de Maga!lon conclut à ce 'qu:en concéda-nt aéle 11.
la DIIe. E~ur.i:lier Montagne ·de l'aNeu .fait . fur le' ~atfeau,
tant par. le Sr. Meyrier , que par le fieur Blanc pere, que
ledit Sr, Meyrier étoit nanti de toutes leS .clefs pendant la
(}erniere maladie du Sr. F.oumier j qu'il àvoit de ' plus les
.170 louis (}~rgent comptan't,' & Aulil
Lréclamer quetques jours a>Jant La mort; :av,ant J~ir.e '.dfoit -à. la- Requêre de la DHe. Fournier, du 12 Février 1778', aina
qu'aux ,fins .ampliatives prifes par die [ur le Barreau, fur la
caifation d~s deux tell:amens des 8 & 21 Mars 1777 , aux
.chefs concernant les ,Srs. Meyrier &: J.i?ierre - Dominique
Blanc, fans préjudice du droit des Parties, ni at!ribution
.a'aucun "nouveau, fous la ;réferYe' dés prèùves extant~s' 'au
.Procès" la DUe. Fournier Montagne vérifiera dans. trois mois,
1 0. qu'die fut expulfée de la chambre du feu .sr. Fournier
fan pere pendant [a derniere malad~e , après le teltament
'par lui fait j 2.°. -qu-e le Sr. Fournier étoi{ fi regi-et~ux
.des tell:amens qu'on 1ui avait extorqués, qu'il le témoigna
.en düànt qu'il avoit fait le tell:ament d~n fou, mais qu'il
.avait fallu le faire aina, fans quoi il auroit été ab.andonné
1& feroit mort fans le fecours d'un v.erre d'cau; 3°. que
Fourniere , mere de Blanc, foit-difant héritiere ~ s'-elt jactée
de dire que fi la DUe. Fournier Montâgne fe plaignait des
,trois teftamens faits pat fon' pere ,'elle lui en feroit faire un.
'luatcieme. qui la dépoui!leroit mê~ ~~ )ajr~allce- à e~l:
.nt
~
-
.
�a ';, lr '0 U!TR1 N
:r. .1 :,
l{gu~etr;~ (allf Âa; prellyeH)ont1:aire J ;?~ ~ notamme'ot qiJéf !;I:
Pile,. r1\1oPt~n~ ia,)toaJjol1rs1Ft;HéJH,!ns'll'appartèmen~ de foh
pere, jufqu'au,rmom nt ?demfa lmOf.lf!; & <'qUé' d~ms l'inter:.
valle, elle entroit & forroie. pour fes l affaires:, fans qué perf9nne l',ait expulfée ; '40. que le, feu SP. FQurnier avoi·t
adopté ,p;!Jbli.quement'l Dominique ,Blanc qu'iL menait avec
ly! da)1~; 'L~6 ,rues' & _places, .même .çlan? ,les.;repàs publics,
& 'qu~J »ubli@it commé [on~ hé'citier Jpréfomp:rif.; lX fina-,
I~m,nt Acu~ ce fut 1) jours avant lia.' mote' du 1S r, .pout:n~er
que le s.r. ,Meyrier fié !l'rendre; à la:.jJi'iere dudit Fournier,
..çhez, t~ DUe. Montagne,'deux malles' remplies:' d'effeçs, apparteoans au' défunt, &) les' fit, 'po:rte'[ danslla marron 'de
'Ce~..d.ernieri':FQur lefdltes preu\:eSJ ~apportéeSlf ~u fau~oe dd les
r~j;lpqnér.,. être li:!éfinÎtivemetlt ,d'it;;droi,t aUXl!,I1artiesll :
_,J')'a~"Arrêt prononcé par M. le premi~r Préfideht! à l'Au;..
l.ç leoçt; qu rôle du I} Mars 1779, la, Sentèn.ce ~u. Lieutenant
,<:\ç :To llqn fut confirmée, la DUe.:- Fournier .fu,t,oondamnée
.~ l'sIt11!;nçlt; ~u 'ifoll appel ~ à tous lesl'dépeHs " plaidans:
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.M.es.,!Gaffin ~:,Alpheranf & ~imeon fils.l.I' 'h
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T.efl'a11lent.Jol'emnel fans ~(/atef ne rlvoque' point 'un Te.f
,'tameiJ.! antùiew 'parfait" quoiqu'il Je fait écoulé un intei:"~ valle de dix, a/1s' entre. l'un & l'autre.
•
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...
,'l!TIEal\-):lap-tiRe.;;Rouxl1faid fon tefla!l!el1t' l'e 4 Septembre~,l~'Û:4i ;;[il, Légue? la . joai1fànce ..d'ullel,.partie' de fa' fucceG:~g'9 <.à ,l\1 afbJiiu 1 Roux,Jon Jftere.,Ji& inmtue p,Ol1t [(;)11, héritiere,l:;I'herefe' Roux fa. fœur, lui fubfiitu:e' fans ,d'érraélion
de qu~rre ,,{L,elle meurr fans l'enfans ,>Iean-BaptiileJBayon
!~,fqlJ[ln ,.&. à 1 fon défaut la. Dile. Bayon. fa fille, 'épaule
~e: ~!l!!~:,PauJl, :Maitre.,Perritquier. .' .~t
!t _ 'l' •. 1 J .Jt)
< Il fait dan.s la fui ré' Ul1~ t.e:fl:~nt J fol'emnel fans! date.,
JilUls; lequeL.. awès 'lv.oir -lég'llé la~ 'jouiffance 1de fon héFitagc
�'DI!' PROVENCE.
,,69
i ton' Aere '&.' 11 Ifa jf~ur, ~' en 'âvoj~ défemparé là )Ibs
-grànde parrie' à l'époufe de Louis Paul, il affeél:e tous fes
autres biens à' des' forldations- pieufes , dont l'effet eH renvoyé après l'ufufruit.
.'
)
MâthIeu Roux fùrvit à fa fœur; il réunit la jOll'ifTance
de toute la fuccefIion , & 'décede aprèS' avoir inHirué
<l'our fon hêritier Jean-Antoine Richelme' qui n"étoit J.point
fou parent.
, A fa mort, le Reaeur nommé aux fondations ptefcrites
par Je reHament folemnel ,denlande la défemparation des
fonds' légués;, Richelme oppofe le défaut de date dù teframent; formalité, efTentielle qui" d'après, l'Ordonnance, de
173 ~., opere une nulliJé irrêpârable \ au moyen 'de quoi
il prétend que Mathieu & Therefe 'Roux étoient héritiers
ab inteflat de Jean-BaptiHe Roux leur frere.' _
Mais fi le fecond tcHament Hf imparfait, le premier
ne reprend.il pas toute fa force? La fubfl:irution n'eH-elle
pas ouverte par le décès 'Jde l'héritier 'grévé ? .Auf? ' ,rJoùis
Paul, comme mari ex maître dès- drbits' & bie'ns 'de la
Dlle. Bayon fllbÜltuée 'à défaut de ion pere, fe pourvoit
en ouverture de la fllbHitution, &: Î11.cidemment en' dfTation du reHamem folemnel.
'
Le Lieutenant de Brignolle , par 4 Sentence du I I
'A6ût);r,,177'; fait droit à la de'tWande' dt! Louis ·Paul.
~' Jean'-Amoinè Richêline en appeJ.le pardevant la Cüm;
il foutient que,' quoiq~le' d'après les Loix qui foHt fous' le
titre des InHitutes, qZlibZls 'modis teflamenta1 ù:zfirmaniu'r ,
, il n'y ait que le tefl:amenc parfait qui puilfe révoqUEr un
~eHament, antérieu·r i ce principe avoir néinmoins foufferc
rplufietlrs' e)'cepriOtl5; la pt'emierb, éjuè 'l'e tdfament' IniÜ'taire imparfàir'à·héantir un teHarüem' antérieur padàit. Leg. •
fE de inj. rflp. '& -Îrr. [aa. teflani.'; la fecônde , d:après 'la
même Loi, le têfl:amenc.' poftérieur imparfait, 'qui appelle
les héritiers ab inteftar, tévoque l'antérieur qui 'appel1e des
E'trangers; la ti'oilie:me , 'lé- reHamè'n't antérieur dt 'révoqué
par le poftétieur imparfa,rt ,s'JI 's'6ft:. éèou\é dix ans' entre
le preqlÎer & le .{e.çoo<1', (L~S' San,imlls 27, Cod. de teflarrt.,
DU
PAiA'lS
�. 70
.
J
0 V R. N A L
D!après cette Loi; la fim pie 4éclaration, pe révoq1tion. I;'\lflj~
podr 'à'néantir une premier~, difpofition, pourvu,quo: la p~
daration foit faite ou .I~ar" écrie, ou en préfenc.e d.e trqi~
témoins.
Il cite Barri dans (on Traité des Succeffions, tom. 2 ,
liv. 10, tit. l , n. 33 ; Decç>rmis, tom. l , col. 1477 ,
~h: 26j Dupe.rier, rom •• 2., p~g. 34,1-- '. ~ tRm. 3 , "liv',4"
quo 1 S ; BonIface, tom. 2 , I.IV. l , tir. 1 S, C,h. 1 ; q qu
il conclud qu'il y a des clrconfiances où la nullité d!un
aCte -n'empêche pas qu'il ne vaille pour révoquer ce qui a
été précédemment fait : Ex ac7u nuLLo declararur l/Oluntas.
,
.
,Pou~roit-on exiger que 1e tefl:amenc qui opere cerr,e rêvo-.
cation fût lui-même achevé & parfait, pour pouvoir la rendre efficace? Ce feroit dét·ruire le fens & l'objet de la Loi•
.A-t-elle ordonné que le teHamenc poftérieur parfait détruiroit le tefl:ament antérieur parfait? Au contraire, .elle n'a
eu pour objet que d~ donner au tefiam.ent nul ou imparfait la faculté qu'il n'auroit paS e.l! de révoquer l'antérieur
parfajt; car les n:gles de l'ancien Drqit. s'y oppofoient, Çe~
}'ermes \:les Infl:itutes: Pojleriore quoque teJfamento quod jure
perfeaum eft, fuperiùs rumpitur, prouvent qu'il fa~loit en
regle générale, que le Iècond fût parfait pour révoqqe~ le
pre.mier. La Loi Sancimus fait exception à cette Regle-; 'e,lle
veut que le tdj:amenc pofiérieur , quoiqu'imparfait; révoque
~un teilament aptérieur parfait, s'il y a :db, ans d;incervalle
eqtrç l'un & l'a litre.
~
,
•. Decormis, loc. cir., obCerve qu'e nonobJ;l:ant la ;divérfité
:d'opinions des Doéleurs , les Parlemens de Paris, GreilObJj:
Touloufe, jugent qu'il fuffit que le tefrateur ait-furvécu
,dix ans au tellament, & qu'il n'ell: -pas néçelfaire que les
dix ans fe foien,t palfés avant celui qui le .révoque.
Il eCl donc certain que le fecond tefl:amertt, quoique fans date,
a révoqué le précédent. La Loi qui prononce la révocation du
premier ,quoique le fecond foit ,iIl!parfait , n'a point établi de
différence daps l'ordre des nullités; elle a accordé, indifiinél;eIl1,~nE tt?,Ll~ te~~m:~f .p'_~~rifll!: J .qll-oique nul. J I.e. P.9.LlY~!~
=&
�\
l
""t . . .
~ r DY; P A.LN....I.S. D'Il ~R.OVENCE.
71
'~e r~voquer ) a?téfl.eur, pourvu qU'li y ait l'intervalle de
·
dik 'ans : I~. nuU,lté opétée par l~ défaut.de date, n'a poïnt
. été exC"ep ce..., J.
"-.
1.
lU.·
" En v'aiK. ihvoqUe-fL'on l'a'ûtotité de (D~corn1is ,.tom. '1,
col. 1 S98. Cet Au~eur foutient . qu'un tefiament fait depuis
'30 ans ,', h'~H poibt 'j'évoq~é hi pâf" le laps de rems, ni
par trois rn·inures trouvées d'un -tetlament dilférept.· Mais
·des. minutes trouvée's dans les papiers d'u teHareu( :n'ont pa~
(IF caraétere de. tefiant nt 'If'il en' elf lautremè'nÎ: 'èl'ùi1 rê'n'à:'
}rièn~ ;~ul!. 'Q~Ç5iqb'é 'nul, hn~ ,Atte 'fait pârdevà'ot ~brai~~
nL1'r.ncupa·rivement,', 'ou' préfenté à Ult Notaire,. & fufcrit"
coriteb~nt)les difpofitiolns de',derpiére volonté d'un Cito}'e~'1
efl: -pou,rta'nt ul) t~fiamel~t, a caule, du c"on.cours ~u N otali
T
& .du teffateur ; mais tan't qu'il rèHe, dans les papIers du
•
11'
".
ï.
1J IJ lJ "
.l
l'
to'rr
'tellqte'
t, rl- n'en
teftament.,.
" ,parte que, le (efiat'eur, Il'a
_ .1,,",.....
.. 1 pas
j, 1 Il " .
encore 'manîfef1é' par aue,ure '9êmatcll~ e\.:rérreure ,'9.~e' ce
,papier, dû.t êrre fa de~niéré ~olo~tê.~'Un honime ~ peut préparer. foh ·refiament. & attêndf~ des' ~ems . &. des circon~- .
tance~ 'p~or . d?,nner. le 'carâae~re d;. rt.efia!l1ent à '1'atte 9r,U',ï)
': pr~pal:e~ U~ .pa~ler .r~nu fec,nit -? :q~0)9U'lr pane '!.a1'de::nomlllatlon de reHament, qUOlqu'd COrftle~lne lesi d,fpol1~i.9n~ ~'~ri }e~am:en.t:) 'h'eJ!:, ~éaft,m?ins qu'U1:.. 1 aél'e yré.eil,,~âtOlre, qUi n:a1!ra ,pas l'elfe.t du tëllament-, pàr'Ce qll'il
eff'linconnu, & que rien n'a' été fait de ce qui étoit nécefr~'ire pour c9~~are: que C'èf!, fréc~fétpe~~, ~à Ge:te .d).rpo'fi~
Elon que- le ~eHateu'r T'e(l: fixp. pour' qu'e'lle lOlt' e'Xecutée
après ,fa mort: m.àis quand le .reHateur a fait tout1ce' qu'il
fa~' ~pOUI: ihânifei:1~i!que' 't~I"pJpier dbit être! fa -dërrüer~
'j.
"
,
,; 01
. >J
1 l, n
d e te fi: ament, 10lt'
r .' qu,"1
)10 ante,. ce pap,Jer à. e Carauere
1
conrienne ou non tou,tes les autres form~s requifes pour .-le
h!ndr~ valâblè ~'& Î1 la' Loi attribue qiJelgu'elfet aux~ teftamens, quoique nuls, celui-ci doit l'opérer, tandiS' .que
le cahier ou le papier gui, reQ:e confondu avec les autres
papiers .du tefiateur, n'aura pas 'fè même avantage.
Louis Paul opporoit 'toutes lb Loix, toutes les Doctrines qui décident qu'il n'y a qu'un tefiament parfait qui
p,w1fe ré CUler,Ut1:I teilament antérieur parfait, & notamment
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Jou a If A, I i ) .
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là Loi 1 &, i , ff. de inj. rupt. ,& irr. Jac. tejl; lei §. 2, Injlit.
quibus modo te{lam. infirm., & DefpeiIfes , tom. 2, pag. 93,
n. '21 :'il convenoit e'nfuire q,ie la Loi Sancimüt ,eil,obfer.....
.vée en Provel~c~;f _m~is il (ou5e,ll;oi,t qu'~He J},e [ popv;oi,t, ètre
ap,pllquée., 1
1
J i , r'
'J
1 [p
tJ
11 tefhimén't (olemne! ,dans lequel le tefl:ateur a omis
l
l ' "
J,
~.'.
la date, .dl: nul même comme aéte de revocat)On , & ne
peut anéantir le pr~;nier.: r Quod ,onuJl~m: efi. , nullum pro~4ucit .eJfea~m:' La .L~i S9~ci~7Îu/;,~~,,;~??'~'e.'P.?i!1 t ~ - ~p.
.t~il4ITjent .nul la force ae rév9quer r~,';ltentju\" 'lr8uOlq}/ Il
y ait un intérvalle de dix ans e.ntre l'un &'l'autr~,; _ eîie
parlé ,'(etilement d'un aéte m-oii1'~ fol~~nèl quiïcon iè9,t.,la
de révocation '.ou la preuve
d'une... ~olônté
con'déclaration
.
}It
" 1
J.
traire; & elle veut que cet aéte foutenu par le laps) de
te'ms pui1fe ü'pérer hi' rév~êatiJn .. d~' t~ilariient ~ntsrieur,
parfait: Tune iirieum eft 'teftar.neht11m
t~m/e~ J;n't{cr'ùJ vo:'
1
{unrate, quàm ex curfu' teriipordti:
•
~ Il ajoutoit qu'il étoit certain qJè Jean - Bapti!l:e, Roux
n'avoit pas voulu mourir ab intejlat.; que fon intention
avoit toujours été d'inilituer tout autre héritier. que .fop
c. Il ' d
1 .JJj~ 1 J
,
,
J,
firere ; qu "1
1 la Olt
one recounr
au pnnClpe,
qUI nous apprend que la révocation atèachéé à un teila~ent dl: conditionnelle & entiérement. dçpendanre' du, fô' t de' l'aétli .
le teilateur n'entend révoquer (es' prêmieres ,difpoIitions
gu'en tant que les nouvelles feront ex~cutées ; Ii elles ne
doivent être rem·
i)
Peuvent rêtre, les intentions primitiyes
plie's :)donc le teilament folemnel fans date ne p'ouvant
av~ r aucuQ effet; li premier devo'it av~i'rj fon exécutio~:
; ':Pa~ Air~t' du 20 'Madt, aû rapport] de M.. le . è~'nfeiIier
de Fabry-Borrilly , la Sentence du Lieutenant dé Brignoll~
fut, confirmée avec dépens ; Ecrivans Mes. Leclerc &
~'~yma\",;De~ans. . l ' ., ~ ,,: :)
. : ' .. "r u'
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73
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ARRÊT VIII.
Le Fonds déguerpi eft réuni '~u Domaine direa, franc de
toute Hypotheque & de toute Servitude.
E
N 177) le Sr. Belfon fe pourvut contre les Hoirs de
Jean Al1:ier , du lieu du Chaffaut, en condamnation
de cinq penflons échues d'un Capital de trois cents livres,
& pour voir dire qu'ils purgeraient la demeure dans la quinzaine , autrement qu'ils feraient contraints pour le principal.
Par le même Exploit, il affigna Antoine Aubert, pour voir
ordonner que les fonds qu'il avait acquis des Hoirs Al1:ier,
par Aél:e du ) Décembre 1774, feraient fournis à fan hypotheque. Les flairs A(1ier furent condamnés par défau t.
Antoine Aubert préfenta & foutint qu'ayant acquis du
Seigneur, enfuite du déguerpilfement qui lui avait été fait
par les Hoirs Ail:ier , les fonds ne pouvaient être fournis
à l'hypotheque de BeKon. Aubert offrit néanmoins de lui
en faire la défemparation, ~tant préalablement rembourfé
de la fomme de 1781 liv. 9 f. 9. deniers, qu'il di(oit avoir
payée au Seigneur, étant déchargé de -toutes. les obl,jgatians qu'il. avait contraél:ées vis-à-vis de lui, & indemnifé
des loyaux-coûts & réparations.
Belfon refufa l'offre; & fur les défen(es refpeél:ives des
Parties, intervint Sentence du Lieutenant de Digne, le 22Novembre 177) , qui déclare les fonds acquis par Aubert,
fOll mÎs à l'hYP9theque de BeKon.
, Appel de la part d'Aubert: il difoit pardevant la Cour,
'que les biens déguerpis fans fraude au Seigneur direél:, font
réunis au Fief en toute nobilité, & afli-anchis des hypo~heqlles & fervitudes que l'emphytéote p~ut y avoir impofé, media tempore, pourvu que "le Seigneur ait rempli"
les formalités prefcrites par l'Arrêt du Confeil de 1637Aucune Loi n'a tracé une forme particuliere pour les dél
,K
~
�74-
J Cl U .. N A L
guerpilfemens; ils font toujours valablement fairs, pourvu
qu'il conite de la volon ré des Parties. L'emphytéote qui,
veut déguerpir, doit d'abord manifefter fon intenrion au
Seigneur: Defertar lundi priùs denuTltiare debet Domino defiderium fuum. PaHour, de lur. feud. & emphyt. , lib. 3,
tit. 1 1 , Il. 3.' Enfl!ite, fi les Parties fone d'accord, le
déguerpiffemeilt peur êrre fair par conrrat, même fous feing
privé, & par un aéte moins folemnel que le jugemen~.
D'Argout en fes Infiirurions au Droir François , \iv. 4 ,
ch. 1.) , & Loifeau, en fOIl Traité du Déguerpiffemene,
liv. S ,ch. l , n. 7, Les Créanciers dont 1es hypotheques
font emporrées vis-à-vis du Seigneur par la réunion au fief,
ne peuvent les conferver, fuivant la Jurifprudence du Parlement de Touloufe, qu'en fe fubrogeant au lieu & place du
nouvel emphytéote, & en l'indemnifant à plein de tout ce
qu'il a payé au Seigneur. D~l_à Auberr concluoit, 1°. que.
le déguerpiffement fair, par Marie Allier, quoique ne réfultant que d'une réponfe par elle faire au bas de l'Exploit
d'affignation qui lui avoit été d~nné à la Requête du Seigneur, étoit auffi valable que s'~l eût été fait FU Sententiam
luclicis. 2°. Que le Seigneur ayant, en exécution de ce
déguerpiffemen'r, t.enu avec exaétitude & précifion la Procédure prefcrite par l'Arrêt .du· Canfèil de 1637, avoir acquis avec la franchiiè de la taille-, celle des hypo~heques;
& conféquemment Aubert tenant de la main du Seigneur,
& à nouveau bail, les biens déguerpis ,ne 'pouvoit' être
expofé aux recherches des Créanciers de Marie Aftier.
Aubert accordoit à Beffon plus .qu'il ne pouvait prétendre, en 9ffrant de lui abandonner ces mêmes biens,
érant préalablement rembourfé des fommes qu'il avoit payées
& des frais, loyaux-coÎlts, réparations, & à la charge, par
Beffon, de remplir envers le Seigneur les obligations im-pofées par le nouveau bail.
Les biens réunis au fief par déguerpilfement, ne.recouvrent pas leur nOQilité, fi cerre réunion a éré faire -fans
formaliré. C'eft 'une des maximes que l'Auteur de norre
J urifprudence féodale établit comme -certaine, tit. deS' Biens
. '
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PAL AIS
DE
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PR.O VEN C E.
nobles, n. 1+ Mai. par la raifon des contraires, lorfque
le Seigneur remplit les formalités, les biens déguerpis font
par lui poffédés noblement, de la même maniere qu'il les
poffédoit, avant qu'il les eût démembrés du fief, en les
donnant à nouveau bail. Ils lui retournent donc par une
conféquence néceffaire, affranchis de fervitudes & hypotheques; l'emphytéote, non tam fibi quàm Domino,poffidet; fa
jouiffance n'dl: que précaire. Aïnli les hypotheques ayant
été créées fur le fonds, fans le fait du Seigneur, 'celuici ne peut pas être obligé à les purger, quand il reprend
le fonds jure- dominii direai.
L'affranchiffement de la taille ef!:, fans contredit, l'argument le plus vié!:orieux qu'on puiffe employer, pour induire
l'alfranchiffement de toutes les' alltres hypotheques & fervi~
rudes: il n'yen a certainement aucune qui foit plus effentielle & plus favorable, puirqu'elle ell: contraé!:ée au profit du Public; cependant elle dl: éteinte, quand le Seigneur
réunit au fief avec les formalités rèquifes; à combien plus
forre raifon' les autres doivent-elles être emportées? Les
Créanciers ont fu ou dll favoir, en contraé!:ant avec l'em,.
phytéore , qu'ils ne pouvaient pas rendre pire la condition
du Seigneur direé!:. En donnant les biens à nouveau bail,
il ne les aliene pas fans retour; .il fe conferve la faculté de les reprendre ~ans le même érat qu'il les tranfmet, fi les conditions de l'emphytéofe ne font pas remplies.
En foumettant le Seigneur à purger les hypotheques que
'l'emphyuéote a imp~fées fans [on confentement " & même
fans le confulter, ce feroit fouvent rendre illufoire la re.
:prife du bien déguerpi; le Seigneur acheteroit fon propre
-bien, quoiqu'il n'ait pas. ceffé d'en être Seigneur par la
-réten·tion du ~omaine direé!:.
•
Celui qui reprend fon bien -dans 1e5 cas prévus par le
Droit, ou en force d'un paé!:e particulier, eft incontef:tabJement plus fa:rorable que le Créancier qui s'efl: expofé
.vol(j)Rtairernent & fci-emmem à la perte de fOD hypotheque,
u futvant la iloi d'u,n dëbirel~1' qui n'av-ait fur fa tête que
K
2.
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JOURN~L
~
~es brens dont il (avoit que mille circonfl:ance~ pouvoient
le d~pouiller. Efl aUlem femper favorabilior caufa ejus, qui
repojcit rem quœ aliquandà fuit fua. AinG le Seigneur qui eft
oblig~ de reprendre [on bien, au moyen du déguerpilfement, doit le recouvrer tel qu'il étoit forti .de fes mains,
parce que la reprife a [on principe dans le tranfport primordial qu'il cn avoit fait en faveur' de l'emphytéote, tems
auquel il n'eH: aucun Créancier qui pût y avoir le moindre
droit. (Catetan, liv. 3 , ch. 36. )
•
Il dt un ca~ où il paroît ju1le de con!èrver les hypotheques, c'df lor[que la réunion au fief eft faite ex caufa
lucrativa, comme .Iorfqu'il s'agit de la félonie. ou de la
confi!cation; mais il n'en doit pas être de même , lorfque la réunion elt faire ex caufa onerofa: le Seigneur qui
reprend [on fonds, parce qu'on ne lui paye pas les redévanées, ou parce qu'on l'a détérioré, le tient à titre onéreux; au lieu qu'il le polfede à titre lucratif, lorfqu'il lui
eft acquis dans le cas de félonie & de confi!èation.
,
BeRon répondait qùe le déguerpilfement n'avoit été fait
p.lr Marie Altier, que ftlr l'intimation de la demande fol'mée par le fieur d\l Chaffaut, ID. pour la faire condamner au
paiement de J'l charges '1 panais 10 colfes & demie
bled, pour les arrérages· de cens & fournage; 2 0 • pour d'obliger à r~tablir les deux bâtimens torr.bés en ruine; 30. pour
.la taire condamner aux dommages &. intérêts réfulrants de
la dégradation des biens, &c.
Sur cette répon[e , le fieur du Chaffaut notifie le déguerpifIèment de Marie Afiier 1t la Communauté, lui déclare
qu'il fera faire les publications requifes par l'Arrêt du Confeil de J 637 , & qu'il réunira les biens à [on -fief avec
nobilité , à mojns qu'elle ne préfenre un nouvel acquéreur ou quelque créancier hypothécaire' qui lui paye les ar,.
!érages de cens & de foumage, , [es dO,mmages - intélêrs, &c.
'.
1u
La Communauté qui croyoit que le fieur du Chaffaut
vouloit réunir les biens à [on fief avec nobilité, trouva fun
homme vivant, mourant & confi[quam en la pe'rronne
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-n J!l
!P R 0 VEN C E.
77
d'An:ûiine Aubert, &t1e Seigiléur lu'i PaŒ,. v,ë'lùe des biens,
moyenna'nt le paiément des arrérages " de ce'ns , de fournage, &c.
La réunion au fief, par voie de' dé:;lierpiffement, abforbe.
t-elle les hypotlî.eq'ues' intermédiaires? Gn' pouvoït 'le croire,
lorfquc l'on fuivoit la Lor ides T,ombarè-s j le fief n'érait
poine alors propré ,à l'emphytéote ; il polfédoit toujours
pour le Seigneur qui le lui avait donné à nouveau bail: il
était alors conféquent de dire, que l'emphytéere ne polfédam, JX1s le fon<1s, ne pouvoit pas mieux l'hyothéquer que
l'aliéner; & que ruifque"'l'aliénation ,lui éfOit irrrerdite; il
ne pouvoir rlill être penmis'de rli:Y-potli~qlief', p,lifque l'hypotheque , fi elle ne .dégénère pas["~n aliénation, donne au
moins jus ad rem: mais ce ryHême qùi pourroit être vrai
dans 1''Origine des fiefs, a difj,aru du moment que les fiefs
font de.vénus patrimoni.aùx t& héréditaires, &-qu'il a ~té permis de les aliéner,' rauf·lé lods a'u ,Seigneur-. ' • \~ , _ ,
Dès-lors il a fallu adn'lettre que le,hS'eigôellt 'mettant fes
biens dans le commcrc'e , alltbrifoit'd'avatiéè les HypotR:e:;'
ques' que l'emphytéote pouvait y établir: dès-lors il ne peul:
reprend re fon bien qu'à la charge des hypotheques. S'il' e
,était autrement, que d'écueils pour les Créanciers! !que dè
préjudices pour le Commerce! Helfon cirait 'Hafhage , erffon
Traité pes Hyporheques, pag. 286 ; lLoifeau , l'oc." cit.;
li\'. 6, ch. 3, n. 6; DUl1loulin, fur lâJ Coutume de Paris;
Louet, lett. C, Som. ) 3 ; Charondas, en fes Réponfes,
liv 6', ch. 48 j Joulfe, en fon Traité du 'Contrat de bail
à 'rente, pag. 13 ~ & 167 ; Geraud " el} fon' Traité des
Droits Seigneuriaux, 'pag. ht4 & 3 1 7,'
r
: D'après ces Doéhines ( oppgfoit .l'Intimé) le déguerpif.
fement n'éteint point les hypotheques; il ne doit pas être
au pouvoir de l'emphytéote de réfoudre le contrat qu'il a
fait, & de frauder par-là les créanciers: Ne fil in arbilrit
debiroris, an res quam ipfe 'debirdr obligavir , maneal obllgara. L'intérêt public ft to.ujours le premier inrérêt; &
Cet intérêt exige qu'on lailfe fubfiHer des hypothequts contraaées fous la foi des acquiiitions.
DU
A'L Ât S=
,
1
�711
, J'Ct) U JI. B, J. J. qua
_ Le' Seigneur peut fe,ulemeo.t, daos ce ·,cas ~ oli1.j~r le
,créancier à difcuter le.s autres biens de l'emphytéote, ou
11 fe charger du bien déguerpi, en payant la. redévance
·portée par le nOUveau bail. Boutaric , eil fes Droits Seigneuriaux, pag. 277, & en [es Inftitutes, pag.· 161 ; d'Olive,
lîv. 2, ch. 1); Catelan , liv. 3, ch. 3 S ; Fromental, in vo.
DéguerpijJèmenr; Defpeiffes, tom. 3 , pag. 98.
Beffon ajoutoit que le déguerpiffement dont il étoit queftian n'en formoit pas un , parce qu'il n'était pas revêtu
des folemnités prefcrites. Suivant Defpeiffes, rom. 3,
ipag. 100, il fayt que le déguerpiffement foit fait en Audience" le Plaid tenant, parce qu'il eft affimilé à l'alién!1tion qui avoit lieu anciennement parmi les Romains,
appellée in jure Ceffia, qui ne pouvoit être faite qu'en plein
jugement. Bacquet., des Droits de Juftice, ch. 2 l , n. 2..'0'6;
Albert, lett. D, ch. &; Bor.pier fur Ranchin ,. verh. Emphyteujis , art. 6 ,pag. 166 Îll fine, font du même avis.
:' Pourquoi exige-t-on, cette folemnité? ParCe que c'eft un
aél:e que l'on appelle légitime', & qui n'intérdfe pas feulement l'emphytéote & le Seigneur; parce qu'il faut diffoudre le lien clientelaire; .enfin, parce que le déguerpiffement
peut abforber la taiUabilité; & il n'eH pas juHe qu'un arrangement auffi incéreffant dans fes conféquences, fe faffe
de gré à gré; la 'Procédure doit être publique, plus entore en Provence, que par-tout ailleurs.
Par Arrêt rendi! au rapport de M. le Confeiller de Gautier
du Poet, le 24 Mars 1779, après partage , (Monfieur le
.confeiller de Fabri Borrely, Compa.rtiteur) la Sentence
fut réformée de l'avis de M. le Cornmiffaire , écrivants
Mes. PafcaIis & VerdoHin.
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Le Pert qui aUJpri[e là Fille à faire une donation., à caufe
de mort, renonce au droit de retour qu'il alloÎ! fur la dot
qu'il lui avoit confli(uü.
Le Fils ilznitué Héritier contraauel & univerfel , ne peul
point attaquer cette renonciation, parce' que la dOl qui
devoit faire retour ,. ne peut êt~e comprife dans l'inflilI/tion.
"
TEan Lacroix, Négociant de la Ville de Tarafcon, marie
rill' Jean Lacroix Ion fils le 18 Oél:obre 1767, & l'infiitue
fon héritier univerfel , [bus la ré[erve d,e 7'000 liv., pour e·l,l
difpo[er en faveur des 'DUes. Marthe Jl M,!rie-Anne ,Lacr.oix
(es deux filles" nOn mar~e-s.
J,
En 1768 il marie Marthe aveç "le fieur" Pierre G.raffet,
de Tara[con , & lui confiitue en doda [om1t!e de 4000 Ji.v.,
dont 800 liv. en argent ou au prix des cqJfres ; il garda les
,PO? liv.• refiantes à confiitution de rente ~ en [upportan.t
-les lntérets au 4 pour cent, avec déclaratIOn que da!1.s Iii
Comme de 4000 liv. étoit comp.rife celle de 300 liv. pour
les droits maternels compétents à Marthe Lacroix.
Peu de tems après Lacroix pere [e démet 1:11 faveur
de [on fils de l'ufufruit de [es biens, fous la réferve d'une
penfion viagere de 400 livres; &, dès ce moment, le fils
'eH c'hargé d'acquitter la pen{ion des 3200 liv. dues à la
DemoifcUe Marthe Lacroix [a Cœur.
.
En Avril 1769 , Marthe Lacroix qui n~a"oit point d'enfans, obtient de [on pere la permiffion de dj[po[er de [es
biens ,. & elle en difpofe en faveur de [es freres & Cœurs.
Après [on décès, Jean Lacroix, co - donataire à caule
de mort,. paye pendant pl,ufieurs années li Jean - Baptifl:e
Gralfet, en qualité de mari & maître de la dot & droits
de Marie Lacroix fa [œur, la portion lui compét'l11t de la
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Jou
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penGon du capital de 3200 liv., & dans fa ruite il refufe
de continuer le paiement, & prétend qu'érant héritier conrra.:tuel de fon pere, celui-ci n'avoir pu, à [on préjudice,
confenrir à la difpo(ition de. fa, fille, & perdre le droit deretour
qui lui éroit' acquis [ur la dot' qû'll lui avait con[,
,
tHuee.
.
'\
.....,.Le ) Nov~fubre ~778,'; Jean-Baptifl:e GrafIèt 1 urant •du
privilege des Pauvres', fait ajourner Jean Lacroix fils par.devant la ,Cour" p,our fe voir condan,1ner au paiement de
la porcion qui" lui rçvenoit des arrérages de la pen(ion du
, 1
capital de 3 200 liv. •
Lacroix olfrit UI1' expédient, p,arïequel il fe condamna
aux arrérages de pen (ion, relatifs feulement aux droits maternels de la Dlle., Marthe Lacroix, & fe mit hors de Cour
fur le furplus des fin,s.'
- Pour Iè foutien de 'fa demande, Jeart - ~âptifl:e Gra{fet
difolt que le droit qe '~etour fut introduit 'Filr la Loi en
'faveur, d~ pere'qui , âprès avoir con!lîtûé. une dot à fa fille,
, avait le malheur de la perd re, fans qu'elle elit biffé d~s
enfanç de fan mar,iage. La Jurifprudence des Arrêts a enfuite 'étendu ce drolç de retour en faveur de tous les arcen;
dants qui avaient 'conltitué ûne dot, Qll exercé une libéralité envers les defcendants. La mêtP,e' reglê n'a pas lieu 11
l'égard des Co\.latéraux ou des Etrangers ;' cq.mme ils exercent une pme libéralité, les biens donnés font dès-lors af...
feél:és irrévocablement au donataire, à moins que le donateur n'ait fiipulé. exp,reffément le droit de tetour.
. Mais fait' qu~i) s'a&iife iup droit oe retour légal, tel ,que
celui du pere &. alltred afCen'dânts 'tOU d'un ,droit' 'de retour
Hipulé par 'le' donateur, d'ans l'un & l'autre cas il dépend
de celui à qui ce, droit appartient, de s'en départir. Lacroix
pere a renoncé à ce droit', en confen,rant que [a fille difpofât de fes b i e n s . ,
,
Un pa,reil confentement opere' nécc'ifaircmeÎlt ceùe renonciation: le pere, en au'torifant fa, fiUè , ne p,eur pas lui accorder une faculte illufoire; & elle' le feroit , 11' ra d ifpo,fition de la fille pouvait ne pas avoir fon effet.
Dupelîer
'
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PAL AIS
D E
PRO VEN C H.
8t
Duperier , en fes Maximes , titre du Droit de Retour,
femble vouloir faire admettre une diftinél:ion entre le confentement ~onnç .par la mere, & celui qui eft donné
par le pere: au premier cas ( dit-il ) comme la permiffion de
la mere ne peut ft rapporter qu'à la fubjlance de l'aéle, elle
Joit nécejJàirement emporter la renonciatiM'~au droit de retour; au lieu qùe le confentement du pereoé'tant nécejJaire pour
la validité de la formalité, il doit être' cenfè s'y rapporter
uniquement.
.
Mais ceere diftinél:ion que Duperier lui· même ne donne
pas comme certaine, dl: moins folide que fpécieufe; elle
.rient encore à t:es fubtilités du Droit Romain que nous
avons avec raifon profe.rites. Dans -rout aéte , il faut
.confidérer l'intention des Parties, parce que c'dl: la feule
Loi qui doit fixer & déterminer l'opinion des Juges. Or
le pere J en confentalH que fa fille difpofe par donation
tl caufe de mort, ne peut donner ce confentementqu'en
fe départant du èroit de retour, parce qu'il n'y a que 'ce
<léparremenr qui puiffe valider la difpofition.
Ici le pere étoit encore débiteur .de 3200 liv. du reftant
.de la dot d'e fa fille; & en donnant fon confentement , il
n'a pu avoir en vue que de valider la 'difpofition. Si la
DUe. Lacroix avoit eu des biens, autres que fa dot, on
pourroit foutenir que le pere n'a entendu donner fon confenrement qu'à raifon de ces mêmes biens; mais tout ,le
patrimoine de la fille étant entre les mains du pere, celuici a renoncé au droit de retour , en confentant à la difpofition.
Les Arrc~ts & les Auteurs ont toujours reconnu qu'un pareil confentement étoit un obftacJe à l'exercice du droit de
retour, & l'on n'a jamais admis la moindre diftinétion entre
le pere & les autres donateurs, parce qu'il y a dans tous
les cas la même raifon de décider. Graffet citoit Defpeiffes,
tom., l , pag. 394, n. 6, & Decormis, tom. 2, col. IO~7'
Cette 'opinion fe trouve coùfacrée par les Arrêts de la
Cour, qui ont conflamment jugé que le confentement du
donateur à la difpoftdon du donataire le privoit du droit de
,
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�Jou R }J A L
rerour; ils font rapportés par Duperier, par Boniface & par
Julien. Ce dernier dans fes Colleél:ions; verh. Donario, cap.
l , §. 3 , litt. P., en cite un rendu en 1666, qui jugea expreffément que le confentement donné par le pere· à la donation
à caufe de mort faite par la fille qu'il avoit dotée, faifoit
ob/bde au droit de rerour; mais cette renonciation peut-elle
avoir lieu au préjudice de l'infiitution contraél:uelle faite ~n
faveur de Jean Lacroix fils?
Con fuirons ( difoit GratTet) la nature de J'infiitution contraél:uelle, elle tient de la nature des donations entrevifs, en
ce qu'elle dl: irrévocable, & qu'elle affure la qualité d'héri. rier à celui qui efi infiitué; elle tient des difpofitions tefl:améntaires, en ce qu'elle ne produit fon effet qu'après la mort
de l'infiituant. L'unique objet que celui-ci fe propofe , efi d'af. furer irrévocablement fa fucceffion à l'infiitué; il lui promet
de n'avoir point' d'autre héritier que lui, mais il ne fe dépouille pas de l'adminifiration de fes biens. Duperier, rom.
2, liv. 2, quo l'î, examine quelle fomme ou quels biens
peut donner ou léguer le pere au préjudice d'une ipfiitution
contraél:uelle, & il décide qu'il peut faire des donations modérées & des legs en faveur de fes autres enfans, & que
quand même ces libéralités rempliroient au delà de leur lé.gitime, il n'y auroit pas lieu au retranchement, pourvu qu'il
o"y eût pas de l'excès, & que l'infiitution contraél:uelle ne
fût pas notablement diminuée.
Le confentement donné par Lacroix pere ne porte d'ailleurs aucune atteinte à l'infiitution contraél:uelle du fils, puifqu"elle a été faite fous la iéferve de ,000 liv. Cette réferve
efi étrangere à, l'inHitution contraél:uelle , elle appartient au
pere qui en a pu difpofer à fon gré, & qui conféquemmellt
a pu autorifer fa fille à en èifpofer elle-même; le pere a pu
fe départir' du droit de retour , & le fils infiitué héritier.
contraél:ueI ne peut s'y oppofer\ ; dès qpe le département d~
pere ne porte point fnr l'objet de l'infiitution•.
Lacroix fils répond oit que la permiffion. que le pere d'onnc
à un fils de famille d!: faire une donation à caufe de mort ,.
efi en quelque forte une formalité e.l'térieure de l'aél:e qui 11'a.
81
�DU P A LA 1 S DB PRO V B N C B.
83
rien de commun avec les difpofirions intrinfeqües. Il faut
bien diil:inguer avec M. d'Agueffeau, tom. 9, pag. 288 &
[uiv., trois chofes dans une donation à caufe de mo.rt: 1 o.
la capacité du donateur; 2. 0 • la fubil:ance ou le fonds des
Aifpofitions; 3°. la forme & la formalité extérieure dont l'aél:e
doit être revêtu. La permifiion du pere -n'a rrait qu'à la
forme extérieure de }'aél:e. Le pere 'par cette permiJIion ne
fait que donner à fon fils la capacité que la Loi lui refufe
fans elle. Induire de cette permiffion une renonciation de
la part du pere aux droits qu'il peut avoir fur 'l'hoirie de fon
enfant, c'eil: méconnaître l'efprit de t9utes les Loix, &
faire tourner, comme dit Dumoulin, au préjudice du pere,
les prérogatives que la Loi lui accorde.
.,'
La permiffion que donne le pere à fon fils de difpofer
de fes biens, ell: une derniere preuve de fa tendreffe; il la
donne ordinairement lorfqu'il voit que fon fils va lui échapper
pour toujours; peut-il alors s'occuper de fes intérêts?
l
Suivant Lacroix, il faut diil:inguer la !impIe permiffion
d'avec l'approbation- expreffe de la difpofition. L'approbation
expreffe, d'après Decormis loc. cir., peut feule priver du
droit de retour. Lacroix pere n'a donné aucun confencement exprès aux difpo!itions de fa fille, il a feulement
don,né la permiffion par un aéte ~paré de la donation ,mê,"?e j
& J1 n'a pu expreffément alW!oup.er lin aae à la redaétIOn
duquel il n'a pas affifie i \œ~C6îl'jh{tement n'a donc pu le
priver de [es droits, ,(l'autant mieux ~ue les biens qui devoient retourner au pere n'émjent 1'as les feuls dont la fille
pût difpofer, elie avoit fes droi'cS maternels à pouvoir tran[mettre.
S'il étoit vrai ( ajourait Lacroix) que le pere eût renoncé
au droit' de retour qui lui compétoit for la dot de [a fille,
dans quelle c1affe rangerait-on cette aliénation? Pourroiton foutenir· qu'elle eil: .du nombre dt; ces aliénations nécef.
faires ou favorables que nos Maximes tolerent? Ne faudroitil pas plutôt la mettre au nombre de ces gratifications
qu'elles réprouvent, parce qu'elles tendent à révoquer ou
à diminuer l'inil:itution contraél:uelle? Il eil: vrai que le pere
L 2<
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s'êcoir réfervé 7000 liv.· pour la dot des deux: filles qui lui
refioient à marier. Tant que ces filles ont vécu, les. 7000 1.
leur appartenoient, & le- pere n!auroit pu 'même les appliquer à un autre ufage; m~is du moment que par le prédécès fans enfans de la Dlle. Lacroix:, la dot de celle-ci a
dû r~tourner à fOI) p,ere, c'efl: un pien qui efi rentré dans
fon patrimoine; .!a propriéJé Jl!i en~~ appartenu, & il en
auroit eil la libre difpofition, s'il n'avoit été, lié par une
~nftitution contraél:.uelle précédente.
, L'infiitutio!J comprend tous les biens & droits généraleme'nt quelconques de l'inftituant. Hœres eft poJ!efJor in univerfum. jus, Defun8i. Donc fi. le pere .avoit un droit certain
fur la dot de la DUe. Lacroix., ce droit fait partie de fa
fucceffion.
Par Arrêt du 2.6 Mars 1779, prononcé par M. le premier
Préfident à l'Audience des Pauvres , la Cour fit droit à
la demande de Jean.Baptifie Gra1fet Olvec dépens; plaidans
~es. M~\Ians & B1=rnardy.
•
1
1
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l' 1t 0
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X.
L'Héritier ufufruitier doit donner à l'Héritier foncier UTl état
détaillé & par lui affirmé 'véritable de l'argem monnayé,
billets & autres titres de créance, Jaifant partie de la fi/capion, de leur valeur & du nom des débiteurs, avec déclaration Ji les créances exiflent' encore, ou Ji elles ont été
rembourfées.
'
,
'Cet état & cette déclaration doivent bre fournis provifoirement,
& fans préjudice du droit des Parties, lors m!me que
l'ufufruitier oppofe la, tràdition à lui faite des billets, &
qu'il a difPofé des fonds relativement aux intentions fecretù
du Défunt.
L'ufufruitier ne fatisfaifant pas ,& ne donnant pas caution,
l'héritier foncier peut obtenir des inhibitions '& défenfts
contre les créanciers de' l'hoirie de faire aucuns rembourfemens, fans qu'il foit légalement averti.
J.
Acques Gaucherand de la Ville de Tarafcon fait fon tef;.
tament le 5 Mars 1750 j il infl:itue fon héritiere Brigitte
Combet, fille de Therefe Gaucherand fa Cœur j & là où elle
viendroit à décéder avant que d'être mariée, il lui fubfl:itue,
quant aux fruits de fon héritage, Mie. Antoine Caucherand
fon frere, Prêtre de la Doél:rine Chrétienne, & DlIe.
Therefe Gaucherand fa fœur, avec fubfiitution de l'un à
l'autre j & quant au', fOl!ds, il lui fuhfl:itue plufieurs de fes
pareos; il prohibe la détraél:ion de I:i quarte; il meurt en
Septembre 1774, après le décès de f'a niece & de fa [œur ,
& fans changer de volonté. L'Abbé Gaucherand fe met en
pofi'effion de l'héritage, fait fa déclaration au Contrôle &
au Centieme Denier comme héritier ab imeflat, & en jouit
paifiblement pendan t p-lus de trois ans.
Le 1.0 Janvier 1778." quelques héritiers inflitués fe pourvoiei1t aU:. Juge de Taraf'c~n c,ontre Mre. Gaucherand , de";,
�"86
J 0 y a 1'" A L
mandent d'être mis en poffeffion des biens, & qu'il fera
accédé da os la maifon où eft· mort le tefiateur, pour y
être appofé le fcellé, & être enfuite fait inventaire de
rou, les effers de la fucceffion, fauf à Mre. Gaucherand la
joui1fance des fruits fa vie durant, en donnant caution,
fi mieux il n'aime que le produit du mobHier foh placé
avec fûreté & avec le concours des héritiers.
Lors de l'inventaire Mre. Galicherand fourient que le tef.
tament de fon. frere eft nul, & qu'il en eH:' conféquemment l'héritier ab ifltcjlal; que les effets fur lefquels on a
mis le fcellé n'ont jamais a'ppartenu au défunt ; qu'il a
rranfporté fes propres meubles, lorfqu'il ef!: venu habiter
fa m.aifon, & qu'il n'a trouvé appartenans à fon frere que
quelques vieux effets dont il a difpofé relativement à fes
intentions, très-peu d'argent comptant, ne pouvant fe rappeller de la fomme, & quelques papiers qui Ont été inventoriés, mais qui étoient inutiles', attendu que le défunt avoit quitté le com~e'rc.e depuis long-rems. '
Il déclare de plus que relat}vement aux intenrions feeretes de fan frere, & dont il avait fait parr à fon Confeffeur , le défunt l'avoit mis en po1feffion de divers billets
pour difpofer des fonds de la maniere qu'il l'en avoit chargé,
. ce qu'il avoit exécuté, n"ayant d'ailleuts tenu aucun état,
ne fe rappellant pas du montant de ces detres aél:ives , ne
devant même en rendre aucun compte, attendu qu'il !l'avoit fait que remplir les mtentions fecretes de fon frere;
il offre d'affirmer tout ce qu'il déclare à ferment.
Les héritiers répondent qu'ayant un titre légal, ils ,peuvent fans contredit exiger que Mre. Gauçheranp déclare à
ferment l'argent qu'il a trouvé lors de la mort de .fon frere ,
& le nom des débiteurs de l'hoirie, & qu'il repréfente les
. billets, lettres de change, livres , journaux & tous les effets appartenans au défùnt , qui ,. fuivant eux, avc;>it quitté
le commerce en détail, mais en faifoit un trè's-confidérable
en gros. Le Juge fait droit à la requifition des héritiers;
l~ Abbé Gaucherand fe réfere à. fa précédente déclararion, &
affirme. à ferment qu'elle contient ~érité, & qu'il ne, connoît
�P:R 0 VEN C E.
87
point d'autres effets appartenanJi au défunt. Les héritiers proteRent contre cette déclaration; l'un d'eux, ufant du priviJege des Pauvres, évoque la caufe pardevant la Cour. D'autres fubRitués interviennent; les légataires demandent le
paiement de leurs legs, & touS adherent aux fins prifes
par les premiers Demandeurs.
.
L'Abbé Gaucherand préfente Requête de fon chef, &
demande la joui1fance de l'ufufruit à lui légué; il offre un
expédient par lequel il maintient les fubHitués dans la propriété des biens de l'hoirie, & confent que les légataires fe payent aux formes de droit, dépens compenfés.
Le. 3 Juillet 1778 , les héritiers dert13ndent qu'il foit fait
injonaion à l'Abbé Gaucherand de donner dans la huitaine
un état détaillé & par lui affirmé véritable de l'argent
monnoyé , lettres de change & titres de créance exiHans.
.li· la mort de fon frere, de leur valeur & du 'nom des
débiteurs , avec déclaration fi les créances exifl:ent encore,
ou fi elles ont été rembourfées ; autrement qu'il leur fera
permis de tirer du défàut dudit érat toutes les induél:ions
de droit. L'Abbé Gaucherand préfente Requête contraire;.
& après s'être fait concéder aél:e d~ ce qu'il fe rapporte
à fa' déclaration couchée au bas de l'inventaire, il conclud à' être mis hors de Cour & de Procès fur la de.mande des fuhfl:itués. Sur les Requêtes refpeél:ives ,_ décret
.de renvoi en jugement.
Des expédiens refpeél:ifs font offerts; toutes les, Parties
.conviennent que les héritiers fubRitués doivent être main.tenus dans la propriété des biens ,- & le fieur Abbé Gau,cherand dans la joui1fance des, mêmes biens; que les legs
.doivent ê.rre payés fur les biens fournis à l'ufufruit. Mais
.quant au chef de la déclaration' exigée par leI> héritiers,
l'Abb' Gaucherand offre de fe purger à ferment 'qu'il n'a
trouvé en arg~t comptant dans la fucceffion de fon frere
_qJJe fa, fomme de neuf cens & quelques livres, n'excédant
l:elle' de mille livres qu'il -offre de garder pour le compte
de la fucceffion, fi mieux les héritiers n'aiment qu'il la place
au profit. de la, fuc&effion pour en jouir fa v.ie dutant " &
DU
•
PAL AIS
D li
�88
• J
v n. if A L
au bénéfice de la déclaration par lui faite lors de l'inventaire, il foutient devoir être mis fllr le fllrpllls des fins
de rIa Requête du 3 Juillet hors de 'Cour & de procès,
en jllrànt par lui que l'emploi qu'il a fait des fonds, enfuite de la tradition & des difpolitions auriculaires' de fon
frè~e, n'a rien de prohibé par les Loix, ajoutant qu'il ne
peut fa!je, aucune autre" déclaration fans manquer au fecret
le plu.s Inviolable; il compenfe ·tous les dépens; les héritiers foutiennent au contraire que cette déclaration n'dl:
pas [uffifante , & ne fauroit remplir leur intérêt.
'S"uivaÎ1~ eux, l' Abbé Gau,~J1erand n'a pu fe pourvoir pour
obte'ni"r 'la paifible joui1fancede l'ufufruit; cette Joui1fance
ne l\ri a' jamais été contef!:ée ; fa demande ef!: donc formée
fan'~liéç~lIité , fans cauf~, & même fans prétexte; d'un
autre côté, il confent ~u, paiement des legs "qu'il avait rerefufé comme héritier p'ur~ ~ fimple; enfin il ne peut refufer la", péclaration qu'ils t;,ggent ; elle peut feule fuppléer
à J2inventaire auquel il étoit' obligé de faire procéder. Solis.
ces difféfens rapports" il~oit être condamr:é aux dépens : l'expédient offert par Jl)S héritiers les ad juge, en entérinant les fins de la Requçte du J'Juillet 1778.
, En vaio, difent - ils" l'Abbé Gaucherand [outient être·
traditionnaire- des billets; .Roint de traces de pareille traditloo; foo a1fenion !J'e .E.eut lui fuffire: tout ufufruitier
pourrait tenir le même langage, & fe former ainfi lui.
même un titre qui le rendrait propriétaire d'une partie
de la fuccelIion;. la quefl:ion~ ef!: d'ailleurs jugée par l'Or. donnance rendue lors de l'inventaire pilr"Ile Juge dç.. .1f'J.rafcoo; Ordonnance qui n'e!l: point attaquée. Le ferment
prêté dans le Procès-verbal par l'Abbé Gaucherand ne remplit pas l'objet de cette Ordonpance j il dl: donc infuffifant.
L'inventaire, répond l'Abbé. Gaucherand, contient l'étit
que les héritiers font en droit d'exiger, c'efl:.à-d.jre, l'erat
dét(lillé des effets & papiers exif!:ans à la mort du défunt j
il a affirmé à ferment avoir repréfenté tout ce qui com-pofoit le patrimoine de (on frere à l'époque de fan dé.
,ès;
0
•
,
,
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PAL AIS
D E
PRO VEN C E.
89
cès; l'Ordonnance du Juge n'avoit pu porter fur un état dé·
taillé de tout ce qui avoit fait partie de la fucceffion de fon
frere , quelques jours avant fa mort. L'Abbé Gaucherand
déclara fur le Barreau en être Appellant , là où elle pourroit être interprétée ainli ; parce que, avant de décider fi
ce dernier état devoit être donné, il falloit que le Juge
pronon~ât fur la queilion de la tradition ; que!l:ion qui
n'avoit poim été traitée devant lui.
D'ailleurs, & indépendamment de l'Ordonnance du Juge,
la demande des héritiers cil ou prématurée, ou fruilratoire; prématurée, fi elle peut porter fur la difcuffion
d'une tradition légitime en elle-rmême; indépendamment
des circonfiances qui la juilifient ; elle forceroit l'Abbé
Gaucherand à révéler une parrie du fecret qui lui a été confié, puifqu'il découvriroit par-là à quelle fomme fe porrent les œuvres méritoires ou expiaroires de fon frere; inutile & fruilratoire, fi elle n'a rien de commun avec la
queilion de la tradition, _après le jugement de laquelle
feulement les héritiers pourront exiger cette déclaration ,
fi elle eA: décidée en leur faveur.
S'il falloit difcuter en l'état la validité de cette traditlOn, il cG: certain que la rradition eil un moyen d'acquérir qui transfere la propriété, à moins qu'elle ne foit
furtive: on ne peut pas appliquer ici l'Ordonnance des
tefl:amens: il s'agit d'une tradition faite pendant la vie ,
& qui avoit -pour objet des œuvres dont on ne doit pas
fonder les motifs; le défunt n'a pu en faire mention dans
fon te!lament; il éroit fait depuis vingt-cinq ans: le teftateur le regardoit comme caduc par le prédécès de l'héritier. FalIoir-il qu'il conlignât dans un aae public l'objet
de fes remords? Les Loix, d'accord avec la nature & la
raifon , condamnent un pareil fyftême. On peut difpofer
manuelIement d'une fomme pour des œuvres expiaroires ;
lâ Jurifprudence des Arrêts a protégé de rous les tems de
pareilles difpo!itions fecretes ; le dépolitaire eft feulement
tenu de jurer que la deilination de pareilles fommes n'apoint un objet prohibé par les Loix; & ,'eft ce que
M
�91>
JOURNAL
l'Abbé Gaucherand offre d'affirmer à ferment; il termina
fi;! défenfe, déclarant que fi foh f~rment pouvoit être rejerté, il ne pouvoit violer fon fecret, & que les héritiers
ne pouvoient tirer aUCune induétion de fon refus.
MonGeur l'Avocat-Général de Califfanne ponant l'a parole , obferva qu'il exiftciit un titre revêtu de toutes les folemnicés, reconnu par toutes las Parties, le teftament de
Jacques Gaucherand , preuve écrite d'une derniere volonté,
qui ne peut être contrariée par une volonté verbale. Le
long efpace de tems qui s'eH; écoulé entre le tefiament
& le décès, donne. eqcore plùs d'autorité à cette difpoJition nnale , loin de la rendre caduque; la' mort de l'héritier écrit ne change point la volonté du tcHate.]r; ce
n'ca pas ici un fils, l'objet des vœux de toute une' famille, &. dont la mort fait ceffer une "infinité de projetJ; ,'e.fi un collatéral à défaut duquel d'autres font appellés: le te1lateur voit mouLir fon héritier, mais il fai~
que fliln Bien paffera à d'autres parens.
La' tra.d·ition alléguée par l'Abbé Gauchcrand n~eft qU!1'
l'exception qu'il o.ppofe au teHament; l'allégation de cette
traditio{l ne peut èil, faire ceffer l'exécution,' parce qu'il
faut to"iours fe décider d'après le titre, & non d'après
-l.'exçepciQU\ qu'on. oppofe au titre: d'ailllmrs ce'tee tradition,
loin g'êne- conflatée ,. efi contrariée en drolt &. en fait;
en droit ,. comrpe faifànt la bafe d'une difpofition auriçulaire, profcrite' même en faveur de la caufe pie , par'
l''1rckk premier de l'Ordopnance des tefiamens, & comme
mife en· oppofrtion av.ec le tefiament de 17 ~ 0, qui n'el}laiffe. appercevair aue.une trace:, qui l'anéantit même,
p.aH'Il· ,qu'on ne préfume pas que quelqu'un tranfpone verbalement li l'ufufruitier le droit de difpofelr des fonds ,. &.
<tQ.110e ainfi ~ l'allégation d'une difpolition verbale lé pou\19i r de dépouiller l'héri<tier fQncier ,. tandis que letè!lateu,! peut manifefier fes intentions par éc(Ît fans tr,ahir
f~n fecreo, & charger, par- exemple, l'tlfllfruitier de' difpofer de: t-elle fomme reladvem~nt aux intentions qll'il lui.
a. CQofié-es ~ e,n fait, puifque même d'après l'av.eu réitéré de
�D U
PAL AIS
D Il
.P R 0 VEN C E.
91
l'Abbé Gaucherand, l'erreur commune entre fon frere &
lui étoit la caducité du tefiament de 17So, attendu la
mort de l'héritiere infiituée, & que cette erreur excluoit
non la défignation de l'emploi d'une certaine fomme pour
un motif expiatoire., ou méritoire, mais u.ne tradition particuliere de quelqües billets à celui que' fa: mort rendoit
propriétaire univerfel & incommutable de toute fa fortune.
Ainfi cette tradition n'exiHant pas , l'Abbé Gaucherand eH
obligé fous ce premier rapport à fournir à ferment la déclaration de la valeur de la fuccellion.
.
Cette déclaration fuoit également néce1faire fous un fecond point de vue, c'efi-à-dire ,. Hi. où: la tradition feroit
3éelle ,parce qu'alors, d'une part, cecte tradition ne pouvoit
être autorifée en droit ; & de l'autre, l'Abbé Gaucherand
devoit fe dire à lui-même qu'il n'étoit pas réputé par fon
frere même devoir. jamais être. propriétaire univerfel, puif•
.q u'il.le rendoit propriétaire particulier d'une partie de la
fucceffion pour en difpofer fuivallt fes intentions {ecretes;
qu'il n'étoit donc qu'ufufruitiet, & conféquemment obligé
à faire inventaire.
La déclaration de la valeur d'une. {uccellion, loin de
·contrarier jamais les mœurs, la xt!ligion., la loi, le refpeél: dû aux difpofitions diél:ées par la confcience d'un
mourant, & confignées dans le fecret de la confcience de
fon frere, dl: au contraire néce1faire de la part de tout
ufufruitier, à plus forte raifon d'un ufufruitier mobiliaire•
.Sicelui-ci doit jouir, le propriétaire doit au moins connoitre la. valeur & la confiftance de la fucceffion ; cette
déclaration ue préjuge. rien; elle conferve au contraire touS
les droits des Parties, puifqu'elle fixe à jamais une bafe
certaine , & qu'elle donne une. fiabilité précaire, fi l'on
veut, mais au moins utile pour l'intérêt d'une foule d'héritiers que la mort de l'Abbé Gaucherand pourroit lai1fer
dans la polition la plus à craindre. Cette déclaration n'a
rien de préma.ruré, ni de préjudiciel; rien n'empêche que
l'Abbé Gaucherand, apr~s J'avoir donnée, ne fa1fe valoir
M:z.
�'9 2
ra
17 Il. N A L
r
1
{es droits fur l'emploi des fommes relativement aux intentions {ecretes de fan frere'.
.
Refufer en l'étae la déclaraeion exigée P"T les héritiers,
ce feroie fans contredi·e préjuger con·tre le eitre ; ce (eroie"
pour ainfi dire', l'anéancir, & admettre comme preuve l'allégation d'une eradition dom il n'exi!l:e aucune trace; ce
ferait décider que la tradition. a été légitime, que l'emploi des (ommes a été bien fait.
'
En vain l'Abbé GaLlchera,nd prétend avoir rempli, lors
de l'inventaire , l'intérêt des héritiers ; on n'y trouve de
fa parr que' les cOlltradiélions- les plus fortes: d"abord iL
· n'a aucun compte> à rendre; il eH (eul maitre de' cout
· ce qu'a laiifé fan. frere;. il n"exifte pl,us aucun de (es effets;. il n'y avoir daus la mai(on que quelques vieux meubles donc iLa di[po[é fuivanr fes intentions;. là point de
'tradition de biH~ts·;. un in!l:ane après il a rom repré(enté ;
il n'a rien caché de ce qui appartenoie à fan nere. Ces
différentes aifertions. faites par [on· Procureur, (ont ra-·
· tifiées par lui fous la foi du ferment. Tantôt il eft propriétaire des effets, tantôt il eft dépofitaire des intentions
de [on frere, & d'une partie de (cs biens qu'il a faie
•paifer. dans [es mains quelques jours avane fa more. Rien
de !l:able dans ce- que dit l'Abbé Gaucherand, l'ien de
fixe .qui puiKe 'in.fpirer la confiance'.
L'Abbé Gaucherand ne péur invoquer la regle' qui veue
.eue les aveux {oient indi,vifibles
en matiere civile. ;. il a
.
( dit-il) avoué les billees ,. mais il:t ajouté qu'on l'avait
'~
.
.
chargé d'en faire l'emploi.
Quel recours' pou.rroir-il cirer de ceete exception? Il ef!:
prouvé par des aaes publics & par les relevés du Conttâle , que des [am mes confidérables one paH'é dans fes
mains; ce pourraie être de (a part une expilaeion qui
aurait pu être pourfuivie par l'aaion criminelle.
Le (erment de J'Abbé Gaucherancl. ne peut donc remplir l'intér&t. des héritiers, puifqu.'il ne 'Ieur fait pa,s C0nlloître la valeur de. la filcceffion,
Ce fermenll'. ne dit rien [ur l'exifrence des livres; il nl:.
.
\
�DU
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PRO VEN CE.
93
'détaille rien; il laiffe tour à dcf1rer; il ne s'accorde en
rien avec l'Ordonnance du Juge.
En vain il oppofe que les fommes 'dont il a à difpofer
n'ont point une defl:ination prohibée par les Loix: il ne
peur faire valoir cette exception, que lorfqu'il aura été dé-cidé que, la tradition qu'il allegue ea valable. Mais il doit
la déclaration exigée par les héritiers , par cela feul qu'il
ea ufufruitier. Le titre doit être exécuté en l'état, n'y
ayant aucune trace légale d'une volonté contraire. C'el1: à
l'Abbé Gaucherand à faire cette déclaration, fans préjud ice
de touS f~s autres droits; elle ne' préjuge rien. Les héritiers ne demandent pas la déclaration de l'emploi ,des
fommes, mais ceHe - de la valeur de la fuccelIion. Tout
exige néanmoins une réferve dans cette déclaration; la r~
putation de l'Abbé Gaucherand, fes meeu rs avant la -mort
de fon frere , fa conduite depuis cet événement, le Teeret que
fa poution peut exiger fm certains objets, l'honneur de fon;
frere, & même fa confcience ; l'enfemble de ces motifs
ne permet pas de regarder la daufe générale comme fuffifante , pour laiffer les chofes en leur entier, même après:
la déclaration de l'Abbé Gaucherand, & réparer, s'il efl:.
poffible , la confuuon qu'a fait naître t'erreur commu,ne'
par Ic défaut d'inventaire qui auroit tout éclairci.
Monficur l'Avocat-Général conclut à la réception de l'expédient offert par les héritiers de Jacques Gaucherand , en
y ajoutant que la déclaration & état déraillé dont s'agit ,_
feroient fairs & remis fans préjudice du droit des Parties, ni
attribution d'auC'un nouveau, & fous la réffrve expreffe de
toutes prétentions, défenfes & exceptions refpettives d.e
droit & de fair, qui pourraient compérer 11 l'une ou à
l'autre des Panies ,au fu.jet de fa tradition allégùée Far
l'Abbé Gaucherand, & de, la va,lidité' ou invalirlité des deftinations par lui prétendues avoir été faires' par le fieur
Gaucherand fon Jorere; toutes lefquelles prérentions, défetlfè s
& exceptions' refpeél:ives demeureront en leur entier.
Et de même' fuite, à ce qu'il fût dit n'y avoir lieu d'e
prononcer fur l'ac11: demandé' par- les héritiers, de l'al1ë-
�94-
Jou
RNA L
gation faite Cur le' Barreau, du montant des ~evenus de
l'héritage; &. qu'ayant tel égard que de raiCon au Curplus
des fins priCes Cur le Barreau par les héritiers, défenfes
fu/fent faites à tous créanciers, tant de l'hoirie de Jacque.s
Gaucherand , que perConnels de l'Abbé Gaucherand, de fe
de/failir des fonds qu'ils ont en main, ou de faire· aucun rembourCement, fans avoir averti les hér~tiers préalablement, & un mois à l'avance, en la perConne de deux
d'iceux dont ils conviendroient, & ce juCqu'à ce qu'autrement
fût dit & ordonné.
Jugé conformément aux condulions par Arrêt prononcé
par Monfieur le premier Préfident, à l'Audience du 17
Avril 1779 i l'Abbé Gaucherand fut condamné aux
dépens.
ARRÊT
XI.
Sur une Demande en bi.lfemenr.
'
A
Ndré Girard, Bourgeois de la ville de Pertuis, fait
[on tell:ament folemnel le '2.2. Novembre 177~ ,; il
inHitue fon héritiere la DUe. Pin fon époufe , & lui fubCtitue Jean-BaptiHe-Claude Turrier.
Après fan décès, Turrier fait appofer le fcellé & pro'céder à l'inventaire, & la Dlle. Pin fait ajourner Turrier
pardevant le Juge de Pertuis, pour voir dire qu'elle feroit
autoril.ee à faire des diHraéHons fur les biens de l'hoirie
fidéicommi/faire jufqu'au concurrent de ce qui lui était dû
pour fa dot, & à raifon des paiemens qu'elle diCoit avoir '
fait à la décharge de l'hoirie.
Le jugement de ces diHraél:ions e!l: déféré à des Arbim:s, & la DUe. Pin donne l'état de fes prétentions.
Turrier tient un comparant aux Arbitres; il Y ob[erve
que les paiemen.s faits par la DUe. Pin Gerard font fi prochains de la mart de fan mari, qu'ils font cenfès faits de
..
�94-
Jou
RNA L
gation faite Cur le' Barreau, du montant des ~evenus de
l'héritage; &. qu'ayant tel égard que de raiCon au Curplus
des fins priCes Cur le Barreau par les héritiers, défenfes
fu/fent faites à tous créanciers, tant de l'hoirie de Jacque.s
Gaucherand , que perConnels de l'Abbé Gaucherand, de fe
de/failir des fonds qu'ils ont en main, ou de faire· aucun rembourCement, fans avoir averti les hér~tiers préalablement, & un mois à l'avance, en la perConne de deux
d'iceux dont ils conviendroient, & ce juCqu'à ce qu'autrement
fût dit & ordonné.
Jugé conformément aux condulions par Arrêt prononcé
par Monfieur le premier Préfident, à l'Audience du 17
Avril 1779 i l'Abbé Gaucherand fut condamné aux
dépens.
ARRÊT
XI.
Sur une Demande en bi.lfemenr.
'
A
Ndré Girard, Bourgeois de la ville de Pertuis, fait
[on tell:ament folemnel le '2.2. Novembre 177~ ,; il
inHitue fon héritiere la DUe. Pin fon époufe , & lui fubCtitue Jean-BaptiHe-Claude Turrier.
Après fan décès, Turrier fait appofer le fcellé & pro'céder à l'inventaire, & la Dlle. Pin fait ajourner Turrier
pardevant le Juge de Pertuis, pour voir dire qu'elle feroit
autoril.ee à faire des diHraéHons fur les biens de l'hoirie
fidéicommi/faire jufqu'au concurrent de ce qui lui était dû
pour fa dot, & à raifon des paiemens qu'elle diCoit avoir '
fait à la décharge de l'hoirie.
Le jugement de ces diHraél:ions e!l: déféré à des Arbim:s, & la DUe. Pin donne l'état de fes prétentions.
Turrier tient un comparant aux Arbitres; il Y ob[erve
que les paiemen.s faits par la DUe. Pin Gerard font fi prochains de la mart de fan mari, qu'ils font cenfès faits de
..
�DU
PALAIS
DE
PRO VEN C E.
~
9;
l'argent qu'elle a trouvé, autre 'lue celui melltionné dans
,l'inventaire.
La Dlle. Pin prétend que le- comparant renferme des
mots injurieux , & en demande le biffement pardevant le
Jug.e de Pertuis, ne voulant plus pourfuivre pardevant
les Arbitres. Turrier préfente & demande d'être relaxé de
l'affignation; fan relax fondé fur ce que, jufqu'à ce
que le fidéicommis fût ouvert, il. ne pouvoit être quefrion de la liquidation de l'hoirie. La Dlle. Pin offre un
expédient; elle fait droit au relax de Turrier, & prononce le biffe ment des termes injurieux : l'expédient fut
reçu par Sentence du 21 Juillet. 1777 ; elle fut réformée.
. pat celle du Lieut~nant d'Aix le 31 Août 1778. La Dlle.
Pin appelle de cette demiere pardevant la Cour, & foutient que Turrier l.'avoit injuriée, en lui difant que les paiemens qu'elle. répétoit, étoient faits de l'argent de fon mari:
par - là, il la diffamait, il la calomnioit, il l'accufoi~
d'expilation & de parjure, pui[qu'elle avait affirmé à ferment lors de l'inventaire, qu'elle ne connoi!foit point
d'aurre argenr, que celui qui. avoit été inventorié. On ne.
pouvoit appliquer contre elle la Loi Q'uintus Mutius, ff. de;
donat. inter virum & uxoreTlf, qui ne peut l'êrre que contre
une femme mariée fous une conititurion générale.
Elle n'eit pas dans ce cas j elle n'avait qU'Ulll! conll:i.
turion parriculiere; elle vivoit depuis long-temps' réparée
de [on mari, polfédant des biens confidérables non compris dans la conll:itution· de dor.
Turr.ier répond que c'dl: l'intention· qui fait l'injure:
faceu nemo pouf! , nift 'lui feit· Je injuriam facere , lel}. 3 "
§. 2 , ff. de injuriis. Ex animo injuria œflimatur , difent -les,
Auteurs: ils établi!fent ddà qu'il n'y a point d'injure dans
ce qui dl:. dit: Non convicii aau[â " [ed. juris jiLi' conJer~
vandi &- deftndendi gratiâ. Tel eH le 'langage de tous ceux
qui ont cî"crit fur cerre matiere-,. & notammenr de Perezius
dans [on. Code, liv. 9, rir. 3 ~, arr. 4,
Son intérêt l'obigeoit à combattre les prétentions de la,
DUe. Pin, la Loi. elle-même lui p,réfemoir. llne exception.;.
�96
Jou RNA L
il en a fait ufage: il a dit avec elle ~ la DUe. Pin: Les
paiemens que vous avq fait font trop voifins de l'époque de
. la mort de votre mari, pour n'etre pas cenfés faits cf.e [es
propres deniers. Si vous ne détruifer cette préfomption par
des preuves, les paiemens que vous réclamer font répétibles.
Si dans cette obfervation il pouvait y avoir injure, tlle
ne pourrait ·être imputée qu'à la" Loi elle-même, clans laquelle elle aéré puifée.
La Lo·i Quintlls Mutius ne fait point la difl:inétion de la
femme mariée fous la confl:icution de dot générale; il n'ell:
pas permis de diHinguer où la Loi ne difl:ingue pas; &
on peut l'oppofer à toutes les femmes, pour les obliger
à prouver und, lzabuerunt. Ainfi l'ont jugé dans des circon{lances bieq remarquables les Arrêts du Parlement de
Paris, rapportés par Denifart, vO. Femmes, nO. 26 , 27,
28 .& 29.
Il ajoutoit que fi la Loi pouvoit ne parler que d'une
femme mariée fous une confrirurion générale, il n'avait
pas pu à la vérité l'oppofer à la Dlle. Pin; mais c'était
de fa part une erreur, & non point une injure; & en
employant un moyen de défenfe, en faifant une faulfe
application de la Loi, il ne devroit être condamné qu'aux
dépens , d'autant mieux que fan exception ne renfermait
rien d'affirmatif; elle ne préfentoit que la préfomption de.
la' Loi: on ne pouvoit même en induire, que Turrier
"eût voulu accuCer la Dlle. Pin de parjure: celle-ci aurait
pu découvrir- une fomme cachée & inconnue lors de l'inventaire, ou retirer une dette aétive alors ignorée.
Par Arrêt du 'l: Mai 1779 , lU rapport de Monfieur
le Confeiller de Thorame fils , la Cour, en concédant.
aéte à Turrier de ce ql 'il n'avoit pas entendu injurier la
Dl1e. Pin, confirma la ~entence du Lieutenant d'Aix avec
amende, renvoi & dépens; écrivants Mes. Lager & Eftrivier.
ARRÈT
XII.
�DU
PALAn,
DE PROVENCE.
ARRÊT
97
XII.
Sur une queflion de compétence.
Es Confuls & Échevins de la Ville de Marfeille dé, cerminerent de prolonger la rue dite de l'Échelle, par
une ligne droite qui devoit couper trois maifons, & donner un débouché dans la rue de la Frache, le plan fut
autorifé par M. l'Intendant.
Le coupement emportoit une très-grande partie de deux
maifons qui appartenoient à la Dlle. Latour, & ne prelloit
qu'une lifiere de neuf ou dix pouces fur la maifon de
Plendollx.
La Dlle. Latour fit rebâtir fes maifons j Plendoux fit
également travailler à la flenne. Les Ouvriers de Plendoux
placerent des étanc;ons qui, de la muraille de fa maifon,
portoient fur celle de la DUe. J-atour.
Celle - ci Ce pourvut au Lieutenant de Marfeille le
21 Août 1776, contre Plendoux; elle demanda que les
lieux fuffent rétablis dans le même état où ils étoient avant
la nouvelle œuvt:e; que Plendoux fût condamné à des dommages-intérêts & aux dépens; que provifoirement il fût fait
un rapport préparatoire de l'état des lieux & du dommage
que pouvoient caufer les étanc;ons; que les étanc;ons fuffent
enlevés, avec défenfes d'en placer de noltVeaux , à peine
de 1000 liv. d'amen'de.
Plendoux défendit; il intervint Sentence qui adjuge les
inhibitions & défenfes provifoires.
Le 24 Oél:obre la DUe. Latour préfenta Requête au Lieutenant contre les fleurs Maire, Confuls & Echevins, aux
fins d'affiHer dans l'inHance pendante entre elle & Plen-'
d<Jux, & concourir avec eUe à l'entérinement de fes fins
principales, & voir dire qu'en cas de fuccomhance de fa
part, ils feroient condamnés à la rélever & garantir dé
N
L
�.
!
. J O'U R·N·A L
-9~
touS les dom mages-intérêts fouffens & à fou/frir par elle
dans fa maifon, à- raifon de la réparation du mur nl1toyen.
Plufieurs voiÛns intervinrent & dem'lcnderent a6l:e de leur
intervention & de ieur adhérence 'aux fins prifes par la DlIe.
Lacour.
Les Echevins décIinerent la jurifdi6l:ion , & foutinrent
gue d'après pl.uGeurs Arrêts du' Confeil, cette conteftation
çevoit être Fonée pardevantr M. l'Intendant.
. Plendoux opPÇlfa qu'il avoit reconnu le Tribunal comPlétettt pour décider, de l'effe,t que devoit avoir le droit de
copropriété fur le mur micoyen & la demande en dom.gJag,es-intéréts ,. li raifon. de l'étançonnage, & en l'état
il requit que la matiere fût délaif{ée à pourfuivre pardevant
qqi de droit, là où l'on fonderoit la demande en démolition de fa bâtiffe, non fur la copropriété, mais fur
~align,~me.n[) donné ,. & fur. la néceffité d'ouvrir une rue,
conformément au, plan donné par les Echevins, le Lieutenam :9!'étanr pas compé.renr de connoître de la conteilation
fbus ce fecond rappon.
L,e, 2.,6 du. mé,me mois d'Oél:obre il, intervint Sentence, qui
débou,ta les E,çhevÎ.\:\S de Leur moyen d'incompétence; ils
en aRpe,llerent. p,~de,valir la Cour ,. & fourinrent que par'
I:Arr~t du Confei~ c:Ju'. 9 Mai [72'i , i;1-s font conüitués
~uKes de: la,. direél:ion Qes coupemeris & alignemens ; & en.
cas de c,omtl;ftat)ons". l~s difput,es quj {ufvienne?f ,; doivent
étn; vuid,ée,s I1~r le. Cornmiifaire du Confeik,
. La, tpatie~e dj;s c.oupenlefls & alignemens n'dl: 'guere
du reffort des Tribunaux ordinaire!,.;;; les formes y font
tFop.loqgue/> 'l EQU.. qu'on. leur ait laiifé le foin de la décoration des Villes :, ce[[~ panie de la chofe publique tombe
I;.Q. aq-n1'niiha.tion ~ en direaion ; eJ1e eR, l;,onfiée aux EcheYÎns lpus J,'ü1fpe,&ion des Intendans ou du .C.onfeil, qui vuide,nt Its a~aires contentie1jfes fUJ Re,qllête,. & fans obferver
les formalités. 'mi)e;r.p~ar~·a{fent. la marche des Juges orqinaires.
Le~ Echeviqs [on,t bie!,! ~lo·ignés de vouloir favorifer un
~
�D,u PAL AIS nE
PRO VEN C B . .
:[9
particulier plutôt qu'un autre ; ils b'ont pas voulu fans
caufe retarder un alignement déja exécuté par un pahicu~
lier; ils ne fe font détérltiinës à permettre à Plendoux
des réparations à fa maifon, que paréè qu'elle avoit été
endommagée par la démolition dé êelle de "la Dlle. Latour:
on ne l'a point oblig~ à reconl1ruirç bu à réparer d'une
maniere équivalente à la reconll:ruétion; on l'a autori[é feulement à mettre -fa' maifon dans l'état' bù elle étqit; il,
n'étoit pas jufie qu'elle (ouffrît par une démolition de la
maifon voiGne. Hors de là les Echevins ne prennent aucun intérêt à Plendoux; ils veulent feulement que leur
cortlplaifance pour la Dlle. Latour De' toûrne pas à un préjudice trop évident pour lui. Déja obligé de couper fa
'maifon beaucoup plus qu'il ne,le devoit originai~emen't, ils
ne veulent pas que par une nouvelle fraude lal'D~moifelle
Latour pui{fe caufer la ruine de la maifon de Plendoux.
D'ailleurs ils ne prennent aucune part à la queftion de
[avoir fi Plendoux a pu appuyer des étancons contre la
'nouvelle façade' de la' DlIe. Latour ; s'il alJ pu J'éparer un
mur qu'elle foutient être mitoyen:, ces ob'jets ne font pas
de leur compétence; mais il leur appartenoit excluGve'ment de permettre, en général à Plendàuil:, & abfiraétion
faire du mur mitoyen, dés réparalions ren?ântes, non pas
11 améliorer fa maifon , mais à la ,tenir dans ,l'état où,
elle auroit été, fi la Dlle. Latour n'en avoÎt ~rti!icieufement
affoibli les coins. La quefiion introduite conir'eux pard'evant le Lieutenapt, & à raifon de laqu'e1Ie ils' ont [outenu qu'il étoit incompétent , efi de '[avoi'r s'ils font ga:..
rants de ce que la maifon de Plendoux{ ne _tombera pa's
'a!fez, tôt au gré de la Dile. Eatour, s'irs [ont obligés d'e
faire achever tout de fuite un alignJment ou ~n coupe·
men't comrneÎ1èé: or, ils n'ont point pour une pareille
quefiion la Sédéchau!fée pour Jugé.
Il ferait tidicule que la Sénéchaulfée décidât fi telle- rue
ou telle autrè doit être alignée ou percée , fi tel prqjet
commencé'dair être rerminé tout de fuite, ou achevé avec
un'e kige lètltélit:' Si' dans certain.es' occaGons ~n peut per-
N:2.
�.J
Ioe
0
U RNA L
mettre de 'réparer une .mnjfon féparée tôut-à-coup de celle
à' qui elle,. éJ.oit contiguë, & ébranlée par cette: féparation .,
èes objets dépendent de
,néceffité plus ou moins prèffante des débouchés des fonds de ra Ville qui paye ces
embellilfemens, & des circonfiances qui rendent une réparation équitable.
,La Demoifelle Latour, & fes adhérens répondirent que ne
s'agilfant que d'uu droit de propriété & d'une demande
en dommages-intérêts ,. le Lieutenant- pouvoit [eul connaître
de la contefiatiou.
Me. Meriaud, Subfiirut, portant la parole, établit que
l'ordre, le pouvoir ,_ l'étendue des J urifdiél:ions [ont fixés
'par des Loix q.ue l'on ne peut' méconnoître ; que les Parties'ne peuvent point [e donnet des Juges; q,u'il nefi jamais
permis à un O.fficier de Ju1l:ice d'entreprendre CUI la Juri[diél:ioll d'un autr~ " & qu'il doit fe dépouiller lui- même
d'une matiere qui n'eft pas de fà. compétel1_ce ,. fans attendre que les. Parties requierent le renvoi.
l Que Caggrandiffement d'une rue déterminé par les Eche:vlns ~! & exécuté d'aprè~, le plan ligné par eux, é.toit le
'principe des c~ntenations qui dtvi'[oient les Parties; que
l'exécution de cet aggrandilfemenr avait fait naître routes
les' quell:ions.
Dans le p.rincipe, & avant qu'il y eût au procès des
Parties, -privilégiées, le Lieutenant avoit, pu connoître d'un
'droit de ,propriété & d'une demande en dommages-intérêts;
-m;;;s depuis que les Echevigs avoient été appeIJés au
procès en !dIifiance en caufe & garantie ( garantie introduite
à raifon de' l'alignement ordonné par les Con fuis ),
& que par - là la pature des conteHations étoit fixée, il
fallOit tonfulter .d'au.rres [ourees. D'après les Arrêts du Con,.
feil ~res 9 ~ai' 17t·), ,_ 7- Oél:obre 1737,:2.8 Août 173 8 "
3 Seprerribre 1739, & ceux rendus en 174) & le 14
Décembre. 1.776 , à la Requête des Echevins de la villede Marfeille, M. l'Intendant conn.oît, fauf Fapp,el au Con,..
fe·il." de: tomes les conreHations qui s'élevent à raifon des.
(lU
_ d'es rues., excavat.ions de terre in , places publi,-
la
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o.\BLlO1'/f.- .
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PALAIS
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PROVENC:f.
101
q'ues , ciilipemens de maifons qui fe font dans la Ville;
il connoît également de l'indemnité due aux 'Particuliers,
à taifdn de pareils coupe mens. .
Il concJud à la réformation de la Sentence, & à ce
que les Parties & mlltieres fulfent renvoyées à pourfuivre
pardevant qui de droit.
Arrêt conforme, prononcé par M. le Préfident de Cabre
le 4 Mai 177'); plaidants Mes. Siméon fils, Alpheran,
Roman-Tributiis & Sellon. Les Intimés furent condamnés
aux dépens.
ARRÉT
Le Cens roturier
L
XII 1.
n~ peut hie encadaftré nt fourni,
paiement de la Taille.
ait
Es fieurs de Paulet & de Limans polfédoient la troi,fieme partie des Moulins de la Ville' d'Hieres; la'
Communauté polfédoit les deux autres tiers., Ils en prétendirent polféder la moitié. Cette contefiation fut terminée par tranfaél:ion du 10 Novembre 1 S76. Les fieurs
.de Paulet & de Limans fe départi,rent de tous leurs droits,
& donnerent à nouveau bail à la C0mmunauté la troifieme partie des Moulins & droits en dépendans, fous la
réferve de la direél:e, avec droit de lods & de retrait"
& d'un cens annuel de 28 cha'rges bled. Les Srs.
de Paulet & de Limans reçurent en outre la fomme de
soo florins une fois payée.
La Communauté vendit dans la fuite les Moulins à
fes créanciers, avec franchife de taille, & fans faire m,ention de la direél:e; ni. du cens impofé fur la troifieme
partie. Cette. réticence fit naître un procès qui fut ter~·
miné par une tranfaél:ion du 8 Juillet ],729. Le fleur
Germain, propriétaire de la direél:e., confentit à l'éteindre,
moyennant la fomme de sooo lîv. ,. que la Communauté
�102
Jou
Il N Il L
lui paya; & en remplacement du cens, elle s'obligea de
payer à perpétuité une rente annuelle ae 390 liv.
Les fleurs Amiot & Barthelemy , devenus propriétaires
de cette redévance , découvrirent que la Communauté
d'Hieres l'avoit fait \;ncadafirer, & l'avoit foumife à la
taille: ils fe pourvurent à la Cour des Aides; pour faire
ordonner qu'elle ferait déchargée & affranchie de tau te
,taille & cotifation à l'avenir, & que la ,Communauté
feroit condamnée à la refhtution des arrérages de taille
induement perçus depuis 29 ans, avec intérêt, tel que de
droit.
Ils foutinrent que la taille étant réelle en Provence ,
elle ne pouvoit être impo(ée (ur des direél:es, des cens;
des rentes foncieres en grains ou en argent. In munere
merè reali , - dit M. de Clapiers, Cauf. 42 , Quefi. l ,
n. T, obligaûo eft realis, & adhœret prœdio & non perfonœ. Petrus Antibolus, en fon Traité de Muneribus , dit
également, en parlant des impôts réels, que,ralia munera
gebentur ab ipfi:r rebus, 'non-, à perfonis.
Mourgues, après avoir établi la réalité des tailles, obferve que les Commilfaires qui procéderent à l'alfouagement général de 1471, ne firent leurs combinai(ons que
fur la valeur réelle des terres.
Chaque Communauté ne peut donc faire encadafirer & (oumettre à la taille que les immeubles réels. EncadaHrer des
fervitudes , des rentes , des direél:es roturieres ou ,autres
droits femblables, c'efi porter atteinte au principe de la
réalité des tailles.
\
. Ils citaient l'Arrêt du 30 Juin 1717, rendu en faveur
du fleur Chauvet & de la Communauté de Mezel, contre
celle de Châteauredon; il était quefiion du Canal des
Moulins de Mezel, qui prenoit fa fource dans le territoire de ChâteaUl:edon, & en. traver(oit une partie alfez
confldérable. Cette Communauté prétendit que ce Canal
& fes bords devaient être encadafirés-. La Communauté
de Mezel & le fleur Chauvet à qui elle avoit vendu fes
Moulins ,. fouçe,noient au contraire qu?il- a'y- av{)it pas lieu
�DU
PALAIS
DE
PROV:E~CE..
.10;3
l'encadaflrement, parce que le titre primordial prouvolt
qu'ils n'avoient pas la propriété du fol du Canal & de fes
rives j que le Seigneur de Châteauredon ne ll'ur avoit rranfponé que ,le droit de faire paffer les eaux, fans leur vendre
le fonds. Sur ces raifons , la Communauté de Châteauredon fut déboutée de fa demande en encadaarement de
cette faculté.
L'Arrêt du 12 Juin 1736 débouta la Communauté de
Grans de fa demande en encadraHemenr de la faculté dl!
droit de pâturage que la Communauté de Miramas avoit
dans le couffou ou pâti de Troupeguieres, affis dans le
territoire de Grans.
Boniface, tom. ') , liv. 6 , tit. 3 , ch. 1 & 2. , rapporte
deux Arrêts qui ont jugé q~e les dire8:es & les cenlives
roturieres ne pouvoient être encadaflrées.
L'affemblée pnticuliere des Procureurs du pays nés &
joints du mois d'Avril 1724, ratifiée par l'Affemblée généraie, mit au nombre des regles à fuivre lors du renouvellement des cadaHres: que pour connoitre le véritable'
produit des biens, les Experts. auroient égard feulement aux'
dtmes, aux cenfes & tafques nobles & feigneurial'es, & qu'i11s
n'auroient point égard aux autres c'enres roturieres , fervi'-.
ees, furcens, penlions, . rentes foncieres', tailles '& impo'-'
fitions de la Communauté.
Me. Julien " dans fes Mémoires manufcrits , tit. êivitas;
cap: ') , verb. Cadàflre, Ajfo!lœgemenr, après avoir expofé
la Doétrine de Defpeifiès, d'après laquelle les rentes font.
eotifees en Languedoc , at-reHe que notre Jllrifprudence'
l'a contraire -: Sed. allo' jure utimur;
"
Ils invoquoient. ·la Loi 2, au Code de jure emphyteutico ,.
qui décide que l'obligarion de payer les- tribOlts' ou impôts
publics ,'l'fi une' d'large qui concerne l'emphytéote & non
le Seigneur direfr.
Alexandre, -li\'. 4', conf. 3)', n. il.~ "dit: que .les im-·
pÔts publics devant' être p'ayés' par .r ceux qui' poffed'ent
comme propriétaires des fands ou d.es fruits , il eH ccr-
'11.
�I~4
Jou
RNA L
ram que l'emphytéote , l'ufufruirier & autres perfonnes
femblables , font renus du paiement des taxes publiques:
Ira fentiunt, Dumoulin fur le titre du Code de jure emphyt.
Rebuftè dans fon Commentaire fur la Loi Ire.,
annonis & tributÏs j Alvarès-Valafcus dans fon
jl/re emphyt. , queft. 17, pag" 18 1.
Dès que le paiement des impôts publics eft par la nature du contrat, une charge de l'emphytéote (ajoutoient les
Demandeurs ) il eft fenfé que la quotité plus ou moins
fone de la cenfive ou de-.1a rente , ne peut rien changer
à ce principe; ce qui détruit ce qu'ont dit J ulius-Clarus,
§. EmphyteufiS , queH. 46 j Garcias, de Expenfis, cap. 1 l ,
n. S7, Philipy, dans fes Arrêts de conféquence, Arrêt
31 ; Defpeilfes, dang< fan Traité des tailles , p. 299;
Loifeau, dans celui du déguerpilfement; Builfon, fur le
titre du Code de annonis & tributis, & Duperier dans fes
notes manufcrites, verb. taille, que quand la redévance eft
confidérable & correfpondante à la totalité des fruirs, le
propriétaire de la rente, portionnaire des fruits, doit contribuer aux taxes publiques, parce que , fune onera fructUl/m. Cette diftinél:ion eft condacnnée par Valafcus dans
fon Traité de jure emplzyteutico, quo l, n. 8 , & quo 17,
n. 6 , & par Pierre de Ubaldis dans fan Traité de CoUeais,
conf. 2 , n. 3,
.
La Commuuauté d'Hieres oppofoit aux fieurs Amiot &
~arthelemy deux fins de non - recevoir: 1°. la Communauté qui doit toujours retrouver la taille de la totalité de
fes Moulins, ne peut pas fouffrir l'anéantilfement du cens,
fi elle ne retrouve le même allivremenr d'ailleurs: 2°. Cette
forme d'allivrement ayant lieu à Hieres depuis deux fiecles,
il n'eft pas poffible de la changer.
Le cens ou la rente viagere font pars fundi , inhœrent
fundo pro quo p'tœjlantur. Ces redévances font imprefcripribles & irrachetables; elles ne peuvent être établies que
in traditione fl/ndi , judicantur immobilia; & enfin l'on a à
raifon d'icelles l'aél:ioll de complainte, qui ne comp~te
qu'au
�DU
PALAIS
Dl!' PROVEN'Cl!.
J'S
qu'au véritable poifeifeur, ainli que F~ttene M·. de Cla~'iers.
cauf.· 29, quo 3; d'où 'il faut conclbrë que quiconque ;
une rente, & fur-~out une rente en grains, & mieux encor ,
une rente qui abforbe une grande partie des fruits l' e,il
tout-à-la-fois & propriéiaire du fonds, &. poffefièur des
'
J
-fruits jufq'u'au concurrent de fa rente.
La taille eU réelle parmi nous, c'eH le poifcffeur du fonds
qui la C1oit·; niais il ne doit jam\iis contribuer aux clprges
publiques, qu'à proportion des fruits qu'il perçoit: del'à
cette foule de texte~' qui nous difent que tributa [uïzt onera
'fruc7uwfz ; delà la maxime 'que PufÎlfruitier, le ,a'ri, 'l'héri~ierfiduciaire & l'emphytéote, qui' touS ne font pas propriétaires 1 & Ile poifellé'nt qu'au notn d'autrui, n'en doive!1.!
pas moins la taille, par lai feule raifon qu'ils perçoi'vent
les fruits, & que tributa [zmt onera fruauum.
Enfin l'égalité dans la répartition des charges tient en'core de tropl près au droit narurel , pour n'être p:!s O'n
des principes fondamentaux i1e!lit ·fodété. Annonas folvât ,
dit la' Loi He, Cod. de ânno'n. & trIbut.' qui po,DèjJiones
tenet & fruaus percipit. La Loi 2 du même titre, dit é'gàJement: Ne ultrà modum [XJffijJionum quas pofJzdes conveniaris, prœfes Provinciœ profpiciet; & la glofe ajoure fur
le mot quas pojJides , cet aurre bien 'dé ifif, ,ro quantztate
fruauum tantùm ; c'eft encore ce' qu'établir la 'Lor 10 ,
Cod. de fund. pâtrim. ~ • 'J
.) : l
,
Cette égalité dans la dill:ribution,' formel un 'des' premiers
principes du droit public, Leg. 12" Cod. de operibus publicis: Ut adfcriptio currat pro viribus jingulorum; àinfi.
l'enfeigne Perezius fur le titre du Code de annonis & tributis, n. 1 S & feq. C'eU le feul moyen d'être june, de
maintenir la force de l'Etat, de ,conferver aux redevables
la faculté de fuivre le cours des, i.mpofitions, & de faire
. contribuer chaque citoyen proporrionellemenc aUl(' avantages
qu'il retire de l'admininration publique.
D'après ces principes, l'on a demandé dans un tems,
fi l'emphytéote qui ne poffede pas le fonds, ou qui ne le
.poifede que pour le Seigneur, doit payer la taille ; & les
o
�Jou
106
g N A L
JufÎfconfu)tes ont répondu qu'il doit la payer, parce qu'il
jouit des frui.ts ; mais il ne doit pas .payer la taille. cor:?,
refpondance au cens.
Tel eG le fentiment de Perezius fur le tit. du Code J~
india. i de Julius-Clarus, §. EmphyuuJis" quo 4~ ; de
Rebuffe , fur la Loi He. de annon. i de Loifeau., en fon
Traité des Seigneuries, tit. de la diftinél:ion des Tentes,
ch. 10; de Defpeiffes , (Om. 3, pag. ~99;. de Philipi, en
.fes Arrêts de conféquence, art. 31 ; de Dccormis, (Orne ~"
col. 1773 i de Buiffon, fur le titre du _Gode de annonis
& f'ibut. La, C~munauté citoit l~Arrêt du ~o Juin 1764,
rendu
contre la Communauté d'Aubagne', le cens
réfer\~é
"
,
~toit de 1~ Ev. par carrerée , ~,d'une poule g,taffe, ainli ~q'l'on
le voit dans le cahier de l'Affemblée du u Janvier 1764'
Il fut jugé qu'un cens auffi confidérable devoit être déduit
fur l'efbmatioD portée par le cadafire ; d'où la Communauté" concluoit. qu'il fut par-là décidé que le cens ,faifant
p.arrie qu. fonds , & emportant prefque la totalité des
{rqi-ts, re~p.hytéQtc ne pouvoit être fournis. d'en payet: la
taille; & que fi le cens venoit à être aliéné en faveur de
tout autre que l'emphytéote ') le poffeffeur de ce cens
{quffriroit l'encadaftrement.
Par Arrêt du 4 _Mai 177CJ ,. au rapport de Monqcur le
C,onfeiUer de Julie_n, le cens fut affranchi, de la taille, là
CommllnaUté: fut condamnée à la reftiturion des railles
perçues depuis fa,. demande, & aux dépens i écrivant5
~es. .Barlet & Pafcalis•
.il ••
r
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A l!l
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ARR Ê T
P
R' 0 V B NeE.
107
XIV.
Quand efl-ce qu'un Mariage efl cenfé fait iilextremis?
Un Enfant conçu en adultere, mais né darlS un tems auquel [es Pere & Mere poul'oient devenir Epoux, efl'- il
légitimé' par le Mariage fubféquent?
Efl- il poifible , dans l'ordre de la nature, qu'un Enfant
nai1Jè viable 17'1. jours après fa conception? La Loi' peutelle l'avouer,?
'
.
G
d.
Uillaume Riou Ife , Me. Chirurgien â Marfeille ,
époufa en premieres noces, Marie-Anne Mourgues,
laquelle il n'eut point d'enfans! Le 21 Février 1774 ,
cette premiere femme mouru\;; & le 26 Mai 1778, Riouffe.
époufa Marguerite Michel; ils d'éc1Jarerent avoir eu- d'uRe
précédente cohabitation, une fille baptifée à la Major lé
LI Août 1774, fous le nom de Sufanne-Elilàbeth Michel,
qui feroit légitimée par le mariage. Le 13 Juin fuivartt
Riouffe fit fon tdlament; il légua l'ufufruit de fes biens
. à Marguerite Michel. fon époufe , la nomma tutrice de fes
l'nfans, & inll:itua héritiers Sufanne-Elifabeth Riouffe fa,
fille , &.. le pollume dont fon époufe pouvoit être gn-'
ceinte.
Le 24 du. même mois' le teftateur mourut. Le I I Juillet
Charles Riou/fe , Greffier de Cannes , & André Ri6ulfe' ,
Capitaine de Bâtiment, coulins germains du définit, firent
mettre le feellé fur les e/fets de la fucéeffion. La' femme"
de Riouffe oppofa. le rellament, &. le 1'4' Juillet' les COll- '
fins g~rmains demanderent qu'il fût nommé un "curateur ad 1
J
hUnI; aâJJm" à SiJfanne-Elifabeth Michel , conr-re' lequH
ajPurnement ferQir laxé, pnur. la '·voit' dédarer incapable'&:'
jnhabile à fuccéder. à;, Riou/fe', &. au dl0yen~ de. ce " 'voir
prQnoncer la caifatiou du teframent, enfemhle l dù' legs d'u-' fufr~i.é!
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\ ~ Le 20,' nomin'arion de curateur; & le 20 Août fuivant,
évocation de la caufe pardevant la' Cour, ~n vertu du privilege des Pauvres: une foule d'intervenans demanderent
d'être re~us Parti~s jointes, & d'adhérer aux Ens .principales; leurs Requêtes furent renvoyées en juge ment. '
Les cQllatéraux & les intervenans préfenterent Jëux quef~
tions à difcmer, l'incapacité de l'héritiere & de' f.1 mere ,
parc.e que le mariage étaot fait in extremis, la Dlle. Michel
ni fa fille 'ne pouvoienr jouir des 'pdvileges des veuves &
ges enfan~; d'a!llelJ~,s .les bâtards adulté'rins ne pouvalll être
J~gitimés par le mariage fubféquent, il ne pou voit leur
être dû que des ali'mens; ils prouvoient que k mariage
avoit été fait in extremiS, en faifant l'applica,ien des principes
& des déclarations d.e 1639, .1697. Sùivailf eux, Riuuffe n'àvoit fongé à faire monter fa concubine au ;rang d'épeufe,
qu'a~l moment qu'il allait eo érIe féparé. Le mar'iage-;
quoique fait ~ YEglife, émir contraire à la difpolition de la ,
Loi.. Qu'ou rapproche (difoie!H-iJ.s) les trois épO:ques, k ....
mariage, le tefbimenr & h more de Guillaume', Riouj-fe.
Que flUt-il de pltls pour caraS:érifer le mariage f~it ifl' extre.mis ? Ils offroientl mêl:ne la preuve que RiouJfe était
rpalade le 26 Ma,~:,..épo:q.ue· de fon maria-ge , de la ma·ladie dont' il mourüt:. &ailleuIs (aJou.tOient - ils.) SufailneE-lifabet)l' Miche! ,"'conli4e p-rês. de qnatre mois avant le
d,éc:~s de la premiere femme de Guillaume RiouHè, & par
conféquent bâtarde adultérine, n.'a pu être légitimée par le
n)a.ri~Jte fubféquent,. qui ne peut couvrir le. v.ice 'de l'adultere. }~ -J. 1
•
' .
,
, L'( v~uv,CUtMicheI & fa fille foutil'l1'ent la ,validité' d'tt mar.iage
&.. 'de l,a légitiœa,tion. Ils t~cherent'de pr.oiJv,er. qtl?en droit, J?époque de la o.'li1fanfi,e fe trpuvam dans. un, tems libre', Venfant.
n~ .Rem êt~ehregaçdé comm,e bâtard ad.~ltérin; qu'e? f<lit, .
I:e t,~m? même de la çOj:jceFti0u av'oit eu. lieu' daITs un état
de· lll?er.té ;'1 ·&·J.qioe. :l'efpace 'de t4Tms qui. fe trouvoit· entr::'Ja ,mort [de,. la premiere ~emme.· ,de Riouffe &' l'accou- '.
li:qem.en,t de la [econde., l!tolt.Juf!if1lnt. Que' par les mots
dU. m<lriage in· extremis,. il falloit enteudre I:ex.trêmi{é de- .
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'la vie, par' le tems vO,ifin èle la mort, & l~ défaut d'efpoir de revenlr en fanté, mais qu'il. ne falloit pas en dire
de même d'üne maladie 'légere ou imprévue; ( Cochin,
tom. 4 , p'!g.. 206 & fuiv., Journal des Audiences, Arrêt
de '1681 ) Au111 falloit"difl:inguer les mariages faits à l'Eglife, de ceu'x auxquels la bénédiaion étoit donnée dans
la chambre; que la preuve otterte étoit non - recevable,
parce que . l'incommodité donc étoit atteinc Riouffe., ne
pouvoit pas être regardée comme une maladie mortelle;
que d'ailleurs on n'alléguoit aucune circonHance grave i
donc cette preuve étoit caprieufe & infuf!jfanre , vagJJe
même & in,ut!le; ql.j'au· moyen de ce .le 'mariage ..dev:oit
êrre décl~ré' .éapable de tous les effets civils; qu'il ..fuffi[oit pour la légitima~ion qu'il y eût une époque libre: iis
citoient la Loi I l , Cod. de natllral. liber.; la Novelle
8?, c·ap.. -~ 1 ; la' ~oi J 12, f[,fIe flflfU. homin.; Bo';
nJtace, tom. 2, l'IV. 3 , tlt. 8 '. ch: 1; ACÇjjr.anza, de partu 1
cap, 8, Il. ')0'&' fu'iv.;' Brodeau lur+'ouet, t,omo l , lett.·C~
pag. 6(n; Dornat, Loix Civiles, Iiv. 2 ,ri.t. 1, fea. 1 ; Deni·
fart; verb. légirimation, n. 30 ; Lebrun, des fucceffions, liv.
1, ch, 3 & 4, fea. 1 ; Lacombe, verb. légitimfltion, fe.a:. 1,
n. 2 ; BOlltaric ,. f~F les Infl:itutes, liv. 3, tit. l , §. 2 ;. ~o
v.arr,uvias; part; '2, cap. 8, §. 2; lV1erlinus '. de legit-ima-, lib;.1 ,.
m. 2, quo 7, n. 21 ; Charondas , hv. i 2 , refp, 1-6.;.
Serres, liv. l ,. tit. 10, pag. 61; &. Dupe~ier ,. plaid., 3.
?, ..
in fine.
. M. l'Avocat - Général de Califfanne fit fentir tout ce
qué' cette' caufe avàit q~int~relTa}lt, &. d.i[cuta avec force,
,
& folidiré toutes les queltions qu'elle p'réfentoit.:
1 o~ Le mariag~ dont s'agit, a-t~l é,é fait in extremis,,'!:.
2°. Faut-il. pour la légitimation;. que les deux époques tie
la conception & de la naiffance aient lieu dans un temsl
libre? 3"' Quelles font le,s époque libres viS-il-vis de l'en-;
Eint de Riouffe? Doit·il ~êr-e,; réll'lté ,h~g,itjll}e , ou reg~rdéJ
comme· bâtard adultérin 1, L'il lervalle de-. rems entre fa
IWncepti~n '& f~ nai1Îance, peut-il. fllffir): Folir ·le.) place~
cians la' premiere. cJaffe ?'
•
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U IL !l' ~ L
L'importauce de la 'premiere' queil:ion fut le premier objet qu'il développa. Les mariages qui font l'origine de la
fociété & le fondement des familles, one occupé de cous
les tems l'attention des Légifiateurs'; ils fe font armés d'une
jull:e févérité contre ceux que le crime prél:ede:, & qui ne
font coneraél:és. qu'aux approches de la mort; ils ont voulu
qu'ils ne tranfmitfenc aux conjoints que des citres infructueux dans l'ordre civil. Il eH -du bon ordre fans doute
de maintenir c;es loix ; mais il ferait pellt-être dangereux
pe leur donner trop d'étendue, & d'empêéher ceux qui
'pnt le, malheur de vivre -dans le défordre , de le réparer
paf le mariage.
.'.
'- L'article 5 de la Déclaration de 1639, prononce l'incl!'"
pacité abfo\ue de toute fucceffion, contre les enfans nés
des mariages que leurs peres &. mèrés ont tenu fecrèts
pendan't leu. vie. L'art. 6 veut que la même peine ait lieu
concre· le, enfilns l qui font nés des fe'mmes que les peres
-one eu pour concubines , & qu'ils époufent lorfqu'ils fom
_~ l'extrémité dè la vie. -'.
L'art. 8 de l'Edit de 1691 confirme exp}etfémenr la Déclaration -de 1639 , tant à l'égard -des femmes, qu'à l'égard
des hommes : il veut de plus que les enfans qui font nés
de leurs débauches avant .le mariage fait in 'extremis, ou
qui ..pourront naître après, foient, ainfi que leur poHérité
4éclarés inc.apables -de coute fucceffion.
Ces LQix font .pricifes "leur équité eil: fenfible ; il faut
que le mariage fait contraél:é entre 1.\n homme, & une
femme qui aient vécu auparavant dans le cré(ordre ; -il faut
qu'il le foit à l'extrêmité de la vie.
'
Mais comment _fixer cene époque? Quelle eil: la ligne
de démarcation que l'on doit -tracer à la 'Loi? Ne faut-il
con----Iegarder comme mariage in extremis que celui qui
traél:é aux approches d'une mort certaine, par un homme
accablé par la douleur & contraint de céder aux larmes
d'une femme pour .laquelle il n'a eu que de la foibletfe?
Faut-il au contraire r~gilrder du même œil un mariage
contraél:é 11. l'.~xçrêmité, de la vie, mais fans dange r de
ca
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mort, fi en[utte une lmala~ie fubitê vi~nt ~nlever un des
(;Qnjoints?
Ne faut-il regarder comme mariage in extremis, qu.~
celui que contraél:e un moribond qui difpofe dans fa chambre d'une volonté qu'il n'a plus, qui promet à la fociété
de lui donner des hommes, tandis qu'il va ceffer de. l'êrre,
qui rougit d'une union de[ordonnée , puifqil'ir voudr.oit Ie
la diffimuler à. lui-même, & qui l'l'Y' a confenri que
lor[qu'il a vu qu'elle ne pouvoit p1us avoir aucun effet!
. D'un autre côté, quel fera le fort de pareils mariages
fai~s ~Ii ,face de l'Eglife ~ ~caompaglnés des' cérémoriies
publiques? N'dl-ce pas là une 'circonftance' trop 1 équiyaque " & ,.qui ne peut faire: regàrder la mort ni comme.
prochaine, ni comme éloignée? Admettre qu'un mariage
doit produire toos ~es effets civils, parce qu'il a été contraél:é en face de l'Eglife, n'dl-ce. pas ren{fr-e~tiles les
Loix IPortée~ ,ContFe les. unions çontral9:ées ln ~x(rèmi's,
fur-tout fi ces unions font cO'ntraéJées l d~ns -ûnLétai:' ·de'
langueur habituelle &, de dép.éri:tfement 'Continuel;: plus rapproché de la mort que de la vie.l Les malades ont fouvent de ces interval'les où la nature fait les derniers· efforts, où elle femble fe rétablir;. mais' la mor.t en' eU-elle'
plus éloignée?
".
; 1i
~''1
l'
. l
'.
.'
Suivant M. de LlimoignQn', l?homme e1I: 1t m~ll:trêmité dela vie" quand la mala4i~ ne lui perme.!;' pas. de revertir en,
fanté. Suivant M. de Bignon, l'Ordonnance n'a. pas préci'.·
Cémenr entendu parler des derniers. jours" &. veue: qu'un.
hOlJ!me exténu~ d'infirmit,és .ne· Coit plUi capable de mà--riage. Suivant;.- M. :Chal;lveJin"J l'llxtrêmillé "de la \I.je dt Gé.
cerns' .fatcaL où·"l'.qn ,a'-a plus~de reEoua:e: POUIl échapt'érJ alll[l
l\.angers. ,Syl.vant .M. le Nain ~ k; cas; de 1't:X'ttênritë de' li
"je ,_ fixé. par l'Ordonnancoe, eU cdui, o.ù rhomme.fr<lppé à,
IPJ~rÇ. fem l'impuiffan<;e d,cs remedes.
.,
.~l .
. .l,'OUr. ~él;ouQ;Fe; le dqyte ,.,l\1onficutc l'AlICKU~Gé'neral re
,,-o~rut l' l~efl'rit de la. Loj 1;' eUe a e.u :pour. ~j~t- d'ein.p.êcher, I.e \iber.rinage., M"11ç cB.~ ~0it xougill'.:dCllltllO'd-l'e2
p.our ép~uJe une concubine, de l?[é.venir qu~on. ne. s'y dé~
'"
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~~rmine
JOU1~~L
que Jor,(que la home va être enfevelie avec Je conjoint dans le tombeau.'
,
• Elle' a refufé tout·· effet civil à une union contraire à
1'1.oQ.qeu.r cju mariage fait par un coupable qui fembn: voula 'r) d' f~p\ul~f fop, repentir plut6t qu'honorer la religion;
Nr'}ln~.:h~111e~qui çontracre moins pour être uni" que
pour fe uV(firl fépltré au moment même de l'union.. Mais il
n'en ,cfl: pa~ .de- même du mariage contraéM avec une
cOllcubine 'J lorfqu'il n'exifie point de fyinpt6mes de mort
p QcJ1ajne; c'ef.l alQrs, JIn lien d'honneur comracré aux yeux
dS',ltt foçjétéub q1J..l. 15gitime.,. qui épure , qu~ réhabilite
,
c ceti, u.ni n a:!l1i.l'o.tdte de la 'Loi. [
• MonJieuF f,A,vpc.at-Général obferva enfuite en fait, que
le con,çubinage- dl: Riouffe avec la DHe. Michel étoit convenu ,~'* d~ai1ll:ur!lJ (;onllaté par la naiffance de l'enfant. Le
mariag!1l1de RÎ'9uffe (ut célébré après nne publication' le 26
Ma1 !77'~,,~ la.Paroiffe St. -Martin, enl préfence de plu!!~ur~ p_er(9,9nes: iLn'y' avoit rien lors de cette céremonie
ql.\i , apnon<;ât unel. JIlort proch'aine; .Riohffe ne mourut' que'
2~ joyfS. après.
c
... Depui~ fon. mariage il avoit viGté des malades;J & Il'avqiç pas ceff~, de reinp:lit res occupat.jonsl; mais il eft des
maladies qui , même en préfemanc à tous les' infians l'idée,
deJ 1 -mort'.;1 d'c. 'anachen't' que 'plus à-la \.ie, & -laiIfent
affe~. de fot(~e à ,ceuî.'·qu.i eri "fOllt! atteints, pour cBntmuer
des fortél:i~as utiles à la focié,é. Le mariage de Riouffe
c4lfil?fi qY;lOre ans & .t1;ois mois après fon, veuvage', & 'près
dl!. qU'itre ~_~.~ la -naiffanèe de Ilenfan~, l'a8:ej de ~Baptêm~é
d.eJ la fille rfaithfous Jdes noms! [up'po(~ , l!, s déux ·circbhTtillj.Çeji)( 'nd.lqùent afful,.que' Riouffe n'àvôit I penfé -à s'u 11'1
la D I~. Michel, lqu'au 'momèht qh'i1 1to 'choitJà -l'exHêmité de·~la.Nie ,~"d'a'illeursl fon tefiament,'
il, [e 'dit cor.
porellement malade, quoique non aHté ,lIne- -la~·ffe. plus au·
eut}, tlo.u~è::fu.r ce "POillt ; ~ cht:e"= déela? tion" p'rduvè' une
maladie. g(awe'l~l 4 qui., q'uoiqu1el-lc ne jl'èbljg~!t tpâs' d~
prder' la' 'duimb.œ,
ne liopvôi1: 'è penda.nt
'l'as l~tr ?elfal'-'
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DE;P R 0 VEN C E.
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dée comme imprévue. A lces .caraél:êres, comment ne pas
reconnaître le mariage in ,extremis! .
On a offert enfuite la preuve que lors. de fan mariage,
Riouffe' était atteint.& malade de la maladie dont, il dl
mort: cette preuve dl-elle rétevable ?', "
Il
_ Riouffe fe, 'marie, reconnaît [on enfant. te{1:e " l'in{1:itue [on hêritier , donne l'ufufruit de .fon bien à celle 'iu'il
vient d~époufer, s'avoue malade dans .fon te{1:ament, &
meurt; tout cela fe confomme _dans l'efpace de 28 jours.
Avec de fi fortes préfomptionst, commentJ[ne pas admettre
la preuve .
.1 . .
,
.
,,( '1
.
f
Monueur l'Avoc.3t-Général,paffa .enfuite ·.à la difcuffion de
la feconde quefrion. Fau~-jl que les deux époqucs,de la-conception & de la naiffance fe trouvent dans un tems libre,
. pour que le Mtard,.puiffe être l~gitimé par [Je mariage fubféquent ? Il établit ce qu'étoit dans le Droit Romain la légitimatiolll pat )p1ariag~ fubféqliénr ;.acjoptée par nos Loix,
. potre,) Rrgit & l,netre, JJiriLPrudenlle: iluprCiluva qu'une pal'ei1le légitimatipu étoit llP. prirûlege , une fiél:ion de la Loi ';
Il3'r laquelle celui qui n'eH pas .-légitime, le devient' par le
marJage po{1:éricur de [es pere' & llmere. La qualité, effentielle'." néq:ffaire ., en un m9t fondamentale. de. la.1égitimatÏ<ln:, a ~OUjOUIS été ~a' libeûé ·des ..conjoints.( L'enfatHi
que le niariage fubféqucélt 'po.uv.oit légitimer, devait être '.n~
-ex [aluto' & folutâ : .le' bâtard adulté.rin ne pouvait ·e.ré"
tendre à ce bénéfice; il falloit, d'après la. Loi, que_le
1J!ariage, fût permis: .fw·us, .m.arri/JIoniU11l nOJl~ 41 :l:.egi/Jul
inter;dic7am, leg.\ '1;0, Cd$!. d~ narur.alibui;libe/is:. EoiQt,,4. 1
g' timatiol1 "fi, 'no:n licer legitimè duxere J/XP;t:.Tf1 , dit la.I2ttlc.
Novelle ,. cum tjuâ parerai habue' c.onnubjum , cui, bmnino'
.lice~ copulare, dit la Loi 1 1, eod.
.
'•
, Les 1 titres, de flqtu .homiaum '& de naturalibus liberi, , le
chap. 7 de la Novelle 89, ont été les- titres du Droio
Civil,' ijui' ont- fc:rvi d~ bafe à '(lécider 11· quelle' époqu ~iie
vpie, exifter 1,\" I~berté .Q,è~. eonjoints .• ~étoic,.,,<: at!'.'rnom.enc
l>
~
de' la conceptipn , ou feuleJllent -di:· la naiŒincé.?,
, M: Droit C,ano~ique ,.da,as 'le. chap. ,cama t'ix, a dO/.Ulé
~
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.
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Jou
ll. N J. L
e;llcore: une nou.velle force .aux Loix. politiques ': rien d'ans
ces différentes Loix de fixe ni de dîfiina , ail moins d'une
!JIaniere explicite.
JlI<fl:iuien, au tir. de natU'ralibus Liberis , Leg. I.omâ, venait de décider que. les enfans nés ar-rès le mariage fubféquent , & conŒquemment pofl dotaLia inflrumenta, n'auraient pas plus de droit .à la fuccellion que ceux qui' émie nt
nés avant ce mariage, puifqu'ils émient la caufe de la
légitimité des derniers, & que ce n'étoit même qu'en vue
des premie.rs ,. que le bénéfice d~ la léghimation avoit été
introduit. Mais. , difoit-on, s'il n'exifte point d'enfans nés
après le' maciage fubféquent ,: foit parce qu'.ils mgu·rront
avant la mOI.t du. pere ,'fait parce que- les époux n'en
auron.t plus, quel fera le· fort des enfans nés avant le mariage? Iu1l:inien répond.,qu'ils n'en U!ront pas moi.ns légitimes: l.efJ. 1 Imâ·, .•
' "
••Dans tl'hypothefe parriculiere ae cette Loi-, il s'agiffoit
,r n enfant conçu f aV.ant le" mariage & né après; eHe le
déclare' légitime, à moins' que la circonfianee du! tems
de la conception ne forme une exception', li· la regle-: OY
favorem libefor.u.m " definitione (Jertd con,cludimus , ut fup~r
in hitju[modi quœflionibus in quibus de. ftIltU libuorll.m ej/
tiubitatio " non (conceptionis ; 'ftd! pattûs rempus. inJPiciatur ,
tirceptis his' trmtummodo :cafibus iw' quibup cbnceprionem
.magü approbari, ùlfonrium condiiionis utiLitas 'expof/ulat.·
. D'apr.ès cette' Loi." difoit' M. d'Agueffeau-,. pou,r. poitvoit
Il'iJTn~f;tre' !\qette 'fic1ion ,IiI faut, amfi que Iparlenti tous LeiDbfh"""Ufis..,· que: '1.u .Veux extdmu ftient· habilè.s: mais ou air
ngatde cecte·( fittion .cp-mme .Une <Loi générale qui ne peut
a.voi lieû :que 'pou't . les:. fubJtitutions- ad .aortes· objets pé-.
cunia·jres, étrangers à l'état dé. bâtardjfe ou de legitimitè
des. ~41fàns', o'u il faut s'en. tenir au' fait f'eul de' la lég~""
•
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tlmatlon.
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f., 1 . .
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- Quél eil:' lt motif de la Loi:~ Que cduy quPépo,ufe :" al;,
inîJio' tale/lf; affeaio'nemL drcfll mulïe.",",' 'hdbuefit " qliœ- eotir
'( { J Il , . n:; ~
,
digpam' ellè. uxBds nomihe'fdciebat.'
E,\1i efFe.t·,:~nd. efi:ce 'lu?il; y.a,adultere ~'Quand efi':ce
�1·
D U PAL AIS D B P lt'0 V Il N C l!.
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même qu'il eft confommé? N'eU-ce pas lors de la conceptlon? Or, dès qu'il a exifré une fois, il ne peut plus
ne pas être: le moment de la nai1fance eU libre; mais
cette liberté n'efface pas la tache de l'adultere. Donc,
quoique ce moment fait libre, il ne peut pas .y avoir de
légitimation; & quoique l'enfant venant au monde doive
être reçu dans la fociété civile avec tout l'avantage que
peut lui donner .la polition des chofes , il ne peut faire
évanouir une tache légale, & dont le crime de fes pere
& mere l'a rendu coupable.
La nai1fance &. la conception font deux points .très-diftinas; mais en même tems ils font inféparables , ils dèpendent l'un de l'autre. Ces deux époques forment un tout
ind,ivilible; la {econde n'dl: que l'efFet dOj1t la premiere
eU la caure irrépara6'le.
/
'
Rien dans le Droit Civil qui prouve, qui néceffite ,
qui indique même qu'en fait de légitimation en général,
le moment de liberté des peres & meres à la nai1fance
des enfans , fufEt; tout indique au contraire qu'il faut
rapprocher les deux époques de la' conception. & de la
nai1fance, n'en faire qu'un feul & même tout qui exige
'une liberté conitante.
Lacombe, vo. Légitimation, a foutèriu 1 que pour la lég-i:'
timation par mariage fu!?féquent, il fufEt que le mariage
ait pu fe faire au tems de la conception, ou de la naif..
rance, ou au tems intermédiaire, parce, dit - ,il, qu'il
faut confidérer le rems le plus favorabll à l'enfant: par
exemple, un homme marié habite aveè une autre iémme ; elle
conçoit: époque prohibée; la femme de cet -homme meurr"
il continue de connaître cette femme:: époqut: libre, rems intermédiaire. Cet homme re marie avec une feconde femme-,
- autre que celle qu'il a connu; & lorfque celle qu'il a engroffé
accouche, il eft de nouveau dans les liens du mariage;
• nouvelle ~oque prohibée, celle de la nail!anct : fa reconde
femme meurt, il époufe celle qu'il avait corlou: il y .a
eu une époque libre, celle du tems intermédiaire; f'enfaue dt conçu en adultere , né en adulcere; doit - il être
p :z.
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R N & L
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.,
légitimé par le mariage fUQféquent? Oui ( dit Lacomhe.)
il fuffit que.. le mariage ait pu ttre r cqntraélé dans le tems i~
termédiaïre entre lf! conception & 1'1. naiffance.. Pourqu.oi
ajoute-t-il que le bâtard adultérin. ne. p~ut être' légitimé.! .
Quand eft-ce . qu.'il peut y avoir· adultere? S~ivant cet Au,eur, ce n~eft ni lors .~e la, naiffance , ni, lors de la
conception.; les. deux époques} mêmes réunies ne fuflifent
pas; il faut· qu~ucune caure poffible n'ait interrompu le
.cours de ce délit, pendant rour le. rems de la groifeife.
Embra!rcr un pareil fyftêm.e,. S'dJ: .c?n~rari7r la LDi
qui s;en tjcm .au~J deux époque..~ d.e ~a .'conception & dé
la. RaiJJàn~e -j c'eQ: en. fair,e " fous le p.rérexte d.e la fa~eut
des enfan~, l'application la) plus C):uelle àbl'hulTI.an.ité du
côté des mœur~, & la plus fa.uffe el1 fair de légiflation.
En fait, l'c"fanr de Riouffe doit-il être. 1 répuré bâta~.d
ou adultérin. ( La concepLion. a-t-elle eu lieu dans un tems
libre? T.elle dJ: la derniere &, pour ainfi. dire ,. la. feule
liJ.uell:ion que pl;éfente certe <;aufe•.
Les Lob, fùr c.eUe matier-e' ne doivent' être. que re réfultat des expériences;. les Loix jèptimo menfe, & de eo q)J.i·
natlls eft, n~ont été faite,s que d'apr;ès l'opinion & à caufe
de' l'opinion d'Hypocrate, propter autoritatem ·dLvi. Hyp.oaratis•. Avant' .commll apr~s c.ette Loi., l~s Mé.dec;lns n'om:
jamais ceifé d'~trll. c9n[ulré~ : on· cOl1noÎr le jugement d'Àèrien, & celyi de Papirius j, o't}:.., ignore enc.ore. mail s tomes
l'es. variations de notre .J.ur.i.fpr\ldence. fur. cette matiere; &
il eft faciltt de, fe.. C()~vaincre eq lifant. les jugf(mel1s des
::r.ribun~ul' ".qu.\l~ J Çlll,t toujour~ ,Çfé r~n~ s, conlme 'fi le
Dcoir, Romiljn n~ _IlPUS ~v.oit 1 r~nfn:is "?cune Lo,i fixe fur.
œ.re mat,ier..e" .ou: qu moins. <;gtj1!!l;; J;i' elle.s ne de.voient
être d'aucune in.(1uence.n
..' .
: . Œ'l cqnnoit " .dit M.B,ouvard~ dans k feconde ConfUlcation, pag. 11.9, u'lç gra(lde,flll,amité df .C.~1I;;1s .q~.i pW,IJellt
avancer le. te~TlS; qel,l'ats.c Ifcheme(lt,,,/ell~s..,\q ~, l~ âjkJJi~~n
phyfique du· f~tuf ,,,fe.L,lcl. çe. la m.,ere-,. les-chag!jns quelconques, la continuation· des maladi~s. périodIques, &. mille autr:e.r ;. mais',on "~'e; èon~;Jt. aUfunë. qui.'puiffi le retarder•.
�DU
PAL AIS
D l!
PRO Y Il N C l!.
-11-7
_ M. Louis:J le fecond 'ant~gopine des naiiTances rardives,
s'explique à-peu-Psès c.omme M. Bouvard, ainli qu'on. le
voir par les dj~éren~ articles 9?'il a fourni à l'Encyclopédie fur cerre m"atiere. Cet Aùreur s'arrête à 9 mois précis ;' avq.Tlt. ou apres, ce term:e, tout 'acco!lchement, dit-il, cft
1 . .
'illégitime.
M., Bouvar~, fans vouloir convenir de rien, croit qu'il
ell: prudent d'admetrre un inrervalle: il admer expreiTément dans fa premiere ConfuJradon les accouche mens de
fept mois; ils font, viables, dit-il,' mais ils ne font pas
nawrels.
M. AHruc, fe propofe de faire de nouvelles expériences.,
afin que l'on h1che une fois pour tolites à quoi s'en tenjr
par des obfervations fôres·.
,
Hypocrare admet 4 mois de v~riâtions. At·jflote s'érend
depuis le feptieme mois jufqu'au LI.me. Pli~e ,ar,puie Je
fentiment d'Ari{J:ote par les obferva~ions' d~ plu~eurs ll:cJes.
Aulugelle nQUs a' tranfmis les mêmes ehénomene~. Gallien
fe contente 'd'aiTurer qu'il n'y a poini de terme ~xe. ,Varron
le prouve pa:r des. exemples. Adrien. réforme par, ces expériences l~ Loi des 12 Tables.. Zacnias rt.voue 'formelle:.me~1t, qu'il n"y a ·aucun princip; aiTez, c~rtain. fur les l1aif-·
fances légitimes, pour pouvoir, régler laI Iurifprudence des
Tribunaux~ Haller., Vàlvieften ,. Moriceau ,.tevret', Lamorte,
Se'nac ont tous admis les plus grand~s va~iariàns.,. fui-to~t
pou,r les naif[.ances· précoce.s. M. dç Buffon 'porte le retardèment j'ufqÙ'.à, 1·2 'mois j M. Bayle & Buél:ous jufqu3àt 18.
Le 1 CuUege entier 'des Médecins de Lyon, &- ,pr~fqtre Î:oute,s:'les Univerffté~ de l'El;rope QAr adoptè les mêmes~ pr;~-'
~ipes .& conf'acre les mêmes expériences."
':,.:, .P,o'mero!e" 'favant Médecin de Paris, dans' fan Trait,é'
des erreUTS v~lgajres de' la Médecine, s'exprime ainfi: L,e
fems cre l'accouchement' n'a aUclllle. certitude parn!i les, 'hommes,;' siil.f4ù,t en Cl:,oire les hifloires, il s'eft . J'U :des' en/ailS'
.de ') mois - qui 'nIant, pas laij[,é; q,ue de vivre en b-onne famé,
& T7âfeJius, Auteur âigfle de foi (ait toujours, Pomerole)}
a. vu une fille ~e 120 ans q,ui éloit née à' ') mois.. • • ,
�l'
a. t
Schenechius, dans fon Traité in-folio; de obfervationibus Medicis raris & novis, rapporte cinq exemples d'enfans nés à cinq mois, & qui cous font· parvenus à un âge
de vigueur & d~ force.
Cardan cite une fille de 18 ans, née au 168me. jour,
& une Re1igieufe de Milan née au 17ome.
Accaranza, en fon Traité de partu , cap. 9, a rempli.
dix pages d'expériences fur des enfans de cinq à fix mois,
qu'il dit être vitales & nazurales.
Fabrot ,Auteur de cette .-Ville, Capizulis quinquemeftribus & ftmeJiribus, cire une foule d'exemples de nàiffance à ~ mois,. dont la plupart font arrivés dans cerre
Province, & il joint le témoignage d'une foule d'Auteurs
qui en ont admis la poffibiliré, &.qui en ont areefié la
réalité.
Mais il s'en trouve un bien plus grand nombre encore
dans un ouvrage in-4°. compofé ex profefJo fur cette mat!ere par Claude Giardin, & qui a pour titre: Du Part de
171 jours, édition d'Ancone 1 ~73'
"
M. Burlon , favant Accoucheur Anglois, dit que les en.
1 fans. de fix mois font rarement viables, mais qu'ils peuvent l'être avec beaucoup de foins ,& que l'erreur 'contraire a été pùifée dans Hypocrate.
Enfin M. Petit dic- dans fa Confultation, page 1 ~ : Il
eJi arrivé que qu,lques-uns des enfans qui font venus d fix
mois, ont. vécu ; il eJi vrai qu'on ne leur a confervé la vie
qu'à force de foins, mais enfin ils ont vécu,. & c'elt la décifi.on de 2:2 Medecins & Chir~rgiens des plus habiles
qui fignerent cerre Confultation. Il n'y a pas une feule
fonê1io~ , ajoute-r-il, dans l'économie animale, 'qui s'exécute
cher tous les individus dans un efpace de tems rigoureux &
déterminé, ce qui détruit toutes les conféqueTlces que l'on a
cru tirer 'de la prétendue uniformité dans les ,Loix deîa nature ; peu de capacité d ft dilater. dans lé foyer de la génération , & peu de fenfibilité dans l'organe de l'accouchefI:lellt " produit les naijJances tardives, & le contraire les naiffànces précor;es,. jufq,u'à ce qu'il y ait irritation, il nl' a
Ils
0 'U Il. N
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PAL AIS
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PRO V l! N C Ê.
11
9
'pqÎllt d'accouchement. L,a quejlion ft réduit donc à [avoir tri
point de théorie, s'il n'ejl pas poffible gue dans l'organe
d'une ftnfibilité ou cl'une dilatabilité plus ou moins grande,
·'un enfant prenne. plut6t O.u plus tard le degré de volume propre
à amener les fibres à leur dernier développement, Or , il eft
certain, dit-il, que ces différences fi fenfibles d'accroifJement,
que les .enft!-ns éprouvent après leur naiffance, ils les éprouvent auffi dans le ftin. de leur mere, puifqu'ils y font furceptibles de toutes les viciffitudes de la fanté ou de la maladie. Il eft certain Jlue les enfans qui am des peres heureulement conjlitués, croijJènt avec .la plus grande rapidité'
il eft certain que l'enfant occupant ainfi plutr1t. un plui
grand e{pace, ptoduit aL~(fi plut6t dans l'organe de l'aecoudzement l'irritation qui le fait naître. Dem:lIlder par confè-.
quenr fi les naiffallce~ peuvent lere tardives ou précoces, c'ejl
demaniier fi les peres font tous du m~me âge, auffi fortf ~
auffi fains; fi les meres ont toutes (e m~me' tempéramem.,
la même vigueur, fi ell~s vivent toutes' de -lai même manie,:,'~.
Ji elles éprouve'!t les. mtmes indifpofitions,.
. .
On voit dans toutes ces autorités (continua M: l'Avocat~
Général ) que les nailfances de fix mois étoient 'poffibles;.
on a prouvé gu'i!' en. ~exiiloit un trèS-gral1d nom!5rf. :M. de.
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& celui, donlt' il s'~giC: aujourd'hui, eil né' au ,J'72.me. HYi
pocrate n'~foit d'abord reconnl1 les enfans viables q.u'à 21.0'
j'ours ; . mais d~apr;:s de nou~'elles expériel1~es, il ·aJ,}régea
ce terme, & n~exigea que, 1·82. l·ours. L'autorité ,de' cei
".
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L'
1
A:uteur lur le terme de l'accouchement cil: non,'feJ.llement
ohfcur~ ,,)Il~~rtaine, contradiél:oire , m"lis eUe 'doit de plus:
êtr re.gardee" c~mméJ' infinim~rit fufpeél:e:
. Aprèll Jlvoir _difcuté les principes phyliques. de cette:
caufe, il, rippella cè' qu'en ont diF: les Loix, quelle a été
reUr~' oriAi~? fouS quel. point, de" ·Yue il' faut les examiner"
q'uelle ~n1iuen~e a eu l'ôpinfon' d'Hypocrate fUr quelques
Loœ,
'~é qu'en' ont
"'wnfé
. Id
.A~teizrsIf les pius exaél:s.
~l
r'·,
1 l'
du pays ,,& ce qu'en biffe conclüre la Jurifprudence.
Lü Loi 12. ,. If. dé. iJatu. homillum ,. s'éxp,rime en. ces ter....
�12.0
r0
U RNA
L
mes: Septimo menfe nafci perfec7um partum jam receJ'tum
èfl proprer alltorùatem doaiffimi viri Hypocratis., & ideà
credendum eft eum qui juftis nuptiis'feptimo menfe natu.s eft,
jufiuni fiLium _e.fJè.
. .La Loi 3 ,t:. 12, ff. de fiûs & legiiimis, & hœredibus, fixe
un autre termè , ,'de. eo qui cencefimo . oaogeflmo - fecu(ldo
die' nawseft , Hypocrates fcripfit, & divus piu·s: Poncificibus refcripfit jufto rempore videri natum , nec - videri, • in
fervituce conceptum, 'cùm mater ipfius ancè cencefimum oaogefi·,
irl!!m -fecf!ndum diem e.fJet marrumiffa.
.
. Cette Loi en' precédée au mêm.:. titre. par une .autre fur
les.' riailfances tardi~es, & en' fixe. le Ile,rme' à, dix mois ;
p'oft detem' menfes mortis natus non admittetur ad Legitimam
hœreditatem. Telle efi encore la difpofition de la Loi 29 ,
fI'. .de libèris & pofthumis ,& de la Loi des 12 'Tables: Si
quis in decem menfibus proximi.r poflhumus natus erit, juftus
e~. La Novelle 39, ch. 2., de' mupere quœ undecimo menfe
peperit, dé:ide. que P~nfant né à .?nze mois révolus' e~
iliégitime.
..'
. .
On v.oit dans ces différentes Loix que le Légillateur
avoit [écarté prudemment dans la ~édaaion toutes les con,
~déra~i6ns' politi9.ues' & morales :;' qù~il f~ ~ornojt à pro~
noncer fur le faIt C0t;IDU, fur l'expénence confiatée; qU'Il
fe ):101'noic nhn à l'ddopter ; q~e', .qu~ri~J( aU-x n~ïirances
précoées, il iJhe prono'iJ~oit' rien. fûÎ' _ les tems antérie~urs;
qu'il n'excluoit aucune époque plus p'récoc~ ; il a reculé
même le terme de la .précocité feloy les pr grès de l'e~
périence, & il n'en' citè ,4'a~fre)1 "fnoiifj '3pe: ,l'autorisé
d'Hypocrate.
,
~ Hypocrate ét6it fans' doute 1uri' granl Phil'é[op'Jie ~,J~1uJ
d Méd ecm;
;, ' ImaIs
ll.
"1 é
' ~ntour
• " \~ é' t'idf'i.)
,1
tOIt
. une
encore qu , lin grau'
nuit épaiffé', Be [on te ms la 'fcience qe l'pbférvat,ion étoit
encore inconnue, la faine Phyfique étoit au 'bèrceau. j u. apr è
· rp':,\r,
·'f)'lIJ.
geons d e ce qUI. a re fié a"d'ecouvnr
s lut
e pro',,,,,
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grè s même d es, connOlllances d un lecle a autte: jugeo
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...
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PALAIS
DE
PROVl!NCIl.
12.1
vient de .traiter, combien _de fois n'dl:-il pas ievenu fur
[es pas, & parmi fes décifions, n'en e!!:-il pas dont heureùfement pour la fociété & pour toilt le genre hl!main ,
on a découvert la faulfeté.
Il ne doit exi!!:er aucune" différence entre l'exécution des
Loix fur les nailfances précoces & de celle fur les nailfances
tardives; les unes & les autres déterminent une époque
fixe; elles font fondées fur l'expérience, & conféquenunenr
doivent être regardées comme également invariables , s'il
e!!: poffible de l'être fur les opérations de la narure•
. Un Arrêt du Parlement de Paris du 20 Août l649,
rapporté dans le tome 1er. du Journal des' Audiences,
déclare légitime une fille née 10 mois 10 jours après la.
mort du mari. Un autre Arrêt rapporté dans la Somme
ru raie de Bouthilier, déclare légitime uce fille née I I mois
après le départ de fon pere pour un voyage d'outremer.
.
Renée de 'Villeneuve dl: déclarée légitime par Arrêt du 6,
Septembre l 6 ') 3, quoique née l2 mois l7 jours après la mort
de fon pere. Un autre Arrêt du 28 Juillet 170') , rapporté
dans les Œuvres de Terra'lfon, déclare légitime un enfant né un an & llX jours après la mort du mari. Un Arrêt du Parlement de Rouen a déclaré légitime un enfant
né l8 mois après. Enfin Godeffroy fur la Novelle 39, rapJ
pu rte qu'une veuve étant accouchée dans fa mailon 19
~~is après la mort de fon mari, l'enfallt fut déclaré lég1C1me.
Suivant M. Talon, dans un . de [es plaidoyers, il eft
con!!:ant que l'enfant n'e!!: pas viable avant cinq mois &
au deffous; mais il s'arrête à cette 'époque; il n'ofe rien
prononcer fur celle qui fuit.
Domat , dans fes Loix Civiles, obferve qu'il n'y a pas
de principe qui puilfe démontrer qu'il faut qu'un enfant ait
été conçu 182. jours avant la nai1l'ance, POUt être à un ju!!:e
terme, & qu'un enfant né 'un peu moins de tems après.
Je mariage ne foit pas légitime: de foru ( continue-t-il)·
lJu'il ne ftwble pas qu'an puiffi régler le jujle urm.e de la
Q
�'122
JOURNAL,
ilurée d'une gro.Dèffi, pour faire juger qu'UTt enfant ftit illégitime , s'il efl né quelques jours plut&t ou plus tard.
Boniface, rom. 2 , part. ~,', liv. 3, tit. 8, ch .. l , rapporte un Arrêt rendu le 12 Ju.in. 1634; en voici Fefpece :
la Dlle. Lebegue , veuve du Sr. de' Gignac, s'étant remariée après l'an du décès réyolu avec Me. de Remerville,
Avocat ert la Cour, accoucha d'uue fille fix mois après
le m.ariage. Le tuteur des enfans héritiers du feu fieur de
Gignac fé pourvut comre la Dlle. Lebegue, pOUl' la faire
condamner à la ref1:itution des allautages qu'elle avoit gagné
par le prédécès du fieur de Gignac, attendu qu'elle avoit
vécu impudiquement dans le deuit..
Le fieur de· Remerville préfenra de torr ~llef Requête,.
pour· faire donner cornmifiion à· une Sage-femme de faire.
rapport de Pétar & qualité du part, Partie appellée : le rapport porta qUl; ~e part étoit tellement débile & exténué,
que', fi on· ne lui eLIt d€ln\né quelque breuvage" il n'auroit
pu vivre , & que le part ne trouvant pas. a1fez- d'e nourriture, attendu. la, foibleffe de la mere·, avan~a. fa fortic , & qu.'il éCQit de {èpt lunes. On dtoit pour le fieur
de RemcrviHe J'exemple d'uu enfant né à Ara'I1'lon' en Languedoc à 23 mois, avec la barbe & les denr~~; L'Arrêt
débouta le tuteur; Ciceron, liv.. 2; , dl! divin.. ,; Cacrdan ,
Accaranza. & d'al1tre~ Médecins. -attef1:ent que le parc ef1:
viable, pourvu qu'il y ait fil( conion&i.ans & _flx .'~l'pofiCions de la tune au. iDleil.
On doit donc jugelr,. d'après les mêmes' p-rincipes, la
caufe de la Michel" puifqu'elle préfenre les mêmes circpnfiances. Dans' "'Arrêt rapporté' pat Boniface, il. ne s'agi1Toit que de gains, lIuptiaux & ,~cs aNamages d'une femme'
dont fon in.contiuence devoit fa priver. Ici: il s'agit du
iD.rt d'un enfant que l'on veut ren:ancher de la fociété ,.
à, qui l'on veut enlever fou nom" fon étqt, là fortune'
& fon. exif1:ence..,
Dès qu'il y a lieu' de fixet, fétat d'es homme~, dès. qu'Olt
pe.ut fl:atuer en. faveur d'un citoyen , la loi- " la. nature"
llhumaniré, ~. droiJ:s' de la. fociété" J'incertitude- cruelle:
~
-.
~.
�DU
PALAIS 'D!:
P'ROVENCll.
123
entre laquelle cet enfant fe trouve', l'infamie & Olé me le
crime d'un côté, le droit de pouvoir fe dire citoyen, <k
l'autre, touS ces motifs font une néceffité de prononcer fur
l'état de ce citoyen.
M. de Califfane conclut à ce qu'avant. dire droit a.ux
Requêtes princjpales & incidentes des fieurs Riouflè &
autres intervenans, ayant tel égard que de raif0!l aux fins
fubfidiaires par eux propofées fur la qualité du mariage in
extremis, fans s'arrêter au furplus de leurs fins fubfidiai..
res porcant fur d'autres qualités. ,il leur fera permis de
faire preuve dans le mois que le fieur Riouffe étoit malade lors de fan mariage de la maladie dont il eH morc,
en délignant par eux la maladie lors de la fignification de
l'Arrêt qui interviendra, fauf & réfervé à la Dlle. Michel
la preuve contraire dans femblable délai.
Le "t Mai à l'Audience du Rôle .la Cour fit regi/he ;
il fut vuidé le ~ au rapport de M. ~e Confeiller du Queilar;
les conclufions furent fuivies, dépens réfervés; pl,aidalls
Mes. Gaffier, Si meon fils & Sauvere.
A
-
'It,J R Élt'. 'X·V.
Un Enfan; peut demander d'~tre jiJufirait aux mauvais trai..
r • temens de ,jiJn pere, & d'~tre [éparé d'avec lui, lorIque
celui
- ci _excede_ les bornes 'de fa puiffance & J de la •cor,...
reOlon.
.
M'.
Arie-Marguerite Caillai d'è la vill~ de M;r[eille 'préfente Requête au Lieutenant de la même Ville;
pour être autori[ée de plaider contre [on pere ; elle demande en conféquence ajournement contre lui, pour fe
'voir conpamner à une penfion ,alimentaire de 600 liv. ~ a[fignation à jour précis pour obtenir une provifion de
300 liv.; elle demande el)- outre d'être mife fous la fauxegarè.e 4,e la Ju/1:ice. Décret le la Juiller 1778, qui l'au-
.Q2.
�U4
JOlI Il
If A L .
tarife· à plaider, la met fous la fauve-garde de la Tufiic.e;.
& accorde l'ajourn~ment &' l'affign~tion''
Le 20 Oétobre Caillol demande la révoc.ation dü déaret, & qu'il lui (oit permis de réintégrer fa fille dans
fa maifon, e.tiam manu militari.. Le 23, décret. de renv.oi en.
"
jugement. ' .
La Caillai offre un expédient intedocutoire , & demande:
à prouver, 1°. que depuis long-tems elle était prefque tous
les jours battue & excédée tant par fan pere que par fa·
marâtre, de coups de pied "de [outRets" le p'ius fouvent·
. de coups de, cordes trempées dans le vinaigre ,. d'Onnés,
avec. tant ,de. force ,. que les voifins les difiing'uoient de
leurs appartemens ; que., l'un. &' l'autrç allaient jufqfl'1i la.
fouler aux pieds & la wlîner.
2°. Que quand. ils la battoient: auffi, cruellement, ils liJi
. fermaient la., b,oucqe pour, érouffer,les cris ;"Cll. que les voi-·
fins 'devoient connaître par. lâ nature des cris..
3~' Que .fan p,ere. &: fa marâtre. ne .l'app,elloient j~mais
par fon 'nom ,. mais. p,ar ceux. de gùeu[e ,. d'excrément lIenature, &: par. autres pareilles dénJmiilations ,. ne lui par!am jamais que la menace & le. bla[phême à. la bouche..
4- o~. Qu'on. l'employait dès [a plus tendre enfance ,.li des
œuvres ferviles· q~~?n, n'aur,oit [p'as .~~xh~~ d,e la fe~.vante la,
plus robufie, pouffant la cruaute Ju[qu'a la' nure lever
tous les jpurs. ~ t.rois heure~ de ma,tin." même pendant
rhiver.
'
•
,;0. Qu'elle m,mq).loit d'es vétemenS' les plüs néCeŒiires
-pour Ce. cduvrir. " &- fe garantir en. hiver. des. rigueurs de
1;1 Cairon.
. 6°"j Qu'cilie était ·fuuvcnr Eriilée des· ,alill1ens les. plus né~~1fairês à la vie a.nimale ,. au paiilt que des vOJfin~ avoieJlt
:.été oblig~s de. lui. dqnner .quelques, m.orceaux de p'ilÎn....
, 7,°. Que. ,Eour comble de cruauté" on la [aifoit coudier
Jur une faupenrê é,lêvée à la hauteur du. plancher ,. &: à: lil.q,ueUe 'elle: ne. ~ouyoit parvenir .que par. le. moyen de quelques. morce'aux.. de bois qui ne tenaient' que p'ar quelques
cloux.; qU'Oll fàlllfroit· même q).l~clle y montât· fans lll-
�DU
PA.IcAIS
DE
PROVERCE.
12.)
miere ;. qu'elle· en tomb~ une. fois, & qu'elle rifqua de périr des bleffures que cette chûte lui occafionna; que malgré
cet accident, fan pere pouffa l'inhumanité jurqu'à conti~
nuer de' la faire coucher au même endroit fans couver~
ture & prerque nue.
8 0 • Que ron pere n'avait ceffé de la traiter, depuis la
mort de fa mere, cam me fi elle n'étoit pas fa fille , Ou
qu'il eût envie de s'en débarraffer , tant en l'excédant de
. routes les manieres , qu'en l'exporant à toute forte de dangers, & en la f..1ifant manquer des alimens & des fecours
1:es- plus néceffaires à la vie.
Le 24 Sentence qui déboute la Caillol de fes fins prin~
cipales ,. rév.oque le décret de f.1uve-garde, enjoint à la
CaillaI de fe retirer par tout le. jour dans la maifon ·de
fon pere. Appel de la part de la Gaip0l. Son pere
demande le nonobfiant appel, le Lieutenant. le lui re~
fufe.,
Le 4 Mai 1779" Marguerite CaillaI préfente un expé~
'dïent pardevatit la Cour; elle y articule de nouveaux faits,
&. elle y demande ra provifion de 300 liv. La caufe por~
.té6. à, l'Audîence, les Parties firent des efforts refpeé1:ifs·
pour fair,e admettre ou rejerter la preuve: la fille foute~
noit que les févices dont elle fe plaignoit, excédoient
les bornes de l'aurorité paternelle. Le pere tâchoit de
prouver au contraire que fa fille fe plaïgnoit à tort, &
qu'il ne l'avoit jamais maltraitée ultrà legitimum. mo~'
dùm..
,On diroit pour Marguerite CaillaI que la puiŒ1nce pa~
ternelle n'dt parmi nous, comme ·toutes les autres·., qu'une
puiffanc.e de proreé1:ion. C'èfi parce que les enfans ne
peuvent fe paffer d'un fou tien dans l'ordre phyfique., d'un,
gllide dans l'ordre' moral, que. le pere a. reçu de. la na,..
l'ure & des loix un pouvoir dont ces loix, ont m~furé l'é,..
tendue fur. l'affeaion au çœur paternel. Mais, Ii loin d'être'
feur proteaeur, il dev.iént leur t·iran ;' fi fes en fans ne
1
. trouvent qu'lin perfécuteur là 011 ils devroient trouver. un·
:lp'pui, ,. [on ponyoir cenè ,parce q~'il ne. llli. a éIé. ac---
�12.6
Jou
R li' A L
cordé que pour leur avantage; & ce feroit renverfer les
loix de la nature, que de [ouffrir qu'il ptIt devenir entre
[es mains un inO:rumcnt de haine & d'oppreffion.
Les liens de la puiffance paternelle doivent donc être
brifés, quand le pere méfufe de cette puiffance. Quoique
la Loi Romaine eiH donné au pere droit de vie '& de
mort, elle ne fouifroit pas qu'il maltraitât fes enfans [ans
'fujet. Dans ce cas, elle le forçoit à les émanciper. Leg.
dillllS Trajanlls ult., ff. fi à parente quis manumiJTu~ fit.
, Ces principes font certains , ils font appuyés fur les
loix de la nature. Auffi trouve - t - on dans tous les Tribunaux des jugemens qui, [ur la plainte des enfans contre
leurs peres, ont prononcé entr'eux une éternelle féparation , qui ont brifé les liens qui les uniffoient, qu'i ont
affranchi les enfans d'une puiffance devenue entre des mains
indignes, un in[humenc de tyrannie &. d'oppreffion. Oaillol
pere, dénie les mauvais traitemens ; (a fille eD offre la
preuve. Les traitemens (ont-ils affez forts pour opérer une
féparation ? Ce n'eO: que filr les circonl!:ances du fait que
'cette caure doit être décidée.
'
S'il ri'étoit quefl:ion que de violences paffageres , fi l'on
pouvait croire que ces violences ne (ont que l'effet d'un
emportement involontairt\, qui ne prît rien fur le cœur
paternel; fi elles n'étoient pas provoquées par une in(piration étrangere ; & fi la Dlle. Caillol n'avait à fe plain'dre que du caraél:ere de fon pere , & non pas de (on
cœur; quelles que fuffent ces violences, le re(pet!: '& la
reconnoiffance qu'elle doit à l'auteur de (es jours au:,
roient étouffé (es plaintes. Mais il s'en faut bien que la
Dlle. Caillol foit dans une pareille pofition : 'les infpi-rations d'une marâtre ont (u la bannir entiérement du
cœur de fon pere: ce (ont ces in(pirations qui, en étouffant un reO:e de tendreffe. font parvenues à' la faire regarder comme un objet odieux. Il n) a donc d'autre
moyen, pour la foufiraire à la jaloufie de [a marâtre,
que celui de l'éloigner de la mai(on paternelle.
Toui les Auteurs OQt placé parmi les' caufes qui' peu-
�DU
PAL AIS
DB
PRO V E Ne E.
l'l7
vent opérer une féparation entre un pere & fes enfans ,
l'exifience d'une marâtre qui.le porte à les malrraiter.
Boerius J déeif. 19 S , n. S; Decormis, tom. 2 , col.
113 0 •
La Dlle. Caillai ne demande pas d'être livrée à ellemême; fan objet efi de fe retirer par-tout où il plaira
à la Cour de la placer; elle ne _demande qu'un afyle honnête & décent où elle puiffe trouver avec tranquillité les
foins néceifaires au foutien de fa vie & à une éducation
trop long-tems négligée par fes parens•
. En vain Caillai pere prétend rendre la preuve inadmiffible , par cela feul qu'elle roule fur des faits invraifemblables, & trop cruels pour être fuppofés. Dans tous les
rems ,. & chez tous les peuples, la violence , le préjugé
même ont rendu les peres· cruels & barbares.
Dans les plus beaux fiecles de la Greee' & de Rome,
chez UII des peuples les plus polis de l'univers , il était
des j.ours confacrés , où des meres couronnées de fleurs,
venaient en triomphe pofer leurs en fans fur les bras pen-·
chés d'une Divinité barbare, aux pieds de laquelle éroit
un "'ralier ardent dcfiiné à les confumer. Pour érouffer les
cris de ces innocemes vi&imes, on fairait rétentir les airs
du bruit des inHrumens: dans un feul jour 300 de ces.
viétimes choifies dans les maifons les plus illuil:res de l'Etar ,
périrent dans cet affreux tourment. Chez un· peuple nOIlJ
moins poli encore, il étoit un autel non m?ins terrible "
où, fous le prétexte de fortifier leur ouvrage, les parens les,
faifoient quelquefo.is expirer fous les coups. Quel eil: celui; qui,
révolté au rÉcit de ces a!freufes barbaries, ne r.egarderoit
ces faits comme impoffibles, & l'HiHor;en comme: un,
impoil:eur? Ces cruels facrifices one cependant exiHé.; &
à la vue de tant de· monumens qui attefient leur exi.fience"
ces hommes ignorans feraient forcés de convenir que pour
avoir tFOP bien: préfumé de la nature ,. en niant. cette'
exifi.ence, ils n'ont fait que [ou tenir une erreur;.
CaillaI pere répondait qu'à la vérité les peres; ne c.on,fer.v.ent plus c.e pouvoir terrible de. vie. &. de morL fur leurs,
�12.8
Jou Il N • t
enfans : ce pouvoir a été réduit à la ûmple correél:ion des
fautes & des délits légers qui ne viennent point à la con. noiffance des Magilhats.
Si les préjugés peuvent étre bons à quelque chofe, c'eft
fans doute ceux qui flétriffenr une famille entiere de l'inconduite de l'un de fes membres ; ils nécelIircnt une
vigilance continuelle, ils préviennent les crimes qui affligent, & troublent la fociété: mais fi ces préjugés tiennent au bien public, il faut donner au chef de la famille non un pouvqir arbitraire, mais un pouvoir de correél:ion j il ne faut pas qu'un pere au moindre châtiment qu'il
exerce fur fes enfans, ait la douleur d'être traîné dans les
Tribunaux pour fe jufrifier envers eux; il ne faut pas qu'on
fe permette de brifer les portes de la mllifon paternelle,
pour venir y exercer la plus cruelle cenfure fur la moindre
de fes aél:ions.
" Il ne f;ut pas qu'un pere foit dans l'affreufe nécelIité
de dévoiler au confpeél: des Tribunaux & de la fociéré,
les fecrets domeHiques; qu'il foit obligé d'accufer lès enfans pour fe laver lui-même du reproche d'avoir excédé
les bornes de l'autorité paternelle.
Pour qu'il foit permis de faire à un pere l'injure de
l'interroger fur les motifs qui l'ont porté à traiter fes enfans avec rigueur, il faut alléguer des faits graves, tels
que leur vie ait été en danger j il faut que les faits foient
vrailèmblables , autre nient on ne fauroit être écouté. EH-il
un feul pere qui n'ait été forcé d'ufer de châtiment envers
fes enfans? En dt-il un feul qui ne craignît d'être préfenté comme un pere inhumain & barbare , fi une ré.
c1amarion de la nature de celle de la Dlle. Caillol pouvoit être adoptée?
.
. Les moyens de corriger les enfans font différens fuivant
la différence des conditions ,parce que l'éducati.on differe '"
& doit différer fuivant les états. Il eft des conditions où
la délicate1te~ des fentimens que l'éducation inlpire , rend.
fenfible aux plus légeres marques de mécontentement. L'a:il
du
�DU
PALAI~
DE
PROVENC&
n9
du 'pere n'a befoin que de s'armer d'un reO',arâ févere pour
imprimer dans l'ame d'un enfant bien né, cette terrellr
ralutaire qui le ramene bientôt à fon ·devoir ,; la perte de
la confiance d'un pere qu'il refpeél:e , eft peut-être ce qui
peu.t le plus affeél:-er fa fenlibilité : mais dans cette claire
de citoyens où l'éducation ne peut pas. préparer de fi heu'reufes difpofitions, où l'on peut mo·jns parler au cœur
qu'ébranler la fenfibilité par des aél:es plus violents ·en apparence, mais qui ne pr0duifent pas des effets auffi pro.mpts~
il faut néceirairement avoir recours à ·ces moyens ,qui- font
-les feuls quoi puiirent fe fail'e entendre avec fuccès" L'indigence ne connoÎt guere la délicareffe de l'amour-propre.;
-ce feroit lu,i parler -url langage inconnu, ·que ~e v.oulQir
-l'aftèél:er autrement q.ue par œ qui -eft fenfible.
Quand il feroit vrai que Caillol pere au·roit ufé quelquefois de ces :fortes de -châtimens envers [es -enfans, fau~
droit-il le regarder comme un pere it~humain, comme un
homme indigne de porter le nom de pere & d',en exerce'r
les roits l Il ·en coûte à un pere de punir fes el'lfans.;
ces aél:es de févérité ne [e font poillt fal'ls une .dGlUloureufe émotion. Faudroit-il qu'un pe.re fût indilfé·rent fur
1a conduite d-e fes enfans, qu'il les abandonnât .à l'curs
penchans , qu'i'l ne che'rchât pas à détou.rner ces ~.ifpofitions
vicieufes dont il n'y a que trop d'oecafions dans une grande
Ville l FaudrGit-il qu'un pereaut<Jrisât par 'f13n inaél:ion &
fan filence les travers <J.ui -entouren·t une jeuneffe imprudente? Ce feroit viole·r ,le vœu de 'la t1arure; ce ferait
abandonner le p.lus faim des devoirs de l'autorité paternelle.
Les 'effets civils de 4t puiffance paternelle ont pour objet les biens ; les -effets naturels Ont pour objet la ptrfonne.
La Loi en ôtant aux peres le droit de vie & de mort qu'ils
a,voient fur leurs enfans , leur laiffe néanm<?ins eelui de
la correél:ion; eHe le donne même aux proches pareos <1\1
défalit du pere; eUe les oblige à la vérité pour les délit~
graves, de les' déférer à la Jufiice; difpofition dure qui
'tend. à rendre des procbes parens les délateurs des per-
R
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~,
J <) Uo- R< N'h Ii .
" 1
fonnes qui leur font les plus ·chçres. Mais !i cette derJ,liere
difpolition rélifie à léur ' affeél:ion', la premiere 0ffre- un
remede falutaire pour préferver l~enfant des égaremens de
la. jeuneffe.
ln corrigmdis minoribus , dit la Loi uniqu~ d'e emenda.lioné propinquorum, pro qualitau deliai, fenioribus' propinqui. tribuimus potejlatem , ut quos ad vitœ decora, domeflicœ laudis exempla non provocant , [altèm' correaionis
Medfcina- compellae ; nequè eamen nos in puniendis minorum'
Jlitiis pouflatem in immenJum extendi voti/mus, fed jure pa.trio, auto.ritas corrigat' propinqui' juvenu erratum', &. pr.ivald
.a:nim-advfrjione: compifcat~
.
'H Ainli, le droit
des peres efi inconrefiable ; la Loi ne
préfume pas qu'ils puiffent excéder. les bornes que la ten·dreffe paternelle met elle-même à leur' eorreél:ion. Mais la.
·nature 'produit quelquefois des monfires.. Un, Lé~i{lateur
n'avojt~pas cru aux. l'ar.ricides. Combien d'exemples n'ont
'pas.. convaincu l'humanité de. cette err-euT!. Un. pere n'dl:
;pas .préful'né haïr (on faag·;. il n'e.fi. pas l'réCumé fe poner
/i. des.aél:ions cruelles, contre fes .enfans..
, Caillol pe.re difcUC0it enfuire tous les faits dont fa fille
dema,bdoit la' p.reuve ,; & râchoit de perfuader qu'il falloit
r.anger. rous ces. fairs dans ,la c1alfe de lieUX qui ne' doiv.ent faire: auc.une impreffion;; les uns parce qu'ils n'excede nt pas. les bornes de la· coruél:ioll parernelle ;. les autreS parce. qu'ils font invraifemblables•.
Monlieur E:Avocat-GénéraL de Califfanne' portant la pa110Ie ,. examina d'àpres les pr.illcipes ce que c'eft que l'autoriré paternelle ;" il difcuraenfuire la preuve offerte j il,
.-Qbferva que, dlawès, la Loi. écrire' dans toUS les cœurs de
,m. main, rhême<><Je.J -1a' nature, 'l'autorité paternell,e eH la
Rlus ancienne .. la Rlus légitime de toutes les puiffances
cltabljes fur. la. t!:rre " fo.ndç~ par le. drpit. natur,el , admire
par' le' droit . pelitif.·
!
"Les ancie.ns tégiflateurs avoient porté ,cette' p~iffance'
aUl{ ~xces !es' pl.us terribles:. ici les «;nfans per-doient au
gfé: Qe.: leurs. peJ:es tous les> droits de leur. filiation; là. h:
130
T'
�DU
PALAIS
13
D'l! -PltOVENCl!.
~roit de vie & de mort fur 'les' êtres' infdttunés ':iuXquels
ils 'avoient donné le jour,' devitlt pour les~ 'peres '& dan~
l'ordre focial une loi de la nature'; & cè droit barbare
donnait un pouvoir plus defpotique., une autorité' plus
tyrannique & plus abfolue que celle dù' Maître fur l'Efclave , parèe qu'il falloitque l'aut6tiré pate1'nelle fût' 'ia
plus forte, & par conféqueht la ,plus terrible'&;' lIa. ,pl~ç
n
It'Vere..
•
IJ
.
~
J'
Par exemple, chez les anciens: Romaimr; l'ellcès '"de
l'autorité paternelle étoit nécelfaire dans l'ordte' politique,
& tenoit à la con!btution de l'Etat'; fe J père y étoit fèllI
l'accufat-eur, k témoin,'& le Juge de fdn'E1s : au ~retnier
mouvement .d.e .colere , 'il tremp.oit impunélhent les' 'mains
·dans fon fang, fans .être tenu de rendre 11c'omp'tè' à perfonne d'une aél:ion li dénaturée.' Il 'h'étoit pas' permis à
ces Légi!1ateurs d'être modérés; ils 1 Craignoient les dangers de l'indépendance ,de la loi naturelle' ; ils .~rappoierrt
A grands coups [ur les parties encore infdrmes de là, [ociéré ,
.qu'ils' vouloient réduire à pc jufEes' h~arnés', &:" ifs laif[oient à d'autres mains le foin de' finir leur ouvrage av c
plus .d'attention;
,
-"~.') J
•
,~,.
L'on trouve cependant des 'ancien!;' iPeuplè~ . .ciufl" ":j.voient point part'agé à cet égard la féfocité romainl. ·Les
Grecs -édairés de bonne _heure du flambeau Ide - la ~t3a-6h
& du génie, n'oublierent point que leurs l'nfans apparté!.
noient à l'Etat : la jeunelfe élevée fous les yeux dt; leurs
Philofophes, y répétoitcomme à Rome le nom d'e patrie , y connoilfoit comme à Romé, le prix de la gloire
& de la vettu; mais 'les Loix'} vtilloient"ellès-mêtnes [ur
cene partie la plus' chere & -la 'piuS' 'prJc'eufe~lde la Républiquè; c'étoient les enfans~ de l'Etat' p.lùtÔ que de
leurs peres. A Lacédemone la paterbité fut' pour ainfi
dire inconnue; on n'y donnoit le nom de mere qu',à la
patrie. Ce n'eft qu'en Frant:e dù 'on â [rli devorr (ë" rap-IHocher des loi" de -la -nature, lQ d'Onner dé jufies bor'ues à l'autorité raternene : -la ~c:>i
'prt>teg~ égaletne~1:
'les pe-res & les ebfa~s; les Magl!lrat& y fbOt les vral~
y
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�~ :'1 ~.. .,
132
Jou
RNA L
peres de .l'È"*, D~après ce . plan pol~tique" & prefqlfe
dans [ôut~s nos 1 Cout\lmes ,_ la puiffance paternelle finit
avec la fÇJibleflè de l'enfant; l?âge de 2) ans en eft le ter.me
le plus reculé.
.
. L'autorité paternelle dl parmi nous une _puiffance de
.Jroteél:ion & de c~nlêrvation, tlne compenfation, de foins
.~ de rèconnoiffance i; que cette idée fi~ vra.ie dans l'état
de nature, eft une vérité bien plus fenfible encore. dans
Féta.· de. [ociété, qui. voit fans c,effe les générations fmu-·
res. dans les g~nérations préfentes , à qui les· peres· fem..
blen.r n'êrr~_ 'chers que, par leurs enbns., où ils ne fon,t
pui.(faps que pour leur avantage, où ils n'Qnt de' force
'que J pou,' p~otég~r leur foibleJfe. A Rome la. puiJfanê.e
pater'nèUe. étoit· une. Magifl:rature domeHique; w France
il n'y a que les. MagjHratures .publiques ,. les Loix & le
Prince :. dans'J1rordte de la nature, on y eil fils avant
. d'être' citoyen ;: dans la' !Dciété ,. Qn. y dl. citoyen avant
'd""cere fi'~
c;..
.
li
: ' j ·Le!i.. d~rnicres
~oix Roma.i·nes· ont adopté les prIncipes
.d"ap'r'è.~ .lifquels·
dQi~ dé~jder la quefl:ion du procès ;.
"'ellës' ne donnent aux peres que la faculré de "hâtier ma}é érpe,ntJ,eur , enfaos·;.If pugition grave n'appanenoit qu'au
.M~gi.rr.!;~t \ .,lùi feul pauvoit. s'armer; d'une févérité qui conj
r
on.
;~~~oYR';âr à. l~; tendren:-~. Leg. 3: ). Cod•. de, 12atriâ poref
_mtT'"
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•
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o~ 'fle peut. conŒqueml]l~nt ad·opter. parmi nous la maxi~
.me àifreufe que Je, fils. ne Reut élever. la voix pour déP,PJlÇe~ J If,5. mauVilis rraitemell~ de fon. 'pere, que lorfqu'il
y. a.;eu J?o.uIj IJ,li~:d~ng~t:, de ~a vie. Il. y a. trop Rrès fans
doute'f e,ntr~' un· pareil, danger. & la mort.. Si par, refpeél:
p,our," e~R~re}; -i~: ~oj refufe. dalls c.e. cas à l:enfànt la voie
<l.r.i~jn~}),'r, ,. la fOCJét~ lui. ~~i.t p.rote.él:ion ; elle lui permet
la: .voie· civile.. La fur~ur' aveugle d'un. pere ne Eeut être
_fÎl'~u[ée.:-[ou~; aucun: 'ko}iu:: de.: V!lc; :: . ce' n~eil:, pas lui. enle-·
v.er Ulli fils " qIJ'e de. le; fouilraire.: .li· .fa, main. meur.rr.i~re,;,
a;ë.fi:. le; lui: :ar.rac~.er.;,· c.'efl::· J,e fàuver, lui-même';, ~'eil p,ro.-.
~1T tQi.lt,./i"lil"fôisj, &: le: eere:: &; l~' fils•. Au1Ii. fEmEe,,-
�D U
PAL AIS
D E' PRO VEN C Il.
13'.3
reur Adrien nous apprend dans la Ldi ) , if. de Leg.
Pompeïâ de parricidiis, que la puiifance paternelle ne peut
jamais s'étendre jufqu'à la férocité,: Parria poteffas in pie'tare deber, non in arrocitau: confijfere; & Perelius ajoute
qu'en obligeant le pere à dénoncer fan fils, le Légifiareur à moins eu en vue de le punir, que de le fauver,
.& de l'arracher au premier mouvement d'une colere dé[ordonnée. La Loi clern,iere, if. Si à parre quis manumiJJùs Jit, efl: encore plus formelle.; l'Empereur Trajan
oblige le pere d'énianciper un fils qu'il avoit excédé au
point d'outrager la nature , & de fe manquer à foi-même.
Aufli les Auteurs, & entr'autres Perelius, tirent de cette
Loi cette conféquence générale , que le fils maltraité peut
demander fan émancipati·on.
Il ne rene donc de la puiifance paternelle rien qui puiife
outrager les mœurs: le privilege même qu'ont les peres
de pouvoir faire annuller le mariage de leurs enfans qu'ils
n'ont pas ap?rouvé, n'eil: fOI)dé que ,[ur leur amour, leur
raifon, & l'incertitude de celle de leurs enfans que l'âge
rient dans l'état d'ignorance, & les paflions dans celui
d!ivreife. Il efl: fâcheux pour l'humanité de ne pas pouvoir douter fi les peres que Platon appelle les images. de la Di-nivité, qu'Arifl:ote veut qu'on honore comme des Pieux·,.
dont Tire-Live appelle la pu·jifance Majejfi paternelle , ne
peuvent devenir des. tyrans., & laiifer- un libre accès dans·
leu.r ame' aux: paflions les plus funcHes.,
Enfin d'a.près Decormis, toute puiifance' eH perdue
par le mauv-ais ufage. -Le maître qui févit trop contre
Fefclave, e1L forcé de le vendre ; le pere eH contraint
ti"émanciper fon fils; le: Seigneur-Juf1icier. e·fI: privé de
la jurifdiél:iorr fu,r {on valTal; la femme efl: féparée. de' fop
mari: Nos Négres même' ont le dreit en France de réclamer;le pouvoir de la' Juftice', pour fe fouHraire aux
violences de leurs', Maîtres.,. comme le- cQofi!tate le. jugement:
•de:- la, T.able de Marbre de 1776..
Delà EalTant à. l'examen particulier de. b caufê, Monliéurt'
...
�134
JOURNAL
l'Avocat-Général rappella que Caillol pere avoit fait valoir
dans [a défenfe des confidérarions politiques [ur le danger de l'indépendance des enfans, des vues fociales [ur
l'éducation du peuple; qu'il avoit voulu fixer les limires
çle la correaion parernelle, ou plurôt les I.aiffer indé~nies;
qu'enfin il avoir comparé les [évices du pere vis-à-vIs du
fils, ~ ceux du mari vis-à-vis la femme.
Il obferva [ur chacun de ce§ objets, que s'il faut craindre de détruire J'autorité paternelle, il faut craindre auffi
d'érablir la tyrannie;. que d'ailleurs on ne peut relâcher les
liens de l'amour filial, en fortifiant ceux de la tendre1fe
parernelle. Un exemple utile arrêtera les peres cruels, s'il
en exifl:e. Combien d.'enfans peut-être qui [ont les viaimes
d'une tyrannie mieux concert~e, dont la voiJ!: mieux étouffée ne peut pas parvenir jufqu'aux Tribunaux!
Les en fans protégés contre leurs peres , ne deviendront pas indépendans; ils I)e connoi1fent pas [eulement
leurs proreaeurs , ni les Loix q\l'ils doivent invoquer:
leur timidité, leur foible1fe [ont des [ûrs garans de leur
obéi1fance; il n'y a aucun, excès de dépravation à craindre dans de jeunes cœurs fi fideles encore aux impre[fions d~ la nature. _
L'éducation du peuple n'efl: pas ·plu.s éloignée de la [en_fib~lité; l'indigence cannait également -la délicateffe 4e
l'amour-prgpre. En vain diroit~on_ que. les châtimens [ont
néce1faires ,poLJr élever cetre cla1fe de citoyens, qui ne
lai1fe à J'éducation d'autre re1fource que ce.lle des coups.
Il eH: certain au contraire que J'iJ1digence eft,Pétat le
plus rapproché de la nature; on y trouve plus de candeur,
plus de probité, plus de pud.:ur, plus même de. ces
préjugés [ublimes ,. qui [ont la Jauve-garderdes mœurs &
des vertus : les mariages y [ont plus. chilles, les famil.
'les plus unies, les liens du fang plus révérés) la nature
plus écoutée, le rendre nom de .pere .plus doux à prononcer ; il Y porte dans J'ame des enfans l'idée du re[pea,
jointe à celle de la reconnoi1fance _; ils y mangent un 1 pain
.
..
�DU
P~LAIS
DE
PRO VENCE.
135
qu'ils voient arrofé des fueurs de leur pere, & fouvent
de fes larmes.
Les faits que l'on impure à Caillol pere, excedent - ils
les bornes de la correaion paternelle? Monfieur l'AvocatGénéral rappella les Doarines qui doivent fixer tous
les doutes fur cerre matiere: les Loix ont tracé aux peres
la route qu'ils on t à fuivre en corrigeant leurs enfans;
s'en écarter, c'efl: abufer de l'autorité paternelle.
Il ef!: certain que pour autorifer la réclamation de l'enfant contre le pere , & de la femme contre le mari, il
ne faut pas des faits qui conf!:atent le danger imminent de
fa vie; tel. n'ef!: pas le motif de la Loi; la fèparation a
l'ieu dès la premiere plainte, dit Decormis, quand les mauvais traitemens ont été fort graves. Denifart attef!:e qu'il
n'ef!: pas néceffaire que le danger de la vie foit dans les
faits allégués ; il fuffit qu'il y ait crainte pour l'avenir.
D'après le caraaere que doivent démontrer les faits dont
on demande la p..euve, le pere ef!: même a'lX yeux de la
Loi" moÏns excufable que le mari: mille circonHances par.'
ticulieres peuvent troubler la raifon de celui-ci : tout conc!Ourt au contraire à enchaîner la colere de celui-là; des
fouPlions, quoiqu'injuHes , l'iVl'effe funeHe d'une paffion'
trompée ou irritée, la jaloufie , cette furie domefiique
qui fe nourrit. d'alarmes & de probabilités, tout,excufeen quelque forte le mari coupable: rien n'allume au contraire le fang du pere c.ontre le fils ;. il ne trouve aucun
aliment à. fà. rage. La foibleffe·, les pleurs de l'enfant ,
fes careffes qui .deviennent fcs feules armes, le nom de
pere répété d'une voix plus tendre & plus émue, tout
concourt à attendrir le pere' fenfible. Le mari fmieu)' peut
n'être que malheureux; le pere cruel ef!: toujours cou-'
J'able.
Monfieur l'Avocat-Général paffa enfuite à l'examen de
l?expédient offert par Marguerite Caillol ; il obferva que
C2illol pere ne pouvait le conrefier ni dans la forme, ni
dans le fonds; il ne pouvait exiger le commencement de..
�136
Jou
lt. N A L
prellve par ecrIt; la preuve écrite eH impoffible dans pareil
cas : il prétend que les faits qu'on veut prouver font captieux ou controuvés; mais il ne faut pas moins en admettre la preuve pour en fixer la nature & le poids. Il
ajoute que la preuve de quelques-uns a été offerte après
coup & pardevanc la Cour: mais Marguerite CaillaI croyait
en avoir aITez dit pardevant le Lieutenant; & d'ailleurs on
peut articuler nouveaux faits même en caufe d'appel. Au
fonds Caillai pere allegue courre fa fille la paillon du
vin & la féduél:ion de la parure; mais il a contredit ces
'affertions en les uniffanr. Comment allier à l'âge de 8 à'
-9 ans des paillons qui ne font que l'effet de l'habitude
ou de l'éducation? Comment allier des défauts & des
vices auill contraires, la paillon la plus brutale & la plus
vile avec le goût de la coquetterie?
Caillai pere a foutenu enfin que les faits étaient peu
graves & quelques-uns invraifemblables , attendu l~ur atrocité, & par conféquent inadmiillbles. Mais d'abord refufer la preuve des faits invraifemblables , parce qu'ils font
atroces, ce ferait autorifer l'excès' de barbarie la plus tyrannique, l'invraifemblance deviendrait la fource & le motif de l'impunité.
Ce pere a produit des atteHations de bonne vie &
·mœurs, & l.ecerrificat de trois femmes qui atteftent n'avoir jamais vu Caillai ni fa fe'mmedu fecond lit mal-traiter Marguerite Caillol. Celle-ci a produit des certificats
contraires; elle a fait valoir le feco"nd mariage de fan
-pere. Mais il eH cerraiQ' qu'on ne peut point diffoudre
·par des certificats les liens de la puiffance paternelle. PaZ;
·reils titres peuvent tout au plus faire préfumer les mauvais traitemens, & en laiffer fouPlionner la. violence &
la continuité.
La circonllance du fecond mariage eH plus grave. De-cormis cite les Loix & les Doél:rines connues en pareille
matiere ; & il ajoute qije fi, lors m~me qu'il ny a point
de marâtre, on prive le pere de l'éducation de l'enfant
pour
�D U
PAL AIS
D E
PRO VEN C E.
13'7
pour la donner à la mere; s'il eft reconnu que le pere n'en
preni pas [oin; à plus forte raifon on peut tirer l'enfant
de la maifon du pere remarié, où la mardtre le fait négliger ou maltraiter. Suivant le Préfident Boërius, déc. 19'b
cil. 'i , l'enfant a droit d'être
nourri hors de la maifon
paternelle, propter fœIJitiam patris, ou s'il a une marâtre,
'/lut qui lzabet nOIJercam more nOIJercali fibi rixalltem; ità d'Argentré, art. 473 , G. 4-, -& la Loi 4 nOIl eft, if. de inofficiofo tellamento.
Néanmoins le r.emari'lge feul ne fuffit pas pour 'foufhaire
l'enfant à l'autorité ,paternelle, il faut que la marâtre le
faife négliger ou maltraiter, nOIJercalibus (ilafioni!?us ; à plus
force raifon , fi elle le maltraite elle-même, nOIJucali more.
Les faits dom fe plaint la -Caillol font graves, atroces ,
,invraifemblables même dans l'état de nature & de tendreife,
-in quo debet confiftere patFia pateftas; mais b preuve n'en
-doit pas moins- être. admife; -elle ne doit être refufée que
-dans le cas d'une impoffibilté abfolue. Il eft un figne ca'ra8:ériftique pour faire admetrre une preuve offerte par un
.enfanr; Quando apparet patf'Îs inlzumanitas aut fœIJit-ia. Or ,
<:haque fait de l'expédient c1fert par laCaiUol refrire -cette
-barbarie, cette négligence atroce, ce délaiifemenc -abfol!l
-qui révolte la nature -; on n'y voit -p()int .)acorre8:ion de
la Loi, modica ,caftigatio.
Les mauvais traitemens y commencent à une époque
'O~I on ,cherch,erDÎt inutilement de reprocher à la fille Caillol
de mauvaifes habitudes. A peine fortie -des maias de la
nature, & à l'âge de 4 ans, eUe rend les bras ve-rs fan
pere; celui-ci la repouife, l'excede cruellement, -& femble
fe repenc,ir de lui avoir donné Ie jour.
Si elle remplit la preuve des -fa-its qu'eHe acoar8:és pardevant la Cour, fan pere la fit <:ouche-r . -avec fa tante ,
non feulem.entdepuis qu'elle émit atteinte de ptifie, mais
encore lOfS de fa 'marc.; on l'a trouvée endormie auprès
du cadavre de fa tance, refpir.er la mort qui s'erl. exhalait,
& en avaler le poifon ; ( fpe8:acle' horrible, invemé jadis
p,ar le, plus cruel des tyrans.)
S
�138
r
0 U R -N -;A L
En vain ce pere eppofe que les faits donc la preuve
·efi ojfert~, font outrés & invraifemblables ; 'en vain alléguet-il. que fa fille était féduite; elle ne pouvoit connoÎtre
à cet âge que la féduél:ion de la nature, des bienfaits &
de la tendrelfe" patemelle ; en. vain invoque-t-il. pour le
prouver, la voix. tardive de cette tendrelfe; il la confond fa'fis
doute avec celle des remords" & le réfultat de l'enqùête
.peut feul jufiifier fi l'on doit accufer l:imagination de la
fille, ou la· barbarie du pere~
Le' 'pete fe·ra barbare fans 'doute, s'il' exced'e ·de coups
_fon malheureux enfant à peine âgé de quatr.e à cinq ans ,parce qu'il ne. peut fuffire à. des travalJX que fon âge,
fon' fexe , fe.s. forces lui rendent étrangers & impoffibles;
s'il voit d'ut}, œiL fec fa fille fuccombet fous le pods des
'fardeaux, tandis que la pitié fe fait entendre dans le cœur
. ~de tous les voiüns;' s'il laiffe manquer cette. fille de nourriture ,. au point qu'elle el! obligée de demander. quelques
.morceaux de pain. hors la maifon de fan pere ,. & de man,ger. ee pain, hors la préfence de celui qui. elt obligé de le
~ui fournir ;.:,fi. de. <i:oneert avec la marâtre" il l'arrache à
un .repos né.ceifaire, il. la prive de nourrirnre. & de vêtement " il. fo.uffre qu'elle foit exp.ofée en· dormant au danger de per,dre la vie ;. fi l'un & l'a'utre l'accablent d'injures les prus. atroces & de mlÎtemens les·_ plus révoltans;
fi la marâtre·, après avoir engagé le pere à la battre, &
l'avoir. félicité. de l!avoir cruellement battue ,. voit· d'un front
f'Crein ruilfeler fan -rang, & lui dit. enfiJite qu'elle ne founite· qu'après le moment de fe démire d'elle; fi ce.tte
,fille' déf~fpérée efi obligée, de! fuir- pluueurs fois la maiCon
de forr p.ere;. fi ne_ pouvant plus réuflel" aux fouffrances,
elle être à, l'aveIiture " elle fe jet e éperdue. ,dans les bras
de h fociété ;. fi. n'eCpérant plus rien. de fa .famille, & ne
pouvant- implorer que la commifération publique ,. elle pré·fente· fur fon corrs les marques funefies <Eune calere qu'elle,
lIfl. obljg~e de révérer ; fi, au milieu. de. Ces infortunes ,.
i:g~rée" épuifée de. fatigues, exténuée & agitée d'un< trem-'
lilement univerfel, elle efl. ramené.e chez .[es lantes par une:
�DU
PALAIS
DE'
PROVENCE.
139
perfonnecharitable , & elle y eH préfentée aux gens de
l'art qui. recommandent les foins les plus affidus, fi on
'veut la conferver.
Quant à la provilion. de 300 Ev. demandée par la fille
Caillol, Monûeur l'Avocat-Général obferva qu'elle devoit
être réduite, attendu l'état de pauvreté des Parties; mais
que fan pere ne pouvait eil refufer une en l'état; qu'il en
fentoit même la juH:ice , puifqu'il avait ·conclu par des fins
fublidiaires à .ce que fa fille fût déboutée de fa demande en
provilion , fous l'ofFte qu'il faifoit de I~ placer dans la· maifan de la Dame de Calas, pour y être' logée, nourrie &
entretenue jufqu'au jugement définitif.
Mais qu'indépendamment des moyens de' fufpicion qu'on
faifoit valoir contre la Dame de Calas , dont la miuâtre
.de la fille Caillai avait été la dorneHique pendant plufleurs années, la Cour ne pouyoit confier le fort de ce'tte
fille dans une maifon particulie.re & étrangere, 'quoique
fûre & honnête; qu'elle devoitêtre féqueH:rée. dans une
maifonl publique, folitaire & religieufe où l'on voit cette
douce dépendance, cette autorité de confiance, fymboles
de la tendrelfe paternelle & de l'obéilfallce filiale. Là le
pere & les Loix feront également ralfurés, fur les mœurs
.de .cette infortunée.
.
Il condut à ce que fans s'arrêter aux fins principales'
ni fubfidiaires de CaillaI pere, l'expédient de la fille Caillai
fût reçu & mis au Greffe, pour être exécuté fuivant fa
forme & teneur; & à ce qu'ayant tel égard que de raifon à la demande en provifion de Marguerite Caillai, fOlL
pere filt condamné à lui garnir' la main de 100 liv., 11la charge' par la Caillol de fe retirer dans telle Maifon
Religieufe ou de Charité que la €OUl: atbitreroit dans la
vj1Je d'Aix ou- dans celle de Marfeille.
Arrêt prononcé, par M. te' Préfident de Cabre , à l'Audience du 12 Mai 1779 , c.onfurme aux conclufions, coordonnant que la Dlle. Caillai' fe retireroit dans la Maifon..
de la Providence de Marfeille, dépens compenfés ; plai'
dan$ >·Mes. D\lbreuil cadet & Sellon.
S :2.
�Jou
Ri N
i.
L.
,
ARR È T
-
X V I.
Sur- une. r.évocation de. Précaire..
P
J Ar aél:e· du "7 Novembre
1'7)1', le fleur de Canill3'C
. vendit à Pierr.e - M·ichel, Genin ,. Ménager du lieu de
Châteaur.enard· ,- une pr.opriéré de teue de la contenanCll
de quatrll faumées fept émines , fituée au terroir du· même
lieu, au prix de 1080 liv., qui furent laiffées à. conftirution de rente.. " fuus la. claufe. expreffe de. confiitut & de.
p,récair.e..
Genin acquït enfilire: du< fieur· de. Canill'ac ,. par aél:ll du'
J'2, Juin, 1-7')7,. une autre propriéré de la. contenance. de
douze émines, confrontant du. levanr celle acquife en 17) l :.
le pdx en fut porté à 300 li.. ; &. comme. le fieur de
Canillac alloit prêré à. Gllnin la. fomme de 2.2.0' liv. qui.
avoit' éré employée à la bâriffe d'une. grange, il. fut fiipulé
que: ces deu~ fommes reHeraient à c.onHiturion de renre,
a\tea 1?,romeffe: de: ne vendre, aliéner. ou échanger la rerre
&. la grange ,. fans avoir préalablement. payé le. fieur de
Canillac;..
Le 19 Juillet: 1-762 Genin maria· fa fille Catherine avec.
Glei{e j, il. lùi. confiitua en, dot une faumée. de terre liruée
dans le t.erroir. de Châreaurenard, à prendre fur un. plus
grand cor·ps" ~. iL char~ea, fon beau-fils de. Rayer au fi e.u l'.
<te Canillac une penfion. de 1,2 liv.. 14 {ol!;..
, Dans le. mois, de. Juillet 17''JI , Genin érant. décédé. in~·
f!l:lvable. ,. fa, fille rép,udia [on. héritage;.
Paul. Roquefeuil ". Négociant du lieu de. Tara{con r
ll.1'éancier privilégié. de la Comme de 1.99. liv. ,. pour. p.rix(
qe., bois, de charpente fourni. pour, la conHruél:ion. de la.
gran·ge· ,. &. qui étoit porteur' d'un conrrat. d'obligarion du,
~er;. Av.riL l\)~." acquit· du· fi.eur de. Canillac. routes fes.
Clréanc.es; ré{ulkantes des, aél:es. des. 2.7. Novembre.:cry.),l. &:
�·
DU
P'ALAIS
DE
PROVENCF.
141
12 JUin 17)7, avec touS fes droits, noms, raifons, acrions, privileges & préférences.
La difcu.ffion étant ouverte pardevant les Officiers de'
Châteaurenard, Roquefeuil y préfenta le 22 Mai 1772 une
Requête incidente pour demander la difiraél:ion des deux
t-erres, pnur être vendues à fa diligence, au plus offrant
& dernier enchéri/feur, les formes de droit gardées , à·
l'effet de fe payer fur le prix, rant en principal, intérêrs,
que dépens, fauf de dépofer l'excédant ( s'il y en avoit )
r.iere le Gre/fe;. & qu'à défaut d'enchéri/feur, il feroir colloqué fur les biens pour toures les fommes qui lui éroient
dues, fuivant l'elbmation qui en feroit faite.
Le Lieurenant de Jllge, par fa Sentence du 1) Juin d'après, accorda ces fins, du confenrement du curareur ad
lites de la d icuffion.
Aucun offrant ne s'érant préfenté, Roquefeuil· fur colloqué & mis en po/feffion des biens, )près avoir éré dé-daré créancier perd~nL de la--fomme de 948. livres, & il
mourut peu de .--fems après.
.
Ses hoirs~urent bientôt troublés dans leur po/feffion par
Gleife qui 0 pofa fon contrat de mariage, & qui s'empara
de cer re fau ée de rerre dorale dont il percevoit les fruirs.·
Antoine Roquefeuil fils & cohéririer de Paul & Jean'
pere, en qualiré de mari de Marie-Anne Roquefeuil., aurre
cohéritiere', préfenterent une Requêre au Juge de Châreau-'
renard le 23 Mars 1773 " & demanderent d'êrre mainre-'
nus en la po/feffion & joui/fance de la fauméc de terre &.
v.igne dont Gleifè s'éwit mis en poifefIion, & qui· faifoit'
parrie des cinq faumées & demie, fur lefquelles la collocation avoit porté, avec inhibirions à. Gleife· de· les troubler , reHiturion des fruirs & dépens.
Gleife fit. valoir· plufieurs moyens de défenfe ;' il fourint
d!adord qu'érant' poife!feur depuis plus de' dix' ans de cetre'
faumée de' terte " fans' aUCUll trouble ni empêchement, il·
avoit acquis le droir d'en jouir, en conrinuanr de payer'
la penfion dont il avoit éré chargé.. Il ajoura que Roque-'
fèWl: n'avoit'. p.u fe colloq\ler tant fur la. grange que fur· lal
�14~
Jou RNA L
faumée, fans l'appeller au procès ;1 mais le précaire rendant
la dMemparation faite au préjudice de ce paél:e, vifcéralement nulle ,J fuivant la Loi 7, §. dernier, ff. de diftraa.
pignor. ,- elle n'avoit pu empêcher la collocation, fur-tout
de la part du Ceffionnaire qui n'avoil.' jamais'rien exigé de
Glei{e; & il fuffit en pareil cas, de faire déclarer la nullité par un jugement qui, en quelque tems qu'il intervienne"
opere toujours l'effet de faire envifager la vente , comme
fi elle n'avoit jamais exifié, à quoi les hoirs Roquefeuil
avoient pourvu par leur Requête incidente du 12 Mars
"1779·
Gleife contefioit en troifieme lieu la refl:itution des fruits
avant la demande , attendu la bonne foi réfultante de fon
titre; mais on lui oppofoit la notoriété des procédures de
la difcuffion qui ne pouvoient pas être ignorées dans un petit lieu tel que Châteaurenard , & la nullité vifcérale de
fon titre qui ne pouvoit lui rien acquérir.
Ces défenfes furent fuivies d'une Requête incidente que
Gleife préfenta le 7 Mai 1773, en caffation de la collocation & priee de poffeffion quant à la [aumée de terre,
avec dépens, dommages-intérêts; & en vertu du privilege
des pauvres, le procès fut évoqué pardevant la Cour, où
Gleife [outint que [on contrat devoit prévaloir fur la collocation, [ur le fondement que la dernie.re Jurifprud,ence de
la Cour permet à un débiteur qui poffede un fonds fous
la c1aufe de confiitut & de précaire, de le vendre, fans
être obligé de payer le prix, pourvu qu'il indique le créancier, & qu'à plus forte rai[on le pere le peut pour l'établiffement de [es enfans , par.ce qu'il ne fait qu'anticiper le partage que la Loi elle-même auroiL fait après [a
·mort.
Les hoirs Roquefeuil répondoient en premier lieu, qu'indépendamment de ce que leur demande en difira8.:ion des
biens avoit précédé les 10 ans, leur aél:ion étant [péciale
& privilégiée, on ne pouvoit faire valoir conrr'eu-x que la
prefcription trentenaire.
En fecoud lieu, ils convenoient dll principe- ;_ mais ils
�D U
1) ~ L A.I S D' E PRO VEN C E.
143
ajoutoient que toutes les fois que la feconde vente eft.
préjudiciable au créancier, il Y a lieu à la révocarion du
précaire: ainfi jugé par les Arrêts rapportés p"r le nouveau
Commentateur de nos Sraruts , t. '2., p. 494 , o.ù l'on voit
que la feconde vente eft regardée comme relle , lorfque
l'on n'a vendu qu'une partie du fonds, & que par ce moyen
la rente a été divifée, parce qu'alors il faudroir fuivre le
fonds fur deux rêres diflerentes; c'eft le cas de l'Arrêt
rapporté par Morgues, p. 44'2., de l'édition de 164'2., &
dl' celui du 15 Juin 1741, qu'on trouve dans le recueil
des Arrêrs notables. Gleife pouvoit d'autant moins exciper
du paiement de la penlion de 12. liv. 14 fols, que Paul
Roquefeuil ni fes hoirs ne l'avoient jamais exigée: le Sr.
de Canillac ne l'avoit jamais res:ue que comme recevant
direétement de Genin, fans vouloir par conféquent confel1tir à la divifibiliré' de la renre; & Gleife n'auroit pu
'être maintenu dans la poffelIion de la' portion à lui défemparée par (qn beau-pere, qu'autant que celui-ci auroit
payé exaél:emenr les peniions ; ou qu'après. l'ouverture de
la difculIiol1, ~Ieife auroit rembourfé les. repréfenrans du
Sr. de Canillac, de tout ce qui leur éroir dû , parce que
ce n'eH: qu'ainli que l'on pourrait dire qu'il ne r,éfulroit·
.lUlOun préJudice' de la revente : mais rien qe. tout cela
n'ayant été fait, il n'émit pas juHe que les hoirs . Roquefeuil. euffent aflàire tour-à-Ia-fois , ' & avec l'hoirie de
Gel.1În' puur pourfuivre leur collocation, &' avec Gleife
pour' retirer. de fa· part une tnodique' penfi!,o' 'de' l'2. liv.
1'4 fols.
Quelque r favorables que puiffenr' être les tranfports faits·
par un pere il fes enfans, ils ne peuvent jamais préju~'
dicier aux droirs du vendeur qui eH: encoré créancier du;
prix, pour pouvoir obliger les hoirs Roquefeuil à accepter la penfion de Gleife,' & ~. s'adreffer à lui pour en,
être payé; il faudroit que le fieur oe Çanill,ac. eût rati-·
-fié le tranfporr ou la démiffion de la faun1ée de ,terre qui .•
avoir. été faite en fa faveur dans fon conu'at de ~ari'!Pe ~)
�/
'/
144
Jou
RNA L
en confentant par cc moyen à la divilion de la rente.;
& la preuve du contraire étoit au Procès.
Par Arrêt du S Mai 1779, au rapport de Monfieur le
Confeiller de St. Marc pere, il fut concédé aél:e aux hoirs
Roquefeuil de la révocation du précaire ; la confiitution dotale fut déclarée nulle, au chef de la fa<lmée de terre
dont s'agi~, avec reH:itution des fruits depuis la demande feulement. Gleife fut condamné aux trois quans
des dépens, l'autre quart entre les Panies compenfé.
ARRÊT
x V II.
Si les revenus des Annates & autres de pareille natllre [ont
dejlinés aux Ornemens fi aux Réparations de l'Eglife.
Les Ponauations [ont - elles confacrées aux m~mes ufages?
L
E Chapitre de Toulon efi gouverné fur le modele des
autres Chapitres de Royaume ; fes revenus font defiinés aux charges & aux difiributions quotidiennes.
En 1772. le Syndic des Bénéficiers préfenra Requête à
la Cour, & demanda qu'en forme & maniere de Réglement, il fût fait une nouvelle répanition de tous les revenus du Chapitre en deux portions égales, les charges
prélevées, dont l'une feroit applicable aux djfiributions manuelles, & l'autre aux gros des Prébendes ; que pour le
Réglement des difiributions quotidiennes , les Panies fe
retireraient à M. l'Evêque pour y être pourvu.
Sur cette demande , on imagina de prendre dans la
cailfe où fe trouvoient confondus tous les droits de la
Menfe, une fomme qui fut partagée manuellement ,. &
fans délibération précédente.
.
1776 Mre. Ar\t:oine Mouttet, Chanoine, ne voulut
pas recevoir, fur le fondement que la Menfe étoit endettée, & il den.;anda qu'Qn y délibérât. En 1777, même
~ef-us de fa part.
.
Le
En
�bu
PALAIS
DB
PaoVllNCll.
14)
Le Chapitre fut aJremblé; on y convint verbalement
de rendre à la caiJre le montant des fupplémens effectués~:: mais--"Gomtt!~le recomblement total auroit pu être
une' occafion . de dérangement, il fut arrêté qu'on le feroi en différentes parties, & à chaque ,quartier des diftributiol1s à venir: il fut complet au pre"mièr quartier de;
Juin 1777'
•
.'
Il fut enfuite pris une Délibération le 1er DécemlJ,re
1777, portant, 1°. que pour fe conformer à l'avis arbitral des Avocats confultés, qui porte que le Chapitre
a pu & même dû accorder en 1776 & 1777 les fupplémens demandés par les Bénéficiers , attendu qu'ils font
dans le vœu des loix du Chapitre & de l'ufage conftamment pratiqué, il ne feroit fait aucun nouveau Réglernent
fur cette matiere, mais qu'on fe contenteroit de fuivre
& d'obferver ceux faits en 12.68 , 1]23 & 1670.
2°. Que les fupplémens que l'on pourra accorder à l'a.
venir, dépendans de l'état où la Menfe fe trouvera alors,
'il fera routes les années, après le compte rendu , & le
premier Mai, préfenté au Chapitre un état du reliquat,
d'après l'examen duquel on verra fi le fupplémenr peut
avoir lieu ou non; & dans le cas où il aura lieu , le
·montant en fera fixé par le Chapitre.
3°. Que le fupplément fera partagé en forme de diftribution ; qu'il en fera enfui te fait article dans le livre des
comptes & dans le verbal, ainG que cela a été toujours.
<pratiqué, afin que ceux qui ont infpe&ion fur la Menfe
puiJrent 100nfronter le 1Upplément accordé avec le reliquat,
& voir en même rems s'il y a eu abus ou non dans:
l'adminiHration du Chapitre.
4°. Que quoique les Confultans enJrent été d'avis que
les 963) liv. emprunt~es prefqu'en entier pour la bâtiJre
de l'Eglife St. Louis, ne duJrent pas être remLourfées:
par la Menfe, attendu l'emploi qui en avoit é-é [dit,
elles le feroient néanmoins dans l'efpace de deux années
.c'ell-à-dire., en 177 8 & J779 , pourvu coutefois qu';l n'y.
T
�146
JOURNAL
ait aU'cun. nouvel ordre pour la continuation de l'Eglife
de St. Louis.
~o. Que fi l'Eglife de St. Louis n'avoit pas lieu, & que
Sa MajeHé accordât au Chapitre fluelque indemnité , il
. feroit pris fur cette indemnité les 7826 liv. 1') f. 8 d.
des droits de lods extingués par la Communauté , pour
.être remplacés au profit de la Menfe.
Art. 6, &c. Mre. Mourret ayant attaqué cette délibération pardevant la Cour, le Chapitre affemblé le 12 Janvier 1778, révoqua le qùatrieme article. Il [e décida 11
rembourfer fur le champ les 963') liv. qu'il avoit empruntées ; & quant aux fommes reçues de la Communauté
de Toulon, pour l'extinétion des direétes , il laiffa fon
projet dans un état d'imperfeétion.
Pour le fou tien de fon appel, Mre. Mouttet difoit
qu'en pénétrant dans les tems les plus réculés, l'on voit
que les biens ecc1éfiaftiques étoient divifés en quatre portians, dont une fe trouvait affeétée aux ornemens & aux
réparations du Temple. Une diHribution nouvelle ayant
fuccédé à celle -là, on deHina les droits d'Annate , de
Ponétuations , de Chape & autres deniers cafuels , à
ces objets d'entretien & de réparation.
L'origine des Annates eft connue j elle remdnte au Concile tenu à Bourges fous Louis VIII & Honoré III.
ElIes furent confirmées par le 'Concordat paffé entre
François 1er. & Léon X. Les Chapitres dirigés par cerre
regle furent néanmoins fournis à en employer le produit
à l'entretien & aux réparations de l'Eg1Jfe & des ornemens, pour écarter l'efpece de fl'monie qui fût provenue
du partage que les membres auroient fait parmi eux
des revenus de la Prébende appartenant au Chanoine
élu.
Decormis, tom. l , col. 3') 1 & fuiv., affure que quant
aux deniers dës Annates, il efi certairr'que par leur deJfination, ils doivent ~tre employés à la dépenfe des ornemens & des réparations de l'Eglife, & non pas à grojJir
'es revenus des Dignités & des Chanoines, en les parta-
�DU
PAL AIS
D Il
P
147
Il 0 V Il Nell.
~ant
ent,.'eux; que la feule confidération qui les a fait tolérer en France, nonobflant le Concile de Bdle & la pragmatique Sanaion ,fut d'en employer le produù aux ornemens &
réparatio.ns des Eglifes. Td eH le fentiment de Lacombe en
fa J urifprudence Canonique , de Denifarc, verb. Annates ,
pag. 120, n. 11.
On peut encore confulter là-delfus Paf!:our en fan Traité
de Beneficiis, liv. 2. , tit 14, n. 2. ; Guifmier fur la pra.gmatique SanB:ion , tit. de .Annat., in verb. Annatorum, &
l'Arrêt rapporré par Boniface, tom. 3 , liv. S , tit. 16,
ch. 3 , pag. S)8.
Les ponB:uations font régies par une application femblahIe. Boniface, au même endroit, attef!:e que leur produit doit
être mis en réparations de l'Eglife, ce qui cfl: conforme Il
l'Arrêt rapporté par Decormis loc. cit.
Durand de Maillane, dans fon DiB:ionnaire Canoni.que,
verb. Diftribution, pag. 'i42 , affure que les dif!:ributions dei
ablèns ne profitent pas aux préfens, [uivant le Concile de
Trente, d'où il faut induire le même ufage, tel qu'on le
voit retracé dans les Mémoires du Clergé, édit. de 1768,
tom. 2, pag. 1174, où il ef!: fait mention d'un Arrêt qui
ordonne que les deniers 'lui demeureront bons par l'abfence de
ceux 'lui /l'auront pas a.Diflé aux Offices Divins, feront mis en
la bourfe commune, pour être employés & convertis aux affaires
& profits de l'Eglife, dont on rendra compte annuellement.
Quant aux droits de Chape, ie Statut de 1670, art. 8,
fe jo'nt aux difpofitions du Droit Canon. Cet article rappel1~ la quotité des fommes dues par les' Dignitaire" , les
Prébendés, les Bénéficiers & autres Eccléfiall:iques, & veut
que pareils droits foient employés à l'a<:hat des Chapes & autr~s orne mens néceffaires.
.
Le Statut de 1268, qui accorde des diHributions aux Chanoines & aux Bénéficiers, auffi conu:iér.bles que les facultés
du Chapitre pourront le permettre, ne dit pas qae les Annates & aueres droies cafuels pafferont en dilhiSu,ion. La
faculté ae les pouvoir aUljmenter l1'eH direae qu'aux revenus de la Menre, c'ef!: - à - dire, à ces revenus courans.
T
2.
�148
Jou
RNA L
que le Chapitre polfede, & qui entrent dans la cailfe principale, parce que lèur produit n'ayant d'autre affeétation que
celle des charges & des difiributions, celles-ci ne peuvent
être augmentées, dès qu'on a pourvu aux dettes : mais il
n'dl: jamais permis de partager des deniers qui doivent former une caiffe féparée , & qui ont une defiination confa.crée & parciculiere.
Mre. Moutet convenoit que l'abus s'introduifit enfuite, &
que le Statut de 1323 unilfoit les Annates à la Menfe ordinaire. Les mau. que cette réunion occallonna, & fes progrès)
exciterent la réclamation de Mre. Guerin. On lit dans Decormis, tom. I, pag. 3~2, que par un Arrêt rendu le 23 Mai
1622 , la Cour fit défenfes au Chapitre de Toulon d'employer les A!j1lates des bénéfices à autre ufage qu'aux Iéparations & ornemens de l'Eglife, conformément aux faints
Conciles, Arrêts & Réglemens de la Cour, à peine de faiiie du temporel.
En 16 S6 il fut palfé entre le Chapitre.& les Bénéficiers
une tranfaétion qui renouvelloit l'ancien abus de verfer les
Annates , & autres revenans;-bons & cafuels dans la cai1fe
des difl:ributions, pour les accroître après les dettes acquittées. Peu de tems après, & en 1670, il fut réfolu un dernier Statut., qui veut que les dettes & charges payées, les
Annates foient mifes en fonds pour l'augmentation des diftributions.
·Ces deux titres furent anéantis par l'Arrêt du 18 Juin
168 S, qui ordonna que le produit des droits d'Annate &
autres cafuels feroit employé aux réparations de l'Egli,fe &
autres dépenfes de néceffité. Depuis lors jufqu'en 1773 , le
Chapitre n'a jamais conçu le projet de faire des fupplémens;
en forte que les revenans-bons des Annates , ponétuations,
droits de Chape, & autres droits cafuels, ont fans celfe été
relpeétés.
La tranfaétion de 1687, intervenue entre le Prévôt & le
Chapitre, ne préfente rien d'oppofé: le Prévôt qui faifoit
valoir contre le Chapitre plufieurs prétentions, avait requis
en.tr'auttes de n'employer .3UX diHributions que les revenus
,
�DU
PAL.U S
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PRO VEN C E.
149
courans, & le difpofitif de l~ tranfaB:ion ., particulier à cet
objet, porta que les Parties el}. oferoient comme par le palfé
fans abus. Il s'enfuit de cet aB:e, 1 0 • que le palfé ne pouvoit être que la regle tracée par l'Arrêt de ID8) , qui ordonnoit que les Annates'& autres droits cafuels n.e pourroient
jamais entrer dans les diHributions, autrement il y auroit eu
abus. '2. 0 • Si dans le tems intermédiaire de l'Arrêt de la
Cour à la tran[aB:ion, le même abus s'étoit glilfé, on Cent
que le Chapitre n'auroit pu par ·de fimples accords déroger
à une loi publique, fi Couvent proclamée, offen[ée qucdque.
fois, mais toujours confirmée. Il n'dl: donc pas vrai [em-,
blable que la tran[aB:ion de 1687 ait eu Qes vues qui s'éloi.
gnalfent de l'e[prit & de la leme de l'Arrêt.
.
En 1709 la mortalité des arbres ayant occafionné la famine à Toulon, le Chapitre crut dans une occafion fi cruelle,
devoir employer tous les revenans-bons au [outien de [es
Membres, & par la délibération du 30 -Septembre m~me an·
née, il fut dit que cela n'auroit lieu que pour le cas pré[ent,
& ne pourrait tirer à conféquence pour l'avenir, ni innover,
déroger & préjudicier aux Réglemens, Statuts, ufages , Arrêts, rran[aB:ions & droits du }:orps & des particuliers. Cette
délibération fut homologuée par la Cour, & eut [on exécu·
tion.
. , •
Le premier article de !=e titre heurre donc ollvertement
au régime primitif. Les fupplémens de 1773, 1776 & 1777,
compofés des deniers provenans des ponB:uations, annates,
droits d~ Chape & deniers cafuels , doivent être annullés,
parce qu'on auroit dû avant toute cho[e procéder à la détractian, & les Commes provenant des profits ordinaires auroient
pu fervir à augmenter les diftributions, fi l'état & les facul.
tés de la Men[e l'eulfent permis : mais toujours eft-il vrai
de dire que les deniers dont on a parlé, ont dû être prélevés. Ce premier article doit encore être annullé, parce
qu'en adoptant le même efprit des ftlpplémens, il établit
pour l'avenir la même regle de conduite: il y a cette di{;.
férence bien notable entre fan principe & celui de Mre.
Moutet, que celui::!à fa~s !!~ivr~~~~ St~Eut~ qU! .c,?nfondent
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Il N A L
les annates, les ponétuations avec les revenus courans de
la Men[e ; au lieu que celui-ci s'éleve contre une confufion
déja prohibée par les Canons & par les Arrêts de la Cour.
Mre. Mouttet .foutenoit encore que les fupplémens des
années 1773 , 1776 & 1777 avoient été faits fans titre &
fans caufe: fans titre, parce qu'il n'y avoit aucune délibération
qui les autorisât: fans caufe , parce qu'indépendamment des
raifons qui devaient empêcher la corif",fion , l'état du Chapitre ne les comportait point.
L'article 2.' de la délibération du 1er. Décembre , porte
qu'aucun fupplétnent ne pourra avoir lieu, qu'après que le
Chapitre l'aura· vérifié & qu'il en aura fait la fixation. Il faut
donc une vérification, une fixation premiere, confentid par
les Capitulans. Un fupplément mérite la difcuffion la plus
férieufe; on doit juger de quels 'fonds il fera compofé, fi
les facultés le permettent, fi les charges & les dettes le favorifent. Pour ftatuer avec connoilfance de caufe fur le Olé.
rite de ces motifs, ne faut-il ,pas que la matiere (oit mife
en délibération? Et une délibération ne doit-elle point être
écrite, fur-tout quand elle eft capable d'attenter à des deniers privilégiés, comme on le pratiqua en 1773 ? II n'y a
eu aucune délibération verbale ni par écrit. Eût-elle été verbaie, Mre. Mouttet n'y affif!:a point, elle ne fuffifoit pas :
le fupplement de 1773 n'a .donc pu être exécuté.
Les fupplémens de 1776 & 1777 n'ont pas été dirigés
d'une autre maniere: point de réclamation de la part des
Bénéficiers; point de délibération par écrit.
II ef!: d'une abfolue néceffité que les fupplémens ne puif.
fent avoir lieu que des revenus couranes de la Me!!fe, après
qu'on en aura prélevé les annates·, les ponétuations, les
droits de Çhape & autres deniers cafuels , pour fervir au
foutien de l'Eglife. Cet ordre en alf~re les ,fondertens inébranlables , parce qu'alors le Service Divin "ne peut' plus
foulfrir. C'eft ce qu'ont prévu les Conf!:irutions Canoniques
.& les Arrêts de la Cour.
Le fecond article: de la délibétatioQ. doit fubir le même,
�DU PAL AIS
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P; 0 VEN C E.
I.~ 1
fort, parce qu'il participe à l'article Jer." qUI fa'ifant revivre
les· Statuts, fuppofe dans le même reliquat la totalité ou la
portion des deniers privilégiés; & étant cngcnd ré par un article nul qui lui communique fan vice, il ne peut avoir plus
de force que lui. Le tableau du reliquat feroit d'une pernicieufe conféquence. C'efi le fimple reliquat qui doit décider
du fupplémem: le Chapitre ne réferve fan examen que fur
le reliquat: donc il n'y a que l'énumération du réfidu du
compte qui, fuivanr l'article, devienne la raifon impulGve
des augmentations. Il efi de la derniue importance qu'une
telle loi n'ait pas cours. Mre. Moutet ne s'oppofera jamûs
à des augmentations, après avoir prélevé les deniers privilégiés, après avoir déduit les charges & les dettes; mais il
n'y adhérera qu'alors. Il efi donc indifpenfable que les fupplémens ne puiifent être ordonnés fans l'ufpeél: & la vérifi~
cation enriere du compte.
L'article 3 de la délibération formant une dépendance du
premier qui étend fa difpofition à tous ceux qui le fuivent,
il réfulte implicitement, & même d'une maniere évidente,
que le partage énoncé fuivant la nature des deniers qui y entrent , d'après l'art. 1er., doit opérer la diHribution de ces
fommes privilégiées, qui ne peuvellf figurer en fupplément:
dès-lors il fe montre contaminé du même vice qui le fait
tomber avec celui qui lui a donné le jour, comme étant inféparables dans leur effet & dans leur fort: le fecond C011firme le fyfiême de délibérer les fupplémens fur l'unique
numéraire du reliquat, puifqu'on ne donne pour méthode
à découvrir l'abus, que celle de lui comparer le fupplément
prononcé. Voilà une nouvelle preuve que le Chapitre n'entend fe fixer qu'à la fomme produif~nt le reliquat, pour fiatuer fur l'augment des difiributions , & qu'il met toujours de
côté fa poGtion intérieure, qui ne famoit être éclairée que
par la préfentation du compte. Ce font ces deux caufes illégales venant au foutien des premier & fecond articles, qui
illfeél:enr le troifime.
Mre. Moutet avoit attaqué le quatrie.me, fur le fondement
�1'j2-
1oÛIiN-At
qu'on devait rembourfer fur le champ les 9636 livres des
emprunts faits pour la b:1tiffe, fans en renvoyer le paiement
aux années fubféquenres.: fa prétention étoit légitime & corroborée par l,es fonds de la Menfe; le Chapitre a fenti que
ce rte, demande n'effuyoit aucune contradiél:ion, puifqu'il a
pris le fage parti, le a Janvier dernier, d'effeél:uer ce rembourfement fur le champ; mais il aurait dû .en même tems
fe condamner aux dépens de ce chef.
Le cinquieme article (continuait Mre. Moutet) choque
en tous fens les faits & le régime du Cpapitre : les faits,
en ,ce que Fextinélion des direéles montoit à une fomme
majeure: le régime, en ce que le remplacement ne devait
point dépendre d'une condition auffi idtéreffante que celle
d'un indemnité: il fuffi(oit que les rembourfemens dérivaifent
,des biens qui font partie de l'ancien domaine, pour que les
deniers en fufI"ent pour aïnli dire facrés, & qu'ils duffent
avoir été 1 dans le moment remplacés. Le Chapitre crut y
fuppléer par la délibération du a Janvier, dans laquelle il
fut réfolu de placer , quand l'occafton fe préfenreroit, la
fomme de 7826 liv. 1'1 f. 8 deniers, retirée de laCommunau té pour les années fufdites; mais ce parti n'eft pas plus
fuffifan t.
Il eft jufrifié par les extraits des quittances expédiés par leGreffier de la Ville" que le total des rembourfemens faits
au Chapitre jufqu'au 9 Janvier dernier, s'éleve à 13098 liv.
17 f. I I deniers. Or, voilà une fomme fupérieure à.celle qui
a été délibérée. Dès-lors la délibération du a Janvier n'eft
pas fatisfaifante. Comment qualifier cette aél:ion auffi infolite
que' furprenanre, de recevoir des rembourfemens, de fe les
partager; & quand il eLt quefrion de remplacer les capitaux, on n'a pas le fou?
Le Chapitre répondoit que le Statut de 12,68 , fait avec
toute la folemnité poffible, renferme des difpofttions remarquables. Après avoir dit que l'adminill:ratiol1 appartIendra
11. deux Cljanoines qui ferant annuellement nommés par le
,Çhapirre , après avoir affigné une prébende à tous les Chanoines ,
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PRO' VEN C E.
1
B
naines, il accorde des difi:ributÎons aux Chanoines, auX
Bénéficiers, & il veut que les difi:ributions foient auffi COnfidérables que les facultés du Chapitre pourront le comporter.
Cette Loi marque le vœu bien formel de mettre en diftribution tout ce que l'état des affaires capitulaires pourra
permettre de defi:iner à cet objet.
Le Statut de 1323 porte que pour fe conformer à plulieurs Réglemens qui ont déja été faits, les annates doivent
être unies à la Menfe , pour qu'on puiffe ménager un fort plus
avantageux à cous les Membres de l'Eglife ,attendu que le
bien du fervice ne pourra que profpérer, en proportion de
ce que ceux qui feront prépofés à ce fervice, feront mieux
récompenfés.
Le Statut de M. d'Oppede, qui efi: la loi vivante du Cha:
pitre, préfenre le réfultat de tous les autres Réglemens ; il
fe ferr à-peu-près des mêmes expreffions; il veut que les annates fervent à acquitter lp.s dettes du Chapitre, à faire. les
réparations, & enfuire à augmenter les difi:ributions. Ce
Statut fuppofe donc que les difi:riburions font fufceptibles
d'être augmentées en proportion des revenus.
Au texte précis des loix , fe joint l'ufage confl:anunent
fuivi de réduire ou d'augmenter les diHributions fuivant les
circonfi:ances: la tranfitél:ion de 1687 attefi:e l'ancienneté de
cet ufage ; elle porte que fur la demande du fieur Prév6t de
faire défenfes à l'Econome d'employer en difi:ribution autres
deniers que ceux des revenus courans du Chapitre, les Parties ont convenu qu'elles en uferoient comme par le paffé &
fans abus. En 1728 le Chapitre réduiGt les diHributions des
Chanoines à 200 liv., & celles du Prév6t à 400 livres. En
1731 la Menfe étant dans l'impoffibilité de payer les difi:ribu-'
tians des Chanoines & des Bénéficiers, le Chapitre délibéra
de priver toUS les Chanoines qui auroient une préi?ende de
~do liv. , de toutes leurs difi:ributions , & de ne donner que
3QO liv. de difl:ribution à ceux qui auroient 200 livres de
prébende. En 1748 il porta à 400 liv. les diffributions,
Toujours
,& enfuite il les porra au prix .courant.
..
V & fuivant
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les circon!l:ances ; le Chapitre a réglé {es Mmarcnes & le
panage de fes revenus: il a réduit ou augmenté (elon le
befoin &: les occurrences. A quoi ferviroit la bonne admi.
ni!l:ration , fi elle ne promettoit une augmentation d'aifance
aux Membres du Cor:ps ? II n'y autoit bientôt plus aucun intérêt à bien admini!l:rer, fi on n'entrevoyoit une récompenfe.
N'e!l:-il pas jufte d'ailleurs que des Chanoines qui ont fu
dans les tems difficiles foutenir la Menfe par des facrifices fut leurs propres revenus , profitent aujourd'hui de
l'aifance qu'ils fe, font donnée au moyen de ces facri, fices!
Le principe général qUI; les Loix ftatutaires confacrent,
dt. qu'il faut al;lgmenter les- diftributio-ns, quand les facultés
du Chapitre le comportent, pen[atis Capituli facultatibus.
Ce principe eft né avec le Chapitre même: il eft retracé par
le plus ancien des Statuts; il-a été vivifié par l'ufage de tous
les tems. Des Loix pofrérieures ont enfuite appliqué ce principe au produit des annates comme aux autres revenus; &
c'eft cette application que le, Arrêts de la Cour ont modifié.
Mais fi le produit des annates a une deftination privilégiée ) les revenus ordinaires ne font pas ftriétement affeétés
à la même deftination: ils ne font que pour fuppléer à l'infuffifance des droits des annates , quand le produit de ces
droits n'eft pas affez conûdérable pour remplir les charges
auxquelles il eft deftiné. Hors delà, les revenus ordinaires,
ou partie de ces revenus tombent en partage, en augmentation, ou fupplément de diftributions. De ce que les anoates ne peuvent être employées felon les Loix précifes ,
qu'aux réparations de l'Eglife, il ne faut pas conclure que
le produit des autres revenus n'cft pas fufceptible d'une autre deftination; mais il faut conclure au contraire que les
Loix n'ayant point affigné une deftination auffi précife au
produit des autres revenus, ce produit deméure libre &
fufceptible d'application à tous objets licites & conve.
oables•
. Si à l'époque des fupplémeqs accordés, on n'a l'pint dé"!
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libéré pas écrit, c'dt que l'écriture n'était pas nééelfaire.
On a befoin de fixer par l'écriture ce qui a trait de tems ,
ce qui tombe en regle de conduite, ce qui peut avoir fuite
& exécution continue. Mais ici il ne s'agilfoit que d'exécuter des Loix exiftantes ; il ne s'agilfoit que d'un aél:~ particulier; il ne falloit qu'agir; & pour cela il fuffifoit d'avoir'
le vœu du Corps. Ce n'eft pas la premiere fois que le Chapitre n'a point configné dans fes regiftres des délibérationS
relatives à des objets courans, qui font entiérement termiJlés par l'aél:e même qui les confomme.
Inutilement Mre. Moutet objeél:e que les augmentations
de difiributions ont été accordées c1andeftinement. Les fup'plémens accordés en 1773, le furent enfuite de la ~emande
des Bénéficiers réalifée par ùne Requête préfenrée à la Cour.
Les fupplémens accordés en 1776 & '1777 l'ont été-dan!i
la même forme que celui de 1773. Réclamation de la part
des Bénéficiers, Alfemblées ,capitulaires, délibérations, inf.
cription dans le livre d'es 9-iftributions, mention faite dans
le Procès-verbal de la clÔture des comptes, en un mot mêm~
publicité. (
La caufe de ces fupplémens fe trouve dans la demande
des Bénéficiers, dans le procès qu'ils avoient inten té au Chapitre, dans le devoir de terminer ce procès, en obtempérant à une réclamation jufie , dans l'aifance où la Menfe
commençait à fe trouver, dans le fac~ifice 'que les Chanoines avoient fait depuis 1730 jufqu'en 17So, d'une par.tie
ou même du total de leurs diihiburions , fous la protefta~
tion elCprelfe de réclamer une indemnité, quand 'la Menfe
ferait en état d'y faire face; enfin dans la modicité des
r:venus, tant de la part des Chanoines, que des Eénéfi·
cIers.
Il n'y auroit que deux objeél:ions poffibles à propofer contre les fupp16mens faits: la première ferait de dire que l'état de la Menfe ne les comportait pas; & la feconde , qu'on
aurait fait entrer dans ces fupplémens des revenus qui ont
une deftination privilégiée. Or, d<li1s les circonfiances , ni
l'une ni l'a,utre ~e. ces, oqjeétions n'eH proporable. Il eft
Y2
�1) 6
1 0 tT 1iïL( t' •
certain que "l'état de la Menfe comportait les fupplémens'
accordés; ce qui eH juftifié par les comptes produits.
Les ponétuations ne font pas régies par les mêmes principes que les annates. Durand de Maillane, dans fon Dictionnaire Canonique, fuppofe évidemment que le réfultat
des ponétuations n'eH point expreffémenr affeété aux réparations de l'Eglife, & que de droit commun il eft rnatiere à
fupplément.
Par-tout où les ponétuations ne font point affeétées au
bien de l'Eglife par la coutume, elles accroiffent aux pré~
fents par le droit. Les Auteurs ont feulement difringué les
'dîlhibutions établies par Statut, de celles qui n'ont d'autre origine que la fondation des biens de l'Eglife. A 1'6gard des premieres, les préfens eo profitent, jure non decrefcendî ; fecùs à l'égard des autres. Il eH donc clair qu'en
regle générale ies dilhibutions établies par Statut fane matiere
à fupplemçnt.
.
L'Arrêt ;apporté dans le's Mémoires du Clergé, tom. 2. ,
pag. 1174, eH particulier à la Coutume de l'Eglife d'Orléans; il n'énonce pas une regle générale: on trouve au contraire deux autres Arrêts dans le même tome, col. 1 198 &
12.00, qui ont confacré le principe que la portion des abfen.s accroît aux préfens. L'ufage de l'Eglife de Toulon eft
que les ponétuations entrent en diHribution ..~' Arrêt du 2.3 Mai
162.2., rendu pour le Chapitre de Toulol3, n'affeéte que les
annates aux réparations & ornemens de l'Eglife. N'importe
qu'un Arrêt du 2.6 Mai 162.6, rendu pour le Chapitre de
Forcalquier , donne la même deil:ination aux ponétuatians; l'ufage de ce Chapitre n'eft pas celui du Chapitre de
Toulon.
Il faut donc diil:inguer le droit commun d'avec les ufages,
titres & coutumes qui tombent en exception.. Le droit corn·
mun veut que les ponétuations foient réguliéremenr mifes en
diil:riIJution. Sans doute il faut refpeéter les coutumes contraires là où eUes font établies j mais il faut fuivre le droit
commun. là où il n'y eil: dérogé par aucune coutume. D<Jns
le Chapitre de Toulon, point de coutume, point d'ufage,
�D"U PÀ'LAÏS
ï;li PilOVBNCll;I57
point de titre qui affeéle lPécialement les ponéluations aux:
ornemens & aux réparations de l'Eglife. Les Arrêts de la
Cour ne parlent que des annates: tous les Procès-verbaux
qui forment la clôture. des comptes, conf1:atent que les abfences reftent toujours dans la Menfe ; ils conftatent que
lorfque les diftributions étoient payées en bled , le réfultat
des abfences étoit tout de fuite cédé à la Menfe, & que de.
puis qu'on paye en argent, on n'a plus fait nulle part mention de ce réfultat. Cependant il eft vrai de dire que fi le
prodUIt des abfences eût dû avoir la même deftination que
les annates , il eût fallu fixer ce produit au moins dans les
livres de compte, afin de ne pas le confondre avec l'argent
de la Meafe, qui n'a point de deftination particuliere. Dans
(eus les 'tems on a Jenu un compte particulier des annates,
des droits de chape, & autres droits cafuels; mais jamais
les ponéluations n'ont figuré dans la c1affe des droits cafuels; jamais elles n'ont été dif1:inguées de la M.enfe.
Suivant le fyftême de Mre. Mouttet, les fupplémens dont
s'agit, ont été pris dans la caiffe générale où tous les droits
étoient confondus: ces fupplémens font donc compofés de
tous les droits. L'on convient que tous les droits étoient
repofés dans la même caiffe; mais l'on nie qu'ils fuffent
confondus. La confufion exifteroit, fi au lieu de tenir un
compte particulier du produit des annates & des autres droits
cafuels, on n'.en avait fait qu'un feul tout avec les autres
revenus de la Menfe. Dans ce cas on ne pourrait les diftinguer ni les féparer ; on n'en connaîtrait pas le réfultat ;
il ferait impoffible d'en déterminer l'application. Mais if
n'y a point de. confufion, quand il y a des comptes différens, quand il y a des réfuItats diftinél:s , & qu'à chaque
inf1:ant on peut donner à chaque réfultar fon applicatioll
particuliere. N'importe que le- produit de toUS les droits
& de tous les revenus fait matériellement reufermé dans
la même caiffe. Ce n'eft pas la différence phyfique qui marque la différence morale des objees, & ce n'eH: pas la réunion matérielle des revenus qui opere cette confufion abu~
�I~13
YOU-RNAL
live que l'on craint tant, Les comptes font-ils di!1ingués?
Voilà l'e1Tentiel.
•
Les Parties, avant le jugement du procès, furent invitées à finir par la voie de l'arbitrage; elles choifirent Me.
Granet, Lieurenant-Général , Civil & Criminel au Siege de
la ville de Toulon, & Me. Julien, Avocat de la même
Ville, lefquels efiimerent que d'apd:s les principes du droit
commun & les difpofitions expre1Tes des plus anciens Statuts de l'Eglife de Toulon, notamment de celui de 1268,
le Chapitre de cette Eglife a le droit!de mettre en diHributions l'excédant de fes revenus libres; mais que cet augment
doit fuivre la forme & la répartition établies pour les diftributions dont il ef!: l'accefloire, & être conféquemment
{ujet aux mêmes ponél:uations ou retranchemens pour ab{ence -& manquemens aux Offices; ainfi un panage égal par
forme de fupplémenr, quoique refireint aux membres de1Tervans habituellement l'Eglife, n'dl: point la véritable & nue
exécution des Statuts du Chapirre, mais une innovation
qui auroit exigé un Réglement exprès & particulier.
Il cfl: d'ailleurs néceifaire pour juger de la légitimité &
de la jufiice des fupplémens, d'examiner &. de fixer l'état
de la Menfe Capitulaire, ainfi que la nature des deniers qui
y font réunis, & dont elle dl: compofée.
Les annates font le premier objet de cet examen; les
droits de chape, de bonnet, & autres cafuels {uivent la
même affeél:ation; c'efi-à-dire, les réparations & l'entretien
de l'Eglife & de la SacriHie ; il n'en efi pas de même des
ponél:uations qui par l'ufage invariable dans le Chapitre doivent accroître aux préfeps ; cette efpece de .coutume qui a
déja pour bafe l'équité, lell: en outre- fortifiée par des titres
domef!:iques & particuliers, tels que les délibérations du If
Juillet 1707, où il e°f!: dit que la ponél:uation rell:e ordinairement au profit de la Menie Capitulaire; de celle du 7
Mai I72~ ,porrant établi1Tement pour le Prieur de Roquebaron, où l'o-n annonce que c'eft l'avis des Avocats confultés, (Mes. Gaillard, Azan, Decotmi~ & Gauthier, en
�DU
PALAIS
DE
PROVENOE.
159
leur ConfuIration du 2.3 Mai 168 l , faite à l'occafion de la
Prébende d'Entrevigne,) d'y appliquer les ponfluations, bien
entendu que comme les ponél:uations, felon l'ufage de cette
Eglife , ref!:ent au profit de la Menfe Capitulaire, on ne les
diver~ira audit fupplément qu'autant que cela fe pourra faire
fans préjudice de ladite Menfe & des charges qu'elle doit
fupporter; c'ef!: encore l'efprit de celle du 16 Mars 17 So.
Les Arbitres entrent enfuite dans un détail tendant à établir que les .fupplémens effeél:ués en 1773, 177 6 & 1777
ne devaient pas l'être, parce que la lituation de la Menfe
Capitulaire ne les autorifoit point, fe 'rencontrant dans ce
partage les fommes provenantes des annates., droits de
chape, bonnet, & autres cafuels qui ont une application
privilégiée aux réparations du Temple, & à l'entretien de la
Sacrif!:ie; ils ajoutent que fan état aél:uel, par les diverfes
réfolutions ultérieures qui ont été prifes, paroiffent les réparer; & réfumant leur opinion fur les articles de la délibération attaquée, ils penferent que le prel/lier, qui ratifie les
jUpplémens faits ès années 1773, 1"776 & 1777 comme conformes aux Loix du Chapitre & à l'ufage, ef!: au contraire une
contravention à ces loix, & une innovation, foit du côté de la
forme de ces fupplémens, qui ne font point dif!:ribués par augment de diftribution, mais partagés par portions égales entre
les membres deffervans, foit du côté du fonds, en ce que
l'état de la Menfe ne comportoit point lefdits fupplémens;
en forte que l'appel de Mre. Mouttet envers cet article fe
montre entiérement fondé.
Le fecond article de la délibération a befoin d'un plus
grand développement fur les deniers qui doivent confiituer
le reliquat, n'étant pas judicieux que le numéraire de ce
fimple reliquat, mais au contraire l'état de la Menfe, doive
guider l'augmentation.
Le troifieme fe rapproche plus des principes & des Statuts que l'article premier avoit méconnu.
Les quatrieme & ciaquieme roulant fur le rembourfement
des emprunts faits pour la Paroiffe St. Louis & fur le remplacement des direél:es extingué~s & confommées à. cet. em.
�'60
J 0 'u R. ~ A. L
ploi, Mre. Mouttet a été encore incantefrablement fondé
à en demander le rétabli1fement. Pour 'arrêter les maux qu'auroit entraîné la délibération du premier Septembre 1777, &
pour obvier aux inconvéniens qui naîtroient d'une difl:ribution d'augmens non fuborclonnés à aucune regle, ils offrirent
un projet de délibération, portant:
" 1°. La nullité de celle du premier Septembre 1777, &
" que la Menfe Capitulaire placera fur la Province ou autre
" Corps la fomme de 20000 Ev. dans le courant de cette
" année pour 'produire la balance entre les rembourfemens
" qu'elle a reçus & les remplacemens qu'elle doit faire, &
" que jufqu'à ce que ledit placement foit effeaué il n'y aura
" lieu à aucun augment de diHribution.
",2°. 'Que les fommes partagées en 1773, 1776 & 1777
" refteront à ceux qui les ont reçues, attendu l'inutilité de
" leur rentrée dans la Menfe qui fe trouve aauellement en
-" état de faire face au placement ci-de1fus; au moyen de
" quoi, Mre. Mouttet confervera, non feulement le fuppl":" 'ment par lui reçu en 1773, & recouvrera' les quaniers
" de diHribution qu'il avoit lai1fé dans la Menfe pour la
" refl:itution de cette fomme, mais il recevra encore la
" 'même fomme qui a été difiribuée à fes Confreres en 1776
" & 1777, avec d'autant moins de peine, que l'état ~e la
" Menfe comporte cette diHribution aauelle, & qu'il feroit
" fondé de réclamer à titre de frais les ponauations qu'il
" a fubi pendant fon voyage pour la pourfuire de fon
" procès, dont ladite fomme lui fervira d'indemniré.
" 3°' Qu'à l'avenir il 'fera tenu trois comptes particuliers;
" le premier, des droits d'annates, chape, bonnet, & autres
" droits d'entrée & de mutation, lefquels ne pourront être
" employés qu'aux réparations & ornemens de l'Eglife Ca.
" thédrale & de· la Paroi1fe St. Louis, & autres Paroi1fes de·
". la Ville qui pour,roient en être démembrées, ainli qu'aux
" confeaions & refeaions defdites Eglifes, & nullement
" des Paroi1fes du Diocefe dont le Chapitre pourrait être
" par la fuite Décimateur; le fecond, des rembourfemens
", reçus & des.remplacemens faits ,.lefquels . auront toujours
" lieu
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PRO VEN C E.
16 l
lieu le plutôt poffible & fans confufion ni d~vertiffement
avec les autres deniers' de la Menfe, de maniere que la
fomme des capitaux du Chapitre foit toujours la même;
le troifieme, des revenus courans de laclite Menfe, & ce ne
fera que d'après ce dernier compte que l'augment des difiributions fera déterminé & fixé pour l'avenir. 4°. En cas que
les réparations foncieres des Domaines du Cllapitre ou
autres établiIfemens à fa charge exigeaIfent des emprunts ,.
on ne pourra procéder à des augments de diflribuiion que
lefd. emprunts' ne foient rembourfés , & l'on ne pourra
y employer le montant des capitaulC rembourfés qu'à char..
ge de placement. So. Que chaque année après l'audition
des comptes il fera préfenté au Chapitre aIfemblé, le
premier Mai, un état du reliquat eJfeaif & en caiIfe dl:!
compte des revenus courants de lad. année, & que la moitié
de chaque reliquat annuel, déduaion faite du reliquat du
compte précédent" fera laiIfée dans la Menfe pour faire
face aux; réparations & améliorations des Domaines ,. cas
imprévus, rémplacemens des capitaux perdus par infol,
vabilité ou autrement, & que l'autre nlOitié de ce reliquat'
pourra être mire en· augment de difiribution. 6°: Que ledit
augment de dillribution. fera réparti dans. l'année qui fuivra
ledit compte en. la même for,me que les diHributions ordi_
naires; &. fera kljet aux. mêmes p'onétuations, & qu'il en
fera fait article dans le livre des comptes & dans le verbal,
afin q'ùe ceux q.ui ont infpeaion fur la Menfe puiIferu:.
confronter l'augment a'ccordé avec le reliquat, &. voir. en
même tems s'il y a' abus ou. non dans l'adminiHration du
Cl Chapitre pour faire
face aux charges établies fur ladite
" Menfe. 7°. Que le montant des ponauations continuera à·
" reflerdans la Menfe.Capitulaire, fuivant l'ancien ufage du Cha,.
,~ pitre, pour faire' face aux ch.arges établies fur la Menfe. "
La délibération du Chapitre fm prire conformément à cet
avis, confirmé par M.I'Evêql1e de Touloule 28 Avril 1779,
adoptée par Mre. Mouttet ,& homologuée par.. Arrêt de la
Cour le 19 Mai fuivant; Mes. Reinand & Portalis écrivans,
Bour.Mre.Mou.ttet
& .....
l'Econome.du
Chapitre.,
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5'
ARRÊT
XVIII.
L'appel comme d'abus incident doit Üre joint au fonds, lorf
que la décifion des moyens d'abus peut préjuger. la queftioll
foncïere.
L
E 10 Août 1777, le Procureur JurifdiéHonnel du lieu.
du Bar expofe dans un comparant à M. l'Evêque de
G;ra1fc les inconvéniens de la fituation du cimetiere, fon
infalubrité & fon infuffifance, & requiert qu'il y foit pourvu,
le~ Confuls & Communauté appellés ; & qu'en cas de défaut, le cimetiere foit interdit comme nuifible, infuffifant,
& contraire au difpolitif des Lettres-patentes de 1776.
Le comparant eil: app'ointé d'un [oit-montré aux Con fuis
& Communauté du Bar; il eil: figoifié le 3 Juillet 1778; la
Communauté répond, combat les motifs du Procureur J urif.
diB:ionnel, & requiert le Vicaire-Général d'accéder. L'accédit
fe fait, le Procurellr JurifdiéHonnel & les Confuls comparoi1fent ; & fur les obfervations & conteil:ations refpeél:ives,
le Vicaire-Général ordonne que le cimetiere fera agrandi dans
fix mois à peine d'interdit; il en détermine la longueur &
la largeur j il eil: dit dans l'Ordonnance qu'elle fer:j exécutée
nonobil:ant & fans préjudice de l'appel, comme s'agi1fant
du Service Divin.
Le 13 Août la Co'mmunauté du Bar délibere de Ce confor'mer à cette Ordonnance; le fieur Muraire déclare être
oppofant à la délibération; la Communauté en demande
l'homologation provifoire ;;cet incident fut joint !lU fonds.
Le 6 Septembre nouvelle délibération de la Communauté,
&' même détermination, fans y parler de l'Ordonnance du
Vicaire-Général: nouvelle oppoûtion du Sr. Muraire; procès
pardevant la Cour à raifon de cette oppolition : M. le Comte
du Bar déclare être oppofant de fon chef; le procès eil:
réglé fur les oppofitions & difl:ribué à M. le Confeiller de
la Bou1ie.
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PALAIS
DE
163
PROVENCE.
Pour le fou tien des délibérations, la Communauté du
Bar verfe. dans fon fac l'Ordonna'nce du Vicaire-Gtnéral ;
le fieur Muraire & le Comte du Bar lui tiennent alors un
aéle & l'interpellent de s'expliquer, fi elle entelid préfenter
cette Ordonnance .:omme un titre judiciaire, légal, compé:
tént, coaélif &, exécutoire; la Communauté répond que cette
Ordonnance eft une décifion légale; que conformément aux
Loix Canoniques, le cimetiere tel qu'il efF, '& avec les agrarrdi1femens déterminés par l'Ordonnance, & délibéré par 'le
Confeilmunicipal, eft fuffifant, déce[Jt &·régulier. Le'Comte
du Bar & le fieur Muraire en déclarent appel comme d'abus,
incident, & préfentent à la 'Cour, le 23 Janvier 1779, requête en entérinement des lettres d'appel; fur cerre requête
les Parties font renvoyées en jugement.
•
La caufe portée à l'Audience du Rôle, les Appellans
fouriennent que le procès-verbal & l'Ordonnance du Vicaire-'
Général de Cra1fe du 3 Août 1778 font abufifs., Trois
moye,ns d'abus, difent-ils ; d'abord entreprife oe ,Jurifdiction , puifque le Vicaire-Général de Gra1fe a ftatué fur l'e,rnplacement, Fagrandiffement & la: fuffiGncè duclmetiere, objets
abfolument temporels, qui regardent la Police générale, &
qui font étrangers à la Jurifdiélion Eccléfiaftique, d'après
les SaintS Canons, les Loix pofitives , .les Auteurs, les
Mandemens de plufieurs Evêques, les Lettres-patentes de
1776, & ,notamment d'après l'arrêté de la Cour fur l'enregiftrement des Lettres-patentes, qui décide que de l'article
VII il üe pourra êtte rien induit contte la ,pui1fance temporelle.
'
D'ailleurs, ajourent les Appellans , cette Ordonnance pré.
fente une contravention formelle aux' Letttes-patentes de,
1776, qui décident que les cimetieres doivent être transférés
hors l'enceinte des habitations,. le Vicaire-Général de Gra1fe.
n'a point ordonné cette transférence, mais feulement l'agrandiffement. La derniere Loi eft précife à cet égard; & fielle pou voit paroître doureufe, la puifIànce Eccléfiaftique dl:,
néceffairement étrangere à toute interprétation ; enfin en,
pareille matieœ, la dé,iûou de la g~eftion fOÎ1ciere dépend.
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ou
toujours de l'événementd\m rapport, &. du plus
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moins d'inconvéniens que ce rapport préfente. Le Vicaire~
Général de Graffe n'a ordonné aucun rapport, il n'auroit pas
même pu l'ordonner, puifqu'il étoit abfolument incompétent.
Troilieme moyen d'abus. L'Ordonnance, difoit le fieur Muraire, touche au droit de propriété ; l'agrandiffement qu'elle
détermine porte fur un terrein qui m'appartient.
La Communauté oppofa que l'appel comme d'abus étoit
non-recevable vis-à-vis elle, & de voit lui être étranger; &
en fe référant à fa réponfe au bas de l'acte tenu par le
Comte du Bar & le fieur Muraire,. elle conclut à ce
qu'en lui concédant acre de ce qu'elle n'avoit jamais voulu
prendre & n'avoit jamais pris l'Ordonnance que comme une
décifion légale de la puiffance Eccléfiail:ique j que conformément aux LoÏx Canoniques, le cimetiere tel qu'il étoit, &
avec l'agrandiffement déterminé par l'Ordonnance & délibéré
par le Confeil de la Communauté, était décent, fuffifant &
régulier, il feroit dit n'y avoir lieu d'appeller comme d'abus
vis-à-vis la Communauté du Bar, qui feroit relaxée de l'a'ffignation avec dépens. Suivant elle, l'Ordonnance attaquée
n'était pas fon ouvrage, elle ne l'avoit pas requife, & fa
déclaration prouvoit affez qu'elle ne vouloit pas s'en fervir.
L'appel comme d'abus, ajolltoit-èlle, n'eil: que captieux;'
on veut fous ce prétexte faire juger le procès de l'oppofition,
en faifant regarder la non-transférence du cimetiere comme
contravention aux Lettres-patentes, quoique la Cour eût jugé
le contraire par l'Arrêt d'OrgèHh -UOrdonnance du VicaireGénéral n'avoit que confirmé le vœu de la Communauté
pour l'agrandiffement du cimetiere ; elle ne pouvoit fe départir de cette Ordonnance, parce qu'elle lui émit abfolument néceffaire , mais elle confentoit à toutes les vérifications.
requifes, fans qu'il fût befoin de l'attaquer. Le fieur Muraire
eil: d'ailleurs non-recevable en fon appel comme d'abus, parce.
que l'Ordonnance n'attaque pas fon droit de propriété. Le.
Juge d'Eglife rie favoit pas même fi le terre in [ur lequel por~
toit l'agrandiffement appartenoit au fie ur Muraire j ce droit:'
feroit rtut~t ~ttaqué par ·la délibératioll de la €ommunauté,
�nu
PALAI S
DE
PROVENCE.
16~
mais délihération jull:e, néceffaire, à l'abri de touS les traits
qu'on voudrait lui porrer, parce que le bien particulier doit
toujours céder à l'intérêt général.
Monfieur l'Avocat-Général de Califfane portant la parole;
obferva que la quell:ion de droit devenait pour aiQfi dire
~trangere à la caufe, & fe réduifoit prefque à une quell:ion
de fait,. il n'y -a, dit-il, pour le prouver qu'à dire un mot
fur chaque moyen d'abus propofé.
y a-t-il contravention aux Lettres-patentes de 1776, parce
qu'on n'a pas transféré le cimetiere hors de l'enceinte de
l'habitation ~
Il établit fur ce premier moyen, qu'il était indifférent
d'examiner- fi la lettre & l'efprit des Lettres-parentes néceffitent la transférence des cimetieres hors des Villes & Villages ; qu'il était également inutile de difcurer fi cette tranf.
férence doit dépendre du fait al! du droit; c'ell:~à-dire, de
-l'é-vénement d'un rapport fur la falubrité & les inconvéniens,
ou du feul vœu des habitans qui déliberent de faire des changemens à leur cimetiere ; que l'oppofition formée aux délibérations de la Communauté par le Comte du Bar & par
le fieur Muraire était la feule quell:ion fonciere qui divifoit
les Parties j l'appel comme d'abus incident n'en était que
l'acceffoire,. que cela était fi vrai, qu'on n'avait pu propofer, contre l'Ordonnance du Vicaire-Général de Graffe que
les mêmes principes qu'on oppofoit contre la délibération
de la Communauté j que conféquemment la difcuffion fur
le moyen d'abus érait vraiment préjudicielle.
Sur le fecond moyen d'abus, M. l'Avocat-Général ob..;
ferva qu'il y avait, dans l'Ordonnance du Grand-Vicaire,
'contravention au droit commun; que le Juge d'Eglife n'avait
pu prononcer fur la fuffifance ni fur l'agrandiffement du citnetiere jqu'il n'avait pas eu le droit d'en fixer le local; que
fi la lettre des Letrres-pat~ntes de 1776 femble donner plus
d'autorité aux procès-verbaux des Eyêques, l'Arrêt d'enregifl:rement, fait avec l'approbation & l'aveu du Chef de la
Jull:ice, ne Iaiffoit plus aucun doute [ur la force dû droit
fommu~ 14. c~ {pjer;_ :nai~ qu'il é~oir inutile, de s'arrêtet
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�166
J .() U RNA t
plus long-temps à la difcuffion de ce moyen, il n'était pas
contefié, il était convenu par toutes les Parties.
Paffant au troifieme moyen, il établit que la contravention
au droit de propriété ne pouvait être qu'un moyen d'oppofition foncier, qui attaquait plus direél:ement la délibération
de la Communauté, que l'Ordonnance du Grand-Vicaire;
d'où il conclut que les moyens d'abus propofés étaient ou
convenus, ou étrangers, ou préjudiciels à la quefiion du fonds,
& que conféquemment ils n'étaient pas en l'état fufceptihles
de dlfcuffion.
La Communauté émit-elle d'aillebrs Partie légitime? Le
Comte du Bar & le fie ur Muraire avaient-ils pu appeller
comme d'abus vis-à-vis elle, ou devait-elle être relaxée de
l'affignation ?
, . '
Ici M. l'Avocat-Général rappella les principes & ramena
les démarches & les défenfes refpeél:ives.
L'Edit de 169') défend de prendre à panie, ni d'intimer
en leurs noms, les Evêques ou leurs Officiaux à raifon des
Ordonnances qu'ils 'auront rendus, s'il y a partie' qui ait
requis ou qui foutienne ces Ordonnances, '& qui fait capable
de répondre des dommages-intérêts ; la Corn munauté eft
fans contredit capable d'en répondre '; elle a donc pu être intimée fur l'appel comme d'abus, fi elle a requis ou folltenu
l'Ordonnance.
Sous le premier point de vue & dans le premier état,
la Communauté appellée pardevant le Grand-Vicaire de Graffe,
pour être. fiatué fur le changement du cimetiere, fou tient qu'il
eft fuffifant, qu'il ne doit pas être transféré, que néanmoins
il 'peut être agrandi.' Elle paroît donc avoir requis le plan
adopté par l'Ordonnance, quÏ> décide, fixe & emFlace l'agrandiffement. Elle auroit dû ne pas comparoÎtre ou· décliner la
Jurifdiélion du Juge d'Eglife ; le Procureur Jurifdiél:ionnel
n'avait pu fans doute le rendre compétent.
L'Ordonnance du Vicaire-Général devient, dès le moment
qu'elle eH: r<:ndue , le motif écrit & la bafe du vœu de la
CÇlmmunauté, qui délibere de l'exécuter; 'dès-lors elle ne
fait, pour ainfi dire, qu'un même tout avec les délibérations
-.
J
�DU PALAIS
DE
PROVENCE.
167
de la Communauté, & lui rend propres les abus dont elle
pouvoit être atteinte.
La Communauté demande enfuite l'homologation provifoire des délibérations, nonobf!:anc les oppofitions qu'elles
éprouvenc; elle demande cette homologation en exécution
de l'Ordonnance du Juge d'Eglife ; elle réclame encore par
ce nouveau fait l'exécution de l'Qrdonnance: elle l'adopte
donc comme un titre à elle, & dont elle veut fe fervir.
Dans l'état provifoire de la caufe ; c'ef!:-à-dire, en pourfuivant.l'homologation des délibérations, la Communauté
foutient qu'elles doivent être exécutées, foit qu'on le décide .par le fait ou par le droit. En fait, parce que l'agrandiffement a été jugé néceffaire par le Juge d'Eglife enfuite
d'une defcence. En droit, parce qu'on ne peut pas furLèoir
l'exécution de l'Ordonnance du Juge d'Eglife fur une matiere.
qui ell: exclufivement de fon reffort, & que d'après l'Edir
de -169) les. Ordonnances rendues fur le? réparations des
Eglifes, & conféquemment rur l'agrandiffement des cimetieres, font exécutoires nonobf!:anc l'appel; donc, ajoute-telle, on ne peut enlever à l'Ordonnance du Grand.Vicaire
l'exécution provifoire que la loi du Ptince lui attribue.
Dans l'état définitif de la caufe; c'ef!:-à-dire, en pourfui-"!
vanc fur l'oppofition aux délibérations, l'Ordonnance du Juge
d'Eglife ef!: toujours le titre que réclame la Communauté pour
parvenir à fair.e débouter les oppofans, & à faire homologuer
définitivement les délibérations.
D'après elle, le local choifi renferme le vœu unanime des
habitans, vœu concre lequel on fera toujours des efforts impuiffans, fi on n'attaque l'Ordonnance du J ug~ d'Eglife qui
a fait toutes les vérifications néceffaires, qui, d'après ces
vérifications, a Hatué fur l'infuffifance & l'agrandiffement dlt
cill'etiere, qui a décidé par-là qu'il étoit inutile de le tranffêrer, & qui a formellement reconnu qu'un rapport de vérification était inutile & fuperflu.
Enfin fur les interpellations judiciaires du Comte du Bar
& du fieur Muraire, la Communauté répond que l'Ordonnance du Vicaire-Général dl: uoe décifion légale de la puif-,
�I~
JouRRi!
fance Eccl~Gaf1:jque; toujours & en tout (;Cat elle invoque
& oppofe cette Ordonnanc'e ,. elle la foutient, l'approuve &
l'exécute; donc les moyens d'abus lui font devenus propres;
donc elle a pu être intimée fur l'appel; donc elle ne peut
être relaxée -de l'affignation, elle a tout au plus des exceptions foncieres à faire valoir fur le plus ou le moins d'abus,
fur le plus' ou le moins d'exécution que doit avoir l'Ordonnance; parce que les Ordonnances du Juge d'Eglife font
fujettes à l'appel comme d'abus, foit que le Juge, n'ait pu
juger, foit que l'ayant pu, il ait conttevenu aux loix du
Prince ou 'aux Canons.
Examinant enfin fi l'appel comme d'abuS' pouvoit être
jugé en l'état, il établit que la difcuffion des moyens d'abus
étoit liée à la difcuffion des moyens d'oppofition ; que les
Parties ne pouvoient employer que les· mêmes armes p()ur
faire crouler l'un & l'autre titre-; .que la décifion de l'appel
préjugeroit la quefiion fonciere; qu'on ne devoit point tou.
cher, quant à ce , aux droits refpeél:ifs des Parcies; que conféquemment il falloit d'un côté joindre l'appel comme d'abus
au principal, afin que les droits de la Communauté refiaffent entiers,. mais que de l'autre il étoit jufie de réferver
Olux Appellans la cJaufe , [au! de disjoindre & même de juger
préalablement l'appel comme d'abus, s'il y écheoit, afin que fi
la Cour confitmait la délibération de la Communauté, ou
faifoit dépendre la quefiion fonciere de quelque rapport ou
vérification, les Appellans ne perdiffent pas le moyen d'obtenir la refiitution de l'amende & les dépens, en f'tifant déclarer l'Ordonnance du Vicaire-Général de Graffe abiJfive•.
Il conclut à ce que fans s'arrêter au relax d'affignation
propofé par les Confuls & Communauté du Bar, l'appel
comme d'abus incident émis envers le procès-verbal & l'Ordonnance du Vicaire-Général de Graffe fut joint au procès
principal fur l'oppofition à la délibération pour y être dit
droit par un 'feul & même Arrêt, fauf de disjoindre, &
même, s'il y écheoit, d'y être fiatué préalablement.
Arrêt cooforme prononcé par M. le Confeiller de Beau,.
recuei"l à l' I\l1diençe, du 1,tôk dl!, ~Q ;Mai 1779, les dép~ns
furent ré[ervés.
' ., - .,
.
ARREJ
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PAL Â l S
DB
PRO VEN C E.
x 69
~=====~====~.ARRÊT
XIX.
Sur une plainte en Rapt.
L.
E 1.3 Juillet 177 6 Marche Nard, âgée de" 18 ans, expoli:
, au Lieutenant-Criminel de la ville d'Arles, que le fieur
Margerit du lieu de Bagnols, d'abord lié d'amitié ;lvec l'uri
de fes freres, & fous ce prétexte fréquentant journellement
fa maifon, conçut bientôt de l'amour pour elle; il le lui
déclara, & n'oublia .rien pour l'affurer de la fincérité de fes
fentimens : fréquentation affidue, affurance continuelle d'un
attachement conftant, promeffe réitérée de l'épourer , tout
fut mis en urage pour la convaincre. Marche Nard crut ne
devoir pas fe méfier de Margerit, tapt que les démarches
de celui-ci n'eurent rien que d'honnête; mais élie lt; repouffa
long-temps avec fuccès lorfqu'il oroit tenrer de lui ravir fon
honneur. Le 6 du mois de Janvier 1776, Margerit la furprit
feule' dans fa maifon; les proteftations d'amour & de fidélité
furent renouvellées avec cette 'force qu'on imagine airémenc
dans un hom me paffionné; les follicitations, les inHances,
les promeffes d'époufer, tout fut employé pour la réduire;
il fut vainqueur, la connut charnelJement, & triompha' ainfi
de la foibleffe de fon fexe & de celle de fon âge. Dès-lors
maître de fon cœur & de fa perfonne, il le devint aifément
de toutes fes volontés: toujours: nouvelles attaques, toujours
nouveaux avantages.
- S'étant reconnue enceinte dans le mois 'de' Février, elle
en fit parc à Margerit; celui-ci la raffura, lui promit de
l'époufer, & lui dit même qu'il l'enleveroit, s'il n'y avoit
pas d'autre moyen pour faire réuffir leur mariage.
Le mercredi dans l'Oél:ave de Hi Fête-Dieu Margeriè
lui dit qu'il étoit tems de perrir ; ils' convinrent (le fe trouver le lendemain matin à l'endroit défigné, que aelà ifS
L
Y
�I79'
)" 0 u li N A t'
iroient à un Mas où ils trouveroient des t~mo~ns auxquefs
'Marger~ feroit part de fes fentimens & du deifeîn où il
étoit de l'époufer, & qu'enfuite elle retourneroit chez elle
Je foir.
Elle fe rendit au -lieu convenu, & Y trouva le fieur -Margerit & le Sr. Aur:e qui la conduifirenr, après plufieurs heures
de marche, dans un endroit folitaire. La Aune lui dit d'un
ton menaçant, & tenant même en main un piftolet qu'il fortit
de fa poche, qu'on alloit la conduire à Eygalieres, q'l'elle
n'avoit qu'à y faire fon expofition contre un inconnu, qu'autrement elle ne retourneroit plus à Arles.
'
Les lamies furent dans ce moment les feules armes de
Marthe . Nard ; elle promit tout, ne pouvant rien refufer.
Elle arriva à Eygalieres, fit l'expofition c~ntre un inconnu,
& fe retourna avec Margerit & Aune: fatiguée du voyage il'
elle fé feotit incommodée;' elle leur en fit part; ils lui répondirent qu'ils defiroient bien qu'elle avortât. Elle déclara
que l'expofition 'faite à Eygalieres étoit fauife, & que Margerit étoit l'auteur de fa groifeife. L'information fut prife
filr la plainte de Marthe Nard,: Margerit' & Aune furent
décrétés de prife-'lU-corps. Margerit appella du décret- de
foit informé & de tout ce qui avoit filivi, & obtint foq.
élargiifement provifoire en donnant caution.
L-a caufe portée à l'Audience, on difoit pour Margerit
que le décret de foit informé étoit nul parce qu'il n'y avoit
point de délit; que ce n'étois point un rapt de féduél:ion
& de violence dont on l'accufoit, mais un fimple fl:upre
qui ne peut donner lieu à une information; que le décret
de phfe-de-corps ne ponvoit être décerné dans les délits
privés; que s'il en étoit autrement, ce feroit donner lieu
aux filles de vexer les jeunes gens dès qu'elles auroie-nt eu
la foiblelfe de fuccomber à leur amour.
.
Marthe Nard répondoit qu'il y avoit un véritable rapt ,de
féduél:ion ; ell,e s'appuyoit fur fa qualité de mineure , fur fa
grolfeife , le~ promelfes de mariage, la fréquentation affidue,
le tranCmarchement, la faulfe expofition faite par furprife &
�D -U
PAL AIS
D E
PRO V Il NeE.
17'1
p~T' violence; tout concouroit 11 rendre fan aéhon légit'ime,
& Je décret de prife-de-corps décerné cancre les fieurs Margerit & Aune hors de toute atteinte.
M. l'Avocat-Général de Calilfanne di!lingua d'abord les
divers genres de l:ommerce illicite, ceux qui permettent
au Juge de s'en tenir à des peines pécuniaires; ceux qui méritent des décrets rigoureux; ceux dont la voie de l'information fait une partie de la peine; enfin ceux qui tie pré[entent qu'un commerce illicite également criminel de la
part de l'homme & de la femme, fans nulle apparence de
féduéHon , ou avec des filles dont l'honneur a déja fouffert
une atteinte, & qui ne méritent pas même l'information.
Nos loix & nos mœurs nous ont fait connaître deux
fortès de rapt, mais entre leCquels la rai[on naturelle & l'autorité de la loi ne permettent pas de faire aucune difiinctian: le rapt de féduél:ibn & celui de violence; celui-ci plus
rare, moins facile, plus contraire 11 nos mœurs, plus oppofé
à l'infrinél: de la nature; l'autre plus commun, mais aufIi plus
dangereux peur-être, parce qu'il parle le langage du cœur.
En faifant le parallele de ces deux fortes de rapt, on re·
connaît aifément qu'on peut réfifier à la force, mais qn'on
a de la peine à fe défendre contre les enchantemens de la
féduél:ion. Dans le rapt de violence, la perfonne qui en eH:
l'objet n'a que le ravilfeur à craindre. Dans le rapt -de' ré•.
duél:ion, elle trouve dans elle-même [on plus redoutable ennemi; il n'dl: pas même vrai de dire que dans le ra.pt de
féduél:ion l'on trouve au moins la volonté & le con[entement
de la perfonne ravie; cette volonté n'dl: point la fienne, c'efr
celle du ravilfeur, que la force de la pafIion lui fait fuivre:
bien loin que le ravilfeur foit excufable ,parce que la perfonne ravie femble contentir à fon déshonneur, il n'en ef!:
par-là que plus coupable. Son véritable crime ell d'avoir en'·
chaîné fa volonté & de l'avoir rendue ainfi la corn pagne &
la viél:ime de {on crime.
La me[ure de la volonté, du confelltement, de la paffion.
de la perfonne ravie, eH en même temps la mefure du crime
du ravilfeur. Le rapt de violence peut. fouvent ne renfermer
Y2
,
�1'p
10tTlt-NAtl •
qu'un crime; celui de féduél:ion en renferme toujours deuX t
celui de la perfonne ravie ne peut excufer celui qui en efl:
l'auteur. C'efi toujours raptus in parentes.
Ce rapt, d'après toutes les loix, exige deux circonfiances:
la minorité de la perfonne ravie & le tranCmarchement pour
parvenir à féduire la fille, & à l'époûfer contre la volonté
des perConnes à qui elle ef!: CoumiCe. Telle en: l'étymologie
du mot de rapt, /ive invitam rapuerir, five volentem abduxerit,
five volentibus, five nolelltibus virginibus, tale facinus fuerit
perpetratum. Ce terme volentibus s'entend d'une volonté à qui
la féduél:ion fait une efpece de violence: verbum volens, dit
MaCcardus, intelligitur de ifta )folulltate ftduaâ quœ fit fpecies
volulltatis ut raptus propè dicatur. Suivant Julius-Clams ,requiiitur ut mulier tranfducatur de loco ad locum, non pas
fimplement pour en abuCer, mais pour la retenir & l'époufer.
Nos' Ordonnances' n'ont pas entendu 'le rapt différemment.
Il 'Y a véritablement une forte de nupre fans tranfmarchemen:, qui conGne à féduire ou à fuborner par artifices, intrigues ,& autres mauvaifes voies des mineurs à l'in ru de
leurs parens. StlIprum eft illicita virgimlm defloratio , fub pa-,
rentum cuftodia exifientium.
L'article premier de la Déclaration de 1730 veut que le
procès foit fait & parfait à tous ceux ou celles qui feront
i1ccuCés d'avoir féduit ou fùborné par artifices, imrigues ,
ou par autres mauvaiCes voies, les fils ou filles mineurs de
2. S ans pour parvenir à un mariage à l'inCu ou Cans le confemement des peres, meres, tuteurs ou curateurs &- parens
fous la puiffance & autorité defquels ils fom. Et l'article 2.
porte que ceux ou celles qui feront convaincus de rapt de
féduél:ion , feront punis de mort, fans que la peine puiffe
être remiCe ni modérée.
/
Mais les perfonnes majeures ou mineures, dit l'article 3;;
'qui n'étant point dans les circonnances ci-deffus marquées ~
fe trouveront feulement coupables d'un commerce illicite,
feront condamnés à telles peines qu'il appartiendra, fèlon
l'exigence des cas, [ans néanmoins que les Juges puiffent
p:ro~once~ la p.eine 'de, m(:lrt, fi ce n'en:. que par l'atrocité
�DU PAL AIS I) E P R 6 VEN C tt;
~73
dès circonll:ances, par la >qualité des coupables, le en me
parût mériter le dernier fupplicé.
Il faut donc diflinguer plufieurs efpeces de commerce
illicite; il en ell: qui fent de véritables crimes par la qua.lité des perfonnes , & qui même peuvent mériter des peines
capitales; tel ell: le ll:upre du domeflique avec la fille de fon
maître l, & celui 011 il Y a difproporcion abfolue de condition. En remontant aux principes pour connoître quel eH!
.le corn merce illicite qui mérite inll:ruaion criminelle, on
trouve celui qui s'eH: commis avec une mineure d'une répu- .
tation entiere, inordinacus concubitlls quo virginitatis integritas colrumpicur; &, comme dit le Commentateur de JuliusClanis, pour que l'aaion criminelle ait lieu, requiriwr ut ftuprata luerit honefta; on préfume alors que la féduaionefl:
venue du coté du fexe le plus fort, in dubio prœfumitur
corrupta dola vel perfllafione. Ce n'ell: pas alors un fimple
fiupre qui foit le crime de deux, prœfumitur corrupta.
Marthe Nard n'ell: donc pas coupable aux yeux de la Loi;
elle a [ans doute pu prendre la voie de l'information contre
fon féduaeur. Les mœurs & les loix également ble1fées quand
il s'agit d'une mineure, ne permettent pas d'héfiter fur ce
point. Il ell: dès-lors inutile d'examiner fi le décret de foit
informé ell: nul, parce que les faits énoncés dans la plainte
ne font pas prouvés; ée principe ell: contraire à toutes les
notions de la J urifprudence criminelle. On ne peut refufer
cette voie que quand le commerce illicite a lieu avec une
fille ou femme déja corrompue qui confent par jnterêt ou par
libertinage à devenir concubine; alors il ne peut plus y avoir
de féduaion ; ce n'ell: plus-là le trait de la nature, c'eG: une volonté réfléchie de fe livrer à la débauche; c'ell: une injure
faite aux bonnes mœurs que les loix ne peuvent point autorifer; mais il n'en ell: pas de même quand on abufe de
la foible1fe d'une mineure honnête en la féduifant par des:
artifices.
.
Ici ce n'ell: pas par défaut de délit que le décret de foit
informé peut être ca1fé ,. ce n'ell pas par calomnie, ce n'eG:
pas
par
inçompéte.llçe ;_...
il n'eLI
pounant._.que çes feuls
moyens.J
.
• • _.....
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•••.
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~
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U·R N ÂL
d'attaquer pareil décret; ce décret doit fubfi!l:er dès que le
délit exi!l:ant offroit matiere à informer. Suivant Sallé la féduél:ion d'une mineure, quand elle n'auroit pour fin qu'un
commerce illicite, expofe le coupable à une pourfuite extraorè1inaire, & même quelquefois a des peines affiiél:ives.
On ne peut faire valoir des confidérations générales pour
la fociété ; on dirait en vain qu'il faut pour l'intérêt des
mœurs enlever à ce fexe artificieux la reffource de vexer des"
jeunes gens qu'il a trop fouvent féduit.& fubjugué ; il ne faut
pas efpérer que l'indulgence en matiere de rapt contienne un
{exe faible & le prémuniffe contre les attaques du nôtre;
la nature parle, le préjugé veut inutilement la faire taire;
il ne prévoit j'amais une défaite; l'innocence & la jeuneffe
ne réfléchiffent guere, & tout nous prouve combien elles
ont he foin de la furveillance des loix , & combien il feroit
dangereux d'enhardir par l'impunité ou par l'indulgence le
. {exe le plus téméraire. Déja nos mœurs ont forcé les loix
au filence fur le concubinage, elles ne puniffent plus le
fiupre volontaire; la fornication efi étrangere à l'aélion cri- minelle, mais elles permettent l'information, elles autori{ent cerce voie' criminelle pour le fiupre involontaire & de
féduél:ion ; elles puniffent le commerce illicite d'une peine
plus ou moins grave fuivant les circonfiances ; enfin elles fe
rendent à la gradation du crime, & dévouent à la marc le {éduél:eur d'une fille qui l'enleve à fes parens ,pour l'époufer. La
{éduél:ion d'une filte honnête & mineure à l'infu de fes parens, illtéreffe à la fois .les loi x , la fociété & le repos des familles parciculieres. Ainfi d'après les loix & l'équité il y a
lieu à la confirmation du décret de fait ,informé.
Au fonds y a-t-il rapt, féduél:ion , en.levement, violence,
faux & tranfmarchement? Quant au rapt d,e violence, il n'en
eH: quefiion ni dans la p'lainte , ni dans la procédure; l'expo;fition 'n'annonce d'autre 'force que celle de la {éduél:ion,
d'autre violence que celle de l'amour, mais de l'amour ar'dent, de l'amour paffionné 'agiffant fur un cœur trop crédule
pour rejetter les promeffes, trop faible pour réfiH:er à [es
amorces, trop nourri pour être armé- concre fa propre expé~.
/
�'DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
175
rience. Quant au rapt de féduél:ion, une longue aŒduité, les
follicitations les plus vives, les in!!:ances les plus féduirantes,
les prote!!:atio~s d'amour les plus énergiques, les promelfes
de mariage mille & mille fois répétées, l'abfence de la mere,
une occauon fune!!:e, un cœur fatigué par fa propre réfiftance, cette iIIulion dangereufe dont la jeunelfe ne pouvoit
la garantir; telles font les gradarions dont Manhe Nard fait'
précéder fa premiere foiblelfe. Que réfulte-t-il de la procédure? Des témoins attefl:ent avoir vu Margerit fréquenter
;ournellement la maifon de la Dlle. Nard; quelques - uns
parlent des aŒduités auprès d'elle, d'autres ont été témoins
des converfations, mais ne les ont pas entendues; nulle
trace" nulle indice de promelfe de mariage. Dans cette
partie de la caure on e!!: pour ainli dire réduit à s'en tenir
aux vraifemblances, ou à en croire les allégations même
des parties. Certainement l'amour dut fe préfenter aux yeux
de Marthe Nard, comme il fe préfente' à cet âge avec tout
ce qu'il a d'attrayant & d'éblouilfant; mais ce n'e!!: pas-là
le rapt de féduél:ion, ce n'ell:, que la féduél:ion même de
l'amour dont Margerit auroit également éprouvé l'empire;
il n'y a pas jufqu'à l'époque, jufqu'aux moindres circonftances de la premiere viél:oire qui ne foient diverfement rapportées. Selon Margerit l'occalion fut fournie par Marthe
Nard; felon celle-ci, ce fut le hafard feul qui la fit naître.
L'un repréfente fa MaÎtrelfe comme cédant à fon penchant
.dans un lieu écarté & dans des circon!!:ances où fa défaite
ne pouvoit qu'être volontaire, parce que l'attente d'une
mere ou d'un frere ne donnoit le tems n'i de réli!!:er ni de
combattre. Celle-ci lailfe voir fon Amant profitant de l'abfence de fa mere" de la honte qu'elle auroit eu d'appeller à
{on fecours, de la litu'1tion même de l'appartement, trèspropre à pr-év,enir tout-à·la.,.fois & les foupçons & la furprife , pour triompher des armes qui l'avoient défendue
jufqu'alors ','mais qu'une longue rélill:ance avoit émoulfé. A
en croire le premier, il n'a remporté qu'une viél:oire facile,
il a vaincu fans, péril & triomphé fans gloire, fes premiers
Eegard~ avoient a1furé fa c()nquête. A en croire Marthe Nard J
�176
Jou RNA L - ,
fon cœut fortifié par des leçons de vertu & par une précieufe
ignorance, ne s'dl: point fi~tôt familiarifé avec le crime; à
17 ans, à peine fortie de fa premiere enfance, route la féduaion, tout le manege de Margerit n'ont pu la corrompre
qu'infenfiblement; fon cœur même, fous un mahre auffi
dangereux, ne faifoit que des progrès lents & funefies ;'
une année entiere a été marquée par fa réfi!l:ance. '
On ne voit fur ces différens objets aucun indice dans la
procédure; il n'y a de prouvé que la fréquentation & un
commerce illicite; e'e!l: la groiTeiTe des œuvres de Margerit;
c'e!l: l'empreiTement de Margerit à faire faire à Marthe Nard
une expolition qui lui hit étrangere; c'efi l'envie qu'il a,
malgré fon amour apparent, d'en être quine pour des
frais de couche , & de n'être obligé ni de la doter, ni
de l'époufer; c'efi fon afcendant fur l'efprit de fa Maîtrelfe
dont il abufe pour l'obliger à faire un aveu qui mettoit le
comble à fon humiliation & n'étoit avantageux qu'à lui feul ;
c'eIl: la fupériorité en fait de rufe & de prévoyance, puifqu'il veut la forcer au filence par cette expolition , & éviteL'
les dommages-intérêts qu'il lui auroit dû. C'eIl: la foiblelfe
de Marthe Nard, aiTez aveugle pour fe prêter à tout, aiTez
crédule pour croire dans ce moment aux petfides catelfes
de fon Amant. Tout concourt à repréfenter Marthe Nard
eomme foible , comme malheureufe, comme trompée.;
comme la viél:ime d'un jeune homme qui la facrifie, qui la
voue au déshonneur fans remords, qui fe joue de fes folles
efpérances & de fa vaine crédulité, qui. expofe même fes
jours &. les jours de fon enfant par un voyage fu oefie , pour
prendre des précautions coupables, pour fe préparer des,
armes contre -l'objet même de fes feintes careiTes.
L'enlevement ne fauroit être regardé que comme une
allégation de Marthe Nard, il, dl: détruit même par fon
expofirion.. Tout .enlevement fuppofe fecret, violence & défallt de volonté: elle en ét0it néanmoins infiruire; fa [oi-,
bleiTe , le point de fëduaion auquel elle étoit parvenue;
lui en avoit fait fournir l'occafion : elle en avoit affigné
fheure; le lieu du. rendez-'I\ous, éEoit donné; elle s'y troLlve
au'
'--'
�D.U
PAL·Al'S· DE
PROVENCE.
177
mohlent marqué: le voyage étoit donc pl'éparé & concerté entre Marthe N.ard & Margerit , elle en avoit reconnu.
la néceffit'é. La procédure confl:ate qu'elle ne favoit pas que
le fujet de fon voyage fllt une expofition ; la vraifemblancll
fait préfumer qu'elle croyoit à un enlevement, pUifqu'elle
demande des témoins, & il n'en falloit pas pour une expoDtion; c'eil à Mauffane que commence le r-ôle odieux de
:Margerit; tout ce qui précede eil couvert de l'ombre du
myilere, ou, li l'on veut, de l'enchantement de l'amour.,
tout ce qui fuit eil marqué au coin de la trahifon & de la
corruption la plus coupable.
Ici il y a violence & crainte préfen tée de ne plus la ra":
mener à Arles fi elle ne fait l'expofition fur un inconnu ~
piHolet montré par le fieur Aune en lui faifant les menaces
dans l'endroit le plus folitaire de la route. Ce fait n'dl:
prouvé par aucun témoin; on ne peut l'envifager que comme
une caufe de la crainte & de la féduaio n •
Il y a enfuite tranfmarchement puniIfable, puifqu'il a pou.r
objet de ttomper la malheureufe amante, la mere de cette
infortunée. Quel eH: le but de ce tranfmarchement f De la
mettre au pouvoir de fes raviffeuFs, d'abufer de [on éloignemem , de rendre toute réfrilance inutile.
Ainfi dans la procedure: affiduités, fréq.uentation prouvée;
groIfeIfe convenue, commerce illicite, & conféquemment,
d'après la loi', préfomptions. de féduaion vis-à-vis d'une mineure, & néceffité du décret de foit informé. Mais cette préfomption celfe pour faire pla<:e à 'la com/iaion quand on
trouve des preuves du tranfmarchemen.t fait. à l'infu des pa-'
re ns & avec le plus, grand fecret ,. non à. la véri té pour par_
v.enir à l1ll mariage, ni pour triompher de la pudeul' d'e
Marthe Nard, mais pour une faveur bien plus. cruelle, &
qui doit mettre le comble au déshonl:lcur de cette fille,
1Jne expofition·. frauduleufe fur urt inconnu : circonilance qu~,
.a.ggrave le délit principal. & qui néceffite le décref de pr,ifede.-corp's.. Margerit cil d'ailleurs fils de famille & étranger
d·e là Province, deux circonitances qui doiven.t in.fluer fur·
du .._.
décret.
un -tl1Rt ,.l~eff'ece.. ,d.c.
-la qu~lité,
- _...- -. En
.- ,--. Zfaux qui fe..
':Ill
�k78
Joli RNA' L
trouve dans l'expoution d'Eygalieres, le tranCmarchement
frauduleux pOUF y parvenir, la fréquentation convenue, la
minorité prouvée, l'honnêteté non contel1:ée, la féduélion
involontaire, & non le um pie fiupre. Tous ces points de vue
autorifent le décret le plus rigoureux.
M. de Califfane conclut à la confirmation du décret de foit
informé & de celuÎ de prife-au-corps, l'élargiffement provifoire tenant ell donnant caution.
.
Arrêt conforme prononcé par M. le Préfldent de St. Vincent à!' Audience de la Chambre Tournelle du 2.1 Mai 1779,
Margerit fut cO[ldamné aux dépens; plaidans Mes. Gra,s &
Simeon' fils.
ARRÊT
XX.
J
Le propriétaire fupérieur d'un moulin pellt confiruire un aurre
engin & fe ferv,ir des eaux en les remett~nt dans le canal
mere.
T E fleur Lemore, ancien Officier de Cavalerie, poffede
..IlL4deux moulins qui tournent à la faveur, de la fource de
-la Foux, qui naît dans un lieu appartenant à la Communamé
de Graffe ; cette Communauté en a difpofé tant pour l'arrofage que pour les moulins, conformément à .J'article 7 des
anciens Statuts & Réglemens.
. C'eil: en force, de ces anciens Réglemens que les engins
conl1:ruits fur les eaux de'la fource de la Foux travaillent
fucceffivement ; les moulins du fieur Lemore , & d'autres
appartenant à des particuliers, font inférieurs à ceux que
poffedent les fleurs Bonnafons ; ces moulins ont toujQurs
fait le m.ême· travail jufqu'au moment où les fleurs Bonnafons occupent une partie des eaux pour l'ufage d'un moulin
à recenfe nouvellement conHruit.
Le fieur Lemore forma complainte pardevant le Lieutenant de Graffe le 12. Février 177'& ; il demanda le rétablif.
�DU
P .... LA1S
DE
PnovENCE.
179
[('ment des lieux dans leur premier état: il requit )'accédit
pour, la nouvelle œuvre vérifiée, être ordonné qu'il feroit
réintégré dans fa poffeffion & jouiffance de l'eau•
. Le Lieutenant accéda fur les lieux; le fieur Lemore demanda la defcription de l'ouverture faite au canal, & de
faire déclarer, 1°. la quantité d'eau que cette ouverture prend
dans le canal mere. 2°. Si le même volume d'cau aina déri9é de fon cours ordinaire, rentrant dans le canal de prife
de fes deux moulins, ell fuffifante ou inutile au travail de
ces mêmes moulins. 3.-°., Si lorfqu'on débouche la cuve de3'
lieurs Bonn'afons" & que l'eau qui la rempliffoit'coule dans
le canal de prife des moulins du fieur Lemore ,la partie
d'eau dérivée pour le moulin à recenfe qui vient du réfervoir
voi(jn des moulins des fieurs Bonnafons, el!: ou n'efi pas ful'abondante au travail 'ordinaire des moulins du fieur Lemore. 4°. Si par le moyen, de ceü~ nouvelle ouverture la'
cuve des moulins des Bonnafons n'ell pas plus long-temps
à être remplie qu'auparavant, & le travail des moulins du
fieur Lemore plus long-temps & plus fouvent imerrompu.
Les fieurs Bonnafons répondirent: 1°. que la partie [eule
des eaux· defiinée à leur moulin à Jecenfe ef!: infuffifante ou
inutile au travail des moulins' du fieur Lemore , lorfque leur
cuve ell bouchée. 2°. Qu'après que leur cuve ell débouchée,
les moulins du fieur Lemore travai1l.ent fans le fecours de
cette partie d'eau. 3°. Que cette partie des eaux ordinaires
n'a pu en être divifée fans que la cuve des fieurs Bonnafons
ne tardât un peu plus long-temps à être rem,plie, & que ce
petit retardement ne peut qu'occafionner un retardement de
travail au fieur Lemore.
Le Lieutenant concéda aéle au fieur LemQre des aveux des
fleurs Bonnafons, & procéda à la defcriprion qui relloir à
faire, affillé d'un Mâ~on ; il rendit enfuite fa Semence,
portant que le fieur Lemore feroit réintégré en poffeffiol'l &
jouiffance des eaux dellinées aux ufage'S de [es moulins; que
l'ouverture faite au canal par lequel les lieurs BOl1nafons ont
détourné le cours ancien & ordinaire des eaux, feroit bou-
Z
2
�ISO
JOURNI1}
chée par un Ml1tre Màçon, avec inhibitions &: défenfes d'ert
faire de nouvelles.
Les fieurs Bonnafons appellerent de cette Sentence pârdevant la Cour: peut-on ou ne 'peut-on pas, difoient-ils ,
faire des moulins à recenfe à Gralfe ? L'affirmative ne peut
fouffrir de doute. rO. Les moulins de cette efpece font
fondés fur l'ufage. iO. Ils font fondés fur l'autorité de la chofe
jugée; car la Communauté ayant voulu en interdire l'ufage,
la Cour par fon Arrêt de 1704 la débouta de fa prétention.
3°. Ils font fondés fur la conceffion des eaux faite par la
Communauté qui permet ces moulins, en ayant elle-même étab1-i un nouveau par la tranfaél:ion de 1767,
La Communauté, propriéraire des eaux, en a fait la con·
ceffion à tous; la di!l:ribution leur en a été faite d'Une maniere parfaitement égale. Où fe trouvera cette égalité, fi les
Bonnafons ne peuyent faire u!)e recenfe dans leurs fonds,
lorfque treize autres habitans en ont fait chacun une dans le
leur? Où fe trouvera cette même égalité, fi tandis que tous
les inférieurs à ces treize recenfes ont été obligés de fou/frir
les divifions & dérivations des eaux de ces recenfes, le fieur
Lemore feul dl: en droit de fe plaindre?
Par la tranfaél:ion de r7 67 , palfée enfuite de deux délibérations de l'univerfalité, les obligations de ceux qui fe fer.
vent fupérieurement des eaux, confifient, rO. à rendre les
eaux dans-le canal mere ; 2.0. à les y rendre toutes; 3°. à
les y rendre avant la prife d'eau de l'inférieur, pour qu'il
puiffe cominuer de les mettre à profit comme par le palfé.
Il confl:e par le verbal d'accédit du Lieutenant, 1°. que la
recenfe des Bonnafons rend les eaux au canal mere; 2.°. qu'elle
les y rend toutes; 3°. qu'elle les y rend avant la prife d'eau,
du fieur Lemore.
Voilà donc les obligations impofées au fUpérieur par le
régime local & par la rranfaél:ion, fur laquelle les deux par':
ties s'étayent, littéralement & de point en point exécutées.
La plainte du Ûeur I:,e~,O.rc::. ~i!i' q~~ç dé~lJ.~e, ~.e tou~ f~qJ
~ement.
�Bu PÜA1S -nÈ P
ROVENCll.
iSI
11 eft prouvé que les Bonnaf6ns comme tous les autres, &
& fuj.,'anr la tranfaétion de 1767,onr le droit de fe [ervir des
eaux relativement à leur befoin, pourvu qu'ils les rendent aü
canal mere. Or quand on pane un préjudice en ufanr de fon
droit, l'on n'en ell: pas tenu, parce que pafeil préjudice n'en
dl: pas un aux yeux de la loi. Nullus videtur dola facere qui
{ua jure utitur, .§. SS , de regul. jur. ira Ulpianus' in leg. praculus 26, if. de damna infeél. Les Bonnafons ont le droit de
préoccupation fur le fieur Lemore, & Peckius de aquœduélu,
tom. 2, quo 18, n. 9, décide que privilegium prœaccupationis
hoc partat in ventre, ut primà ille prœferatur, ,qui primà accupavit, lors même qu'il en réfulte <lu préjudice à l'inférieur;
& c'ef!: ainli que .le foutiennenr les ,Auteurs, etiamfi naceat
inferiori.
.
Les fleurs Bonnafons ajoutoient que la dérivation & la
diviiion des eaux font licites , par-là même qu'elles font
deHinées à un ouvrage licite. Ainli l'anef!:ent Cancerius, cap.
4 de fervitutibus; Peckius de aquœduélu, cap. 4, quo 4;
Sanleçer, Faber, la Rocheflavin, Henrys & Bretonnier,
Mourgues &·Duperier.
La prétention du fieur Lemore ef!: donc injuf!:e, puifqu'elle
tend à anéantir la concelIion des eaux & le régime local, à
rendre de nul effet J'Arrêt de la Cour, qui inurilemènt 'auroit autorifé les reèenfes, s'il étoit prohibé de divifer les
eaux, ces moulins ne pouvant exif!:er' fans cette divilion; à
détruire les moulins établis, à interdire l'établiffement de
nouveaux, à' jetter le trouble & la difcorde parmi tous les
poffédans engins, en voulant s'arroger un droit nouveau, qui
poneroit atteinte à l'effence de la chofe publique.
Le lieur Lemore .répondoit qu'il fuffit que les eaux foient
publiques & def!:inées à un ufage qui inréreffe une partie d~
l'univerfalité des habitans, pour qu'on ne puiffe point en intervenir le cours ordinaire;' c'ef!: ce que décide la loi l , ff.
de rivif. Celui qui jouit publiquement d'un ruiffeau, peut le
nettoyer & Ile réparer, fous condition pourtant qu'il fe borne
à réparer fans changer le cours ordinaire de l'eau, ne aliter
P1uam ducat quam priore œjlme duxi, ; fui!anr le paragraphe ~
�J . U :Il- N A, L
de la mêm~, loi, reficere efl in priflinum flatum,reflaurare. On
'181.
•
ne peut donc rien faire de nouveau, on ne peut que remettre les choCes dans leur premier état. Mais fi en réparant,
dit le §. demier de la même loi, on donne plus d'étendue
au c.anal , ou qu'on le rétréci1fe, ,ou qu'on le rehauffe ,fi eum~
dem rivllm dilatu, ·qeprimat veZ attollat, on dl: en droit de le
défendre, impunèprohiberi puto. Il dl: donc permis de nettoyer
un canal, de rétablir le cours de l'eau dans fon premier état,
'& il eft défendu d'en changer le, cours ordinaire; la loi ne
fauroit être p'lus expreife-; c'eft ce que décide encore le '§.
8 de la loi l " ff. de fonte.; la loi, tnqnifefle·, cod. de fervitutibu!., ~ la loi 1. ad legem A iJlf.iliam.
~
.
\
Il cf!: vrai que d'autres textes dans Je droit permettent
au propriétaire fupérieur de changer à fan gré le cours or,.
dinaire des eaux; mais on les concilie facilement cri failane attel~tion à la n'lIure des eaux fur leCquelles ils ftatuent.
C~s textes reglent l'uCage des e'lux privées, & décident que
le propriétaire ~'un fonds d~ns lequel naît ou paffe' une
eau privée, eft le maître d'en difpofer à fan gré, d'en priver
l'inférieur, à moins que l'eau ne coule à titre de fervitude
dans [on fonds. Telle cft la loi in meo flllldo , ff. de aqlla
pluv. arcend. ; la loi Fluminllm, §. dernier, ff. de damno infec7o) & la loi Proculus au même titre.
. ,Les J orifconCultes qui ont écrit fur cette matiere n?ont pas
laiffé échapper ces dift·inétions. Cancerius, cap. 4 defervÎtutib.,
conful.rant pour un nommé Valls, ne manqua pas de la faire.
Il fuffit que les eaux foient publiques pour qu'on n'en puilfe
point divertir le cours ordinaire. Fulfent-elles même privées,
(ln ne peut jamais· en changer le cours toutes les fois qu'elles
coulent per.pétuellement & qu'elles font deftinées à des uCages publics. C'e!l:-là le l'éCumé de fa doél:rine fur les queftions
qu'il traite.
De Luca, diCc. 3 l de fervitutibllS, poCe les mêmes principes : le cours naturéJ -des eaux, fuivant cet Auteur " ,n'eft
point capable, quelque long qu'il {oit, d'établir un droit de
lèrvitude en faveur des propriétaires des fonds inférieurs ;,
cette regle [ouffre. c$:pendanr une exception, c'eft dans le:
�DU PALAIS
DE
PROVENCE.
IS3
cas Où l'eau eft deftinée à un ufage qui inréreJfe le public.
Il eft dit enfuite qu'on ne peut point accorder la permiffion
de M.tir un nouveau moulin fupérieur: fi divertatur aqua quœ
inferiori juxta folitllm non [ufficiat. Il ne fàut point que Je
préjudice provienne du concours de ceux qui s'en fervenr;
mais il faut qu'il fait réel, qu'il provienne de la 'dérivation
& de la diminution de l'eau: dwnmodo prœjudiciuln fit reale
.
re[ultans ex diminutione aquœ.
. Taures' les fois que l'on entreprend des ouvrages [ur .les
eaux publiq~es , ou de!~inées à des ufages publics, fi ces ouvrages portent préjl1dice au moulin inférieur, s'ils le troublent dans la jouiŒlnce des eaux, dans la maniere dont il
avait accoutumé de s'en fervir j & fi ces ouvrages diminueni:
fon travail, il faut rétablir l'inférieur dans fa poJfeffion. Deux
conditions doivent toujours concourir: 1°. diverriJfement des
eaux jcontre l'ancienne forme: 2°. divertiJfement qui porte
préjudice; & iorfqu'elles fe rencontrent ,. on doit rétablir les
chores· dans leur premier état.
Dans 'le fait les eaux font publiques; elles coulént perpétuellement ; elles' prennent leur fource dans un local appartenant à la Communauté; ces eaux coulent pour un objet d'utilité publique, pour une partie de l'univerfalité des habitans;
elles font tourner quatre-vingt moulins. Les fleurs Bonnafons
n'on~ donc jamais dû fe permettre d'en divèrtir le cours.
Si la Communauté en a difpo[é, elle eH: ëcn[ée les avoir
réparties à tous les habitans avec égalité, parce que tous ont
un droit égal à fes faveurs. Toute conceffion, même celle
du Prince, s'interprete toujours de maniere que le tiers ne
foit point lé[é. Pechius de aquœduélu , lib. l , cap. 2, quo 2,
n. 10; Sanleger Refol. civil., cap. 48 ,n. 12. On ne peut
donc jamais préfumer que l'intention de la Communauté a
été de faire [ouifrir un préjudice confldérable à un citoyen ,_
en permettant au fupérieur d'entreprendre des ouvrages nuifibles aux inférieurs. Car ici il n'y a pas de milieu: ou le
fupérieur peut porter préjudice à l'inférieur, ou il ne peut
lui en porter aucun. S'il peut porter un léger préjudice dans
l'adminiftration des eaux, il peut doue en porter un confidé~
�~S4
Jou RNA L .
rable. Ell:-il polIible que l'intention de la CommunaLlté ait
été d'accorder les eaux au fupérieur & de lui en laiffer un
,ufage fi defpotique, qu'il pût, en les divertilfant, les 'rendre
inutiles à l'inférieur, ou préjudiciables au travail de fes engins?
Il faut expliquer la concelIioin de maniere que la regle
d'égalité foit maintenue, il faut la renfermer dans des jull:es
bornes, & dire' que tous les citoyens ayant un droit égal
aux eaux, par leur feule qualité de citoyens, il n'dl: point
permis aux fupérieurs d'entreprendre des ouvrages nuiGbles
au cours ordinaire des eaux. La nouvelle œuvre des Bonnafons contrarie donc. ouvertement l'efprit & l'objet .de la
concelIion.
.
Les Bonnafons reconnoilfent qu'ils doivent remettre les
eaux dans le canal mere, en force' d'un titre d'obligation;
il n'y a donc rien d'arbitraire dans leur ufage ; il font
obligés de les y remettre de maniere que l'inférieur puilfe
en ufer; & que fes engins puiffent travailler comme, ils
ont toujours fait. Au fonds, le titre de fervitude eft acquis
aux inférieurs par le long efpace de tems pendant lequel
les eaux coulent & par l'objet de leur deftination. Tous
les Auteurs, qui étahlilfent que le cours naturel des eaux,
quelque long qu'il foit, ne peut jamais former un titre
de fervitude, recohnoilfent que lorfque les eaux font deftinees
à une partie des habitans" & qu'elles coulent depuis longrems, la fenirude ell: acquife; c'el1:-là une limitation que
reçoit la regle générale, comme dit Cœpola de ftrvitutibus,
cap. 22, n. 4, & cap. 4, n. 2) ; de Gobius de aquis, quo
12., n. 27, & de de Luca de fervitutibus, difc. 31, Il. 'j. Il eft
donc conl1:ant que dès que les eaux font del1:inée,s pour une
partie de l'univerfalité des habitans muùis l/tentibus, fi
concurrat ufus accolentium, elles ne. peuvent point être diver:..
ries de leur cours ordinaire; le cours naturel. d.es eapx' pen,
dallt long-tems inducit confue,tudinem..
' ,
Par Arrêt du 4 Juin 1779,' au rapport dè Mi lé Con..·
feiller de Sr. Martih, la Sentence fllt réformée, le fleur
Lemore débouté de fa complain~e" a~ec, dép.~ns ;..écrivans
Me,s. Rarler & Ecnin..
'
~.",
AmI:
_ ,,-:!;J
�c
ARRÉT
xX
w
•
J.
Le propriétaire eft tenu des réparation" néceffaires, 1tonobftalu
la cIauJe expreffi d'Ùre difPenfé d'en faire•.
E
N l'année 177 0 le lieur Eliés ,-Procuraur fon'dé de la
Dame Tournier de Saqui, loua une partie de maifon
au fieur Bonhomme, Marchand Liquorifie de la ville de
Toulon; l'arrentement, qui ne devoit'commencer que dans
deux ans, fut paffé pour cinq; il fut dit dans la convention
qu'Eliés rie fe foumettoit à aucune forte de réparation, le
tout étant en très-bon état; après ce premier bail il en fut
paffé un feéund pour. le même tems, & fou~ les mêmes con•.
ditions.
j
Bonhomme fe pourvut au· Lieutéflant de Toulon par requête du 8 AOllt 1777, aux fins .Cle fa.iré condamner la Dame
de Saqui à lui payer SO livres 10 f. pour la moitié de la
dépenfe des réparations qU'Il avoit faites, à faire remplacer
la porte du magafin & les fenêtres de l'entre-fol, & à faire
metue un arcboutant à la porte du magafin qui. conduit à
la cave. Il requit enfuite par une requête incidente du 27
Oélobre fuivant que la Dame de Saqui fût condamnée à'
faire changer la porte de communication. du courroir au magafin. Il offrit enfin un expédient, portant qu'avant dire
droit à fa demande principale, concernant les SO livres 10
fols, il prouveroit fommairement que le fieur Eliés avoir
promis' de. lui 'payer la moitié defdites~réparations;& que
par Experts convenus ou pris. d'office, il. feroit fait rappon
préparatoire de l'état & fituation de la porte intérieure de
la boutique, des fenêtres de l'emre-fol & de la porte qui
du courroir mene au magafi[]·, lefquels Exp.erts déclareroient fi ces deux portes & les fenétres n'éroient pas dé.
labrées par vétufié, & s'il n'y avoit pas un danger immi.
nent à ce qu'elles continuaffem de fubfiHer comme ell~§
étoienr.
A ~
l
._.
�·86
J01JR'N<\L
Le Lieutenant par la Sentence du 3·Avril Ï771J; déclara
Je fleur Bonhomne non-recevable au chef concernant les ré,..
'parations à faIre aux portes & aux fenêtres ; & avant dire
droit au premier chef de fa requête principale, il ordonna
qu'il prouveroit [ommairement que lors des réparations
dont s'agit, le fieur Eliés promit de payer la moitié
de la Mpenfe, & qu'il ordonna, dirigea & recetta l'pu,,:
vrage.
Le fieur Bonhomme appella de cette Sentence aux chefs
qui le déboutoient de fes demandes & du rapport interlocutoire, il préfenta epfuite une requête aux fins de faire
cotifl:ater par un rappon préparatoire les mêmes faits qui
faifoient la matiere du rapport interlocutoire; ce qui lui fut
accordé par dé(;ret du 27 Juin 1770. Il fit procédet à fon
tapport.
Eour le fou tien de fon appel, il difoit qu'il s'agit de favoir fi la Dame de Saqui, qui lui a arrenté une partie de
fa maifon, doit les réparations nécelfaires & qui entrent
dans la jQuilfance.. La claufe : ne Je foumet à· aucunes forres
de réparations, le tOlft étant en très·bon état, ne contenant
pas la décharge des réparations nécelfaires. Si les claufes des
contrats font corrélatives, le paél:e exprès qu'OlD. trouve dans
la mêmè convention, par leq)lel la Dame de Saqui s'oblige
de faire jouir paifiblement le fieur Bonhomme, explique au
befoin la difpenfe des réparations. En elFet fi le locateur étoit
difpenfé des réparations, tout celfant d'être en bon état, il
fe.roit difpenfé dl': faire jouir; les deux claufes impliqueroient
contradiél:ion. On ne peut donc les entendre que conformément au droit commun, qui fait conGfl:er la prefl:ation de
la jouilfance dans les réparations, frui non licet .Ii. non réfi-.
citur ; L. l S, §. l , lF.locatÎ.
. Les claufes ne peuvent pas opérer contre leur naturelle
fignification; contre l'intention évidente des contraél:ans, &
contre l'elfence & la nature Ide la chofe : ftmpe r debet fieri
iruerpretatio ut vitetur abfurdum & iniquitas. Celle dont s'agit.
eH:, aina que celle de faire jouir, conforme au droit" commun, & elle ne peut rien produire de plus. Il fau.droît pout,
�D U
PAL AIS
D E
P
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E N
CB.
187
cela y avoir dérogé de la maniere la plus précife ; & c'dl:
ce qui n'a pas été fait.
Il dl: conftant què la difpenfe des réparations n'eft relative qu'à l'idée que le bon état aél:uel de la maifon, vrai ou
apparent, continueroit à être ou paroître tel pendant tOUl
le cours du bail j le vice .pouvoit exifier iotérieurement du
temps de la convention & ne s'être niontré qu'après; &
c'efl: alors qu'en vertu du paél:e même de la convention, &
en vertu du droit commun, l'obligarion de réparer a pris
riaiifance.
Quoiqu'il ne s'agit pas d'une impoffibilité abfolue d'habiter, il était quefl:ion néanmoins, en l'état de délabremene
où fe twuvoient les portes & fenêtres, d'une habitation non
mre & expofée à un danger imminent; ce font les termes
du rapport. La fûr.eté fait partie de la jouiiIance eifentielle
9U contrat, ic conféquemment le paél:e qui exclurnit la
flIreté de la jouiifance feroit également contraire à l'eifence
du contrat. Une maifon efl: inhabitable quand elle n'efl: pas
fermée ou duement fermée; auffi l'Arrêt qui ordonne le rap~
port préparatoire a-t-il permis au- fieur Bonhomme de faire
faire les réparations, fi elles étaient jugées néceflàires par
les' Experts; & comme elles importaient à fa fûreté, le Sr.
Bonhomme les a faites faire fous l'infpe"él:ion d'un des Experts, & a rapporté' quittance- des Ouvriers.
D'ailleurs la Dame de Saqui ne défavoue pas que fan
Procureur fondé a fait faire des réparations pendant la
durée du bail, elle le replie feulement à dire qu'ell~ -l'a fai~
en fe départant de fon droit. Cette exécution, quoi qu'on
en dife, jointe au dr,git commun & au fens clair que la con..
vention préfente, ne laiife plus aucun doute.
. Les Experts one déclaré que le doublage de la 'porte Îr.1térieure de la boutique, & la partie fupérieure d'icelle, du
côté du batrant, où fe trouve une .ouverture, font délabrés
par vétellé. Quoique les portes n'euifent befoin que d'une.
réparation par~iaire, il n'en efl: pas moins vrai que le défaut
de ces réparations conftitLioit le fieur Bonhomme cl ans un.
danger imminent, & cela fuffit pOLir fouruettrè la Dame de
Aa2
L
l.J
�'188
JOURNAL
Saqui am{ paie mens des réparations telles qu'elles [ont. por-,
'
tées par le rapport & qu'elles ont éé faites.
La D:ime de Saqui répondoit que le fieur Eliés, [on Pro.
cùreur fondé, par la c1aufe ne Je foumettant à aucune forte de
réparation, a voulu étre difpenfé d'en fair.e aucune pendant la
durée du bail, de quelque efpece, de quelque nature qu'elle fût,
-& quelque événement qui pût furvenir. Le paB:e qui difpenfe
des réparations eil: général &, abfolu ; il ne contient aucune reil:riB:ion, & n'eil: fubordonné à aucune condition.
La c1aufe, le tout étant en très-bon état, cil: indépendante
tie la précédente, elle n'y apporte aucune reHriB:ion ni aucune dérogation. Si la difpenfe des réparations n'avoit été
fiipulée que conditionnellement, & fi elle ne devoit avoir
lieu qu'autant que la maifon continueroit d'étre en bon état,
il arriverait que le fieur Eliés n'aurait rien fait d'utile, que la
c1aufe par laquelle il a voulu n'être fournis 11'1 aucune forte
de r~paration feroit oifeufe., fruHratoite & 'ne porteroit fur
rien; en effet rant qll'une maifon eH en bon état, le locataire ne peut prétendre la moindre répar.1tion, fi l'on n'avoit en vue que le très-bon état de la maifon; & fi l'on
avoit voulu que là difpenfe des réparations n'eût lieu qu'à
cette condition que la maifon continueroit d'être en bon état, _
on n'aurait pas eu befoin de l'énoncer, puifque cela étoit' de
droit; cette énonciation devoit donc avoir un motif & un
objet, ce' ,devoit être néceifairement de difpenfer la Dame
de Saqui de toute forte de réparations indépendamment du
bon ou mauvais état à venir de la maifon.
Aucun des paB:es inft!rés dans un aB:e ne doit être inutile;
ils doivent tous avoir un effet général & l"':remptoire , comme
nous l'apprend Decormis, tom. 2., col. 996, après Dumoulin;
qui dit en fonConfeil 8, n°, 18 , ,que les claufes & les renonciations générales s'étendent jufqu'aux droits auxquels on
h'a pas penfé fpécialement, mais feulement en gros & confufément : or le paB:e portant difpenfe de toute lème de réparations eH général, il s'applique donc & doit avoir fOll~
effet d<lns tous les cas où la maifon pourroit avoir be(oin de
réparations, & pour toutes les réparations quelconques. .
�~ u P A do l s' 'n il 15 R ;, VEN C E.
d9
, "Von convient que de .droit commun le propriétaire efl:
obligé de faire à la maifon toutes les réparations néce1Taires ;
mais n'dl-il pas permis aux Parties de fe tirer de la .difpo1ition du droit commun, d'y déroger? C'eH ce qui eH arrivé
dans le cas préfent ; il ne faut donc pas confuiter les regles du droit commun, mais les accords 'que les Parties ont
fait & qui forment leur loi.
'
Il ell: de l'e1Tence du contrat de louage que le locataire
joui1Te, mais aux cond itions & avec les rdl:riél:ions dont
-les Panies ont trouvé bon de convenir; l'on 'a pu convenir
que la Dame de Saqùi ferait difpenfée de toute réparation,
parce qu'une pareille difpenfe n'aboutit pas à expulfer le locataire de la maifon, à le priver de toute joui1Tance; mais à
la lui rendre moins commode ou mOIns agréable; perfonne ne s'ell: avifé de prétendre qu'un tel paél:e Elit illicite
& contraire aux bonnes mœurs..
.
La Dame de Saqui a pris durant le cours du procès des
fins fubfidiaires, par lefquelles elle a offert de prouver, la ..
que lors du fecond arrentement touS les appartemens remis
~ Bonhomme, ainfi' que les portes & les fenêtres, étaient
-en bon état.. 2 0 • Que les dégradations furvenues aux portes
'ont été faites par le fieur Bonhomme lui-même ou de fan
ordre, foit en ouvrant les portes avec trop de violence &
de précipitation, fait en ôtant des planches, des morceaux
de' bois, & agrandi1Tant les trous qu'il y avait. 30 • Que le
délabrement des portes, & notamment de celle du.
magafin , a été fait ou augmenté dl:puis.le pr,ocès commencé..
4°. Que Bonhomme avait fous-arrenté les appartem.ens du
premier étage ou entre-fol ~ des Hollandois' qui y ont tenu
'pendant long-tems trois chaudieres, d'équîpages de bâtimen~,
& que les Matelots, ou autres perfonn,es chargées de faire
bouil1ir ces chaudieres, fendaient Le bois fur ~e plancher, &
caufoit un grand préju,dice tant aux apFartemens qu'aux fenêtres..
Quoique les Experts aient déclaré que les portes & fenêtres étoient vieilles & rongées par les vers, ils n'ont pas
dît qu'elles fu1Tent hors de fervice', puifqu'ils ont a1Turé au
�Jou il.. N A L
contraire qu'on pourroit les faire Cervir en y fairant quelques
. réparations. Il arrive rouVent qu'une porte ou un meuble, quoique vieux, fait encore' bon urage en le ménageant; c'en ce
qui feroit arrivé à l'égard des portes & des fenêtres. dont
s'agit, fi le fieur Bonhomme n'en eût méfufé , s'il ne les eût
dégradées avec affeél:ation & par malice. Ce -que les témoins
pourront dépofer ne détruira pas ce que les Experts peuvent avoir déclaré: d'où il fuit que cette preuve fubfidiaire dl:
ré~uliere & recevable.
Par Arrêt du ) Jllin 1779, au rapport de M. de Thorame,
la Cour ayant au.cunement égard au fecond chef des requêtes
du fieur Bonhomme des 9 Août 1777 & 17 Janvier 177 8 ,
condamna là Dame de Saqui au paiement des )8 livres 14 f.
du montant des réparations jugées néceffaires par le rapport du 9 Septembre 1778, & à tous les dépens; écrivans
Mes. Aude & Bovis.
'190
'A R R Ê T
xX
II.
Si le Failli qui s'eft obligé par
UI! concordat à payer [es dettu
dans dix ans à raifon d'un. dixieme par an, ayant enfilÎt~
fait un nouvel arrangement avec l'un de [es créanciers qu'il'
a éxécuté en partie, peut demander de revenir à l'txécution
du cQncordat.
L
A veuve Giraud & David, NégoGians de la ville de
Salon, ayant effuyé des pertes dans leur commerce.;
remirent- leur bilan, &, pafferent enfuite un concordat avec
leurs créanciers le 18 Mars 177). Les fieurs Roux & Efieve,.
Négocians de la ville de Montpellier, fignerent cet a.ccord ,.
qui obligeoit la Raifon de la Veuve Giraud & David, fous
le cautionuement des fieurs Giraud & David fils, de payer
un dixieme chaque année.
Pollérieurement à ce concordat la veuve Giraud & David'
conCentirel,t d'anticiper le paiement c~nceroant le~ fieu~
t
�bu
PAL AIS
DE
PRO 't E NeE.'
19 r
Roux & Efreve j ce nouvel arrangement leur ~ccordoic d'être
payé dans fix ans- au lieu de dix. Pour remplîr cet accord
la veuve Giraud & David firent cinq billets de I2.43 liv. 9 f.
Le premier n'étoit payable qu'au 10 Avril 1777, c'eft-àdire, deux ans après le concordat; les autres devoient l'être
fucceffivement & chaque année. Au moyen de ces billets
Roux & Efteve firent quittance à la veuve Giraud & David
du montant de la fomme dont ils éroient déclarés créancÎers par le concordat.
A l'échéance du premier billet, la veuve Giraud & David
n'ayant pu payer à com pte que la fomme de fix cents livres,
.1 fut protefté pour le furplus le 17 Avril x777 , & par
exploit du 2-4 du même mois, la veuve Giraud & David,
& les fieurs Giraud & David leur fils, endo1feurs defd. billets,
furent affignés pardevant le Juge de Salon, pour fe voir condamner confulairement au paiement des 643 liv. 9 f. dt! furplus du billet. Sur cette affignation intervint Sentence le 26
Mai fuivant, confirmée par celle du Lieutenant d'Arles du
3 Mars %778 , qui condamne les parties affignées au paiement de la fomme.
La veuve Giraud & Conforts appellerent de ces Sentences
pardevant la Cour; ils difoient que les délibérations prife~
par les créanciers d'un débiteur failli, & les concordats qu'ils
fignent font des loix, tant pour ceux qui ont foufcrit & le
débiteur, que pour les autres créanciers qui n'ont pas voulu
figner, pourvu que les créances de ceux-ci n'excedent pas
le quart des dettes; ils doivent les exécuter ponél:uellement,
ainfi qu'il eft prefcrit par divers articles du titre xx de l'Edit
de x673; de forte que lorfqu'il a été convenu entr'eux, foit
d'un attermoiement, foit d'une rem ire d'une partie des
dettes, un créancier ne peut pas exiger du débiteur une
condition plus avantageufe que celle qui a été tracée dans le
éoncordat. Si, foit par prome1fes, foit par menaces, il
exige du débiteur quelque fomme en fus, ou des conditions
plus avantageufes, c'e1t un dol, une fraude qui doit étre
réprimée, en lui faifant fubir la loi générale qu'il a eu la
rnauvaife foi d'enfreindre: le dol, 1'1 fraude fonc des vices,
�19~
J
0 V'R NAt
qui annullent ipfo jure tous les aél:es qui en font infeél:és;
ainfi décidé par la Loi 7, ff. de dolo malo ; par la Loi
3 l , if. de a8ion. cmpt. , & par la Loi 3 1, If. depofili.
Ces fraudes ne font que trop fréquentes dans le commerce; un débiteur qui attend fa tranquillité & fan exi!l:ence
civile de la iignature de fan concordat, fIgnature qu'un
créancier trop avantageux peut lui faire acheter par un avantage pérfonnel dont les autres font privés, réfiHe difficilement à cette voix impérieufe qui le fubjugue.
Savary dans fan parfait Négociant, tom. l , part. 2, Ev.
4, ch. 4 , pag. 341 , rapporte les divers moyens qu'emploient ordinairement ces créanciers pour extorquer de lems.
débiteurs des obJigation,s illégitimes; il ob[erve fort judicieufement que cette fraude eH un moyen infaillible pour
faire faillir une feconde fois le débiteur, qui par-là fe met
[auvent dans l'impuiffance de remplir [es engagemens; il
rapporte à cet égard un nombre infini d'exemples ; il fàit
une loi au débiteur de traiter tous fes néanciers également ;
& (ans diHinél:ion même de [es plus proches pareos; il
l'invite à écomer, [ans en être ébranlé, toutes les menaces,
toutes les promeffes que lui font les créanciers; il avoue
néanmoins qu'il e!l: difficile qu'un débiteur failli puiffe S'Çl1
défend re.
Après avoir convenu d'avoir figné le concordat, & que
le débiteur n'y étoit fournis qu'à payer un dixiame des
créances chaque' année, Roux & E!l:eve IFétendel1t pour excu fer leur fraude, qu'antérieurement au concordat la veuve
Giraud & David, fenfibles à ce qu'ils n'avaient pas fcruté
leur conduite, & qu'ils concouraient à Èhomologation de
l'écrite, confentirenr à· anticiper le paiement de ce q.ui leur
était dû; mais cette .allégation eH une fauffeté évidente. Eftil en effet naturel de pen[er que des débiteurs qui ont été
obligé.s de faire faillite, qui ont fait avec leurs créanciers un
concordat meurtrier, qu'ils n'exécutent qu'avec les plus gran.
des peines, aient offert ou confenti volontairement à une
a.llticipation de paiement de leur dette ? S'ils avaient eu
'J.?elque, choCe à. craindr.e de. l'examen de leur. conduite, n'y;
.
. .
étoient-ils
---
j
�D II
PAL AIS
D E
19'1
Ptt 0 VEN C E.
~toient-ils pas expofés vis-à-vis chaque créancier;
& s'ils ont
{oufcrit de nouvelles obligations pour avoir la fignature de
Roux & Efieve, ne l'one-ils pas évidemment achetée au
préjudice des autres créanciers & au leur comme contraines
& forcés, enfuite des menaces & des promeffes faites par
dol & fraude l
L'arrangement frauduleux que Roux & Efieve ont arraché
à leurs débiteurs ne les indemnife pas totalement ; cela efl:
vrai: mais de ce qu'ils ne [one pas entiérement indemnifés,
de ce qu'ils n'en ont reçu que l'avaneage d'être payés dans
fix ans, tandis que tou-S les autres créanciers, au fort defquels
ils [ont liés par une loi commune, ne doivent être payés
que dans dix., en ont-ils moins fait ce qu'ils ne devoient
pas faire? Les cinq obligarions qu'ils ont rapportées fontelles moins iofeéèées de dol, de fraude & de force ? Si le
confenrement des débiteurs avoir été au/Ii libre qu'il fut
forcé, auroient-ils dll le demander, & la demande qu'ils
en ont fatte n'efi-elle pas toujours une fraude faite à la lo} .
du concordat, au préjudice des faillis, & de la maffe des
créanciers qui [ont au cas d'être plus difficilement payés,:
parce que les obligations conrraéèées vis-à-vis Roux & Efteve font plus fortes & plus difficiles à remplir?
On ne peut oppofer avec [uccès que la veuve Giraud &
Day.id ont exécuté leur nouvelle obligation e:l payant Ulle
partie du premier billet; il s'agit ici de dol, de fraude &
d'ufure qui ne peuvent étre couverts par un aéèe approbatif,
fans une renonciation expreffe à l'aéèion qu'ils Ont d'attaquer l'aéèe qui les confirme, fuivant les textes du .droit & les
Arrêts rapportés par Louet, letr. T, fomm. 6, & par Bo.·
1Iifa,ce, tom. l , part. l , liv. 8, l'il'. 2, chap. 8. Que peuvent d'ailleurs les approbations d'un aéèe nul de pareil)e nullité? N'eH-il pas de regle d'après la loi 27, ff. de oblig. &
ac7ion. qu'une obligation qui ne peut fubfiHer par elle-même,
ne peut devenir valable dans la fuite? Ce qui efi fair. en exécu-tion du contrat, par exemple, le paiement fai-t en vertu d'une
obligation ne peut en opérer la confirmation'; de forte que
li l'aéèe efl: révoçable en [on prinç:ipe ou à rajfoll d'un filÏ,
. - - .' ._- _. - --
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pofiérieur; l'exécution ne forme pas une fill de non-rece~
voir. Telle dl: la déciGon de Decormis, tom. 2., col I040:
ce qu'il confirme par la loi 3, §. [cio, If. de minor. ; & -cela,
IO. p1rce que le contrat devant être exécuté pendant la refciGon, le paiement ne peut être regardé que comme une
exécution forcée du contrat. 2.°. Les aél:ions refcifoires ont
un temps qui efi tout au moins de dix années; en forte que
l'exécution pure & hm pie & .fans protefiation qui feroit faite
durant neuf ans, n'empêche pas le fuccès de la refcifion dans
la dixieme année.
.Les nouvelles obligations contraél:ées par la veuve Gir:lud
& David font income!l:abkment révocables, parce qu'elles
ont été faites contre la loi de l'égalité qu'il doit y avoir entre
des créanciers à titre égal, qui ont foufcrit un concordat, &
qu'elles n'ont été contraél:ées que par dol & par crainte ; ce
qui eH un moyen valable de refciGon fuivant les loix I , 2., 3
& 7, ff. quod metus cauf. ; la loi derniere, cod. de his quœ
If. de dolo •
metufve; la loi 3, cod. de tranfaa.; & la loi
. Par le concordat du 18 Mars 1771' la veuve Giraud &
David ne devoient à Roux.& EHeve que des fommes payables en dix ans; ils fe font obligés par cinq billets pof!:érieurs
de les payer en Lix; malgré cette nouvelle obligation ils .ne
doivent les payer que conformément à leur premiere date &
en dixiemes. La veuve Giraud & David n'ont pas befoill de
l'intervention & de la réclamation 'de la ma{fe de leurs
créanciers pour faire annuller leurs obligations. Cette inter-.
vention n'ajouteroit r·ien à leurs droits nai{fans du préjudice
qu'ils en reçoivent plmôt & plus direél:ement qu'eux;' il leur
fulEt de prouver que leurs obligations [Ont nulles comme
faires par crainte, dol, fraude & fans caufe ; la ma{fe ne'
doit pas même agir, dès qu'elle eH payée exaél:ement en con..'
formité du concordat.
Roux & Efteve répondoient que l'acompte des 600 liv.
payées par la veuve Giraud & David formoit une fin de
non-recevoir imparable; par ce paiement ils ont reconnu la
légitimité de leurs obligations; ils n'éroient point alors agités'
de ce mouvement tumultueux qui les porte aujourd'hui à mé-
I,
,
�DU
PAL AIS
D B
PRO. VEN C E.
19 S
connoître leurs engagemens ; cette approbation ultérieure cft
une reconnoilTance & un acquiefcement qui fortifie leur fi.
gnature. On peut voir l'Ordonnance de 1667, tir. 27, arr.
5 , aux nores & aux mots y eu.Dent formellement acquiefcé ,
& DefpeilTes, rom. 2, rit. 12, fea. 2, art. 2, na. 1.
Le prétexte de dol & de fraude ne peut faire la plus lé.
gere impreffion ; fi d'une' part la veuve Giraud & David difent avoir été fUl'pris à l'époque de la fignature du concordat
qu'ils fol1iciwient pour rapporter les trois quarts des créan·
ces, de l'autre ils ne peuvent faire valoir la même exception·deux
années après, & lorfqu'ils paient une panie de la fomme;
ce paiement prouve que l'accord a été fincere, & il ne p.eut
exifter aucun foupçon de furprife ou de captation; s'ils
avoient été flll'pris, loin de payer purement & fimplement
deux années après panie de l'obligation, ils auroient proteHé , ils auroient même refufé de payer. La loi 13, cod. de'
lion numerata pecunia., s'exprime en ces termes: nimis enim'
- indignum e.Oè judicamus quod [ua qllifque voce dilucidè. protef
tatus efi, id in elln:z.dem cafum infirmare tej/imonioque proprio'
rejljlere.
.
Quelle eft d'ailleurs la perte que fouifrent ici la veuve Gi··
raud & David? Ils ont promis de payel: dans Iix années ccqui ne de voit l'être que dans dix i cette' aNticipation n'offre
pas une furcharge qui puilTe leur devenir funefie; les fieurs
Roux & Efieve n'ont point convenu fur tme indemnité plé-·
niere, & même tant foit peu confidérable. Par le concordat
les faillis' s'ohligerent de donner un dixieme chaque année ;
par le nouvel arrangement ils fe fournirent à folder leur créa ne ~
dans fix ans: mais on ne doit pas laiJTer échapper cette diverfiré
frappante, que par le concordat le premier paiement fiipulé
envers la malTe s'accomplît au même jour de l'année fuivante
1776, au lieu que par l'accord des Srs. Roux & EHeve avec la;
veuve Giraud & David, le premier biller qui forme le fixieme, n'eH exigible que le la Avril 1777; c'eH-à-dire, deux.
années après le concordat. Ce rerard confiinie Roux & E[.
·reve dans une perte que les autres créanciers ne fupporrel1l!
.I?0int ;. & ce défavantage mefur': aveÇ. l'anticipation dont o~
B b 20.
�':196
Jou RNA L
[e plaint'; réduit preCqu'à rien la différence que l'on tkhe d'y'
rencontrer.
A ne juger la que!l:ion que d'après les principes du droit;
..)1 efl certain que le débiteur qui, ayant terme, paye par avance,
ne peut retirer ce qu'il a payé, parce qu'il le devait & qlle
le terme e!l: purement facultatif. Quod certd die promijJum
ejl , vel flatim da.i potefl, totum enim medium tempus. ad [olve,t'dllm promij]ôri liberum relinq'lIi intelligitur. L. 70, ff. de
[olut.
Les Jurifconfultes ne mettent abfolument aucun doute [ur
cette queflion. Suivant Domat en [es Loix Civiles, Ev. 'h
tit. l , [eél:. l , n°. )' pag 178, & lîv. 2 , tit. 7, feél:. l , nO.
4, p. 17 2 , fi un débiteur paye avant le terme, quand même la
cho[e ne [eroitdue qu'après [a mort, le créancier qui reçoit ce
paiement, quoiqu'il n'ait pas droit de le demander, peut le
retenir; car le débiteur a pu l'avancer, & n'a payé que ce qu'il
devoit. Si cum moriar date promifero & antea [olvam , repetere
non pojJum.
Dans les Jurifdiél:ions confulaires l'anticipation du paiement e!l: autorifée , & même on y favoriCe les avantages
que le débiteur failli a confenti au profit de l'un de [es
créanciers; on y fait toutefois cette dill:inél:ion judicieufe ,
que l'augment n'y ell: toléré & permis que du créancier au
failli, & [luf les droits de la mafl'e; c'e!l: la Jurifprudence
conHante de ces Tribunaux. Le motif en eH: que le débiteur
[e trouve libre de gratifier qui bon lui [emble , & que le
plus fouvent, une plus' forte remife tend à lui maintenir
la confiance & le crédit des Négocians avec lefquels il traite.
Malgré l'avantage que renferme le concordat; malgré le
plus grand délai accordé à la veuve Giraud & David, l'obligation naturelle [ubfiHe toujours; toujours il eH vrai que la
Comme due' à Roux & EHeve étoit exigible; les débiteurs
[e voyoien.t obligés de la payer; cette obligation que 1'011
nomme naturelle à rai[on de l'efl'ence de la dette, renfermait la caufe qui légitime la nouvelle obligation ; d'autant
'mieux que le terme de_l'échéance n'a eu une plus grande
~xtenfion que par le confentemenr réciproque des parties ;.
�,
DU P À.LA 1 ii 'n E P Il. 0 v Ef: C H;
'197
qui peut fe réfoudre de la même maniere qu'il a été formé;
il n'y a là ni dol ni fraude; il fufEt que l'accord ultérieur
ne manque ni à la vérité, ni à la droiture; ici il ne fait que
fe rapprocher du premier état des chofes.
Delà, routes les fois que les faillis fe font préfenrés pour
attaquer les billets qu'ils avaient foufcrits , dans le deifein
d'indemnifer certains créanciers du quierus par eux confenti ,
ils ont roujours été repouifés.
La Rairon de Magnan & Omerat, Négocians de Marfeille,
ayant fait faillite, le fieur Nance ayant accédé au concordat
portant réduél:ion à 40 pour cent des créances chirographaires, obtint d'eux des billets à ordre pour le montanr du
quittus du 60 pour cent. Le fieur Magnon voulut revenir
envers fes billets; mais par Arrêt du mois de Juin 1713 ,au
rapport de- M. de Beaurecueil, il fut dé.bouté de fa demande
avec dépens.
La veuve Giraud & David étoient rétablis lorfqu'ils ont
fait les billets qu'ils attaquent; ils furent alors cenfés -connaître la force de leur engagement & les caufes qui les y
ont invités, dont une principale, outre le crédit & la con·
fiance qu'ils d.choient d'acquérir, con!Hl:e en ce que, parmi
les articles procédant des ventes qui compofoient la créance
des _fieurs Roux & EIl:eve , il Y avoit un,e lettre de change
fournie par la veuve Giraud & David en paiement des Rois
qu'ils n'acquitterent point.
Quant à l'intérêt de la maife, il eIl: bien étrange que tandis qu'elle ne dit mot, la veuve Giraud & David s'avifent
d'exercer foI.1 droit qui veille & ne peut s'éteindre même
par le paiement. Si les faillis font nouvellement dérangés;
la maife rapporte par l'homologation du concprdat une hypotheque capable de faire recombler rout ce qui aura été
acquitté outre le contenu de la loi commune; or ceere aél:ion
garantilfant fon intérêt, en vain la veuve Giraud & David
l'implorent; dans cette incertitude on ne doit pas rompre
un accord auquel rien ne porte ohIl:acle.
La veuve Giraud & David font la. non-recevables, parce
qu'ils OUt déja acquitté partie du montant d'un billet, &;
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~
1 " 1 0 u ft N f r;.
4" .
qbe cette '.e~écutioq leur ffw'jP 1'1 pprte à tpute r,éc1am~tiol1~
:2.°. Ils [Ont mal fondés, [oit Rarce qu'il eft permis à un
chacun de difpo[er de fan bier propre ~ [ur-tout qua~d cet
aéte de propriété a une caufe légitime qui fett de bafe à
l'arrangement nouveau, fait par.ce que d'après les principes
Liu droit & les regles du commerce, non feulement le débiteur a la faculté d'anticiper fan paiement, mais même il
peut f:1ire des -facrifices particuliers envers lefquels il ne [aurait être rell:itué ,_ tant qu'ils. J?'exçedent point la condition
premiere du créancier.'
.
La veuve Girayd & :Q.avjd o.ffrirtnt expédient le, 9 Juin
1779, & confirmerent la Sentence du Lieutenant d'Arles;
écrivants Mes. Reinaud & Fauchier.
-
ARRÊT
XXIII.
En Pr.ovenfe, à r.aifon du tran!port des Denrées & Marchandifes dan~ les quaEre lieues limitrophes du Pays étranger,
on n'eft point obligé de pr.endre des acquits à caution.
TES cinq groifes Fermes confifl:oient anciennement en
.JiL.!1 différens droits qu'on lev(jit fur les marchandires allant
& venant de l'Etranger: 1°. le haut paifage, ou impofition à
t'liron de fept deniers pour livre fur le tranfpolt de <:ertaines.
marchandifes. :2.°. La Reve ou impofition à raifon de 4 f. pourlivre de la valeur de toutes les marchandifes ou denrées en gél)éral. 3°. L'impofition foraine de 1:2. f. pour livre de la même
valeur. 4.°. La traite oU; impofition foraine d'Anjou fur uq
taux différent. )0. Le trépas de Lqire [ur. ce qui pafToit dans
certain dill:riél: du cours de ce Fleuve.
Les quatre premiers droits foqt fort ançiens.; ils n'étaient
dus que pour les II1archaodifes tI;'1ofponées chez l'Etranger;(
ils [airaient partie des aides, c'ell:-à-dire ,. des [ubfi,des que
les peuples accordaient a.u Roi pour l'aide~ à faire la guerre•.
Le cÎl}quieme fut
. établi en 1369.
. .
�DU PALAIS DE PROVENCE;
199
, >rdutes les Provinces du Royaume ne fe foumirent pas au
paiement de ces droits; il Y en eUl qui refuferent de les
acquitter pour l'exportation de leurs marchandî[es chez
l'Etranger. .sur ce refus il fut ordonné que ces droits feroient
per~us fur les marchandi[es qui feroient tranfportées des Provinces qui s'étoient affujetties aux droits, dans celles qui s'y
étoien t refufées.
Anciennement ces cinq droits différens formoient tout autant de fermes qu'on appelloir les cinq groffes fermes. Cette
dénomination a toujours fubIiHé.
En 1664 tous les droits formant les cinq groffes fermes
furent fupprimés & 'Convertis en 'un feul droit. d'entrée &
de fortie pour les Provinces appellées des cinq groffes fermes,
qui font les feules pour lefquelles cette lOonverfion fut faite.
Le tarif qui fut fait comprend la Normandie, la Picardie,
la Champagne, le pays de Breffe, le Poitou, le pays d'Aunis,
le Berry, le Bourbonnois, l'Anjou, le Maine, l'Ille de France,
l'Orléanois, la Perche, le Nivernois 1&"la Touraine.
Les autres Provinces du Royaume, dont la Provence eR
du nombre, [ont celles qu'on appelle hors de la ferme, &
qui, quant à ce, font réputées Provinces étrangeres. C'eR
pourquoi elles ne furent pas comprifes dans le tarif de
f664 , après lequel on a continué de percevoir comme auparavant dans les Provinces étrangeres des droits locaux,
fuivant des tarifs particuliers. La Provence qui n'étoit point
unie au Royaume de France lors de l'établiffement de ces
anciens droits., & qui par conféquent étoit mieux fondée que
l'es autres à ne pas s'y fou mettre , payait <les droits fuivant
des tarifs oe 1632. & 1633, qui la concernoient' feule•
• Un Ilou'veau tarif de 1667 augmenta -le taux ae quefques:ûns des droits d'entrée & de' fortie établis en 1664, & ordonna que la perception en feroit faite aux premiers Bureaux
des Provinces réputées étrangeres & à ceux de la Douane de·
Lyon. Mais [ur la réclamation des' Procureurs du Pays, il'
interVint un' Arrêt du Confeil du )0 Décembre 166li, qlli
déchargea leS habitans du pays de Provence ,d~ paiement des
drblts'meriüoiinés aux tarifs de 1664 & 1667 pour les den:;'
\,
.,
��DU PAL AIS. D Il P R '0 v Il NeE:
2.0{
'nombre, qualltité, qualité & deflination au Bureau de l'enlevement; & s'il ny en a pas, au premier de la route; d'y
conduire les marcllandifes & del!rées par des voies obliques &
détournées, & fans avoir pris des acquits à caution pour les y
rapporter bien & valablement' déchargés dans le temps porté
par la foumiffion; & en ce qui eft des detlrées & marchandifes fujettes aux droits du crû des lieux dom les territoires
font fur la liJiere des pays étrangers ou réputés tels, ordonne
que les habitans qui voudront tranfporter les marchandifes &
denrées d'un endroit à un autre, feront tenus de les déclarer
par leur nombre, qualité & qualltité, & l'endroit de leur deftùiation avec leur route au Bureau du lieu, s'il y en a : enjoint aux Receveurs de leur expédier incontinent & fans frais
des pajJè-avans , à peine de 100 livres d'amende de tous
dépens, dommages & intùÜs., & d'êtl'e pourfuivis extraordinairement par les voies de droit fur la plainte qui pourrait el!
être portée; à l'effet de quoi enjoint aux Receveurs ,. leurs
Commis & Prépofés de fe tenir à leurs Bureaux puur faire
l'expédilion fans retardement aux paniwliers qui fe préfentel'ont, fous les mêmes peines, & le tranfport des denrées &
marchandifes fera fait en conformité des articles 1) & 16 du
du titre 6 de l'Ordonnance de 1687 ; & à l'égard des lieux
où il ny flura pas de Bureau , ordonne que les habitans feront tenus de prendre des Conflds, & en leur abJence, do
Curés ou Notaires, s'il y en a, des certificats qui contiend-ront
pareillemellt le nombre, quantité, qualité des marchandifes &
denrées, l'eI!droit où elles doi.vent être portées, & les chemins,
[entiers du viols par lefquels ils voudront paffer & les conduire, le[quels certificats les habitans feront tenus de repréfenter
aux Employés des Fermes quand ils en feront requis & interpellés de leur part ; Et de même flâte ,fait inhibitions & dé[enfes aux habitans de la Communauté de Simiane, & à tous
ceux qui! font limitrophes des pays étrangers ou réputés tels,
de porter leurs denrées & marchandifes jùr les limites pour y
en faire les entrep6ts & amas, & les y cacher , vendre &
débiter fous aucun prétexte; & audit cas ordonne que les pajJèa1JanS ou certificats qu'ils pourront avoir rapportés ,feront nuls
e c.
�'-oz;
Jou RNA L'
& fans effet, le tout en conformité des Arrêts du Confeil des
13 Mai 1723, & 13 Mars 172), Ordonnances, Ediu', &c.
L'Adjudicataire n'eut garde de mettre cet Arrêt à exécution; ce ne fut que dix ans après cette époque, & en
1767 qu'il fit des tentatives pour s'en prév.aloir dans des
circonfiances qui parurent favorifer fon projet. L'adminiftration de la Province en étal}t infiruite, il fut déterminé
dans une afTemblée particuliere du 2 Juillet 1767 , de confuiter fur les voies que le Pays devoit prendre contre ce
Réglement. La Confultation qui fut rapportée le 20 Août
fuivaot, porta de fe pourvoir par la voie de la tierce 01'1'0fition, ce qui fut effeél:ué par la Requête du 28 Juillet 1768.
L'inftance fut liée, le procès pourfuivi jufqu'en 1771. Le
1er. Avril 1776 le Fermier fit faire une faifie dans le lieu
de Solliers de 90 quintaux de café des HIes, & de 80 quintaux de coron filé.
Jourdan, propriétaire de ces marchandifes , fe pourvut en
cafTation dt: cette faifie pardevant le Maitre des Ports de
Toulon; il fou tint qu'il n'érait point en contravention;
qu'il avoit acheté ces rnarchandifes en 177') à la Foire franche de St. Maximin; qu'il s'était muni d'un pafTe-avant des
Confuls , en vertu duquel il avoit fait rouler ces Marchandifes de St. Maximin à Hieres, & d'Hieres à Solliers où
elles avoient été failles.
•
L'Adjudicataire répondit que les marchandifes faînes avoient
été verfées en contrebande dans la nuit du 3 l Mars 1776 fur
la plage d'Hieres, à Gapeau; il ajoura que quand même il
feroit vrai que ces marchandifes eufTent été achetées à St.
Maximin en 177) , Jourdan n'auroit pas moins été en contravention , parce qu'il avoit fait circuler ces marchandifes
dans les quatre lieues limitrophes du pays étranger, fans
être muni d'un acquit à caution, fuivant l'Arrêt de Reglement du 7 Juin 17)2.
Le Maître des Porcs de Toulon, par fa Sentence du 7
Août 1776, cafTa la faifie ; l'Adjudicataire appella pardevant
la Cour des Aides.
'
. Les Procureurs du pays intervinrent, & foutinrent, 1°.
�D U
PAL AIS
D E
'16)
PRO VEN C E:
que l'Ordonnance de 1687 n'a été faite que pour les Provinces foumifes aux cinq groffes Fermes. 2.°. Qu'elle n'a jamais été exécutée en Provence, avec d'autant plus de rai(on,
que les titres particuliers & la fituation de cette Province
ne permettent pas qu'on l'y exécute. 3°. Que cette Ordonnance- n'a point été enregi!l:rée en Provence, & qu'elle ne
peur point y avoir caraél:ere de loi publique.
L'article 3 du titre premier déclare les ~rovinces de Normandie , Picardie, Champagne, Bourgogne, Breffe, Bourbannais, Berry, Poitou & le pays d'Aunis, d'Anjou &
le Maine, enfemble les Provinces qui y font renfermées,
de l'étendue de la Ferme du Roi, & les autres Provinces
du Royaume, font réputées étrangeres en ce qui concerne
les droits de fortie & d'entrée, jufqu'à cd qu'alltrement foit
dit & ordonné.
Les art. 1 , 1) & 16 du tit•. 6 , veulent que- les Marchands ou Voituriers qui feront (ortir des marchandifes de'
l'étendue de la Ferme pour y rentrer, fait par mer, fait par
. terre, foient tenus de les paflèr au Bureau, ou de faire une
déclaration conformément à l'art. 3 du tit•. 2. , fous les mêmes
peines.....; que les Marchands, Voituriers, Rouliers, Mfffagers ,& tous autres qui ameneront des marchandifes dll
dedans de la Ferme, & qui les feront paffer dans les quarre
lieues proche des limites, feront tenus de faire leurs déclarations au Bureau du lien d'où ils partiront, s'il y a Bureau, finon au premier Bureau de leur route, & d'y prendre
des acquits à 'caution, encore que les marchandi!es foient
de!l:inées pour le dedans de la F'erme. Suivant l'article 16,.
ceux qui enleveront des marchandifes dans les quatre lieues,
feront tenus, aufIi fous les mêmes peines, de faire lellr
déclaration au Bureau du lieu d'oll ils partiront, s'il y a
Bureau, finon au plus prochaiu Bureau , & d'y prendre pareillement des acquits à caution, foit que les marchandifes
foient defiinécs pour les quatre lieues ou pour entrer plus.
avant dans les pays fournis à la Ferme.
Ces articles ne [oumettent à des déclarations & à des:
acquits à caution que ceux qui apporteront des rnarchandifcs..
Cc
2.
�<
, 2.04
Jou RNA L
du dedans de la Ferme, dans les quatre lieues des limites,
& ceux qui en enleverone dans les quatre lieues pour les
faire entrer plus avant dans la Ferme. Il dl: évident que fi
le Légifiateur avait voulu fou mettre aux mêmes regles les
Provinces réputées étrangeres, il n'auroit pas limité [on
Ordonnance aux tranfports faits dans l'étendue de la Ferme
& aux quatre lieues frontieres.
Depuis les tarifs de 1664 & 1667 qui ont été inconnus
en Provence, les denrées & les marchandifes ont circulé
dans le pays, foit dans les quatre lieues limitrophes, foit
dans l'ineérieur avec une entiere liberté. Les Adjudicataires
ne conçurent pas l'idée d'établir en Provence la moindre des
formalités pre[crites par l'Ordonnance de 1687' Ce point de
fait ell: notoire; il ell: d'ailleurs établi, 1°. pat un Arrêt
de la Cour du 7 Mai 1688 ineervenu entre la Province &
le fieur Bos, Maltre des Ports, qUI maintint les Confuls
d'Aix & les autres Confuls de la Province dans le droit de
faire & délivrer des certificats & paITe-ports des denrées &
marchandifes du crû de la Province, qui ferone portées de
terre à terre & de lieu en lieu dans le pays, même en la
ville de Marfeille, fans en fortir; fit défenfes au Maitre
des Ports d'expédier pareils certificats, & lui permit feulement de les expédier' pour le tranfport des marchandifes
& denrées qui ferone portées à l'Etranger
2°. Par un Arrêt du Confeil du 8 Janvier 171') , qui con·
firme pareillement les Confuis d'Aix dans la faculté de délivrer des certificats pour le tranfport dans l'intérieur de la
Province, des marchand ifes du crû & des Fabriques de la
Ville & fan terroir, même des marchandifes étrangeres
qui feront enlevées de ladite Ville, & dont les droits auront
été acquittés.
, 3°. Par un autre Arrêt du Confeil du 'Î du même mois
de Janvier 17 1') , qui ordonne que touS Muletiers & Voi.
turiers portant des huiles de cerre Province dans les autres du Royaume ou aux pays étrangers, feront tenus de
prendre des acquits à caution des Commis du 'Fermier , dans
les B,ureaux des lieux où ils les auror:t chargés, s'il y en lf
�DU
PALAIS·
DE
Pll.OVENCE
;la')
d'établis; finon au plus prochain de leur toute, portant prome1fe de rapporter des certificats au dos du paiement des
droits dans les Bureaux du lieu de la defiination des huiles,
pour celles defiinées pour les autres Provinces & au dernier
Bureau de Cortie du Royaumepour celles allant aux pays étrangers, leCquels acquits à caution les Muletiers & Voituriers Ceront tenus de repréCenccr dans les Bureaux de leur route pour
y être viCés par les Commis.
,
Cet Arrêt dl: la premiere loi publique en Provence qui
ait établi la gêne des acquits à caution pour les tranCports
qui feront faits fur les frontieres de la Province; c'efi une
loi Cpéciale pour les huiles.
La preuve que l'Ordonnance de 1687 n'étoit point en
vigueur en Provence pour les acquits à caution & aurres
gênes dans les quatre lieues frontieres, Ce tire de l'Arrêt
de 171'), que l'Adjudicataire fut obligé de Colliciter au
ConCeil.
.
4°, Les Arrêts du ConCeil des 3 Mai 17 2 3 & 13 Mars
172') , revêtus de Lettres-patentes, fourniffent les mêmes induél:ions. Par le premier, Sa Majefié ordonne que l'article 7
du titre 9 de l'Ordonnance de 1687, portant défenCes d'établir aucuns magafins ou entrepôts dans les fronrieres, fera
exécuté dans l'étendue du territoire de MarCeille. Par le fecond, la même chaCe eft ordonnée pour le territoire d'Aubagne, & autres lieux voifins des Bureaux !itués aux environs
de MarCeille.
') 0. Par les Lettres-patenteS du 17 Oél:obre 1724, Sa Majefié ordonne que l'article 2. du titre premier de l'Ordonnance de 1687 Cera exécuté dans les Bureaux du Lyonnois,.
Dauphiné, Provence & Languedoc, & qu'en conCéquence
11 ne fera fait à l'avenir aucune déduél:ion des caiffes,
tonnèaux & ferpillieres. Si cet article n'a dû être exécuté
que pour l'avenir en Provence, il n'y éroit pas en vigueur
auparavant.
11 efi donc certain, prouvé & démontré que l'Ordonnance
de 1687 n'a pas été faite. pour la Provence, qu'elle n'y a
jamai~ été exécutée) qu'e1!~ n'y' cft poi~t appli:ab!e) '"s
�~06
Jou Ii N
Â
i
l'on peut dire qu'il feroit impoffible de l'y exécuter.
La Provence dl: très-refferrée dans fan enceinte; elle eft
bornée par-tout par les pays étrangers, ou réputés tels; c'ef!:.à-dire, par la mer, le Languedoc, le long du Rhône, le
Comté Vénaiffin, le Dauphiné, la Savoie, le Piémont, le
Comté de Nice, & Marfeille même, ; de forte que fi la regle
des quarre lieues fronrieres étoit établie en Provence, à peine
auroit-on un efpace de dix à douze li~ues dans le fein de
fan pays pour y faire circuler librement les denrées & mar·
chandifes: plus des trois quarts de la Province feroient entourés .des filets que l'Adjudicataire voudroit tendre dans
toute fa circonférence, & feroient fournis aux impôts qu'il
voudrait établir fur les citoyens; prefque de par-tout on tou·
cheroit aux quahe lieues frontieres. Il ne pourroit être tranfporré d'un lieu à un autre, du dedans comme du dehors de
la Province, aucunes denrées ni marchandifes foumifes aux
droits, Jans en avoir fait la déclaration à u'n Bureau de, la
Ferme qu'il faudroit fouvent aller chercher bien loin, fans s'être
muni d'un acquit à caution & l'avoir pareillement payé, fans
rapporrer le certificat de defcente & l'avoir payé. En un mot,
fans avoir fait toutes les foumiffions & rempli toutes les
formalités oppreffives que l'Arrêt de 17)2 impofe, en ordonnant l'exécution de l'Ordonnance de 1687'
C'efl: une maxime cerraine qu'une loi ne peut avoir dans
la Provin,ce un caraél:ere d'authenticité & de publicité, qu'elle
n'ait été vérifiée & enrégifl:rée par les Cours Souveraines dans
le reffort defquelles on veut la faire exécuter; c'eil: cet enrégifl:rement & la publication qui s'enfuit qui fait connoître
la loi au citoyen, & qui lui donne fa perfeél:ion & fa vi·
gueur. Delà vient que l'Ordonnance de Louis XIII de 1629;
qui difpofe fur une infinité d'objets importans, n'a jamais été
exécutée en Provence, parce qu'elle n'y a point été enrégiHrée j il en eU: de même de l'Ordonnance de 1747 au fujet
des fubfl:ituriol1s.
Cette maxime d'Etat ef!: encore plus facrée en Provence
que par-tout ailleurs, lorfqu'il s'agit d'un Edit burfal ; en pa-xcii cas il ne fuffit même pas que le~ n9uvelles loix émanées.
�On u
PAL AIS
D E
PRO VEN C E.
'101
'du Souverain foient enrégifirées par les Cours Souveraines
pour y être exécutoires; fUlvant notre confiirution, nul impôt
ne peut être établi & levé dans le pays fans le confentement
libre des Etats. ( Statut du 8 Novembre 1480, rapporté dans
le nouveau çommentaire, tom. 2., pag 390. )
L'Adjudicataire des Fermes répondait que les loix qui concernent l'Ftat ne font qu'une; qu'elles font indivifibles. Le
régime, la police du commerce font les mêmes dans tout
le Royaume; les regles, les formalités à remplir ne peuvent être différentes d'une Province à l'autre.
L'Ordonnance de 1687 ne déroge point aux prérogatives
qu'om les Confuls d'Aix de délivrer des certificats pour les
marchandifes du crû & fabriques d'Aix, en rempliifant les
formalités qu'elle prefcrit à l'égard des étrangers, & l'Arrêt
du 8 Janvier 171) ne déroge pas à l'Ordonnance de 1687,
ni aux Réglemens qui l'ont précédée & fuivie. Les droits
fur les huiles font des droits particuliers, abfolument étrangers à ceux des Fermes & qui n'ont rien de commun avec
la circulation des marchandifes dans les quatre lieues frontieres de l'Etranger; d'ailleurs cet Arrêt a été rendu à la
requête des Procureurs du pays, & il contient des formalités
qu'ils ont demandées eux-mêmes.
L'Ordonnance de 1687 contient quatorze titres, dont
douze fom exécutés & ont toujours été exécutés en Provence:
l'Ordonnance de 1687 n'a jamais été adreifée à la Cour; mais
elle n'a pas moins été publiée par le Parlement de Paris &
toutes les Cours Supérieures de cette Capitale j quoiqu'elle
n'ait pas été enrégifirée par la Cour des Aides de Provence,
elle ne l'a pas moins adoptée par les enrégifiremens des Edits,
Déclarations, Arrêts & Lettres-patentes promulguées de fon
autorité, & qui portent fur l'exécution de quelques articles
ùe cette Ordonnance; par les enregifiremens de touS les baux
& Arrêts de prife de poifeffion rendus depuis: elle y a acquis par-là le caraél:ere de publicité, & la plénitude de l'auttorité ; elle a également acquis force de loi par un Arrêt du
1696 , & un femblable du 13
,Confeil du 18 Décembre
,
�1.08
JOURNAi
AOtlt 1772. , imprimés & affichés de l'autorité de M. l'Inten~
dant.
Fn établilfant en Provence les .acquits à caution pour les
quatre lieues frantieres, on y établit une loi de police généraIe, fàns laquelle la régie des Fermes ne pourrait être faite
dans le pays, n'yen ayant point d'autre qui puilfe régir cette
matiere. il ne s'agit pas ici d'une loi burfale qui puilfe impofer aucune furcharge aux citoyens; cette loi ne s'applique
pas à toutes lèS..JCClurienis du pays; les citoyens ne pourraient rencontrer des difficultés qu'autant qu'ils voudraient
tranfporter leurs denrées & marchandifes aux pays étrangers
:ficns fe fou mettre aux formalités prefcrites par les Ordonnances , & à la police qu'ellcs prefcrivent.
L'Adjudicataire convenait que les acquits à caution ne
feront' pas nécelfaires pour la circulation des denrées &
marchandifes dans les quatre lieues frantieres du Comtat,
du Languedoc & du Dauphiné, parce qu'il n'eH: dû aucun
droit de ce qui va de Provence en Languedoc & au Comtat,
& qu'il n'cfl dù que des droits locaux de ce qui va de Provence en Dauphiné; il promettoit de n'exiger les acquits à
caution que pour les [rontieres du Piémont" du Comté de
Nice & des bords de la mer.
Par Arrêt du 1) Juin 1779 , au Rapport de M. le Confeillar de Fulconis, la Cour des Aides [aifant droit fUI: toutes
les fins & conclulions des parties au bénéfice de la tierce
oppolition formée par les Pmcureurs des Gens des trois
Etats du pays de Provence, révoqua l'Arrêt du 7 Juin 17)2.,
fit défenfes à l'Adjudicataire GénéraL des Ferrhes & à tous
autres qu'il appartiendrait, de mettre cet Arrêt à exécution
à peine de dix mille livres d'amende, de nullité des procédures, de tous dépens, dommages & intérêts, & d'en être
informé; confirma la Sentence du Maître des Ports, condamna l'Adjudicataire aux dépens envers toutes les parties,
& ordonna l'imprelIion & l'affiche de l'Arrêt;. écrivants Mes.
rochet & Leclerc.L
,- .-
ARRElj
1
�DU
PALAIS
DE
ARRÈT
PROVENC-Il:
~:o~
x X IV.
Le premier aêle paffé entre cohéritiers à raifon de la fucceffion;
- eji le feul qui [oit regardé com-me ac7e de partage, & la
tranfaaion paffée fur ce premier aêle n'efl point jujettè à
refcifion pour cauft de léJion.
On Ile peut obtenir des fecondes lettres de refcifion pour le mlme
fait, & entre mêmes parties, quoiqu'il s'agijJe d'un 1l0uyeall_
contrat.
P'
A R contrat de mariage de Jean-Louis Coulomb du 6
, Janvier 1738, Noé Coulomb [on aïeul l'inftitua un de
[es héri tiers, pour partager [on héritage avec There[e Cou~
10mb [a tante.
En 1740 l'aïeul mourut, & Françoife Pons [a veuve fit
[on te!1:ament le 28 Novembre 1742; elle ordonna le partage de [es biens. entre {.1 fille & -[on petit-fils, & leur affigna à chacun divers effets) [auf à eux de faire après [a mort
le partage du [urplus.
Le 14 Mai 1746 la tante & le neveu pa!ferent un aae
de partage de la mai[on délaiffée par Françoi[e Pons: il fut
dit qu'il avait été paffé un précédent partage riere Me. Garnier,
Notaire, & la tante déclara quitter [on neveu de toutes les
prétentions qu'elle pouvoit avoir [ur les [ucceffiol1s de [es
pere & mere.
Cinq ans après There[e Coulomb prétendant que cette.
déclaration lui avait été [urpri[e, & qu'il n'y avoit jamais eu
de partage pardevanr Me. Garnier, demanda pardevant le
Juge de St. Zacharie [a portion des biens des hoiries de Noé
Coulomb & de Françoi[e Pons, autres que ceux qui avoient
été partagés, & prir dans le cours de l'inftance des lettres
de reHitution envers l'aae. La Sentence qui intetvint or.
donna le partage; dIe fut confirmée par Arrêt du 1'4 Avril
1. .,60, qui ordonn" au. furplus _qu~ les panies recotUbleroien~
Lf-
-
-
~-
_ .•
-
Dd
�"'10
figllr~tivement la
JOURNAL
valeur efl:edive à i'époque de 1746, des
portions qui leur étaient obvenues de la maifon héréditaire,
attendu qu'elles l'avoient aliénée; enfuite, & par tranfaél:ion
du 12 Novembre 1763 , tout ce qui pouvoit encore revenir
à Jean-François-Barthelemi , fils & héritier de Therefe Cou10mb, fur les fllccefIions de Noé Coulomb & de Françoife
Ports, fôt fixé à 396 liv.
Barthelemi fe croyant encore léfé fe pourvut contre cet
aél:e par voie de refcifion, & obtint un Arrêt le 22 Mars
1771, porrant qu'avant dire droit il feroit procédé par Experts à l'efrimation des biens partagés.
Le 23 Janvier 1773, nouvelle tranfaél:io'n où Coulomb
défempara à Barthelemi pour 900 liv. d'immeubles; ils
renoncerent refpeél:ivement à taus plus grands droits.
Coulomb exploitait alors une bafiide appartenante à JeanBaptifre Concordan , Bourgeois de la ville de St. Maximin;
il était en arrérages; Concordan le mit en caufe; il. obtint
diverfes adjudications. & fit faifir tous les biens du débiteur.
Barthelemi réclama ceux qui lui avoient éré défemparés par
la tranfaél:ion de 1773 , dont il avoit oublié de fe, charger
fur le cadafrre, & Concordan confentit à la main levée.
Dans le même temps Barthelemi demandoit à la Cour
la refcifion de la tranfaél:ion de 1773, fur le fondement du
bloc & de la léfion.
Concordan en. fut informé; il intervint au procès pour
faire déclarer Barthelemi non-recevable.
Cel;ü-ci oppofa lui-même une fin de non-recevoir 11. Concordan, fur le fondement qu'il n'étoit pas partie dans
l'aél:e de 1773. Concordan lui répondit que quoiqu'il n'y eût
pas fiipulé, il était inréreffé à le faire maintenir, n'étant
pas jufie 'qu'il fût la viél:ime d'un complot de famille qui
pourrait lui ravir les moyens de fe payer fur les biens de
fan débiteur.
.
Il propofa deux moyens pour faire déclarer Barthelemi
non-recevable dans fa demande.
Il). L'aél:e de 177.3 était une véritable tranfaél:ion fur procès,
&. d'aprè~ !,q~d?~nauce , un p,!reil aél:e p.aifé ent:e majeUfij
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
211
peut être refcindé, même pour léfion d'outre- - moitié.
Barthelemi convenoit du principe, mais il foutenoit que les
acres de partage font toujours refcindahles pour caufe de
léfion ,.1orfqu'ils n'ont pas été faits fuivant les regles & aux
formes de droit, & il fondoit la nullité fur le défaut d'dE.
mation & de détail, puifque la fixatÏon de fes droits avoit
été faite en bloc.
Concordan repliquoit que véritablement, fuivant notre
Jurifprudence, le premier acre paifé entre cohéritiers, quelque nom qu'on lui donne, n'eH jamais regardé que comme
un acre de partage fujet à refcifion pour léfion du tiers au
quart; mais que dans le cas préfent il n'étoit pas queftiond'un premier acre, mais d'un rroifieme intervenu fur procès
après un Arrêt interloc moire; que c'étoit-Ià une véritable.
tran[acrion qui ne pouvoit plus être refcindée " même 'pour
lélion d'outre-mo~tié, comme le remarquoient le nouveau Com-'
mentateur de nos Statuts" T:. r, pag_ 243, na.. '4; Lebrun
dans fon Traité des 5.ucceffions, L •. 4, ch.. l , na. ')6, &
Carelan, L . .,-, ch•. T';; il. aJoutOlt fur. la nullité, que ce
moyen n'efl: pas admis dans la bouche d'un majeur qui ef!:
toujours cenfé êrr.e infhuit de fes dr.oits" qlland il tranfige
fur une injuftice dont il fe plaint•.
Concordan puifoit fa feconde fin dè non recevoir dans la
regle qui ne veut pas qu'on fupplie deux fois le Prince pOUl'
le même fait. Barthelemi répond oit que la regle invoquée
par Concordan ne prouvoit autre chofe , finon qu'il ne doit
pas être permis de revenir deux fois contre un feul & même
aék
On lui repliquoit que quoique les Loix qui font fous le
titre dn Cod. de precib. imperat. ofJer., & fous cet alltre ,
Si fœpius in illteg. reflit. poflul., décident ce cas, on n'en
jugeoit pas moins d'après ces Loix, que la voie de la reftitution n'eft pas ouverte, quoiqu'il s'agiife d'un nouveau
conrrar, lorfqu'il cf!: intervenu pour la même caufe & entre
les mêmes parties, ainfi que l'artefl:e Julien en fes Collec-·
tions manufcrites, Va. ReJlitutio, litt. 0 , 011 il dénie la
Dd2
'ne
�1
l.ti'
TOURNA!.
rell:itution pro eddem re, & qu'il a été jugé par l' Arrêt in~
tervenu entre les Freres Brun du lieu de Rians.
Par Arrêt du 17 Juin t779, au Rapport de M. le Con..;
feiller de Beauval, Barthe1emi fut déclaré non-recevable en
fa demande en refcilion.
,:
ARRÉT
..
;
x XV.
Le mari quoiqu'infolvable peut exiger les dettes de là femme;
mariée fous une conflitution générale, fans donner cautioTlf.
Le fonds dotal peut être aliéné en cas de néceffité ou d'utilité éviden te pour la femme.
.
VTIENNE Gir'aud, Marchand fabricant de fucre de la
~ville de Marfeille , époufa en 1740 Dlle. Claire Sauteron
fous une conflitution générale. Après la mort de fon pere
elle recueillit, conjointemeut av~c Therefe Sauteron fa fœur ,
une maifon fituée à la porte d'Aix.
Ces deux fœurs jouirent de cette maifon du vivant même
de leur pere, qui étant tombé en caducité leur avoit laiffé
l'adminiH:ration de fes biens i. elles avoient reconnu l'inconvénient de la co-propriété, & dans l'aéle paffé en 1747
elles déclarent la difficulté & les défavantages de la divilion;
& fe déterminent à la vendre du confentement de Giraud;
la Dlle. Therefe Sauteron, époufe de Maillet, en fit l'acquifition pour le prix de 16000 Ev. & il fut fait des indications
aux créanciers de Giraud pour la portion qui revenoit à fon
époufe, à la charge par eux de la fubroger à leurs droits lors
des paiemens qui leur feroient faits.
.
En 1766 la Dlle. Maillet vendit cette maifon à Mre. Fran..;
liois Ollivier, Prévôt de l'Eglife Collégiale de St. Martin
pour le prix de 20000 liv., donc 4000 liv. furent indiquée.s
à q\lelques créanciers, 10000 liv. à fonds perdu, & 6000
livres payables dans dix ans.
�D U
PAL
AIS
DE
PRO VEN C E:
213
La DUe. Maillet mourut ab int~fiat le premier Novembre
'1777' La Dlle. Claire Sauteron fa fœur fut fon héritiere.
Giraud, en qualité de mari & maître, de la dot & droits de
fon époufe, demanda le paiement de fix mille livres échues;
Mre. Ollivier refufa de payer, & fur ce refus Giraud fe
pourvut au Lieutenant de Marfeille par requête du 22 du
même mois; Mre. Ollivier oppofa que Giraud n'avoit pas la
qualité pour recevoir, que le dérangement de fes affaires
ne lui permettoit de payer qu'en lui indiquant un paiement
sûr & folvable.
Le proéès s'engagea pardevant le Lieutenant, & Giraud
confentit enfuite à compromett!e à des Arbitres. La Sentence
arbitrale qui intervint le 9 Février 1778 mit Mre. Ollivier
hors de Cour & de procès avec dépens fur la demande de
Giraud.
Giraud appella de Cette Sentence pardevant la Cour &'
prit des conclufions fubfidiaires , portant que là où la Cour
rejetteroit les fi:ls de fa demande, attendu la crainte de
l'éviébon fondée fur la nullité de l'aéte de licitation de 1747
& de celui d'acquifition de- 1766, les aétes fuffent déclaré!>
nuls, & comme tels calTés, fous l'offre de rembourfer à Mre.
Ollivier toutes les fommes par lui payées à la décharge de la
maifon. Suivant lui, il eil: de maxime conil:ante que le mari
a pendant le mariage la libre adminiltration de la dot de fa
femme, maritus confiante matrimonio rei dotalis efi DomùlUS ;
il eil: également certain qu'il peut' à ce titre pourfuivre le recouvrement des dettes aétives qui ont fàit partie de la conftitution dotale; ce principe eil: atteil:é par tous les Auteurs
& par un aéte de notoriété des Syndics des Avocats, qui
porte " que lorfque la femme majeure, dans fon contrat de
" mariage, s'eil: conil:ituée en dot tous fes biens préfens &
" à venir, le mari eil: reçu à pourfuivre le recouvrement des
" dett~s dues à fa femme en juil:ifiant de fon contrat de
" manage. "
Lacombe dans fon Recueil de J urifprudence civile, fea.
3' verb. dot, obferve " que le mari eil: maltre de la dot penl' dant le mariage; il a le dro~t de l'exiger du débiteur oq
�~I'l-
"
"
"
"
JOURNÂt
de celui qui l'a conftituée. II ajoute enfuite que la dot
payée au mari infolvable , eft à la perte de la femme, quoi.
que le mari foit mineur, fans que la femme pui!fe être re[tituée fous ce prétexte. "
L'Annotateur des aéèes de notoriété de Mrs. les Gens du
Roi ( pag. 12. du Recueil) examine la quefiion de favoir fi
le débiteur d'une dette dotale peut pre[crire contre la femme;
il décide pour l'affirmative j mais il obferve que cette erpecc
de libération n'eft que conditionnelle; & que dans le cas
d'iofolvabilité de la part du mari, la femme peur revenir
contre le débiteur, à la différence du paiement effeéèif qui
lui interdit toute efpece de recours contre ce même débiteur.
C'eft [ur ces principes qll'il a été jugé par un Arrét
rapporté par Boniface, tom l, pag. 381, que le mari pouvoit exiger un capital à penfion perpétuelle, conftitué en dot
à ra femme, [ans être obligé à dODner caution. Expilly;
Plaidoyer 2., rapporte un pareil Arrêt.
La difficulté que Mre. Ollivier avoir élevée pardevant les
Arbirres confiftoit à favoir fi le' mari pouvoit aliéner le fonds
dotal confiante matrimania , & fi la licitation qui a été faite
d'une mai[on, dont une partie a été conftiruée en. dot à la
Dlle. Sauteron ne devoit point être regardée comme une vraie
aliénation prohibée par la loi Julia , de fundo dO/a li , &
contre laquelle la femme pou\\oit réclamer dans la fuit~.
On doit convenir qu'en rcgle générare l'aliénation du fonds
dotal eH prohibée j le mari qui a vendu peut lui-même revenir contre fon pwpre fait, ll;lais cela s'entend d'une aliénation qui n'a poim de caure néce!fairc ou utile à la femme,
& l'on n'a jamais révoqué en. doute que le mari ne fÎlt
autori[é à vendre le fonds dotal pour payer les dettes dont
il étoit chargé avant le mariage; c'cft moins une· aliénationde fa part qu'u.n aéèe de bonne adminifhation. II faut dire
la même chofe de la vente du fonds dotal. qui eft poifédé
en commun par des tierces perfonnes, & qui dl: vendu par
licitation. Le mari n'eH point le maître de faire [ubfifier la
l;ommunion ; c'eft auffi {Jarce que la loi le [uppo[e de même..
�D U
PAL AIS
DE' PRO VEN C E.
2.
r~
qu'elle n'en prohibe pas l'aliénation, elle décide feulemen:
que le prix qui en revient à la femme pour la portion qUi
qui lui compete, eft regardé comme dotal: Ji fundus communis, dit la loi 78, §. 4, ff. de jure dotium , in dotem datus
erir & facius egerir cum marira, communi dividundo, adjudicatufque fundus fado fuerir, in dote erir quanriras qud '[ocius
mariro damnatus fuerit aut prœtii portio quœ dijlraéla ejl.
Serres dans fes In{l:itutions au drait Franliois, livre'2, tit.
8, pag. 192, aprl:s avoir examiné les divers cas où le fonds
dotal peut être aliéné, ohferve fur cette loi " que le fonds
" baillé ~n dot, qui fe trouve indivis avec des tierces per" fonnes, peut être également vendu & licité, s'il n'dl: pas
" partageable; en forte que fi par la licitation le fonds échoit
" & ef!: adjugé à un autre qu'au mari, la dot ne confifte
" alors qu'au prix ou à la fomme d'argent que le mari re" liait pour la portion que fa femme avait furIe fonds; &
" c'efi-là une de ces aliénations nécelfaires & involontaires
" qui ne font point prohibées par les, loix. "
Ainli quand on devrait regarder la licitation comme une
vraie aliénation du fonds dotal, elle ne ferait pas moins
~lable; on convient que lorfque la divifion d'un fonds paffédé en commun peut être faite fans le déprécier, il n'ef!:
point alors nécelfaire de le vendre; mais il n'était pas poffible de partager la maifon dont s'agit fans la· déprécier confidérablement; il n'était point néceffaire d'en faire conf!:er
par un rapport, parce qu'à Marfeille une maifon n'ef!: point
un effet dont la divifion puilfe. être avantageufe aux copropriétaires.
Il ef!: vrai que le mari ne peut point provoquer un par.
tage; mais cette exception, qui pourrait être propofée par
le communifte contre lequel ce partage ferait demandé, n'cfl:
point une confidération pour faire regarder la licitation ou la
vente du fonds dotal comme nulle, dès que le co-propriétaire
ya confenri, & qu'il y a même à préfumer que le fieur Giraud a été lui-même provoqué à la licitation de l'immeuble
polfédé en commun, ou du moins qu'elle a eu lieu du con~
fentemen~ de~ de~x proprié~air~s.
�'ù6
Jou R
N À
~
Mre. Ollivier ne peut quereller l'aaede 1747, portant
vente de la mairon à la Dlle. Maillet, ni celui qui lui a été
palfé en 1766 par la DlIe. Maillet, parce qu'il n'ignorait pas
& ne pouvait ignorer qu'une partie de cette maifon était
dotale; & quand même ces aétes feraient nuls, il n'auroit
aucuns dommages & intérêts' à prétendre contre Giraud,
ainfi que l'attellent les Duperier, tom. 1 de fes Œuvres, pag.
'p), & M. de Bezieux dans fes Arrêts, pag. 370 , & que
la Cour l'a jugé par fan Arrêt du 2.2. Juin 1764, au rapport
de M. de Gras en faveur de Jofeph Breton qui avait veQ,du
des propriétés dotales à la Dlle. Bernard fan époufe.
Mre. Ollivier répondit qu'il ne pouvait être forcé de payer
à Giraud les 6000 liv. portées par l'aéte d'acquifition, attendu fan infolvabilité notoire; & que quand même il pourrait l'être, l'aae de licitation de 1747 & celui de vente'
palfée à la Dlle. Maillet fe trouvant nuls ,. la caufe qui donne
lieu au paiement des 6000 livres ne fubuilerait plus.
Perfonne n'ignOl:e que l'aliénation du fonds dotal el!: prohibée rar le droit; la licitation faite par l'aéte de 1747 étant
une véritable aliénation, le paiemenr que Mre. Ollivier ferait
à Giraud du prix de [on acquiution ferait mal fait; le mari
peut bien exiger les dettes dotales de fan époufe, mais il
ne s'agit point ici d'une dette dotale, c'eil le prix de l'aliénation d'un fonds dotal qui n'a pu l'être, attendu que la
femme étoit mariée fous une conil:itution générale. Si cette
aliénation eil: nulle, il Y a crainte d't'viétion, & dès-lors les
paiemens ne font pas valablement faits; Mre. Ollivier a à
craindre de ne pas trouver taures fes [ûretés chez Giraud;
il lui faut une caution ou toute autre affurance. La licitation
dont s'agit n'a pu être faite que de l'autorité du. Juge; ce
défaut de formalité l'infeéte encore d'une fe.conde nullité;
d'ailleurs la licitation n'eil: permife que lorfque la chofe n'eil:
pas partageable.
.
Mre. Ollivier préfenta llne requête incidente le 14 Mai
J..779 , dans laquelle il conclut à ce que fans s'arrêter à la.
deman>ie de Giraud, tendante en calfation des aétes de lici,tation & de vente, il fut tpis hors de Cour & de procès.
.
~.
.
Arrêt
�1> A LAI S
E';
2. l 7
'Arrét du 17 Juin 1779, au rapport de M. le Confeilfer de
Thorame, qui condamne Mre. Ollivier au paiement de 6000 liv.
avec intéréts, & moyennant le paiement bien & valablement déchargé, déclare n'y avoir lieu de prononcer fur les
fins fubiidiaires refpeaivemeht prifes, maintient Mre. Ollivier dans fan acquifition, & le condamne à tous les dé.
pens; écrivants Mes. Roman Tributiis & Sellon.
D P'
D E
PRO VEN C
J
ARRÊT
XXVL
Le Vendeur du Cabal de Fabrique de Tuiles & de Briquer d
une préférence fur tous les effets qni Je troupent dans la Fa,
brique lors de la faillite du' débiteur ~
.
M
!
E. Pierre-Theodore Funel, Avocat en la Cour, faifoit
exploiter pour fan compte des Fabriques de ruiles &
briques lituées au quartier St. Suffren au Fauxbourg de Marfeille hors la porte de Rome. Le 8 Avril 1778 il vendit à
François Hyppolite Mille, Fabricant de ruiles, le cabal des
Fabriques, eompofé de divers articles; [woir, tuiles, briques, ruyaux, &c. Tous les articles furent inventoriés &
efl:imés à la fomme de 3742. liv. 1'Î f. Il fut ajouré au bas
de l'inventaire: Tous les effets & marchandife:r affec7és & hypothéqués en faveur de Me. Funel- jufqu'à [on entier paiement;
Mille fit li Me. Funel cinq billets à ordre payables dans cinq
termes diJférens & convenus.
Mille était encore débiteur de Me. Funel le 2.4 Août &
lorfqu'il remit fan bilan à la Jurifdiaion Confulaire. Me.
Funel , infiruit de cetre faillite, préienta au même Tribunal
une ReRuête , aux fins qu'il lui fût permis de faire faifir
confervatairement tous les effets & marchandifes compofant
le cabal qu'il avait vendu à Mille. Cette faific lui fut accor-;
,ciée , & fut faite le lendemain.
Far· une alltre requête du 7 Septembre Me. Funel demanda
. E e
:~
!
�1> A LAI S
E';
2. l 7
'Arrét du 17 Juin 1779, au rapport de M. le Confeilfer de
Thorame, qui condamne Mre. Ollivier au paiement de 6000 liv.
avec intéréts, & moyennant le paiement bien & valablement déchargé, déclare n'y avoir lieu de prononcer fur les
fins fubiidiaires refpeaivemeht prifes, maintient Mre. Ollivier dans fan acquifition, & le condamne à tous les dé.
pens; écrivants Mes. Roman Tributiis & Sellon.
D P'
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PRO VEN C
J
ARRÊT
XXVL
Le Vendeur du Cabal de Fabrique de Tuiles & de Briquer d
une préférence fur tous les effets qni Je troupent dans la Fa,
brique lors de la faillite du' débiteur ~
.
M
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E. Pierre-Theodore Funel, Avocat en la Cour, faifoit
exploiter pour fan compte des Fabriques de ruiles &
briques lituées au quartier St. Suffren au Fauxbourg de Marfeille hors la porte de Rome. Le 8 Avril 1778 il vendit à
François Hyppolite Mille, Fabricant de ruiles, le cabal des
Fabriques, eompofé de divers articles; [woir, tuiles, briques, ruyaux, &c. Tous les articles furent inventoriés &
efl:imés à la fomme de 3742. liv. 1'Î f. Il fut ajouré au bas
de l'inventaire: Tous les effets & marchandife:r affec7és & hypothéqués en faveur de Me. Funel- jufqu'à [on entier paiement;
Mille fit li Me. Funel cinq billets à ordre payables dans cinq
termes diJférens & convenus.
Mille était encore débiteur de Me. Funel le 2.4 Août &
lorfqu'il remit fan bilan à la Jurifdiaion Confulaire. Me.
Funel , infiruit de cetre faillite, préienta au même Tribunal
une ReRuête , aux fins qu'il lui fût permis de faire faifir
confervatairement tous les effets & marchandifes compofant
le cabal qu'il avait vendu à Mille. Cette faific lui fut accor-;
,ciée , & fut faite le lendemain.
Far· une alltre requête du 7 Septembre Me. Funel demanda
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a ~gi1atlon COntre, Mille, à l'effet qu'il fût condamné au
p:lle~ent de 3024 liv: qui rell:oient dues du prix du cllbal des
Fabnques, avec intérêts tels que de droit, dépens & <1ontrainte par. corps, & pour voir dire que Me. Funel ~feroit
payé préférablement à touS autres créanciers de Mille (ur Je
produit des effets & marchandifes formant le cabal des Fab'riques, & c:e tant par droit de fuite & réclal1}ation, que
par toute aùtre aalOn de privilege lui compétant en fa qua':
lité de vendeur des mêmes, effets; il demanda en même
tems l'affignatioti contre la maffe des créanciers de Mille
en la perfoune de deux d'iceu! , pour"affiHer , li bon leur
fembloit , en l'inll:ance , & voir adjuger les fins avec dépens
en leur propre en cas de contefl:ation.
"
Cette requête fut lignifiée li Mille & à la maffe des créanciers en la perfonne de deux d'entr'eux ; ces derlliers. ne
comparurent point, Mille défendit feuI:
"
Le 23 Oaobre Me. Funel préfenra une Requête incidente
contre Mille en condamnatIon de 100 liv. pour un mois de
loyer, avec le même privilege.
'
La caufe portée à l'Audience, les Juges-Confuls rendirent·
le 3 Novembre 1778 Sentence, par laquelle faifant droit au
premier chef de la Requête de Me. Pune! & à, [a Requête
.-incidente, Mille fut condamné, au paiet:J1enc"de la fomme
de 3024 liv. d)une p~rt, ~ de 100 liv. de l'autre, avec
intérêts, dépens & contrainre par corp.s , & au furplus- Me.
Funel fut déclaré privilégié & préférable à tou~ créanciers
pour les 100 liv. de la rente & acceffoires fur les eftèts &
marchandjres fajus à fa Requête j & avant dire droit au
fecond chef de la Requête principale de Me. Funel, il fut
ordonné que par Experts dont les parties conviendraient
daRs trois jours, autrement pris d'office, il f~roir fait rapport de vérification des marchagdires. & effets raius , lefquels Experts déclareraient ceux & celles qui exill:Clù & font
en nature des mêmes qui, avaient été vendus pat Me. Futlel
à Mille, en quoi ils confiitent & en feraient l'efiime; "'a
l',elfet de quoi ils feroient toutes les déclarations & obferva.,
/
•
�DU
PALAIS
21 9
DE fROVENel!.
tions requifes & néceifaires, ouiroient témoins & fapiteurs fi befoin étoit , dépens de ce chef réfervés.
Me. funel appella de cHte Senrence pardevant la Cour;
Mille préfenta une Requête en homologation de fon concordat, & par Arrêt du 10 Décembre la Cour en l'homologuant, en pronon~a l'exécution définitive contre les créan":'
ciers confentans ,& provifoire contre les réfraélaires. Cet'
Arrêt fut fignifié à Me. Funel', & le 12 celui ci préfenta une
Requête en révocation de l'Arrêt d'homologation, & provifoirement la fur[éance- à [on exécution. Il obtint le tout.
en état, la furféance fut ènfuite jointe du confentement des,
parcies au principal, le tout en état continué.
Pour le foutien de fon appel Me. Funel difoit que parm~;
les objets qui compofoient le -cabal, & qui avaient été faifis"
les uns 'avaient été inventoriés & étoiel1t dans le même état,
que lors de la vente; quant à ces ar..ricles, Mille convenait
que Me. funel avoit fur, €UJ(; un privilege exdufif ;, quant
aux autres , il faut obferver: que Mille n'a gllere travaillé,
dans la Fabrique que deux ou trois mois: depuis l'époque
de l'achat' jUfqll'à celle de [a faillite,_ Me. Funel lui,
avoit vendu. deux articles de 1llatiere ou terre glaife, dont
l'un fe monte à la fomme de 96 liv. , & l'autre à celle de
2')2 liv. 7: [,';' de. maniere qu'il faut confidérer ces objets
comme l-a même matiere exifiante' fous un nouveau mode
ou une autrl! modification. Le privilege quil réclame s'étend
non feulement fur ces derniers objets " mais' même [ur ceux.
qui pourraient ,exifier' aéluellement dans la Fabrique, tenant,
leur fubHance, leur exifience phyfiqu~ & leur entiere con.fiiturion du feul fait de Mille.
.
En éHet, quel eH l'objet que Me. Fune! a vendu à Mille?'
Un cabal de Fabrique de wiles & briques, c'eIt-à-dire)
unt> unive.rlaliré , corpus, jus llIliverfale , qui lors de la vente
a été expreifément affeélée & hypothéquée à Me. Funel juf.
qu'à [on entier paiement. Les pieces qui compofoient ce
cabalant pu être changées & reproduites. Le cabal li tOujours confervé [on identité. Le changement des pieces n'a
Point empêché que ce ne fût le même tout toujours llYpo~
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2.
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théqué ~. Me. Fune\. Les pietes en fe remplaçant ont été
fubrogées les unes aux autres, & Me. Funel a toujours eu
fon privilege fur l'uhiverfalité du cabal, parce qu'il a toujours été le même.
En· raifonnant par analogie, n'eil-il pas vrai que le ven.
deur d'uné maifon , nonobll:ant les change mens que pourra
y faire l'acheteu't' en faiCwt démolir ou bâtir, confervë toujours une hypotheque fur cette maifon jufqu'à ce 'qu'il foit
entiérehlent payé du prix? Si l'on vend un troupeau, & que
les brebis me'urent , l'hypotheque ell: toujours confervée fur
le troupeau renouvellé & qui remplace le premier. Le vendeur d'un étang conferve toujours fon privilege fur cet objet,.
quoique les poiffons fe reproduifent. Les capitaux en grains
pour les femences, fubrogés d'une année à'l'autre , ne con·
fervent-i1s .pas toujours la même nature, & celui q'ui les a
fournis n'ell:-il pas toujours préférable pGur fon paiement ?
Tous ces exemples font rapportés par Boniface, tom. 4 ,
pag. 'Î 24 & fuiv: Dans tous ces cas il 'Y a une reproduél:ion
dans les individus & un changement dans les objets; mais
ne font-ils pas fubrogés les uns aux autres pour conferver
l'hypotheque? Subrogatum [apit nawram [ubrogati.
Me. Funel ayant vendu un cabal de Fabrique., quoique
quelques pieces aient pu être remplacées par 'd'autres , le
cabal a ,toujours été le même, & l'Ulûverfalité de ce qu'il a
contenu a toujours été hypothéquée à Me. Fune! pour fon
paiement. La preuve que Me. Funel a vendu à Mille un tout,
corpus univer[ale, fe tire encore des réferves expreffes qui
font détaillées dans la ven'te. N~import'e que les articles aientété ell:imés féparément, Me. Funel ne doit pas moins être
payé préférablement à tout autre créancier.
Une foule d'Auteurs attell:ent cette maxime. Anfaldus;
·difc. 83 , n. 4, d'apr s la Loi dm tabernam, ff. de pigno ,
dit: in quo faneiwr merces in tabernam poftmodùm introdue1as
fubjeaas effè eidem vinculo pignorationis.
Cafaregis, fur le dirc. :<- [6 , ell: du même avis, & cite
plulieurs Auteurs qui ont enfeigné la même doéirine : Et
l5en~,,-aliter, 'iuod fubrosatio hune effec1um de jure femper ope";
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
221
retûr, quod res novœ fubrogatœ loco' antiquarum habeantur
pro iifdem relJus antiquis, docent manf. confidtat. 14) , n. )
&- 16 , & confultat. 14S, n. 37, & qllam plures alii citati
per tabell. in verb. fubrogatio , n. 4, (Rote Romaine, déc if.
1) , n. 7, part. 19, tom. 1.) Il cite plus bas ce' principe du
droit, ex quo docemur quod res in locum antiquœ filbrogata
afJumit naturam, conditiones & qualitates omnes quas habe~at ~ntiqua ; & ideà res /lova filbrogata , pro antiqua omninà
ln Jure reputatur•.
On peut voir Merlinus , de pignoribus, lib. 2, tir. l ;
quo 44, n. 27, qui dit: Cùm verius fit, res venales aut
merces dici corpus univerfale & lmiverfalitatem importare.
Ainli un créancier ou un vendeur qui a une hypotheque
fur une bçutique, trouve fur l'univerfalité des marchandifes
qu'elle renferme. une a1furance pour fan hypotheque.
. Defpeiffes, tom. :r , part. 2, tit. 3, fetr. 4, ne fauroit être
. plus favorable: Par la m~me raifon (dit-il )l'hypotheqlle d'une
bqutique n'eft pas éteinte de ce qu'après la conftitution de l'hypotheqae, le débiteur a vendu les marchandifes qui étaient pOlir
lors en la boutique & y en a mis d'autres; car l'hypotheq!/(:
Jùbfifte aux marcharidifes qui y ont eté mifes depuis, & qui
sy trouvent au temps du décès du débiteur. L. pén. in princip.
fE de pignoribus.
Bafnage dans fan Traité des Hypotheques , pag. 480 "
non feulement efr du même avis que Defpei1fes, mais il s'exprime préfque de la même maniere.
Vne fuire de Loix viennent à l'appui de cette maJ(ime. La
Loi ! 3, ff. de pignoribus & hypothecis , ne (aurait être plus.
précife. V n .troupeau étant hypothéqué, l'hypotheque pa1fe
fur les agneaux; & quand même il ferait tout renouvellé, ce
n.ouveau troupeau conferve par fubrogation la même qualité
'que l'ancien: grege pignori obligato, qliœ pofteà nafculltur,
tenentur, [et!. erfi prioribus capitibus decedentibus , totus grex
fuerit renovatus, pignori tenebitur.
. La Loi 76 proponebatur , Jf. de judiciis, renferme plufieurs
exemples tous analogues à cerre caufe. Nam & legionem
( dit':'elle ) eamdem haberi ex qua multi deceffiffint, quorum iA
�~~~
Jou RNA t
lOCllm alii fubjeai effint. Une -Légion d'où tOllt forcis plu...
fielJrs Soldats, remplacés par d'autres, ne celfe Eas d'être la
même Légion. Ainfi le cabal vendu, d'où ont été tirées pluneurs pieces de tuilerie remplacées par- d'autres, dl: encore
le même cabal: iremque navem, continue la loi, fi adeà [œpe
refec1a effet, ut nulla tabula eadem permaneret, quœ non nova
fuiflèt nihilomillus eamâem effè exijlimari. Titius vend un vaif{eau, il dl: radoubé rout de neuf: qui doute que Titius n'ait
fur ce vailfeau un privilege exclufif pour [on paiement?
Ajoutons la Loi 34, ff. de pignoribus & hypothecis: un
débiteur après avoir hypothéqué [a boutique à [on créancier,
vend les' marchandi[es qu'elle cont}ent, en achete .d'autres
qu'il place dans la boutique & meurt ; on demande fi le
créancier a une hypotheque [UF tout le contenu en la boutique, quoique les marchandi[es aient été changées, & qu'on
en ait apporté d'autres. L~ Loi répond que toutes les marchandi[es trouvées dans la boutique au te.mps de. la mort du
débiteur [ont hypothéquées au créancier..
Me. Fune\ convenoit cependant que s'iL exi'fioît dans lecabal quelques marchandi[es pa.rriculieres, d011t le prix n'eût
pas été payé au vendeur, & qu'il vint les réclamer par droit
de [uite, il ne pourroit s'oppo[er à c.ene réclamation. Mais
ce cas [cul. excepté, Me. Funet a un privilege exclufif
pour [on paiement [ur tout ce qüi. compo[e. le cabal. Il n'a
point vendu ,une marchandi[e- 'parriculiere, il a vendu un:
cabal de Fabrique' de tt:i1es & de briques, fus, corpus univerfale encore exiHant ,. nonob{l:anr le ch~ngement ou la différence de mode de quelques panies. Son hypotheque s'étend
fur cette univer[alité, & il. a [ur elle un privilege exclufif
ju[qu'à l'entier paiement.
Quant à la que{l:ion relative à la calTation du concordat &
~Ia révocation de l'Arrêt qui l'homogue, Me. Funel di[oit li
1°. que quoiqu'il eût une hypotheque & un privilege exclufif,.
il n'y était compris qu'au nombre des créanciers chirogra-:
phaires. 2°. La Sentence le déclare créancier de la fomme de
3124 liv., t~ndis qu'il ne fait monter [a créance qu'à 2993
liv. 3°. Les créanc:s de ceux qui 0!l} fign~ le ~o~cord~t ne;
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
22.3
s'élevent pas aux trois quarts des c"réances paffives de Mille,
calculant même d'après le bilan, il s'en faut de
903 liv. pour atteindre aux tl'Ois quarts; ce qui eft contraire
à l'art. 6 de l'Ordonnance de 1673, tit. des taillites. 4°. Les
créances d~ ceux qui ont figné le concordat font fimulées.
(. Il n'y a point eu d'a1Temblée des créanciers, & Me.
Fune!, quoiqu'un des principaux, fait par le montant de fa
creance, fait par fan privilege, n'a "jamais été appellé. Tous
ces moyens doivent opérer la ca1Tation d'un aae qui ne doit
fan exiftence qu'à la cupidité de Mille.
Mille répondait 'qu'une vente dl: parfaite quand les Parties font d'accord fur la chofe & fur le prix; il eft indifférent que le prix ait été payé ou que le vendeur fe foit contenté d,e la parole de l'acheteur. La chofe vendue ou délivrée change ainfi de maître; cependant l'on convient qu'en
cas de difcuffion, de faillite, le vendeur a un privilege, .une
préférence fur les .marchandifes vendues ft elles font encore
entre les mains de 'l'acheteur, & fi elles font en nature.
. Tous les Auteurs qui ont approfondi cette queftion la
'décident de même. Boutaric fur les Inftituts , lïv. 2, tit. 1,
§. 41 , pag. 1')9, après avoir parlé de l'hypotheque fpéciale
& privilégiee, appellée communément précaire, qui compete
au vendeur d'un immeuble, en cas de difcuffion de la part
de fan débiteur, s'exprime ainfi : cette JurifPrudence illtroduite d'abord pour la vente des immeubles, a été étendue dans
la fuite à la vente des chofes mobiliaires fous deux conditions
néanmoins ; la premiere , qu'elles foient entre les mains de
l'acheteur; car fi elles avoient changé de maître, on feroit dans .
le cas de cette maxime: ( meubles en France n'ont point de
fuite par hypotheque; ) la feconde, qu'elles [oient encore en
. nature; c'efl-à-dire,' que l'acheteur ne les ait pas m~lées &.
, confondues de maniere que la réparation ou la l'érification n'en
puifJe être faite qu'avec peine; il faut qu'elles [oient fous corde
& non dépliées: ità fenriunt ; d'Olive liv. 4, chap. la; Savary ,. tom. 1, ·pag. 623; & le Praticien des J ~ges-Confuls,
·pag. 4]2.
.
. -1. 11 dt d.o.n.c certain que la préférence ne campete plus a~
puif~u'.en
�'22.4
Jou
R N' A L
vendeur toutes les fois 'que' les lI1archandifes ont été vendues 'ou débamrées, ou confondues avec d'autres, de maniere que la vérification en foit difficile. Il y a fur ce point
une loi précife pour la ville de Marfeille-, c'eft la délibération
de la Chambre du Commerce de 1730, eHe n'accorde la
préférence que fur la marchan'dire extante & en nature.,
Les divers objets qui compofoient le cabal que Me. Fune!
'le dit à Mille exiftent-ils encore entre fes mains l Sont-il5
en nature ,? Sont-ils les mêtnes que les marchandifes que Me.
Fune! a fait faifir l'Parmi les objets énoncés dans l'inventaire fe trouvaient un cheval, des harnois, un tombereau, .
de 'la pâte, &c. Ces effets ont été vendu!!, ils ne peuvent plus donner lieu à une demande en ptéférence. Il fe
trouvait de la terre creurée & de la terre glaire, des vafes ,
des tuyaux, des tuiles, des mallons: rien n'exifte de tous ces
objets, Mille les a vendus depuis long-temps.
La préférence dépend néceifairemem du point de fait, fi
les marchandifes faifies font les mêmes que celles qui: furent vendues à Mille; or il n'y a que des Experts' qui puiffent le décider; les Juges Conruls en ordonnant la vérification ont donc jugé fuivant les principes.
.
Me. Fune! ne peut pas dire qu'étant le fourniifeur de la
matiere qui a fervi pour les marchandires faifies, il doit
avoir la prçférence fur ces marchandifes. La matiere n'appartenait point à Me. Funel ; Mille n'a point employé la
.terte creufée, ni la terre glaife comprife dans l'inventaire,
puirqu'elles exiftent encore; elles étaient d'ailleurs fi péti
confidérables, qu'elles n'auraient pu fuffire pour la centieme
partie des marchandifes faifies ; elles n'en ont donc point
été compofées ; & quand même elles auraient formé toutes
ces mardlandifcs , Me. Eunel n'aurait aucune préférence fur
elle,s, parce que cette terre une fois changée de namre , une
fois dénaturée ne peut plus être pourfuivie dans ce qu'elle a.
produit.
'
,
. Un homme hyp.otheque une forêt, on en coupe les bois.;
on en c.onHruit des navires, l'hypotheque fubQfie-t-eUe en:',
~~r~ ~ peuE~~l!~ ~:é~~~~~ ~~~ Ee~ ~~
,
t, N?~~,
;Ç'efiL·l~
01.
~~"
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DU
PALA1 S
DE
PROVENCIl,
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Loi 18, §:' 3 , If. de pignorat. aaiane, qui le décide formellement. Cette Loi s'applique à toure efpece de marchandifes; Faber nous en donne la raifon : La chofe une
fois dénaturée, éeffe d'êtrè ce qu'elle étoit d'abord, & devient ce qu'elle n'étoit pas; le droit que l'on avoit alors s'dl:
entiérement éteint. Ratio decidendi extinaione rei obligatœ
extinguitur vinculum & obligatio pignoris , qllamvis eadent.
materia durare videatu,r, quia tamen forma mutata eft , cœpit
alia res I!ffe.
Ce n'dl: pas par les Loix fur les matieres ordinaires que,
l'on doit juger les faits relatifs au commerce, c'eft d'après
les regles qui lui font propres. Or [uivant ces regles tom
privilege ceffe dès que la chofe a été dénaturée; la délibération de la Chambre du Commerce de 1730 ne l'admet que
quand la chofe eft encore ex tante. Quand elle ne l'eft plus,
quoiqu'elle ait été renouvellée & reproduite, le privilege n'a
plus lieu.
Par Arrêt rendu le 19 Juin 1779, au rapport de M. le
Con[eiller de la BouEe, la Sentence fut réformée quant à
ce , la préférence accordée à Me. Funel fur les marchandifes
,& eHets failis compofant le cabal des Fabriques, pour les
3024 liv. à lui adjugées avec intérêts; le concordat fut déclaré 11ul, & Mille fut condamné à tous les dépens; écrivant
Mes. Clement & Sauvere.
==:===========:::==ARRÊT
XXVII.
Quand eft-ce que lors d'un contrat d'échange, le Seignwl1
pellt exercer le retra..it féodal ,7
\;rEan-François , Leger &
Pierre Lombard [reres, &:
i?W Jean-Louis Boyer du lieu d'Entrecafieaux, échangerent
par aae du 10 Décembre 1764, des terres qu'ils poffêdoient
dans les terroirs de Pontevês & d'Entrecalfeallx. Les freres
Lombard eurent ,elles que Boyer poffédoii: à- EntrecafieauX'~
~
~,
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�226
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& lui cédercllt celles qu'ils avaient à POlltevés. Le 7 Juin
J 777 M. le Préfident d'ElltrecaHeaux les alIigna pardevant
Notaire ,pour qu'en force du retrait féodal ils lui fiffent la
défemparation de la terre par eux acquifc ~n échange, & à
défaut, il les ajourna par le même exploit pardevant le
~ieutenant de Brignoles. Les freres Lombard contellerent le •
retrait; ils y furent fournis par S'entencè du 30 Avril 1778.
Les freres Lombard appellerent parrlevant la Cour, &
préfenterent 11. juger la quellion de favoir fi le retrllit féodal
a - liea lors de l'échange des fonds relevans de deux Di~eaes.J
.- Dans le prinçipe des fiefs , dans l'origine du gouvernement f~odal, l'aliénation n'était pas permife à l'emphytéote.
Propriétaire & poffeffeur du fonds emphytéotique, il étoit
tenu de le cultiver, de l'améliorer, de le conferver. C'étoitlà la condition du bail fops laquelle il l'avoit reçu primordialement. Il ne pouvoit l'aliéner fous atlcun prétexte. La
févérité de cette Loi infpirée. & diÇl:ée par le defpotifme féodal, était meurtriere à l~l;-mphytéote, au Seignenr & à l'Etat:
A l'emphytéote, parçe qu'étant privé du bénéfice de l'aliénation, il était moins jaloux & moins porté à améliorer le
fonds emphytéotique. ,Au Seigneur, parce qu'il recevoit un
préjudice confidérable de cette manutention fervile & 'perpétuelle. A l'Etat, parce que ce joug .tyrannique mettoit des
entraves au commerce qui s'accroît & fe vivifie avec la liberté & dans la facilité des mutations. Un intérêt particulier & général, mieux réfléchi, plus combiné, admit des
principes plus falutaires ; l'aliénation fu~ per.mife à l'emphytéote , & le Seigneur obtint en forme d'indemnité d'une
'perte qu'il ne recevoit point., le lods & le retrait : le lods
qui ell le prix de l'approbation accordée à la vente emphytéotique; le retrait qui ell u~e voie utile pour réunir le domaine fervant au domaine dominant.
. Mais ,ces droits féodaux ne marchent pa!; toujours.. de
pair; c'dt-à-dir,e , que l'un n'ell~ pas ado,lis 'l1é~effairemen~
toutes les fois que l'autre ,ell dû. ~uivant .la vtai~ ,mal'ime ,
le Seigneur ell en 'droit de percevoir .le, lods .1qrfqu'il y ~
�DU
PAL AIS
D E
PRO VEN C Il:
227
ouverture au retrait, & s'il ne veut pas retraire. D,ans cet-té
hypothefe ccs deux drpits feigneuriaux ne fe quittent point;,
mais le retrait n'eft point admis dans tous les cas où le lods dl:
dû. Il y a bien des cas où il ne peur être exercé & O~I il
fe tait, fuivant la Jurifprudence de Guipape, liv. '2, fcd.
13, art. 13, pag. 136.
,
Cette maxime eft confignée dans le Recueil de Jurifprudence féodale, titre du rerrair, nO. 3) ; dans les Confultations de M. Decormis, & dans le nouveau Commentaire
des -Staturs , rom. l , feél:. 3, pag. 33), n. 3.
Les' donations particulieres, le legs à concurrence de 1<\
chofe impofée au légataire, les échanges, tous ces contrats
ront fujers au paiement du lods, & font .dfranchis de l'exercice du retrait. Le cas de fraude excepté, le rerrait n'a pas
lieu en échange pur & abfolu, non plus qu'en donation pure
& abfolue, partage, licitation, & tranfaél:ion. ( Jurifprudence
féodale ,'tit. dû retreit, n. 41~) Ill1'y a vérirablement uuvt:rture au retrait <]u'en contrat oe "t:ote , pan.:e qu'alors le
varral tranfporre, aliene à prix d'argent" retire on bénéfil:e
de l'aliénation, & par cette confidération autorife le Seigneurà retenir par prélation le fonds emphytéotique vendu, avec
d'aurant plus, de raifon , que le vendeur ne fouffre point de
cette retenue, & que l'acheteur n'eft pas plus facrifié, puifqu'il reçoit un entier rembourfement , & .qu'il eH renvoyé
indemne par la réception 'de la mêlfle 'quantité d'ar;genr.
Ferrieres, Traité des Fiefs, ch. 3 , feél:. '2 , art. 1 & '2;'
Guiot, Traité des matieres féodales, pag. 13 ; Bouraric ,
Traité des Droits feigneuriaux , pag. 406; M. de la Lil'oniere, Traité des Fiefs!, liv. 'i , ch. l & 3. L'on [ait, di.t
13ray,é , Traité du Retrait féodal, pag. '2, que [ous le ter/ne
d'aliénation [ail! compris· tous les aRes tranflatifs de propriété,
de quelque naHlre qu'ils [aieut, même les aRes de dérniere YOlamé; mais lor[qu'il s'agit du retrait, l'on n'entend par le
terme d'aliénation que la yéritable }'eme, ou les ac?es équip'ollens à la yente , mais que l'on a déguifès, ou ceux qui
participent en partie de la vente, & en partie d'tlll ajltre cont.rar..,.
Ff '2.
�'~-1.g
Jou RNA t
En regle générale le retrait ne peut pas être eltercé lofg;
.d'un contrat d'échange; ce conttat a t'Üujours joui de l1exemption féodale, & cette exemption lui dl: attribuée par des
raifons particulieres & intrinfeqlles qlli tiennent à la qllalité
& à l'efpece même de cette mlltation. 1°. Dans le contrat
d'échange aucune des parties ne vellt vendre. On -n'y diHingue
ni vendeur, ni acheteur, ni marcbandife, ni prix. Chaque
contraél:ant fe borne à une défemparation mutuelle. C'eil: la
permlltation refpeél:ive d'un immeuble avec un autre immeuhie; c'eil: véritablem'ent l'efpece du contrat connu <;lans le
droit Romain fous la déûgnation do ut des : on cede un
fonds à condition qu'on acqlliert un autre fonds. Sans cette
condition elfentielle on ne confentiroit pas à la défempara~ion. qef!: le- paél:e conditionnel, fans lequel le contrat n'au- .
-roit pas eu lieu, fans lequel il n'y auroit auçun engagement.
·Dès-Iors comment eil:.il poffible d'exercer la prélation fur un
contrat qui n'eil: fufceptibl.e d'aucune modification ? Cette
forme caraél:ériftique du contrat d'échange eft remarquée par
Dumoulin fur la coutume de Paris, §. 33, glof.
in verb.
droit de relief, nO. 41.
2°. Les immeubles échangés [e [uccedent. Par la [ubrogation qui en eil: - faite, ils [e remplacent mutuellement,
fubrogatum [apit naturam filbrogati. Dans la vente on diftin.
gue l'acheteur & le vendeur; on connoît l'immeuble vendu
& le prix de cet immeuble. L'un cede [on fonds & reçoit
de l'argent; l'autre cede de l'argent & reçoit le fonds, fine
prœtio nulla efl venditio. Dans l'échange on ne connoît ni
la chofe aliénée, ni le prix. On ne peut difcerner parmi les
contraél:ans quel eil: celui qui ef!: vendeur ou acheteur, ilt
permutatione tlifcerni non potefl uter emptor vel venditor. Les
-deux co-permutans [ont tout-à-Ia-fois acheteur & vendeur.
Les héritages échangés [ont tour-à-tour la marchandife -& le
-prix. Dans cette confulion d'engagement d'héritages & de
per[onnes, comment introduire le retrait féodal? Sur quels
fonds pouvoir l'exercer? Contre quel contrattant pouvoir le
<ti~jger? ~u~ tous les Féudi~es [outiennent qu'il n'a pas lieu,
l,
�DU PALAIS DI! l'RovilNCE,'-
'1 2 9
en contrat d'échange. Guiot, Traité des Fiefs, chap. 3 ; M,
de la Livoniere, 1i'V. 5 , chap. 4'
3°. Le poffeifeur évincé par le retrait ne feroit point in(lem nifé par l'eil:imation de l'immeuble retraie. Suivant les
loix, l'ufage & la juflice, le Seigneur retrayant eH: obligé de
rembourfer à l'acheteur les mêmes efpeces ou les mêmes im~
meubles que celui-ci a donné en paiement de l'acquifition.
Suivant les principes féodaux, il eil: tenu de le rétablir entiérement indemne, de le renvoyer dans le même état où il
étoiç avant l'acquifition. Debet abire omnino indemnis. La principale regle en exerçant le retrait, efl que l'emphytéote n'en
reçoive ni perte, ni préjudice. ( Guipape en fa Jurifprudence,
pag. 136, art. IJ. )
Comment ce rembourfement & cette indemnité auront-ils
lieu dans l'exercice du retrait féodal fur un héritage échangé?
Comment le Seigneur fera-t-il en état de reflituer au co-perfuutant, évincé par le retrait, le fonds qu'il avoit cédé en
éch'ange ? Cette reflitLltion n'eH pas en fan pouvoir; elle
ell: cependant utile, néceffaire ; fi cette indemnité pléniere
n'eft pas faite, le co-permutant évincé n'eft pas omninà indemnis, il reçoit perte & préjudice, & alors le retrait ef!:
exclu. Doit-il être fondé fur un aél:e d'injllftice, fur la ruine
du vaffal & l'avantage inconfidéré du Seigneur direél: l
Dans l'exécution ordinaire du contrat d'échange, fi l'un
'des co-permutans ell évincé en tout ou en partie dans la
propriété & la poifelIion de l'héritage co-permuté, le contrat d'échange eH annullé en entier par le feul fait de l'éviction , & le co-permutant évincé eil: reçu à demander la ref,tirution de l'immeuble qu'il a défemparé en échange. Le
retrait que le Seigneur exerce fur un héritage échangé,"
eH une éviél:ion réelle qui annulle le contrat d'échange. Par
le moyen de cette éviél:ion, le co-permutant recouvre tous
fes droits ; dépouillé des fonds qu'il a acquis, il eH fondé
à réclamer celui qu'il a défemparé. Telle eil la loi particuliere à ce contrat. Si par des principes propres au retrait,
le Seigneur retrayant eH: tenu lui-même de faire cette reHiturion; & li cette reftitution n'e{l: pas en fon pouvoir, à rai-:;
�2.30
Jou
RNA I.
fon de cette impuiifance, il n'dl: pas re~u à farmer le retrail:
fur un contrat d'échange. 1°. Parce que le poifeifeur évincé
par le retrait ne fera pas entiérement indemnifé s'il n'a pas,
ou le fonds qu'il a cédé en échange, ou celui ,qu'il a re~u.
'2. 0. Parce qu'il a tellement compté fur la confervation de ce
dernier fonds, que fans cette aifurance parfaite, il n'auroit
point confenti à céder celui qui lui appartenoit déja. C'efl:
la condition fans laquelle il n'auroit point çontraél:é, alio-,
qI/in verifimiliter, & lit plurimum .non Jui1Jènt permwaruri.
Le rembourfen'lent en argent du ,prix de l'Immeuble retrait ne remplit point l'es droits de la jufiice, & l'intérêt abfolu de l'acquéreur évincé. A la vérité l'argent efl: en quelque forte la repréfencation de tous les droits corporels &
effets quelconques qui font dans la fociété & le commerce.
Mais ce métal précieux ne remplit, pas toujours le degré
d'affeél:ion qui ell: placé à la poifduon d'un immeubl~. Tel
citoyen ne [acrifleroit pas ,un domaine à l'offre d'un prix
rrès-c,onfidérable, qui l'abandonne à l'offre d'un a,utre do- '
maille. JI cede le premier domaine, qu'il affèéHonne beaucoup, pour avoir le fecond qu'on lui préfente" & qu'il affeél:ionne encore plus. C'ef! l'aifurance de que feconde poffeffion qui l'engage à renoncer à la premiere, à paffer le
contrat d'échange. Il ne veut ni vendre ni acheter, mais
fubroger un fonds à un autre fonds: in permlltatiolle nellter
intendit vende,e , fed dllmtaxat permutare, & certam rem loco
certœ rei fubrogare. Mourgues fur les Statuts, pag. 1 l ') ;' fait
valoir les mêmes raifons d'équité, & de confidération, 'pour
repouifer du contrat d'échange la demande en retrait lignager. Les Auteurs qui ont -traité les matieres féodales, penfent uniquement 'que le retrait féodal n'a pas lieu quand un
fonds eH échangé. ( Annotations 'fur ,les Arrêts imprimés
dans les Œuvres de Duperier, tom '2., pag. 402. ).
Le nouveau Commentateur des Statuts retrace longuement
les motifs d'exc1ullon du retrait lignager, & les applique
enfuite au retrait féodal: in permutatione. ce.Dàt jus prœla--:
lionis, dit Guipa,pe, quefi. ')oS.
Pourquoi diHinguer le cas où le~ fond~ é~h~n~é~ f?,IlE §j
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE
:2.31
tués dans deux fiefs différens? La loi étant générale, il faut
,la fuivre tprupuleufement; toute interprétation feroit dangereufe ou vicieufe. Lorfque la Loi ou la Jurifprudence ont
jugé utile ou jufte d'admettre des exceptions, elles les ont
propofées, admifes & érigées en maximes. Ainli dans
l'échange avec une rente conitituée ou avec des meubles, Olt
s'il a foulte ultradimidiaire dans le prix, ou s'il y a ·fraude ,
le retrait eft recevable. Mais ces exceptions affermiifent la
regle, puifque ces év.énemens prévus & exceptés érant mis
à l'écart, la regle eft générale & fubfifte intégralement, inclujio lInius eft excllljio alterius.
Cette diftintlion a deux v·ices remarquables: 1°. Elle ferait une exrenfion abufive des exceprions déja inrrodu ites
c'!.nrre les raifons de droit qui excluent le rerrait féodal du
contrat d'échange. Or tous les principes nous apprennent
que ce qui a été adopté contre la difpofition de la loi, ne
fouffre aucune exrenfion. 2°. La loi, la coutume, la jurifprudence déterminées par des confidérarions de juftice, par l'intérêt du tiers, ont prononcé impérativement que le rerrait
ne feroit point appliqué à l'échange de deux fonds' dans
quelque fief quelconque qu'ils foient fitués : lIbi. lex nO/l
difiinguit, nec nos difiinguere debemus. Tout doit être foumis fans ré[erve à fan empire. M. de la Touloubïe dans fan
Recueil de Jurifprudence féodale, tit. du lods, nO. 62, atteHe que" dans le cas de l'échange ete deux fonds mouvans
" d'une même diretle, il n'eft dû au Seigneur diretl qu'un
" . feul lods, dont chacun des fonds échangés fupporte la
" moirié; que s'ils relevent de del:lx différentes direél:es , le
" lods eft dû à plein & à chacun des Seigneurs. " Il eH fen11ble que cerre queftion ayant été prévue & décidée pour la
perceprion du lods, aurait été prévue & décidée auffi pour
l'exercice du rerrair, s'il pouvait avoir lieu.
M. le Préfident d'Entrecail:eaux répondait qu'il eft de maxime que le valfal doit exhiber fan titre d'achat au Seigneur
& lui demander invelliture; que rien ne [upplée cetre for1ll.alité, qui eft. de devoir; quelque connoilfance qu'ait eu
d'ailleurs ,le Seigneur, le défau~ de no~ification proroge à 30,
�'2.32
JOURNAL
ans l'exercice du retrait, ainli que .l'ob[erve la Touloubre
dans [es Droits Seigneuriaux, tit. du retrait, na. 10, I l &
12; qu'anciennement le valTal ne pouvait aliéner [on bien
irrequifito Domino. Il y avait commi[e Ii avant tout on n'avoit
l'apporté [on agrément; & d'après la loi derniere, cod. de
jur~ emphyt., le valTal étoit obligé de déclarer au Seigneur
l'intention oÙ il étoit de vendre [on bien, & le prix qu'on
lui en offroit ; le Seigneur pouvait le retenir au méme prix;
il avoit deux mois pour [e déterminer. Aujourd'hui .l'emphytéote dl: lihre de difpo[er de fan bieu ; c'e!!: à l'acquéreur à
demander l'inveHirure, & le Seigneur peut alors retenir un
fonds aliéué 'par une vente qu'il n'a pas approuvée, ou inve!!:ir le nouveau valTal & recevoir le droit de lods.
Il convenoit que le retrait n'a pas lieu dans le cas de
l'échange fous la méme direél:e, parce que chacun des échangeaus a donné fon fonds pour un fonds, & ne l'auroit pas
donné pour de l'argent; mais il foutenoit qu'il peut êm:,
exercé lorfque les fonds échangés rel'event de deux direél:es.
Il convenoit qu'un des principes du retrait veut que l'acheteur foit remis en l'état où il érait avant la vente, qu'il [e
retire indemne, & qu'il ne jQuiroit pas de cette reHitution
au méme état s'il ne recevoit que de l'argent, tandis qu'il
n'a défemparé un fonds que le Seigneur ne peut pas lui
rendre, que pour polTéder celui qu'il veut lui ôter. Mais.
fuivant lui, l'hypothefe de l'échange de deux fonds relevants de
deux direél:es a été prévue dans l'établilTement de la regle
générale, qni exclut le retrait de cette forte de contrat,
& a fait parcie de fa difpofition; il citoit les _coutumes
tle Tours & de Bretagne, & l'opinion de M. de la Livoniere , qui portent qu'il' y a vente en échange, quand
les hérirages. échangés font Iitués en divers Fiefs.
Le rerrait a deux objets: le premier, de ne pas donner
au Seigneur un valTal qu'il n'agrée pas; le [econd, de lui
conferver le droit de réunir 1t [on FieJ le domaine aliéné..
Le Seigneur ayant le choix des vaffaux ,.doit, l'avoir auffi,
tle la place qu'ils tiennent dans le Fief ;' il pêut ne pas.:
cd fonds --fQit po./fédé
.lui être. indifférent
. ... _. que. _.teL ou
.- -_.
-,- par
tel
~
-~-.
~
.'
�DU
PALAIS
DE
PROV~l'CE.
2.33
'tel ou tel. Dans le cas de l'échange de deux fonds relevant!
de la même direél:e, le Seigneur conferve les mêmes vaffaux, les invefiit tous les deux, & reçoit un demi-lods de
chacun; mais lorfque les fonds échangés relevent de deux
différentes direél:es , le Seigneur voit dans l'échange un mépris de fan Fief, puifqu'un étranger veut devenir fan valfal
malgré lui, & "le forcer de lui donner l'invelliturc, & qu'un
de fes valfaux paife à une poifeffion. étrangere ; il ne
connolt d'ailleurs que lui, & ne peut avoir d'affeél:ion pour
un vaifal étranger; il doit donc être reçu à retraire en donnant ·le prix du fonds échangé.
D'ailleurs le change de Boyer & des freres Lombard n5
peut être regardé comme fincere; tout prouve que c'efi une
véritable vente; on n'a qu'à pefer tant fait peu les circonftances qui ont précédé & qui ont fuivi cet aél:e. Boyer,
marié hors de fa patrie, vient à. Enrrecafieaux pOl)r vendre
le peu de bien qu'il a , & retourner enfuite :au pays de fa
femme; il. vend . à l'encan public fa mai fan & quelques
'Petits coins de terre, à l'exception du fonds échangé. Ne
pouvant lç vendre, il l'échange pour une terre fituée à Ponrevés. Du moment de l'échange, il cherche à vendre certe
derniere acquifition; il la vend au plus vil prix & à moitié
pene. Tout prouve que l'échange ne pouvait a"oir peur·
motif l'afieél:ion, que chaque panie avait pour le fonds qu'elle
recevait, & que c'était dans l'intetltion des parties une véritable vente. Dans les conrrats /lon tam infpicitur forma,.
. '1uàm J'irtus & ejfe8us , maximè ubi agitllr de prœjudicia
tertii. Il citait les Loix fous le titre du Code plus Falen:
'iuod agitur, quàm , &c.
D'après ces p.inci.pes ( continuait M. d'Entrecarleaux )
il eft évident que daus l'échange d'un fonds étranzer contre
un fonds de la direél:e d'un Seigneur, celui-ci a le droit de
refufer l'invefiiture à l'acquéreur du fonds foumis à fa direél:e, & que, ne voulant pas l'inveflir , il peut ufer du droit
de prélation , en rembourfant à J'acquéreur par voie d'échange
la jufie valeur de fan acqui/ition.
Si un échange de fonds à fonds de valeur à-peu-près égale
Cg
�234
Jou
RNA L
dan> une même Seigneuri(~ féodale donne ouverture au lods
ou à un demi-lods de chaque fonds, & ne donne pas 'Ill
SeIgneur le droit d'exercer le retrait féodal, c'eft parce que
le Seigneur a donné primirivement l'inveHiture de ceS fonds
à chacun des poifeifeurs ; un échange ég'll les fait regarder
COmme étant inveftis des choCes échangées, & par une
fi.9:ion de droit, l'inveftiture paife d'une partie à l'autre,
.parce qu'en effet chacun des empbytéotes ne poifede plus
apres l'éch'lnge que ce qu'il poifédoit auparavant; c'eft une
fubrogarion d'Lm fonds de même valeur à un autre fonds de
valeur égale, & c'eft dans ce cas feulement que s'applique
la maxime· [ubrogatum [apit naturam fubrogati.
Il eft vrai en principe que· toutes les fois qu'il y a ouverture au droit de lods, il n'eft pas p.ermis d'exercer le retrait féodal; mais toutes les fois qu'un emphytéote acquierF
ce qu'il n'avoit pas, & qu'il n'a pas pour lui la faveur de
la fubrogation d'un fonds à un autre dans le même direél:e,
l'acquéreur a befoin de l'inveftimre; & dans tous les cas
où un emphytéote a befoin d'une nouvelle inveftiture, le
Seigneur eft en droit d'exercer le retrait féodal. Nul doute
qu'un emphytéote qui acquiert dans une direél:e féodale un
fonds qu'il ne poifédoit pas auparavant, n'ait befoin q'une
nouvelle inveftiture; c'eft au Seigneur à la donner ou à la
refufer ; dans ce dernier cas il lui ef!: loiCible d'exercer le
retrait féodal.
Il y a mépris- de fief quand un vaifal veut acquérir un.
bien contre la vo,lonré du Seigneur, en prétendant qu'il
peut le forcer à lui donner l'invef!:iture, ou lui refufer l'exercice du retrait féodal.
Par Arrêt du 21 Juin 1779 , pu rapport de M. le Con.J
feiller de Fortis , la Sentence fut confirmée avec renvoi 'amende & dépens; écrivant Mes. Bremond &.......
.
�DU
PAL AIS
AR'RÉT
D:Il
PRO VEN C E.
xx
VII I.
'.Après [iollverturt de la reqll~te civile, l'inflance [ur le rtfcifàire efl fujette à péremption, s'il n'y a diflriblltion à un
Commiffaire.
nAR Sentence rendue par les luges-Confuls de la ville
de Marfeille, le 6 :Qécembre 1769, Nicolas Manen"
Négociant, fut débouté de la préférence qu'il demandoit fur
des grains qui lui avoient été vendus par Jean Salvadon.
Cette Sentence fut confirmée par Arrêt rendu par forclufion
le 13 Juin fuivant.
'
Nicolas Manen impétra requête dvile envers cet Arrêt;
elle fut ouverte le 30 Juin 1774·
,Me. Revelly, Courtier Royal, par le minillere de qui les
dilférens aél:es de vente à Salvadon avoient été faits, qui avoit
fourni aux vendeurs fa garanrie pour partie du prix, prit leur
fait & caufe jufqu'à la concurrence des fommes par lui cautionnées " & les Parties pourfuivirent fur l'appel de la Sentence des Juges-Confuls jufq'au 12. Mai 177"> ; il fur même,
ordonné, le 4 Novembre 1774, un dépôt riere le Receveur
des Confignations de la fomme de 178 l liv. 13 f. du montant des frais; le d~pôt fut elfeél: ué.
A la fin du mois de Mai 1 778, les trois ans de la péremp'tion étant revolus, Me. Revelly prend en Chancellerie des.
Lettres d.e péremption, & par exploit du 30 jl ajourne Manen
pardevanr la Cour pour venir voir déclarer l'inllance d'uppel
périmée , au moyen de ce voir ordonner la confirmation
de la Sentence.
Me. Revelly [outenoit que par le Réglement de la Cour
du 1) Mars 1672. la péremption eH acquife pardevant les
Cours lorfgue le CommifIàire cfi décédé, & qu'il s'efi cn-fuite paifé trois ans [lns que le p'rocès ait ér6 dillribué; elle.:
G g 2.
r
�"3 6
JOURNAL
reprend fon cours lorfqu'il ce!fe d'y avoir un Commi1faire
procès.
On Arrêt qui ouvre la requête civile, rem~t les Parties
au même état qu'auparavant; mais il n'y a plus de Commiffaire dans Pinfl:ance qu'il fait revivre, parce que d'après
l'arr. 38 du tirre des requête?-civiles de l'Ordonnance de
1667, celui au rapport de qui ef!: intervenu l'Arrêt ou Jugement en dernier reffort, contre lequel la requête civile ef!:
ouverte, ne peut être Rapporteur dU'procès fur ·Ie refcifoire,
& l'inHance e{~ pourfuivie en l'état d'un procès non diUribué.
L'inltance en requête civile ef!: fujette à la péremption.
Comment la requête civile communiqueroit-elle à l'inf!:ance
antérieure un privilege qu'elle n'a pas? Quel ef!: l'effet de
l'Arrêt qui ouvre la requête civile? de remettre les Parties
au même état qu'auparavant. Or l'état d'auparavant était
une infl:ance fujette à la péremption; donc l'Arrêt remet les
Panies en l'état d'une inUance fufceptible d'être périmée par
la ceffation des pourfuites péndant trois ans.
Il ell: impoffible à Manen d'établir qu'apres l'ouverture de
la requête civile l'inll:ance ne peut plus périmer. Les principes condamnent cette prétention; la péremption cil: la peine
de la négligence des Plaideurs, elle a été introduite ne lites
fiant pœr.è immortales & vitœ lzomillum modum excedallt. Pourquoi après la requête civile laifferoit-on impunie cette même
négligence qui auparavant auroit donné lieu à la péremption?
La requête civile ell: un remede extraordinaire, &, quoique
néceffaire par fois, peu favorable en ce qu'elle ne tend que
trop à éternifer les procès. Il ne faut donc pas donner après
l'ouverture de la requête civile plus de privilege à l'inO:ance
qu'elle. n'avoit auparavant.
'Mane'n répondait qu'il ef!: vrai que la péremption d'inf!:ance
introduite par la loi properandum, cod. de judiciis, renouvellée par l'Ordonnance de Rouffillon, a lieu lorfqu'une
in{l:ance a été impourfuivie pendant trois ans; l'article Il
de cette Ordonnance ef!: précis. Il dl: vrai encore que l'Or~
dollnance de .1629, art. 91, ordonne l'exécution de l'Or~
jlU
�»u PAL AIS DE PRO'V l! N C É:
231
âonnance de Rou/Iillon, & ces Ordonnances font fuivies
en Provence Jous les limitations & modifications que la
Jurifprudence des Arrêts y a apportées.
Une premiere limitation veut que les Ordonnances con~
cernant les: pérem ptions d'inHance n'aient pas lieu aux procès
par écrit, conclus & relius pour juger en la Cour, & qu i
.avoient une fois été en état de recevoir Jugement, aina
que l'établit Brodeau fur Louet, verb. péremption, fomm.
16, & qu'il fut jugé par les Arrêts qu'il rapporte,
L'article 2 du Réglement du Parlement de Paris, du 18
Mars 169 l , porte que les appellations tomberont en pé.
remption & emporteront de plein droit h confirmation des
Sentences, fi ce n'eH qu'en Cour les appellations foient conclues ou appointées au ConCeil. Cela eH: encore précis dans
le Réglement de la Cour du 1') Mars 167~ : la péremption,
y eH-il dit, n'aura pas lieu aux proces entiérement injlruits ,
difiribués à un CONlmiflàire.
Le procès dont s'agit étoit difrribué à un Commi1faire :
la requête civile ouverte, les Parties font remifes au même
état qu'elles étoient auparavant; or auparavan l'état du procès
é.wit une infrance d'une cauCe difrribuée à un CommiŒ'lÎre.
La péremption ne pouvoit donJ:: pas avoir lieu.
De l'article 38 du, titre 3 S de l'Ordonnance de 1667 on
, 'I].e peut induire qu'il, n'y avoit plus de Commi1faire. Le
motifqui Curvient & qui rend le Commi1faire fufpeét, n''rt'Up~cl~s qu'il ~'ex,ifre ,une difrr}bution faite à u,n ComyJiffarre , & cette dlfrnbuclOn empeèhe la péremptIOn.
LorCqu'un procès eH: difrribué à un Commi1faire, qui devient allié de l'une des Parties à un degré à ne pouvoir plus
être Rapporteur, s'il fe pa1fe trois ans fans pourfuite, dirat-on que ce. procès a périmé parce que le Rapporteur ef~
devenu fufpeét ? Cette exception feroit condamnée par tous
les principes; il en' faue dire de même du cas de l'ouverture
de la requête civile. Il y a plus (continuoit Manen ) il fuiEt
qu'il foit intervenu quelque Arrêt interlocutoire ou provifionnel,
pour que la péremption ne pui1fe pas avoir lieu. (Mourgues,
pag. 77; aaes de notoriété de MM. les Gens du Roi, n°.
�"
Jou R 1': 'f,. L
10, pag. 17, & l'Annotatéur ,'pag. 179; Julien, dans [es
Notes manufcrites, verb. Judex, caput 4, §. 9, litt. L, nO.
!'l.38
1I6, & Brodeau lett. P, nO. 161. ) Il citait pluficiirs Arrêts.
,
Le premier, du 27 Juin 1730, au 'rapport de M. Je Con[eiller d~ Jouques, en faveur des Dllès. 13orelly, contre Mre.
Raphelis, Prêtre-=Chanoine de l'Eglife Collégiale de Draguignan, jugea qu'il n'y avoit point de péremption par la
ceffation de' .pourfnite pendant trois ans dans une inHance
où 'il y avoit eu une Sentence qui portoit que les Parties
pourfuivroient au principal ainli qu'i.J appartient, & cependant adjugeait une provillon.
:.
Le fecond", du 30 Mai 1741, à l'Audienc:e de relevée;,
plaidans ,Me. C~ry fils & Me. Veyrier Procureur, décida
qu'un Arrêt qui, après avoir prononcé définitivement fur divers chefs, de demande, ordonnait un plus amplenient oui fUT
un aurre chef, n'étoit pas fujet à péremption fur le plus amplement oui, & qu'on avait 30 ans pour l'exécuter en ce
chef comme dans les autres. Me. Veyrier difoit qu'il s'agiffait en cela de pure inHruaion, & Me.. Chery, foutenoit'
qu'il s'agiffoit de l'exécution d'un Arrêt qui a toujours 30 ans
de durée.
Le troilieme, du 24 Mars 1742, au rapport de M. le Confeiller de Mondefpin, jugea qu'il n'y avoit point de péremption dans un procès entre Frao9ois Elie, donataire de Catherine Chauvin fa mere, contre Me. Antoine Chauvil\.,·Notaire, & Henri Chauvin fan frere. Il y avait trois ArIêts interlocutoires j le premier, en déboutement d'un décli113coire ; le fecond, en déboutement d'un expédient à compromettre; & le troifieme, en adjudication d'une provilion.
Les Jugemens, dont l'un ouvre la requêre civile, l'autre
en exécution du premier fait injonaion de dépofer riere le
GrefFe des Conlignations la fomme de 1781 liv. 13 fols 4
d'en., font quelque chofe de plus que de fimples Arrêts il1ter-'
locucoires. L'Arrêt qui ouvre la requête civile juge définitivement les points de droit qui donnent lieu à la ré'rraaation de l'Arrêt attaqué; & quand il faudroit regarder celui qui
,
�11 A LAI S DE P R a-v E NeE.
23.9
pro~cette réeraél:aeion cpmme provifionnel ou incerlocutojpl!!lllllllM' fujet du refcifoire, il n'empêcheroit pas moins
la pérem ption. C'efl: le fentiment de Radier, pag. 199, de
Graverol fur la Rocheflavin, liv. }, tit 6, arc. 1, & d'Albert
verb. Péremptiou.
Par Arrêt du 21 Juin 1779, au rapport de M. le Conreiller du Queilar, la Cour déclara. l'in
d'appel péri.
mée, confirma au moyen de ce la Senten e es Juges-Confuis, & condamna l'Appellant à l'amende & aux dépens j
écrivant Mes. Verdet & Roman Triburiis:
.
. Voyez ce que j'ai dit. dans mon Commentaire fur le Réglement de la ·Cour, rit. ·de la peremptipn, rom. l , pag.
4 2 S & fuiv.
{
DU
=~~==~======. ARR Ê T
X XIX.
Le Sénat.s-Collfidte Velleyelt efi· rigoureufement obfervé en
Provence.
Z·
ESLIN, Languenfée & Mer~ Négocians de la ville
de Marfeille, remirent à Me. ~ Courrier de change,
dans le mois de Septembre 1776, divers papiers qui formaient la fomme d'environ 9000 liv.
Zeflin & Compagnie tirerent enfuiee des mandats fur Me•
•
qui ne furent point acquittés j & comme ils doutaient de la folvabilité de ce Courtier, ils exigerent que la
Dame _
s'engageât pour fan fils. En conféquence elle
él:obre même année de la fomme de
fit ùn billet au 11\0'
87')2 liv., co'nçu va r r:eçue comptant, & payable par tout
Novembre lors prochain.
Me. _
remit fon bilan le 5 Novembre 1776. Ze!lin &
Compagnie firent affigner la veuve _ _ pardevant les Iu'ges-Confuls en condamnation du montant de fan billet;
e..lle déclili~ la J urifcliél:ion, & le~ J uge~-Confuls firent droit"
. '
au déclinatoire.
,</,
�•
2.40
JOlI RNA L
Zeilin & Compagnie firent affigner la veuve "par..;
devant le Lieutenant Civil de Marfeille; elle im~' des
lettres de refcifion, & par Sentence du 22 Août 1778
les fieurs Zeflin & Compagnie furent déboutés de leur
demande avec dépens. Ils en appellerent pardevant la
Cour.
_La Dame
. faifoit valoir deux moyens; le premier ,.
tiré de ce que a fignature avoit été furprife, & de ce que
la caure du billet étoit fauffe ; le fecond, que la véritable
caufe étoit le cautionnement de fon fils, qu'elle était confé·
quemment invalable:,
Sur le premier moyen, elle difoit que d'après les Déclarations des 30 Juillet 1730, & 22 Septembre '733, les
billets font de nul effet, fi celui qui a figné n'en a écrit le
corps ou approuvé la fomme de fa main & fans chiffres.
Dans le fait, il s'agit d'un billet à ordre, qui n'eil point
foufcrir par une perfonne de commerce; la veuve
n'a
eu jufqù'à cette époque aucune relation avec ZeŒn & Compagnie , ni avec aucun autre Négociant.
Suivant Denifart un billet écrit d'une main" étrangere ,mais figné par celui auquel le paiement était ~emandé, avec
addition de fa main <i
s deux mots: j'approuve l'écriture,
fut déclaré nul au r
t de M. de Vienne le 22 Août
1741. On jugea que les feuls termes, j'approuve l'écriture,
n'équivalent point la reconnoiffance de la fomme portée au
billet, qu'exige la Déclaration de 1733. Cet Auteur rap~
\..lÎn autre Arrêt du la Avril 1764; ainfi pareillement jugtIpIIP
Arrêt du ) Mai 17)9 en faveur du fieur Mingaud~urgeois
de Lorgues ,',contre le lieur Heraut, Maître C~en.
Sur le fecond moyen, la veuve _
cifoit qu'il n'y a
pas d'obligation plus favorable que le cautionnement qu'une
tem me foufcrit pour fan pere, fa mere , fan m' - ou fan
fils, gênés dans le r ftàires;- ou preffés par u
ancier.
Cependant ce caut
ment cft annuflé par le Sénatus-Confuite Velleyen : fi cùm ipfè ml/tuam pecuniam aceiperu, mater
tl/a contra amplijJimi ordinis con[ultum fidem jùam interpofiât, exceptione Je tl/eri potefl. -Proifldè neque maritum , neque
-
fi/.HJ
_ .m.,
�DU. PAL'TA'I S' DË ,PROVENCE.
'241'
]ilium " neque patrem , permittitur mulieri defenderé. L: 2, '§•.
.fin. , Jf. ad S. C. Velleyanum ; L. 3, èod. coll. Le motif du Sénatus-Confulte dl: la foibleffe du fexc,
& la nullité de l'interceffion dl: fondée fllr ce qu'il dl: préfumé que la femme n'a pas donné un confentement libre.
Opem tulit Tnulieribus p r.p ter fexûs imbecillilatém. La femme
n'dl: pas cenfée avoir connu les conféquenees d~un àéle, dona
le dan'ger n'dl: que dans le lointain,. & qui eIl: poué le moins
indifcret, méme de la patt des hommes, quoique capables
d'une plus graRde prévoyance. Elle peut prêter & donper ;
le droit ne lui- intefdit pas le commerce de~ fervices & des
bienfaits. La loi ?ffigne la raifon de cette différence-; mulier
facilius fe obligat; raifon fondée fur le caraélere commun des
femmes; mulieres, dit Dumoulin, ad promitte(ldum faâlè inducul/tur, cum non efl periculufIl jam prœfens in oculis; ad dandum autem [une cllllëlatiores. Ideà gtoffa dicit"; genus mulie'tutn.
avariJJimum.
.
.
La décifion de la loi- ell: précife; & loin d'c pouvoir iêtl!e
fufpeéle à nos mœurs à raifon des liens qui uniffent le mari
& la femme, le pere & la fille, la mere & le fils, elle doit
ne nous en être que plus précie\lfe , parce que ce font fur-·
tout les perfonnes cheres à une femme qui rencontrent en
elle plus de foihleffe. Auffi voit-on que d'accord avec le,
droit Romain, les Auteurs & 'les Tril:iunalJx François' ref.
riment les fem!ll,es envers un pareil cautionnement. CHltrondas, liv. 8, chap: 2 ; Bouchel au' mot Velleyen; Bon.taric, InHit. , p~g. 468 ; Serres, I,nfl:it., pag. 488; Catelan',
liv. 4, chap. 49; d'Olive , 1iv~ 4-, chap. 13; Duperier, 'rom•.
2 , pag. ~ 78 , n°' 4, &c.
"
'
La faveur de la perfonn~~ur 'qui 'la' femme s'oblige ne
porrant aucune" atteinte alWlfl"ivilege du Velleyen, il f~ut
examiner fi la faveur de la caufe' qui donne lieu- à l'ob Tigation d
femme dl:- plus pui1fànte. Il eH un cas où
la femme peur cautionner valablement pour fan pere, fa
mere', fon mari ou fon fils, c'eIl: Jorfque l'un d'eux ef!: en
prifon pour crime. Boutai'ic [ur les Infl:jrures, pag. 46'S ;
CateJan & Vedel, liv. 4- , chap. l , &' liv. ~ ~ cIiap. 16;,
,
H h
�-2.4,2.
~ J'\) u f,l.
.'"
N
A L
.Faber, liv•.f, tir. '1I, d~f. ,,16 ; Imbert, Enhi,ridion, pag.
14'i j Decorm is , rom. 2. , col. 1163; Boniface) tom. 2.., li".
4" rir. 20, chap. 7,
• Hors de ce cas, la f~mlJ1e ne peur çautionner au civil
•.pour ~,lJcun de fes proche~ ,f~r-il même déçenu,en prifon par
}e~ créanciers, à moins·.qu'il ne foj= noble. C'efi: ce qui nous
~f!: formelleqtent arref!:é par Serres Loc. cir.; par Balfet, tom.
l , liv. 4, tir. 7,. chap. 2. ; par Vedel, rom. 2., liv. S , ch.
16 & 17; par Brillon, verb. femme; Boniface, rom. 2., liv.
· 4 , tir. 24, -chap. 6 ; Faber ,en fon code ad Sen. Confult.
Vell., déf., 16.,.EJ c'eil:. aiqfi q,ue la quef!:io'n fut jugée pada
,Coqr le~ 24' N: ovembre '173 S en :faveur d'Elifabeth Delaye
,cgqrre II! Fui/lier de lYIarfeille; elle s'étoit obligée pour faire
forrir fon mari. des prifons,. Oll il était dérenu pour dettes.
l'Arrêt décida .que 'Ie mari n'étant pas homme de qualité
.po!!voit, fortir de", p·rifon. au moyc.n de la ceffioll de biens.
. Le morif de 'ces deux décifions oppofées eil: fenfible. Dans
lè premier cas, ,le pere, le mari ou le fils n'ont plu.s de
relfource que dans l'interceffion de la fille, de la femmè ou
de la mere. Dans le fecond, ils peuvent faire ceffion de biens
.& recouvrer leur liberté.
_
En ,un !U()t, capables' de s'obliger pour leurs propres af.. faires, de donner, de prêJer, les femmes fOht incapable~ de
rout engagement· pour lc:s affaires d'autrui, par cela feul
· qu'elles font femmes,'& que l'aél:e ef!: un èautionneinent.
· Un pareil aél:e· les lie tellement peu, il ef!: tellement préfumé
.avoir été furpris à la foiblelfc: de leur fexe, qu'elles peuvent
répéter le paiement qJl'elles on~ fait en exécution, comme
un paiement fair par erreur, pe~ errorum folurum, & par
l'aél:ion condic1io indebiti.
Le billet que la - Da~e _
combat par l'exception du
Velleyen, préfente une obligarion direél:e de fa part en faveur de Zefiin §c Compagnie, La Dame .... rie commerce pas; on ne peut donc elÇcepter de la prohibition le
cautionnement que la femme prête à autrui pour raifon de
detre de commerce. Q\lelle que fait la -dette cautionnée, le
cautionnement n'en eH: pas moins cet aél:e. qUI; b.loi· interdit
.
...
" . '
/
�DU. PALAIS
DE
PRÔVENCE.
243
à la femnlë. Vame du commerce e1t la bonne foi, & la
faveur qui lui eH due n'exige certainement pas que l'on
donne aux· fem!11es une libute qui leur a 'été interdite, parce
"
qu'il étoit trop facile à la mauvaife foi d'eri abufer.
. En vain oppofe-t-on que Me. . . . etoit un dépofitaire
infidele qui auroit pu être pourfuivi èxtraordinairement, .ou
condamné au paiement avec contrainte par corps; fous'I'un
& l'autre afpeél:, lorfque la Dame'" a cautionné, <;''1
été pour tirer [on fils de prifon. Me.
étoit pour raifon
de la dette tOntrai'gnab1e par corps. Mais il n'y avait poiiît
de Sentence contre lui, il n'étoi~ pas en prifon ; & l'exception qui 'veut que.là femme s'oblige' valableme,nt 'pour tirer
[on mari ou [on fils de pri[on, doit être entendue dans
la firiél:e 'Î!gnificàtion des termes.' C'efi ainfi que l'atteHe,
Livoniere en [es regles du. droit. La femme, dit-jl', peut
s'oblig,er 'valablemehtfans, ~tre 'l1utorifée· pour retirer. fan mari'
de prifon, & non pour l'emp~chet' d'y·enfrer., Cette différence
eH indiquée par la raifon & admifénpar les loilC.·' ',, :,'
L'on trouve dans le Journal des Audi~nces, tom. l , liv.
6, chap. 14, un 'Arrêt qui rellitùa la femme'èn\'ers ùne obligation qti'elle av.oit ~p;1lfée~ poùr<.[ol]' mari l?<;)ur[uivi comme
Hellionataire ~ faux vetldc'ur )IdeL1:-à-c}jref''''Pill~\aéJ:ion .crim'Ï:
mUe. Le 'm;1rÎ. n'étoit 'pasJ:en"pô1bll f;('jl .n.e slagi1I'dit quede faire c'elfer de fimp1eJi_pouifuires: Rrilfon· dans.fon f Dictionnaire, tom. 6, pag. 8:2.)~, rapporte plufieurs Arrêts fem-.
blables. .
"
Le Velleyen eft exa8:ement & inviolhblem.enr :ribfervé nf)
Provence; ainfi -attellé 'par·.Ml'1 .. les Gèris ,du Roi'~le 4j:Gctabre, l 690' ,Ainfi jugé le.2 l Juin:.I 76cr-,<'aUJ rappor 'de- M.:
le. ConfeiHer de Mons, au profit'.de la DlLe-. Guiran Parmentier de la ville d'Aix, contre le fieur Bacine, TréIorier
Provincial des Gu~rres. Cf: dernier, avoit.été [oumis à p..rou-vec que l'argent prêté avoit tou-rné:au .profit de la ferirmt'.'. ,Il
ne remplit pas la preuve; il offrît au fonds exp édjent de'con-·
damnation. Autre Arrêt. rendu en' 177 S à l'exrraordina'Îre •
qui refcinda au profit de Ricoux une obligation è-olltraélé.e<o
par la femme Eour [on mari•. '
.' .
Hh.:lo
�24 4
Jou R 'N A L
Par Arrêt rendu au rapport de M. le Confeiller de fa
Boulie le 22 Juill 1779, la Sentence du Lieutenant de Marfeille f~t c"onfirmée tom d'une voile, avec dépens; plaidant
Mes. Ro>man .Tributiis & ..••.
Le' motif de l'Arrê~le: Velleyen ;,MM. les Juges attefl:erent qué les Déclarations de 1730 & 173'" ne [ont
gueres fUlvies en Provence que 'dans le cas de fraude évidente.-
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Le retrait lignager exercé filr la velite de ,droits fucceJJiF ne
ll!pcut pas fouer fur ,les meubles.
lin cohéritier 'nelpeut ~exércer le raéhat fur' la vente faite p'ar
J l'al/r.fè~:cohér:itier. ,à ,un "étranger,
d?une partie des droits
fû~ceffifs qui> e fnnt' l?oiizi .ch .litige.
1(;fl
•
l'
1
1if'Ean-Jofeph Gueit de la ville de St. Maximin fe trouvant
rJJ en ~mérjque ; céda après la marc de fes pere & mere à
Fran<;ois Gerbe, 'pal' aél:e du 17' Novembre 1777 paŒé au
BourgJ.St. Pierre, tous Ie-s droits fucceffifs, mobiliers &
im inbb'ilü~rs, que Gueit avait à pr.étend re fur ces' deux fucceffions, moyel1nant la fomme de 1000 liv.
Gerbe -ayant vDulu exercer les mêmes droits, les fœurs
de Gueit le firent affigner les '2, 1 & 27 Mars 1778 pardevant le Juge de St. 'Maximin, pour le faire condamner à
leur vùider., ,tant .par vore de renait lignager, que par. celle
du rachat, tous les droits fucceffifs échus à leur frere par
le décès de fes pere & mere, & par lui vendus à Gerbe ;.
fous l'offre de lui rembourfer les fommes qu'il avoit payées
I?our_ raifon de- ce , & tout ce qui pourrait lui être légitiIllement dû, ,même de jurer qu'eUes retenoient pour elles
& ne prêtaient leur nO'ffil à perfonne.
'
• Cette de~and~ fut d'abord conteilée en entier; Gerbe
offrit enfuite, un expédient le 8 ~,ai fuivant; il fe condamna
•
�,
i> U PA L A l' S D Il PRO VEN C Il,'
24~
~ défemparer, par voie de retrait lignage~, les terres comprifes dans la vente -ou cellion qu'il avoit, rapp'orrée des droits
fuccelfus, à condition qu'on lui rembourferoit la partie du
prix & des frais & .loyaux~coûts de l'aél:e"dù 17 Novemh,re
1777, qui portoien't .fur les immeubles' & tous légitimes
aècelfoires, avec intérêts tels que de droit, à compter du
jour de 'l'aél:e, fuivant la ventilation ou féparation qui en
feroit faite par Experts convenus, &c. ; fur le furplus de la
demande il fe mit hors de Cour & de procès., Cet expédient
fut reçu par Sentence du 10 Septembre 1778.
. Les Cœurs Gueit appellerent de cette Sentence pardevant
la ,cour: fuivant elles la Sentence étoit injufte, en ce qu'elle,
avoit diftingué les 'immeubles des meubles qui compofoiént
l'héritage, & n'avoit fait porter le retrait que fur les premiers. Le retrait ne touche pas au droit de propriété, il
n'empêche pas le propriétail'e de difpofer de fon bie,n à- fa
volonté'~ il autorife feulement le parent du vendeur à retenir le bien dont ce dernier a difpofé en faveur d'un étranger,
en fe mettant en tout au lieu & place de l,'acheteur, ce qui
ne porre aucun préjudice au propriétaire.
Si quelques Auteurs ont regardé le retrait, comme contraire au droit commun & à la liberté du commerce, d'au, rres l'ont envifagé, -avec plus de raifon , comme favor~ble,
en ce qu'il tend à conferver le bien dans les familles, De
ce nombre, font Decormis , tom. 2. , col. 170'1, & le nouveau Commentateur des StatUts, t9m. l , pag. 262, qui dit
que le retrait lignager eft fondé en équité fuivant notre Statut: ex bono & œquo procedir; que la confervation des bien(>
dans les familles en eft l'objet; qu'on ne peut pas dire qu'il
fait odieux, comme contraire à la liberté des ventes; qu.'il
eft de toute ancienneté & antérieur à nos Statuts.
En thefe générale, le retrait n'a lieu que dans la vente
des immeubles, & non dans celle des chofes 'mobiliaires ;
mais ce n'eft qu'autant que les meubles font vendus féparé-'
ment; quand. ils font vendus conjointement avec les immeubles auxquels ils font attachés & dont ils font partie, lInico
l'.retio, pour lors ils. fuiven~ le fort des immeubles auxquels
�"J
2.411
OUR N A L
ils [ont inhérents ; aioli fi l'on. vend une grange, touS le!'"
inftrumens aratoires, les capitaux en [emences·& en befl:iaux
qui s'y trouvent ,Jont [ujets au retrait .comme la grange eHeméme.
Il doit en étre de méme de la vente d'une hérédité, parce
que l'hérédité eH un droit incorporel qui" eft compofé d'im•
. meubles & de meubles, & dans la confulion des uns &
des autres, il participe de la nature'des premiers, comme
étant ce qu'il y a de plus ÏIr.ponant dans une [ucceffion.
Si dans la vente d'une hérédité, on avoit vendu' [éparément les meubles, les capitaux ,.Ies aé1:ions &·Ies immeubles , & fi l'on avait fixé 'un p~rix à chaque chofe ; il Y au';
rait plufieurs ventes', le retrait ne poneroit que [ur celle
con-cernant les immeubles, qui [eule en eH [ufceptible;
mais quand on vend confufément tous les droits [ucceffifs ,
une hérédité en général, univerfum jus, 'pour lors le retrait
embra:lTe néce:lTaire.ment tout ce qui compofe Ehérédité vendue, & l'on ne doit. pas d.ivifer, féparer ce que les parties
.onr confondu & ce qui eH fair ·pour l'être. Dans pareil cas
l'achat des immeubles & des meubles n'eH fait qu'en conlidération les uns des aùtres. La. réunion des deux objets les
rend plus conftdérables &. plus précieux, ils perdraient
beaucoup de leur valeur fi on les [éparoir.
D'ailleurs pour les féparer, il faudroir procéder à un rapport d'eHime, à une ventilarion , ce qui donnerait lieu a
des recours & à des conreHations [ans' nn. C'eH par ces
conlidérations &. par la .crainte de ces différents inconvén iens , que nos Auteurs les plus profonds & les plus judicieux ont rejerté toute divifion en pareH cas. Moro-ac fur la
I~oi 4, cod. de hœreditate veZ aaione venditd. Tiraqueau en
fan Trairé du rerrait, §. 1 , glof. 7 , 11. 8 r.; & Brayé dans
fan Trairé dû rerrait , pan. 2., quo 2.6, pag. 190.
Dan> le cas préfen.t il eH certain & convenu que parmi les
droitS [ucceffifs vendus par Jean-Jofeph Gueir, il y a des biensfOnds qui forment la plus gran.de partie" de ces droits. Les
meubles qui y font compris font de peu de valeur, ils ne
font que EaccdfoÎre des immeubles avec lefquels ils font
1
�DU
PAL.AIS
DE
PROVENCE.
241
identifiés & confondus. Il dl: prefque impoffible de les en
détacher, de les divifer, & la Sentence qui a ordonné cette
diviiion, pour ne faire porter le retrait que' fur les biens
fonds, dl: contraire au droit, à la. raifon', elle dl:' fouverainement injufie.
. Sur le racbat, .les Cœurs Gueit diroient qu'il faut bien dif~
tingiJer la. vente d'Une hérédité eotiere , dans laquelle il 'n.'y
a ni concurrent, ni cohéritier, de. la vente qui ne porte
{jue fur un.e partie ,de l'hérédité qui· efi à prendre fur une
ma/fe commune 11. d'autres. La premiere ne pouvant occafionner aucun litige, le rachat ne. fauroit y être admis; la
.feconde au cOlHraire ne. peut manquer de -donner lieu à des
.contefiations & 11. des inconvénieni de toute efpece. Des
parens , & fur-tout· des Freres qui ont à partager la fucceffion de leur pere & mere, s~arrangent t0ujours' amiablcmeu.t , fans brujt & fans éclat; le lien qui les unit, & l'intérêt refpeél:if,qu'ils ont 11 ne pas divulguer leurs affaires domefiiques, les portel,t à éviter toute difcuffion. Un Etranger
qui s'ingerc dans une pareille fucceffion, n'a pas les mêmes
vues, ni les mêmes difpofitions; il ne craint pas de manifener les fecrets de la famille, d'y répaAdre le trouble &
.le défordre , de tracaffer de toutes les manieres les héritiers
Au fang, pour les forcer à fe rédimer- de la vexation par des
facrifices exorbitans. Le rachat doit être accueilli dans -ce
,dernier cas, parce que tout ce qui tend 11 éviter les troubles, les injufiices IX. les vexations, eH favorable aux yeux
.de la loi.
.'
.
• "r.:es Loix per diverfas & ab Anaflafio, cod. Mandati, dé,fendent la çeffion des droits litigieux, & veulent qu'en pareil cas lé débiteur. cédé fait reçu à rembourfer l'acquéreur.
J.,es droits fuççeffifs que Jean-Jofeph Gueit a vendus ou cédés
à Gerbe, n.e font pas litigieux a,au & en 'eux-mêmes, mais
i~s peuvent le devenir. C'ell:-là fûremeut une occaiion & une
matiere 11 litige. Le motif de ces Loix a été d'éviter qu'un
ceffionnaire ne vexât., .n'inquiétât le débiteur cédé. Le fenci.
m~,nt de Brodeau fur Louet, lett. C, fomm. 13 , n. 2, efi
~onforme à l'efprit,des mêmes Loix. .
�~-48
J
0 11 R 11 1.. t ' .
Jean-JoÎeph Gueit n'a pas vendu la fucceflion entiere de
fes pere & mere , mais feulement la part qu'il y avait, les
droits qui lui compétaient, fait comme héritier, fait comme
légataire, ou' autrement; car il ne connoiffoit pas fa qualité,
ni cOl1féquemment les droits qu'elle lui attribuait. Il n'était
pas [eul héritier, il n'étoit que portionnaire des fucceffion,s;
fes fœurs avaient COalme lui une part de ces mêmes fuccéf.
fions plus ou moins grande; eUes étaient donc cohéririeres
du pere & mere communs; elles auraient ce titre quand même
elles ne feraient que légitimaires. Ainfi le frere ayant vendu
[a portion à un étranger, [es Cœurs peuvent exercer le rachat, & demander de' lui être [ubrogées en le rembourfant..
D'ailleurs les mêmes ratfons qui ont fait établir' le rachat
en faveur du cohéritier fubfifl:eroient à l'égard du légitimaire-,
quand même il n'auroit pas le titre & la qualité de cohéri·
tier, puifque dans l'un comme dans l'autre cas il faudrait
procéder à dés rapports, à des compofitions d'héritages,
& à plufieurs autres procédures.
Gerbe répondait qu'en thefe générale cbacun dl: maître
de {(,n bien & peut en faire ce que bon IUf femble ; unu[quifque eJl rei fuœ moderator & arbiter. La propriété eH un
droit [acré. Tout ce qui e,n eH une fuite , l'eH égalemem.
Vendre [on bien, c'eH u[er de ce droit. Il [eroit en effet
bien inutile d'avoir une chofe en propriété, fi l'on ne pouvait pas en faire de l?argent au be[oin. Une maffe d'hérédité
QU de droits [ucceffifs, eH lm bien qui appartient en propriété à celui à qui ils [Ont dus. Il cfl: done con[équen~
qu'JI puijfe la vendre lorfque [es affaires l'exigent.
On convient que le retrait eH une voie légale pour con..:
[efver les immeubles compris dans une vente; mais fuivaO't
D'ecormis & tous les Auteurs, le retrait etl: contraire au
droit commun, à la Loi dudùm 14, cod. de contrah. empt.,
à la liberté du commerce, li la propriété & à faculté que
l'on a de vendre [on bien, puifque par le retrait, le vendel'lr
a un autre acquéreur que' celüi qu'il a choifi.
Delà vient que c'eil: une matiere de rigueur pour le De..
mandellr, & qu'on le .refl:reint de tous les c,ôtés. ~n ne doit
pat:
la
�nu
PALÀIS
n'E
PilOVll-)qCE.
'249
.par conféquent pas 'l'étendre' d'un cas à l'autre; il faut le
renfermer dans les bornes qui lui font prefcrites. Or notre
Statût 'ne pérmet le retrait què fur les immeubles. Mourgues,
pag: 11 1 in fine; & Tiraqueau , §. l , glof. 7" n. 8) & 86,
& §. 23, glof. 2'. ;n. 8,,9 & i-Q; il n'a pas même lieu fur des
-immeubles fiél:ifs, tels que les 'offices, les capitaux, &c. ,
'il n'alfeae que les imméubles réels.
Il n'dt que/lion ici que de meubles. Gerbé a confenri au
retrait des immeubles; la Sentence a adopté fan olfre; les
AppellaÎJs ne veulent autre chofe qu?excrcer le retrait fur des
meubles. Vouloir que des meubles qui ne font point fournis
au retrait, changent 'de nature & deviennent fujets à l'exercice de ce droit par leur union avec des immeubles dans le
contrat de vente, ce n'eft pas feulement ,ételldn: ,trne dif-:pofition qui doit érre .eftreinre, mais faire une Loi où il
n'y ca a point, puifque les meubles ne font point compris
dans le Statut.
'
, '-If'
.• JI faut admettre le retrait fut 1e·s immeubles; puifqu'iJ'efr
établi, & procéd"r à la féparatioh lie ce's"immeubles d'avec
les autres objets, proportionn'eHement aù prix COtâl. C'eft cc
qu'etablit le ~ouveau Comnièntatèlir du Statut';· tOm. 1, pag.
2.72.' Notre Statut ne permettant· le retrait;, dit"'-il, que poùr,
les p'oJJèffions, il faut', d'àns.'.z(rz'e' vente}d'hétèdité, a'dmemi
le ,em'lii pour les immézibtes',''& le tefu/à pour lês meubles ~
les dettes aaives, les.' obligat-ÎOI!s ,-fi Cif'cquÛeur n'aime- mieu»
que le retrait. ait lieu pour le ,tout.,! i • Mars s'il n'accorde
le retrait que des immeubles, & que la v.ente de toute l' lzérédité ait été faite par un [eul ptix.~, on fixe alors le prix "defi
jmmeuble$ par lIentilation.
." 1.
•
" •• (
. Sur la fecôade queil:ion-, Gerb.e répondbit, que rien n'dl:'
Plus fufceptihle- de· vente qu'une maffe d'hérédité bu de'
droits fucceffifs; r-ien n'eft- plus licit.e que cerre vente; elle'
èfl: regardée tanquàm ]a9us retis à cauklde l'incertinrde- des'
éVéne-rt)ens. La Loi :2., Cod.' de01'efcind; ver.zd. n'y- a pa-s lieli.Aucune refciüon n'y eft aJmifel méme pour léfion"énormif"
fime, fuivant les Loix du If. i&. du .cod. lie !rœred. vel aa.~
&·le'~ A~r~t~ Vippdrtés,'ra-r,:lwu:~ &::!l!odea'u; tete. H,:
.rend.,
1.L
--
�.2)0
JOURN'AL'
fomm. 7 ~ 8; Cate1an 1 liv.j) ;" ch. 6; & Dei-"peifI'es , tom;
l , pag. 32.,'
.
Les Loix pu diverfas &ab Anaflafio, Cod. mandati, qui
adl'll~'\tent le débiteur au rachat des. droitsveodus, n'am:
lieu que pour les droits ,li igieux.qui,. ont été acquis Rnimo
vexandi, & 11:'om jamais .•fait qbftacJe) aux ventes d'hérédités ou de droits fucceffifs., Il f\lit dt; ces principes que
le vendeur- ne p.eut revenir contre une vente de droits fuceffiEs fous quelq'ue prétexte ,que ce p\1iffe être, & il ferait
étonnant de donner à fes parens un qroit qu'il n'a pas lui- ,
nlêlne.
j , )
.
,Adm~ttre' le rachat; c'eft g'êner le c'ommerce. U n hom~e
qui aura des droits fucceffifs à vendre, ne trouvera plus d'acheteurs. Ce q.ui, lui, en. procure, c'eU: l'efpoir du gain.
Cet efpoir leur. fera enlevé, dès que les _pareos auront la fac,\.llté d'ex.erce~ le r.achat. Il eft fenfible qu'ils oe s'y détermineront que 'Iorfqu'ils y trouveront leur avantage. S'il y
:j. dé 'la perte,' ils J.a, lailIèl'oll,t fupporter à l'acquéreur; s'il
y a 1111 'gain ~"il~ 's'GIl empareront par le l1'loyen du rachat;
& dès-lors il n'y aura jamais qu'à perdre pour l'acheteur.
Perfonne ne voudra~s'expofer à-,nne -perte certaine. Celui qui
aura des dro.its flo1çccffiEs à ·vendre fera .obligé de lçs ga.rdeJ;'
infrtia:ll~ufi:ltièll,t, "<$c' fouvent de les apandonner. Il pe fera
plus 'maîrre de fan !;lien. On portera atteinte' à (a propriéçé ;
en l'empêchant de vendre, & à celle de l'acquéreur, en le
dépouillant de ce qu'il aura acquis. Pareille 'conféqueoce
eft-elle admiffible? Ici Jofeph Gueit était à Amériqu,e; i,l
ne po\!voit ,rerirer ce qu.i, lpi.;re.venoit, des fuccé~ons paternelle & maternelle, qu'en abanâonpant fon cO'l1)merce pou li
"enlr effyyer un 'procès' à S'aint-Maximin; il eûç, fans d01,1re
p.référé la pe.te entiere ,des' droits. Gerb.e le délivre de ,cet
embarras. Il lui compte Ul} argent qu'il était fans. efpoir de
retirer; & GerBe', en rendant fervice 'à Gueit" s'expofe aux;
rifques des évéoemens;' tanp-is, ~qu'il l!'Quvoit el1)p~oyer ce
même ,argent à acheter, des marchandifes',qu'il..auroit appqr.
rées en F.rance' à 'bord, u' ~aiffeau qu'il commandait, l!Je
.qui lui auraient produit beaucoup plus' que- cette 'vènte, qu~'
1
r
�D U
PAL A 1 9 D B
2. ~ f
PRO' VEN C E.
jufqu'ici ne lui a donné q,u'un procès. Il fou,ffriroit çonc un
dommage réel par l'adrnJfIion du rachat.
1
Jofeph Cueit n'a point de cohéritier; il eH légitimair!;.
dans la fuccellion de fan pere, & {eul héritier de fa mere.
La légitime paternelle 'ell déja fixée p~r un ,aéle palfé entre,
~a fœur héritiere & les fœurs légitimaires. L'hérédité de la
mere ef!: fixée pa,r fan contrat de, mariage; il n'y a donc
aucune conteHation entre Cueit & fes fœurs ; elles n'ont. à
craindre aucune vexation de fa part: donc point de rachat
ex' confeffis.
Par Arr_êt du 2.2 Juin 1779, aRrès partage, Mr. le Confeiller <,i.e Ramatuelle, Rapporteur, & Mr. ,le Confeiller d'AIpheran, Compartiteur, la Sentence fut confirmée avec dé-,
pens, de l'avis de Mr. le Companiteur ; écl'Îvam M,es. Bovis,
& çras.
-ARR E,. T
;
X X X 1.
.-..
Le decret d'union de deux Cures dans la mJme Eglife n'eft
point abuJif lorfqu'il y a lléceffité ou utilité pour L'Eglife.
Pour la diflribution du cafùel & des offrandes, il faut confulter
l'ufage particulier de chaque Eglife.
L
A Paroilfe de Barjols étoit delfervie par deux Curé
portionnaires d'une même Cure qui fe d'ivifoient entr'eux,
le produit & le cafue!. Le 13,Décembre 1773 le vice,-Pro-'
moteur de M. l'Evêque de Fréjps fe pourvut à ,ce Prélat pour
qu'il fÔt procédé à l'union des deux portions de la Cure &
n'en faire q)J'Ul1 feul & même titre, en employant les revenus tant fixes que cafuels de celle fupprimée, à liétablilfement de deux Vicaires amovibles qui, outre l'adminiHration.
des Sacre mens & autres fonélions curiales, feroiem dans le
Chœur de l'Eglife. de Barjols toutes les fonélions qui étaient.
à la charge des Curés aéluels, lorfque le Curé ne pourrait..'
ou ne voudrait pas les exercer par lui-même..
li. 2,
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PAL A 1 9 D B
2. ~ f
PRO' VEN C E.
jufqu'ici ne lui a donné q,u'un procès. Il fou,ffriroit çonc un
dommage réel par l'adrnJfIion du rachat.
1
Jofeph Cueit n'a point de cohéritier; il eH légitimair!;.
dans la fuccellion de fan pere, & {eul héritier de fa mere.
La légitime paternelle 'ell déja fixée p~r un ,aéle palfé entre,
~a fœur héritiere & les fœurs légitimaires. L'hérédité de la
mere ef!: fixée pa,r fan contrat de, mariage; il n'y a donc
aucune conteHation entre Cueit & fes fœurs ; elles n'ont. à
craindre aucune vexation de fa part: donc point de rachat
ex' confeffis.
Par Arr_êt du 2.2 Juin 1779, aRrès partage, Mr. le Confeiller <,i.e Ramatuelle, Rapporteur, & Mr. ,le Confeiller d'AIpheran, Compartiteur, la Sentence fut confirmée avec dé-,
pens, de l'avis de Mr. le Companiteur ; écl'Îvam M,es. Bovis,
& çras.
-ARR E,. T
;
X X X 1.
.-..
Le decret d'union de deux Cures dans la mJme Eglife n'eft
point abuJif lorfqu'il y a lléceffité ou utilité pour L'Eglife.
Pour la diflribution du cafùel & des offrandes, il faut confulter
l'ufage particulier de chaque Eglife.
L
A Paroilfe de Barjols étoit delfervie par deux Curé
portionnaires d'une même Cure qui fe d'ivifoient entr'eux,
le produit & le cafue!. Le 13,Décembre 1773 le vice,-Pro-'
moteur de M. l'Evêque de Fréjps fe pourvut à ,ce Prélat pour
qu'il fÔt procédé à l'union des deux portions de la Cure &
n'en faire q)J'Ul1 feul & même titre, en employant les revenus tant fixes que cafuels de celle fupprimée, à liétablilfement de deux Vicaires amovibles qui, outre l'adminiHration.
des Sacre mens & autres fonélions curiales, feroiem dans le
Chœur de l'Eglife. de Barjols toutes les fonélions qui étaient.
à la charge des Curés aéluels, lorfque le Curé ne pourrait..'
ou ne voudrait pas les exercer par lui-même..
li. 2,
�~, 'l:
Jou RNA-r:
Le vice-PrOl)loteur deman'da qu'il fôt nommé ùn èom::
miffaire à J'effet de prendre l'information de commodo &
incommodo, entendre. les Panies intéreffées, recevoir la
.démiffion de Mre. Mingaud qui, fetrouy()it pourvu à cette
époque de la portion de Cure dont on demandait ·l'union.
M. l'Evêque de Fréjus accorda les fins de cette requête.
La procédure fut prife, les Parties intéreffées donnerent
leur vœu; le Chapitre, la Communauté de Barjols confentirent à l'union fous les conditions éilloncée.s, & toutes les
formalités remplies, intervint, le 14 Mars 1774, décrec
portant union à perpétuité des deux p<>rtions de la Cure de
Barjols, pour 'ne -faire plus qu'un feul & même titre, renfermant la totalité, de la Cure, de façon qué ces portions ne
puflènt plus être divifées à l'avenir ni conférées féparément.
Le décret porte fuppreffion en tant que de befoin du titre de
la poreign de Cure dont étoit pourvu Mre. Mingaud, à
l'effet de l'unir à celui de la portion que poffédoit Mre. Gaf.
quet, pour ne faire plus qu'un feul & même titre qui ferait
poffédé indiviflblement par Mre. Gafquet & {es fucceffeurs
en la Cure de Barjols; ordonne que les revenus tant fixes
que cafuels de la portion de Cure ci-devant poffédée par Mte.
Mingaud, feraient employées, fauf les taxes du Diocefe que
devait fupporter cette portion de Cure, à l'établiffement de·
deux Vicaires amovibles qui', outre l'adminill:ration des Sacremens & autres fonél:ions curiales, feroient alternativement,
l'tin à défaut de l'autre, dans le- Chœur de l'Eglife de Bar,.
jQls , toutes les fonél:ions qui étoient ci-devant à la charge.
des Curés, lorfque le ·Curé ne les exerceroit pas par luimême. Il fut 1'éfervé à Mre. Mingaud, (ur les revenus de fa
portion de Cure, ·une penflon annuelle & viagere de 300 liv.
Le décret d'union fut confirmé par les Letttes-patentes
da mois de Juillet 177'), & le 18 Novembre fuivant les
Lettres-patentes furent enrégifrrées ciere le Greffe de la
Cour. .
.
Mre. Valence fut un des Vicaires amovibles qui remplaça
te Curé fupprimé. Mre. Gafquet réunit fur fa tête tout le tirre
de la Cure; il fe conforma aux conditions énoncées dao~
�s
n'u PAL A Î
DE
PRO VEN C ll;
1.0
te décret d'union pour le revenu fixe & cafuel. En 177 6
il permura avec Mre. de Monjallard , qui fut pourvu de la
Cure de Barjols fous tes mêmes conditions.
La paiJÇ & la tranquillité paraiffoienr avoir régné dans la
. Paroiffe de Barjols, lor[que Mre. Valence fut obligé de préfenter, le 29 Avril 1778, une requête au Lieutenant de Brignoles
en ajournement contre Mre. Monjallard, aux fins de fe voir condamner à partager & à. lui tenir compte de la ponion des
droits cafueIs qu'il avoir perçus depuis l'î mois, & qu'il continuoit de percevoir [ans lui en faire part; lui déclarant qu'il
avoit toujours -fait & était prêt de faire à l'avenir taures les
fonél:ions de fon 'miniflere en conformité du ManClement de
Mgr. l'Evêque de Fréjus, & relativement aux conditions dli
décret d'union. ,
Sur la lignification, Mre. Monjallard répondit qu'en affociant
volontairement Mre. Valence au cafuel des baptêmes, mariages & autres droits qu'on appelle les droits de l'étole,
& qui, fllivant les maximes & les Ordonnances du Royaume, appartient aux Curés, à l'exclulion de leurs Secondaires,
foit qu'ils exercent par eux-mêmes les fonaions curiales, foit
qu'ils les faffent exercer par leur Vicaire, & dont ·aucun titre
-ni ufage contraire ne peut fonder une exception pour la Cure
de Barjols, parce que la totalité de la Cure étant aujourd'hui
réunie fur la tête d'un feul Curé, le revenu & le droit curial font inféparables du titre & de la charge, il n'aurait
jamais pu prévoir qu'il dût effuyer un jour de la part de
Mre. Valence pes procédés auffi durs & auffi peu reconconnoiffans'; que néanmoins pour ne pas démentir [on caraél:ere de doontéreffement & de paix, & pour prouver que
fon intention avoit toujours été d'admettre. Mre. Valence au
partage du cafuel, il offrait de lui en tenir compte, &
l'interpelloit de lui donner l'état de ce qu'il avoit perçu lui.
même. Mre. Denans, Prévôt de l'Eglife Collégiale de Barjols ,intervint dans l'inflance, & demanda que le décret
d'unioo , les Lettres-patentes & l'Arrêt d'enrégilhement fuffene exécutés fuivant leur forme & teneur. La Communauté
in.terviat
également, & foutint les.... mêmes fi.Qs.·
-'
�~H
Jou
11. NA L
•
Mre. Monjallara demandaenfuite ·contre Mre•. MoR'y , SOUSSacrifiain de l'Eglife de Barjols, la cire des MeR'es de relevées de couche, de la premiere Communion des enfans &
des enterremens qu'il exigeoit en fa qualité de Sous-Sacriftain , lefquels droits appartîennent aux Curés fe\,lls depuis
l'option qu'ils ont faites de la portion congrue. ~a caufe
fut réglée le 2. Septembre 1778.
Le décret d'un ion de! deux Cures étant le titre principal qu'on oppofoit à Mre. Monjallard, il fe détermina à
l'attaquer par la voie de l'appel comme d'abus; il fit affi.
gner Mre. Denans, Mre. Valence. & la Communauté pardevant la Cour; il appella en même temps de l'Ordonnance de pieces mifes avec évocation du fonds & princi.
pal; l'':vocation ayant été confentie, il Y eut Arrêt qui en
ordonna la jonaion.
.
Mre. Monjallard difoit que depuis l'option tout le cafue1
appartenoit aux Curés feuls, à l'excluflOn du Prévôt & de
l'Eglife Collégiale, comme Décim<rteur ou Curé· primitif.
L'union a transféré fur la même tête tout ce cafueI. Camus,
Duperray les attribuent aux Pafieurs comme une reconnoiffance, à caufe des Sacremens, & comme une marque de la
piété des Fideles. La décifion de ces Auteurs efi puifée dans
l'Ordonnance de Blois, art. ~ l ; dans l'Edit de Melun de
l 'P9, an. 2.7. La Déclaration du 17 Août 1632., veut
qu'outre les pOItions congrues, les Curés aient encore les
petites dîmes, les fonds des Cures, les fondations des obits;
& autres revenus ordinaires. Même difpofition dans la ,Dé.
c1 qration du 18 Oaobre 1634.
Le cafuel appanient aux Curés, fuivant Vanefpen, de. ob/a""
tioniblls , §. 12, pag. 60; Pafiour de beneficiis, lib. 3 , . de.
oblatio"nibus. Ce n'efi point aux dépens des Curés que les
Secondaires doivent lui êrre donné~. Comme Secondaire· ,.
Mre. Valence a un cafuel perfonnel, il lui dl: attribué pal'
les Réglemens dU Diocefe ; ce font les droits .de Vicaire aux
enten·emens, Melfes de mort, obits & fondations; mais fur
le ca fuel il n'a aucun droit comme Secondaire. Aucune loi
n'admet les. 8ecQndaires au panage des revenus ca(uels qu
�'Du
PALAIS
DE
PRO'VENCE;
'251)
Curé', ce ne peut être que par 'l'attribution que lui en a
faite le Prévôt; mais le Prévôt lui-même n'avoit aucun droir,
il n'a pu en difpofe,r.
Ce n'dt point à raifon du fervice Paroiffial, mais bien '11.
raifon du fervice dans le Chœur, que le Prévôt a attribué aux
Vicaires la moitié du cafuel du Curé. Cette attribution ea
injuil:e de la part du Décimateur qui prend fur les revenus
cafuels du Curé, non pour fournir aux befoins de la Paroiffe,
mais pour les appliquer à un objet étranger à la Paroiffe.
Celui qui rejette les charges du Miniil:re inutile fur 'le falaire du Pail:eur qui travaille, enfreint toutes les regles de la
juil:ice & de l'équité.
.
Le Prévôt n'a pas plus 'de droit fur cette partie du cafuel
que fur celle qui fe trouve affeél:ée à la fous·Sacriil:ie de Barjols, qui coofiil:e aux Offrandes, foit en cire, foit en argent perçus aux enterremens que le Curé fait pa'r lui-même,
aux relevées de couche, aux premieres Communions des enfans. Ces aél:es font des_ aél:es curiaux, <le conféquemment
le' cafuel qui eft relatif à ces aétes eft un revenu curial. Il
n'im porte que la Cure foit unie à la Collégiale; dès que le
Curé a opté pour, la congrue, tout le cafuel lui a été dévolu
en force de cette option; la portion congrue n'a été confidérée comme congrue' & fu!Iifante qu'en confidération dli
cafuel dont les Curés ont roujours fait la perception; il
citoit les Déclarations du 29 Janvier 1686 & 30 Jnin 1690,confirmées par la Déclaration de .1731 & celle de 1768 aux
articles 4- & lo;"il rappelloit plufieurs Arrêts du Parlement
de Paris, de Rouen, de Touloufe, pour établjr le principe
que toutes les Offrandes appartiennent au Curé; & les Arrêts de ce. Parlement de 1747 & 1751 qui ont jugé que'
le Chapitre de Barjols étoit réduit dans l'Eglife' Paroiffiale .
aux feuls droits honorifiques.
Après avoir établi le fonds de fes prétentions, Mre. Mon,jallard préfentoit divers moyens d'abus. Contravention au
droit naturel: celui. qui travaille doit jouir du fruit de [on.
travail. Contravention au droit commun; les Curés joui[".
�,-')6
Jo V R :Il A L
fent de tout le cafue!. Contravention aux Ordonnal'lces : ellès
font rappellées dans les défenfes au fOnds..
Le Prévôt a fait cetre union relative'ment au fervice du
Chœur; il a donné terflporale pro" fPiriruali. U Il Auteur avait
donné en principe ce que Mre. Denans a réduit eIl' aae. La
propofition fut cenfurée par le Pape Innocent XI, & par
le Clergé de Fran(:e en 1700. Lé motif de l'union efi entaché de fimonie ; il Y a fimonie d'après cette cenfure, non
feulement lorfqu'on re~oit le temporel, comme prix du [pirituel, mais encore comme motif qui porte à donner le
fpirituel.
'
Sur l'intervention pe la Communauté, Mie. de Monjallard difoit qu'elle ét'oit mal fondée & [ans intérêt, qu'elle
contrariait même fan véritable intérêt. On a voulu lui perfuader que Mre. Monjallard ne voulait point de Vicaire, &
peu s'en faut cependant qu'elle ne veuille le forcer à partager avec les Vicaires le Minifiere paHo rai. Erreur dans fan
motif, dériGon dans fa prétention; Mre. Monjallard ne refufe pas les Vicaires qu'on voudra lui donner pour l'aider
& le fuppléer dans [es fontlions; mais que le Vicaire ait le
droit de prétendre au partage du minifiere, lorfque le Curé
voudra l'exercer en entier par lui-même, où trouve-t-on le
fondement de ce droit?
Mre. Denans répondait qu'il avait jtlfiifié fa conduite par
fa conduite même. Pour le pécuniaire, la [uppreffioll ne lui
procure aucun avantage, puj.[qu'il donne aux deux Prêtres
amovibles, ce qu'l! donnait au Curé [upprimé: il fe trouve
au contraire en perte; il a f.1crifié 1200' liv. pour tous les
frais de la procédure; il a fallu donner une penGon de "300
liv. au Curé dont le titre étoit fupprimé. Ces objets font
perfonnels au Prévôt; ils ne peuvent être rejetéés fur la Prévôté; il a renoncé à fan droit de collation: perte du côté
de l'honorifique.
' '
,
Mre., Valence difoit qu'on n'avait rien ôté àu' Curé.dlt '
côté dil pécuniaire; il a la moitié du- revenu, fiXé ;:Ie' cafuéJ:.'
Il été. donné à des ~rêtres qui [one Mirtifi1'C!s curiaux, ·capaJ •
bles.
�'~.'
DU PAL AIS DE PRO VEN C E,'
2~1
bles des fonétions curiales, & a1focié avec Mre. Monjallard
aux mêmes fonétions. Il invoquoit 'Ie droit naturel, qui
veut que celui qui fert l'Autel paroiffial vive de l'Autel; les
Ordonnances veulent que le Vicaire pui1fe participer au cafuel; il citoit les Déclarations de 1731 & 1768. Un Miniftre non paroiffial peut participer au cafuel ex titulo vel
confuerudine cenrenaria. La regle _eft certaine depuis la Déclaration de 1731. Dès-lors l'Evêque a pu dire: la portion
du Curé fupprimé appartiendra aux Ficaires qui le fuppléenr.
Où cf!: l'abus? Qu'a-t-on ôté au titre de Mre. Monjallard ?
Le droit naturel & la juftice ont-ils été léfés? Qu'importe
que les deux Curés eu1fent fait leur option? Ils fe partageoient le cafuel: celui qui a fubfifté n'a donc rien perdu.
Trois Arrêts rendus par le Parlement de Provence ont
confirmé la maxime. Il n'y a donc point d'abus; l'intervention du Prévôt & de la Communauté cft légitime
Le Curé a un titre plus honorable; il eH Coulagé d'ailleurs
dans fes fonétions, puifqu'il y a trois De1fervans au lieu de
deux; il a le même fevenu dom il joui1foit avant l'union.
Sur la queftion des Offrandes, Mre. Mo1fy difoit qLe -de'
tous les. temps le Chapitre en avoit joui; que d'abord ille,s
avait transférét's au Sacriftain, à la charge de fournir le lu-·
minaire;. que ce dernier s'arrangea âveè la Confrairie; s'en.
dégoûta enfuite, & alors le Prévôt fonda le Sous-Sac riftain, de concert avec le Sacriftain.; il lui donna les Offrandes, & depuis 16rs le Sous-Sacriftain en a joui. Il invoquoit les principes, -qui veulent que les oblations, offran~
des & honoraires appartiennent aux Curés, à moins qu'il
n?y ait Tranfaétions ou Arrêts contraires, ou po!feffion centenaire.
Me. Mériaud , Subftitut, obferva que la n~ceffité & l'utilité doivent toujours être les deux caufes de l'union; elles
ne peuvent être féparées; ce feroit mal remédier aux be_
foins de l'Eglife que de ne pas les LOnfuher; les Supérieurs,
dans les unions qu'ils fe propoCent, ou qui leur {ont propofées, tle doivent confidérer que l'utilité du ~ervice. La,uceffité de l'E15lift, dit Lacombe, doit Je trouver du c6ti-
•
I):.x
�2.,;8
Jou RNA t
de l'Eglife auquel l'union Je fait, & l'utilité pour l'Eglife du
cl1té du bénéfice uni, c'dt-à-dire, 'lue l'Eglife doit tirer de ce
bénéfice uni plus de Service après l'union qu'elle ne faifoit auparavant. Toute union ef!: abufive , . lorfque ces -deux motifs ne l'ont pas déterminée; elle ef!: encore abufive, lorfqu'on n'a pas obfervé les formalités établies.
Tous Bénéfices font fufceptibles d'être unis, même les
Evêchés &; les Cures, ce qui dépend des circonf!:ances .&
de l'intérêt de l'Eglife. L'on voit dans le Diélionnaire canonique que la réunion de plufieurs Cures ou portions de
Cures dans 1;;1. même Eglife font. très-favorables.
Le Décret dont s'agit ne renferme point d'abus; la néceffité. & l'utilité font les motifs qui l'ont déterminé. Deux
Prêtres égaux en revenus avoient toujours deffervi la' Paroiffe de Barjols; les circonf!:ances exigerent une augmentation dans le nombre des Minifires: deux Prêtres furent
nommés au lieu & place d'un Curé; le Service de l'Eglife
y gagnoit: le Curé, dont le titre devenoit plus refpeélable
par cette réunion, fe procuroit un foulagement dans fes
fonélions. Tels furent les motifs qui engagerent le VicePromoteur à folliciter le décret d'union. Mais a+Oll pu attribuer à des Secondaires, à des Prêtres amovibles le cafuel
appartenant au Curé fupprimé? Le décret d'union n'a-r-il
pas confondu les perfonnes avec le titre? Doit - on faire
droit à l'appel comme d'abus?
,
Les Curés font fort anciens dans l'Eglife ; les fonélions
qu'ils rempliffent font des plus effentielles. Dans les premiers fiecles, il Y avoit peu de différence entre les Curés
& les Evêques. Les Evêques étoient autrefois obligés de
veiller à ce que les Curés euffent un revenu fuffifant; il leur
étoit même enjoint d'unir deux Cures, lorfqùe le revenu de
chacune étoit trop modique. Les temps ne furent pas toujours les mêmes; des circonfiances fâcheufes, qu'il ef!: inutile de rappeller, réduifirent grand nombre de Curés dans
la mifere; des fonélions aliguRes furent avilies par la baffeffe
des ·Minifires de l'E 6 life. On voulut remédier à ces abus:
des Ordonnances de nos Souverains enjoignirent ~ux ~vê-:.
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE
'2~Cj
ques d'établir des Curés ou Vicaires perpétuels, oÙ il n'y
en avoit que d'amovibles, & de pourvoir à leur fubfiftance
par des portions congrues.
.
Les Déclarations de 1686 & 1690 fixent. cette portion
congrue à la fomme de 300 liv. ; elles attribuent également
aux Curés les offrandes, honoraires, droits cafuels & les
dîmes novales. Celle de 1690 attribue de plus aux Curés,
toutes oblations & offrandes en cire & en argent, le cafuel,
les obits & les fondations. Au moyen de cette portion congrue, les Curés qui ont f':lit leur option, ne peuvent plus re·
cevoir les menues & vertes dixmes.
Depuis cette époque, & relativement au temps, eft inter·'
venu la Déclaration de 1768, qui fixe à S00 liv. la portion
congrue des Curés, & à 200 liv. celle des Vicaires ou Secondaires qui n'écoit auparavant que de IS0' L'art. 4- veut
que les Curés joui1fem des oblations, honoraires, offran.
des ou ca fuel , en cout ou en parcie, fllivant l'ufage des lieux~
La même fomme eft fixée pour tous les Curés également ,.
foit qu'ils habitent des petits lieux', foit qu'ils régi1Tent (legrandes Par.oiifes. Dans les unes, l'augmentation du cafueL
ajoute à la modicité de la porcion congrue; dans les autres ,cette même portion congrue dédommage de la modicité du
ca(uel. Il étoit jufte fans dou,te que celui qui fupporcoit le
poids & la fatigue trouv~t de quoi vivre honnêtement, &
fît ainli refpeél:er le caraélere honorable dont il était revêtu.
Il feroit à defirer que les revenus des Curés fùifenr plus con·
fidérables; qu'ils fu1Tenr par là plus à portée de connaître
les befoins de leurs Paroiffiens, & de les faire ce1fer; on
ne verroit plus languir dans la mifere des citoyens dont les
jours fane utiles à l'Etat, & dont la fituation fait honte tout
à la fois à l'humanité & à la religion.
Le Curé n'a pas pu régir feul l'adminifiration d'une Pa··
roi1Te ; fan étendue, le nombre des habitans ont exigé des
fecours & des Prêtres égaux en fonélions, admis au même.
miniftere ; ils leur ont été aifociés, mais différens entr'eulC
du côté de la dignité, du côté du titre, ils n'ont été qu'amovibles au choix, à la. volonté de l'Evêque qu i les avoit
l.
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Jou It N' A f:
nommés, on peut les changer, les révoquer toutes les fois
que les circonfrances l'exigent; leurs revenus Ont également
été fixés à une fomme qui doit être fupportée par les Décimateurs. Moyennant cette portion congrue ils n'ont rien
à voir fur le cafuel du Curé; il exifre, à la vérité, dans des
Diocefes des Réglemens particuliers qui leur attribuent quel.
que partie du cafuel; il en exifre dans le Diocefe de Fréjus.
Après avoir fixé la qualité des perfonnes & déterminé les
revenus attachés à leurs fonétions, Me. Meriaud examina
s'il y avoit abus dans le décret d'union.
Deux Curés égaux en titre régiffoient la Paroiffe de Bar.;
jois ; égaux en caraétere, leurs fontl:ions étoient les mêmes ;
fournis alternativement au fervice du Chœur, ils avoient à
raifon de ce une rétribution en bled & en vin. A l'époque
de l'Edit fur les portions congrues , leur option les fit renoncer à tous les droits qu'ils avoient coutume de percevoir; & conformément à l'ufage du Royaume, ils ne jouirent que de la portion congrue, & fe partagerent tout le
cafue! attaché au titre de Curé ; ce régime s'étoie· toujours
confervé jufqu'à la fuppreffion de l'une des Cures. Il fut mis
alors deux Prêtres amovibles à la place du Curé fupprimé,
auxquels on attribue les mêmes revenus, & ils partagerent
la portion congrue de 500 liv. & la moitié du cafuel que
le Curé fupprimé percevoit à raifon de fon titre.
L'utilité & la néceffité furent le motif de cette union;
trois Prêtres au lieu de deux deffervoient la Paroiffe; le fer.
vice de l'Eglife y gagnoit confidérablement; le Curé [e.
trouvoit foulagé dans fes fonétions; ces deux Prêtres, qui
n'étoient qu'amovibles, ajoutoient à cet intérêe l'avantage de
pouvoir être changés fi les circonHances l'exigeoient.
Dans le premier régime de l'Eglife de Barjols, le Curé
étoit obligé de vivre avec un Minifrre dont le titre éroit
égal au fien , dont les fonétions éroieot les mêmes; ce ne
pouvoit être que pour des caufe~ confidérables , pour des
<lbjets graves, que la Communauté eût pu porter plainte à l'Evêque ; le titre étoit irrévocable; la Communauté & le Curé ont
dClnc gagné à cette union; l'un & l'autre de(uent qu'elle foit entre~
�DU PALAis DE PROVEN'CE';
''l.·6r'
fenue; le Curé feul fe plaint de ce qu'on a pris fur fort cafuel,
pour établir deux Secondaires qui ne font point à fa charge;
que l'obligation de remplir le .fervice du Chœur annonce le
motif de l'union; que cette obligation feule l'a déterminée;
que c'efi-Ià une fimonie de la part du Prévôt que l'on doit
profcrire.
Mais les Déclarations de 173 l & 1768 veulent qu'on
fe conforme à cet égard aux tranfaél:ions, aux. titres & à
l'ufage des lieux. Dans les uns, les Curés jouilfent de tout;
dans les autres, les ufages font refpeél:és. Me. Camus, qui
a commenté l'Edit de 1768, obferve fur l'art. 4- que la regle
établie par le droit commun, efl: que les Curés jouilfent de
la totalité des oblations qui font faites dans leur. Paroilfe :
les conféquences de cette regle peuvent être confidérées
par rapport aux Curés primitifs & par rapport aux Vicaires amovibles, Chapelains & autres qui aident le Curé
dans la delferte de l'Eglife , ou qui delfervent eux-mêmes.
Ce Commentateur rappelle les difpofitions des Déclarations
de 1686 & de 1690, les contefl:ations qui s'émient élevées
entre les Curés primitifs & les Curés perpétuels ; & parlant de la Déclaration de 173 l ,il dit que le dernier état
des chofes efl: fixé par cette loi qui veut, qu'on fe conforme
à l'ufage des lieux.
Plufieurs Auteurs, Vanefpen, Sollier, Lacombe, Joulfe
ont parlé de cet ufage qui déroge à la regle générale. Aucune loi n'attribue le cafuel aux Cu rés excluIivement à leurs
Vicaires, & n'an nulle les Réglemens qui en accordent à ceu!Cci une pal'tie. L'Edit de Blois, celui de Melun, les Déclarations de 1686 & 1690 ne forment aucune difiinél:içm
entre le cafuel des mariages & celui des enterremens ; il n'y,
a pas plus de contravention à ces loix, d'attribuer à des Vi.,.
caires une partie du cafuel des mariages, qu'une partie du
cafuel des enterremens; chaque Diocefe efl: régi par des
Reglemens particuliers; ils feroient cependant nuls s'ils
étoient 1:ontraires à la loi; & les Parlemens, obligés de
~eiller à fan exécution, ne les enrégifl:reroient pas.
;En 'principe le ~~f~~! app'a:~i~nt ~~ totalité ~u Curé;
i!
�;'62.
Jou R 1'1 A r;
jouit également en pleine propriété de la portion congruC\
lorfqu'il a fait fon option; ce revenu n'dl: fufceptible d'au~
cune impofition, d'aucune charge. Dans une Paroiffe où,
les befoins & le nombre des habitans exigent une augmentation de Miniil:res, on ne peut en établir aux dépens du
Curé, c'eil: au Prieur décimateur à fournir à l'entretien des
Secondaires. Mais dans l'hypothefe préfente deux Curés fe
trouvoient établis dans la Paroiffe de Barjols, partageant
tout-à-la-fois le titre & les revenus. La fuppreffion de l'un
d'eux transfere fur la tête de celui qui eH: confervé toute la
dignité, & le revenu du Bénéfice fupprimé eIl: attribué à
deux Vicaires, à deux Prêtres amovibles; dans ce dernier
cas ce ne font pas ~es Secondaires ordinaires, ils deviennent
par la fuppreffion les repréfentans du Curé fup'primé. On ne
peut citer aucune loi qUI prohibe cet arrangement; c'eIl: une
circonf1:ance que la loi n'a pas prévu, qu'elle n'a pas contredit, & qu'il faut décider relativement à l'avantage que peut
en retirer l'Eglife de Barjols.
La réunion opere deux effets; le premier, de rendre le
ritre du Curé plus honorable en ne pas divilànt le titre; le
fecond , de lui procurer des fecours & des foulagemens dans
-la perfonne de deux Secondaires, fecours dont profite la
Communauté de Barjols. Les revenus du Curé font toujours
les mêmes, fon cafuel n'a point changé, les deux Prêtres ne
font point à fa charge, il jouit de tout ce dont il jouiffoit,
il a gagné du côté du titre & n'a rien perdu du côté des
émolumens.
.
Le prétexte de fimonie n'a aU'cune forte de fondement;
pour en être convall1cu, il faut examiner la conduite de
Mre. Denans; fa qualité de Prévôt lui donne la collation de
la Cure de Barjols. Lorfque les deux titres exiil:oient, fa
collation était plus étendue, il nommoit à deux Bénéfices ;,
la réunion à réduit fon droit à un feul, elle a diminué fes
privileges , & de ce côté il ne s'eil: rendu coujlable d'aucune
fimonie; il a demandé que les deux Secondaires rempliffentles fonél:ions du Chœur, il le pouvoit; un Collateur qui
fait un facrifice da.ns une union de Bénéfices 2 peut préfe~.t~r
�'Dù
PALAoÏ~
DE
PROVENCE:
.:2.63
au Supérieur EccléfiaHique des conditions qui foient uue.
forte ode dédommagement; l'Evêque de Fréjus pouvoit refufer ces conditions, il en avoit le droit, & le Pré'lôt ne pouvoit empêcher l'union fi elle avoit été reconnue juHe & néceffaire; d'ailleurs on n'a procuré aucun intérêt à [on Bénéfice ; il efi: au contraire en perte, parce qu'outre que les
deux Secondaires jouilfent des dwits de la Cure fupprimée ,
il paie encore à l'ancien Curé 300 livres de penflon viagere.
Quant à la qùefi:ion concernant les OlFrandes & oblations
perçues par Mre. Molfy en fa qualité de Sous-Sacrifiain, les
principes qui condamnent l'appel comme d'abus de Mr.e.
Monjallard fervent également à combattre cette prétention.
Me. Meriaud conclut à la confirmation du décret d'union
des deux Cures, à ce qu'en évoquant le fon'!s & principal,
Mre. Monjallard fût condamné à refi:ituer à Mre. Valence
la moitié des droits demandés, [uivant l'état & rôle qui
en [eroit donné, 0& à ce que Mre. Molfy, Sous.SacriHain, fût
mis hors de Cour & de procès fur les fins prifcp contre lui
par Mre. Monjallard, [ans pouvoir être troublé dans la per.
ception des OlFrandes qui .lui [ont attribuées par les titres &
par les ufages.
Arrêt conforme, prononcé par M. le Préfident de Lauris
~ l'Audience du Rôle du 22. Juin 1779; Mre. Monjalldrd
fut condamné aux dépens envers toutes les Parcies i plôlÏ-;
daot Mes. Gaffier & Roman Tributiis.
�,
ARRÊT
-
XXXII.
L'Affureur fupporte la perte ou dommage arrivé au Navire fur
mer par temp~te, naufrage, 011, autre cas fortuit de mer,
en gardant contre lui les formalités requifes.
L
E 30 Janvier 177'), François & Laurent Audibert firent
affurer pour le compte du fieur Laurent Labbé, la
fomme de 1 )200 liv., pour la navigation & les voyages que
la Polacre le Hafard, Capitaine Viau, pourroit faire pendant
le terme de fix mois en tous lieux que ce fût; & c'efl (porte
la police) tant fur l'intédt du fieur Labbé au corps, agr€IS,
armement, a vituaillement , (alaires, avances à l'équipage, mifè
hors & dernieres expéditions de ladite Polacre, que fùr les
facultés & marchandifes qui Je trouvent chtl1rgées [lIr icelle, &
encore [ur la parfie de 3771 liv. I l f. 6 den. données d la
groJJe par ledit fieur Labbé audit Capitaine Viau, pour employer au carps de. ladite Polacre, ainfi que le[dits AJJùrù
feront apparoir.
.
Pour la partie de la groffi par billet ,Jignt dudit Capitaine
Piau, du 27 Septembre 17'14, pour les facultés par cannai[fe.ment & autlies fortes d'écritures, & pour le· corps, par telle
piece· que ce foit , publique ou privée·, juflifiant l'imédt du Sr.
L'Abbé; le difpen[anr, les fieurs AJJùreurs, de produire aucune juflification pour le coût & achat de ladite Polacre, ni
aucun compte d'armement, & mife hors d'icelle, attendu l'lvaluation qui en a été faite entre les parties, à la fomme de
24000 liv., pour tenir lieu de cap.ital en tout temps & en.
tout lieu.
La Polacre étoit depuis quelque temps en caravane dans·
le Levant; & le 7 Janvier 1776, le Capitaine expofe au
Conful de Chypre qu'étant parti de Candie le dernier jour
du mois précédent avec un chargement Turc pour Alexandrie, les mauvais. temps & la tempête qu'il a effuyés aya~t
1;lU~
�DU
PAL AIS
D E
PRO V II Ne 'Il.
'26 ')
mis fon Bâtiment dans le plus grand rifque & péril, il s'ell
vu dans la néceffité, étant en' vue d'Alexandrie, de rétrograder au gré des vents; il a eu routes les peines poffibles,
avec le plus grand travail, à pouvoir atteindre le port de
Famagoufl:e. Que comme la tempête l'a toujours tenu entre
deux eaux, il a :été obligé de jetter à la mer un gros canon, & divers agrêts & ufl:enfiles de fon Bâtiment, & enfuire plufieurs marchandifes de fon ch~rgement; qu'il ne
cr~it pas fon Bâtiment navigable, ni par conféquent en état
d'aller. porter fa cargaifon en Egypte; il requiert le Conful
de faire vifiter le Navire, de l'aurorifer à verfer fur un autre
Bâtiment la marchandife, pour la porter au lieu de fa def-,
tination, & d:e faire intervenir les Officiers de J ufl:ice du
Gouvernement i pour qu'ils puilfenr l'auwriler & confl:ater
le danger, attendu qu'il a' été expédié de Candie fans aucun
paifager Turc, ni Subrecargue, pOUl' en témoignerr
Le Conful, par fan décret nomme', pour faire la· viCitC';
le Capitaine George, MalcaH:ek, Anglais, le Capitaine Leonardo Palma, Napolitain, Laurent Colomb, Charpentier,
& Pierre Soudraque, Calfat; il ordonne à, Jerôme Caridy,.
fecond Drogueman, de les accompagner à Famagoufl:e, &
de faire intervenir la: J ufl:ice turque à cette vifite., en exigeant d'elle fan rapport.
Les Experts déclarent pau leur rapport dü 16 Janvier'que
le Bâtiment feroit en état de naviguer, pourvu qu'on lui
fît les réparations dont ils firent le détail.
Le 2.) Janvier, le Capitaine comparoît pardevant le Confui pour faire fan eonfulat; il lui· expofe que le 6 il entra
heureufement dans le port de FamagouHe, où il échoua vers
les dix heures du, foir., Le ') Février d'après, il demanda
d'être autorifé à faire abandon de fa Polacre après fan d~
chargement, & de congédier fan équipage, à la réferve d'un
Ecrivain, d'un Matelot, & d'un Moulfe; il expofe en outre
que les réparations confidérables qü'il faut faire à fan Bâtiment, enfuite du rapport des Experts, font impoffibles, lui
maoquanr de bois, d'ouvriers) & de fonds néce1faires poui
fournir
à ce.s dépenfçs.,
. -'-' -.... . .... ...
-
-_
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�'2.66
Jou RNA L
Ces fins furent accordées, & le Confill lui enjoint, par
fon Ordonnance, de rrouver de l'argent fur la quille de
. ion Vailfeau, pour fatisfaire au paiement des falaires de fon'
équipage. En conféquence, le Capitaine fait abandon, &
donna congé à l'équipage, fous la réferve d'un Ecrivain,
d'un Matelot & d'un Moulfe.
Il demande enfuite d'être autorifé de faire la vente du
Bâtiment, au plus grand avantage & pour le compte de qui
de droir; le Juge, par fon décret, l'y autorife ·à fon rifque,
péril & fortune.
En exécution de ce décret, le Capitaine Viau vend aux
encheres la Polacre; elle produilit mil lix cens foixante
& dix-fept piaHres trente parats. Il en fair fa déc1aratipn
le trente du même mois d'Avril en la Chancellerie de Chypre, & réitere fon abandon, avec f@umiffion ,de rendre
compte fidele à qui de droit. Il emploie le produit du Na~
vi~e & ce qui lui reHoit des facultés, déduélioll. faite des
falaires & dépenfes, à l'achat des marchandifes qu'il embarque fur la Tartane la Flçre. Il en fait part au Sr. Labbé,
lequel en fait l'abandon le 28 Août 1776, qu'il lignifie
à fes Alfureurs, en 'leur déclarant que le produit du Navire
& des facultés avoit été employé à l'achat de diverfes
marchandifes à lui adrelfées par le .capitaine Bernard, & en
·une traite de 4000 piaHrei fur le fie ur de Lepine, Direéleur
des Vivres à Toulon.
Il préfente le 3 Avril 1777 une requête contre le lieur
Remufat & autres Alfureurs, en paiement des fommes affurées , tant fur corps que fur facultés, & en contrainte provifoire , en donnant par lui bonne & fuffifante caurion.
La caufe portée à l'Audience le I I Juillet 1777, il intervint Sentence qui joint les fins provifoires au fonds & prinCipal, & ordonne que les parties écriront au Greffe•.
Les Alfureurs appellerent pardevant la Cour de cette Sentence; ils fe départirent enfuite de leur appel, & oppoferent la fin de non-recevoir, réfultame du défaut de communication des pieces julhficatives, requife par l'art. S7, tit.
des Alfurances de l'Ordonnance d.e 1681.
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PAL A J S
DE
').6,
PRO VEN C E;
Le Lieutenant de l'Amirauté, par fa Sentence du J') Seprembre J778, fir droir à la demande de Laurent Labbé,
avec dépens.
.
'Labbé la fit lignifier aux AlTureurs, fous la protef!:arion
& réferve de tous fes droits.
Les AlTureurs en appellerent pardevant la Cour; & comme
elle étoit exécutoire nonQbftanr l'appel, ils préfenterent une
requête en furféance; fur le concours des requêtes refpectives, la furféance fut renvoyée en jugement, le tour en
état continué, en donnant, par les Affureurs, bonne & fuEfifante caurion.
Les Affureurs oppofoient, en premier lieu, qu'il ne conftoit pas que le dommage filt l'effet du cas fortuit ;-2°. que
le dommage n'avoit pas été légalement conftaté; 3°. qu'il ne
romberoit jamais qu'en avarie.
Ils ·obferverent d'abord que le rapport ne diroit rien fur
la caufe du dommage, & que deux faits doivent concourir;
pour donner ouverture à la perte d'affurance, un dommage,
& un dommage qui foit l'effet d'une fortùne de mer. \
Il conf\e d'un dommage, mais il peut être l'effet du vice
propre de la chofe dont les Affureurs ne répondent pas.
C'eft-là une queflion de fait, un point expérimenta!", qui
doivent décider les Experts commis pour la vinte d'un Navire; ils ciraient Valin (ur l'art. 29 du tir, des Affurances.
lIt di{oient en{uite que les Experts qui avoient procédé
au rapport de vifite n'avoient 'point prêté le ferment; dèslors leur rapport eH nul. Les Experts n'ont pu avoir la confiance de la Loi, puifqu'ils n'ont pas rempli l'épreuve qu'epe
exige; le ferment doit être prêté par tous ceux qui rempliffent des fonél:ions publiques ou judiciaires. Dans raus les
rapports femblables, il eft fait mention du ferment des Experts. Donc (concluoient-ils) le dommage, fondement de
la demande du neur Labbé, n'a pas été légalement conftaté~
d'ailleurs le rapport n'a pas été fait ainfi qu'il avoit été requis & ordonné; la J unice turque devoit intervenir. Il ne
paroît pas de cette intervention; le rapport dl: encore à cet
égard un aél:e illégal, une oreuve infuflifante.
.
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Enfin ( cOlltil1lJoiem les AlTureurs) en fuppofant que le
dommage fût conll:até par une preuve légale, & qu'il procédât d'une fortune de mer, il ne tomberoit jamais qu'en:
avane.
Laurent Labbé préfente comme caufe d'abandon l'innavi.
gabilité & même "l'échouement du Navire; l'un & l'autre
prétexte font également frivoles. Le Navire, qui efl: devenu
in navigable pendant le cours d'un voyage, par tempête, ou
autre cas fortuit, peut être abandonné aux Affureurs.
S'il ell: condamné comme n'étant bon qu'à être dépécé ;
il dl: entiéremem perdu. Si le Navire pouvant être raduubé,
il n'y a dans le lieu ni matériaux ni Ouvriers pour le radoub , cette im poffibilité locale a le même effet que
l'impoffibilité phyfique. Si le Navire pouvant être radoubé,
& étant dans un lieu où il ne manque ni matériaux ni Ouvriers, la dépenfe du radoud ell: cependant fi forte qu'elle
excede ou égale la valeur du Navire, il doit être encore
con'fidéré dans ce cas comme entiérement perdu; le radoub
fer.oit plutôt une reconll:ruél:ion qu'une réparation. Aucune
de ces trois efpeces d'in navigabilité n'ell: vérifiée de la part
de Laurent Labbé.. Le Navire n'étoit pas phyfiquemeilt
irréparable. Les Experts difent au contraire avoir trouvé
que le Bâtiment eH: en état de naviguer, pourvu qu'on lui
faITe les réparatÏons dont ils font le détajl.
.
H n'étoit pas irréparable relativement au manque d'Ouvriers
& de matériaux; les Experts n'ont pas dit que les matériaux
(le les Ouvriers manquaffem; ils prefcrivent au contraire le
radoud comme très-poffible dans le lieu. Il ell: de notoriété
publique qu'on trouve dans l'me de Chypre tous les matériaux & les Ouvriers nécelTaires.
Le Navire el\fin n'étoit pas irréparab'le relativement à l'exceffive dépenfe' du radoub. Dans tous les rapports où le Navire efi condamné par cette confidération, les Experts ont
l'attention de le dire. Ici ils ont tellement peu conlidéré la
dépenfe comme exceffive , qu'ils n'ont pas même cru nécef.
faire de l'évaluer; en un mot, un rapport dans lequel les
Experts fe bornent à décider que le Navire fercit en éta~
�D11 P A i
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b E PRO 'V E NeE:
269
'ile naviguer, pourvu qu'on lui fit les répara rions qu'ils détaillent, ne juH:ifie point une demande en abandon pour caufe
d'innavigabilité, fait effeél:ive, fait relative.
Laurent Labbé oppofe enfin ( obfervent toujours les Affureurs ) que le Capitaine n'avait point en main & n'a pu trouver
les fonds néceffaires pour le radoub.
Ce prétexte dl: inconcluant en droit; on ne peut l'admettre
fans contrarier l'Ordonnance, 'fans heurter direél:ement le
contrat qui a été paffé entre les Parties, & mettre l'infolvabilité & le di[crédit de l'Affuré an rang des périls de la mer,
gui [ont [euls à la charge des Affureurs.
Laurent Labbé répondait que d'après l'art. 26 du titre 6
de l'Ordonnance de la Marine, & par la nature du conrrat,
les Affureurs prennent [ur eux tous les rifques, toutes les
pertes, dommages qui arrivent [ur mer par tempêtes, naufrages, échouemens.
.
L'affurance dl: une convention par laquelle, moyennant
une certaine fomme, un particulier fe rend garant des accidens qui arrivent en voyage par cas fortuits à un Vaiffeau
ou à fan chargement; c'eft la définition qu'en donnent les
divers Commentateurs de l'Ordonnance de 1681 : conllentio
de r.ebus tuto transferendis pro certo prœtio feu allerjio periculi.
L'affureur prend pour lui-même le péril que les cho(es affurées courent fur mer. Allerjio periculi ita diaa quod aliquis
periculum allerfuin in mare in Je recipit.
Pour faire confter du rifque, le Capitaine doit s'adrcffer
au Conful, chef de la Nation, dans le lieu de fon établiffement ; il lui préfente un état circonftancié du uniftre auquel
il fe trouve expofé, ce qu'on appelle Confidat; lorfque le
Capitaine a fait fon expofition circonHanciée ; lorfqu'elle a
été affirmée par l'équipage; lorfque la religion du ferment
a imprimé le [ceau de la vérité fur ce qui dl:. expo[é , le
doute n'di plus admis, excepté le cas de faux; au moyen
de quoi l'information prife fur l'expofé eft une preuve légale
qui ne peut être détruite qu'en prouvant que .l'équipage 'l,
dépafé fauffement.
\
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t
0 U RNA L
-L'innavigahilité qui procede d'une tempête, eil: à la charge
des Alfureurs; les Loix & les Arrêts dill:inguem le finill:re,
de l'in navigabilité ; lorfqu'il arrive du vice propre, alors les
Alfureurs n'en font pas tenus; mais lorfque l'état du Bâtiment eil: changé par la tempête-; par les coups de mer, les
Alfureurs en font tenus, & c'eil: à cette difrinaion que fe
rapportent tous les Arrêt!! pour & contre les Alfureurs.
" L'innavigabilité ( porte l'avis de la Chambre du Com" merce ) pendant le cours du voyage, pourvu qu'elle arrive
" par tempête & autres cas fortuits, donne lieu indubitable" ment à l'abandon du corps du Vailfeau ; un Navire n'eil:
" fait que pour naviguer; dès qu'il eil: in navigable & qu'il ne
" peut plus remplir fa deHination , il eH entiérement perdu,
" & par conféquenr il peut être abandonné aux Alfureurs ; le
" cas d'innavigabilité ne fe trouve pas individuellement ex" primé dans l'artide 46 de l'Ordonnance, il Y eil: virtuelle" ment compris, & cette regle dans la pratique n'a jamais
" fouffert de difficulté.
" On diHingue ( ajoute la Chambre du Commerce) di" verfes forres rl'innavigahilité qui donnent également lieu à
" l'abandon; l'innavigabiliré qu'on peut appeller effeaive, fe
" rencontre lorfque .le Vailfeau eil: tellemenr délabré qu'on
" ne peut pas phyfiquemenr le radouber, & qu'il n'ell: bon qu'à
., être dépécé. L'innavigabilité qu'on peut appeller relative,
" fe trouve lorfque le Vailfeau pouvant être phyfiquement
" radoubé, fe trouve dans un lieu oÙ l'on ne peut trouver ni
" les matériaux, ni les Ouvriers nécelfaires pour le radouber;
" cette impuilfance opere le même effet que fi le Vailfeau
", étoit phyfiquement irréparable. Un autre exemple d'in na.
" vipabiliré relative, eH lorfqu'un Vaiifeau pouvant être ré" paré, & fe trouvant dans un lieu où il peut l'être, la
" dépenfe de radoub. & réparation feroit fi forte, qu'elle
" excégeroit ou ég~leroit la valeur du Vaiifeau après qu'il
" aurolt été réparé ; alors il eil: vrai de dire que le Vaif.
" feau eil: enriéremenr perdu, qu'on n'a rien confervé de
" ce Vaiifeau , puifque ce qui exilte ne vaut pas plus que
" les frais de réparation qu'on y ajoute~ Dans ces divers,
�1> u
PAL AIS
DE
PRO VEN C E"
271'
cas, le Vailfeau eH: véritablement innavigable & perdu,
" & peut être abandonné aux AlfUl'eurs. "
Ici l'in navigabilité elt vraie & prouvée ; le Capitaine ne
pouvoit remettre le Bàtimcnt en état de naviguer que par
des réparations dont la dépenfe auroit excédé la valeur du
Bàtiment.
L'a Polacre ét~it dans le meilleur état lorfqu'ellç fut nolifée par les Négocians Turcs pour Alexandrie; elle n'a' ,
dépéri que par les mauvais temps & la tempête qu'elle elfuya
au commencement du mois de Janvier 1776, & qui la firent échouer à FamagouHe; cela eH: juH:ifié par le rapport.
On y voit que le Navire avoit été 4élabré par les mauvais
temps; que les réparations qui y font décrites, & fans lefquelles on ne pouvoit le mettre en mer, embralfent tout le
corps du Bâtiment.
Le défaut de ferment des Experts ne rend pas le rapport nul; on ne procede pas dans les Echelles du Levant
en exécution des ordres du Conful, comme l'on procede
dans les·Jurifdiél:ions ordinaires: tout fe fait de pIano, & le
défaut de formalité qui vicieroit un aél:e judiciaire, là où il
y a des regles établies, n'opere rien dans un lieu où les mêmes regles ne font pas ufitées.
Il n'eH: pas fpécifié dans les pieces ni dans le rapport
que le Drogman & la JuH:ice Turque foient intervenus lors
de la vifite du Navire; cela ell: vrai: mais à Chypre, en rédigeant un rapport, on n'y fait aucune mention des pe,rfonnes
qui y affiH:ent. Au fonds, l'intervention de, la Jufl:ice Turque
ne pouvoit jamais regarder l'intérêt des Alfureurs; elle n'étoit
appellée 'que pour l'intérêt des Nolifataires Turcs.
Au furplus, le Vailfeau ne pouvoit être réparé ; il man'·
quoit de matériaux, d'Ouvriers & de fonds fuffifans. Si le
Conful François n'avoit été convaincu de l'importance des
réparations & du défaut de ce qui étoit nécelfaire pour
les faire, il n'auroit pas autorifé l'abandon du Vailfeau. ,Les
Experts n'avoient rien à déclarer à cet égard; ils avoient
feulement à décrire l'état du Navire & à fixer les réparah
~jons.
.
�'f.7'1
iJ
0
U RNA L
Par Arrét rendu le 22 Juin 1779, au rapport de Mr.. le
Confeiller de Ballon., la Sentence fut confirmée; & au moyen
de ce, la Cour déclara n'y avoir lieu à prononcer fur la furféance demandée par les Aifureurs, qui furent condamnés à
tous les dépens; écrivant Mes. Roman Tributiis & Verdet•
.
ARR Ê T
J
X X XII
J.
Le ferment en plaid eft déféré, arbitrio Judicis, contre le tuteur
'lui n'a point fait inventaire, ou qui refufe de. repréfenter
& de remettre les titres & effets d~ 'pupille·.
y
Acques Reveft, du lieu de Tourves, époufe le 23 No~ vembre 17)4 Magdeleine Guigou du lieu d'Auriol. Dans
le contrat de mariage, .Jofeph Reveft pere l'émancipe, &
lui donne entre-vif & pour caufe de nôces, la fomme de
2000 IiI'. payables en biens, effets ou argent, au choix du
pere & à l'eftime lors de l'infupporr. Jacques Reveft n'eut
aucun enfant de ce mariage; Marguerite Guigou l'inftitue
fon héritier univerfe1.
Le 28 Avril 17')'), Jofeph Reveft vend & tranfporre à
fon fils, fans aucune rétention, touS les. meubles, linges ,
ufl:enliles, batterie de cuifine & atltres effets qui fe trouvent
dans la :naifon, pour le prix' de 29') liv. dont le contra.
porre quittance.
Le 6 Mai fuivant, Jofeph Revefl: lui arrente pour trois
anllées , le logis & maifon du' Dauphin couronné. Ce contrat contient une ratification de la vente du 29 Avril précédent, & une énumération des' meubles, linges & effets
ljui y font vendus.
, En Janvier 1764, J~cques Reveft époufe en fecondes n6ces Marie-Claire Clar, & décede le 9 Oél:0bre 1771, laiffant une fille appellée Marie-Therefe-Virginie Reveil:. Après
fa mort, Jofeph Revefl:, aieul, s'empare de la tutelle de fa
petite-fille & de tous les biens qui lui appartenaient, & dé.
-,
cedf
�DU
PALÀIS
DE
PR"OVENCE.
:27'3
céda le 13 Oél:obre 177 2 , après avoir inilitué Mre. Jofeph
ReveIl: Prêtre fon fils, fon héritier univerfel; & l'avoir
nommé tuteur de fa petite-fille, qu'il n'avoit pourtant pa-s
fous fa pui1fance, étant née d'un pere émancipé.
Le 21 Janvier 1774, Marie Clar réclame la tutelle, par
une requête qu'elle préfente aux Officiers de Tourves;' eHe
lui ell accordée par Semence du 12 Avril [uivant. Elle fait
lignifier cette Sentence à Mre. Revefl:, & l'interpelle de [e
de1failir de tous les biens fonds, meubles, immeubles, &
généralemenE de tout ce qui appartenoit à 1« pupille.
Cette interpellation produilit un confentement à un arbitrage.
Mes. Pazery & Leclerc furent choilis pour Arbitres. Ils rendirent leur Sentence arbitrale le 21 Juin 1'774, par laquelle
ils déclarent que la Dlle. Clar doit être' mire en po1feffio1\
de tous les biens & droits obvenus à la pupille du chef de
Jacques ReveIl: fon pere, du chef de Marie-Anne Beauffier
fa grand'mere, & de celui de MaFie - Magdeleine. Guigou,
épou{e en premieres nôces de Jacques Reveil: [on pere; ils
'Condamnent Mre. Reveil: à la rémiffion de 'tous les titres,
papiers, documens appa'rtenans à Jacques Reveil:, fauf d'être
Hatué, ainli qu'il appartiendra, -{ur les juil:ificarïons ou induél:ion5. qui r.éfuheront des papiers, titres ou· documens,
ou en cas de 'rémiffioI1' ineomplette d'iceuX.·
Cette Sentence ayant ét-é homologuée par les Officiers de
Tourves, elle fut lignifiée le 21 Janvier 177S à Mre. Reveil, avec injonél:ion de r.emettre tous les titres, papiers;quittances & documens appartenans à l'lioirie de Jacques
Reveil, les meubles, linges, &c. enfemhle de donner le
compte de fon adminifiration:
'
Cette injonél:ion fut infruél:ueufe, & demeura comme non,
faite, ce qui obligea la Dlle. Clar de préfenter une requête'
aux Officiers de Tourves, par laquelle elle demanda que
faute par Mre. Revefi d'avoir exécuté la Sentence arbitrale,.
il fllt condamné à la Comme de 2S000 liv., fous la foi du'
ferment qui [eroit par elle prêté, pour lui tenir lieu· d'in""
demnité de tout ce que ledit Mre. Reveil: lui dérenoit. Le<
Iuge-d~ Tou~~~s acwrcla le~ fins de celte demal1' de, & !'-exé:1'M m.
�Jou li
2.74
N A
L
curion de la Sentence nonobll:ant & fans .préjudice de l'appel" en donnant par la DUe. Clar bonne & fuffifanre caution.
Le ) Mai 1777, cette Sentence fut fignifiée à Mre. Revell:, '!vec déclaration que n'étant pas au pouvoir de la tutrice de lui offrir des cautions qui lui fuifent agréables, elle
lui offroit le cautionnement juratoire de tous les biens &
droits de la pupille, fe réfervant, à défaut d'acceptation,
le droit d'appeller elle-même de la Sentence.
Mee. Reveil: contell:a ce cautionnemenr juratoire, & la
Dlle. Reveil: évoqua l'inHance pardevant la Cour, attendu
fa pauvreté. Elle difoit que le ferment en plaid, appellé chez
les Romains. jusjurand~m in [item, ell: une eftimation religieufe du dommage que le demandeur reçoit par le dol, le
fait & la malverfation du défendeur. Il ne ferait guere poffible d'apprécier
dommage à fa jufte valeUl;; il faut d'ailleurs punir le dol, l'injull:ice & la mauvaife foi. L'appréciation en eH donc laiifée au demandeur; & comme il pourrait être prévenu en fa faveur ou aveuglé par fan intérêt, &
faire une ell:imation exceffive, cette ef!:imation exceffive ef!:
purifiée par la voie du ferment. C'ef!: par ce tte raifon que
le ferment in litem ell: appellé par Cujas religiofa eflimatio ,
étant réellement une e/l:imatîon du dommage, remife à la
religion & à la bonne foi de la partie. Le but de ce ferment
l:1l: de rétablir les chofes dans l'ordre qu'elles doivent avait
par leur état natutel & l'inll:irution civile, d'enlever la l'oCfeffioi't à celui qui l'a ufurpée , & de la remettre à celui à qui
elle appartient légitimement. Jusjurandum in litem non alid
tle caufd deferri quàm ne quis invùùs & adverfarii dolo cogatur re fut! carere. ( Faber, error. 6, décad. 18; Buiifon en
fan Code, liv. 'l, tit. )3, n. 1. )
.
Chaque citoyen doit jouir paifiblement, fous l'empire des
Loix, du domaine qui lui a été tranfporté par fes ancêtres,
ou qu'il a acquis avec titre & bonne foi; cette propriété ne'
doit lui être enlevée que par fan confelltement, & jamais
par le dol ou par violence & oppreffion. Le fermenr OU
l'ell:imation qui ell: délaiifée à la partie fur la valeuJ: de la,
ce
�DU PAL AIS DE
PRO VEN C li'.
'2.7~
chore qui efl: en litige, efl: un moyen équitable, introduit
par les Loix Romaines, pour punir d'une part la fraude
& la mauvaife foi, & venger de l'autre l'outrage qui efl:
fait à la propriété & à la poffeffion civile. (Buiffon en (on
Code, liv. ~, tit. n, n. 1; l'Auteur du Journal des Audiences, tom. l, Ev. 8, ch. 2.)
.
Ce ferment a lieu, tant aux contrats de droit, qu'aux
contrats de bonne foi; il efl: reçu pour. les aél:ions réelles,
comme pour les aél:ions perfonnelles ; il fufEt qu'il foit queftion d'une demande en refl:itution, fon admiffion efl: prononcée, lorfque par le dol du défendeur la chofe n'efl: pas
refl:ituée ni exhibée au demandeur. Telle efl: l'opinion de
Ferrieres en fan Diél:ionnaire de Droit & de Pratique, vo,
Serment, jùr l'eflimgtion d'lIlle [omme pour laquelle il y a procès; de Defpeiffes, tom. '2., pag. f1.8, n. 12; de Buiffon
en {on· Code, liv. ~, tit. n; de Duperier, tom 2, pag.
13 ~; de Me. J u}ien dans fon Commentaire fur les Statut~
de Provence, tom. 1 , pag. 77 , n. 8.
_
En particulier, le ferment in litem ell: reçu pour l'aél:ion.
de tutelle, contre le tuteur qui n'a point fait inventaire ouqui a mal adminiftré, & qui a porté un torr réel au pupille,.
dont l'adminiHration était confiée à fes foins. L. Tutf1r 'lu;;;'
repertoriZlm 7 ,ff. de j;z litem jurando. Cujas fur cette Loi,/
Ferrieres & Duperier aux endroits cités; Boniface, tom.
IiI'. l , tit. 39, n. 1 ; Dumoulin fur la coutume de Paris ,_
§. 9, glof. 6 in va. Rendre compte, n. 34.
Tous ces principes, ajoutoit la DUe. Clar, reçoivent uneapplication exaél:e aux circonflances de la caufe. Mre. Revell: s'eH conduit avec dol, fraude & mauvaife foi; il s'eH
emparé de .la fortune entiere de fa pupille; il détient fes
immeubles, fes meubles, titres & papiers; il jouit paifible-ment des biens de fa niece, qu'il dégrade & aliene journellement par des aél:es frauduleux; il n'a point rendu le
compte tutelaire, il ne veut point exécuter la Sentence arbitrale. Dans ces circonitances, le ferment en plaid ne fau-.
roit être refufé à la DUe. Clar. ~e ferment demandé jufqu'à.
Mm 2.
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la concurrence de 2S000 liv. , ne préCente aucune évaluation exceffive; la réparation doir êrre proportionnée au dommage reçu; la fixation doir êrre relarive aux privations &. auX
perres. La DlIe. Clar donnoir enfuite le tableau du dommage que la pupille avoir reçu de la part de fan oncle & de
fan tuteur.
Mre. Reveil: oppo[a en vain qu'il érait de bonne foi; qu'il
avait adminillré une tutelle que lui déférait le rellament de
l'aïeul.
. Par Arrêt rendu au rapport de M. le Confeiller de Thorame, le 2) Juin 1779, la Cour ayant aucunement égard aux
fins principales de Marie-Claire Clar, faute par Mre. Reveil:,
ci-devant tuteur, d'avoir fait invenraire , & d'avoir exécuté
la Sentence arbitrale, le condamna à payer à la tutrice la
fomme de 6000 liv., fous le ferment en plaid qu'elle prêteroit, pour la Comme être placée [ur un Corps relféant &
folvable, au profit de Matie:Therefe-Virginie Reveil, & lui
tenir lieu d'indemniré. Mre. Reveil: fut condamné aux dépens.
276
ARR Ê T
RNA
X X XIV.
Les lurés-Prifeurs ne peuvent prétendre les quatre' deniers pOlfr
livre filr la vente volontaire ou privée des meubles.
'T 'Hôpital
Général de la Miféficorde de la ville d'Aix ayant
~recueilli la fucceffion de Mademoi[elle de Bezieux, les
~rs firent procéder à la vellte privée des meubles. Le
fleur Pi,radeau, Régilfeur des droirs attribués aux Offices de
Jurés-Pri[eurs, vendeurs de meubles, créés par Edit du mois
de Février 1771 , demanda de percevoir [lIr cette vence les
quatre deniers pour livre attribués à ces Offices; il [e pourvut
pardevant le Lieutenant-Général pour faire. condamner les
Reél:eurs. de l'Hôpital au paiement de 1000 liv. d'amende, ~
�DU PAL AIS ri E - PRO' VEN C E.
. 277liv. de dommages-intérêrs, tenant lieu des quatre
deniers pour livre ;' l'in!l:ance fut évoquée pardevant la
Cour.
La province, inftruite de la prétention du fieur Pirodeau,
intervint. dans l'inftance; elle difoit qu'en 1'696 le Roi avoit
créé des Offices de Jurés-Prifeurs; qu'en 1712 il créa enèore des Offices de Commilfaires aux prifées & ventes de
meubles.
Ces Offices ne furent ni levés ni exercés en Provence; lePays abonna ceux de Commilfaires aux ventes moyennant
la fomme de 1 ~o mille livres. Dans le mois de Février 1771
il fut rendu un nouvel Edit qui, dans les articles 1 & 2,
:éteint &; fupprime les Offices créés par les anciens, en érige
de nouveaux dans toutes les Villes & Bourgs du Royaume,
& fe réferve d'en fixer le nombre & la finance.
Par les articles ~ & 6 on fixe les fonél:ions que les nouveaux: Officiers doi~ent .remplir & les droits qu'ils peuvent
percevoir, notamment quatre deniers pour livre fur le mentant des ventes. Quelques mois après, & le 7 J uiUet même
année, Arrêt du Confeil revêtu de Lettres-Patentes, par
lequel le Roi fe réferve de percevoir ces mêmes droits à fon
profit. Il dl: porté par cet Arrêt: 1°. qu'il fera furfis à la
levée & vente des Offices de Jurés-Prifeurs, vendeurs de
biens meubles, jufqu'à ce qu'autrement il ait été ordonné.
2. 0. Que les Notaires, Greffiers, Huiffiers ou Serge-es Royaux
pourront faire valablement, lorfqu'ils en feront requis, les
prifées & ventes des biens meubles •.. ; qu'ils jouiront des
vacations réglées par l'arr. 6 de l'Edit, fans qu'ils puilfent
s'attribller les droits de quatre deniers pour livre fur le montant des ventes; defquels droits néanmoins les Notaires,
Greffiers, Huiffiers ou Sergens Royaux qui feront les ventes,
feront tenus de faire la perception pour en compter à celui
qui (era prépofe au recouvrement.
La Déclaration du 17 Août même année, réferve également
au profit du Roi la perception des quatre deniers pour livre
fur le prix des ventes.
Depuis lors le~ çhores font demeurées en çet état i le.~
à
~oo
�'-7S
] 0 U R 'N A L
Offices de Jurés-Prifeurs , vendeurs de biens meubles, dont
le premier établiffement remonte à l'époque de 1696, n!ont
jamais été I~vés en Provence; ils ont toujours été regardés
comme des inftitutions étrangeres au pays. Les nouvelles loix
concernant ces Offices [ont des loix purement burfales , dont
le plus fouvent l'effeteft fubitement féparé de la caufe.
D'une part, elles fuppofentque les fonétions attribuées aux
Offices de Jurés-Prifeurs exigent par leur importance des Titulaires particuliers; elles affignent certains droits à ces Titulaires. D'autre part, elles [ufpendent dans le même inf·
tant, & pour un temps illimité, la levée & la vente de ces
Offices,. elles ne laiffent fublifter que les droits deHinés aux
Titulaires, & elles ordonnent que ces droits feront per'rus au
profit du Roi.
Voilà donc l'effet réparé de fa caufe ; les gages n'avoient
jté fixés que pour les fonétions. On fufpend l'exercice des
fonétions , & on ordonne le l'aiemç,nt des gages. Ce qui
n'étoit établi que comme falaire, eft fubitement transformé
en exaétion. L'exécution de la loi en contrarie le principe; &
au lieu de former le nouvel étahliffement que l'on annonce,
on leve un impôt qui n'avoit pas même été annonc~.
Il s'agit ici d'une vente purement volontaire, qui n'a poinr.été faite après un inventaire, ni. par autorité de J ull:ice. Il
eft certain que les quatre deniers pour livre ne font que
l'émolument attaché par l'Edit de 1771 aux fonétions des
Jurés-Prifeurs; cela réfulte de l'article 6 de cet Edit. A la
vérité la levée & la vente des Offices de Jurés.Prifeurs one
été fufpendues, & il a été dit que les quatre deniers pour
livre doivent être perçus au profit du Roi; mais il ell: également vrai que ces quatre deniers pour liv're ne peuvent être
per'rus ail profit du Roi que dans les cas & dans les circonf..,
tances où ils auroient été per'rus par les J ures-Prifeurs eux",:
mêmes.
L'arr. S de l'Edit de 1771, n'exige éu ne [uppofe l'intervention du miniftere des Jurés-Prifeurs que dans les ventes
faites volontairement -après les inventaires, ou pa'r autorité
lile J ull:ice. Auffi toutes les loix n'ollt jamais parlé q~e des
�u PA 1;! 1 s D E PR:o VEN C F. .
279
wntes forcées faites par autorité de J uflice, ou des ventes
faites après les inventaires. La preuve en dl: dans la Déclaration du I2. Mars 1697, rapporrée par Brillon au mot
Huiffiers, na. ~ , à laquelle les loix nouvelles n'ont fait que
fe conformer; & d'après la loi fiacutaire du pays, il n'dl:
dû au Prince aucun droit d'encan Iilr les ventes volontaires
des meubles.
De droit commun chacun eil maître de difpofer de fon
bien, rei jùœ quifquis moderator & arbiter. Chacun peut librement vendre ce qui lui apparriene ; cela dérive du droit
de propriété, droit toujours facré & plus inviolable encore
dans les chofes mobiliaires. Il dl: des aB:es dans la fociété
pour lefquels nous avons befoin de l'autorifation de la loi
civile; mais les ventes one toujours été rangées dans la
c1affe des contrats qui appartiennent au droit des gens, &
qui conféquemment n'ont pas befoin d'une autorifation expreffe de la loi. poûtive ,jure f5entium omnes penè contraaus
introduai flint ut emptio & venditio. Infrir. liv. 1, tit. 2., §.
2. Delà les ventes font confommées par, le feul confentement
des Parries, fans l'intervention du minifiere d'aucun Officier
public, conJenfu fiunt obligationes in emptionibus, v.enditionibus; l'écriture n'y eH pas même n;guife, fcripturd non
opus efL Pour lier .les contraB:ans, il ne fàut que leur volonté
réciproque; ils fone les rnaitres abfolus de la fixation du
prix comme cie toutes les autres conditions ; il leur eil même
permis, pour nous fervir de l'expreffion de la loi, de fe circonvenir entr'eux, Je invicem circumvenire. Leurs pa.B:es, quoique privés, font des loix inviolables, pourvu qu'ils ne foient
pas contraires à la police générale ou aux regles de la juftice naturelle; il feroit donc abfurde & contraire aux premiers élémens du droit ~e fuppofer que .pour les ventes volontaires on a hefoin de l'intervention de l'autorité publique.
LorCque la vente eil forc6e, lorfqu'elle fe fait par autorité
·de JuHice, on fènt qu'il eil utile, pour l'intérêt du tiers,
d'obferver certaines formalités, d'appeller un Officier public
fur qui l'on puiffe fe repofer de :1'eHimation juHe des objets qui font à vendre. Mais hors delà, pourquoi vouloi~
Jj
�2.80
Jou Il. 11' AL'
obliger un citoyen qui vend librement [es meubles, & qui
les vend à qui- il veut & comme il veut, de recourir à des
Officiers de Jufiice, dont le minifiere n'efi jamais requis en
chofes purement libres & volontaires? Un particulier vend
quelquefois fes effets mobiliers par befoin; fouvent il lui arrive de les vendre par luxe, c'efi-à-dire, dans l'objet de les
remplacer par des meubles plus fomptueux; plus fouvent
encore il change de meubles, parce qu'il change de domicile. Faudra-t-il dans tous ces cas que ce particulier fe jette
dans un dédale de procédures inquiétantes & ruineufes?
Faudra-t-il que pour ufer du drcit naturel que l'on a de
vendre fon bien, on fnive des formes, qui dans plus d'une
occafion , dévoreroient le prix même de la vente? Cela n'ell:
ni raifonnable, ni poffible.
A la vérité, l'Edit de 1771, après avoir parlé des ventes
faites par autorité de JuHice, parle auffi des veRtes volontairement faites; mais il s'en faut bien que cet Edit veuille
envelopper toutes· les ventes volontaires. Il. ne difpofe que
pour les venœs faites volontairement après les inventaires ;'
la venre faite après inventaire, n'eH qu'une fuite, une conféquence de l'inventaire lui-même. Communément l'inventaire porte l'efiimation, la prifée. Donc après l'inventaire,
le droit dl: acquis aux Officiers-Prifeurs. N'importe que
la vente foit enfuite faite volontairement; c'eH l'inventaire
fait avant la vente qui dl: dans ce cas le principe de la
perception du droit'.
Quand on dit que l'inventaire renferme communément
l'efiimation ,on ne parle que d'après des Loix connues.
L'art. 7 du tir. 2. de l'Ordonnance de 1747 fur les f-ubHitutions, veut que l'h,)ventaire contienne la prifée des meubles, & cela même dans les pays où il n'eH pas d'ufage de
la faire. Mais quand ce n'ell: pas le cas de faire inventaire,
quand la Loi n'a point à veiller à l'intérêt du tiers, quand
la Hberté des contraél:ans eH entiere, comme dans les ventes
purement volontaires, alors il n'y a· pas matienl à prifée"
ni à efl:imation juridique.
:. Les Arrêts dl.l Conreil des 4 Jllil1e~ & n Août
In",:-~
�DU
PALAt's
'DE
P'ROVENCE'
281
T
20 Juin 1773, & 14 Jui·llet 1774 qu'on oppofe, ne peuvent
être d'aucune confidération; ils {(mt -Intervenus fiJr'Jil fimple
requête du Régilfeur; les Parties condamn'~es n'ont point
été entell:dues; elles auraient pu attaquer ces Jugemens par
la voie de l'oppofitlon; elles .'ne l'ont pas fait, parce qu'elles
ont vraifembJ.ablernem mieux -aimé fubir la condamnatiOll
prononcée, 'que d'aller fuivre à gnr~ds fràis l}ne' in!fanc'e rui.
neufe dans la Capitale.
Par Arrêt rendu le 2) Juin 1779, 'au' rapport de Mr. te
Confeiller de Ballon, le Régiffeur fut débouté de fa de~
mande .avec ~éperi5 ; écrivam ..M,e. Portalis lors Affe1feu~';'
&
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Arrêt femblllbie 'du même jour,
Piété de la· ville de Marfeille.
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J.'"
L'e chef-d'œuvre ~rdonné p'ar leY Jl;ges dè Pbl[ce doie Ûre' 'ertr'·
miné en leur pré-fence & celle'des Jurés du Corps.'
Lorfque le rllpp'0rt r-ejette té chef-cPœiivre ,'ôn 'n'a- pds- befpia
- d:en ·dédarcr reeours'l oh p'éut' ,deint;ndér un [e~ondJ examen;
f
;.
J
.r. ..... d ..... '
..
Il
l n
(
:/ ~ Ntoine Mèilfien kyani faIt' [on app~entIJrage & rra-,..t')\..vaiJ.lé long-temps '~n qualité de Compagnon, voufuc
fi: faire' agréger au Corps 'des Maîtres Cordonaiers de. la ville
d'Aix; on lui prefcriv·it p9,ur çhef-d'âalVre 'u~eFaire de bot~es
à,.pli 'C011éhé; I1he' àutre' à· fat de vacbe, (ùne p'aire de fou;
J>iers de vache à' double femelle, & UIT colret de' madoquin
toué éntier-, -fall'S découper., MeiJfreIT préten~it qu'on devait
lui .afIignel'- des ouvrages à la mode- du temps, & non- une
~ieille chau1fure- qu'il ne connoiifoit que' par tradition ,. &
'l.u"aucun deS' Maîrres dt!' Corps ne feroit. en ét~t de faire ni
de juger• .JI· fe pour.vut am(· Lieutenans--Généraux de, Police_;
'lui, par leur décret du 18 Septembre 1778, enjoignirent'aux
chef,:•.
..fcieua
--- d'ajfemblg.;·le
.. _. - Corps pour. lui
_.. -indiquer Nun-autre
u.
~
d
~
._~_
~-
�;2.82.
Jou RNA L
d'œuvre. Le Corps. aJrembl0 prefcrivitl'our chef-.d'œuvre
ùn'é 'paire de bottes ~olles, une paire de bottes forces ,. une
paire de -fouliers bon point, & une paire d'efcarpin fans lilfe
à talon de bois.
Meiif;en, qui ne vivait que. de (on travail, écoit dans
l'impuiJrance de fOlfr~ir amc fra.is d'un <:hef-d'œuvre auffi pifpéndieux, &' qui r pouvoit l'occuper plus de quatre mois. Il
fe pourvut ~ne feconde fois; il expofa qu:il n'écoit pas néceffaire, pour éprouver la capacité d'un Afp.irant, de le fou!Uettre à d<:s {p,reuv!s ml,lltipliées; que celui qui étoit en état
deJa,i[e lune, b~tte" pouvoit en faire dix & vingt·; . & par
OrJonnance du 7 Oaobre fuivant, ce chef-d'œuvre. f\lt répui~.~,:u~e Jb.?ttej.<;rtl;, à une botte molle, à une paire d'efcarpll1 fans Idfe a talon 'de bois, & à une paire de fouliers
bon point.
Les Ma~res _G.or4.OOlliers appellerent de cette Ordonnance pardevant la Cour, & fe départirent enfuite de leur
appel. Le chef-d'g:uy,re p~efcrit par les Lie.utenans de Police
devoit être examiné en leur préfence par les Prieurs & Jurés
du Corps.· Mais à peine fut-i.l fini, que quelques Maîtres',
autres 'que les Prieurs ~ Jurés, s'a1femblere~t à ,l'infu, de
l\feiifre~l pouF en, faire .l'e~amen; l'ou.vr.age fut jugé défeaueux da,ns ,çoutes.\~es parties j ils en dreiferent' leur rapport, ils le firent lignifier à MeiIFren. Ce dernier préfenta
une nouvelle requête aux Lieutenans-Généraux de :police, &
demanda que les Prieurs &Jurés du ,Corps feroient .affignés
pardevant eux, à l'elFet d'examiner & de juger fon ouvrage.
L'affignation lui ayant ét~ accoçdée parJe ~écret qui in-:tervint le 2.6' Npvembre 1778, ,& ayant été donnée, les
Prieurs & Jurés appellerent du décret, & né\lnmoins ils COlIlparurent à l'Hôtel-de-VilIe, exçepté Grognard & J,'layofc; ils
,Bxaminerent le chef-d'œuvre; ils le trouverent bienfait. Il
réfulce du procès-verbal qui fut dreifé par les Lieutenans de
~?lice ,'ql1e de huit Examinat~ur.s il y en eut cinq qui l'app.rouvere nt , les trois autres .ne voulurent pas donner leur vœu•.
L~s Pri~lfrs & Jurés s'étant. retirés., les Lieucenans de Po~ice firent clorre leur procès-verbal_, & rendirent ijne 9rdon,
�DU
PAL AIS
Dl!
PRO VEN C E;
23J
nance par laquelle Meiffren fut reçu au nombre des Maîtres
Cordonniers, pour en el<ercer la profeffion & jouir de touS les
honneurs & prérogatives du Corps, en payant les droits
ordinaires de réception.
Les Maîtres Cordonniers préfenterent enfuite fur l'appel
qu'ils avoient déclaré du décret du 26 Novembre 1778, &
par requête incidente du 24 Février 1779, ils amplierent
leur appel envers l'Ordonnance qui reçoit Meiffren à la Maltrife.
Meiffren [outetlOit que les Cordonniers étoient non-rece:':'
vables & mal fondés dan's leur appel envers le décret du 26Novembre 1778. Non-recevables, parce qu'ils avoient euxmêmes exécuté ce décret en comparoilfanr pardevant les Lieutenans-Généraux de Police, & en examinant le chef-d'œuvre
en leur préfence. L'on ne peut plus reven-ir contre un Jugement acquiefcé; or l'exécution eft un acquiefcement tacitequi a autant & même plus de force qu'un acquiefcement
formel; c'eft la décifion de la loi ad fol'utionem , cod. de rl:judicatâ. Mal fondés, en lie que ce décret étoit jùfte & conforme aux regles. Il faut confidérer le rapport qui fut fait
par quelques Maltres Cordonniers, comme s'il n'avoit jamais.
exifté. 1°. Ces prérendus AdjoiO'ts -n'avoient ni pouvoir tri.
caraél:ere pour juger de la capacité de l'Afpirant ; ce droit
n'appartient qu'aux Prieurs &. JUFés du Corps , fui~ant l'ufage& les Réglemens des Communautés d'Ârtifans. 2 • Le chef:..d'œuvre ayant été prefctit par une Ordonilance de Police"
c'étoit en préfence des Juges qu'il devoit être examiné. Ilfuit
delà que le décret qui ordonna que les Prieurs & Jurés feroient affignés à campa'roître au Bureau de Police pom li'
procéder à l'examen du chef-d'œuvre, ne pouvoit pas ê.re attaqué, fous prétexte qu'il exiHoir déja un râpport de véri'fi. cation.
n ne faut pas confondre l'examen d'un chef-d'œuvre avec
les rapports ordinaires qui ne peuvent être attaqués que par
la voie du recours" & defquels il eft -permis de recourir juf-qu'à ce qu'il y ait trois rapports conformes. La vérification.
d'un fait ex,eérimental sui intére1fe les biens, la fortune des
-
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- -- -
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tin
2-,
.
•,
�~84
Jou ll. N À L
citoyens, exige des formalités, des délais; un ordre de pro-"
cédures ; il dl: néce1faire que les Parties qui plaident pour
des objets importans puj1fent éclaircir la vérité des faits
que le Juge ne peut connoître de fa place que par l'uniformité de certains nombres de déci fions expérimentales. Mais
l'examen d'un chef-d'œuvre ell: une opération.-fi.mple & fommaire qui ne fauroit comporter les formalités & lès procé.
dures ufitées en matiere de rapports ordinaires; il ne peut
pas être affujetti à des recours, dont la multiplicité donneroit
lieu à des frais' confidérables & à des longueurs que les Afpirans. feroient hors d'état .de fupporter.
. La police des Corps PQur l'intérêt public, exige que les
Arpirans faffent un chef-d'œuvre, & que ce chef-d'œuvre
foit examiné & jugé par des gens de l'art. Il fera vrai, ft
l!on veut, qu'en bonne politique, les profeffions d'Arrifans
Be doivent être 'confiées qu'à des hommes-expérimentés, afin
que la foi publique ne fait pas nompée, afin que les arts
approchent toujours plus de .leur perfeél:ion. Mais ce méma
motif d'imérét puhlic exige auffi que cet examen foit fait
fommairement & fan~ formalités, pour ne pas décourager
les ouvriers, en les expofant aux longueurs -& aux frais des
procédures. Il importe au bien du commerce, de leur faciliter .les moyens de faire valoir leur indull:rie, & d'applanir,
autant qu'il ell: poffible, les difficultés qu'on peut leur faire
pour les empêcher de parvenir à la maîtrife.
On peut juger ùe la capacité d'un Afpirant, fans l'a1fervir
à des formalités fuperflues, qui peuvent le dégoûter de fon
érat. .si par un premier examen, fon chef-d'œuvre eil: re}etté, il a la fac'ulré d'en demander un fecond, fans être
obligé de recourir du premier, parce que la voie du recourS
. eil: inutile en pareil cas; i:l en réfulteroit les plus grands inconvéniens, fi elle pouvoie être admire. Ce point de regle
ell: expre1fément décidé par l'article '17 de l'Edit d'Henri III,.
.donné en 1 S81.
Cette Loi, qui régit toutes les Communautés d'Artifans,
eil: claire & précife. Elle nous apprend de quelle maniere
r~.n doit procéder à la vérification d~s chefs-d'œuvres & aux;
�bu'
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i AtS li Ii
PRO V li NeIl"
28)
dceptions; elle ne dit pas que l'ACpirant ne pourra demander
un [econd examen qu'après qu'il aura attaqué le premier par
la voie du recours, elle dit au contraire que le Cecond examen lui fera accordé fur le champ & fans autre formalité.
Ce qui prouve que ta voie du recours ne peut pas avoir
lieu, c'ef!: qu'il ne peut y avoir que deux examens, felon la
diCpoIition de l'Edit; c"ef!: que l'Afpiranc ef!: le feul en 'droit
de demander un [econd examen, fi le premier ne lui ell:
pas favorable.
>
De forte que le Juge, en admettant à la maitriCe l'ACpirant, dont le chef-d'œU\'re 'eft approuvé par l'un des deux
examens, ne fait pas fonaion d'Expert; il ne décide pas
lequel des deux doit l'emporter; il décide, d'après la Loi,
que la capacité de l'ouvrier ef!: [uffiCamment' déclarée & attefl:ée par la foi d'un feul rapport de vérification.
Indépendamment de la difpolition de l'Edit & de l'urage '
conftamment obfervé,- ce fingulier CyHême de recours a été
plufieurs fois condamné, par les Arrêts de la Cour, & nQtamment par celui rendu le 30 Mai 1763, en faveur du
nommé Gerbier, contre I-:s Prieurs des Maîtres Cordonniers de la ville d'Aix, qui furent déboutés de ,leur requête
en caffation du verbal & du rapport de vérification, & qui
confirma l'Ordonnance des Lieutenans de Police qui avoit
l'ecu Gerbier à la MaitriCe.
'Les Maîtres Cordonniers répondoient, qu'il en eft d'un
rapport comme d'une Sentence, il fublifie tant' qu'il n'eft
point attaqué; il falloit faire celfer l'effet du rapport des adjoints; il falloit en recourir avant que d'en demander un
autre; & les Juges de Police ne pouvoient pas ordonner
une nouvelle vérification du chef-d'œuvre, en lailfant intaae
la premiere ; les Juges de Police ne pouvoient pas fe décider CUl' la foi du fecond rapport, au préjudice du premier.
Ces deux rapports étant conrradiaoires, c'étoit s'ériger euxmêmes en Experts, & prononcer Cur un fait expérimental",
dont i'!1' n'avoient aucune connoilfance. Si lorfque le chefd'œuvre e.fl: rejetté par un premier examen, l'ACpirant a le
è,roit d'!u demander un [eçoud , il doit être permis aUl5
�J
~85'
0
V 11. N A L '
Prieurs du Corps d'en demander un troifieme; la Loi doit:
être égale.
D'ailleurs le chef-d'œuvre ne devait pas être examiné en
préfence des Juges de Police, attendu qae les Examinat'eurs,
obligés de fe communiquer refpeétivemertt leurs lumieres
pour juger de. la perfeétion d'un ouvrage, doivent difcuter
leurs obfervations dans le filence & en pleine liberté. Le
chef-d'œuvre ne pouvait pas être déplacé; les Juges dePolice étaient obligés d'accéder fur le lieu du dépôt, pOlar
s'affurer que le chef-d'œuvre était le même que celui auquel
l'Afpirant avait travaillé; enfin le fecond examen n'énumererien en détail, & ne combat point les raifons déterminatives du premier; cet examen fut fait par cinq Prieurs ou'
Jurés, dont l'un avait figné le premier rapport, & l'autre
était beau-frere de l'Afpirant.
Par Arrêt du 2~ Juin 1779, au rapport pe M. le Con,;.;
[eiller de Montvallon, l'Ordonnance des Juges de Police fut
confirmée avec dépens; écrivant Mes. Rambot &.
- ••
ARR Ê T
X X X V J.
Le parent n'ejl pas reçu à retraire lorJque l''aae de vente préfente 1111 objet que le vendeld a eu fpécialement en vue, &.
que le retrait feroit cèJJer.
-.
i Ar aéte du 8 Février 1762, Jofeph Reynoard, Négo~
cram de la ville de Cuers,. vend à Jacques Audier, Char'-retier de la même ville, la terre qu'il poffédoit au terroir de
Cuets, quartier de la RouTlTiltiere, au prix dé 2000 liv.; il
le chargea. de payer 690 liv. aux créanciers y déno'mmés,
& en confidérarion des 1310 lillres reftanres (fut-i:l dit dans
l'aéte) Audier promet encore & s'oblige de- nourrir à: fa table
& ordinaire, habiller & entretenir Reynoard, fiiivanD fàn étM;
peudant tout le temps qu'il- vivra, en travaillant de·fon mieux
li [on profit j & en caJl qu'ils ne fiifJent pds d'a"orâ;' de !u1:
P
•
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~85'
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V 11. N A L '
Prieurs du Corps d'en demander un troifieme; la Loi doit:
être égale.
D'ailleurs le chef-d'œuvre ne devait pas être examiné en
préfence des Juges de Police, attendu qae les Examinat'eurs,
obligés de fe communiquer refpeétivemertt leurs lumieres
pour juger de. la perfeétion d'un ouvrage, doivent difcuter
leurs obfervations dans le filence & en pleine liberté. Le
chef-d'œuvre ne pouvait pas être déplacé; les Juges dePolice étaient obligés d'accéder fur le lieu du dépôt, pOlar
s'affurer que le chef-d'œuvre était le même que celui auquel
l'Afpirant avait travaillé; enfin le fecond examen n'énumererien en détail, & ne combat point les raifons déterminatives du premier; cet examen fut fait par cinq Prieurs ou'
Jurés, dont l'un avait figné le premier rapport, & l'autre
était beau-frere de l'Afpirant.
Par Arrêt du 2~ Juin 1779, au rapport pe M. le Con,;.;
[eiller de Montvallon, l'Ordonnance des Juges de Police fut
confirmée avec dépens; écrivant Mes. Rambot &.
- ••
ARR Ê T
X X X V J.
Le parent n'ejl pas reçu à retraire lorJque l''aae de vente préfente 1111 objet que le vendeld a eu fpécialement en vue, &.
que le retrait feroit cèJJer.
-.
i Ar aéte du 8 Février 1762, Jofeph Reynoard, Négo~
cram de la ville de Cuers,. vend à Jacques Audier, Char'-retier de la même ville, la terre qu'il poffédoit au terroir de
Cuets, quartier de la RouTlTiltiere, au prix dé 2000 liv.; il
le chargea. de payer 690 liv. aux créanciers y déno'mmés,
& en confidérarion des 1310 lillres reftanres (fut-i:l dit dans
l'aéte) Audier promet encore & s'oblige de- nourrir à: fa table
& ordinaire, habiller & entretenir Reynoard, fiiivanD fàn étM;
peudant tout le temps qu'il- vivra, en travaillant de·fon mieux
li [on profit j & en caJl qu'ils ne fiifJent pds d'a"orâ;' de !u1:
P
•
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE
2,
87
'payer, dès le jour de l'infupport, dix fols chaque jour, auJli..
là vie durant.
Pierre Reynoard, Maitre Chirurgien, & frere du vendeur,
demanda d'être admis au retrait; il Y fut recru par Sente!lce
du Juge de Cuers du 24 Mai fuivant.,
Audier appella pardevant le Lieutenant 'de Toulon, &
dans l'inf!:ance d'appel il fit affif!:er fan vendeur, pour voir
dire que là où la Sentence ferait confirmée, il ferait déchargé
de routes les obligations qu'il avait contraél:é à fan égard.
Jofeph Reynoard donna des défenfes ; il foutint que le re·
t,rait ne pouvait être admis' fans fan confentement, que
n'ayant pu fe comporter avec fan frere, il n'étoit pas juf!:e de
maintenir une Sentence qui rendait fa lituation pire, en le
renvoyant à un cas d'infupport qu'il n'avoit pas à craindre de
la part d'Audier ; il adhéra à l'appel déclaré par ce dernier.
Le Lieutenant de Toulon réforma la 'Sentence par celle du
'12 Décembre 1763, & condamna Pierre Reynoatd aux dé-,
pens envers routes les Parties.
Treize ans s'écoulerent fans que le retrayant fe plaignit;
l'Acquéreur & le vendeur mouru'rene dans l'intervalle, & le
9 Mars 1776 les hoirs d'Audier furent intimés en appel de
la Seneence, & Pierre Reynoard demanda par une requête
incid,enre la re!l:itution des fruits perc;us.
L'aél:e du 8 Février 176'2., enfuite duquel Pierre Reynoard
exerc;oit le retrait, éroit-ïl de nature à pouvoir y donner
ouverture?
. Reynoard invoquoit la difpolition formelle du fiatut qui
accorde aux parens le droit de retrait fur routes les ventes indif!:inél:ement.
. Or ( ajoutait-il) l'aél:e du 8 Février 176'2. ef!: un aél:e de
"ente de fa nature, & même il ef!: qualifié tel par les Parties ; l'obligation de nourrir & entrerenir le vendeur fa vie
durant, ou de lui payer'une penGon viagere de 10 fols par
jour "n'exclut pas lè retrait, puifque tous les Auteurs con-,
viennent qu'il a lieu fur les ventes à fonds perdu.
Les. hoirs d'Audier répondirent qu'il ne CulEfoit pas que le
~ontrat eût été qualifié d'aél:e de vente, pour faire admett~S
�258
J a v R N ft. L
le retrait; le motif d'affeélion, le choix des perfomies qui fr~
Xent la détermination ·du vendeur qui a voulu affurer fan en·,
fretien & fa nourriture, ne permettent pas d'affimiler un
pareil contrat à un aéle de .vente à fonds perdu; & dans
le cas de la vente paffée à leur pere, il n'y avait pas ou-.
verture au retrait; ils appuyaient ces raifQns de l'autorité .de
Tiraqueau dans (on retrait lignager, §. 2~, glof.
nO, 2;
de celle de la Livoniere en fan Traité des' Fiefs, L. ~',.
chal" s, feél. 3, pag. 448 , & de. Grimaudet des retraits,
L. ~. chal" I~ • •
On leur repliquoit que ces doélrines .ne parlaient 'I"e des
donations faites à la charge de nourrir le ve~deur, .& que la
vente dont il s'agitToi.t ne pouy.oit être co.nfidérée fous le
même afpeél. Reynoard n:avoit pas entendu faire une do..;
n.atlon, elle ferait même nulle pour n'avoir- pas été revêtue
des- formdli~és prefcrites ; d'ailLeurs la charge de nourrir. &
entretenir le vendeur étant ap.préciée dans l'aéle de vente, il
ne tenait qu'à l'acquéreur de s'l:.n décharger en. payant les lQ,
Jols par· jçU!..
.
-,
J..es hoirs d'Audier obfervoiene enco~ qu'il étaie affez'
indifférent. que les Auteurs qu'ils citaient parlaffent des ventes'
ou des donations, puifqu.e le retrait a lieu non feulement
pour les ventes pures & fimples, mais i encore pour toute
forte de tranfporrs équipollens. On Fadmet en matiere de
donations, quand on peu,r les regarder comme des ventes
déguifées. Mais, ajouraient-ils d'après Denifart, vO•• Retrait
lignager, le retrait ne doit pas être accordé fur une aliéna-:
tian faite à des conditions qui [uppofent un choix de per-'
: fonnes, une confiance finguliere dans les mœurs & l'amitié
de l~acquéreur, &; relies qu'on puiffe craille que celui qu.i a .
fait la vente, ne l'eût pas faite aux mêmes conditions avec
une autre perfonne; or la condition de nourrir: & entretenir;
•
le vendeur cft de cette efpece.
L'on priverait le particulier de la·J1iber.t· de 'choiRr unè,
.per(onne de, confiance & un ami pour s'affurer; des De~'
foins les plus p,rdfans de la vie,; s'il dépendait 'du pl'emier
parent,. qlli fe §irig:eroit. bien pl\l~ P\l~ ~e~ vues d'intérê~
2,.
g,u~
�s D E P RI:> VEN C E.
~S9
que par un fentiment d'amitié, de faire perdre cet avantage au vendeur en le forliant de vivre malgré lui à fa table,
s'il n'aimoit mieux accepter une' modique rétribution infuffifante à fes befoins, & qui n'avoit été fiipulée que pour U11
cas qu'il était de la prudence de prévoir, mais fur lequel il
n'avoit' pas dt! naturellement compter, par le caraél:ere & le
[entiment qu'il connoi1foit dans la perfonne qu'il avoit choifl.
Par Arrêt du 26 Juin 1779, au rapport de M. le Con[l'iller de la Beaume, la Sentence du Lieutenant de Toulon.
fut confirmée.
D U
PAL A' i
: : .==::=====~==~~====
ARRÊT
xX
L
XV 1 J.
Les Médeâns ne formant pas Corps, peuvent-ils s'oppofer à
ce que quelqu'un exerce ln. Médecine, fur-tour ailleurs qu'au
lieu de leur domicile?
Une Univerfité, peut-elle tro,ubler dans l'exercice d~ la Médecine, celui qui a obtelllJo [es degrés dans une autre?
Peut-on exiger les certificats du umps d'étud~ de celui qui
pré[enU [es degrés?' ,
E 13 Juillet 1778, les fleurs Poilroux & autres Doc..
1
tems en Médecine tinren. un aél:e extrajudiciaire à Me:
Guerin, qui avoit fait ënrégifirer des Lettres de Médecine
au Greffe. de la Jurifdiél:ion de- Fugeiret;' ils l'interpellerel1t
de leur communiquer fes anefl:ations d?écude·,
.
Enfuite de cet <!de, ils préfenterent requête aux Lieu-tenans Généraux de' Police de FugeiFet, & demanderenc que
Me. Guerin filt ajou-rné, pour voir dire que les degrés par
lui obtenus· dans l'Univerfit6 d'Orange [croient déc·larés nuls,
avec inhibitions & défenfes. ~exercer. la Médecine, & di:
prendre le cine de Médecia ,. à peine de soo liv. d'amende.
Les Conruls de Fugeiret ayant abfienu, la Cour {ubrogea
le 26 Août les fleurs' Girauà & Martin.
o
Me. G~ri~ ~éfend~t.t & ?PP.e>§ ~. Q~urs Poiltoux &L
- 0 Il
L
,
L.
~
�290
Jau
RNA L'
Conforts, qu'ils étoient non-recevables & fans aétion pau~
n'avoir pas fait enrégilher leurs Lettres.
Sentence du 22 Janvier l779, par laquelle fàns s'arrêter
-iux fins de non-recevoir propofées par Me. Guerin, les Ju'ges de Police ordonnerent qu'il feroit pourfuivi fur les fins
principales, ainli qu'il appartient.
Me. Guerin déclara appel de cette Sentence, avec dauCe
d'évocation du fonds & principal.
La Faculté de Médecine de Montpellier intervint, & adhéra
amc fins prifes par le lieur Poilroux & Conforts.
Suivant Me. Guerin, la demande de fes Adverfaires était
non-recevable, injulte, injurieufe & fraudule·ufe.
Non-recevable: lO. parce que des Médecins épars n'ont
pas le droit d'intenter une aaion en nullité de degrés contre
un de leurs Confreres, cette aaion leur étant étrangere. 2. 0.
1?arce qu'en l'état, ils ne pouvoient ni exercer la Médecine,
ni jouir des privileges attachés à cette profeffion, n'ayant
point fait enrégiltrer leurs Lettres 'aux Greffes des Jurifdicrions où ils étoient établis ( formalité requife par l'arr. 3 ')
de l'Edit de 1 7°7') Ils n'avoient pas d'ailleurs les cerrifi. cats d'étude qu'ils exigeoient de Me. Guerin.
InjuHe : les lettres de Me. Guerin font une preuve authentique de fes études, & on ne peut la détruire que par
l'infcription en faux; cette voie eH même rejettée d'après
la Jurifprudence de plulieurs Parlemens. Verdier, dans [a
Jurifprudence de Médecine, tom. 2, pag. ') 8 l , rapporte
deux Arrêts du Parlement de Paris. La capacité conférée
par le degré, [uppofe à fon tour une étude complette;
Injurieufe : en ce qu'on -lui avoit dit que [es~ruccès étoient
des chimeres; qu'il n'étoit pas fait pour mériter la confia nce
publique; qu'il étoit dangereux de le laitTer continuer dans
les fonaions de [on état; qu'il était d'une impéritie & d'une
ignorance humiliante même pour fes Confreres.
Il revenait enfuite à la fin de non-recevoir, en foutenant
que l'honneur général de la Médecine devait être très-érranger à chaque particulier; que la contravenrio.n aux droits
~'é~oit V,as confiée à chaque Membre, mais aux Corps, au~
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
':19 1
Univer!ités les plus prochaines auxquelles l'amende éroit attri.
buée; que conféquemment elles avoient feules aél:ion. La Loi
avoir difcerné les Charlatans & les Médecins par des grades;
pour attaquer les uns ou les autres, il falloir une dénoncia':' ..
rion au Miniilere public. Jamais aucun Arrêt n'avoit prononcé des inhibitions à la requête de !impIes Médecins. Il
ne faut pas -confondre la Chirurgie avec la Médecine; couronner la prétention des fieurs Poilroux & Conforts, ce feroit livrer la fociété aux plus grands dangers; quand même
l'intérêt particulier pourroit légitimer l'aél:ion, ce ne feroit
jamais que pour les Médecins qui rélideroient dans la même
Ville. Il ajoutoit que l'Edit de '707 n'cIl: qu'une regle de régime intérieur des Univerlités. Les atte!l:ations n'éroient point _
exigées à peine de nullité. En fait, elles devroient être prife~
par-rout, & elles ne le font qu'à Paris & pour la forme;
let.;r défaut éroit couvert par l'admiffion aux grades & par
des matricules exaétes. La preuve par écr;t & par aaes publics e!l: reçue contre les anefiations, mais non comre les
lettres ni -les matricules. A cet égard, il faut nécdfairerncnt
s'infcrire en faux.
Il oppofQit à la Faculté de Montpellier, que fi elle avoir
~ fe plaindre de la facilité de la Faculté d'Orange, elle n'avoit qu'à recolirir au Roi; que fi quelque Univerfité avoit
aél:ion contre lui, ce ne pouvoit être que l'Univerlité d'Aix,
qui éroit la plus prochaine, & dont l'aél:ion éroit circonf.
crite dans .fon di!l:riél:.
Les fieurs Poil roux & Conforts répond oient , qu'il falloit
qu'il y ellt du doute fur la qualité des Médecins, pour que
l'enrégi!l:rement fût néceffaire; qu'il n'yen a.voit jamais eu
fur la leur; qu'ils en avoient néanmoins rapporté le certificat du Greffier; & ils avoient produit leurs atte!l:ationsd'étude. L'honneur, auffi cher à chaque Médecin, néceffiroit leur aél:ion : ils ne devoient pas laiffer avilir uI1e profeffion honorable, par la baffeffe c1es [entimens, inféparables
du charlatanifme ; les rifques auxquels le Public & euxmêmes feroient expofés par l'impéritie, & peut-être le crim~
d'un homme <tui n'avoir aucun garant de fes mœurs & de00-20-
L..
�~~
t
JOURNiL
.
fa probité, leur en faifoit une nouvelle Loi; enlin un abus
qui intérelfoit leur fortune, pouvoit être la caufe impullive
de leur dénonciation & de leur pourfuire; ils ne pouvoient
-pas montrer moins de follicitude que les Ordonnances & les
Arrêts de Réglement, qui fans celfe ont accueilli les plaintes
des particuliers, & ont renouvellé de trop jufies Î!1hibi·
tions & défenfes.
Quant au fonds, & d'après l'Edit de 1707, trois ans
d'étude, une affiduité confiante & des atteHations étoient
ahfolument néceifaires. Ces conditions n'ayant pas ,été remplies dans la r~ception de Me. Guerin, elle étoit néceifairement nulle. Ld degrés ne peuvent [euls former la preuve
de la capac.ité ~ il faut les attef!:ations que les Lettres ne
peuvent fuppléer; les formalirés ont été multipliées pour
prévenir les abus. Soutenir qu'après l'obtention des degrés,
on n'efl plus recevable à demander les attef!:ations, c'eft
contrarier h: texte même de l'Edit, c'cit rendre toute véri.
fication impoffible.
En fait, les Lettres & les infcriptions de Me. Guerin font
fauifes ou plutôt [ont nulles. L'infcription en faux permi[e
contre tout aél:e, n'eft pas même nécillaire ici. Un corn.
mencement de preuve p-ar écrit fuffiroit pour être admis à'
la preuve par témoins. Ici cette preuve ef!: inutile. Il exifle des
.titres authentiques émanés de Me. Guerin lui-même, qui, en
droit, & d'après tous les Auteurs, peuvent .détruire la foi
due aux aél:es des U niverlités ,dès qu'il y a eu une rélidence
non interrompue hors du lieu de l'Univerfiré.
Or les certificats qu'il a produit prouvent qu'il a conf!:am.
ment vilité des malades depuis 1773 jufqu'en 1778. Il a
toujours payé fa capitation au Fugeiret ; il y a paifé des aél:es
publics dans les années 1773 , 1774, 1775 & 177 6 ; il Y
a fait baptifer deux filles dans le même intervalle: ces aél:es
répétés prouvent une rélidence continuelle, & non celle
des vacations : donc il n'a pas étudié. D'ailleurs, & d'après
les lettres que Me. Guerin a écrites, [on impéritie efi dé.
montrée; il ne fait ni le français, ni le latin, pas un mot
&'orrogtaphe ; enfin [es infcriptions même contrafient aveq
�DU
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PR
{, V II NeE:
2.93
{èS aveux. La premiere dl: du 3 Novembre 1773; il en
exill:e cependant une du 3 Février de la même année.
. L'Univerfité fe fervoit des mêmes moyens, & foutenoit
que c'éto-it une aél:ion d'abus folidaire à toutes les Uuiverfités; qu'elle ne pouvoit pas demander l'amende, mais que
chargée fpécialement, comme Univerfité reçue & prépondé- ,
rante, de prendre des noteS, elle devoit plus particuliérement réclamer contre les abus.
M. l'Avocat-Général de Califfanne obfèrva
fur la fin de
.
non-recevoir, que dans une fociété bien ordonnée toUS les
biens nous font donnés par les loix, ils nous font au1U
confervés par elle" ; elle" tendent (an" cetre à rétablir l'harmonie qui dl: leur ouvrage ; elles accourent par-tout où
l'intérêt du citoyen les appelle; mais, conipatiffantes envers
le citoyen opprimé qui les implore, elles déteftent le déla-ceur qui n'dl: animé que par la vengeance; l'intérêt feul peut
donner le droit de les réclamer. Cet intérêt ef!: auffi varié
que les biens qui peuvent en être l'objet; la vie, l'honneur,
la fortune font également fous la proteél:ion des loix; elles
'forment cette chaine d'intérêts qui lie. les hommes entr'eux ;
c'ef!: fous ces différens points de. vue qu'il examina l'aél:ion
des Médecins.
On ne peut fe diffimuler que le bien public ne fait un
motif bien féduifant & capable d'entraîner les ames les plus
honnêtes; mais nos loix, fans condamner, fans éteindre ce
noble patriotifme qui doit échauftèr t-out bon citoyen, l'ont
fubordonné à. la douceur de nos mœurs ; la rivalité feule
entre les citoyens a été enchaînée; elles ont voulu tarir la
fource des délations, abroger les aél:ions populaires, pour
biffer veiller la parcie publique. ,
Quant à l'honneur, des Médecins ont à peine obteilll leurs
'degrés, qu'ils fe trouvent ifolés les uns des autres par la
nature même de leurs foncrions & de leur minif!:ere; ils ne
forment pas, comme les Avocats, un Ordre parriculier, au
nom duquel ils fe rallient; ils n'ont ni Chef ni Syndics.
Elevés le plus [auvent dans différentes écoles, ils n'ont pas
~ême en~r\;ux ces liaifons toujours fi douces, quelquefois .q
.
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�2.94
J
0
tJ R N K 'L
forres, que forment les premieres études. N'ayant, pour;
ainli dire, déformais à obferver entr'eux aucune forte de
police intérieure, ils font ,également privés de l'adminif!:ra.
tian qu'elle entraîne; il femble même qu'on peut conclure
delà qu'ils n'ont pas un honneur commun & folidaire à défendre.
"
Les Médecins qui fe font réunis contre Me. Guerin font
éloignés de plus de vingt lieues les uns des autres; il a
a fallu les chercher, les appeller au loin pour les affocier,
non au même intérêt, mais à la même vcngean,e. S'ils
viennent comme Corps, etl en font les repréfentans? S'ils
viennent comme ayant leur point de réunion à l'Univedité
de la Province, d'où vient que ,ette Univerfité garde le fi.
lence? S'ils ont des Chefs, pourquoi n'ont-ils pas excité leur
zele & éclairé leur follicitude ?
Si les fieurs Poilroux & Confons n'ont point d'honneurcommun 11 défendre, ils n'ont pas davantage leur honneur
particulier à venger.. Me. Guerin fût-il au nombre des ChaFlarans, leur réputation peut-elle en recevoir quelque atteinte?
Les reproches que l'ont fait à Me. Guerin ne .po.urront jamais déshonorer que lui feul; ils ne feront peut-être que
rendre fes Confrere's plus refpeaables par le contraf!:e frappant entre leurs fentimens & les fiens. Mais, parce que les
Lettres de degrés' ne feront pas accompagnées de certificats d'étude, ou qu'elles n'auront pas été le prix d'une ri.
goureufe affiduité, Me.. Guerin fe ferait-il par-là même avili?
Son ame auroit-elle perdu tout fan rcffort?'
Ils craignent, difent-ils, que le mépris pour le charlata- '
nifme ne porte fur la véritable fcience. Cela même devrait
les raffurer. Le peuple n'ef!:. point à l'abri d'une [éduaion
momentanée, mais il ne tarde pas à apprécier le mérite, &
l'efl:ime du Public devient la récompenfe des vrais talens ;
rien peut-êrre ne fait plus valoir· les véritables Médecins qUlf
le mépris des Empiriques.
.
Il eH: néanmoins plufieurs fortes de profeffions dans une
[aciéré bien ordonnée; il en ef!: qui ne font relatives qu'à la
.fuhfiftance journaliere des citoyens; d'autres ne donnen;
�D U
PAL AIS
D B
PRO V B NeE.
~9 S
;les droits qu'à l'eftime publique &. à la gloire; il en eft
d'intermédiaires qi1Ï' menent cout à la fois à la confidération
&. à Ja fortune; telle eft la Médecine.
Sou~ ce point de vue, le Médecin qui met un prix à [es
bienfaits, Couvent payés par la fimple reconnoi1Tance, n'avilit
point la noble1Te de [es Centimens. Il a fait des études coûteu[es; il s'eft la horieu[ement préparé à devenir utile à [es
femhlahles; l'intérêt pécuniaire peut donc devenir .pour lui,
comme dans toute aucre profeffion, la haCe d'une aél:iou
légitime; ils peuvent écarter un concurrent, qui n'ayant pas
les mêmes citres qu'eux, ne peut partager ni leurs devoirs,
ni leurs privileg-es.
En fait, les certificats d'étude doivent être expédiés par
l'Univerfité , fignés par les Profe1Teurs, le Greffier ou le Secretaire, &. [cellés du Cceau de l'Uunivedité, Celon Rebuffe
& Theveneau, quia figillum efl de farmd. La [impie atteCtation d'un Profelfeur ne peut en tenir lieu; mais en droit,
tant que les certificats ne Cont pas repréCentés, l'exercic"e légal, l'état, les fonél:ions de Médecin Cont-elles CuCpendues!.
Eft-ce une condition préliminaire exigée par l'Edic de 1707?
L'arc. 39, le [eul qui aic quelque rapport, veut que la Médecine ne pui1Te être execcée par aucun Médecin, qu'il n'ait
préalablement préCenté Ces Letcres de degré aux Juges de Police, &. les ait fait enrégiftrer à leur Greffe. Cerre repréCen.
tation préalable cft donc limitée aux Lettres, &. n'eft point
~exigée pour les certificats.
La Médecine, cette Ccience conjeél:urale, qnt qu'elle ne
fe nourrit que de théorie, n'acquiert quelque degré de certitude &. d'utilité, que 10rCqu'elle deCcend de la hauteur des
[yUênies, pour prendre l'expérience pour baie; mais le
théa[re de cette expérience eft dans le Cein même de la [0ciété, bien plus que Cur les hancs de l'école. De [Qut temps,
& fuivant la JuriCprudence Romaine, il n'érait pas permis
d'exercer la Médecine, Cans rapporter des preuves authentiques de [a capacité.
Mr. l'Avocat Général diCcuta enCuite les articles de l'Edit
~e 17°7, concernant le temps d'étude &. les degrés; il ob!
�2.96
Jou R If A L
ferva que Me. Guerin avait obtenu fes degrés au milieu d'uné
Aifemblée augufie, où la religion & lâ patrie interviennent
par leurs repréfentan~; où le Public eH admis pour don~
ner, en quelque [orte, fan fuffrage par fa préfence. C'eil:
au milieu de cet appareil que le Candidat ef!: examiné; c'eil:
en préfence de ces témoins refpeél:ables qu'il fait fa profeffion de foi, & prête ferment fur les Livres faints; c'ef!:
d'après cette inauguration folemnelle qu'il obtient les Lettres qui fixent fan rang, hl profeffion dans la fociété·; il les
relt0it bien moins de l'UniverIité que du Monarque, des Loi ,
de l'or.dre établi; elles ont le fceau de la foi publique. Ce
contrat Ii authentique ne fauroit être un crime de faux; cette
- profeffion de foi, ce ferment ne font paine- une. v.aine cérémonie inventée. par la cupidité.; la Religion & les MagiHrats
ne deviendroient point 'les complices de cet indigne arti~
bce ; tant. d'appareil ne fauroit couvrir une impofiure.
:
Me. Guerin a fait enré.giHrer fes lettres au Greffe de Fu..;
geiret où il s'dl: établi; fan état, fous ce point ,1<; vue, parait donc inébranlable. Aucun article de l'Edit de 1707
n'exige la repréfentation des certificats d'étude après l'obten~
tion des degrés.
.
Il Y ade la contradiél:ion à exiger les certificats après
les lettres ; c'efi attacher plus de foi aux certifi~ats
qu'aux degrés ; c'ef!: vouloir que les certificats mettent le
fceau aux degrés, tandis que c'efi aux degrés à fuppléer aux:
certificats; c'efi ne pas fufpeél:er le Profellèu.r co:rtifiatlt &
fe défier de l'Univerfité éntiere, c'efi fuire. dépendre un
aél:e public & folemnel d'une attefl:ation particuliere que
cet aél:e fuppofe ; c'e.ll: croire le Profeifeur lorfqu'il figne le·
certificat ifolé, & ne plus croire ce même ProfeiTeur lorfqu.'il figne les lettres qui foutiennent le même témoIgnage;
c'e(l ap.peller de la Iignature publique. à la fignature privée.
Par l'Arrê.t du 1) Mai 1711, rendu fur les concluIions. de
M. le Nain, Avocat-Général., & rapporté dans le Journal
des Audiences, il a été folemnellement décidé que les let-.
tres de degré. fuffifent flins le: fecours. de.s.certificats. du. cemS
.d'étude..... .
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�DU
PALAiIS
DE
PROVENCE.
1).97
D'après Domat dans fon Traité des Univerfités, pour
prouver la capaciré des perfonnes , les loix demandent le
témoignage des Univerfirés par les degrés qu'elles conferenq
c'eH pour l'intérêt public que les loix exigenr ce témoignage.
Mais de quelle influence pourroir-il êrre, fi les Confreres du
nouveau Médécin pouvoienr en récufer la force fans en combattre l'aurhenricité? Quel feroir le droit des Univerfirés s'il
falloir prouver à d'aurres qu'a elles, & les érudes, & la ca.
pacité dont les degrés qu'elles conferent font le rémoignage?
Par /lOtre ufage , ajollte Domar, la capacité du l'.'Iédccin eft
prouvée par le degré de Doc7eur ; ,mais fi la capacité & lçz
fcience font prouyées, que fera- ce du études elles-mêmes?
Sur la requêre d'intervention de l'Univerfiré de Monrpellier, M. l'Avocar-Génér31 établit que toures les Univedirés
font Cœurs comme les fèiences qu'elles enfeignent; nos Rois
qui les ont fondées n'ont dil1ingué ni leurs prércgarives ni
leurs pouvoirs; les degrés qu'on y obtienr n'ont pas plus
ou moins èe force & d'authenticité {elon la Faculré qui
les confere; la célébrité de.s Profeffeurs, en faif~lOt fleurir une
Univerfité, leur donne un éclat paffager, fans augmenter fon
pouvoir permanent. Le génie de la Médecine, fixé depuis
quelque temps dans la Faculté de Montpellier., menace peurêtre de l'abandonner, fi elle ne répare des pertes récentes
& célebres. Cette célébrité Ile lui donne d'ailleurs aucune fuprémarie , elle ne fauroit exiHer entre deux Univerfités j la
Faculté d'Orange garde encore fon rang parmi les Univer{ités du Royaume " fes pouvoirs n'ont reçu aucune aneinte.
Les différenres Univerfités du Royaume, fuivant Rebuflè
& Paflour, font donc égalemeo.t fameufes, omn'!:s UniverfilaIes Regni cenfemur famofœ, & famofa Univerfitas efl in qua
funt Doc7ores & AudilOres; elles font également pl:iÎvilégiées.j
il n'exifte cntr'elles aucune di-fférence, ainfi que l'aneftent
les mêmes Jurifconfulres.
Sous ce point de vue l'intervention de la Faculré de Mon-·
pellier ne peut être admife: elle voudroit décider des degrés
conférés par la Faculté d'Orange; ce droit fuppoferoit infl'eaion & fupéJ:ioriré ; c'efi bien moins de Me. Guerin qu'iL
Pl?
�298
Jou RNA L
s'agie pour elle., que de l'Univeruté même d'Orange; en reconnaiJfarrc l'exifl:ence des degrés préfentés par Me. Guerin,
elle ne peur les attaquer que par le défaut de pouvoir de
la Faculté qui les a conférés, & c'eil: par cette égalité même
de pouvoir qu'elle eil: repouifée.
La faveur des fcierices dont l'Univeruté de Montpellier fe
couvre, le relâchement, ou plurât la foibleife exceflive qu'elle
reproche à fl rivale, la dégénération dans les études qu'elle
lui impute, cette décadence générale donc l'Univeruté d'Orange gémit; tels font les prétextes de fon zele. Elles font
cependanc liées par la même chaîne de devoirs; l'Edit de .
1707 leur ell: commun j après la vo,ie de l'exemple, il lui
re!l:eroit peut-être celle d'une invitation douce, jamais celle
de la correél:ion. La rell:auration des études ne donne peutêtre pas moins de follicitude à la Faculté d'Orange qu'à
celle de Montpellier. Les Oniverutés s'imp.uteut l'une à l'autre la néceflité de cette rdl:auration; mais ce n'eil: pas dans
fon intervention que la Faculté de Montpellier doit cher.cher le prétexte & l'o-ccafion d'une délation aufli grave.
M. l'Avocat-Général cO-nc!ut à la réformation de la Sentence , & à ce qu'en évoquant le fonds & principal, fans
s'arrêter à la requête des fleurs Poilroux & Confores, non
plus qu'à la requête d'intervention de l'Univerfité de Mon-tpellier, dans lefquelles ils feroient déclarés non-recevables &
mal fondés, inhibitions & défenfes leur fuifenc faites de troubler à l'avenir Me. Guerin dans l'exercice de' fa profeflion,
à peine d'amende & d'en étre informé.
Arrêt conforme rendu à l'Audience du 28 Juin 1779,
les fleurs Poil roux & Conforts & l'Univerfité de Montpellier
furent condamnés aux dépens; plaidant Mes. Meiffret, Gras
& Sauvere.
�DU PALAIS
DE
299
PROVENCE.
n·
ARRÊT
XXXVIII.
La naiffance peut-elle Üre prouvée par témoins, &.dans quel cas.1
1r Ofcph Reinier, du lieu de Gonfaron, époufa~ le 4 Fé/ l21iJ vrier 17'i3 Marie-Anne Guillabert. Elle mourut enceinte
de neuf mois. L'enfant fut tiré par jncifion., & oNdoyé par
le Curé du lieu; il mqurut une heure après.
Hubert Guillabert réclama la dot de fa fœur; on lui remit
feulement fon trouifeau. Jofeph Reinier mourut quelque temps
après, & Quenis Reinier fut [on héritier ab intefiat. Le T
Janvier 177 S , les hoirs de Marie-Anne. Guillabert fe pourvurent pardevant le Lieutenant des Soumi/fioos au Siege de
Brignoles, en condamnarion de. la fomme de 871 liv. du
refiant de la dot de leur fœut, avec int~rêts du jeur du décès. La Sentence fit droit aux fins de cette dçmande, quoique Quenis Re'inier opposât que l'enfant étant mort après
la mere, avoit recueilli fa [ucceJEon, & l'avoi.t. traofmife à
[on pere.
.
Reioier en appella pardevaot la Cour•. Suivant .lui, l'en-'
fant étant né vivant, il faut admertre qu'il étoit viable,
parce qu'outre qu'il était né au. terme ordinaire, il., était
d'ailleurs parfaitement conforme, ce qui fuflit, [Divant l<j.
Loi QuOd certatum 3,. Cocl. de Poj/humis hafrec/. inflit., &
Doélrine d., tous les Interpretes. C'eft d'après 'ce \<Jtu -gé,
néral , que Decormis attcHe tom. l , col. 173 S, que pour"
peu que les enfans nés par incijion aient de vie, ils en ont'
a.Dèr pOlir allquérir .la fucce1Jio/l de leur mere, ce qu'il faut
néanmoins entendre avec la limitation de .Ia Loi Certotum.;.
Ji vivus ad orb-em totus proceffù, ad /lulll/m declinan.r mOIlJ-·
trum veZ prodigium, fi vivus perfeélt! natus fit. Delà tomes
les Doélrines & les Arrêts qui ont décidé que les enfans
\'enus au monde dans un état de pcrfe&ion ,. [ont capables.
ra
Pp
2
�300
"J
0
U RNA L
de fucceffion, fans qu'on foie obligé de prouver qu'ils étoient
viables.
On rrouve deux Arrêes rapportés par Charondas, liv. ~,
re[ponf. Il en eH: un aurre rendu par le Parleniene de Dijon
en 17~2, dans \'efpece duquel on n'ordonna que la preuve
de LI vie de l'enfant, fur le morif .que les Empéreurs & les
JurifGOnfultes, notamment Ulpien, one affimilé les enfans
que l'on d'oit à l'opéraeion céfarienne, aux enfans venus au
/ffionde par les voies ordinaires. Cela poré , dès qu'un enfam né par le fecours de l'art, dl: cenfé avoué par la nature, il eO: inutile d'examiner s'il ef!: viable. Les hommes
ne doivent l;as 'pénétrer dans les fecrets de la Nature, qui
font des myf!:eres pour eux. Quand elle a fait un oùvrage ,
c'ef\: à elle à le conferver ou à le décru ire ; il Y a de la té'm~rieé d'ofer afligner le terme qu'elle s'ef!: prefcrite, pour
que les enfans foient cenfés viables.
Cesl principes ont été reconnus par ~1l1 Arrêe de la Cour,
rendu le 2 l Mai 17 ~ 9 , en faveur des Matheron pere & fils
de la ville de Barcelonerre. Il s'agilI'oit dans ce cas d'un
enfalH tiré par incifion. La Sentence avoie feulement ordonné la preuve que cet enfane était en vie. Les héritiers'
de la mere avoiem appellé de la Sentence, en prétendant
que' cette preuve ne remplilI'oit pas lë vœu de la J uftice, &
qu'il aurait fallu charger le pere de prouver que le part éwit
viable. L'Arrêt confirma la Sentence; il décida par coi1féquelH qu'il fuffifoit de prouver que le pof\:hu me éwit né vivane, & qu'il falloit toujours le p.réfumer viable, quando viVilS pe rfec7è natus efl.
.
Reiriier rapportait deu~ cenificaes ; l'un du Curé, l'autre
de la Sage-femme, qui atrefl:oiene que l'enfant écoit né viable. Les déclarations de cene efpêce (difoie-il) font pleine
& elltiere foi; & pour les détruire, les héritiers du fang ne
font pas admis à prouver que l'enfane ell: né mon. Le fait
de la nailI'ance cfl: du relI'orc du Curé qui a ondoyé. Il en~
tre, comme celui de la vie, dans le mini!lere & les fo'nctians de l'Accoucheufe, qui re~oie l'enfam quand il viem au
,
�DU
PALAIS
DE
PROVENCF.
30r
monde. Le Curé (il en: vrai) avoit omis d'inférer dans les
regiHres la naiffance & la mort de cet enfant; miJis il avoit
réparé cette omiffion, en faifant une déclaration qui conftate ce fait. Cette preuve, jointe à l'atteHation de la Sagéfemme, au rapport de cous les habitans du lieu, doit opérer
cout l'effet que la réparation de l'omiffion auroit pu produire.
Reinier demanda fubfidiairement à prouver, fans préjudice des preuyes réfu!rames des pieces du procès, qu'après
la mort de Marianne Guillaberc, on tira de fon fein, par
incifion, un enfant qui mourut peu de temps après fon extraél:ion, qui fur notoirement & publiquement mis dans la
même biere,· & fucceffivement dans la même foffe que
Marianne Guillabert.
.
Reinier convenoit qu'il feroit abfurde de prétendre que
la preuve vocale doit être admife dans tous les cas; qu'on
n'en connoît que trop les dangers. Le but des Tribunaux
dl: d'aller au bien 'par les voies de la vérité, La mauvaife
foi des hommes, la fragilité, l'inHabilité de leur mémoire
ont fait introduire des regles parciculieres en matiere des.
preuves. Il a fallu donner une permanence, Il ne publicité
aux preuves qui régiffent l'état des citoyens; il a fallu refferrer
la preuve vocale dont il eH fi facile d'abufer.
Delà les Loix ont ordonné les RegiHres contenant les
naiffances, les mariages, les fépulcures;. mais les Loix
ont toujours l'objet prédominant de fixer la vérité. Elles ad.
mettent la preuve vocale, coures les fois que les circonHances
la font defirer, ou la rendent néceffaire, & lorfqu'elle fe préfente fous des traits qui n'en permettent pas l'abus.
Ainfi l'Arrêt rendu par la Cour en 17)3 ordonna qu'il feroit pris une enquête fur le décès d'une femme dont le Curé
de Simiane avoit omis d'inférer la fépulcure dans les Regirtres : le décès écoit de l'année 1747; la Cour ne trouva pas
qu'il y eÎIt le moindre doute à fe former, le fait de la fépulture étant un fait nocoire & public, un fait fur lequel
il eH impoffible d'égarer & furprendre la J ufl:ice , parce que
les faits de cerre efpece peuvent être établis comme faits de
�30'2.
J
0
t1 RNA L
notoriété, & par l'affirmation de tout le lieu. Auffi les Au.
teurs qui 0n.t écrit fur l'Ordonnance, nous apprennent qu'en
cas d'omiffion ou d'erreur gljifée dans les Regïfires, la réparation s'en fait de l'autorité du Juge Royal d'après une
enquête qu'on prend. ( Denifart, va. Regiftre ; Rodier fur
l'Ordonnance de 1667, titre des faits. qui giffent en preuve,
art. 10, quo 2. )
_
'Ce n'eH pas la premiere fois que l'on a vu des naiifances
omifes & réparées dans les Regifires , foit par la repréfentation des perfonnes lorfqu'elles vivent encore, foit par une
enquête fur la notoriété après leur mort. Pourquoi la preuve
par témoins pourroit-elle être refufée? Il faut remonter aux
principes & ne pas en diŒmuler la force j on ne pourroit la
rejetter que par la crainte de fes abus ou de fes dangers ;
mais il n'y a po"int d'abus à redouter, point de danger à
craindre dans le cas d'une preuve de notoriété j on ne corfompt pas, on n'aveugle pas. une entiere Communallté d'habilans. La preuve d'un fait notoire & public en: même
moins corruptible & plus dégagée de toute efpece d'abus
que la littérale.
Pour établir la force des faits publics & de notôriété,
il rappelloit l'Arrêt que la Cour rendit en J777 en faveur
de la nommée Garein de la ville de Marfeille contre un citoyen de la "même ville. Elle demandait des alimens, une
pen(jon, des frais d'entretien & d'éducation pour un enfànr qu'elle difoit avoir eu des œuvres de ce citoyen. La
Garein oft'tOit la preuve par témoins. Elle n'avoit pour elle
ni expolltion ni promeife quelconque j elle obfervoit que fon
corn merce éroit public, notoire, qu'il avoit duré plus de
dix ans j que le (jege en avoit été tranfporté dans différens
quartiers de la ville. Les faits qu'elle metroit en preuve
éroient tellement compliqués, ils exigeoient l'interpo(jtion
de tant de témoins, qu'en les préfentanr comme npt.oires
& publics, il n'étoit pas poffible de corrompre la foi de
tous les témoins qui devoient en rendre compte. La preuve
fut admife, parce qu'on ne pouvoit la refufer fur un fait pré".
{enté comme public & notoire.
"
�DU PALAIS DE
PROVENCE.
303
Les hoirs Guil1abert répondaient que parmi les Romains
on avait des RegiHres publics fur la nailTance & la mort des
hommes, qui faifoient preuve enriere fur les queHions de filiation, d'âge, & autres relatives à l'Etat. On appel10it cette
preuve profeffio natalium , il n'écoit pas permis d'en admettre une autre. C'écoit au pere â aller déclarer dans ces Regillres la nailTance & le décès de fes' enfàns ; à fon défaur,
la mere & même l'aïeul écoient reçues à remplir ce devoir; etiam matri. profeffio filiorum recipitur, fed & avi recipienda efl; leg. 16, tE de probat. Parmi eux la preuve de
la nailTance & de l'âge fe faifoit également par les Regiftres des Receveurs des impôts publics, libris cenfualibus ,
dans lefquels la loi 3, ff. de cenfibus, avoit ordonné qu'on
enrégillrât l'-âge de chaque perfonne, à l'effet de lavoir quand
il feroit temps de l'impofer & de la .comprendre dans le
rôle de la capitation.
_ Toute autre preuve de la nailTance & de la filiation étoit
condamnée: non nudis affiverationibus', porte la loi 14, cod.
de probat., nec ementita profeffione , lieu utrique confentiant
filii civili jure, patri conflituuntur. La loi 2. , cod. de tell.
n'eH pas moins exprelTe : fi tibi controverfia ingenuitatis fiat,
defende caufam tl/am inflrumentis & argumentis quibus potes,
foli enim tefles ad ingenuitatis probationem non fufficiunt.
Ils cicoient enfuite le difpofitif des Ordonnances de nos
Rois. Celle de 1 139 ordonne en l'art. 1 1, qu'à l'égard des
bapt~mes il en feroit fait un Regijtre en forme de preuve, lequel contiendrait le temps & l'heure de la nativite.
L'Ordonnance de Blois, art. 18, pour éviter la preuve
par témoins que l'on étoit fouvent contraint de faire en Juflice
touchant les naij]ànces, mariages, morts, enterremens des pero
[onnes, enjoint aux Greffiers de pourfuivre tous Curés ou leurs
Vicaires du reffort de leur Siege, de porter eux-m~mes, dans
deux mois après la fin de chaque année, les Regiflres de bapt~mes, mariages & fépultures de leur ParoifTe.
L'Ordonnance du mois de Janvier 1629, dans l'objet
d'exclure· toujours mieux la preuve par témoins fur couee
quefl:ion d'Etat, enjoint à tous Curés de faire de bons
&:
�J04
Jou
RNA L
fide/es Regif/res de baptGmes, mariages & mortuaires.
Dix ans après parut l'Ordonnance de 1639, dont l'art. 7
défend à tous Juges, même aux Juges Eccléfiafl:iques, de
recevoir la preuve par témoins de promeffes de mariages ni
autrement que par écrit, hors le cas où il ferait articulé
que l'a5l:e de célébration aurait été perdu.
.
Toutes ces Ordonnances furent fuivies de celle de 1667,
dont l'art. 7 du titre 20 porte: ler preuves de l'âge, du mariage & du temps du déCès, feront reçues par des Regif/re~
en bonne forme, qui feront foi & preuve en Jufiice. Sur quoI
Rhodier obferve que la preuve de ces faits efi très-effèntielle,
parce que delà dépend la condùion des perfonnes, l'ordre &
l'ouverture des fucceffions ,. que cette Ordonnance & celle de
.1 S39 ont eu en vue de commettre le moins qu'il re peut cette
preuve à la foi des témoins qui pourraient aijèment fe prher au
defir & au be/oin des parties.
L'article q. du même titre de l'Ordonnance de 1667
n'autorife la preuve par témoins que dans le feul cas de la
per:e des RegiHres , ou qu'amant qu'il n'yen aurait jamaIs eu.
L'Ordonnance de 1736, pour affurer par des aaes authentiques les preuves de l'état des citoyens, exige qu'il fait
tenu par les Curés deux RegiHres cotés & paraphés par le
premier Officier de chaque Balliage du reffort; que tous les
aé1:es de baptêmes, mariages & fépulrures foient infcrits,
tant fur l'un qu~ fur l'autrel, de fuite & fans aucun blanc;
que les aél:es fOlent {ignés par nombre de parens & de témoins; & prévoyant le cas où l'enfant aurait été ondoyé &
viendrait à décéder, elle veut qu'on infcrive tout de fuite
l'acte d'ondoyemenr, pour confiater, dit Me. Salle fur l'arr.
S de cene Loi, l'état de l'enfant, qui pourrait fort bien mourir:
dans l'intervalle de l'ondoyement & du fupplément des cérémOllies du baptême.
Tel ell: notre droit. Point de preuve vocale fur la naiffance & l'état des hom mes, à moins que les RegiHres
n'aient été perdus ou qu'il n'yen ait jamais eu. Quand ils exif~ent, ce n'eft que pa.~ eux,.que [e fixe.l'éJat, la condition. des ci.
toyens~
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
30S
toyens. C'efl: à eux & à eux feuls à fixer cette preuve. Les
omiffions des Curés ou Vicaires ne fe préfument point; on
préfume au contraire qu'ils ont rempli leur devoir, qu'ils
ont chargé les Regifires qui leur font confiés avec tant de
foin, des naiifances, mariages & décès qui font fmvenus
dans le cours de leurs fervices. Rien ne peut étre ajouté
à ces Regiftres, rien ne s'y fupplée; on ne peut pas plus
en retrancher qu'en augmenter les itéles. Tom ce qui s'y
trouve écrit, fait pleine & entiere foi; & tout ce qui s'y
trouve omis, eH cenfé n'avoir jamais exiHé.
Où en feroit-on, s'il étoit permis de s'écarter de la teneur des RegiHres, d'y fuppléer des aéles qui n'y ont jamais été infcrits, & fi l'on pouvait être admis, en pareille
matiere, à la preuve par témoins? Tel homme n'auroit jamais eu d'enfans qui fe trouveroit chargé de famille. Les
maris fur-tout, que le décès de leurs femmes expofent à la
reHitution de la dot, ne manqueroient pas de foutenir d'avoir
été peres; & s'il n'en coûtoit, pour gagner la dot, que la
-peine de trouver deux témoins qui l'atteHaifent, on pourroit compter d'avance que le défordre feroit bientôt dans
la fociété, & que les droits des femmes ne feroient prefque
jamais rendus.
On trouvera dans les Auteurs, qu'on s'eft contenté de la
reconnoiifance des parens & de la poifeffion de l'état de
l'enfant, pour ad mettre à la preuve de la filiation; mais on
ne verra pas qu'on l'y ait jamais reçu, fur le fondemtnt'
d'un commencement de preuve par écrit. Jugeons-en par
l'Arrêt qui intervint le tl Avril 1737 dans l'affaire d~ la
Dame Bruis, rapporté par Me. Cochin, tom. 4, p<lg.. 3 'i a.
Privée du fecours des RegiHres, elle ju1lifioi.t d'avoir toujours été éduquée par celle qu'elle lè donnait pour mere.;
d'en avoir reçu une dot de 100000 l.iv·. lors de fon mariage,
outre une donation de 1000 liv. de pen.J.ion. viagere; elle
faifoit valoir une foule de lettres qu'elle avait reçues de fa
part, qui toutes prouvoient la tendreife d'une mere. Rien.
de plus fOfr fans doute : on lui répond qu'il n'y avoir 1'3'5
de commencement de. preuve par écrit ,ap,able de faire-
.
.Q q..
�-
306
Jou RNA L
taire la regle j qu'il fallait, ou la poffeffion conll:ante' & publique de [on érat, ou l'énonciation des Regill:res pour jlJfrilier de la filiation j ainG. jugé par l'Arrêt.
Les hoirs Guillabert difcutoient enfuite les certificats du
Curé & de la Sage-femme. Ils en préfentoient les contraddionsj ils reprochaient à Reinier de. n'avoir pas produit
l'atceflation du Chirurgien qui avoit fait l'opération.
Quand la Loi a défendu la preuve fur cenaines matieres,
qu'elle a même marqué les feules exceptions qu'elle a trouvé
bon d'établir, il n'ell: pas de faits, quelques notoires &
'publics qu'on les donne, à l'appui defquels on puiffe la faire.
admettre. S'écarter de la regle, fous le prétexte de la nature & de la qualité des faits, il n'y aurait jamais moyen
de la fuivre, parce que toujours on les releveroit, jufqu'à.les
.donner pour la vérité même. Le cri de tout un peuple feroir l'objetlion bannale; toujours les faits feraient préfentés
de façon à raffurer fur les dangers de la preuve; dans chaque procès, on feroit valoir les mêmes confidérations; on
illvoquûoit la notoriété, la plus grande publiciré; pour tout
dire, en un mot, ce feroit toujours le même prétexte.
Denifart, . tom. 2, va. Etat, rapporoe un Arrêt qui débouta une fille qui fe difoit enfant du fieur de la Francandiere, de la preuve qu'die offroit de fa filiation j elle alléguoir qu'elle n'avoit pas été baptifée, mais fimplement ondoyée; elle articulait une naiffance & des foins du pere
& de la mere très-bien circonfl:anciés jufqu'à un certain
.1ge. Un. aurre Arrêt dans la caufe d'Elifabeth Duveil, Ce
.difaut fille de Pierre, rapporté par Mr. d'Agueffeau, qui la
débouta d'une pareille preuve. Avtre Arrêr dans Soëfve ,
tom. l , cent. l , ch. 34, qui rendit également hommage
à la maxime. On en trouve un autre rapporté par Me. Co• chin, tom.
pag. 348; & c'efi ainli que la Cour le jugea
par l'Arrêt du mois de Mars 1776, contre le nommé Mafvert, en tàveur de Me. Coye de Tarafcon.
Par Arrêt du 28 Juin 1779, au rapport de M. ·le Con- feiller de Saint-Jean, la Sentence fut confirmée avec dépens ; écrivant Mes. Gaffiel' & CauVet•
4,
•
�DU
PAL AIS
DE
PRO VEN C Il.
307
~=======:==:==ARRÊT
XXXIX.
Si Z'éZ!élion faite dans un te(lament qui a été enfuite rélloqué
par un alltre teflament {ans parlu ·de l'éleélion, en emporte
de droit /,a réllocation.
Si l'acceptatàm du legs emp~che de réclamer' la fubfiituciorr
appofte dans un précédent teflament.
.
.
V
Incenr Mercurin, de.la ville d'Aix, époufa en premieres'
" noces Marguerite Maurel ; dans fon contrat cïvif 1 de
mariage, du 23 Janvier 1723, Jean Mercurin pere lui fit
donation d'une hafiide fituée au terroir de la même ville ,.
avec cJaufe de fubHitution en faveur des en fans qui naÎtroient de ce mariage, les mâles préferés aux filles au choix
du donataire; & à défaut de nomination, l'aîné des enfans m~les étoit appellé par le donateur.
De ce mariage nâquirent Jean-BaptiHe & Jean-Jofeph•.
Vincent Mercurin fe remaria peu de temps après le décès de Marguerite Maurel ; de fon mariage avec Anne Gardet,.
il eut encore un garçon & deux filles. Il fit un tefiament le
31 Mars 1762, dans lequel il infiitua héritier Jean-Jofeph
fon fils cadet du premier lit, & le nomma en même temps
pour recueillir les biens de la fubfiitution .. Il fit un fecond
t~frament le 28 Décembre 1770, par lequel il nomma pu-·
rement & fimplement pour :fon héritier l'un de !es enfans
mâles du fecond lit, fans révoquer l'éleél:ion au fidéicommis'
qu'il avoit faire en faveur de Jean-Jofeph.
1 Vincent Mercurin mourut, & Jean-Baptifre fon fils aîné·
du premier lit {e croyant appelJé de droit au fidéicommis
par défaut de nomination, fe mit en poffeffion des ~iens
librlls délaiffés par {on pere, attendu que les biens fub~itués
avoient été aliénés, & que le défaut de publiqtion & d'en-régifirement mettoit. les tiers-acq~éreurs à couvert de toute.
recherche.-
�308
Jou
R li' A L
Les biens libres confifl:oient entr'autres à une rnaifon
qu'il vendit au prix de 4000 livres à Jean Payan par aél:e
du lIMai 177'2.; il chargea l'acheteur de cette maifon de
payer pour lui à Jean-Jofeph fon frere 7<,,0 liv., à laquelle
fomme avoit été fixée la portion qui lui compétait. Ce dernier comparut à l'aél:e, & reçut des mains de l'acquéreur 4'i0
liv. à compte.
Après le déds de Jean-Baptifl:e Mercurin, Jean-Jofeph
ayant eu connoi/fance de l'éleél:ion contenue dans le teHament du 31 Mars 176'2. , préfenta requête au Lieutenant Général; il demanda contre les héritiers de Jean - BaptiHe
Mercurin , .l'ouverture du fidéicommis appofé dans le contrat de mariage du '2.3 Janvier 17'2.3, & contre Jean Payan,
qu'il feroit condamné à la défemparation de la maifon par
lui acquife, comme faifant partie des biens libres de Vincent Mercurin, deltinés à remplacer les biens fubH.itués.
L'il1fl:ance fut enfuite évoquée pardevant la Cour, en vertu
du privilege des Pauvres.
Suivant Jean-Jofeph Mercurin, les le~s & les fidéicommis ne font pas les feules difpolitions qui peuvent faire la
• matiere des telbmens; rien n'empêche de'tpêler dans ces
aél:es de derniere volonté des difpolitiol1s quï"'t-iennent de la
nature des contrats. La Loi 7, if. de ajJignandis libertis,
nous apprend. que l'affignation des affranchis, qui, dans
l'ancienne Rome, fe faifoit par le Patron en faveur de fes
enfans, pouvoit être faite par teftament, quoiqu'elle ne fût
regardee, ni comme legs, ni comme fidéicommis. Parmi
nous, celui qui ef!: c:.hargé d'élire à un fidéicommis, peut
faire fon choix dans fon tefl:ament, comme dans rout autre
aél:e; il peut encore y faire des déclarations, des confeffions de dette, &c.
Ces difp'olitions contraél:uelles, quoique jointes avec les
difpofitions teHamenraires, font pourtant de différente nature; elles n'ont rien de commun avec elles j elles fOllt "lib':
folument étrangeres au tefl:ament, comme' 'dic la Loi 20, jf.
de verbor. fignif. Verba contraxerunt, geJTerunt , non pertinent
ad jus teflandi.
�D 11 PAL AIS
D l!
PRO VEN C E.
30 9
L'éleaion ou la reHit.ltion d'un fidéicommis n'eLl: qu'un
fimple miniHere, qu'une déclaration de la volonté du fon~
dateur du fidéicommis. L'élifant n'exerce point une libéralité; il ne donne rien du fien; il n'a d'autre qualité que celle
de dépofitaire; il eH le miniHre & l'exécuteur du fondateur
du fidéicommis: eleaus non capit ex teftamento eligemis, [ed
ejus qui juffit reftitui. L'éleél:ion eH encore confidérée comme
une dette que l'éleél:eur eH chargé d'acquitter. JEris alieni
Joco ••• debitor ipfiufmet elec1jonis.
L'éleél:ion n'étant autre chofe qu'une fimple déclaration
de la volonté du fondateur du fidéicommis, prend fà force
du teHament qui donne pouvoir d'élire; delà elle peut être
faite dans toute forte d'aél:es, pourvu qu'il conHe de la volomé de l'élifant; elle peùt être faite ou par donation entre
vif, ou par teHament, ou par aél:e féparé; elle n'a pas be-,
foin, pour être valable, d'être revêtue des formalités eiTentielles dans les aél:es de difpofition à caufe de mort, & furtout dans les teHamens; delà elle ne lai/fe pas de produire
fon eHet, quoique le. teHament qui la renferme foit nul,
ex aau nulIo, declarawr volumas.
.
Celui qui dl: chargé d'élire, &. qui fait fon choix dans
fon teHament, fait donc deux aél:es; il difpofe d'un bien
qui lui étoit confié, & en cette qualité, il fait un aél:e d'éleél:iofl; il difpofe de fes biens propres, & en cette qualité,
il fait un te!l:ament. Ces deux aél:es, quoique renfermés dans
un feul, font pourtant abfol)lment diHinéts & féparés l'un de
l'autre. L'éleél:ion n'a rien de commun avec les autres difpa.
litions teHamentaires, non pertiner ad jus teftandi. Elle eH autant étrangere au reHament par fon objet que par fa nature.
Cela eH fi vrai, que la nullité du tefl:ament n'opere pas celle
de l'éleél:ion, tandis que toutes les difpofitions qûi ont trait
aux tefl:amens en (uivent le fort, & tombent de plein droit
par les nullités dont ils font infeél:és.
Si l'éleél:ion peut fubfill:er fans le tefiament qui la renferme, fi elle n'en fait pas partie, elle ne peut donc pas
être révoquée de plein ~lroit par la feule révocation du teftament.
�310
Jou 1'- N A L
Il faut difiinguer l'éleél:ion tacite d'avec l'éleél:ion expreffe.
La tacite qui a lîeu per inflitutionem hœredis, lorfque celui
qui dl: chargé d'élire inil:itue fon héritier univerfel, l'un des
éligibles, dl: emportée par la révocation du téilament, parce
que dans ce cas, n'exiil:ant que par l'inil:itution d'héritier
qui eil: révoquée, elle doit néceffairement périr avec elle.
L'éleél:ion expreffe ne tient au contraire fon exi!l:.ence que
d'elle-même; elle ne prend fa force que du teil:ament qui
donne pouvoir d'élire -; elle n'emprunte rien de l'in fritution
d'héritier, ni du teHament de l'élIfant dont elle ne fair point
partie; elle ne peut pas par confequent être révoquée par I~
feule révocation de l'inHitution d'héritier ou du teHament où
elle -eil: renfermée.
Me. Vulfon en fan Traité des Eleaions, édit. de I7~3,
pag. 180, décide que le teHamenr & l'inil:itution poil:érieure
ne révoquent aucunement_ l'éleél:ion précédente. Quand deux
aél:es fom entiérement connexes, le âernier révoque toujours
le premier; telle eH la regle pofleriora derogant prioriblls.
Mais les aEl:es d'une nature difrerente ,_ & qui n'ont aucune
connexité entr'eux, font exceptés de cette -regle. Le dernier
n'ôte point au premier. fa force & fa vigueur; ils produifent
refpecrivemenc leur eflet. Ainfi un teil:ament pur & {impIe,
dans lequel le teil:ateur ne difpofe que de fes biens propres,
ne peut pas révoquer un acre d'éleél:ion précédemment fait,
parce que ces deux difpofitions diflerent entr'elles par leur
-nature & par leur objet.
A la bonne heure que l'éleél:ion foit emportée par la ré~
vocation du teil:ament, lorfque le teil:ateur fait un nouveau
choix dans un teil:ament' poil:érieur; dans ce cas le dernier
teHament eil: à l'inil:ar du premier, il peut être confidéré
fous la double qualité d'aél:e d'éleél:ion & de teil:amem, &
conféquemment chaque- difpofition porte fon coup.
•
Il eH: de pr.incipe atteHé par les Auteurs, & notamment
par Julien dans fes Mémoires manufcrits, vu. SlIbflitutià , fol.
13, lett. D., & par M. V,ulfon en l'endroit cité, pag. 179,
que l'éleél:ion tacite per inflirutionem hœredis, ne révoque
point féleél:ion expre1fe, parce qu'une difpofition générale
.
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PAL AIS
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3 rI
ne déroge point à une difpofition particuliere, quia fpeciei
per genus non derogatur. Il dl: encore de principe qu'une
précédente éleaiol1 expreife n'ef!: point révoquée par une
éleaion pofiérieure faite en faveur d'une perfonne qui n'ef!:
point éligible. Ainli l'attellent Brillon au mot Eleaion d'héritier; Serres dans fes Infiituts, liv. 2 , tit. 23, §. 12 ; Cambolas, Décilions notables, liv. '), ch. 36.
Si l'éleaion tacite qui, réfùlte de l'inititution d'héritier ne
révoque point l'éleaion expreife faite prccédem ment, à quel
propos veut-on qu'elle foit emportée par la feule révocation
du tefl:ament l S'il fuffifoit d'oppofer à une volonté expreife
la feule préfomption d'une volonté contraire, certainement
l'éleaion pof!:érieure, quoique faite en faveur d'un incapable,
révoquerait l'éleaion antérieure. Dans ce cas, l'on voit
clairement que l'intention de l'élifant écoit d'exclure le premier élu, au lieu que' la feule révocation du tef!:ament indique un changement de volonté relatif aux biens propres
du tef!:ateur & non pas aux b.ieqs fidéicommiifaires. Si l'élection expreife, précédemment faite, ne peut être révoquée que
par une autre éleaion expreife O!J par un aae exprès de révocation, &' non pas par 'des préfomptions de changement
de volonté, la premiere vaut & fubfifie contre l'intention
évidente de l'éli!ànt : d'où il fuit que la révocation du teftament n'indique pas un changement de volonté par rapport. à l'éleaion qui y ef!: contenlle ; & que ce changement,
fallut-il' le fuppofer, en droit ou en fait, ne ferait jnmais ca- .
pable de la révoquer.
La fin de non-recevoir qu'on oppofe à Jean-Jofeph Mercurin n'exige pas une réfutation férieufe. En acceptant le
paiement ou l'indication qui lui fut faite par fon frere dans
l'aae de vente de la maifon, Mercurin n'a pas pu préjudicier à fes droits. Son acceptation aurait pu lui nuire, fi
-elle pouvoit être regardée comme une renonciation tacite
.au fidéicommis; mais il n'eH: pas poffible de l'envifager fous
ce rapport.
.
Une renonciation tacite ne peut fe tirer que de certaines
circonfl:ances, ou _de certains aaes qui manifefient d'une
�312
JOURNAL
maniere non équivoque la volonté & l'intention de ren'oncer
à un droit acquis. D'ailleurs l'on n'efi poine cenfé & l'on
ne 'peue pas même renoncer à un droit inconnu & ignoré.
Ici Jean-Jofeph Mercurin, acceptant ce paiemene, ignoroie
l'éleaion faite en fa faveur dans k premier teHamene de Vincent fon pere.
L'objet du paiement & la qualité qui impofoit à JeanBaptiHe Mercurin l'obligation de payer, excluent cout foupyon de renonciation. Il conHe en faie que les 7')0 liv. reyues
par' Jean-Jofeph lui furent payées pour' la portion qui lui
cam pétaie fur la doe de fa mere j ce paiement n"avoit rien de
commun avec les biens de la fubHitution ; Jean-Baptifie
Mercurin écoie ceffionnaire des biens & droies fucceffifs de
fan pere en vereu de la tranfaétion pafi'ée entre lui & les héritiers tefiamentaires le Il Mars 1772; & en cette qualité,
il était tenu de payer à fan frere la portion le concernant
fm la dot de fa mere. Jean-Jofeph Mercurin traicoit avec
fan frere, comm,e s'il eûe traité avec Anne Gardet fa marâtre , fi elle ne fe fûe pas départie de fa qualieé d'hérieiere ,..
par la tranfaétion de 177'1.~
Celui qui n'a pas une connoÎifance précife du: droit ~n'on
lui ravit, ou cone on difpofe à fan préjudice-, n'eH point
cenfé y renoncer, quelque aéte pofiérieur qu'il puiife faire.
Il n'a pas tenu à lui de s'y oppofer, quia concradicere non
.pMuie, comme dit la Loi Caius, ff. de.Pignor. aa. D'ailleurs
celui qui eH dans l'erreur & qui ignore fan droit, ne peut
pas donner un confentement, errancis nuUus eft confenfus•
. Pour pouvoir oppofer à Jean-Jo[eph Mercurin le fait du
paiement comme une approbation & une renonciation tacite, il faudrait prouv.er qu'il avait une connoiifance particuliere de l'éleétion faire à fan profit; qu'il avait fait des
aéles de propriété, comme fuhfritué" ou prétendant droit à
la fub{titution.
Les hoirs de Iean-Baptill:e Mercurin & Jean Payan répon,.
doient, que Jean-Jofeph Mercurin était tout à la fois non-reEevable & mal fondé; non-recel'able, parce qu'en acceptant,.
lors. de la vente de la maifon, le, paiement de [es droits
fucceŒfs li<
�D U PAL AIS D 11 P R. a YEN C Il.
3 [3
fu.cceffifs, il avait reconnu que la fubfiitution étoit fixée fur
la tête de Jean - BaptiHe; mal fondé, parce que l'éleél:ion
contenue dans le teHamenr du 31 Mars 176'2. ayant été emportée de plein droit par la révocation de ce même te!1:ament, Vincent Mercurin étoit mort fans avoir fait aucun
choix; & dès-lors, d'après le vœu du fondateur du fidéicommis, Jean-RaptiHe étoit appellé, comme l'aîné des ellfans du premier lit.
En thefe générale, la teneur des paél:es & l'objet que les
parties s'y font propofées, caraél:érifem l'aél:e. Comme il
prend fa détermination de la partie la plus confidérable , b
difpofition particuliere qu'il renferme, ne peut influer fur
fon elfence, ni moins encore la changer; elle doit donc
nécelfairement en prendre la nature. Partie d'un même tout,
il n'eH pas poffible qu'elle foit d'une qualité différente; que
l'enfemble foit fournis à des regles qui ne concernent pas
fa 'partie, & qu'une difpofition, qui n'eH qu'une dépendance, qll'un acceffoire, ne fait pas réglée par les mêmes
principes que l'aél:e principal dans lequel elle fe trouve inférée , idem efl jus in parte ae Ùl toto.
Ce n'eH pas qu'on n'ait permis, malgré la Loi 20, ff. de
Verbor, fignif. & le §. dernier de la Loi Hœredes palàm , if.
de Teflament. de mêler dans un teHamem, des difpofitions
particulieres qui tiennent à la namre des comrats; mais ces·
difpofitions ne prennent pas u·n caraél:eré diHinél: de l'aél:e
qui les renferme, & ne font pas de différente nature. Les
Interpretes Ont bien douté qu'on pût les inférer dans un
teHament ; mais ils l'econnoiffent que quand elles s'y trouvent, elles ne font pas de plus de durée, & que la t9talité d'un aél:e, qui ne prend fa force que par la. mort, cft
fujerre à variation pendant la vie..
On a vu avec raifon. que tout ce qui eft inféré· dans un
teHament, d.oit être réputé difpofition finale, puifque le titre, inconnu au tiers qui doiE en profite!', demeure pardevers le teHateur pendant toute fa vie, & qu'il ne doit produire quelque effet que du jour de fa mort. Une difpofition,
pour avoir effet ,. doit être contenue dans un titre qui exiHe
Rr
�314-
10
UR. N
A
L
au temps oÙ fon exécution commence. Ce titre efr chance.;
lant pendant toute la vie du tefrateur; la 4ifpofition qu'il
renferme doit donc l'être auffi; elle eft d'une même nature;
elle eft foumife aux mêmes LoilC; elle doit donc être révo-"
quée, quand le teftament, dont elle eft une dépendance,
fe trouve révoqué.
Cette conféquence dérive néce1fairement du principe attefté par les Auteurs les ,plus refpeétables; tels que Fernand, Faber & autres, & couronné en 1778 par un Arrêt rendu au rapport de M. le Confeiller de Saint-Martin,
entre Jofeph Bieule & Marguerite Marc, qui jugea que la
confeffion d'une dette contenue dans un teftament, étoit révoquée avec le teHament qui la renfermoit ; il répugne que
le principal foit a néanti par une volon~é contraire, & que
l'accelfoire concourant à former le toUt, foit inébranlable,
& fournis à des regles abfolument différentes de celles qui
régiŒent le titre qui lui fert de fondemènt. Pour que la
difpofition foit irrévocable du morr,ent de fon exifience, il
faut qu'elle foit acceptée par le tiers qui dcfit en profiter;
mais la difpofition qui n'ell: appuyée que fur la volonté d'un
'feul, demeure chancelante & variable comme cette même
volonté, & conferve le caraétere de diipofition finale.
"
L'éleétion que fait l'héritier grevé n'ell: pas régie par des
principes différens; attachée à l'aéte qui la contient, elle
en fuit le fort, & devient contrat & irrévocable, ou {impie defl:ination & difpofition finale, fuivant que l'aéte qui
la renferme ell: lui-même contrat ou tefiament. Au moyen
de ce, l'éleétion n'étant qu'une partie de l'itéte qui la renfeqne, cet aéte en détermine la nature "' elle doit en fubir
le fort & être révoquée avec lui, [olo nutu contrariœ voluntatis. Or, quelle' marque plus "certaine de changement de
volonté que la révocation du teftament? Du moment que le
tenament a été révoqué, l'éleétion y contenue en cenfée
n'avoir jamais eu un moment de vie; l'élu n'ayant plus pout
lui ultimam voluntatem defunai, attendu "que la révocation
du tefl:ament en affeéte touteS les difpofitions: revocato teftamenro, tota defunai vqluntas quœ in eo feripta fuerat, irrita
�D U
PAL AIS
DEfi R. 0 VEN C E.
31 S'·
conftituitur. D'après Fromental, va. EI,aion, l'éleéfion même
expreife faite dans un premier teftament, dt révoquée par
un fecond, quoiqu'il n'y foit fait aucune éleétion ; & en ce
cas, le fidéicommis fe divife entre tous les éligibles, fi le
fondateur n'en a autrement difpofé. D'après l'arr. 64 de
l'Ordonnance des Teftamens, l'éleétion n'eft irrévocable que
lorfqu'elle eft faite par un aéte entre vif, & acceptée par'
l'élu dans la forme prefcrite pour l'acceptation des dona-·
tlOIIS.
Les hoirs de Jean-Baptifte Mercurin concluoient que Vincent Mercurin étant mort fans élire, la volonté expreife du
fondateur du fidéicommis les mettoit en poifeffion des biens
fubftitués. Ils ajoutaient que Jean-Jofeph Mercurin était non··
recevable en fa demande, ne l'ayant formée qu'après avoir.'
reconnu que la fubftitution devoit être ouverre en faveut de
Jean-Baptiile fon frere, en lignant, conjointement avec lui"
une procuration, pour donner pouvoir à un Procureur de.
préfenter un expédient, porrant entr'autres chofes l'ouverture de la fubilitution appofée dans le contrat de mariage'
de Vincent Mercurin leur pere, en faveur de Jean-BaptiHe;
Mercurin, comme fils aîné & appellé à icelle à défaut de:
nomination. Il l'avoit encore reconnue, en acceptant l'indication faite en fa faveur par fon frere dans l'aéte de vente;,
cette indication ne pouvoit être faite par Jean-Baptifie que'
comme fubilitué, puifque ce n'était qu'à ce titre qu'il l'of.·
fédoit la maifon dont le prix a fer-vi à le payer.- Il eft donc.
non-recevable à attaquer aujourd'hui ce qu'il a approuvé dans
un temps. Il n'eil pas probable qu'il eût ignoré pendant fi.
long-temps l'éleétion qu'il invoque aujourd'hui.,
Par Arrêt du 30 Juin 1779., au rapport de M.· le €onfeiller de Beaurecueil, Jean - Jofeph Mercur.in fut déclaré'
non - recevable. & mal fondé ,. avec dépens; écrivant Mesr
Rambot & W 1.1. r.
~~
�ARR Ê T
X X X X.
Les aliénations faites par le mineur alfifté de [on curateur
doivent hre attaquées dans les dix ans du jour de la majorùé.
L
E 14 Janvier 1733, la Dl1e. Grambois de la vil1e de
Marfeille, mineure & affifiée de fon curateur, vend à la
Dl1e. Olive une maifon dont le prix fut indiqué ou-employé
au trouffeau de la Dlle. Grambois.
La Dlle. Grambois fe marie avec le lieur Duratan; el1e
l'infiieue fon héritier univerfel, & meurt le 2.) Juillet 1744,
délaiffant une fille. Duratan fe remarie le 18 Décembre
1749, & meurt le 1'1 Juin 1769. Dans cet interval1e, & le
3 Août 17'18, la Dlle. Olive tranfporte par échange la
-maifon à la Dame Nicolas & re<:oi1: une bafl:ide. La Dlle.
Olive vend la bafl:ide au lieur Suri~n le 2.7- Novembre 1772..
A près la mort du lieur Duratan, fa fille répudie fa fucceffion & le I I Février 1774 el1e réclame la maifon vendue
par fa 111ere en minorité. Le Lieutenant de Marfeille, par fa
Sentence du 2.0 Juin 1778, caffe l'aél:e de vente, avec refl:i·
tution de fruits. La Dlle. Nicolas appelle de_cette Sentence
& forme llne garantie conrre le {jeur Surian.
La Dl1e. Duratan difait qu'il étoit ju fl:ifié au procès que
que la vendereffe n'avoit que quinze ans lorfqu'elle vendit
fa maifon; qu'elle fe maria un an & cinq jours après fous
une confl:itution génerale; qu'elle décéda le 2. 'i Juillet 1744.
Point de prefcription pendant tout ce temps. Elle eût pu
commencer alors, li le lieur Duratan qu'elle inftitua fon héritier ne fe fût remarié, & !;l'eût pas perM"f'lfr fon convoi
à de feconcies noCes la fuëcelfio'n de fa premiere femme.
Cet événement ayant fait paffer cette même fucceffion fur
la tête de fa fille, la prefcription trouva un nouvel obfiacle
dans fa qualité de fille de famille, obfiac1e qui ne put être
�317
foutevê . qu'au décès de fon pere, premier moment qu'elle
put agir.
La prefcription n'a pu commencer au décès de la mere ,
parce que Je droit de la Dlle. Duratan n'éroit point ouvert.
Quoique fa fille unique, elle n'avoit qu'une efpérance à fa
fucceffion, & cette efpérance ne pouvoit fe réalifer qu'autant
que fon pere fe remarieroit. Me. Julien dans fes Notes manufcrites, rom. 1 de prrefcript. , cap. 2, p. 'i , litt. M.,
propofe la queftion de favoir quel eH l'empêchement qui
arrête la prefcription. Aliud impedimentum eft, fi nondùm dies
aut conditio evenerit, non porefl enim prœfcribi aaio, antequàm
nqta fit.
Le pere héritier de fa femme n'eH qu'un héritier conditionnel, & à la charge de garder viduité. S'il fe remarie,
il celfe de l'être; fa polfeffion n'a été que précaire, & la
peine qu'il encourt par fon remariage a un effet Li fort rétroactif, qu'il eH cenfé n'avoir jamais été héritier, & n'avoir joui
des biens dévolus à fes enfans du premier lit qu'en force de
la puilfance paternelle. Au moyen de cette fiaion, il faut
regarder l'enfant comme s'il avait été infl:itué héritier par fa
mere; & fous ce point de vue la prefcription n'a pu. courir
contre lui pendant la vie du pere.
S'il eH certain que le pere ne peut rien faire au préjudice
du droit, comme de la !impIe efpérance de fes enfans ; s'il
ne .dépend pas de lui de rén,dre ce droit & cette efpérance
vains & illufoires par des aliénations ou des engagemens ,
il fuit nécelfairement que la prefcription ne peut courir
contr'eux pendant le temps de la jouilfance paternelle. Le
droit & l'efpérance marchent d'un pas égal, parce que le
pere eft obligé de garder à fes enfans du premier lit, fans
aucune diHraEtion, tout ce qu'il a reçu de fa femme, ainfi
que l'attefl:e Defpeilfes, tom. 1, part. l , fea. 6, nO. 2. Le
mari n'eH alors qu'un héritier conditionnel, & fon convoi a
un effet rétroatl:if. ( M. 'de Bezieux, pag. 390') Telle eH
encore la difpofition du Statut, qui exclut toute prefcriptian, en ces termes : feclufl1 quâcumqu.e 'prœfcriptione , uiam
longiJJimâ , & le témoignage de Me. J uheu dans fon ComDU
PALAIS
DB
P'ROVENCE.
�318
JOURNAL
mentaire fur le Statut, qui dit expreffément que l'aaion
des enfans n'dl: ouverte & ne doit être intentée qu'après
le décès de la mere; que jufqu'alors leur droit ell: en fufpens, & qu'il ne fauroit y avoir prefcription qu'autant que
les enfans laiiferoient paffer 30 ans du· jour du décès de
leur mere fans former leur demande. D'ailleurs il eG: ici
q\leG:ion d'une vente nulle ipfo jure, d'une revendication &
non d'une aaion refcifoire. Or les loix difpenfent dans ce
cas de venir par lettres de refcilion, & n'admettent conféquemment d'autre prefcription que celle. de 30 ans. Non eft
vobis neceJJaria in integrum reflitutio, dit la loi 2, cod. de
prred. & aliis: fi tutores veZ curatores veflri pojJèffionem, Zice~
pignori nexam vendiderunt fine decreto. Telle eG: encore la
difpolition de la loi 4 du même titre.
Si les biens immeubles des minems font vendus fans autorité de Juftice, la vente eft nulle, & le mineur n'a pas
befoin d'en être re1l:itué & d'impétrer des lettres. ( Fromental, pag. ')00; Ferrieres dans fan Traité des Tutelles,
part. 4, feél:. 8 , nO • 3)7; Duperier, rom. 3 , pag. 397 ;
Bon.iface, tom. 4, liv. 4, tit. 7, ) M. Julien dans fan Commentaire fUI le Sta.tl1t, rom. 2 , pag.. '578 , rapporte divers
Arrêts qui 1ont ainli jugé. Autre Arrêt rendu en Juillet 1776,
au rapport de M. le Confeill.er de ·Fabry , en faveur du lieur
Peyrony de Gonfaron, qui Gonfirma la Sentence du Lieutenant de Brignoles qui avoit caffé l'aél:e de défemparation
d'une terre paffée par fa mere en 1733.
La qualité de fecond acquéreur ne fauroit être d'aucun
poids, il ne fait que continuer 'la poffeffion du premier, &
il détient comme lui un bien vendu contra Zegum interdi8a.
Le texte de l'Authentique maZœ. fidei veut que celui qui acquiert d'un poifeifeur de mauvaife foi ne puiife oppofer la
prefcription de la ans; il exige celle de 3'0 ans. Malœ fidei·
poJfejJàre aZienante, cefJàt Zongi temporis prœfcriptio :.fpe8atur
ergà 30 annorum defenfio. En fait la Dlle. Olive, premier
acheteur, fut un poifeifeur. de mauvaife foi pour avoir acheté
d'une mineure qui avoit à peine quinze ans, fans néceffité.,.
fàns caufe-, fans décret ,. & fans formalités•.
�DU
PAt AIS
DB
PRO VEN C B.
3r 9
TI eG: vrai que ce texte ne proroge l'aél:ion à 30 ans
contre le fecond acquéreur, que parce qu'il fuppofe que le
réclamataire ignoroit fop droit & ne favoit pas que la chofe
vendue lui appartînt. Mais Serres dans· fes Inil:ituts, tit.
cie ufucap. , remarque que dans les pays de droit écrit, cette
connoiifance n'eil: jamais préfumée, & qu'on y juge conftamment qu'il faut toujours 30 ans pour acquérir par la
prefcription les chofes qui fie leur nature font imprefcriptibles.
La Dame Nicolas, veuve Crefp, difoit contre Surian,
qu'il n'ell: pas poffible que le contrat fuhfiil:e pour une partie,
fans fùhfiG:er pour le tout; il falloit donc qu'étant dépouillée
de la maifon , eUe rentrât dans fon domaine. C'eft ce que
décide la Loi premiere , jf. de rer. permut.: in permutatione
cùm utrumque pretium efl, utriufque rem fiui oportet. Delà
le Légi!1areur conclut: undè, fi ea res quam acceperim veZ
çederim pofleà evincatllr, in fa8um dandam a8ionem refpondetur. L'on fait que l'aél:ion in fac1um aboutit, en fait
d'échange, à la reH:itution du fonds donné en contre-échange,
puifq.ue c'eil: l'aél:ion do ut des, ou , fi l'on'veut, conditio
caufli non fecutâ.
La Loi premiere, Cod. eod. n'cil pas moins précife:
Permutatione fac1â, fi evic1um efl. quod daturn efl, fi hoc elegeris, cum ratione reflitui poJfulabis. C'eft d'après ce~ dilférens Textes que Legrand, fur la coutume de Troyes, art.
l 'i4, n. 31 , dit qne l'échange fe fait feulement rei tradi·
cfitione, & qu'en échange, celui qui eil: inquiété en la chofe
par lui reçue, peut demander de rentrer en la chofe par lui
donnée en contre-échange; ita Buiifon, fur le titre du cod.
de ru. permutat.; & c'eil: ainfi que les Arrêts l'ont décidé; ils
font rapportés par Boniface, M. de Saint-Jean & Duperie.r.
Combattant enfuite la prétention de la Dlle. Duratan, elle
la foutenoit non-recevable. La vente ayant été paifée par la
mineure elle-même, elle ou fes héritiers devoient agir dans
les dix ans utiles; les dix années utiles de la reil:itution une
fois écoulées, l'aél:ion eft éteinte, avec d'autant plus de raifon , que la Olle. Duratan repréfentoit l'h(:ritier putatif;.
�32.0
Jou RNA L
elle eft dans le fait un tiers poffeffeur qui n'a point acquis
à non domino, & qui eft au cas de la prefcription- de dix
ans.
Lorfque le mineur a lui-même vendu, il doit revenir dans
les dix ans. La Dame Nicolas citoit l'art. 134 de l'Ordonnance de' Franl(ois premier, Theveneau & l'Arrêt rapporté
par Dunod; elle invoquoir l'Autorité de Mornac, -de Cochin, & de la Loi 2. ) , ff. de petit. fzœred., pour établir que
l'aliénation faite par l'héririer putatif n'expofoit pas l'acquéreur à la revendication.
Ce n'eft que lorfque le contrat a été paffé par le tuteur
ou par le curareur, qu'érant alors nul d'une nullité publique,
on peut en demander la caffation dans les rrente ans. Mais
lorfque le mineur a lui·même vendu avec l'affiHance de fon
cUfllteur, qu'il air vendu avec formalité ou fans formalité,
rien de plus indifféren{, s'il ne fe pourvoir dans les dix ans.
Beaucoup d'Auteurs n'onr pas faifi la différence qu'il y <!
que le mineur vende lui - même affifté de fon curateur, Ol!
que la vente air été paffée par fon curateur; delà on les'iI:
vu' confondre léS de'ux cas. Mais ceux qui ont faiii l'efprit
des Loix, ont ru diHinguer que la vente faite par le tuteur
ou par le curateur, étoit nulle d'une nullité de droit public,
& que celle qui éroit faite par le mineur, affifté de fon curateur, l1'éroir pas nulle; fed venJebat tantùm annullanda.
. L'on diflingue en droit les contrats qui font nuls d"une
nullité du droit public, de ceux qui ne font nuls que d'un.e
nullité privée. Au premier cas, l'aél:ion de refcifion durè
trente années; au fecond, elle n'en dure que dix. L'Ordonnance de 1)39 a décidé que l'aliénation du mineur, faite fans
décrèt ni autorité du Juge, np. donnoit lieu qu'à l'aél:ion de
reftitucion, qui ne dure que dix ans.
Dumoulin, fur l'Ordonnance, fait hi diftinél:ion des con.
trars faits par les mineurs, & dit: fecùs, fi par les tuteurs,
& fic tantùm de .adultis. Mr. Bourdin dans fa Paraphrafe
fur la même Ordonnance, a le mieux développé cette queftion. Theveneau, Duperier en fes Notes inanufcrites, va.
Mùuur, Mourgues fur le Statut l pag. p; Boniface, tom. 4,
pagh
�DU.PA LA1S. D.E PR-OVENCE.
3'2.1
o
'2.44; J ulten y. Rejllttltlo, pag. 19 'i , & Decormis
'2., col. l'il 6, tiennent le même langage. De fait (ob~
pag.
tom.
fervoit la Dame Nicolas) les dix ans utiles fe font écoulés
dep . la vente paffée par la Dlle. Grambois. Le heur Duratan, Fon mari & Fon héritier, avoit joui, comme vrai
propriétaire, pendant cinq ans & cinq mois. La Dlle. Duratan n'a fotmé fa demande que quatre ans & huit mois
après la mort de Fon pere; il faut joindre les deux temps
que l'un ou l'autre héritier a joui comme vrai maître, & a
pu agir pour faire refcinder la vente, & dès-lors l'aél:ion
dl: prefcrite.
La Dame Nicolas ajouta qu'ellc auroit pu établir qu'étant
fecond tiers acquéreur, il lui fufEfoit de la prefcription de
dix années, ainIi que le décidellt l'Authentique Malœ Jidei ,
le chap. 7 de la Novelle 119, Duperier en fes Maximes,
tit. de la Pi'efcription de dix ans.
Dès que la prefcription de dix ans fufEt d'ailleurs, cette
derniere queO:ion ne revient que pour donner plu§ de faveur
à la caufe : tout étoit confommé depuis près de quaranr~
cinq ans j d'ailleurs la mineure n'avoit point été léfée j elle
trouva Fon avantage dans la vente qui facilita fon mariage;
& il fuffit que dans le long intervalle de temps qui s'eft
écoulé, on trouve dix années utiles, pendant lefquelles les
hoirs de la Dlle. Grambois auroient pu agir.
Le fieur Surian obfervo~ que n'ayant pas traité avec la
Dame Nicolas, elle n'avoit aucune garantie à intenter contre
lui; qu'il avoit acquis aux encheres; qu'il po1fédoit la bafride depuis trente ou quarante années; que ce temps fufEfoit
pour lui avoir acquis 1a prefcriprion. L'aél:ion en revendication compéteroit à la Dame Nicolas, fi la campagne éroit
encore dans les mains de la Dlle. Olive; mais dès qu'elle
l'a vendue & qu'elle fe trouve entre les mains d'un tiers,
elle n'a point d'aél:ion contre ce tiers. C'eO: la décifion de
la Loi 3, if. de rer. permut.; de la Loi Cwn precibus au
même titre dl! Code j & c'e11: le fentiment du PréIident Faber, déf. 9, Cod. de rer. permutat.
Par Arrêt du premier Juillet 1779, après partage, M.
S s
�3~~
Jou RNA L
le Confeiller de Monvallon, Rapporteur, & M. le Confeiller
de Robineau, Compartiteur, qui fut de l'avis de l'Arrêt, la
Dlle. Duratan fut déboutée de fa demande, avec dépens envers toutes les parties; écrivant Mes. Pafcalis & Cauv • Il
fut décidé tout d'une voix que l'aliénation avoit dû être attaquée dans les dix ans. La Cour fut partagée fur la queftion de favoir, li pour compléter les dix ans, il falloit joindre le temps du veuvage du pere, au temps que la fille avoit
joui apr1:s la mort de ce dernier.
Le partage fut vuidé tout d'une voix, de l'avis de M. de
Beaulieu; il fut jugé que les deux temps devaient être
joints, parce que la Dlle. Gramb'ois n'ayant point impofé
la condition à fan mari de ne point fe -remarier, ce dernier
n'avoit perdu fa propriété que par le feul effet de la Loi;
& il av?it joui comme vrai maître.
-
ARR Ê T
X X X X J.
En Provence l'Ordre de Malte eft fournis au paiement ,des
reves & impofitions 'établies par les Communautés [ur les
fruits, denrées & marclzandifes de confommation.
D,y
Ans le mois de Juillet 1777 , Mre. d'Albert St. Hy, "polire, Chevalier profès de l'Ordre de Malte, demande
aux lieurs Confuls & AlTelTeur d'Aix l'exemption du droit
de Piquet pour la farine nécelTaire à fa confommation, fous
prétexte que quelques Commandeurs de fan Ordre avaient
joui, par intervalles, de cette franchife, en vertu d'un Arrêt
<lu Grand Confeil, rendu contre la ville d'Aix en 1663.
Le Cohfeil Municipal alTemblé le 26 du même mois,
délibere de confulter, & qu'en attendant, le Fermier percevra le droit de Piquet fur la farine du lieur Chevalier
d'Albert.
Dans l'intervalle, les lieurs Chevalier d'Albert & de Treffemanes-Chafieuil refufent de payer les droits de deux facs
�3~~
Jou RNA L
le Confeiller de Monvallon, Rapporteur, & M. le Confeiller
de Robineau, Compartiteur, qui fut de l'avis de l'Arrêt, la
Dlle. Duratan fut déboutée de fa demande, avec dépens envers toutes les parties; écrivant Mes. Pafcalis & Cauv • Il
fut décidé tout d'une voix que l'aliénation avoit dû être attaquée dans les dix ans. La Cour fut partagée fur la queftion de favoir, li pour compléter les dix ans, il falloit joindre le temps du veuvage du pere, au temps que la fille avoit
joui apr1:s la mort de ce dernier.
Le partage fut vuidé tout d'une voix, de l'avis de M. de
Beaulieu; il fut jugé que les deux temps devaient être
joints, parce que la Dlle. Gramb'ois n'ayant point impofé
la condition à fan mari de ne point fe -remarier, ce dernier
n'avoit perdu fa propriété que par le feul effet de la Loi;
& il av?it joui comme vrai maître.
-
ARR Ê T
X X X X J.
En Provence l'Ordre de Malte eft fournis au paiement ,des
reves & impofitions 'établies par les Communautés [ur les
fruits, denrées & marclzandifes de confommation.
D,y
Ans le mois de Juillet 1777 , Mre. d'Albert St. Hy, "polire, Chevalier profès de l'Ordre de Malte, demande
aux lieurs Confuls & AlTelTeur d'Aix l'exemption du droit
de Piquet pour la farine nécelTaire à fa confommation, fous
prétexte que quelques Commandeurs de fan Ordre avaient
joui, par intervalles, de cette franchife, en vertu d'un Arrêt
<lu Grand Confeil, rendu contre la ville d'Aix en 1663.
Le Cohfeil Municipal alTemblé le 26 du même mois,
délibere de confulter, & qu'en attendant, le Fermier percevra le droit de Piquet fur la farine du lieur Chevalier
d'Albert.
Dans l'intervalle, les lieurs Chevalier d'Albert & de Treffemanes-Chafieuil refufent de payer les droits de deux facs
�223
de farine qu'ils voulaient faire entrer dans la Ville; le Fermier les retient. Ils s'adreJfent à la Cour des Aides le 29
Avril 1778, & demanden.t, contre le Fermier, injonétion
de les remettre. Le Fermier répond qu'il fallait s'adreJfer
aux Confuls. Les lieurs Chevaliers d'Albert & de TreJfemanes perliHent à diriger leur demande contre le Fermier;
celui-ci, pour ne pas eJfuyer un procès en fon propre, relâche les deux facs de farine. Les Chevaliers d'Albert &
de TreJfemanes notifient aux lieurs Con fuis & AlIèJfeur d'Aix
tout ce qui s'étoit paJfé 'entr'eux & le Fermier. Le Sr. AffeJfeur répond qu'il n'y prenoit aucune part, & prateHe de
tous les droits de la Communauté.
Le 14 Novembre la Communauté d'Aix fe pourvoit à la
Cour des Aides, ppur obtenir des inhibitions & défenfes
contre les lieurs Chevaliers d'Albert & de TreJfemanes, de
_ faire entrer dans la Ville aucune farine, fans payer le droit
de Piquet, fous les peines de droit. Mre. de Gaillard, Procureur Général & Receveur de l'Ordre de Malte, prend le
fait & caufe des lieurs Chevalier d'Albert &. de TreJfemalles.
D'autre part, l'AJfemblée des Etats délibere l'intervention
du Pays, à l'effet de faire valoir les Statuts & les Loix fondamentales & conflitutives de la Province, fuivant le[quelles il
Ile peut y avoir lieu, en matiere de reves, à aucune exemption ou privilege perJimnel. Mrs. les Procureurs du Pays furent chargés en même temps de demander que l'Arrêt qui
interviendroit feroit exécuté dans toute l'étendue nu Pays &
Comté de Provence & Terres adjacentes.
En conféquence la Province intervient, fe pourvoir par.
la voie de la tierce oppolition, en tant que befoin [eroit,
envers tous Arrêts & Titres qui peuvent avoir été obtenus
par l'Ordre de Malte, relativement à l'exemption per[onnelle
des reves & impolitions établies & à établir fur les fruits,
denrées & marchandifes, & demande que l'Edit du mois
d'Avril 166!, l'Arrêt du 2 Février 1702, les Statuts & autres Loix municipales de la Province, feront exécutés [elon.
leur forme & teneur; ce faifant, q)Jc défenfes feront faites,
Ss 2,
.
DU
PAL AIS
DE
PRO VEN C E.
�31.4
Jou RNA L
aux lieurs Chev'lli~rs d'Albert & de:: TreJremanes, ou foit au
fieur Receveur Général, prenant leur fait & caufe, de faire
entrer dans la ville d'Aix aucunes farines, fans payer le
droit de Piquet, à peine de faiue 'des farines, du paiement
de l'amende, & autres peines portées par les baux; qu'il
fera en outre ordonné que les Membres qui compofent l'Ordre de Malte feront foumis , à l'inrtar des autres citoyens,
au paiement des reves & impoutions établies & à établir,
tant par la ville d'Aix, que par les autres Communautés du
Pays, fur les fruits, denrées & marchandiCes, fans pouvoir
réclamer aucune exemption perConnelle, fauf les exemptions
réelles, s'il y échoit, & ce fous les peines portées par les
baux; que l'Arrêt qui interviendra fera exécuté dans toute
l'étendue du Pays & Comté de Provence, & Terres adjacentes, & qu'il fera publié, imprimé & affiché par-tout
oll il appartiendra.
_
L'affaire fut plaidée pendant feize Audiences, & les défenfes refpetl:ives furent établies fur des titres relatifs à la
conHitution de la Province, ou qui fembloient.établir l'exemp.
tion réclamée par l'Ordre de Malte.
1
Déjenfe du Pays.
La -Province & la Communauté d'Aix foutiennent, 1°.
que le droit d'établir en Provence des reves fur les fruits,
les denrées & les marchandifes, dérive de la conftitution
du Pays & de fes Loix fondamentales, qui forment fon véritable droit commun, & non d'un fimple privilege otl:royé
par le Souverain. 2°. Qu'en Provence, & d'après les maximes du Pays, les reves font réelles & patrimoniales de
leur nature; qu'elles font affimilées à la taille fur les fonds,
&. qu'elles font abfolument incompatibles avec tout exemption perfonnelle.
Premiere Propofition.
-Quoique les Nations.. aient perdu la liberté dans le Gou-
�D U PAL AIS
D E
PRO VEN C E.
32')
vernement politique, du moment qu'elles ont été fubjuguées,
ou qu'elles fe font données des Maîtres (liberté acquife à
toutes les [aciétés dans leur inftitution primitiye) il Y a néanmoins dans le Royaume plufieurs Provinces connues fous
le nom de Pays d'Etat; elles ont confervé le droit de s'adminiil:rèr en Corps de Nation, de déterminer elles-mêmes
_ leurs impoGtions, & de pourvoir aux befoins communs avec
une entiere indépendance, & de la maniere qui leur paroît
la moins onéreufe. Là les particuliers ne doivent au Roi
aucune taxe perfonnelle, le Corps de la Nation eil: feul
obligé envers le Souverain, feul il paye les tributs, feul il
détermine la forme & le moyen d'en faire la levée. ( privilt:ge facré qui, en établilfant la réalité des charges, ga·
rantit le peuple de l'oppreffion, en faifant régner l'égalité
parmi les citoyens. )
Sans entrer dans l'examen des reHriél:iQns que fouffre ce
privilege dans les autres Pays d'Etat, on obferva que la Provence forme un Etat à. part qui a fa" propre confiHance,
fes Loix, fes mœurs parriculieres qui la diil:inguent elfentiellement des antres Provinces dans fon Gouvernement poli tique.
Il eft attefté par tous les monumens dn Pays, & par
tous les Hiftoriens, qu'elle a confervé dans tous les temps
la forme de fon adminiftration intérieure, & le droit d'ap•.
pliquer fes im pofitions à fon gré,. fur les fonds, fur les
fruits, fur les meubles, fur les denrées, fur les marchan·
difes, & qu'elle n'a fubi aucun impôt, fans le confentement du Corps de la Nation. Avant la domination des Romains, on y vivoit preCque dans un état de nature ; Rome
donna enlùite des Loix à cette Province; mais ces Loix
ne firent que perfeélionner celles qui lui étoient propres,
loin de donner atteinte à la liberré de fon Gouvernement
politique. La Provence fut, d'après le témoignage de Pline,
la Province de l'Empire la plus favorifée; les Romains euxmêmes .appelloient Marfeille la Cœilr de Rome.
La Loi Romaine autorifoit toutes les Provinces à lever
�JOURNAL
3 26 ,
elles-memes leurs impofitions. Leg. 10, Cod. de ~veaig. &
comm.
La Provence, devenue la proie des Vendales, des Gors,
des Viugors & des Bourguignons, fut le théatre d'une guerte
continuelle; elle paffa enfuite une premiere fois fous la do~
mination des Rois de France, delà fous celle des Rois
d'Arles, & après fous celle des Comres de Provence; toujours elle fut régie par la Loi Romaine, toujours elle conferva fes mœurs & fes coutumes.
Les Comtes de Provencè n'impofoient une taille ou· une
quête fur leurs Sujets, que dans des occauons extraordinaires~
connues fous le nom de cas impériaux; mais cene impofil'ion, & toutes celles qui étoient nécelIàires pour les propres
befoins du Pays, étoient établies au gré des Etats, fur les
immeubles, fur les meubles, fur les fruits, fur les denrc=es,
fur les marchandifes, & le Souverain n'y mettoit aucun obftacle; les Etats ordonnoient, le Souverain. approuvoit. Le
choix des impofitions étoit donc dévolu aux Corps du Pays,
en force d'un droit national.
La preuve de ce droit eH confignée dans tous les monumens du Pays. Les Etats tenus à Aix en 1393, en préfence
de la Reine Marie de Blois, mere & tutrice de Louis II,
Comte de Provence, déliberent une reve générale fur le fel
&. fur la farine, au profit du Corps du Pays; ceux tenus
à Pertuis fous le mêrqe regne, déliberent une impofition
générale fur tous les fruits, au profit du Corps du Pays,
& ordonnent notamment qu'il fera payé ux deniers par livre
de route marchandife ou autres chofes mobiliaires qui fe
vendront pendant un an dans le Comté de Provence, par
qui que ce foit qu'elles foient achetées ou vendues, n'exceptant perfonne ,.de quelque prééminenc~ & condition qu'elle
foit.
Ceux tenus à Aix en 1396, en préfence de la même Reine,
déliberent que les Vigueries du Pays pourront payer leur
quote-part des fmpoutions, ou par reves, ou par fouage, ou
autrement d leur. choix. Les Etats tenus de tous les temps,
�DU PAL AIS DB PRO v B N C B.
327
jull:ifient que la Provence a toujours confervé le droit de
s'impofer elle-même, & de la maniere qui lui a paru la
plus commode, & pour le temps qu'elle a cru nécelfaire. Ce
droit a roujours été exercé, en préfence ou de l'agrément du
Souverain, comme un droit préexill:ant & acquis au Corps
de la Nation; & les Statuts de 1410, 143 2 , 1437 & 1447,
faits en préfence du Souverai'n lui-même, décident formellement que toutes Cités, Villes &. Chdteaux pourront établir
les reves fitr toute forte de fruits, de denrées & de marc1lflndifes , pour toutes charges préfentes , paiJées & à venir, les
augmenter, les diminuer, les fupprimer toutes. les fois qu'il
leur plaira; le Statut interdit au Prince lui - même la faculté d'y mettre aucun obHacle. Le droit d'établir des reves
en Provence ell: donc un droit attaché au Corps de la Na·
tion, un droit conll:itutif qui embralfe tous les temps, &
qui porte fur tous les objets; les délibérations prifes à
cet égard par les Etats alfemblés, font des véritables Loix:
d'Etat, formées fous les yeux du Souverain, dans les Affemblées nationales, & par le fuffrage libre de tous ceux qui
ont droit d'y voter; on ne peut y .méconnoître le caraaere
des Loix fondamentales de la Nation, jus quod populus ipfi
fibi conftituit. Aujourd'hui même, & dans les Alfemblées
des Etats, où Sa. Maje!1:é e!1: toujours préfente en la perfonne de fes Commilfaires, la Province n'éprouve aucun
obHacle dans le libre choix de fes impolitions; fon admi·
ni!1:ration politique n'a jamais varié, & l'heureufe prérogative de déterminer elle-même fes impofitions, n'a d'autre
époque que celle de l'exiH:ence de la Nation.
Le droit d'établir des reves en Provence e!1: non feulement une Loi fondamentale de l'Etat, elle ~!1: encore une
Loi de néceffité. La Provence, très"' relferrée, ne fournit
que de foibles relfources par fes produaions; elle ne peut
devenir florilfante que par le commerce & par l'indufhie.
Les fonds ne pouvant fupporter tout le poids des charges,
il faut néceifairement les répartir fur une infinité d'objets di·
vers, par-là le cultivateur eH encouragé, le pauvre e!1: foulagé, en faifant contribuer le riche & l'étranger qui vien-
�328
J
0' U RNA L
'
nent partager le commerce du ciroyen, & jouir de fes avan':'
tages , de fes biens, & des monumens publics.
Charles d'Anjou, dernier Comte de Provence, ne tranCféra cette Province au Roi de France à titre d'infiitution,
que fous la condition expreife que lui & fes fucceifeurs maintiendroient inviolablement & à jamais.1a Provence dans fes
Loix, fes coutumes, [es mœurs, fes franchifes qu'il venoit
lui-même de confirmer folemnellement dans l'Aifemblée des
Etats du 8 Novembre 1420. Louis XI, héritier de Charles
d'Anjou, & après lui tous les Rois de France [es fucce[feurs, ont promis folemnellement de ne point roucher aux
Privileges de la Provence, & ont reconnu par-là que le
corps des Statuts & des franchifes de cette Province, formoit fon droit commun, inféparable de fa confiitution &
de fon exifience• ..La Province s'efi toujours opp'ofée avec fuccès , lor[qu'on
a voulu donnér atteinte au droit qu'elle a de s'impofer elle·
même de la maniere qui lui paroÎt la plus convenable. Le
Bureau des Finances furprit un Arrêt du Confeil du 16
Mai 164.0, qui fit défenfes à la Cour des Aides d'auto ri fer
l'impolition des reves & autres de pareille nature, lorfqu'elles
excéderoient 300 liv., & aux Communautés d'en faire la
l~vée, fans Lettres-patentes fcellées du grand [ceau , enré-'
gifhées au Contrôle· général des Finances, & au Bureau d,es
Tréforiers de France. La Province fe pourvut contre cet
Arrêt; il fut révoqué le 26 Janvier 164I.
Les Tré[oriers de France firent de nouveaux efforts, &
foutenant que les reves n'étoient en Provence rien de plus
que des impo~tions de privilegp., comme les oé1:rois dans
tout le Royaume, ils obtinrent un autre Arrêt du Confeil
le 18 Décembre 164'1, qui renollVella les difpolitions' de
celui du 16 Mai 1640. La Provence fentit que fes Loix &
{ès ConHitutions éroient par-là totalement anéanties; rous
les ciroyens en furent vivement ail armés ; ils porterent leurs
jufl:es réc1anlations au pied du Trône. M. le Marquis de
Marignaqe, premier Couru], & Me. Perrini, Aifeifeur d'Aix,
Procureurs
�DU
,
PALAIS
Di!
32 9
PRovEN'cE
Procureurs du Pays, furent <lépurés à Paris pour demande'r
la révocation de l'Arrêt.
Toutes les Loix, tous les titres de la Province furent
'porrés au pied du Trône; la nature de nos reves fut pleinement d jfcurée; tous les moyens refpeéèifs de défenfe furent épuifésj & d'après l'examen le plus' mûr, il intervint,
- en contradiaoires défenfes, l'Arrêt du Confeil du 30 Juillet
] 642, qui révoqua celui du 18 Décembre 1641, & qui
maintint les Communautés de Provence dans le droit de
faire les impoJitions & levées: fuivant les,anciennes formes,
coutumes & Réglemens du Pays.
.Le Bureau des Finances fit de nouvelles tentatives, &
obtint {ur requête un Arrêt du Confeil le '10 Décembre
1642, qui renouvella celui du 18 Décembre 1641. Nouv.elle réclamation de la Province, fur laquelle, par Arrêt du'
Con{eil du dernier Mars 1643, Sa Majefié révoquant l'Arrêt
du 10 Décembre précédent, ordonna que les COj1l1TIunautés
de Provence feroient -leurs impçfitions fur les fruits, denrées & marchandi{es, ainJi qu'il en a été uft par le paffé,
fuivant les anciennes formes, coutumes & Réglemens. du Pays.
Cet Arrêt, revêtu de Lettres-patentes enrég,ifhées, forma
une véritable Loi publique en faveur du Pays.
.
Plus de vingt ans après" & le 21 Février I66'h le Bureau des Finances obtint un autre Arrêt du ConfeiJ., qui renouvella les difpofitions de ceux des 16 Mai 1640, 18 Décembre 1641, & 10 Décembre 1642. ; & en verru de ce
litre, il rendit le 21 Novembre même année, une Ordonnance, faifant défenfes aux Communautés de faire des impafitions fur les fruits & les denrées, fans Lettres-Patentes de.
Sa Majejfé. Mais un dernier Arrêt du Confeil dn 30 Janvier 1666, rendu. fur les remontrances du Pays, révoqua
celui du 21 Février 1664, comme contraire au droit municipal de la Province, & aux précédens Arrêts par elle able- .
nus; & Sa Majefié maintint les Communautés dans le droir
d'en ufèr: pour les impoJitiollS, comme par le paile.
La nature des reves en Provence a IOujours été reconnue·
pat le Souver.ain; un Edit du mois de Février 17.04. créa.
Tt.
•
�330
Jou RNA L
des Offices d'Infpeéteurs amc Boucheri~s, avec attribution
de cercains droits fur chaque bœuf, vache, mouton & autres beaiaux qui entreroient aux Villes & Bourgs fermés,
& qui feroient deflinés aux boucheries. Cet établiffemenc
étant incompatible avec la nature de nos reves, la Province
en otltint l:.t fuppreffion en Provence ; ~ par Arrêt du Confeil dù ~ 9 Août même année, S'l MajeHé maintint la Provence dans le droit d'établir fes impoutions fur les denrées,
même fur la viande, conformément à fes Statuts, auxquels
Sa Majeflé ordonne qu'il ne pourra être à l'avenir. dérogé.
La Déclaration du 21 Novembre 1763 établit un fixieme
fol pour livet: cles dI;Oits de ferme, oélrois & autres de cette
nature; mais elle en excepte expreffément les reves & impoutions que les Communautés de Provence déliberent
d'établir fur les confommations & les fruits, fuivant le.s ufages du Pays.
En 1768, le Roi demande des dons gratuits extraordinaires à toutes les Provinces' de fon Royaume, & invite chaque Communauté à indiquer les confommations fur lefquelles
il leur feroit moins onéreux d'établir un impôt pour furvenir
à ces dons gratuits, afin que Sa Majeflé les autorisât à le
lever. L'Edit eH: envoyé en Pr?vence; les deux Cours éle"
vent leur voix, & de concert avec la Province, repréfentent au Roi que la Provence n'eH: pas Pays d'oaroi; que
chaque Communauté yale libre choix de fes impoutions,
fans avoir befoin d'aucune autorifat-ion:
, l'Edit fut retiré.
On lit dans les Réglemens du Confeil intervenus en 16'i 'i ,
1672. & 1764, entre les deux Cours· & la SénéchaulIee,
au fujet de leur Jurifdiélion refpeélive, que les Communautés
du Pays n'ont befoin, ni de la permiffion du Roi, ni- de
celle d'aucun Tribunal, pour délibérer lés reves & impofitians fur les fruits & confommations , & qu'il fuffit de faire
homologuer par la Cour les délibérations prifes à ce fujet,
pour en affurer l'exécution (homologation qui tient lieu de
l'approbation que les anciens Comtes de Provence appo[oient au bas des Statuts faits par les· Etats, où ils affiftoien -en perfonne. )
�331
.A tant de titres précieux, la Province joignoit les Arrêts
de la Cour des Aides; le Réglement du S Mars 17S S, relatif à celui du 30 Juin I7S3, fait les Chambres affemblées,
autorife les Communautés à impofer fur les fruits, denrées .& marchandifes, ,fans obtenir aucune permiffion, .à la
c'harge de faire homologuer les délibêrations par la Cour,
. avant qu'elles puiffent êtie exécutées. .Le nouveau Commentateur des Statuts de la Province, tom. 2, pag. 341 & fuiv.
rapporte plulieurs Arrêts qui 'Ollt maintenu la maxime fondamentale du Pays.
DU
PALAIS
D<ll
PR,OVI!NCI!.
o
Seconde PropofitioTl'.
En
Provence les reves font impofé.es, non fur les pet.
fonnes, mais fur les chofes, c'elt-à-dire, fur les fruits, [ur
les denrées, fur les autres confommations : donc elles [ont
réelles, ainli que la taille [ur les fonds; la taille ef!: une redevance en argellt 'qui affeae les fon.ds, & que le poffeffeur
paye. La reve 'ef!: une impolition en argent qui afleae la
denrée, & que le con[ommateur ·paye. Le fonds doit la·
taille; la denrée doit la reve; & on ne .paye que parce qu'on'
poffede ou parce qu'on confomme. La qualité du citoyen
n'a aucllne rdation avec l'impôt.
La Loi premiere, jf. de muner. ; .la Loi 3, Cod. de anrf.
& tribut.; la Loi 6, Cod. de v.e8ig. & comm., décident que'
les impolitions réelles {ont celles qui affeaent les chofes oc
non les per[onnes. D'ailleurs toutes les impolitiQns [ont
réelles en Provence; la conf!:itution du Pays le veut ainli;,
tous les Titres, tous les 'Arrêts le .coilfirmeflt; delà vient
que les reves y font libres; elles .s'impo{enr au gré des Corn.
munautés. Les Statuts rapportés ci - deffus établjJfenr Ce'
droit national; la Déclaration ,du 3 Février 1764 le main.tient, tant pour le paiement des impôts, que pour l'ac-·
~uittemenr des dettes & charges municipales des Commul)autés; il a exiHé de 'tous les temps '; il ef!: atte1l:é par M•.
de Clapiers, cauf. 42, quen•. l , n. 30"
Les reves démontré.es réelles ~ ne Feuvent être fufceptibles;
Tt
2;.
�Jou
332.
RNA L
-
d'aucune-exemption perfonnelle, d'après la Loi 18 tom. :a;
jf. de ml/nu. & /zonor.; il n'ell: aucune dignité, aucun privilege, aucune confidération qui puiffent en affranchir, (M.
de Clapiers, cauf. '12., quell:ion 1 , n. 9); tel ell: le difpolitif
des Loix l, 'Î , 6, 7 & 9, Cod. de muner. patrim.; .de la
Loi premiere, Cod. de indic1. ;. des Loix 6 & 12., Cod. de
vec1ig. & comm.; &' des. Statuts du 8 Novembre 1447 &
'1448, ce dernier, rapporté -par Bomy, pag. 17. Boniface,
tom. '2:'; part. 3, Ifv. 2., tit. 2., ·ch. la, rapporte des Arrêts qui fournirent au paiement des reves, .les quatre Ordres
Mendians, & les Religieufes de Ste. Claire de la ville d'Aix.
M. le Procureur Généra"!';' à\lqui le Con{èil demanda les motifs de l'Arrêt que les Religieufes de Ste. Claire avaient attaqué, attell:a à Sa Majell:é que l'Arrêt .étoit fondé, fur ce
que d'après la Loi du Pays, les reves y_ font réelles, &. ne
peuvent être fu(ceptibles d'aucune exemption perfonnelle. Les
deux Cours renouvellerent d'.office le même témoignage, en
enrégiLhanc la Déclaration du 13 J anvi.er q64, & arrell:erent que les tailles. & autres impoJi/ions ~/ant réelles en Provence., nul ne. peut en Üre exe.mpt par aucun privilege pèrfonnel.
"
,
•. Aulli. la lurifprudence. die lIa J Cour des Aides n1a jamais
varié fur ce point. L'Arrêt dit 9 Novembre 1713 fou met
les Employés .des Fermes au,. paiement des reves, malgré
l'Ordonnance de 1681; celui db 2.8 Juin 1747, Y fou met
les nobles Verriers, malgré les Lettres - patentes du Roi
René de l'an 14P; celui rendu en faveur de la ville d'Aix
le I I AoÎlt 1767, Y fou met les Suiffes, malgré le Traité
d'alliance fait entre Charles VII & la Nation Suiffe en 1463,
confirmé par tous les Rois fes fucceffeurs.
Les Arrêts du Confeil Ont également maintenu la
conll:itution d'e la Province; celui du 14 Oé1obre 1684
foumet les Officiers de la Vénerie 'au paiement des reves
impofées en Provence, malgré, leurs titres d'exemption; celui du 20 Décembre 169 l Y fou met les Officiers
des Sénéchauffées de cette Province; même déci fion en la
même année., contre lep Ma!tres des P.oll:e.s; mêmedécifion
,
--
�DU'
PALAIS
DE
PROVENCE.
333
le 30 Mai 17°7, contre les Officiers des Chancelleries j autre
Arrêt rendu le 2. 1 Décembre 1764, par les Commiifain:s
du Confeil, contre les Syndics de la Compagnie des Indes, malgré les Lettres-patentes de 1696, qui l'exemptenc
de toute impofition dans tout le Royaume j autre Arrêt du
Confeil du 1 8 Juin 176), contre les Officiers & Ouvriers
de la Monnoie de la ville d'Aix, malgré les titres les plus
formels d'exemption j autre du 19 Août 1766, contre les
Religieux Dominicains de Saint-Maximin. La Loi du Pays
n'a jamais été altérée, & les Troupes même de Sa Majefté
y font foumifes au paiement des reves.
,
Défenfe de l'Ordre de Malte.
L'Ordre de Malte tâcha d'abord de fixer la vraie nature
& l'origine des reves;' il confulta enfuite les titres de la Province, fe réfervant de joindre en fa faveur les titres les plus
multipliés & les plus refpeél:ables à la poifeffion la plus ancienne, foutenue par une Jurifprudence univerfelle & de tous
les temps.
Suivant lui, les reves n'ont rien de commun, rien de
relatif avec les tailles & les autres impofitions fur les fonds.
Elles fe levent fur les objets de confommation ou d'ufage
univerfel, indépendamment du fonds qui les a produit. Le
fruit ef!: impofé, non .comme perçu, mais comme confommé, foit qu'il foit perçu dans le terroir de la Cité qui
a établi l'impofition, ou dans tout alltre; ce n'ea pas le
propriétaire qui paie, c'efl: lç confommateur. L'impôt ne
fauroit.,être réel,. puifqu'il eft établi fur les pe~fonnes, &
non fur les fonds. Deux citoyens ont deux domaines de valeur égale j l'un ayant femme & dix enfans paye pour douze;
l'autre célibataire, ne paie que pour un.
Auffi (continuoit-il) tous les Auteurs attefl:ent que la
charge des reves & gabelles ef!: perfonnelle. De Luca, de
regalibus, ·difcurf. ) 2, n. 12; difcurf. 14, n. 6; & difcur(.
189' Riccius, dans fa Pratique univerfelle des queftions de
droit, tom. 3, réfol. 129. Cha1fanée, dans fon Commen~
�/
334
Jou 'R N A L
taire fur les coutumes du Duché de Bourgqgne, tlt. des
Juftices, tom. 4, n. 2.3 & 2.8; Philippi ,prife. noJlrorumque
muner. fumma, n. la & 34.
D'après Philippi, au n. ')6, l'origine des gàbeIIes vient
de l'Italie, & ce mot comprend toute impofition quelconque qui fe 'leve fur les meub.\es. Donc les revés ne font de
leur nature que des charges mobiliaires & perfonneIIes; réguIiérement elles ne devroient pas être payées par le pàlfant.,
ou tout autre qni ,n'eft pas ,membre dë la Cité. Efi-il jufie
que l'étranger foit forcé à ne confbmmer que du pair &
du vin impofables? L'établilfement d'un pareil 'droit déroge
tou,t à la fois, à la liberté naturelle & à la liberté civile;
de-là vient que les reves ne peuvent être impofées réguliéremenr qu'avec la permiffion du Souverain. (Riccius, collea. 900; Novarrus, de gravamin. vaJàl. gravam. 33'), n.
l
& fèq.; Bertachinus, de gabellis au commence'ment de
fon Traité; "Pierre de Ubaldis-, de collee1. n. 3; -de Luca,
de regalibus, difcurf. 44, n. l & fuiv.; & difcurf. 63 & 64')
à moins que les Communautés n'aient pour elles une poffeffion immémoriale, qui a l'effet du titre & du privilege;
facit vaum quidquid efl poffibile. La polfeffion immémoriale
ne fuffit pas même en France; il faut un titre de conceffion (Philippi, en fes Arrêts de conféquence, Arrêt 94. )
Il cite l'Ordonnance de Moulins, art. 2.3,'& celle de'Blois,
art. 17') & 180 : auffi le fameux Arrêt du Confeil de 1643
ne maintient les Communautés de Provence, dans le droit
d'impofer des reves, 'qu'ainfi qu'elles l'avoient fait :auparavant', c'eft-à-dire , 'en force de la conceffion de nos anciens
Souverains. Les Communautés ont', de droit commun &
de droit naturel, le pouvoir de '[e cotifer intérieûrement,
mais jamais celui d'alfujettir l'étranger à l'impo.Lition locale.
S'il en faut croire les Confuls d'Aix (continuait-on POUE
l'Ordre de Malte ).l'étranger cft citoyen pendant fon féjour.
Mais 'peut-il être -citoyen 'pour ,les charges, fans l'être .pour
les honneul"s? L'air que l'on refpire en palfant ,dans un lieu,.
l'habitation que l'on y prend cafuellement, peuvent-ils être
des principes d'impôt, &: de contribution? Obiets de liberté
�DU
PALAIS
DI!
PIlOVENCE.
331
naturelle & publique, peuvent-ils devenir des principes de
.--fervitude ?
De droit commun & de droit naturel, l'étranger n'dl:
contribuable, fous aucun rapport, aux charges de la Communauté; le droit de Cité n'dl: qu'un droit de corn munion ; jus Communitatis efi jus fociecatis. Tous les Auteurs
attefient que l'étranger non potefi gabellari, /lift fiance priJ/ilegio vel confuetudine. immemorial~ qllœ efi ad infiar privilegii.
Bertachinus, de gabell. & veaigal. part. 7, n. 8, obferve
qu'on peut impofer des charges aux étrangers pro reblls quas
poffident- in loco, mais qu'ils ne font jamais fournis ad
onera perfonalia.
. Le véritable état, le tableau fidele de notre confiitution
nous apprend que les impofitions font réelles & prédiales
en Provence; les reves n'y font que des im po Citions de
fupplément & de fubfide, qui, dans l'ordre antique & primitif de notre confiitution, n'auroient dû porter que fur les
potfetfeurs des fonds chargés d'acquitter les deniers du
Roi & du Pays. L'on voit dans tous les Statuts que le
Prince fou mettant à l'impôt ceux qui ne font pas membres
de la Cité, reconnoît que cet établitfement efi contraire
au draie: placet, lice! jus repugnet; dans d'autres occa.
fions, il en exempte l'étranger. Toujours efi-il vrai de dire
qu'il a fallu dans le principe la conceffion du Souverain
pour l'impofition des reves. Le Roi René accorda ce privilege à la ville de Marfeille, le I l Février 1448. Celui
des habitans d'Aix efi· connu, on le trouve dans le Recueil de fes Privileges, pag. II.
Cette conceffion étoie pareillement nécetfaire parmi les
Romains. Chacun connoîe le fameux titre du Code Vec1igalia nova fine Principis licentiâ infiitui non poJJè. C'efi en
Italie qu'on a vu naître les reves; & lors de la Paix de
Confiance en 1180, les· Communautés impériales qui contraél:erent avec l'Empereur, & done on trouve l'état dans
le Traité, fe firent confirmer les droies régaliens qui leur
avoient été précédemment donnés. L'Ordre de Malte établitfoit enfuite que les.reves fubrogées aux taiiies, ne doi~
�336
Jou RNA L
vent pas être jugées [ur les principes de la réalité ou de la
prédialité. 1°. (difoit-il) les fiétions du droit ne peuvent
changer l'ordre & la nature des chofes. 2°. On n'admet jamais des fiétions, à moins qu'elles ne foie nt déclarées &
autorifées par une Loi exprelTe. Qu'on lailTe les fiétions &
les fubrogations au pouvoir de l'homme, tout fera dénaturé
ou perver"ti. 3°. Les reves ne pourroient être fub,rogées aux
tailles que pour ce qui concerne l'application des denrées
en réfultant. Au fonds, & lors de la perception, on ne
pourra jamais les conGdérer que comme impoGtion perfonnelle, affife fur des meubles, touchant à la perfonne. 4°.
En admettant cerce fubrogation, il en réfulte un nouveau'
titre d'exemptien pour l'Ordre de Malte, dont les revenus
conGHenr en dîmes, en domaines féodaux, & domaines
ruraux polTédés par l'Ordre avant 147 l , & par conféquent
exempt de toute pref!:ation'; qu'on fubroge les reves à la
taille, l'o.rdre fera exempt de reves, puifque fes domaines
ne peuvent être fournis à la taille.
L'Ordre de' Malte tâcha de prOllve·r qu'il peut exif!:er des
exemptions légitimes en matiere de reves. Il efl: évident, difoit-il, que les r~ves ne font pas prédiales de leur. nature;
elles font notoirement, d'ap.rès les aveux ·du Pays, & la
décifion univoque de tous les Auteurs, veéligalia onera impoJira Juper rebus quœ vehuntur; dès-lors il peut y avoir des
exem ptions. Ce n'ef!: que pour les tributs, pour les charges
prédiales que .le Prince, en donnant des exemptions perronnelles, doit prendre pour fon compte la portion des exempts.
(Philippi in jilmmâ ml/ner. n. 80, & dans les ArrêtS de conféquence, pag. 112. ) Pierre Antiboul, ancien Auteur Provençal, dans fon Traité de muneribus, part,. 2, n. 12, acreHe que les Loix qui prohibent les exemptions, ne parlent
que des impôts fur les polTeffions , c'eH-à-dire (dit-il) fur
les immeubles. Mais on trouve à tout pas des exemptions
légitimes fur les impôts affis fur les meubles de palTage )d'entrée.& de fortie, fur les péages, p6ntanages, qui, fuivant Godefroy lui-même, ad Leg. 6, Cod. de veéligalibus)d-eiven,t être régis par les mêmes principes <lue les gabelles.
Ce
�,.
DU PALAIS DE PROVENCE.
3j7
Ce qui acheve de démontrer qu'il peut y avoir des titres
.légitimes d'exempr'ion en matiete de reves, c'efi que le droit
de les établir ne peut dériver que de la conceffion faite par
le Souverain. Or la même Puilfance qui donne droit d'impofer, qui peut refufer la conceffion, peut, fans contredit,
accorder des exemptions. En vain le Pays oppofe que le
droit d'impofer des reves efi acquis aux Communautés de
la Province, qu'il efi patrimonial; on répondra toujours
avec fuccès que c'efi le Souverain qui leur donne ce droit,
& que conféquemmen t il peut établir des exemptions.
Non feulement (continuait - il) il peut y avoir lieu à
l'exemption en matiere de reves , mais même il y en a des
titres formels & authentiques. L'Arrêt du Confeil de 1661
(fameux titre du minot obtenu par la Province) anéantit
des titres nouveaux que les Ecdéfiafiiques avoient furpris
pour l'exemption des reves, mais avec cette c1aufe exprelfe :
voulant qu'il en [oit ufé, comme avant lefdits Ardts, pour
ceux qui font fondés en bons & valables titres.· Me. Julien,
dans [es Colleélions manufcrites, vo. Civitas, cap. )' litt. H,:
attefie que les Ecc1éfiafiiques font exempts de reves cu nt·
JPeciali diplomate.
Le Prince, en pareille matiée, ne peut pas prendre pour
fon compœ la ponion des exempts. D'abord il ne la prenoit pas, lorfqu'anciennement, & en accordant l'impofition, il en exemptoit les étrangers. En fecond lieu,. comment combiner & calculer ces infiniment petits que 1<1 confommation embralfe? Enfin la Cour a, dans tollS les temps,.
enregifiré des refcripts des Souverains, portant exemption
en matiere de reves, quoiqu'accordée, fàns que le Prince
eùt pris fur lui la ponion des exempts. On trouve fept
Arrêts rendus en faveur de l'Abbaye de la Manarre, contre
la Communauté d'Hieres, fous les dates des 14 Janvier 1174,·
2 Décembre 161), 24 Juillet 1647, 24 Avril. 166), 3·
Juin de la même année ~ 7 Mai 1713, & 4 Avril 1769.
li Y a en Provence d'autres exemptions en fait de reves•.
1°. Celle des Seigneurs. On en trOuve des traces dans les,
Etats de 1323, clans Je Statut de 14.47;· & dans Novar•.us."
Vv-
�338
Jou
RNA L
de gravam. vafJal. déc. 176, 177, 178, 179: le Seignêur
n'etl pas fournis aux reves, parce qu'il dl externe, eft non
o
jiJbdit:ls p. • celle des Prieurs, des Chapitres, des Vicaires
perpétuels, & même des Congruiftes, quoiqu'ils ne perçoivent point de dîme. L'exemption n'eft donc point la fuite
du privilege réel de la dîme; elle a fon principe dans les
Loix qui font fous le titre du Code de Epifc. & Cleric.
L'Ordre de Malte préfenta enfuite les titres, qui, [uivant
lui, établi1fent [on exemption. Par le Diplome de l'Empereur Fréderic II, donné en 12.39, tous les biens de l'Ordre y [ont mis fous [a proteaion impériale j les per[onnes
& les biens de la Religion y font déclarés exempts ab omnibus exaaionibus arque angariis & ab omni onere pecuniariœ
rributionis. Cet Empereur ne pouvait rien donner [ur les
tributs ou preftations des fonds; aufli les· biens roturiers
polfédés par l'Ordre de Malte font [ou mis à la taille j mais
delà il faut néce1fairement conclure qae ce privilege porte
[ur les preftation~ [u[ceptibles d'exemption; & mille titres
atteftent que l'Empereur Fréderic II avait le pouvoir de l'accorder; il était [uzérain, d'après les aveux du Pays j il pouvait donc faire des Loix & accorder des exemptions.
La fameufe Clémentine donnée par Clément VII en 1 S2.3
affranchit les membres de l'Ordre à [aIutione & exaaione
paffagii, pedagii , gabellœ , datii, traaœ, procurationis, jucundi adventûs. Clément VII, comme Pontife & comme
Souverain de Rome, n'avait ( il eft vrai) aucun droit d'accorder des franchi[es en Provence. Mais la Clémentine eH:
devenue nationale; nos Rois en ont ordonné l'exécution dans
le. Royaume par des Déclarations formelles, enrégiftrées par
les deux Cours & conilamment exécutées. Elle eil loi de
l'Eglife & de l'Etat.
Les Lettres-patentes d'Henri II, données en 1549, dans
lefquelles eft reproduite la Charte de Richard, Roi d'Angleterre, Duc de Normandie & Guienne , & Comte d'Anjou,
porte, ainfi que la Charte, l'exemption pléniere des biens,
perfonnes, provifions & denrées des membres de l'Ordre;
ces Lettres-patentes ont été confirmées de re.gne en regne ,
�339
& notamment par les Lettres-patentes données en 1716,
DU
PAL"AIS
DE
PROVENCE.
portant exemption de toute impofition, & enrégifirées purement & fimplement après des Arrêts làns nombre qui exemptent l'Ordre de Malte des reves.
La polfeffion de l'Ordre ef!: un titre également refpeél:able:
polfeffion antique, préexifianre, antérieure même à la naifrance des reves; polfeffion qui remonte "à tous les temps
poffibles , parce qu'elle remonte à touS les temps connus;
elle ef!: même prouvée par les Etats de 1393. Il Y fur établi
des reves, & il fut dit que tome perfonne contribueroit à
cet impôt; les Chevaliers de Malte furent fournis à payer,
mais comme exempts. Toutes les exemptions celferent, &
l'impôt frappa même fur le Pape, lors réfidant à Avignon.
Cette polfeffion efi judiciairement fixée par des Arrêts fans
nombre qui déclarent l'Ordre de Malthe exempt des reves
& gabelles. En 1 S48 il fut maintenu dans l'exemption de la
farine du Piquet contre les Fermiers d'Aix. Le 4 Mars 1 S77
Arrêt qui déclare les Religieux de l'Ordre exempts des droits
de gabelles de la ville de Salon, fuivant leurs anciens privileges confirmés par les Arrêts, & pour les denrées qu'ils enleveront de leur cn1, ou qu'ils acheteront pOl/r leurs ufages & provifions particl/lieres ou de la religion, fans abus toutefois. Autre
Arrêt du premier Avril 1 S93, contre la Communauté de Mar[eille. Autre du 21 Juin 1606, comre la Communauté d'Arles.
Le 29 Avril 1611 la Cour déclara les Il'embres de l'Ordre
exempts de touS droits de péage fur le Rliône. L'Arrêt rendu
le 13 Mars 1613 contre la Communauté de Toulon les déclara exempts des droits de reves. Par Arrêt rendu par le
Grand-Confeil comre la Communauté d'Aix le 31 Mars
1663 , l'Ordre fut déclaré exempt du droit de reve fur les
farines. Même Arrêt du 4 Juin 1672 contre la Communauté
d'Arles. Autre Arrêt rend u par la Cour le 11 Décembre 1629"
comre les Propriétaires des moulins à huile de cette Ville•.
Autre du 16 Février 1636 contre le Fermier de la reve de la
farine impofée par la Communauté de Tarafcon , les Con{uls en qualité. Lors de l'Arrêt rendu par la Cour", le 30 Juin l
"L764., au rapport de. M." lç Confeiller de Gafiaud, au p'rofir.
V
v
2,.
�340
Jou RNA L
du Bailli de Fonsblanche, contre la Communauté de Ceire!l:e;
on rappella tout ce qu'on pouvoit dire fut l'origine & la na[Ure des reves, fur la poffibilité de l'exemption, fur la prétendue infuffifartce des ritres ; tout fut dit, tOut fut réfuté,
tout fut jugé; le Bailli de Fonsblanche rapporta gain de
caufe.
Le Parlement jugeoit de même lorfqu'il connoi1foit promifcuément de ces matieres, & avant les Réglemens qui ont
fixé les bornes des deux Jurifdiél:ions. L'on trouve deux Arrêts rendus par cette Cour; l'un du 3 J.uillet 1 S't8, au profit
du Prieur de Sr. Jean, éontre la Communauté d'Aix, au fujet
de l'impofition d'un fol par quintal de farine; l'autre du 2.8
Mars 1nI, qui déclare l'Ordre exempt des reves établies
.
dans la ville d'Aix.
A la Jurifprudence obfervée en Provence, l'Ordre réuniffoit celle de tous les Tribunaux du Royaume, & il rapportoit nombre d'Arrêts rendus par le Confeil & par les Cours
c;les Aides de Paris, de Normandie, de Montpellier & du
Dauphiné. Il concluoit que fa poiTeffion embraiToit cous les
temps, & qu'elle était d'ailleurs relative à fes titres primitifs.
Il examina en!ù'ire fi les titres que lui oppofoit la Province
avaient révoqué fon privilege. Suivant lui l'Arrêt du Confeil
l!e 1661 , rapporté par Boniface, tom. 4 , pag. 82.2. & fuiv. ,
révoque feulement l'Arrêt du la Février précédent & autres
y mentionnés, qui exemptoient des reves les Chevaliers de
Malte; il laifiè donc fubfiner les titres de privilege auxquels
il ne touche pH, d'autant plus qu'il renferme la claufe : vouLam qu'il en fait uft comme avant lefdits Arr~ts, pour ceux
qui [ont fondés en bons & valables titres; & cette difpofition
e!l: confirmée par l'Arrêt du Grand-Confeil du 31 Mars
;1663'
Enfin ( difoit l'Ordre' de Malte) nos privileges ne doivent
pas être révoqués; la franchife des reves n'dl ni impratica-.
ble, ni trop onéreufe, ni éverilve de la confl:itution du pays.
Elle a eu fon effet jufqu'aujourd'hui fans trouble, fans embarras;
il n'y a qu'à faire à la fin de chaque année le compte du produit de l'exemption fur le calcul de 1'1 confommation réelle; on
�•
DU
PAL AIS
DE
PRO V B Ne B.
34[
fépare ainli les denrées qui doivent paffer en franchife d'avec
celles qui tombellt en fourniture exdulive. Ou l'a toujours pratiqué de même.
L'exemption ne préfente rien d'onéreux; elle fe réduit
à bien peu de chofe, & la charge fera toujours imperceptible vis-à-vis cette énorme quantité de denrées qui fe perçoivent annuellement dans les fonds de l'Ordre de Malte,
& qui dans l'ordre confl:itutif ne feroient point impofables,
parce qu'on ne peut impofer ni fur les fonds de l'ancien
domaine de l'Eglife, ni fur les biens feigneuriaux, ni fur le
produit des dîmes.
Enfin elle ne détruit point notre conIl:itution ; elle ne fait
au contraire que la confirmer.. Qu'on parte de l'ordre & de
la nature des chofes ; qu'on remonte à l'origine & aux:
vrais principes du droit public, on trouvera que le droit
d'impofer en reves n'eIl: que de conceffion; qu'on ne peut
le tenir que du Souverain; que le Souverain peut conféquem~
ment accorder des exemptions
Replique "du Pays.
Pour détruire le fyf!:ême de l'Ordre de Malte, la Province
& la Ville établirent, 1°. que l'Ordre de Malte n'a jamais
eu de titre d'exemption perfonnelle des reves; 2°. que s'il
pouvoit exif!:er un pareil titre, il feroit anéanti par les Loi)C
publiques qui gouvernent le Pays.
D'après l'efprit du Hede, d'après mille caufes connues;
toutes les inf!:itutions ont été favorifées dans leur berceau,
par des libéralités, par des bienfaits de toute efpece. Mais
les inf!:itutions paffent, les Nations feules ne paffent pas.
Un Corps de peuple ef!: toujours plus refpeél:able que tous
les Ordres enfemble. Les privileges d'un Ordre ne peuvent
jamais entrer en parallele avec ceux: des Nations. II faut
donc, dans tous les temps, remonter au principe des inftitutions particulieres, les confronter avec les maximes conftitutives des fociétés, & le privilege ahulif doit ceffer. Ainli
l'Ordre de Malte prétendoit que [es Membres étoient exempts
�342.
Jou R N Â L
de toute Juri[diaion féculiere ou laïque; des titres exprès
confacroient l'exemption; mais l'Arrêt du Parlement de
Paris jugea qu'elle étoit abufive.
Quels font d'ailleurs les titres d'exemption de l'Ordre de
Malte? L'Emper.eur Fréderic n'étant que Seigneur fuzerain
du Comté de Provence, n'avait pas le droit d'exempter de
nos impofitions municipales qui n'avoient rien de dépendant de fa fuzeraineté, il ne pouvoit exempter que des rétributions qu'il pouvoit être en droit d'exiger. Le Pape
n'ayant aucun pouvoir [ur le temporel, la Clémentine n'a
pu exempter l'Ordre de Malte de toute impofition; la levée
des fubfides appartient, fans contredit, à la temporalité; elle
fut annexée fans l'aveu de la Nation, & elle ne pouvait
être adoptée que dans les difpofitions relatives à la difcipline eccléfiaftique.
Le Diplome de Richard, Roi d'Angleterre, ouvrage d'un,
Souverain étranger, ne peut avoir parmi nous aucune force :
l'Ordre de Malte eftforcé d'en convenir. Cequel'on voit clairement dans ces premiers temps, c'en que les Chevaliers de
Malte payaient les reves, comme les autres citoyens. Les
Affemhlées nationales de 139 l , 1393, 1394, poHérieures
au Diplome de l'Empereur f'réderic, déclarerent toutes les
denrées, toutes les marchandifes fujenes à l'impôt, quel
qu'en fût l'acheteur ou le vendeur, Ev~que, A rchev~que ,
Commandeur, & dans quelque lieu qu'elles fuffent confom·
mées, même dans les terres de St. Jean de Jerufalem.
L'exemption portée par les Lenres-patentes d'Henri II
n'elt relative qu'aux droits royaux; la preuve en eft dans la
Loi même; & le préambule des Lettres - parentes jultifie que l'Ordre de Maire ne demandait pas d'autre exemption. D'ailleurs les graces du Prince ne doivent jamais être
préjudiciables au tiers; le Souverain doit être jufte avant
que d'être bienfaifant ; auffi le Parlement de Paris n'enrégi.fl:ra ces Lettres-patentes qu'avec cette c1aufe : in quantùm.
concernit Dominium Regis; & dans touS les refcripts concernant l'Ordre de Malte, le Légiilateur déclare expreffément qu'il n'entend pas porter préjudice. au tiers ; falv(})
�DU
PALAIS
DE
PROVI!NCI!.
343
in aliis jure noftro, & in omnibus jure elieno. L'Ordre de
Malte n'a jamais entendu en jouir dans un autre fens : auffi
n'a-t-il jamais refufé de contribuer aux décimes & aux autres impofitions du Clergé de France. Il ne jouit même
prefque plus des exemptions qui lui ont été concédées; il a
payé en diverfes occafions, le droit <l'amorri{femenr pour
les biens qu'il po{fede ; il paie les oél:rois 11 Paris & à Lyon;
il paie par-tout les droits de traite, foraine & douane.
II a toujours été fournis à payer nos impofitions. Par Arrêt
du 3 l Mai 169I, il fut jugé que le Commandeur de Comps,
Seigneur en parcie du bois de LeIl:erel , contribueroit à la
réparation du chemin qui va de Fréjus à Cannes, & qui
traverfe le bois. En 1661 , il furprend un Arrêt du Confeil
qui l'exempte de nos reves; un Edit de la même année
révoque cet Arrêt.
Si l'Ordre de Malte pouvoit avoir des titres, ils feroien t
anéantis par les Loix fondamentales du Pays. Le droit d'établir des reves dl: en Provence un droit confiitutif, commun
& national. Les reves y font réelles par la nature des chofes, & par la maxime du Pays. Accorder des exemptions
perfonnelles en matiere de reves, ce feroit renverfer les Loix
nationales. La forme de l'adminiHration de cette Province
remonte aux fiecles les plus réculés; toujours elle a eu le
droit de s'impofer de la maniere la plus commodé & la
moins onéreufe; & la faculté d'établir des reves fur les confommations, eIl: une dérivation du droit général. On en a
conL1:amment ufé, fans difl:inél:ion de lieux, de chofes ni de
perfonnes. Le vœu des habirans forme l'impÔt, & l'homologation de la délibération ne fait qu'appuyer ce vœu, du
fecours de l'autorité coaél:ive. La faculté n'eIl: donc point
un privilege de conceffion.
En vain l'Ordre de Malte veut donner à entendre que fes
Membres font étrangers dans la Cité; ils tiennent (difentils) à une Religion, à un Ordre. Mais qui les a déliés de
de leurs obligations envers la patrie? Ils nai{fent hommes
& citoyens; ils ne ce{fent pas de l'être en devenant Religieux. Au furplus, l'étranger qui habite & qui confomme,
�34~
Jou RNA L
pale les reves (ur les con(ommation·s. Cela arrive par-tout:
Cela tient au droit des gens.
Ce n'eft qu'improprement que les droits des Provinces
(ont appellés Privileges. Ils (ont plutôt les conditions de
l'affociation politique & civile; ils (ont le lien commun de
l'autorité & de l'obéi/lance. En Provence, une Loi particuliere déclare nul d'avance tout ce qui peut être contraire
à la conftitution (Statut de 1489.) Cette Loi, émanée de
.nos Souverains depuis notre réunion à la Couronne, eft une
reconnoi{fance des conditions auxquelles cette réunion a
été faite. Elle eft écrite (ur le Trône; elle eft inébranlable
comme lui. Détruire ou diminuer le droit qu'a cette Province d'établir des reves, ce (eroit attaquer (a conftitution
inaltérable. Ce droit eft donc fondamental, & ne peut (ouffrir aucune exemption perfonnelle. C'eft encore fans efpoir
de (uccès> que l'Ordre de Malte oppore que la Cour eft
liée par tous les Arrêts qui (ont intervenus en faveur de
l'Ordre de .Malte dans les différens Tribunaux, & par ceux
qu'elle a rendu elle-même. Ces Arrêts, rendus contre quelques Communautés particulieres, [ont attaqués aujourd'hui
par la Pro~jnce, comme partie non ouie. Son droit eft entier; en matiere de droit public, il faut toujours remonter
aux principes, & révoquer les Arrêts qui [ont contraires
a-ux Loix conftitutives; les regifl:res de la Cour font foi
qu'en pareilles circonftances, & même en matiere de reves ,
l'oppofition de la Province a été favorablement acueillie
toutes les fois qu'il a fallu rétablir le dFOit national..
La Cour peut, [ans contredit, fiatuer fur des Arrêts rendus par le Grand - Confeil & par d'autres Tribunaux. Elle
dl: eJfentiellement compétente pour connaître de tout ce qui
touche à la matiere des reves. Toutes les attributions abu!ives ont ce{fé; elle a repris la plénitude de. pouvoir que
les Loix lui garanriffent. Elle peut revoir touS ces Arrêts;
les Tribunaux qui les ont rendus, la repréfentoient. Elle
peut donc aUJourd'hui juger la quefl:ion; bien plus ,'les Loix
lui en impofent Fobligation; c',eH à elle à (outenir notre
cDn.fI:itution, à maintenir nos principes..
A'R.RÊT .
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PAL AIS
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R 0 VEN C E.
34~
'ARRET de la Cour du Comptes, Aides & Finances de
Provence, en faveur des Gens des Trois-Etats du Pays fk
P;ovence, contre l'Ordre de Malte.
LOUIS, &c. Comme foit que par Arrêt cejourd'hui
rendu à l'Audience pardevant nos amés & féaux Con~
feillers, les Gens tenant notre Cour des Comptes, Aides
& Finances audit Pays de Provence, entre les fieurs Confuis, Alfelfeur & Communauré de notre ville d'Aix, demandeurs en requête & fins y contenues du 14 Novembre
1778, d'une part; & Mre. Frere Dominique-Gafpard-Balthazard de Gaillard, Bailli, Grand-Croix de l'Ordre de St.
Jean de Jerufalem, Commandeur de Valence, Procureur
général de fondit Ordre, Receveur de fon commun tréJor
au Grand Prieuré de Saint-Gilles, prenant le fait & caufe
en main de Mres. Jofeph-Charles-Raymond de TrelfemanesChafieuil, & Èfprit d'Albert S. Hypolite, Chevaliers profès
dudit Ordre, défendeurs d'autre: Et entre les fieurs Procureurs des Gens des Trois - Etats. de notre Pays de Provence, . demandeurs en requête d'intervention & fins y contenues du 13 Février 1779, d'une part; & ledit Mre. Frere
de Gaillard, en la fufdite qualité qu'il procede; & lefdits
lieurs Con fuis , Alfelfeur & Communauté dudit Aix, défendeurs, d'aurre.
SAVOIR FAISONS quenotredite Cour, par fon Arrêt
du jour & date des Préfentes, oui les Avocats des parties
& notre Procureur Général, Jans s'arrêter aux fins de nonrecevoir propofées par le Receveur de l'Ordre de Malte,
dont l'a démis & débouté, faifant droit à la requête des
Procureurs des Gens des Trois-Etats de no~re Pays de
Provence, du 13 Février 1779, de même qu'aux fins par eux
prifes fur le Barreau, & à l'oppofition par eux formée, en
tant que de befoin, corn me tiers non ouis, à tous Arrêns
émanés de l'autorité de notredite Cour, & à tous autres
titres quelconques obtenus par l'Ordre de Malte, relativement
à l'exemption per(onnelle des reves & impofitions établies.
Xx
�34~
Jou ~ N AL
& à établir par les Communautés du Pays, fur les fruits;
denrées & _ marchandifes, fans s'arrêter _auxdits Arrêts &
titres, ni à tout ce qui peut s'en être enfuivi, & ayant
égard, au moyen de ce, à la requête des Confuls & Commllnauté de notre ville d'Aix, du 14 Novembre 1778, a
ordonné & ordonne que notre Edit du mois d'Août 1661,
l'Arrêt de notre Confeil du 7 Février 1702, les Statuts &
autres Loix municipales de la Province, feront exécutés
fU,ivant leur forme & teneur; ce faifant, a fait & fait inhibitions & défènfes aux Chevaliers d'Albert & de Trelfemanes, ou fait audit Rece."eur de l'Ordre, prenant leur fait
& caufe, & à tous autres Membres dudit Ordre, de faire
sntrer dans notre ville d'Aix, aucune farine, fans payer le
droit de Reve & du Piquet, à quelque titre, & fous quelque prétexte que ce foit, à peine de faifie d'icelle, du paiement de l'amende, & autres peines portées par les baux:
Et de même fuite, a ordonné & ordonne que ledit Ordre &
tous les !\1embres qui le compofent ,feront & demeureront
fournis au paiement de _toutes les reves & impofitions établies & à établir, tant par notre ville d'Aix, que par les
autres Communautés du Pays, fur les fruits, denrées &
marchandifes, fans pouvoir réclamer aucune exemption perfonnelle; fauf cependant les exemptions réelles -aux cas &
formes de droit: Ordonne en outre que le préfent Arrêt
fera exécuté dans toute l'étendue de notre Comté de Provence, Forcalquier & Terres adjacentes, & imprimé, publié & affiché par-tout où bdoin fera, à la diligence des
Procureurs du Pays, oc aux frais de la Province; condamne
le Receveur général de l'Ordre de Malte aux dépens envers
toutes les Parties. POUR CE EST-IL que nous, &c. Données
à Aix en notre,lite Cour le troifieme Juillet, l'an de grace
mil fept cent foixante dix-neuf, & de notre regne ie fixieme.
Par la Cour. Signé BONAUD. Plaidant Mes. Pochet, Portalis, lors Afl'efl'eur, & Gaffier.
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347
=====:====::::::=::::::======~
ARRÊT
XXXXII.
Le créancier qui a reçu de fon débiteur failli des lettres de
change en paiement de ce qui lui était dû, ne peut être foumis qu'à recombler ces mémes lettres de change, s'il les a
-encore en [on pouvoir, pourvu qu'il n'air rien négligé P'l/CI
s'en procurer le paiement.
M
ra
l E. Collavier, Courtier Royal de
ville de Marfeille,ayant failli dans le courant du mois de Mail 774,
on lui donna des adjoints qui lui laHferent la liberté ae continuer fes fonél:ions. Les Freres Mouttet & Compagnie, Négocians de la ville de Brignoles, ignorant cette fàillite, firent
des paiemens au fieur Collavier; & ayant été enfuite à
Marfeille en 177') -, où i-ls trouverent le fieur Collavier exerçant librement fa profeffion, ils arr,éterenr &- c1ôturerenr leur
compte avec lui; ils fe tFOuverent créanciers de 3345 liv.1) f. 6 d. Ils reçurent lEn paiement une lettre de "bange fur
Serra & Andrieu, payable en Saints, de 2616 liv., une déclaration de participation d'intéréts fur des billets dus par
Gadzino & Falque, & finalement un billet à volonté de
329 liv. 1) f. 3 den. Cette opération fut portée dans les
Livres refpeél:i-fs de Me. Collavier & des Freres Mouttet &
& Compagnie; au moyen de ce, Me. Co\lavier fu-t quittancépour comptant lors du compte aHêté.- Les Adminifirateursde la faillite de Me. Collavier fe pour-vurent par requête du18 Février 1778 pardevant les Juges-Confuls, & demande-refit que les Freres Mouttet & Compagnie fulfent condamnésà recombler en comptant, la fomme de 2341 liv-. l f. 5,
den. formant le 70 pour cent de celle de 33'4) _liv. 1) f..
6 den. dont ils difoient- que les fr-eres Mouttet & Com-pagnie avoient reçu le montanr.
_
Les fre~es M,outtet répondoient qu'ils n'avoient été payéS":
qu?en paplers;_ ~q.ue cela- réfultoit de leurs écritures; q!l'on:
-
1
Xx.:z.:,
�34-8
1
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U RNA L
devoit également en trouver la preuve dans celles de Me.
Collavier. Ils reconnurent la néceffité du recomblement que
la plus exaéte bonne foi ne peut empêcher j mais ils obfervoient que le paiement énoncé pour comptant n'avoit été
fait qu'en papiers; ces papiers fe trouvoient encore en nature dans leurs mains; ils offrirent de les rendre. La quef-.
tion fut corn promife à deux Avocats-Arbitres, qui déciderent que les freres Mouttet & Compagnie devoient être relaxés d'infrance, au bénéfice de leurs offres.
Les Adminifrrateurs de la faillite reprirent leurs pourfuites pardevant les Juges-Confuls, qui par leur Sentence
du 2.3 Février, condamnerent les freres Mouttet au recomblement de la fomme de 1612. liv. 6 f. 6. den., formant
le 70 pour cent du montant de la lettre de change de
2.616 liv. fur Serra & Andrieu, & ordonnetent de plus le
recomblement en nature du billet à volonté de 32.9 1. 1) f.
) den., & de la déclaration de la participation pour 4-00
liv. d'intérêts aux billets de Gadzino & Falque.
Les freres Mouttet appellerent de cette Sentence, après
l'avoir exécutée provifoirement, & comme contraints & for. cés. Ils préCenterent enfuite une requête incidente en reHitution de la fomme par eux payée, & pour faire condamner
les Adminifrrateurs au paiement de la fomme de 1014- Jîv.
14 f., faifant le trente pour cent de celle de 334) liv. 1) f.
) den. du montant de leur créance.
Ils reconnoilfoient que leur bonne foi ne pouvoit les
fouftraire au recomblement. Me. Collavier, quoique non
gêné, non veillé en fait .p.ar fes Syndics, n'étoit pas néan':'
moins 'parfaitement libre; fon état étoit entamé; il ne lui
étoit pas permis de payer un ctéancier au préjudice des autres. Mais ce recomblement devoit-il être fait en papier ou
en argent? Si les freres Mouttet & Compagnie avoient été
payés comptant, le recomblement en argent ne pourroit
être contefré. Mais il étoit conftant que le paiement n'avoit
été effetl:ué qu'en papiers j il fuffifoit donc aux freres Mouttet
de rendre les papiers en nature. Si par leur faute la lettre
de chang-e avoit empiré, s'ils, ne l'avoient p'!s préfentée à
�D U PAL AIS DE PRO VEN C t.
349
l'écheance, s'ils avoient négligé d'en pourfuivre le paiement
contre Serra & Andrieu, depuis tombés en faillite, dans
ce cas, il faudroit en rendre refponfables les freres Mouttet
& Compagnie, non par voie de recomblement, mais à titre de dommages & intérêts. Ici la lettre de change avoit
été préfentée à fon échéance, elle avait été proteHée; toutes
les formalités avaient été remplies avec exaél:itude & intégrité. Les débiteurs avaient failli j il n'y avait rien en tour
cela qu'on pût imputer aux freres Mouttet : il devoit donc
leur fuifire de rendre la lettre de change en nature.
Que Me. Collavier fe fùt procuré la lettre de change, ou'
en donnant des effets appartenans à la maŒe, ou par tout
autre moyen que ce pùt être, rien de plus inutile à examiner.
Il fuifit d'obferver qu'il en fit la tradition aux fteres Mouttet,
à compte de ce qu'il leur devait. Ces derniers n'avaient
recru de Me. Collayier, en paiement de 2616 liv., que ce
même papier, dont ils n'avaient pu fe procurer le paiement,
& qui n'avait été dans leurs mains qu'un papier inutile.
Les Adminiilrateurs de la maŒe des Créanciers de Mé.
Collavier répondaient qu'il étoit bien étrange de voir les
freres Mouttet fou tenir qu'ils n'avaient pas eu connoiŒance de
la faillite de Me. Col1avier, tandis que dans tolH le Royaume,
les faillites multipliées d'une infinité de Négocians, &
lûr - tour des Courriers de Marfeille, après la chelte de
Verdilhon, étaient connues de tout le monde qui avait les
yeux ouverrs fur la Place de Marfeille.
La lettre de change de 2616 liv. n'était. point un effet
appartenant à Collavier; ce n'eil pas lui qui l'avoit donnée
aux fieurs Mourtet en paiement de leur créance. Ils l'avaient
recrue direél:ement des mains de Serra & Andrieu; ceux-ci
la tirerent à l'ordre de Mouttet & Compagnie, Ces derniers fuivirent la feule foi des tireurs. Collavier n'y intervint, ni comme endoŒeur, ni fous aucun ·autre rapport;
il ne s'en mêla que pour en payer la valeur à leur décharge.
La lettre de change porte même que Serra & Andrieu en
evoient recru le montant de Mouttet & Compagnie. Con(équemment fi elle eft venue à proten, & fi Serra & An~
�3)0
Jou RNA L
drieu ont fait faillite, elle. ne peut être revenue entre les
mains de Mouttet & Compagnie que pour leur' compte; "ils
en doivent feuls fouffrir la perte; ils ne peuvent la donner
en recomblement de ce que Collavier avoit payé pour eulC
en argent ou en bons effets appartenans à la maffe de fes
Créanciers.
Si Collavier avoit propofé aux freres Mouttet cette lettre
de change en paiement de leur créance, il l'auroit faite tirer
à fon ordre, & l'auroit après endolfée en leur faveur. La
raifon en eft fimple : celui qui propofe un papier en 'paiement de fa dene, doit en être garant, & il ne peut l'être
que par fa fignature. Il e1J: de regle que celui qui reçoit une
lettre de change tirée à droiture à fon ordre, ne traite qu'avec
le tirellr dont -il fuit la foi: il n'a de titre que contre lui.
Il eft donc évident que fi au lieu d'avoir befoin de la lettre
de change en queftion, ils ne l'avoient reçue qu'en paiement de ce que Collavier leur devoit, ils fe feroient bien
gardés de confentir qu'elle fût tirée immédiatement a leur
ordril; ils n'auroient pas manqué d'exiger qu'elle le fût à
l'ordre de Collavier, & qu'elle fût enfuite par lui endolfée
en leur faveur. La feule contexture de la lettre de change
prouve qu'ils en avoient befoin ,. & qu'ils confentirent de
la pr.endre pour leur compte & à leurs propres rifques.
Enfin Collavier ab.ufant de l'adminiftrat!on qu'on lui avoit
confiée, en payant. pour les [(eurs Mounet & Compagnie,
la valeur de cette lettre de change en bons effets apartenan~
à la malfe de fes C~éanciers ,leur avoit fourni beaucoup audelà du trente pour cent de la créance: les Adminiftrateurs
étoieM, fans contredit ,. fondés· à leur demander le recomblement du furplus ..
Par AHêt du. 6 JuiUet 1779, rendu au rapport de M.
de Ballon, la décifion des. Arbitres fut confirmée avec dë-:
pens ; écrivant Mes. Barlet & Gaffier.
�DU
PAL AIS
DE
P
R P VEN C E.
3 St
~=====~===~=
ARRÊT
XXXXIII.
Les Communautis peuvent changer leurs Réglemens quand le
bien public l'exige.
L
E 30 Novembre 1777 les Confuls & Communauté de
Seyne convoquerent un Confeil de tous chefs de famille
pour délibérer fur les peines que l'on pourroit impofer contre
ceux qui introduiroient leurs troupeaux dans les défens de la
Communauté au préjudice des particuliers qui avoient le droit
d'y envoyer dépaître leurs gros beHiaux.
On délibéra d'impofer une peine de vingt fols pour chaque
bête d'avérage qui feroit trouvée dépaître dans les défel}s ,
laquelle fomme appartiendroit moitié au Dénonciateur, moitié
à la Communauté; il fut ajouté que toute perfonne auroit l~
droit de dénoncer, & que tous ceux que l'on trouveroit faucher ou cueillir avec la fauffille de l'herbe aux défens, ou y
ramalfer du fumier, paieroient 24 liv. pour le fauffillage de
l'herbe, & 12 livres pour l'enlevement du fumier.
Les Confuls demanderent l'homologation de la délibération;
mais le Confeil général ayant été alfemblé fans permiffion ,
l'Arrêt du 12 Décembre 1777 calfa la délibêration, & il fut
ordonné qu'il feroit alfemblé un Confeil général de tous
chefs de famille fixé au 2 l du même mois pour être délibéré fur le projet de réglement.
En conféquence, & le jour indiqué, le Confeil, compofé de
cent vingt chefs de famille, délibéra à la pluralité des fuifrages
les mêmes peines prononcéei par la délibération calfée ; on
y ajouta que le troupeau qui feroit dén.oncé de nuit feroit
confifqué ; la délibération fut enfuite homologuée.
Le 12 Janvier 1778 le fieur Roux, Négociant du lieu de
Couloubrieux, dans la Communauté de Seyne, préfenta une
requête à la Cour en oppofition à cette délibération; quel.
ques particuliers intervinrent dans l'infiance & adhérerent.
,
�3')2
.JOURNAL
Les Oppofans fe plaignaient de la répartition de l'amende
qui devait être partagée entre le Dénonciateur & la Communauté, & qui, étant confidérable, ne pouvoit qu'occafionner
de fauffes dénonces. Si la loi efi confirmée ( difoient-ils ) on
ne pourra plus tenir de menu bétail; une peine auffi forte
engage ta des gens mal intentionnés à féduire les Bergers à
prix d'argent, pour les porter à conduire les troupeaux à la
grande montagne; l'amende fera encourue fi c'dt de jour,
la confifcation fi c'efi la nuit, & tout le bénéfice ne fera que
pour ceux qui n'en devroient attendre aucun. La peine prononcée par le nouveau réglement menac·e la fortune des par·
ticuliers, & entraîne avec elle la ruine du propriétaire.
Les Confuls de la Communauté de Seyne répondirent &
préfenterent leur conduite comme une fuite de leur attention
à veiller fur les intérêts de tous les particuliers; ils demanderent la confirmation d'un régIe ment dont les difpofitions
avoient déja paffé fous les yeux de la Cour, & auxquelleselle avoit donné fon approbation par l'Arrêt d'homologation.
Suivant eux, les Oppofans ne pouvoient fe plaindre avec raifon
des peines prononcées.: pourquoi fe plaindre s'ils devoient ne
jamais fe mettre au cas de la r;:ontravention ? Qu'avoient-ils à
ctaindre d'une impofiiion que leur conduite ne les mettroit
pas à même d'encourir? On devoit fufpeél:er avec raifon leur
oppofition , parce que moins la peine feroit forte, moins
fans doute craindroient-ils de contrevenir.
Me. Meriaud, Subfiitut, obferva que vouloir changer les
réglemens d'une Communauté & en fubfiituer de nouveaux,
c'eH louvent faire naître de plus grands abus ; fouvent le
mal dt d·autant plus grand, qu'il devient quelquefois fans remede: il n'efi pas permis arbitrairement de faire des loix;
les nouvelles entraînent avec elles des fuites fâcheufes que le
temps efi feul capable ·de détruire.
Toute loi générale eH diél:ée pour l'avantage & le bien
des particuliers pour lefquels elle èfi donnée; ces deux motifs [ont les feuls qui la déterminent; mais les loix locales font
~é.gies par d'autres principes, elles font conformes aux ufages
. des particuliers, à la nature du pays qu'ils habitent; les
régIe mens
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PRO VEN C ~.
3H
réglemens des Communautés font précifément dans cette
hypothefe ; les abus n'ont pas été les mêmes dans taus les
temps; on a corrigé ceux qui exiftoient à l'époque de la Loi
publiée, mais fouvent on n'a pas pu prévoir ceux que des
circonftances particulieres feroient naître dans d'autres temps;
quelquefois même le local a été dénaturé; l'habitation qui
dans le principe étoit confidérable" eft devenue déferte; les
impofitions qui étaient fupportées par un grand nombre 1
n'ont plus été acquittées que par quelques particuliers; fouvent les abus fe font augmentés en proportion de ce que leS-.
mœurs ont diminué; & dans taus ces cas, pour obvier à
ces inconvéniens , il a fallu donner des loix nouvelles, changer la forme de l'adminiftration, faire de nouvelles impofitions; la loi ancienne devenoit inutile, impoffible même dans
fon exécution; il en faUoit néanmoins quelqu'une, puifque
les hommes ne peuvent jamais fe conduire par eux-mêmes,
& qu'ils doivent/toujours être guidés par le frein de la Loi.
Auffi dans tous les temps; & de nos jours, les Cpmmunautés
fe font-elles toujours adreifées à la Cour, pour lui demand~r
la permiffion d'aifembler un Confeil général de touS chefS
de f:1mille, à l'eltet d'y délibérer fur un nouveau Réglement.
Une des qualités les plus eifentielles de l'Adminiftrateur,
eft de juger avec difcernement quel ef~ le Réglement qui peut
le mieux convenir à la Communauté.
Le Réglement qui régiffoit la Communauté de Seyne érait
ancien; le temps avoit détruit en partie les abus qui y avoient
été prévus; il falloit néanmoins les corriget emiétement;
on ne pou voit le faire que par une Loi nouvelle: tel fu.t
l'objet de la délibération du 2. 1 Décembre 1778..
La Communauté, qui s'était elle-même donné la Loi dans
un autre temps, pou voit la révoquer, la changer, lorfque
les circonftances paroiifoient l'exiger. Le Réglement eil:
une Loi locale j les Confuls pouvoient feuls décider fi elle
. était toujours de néceffiré j ils n'avoient pas néanmoins la fa>culté de la corriger, de l'érendre à leur gré; ils n'éraient que
fimples Adminiftrateurs; & eh cette qualiré, ils devoient repréfenter au Confeil de la Communauté ,. les inconvéniens
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Jou R N Â L
qu'ils croyoient . y trouver. Ces inconvéniens ont été égal.ement vérifiés par la plus grande partie des citoyens; &
la délibération qui a été prife en con{équence ayant été homologuée par la Cour, il ne refie aucun obfiacJe: chaque
citoyen efi fournis à la Loi.
Q.lels ont été les motifs de la conduite des Confuls de
Seyne, dans la propolition qu'ils ont faite au Confeil de la
Communauté? Quds ont été ceux qui ont déterminé cette
même Communauté à prendre la Délibération? Le bien &
l'intérêt de l'univerfalité des habitans. Les pâturages fO,nt
une des principales reifources de la Communauté de Seyne,
fituée dans la haute Provence, pour l'aider à furvenir aux im·
poG.tions de la Province. Il a fallu de tous les temps veiller
à la confèrvation d'un bien d'autant plus précieux, qu'il efi
devenu plus rare dans cette Province, où des montagnes
efcarpées, des défrichemens fans précaution, ont formé des
ravins conlidérables qui ont détruit le peu de terrein qui fe
trou voit dans les vallons, au pied de ces mêmes montagnes.
La plus grande partie des Oppofans ont été dénoncés en
différentes fois; leur fituation les met à même de profiter
davantage des herbes. qui croiifent fur la montagne qui a
donné. lieu au Réglement. Habitans de deux hameaux, appellés les Maures & Couloubroux, leur proximité de cette
montagne les ponoit à la contravention.
A l'égard de la peine de la confifcation prononcée par le
Réglement, on en trouve un exemple dans le nouvea!1 Commentaire fUt notre Statut, corn. l , pag. 'i86. Me. Julien y
rapporte un Réglement fait par la Communauté de Lançon,
le I2. Novembre 17'i8, & homologué par la Cour, avec
cette circonfiance, qu'il fût permis à cette Communauté de
faire imprimer, publier & afficher l'Arrêt- par - cout où befoin feroit.
Me. Meriaud .examina enfuite -fi coute perfdnne eft reçue
. à dénoncer, & fi on a pu .lui appliquer la moitié des
amendes.
Il efi' dit dans le Statut, que la dénonce faite avec ferment. au Greffe de la Jurifdiaion ordinaire, foit par le Ban~
�DU
PALAIS
DE
355
PROVllNCE.
nier ou par la perfonne intére1fée, fait foi. Toute perfonne
même _qui a furpris l'infraéleur de ban, peut faire la dénonce pour le maître. Bomy, dans fes Mélanges, rapporte
le Réglement du 4 Mai 138 l , où il dl: dit à l'art. 3 que
tonte perfonne digne de foi fera crue à fon ferment, tant
pour demander que pour accuLer le ban & le dommage donné,
foit en fes biens, fait en ceux d'autrui. On s'eft éloigné (ajoure
le Commentateur) dans ce point, du droit commun, [uivant
lequel le témoignage d'un [eul, & fur-tout de la partie intérefJée, n'eft pas une preuve fuffifànte; mais la difficulté d'avoir
des preuves des infrac7ions de ban & des dommages caufes
à la campagne, a fait qu'on s'eft conten!é de la dénonce faite
avec ferment, [oit par le Bannier ou par. la partie elle-m~me,
ou par [es [erviteurs, ou par une autre perfonne. Telle dl:
la Loi, leI dl: fon motif. La Communauté de Seyne s'dl:
conformée à fes difpofitions_, & on ne fauroit porter atteinte à cet égard à fa délibération, d'autant que cette dénonce- n'dl: pas tellement décifive, qu'elle ne pui_Ke être, détruite par la preuve contraire. Le ferment ne peut y faire
obfl:acle; fi le- dénoncé demandoit à prouver que la dénonce
a èté faite par animofité, ou que le dommage a été caufé
par un autre bétail, ou que fan bétail n'étoit point dans cequartier au jour & à l'heure marquée, par. la dénonce, la
preuve pourroit être reçue.
Il conclut à ce que fans s'arrêter à l'oppofition de Roux
& fes Adhérens, la délibération fût exécutée felon fa forme
& reneur.
Arrêt du 7 Juillet 1779, prononcé par Mr. le Préfident
de Saint-Vincent, conforme aux conclllfions ,.en y ajoutant
qu'au lieu de la confifcation pronot;lcée contre le troupeau
trouvé de nuit, il "feroit décerné une amende de 40 fols par
bête. L'Arrêt condamna les Appellans & Intervenans aux
trois quarts des dépens, l'autre quart compenfé; plaidant
Mes., Gaffier & Simeon.-
y y
2.
-
.
�JOURNAL
ARR Ê T
X X X XIV.
Un Courtier, entre les mains duquel on a fait un dép~t en
vertll d'un Jugement, venant à faire faillite, ne peut obliger
celui qui a dépofé à fuivre le fort de [es autres créanciers.
L
1
ES hoirs du neur Jacques Olive, Négociant & ancien
Echevin de la ville de Marfeille, étant en procès pardevant le ï..ieutenant de l'Amirauté, contre différentes parties,
au fujet d'un Vaiffeau qui avoit été [aiû,' obtinrent le 4 Janvier 1772. un Jugement provifoire, par lequel il fut ordonné
qu'ils dépoferaient par forme de cautionnement, entre les
mains de Me. Verdillon, Courtier Royal, la fomme de
6000 liv.
Ce Jugement fut ngnifié aux Parties & à Me. Verdillon
par divers exploits qui furent contrôlés; le dépôt fut fait
entre les mains de ce dernier, il en donna fon reCiu, qui
fut tranfcrit dans l'un des exploits.
Les hoi~s Olive rapporterent du même Lieutenant; le 13
Mars 1778, une feconde Sentence 'qui les autorifa à retirer
des mains de Me. Verdillon les 6000 liv. dépofées. Me. Verdillon, lors de la ûgnification qui lui fut faite de ce Juge'ment, fit une reponCe ; il excipa de ,ce que da'ns l'intervalle du dépôt à cette feconde Sentence, il avoit fait faillite,
& avoit paffé avec fes créanciers un concordat par lequel ils
l'avoient qùitté d'une grande partie de leurs créances; il
. requit les hoirs Olive de fe contenter d,u vingt-huit pOlllr cent
des 6000 liv., Cauf d'en recevoir encore quatre pour cent à
la fin du mois de Décembre lors prochain. Mais par Sentence
du Lieutenant de l'Amirauté il fut condamné à l'entiere reCtitution du dépôt, avec dépens; il e~ appella pardevant la
Cour.
Les hoirs Olive diCoÎent que le dépôt au moyen duquel
on confie des ef(ets à un tiers, non pour rerirer un profit
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PAL AIS
D E
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R 0 VEN C E.
3 )7
de la rémiffion qu'on lui en fait, mais uniquement pour qu'il
en ait la garde, & que par fes foins il en empêche le dépéri1fement, eft un aEte facré & inviolable. D'après la loi,
le dépofitaire commet un vol s'il fe fert de la chofe dé pofée ;
§. furtum, inftit. de obligat. qUIl! ex deli80 nafeuntllr. L. 3,
cod. depofiti, & L. 29, ff. eod. Le dépofitaire eH: toujours
tenu de rendre le dépôt à celui à qui il appartient, fans
pouvoir lui oppofer de compenfation, quand même il ferait
créancier d'une plus forte fomme ; il ne prefcrit jamais par
quelque temps qu'il po1fede ; la contrainte par corps a toujours lieu contre lui, & dans quelque cas fâcheux qu'il fe
trouve; on ne peut admettre en fa faveur la miférable ceffion de fes biens au préjudice du propriétaire du dépôt.
Le dépôt ne prive point celui qui le fait de la propriété
de la chofe dépofée ; il peut toujours la réclamer & la revendiquer en nature : en cela le dépôt differe e1fenriel1ement
du prêt appel1é en cirait mutllum. Celui-ci tranfmet à l'emprunteur la propriété de la ihofe prêtée, ut de meo tuum fiat;
l'emprunteur n'eU fournis qu'à rendre l'équiv~lent. Auffi le
change ou l'intérêt peut avoir lieu en matiere de prêt ( hors
les cas auxquels les loix le défendent ) au lieu qu'on n'en
peut jamais exiger d'une fomme d'argent mife en dépôt, du
moins fans renoncer à tous les privileges dérivant de fa nature : car, comme difent tous les Auteurs, depofiwm vertitur
in mutLlllm , cum ex eo ufurœ percipiuntllr. Delà celui .qui
confie un dépôt à quelqu'un, n'eU pas proprement créancier
du dépofitaire j il n'a- aucune obligation direEte fur fes biens;
& s'ils font en difttibution, il n'a autre chofe à requérir que
la diftraEtion du dépôt, parce qu'il n'a jamais été in bonis du
dépofitaire. C'eft la remarque de Defpei1fes , tom. l , pag•
.').07, nO. 1), & le motif des Loix, des Arrêts, & des Auteurs qu'il cite.
Il eU vrai que, comme il n'eft point de regle que la cupidité ne foule aux pieds, il n'arrive que trop que des dépofitaires , même publics, fe fervent de l'argent confié à leur
garde, & que, devenant enfuite infolvahles, il eft impoffible
a,ux propriétaires don~ ils ont diverti les fonds, de les reven·
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Jou
RNA L
cliquer ·en nature. Ceux-ci fe voyant alor·g forcés de convertir
en aél:ion les droits de propriété qu'ils avaient, il cf!: en ce
cas indifpenfable d'examiner quels doivent être les acceffoires
de cette aél:ion, tels que l'hypotheque ou le privilege. Ce
n'ef!: pas la loi qui l'ordonne ainfi ; ce n'eft pas la nature
de la chofe; car l'une & l'autre donnent à celui à qui appar.
tient le dépôt, l'aél:ion de revendication; mais c'ef!: la néceffité' qui y oblige.
Delà font nées plufieurs di!l:inél:ions. S'agit-il d'un dépôt
privé fait entre les mains d'un particulier que le propriétaire
a lui-même choifi, & dont il a fuivi le foi au point de ne
lui confier fon bien que verbalement ou fous une écrite privée , il n'y a point alors d'hypotheque ; dans ce cas même
la loi voudroit pouvoir favorifer l'aél:ion du réclamataire , &
lui accorder des préférences fur ceux qui ont contraél:é avec
le dépofitaire à d'àutres titres; mais il feroit facile de fuppofer des dépôts qui n'allroient rien de réel, de fabriquer
après coup des aél:es antidatés, & de léfer le tiers aux dépens de la vérité & de la juftice, & même au profit des débiteurs infolvables qui pourroient trouver des prête-noms.
Mais s'agit-il d'un dépôt fait entre les mains d'un homme
commis par la Loi ou par la Jufl:ice, il 'y a dès-lors dans
plufieurs cas privilege. Tels font ceux des dépôts faits entre
les mains des Receveurs des Configl1ations ou de tous autres Officiers publics, chargés par état de les recevoir, & à
qui les droits de leurs Offices obligent néceffairement de
les confier. C'ef!: la remarque de Bafnage en fon Traité des
Hypotheques, pag. 376; de Denifart, vO. Fait de charges;
de Loifeau en fon Traité des Offices, liv. 2., cha'p. 6,
nO. 36 j du Journal du Palais, tom. l, pag. 131 de l'édition in folio. L'effet de ce privilege eH que tous ceux qui
Ont fait des dépôts font préferés, fans égard à leurs dates,
aux créanciers antérieurs du dépofitaire fur le prix de l'Office
de celui-ci, & ils l'emportent même fur le vendeur de
l'Office, quoique l~ prix lui en foit encore dû.
Les hoirs Olive étoicllt en procès pour raifon d'un Vaif[eau faifi, & le Lieutenant de l'Amirauté, avant que de le
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l.-ROVENCE.
3'\9
··Ieu·r livrer, trouva bon d'ordonner que pour la fûreté de
leurs Compétiteurs ils dépoferoient 6000 liv. entre les mains
de Me. Verdillon. Me. Verdillon fut à cet égard fequef!:re &
dépofitaire de JuH:ice. Ses biens furent afFeétés & exprelTément hypothéqués -pour la fûreté du dépôt.
On connoît en droit trois fortes d'hypotheques; les contraél:uelles, les tacites ou légales, & les judiciaires. Les premieres, dérivent de tous contrats par lefquels un homme
s'oblige & hypotheque fes biens. Les ·fecondes , de' toute
adminiHration déférée par la J uHice ou par la Loi; & la
.trom-eme, de toute Sentence acquiefcée ou confirmée par'
Arrêt, qui foumet direél:ement ou indireél:ement une partie
à payer une fomme ou à la rendre, ou à quelqu'autre obligation qui peut dégénérer en créance.
Or de ces trois hypotheques, les deL;x dernieres conviennent parfaitement contre le fequef!:re; favoir, la tacite ou
légale, parce qu'étant nommé par un Jugement, il remplit
des fonél:ions publiques, parfaitement comparables à celles
des tuteurs, curateurs & autres adminif!:rateurs, contre qui
on ne peut pas difputer que l'hypotheque légale n'ait lieu.
Les fequef!:res judiciaires font à l'infla,r des tuteurs, des
curateurs, des adminif!:rateurs des Communautés, & autres
réputés ,publics, parce que c'ef!: de l'autorité publique qu'ils
tiennent leurs fonélions ; cela ef!: fi vrai, qu'on ne peut pas
s'oppofer par voie de fait à leur établilTement, ou les trou. bler dans leurs fonél:ions, fans fe rendre coupable d'un crime
.réputé public, parce qu'il attente à l'autorité publique.
L'hypotheque judiciaire. ne peut pas non plus être con-·
tef!:ée de la part d'un fequef!:re nommé par un Jugement; car
d'après les Loix Romaines & les Ordonnances du Royaume,
les Jugemens donnent hypotheque contre les parties qu'elles
foumettent à rendre quelque fomme, ou qui les en conflituent comptables; c'efl ce qui ef1: établi par l'Ordon.nance
de 1139, art. 92. . & 93 ,. par celle de Moulins, art. S3, &
par la Déclaration du 10 Juillet 1')66.
On ne peut nier que celui qui a eté forcé par la Juf!:ice
de confier fonbien à un dépofitaire ou fequef!:re, n'ait hy-
�360
Jou RNA L
potheque fur les biens de celui-ci. Il y a plufieurs AutE!\lr~
qui fe débarrent fur le point de favoir s'il a un privilege
qui le rende préférable à tOUS fes créanciers, ou s'il faut du
moins lui livrer plutôt qu'à ceux-ci le prix de fon Office
lorfqu'il en a un, mais tous conviennent ou expreirément
ou tacitement qu'il a hyp0l;heque fur touS fes biens. C'eil:
ce que dit en termes formels Domat en fes Loix Civiles,
liv. 3, tit. l , feér. ) , nO. 26, aux Notes; Loifeau des Offices, liv. 2, chap. 6, nO. 37, & nO. 34 & 3S ; Bafnage en
fon Traité des HypotHeques, pag. 377.
Me. Verdillon, lors du dépôt, étoit un Courtier en titre,
pourvu à cet égard par le Roi, & l'ufage de Marfeille , en
matiere men:antille, a toujours été de remettre les dépôts
des fommes litigieufes aux Courtiers par préférence au Receveur des Conlignatidns. Duperier, liv. 4, queil:. 30, démontre d'après la difpolition des Loix, que, celui qui a confié un dépôt à un Courtier, même fans Ordonnance de Juftice, eil: préférable à tous fes créanciers hypothécaires, à l'exceprion des feuls privilégiés; à plus forte' raifon doit-il être
difiingué de fes créanciers chirographaires.
L'Arrêt du mois de Janvier 1777, rendu au rapport de
M. de Ballon, en faveur du lieur Verdilhon, contre les
Créanciers des fieurs Gabriel pere '& fils, Négocians de la
ville de Mar[eille, n'eH: point applicable, parce que Me.
Verdilhon n'avoit été nommé Caiflier de la maife des Cr':anciers des lieurs Gabriel, que par la maire elle-même, &
non par autorité de Iuftice ; au lieu que dans, le cas préfent, c'eil: l'autorité publiq\le qui a chargé Me. Verdilhon
du dépôt.
Decormis, ,tom. 2, col. 17 S6 & fuiv., dit que la nomination faite par un Juge d'un curateur aux biens,' d'un SequeHre ou autre <Iépolitaire, rend les fonérions de celui-ci
publiques, comme celle des Tuteurs, des Adminiil:rateurs
des Communautés & autres femblables, & qu'au contraire,
la nomination qu'une maife de créanciers fait de fes Syndics ou de [es Caifliers, n'opere qu'une adminiil:ration privée; qui ne differe en rien d'un fimple mandat ou proc~ra.tIon
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PALAIS
D E
PRO V • Nell.
36)
tian qu'un particulier fait à l'égard d'un autre particulier
pour gérer fes affaires.
Me. Verdilhon répondait que véritablement le dépôt doit
être facré & rendu entier, ·non que les particuliers à qui l'on
remet une fomme pour la garder en dépôt, foient obligés
de la garder in {acculo ,fignato. Rien de fi connu que les
dépôts ne fe font plus dans un fac cacheté, comme on le
pratiquait chez les Romains; on laiJre au contraire, fuivant
le témoignage de Duperier, rom. l, liv. 4, quefl. 30, au
dépofitaire la liberté d'en ufer. Nous ne l'obligeons mim-e
plus, dit cet Auteur, à rendre le mime argent, mais feule-'
ment la -mime quantité, non idem, fed tantumdem; c'eH ce
à quoi Me. Verdilhon aurait fatisfait avec la plus grande
exaélitude, fi la Place de Marfeille n'dIt fouffert en 1774,
la. plus violente des corn motions. Chacun fe rappelle le nombre des faillites qu'il y eut à Marfeille à cette époque. L'Îmmen lité des pertes que Me. Verdilh-on y eJruya, l'obligea de
fuccomber à fan cour, & de remettre fon bilan~
Sur le pied du concordat & de l'Arrêt du 23 Août 1777
qui l'homologue, cout créancier chirographaire ne pouvait
recevoir de Me. Verdilhon que 32 pour cent de fa créance, &
les hoirs Olive éroient, fans contredit, de ce nombre, dès
qu'ils n'avoient d'autre tirre, pour recouvrer la- fomme de
6000 liv. qu'ils avoient dépofé entre fes mains, que le récépiJré privé qu'il leur en fit le '10 Février 1772. Ils,pouvoient d'autant moins fe le diffimuler, que cous ceux qui
avoient confié pareils dépôts à Me: Verdilhon, n'avaient
pas cru pouvoir rien exiger de plus, & que la maJre de's,
Créanciers du fieur Gabriel, dont il avait été nommé Caiffier par leur Concordat duement homologué, ayant prétendu devoir être conlidérée, comme créanciere hypothécaire, à raifon des fommes dépofées entre fes ma,ins, en
vertu du Concordat. & de i' Arrêt qui l'homologuoit, fut
néanmoins réduite à la qualité de fimple créanciere chirographaire, par Arrêt du 17 Février 1777, au rapport de
M. le Confciller de Ballon.
'
Le Droit Romain ne reconnoiifoit que l'hypotheque t~,
Zz-
�3 6 2.
Jou RNA
L
cire & la conventionnelle; celle ex judicato n'a été introtroduire que par les Ordonnances de nos Rois, ainfi qu'on
peut le voir dans Builfon en fon Code fur le titre In qùibus
caufis pignus vel hypotheca tacitè contrahitlir. "Le droit cî" vil, dir-il , rec0'1no;t deux fortes d'hypotheques, l'une ex" preJ]è, qui vient des contrats & .de la convention exprefJe
" des parties, & l'autre tacite, qui eft établie par la force &
" la puiJ]ànce de la Loi. Le Droit Français en a établi IIne
" troifieme qui vient de la condamnation: t'ar /ùivant l'Ordon!' nance de Charles IX, inftrée au Code Henry, liv. 9, tÎt.
" 1, la partie a hypot/zeque fur les biens du condamné du
" jpur de la Sentence_, fi elle eft confirmée par Arrêt, ou
" que d'icelle il n'y ait appel. ,
Nous ne connoilfons (dir Duperier, édirion de Grenoble,
liv. r, quell:. S , pag. 2. S ,) que trois forres d'hypotheques,
la légale, la conventionnelle (c'efl:-à-dire, la contraauelle)
& cell-e du judicat, qui a ~ré introduire par l'Ordonnance.
C',efl: Ull autre principe non moins conftant, que l'hypotheque ne dépend pas parmi nous, comme dans -le Droit
Romain, de la convention des parties, mais fe conftitue ,
ainfi que le remarque Brodeau fur Louet, lett. H. fomm. 1'),
par la feule autorité du Roi, & par le minifl:ere de fes Officiers. D'où vient ( ajoute-t-il) que les contrats palfés hors
le Royaume, même les contrats de mariage, quoique dépendans du droit des gens, ni les aaes de tutelle, ne por'tem point d'hypotheque, foit expreife ou tac ire fur les biens
fitués en France, comme il a éré jugé par divers Arrêts!
Il eft fi vrai que l'hypoçheque ne dépend pas de la volonté du créancier & du débiteur, & ne fe confbtue que par
le miniftere des Officiers Royaux, qu'une Sentence-' rendue
par des Arbitres, quoiqu'en charge & en vertu d'un com· promis, avec claufe qu'elle aura hypotheque, -ne peut ce,pendant la donner que du jour qu'elle eft homologuée en
JliItice, ou acquiefcée par aae pafle pardevant Notaire, ainfi
qu'on le voit dans les atrêtés de M. le Préfident de Lamoi·
gnon, au titre des aaions perfonnelles & d'hypotheques,
n. 2.6.
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D E
PRO VEN C E.
363
. Il n'dl: en effet per[onne qui ne [ache qu'il n'y a que les
créanciers pour raifon des dépôts faits entre les mains de~
Receveurs des Confignations, c'eH-à-dire, de ces Officier~ ,
publics, chargés par état & obligés néceffairement de recevoir les -dépôts, qui puiffent avoir quelque privilege; &
com'me on a reconnu ne pouvoir [e plac;:er, dans c·ette hypothe[e, que Me. Verdilhon ne pouvoit être tenu, à rai [on
de [on Office., de [e charger du dépôt dont s'agit, & qu'i}
ne le reçut que volontairement, les hoirs Olive [e [Ollt bor~
nés à l'hypotheque [ur [es bie·ns.
L'on convient que l'hyporheque tacire ou légale a lieu
contre Je. tuteur & autres AdminiHrateurs publics; mais elle
n'a lieu que parce que la Loi l'a établie par tour autant de
rextes précis; ainfi, fi les biens du tuteur [ont tacitement
hypothéqués en faveur de [on pupille, c'eH en vertu de la
Loi pro officia, Cod. de adminijtr. tl/l'or. Si les biem; des AdminiHrateurs des Communautés [ont tacitement hypothéqués
en faveur de la Communauté dont ils ont géré les affaires,
c'eIl: en vertu de la Loi derniere, Cod. quo quifque ordine
conven. Si la femme a pareillement une hypotheque tacite
ou légale [ur les' biens de [on mari, c'eIl: en vertu de la
Loi premiere, §. & ut plenius, Cod. de rei uxoriœ aaione.
En Ul~ mot, il n'y a point d'hypotheque tacite qui ne foit
appuyée fur quelque texte précis, ainfi qu'on le voit dans
Surdus, décif. 271 ,n. 9. Non dicitur hypotheca niJi in cafibus
à jure expreffis. Dupleffis en fes Confultations, tom. l , pag.
627 , n'eH pas moins exprès fur ce point. Une maxime bien
certaine (dit-il) eft que l'hypotheque léf§ale ou tacite n'a jamais lieu, s'il n'y a une loi expreffe qui l'ordonne, & .fi ellel'a accordée contre les lUterlrS, les maris, les Adminijtrateurs'
des Communautés, ce n'eft que parce qu'elle le a regardés.'
comme des AdminijtrateuTs néceffaires & forcés.
Sans contredit les Seque'fires judiciaires qui ne forrt pas'
moins AdminiHrateurs forcés, font de ce nombre; & quand
la lufiice aura mis queJ~u'un en poffeffion d'un immeuble
(lU autre effet quelconque pour le gérer, l'adminifirer ou le
garder, nul doute qu'elle ne puiffe le 'lui. redemander avec;
Z z z..
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RNA L
toutes les fû.retés poffibles. Mais dans le cas préfent, & relativement au dépôt reçu par Me. Verdilhon bien volontairement dans fa propre maifon, & fous feing privé, il n'efl:
pas poHible de l'en regarder corn me Sequef!:re ou dépolitaire de Juf!:ice. Ce n'ef!: pas que les hoirs Olive, en remettant les 6000 liv. à Me. Verdilhon, ne puffent l'en ren·
dre dépolitaire judiciaire, &. acquérir dès-lors unehypotheque fur fes biens, s'il avait voulu s'en charger; mais alors
il fallait lui faire lignifier la Sentence, & l'alIigner au premier jour d'Audience, pour venir recevoir la fomme , & voir
dire qu'il en demeurerait chargé, ou pardevant le Greffier,
pour venir la recevoir, & s'en charger fur le regif!:re des
cautionne mens ou des conlignations; alors il feroit vrai de
dire qu'il aurait reçu cette fomme en vertu du contrat ou
quali contrat qu'il aurait paffé avec la J uf!:ice.
Par Arrêt du 9 Juillet 1779, au rapport de Mr. le Confeiller de la Boulie, la Sentence fut· confirmée avec clépens
& contrainte par corps; écrivant Mes. Serraire & Deforgues.
=~=~=========ARR Ê T
X X X X V.
Le créancier a une aaion direae contre le débiteur de [on
débiteur, qui a àccepté la délégation & a promis de
payer.
n
N l'ànnée 1769, Claude Dofoul, du lieu de Braux;
~ vendit à Pierre Dofoul, du lieu de Saint-Benoît, une
paire bœuf; l'acheteur r~f!:a devoir' 69 liv. du prix. Il les
revendit à Etienne Clinchard, & le chargea verbalement
d'acquitter les 69 liv. à Claude Dofon!. Celui - ci n'étant
pas payé, fit affigner Clinchard en condamnation de cette
fomme.
Clinchard foutint qu'il n'avait point traité avec Claude.
Dofoul, & que fan aaion devait être dirigée contre Pierre
Dofoul, fan véritable débiteur. Sur cette réponfe , Claude,
�DU
PAL AIS
D E
PR.O VEN C E.
36)
Doroul offrit de vérifier qu'au mois d'Oétobre 1769, Etienne
Clinchard le chargea de lui payer cette fomme à l'acquit.&
décharge de Pierre Dofoul. Le Juge, par fa Sentence du
2.) Février 1774 ~ chargea Claude Dofoul d'appeller au procès
la veuve de Pierre Dofoul pour être ouie, & le condamna
aux dépens de cet incident.
Claude Dofoul appella de cette Sentence au Lieutenant
de Cafl:ellane; & par autre Sentence du 30 Mai fuivant, la
preuve offerte par Claude Dofoul pardevanr le premier Juge,
fut adoptée: Clinchard en appella pardevant la Cour.
On difoit pour lui que la délégation efl: une efpece de
ceffion, par laquelle un débiteur fubll:itue fan débiteur en
fa place; au moyen de quoi, ce débiteur délégué promet.
payer la dette au créancier de fan créancier.
Pour qu'une délégation [oit valable ( dit Ferriere dans fan
Diétionnaire de Droit, vo. Délégation) il faut que trois per[onnes y donnent leur confentement; [avoir, le débiteur qui
délegue , [on débiteur qui efl délégué, & le créancier du débiteur qui délegue.
Il n'y a donc point de délégation, s'il n'intervient quelque. f1:ipulation entre le créancier originaire & le nouveau
débiteur. Faber, dans fan Code, tit. de local. déf. 28, n. 6,
l'établit ainfi, d'après la Loi 1 l , ff. de noval. & delegat.
Si un débiteur charge fon débiteur de payer fon créill1cier, & que ce créancier ne foit ni préfenr, ni f1:ipulant ,
il n'y aura donc point de délégation; s'il n'y a point de
délégation, il n'y a point de changement de débiteur; &
s'il n'y a point de changement de débiteur, l'aétion du
créancier doit être dirigée, non contre le débiteur de fOll
débiteur, mais uniquement contre fon vrai débiteur.
L'indication qu'un débiteur fait à fan débiteur, de payer
à fan créancier ce qu'il lui doit, ne formant pas une délégation, ne fauroit autorifer une aétion du créancier contre
le débiteur indiqué. L'indication peut être révoquée dans
l'iritervalle de la convention à la demande; le débiteur originaire peut recevoir [on paiement; le débiteur indiqué peut
fe libérer valablement, [ans crainte. de recherche de la part
�366
.
Jou R N À L
du créancier, puifqu'il n'a confenti aucun engagement à fon
égard.
,
Le défaut de préfence de Claude Dofaul, fon défaut de
fl:ipulation, forme un obfiacle à ce qu'il ait acquis une action direéte contre Clinchard, & à ce que Clinchard puilfe
le reconnoître pour fo[,1 unique créatl'cier.
On ajoutoit pour CI inchard ,que la preuve offerte ne
fauroit motiver la réclamarion de Claude Dofoul, parce
qu'il aurait fallu difcuter préalablement Pierre Dofoul; les
Loix 16, §. ulr. jJ. de fidejuffor. , & 116, jf. de verb. obligat.,
décident précifément. qu'il ne cqmpete ·au créan'cier qu'une
aB:ion fubfidiaire, qui ne peur être exercée qu'après la difEuffion. des biens du débiteur originaire; ità fentiunt. Le
'Pré{jdent Faber', dans fan Code de conflit. pecWl. déf. 1;
Charondas en fes Réponfes, liv. 42, ch. 1°4; Duperier,
tom. 2, liv. 4, n. 2,87'
On répondoit pour Honoré Grac, héritier de Claùde Do- .
f'Ou!, que pour- jùfl:ifier fon aél:ion, on n'aVoit pas befoin de
prouver les conventions intervenues entre Clinchard & P·ierre
Dofoul; qu'il fuffifoit de confia ter celles qui étaient intervenues entre le créancier originaire & Clin.chard, & que
lorfqu'un fecond débiteur s'dl: fubrogé volontairement à la
place dl! premier, 'en promettant de p·ayer pour .lui, on n'eIl:
pas oblIgé de difcuter ce premier débiteur, fuivant la Doctrine de Cancerius, rapportée par Duperier, tom. 2, liv. 4,
. n. 287; celle de Julien en fes Colleétions manufcrites, vu.
FidejujJio, pag. 8, litt. P; de BuiiI'on, au titre de conflit.
pecan., n. 1 ; deMornac., fur la Loi premiere de la même
Rubrique, & fuivant l'Arrêt du 24 ;Février 1767, rendu
au rappeh de M. de Mirabeau, e~ faveur ,de Louis Banon,
Ménager di:! lieu de Valenfolles..
Si on peut attaquer fans difcuffioll préalable du premier
débireur celui qui a promis de payer, fans avoir aucun intéret à la chofe, & uniquement pour rendre fervice ,. l'on eIl:
bien plus fondé d~en ag·ir ·de même vis-à~vis de celui, qui
comme Clinchard·, ne s'oblige à payer qu'à raifon·& à-con· .
currence' de ce qu'il doit du prix d'une marcl,i.!lhdife qu'il 3>
•
,
�DU PALAIS
DE
PROVENCE.
367
en fan pouvoir, & qui ne lui a été livrée que fous la promeffe d'acquitter une dette de fan vendeur; dette qui procédait de la même caufe. Il finjffoit par obferver q e fi
quelqu'un pouvait être tenu d'appeller li! veuve de Pierre D o[oui au procès, ce devait être Clinchard , pour faire dire
que moyennant le paiement fait ou 'à faire à Claude Do[ouI, il ferait valablement déchargé, s'il avait à craindre
quelque recherche de la part de cette veuye.
Par Arrêt du 9 Juillet 1779, au rapport de M. le Confeiller du Perier, la Sentence d'u Lieutenant fllt confirmée
avec dépens; écrivant Mes. Sauvaire.& .
ARRÊT
XXXXVI.
L'héritier par inventaire efl obligé. d'appeller dans l'inflance
tous les créanciers connus & les légataires.
L
E 3 Février 17 21 , Mre. Jofeph de Simiane fait fan
tenament. Il legue aux pauvres nécelIiteux du lieu de
Simiane, une penfion annuelle & perpétuelle de la fomme
de 100 liv., qui fera remife aux Reél:eurs de l'Œuvre par
Mre. Claude-Français-Leon de. Simiane, fan fils & fon
héritier; après fa mort, le fieurMarquis de Simiane prit des
lettres de bénéfice d'inventaire, & appella quelqnes créan•
.ciers. Il intervint une Sentence de rangement.
Le 7 Septembre 1741, Me. Garnier, fan Procureur fondé,
paya le droit d'inli.nuation du legs fait à l'Œuvre des pauvres
nécelIiteux.
Le 2) Juillet 177), l'Œuvre fe pourvut pardevant le Lieu"::tenant de la ville d'Aix, contre Mre.· de Simiane, en condamnation des arrérages du legs.
L'affaire fut compromife à des Arbitres, qui par leur
Sentence dU"1.i2 Août 1778, adjugerent à l'Œuvre le legs,
Jes arrérages & les intérêts tels que de droit•
. Le Marquis de Simiane ~ppell)l de ce'tte Sentence parde.
�DU PALAIS
DE
PROVENCE.
367
en fan pouvoir, & qui ne lui a été livrée que fous la promeffe d'acquitter une dette de fan vendeur; dette qui procédait de la même caufe. Il finjffoit par obferver q e fi
quelqu'un pouvait être tenu d'appeller li! veuve de Pierre D o[oui au procès, ce devait être Clinchard , pour faire dire
que moyennant le paiement fait ou 'à faire à Claude Do[ouI, il ferait valablement déchargé, s'il avait à craindre
quelque recherche de la part de cette veuye.
Par Arrêt du 9 Juillet 1779, au rapport de M. le Confeiller du Perier, la Sentence d'u Lieutenant fllt confirmée
avec dépens; écrivant Mes. Sauvaire.& .
ARRÊT
XXXXVI.
L'héritier par inventaire efl obligé. d'appeller dans l'inflance
tous les créanciers connus & les légataires.
L
E 3 Février 17 21 , Mre. Jofeph de Simiane fait fan
tenament. Il legue aux pauvres nécelIiteux du lieu de
Simiane, une penfion annuelle & perpétuelle de la fomme
de 100 liv., qui fera remife aux Reél:eurs de l'Œuvre par
Mre. Claude-Français-Leon de. Simiane, fan fils & fon
héritier; après fa mort, le fieurMarquis de Simiane prit des
lettres de bénéfice d'inventaire, & appella quelqnes créan•
.ciers. Il intervint une Sentence de rangement.
Le 7 Septembre 1741, Me. Garnier, fan Procureur fondé,
paya le droit d'inli.nuation du legs fait à l'Œuvre des pauvres
nécelIiteux.
Le 2) Juillet 177), l'Œuvre fe pourvut pardevant le Lieu"::tenant de la ville d'Aix, contre Mre.· de Simiane, en condamnation des arrérages du legs.
L'affaire fut compromife à des Arbitres, qui par leur
Sentence dU"1.i2 Août 1778, adjugerent à l'Œuvre le legs,
Jes arrérages & les intérêts tels que de droit•
. Le Marquis de Simiane ~ppell)l de ce'tte Sentence parde.
�368"
Jou RNA J,
vant la Cour, & oppofa que Mre. de Simiane km perl:
n'avait laiIfé aucun bien pour payer, ni fes créanciers, ni
fes légataires, qu'il avait été obligé de payer 80000 I.
de dettes fur les biens qui lui étoient acquis par ux différentes fuhf\:itutions; qu'il avait pris l'héritage de fan pere
par bénéfice d'inventaire; qu'il' avait fait affigner tous les
créanciers à titre onéreux, & qu'attendu l'lnfuflifance de
}'hoirie, il avait cm pouvoir fe difpenfer de faire affigner
les légataires; qu'ayant oppofé aux créanciers, pardevant le
Parlement de Grenoble, les différens fidéicommis ouverts
en fa faveur, un -Arrêt ·avoit furus aux pourfuites des créan. ciers pour u~ années, en payant annuellement par l'héritier,
les intérêts des fommes principales; que par là il étoit juil:ifié
que l'héritier payoit les dettes fur fes biens propres, & que
fan pere n'avoit fait que des legs de pure ofl:entation. Dèslors. il était inutile d'affigner vingt-deux ou vingt-trois légataires infruélueux :' auffi les légataires fe difpenferent, d'un
. corn ml1l1 accord, d'intervenir dans l'infl:anc·e.
Ce n'eH que 47 ans après la mort de Mre. de Simiane
pere, & en 177'>, que la Communauté de Simiane, prenant le n?m des Reéleurs de l'Œuvre de la Miféricorde, demande les arrérages du legs.
1
La Loi Sed cùm teflator, Cod. ad Leg. falcid. n'efl: pas
exécutée en Provence dans taures fes difpoulions ; on n'appelle plus les trois témoins pour chaque légataire abfenr,
(lU qui n'intervient pas
à la confeélion de l'inventaire; on
n'a.ppelle plus également nominatim tous les légataires, & il
fufl-it d'a.lIigner lés principaux créanciers ou' les principaux
légataires; fauf aux autres d'intervenir: encore doit-on ne
pas les appelkr, lorfque leur degré dl: évidemment infrucltueux.
Le Préfident Faber fe faif.1nt ce~te quel1:ion ,. quando I!O-Leat inveiltarium etiam in prœjudicium eorum qui non filnt nomi,'latim, il répond avec jufl:ice & équité: illud quoque
obfervandum eil' non effe ci'tandum eum' qui, Ji adeffee, coneradicere noiz .poffée; numquam enim a'udièndus' eit qui nihil
aliud allegat niji qu.od non fuerit citatlls, Ji nihil aliud adferat ,.
�,
DU
PALA1'S
DE
PR,OVllNCE.
369
ferat, ad rem pertinens quod dixifJèt, fi fuifJet cÏtatus. La rai.
Ion nous en eil: donnée par la loi elle - même: tanquam
cujus nihil interfit. Nemo enim five agendo, jive excipiendo
audiendus efl fine intereffè.
'Il a été mille fois reconnu que la formalité d'affigner tous
les créanciers ou tous les légataires, étoit une de ces formalités réellement préjudiciables à l'héritier bénéficiaire; elle
tend à groffir les frais, fans profit pour les créanciers ou
légataires, qui peuvent pendant trente ans intervenir & former leur aél:ion.
Si Mre. de Simiane a vendu des biens fans encheres, il
a pu le faire, puifqu'il vendoit' fes biens propres pour payer
les dettes de fon pere ;' il a rapporté à cet égard les droits
des créanciers payés; il peut oppofer ces mêmes droits aux
légataires; le défaut de publication des fubfiitutions n'operè
rien en faveur de l'Œuvre; les légataires ne peuvent en retirer aucun profit. D'ailleurs la' demande n'ayant été formée
que quarante-Jept ans après 1'1 mort du te1tateur, l'aél:ioll
eH: p,refcrite; la prefcription ,n'a pu être interrompue par,le
paiement du droit d'infinuation du legs. Ce paiement forcé,
& fait à la requête du traitant, ne peut être regardé comme
un aél:e d'héritier vis-à-vis les légaFaires ; d'ailleurs le droit
a été payé en 1741 , la demande n'?- été formée qu'en 177'5:
trente-quatre ans féparent ces deux aél:es.
(
L'héritier conven oit qu'on ne prefcrit contre l'Eglife que
par quarante ans, & que les Auteurs accordent le mêmè
jJrivilege aux Hôpitaux; mais l'Œuvre de la Miféricorde de
Simiane n'eH: pas un Hôpital, & ne peut être confidérée.
,. çomme un Corps ~ccléfiail:ique, pujfqu',elle. ,eil: rep'réfentée
'par l~s fe~ls Confuls, & qu'elle n'a ni Lettres-pateHtes, ni
Statuts, ni Réglemens, ni autoriration, ni ,état légal,; elle
iéfide dans le Corps de !a Communauté.., qui eH un Corps
purement laïque, contre lequel court la p~efcription de trente'
ans. ·Fromental, au mot.Eglijè, pag. '2.69, dit q,u~ les Hô-,
pitaux & autres lieux pieux joui-!fent .des privileges accot;désà l'Eglife, mais il les .refufe aux .Confrairies qloll dememèn t
dans le droit commun, ideTJ fentiunt j Mayn~rd , liv. '5 , ch
.
Aaa
•
�370
Jou
RNA. L
4'1 ; Schiridion, pag. '160, n. Ill; & cette dif!:inéHon eR
autorifée par l'Edit du mois d'Août 1749.
'..
Le Marquis de Simiane convenoit qu'un legs annuel &
perpétuel ne peut pas p.refcrire " quand le titre a été reconnu & exécuté; mais [uivant lui., un titre infruél:,ueux eft
un t4rre nul, qui ne peut produire aucun effet•.
.I1 ajoutoit que le bénéfice d'invemaire peut être oppofé
par l'héritie·r à touS les prétendans-droits dans la fuccellion,
, quoique non appellés, parce que la qualité d'héritier bénéficiaire ef!: ineffa~able fur fa tête; il n'y a que l'inventaire
lui"(même qui ne peut leur être oppofé , parce qu'ayant été
fait hors de leur préfence -, ils ont le droit de le' contredï're.
.
.. 'Le Marquis de Simi·ane conclut à la réformation. de la
Sentence, & au déboutement de la· dem'ande libellée des
Rtiél:elJrs de l'Œovre de la Miféricorde, tant par fins de
n'ori-rècevoir qu'autrement; fauf à eux d'agir dans le bénéfice d'inventaire l' airifi qu'ils aviferoient;, & à lui,
en 'jfa qualité d'héritier bénéficiaire, fes exceptions & défenfes.
Les Reél:eurs de' l'Œuvre foutenoient au contraire que le
Marquis de· S'imiane av~it agi -comme héritier pur & !impIe';' qu'en " cette qualité,t it avoit vendu plufieurs effets
confidérables dépendans 8e la fuccellion de [on pere, &
payé.le droit d'infinuàtloll.dU-legs.·
C
Suivant eux." I~héritier bénéficiaire eft obligé d'appeller
t-ous les créanciers, légataires & prétendans-droits à la fuccellion, certainslr &. éonnus;I c'ef!: un principe attef!:é par la
Loi Sed cùm tefl~tor j par Mornac, fur le titre de jure ddiberandi; par' Julien en [es. Notes manufcrites, va. Hœres,
§':4; par Serres j en fes rnfiitution~ au DrOIt Fran~ais , pag.
314; par- Bretonnier fur Hen rys , liv. 6, ch. 4, quo I I ; &
par l'Aél:e de Notoriété de Mrs. les Gens d\! Roi, du 16
Mai 1~91,. au .Recueil- im'primé , p'ag.' 89; autrement il-eft
déclaré hériJ:Î~r' pur & fimple 1 vis-à- is cJux' qui he font
point appc:llés. ( Faber , Tur re tit~e 'du Code de jure detiber..andi.; Deco'rmis.,- tom. 2,', col. 1438.)
�,
DU
PALA 1S
DE'P R 0 V E·NCE.
37f
L'héritier qui prend une fucceffion par inventaire, déclare
ne vouloir point faire fa caufe propre de celle de celui -auquel
il fuccede; il ouvre une inHance générale; il dépofe, pour
ainli dire, les biens de la fucceffion entre les mains de la Loi ~
dès-lors il ne figure plus lui-même que comme créancier, s'il
a. des· droits perfonnels à réclame,r. Les autres créanciers
ont un droit égal à lui. Ils ont l'intérêt le plus preffant à
affiHer à l'inventaire; ils doivent donc y être' appellés : ils
le doivent avec d'autant plus de raifon, que s'il étoit per- .
mis à l'héritier de n'appeller. que quelques-uns des créanciers, il pourroit ne choilir que les premiers tn hypot~e
que, qui feroient d'autant plus négligens à veiller à ce que
l'inventaire fût exaét, qu'ils feroient affurés de leur paiemenr.
En vain Mre. de Simiane oppofe l'infuffifance notoire de'
l'hoirie de fon pere, & que les dettes de ce derni~r ont 'été
payées fur les biens propres à l'héritier. Son allégation ne
fuffit pas; il falloit le prouver par l'épurement- du bénéJice
d'inventaire; il falloit appeller lll.s légataires.pour les en convaincre; par cela feul qu'ils n'ont point été appellês, l'inventaire ell: de nul effet à leur égard. M. dé Simiane doit
donc être conlidéré, vis-à-vis l'Œuvre, comme héritier pur
& limple, fans pouvoir invoquer l'Arrêt de confenfiz du Par-,
lement de Grenoble. Cet Arrêt prouveroit le contraire. M:
de Simiane y conrent de payer les créanciers fur fes propres,
biens; il reconnoÎt par là que l'hoirie paternelle n'ell: pas
infuffifante. Les créanciers y confentel1t à la perte de quel/ques annuités d'intérêt; mais ce conrentement d'oir être regardé comme un facrifice fait au defir de la p.aix, & non.
co'mme un rerranchement nécdfaire,· M. de Simiane y pro"":
telle de tous fes droirs, contre les héritiers de (vn pere"
mais fa protef!:arion ne peut lui être d'aucun fecours. D'abord elle ell: contraire à l'aéte d'héritier qu'il fait. 'Sa conduite poll:érieure prouve en(uite qu'elle ne regarde poin·t.
l'Œuvre, puifque quelques années après il p.aya le droit.
d'infinuation du legs.
. D'ailleurs (continuoi€l1t les Reéte\.l<rs) il ell: de maxime
q,ue l'héritier fidéicommiffaire ne peut fuire valoir la [ubHi~
 a.a 2..
,
�37~
.
Jou R'
(
N A L
tunon contre l'héritier grevé, fes héritiers ou les' tiers pof.
feffeurs des biens fubfiitués, qu'après avoir fait ouvrir la
fubfiitution, & après que les parcelles de compofition &
de détraél:ion ont été refpeél:ivement données & jugées. Suivant Ricard, Traité des Subfiiturions, part. 2, chap. 16,
n. 1 SS, il n'a que l'aél:ion ordinaire en délivrance; & Boniface, tom. 2, part. 2; ,'liv. 2, tit. 2, chap. 14, rapporte
un Arrêt du 23 Mars 1613, & un autre du dernier Mars
166 l qui l'ont jugé de même.
,
Ici M. de Simiane n'a point donné la parcelle de compo!ition ; il n~a ni fa.i~ épurer le fidéicommis, ni fait liquider
fes droits; il ne peut donc pas fe prévaloir contre l'Œuvre de fa qualité d'héritier fubfiirué à fan aïeul.
Enfin les aél:es d'héritier pur & !impie que le Marquis de
Simiane a fait, forment un nouvel obfiacle à ce qu'il puiffe
fe prévaloir encore de fa qualité d'héritier bénéficiaire.
L'héritier bénéficiaire ne peur faire aucune, vente fans la
participation des créanciers, & .fans l'avoir faite précéder
de la formalité àes encheres; c'ell: la difpo!ition expreffe du
foixante-quatrieme Aél:e de Notoriété, délivré le 14 Février
16 9 2 •
. Les Reél:eurs foorinrent enfuite qu'il ne pouvait y avoir
lieu à la prefcription, s'agiffant d'une prefiation annuelle'
qui n'a point de fort principal. Les maximes fur ce point
font invariables; la Loi Cùm notiJ!imi, §., ult., Cod. de
Prœ(cript. 30 veZ 40 ann., efl précife. ln his etiam promiffionibus vei Iegatis, vei aliis obligationibus quœ dationem per
fingulos annos veZ men{es, aut aliquod fingulare témpus continent tempora memoratarum prœfcriptionum, non ab exordio
talis obligationis, {ed ab initio cujufcumque anni vel menfis,
vel alterius fingularis, temporis computari manifeflum eft.
La Loi Sancimus 46, §. fi vero, Cod. de Epifcopis & Clerjcis, établit la même imprefcriptibilité à l'égard des penfions annuelles données ou léguées à l'Eglilè. Duperier,
tom. 1, liv. 1, quefi. 12 & 17, attefie la même maxime. '
On ne peut pas dire que le teibnient de Mre. de SinÎlane
efi prefcrit; fan fils a aliéné une partie con:idétable de fes
�.
D U
PAL AIS
D E
PRO VEN C E.
37~
biens. En quelle qualité a-t-il fait ces aliénations? Ce n'eft
point en qualité d'héritier bénéficiaire, puifqu'il les a faires
fans l'intervention des créanciers, fans l'autoriré du Juge, &
fans la formalité des encheres; ce n'ell: point comme héritier fubfl:itué, puifqu'il n'a point fait épurer le' fidéicommis.
Le paiement du droit d'inGnuation du legs efl: une déclaration expreife de l'intention où écoit le Marquis de Simiane de payer ce legs: car s'il n'avoit pas eu cerre intention, le droit n'auroit pas été dû; ce paiement n'efl: même
qu'une. avance que l'héritier fait en faveur des légataires;
on peut le confidérer comme le paiement d'une partie du
legs; & il n'efl: pas poffible de ne pas voir, dans femblable
paiement, une exécution bien décidée du teilament : aillfi"
point! de prefcription, en [uppofant que" la dette fût prefcriptible. M. de Simiane meurt en 1728 j en 1741, l'héritter paie le droit d'inIinuation du legs; en 1764, l'Hôpital de Rians forme demande de la moitié le concernant
du legs.
Il efl: certain que s'il y a plufieurs débiteurs, la reconnoiifance d'un [eul interrompt la prefcription pour cous;
elle dl: également interrompue par la demande d'un feui
créancier, s'il y en a plufieurs: ainIi la demande de l'Hôpital de Rians, créancier par un feul & même aéle, a in.cerrompu la prefcription au profit de l'Hôpital de Simiane•
. La caufe pie laïque ne connoît, comme les Œuvres eccléfiafl:iques, comme l'Eglife même, d'autre prefcription que
celle de 40 ans; le défaut de Lettres-patentes n'efl: point
une incapacité, parce que ce qui ef!: une fois deftiné à une
Œuvre pie par la volonté du teGateur, ne peut en être diverti, lors même que la deftination" précife qu'il en a indiquée ne peut s'accomplir; ainli le legs fait à telle Œuvre ,
fe dirige vers telle autre, fi celle qui eft indiquée ne peut
pas en profiter.
Il ef!: incontefl:able qu'un legs, une fois def!:iné à une
Œuvre pie, ne peut plus changer de deftination; fi l'Œuvre
eft incapable, l'héritier ne gagne rien, il faut qu'il faiTe la
.pention à une Œuvre capable. Le Marquis de ,Simiane ne
�374
Jou RNA L
pouvait donc exciper de cette incapacité, avec d'autant
plus de raifon, que l'Œuvre de Simiane & celle de Rians
font deux légaraires joints re & verbis; & par cette feule
raifon, la portion de l'un accroîtrait à l'autre, en cas d'in.'
.
capacité. (In{lit. lib. 2, tit. 20, tom. 8.)
Enfin le Marquis de Simiane efi tout à la fois non-recevable & mal fondé à contefier Il cette Œuvre la capaèité de
recevoir. Elle exiHe depuis très-long-temps; les titres qu'elle
a communiqué au procès ne fixent pas fan origine, maill
ils indiquent fan exifience dans des temps reculés, puifqu'il y en a un qui ,remonte, au 17 Février 1677; fa pof[ellion doit lui fervir de titre.
,Par Arrêt du la Juillet 1779, au rapport de Mr. le Con[eiller de Fonfcolombe, la Sentence arbitrale fut confirmée
avec dépens; écrivant Mes. Verdet & Bertet.
)
===~=====~======:AR RÊ T
XXXXVII.
011 pellt deman.der la licitation d'un effet qui eft commzln à
plufieurs, lorfqu'il y a impoffibilité ou incommodité fuffi[ante dans le partag~, ou dans la pojJeffion en commun.
L
Es cinq freres Gillete, de la ville de Graffe, poffédoient un moulin par portions égales. Trois de ces freres
vendirent leur portion à Claude-Henri Courmes, Négociant;
les deux autres vendirent la leur à Jean - Jofeph Courmes;.
Bourgeois de la même Ville.
Claude-Henri Courmes fe pourvut contre fan frere pardevant le Lieutenant au Siege de Graffe, en licitation du
moulin. Cette demande fut compromife à des Arbitres; ils
rendirent leur Sentence le 4 Avril 1779; ils firent droit à
la demande de Claude-Henri Courmes, avec dépens ~ Jean-·
Jofeph CourIT)cs. en app,ella pardevant la Cour.
Il foutint que les Arbitres avaient fait, de la licitation ,.
une Loi particuliere 1 indépendante & fotcée,. qu~iqu'elle:
1
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
37').
ne foit que relative, inhérente & accelfoire aux Loix qUI
difpofent fur la né effité de partager ce que plufieurs polfedent ut finguli & par indivis, en force d'un titre commun.
Le partage par licitation ne peut avoir lieu que lorfque
la propriété dérive d'un même titre, c'eft -à· dire, d'une
hérédité ou d'ulle donation, d'une fociété ou d'un achat fait
par tous les intérelfés en communion & par indivis, dans
l'objet d'en jouir focialement ; c'en: ce qui eft établi par les
Loix du Digefte & du Code, qui font fouli les titres famil.
t;rcifcund., commun. dillid., & pro facio.
Le moulin dont s'agit n'étoit point obvenu aux freres
Courmes d'une fociété proprement dite; ils vivoient féparement entr'eux ; l'acquifition n'en avoit pas été faite ~e leurs
deniers communs, il n'y avoit par, conféquent pas lieu au
panage, ni à la licitation.
Il n'avoit pas non plus recueilli ce moulin par donation, ni
fucceffion; fon frere n'a donc pu fonder fa demande en par, partage par licitation fur l'hypothefe de ces d.eux premiers
"cas, qui, par la Loi des douze Tables, font les [euls qui en
donnent l'aaion entre cohéritiers ou alfociés; il n'a pu la
calquer que fur la communion préfumée de l'achat du moulin, dont il jouit par indivis avec fon' frere; troifieme cas
dont on doit l'excenfion à la Loi 1.2, if. communi dividundo.
A ce dernier titre, il ne peut pas demander la licitation,
parce qu'il n'avoi.t pas acheté conjointement avec fon frere
par ûn feul & même aac; il avoit même acquis ce qu'il
polfédoit par deux aaes féparés, & n'avoit jamais voulu
réunir la portion de fon frere à la fienne.
Leur communion d'intérêt, dans la jouiJrance par indivis
de cin'q portions divifées réellement en propriété, n'eft donc
pas de ·la même nature que celle que la Loi affimile à la
[ociété & à la cohérédité , pour donner ouverture à l'aaion_
én partage, même par licitation accelfoire, velu ri inter eos
qui pariter eamdem.rem emerunt.
. L'achat n'eft jamais préfumé fait ratione focietntis , lorfqu'il n~e!l: pas fait pariter & fimul; un achat d,jftinél: & féparé des autres., & qui en differe & par la quantité & pa~
�376
Jou RNA L
le prix, n'ell: pas un achat conjoint & commun qui puilI"e
établir ou faire préfumer la fociété.
L'aél:ion en licitation étoit ouverte aux cinq freres Gillete,
qui recueillirent le moulin en commun & par droit de fucceffion paternelle, mais elle el!: fermée aux freres Courmes;
il ne peut y avoir fieu à licitation, là où il ne peut y avoir
lieu à partage. Tel el!: le vœu des Loix, des Doél:rines &
des Arrêts; Domat, Guyot, Ferriere, Pothier, Argout fe
réuni{rent avec Defpeiifes, part. l, tit. 3 , fea. 4; & tous
les autres Auteurs qui ont écrit fur cette matiere, atteHent
que la licitation n'el!: qu'une faculté acceifoire du partage,
une des formes qui lui font affeél:ées; qu'elle ne peut avoi~
lieu qu'en cas de divifion impoffible, incommode ou préjudiciable aux co-parcageans, & qu'autant qu'il ne l~r plaît
pas de maintenir l'indivis.
L'aél:ion qu'elie produit ne corn porte qu'aux propriétaires
qui ont acquis par un titre COJl1mUn, tels que cohéritiers,
co-fégataires, co-donataires, co-aifociés & co-acquéreurs.
Les freres Gi1lete qui pouvoient partager & licirer, ne
l'ont pas voulu; ils ont préféré la divifion fonciere en portions égales aux poifeffions par indivis : ils n'ont point cédé
leur aél:ion à leurs acquéreurs; ils les ont au contraire aifervis
aux dépens de leur intérêt propre, -& par une divifion des
ponions transférées en divers temps, & fous des prix différens, à fuivre l'exemple de la plupart des co-propriétaires
des moulins de Graife, & de ceux du rel!:e de la Province.
Jean-Jofeph Courmes a fait plus qu'il ne devoit ; il a of.
fert, par fon expédient, de vendre à fon frere les deux cinquiemes de fon acquiution, fi mieux il n'aimoit lui rétrocéder les trois cinquiemes qu'il avait préalablem,ent acquis
au prix refpeél:if de leurs aél:es d'achats, en y comprenant
les frais & les lods dus à raifon du tranfpon.
L'Arrêt du mois d'Oél:obre 163'; , rapporté par Duperier,
& que fan frere cite comme un- nouveau titre favorable au
fyHême de la licitation, n'dl: propre qu'à faire fentir la juftice de l'offre furabondante de vendre ou d'acheter.
- .
Claude-Henri Courmes a acquis fciemment & volontairement
•
�DU PAL AIS
D:El
PRO V:El Ne!:.
377
rement trois portions difiinél:es &. réparées des cinq, dont
érait formée la communion du moulin , entr~ les freres Gille te ; Jean-Jo[eph Courmes a acquis pofiérieurement & [éparement les deux autres portions également expreffives de
dil'ifion fonciere & préexifiante, ce qui réduit la communion entr'eux à une jouilTance par indivis & à portions inégales re[peél:ivement à leurs intérêts; ce n'a donc été que
par déférence, & nullement par obligation, qU'li lui a 0(fert de lui vendre [es deux portions, ou d'acheter les trois
autres.
Claude-Henri Courmes oppo[a que tous ceux qui jouilTent
en commun de quelque immeuble, peuvent exercer l'aél:ion
de partage & de divifion; que c'eH-là le remede que la Loi
leur donne pour rorilpre la Communauté [ubiifiante; _ce re~
mede ne tend qu'à réintégrer chacun des Communif!es dans
le' droit de difpo[er à [on gré de la portion qu'il a dans
fimmeuble qui étoit refié indivis, & à le faire jouir de cette
liberté primitive que la communion avoit détruite.
De ce premier principe en découle un [econd. Les LégifIateurs ont reconnu que le moyen qu'ils avaient introduit
pour faciliter la dilTolurion de la communion, pouvoit éprouver des difficultés dans [on exécution, fait d'après la nature même de l'immeuble, q'li étant indivifible, ne peut
pas être commodément partagé, [oit d'après cette confidération majeure, qu'en divi[ant [eaione corporum, chaque
portion diminuoit de valeur, & chaque co-part~eant fouEfroit dès-lors un préjudice réel. Pour prévenir ces inconvéniens, on a introduit la licitation, qui n'efi qu'un mode de
partage. La Loi ') 'i, if. famil. erci[. a été la premiere à
adopter exprelTément ce moyen, que la Loi des douze Tables avoit déja indiqué.
11 eH vrai que la premiere de ces Loix [embfe d-emander.
une impoffibilité prefque phyfique, pour en venir à la licitation. Mais comme l'a remarqué GuYOt, pag. ') de fanTraité des Fiefs, les Doél:eurs ont manifefié le fens de
cette Loi, & ont remarqué que cette im poffibilité n'étoit
autre cho[e que la perte & l'incommodité que l'un des ComBbb
�378
#
1
0 U Il N Â
L
.
munilles pouvoit fou/frir dans la divilion ordin~ire, ils fe
font même fondés fur la Loi l , Cod. commun. divid. , qui
eft plus précife & plus formelle. Ils en ont conclu que
pour légitimer la demande en licitation, il n'étoit befoin
que de confulter l'intérêt des co-propriétaires. Ils ont été
- enfuite plus loin; & toujours appuyés fur divers Textes du
Droit, ils fe font réunis à décider que pour accueillir une
pareille demande, il ne falloit pas qu'elle fût formée par
tous les Communill:es : qu'un feul pouvoit la provoquer; &
que dès le moment qu'il paroiffoit que l'immeuble à partager étoit indivifible, la licitation en devenoit forcée, foit
que la communion eût exifté per tempus immemoriale, foit
qu'elle eût été établie par un pa~e exprès.
GuYOt établit, comme une maxime générale & conllante,
que pour en venir à la licitation, il fuffit que la chofe ne
fe puiife pas partager commodément; qu'il ne faut pas y
chercher l'impoffibilité; mais que la, feule incommodité, le
feul inconvénienr, le moindre préjudice· fuffit : fa décifion
n'eft que la conféquence d'une infinité de DoB:rines qu'il
rappelle.
Serres & Ferrieres, dans leurs Infl:it., reconnoiifent le
même principe. Dargou, à la pag. 'lIS de fes Inftitutions.
au Droit Français, en reconnoÎt également la juftice; Pothier, après avoir décidé à la pag. 33 du tom. 2. de fon
Traité des Contrats de vent~ ,qù'un des. Communill:es peut
toujours obliger les autres à liciter l'inimeuble indivis, à
confenrir ainfi, que la totalité en foit· adjugée à celui d'en- '
tr'eux qui la portera au plus haut prix, regarde ce droit
donné à un des co-propriétaires, comme inféparable du
titre même de la communion.
Nos Auteurs Provençaux ont également adopté cette ma·
xime. M. de Saint-Jean, décif. 30, la regarde comme une
vérité incontefl:able. Buiffon, au tit. 31 du liv. 3 de fon
Code, en établit la certitude fur plufieurs Loix; jl obferve que. c'ell:-Ià une hypothefe dans laquelle, contre la
regle ordinaire, on eft forcé de vendre.
Enfin Decormis, tom. 1, col. 9°9, & Duperier dans
�DU
PAL AIS
D E
P'R 0 VEN C E.
379
fes Notes manufcrites, après avoit obfervé que la communion entraîne toujours des contefiations avec elle, décident
tout à la fois, & que le paél:e de ne partager jamais la
chofe commune, .ne peut 'étre entretenu, & que fi l'effet
poffédé en commun dl: indiviiible , il faut venir à la licitation.
Les inconvéniens que la Loi a voulu prévenir, en intro~
duifant la licitation, pouvant fe rencontrer également entre
des cohéritiers & entre de iimples co-propriétaires, le remede doit donc être le même pour les uns & pour les autres, fuivant la regle connue ibi idem jus, uEi eadem ratia
decidendi.
Auffi les Loix qu'on trouve fous le titre 37 du liv. 3 du
Code, & toutes celles qui (ont fous celui du If. commun.
divid. ne mettent aucune diil:inél:ion entre les cohéritier,s ,
les co-affociés & les co-propriétaires; un tiers acquéreur
peut obliger à liciter l'immeuble qu'il poffede en commun
avec le frere de celui de qui il a acheté.
,
Il s'agit ici d'un moulin, c'eil:-à-dire, d'lIn effet qui ne'
forme qu'une même maffe, qu'un. feul corps,· qui ne peut
dès-lors être démembré feaione corporum ,en autant de portions qu'il y a de propriéraires, d'un immeuble qùi perdroit
infailliblement de fa valeur, s'il étoit divifé, & que chaque
propriétaire ne peut, ni, faire exploiter fucceffivemeHt, parce
que le titre conll:irutif ne le porre pas de même, ni· poiféder
promifcuément, Gns qu'on vît fe perpéruer taus les inconniens que la communion entraîne toujo\lrs avec elle.
L'Arrêt rapporté à la pag.\ 444 du tom. 2. de Duperier"
dans l'hyporhefe duquel il s'agiffoit, cq'mme dans le cas
préfent, d'un moulin, jugea que dès q{l'il étoit polfédé en,
commun, il falloit l'acheter ou le vendre•.
Vainement Jean-Jolèph Courmes obferve que le produit
du moulin pouvant être partagé enrre les co-propr.iétaires,
QJ1 ne peut pas regarder cet immeuble, comme un effet in-divilible. 1°. Cette objeél:ion eil: viél:orieufemenr repouffée
dans les exemples déja cités, & dans l'efpece defquels le:
produit des eHets.!?olfédés en commun ,. était auffi bien diB b b 2.
�380
Jou
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À
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vifible. 2°. Pour parvenir à la licitation, il n'dl: l'as néceffaire de rencontrer une impoffibilité phyfique dans le par1:age; il fuffit de trouver, comme difent les 'Auteurs, une
irn poffibilité moins que morale, réfultante des inconvéniens
qui peuvent naître de la communion. On fait qu'un moulin
exige tous les jours quelque réparation: l'exploitatiôn en eft
confiée à des mercenaires. Il faut veiller continuellement (ur
eux, prévenir les abus qu'ils peuvent commettre dans la perception.-du produit, exciter leur exaél:itude au travail, empêcher qu'ils ne déplaifent à ceux qui recourent à eux pour
moudre. leurs grains & détriter leurs olives; il faut, dans
cet état, qu'un des co-propriétaires dirige le travail, choififfe les Meûniers, fuive leurs opérations, & fa conduite peut
être cenfurée par l'autre Communifte; la défunion des deux
Communiftes décrédite même l'effet commun.
En matiere même de fociété, où les parties fe trouvent
liées par un paél:e exprès, 0.0 peut en demander la diffo!ution : Ji focius eft rixofus, ou comme dit la Loi; fi ità in-'
juriofus & damnofus Jit, ut non expediat eum pari, il doit
en être de même en matiere de communion, qui n'a été
établie par aucun paél:e écrit ou tacite.
Vainement Jean-Jofeph Courmes excipe de ce que fon
frere n'a acheté la portion du moulin que pour vivre en
commun avec lui, à l'exemple de plufieurs autres parriculiers-<le Graffe. 1°. On ne voit nulle part la preuve de cette
volonté; il n'a point acquis par le même aél:e que fon frere;
il eH: propriétaire antérieur à celui-ci; on ne peut pas dire
qu'à l'époque qu'il a acquis, il pût prévoir que fon frere deviendroit poffeffeur de la portion reftante. 2°. Les exemples
ne peuvent pas déroger à l'effet de la Loi; quelques multipliés qu'ils puiffent être, ils ne lient jamais ceux qui refufent de les fuivre; les particuliers qui poffedent à Graffe des
moulins en commun, peuvent y être déterminés par des
motifs particuliers qui ne fe rencontrent point ici; une heureufe harmonie regne entr'eux. Leurs engins, en travaillant
la même quantité dit. matieres, donnent le même produit.
Ici la difcorde s'eU: élevée entre les Freres Courmes; leur,
�D U
PAL AIS
.DE
PRO VEN C E.
381
divifion empêchant une amélioration dans l'exploitation du
moulin, il n'y a donc pas la même raifon pour entretenir
la communion.
En vain fon frere lui offre de lui céder fa porrion ~u même
prix qu'il l'a achetée, parce que dans l'aél:e d'~cquifition, ce
prix a été porré au delà des fommes qui furent effeél:ivement
payées. C'efi·là un fait qui paraît confiant, & dont on ne
peut pas nier l'exifience, en difant que le dol & la fraude
ne fe préfument 'pas, parce .qu'on fait qu'il arrive tous les
jours que pour rendre la voie du retrait plus difficile, un acquéreur fait porrer dans l'aél:e le prix de fon acquifition à
une plus forre fomme que celle qu'il en donne. D'ailleurs
la diminution que le moulin a: fouffere dans fon travail,
l'état de vétufié dans lequel il fe trouve, les réparations
qu'il exige, toutes ces circonfiances prouvent que la valeur
aél:uelle de cet engin ne peut qu'être inférieure à celle qu'il
avoit lorfqu'ils en firent l'acquifition des freres Gillete.
Enfin la licitation étant ouverre , le moulin expofé
aux encheres, les étrangers feront admis au concours des
offres: l'expérience apprend combien cette maniere de procéder efi utile aux vendeurs; la chaleur des encheres multiplie toujours les acquéreurs, & fait augmenter le prix de
l'immeuble qui doit être délivré au plus offrant.
Par Arrêt du 13 Juillet 1779, au rappore de M. le Con{eiller de Robineau de Beaulieu, la Sentence arbitrale fut
confirmée avec dépens; écrivant Mes. Gazan & J. Bernard.
/
�JOURNAL
ARRÊT
"
XXXXVIII.
1°. Dans quel temps' le domicilt: de fait eft· acquis.
2°. Dans quel cas l'acquiefcement à une Sentence incompétente,
n'eft pas un obftacle à l'appel.
.
Ef~r Bellier, originaire d~ Per~es d.'ins le Cor~ltat , Fabncant de chandelles, vmt s'etabltr à Marfellle & s'y
maria. Son pérequi habitoit à Pernes, lui écrivoit de temps
à autre de lui envoyer de l'argent: les lettre~ étoient produites au procès. Bellier fils l'engagea de venir refler chez
lui, avec Marguerite Bellier fa fille. Il y vint, & reconnut
par aéle public du 10 Mars 1770 , qu~il étoit débiteur de
fon fils de la fomme de 3000 liv. Le 7 JapYiër 1768, Bellier p~re avoj~ fa!I une gonation univerfelle de tous fes biens
à Marguerite Bellier.
Bellier pere mourut à Marfeille, & la Dlle. Bellier c'ontinua de refler dans la maifon de [on frere, où elle étoit
entretenue & nourrie à (es dépens. Elle retourna dans la
fuite à Pernes, & il continua de pourvqir à [a [ubfiflance.
Peu de temps ap/ès la mort de fon pere, Cefar Bellier
avoit communiqU
[a Cœur le compte de [es créances, elle
en reconnut la ju ice; & pour pourvoir au moyen d'être
payé, Bellier [e p urvut, du confentement de [a [œur, par-"
devant le Lieutenant de Marfeille, par exploit du 2 S Juin
1771., en condamnation de la fomme de 7222 lîv. 19 [.;
& par Sentence rendue par défaut le 23 Juillet même 3!nnée ,. la -DUe. Bellier fut cç>ndamnée au paiement de cette
fomme.
En vertu de cette Sentence, Bellier fe colloqua [ur les
biens exiflans, toujours du confentement de [a {œur;. & il
réfulte de la collocation, que le fieur Bellier n'avoit pu fe
payer, [ur les biens de la donation, que pour la Comme
de 42 2 S liv. 3 f.
C
l
t
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DU PALAIS DE'PROVENCE.
383
Les rentiers ne voulant pas fe dépouiller des rentes, malgré la collocation, Hellier obtint un paréatis des Officiers
de Juftice du Comtat, au moyen duquel il pût continuer
(es exécutions.
La Dlle. Hellier forma oppofition au paréatis, & prit le
fait & caufe en main des rentiers. Bellier requit le déboutement de cette oppofition; & le 2.3 Juin 177) , le Reaeur
rendit une Ordonnance, portant que fans s'arrêter à l'oppofition, il feroit paifé ou tre à l'exécution du paréatis , &
condamna la Dlle. Bellier aux dépens.
. La Dlle. Hellier déclara appel de cette Sentence; elle en
fut enfuite déchue, pour ne l'avoir pas relevé dans le temps
fixé par les Loix du Comtat. Elle appella alors pardevant
la Cour, de la Sentence rendue par défaut par le Lieutenant de Marfeille.
Pour le fou tien de fon appel, elle difoit que' cette Sen~ence étoit incompétente, parce que l'alIignadon devoit lui
~tre donnée pardevant le Juge de Pernes, Juge de fon domicile, & non pardevant le Lieutenant de Marfeille, où
elle n'avo,it qu'un domicile d'accident. Qu'elle étoit injufte,
parce qu'en fa qualité de donataire univerfelle du fieur Hellier, elle ne devoit point être tenue des dettes contraaées
depuis la donation; une donation étant un aae irrévocable,
on ne peut y porter atteinte par des obligatious po{lérieures
.qui tendent 11 la rendre fans effet.
Marguerite Hellier convenoit qu'en 1770 elle étoit 'partie
avec fon pere pour 'Marfeille ,. parce qu'elle ne pouvoit fub!ifter 11: Pernes fans revenus, & qu'elle étoit d'ailleurs né·
çeifaire à. Marfeille pour don:n~r, fes foins à fon pere. Mais
s'il faut l'en croire, elle n'avoit jamais prétendu y demeurer
toujours; elle s'étoit regardée chez fon frere comme dans
la maifon d'a'utrui, quoique gratuitement & fans intérêt; elle
t;l'étoit à Marfeilleque jufqu'à la mort de fon pere, temps
auquel ellé comptoit retourner à Pernes, pour y jouir du
~ien que fon pere lui avoit donné. Son féjour à Marfeille,
après la mort de fon pere, ne fut prolongé que par complaifance ; mais peut - on en conclure un établilfement de
•
�3S4
Jou RNA L
domicile; une intention, une volonté de s'y fixer? Cette
volonté peut-elle fe conjeaurer, fans être manifefiée d'une
maniere précife, non équivoque? Une rélidence momentanée peut-elle la faire préfumer, tandis que le dom icile ne
peut être acquis que par la demeure de dix ans, aina que
le veut la Loi 2., Cod; de incolis, & que l'attelle le nouveau Commentateur du Statut, tom. l , pag. p6.
Il efi certain que l'intention de fixer fon domicile efi néceffaire pour le confrituer dans un lieu; cette intention ne
peut fe préfu mer, ni fe manifefrer que par une déclaration
de vouloir réfider, ou par une demeure de dix ans.
Dans le cas préfent, y a-t- il déclaration de la part de
Marguerite Bellier? Y a-t-il 'un féjour penaant dix ans? Il
Y a au contraire une preuve conltante de fa volonré de re·tourner à Pernes; cetre preuve fe tire de fa demeure cafuelle, accidentelle & précaire chez fon frere à Marfeille,
& de fon rerour effeaif en la ville de Pernes.
Elle obfervoit qu'on ne pouvait pas dire qu'elle eût reconnu la compétence du Lieutenant de Marfeille, parce qu'elle
avait wiu copie de l'exploit, fans favoir même' ce qu'il
contenait, & qu'elle y avait fait 'des réponfes, avec 4éclara~
tian de ne favoir point écrire, quoiqu'elle flIt ligner. Ces
aaes ne forment point un acquiefcement à la Sentence d'un
Juge qui efi notoirement incompétent. .
Sur l'injufiice de la Sentence, elfe foutenoit que Bellier
pere ne pouvait plus contraaer des dettes, du moment qu'il
avoit fàit à fa fille une donation univerfelle de tous fes biens;
que d'ailleurs fur le total des 7000 liv. dont elle prononce
l'adjudication, il n'y avait qu'un 'article qui fût réellement dû.
Cefar Bellier répondait fJr l'incqmpétence, que fa fceux
élevoit pardevant la Cour une queltion deja décidée contre
elle par les Juges du Comtat, & par une Sentence qui avoir
paffé en force de chofe jugée.
S'il étoit permis aux parties de faire rejuger les mêmes
quefiions, les procès n'auraient jamais de fin. .Parmi les
exceptions connues au Palais, i\- n'e~ efi point de plus pé":
remproire que celle de l'exception de la chofe jugée. Dès'
qu'une
�bU
PAL AIS
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P il. 0
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38)
qu'une quefiion a été décidée, elle ne peut plus faire, entre
les mêmes panies, matiere à nouvelle contefiation; c'eH la
décilion de la Loi 6, if. de exceptione rei judicat., & c'ell:
ce qui fut jugé par l'Arrêt du 23 Mars 1779 à l'extraordinaire, au rappon de M. le Con[eiller de Ballon, en faveur
des hoirs d'Etienne Guigues, du lieu de Saim-Pierre de
Me[ounegue, contre la Darne de Maubert. Il s'agiifoit d'une
Sentence rendue par les Juges du Comtat, qui avoit condamné cette Darne au paiement de certaines Commes ; elle
en avoit déclaré appel, mais elle ne l'avoit point relevé dans
le temps; elle avoit exécuté la Sentence qui avoit paifé en
force de cho[e jugée. La Dame de Maubert vint renouvellel'
pardevant le Juge de Boulbon, le même procès qui avoit été'
décidé contre elle par les Juges du Comtat j le Juge de
Boulbon n'eut aucun égard à l'exception de la cho[e jugée;"
mais l'Arrêt réforma la Sentence.
Il convenoit que le défendeur doit être affigné p'ardevanr
le Juge de [on domicile; Marguerite Bellier prétend qu'elle
avoit [on domicile à Pernes, & qu'elle devoit y être affignée ;
elle obferve que, pour qu'on puiffe être préfumé avoir in~
telHion de fixer [on domicile quelque pan, il faut qu'on y
ait demeuré pendant dix ans; Blais elle confond les cas &
les circonfiances :. lorfqu'il s'agi~ ,du domicile, à l'effet d'être'
réputé citoyen d'une Ville, & avoir droit de pankiper ame
charges & allX honneu.rs, il en néceifaire de déclarer qu'on'
veut s'y établir; à défaut de déclaration, il faut que la ré~'
fidence pendant d~x ans faife: préfumer que l'cm- a, ch€liG Je;
lieu. de" fan domicile; c'e!1: la remarque du Rouveau Cemmentateur du· Statut, loco citato'; mais €e cas except~, UlI'
[éjour "moins c.onlidérable fulEr, [ur-tout lorfqu'il- paroit qu'on.
féjourne dans un endr.oit dans le deifein d'y établir [on domicile. " Les affignations " (dit le nouveau Commen'ta-'
teur au même endroit)- ", doiv.ent être données au défen-'
". dlOUr dans fan vrai domicile, où il, fait fa réfldence, où'
" il a le fiege de [a fonune & ~e [es affaires, & parde" vam le. Juge de [011 domicile, fuivant la regle alla" fequitUT'
" forum rei, & l'affignation [eroit nulle qui [eroit donnée"
Ccc
�386
Jou R 'fi .l. L
,
" pardevant le domicile d'origine où le défendeur ne fait plus
" fa demeure; c'ei1: la remarque de Mornac, fur la Loi pé" nultieme, .If. de Senatoribus. "
Les Arrêts du Parlement de Paris ont jugé que lorfqu'une
partie avait deux domiciles, elle pouvait être affignée ou à
l'un ou à l'autre; ( Journàl du Palais, pag. 183) Bornier,
dans fan Commentaire fur l'Ordonnance de 1667, tit. des
Ajournemens, attell:e la même maxime.
Ainli il fufEt que celui qu'on veut affigner ait établi ton
domicile quelque parr, pour qu'il puiffe être valablement
affigné pardevant le Juge de ce domicile, & non pardevant
le Juge du domiciJe de fan origine. Le féjour de dix ans
n'eLl: pas néceffaire pour avoir préfomption f,Jffifante, que
le défendeur a voulu établir fan domicile dans la Ville où
l'affignation lui ell: donnée; & cela ell: li' vrai, que n'y eût-il
qu'un moment, il fufEt que l'intention de changer de. domicile fait manifeit.ée, pour que l'affignation au nouveau fait
valabJe.~
." Dans le cas de changement de domicile de celu·i à qui
" on fait lignifier quelque exploit" (dit Radier dans fan
Commentaire fur l'Ot:.dbnnance de 1667, tit. des Ajournemens, pag. 29 )" la fignification faite au nouveau do" m icile aétuel, bien coni1:anr, ferait fans doute valable,
" n'y eût-il qu'un "feul jour de ce changement de domicile.
" Si de voluntate appareat & unD momento confiitutum in" telligitur. "
Il n'ell: plus he foin parmi nous'de rell:er dix ans dans une
Ville .pour y acqùérir le domicile. " Celui qui rélide dans
" une Ville pour y faire fes études" (obferve encore Radier ) " n'était cenfé, par le Droit Romain ,. y avoir fon'
" 40'micile qu'après dix ans, Leg. 2 , Cod. de Încolis; mais
" puifque les Ordonnances àe nos Rois, des années 1478,
" 1479, ~ fur-tout celle de 1667, tir. 4, arr. 30, ont
" donné à ceux qui étlldioient aél:uellemenr dans les U ni" verlirés, la permiffion de. porrer leurs cau{es, tant en
" demandant qu'en défendant devant les Juges conferva" ceurs des privileges des U niverfités, il s'enfuit qu'après
�D U
PAL AIS
D E
PRO VEN C E.
387
" fix mois, un écolier eH cenfé avoir fon domicile dans
" le lieu où il fait fes études."
Il faut feulement examiner, fi celui que l'on affigne, a eu
réellement l'intention d'établir Fon domicile dans une Ville;
le féjour d'un an. fuffit pour qu'il en réfulte une préfomption
légale, à l'effet de l'affigner devant le Juge du lieu Ol! 1" nouveau domicile eH établi. On fent bien "que, lorfqu'on eH
accidentellement dans une Ville, qu'on y eH amené par des
affaires, qu'on ne renonce pas à l'ancien domicile, l'abfence,
quelque longue qu'elle puiffe être, ne peut pas faite perdre
le 'domicile d'origine, & en établir un nouveau dans l'en"droit où l'on aura réfidé animo revertendi : car pour établir
un domicile quelque part, il faut tout à la fois le fait & la
volonté. C'eH l'efpece des deux' Arrêts rapportés par Denifart, au mot Domicile.
Ici Marguerite Bellier a demeuré quatre ans-~ Marfeille ;
c'eU dans ce temps qu'elle a été affignée pardevant le Lieutenant, & qu'elle ;l été condamnée. Bellier pere n'dt point
venu à Marfeille accidentellement; fa volol11é étoit manifeUée d'y finir fes jours; & fa fille, qui l'a fuivi & rené
avec lui jufqu'à fa morc, avoit également fixé Fon domicile
dans cette Ville. La preuve de cette intention de la parc du
pere &" de la fille, fe trouve dans les lettres qu'ils avoient
écrites de Pernes à Bellier fils.
- Autre preuve bien convaincante que la fille Bellier s'eH
regardéé comme domiciliée à Marfeille; elle a reçu l'exploit
qui l'affignoit pardevant le Lieutenant", & a acquiefcé à l'aŒgnation; & quoiqu'il foit très-vrai que les parties ne puiffent
pas fe choifir elles-mêmes,des Juges, il eH néanmoins cert"ain que la corn pétence ou incompétence du Lieutenant, dépendant du point de favoir, fi la Dlle. Bellier étoit réellement domiciliée à Marfeille , elle l'a reconnu formellement,
en ne déclinant point la compétence du "Tribunal. A la bonne
heure que \orfqu'un Juge fera incom pérel11 ratione materiœ,
c'e!I:-à-dire, lorfqu'i\ s'agira d'une mariere attribuée à un autre
Juge, par la difpofirion des Ordonnances, les parties ne
puiffent choifir elles-mêmes les Juges, & renverler l'ordre
Ccc 2,
�388
Jou
Il N A L
des JurifdiS:ions par des acquiefcemens; mais lorfque l'incompétence dépend uniquement du fait de la partie, il eH:
confbnt que l'acquiefcement de la partie décide e1fentiellement la compétence, parce que cet acquiefcement tend à
éclaircir le fait qui
en contefl:ation, & qui doit décider
de la compétence. AinG la fille Bellier, affignée comme.
ayant fo'n domicile à Marfeille, a décidé contr'elle , p"r fan
acquiefcement, qu'elle y érait réellement domiciliée. Elle
a, de fait, acquiefcé à la Sentence, puifque lors de .J'affignatian, elle a répondu que fan frere n'avait qu'à' faire légitimer
fan titre, & après la Senrence , elle a confenti que fan frere
fe colloquât par un feul exploit, enfuite d'un rapport d'efl:imation. ,
Sur le moyen d'injufl:ice, Cefar Bellier obfervoit que le
contrat de 3000 liv. était pa1fé à la vérité après la donatian, mais il était caufé. pour prêt de pareille fomme qu'il
avait fait à fan pere anterieurement à la donation. Aina
l'aél:e .devoit avoir un effet rétroaél:if & anrérie"ur, parce que
la dette é'roit contraél:ée avant la donation.
Par Arrêt du 15 Juillet 1779, au rapport de M.le Confeiller du Queylar, Marguerite Bellier fut déclarée non-re ceva·
ble en fan appel, avec dépens; écrivant Mes. Sellon & Imbert.
en
ARR Ê T
X X X XIX.
A défaut de tit", la quotité de la dtme doit ttre réglée d''!Près
i'l/rage local; & à défaut, d'après i'urage des lieux circonvoifins.
T
A dîme f~ paie au lieu de Meolans fur le pied du vingtles Curés, co-décimateurs pour la moitié, ne
l'ont jamai.s per~ue autrement.
Les Archevêques d'Embrun, co-décimateurspour l'autre
moitié, ne l'avoient jamais levée en nature j ils l'avaient
toujours abonnée, tantôt par des baux particuliers, tantôt, ..
.JiLŒ unie me;
�DU PALAIS DE PROVENCE.
389
& le plus [ouve nt , en la comprenant dans des abonnemens
généraux faits avec la Vallée de Barc:elonette en corps.
En 1777' M. l'Archevêque voulut percevoir celle des
agneauK en nature! Les particuliers de la Commutiauté de
Meolans offrirent' de payer [ur le pied du vingt-unie me , &
d'après l'eftimation qui. [eroit faite de leurs agneaux par
Experts convenus, attendu que le nombre qu'ils en avoient
ne permettoit pas de payer en nature.' Cette offre fut refufée; les Prépofés de M. J'Archevêque préte.ndirent que
c'étoit à eux à faire l'évaluation des agneaux.' .: .
En Juillet. fuivant, les Confuls de Meolans firent fignifier
un aéle .au.p.rocureur fondé de M., l'Archevêque d'Embrun,
pour qu'il eût' à faire éleél:ion de domicile dans la Maifon
presbytérale de chaque quartier de la Communauté, afin
que les redevables de la dîme puffent y donner' les avenif.
femens néceffaires avant d'enlever lenrs fruits.
.
M. l'Archevêque répondit qu'il ne devoit élire qu'un domicile dans le- chef-lieu, & qu'il.l'avoit élu chez Mre. Tholofan, Curé de Meolans. Il ajouta que la levée des fruits
devoit fe faire quartier par quartier, mas par mas; que dans
le cas de contravention, il [e pourvo.iroit en dommages-intérêts conffe la Communauté, & même contre chaque par.
ticulier contrevenant.
1
Le 28 du même mois, le Prépafé fit lignifier un nouvel
a&e aux Confuls, & les interpella ae déclarer s'ils entendoient payer le droit de dîme au quinzain , pour les grains
& les agneaux, & notamment pour les gerbes à lever, quartier par quartier, mas par mas, [uivant la maturité . • . •
leur·déclarant que leur filence feroit pris pour-un refus formel de leur part; .&' qu'audit cas, il proteftoit de tous les
droits de M. l'Archevêque.
Les Confuls répondirent que les habitans de leur Communauté étoient prêts à payer aux Seigneurs décimateurs la
dîme de leurs fruits fur le pied du vingtain, conformément
à.l'ufage.
. '
Les Dîmeurs ne fe préfenterent pas fur les avertiffemens
donnés par le~ redevables; ceux ... ci aprè; avoir attendu le
�390
,
JOU·RNAL ..
temps .de, droit, enleverent les gerbes, & laifferent la dîme
fur les champs. En ,1778, M. l'Archeyêque perçut la dîme
en arg~nt, fur le,. pied des anciens ballX. En Novembre
même ~l)pée ,. il fit ajourner pardevapt la Cour les ,Confuls
& Communauté de Méolans, & demanda· contr'eux les
droits de dîme échus) & à échoir; les échllS, (u'ivaqt la fixation qui en feroit faite par Expert!!', & ceux à échÇlir, fur
le pied du quinzjeme, l$;. en la forme déterminée par l'Arrêt
du 21 Juin,.I:72.6.
. Il fondoit' fa p~étentio.~ ,1°. fur.)e . li~re ve;d,J ~on(ervé
d'tps les Archives d'Emhrup',.qui juftifioit que )a dîme 'du
bled & des .agneaux, fe paje à Meolaoo,fur1le pied.dll.quillfie me. 2°. Sur le livre "bleu qui conrielJc)a traduél:ion.lit-,
téra)e du livre verd ; traduél:ion faite & imprimée par o'rdre
de 1 la Comnlunauté ; traduél:io!J ;qu,'elle eft par. conféque!TIment obligée d'adopter. J
r.
"
.
l"
La Cour ( difoit-il ) a décidé par deux ,Arrêts, .que ,c'eft
conformément à. ce livre que la dîme doit être perçue dans
taute la Vallée de Barcelonnetei le premier rendu en 1726,
en faveur de M. de Tencin, Archevêque d'Embrun; ·Ie fecond, rendu en 173 l, .en"f veur du Chap,i.tre. . .
Il f~i(oit valpir~le.s di'{ers...a,él:es d'·abpnneJUehs paffés -avec·
la Com'munauté en 17 'i7 , 17 6 S & I7fn, qui fe référoÎ!;nt.
au livre verd.' L'a eom!Uun3uté r de .Meolans avpiJ approuvé ces .alJonnemens ; t;lIe les avoit exécutés ; ~lle n'était
donc ni recevable, ni fondée à le~ défavouer.
La Communau'té opporojt quç le, li.v.r.er v~Sd .n'était aUtre
chofe gll'un livre de, raifçll1 , ouvrage des gers ,d'aJfa,ires des
Archevêque", d':I;:mbllln. Iln'e!l: permis à perfopne de, feJair,e
de titres, &, ce qui ,eft écrit dans un li\lfç ,-d~,! rai[on ', .ne
peut obliger le tiers. C'eft la difpoLitioll eipreffe de la Loi
7, Cod. de. probatio71ib. ; cette Loi nOl)s apprend que le
Fife lui-même n'a pas plu,s de privilege que le fimp)e particulier : exemplo pemicio/ùm efl ut ei.fèripturœ .crecfatur qud,
unufquifque jibi ad/lotatione proprid debitorem conftituit. Undè
neque FiJèum, n~que alium quemlibet ex fuis fubn()tationibus
debiti probarionem pra?bere pofJe oporte!.
�P
PRO VEN CE.
391
La Communauté convenait qu'à cert~ins égards, ce liv~e
écoit quelque cho(e' de plus qu'un livre de rai(on; qu'outre
l'énumération des droits prétendus par l'Archevêque, il contenoir la tran(cription de divers aéles anciens, qui (ont effeél:ivemenr les titres confriturifs de la plupart de ces droits,
& qui écoienc (ou(crits par un ~otaire ; que 'dans cette partie,
le livre pouvoir former titre en faveur des Archevêques;
mais qu'il en écoit autremenr de la partie qui ne contenoit
que de fimples annotations, qu'une énumération de prétendus
droits, dépourvue de coure jufrification;, que ces annotations
ne pouvaient être regardées comme un contrat con(enti par
les per[onnes donc elles [uppo(oient l'obligatioo; qu'elles
étaient d'ailleurs (u(peéles de ,toutes les. manieres. 1°, Fur[ent-elles de' la main de l'homme public qui avait fait la
tran[cription des titres, & qui avait figné à la fin du livre,
cet homme public n'avoir pu certifier que la vérité des aél:es
qu'il avoir' tran(crit; rien n'alTuroit à lui-même la vérité de
ce qu'on lui fai(oit écrire '(ans preuves.
2°. Ce livre" n'éroit pas même entiéremenr -écrit' de la
même main. En plufieurs endroits, très-Couvent même dans
la même page, on y trouve des écritures qui ne (ont pas du
même fiecle, & des additions qui paroilTenr, d'une ma"
niere frappante, avoir été faites après coup; on y trouve
prefque par:"cout des blancs confidérables, des renvois, des
apofrilles (ans aucune forme légale, qui (ont même quel~
quefois d'une main difterenre de celle qui a écrit le' reHant
de la page.
3°. Il Y avoit dans ce -livre des contradiél:ions & des
inexaél:itudes (ans nombre, & même des droits, déclarés
dans une partie du livre, exiflans & perçus, & déclarés
éteints' dans une 'partie antérieure.
Le livre bleu que la Vallée a fait faire récem ment, &
dans lequel on trouve une traduélion littérale de quelques
fragmens du' livre verd, ne peut former' titre en faveur de
M. l'Archevêque, pui(que ce livre verd lui-même n'en a ni
les caraél:eres, ni la force.
La Vallée n'a jamais délibéré de faice traduire .le livre
:D U
A LA 15
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�391.
<
JOUll'NAL
verd, mais feulement de confulter fur la maniere de payer
la dîme " & de faire imprimer le réfulti,lt de la Confultation
pour fervir d'inftruél:ion aux redevables; d'ailleurs traduire
un ouvrage, ce n'efl: pas l'adopter.
L'Arrêt rendu en 1731, en faveur du Chapitre, dl: entiérement étranger à la Communauté de Meo1ans; d'ailleurs
il n'y étoit pas queftion, entre le Chapitre & les Communautés en qualité, de la quotité de la dîme, mais feulement
de décider li les Communautés devoient contribuer aux frais
de la levée de la dîme.
Il eft vrai que lors de l'Arrêt de 1726, elle étolt en qualité dans le procès, puifq'ue le procès regardoit. toute la
Vallée; il ell vrai auffi que l'Arrêt porte que la dîme fera
payée à la quote portée par le livre verd; mais il ef!: égaIement certain que cette difpolition dans l'Arrêt ne fait pas
partie du Jugement, elle n'y eft qu'énonciative, & elle ne
{auroit produire aucun effet: lors de cet Arrêt, la queftion
de la dîme ne formoit pas matiere à contef!:ation.
_
D'ailleurs cet Arrêt n'a jamais été lignifié; & le feul défaut d'exécmion pendant trente ans; opere la .prefcription
de la chofe jugée. ( Faber, de prœfcript. 30 lIet 40 ann.
dé~ 12.)
"
M. l'Archevêque (continuait la Communauté) n'a dom:
pour lui ni le titre, hi l'autorité de la chofe jugée. Le titre
qui fixe la quotité de la dîme à Meolans ne paroît pas;. la
queftion de cette quotité eft toute nouvelle, & les Archevêques d'Embrun n'ayant jamais levé la dîme en nature dans
la VaHée de Barcelonnete, il n'y a en leur faveur aucune
l'oifeffion de fait.
, Les aél:es d'abonnement paifés avec l':Archevêque les 2S
Mai, 16),2, & '6 Mai 1717, portent expreifément que la
dîme dans la Communauté. de Meolans doit être levée au.
vmgtam.
Ceux qui ont agi au nom de la, Communamé lors des,
abonnemens de 173-S & 173-7, ont. excédé leur pouvoir,. eI\'
déclarant que la Communauté.. paierQit la dîme des grains
&. des agneaux au quinzi\in i ils n'avoient d'aqtre pouvoir. que,
celui·
-
�DU
PAL AIS
DE
PRO V E Ne E.
n ea
1
393
,celui d'abonner la dîme en argent: auffi la Communauté
n'a jamais voulu ratifier leur déclaration, qui efl: contraire
aùx anciens abonne mens confentis par les Archevêques, &
qui ne peut détruire des aaes primitifs & folemnels, qui
embraffent un intervalle de plus de foixante & dix ans, &
qui fixent, de )'-aveu des Archevêques, la quotité de la dîme
au vingt'ain.
,
C'efl: un principe incontefiable, ajoutoit-elle, que quand
les titres ne font pas connus, il faut recourir aux anciennes
co"utumes des lieux, pour régler la quotité de la dîme. Si
cette coutume efl: elle-même obfcure & incertaine, il faut
confulter 'celle des lieux circonvoifins; telle eH la difpofition
'littérale- de l'art. 29 de l'Edit de 1 )79, & ce qu'atteaent
d'ailleurs touS les CanoniHes, entr'autres d'Hericourt dans
fes Loix eccléfiaHiques, part. 2, pag. 172, n. 12.'
également certain que s'il y a du doute & de l'obfcurité fur la quotité de la ~lîme, la caufe des Clercs eH
toujours la moins favorable, comme l'obferve M, Simon
dans fes Maximes du Droit canonique, pag. 89; & cela,
dit-il, d'après Boërius, en fa décijion 236 ; n~ notentur avariûd in exac7ione rerum temporalium.
Ici d'un côté, les Archevêques d'Embrun n'ont jamais
pris la dîme en nature à Meolans; de l'autre, les Curés du
lieu qui font co - déci-mateurs, l'y ont levée quelquefois,
mais tolljours au vingtain,
Si quelques aaes renferment des énonciations qui font
favorables à M. l'Archevêque" il en efl: d'autres qui lui font
contraires. La quotité doit donc être réglée d'après l'ufàge des
lieux circonvoifins; & de l'aveu de M. l'Archevêqlle, la
dîme fe penioit da,ns toute la Vallée fur le pied du vingtain~
La quotité devrait même être réglée relativement aux titres les moins onéreux; la dîme n'cfl: pas un drait plus
privilégié ou plus favorable qlle les droits feigneu6aux : or
en matiere de droits feigneuriaux, quand le titre primordial
ne paraît pas, & qu'il n'y a que des reconnoiffances difcerdantes , celle qui efl: la moins ooéreufe pour le redevable'"
Ddd
�-394
t
0
U RNA L
prévaut; ainG l'attell:e Latouloubre dans fa Jurifpru'dettce
féodale, part. 2., tit. 9, n. 2. 'î , pag. 2. 3 'î'
Par Arrêt du 16 Juillet i779 , au rapport de M. le Confeiller de Ballon, M. l'Archevêque d'Embrun fu~ débouté
de fd requête, avec dépens; écrivant Mes. Laget & Portalis.
4
ARRÊT
L.
Un prheur à la groJJe fùr marchandifes, ne perd pas [on
capital, fi lors du naufrage, le .VaijJèau n'eft pas chargé
de ces mêmes marchandifès.
,
A
Lexandre Bonfillon céda à Simon Gilli un billet à la
N groffe qu'il avoit fur Lambert pere & fils, & s'obligea,
là où le Vaiffeau l'Aigle n'auroit pas fait retour dans deux
ans, de reprendre le billet pour fan compte.
Le Vaiffeau. n'était pas arrivé au terme fiipulé; Gilli attaqua Bonfillon; celui - ci oppof.l que le Vaiffeau avoit fait
naufrage, & que le porteur du billet n'avoÎt qu'à recouvrer
les effets fauvés.
Gilli repliqua que pour le fou mettre à ce recouvrement,
& à accepter l'abandon, il fallait prouver que les débiteurs
à la groiIè avaient des marchandifes fur le Vaiffeau lorfqu'il périt.
Le Lieutenant de l'Amirauté, par fa Sentence,. renvoya
la caufe après un an, ou plutôt, fi Lambert pë,re & fils ar·
rivaient•
. Les Lambert pere & fils arriverent, mais fans profit pour
Bonfillon, qui foutint alors qu'il fuffifoit que le Vaiffeau e~t
péri, pour que les marchandifes qui n'avaient pas péri avec
lui fuffent cenfées perdues.
. Le Lieutenant, par fa Sentence, condamna les hoirs
~'Alexandre Bonfillon, qui était mort dans l'intervalle, au
�DU
l'A LAI S
l'l E
PRO VEN C E.
39s
paiement des 380'0 liv., montant du billet, fous la déduction de la valeur des effets qu'ils prouveroient dans la huitaine y avoir eu à bord pour le compte des Lambert lors
du naufrage.
Les hoirs Bonfillon appellerent pardevan t la Cour de cette
Sentence; ils prétendoient que les Lambert avoient dans le
chargement à l'époque du naufrage des effets pour leur compte
d'un prix bien fupérieur à la fomme prêtée, mais ils convenoient qu.'à cette époque il n'y avoit rien de chargé fur le
Vaiffèau.
Ils difoient que par la nature du contrat à la groffe, le
Prêteur prend fur lui tous les événemens de la mer, événements qui font les mêmes que ceux dont fe chargent les
Affureurs ; que le délaiffement peut être fait en cas de naufrage fuivant la difpofition de l'art. 46 de l'Ordonnance de la
Marine, titre d,s aJJurances; qu'il y' avoit des marchandifes
à bord, puifque le juge ordonna que le Subrecargue remettroit un état des agrêts, apparaux, vivres, munitions, marchandifes, & de touS effets de cargaifon étant à bord du Bâtimen t lors de fon naufrage.
Qu'importe que le finiftre ait frappé fur ~e navire feul ou
conjointement fur les marchandifes ; le fort" du propriéraire
eH le même dans les deux cas. Le propriétaire qui a perdu
fon Vaiffeau dans le Pon non encore chargé, retrouve fa
cargaifon dans fes magafins; il n'eIl: pas néceffaire que les
effets [oient perdus phyfiquement.
Les Preneurs avoient un intérêt au chargement de 2188)
liv. , cet intérêt cautionnoit fufEfamment le billet de groffe
de 3800 liv. ; c'eH l'intérêt au chargement que le Preneur
doit jufiifier; cette juHification une fois faite, touS les rifques font à la chage des Prêteurs; en effet fi un Vaiffeau
relâche pendant fa route, fi quelque événement oblige à Iedécharger, s'il périt à vuide, & fi faute de trouver un autre
Navire pour [a cargaifon, elle eH perdue, il doit être égal.
pour les propriétaires que les marchandifes aient été englou-ties par la mer ou dépéries à cerre.
Les hoirs Gilli oppofoient que la Sentence n'écoit qu"",,
D d d 2.
�396
Jou
R. N
A L
l'exécution littérale de l'article J 4 de l'Ordonnance de la Marine, titre des contrats à la grojJe aventure. Ils avouoient que
le délaiffement peut être fait en cas de naufrage, d'après la
difpoution de l'article 46 des affurances. Le délaiffement
fondé fur le naufrage d'un Vaiffeau doit-il s'étendre aux
marchandîfes qui n'ont pas fait naufrage avec lui, qui n'y
étaient pas encore chargées? C'efl ce que l'Ordonnance ne
dit pas, & c'ell: ce qu'il faut pourtant décider dans ce procès
en faififfant l'efprit de la loi.
,
Suivant l'art. 2., tit. des conirats à la grojJe aventllre , le
Prêteur a pouvoir de choifir la partie du Vaiffeau ou de la
cargaifon fur laquelle il veut courir des rifques ; on ne peut
donc le forcer à fe reffentir de la perte d'une chofe fur laquelle il n'a pas voulu prêter. Que fait au Prêteur fur marchandifes la perte du Navire?
Auffi Valin fur cet article dit que le Pdteur ne court rifque que de la perte de la cllofe pour laquelle il a pdté.
L'article 1 l du même titre veut que les contrats à la groffe
demeurent nuls par la perte entiere des effets fur lefquels on
alira prêté, pourvu qu'elle arrive par cas fortuit dans le tems
& dans les lieu~ des rifques.
II faut donc que ce fait la eargaifon qui ait péri, pour
que le Prêteur à la groffe courre le rifque du naufrage. Si le
Vaiffeau périt après avoir été déchargé dans le lieu du voyage,
& avant d'être déchargé des retraits, fa perte ne porte aucun
préjudice au Prêteur fur marchandifes, puifque ce ne font pas
les effets fur lefquels il a prêté qui ont péri.
L'équité veut que l'on' interprete les aél:es felon l'intention
qu'ont dû avoir les parcies. Or il eil clair que celui qui pouvait prêter à la groffe {ur corps & facultés, & qui n'a prêté
que fur ces dernieres, n'a voulu s'expofer qu'aux rifques
qu'elles couraient, & n.on à ceux du corps qu'if ne voulait
pas partager.
L'Ordonnance veut qu'on puiffe prêter à la groffe ou féparément, ou conjointement fur le corps, armement, &c.
S'il eil permis de prêter fur tel objet féparément de tel autre,
il faut néceffairemenc difiinguer les prêts qui one des objets
différens.
'
�DU
PALAIS
DI!
PR.OVENCE.
,.
397
C'ef!: donc une mauvaife objeél:ion de diœ que l'atticle 46
du titre des affurances autorife le délailfement dans le cas
du naufrage, fans diHinguer le délaiffement des marchandifes
de celui du Valffeau , & qu'il ne faut pas ajouter à la loi en
fuppléant une di!l:inél:ion qu'elle ne fait pas.
On répondra avec fuccès que toutes les fois qu'une di!l:inction e!l: indiquée' par l'efprit de la loi, elle e!l: permife & même
néceffaire ; les Légiflateurs ne pouvant pas tout prévoir, ne
fe font occupés que des regles générales, laiffant aux Juges
le foin d'avoir égard aux exceptions; enfin il faut diainguer
& même détourner les termes de leur fignification propre
toutes les fois que fans cette précaution la loi deviendroit
nbfurde ou injufte.
Il feroit inique que celui qui n'a voulu courir que le
rifque du corps foulfrît du mal arrivé aux marchandifes, &
réciproquement que celui qui ne s'dl: intéreffé qu'aux marchandifes fupportât la perte du corps qui auroit fait nau'"
frage, tandis que les marchandifes ~épofées dans des maga-:
fins n'auroient pas fouffert.
Le délaiffement eft l'abandon que l'Affuré ou l'Emprunteur à la groffe font de la chofe affurée ou chargée du
prêt, à l'effet d'obliger l'Affureur d'en payer le prix, ou le
Prêteur de perdre ce qu'il avoit avancé. C'eft donc la perte
qui doune lieu au délaiffement; & l'article 46 a exprimé les·
divers cas où il y a perte, la prire, le naufrage, &c.
Si les affurances & les prêts à la groffe peuvent être divifés, leur exécution qui amene le délaiffement doit l'être
néceffairement ; l'article parle en général des cas où il y a
lieu au délaiffement ; il faut l'appliquer enfuite aux divers
effets qui en font fufceptibles. On ne peut faire un délaiffement général, abrolu & conjoint, qu'autant que les affurances ou les prêts à la groffe portent conjointement fur
tout.
Quoique le naufrage roit un cas de délaiffemerit pour les
effets a.'furés, ou rur 1erquels on a emprunté, l'Ordonnance
ne re concente pas de la perte du Navire, elle veut que
1'0.11 juftifie que l'Emprunteur y avoit des effets jurqu'à con:
�398
,
.J- 0
~ù R- 'N A L'
currence du prê~. Ici les Adver[aires [ont hors d'état de
fournir la preuve qu'il y àvoit des effets.
En droit, la perte de quelque caure qu'elle' vienne dl:
fans doute iQdilférente au Propriétaire; mais eUe ne l'eil:
pas au Donneur 11 la groffe , qui ne répond que des fortunes
.de mer emportant perte entiere, & non de.. celles, qui
n'opere nt qu'un retard, une vente moins. av.anrageufe, ou la
perte d'eftets fur lefquels il n'a pas prêté.
Il eil: indifférent que le Donneur à la groJre réponde ou
non de la perte:des marchanilifes fur terre, il, faut toujours
prouver 'qu'elles ont été perduës fur mer; il feroit ridicule
d'admettre en; preuve un naufrage arrivé fur mer lorfque les
ma.rchandifes n'étoient pas embarquées; tant que les rifques
du Donl)eur font à terre avec les marchandifes, le bris du
VaiJreau lui eil: indifférent; il ne peut courir à la fois des
rirques fur les deux élémens., lorfque les effets pour lefquels
il a.prêté ne font que fur un.
Pour donner lieu à l'abandon, il faut qu'il y ait perte de
l'effet fur lequel il a été pris des. deniers à .la groffe. Or il
n'y a pas perte dès que le.s effets ,n'ànr pas été fur le
VaiJfeau naufragé; ils peuvent n'être pas vendus avec profit,
mais le Donneljr à ·la groJre ne cautionne pas la plus grande
ou la moindre valeur des marchandi[es, il garantit feulement
qu'elles arriveront, qu'e la poJreffion en fera confervée au
Propriétaire.
.
Par l'Arrêt du 17 Mai 1776, rendu en faveur d'Hermite;
la Cour a ramené fa Jurifprudence ~ celle de tous les autres
Parlemens & à l'opinion de Valin 1 de Pothier, & des meil~
leurs A-ureurs ; elle a jugé que la perte du VaiJreau n'emporte pas celle des marchandifes, que le délaiJrement permis
en cas de naufrage, bris, &c. s'applique à ce qui dl: nau~
fragé, & non à ce qui n'a pas fouffert. Delà on doit conclure que l'Arrêt rendu le 21 Avril 1776 contre Fiquet ne
fauroit être déciuf ; un Arrêt unique ne peut former Jurifprudence, & d'ailleurs les vrais principes de la matiere étoient
moins connus à cette époque; on tenait alors que le ftniHre
du VaifIeau frappait fur les marchandifes, quoiqu'intaél:es•.
�:nu
PAL~IS DE
PROVENCE.
399
Delà les hoirs Gilli concluoient que Lambért pere & fils
n'ayant aucun effet fur le Vailfeau lors du naufrage, & le
chargement auquel ils avoient intérêt étant à terre, le chargement fur lequel le contrat à la groffe avoit été fait n'avoit
effuyé aucun des. cas fortuits qui operenr le délaiffement.
Par Arrêt du 16 Juillet 1779, au rapport de M. le Confeiller de Perier, la Sentl:nce fut confirmée avec dépens;
écrivant Mes. Simeon fils &:. • . . •
.J
•
Il
ARR Ê T .'L
r.
."
(
.
Dans la vente des biens 'des pupilles & mineurs, il faut qu'il
y ait néceffité , permiffion du JUGe, ejfimatiQII, affiches &
enchues.
Les tuteurs & les curateurs ne "peuvent acquérir les biens·
de leurs pupilles. ou mineurs, m~me' par perfonnes interpoftes.
C
Laude Daumas du lieu de St. Pierre fit fon teflament
le 17 Février 17'j6 j il inflitua Jofeph fon fils aîné fon
héritier; celui-ci recueillit la fucceffion, exigea quelques dettes
aél:ives., & l'abandonna enfuite par aél:e du 12. Oél:obre 1763
à Anne-Marie Dernuffon fa mere, moyennant l 'j0 liv. Elle
lai compta 'jo liv., & promit de lui payer les 100 liv. renantes
dans quatre années & en quatre paiemens égaux fans intérêts jufqu'à l'expiration du terme .convenu.
En 1766 Anne-Marie Dernuffon fit fon teflament ; elle
légua à Jofeph Daumas fon fils 3'j liv. ID fols, & elle infbtua fes fix autres enfans fes héritiers. Les parens affemblés nommerent Alexandre Drogoul tuteur des quatre pupilles, & Cefar Fabre curateur des mineurs; on procéda à /
J'inventaire; Cefar Fabre curateur fe chargea de tous les effets,
admininra \es biêns, & fit toutes les fonél:ions du tuteur.
Ces héritiers poffédoienr deu'x immeubles qui valoient au
delà de 600 liv. j. Ce{~r Fabre convoqua l'affemblée de quel-
�:nu
PAL~IS DE
PROVENCE.
399
Delà les hoirs Gilli concluoient que Lambért pere & fils
n'ayant aucun effet fur le Vailfeau lors du naufrage, & le
chargement auquel ils avoient intérêt étant à terre, le chargement fur lequel le contrat à la groffe avoit été fait n'avoit
effuyé aucun des. cas fortuits qui operenr le délaiffement.
Par Arrêt du 16 Juillet 1779, au rapport de M. le Confeiller de Perier, la Sentl:nce fut confirmée avec dépens;
écrivant Mes. Simeon fils &:. • . . •
.J
•
Il
ARR Ê T .'L
r.
."
(
.
Dans la vente des biens 'des pupilles & mineurs, il faut qu'il
y ait néceffité , permiffion du JUGe, ejfimatiQII, affiches &
enchues.
Les tuteurs & les curateurs ne "peuvent acquérir les biens·
de leurs pupilles. ou mineurs, m~me' par perfonnes interpoftes.
C
Laude Daumas du lieu de St. Pierre fit fon teflament
le 17 Février 17'j6 j il inflitua Jofeph fon fils aîné fon
héritier; celui-ci recueillit la fucceffion, exigea quelques dettes
aél:ives., & l'abandonna enfuite par aél:e du 12. Oél:obre 1763
à Anne-Marie Dernuffon fa mere, moyennant l 'j0 liv. Elle
lai compta 'jo liv., & promit de lui payer les 100 liv. renantes
dans quatre années & en quatre paiemens égaux fans intérêts jufqu'à l'expiration du terme .convenu.
En 1766 Anne-Marie Dernuffon fit fon teflament ; elle
légua à Jofeph Daumas fon fils 3'j liv. ID fols, & elle infbtua fes fix autres enfans fes héritiers. Les parens affemblés nommerent Alexandre Drogoul tuteur des quatre pupilles, & Cefar Fabre curateur des mineurs; on procéda à /
J'inventaire; Cefar Fabre curateur fe chargea de tous les effets,
admininra \es biêns, & fit toutes les fonél:ions du tuteur.
Ces héritiers poffédoienr deu'x immeubles qui valoient au
delà de 600 liv. j. Ce{~r Fabre convoqua l'affemblée de quel-
�J-'o U'lCN-A L ! '
"
ques pare'n~; ils délibererent de 'les vendre pour payer ce
qui étoit dfi à Jofeph Daumas; on nomma 'deux perfonnes
pour en Jaire l'efiimation; le Lieutenant de Juge homologua
cette déliberation le 9 Aout 1766.
Sans eflimarion, fans affiches, fans encheres il fut paIfé
le 12 Aoûr un aél:e d'infolurondÏlrioo. des deu~ domaines par
CeIar Fabre. a~ prix de '1'3) li.v.J.to' fols j Dragoul flipula
comme ruteur des pupilles; .Fabre affifla l'un,des mineurs,
& contraél:a même fans aucune forre de mandat pour Jean
Daumas autre- cohéritier, & qui étoit abfent.
'
Jofeph Daumas rranfporra le même jour ces mêmes domaines à Lanrent Fab're 'fôn. pa'rent au prix de 16) livres
10 f. Le 20 Aofit Ce[ar Fabre exerça le r,errait, & rembourfa
à Laurent Fabre le- prix, les "frais' & 10yaux-etlûrS ,. & d~
vint pofI;'dfellr de ces domaines moyennant la fomme ,de
180 livres.
r, Le '30 Mài :177°,' les__ freres- Daùmas devenus' majeurs;
attaquerent' Ce[ar Fabre. en revendication; Ils offrirent de
lui rembourfer les 13) liv. 10 f. du prix de la premiere acquifirion.- L'inflance périma. Le 30 Aoùr 1778, ils l'affignerent pilrdevanr la Conr, aux mêmes fins. Fabre appella Jofeph Daumas au _prpcès; l'un & l'aurre [e prévaloient du
décret du Juge qUI avoit permis l'aliéflation fa~s néceffité;
'& fans l'obfervarion des formalités. Les freres Daumas en
appellerent incidemment.
Suivan't eux, le tranfport des domaines revendiqués était
nul & frauduleux; il éroir nul, parce qu'il avoir été fait
fans caufe & [ans formalités; frauduleux, parce qiJe c'étoit
l'Adminiftrateur qui s'étoir vendu à lui-même~
Les Loix ont accordé aux pupilles & aux minenrs, une proteél:ion toure parriculire; elles veillent à la fÛreté de leurs perfonnes, & à la confervation de leurs bien-s; elles en Ont in.
terdit l'aliénation aux tureurs & aux curareurs : l'Empereur
Severe en fit une Loi précife : proptered interdicam tcItoribus
.400
vel curararibus ne prœdia- rufltca vel fuburbana detrahant. '
Il ef!: des cas [ans doute Olt l'aliénation devenue néceff.lire, dt permife;' teIs que l'exiHence a'une dette paffive',
urg,entÇ:
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
401
urgente, & l'iInpoffibilité de l'acquitter par la valeur des
meubles & effets. Les Loix S , ff. de reb. eor. qui fub turela
& 12', Cod. de prœdiis & aliis reb. min. font claires; non
diftrahi jubet Prœtor, nifi œs alienum urgeat. Une foule de
Loix étahlilfent que le prix des meubles & effets doit être
préalablement employé au paiement de la dette. Leg. magis
puto, §. 9, jf. de reb. eor.; Leg. à divo Pio, §. 2., jf. de re
judicata.
L'aliénation des immeubles des pupilles & des mineurs
'ne peut être valablement f.1ite, s'il n'y a l'exiil:ence d'une
dette paffive & urgente, l'impoffibilité de J'acquitter amrement, l'~vis des parens, la permiffion du Juge, une eHimatian préalable, des alIiçhes & des encheres.
La troifieme de ces formalités eil: requife par la Loi magis
puto, §. I I : requirat ergd Prœtor nece.Dàrios pupilli ~!el parelltes, vel libertos aliquos fideles" vel alium qui notitiam rerUlIl pupillarum habet.
La quarrieme eil: établie par la même Loi, §. 9 : non paf
Jim tutoribus fub obtent.u œris alieni permitti debuit venditio ,
namque non e.Dè viam eis diftra8ionis tributam , & ided Prœtori
arbitrium hujus rei Senatus dedit.
Les deux aunes formalités çl'eil:imatiol1 & les encheres)
dérivent, comme l'obferve, Julien dans fes Mémoires manufcrits de tutela, cap. de adnziniftrat. Twor., letc. T., de la Loi
Si quos 16, Cod. de refc.ind. vendit.
Ces formalités f{l11t également néceffilires pour les vcnees
des biens des ,pupilles & des mineurs; le tiae du Digelle
de rebus eorum qui fub curela l'el cura funt fine decreto non
alienandis vel jùpponeJ:dis; celui du Code de prœdiis & aliis
r:ebus minorum jjne de.creto non alienandis vet obligandis, l'a'nnoncent a l f e i . .
. .
Chacune de ces quatre formalj{és, tend à, l'av<llltage du
pupille & du mineur; la premier.: vérifie la caufe, éclaire le
Magillr.at & le difpofe à rendre un décret jufie; la Feconde _
la confacœ & fixe la propriété; la troiGeme donlJc une idée
de fa valeur & regle le taux fur. lequel elle peut être mire aux;
enclleres i la qpatriemc. attire. un. COnCOl\fS d.'acquéreurs ,. qui.
Eee..
�402.
Jou
Il N A L
dans la chaleur qu'occaJionnent toujouts ces ventes publi'lues, peuvent [e déterminer à offrir du domaine [on légitime prix, quelquefois même au delà. Elles [ont [crupul.euCement ob[ervées parmi nous, ainli que l'attefle Me. Julien
dans [on Commentaire [ur nos Statuts, tom. 2, pag. ')78.
On trouve des Arrêts dans Boqiface, tom. 1 , liv. 4: , tit. 9 ,
ch. l, & dans Duperier, tom. 2 , va. Aliénation, qui ont
caffé des tran[ports où l'on avait omis quelqu'une de ces
formalités.
.
Ici il n'y avait point de néceffiré d'aliéner les deux domaines revendiqués pour acquit,rer les 13') liv. la [ols. Une partie de cette [am me n'était pas encore échue, & ne produi[oit point d'intérêt; d'ailleurs les ourils de Maréchal
ferrant pouvaient être vendus, ils valaient au-delà de 1 ')0'
liv.; enfin la dette' n'était pas urgente, il n'yen avait aucune demande judiciaire.' L'aliénation fut' donc faite [ans
cau[e; elle le fut [ans formalités. Point d'eHimation, point
d'encheres; le tran[port eH donc nul, [ans pouvoir examiner li au fonds il eft jufte ou non. Telle eft la.. déciIion
de la Loi Il, Cod. de prœd. & aliis rebus, parce qu'alors,
ainli quc s'explique la Loi, fupervacuwu efl de vili pretio
traêlare.
En fait, la lélion cH évidente; l'omiffion des formalités
la fait pré[umer; les pieccs du procès lc prouvent. Les deqx
domaines revendiqués furent aliénés le 12 Août 1766, au
prix de 13') liv. la [. ; l'acquéreur les tran[porta le même
jour à Laurent Daumas pour 16') liv. la f. Ce[ar ,Fabre
exerça 'le retrait lignager dès le 20; il rembourra les 16') 1.
la f.; il paya les frais & loyaux-coûts; ces deux domaines
lui revinrent environ 200 liv.; cependant les pupilles n'en
avaient retiré que 13') Iîv. 10 f.
.
Ils ajouraient que le tran[port était frauduleux. Les tuteurs, les curareurs ne peuvent point acquérir direél:cmcnt
ni indireél:ement les biens de leurs pupilles & de leurs ri-.ineurs. Telle eH la.. décilion de la Loi 34, §. 7, jf. de conrrah.
empt. tutor rem pupilli emere. non potejl, idemque porrigendum
ad fimilia, id ejl, ad Curatores, Procuratores & qui llegQti~
aliena g e r u m . · ·
,
�403
La Loi pupillus, §'. 2, ff. de /fut. tl/t., I,eur permet cependant de fuire pareille acquifition; mais elle leur impofe ces
trois conditions routes également propres à écarter la fraude.
Il faut qu'ils achetent 1°. d contutore, 2°. palàm, 3°. non callide. Dans res Arrêts rapportés par Duperier, rom. 2, pag.
)76, on en trouve un qui jugea que;le tuteur ne pouvoit
acquérir qu'aux encheres.
.'
Fabre éroit co-tuteur des uns 1 curateu.r. des autres; il fe
difoit Procuteur d'un autre mineur abfeDt. Confidéré fous
ces. trois qflalités, il ne pouvoit acheter les pr.opriétés re-'
vendiquées qu'aux encheres, après llne efiimation' judiciairement faite; il les acquit néanmoins par une voie indireac & frallduleufe. D'abor~ il les aliene. à Jofeph Daumas; le même jour, cet acquéreur les tranfporte à Laurens
Daumas fon parent; Cefar' Fabre exerce le retrait huit jours
flprès.
.
.
. .
~I1s fouiin.rent enfuite que la refiitution des fruits étoit ~~Ie
depuis le tranfport j ils ciroient les Loix 14, &. i6, Cgd. de
prœdiis & aliis; Le Cardinal de Luca', dans fon Traité
de Regalibus, di[c.. 30, n.· 3,- ob[erve que dans eene matiere de la refiitution des fruits, on difiingue le cas de la.
nullité de Faae & celui de la refcifion.; qu'au premier
cas, lia refiitutlon des fruits a lieu, qu'il n'en efi pas de
même au [econd : ln hac materia !ruauum diflinguilllr ail.
aaus impugnetllr eçr capite nullitatis, veL capite refcifio,nis,
I}/ primo caJu intra eorum rejjitutio , fecùs autem fecundo. M..
Julien fur nos Statuts ,. rom. 1,. pag. 242, anene, d'après
Maffe, que les fruits fone dus depuis le tranfpOl:t, quand il.
eH fait fans formalités..
.
- Jofeph Daumas répondoit qu'il1avoit été obligé .;le fair~
ajourner fes freres & fœurs,. par. exploit -du 6 Août 1766,en pai~ment de t 3) Iiv. lOf. qu~ils lui devoi,ent en qualité:
d'héritiers de leur: mete. Trois jours aBrès, les p.arens a[-·
femblés. pardevane le Juge à la TCquifition du tuteur & du.
curateur, déliberent, pour· éviter: plus grands frais, çe qé~
femparer des fonds en paiement, d'après l'efiima!ion qui en·
kroit faite•. Deux EXp'eqs font .nommés dans l'affemblée.:
Ke. e 2.'
DU
PAL AIS
DE. PRO V B NeE.
�404
Jou RNA L
même; le Juge reçoit leur ferment, & l'emme fut faite;
elle porta fur deux morceaux de terrein, dont l'un en France, "
& l'autre en Savoie; ils furent donnés à Daumas en paiement d"es 13') liv. lOf. Ce dernier qui ne pouvoit, de
Toulon 011 il avoit fon domicile, ni les exploiter ni les
veiller, les vendit au prix de 16') liv. lOf. à Laurent Dauruas, de la main duquel ils palferent quelques jours après
à Cefar Fabre, par la voie du retrait lignager.
La vente fut nécelfaire; il n'y avait pas d'autres mqyens;
pour arrêter les pour[uites d'un créancier légitime, que de
donner du bien en paiement. L'inventaire jufiifie qu'il n'y
"avoit point d'argent monnoy~. Il n'y avait p~s plus à compcer
fur les meubles; cous enfemble n'auroient pas rapporté dix
écus. L'inventaire ne préfente que des guenilles; coutes
d'ailleurs fi nécelfaires, qu'il eîlt fallu les remplacer par
d'autres ," fi on fe fût décidé à les vp.ndre. Les outils de Maréchal à forge ne confif!:oient qu'à, un foumet, un enclume,
une' malfe , deux tenailles & un gros nlarteau qui valaient
à peine 24 liv.
Les formalités furent d'ailleurs obfervées; le confentement des paréns réfulce de la délibération du 9 Août; le
Juge l'autorifa par fa préfence & par fa fignature; il ne confie
pas de' l'efiimation, il ea vrai, mais il confie qu'elle fut
délibérée, qu'il fut nommé des Experts en préfence du Juge
pour y procéder, & qu'ils prêterent ferment. Les encheres'
auroient été préjudiciables, vu le peu d'importance des deux
morceaux de terrein ; ces formalités n'ont été établies que
pour l'avantage di! pupiUe & du mineur ; quand cet objet
ne- peut être rempli, & plus encore quan"d au lieu de procurer un "profit, il ne peue e'n réfulter que du préjudice, on
eft difpenfé d'en faire.
La regle ef!: connue: de millimis non curat Prœtor. Delà
vient que la vénte des meubles & effets des mineurs n'eft
foumife à aucune formalité; delà vient encore qu'on
'n'en exige aucune dans l'aliénation de leurs immeubles,
'iorfqu'ils font de peu d'importance. AinÎl jugé par l'Arrêt
rapporté par Duperier dans fes Note~ manufcrites, vo.' Re[-.
�DU PAl. A1 ~
ri B PRO V B· N C 1!;
.. 4°)
ci.fion, qui déboura de la caffarion, fur le_fondement que la
propriéré éroit de peu de valeur.
On n'eût donc fair que le préjudice des enfans en recourane aux encheres; ainli le jugerene la famille enriere _& lè
Juge, dont le fulfl'age eft- éxclufif de léfion comme de fraude.
Telle ef!: la difpofirion' de lâ loi tranfaélionis, cod. de tran[aa.; le fenrimehr de M. de Chaffanée, §. 7 .in verb. r qui
doivent fùccéder: toUi adeà prœfumptionem doli & merzis, ut
'1uœrendi poJleà [pes non fit ,fi interfuiffint confangllinei'; de
Rebuife fur l'article 93 de l'Ordonnance d~ 1'539 de·chirl}[J.
recogr;it. n. t-S, qui s'explique énergiquemenr en ces. termes re·
marquables : perinde id effe, ac fi palàm omnibùs coramqu.e Jùdice- geflum fuiffit negotillm, & de DumouHn, conf. 2., 'n o •
) , qui va jufqu'à dire qu'il n'y a plus à compter fur'aucun
moyen, quand même on eût rraité avec une perronne prohibée , etiamfi geJlum fit à perfona prdhibita.· • 1
r On fe retranche donc inutilement fur la/léfion;' des parens
affemblés pour épurer la fucceffion de leu'rs neveux, ne font
pas cenfés fe réunir pour faire leur préjudice; la loi préfumé
mieux d'eux; elle fe n:pofe fur leur aflèéHon du foin de faire
leur avantage. C'ef!: pour leur bien qu'elle efl:ime qu'ils n'ont
pas fait tour ce qu'elle a exigé; il fuffir qu'il lui apparoiffe de la .néceffiré de l'aliénation & de l'urilité de l'emploi de~ den'iers, pour que fon vœu foit rempli. Ces condirions, pour
la fûreré defqùelles elle a requis rant âe form'~lirés, la farîsforlr, & quand il en confie, elle méprife les. "clameurs des
enfans.
. \
Il ne peut d'ailleurs s'agir ici' de 'léfion ; il eûr fall\! gue
les enfans en euffetlt pris la voie; ils ont opré pour cèlle dè
la nullité; en fuppoCanr donc un préjudice pout.eux du côr(: da
prix, il ne faudroit pas moins l~.s débourer 'avêc"âépens de
leurs fins en caffarion, Cauf de venir· par lerrres de refcifion.
Confie-t-il d'ailleurs qu'ils aienr été léfés! Quand même les
morceaux de terre., que reçut leur frere en paiement, auroient
valu quelque chofe de plus, ils n'auroient pas fuffi à le payer,
parce qu'eri joignan.r aux 13) livres 10 fols qu'ils lui devoient, les intérêts de la légitime & les dépens' du procè's.
�'406
. ,J
Q' U Il, N
~ L
~
li plus"value' fuppofée auroit ~té infuffifarite. D'autre part·;
fi Daumas a troûvé un bénéf.ice Q.e 30 liv. fur la vente, c'ef!
qu'elle fut faite à crédit, & fouveQ-t la convel),ance bien plus
,
que la valeur détermi,ne le prix d:es cho(es.,
Il y'a plus .C co,nünuqit Jofeph, Dau,nùls) la, for.malitéïles
ellchercs- fût-ell.. dl! rnÎ.tl.!re <\ ne 1 ppuvoir être;, couverte" &
eût'-on 'o,mis les t·çoi!; aU,tFes qu'oo eut atren,~ion cle remp-lir,
l'aél,e teroit éga,lért)ent ,léga.l,-paree qU,'au lie,u, d'llpe vente,
,il n'eft, au fOl)qs qu'un pâ,r-raO'e , ~ q,o. n'X- fit qu,e d.épartir
à Jofepa J;>'!~mas.lq portion des Q~eJ+S, de l'a 1l}a.ifon q~i lui
reve,qoit.' J?'our rai.[q.IJ, d:e ,ce, il n'e'~ ni Loi, n) Arrêt, ni
A~t.eur qIJi, ~jt ~xigé la. I)).oifld,~e fouriali,t~. Ç'eH ici un hé·
ririer de fon pere" qui n'a pas. dif'c.on-tipu~ 4e fêtre, nonobftant' fes' accorls 'avec fa, mere, jufqu'à çOl')currence de ce
'qu'elle lui oevoit. Il eft de plus légitimaire fur la fucce~on
maternelle; & dès - lors il étoit pOrtionnaiJ:e des. biens de
~Qaqu.e 1)éréqité: L'enfant péue fe~jrer de la maire des biens
11(la 'maifon, la .portion qÎJ;i lui corn pete , /àns le recours
CIes f6rrl"ll;ir' s; P9ur j04ir <le Ca, porriàn, il n'eH: pas obligé
ae recourir au JiJl~e, d''affeil)bler les par,ens, & de vendre
jlux ~ncheres. La r~latiere n'el'ige rien de pareil; point d'obli·
,gation d'agir aveç' co'u.t cet é~lat en fait, de partage & de
paiem~nt d'e légi,ti01e•. Ce !j'c'U que popr les ventes que les
'ce cas que les Loi"
formalités,font reqJ)ifes; Ce n~eft"qLle
les /ixig'ent. Dq,mat, d.ans (es' Loix ciyiles, pag. 8, n. 1);
~n fait un~ regle: Les Loix, dit-il, qùi prefèrivent de certaines formalités, s'interpieient 'de façon qu'on nè les applique
pas qudelà de leur. difpofition " à1ides c.anfêquwces & pour. des
j.
•
A,.,t
•
"
cas
qu' Iel f.s ,ne'''"''
s den deM PQmt.
,um Jtous
les Auteurs
atIe'Hém ~ ,~4'QÔ :'pe~ç ~Iiéne( les,;bJen~,\des mineurs, & c~uJl:
a~ ~cfrIG?tt}P11S, nonobftant le,s (~éfenCes, du t~Hàteur, &
fans r,ecoutlr à aucune, formalité, 10rCqu'11 s'agit de payer
Jes eil'fan5 de la maiCon. Decormis, COOl., 2, col., 376 /x.
_716', ,è,H ê~~lès fur ce. p,oi,nt,' alnh qu,e. G1.ljpage, quefL96;
l"aber', Cod. de in, inuq,. reJii!,:, déf. 2; ~ c'efl:, ce q ijfUf
,exprèlfémdnt jugéi par Arrêt du 16 Avril 1768; rendu' 'Iprès
jÎ.a'rra&e,; M? d,e,~ Crotes Ra!'porteur, .& M~ de S.aint~Mar~
dflns
�D u PAL AIS :n E "P lt 0 V Il N C J!:
407
Gompartiteur, en la caufe d:Arnbroife Gravier & de 1,ofeplL
Ventre 3e la ville de"C;;olmars. Une rnere en mariant fa
fille lui con!!:itua 600 liv. en dot, & lui défempara, en
paiement du legs que fon pere lui avoit laiifé, une terre ,de
la valeur de H7 liv., dépendante de la fucceflion. L'hériri.~r
quérella dans la fuire cette défemparation, fur le fondement
qu'elle avait éré faite fans ,aucune,formalité; il fut débouté
de fa demande.
Quant à la fraude, il difoit que pour pouvoir l'établir ,
il faut le concours de deux circon!!:ances; la premiere, que
les biens que poifede Gefar Fabre euifent appartenu aux pupilles & aux mineurs; la feconde, que la Loi qui çéfend
aux tuteurs & curateurs d'acheter les bi~ns de le~rs pupilles
, & de leurs mineurs, leur eût également prohibé de fe charger
d'aucun bien qui eût éré li eux. Or, en -fait, les biens que
Gefar Fabre poffede, n'ont jamais appartenu aux mineurs, ils
ont toujours formé la portion héréditaire & légitimaire de
Jofeph Daumas leur frere; & en droit, la Loi ne va pas li
loin qu'on le fuppofe, elle fe borne à défendre aux' tuteurs
& aux curareurs d'acherer de leurs pupilles & mineurs. Ce
n'e!!: donc pas y contrevenir, que de retraire un bien qui
leur a. appartenu. U ne fois forri de leurs mains, ce bien
n'elt plus à eux, la défenfe ceife, l'on rernre dans le droit
commun, & par une fuite de la regle, omne permij]nm,
quod non prohibitum, rien de plus licire que d'aclleter de
leur acquéreur, & encore plus de retraire fur un fecond poffeifeur. La garaRrie que Fabre demande conrre Jofeph Daumas n'e!!: pas fondée, pa,rce que ce n'e!!: pas à lui que la
vente à été faire, mais à Laurens Daumas, qui n'e!!: ni parent, ni perfonne prohibée, ce qui exclut toute idée ,d'intelligence & de collufion de la part de Jofeph Daùmas avec
le curateur. Ce qui rend encore plus la garantie infoutenahie, .c'e!!: l'offre que les dernalldeurs ont fait à Cefar Fabre
de lui rembourfer fes deniers; par-là ils ont rempli fan intérêt~
. Par Arrêt du 16 Juillet 1779, au rapport de M. le Con[eiller de Chenerilles, le tranfport fait à Jofeph Daumas fue
-
\
,
,
�408
.' , Jou RNA. L
caifé avec refl:itution de~ fruits depuis le ,!2' ~?ût 1766;
l'appel incidellt fut" rejett9 ; ,F,abre fut con~~m.né. aux 19é~
pens, & Jofeph Daumas à le relever & garantir; écrivant
Mes. Sauvere & Cauvet.
.
(
ARR Ê T
'L II.
)
•
Quelles font les ,caufes qui peuvent donner lieu à la féparatioa
de corps entre Mari & 'Femm~ ?
L
.
.
E fieur {3erard,' Marchand. de la ville' d'Arles, [e maria
avec la' DUe. Roman; cette femme fit d'abord rous fes
efforts pour introduire fa mere dans la maifon de fon mari;.
celui-c.i avoit encore la fienne : cette ~irconHance & des
arrangemens dmnè!1:iques ne lui ·perm.irent as de condefcendre,~u:'defir de' fa :belle-me'~e; eUe eq '!'narqua fon reifen~iment ;_ i.l n'e!1: forte ~e.,propQS , dFProcédés & d'infpiratipns. qu'elle ne .t::1Ît en œuv~e. S.a fille '~roit l'inihument
qu'elle [aifoit agir à [on gré: aux prieres & aux inv!:arions
fuccéderent les plaintes, les reproches, des aggreffions tantôt cland eihnes, tag,tqc. pll,blique.s,. des querelles, des injures. La patience n1abando.nnoit point le mari, fa raifon
le f~uten,?it; }n~îs li! eit ge ces inHans où la violence de
l'att-aque permet la fenfibilité. de 'l'olltrage; & fi le moment
d'une ju.He vivacité put iaiifer échapper un trait d'impatience,
ce fut moins reffet ge, 4, b.ruta1}té que. c.elu,i., de la provocation. JQue\.9ue, rolé~'ance ,que Eon .pui;ife apporter ,)1 eH un
t~r!tle~où I~ nature fuccombe. ,C'elt d'apr~s ces, agnceries
.conliquelle,~ .que I~ DUe. Roman :pouifa '(on mari à l'extrê,mité; la fui!e précipitée que [i premiere informiltion conf.tare, 11e jufl:ifie que nop qu'elle éroit aggrefIeufe, qu'elle
lui avoit man.qué & q~'elle méritoit d'ep ~tre reprife. .
La'DUe, Roman fit prendre une information civil.e qui
,n.'abouuit à autre; ch.ofe q.u'~,manifefrer la caufe. de la viva,cité .'lui l>voit p'orté.e à, fodir de. la mai[on de ion, mari~~ ce
dt:Iau,
�li U
PAL AIS
DE
409
PRO VEN C B.
'défaut de fuccès l'engagea à l~ rejoindre, & elle vécut avec
lui d'intelligence jufqu'à ce que les 1nfiigations eulient fu{ci,té de nouveaux défordres. La belle-mere impatiente &
jaloufe , s'irriroit de fentir que fa fille ne faifoit aucun pro-grès POUi' arriver à fon but, & c',efi à la fuite de ces menées
fourdes, & quelquefois publiques, que la DlJe. Berard prit
la réfolution de s'évader , empor~ant avec elle des eHets, &
fe flattant de trouver dans cette féparation volontaire & dans
cette fpoliation importante, un moyen pour déterminer Fon
mari à rem plir fes vœux.
• Dans ces circonfiances le fieur 'Berard préfenta requête au
·Lieutenant d'Arles le premier Juillet 17.78, & demanda
'qu'injonél:ion feroit faite à la Dlle. Roman de le rejoindre,
fous l'offre de la traiter maritalement; qu'inhibitions feroient
faites à la l'cuve Roman de fréquenter la maifon de Fon beau.fils, à défaut il demanda l'ajournement.
Cette requête fut fignifiée; la" Dlle. Roman annon~a dans
fa réponfe une procédure en féparation; le fieur -B~rard' préfenta une requête incidente le 29 du même mois) à l'effet de
la contraindre à faire procéder incelfamment à cette feconde
:information; il demanda également à prouver l'en'Ievement.
Le Lieutenant rendit une Ordonnance qui, fournit la Dlle.
Roman à faire procéder à cet~e information- dans 'quinzaine.
Elle y fit procéder; il ne réfulte amie chofe-de la premierc
information, fi ce n'efi qu'un foir -la Dlle. Berard fortit de
la maifon de fon' mari, criant au [ecours, & que le -Sr.
Berard fe hâta de la venir prendre pour la forcer de rentrer;
il la faint par une flotte de fes cheveux, & la fécquant à
coups- de pieds, il la fit rentrer.
1
Su,t les' défenfes re[peél:ives, le Lieutenant rendit fa Serrtence définitive le 10 Oél:obre 1778; il débouta Marguerite
Roman de fa demande en féparation, lui enjoignant de rejoindre (on mari- par tout le jour, à la charge par lui de
la traiter maritalement, & il admit la preuve de l'enlevement. Appel de la part de la femme pardevant la Com.
Le fieur Berard, pour le [ou tien de la Sentence, di(oit
que les loix au ti,tre du digefie de [oZut. matrimon. & de ripta
,
Fff
�410
Jou
RNA L
nupt, , nous apprennent que le mariage efl confortium omnÎs
vitœ, une communion de touS les biens & de tous les maUle.
Cette maxime que les Payens nous ont tranfmife ( eux qui
ne fe régloient que par des principes d'honnêteté morale")
doit être plus exaélement fui vie par des Chrétiens, non
feulemel;lt parce que le mariage efi parmi ces derniers plus
indilfoluble que chez les Payens, mais encore parce que
c'efi un Sacrement qui a la charité pour bafe.
De cette idée, par-tout accueillie, il doit en réfulter que
la f.bparation ne fe permet que dans des circonfiances trèsgraves, encore faut-il les examiner fqflpu,leufementpoflr conpoltre fi la demande n'efi point produite par l'animofité; il
faut chercher fi la femme A'a contribué en t;ien aux procédés
dont elle fe plaint, & fi c'efi un mal d'habitude chez le mari;
car on ne doit pas admettre la preuve d'un mauvais traitement unique ou palfag~r.
,
'
U ne autre dif!:inélion non 'moins folide c'onfifie à vérifi~r 1é,tat ~ la' conqition' des Par~i~s , Nrce que celles d'un
rang plus,' 'élevé q):>tiepnel1t, ~eur féparation pour, des faits
moins graves. La multitude 'de ,ces confidérations a fait dire
aux J urifconJultes qu'il ef!: bi~n djfficile de fixer la' caufe lé•
gitime de,)a,/éHarati9J1H," . . "
Pothier ,en 'fon, Trait' du~ Contrat. de Marf~ge, part. 6,
chap. 3, irt. l ,,'Ril-g: ~'78 ,. indique la cogduite que la femmlè
doit tenîr env~rs (qn mari,: ".~lle ne doit oppofer, dit·il ,
"'. que la ,patience aux mauvaifes manieres de fon inari &
" même à fes mauvais trajremens.....Cela ne doit pas l'em" pêcher d'aller dans t,ou.te:; .le~ 'occauons au devaqt .dç [op.
" mari, & elle ne doit pas le quitter à moins' que leê chofe~
" ne fojent portées au~:.plu~ g~an,des c;xtrêmi1i~s, "
.
La réfoluriol1 de cet Auteur à indiquer les caufes de, fé.
paration parolt vacillante, parce qu'on .ne fauroit agir ,avec
trop de ménagement quand il faut d'anéantir l'union cop-.jugale; la facilité de la réfoudre l'endroit ,cet état faiAt,J~m~
blable à un aél:e de commerce ou de conven:ll1çe, & perdroit ainfi fon augufre caraélere & fon éclat. Il eil: vrai que
Pothier laiife à la p.rl.ldenc~ &, à ~'arbitrage' du Juge le foin
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P
À
LAI S
D-E
PRO VEN C E.
4 Ir
de diftinguer le 'degré de ce qu'une femme doit fouffrir, pour
y appliquer le principe de la féparation ; il blâme J'un &
l'autre excès d'une volonté, ou facile li. accorder la' féparation pour des difcuffions paffageres , ou trop difficile quand
les choiès font portées à une haine invétérée. Le même
Auteur attefte, il eft vrai, que les mauvais traitemens font
une caufe de féparation; il cite le témoignage d'Innocent
III. au chap. 13, extrà de reft. fpol. Si tanta fit viri f(fivitia
ut mulieri trepidanti non poffit fufficiens 'fècuritas provideri ,
non folùm non debet rejtitui, fed ab eo potiù~ amoveri. Il'cire
un Arrêt du Parlement 'de Paris q'ui ordonna la 'féparation ;
il s'agiffok de la femme d'un Tr~forier de France dont la
condition méritoit des égards ,- & il Y âvoit 'de la vart du
mari des traits' multipliés d'un mépris infupportable infpiré à
fes enfans & publiquement affeél:é, qui rendoit la pofition de
l'époufe' des'plus accablantes.
'M~ Cochin,' tom. 4' de fes Œuvres, pag. 97 , obfetve
" qu'il faut qu'il ,n'y ait point de fûreté pour la vie dé H.
" femme, que les févices & les mauvais traitemens foient
,; portés aux excès les plus violens." Denifart, va. Séparation, 'pag. 494, dit" que fi les faits a-rciculés par la femme
" n'annoncent' point dans le mari une ,férociré de caraél:er~
;,' q'ui .faffe craindre pour les jours de la femme, elle n'è
;; 1 peut ~tre ad mire' à la l pteùve, il faut alors la déclarer non" recevable; l'ordte public, la dignité du Sacrement '& lé
;, repos des familles exigent cette févérité dans le Magiftrat."
Bafrrage fur l'art. 391 de.la coutume de Normandie, & Lacombe font du même avis.
Mais quel doit être ce degré de férocité? Pourroit-on y
comprendre un moment de colere fugitive, dans lequel un
mari auroit battu fa femme? Combien de féparations ne verroit-on pas introduire au Palais, fi ce fyftême étoit éCOUlé?
Le 'plus Couvent même, c'eft la femme qui s'attire un mauvais procédé, qui devient pour ainfi dire néceffaire parmi
les pléblées pour corriger une inconduire : auffi a· t-on vu
fans ceffe que lorfqu'une femme eft venue Ce plaindre d'un
feul & unique mauvais traitement, tel que celui d'avoir élé
F f f 2
�4U
JOl1RNAL
l,-
battue,' la Cour, par fes Arrêts, a toujours rejetté fa réc1a;
mation ; tel eft celui que Bonnet rapporte au mot SéYices,
pag. 34'),
-_
Telles font les Loix & la Jurifprudence qui guiden~ la
décifion que l'on doit.p,orter fur une demande én féparation, les bornes ,el} (ont ind~!wées. II ne, s'agit donc .plus
que d'examiller fi les févices, dont.la DUe. R9man fe plaint,
font de'la nature de celles qui ont' été défign~es. Non feulement il y a un intervalle immenfe des preuvès qu'elle ap~
1?0I;,e, à celles qu'elle -dçvFoit fou1'l1ir, mais il n'y. a même
!ien- dans"fes informations dont elle ,puilfe , tirer avantage;
}ion y) v<;>i,t a,u COJQtr'lire ,,:,qe If-, part, de la fem:ue, un efprit
de morofité &. de mutinerie 'repréhenfible; on y entrevoi~ .
l'intention blâmable d'avoir fomenot~{t1es, procédés contre
lefquels elle fe récrie, & la -caufe de cette fomentation n'eft
autre qu'un complot tramé pour faire, fortir la DUe. Berard
Ilet
fon
fils, & fa faire remplacer
par
mere de ~a maifon
•
,
•
'.
la veuve Roman.
1
• '1 •
'.'
1
1.
On faIt que les belles-merès' font qùelquefois difficiles;,
.mais dl-ce une raifon pour _fufciter le trouble & la révolte?
Combien des belles - filles ont fou/fert ces petites rév~lu-:
lions?" Le~ maris ne leur donnent-ils point l'exemple de l~
patienci & de la modération? E.t fi le fils to~ere ,de pareils
!rouble:; domelliques, la femme, qui eft un fecond luimême, ne doit-elle pas avoir la même tolérance?
Le fait rappellé dans la premiere information, ne pré.
fente point le pér!1 de la vie dont parlent les Auteurs: où
font les rechûtes? Un moment de colere jullement excité'feroit-il regardé comme un de ces févices propres à légitimer une féparation? N'ell-ce pas le cas de dire avec touS,
les Jurifconfultes, qu'une aél:ion fugitive, ifolée & purement
accidentelle, n'a jamais été, au vœu de la Loi, une raifon
de divorce?
II eft tellement vrai que cette dilfention procédait du
chef de la femme, que, perfuadée de fon tort, elle fe hâta
de rejoindre fon mari. Cette reconciliation produit coorre
elle une fin de non-recevoir infurffiontable. Pothier, pag.
1
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PA1.ÂIS
DE
PR-OV:lNCE.
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-19Q, djt " que lorfqu'il a éclaté un commencement de
rupture entre un mari & une femme, qui a été fuivie d'une
reconciliation, les faits de mauvais trâitemens qui ont
précédé ce commencement de rupture, font couverts par
la reconciliation qui rend la femme non-recevable à s'en '
plaindre; c'eil: pourquoi la femme ne doit _point par la
fuite être écoutée dans une demande en réparation, fi ce
!' n'eil: pour des faits nouveaux qui fe roient paJIés depuis
" la reconciliation. "
_Pas un des témoins ouis dans la feconde information,
n'atteil:e que la Dlle. Roman ait été battue par fon mari;
ils n'indiquent rien de plus que la méfintelligence qui régnoit entre la belle-mere & la belle-fille, parce que la prerniere im?rouvoit ce qui écoit fait par la feconde.
. Par Arrêt rendu au rapport ~e M. le Confeiller de la
Boulie le 17 Juillet 1779, la Cour ordonna que la Dlle.
Roman rejoindroit fon mari par tout le jour, & rapporteroit chez lui fes hardes & effets; écrivant Mes. Jacob &.....
"
".
"
"
"
"
===~=~===~===,_.,
ARRÊT
LIlI.
Caraë1eres d'une Banqueroute fr~uduleuft ..
E
N l'année 1763 la DUe. Gannivet veuve Fache, Boulangere de la ville de Marfeille, fit un billet à ordre en
faveur de Pierre Chabre fon Garc;on, de la fomme de 122)
liv. pour falaires de douze années de travail qu'il avait fait
chez elle.
Chabre n'étant pas payé fit ajourner la DUe. Gannivet en
condamnation du montant du billet & des falaire,s d'une der~iere année de travail; il obtint le 10 Novembre 1768 une
Sent.ence qui fit droit à fa demande avec contrainte par
corps; les Juges - Confuls lui accorderent une contrainte
forcée, fauf un mois, par décret du 12 Décembre 1769.
La DUe. Gannivet déclara appel tant de la Senten,e que du
�1 44décret
JOURNAL'
forcé, & demanda à la Cour un tout en état qui
lui fut accordé.
Le procès écoit pr~t à recevoir jugement au rapport de
M. l'Abbé de Clapiers, lorfque la Dlle. Gannivet fit fignifier à' Chabre l'Arrêt qui homologuoit le concordat paffé
avec fes créanciers; Chabre préfenta une Requête incidentè
en tÎerce oppofition envers l'Arrêt 'd'homologation , &' de..:
manda le foulevement des défenfes qui y étoient décernées.
La Dlle. Gannivet offrit alors un expédient; elle con~
fentÎt à la confirmation de la Sentence, & à ce que Chabre
fÛt payé à raifon du la poùr 100, conformément au con~
cordat.
.' ,
. Chabre en offrit un de- fon côté qui confirmait la Sentence & faifoit dr~it à fa Requête incidente; pour, le foutenir, il difoit qu'il eft certain q'ue le débiteur failli qui a ufé
de dol & di:: fraude, eft réputé banqueroutier frauduleux.
L'article -1.0 du titre 1 l de l'Ordonnanc~ de 16'73 , lui donne
cette odieufe qualificatiol'l : Déclarons, dit-il, Ibanqueroutiers
frauduleux ceux qui auront diverti leurs effets, fuppofé des
è~éanciers, ou déclaré plus qu'il n'était dû aux véritables créanClers.
Delà, le créancier qui n'a point été appellé lors du
concordat, ne peut point être lié par la pl~ralité ; celui-là
même qui l'aurait figflé, celf~roit de l'être par la fignature ,
dès qu'il feroit en état de fournir la preuve que fan débiteur cft coupable de dol.
Chabre fe' plaint de ce que la Dlle'- Gannivet a enlevé,
fur le point de faillir, fes, effets les plus précÎeux , & les a
fait tranfporter dans la maifon de fon parâtre j il offre d'en
rapporter la preuve la plus complette. La preuve doit être
reçu~ : fraus, dit Dumoulin fur la Coutume de Paris, §. 23 ,
Glof. 2 , n. 19, confiJlit in circumJlantiis faai, quod probandum éfl per teJles. C'en encore l'opinion de Brodeau fur Louet,
lett. F. , Somm. 7,
Suivant lui, indépendamment de l'enlévement d'effets dO!1t
il offre la preuve , & qui caraél:érife le dol, la Dlle. Gannive.t le trouve encore dans le cas d'avoir altéré, augmenté
..
..
~
,.",
�D U PAL AIS
D E
PRO VEN C E.
4 1,\
(lans [on bilan les créances; ~lIe a plus déclaré qu'il n'étoit dû aux créanciers; le verbal d'affirmation en fournit la
preuve.
L'Ordonnance de 1673, tit. 1 l , art. 2., veut que ceux
qui auront fait faillite, foient tenus de donner à leurs créanciers un etat certifié d'eux de tout ce qu'ils poffedent & de
tout ce qu'ils doivent" ce qui eIl: encore ordonné par la
déclaration du 13 Juin 1716.
, Le failli eIl: donc obligé de donner un état exaél: & détaillé,
autrement il tombe dans un délit puniffable qui le rend indigne de jouir du bénéficé d'un atteqIloiement; indignus efl
beneficio Iegis, qui in legem commitlit.
Il réfulte encore du procès-verbal d'affirmation, qu'il eH:
des créanciers qui n'ont point affirmé leurs créances, qubiqu;ils aient figné le concordat. Or l'obligation de la part du
c~éancier d'affirmér devant les luges-Confuls, efi: tellement
étroite, que le 1 défaut' de cette affirmation le fait déch.eoir
~e fa créa!lce, le ,rend fufpeél: de dol, & le .fait par conféquene regarder comme un créancier fuppofé par le failli; -ce.
qui eIl: précifémenc établi par les Déclarations du Roi des
13 Septembre 1739, & 7 Janvier 17 60 •
.
La DlIe. Gannivet foutenoit que Chabre n'avait que la
voie criminelle pour confi:ater les fraudes qu'il lui imputait;
mais on lui répondait que le délit produit, deux aél:ions , la
~ivile & la criminelle. L'on peut intenter ou l'une ou l'autre;
{!x quoique toutes les dellx partent de la même fource, elles
9nt cependant une voie différente; la premiere tend ad rei
vindicationem, la feconde au contraire porte ru'r l'intérét
public, ad vindiaam. C'efi: C.e qu'on ré[ume des Loix .prel11i~re & derniere, cod. de [urtis & fervo corrupto. Le' choix
oe l'aél:ion civile ne fait point perdre la criminelle, lorfque
le crime intéreffe le public;' mais' s'il ne s'agit que d'un
crime privé, & qu'il n'ait qu'un objet, l'option de l'aél:ion
civile opere une fin de non-recevoir contre la criminellè,
aItera eleaa , alteram confumit. Cette difi:inél:ion eH tirée de
la Loi qui fervum 34 , ff: de obligat. & aaion. , & elle efl:
obfervée dans la Pratique. On peut voir 1~-de1fus Boniface
�"416
Jou RNA L
tom. ~, liv. 3, tic. 12 , ch. S ; & Bonnet lett. A, pag. 3;
En partant de ce principe, il dl: certain que Chabre
dans les deux aaions qu'il a, a eu le droit de choiGr l'une
plutôt que l'amre; il a donc pu Ce· décider pour la civile qui
va au même but, qui ell: de parvenir, par la preuve des
fraudes qu'il préfente & par celle qu'il oJJ;re encore de rapporter, à fe faire payer de fes falaires. Il n'eût jamais imaginé qu'on lui fit un crime d'avoir opté pour la voie la
moins rigoureufe & la moins douce, tandis que la DlIe.
Gannivet fe trouve dans la circonll:ance d'encourir une peine
.
affiiaive, s'il fe fût déterminé pour la criminelle.
Le concordat ne peut point être oppofé à Chabre dès qu'il
a demandé la révocation de l'Arrêt qui l'homologue; la
Déclaration du 11 Janvier 1716 ne dit pas que le créancier
fait obligé, POUt faire tomber le concordat, de pourfuivre
extraordinairement le; débiteur failli. 1;.a Déclaration du 13
Juin de la même année laiffe à l'arbitrage de Meffieurs les
Gens du Roi ou au créancier le foin de pourfuivre le -débiteur. De .forte que tout relle dans le droit commun. L.
créancier a toujours la liberté du choix dans fes deux actions, il peut opter plutôt pour l'une que pour l'autre. Il ell:
-eonféquemment indifférent qu'il prenne la voie civile; &
lorfqu'il fe détermine pour celle-ci, il doit être écouté, foit
qu'il préfente la preuve du dol, (oit qu'il offre de la remplir.
Par Arrêt du 17 Juillet 1779, au rapport de M. le Confeiller de Thorame fils, la Sentence fut confirmée; les in· '
hibirions & défenfes furent révoquées j les Parties furent remifes au même état qu'avant le concordat: permis à Chabre
de continuer fes exécutions, & la Dlle.- Gannivet fut condamnée aux dépens i éc.rivaot Mes. Doulet Fortunay &••••
..
•
•
ARRET
.
,
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PALAIS
DB
ARR Ê T
PR.OVENCB.
'4 1 7
L 1 V.
Sur le droit de rachat accordé aux Communautés.
'L
1
ES moulins & fours du lieu de Tourrettes n'étoient
point originairement bannaux. En 1') 13 le Seigneur du
lieu ayant réclamé colltre la Communauté diverfes redevances
feigneuriales , relies que .la tafque, le dmit de caucade ; &
ayant foute nu que les habitans étoient en ufage de porter
leur bled aux moulins & fours qui lui appartenaient, elle
lui oppofa la non-exifience de la bannalité & le droit qu'elle
a~oit d'aller moudre le bled & détriter les olives, non feulement aux moulins du Seigneur, mais encore à ceux des
particul iers..
Pour terminer ces contefiations, il fut palfé une tranfaél:ion le 30 Juin 1')13 ;- dans les articles 9 & 10 il fut dit
que les habitans feraient obligés· d'aller moudre & détriter
leurs grains & olives dans les' moulins du- Seigneur" mais.
qu'ils auraient la faculté d'en conHruire fuivant leur volonté,
en payant par eux une cenfe d2un fol pour chaque moulin& paroir.
Il en fut paffé une feconde le 20 Juillet 1')27 ,- lors de
laquelle le Seigneur donna à nouveau bail à la Communauté
plulleurs droits feigneut'iaux & tous 'ceux qu'il avait fur les
moulins, fours, & fur le fonds de ces immeubles, moyennant"
l\.ne penfion féodale d~ trois cents qui~e florins, laquelle
ferait inextinguible & à perpétuité, avec la' faculté de con[-'
rrûire d'autres fours & moulins.
'
La Communauté pofféda les m{)ulins & les fours jiJfqu'en
164'3 , temps auquef::, forcée d'acquitter fes dettes & d'en
faire un département, elle aliéna les fours au lieur d'Augery,
& les moulins· au Sr. Henricy, [es créanciers, pour la fomme'
de 1') 17)- liVl
. - Le Seigneur de Tourrette!> acquit· dans la fuite les fours
du fleur. Augery, &. exerqa long-temps après le retrait féodal:
. Ggg
�418
JOURNAL
lùr les moulins, la Dame de Ste. Cecile, fille du Sr. Hen. ricy, les lui défempara.
La Communauté étant autorifée 11. rentrer dans les domaines par elle alién~s pour caufe de département, préfenta
une requête 11. la Cour des Aides le 9 Décembre 1772, par
laquelle eUe conclut à ce qu'il fût laxé ajournAement contre
le fieur des Tourrettes, pour voir dire & ordonner qu'il
feroit condamné 11. délailfer 11. la Communauté les fours &
moulins par eUe aliénés, fous l'offre de lui en rembourrer le
prix fur le pied de l'acquifition, enfemble"les frais & loyauxCOÛtS, fi mieux il n'aimoit confentir 11. l'encada!l:rement fur
le pied de l'allivrementqui en.. feroit fait 11. connoiffance
d'Experts, enfemble de payer les arrérages de taille depuis
le 29 du mois d'Oaobre précédent, jour auquel la délib~
ration avoit été prife par la Communauté, ce qu'il déclareroit dans un temps précis, autrement déchu de l'option.
Pour le fou tien de fa demande, la Communauté difoit
qu'elle était en droit de rentrer dans le domaine des fours
& moulins par elle aliénés, fuivant les Arrêts du Confeil du
1') Juin 1668 & 7 Février 1702. Ces Arrêts permettent
aux Communautés de reprendre les domaines par eUe aliénés
avec franchife de taiUe , en rembourfant le Seigneur & tous
autres détenteurs du prix de l'aliénation, fi mieux les poffeffeurs n'aiment payer les tai1les "fur le pied dei autres bieni
roturiers de pareille nature & valeur.
Le Seigneur ne fauroit repouffer la demande de la Communauté, fans jufrifier que les domaines dont s'agit dérivaient
du fief, que ta bannalité avoit .été établie in traditione lundi; "
il eH: certain que le feul titre de la feigneurie ne donne "paS
-au Seigneur le droit de con!l:ituer· la bannalité fur les moulins ni fur les fours, comme l'obfervent Brodeau fur Louet ,.
lett. M., fomm. 17 ; de la Place dans fon Introduél:ion aux:
droits feigneuriaux, verb. Bannalité, pag. 81. Il faut qu'eUe
foit con!l:ituée par un titre exprès.; que lors de l'inféodation
le Seigneur l'ait établie en fe donnant des hommes & des
vaffau~; qu'il ait été 'convenu qu'elle feroit partie de la fei.
gneuCle.
1,
�4 19
La tranfaélion de l S13 ne parle aucunement des fours;
& loin de fuppofer une bannalité préexiftante & dérivanre
du fief pour les moulins, l'on ne fait que l'établir par le
titre, pu'ifque la Communa,uté foutenoit être dans la li,berté
de moudre fes grains, non feulement dans les moulins du
~eigneur , mais dans cous les autres.
L'Arrêt du Confeil du 1') Juin 1668 porte que les domaines baillés par les Commun-auiés aux Seigneurs des lieux,
en paiement des dettes légitimes, demeureront francs &
~xem pts de taille, au cas qu'ils juftifient qu'ils ont été aup~ravant' démembrés ou -qu'ils ont fait partie de leur feigneuFie, & qu'ils y font retournés par collocation, ou affignation
en département des dettes en exécution des Arrêts du Confeil.
_
L'art. ') confirme ce principe, en difant qu'à l'égard des
domaines qui n'auront pas procédé de leur fief & n'y feront
pas recournés par les voies fufdites, les Communautés pourront les reprendre.
La queHion fut décidée en arèitrage le 27 Août 1696 par
trois fameux Jurifconfultes de leur temps ( Mes. Decormis,
GaHaud & Gros) dans la caufe du Seigneur de Barles: leur
Sentence' porte que la Communauté devoit être déboutée
du rachat demandé fur les collocations faites par le Seigneur;
& fur -les tranfports & rémiffions faites au Seigneur des domaines de la Communauté; & quant aux biens mentiqnnés
en la collocation faite par Mouton en l'année 1643, ~ poffédés par la Dame de Grillet, ,ên la qualité qu'elle agir, &
!lutres biens que la Dame pourroit ·avoir acquis des créilllciers colloqués fur les domaines de la Communauté, la Corn.
munauté' fut recrue au rac'hat, comme elle l'auroit été contre
Moucon & autres particuliers, en rembourfant le prix &
loyaux-coûts.
,
Quand même il s'agiroit des domaines fortis originairement du fief, & revenus dans les mains du Seigneur par
une acquifition en, roture, ils ne p.ourroient plus être poffédés en franchife de taillè, & reprendre leur premiere no-'
bilité. C'eft la remarql,le de J'hilipi dans fon Traité de,
G g g 2;
DU PA I. AIS D E PRO VEN C B.
,
�1
42.0
0
U Il N
AL,
:
Summ& munerum, art. 88; & dans [es Arrêts; Arr. 30.
Ce rte queHion fut jugée par la Cour des Aides de Mont·pe.llier, dans une caufe évoquée de cette Province, & par
un Arrêt du 3 l Septembre 1670, rapporté par Boniface,
tom. 4, pag. 181; el1e.fut· également décidée par Arrêt du
mois de Mars 1633, com're le fieur de Peyrui, Co-[eigneur
de Montauroux.
'.
,.
Il ef!: indifférent que les immeubles [oient retournés a4
Se1gneur, par la vente ou par.la voie du retrait féodJll, Rarce
que le retrait féodal fubroge le Seigneur à la place de ll'ac~
-quéreut; il ef!: l'acquéreur lui-même. L'J. condition ç'eIl: pa ~
plus favorable, quand il ef!: lui-même acheteur, qu'e quar(t
-il fe fubroge à l'acheteur par le retràÎt, parce que dans tous
les cas il y a un changement de perfonne & de po!fef~
fion j & fui va nt tous les Auteurs, le retraY'J.nt fubintrat in
loeum emptoris & non ve/lditoris. ",
"
Ce's principes font tel1ement certains, qu'il eH de maxime, acref!:ée' par Latouloubre , au titre de's Biens l)obles.,
arr. 1'i, que les biens réunis par retrait, donnés e'nfuite
par le Seigneur à nouveau bail, & réunis de nouveau par
déguerpi!fement, fo'nt toujours roturiers..
Le Marquis de Trans répondoit que les fours & les moulins avoient été originairement démembrés du fief par les
Tranfaél:ions des 30 Juin l 'i l3 , & 2.0 Juillet 1)27, qu'il
était indifférent que les fours & les moulins lui eu!fent été
défemparés direél:emenr & immédiatement par la Commu.
nauté, ou à fes créanciers, dès qu'il les avoit réunis fur 'fa
tête. L'Arrêt du Confeil du 1'i Juin 1668 n'a~ parlé -d~~
biens bail1és par les Communautés aux Seigneurs que ..par
démonf!:ration, & non comme d'une cooditition e!fentieIlement requifè pour maintenir l'exemption de la taille. Si les
Arbitres ~ par leur Sentence· arbitrale, re<;urent laCommu.
namé de Barles au rachat des biens, poffédés par la Darne
de Gril1et, & fur lefquels Mouton & autres créanciers de
la Cbmmunauté s"étoient col1oqués, ~e' ne fut que parce
•qu'e.lle avoit demandé le rachat des b'iells contre ces partiçuliers avant .qu'en~
les eût ~cqui~~
... - ..
.
- b.~ jugemenp des Corn,::
~
~..
�4 21
rnilfa!res délégués entre le fie).!r de Valbelle & la Communauté de Rougiers, du, 1) Août 111 l , & l'Arrêt du 17
Juin 17°4, rendu, en faveur du S~5gneur..de Pe,yrui" n~ont
rien décidé POUr,ll~ ,c:aufe prSfeQt\1';' Hl!!i' ::reJ!dü" en fayeur
de la Communauté de Montfqrt, )e~;I4, J\1iti',1'j'r68',,'CjQnfirmé par l' Arr~t du Confeil' du ,8 )\1~i ~:n4 j la Province
& le Corps de la Nobleffe en ,qualité, a' jugé que le Seigneur
qui avoit acquis des ~réancjers de la Conimunaut~ ,les biens
qu'elle leur avoit défemparé pour caufe de département,
pouvoit fe [oufiraire au rachat.
,
_"
- Le feul cas où lès Communautés font fondées de repreQdre
[ur leurs Seigneurs les hiens vendu~ èn franchife de taille,
ell celui où ellès en ont demandé le rachat antérieurement
à leur, acquifition;, parce qu'il' efi alors vrai- de dire qu'ils
[ont les repréfentans du ,particl,llier çontre qui cette aél:ioll
aurait été réalifée, & que la demande. qu'elles en avoient
formé étant réelle, potte ,contre tous les poffeffeur~ : les auteurs du fieur Marquis de Trans ayant acquis les moulins à
huile par droit de retrait féodal du créancier à qui la Communàuté les avoit infolutondonnés, il eH cenfé les avoir
reçus direél:ement de la C~mmllnauté. Il s'appuyoit enfuite
.fur la tra(lfaél:ion du 27 Novembre 167h qui lui affranchiffoit cinq livres cadaftrales des biens roturiers, tels qu'il
,voudroit, à (on choix & option • •. laquelle application (écoit'il dit) il fera tenu de faire dans quatre années prochaines;
& fi après icelles applications faites, ledit Seigneur Comte ou
[es fucceffeurs alienent lefdits biens afJi;ar;ch~s ou ,partie ç/'iceux,
ils pourront en fubroger d'autres roturiers à leur place, à leur
,choix, dont la franchife & compenfation fera renaifJante•
. Cette application fut faite par une feconde tranfaél:ion
'du I I Décembre 1697, & les fonds y défignés confifillnt
en 16'articles des biens montant à )14 florins 4 rois, furent en conféquence tirés du cadaftre. çet affranchiffement
'fut fait par la voie de la compen[ation, puifqu'à l'époque
:de 167), III Seigneur avoit une matiere plus que fuffifante
pour l'opérer, au moyen de l'aliénation des biens nobles
faite par, ~s auteLlrs; s'il dl: nul, IX. s'il .Q'a pas cru devoir
,
DU
1
PAL.~~S, DE' PROVENCE.
•• ~ . .
_
....
�4U
.,
Jou RNA L
le foutenir; c'efl: uniquement par rapport- à la- forme; &.
parce qu'on fe borna à y énoncer vaguement les biens nobles aliénés par fes auteurs, fans entrer à ce fujet dans un
détail eXaél: ~ circon~aticié des biens, ainfi que l'exigeait
l'Arrêt du Confeil de 1702.
,
'
,.
Par Arrêt de la Cour des Aides- du 19 Juillet 1779, le
rachat fut permis, fi mieux le' Seigneur n"aimoit l'encadaftrement ; le Seigneur fut condamné aux dépens;
A.R R È T
,
LV.
Si la Lettre du Roi du rq Juillet 1778 écrire à l'Am/ral de
France forme une vraie déclaration de guerre, .capab.le di:
donner lieu d une augmentation de ·prime•.
Que valent les termes de déclaration de guêrre, hoHilités ou
repréfailleg mis dans les Polices d)AjJurance?
•
'1'Ofeph
& Georgé Audibert, Négocians de la ville de
Marfeille, agilfant' d'ordre des fieurs Lafont ai né & fils
~
de Bordeaux, firent foufcrire une police' d'affurance le 10
Juin 1778 par le miniHer'e de Me. Dalmas, Courtier, pour
la fomme de 83200 liv. , un tiers fur corps, & deux tiers
fur facultés, chargées fur le navire le Maréchal de 13riffac,
Capitaine Raymond Lafite, de forcie des Hles Françoifes de
l'Amériqre ; la prim~ y fut Hipulée à raifon du cinq pour
cent, avec cette co'ndition: que dans le cas de déclaration
de guerre entre la France & avec quelqu Puiffance Chrétienne que ce fût, avant l'arcivée du navire à Bo'rdeaox , la
prime ferait augmentée de 2) pour cent payables à l'heu":
reufe arrivée du navire.
Ce vaiffeau arriva heureufement à Bordeaux le 28 Juille~
de la même année, & le 9 Septembre fuivant quelques Affureurs fe pourvurent contre les fleurs Audibert en paiement
de 2) pour cent d'augmentation de prime fur les fommes
par eux affurées, avec intérêts tels que de droit; d'autres
�:0 u PAL A. l S D 11
PRO VEN C :Il.
.p. 3
AfliIreurs intervinrent dans l'inftance , & par Sentellce du
2.3 Mars 1779, le Li,eutenant de l'Amirauté de Marlèille
condamna les lieurs Audibert au paiement de l'augmentation
de prime f1:ipulée dans leur police.
Les lieurs.Audibert appellerent de cette Sentence. Premier
Grief. Ils di[oient que dans la police on y trouve la dau[e ,
en cas de déclaration de guerre ou de prife du navire, par excluliQn au cas de fimples hoflilités ou repréfailles.
Le 17 Juin '1778 l'Efcadre Ahgloife s'étoit emparée des
Frégates la Pallas & la Licorne' , & IJne Frégate Angloife
avait fait infulte au Pavillon François, en attaquant la Frégate la Belle-Poule. Le 10 Juillet le Roi éCl'ivit une Lettre à
M. l'Amiral, dans laquelle après avoir expofé les jufies fujets
de plaintes que lui avaient donné les Anglais, Sa Majefié y
dit : " Tous ces prpcédés injurieux, & prinéipalement l'in" fuIte faite à mon Pavillon , m'ont forcé de mettre un
" terme à la modération que je m'étois propo[ée , & ne me
" permettent pas de fufpendre plus long-temps les effets de
" mon reffentiment; la dignité de ma Couron e & la pro" teél:ion que je dois à mes fujets , exigent que j'ufe enfin
,,- de repréfailles & j'agilfe hoftilement contre 1 ~ngleterre ,
" que mes Vailfeaux attaquent & tâchent de s'emparer ou
" de détruire les Vailfeaux , Frégates ou autres Bâtimens
., apparrenans au Roi d'Angleterre, & q\J'ils arrêtent & fe
" faililfent pareillemellt de tous Navires lYJarchands Anglais
" dont ils pourront avoir occalion de s'emparer. Je vous
" fais donc cette lettre, pour vous dire qu'ayant ordonné
" en conféquence aux Commandans de mes Efcadres & de
."" mes Porcs, de ptefcrire aux Capitaines de mes Vaiffeaux
" de courre fus à ceux du Roi d'Angleterre, ainu qu'aux
" Navires appartenans à fes Sujets, de s'en emparer, & de
" les conduire dans les Ports de mon Royaume; mon in') tention eft qu'en repré[ailles des prifes faites fur mes Su.
" jets par les Cgrfaires & Armateurs Anglois, vous faffiez
1.> délivrer des commiffions en courfe à ceux de mes Sujets'
" qui en demanderont, &c. "
Cette, le.ttre n'I;ft point une déclaration de guerre; elle
�,
42.4
Jou RNA L
fuppoîe' des' holl:ilités de la paFt des Anglois ;eiIe autorif~
& 1 ordonne- les répréfailles de 'la- part des ·Fran~ois. C'ell:
poll:érieurement à l'infulte faite au Favillon fra.n~ois & à cettè
lettre du Roi à M. l'Amiral, que le Navire le M4Téchal de
Briffac ell: arrivé à Bordeaux; mais il n'avoit· couru aucun
rifque dans fa, traverfé'e. Il dt certain que j1:lfqu'à u!1e, époque po{;férieuré' à"l'arriv&è du N av'ire , les Cotfaires' Angloisont laiffé paffer·libremenf les Vaiffeaux Franç.oisqûi 'n'e .~e-i
noient pas de.l'Amérique féptentt'ionale " 0i!. qui. n'étoient
pas chargés des marchandifès de ce pays. Plufieurs. de- nos·
Vaiffeaux ont été arrêtés, vifités· & relâchés, quoique les
Capitaines Anglois connuffe.nt la lèttr'e du Roi d~ Francè·à
l'Amiral, ainfi qu'iJ confie par la déclal'ation faite en l'Am irau:r.é de ,Guienne par lê Capitaine Sebaftien Malvos, éoinmandânt la Clari, qui eH entré le 8 AOlit '1:778 dans la Garonne·, & eH arrivé le 10 dans le port.de Bordeaux.
~ La -proclamation du Roi c!'Angleterre n'a été publiée à
borr.dres que l'e 2.9 Juillët, & les lettres de marque ri'ont
été ~~:pédiée~ en' conféquence, que les.p.remiers i?urs du mois
d' AOI'It '; de [ofte" qùe nos N aV·lres, ~Ul ne veno~ent pas' des
Etats-unis, n'ont· point couru les rifques de guerre. Cette
foule de prifes, qui ont fait fupporter des peFtes ·immenfes
aux Affureurs, font" tôutes. poftérieures au 2.9 Juillet; & à
l'exception de celle du Squveur, toures' Ont été faites en
vert'u des lettres de marque; ,ce' N av.ire, faifi par des Fré':
gates du Roi, ne le fut même que parce qu'il fe ·:trouvoit
auprès d'un Port Anglois., où ceux qui le faifirent pou voient
l'amener pour fe faire aurorifer par les Supérieurs.
La feconde lettre du Roi, écrite à· M.I'Amiral·le 'i Avril'
'1779.' fixe au· 17 Juin 1778 le conimencement des hofiilités de la. pan des Anglois. Sa Majefié s'explique ainfi:" n
" s'eft élevé dIS doutes fur l'époque à laquelle doit être fixé
" le commencement des holl:ilités·, & il pourrait ré" fuIter de cette ince'rtitude, des contefiat·ions préjudiciables
,~ au. Commerce. C'ef!: pour les prévenir que j'ai jugé né" ceffaire de vous expliquer plus particuliérement cè que je
,,. VOl\S ai {,lÎt affez connaître· par ma lettre du 10 'Juillet•.
" Je:
�DU
PALÀIS
DE
PROVENCE.
42)
Je vous charge en conféquence de mander à cous ceux qui
fone fous vos ordres, que c'eil: l'infulre faite à mon Pavillon par l'ECcadre AngloiCe en s'emparant le 17 Juin
1778 de mes Frégates la Pallas & la Licorne, qui m'a
mis dans la néceffité d'ufer de repréfailles, & que c'eH
JO
de ce jour, 17 Juin 1778, que l'on doit fixer le com,; mencement des hoil:ilités commiiès contre mes Sujets
" par ceux du Roi d'Angleterre, & la prélènte ne tend à
" autre fin."
Sa Majeil:é déclare bien précifément par cette lettre que
les hoil:ilités de la part des Anglais ont commencé le 17
Juin, & les repréfailles de la parr de la France par fa lettre
du 10 Juillet. Hoflilités & repréfailles ne font autre chofe
que les événemens arrivés; événemens que les polices d'affurance excluoient de la condition de l'augmcnration, en
la renfermant entre les deux cas extrêmes de la déclaration
de guerre ou de la priCe de Navire; évépemens dont le Roi
ne fixe que le commencement, & qui donnent lieu. aux
opéra rions paniculieres pratiquées lors de la derniere guerre.
Il eft donc vrai que les Anglais, Coit par leurs Corfaires,
foit par leur Marine Royale, n'ont commis aucune hoHilité
contre norre Marine marchande jufqu'après le 29 Juillet. En
effet 9n voit qu'après le combat de la Bel!e Poule & la
prife de nos deux Frégates, nos Navires Marchands ont
traverfé l'Efcadre Angloife commandée par l'Amiral Kepe1,
fans en recevoir la moindre inCulte, & qu'après même le,
combat d'Oueffanr nos Bâtimens de commerce ont été rer.
peél:és par le's armemens en courfe des Anglois.
Diverfes. polices qui ont été faites depuis l'époque de la
nouvelle du combat de la Belle Poule jufqu'au jour où la
lettre du Roi à M. l'Amiral fut connue à Marfeille, portent la même claufe 'd'augmentation de prime en cas de déclaration de guerre ou de priCe de Navire. C'eil: ce qui réfulre des deux certificats expédiés, l'un par des Courtiers,
l'autre par des Notaires d'affurance.
Nos polices ne promettent pas l'augmentation en cas
de guerre feulement, ou en cas de guerre, hofrilités eX re"
"
"
"
"
Hhh
�426-
Jou :a.
N A L
préfailles; elles la promettent en cas de déclaration de guerre
ou de priee du Navire. Valin, tom. 2, pag. 36, rapporte
les raifons qui furent données dans un fait d'affurance qu'il
cite. Les Affurés, dit-il, prétendirent qu'il ell: de maxime
" que dans les polices d'affurance, de même que dans les
" autres contrats fynallagmatiques, bn s'en tient aux c1aufes
" & 'àmditions qui y font inférées, fan~ y rien ajouter par
" extenfion d'un cas à un autre, & q\le conféquemment
" l'augmentation de prime n'ayant été fi'iRulée que pour le
"cas de guerre, les fimples hofiilités -tans guerre dé" c1arée ne pouvoient donner lieu à l'augmentation com"me étrangere à la guerre, qui feule avoit fait l'objet
" de la Hipulation. Les Affureurs répondirent qu'il ne
" s'agiffoit pas d'étendre la c1aufe, mais feulement de la
" prendre dans le fens que les parties y avoient attaché de
" part & d'autre; que fi elles n'avoient parlé que du cas
" de la, guerre, c'eH qu'elles ne s'imaginoient pas qu'il y
" eût des prifes à craindre avant que là guerre fùt déclarée;
" qu'en prévoyant le cas de guerre, celui des hofiilités y étoit
" compris de nature de chofe, comme ayant les eftets de
,,_la guerre déclarée, puifque de la part des Anglois c'étoit
" une guerre de fait, qui, à la formalité près, opéroit autant
" que 1'1 guerre déclarée dans les regles , & que par conféquent
n l'augmentation Hipulée leur étoit due à raifon des hofiili,. tés [urvenues, quoique dans les polices d'affurances on
" n'eut exprimé que le cas de la guerre. "
Les Sentences, Jugemens & Arrêts qui, couronnés par
les applaudiffemens de la Nation, déciderent cette queftion
en faveur des Affureurs, ne jugerent pas que la condition
en cas de déclaration de guerre étoit la même en foi que celle
en cas de guerre, hoflilités & repréfailles; ils prirent cette condition , non dans le fens propre, mais dans le fens plus
étendu que les parties yavoient vraifemblablement attaché;
mais s'il eût paru que les parties avoient entendu refireindre
la condition aux fens propres des termes qui l'exprimoient,
la quefiion eùt été décidée autrement. .
La c1aufe de nos polices n'ell: pas en cas de déclaration
�DU
PAL AIS
DE
42 7
PRO VEN C H.
de guerre feulement. Cette expreffion indétermiriée feroit
peut-étre fufceprible de l'interprétation qui lui fue donnée
par les jugemens ci-delfus. La claufe efi en cas de déclaration de guerre ou de prife de Navire. L'expreffion du cas de la
prife du Navire, détermine l'expreffion du cas de la déclaration de guerre, & la réduit au fens propre des termes.
Contraaus legem ex conventione accipiunt ; & comme dit
Cafa-Regis , difc. l , n. l , en matiere d'.alfurance fur-tout,
le contrat efi fufceptible de toures claufes & conditions:
in materia ajJecurationis principaliter inhœrendum eft verbis
apochœ ajJecurationis , qll,ia imo ifla pro Lege habenda eft, nec
ab ea recedere debemus, quia contrahentium voluntas melius
haberi non poteft. De ces principes on conclud d'avance qu'en
exécurion çu contrat, la demande en augmentarion de prime
doit être J'éjettée, puifque cerre augmentation de prime aéré'
promife en cas de guerre ou de prife du Navire, à l'exclufion du cas de fimples hofiilités ou repréf:jilles, & de tout
érat de gu'erre non précédé d'une déclaration.
A l'époque 0(1 les polices Ont été foufcrîtes, trois événe-'mens pouvaient être les fujets d'une prime conditionnelle.
La déclaration de guerre, les hofiîlités & les reprél:1illes.
Déclaration de guerre efi un aél:e par lequel une Puilfance
déclare la guerre à une autre. Hofiilités font les courres des
gens de guerre, les pillages, les exaél:ions qu'un Prince ou
un Etat fouverain fait exercer contre un autrl; Prince ou un
autre Etat. Reprérailles font la prire, le butin que l'on fait
fur les étrangers avec lefquels on n'efl: pas en guerre, pour
s'indemnirer de ce qu'il:. ont pris fur nous, du dommage
qu'ils nous ont caufé.
La letne du Roi à M. l'Amiral du 10 Juillet 1778 lI'efi
pas un Manifefie; elle n'et!: pas cet aél:e du droit des gens
par lequel les Puilfances de l'Europe fe déclarent la guerre ;,
elle n'ell: point écrite au Roi d'Angleterre qui ne l'a connue
que par [a publiciré en France; elle n'ell: donc pas une,déc1aration de guerre faite au Roi d'Angleterre. Le Roi de
France fe plaine dans cette lettre des hofl:ilités commifes
par les Anglais, hoHilités qu'on ne peut dire avoir été pré-
Hhh
2.
�42.8
Jou RNA };.
cédées d'une déclaration de guerre : comment en a agi fe
Roi de France pour en avoir raifon ? Dit~jl qu'il a déclaré
la guerre aux Anglois ? Il dit feulement que l'infulte faite à
fon Pavillon l'a mis dans la néceffité d'ufer de repréfailles.
Le Roi par [a lettre du la Juillet annonce [a réfolution de
repou1Ter dans toutes les mers la force par la force en vertu
de la loi fuprême, la plus juile qui fût jamais, celle des
repréfailles. Cette loi invoquée dans la lettre, Ii propre par
ce motif à légitimer les ordres de porrer des coups coorre
l'ennemi qui la provoque, [e trouve néanmoins reHreiore
dans les effets qu'elle va praduire, à de fimples hoililités ma·
ritimes. La lettre ne lai1Te pas échapper un [eul mot tendant à porter atteinte à l'autorité des Traités. Bien loin
qu'on pui1Te en induire le de1Tein de les rompre & de les
troubler, on n'y trouve pas une expreffion qui pui1Te être
adaptée ou appropriée à une déclaration de guerre ab[olue
& proprement dite. Le Roi n'emploie pas l'expreffion con·
facrée, parce qu'il ne veut pas déclarer la guerre. Une prompte fatisfaétion arrête [ubirement les effets des repréfailles; le
Roi devoit croire' à l'efficacité de ce moyen qu'il préférait.
Qu'entend.on & qu'eil-il permis d'entendre par cette
dénomination énergique: déclaration de guerre? N'eil-ce pas
cet aéte Â-rlarmant qui menace indiftinél:emenr les polfeffions
& domaines qui en font les objets direéts ? Cet aéte autorife tous les ravages; il ne contient ni exception, ni reHriction , ni réferve. Le Roi annonce-t-il dans fa lettre qu'il
veut & entend que les Traités foient rompus? Menace-t-il
d"envahir les polfeffions du Roi d'Angleterre 1 Aurorife-t-il
{es Généraux & [es Troupes à· s'en emparer?
L'état de guerre ouverte & non déclarée n'a pas été
l'objét de la convention future [ur la prime; mais il eH
entré au. contraire en confidération dans la convention pré[ente fur la prime, convention qui en a porté le taux à·
cinq pour cent, c'eil.à-dire, au double du taux courant des
primes pour les feuls rifques de paix. On a penfé <fans un
temps que la daufe en cas de guerre comprenait le cas des.
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
42 9
holl:ilités ; dans le même temps on a également penfé
que cette c1aufe ne devoit pas être prife dans un fens plus
étendu, lorfqu'il paroiffoit que l'intention des parties avoit
été de ne l'ernployer que dans le fens propre. Dans aucun
temps on n'a penfé ni pu penfer que la c1aufe en cas de déclaration de guerre ou de prife du Navire comprenoit le cas
d'hojlilités. Il auroit fallu fous-entendre dans la c1aufe le mot
hojlilités, c'ea-à-dire, fuppofer une ftipulation abrurde j car
la prife du Navire étant toujours une hofrilité ,le cas des
hoftilités emp,orte celui ete la prife du Navire, celui.ci n'a
pu êtr~ exprimé au lieu de celui-là que pour réduire le plus
au mOll1s.
Or fi le paél:e de la police ne réduifoit point la déclaration
de guerre au fens propre, & s'il avoit pu être queaion de
difcuter fi lIette expreffion comprend tollS aél:es hoftiles ou
tout état de guerre non précédé d'une déclaration propre-'
ment dite, comment les Affureurs & les Affurés, anraientils évité ces conteftations auxquelles, de l'aveu des pre.
miers, les parties n'ont pas voulu s'expofer? Ainfi d'après
la maniere dont la claufe ea exprimée, & l'intention' des
parties avouée par les Affureurs eux - mêmes, il a été
dit &convcnu eqtr'elles 'que l'augmentation de prime amoit
lieu dans les cas feulement de déclaration de guerre, ou de
prire du Navire, à l'exclu lion du cas ,d'hoftilités, de repréfailles, ou d'un état de guerre, non précédé d'une déclaration proprement dite.
Ce feroit une erreur de croire que par cette c1aufe les
Affureurs ne recevoient aucun prix pour le rifque auquel les
expofoient les hoftilités & les repréfailles. Il ea vrai que hors
du cas de déclaration de guerre, l'augmentation n'cfl: promife qu'en cas de prire de Navire, & qu'à conlidérer l'augmentation indépendamment de fon taux'& celui de la prime
payée, il paroît qu'il n'y a point de falaire promis pour le
rifque de la prife que les Affureurs couroient en cas d'hoftilités & repréfailles.
Mais les primes de paix n'étoient que de deux & demi
pour cent de fortie des HIes Fran~oifes de l'Amérique j le$
�430
Jou RNA L
Alfureurs n'au l'oient exigé fur le Vailfeau le Maréchal de BrijJac
que le trois pour cent, fi les Alfurés eulfent voulu fiipuler
l'augmentation dans le cas de guerre, hofiilités & repréfailles.
La prime payée fut néanmoins portée à cinq pour cent.
Qu'efi-ce que le deux & demi ou le demi pour cent en fus
de la prime de paix, fi ce n'efi le prix du rifque que dès
ce moment les Alfureurs pre noient fur eux; de ce rifqlle intermidiaire eptre ceux réfultans d'une déclaration de guerre
proprement dite, & le malheur de la prife du Navire? La
,prime payée fut portée à deux & demi ou deux pour cent
en [us de la prime _de paix, en confidération de ce que
l'alfurance étoit en quelque façon à tout événell'\ent, hors
ceux de la déclar~tion de guerre ou de prife du ,Navire ,
pour lefquels feulement l'augmentation fut promife.
A lépoque des polices il avoit été fait des alfurances à
'tout événement, moyennant la prime de qix à douze pour
, cent. Et pofiérieurement au 17 Juillet, jour de la proclamation du Roi d'Angleterre, on n'a Hipulé pour prime de
guerre que le vingt pour cent. L'augmentation promife eH:
de vingt-cinq pour cent en fus de la prime de cinq pour
cent payée; de forte que les Alfurés ont promis une augmentation qui ponoit la prime à dix pour cent au delà du taux
qui a été convenu enfuite pour la prime de guerre, & à dix-,
huit pour cent de plus que la prime convenue à l'époque de
leurs polices pour les alfurances à rout événement. Pourquoi
ce plus grand prix, fi ce n'efi en confidération des l'if'lues
que les Alfureurs pouvoient courir hors des cas qui devoient
vérifier la condition de l'augmentation? Ainfi & dans le
taux de la prime reçue, & dans celui de l'augmentation pro- '
mife, on trouvera le juHe prix des l'if'lues que les Alfureurs
pouvoient courir, outre ceux de paix, entre les rifques -de
la déclaration de guerre & le malheur de la prife , entre
ces deux événemens qui devoient d'on ne l' ouverture à l'augmentatian.
_
Second grief. ;La prime .eil: le prix des rifques ; l'augmentation de prime promife, Ji tel événement arrive, eil: un fur~
croît de prix conditionnel pour lln furcroît de rifque qui eil:.
�1
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PAL AIS D l!
PRO v B N C ll.
4'31
éventuel. Il n'efi pas juHe de payer aux Affureurs des rifques
qu'ils n'ont pas courus, comme il ferait injufie de leur refufer, contre la foi des conventions, le prix de ceux qui ont
été réels pour eux.
Donc fi au 28 Juillet 1778, jour de l'arrivée du Navire
à Bordeaux, il n'y avoit pas eu de rifques plus confidérables
que ceux qui exifioient à l'époque du contrat, l'augmentation
de prime promife pour les plus grands rifques éventuels, n'efi
pas acquife aux Affureurs.
Faut-il conclure que dès le moment de la lettre du lé
Juillet 1778, écrite par le Roi à M. l'Amiral" antérieurement à l'arrivée du Navire, tous les périls de la guerre on.t
menacé notre commerce; non certainement, fi les dangers
que cette lettre allait vraifemblablement fufciter contre notre
commerce, n'ont pas été eifeél:ifs dès ce moment. La lettre
en contenait le germe ; mais pour que le rifque exiHât, il
fallait que le germe fût développé. Cette lettre fût-elle l'événement prévu dans les polices, la condition de l'augmentation a eu encore trait de temps, pour ainfi dire, fi les
rifques ont eu trait de temps.
Dans le fait notre commerce n'avoit encore reçu aucune
infulte le 28 Juillet, jour de l'arrivée du Navire à Bordeaux;
les premieres prifes ont été faites fur nos Vaiffeaux Marchands, pofrérieuremenr à la proclamation du Roi d'Angleterre en date du 29 Juillet, & à l'expédition des lettres
de' marque. Avant cette proclamation, il émit moralement
impoffible que nos Vaiffeaux fuffent faifis, parce que les Anglois ne font aucune prife fans lettres de marque du Roi.
Tel efi ce procès qui n'aurait pas vu le jour fi les Affureurs,
qui invoquent la vérité & la jufiice, avaient été de bonne
foi à convenir que l'efprit des parties ne devait contenir au
delà de ce que la lettre exprime.
'
Les Affureurs répondoienr, que demander fi la claufe conditionnelle appofée dans les polices d'affurances doit procurer
aux Affureurs l'augmenration de prime qui en eH l'objet,
c'efi demander fi l'on doit être fidele à fa promeffe ; fi l'on
doit exécuter des engage mens qu'on. a çontraél:és; fi la foi
1
�432,
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des contrats peut étre impunément violée. L'intérêt per[onnel peut-il faire oublier ces devoirs [acrés, ces premiers
principes d'équité qui [ont les liens de toute [ociété? Le
paéte qui lie les parties ef!: précis, il ef!: impolftble d'en méconnoître la loi ,. [on exécution tient même à la liberté qui
l'a fait contraé!:er ; il ef!: devenu pour les parties un joug
néceffaire dès l'inf!:ant qu'elles l'ont regardé comme un joug
volontaire aU'luel elles [e [oumettoient : hoc fervabitur quod
ab initio convenit "legem ellim contraaus dedit.
Il n'elt pas douteux que les parties ont Pl} inférer dans
leur contrat les claufes ou les conditions que les circ'onfiances ont déterminé. Contraaus legem ex conventione accipiunt,
dit la loi 1, §. 6, ff. dépof. Il ef!: libre à, deux perfonnes
qui contraétent d'ajouter à leur paéte telle condition, d'affigner telle époque pour l'exécution de leurs engagemens. G.e
droit dérive de la liberté qu'a tout citoyen de ç!ïfpofer de
fes biens ou de [a perfoune , d'après fa propre volonté, tant
qu'elle n'dt pas oppo[ée à celle de la loi.
Ces principes acquierent une nouvelle force quand on les
applique au contrat d'affurance. Cet aéte, pl~s que tout
autre, doit jouir de cette liberté, qui permet aux parties de
le modifier, de l'étendre ou de le ref!:reindre [uivant les cas
& les circonf!:ances. Il doit aurant être fufceptible de diverfes difpofitions, que l'élément qui en ef!: l'objet, ef!: variable dans les dangers contre lefquels il doit précautionuer.
Mais quand une fois la condition eft convenue, les parties
fe [ont impofées une loi, elle doit être invariable. Les termes _du_contrat doivent être rigoureufement ohfervés, dit
Cafa-Regis, difc. 1, n°. 1; Rote de Gênes, décif. 102;
Santerna de affecurat. , part. 3 , n°. 38 , Loccenius de jurt:
maritimo & navali, lib. 2, cap. S, nU. 9. Le contrat d'affurance ayant pour objet un rifque qui peut être attaché arbitrairement à tel ou tel événement, fur-tour ceux de la mer
pouvant varier à l'infini, [uivant la combinaifon de mille
circonGances différentes, on ne [auroit refireindre' ni étendre
les claufes que ces circonf!:ances ont déterminées. Or le paéte
dont il s'agit ne [auroit être ni plus clair, ni plus for!TIel j,
il
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PACA1:S<
1lE
PiOVENCE.
-433
il Y eft dit exprefféinent qu'en cas dé déclaration de guerr.e
la prime feroit augmentée de vingt-cinq pour cenr. On peut
comparer ce paél:e particulier à une vente conditionnelle',
qui devient parfaite dès l'inHant que l'événement dl: prévu.
& vérifié. Condicionales venditiones tulle puficiuntur eùm ilTlr
pleta [uerit eonditio; leg. 7,
ff.
de eontralz. empt.
..1
En effet en confultant l'intention. des parties, on ne fauroiG
dopter qu'elles n'aient voulu donn.er à un aél:e précis un effet
déterminé par tet aél:e même. Aiofi le premier fignal de ,la
-guerre a dû être pour l'Affmé l'époque des nouveaux engagemens qui s'élevoient entre lui & fes Affurems. Cette époque al.dù. p'rocurer également à' ceux-ci le b.énéfice cerraill
qu'ils s'étoient préparé par 'leur pr.évoyance, Je 'dédommage,ment réèl·:aes pertes multipliées: qu'ils alloient effuyer.' , ,
Dans cette perCpeél:ive allarmanre, qui préfentoit, à toutes
les parties 'des dangers inévitables, chacun a dù car nIer le
plus ou le moins de rifques qu'il avoir à courir par J'événement qu'il redontoit. Des dévaftations inopiriées, llne dé-·
daration imprévue de.la part de l'Angleterre, expo[oient les
Affureurs à des pertes plus certaines: cette Nation nous avoit
donné plus d'une fois l'exempl~ d'une perfidie " c.ondamnée
'!utànt par. les vrais principes de la politiqu.e que pal- les
maximes. fàctées du droit des gens, & les regles exaél:e,s
de la morale.JDes exemples fameux dans' ce genre moriv<>ient
nos craintes' peur l'avenir. On prévoyoit des t:irconIl:ance~
.' terribles, où.!'Affureur n'auroit plus que des pertes à fup-porter. Il étoit poffible- cependant que les Anglois fe tin[fent Ilong-temps encore dans les bornes de la modération
dont o.n ne pouvoit: pé'nétrer les motifs. Dans ce cas ils
couroient des r.ifques bien moindres que ,ceux auxquels ils
pouvoient être expofés dans' le cas 'c0ntraire. Cet état d'in,certitude ,. ce calcul des évéilemens poffibles &. des è1angers'
exiftans , déterrninerent des accords nO'lveaux ,;qu?on. foumi.t
à: des conditions, pour lefquelles on prévit & on défigna des
époques.. Cet aae émané de la Puilfance Souveraine, qui de~
voit créer un nouvel ordre- des chofes, par lequel tous liens
de concorde, entre les. d.eux. F,~uFles, allpient êtr.e rompus.,.
1 ii
�L434
Jou
RNA L
d'ut affigné 'comme le terme fixe auquel les engagemens
coodjtionnels des parties auroient lieu. On voulut prévenir
par ce moyen les inconvéoiens, l'indécifion & l'embarr,as
où des c1aufes obfcures inférées dans les polices d'affurance
avoient jetté les parties & les Tribunaux dans les contell:arions élevées dans le cours de la' guerre derniere.
l' ,Long-temps avant la lettre du 10 Juillet une foule d'e Cor.
faires étoient répandus fur les côtes circonvoifines. Le premier fignal devoit porter la défolation dans nos mers, &
faire courir à nos Navires tous les dangers d'une guerre en,gagée depuis long-temps; plufienrs même de -ces Corfaires
n'ont pas attendu une déclaration pour exercer concre nous
.le~ ,déprédations qu'elle feule eût dû provoquer. Vers la fin
du mois de Mars 1778 les Navires le Baudoin & la Thémis
·furent arrêtés à Guernezey'; cette piraterie. a pourtant été
autorifée ; les Navires ont été déclarés de bonne prife, &
les Affureurs de Marfeille ,en ont payé la perte fans réclama-tion. Le Navire le Sauveur appartenant aux fieurs Ventre
& Pafcal fut également arrêté par des Frégates qui n'avoient
-lli ordres ni commiffions pour faifir nos VaiJreaux. Une
foule de prifes auffi injufies qu'imprévues ont fait fupporrer
des pertes immenfes aux Affureurs. Ne fallait-il pas qu'ils
puffent s'en dédommager par des' événemens henreux? Il ell:
notoire que dans le même temps on foufcrivoit à Marfeille
des affurances à 18 & 20 pour cent de prime à tout événement. Les Affurés fe procurerent donc un bénéfice réel en
ne fixanc l'augmentation de prime qu'à une époque déterminée.
Enfin le paél:e ell: précis, il efi de' droit rigoureux ~ il
doit être obligatoire pour toutes les parties. Ubi pa8um vet
tran[a8ù; ftripta eji, jiipulationis & acceptationis vincI/lis firmitas juris innexil eft, dit la loi 40 , cod. de tran[a8. C'ell:
d'apr1:s ce même paél:e qu'ils ont égalemenc fournis tous les
rifques exil1:ans à l'~poque d'une déclaratioll-, fans en apprécier le plus ou le· moins de valeur ; c'ell: en vertu de cette
daufe cond.itionnelle, qu'ils n'ont fait dépendre ni du, temps
ni des circonfianceS, ~ais qu'ils ont liée à une époque. cer-
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PAL A U
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P R"O VEN C E.
4'3 )
t:rine, Car- relie a été letlr intention ; c'eft ce' qu'il faut lire
dans leur contrat, parce que c'eft ce qu'ils ont voulu y exprimer: in contra8ibcls, dit M. de St. Jean, décif. )8 , nO.
3 , infpicitur id quod principaliter agitur, & agitur id quod'
principaliter exprimitur.
Il eft exprelfément fiipulé dans les polices, qu'en cas de
guerre avant l'arrivée du Navire à :Bordeaux, la prime fera
augmentée de vingt-cinq pour cent. Le Navire n'eft arrivé à
Bordeaux que le 2.8 de Juillet, c'e!l:-à-.dire , dix-huit jÇlurs
après la' lettre de Sa Majefté, que l'on a dû regarder tomme une déclaration de guerre non équivoque. Les propfiétairt:s de ce Navi-re' fom donc foemis à une ,augmentation de
prime dont ils avoie/ilit eux-mêmes fixé la date.
Il s'agit d'examiner fi cette condition elfentielle qui cil
l'objet du paae eft vérifiée; 2efi de fon ex:iftence que' .dépend l'exécution du contrat.
. '1
Tandis que toutes les Nations attentives aux gearrds é'/é>.,
ne mens qui agitoient notre globe, régloie'nt 'd'après: eux leur-s J
intérêts particuliers, notre Nation, plu-s fpécialeltlent intérelfée à ces événemens, formoit auffi des projets qui leur
étaient plus direas. Le fouvenir de l'lOS anclênnes .querelles.,
la fierté d'un rival orgueilleux qu'il falloit' humilier', la co11fiftance de nos propres forces, les, intérêts d'lm peuple nouveau'
qui confacroit le premier ufage de fa liberté' à la' cim'el1ret
par les liens d'une amitié réciproque; enfin le cri de toure
une Nation qui juftifioit la confiance qu'elle a:V0it en fon.
Prince, 'par l'amour que fon Prince avoiu pour elle ,- 'tout
follicitoit une' rupture dont toutes les circonRrarnces: -gofrantilfoient le fuccès. Sous Le prétexte. d'une communication_
prohibée, les Anglois. arrêteient déja rros Navires· qu'i1s.
foupçonnoient expédiés pour l'Amérique Septentrionale '; pltl-fieurs avaient été détel'lus. Des combats finguliers, où, fous;
les dehors d'une querelle particuliere,"on vengeoit cepen-J
dant une querelle plus im poreante ,touS ces ,aVant-coüre-urs"
d'une guerre prochaine ne laiifolent plus- de.:doures fur fiés
nouveaux dangers qui menaçoient Dotre commerce. Par' les
foins prévoyans d'un Miniftre" DDS ,POItS ne pouvoient plus.
lii.2. --
�436
J -0' U RNA L '
contenir les préparatifs formidables .qui devaient faire re{-'
peél:er la gloire du nom Fran~ois.
, .Gette perfpe3:ive allarmante' pour nos C()mmer~ans leur fit
imagin'~r des clallfes. i(~.ufides qui partageoient également
les rifques entre les A/fllreurs & les A/furés. On prévit que
la ;dédauation de_ gùerre 'réalj{eroit [Qus les dangers que l'on
redoutQit; ce fut contre 'ces événemens qu'on fe précautionna.
Les chofes étoient dans cet etat de crainte & d'incertitude,
lorfqljl'ulHd-faite,de.procédés injurieux de la part des Anglois
déte'rt1ùnere\lt le ·Souverain. à venger la dignité de, fa Cour.Q[ine,',& Ji repouflèr par Ja force ,les attentats multiplies
des ,ennemis de :l'Etat. -Les taifons infhées dans la .lettre.
du ro Juillet -r778; contiennent les principaux motifs qui'
déterminent le Souverain à agir, hofl:ilement contre cette
l'u,iifance. A peine c;ette ,lettre J efl: publiée, que les dangers
redoublenr de [Qute part. Aux déva!l:ations de nos ennemis"
nQs, Armateurs ,oppo'lènt desi forces multipliées;: [Qns liens
d~lJpaiJGJ & de .c.on.co.udé fonu l anéantis; chacun fe hâte -de·
feconder la volonté d.u Souverain; d,e zele qui n'attend pas
d'être averti, précipice nos -MaTins dans les Vai{feaux de Sa
l\1ajeJté; nos mers font couvertes des Efcadres refpeél:ives
deI deux:' N arions; r&' lès.Génénlux de notte Monarque s'em":
PIeffe/H de mani}u'er'" par' des triomphes, 'deslljours déja
m.!l.rqués par ,des ,vertus. _
, '\
:0
, A des fignes auffi peu équ,ivoques ,peut.;.on méconnoître
uné, gue.rrç déclarée ?,' EH-il poffible de n'envifager ces fuites
te.~ri.plts)[aiun· <.rupture gêné <lIe,. qUe'lJcomme des pofl:ilitês
partielles, ,qui n'oD(,ch.a'ngé ni l'état. des chofes, ni l'ordre
des.· .opérations merdintilles?' La 'lettre de Sa Majefré n'cft-.
eUe j'pas le pri:ncipe. qui:a donné l'être" à ,ces événemens' pré-f
vus' p~r nos Commer~ans, lorfqu'ils Hjpulerent des cl~ufes
qui lepi étoient relatiyes? Si -c'eH cet aae qui a réalifé les
dange.r,;; que- les partie.sl~al'oiènt <reg'arcl:é, comme en étant l
le~1 (ui~{:s, inévita,bJ~s ,.Hla ftUlIlition 'du~ paék eH donc pleiIteme)l,t vérifiée. -_L~otid:relJdes événemens s'accorde parfai.
teme(lt ,avec l'.in,tentiollldes'iparties -qui avoient voulu s'en
garà':ltir'i La ,lel:t.re de "Sa lY1ajeHé, dt donc cette épo-
1_
�DU
PAL AIS
DB
PRO VEN CE.
437
que folemnelle, refpeél:ivement défignée dans le contrat.
ee [eroit une erréur de n'envifager les hoHilités générales
qui ont accompagné cette regle, que comme des reprélailles. On dillingue , fuivant le langage de tous les PubliciIles,
deux fortes cleguerre; la guerre pleine & parfaite, & la
guerre imparfaite, relative & partielle.
La guerre pleine & parfaire eH celle qui, en brifant touS
les nœuds qui retenoient deux peuples dans un érat refpeaiE
de modérarion, livre leurs deIlinées à la loi terrible du
plus fan. C'eH un fait général qui s'accom plit partout, qui expofe en même remps & dans tous les lieux,
taure fonune pardculiere & publique aux dangers eifrayans
qu'il entraîne. Si des dévd1:ations paniculieres, fi les querelles qui l'ont précédées en fone quelquefois le principe,
c'eCl ordinairement un aae émané de l'Autoriré Souverainequi l'accomplit & la vérifie.
La guerre imparfait", relative & partielle, ne s'exerce au
contraire que dans certains lieux, & le plus fouvent enrre
particuliers. Le caprice, la h;line d'un moment, engagent
[auvent des rixes privées, qui ne vont pas jufqu'à troubler
la tranquillité générale. Des Corfaires peuvent infefler certains' parages, exercer des déprédations criminelles contre
qnelques ciroyens'; ces fairs 'ifolés , ces combats perfonnels
ne décident pas du fort des Empires. " La guerre pleine &
" parfaite, dit Burlamaqui, Principes du Droit politique,
" rom. 2., part. 4, ch. 3, §. 30, pag. ')6, efl: celle qui
" rompt entiérement & à tous égards l'érat de paix & de
" fociété, & qui donne lieu à i6us les; aaes ,(l'holtilités ;
" quels qu'ils puilTent être. La guerre imparfaite ell ap con!.
,. traire celle 'qui ne rompt pas la paix à touS égards', mais
" pàur de cenaines chofes feulement, l'état de paix foo;, dîftant, quant au flirplus. "
C'efl: conlire ces hblblirés parric;lles que l'on ufe de re-'
prMailles•. On' arrête, on faUit mêrpe des VailTeaux appar-'
tenans 'à la Nation, dont les Sujets fe font permis des dé.)
prédatipns , pour obtenir du Gouvernement la reftitution des
prifes q\l?ils ont faites, ou pour tenir lieu d'indemnité lorf.,,:
o
�438
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N ,A L
.
qu'il s'y refufe. Telle eft la nature des rèpréfailles, que non
feulement elles ne con1tituent pas la guerre, mais qu'elles
rendent méme à ramener tout à l'ordre, en procurant une
fatisfaél:ion à celui qui a été offenfé. D'autres fois des, vues
politiques, reJ;1fe~mées dans le fecret du MiniHere, engagent à détenir dans nos Ports, les Vaiffeaux d'un peuple
qui les y a amenés fous la foi d'un Traité. Mais cette dé·
tention n'entraine jamais une confifcation des effets qui s'y
trouvent chargés; elle ne donne ni au Gouvernement, ni
aux particuliers aucun droit d,e .propriété fur eu~. C'eft par
des motifs de précaution, déterminés par les circonHances,
Iju'on s'en affure. Tels ont été les motifs qui ont engagé
de retenir pendant quelque temps 1 dans le port de Mar[eille, les Navires Anglois qui s'y trouvoient, lorfqu'il eût
été dange~eux de laiffer ébruiter les projets & les opérations
de notre miniftere. Ces forres de déve.ntion ne [ont pas
même des repréfailles, ce font des moyens aurorifés par la
p.olitique des· Etats, pour fervir les projets de ceux qui les
gouvernept.. Ainû, fous ce point de vue, tout ce qui n'ex~.ofe la fortune des particuliers qu'à certains égards, doit
être rega.rdé CO!I)me une guerre imparfaite, relative à certains
lieux, prefq,ue toujours indépendante des opérations générales d'une Nation. Mais lorfque ces ,hofiilités deviennent
i.miverfelles, lorfqu'elles s'étendent par-cour ,lorfqu'un aél:e
[ôlemnel eH venu donner une exploûon générale à ce fm
déj,a f6menré par la haine des particuliers, alors on ne peut
plus les envifager que comme llne guerre enriere & parfaire,
l
qui ewofe généralement tous les Sujets d'une Nation à des
dangers unillerfels.
.
. i
Or 1;1 lect're de Sa Majefté n'eft - elle pas cet aél:e qui a
cha~gé l'chao des chofes, qui a rendu publiques & générales
les déprédations de nos ennemjs? Peut-on regarder comme
<ie l\oftilités partielles ces chocs multjpliés, ces cpmbats
jpurnaliers? Faut-iL n'eql'lifager que comme des re,préfa.illes
çes. prifes ~~!11enfes qui défol~nt le commerc;e des deux Feu..
pl~~? cTa,ndis que tout.es les fort,unes font ébranlées p.ar ces
f.evers mulfipJiés, lOFfqu?upe foule de nos c,oncir.0l'ells gé-
�DV
PALAIS
DE
PROVENCE.
439
miffent dans les fers d'une longue caprivité , foutiendra-t-ou
froidement que les circonftances n'ont pas varié, que la
guerre n'exifte pas?
L'Arrêt de Réglement du 26 Juillet 1778, concernant
la navigation des Bâtimens neutres, n'a été rendu que pour
prévenir les abus qui pouvoient naître q.ans le courant de la
guerre. L'art. 31 de -celui du 27 Août ordonne l'exécution
du premier dans tout fon contenu pour les marchandifes
provenant des échouemens des Navires ennemis, pendant la
préfente guerre. Le préambule de l'Arrêt du Conreil d'Etat
du Roi du 18 Oél:obre' 1778 dl conçu en ces termes: Le
Roi defirant entretenir le plus grand ordre dans [es Finances,
au milieu de la guerre, &c. Dans ces deux articles le Souverain ne reconnoÎt-il pas lui-même expreffément la réalité
de la guerre? bans l'une & dans l'autre, il la fuppofe exif.
tante depuis long-temps.
Les mêmes motifs qui firent ftipuler entre les Négocians
des claufes relatives à l'événement d'une rupture, firent inférer dans le bail des fermes une condition exprdfe de rémiment des droits du Domaine d'Occident, dom la perception fe faifoit au nom du Fermier. Il fut ftipulé que dans
le cas d'une déclaration de guerre, la perception en feroit
faite au nom & pour compte" de Sa Majefté. Mais ce -qui
doit détruire tous les doutes fur la réalité de cet événement,
c'eft la lettre de Sa Majefté du ., Avril 17'79, Le Roi y fixe
expreffément la date des hoHilités au 17 Juin 1778, époque de la prife de nos deux Frégates la Licorne & la Pallas,
"& des dévaftations publiques & univerfelles que les Anglois
ont commencé d'exercer dans nos Mers.
Quant à la défignarion d'hoftilités, guerre, déclaration
de guerre, c'eft la même époque qu'on a défigné, en employant des expreffions différentes; toutes fe rapportel;t à
ce moment fatal qui a fournis les A/fureurs à de nouveaux
dangers. L'augmentation de prime eft due dans tous ces
cas, p"arce que l'événement prévu eft vérifié, pa~ce que la
Loi du contrat eft égale; cette queHion fut formellement
�'440
' ' , Jou
'Il' N A. r; ',' .. -
décidée dans la guerre derniere par I~s Arrêts .rapporté'S
par Pothier dans [on contrat d'affurance,. ch. 2., &:. par
Valin [m: l'Ordonnance de la Marine.
Dans le cas pré[ent on oppo[eroit en vain que les parties ayant' dérerminé une époque certaine, défigné une déclaration de guerre, comme la condition expreffe de .leurs
engagemens, ils ne peuvent plus donner à leur contra~
un effet prématuré, en ,relatant l'augmentation de prime au
commencement des hofiilltés. Il eH bien 'vrai que les parties on,t défigné une époque; mais dans l'incertitude oÙ elles
'écojent lorfqu'elles ont contraété, forcées de choillr un terme
quelconque., objet de leur condition, ,'"elles ont pouffé leur
prévoyance. auŒ loin qu'elles l'ont pu.: Une ,déclarati6n,de
guerre leur parut un fait affez public:" liJ·n aéte affez [olemnel
pour I},e laiffer aucun lieu à des conteHations. Comme le
motif de leur paéte érait de fe précautionner, autant contre
les' tergiverfations de' la c1iicane, que ,contre les dangers des
évéo.emens, dIes' crurent 'que l'ép0quc défigiJée é'rait bien
plus éerraine, q.uela claufe vague el! cas d'hoftilités, du commencement defquelles on ne conwiendroit ja,mais. Elles ne
pouvoient pas prévoir que 'le Souverain fixeroit Iu.i·même à
une époque invariable le commencement des h0fiilités gén,éraies, de ces dangers pùblics" devenus l'occafion, d:une
guerce ab [olue. , qui é,toit précifément l!objet de leur paéte.
Mais dès l'inftao.t <JuCicette époque cil: devenue lm. objet cer.·
tain & indubirable, c'dl: à ce.tte· date que doivent fe référer
leurs accords., Si leur, intention, a vétitablement été de fe
précautionne.r contre ces rifques univer[els, l'époque dé.terminée par le Souverain. lui-même,. dl: v.raiment c.elle qu'elles
pn~ fiipulée dans leur é6ntrat. Elles n.e dorinént' pas un
effet ré.troaétif à leur paéte, il réfulre feulement de l'événement qu'elles avo'ent mal cakulé.. Le Legiflateur leur a, fait
connoÎtr,e que' l'époque où leur condition s'érait vérifiée,
n'é.rait pas cel1e qu'.elles. avoient défignée ~ que celle, qu':lles
ayo.ient prévu fans pouvoir' la défigner, étoit à une date an.,.
t.é.rie«r.e à. la dédaration de' guerre., Dès. lors, fans altérer
,
leu.r:
�,
.
DU PAL AIS D E PRO VEN C E.
441
leur patte, ni contredire leurs accords, eIJes peuvent faire
remonter leurs engagemens à cette date qui vient de leur
être prefcrite par le Souverain.
Par Arrêt du 19 Juillet 1779, au rapport de M. le Confeiller de Ballon, la Cour confirma la Sentence avec amende,
renvoi & dépens; & faifant droit au requiGtoire de M. Je Procureur Général, ordonna, par forme & maniere de Réglement, que les hoftilités donnant lieu à l'augmentation des
primes d'affurance, "onvenue pour Je cas de guerre, feroient
& demeureraient fixées au 17 Juin 1778, & qu'au moyen
de ce toute augmentation de prime d'affurance, déterminée
dans le contrat, & [ubordonnée a.ux cas de déclaration dl
guerre, /zojlilités ou refréfailles, ferait due depuis cette épo-.
que pour tous les Navires [ur le{quels les affurances auroient
été faites; & quant aux affurances des Navires arrivés à leur
deftination après le 17 Juin 1778, 11 rai[on defquelles il
aurait été convenu de Cuivre pour l'augmentation des primes
le taux de la place, l'augmentation ferait fixée & réglée
[uivant le même taux par la Chambre du Commerce. La
Cour ordonna l'impreffion <le J'Arrêt; écrivant Mes. Roman
Tributiis & Guieu.
Les fleurs Audiberr [e pourvurent au Confeil contre cet
Arrêt; mais par Arrêt du 5 Février 1780 leur demande
fut rejettée.
)v
ARRÊT
u.
LVI.-
Le Mandataire eft tenu vis-à-vis fan Mandant, lorfqu'il agit
contre ou outre la loi du mandat.
G
Ay & Blondeau , Négocians de la ville de Marfeille,
endofferent en faveur d'Alexandre Bonfilhon, Négociant
de la même ville, une lettre de. change de 4200 liv. tirée' à
leur ordre [ur Lyon par Granier, Négociant de 'rarafcbn.
Cette lettre paifa à J'ordre de Faure, Dragon & Compagnie,
•
1
KXK
�,
.
DU PAL AIS D E PRO VEN C E.
441
leur patte, ni contredire leurs accords, eIJes peuvent faire
remonter leurs engagemens à cette date qui vient de leur
être prefcrite par le Souverain.
Par Arrêt du 19 Juillet 1779, au rapport de M. le Confeiller de Ballon, la Cour confirma la Sentence avec amende,
renvoi & dépens; & faifant droit au requiGtoire de M. Je Procureur Général, ordonna, par forme & maniere de Réglement, que les hoftilités donnant lieu à l'augmentation des
primes d'affurance, "onvenue pour Je cas de guerre, feroient
& demeureraient fixées au 17 Juin 1778, & qu'au moyen
de ce toute augmentation de prime d'affurance, déterminée
dans le contrat, & [ubordonnée a.ux cas de déclaration dl
guerre, /zojlilités ou refréfailles, ferait due depuis cette épo-.
que pour tous les Navires [ur le{quels les affurances auroient
été faites; & quant aux affurances des Navires arrivés à leur
deftination après le 17 Juin 1778, 11 rai[on defquelles il
aurait été convenu de Cuivre pour l'augmentation des primes
le taux de la place, l'augmentation ferait fixée & réglée
[uivant le même taux par la Chambre du Commerce. La
Cour ordonna l'impreffion <le J'Arrêt; écrivant Mes. Roman
Tributiis & Guieu.
Les fleurs Audiberr [e pourvurent au Confeil contre cet
Arrêt; mais par Arrêt du 5 Février 1780 leur demande
fut rejettée.
)v
ARRÊT
u.
LVI.-
Le Mandataire eft tenu vis-à-vis fan Mandant, lorfqu'il agit
contre ou outre la loi du mandat.
G
Ay & Blondeau , Négocians de la ville de Marfeille,
endofferent en faveur d'Alexandre Bonfilhon, Négociant
de la même ville, une lettre de. change de 4200 liv. tirée' à
leur ordre [ur Lyon par Granier, Négociant de 'rarafcbn.
Cette lettre paifa à J'ordre de Faure, Dragon & Compagnie,
•
1
KXK
�44'2.
Jou
RNA L
& de ceux-ci, à l'ordre d'autres Négocians. Elle fut protefiée
faute ~e paiement; les endoffeurs firent leur retour, & la retraite revint fur Bonfilhon qui écrivit le 10 Janvier 1774 à
l\Jauche, Lacroix & Compagnie, Négocians de Tarafcon,
les chargea d'en faire le recouvrement de Granier, & de le
pourfuivre à défaut de paiement.
Mauche, Lacroix & Compagnie préfenterent la lettre de
c angé - à Granier qui ne paya pas ; ils remirent à Me.
Reynaud, Procureur de Tarafcon, tous les papiers pour pouvoir pourfuivre Granier, & le chargerent d'en infiruire Gay
fils, principal intéreffé.
Gay fils vint à Tarafcon ; Lacroix l'accompagna chez Me.
~eynaud qui conféra avec lui, & obtint enfuite deux Sentences de condamnation contre Granier; il les fit Lignifier;
il fut payé de fes frais par Lacroix; il garda les papiers
qu'il remit dans le mois de Juin 1774: à Granier enfuite de
la lettre à lui écrite par Gay & Blondeau; il en retira un
récêpiffé de Granier qu'il remit à Gay & Bldndeau qui lui
en firent une décharge.
Dans cet état des chofes, Bonfilh6n fit affigner Mauche,
Lacroix & Compagnie ,pardevant le Juge royal de Tarafcon,
en rémiffion des papiers du procès intenté & pourfuivi, en
fon' nom contre Granier, & notamment de la lettre ·de
change; & à défaut de rémiffion, il demanda le montant
de la lettre de change, avec intérêts & dépens. Mauche"
Lacroix & Compagnie fire~1t, affigner Me. Reynaud en garantie; celui-ci appella Granier en contre-garantie, & demanda qu'il remît la lettre de change riere le Greffe.
Le 1) Juin 177) le Juge rendit Sentence; Mauche, Lacroix .& Compagnie, & Me. Reynaud furent relaxés d'inCtance; BOl1filh?n fut condamné aux dépen"s enve'rs eux; Gra.
,nier fut fournis' à remettre la lettre de change & les procédures, & à le relever des dépens prononcés contre lui.
Bonfilho,n appella de cette Sentence pa,rdevant le Lieutenant d.'Arles qui la réforma; Manche, Lacroix & Compagnie 'furent condamnés folidairement à remettre dans hlJit
jou.rs ptécifément tous I~s papiers, & notamment la lenre ,de
•
�DU
PAL AIS
D E
PRO VEN C E.
443
change, autrement contraints au paiement du montant; ils
furent condamnés aux dépens envers toutes les parties.
Mauche , Lacroix & Compagnie appellerent pardevant
la Cour; ils fourintent qu'ils n'avoient exercé qu'un fimple
office d'ami en recevant les papiers_ & la lettre de change
de Bonfilhon; que leur miffion étoit remplie par la rémiffio}l qu'ils en avoient faite à un Procureur; que Me. Reynaud
en étoit feul dépofitaire, & que c'étoit de lui feul qu'il !àlloit
les retirer.
Si ~Me. Reynaud avoit remis fans ordre les papiers à
Granier ,- ils ne pouvoienf être tenus de cette inadvertence;
le mandant doit s'imputer tous les inconvéniens qui ont p
en réfulter, & qui ne font point le fait du mandaçaire.
Celui-ci n'dl: tenu qu'à exécuter ponél:uellement fines mandati. Leur mandat a été rempli, dès que les papiers ont été
remis au Procureur, & que l'affignation a été donnée.
D'ailleurs il dl: certain que le pouvoir du Procureur fondé,
du mandataire s'évanouit dès que la partie intéreifée ,. le
mandant fe préfente pour gérer & agir.
En droit, le premier engagement du mandant étant de ratifier tout ce qui a été fait [ùivant le pouvoir qu'il a donné,
fa ratification rend comme à lui propre & abfolument irrévocable tout ce qui a été fait par le mandataire. Ici Gay
fils repréfentant fan pere principal intéreifé, avoit comparu chez Me. Reynaud, l'avoit chargé de continuer les
pourfuitcs, & avoit par-là approuvé l'exécution du mandat. Gay
comparoiifant & agiifant chez Me. Reynaud, repréfcntoit néceifairement Bonfilhon dont il étoit le garant; dès-lors Mauche,
Lacroix & Compagnie devoient êoce à l'abri de toute recherche.
La confiitution d'un fecond mandataire révoq~e les
pouvoirs donnés au premier: Julianus aït ~lIm qui dedit diverJis temporibus PrOliuratores duos" pojleriorëm dando, priorem prolzibllijJe y-ideri. L. 31, §. 2, ff. de Pro cu rat.
En fait, Bonfilhon s'étoit donné un nouveau mandâtaire
en la perfonne de Me. Reynaud fon Procureur; la rémiffion·
des papiets faite de l'ordre de Bonfilhon, & ratifiée par Gay
fon repréfemant , confiitua Me. Reynaud feul mandataire,
KKK2
�.444
JOURNAL
dès - lors le pouvoir de Mauche, Lacroix & Compagnie
celfa, & Me. Reynaud devait être feul tenu d'avoir remis
imprudemment les papiers à Granier.
Le Procureur eH tenu de fan impéritie dès qu'il en
,chargé des papiers ,- fuivant Henrys, tom. l , liv. 2, chap.
4 ,ejueH. 27. La Loi 9, cod. mandati en exprelfe : Cùm
'per Procuratorem cauJam tuam lœJam eiJe dicas, mandati aaia
adversùs eum tibi competit..
Me. Re~'naud répondait qu'il ne pouvoit être tenu de rien.
Il avoit reçu les papiers de la main de Lacroix qui compàrut enfuit'; avec Gay chez lui, & lui atteHa que Gay étoit
le' principal inrérelfé dans cette a:lraire ; ce ne fut que fous
la 'foi de cette attenation qu'il remit les papiers à Granier
.fur la lettre de Gay.
Les hoirs Bonfilhon oppofoient que la fonél:ion de Me.
Reynaud, Procureur ad lites, n'opéroit point un cllangement dans l'exercice du mandat.
~; Il éroit moralement impoffible de déférer à Gay le droit
'de propriété de la lettre de change, ni de reconnoÎ.rre en lui
le véritable repréfentant de Bonfilhon.
Gay endolfeur étoit, à la vérité, principal intérelfé au
'paiement de la retraite, puifqu'il éroit le fidéjuJ1eur folidaire
. de Granier tireur; il avoit intérêt, & le principal intérêt, à ce
que Granier payât pour faire celfer fon obligation. Mais cet
intérêt ne le rendoit pas propriétaire de la lettre de cflange ;
)1 ne le pouvoit devenir qu'au moyen d'un rembour[ement
effeél:if valant rétroceffion. La lettre de change a donc rou'jours, appartenu à Bonfilhon, & on n'avait pu la remettre
'fans fon or,dre.
1 Dès-lors Lacroix', Mauche & Compagnie étoient tenus
vis-à-vis Bonfilhon du fait du Procureur ad lites qu'ils avaient
feuls choifi; Bonfilhon n'avoit jamais connu ~e. Reynaud,
& Me. Reyn,aud avait toujours avoué au procès qu'il n'avoi~
connu dans cette affaire que Mauche , Lacroix & Com, 1
.
pagl1le.
Par Arrêt du 19 Juillet 1779, au rapport de M. le Confeillet de Fonfcolombe , la Sentence du Lieutenant d'Arles
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L'A 1 S
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PRO VEN C E.
44'>
fut confirmée au chef concernant les hoirs Bonfilhon, avec
dépens concre Lacroix, Mauche & Compagnie. Me. Reynaud fut condamné à garantir & relever ceux-ci, & Granier
à la contre-garantie envers Me. Reynaud avec dépens; écrivant Mes. J. Bernard & Perrin.
ARRÊT
LVII.
Donation faite en fraùde d'lIlle créance déclarée nulle & de
nlll effet li l'égard dll créancier. .
E
.
L
,)
19 Mars 1719 Franc;ois Ifnard époufa auCap Franc;ois, HIe St. Domillglle, la DUe. Marie Ma.gdeleioe
Gafpard. Le contrat de mariage érablit une communauté de
biens qui devoit être régie par la coutume de Paris., L'époufe
apporta dans la communauté la fomme de 12000 Ev.,. &
fe réferva la facult~ de renoncer ou d'accepter la c.ommunauté.
Les deux époux vinrent enfuite s'établir au, lieu de la
Verdier~, où ils projenerent l'acquilition d'une bal1:ide &
fon tenement de rerre au quartier de la Blaque. Le 1) Mars
1732, la Dl1e. Gafpard légua par pr~ciput la moitié de fes
hardes à la Dl1e. Marie Ifilard fa fille ; elle -l'inl1:irua hécitiere conjointement avec André Ifnard fon fils pour partager fa dot & droi~s par égales portions, laiffa l'ufufruit de
fes biens à Fpnc;ois Ifnard fon mari, à la charge de donneJ;
à fa fille lo'rs de fon mariage la Jomme de 2000 liv. , & en
outre la moitié de fes hardes; elle mourut le lendemain
dans ces difpolitions.
Francois Ifnard fit fon tel1:ament le 21 du même mois;
il légu; 2000 liv. à Marie Ifnard, inl1:icua héritier André
Ifnard, déféra la tutelle de fes enfans à Jo[eph Thomas' fon
beau-frùe, . & ordonna un inventaire domel1:ique qui feroit
fait par Mre. Verne &. le lieur Burle; il mouJut le mêm~
.,
Jour.
).
�.
446
Jou RNA L
Après fon décès on procéda à l'invenraire qui confiara
-les meubles, effers, argent, & autres objers de la fucceflion parernelle. Le 2 Avril fuivant Jofeph Thomas, tuteur,
'confomma l'acquifirion projettée par François Ifnard & la
DlIe. Gafpard. Le domaine de la Blaque fut acheré au
prix de 1 Boo Ev. ; le conrrat porra quittance.
Le 7 Février 173) Marie Hnard fut mariée à Thomas
Burie, neveu du tuteur; il fut dit dans les convenrions matrimoniales, rédigées en aéte public le 29 Mai 1736, que la
DUe. Marie Ifnarq, affiHée & aurorifée de fon curateur, renonçoit fubfidi<lirement à la communauté de biens que fa
mere avoit coritraétée avec Ifnard fon père ; & elle fe conftieua en dOt' tous fes biens & droirs préfens & à venir, à
, compte defquels Burie déclara avoir reçu 200 livres en nipes
& ,effets de fon époufe, & 600 'Iivres en argent.
v 1 Thomas
Burie demanda le 26 Seprembre 1747, comre
Hnard fon beau-frere, le partage de la fuccellion de la DlIe.
.Gafpard. Le jugemerrt de cerre demande fut compromis à
·Mes. Pafcal, de ·Colonia & Simeon, qui, par leur Sentence du 27 Détobre de la même année, ordonnereflt la
compofitioC\ de l'hérjtagede la DUe. Gafpard, la compofition & l'efiimation des biens délaiifés par François Ifoard ;
la détraétion de la fomme de 12000 liv. apportée dans la
communauté; la détraétion de la fomme de 1000 liv. , valeur du douaire préfix, & le paiemenr des 2000 liv. du legs
paternel.
Hnard . appella de cerre Senrence pardeva,nt la Cour, &;
Burie prit des lettres de refcifion envers la renonciation
contenue dans le contrat de mariage du 29 Mai 1736.
, L'inHance refra impourfuivie; André Ifnard émancipa le
1~ Mars 17) 1 Antoine Ifnard, & lui' fit donation. de la bar.
tillé de h Blaque. Thomas Burie demanda un fecond. arbitrage; les Magifl:rats qui furent choifis décidereot verbalement ,t & firent un arrangémenc traétatif, enfuite duquel les
parties paiferent 'un aéte d'~ccord lé 23 Juin 17 SI , dans lequel il fut dit qu'après' avoir examiné, calculé & compenfé
touS les paiernens faits, tant de la part d'Ifnard qu'à fa dé":
,
�DU PALAIS
DE
PROVENCE.
447
charge, les droits dus à Burie e'n principal d.emeu,eroient
réglés & fixés à 4000 lïv., qu'André I/nard pourroit garder
en mains pendant huit ans, en fupportant les intérêts au
denier vingt.
Le 10 Mars 17S3, André Hnard défempara à Burie, en
paiement des 4000 liv. qu'il lui devoit, une partie de la baftide de la Blaque; & celui:ci la vendit à J~feph Roux, Mar.
chand du lieu de Varages.
Antoine Hnard fe pourvut le 17 Avril 1767 contre Burie,
en calfation de l'aél:e de tranfport du 10 Mars 17)3 , avec
reititution des fruits & dépens, fous l'offre de lui payer ce
qui lui feroit légitimement dû à l'époque de la donation; il
demanda la commune exécution contre Jofeph Roux. Pendant
cette initance, la Dlle. Marie Blanc, mere d'Antoine Ifnard , &
en vertu de fa procuration, céda au fieur Charles, Bourgeois
de la ville de Brignoles, tous les droits de fon fils contre
BurIe & Roux, à raifon defquels l'initance fut formée par~
devant la Cour; Charles préfenta enfuite une requête en caffation de l'obligation du 23 Juin 17'P ; Burie & Roux attaquerent la cellion.
Le fieur Charles difoit que les Loix permettent à tous les
citoyens de vendre ou de céder lellrs aél:ions , droits & dettes
aél:ives; tout ce qui fait partie de la propr,iété civile eit fufceptihle d'aliénation. Cette regle eH: établie fur les diverfes
J;.oix du Code & du DigeHe, fous le titre de hœred. vel aa.,
vend. Ces Loix ont feulement borné leur attention à 'ne
point permettre à certaines perfolines d'acquérir les droits
litigieux; mais le fieur Charles n'étoit point au rang des
perfonnes prohibées, & n'avoit aucune incapacité perfennelle à acquérir les droits d'Antoine Ifnard.
En vain on oppoferoit qu'Antoine Hnard avoit été condamné par contumace à la peine de défertion, & qu'il étoit
mort civilement. En droit, l'exécution figurative du J ugemeut de condamnation, eH le feul aél:e elfentiel qui donne
cours à la mort civile. En fait, les condamnations mIlitaires
ne s'exécutent' pas par effigie. Rieq de plus précis que le
fentiment de Denifart, va. Mort civile, n. 29, où i,1 combat
�448
Jou RNA L .
vivement l'opinion,de l'Auteur du Traité
la Mort civile.'
Si cette peine n'dl: pas cnoburue dans cette hypothefe ,
elle fera encore moins infligée par les Jugemens de condamnation, rendus en conformité de l'Ordonnance du 12 Décembre 177S' Cette Ordonna\lce ne prononce pas une peine
perpétuelle contre les Déferteurs; elle "établit feutement une"
chaîne de terre, à laquelle les Déferteurs· 'feront attachés,
comme for~ats, penflant le temps porté par les Jugemens
des Confeils de Guerre.
Dans cous les articles qui compofent cette Ordonnance,
on ne trouve nulle part la peine rigoureufe de la perpétuité,
on voit au contraire que l'intention de Sa Majené a été de
condam ner les Déferteurs à la chaîne de terre, pour un certain temps, dont elle a laiiré la fixation aux Confeils de
Guerre. Cette condamnation peut donc être comparée aux
galeres à temps. Ces deux fortes de peines ont entr'elles une
analogie; l'une en infligée au cicoyen qui a délinqué dans la
vie civile, l'autre en impofée au foldat qui, oubliant les
Loi~ de l'Etat & celles de-l'honneur, abandonne fes Drapeaux. En punition de fon crime, l'un en attaché comme
for~at à la galere; en punition de fa défertion , l'autre ell:
attaché comme for~at à la chaîne de terre. Mais le temps de
l'expiation écoulé, oil pour mieux dire, la durée de leur captivité, & même lorfqu'ils font efclaves de la peine, ils confervent toujours-les droits & les prérogatives des citoyens.
Ces deux fortes de peines étant exaélement fembJables,
doivent être régies par les mêmes principes & produire les
mêmes effets : or l'Ordonnance de _1670, tit~ 17, art. 29 ,
&. la Jurifprudence des Arrêts, rapportée par Boniface, tom.
1 , liv. 6, tit. 6,.ch. 1; Duperier, tom. l , liv. l , quen. 6;
& Lacombe, Matieres criminelles, part. l , ch. l ,. pag. 7 ,
nous apprennent qù'il n'y a que la condamnation aux galeres perpétuelles ou au banniirement perpétuel qui emporte
la mort civile du condamné. La premiere peine en comparée
à celle que les Loix Romaines appelloient damnatio in metallum; & la feconde en affimilée à celle qui écoit connue
(ous le nom de déportation. Mais la condamnation aux galeres
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A L,J\- ~ S _ ~ E
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r 449
teres· f~ .,temM n~a jamais faii: perare, 3f q){ldamné les ,d ~iis
-ou "~itPYr~n )~,ne' n'\I jam~is opéré con re lui la. m~n ci ile"
nemo m,oriwr a,J umJlus.
• 1.,1 J
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Le béferteur at'raché àl la cli;îîn~ de terre eft donc à l'in'll:'}r
dû
Galérien à 'temps '," il confeive'
wuYes' fes' aél:ions dv.iles,
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1
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& peut les, exercer pendal}t la d,urée, d,e fa captivitf. C;ene
~él:iôn appartient en~ore tnieux à .celui· gui n'ell condamné
-quel,par concumaèe:.Ainli en fJpplO1fant ~u'Antoine l(na~d fûe
" coiidaihné "cprJ.1me, Défert~ùr parc,onnin,ace, ~'Ia cb~f~ç de
terre pour un temps fixê, & ,déte-;'miné, il n:aurQit pqiî)e
pe~du' par fa condamnation l~s', droi'es qu'il ,avoie. acquis
p'lr la donatiori du premier M~rs I7S i ; il, ne ie~'oit qu.'à
,l~i de les, faire valpir per.{o~ne,I,ljeIY!flJt o~ ~;e ,les ,céder ,à' un
tIers. J .
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. Il pe' faut poinç alli,miler la celfion 'du', I? Avril 1 77 Il à
celles qui fone faites_à ,.des. perfonn'cs étrangeres ou pui~
, fantes, à celles que la cupidité, fuggefe à un' homme riche,
ou que la tyrannie. arrac;he 1i l'hon{,me, foiole, &:,qui. p'lr
"dé'
I i pOIllC
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d'Il'les, r.lavo~a bl e;mept
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ces conn
rations ne "
IOnt
accuel
da1,1s les"Tribunaux;. celle q~io a, été' fatte a'u ',lieur! Ch~rl~s
3 été diCl:ée !par là' cbnv~rianci.&, l'utllité:~ Elle ~toit de
convenance, puifque le lieur Charles efi le plus prqche pa- \
rent & l'héritier !(réfomptif
d'Ifnard. ·Elle
é~oit lltile, puifJ
J
qu'il nourrit la,Dlle. B1anc l11ere a,Jlfnard , &"qu'il fait tenir
de: eemps en temRs quclqJes fecoût~ à ce derniç'r., n ,
'
Charlés, 'pour,! epou,1fe~ -la 'r~qu~~e, çléJ Bu,rI,e,eo-, caflàti~m
ce la donation dû' premier Mars I7Ü; diroit qu'une dona- tion efi un engagemene valable lorfqu'elle a été' éfiétée 'pour
une jufie c,au[e, lor[qll'otl voie évidemmenF qu'elte ,a ,éié in[des motifs
louables ' pour le Jjien
de la 1'fàmillcj",&
P1 irée par
)
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non par des vHEis fra~duleutès: Une donation, eCl:,encoff )é'gitime 10r{qu'èlle n',a: pas é'té faite en fraùl:je de's e'i~f~tiops
_con~mencées, irr [ra,udem incœfIIli',.~m exeiutionum. ICI, il ,r;'y
avolt aucùne executlon commencée ou p,réparée. Il eufiolt à
la vérité une Sentenée' arbitral~ ; mtiS' il" avoir appèl de/ceete
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même
<lonne't)ehtré vifs/ S'illlen ét,oie aü'tre-m2ent; le commerce fetroie'abo\i, &Il a 'fa'cuité qu"a le pere 'de fam'ille dé 'I;'ou~:;''l''fJ')
.rl'.'! l d,e~rrlllh)
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'li'!r es ,'une aétion de. rê~\-ès' fur les biens aliê'nés; bu" u~e
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,Ien~ e t'ere
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caffèr.'urt aél'e [oleniiJ.él·f'~il:'·àyeè todi].é .foi'; lIE qu(ëff'd'àu-cah.t :p"lus'\-èfpea!!ble ~ ~u:in~'n1pli\:J le~~~u 'de ·1~JD.âture '&
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cré'!P,i!ief!>-.w maJgrF~les"al'flar«>~s 4.~, frau};~ .. ; ily avoit
Fli~UYlj1 ige)i. eX~.!~SJns. ~Q~mencéF~ ;. la~ .c!p$1f!tion ne fu
Rflil(f· c~ê$ i "i!!fUSLo.r~~ljf\~ f~B}lj~511f q~eJJe~fbielJs, d0.flJé~l
fSrolSpJf/9fl-mJS-aqxr.a{bo!,s·'dur:S\"e~pSIrr i ·,f. •
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1 r/~F,Çtr,c;}té p'!r 1\;1. de ~~i7ux..a j~K.é·q.llljll fré~!1S"H[Pf.u51.
valablement porrer fes exécl1tio"~Si fi !f'l~fbi~~ de nés pa,rü
l~ gere f'!.l}s né~efll,tç. ou 'Cayf~ d,~ m~ri.i!gel Ç,u 4T,rêtc ne
Ga~a .p.cpjnt Ji!, 4qn Üp!?,~il d~.&r.,? feuLe,ml!;{lt 'Y-ldèTf'i1y,i.er,y.n.n
<t.ai9J1-BPll;t:Jlogl~{[r jly. gopat,aireau: paie~en51ST III) créa%e.'J
4:J fQurn~.tçre à:,re.s~e~éG\!' io~s les.b",eps qO}ti9Çs"J,~~,i13na~i<?,
n:e(t: pa .jun titlre 1 ilhifoir e . qy'il: di..p~lJP,t flp ,~P5iSt;· -dt.~)
hommes· d'a~taquer ou a· éantir. Ifi I~ doqation .a2 .été l~iteJ .
Bar néceffité. Le !leur, ~urle n'eil: ppint créan,;ie,r ; )e.J.i t-il,
15 d.onation ne fsrqit .pas a!!éaqtje, el~.e,/Tr9i~ .d,~~~r~ fi: kplel]t {o,nlPife .a,u" l?o,4r(ui~~s"&j lix~cu.~iQI;%:Wt_ 4T~~ .fu:le-:
J;-i1 d,erpanqe de BurIe eft d0l1oc rt;ll\~ fqmlée ElLej,e.(l:tqco ,el
non-recevable.
1 .
)
1["
.):
~'l!'
Bu~le dl:-il créancier d'rfnard perç ? Il n~ pr~feEF':> ni un,
état dez 1.. créance, ni un état d~s .paiemcn~ 3 il oppo e
v.agllpue,çt CQm.m~. des titEes ~lî <:.~éa!lçe l~ tlîlhmen ·,de.,fo >
beau-pere, celui de fa belle-11?Jc:r!i~·l'!. ~f(ntl1Pc ' arbi~rj1.lS"i
Ja çranfaél:ion de, 1'7') 1.., & ceJJ'T fi!; !1,n : fll~~ fT5tç ju{l:ification eil imparfaite, inconc1qant.e 4 inadl.11lffibjy.
1.
Pour le fourien de f'\, R.equête «>n. caifatioq de~ l'oJ?)igatip
du 2,3Juin 17) l , C,~'lrles diroit, SUt; fi rang(J~l1~'tlJ I<;,m!?~"
Çhélmllnt.& fans,do.). ni [\"Iude, lr!.fie~r ~f!1a~a~a R!l6\!!npHl
ç,n;re. vif~ ~ fop fils, p'!r.l1ne ,fuite de J.,! mé.X:1 ljJ:."ifol\,; iJ, n,ç
lui a pas été perP-Jis d~ ~érl'geE à ser,te dBlliiÇ~onj "lhe~t çg,-:,
tain· que la dona~ion .çn~re vifs.~!t un en.g~ge.~lent qHi !'le
peut ê.tre révoqué, an~allti ou fUPrprimé. Elle dpient irré.v9.cable dè!( ql1'ell~ '! ac"gui~ fa peI~eé\io~, qu;œ ~ AfHSri!J!.P"..
fe.flœ, temerè revoc!lri .no]!/ ppffù.rn•. §\ 2.. Iç.lFs de, dOBI!}, L'i révocabilité eft fon p,rinGip'l.l hilHaçr.e; elle en e.!l: ~l'~Vel!S
& le fondement.
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Le contrat du 23 JUlfl I7P , par J~que1 If!!a~d f" r~cpn~
noît débi;eur en faveu~ de ~L1~le', eft uo j1a~ 9f5ogatoire ~
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b donation ,"il eŒ ,fufpeél:', frauduleux & nul. ,Lié par lin
engagement 'irrévoca,ble', Ifnard' n'a pas 'eu le: pouvoir injuŒe
de re"t:onIîoît~e'une dette importa,nte de 4°90 liv. gui n'exifd)ir'pats, & pat'cette' reconnoïffance fraudlileufe anéântir la
majeure. partie {le la donation, Bl!,r1e, qui ,'ef~ me6bre de
la fâni,llê;' & quï n'ign'oroit pas cette donation, n'a pu fe'forme):
un 'titre qui lui Jût contraire.
"
,
.
. ~ -Chârles ob{ervoit encori: qué ·les 'lettres de refcifto'n font'
riéceffaires tou~es 'les fois qu'une' perfonne ayant paffé ~m"
contrat" cfi~rcl1e 'l.' faire refcinder ce cq~trat, à revehir con-'
tre,le èonvemionne1. Il ell: <;>bligé alors d'obtenir 'des lettres
d'u~Pr,hce'qui'l!Ji {orlt '~xpé'diées en Chancellerie. Mais lorf-'
qu'un -riels acraque ce contrat, comme il ne vient pas ,:ontre
fon propre fait, les lettres de refcifion lui font étrangeres ,;
& ft ,le- dmtrat eŒ nul; il en demande la caffati,on par une
re'quëlte, en c<;>ncluant à ce qu'il foit décl'aré nul, & com:'"
m-e Jeel caffé. Les·1moyens de refl:it'ution réfident-ils en la
perfonne ? les leitre~ font néceifaires. Viennent-ils de la nature; de la forme ou de la fubfl:ance du contrat? elles font
fuperflues. ( Ricard des difpofttions conditionnelles, n. 8S')
Si par fois on obtient des lettres, c'eŒ pour une plus grande
precaution &, furabondamment.
'
,.
'
, Le tiers 'qui attaque un contrat, qu'il n'a point paffé,
quife pourvoit contre l'aéle, non pas à titre de refcifion, mais
à titre de revendication, qui réclame fon bien, qui a été
injuŒement engagé par celui qui n'avo,it pas le pouvoir, à
non Domino','a aél:ion pendant 30 ans. c'eŒ! le terme fixé
pour la revendicatiàn. Ain'fi ~les b'iens fub!l:itués qui ont été
aliénés par l.'héritier grevé peuvent être revendiqués pendant
,30 ans. L. ult., cod. commùnia '(fe Legatis & fideicommiffis.
Les enfans, font recevables 'pendant -30 ans à demand~r-la
révocation des aliénations -de leurs bien~ faites par leur pc;re.
!J. l, coa. de bonis maternis. L'aliénatioo':d'ès biens dotaux.
peut a,uffi être révoquée dûrant èe.'même efpace de temps, '
parce qu'ayant été faite prohibente Lege Julia, elle elt nulle
& invalable. L. l , if. de fundd dotali.' Enfin roures les fois
qu'il y a aliénation faite
non Domino, ou une obligation
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PRO VEN C E.
4B
paffée par celui qui n'étoit pas libre, & qu'il y a aaion à la
revendication, le propriétaire qui revendique fon immeuble
injufiement aliéné, ou qui attaque cette obligation peut exer-'
cer ces droits pendant 30 ans. Duperier, wm"3, liv. 4 ,
que!t. 17. 11 y- a plus: la même aét'ion auroit compété au
fieur Ifnard fils ou au fieur Charles qui le repréfelHe, pendant 40 ou SO ans, fuivant cet axiome de drojt quœ flmt
umporalia ad agendum , [unt perpetua ad excipiendllm. Dunod
dans fon Traité des Prefcriptions. Godefroy ad leg. S , cod.'
de exceptionibus. Henrys & Breronnier, tom. 2 , liv. 4,
quo 64,
Les tranfaaions fur procès ne font point fujeaes à ref.
cilion par la léfioll d'ourre-moitié ou par· le dolus re ipfd.
On préfume que celui qui a tranligé fur un procès a contraaé avec connoiffance & difct:rnemene fur un événement
in.certain, & il ne doit pas être recevable à former des re-'
grès fur cet aae, parce qu'il feroit difficile de confiater en
quoi cGnlif!:e la lélion. Mais le dol pedonnel fournit un
moyen de reH:itution, même à celui qui a contraaé, fuivant
1'0bfervarion de Theveneau ; il n'dl: pas moins certain que
le tiers à qui cette tranfaaion porte un préjudice, dl: rece·
vable à l'attaquer, même pour caufe de léfion. Il ne fe fond'e
poine fur la lélion qui auroit été perfonnelle à celui qui: a
tranligé, il fait valoir celle qu'il fouffre dire6l:emene.
Les mêmes vices qui infeaent le conerat du 23 Juin 17'i t)
fe communiquent à celui du 10 Mars 17S;, qui n'efi que'
fon exécution, & concourent à fon anéaneiIfemene. Comme·
. il partieipe à fa' nullité, il doit partager également fa réfolution. Si Ifnard pere ayant fait donation enere vifs de la baCtide de la Blaque à fon fils, n'a pu déroger à cette donation
par la reconnoiffance frauduleufe d'une dette chimérique,
par identité de raifon, il n'a pu, en paiemene de cette pré~
tendue dette, défemparer une ponion du domaine donné
f-ous un titre irrévocable. Cette défemparation n'dl:, pour
ainfi- dire, que la conr~quence & la fin de la reconI\Oiffance
Burie répondoit que les donations que les peres font à
leurs énfans. [ans néceffité & hors du coptrat de ·mariage J
�: . . , ' ~ ,o'U Rt N A~ LI J. J , c' r'
rônt des' aél:6s ·qtje la~' Loj. r.épd-lte a;Vs:lY' éçé:fati,tl' .e!}r frau Gr"
des C{éanciers·,. &çj qqi. Ratl çel~;l]l,Ç.m6); 1n!1 p.çuye,nt lt;u§.
p.qrter aue.une f~l're I?e R éjY9{iç;e. ~P. §" Q~I tjtfe Pt'- li'h
4 des, In~Jt~ês, dé13l~ q3 f![un ,çie[jlteJ.!~t, de(l!mWISe-. q,le,l7J
ql}~unJ: d; r~s e;ffets, au" P.J.çju_dip.Gfi d~. fes, t<fr,~àl,lcJJ:r~.) il)e.l/l
dl: ~ermis de faire' r~WAuer GetJ6, 4éft1mpa~atiqn, ~Jl rét '1
blilfanr cet e.ffé.t dans, le' g.atrimO;Îpe 'du d~kili.çur, tout· d
mêni9 que s'il avait tou19Ur-S. ref.l:é 'en (a pofl'dlio,ll : Item~A
'1.uJs)n fr,4u,'rjefl1o credjcoliUfT/ r.-em,·,Jil(}{lJo a,li,cui\tra.d.id~rit, R-erT[litj,
tit!;!r ipji{ sreçli'f(J,!ibufJ;!'T;efciff~ trfl;litione, ~a1!! IremtRp.tI;re,~ i4
'l'tA"
f
ejf ~ dicere eam rem traditam non effi , & ob id in bOnl.[;AeqÏrjI
u}nbuJ manjiife.
"
1 •
T
l.?art. '4\ du tit. Il. de l'OrdonJ;laI)ce de' 1673, déclare,
nuls tous tranfports., telIions , ventes & donatioI)s d~ biens,
J!l€l,Ible,s' cSç, immeubles fa,its en fr!l,ude d~s ..q~çanii"r~, vOtj-.
1a~1.[ gu'ils ,(oiç;nt rap.po~tés. à .I:'!! mafl'e C0!:1~mU11; gesl ~.tfçts.
J-aJ J ùr.ilf.p-rusl~n,lte des Ar~êtsJ:sJy éfl: conformét)<,Jen~ déCii-.
d,ant, que. la 9.Qqatiol1 du pere au fils ,n'err pas un tiH;e 112.güi·me .ppU'r obliger les créanciers à di(curer les biens en
état ~(], B~re, &, qu~o,n peur fe payer (ur lès bienS' d9nnés;,
tpu:cJ d~Ll;11êrn.e Ejire1/il n'}' aY'fit l?Qint, el} ~:e q,o)1~tiQn •. C'efl:r
C:.e: .que jJu,gea l'Arfet{ r;apporr,e Fil B9nlf~Ge, ~ roP.1 ~,Il":. J ,,'
t.tr'iIl6 "ch. 3: Da.ns-I'efpec~ qe cet Arrêt, la don:ar-ioll étbit)
évidêmllH;nr ft;audnleufe. 1°. Pour avoir été tàire :enrre pèr-'
(onnes conjo.inres, pere & fils. 2,.0. Des biens les plus pré~ielJx,:de, 1\1 fucceffiop. JO. En hail:Je d,es exécutions prépa~~~.
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çe,s ~r.ois. cqnGdéra;ioQ's fe ,renc<)ll,trent ici., C'efl:'une dolff\tionl f<fitç 'RaI,' un pçr~ là fon fils ,du. feul eHèç de .fon patd:m9~ne , ~ tur lequel fes créaqciers 'eufl'ent pu porter par conféqlletlt' leurs exécutions'; les ~xécution~ éroient plus prochaiÎ1~sl quit dans l'Arrêt,rap,portÇ' par Boniface" puifque les
MrÇie!i plaido,iépt d,éja, depu!~ <}\iatrç ;I.nS; qu'il fV9.iç ~té rend!!
lJn!jqSent.ç"Qce, .arl?·itf~le_, & qu'on étoit fur le pp'int d'avoil,"
\l:~ Arr~t .. 1 r _
.'
1; M. de .Beziel!x, liv. 3, chap. 7, §. l , rapporte trois Arrêts, qui 9écideren,t également que le cré'lncier peut valable-1
J
,
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L~A l' S 1 D E PRO VEN C ll.
"41 ~,
'merle portèr IfeS'déèutions~fur ' 4és DieOiPdênrlés)~par le pere
fans rrlé2éffit6 ou, caure 'dé h\ar~ge,{BienJgu'if néHlesreûe-~s
D U
P
A
'atipa aVJl t fait [aiftr in Jim Juaicati. .;
j
'J "f f
1
,." La donation étant de nulle ,;aleur vis-à-vis av créancier,
· 'elle n'a pu par conféquent"faire obftacl.e'.à ce que le Sr:Tf.nàr 'terminât fes tli'fférens, àvec Ile ffieùr-Burle, par là'uanktc-. ion ,qu'il s'agit d'apprécier" dans çeqe P!lr~é 'dé'- la ~ caufe ;
&: rien ne' doIt 'l'His furprèridre , .que~l:Ié)voir -qu1Jp'c.es ,"'oÏvo-ir
• fa'it l'aveu de lcette maxime " conhe11'aquelIëïr férêibalailteurs
inutile .de s'élever " fe' fieur Charlei râifonrte commees'il s'agiif<;)it 'd'un titre <onérepx, & çi'un..tranfporr ·fait ae .bonne
- f'tii ,Clqui1 elît"'tlû lier ~irfévbcablement·les'maln~ 'au J d~b'ireur
- & au créancier. ,1 J
, '. ". ... Illl,', "D • -,J. Il
-Ill' Le èompte' [\.'e"ft pas 1l1a'vÛire'da.n:S~'aél:~F!rp}J.is"léS '(Jar-'ties y ont convenu de l'avoir fait, '& de) p2 ayo ir c'of![i'<ÏcM
que d'après le réfilltat 'de cette ,opération~l\(?e!1: toujours ainfi
qu"on le 'pratique entre perfonnes majeures ~ que'la 'Io.o.i 'fup-,
pofe tqujours fuffifammenç infl:ruites de lèdfs d'faits. ',;D'-à11-leurs ce 'ne (eroit jamais là une n'ullité a,e' droiC'JpuMicJ ; on
ne pourroiLIa-' puifer tout au plùs 'que, Ld~bs' Iii -dîfpbfit-iôn
des Loix Romaines ,,'qui ne peuve'nç' cependant sToaplpli4uèr
qu'au càs ['de la' minorité' de l'un des 'con~raél:ans ;,1.& ïlauroit fallu né'Ceifair,ement la' pl'op'ofell dâns les âix-ans de'l'aél:è,
& avec le. fecours des Lettres du Prince,
'oc
.0'11 ne's'agit pas ici 'd'Uh ''déDlte~[.uqui ' tfi'oit -p'e}"<lu [:D\lte
• adrnll1ï'fl:r tion , .&: qui 'n' uroie va's' rt}'êmeliJe '.droit de fe ré.
gler avec. fan créancier, & de fixer' dans 1!n aél:e public ce
- qu'il 'lui renoit à payer' de fa d'ette, milis: bien d'un- pere à
• qui bd aJofr tal fairt one"d'O'rlàdhn du 'plus~précieux de fon
héritage, à un ~nfant fort jeune; titre purement gratuit que
la Loi déclare fufpeél: de fraude, & qui doit être regardé
comme non obvenu vis-à-vis du créancier, en lajifanr par
conféquent toutes chofes dans le même état, pour tout ce
qui pou voit concerner la liquidation & le paiement de la
dette.
Le fieur Charles excipe de la léfion ; on pourrait fe bor,...ner, , répondre qu'y ayant en 1751, jufl:e matiere à tranfac_.1
,~
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, . 1 .,.
Jou
li,
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tion, & cet aac n~ pouvant pas être regardé par con(~quent
cottltpç pmplé, le IJlPy~n de .Iéflon n'eH: pas prppof~ple par
là faveur qui eH: due à ces fortes de conventions. On ne pel;lt
révoquer eq doute' qu'il n'y eût matiere à tranfa~ion, attendu le procès qui tralnoit depuis quarre ans, & qu;i avojt
déja été 'mis. 4eux fois ~n arbitr~ge, à raifon des droits"qui
compétaient au fleur.B~rle, ,daps les fucceffions du Sr. Ifnard &, de la .Dlle,Gafpard., pere & m~re. :dc) [9.9 épou(~.
L'Orqonnance rapportée par Theveneau, liv. 2. , tit. 2.2.,
ôlrt. 2., appellée l'Edit des Tranfaaions, ne permet pas de ffl
, p<,)Ut:voi~ contre les aaes. de cette;. ,efpece, même fOU5 pr.é" texte ;de léflon d'out:re-,moitiél. ~B juHe prix, &, fait iniofl~aux J~ges de débouter Ils itppétrans de. le';lfs Lettres€ De· cer~s·"ltom. 2. ,'col. 1608'; .Catelan, IIv'-5, ch"l'f2.; fro· mental, va. Tranfaaions; & Julien, en fes Colleaions mai nufcr.ites ,. va. Reflitutio, pag. 9, Iiu_ Q, difent tous qu'eo
· J'l)jltier.e de, tranfaaions, on ne s'arrête pas à la I~flon entre
.
.
'
_ pfr~nnes ,mai~ures.
riO L'intüêt· pu}>ljc qui repof~ fo';l,s la foi de c,es fortes de
,cOntr~!s.;. s'éleve:à ,fon tour pour repoutre.r des fecherches
" ()ubliées, & qu'on ,eft venu renouveller après dix ans de. ceffation ,de taute procédure, en ve,rtu d'une ceffion odieufe de
l ~s drçi,ts ch,iméJ~que.s, qu'on n'avoi.t pas eu le courage, ,de
pourfuivre.
.
~ .Par Arrêt-du ~I ~u!llet I779,; .au rapport de .M.
Con· feJller de :ijt;aulieu, la donation fme pat André Ifnard à fan
fils, fut déclarée nulle & comme. non advenuê à l'égard de'
Burie;. Ifnard & le fieur Charles furent déboutés de leurs
,.4emandes avec;:. dépens ~ éc~ivant '~e!i. Bre;nlOnd & ~ ; •••
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PRO V II Ne H.
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ARR Ê T
L V J J J.
Si les Notaires peuvent prétendre d'iJtré élus aux charges de
Greffier de la Communauté exclufivement à tous autres.
Le Greffier de la Communauté doit-il recevoir les délibérations
des Corps & Communautés d'Artifans, lorfqu'elles font autorifèes par les Juges de Police?
Dans quel Greffe doit-on dépofer les collocations, les Sentences arbitrales, les comptes tutélaires, & les délibérations
prifes par les créanciers?
Es Notaires de la ville d'Arles préfenterent requéte à
la Cour le 21 Novembre 1778 ; ils demanderent que
leur College feroit maintenu dans le droit, poifelIion &
jouiifance de recevoir exc1ufivement à tous autr,es les aél:es
de la Communauté, & de remplir par le Notaire qui ferait
élu & nommé annuellement, fuivant l'ufage, les fonél:ions
du Secretaire de la Communauté, avec inhibitions & défenfes. aux Confuls, & à tOUS autres qu'il appartiendroit, de'
les y . troubler, à peine 'de mille livres d'amende, de tous
dépens, dommages & intérêts, & d'en être informé; que
les Edits de création du Greffe des collocations de 1578 &
1606, celui de création du Greffe des arbitrages de 1673;
les Arrêts de Réglement du 9 Mars 1662 , 26 Juin 1.686
& 28 Oél:obre 1748, feroient exécutés felon leur forme &
teneur, & qu'en conféquence tous les p-rocès-verbaux d'eftimation, failles, collocations & mife en poifelIion des bien'S;
les Jugemens , Sentences & autres aél:es des Arbitres & amiables Compollteurs ou autres Juges convenus, les <;omptes de.
tutelle, de liquidation & autres; les délibérations & aflemblées générales des créanciers feraient rem is au Greffe des,
collocations & des conventions & arbitrages, & à celui de{:.
dits Greffes auquel ces aél:es appartiennent, avec injollél:ion
aux Confuls de remettre ceux qu'ils avoient pardevers eux ,.
Mmm
L
�4)8
Jou
RNA L
avec reClitution des droits perçus; qu'ils feraient en outre
côndamnés à l'aulende de 3000 liv. portée par l'Edit de
création du Greffe; des arbitrages de r673' & à celle de 300
livres portée par les Arrêts de Réglement concernant le Grelfe
des collocations; & que défenfes feroient faites aux Confuls
de fe fervir, pour recevoir les délibérations' des Corps &
Communautés d'Artifans qui feraient prires pardevant eux,
comme Juges de Police, d'autres perfonnes que du Notair.e
des ·Corps, à peine de r 000. liv. d'amende..
.
Pour le foutien de ces fins, les Notaires difoient qu'i,ls
avaient acqui5 le Greffe de la Communauté créé en r 690 ;
que la Jurifprudence de la Cour veut que les Notaires rempliifenl exc!ufivement les Greftès' des Communautés; que cela
fut ainli jugé par les Arrêts rapportés par Boniface, cam. 2.,
pag. 392 & 393; qu'ils font en poifeffion la plus allcienne
de remplir le Greffe de la Communauté d'Arles; que leur
poifeffion v'am titre.; que les Edits portant créarion des Of.
fices Municipaux, ne font que des Edits burfaux fans exécu~
Mon, du moment que la finance li été acquittée, & que le
droit d'élire un Greffier ne peut exclure les Notaires de cet
emploi; que le Pub1\c d! intéreifé à ce' que les Communautés ne jouiffent pas des Offices qu'elles ont acheté, parce
que le Greffier ne feroit pas une perfonne publique, n'auroit
ni la capacit~, ni la fcience, ni ce degré de pureté que
l'on retrouve caujours dans l'efpece de MagiHrature que remplit le Notaire. Les Offices Municipaux n'ont été réunis que
pour laiffer aux Communautés la liberté" des éleétions; & fi
la réception des aéles de -Ia Communauté fait partie des fonctions attribuées aUJ( Greffiers par les Edits de néation , ce
R'eH que pour les exercer en la même forme & maniere pratiquée aV:ll1( l'Edit de 1733 : or les Greffiers ne recevant pàs
les aétes des Communautés avant 1733, ils ne doivent pas
les recevoir après; cela efi d'autant plus vrai, que quoique
la Province eût demandé la réunion avec -tous les droits attribués par les Edits, l'Àrrêt du Confeil de 17)7 n'e l'ordonne qu'en la forme & maniere pratiquée avant l'Edit 'du
RlOis de Novembre 1733'
�DU
PALÀ~S 'DE
PROVENCR.
4~9
. Que par l'Edit de 1 S78 , & par celui de 1706, ils ai/oient
été créés pour la garde & l'enrégiHrement des failles &. collocations; que l'Arrêt de Réglement de 1662" défend aux
Greffiers .des Sieges l!J:. autres Jurifdiél:ions de les faire remettre direél:einent ou indireél:ement dans leur Greffe. Les
Edits portant création du Greffe de l'Ecritoi-re, ne dérogent
pas à ceux des Notaires. L'Edit de 1690 ne parle que des
rapports de mefurage & arpentage ; & s'il emploie le mot
de collocation, il n'entend pas cette collocation définitive
qui forme le titre de propriété, mais feulement cet :Iél:e préparat9ire qui conduit à l'adjudication définitive.
. Pour le [ourien de la demande concernant les comptes
tutélaires, ils s'appuyaient fur l'Edit de. 1673, qui veut que
.les fonél:ions des Greffiers des conventions conGHent à garder les minutes des Compromis ,. Jugemens, Se11l11nCeS, Syndicats & autres Aél:es , des Arbitres, amjables Compollteurs-,
Juges convenus, ellfemble les comptes de tutelle, liquidalion & autres. Il n'y a aucun inconvénient. que les' Auditeurs
de compte jugent les comptes tutélaires, & que les Notaires
aient le dépôt de leurs Jugemens.
La Communauté d'Arles répondoit que, quand même les
Notaires auroien,t acquis le Greffe de la Com11!unauté créé
en 1690, cet Office ayant été fupprimé en 172.4, & Y ayant
'eu une nouvelle création en 17.33., dont la Pro..ince & les
Terres Adjacentes. a.voient acquis les Offices en 17S7, \,'Office de la création de 1690, que le College amoit pu ac,quérir "fc trouvant anéanti par l'Edit de fupprcffion de 172.4,
il n'avait aucun d'roir à l'Office nouve1Jemen.t créé en 1733,.
,& réuni en 1-7)7.L'Arrêt d'u Confeir du 30 Janvier 1666, dllement enrégi!lré le. I~. Avril [uivant ,. mail1lie11l les CommupJutés dans
le droit de choiur indifFéremment pour Greffier, ou un No.
raire, ou taU! autre citoyen.
(r _
-. -,
Me.. Julien., dans fan Code, in y9. Cjvitas, ciiP'1,2., ~lit ~
"4C!uarius CiJ:itatis debet effi Notarius, ex .arzriq.uis .conJjletudi-;
nibus Sena1l1s: fed fecùs Judicatum Senaws.Confulw Magni
Conjilii die 30' Janvier 1663 juxtà quod EdiaulTl. exeediJum.:
Mmm :l,..
�460
Jou RNA L
, .
eft, &- verificatum d Senatu die 15 Avril eodem annà; & ità
judicatum anno 1673 in gratiam civitatis Pertufienfis contrà
Notarios.
L'Arrêt du Confeil du 2I Mars 1757, portant réunion
des Offices Municipaux: à la Province, permet aux Commu'·
nautés de procéder en la forme ordinaire à l'éleél:ion des fujets qu'elles jugeront les plus capables, pour être par eux ~
l~s Offices exercés aux droits & fonél:ions y attribués, le tout
en la même forme & maniere pratiquée avant l'Edit du mois
de Novembre 1733.
,
Les Greffiers & Secretaires des Communautés qU)" font
élus par elles, font des vrais Officiers Municipaux:; elles peuvent y élire les fujets qu'elles jugent les plus capables; elles
ne font donc pas obligées de fixer leur choix fur un tel citoyen, ni même de le renfermer dans telle claff~ de citoyens.
Ainli la Communauté d'Eyragues fecoua le joug de cette fervitude, par Arrêt de la COllr du 14 Mai 1720, quoique l'article 1) d'un ancien Réglement qu'elle avoit de l'époque dé
1663, portât que le, Greffier feroit un Notaire du lieu; elle
demanda à la Cour qu'il lui filt permis de modifier cet article,
& d'élire pour Greffier tel citoyenqu'elle trouveroit à propos;
& la Délibération qu'elle p.rit fut homologuée par cet Arr,êt;
La même chofe fut jugée par Arrêt du 21 Janvier 1762, en
faveur de la Communauté d'Aix, contre les Notaires de la
même Ville. ['"et Arrêt efr ,rapporté dans le cahier de l'Affemblée de la même année, pag. 118 j & c'el~ ce qui fut
encore jugé par autre Arrêt du 21 Mars 1770, en faveur de
la Communauté de Gravefon.
Quant à la poffe11ion, on difoit que quand la Communauté aéheta l'Office créé en 1690, elle en confia l'exercice
au lieur Confranti!1, qualifié Bourgeois dans l'aél:e de nomination du 2.2 Février 1692. En 1699 le fieur Sabatier qui
étoit Notaire fut nommé à, cette place; & ayant vendu fon
Office, il fut continu'é jufqu'en 17 l 6. Son fils qui n'était pas
Notaire -lui fuccéda. Le x5 Jùjn 17) 5 , le lieur Lemaine
Avocat 'fut nommé-, & le 2. 5 Avril In5 le fieur Roboly,
aufii Avocat.
"
�D U
P A X. AIS
D.
PRO V B Nell.
461
L'Edit du mois de Juillet 1690 porte que les Greffiers
recevront & écrironJ les baux li ferme, prix-faits, encheres & furdites pour les affaires des Communautés, cautionnemens, quittances, mandemens , procurations, députatians, éleél:ions dl:s Officiers municipaux, & autres aél:es de
délibérations des Villes & Communautés; défenfes y font
faites aux Villes & Communautés de paffer ou faire paffer
aucuns aél:es de la nature ci-deffus par d'autres perfonnes que
par leurs Greffiers & Secretaires.
On trouve la même difpofition dans l'Arrêt du Confeil du
14 Juillet 1691. On voit mêtftè dans l'Edit d'u. l't\ois d-è
Mai 1709 que lèS aél:es reçus & !ignés par les Greffiers &
Secretaires font foi, font exécutoires & porrent hypôtlJequ'e
avec pareille force & vertu que s'ils étaient reçus & pa'ffés
pardevant Notaires.
.
Tous ces Offices une fois fupprimés & recréés en 1733',
le font avec les mêmes droits portés par les précédèns Edits
de 1690 & 1709, & l'Arrêt du Confeil de 17)7 dit ex:'
preffément : pOUl: Üre par eux lefdits Offices exercés aux droits
& fonaions attribuées aux Greffiers.
Par l'Arrêt du Confeil du 23 Juin 1766, rendu au rapport,
de M. de Virigny, le Roi ayant aucunement égard aulè de:mandes des Procureurs des gens des trois états, &' hderprétant en tant que de befoin l'Arrêt de fan Confeil du 2 Mai
17)7, ordonne que fan's s'arreter à: l'Arrêt du Pa'dement
d'Aix du 9 Avril 1761, les Secretaires élus par les Communautés feront maintenus dans le droit de recevoir & écrire
les baux, &c. ; fait défenfes au~ N araires de les y troubler,
à peine de 300 lîv. d'amende.
La Communauté d'Arles ne contefre pas aux Notaires le
'droit d'avoir le dépôt des Sentences arbitrales & autres
aél:es judiciaires de pareille nature, & elle offre de rétablir
pareils aél:es fi aucun:; s'en rrouvent dans fort Greffe.
En 1690 il intervint trois différens Edits !"octant création d'Experts jurés & de Greffièr d'Ecrit6ire. L'un dans le
mois de Mai qui ne créoit des Expérts jurés que dans les
'villes de' Padement & de Préfi'dial, & leur donnait des
�1
462.
Jou ,lt N A L
fonél:ions reiferrées. Le [econd du mois de Juillet qui proroge la création dans toutes les Villes où' il y a Bailliage &
Juri(diél:ion Royale [OIlS l.es mêmes' fonéhons , & qui ne
donne aIt Greffier que le droit de recevoir l~s, rapports que
feroient les Experts. Le troifieme qui intetvint en Décembre
am plie les droits des Experts, &.. ajoute qu'ils feront obligés
de rememe la minute des r"apports ';:l'arpen,tage' & de me'furage entre les mains du Greffier de l'Ecritoire pour en d~.
livrer de fecondes ou autres expéditions aux parties.
Il eH évident, que la c.réation de' 1 69,0 ~mibue aux Experts
îurés les ,,,pllocations &.. le dépôt1de leur rapport 'ku Greffier
de l'Ecritoire, & que par confêquent fi la ville d,' Arles a' r~uni
.le Gn;ife. lie l'Ecritoire, ell.e a réüni le drolt de co'nCerv.er le
dépôt des collocations. La Communauté d'Arle,s réunit toUS
ces Offices d'Experts jurés de l'Ecritoire par ·comrat du 2..:L
J.uillet ,1.69.7, &.. obtint un.. Arrêt du COI\feil qui lui donne
'la -4êulté .de Les f~ire, exercer par ce.u·x qui. [erOllt par elle
'J;lomrnés én 'la.,maniere 'accoutumÉe..
J
:">L'Arfêt dl!- Co~fe.i~ d'u. '1:7 Avril. 17°0 port,ant réunion de
'to~~' les' offièês a~' Corps de la Communaulé, les rapports
de follocation y fl'lnt mis à côté des rap.ports des voies
manp,am~ntales ou liquidation d.es dommages, comme les
'1!os' & les'atJtr~s, rte de,vant être faits que' par les EHimateurs
,de Iii Communauté..
.
. ,l~a( l'Edit- dû Roi Réné, du II. Juin 14:03 lès coooptes tll.rélaires doivent être rendus pardevant les Auditeurs des
Comptes qui font annuellement nommés par le Confeil de
là.. ville ~d'Aix. Cet Edit fut confirmé. par Letrres-Palentes du
. "II rüin 14'13 rendues en. fayeur des pupill.es, niineurs &
auditwrs de. c.ompre•. Quoique cet Edit n'ait établi la regle
q,ue po.ur la: ville d:Aix ,: ellf a élé cependant prorogée dans
toute lâ Province. Ce droit a été confirmé par l'Edir du
mois de Mars },,67,o, rapporté dans B.oniface ,. tom. 3, livre
'" , tit., S., c.hap.
qui révoque l'Edit dù !TI0js d'Oél:obre
166'7" porta'r..t création dJ.Experts jurés & Auditeurs de
,Cp!llptes, tlltéJa'ires, & v~ùt que. l'audition, examen & c1ô.t,ure: des c.oJI1Ete.s. tUtélair~s, (oient. faits rardevane. ks A.udi,,:.
L,
�,
DU
PALAIS. DE
PROVENCE.
463
ceurs ordinaires qui font nommés annuellement par les Con.
feils des villes & lieux fuivaot 'l'ancien urage de la Province.
Mourgues, pag. 3); Bomy, pag. 60; M. de Regulfe,
rom. l , pag. 2 l 8 , & M. de Bezieux , pag. 542., font menrioA de p'lufieurs Réglemens de la Cam qui ont confirmé la
maxime.·
'
'
, , Par Arrêt du 2 l Juillet 1779 , rendu à l'extraordinaire, au •
rapport de M. le Confeiller de Sr. Marc, la Cour ordonna
que l'Edit de 1673 ferait exécuté fuivant fa forme & teneur,
condamna les Confuls & Communauté de la ville d'Arles
à rendre au College. des Notaires les minutes des 'Senrence~
arbitrales & autres lIél:es de pareille nature, s'il s'en trou voit
dans le GreJlè de la Communauté,,&' à la re!1:itution des
droits pel'çus fur l'expédition de pareils aél:es, [uivant la hquidation qui en feroit faite par Experts convenus ou pris d'office; & en concédant aél:e aux Confuls de la déclaT'acion par
elolX faite dans l'inftance de ce que pareils aél:es, fi aucuns
avoient' été dépofés', 'l'avoient été contre la connoijfan~e &
le vœu de la Communauté, elle mit les Confuls & Communauté hors de Cour & 'de procès fur les plus amples fins des
Notaires concernant Ce chef, condamna néanmoins les Co.nfuis & Communauré aux dépens de cette qualité; & de même
fuite, ordonna que les délibérations de'S Corps des Ans &
Métiers, où la prétence des Juges de Police n'eH néce1faire
que pour l'autorifation, feroient reçues par un Noraire, lorfqu'il feroit Greffier du Corps, exclufivement au Greffier de
la Police'" à peine de 1000 liv. d'amende & d'en être informé; condamna les Confuls & Communauté à la moitié des
ilépens de cette qualité, l'autre moitié entre les parties corn·
pentee; & en concédant aél:e aux Confuls & Communauté de
cc qu'ils, n'empêchoient que conformément aux Edits portant création des Greffiers eorégithateurs des collocations,
le Coilege des Notaires enregithât les collocations & perçût
les droits 'dus à rairon de ce fur le pied des Edits & Arrêts
intervenu:;, & qu'il expédiât extrait des enrégiflremens en
êoncours avec le Greffier de l'EctitQire réuni au Greffe de
la C,ommunauté, & encore de ce qu'ils n'empêchaient que
,
.,.
�·464 .
Jou RNA L
les comptes tutélaires qui ne' feroient qu'examinés, & non
jug~s , fulfent dépofés au Greffe des conventions, ainli que
fOUS aél:es conventionnels, & de ce qu'ils n'avoient jamais
entendu retenir au Greffe de la Communauté, comme Greffe
des Auditeurs des Comptes, que les comptes tutélaires jugés
par les Auditeurs, la Cour mit les Confuls & Communauté
hors de Cour & de proj:è,? fur les autres fins des Notaires,
• condamna les Syndics du College aux dépens de, ces qualit~s.
ARRÊT :LIX.
tes
y
Juges peuvent interloquer d'office, fi III matiere eft dif
- pofée.·.
.
pans un Jugement qui ordonne lin rapport provifoire ou interlocutoire ,. aux frais de . . . la clauft fauf d'en faire, eft
fi!ppléée de droit, lorfqu'elle eft omife.
1r'
Ouis Paul, Négociant de la ville de Toulon, arrenta le
~ I2. Décembre 1774 à Jofeph-Laurent-Philippe Sicard,
Négoci?nt de la même Ville, deux moulins, cabas, engins,
& autres ufienfiles & effets fervant à la fabrication du fu~ac , herhes ge den~on & pouffiere de p·in fervant à la tan·
nerie, m.oyennant la rente de soo liv., pour entrer en pof(effion le premier Juillet 177'), Paul promit de procurer à
Sicar~ la connoilfance de tous fes amis qui faifoient ufage
QU fumac, pouiliere de pin, &c. & renonça à faire ce commerce pour fon. compte; il fit même dans la fuite plufieuts
~ch.at.s, de l'ordre ~ pour 1<; çompte de· Sicard. Des cont~n'!tiçns s'éleverent entr<; Paul & Sicard; ce dernier interpella Paul d~ celfer toute çom m'iffion pour lui, de ne point
fe mêler en aucune façon, ni fous aucun prétexte, de fOIl
commerce pour les achats & poqr les ventc;s. Paul répondit
que Sicard s'expliquait Un peu trop tard, qu'il y avo~t encore
des ma,rchanqifes.. a,chetéfs Ilour fon c6mpte, & qu'il éroit
obl,igé .cle les recevoir'& d'en payer le Pfix•. Les marchandifes
�DU
PAL AIS
DE
P
&
0 VEN C E.
46~
dires arriverenr; Sicard refufa de les payer, fous prétexte
qu'étant arrivées après l'aél:e interpella tif , elles devoient être
pour le'compte de Paul. Ce dernier en demanda le paiement;
il demanda de plus incidemment que Sicard fût condamné
à lui payer la fomme de 127'1. liv., montant de fa promeffe
privée.
Sica rd offrit un expédient; 1°. il fe condamna au 'paiement
du prix des marchandi[es achetées, fans droit de commiffion,
vérification préalablement faite des marchandifes par Experrs ,
qui déclareroient fi au temps du débarquement & d" l'eJnmagafinage, elles étoient bonnes & de recette. 2,0. Il fe condamna au paiement des 1272, liv. du montant du bille.t.
Le Lieutenant par fa Sentence jugeant con[ulairement avant
dire droit à l'exploit libellé & à la requête inéidente, ainfi
qu'aux, fins & conclu fions y relatives, ordonna qu'à la diligence & aux frais de Sicard, par Experts èonvenus dans trois
. jours, autrement nommés d'office, il [eroiE fait dans le tenls'
de droit~ rapport de l'état des marchandiiès , ~efquels Experts
en procédant déclareroient fi lorfqu'elles avoient été débarquées & mifes en magafins elles étaient bonnes ;' triar'chandes & de recette; oui raient témoins, &c. ,
Sicard appella de cette Sentence pBrdevant la Cour; if
cotait pour grief, la. que le Lieutenant n'avait point 1'ro-'
noncé l'adjudication des Commes non cOhtefiées; 2°. 'qu'au.
lieu de le condamner relativement à fan expédient, il avait'
interloqué fur la vérification des marchandifes à l'époque du'
débarquement.
;
Touie Sentence ( difoit-il ) qui prononce fur des chofes,
non demandées, ou non conte fiées , eft nulle; il étoit convenu par les deux parties, que Sicard devoit être condamné
au paiement des Commes par lui dues; cerre condamnation'
écoit prononcée par l'expédiem offert par Sicard ; cependant
le Lielltenant avoit interloqué cette condamnation, & avoit:
fait par-là fupporrer à Sicard des intérêts dont il aumit été
affranchi par l'exécution de la condamnation confenrie de
fa part & acceptée par Paul. Sicard avoit lui-même tracé·
par fon expédient la route dont le Lieutenant n'a.uroit l'as:
Non
�466.
Jou RNA L
dû s'écarter, n'étant pas contredite par Paul. La route tracée
& adoptée étoit une condamnation & non une interlocutiç>n;
le Lieutenant devoit donc condamner Sicard & ne pas interloql!er; ce font les 'expédiens, ce font les condulions qui
fixent les intentions, la volo(lté, les ac.quiefcemens des parties, & qui doivent faire la regle dans la prononciation des
J uge~ens. Le Lieutenant ay,ant trouvé dans l'expédient de
Sicard une vérification à faire, il auroit dû la prononcer
telle qu'elle étoit demandée; ce n'étoit pas à lui à faire la loi
:tux partie~ fur. une chofe non conteilée, à diriger ou leurs
intérêts 0'01 leurs intentions j il n'avoit, rien à examiner" à
juger,.ni à,ch<jnger à cet égard, inter,confentientes nullœ[unt
Judicis. partes. En vain diroit-on que la condamnation érait
fubordonnée à la condition de la vérification. Elle étoit au
contraire abfol,ue & qéfinitive; le paiement étoit feulement
fufpendu jufqu'apr~~ la vérification; l'objet de cette fufpenfion n'étoit autre que pe ne pas prendre celles des marchan4ifes qui feroient dé.darées par les ,Experts n'être pas bonnes,
march;1I1ges lX. de recette au temps du débarquement & em-,
1,
., _
•
magafinage.
"
D'ailleurs ( ajoutoit l'Appellant) le Lieutenant en ordonnant le rapport aux frais de Sicard, auroit dû inférer la
daufe [auf d'en faire.; le défaut de cett.e prononciation ,pré-'
j\!ge que Sicard ne peut répéter ,les frais, quel que foit l'événement du rapport. De quelque caufe que procede le retran.chement de,la daufe [auf d'en faire, il n'en renferme pas
moins une irrégularité condamnée par l'Ordonnance, & une.
injuilice caraél:érifée. Cette daufe a été établie pour fixer la
différence qu'il y a entre un rapport qUI doit être fait aux
dépens de celui qui le requiert, fans efpoir de, reilitution; &
& un rapport où la partie ne fait que l'avance des frais, pour
en être rembourfée, ou non, fuivant l'événement du rapport.
Il n'eil donc pas vrai qu'elle foit de droit, puifqu'il ell: des
cas où les rapports font faits & doivent l'être irrévocablement aux frais d'une partie : fi Sicard en avoit fouffert le
retranchement dans la Sentence, il ne pourroit répéter les
frai~ dl.! rap port quel que .fût l'événemenr.
\
�DU
PAL AIS
D E
PRO VEN C E.
467
Paul- répondoit qu'il était furprenant que Sicard ofât fe
plaindre de ce que le Lieutenant avoit fuivi mot pour mot fes
conclufions. La Sentence ne prononce la condamnation
qu'après que la vérification aura été faite; il faut que celleci précede, & l'autre ne peut en être que la fuite; tautes
les deux ne peuvent marcher enfemble, parce que dans leur
effence l'une ef!: capable d'écarter l'autre:
Si le Lieutenant avoit prononcé b condamnation des fommes relatives à la valeur des marchandifes, Paul auroit pu,
en ve~tu de cette Sentence, exécuter fon débiteur & fe faire
payer. Quel contraf!:e! la vérification n'auroit été effeél:uée
qu'après que Sicard n'auroit plus rien dû à fon créancier;
& en fuppofant que .cette vérification portât les Experts à
déclarer que les marchandifes n'étaient pas de recette, Sicard n'auroit pu être contraint de les recevoir, tandis qu'il
en auroit déja payé le prix. L'incertitude de l'obligation à
prendre les marchandifes dépendant de la vérification qui devoir décider du rejer ou de la réception, ne permettait donc
pas au J ug-e'-de faire une prononciation oifeufe & qui pouvoit devenir contraire à l'événement; la faine raifon dictait que puifque cette réception ou cette condamnation fe
trouvait fubordonnée à la vérification, il falloit que celle-ci
précédât l'autre.
. Sicard prétend que la Sentence lui porte un préjudice en
ce que ne pouvant fe libérer, elle lui fait fupporter des intérêts. Mais pourquoi fe plaindre d'un fait qu'il a lui-même
deman.dé? Le Lieutenant ne pou voit pas rendre une Sen··
tence qui rentèrmât des difpofirions qui s'entrechoquaffen't;
s'il avoit condamné Sicard en fubordonnant cette condamnation à une vérificatiOl; , il pouvoit s'enfuivre que l'iffue de
cette vétification rendît la condamnation caduque. D'ailleurs
de deux chofes 1'une : ou Paul fera fournis à fe charger de~
marchandifes, attendu leur défeél:uofité, & dans ce cas il en·
durera lui feul la perte des dépens & des intérêts; ou les
marchandifcs feront déclarées de recette, & alors Sica rd,
fera tenu de. les prendre;. & comme par une contef!:ation. délSnn2.
�468
Jou RNA L •
placée il aura oçcalionné lui-même l'interlocution & le retard,
il devra feul fupporter les intérêts & les dépens.
Il eft certain ( continuait Paul) que le filence de la, Sentence fur la claufe [auf d'en faire, n'offre qu'une fimple omiffion j l'ufage plutôt que la regle l'a introduite j l'on dit l'u[age,
parce que, lors même qu'elle n'eft point énoncée, elle cft
fuppléée de droit j ainli dans les inftances criminelles, on
conclut à la folidaire contre tous les accufés ; fi elle n'eft
point exprimée, elle n'eft pas moins exécutoire. (Ferriere
dans fan DiéEonnaire, va. Dépens, pag. 674') Il en eft de
.même de tous les dépens qui fe font pour parvenir -à un
jugement. ( Ordonnance de 1667, tir. 31, arr. l, & Jouffe
fur cet article, pag. 490. )
De ces réHexions nait cetre conféquence infaillible, que
par la Loi, les dépens doivent être adjugés à celui qui rapporte gain Qe caufe. Dès-lors la prononciation d'une Ordonmnce qui interloque, & qui charge l'une des parties de faire
les frais d'un rapport, ne fauroit être conlidérée comme définirive, parce que l'événement de l'interlocurion peut diriger la condamnation des dépens conrre l'autre, attendu que
la charge premiere de fatisfaire aux frais de l'inrerlocution,
n'emporte qu'ut?e force provifoire que,le Juge peut changer,
lorfqu'il prononce fur le fonds j & il {ùffit, fuivan,t le tel$te
de l'Ordonnenee, qu'en ftaruant fur les dépens la partie fuccombante fait obligée de les payer , pour que ceux dérivant
de l'interlocutoire, dont le bur & la nature ne [ont autr~s que
d'éclaircir les quefiions foncieres & préparer 'le Jugement
final, foie nt indjfp~nfablement compris dans la prononciation de la Sentence définitive. ,
Il eft tellement vrai que cette application ne fa'uroit être
différente, & que la c1aufe [auf d'en faire eft purement de
ftyle & fuperHue, puifqu'elle eH: de droit, que la Sentence
l'indique ouvertement, en déclarant que le rapport fera fait
à la diligence de Sicard ; fi le Lieutenant avait entendu lui
rendre, la charge des frais du rapport particuliere & exclufive,
il ne fe ferait point fervi du mot à la c/iligence, q~i n'em-,
�D~
469
porte d'autre fens que celui d'exprimer de la façon la plus
énergique que Sicard fera provifoirement procéder au rapport, & cet attribut provifoire ou précaire n'indique qu'une.
obligation fufceptible de changement.
Par Arrêt du 21 Juillet 1779, au rapport de M. le Confeiller de Vitrolles, la Sentence fut confirmée avec dépens;
écrivant Mes. Fauchier & Reinaud.
DU
PALAIS
ARR Ê T
P R. OVBNCll.
1, X.
Si celui ,qui prétend avoir été originairement propriétaire du fol
d'un chemin, peut en réclamer la propriété, en cas de fuppreiJion ou changement du chemin.
L exiHoit dans le terroir de Marfeille un chemin voifinal,
qui du pont tranfverfal du torrent appellé Jarret, conduifoit au hameau de' la Mq.gdeleine, & qui étoit également utile
& commun à [Ous les poifédans-biens des quartiers de SaintBarnabé, Saint-Julien, ler Cayols & autres. Ce chemin voifinal, fitué entre le domaine du fieur de Cuers & celui des
Peres Chartreu'x, étoit cotoyé de murailles dont ces propriétaires avoient refpeél:ivement clos leur poffeffion.
Il était originairement dans la (uperficie, à un niveau
prefque égal du fonds des deux riverains; mais les eaux qui
venoient du grand chemin, & alloient fe précipiter dans le
torrent de Jarret, l'avoient tellement creufé , que les murailles
riveraines éroient décharnées jufques aux fondations; en forte
que dans les crues d'eau, ce chemin voifinal étoit impraticable; il formoit divers angles faillans & rentrans qui en
dégradoient la direél:ion, & qui, vu la facilité d'échapper
par le torrent de Jarret, favorifoienc les attentats à la fûreté
publique. Les I!1téreffés reconnurent qu'on ne pouvoit obvier
à ces inconvéniens, qu'en confiruifant un nouveau chemin
fur un terrein fupérieur, qui du pont de Jarret à celui du
hameau de la Magdeleine, pût remplacer l'ancien en ligne
I
�470
Jou RNA L
direél:e. On ne tro\lvoit à çet effet qu'un emplacement qui appartenoit aux Chartreux; le fieur de Catelin, J'un des Intéreffés, en fit J'acquifition, & le céda pour J'intérêt commun.
. Tous les Intéreffés furent enfui te convoqués, & il fut
pris une Délibération unanime le 20 Février 1774, dans
laquelle, en reconnoiffance des bons offices de M. de Carelin, ou lui cede le chemin vieux, en remplacement du ter·
rein plus fpacieux & bien plus précieux , dont il avoit
fait le facrifice, pour y emplacer le nouveau; & on lui
donne les pouvoirs les plus étendus pour traiter avec le Sr.
de Cuers, & paffer avec lùi tous les aél:es qu'il croiroit néceifaires à la confommation & à la perfeél:ion du projet.
Le fieur de Cuers forma oppofition à la Délibération, au
chef portant ceffion au fieur de Catelin de l'efpace du chemin 'vieux; la Sénéchauffée de Marfeille étant fufpeél:e, attendu que le fieur de C-arelin en étoit membre, l'affàire fut
renvoyée au Siege d'Aix, & le fieur de Cuers obtint un tout
en état.
Il fonda fon oppofiti'on fur ce que le vieux chemin lui
avoit appartenu originairement, & qu'il devoit lui retourner
du moment qu'on en interdifoit l'ufage; que l'univerfalité
des poffédans biens & co-propriétaires. de cet emplacement
n'avoient pu, à fon préjudice, en difpofer en corps, ni l'échanger avec' celui du chemin nouveau; que cet échange le
privoit de l'avantage de conHruire des maifons dans fon efpace, & d'y former des rues.
Pendant l'inHance les poffédans biens firent tracer le
nouveau chemin, & le firent conduire jufqu'au point du
vieux chemin fur lequel le tout en état prohiboit route enrreprife;'
.
La caufe portée à l'Audience) il fut fait regiHre & vuidé
le 20 Aoûr 1774 par un réglement à écrire.
.
Le Lieutenant d'Aix rendit Sentence par forclufion le 21
Février 1777 , & ordonna qu'avant dire droit fur toutes les
fins & conclufions des parries, il feroit fair rapport prépara.
toire & de[criptif de l'état des lieux contentieux par Experts.
�DU PALAIS DE PItOVENCE.
471
convenus ou pris d'office, lefque1s décldreroient li le déplacement & changement du chemin, & la fuppreffion du chemin vieux, étaient avantageux ou préjudiciables au domaine
du lienr de Cuex-5, & décriroient à cet effet cous les préjudices & avantages qui pourroient en réfulter.
En exécution de cette Sentence les Experts furent nommés ; ils firent leur rapport. Le lieur de Cuers la fi-r rignifier aux poffédans biens, avec protefl:ation de le débattre
dans le cas où les poffédans biens l'attaqueroient. Et par
Semence du 'î Oéèobre 1778 le fieur de Cuers fut débouté
de fon oppolition avec dépens. Il appella pardevant la
Cour. Il oppofoit, 1°. que les -co-propriétaires de l'ancien
chemin n'avoient pu le céder à fon préjudice, foit qu'il fût
chemin public ou voifinal; 2.°. que la Sentence qui ordonnoit
le rapport n'écoit que préparatOire, qu'elle n'avoit rien préjugé fur la queHion de propriété; 3°. que quand même
cette Sentence feroit interlocutoire, il réfultoit par le rapport trop de préjudices contre fon domaine pour avoir à
craindre qu'on dût le priver du vieux chemin en faveur du
rieur de Cate1in. Il préfenta enfuite une requête en caffation
du rapport interlocutoire.
Les Syndics des poffédans biens foutenoient qu'il étoit
indifférent que le terrein' du vieux chemin eût appartenu dans
le principe au fieur de Cuers ou à fes auteurs en total ou
en partie, que du moment qu'il fut conHruit & delliné à
l~urage public des poffédans biens, il en perdit la propriété : fi le prix en fut payé, c'étoit une vente; s'il en fit
don, c'étoit une pollicitation dont l'obligation efi également irrévocable; le fieur de Cuers ne pourroit afpirer au
retour de propriéré qu'en tant qu'il auroit été fiipulé.
En vain le fieur de Cuers fuppoferoit que c'efr un chemin public dont il veut affimiler les prérogatives à celles des
chofes faintes qui n'appartiennent à perfonne-: nullius funt
res facrœ ; les chemins, quoique ,publics, en tant que l'u/age
e-n efi commun à tous les citoyens, ne pe'uvent être mis an
rang des chofes faintes ou re1igieufes , ils ne font pas même
~ans la cathégorie des chores publiques dont le droit Ro-
�'t7~
1 <>
U RNA L
mam déférait la propriété au peuple que le Roi repréfente
en France, & qui forment en Provence partie du domaine
des Communautés, confidérées fOllS ce rapport comme des
particuliers, fuivanc la difpofition de la Loi 1), ft: de verb.
fignif.
Delà vienr que pareils chemins, improprement appellés
chemins publics, ne font pas même chofes publiques de
leur nature, ils font rangés darts la claRè des régales mineures, donr nos anciens Comtes ont cédé la propriété &
les, droits en dépendans aux Communautés de la Province,
à la charge de les entretenir à leurs dépens ; delà vienr encore que les Communautés qui achetent des particuliers les
terreins propres à former les chemins, font en droit d'en
difpofer par vente ou par échange co-mOle des autres--biens
de leurs domaines; en forte que s'il s'agiffoit ici d'un chemin public, le fieur de Cuers feroit non-recevable à fe plain~
dre du tranfport ou de la ceffion que l'univerfalité des habitans en a fait au fieur de Catdin, fur-tout en confidérant
que ce vieux chemin a tenu lieu de prix au remplacement
d'un autre plus fpacieux, plus utile, plus commode & plus
sôr.
Les Seigneurs féodataires & les Communautés font refpeél:ivemenr obligés de fournir à la Province le tenein né-:
,ceffaire à la confrruél:ion des chemins dans l'étendue de leurs
rerritoires; fi les chemins fonr tracés dans les biens nobles, les Seigneurs qui en cedent gratuitement la conrenance
à la Province, ainfi que les Communautés à l'égard des
hiens roturiers, reprennenr comme elles ces conrenances en
cas de fuppreffion ou d'abandon par forme d'échange des
'anciens chemins aux nouveaux j mais les Communautés qui
fonr, dans, les deux cas, forcées d'acheter des particuliers
les biens roturiers de Hi nés aux nouveaux chemins, donnent
en compenfation ou cedenr en paiement l'emplacement des,
vieux fuivanr l'ef!:imation par Experts.
Le {ieur de Cuers n'eH pas plus heureux s'il convient
qu'il ef!: quef!:ion d'un chemin voifinal, parce que ce chemin
voifinal a été formé dans le principe aux dépens de tous les.
iotéreffé~
�DU PAL AIS
DE PR.O VEN C E.
473
intérelfés dans l'ordre de la répartition prefcrite par 1I;s
iéglemens partkuliers' à...cette forfè de chemin~; le..terrein
qui fervit à le former fut irrévocablement donné par poli icitation, ou acheté des deniers communs; il devint fous les
deux rapports uni au domaine de rous les illtérelfés à la
charge de leur urage' commun ;"&·fous:ce point de' vue l'ancien polfeffel1l~ :de .ce' teJrein}llyanr été dépQujll~ 'de, tous .les
droits de la propriété par le tranfport 'faitd .l'univ'er.fàlilé ,
il ne peut prétendre au rerour de cette propriété dont il
eH: cenfé avoir Jle prix en' main: res & pretium ne peuve'nt
concourir enfemble.
', ~
Dlailleurs rien n'indique q~e 'le terreia 'préfomptivemeni:
acheté, ou donné là ~tit~ irrév.ocable de la lpollicitation,~pro
cede du domaine des "2lUteursfIdu fleur de 'Cuérs, pluiôcrque
de celui des Peres Char'treux. "Cet ancien chemin était 'fis
entre les deux domaines; l'aae 'de 1714 donne pour confront
au domaine des Chartreux celui. du fieur de Cuers, ichemia
entre deux.
"
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, _ l'
J
La Sentence du 2.1 Février 1777, en ordonnant un-rapI1d,t
in medio titis,.&. avant dire droir, préjugea que les avantagl:s où
les préjudices qui pourraient réfulter du changement du chemin,
fixeroient la décifion définitive, tant fur le principal que ftlr,
les dépens dont cette Sentence réferye égalemenn l'adjudica-tion. Elle fut vraiment interlocuroire & p'réjudicielle : or le
rapport établit parfaitement que le ~hangernent du chemiR
eft avantageux au domaine du fieur de Cuers. Son oppofitioll'
eil: donc mill fondée, d'autant plus qu'il a lui-même pr.oduit
& approuvé le rapport.
Il en ell: des rapports comme des Sentences j l'aaÏon poUt
les débattre dure trente ans; mais l'ac'Juiefcement éteint
l'aaion : fera' eft appel/ario poft execurionem fubfecutam. La:
maxime eil: connue; elle eil: retracée par Me•.Julien dans fon
Commentaire fur nos Statuts, tom. 1 , pag. 362..,
Par Arrêt du 2. 1 Juillet 177'7, au rapport de Ml'. le Con[eiller du Queylar, la Semence fut confirmée, avec dépens;,
écrivant Mes. J•. Bernard &. • • •
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A,R,R Ê T
LXI.
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Le,' membre d'un Corps ou,' Cpmmunauté ne peut agir ou fé-·
:poadre valablemènt a'Ù; nom:d la généralité t s'il n'y eft ex! ~,p"'C'ff'émeni arltarift. JIt)
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Ans.le mois d'Avril. 1778, les .confuls de la ville de
Digne préfenterent Requête à la Cour contre l'un des
Reé:l:eurs. dè l'Hôpital'la Charüé .de Îa même 'Ville, en bif.(~!t!ent d'urie' ~prqpo'fition 'injurieufe par lui Jaite dans une af{emblée. des Reél:eurs ;t.ils demanderent' la 'commune exécution co'nt~é les autres' Reél:eurs, de l'Arrêt qui interviendrait;
fi mieux ils n:aimoient confentir à la commune exécution; .
ce qu'ils feraient tenus de déclarer lors de la fignification
de la requête, dans lequel cas, & non autrement, ils feraient
difpenfé,s, deJ faire pséfemer. La .fignification de cette requête fut faite à ,deux des
Reél:eurs pour tous; ils répondirent qu'ils confentoient à
la commune' exécution, & déclareretit qu'au moyen de ce
ils 1 ne 'feraient point préfenter. Les Con(uls rapporterent
péanmoins un Arrêt de .défaut avec dépens contre les Recteurs en propre; ils en. demanderent la ca!fation.
. On a pourfuivi, difoient-ils, & on 'a fair condamner comme défaillantes des parties qu'on avait difpenfé expre!fémen.t
de préfenter; & cette difpenfe ayant été. acceptée d'une ma.
piere légale & précife, il ne pouvait y avoir :lieu à un Arrêt
~é défaut.
.
La peine du défaut n'ell: établie que contre, ceux qui
par déf0béi!fance ou négligence ne fe préfentent point dans
le temps de droit. ,
.
Jamais elle n'a lieu cancre ceux qu'on difpenfe de compa,"oître. Les Reél:eurs ajoutaient, qu'ils éraient. condamnés à
des dépens en propre quoiqu'ils n'eu!fent Joutenu aucune
c;onteftation. Ici l'Arrêt accordait plus qu'il n'avait-été de.~ ~
C;
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PAL AIS
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47~
0 V Il N C J!.
mandé. Les Con fuIs b'avoient demandé les dépens qu'en cas
de contefiat ion , & les ·Reé1:eurs parleur réponfe avoient déclaré ne vouloir point contefier.
Enfin on avoit obtenu la commune exécmion d'un Arrêt
qUI n'étoit point encore rendu, ,au lie,u de fe cooforiller
aux regles & à Fufage, qui veulent qu'on fa1re prononcer;la
commune exécution en queue' de l'Arrêt qui prononce' fur
la contefiation fonciere, ou qu'on fa1re rendre' un autre
Arrêt particulier., poHérieur &. féparé du premier.1
j
~'
Les Confuls fomenoient au contraire que Ia'lféponfeJ-des
deUJ{,'ReB:eurs n'avoié' pli arrêter leurs pourfuites '; ,il ne .pouvoient prendre fur eux de fairé )unè' r.éponfe ,:lparce qu'~1
s'agi1roit de l'Hôpital lui.mtme; don'~ le vœu
pouvoit 'être
conUaté que par une délibération générale de'l'Œuvre•.
Les ,Con fuIs 'fe feroient expofés à de' nollvelles conr.efiations aprè!s 'l'Arrêt, s'ils avoiebt éù la facdlité [dê 'fe 'continref
âu confenternent,JdortnéI par ,àeux Readrs. Ils ont donc1pu
pourfuivr~ ,un' Arrêt de défaut,;& regarder!Jce .'Confèntemeiit
comme n~étant pas l'ouvrage de la pluralité & -le vœu du
BUreau.
L'Arrêt de défaut ne porte, aux parties 'au.cun' pr~jud ice
quoique"tendu avant le jùgethenDJd~ la qmttité; "princil'aleJ,
&-on ne trouve aucun 'téxte"ni 'dâns.le<ldmit1ini,dansl les 'Oi...
donnances qui détermj.ne, à ,pe'iile'deJfnullité-., le' tems aUljuel
les demandes en commune exé\:ution doivent -être form'ées
~!),
& jugées.
, .Q'aillel!lrs c'efi au 'défendeur'à fe.reprocher del n'avoir. pas
fait préfenter pqur pouvoir faire marcher les dèu'x: prac.6dures
dans le même temps.- E'ofin là' c011da'mnation au~' déjiens
prononcée contre les' Reé1:elfrs devoit ,lli& en'cas, def conteHation; & dès qu'il eft prouvé ,que Facquiefèement du Bnreau ne fe trouvoit pas fuffifamnlent établi par la réponfe
d'un ou de; deux ~e.aeu!s-,I fI efi certain~ qq'oh 'a -dû -les '$egarder comme ayant conte:fié' la' comm'tln'é décution" ,d'emandée. Le défaut opere"le même lelf~t_que rla conteHation. '
j
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If!:';" ~j :'1 i.:' :# ... 1
Me. Bermond Subftitut portan't ]a parole obferva .ql1e
ne
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0 0 0 :2.
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. I r · • J) Q U RNA L
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l'obligatiol\,' de :comparoître fur les a/Iignations données en
jllf!:ice ,dl. le .premier devoir des défendeurs, & le plus indifpenfable. L'Ordonnance a même établi la peine la plus
forte èorftrq· ceux qui ll.égligeroient de la re/llpljr; elle au~orife le J'Ige de prononcer l'entérin.ement des fins prifes
cpnt('~ux;]
Il
.
.
: ...
,II n'ef!: pas moi l1 s certain que l'obligation de fe préfenter
&. la .peine portée contre les défaillans n'ont été établies
que pour l?il..Vancage dQ pourClIivant. Son intérêt feul a diél:é
CJllce: difpofiti6n. de ,la loi.) •. J .
\
_••
- Les' ffio9fuls de Digne ayant expreffémcnt djfpeJ1fé Jes
Reél:eurs Ae. venir "préfente\i tflir leur requête, ,il fer~i t \JtJjù(1e
d'entretenir' BArrét dé défaut fi la difpenfe avait. été ,va1ablement. acceptée. )
1
-c -Mais il.falloit au .mQÏ11s un confentemenl;. légal donné par
ie B.ureau ~i:nêOle j' o\;l~'pat perfo.l1l)es a)'àn,e de Jl,li.p~JUyoir, &.
eommi/IiolJ" ,Il falIoit,lft'i con'fenrement qui· pû~ pffurer les
Confuis fur.leuodemande., & lJ.lli ne laiffât allx.Reél:euTs aueu.n- prétexte. polit ref~fer d'exécuter ce qu'ils avoient,.p.romis.
r L'acqu~e((lement de deux Reaclvs.ne -pouvoit tt:aJ1quillifer
}es Çonfuls y &;rquQÎque ,ceux111I~fljffe.nt .mem!:lrès du .B~r!Jau
de >l'HôpitaL,1 oruipouvoit ._tQujbuI:$ çrail1clCi< quedeur',r~ponfe
he fût défapp.ro.u·vcSe. par.; la.c·géJléraliJé. r 'l~ , . . - - J J. "
< Ce n'ef!: que ·dan$ upê'alfemblée générale du Bureau qu'il
. peut être pris quelque détermination fur les intérêts d'une
Œyvre.; C~, n'ef!: que dflns 'ce.ct.e- 'iiff.eJ11b)éç q}leJ'ré[J.de 'le pouVoir/de .. délibére!'. . ~ ';,' 1'-; ";_'ll'Jo l jrl( "~ . . '
.
Ij'HôpiÎal ne pouvoit',êtrc.. lié. Far le, êOIJ-fencerocntcd'onné
_par deux, .des Reéfeùra'; &.Jcom<l1l\'e les ohligation$ [ont ref.peél:ives, ir-faut cqnvenir .que fi l'.Hôp~tâl n'était point en.gagé à l'effet d'accorder ')a commune e~écution demandée
.par .les iC.onfuls·" eeuiq-ci .n'av.oient,.p9int .perdu le ,d,roit de
.pollr[uïvt.e &' dJQbtellilUun f\rrêt. ;., .
,
. La difpenfe Jpelpréfen.tet n'~.tait promife &e pe. pouvoit
l'être que dans le cas d'un confentement valable & [ur lequel .iL ne fût' pas po/Iible' de I~venir.
J.
�DU
PALAIS oDE
PROVENCE.
477
On auroit foutenu fans fuccès, pour l'intérêt des Reél:eurs,
que puifque les Con fuis eux-mêmes avoient choili deux Recteurs pour leur fignifier leur Requête, ils avoient jugé parlà qu'ils écoient perfonnes aptes pour répondre, & pour accorder ou refufer la commune exécution. On peut fignifier
à un Reél:eur, mais celui-ci n'ell: point autorifé à répondre
fans pouvoir exprès. Ils auroient dû rendre corn pte au Bureau de la fignification qu'ils avoient re~ue, & faire délibérer
fur la réponfe.
Il obferva enfuite qu'il n'étoit pas néceffaire que l'Arrêt
fur le principal fût intervenu lors du Jugement de la com-'
rnune exécution; l'on ne trouve nulle parc le principe de
cette obligation. D'ailleurs il n'en réfulte aucun mal pour
les parries, & tel eH notre ufage confiant.
La commune exécution n'auroit point été ordonnée avant
que l'Arrêt fur le fonds eût été rendu, fi les Reél:eurs avoient
préfenté" dans les délais de l'Ordonnance, & s'ils avoient défendu fur cette qualité. L'inftruél:ion d'une procédure par
défaut a une marche bien plus rapide que l'infiruél:ion qui
fe fait contradiél:oirement; il établit fur le dernier moyen,
tiré de ce que les Reél:eurs avoient été condamnés en propre aux dépens, qu'il n'étoit °pas mieux fondé que les précédens.
Si le confentement donné par les Reél:eurs, fur la fignification de la Requête, ne porre pas le caraél:ere de validité,
néceffaire pour arrêter les pourfuites des Confuls, on a °pu
regarder leur demande comme conteHée.
°
Il eH vrai de dire que-, le Bureau de l'Hôpital n'auroit peutêtre pas conreHé la demande des Confuls, s'il en avoit eu
c.onnoiffance. Mais cette confidération n'inréreffe point les
Confuls, donOt la procédure eH réguliere, & l'aél:ion que l'Hôpital peut avoir contre les deux Reél:eurs, n'empêche pas
qu'il ne faille entretenir l'Arrêt de défaut.
Il conc1ud à ce qu'en concédant aél:e aux Confuls de ce
qu'ils n'avoient jamais contefié le rabattement de l'Arrêt de
défaut) demandé par les Reél:eurs fur le Barreau, ils fuffent
�479
. Jou R. N A. L
mis hors de Cour & de procès fur la demande en calfation,
& les Reéleurs rerus en leurs défenfes.
Arrêt conforme, prononcé par M. le Préfident de la Tourd'Aigues, à l'AudienCe tenue par la Chambre des Vacations,
le 24 Juillet 1779 ; les Reéleurs furent condamnés au.x dépens.
•
ARRÊT
LXII.
Si lorfqu'on veut faire rendre compte à un Adminiftrateur, à un
. Commiffionnaire, il faut Je pourvoir pardevam le Juge du
lieu où la geflion a été faite.
Si la maxime aélor fequitur forum rei n'a pas lieu à l'égarà des
Français & s'il ne font pas obligés de plaider .hors du
Royaume.
Si la reconnoiffance de la Jurifdiëiion emp~che que l'on puiffe
enfuite la décliner.
,.
T
E Sr. Rangoni, originaire Franrais, établi à Livourne,
..Jl1..Ilfut affigné le I I Oélobre 1777 , à la requête des fieurs
Leclerc pere & fils, Négocians de Marfeille, pardevant les
Juges-Confuls de la même Ville, en condamnùion de quatre
cents cinquante piaHres à raifon d'une gdbon faite à Livourne, fuivant la réduélion en livres tournois qui en feroit
faite par le premier Courtier de change requis, & pour
voir dire qu'il feroit procédé pardevant les Juges-Confuls à
la revifion, vérification & correélion des comptes de Rangoni, fuivant les pieces juHificatives qu'il feroit tenu de remettre riere le Greffe ou pardevant le Rapporteur qu'il p'lairoit aux Juges-Confuls de commettre, lefquelles pieces il
-remettroit dans la quinzaine du jour de la Sentence qui interviendrait, autrement qu'ils feroient définitivement autorifés
à tirer du défaut de rémiffion toutes les induélions de droit,
& à donner tels redreffemens qu'ils aviferoienr pour être
�479
procédé. aux revifions, vérifications & correél:ions , &: que
dans tous les cas Rangoni feroit condamné au rembourfe.ment du montant des redreffemens, avec intérêts tels que de
droit, dépens & contrainte par corps. La requête & le décret furent fignifiés par exploit du même jour à l'anèien domicile de Rangoni ; deux jours après il intervint Sentence
par défaut qui fait droit à la demande des fieurs Leclerc.
Dans le mois de Novembre fuivant les fieurs Leclerc firent nommer un Courtier de c~ange pour procéder à l'évaluation des pia!l:res fuivant notre mon noie , & firent faire des
arrêtemens entre. les mains de divers particuliers de Marfeille qui ne firent aucune réponfe, ou 'lui répondirent ne
rien avoir au fieur Rangoni.
. Le~ fie'urs Leclerc pourf~ivoient ainfi J'exécutjon de leur
Sentence par défaut, quand le fieur RangQni vint fe pourvoir
en rabartement par requê.re du 16 Février 1778 ; il déclina
la Jurifdiél:ion des J uges-Confuls de Marfeille. Le rabattement fut con{enti, mais les fieurs Leclerc conte!l:erent le déc1inatoire, & le 19 du même mois les Juges-Confuls rendirent une Sentence qui re<;oit le fieur Rangoni au rabatrement, le déboute du déclinatoire, & renvoie la caufe au premier jour àprès deux mois.
Cetre Sentence fut fignifiée le 9 du mois de Mars, &: .
fur la fignifica"tion il n'y eut point d'appel. Le I l Mai nouvelle ~enrence qui nomme un Négociant pour examiuer les
conrertations des parties, & en faire en{uire. le rapport; cetre
Senrence fut fignifiée 'lU fieur Rangoni qui n'en appella pas;
il fit le le.ndemain affirmation pour pourfuivre le procès jufqu'à Jugement définitif. Les fieurs Leclerc commencent alors
.à inrtruire leur aél:lon ; ils demandent par une requêre
que le lieur Rangoni remette dans le mois des lettres &
des comptes originaux, qu'jl déclare les noms des Courriers
par le minirtere defquels il avoit vendu.'
.
Le fieur Rangoni, fans parler du déc1inatoire, donne des
défenfes fur le fonds de la ~onteaation', & prend des fins
contte le~ ueurs Leclerc. Dan~ cet état il intervient Sentence
qui renv.oie la caufe au premier jour après deux mois, avec
DU
PAL AIS. D E
PRO VEN C B.
�480
j
0 U RNA L
injonél:ion aux lieurs Leclerc de faire expédier leurs pieces
jufiificatives. Ceux-ci fatisfirent à ce Jugement, & donnerent
de nouvelles défenfes fur le fonds qui furent combattues par
celles du fieur Rangoni.
Le 7 du mois d'Août les Juges-Confuls rendirent une
autre Sentence, portant que le lieur Rangoni remettrait des.
pieces & déclareroit le nom des Courriers par l'entremife
defquels il avoit vendu; cette Sentence fut exécutée par
le fieur Rangoni dans toutes fes difpolitions. Le 27 Novembre les Juges-Confuls aJTemblés en Rote rendireat une
Sentence, après avoir ouï les parties, qui confirme celle du
13 Oélobre 1777 au chef de la condamnation de 4)0 piafrres, & qui renvoie pour le furplus au premier' jour. après
deux mois. Ce délai de deux mois expirait le ) Février
1779; le fieur Rangoni fit lignifier aux fleurs Leclerc des
lettres d'appel & une requête en furféance envers les Se~
tences des Juges-Confuls.
. Le lieur Rangoni fondoit fon fyfiême fur le fentimel1t dè
quelques Auteurs, fur des Arrêts des différens Parlemens du
Royaume & [ur des raifons de convenance ou même de nénelIité.
Efcobar en fon Traité de Ratiociniis, cap. 7, examinant
la quefiion de favoir dans quel lieu & pardevant quel Juge
il fau-t fe pourvoir contre celui qui a géré, penfe que ce ne
peut être que pardevant le Juge du lieu où la gefl:ion a été
fàite. Il établit enfuite que· quand même celui ql1i fe charge
d'agir pour autrui auroit adminifl:ré ou géré a·illeurs que
dans le lieu· de fon domi-cile, il doit toujours être convenu
là où s'efi faite l'adminjfl:ration.
BouleBois, dans fon Traité dès Statuts- réels', tom. 1, pag.
607, attelle qu'on fe pOl1rvoie incompétemment quand on
affigne un Fraq~ais hors du Royaume, & vice verfil , parce
que, dit-il, la maxime· aaor fequitur forum rei ef!: la maxime
de toutes les Nations ;- tous les peuples l'ont reconnue. Ayrault dans fon Inllruélioll Judiciai·re·, liv. 1, n. Il·; Lecoq,
quo 148-; Mornac fur la Loi derniere·, fi. de·' Jurifdia. ;
DriUon, va. EtranfJer , Jurifdiaiol1,; l' Auteur ~u Traité du.
c.or,t>s.
�DU
PAt. A 1: S
D B
PRO V Il Nell.
4fh
Corps. politique; Edit. de q64, tdm •.:l. , pag: ') 3 ; Bacquet,
tit. des Juftices, ch. S'., n. 30, font' du même avis. Les
.motifs de cettll regle, loin de ceffer dans le cas d'un compte
à rendre ou à .débattre entre deux parties de Narions diffé.rentes, n'en deviennent au cQnrraire que plus graves, d'autant ,qu'il eft plus facile de fe procurer les preuves, les inftr~ions, &' les documens pardevant les Tribunaux i:\'u'ntt
même Monarchie, que dans un Tribunal étranger. Le principal motif de compétence, dans le cas d'une reddition de
compte pour le Juge.du, lieu de l'adminifl:ration, fe tire' de
çc;: què ,ce n~efl: guere que par,de.vant ce Juge que l'on peut
trouver in(iruc7io fufficiens , nora reflimonia & veriffima docu':
menta. Ce feroit .donc contrarier le principe & fes motifs,
que de prétendre que cette regle ne peut p'as ,avoir lieu entre'
deux parties de différentes Monarchies; auffi la Loi n'admetelle aucune diftinél:ion à cet égard; elle ne reconnoît d'aurrCj
Juge compétent en matiere dellreddition de compte" ,qull'
çelui de l'adminiJtration, , à quelque titré qu'elle 'ait été_faite,l
five in eurela , five in alio quocumque rieulo•. . dL : ) Jl • -1
Boni(ace rapporte un Arrêt rendu en 167" , par lequer il
fut jugé, que deux Marchands établis à Marfeille , & ·qui·
avoient .eçu les commiffions d'un 'N.égQciant d'Allemagne
avoient, pU', en intentant contre' ée aèraie~'\'e remede fde la'
Loi D;ijfamari" l'amgper:llardevant lèLieurenant decMaF&i1Ie.:
Ces j1eux' Ma,rch'lnds, Français furent conlidér':s~ lors: de cet!
Arrêt comme vrais Défendeurs; ils l'étoient eftèél:ivem.ent'
par la nature de leur aél:ibn ,.qui entraînoit une rev,ilion de'
compte, & il fut i:!Jgé q~'O,l).! ne pOjlvoit les y wumettre quc.
dans le lieu de leur geHi{)n~
La même chofe fut jugée en 1733 au rapport d'e MI.l'e.
Co~feiller de Faucon entre Jean-Pierre Lamotte de la v,illede Marfeille, & Jofeph Lamotte fon frere; il s'agiffoit de;
prononcer fur un compte, & les parties furent, renvoyées.
un Efpagne , parce que la geftion y avoit été faite. PareiL
Arrêt rendu le "S Avril 174" entre les lieurs:.Broqueri, Efeif~
~ire, Négocians d~ Marfeille., & I.e fleur. D.elor.,- J'~ t
I.e Journal du Parleme..qt de Bretagne!, tom. ·:("PPg;':U25:';'
PpR
,1
�487..
fou
Il 'if A r;
fait mention d'un,Arrêt de' 1734 lors duquel le. Reur Joly de
5-. Malo avoit été a/Iigné par le fleur Garnier pardevant l'Amirauté de lad. Ville. L'aél:ion de Garnier écoit une aél:ion
en reddition de compte. Joly ayant répondu que cette aél:ion
auroit dû. être por~ée à. Cadix, parce que c'était-là. que fan
commerce, fe faifoit par l'entremife du fleur LUKiK fan Alfocié "l'Arrêt du, Parlement de Rennes le jugea de même.
La maxime dl: donc certaine, & le créancier fuit toujours
le débiteur; la qualité de Francais ne difpenfe point de cette,
loi générale. Le droit des gen; s'oppofe à. ce 'qu'aucune N ation ne puilfe raifonnablement avoir un avantage réel fur
l'autre.
\ . ' ,"
)\ ,
Bi la' maxime aaor fequitur forum' rei eft 'vraie en général , elle l'ef\ bien plus dans une maciere de, cotnmèrce ,
&·fur-rout de reviLion de compte. Le Commerçant n'eft étranger, dans 'aucun pays; expofé à. elfuyer des conteftations
dans ~out~s: les parries du mon~e où fon commerce s'étend,
tpus 'les Trib'u.Ï1aui){ lui affurent ,pr.oteél:ion & juüice , il n'en
peut recufer aucun. ... '
'J
,
(
• Les Lieurs Leclerc font, 'Français, mais leur aél:,ion cft
dirigée contre une Mairon qui étoit établie,hors du Royaume
lors de leur, contrat; ils, doivent donc porrer leur aél:ion
dans le lieu où,lcette Maifon eH: établie, & où' (e trouve t~ut
à-la.-foiScle dqmicilel& 'le' commerce de leùr partie j'ce font
les Lieurs Leclero qui ont .eux-mêmes rècherché d'avoir affaire avec le Lieur Rangoni, & qùi l'ont volontairement'
chargé de leurs commi/Iions à. Livourne. Quand celui-ci a
formé avec les fleurs Leclerc une contraci -don~ l'exécution'
devoit être faite 'à Livourne, le d·roit commun 'lui affuroit
de, n'avoir pour raifon de~ ce d'autres Jtiges que ceu,x de fO~l
PilYs ; li le cOlltra'ire é~()it reçu, nul Commerçant 'n'ofèro'it
accepter à l'avenir des commiflions dans les pays étrangers;'
nulle perfonnc qui vouIüt Ce 'rendre comptable 'ailleurs que
'dans le liéu O(l il adminiH:re & où 1 fan cdmmérce ëH:' établi,
&, qui ,voulût, s'expofèr a ê~re jugé I f~~vaht~;'ôe~ loix et1'angeres, & renoncer' à. celleS' furAla f6i f defque11es il a r.:on~
t\~é ; 'il- n'y 'àuroit:>poin't fde: Négl:5ciant -quiJ foufcrivît -un
"
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PAL À l'S
D
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0 VEN C E.
4113
contrat enfuite duquel on pourroit le trainer hors du pays
de fon établiirement, & l'obliger à rranfporrer fes écritures
& généralement touS [es papiers de commerce pour fuivre
une revifion' de compte. Tous les principes s'oppofent à
ce [yfiême, &. toutes les Nations s'éleveroient contre lui
parce qu'il en defiruél:if du commerce & de toute comrtlli. . .
mcanon.
'
Le fieur Rangoni n'a en France aucune marchandife,
aucune fomme qui pùt être faifie ; il a quelques immeubles
à Marfeille , parce qu'il efi originaire Français ; mais les
immeubles refient pour l'a1furance du créancier, & ne donnent aucun droit POUt la compétence des Juges Français.
Ce n'en que pour la fûreté du créancier qu'on lui accorde le
droit de faire [aiar les marchandifes ou la perfonne de fon
débiteur qui paire en France; mais la même rairon n'exifie
point à l'égard des immeubles que l'étranger peut y poiré!
der; c'efi-à-dire , qu'il n'y a pas le même danger pour le
créancier qui peut voir difparoître à chaque in fiant la perConne ou les marchandi[es de fon débiteur. Il n'y a donc
aucune 'circonfiance particuliere, aucun prétexte qui pui1fe
favori fer la prétention des lieurs Leclerc; ils ont contraél:é
avec un étranger, ils l'ont volontairement chargé de leurs
commiffions, ils l'ont confiitué leur comptable, ils refufent
aujourd'hui de reconnoître les Juges du pays où le contrat
a reçu [on exécution; leur aél:ion efi purement une aél:ion en
reddition de compte, & l'on ne conçoit pas comment ils
ofent fe flatter de pouvoir l'introduire ailleurs que là OL! la
gefiion a été faite.
L'aél:ion en reddition de compte efi' une efpece d'aél:ion
réelle qui doit être portée au Juge du lieu dans lequel l'ad miniHration a été faite; c'ell la difpolition textuelle des Loix
Romaines. Qui in aliquo loco adminifiraJJcrunt, codcm loco &
. dcfendi debcnt. C'efi ce qu'enfeignent auffi les Loix 1 ~ 2"
Cod. ubi de ratiociniis; les comptes (difent-elles ) do·jvent
être rendus dans les lieux de l'adminifiration: ubi hœc geffit, \
rationem oportet reddere...-.
Les lieurs Leclerc [outenoieot au conrraire que quoique
Ppp 2
~
�484
Jou ~ N A L '
aé10r fequitur forum rei fait généralement reconnu;
le prin~ipe
,il fouffre néanmoins plufieurs exceptions. Des perfonnes privilégiées ne fuivent jamais le domicile du Défendeur; la convention 'exprelfe des parçies, la ûtuation des immeubles &
éffets à raifon defquels on plaide, la matiere des contef-:tations font encore tout autant d'exceptions à la regle gé-.
nérale. Ce n'dl: point ici une de ces maximes fondamentales
qui tiennent à l'éqllité, & qui font par conféquent de toutes
les Nations.
Les' fieurs Leclerc peuvent donc oppofer avec fuccès une
exceptiqn qui les difpenfe de fuivre le domicile du Défen~
deur, & leur -exception dl: d'autant plus favorable, qu'elle
ell: fondée fur un privilege national, fur le droit attribué aux
Français de ne reconnoître ~'autre Jurifdiél:ion que celle des
Tribunaux de France, fait en demandant, foit en défendant•
. Brodèau -fur Louet, letc. D, fomm. 49, dit que les Français ne peuvent être contraints, foit au civil, foit au criminel, de plaider hors le Royaume; que tous les fujets du Roi
étant indill:inél:ement obligés à fa ju{l:ice & autorité fouveraine, ne peuvent en être di{l:raits ou exempts, fait pour.
leurs perfonnes ou po.ur leurs biens, fans permiffion du Roi;
il cite tout de fuite l'exemple d'Henri II, qui défendic
de traiter ailleurs que pardevant les Juges du Royaume
la caufe de la Marqu.i[e de Rhotelin & du Duc de Longueville touchant la Comté de Neufchâtel.
Un Arrêt dil Confeil de 1613 jugea que les contell:atîons' dë la Darne Comtelfe de Sault & de M. de Crequi,
touchant les terres fituées dans le Comtat, devoient être retenues & traitées au Parlement de Paris.
Un autre Arrêt re.ndu en 1627 par le Parlemenc de Grenoble, & rapporté par Louet, jugea que des créanciers Regnicoles ne pouvaient êtreco.ntraints de b,ailler leur demande dâns un Tribunal étrange,r où l'on avoit introduit la dif,cuffion des biens d'nn débiteur Français.
Balfet rapporie un Arrêt dont les circon{l:ances font frappantes. Des Dauphinois avoieoc for01é une focieté pou~
�f>U
PALAIS
DE
Pll,OVENCI!.
"
4~1
commercer dans tes Echelles de Savoie, &'cette [ociété
fut détruite par une tranfatl:ion ; l'une des parties voulut
enfuite faire prononcer la refcifion de l'aél:e, & fe pourvut
aux Juges du Dauphiné; le Défendeu'r requit fon renvoi pardevant le Juge des Echelles de Savoie, lieu de fa réfidence;
le Parlement de Grenoble retine la caufe, & débouta du' dédinatoire, fur le fondement que le Défendeur,' originaire Français, n'avait pas pu en allant en Savoie priver les Juges de
France de leur J urifdiél:ion, & que l~s Français ne pouvoi~nt
être contraints de plaider hors Îe Royaume. 1 - , T
Le Journal des Audiences .fait menrion de femblables Arrêts ; le Parlement d'Aix en a rentiu plufieurs', entr'autt'es'
celui du fieur Allamelle', du lieu de Vaugines, qui affigna en
France des habitans au Comtat avec lefquels il avoit fait
une fociété; & celui rendu en faveur dlls enfans du fieur
Laplace, Négociant de Marfeille, contre des Hollandois.
Le principe aélor fequitur forum rfi 'eil: bon à confultet.
encre Français, entre gehs établis dans le même pays; mais
quand l'une des parcies dl: étrangere du Royaume, la regle
n'dl: plus la même, & l'on s'en tient alor~ 'au principe fupérieur qui défend à tout Français d'aller plaider dans une
r
Monarchie étrangere.
.
La réclamation du privilege des Français de ne pouvoir,
plaider que pardevant leurs Juges, eft fondée fur-rout , quand
jls trouvent en France des effets apparcenants à leur débiteur'
étranger; le Juge Franç'ais a alors une raifon de plus pour
cOl1noÎtre de leur demande, patce qu'il trouve dans l'éten-,
due de fa Jurifdiél:ion de quoi contraindre le débiteur à fatisfaire le créancier; les effets fitués én France font fpécialement fous fa fauve-garde, il en doit compte à l'étranger
qui les céclameroit , & par la même raifon il doit juftice au
National qui. veut exercer quelque droit fur ces mêmes,
effets.
Cette maxime de droit public Français peut appartenir à
routes les Nations, & chacune d'elles peut la faire valoir à.
fon rour. D'ailleurs le fieur Rangoni eIl: lui-même Négociant Fraaçais., & la Maifon de commerce établie à Mar."";
�J 9 U R N ~ ·L.. • •
t'
{eille élUe trqnc de cene Mai.fon ·pa.criculiere qu'il a é.tablie,
à Livourne. Ce Négociant p.offede par indivis des immeubles à Marfo<ille, q1.!e (on pere lui a laiffés, & ces différentes con6Mradqns·,a\lroi,ent qû lui impofer filence , & lui
faire. fentir :qttê,l.e$ Juges d!: Marfeilk n'étoient point pour
lui des Juges étgngçrs. ;rl1l1ement (lès raifons o.nt pu faire
impreffi.on fUr le lieur Bral]goni, qu'il a. lai!fé écouler \<ln'e'
année fans attaquer la compétence des Juges-Confuls de
lY(arfe,iUe.
. '
La reconnoi[ance de la ruri[diél:io.n, ef!: fans. contredit la)
fiPt,dt< n9n-re,Çe'io;r la ,plus .fort:e;'que non pui!fe oppofer,
fuy-touç qUlod l'incompétence ,réfulte·: de.la qualité de 1 la
perfonne. L incompétence qui tient à la matiere ne peur fe
couvrir par la comparution' ou par d~autres acquiefcemens;
!!l'ais celle qui n:ef!: fondée,que fur le privilege de la perfonl).e, fe couvr.e .en,tiérement par le fait" deîa partie.
I:.'exc~prjon du lieur Rangoni ftir' 'ce qu'il étoit domicilié"
~ L~vourne ,& qu'om avoit d'Th l'y affigner, a' été condamnée
par le Tribunal Confulaire de Marfeille, & c'ef!: alors qu'il'
auroit dû. appeller du Jugement qui le déboutoit qe fon
déclinatoire : Iii a au contraire défendu fur le fonds, & ce
n'eO: qu'après avoir été condamné fur une -partie du principal., qu'il a fait revivre fonexception tirée de l'incompétence du Tribunal: fes ponrfuites, fes défenfes libres &
volontaires pendant l'efpace d'une année,. forment une fin
de non-recevoir infurmontable.
Me. Ber:ilond, SubHitut, obferva que le privilege des
Français, confif!:ant à ne pouvoir être. diilraits de la Jurifdiél:ion des Juges établis par leur Souverain, tant en demandant qu'en défendant, eil le motif de plufieuts Arrêts
rendus en différentes Cours du Royaume, rapportés par
Brodeau fur Louet. Mais quelle eil l'origine, quelle eil la
hare de ce privilege, & comment les Français peuvent-ils
en jouir envers' les Etrangers? ,
Il n'eH pas tle principe plus certain que celui qui veut
qu'il ne puiffe exiiler de privilege fans être fondé fur un
titre légitime & valable. L'opiniolt des Auteurs fuppofe un
486
, ~ ."
�lll] PAL AIS Il:ll ,p R 0 VEN C E.
, 487
tIrre.., mais elle ne le forme' pas. Boulenois dans fan Trairé
de 'la per[onnalité , examine le point de favoir quel dl: le
Juge compérenr pour prononcer enrre un Naturel Françaj~
& un Erranger. Si l'Etranger, dir-il , ejl Défendeur, ou c'ejl
à l'occafion de quelqu'engagement contraaé dans le lieu de [on
établiJfèment, ou qui y devoit '~tre conJommé, ou c'ejl à l:occpfion de quelqu'engagement contraaé ailleuri; dans le premie!
cas il faut
déterminer par le principe que nous venons d'expofer, qui eft de fuivre le domicile du Défendeur; le pri;zcipe
acror fequirur forum rei , eft ,le prinâpe de toutes les Nations.
, Comment tes Français pourront-il's avoir unl,avanrage fûr
les aurres Naribns fans le confenrement de, cd nlêmes' Nations & des Souverains qui les gouverneur? Qii'èl \1ft le Trairé
en vertu' duquel rous les Etrangers Défendeurs feronr obligés
de quirrer leur pa~'s pour venir fe juHifier pardevant les Tribunaux de cerre Monarchie? Comment eH-il donc arrivé
que les ÈrFangers-on'r perdu cet' avantage préci'eux' & na,rurel
qe ne pbllvoir- êrre convenus que pardevant leurs Juges', &'
qUè' nbus 'avon's acquis fu'r eux l'availtage de les arrirer dans
le .Royaume quand" nous aurons quelque, prérention à faire
v-aloir conrr'eux ! Car c'ea-Ià que conduit néceffairement le
fyltême dans -lequel on' fourient ce- prétendu privilege des
.'
'1
,
.,
•
Frarlcai's '--" t , , : ,
, (iJl~aque Nacï,on 'particulière forme dans l'ordre général'
un ccorps'Jfép'aré ,. "dont la légiilaciôn eft' indifférente ~ tout.
âutre corp.s qU,i peur oppoCer une puiffance & une autoriré
égale dans l'établiffemenr des Loix.' La feule autoriré fupérie'ure qui, e'ncha'în "tolites les 'Nacrohs ,.' & que roures, les:
Narions :refp'etlenë ~ ft' '~ene qui prend, fa fourd' daps le
' d es geps,
' d. 'rOlt
'l, 1u.ll1vene
,."
"'II>ement 'reconnuJ &" l'br'.
0 lerve' , ,
d rOlt
parce qu'il in'flul; elfe,ntiellement fur l'harmonie un'iverfelle &,'
fur le bonheur des peuples: Ce droit fondé principalement
fur l'équité & fur )a juflice , a établi l'égalité la' plus parr'
"
1 r f 1 NA 1 1 ... ;
1; [ Ji\), ",.l' , I ! J ,
Ialre enrre'
toutes
es
"tron, ou mohue
, u. n lIumet aucun ,
privifege d'Lure Nàrion, à l'au de: Les 1ir~I{èais; n-\: faurdient
dO,nc avoir feuls la faculré de "Ii'êti'e ;
lâucu'ns'''cas .'
le
.
1Jo
à;!is"
•
�..
'~8'8
, .
diHrait~ de leurs.. .Juge~:P'l~urel?; ilt eG: iftlpoffible que les
Etringers ne plJilfent u(er(l ds re.pté.failles;.& fe: donnèr 11
leur rour le ,même privilege', fans renverfer l'ordre général.
Il faut donc conclure que le prétendu privilege des Fran~ais, de ne pouvoir être dilhaits de leurs Juges, foit en de.
mandant, foit en défendant, eft d'une '"pplication impoffiblé'; & 'de plus 0uvertement contraire aux droits des g~IlS,:
c'eH, ce qu'en a penfé le favant Dumoulin.
' 'La maxime générale aaor fequitur forum rei eft on ne
peut pas plus jull:e & univerfellerpem reconnue; c'eft à
cette maxime qu'il faut s'en tenir dans rous les cas généraux,
& ce n'eft qUF, dans, ~es cin;onftances particulie~es ;qu:il.eft
permis de dér9ger &. d\lbliger l'étranger à, venir plaider eo
France; dq moins faut-il c,onvenir que les Jt!gemen,s qye
les Fran~ais peuvent obtenir 'de leurs Juges, ne ferqient le
plus fouvent qu'un vain titre qu'ils ne pourroient pas mettre,
à exécu:ion:
'"
,l,
'.,
'
,
_
"
Il,,
Le (ueur Rangoni auroi~ .donc jqf1;~ment décliné:la rurj(-,·
diélion des Juges-Confuls de M~rSeillé., }'iA.!le lu:"n;~arçoitl
que comme un étranger, défendeu.r que, J~s ,f1eu,r,s cLecl~rc,
vouloient attirer en France au préjudice du' droit pes gens;
mais il eft Fran~ais lui-~ême, & polfede de,s immeubles en
Ffilllce, en qualitGJsl:hél)5iej~,Prl Jon pere,.• Qet~~\ :p.olfeffion
a pu fervir de fondemént aux fleurs Lederc, poùr fe' 'peurvoir pardevant les J li,geJ,~Çpnful~ ~:e Marfei~le,~J
o.n VrOl!vé
dans leur pays drs effets q!1J\ pou oi~n5J u,r ~épondre,aes'ild
judications qu'ils folliciroien~" '~:Ju;,}efq~els
,pouyoient
en fin de caufe porrer ~eu,rs ~xéfuti~. sJIfI~:e,(l:,-il~pa~, vr~i que
fi des effets limést en d;t;'ranc1e
'n& c.:JJfl(l)
,.'!DDarr~nant
~. Pétranger
"
JYJrt..
lui ét,9i~nç. enlevé.s par·l.lIt.Ei i\:ll~~Is)guiJy?~r1J-t ~!\l~ 'pouiller ,~
l'é:ranper ren~r01t (a plà\nte.,p;~r~$.'i'a~t,).~s. Jug'~1'..9~' }j:ra,t;lce
qUI lUI devrolent proteéhofl &: Julbce ~,.ralfon de' ces e1fe~s
trouvés dans l'étendue de" feùr Jurifè\iél:ion? Et ne peut-on
pas dire que les Juges nationaux ne doivent ,pas .~oips _jy\l:i,:e-[
&;"prote'él:i0,p, au fi~oyen qui vept- fai;re; vr.!oir ~f~J d_r.<:!it~ fU~l
deS .effets qu'il rencontre dans (9U pay,s 'lHu'à J'et~,nge,r ,q 1.
v·eut en coti.'t~rvh
,lâ,)propriétG ,? '
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�489
Auffi on ne refufe jamais la permiffion de faifir, quand il
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PRO VEN C :!.
ell: queil:ion d'arrêter des effets qui ne font que paffer en
France, & qui peuvent à chaque'inHant fortir du Royaume,
ou quand un étranger a le bonheur de trouver dans le pays
des effets appartenans à fon débiteur étranger; le luge devient alors compétent entre deux parties étrangeres. Cette
compétence a pour bafe la fûreté du créancier, la néce,ffité
d'arrêter les fraudes du débiteur. Il eH vrai que 'quand la'
conteil:ation eH entre deux étrangers, on n'accorde au pourfuÎ\'ant qu'un arrêtement provifoire, après lequel on renvoie
les parties pardevant leurs Juges nationaux. Mais ce renvo~
feroit-il juHe, quand c'eil: un Français qui réclame! Et fes
Juges naturels doivent-ils le renvoyer à des Tribunaux étrangers , quand ils trouvent fous leur main de quoi. rendre leur
Jugement utile & profitable? D'ailleurs le Commerçant eH:
l'homme & l'habitant de rous les pays; par-rout 011 s'étend
fon commerce, par-rout où' il a des effets {hués, il trouve.
des Juges qui ne doivent pas lui être étrangers.
Ici les fleurs Leclerc' fe prétendant créanciers du. fleur
Rangoni ont trou:vé des immeubles appartenans·, li ce' dernier, foumis à la prateaion & conféquemment à la juil:ice
du Roi; cette circonil:ance paraît d'un grand poids dans
cette caùfe , & elle a paru d'autant plus décilive aUJ{ lieurs'
Leclerc, que leur débiteur eft originair.e Français; qu'il fe
trouve lié à leur Jurifdiaion, tant par fa. qualité de Fran~'
çais qu'il ne perd. jamais , que par les effets qu'il poffede
dans le pays; qu'un Négociant étranger pourrait bie~
plutôt méconnoÎtre les Jurifdiaions de France, malgré les
poffeffions qu'il y auroit, que le fleur Rangoni, Français
d'origine, dont 'Ies parens font en France, & dont peutêtre la Mai{on établie à 'Livourne n'eH qu'un démembrement
de celle établie à. Marfeille.
Ces confldératians, quoique' preffantes, ne' font pas les
feules que cette caufe préfence en faveur des Srs. Leclerc ;,
il eil: une fin de non-recevoir oppafée au fleur Rangoni., •
q.ui a· entiérement fixé 'notre détermination.
L'Or.donnance de 1667 ,. titre des ~ng.és & ,défauts.,. veut'
Qqq.
�490
Jou RNA L .
qu'on ptopOre les fins de non-recevoir, nullités des exploits
& 1 autres exceptions péremptoires, pour y être préaiablement dit. droit.
L'incompétence doit être proporée in limine Lilis; c'eG:
l'opinion des Commentateurs qui penrent qu'elle eG: couverte, par l'acquiefcement des parties, à moins qu'il ne 5'agiffe d'une. incompétence ratione materiœ·; La partie qui de..,
mande ,[on renvoi (dit le Commentateur' d'Orléans) doit lou-
jours le demander avant conteflation en caufe, parce qu'en procédant volorttairem,enl devant le Juge, elle fe [oumet à fa' jurifdiaion. Il ajoute qu'on ne peut appeller, comme de Juge .
încom'pétent, que lorfque le Juge a connu de l'affaire & l'a
jugée par défaut, étant abfolument incompétent, ou que le
Juge étant incompétent ralÏone materiœ, a refufé 11: renvoi
à la pat:rie qui appelle.
Rodier atte!l:e que dans tous les cas oll le Jugement a été
rendu contrudiB:oirement au principal entre les parties, c'eH
une mauvaife procédure à l'une d'elles d'appeller comme de
Jugé incompéteat, parce que ces par.ries ayant reconnU volontairement la ,jurifdiB:ion , elles 'ne peuvent plus la regarder
comme incompétente.
Il n'y a donc que l'incompétence ratione ma.ruiœ qui ne
peut être couverte par l'acquiefcement des parties; celle qui
eG: relative à la perfonne ou à fon privilege, l'eH entiérement par les procédures & par le faü de la. partie.
On a foin de difl:inguer cette incompétence de celle qui
tient à la matiere j celle-ci ne peut jamais être couverte .par
aucune efpece d'acquiefcement. La diftinél:ion des matieres
réclame fans ceffe pour chaque Tribunal & pour l'ordre public, qui eH intéreffé à ce qu'aucun Juge ne connoiffe que
de. ce qui lui eG: attribué. L'ordre public réclame fans ceffe ,.
lorfqu'il s'agit d'une matiere que le Juge aurcit dû renvoyer
d'office, & dans ce cas, l'incompétence peut toujours être
propofée; mais -quanq l'incompétence n'efl: que relative, &
que la. partie qui a req-\:lis le renvoi a enfuite acquiefcé au
Jugement qui l'en déboute, on ne .trouve aucun texte qui
autorif-e à re'tournet. au' rn<rye-n d'ip.çonrpétence•. 1
�D U
PAL AIS
D lJ
49.t
P Il 0 VEN C l!.
Le fleur Rangoni a propofé le renvoi, cela efl vrai, mais
acquiefçant au Jugement qui l'en avoit débouté, il a ~Iaidé
volontairement pendant un an pardevant les Juges-Coofuls,
dont il voudroit faire prononcer aujourd'huI l'incompétence;
il lui était lihre de manifdl:er là volonté, &' à'appeller de la
Semence qui le déboutait du déclinataire : fon filence à cet
égard annonçoit qu'il fe tenoit pour bien condamné fut cette
partie de la cau fe.
Me. Bermond conclut à la confirmation de la Sentence;
& de même fuite à ce que fans s'arrêter à la Requête en
furféance du fieur Rangoni envers la Serltence du 2"] No·vembre 1778, faifant droit à celle des fieurs Leclerc, il ferait pourfuivi fur l'appel, ainfi qu'il appartient, & cependant Je tout en état foulevé, & permis de continuer les exé•
1
cutlOns.
Arrêt conforme, prononcé par M. le Préfident de la Tourd'Aigues à l'Audience de la Chambre des VacatiQns, du 20
Août 1779; le fieur Rangoni fut condamné aux dépens; plaidant Mes. ÇafIier & •
ARRÊT
LXIII.
Sur une oppofitJon formée par le pere au mariage de là fille.
:
"
D
Ans le mois d'Avril J 77 8 , la DlIe. Jeanne ••• : du
JI lieu de la Coll:e, quitta la 'maifon paternelle,"& fut
ravie par Jacques •.• & l'un de fes freres qui s'étant frqu,vés fur un chemin par où elle devait paifer, la conduifirerit
dans leur propre maifon. Comme elle avait atteint fa vingtcinquieme année, elle tint peu de jours après les alles de
re[pell à [on pere; elle l'inrerpellà de confenrir à fon mariAge
avec Jacques . • • . . Le pere déclara être oppofant al,! mariage, & 'porta plainte pardevant les Officiers de la Cofte,
contre Jacques ••••• & fes parent-s au "fujet de l'enlevement & de la féduéHon qu'il prétendoit avoir été pratiqués
"Qqq
2
�49,1..
JO'URNAL
•
envers fa fille; il intervi~t Sentence le 8 Février 1779, qUI
condamna cette famille à des Iréparations & à des dommages - in térêts.
Lê pere de la fille déclara enfuite perfifl:er dans fon oppofition. S'a fille vint fe mettre fous la fauve - garde de la
Cour, & demanda que fon pere feroit ajourné pour fe voir
,débouter de fon oppofition, & pour voir dire qu'il feroit
'paIfé outre à la célébration de fon mariage : elle demanda
en même temps une provifion.
.
; Le pere réclamoit les droits de la puiIfance paternelle, les
LO,ix .de la n'ature & du fang, les anciennes Confiitutions
de l'Eglife, les Ordonnances du Royaume & les Arrêts. Il
rappetloit la difpofition de la Loi unique au Code de raptu
·tlirginum, qui prononce la peine de mort & la perte des
biens contre les raviIfeurs ; la Novel1e 143 qui prohibe le
mariage entre le raviIfeur & la perfonne ravie; la Déclara· tion de 1730, qui, après avoit prononcé la peine de mort
çontre le féduél:eur, veut qu'il leur foit défendu de contraél:er
mariage avec lit perfonne à l'égard de laquelle la féduétion a
été p.atiquée, quand m~me (dit cette Loi) la per[anne ravie,
Jjs pere & mere, tuteurs & curateurs requerraient expreiJement
le mariage.
Jacques. , , , ,s'eG: rendu coupable de·l'enlevement le
plus odieux & le plus hardi; il a bravé routes les Loix, pour
prive.r un pere de l'une de fes filles, & l'our le contraindr!;
li la lui donner en mariage, nonobfl:ant la différence des
états & des fortunes. C'ef!:, de la part de la famille de Jac'ques • '. " , qui a toute trempé dans le complot & qui a
maçhiné cet enleveinent, le vol le plus caraél:éri[é, & l'ou· trage le plus fanglant pour la f:1mil1e dt: Jeanne. , •. Rien
n'ef!: plus précieux· pour un pere, que le droit que la nature
lui dopne de pourvoir lui-ll)ême à l'établiIfemem de fes
enfans: Il eG: biet} juft!=en effet qu'on la,ifle cette confola,tion à des parens); qui ri'om trav~illé pendant tour le temps
de leur vie q1.!e.dans l'objet de pouvoir établir un jour leurs
enfans d'uné maniere avantâgeufe. Cet eCpoir leur eH: enlevé
"par un ravi~eur,' qui foulant aux pieds ce qu'il y a de plus
�•
DU
...
PALAIS
Dl!
PROVENCE.
493
facré, veut les forcer à confentir à un mariage tout-à-fait
oppofé à leurs vues, & fouvent très-défordonné. Les Loix
font juHes dans leur rigueur; le Légif1ateur ne pouvait apporter trop de précaution pour arrêter de pareils défordres.
D'ailleurs la procédure prife contre Jacques . . . & {a' famille n'eLl: point irrévocablement jugée, & cette ~irconf
tanCl: rend la demande de Jeanne . . . '. prématurée & nonrecevable. C'el!: une maxime certaine & conlàcrée par les
.Arrêts, qu'on ne peut paffer outre à la célébration du mariage, tant que l'inl!:ance en rapt fubfi.(l:e; il faut attendre
que cette infl:ance fait jugéf, & que la Jul!:ice ait ,prononcé
une peine proportionnée au délit, pour pouvoir apprécier
les moyens d'oppofition du pere, & fl:atuer fur la dema~de
de fa fille.
Quant à la prov'ifion, il difoit qu'il avait rempli fes obligations, en lui offrant de la nourrir chez lui, ou de lui
payer fan entretien chez tel de fes parens qu'elle voudrait
·choilir. .
, '
Jeanne •••• répondait qu'elle était majeure, & que fan \
il.ge de'voit rendre l'oppofition de fan' pere, iIIufoire; qu'elle
avait fatisfait à la Loi par trois fommations refpeél:ueufes
qU'elle avait tenues à fan pere; au moyen de ces aél:es de refpeél:, elle a dll avoir la liberté de Te marier fans fon confentement; & Jacqués .••• el!: celui en qui elle a cru; trouver
les qualités convenables pour affurer fan bonheur. L'enlevement qu'on lui reproche ne pré[ente aucune circonl!:ance
grave qui puiffe le faire cqndamner 11. quelque peine confidé-rablé, & qui doive arrêter le. mariage. Elle écoit majeure 'à
l'époque de l'enlevement; & Jacques . . . qui écoit mineur,
ne peut pas ,être confidéré comme un féduél:eur qui ait ravi
~a fille à [es parens ; d'ailleurs il n'dl: point interdit au raviffeur de contraél:er mariage avec la perfonne ravie, quand
une fois elle eLl: fortie de fes mains, & qu'elle el!: rendue à
elle-même j on regarde fa volonté comme captivée, tant qu'elle
el!: fous la main de celui qui l'a féduite; & comme le ma~
riage el!: l'engagement le plus important 'de la vie, on a
•
�494 '
Jou
"
RNA L
").
voulu-qu'a ne puiffe être cootracré que par des parties dont
la volonté foit entiérement libre.
Tel dl: l'objet & l'efprit des Loix que le pere a invoquées ; l'enlevement "n'etl: plus un obf!:acle au mariage,
quand.la p~ rfonne Tavie fe'"retrouve eri liberté, & qu'il cori He
oe fa .Iiberré d'v ne' manlere 'cerraine. Il exiHe à la vérité unè
procé'd'ure en enlevemeht', mais elle a été jugée, & elle l'
été d'une maniere qui juf!:ifie qu'il n'étoit point quefl:ion d'un
enlevement fait dans des circonHances graves, capables d'empêcher "le mariage, La Sentence 'des Officiers de la CoHe ne
'prono~c.e 'qu'hne a'mende; pne' èondamnation de cette nature ne peu~ arrêter un madage çonfeoti' par les deux par'ties, fur-tout qUilnd la fille, qu'i eH majeure dep'uis longtemps, a rempli toutes les formalités que nos Or90nnances
'exigent.
.
••
.' On' ne peut pas dire qu'elle ne confent à époufet fon raviffeur que pour céder à la'.[ollicitarion de' ce dernier, &
par une fuite de l'empire que ce raviffeu.r a pris fur fes volontés; la féparatioQ a duré aJTez fong-temps', &, elle étoit
affez bien établie entre les parties pour que Jeanne , , . ai,t
pu' faire un ufage entier de fa liberré.
,
. " Me'. 'Bermond
,
SubHiéut,
obJerva
(j'ue
la
Loi,
uniqùe', Cod.
•.
q . ' ,
de raptu viriJinum, & les Novelles 143 & l )c\', excluent, il
'cff vrai, pour toujours de tout cfpoil' de mariage, le raviffeur & la perfollne ravie; mais les décifions canoniques dont
l'Ordonnance de 1539 a adopté les difj)ofitions) font beau,'coup moins féveres & beaucoup plus favorables à Jeanne, ... En
déclara'nt qu'il ne peut jamais y f1voir de mariage entre le r~
viffeur & la perronne'ravie , elle' aj'oute que cet empê'chement
'fubfifie feulement pendant le temps où celle-ci eH entre le,s
mains & aans la puiffance de l'autre; de forre 'l.ue fi la per~
,lonne ;avie, féparée du ,raviffeur, don~e ou reopuvelle fon
. confentement', dès-lors Il n'y a plus a,ucun empêden~e.nf ap.
mariage. C'eH ce q\!i nous ef!: appris parle Concile de Trente,
cf (fi'
h
6
' pote[-.:Je
IOn 24, cap,
,en' ces termes: . uam d'"
lU rapJ,a zn
"e
rate raptorir manferit, nullum poffir inter cos confiflcre matri-
�DU
PALAIS
DE
Pa OVE NeE.
'!'9S
monium ; fed fi à raptore feparata & in [oco tuto conJlituta,
ilium in virum habere confenfèrit, eam raptor in, uxorem habeat.
L'Ordonnance de 1639 s'dl conformée à.la décifion de
ce Concile, puifqu'elle déclare en l'art. 3 que le mariage du
raviffeur avec la perfonne ravie ef!: non valablement contraél:é,
tandis que la perfonne ravie ef!: en la poffefl!on du raviffeur.
Et la même Ordonnance fe contente d'ôter les effets civils
à ces mêmes mariages, dans le cas où la perfonne ravie
étant majeure & remife en liberté, donne un nouveau confentemenr;
C'efl: fur ces principes que le fieur Eynar~, du lieu de
Sault, fut 'Ùébollté de l'oppofition qu'il avoit formée ~u mariage de fa fille; il s'appuyoit tur l'enlevement de la fille &
fur des conf!:itutions qui prohibent le mariage entre le raviffeur
& la perfonne ravie. On lui répondoit Hue fa fille ayant été
rendue à elle-même, & pouvant donner un confentementJibre, il n'y avoit plus d'empêchement légitime au mariage;,
& p,ar Arrêt du 20 Décembre 17')4, conforme aux 'conclufions portées par Me. Efmiol, Subfl:itut, Eynard fut débouté de fon oppofition, & il fut paffé outre à la célébration du mariage.
On ne peut pas dire ici, que Jean,ne ••••. n'étoit pas
dans un état de liberté quand elle a renouvellé fon confentement; elle a été féparé<; de fon raviffeur peu de temps,
après l'enlevement, & elle a paffé une année entiere dans
un Couvent de cette Ville, où elle n'étoit plus expofée à fes
follicitatio,ns. Le confenrem.ent qu'elle renouvelle après cette
épreuve, ef!: le développement d'une volonté libre & conftante.
Inutilement le pere oppofe que la procédure en rapt n'dl:
pas jugée, puifqu'il conf!:e par la Sentence qu'elle l'ef!: à fon
égard, & qu'il n'en a point appellé; les difpofitiorrs de cette
Sentence n'annoncent rien de bien grave contre l'accufé, puifq\l'elles ne le condamnent qu'à des réparations à l'Audiepce ,
& à une amende de cinq cent livres envers la. partie. La
�49.6
Jou R N A L
procédure ne r'enferme aucune 'dépofition qui pui1fe donner
lieu à une condamnation plus forte. '
Il paroÎt par la précaution que Jeanne . • . . avoit pris
d'emporter avec elle coutes- fes hardes, qu'elle écoit au moins
. de ,moitié dans le fait qui a donné lieu à la procédure, c'eRà-dire dans fa fuite de la maifon paternelle. Cette circonetànce exclut COute iqée de force & de violence de la part
de Jacques . . • . & l'âge de Jeanne .•• , qui à l'e'poque
de l'enlevement écoit majeure & beaucoup plus âgée que
Jacques . • • . . qui écoit encore mineur, fait ceffet toute·
préfomptio~ de féduétion & de rapt proprement dit.
Ce n'eft que dans le cas d'une procédure non jugée que
la célébration des· mariages peut étre arrétée, parce qu'on
ignore quelle preuve il peut en réfulter contre l'accufé, &
que les Loix n'aucorifem point le mariage d'un cicoyen dont
le fort & l'état font compromis.
Jacques .••• n'eft point une perfonne dont l'alliance
avec la famille de la' fille préfente rien de défordonné; c'eft
l~ fils d'un Fermier çjl'IÏ demande en mariage la fille d'un
Bourgeois de· la Cofte,. & quoiqu'il y ait de la différence
dans l'état des parties, ce n'eft poin·t une difproponion capable , fur-cout dans les circonftances, de mettre obHacle
à l'union. Le pere auroit peUl-être pu établir fa fille d'une
maniere plus avantageufe ; mais à l'époque du tranfmarchement de cette fille, celle-ci écoit déja majeure ; ell'e avoit
par conféquent l'âge où les enfans pel:lvent fe marier fans le
confentement de leurs peres, pourvu qu'ils leur fignifient
trois fommations refpeétueufes, ce qui n'a été ordonné que
pour plHlir la négligence des parens 11 établir leurs enfans.
Jeanne . . • . a rempli cette formalité, après avoir témoigné fa volonté de la maniere la plus expreffe, & dans
un tell:lpS où Jacques •••. ne la tetloit plus fous fa puif.
[,lnce, & où elle a pu porter un vœu libre & parfaitement
dégagé. L'oppofition d'e fon pere ne peut donc empêcher
le mariage qu'elle follicite , il n?a· rien de contraire aUlè Loix...
d·u .Royaume.
'
Il
�D U
PAL AIS
D E
PRO VEN C B.
497
Il eO: de principe que les proviûons doivent être jugées
relativement au temps où la demande a été formée. Si
Jeanne • . • . n'a pu obtenir de proviûon dans le temps où
elIe a été obligée de pourfuivre fon aétion, il eO: à préfumer
q~'elle n'a fourni aux frars de fes pourfuiles qu'en comractant des dettes qu'elle fe trouve dans ce momem obligée
d'acquitter; fa demande en provilion ell: aujourd'hui d'autant plus légitime, que la qualité des parties s'oppofe à ce
qu'on lui adjuge les dépens qu'elle a été obligée de faire
pour parvenir à la célébration de fon mariage; d'ailleurs fon
pere reconnoît lui-même devoir fournir à fa nourriture, &
[emble laiifer à la prudence de la Cour de la fixer.
Il concJud à ce que fans s'arrêter à l'oppofition du pere,
faifant droit à la Requête de Jeanne .•• il fût paifé ourre
à fon mariage avec Jacques ••_•. & qu'il lui fût adjugé une
provilion de l 'i 0 liv.
Arrêt du 2 J Aotlt 1779, prononcé par M. le Préfident de
~ Tour-d'Aigues, conformément aux conclufions ; le perit
r~t condamné aux dépens.
"
ARR Ê T
LXIV.
Le Pere eft [eul en droit de choijir la Nourrice de [on Enfant.
La Belle-mere eft t-enue fubfidiairement d fournir des aliment.
d' fa Belle-fille, Ji: [es facultés le permettent.-
.E
N 1776 Pierre Guigues de la ville de MarfèilJe époufe
, la DlIe. Viél:oire Arnaud de la même Ville.
Viétoire Arnaud fe confiitue en doc la fomme de 81 r4 1. ,dom 3000 liv. en la valeur des hardes, & Guigues> recon-noît avoir reçu comptant le furplus.
La mer.e de Guigues nomme fon fils pour fon héritieruniverfel, elle lui fait en outre donation entre vifS de la'
iDmme de 3000 liv. procédant d'un legs qui' lui avoit été.
fuit. par une de. [es ranres ,. & qu'elle. ven oit de recueillir.
R
r r.
�498
,
Jou
R li A L , .
Cette union ne fut pas des plus heureu[es , & dans le
mois de Mars 1779, la Dame Guigues qui [e trouvoit alors
enceinte d'un garçon, dont elle accoucha en la ville d'Aix,
quitte la mai[on de [on mari.
.
Elle [e pourvoit tout de fuite au Lieutenant de Mar[eille,
tant concre ce dernier que contre [a belle-mere , en paiement, 1°. d'une penfion alimentaire de 600 liv., 2,0. de 300
liv. pour les frais de couche & acce1Toires; 3° elle demande
une provifion de 800 liv., & qu'il lui fût permis de faire
arrêter entre les mains du freur Gerin les 3000 liv. données
par [a belle-mere dans les ar-cicles de [on mariage.
La caufè fut évoquée pardevant la Cour; la Dame Guigues obtint une provifion de 400 liv. à prendre [ur les biens
de [on mari, & fubfidiairemenc [ur ceux de fa belle.mere,
& en outre la permiffion de faire' arrêter les 3000 liv. entre
les mains du fieur Gerin.
Le vingt-fix Juin fuivant ,. François Tourneau, mari de
la Nourrice que lu Dame Guigues Belle-fille avoit choifi ,
intervint dans l'inftance , & demanda que le mari fût condamné à lui payer les mois échus & à échoir.
<;;uigues oJfrit tout ce qui étoit dû à cette Nourrice, &
prétendit que [on fils devait lui être remis, pour -le placer
chez telle autre Nourrice qu'il choifiroit.
François Tourneau foutine que Guigu~s ne pouvoit re.
prendre [on fils [ans lui en procurer un autrè qui lui a1Turât
les mêmes profits, & dont la fanté fût connue.
La Dame Guigues belle-fille s'oppo[a pareillement à la
réclamation de fan mari.
Sur la demande fonciere en paiement d'une penfion alimentaire de 600, elle [outint que [on mari lui devait des
aliments 'à double titre; comme mari & comme joui1Tane
de fa dot.
C'eft un principe de droit naturel (difoit-elle) que les
alimens font fournis par le mari à fa femme réparée d'avec lui;
ce fentiment eft dans tous les cœurs.
La fixation d'une pareille penfion dépend de l'état & des
. facultés des parties; celle d~ 600 liv. peut à peine fuffire à
�DU
P
A .L AIS
D lE
PRO VEN CIl.
499
fa nourriture & à fan entretien ; il faut d'aiHeurs que le
paiement en fait affuré, & que 1'Arrêt qui la lui adjugera ne
fait pas entre fes mains un titre inutile & illufoire.
Son mari qui a fe(iU la dot, & qui en a difpofé à fon
profit, ne préfente perfonneHement aucune affurance pour
le paiement de cerre penfion ; la Dame Guigues fa mere
poffede lesbiens de la maifon , c'eft eHe qui jouit & qui
difpofe de tous les revenus, c'ef! eHe par conféquent qui
doit répondre du paiement de cette penfion.
. La maxime eft d'ailleurs inconteftable; l'obligation de
fournir la nourrimre lift indifpenfable & refpeél:ive encre les
afcendans & les defcendal1s. Les loix de la namre foumettent donc la Dame Guigues à lui fournir des alimens, d'autant mieux qu'eHe offre de rentrer chez eHe & de les prendre
à f.l tablè.
Sur ce que fon mari foutenoit qu'il étoit en droit dé
choifir une Nourrice à fon fils, eHe lobferva que cerre prétention était tout à la fois contraire à l'intérêt du fils & de
la Nourrice, le prix n'étant pas d'aiHeurs exorbitanr, &: le
changement de lait pouvant nuir~ à l'enfant.
Le fieur Guigues & la Dame fa mere offrirent à leul'
époufe & heHe-fille une penfion alimentaire de 400 liv.,
payable par le mari jufqu'au tems où il poun:oit recevoir fa
femme.
Ils fout.enoient que cerre penGon· étoit déterminée relati. ment à la dot qui était de 8000 liv., & qui ne pwduifoit
pas même l'i!1térêt du cinq pour cent•.
Suivant eux, la commune exécution demandée contre la,
Dame Gu.igues mere n'était fondée fur aucun titre, & in;
pouvait être favorablement accueil·lie. La Dame C:;uigueS
-mere n:avoit point reçu la dot, elle n'en avait point difpofé, elle n'étllit donc en aucune maniere .chargée d'en
rendre compte & d'en paye.r la penfion.
La Dame Guigues belle-fille ne pouvoit établir- cette com.mune exécution qu'en faifant envifager cette penfion. comme,
une dette d'aliments; il eft vrai que fous ce rapp-or-t la nteri
pourr.oie en être. tenuc_
~
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' Jou
RNA L
Mais les alimens ne font dus qu'à pifon des facultés de
celui qui doit les fournir. Or, il dt iffl:ifié que' le revenu de
la Dame Guigues mere était modiqte & fuffifoit à peine à
l'entretien de fa famille; & on ne j peut la foumettre fous
aucun rapport à recevoir fa belle2file chez elle, & à lui
fournir des aliments à fa table.
C'dl: au pere feul , continuait 1 fieur Guigues, à choifir
la Nourrice de fon enfant, puifqu'il dl: le feul obligé de -la
payer.
Me. Bermond , Subfl:itut, portant la parole, obferva que
l'oJfre faite par Guigues paroiffoit être fatisfaél:oire relative, ment à la dot qu'il avait reçu de fan époufe, & relativement à fes facultes.
Mais la difficulté confifl:oit à favoir, fi la Dame Guigues
belle-mere ne devait pas répondre fubfidiairement du paiement de cette pen fion.
L'obligaëion de tenir compte & de payer des intérêts, ne
peut être fondée que fur ce que l'on a reçu la chofe dont
on répond dans la fuite.
, Ici Guigues a lui feul reçu & difpofé de la dot de fa femme;
il paraît donc feul obligé au paiement d'une penfion qui
procede & qui prend fa fource dans la confl:itution dotale.
, Mais il dl: incontef!:able qu'il exif!:e une obligation entre
les peres & les enfans, de fe fournir des alimens felon que
les facultés des uns ou des autres le permettenr; cette obligation s'étend encore aux petits-fils & aux proches parens.
Ce n'eft pas UTI bienfait entre pareIlS (dit Quintilien) de
donner la nourriture à ceux qui ne peuvent Je la procurer d'ailleurs; c'eft un crime de la leur refuJer.
,
Cette maxime ef!: fondée fur la loi du fang, & l'obligation
de fournir des alimens ef!: indépendante de la dot & des
avantages qu'on peut avoir reçu.
Ainli par Arrêt du 13 Mai 16 l 3, rapporté par Brodeau,
un gendre fut condamné à payer une pen lion à fa bellemere, quoiqu'il n'eût reçu d'elle aucun avantage, & qlle, fa,
f.emme ne lui eût apporté auçune dot.
.
P,ar la même raifon la belle-mere doit des alimens, à fan
�:DU
FALAIS
DE
PROVENCE.
,01
gendre & à fa belle-fille, fi elle eft indigente & hors d'état
de fournir elle-même à fa nourriture.
Mais puifque la Darne Guigues veut réclamer des alimens
de fa belle-mere, il faut qu'elle foir jugée par nos principes
en matiere d'alimens; & il ell: certain que celui qui doit des
alimens, ne les doit jamais que relativement à fes facultés.
Car enfin, ou la Darne Guigues prétend une penfion à
raifon de fa dot, ou elle ne ,réclame que des alimens. Dans
le premier cas, comme fa belle-mere n'a point reçu la dot,
elle n'a rien à lui reHituer aujourd'hui, ni par forme de penfion ni autrement, le pere feul étant tenu à la reftitution de
la dot par fa préfence au contrat de mariage de fan fils.
Dans le fecond cas, la Dame Guigues, belle - fille, ne
peut fe fouftraire aux principes é.tablis pour les adjudications
d'alimens, l'obligation de fa belle-m.ere envers elle fe déter,minera toujours d'une maniere relative à fes moyens & à fa
fituation.
- D'après ce principe, il faut néceffairement examiner les
facultés de la Darne Guigues mere.
Elle poffede uniquement une maifon à Marfeille , rue Dauphine; l'appartement defiiné à recevoir l'affemblée pourrait
lui rapponer une rente affez confidérable , auffi l'a-t-elle mife
en ligne de compte, en la fixant à 400 liv.
Ce produit n'eH point une ch,ofe affurée, fur laquelle on
puiffe compter affez pour en faire. la bafe d'une obligation
telle que celle à laquelle on veut la. foumettre : il ne paraît_
pas poffible d'ailleurs que ce. produit foit pour la Dame Guigues d'une grande reffource.
L~s dépenfes qu'occafionnent de' par.eilles affemblées font
toujours conlidérables" & réduifent fes profits à peu de
chofe.
_ • . . .__
_
D'ailleurs elle a cinq perfonnes à qui elle doit & à qui
elle fournit des alimens , fans comprendre fa belle-fille. Cette
derniere ne peut jamais venir qu'en concours avec les aut.res, & demander une fixieme portion pour s'alimenter.
Or cette ponion lui eft déja donnée, puifqu'elle jouit des
�'~02.
Jou
1 ~o
Il N A L
liv., qui fontIe produit ·des 3000 liv. que la mere avait
données en mariant fan fils.
La Dame Guigues belle-fille jouit, au moyen de~ intérêts de ce capital, d'une portion des biens de fa belle-mere;
& comme ces 1 SO liv. font environ la fixieme partie des
revenus dont celle-ci peut jouir, fa belle-fille n'a plus rien
à prétendre, parce que les autres. membres de la fàmille
ont les' mêmes droits fur ces revenus, & peuvent pareillement prétendre des alimens. . '
Quant à l'offre que la Dame Guigues a faite d'aller .dans
la maifon de fa belle-mere, il auroit été à fouhaiter qu'elle
eÎlt été acceptée; mais par le droit,' la belle-mere n'dt poini
obligée de recevoir fa belle-fille dans fa maifon : cette obli\ gation n'eft impofée qu'au mari.
Sur la feconde qualité, Me. Bermond obferva que fi Gui.
gues doit payer, en fa qualité de pere, les mois de Nourrice de fon enfant, il ne paroît ·pas juHe de le priver du
droit de choifir la Nourrice lui-même, & de faire un prix
convenable à fes facultés. & à fa fituation.
Le plus petit objet de dépenfe peut être confidérable pour
lui: il n'eH pas juHe que fa femme l'ait enga~é malgré lui
à une dépenfe au-deffus de fes forces; il fufEt de confulter
ici l'intérêt de l'enfant, & pourvu que fa fanté ne foit expofée à aucun rifque, c'eH à Guigues à le placer où bon lui
femble , & à choi(ir, s'il le peut, une Nourrice dont le prix
fait mains confidérable.
Il conclud à ce que l'expédient offert par Guigues & par·
la Dame fa mere fÎlt reçu & .mis au Greffe, pour être exé'.
.
cuté fuïYant fa forme & teneur.
Arrêt conforme prononcé par M. le Préfident de la Tour.
,d'Aigues à l'Audience du 27 Août 1779, dépens compenfés j
plaid ans Mes•• "•••
"
�DU
PAL AIS
DE
A R'R Ê T
/
PRO V E:If C ll.
~03
LXV.
En demandant la caffation {/une procédure oppreffive & évi~ demment calomnieufe, on peut demander la réferve de fe
pourvoir en dommages & intérêts.
On ne peut informer {ur les faits qui ne [ont pas cIJmpris dans
la plainte.
On ne peut former une plainte que par' Requête.
L
E I I Mai 1779, le Procureur du :Roi, en la J udicature Royale de Lorgues, préfenta une Requête de
plainte contre Jofeph . • • . exerçant les fonéiions de ,Procureur auprès du même Tribunal. L'objet de la plainte étoit
de le dénoncer, comme ayant prévariqué dans l'exercice des
fontl:ions de fon miniHere, trahi la confiance de fes clients,
& manqué à la fidélité [ans réferve qu'il leur devoit. Un feul
trait dl! prévarication eH: cependant fpécifié dans la Requête;'
il yeil: dit que les Fermiers à farine de Lorgues ayant attaqué
un parriculier en contravention à ·Ia bannaliié des moulins
qu'ils tenaient à ferme de la Communauté, ce particulier
excipa de ce qu'il n'étoit allé moudre à un moulin étranger
qu'après avoir attendu inutilement plus de quatre heures dan's
ceux de Lorgues; que fur cene exception, les Fermiers ap_pellerent la Communauté en garantie, comme ne leur ayant
point déclaré qu'~près ·un certain délai, les habitans' pouvoient aller moudre, ailleurs, & n'étoient plus fdumis au
droit de mouture; .que Jofeph ••.. , Procureur, & même
ancien Greffier de la Communauté, au lieu de {e borner à
défendre l'iqtérêt & le droit de fa partie pôur laquelle il a
en efFet publiquement occupé, dans la fuite, avoit compofé
un Mémoire fans fignarure, mais écrit de fa main, enriérement favorable à la demande en garantie des Fermiers.
Le Procureur du Roi conclut de ce fait, que Jofeph . . . ,
non content d'abufer des facilités que ·Iui donnait fa qua~
•
�~o4
Jà
u'a
N'AL
... :
lité d'ancien Greffier de la Communauté, pour raffemhler
des tirres contre elle-même, avoit pouffé 'l'infidélité jufqu'lI
les employer contre l'intérêt de {a partie. Il requit l'information, elle lui fut accordée.
'
L'information fut clôturée le 2 l Mai, & le lendemain le
Procureur du Roi déClare dans un Comparant tenu au Juge,
remettre & joindre à la procédure, deux aél:es de. défaveu
de Marie Eynaud & de Jean Vaquier; il lui fait part des
nouveaux détails qu'il a recueillis {ur le procès d'Antoine
Bonnefoi, contre Denis Grillon ,. & enfuite contre Jacques
Jourdan, {on vendeur & {on garant; il.jQint encore 11 la
procédure des pieces qui juftifient que Jofeph •.•• a défendu à la: fois Denis Grillon, qui prétendoit un droit de
{ervitude {ur une propriété vendue à Bonnefoi; & Jourdan,
ga~ant de Bonnefoi, comme vendeur de la même propriété.
JI ajoute que Jofeph . . • . , après avoir trahi la Communauté en faveur des Fermiers, vient encore d'abandonner
tes Fermiers pour retourner à la Communauté, au nom de
l.aquelle il occupe dans une contefiation pareille à celle {ur
laquelle il s'étoit montré fi favorable Il leur prétention. Le
Procureur du Roi adopte enfin l'anecdote des freres Ventre, fur laquelle il donne des éclairci/femens , & produit des
pieces qui prouvent que Jofeph . . . . a été le Procureur du
demandeur prin.cipal, & celui du garanJ. Le Juge de Lorgues donne aél:e de la rémiflion de toutes les pieces pour
fervir de preuves littérales.
Le 1"1 Juin Jo{eph .••• eft décr-;:té d'ajournement en
per{onne. Le 26 le Procureur du Roi tient un nouveau Comparant au Juge,. en rémiffion de nouvelles pieces, tendantes
Il confiater deux nouvelles prévarications; elles confifioient ,
felon lui, en ce que Jofeph '.••• avoit formé demande en
provifion, qui, quoiqu'elle eût été favorablement ac.cueillie
par le Juge de Lorgues, avoit été dé{avouée par la partie,
au nom de laquelle il l'avoit intentée, & eno ce que dans un
autre procès. il avoit joué le double rôle çle Procureur du
demandeur en garantie & du défendeur en contre-garantie,
qljPique le nom feul de ces deux différentes parties ,. annonce
combien.
�('
DU
:PALAIS-DE
-
;o~
PROVENCE.
combien leurs inrérêrs font réellement oppafés. Le Juge lui
concéda aéle de la rém iffion de ces nouvelles pieces.
Jofeph . . . . appella du décret d'ajournement, & -prêra
fes . réponfes pardevant un Commiifai.r.e de la Cour. JI atraqua enfuite le décret de foit-informé, & tout ce qui 'avoir
fuivi.
Il difoit qu'il n'y avoit point de délit, que la -procédure
devoit êrrè caifée en haine de la calomnie, & que cette caffation eft elle-même la premiere des réparations que l'innocent calomnié a droit d'exiger. Inftruélion bizarre, extraordinaire, partiale, & fur le tout, 's'~garant perpétuellemen~
dans la pourfuite de faits étrangers, & dégénérant réellement
en inftigation générale. Procédure v.icieufe; procédure qui'
devroit être caifée même en faveur d'un accufé jufiement in-·
culpé, violemment foup~onné, parce que les formes & les
r.egles de la procédure font facrées; que rien n'cft plus imporrant que d~n maintenir l'obfervation même la plus -mi-,
nurieufe, & qu'il vaut mieux qu'elles fauvent un coupable ,que li eUes celfoient de fervir' de fauve-garde aux. citoyens.
in jufiem.ent perfécurés.
Rien 'n'eft plus aifé, à établir, que Finnocence abfolue du'.
fait pour lequel Jofeph ..• a' éré d'abord dénoncé au Tri-'
bunal de Lorgues. On voit même la pur,eté. de to.ute fa con-'
duire dans le détail de laquelle on a voulu entrer.·
Le Mémoire joint à 'la procédure, comme confiarant l'iàfidélité la plus marquée, fut écr,it en 177 )" Cene dare eft,
importante à fixer; depuis lors, & dès l~année fuivante , la,
contefiation fe renouvella; & ce même Procureur, qu'on~
prérend, avoir trahi la' Communauré en faveuT des Fermiers ,-,
eft le feul qui empêcha. le' Confeil, qùi penchoit encore'
pour eux, de rermine,r cette contefiarion par un nouveau,
facrince .. Ge.fl:. pour l'infir.uélion de ce. procès que le Mé-moire à confuher refia enrre les mains de •...• , comme;
une piece indifférente, & fur remis à. Jacques .' . . • . ,.
ennemi de Jofeph
A. l'époque de la compofition. de,
ce Mémoire, Jofeph •... n'étoit point le Procureur· de. la:
Co.mmunauté, p'uifq~e la c.ommunauréelle-même n'étoit p.oim':
S.S5_
�')06
.
Jou
Il N A L'
amenée en êaufe. Sur la fignification que les Fermiers deg
moulins lui firent faire des exceptions foncieres que leur oppofoient les particuliers pourfuivis_ en contravention à la bannalité des moulins, il fut feulement que!1:ion de délibérer
fur le parti que l'on avoit à prendre; & le long dire du premier Conful, inféré dans une délibération que Jofeph •..•
a produit,;& que le Procureur du Roi n'auroit pas dû négliger, laiffe entrevoir clairement que fon opinion, qui fut
d'abord adoptée, étoit que ces exceptions devoient être regardées comme illégales & comme dangereufes, & que la
Communauté devoit fe joindre aux Fermiers.
Malgré une premiere Confultation de deux Avocats de
Draguignan qui condamnoit cette opinion, on y tenoit encore; on voulut avoir une feconde Confultation avant de fe
refoudre à l'abandonner; c'ef!: pour l'infl:ruél:ion des deux
Avocats que le Mémoire fut dreffé. La preuve de l'accord
qu'il y avoit entre les Fermiers & les Confuls, fe tire de ce
que cette feconde Confultation, rapportée aux frais & fous
le nom des Fermiers, vife celle faite en faveur de la Communauté par les Avocats de Draguignan, & eft délibérée fur
les mêmes pieces. Il eH: vrai qu'elle a profcrit, comme la
premiere, le fyf!:ême d'union entre les Fermiers & les Confuis, auffi ce fyf!:ême fut-il abandonné. .
Dans cet état des chofes , quel ef!: le crime de Jofeph ••• ?
Il n'étoit point Procureur de la Communauté lorfqu'il a écrit;
il n'a rien écrit de réellement contraire aux intérêts & aux
droits de la Communauté, puifque s'il s'exprime d'une maniere favorable à la garantie demandée par les Fermiers, c'ef!:
qu'alors la Communauté elle-même agiffoit de concert avec
eux. Enfin' quel délit peut contenir un Mémoire à confulter,
qui ne préfentc tout au plus que des doutes, qui n'ont jamais, s'il ef!: permis de s'exprimer ainli, que le profpeél:us
d'un problême à réfoudre, propofé à des Jurifconfultes?
Mais s'il n'y a point de érime dans l'intention .dans laquelle le Mémoire a été écrit, ni dans.le Mémoire lui-même,
y en a-t-~l dans la maniere dont .il. a été livré, dom Il cft
parvenu aux mains du Miniftere public'? Ici Jofeph • • • a
�DU
PALAiS
DE
PROVENCE.
')07
l'avantage de recueillir des preuves contre fan perfécuteur fe, cret, dans cette m,ême procédure qu'il a évidemment dirigée,
c'ef1:-à-dire,' dans fan propre ouvrage.
Le Mémoire a éte vu erirre,les mains de Jacques . . . ,.
Procureur'des Fermiers; il lui avait été remis par fes clients;
ce Procureur en a convenu lui-même; ceux-ci ont voulu le
ravoir; il avait eu la bonté de les prévenir que la .publicité
de çe Mémoire pourrait faire tort à Jo(eph . • . . ; qui les
avoit en effet bien (ervi, mais qui n'auroit pas dll oublier
qu'il devait (on zele & (es talens à leurs Adver(aires. Pourquoi Jacques .' • . . ne le leur a-t-il pas rendu? La dupli~
cité, la haine diffimulée & l'infidélité percent de toute part;
on lui demande le Mémoire, & il en fait faire une copie
qu'il remet. Sur de nouvelles inf1:ances qu'une pareille conduite doit rendre plus vives, il (e contente d'affurer, de
'procef1:er qu'il l'a brùlé; cependant le Mémoire fe retrouve
dans les mains du Procureur. du Roi, entre le (quelles il devient le flambeau qui fert à allumer celui qui doit con(umer
'Jofeph . • . • On n'a plus be(oin de chercher à découvrir
quel eH: celui qui a remis le Mémoire au Procureur du Roi,
quel dl: l'inH:igateur, le délateur, le calomniateur de Jofeph • • . . •
Jacques •... en a pris ouvertement le rôle à la fin- de fa
dépofition ; c'eH: lui qui le premier a dépo(é , ou plutôt dénoncé des faits étrangers; & il en a 'donné l'exempl~ aux
autres témoins. II n'eH: pas difficile à Jo(eph . . . . . de fe
juHifier fur tous ces faits; d'abord' un feul mot fuffit pour
répondre aux prétendus défaveux qu'on lui oppo(e ; ils ont
tous été reçus par Jacques . • . . à qui fa qualité de Notaire
& de Procureur donne la même facilité de fe multiplier. On
peut donc en conclure, (ans inju!1:ice, qu'ils ont été captés
ou furpris , fur-tout fi l'on y confidere que l'on fait. parler
de~ perfonnes iIlitérées, à qui le rédaél:eur d'un aél:e peut
faire dire aifément tout Ct; qu'il veut. Peut-on croire qu'un
Procureur occupe pour une partie, fans tirre,- fans charge,
fans miffion? Ne s'e1(po(e - t- il pas à fe voir ridiculement
prévenu ou fupplanté par celui de fes Confreres que la partie
.
SSS:l.
�~ 08
Jou 1'l N A L , '
,aurait véritablement choifi? La preuve de la [uppoûtion &:'
&: même de la malignité des prétendus a&es de dé[aveu qu'on
oppofe à Jofeph .•. , c'efl: l'attention alfe&ée qu'on a eue
d'écarter ceux dont ils font l'ouvrage. Pourquoi ne pas les
entendre en témoins? Pourquoi priver Jofeph . . . . , de
, l'avantage & du plaifir de les voir défavouer à leur tour leurs
J'l'étendus défaveux, ou du moins de les confondre eux,mêmes à la confrontation.
La' mên~e' réflexion fuffit pour énerver enriérement le fe,cond c,hef de l'accufation intentée contre Jofeph .••.. , &:
.pour le jufl:ifier de cette avidité exceffive qu'on lui reproche;
;avidité qui (dit-on) l'a porté jufqu'à vouloir fe multiplier
,jufqu'à l'infini dans le même procès, & Y jouer les rôles
Jes plus contradi&oires.
Mais fur ce reproche qui paroît fi grave, rien n'efl: plus
aifé que de faire illufion à la J ufl:ice,. & de calomnier le Pro,cureur le plus honnête. En effet, les garans' peuvent dans
un procès, fuivant le genre de défenfe qu'ils embmŒent, ou
faire caufe commune avec les Défendeurs, & dans ce cas
ils deviennent les Adverfaires réels des Demandeurs; ou con,tefl:er la garantie elle-même, & dans ce cas, rien n'empêche que le Procureur du Demandeur foit auffi Je l~ur. Sur le
tout, on n'a point fait entendre ceux qui pouvoient direc,tement accufer Jofeph .. ' . . . de cette efpece de prévarication, ceux qui en avoient fouffert: rien n'ef~ donc plus foi~
hie à la fois & plus fufpe& que le genre de preuve que l'on
a admis.
Si le Procureur du Roi vouloit pourfuivre Jofeph ••••
fur ces nouveaux faits, il devoit commencer par en rendre
,plainte; il pouvoit demander a&e de fe qu'il employoit les
pieces écrites pour information littéraire j mai~ il devoit toujours demander l'information vocale, ne fût-ce que pour faire
entendre ceux dont ces pieces étaient l'ouvrage j il falloit
fur-tout procéder par voie de Requête en addition ou en
çontinuation d'information. Que lignifient ces Comparants
que le Procureur du Roi leur a fubfl:itué? Efl: - ce par des
'çomparants que le Minifl:ere public fe rend partie, & qu'i~
�DU
PALAIS
DE
PROV-ENCE.
(~o9
,excite,l'aaivité du. Juge! Le Procureur du Roi a abandonné
la marche légale & connue de la procédure, pour fuivre un
plan particulier d'infiruaion, comme il a peut - être fuivi
.des pallions & des haines Earticulieres. La procédure 'doit
donc, être. anéantie; comme un ouvrage inique & monfitrueux, également réprouvé par la J uHice & par la Loi.
Mais fufE.t-il d'abfoudre un innocent évidemment calomnié! N~ f~ut-jl pas aulli le venger, fur - tout quand il a le
bonheur de prendre fon calomniateur, pour aina dire, fur
le fait, & de' le trouver 1 embarraffé, & pris lui-même
.dans le piege qu'il lui avoit tendu! Le caloplOiate,!r viable &. connu de Jofeph ••.• , eH Jacques ••.••• Il .n'y à
.qu'à lire fa dépo~tion; en s'efforçant de le noircir, il n'a
pu parvenir qu'à s'incriminer lui-même; on voit que c'eft
.lui qui a remis le Mémoire au Procureur du Roi, & qu'il
eH par conféqu~nt fon dénonciateur; il devien~,même fon
accufateur direa fur .tous les autres faits compris da,ns l'in.
formation. C'e,ll donc à lui à fubir la peine de la calomnie,
M. l'Avocat Général d'Eymar de MOI.Hmeyan obferv·a que
le fyltême de Jofeph , ••. tendoit non feulement à la caffa- .
tion de la procédure, mais encore à fe faire accorder la réferve de fe pourvoir en dommages - intérêts contre fon dénonciateur. Cette feconde demande forme d'abord un préjugé favorable en faveur de la detbande en caffarion, par~e
qu'il eH plus rare de voir des accufés [olliciter à la fois leur
jufiification & leur vengeance. La plupart, contents de brifer
.1p. piege où ils [e trouvent pris, regarderoient même [ouvent, comme dangereufe, la recherche d~ celui qui le leur a
tendu.
,
•
J
•
Il '1- a infiniment loin d'une procédure nulle & illégale à
une procédure opprellive & calomnieufe j ce font deux
que fiions bien dill:inaes & bien indépendanres. Cependant
il n'y a que l'opprellion ou la calomnie qui donnent droit à'
~n accufé de demander deI' dommages.inté~êts.
.
. Prét~ndroit-on qu'.~ne ample réferve de fe pourvoir n'6quiv.aut ,pas à une demal,1de aauelle? Mais on n'y apperçoit
a.ucune, différente ~!fentiel1e; & s'il fau~ ,même p~[er fcr~;;
~
�~IO
JOURNAL
puleufement les termes, & apprécier fur-tout cette efpece de
réticence fâcheufe que contient la fimple réferve, l'on dira
qu'elle paroît peut-être plus,grave qu'une demande aél:uelle~
ment fpécifiée, en ce que ne défignant point nommément
quel a été l'ennemi, le calomniateur de Jofeph •.•. , elle
femble donner à entendre que le .Procureur du Roi & le
Juge fe font avilis eux - mêmes jufqu'à jouer un fi indigne
rôle.
Ici la demande en calTation n'a pas befoin de tirer d'ailleurs fon imporrance. Fût-il en efFet ïamais procédure plus
-grave? Elle a po'ur objet les prévarications d'un hom me public ; conféquemment elle mérite d'être plqs fcrupuleurement ,
1"lus rigoureufement examinée & dircutée. On ïè tient en
garde contre les brigands, contre les fripons; l'homme n'a
befoin que d'expérience & de fagelTe pour leur échapper;
mais la foi publique & la févérité feule des Magilhats qui
'furveillent, peuvent nous empêcher de devenir les viél:imes
de ceux qui, dépofitaires par état de nos intérêts les plus
chers, de notre forrune, de notre vie & de notre honneur,
auroient tous les moyens réunis enfemble pour nous attirer
dans le piege qu'ils nous tendraient" & contre lefquels nous
n'avons pas même la relTource d'une défiance qui pourrait
nous devenir auffi l'une ne , que cette confiance elle-même qui
nous aurait perdu.
. Que les Notaires, que les Procureurs, que tout homme,
qui a en quelque forte le droit d'exige'r d'un autre homme
qu'il le rende (on confident intime, & qu'il.fe repofe entié·
remenc fur lui comme fur un autre lui-même, ne s'en prenne
qu'à l'importance, qu'à la délicatefTe exceffive de fes fonctions. Si l'œil- vigilant & févere du Vengeur public lin fans
celTe fixé fur toute fa conduite, fi là main eH toujours prête
à s'étendre fur lui au premier foup~on qui s'éleve, c'eH parce
qu'ils font nécelTaires à la fociété dont ils. font les relTorts
& les liens; 'que rien, pour ainfi dire, -de ce qu'ils penfenc
tlu de ce qu'ils font ne lui eH indifFérent, & que celui qui en
réunit les intérêts & les aél:ions, veille en" quelque forte fur
eux, avec autant d'attention que fur la fociété entiere. Les
�]) U
PAL AIS
D U"
PRO V li NeE.
~ 11
autres citoyens'peuvent commettre des délits privés, ou dont
le rapport au refie des citoyens efi du moins fort éloigné; mais tous les crimes à eux font publics, & ont {ur
l'ordre public une influence immédiate & rapide.
Ce n'efi point le défaut de délicateffe, l'avidité feule ou
le defir aveugle de s'enrichir, même fans fe conformer fcrupuleufement aux loix de l'honneur & de la probité, qu'on
punit communément dans les Procureurs & dans les No- .
taires, c'efi l'abus de tout ce qu'il y a de plus refpeétable
& de plus facré parmi les hommes; leur confiance intime
& fans réferve efi le dépôt de tous leurs intérêts les plus
précieux & les plus chers. Mais fi ces Officiers font punis
à rai[on de la violation des droits les plus faints de l'humanité ,ils en font donc réellement les dépofiraires. Cett~
conféquence efi bien !impie; il femble cependant qu'on n'dl:
jamais allé jufqu'à elle, ou .du moins qu'on n'en a point fenti
le poids & l'étendue; on s'efi accoutumé à ne regarder ceS
profeffions que comme communes & ordinaires, tandis que
tout homme qui réfléchit, apperçoit bientôt combiel1 elles,
Jont importantes & relevées, & defireroit que l'homme d'état,
que le Légiflateur les eût placées fbus leur vrai point de vue.
Ces Officiers eux-mêmes ne femblent fentir que leur dépendance; l'on dirait qu'elle les a dégradés en quelque forte:
on a prefque befoin de les avertir combien le principe '·de
cette dépendance efi noble, puifqu'il n'efi autre que l'importance & l'étendue de leurs f<;>nétions.
. '
C'efi dans l'exercice de ces fonétions fi effentielles, fi délicates qu'on a accufé Jofeph •..•• d'avoir délinqué. Pouvait-on refuf<;r au Vengeur public le droit de le pourfiüvre?
Il eH: vrai qu'il ne doit fe déterminer qu'avec beaucoup" de
circonfpeétion & de réferve à pourfuivre un homme p.ublic,
parce que plus l'objet de fes, pourfuites efi effentiel & majeur, plus le premier effet en efi terrible & fouvent irréparablé; la jufiificatiol1 la plus complette ne fuflit même plus
POUt détruire les fU,nefies conféquençes 'd',ulle accufation in.
june ou feulement imprudenté. On apprend" il efi vrili ,.que
la parcie publique s'efi trompée 'dans (es foupçons, mais on
�~n
fe fou~ient
Jou
R N
À L
. .
.
toujours qu'elle en a eu, & le feul malheur d'en.
avoir excité, fuffit quelquefois pour priver Jn Notaire., 'un
Procureur de fon état, ou du moins d~ la co'nfiance publique, qui en e11: le plus riche & le plus glorieux appanage.
Il e11: donc peu de devoirs' plus d·ifficiles & plus eifelltiels
en même temps à concilier, que celui de l'attention la plus
làine & la plus infatigable à {iH·ve·iller tout citoyen qui rem·
plit lui-même des fonél:ions pbbliques, & celui de la réferve,
de la circonfpeél:ion la plus fcrupuleufe à le dénoncer & à le·
pourfuivre.
Si pour rappel1er le Vengeur public à cette circonfpeél:ion·
li néceifaire dans un mini11:ere qui eil: par lui-même li· aél:if ,
& don. les moindres démarches Ont tant d'éclat & de conféquence,
s'eH fouvent fervi de cette canfidér-ation, qu'en.
attaqu·ant, il ble1fe touj-ours; que fa rétraél:ation. peut rendre
l'honneur au eitoyen qu'il a trop légerement i-ncriminé, mais
ne fuffit jamais pour le conroler, pour l'e dédommager de
t-aures tes peines, de toutes les pertes qu'il a eifuyées, & ne
lui laiife cependant aucune autre reifource; combien cette
confidération· acquiert-elle plus de poids encore, larfqu'il s'agit d'~-n homm'e public, à qui le fuffrage de fon accufateur'
lui-même peut bien rendre l'honneur perfonnel, mais ne'
t-end jamais l'honneur plus délicat encore de fan état, & la
Jouiifance de (let hopneur fans. lequel pourtant il n'en remplit plùs les fonél:io'llS?
Ce n'e11: pas du mOIns fur- te choix & fur ta qualification:
du- délit· qu'on- tui reprochera de s'être trompé; on ne fe
plaindra· point qu'il. ait choifi· l'objet de fa· plainte dans la,
élaife· de' (es aél:ibns équivoques qui peuvent être diverfement·
nuerprétéès, ou r:nême d'è ·cesdélits imparfaits, à. raifon def-.
f4uels I~aél:ion eH fo"uvent conteHée au·Mini11:ere public. L'in-·
fidélite' dem· il aGcufe Jolèph •...• eil: des plus gravos &'
des plus ca·raél:érifées qu'un. Procuteur puiife commettre, ce.
n'e11: pas' feulement pGUr.· aVGir. manqué de' zele &' d~aél:ivité
d-ans.lâ. défenfe· de fes clients;. ce n'eH. poin~ pour. a.vair. fa~
aili-té ,. par- urie cGnnivence cpiminellé ,. ou· une inaél:ion int#clfé'e,;; le- fuccès-de la'p'arcie açlverfe:" q,u'ille dénonce &: le'
Eourfuit..
on
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PALAIS
~
;]DE"
Pre d,VE NeE,
"-
5IJ
pourfuit) 11 fie s'a'git de tien moins que d'àvbir vendù .de
n'ouveau à leurs Adverfaircs les ralens & fe miniftere qu'il'
ne devoit employer qu'au fervice de [es clients; ce n'eft _que
parce 1 qu'il l'a vu jouer à la fois dans le même procès, le
rôle contradi8:oire- de demandeur & de défend-eur, que le
Procureur du Roi a déféré à la Juftice ce Procuréur auda~.
CIeux,
Cette prévarication fi énorme qu'elle eft.à peine croyable "
eft cependant bien conHatée par lJO. Mémoire écrit de la
propre main de Jofeph , ", ',' -C~ .. Mémoire ,. qui, de fon'
aveu, eH le propre ouvrage du Procureur de la Comm'u-'
nauré, a cependant été comparé pour l'intérêt, 'des Fermiers,.
demandeurs contre ellé ell; garantie & en 'I./liftance en caMé
dans un procès qu'ils àvoient intenté à -divers particulierspour des contraventions à la bannalité des ,moulins. C'ef!:.
fur. ce fait majeur qu'on peut qnalifier, ce [e tuh le ; de rra'hifon, ql;le l'information a 1été Fr~fe;. & quelle preuye," n?enréü'l!te-t-il pas fur la certitude du, délill,. fur fon- impnrtance"
fur l'idée qu'en avoient con<;ùe 'Jofeph , • " lu.i~même , 1 &.
les Fermiers qu'il avoit fi bien fervi?
'
,
: Lê Procureur de ces Fermiers antelte 'qu'il a été étran-gement frappé de voir,la plume" de, Jofeph_. " .c '-', Pro-cut.Cur de la Communall'té,' occupée à .en défendre'rles
Adverfaires.- Il avoue qu'a ne put s'empêcher. 'd'in tém-oi-:
gner lui-même une furprife mêlée de quelque ind.ignation àfes propres clients; il ajoure que ceux-cio, comprenant depuis,
lors que Jofeph , ••., en ne fuivant'<jue le defir de, leur être'
utile, s'était lui - même compromis" témoign,er.ent à: dijf&',
rentes reprifes l'envie -.la plus forte & la plus impatiente. de,
r'avoir l'original de ce Mémoire ,.jufqu?à offrir datls cet objet
des fommes importantes, s'il en était befoin. D'où leur.venoit cette folliéitude & cette impatience, & qui la' leur'
infpirojt, fi ce -n'eH Jofeph.• ,.• lui - même, qui, leur- JaiLInt femir à quel prix il les- avoit fer,vi, les piquoit fans doute.
d'honneur, & leur. perfuadoit qu'ils ne de-voient rien' _épar~'
gner pour lui prouver une reconnoiffilnce, qui_ dev-oit le re.tirer du périL où iL s'érait préci.eité Eour eux?
c, t.
J
r
�51+
.
J
'u RNA L
. R.ietl·jn;eG: mieux ptouvé dans la procédure que ces mou"
vemens de zele & d'inquiétude pour Jofeph ••.. , qui agitoient les Fermiers, c'eG:-à-dire, ceux en faveur de qui il
avoit oublié les p.remiers devoirs' de fon minitl:ere. Plufieurs
témoins. ont NU l'un des Fermie~s tomber dans des efpeces
de cQovullions, en ne recevant' que..1a copie de ce Mémoire à..
la place de l'original qu'il avoit demandé. D'autres l'ont vu
t;edemander cet original avec une forte' de fureur, & fortir
de l'Erude de. Jacques •.• '. navré de ne l'avoir point rec;ouvré, quoiq~'on.ll'eût aifuré .qu'il .éco·it réduit en cendres,
, qu'il n'exiG:oie:. plus.. Jfl.
)
.. r
.
1 Delà cec' empreffement fi mar<;iué1à alioir l~ M~moire, dès.
qu'on leur a· dit"qu'il pouvoit. nuire à Jofeph . • . . . . fon
auteur; emprdfement dont le motif eG: Ii mal déguifé fous
c;e prétexte frivole, que ce Mémoire ef!:. fi précieux pour eux,
que la perte en Jeroit, irréparable. Qui ne voit dans ces paroles, que. les Fermiers ne f'ont (ans doute que. répérçr les
propres termes .dont Io(eph) . . . devoit. fe fervir avec eux,
& l'rxpreffion naïve des mouvemens de crainte al!xquels il
étoit livré.
. , M. l'Avocat Général difcuta enfuite le Mémoire. Quel' tort
(dit"il ) ,a. eu Jofepli.
de rédiger, d'après l'opinion des
AdminiG:ràteurs de la Communauté, qui, après tout, avoient
le droit .de' diriger la' plume de. leu~ Greffier, les quell:ions
que l'on foumettoit de nouveàll, comme problématiques, &.
même comme devant fe décider en faveur des Fermiers, au
juge.ment de deux J urifconfultes .de cette .V.ille? On ne trouve.
rien de cûmin'el, ni même de fU'rprenant que', dans l'intervalle de deux Délibérations, le Greffier de la Communauté,
qùi n'avoit, encore eu aucune occalion d'exercer fes fonêtions
.de Procureur, puifque la conteHadon n'étoit pas encore entamée ; ait penfé, ait écrit, comme les AdminiG:rateurs en
chef de la Communauté', d'une.maniere favorable au fyll:ême
des Fermiers, puifqu'il ,parait que dans ce même' temps,.
l'avis commun étoit, que non feulement la jull:ice, mai"
l'intérêt même de la Communauté exigeoit qu'on fît caufe
~onrtnune avec eux.
'JO
0
• '"
�n v PAL A I:S ',n il ':P,R'O VEN CE •. ,
) 11
• La rédaél:ion d'un M-émoire' à confulter en leur faveur,
dans ces circonfl:ances, ne paroît pas plus cdndamnable que
la i-érriiffion entre leurs mains d'e la ConfultatÎon rapponée
par la Communauté; cette rémiffion, qui ne peut avoir été
faite que du confentement, & fans doute en vertu des 9rdre'S
des' Admini!lrateurs en chef; prouve' d'ailleurs que le Greffin;
les Confuls & le Confe.il entiér', agiffoient Ide conèert, &
croyoient avoir un intérét commun!'
, ' - ~,~ ,Ill"~
. Le Procureur du Roi au Tribunal n'a point' fait précéder
fa d énonciation d'un examen fcrupuleux &- détaillé 'de fà
conduite de J~feph •. ; , & fur-tout -de cette, comparaiCon
importante & deciliv.e avec la: condùite des Adminiit,ratêur
eux-mêmes. Mais en raffemblant des 1pieces·c06trè Jo(eph.::.?
n'a-t-i! pas trop oublié & même dédaigné en' quelque' forte
celles qui pouvoient fervir à fa jufl:ification ,'quoiqu'elles s'of..!
friffent toutes feules, quoiqu'elles' fuffent indiquées &rappellées par celles qu'il avoit déja ençre-le~ mains? Trois confidération's effentielles, & qui fuffiroie(lt pour la 'fu,ftifiéarlon
de Jofeph . . • . [ur ce chef qui 'a été d'abord -l'uniqu~'baCe
de la plainte du Procureur du Roi', ont 'é.chappé, on.One
fait comment, à [on attention. La premiere ,'la qualité de
Greffier, & par conféquent d'Officier, dépendant des Adminifl:rateurs. La [econde, l'époque pr.éci[e'. O~I' le Mémoire
été écrit; & la rroifieme, la qualité' de Procureull qu'pl)..
donne à JoCeph . . . . à l'époque du Mémoir.e;""
1
.; ,
D'autres délits font venus à l'appui de:)c~ délit prérendti~ ..
Des Comparans, en' matiere àe procédure & d'inHruél:ion
criminelle, fubfl:itués à des Requêtes en addition & conti~,
, nuation d'information; on a peine à concevoir 0\.1 le Pro=
cureur du Roi a pris le modele & même J1il:Jée d'une" form,€!
de procéder fi nouvelle & fi' inouiF' Quel effet' peuv,ent
avoir ces Comparan'ts & le déèret même-par lequell~ Juge
ordonne que les pieces produites par le Procureur du Roi "
demeureront jointes à la procédure pour [ervir, de preuves·
littéraires? Mais de qùoi pourront-elles faire precvè? Ce n'dt
point de l'objet de la premiere plainte; puifqu'elles n'y' ont
aucun rapp'ort; ce n'eU Eoint' de la nouvd1e', puifqu'i! n'Y."
a
1.':[[2.-
�~.( 6 .
.
A
J. ,0" U·
R N À L'
d
l'
en aVOle pome,
quoI le rapporeent onc ces preuves Ir..;
iérai:-es? A des faits dépofés par des témoins. Mais ces faies
eux-mêmes fe rapportent-ils à la plainte du Vengel\r public?
Sont-ils dq moins adoptés par lui dans une plainte fubféquente? 'poin.e dl) tollr. Faits ifolés, étr~ngers à la plainte
prircjp.~I~. ,Prem;e littàaire oifçrte, non par les témûins
5yx-mê,m,es, ll:)"'!is. par,le M:inifte.re publiçJ' qui ne rend pas
même une plainte inciqe.nte" qui n\~1fai~ pas. même de COU"7
vrir u~'lvice déja irréparable; on a peine à compter ici les
.
nullités qu'on a.entaffées tes unes fur Ic;s autres.
1 )rt~l~ ,téml?ins ont it~ ou.is fur de~ faits viGl>lement étrange,rs. ,à la, p\,ipte. ~1J Procurepl:.pl! Rpi., qui dénonce unique:.
m.~p' le faie. cjLj ~smoirf' Ce, font les té/TIoins qui, d'ans
I,e~rs ~époGtions, l'one inftruit des faits qlj'il a cru prouver,
.en joignant à la procédure les pieces qui pou'voient les conftater. :;.Les Comparans fubftitués à une Requête en addition
51:: pl.ainte Q,ne cee inconvénient de plus, qu'ils ne peuvent
fervitJ.~e ha(e réguliere,& légale à aucune procédure fubféque nt\; , & qu'ils desiennent une fource féc;onde & même
~~épui[able de, nOllyt;lIes. nullités. On peut ajC?L!ter ce vice
choquant, que leur effee eft ~n quelque forte de dégr~der le
Vengeur public, en le [aifant fervir, s'il ef!: permis d'employer cette exprelfion, d'aide de témoin, puifqu'il fe borne
à oifçir la p.réuve littéraire de fe qu'ils one déja, dépofé, ell
lui faifant échanger réellemen,t avec eu~ les fonél:ions d'accufateur, & fuivre aveuglément & fervilernent leur témoi.
gnage, lui qui eft fait pour le diriger. Il eft impoffible de
défendre une procédure infeél:ée de tant de vices, criblée de
.fant de nullités j une procédure' dans laquelle le Procureur'
. du Roi & le Juge, oubliant les regles les plus fimples de
l'Ordonnance, & quittant les [entiers les plus battus, fe font
ouvert une route nouvelle dans laquelle ils bronchent à chaque pas.
Il y a cependant encote à !raiter la queftion la plus importante & la plus' délicate du procès; c'eft la réferve de fe
pourvoir en dommages-lntérêts conere qui de droit, à laquel\e Iofep? .' •.• ~ co~clud.·
,
�_ nu
PALAIS
DE .PROVENCE.
"p1
Il ne fuffit pas qu'un accufé foit abfous & même jufiifié ,
pou. avoir droit de prétendre à cene efpece de récrimination, de vengeance, qui paroît excéder de beaucoup les
bornes d'une juél:ification ordinaire. On connoît une efpece
de calomnie innocente, difent les Auteurs, en haine ou plut6t .
en connoifJance de laquelle on peut cajJer une procédure dont
le but évident e(l de compromettre un inr.ocent, mais qui ne
fuffit pourtant pas pour en faire condamner les auteurs à la
peine ordinaire de la calomnie.. Ainfi lorfqu'un accufateur, même
privé, paroît avoir été entraîné par une erreur invin{;ible que les
Tribunaux les plus éclairés n'ont pu éviter de partager, il
peut fuccombec fans honte & fans danger dans fon accu fation, & l'innocence de l'accufé ne lui devient pas toujours
funefle. Nous en avons pour exemple l'Arrêt rendu par le
Parlement de Paris, dans la caufe du Comte de Mongomeri
& des héritiers du fieur de Langlade.
A plus forte raifon, lorfqu'il n'y a d'autre accufateur que
le Mini(leœ public qui a dénoncé, de fon propre' mouvement, & pour l'intérêt feul de la vérité, un citoyen qu'il a
cru coupable, on doit être alors plus circonfpeél: à accorder
une réferve de fe pourvoir en dommages-intérêts.
Telles font les principales confidérations qui s'é1evenc contre
la demande de Jofeph . . . ; fon innocence a-t-elle été juftifiée avec a{fez d'éclat? A - t- elle été calomniée avec airez
d'injuflice, pour qu'on doive lui accorder des dommagesintérêts? A-t-il enfin une partie légitime, contre laquelle il
pui{fe en former la demande? On a vu fur le fait principal
du Mémoire, que loin qu'il fubfifle encore le moindre foup-c,:on d'infidélité contre lui, il dt même prouvé qu'il n'a pu
commettre celle dont on l'accufe.
Ainfi non feulement aucun foupc,:on ne f-ublHle plus cont~e
l'innocence de Jofeph • . • . , mais tous les faits fom qifparus jufqu'à la trace la plus légere, jufqu'à l'impreffion involo\ltaire même qu'ils auraient pu faire fur l'efprit du Juge.
Ainfi fon innocence n'dt pas feulement une innocence négative & préfumée , qu,i fuffit cependant elle-même, [ur-tout
lor[qu'il s'agit d'un .délit 4'ailleurs équivoque & il1certai~
�'~ 18
l
Jou
RNA L
pour obtenir d'être déchargé de l'accuCation-,-mais une innocence démontrée, pofitive & a\>folue, qui il droit à route
forre de fatisf'aél:ion, fur-tout fi l'on apper~oit que l'erreur
injurieufe dans laquelle on cil: tombé Jur fon compte, paroÎt
être volontaire & qu'on'l'a évidemment calomnié.
Telle eft en effet la feconde condition requife pour obtenir
des dommages-intérêts; il ne fuflit pas qùe l'innocen<:e d'un
accufé foit reconnue avec éclat ,. il faut encore qu'el)e ait.
été calomniée avec injufiice.
Ainfi fi les événemens, fi les pieces dont dépend la jufiification, .quoique évidente & complette d'un accufé, font
poll:érieures à la plainte, on rerombe dans le cas de la calomnie innocente & involontaire qui ne donne point lieu à
une adjudication de dommages-intérêts. Mais telle n'ell: point
la pofition où fe trouve Jofeph ....• ; fon lnnocence érait
auffi aifée à prouver & à reconnoÎtre , lorfqu'il a été accufé, .
qu'aujourd'hui. L'état des chofes n'a poin.t changé depui~
ce temps, & l'erreur du Juge n'a tenu qu'au défaut de quelque éclairciifement qu'il étoit dès - lors aifé de fe procurer.
L'erreur dans laquelle on ell: tombé fur l'innocence de Jofeph '.' .. a donc été ni invincible, ni même involontaire.
Deux conditions e.1fe~tielles <1;ui confbtuent la. calomnie innocente.
Elle n'a pas été invincible, puifqu'il exifie des preuves de
l'innocence de JoCeph .•• ; elle ne l'a pas même été, ce qui·
fufliroit peut-être encore, ratione temporis-, puifque les mêmes:
pieces exiHoienr lors de l'accufation., qu'on les avoit , pour.
ainfi dire, fo.us les yeux, ou qu'elles éroient du moins indi'luées & rappellées par celles qu'on avoit raifernblées contre
l'accufé•. Elle n'a pas été involontaire, pui[que ce n'a pas été
malg,ré lui, & pat la f<lrce des indices, par la l'éunion des
lkirconll:ances. fingulieres, que le Juge a été trômpé & en
tombé dans l'inconvénient terrible de calomnier un innocent,
mais enfuite , & en punition de [a négligence à fe procurer.
les éclaitciifemens les plus fimples; négligence d'autant plus
inexcufable , que. rout l'avertilfoit au contraire de redoubler.
de p'récaution &. de. fcrupules ,. puifqu'iL [avoit que la. main;
�DU
PALAU
DE
PROVENCE.
F9
d'où partoit l'extrait qu'il a faifi pour l'employer contre Jofeph .••. , étoit une main fufpeél:e & ennemie.
Ce n'ell: point le cas d'objeéter ici que la négligence n'ell:
point un crime, ni d'exciper de, ce qu'une faute commife,
par fimple négligence, n'éqùivaut jamais à une faute purement volontaire. D'abord il n'y a jamais fimple négligence
dans le fait d'un Juge, qui ne procede pas dans des fonctions aufli im portanres l aufli terribles que les fiennes, avec
toute,s les précautions ,poflibles , & qui n"a pas le foin de'
recueillir, avant' que de hafarder aucune démarche d'éclat,
tous les renfeignemens qui font du moins à fa portée. Enfuite, comme ce n'ell: déja que par une di!l:inétion ,peut-être
trop fubtile & trop partiale en faveur des accufateurs & des
Juges, qu'on di!l:ingue deux fortes de calomnie, & que toutes
deux ayant le même effet concre l'accufé, devroient du moins
donner lieu aux mêmes réparations; 'il feroit fur-tout fouverainemem injufie de citer une feconde difiinétion fur la
premiere. Il eH: donc certain encore que l'innocence, d~ Jofeph ..••,n'a été calomniée que parce qu'on a voulu la calomnier, ou du moins, quoiqu'on eût pu éviter affez aifément
de le faire.
'
C'efi cependant quelque chofe de fi grave, & l'on ofe,
dire, de fi fcandaleux, que de faire defcendre un Juge de fon
Tribunal, que de Jaiffer pourfuivre le Vengeur public , comme
s'étant Jaiffé entraîner lui-même par des paflions & des hai- ,
nes privées, que, malgré des motifs fi preffanrs de pçncher
en faveur de Jofeph . • . , l'on, ne fe feroit pourtant peutêtre jamais décidé à lui' accorder fa demande en dommagesintérêts, s'il n'eût fourni, ou plutôt, fi la procédure elle-même
ne fourniffoit' des moyens de 'CO!fcilier des confidérations
puiffantes de part & d'autre qui paroiffent fe combattre &
s'encrllchoquer.
, , Si un accl!fateur privé fût tombé dans la même erreur,
comme on ignore fes intentions, & que rien n'oblige à en·
préfumer trop favorablement, lorfque les faits eux-mêmes
fe préfentent fous un jour défavôrable, il n'y auroit point à
héûter fans doute d'accorder la .réferve de fe pourvoir en
•
�)~O
Jou RNA L
àommage!-inrérêrs. Mais roures les préfomprions font' en
faveur du Vengéur public; comme il n'a poinr d'inrérêt à
vexer, à perfécurer, on ne doit' pas lui prêter aifément l'Întenrion de le faire; & tant qu'il ne fait que fe rmmper, tant
qu'il ne- per(écure pas ep eflet d'une maniere ouverre & n0-n
équivoque, l'accufé a fans doure droit de fè plaindre des erl'eurs dans lefquelles le Vengeur public eH: tombé, mais nOll
pas celui d'en êrre vengé; & l'on doit pllltôt à celui - ci la
jultice de le plaindre lui-même.
Jofeph '• . . . auroit encore fuccombé fous des conûdérations d'ordre public, qui répugnent à ce qu'on compromette
trop aifément, foit les Juges, foit les Magiihats qui pro-·
voquent leur minifiere, parce que la conféquen€e la moins
terrible d'un pareil abus, feroit de plonger tous les Tribunaux inférieurs dans une léthargie funeHe li la' tranquillité &
à la fô.reté publique; toutes les eonlidérarions de faveur &
d'équité même doivent céder à des conlidérations d'un or·
dre fi majeur & fi. relevé. Mais tout change, & elles reprennent toure l?influence. qu'eUes doivent juHement avoir,
fi l'accufé, qu'on voit avoir été clairement calomnié, peut
êrre vengé, fans que ni le Juge qui l'a pourfuivi, ni l'accu,...
fareur public lui-même foient . en quelque forre dégradés &
flétris, fi derriere cet accufateur public., on. découvre un, ac-·
cufateur fecret qui a dirigé fa main, qui l'a armée du trait
funefl:e & empoifonné de la calomnie, qui en a répandu' les
nuages au: tour du Juge, & qui l'a ainli empêché de difcerner IX. d'apprécier les obje.rs au flambeau de la jufiice &
de la vé.tité.
.
!ofeph .•..•. prérend' être aifez heureux' pour que le
Ciel: lui ait mé~agé cet avantage; & ce qu'il y a de plus
heureux. encore, c'efl: que c'eft da.ns la pr.océdure· elle-même,
qu'il affure cependant être l'ouvrage de cet ennemi obfcur &
J?erhde, qu:il croit pouvoir, le prendre & l'envelopper comme
dans fo'~ propr.e piege.
. M. l'Avocat GénéraL, après avoir. difcuré la dépofition de
J:àcque.s .••.• , conclut à ce que fairant droit à l'appel de
Jo[epll. ~, •.•• envers le décr.et de foit-informé rendu. par le·
Juge:
�D U PAL AIS' ,n l! .p R (J VEN C E.
~:2. 1
Jùge âe :Corguès & rout ce qui l'a fuivi, le rout fût déclaré
nul, mal advenu & comme te) calTé, l'App.ellant ,déchargé.
(je, l'accufation intentée contre lui par le Procureur du Roi
en la Jurifdiétion de Lorgues ,,fauf & réfervé à lui d'agir pour
[es dOmil1ages - intérêts l ainfi .qu'il ve.rroit han être, contre
c;elui qui' a été le dernier dépolitaire, & qui paraît .avoir été
lè dénonciateur du, Mémoire dom s'agit; permis à lui d'eru
demander le nom au Procureur du Roi, & même de fe faire •
remettre, par le Greffier de Lorgues, extrait de la, procé-'
d':llC calTée, pOlir lui fervi~. d'indicatiqn; il n'empêcha l'im-'
preffion de l' Arr~t qui interviendroit, jufqu'au nombre de
<;it;Jquante exemplaires, aux frais dè J;ofeph .•. , & l'affiche
par-tout où befoin feroit. •
'
Par Arrêt du 3 Septembre 1779, prononcé par M. le Pré!idem de ,la Tour-d'Aigues, -le décret de foit-informé & ce·
Iui,d'ajournement furem,déclarés nuls & comme tels calTés,
Jofeph " '.. ! • 4,échargé de, l'accufation, Jallf à lui de ..fe
pourv0;r pour fes dommages - intérêts C,antre qui.il verrait
bon être; il lui fût permis de faire imprim~r l'Arrêt au nom-,
bre de cinquante exemplaires, & de le fàire .afficher par-torit
où befoin feroi t.
1
==============::~=~.
AR RÊ T
LXVI.
Celui qui a cautionné par aile public, mtme' en matiere de'
Commerce, n'eft point par-là fournis à. la Jurifdiaion Con·
fulaire.
:D
,
"
Ans le moïs de JuiJ1et '1777, le lieur Veyron, PalTe-'
mentier à Marfeille, emprtlnca S3 l liv. du Sr. CaHes ,.
.
- Navigant de la même Ville, & s'obligea de les lui rendre:
dans .le nlOis. de Décembre fui·vant. Il fut d:it dans l'aéèe que:
cette ,fomme étoit prêtée à Vey.ron pour fûrvenir à fes .af-,
faires de commerce, &.Je fieue Terrier ,. Chirurgien,,. fi!;
Vv.v
"1
�D U PAL AIS' ,n l! .p R (J VEN C E.
~:2. 1
Jùge âe :Corguès & rout ce qui l'a fuivi, le rout fût déclaré
nul, mal advenu & comme te) calTé, l'App.ellant ,déchargé.
(je, l'accufation intentée contre lui par le Procureur du Roi
en la Jurifdiétion de Lorgues ,,fauf & réfervé à lui d'agir pour
[es dOmil1ages - intérêts l ainfi .qu'il ve.rroit han être, contre
c;elui qui' a été le dernier dépolitaire, & qui paraît .avoir été
lè dénonciateur du, Mémoire dom s'agit; permis à lui d'eru
demander le nom au Procureur du Roi, & même de fe faire •
remettre, par le Greffier de Lorgues, extrait de la, procé-'
d':llC calTée, pOlir lui fervi~. d'indicatiqn; il n'empêcha l'im-'
preffion de l' Arr~t qui interviendroit, jufqu'au nombre de
<;it;Jquante exemplaires, aux frais dè J;ofeph .•. , & l'affiche
par-tout où befoin feroit. •
'
Par Arrêt du 3 Septembre 1779, prononcé par M. le Pré!idem de ,la Tour-d'Aigues, -le décret de foit-informé & ce·
Iui,d'ajournement furem,déclarés nuls & comme tels calTés,
Jofeph " '.. ! • 4,échargé de, l'accufation, Jallf à lui de ..fe
pourv0;r pour fes dommages - intérêts C,antre qui.il verrait
bon être; il lui fût permis de faire imprim~r l'Arrêt au nom-,
bre de cinquante exemplaires, & de le fàire .afficher par-torit
où befoin feroi t.
1
==============::~=~.
AR RÊ T
LXVI.
Celui qui a cautionné par aile public, mtme' en matiere de'
Commerce, n'eft point par-là fournis à. la Jurifdiaion Con·
fulaire.
:D
,
"
Ans le moïs de JuiJ1et '1777, le lieur Veyron, PalTe-'
mentier à Marfeille, emprtlnca S3 l liv. du Sr. CaHes ,.
.
- Navigant de la même Ville, & s'obligea de les lui rendre:
dans .le nlOis. de Décembre fui·vant. Il fut d:it dans l'aéèe que:
cette ,fomme étoit prêtée à Vey.ron pour fûrvenir à fes .af-,
faires de commerce, &.Je fieue Terrier ,. Chirurgien,,. fi!;
Vv.v
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�~2~'
J
0 U
it
1< A
L
t
•.
fendit caution, avec renonciation expteffl:' au bénéfice ae di..i..
vifion &,de diCcuffion.
1 (
:
Le terme du paiement étant expiré, CarIes Ce pourvut aux
Juges-ConCuls pour faire condamner Colidairement le débiteur & la caution, avec' contrainte par corps. Terrier comparut, & propoCa des fins déclinatoi'res j'il en fut.déboutê',
& il fut enCuite 'condamné fur le fonds.'
l,
Il appella de cette Sentence pardevant la Cour; il de.
manda qu'il fût Curfis à fon exécution j & par un décre·t du
mois de Février 1778, les fins de fa Requête furent renvoyées 'en J ugemenc ; demeurant tout en état.
II, 1
• '
~ Terrier foutenoit qu'il n'avoit pu, par fon' cautionneIilent ,
fe Coumeme à un Tribunal de rigueur, qui n'ell: établi·gue.
pàur connoître des conre!htions qui s'élevent entre Marchands
ou Négociants à raifon de leur commerce; que l'Ordonnance
du Commerce & les Déclarations poll:érieures ne laiffent au
cun doute fur la compétence des J uges-Confuls; & fur, les·
matieres.tqui doivent être portées à leur Tribunal j qu'il s'a'
giffoit ici d'un .prêt pur & {impIe fait par un paniculier nbhl
Négociant, dans .un aae public, ce qui ne préfente point:
la forme u{itée poür les obligations de commerce, donc les
Juges-ConCuls connoiffent.
Caries qui a fait le prêt, exerce, de notoriété publique,
le métier de Navigant, & n'ell: point compris parmi les
Négociants prop.rernent dits, qui n'ont d'autre état que celui du commerce; il n'a livré au fieur Veyron aucune Cone
de marchand ifes que celui-ci faffe profeffion de revendre; Il
lui a Ceulement prêté une Comme qui lui étoit néceffaire dans
fon corn merce; il n'a fait en cela qu'un aae ordinaire qui
n'a rien de mercantille, & auquel on a donné la forme d'une
obligation lpure & {impie. \
',' .
r
D'ailleurs Terrier n'ef!: que la caution de Veyron; &
n'étant pas perConnellement dans la claffe des Commer'tants , la Jurifdiaion des.Juges-Confuls-lui eH: 'toujOl~rs é~ran-'
gere; Iles Négociants feuls [ont leurs jufliciables!, & Ires ci~
toyens àrdinaires ne peuvent s'y,foum~ttre que 'par la foufo: •
�DU
PALAIS
DI!
PROVI!NC!!.
'P3
.cription'dès lettres de change: c'eft le feul cas où l'on puifii:
,attirer' un particulier non Négociilnt au Tribunal Con(ulaire,
.s'y fût-il volontairement foumis de la maniere la plus ex-'
-preffe. Le cautionnement. de Terrier n'eft ajouré dans l'aél:e
.d'emprunt que pour la plus grande sûreté du prêteur, & cettè
·sûreté s'y trouve toujours, quel que foit le Tribunal où Carles
'portera (a demande. Terrier ne peut être confidéré comme
Négociant, malgré tous les efforts de CarIes; il exerce la
·Chirurgie à Marfeille; des Sentences Confulaires, rendues
.depuis long-temps, & dans un moment où il a accidentellement faÏ! quelques aél:es de commerce, ne le conftiruent
'pas Négociant pour tour le.temps de fa vie.
Caries répondoit que l'Ordonnance a expreffément foumis
T-errier à là Jurifdiél:ion Confulaire, & on ne peut furfeoir
à l'exécution de la Sentence; le principal obligé s'eH: tenu
pour bien condamné, & n'a point décliné la Jurifdittion des
Juges-Confuls. Effettivement, Veyron dl: Marchand; il a
emprunté poùr faire aller fon commerce, & la fomme qui
lui a été prêtée, doit être confidérée comme une (marchandife qu'on lui livre, afin de revendre. L'argent comptane
qu'il a reçu, eft repréfentatif d'une marchandiCe ; il dl: mar. chandife lui-même parmi des Négociants. En un mot, il.a
fervi à Veyran pour fe procurer la marchandife néceffaire
à foutenir fon commerce; il faut par conféqucnt accorder
la même faveur à CarIes qui lui a fourni cet argent, qu'à
celui qui lui auroit fourni la marchandife même.
L'Ordonnance eH: claire & précife {ur ce point, elle veue
que les obligations contrattées par les. Marchands ou Négocians pour faie de leur commerce, foient de la compétence
des Tribunaux Con(ulaires ; ici l'obligation cil: entre Marchands , & CarIes a conftamment joui de cette qualité, .qui
eft prefque toujours comprili: & fous-entendue fous celle de
.Navigant.
Terrier fa caution n'eil: pas moins dans la claJre des
. Commerçans, quoiqu'il. exerce la Chirurgie. Pendant ·trèslong-temps il a· navigué, & il n'a c.effé avant & après éle
faire des' aél:es de c.ommerce ;. on a verŒ au procès des.
V vv 2,.
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J o· U RNA L
Sentencès Conf'ulaires qui le jufl:ifient• .Enfin il n'ëil pas ité-ceifaire qu'il foit lui-même Marchand pour légitimer le Tribunal Confu!aire, foocautionnement le met fans difl:inction à la place du principal obligé; il a contraél:é exaél:e-ment la même obligation dans toute fon étendue, il s'dt
fOu m is aux mêmes Juges; il faut donc que les Juges-Coqfuis qui font compétens pour connoître du fonds de l'obligation, & qui ont pu condamner le débiteur principal,
connoiifenr auffi de l'obligation de la caution qui Ce confond aux yeu)( de la loi avec le débiteur pour lequel elle a
cautionné..
Me. Bermond, SubHitllt, obferva que le commeree eil:
régi en France par des regles & par des loix particulieres.
On a fenti que rien n'étoit plus eifentiel que de faire promptement ceifer les contefl:ations qui pourroient s'élever entre
fes Négocians ; & la juHice la plus prompte eil: pour eux la
. meilleure juHice. On a créé dans cet objet des. Tribunaux
particuliers où, en élaguant la plupart des formes, on a rendu
la marche de la procédure extrêmement rapide. L'intérêt du
commerce a exigé l'établiifement des Jurifdiél:ions Confulaires & de la contrainte par corps; mais l'intérêt des Jurifdiél:ions & l'intérêt général exigent qu'on n'y connoiife
que des caufes dont l'attribution eil: expreifément portée
par la loi.
\
Terrier qui s'eil: rendu caution de Veyron par un aél:e
public, eil:·il fournis à la Jurifdiél:ion Confulaire & à la contrainte par corps?
. L'Ordonnance de J 673 , qui n'a été rendue qu'après des'
faix particulieres qu'on avoit établi pour le commerce ,
femble avoir prévu tous les cas dont la connoiifance doit
appartenir aux J uges-Confuls. L'arr. J du l'il'. 7 des Contraintes par corp-r, porte que ceux qui auront {igné des lettres ou billets de change pourront être contraints par corps,
enfemble ceux qui y auront mis leur aval, qui auront promis
d'en fournir avec remife de place en place, qui auront fait
des promeifes pour lettres de change à eux fournies, 011
qui le devront être; entre cous Négodans ou Marchands qui
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PAL AIS
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PRO v Il NeE.
fl.~
auront" ligné des billets pour valeur reçue comptant ou en
marchandifes., foit qu'ils doivent être acquittés à un particu..
lier y dénommé ou à fon ordre, ou au porreur.
Il eft clair, d'après cette difpofition, que les obligations'
-faites entre Marchands ou Négocians pour fait de leur négoce , font de la compétence' des Juges-Confuls ; mais celui
qui fe rend caution du paiement peut-il être fouftrait à leur
. Jurifdiétion ?
En regle générale l'engagement de la caution eft au/Ii
étendu que celui du principal débiteur ; fon obligation ne
peut ê"tre moindre qu'autant qu'on en eft expreffément con~
venu. Mais dans les matieres mercantilles celui qui caùtionne
ne peut fe fou mettre à un Tribunal de rigueùr feulement
établi pour les Corn merçans, à moins qu'il ne s'y foumette
èn la forme prefcrite par l'Ordonnance.
Le Légiflateur a prévu le cas du cautionnement, & il a
voulu que quand il feroit mis par aval au bas d'un billet de
commerce, il fût attributif de Jurifdiétion. Non feulement
alors la caution fe "rend refponfable du paiement d'.une dette
mercantille, mais encore la forme qu'elle donne à fon càutionnement tient de la nature du commerce, & le lie expreffément au Tribunal des Juges-Confuls.
Celui qui met fon aval au bas d'une lettre de change, eft
conudéré com me celui-là même qui l'a !ignée, & comme
lui il el!: fou mis à la Jurifdiétion Confulaire & à la contrainte par corps. Mais de ce 'lue l'Ordonnance a exprimé
le cas 'où la caution feroit jugée avec la même rigueur &
par les mêmes luges que le principal obligé; de ce que l'Ordonnance a marqué la forme du cautionnement qui fou mettoit à la Jurifdiétion des Juges-Confuls, il fuit que ces Juges
• demeurent incompétens dans tous les autres cas où la caueion ne s'eft point obligée en la forme prefcrite, c'eft-à-dire ,
en mettant fon aval.
Ici la caution s'dl: obligée pardevant Notaire purement &
!implement ;' fon obligation remre dans la claffe des obligadons ordinaires, ou pour mieux dire elle n'en eft jamais
fortie ;" on ne peut la juger que fuivanc le droit commun. It
�~26
JO'u R N "A L
J
,
·faut une loi bien précife, une difpofition bien exp,re1fe pout'
difiraire un' citoyen de fes Juges naturels & le foumettterà
une J urifdiél:ion où tout eil de rigueur, & à la contrainte
-par corps; cette difpofition n'exiHe- nulle part pour les cautionnemens faits pa~devant Notaire; on· ne trouve ,la con\.
· trainte par corps que cantre ceux qui auroient cauti:onn~
·pour aval. On ne p~ut pas étendre cette peine 'd'un cas à,
l'autre, & l'appliquer fans diHinél:ion à toute 'forte de cau· tionnemens, dans' quelque forme qu'ils foient faits; d'ailleurs le créancier qui oblige fon débiteur & fa caution 'à
pa1fer leur bbligation pardevant un Notaire; ne facrifie & ne
perd: la contrainte par corps qu'en fe procurant une hypo'theque fur leurs biens. Cet avantage vau,t bien celui auquel
il renonce; il trouve une plus grande sûreté dans les chofes
que dans la perfonne, & la caution n'érant exigée que pour
l'a1furance du créancier, fon intérêt cH rempli d'une maniere bien plus folide.
Les Sentences qu'on a communiquées pour prouver que
Terrier étoit Négociant, font rendues depuis dix ans, &
ne le conHituent -point Négociant à l'époque de fon cautionnement qui eH du mois de Juillet 1777. Il a pu à cet
époque avoir fait quelques aél:es particuliers de commerce,
'pour raifon defquels on l'ait valablement affigné à la J uri[..
diél:ion confulaire, fans qu'on pui1fe dire qu'il ait confervé
la qualité de Négociant; il eil: d'ailleurs prouvé qu'il exerce
·publiquement la Chirurgie. Quelques aél:es ifolés ne conilituent pas le Négociant, ou du moins ils ne le conHiruent
que pour raifon de ces aél:es feulement. Ainli Terrier - ne _
peut être confidéré corn me Négociant par état , foit parce
qu'il eil Maître Chirurgien dans la ville de Marfeille, fait
parce que les aé1:es de commerce qu'on lui oppofe font anciens, & depuis cette époque fon état pouvait être. changé.
On ne juHifie d'aucun aél:e de négoce qu'il eût fait dans les
derniers temps; il conHe au contraire de fa qualité .dominante de Chirurgien qui exclut celle de Négociant, & qui
le lai1fe dans la cla1fe de citoyen ordinaire. '
Le Commentateur d'Orléans, fur le titre de la Jurifdic~
�DU PALAI'S.
'iDET .l'ROVE Ne E.
'i~:7[
tion deS. Juges,.Gonftllst, 1 ra~porte; il ~H:.,vrai li' un A.rt:êt! du,.
Parlement de Paris, qui fournit un Bourgeois à la Jurif{\iction confulaire pour,raifon de fon cautionnement donné à
un Marchand. Màis. a.'abord ce Commentateur.,' en citant.
cet Arrêt: ,.l'Ie"pa,roît pas' trop affuré de -la maxime , &: ne
le préfente que comme un Arrêt dont il ell étonné Ipi-même. 1
Il de dit .;pas que le cautionnement du Bourgeois> fût configné dans un aéle Pilffépardevant Notaire'; & cette circonftance paroît cependant décifive en pareille rencontre.
,D.enifart , fous le' mot Cautionnement, s.'explique d'une
manier€;. plus certaine, 1& rapporte un Arrêt pcécifément
daqs, les mêmes 'cillConfiances que cellçs où' fe trouv.e Ter-.
rier.lCelui.. , dit-il', qui cautionne le dlbiteur d'une~ Jeur.e.de
change par un aval,. s'expofe à la contrainte par corps ,. comm,e
le débiteur principal, ne fllt.il point Négociant, 'c'eft la dif~
poJition de l'Ordonnance ,du Commerce; ,mai:r fi le 'eauJÎcmnement éto.it..jait par' aat devant No caire. , le c.réancier n'auroit·
contre la caution, qu'une 4aion Iliillite (&J;ordinaire ;_c~efl ce qui
a été jugé ,par Arr~t .du' mois de "Juillet 1766. Il ajoute) que
dans un pareil cas la caution,ne peut bre aiJignée aux Confuls-,
& qu'il fuffit de mettre le titre à ~X(écution en lui donnant une,
forTfle exécutoire.
.
.
Il .faut donc s'en fenil' ,à cette' difiinélion lqui efi fondée.
fur l'Ordonnance & qui ~fi adoptée _par des Arrêts "que le.
cautionnement par aVàl fou met à lai!contrainre pan corps "
mais que celui qui en: promis dans un aéle public ne peut
pas y foumettre, n'étant pas fait .daqs la forme ,que l'Ordonnance exige.· .
.
;
Ce n'efi point-là l'efpece de cautionnement dont l'Ord<;IOnance a 'prononcé la foumiffion à la Jufiice confulaire &
à la contrainte; c?efi une.autre fonne de cautionnement '1
dans laquelle le créancier fe procure' un avantage de plus i
& pour Iaquelle la Jurifdiélion confulaire n'a point été ·écablie.
Il' n'y.:a qu'un feul cas JOÙ le cautionnément aurait pu [oumettre Terrier à la contrainte Jpar ()orp~, c'érait, celui olt
il l'auroit mis pbr,:aval< au;'\ias,~'un, billet ,de commerce; dès
qu'il nell'a pas' fait, il n'eft plus' compris dans la difpofitiolll
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de 1l0rdonnance, qui feuJe aùr;(!)jc~u; lui,.faire pérdré [es',
Juges naturels.
'
D'ail1éurs li le principal obligé ne fe trouvoit.pas lui-même
fournis à la Jurifdiéljon Confulaire, à plus forte,raifon la cau-,
tf{)!\, doit el1li être exempte. On peuc; dire 'pqurnle princip'al.
débireur ,qùe les deux parties n'étoient pas 116goc~aDCes ; que.
l'Onlonnance .exjge cependant que' J'obligation aie· été .paffée .
entre deox MarcHands ou Négocians. pour que' fes Juges-Con'
fuIs puiffent en connoître.
,Les N'llJigans ne fonc point cenJés Nigocian~ dans"tous
les remps:&, pour cous les, aéles qu'ils peuvent faire; ils -ne-:
fone conil.itués tels 'que quand ils fom ..r:éellement quelqueafu .de·commerce. &' pour raifon.de ceF aéle. Airi!ï.]e' Navigant'<Jui preud des' marchandifes pour revendre dans le
pays o'ù ril va 'débarquer, fait un aCl:e de négoce, & pour le
paiement de 'ces ,mal'Chpn.dife.s iLeft ·contraignable par ·colAs•.
Ma.is'ce nr,eft. q'ue. daQs. ce cas, 'qu~i1 eft . déclaré Com.merçan,t & 'iu'gé; comlÏl.e .tel ,. &, IiI .r.eiîtl~ :dahs, la daffe ,des' au->
tres> cicovens pènlt 'tous, ks' aur.reA" engag.emens qù'il' peu t,
pre.Îldre , &. pour t0US .Ies aCl:es qu'i1"pe,ut paffet.
.Le Parlemén't de Paris,,. par foh Ar~êt du 30 luin 17 [6·,
décharge la Roche de ).a contraince par corps' que Compa:
gn6r--demandoit conttè lui en'vertu Il~PIJ IÇonJrac,!,-LibEe qu'on'
avoit fubftirué à url biljet ··à 1Qrdrç pQ~r 'le mencant du vin
que'. Compagnot avoit Jivi"é à ·la Roclie; ce qui décide neltement que Je contrat public, eft d'une .namre bien différence,.,
& qu'il ne foumet pas .Ie débiteur aux mêmes peines ni,
aux 'mêmes Juges que les limples obligations purement iner(7anrljlleS·~'
,r•
d
.....!
;
~
~Airifi Terrier ne peut' êtie fournis 1r la lùrÎfdiCl:ion des luges
Ç.onfuls, foit parce qu'il n'eft pas perlonnellemenc Négociant ,.
foit \'latce qU'Il a fourni fon caucionnement en la forme. des,
obligations ordinaires & régies par 'le droit cO.mmun.
·,uMe., BeJJimond.corrdut à' ce, qu'il fût furfis à Ycxécutiondl:-.
la' JSentencè, è.es 1,uges-oCanfuls.
J
; Arrêt conforme prononcé 1'ar M..,lelPréfident de ta- Tour.ci:' Aigues 'à l'i\udience ~u 4: Septembre i7.7-9.. Caries fut, c.ondamné aux dépens.
ARREJ:"
J...
�DU
PALAIS
DE
P'9
PROVENCE.
,
ARRÊT
LXVII.
La voie de l'information eft ouverte entre parens-, lorfque la
plainte préfente des faits graves.
Lé procès extraordinaire ne peut ~tre refufé à l'accufé qui le
demande.
E ~ M~~s 1779, Pierre-Augu!l:in Ripert , de la ville d'c
Marfeille , préfenra une Requête en information co.ntre
Antoine & Thomas Riperr, fes deüx freres cadets, difant
qu'ils s'étaient porrés contre lui aux derniers excès.
L'information fut corn mencée , & que Iques jours après
Antoine & Thomas Ripert préfenterent de leur chef une
Requête de plainte, & demanderent qu'il leur fllt auffi permis d'informer.
.
Ils exp.olèrenc que leur frere ,ainé s'étoit (ervi du nom & de
la confiance du pere pour exercer à leur égard les traitemens les
plus révoltans,.& les mettre enfin hors de la mai(on paternelle; qu'il n'avait cdfé de les diffamer, ayant dans tous les
temps aigri leur pere cdntr'eux, l'ayant même engagé à (e
fervir de fan autorité pour les faire enfermer.- L'in{ormation
fut priee (ur les deux Requêtes; Pierre - Augu!l:in Ripera
fut décrété d'ajournement; 'Antoine & Thon1as le furent
d'affigné.
, Tous prê,terene leurs répon(es ; Antoine & Thomas de":'
rnanderent kprocès extraordinaire; il fut ordonné par Senteneence du .•••• Pierre-Augul1:in Ripert en appeHa pardevant la Cour; il attaqua enfuite le décret de foit-i·nformé
rend.u contre lui, & il demanda par Requête qu'il flIc .furus
au procès extraordinaire.
_Antoine .& Thomas Ripert pré(enterem une Requête co-ntraire; fur les Requêtes refpedives la Cour renvo}la les P.M-,
des à l'Audien,,e•
.. Pierre-Auguftin Ripert obferva qu'il n'avait pris lai v.eie:
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rigoureufe que pour en impofer à fes Freres. ~amais il n'a.;
voit penfé à rapporter une .condamnation contr'eux.
Jamais la haine n'avoit dirigé fes démarches ni fa procédure; il confcntit à fe départir de fa plainte, fi fes Freres
éraient animés des mêmes fentimens•
• , La qualité des Parties (difoit-il) & les circonfiances
rendoient ce département néceffaire; mais (ajoutoit-il) fi
fes Freres refufoient de facrifier leur reffentiment à l'envie
de vivre en paix avec lui, il érait jufte qu'il laifsât fubfifter
fa procédure, comme la feule chofe qu'il pût oppofer à leurs
pourfuites.
.
Il fondoit enfuite fa demande en caffation de la procédsre prife contre lui, fur ce que fes Freres ne fe plaignoient
pas de délits affez graves pour autorifer l'information entre
freres.
Le véritable objet de leur procédure n'étoit, fuivant lui,
que de fe préparer des preuves pour attaquer dans la fuite
les tkrnieres difpoutions du pere.
, Dans leur plaiilte ils lui reprochent d'avoir capté la confiance du pere, & d'en avoir abufé à leur préjudice. Mais
cette efpece de captation n'eft pas par elle-même un délit; .
& l'on. ne peut faire informer, pour raifon de ce, fi l'accufé n'a pas employé des moyens odieux & repréhenfibles.
Le fait ramené dans 'la Requête de la menace d'un coup
de couteau, était perfonnel au pere; le fils n'avoit aucune part;
à ce trait d'emportement.
'
La menace de fa part des lettres de cachets érait .une menace ridicule qùi ne pouvo"Ït être conudérée comme un ~élit,
fur-tout dans la bouche d'un homme qui érait. abfolument
fans pouvoir. Les autres termes injurieux n!étoient pas prouvés;
le fuffent-ils, la qualité des perfonnes & l'habitude où elles
fom de ne parler qu'en termes groffier~ & injurieux, ne
permettent pas' de leur imputer à dtllit, ce qui feroit trèsrepréhenuble chez des clèoyens d'un rangJ.ptus élevé., &
dont l'éducation auroit été plus 'foignée.
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Ses Freres fe pl?-ign~ient e!!,c?re d'~voir été, ~al nourris
,dans la maifon de leur p.ere , & d'avQlf trouvé la potte fer.
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à mefure qu'ils fe retiraient; mais ce font-Ill des
détails domeftiques capables d'aurorifer une féparation, fi
elle était -demandée; jamais on n'en peut faire le fujet d'une
procédure entre des freres.
. .
L'information prife à leur Requête eft donc fans bafe;
elle ne porte fur aucun délit.
S'il étoit poffible , malgré routes ces confidérations , qu'on
laifsât fubfiHer certe procédure, il faudroit du moins furfeoir 11 l'exécution du procès extraordinaire.
Cette forme de procéder n'dl: établie que pour les casqui méritent d'être inftruirs, & qui peuvent faire prononcer
en jugeant quelque peine affiiélive ou infamante.
Des diifentions domelliques, des procédés entre freres.,
quelques repréhenfibles qu'ils foient, ne peuvenc jamais donner lieu à une pareille condamnation. La nature des décrets n'annonce rien de grave, & il eft même du devoir
des Juges de terminer au plutôt de pareilles procédures.
Il ferait dangereux de laiifer aux Parties le choix des
procédures, fans confulrer l'efpece de délit qu'on inftruit. .
La plupart abuferoient de cette faculté pour prolonger l'inftruélion, quelquefois même, pour confumer leurs Adverfaires, en frais, & ils feraient [ervir d'inll:rument à leur
paffion , ce qui. n'a été fagement établi par l'Ordonnance·
que
pour parvenir plus sÎlrement à la découverte de la
, .
vente.
Antoine & Thomas Ripert prétendoient au contraire que
tous les faits fur lefquels ils s'éwient déterminés à faire
informer concre leur frere, éraient des faits graves, incéref.
fant eifentiellement l'ordre public, & dont la po'urfuite doit
être faire avec toute la rigueur & ·routes les précautions de·
l'Ordonnance. Ils s'applaudiifoient de n'avoir rien à dire·
contre leur pere; mais ils préfenroient leur frere ainé comme.
l'auteur de tout ce qu'ils avoient fouffert. ~
Ils lui reprochoient de les ·avoir préfentés au public comme des aifaffins , après les avoir perdu dans l'efprit du pere'
& après avoir engagé ce dernier à folliciter une lettre d~·
cachet conte'eux•.
x x.x 2.
.
�B2.
JOUR. N
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Il avait dit publiquement qu'il détruiroic toutes leurs efpé.
rances en faifant mourir fon pere infolvable; il les avait
cha/fés de la maifon pacernelle avec éclat.
La porte leur fuc fermée un [air à mefure qu'Us fe retiraient; & il leur a fallu plaider pour obtenir une partie de
leur linge & de leurs effets.
.
Ils avaient reçu dans- la mai[on les craicemens les plus
barbares & les plus méprifans. La peine des Galeres leut
écait annoncée ; le pere [e porta même un jour à les pourfuivre avec un couteatl; ce moment de .fureur n'érait que
l'effet des impteffions auxquelles un vieillard, âgé de plus
de quatre-vingt ans, [e lai/foit trop facilement aller; impreffions qui lui éraient données par leur propre frere.
La qualicé de frere n'était point un moyen capable d'arrêter leurs pour[uites, & de leur faire interdire la voie criminelle.
Les torts dfun frere n'éraient que plus rêvoltans; d'ailleurs il avait donné lui-même à fes freres l'exemple d'une
pareille pourfuite. Leur Requête en information n'était furvenue qu'après celle de leur frere qui avoit déja fait entendre
plufieurs témoins.
Le moyen tiré. de la qualité des Parties ell: donc déplacé.
dans la bouche de leur frere .ainé , indépendamment de ce
qu'il exifie des Arrêts [ans nombre qui ont confirmé des
procédures prifes encre parens.
•
La ReqUête en furféance au procès extraordinaire n'érait
pas mieux fondée. L'on ne voit pas fous quel prétexte on
vouloit les priver de l'avantage qu'ils pouvaient retirer du
récolement & de la confrontation des témoins. C'efi en
faveur des accufés que l'Ordonnance a établi cette forme
de procéder.
Il leur importait d'établir la vérité de la' plainte de la
maniere la plus fcrupuleufe. Ils ne vouloie[J.t négliger aucun des moyens que la Loi leur fournit pour leur juftrficatio.n.
Ce n'efi point fur des raifons de convenance qu'il faut
juger de l'infiruél:ion des procédures, & enlever à des ac-
�,
D U - P cA 'L A. 15 D B P"R. 0 V li NeE.
~ 33
cufés le f~ul moye'n que l'Ordpnnance leur ménage pour re,pouffer l'accufarion fous laquelle ils gémiffenr.
Me. Bermond, SubHitut, ponant la parole, établit fur la
premiere queHion en caffation de la procéd ure, qu'il eH cer,
tain que plus les Panies font. rapprochées par les liens facrés
de la nature, plLls les Juges doivent être circon[peas en
leut 'accordant la permiffion ù'informer, & de [e pourfuivre
mutellement avec rigueur.
L'ordre public exige même que la Jufl:ice ne pénetre pas
dans l'intérieur des familles pour s'occuper des querelles
que l'intérêt & la jalouGe n'y font naître que trop Couvent.
. Le temps & la réflexion [uffi[ent pour ramener à leur
devoir ceux qui ont eu le malheur de s'oublier envers leurs
parens , tandis que la publicité & la pourfuite de leurs torts
pourroit ajouter à leur reffentiment , & les éloigner de toute
idée de reconciliation.
'
Mais il eH des circonfl:ances malheureufes oû l'on ne peut
plus fe flatter que la voix de la nature [e faffe entendre. Il
faut alors néceffairement recourir à l'autorité des Loix.
,
Si Antoine & Thomas Ripen n'avoient eu à dénoncer à la
Jufl:ice que des détails domeHiques & quelques diviGons avec
leur frere, fans excès, Tans aucune circonfl:ance véritable":
ment grave & criminelle, l'information n'éroit pas faire
pour leur plainte.
Cette voie ne leur ét6it ouvette que pour dénoncer un
délit grave &. puniffable , digne de route.la rigueur de l'information.
.
Ce n'eH donc que par la connoiffance de l'information
que la Cour doit prononcer [ur la "affation demandée de
leur procédure.
.•
C'eH par les charges qu'elle renférme qu'on connoÎtra fi
leur plainte manque par la hafe, &' s'jl faut anéantir leur
.procéd ure.
Il obferva qu'il réfultoit de la procédure que Pierre.Auguf.
tin Ripert s'étoit emparé de l'e[prit de [on pere, & avoit
travaillé pour l'aigrir contre fes deux freles Antoine &
,Thomas.
�)34
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Il en réCultoit encore qu'il 's'étoit llvré à des excès bien
repréhenCtbles à l'égard de fes freres,'& qu'il étoit l'auteut.
de tout ce qu'ils avoient eu à foufFrir dans la maiCon paternelle. Un témoin l'accu Ce d'avoir fortement irrité le pere con·
tr'eux, au point qu'il Ce Caifit d'un couteau. Le même témoin
ajoute que l'ainé Ripert avait infpiré à [on pere de mourir in·
folvable, & ·de trouver par.là le moyen' de punir [es Jreres.
Les autres faits de la plainte étoient également ju!l:ifiés.
AinCt l'ainé Ripert avoit tout facrifié au plaifir de fe vengel': fa réputation , fon honneur, les fentimens de fon
pere.
.
La procédure ne préCentoit rien qui indiquât qu'Augu!l:in
RiperE eût envie de vivre fraternellement avec fes freres , on
y trouvoit au contraire le dejfein bien foutenu de les perdre.
Il les avoit attaqués dans l'efprit de leur pere qui étoit la
feule perfonne de qui ils avoient à efpérer ; il n'avoit pas
craint d'indifpofer continuellement ce vieillard contr'eux, &
de lui perfuader qu'il n'y avoit poine de' traitement qu'ils
n'eujfent mérité.
Comment leur refufer l'aél:ion criminelle? Comment écou·
ter d'ailleurs l'ai né Ripert, lui qui avoit dévancé ü:s freres
dans la voie rigoureufe pour des faits moins graves, & qui
avoient produit un moindre décret?
Me. Bermond ajouta que le déBartement que l'ainé Ripert ofFroit de faire de fa procédure auroit été louable dan.s
toute autre circonHance. Ici il n'étoit d'aucun poids, puifque l'ainé Riperr étoit fous un décret plus rigoureux. Il
falloit donc juger les parties fuivant les regles de notre procédure.
Nos Livres font remplis d'Arrêts qui font intervenus fur
des procédures prifes entre parens, c'efl: toujours la nature
du délit qui détermine la nature de l'aélion.
La qualité de Jrere ne s'oppofe point à ce qu'il exifie une
procédure, quand elle efl: prife fur des faits graves, fur des
excès & des déford l'es pareils à ceux qui font conHatés par
l'information des freres Ripert cadets.
Sur le Jugement qui ordonnoit le procès extraordinaire,
�DU
PAL AIS
DB
PRO VEN C E.
~3~
Me. Bermond ohferva que la procédur,e prife à la requête dé
Ripert ainé ne portoit pas fur des faits auffi légers qu'il
avoit pu fe le perfuader, fa requête de plainte annonçoit
fur-tout qu'il pourroit y avoir lieu ,à une condamnation airez
forte relativemen,.t à la qualité des parties.
1
Mais la procédure n'ét9i~, point ici la feule chofe qui dût
d~terminer la Cour; la regle générale efi que le procès extràordinaire ne fe refufe -jamais à Faccufé qui demande qu'il y
foit procédé.
L'Ordonnance, au titre des Récplemens &. Confrontations,
veu,t que fi l'accufation mérite d'Üre inftruite, le Juge ordonne
qu'il foit procédé p.àr re,cotement\& .confroT/ta.tion, ; -cette dif:..
pofitÎf;)ll femble d'-abord:~,atinoricer que Je. procès ext;raQrdinaire ,ne fera 1 ordollpê que, ql1and, l'accufation ,fera grave.
Mais l'Ordonnance ne parle ici que des cas où le Juge
doit l'ordonner d'office, &' où il ne doit confulter que les
charges de 11'inf9rma6ion J élu pOJlr mieu,X dire, le ,délit 4ui ed
fait la ma,tier~.,.
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," JI '
1
Cette difpQfition ne regarde pas le cas- où une partie ae.'"
cufée dèmande, pour erablir (a jufiification ou pour ajfoiblir les charges, -qu'il f-oit' procédé c;:xtraorilinairement.
C'efi. le feulJllJloment- 0\1 l~a~cu[é puiffe çOl)noÎtre, ·le.fe"
cra def lavprocédure: f'c'e!!:. p'jr coriféq!l~nt le, felll ( olJ,l"il
puiire fel~éfen,drei1reJatjv~me.l)t "à. çe ,qlJ,Î; lli été d.épg(ÔJ.col)ère
llii. - al ,:" ~I." -:!'l()~r (Ir .. •• ;,: .... ':-i\. . l
. Ji ,1 ~:
Il feroit inJufie de .le. priyer, de cette,'reirouFqe, I!;Ç ,·dè, V9U~
loir' le juger fans qU'Il. ait.•pu, ~(er- du, n10yep de dé(enfe que
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r.OrnçlllnanceJ1U!pa~mépagé"L ~"j J f 1~
'JI' JjC;'" '. , , ' .
Le procès extraord;Î.naire ~fi rfaps! 'ÇOn-tredit, le moyen le
plus:,fimple & le lf'lus.~û.r Ipour ,.tirer ,laJyérité' pOUf ou.c9ntre'
faccufé, à qûi Iron 3,) tOl:lioùrs Ipernii.s de, fournir alors. fes
reproches, de prmdre .droit Ifur les dépoutÎgpsJde;; fémoins ,
de. les faire 'intenroger .par-:le eJ!lge filt les cir~.onGapces de
ces 'êmes di[p.ofit~ons.( Ju::-i\ lb!:, ~l:)!l ';J{lL' , ';J ,,' 1
Tel efi .li:ié'drott .de l'accufé>rdL1Oit,!jnébntllftable'qu~,ri'en
ne plmtr~lui,fài'rel.p;erdJ-l:..p~ . ',; l'" >Ci ,1. 'j ~ " - ' . " L
JfJH' :cooôlu.c.'ap [Qu!ey.eIfleo.tbdll
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de Pierre-Auguftin Riperr, avec' renvoi & amende, pour
être pourfuivi en exécution de la Sentence du procès extraordinaire.
Arrêt conforme 'prononcé par M. le Préfident de la Tourd'Aigues à l'Audience du i Septembre 1179; l'AppcUânt fue:
condamné à l'amende & aux d~pens.
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Les P'arms, doîveni ~tre confûltér fur le Mariàgè d'un Minèul',
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- s'il y a fbupçon}ùffifant deIéduaion bU de contrainte.'
On ne peut ft plaindre des terines inj{Jtieux:, lorfqu'une jufie
, défenfe les a rendu~ n.éceffiires.
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'Dame. A:/fne Mark'ar'1 f éJfPufa en .175 '1! " à ::F'Jn-is le î'ieür
Chapelié, Négociant Fran<;ais. Les deux époux fe rêndifènt 'à. 1\1arlhll'e ûli- ils' fixe;ré-!\.t !I"eut tlq,miciJ.e,
'.
, :Le Iléur €hàpelié.'rnourut1 lti' 3.6JMai 17)7' n Ia.jtra. fi:,
cnfans ," deûx 'gar<;bris &. quatre hUes.! Par Ion reftament Il
1nl1itbaJ Iltp~Ufe du HelUr- Ramagnac. hétiti~re 'univerCelle. Il
légo\alà1hlln:..CliaF!es-Frederk'·fo'n 'fils- aîné '~,o:()(joi:liv'. ; &' à
JealJ~Â~[oilie'-L0~is' &:,à fes,~fi:lles" 4diJoQl:li\l. pour'.!éur teniq
lieu de légitime; il nomma les heurs Romagnac & Chapelié
tu-tèurs & curateurS ~e fes: enfans p-upiUes &. 'mineurs; il
légua; à ·fon époule,uo'penlioR. annuelle', & viagere de.. tRoa:
li,v•., pa~'able_ p~; tiers & gar av·aqi;~~'de.. quâtl'e> en ,ql!lattl~
molSJ j •.&;i tèusJ~es·· ifiéuble:s ,aJ~la ~mf3i.fon. ,;.
J h
l
J' Apt~Olal mor~-dè'léU:r'pèff 'iJ.és':DHt's. rCammë &rjV>irginie
Chapl!"Hé furem1 cl'l'l1dtlites; ~ 'NîrùesJ chez la' Dame Lezan
leu.f tante ',. ce' qui excita 'Ia~ réclamation 'de 'la Daille Marki\n
teuF ~}€re ,- -qabfe' prélènt''L p3rdev.anr les Tribunaux:. d'e :J uf~
tice comme une mere Catholique ".à. ,qui. <:dès. p'arensd?ro~
tetla nîll Jâtlkbj\jntu d'enlèvet il'4ducatilifn :de ~fes: filles; a b T
La Dame Markan ptéfenta Requête', a~~ 'iLreute'naI),q de.
M~ftil~ le 1;1z lfuillec l'7~-}ljt elle dtmandà qu'ibfûttét:njoinc
1
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PALAIS
D'E
PROVENCl!.
137
aux fieurs Chapelié & Romagnac de réintégrer &'faire conduire fur le champ, & à l'in fiant de la Requête & du Décret qui interviendroit, le5 Dlles. Camille & Virginie Chapelié fes filles auprès. n'elle & dans fa maifon d'habitation,
pour continuer d'y loger & d'y vivre, en conformité du
teltament de leur pere, & felon le droit qu'ellc en 'avoit en
Dl qualité de mere; autrement; en cas de délai ou refus da
leur part, qu'ils feroient affignés à jour, lieu & heure précis
pour le voir ainli dire & ordonner, même pour voir dire
que 'faute par eUlk de ce faire,. fur la lignification du décret
qui interviendroit, en vertu d'icelui, & fans qu'il en fût
befoin d'atHre, ils feroient. contraints, même par corps. ~
fous la réferve expre!fe d'intenter contr'eux l'aélion crimi"
nelle, & cependant qu'il lui feroit permis de faire arrêter
fes filles par-tout où elles fe trouveraient, pour être conduites fous sûre garde dans !à maifoIT-, avec inhibitions &
défenfes aux fieurs Chapelié & Romagnac, & à tous aurres,
d'y mettre obfiacle, à peine d'amende & d'en~ être informé;
Le Lieutenant de Marfeille ordonna que les Dlles. Chapelié feroient réintégrées à Marfeille auprès de leur mere;
mais l'appel des lieurs Romagnac & Chapelié ayant arrêté
l'exécution de cerre Sentence, la Dame Markan fit plufieurs
voyages à Nîmes pour y voir [es deux filles .qui. furent toujours dérobées à 'fe~ recherches.
La Dame Markan changea une' panie de fes fins.;
elle demanda que fes filles fero.ient conduites au·. Couvent
des Dames Lyonnoifes, ou tqut autre Couvent de la ville'
de Marfeille, pour y êtr.e élevées dans les principes de la
Religion Catholique, Apofiolique & Romaine.
Le Lieutenant ordonna un foil montré à: panie ,. & (ur. la
lignification., les lieurs Romagnac & Chapelié déclarerent
fe rapporter à une Requête contr<lire. Dans cet intervalle il
y eut une a!femblée des parens ,. dans laquelle il· fut délibéré
q.ue les tuteurs Tetireroient les Dlles. Chapelié pour. les envoyer à Nîmes auprès de quelque parent, ou à Lyon. daM'
1Jl mejJJeur penfion q!-l'ils Fourroient trouver., p.our. leut faire;.
y y y,
�138
,
Jou
RNA L
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donner une éducation ,conforme à leur état, jufqu'à ce qu'elles
.fu1fent parvenues en âge de poulloir ~tre mariées.
Sur les défenfes refpeél:ives des parties il intervint Sentence le 7 Septemb're 1770~ , qui fit droit aux fins prifes par
la Dàme Markan:. Les. tutel!rs en appellerenc,;, elle demanda
le nonobftant appel; ,la Cour rendit un décret de furféance.
La DameiMarkan obtint le 6 Mars 17.78 .un ordi:e dLLRoi,
qui enjoignit à l'Abbe1fe du Couvent de fa Déferre à Lyon
de recevoir les Dlles. Chapelié.
, ,P.endant leur féjouI dans ce -Couvent', le fils d'un Capi~
taine d!lnfanterjeJ' &' ..quiiavœit fervi lui-même dan's les
Gendarmes Ecojfoi~ " fe; préfenta pour époufer l'ainée. Les
fleurs Rorhagnac & Chapelié préfenterent une Requête au
, Lieutenant du Préfidial de Lyon; ils demanderent qu'il fût
,fait ,inhibitions & defenfes au Curé de la Paroi1fe de 'pa1fer
outre cà da 'célébartiQn du. mariage; à. la Dame 'M<irkan de
p.onner fuite au COlTtrat qu'elle av.oit· fait figner à fa fille, &
à l'Abbe1fe de la \ Déferre u'e lai1fer forrir de fan Couverlt
les Dlles. Œhapelié_
• Le Lieutenant rendit une ..ordonnance portant des défenfes provifoires; & 'qu'avant dire droit fur cette requête,
il Jeroit par lui accédé au _Col,lvem de ta Déferte pour y recevoir les déclarations .de la Dlle. Camille Chapelié. D'après
ce que déclara cette fille, le. Lieutenant fit' droit aux fins de
la 'Requête des !leurs Romagnac & Chapelié.
L'ordre étant arrivé pour faire fonir la Dlle. Camille Chapelié du Couvent, elle préfenta Requête au !Uême Lieutenant>; elle demanda qu'il lui fût concédé a6l:e de ce qu'elle
l'étraél:oit le. contenu aux déclarations qu'elle avoit faites,
comme ayant été infpirées par les fleurs Romagnac & Chapelié; de ce qu'elle deGroit refler avec fa mere, & qu'en
conféquence défenfes fu1fent faites, tant aux fleurs Romagnac
& Chapdié qu'à, tous autres,. de la troubler, fous les peines de '
droit. Le Lieutenant accorda à la Dne. Chapelié l'aél:e par
elle demandé. Dans le même temps arriva l'ordre du Roi,
portant que.les deux.fœurs feroient. miles en liberté. Et le 9
�DU
PALAls
DB
PaOVENC'E.
n9
Nove:mbre I77~ la Dame Markan demanda'& 6btint injonél:lon à l'Abbeffe de lui remettre fllr le' ch'~mp la DUe.
,t.,'
Camille Chapelié.
•
Sur la 'fignification du décret, .l'Abbeffe remit la Dlle.
Camille Chapelié à fa mere ; mais fur le requiGtoire du Procureur du Roi, le Lieutenant renvoya les- panies au Lieutenant de Marfeille , à l'effet de faire nommer urt tuteur ou·
curateùr polir la célébration du maria'ge, & OI:donna que les
Dlles. Chauelié feroient conduites au Couvent du Bon-Pafteur de la ~ille de Lyon, pour y reHer jufqu'à ce qu'autrement fût dit & ordonné· par le Lieutenant de Marfeille ;
que défenfes feroient faites à la Dame' Markan de donner
fuile à la célébration du mariage, & il reçut l'oppoGlion du
Procureur du Roi envers ce précédent décret, pour. être
vuidée également par le Lieutenant de Marfeille.
En vertu de cette Ordonnance on voulut enlever les Dlles.
Chapelié de la maifon de leur. mere ; celle-ci .fit des. repréfentations; la mere & les filles fiJr~nt conduites chez le Lieutenant qui, après les .avoir interrogé~s, rendit une nouvelle
Ordonnance qui aonna aéle à la Dâme Markan de ce qu'elle
ne donneroit pas fuite au contrat de mariage jufqu'à ce
qu'elle y fllt autorifée par les ~utel1rs ou curateurs qui feroient.
nommés par .le Lieutenant de Marfeille, &- il fur ordonné
que les Dlles. Chàpelié demeureraient' chez leur mere.
La Dame Markan fe rendit à Marfeille avec les Dlles:
fes filles & l'époux propofé ; les Geim Romagnac & Chapelié firent lignifier leur oppolitiou aux Curés. Les Dlles.
Chapelié fe pourvurent contre leurs tuteurs pardevant le Lieutenant de Marfeille pour les faire condamner, 1°. à rendre
comple de l'adminiHration tu~élaire ; 2.? au", dommages 00
intérêts qu'elles avoient- fouffert de celle même adminiftratian.
La Dlle. Camille Chapelié fe pourvut le 1 ~ Février 1779.
contre les lieurs Romagnac & Chapelié en déboutement deleur oppolition. Ils préfenterent une Req.ùête contraire, &
ils prirent enfuite des fins fublidiaires, portant que les parens & voilins ·de l'ancien domicile. &; dt:' l'aéluel feroien];;
'1-yy2..
\
�540
Jou •
N A L
convoqués.; p.Oyr délibérer fur les convenances du mariage
. p.ropofé. he Procuteur du Roi adopta les fins fubtidiaires,
& requit de fan chef que le fieur Duprat ,qu'on préfentoit
pour époux, remettroit au. Grene les titres de fan état &;
de fes hlcultés ; le Lieutenao.t ordonna l'aifemblée des parens .& des yoifins-, & que le fieur Duprat ,reme;troit les)
,
' .
.:,r
titres ckJQQ état..
La DJ1.I:, ,ChJlPc:Jié appella pardevant la Cour; elle demanda 'qu'il feroit pa1fé outre à la célébration de fon mariage. Les fieurs Chapelié & Romagnac préfenterent des
Requêtes contraires, {ur lefquelles la Cour renvoya la caufe
en J ugemenc, & ordonna que provifqirement la DIle'. Chapelié fe retireroit d.ans un Couvent jufqu'à cç qu'autrementfût dis & ordonné, avec. défenfes d'y voir le fieur Duprat.
La Dame Markan intervint dans cet. incident pour de~ander la fuppre$on de la Requête des fieuts Chapelié &
Romagnac comme lui étant injurieufe.
La Dlle. Chapelié préfentoit deux différens objets; le pre-.
mier tendoit à démontrer que les faits perfonnels li la Dame,
Markan étoient vraiment injurieux, étrangers à la caufe, faux
& imaginés fur le plan le plus odieux de diffamation. Le
kcond, établi1foit que le confentement feul de la Darne
Markan étoit néce1faire au mariage de fa fille; que le. Srs.,
Romagnac & Chapelié éroient non-recevables à s'y oppofer;
que la volonté de la DlIe. Chapelié avoit été libre dans touS
les temps, & que le fyfiêrne de contrainte & de féduction
étoit également faux & injurieux à la Darne Markan.
La Dame Markan s'efi-clle trompée dans fon choix ( difoit-on fur. la premiere quell:ion? ) A.-t-elle pou1fé la prévention jufqu'à. confenFtr à un mariage qui pût alarmer fa famille? Voilà l'uniqlle poiqt à juger. Pourquoi entrer dans les
détails de faits privés? Pourquoi a-t-on cru qu'il fallait injurier
la mere pour pouvoir s'oppofer au mariage de la fille? Si
les faits rappellés étaient vrais, ils feroient toujous inutile~
à la ca,ufe, & par cela feul injurieux & repréheniihlcs. La
Dame Markan a donné fon confente ment au mariage du Sr,'
Duprat avec fa filJe; ce 111ariage. e.fl,de fon choix, il ré1!nit
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
541
le vœu de la Dlle: Chapelié ; en faut-il davantage pour légitimer cette uoion aux yeux des Tribunaux & de la fociété ?
Le mariage dl: , fans contredit, l'aél:e le plus important
de la vie. Il dl: juf!:e de confuiter fur-tout la volonté de
c,dui qui s'y engage, puifque fon bonheur dépend effentiellement du {:hoix de la perfonne avec laquelle il doit s'unir,
D'un autre côté, un des plus beaux effets de la puiffance
paternelle, eft d'empêcher les mariages que les enfans veulent contraél:er, quand leur choix ne s'accorde point avec
la volonté du pere. La mere jouit encore de ce droit, quand
elle a furvécu au pere, & le pouvoir paternel vient [e concentrer fur fa tête. Son confenrement eft effentiel au mariage
de fes 'enfans j elle pourroit eo pourfuivre la caif.'uion , fi on
ne l'avoit pas requis.
. L'Ordonnance de Blois, qui exige le confentement des
tuteurs & curateurs pour le mariage des mineurs, n'eH
point fuivie dans les pays de droit écrit, où l'on obferve
fcrupuleufement fur les mariages la difpofition du droit Romain. Cette Ordonnance n'dl: en vigueur que dans les pays
coutumiers, où la tutelle fe proroge jufqu'à la majorité,
& où les curateurs font non feulement donnés pour l'ad miniftration des biens, mais encore pour la perfonne. En pays
de droit écrit les mineurs ne font obligés d'avoir des curateurs que lorfqu'ils plaidenr.: Inviti adolefcenres curatores'
non tUCipiunt prœterquàm ill litem. Mais lorfqu'il s'agit de fe
marier, leur confentement n'ef!: l'as du tout néceflàire. La
Loi in copulandis, Cod. de nuptiis, le décide formellement.
La volonté des parens & des alliés ne doit être d'aucune
confldération : In copulandis nuptiis, me curatoris qui folam
rei familiaris fùbflinet ,adminiflrationem, nec cognatarum , j.'el
affinium ulla autoritas parefl intervellire ,fed fpec1allda eft ejus
voluntas de cujus calljun8iane trac1atur.
Le mineur peut donc fe marier fans l'affif!:ance & l'autorité de fan curateur, naD plus que de fes proches parens ou
alliés. Cujas décide même, dans une de fes Confultations,
~ue le pere ne peut pas '. par fon tefiament ~ impofer à fil,
�H2.
Jou
RNA L
fille mineure l'obligation de fe marier d'après le confentemenc
de fes curateurs. C~telan & Ved~l le penfent .de même. Il
dl: un feul cas où les curateurs peuvent être ~ntelldus &
s'oppofer valablemeilt au mariage du mineur. C'ef!: celui
d'une méfalliance , ou d'une difproponion infupportable
qui fafre préfumer la fubornation. (Serres, dans fes Infl:itutions au' droit François, tit. de nuptiis. )
Sur quel motif fera donc fondée· l'oppofition des fleurs
Romagnac & Chapelié? Si la volonté de la Dlle. Chapelié
--n'étoit poim libre, il ne pourroit point y avoir de mariage entr'elle & le fleur Duprat. Mais les réponfes qu'elle
avoit prêté pardevant le Lieutenant du Prélidial de Lyon,
font une preuve non fufpeél:e de fa volonté.'
La Darne Marhn diloit que jamais femme ne fut plus
indignement outragée; jamais une plus lâche diffamation
n'a été employée pour la déshonorer. On l'a repréfentée
comme une femme hardie & impérieufe, qui, après avoir
fcandalifé le public par la conduite la plus déshonnête, vient
préfellter à la Cour le projet fcandaleux d'un mariage qui
dl: le fruit de la contrainte & de la féduél:ion; d'un mariage
indigne de la Dlle. Chapelié & de fa famille. On accufe
la Darne Markan d'aVaIt' voulu mêler la caufe de la religion à une contefl:ation purement civile; d'en avoi( aftèél:é
le publié, principalement les Maifons-religieufes al! fa fille
a été placée; d'avoir excité dans celle de la Viflration, al!
elle efl: aél:uellement, le zele des Religieufes contre des
Protell:ans. On a tâché de la diffamer par les circonfl:ances
les plus avilijfanres, en difant qu'elle étoit fans mœurs &
fans conduite, on a donné des motifs étrangers & humilians à des faits que les fleurs Romagnac & Chapelié auraient dû diffimuler, & qui, totalement indifférens à la
caufe, ne pouvaient avoir d'autre objet que fa diffamation.
Les Geurs Romagnac & Chape lié foutenoient' que la DlIe•
.Camille Chapelié , leur niece, fuivoit en aveugle des impreffions étrangeres. Ils rappelloient les Ordonnances ou Royaume , qui exigent, pour les enfans de famille, le confentement des peres & meres; & les difpoLitions de notre droit ,.
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
~43
qui, ~ défaut du pere & de la mere , exigent le c6nfentement <;les curateurs, lefquels fone fournis auparavant à prendre l'avis de la famille. Clltte difpofition fe rapproche de ce
qui eft établi par deux Empereurs Romains couchant le mariage des jeunes filles; & c'eft à ceere regle qu'il faut fe
tenir, nonobftane ce qu'a dit Mr. de Catelan , qui, dans fes
Obfervations, a confondu les différentes parties de la
Loi, & en a donné par conféquene une interprétation vicieufe.
Il .eH: bien vrai, en principe général, que le mineur peut
fe marie,r fans l'intervencion de fon curateur & fans l'avis
de fes parens. Mais il eft une exception à cette regle pour
le mariage des filles mineures; eUe veut que dans le cas où
le pere fera mort, la fille, la mere & les parens foient
confultés.
L'Ordonnance de Blois qui a difpofé fur la matiere importance des mariages, & qui a prefcrit les formalités néce/faires pour ceux des mineurs , exige le confentement des
peres & meres, & des curateurs à leur défaut. Cette difpofition eft f.1ge ; l'incérêt des mineurs demande qu'ils ne
foient pas entiérement livrés à leur volonté, quand il s'agit
de coneraél:er un engagemene fur les fuites duquel la foiblelfe
de leur âge ne leur permet pas d'être éclairés. Le devoir
des curateurs & des parens confiHe à venir à leur fecours
dans une conjonél:ure auffi délicate & dans un aél:e auffi elfentiel. Les oppofitions qu?ils forment au mariage des jeunes
perfonnes confiées à leur foin & à leur prudence, doivent être favorablement accueillies, & leurs motifs doivent être pefés avec beaucoup d'exaél:itude & de circonfpeél:ion.
Ce n'eft pas que le confentement des curateurs fait eIrenti.ellement nécelfaire, à l'effet que le défaut de confentement
rende nuls les mariages des mineurs; mais quand leur mariage n'eft point conrraél:é encore, leur oppofition doit être
reçue, & fur-tout quand à la qualité de curateurs, ils réunis
[ene celle de parens.
Serres, dans fes Inftitutions au droit Franc;ois , dit qu'on
�H4
Jou R N A L
ne .reçoit point les curateurs ni les collatéraux à s'oppofer aU
mariage de leurs parens. Mais cet Auteur excepte le cas de
minorité, & veut que l'avis des parens & cmateurs ne foit .
pas négligé quand il s'agit de l'établifièrnent d'un mineur.
Cette 1Jo8:rine, conforme à la raifon & à la fagdfe de nos
Loix', n'etl: point deHru8:ive de la liberté naturdle ; celui
qui doit [e marier ayant l'intérêt le plus preffant dans l'engagement qu'il conrra8:e , [a volonté doit toujours préva'1oir
[ur celle de fes proches. Mais la volonté du mineur ne doit
l'emporter fur l'avis des pareos ou du curateur, que quand
elle eH perfévérante & à l'épreuve de taures les repréfentarions. Quand une famille en:tiere dé[approuve le mariage'
t,'I'une perfonne min-eure" les Loix veulent qu'il ne foit déféré à fa volonté que quand la famille n'a plus rien à efpérex, & ne doit plus [e promettre de faire renoncer le mineur
à [on projet.
.
On lit dans le Code Matrimonial, fur 'Te mot mineur, que
la Dame Grosjean, ayeule d.e la Dlle. .Gargan, voulait la
marier; (ur l'oppofition des parens qui alléguaient difproponion d'âge, de bien, de naiffance, & la facilité de·l'ayeule
'lui avqit pu être aifément réduite , il Y eut des conc!ufions
portées par Mr. l'Avocat Général au Parlement de Paris ,. à
affembler les parens. L'Arrêt du 30 Mai, 1767 renvoya la
caure à deux ans, à raifon d.e l'âge tendre de la DemoiCelle,
pendant lequel temps elle [eroit mife dans un Couven.t , dont
il [eroit convenu entre fan. ayeule & [es parens•.
Dans le même Code, au mot tuteurs, il Y a pluueurs
.autres Arrêts; celui de Marie Havart du 20 Iuin 17-3°; celui
,de la Darne de Blagny du. 6 Juillet 17')1, lors duquel il fut
6rdonné qu'il [eroit fait ,\ffemblée de douze parens p.aternels
& d0uze maternels, qui aviferoienc- d1un lieu. où. on placetoit la mineure, jufqu'à ce qu'elle fût pourvue par mariage.,
& que ce mariage ne pourtOit êtr.e fait que pat l'avis du tuteur & des mêm.es. parens..
On trouve au JournaL des Audiences, fous la date des, 1 &
Juin & 26 Novembre 17°1, qu'un jeune homme n'ayant~ni
. l'ere. ni m.ere ,. âgé de vingt-un. ans, v.oulant fe marier. ,. &
[Oll.
�DU
PAL AIS
D Il
PRO VEN C Il.
)4~
{on curateur y c-on fenta nt , fon frere ainé s'y oppofa. Une
premiere affemblée de parens fut ordonnée; le ré[ultat fut
favorable au mariage. D'autres parens étant intervenus, une
nouvelle affemblée fut jugée néceffaire , & fur le partage d'opinions, le Parlement de Paris' fit défenfes au mineur de
contraél:er le mariage qu'il projenoit.
On voulut marier la Dlle. Moulier, âgée de quinze ans, à
un Gareron Apothicaire qui étoit {on cou fin : plufieurs parens
confentoient à ce mariage; un [eul s'y oppo[a; le tuteur
s'en rapportoit à la prudence de la Cour; par Arrée- dy 18
AotIt 1702. il fut dit que la Dlle. Moulier [eroit mire dans
une Communauté, où au bout d'un an elle [eroit interrogée
par un Con[eiller; qu'il feroit fait dans cet intervalle une
.affemblée de douze parens pour- avi[er [ur [on mariage.
U ne autre caure jugée également par le Parlement de Paris en 17')0 , & confignée dans le Code Matrimonial fous
lé mot parens , ordonna une affemblée de la famille à la diligènce du Procureur du Roi, pour donner avis [ur le mariage , & un ordre à l'ayeule de la mineure de mettre hors
de fa mai[on le futur marr.
.
Ici, les fieurs Romagnac & Chapelié. font les exécuteurs
tefiamentaires, les tuteurs & curateurs des Dlles. ChapeJ.ié,
ils ont les mêmes pouvoirs, la même autorité -qu'auroit eu
leur pere; ils manqueroient autant à la confiance dont le
iieur Louis Chapelié les a honorés, qu'à l'obligation que le
fang leur impofe , s'ils ne fai[oient aujourd'h~i' tous leurs
efforts pour empêcher le mariage donc ils craignent queJeuv
niece n'etIt à [e repentir bientôt. La diJ!'érence de religion
n'a été qu'un prétexte imaginé par la Dame Markan: ,,'eil:
Hne rai[on dont elle a évidemment abu[é; & les fieurs Chapelié & Romagnac [e font fait un devoir d'aneHer à la 'Cour.
& au public que leur niece n'auroit jamais qu'un époux:
Catholique, fi elle vouloit ne fe déterminer que par leuIt
choix._
Il eil d'autres motifs que celui pris de la religion du fieur
Duprat, pour autorifer & pour jufiifier.leur oppofition. La
DUe. Chapelié n'a. ceffé d'être en la. puiffance de [a mere. &:..
Zzz.
�)46
Jou
Il. N A ri
du fleur Duprat. Il dl: difficile que dans l'o1ge le plus foible'
on ait la force de réGil:er à une obfelIion continuelle: cependant la Dame Markan ofe préfenter aujourd'hui fa-1ifle comme une perfonne dont la liberté d'ihtention n'a jamais été
compromife. Il paraît pourtant, par le il:yle des lettres qu'elle
écrivoit dans ce temps, & par le il:yle du journal qu'on a .
préfenté comme fon ouvrage, que le fleur Duprat étoit l'inftrument de fes démarches & l'auteur de toutes fes déclarations. La rapidité avec laquelle la Dame Markan pourfuit & exécute fonprojet, [ert encore à l'accufer & à la
rendre fufpeél:e.
Le contrat fut flglaé avant que fa fille pô.t connoître celui
avec qui elle alloit paffer fa vie, avant même qu'elle fût
fortie du Cou,<,ent de la Déferte. Tout devoit s'exécuter avec
la plus grande précipitation. C'étoit le moyen imaginé pour
prévenir l'effet des réclamations des parens. La Dame Markan viola toutes les regles pour parvenir à fon but; elle a
hefoin de l'autorité d'un Juge, & un Juge fans pouvoir eil:
celui à qui elle s'adreffe ; tout lui eil: indifférent, pouvu qu'elle
foit en poffelIion de [a fille, affez de temps pour exécuter
ce qu'elle a conçu.
Sur la prétendue diffamation de la Dame Markan, les'
fleurs Romagnac & Chapelié répondoieht que tout ce qui
eil:. utile à la caufe, quoique d'ailleurs défagréahle, eil: permis. Le droit de la défenfe eil: au-deffus des ménagemens ;
il 'n'y a point d'injure dans les faits, toutes les fois qu'il y
a nécelIité de les rappeller. Il n'yen a point dans les exl'relIions, toutes les fois qu'elles font telles que les exigent les faits. Des faits violens demandent des termes
forts; des faits délicats veulent être préfentés d'une maniere qui, fans dire ce qui ne doit qu'être foupçonné, laiffe
pourtant entrevoir tout ce qu'ils fuppofel?t. En un mot,
celui qui ne préfente que les faits: néceffaires , qui n'emploie que le il:yle qui leur convient, eil: hors de tout reproche. Il ne faut pas entendre par mœurs, cette vertu
commune que l'on préfume dans toute femme, & donc
l'ab[ence eil: un vice honteux, mais une certaine gravité dl:
�DU
PAL AIS
DE
PRO VEN CE.
547
mœurs, une conduite digne du re[peét du public & de la
confiance de la famille. En un mor, cette exception, on ne
dir pas des fautes, mais du [oupçon pre[qu'auffi néceffaire
aux femJI1es que la vereu elle-même. Il a donc fallu dire que
la Dame Markan avait reçu de fortes marques de mécon- tentement de la pare de [on mari; que jamais elle n'avait
eu [a confiance ; qu'il avait fait élever loin d'elle [es deux
filles- ainées ; qu'il avait choili pour les cadettes des tuteurs
& cmateurs à fan elÇc1ulion; que la famille entiere avait
penfé que ces deux enfans ne devaient pas demeurer à Marfei1le auprès de leur mere , & que c'étoit en e~écution de
ce vœu de famille, qu'elles avaient été conduites à Nifmes
& à Geneve. Tout cela étoit néceifaire pour la juftification
des lieurs Romagnac & Chape1ié, à qui on avait reproché
d'avoir enlevé & traofmarché les deux Dlles. Chapelié. Cela
étoir néceifaire au fourien de leur oppolirion que l'on voulait faire tomber par ce feul mot: vous combatter le vœu
d'une mere. Falloir-il bien repouffer les préfomptions générales réfultantes de ce nom facré, par les circonftauces par~'
ticulieres.
.
,Me. Bermond , Subflitut, obferva que la puiffance paternelle étoit parmi les Romains le feul fondement de la néceffité du confenremenr des peres au mariage de leurs enfans; d'où il fuivoit que le fils émancipé pouvoit fe marier
fans le confentement de [on pere, & que celui de la mere
n'étair jamais requis, puifqu'elle n'avait jamais fes enfans
fous fa puiffance. Nous avons penfé autrement fur l'obligation d'obrenir le confentemenr des peres & meres pour
le mariage de leurs enfans, & nous avons cru que cette
obligarion érait folldée auranr fur le refpeét qu'on leur doit
par la Loi divine, que [ur la puiffance que leur ont arrri-bué les Loix Romaines..
La volonré de la mere, il efl vrai, refle taujours [ubordonnée à celle du pere qui prévaut & qui l'emporre; maisquand la mere feule eft en vie, fon confenremenr devient feul,
abfolument néceifaire.
VOrdonnance. de Blois exige le con[entemenr d'es tuteurs,
Z z z 2.,
�H8
Jou B. N A L
& curateurs dans les mariages des mineurs, & défend eX~
'prefTément aux Curés de paffer outre à la célébration de leurs
mariages, s'il n'd! jufl:ifié de leur confentement; mais cette
loi n'entend parler que des pays' coutumiers, où la tutelle--&
curatelle ne font qu'une même chofe, comme l'obferve DumWllin.
Dans les Provinces régies par le droit écrit, la tutelle finit
à mefure que la puberté commence, & les curateurs que
l'on donne aux mineurs n'ont aucune forte de droit fur leur
perfonne ; leur fonél:ion efl: bornée à l'adminifl:ration des
chofes. Ce n?efl: cependant, que fur un droit qu'on a fur la
perfonne qu'on. peut fonde.r la néceffité du Gonfentement au
mariage; il faur obferver que ce confentement requis par
l'Ordonnance l'efl: fous peine de nullité, & qu'il efl: effent.iel à la validité du mariage. Cette difpoGtion ne peut donc.
pas avoir lieu dans les Provinces où les mineurs ne font en
aucune façon fous la dépendance des curateurs, ou même ils
ne font point obligés d'en avoir.
• La no D1ination de curateur n'efl: pas néceff'lire pour la
validité des mariages des mineurs, & leur confenrement efl:
tout ce qu'il y a d'effentiel. G'efl:.là une maxime certaine
dans tous les pays d,e droit écrit, fuivanr les Arrêts rapponés par Cate1an, & celui prononcé par M. le premier
Préfidenr Lebret le 10 Mai 172.'5'
Mais en !aifTant aux perfonnes mineures la liberté de fe
marier à leur ~ré , les Ordonnances éraient trop fages pour
les laiffer en bute à la féduél:ion , & les expofer à contraél:er
des mariages qui bleffent les convenances.
/
.Quoique le mineur puiffe Jlillablement contraaer mariage fans
l'affiflance du curateur ( difent les Commentateurs des InHitutions du drojt François) cependant, lorfqu'il y a des préfomptions fortes & fuffifantes de fubornation , les _Ordonnances
établies pour éviter la jùbornation doivent Jtre étroitement
obfervées. C'e(l: alors que l'oppofition des parens', même
éloignés, eH facilement écoutée dans les Tribunaux de Juftice, & qu'elle doit fufpendre la célébration d'un mariage
dont les inconvéniens ne font point apper-;us par l'individu
1
�:fi A LAI S D H PRO VEN C E.
'149
qui veut le cOllCraéter, foit pilrce que la foibleife de fon âge
le tient dans un état d'ignorance, foit parce que les paffiom~
le tiennent dans un état d'ivreife. Le confenrement des parens dt moins fondé fur leur puilfance que fur leur amour,
fur leur raifon & 'fur l'incertitude de celle des enfans. Il
ièroit inhumain que perfonne ne vÎnt- au fecours d'un mi·
neur âgé de quinze ou {eize ans, que le pre!l:ige environne,
& qui reçoit ave.c la plus grande facilité toutes les impreffions qu'on veut lui donner. L'obligation de fes parens eft
fans doute une obligation naturelle qui prend fa fource dans
les droits les plus facrés & les plus précieuK pour l'humanité:
S'il étoit poffible d'imaginer une inftitution finguliere où
l'amour du bien public pût être tel qu'il furpaifât rout autre
amour, on y établiroit des loix qui donneroient aux Magifr.rats une infpeétion fur le mariage des enfans des citoy~ns.
Cette in,fpeétion feroit la même que celle que la nature avoit
donnée aux peres; ces loix feroient fages, parce que les
Magiftrats font les vrais peres de ceux qui demeur-ent fans
fecours & fans défenfe. Il eft bien difficile que daus· un âge
extrêmement tendre, un citoyen foit en état de di[cerner ce
qui lui. convient, & de balancer les avantages & les incon..
véniens d'un mariage. Comment peut-il prévoir? Comment
peut-il comparer? Comment peut-il fentir tous les rapports
qui doivent influer à· rendre fon établiifement plus ou moin!>
heureux? Il eft bien dangereux que la foihleife de fon âge &
fon inexpérience ne le rendent au contraire la viétime de
l'avarice & de la fraude, & ne l'expofent à contraéter avec
joie un engagement qui doit pourtant le rendre malheureux
toute fa vie.
Ce font ces confidérations puiifantes qui autorifent les patens à intervenir & à s'oppofer aux mariages des mineurs,
& qui engagent ·les Tribunaux à y déférer; c'e!l: alors le cas
-d'appliquer ce qu'one dit les Commenrateurs des Infl:ituts,
que les mefun!s prifes pour éviter la fubornation doivent
êue étroitement obfervées quand il y en a de fortes pré-,
fomptions.
D U
�"0
Jou
~ N A L
Cette regle paro1t faite pour la caufe; non feulement on
peut dire qu'il y a des préfomptions de [éduél:ion qui frappent, mais on en voit un commencement de preuve, & il en:
impo/lible de ne pas l'appercevoir dans la déclaration faite
au Juge de Lyon par la Dlle. Chapelié, & dans la lettre
qu'elle écrivit en même temps au fieur Romagnac à Marfeille. On y apprend que la Dlle. Camille Chapelié ne con·
noiffoit point du tout la fortune, la famille, ni les. qualités
per[onnelles du fieur Duprat, quand la Dame Markan [a mere
voulut le lui donner- pour époux. La triHeffe & le repentir
[uivirent de près la fignature du contrat, qu'elle avoit donnée
[ans réflexion; la Dame Markan [a mere ent,roit en fureur,
en imaginant que ce mariage ne- [e feroit point. Enfin la
Dlle•. Chape1ié préfere le célibat à cet établiffement; elle fe
détermine dans [a tri!leffe à tromper les vues de la nature;
elle demande comme une grace de demeurer dans la Maifon
de la Déferte ; elle écrit à [es parens, à [es amis avec la plus
grande confiance, & dans [a douleur, elle demande la 'caffation de [on contrat.
Il efl: vrai que cette lettre, ainfi que la déclaration- qui l'a
précédée, efl: -en[uite retraél:ée par des lertres & des déclaration's contraires; mais les premiers aveux de la Dlle. Chapelié [ont d'un plus grand poids que ce qu'elle a pu dire·
dans la fuite, parce qu'ils ne peuvent pas être [oupçonnés de
lui avoir été arrachés dans un état de contrainte & d'obfe/lion. Les fleurs Chapelié & Romagna.c établis à Mar[eille n'avoient pas pu prévoir les liai[ons que la Dame Marlran formeroit à Paris, & ignoroient ab[olument [es relations avec le fieur Duprat; moins encore ont-ils pu prévoir
le deKein., enTle voyant, d'e;n faire [on gendre, & qu'elle
apporteroit la plus g,rande diligence à l'exécution de ce defrein ; ils n'o~t pu le favoir que parce que la DUe. Chapelié
leur niece le leur avoit écr.it ;. ils n'ont été infl:r\!its des. ma·
nœuvres & du projet de la Dame Markan que quand [a fille
a· cherché en eux des recours & une proteaion.
1 Il s'agit ici du bonheur ou du malheur de la Dlle. Chapelié ;, [on. mar.iag.e. doit en décider;. il faut donc apporter li
�1) U PAL A. l S Dl!
P R <> VEN C ll:.
'î)1
plus grande précaution en jugeant les moyens d'oppolltion
de fes oncle & beau-frere. Ils fe préfentent pour faire fufpendre la célébration du mariage d'une mineure avec un
étranger dont ils ne connoiifent ni la fortune ni la famille;
ils craignent que le conlèntement qu'elle a donné à ce mariage ne fait le fruit de la féduél:ion & de la contrainte;
ils demandent à être inlhuits fur ces' différens articles, & à
être r,aifurés par des témoignages non équivoques; ils exigent une juHification & ùne aifurance qui dl: due à leur
zele; ils réclament la proteél:ion des loix pour arrêter jufqu'alors l'exécution d'un contrat dont les fuites pourraient
être- cruelles pour la Dlle. ChapeIié leur niece. Rien n'dt
donc plus favorable que l'aél:ion exercée aujourd'hui par les
fieurs Chapelié & Romagnac, & rien ne ferait plus dange..
reux que de méprifer leur oppofition.
.
" La cêlébration d'un mariage, dit M. d'Agueifeau , tom.
" 7, pag. ~ 07 , n'a rien .de provifoire ; la promptitude de
" l'expédition, fi recommand,ée aux Juges dans d'autres cas,
" deviendrait une' précipitation dangereufe dans les occa.
" fions où il s'agit de Hatuer fur ce qui eft irréparable; &
" bien loin de craindre alors les inconvéniens de la lenteur,
" on doit les regarder comme falutaires 'pour mieux aifurer
" la dellinée d'un mariage & parvenir plus facilement à une
" conciliation toujours defirable dans une famille."
Cette autotité, qui eH celle de la raifon même, prefcrit
ce. qui eH à faire dans cette caufe, & fait fentir la néceffité qu'il y a d'écouter l'oppofition des fieurs Chapelié &
Romagnac.
Sur la Requête en fuppreffion que la Dame Markan avait
préfentée, Me. Bhmond obferva que les fieurs Chapelié &
Romagnac avoient dit que la Dame Mar1:an avoit reçu de
fortes preuves de méconte~tement de [on mar;, que jamais elle
n'avait joui de fa confiance, &c. Il eH vrai que la Dame
Markan avoit dû entendre avec peine cette difcuffion & le
détail de tous ces faits, s'ils font vrais; mais s'ils font né.
ceifaires au Jugement de la caufe, peut-on les fupprimer
comme injurieux ! Il importoit aux fieurs Chapelié
..
•
�'s ~2.
10
U RNA L
Romagnac d'établir que 'la Dame· Markan n'avait
point obtenu la confiance de fan mari, & qu'il ne J'en
avoit pas jugée digne. Ils n'ont poÎnt dit pourquoi elle
l'avait perdue; ils fe font contentés de dire & .de prouver'qu'elle ne J'avait pas. Peut-être fan mari ne lui a-t-il pas
rendu juftice, & s'eft-il porté, fans trop de raifons, à des
voies. de rigueur à . l'égard ~'une femme qui n'avoit excité
fes plaintes que par imprudence; mais les apparences n'en
font pas moins contr'elle ; les fieurs Romagnall & Chapelié
n'auront pas moins cité des circon!l:ances- véritables, effentielles à leur défenfe, qui confi!l:oit à· f0utenir que le confentement de la Dame Markan au mariage de fa fille ne devait point prévaloir à leur oppofition. Il '-tl'y a donc ill'jure
ni dans l.eur Requête ni dans leur Mémoire; les faits qu?ils
ont avancés font notoires, ils étaient d'ailleurs néceffaires à
leur défenfe.
.
n conclut à ce que l'appeUation de la. BUe. Chapelié
fût- mire au n'éant, & que ce dont était app~l tînt & forcît
fon plein & entier effet; & au. moyen· d'e ce, que fans s'arrêter 11 la Requête en permiffion: de palfer outre,. de la. Dlle•.
Camille Chapelié, ni à.. celle de la Dame Markan, les Sr,s•.
Chapelié & Romagnac fulfent mis [ux: icelles hors de COUlI
& de procès; & de même fuite, que la Dlle., Camille Chapelié demeurerait au· Couvent ju.[qn'à ce que par l'alfemblée
des paJ<ens il eût été autrement délibéré & fratué fur le
procès-verbal d'alfemblée fait'"par le Lieutenant de Mar.[eille,.
à qui il r.equit que les panies fuffent l'envoyées pour. faire
exécuter l'Arrêt qui intetvie.ndroit ,. & . fa Sentence. fuivant
kur. f0r.me & teneur~
Arrêt conforme, apr.ès regiftre, du' r)-' Septembre 1779".
la, D..ame & DUe. Chapelié furent condamnées au'\{ dépens.
chacune les. c;onc.e.rnant ; plaidant Me.s., Gaffier l. Sime.on fils.
&. Sellon..
.
&
,.
�,
DU
PALAIS:
DE
PllOVllNCll'Hl
•
9
ARR Ê T
LXI X.
L'Artifàn ne peut évoquer pardevant la Cour en vertu du
privilege des Pauvres.
'ON
demanda à l'Audience du Rôle des Pauvres, du
'Mars 1779 ,
les Artifans pouvoiene évoquer leurs
2.6
fi
caufes pardevane la Cour, munis du cereificae du Curé &
des Confl.!ls du l i e u . .
.
Barthelemy avoie faie un billee à Jofeph Rey, Boulanger de la ville d'Aubagne, $le la fomme de 2.00 piafires
fans y exprimer aucune caufe. Rey le fie alIigner pardevantles Officiers d'Aubagne, & évoqua enfuite l'infiance pardevanr la Cour.
Barthelemy conrefia l'évocation; on difoit pour lui quel'Artifan ne peue -évoquer, parce qu'i-~ a des re1fou-rce~ cachées qu'il dépend de lui de ne pas manifeHer; on ciroie
l'Arrêt rapporté par, Boniface , tom. l , liv. 1 , tit. 1-3, qui.
débouta un Attifan de l'évocation. Autre Arrêe à l'Audience des Pauvres de Noël en 1777, contre les DUes.
Moufiiers, qui difoient n'avoir plus q.u'une propriété 'ellimée:
7'00 livres.
Arrêe du 2.6 Mars 1779, prononcé par M. le premiec
Préfident de la Tour, qui fair droit au dêclinatoire, con-formément aux conclufions de M. l'Avocat-Général de CaliRànc ; plaidant Mes. GalIier & ...•
�JOURNAL
ARRÊT
LXX.
Si un fils iie famille peut s'obliger valablement pour des mar""';
chandifes achetées en foire.
Si lis Juges-Confuls peuvent décerner des décrets forcés.
S; un décret forcé eft nul quand il n'a pas été précédé de trois
verbaux de perquifition.
E fieur Roubin de Marfeille achete· en foire de Beaucaire des cuirs de' RufIie des lieurs Miffre & Clavel de
la même Ville. Il leur fait un billet à ordre payable' dans
fix mois.
. '
.
.Il ne paie pas. On l'afIigne pardevanr. les Juges-Confuls.
Sentence de défaut qui le condamne au paiement avec con,trainte par corps.
.
- . On veut le faifir, il met en· fuite l'Hliiffier & fes Records.
On demande un décret forcé aux Juges-Con(ulsqui l'accordent le 2 'Î Février 1777.
,
Le pere de Roubin appelle enfuite de la Senterlce, & le
21 J uillét fuivant il préfente au Parlement une .Requête en·
furféance à l'exécution de la- Sentence. Sur le concours des
R~quêtes refpeél:ives , il en eH débouté par Arrêt du 19
Août.
Il fe pourvoit en révocation; il meurt avant le Jugement;
fes enfans reprennent les pourfuites en leur nom.
Cependant le. lieur· Roubin fils eH arrêté & conduit en
prifon. Il appelle du décret forcé pardevant la' Cour; il demande aux Juges-Confuls l'élargiffement pour caufe de maladie : il eH accordé.
La caufe portée à l'Audience ,. on difoit pour le Sr. Roubin,
1.0. que la Sentence était nulle.& injufie, parce que le fieur
Roubin n'étant point Négociant, n'étoit pas jufriciable des
Juges-Confuls; & qu'étant fils de famille & mineur, il n'avoit_pu contraél:er aucune obligation. _2 0. Que le décret forcé
L
.
�D U
P A:a '"
1 S
D E
PRO VEN C E.
555
était nul, parce que le's Juges-Confuls n'en pouvoient décetner aucun; que c'érait un attentat à l'autorité de la Cour,
à qui feule, il appartenait de les di(cerner; enfin que ce
décret forcé était nul, parce ,qu'il aurait dû être précédé de
trois verbaux de perquilitions.
, On répondoit pour" le lieur Miffre & Clavel, 1~. que les
Juges-Confuls fant compëtens pour connoître de toutes
affaires mercantilles; que le fils de famille mineur qui fe
mêle de n~gocier ell: réputé majeur, & peut valablement
s'obliger pour fait de commerce. On citoit des aél:es de
commerce faits 'par le fieur Roubin, & l'on ajoutoit que
quana même il n'auroit fait que des aél:es de commerce
paifagers, il n'en auroit pas moins été jufliciable des J ugesConfuls, fuivant Jouife fur l'Ordonnance de r673 & l'Arrêt
rapporté par Bonnet des Juges & Confuls, Arrêt XX. 2. 0 •
Que les Juges-Confuls étoient néceifairement compétens pour
décerner un décret forcé, parce' que c'était une fuite du pouvoir qu'ils avoient de décerner la èontrainte ; qu'ils étaient
d'ailleurs les feuls à même de prononcer avec connoiifance
cie caufe ; que tels avoient toujours été leurs ufages, & qu'ils
avaient pu décerner celui-ci fur un feul verbal de perqui!ition , parce qu'il y avoit eu rebellion.
-'
Par Arrêt p~anoncé par M. le Prélident de St. Vincent à l'Audience du 30 Avril 1779, conformément" aux
conclulions porcées par Me." Aguillon SubHicut, la Cour
confirma l'Arrêt du 19 Août, & caifa le décret forcé; plai~
dant Mes. Lager & Gras. Il fut jugé gue les' J uges-Confuls
peuvent connoîrre de la conreGation; qu'ils peuvent" décerner
des décrets forcés, mais qu'ils ne doivent les décerner s'ils
n'ont été précédés de trois verbaux de perquifitioll.
Aaa a z
,
�JOU1lNA);
ARRÊT
LXXI.
Le Fabricant par privilege eft obligé de contribuer à toutes
les charges du Corps.
.
T
Ourniaire leva ume Fabrique de velours en la ville d'Aix;
il préfeota Requête à la Cour, & après avoir ppofé
que les Maîtres Pa1fementiers prétendoient que la fabrication des ouvrages en foie à la grande & pe,J:ite navette leur
étoit dévolue, il demanda qu'inhibitions & défenfes leur
feroient faites de, le troubler dans fa Manufaél:ure fous quelque prétexte que ce fût, à peine d'amende, dépens, dom·
mages & intérêts, & d'en être informé. La Cour par fon
Arrêt du 30 Mai 177<, accorda les inhibitions demandées.
Les Maîtres Pa1fementiers en demanderent la révocation
par Requête du 3- Février 1776 ; Tourniaire offrit un expédient , par lequel fe faifant concéder aéle de ce qu'il confentoit de payer, depuis l'établi1fement de fa Fabrique, Ulle
quote pour chacun de fes Ouvriers qui feroit réglée par Experts
eu égard aux charges royales feulement, & aux dettes çontraéMes à raifon d'icelles; il demanda d'êrre mis, fur la Requête des Syndics des Paifementiers, hors de Cour & de
procès, avec dépens.
.
On difoit pour les Paifementiers qu'il réfulte des Statuts
de leur Corps, confirmés par Letrres-Parentes du mois de
Juillet 1776, qu'ils ont le droit exclufif de faire les étoffes
de foie à la grande & petite navette, & notamment le ve. lours. Quanq l'autorité ou la puiiTance légiilative a refireint
l'exercice d'un Art à un certilÏn nombre de Maîtres réunis
en Communauté, perfonne ne peur s'y immifcer publiquement, à moins qu'il ne fe faife agréger d'ailleurs, & qu'il
ne paye les quotes annuelles.
L'Art des Paifementiers confifie dans la fabricltion de
plufieurs étoffes de foie, dans lefquelles efi comprife nom~
1
�:D U
PAL AIS
D 11
PRO VEN CE.
H1
mément celle du velours: or, de ce qu'ils ne feront point
cette étoJFe, qui forme une partie de leur Art, & pour la·
quelle leur Maîtrife a été. créée, auront-ils perdu le droit
d'a1Tujerrir à leur Jurande l'Ouvrier qui en entreprendra la fabricarion ? La Mafrrife eft un tirre indivifible, elle porte fur
tous les objets relarifs au Mérier qui'a été mis en Jurande.
Un pri1'i1ege, une conceffion du Prince eft un droir de rtlere
.faculté , qui ne peùr pas fe perdre par le non ufage. Si les
Pa1Tementiers ne fonr pas le velours, il n'exifre pas moins
dans leur Corps une Maîrrife pour cette partie de leur Art;
de maniere que l'Ouvrier qui viendra porrer foh indtiHtie fu~
cer objer, fera toujours obligé de pa1Ter Maîrre pour acquérir
-la facuité de travailler. Telle ef!: la loi <les Jurandes qui
s'obferve inviolablement dans toures les villes du Royaume
où il y a des Maîrrifes créées.
L'i1rl1:irurion des Jurandes ef!: une loi pofitive &" de droit
écrit, dont il n'ef!: pas permis a'érendre ou de re1Terrer les
difpofirions. Elle ne peut être changée ni modifiée par toute
autre main que celle qui l'a créée, ejus eft abrogare, cujus eft
condere. Il eH: donc certain que les Maîtres Pafièmentiers font
en droir d'obliger le fieur Tourniaire de fe faire agréger &..
de payer les droits" de Maltrife érablis par l'ufage & par leur
Réglemenr ; s'ils ne l'exigent point, c'ef!: pour ne pas avoir
l'air de vouloir traver[er une Manufaél:ure que la Province a
Cru utile & avanrageu[e au public. Mais en parricipant par
une faveur parriculiere aux privileges de leur Maîrri[e, ,en
exerçant une faculté qui leur dl: acquife, comment TOllrniaire pourrait-il jamais évirer de contribuer aux charges
qui y font arrachées t
Taures les Communaurés d'Arti[ans fupportent une grande
parrie des charges de Ville & de l'Etar. Cef!: pour fubvenir
à l'acquittemen"t de ces charges, que chaque Corps impofe
une quore annuelle fur fes membres. Cerre cotifarion, par
rapport à fon objer & à fa defl:inarion , ef!: \lne charge publique, de laquelle perfonne n'ef!: exempt. Chacun fait que
l'immuniré de ces forres d'impoLirions réfifl:e aux premiers
"principes du droit public. La loi nous apprend que toure~
�••8
10
U RNA L " •
"
c;onventions & refqits en matie.~e d'iïnpoûtions publiques
font abufifs, &. que les Cours fouveraines, quelque refpeél:able & étendue que foit leur autorité., ne peuvent en
accorder l'exemption à perfonne.
.
"., Si la fabrication de Tourniaire dl: utile au public, il ne
faut pas pour cela renverfer un établiffement non. moins
ljtile, tel que celui d'un. Corps dont le public ne reçoit pas
de moindres avantages. L'intérêt d'un Corps a des conféqu~nces plus grandes que celui d'une Manufaél:ure qui peut
d'ailleurs (ubfi!l:er fans bleffer le droit du tiers, & en' fe
çonforma'Jlt 11 Jléquité qui ne permet pas de jouir des
profits attachés à un Métier, fans en fupporter les charges•.
L'obligation de payer les quotes annuelles des Corps nel'rpcede pas des privileges de leur Jurande, elle dérive du
droit public. Il n'dl: point néceffaire qu'un Corps d'Arts
~ Métiers ait une Jurande pour avoir le droit d'impofer
fur fes membres, parce que les Communautés d'Artifans qui.
Ile forment qu'une affociation tolérée dans l'état, fupportent les' mêmes charges que celles qui font .fondées en Lettres-Patentes ; de maniere que l'Ouvrier qui e!l: exempt de
la. MaÎtrife, parce· qu'il q'y a point de Jurande pour le Mècier'qu'il exerce, ef!: néflnmoins obligé de payer une quate,
s'il exi!l:e une affociatian de perfonnes de la olême Profe/Iion que la fienne ,& qui foient dans l'ufage de fe cotifer.
Il . Y a plus: il ef!: phyliquerrient impo/Iible de faire le
velours, fans entrepre·ndre fur la fabrication des Maîtres PalTementiers•. Il faur mouliner, organciner la foie av.ant de l'em.
ployer; le .Fabricant de velours exerce, par rapport à ces
opérations, une faculté acquife au Corps des Paffementiers,
qui réunit une Maîtrife de Moulinier; de maniere que fous .
cous les points de vue po/Iibles le Sr. Tourniaire e!l: agrége à
l:e Corps par la nature de fa Fabrique, & cette agrégation
le foumet aux irnpofitions & aux charges ordinaires. Ainu
Tourniaire s'étant fournis par fa Fabrique aux irnpofitions
du Corps des Paffemenriers, dl: o~ligé de contribuer indiftinc1e.ment à toutes leurs charges.
�D l1 Il A LAI S D Il P Il >0 v Il N C :Il;
f~9'
On répondait pour Tourniaire qu'il n.e faut 'pa'5 ,le conildérer comme Maître du Corps des Pa1fementiers, mais'
comme un Fabricant par privilege, qui n'eft point a1fujetti
à la Maîtrife, & c'ell fous ce point de vue que les Syndics.>
les regardent eux-mêmes, d'aptès le rédigé de leurs conclu-'
fions. Or des Fabricans par privilege qui n'ont ni les honneurs ni les profits du Corps, ne doivent pas contribueraux charges qui procurent ces profits; comme ils pattici- .
pent aux bénéfices de l'il1dufirie, il eft jufie qu'ils contribuent aux impolltions qu'il a plu à Sa Majefié d'établir fur
cette il1dufirie, & telle efi la teneur de l'expédient of-,
fert par Tourniaire. C'eU ainli que la Cour l'a jugé par
Arrêt du 26 Février 1779 en faveur des Apothicaires privilégiés , comme ayant gagné la, Maltrife, ou plutôt la fa. cuité d'exercer lëur Art ,; ·fans être agrégés au Corps des
Maîtres Apothicaires de cette Ville. La prétention des
Maîtres Apothicaires 'étoit en cout {emblaMe à celle des
Syndics des Pa1femenriers. Comme eux, ils .youloiènt {oumettre les privilégiés à contribuer indéfiniment à touteS le.s
charges du Corps; comme Toucniaire, ils offroienr de contribuer aux charges purement Royales, & l'Arrêt décida
que leurs offres écoient fatisfaél:oires.
.
Ici il s'agit d'une entreprife en grand, formée pat un'Né-'
gociant qui i1'ell: pas fait pour être Maitre Pa1fememier ; c'eil
'une entreprife qui ne doit éprouver aucune gêne ; le Pays'
s'enrichit de fes fpéculations; c'efi une Manufaél:ure établie
pour l'utilité publique, qui doit être exempte du paiement
des impofitions, autres que celles qui ne font pas Royales.'
Tourniaire doit payer une quote à raifon de fan rravail, mais
il ne faut pas pour.cela révoquer l'Arrêt de la Cour, qui le,
met en {auve-garde, & qui inhibe de le troubler dans fa Mallufaél:ure. Les inhibitions & défenfes contenues dans cet
Arrêt font confirmées par l'aveu que fonr les Maîtres Pa1fe-"
rnentiers, que TOllf;lÎaire peut fabriquer du velours. Al'égard
des quotes qu'il n'a jamais concefié de payer, il écoitfoumis'
à des contraintes, à des faifies; on pouvoit procéder parvoie· exécutive, fans [e pourvoir en révocation de l'Arrêr.,
�;,60 .
,f 0 U RNA L,
-r
D'aIlleurs en rendant hommage à la difpolition littérale
'des Statuts des Maîtres Patrementiers, qui leur attribue le
,droit exclufif de faire le velours, ils ne peuvent fe plaindre
qU"on ait formé une Manufaél:ure de cette étoffe,- puiCque
n'étant point en polfeffion d'en faire, pour avoir I}égligé cette
parcie de leur art, ils ne font pas fond,és à réclamer les privi,leges d'un état dont ils ne remplitrent pas les fo,nél:i9ns•
. Par Arrêt du Ii Mai 1779, rendu au rapport de M. le
Confeiller de Franc, la Cour révoqua fon Arrêt du 30 Mai
J. 77 ~, & ,condamna Tourniaire aux dépens; écrivan.r Mes~
R,ambot & Simeon fils.
J
t
,
ARR Ê
,
t
L X X 1 J.
C'efl aux Corps &' Communautés d'Arts & Métiers cf inC}f, quer le chef-d'œuvre à l'A[pirant à la Maîtrife.
Quelle- eft relatil?e'mem à cet objet l'autorité; des Juges dl2
Police!
11" E
-
EO:ublier, - Garçon MenuÎÛer de la ville d'Aix ,.
eJi/;fe préfentà au' Cbrps des' Menuifiers de la· même Ville
popr, y. ê'tre reçu, MaîÙe. n montra aux P'rieurs & Jurés
une police d'apprentitrage,. une autre de caflcellàtion. fous
1,èing: privé, & une quittance de 12., liv. payées au Cor.ps
pquI..le droit établi fyr les Apprentifs. O,n lui donna pour
"hef-d'œuvre yne porre de garde-robe & un parquet. EituJi>lier refufa ce chef-d'œuvre, & fit affigner les Syndics
pardeva,nt les Lieutenans-Généraux de Police, à l'effet qu'il
leur fût enjoint de convoquer le Çorps pardevant eux à teliaur , lieu &. heure qu'il leur plairoit fixer, pour lùi être
donné un chef-d'œuvre;, autrement & faute par ,eux d'af.,
[embler le Corps, que le chef-d'œuvre' lui feroit ordonné en,
leur préfence par .les a,nciens Jures qu'il leur plairoit commettre:, pou,r, J~ chef-d'œuvre fait & due ment par eux exa-,
mioé' 'i être. procédé à fa. réceptioll aux formes, ordinaires.
A N
Le.
1
�D U
PAL AIS. D E l ' R 0 VEN C E.
~ 6l
Le Bureau de Police lui accorda l'injonél:ion requi(e.
. Les quatre Jurés, le Principal & les Auditeurs de compte,
---iIui (ont ordinairement commis pour donner le chef-d'am·
vre, (e rendirent au Bureau de Police. Eftublier (e plaignit
de ce qu'on lui avoit ordonné un chef-d'œuvre qui (urpa1foit
(es talens , & demanda qu'on lui en indiquât un autre plus
facile & moins compliqué. Les Prieurs, du confentemen.t
du Bureau de Police, lui donnerent à f.lire une porte',d'en-coigneure telle qu'elle avoit été donnée à plufieurs autres
Apprentifs. Le chef-d'œuvre fut agréé par toutes les l)arties.;
il n'étoit plus qtleftion que d'en tracer le plan; )es Prieurs
(e ciifpofoient à le tracer ,; Eltublier s'y oppofa, & prétendit
être en droit de faire cette encoignure à (on gré & {ùivant
le plan qu'il Ce traceroit à lui- même. Sur les démêlés
qui s'éleverent (ur ce point, le Bureau , attendu le de.J]èin
marqué par les Prieurs de vouloir traiter Eftublier avec trop
de rigueur, commit d'office quatre anciens Jurés pour affigner à Eftublier un chef..d'Oiuvre, & ordonl)a que le livre
de réception du Corps relt~roit tiere le Greffe jufqu'à ce
qu'il en eût été autrement ordonné.
Les quatre anciens Jurés s'a1femblerent au Bureau de Po.lice; deux d'enrr'eux donnerent pour chef-d'œuvre à Eftublier une pone d'encoignure conforme au plan & pr.ofil
de celui qui avoit été donné à Arnaud par Délibération .d\!
17 Juin 1776; les deux. autres revendiquerent les droits d!!
Corps, & dirent qu?attendu qu'il exiftoit une Délibération
prife par le Corps, ils ne croyoient pas pouvoir ordonner le
chef-d'œuvre, & qu'ils délaiffoient aux Jurés modernes de
l'ordonner eux-mêmes. Les Lieutenans- Généraux de 'I)olice
rendirent une Ordonnance, par laquelle, (ans s'arrêt~r à l'opinion de
qp'ils rejetterent comme indécenre & atten.catoire à la précédente Ordonnance, ils ordonnere)lt à Eflublier le chef:d'œuvre propofé par les deux a\)rres anciens
Jurés, laquelle Ordonnance (eroit exécutoire pon'obltant op.pofirion ou appellation.
Les Prieurs modernes appellerent de ce J ugl:menr pard.evant la Cour. & demanderent le tout en étar. La o"r..
B b bb
�.
~62
Jou RNA L
ayant été renvoyée en Jugement, on difoit pour eux qu'une
Délibération prife dans un Corps légitimement établi, forme
un titre légal. La Délibération qui a impofé à Eftublier le
chef-d'œuvre eft-elle· exceffive, injufre, trop rigoureufe? Il
devoi.t commencer par l'attaquer en Jufrice pour la faire ré~
vaquer. Ce 'n'dl qu'après ce préalable qu'il pouvoit folliciter
une nouvelle Délibération, portant im pofition d'un nouveau
chef-d'œuvre. Les quatre membres particuliers qui ont pris
d'un autre côté une Délibération adverfative de la premiere ,
n'ont pu l'anéantir, parce qu'il n'y a que le Corps affemblé
qui puiffe révoquer les Délibérations qu'il a prifes.
Le droit d'ordonner le chef-d'œuvre n'appartient qu'aux
Jurés modernes ; c'efr à eux à qui il faut s'adreffer; ils ont
une efpece de J urifdiélion d'autant plus légale, d'autant moins
"fufpeéle , qu'ils la tiennent du Corps lui-même, & de chaque membre en particulier. L'éleélion aux· charges d'un
Corps fe fait fous les yeux & fous l'autorifation de la Police,
qui donne à cha'que Officiér nommé le pouvoir de gérer publiquement la fértcrion qui lui efr confiée. Chaque Officier élu
dans cette forme authentique, a, aux yeux du public, un caracrere d'autorité qui captive l'opinion des citoyens, & fixe
Couvent la décifion des Magifrrats. A plus forte raifon les
mêmes Offièiers onre-ils & doivent-ils avoir, dans l'intérieur
du Corps dont ils exercent le pouvoir, & envers chacun des
membres qui le compofent, un droit de Jurifdiélion & de
reffort dont ils ne peuvent être dépouillés, fi ce n'eft dans des
circonftançes graves & pour caufe de malverfation. L'ufage
qui ti~nt lieu de regle a même fait établir, qu'en cas d'empêchement· ou de fufpicion des Jurés ordinaires, ceux de
la précéde"nte année confervent le' même degré' d'autorité.;
ils l'exercent en fupplément & par forme. de fubrogation
légale aux Jurés ordinaires.
Par quelle efpece. d'affecration les Lieurenans - Généraux
de Police ont-ils fait appeller pour le chef-d'œuvre dont s'agit
quatre membres du Corps qui n'étoient ni les Jurés modernes , ni même les Jurés 'anciens? On a choifi des perfon-'
nes qui n'avoient aucune' e.fpece d'aptitude légale à la t:hofe.
.
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DU
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PALA-IS
-D:!!
PRovE'NeE.
163
On auroit dû s'appercevoir qu'on defiituoit cout à la fois du
pouvoir qui leur éroit confié, & les Jurés modernes, &
les Jurés anciens. Les Lieutenans-Géuéraux de Police, dé
leur propre autorité, ont transféré à d'autres le pouvoir qui
n'appartenait qu'à ceux-ci.
Lee Lieurenans - Généraux de Police fe' font arrogés le
droit de vuider un partage d'opinion qui n'écoit point de
lenr reffort. Ils avaient affemblé quatre membres du Corps
des Menuifiers pour prononcer fur l'efpece de chef-d'œuvre
qui étoit à affigner à Efiublier. Deux de ces membres pen·
fpient d'une fac;on, & deux penfoient d'une autre. Il falloit
choifir un tiers. Or à qui appartenoit le choix? Ce ne pouvoit' être qu'à ces quatre membres e"n qui le pouvoir du
Corps l'élidait comme Experts jurés, ou mieux encore au
Corps lui-même.
L'Edit de création des Lieurenans - Généraux ode Police
qui leur attribue la connoiffance des éleél:ions des Maîtres
jurés des Corps d'Arts & Métiers, des brevets d'apprenti-ffage & réception des Maîtres, ne leur donne qu'une connoiffance d'illfpeél:ion de l'aél:ion, & de Jurifdiél:ion en cas
de contefiation. Or on ne peut envifager comme conteftation un partage d'opinion entre quatre membres d'un
Corps. On doit dans ce cas recourir à un tiers qui prononce; & fi fur l'exécution de leur décifion il furvicnt
quelque diflerent , les Lieutenans-Généraux de Police font
alors compétens d'en-connoÎtre ; mais ils ne pou voient pas
de .leur place décider de la qualité de l'un ou de l'autr~
chef-d'œuvre. C'étoit un point de fait fur lequel il ne leur ap-partenoit de fiatuer qu'après des. vérifications. Ils n'avaient
pas le droit de fe propofer comme le tiers ju,ré; ils n'en
avoient pas même la capacIté. Cette qualité érait du choix;
des Jurés eux-mêmes, & mieux encore du choix du Corps
aifemblé.
.
On répondoit pour EHublier que dans le Droit il .n'en
_ell pas des Délibérations comme des Jugemens ; lenr contrariété ne fait pas un moyen de révocation ou d'annihilation. Les Délibérations n'étant que le réfultat des volontés
B bbb :2.
�'-
,64
Jou RNA L
des Corps, comme ces volontés font variables, les Délibérations le font auffi, & rien n'empêche que fur mille
confidérarions qui fe préfentent, on ne prenne une Délibération différenre de celle qui avoit été précédemment arrêtée ,fur-rout lorfque ces Délibérations ne rouchent point
au régime du Corps, & concernent un particulier à qui
il faut accorder plus ou moins d'indulgence, un chef-d'amvre plus ou moins facile. A cet égard, le Corps peut varier
autant qu'il lui plaît; il n'y a rien en cela qui indique contradiél:ion, qui mette le moindre embarras dans l'admi'nill:ration du Corps.
. Dans le fait, on détibére le 10 Septembre de donner à
Ell:ublier un chef-d'œuvre qui eH très-difficile: il fe pourvoit aux Juges de Police j il demande que le Corps fait
affemblé devant eux pour lui affigner un nouveau chef-d'œuvre. Les Juges de Police indiquenr l'affemblée au 16 j elle
a lieu au jour indiqué j lé Corps donne à Ef1:ublier un
chef-d'œuvre moins compliqué; mais au moment où il faut
rédiger la Délibération, le plus grand nombre "<les Délibérans ne veut pas l'adopter, & demande l'exécurion de la
premiere Délibération. Dans ces circonHio\nces n'eH-il pas
abfurde dt; fe plaindre de ce que les Lieutenans-Généraux
de Police ordonnerent que par des Jurés anciens qu'ils
'nommerent , un chef-d'œu\'re ferait donné à EHublier ?
La Délibérarion du 10 éroit réformée par la Délibérarion non tranfcrite, mais atteH:ée par les Lieuterlans-Généraux de Police dans leur procès-verbal j elle l'érait encore
-par leur Sentence : car quand même le· Corps n:auroit pas
confenti à donner un nouveau chef-d'œClvre à Ell:ublier , les
Juges de Police auraient eu le droit d'ordonner qu'il lui en
fût donné un autre.
Les Juges de Police n'ont point été abftreints à choifir les
Jurés de l'année précédente, parce qu'il n'y a aucune Loi qui
le prefcrive. Les Statuts des Menuifiers ne difent autre chofe,
flnon qu'il (era élu chaque année un Principal, deux Jurés,
& quatre anciens qui donneront les chefs-d'œuvre j il n'a pas
prévu le cas où les deux Jurés & les quatre anciens Maîtres
�DU
PAL AIS
DE
PRO VEN C E.
565
feroien,t fufpeél:s; il'n'a pas même dù le prévoir, parce que,
pour .l'alIignat d'un chef-d'œuvre t:lit dans le Corps ( ce, qui
tombe en adminiHration) il ne peut y avoir de récufation' ni
de fufpicion. Ainfi lorfque les Jurés fe comporrent jujuHement,
& qu'il faut les remplacer pour la réception d'un Afpirant,
le Juge peut cilOiiir tels anciens Jurés qui lui parôiflènt les
.plus aptes. Puifque les Jurés qu'il eft obligé de nommer
d'office ont eu la confiance du Corps, pourquoi n'auroientjls pas la fienne dans un fait où la mauvaife conduite du
Corps l'oblige à interpofer fa furveillance? Dès qu'il n'y a
ni une raifon grave, ni une loi qui s'oppofe à la liberré du
chpix , on ne peut, en réclamant des regles étrangeres au
Corps des Menuifiers, & parriculieres aux Eitimateurs, créer
un moyen de nullité; & moins encore un moyen de furféance.
La même quefl:ion fut décidée en fa\'eur, du nommé
l'oHe! contre Je même Corps des Menuifiers par l'Arrêt
du, i6 Août 177 l, qui les déb(;lUta de la furféance à l'Ordonnance de Police qui avait nommé deux Maîtres du Corps,
[ans examiner s'ils avoient été Jurés ou non pour alIigner un
chef-d'œuvre à Pofl:el.
M. l'Avocat-Général de Califfane obferva que les J ugemens
en fait de police font exécutés nonobHant appel; l'Ordonnance ne Ie contente point de cette difpofition générale &
poiieive , elle défend d'accorder de furféance en pareil cas
(arr. 16 du tit, 17 de l'Ordonnance de 1667.) Mais tous'
les Commentateurs nous expliquent cet arricle ; ils diilin_
guent les califes de Police en elles-mêmes, de celles qui ne
{one qu'attributives de Jurifdiél:ion. Quand il s'agit de' fait
de'Police, point de difficulté; mais à l'égard de cc qui concerne les Métiers, dit Jouffe, comme font les différens qui
jûrvimnent mtre deux Communaulés ou Corps de 1l-1étiers, OLt
'entre une Communauté & un de [es IVlembres, ou enlre U/l
Matlre & un Apprentif ou Compagnon, & autres conteftations
[emblables, il faut diflingller s'il s'agit de l'exécution de quel'lue Slatut ou non; dans le premier cas, comme les parties [ont
fondées en titre, il eft conjlam que la Sentence ren.due {ur ces
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conteflations doit ~tre exécutée par provifion, autrement il faut
s'en tenir à la regle générale, & les Sentences ne peuvent
s'exécuter provifoirement.
.
Si Ettublier, qui fe préfente pour être reçu Maître Mçnuilier, a rempli les préalables qui doivent néceffairement
précéder
réception; s'il n'ell: arrêté que par les vexations
de fon Corps; fi les Lieurenans.. . Généraux de Police [e [ont
bornés à décider que ces préalables indifpen[ables ont été
remplis, il n'efl: pas douteux que l'Ordonnance qui a prefcrit fa réception, ne doit point [ouffrir de retardement; mais
fi El1:ublier n'en eil: pas à ce dernier degré qui ne fépare
fa réception que d'un point; fi c'ell: un Ouvrier bien plus
rapproché encore de [es Compatriotes que de fes Maîtres,
qui n'a fait encore aucun pas réel vers 'fa réce ption , qui n'a
rempli aucune des formalités qui doive.nt la précéder, qu'il
faudrait tirer rout-à-coup du milieu du Compagnonage pour
l'admettre dans le Corps, qu'il faudroit y tranfporrer , pour
ainli dire, plutôt que l'y faire entrer; qui enfin dans ce moment n'a pas plus d'autre droit à être du Corps que celui d'avoir demandé d'y être admis, la' [urféance [e préfenre bien
différemment.,
Deux formalités effentielles précedent toute réception:
un chef-d'œuvre donné par le Corps ou par le délégué du
Corps; un chef-d'œuvre recetté dans la même forme .. Il
femble qu'El1:ublier ne préfenre ni l'une ni l'aurre, ou plutôt
le chef-d'œ.uvre qu'il préfente n'a été donné que par les
Juges de Police & n'a étê recetté que par eux. D'après cette
douhle infraél:ion aux regles, le Corps a-.[-il eu fi grand torr
de repréfenter que fi cerce Ordonnance pou voit exiil:er, fi
clle pouv6it être exécutée provifoiremenl, le Corps ne feroit
plus réellement qu'un vain fantôme ~
Quelle cil: l'aurarité des Juges de Police fur les Corps
d'Arts & Métiers, relativement fur-rour à la réception des
Maîtres? Cette autorité a POUt bafe & pour principe de
faire obferver aux Corps leurs propres Statuts & Réglemens ,.
à en empêcher les infi-a.:tions, à les ramener à leur propre
r.egle lor.[qu'ils s'en. écartent, à rév0'lu~r les délibérati.or:ls,·
ra
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
,67
contraires à leurs Réglemens. Ce n'efi que fous ce pOint
de vue qu'on peut la concilier avec la vigueur réelle, toujours exilhnte , toujours refpeél:able des Statuts du Corps.
Le Corps avoit d'abord donné pour chef-d'œuvre à Eftublier une porte d'armoire & un parquet; la délibération
étoit éçrite, elle exifioit dans route fa force. Eroit-elle injufie ? il falloit qu'Efiublier en demandât la réformation;
c'eft-à-dire, le chef-d'œuvre éroit-il trop fort, trop rigou. reux, trop difficile, marquoit-il de l'humeur? c'éroit ce qu'il'
falloit décider d'après les Statuts &' l'ufage du Corps. Une
premier~ Ordonnance des Lieutenans-Généraux de Police a
convoqué le Corps; )'1 légitimité du chef-d'œuvre y a été
difcutée; néanmoins, foit juftice, foit complaifance, les Syndics, fans révoquer la délibération, conviennent de changer le
chef-d'œuvre. On propofe à Ell:ublier une encoignure; mais
comme une encoignure & tout ouvrage de Menuiferie peut
.être 'très-difficile par les montures, les ornemens & la forme,
il ne fuffifoit p'lS de propofer une encoignure, il falloir la
déterminer.
Que devoient, que pouvoieqt faire les Lieutenans-Géné'raux de Police d'après le principe établi? Il Y avoit contertation, non fur le chef-d'œuvre, mais fur le modele en
profil, ou déligné par écrit; il falloit examiner l'ouvrage,
& prononcer que le c11ef-d'œuvre feroit donné d'une maniere ou de l'autre; il falloit, non cherc.her à faire naître
une conteftation, mais prononcer fur celle qui exil1:oit. .
On a vu ce qu~éroit le Trihunaldes Lieutenans-Géné.raux de· ·Police par rapport· aux Arts & Métiers. Les
Corps, par leur qualité de Communautés, ayant des Chefs,
des Statuts, des Réglemens, des Regifires , ont une adminil1:ration , une police intérieure fur les membres; ils le
forment pour ain.li dire à eu.x-mêmes leur premier Tribunal,
ils ont Une J urifdiél:ion d.e police, ils fia rue nt , ils prononcent, ils admettent", ils rejettent; l'.obfervation de leurs
6taruts eH: d'abord confiée à eux feuls, puis à la Police;
les Candidats font-d'abord examinés & jl,)gés par le premier
Tribl\A'II; toutes les prérogatives font réelle~, les honneurs
/
�56S
Jou • ~ A L
,ont leur propre exiilence, i'1s les tiennent de leurs Staturs ;
le Tribunal de· la Police eil pour ainG dire le!!r Tribunal
d'appel, de réformation & de [econd degré.
Auffi l'on ne doit pas être étonné que ces Ordonn'ances
[oient ord inairement exécutées provifoirement; c'eH: peutêtre fous ce poînt de vue, & en les corifidérant comme
Juges d'appel, que ce 'privilege' leur a été accordé; on a fuppofé que l'Ordonnance, ou plut6t la Délibération étan t
cairée ou confirmée par ce Tribumll, toutes les préfomptions
éroient en faveur de cette Sentence, & que dans des marieres de la nature de celles qu·i pouvoient en être Fobjet ,
l'encouragement des Arts ne devait poine être fubordonné
à l'opiniârrété des Plaideurs. Sous ce, point de vue, le TribUllaI de· Police ne feroit peut-être' pas incompétent; mais
dans cette caufe ils n'ont rien eu' ni li cairer ni à réformer;
Eftublier n'a été ni examiné, ni jugé par fon Corps ; ce
premier Tribunal· n'a été appellé à la, Police que pourêrre
privé de- cous fus droits, que pour voir v·ioler tous fes privileges. Il n'a point prononcé [ur la réception d'Eftublier-;
i! avoit ordonné un chef-d'œuvre, & la d~libération· fub{jfte ;
i-\ en vouloit un [econd [ur la priere du Candidat, mais jl
vouloit le· donner Celon l'üfage qui lui efi propre. Les J Ilges de Police n'ont p-oint prononcé, fur cet ufage,' ils n'one
point: enjoint au Corps de délibérer, ils en ont confié le
foin à quatre particu}iers à qui.ils en ont donné le pouvoir
contre toutes les r-egles, qui même ont été divifés entr'eux·,
lor[que les Lieutenans-Généraux de Police ont pris fur eux
d'ordonner ce chef-d'œuvre; ce font donc eux-mêmes qui
l'on.t ordonné ~ ce, [one eux qui, oeit voulu le recetter ; ils fe
{OBI: conduies, ils ont prononcé comme les premiers Juges
de la matiere, comme les premiers Juges du Candidat; ils
ont donc ufurpé les droits du CotpS ; ils devoient faire ob{erver les Statuts; ce font ces Statllots nlême qu'ils ont enfreint de la maniere la, moins .équivoque.
Le Tribunal· de la Police n'eft point ici comme Tribunal.
d'appel, c'ell:-à-,dire, fous le feul titre qui auroit pu le rendre
cempétent; il dl; à la· p-lace.. du Corps" à,laplace des Jurés,;
,
. ,
il
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
~69
il a ufurpé leurs fonaions, & il fubfille une Ordonqance de
Police abfolument contraire à une délibération non attaquée.
Il y a donc incompétence, non pas, fi l'on veut, incompétence de droit & de perfonnes, mais incompétence de
fait & de fonaions; cette incompétence ell: bien plus fenfible encore dans l'Ordonnance qui a vuidé le partage des
Menuifiers.
M. l'Avocat-Général conclut à ce que faifant droit aux
Requêtes des Menuifiers , il feroit furfis aux Ordonnances de
Police, & pourfuivi fur l'appel.
Arrêt du 18 Juin i 779 conforme àux conclufions,. prononcé pal' M. le Préfident de la Tout-d'Aigues, plaidant
Mes. Gailler & Simeon fils.
-=====--==~===~,.
-
'f'"" _ _
ARR Ê 'F
L X XII J.
Procédure prift fur la rémiffion d'un Mémoire injurieux, faite'
en vertu d'une Délibération d'une Communauté.
"1
D
le Confeil de la Communauté de Camps, tenu'
" le 28 Janvier 1776, on. délibéra de ra maffer tous les'
faits qu'on imputoit à Me..•. ;.. Lieutenant de Juge du lieu.
On fit figner les plaintes à ceux qui favoient figner, & les'
aurres firent leur marque. Tous·les faiti furene inférés dans:
un Mémoire qui fut lu & approuvé dans un. Confeil général'
tenu le 11' Février, & il fut délibéré de le préfemer au Dé-·
puté du Chapitre St•. Viélor ,. Seigneur du lieu..
Le· Mémoire fut remis par le Chapitre au Lieutenant de'
Juge. On y lifait ~ qu'il étoit' ifJu de la lie du peuple, qu'on'
ne pe[era point fur la dépravation de [es mœurs,. la pudeur.
la décence & la charité l'e défendent également; le fieur . ..••
enchatné par [on· go(a naturel pour les exces, S:Y e{lliv.ré dans"
toutes les occafions fans ménagement ni ré[erve:, & a été toute:
jà vie un (ujet de fcandale & une pierre d'achoppement pour:fis concitoyens., en. aucorifant parmi. eux par fan exemple.,.le.>:
ecce.
i
!
ANS
�)70'
Jou RNA L
défordres les plus licentieux. Les gens. de tout Age, de tout
fexe , de toute condition fe réuniraient à l'envi pour attefter
unanimement cette vérité. On défie le fieur • ••.•• lui-m~me
de la démentir. La haine la mieux méritée, le reffentiment
le plus jufte, la vengeance la plus douce ny mettront pas
la plus faible nuance. Des cœurs honn~tes & généreux font
inaccejJibles, & ne s'ouvrent point à des fentimens fi bas.
L'adminiftration du fieur Viguier eft la plus dure la plus impérieufe, la plus extravagante qui fût jamais. Comment, depuis qu'il eft et! place, a-t-il exercé la Police? Avec une verge
de fer, en tyran cruel, en defpote ignorant & fanatique,
en vrai ennemi de la patri; & des Seigneurs m~me dont il
a l'honneur d'Üre le repréfentant, & que malheureufement il
n'a repréfenté que de la maniere la plus propre à les défigurer & à les faire haïr. La violence & l'injuftice , foutenues
du plus fol orgueil, ont été conftamment les mobiles dangereux & la regle de fa conduite en tout genre, &c. On rapporte enfuite les faits.
.
- Sur l'annonce de la rémiffion du Mémoire & de l'information que le Lieutenant de Juge allait faire prendre, les
Maire:'Confuls & -les principaux habitans lui tinrent un aél:e
le 2i- Novembre 1776, par lequel ils lui déclarerent que
c'était fans intention formelle d'injure , & dans. la feule
vue du bien public qu'ils avoient préfenté le Mémoire au
Chapitre j qu'on le lui avait confié à titre de dépôt facré &
inviolable, & que fur la connoiffance que l'on avoit qu'il
fe propofoit d'en faire la matiere d'une information, on
l'interpellait. de ne pas dilIimuler dans [a Requête, que les
faits qu'il prétendait injurieux n'étaient venus qu'à l'appui
de la demande en deftitution de fa place, & que ces
mêmes faits ne pouvaient fournir qu'une aél:ion en injonél:ion
à juftifier, &c.
Le Lieutenant de Juge préfenta [a Requête de plainte le
26 du même mois; il denia'nda l'information littéraire & par
témoins. Sur la procédure il intervint divers décrets d'ajournement perfonnel & d'alIigné. Les accufés, prêterent leurs
l;"éponfes , & fur les, Requêtes refpeél:ives de.s Pa,rties, le.
�DU
PALA").S
DE
PROVENCE.
pl
Lieutenant de Brignoles rendit Sentence le 8 Mai 1778, &
mit les accufés hors de Cour & de procès; il ordonna le
bilfement de queiques mots du Mémoire, lequel ferviroit
néanmoins de dénonciation au Procureur du Roi contre
Me
.
Appel de la part du Lieutenant de Juge. Il foutenoit que.
s'il s'agiffoit d'une Communauté qui elI[ commis le délit,
on pourroit dire que, par des motifs d'ordre public & de
faine police, la voie de l'accufation leur efi interdite contre
les Officiers de Jufiice, contre les Curés, & contre les autres perfonnes qui exercent des fonétions publiques. C'el!:
la Doétrine de tous les Auteurs, & notamment de Julius
Clarus, dans fa Pratique Criminelle, liv. l , §. dernier, quo
14 , n. 2.4; de Guipape, quo 164. Delà, les Arrêts nombreux rendus par la Cour & rapportés par Boniface, tom.
I , liv. I ,tit. l , n. 2.0, & par Duperier, va. Communautés;
par Buiffon , fur le titre du Code ne Fifcus -y-e/ Refpublica , &
par Mr. de Reguffe , tonl. l , pag. 2.81. On connaît la bafe
de cerre Jurifprudence, qui n'admet la plainte des Communautés que dans certains cas: Reboul obferve dans fOIl
Traité fur les Matieres Criminelles, part. 2., ch. l & fuiv.,
que l'aétion ne peut pas compéter aux Communautés dans
les délits ordinaires & privés, parce qu'on ne peut être accufateurs eIi France, qu'autant qU'ail veut venger fuam au!'
fuonim injuriam.
Les mouvemens des Communautés font trop fauve nt dirigés,
par la haine, le reffentitnent & 'les paflions particulieres de'
quelques dominans qui les gouvernell[ , & il el!: effentiel de
ne pas leur ouvrir trop légérement la voie des plaintes & ,
des acc\lfations. Cette voie préfente des rifques à ceux qui
s'y engagent pour leur propre compte. Mais qui pourrait
contenir les Adminifirateurs ou les dominans des Communautés, fi la voie de la plainte leur était ouverte au nom de:
la Cité? Tout homme public, tout Officier de JuHice qui·
n'aurait pas le bonheur de plaire à ces petits defpbtes qUI'
tiennent taus les petits lieux fous la main, deviendroit bientô.t l'objet d'une plainte portée au nom de la Communauté"
CCCC2..
�~72.
Jou
RNA L
& qui ferait alimentée & foutenue avec les deniers de la
veuve & de l'orphelin. On ne verroit au Palais que des caufes de cette efpecequi feroient préfentées & foutenues avec au. dace, parce qu'il n'ell rien de plus intrépide que l'efpoir de
l'impunité perfonnelle, & l'affurance de fe confondre ,avec
une foule de têtes qui partagent la peine de la condamnation.
, La caufe aétuelle en fournit un exemple frappant, conti.nuait le Lieutenant de Juge, non que Je libelle doive être
regardé, comme l'ouvrage de la Cité. Cela ne peut fe foutenir
ni en fait ni en droit; mais on y trouve une alfociatiol1
faite dans le principe par le moyen .d-es lignatures cimentées
& foutenues par l'intérêt & la néceffité d'une défenfe commune.
Comment le Confeil de la Communauté a-t-il été alfemblé? On a fait une invitation générale & publique par proclamation à tous les habitans pour venir ligner & fournir des
griefs de plainte contre Mc••.... Il eil: prouvé par la proçédure que ceux qui vouloient fortir fans figner, n'en éroient
pas les maîtres; & qu'il fallait figner ou faire fa marque.
Quelques-uns s'y prêterent par foiblelfe; les autres, & le
plus grand nombre, de volonté, comme ennemi de l'a pp èllanr. Peut-on préfenter avec décence le libelle comme un
ouvrage de la Communauté? Peut-on dire que Me.' .•••
devoit diriger fa plainte conrr'elle ? D'abord en droit une
Communauté n'outrage pas. Vingt ou trente habitans qui
fe liguent pour diffamer un ciroyen, n'en lienl pas quatre'
cents qui font étrangers au fait, & qui n'y prennent aucune part. S'il exiH:oie une délibération contenant les mêmes horreurs que le libelle, on pourrait en, dem,ander Il<
biffe ment contre 'la Communauté; mais s'il y avait une information à prendre, on pourroit aller aux auteurs de l'injure perfonnellement, & les 'faire punir corn me s'étant fervis
mal-à-propos du nom de la Communauté. On ne tl'Ouve au
ças préfent aucune délibération ; on voit une convoc~tion
attentatoire, fcandaleufe, féditieufe, faite au nom des Confuis; une invitation 'publique, générale à tous les ennemis
& détraétenrs de Me••••• ; une alfemblée tumultueufe, illé·
�DU
PAL A'[ S D li:
PRO VEN C E.
~73
gare, fans aurorifation, des lignatures fournies par la paf.,
fion ou extorquées par la force, & finalement un mouvement
délibéré, ptéparé d'avance contre la naiffance, les mœurs
& l'exercice d'lm Officier de Juflice qui fe trouve en place
depuis- 30 ans, & qui n'avoit jamais eu la moindre affaire
perfon nelle.
Qui peut reconnoître à tous ces différens ttaits , un ouvrage de Communauté? Qui n'y treuvera pas au contraire
l'expreffion vive, frappante, énergique de la haine, de la
paffion & de tous les emporremens que des principes auffi
funefles peuvent produire? Il n'y a pas feulement o'utrage
dans le libelle; indépendamment de ce libelle, l'injure,
l'atrocité, 1'auçjace, le delir effronté de diffamer, tous ces
vices forrent avec évidence & plénitude des démarches dont
on vient de préfellter le tableau, & dont la preuve eil: autant é!ablie fut la procédure que fur l'aveu des querellés
eux-mêmes. Ainli l'Appellant n'a pas dû diriger fa plainte
contre la Communauté; il auroit pu s'en difpenfer, dans
le C<lS même où les atrocités du libelle auroient été conlignées dans une délibération. On ne pourroit voir dam; un
titre de cette efpece que la paffion de quelques particuliers,
& 'v)bus qu'ils auroient. commis dans l'exercice des fonél:ions
municipales; mais l'outrage n'en feroit pas moins perfonnel
à fes auteurs : on ne le rendroit jamais revedible fur la
CommLnauté; la Juflice n'auroit jamais à traiti~r direél:ement
& perfonnellement qu'avec les auteurs de ce mouvement,
qu'il feroit impoffible de prendre pour un vœu de Cité; ici
les circonflances font telles, que l'aél:ion eût été très-illégalement dirigée contre la Communauté, parce que la convocation, l'affemhlée , les violences, les manœuvres, le
libelle & les lignatures forment tout autant d'attentats privés, particuliers qui n'appartiennent pas à la Communauté,
& fur lequel cette derniere n'eût pas manqué de fe faire
. relaxer, li Me•••••• eût dirigé fa plainte contr'elle.
Les accufés prétendent que le Mémoire ayant été remis
au Chapitre St.,Viél:or à titre de dépôt, Me••••.. ne peut
point s'en fervir pour en faire la mariere d'une plainte. pans,
�\
~74
Jou
RNA L
ce Mémoire on le diffamoit. Falloir-il bien qu'il eût 'le
moyen de fe défendre; le Chapitte devoit lui donner connoiifance de la dénonciation qu'on propofoit contre lui, &
le mette à portée d'en démontrer l'horreur & le menfonge.
Ell:-il propofable dans ces circonll:ances de prétendre que
le Chapitre St. Vitl:or ne devoir avoir le libelle qu'à titre de
dépôt & pour le rendre? L'eût-il reçu à ce rirre? Eût-il
voulu fou mettre fon Viguier à la honte de la diffamation,
& lui interdire les moyens de réparation pour lè'cas où on
l'auroit mal-à-propos diffamé? En remettant le libelle, le
Chapitre St. Vitl:or a prouvé fuffifamment qu'il ne l'avoit pas
reçu à titre de dépôt j il devoit fans contredit proretl:ion
aux habitans de Camps; mais il la devoit également aux
Officiers de fa J uflice. Il falloit dell:ituer ce dernier s'il étoit
coupa5le; s'il étoit innocent & cruellement perfécuté, iL
falloit, dans l'impuiifance de le réparer, lui fournir les
moyens convenables pour y parvenir. Un Mémoire abominable avoit compromis l'état & l'ho,nneur de ce citoyen.
Ce Mémoire avoit été lu dans les cercles; le bruit en étoit
répandu dans toute' la contrée, & ceux qui ne l'avoient pas
lu , favoient all moins que Me.•••. avoit été préfenté aux
• Seigneurs comme un fujet mal famé, que l'ordre & l'ini:éfét public devoit faire tirer de fa place. Le Chapitre St.
Vitl:or a fen.ri que la non-dell:itution de 'cet Officier n'étoir
dans les circonfl:ances qu'une réparation tres-imparfaite, &
qu'il lu·i falloit de plus les fatisfatl:ions les plus éclatantes•.
Il a fenti qu'il étoit dans l'impuiifance de les lui donner,.
qU.e la réparation de cet outrage n'appartenait qu'aux Tribunaux ; il a dû par juHice le mettre au cas de la demander•.
Le Mémoire dont s'agit réunit roures les circonfiances
dans leJquelles il faut févir exemplairement. rO. Le libelle
dt devenu public. 2.°. Il a été {igné, excité, préfenté dans
des circonHances & par des moyens qui le rendent trèscrim.inel.. 3°. Tout le tiifu de l'ouvrage préfenre les ttaits
d'une haine effjenée & les plus coupables emporremens. 4°.
Il efl: le produit d'un moùvemenr rumultueux, excité par'
quelqu.es ennemis connus.. ~,o •. Il ell: préfen.té par des per,.
�DU PAL AIS
D Il
PRO V Il Ne B.
~7)
fonnes qui n'auraient pas même été recevables 11 accufer.
Dans cet état, les faits fu/fent-ils vrais & non' calomnieux,
les Auteurs & les Signataires du libelle devroient être punis.
La délation étayée fur· une preuve à faire , fur des témoins
à entendre, n'eft au fonds qu'une odieufe diffamation. On
difcuta enfuiee les chefs de plainte contenus dans le MémOIre.
On répondoit pour les accufés qu'il ne compétoit à Me.
~ ••. aucune aél:ion d'injure; qu'il ne lui était pas feulement permis de prononcer le mot de calomnie; que le
Mémoire étant l'ouvrage du Confeil général de la Communauté, il n'avoit d'aél:ion que contre la Communauté, & que
même jamais le Mémoire n'auroit dû faire la bafe d'une
plainee en J uftice. Me• . . . • avoit fait faifir les poids &
mefures de la Communauté. Ce n'eft pas malo anima qu'un
Corps de Communauté peut avoir des mefures inexaél:es. Si
le temps a exercé fur elles fon empire, elle ne peut pas
vouloir en méfufer; on ne peut faifir les mefures de la
Communauté que pour les faire vérifier & non pour s'en.
emparer, les garder & fubftituer au public une autre meCure qtte Me..•.. favoit plus avantageufe. Nul doute par
conféquent que la Communauté n'ait pu, n'ait dû, & qu'elle
n'eût un prétexte très-légitime de s'adre/fer au Seigneur, de
lui demander raifon des procédés de Me..•.• & fa deftitution. Or un Mémoire dre/fé dans de pareilles circonftane.es,
& confié au Seigneur, ·peut.il être réputé injurieux & fournir matiere à aél:ion d'injure? Faudra-t-il qu'une Communauté fubi/fe toutes les injuftices d'un Juge qui méconnoît
tous les devoirs de fa place, ou que fi elle s'en plaint à fon
Seigneur, on lui dife il y a injure & calomnie? Il Y a injure, parce que les faits à la faveur defquels on demande la
deHitution font injurieux; & il Y a calomnie, parce que
l'on n'en a pas une preuve écrite.
La Communauté préfentant fon Mémoire au Ch~pirre Sr.
Viél:or, & l'appuyant fur des faits graves qui devoient conduire à la deH:iturion de Me.. " •• 1. avoit tout autre objet
que celui d'injurier; elle avoit un objet plus légitime à rernj
�JOUR:NAL
',7 6
plir, & les faits prétendus injurieux n'étant qué des moyens
legirimes de la conduire à fon but', l'aél:ion d'injure ne
compéroit plis.
Qu'dl-ce que la calomnie? C'eIl: l'imputation d'un fait
fciem ment faux, calumniator eft is qui fciens falfam accufationem intendit. Cette définirion fera, fi l'on veut, fufceptible·
de la diHinél:ion que l'on fair entre la calomnie évidente &- la calomnie préfumée j mais 'toujours eH-il vrai de dire que
s'il n'y a calomnie préfumée que par défaut de preuve, &
calomnie évidente lor[que le fait eH prouvé faux, .il n'dt
pas poffible qu'on dife, il Y a calomnie, lorfqu'il n'a pas
é.ré feulement permis d'adminiO:rer les preuves. Il. faut don~
en venir à ce point; il n'eO: pas poffible de dire qu'il y a
calomnie tant qu'on n'aura pas mis l'accufateur 11 même cle
prouver ,parce que le Juge qui ne peut pas favoir fi la
preuve des faits fera ou ne fera pas rapportée ~ ne peut par
conféquent pas. d~re.,. les faits font ou ne font pas vrais, &
il n'y. a qu'une alfenion pofitive & légale fur la vérité ou·
fur la· faulferé des. faits qui puilfe permeme au luge d.e direil y .a ou il n'y a pas calomnie.
Il eH permis quelquefois pour' un· intérê.t légirime: de fce·
défendre., o.u même d'anaqller par des faits injurieux quand.
ils fO r1.t vrais; la paEtie contte laquelle ils font av.ancés
doit fe- reprocher à elle-même le défordre de fà conduite·;;
& d'un aurre cô:té celui qui trouve un· intérêt' perfonne!.
à. les faire valoir, ne d.oit pas être .privé: de. cet avantage, fous:
prétexte que:""le. fait eft i'11jurieux..
Que l'on (e repré{ente en effet la· nature' de ce procès;d?une, pan ,.le.. Corps entier de la Communauté, finguli, ut'
univerfi &. finguli ut fin~uli, impute·, à Me.••..• des prévaris'eu
cations de toutes. les efpeces j de l'autre, Me. r
défend &. crie il, la c.alomnie. Lequ.el des deu?!" en croire ?
Dira-t-on il..y a calomnie l les faits peuvent êtie vrais.. Dira-.
t70l1 il' nY· a pas. calomnie 1. ks faits peuvent être. faux. Il
faut donc éclairci·r ;. il faut donc, nécelfairernent ordQl).ner·
h1 1?r.eùye d~s. faits " & ju[qj.l'alors toute. réparation. à rai[oll.
L
,
•.••
<k:
�'Bu
PALAIS
nE
PIlOVJ!NCl!:
'~77
(le la calomnie eft hors d'œuvre & prématurée. Pr~us rtllt
purgare fe debet quam accufare,.
Le Mémoire déféré au Seigneur dl: une véritable plainte;
il ne lui fut préfcnté que comme remplifTant le Tnbunal
domell:ique, que comme un Juge de paix qui devoit tout
afToupir, foit qu'il fit ou qu'il ne fit pas juHice; en forte
qu'un pareil Mémoire, une fois adrefTé au Seigneur, ea une
plainte direae contre Me•.•• , & une plainte de la même
nature que celle que l'on auroit pu porter aux Tribunaux.
Voilà pourquoi on avoit dit à Me•.. : ail lieu d'accufer d'injure & de calomnie, vous devier venir par injonaion de juflifter.
~
Le Mémoire eft l'ouvrage de la Communauté, & le fait
eft jullifié par cette foule de délibérations prifes dans les
Confeils généraux. C'eH un Confeil général qui en a délibéré la rédaaion; c'eH un Confeil général qui l'a approuvée ; c'eH dans un Confeil général qu'Il a été {igné; c'eft
un Confeil général qui a délibéré de le préfenter à St. Viaor.
Nul doute que le Mémoire ne foit l'ouvrage de la Commu-:,
nauté, & que ceux qùi 1'0Dt ligné ne l'ont ligné que comme
Membres & Confeillers de la Communauté. Nul doute en·
core qu'en portant leur vœu comme Confeillers fur une affaire déférée au Confeil, on ne peut les accufer ni d'injure
ni de diffamation. Ils Ollt donné leur vœu comme ils le penfoie nt; ils ont cru que la rédaaion & la préfentation du
Mémoire opéreroient le plus grand bien de la CommulIauté ; s'ils fe font trompés, on Ile doit pas les en punir
à· la fuite d'une information.
C'eH donc contre la Communauté que l'on auroit dû fe
pourvoir. Il n'eft pas nouveau qu'un Corps entier commette.
quelque excès ou même des crimes qui méritent d'informer
cqnrre lui ; l'Ordonnance criminelle en a fait un titre exp.rès. Le fait. a-t-il été commis enfuited'une délibération du
Confeil & après l'avoir commis, c'eft la Communauté
qui en répond, pat la rairon que c'ell: .la Communauté qui
l'a délibéré; touS les Auteurs font de cet avis. Papon, liv.
7 , tit. 2. ,Arr~t ~ ; Charondas, liv. 3 , réponfe 83; Def.,
Dddd
1
�f7&
' Jau tr N A JI
peiffes, tom. :1 , pag.: 7~~ ; Bomaric, Touffe, Vouglans,
Serpillon, Bornier, & t0\s les Commematems.
Il ell: bien vrai qu'en agiffant contre la Communauté,
en ne doit pas, comme le dit l'Ordonnance, laiffü totalement de côté les principaux auteurs du crime, & leurs
~omplices. Mais tout ce qu'on peut en conclure, c'ell: que
ces principaux auteurs ne cluivent & ne peuvent être condamnés qu'avec le Corps de la Communauté, & par con{équent -lQrfque la Communauté n'dt puint au procès. pour
fubir les condamnations principales, il n'dl: pas poffible d'en
porter aucune contre les' principaux auteurs.
Il n'ell: pas abfolument vrai que la voie de la plainte
.né foit jamais ouverte à une Communauté; s'il faut craindre
d'une parr les mouvemens étrangers qui peuvent agiter fon
, adminiftration, il ne faut pas de l'autre la réduire à fouffrir
.en filence l'injufiice & la prévarication. Delà les Arrêts qui
qnt admis & tefufé les plaintes des Communautés. Me. Reboul, fur les matieres criminelles, parr"2 , ch. J , tit. des
Plainte" pag. 33, donne les rairons de cette différence•.
Comment croire qu'un Chapitre tel que celui de St. Viéton
livrera un Mémoire qu'une de fes Communautés dépofe d.ans
[on [ein? Ces forres de Mémoires adreffés à des Supé~ieurs ,.
ne leur font jamais confiés pour être .divulgués. On les leur.
donne: dans le fecret pour y. rell:er ,. fauf au Supérieur· d'en,
f/lire tel ufage que fa fageffe lui fuggere ; s'il· croit devoir leur'
dOQner fuite, rautorité don.t il. dt revêtu lui en laiffe tou-·
jpurs ks moyens. Comme le ,coup a é.té porté dans le fi-·
lence·, il punit également en filence. Une lettre de mécbn.·
tentement plus' ou moins forte fuffit à la peine, & la lettre:
a été éçrÎte ; bien plus ,. elle a. étéJue en plein Confeil., féant·
Me•. ~ .•. Ainli agjt le Supérieur qui a intérêt de tOut favoir.;;
[GUS les avis. lui. font bons;. il. n'en. néglige aucun ;, vérité
ou calomnie,. tout.. lui ferr, parce qu'it ramene tout au. bien.
& à, l'ordre. qu'iL eft chargé d'établir j c'eH. fouvent du fein.
même du. mal- qu'iL fait en. extraire k plus gr.and bie.n•. De-·
llifart &: Serpillon établiffent qu'iL eH trop" dangéreux d'af-·
{eoir. un. Jugçmen.t fur, une: lettre. q,ui.n'a p'as été adreffée.1L
�DU
PÂAAIS
DE
PROVENCE~
',19
celui qui veut s'en prévaloir; quelque déclamation qu'elle
contienne, elle ne doit pas être produire en Jull:ice. L'Arrêt
du Parlement de Paris du 17 Août 1777 ordonna que la
lettre' écrite par l'Abbetre de la Perigne à l'Evêque du Mans
~uï feroit rendue, & mit h<Jrs de Cour fur l'aaion en inlure.
Par Arrêt du 12. J LIillet ·1779, rendu au rapport de M.
le Confeiller du Bourguet, la ,Sentence du Lieutenant de
Brignoles fut réformée, les accufés furent condamnés folidairement à 6000 liv. pour dommages & intérêts, à des
réparations & aux dépens. Il fut permis d'imprimer & d'afficher l'Arrêt j écrivant Mes. Gaffier & Pafcalis.
FIN.
ERR A TA.
Pag. 307, lign. 2 au Sommaire: En emporte de droit la
révocation. Lifez : Efl révoquée de plein droit.
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2.
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https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/2/88/Janety-V4.pdf
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PDF Text
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JÜU·RN·AL
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PALAIS
PROVENCE,.
DE
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A
RECUEIL DES ARRETS
RE N)J us depuis les derniers Journalifles , par le
Parlement. & la Cour des Aides de cette Province.
Par Me.
JAN ET Y.
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AN N EE
~==~~~~!!!!==n;:'}
.
1780.
~==~~~;;;;==~
'.
A l X,
A
Chez
Imprimeu~ du Roi, vis-à-vis
le College.
ANDRÉ AD IBERT,
M.
o
DCC.
L X X XII J.
AVEC APPROBATION ET PERMISSIQ •
1
�-
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~~======::;:=.~~2?"~~.~:~
TABLE
•
JDJÊS SOJJ1lMlA)[RJES
CONTENUS DANS CE VOLUME.
IARRÊT 1. La portion congrue d'un Vicaire ou Secondaire, [on cafuel & [es rétributions de Mdfès ne peuvent être
faifis. Page
3
'ARRÊT II. Si la qualification de Noble prife pendant Ull
fiecle fuffit en Provence pour acquérir la Nohldfè.
Si celui qui conteJle la NobleJJè, doit être puni par une
IO
amende & par la fupprejJion de [es Mémoires.
'ARRÊT III. On ne peut prouver par témoins le paiement d'une
créance écrite, fur - tout fi la [omme qu'on dit avoir été
payée, excede lOO liv.
l'Î
'ARRÊT IV. Le Lieutenant de l'Amirauté peut-il connoître
de la réclamation des marchandifes arrivées par mer, &
tranJPortées hors du VaiJfèau?
22
'ARRÊT V. Le ProCllreur du Roi pourfuivant en force d'une
dénpnci:ztion ou d'un délaiJfèment, peut omettre dans fa
requête les faits étrangers ou inutiles infèrés dans la dénonciation ou dans la requête de la partie civile.
'Doit-on lire à chaque témoin la requête de plainte à peine
de nullité, & dgit - il en être fait mention exprejJè dans
chaque dépofition?
On ne doit joindre à la procédure que les pieces [ervant à
conviélion.
La déclaration que fait le luge d'a6Jlenir, ne doit contenir
rien d'injuriellx.
27
\
'
�fSlC
TABLE
VI. En vendant une partie d'un 6ien fonds dont l'atlivrement efl indivis, l'on peUl clzarlSer l'acifuùeür d'UT~.
partie de l'allivrement, pourvu qu'il n'y ait dans la divi- .
42.
fion ni dol ni fraude.
ARRÊT VII. Sur une demande en droit d'offrir.
. 48"
ARRÊT VIII. Le recours fimple doit être' vuidé en l'état dit
premier rapport.
Apres le recours /impIe, on peut être reçu au recours en:
droit.
La prohifJition faite au pere de l'ujùfruit, doit-elle être expre.IJe ?
'î4
ARRÊT. IX. Peut-on faire informer fur les faits de captation?'
Comment & dans quel cas peut - on attaquer un tej 1a"!ent
. 6l
comme faux?
ARRÊT X. Le failli efl oGligé, en remettant fon bila/l " de
.
remettre [es livres de commerce.
te créancier qui n'a pds figné le concordat"; peut ,oppo[er cédéfaut de rémiffion.
79'
ARRÊT XI. Sur une· demande en fèparation d'ha6it'tltion: . S'li
ARRÊT XII.. La tranfaction pa.lfèe avec celui. qui a cédé [es
droits & [on aaion efl valable, fi. la. ceJlion' n'a. été' àupa:'
. ' , 90
ravant fignifiée.·
ARRÊT XIII. Le département de l'accujàt"ew', auendiJ. l'impojJiDilité où il efl de faire· 'entendre les témoins,· ne péut,
arrêter l'inJlruaion de' là procédure, .tt, opérer'le jùgement:
,.
en l e.lat.
On ne peut. prononcer fur la plainte en.€ûlômnie,. 'lu'apdoS·le
jugement' de l'accujàtion prÎlzcip-ale•.
Non bis in. idem.
.
Un França?s n'efl' point' oMigé. d'allet..pargel' fa· caizturfiace:
en pays étranger..
9)"
ARRÊT XIV. L'aïeule peut· dans certai"s cas ,.& a·défllllt du.
pere & de la mere, s'oppofer au .mff.ùztè" dè [on peti't;.fils.
.
.
,
I02/ARRÊT XV. Sur une 'lueJlion de compétellce.
. '} _
Une Sentence qui or'damie· le nono1Jflatil apptl ,-[ans' ifnprJfr:r.-··
l'o61igatioll .1.: donner camion,- eji..dle nullg..?,
.
ARRÊT
\
�s.
1) E S SOM M À 1 R t
'~9t
Les procédures faites depuis l'appel déclaré, doiVent-elles être
, . cajJèes?
.
La demeure, en fait de tachat conventionnel, peut-elle être
purgée pendant trente ans, lorfque le rachat li été con ven!!
fàns jlipulation d'aucune peiné, & CJu'il n'ejl point intervenu
de déchéance judicia.ire? • • ,: .' "', \
'l'n
ARRÊT XVI. Il n'ejl da aucull lods au Roi fui- le prix des
biens roturiers vendus avec le Fief
.
"
1 l lt
ARRÊT XVII. Simulation d'un ac?e oppofée par une deS parties
12.1
çontrac?antes.
_
l
V
L
\
.
~fl. 1 •
'
Til
-/:
A RRBT X III. 'a novation n'el' pas opérée' par lm Jecon d'
ac?e pajJè avec :l'héritier,- fur l'exécution d'un "'aae pa.f!è
avec le défunt.
,'d
l,' l
',.' 12.4
ARRÊT XIX. Les Juges-Confitls ,ne 'peuvent'pas corznoEtre d'une
, obligation pure & /impIe fjui ne dérive pas' d'un fait de
'l'
commerce.
..
l '\
1! -
~.';\'.;.
XX. On peut ",épudiu Jlne fucr;ejfi'on,' tant '1
'...
~
'I 2
9
l'on
ne 'l'a pas aéceptée, ,ou CJu'on rl"a pasfait-des' {raes formels
d'héritier.
')'," , .
La détention des effets ~éréditaireS' n'ejl p~int un ohjlacle à la
répudiation ,fi l'on peut rapporter cette déte,ntion à tout autretitre qu,e ce.lui d'héritier. " .
,
.\. ,n'
. 131
ARR.ÊT' XXI. Peut':on [e"fair? réfl.it~er ehver~ l4 vente' 4'urt. .
, . 137.
Office?
,
. "
.
ARRÊT XXI1. Les Jùges-Confuls' ne \peuvent pas ordQnner
qu'une partie comparo/ira pardevant'eux par1Jrain mift,.
'pour ·être ouie par fà bouche.
',
y
147
ARRÊT XXIII. Le Iretraitféodal 'a lieu' en cqs (Je' àente -à fonds
perdu, même après la mort du vendeur. '
' . i S4'ARRÊT XXIV. Le" Procureur diL Ré peut être récl/ft, même
10rfqu'U efl fèul partie.
.' ' , .
.
Le Juge qui· s'ahflient fur une rquête'en récufnrion, ne p~urfi:
plaindre & faire informer fur les faits injurief;lx ou calomnieux qu'elle peut comenîr,' avant 'lue la partie récufante ait'\
été admife a. en faire la preuve, & a~an( 'lue fa récufation
1 )'8
{oit jugée.
'
'ÂJ:lR.'ÎlT XXV. En matiere de vérification d'écriture privée, la
ARRÊT
1
�592.
' T A BLE
preuve par comparaifon d'écritures &-la preuve par témoinS.
ne peuvent point marcher enfemhle ; la preuve vocale ne peut
être admife qu'il défaut de la premiere, & l''enquête ne peut
176
être prife par les Experts.
'ARRÊT XXVI. Une Sentence peut-elle être exécutée .nonoijlant
l'appel, même pour les dépens, lorfqu'ils font conjidéra183
bles?
ARRÊT XXVII. L'éleaion tacite, comprife dans l'inflitution,
révoque l'éhc7ion expreJfè contenue dans un premier tefla190
ment.
ARRÊT XXVIII; Arrêt de la Cour des Comptes, Aides &
Finances de Provence, portant régiement pour les encheres
des fermes des Commu'nautés.
197
ARRÊT XXIX. Le lods efi dû fur le prix de la vente des hais.
de haute-futaie.
202.
AR~ÊT :XXX. Curatelle de l'interdit ne doit point être déférée
il la mere remariée.
"
.
207
AR~ÊT '~XXI. ,La' claufe, permis au Capitaine de' toucher &
faire échelle en tous les lieux que bon lui femblera, lie lui
donne pas la faculté de dérouter (;. changer fon ·voyage. 2 l 'lo
ARRÊT
Çaffition d'un verhal de perquijition, & de
tolite la procédure.
. \',
• _ • 2, 19
4R~ÊT ~XXI.II, .. Si lq lijion a ~i~u dans un: aae' il penjioll
viagere, & fi l'on peut Je faire rêflituer.
'. ,~ 2,~~
ARRÊT XXXIV, Le hillet ordre eJl négociable "quoique celut
qui l'a .fttit,llE foit point MarchanJl;",
.
. 22,8
ARRÊT XXXV. 'La femme mr;riée foui .une conflitution
nérallf ,ne. pe~t accepser u.n~ ,donation fansJ {'autorifation. J.f/..
fon'mari ou' de laJflj}~fe. .. '
;. .. \ ~' • y' 232ARRÊL ~X~'XI. A!J.e. fU!aqu(~ol7J.me·jimuU ne peut étre dé~.
tmit par des préfomptions.
.
.
238
ARRÊT ~VII. Le demandeur en èomplainte quifuccomhe" ..
n'e{t pas touJQlI,rs condamné l'af!le,,!~e.·
24-3
ARRÊT XXXVIII. Si la d,emq;z1e.. en mifèrahle celJio,n des
hiens, jùillie d'un, décret portant des défenJes pmviJàires aux
, créanciers de' faire, des "'exécutions fur la peijànne du dé.-hi-
J9CXtI.
a
ge-
a
teÙl'.
�DE S" S 0 M·M A: nrE's..
5,9']'
ItI!Ur-; 'le. ptive dl! iaiFe valoir pendant procès '[es acnons actives"
:Si le cédànt- peut· Féél-âmer là [omme céda, quand poJlérim. rement ·à la fignification de la cejfr.on,. il efi furvenu de
, . '!ouveaux arrangemens ignorés du débiteur cédé.
'Si le débiteur peut· refufer le paiement, fitr le fondement que
la [Omml! due doit être placée, cS' que le. tiers au projit de
qui elle doit l'être, confellt à ce qu'elle refie entre fes mains,
en payant les intùêts au créancier.
249t
A'RRÊT. XXXIX.. Partage différé jufques après là. mort de l'un:"
des cohéritiers...
~1Jn c9héritier ne peut', avant le partage, vendfe urr· fonds de ~
l'hoirie, [auf de garder le prix pour [on lM.
L'acheteur, qui connoît le. vice du tranfPort, n'a aI!cune garalltie:
2) ).,
contre le vendeur.
ARRÊT XL, L'information doit être convertie en' enquête,.
, lorfiue la procédure ne préfente aucun attentat ail délit dé- ..
'terminé,,'
260-'
'ARRÊT XLI. Pour' être reçu Mattre, ilfuffit dè juflifier--qt/om::.
a rempli les formalités preferites..
Le Corps ne,peut point détruire' ces preuves par· des faits·néi.··
gatifs..
266',
'ARRÊT. LXIL Quefiion d'a.lfùrance maritime..
'71.-ARRÊT, XLIII:' On ne peut atta'luer, un aali après 'l!'avoir28,0"
.]igné.. '
'ARRÊT 'XLIV. L'héritier gfev6 efi'prmïe légitime pour"'efier'
en-jllgement, &. l'on peut exécuter vis-à-vis de lui fur. lës.:
biens fithflitués•.
Le t/élai..de dix jours jix~'par le Réglementde'la Cour; pour.-., déclarer. recours d'un rapport d'eflimation dans un 'Plucès282 ..
, exécutorial, n'I!fl pas fimplement comminatoire. .
NRRÊT' XLV.. On ne. peut , acquérir la fervitude dt·paffige...•
que par un temps i'fll7}émorial, & la preuve ;le la poJJèjjj.on ~
ancienne indique -la preuve. de.. la poJRfljon immémoriale;
"
.
28Tl
ftimÊ"lt XLVI....Procureur fundé'peutêtre inflit'ué. 'héritià.~. 2 93~
t1:w.kro, XLVI!.,. L'mexécutii5rr,d~une: convention' de Ii:i: E.ar.t:.di.::
RfEf",
�~
l'une des parties, n'en opere pas ,la' réfolution dç droit; il
faut recourir au luge pour la faire prononcer.
,
Les claufes pénales & réfolutoires inJèrées dans les conventions,.
ne font jamais réputées que comminatoires, & la partie ,qui
n'a poùit rempli fes engagemens , efl toujours reçue cl purger
la demeure dans tel délai que le luge trouve bon de lui ac-
594
•
ro~
T.ABLE·
.
La partie qlli fe laijJè condamner par défaut doit toujours les
dép'ens du défaut, quand même la Sentence viendrait cl être
réformée en caufe d'appel.
2.94
ARRÊT XLVIII. Si celui cl qui on accorde la fervitude de
paJ/àge dans un viol, pour les négoces de fa propriété,
peut s'en fen'ir pour l'introduc7ion d'un troupeau de ~eftiaux.
'
Si la poffiJ/ion de trente ans fùffit pour l'interprétatio~ d"/llz
titre obfcur
.
303
ARRÊT XLIX. Le fils émancipé peul faire des. acquifitions en
fon nom, quoiqu'il habite avec fon pere, & il n'efl pas'
obligé de .les recombler pour la fixation de la ~égitime de fes .
freres.,
)09
ARRÊT L. La preuve par témoins ne peut-être reçue contre la
preuve écrite.
La,Délibération d'un Corps fulf!fle, quoique non revêtue d'une
formalité prefcrit~ par un titre primitif, mais abrogée par un
long ufage.
'
313
ARRÊT LI. Le luge, jugl:ant· même confulairement, ne peut
cumuler le d/clinatoire avec le fonds.
318
ARRÊT LII. Tout luge ejl-il compétent pour connaître de l'avération d'une promeffi privée ?
On ne peut faifir provifoirement en force d'une pron;zeffi privée,
fJuoique reconnue & avérée. .
32.4
ARRÊT LIlI. La Cour ejl:.dépouillée de la matiere par l'Arrêt
qui renvoie au premier luge.
332.
ARRÊT LIV. Comment fixer ,le., domicile iJ:.une partie en fait
d'aj]ignation?
335
ARRÊT LV. La récufation d'un luge doit être propoJèe par requête, & les faits doivent être détaillés.
338;
�SOM MAI RES.
~9~
1\.RRÊT LVI. Les affaires de commerce, & jugées confulairement, doivent l'être a l'audience.
341
ARRÊT LVII. Peut-on aifigner un é.tranger ailleurs qlle par"
DES
devant le Juge de [on domicile?
Dans quels cas peut-on décerner contre lui décret de main
mift?
344
ARRÊT LVIII. Le hénéfice de la /ithrogation que rapporte le
tiers-acquéreur qui paye un créancier antérieur ou préféraMe
qui le menace d'évic1ion, confzfle le mainten ir dans la pof
ftlfion de l'effet contre les efforts des créanciers pC!flérieursa celui qu'il a payé.
'.
Ce tiers-acquéreur n'a dans ce cas d'hypotheque que du jour
de [on acqui(ztion, pour le fruit de la garantie qui lui efl
ouverte contre [on vendeur.
3 S0
ARRÊT LIX. Peut-on être reçu au rachat conventionnel, après
l'expiration du terme flipulé, & avant que la déchéance [oit
3S8
prononcée?
ARRÊT LX. Dans les a.ffùrances maritimes, comme dans les
autres contrats, l'énonciation fimulée ou fauj[e ne nuit point
a la difPofition.
362.
ARRÊT LXI. Les acquiJitions faites 'par la femme durant le
mariage ou pendant l'année du deuil, [ont préfumées faites
avec les deniers du mari, fi elle ne montre 11l1dè habuerir.
Secll5 de celles faites apres l'année de deuil, quoique peu de
jours après.
36')
ARRÊT LXII. Accédit fans information précédente.
369
ARRÊT LXIII. Sur un décret forcé.
376
ARRÊT LXIV. On ne peut, hors les cas prévus par la Loi,
enlever un pere l'éducation de fes enfans. 38 {
ARRÊT LXV. L'exercice de la lutte dans des jeux [olemnels
publics, ne donne aucune aRion pour les dommages-Intérêts réfultans des ble.ffùres.
Mais cette aaian compete pour les Me.ffùres dans une lutte particuliere.
.
Celui contre lequel on demande des dommages-intérêts pour
exces & MejJùres, ne peut pas ft pourvoir en hijfem"ent des'
a
a
e·
F Hf 2.
�~9~
"T A llL"E
termes fJû'il p/éte1zâ lu'i être injurieux
plaime; làrfque ceS térmes foni relatif;
lieu a (a plaint,.
:ARRÊT -LXVI. Les .termes mis dans un
prenan'c le riG:jue du jo~r & heure
c.
aâns' la- 'retJu~te .~
aufaît qUE a ·40nni
385
contrat i;PajJùr.anc,e,
que le, Navire fera
ou aura fair voile de rel lieu à rel lieu, défignent III!
,temps prochain, & n'autori[ent pas, en favel/r de l'ajJùn!
con-trel'ajJùreur,
rompre ou
changer1e voy.age. '389
.ARRÊT LXVII. Sur un droit de fuite.
401,
.,ARRÊT LXVIII. Queflion de coml!..étence.
413
.ARRÊT LXIX. La condition impoJèe a.l'héritier d'hahit~r, un
,certain, lieu" ne produit aucun effet" fi elle ne tourne.à
.
420
l'avanlage dé quelqu'ulI.·
~Rll-ÊT LXX. Différence 'Jiu .rÛax .d'aiJignation & du. r<:lax
d1inflance.
.
$n matiere cr-iminell~, on ne doit point appeller dans une i;yIan,ce
d'appel~ pour' voir diiclarer l'Arrêt ,commun & exécutoire,
les accufès qui n'ont point appellé.
..
430
.~RRÊT LXX~. Le Muyel acquéreur ne peut expulfer le Fermier pour l'année couran're.
439
,ARRÊT LXXII. .Compétence des Lieutellans en· matiere de
tailles.
,On ne peut Jair;e ùzfl1rmer, s'il n'y a délit.
It: 'créancier faifiJfàllt répond du fait du [efJueflre vis-à~vis
1e débiteur faifi.
.
448
.ARRÊT LXXIII. Pendant l'inflance en refèifùm" la prefèrip.
tion pour l'exercice du retrait ne court pas.
Le .retrait lignager a - t - il lieu dans l'échange de plllfieurs
fonds, larfql/'ily a fixation des prix?
41)9
-ARRÊT LXXIV. La moitié de la dot conflituée par le pere
lui faifant retour, jùivant le Statut de la v,ille de Mar.feille ~ en cas de prédécès de fa fille & de [es petits-fils,
fùpporte par moitié les charges & les hypotheques. 463
ARRÊT LXXV. Sur la cl1mpéience des Juges Con[ervateurs
.de Lyoll.
468
~ÊT LXXVI. f:orfqll'il s'agit d'ulle écr~te privée, la far-
a
a
�'D'ES "Sr (), Mi M A-{I RES..
'~'91
• ,màlit~ Cle l'(l,vùatiOll dpi~ ... ellé pr.é.céder toutes les autres
4>.73
procédures?
.l\RRÊ'1' LXXVII. On. '1]e Feut délihérer ,que dans un Confeil
.général compojè de tous chefs de famille "fur un ohjet qui
.intérejJè chaqüe hahitant en particulier, fingulos ut fingulos.
478
:ARRÊT LXXVIII. Appel comme d'ahus d'un mariage contrac7é a Nice fins le conj(ntement du pere', avec difPenfe
des trois hans, & hors la préfence du propre Curé. 484ARRÊT LXXIX. Le demandeur en cejJion de biens .doit être
in vinculis lors de la demande.
'~o~
.ARRÊT LXXX. Le créancier du défunt a deux aRions cOntre
les héritiers; l'une perfonnelle fùr leurs biens propres, &
"contre chacun, feulement pour .ta portion le concernant;
.l'autre hypotMcaire & pour le tout con,tre chacun des héritiers, fur les hiens délaiffés par le défunt.
~ 12ARRÊT LXXXI. La tranfac7ion entre majeurs n'efl pas fùjette
a refeifion pour caufe de léfion.
'Quid de la vente des droits fucceififs?
'Quid des autres ·contrats , lorfqu'il y a des ac7es exécutifs &
approbatifs?
~ 19
'ARRÊi1' LXXXII. L'Auhugijle répond également vis~a-vis
de ceux qu'il loge, & de -fon aUberge, & des lieux qu'il
~ 24
indique, ·comme pouvant en difPofer.
ARRÊT LXXXIII. Quels font les inventaires auxquels les
Notaires peuvent procéder?
Quels font .ceux auxquels il doit être proaédé par le Juge?
)2<]
ARRÊT LXXXIV. Preuve par témoins de la démlmce du
teflateur rejettée.
54S
ARRÊT LXXXV. Indemnité due au Fermier d'une Communauté, quoiqu'il ne lui eût pas dénoncé le danger éviden~
de perte.
~0
'ARRÊT LXXXVI. A quels fignes l'econnoÎl-onune Paroif/è?
·s
~RRÊT
LXXXVII. L'offre a deniers découverts
ifl
~5S
fati$fa.:-
�S9 8
T A BLE
1
elle efi faite dans le- premier délai de 'raffigna~
S72.
ARRÊT LXXXVIII. Le ceffio,maire du droit de prélation efl
préférable
l'acquéreur qui rapporte pofiérieurement la
toire ,
tion ?
li
a
même ce[Jiol/~
S77
Fin de la Table des Sommaires.
,
'.
.,
)
-
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�P A ,L A L S
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JD'JE'~ ';? Jlio. rit Nrê.JE~.,
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La Portiôn congrue' d.'un p'"icâir~
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QU
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1
S~c1Jndair'e, forl cafuel
&- 'ft~ rétrihutions de~ Mçffis. ~I:' peuvent être (aifis:
'
M
rl~
.~
J~
~e:Tértj~p., Prêtre " Vic~ire d!,! .la. 'p~~iffe·.qu Ye-rne.•
-.
g\le~ ,. d~\'OIt' à ~Vh:e.: R~t1ç le!iJrals, d:'U'1;,'p,I;oc~s.:qu'll
avoit perdu. Après la mort de Mre. Petit, fes hoirs .tiren~
faifir' enQI'l,,1e5'l rpa;l\s de. Mre'. C~auve,ç, Prie!Jr-Curé de la
Paroilfé ,du Vertnegues " l~ouE,es 'lesl fommes qu'iJ ,!~'oit_ en
main-, ,& 91l?il' ~.ev9jt. 91,1 pourrO,\çi.del(oir à l'aven.ir à Mre.
J;'errian R?ur hO!lora·ire,s, qrpi.ts ,&) ~é~riblJt.~o~\ldç Me~l;1s.
M.re. ,1;,ema .fé.,p0l,1rvut ail ,LIC,utenalJ!1 cl' AIX ~n: .calfatlOU
d~ ,cet' ar~êt-e~en~; le§'lh~!~..-tle :l~1re. Petiu?ffl:irent un ~x.
pedlem; Ils redulfirent- la, falfie an ners net pe. la ROWC!u
çongr.ue.)..!iéduçHo(1 faite· des décimes.& ,ch~rgkls, ~ ~enwn~
.
•
•
A
2,
�'4
loURNAt..
derent -qulau Inoyén- de ce; elle f(!roit confirmée, pour le
tiers, main'-levél'; faite du furp!us, dépens compenfés. La
caufe fut évoqué~ pardèvanr la Cour par exploit du l S Mai
1779·
.
.'
(
.,
_
,
On difoit pour Mre. Tertian, que, fuivant la Loijlipendia,
Cod. de executione rei'judicatœ, & la, Novelle S3, tir. 8,
chap. S, on ne pouvait faiftr la paie du Soldm dont le
fervice étoit néce1faire àJa République. bn ne peur également
faiftr les gages des .comédiens. Les falaires dus aux Mininres
deH:inés aux Services divins feraient-ils moins privilégiés
que les .gages & appointemens des Officiers qui fervent le
Prince? Seraient-ils moins privilégiés que les {alaires accordés à ces hommes deninés par étar à l'amu{ement du
public, & pour lefquels le préjugé a imprimé une forte d'infamie? Si les gageS des Comédiens Fran~ois ne peuvent être
faifts, par la raifon~gu'ils (ont p~épo{é~ pour les amufemens
phblics' de la Narion" queJe Gol1vernemenr a regàrdé avec
iaifon c~mme' nécelraires, pourquoi ies alimens d'un Prêtre,
de celui qui eH: préFaCé pour le Service divin, feraient-ils
regardés d'un œil moins favorable?
La Déclarai-ion de· 1686 veut· Ile -les congrues foient
exemptes de toute charge~ La"'-congrïJe ,"dtt Dùperray, rom.
:1." ,char,' ;3),!lo:.3 ,,,efl c~njiderée co.~m.e fe néceJfjire é;',.~a
legltlfn~, d un r;;;'ë -pour l'Ivre; elie-,n/! peut donc /!trJ empe"
chée ; 'diminuée , ni affoihlie pour quelqu{'ëaùft CJue 'ce /oit. La
fubftllance du Prêtre dl: de droit divin, Celon l'obCervarion
de 'Dumoul~n''fur-le chapit're Parrochianos r'de de;imfs, & là
po'rtiak côngr.lle J qui foù'F1Jit ià cettè 'fub'fitfant:el eft: 'ûtl dépôt
facré.'
:' [ "
, 'r;, e'> .' 8, . L , ~'lqJ. .ub l~q 1io'lt
, . C'efl: ftwd~' principe àtte'flé- par toûs 'le~g[ Aùtetits';'&~piir
les Déclarations ,de Sa Mdjellé, qu'ont éré: -r~!!dùs plufteurs
Arrêts,'~ entr'autr~s celui rapporté jiar/'Rebuffe "ti~. des
p~rtions c~nlfl'lIes, ''n~? 96, ~'û!' ju~ea:qbè')la~~or~ièd ~0iigru;
d ~Ill Cure ne'pouv~tt 'pas, etre 'fal~e '~'1n'et61t'.pa-S même
fUJette à compenfatlOll,. Cet Arrêi:l n'enl voulut p~s'Ia-diii@t\re
entre lies arrérages de la fport-ion cdn:gruè du Curê de .G~he
villiers; & un exécutoire''Cie -dépenss que le Chapitre de St.
�D U
PAL AIS
D E
PRO VEN C E:
~'
Marcel de Paris avait obtenu contre lui. La crainté de voir
un EccléfiaHique réduit à une mendicité qui déshonorerait
fan caraél:ere, a été le motif de ces .fages Réglemens.
11 y a néanmoins différens Arrêts fur cette matiere; les
iJns ont déclaré la portion cangue non faififfable ; les autres
ont admis la faifie du tiers en faveur des créanciers; mais
il eft aifé de concilier ces Arrêts. Le tiers de la portion
congrue eft faififfable pour dettes concernant la nourriture
& la {ilbfiftance, puifque c'eit pour cet objet qu'elle eft
àccordée; mais elle n'eft pas faififfable pour toute autre
dette. Tel eft le fentiment de MI'. Le Camus dans fan Comhlentaire fur l'Edit de 1768.
'. 1
D'aillellrs les Arrêts .qui ont admis la faifie du tiers de
la portion congrue, ne font intervenus que contre des Curés
ou des Vicaires perpétuels qui ont ~ 00 IiI". de portion congrlle., & nOn contre des Vicaires .dont la leur n'eft que .de
2,)0 li\'. LeS premiers participent encore au cafuel, aux obits &
aux fondations; au lieu que les autres nlom pas.d'autres revenus.
Les émolùmens & rétributions journalieres des' Profeffeurs
des Univerfités ne peuvent être faifis; les épices, vacations
& émolumens journaliers des Juges & autres Officiers de
Jufl:ice, ne peuvent l'être pareille.ment. Gela eft: attefté par
urie -foule' d'Artêts , par ,Loifeau', par La RocheflaV'in en fon
Traité des Parlemens de Franoë, & par le Commentateur .de
l'O.rdonnance ,de ;1667. Ces dift,i'iburions quotidiennes font
le prix du travail des Magiftrats, & il eft de l'intérêt public
que la juftice fait rendue. 'Le même motif a fait regarder
les "diftributions. quotidiennes des Chanoines, les oblations
.& kt1'tres menues rétributions des Bénéfioie'rs; comme ,des
chofes non fàififfables, parce- qù'elles tiennent lieu d'alimens
à ceux qui les reçoivent, & qu'il eft' néceffaire que le Service
divin ne fait pas fufpendu. Toùs les .Auteur.s,ont rendu hom'1tJàge à ceS principes; & Bonifac.e, ·tom. l , liv. 2, tit. 8,
cltap. 2.,tpag. u8 &.fuiv.; rapporte trois Arrêts 'qui tous
ont jugé ql;le les diftribucions quotidiennes !le peuvent être
.faifies par un . créancier 'du Bénéficier:' mendiçafet (lericus
in dedecus' (;. opproorium Ecclefiœ.
�6
JOURNAL
On répondoit pour les hoies de Mre. Petit, que de droit
commun, cout ce qui apparriemall débiteur peut être faiu
par fon créancier. L'obligation des bieJi)s fuit nécelfairement
celle de la perfonne; & comme '-elle-ci efl: générale, la
premiere ne peut être limitée qu_e. p<!r un,e Loi exprelfe. Auffi·
n'en connoilfons-nous aucune qui fatfe l'énumération des effets
faifi/fables, parce 'qu'ils le Cont COLIS de dro·it commun, &
toutes celles qui parlent de cette matiere font-elles connues
par forme d'exception & de limitation. Or, il n'efi aucune
Loi qui prohibe d'arrêter la portion çongrue; donc cout
Ciréancier légitime peut la Jaire faifie.
Il eH bien vrai que l'Edit de 169'5 ne permet dé faifir
que le, tiers des revenus du Bénéfice: d'uOl .l?rêtte; mais il
n'efi aucune LoÎJ qui défende au çréancieJ" de porcer fes
exécutions fur le tiers de la congru,e, & c'en efi alfez pour
qu~il lui foit permis, de fe payet fur Cie· tie.rs., de la même
manierequ'il fe pa;yeroit fur tout autr~ revenu du Bénéfice.
A défaut de Loi précife" Fon inv.oque le principe, qui
défend.de faifir les penfions alimenta.ires Î; mais il n'eH aucun
revenu qu'on ne pllt par ce moyen m.etere à l?abri des exécutions des créanciers. Tous ont pour unique ebjet l'entretien & la fubfillance du Prêtre j ce n'eG:;qu'à ce titre que
l'EgliCe les lui donne; ce n'eil qu'à ce titee qu'il peut les
garder. Miniilre de l'EgliCe, il n'en eJb pas le' mercenaire;
tout· ce qui excede fes befoins., cell'e de lui appartenir. Il efl:
de maxime inconcefiable que les revenus des Béné.fices font
fournis aux exécutions des ctéancîers , comme tQIlS les autres biens. d'un débiteur. Cerre regle 'nfdhuffne ql:l'une' exceptioQ.
relative à la. gloCe de'Ja fameufe' déCréta le Odoo,rd/JS<, de. Jo/ut.).
elle confifie à ne pas permettre' qp'on exé..cut.e un Eçclé
fiafi'ique.in tQtum ,. mais. feulement· irz. q.uantU]1]. f-ac.ere poujl;
habita ratione, ne egeat. Delà viennent les difpoGrions' <le
l'Ordonnance Civile, & de l'Edit d:e t69'\;; delàda., lurifpr,ll:"
dence des Arrêts, qui n'a permis aux. créanciers de fa.iflJ" ql;le
le tiers de la .porcion congr.ue., . Il l,
' .)
La J:ortion congrue e/l une penfion alimentaire; les. Conlciles & les Ordonnances .ne l'one confidérée que dans le
�D U
PAL AIS
D E
PRO VEN C E.
.,
rapport qu'elle a avec le Décimateur qui la doit, c'efi-à-dire
qu'en ordonnant de payer une congrue, ces différentes Loix
n'ont voulu que lui impofer l'obligation de donner au Prêtre
une fublifiance convenable; elle efi l'aliment de l'Eccléliaftique vis-à-vis de l'Autel qu'il de{fen' c'efi le feul fruit (;jue
cet Autel lui donne, puifqu'elle n'efi due, aïnli que le dit
Mr. Camus dans le nouveau Traité des porcions congrues,
qu'aura nt que le Curé n'a point d'autre revenu eccléfiafiique
fuffifant pour lui procurer le néceffaire. Brillon dans fon
Diél:ionnaire des Arrêts dit, {jue la Jurifprudence du GrandConfeil efi que le tiers de la congrue 'efl: faififfable, afin
d'empêcher sue les Curés ne deviennent plaideurs, fous prétexte que leur portion congrue ne pourrait être failie.
Depuis la Déclaration de 1686, on a reconnu que la
congrue étoit en tour femblable aux aUtres revenus eccléfiafiiq"ùes , & que puifque le Légiflateur la foumettoit au
paiement des impofitions du Clergé, il falloit qu'elle fubît
le fort des revenus ordinaires auxquels elle étoit alIimilée.
Auffi les Tribunaux n'héfiterent - ils plus à la déclarer faifi{fable jufqu'au concurrent du tiers. Un premier Arrêt rendu
par le Parlement de Paris le jugea de même en 1697. La
même quefiioll fut décidée d'après la même regle, par deux
Arrêts du Parlement de Dijon des 1 & 1 S Oél:obre 1700.
Ces Arrêts & beaucoup d'aurres font rapportés par Duperray
dans fon Traité des droits honorifiques, liv. 4, ch. S, n. 7;
Catelan & Denifart, va. portion congrue; d'Hericourt dans
fes Loix eccléfiafiiques, parc. 4, ch. 8 , §. 9 ; Goard dans
fon Traité des Bénéfices, tom. 2, pag. 368 & fuiv.; Me.
Honnoré dans fes noces manufcrites, va. portion congrue;
Lacombe, va. eod.; Jou{fe fur l'Ordonhance civile, arr. 16 ,
tic. 33, & fur l'Edit de 169S , arr. 24'; Coudert fUr le même
Edit, tom. l , art. 8, pag. 110; & Durand de Maillane
dans fon Diél:ionnaire, va. portion congrue.
Si d'ailleurs jufqu'en 1768 on n'a permis de faifir que le
tiers de la porcion congrue, ce n'a été que parce que les
Curés avoient encore les novnles fur lefquelles les créanciers pouvoient porter leurs exécutions. C'el1 ce qu'a fort
,• •
�g
.
'JouRNAL
bien oblèr~é Coudert fur J'art. 3 de J'Edit de 1768.
.'
MonGeur l'Avocat-Général de Montmeyan obferva que la
déciGon du procès parciflàit dépendre de la faveur que mé.ritent d'un côté les rétributions facrées de l'Amel & la fubfifl:ance de fan Min' re, & de l'autre la: créance la plus
légitime, la plus pnvilégiée, la plus imprefcriptiblë. La'
difficulté & le douce conGfl:ent à favoir laquelle doit l'emporter fur l'autre de ces deux importances conGdérations.
D'abord fi .cout débiteur fuyard fe préfente fous un point
de vue fâcbeux & défavorable, à quel accueil plus fâcheux
encore ne doit pas s'attendre celui qui non feulement ne
recule pas, mais qui mêm,e repoulfe (on créancier, qui ne
fe borne pas à demander. des dilais, mais qui follicite fans,
pudeur le privilege honteux de s'acquitter fans payer, &
d'infulter en quelque fane publiquemen~ à la bonne foi do ne
'
..
il abufe !
On peut dire pour dimin.uer cette efpece d'indignation
qu'excite d'abord contre lui le fort d'un créancier trompé
dans fes pourfuites, que ce dernier s'dl: fait ce fort à luimême, & qu'il a toujours à fe reprocher du-moins quelque
léger.e imprudence. Mais ici Mre, Petit n'a pas fuivi la foi
de Mre. ·Tertian, & ce l~'efl: poin.t la néceffité qui a entrainé Mre. Tertian; c'efl: une avidité, c'efl: une ambition
auffi inexcufables dans leurs prinçipes que d"ns leurs progrès..
' .
.
C'e!l: peu de dire que le privilege de manquer à tous
leurs engagemens fercit fatal aux Eccléfia!l:iques eux-mêmes ~
en les privant de tout crédit, & en rendant à jamais inutiles pour eux- mêmes ces engagemens dont il')es aurait
affranchis une fois, & du fecours defquels ils /;le pOUffaient
plus efpérer de Ce fervir. Tout principe d'ordIe ~ de tranquillité ferait Mtruit Raut la fociété, en y inrroduifant une:
inégalité fi injufl:e & fi monfl:n.\eufe. Cet ordre, le premier-& le plus favorifé de teus , deviendrait par-là le tyran d~s
autres ordr~s" non pas qu'on. fait alfez inju!te pour· le foup-'
~onner d'une corruption univerfelle, mais il fuffiroit d'Un
petit nombre de particuliers corrompus, pour tout bouleverfer),
.•..
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DU
PAL AIS
D E
9
PRO VEN C E.
verfer, pour tour confondre. Que deviendrait alors ce refpeél:
& cerre crainte naturelle qui établit & maintient l'équilibre
eurre les différens ordres de l'Etat, comme entre les particuliers qui les compofeur? Mais d'autre part, que deviendra
Mre. Terrian, fi féduit par l'élévation apparente des confidérations & de~' motifs que les hoirs de Mre. Petit font
valoir, le Juge admet les principes barbares qu'ils veulent
établir fous le prétexte fpécieux de bien public, & de la néceffité
de maiurenir l'harmonie générale; puifqu'il en réfillte en les
analyfant ,.que Mre. Terrian doit périr de mifere & de faim,
pourjfer_vi~. d'exemple aux EccléGaHiques qui pourraient avoir
la m'!.nie dll voulojr, troubler le repos des autres, ,& pOlir
avp,ir' l eu le malheur de) perdre un procès.
. .
Une Jurifprudence conf!:aure a établi que les créanciers
peuvent arr~ter ju[qu'au ti~rs de la portion congrue, pour
fe . payer de leurs, créances. Ma is fi l',on ne trouve. point
des Arrêts qui difpenfent expreffément quelque Vicaire de
~ouffrir ce même retranchem~ur, c'ef!: qu'aucun d'eux n'en a
réclamé. On a fenti que le retranchement du tiers d'une
fomme de 'i 00 liv. deHinée à alimenter & à enrnitenir un
Minif!:re facré, un membre e1fentiel de la Hiérarchie eccléfiaf!:ique, étoit le plus grand façrifice que l'humanité' pût
faire à la Juf!:ice. .
•.
.
Il ef!: cerrain que par ce retranchement, on a réduit les
Curés au 'plas étroit néce1faire, à un néceffaire fur lequel
les Vicaires, touS inférieurs qu'ils. font en dignité ,ne peu~
vent ,ri.en retrancher. Si la néceffité a fait établir que dans
tous les cas, il devoit au moins relter à un Paf!:eur. 300 liv.
pour vivre, n'ef!:-il pas d'une plus grande néceffité qu'un Se~
condaire qui ef!: après tout un homme comme lui, fournis
comme lui aux mêmes beCoins, ait aU moins 2S0 liv. de
revenu?
Combien la portion çongrue n'ef!:",elle pas plus favorable
qu'une penilon alimentaire! Indépendamment de fa fpiri~
tualité, de fa fOl/rce & de fa deHin~rion qui font vérita~
plernent facrées ,n'eH-il pas vrai qu'elle repréfente à la fqis,
119A fel,lh:mc;nt l'ellcr<:rien &; la fuhfll!ançe du Minif!:re l mais
. .
B
�. : 1 , ' , 1J o' U RNA t'
l J 1[
le priJé d'~n 'tràvail·opiniâtre, le fru1,~'de fon' indu!l:rie jour':
naliere; au lieu que la penlion lalimentaire n'efl: refpeél:able
qu'à un feuhle ees titres.
.' . .;, ."
. Mr. l'Avocat - Général cQnclut à ce· que f<lns" ~'arrérer à
l'éxpédiem définitif des hoirs de Mre. Petit, ayant tel·égâh,i
que de raifon à la requête de Mre. Tertian du 30 Avril 1779,
dom les fins avoiènt été évoquées pardevant la Cour, la
failie faite entre les mains 'de Mre. chauvet' femit, déclarée
nulle & comme telle c'aifée' " fauf aux h'oirs' de Mre. Petit
d~ fairé fa~1ir co4slJ'eg revenus de Mre.1Yertian<J, 'al,!' e~\~ue
fa portion écingrue, qui demeurèroit r6ujo,ûrs'libr".àùd1fIM1' •
Tertianl , & àutres' qtt~ les'objets"d'é iJareille nllttJre, ;/& :qu'11
feroit enjoint à Mre':'CH1i'uvet ~e Cc {de'lfaiilir6oire' Ies;niâins
de Mre: Terti!l11' des objets compris dans.la fail(~ & fpi!2ialerremde fa 'portion' c9ng~ue échue & -à 'bJ1eoir..'
.
.
'~rrê't du 26 Janvier 1 j8b,' proriBhcé' par ~.~le 'frèrniétl
P'ré411em, conforme 'riG 'conélûRons; lès hbir~:deMre/p€!ti~
furent' c'ondaîn'n~s 'aux "dep fis: / Plaidaht Mès. Jaùffret~"&'
Ga'pre au ."
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Si la qlidlifiéation1de Noble P~ife pen.'daht un fiecle Juffit, ~n.
Provenee· pour· a-efjuêrir la No1flejJè.··
.
t )1,
.,
Si celai 'lui comefle la NoblejJe', 'doit hre puni par ûne dmehde
G' par la [upprejJion'de {ès Mimoires."
, ~ll ~:.>! ,
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P
Ierre-André Chabot du lieu de la Rochetté appelia dè
la' taxe' des dépens que le lieur Jean-Baptifie-JofephLaurens de Saqui du même lieu avoit obtenu ~ontre lui. Il
demanda la réduél:iort"de l'article qui avoit taxé les voyages
du fleur de Saqui comme Noble; & dans le cours du procès i-l traita fon Adverfaire d'homme injufie & d'oppreffeur.
Le fleur de Saqui préfenca le 12 Mars 1779 requête en
fuppreffion des Mémoires de Chabot, & en adjudication
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
Il
'plane amende de'loo liv., foit à calife de I~ d~négation de
la Noblelfe, foit à caufe des injures.
'
Chabot communiqua le teflament du pere de fon Adverfaire, où il n'avoit pris que la qualité de Bourgeois. Le lieur
de Saqui foutipt que c'érait par erreur que fpn Rere avoit
pris c~tte quali,té; il demanda incidemment que cette ~.rreur
fût r~parée, & que la qualité de Nohle fût fubfiituée à celle
de Bourgeois.
.
Le··procès érait compofé de trois qualités. 1°. Le lieur.
d~ Saqu,i efl ~ il Noble, &.a - t -;1 dû être taxé comme
tel? 2°. L's:rreur doit-elle être réparée? 3°. Ch<ibot .do.it-Î~
~t~e Buni pgurlayoir. dénié la Nohlelfe du lieur de Saqui, &
pour l'avoir, accyfé d'injuflice & d'p.ppreffion ?
Ir
1
, Chabot difoie que tous les hommes font cenfés roturiers,
li: Ipqins qu!i1s ne prouvent leur Noblelfe; que c'e.fl à ce1u.i
i1u.i en excipe à en juflifier, & qu'à défaut de preu\;'e 'il daiç
~~re déchu de cette qmf1i té accidentelle.
) 1 .. '1 l
"
Nous connQilfons trois fortes de ·Nobles ; ,les Neble!\
'd'origine Oll de nailfance; les Nobles par Lettres du Prince,
& les Nobles par l'exercice de certaines charges on de rob~
ou d'épée. Le lieur de Saqni ne fe prévaut point de ce!>
deux dernieres !6>rres- de Noblelfe; il convient' qu'il n'a point
de (titte,de çonçe/I!on; il. convient auffi que {es aïeux n'on~
jamAi~ rel).lpli. Olt dans la robe, ou dans Eépée,: de~ ,charges
oU des emplois attrib\ltifs de la N oblelfe : il ne peut dalla
êt-re quefl;ion que de la Noblelfe d'origine, la plus ancienne
~ la vérité, & la plus refpeél:able de toutes.
f ,OL,. à qu~ls,caraél:_eres, reconnoît-on cette Noblelfe? Nous
avons q~elquesr.Loix f\lr cette matiere. ,L'Arrêt du Confeil·
QU -1 ~.. Mars lQ(h, rapporté par Bonif'lce, tom.- l', pag.
272 " fournît les perfonnes qui fe croyoient Nobles, à juili.
fier· pardevant les Commilfaires nommés par Sa Majeflé,
que lel;lrs aïeux ,& lpeteS avo:ient pris Iq qualité de Chevalier
ou 1i'Ecuyer depuis l' mmée 1560., & à, prôu.ver ·leur d4çen-..
dance & filiation avec POJJeJ/iOIl des Fiefs, fmplo;s & fervice~
de leurs autèurs, 'par des contrats de mariage, partage, aRes;
de tutelle, aveux, dénombremens & autres ac7es authentitJl1es.
<
(
.
.
,
Il 2<
�u
JOUll.NAr;
Cette :toi veut m~me que fi le titre âe rotut'e p:tfo1t;
1a qualification de NoMe prife pendant plus d'un flec1e, &
renforcée par la poffeffion des Fiefs & l'exercice ~es emplois, foit inutile.
Cette Loi exige, qu'à la qualification de NoMe [oit joint
le concours de la poffeffion des Fiefs & l'exercice des emplois; cependant il faut convenir qu'elle a reçu quelque
modification. Mr. de Bellegui[e chargé par Sa Majefié de
la pour[uite de la vérification des ritres de la Nobleffe de
Provence, nous l'apprend dans [on Traité de la NoMeJJè,
pag. 6 s; il s'exprime en ces termes : " Ce h'efi pas que
" cet Artêt ait été exécuté dans toute fa rigu'eur, E!n ce
" qu'il porte la néceffité de la preuve des F,iefs & des [er" vices; on a pris l'alternative. Mrs.les Commi1faires connoi[" [a nt que les meilleures familles ne pourroient pas fatif;, faire aux deux conditions, fe font difpofés de juger en
" leur faveur, quand elles fatisfaifoient à l'une ou à J'autre;
" autrement il fût arrivé qu'on auroit fouvent dégradé. des
" Nobles, aq lieu -d'empêcher des rocuriers à le devenir 1
" & que .pou.r réformer un abus, on eut fait des injuf" tices. "
.
Delà, contluoit Chabot, le fleur de Saqui doit prouver
& la qualité de Noble ou d'Ecuyer depuis 1 S60, & la poffeffion des Fiefs ou l'exercice des emplois. -Or les auteurs
du' fleur de Saqui n'ont jamais po1fédé aucuns Fiefs; Ils
n'om jamais rempli aucune charge importa me dans l'Etat;
leurs defcendans prouveroient donc inutilement qu'ils ontpris la qualité de NoMes j d'ailleurs cette qualification n'a
pas été confiante, puifque l'on trouve des aél:es, tels que le
tefiament du fleur Jofeph de Saqui, où il ne 'prit que celle
de Bourgeois. Son fils ne doit donc être confldéré que
comme tel; il ne doit point être taxé comme Noble;.&
Cbabot ne doit point être puni par la fuppreffion de fes
Mémoires & par une amende, pour avoir dénié à [on Ad.
verfaire lm titre qu'il ufurpoit.
Quand même le fleur de Saqui [eroit déclaré Noble, [a
requête en fuppreffion des Mémoires & en .adjudication.
�:Du P ALA 1S nl! PRO VIl Ne l!;
11
amende devrait être rejettée. Quel rort a Chabot de
ne pas vouloir envifager un Noble dans le fieur de Saqui?
II a vu fan aïeul n'exe'rcer à la Rochette que l'emploi de
Commis-Contrôleur aux aaès; il a vu fan pere ne prendre
-dans fon tefl:ament que la qualité de Bourgeois; il l'a vu lui.
même tenter inutilement d'exempter fon domefiique. du fort
de la milice. S'il a été dans l'erreur, cette erreur !Lü" efl:
commune avec toute la contrée: fi le lieur de Saqui étoie
Noble, pourquoi n'a - t - il pas f.1it réparer l'erreur inférée
- dans le tefl:ament de fon pere? Pourquoi l'a - t - il exécuté
pendant trente ans? Chabot a accufé fon Adverfaire d'injufl:ice & de tyrannie? Mais fi cette qualificarion efl: peu
agréable, elle efl: du-moins vraie, & Chabot n'efl: pas 'repréhenGble d'avoir raconté fes malheurs à la Cour. On n'efl:
pas autorifé fans doute à outrager un Citoyen; mais il efl:
toujours permis de fe défendre, & ·la défenlé feraie fans
force, li elle étoir [ans liberré.
•
Le fieur de' Saqu'i répondoit qu'il étoir:! éronnant qu'on
osâr révoquer en doure la .Noblelfe de [a famille; elle n'a
poinr acquis cetre Noblelfe ni à prix d'argent, ni par l'èxercice de certaines charges; mais elle la tient de la nàilfance,
& cerre Nobldre efl: fi ancienne, qu'elle [e perd dans la
nuit' des remps.'
' . /.
l?
En droit, la qualification de NoMe prife pendant un 'fiècle
filffir pour prouver la Noblelfe. Decormis, tom. l , col. r023,
arrefl:e que felon la Loi premiere, Cod. de ciignit..& le fenûm~nt commun & univerfel des Auteu'rs, celui ~ la if! rétuté
Noble dont le pere & l'aïeul ont vécu nohlemenl & 'en ·Géntilshommes avec des titres & qualités de Nohleffi; a fnôins qu;il
n'apparoijfe d'un commencement roturier, ceue l'fJréfomptiol7.
de la No61effi du pere & de l'aïeul étant juris & de jurè, &
Jaifont raifonnaMement croire que le temps d'auparavant a été
femhlahle , fi ce n'if! qu'il ré/ùlee du contr'dù'e' par quelque
preuve de commencement roturier. 1
Dans.le fiecle dernier, il fut fait les 'plus t1goureufes recherches conrre les faux Nobles. L'Arrêt 'du Confeil du 19
Mars 1667 fembloie exiger le çonçours de la qUlllificariol1
n'une
�1:4
•
. )
J 0 VI 1\ N AL.
de Nâ'ble 'prife qepuislI S60, de J~)po1TeffiQn des ·Fi~fs:&
de l'emploi des charges; mais cette Loi dl: d'autant plus
rigoureufe en Provence, que les Nobles n'y- jouiffenc d'aucun.
droit ·cl'exeIl}Pfion;· auffi les no.uvelles,LoiK qui parutent enfuite, furept moins fév~res. On s'y con,enta de) la qualificatjon de Nob~IiLpriCe' pt.ndanf. un fiecle. L'Aut,eur ç1u Dic.tionhllire r'lifonné des Pomaines, vo., Nobltffi., dit : Nou$
connoijJQns, d~ux ,eJPeces de lIlobleJIè, l'ur[e d'origine, & l'autre
de conceJlion. J;a.premiere doit être prollvée.F?!r des ac7es [0lemnels, tels. que des. cQntrat$ d~ mariage, des ,Ac~s baptifteres "d'es. partages, 'des! tranjflc7ions & dlltrlis ac7e$; a,uthenûqU<js qui jujlifi/int l)ne génifllogie il2c.ontejùil!?le " G' que les an:'
cêtres par mâles ont pris & c(Jntihué de prendre fans interruption pendtlflt 'çent ans les qualités appwtenantes il la NohleJJè. :QeJ1if'lCl' ti~nc l.e1lTlême langag!l.1 Bpnifaçe, Decorn)is
&;Mr;~d~ l\1RllJV<l!on , Aucéws 9U,l.pay.s, n:exigent rien de
plus; Mr. de Montvalon, ..9?apr~s·o,les : Loft· por,rées fur
cett, rtl.qfi~e ,;nj:j\lftJa~tèll:e'QiIOS fçn Préçi$ ges Ordonnances, 'V~. Npbld/è,' que la NobleJ[e ,parmi nous d.ojt êrre
1uftîtfée depuis J\anqée 1 S60 par des- qualifications de Chevalier 9J1.d';Ikuyer...Où enJeroir-oJ1, {Là cew;,qualifiçario[l
jl f{ll1G:iJ ~J;I~re: jQi~1dr~ l~ poffeUioni;des I::i.ef!i '~\1 Fcxercice
des emp-Iois? Combien de Nobles parmi nOHs] qui, n'ont
j~!1j~is p()ffédé~i;lUc.U)1S'Eje~; ,l\(; ~U'il n'ontr,jaR).~is ·remp.l) .aucune, pl~Ke, 04 ~a!ls la. robe, ou dans l'épée! Faut-il pour
cê)â. lçs _d~po,uiller q'up~ qualité qu'ils tiennent <le leurl'
p.c:r-e.l>', ~ ~ljIe j.unaisl'p.çJfon..ne ne lew"a çOl)te~~e?, " HI
-<.IiP~'!!$ J~ f;!iç " le){j~~r!.de, S~qll.i., pe.ût 'remqnter j\lf'qu~à' [og.
~}nqlÙ~:me, !lïf'\!\' ,.\~ ,çoil]llter [ep(_g~!1,é'rilt,iQ'ns çe 1 ~oplelfe
~l1i embrwr(tnL~u del~,d~delllC fie,clesnLes ,aél:es ..qulil;:<j.
cpmmlÏniqùés, .prouvent qyç f~s. ancêçrç5 ont: Foujours pris
l,a. qu'!Üt~l..de NoM"ll' Ca ,Noble$.e {UÇl\tl1ê.me. ~onfiaçée en
:JAl:9, pan lln~\~~l1for~af~olJ' ~u.ï f!re f\li~, ~ cçHe\éj>qqlJ<:. Lé
Puget de SavOJe, ou refidOJel)t ,i\lltF.e.(qjs. f(1S ,pereS" en offry
'encore a&lIellemept p{!S prepves ç!ans J~~ tewple.s; -auffi ils
s'allie..renr aux plus i)lufires maifol1s, relje's qùe celles de Glafz..
dews , de Gaillard. Depuis, il n'·y a eu aucune. dérogeance ~
--
_.~
�DU
PALUS' 'DB :PR.OVI!NCI!~
I~'
l!emploi de (!;ont~leur aux"attes ~opere point 'cet effetr;'
tous les Aureûrs l'a'creil:ent. Si dans un teframenr, pour iminuer les droits du contrôle, on n'a pris que la qualité de
Bourgeois, cette qualification ne peut point nuire aux en-.
filas, foit que leur naiffanc:e' foit antérieure. ou poHérieure
à .cet atte; cette inexaél:itude doit être réparée. dans tous_
les temps.
Le ûeu't de Saqui ell: donc Noble;l il a dtl êere taxé
comme tel; la taxe doit coaféquemment être confirmée:
mais cel~ .ne 'fuffit point; Chabot doit être puni & de lui
avoir contefré· fa Nobleife-, & de l'avoir traité d'oppreffiur
dans ·des Mémoires. La fimple.fdénégation e-fr une injure,
pui(q~'elle tend à privei'.\In homme rde fon état.
'
,Arrêt du 9 Juin 1779, au' râpport 'de Mr. le Confeiller
de' Char,leval, qui mainrient le fieur de Saqui dans fa Nobleffe, qui rejette avec dépens fa requête en fuppreffion &
én "amendè', & :-qui orclolln!!lrq 'à"!es" fraïs .l'efC.eur inférée'
daris le téfiament,.de [owperel(era réparé ,-&Ique la qualité
de Bourgeois ferà ful1fiiruée à:-Çellecde Noble. Ecrivant Mes'
Cauvet & Sauvere.
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On ne peut prouver par témoins le 'paiement d'ltrle créance
éc"rite, jùr-tout fi la [omme qu'oll dit avoir été payée excede• t'oo liv.
1
E 7 Juin 177'), demande :dé la part d~Anne Long, époure
libre dans fes aél:ions de Pierre Roubaud, Cha.rretier
du lieu d'Auriol, concre Joac~irn, Jean & André Long fes
freres, Ménagers du lieu de Roquevaire'- en paiement du
legs de 800 liv. a elle fait par fan pere~, avec intérêts depuis
le jour de fon mariage, fous la déduél:ion de cous légitimes
paiemens dont ils jufiifieroient. Le '~4 Juillet, Sentence.
endIle par déf<\uc. par le Jpge de. Roquevaire,. en exécu,
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tion de laquelle il fut fait un commandement & une failie,;'
Le 27 Mars 1776, les freres Long~ l'affignerent à comparoître 'dans l'Erude de Me. Crifl:in, Notaire à Roquevaire,
à l'effet de recevoir ce qui lui étoit légitimément dû des
fucceffions d·e [es pere & mère; ils lui oppo[ent des paiemens, elle les conrefl:e. Ils pré[enterent le 24 Juilleç 1777
une requête au Juge d'Auriol, & affignerent leur Cœur pour'
voir ordonner qu'elle concéderoit quittance des 800 liv. a
elle léguées par Pierre Long [on pere, autrement que la
Sentence qui interviendroit leur [erv,iroit de quittance.
•
Par uni: requête incidente du 12 ,Septembre [uivanr, les,
freres Long demanderent de faire répQnçlre cathégoriquement leur Cœur & [on maJ;'Î [ur les diffërentes Commes qu'ils
di[oient leur avoir payées, & par Sentence du 23 du même'
mois, les répon[es cathégoriques fu;ent- admires & en[uite
,
pretees.
""
..
~Le 21 Août', 'les·, treres '<Long 'préfenterel)t' U\1.e requête
incidente, pour être rerrus à prouve;r, tO. que leux; Cœur avoit
J:erru un trouifeaiI au, moins de lOO ljv.; 2°; qu'elle ,!voit
occupé avec [on mari pendant dix ans des Jlppa,rtemens dans
la mai[on paternelle, fous le loyer de 30 liv. par an;
3°. qu'elle (Ivoit déclaré à Mre. LQJ)"g, P'rêtre, avoir rerru 660
liv., laquelle Comme elle étoit en état de paffer en déduétion
de [on legs; 4°. qu'elle avoit,dit à plulieurs per[onnes qu'elle
émit payée de [on legs.
Dans cet état des cho[es,· Anne Long évoqua l'Înfl:anée
pardevam la Cour. Les freres Long pré[ent~rent une requ~te
incidente en 1778 en appel de la Sentence de déf<jut rendue
par les Officiers de Roquevaire le 14 Juillet 177S'
Les freres Long convepoient 'que la p~e.uve voçale -n'eft:
pas recevable, quand la- cho[eJexcede la valeur de 100 liv•
. C'efl: la di[poGrion de l'art. S4 de l'OrdQonance de MQulins,
& de l'art. 2 du titre, 20 de celle de 1667, ,;ontraires à la
:Loi in exercendés liti/Jus rs;:' E;od. de fide i{lflru.mentoru.m,
qui admet, à .défayt de: tiuré, la preuve te!hmoniale, .à
quelque· LOmme· que, la dlo~ conten(ieu[e puiffe monter.
• Mais., fuivant les frere~ LO.l1g, ,erte regle [ouffre plu~eurs
exceptIons %
.
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PAL A 1.S ~ D E
17
P'It 0 VEN C E;
exceptions, qui confiil:ent entr'autres ~n ce qüe la preuve
par témoins eil: tolljours re~ue , quand il y a un commencement de preuve par écrit, quand il y a dol, fraude', mauvaife foi, expilation, fouHraél:ion, enlévement, vol oc
autres cas femblables.
D'après Bornier, fur l'art. 3 du titre 20 ci-delfus cité, la
raifon pOlir laquelle la preuye par témoins dl: re~ue, lorfqu'il
y a commencement de preuve par écrit, & que cette preuve'
n'eil: ordonnée que pour fortifier l'écriture, eH: que l'art. 54
de l'Ordonnance de Moulins étant contre le droit commun,
doit être plutôt reil:reint.
.
Telle eil: encore la Doél:rine de Loifeau, des Offices, liv.
l, chap. il, nO. 62; de Baquet, des droits de jull:"ice, chap.
9, & de Mornac fur la, Loi certi 9' §. quoniam, ff. de reDus
creditis, fi certllm petatur, qui dit que le moindre commencement de preuve par écrit fufht pour faire admettre la preuve
vocale.
Ce principe ainfi pofé, les freres Long établilfoient pluGeurs commencemens de preuve par écrit; le premier, fur
le teHamenr de Pierre Long, par lequel il avait légué les
fruits de fan héritage à fa femme, à la charge de nourrir
& entretenir tous fes enfans. Or, il eil: cerrain qu'Anne Long
avait, lors de fan mariage, des hardes & effets de la valeur
de plus de 300 liv. Douze particuliers do lieu de Roquevaire.
avaient décbré pardevant Notaire, qu'Anne Long étoit trèsbien nippée, & qu'elle avait un troulfeau précieux.
Comment Anne Long & Pierre Roubaud ont-ils pu [e
déterminer à [e parjurer I\m & l'amre dans leurs réponfe~
cathégoriques, en dénianr -d'avoir re~u un troulfeau? A qui
perfuadera-t-on qu'une fille, légataire d'une fomme de 800
liv., n'a re~u aucun troulfeau, & qu'elle s'dl: mariée aveQ
,les haillons qu'elle avait [ur le corps?
Les freres Long tiraient un [econd commencement de
preuve par écrit du contrat de mariage de Marie Long, du'
26 Février 1758, duquel il réfulroit que [es hardes montaient.
à 3')0Iiv. Or, fi une fille en fe mariant eil: cenfée .apporrer
troulfeau à fon mari, il eil: conHant que lor[qu'il n'ap-.
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paroit pis de ce même trouffeau, on en fixe la valeur fut
le même pied qùe celui qui dl: porté par le contrat de mariage d'une des fœurs, Ol! fuivant l'importance de la dot, ou
à connoiffance d'Experts, aina que l'obfervent Ferriere fur
Guipape, décif. 468 i Faber fur le Cod. tit. de jure dotium;
Boniface, tom. 4, liv. 6, tit. 2, chap. 2; & Decormis, rom.
2, col. 367; & cela quand même le mari aurait lui-même
fait les hardes.
Les freres Long ajoutoÎent que pour être admis à la
preuve vocale, filr une chofe dont le prix excede la valeur
de cent livres, il n'eil: pas néceffaire d'avoir un corn menc'ement de preuve par écrit, il fuffit qu'il y ait .dol de la
part de celui contre lequel on demande cetre preuve. C'e{!:
ce qu'obfetve Bornier fur l'art. 2 du ritre des faits 'lui gif!ènt
en preuve, de l'Ordonnance de 1667; Baffer, rom.
liv.
tit. 28, chap. 4; & Brillon dans fan Diél:ionnaire des Arrêts,
verb. preuve, n°. 110.
. De quel fecours peut leur être aujourd'hui la dénégation
d'Anne Long & de fon mari contre tant de rirres? La
Loi, toujours fage, prudence & furveillante, a voulu que le
long filence du créancier, fans former demande de ce qui lui
eH dû, faffe préfumer le paiement & l'exrinél:ion de la dette;
aina le veut la Loi procula 26, if. de prohationihus & prœjùmpt., fur-tout lorfqu'il s'agit d'une fomme importante due
par le frere. Mr. Le Pretre, cene. l , chap. 7, obferve que
pour préfumer qu'une dette a été éteinte ou remife contre
celui qui la demande, il faut qu'il y ait confanguinitas &
conjunc7io perfonamm, & longi temporis taciturriitas.
Dumoulin. eil: tellement pénétré du poids & de la faveur
que doit avoir une pareille préfomption, qu'il foutient en
fan Confeil 37, que c'eil: de la part du créancier un vérirable dol d'avoir attendu long-remps après le décès du débiteur de former la demande de ce qui lui eil: dll, ce qui
ne peut avoir pour but que d'enlever la preuve du paiement,
ljuoniam dolus prœfùmitur contra eum 'lui diJlulit agere, donec
periit prohatio; ce qui efl: encore décidé par la Loi 12 5 J'
if. de regulis juris.
l,
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PALA~S
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~RpVENCE.
1:9
Il efl: efl: encore une exception non moins péremptoire
( continuoient les Freres Long); elle confi!l:e en ce que la
dot efl: préfumée avoir été payée au mari par fon !ilence
de dix ans fans en former demande. L'Empereur Ju!l:inien
ordonne d'abord par fa NoveUe 100, chap. l , que fi le mari
ne retire point dans l'efpace de deux ans la dot de fOll
époufe, fa négligence ne pourra lui être oppofée, & il aura
aétion d'en demander le paiement i mais s'il a laiffé paffer
dix ans dans un profond !ilence, fans iptenter fon aétion
& introduire' fa demande, il ~efl: plus reçu à fe plaindre,
ni à demander d'être admis à'la preuve ,qu'elle ne lui a pas
été comptée. C.'eft ce qui ell:, encore répété au chap. 2, &.
ce qui e!l: obfervé par Gueret fqr Mr. Le Pretre, cent. 3,
chap. 67; par Brodeau fur Louet, Jett. D, (omm. 19; par
Decormis,' tom. 2, col. 475; par Cate/an , liv. 'f, chap. 46;
-par Anne Robert,' relium judiç(ltarum, lib. 4, cap. 19; par
Mafuer, tit. des ,exceptions, in fi'le, ~ paf Bilquet, des droits·
de juflice, chap. 1 S, nO. 60.
En fuppofane que cette ft'mle de titres, tous plus folemnels 1 corroborés par les aveux des Adverfaires, appuyés pat
la fa)TIil!e entie-re, foutenus par la notoriété publique, &.
fortifiés par J'autorité de la Loi, ne fuffent pas affez puif~
(ans pour ju!l:ifier entiérement ce paiement, pourroit-on fe
refufer de les recevoir pour commencement de preuve par
écrit, &. exclure la preuve par témoins?
Les Auteurs les plus féveres contre la preuve par témoins
Ce réuniffent tous à fontenir qu'elle doit être admife, non
feulement lorfqu'il ya un commencement de preuve par éCliç,
mais encore fur les moindres apparences de la vérité du fait
qu'ou avance. C'e!l: ce qu'obfervent Danti dans fon Traité de
la pteuve par témoins, part. 2, chap. l, pag. 3, &. chap. 1 1"
pag. 134; &. pefpeiffes, tom. 2, pag. SI 7, col. 2 in fine.
C'e{l: ce que la Cour a décidé par Arrêt rendu en 1756,
au rapport de Mr/1e Confeil1er ç1e Thorame dans ces cir.
confl:ances. Par aè1:e du r8 Oétobre 1749, la Dl1e. Vigne
vendit au fieur Coquel, Perruquier, une maifol1 à la rue dll
Pontrnorea\l, au prix de 9000 liv., dont 953 liv. comptant)
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18'47 liv. furent indiquées, &: les 6200 liv. reltantes lui fu....
rent laiifées à conltirution de' rente au denier vingt. Le 20
Juin 1714, la DUe.. Vigneexpofa clame'ur, fit procéder à une
failie de meubles, & affigna le lieu'r Coqüel en condamnation
de 93'c> liv:pour trois années d'arrérag~s de ~enlion échus, fous
la déduél:ion _1°. dé 120 liv. qu'elle déclara avoir relj'ues en'
parties brifées & fans quittance; 2°. de 300 liv, du montant
d'un mandat qu'elle avoit fait, & réduifit par-là fa créance
à ') la liv, Sur l'intimation de la faiiie, le lieur Coquel déclara qu'il fe pourvoirait en caifarion, & le 20 Juillet fuivant
il préfenta fa requête, qu'il fonda 1°, fur ce que fa femme
ayant eu quelque conteltation avec -la DUe. JVigne, elle la
menalj'a de l'en filire re'pentir, en faifant condamner [on mari
à payer une [econde fois les penlions dont il n'avait aucune
quittance; 2°. [ur ce que quelque temps avant le mois de
Juin, la Dlle. Vigne pria la femme dù -lieur Coquel de lui
faire prêter huit louis au fieur Poujol; d'où il concluoit qu'il'
ne devait rien à la Dlle, Vigne, puifqu'au lieu d'emprunter,
elle fe [eroit adreifée à lui pour fe procurer fan paiement. Par
un expédient il prononlj'a la calfation de la failie avec dommages-intérêts, &- demanda fubfidiairement d'être admis à
prouver par témoins qu'il avoit payé, Par Sentence du 20
Juin 17') S, la preuve demandée par le fieur Coquel fut rejettée avec dépens. Il appella de ce Jugement pardevant la
Cour, _& par l'Arrêt la Sentence fut réformée, & le fieur
Coquel fllt admis 11 la preuve.
_
Anne Long répondoit qu'il elt prouvé par écrit que [es'
freres n'ont pas acquitté le legs de 800 liv. qui elt [a portion
légitimaire; que les ayant fait affigner en paiement & ayant
obtenu une Sentence qui leur fut lignifiée, ils affignerent leur
fœur pardeVaht un Notaire pour recevoit ce qui lui était légitimériient dû, & leur en concéder quittance; ils ont donc
reconnu par-là qu~i1s étaient encore débiteurs d'Anne Long,
Cet aveu elt conligné dans un aél:e riere Notaire; cet aél:e fait,
preuve, & une preuve 'écrite; il eH donc prouvé par écrit,
qu'ils n'ont pas acquitté le legs de 800 fiv,
L:l preuve vocale, -n'étant ordonnée que pour fortifier
�nu
PALA1S
DE
PROVENCE;
21
l'écriture, il eil juile & régulier que cette preuve foit ordonnée, pour éclaircir ce qu'il pourrait y avoir d'obfcur &
d'imparfait. Cependant tous les Jurifconfultes eilimem qu'elle
ne doit être admife qu'avec la plus grande circonfpeél:ion.
Mornac eil le plus relâché de tous les Auteurs fur cette
matiete. Danti dans fes obfervations fur' Doiceau, réfute cet
Auteur; iL réCulte même de cette réfutation, que dans la
pratique, la Doél:rine de Mornac deviendrait deilruél:ive des
aél:es les plus facrés: Dicimus prohibitum non elfe ediélo regio
probationem per tefles in fumma qua; celltum libras jùperat ,
fi vel talltillum fcripto cui fides (ldhibeatur, de re cOlUroversâ
cOllfliterit.
D'après ce principe, il fuffit qu'un écrit digne de foi touche
même légérement l'objet du litige, pour que la preuve vocale
foit admiffihle; mais il faut que cet écrit touche l'objet qui
eil en litige; il faut que s'il s'agit d'un paiement, l'écrit
touche le paiement qui eil in lIuhe, pour qù'il puiffe être
regardé comme un commencement de preuve par écrit. Or,
fi la prétention des freres Long était admife, il s'agiroit·
de prouver Ii les 800 liv. qui ont été l.éguées à Anne Long,
ont ou n'ont pas été payées lors de fon mariage ou après
fon mariage. Le commencement de preuve qu'ils rapportent, eil un monceau d'atteilations auffi inutiles que fufpeél:es.
Ces témoignages font étrangers à Anne Long, fufpeél:s
d'après l'Ordonnance. Il eil abfurde de vouloir en tirer uri
commencement de preuve par écrit. Il n'eil point d'obligation, point d'aél:e qui liât, Ii· on pouvoit le faire dépendre
de la preuve vocale à la faveur de quelques témoignages que
l'on rapporteroit par écrit. Les attefbltions que l'on rapporte, font non feulement illégales & fufpeél:es , mais elles
font encore inconcluantes, dès qu'elles préfentent des ouidires, lorfqu'il faudrait des faits, \à où l'Ordonnance & la
faveur de la légitime, la force du teilament & les aél:es du
27 Mars & l Avril ne fe réuniraient pas 'pour repouffer
une voie auffi fufpeél:e & auffi contraire au drait public.
Livoniere dans [es regles du Droit Français, tit. 9, nO. 6,
affirme que la preuve par témoins d'un fait qui tend à dé.,
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truire une obligation écrite, n'eH: pas moins prohibée que
la preuve contre l'obligation écrite; & la preuve vocale que
les freres Long follicitent, auroit le double effet de détruire
une obligiition écrite, & d'être contre une obligation écrite.
Danti, addition au chap. l de la preuve par témoins, appuye
, la même maxime par des regles fondées fur l'intérêt public,
& le péril qu'il y auroit à faire dépendre & le fort des'
contrats, & la fortune des citoyens de , la preuve vocale. Boniface , tom. l, liv. 8, tit. '"'7, pag. SIl, efl: du même avis.
Si la Loi regarde la preuve vocale comme inhabile à prouver
le paiement d'une fommeexcédant 100 liv., par la facilité avec
laquelle on peut gagner des témoins; fi le bien de la fociété
a demandé que les obligations contraél:uelles ne dépendiffent pas de la preuve vocale, ce même intérêt de la fociété
s'unit à la Loi pour repouifer les freres Long, qui vi~nnent
en fraude de ta Loi amonceller des témoignages fufpeél:s,
pour priver leur fœur d'un droit auffi facré que l'efl: celui
de la légitime.
Par Arrêt du 18 Février 1780, rendu au rapport de Mr.
le Confeiller de Saint-Marc, les freres Long furent déboutés
de leur Requête; la Sentence des Officiers de Roquevaire
fut confifl~ée, avec dépens. Ecrivant Me. Reibaud & Audiffren.
Z2.
A. R R Ê T
IV.
Le Lieutenant de l'Amirauté peut-il connoltre de la réclamation des marchandifes arri'Vées par mer, & tranJPortées hors
du Vaiffiau?
.
.
E Capitaine Gayet arriva à Marfeille en Avrill 1777;
venant de la Guadeloupe, oÙ il avoit chargé pou,!' compte
du porteur du connoilfement quatre barriques & un rier90n
de fucre; les fleurs Gerin, propriétaires du chargement du
Navire, re9urent les barriques de fucre, & en difpoferenr.
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2.3
'Le 2. Novembre 1778, la Dlle. Villecroze fe pourvut aux
luges-Confuls en refticution des barriques fucre, & à défaut
en condamnation de la fomme de trois mille livres.- Elle obtint une Sentence de défaut contre les fieurs Gerin; ils fe
pourvurent en rabattement, & propoferent le déclinatoire,
dont ils furent déboutés; ils apppellerent pardevant la
Cour.
On difoit pour eux, que la demande en délivrance d'une
marchandife que la Dlle. Villecroze prétendoit avoir été
chargée pour fon compte, n'avoit pu être portée qu'au Tribunal de l'Amirauté de Marfeille, auquel elle efr attribuée
expreffément & exclufivement à tous aucres Juges, fuivant
l'Ordonnance de la Marine, liv. l , tit. 2, art 1 & 2.
L'aél:ion de la Dlle. Villecroze ne tendait à autre chofe
qu'à la délivrance des quatre barriques fucre, à la charge
d'en payer le frêt, droits du Roi & acceffoires; elle auroit
pu la former contre le Capitaine Gayet lui-même à l'arrivée
du Navire l'Antoinette, en vertu du connoiffement qui étoit
en [es mains; les fieurs Gerin étoient d'ailleurs propriétaires
& armateurs dn Navire l'Antoinette; à ce titre, ils ne fai[oient qu'une feule & même perfonne avec le Capitaine Gayet
vis-à-vis des confignataires des marchandifes chargées fur le
Navire; ils étoient folidairement obligés de les délivrér aux
véritables propriétaires, ou d'en payer la valeur, comme étant
tenus du fait du Capitaine, fuivant h difptJfition littérale de
l'Ordonnance de la Marine, tit. 8 , art. 2.
Il n'y a donc aucune différence à faire entre le Capitaiue
Gayet, maître du Navire l'Antoinette, & les fieurs Gerin,
armateurs, fur la compétence de la matiere. Si le Capitaine
affigné pardevant les Juges-Confuls avoit été fondé à demander fon renvoi au Tribunal de l'Amirauté, par une fuite
rléceffaire du même principe de folidarité établi par l'Ordonnance & de la nature de l'aél:ion intentée aujourd'hui éoIitrè
les lieurs Gerin, le déclinatoire par eux propofé ddit être
favorablement. accueilli, parce qu'ils ont loujôurs la qualité
de propriétaires & d'armateurs, qu'ils n'ont jamais ceffé
d'avoir, & que les quatre barriques fucre font en leurs mains.
�~
JOURNAL
Or, l'Ordonnance de la Marine, liv. 1, tit. 2. de la compétence des Juges de l'Amirauté, déclare que toutes aaionsqui procedent des chartes parties, connoiffemens ou polices
de chargement, font de leur compétence.
On convint pour les DlIes. Villecroze du principe ,que le
Lieutenant de l'Amirauté etoit feul compétent de connoître
des contefiations qui s'élevent en(uite d'un connoiffement ;
mais elle foutint que ce principe n'étoit point ap,plicable 11
la caufe, les circonfiances en étoient différentes; ce font
elles qui ont déterminé fa conduite; elle les invoquoit encore, pour établir la compétence des Juges-Confuls. Si
les barriques de fucre fe trouvoient encore fur le Vaiffeau,
la DlIe. Villecroze n'auroit pu s'adreffer qu'au Lieutenant
de l'Amirauté; mais les barriques ~yant' éré enlevées du
Vaiffeau, & tranfportées dans un magalin, le changement du
local a fait changer le Tribunal devant lequel elle avoit à
fe pourvoir. C'ef!: un objet de commerce réclamé par des
Négocians, qui ne pouvoient avoir d'aurre Tribunal que la
Jurifdiaion Confulaire. Ainli il y a lieu de réclamer, pour
l'avantage du commerce, toute la faveur qu'on lui a accordé,
foit dans les délais, foit dans l'exécution de fes Jugemens ;
elle deviendroit inutile, fi les parties avoient le droit de propofer de pareils incidens; la fraude & la mauvaife foi trouveroient des reffources. D'ailleurs, dans la caufe dont s'agit,
les freres Gerin ont éré entendus; la Sentence dl: claire à ce
fujet ; elle déboute du déclinatoire; elle ordonne que les.
parties plaideroient fur le fonds.
Me. Meriaud, Subll:irut, obferva que les quefiions de dédînatoire font des quef!:ions de fair. S'agit-il de la qualité
des pa'rries, on difcure leur érat; les preùves réciproques
dérerminent le jugement de compérence. S'agir-il de réclamer le paiement de quelque objet, on examine les circonfiances dans lefquelles la demande efi intervenue.
L'art. 2. du rir. 2., liv. l de l'Ordonnance de la Marine,
veut que toutes les aaions qui procedent de chartes parties,
a1fréremens Ol1 noliffemens, connoiffemens ou polices de
chargement, frêt ou nolis, engagement ou loyer de Matelots,
&
�.
nu PAtAIS. DI!! l'iRovENCIl:
''-1
& 'des vitmlilles qui leur feront fournjes-pour 'leur nourriture
par ordre du maître pendant l'équipement du Vaiffeau, enfemhIe des polices d'affurance, obligation à la 'groffe, aventure ou
à retour de voyage, & génér"lement .sie tous cqntrats con~
cernant je commerce de la mer, fojenrc de,la compétence
du Lieutenant de l'Amirauté, nonobHaq,t tolItes foumiffions
& privileges contraires.
, (J
•
A l'époque de cette Loi,' .plulieurs conre!l:ations & plulieurs doutes s'éleverent fur la derniere partie de cer article;
-Les Juges de l'Amirauté prétendirent que leur ,Jurifdiél:ion
.s'étendoit à rouç ce qui P04voi"t i1vpir quelque rappor.t, quoiqoe éloigné, 'à un [1ir maririm,t: ;I!ils .youloient y comp' endre
les 'leptes d~s march'Jndifes, par ,cela (e.ùl ~qu'elles ,_aYoien~
été tranfpoqées par mèr.
,.
)
.
, Le.!' Jùges ordinaires ,& les Jljges.-Çontuls fomenoient 'llu
iCQJ)t.r'liJe, que la J]Jrifdiéèion de l'A)J11ir,auté çlevoit être bornée
.aux vente,st& autres C0l)trat~ <co.lJèie.rmln~lles marchandifes
:qui.,,Côpt )t;~ap.(!'o.rt~ès &{.eovpyées P'!f rmer ènrre .perfonnes
,affoc'ié~s', pour en partager les pr06rs ou les pertes. La ~u:
rifdiél:io.!l Ç9pfillairê Ce fendqit fur-tour fur les Lettres-pa-/ _te!.1t~s deJqn établiffement du 8 Mai 1564-, & fur l'Edit dé ChâJ~~aubrjHal1d t1u mo)s~d,iOéèobr~1 1565, qui d,onnent,le droir au)'
:;~ugês-Ç.Qlifuls de cOnlibÎrre de',tQl;ls p,ro&s -& diffërens entre
Marchands, loit qu~. les difl;érel]s .pro<;<:dè]lt d'obligati.ons:,
l,ç;éd.ûle~, réèépi(Tél, lettres dejc!l~ngeJ' I(W crégit, tranfJ?5Jrt de
~.I}l'lrchanPifes, p,rivariye,menr à·tous autres Juges, ce qui aura
lieu ( ajoure le même Edir') /aÎlt par mer que par terre.
nI ,Ces, dif{érentes Loix, ql;le .,ch\!c.uq iQterpréroir à fon avan~tag~, ;donl1l"rent lieU.} t'Edit ,d~,I7tIJ , i.l1terp,rétatifsje l'~rr•
• JI. du fi~. a. de l'Ordonp 'nc~" d~. la Maril]e, 5,ui feulr fixoit
la compétence de l'Amirauté. Cet Edir borne (es QifpQ(j.tians en faveur des Juges de l'Amirauté aux entreprifes con.cernant le commerce de la mer, relatif à la navigation &
aux contl'ars qui ont pour objc;t les tranfports des marchan.
difes par la voie des Vaifféaux. On n'y voit nulle attribution
des aétions qui s'intentent entre Marchands à l'occalion du
trafic de ces mêmes marchandifes; la connoiifance en doit
D
�!l6
•.
,1]'0 U R N ~A .E'
donc demeurer au'x '}oges-Confuls, qui ne poprrciièl1t 'eh être
" -dépoûîHés que .par une -dérogatioh expreffe aux Edits de
[1564 & IJ'S 65 qui la leur 011.t expreffément attribuée.
· La Dlle. Villecroze réclame quatre 'barriqu,es & un tierçon
fucre qui Je trouvoient embarquées fur le Navire à la' Gua'<faloupe 'poùr -fon -I!ompte; !h preuve en efl: dans fon connoiffement: le Capitaine devoit fans doute lui expédier les
'barriques" fui feul 'èn avoit le droit; ce fut à lui que la Dlle.
Villecroze s'adreffa 'pour lùi en fàire 'l'expédition. Ldrfqu'elle
apprit que .Ies liel1rs Gerin, armateurs du Navire., avoient fait
·tra'nfpol'ter le's inarchantllfes Bans un de 'Ie'ur magalin , elle leur
fen fit la tlémanâe-I'~ fur leur- reflis elle fepourvut pa'rdevant les
:Juges-Cbnfuls j c'êtoien'tJles·feûls 'Juges compéréns j il y'avbit eU
novation, cha.ngement; les barriques dé' fucre n'étoient plus fur
Ile VâH'feaiJ; le' Capitaine- n'étolt point attaque: ce n'étoit point
'en vertu du-côrtnoiffement que la Dlle. Villeltroze·les rêclamoir;
~elle fe 1Jlaignoit 'de·!)!enlévement -des objets qui lui apparte[hôient-,'& fur.lefquelsJles 'freres'Gerin h!avoienc aucûn droit;
'laccbmmunicatiô'n au con'nbiffemem ne pouvoit point établir
-la 'com'pétence de l'Amiraufé. La Dlle. Villecroze a donc
'pu" réclarrter!les difpofitio'ns de \'Etlit de 17 il; & ë'efl: ce
;qui a été Lugé ,pâr l'l'\rrèt ren'du le 0: 3 Septembre 17'2.9,' 'en
êfàv~ur des fiëu'rs <G"eri'nains 'de la ville de =Marfeille, 'èolh e
, •
fJeàn-Francoi-s 1Riear'd"-de la même '\Tilhi.' j
Me.. ' Meriautl1côn&iut à1ce 'que -l'appellàtion\ fût. mife aù
'néant, & que ·ce·dont' éft appél, tî~: & fordt fonplein .&
emier' 'effét.
" ,
.'
,\
Arrêt rendu le 18 Févribr '178&; prononcé, par M. le
·Premier JPréfiden't',. èoiiformeaùx condu'fioÀs-, les frèrès
·Gerin ltonliâmnes Jaux <I~pe!l'ls;>~Plàîd~~t 'Mes. G<l'ffier &, Si.
•rneon fils.
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Le Procureur du. Roi. poprfuivant en forct;. d'une dénqnc.iatipn.
ou d'un délaijfement, peut omettre dan.s..fJ:i rt;quête les.. faits
étrangers ou inutiles infèr-és, dans la c!.énoRcjatio.n ou dans
la requête de la parti~ civile.,
l)oit~on lire à ch4qu.e témoin 4a re'll1ête 4e plajnte, à peint; de
nqllilé, & doit-il en être fait TTJeT)tio.n exp.reffi dans chaque
dépofition ?
On ne doit joindre à la procé.dur~ que Zf!S pi~ces fervant à
convic1ion.
La déclaration que fair, le luge d' ahfle~ir, n_~ 4,pit conterùr
rien d'ù;ljurieux.
AR Arrêt dt: la.Cour du 'i fév,~it\t 1778, il (\lt déclaré
y avoir abus dans la plainte, l'infiruÇl;ion, le jpgement·
& tout,e. la procéd.ure c1aufl:rale prife à la requête du Pt<te
H. contre le Pere A. tous les delJx Religieul' du même
Ordre, fauf &.. ~éfervé au peFe H. de fe pourvoir pardevant
qui de droie, permis de faire réouir les m.êmes témoin,s;.
&, faute pllr le Pere H. de for(l1er f~ plainte qan.~ le mois,
permis au Procure.ur du Roi au Siege de Draguignall d'en
fajre la; pourfuite. Le 10 Mars mêm~ année,. I~ Pere H.
rendit plainte; il demanda l'information, la jon.Çtion d'une,
foule de· pieces·; déclara qu'il n'eQten.dl\lit point être partie,
& délai1fa les pourfuites au minj~ere plÙ>lic, fans préj\!Qice
çe fes domm.age.s-intérêts.
.
Le Pere H,: ne joignit p;lS les pi.eces' q1l'il éno0'i0it dan~
fa requête; le Procureur <tu ,Roi requjt l'il1forl'n!!tion fur la
plainte du Pere H. fauf apr~s la rémiŒon au_ Greffe dès
pieces'y mention.nées, de requérir la j0nél:ion de celle~
qui avoient [rait à Ja plainte. ])écn:t çonforrne.
Quelques jours après, le FroCIl~e\lr, dll Roi préfenta une
nouvelle requête, dans laquelle il expofa que celle du Pere
fI. étoit .li flJrcbargée d.e. faits inljtiles & fi diffufe, qu'il
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. ~., •.. 1" 0 U R :N A t
étoit indi[penJable de la fupprimer-; que les faits étrangers
feroienr perdre de vue les elTenriels; qu'il falloir en préfenrer
une autre, révoquer. le décret du 10 Mars, en rendre un
nouveau, & ne lailTer fublifrer la premiere requêre que pour
faire 'voir qu'il était indifpenfable de la remplacer. 11 rend
enfuité côrnpte de toures les circonfratices du délit donc [e
plaint le Pere H., difcure les pieces néceiIàires à joindre,
& requiert la révocarion du décret du JO Mars mis au bas
de la requête du Fere H. & l'informarion [ur la nouvelle
requête. Décret du 2.2 Avril conforme au}' condulions.
L'information efr prife; & le 2. Tuiller nouvelle requête
du Procureur du Roi, qùi demande' la .jonaion de plulieurs
pieces confondues dans l'immenfiré de celles de la procécédure' détllfu-él:! abu'fi.ve. Décrer conforme. Au bas de l'in-.
formation, les Peres A. & J. F. font décrérés d'affigné
par le Lieutenant-Criminel, lequel met au bas de l'information fon ''abfl:enrioh en ces termes : le dédare abflenir
pro modëfr'iâ dans la procédure criminelle ci-dejJùs, & cepend'â1Ù j'ai paraphé', ne varietur, l'état & rôle des témoins donné
par le Pere H. inJligateur, .& écrit de fa main, parce 'lue {on
exiflence prouve la légéreté avec laquelle ce Religieux hafarde
les faits les plus graves fans rai{on ni fondement; il prétend
'lue j'ai entendu le Pere R. d'riffice , & fans 'lu!il ait été
aifigné , tandis que ce témoin [e trouve le dix-neuvieme fur
ce rôle avec un intendit yigoureux, & qui me fit repentir d'en
avoir fait lec'1ure d ce Pere; tout le monde ifl coupable d
[es yeux; il [e plaint de Mr. le Procureur du Roi qui a
dreJfè la requête, de l'HuijJier 'lui a afligné les témoins, des
témoins qui ont dépofè , du Griffier. qui a écrit les déprfitions,
& enfin dt moi 'lui lès ai reçues & rédigées, &c.
Les s & 8' du même mois, les décrétés prêtetent leurs
réponfes pardevant le Lieutenant-Particulier; le 13, Sentence de procès extraordinaire; on l'inHruilit, & à la veille
du jugement le Pere H. demanda d'être re~u partie jointe
& interv'enanre, ce qui lui fut accordé par Seiltenc.e du 13
Oaobre 1778. '
.
.
En conféquence il vint préfenter requête au Lièutenant;
�nu
PALAIS
DE
PROVENCE.
'29
. & demanda qué quelques lettres du Général & touS les
aél:es de la procédure clauUrale &. aurres pir::ces de conviction fuffent jointes à la procédure prife à Draguignan. Le
Procureur du Roi conclut à ce gue cette requête tût jointe
au procès, pour, en jugeant, y avoir tel égard que de raifon.
Le Lieutenant-Particulier ordonna' cette jonélion par fon
décret du 13 Janvier 1779. Le Pere A. [e /pouryUt pardevant le même Tribunal en révocation de ce décret, qui fut
révoqué après .la plaidoirie des parties par Sentence du 2-6
du même mois, au chef qui ordonne la jonél:ion des aél:es
de la procédure clauHrale, des écrits & Mémoires du Pere A.
employés dans cette procédure.
Le pere H.. appelJa de cette Ordonnance, & d~manda la
fuppreffion de la déclaration d'abHention. On difoit pour
lui, que le Procureur du Roi,. au lieu de faire informer
fur fa requête, en avait fait une autre qu'il avait compofé à
fon gré, & fur laquelle les témoins avoient été entendus;
la requête du Pere H. avait difparu. En droit, le Procucnreur du Roi avoit-il pu [ubfiiruer [a requête à la fienne?
La partie publique ne peut changer les plaintes & dénonciations; c'eU ce qui a été jugé par l'Arrêt du Parlement
de Paris de l'année 17 13, rapporté par Lacombe, va. procédure.
Le prétexte dont s'eU fervi le Procureur du Roi, que
la requête du Pere H. étoit un verbiage, qu'il y avoit beaucoup d'inutilités, étoit le feul plauGble ; mais on peut répondre qu'il n'érait pills temps de changer; le [art de
cette requête était fixé par le décret de fait-informé mis au
bas; il étoit jugé par-là qu'on informerait fur cette requête,
En effet, il eU dangereux de donner droit de changer; il
peut en arriver de grands inconvéniens , [oit par prévention,
foit ·par abus; ce qu'on gagne en abrégeant, ne vaut pas
ce que la J uflice peut perdre d'un autre côté. Sous prétexte d'abréger, on a filpprimé des faits effentiels ; on en
a changé d'autres; on a réparé de la procédure, des pieces
dont le Pere H. avait demandé la jonél:ion.
Il n'y avoit point de faits inutiles, Pllifque. le Procureu~
�jO
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tI 11: N li L
du, Roi les avoit mis, dans fa requê'te ; ils émient lëuleme!1~ dénaturés. Ce fb'no les' vrllis· moyens· pOUI: égarer la. Juf..,
tice , brouiller les témoins & couper. le fil des· preuves.. Le
Pere H. avait demandé la jonél:ion de plulieurs pieces mentionnées dans fa requête; le Procureur du Roi, en fubfl:i- .
tuaüt la lienne, n'avait demandé la jonél:ion que d'une
petite' partie; il avoi~ privé par-là le Pere H. des preuves
& du bénéfice qu'il efpéroit trouver dans les autres. Orr
palTeroic. fous ftlence qu'on ellC changé pour mieux faire,
en fe concertant avec le Pere H.; mais on ne peut change·r arbic:r.airement "énerver &. dénaturer.
Second moyen,. On n'a repréfencé aucune piece aux témoins.; fi on avait joint toutes les pieces de la premie;e
l'equête du Pete H., dans. ce cas il y auroü nullité, pour
n'avoir repréfencé les pieces Jointes. N'y a\'oic-il point de
jonél:ion, nullité dans le décret pour ne l'avoir pas pronon..:
€ée. D'ailleurs dès le 13 Janvier il y avait une jonétion quelconque de quelques pieces.
Troifieme moyen. Défaut de leél:ure de la plainte, même
du Pr.ocureur du Roi, à prefque tous les témoins. L'Ord'011l1anCe ne l'exige pas, mais elle la fuppofe ;. elle eft de
droü univerfel. D'après les Réglemens de la Cour de tous
les temps on calTe les dépofitions qui tombent fur des faits
étrangers à la plainte (Arrêts de Rians & d'Ampus J. On
calTe, s'i-l n'elt point parlé de plainte (Arrêt de 174:6 qui
o'rdonne' de faire leél:ure). L'ufage (d.it le Commentateur)
dl d'en charger les dépojitions.
En matiere criminelle il fant faire nienti0n de ce qu'on
eft obligé de faire; ainfi j-ugé dans l'affaire du fieur de Pel iffre'r de Pierrefeu. Quand le plus grand nombr~ des dépofitions
eft infeél:é de quelque vice ,o~ caffe toue, même les dépofitions non viciées. C'eft le témoignage de Vouglans [ur le
titre 6 de l'OrdOlinan€e Criminelle, art. 1 t, n. 2 & 3. En
droit, les points eff,wriels one befoin d'êrre répétés à chaque préliminaire; les mors comme deJfus he difent rien de
précis, rien qlli enchaîne la foi {ilr le fait particulier.
. D'ailleurs ( continuait le Pere H. ) le Lieutenant a élevé
�DU
P A tIrs
:n Il
,p RO V IlNC I l ' , ' J f
contre moi un monument d'injl!fe ,& d'infamie dans fa déclaration d'abil:ention; il l'a rendu éternel dans un Greffe
& dans la procédure; la forme de fa déclaration ef!: outrageante ,la reduplication affe&ée ; le 'Juge doit expliquer fes
motifs, mais fans prévention, fans injure. Il irnporre pen
au .Pere H. que le Pere A, ait follicité cette déclaration;
-elle n'en eil: pas moins,dans <Ja procédure qui exif!:e entre
eux; elle donne au Pere A. un bénéfice de prévention contre le Pere H. dans l'arne .de tout Juge qui fuccédera au
Lieutenant, & qui jugera. Le Pere H. ,ef!: uutragé dans
une procédure qui eil: commune enrre lui & le Pere li,;
faaum judicis, faaum partis.
Dernier moyen. (Appel de l'Ordonnance du 26 Janvier.,
qui révoque le décret du 13). Il falloit joindre la pro'cédure c1auf!:rale pour les aveux donc le bénéfice ef!: acquis. Ceux dont il ne conf!:e que par l'alfertion du Juge
difparoilfenr; le Juge ef!: fans cara&ere; fan alfertian ne
,lie pas; mais l'aveu ligné, alfermenré ,peut en faire per,dre le bénéfice. On ne demande pas qu'on in!huife là-deffus,
-mais qu'elle ref!:e pour mémoire; le Juge ,verra les faits
fixés, pourra interroger d'après ces faits,;, il n'ef!: donc pas
.poffible qu'une preuve écrite foit enlevée. Ce feroit un abus
-énorme, fi le Juge étoit maître de retrancher d'avance.,
-par un Jugement particulier, des .pieces .qui .confratent le
corps du délit.
,
On répondoit pour le Pere A. qll'il n'avoit pas follici~é
<Ilabfrenrion du Lieutenant; qu'il ne l'avoit pas tléterminée.,
co&: qu'il regrettoit ,un Juge integre. Le Lieutenant avait le
"droit par l'ufage d'abf!:enir fans donner fes raifons..Par 1'0r, donnance, il devoit les donner. Les circonfrances l'ont
forcé de ' fortir des bornes de l'ufage, poui- Ce rapprocher
-de J'exécution des Loix; il a bien fait de rendre compte
des outrages qu'il a recrus, de faire connaître, une fois
-pour toûtes, le Pere H. Se départant du procès, il pouvoir fe,plaindre de lui. Eh quoi! un client audacieux calom·niera fon Juge, Je forcera' de -quiner [on Tribunal, parce
-que ce Juge iDtegre craindra d'y porter quelque reifenriment1
�3i
·JOURNAi
ou d'y paroltre environné" des foupçons ! & ce que le client
aura fait, le Juge ne pourra pas le dire! le Juge qui a
droit de verbalifer, de févir contre ceux qui l'offenfent,
n'aura pas pu, en négligeant la punition, fe contenter d~
configner dans la procédure qu'il quitte, les motifs de fon
abl!:ention ! Si les faits font vrais, qui ell:-ce qui blâmera
le Lieutenant de fa conduire? Sont-ils faux, il faut le prouver, avant de demander le biffe ment de la déclaration. Jufques
alors une entiere foi ell: due au procès-verbal du Juge; il faut
l'attaquer de calomnie, fe rendre partie. La Cour ne prof..crira' pas un aél:e qui en foi n'a rien d'illégal, qui el!: fait
en exécution de l'art. 18 de l'Ordonnance, & que la gravité
des faits auroit même rendu Iléceifaire indépendamment de
toute Loi. Cet aél:e fe fou tient par fa propre force; plus
les imputations font confidérables , plus le Pere H. el!: préfumé coupable; plus elles exigeoient d'être confignées par
écrit, plus il feroit befoin de les approfondir, avant de les
traiter comme injurieufes, & d'entendre le Lieurenant qtti
a fini [a dé 'Iararion par arrell:er que fi la Cour le Jugeoit
nécelfai"re , il éroit en état de prouver toutes le injures dont
il avoir été accablé.
Le Pere H. n'a pas dit qu'il pré.rendoit que l'on dût lire aux
témoins la requête longue & inintelligible qu'il avoit préfentée; il el!: sûr qu'il eut été inurjl~ de lire une requête rectifiée par celle du Procureur du Roi. Il y a plus: c'eut été Ulle
fottife & une nullité, parce qu'on auroit donné' lieu aux témoins
de vaguer [ur les fairs étrangers .qui y éroient cont.enus;
on leur auroit fait perdre, pâr.le long ehtortillage',q\li.en
faifoit la. conrexture , le point élfenriel ftir l~q(iel fils- avoient
à dépofer. On auroit de plus éommis nullité', parce qu'Ç>,n'
leur auroit préfenté une piece fLlr laquelle il étoit dit qu'il"
ne feroit ·pas informé, puifque le décret du 1'0 Mars por• tant l'information éroit révoqué. L'art. 8 de -j'Ordonn"nçe
de 1 670, titre 3, porte que s'il n'y a poipt de partie civile, les procès feront pourfuivis à, la diiigence'& rou~ le
nom des parties publiques. Le Procureur du Roi érant p<lr
(;onféquent , par le délailfement du Pere H., le feul aCCI)fateuf"
�DÙ
PALAIS' DE
PROVENCE;
33"'
Nteur; pou voit diriger la procédure & la plàinte fur les
faits qui iméreifoient véritablemem fon minifl:ere , & abandonner qes minuties que le reifemimem feul de la partie ci·
vil~ pouvoient relever. L'Arrêt rapporté par Lacombe étaie
dans un cas où on reprochoit au Promoteur d'avoir tû dans
la plainte ce· qui auroit rendu le délit privilégié, & donné
lieu à l'intervention du Juge Royal.
I:e Procureur du Roi a expofé tout ce que la requête
du Pere H.. comenoit d'elfentiel; il l'a dépouillée des rai10nnemens , des commentaires, parce qu.'il efl: mieux de
préfenrer des faits aux té.moins, fans leur faire voir la conféquel)ce ,& les induaions que 1'011 veut en tirer.
L'Ordonn~nce veut que les pieces fervant à la preuve
foiem joimes au procès; mais elle ne dit pas que la volonté de l'a~cufateur forçera le Juge à recevoir tout ce qu'il
lui, pr~fentera. Rien' n'exclut un choix judicieux de la parc
du. Juge " & tout le néceffite. S'il en étoit autrement, des
accufateurs jetteroient rou"!; les jours le plus grand embar, ras dans les procédures, en y verfant un tas de papiers
defquels ils .induiroient bien ou mal la vérité de leur accufation. Lors Ulême que tous ces papiers auroient été joints,
le Lieutenant auroit pu ne repréfenter que ceux faifant
véritablement preuve. Il y a plus : tOlites cès pieces confifl:oient en écritures, dont pas Une qui ,fût originale, & fufceptible par conféquem de la vérification & reconnoiifance
que l'Ordonnance, l'eue que l'on en faife. Le Procureur du
Roi, que le délailfemem ,des parties n'aifervit pas à fuivre
leurs idées & leurs caprices, eut donc raifon. de faire un
choix da\ls la multitude des pieces préfemées, '
Le Lieutenam, dans la premiere dépofition, li obferv6
toutes les formalités requifes par l'Ordonnance. II efl: dit que
la.leaure de la, plainte a été f\lite au témoin. Dans les autres,
il a fimplement dit, oui comm~ deJJùs ; . & au trelltieme témoin, comme il l'emendoit chez lui, il a répété ce qu'il
avoit dit dans la preilliere dépofition.
Au fonds, l'expreffion oui comme de.!füs efl:-elle infuffifante?
11 faud,roit pour cela que l'Ordonnance exigeât qu'il fera faie
E
�34
Jou
Il. N A
mention de la le8:ure en termes marqués & facratftentaux 1
fi oui comme de.f!ùs équipolle à cette mention, à moins
qu'il n'y ait des expreffions confacrées pour anef!:er la lecture de la plainte, il n'y aura point de nullité. L'Ordonnance n'a pas même exigé que l'on feroit mention de la
leél:ure de la plaintes mais l'oui comme de.f1ùs affure pleinement cette leél:ure, & fe- rapporte à ce qui a été fait dans
la premiere dépofition. L'ufage de Draguinan eH que l'on
fe fert des mêmes expreffions dans les dépofitions qui fuivent la premiere.
II ef!: certain que le Juge peut fe réformer toutes les
fois que fon décret n'a pas été contradiél:oirement rendu;
on a dans ce cas le choix d'appeller ou de fe rendre oppofant au décret rendu fans ouir partie; c'ef!: le fentiment
de Jouffe fur l'art. 3 du titre des Requêtes civiles.
La procédure dont on demande la jonél:ion a été déclarée abufive; elle n'exifie donc plus: car l'abus ef!: la plus
grande des nullités; il fuppofe à la fois incompétence - &
enrreprife. II feroit donc abfurde d'appuyer un jugement fur
une procédure abufive. D'ailleurs l'abus fut déclaré fur les
nullités & les irrégularités les plus fortes, fur l'incompétence, parce qu'il s'agiffoit d'un crime dom la fociété pouvoit feule connoître.
Quelle ef!: la regle, en matiere de caffation de procédure,
& lorfqu'il y a lieu d'inf!:ruire de nouveau? On donne la
procédure nulle comme Mémoire au Juge ou au Procureur
du Roi chargé de l'infiruél:ion; s'il y a des pieces fervant
à la preuve, on les tire de la procédure nulle, & on les
verfe dans la nouvelle; mais la procédure nulle n'dl: pas
jointe à celle qui la remplace & qui ne doit pas être nulle.
On ne joint pas comme aél:e de procédure, une procé..:
dure annullée à celle que l'on refait; elle efl: remife feulement pour Y" puifer le nom des témoins qu'il efl: permis
de réouir, & quelques notions pour les interrogatoires de
l'accufé; mais la partie civile ne peut en tirer aucun droit; le
Juge ne peut y ajouter aucune foi, & moins encore la vifer
& la regarder comme devant influer à fon Jugement.
�DU
PALAIS
Dl!
3S
PROVllNCl!.
Mr. l'Avocat - Général de Cali1Tanne obferva qu'il faut
'di!l:inguer deux fortes de pourfuites, celle du miniilere public, cellè des particuliers. Celle de ces derniers qui cherchent à fe venger d'une injure, d'une querelle, de quelque animofité particuliere ou de quelque délit privé, ne
peut pas fàire la matiere d'une accufation publique. Cette
aétion ne tient qu'indireétement ,à l'intérêt général, & le
miniilere public n'y eil, pour ainfi dire, que le furveillant
au nom de la focieté. Au contraire, dans celles où le miniilere public eil réputé partie principale, alors, ou fon zele
n'a pas eu befoin d'être excité, & il eil lui-même accu.fateur, ou le crime lui a été dénoncé, & foit par impuiffance ou tout autre motif, la pourfuite lui en a été dé..
lai1Tée. Dans les deux cas, il exiile un crime à punir; la
fociété doit être vengée; elle s'en repofe fur la vigilence
du minifiere impartial. Mais en même temps le' nom feul
de ce minifiere fixe les bornes de fes fonétions ; fi le plaignant ou le dénonciateur ne s'eil pas contenté de déférer
un crime public; fi l'intérêt de la fociéré n'a pas été le
feul motif qui l'ait animé; s'il a voulu faire pourfuivre un
délit' particulier par le vengeur de la fociété, il s'eil trompé;
le minifiere public ne peuLs'inveHir de cette, aétion & la
pourfuivre. Ainu, tout ce qui dans cette dénonciation ne tient
'pas à un délit qui intére1Te la fociété, ne peur être l'objet
des recherches du miniHere public; il. n'en doit faire aucun ufage.
Connoître le crime, faire punir le coupable, ou rendre
-à la faciété l'innocent, tels font fes devoirs. Comment
pourroit-il les remplir, s'il omettoit des circonfrances e1Tentielles du crime? Quel trifre & fatal privilege feroit=ce
donc accorder au minifiere public, que d'établir dans fa main
une balance arbitraire entre l'innocent & le coupable, au lieu
de la lai1Ter réuder dans les preuves par la pourfilite & les
'recherches les plus exaétes! Tout dans le dénonciateur & le
miniHere public doit être le même, dès que le délit imére1Te
la [aciété: accufat ion , objet, efprit.
Emre les mains du vengeur de la facié.té, tout acquiert
Ez.
�'36
t
<> UR N AL
un degré de vérité de plus; & Couvent; quand le. particli~
·lier agit, Ces pourfuites Cont guidées par des haines particulieres, ou par vengeance contre l'accuCé. Le minifiere public
ne l'eH: que par la haine du crime; il fe dépouille de tautes
les circonfiances étrangeres ; accufaceur public, il n'en quitte
jamais le caraél:ere; il éclaircit les faits, point de raifonnemens; ils pourraient n'être. pas jufies. Point d'ind~él:ions ;
elles pourraient être fauffes. C'efi aux témoins Ceuls à les \
faire. Il préCente les faits avec clarté; il ne veut pas qu'un
feul échappe aux témoins, tout efi précis; il ne perd p.as
de vue le délit; la vérité le conduit fans ceffe, & non la
fraude; le Coupçon Ceul ferait un outrage. Tels font les principes. Le Procureur du Roi de la Sénéchauflee de Draguignan leur a-t-il rendu hommage, ou les a-t-il enfreints? Le
feul fait fur lequel il fallait informer, étoit le vol, fes circonfiances & dépendances. Mr. l'Avocat-Général détailla
enfuite les faits omis dans la Requête du Procureur du Ro.i,
& prouva, d'après la leél:ure des deux Requêtes, que tous
les faits effentiels prétendus' omis par le tableau qu'en
avait préCenté le Pere H. étaient dans la Requête du Procureur du Roi avec la plus grande clarté, une précifion
bien heureuCe' & une éloquence bien rare. Point de faits
faux; point de faits changés. Rien donc que de régulier dans
la Requête du Procureur du Roi, rien qui néceffite le remede de la Loi', c'eft-à-dire , une addition & continuation
d'information.
.
Second moyen. On n'a pas lu la Requhe de plainte aux
témoins, puifqu'on n'en a pas fait mention. Le témoin a vagué; il n'a pu dépofer' 'lue fur des faits étrangers; .les circonfiances du délit lui olJt été, pour aÏJljz dire, inconnues.
Mr. l'Avocat-Général ne chercha pas à prouver la nullité
tirée du défaut de leél:ure de la Requête de plainte, &. ft
c'étoit une de ces formalités indifpenfables à la Cubfiance
même de la dépofition; il était convenu par tautes les parties que l'Ordonnance fe taifoit fur cette nullité; dès-lors
pouvait-elle être fuppléée? L'Ordonnance qui, dans le préambule de chaque dépofition, avoit ordonné à peine de nullité
�nu
PKLAIS
nE
-PROVENCE;
31
la mention 'd'une foule de mots, 'aurait-elle laiffé cette
nullité à l'arbitraire des Juges? Les nullités fom de rigueur;
ellés ne foLiffrent aucune extenlion; dès que la nullité n'eft
pas prononcée, la formalité peut être omife fans nullité.
Dans tous les Arrêts de Réglement, & fur-tout' dans celui
du Parlement de Paris de 173 l , on y parle de la leaure
de la Requête de plainte; mais jamais de la néceffité de
cette mention, ,à peine de nullité.
Dans la procédure dont s'agit, le Lieutenant, dans le'
préambule de la premiere dépolition , a rempli, dâns le plus
grand détail, toutes les formalités néceffaires; il a fait
mention de tout ce que l'Ordonnance prefcrit, de ce que
même l'ufage feul a confacré. La mention de la IllaUr~
de la Requête de plainte y,dl: expreffe. Dans les autres dépolitions des 28 premiers témoins, 'il Y dl: dit limplemen(:
dudit jour, an, au lieu t;. pardevant fjui deJfus, conjlitué lm
tel témoin produit, affigné {,' oui comme deJfus. En l'état de
cette procédure peut-on dire que la leaure de la plainte n'ait
point été faite aux témoins, quoiqu'il n~en foit fait aucUne
mention? Peut-on, en créant une prétendue nullité du défaut de mention de cette leaure, trouver que rien ne prouve
cerre mention? Que veut dire la claufe, comme deJfus?
.N'eft-ce pas à la premiere depolition que ces mots fe rap.portent, à cerre dépolition où la mention.de la leaure de
,la requête de plainte eft précifement exprimée? A quoi pourroient fe rapporter ces mots ,. puifque to,utes les autres for. malités requif<::s pa'r l'Ordonnance font ftriaement remplies?
En effet, ou le Lieutement auroir agi par ignorance, &
alors il n'auroit pas plus f~u qu'il falloit énoncer .la leaure
de la requête de plainte dans la p~emiere'dépofition, ou il
agiffoit par fraude ( ce qui ne peut pas fe préfumer ) & alors
,il fe fût bien gardé d'omettre la memion de cerre leaure à
chacun des témoins.
Quand ou dit que la c1aufe , oui comme deJfus, peut fuffire
& tenir lieu de la mention de la leaure de la requête de
plainte, c'eft d'après une foule d'Arrêts de la Cour; l'on a
les proçédures
prifes
au Siege de Dra,
"vérifié au Greffe
.
.
.
.'.
-
~.
�38
Jou
RNA L'
guignan depuis près de 30 ans; elles (ont dans le méme
Hyle, elles one eté cohfirmées par la Cour.
'
Mr. l'Avocat-Général examina enfuite ce qui regardoit la
jonél:ion des pieces; & quant à la forme de l'Ordonnance
done érait appel, il fixa, d'après raus les Aureurs, qu'elle,
érait reguliere. Le Juge peut fe réformer, quand il s'agit
d'une Ordonnance rendue [ans coneradiél:eur; l'appel &
l'oppoution font alors à la difpourion de celui qui fe croit
Iéfé, & cela même en matiere civile; à bien plus forte
raifon dans raute infiruél:ion criminelle, où divers articles de
l'Ordonnance permettent au Juge de fe réformer. Le Pere
H. , en préfentant fa requête, n'y joignit pas les pieces dont
il faifoit mention; auffi les concluuons du Procureur du Roi
porraient-elles ,fa/if, après la rémifJion des pieces ci-deJfus ,
de requérir la jonc7ion de' celles qui ont trait rI la plainte dont
il s'agit. Le décret ne prononce rien fur cette jonél:ion.
Dans la nouveIle requête, le Procureur du Roi dit que de rautes
les pieces remifes par le Pere H., il n'y a en original
qu'une lettre du Pere E. fon frere, & une autre de fa fœur,
qui ne peuvent former aucun degré de preuve. Falloit-i1
joindre le procès.:.verbal d'eifraél:ion faite à fon Bureau?
Procès-verbal fait par un Juge incompétent, après un in-tervalle de temps très-confidérahle qui avoit permis de changer l'état des lieux, & une foule d'autres pieces rames plus
inuriles & plus étrang-eres les unes que les autres au délie
dont il falloit avoir la preuve.'
Le Pere H. peut-il, après une pareille requête, fe plaindre de ce què le Procureur du Roi a cherché à écarter les
preuves? Peut-il dire encdre que les pieces de conv'iaion
n'ont pas éré jointes à la procédure, & n'ont pu être re.préfentées aux rémoins lors de leurs dépouE,ions? Puifque
cette jonél:ion a éré ordonnee; puifque d'après l'Ordonnance
elle pem avoir lieu en raut état de caufe, & que fi elle ne
l'avait pas été, elle pourroit l'être; pu ifqu'elle n'efi pas,
requife à peine de nullité vis-à-vis des témoins; pu ifqu'elle
efi lailfée à l'arbitraire du Juge; puifqu'~nfin cette repréfentation a eu lieu lors du récolement & des co.nfrontations:t
�'n E P Il 0 V II NeE:
39
c'êfi-~-dirè, là repréCeqtation des pieces qlli pouvaient l'être i
il eut été de toute abfurdité de repr-é(enter à des témoins
des pieces qui leur euffent été totalement étrangeres, qu'ils
n'auroient jamais vu ni connu & qui n'euffent pu donner
aucun inliice du délit.
Cependant l'inftruélion étant finie, & les conclufions définitives données, le Pere H. vient demander d'être re'iu
partie jointe & intervenante, & préfente enfuite une requêre
en jonélion de toutes les pieces quelconques produites depuis le commencement de l'affaire, de toutes celles qui
compofoient la procédure claufirale, non pas, dit-il, fimplement pour [en,ir de mémoire, mais pour mieux conflaur
le délit, tant permanent que fugitif, pour être les pieces exa. minées lors du jugement du procès. Le Procureur du Roi
cQnclut à ce que cette requête fût jointe au procès, pour,
en jugeant, yavoir tel égard que de raifon. Décret ~u même
jour qui ordonne la jonélion. Requête des Peres A. & J. F.
en révocation: Ordonnance qui révoque.
Le Procureur du Roi a fuivi l'intention de la Cour, puifqu'il a trouvé dans la procédure abufive, des pieces qui
pouvoient confiater le corps de délit qu'il a fait joindre à.
la nouvelle; ain!i ces pieces de la procédure c1aufirale, qui
de fait ont Cervi de Mémoire, peuvent l'être de droit &
par une clauCe précife de l'Atrêt. Si le Pere H. n'eût demandé l'apport de la procédure que pour fervir de Mémoire,
& non la jonélion, il n'eût été ni contefié, ni refufé; car
il y a une grande différence entre un décret de jonélion,
& un !impIe décret d'apport, qui peut avoir lieu même visà-vis d'une procédure incompétente.
Il exifie un chef de demande particulier, qu i porte directement contre le chef du Tribunal de Draguignan. Ici Mr.
r Avocat-Général obCerva qu'il y avait également à craindre & d'être trop févere, & de ne l'être pas affez. Il ne
faut point encore examiner (dit-il) s'il y a injure dans
la déclaration du Lieutenant; il ne faut Conder que les motifS qui y ont donné lieu, ne point Cortir pour en juger,
~e l'ame, de l'efprit des fentimens qui l'ont infpirée.
D U
PAr, A rg
�'40
' ~ 1. 0', U
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ïi A L ,
,
1
L'on voit un Iuge pénécI;é de la dignité de (es fohél:ioM;
fa propre déliéatelfe, l'honnêteté de (on cœur, peut~être la'
chaleur de (on âge, élevent, ennoblilfent à (es yeux (on,
propre minif!:ere, il (e crçit injurié, (on ame s'émeut; il croit
devoir à (a place, à {on rang, à (es principes, une, pr'oVlpte;
apologi~'; il 'a,befdioJde 'donner un libre cours à (a 'propre
(enlibilité; ,il ne (auroit la contenir; il ne craint' pas de doôner
de l'exiftence au'x propos, injurieux dont il croit avoir été
l'objet; il les (uppo(e connus, 'répandus; il vole audevant
même des (oup<;ons; il (e, d.éfend cpntr~ qes cllimeres; rôut
fon Corps ef!: 'compromisiayec lui; il cJlerche à Je jufl:ifier';
,il invoque même les (éveres regards de la Iuflice, pour e'n
êtré condamné -ou ab(ous. . .
'.
\
Voilà le Juge que l'on dénonce; fi on demilnde l'injure
'dont on l'accu(e, on trouve qû'il a répété, qu'il a configné
'des propos mobiles '& fugit-ifs,lqui n'iQjuriôient que· lui feuJ ~
lui feul leue a -donné .quelque. exif!:ençe; Jui~ feul les a fait
fervir de monument contre, lut;, [a )ufiifica,rion a le . roll>
paffionné, mais.é'ef!: le ron d'une apo'logi~, rlutôt q\1e g'une
injure; il cherche. bien mojns à at,taquer qu'à [e d.éfendre;
il penCe bien moins à lui-même qu'al! Pere H. CotiHnent
l'accufer de. devenir' coupable dans un 'inf!:anc où; iJ n'e,mpntr,e
un zele fi ,ardent., ;que ,pqur p.rouver· qu'il. n.e:' l'dt point ?,
Commént, lorfqtiiléprouve li fQrtement le beJoiO: jmpérieu)j!
d'une juH:ification publique, fuppofer qu'il a VOpltl la perdre·(
Cette ame opprelfée, agicée.par le fQuRçoq" qu.i,Sfut.IT!o_nçrer
fa pureté à .tous les yeux, qui s'eliPofe à tous .les regards',
eH: bien éloignée .de, voulpir (e; fouiller Pilr l'ii}jpre ; :elleJ \fi:
trop dominée par l'honn,eur, pourl~~tTje :9l1ffi~p,I\~ la vel1ge'llice.
. '1'(1ais d'un autre "côté,' s'il paroît que)j!!) r:ieu!e;n~nhefi:
exenJpt du délit, il ne l'eH pas d'une'faute (eplibJe; le Pere
H., n'avoit conligné [es griefs contre ..fon) Jug!l , que d,(\ns un
Mémoi.re confié ap (eqet de l' AdqJjnUJr?tign· p~bliq).l~ , &
.enveloppé' du myl1:ere qui l'envi,rbl1!1oi,t. CeluiTci, ç1evoi~ ot!
l'ignorer, ou Je défendre ,par ,les même!l: arm:~s" s'iJ en :ayoit
quelque coonoilfance; fa juHification peigpoit le. Peçe H. [ÔL1~
des couleurs défavabtageu(es;, c'étoit une apologie; mais lij.
1
chaleur
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P AI. A'!S
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P ROV"IlN CE.
chaleur la rendoit infolite, prefque indécente même; le Juge
paroiffoit déchirer le voile qui devoit le dérober aux yeux de
fa partie, pour n'y laiffer' appercevoir que l'homme; une
fenlibilité outrée paroiffoit prendre la place de la modération de la Loi; l'endroit où cette jull:ification étoit conlignée,
en montroit toute l'irrégularité; elle étoit cachée, dérobée
aux yeux du Pere H.; celui-ci ne pouvoit 'Ce défendre contre
elle; c'était a"u milieu d'une procédure que le Lieutenant
vouloit placer la preuve de fon honnêteté; c'éroit au bas de
l'information qu'il forçoit le Juge de .décider s'il s'était jull:ifié,
ou s'il avoit befoin de l'être; ce n'éroit ni le procès-verbal
d'un Juge injurié dans fon Tribunal, & qui auroit été connu
aU coupable, ni des motifs d'abfiention tels que ceux qu'on
peut mettre au jour, d'après l'Ordonnance, pour les faire juger,
& qui euffent été communiqués;. c'é~it plut6~ une accufation. d'autant plus dangereufe, qu'elle faifoit parcie 'de )a
procéduré.
. .Entre ces aifférens motifs, la fageffe de la Cour difiingue
aifé'ment ce qu'il faut excu[er, de ce qu'il faut punir, & ce
qu'il faut pardonner 3 la fituation & à l'honnêteté du Lieu"
tenant, de ce qu'il faut aècorder à la plainte du Pere H. ; le
biffement préfenteroit un délit, un coupable, & rout préfente un-e limple iàégularité. Ne fuffiroit-il pas pour l'intérêt
du Pere H., pOUL celui de routes les parties, de déclarer
ces motifs 'd'abfiention comme non obvenus?
Mr. l'Avocat-Général conclut à ce qu'il fût ordonné-que
faifant droit à la requête d'intervention du Pere...... fans
;s'arrêter à J'appel-du Pere H. envers-Iar Sentence du 26
J;lnvier 1779', non plus qu'à fa requête incidente en amplia~
tion d'appel concernant la caffation de la procédure', dont il
feroit démis & débouté, l'appellation feroit mife au 'néanè ,
ce dont efi appel tiendroit & 'forriroit [on plein & entier
effet, la procédure claufirale, les Mémoires & les. requêtes
du Pere A. produits, fervant néanmoins de Mémoire dans la
procédure prife à Draguignan, avec renvoi & amende; & d~
.même fuite, à ce qu'ayant tel égard que de raifon à la requête
pu Pere II. fur le biffemen·t. les termes iüférés dans J'a.:re
F
�42.
Jou 'R N
A.
1: '
d'àbHention feroient regardés comme non 'obvenu!:;
Arrêt du 19 Février 178o, prononcé pat M.le Pré'lrdènt
'de St. Vincent, conforme aux conc1ufions; le 'Pere H. fut
conda.mné 'lUX dépens. Plaidant Mes. Ga1lier & Simeon
fils.
ARR Ê T'" V J.
,
En vendant une parâe d'un ·hien fonds dont l'allivrement if!
indivis, l'on peut charger l'acquéreur d'une partie d-e l'alli-vrement, pourvu qu'il n'y ait dans la divifion ni dol ni
fraude.
L
E 17 Février 1776 , Me. Julien, Notaire Royal du
lieu des Omergues, vendit à Claude Audibert, Travailleur
du lieu de Curel, la moitié d'une terre inculte qu'il poffédoit au
terroir des Omergues, de la contenance d'environ quinzê
-charges en femence, moyennant le prix de 48 liv.; il fut
convenu qu'Audibert feroit chargé de la moitié de l'allivrément du fonds.
La Communauté des Omergues demanda contre Me. Julien
la caffation de cet aél:e de vente, comme frauduleux & ftmulé; les hoirs 4e Claude Audibert firent fignifier un aél:e
au tréforier; ils _expoferent que fe trouvant compris aux
rôles des impqfitions de la Communauté en 1776, 1777 &
1778, pour raifon des fon~s qu'ils. poffédoient, & les mêmes
qu' Audib~rt avoit rapporté de Me. Julien, ils requéraient le
colleél:eur de recevoir la fomme de· I2.9 Ev. Cette offré fut
refufée. Ils préfenterent requête à la Cour des Aides, à l'effet
qu'il fût ordonné qu'ils feraient reçus parties jointes & ihtervenanres en l'inll:ance pendante entre les Confuls & Communauté des Omergues, & Me. Julien, pour y requérir de
leur chef qu'en leur concédant aél:e des offres faites dan~
leur aél:e extrajudiciaire, fans s'arrêter à la requête des Confuis, au chef concémane la caflàtian de l'aéle, il tiendroit
�42.
Jou 'R N
A.
1: '
d'àbHention feroient regardés comme non 'obvenu!:;
Arrêt du 19 Février 178o, prononcé pat M.le Pré'lrdènt
'de St. Vincent, conforme aux conc1ufions; le 'Pere H. fut
conda.mné 'lUX dépens. Plaidant Mes. Ga1lier & Simeon
fils.
ARR Ê T'" V J.
,
En vendant une parâe d'un ·hien fonds dont l'allivrement if!
indivis, l'on peut charger l'acquéreur d'une partie d-e l'alli-vrement, pourvu qu'il n'y ait dans la divifion ni dol ni
fraude.
L
E 17 Février 1776 , Me. Julien, Notaire Royal du
lieu des Omergues, vendit à Claude Audibert, Travailleur
du lieu de Curel, la moitié d'une terre inculte qu'il poffédoit au
terroir des Omergues, de la contenance d'environ quinzê
-charges en femence, moyennant le prix de 48 liv.; il fut
convenu qu'Audibert feroit chargé de la moitié de l'allivrément du fonds.
La Communauté des Omergues demanda contre Me. Julien
la caffation de cet aél:e de vente, comme frauduleux & ftmulé; les hoirs 4e Claude Audibert firent fignifier un aél:e
au tréforier; ils _expoferent que fe trouvant compris aux
rôles des impqfitions de la Communauté en 1776, 1777 &
1778, pour raifon des fon~s qu'ils. poffédoient, & les mêmes
qu' Audib~rt avoit rapporté de Me. Julien, ils requéraient le
colleél:eur de recevoir la fomme de· I2.9 Ev. Cette offré fut
refufée. Ils préfenterent requête à la Cour des Aides, à l'effet
qu'il fût ordonné qu'ils feraient reçus parties jointes & ihtervenanres en l'inll:ance pendante entre les Confuls & Communauté des Omergues, & Me. Julien, pour y requérir de
leur chef qu'en leur concédant aél:e des offres faites dan~
leur aél:e extrajudiciaire, fans s'arrêter à la requête des Confuis, au chef concémane la caflàtian de l'aéle, il tiendroit
�DU
PAL A tS
D :g,
l' R 0 V II N C 1 l . 4 3
fortiroit fon plein &- entier effet. L'intervention fut re'itie
par Arrêt du I I Juillet 1779.
On difoit pour la Communauté qu'il avoit été libre, à Me..
Julien de démembrer fes domaines, & d'en vendre une partie
à quL bon lui fen'lbioit; l'on convint même que les aél:es
. qui renferment de pareilS1 tranfports, devoiente fervir de titre
contre.. les Communautés, poun défalquer. de la.cote cadafirale
du, v:endeur le.. démembrement qui en avoie été fait, & pOUl"
en, charger l'acquéreur. Mais cela ne "peut avoit lieu que
lorfque les hiens. qu'on· tranfporre à· un tiers font infcrits
dans. le cadafire public, avec une efiimation particuliere &
un allivrement fixe & certain·, ainli. qu'on le pratique com~
munément dans..- tous les. cadaHres, qui doivent exprimer. la
contenance" l'efiimation & l'allivrement de tous les biens
de, différente efpece & qualité qui y font cotifés. Dès-lors
on ne fait aucun tort à une Communa\lté de· fe fervir contre
elle d~un aél:e. de v.ente, comme d'un titre, pour retrancher
de la. cote. du vendeur ce qui ef!: porté fur la cote particuliere
de: l'acquéreur.
.
Mais ilt en 'eH autrement, lotfqu'il exiHe fur le cadafire
une cote qui,n'exprime qu'un feul allivrement pour la totalité
des biens- de.diffétente. qualité qui la compofent. Une telle
cote ,. qui n'ayant pas été reél:ifiée & réformée dans le temps
de droit, neo forme pas moins le titre de la Communauté
contre le poffeffeur, ne peut pas être changée' arbitrairement,
& altérée_ de voie de. fait au préjudice de la Communauté.
Le poffeffeur d'une telle cote ne peut pas en vertu de tran("
ports vrais Ol! faux, Iinceres ou Iimulés, porter une mail\
téméraire. fur le cadafire public, pour. fe décharger de fa
propre autorité. d'une. partie effentielle de fa cote fur un
infolvable, en formant à celui-ci une cote infruétueufe & dé"
rifoire. C'efi-là un vrai attentat à toures les regles du droie.
& de l'ordre public.
C'ef! précifément ce qu'avoit fait Me. Julien. Il poffédoie
une cote fur le cadafire compofée de terres cultes & in"
cultes qui n'avoient. pas été efiimées & allivrées féparément,
&' qui ne formoient qu'un feul & !uême allivrement indivi~.
'&;
F
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�44-
,_. 1 O.·U
RNA
~
..
Cette cote exil1:oit en .cet état depuis cinquante ans dans un'
monument public, qui efl: la Loi vivante de la Commu-'
nauté des Omergues. C'el1: en vertu de l'aB:e de cranfport
que Me. Julien, en fa qualité de Greffier de la Communauté,
avoit formé fur le cadaftre une cote qui avait été défalquée
de la fienne. Par cette voie de fait il avait voulu forcer
les Adminil1:rateurs de la Communauté à comprendre Claude
Audibert dans Je c,azernet , comme feul propriétaire de cette
cote, & débiteur perfonnel de la taille qui en dépend. En
effe.t , tant que cette cote particuliere fubfil1:e filr le cadaftre, les Adminiftrateurs font forcés de comprendre Claude
Audibert dans Je rôle des l'edevables.
Me. Julien a voulu fe fervir contre la Communauté de.
cet aB:e de tranfport, comme étant le titre fondamental
d'un allivrement particulier qu'il a inféré dans le cadaftre.
C'e-ft en vertu de cet aB:e qu'il a mutilé fa propre cote,
pour en tranfporter une partie fur la tête d'un infolvable,
afin de s'affranchir par-là de la moitié de fes tailles, & de
priver la, Communauté de l'aB:ion réelle & folidaire qui lui
compete fur tous les biens qui compofent fan allivrem~nt
indivis. La Communauté a donc pu & dû attaquer le tranfporc & l'allivrement ftipulé dans l'aB:e, parce qu'ils font
également frauduleux à fan égard, & qu'ils font inféparables, l'un étant devenu le titre ou le prétexte de l'autre.
L'indivifibilité de l'allivrement de Me. Julien a acquis à
la Communauté une aB:ion réelle fur les fruits & fur les
,fonds de la totalité du te nement pour la taille de chaque
parciè qui le compofe , & une aB:ion perfonnelle pour le tout
contre le poiTeiTeur. Celui-ci peut divifer fon tenement à différens particuliers, & faire avec eux tous les arrangemens
qu'il trouve bon pour la contribution aux charges publiques.
Il peut y avoir des Arrêts qui ont jugé qu'un particulier
peut s'obliger à payer la taille à la décharge d'un autre;
mais il n'yen a point qui ait jugé que les Communautés
font liées par de tels paB:es. Jamais une çommunauté peut
être obligée de reconnoître d'autre débiteur des tames que
le vrai poiTeiTeur. Me. Julien n'a donc pas pu entreprendre
�nu, PAL AIS D E P'R 0 V È N C 1':;
4'~
'de priver la' Communauté de l'aél:ion- folidaire qui lui efi:
acquife tant fur les fruits & fur les fonds, que contre le poffeffeur, pour le paiement de la taille d'un allivrement indivis.
Cet allivrement doit néceffairement demeurer tel qu'il efl:,
jufqu'à la confeaion d'un nouveau cadaHre, parce qu'après
cinquante ails d'exéclltion on ne peut le' réformer ni par la
voie de la caffation, ni par celle du recours, ni par COute
autre quelconque:
On ne peut pas dire que s'il n'a pas été permis de fyncoper arbitrairement une cote indivife, cette opération doit •
être faite par des Experts convenus ou nommés d'office entre la Communauté & l'acquéreur, ou le vendeur, aux frais
de la partie qui fuccombera. Ce feroir contvarier & enfreindre ouvertement la: Loi, qui défend de coucher aux difpofitions & à la fubfl:ance des cadaHres après le temps de
droit. Ce feroit faire fupporter aux Communautés la peine
de la négligence des particuliers qui n'auroient pas fait réparer, en temps opportun, les irrégularités & les erreurs
de leurs cotes cadafl:rales. Ce feroit enfin vouloir ruiner entiérement les Communautés, en les expofant à fupporter
des frais de rapports qui fe renouvelleroient cous les jours,
& qui abforberoient au centuple la valeur des tailles qu~elles
voudroient réc1amer.
On répondoit pour, Me. Julien que chacun efl: maitre de fon
fonds; chacun peut en difpofer à fon gré, ou fujvant fes
befoins. En vendant la moitié d'un fonds, il n'eLl: ni jufl:e
ni poffible que le vendeur fupporte la totalité de la raille
qui y a été répartie. Le mauvais comme le bon ont pefé dans
l'allivrement ; il faut par conféquent que la vente d'une partie, foit bon, foit mauvais, emporte une portion de l'allivrement. ' .
.
Si la Communauté prétend que la répartition qui a été
faite de l'allivrement lui préjudicie, c'efl: à elle à le prouver; mais comme la Cour ne peut pas le juger de fa place,
il faut alors que des Experts dérerminent fi la répartition
de l'allivrement efi: ou n'efl: pas jufi:e.
En vain oppo[e-t-on que la çot,e ayant été efiimée par
-
�~6
Jo
U"R NA L
indiv.is; 011- ne peut pas la féparer ; la cotifatioll au ca';;
da{~re n'a jamais <empêché le propriétaire de vendre une
partie de fon fonds, & cette partie. participant à l'aUivrement
comme le furpJus, rien n'empêche d'en faire la féparation.
D'ailleurs l'intérêt de la Communauté pour la tajllabilité
n'efi pas une raifon qui p1!iffe priver lepropriétaire de vendre
une panie de fon fonds; & le proJl~iérajre feroit trop,malheureux, s'il étoit obligé de vendre la totalité de fon dD~
maine pour l'intérêt de la taille, quand au moyen de.Ia v~nte
d'un tiers ou d'un quart, il pourroit payer fes créanciers. Enfin,
la Jufrice autorife elle-même cette divifion. Qu'un créancier
foit obligé de fe colloquer, l$e que la collocation n'emporte pas la totalité du fonds, faudra-t-il bien que le fur.plus reHe au propriétaire, d'autant plus que la Commu11auré retrouve la totalité de fon allivrement dans. les deux
parties.
La Communauté parle contre fon intérêt, parce que li
jamais il n'eH permis de démembrer un fonds inculte, 011
ne pourra jamais donner à nouveau bail; & les funds rertant.. dans un état incuit, fon cadafire. ne recevra jamais
l'accroiffement de la. culture. Elle parle encore contr.e l'intérêt, général, parœ. que. fon fyfrême ne tendroit qu'à,empêcher les nouveaux baux , les èéfrichemens, les répartitions
que l'on fait au peuple en petite quantité. qefr,dans les nouveaux baux &' les défrichernens que fe trouve· l'intérêt gé.néral, au moyen du plus grand, avanrage que la Communauté
en retire. Enfin, elle veut une opération impoilible, parce que
le citoyen ne peut pas attendre. la confeél:iOll.d'un nouveau cadafl:re , pour donner à nouveau bail ou vendre,une partie de
fon fOllds.
On obfervoit pour les hoirs de Claude Audibert, que le
paél:e de l'aél:e contenant le tranfport, devoit être entretenu,
quand même il faudroit fuppofer que. le paél:e concernant
l'allivrement. efr nul, la Communauté convenant elle-même
qu'il fau~ difiiguer le droit de propriété" de. l'obligation impofée à tous les poffédans~biens de. payer .leurs tailles con·
formément.à leurs allivremens , &2 avouant que ce n'dl pa1<
contre le tranfpoft qu'elle s'éleve.
�nu PAL A t s J) È Pit 0 V Il Nell:
4'7
'Si la Cotrununàaté n'a aucu'n 'intérêt de fe plaindre de la
vente & du tranCport, pourquoi conrelte-t-elle les fins de
la requête d'intervention, qui n'ont pour objet que de faire
maintenir la venté & le tranfport, les hoirs Audibert nè
prenant aucune part à ce qui concerne l'allivrement , parce
qu'ils favent qu'ils font obligés d'en payer la moitié, s'y
étant fournis, '& ne voulant pas élevér une conteltation condamnée par la Loi Epiflolà 52, §. pac7um 2 ,ff. de paais,
& par la glofe fur la Loi vacuatis, Cod. de decu'rioni6us?
Ils convenôienr qu'il n'y a point de paél:e qui pui1fe décharger le fonds de l'obligation de payer la taillé en tout
ou en partie, & en impoCer l'obligation à un autre, ruivant la Loi inter dehitorem , qui elt précife. Après avoir poCé
le cas d'un pareil paél:e, elle dit qu'elle ne peut préjudicier
au fiCc. Il efi: certain que le propriétairé ne peut pas, en
vendant fan bien, décharger ce qui lui relte du paiement
de la taille, & la faire fupporter à la ~'partie qu'il aliene ;
mais cela ne rend pas l'aél:e nul, quant à la venre & au
tranCport. Le droi.t de la Communauté, rela if à fan intérêt,
fe borne à demander que nonobltant le _'paél:e ,d'affranchiCfement, !lui fera déclare de nul effet vis':'àïvis eUe., le vendeur continuera de payer la taiiIe du bien qui lui r'elte , &
l',acquéreur ne féra chargé & allivré que relâtivetftênt à fan
acqüifition, parce qH~ la CommunaUté elt èn droit de fairè
fupporter au vendeur la taille qui correfpohd ~ à ~e qui lui
celte; à l'èffet que le bien al1éné ne filppbrte que ce qu'il
doit fupporter; mais jamais la Communauté fi'elt en droit
de dèmandet la cafiatioh de l'aél:e, à l'effet de faire annuller le tranfport & dépouiller l'acquéreur, fous prétexte qu'il y a dans l'aél:e un paél:e de rranchife de taille.
Par Arrêt du 2.3 Février 1780, au rapport de Mr. le
ConCeiller de Michel, la Cour des Aides, fans s'arrêter
aU premier chef de la requête des ConCuls & Communauté
des Omergues, tendant à la calfation de l'aél:e, mit Julien
<lé les hoirs d'Audibert fur ce chef hors de Cour & de
t>roEès ; condamna les Confuls & Communauté aux dépens
de ~ette qualité; & avant dire droit au chef de la requête
�~
JOU~N~L
des ConfuIs , concernant la prétendue fraude. de l'ailivre';
ment, ordonne qu'aux frais & dépens de Julien, fauf d'en
faire, il f~roit fait rapport à l'effet de déclarer fi l'ail ivrement porté fur la partie de la propriété vendue par Julien
à Claude Audibert, correfpondoit à l'allivrement qui fe
trouvoit impofé, fur la partie de la propriété refiante à Julien, en fuivant toujours la même regle d'efiimation qui
avoit été fuivie par les Experts qui avoient procédé au dernier cadalhe, lefquels Experts déclareroient en quoi confiltoit la différence d'un allivrement à l'autre, s'il y en avoit
une, & la portion ,de l'allivrement que devoit fupport~r l'une
& l'autre partie de la propriété. Ecrivant Mes. Pochet) 1
Pafcalis & Verdet neveu.
,
VII.
SUR une demande en droit d'offrir.
'AU
mois de Janvier 17'i9, André......... &'Co11lpagni~
firent faillite, & ,remirent leur bilan au Greffe de la
Jurifdiél:ion Confulaire. Au mois d'Avril fuivanç, projet de
concordat propofé par les fa illis, foufcrit par Un petit·
nombre de créanciers, contenant 1°, abandon des biens,
droits & aél:ions des faillis en faveur de leurs créanciers;
,-0, nomination de deux 'Syndiçs .& d'uq Caiffier 'pour gérer
les aél:,ions des faillis', recÇll,lvrer les dettes & effets, vt;ndre
les biens, & payer les; créancie~s par ordre d~hypoçheque,
de privilege &. de ,préférence.
, Les Syndics des créanciers fe pourvurent à la Cour le
2'i Mai fuivant, & demanderent l'homologation du concordat, ou une adminiltration provifoire. Décret, qui o.rdonne
qu'il feroit pourfuivi ainli qu'il appartient. Le 3! du mêrpe
mois, les Juges-Confuls refuferent auffi l'homologatiou i ils
ordonnerent néanmoins que. le concordat feroit ~xécuté de
Jeur autorité, au chef concernant la nomination des $yndiçs
�DU
PAL AIS
D Il
49
PRO VEN C Il.
dies pour le recouvrement des dettes & effets, régie, adminifiration & vente des biens; les formalités de droit gardées pour la vente.
Quinze jours après, nouvelle demande des Syndics en
vente des biens immeubles contre les créanciers réfractaires aU concordat. Seconde Sentence d~s Juges-Con!ùls,
qui ordonne que les biens de la faillite feront vendus aux
encheres, efiimation préalablement faite; l'efiimation fut
faite; le rapport fut reçu, les encheres furent ouvertes.
Me. Courmes y comparut, & fit une offre de S2.800 liv.
fur la maifon lituée fur le Port. Cette offre fut acceptée
par les Syndics, & la délivrance lui en fut paifée, fauf
huitaine. Giraud, l'un des créanciers, appella de cette délivrance, parce que la maifon avoit été délivrée im deifous
du prix de l'efiime; Me. Courmes s'en départit, fan offre
néanmoins tenant.
Au mois de Février 1760, les créanciers délibérerent
un nouveau concordat, portant la. nomination de nouveaux
0
Syndics; 2. • que les encheres pour la vente des biens feroient continuées, & même qu'il en feroit fait de furabondantes au rabais; 30. il fut donné pouvoir aux Syndics de
,faire procéder à une Sentence d'ordre & tangement des
créanciers, par Mes. Brefl: & Portalier Avocats. Cette Sen.cence fut rendue le la Mai 1760, & homologuée par les
Juges-Confuls le 2.6 Novembre 1761.
Les Syndics firent ouvrir de fecondes encheres au mois
.deMail 760; ils affignerent Me. Courmes, qui renollvella,
fon offre de 52.800 liv. Cette offre fut trouvée infuffifante,
& les encheres furent abandonnées.
Le 18 'Septembre 1760, les Syndics paiferent vente
traél:ative & hors des encheres à la Dame Laurent veuve
Gouffre, de la maifon du Port, & de deux autres m:1ifons
au deifous, du prix de l'efiime.
Cette faillite fut épurée par IlD rapport de liquidatioll
des comptes des Syndics & Caiffier le I I AoÎlt' 177 S, fait
par les fleurs Millot & Rangony Négocians. Me. Courmes
fe PÇUtvut en çaifariol1 de la vente traél:ative faite par les
.
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R III A l:i
Syndics à la Dame Gouffre, de la mai[on du Port; il demanda la -commune exécution du Jugement qlfi interviendrait contre les hoirs de cette Dame, qui formerent une
garantie cancre les Syndics; & par une requête incidence
Me. Courmes forma une demande en droit d'offrir, & conferva ceUe en ca1fation comme demande fubLidiaire.
Me. Courmes di[oit que c'eft un principe certain & invariable, qu'un créancier hypothécaire & perdant dans une
inf1:ance de difcuffion ou de bénéfice d'inventaire, a le droit
de demander au créancier colloqué, ou à qui on a défemparé ou iofolucondonné un bien du débiteur commun, de
lui défemparer par droit d'offrir, en lui rembourfant néanmoins & préalablement le prix, frais & loyaux-coûts. Cette
aél:ion n'a rien d'odieux; elle eft au concraire favorable;
c'eft un remede que la Loi, le Statut & le Réglemenc de
la Cour accordent au créancier perdanc , pour l'indemnifer,
s'il efi poffibie.
Un créancier acquéreur ne peut, fans injufiice, fe rehlfer à vuider par droit d'offrir. En acquéranc le bien, il
n'a voulu que fe payer de fa créance; en lui demandant
la défemparation de ce bien par droit d'offrir, on le rembourfe; il ne peut rien prétendre au delà de fan paiement.
Les hoirs de la Dame Gouffre ne peuvent donc cont~fter
la demande en droit d'offrir; Me. Courmes ef!: créancier
11ypothécaire & perdant.
Sur la demande en ca1fation de la vente, Me. Courmes
difoit que fuivant le Réglement de la Cour les biens dépendans d'une difcuffion ou d'un bénéfice d'inventaire, ne
peuvent être vendus qu'aux encheres publiques. Les deux
Sencences Confulaires du 6 Mai & 1'î Juin 17'î9 l'ordonnaient de même. Les deux concordats n'ont jamais aut~rifé les Syndics à vendre traél:ativement & hors des encheres. Cette vente ef!: encore nulle, pour avoir été faite au·de1fous du prix de l'eftime, & au-de1fous de l'offre fubfiftante de Me. Courmes dans les encheres.
Les Syndics de la faillite obfervoient que l'éviél:ion que
[ouffre le polfeifeur du fonds contre lequel on vient par
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PALAIS
Dl!
PROVENCl!.
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-droit d'offrir, ne fauroit donner lieu à la garantie, parce qu'o n
ne peut l'évincer qu'en le rendant entiérement indemne,
l'aél:ion pour laquelle on l'évince étant un bénéfice accordé
par la Loi au créancier perdant; il a dû [avoir, lorfqu'il a
acquis, qu'il couroit cet événement. C'efl: d'après ces confidérations, que par Arrêt du 2.8 Juin 1710, rapporté par
M. de Bezieux , li\'. 8 , chap. l , §. 8, un particulier évincé
par le droit d'offrir fut débou.ré de la garantie.
Il efl: confl:ant que la pleine garantie n'efl: due à l'acquéreur évincé qu'autant que celui-ci a ignoré le vice de la
vente ou de la chofe vendue. Dans le cas contraire- il n'a
à prétendre aucuns dbmma~es & intérêts; il doit s'imputer
à lui-m.ême l'événement qu'il a voulu courir, comme le
dit Cujas d'après un ancien: prudens emifli vitiofum dic7a
tibi Lex efl. La refl:itutiotl du prix de fan acquifition & celle
des réparations & améliorations utiles & néceffaires font
tout ce qu'il efl: en droit de demander. Delà vient, commel'Ont décidé les Arrêts rapportés par Boniface, tom. l, liv.
6 , tit. 2 , chap. 8 , & par M. de Saint-Jean, décif. 88, que
celui qui a acquis -fciemment un fonds dotal ne peut pas
prétendre des dommages-intétêts contre le mari, quoique
celui-ci, en lui vendant ce fonds, fe foit fournis expreffément à la pleine garantie. Delà vient encore, comme l'obferve Duperier, tom. l, liv. 4, quer. 20, que le vendeur n'efl: tenu à aucuns dommages & intérêts, pour n'avoir pas déclaré la fervitude à laquelle-la chofe- vendue étoit
foumife, quand il eil: pmuvé que le vendeur en a eu connoiffance.
Pour repouffer la demande de Me. Courmes en caffation de l'üJ>folutondation , les 1 Syndics difoient, 1°. qu'ils
avaient requ par les concordats les pouvoirs de vendre tracrativement & hors des encheres; 2°. qu'il ne s'agiffoit pas
ici d'une vente proprement dite, mais d'une infolutondatiou pour laquelle ·-ils avaient de la maffe des créanciers les
pouvoirs les plus exprès; 3°. que par cette opération ils
avoient .fait le plus granç! '!vantage de tous les créanciers,
qui fans cela euffent tOLlS effuyé la perte entiere de leurf>
créances.
G :l<
�)1-
JOURNAL
Quand l'homologation des concordats a été demandée à
la Cour, t(lut le monde a cru de bonne foi qu'ils portoient
avec eux le nombre de fignatures requifes. Me. Courmes.
qui les a foufcrit, a été lui-même dans ceite croyance; il
a été avec les Syndics en demander l'homologation.
Les Syndics ont agi de bonne foi; ceux qui ont contraél:é avec eux, ne l'ont fait que fous la foi de cet Arrêt
qu'ils ont dû regarder comme inébranlable. Or, tout·ce
qui fe fait fous les aufpices d'un titre légal & qu'on a dû
croire tel, ne peut recevoir aucune atteinte: error communis facit jus.
Leconcordatdu 28 Avril 17)9 porte en l'art. 2, que les
fazllis font un ahandon général d leurs créanciers de tous leurs
hiens, pour par eux s'en emparer, lespoffider ,les vendre tractaûvel7lent , ou autrement en difPofer d leur volonté. Où trouve-t-on que lorfque des créanciers acceptant l'abandon que
leur fait un débiteur failli, font un contrat d'union & nomIflent des Syndics, ils foient en ufage de ne faire les ventes
des effets & des immeubles de la faillite, qu'aux enchel'es & après en avoir fait faire une ef!:imation? Si tel étoie
l'ufage en pareil cas, autant vaud l'oit-il que l'on donnât
ouverture à la difcuffiol,l & qu'on l'apurât. Chacun fait
que quand les créanciers d'une faillite fe fyndiquent,
c'eil: pour éviter les frais de Juil:ice; c'ef!: pour procéder
entr'eux, à l'amiable, à la vente- des biens & au rangement:l
Le concordat du 28 Février 1760 -annonce, dans fon,
préambule, de faire ceffer les formalités de Juil:ice, âttendu.
le défordre & la lenteur qu'elles mettoient dans Jes opé-·
rations, & .les frais confidérables qu'elles entraînoient.
Les. Syndics ont agi pour l'intérêt de tous; ils .ont pr,ocuré aux créanciers des répartitions dont ils jouiffent de-.
puis long temps; tandi's qu'il n'y auroit pas eu un fol pour
perfonn~, s'ils s'étoient conduits différemment. Me.. Cour-.
mes eil: d'ailleurs le feul fur 30 créanciers qui fe plaigne)
de leur adminifiration; touS les autres font contents &
fàtisfaits.
,.
,
Quand le mandataire a excédé fes pouvoirs, difoient en-
.
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PALAIS
DI!
PROVI!NCI!.
13
éore les Syndics, & a fait 1 néanmoins l'avantage pe ,fon
mandant, celui-ci 1ef!:, obligé de le' ratifier: quemadmodum ,
dit la Loi 9, if. de negotiis gefl. quod utiliter geflllm eJl,
neceJfe efl aplld judiam pro rato haheri, ita ohzne t]uod
ab ipfo prohatum efl.
,
,
,
•
. Quand le Procureur excede, fes pouvbirs, le filence du
mandataire' qui a connu cet excès, vaut ,tout autànt qu'une
approbation expreiTe; c'efl: la Docl:rine des Auteurs, tels
que d'Argentré, Godefroy, Coquill~, Dumoulin & Pothier filr le contrat de manQat, chap. 3, feél:. 3, art. 4,
pag. 2S3.
(
J
- Me. Courmes a demandé" arrangé, corrigé le compte
des Syndics. Or, demanper çompte à quelq,u'un d'une chofe
qu'il a gérée, c'efl: là ratifier. La Loi 66, if. de fidejufforihus & mandatoribus, y efi expreiTe. C'efl: encore la Doctrine de Buiffon ,dans fon ,Code, liv. 6., tit. 6, na, 16.
Les Loix ne permettent pas à celui qui a renoncé à lin
droit qu'il avoit, de revenir contre fon ~propre ,fait; elles
s'y oppofent au contraire de la maniere là plus formelle &
la plus expreiTe. La Loi pénultieme du Code de pac7is
efi précife; elle défend même aux Juges d'avoir égard à
une pareille réclamation ,. à peine d'en" répQndre per(on~
nellement.
'
Les hoirs de la Dame Goulfre obfervoien qu'.on ne'
conrefl:oit point à Me. Courmes les principes qu'il a établis pour prouver .la... faveur .du droit qu~il voudroit exercer.
On lui refufe le titre de créancier hypothécaire, par le
défaut de jufiificadon: Des' 'p'olices' d'âiTura'nces,' des Sentences des Juge~"Confuls, lui ont cerFainement:'donné une
hypotheque incontefl:able fur les biens de fon débiteur"'; mais
il Jaut produire" cès tit,res; 'tant qu'il. ne Je, fera pas, on
fera fondé à lui refufer toute croyance, à repouffet fon
aél:ion comme dénuée de tout fondement: 1/on creditur referenti il nifi' confle.t;::de relato: On 'èon'oient 'que Me. Courmes.a figuré dans la' :faillite en .qualité.de créancier hyporh'iicaire; les f98000 livI qu'il...a reçues'"mlt:abfolumenr éteint
fes créances. De, [a99n que: ~dans ce .. ~o.mcnt" profitant
�•
~4
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0. U R N'A Il
d'un droi~ qui efl: éteint par le' paiement 'qu"il ,3- reçu" il
excipe des ticres confl:irucifs., d~ ce ,droit qui n'exifl:e plus,
pour le préfencer comme (ubfifl:ant encore.
Si l'infolucondacion faice à la Dame Go.uffre fans pouvoir
& fans aurorifacion dl: nulle, Me. Courmes ne peur exercer
l'aél:ion en 'droit d'offrir, parée que les biens doivent recourner à la maffe. Il dl: dans Ijalcern'alive, ou de chojfir
l'exercice du droit qu'il voudroit s'arroger aujourd'hui, en
reconnoiffant la validité de la vente qui elil efl: l'objet, ou
de renOnc~r à cerr~ aél:ion, s'il perfifl:e à foucenir la nullicé
de la vence. S'il approuve la vence comme valide, il efl:
non recevable à exercer le droit d'offrir vis-à-vis un créancier auquel il â lui-même vendu; s'il prétend que cerre
vente ell: nulle, il efl: encore non recevable à intenter fon
aél:ion, parce que le bien défemparé retourne à la malfe..
Il doit donc être également débouté dans l'un & .l'aurrè
cas.
' ,
.
• Par Arrêt du 16 Mars 1780, rendu à l'extraordinaire, au
rapport de Mr. lé Confeiller de, Bàllon, Me. Courmes {ut
débouté de fa demande en drait d'offrir, & en caffation de
l'infolutondation, avec dépens envers toutes les parties.
Ecri...an.t Mes. :Laget, Guieu. & Gourmes.
ARR Ê'T VI Il.
Le r.ecours fimple doit hr:e vuidé en?état du premier rappcH-t.
Après le )reCOlJrs fimple ,. on pèut être.' reçu, .au ~ recours- en
droit" '
f"
r'
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l'
La prohihition 'faite au pere de' l'ufufruit doit-elle être 'èxpreJJè ?o
• .
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J nt
l'ERRE Roux du lie de Malemort époufu~ et! '1733Louife Favetier fous.'llne con'fl:it'ùti~n générale; enMV·)
& 17'> l , il vendit àcNkolas Jourdan du mêqle lieu 1 divets
capitaux (ormant partie de la dot de fon. époofe.
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P
1
�rs D E PRO VEN C E.
H
Le '11> Novembre 1767, Louife Faverier fit fan teHament;
elle inG:itua Jofeph Roux fan fils pour fan héritier, à la
charge de nourrir &. entretenir PieI:re Roux fan pere fuivant fon état & condition, du produit de fan héritage; &
là où fan héritier ne s'acquitterait pas de cette charge.,
elle inG:itua fan mari héritier ufufruitier. Après la mort de
Louife Favetier, & le 9 ·Janvier 1776, fan fils, émancipé
par fan pere, fit affignei pardevant la Cour, en venu du
privilege des pauvres, les hoirs qe Nicolas Jourdan en révendicatiol1 des biens par lui acquis de Pierre Roux, avec
reG:itution des fruits. Ces fins lui furenl adjugées par Arrêt
d'exploit rendu au Rôle des pauvres le 2I Mars 1777. Le
18 Juillet fuivant, il fut procédé au rapport de liquidation
des frllits. Les hoirs de Jourdan en déclarerent recours
fimple; il en fut fait un fecond ; 'recours en droit déclaré par
les hoirs Jourdan, tant envers le premier qu'envers le
fecond rapport, à l'effet de les faire réformer aux chefs qui
adjugeoient la reG:itution des fruits jufques à l'émancipation
de Jo[eph Roux, & de faire dire & ordonner que les rapports ne feraient exécutés pour la reG:itution des fruits, que
depuis l'émancipation jufques à la défemparation qui en avait
été faite.
Jofeph Roux préfenta une requête incidente, par laquelle
il con[entit la caffation du [econd rapport; mais il demanda
que fans s'arrêter au recours en droit du premier, auquel
les hoirs Jourdan' feroient déclarés non recevables & mal
fondés, il ferait pourfuivi fur leur recours fimple a'inti qu'il
appartiendroit.
On difoit pour les hoirs Jourdan, qu'il eG: de maxime tri·
viale que le premi~r Tapport eG: commun aux deux parties;
qu'après ce rapport, chacune d'elles peut recourir deux fois,
fauf enfuite le recours au Juge comme arbitre de droit. L'on
trouve dans le Recueil des Aél:es de Notoriété du Parquet, pag.
36, ABe 2.3, que les parties peuvent recourir au Juge comme
arbitre de droit, étant tels recours reçus jUfÎlues d 30 ans.
Le recours fimple n'a jamais éré une fin de non-recevoir
contre le recours en droir. En vain Jo[eph Roux oppoferoit
D U
PAL A
�56,
J o'u R N A'L' ,
que par le recours ftmple la partie recourante ne fe plaignant
que du fait, comme d'une ei1:imation trop. ba!fe, d'une vérification inexaél:e, eft cenfée avoir approuvé par-là dans le
rapport dont il a déclaré recours tout ce qui ne tombe pas
en vérification de fait. Les Arrêts ont conftamrnent jugé
que même trois recours filcèeffifs n'empêchoient pas le recourant de s'adre!fer à la Cour cOmme arbitre de droit,
toutes les fois que les Experts avoient viliblement erré dans
leurs opérations fur l'application d'un. point de droit. Boniface, tolU. '2, part, y, liv. 2, t it. 8, chap. 4, pag. 396,
rappone' un Arrêt précis: fur ce point. L'Annotateur des
Aél:es de Notoriété, nO. 18, pag. 30, établit la même
muime.
•
;
Difcutant enfuité la queftion de droit, ils obfervoient que
par la difpoÎ1tion de ,la Loi l, Cod. de bonis maternis, le
pere avoit l'entiere propriété des biens ave,ntifs de fes en:Elns. Les Loix citni opportèt, Cod. de bonis quœ liberis, &
Ji patri 'tua, Cod. de;ufufruc7u, commuerent cette propriété
en fimple ufufruit aont·le pere ne peut être privé, fous quel.
que prétexte que ce pui!fe être, comme l'a obfervé Duperier,
tom. l , liv. 1, qneft. 18, & liv. 5, chap. 1, pag. 467 de
fes Maximes, & Cambolas, liv. 2, chap. 17. Il le conferve
même après leur déëès, comme l'a décidé la Loi Ji patri
tua, & ainfi que ·l'a parfaitement prouvé Barri, dé legitimâ ,
liv. 16, tit. 10, nO. 4. Enfin il en retient la moitié, quoiqu'il
les ait émancipé.., & qu'il ne s'en foit fait, aucune réferve,
fuivant la remarque de Duperier, liv. 3, queftion 12, & de
Bretonnier fur Henris, tom. 2, Iiv. 4, que ft..73, pag. 373.
S'il 'eft de principe que la faculté de prohiber les fruits au
pere eH fondée fur ce que celui qui inll:itue le fils eH le
maître d'appofer à fes volontés telle condition que bon lui
femble , la mere n'étant pas libre de priver fon fils de fa légitime, n'a pu par conféquent impofer des conditions à cette
'même légitime, 'ni priver le pere des fruits de cette portion
que le fils ,ne tient pas de·la libér-alité de ,fa mere, mais de
la Loi. C'eft la décifion expre!fe de la Novelle 142, cap. 1.
C'efr d'après cette Loi, que Decormis, tom. 1, col. 168 J. ,
.
dit
�rs J> E J RR 0 VEN C E.
,57
dit quel lai mere' ,pèut pr.obiber à fan. màri "l'ufufruit des biens
qu'elle'laiife· à fes enfans, poùrvu qu'~lle le .faife expreifé-'
ment, & que la prohibition ne" touche pas aux fruits, de la'
légiçime, qui .ne fe p.e vent ôter au pere.
La Loirfi:llfufruRuf 14; §. 2.,.If. quandoidies,legat.;vel
fideicomm. ced. avoit dit que' fi lerlegs fl/if au hls efl:'fait avec,
ce.tte condition, ut ipfi ftlvatur, il,ply/a 'quel le fils 'qui puiife
le deman~er - fi patu petat, er.if' excepiione repelleridus. La
Novelle 117, cap. l, p.o!l:érieure 'à cetfe Loi, & qui e!l: à
cet égax:d le vrai fiege de la matieré, exige en deux endroits
une p-rohibitio~ expreife. Auffi tous les .Auteurs le;foutiennent
de"'même,'Julien:dans.;fon Code, v~llmaûimonium'"'cap; 4,
§. fl, ·liti. D; Serres 'en fes ln!l:iruts ~ liv. 2., tit. 9, pag. 2.06;.
Defpeiifes., tit. des contrats; part. 2.1, tir. Ir;.àrt. l, feéc. 14,
de. l:ufufruit, tom. '1 , n. 13, pag. 5-71.
. Si la .décifion précife de la Loi pouvoit avoir befoin d'être
àppuyée 'le quelques confidératiops, 'elles fe p:réfentenr ici
en foule. On fait· 'q'u~ les Loix ont permis au tefia.teur de
pr.ohiber toute détraél:ion oe !1uar'tel, mais qU'fIles exigent à
cet effet une prohibition expreife ( NoveLle l, c.ap. 2. ). L'Or-donnance des-·tefiamens a confirmé cette difpo1iiion. Chacun
(lQnnoît le fameux Arrêt rendu au .rapport de Mr. de Lauris,
enr.rda Da.ine· .de ·Gàillard .d'Agoplt, & le fieur R:afpau~ . .Au
ca.s: de cet Arrêt ;'le tefiateur avoit 9rdo.nné que fon héritage
feroit. rendu' par le1.pere 'falJ'sl déJraéI.ian.auCJln(t;JI'Arrêt n'ad~'
mit pas n'loins la détraél:ion ·de la'quarte, par cela feul que
le tefiatetwoe l'avoir- pas expreifémenr prohibée. Autre Arrêt
du la ,Mai 1777, rendt< au rappor de Mr. de franc, en
fàveur de Léon Çjrard, ,c9ntr~ LOlJls Gir9-rd fJm fils, ,
e D'lIprè~ toutés ces Aurdrité~; le.s b..oirs -de Nicolas Jourdan
'di!l:ingyoienr trois temps pour fixer' le moMan!:' delJâ re!l:itu~
. tion.des fruits; celui qui s'étoit écoulé depuis les aél:es d'alié~
nation jufques à la mort de la femme, cel\li qui àvoit couru de~
puis ce d.écès jllfques,au jour de l'émancipatiol), & le temps'
po!l:érieur, à l'érnancipation. Dans les deux premiers temps)
fierre Roux avait dû jouir des fruits, [oit comme "mari,
tan,c qlJe fon épou(e il vécu" foit cçmrne pere, Wlt que fou
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fils n'a pas eté ,émancipé; celui-ci n'a (e~droit de' perœ:voifles fruits que.au JOUI: .de ,fan émancipation; ce n'dl: que ae
ce jour que compte, à .fan .égard l'indue occupation; il' ne
faut donc lui adjuger.les fruits 'que depuis cette époque, ,&
les rapports qui en font la. liquidation , & qui 'font partir
cette refiiéutidri de plus loin., doiv.ent· être réformés.
'•. '.
On convenait. pôur Jofeph Roux, que 'les .Expens r.ecu,r-'
faires qui n'écoient .Juges que du fait, qui ne .pouvoient'
s'écarter des opér.ations fixées par les premiers" n'auroient
pas ,dû faire ,panir la refiitution des fruits depuis les aél:es
d'aliénation,;.ils le .pouvoient d'autanc.:moins, que le premier.
rapport liquidoit,feulemenr cette refiitution. depuisJe .décèS
de la mere" &. -que .Ies Iroirs Jourdan .étoien~ lés feuls qui
en ;eu/fenr recourll~ ,Ié:r!lpport de r.ellours"renfermoit donc
un ultra petita qui en.d-evoit opérer.la ca1faDi:on:...Les ..'Ex~
perts .reèurfaire's nlont rien autre à faire que de procéder
à une ·nou.v.elle ··èfiimation, pour favoir fi celle' qui' a été
faite1p·ar ..les premiers Experts" l'a été bien ou .mal; ma4
il ne .1eurJ eŒ'.jamais [permis. de .changer la ,n<l'ture' des opé..r./
ratiQns, de procéder fut un nouvel état .des chofes; ils doiv.ent s'en .tenir'" à 'la :toute qui leur efi indiquée"par-Ie pre'
mier rapport.; en ,un mot, ..le recours' doit être vuidé en
Eétac; & il .ne.·le Ifer,oit pas, s'îI dépendait des 'feconds Exp.erts· de' prendre p'(i)ur .l'egle de leurs op-ér.at,ionsl.toute autre'
mette que celle .qui leur 'a été pr~fcrite'.par les <premiers. !·;t
Le recours fimple n'ef!:' autre chofe. que 1a voie de re-'
courir à d'autres Exper.ts pour faire' réparer .le" préjudice'
caufé, :par les premiers, à raifon de .Ia .trop 'forte fOU .Ia t.rop
petite efiimation contenue-dans le 'rappore; mais ~e te'cours
n'attaque pas ile fonds dé ·Ieurs opérations;, ~j,fuppofe même
qu'ellesl font. légitimes, i& -qu'ellell doivent' :fervir de reglé
aux Experts qui doivent procéder au r(lpport de recours.
Mais (cÔntinùoit Jofeph Roux) 'les hoirs Jourda'n font'
non recevables à attaquer le premier rapport i parce que.;
. par leur recours fimple, ils ont approuvé les opérations
-des Experts, & il ne leur efi plus permis de les attaquer.
Leur recours fimple n'a eu -& ·ne peut avoir eu pour objet·
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RROVENCE;
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qûe de faIre' dinilnùeF'I'efiimation portée par. le rapport; lè
fonds, des opérations eft toujours le même-; il doit fervir
'de mette aux Experts recurtaires, & les hoirs Jourdan ont.
,approuvé cette maniere de· prOi:éder, en recourant à d'autres E~perts pal' la voie du recours !impie, qui fuppofe que
toutes chofes ont été faites légalement. 1 Il refte à examiner fi Jes ·hoirs Jourdan fonr. mal fondés
en leur recôurs en droit. On trouve dans le teftament de
Loui(e Favetier la prohibition la plus expreffe 'de l'ufufruit
que fon mari auroit pu prétendre [ur fa· fucceffion.
Pour prîver le pere de l'ufufi'uit des bjens dorinés à fon
fils, il fufIit que cette prohibition foit une conféquence néceffaire de la diCj)ofiti6n> du Teftateur, & que fa'volonté
ne puiffe recevoir 'fon exécution qu'autant que le pere fera
privé de·l'ufufruit. Un grand principe en matiere de difpofition de derniere volonté, eft qu'il faut coofulter princjpa_
leinent I~intent'ibn de celui qui' difpofe, & que c'eft à ce
feùl objet qu'il faùe s'arrêter, parce que c'dt: le feul dont
les Lo'ix aient 'affuré l'exécution: Totum fadt voluntas teJla:'
toris, dit la Loi ex fac?o ,if. de Izœred. inflit. & la Loi amhiguitas, Cod. de teJlam.
III La. Lbi ji ujiJfruc?usJ , §. ji quis ita ,ffi fjuando dies legato
ve/rjideic. eft: très-applicable au· cas de la caufe'. Il' s'agit
d'un legs fai.t au fils de famille:, ut ipji falvatur; il n'Y'avoit
aù€une.: prohiBition- Iexpreffe d'ufufruit au pere; & le Légiilat~ur n'en'répond pas moins :ji·pater petat , exc;eptionl:
erit reeellendùs, parce que-·, comme lè c!it la ~lofe, nec
patri,videtur; aéfjuiri'iifufruàuf.
. 1
• )
Or ,. fi ~daÎls . le- cas de: cette Loi, l'ufufruit dt cenfê
prohibé' al1 pete; par pela· feul' qtl~il eft ordonné que le legs
féra- payé: au fils, à c{)mbien plus forté rlli(cin' fera-toi! vrai
de dire -que ,lé pere n'a pas eu, lé droit ~e jouir des fruits.
de l'Héri[ag~' de· ;Couife Favetier, p~i(que'l'ufufruit en eft
expreffément aJféété· au' fils·, & qu'il-ne' s.'agit pas d'entrer
dans l'examen de flavoir ql,lel1e a' pu être l'intention de la
Tefl:atrice.
.
Auffi les AUretlrS qui ont traité & approfondi cette quef..
H2.
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"60
:>'n"'),JOURNAL,
tion ,. fe r,é'uqilfent, tous à [outenir qu'il fuffit d'indùire cette'
prohibition des terme~ & de la volonté du Tefiateur. Tel
en: le fenciment de Pafcalis en fon Traité de viribus patriœ
poteJlatis, part. 1" ch. 3 , nO. 38 ;.de Sabellps, vO. ufufruc1I,ts,
n°. 19; de ):lerezius fur le titre du Code de bQnis quœ liberis,
nO. II;- du Cardiqal de Luca-, dé ftrvitutibus, difc. 64,
n°. l & 2; de Boefius, Péeir. 193..
.
.
Enfin la quefiion doit d'autant moins fouffrir de difficulté,
qu'elle a été jugée par Arrêt du 7 Mars 1769, au rapport
de Mr. de· Perier , ,encre Me. Decoup de III ville de Lambefc.,
& le fieur Decoup fon pere. Cet Arrêt efi décifif dans la
caufe aél:uelle; ~ fi la queHion eû.t été fufceptible de difficuité,. c'éroit fans. doute parce quJil' s~agilfoit d'un peg~
qui venoit lui-même réclamer fes droits, & qui mériroit
fans doute beaucoup plus de faveur que les hoirs Jourdan ~
qui excipent du droit du tiers, Pierre Ro.ux· n'ayant jamais
réclamé de cette prohibition penda,nt, fa vie. Le, premier
rapport efi donc légitime, en ce qu'il adjuge.la re{titutio1.l
,des fruits depuis le décès dè Louife F avetier, & le recours
,en droit dO,it être rejené.
.
Par Arrêt du 6 Avril 1780, au rapport de Mr. le Confeiller de Ba~lon, la Cour ayant tel égard que de' raifon au
'recours en droit des hoirs Jourdan , décla~a nul le rapport
de ~ecours; ,& fans s'arrêrer au chef ,de leur requête ëon,cernant le, recours en droit envers le: premier rapport,
auquel elle les déclara. mal fondés, ordonna qu'il feroie
pourfuivi fur le recours fimple ainfi qu'il appartiendro,it,
à l'effet de quoi, par Expert~ convenus ou. pr.is· d'office,
il fe~oit procédé au rapport de recours. fimple, lefquels
Experts en procédant fuivroient le plan des opérations
fixées par le premier rapport, & liquideroient la refiitution
des fruits depuis le décès de Louife Favetier; les hoirs
Jourdan furent condamnés à la moitié des dépens, l'autre
moitié entre les partie~ compenfée. Ecrivant ~es. Artaud
& Mouans.
�ARRÊT
IX.
Peut-on faire informer fur les faits de captation?
Comment' &. dans quel cas peut - on attaquer un tiflament
comme faux?
Ntoine Blanc de .la ville de Marfeille fait deux tefl:am.ens; le premier en 1770, le fecond le I I J'\lillet 1779,
dans lequel Marie-Marguerite Bedot , épQufe de Pierre Merlat
Perruq1,lier, eil inHituée héritiere. Le 6 Septembre 1779,
.Thomas Blanc & Marguerite Blanc, époufe d'Ellies , neveu
& niece d'Antoine BJane, fe pourvoient au Lieutenant Civil
de Marfeille, en caffation du dernier tefiament, comme
.étant le fruit d'une çaptation dangereufe exercée par l'oncle
de l'héritiere. Le 30 Septembre, expofition au Lieutenant
Criminel de la même Ville de la part de Thomas Blanc,
portant que le te!l:ament eft nul, le Notaire ne s'étant pas
conformé à l'art. S de l'Ordonnance de 173 S ; qu'il eft le
fruit de la fuggeHion pratiquée par le Confeffeur de Blanc,
oncle de l'héritiere, qui conduilit le Teftateur chez le Notaire; que là, fans témoins; en préfence feulement de l'hé·ritiere, du Confeffeur & du TeHateur, le tefiament avoit
.été rédigé; que les témoins ne furent appellés qu'après;
que le Notaire avoit donc fauffement déclaré que le Tefiateur .lui avoit fait connoître fes difpoûtions en préfence des
témoins. L'information eil demandée; elle eil prife tant
fur la captation que fur le faux; le Notaire, les ûx témoins
inilrumentaires, l'héritiere & le Moine font décrétés d'affigné.
Marguerite Blanc intervient enfuite , & préfente une reqllête
en continuation d'information.
'
Les décrétés appellerent pardev;lnt la Cour du décret de foit
informé & de toute la procédure. On difoit pour Marie-Marguerite Bedot ,époufe de Merlat, que la procédure principale
requife par Thomas Blanc étoit inconteilahlement n.ulle par
~éfaut d'intérêt, attendu que quand même le teHament crou~
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leroit, celui de 1770 fubfilleroit, & ce dernier ne contient au<:une difpofirion en faveur de Thomas Blanc. L'intervention
pofiérieure de Marguerite Blanc pourroit-elle en eJFacer le
vice? Ell-il bien légal de fubroger après coup un plaignant qui
feroit recevable, à un autre plaignant qui ne l'efi pas, pour
lui faire adopter une proéédure fonciérement nulle? Tous'
les parens poffibles auroient - ils pu donner à la procédure
non recevable de Thomas Blanc une confiftance qu'elle
n'avoit pas? La procédure en addition ou continuation d'in.formation efi nulle; c'efi une procédure acceifoire qui manque & croulé par défaut de principa 1.
Thomas Blanc a, requis l'information, tant fur le faux que
fur la captation. Sur la captation, la procédure efi incon.teHablement nulle. La captation ne fe pourfuit pas par la
voie criminelle; la preuve n'en efi 're~ue au civil que dans
des circonllances graves, ou quand il exifie des commence.mens de preuve par écrit; une foule d'Arrêts ont rejetté.
cette preuve: tels font celui rendu entre le nommé Fillot de
Souliers, contre la Dlle. Eynefy; cetui de Me. Silvy, contre
l'Hôpital de' Pourrieres; celui de la Dlle. Clarion d'Arles ,.
contre Petit de Mallemort, & celui rendLl contre la Dlle.
Fournier en 1779.
Il n'ifl pas permis, di·t Denifart '10. preuve, nO• 13 , de faire
informer des faits de fuggeflion, d'articuler un moyen defaux:
admiflible, {,> fo,us ce prétexte faire preuve de faits inadmiflihies.
.
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L e meme' u eur, v. -'po , n • .:J, . v. contrat, n:._ 1 l ,
rapporte plufieurs Arrêts, & pofe pOUl'> çertain, d'après l'obfervation àe Mr; 1 Aivocat-Général' 'Gilbertl, que toutes voies
indireél:es., ménaRees pour introduire' la p'rel;lve· te.fiimoniale
contre·des aél:'es., fO.llt autant de fraudes- 11 Fordre·publié., &
des fubtilités pour faire recevoir· une preuve p'roliihée par
-l'Ordonnance. On· en· trouve cinq autres dOj,ns les Cau[es·Célebres., tom; J.' pag. 49.
.
C'efi auffi· ce- que la ~our a confiamment- jugé par [es
Arrêts. Tel! efi-celui· dù 13 Avril 1764', rendu· en··faveur du
fie ur Philip, coutre le· fleur Jaine· de· Mar[eille. Le- fieuz:
;62.
1
•
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PALAfS
DI!. P ROVll Nel!:
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Philip était porteur d'une prome1fe de 1') 2') liv.; le lieur
Jaine avoie imaginé le fyfiême d'une plainte, portant fur des
voies de fait, & dans laquelle il avoit infidieufement mêlé
des trairs tendans à attaquer la vérité & la légalité de fa
prome1fe. La Cour ne vit dans cette procédure qu'une voie
de tournure & d'artifice pour faire pa1fer une preuve prohi.
bée par l'Ordonnance, & tendant à renverfer un titre écrit
d'obligation. Tel eft encore l'Arrêt du 14 Juillet 1777, en
faveur de Me.... .• de la ville de Gra1fe, contre Me.•••••
Il avoit été pris ~ontre le premier une procédure tendante à prouver un abus prétendu de confiance & de dépôt.
C'étoit ub fait de convention dont la preuve n'eut pas été
recevable au civil; la Cour ca1fa la procédure. Enfin il eft
un troifieme Arrêt du 26 Mars 1778, qui ca1fa la procédure de· Jean Pere de la ville de Tarafcon, contre Jacques
Lagier, Marchand de dentelles "du lieu de Crapo~ne en
Velay. Ce dernier écoit porteur de lettres de change & de
divers titres de créance fur le nommé Roquefeuille, dont"
Jean Pere étoit héritier. Une procédure avoit été prife à la
Requête de Jean Pere, tant contre la veuve que contre
Lagier. Cette procédure tendait "à décrier & faire tomber
les titres de créance :qui fe troùvoient dans les mains de
c.e dernier; elle fut ca1fée en force des principes "que l'oû
vient de- 'citer:
,
On obfervoit pour le Notaire, que la plus impérieufe de
toutes les preuves, en celle qui réfulte d'un aél:e public; elle
efi authentique par elle-même; elle fixe la foi publique; elle
eft la preuve légale par excellence.
Le L~gjfiateur n'a revêtu,l'homme public d'-une au/Ii grande
autorité, qu!après avoir pris toutes' les précautions néceffaires pour s'a1furer de fa fidélité; la lignature des parcies,
celle des témoins, & l'expre/Iion des formalités requifes. Au/Ii
fcrupuleux dans fes précautions qu'aveugle dans la confiance
qui en eft le fruit, dès qu'il reconnoît dans l'aél:e les caracteres qu'il a prefcrit, il veut- que fan fuffrage entraîne celui
du Public & des Juges; qu'il foit la regle de leurs opinions
& l'appui ~e la vérité; qu'il Ja1fe foi par lui-même; qu'il
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Jou
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" •
prouve jufqu'aux formalités intrinfeques qui doivent' vajiHer'
les difpofitions qu'il'contient, & 'que toure fa formalité ex_T
térieure réfide dans le témoignage qu'en ont Tendu par
leurs fignatures les Minifires à qui il en a confié la confeéHon:,
Vouloir en détruire' les énonciations, c'efi tenter de'prouver
la non 'exifience d'une chofe qui efi folemnellement attefiée.
par le genre de preuve que la Loi a c.onfacré; preuve qui en~
tralne néceffairement les efprits, & repouffe tout ce qui peut
tendre à la faire révoquer en doute. Efi-ce connoltre l'ufage
de la preuve tefiimoniale, que de l'employer contre une preuvé
littérale, authentique par elle-même, & qui ne peut foulfrir
aucun paraUele? Comment fe pourroit-il que la plus foible·
triompMt de la plus forte ?Fautive , incertaine ~ dangereufe,
fufpeél:e de corruption & de menfo.nge, la preuve vocale
n'efi que fubfidiaire à la littérale; ce n'efi qu'à défaut d~
toute autre qu'elle efi admife, pour décou\!rir des vérités inconnues. Elle ne doit jamais devenir un moyen pOUl' détruire la pr~uve des vérités confiatées & juil:ifiées par écrit.
A quel défordre la fociété civile ne feroit-ellè pasexpofée,
s'il en étoit autrement! La foi publique n'auroit plus d'appui;.
le fort des citoyens n'au l'oit plus de regles;. les aél:es. les plus
folemnels feraient liv.l'és à la cupidité; en un mot; le' fort
de toutes les conventions, de tous les traités, de tous. les
aél:es, feroit entre les mains de deux ou trois témoins. v.endus·
au plus olfrant. . .
.
"
"
C'efi d'après des confidérations auŒ imporraqtes; c'efi
fur ces principes, que tous' les Auteurs conviennent qu'un
tefiament ne peut être caffé fous prétexte d'nmifiions, s'il
ne porte en 'Iui~même la preuve des défauts par ]efquels..on
~'attaque. Le Notaire ~ qui l'a' reçu; 'les témoins) qùi ;l"o'nt
foufcrit décIaraffent-ils que les formalités requifes·.n'ont pâs'
été obfervées, an ne s'arrêrerait pas à 1eur décIara.cion. C'efr
ce qui réfulte d'un Arrêt du 9 Juillet 1603' rapporté par
Bouvot, éom. 2, '10. (fjlament, quefi. 77.'
...
Le tefiamenc fuggéré efi J"ouvrage du tellateur, .mais du
teHateur furpris & Jéduit par des artifices étrangers au tefia-·
ment, fur lefquels le Notaire n'attefre rien, & qui ne font
.
ni
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PALAIS
DE
PltOVENCl\:;
'~'f
ni 'de fa connoiifance, ni de fon reifort. Voilà pourquoi la
preuve vocale de la fuggeflion efr reçue [ans inCcription de
faux. Elle ne contrarie point la preuve littérale. Mais fi l'on
arraque la volonté du teflateur, en fuppofant que le Notaire
n'a pas écrit fes véritables difpofitions, ou que par dol &
fraude il a fubHitué un autre héritier à celui -que le tefrateur
. lui avoit nommé, on ne peut faire la preuve de ces faits
que par la voie de l'infcription en faux, parce qu'on attaque
des difpolitions atreflées Far le Notaire, faifant les [onaions
de fon miniflere.
.Prétend-on que' les parties matérielles du teflament font
fauffes, qu'elles ont été fuppofées, augmentées, diminuées,
altérées ou changées? Alors l'aae perd la confiance que la
Loi lui 'attribuoit; il eH: [uppofé n'être plus l'ouvrage dn
te.fl:atepr ni des témoins, & l'infcription de faux efl reçue.
Mais il en efl autremenç du ,cas où cerre infcription ne porte
que fur l'énonciation d'une, formalité qu'on fuppofe n'avoir.
pas été remplie, quoique tous les miniflres de l'aél;e en garantiffent l'accompliffemenr. Bien qu'il [oit argué de faux,
l'aae n'en efr pas moins l'ouvrage de ceux qui l'ont ligné"
&; en qui la Loi a mis fa confiance & le dépôt de la foi
publique. L'accufation de faux ne préjudicie pas à leur qua~
lité; elle n'ôte rien à la forme extérieure par laquelle l'aae
efl devenu entre leurs mains le ligne de 1'1 vérité; elle ne
détruit pas la fupériorité de la preuve littérale, qui exclu't:
la preuve vocale i elle ne chal1ge &; n'altere en rien les prin~
cipes de l'authentiçité de l'aél;e, qui ne p~uvent pas dépendre
d'pne vaine formule. La preuve irrecevable au çivil Je fera éga~
lement' au criminel, fi Il; fonds des chofes efl to~jours le
même. C'efr ain,fi que s'expliquoient Mrs. Bignon & T'lIon"
Avocats_Généraux du Parlement de Paris, lors des Arrêts qui
furent rendus fUr leurs plaidoiries, & qui font rapportés dans
le Journal des Audiences, tom. 2, liv. J, çhap. 4,.& liv. 3,
chap. 26. .
'.
Un teframent en 1738 fur attaqué par la voie du faux,
fur le fondement que le Notaire qui l'avoit reçu, n'avoi~
pas été préfellc à la rédaaion, mais feulement fon fils i ce
1
�66
JOU'RNAL
qui fut prouvé par la procédure. Les premiers Jùges lé dé~
c1arerent nul, & laxétënt des déèrets cohtre le Notaire &.
contre fon fils. te Parlement de Paris réforma:; mit le
pere & le fils hors de Cour &. de proc/!s, &. cdnfirma le
tefiament.
'
, Me. Peigne, Notairé d'Arefne-Ie-Comte' en Anois, reçut
un tefhment qùi fut argllé de faux. Vinformation renfermoit la preuve complette qu'il l'avoit apporté tout'fait chez
le Tefiateur de qui il avoit conduit la main pour l'aider
à figner. Par Arrêt du Parlement de P'aris, le décret
de prife ail côrps déeerné contre le Noraire fut cafré. Il fut
déchargé de l'ac€ufarion avec dommages & intérêts, & le
tefiament fut emreteol:l.
Un autre tefiament reçu à Lyon par Me. Perrodon fut
querellé de fal,lx i fol,ls le prétexte qu'il n'avoit appi:'llê les
témoins qu'après l'avoir tranfcrit dans fa main-courante ;
qu'il ne lel,lr en avoit point fait la leél:ure, &. qu'il avoit fait
teffer un· agoni.ra·nt.. Par Arrêt du m6is de Mai, 1746,·le tefl:ament fut éonfirmé, & le Notaire relaxé d-'infiance, avec dépens, dommages-intérêts.
Il efi en effet de ·l'intérêt public que des aél:es qui affurent les biens &. le repos des citoyens f foient à couver.t
des ent.repcifes & de l'inquiémde des' fuccefréurs aD inteflat.
La Jùritiwlld'ence a fagement prévenu. de pareils incol1véniens , en ex,igednt que le faux frappe fur la fubftance des
d·ifpôfitions ; en ne ré'Cevant aucune preuve toutes lés fois
qu'il confie que fa volonté du -Tefiateur n'a été ni furprife
ni fuppofée; en' ne s'arrêtam pas même aux déclarations
que le Notaire & les témbins' faif'tJient à l'extrêniité de la
vie. C'efi ce qui fut jugé par l'Arrêt de' Bouvot ci-delfus
cité. Le motif fut que le Notaire & les témoins ne font établis qùe pour porter témoignage du tefiament , & hon pour
le détruire.
On a établi pour les Juges une Jurifprudence encore plus
favorable à leurs affertions" qui confirme celle qu'on a introduite en favéur des Notàires, & prouve toujours' mieux
"ombien on· fe défie de la preuve vocale. On ne reçoit point
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PAL AIS
D E
61
PRO VEN C E;
l'infcription de tàux tendance à prouver que le Juge ayant
fencencié un jour fériar, a effacé la vraie date pour en fubftÏtuer une autre. On ne reçoit point l'infcription de faux
tendante à prouver que le Juge a rédigé les dépolitions
d'une maniere différente de ce que lui ont dit les témoins.
Il y a à cet egard des Arrêts de la Cour & du Parlement
de Grenoble.
Les témoins qui dépofent après coup concre l'énonciation d'un teftament, font fufpeB:s de fubornation, parce que
celui qui les emploit eft guidé par ron intérêt, & vire à
un objet auquel il ne peut parvenir qu'en fe procurant des
dépolit ions favorables contre le teftament. C'eft l'obfervation de Breronnier fur Henrys, rom. l , liv. 'î, ch. l , quo
7; de Chorier en fa Jurifprudence de Guipape, liv. 3 , feB:.
l , art. 8, pag. 1') 3; de Decormis & de Danty aux aditions
fUr la Préface de Boiceau, n. 33. Le témoin inftrumentaire
exerce un miniftere public & néceffaire. Du moment que
par hl fignature il s'efl: voué au tefiament, fon minifiere
eft confommé, & il demeure irrévocablement lié à le foutenir. S'il fe contredit après coup, il décheoit de fon caractere , & c'efi vraiment alors qu'il devient fufpeB: & indigne
de tome croyance.
Il ne refie qu'une feule exception; c'eft lorfque le témoin qui a ligné, prouve qu'il a été filrpris par le dol du Notaire. Dans ce cas, le témoin n'eH pas coupable de prévaricarion , & on peut l'entendre, s'il manifefie les caufes de
fon erreur involontaire. C'efl: ce que dit Godefroy fur- la Loi
1') , -Cod. de (ide iriflrument., & lVIr. le Prélident Faber en
fa défin. 3, filr le titre du Code ad leg. Cornel. de faljis.
L'information qui n'attaque que les formalirés extrinfeques
de l'aB:e, efl: une enquête déguifée qui doit être rejercée.
Les témoins infirumentaires n'ont caraB:ere que pour affurer
les folemnités de l'aB:e, & nullement pour les faire révoquer en doute. C'efl:- ce que la Cour jugea par l'Arrêt du 3 l
Mai 174), au rapport de Mr. de Lauris, qui déclara impercinens & inadmilTibles des moyens de faux, conliftants en'
ce que le teHamenr avoit été fait dans une maifon tierce 1
1
20
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JOURNAL
quele Notaire avait été enfuite le publier dans la maifon
de la Tef!:atrice ,éloignée de deux cens pas;. que les témoins & le Notaire n'avaient reHé dans la. chambre de la
malade que le temps néceffaire pour la publ ication, & que
cependant le Notaire n'avait. pas fait difficulté de déclarer
<lue le tef!:ament avait été fait dans la maifon de la Tefl:atriee , diél:é par elle en préfence des témoins, &c. C'ef!:
auffi ce qui fut reconnu dans la fameufe affaire de Me.
Meilhe , Notaire de Draguignan, jugée par Arrêt du mois
de Juin 1771.
On répondait pour Thomas & Marguerite Blanc, que de
ce qu'une plainte ef!: rendue par quelqu'un qui, n'ayant auçun intérêt de la pourfuivre, n'a pas eu droit de la porter, .
i.l ne s'enfuit pas qu'elle fait nulle; elle ef!: non-recevable,
parce qu'en France les aél:ions ne font pas populaires: mais
il, y a loin d'une plainte nulle, à une plainte non-recevable.
Il ne peue donc pas être illégal que celui auquel le droit en
ef!: incontef!:ablement acquis, fe préfente pour l'adopter &
en faire lui-même les pourfuites..Si cette propofition ef!: vraie
en thefe générale, elle eil: d'autant plus inconte!lable, lorfque, comme dans le cas préfent, LI plainte rendue portant
fur un délit grave, là où la partie civile plaignante. n'aurait
eu aucun intérêt de la porter & dl! la pO,urfuivre, elle devrait
toujours fubG!ler pour l'intérêt. public.
.
Marguerite Blanc ef!: légataire de 2000 liv. dans le tef!:a-.
ment' de 1770 ; elle a donc intérêt d'avoir adhéré à la plainte
de Thomas Blanc. Son but principal a été de rapporter la
preuve de la fauffeté du tef!:ament qu'on attaque j de juf!:ifier que, quoiqu'il fût dit' dans ce tef!:ament que les folem-.
nités qu'exige l'Ordonnance de 173'), à peine de nullité,
avaient été remplies, ces folemnités avaient été ouvertement violées.
Sur le fecond moyen on difoit que vouloir que les folem- .
ni tés d'un tef!:ament n'aient aucun rapport avec la vérité de
a di fpoGtion j qu'elles ne foient conGdérées que comme de
pures formalités de peu de conféquence, & que l'on peut
négliger fans jnconvéniens , c'ef!: s'élever ouvertement con.,-.
�PALAtS' bn PR-OVENCE:
09'
tte les LoÎx leS plus expreŒes, contre les regles les. plus falutaites.
~
Dans les premiers temps, les teflamens ne fe faifoient
chez les Romains qu'en préfence de tout le peuple. Ce n'étoit qu'au milieu de tous fes concir01'ens, Juges & témoins de
fa capacité, ge fa fagefTe &. de l'emiere liberté avec laquelle
il agiffoit , qu'un Tefiareur pouvoit urer efficacement du pouvoir que lui avoir accordé le droit civil de faire de fes dernieres difpofitions autant de loix domefiiques , de changer à
fon gré, de troubler, d'abroger l'ordre naturei & favorable
des fucceffions légitimes.
'
Quand enfuite les teHamens dèvinrent des aél:es fecrers &
domefliques; quand les Romains eurent imaginé & i11tl'oduit parmi eux les différentes manieres de refler qu'ils nous
ont tranfmis avec leurs ufages & leurs Loix., l'ancienne folemniré devint impraticable; on y en fubfrirua d'autres. Les
Loix fubrogerent au 'peuple un certain nombre de témoins;
elles établirenr que lorfque le Teflateur vou droit faire un'
teHament nuncuparif , ce tefl:ament ne pourroit être valable
qu'autant qu'il prononceroit lui-même, & de fa propre bouche, le nom de fes héritiers en préfem:e des témoins. L. 2 l ,
if. qui teflamenta facere POjJilllt•.
Les Ordonnances de nos. Rois ont· voulu que de pareils
tefl:amens fufTent faits.en préfence au moins de fept témoins,
y compris le Notaire ,. que non feulement le Teflateur prononçât , en préCence des témoins , le nom de Ces héritiers,
mais qu'il diél:ât même à haute & intelligible voix toutes les
difpofitions de fon tefl:ament, & que le Notaire les écrivit à mefure qu'elles feroient prononcées. (Art.) de l'Ordonnance de 173) )., Le Légifiateur a enfuite prononcé la
nullité de tous les tefl:amens dans lefquels on n'auroit
pas obCervé ces Colemnités. (Art. 47 de la même Ordonnance ).
Les Légifiateurs ont fenci que de tous les aél:es poffibles,
il n'en étoit pas de plus important que le tefiament; qu'il
n'en étoit par conféquent aucun qui méritât plus particuliéremenc leur attention. Pour faire valoir un tefl:ament, il
'tH!
�10
Jou
B. N A L
ne fuffi~ pas que la volonté du Tl:lfiaçeur PilrpiJfe; il fape
encore que cette volonté foit appuyée des formalité§ que"
les Loix veuletH êtFl~ obfervée~ peur la rendre e$.c,ace; ç'efl:
ainli que .s'explique FLlrgole , Traité de§ TeUiltlleO§, çh. 5 ,.
feél:. 3 , pag. 262, n. 5'7.
Boniface, ~om. 5, liv. l , tir. 8 ,_ch. l , rapporte un Arrêt qui appointa les parties con.raires en leurs fait:; , dans
un cas où les folemnités établies par tes Loix .Romaines
'lvoienr été violi~s. Ç~lui qui açcaquoir le teH-'llPent, prétendoit qu'il avo)ç ~té fait f\jr l'interrogat du Norllire. Il en rapporte LlO autre, tit. 17, chap. l , p.ag. 94 , qui, avanr' dire
droit fur une çlemande en qJTatien , admit la preuve de la
démence ~ imbécilli~é du TeH:aJeur, & de Ce que le teframent attaql,lé avoit ~t!Î fait 'hors de fa préfeoce.. Au tom.
2 , liv. l , tir, l , ch. 4 , le même Arrêtilte en rapporte un
troifiem~ qui, fans avoir égard aux nllllités Eropofées, ordonn~ que le qe'malldeljr en ça1I:alion du teltament s'infcriroit en faux.
' .,' f
r Le Parleménr, de Pari& rec-evpit également la preuve par
tén1Qjl~s de la violation des fQlemnités requifes par les courumes clans les tefiamens. (Arrêt rapporté par Papon, liv. 20 ,
lit. l , n. 20, pag. 1121; Sallé, fur l'art. 5 de l'Ordonnance, dé 1735; Denifart", vo., Notaires, n. 65 & 68,
& va. teflamens, n. 7'2; Catelan, liy. 2 , ch. 68 ).
L'art. 48 de l'Ordonnailce de 1735', veut que les Notaires, Tabéllions ou autres per[onnes puhliques, les témoins qui auraient figné les tefiamens , codicilles ou aél:es
de derniere volonté, :ou les aél:.es . de [ufcription des tefia.
mens myfiiques, faai av.oir vu le Tefiateur, & fans ravoir
entendu pmnoncer fes difpoûrÎons. ,. ,au les lui avoir vu pré(enter lors de ladite fufcriprion ,. foient pourfuivis extraoFdi •
. nairement , & condamnés; favoir , les Notaires à la peine
de mort, & les témoins à relies peines affiiél:ives Qc infa.ll1antes qu~il appartienùra.
,,'
Peut-an fuppofer que la Loi eût p-ou1fé fi loin les précautions & la rigueur pour prévenir la v.iolatioll de ces
folemoités, fi. elles ne pouvaient être regardées que. cam··
�r
D U PAL I l s fi Ji PRO V I! N' C ,i:
•
7Î •
mé de pures forrrHilités.ifIdiltérebtes , '" n'ayant aucun iapPOtt avec la légalité; la vérité de l'aéte? Peut-on [outenir
que l'aéle dans lequel ces- fblemnltés auroient d'autant plus
été méprifées, qu'on y aurait fa~lrernent fupp6fé de les avoir
remplies, ne peut etre atraqué d'allcune maniere ,di entamé par aucun témoignage? C'eil: donc en -vain que la
Loi a établi; prefcrit; exigé ces folemmtés! C'éll:
donc en vain qu'elle a prononcé la nulfité des aéles où
elles ne feraient pas obfervées! Il dépendra des Notaires
de la méptifer ,-de la braver iênpunément!
Les folemnités des refl:arnens ont ~té établies pour en
aJfurer la vérité, poo'r (im fier qu'ils font l'ouvrage de la
volonté libre des rell:atetlrs. Tbut tell:amerlt qui n'a pas
été fait avec ces [alemnites, ell: donc nul. On ne peut
pas dire qu'il ait les cara8:eres qui feols rênCletlt un pareil
a-éle lég<l"l;- fi, quoique le teflament' p6rre que les falelnnités requifes dnt été obfer\'ées; elles oht néanmoins été négligées, cet a'él:e ell: entaché d'un double vice; il èll: doublement MI, & la fauJfeté au moyen de laquel1e on a voulu
coU\'rir cette contraventian,' prouve qu'elle a été volontaire, qu'elle eH cdnféque'm'méltt criminelle. 11 exill:e dans
ée c-as deux arimes à pùnir. Tout xlge qu'ilslle {o~ent. Ii
n'dt 'donc pas pO'ffible 'que les ,voiés de la JuŒiée ne -raient
pa's d?'vert~s .l'our, aψquet un femblabfe:, t:~aMent ,0 ,qu'if
n'y ait aucun m'oyen d'én' prouver la nullne &. la, fauf{èté.
~.
Mr. 1:Avocat-Généra:l de CaliJfan'e o'bférva , en fait, qu'Antoi,ne BlàI1c; ~p<till fan tffia-m'en't' du ,;,6 Septembre 1770,
Navoit IâiJfé -que 36do li,,: 1i rés prop'r S' p'atens, tout le
r~ll:e devant ê re reêilei)H par les parens dé f~ femme., La
Dlle. Bedot y ell: cofréfitiere aVec fa rœur. Thomas Blanc
'n'y a aucu'né part ,- & la . Ulle. Ffelies 'y efi légataire pour
2000 liv.; tprès dé huit ans',-:1près la' DUe. Hedet fe marie, •
& reço-it de nDuvelles p'reu 'es de 1:l bienfa:ifan d'Antoine
Blanc. En 1179, il fait én fecond refH~men pat lèquel une
cohéritiere de celui de 1770 efi fuppht'n y mais iL lui
efi légué la jouiffance & la propriété d'dnè tu<tifon qu'i vaut
J \
1
- '
�7'i,
JOURNA.L·
r
pre[que la 'moitié de la [ucceffion ;. ellé ne [e plaint' pas:
Thomas Blanc n'a rien eu dans le [econd; il n'avoit pas
plus dans le premier; il a, cru que ce fiIence du tef!:ateur
lui donnoit le droit de fe plaindre; il en a conclu que
dès qu'un homme ne donnoit pas· à tous fes parens, [on teframent étoit capté &: [uggéré, & en particulier. dans la
caufe', que -cette captation vicioit également le tef!:ament
de 1770 & celui de 1779.
Si la volonté d'Antoine Blanc a été furprife ; fi une influence étrangere & m!lligne l'a dominé, Thomas Blanc &
la Dlle. Helies auroient dû en ch:ucher les traces dans le
ref!:ament de 1770; ils auroient dei en.accufer la DUe. Bedot
elle-même, qui p,endant .1'0 ans a parr aux libéralités confrantes du tef!:ateur, & non le Religieux oncle de l'héritiere.
Ils ont [enti tans doute que ce fyHême, quoique néceffité
par leur défenfe; répugnerait 'lux premieres notions du caraél:ere & du cœur de l'homme. Comment perfuader que la
captation a dur~ près de .10 ans~ qu'aJ':aJ?t eu fon effet par
un prem.ier tef!:ament de 1770, elle ait eu befoin de'nouvelles intrigues en' 1779 pour aitermir cette volonté, candis
que toutes les circonHances ,prouvent qu'elle n'~voit jamais
varié .un. feul infrant? CO\Ilme~t, donner des preuves de ce
long emp'ire ? La captation .d orJ;1ine l'ame,)a furpreng, l'aveugle & l'entraînS\> ·La rapidité de fon ouvrage-ell facilite,
en affure le fuccès: C'efr .un éta~ -pénible pour l'ame [ubjuguée, c'ef!: le 'tourment de lâ liberté. Dans cetre crife, la
foibleffe donne le cOt1fentemen~ .fatal ; le tefrateur pe furvit pas pou:. I~. dééÏ<,uire; V?iM (eJC(J,nlmencem~nt & l'iffu~
de ce genre de, comnat. M"'Iis.. regner paifiblement, [ur [on
ame; m'ais l'aJfS'rvir 'pendant ~ u'n~ I~ngue 'r~ire d'an,nées)
[ans q\l'il regretù ni fa liberté cap.tive , ni fa raifon enchaî-.
née; mais lui faire aimer [on' ouvrag~; mais le lui fair~ _
confirmer plûfieurs fois dans je. salme fies [ens, < .~J IF vi::
gueur de la [allté: .quelle efr cette é~pnnante, ,Çam<ition 1
Si la pile: Redût
.,dev?it)· [e~ roin~,
[es [e~.o~Js, ~
[a' rendrefl,"e;. fi, elle devolt n'être attnbuee qu'à ce dou
~mpire q\lc l'amitié, les brenfaits " l~' r~èol1noiffance .èaven~
.
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P il. 0 VEN cl!;
73
fi bien conferver filr les am es honnêtes; ft elle étoit l'ouvrage d'une prédileél:ion fecrete, d'un penchant irrélill:ible;
fi l'ame d'Antoine Blanc n'avoit été entraînée que par fa
propre fenlibilité, alors l'on con~oit comment cet empire
a pu être durable.
Il établit en droit, que la captation, dangereufe, repréhenfible ,profcrite par les Loix coupable, ft l'on veur,
dans les mœurs, n'efl: cependant pas un crime; les moyens qu'elle emploit, operent une violence morale, donnent
des chaînes à la volont,é, féduifent le cœur; mais l'intérêt
public n'ell: point alarmé; les armes de la féduél:ion dirigées contre la volonté du tell:ateur, ce mêlange de foins,
de tendre1fe, de fecours, qui le fubjuguent même, en
altérant la liberté d'un [eul, ne menacent pas celle de tous.
Le tefiateur lui-même croit Couvent être libre, alors qu'il
l'efi le moins; entouré de parens avides, [on héritage
devient le prix du plus adroit; il doit Couvent les [oins,
& les fecours qu'on rend à la vieille1fe, à une tendre1fe fuggérée par l'intérêt, à une fenfibiliré que la cupidité [eule
échauftè. On abufe de fa foible1fe, plus encore que de [es
craintés; on obtient les bienfaits plus encore qu'on ne les
arrache. C'efi lui qui donne même ce qu'on lui enleve;
.auffi Ja [ociété ne voi.r-elle rien, non pas de repréhenfible',
,mais .de criminel, dans ces démarches de l'intérêt qui' d'abord enchaîné lui-même aux volontés capri.cieufes d'ut.!
vieillard, finit par l'a1fervir à fon tour, & qui Couvent n'achete cet empire momentané & incertain, que par le plus
,long &, le plus cruel efclavage. Si l'artifice efl: découvert,
'on ·ca1fe des difpofirio.tJs qui ne [ont pas celles du tefl:ateur;
'on. les détruit" non comme étant l'ouvrage du crime, mais
comme des Loix, qui n''lyant pas le fceaq de la liberté,
n'ont' pas la fanél:ion du [eul Légiflateur qui pouvait les
prononcer & les traQ[mettre, IX çomme des tell:arnens faits
-par des tefl:ateurs: qui ne pouvoien.t pas tefl:er, ou par· des
.gens qui difpofoient des biens ou d'une velonré étrangere;
-On les fait difparoîcre, malS on ne punit pas leurs auteurs,
K
�'lif
,10U:rtNAt
Ainn ùne procédure criminelle fUI: de' fI1'l1p\e'S faits de
captatiçm iferoit fàns doute J'une irrégularité fenfib'le. Quels
lnconvéniens, quels dangers n'emraîneroit pas cetle irrégularité! Rien n'ell: plus difficile dans notre Jurifprudence
que d'être admis à la 'preuve des faits de captation. Les faits
les' plus graves, les préfomprions les plus décilives doivent
être ;alléguées pour l'obtenir. Comme la volonté du teHa'telTr, corrlignée dans un aél:e a'mhemique, dl: une volonté légale, ce-rta,ine, il faue., pour la détruire par des moyens de cap''ration, que la volontéconrraire foitde la derniere évidence; que
Jes Juges foient frappés de :Cene contradiél:ion de femimens
où le tefunèur a paru fe tf{)uver, & que dans l'incertitude
'de détet-m'În~{' bquelle de 'ces wolo'ntés dl: la véritable, ils
cro-iênt dgvoir admettre la preuve 'Contraire de celle qui a
,pour ;garant -un ,a&e folemnel. Si on ne leur préfente que
'quelques regretS équivoques; quelques plaimes incertaines,
un afcendam ord~nairé, ils llliJTeat ,filblifier la foi' d'un aél:e
légal; ils {ont raffilrés fur "la volonté du reltateur;-ils écarten!). del; 'réclamations -que l'intérêt feul a diél:ées '; ils font
,d'autant plus dj.ificile~ [ur cene, preuve., que t,rès-fouvent
,la captatiofJ même réelle a laiJTé au teHateur toute fa li;berté. Ce fera .J'empire de l'habitude; le lieu des h.ienfaits,
l'afcendant 'Î'rréLiHib'le de -1'amiti'é .qui ·galfra enchaînée. Heu-reufe féduétibn ~ doux ~empire! fur quelles ames ne re.gnez-vous .pas '!
L
S'il était permis à lin fimple demandeuÎ' en :caJfation de
prendr.e la voiè criminelle, de faire informer fut des faits
de captation -dès-lors ft0ute difcufllon deviendrait inUtile;
~e ne -feroit plus ni de la Loi, 'l'Ii des Juges, mail; de
des 'propres démarches, '& pour .ainfi dire" de fa propre
téméri~é , que l~aGéufateur recevroit le bénéfice d'une preuve
qui au civil pourroit lui êtreconte'Hée; il fe 1a donnerait
à lui-'mê'me; il éviteroit cet examen redoutable dont peut[être elle n'aurait pas triomphé; tOUtes les difficultes feiraient tranchées, ,tous les obHacles furrnontés; I.es fage,s
·barrieres élevées par nos Loix feroient retlverfées; il prou,,;
veroit même avant d'être admis à prouver.
J,
�·
bu PALA'IS DE PROVENCE:.,
7~
Ici la voie la plus rigol:lreufe a été adoptée par Gelle des
parties qui avoit le moinrlre intérêt, ou plutôt qui n'en avoit
aucun. Thomas Blanc, toujours étranger au cœur du t'eftaÎ:eur comme 11- fes libéralités " àttaquoit en faux un teIl:ament dont la cflûte ne lui donnoit pas plus de droit à la
bienfaiunce, ni à ~a fortune de fon oncle; il étolt égaIement écarté- par les difpofitions de celui de 1770; il fe
plaignoit, il dénonço;t un crime, il invoquait tout l'appareil d'une procédure criminelle, & il- étoit non-recevable;
il étoit fans aélion comme fans intérêt;.fa plainte' l1'étoie
q~'une délation. La DUe. Helies, qui devoit pins qne lui
profiter de cette attaoq ue , ell: venue corriger l'itrégufarité
par fon intervention·; il eft certain que l'aclhéren-te' a un effet
retroaélif pour profiter de ce qui en fait & de ce qui exifte;
il n'dl: pas auffi certain qtle ce't effet foit le même pour
réparer ce qui eH vicieux extrinfequement', ou r.edonner la
vie à ce qui eft nul, d'Une !impie nullité relative; car c'e!l:
ainfi que l'on doit confidérer la procédme de Thomas Blanc
dans fon principe. Si c'ef!: à la requête d'un délateur que
les témoins ont été entendus, que le Juge a frappé, le
véritable accufateur puurra-t-il adopter cet ouvrage contre
l'accufé? Ne fera-t-il pas profcrit par les Loix? La 1ufl:ice
ne rejettera-t-efle pas des armes fournies par un accufateur téméraire, en l'écartant de la caufe,? Confervera-t-on
ce qu'il a fait? Aura-t-on plus de ménagement pour fon
ouvrage que pour lui-même?
Mr; PAvocat-Général difcuta ellfuite les divers faits. de
captation coartés par Thomas Blanc, & fa requête de plainte;
il oMervlt que d'après un principe qui n'ef!: pas contreverfé,
on n'ef!: pas reçu à prouver par témoins le contraire du'
contenu aux aéles, on n'e!l: pas reçu à acquérir une preuve
d'un moindre poids, d'une moindre importance que celle
qu'on veut détruire. Tout aéle. public a pour lui-même,
non feulement cette preuve tef!:imonial'e qu'on voudroit lui
oppofer, & qui par conféquent, en équilibre & en oppofi\ion l'une avec l'autre, laiiferoit la vérité incertaine; mais
il a de plus la fanélion d'un homme public; il eft cru
K20
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76
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parce qu'il l'a ,dit; c'dt peut-être une conféquence ri..:
dicule dans les regles générales; mais dans uQe fociété
où un homme en' repréfente fouvent plufieurs, & quelquefois tous, il a fallu fans doute attacher cerre efpece de foi
civile aux opérations d'une foule d'individus. Cerre maniere
de les voir ne les a pas rendus infaillibles, ne les a pas
dégagés des paflions humaines; mais elle a ra1furé la fociété; il efi important qu'on ne fait pas en garde contre des hommes publics, comme contre des hommes ordinaires.
Ourre cette foi publique due aux aaes & dont la fociété efi, pour ainli dire, devenue le garant par le minifiere de ceux qu'elle a aurorifés, ils réuni1fent encore
routes les probabilités morales fondées fur le fimple témoignage humain des témoins, c'efi-à-dire , des citoyens,
& la fociété en leur nom furveille tous les Notaires euxmêmes qui doivent figner prefque tous les aaes publics.
Comment détruire cerre double authenticité par une feule,
celle de la preuve par témoins? Elle doit donc en générai être rejettée contre la foi due aux aaes. Une foule
d'axiomes de droit fixent cette vérité.
Il ne faut pas cependant croire que ces principes décident la quefiion préfente; il paraît convenu que l'accuration de faux forme une exception à la regle générale,
parce que dans ce cas, c'ell: la baie même de la foi de
l'aae que l'on attaque; on n'y oppofe plus témoin à témain, ni des témoignages privés à la fanaion publique;
mais on détruit l'exifience même de ces témoins, de cette,
fanaion, on ne veut pas feulement l'ébranler & la rendre
fufpeae; mais montrer qu'une main infidele en a tracé
le caraaere; mais prouver qu'il n'y a réellement eu ni
fanaion publique, ni témoins, le principe que la foi ell:
due aux ,aaes refie alors fans application, parce que l'action du faux tend à prouver que l'aae lui-même n'exifie
pas. Ainfi par-là on fauve l'abus que l'on pourrait faire
de la preuve par témoins.
De quel faux peuc-il s'agir pour ,que cette exception foi~
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l'HA
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t'n:()V'uicl!:
71
recevable? Il ell: un faux matériel qui confill:e dans la fauffeté même des fignatures qui ont revêtu un aéte de la forme
légale ; on peut les attaquer en refpeétant même la foi due
.aux difpofitions foncieres de l'aéte.
. Quand le faux n'eil: qu'intelleétuel; quand l'accufateur con..
vient de la vérité des fignatures; quand il n'attaque que les
aifertions qu'elles garantiifent , & qu'il veut les faire romber
par la preuve par témoins, alors tout ell: obll:ac1e , tout eil:
danger, tout fait craindre l'inconvénient de la preuve qui
lie devrait pas avoir lieu contre la foi des aétes•. Mais en
même temps, dit l'Auteur du Code du faux dans fes' queftians de droit , plus l'anth'enticité de ces aaes efi grande,
plus il rfl intireJfànt ~ue le faux dont ils peuvent être infeais
[oit découvert & puni; & on 'ne peut pas Je diffimuler que cette
conJidiration ne [oit grave. Il efi vrai, ajoute-t-il, que l~
Juge doit faire grande attention aux circonflances ; il doit examiner fi le titre argué de faux fournit d'ailleurs des indices &
des commencemens de preuves de faux qui [oient, pour ainfi
dire, convenus. Ces indices & adminicules levent tous les
doutes, autrement il en erifle ~u'il n'rfl pas poffiMe de lever; tout doit dépendre de l'examen des circonfiances particuLieres.
_ En effet', fi la feule. preuve par témoins peut détruire unaéte authentique, un aéte garanti par des fignatures 'qui ne
font point attaquées, reyêtu de toutes -les. formàlités, attefl:é par des témoins qui, quant à ce , ont remp1i leur tâ, che ,ne peuvent plus rien alléguer contre leur fignature ,
ne doivent pas même y être reçus ; par des témoins qui ,.
pour être admis à prouver non l'extérieur de l'aéte , mais le
vice du fonds de la volonté, doivent prouver, fuivant Godefroy, J;'aber & plufieurs autres Auteurs, qu'ils ont été furpris:
Dehent evidentiffimis prohationihus docere Je deceptos in fuhfcrihendo. Qui ne fent qu'il pourra en réfulter, par la corruption des mœllrs, la facilité des fubornations & la po/Iibilité des faux-témoignages! Il femble qu'avant que d'admettre cette preuve, la fociété & les Magifirats doivent
~tre raifurés des dangers dont elle menace , par des foui'.'"
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t;on~
" ! ! '1
d. Ô U
R N A~r;
1
-
viohll1s., des .indices prelfans, des préfompti<rns fortes
qui puilfeot faire c:raindre l'exill:ence de ce fàul!.
<
Mr. l'Avocat~Gén.éral rapfJona les différens Arrêts, cités par
le Noraire, & qui ont rejerré l'infcription de faux contre le
~onten\D'aux. aélciu Il obferva enfuite que la capration & le
faux {~ détruifen.t..Au oiv.il, il pouvoie y avoir nullité &
captatinn ; parce que, qU9ique le Telhteur eÙc été- féduit', lé
Notai're pouvait commettre une nullité; mais s'il y'a càptaiion, le faux eH idéal, la procédure criminelle manque par
f,v bafe. Il n'y a po.int de délit; ce n'ell: qu'un moyen de
éalfation qu'il falloitlp:ourfuivre pardevant le Lieutenant Civil.
S'il y a Jaux; la: procéd re n:l1!'l eH pas moins .nulle-, puifque l'on 'a lfa'it informer'fur, le faux & la fubo'rnation. Mais
doit-elle èr~e recommencée' pardevam le.Lieutenanr Criminel?
Le ,faux Ifeuh1e doir-il pas êrre POUdi.livi? Cette guefiion
peut-elle enl:ore en faire une, lorf'qu'on voit que ce rell:amenr,.
foirqu'on: l'arraqae'ç'oinmé,f.'1û\ oucomme capté, ne préfeme
gué les mêmes d'irp6ff~iQns que celui me I770? Lorfqu'on voit
que les différences 'qui fe \ rroUvent enrre. ces deux a étes ,
lailfent fubiifrer la préférence pour l'héritier de. 1779; lorfqu'on 'voit que cerre vo.Iomé n'eH qu'une fuire des libéralités de ce Tell:ateur , lors du camrat de mariàge de Marguerite fa')niece &'fa. filleule; lorfqu'on voit gue ce Tefrateur .ria Jamais ilarié ; lorfqu'enfin tout indique que ce teframent. efi· (Jàn volonté libre', parce qu'elle efi confia'me; lorfque les préfomptions de faux font contradiél:oires , l'on ofe
même dire impoffibles ; lorfque tout parle en favellr d'un
~él:e; lorfqu'il faut, pour que la captation du tefl:ament de
1779, dénuéë de toilte preUJVe, 'de·toure préfornptioR; .de
~out indice; ne' _pa'roilfe pas entiérement invraifemblàblé,
faire ftibiiHer cette captarion pendant l'efpace de trente ans?
Car ou le Tefiateur était féduit, ou il ne l'étoit pas. S'il
fétait, le faux devenoit inutile, fur-tout:fi cet empire étain
irréfiHible par une fuite d'anné~s. S'il ne l'était pas, s'il
agilfoic avec liberté, fi le Notaire feu!' a gêné les clifpofit-ions, s'i!ne les a pas écritès fors qe 'la diélée ,du Tef~ilCeUr) s'il ne lui a arraéhé qu'un av~u faél:ice) &) pou~
�nu PAi:Ai,sl DB P'n.OVIlNCt!:
7
'ain!i dire, {imulé,.un conCe!ltement tacite d'unè volonté qui
n'étoit pas la {ienne, en un mo't , s'11 iL cuntrarié la yolollté
du Tefiateur , pourquoi cette volonte Ce trOllVe-r-elle conforme à tout ce qu'avoi t fait le Tefrateur depuis dix ans?
Donc faux auffi inutile qu'impoffible.
•, •
Mr. l'Avocat-Général conclut à ce que, fans s'arrêter 11.
la œquête d'intervention de 'MargueriteBianc , épouiè d'Helies, faiCant 'droit à l'appel de Marguerite Bedor , époûfe
de Pierre Merlat & autres, le dénet de foit-informé , &
de tout ce .qui l'avoit Cuivi , fut, déclaré nul, & comme rel
<:alfé .,avec perrniffion 1au Notaire [de faire imprimer &
afficher l'Arrêt.
Par ATtêt du 1'Î Avrif 1i8a, pronoilcépar Mr.le Préiident
de Saint-Vincent, les condulions furent- fuivies , avec dépens. Plaidant Mes. Gailler, Simeon fils & Laget.
..
ARJ;tÊT
X.
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Le -Failli 41 'obligé, en remettant [on bilan., ,de 'nemettre
les livres de commerce.
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'Le créancier 'lui n'a pas figné ·le ço lcor'dtlt ,;p,eJJt 0pFojèr ce
défaut de rémiffion.
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ES aff~ires d,e Tofep?....... ,~archand Tanne~i de la.ville
de BaTJols , etant' derangees dans les premIers mOIs de
Bannée 1774, il préCenta un conçorclat à fes créanQiers ;, ,il
s'obligea de payer le cinQuante 'pour'eent'<\e leurs'créances; le
concoràat fut {igné 'le "7 -JtIars mê1:ne année·; mais il ne
fut point h0mologué, Le 8 du, moi's d/Août ,ftüvaor, Jil
offrit à fes créanciers le 18 pour cent, au lieu du 'Î o. Quelques-uns accepterent & {ignerent un nouveau concordat; le
fieu'r Aubin, Negociant de MarCeille, refufa de le ligner;
Donpbfiant çe refus, Jofeph....... en demanda & obtint l'ho. roologation le 26 du même mois.
Aubin fic des pourCuites contre fan débiteur; il demalld,!
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que le fcellé :ftit appofe chez lui, & fit faifir quelques mar":
chandjfes qui étoient dans fa fabrique. Ayant enfuire appris
qu'il n'avoit remis ni fes livres, ni fon bilan riere le Greffe
de la Jurifdiél:ion de Barjols, il fe pourvut en révocation
du décret portam homologation du concordat du 8 Août
, i774'
On difoit pour Aubin que le concordat 'était nul, parce
qu'il n'avait point été précédé de la rémiffion des livres &
du bilan; parce qu'aucun des créanciers fignataires n'avoit
affirmé à ferment la vérité de fa créance; parce que le
failli n'avait pas même demandé l'aifemblée de [es créan.
ciers.
ï
;
Le défa'ut rde remiffiun des livrès & du- bilan efi: un
moyeninfurmoiJtable contre le concordat & le Jugement qui
l'homologue. Les Déclarations du Roi des 13 Juin '716 &
13 Septembre 1739, ordonnent cette rémiffion ..comme Ull
préalable -eifentiel à la légitimité de toutes 'écrites Qu-concordats, & à la validité des Jugemens d'homologation; ces
aél:es y font dédarés nuls &: de nul effet, par le [eul défaut
de rémiffion.
. Le'défaut d'affirmation des cré-ances ell: encore un vice
radical, parce qu'en eflet, un concordat. ne peut devenir·
'obligatoire contre 'les ctéanders (efu(ans , que lorfqu'il dl:
l'ouvrage de ceux qui avoient droit & tit(e pour le' ligner;;
c'efi: ce qui efi: prefcrit par la Décl'lration dl! I I Janvi.er
17 16.
,.,"
C'e!1: un-e maxime que les créanciers n'acquierellt le dro.Ît
de lier les abfens -& les réfraB:aitles , - que lorfqu'on a ~.;-u
Ce former 'auparavant .ceue-éfpece de· [clc~né qui réfulre 'd'une
aifemblée légalemel1t~co-nv0quêe.'II 'rl'l'a jufques-Ià riefJ qui
[oit commun entre les "créanè-iers du failli; jufqües -là les
uns ne peuvent difpofer des intérêts des au~res; jufques-Ià chacun d'eux conferve tous [es droits &. la liberté de pourfuivre
le dehiteur. Telle efi: la regle ,lJFefc!'ite., par .\'lArrêt de la
Cour du premier Avril 1151. l , rapporté par- Mr. de BezieuX',
pag. 570, & par l'Arrêt déRéglernent du '3 Jùin l'7If,'rap-,
po.rte par Mr. de.Reguffe.
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. On repooQôit pour le failli, que quoique 'les O'rdotinances
"aienc requis la rémiffion des livres, les créanciers pouvoient
en difpenfer. D'ailleurs Jofeph..... , n'étoit pas au cas de
les remettre, puifqu'il n'en avoit point, ainli que tous les
• autres Tanneurs de Barjols. L'Ordonnance doit étre regardée comme un confeil, plutôt que comme une regle qui fer-oit quelquefois préjudiciable aux créanciers; c'eH leur intérét qu'elle a coofulré, & qu'il faut prendre pour guide dans
les arrangemens des faillites; c'ell le fenrimenr de tous les
Commentateurs. Quand l'état des affaires du débiteur en
parfaitemenc connu des créanciers, une rémiffion de bilan
n'ell plus qu'une opération inutile; elle ne peut donner de
plus grande connoiifance aux créanciers, & 'ne ferviroit qu'li
faire confumer en frais le peu qui refie dans une faillite.
. Les autres créanciers avoient le même intérét que le lieur
Aubin à conceller un concordat qui les réduifoit au dix-huit
pour cent; ils l'onc pourranc ligné, & l'on ne préfume pas
qu'ils aient voulu faire grace à leur déoiteur.
Le défaut d'affirmation des créances ne fauroit fuire un
moyen de nullité, parce qu'on peut y faire procéder en rout
temps, & le failli offre de la rapporter; il n'a fait que ce
que fes créanciers ont voulu. Pouvoit-il ne pas recevoir la: loi qu'ils lui impofoient ?
Me. Bermond, Subfiitut., obferva que l'arr. 3 du rit. II de.
l'Ordonnance de 1673, porre que les Négocians, Marchands'
&:. Banquiers, féront tenus de repréfencer leurs livres & regiftres, pour être remis au GrefFe des Juges-Confuls, s'il y en'
a , linon à l'Hôtel commun des Villes, ou ès mains des;
créanciers, à leur choix.
La Déclaration de 1716 ajoutant à cerre difpolition, veut
que faute de ce, le débiteur failli ne puiife être reçu à paifel'
a.vec fes créanciers aucun contrat d'atermoiement, concordat, Tranfaél:ion ou autre aél:e, & qu'il puiife même être
pourfuivi comme banqueroutier frauduleux.
Telles fone les obligations du débiteur, quant à la rémiffion de fes livres & regillres; telles fone les peines que le
LégiUateur a attachées au défa\lt d'exécution de la Loi. Nul,
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cOJ)J:orÏ:1at S1"ell: valable, .quand le .débiJ:eUl Ilt s'eA: pig
fermé à la difpolition de l'Qr.donnanœ.
CQmme·nt Ies créanciers paurrlilient.ils, fans le fepollr!
des livres du déhiœyr, ac.quérir cette clOnnoi4faJ?ce enae de.
fes ;lffaires, d'après laquelle ils. doivent prendre, pour l'in,.
eér~t de [Q;lIS, les mefures les plus (ages.? Cammen.t! pDur1
roient-ils fa.voir fi leur débiteur ne lear a porté aucun P!éjudice, &: s'il ne s'efI: per!pis aucune forte d'aMnatwl1 ~ de
eranfport qui foit contraire à leurs dr.(j)insJ
11 ef!: yrai, que les cr.éancierspeu\!eat jJifp.enfer leur dé..
biteur de "etce rémiffion; on ne p.ourroit pas.oppafer "ette
renonciation amc c.néanciers, fi le défaut de rém,WflOn étoit
c.onfidéré comme u~ nullité ahfol.ue, parce que.crs fortes
de tUlHités ne peuve/U) élire \qou,v~rtes par auaun ".@l~fente~
ment. Ma~ l:t Lw qui a impofé cette' obligaliÏ0n ail débiteur, n'ef!: qulune limple L,Qi civ.i1e, toute relative à Pincérêt
des cl'éanciers.
Ainfi, quand 1'.unanimité des fuffrag-es fura réunie par le,
débiteur-" &: que fes, créanciers auront tous aon[enti à le difp.enfer d'IUle rémiffion jur.idillue d~ [es livres., ils fe er0Uv.eront liés. pa.r lellr' C:0nfentement, & ils ne pourrQll~ plus'
l~bligel' à cemRlir URe f.(j)rmalÏté dont ils lIaur0nl: cdifpenre
eux-mêmes. Tels font les principes. ful' lefqllds. iOlierviat
l'Anie en fà.veur ,du Jieur. Kick ~ la "ille de Mar.feille,
œntre un de fes néanciers.
Mais cela 'ne peut' avow lieu cont.re uncréall.cier. .quin'a
point wtp~lilfé lui-même fon débiteur de la rémi.tfiun des livees,; la r.enon.. ia.tio~.des autr.es créan"ier-s lui ilL!: aJ)folume~c
indifférente; elle n'dl: point légale, parœ '1uli11 faun que cha..
cun d,s cr.éanciers puiife profiter d"une form.11nté é.ta:blie
p.o.ur fua av..antag.e. lLeu,r figGature le I.iuoit ~ fii ce qui eft
pre!crit p~ fOJdonnance a~o.ili été r.eligieufement vbfervé"
parce que les for-lililalités fom amant de préçau~ions que la
Loi a prifes pour a/fure.r l'intérêt du. q:éancier, & prévelfir
les fcaudes du fail1i.
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Le prétexte dont le débiteur fe fer,t pou.r fe difpenfer cde
la rémiffion, el!! difant qu'il ll~avQit aUli:L1D& liv.res dew!Jl~
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- merce ~ ne fert qu'à vouloir couvrir une nullité par une autre.
L'Ordonnance de 16-'3 requiert exprefféme-nt en l'art. t du
titre 3, que tous les Marchands & Négocians auront un livre
contenant tout leur négoce J lettres Be c:hange, dettes aaives & paffives. Elle fait une obligation à toUS Marchands &
Négocians d'avoir ,des livres. Les Commèntateurs difent que
les livres font néceffaires, afin que les Négocians puiffent
rendre taifon de lebr conduire, au cas qu'ils vihffent à être
dérangés dans le/us affaires.
Inutilement opfTolè'roit-on au fieur Aubin qu'il avoit déja
figné tin premier concorùat, lors duquel il n'avoit pas exigé
la repréferitatŒon des livres; c'en tJoé grace qu'il vbulut
bien faire à cette prem'ere époque, puifqo'il déIJendofc de
lui d'élever la même difficulté <I0'il a élevée lors de la feconde convention. Tout te qu'on peut en conclure, ctef!:
qu'il fe rep-ofa alo'rs fur la h:onne foi de fon débit{'Ut, &
qu'il le difpenfa pour rcette fois de fournir ime joftificati(l)Q;
mais on ne trouve nulle part l'obligation du fieur Aubin dê
foufcrire tous les acoor<!s poll:édeurs que ce débiteur .p-oor.!.
roit paffer avec fes créanciers. Il y a même unè différence
fi cohfidêrable em're ce qui eil: donné aux créanciers par le
premier concoidat, & ce qui leur eH donné par le fecond,
qu'il n'eH pas étonnant que le débiteur aie rertcontré plus
d'obfrination de la parr dés iméreffés.
Le défaut d'affirmation d'es créances ne p-arut pas un moyén
capable de fairerévoquèr l'homologation du coneordat, s'il
avoit été dans la forme uIitée & établie, parlJe qu'on péuC
la fopp-léer en tout état de dufe.
,
Me. Bermond cdnc1ut à <Ce qu'il fut o'rdonné que faifant
èroit à la requête du lieur Aubin, le décret du 26 Août 1774'
portant homologation du concordat de Jofeph ......• fè-rdic
& demeurerait révoqué; au chef concerbant le fieur Aubin,
& qu'il lui ferait vermis de pourfuivre fes exécutions ju[<tues
au co'ncurrenr des 'fommes 11 lui dues.
Par Arrêt du I~ Avril 1780, prononcé par Mt. le Ptemiel'
Préfidem, les condufions furenL fllivies; Jofeph ...•. tht condamné aux dépens. Plaidant Mès. Eil'rivier & Gaffier.
,
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ARRÊT
SUR une demande
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XI.
féparation d'habitation.
E 17 Aout 1768 , le fieur Giraud' de la ville dé Mar[eille [e maria avec la Dlle. There[e Peiron; fix [emaines après, Giraud étant dans le deffein de paffer dans les HIes,
interpella [a femme de le [uivre, fous l'offre de fournir à touS
fes be[oins, & de la traiter maritalemenr. La DUe. Peiron
répondir que quelque attachement qu'elle eûr pour [on époux,
eUe ne pouvoir'[e deterrr,iner à paffer avec lui dans les HIes;
qu'avant de [e marier, [on mari l'avait affurée qu'il n'y pa[ferait jamais. EUe pré[enra requêre au Lieutenant pour avoir
fan trouffeau; elle obtint une Ordonnance qui fut exécutée
par le mari; celui-'ci lui, fit même une procurariou pour retirer pendilCit fan abfence les penlions échues & à écheoir
d'un capital de 2000 liv.
Le lieur Giraud p'lrrit, & le 23 Septembre la Dlle. Peiron
demanda au Lieutenant de Marfeille une penlion alimentaire;
Giraud en fut. inHruit; & le I l Juillet 1769, il donna une
requêre incidence en injonÇl:ion à fa femme de le joindre à
la Martinique, & de s'embarquer fur le premier Vaiffeau
qui Rartiroit, fous l'offre de payer [on paffage, de fournir à
[es befoins pour fan voyage & fan fejour aux HIes, & de
la trairer maritalement. Le 4 Février 1771, Sentence contradiaoire qui déboute la DUe. Peiron de fa requête principale, fi mieux elle n'aime rejoindre [on mari; elle lui fut
fignifiée.le 16 du même mois.
Six ans après, & le 24 Février 1777, Giraud requit [a
femme de venir le rejoindre à Avignon, où il avait fixé [on
domicile, fous l'offre de la traiter maritalement; & dans le
cas où elle prendrait le p~érexre de n'être pas obligée de
f~ivre f01;1 mari dans une Monarchie étrahgere, il lui déclare
qu'il oRre de rran[porrer fan domicile dans la Ville d'Orange.
�nu
PALAt-S
DB ·PROVIlNCl!.
'Ir;':
La Dlle. Peiron répondit qu'elle avolt fOlrfferi trop 1 de
mépris, d'injures, de mauvais traitemens & d'outrages de la'
part de fan mari., qu'elle en recevait aél:uellemenr trop
de fa conduite, pour que la Jufl:ice & les Loix puilfenr l'obliger.
à- l'aller rejoindr~ dans une Monarchie étrangere .où elle
ferait privée de tour feconrs. Le 20 Mars, Senrence qui ordonne qu'il fera pourfuivi au Jonds & principal ainli qu'il
appartienr, déboute des fins de non-procéder propofées.
par Giraud, & adjuge à fa femme une provillon de 300 liv.
& la fauve-garde. Giraud rippella de cette Semence avec
claulè d'évocation du fonds & principal; i~ demanda la fur-.
féance; décret de [oit-montré partie, demeurant tout èn état
jufiJu'a la réponjè. Le J S ~ 22 Avril, nouvelle requête
avec claufe irritanre, qui palfe en force de chofe iugée. Le
. 19 Février 1779, requête incidente de Giraud en injonction à fa femme de venir le rejoindre dans quinzaine, &
d'apporter fon rroulfeau qui lui avait été remis avant la
féparation ,le tout en vertu de la Senrence qu'il avoit obtenu en 177 r.
Le 10 Avril 1780, la Dlle. Peiron préfenra une requête incidenre pour être. recrue, en tant que de befoin, appellanre de la Sentence âu mois de Févrie~ 177 [, Ces
deux demandes furenr .renvoyées à PAudience. Elle .o.ffria.
à prouver, 1°. que dès les premiers jours CIe fan mariage 1Giraud la ma1rraitoit de . paroles, de menaces & de coups,
qu'il la tenait enfermée dans fa chambre, lui. fa ifa nr manquer de tout; 2°. que dès-lors il vivait dans la même maifan avec une concubine, nomméè .Claudim:, qui était enceinte de fes œuvres; 3°: qu'il l'ouloic' mener'.la Dlle: Pei."
ron en Amérique avec cette 'concubine; 4-0. qu'iLétoit re~
venu de l'Amérique avec cette même fille avec laquelle il s'était établi dans le Comtat; So. qu'il ne donna aucune nou.velle de fon recour à la Dlle. Peiron; 6°. que rée.emmenr il
avait eu un enfanr de cette -concubine; 7°. qu'il -avait tenu
des propos calomnieux & diffamants filr la conduite de fan
époure; 8°, qu'il avoit dit qu'il voulait avoir fa femme pour
la mener en Amérique , la faire périr & légitimer fes en-
a
fans adLlltérins,
~c.
,
�~r
Jd~~NA~
. '0rrdifoÎ't ,pout le fieur Gîl'llUd, que la conduite.dé' [a fefumé avait été lit feule calife de" fan commerce qüi nJavoit
rien eo de fcaudaleltx; que fa cohcub-ine n'avoit jama'is ha'bité avec eUe" d'ans la maIfon de fOIil mari-; que depuis long
temps ils n'habitaient point fous le mêtne toit;, qu'il ne re-'
demande' fa femme que fous la l'Fomeffe pofitive de ne pIuS'
reva}r cette fiUe; aÎnii pIuS" de commerce, ni, de caufe de
féparation qui' dure depuis alfe1: long temps, /!c que la Loi
doit faire celfer.
Pour détruire les faits contenus dans l'expédient de là
Dame Giraud, bn' difoit que l'offre de la traiter maritale...
- meilt les fa'ifoit"évanouir ; qu'une féparation de douze ans les
avoie eXp'iés; qu'enfin ils éto'iene [uppofés, parce que la
Dame Giraud n'en avoit rien di~ en 1768.
On répondoit pour la Dame Giraud, que la concubine
'écoie avec [on mari lors de- fon mariage, & qu'elre lui
a'Voi't plus d'up'e fois fait fencir combien eHe avoit d'empire
fur'fon m-ari, par le peu de forns & d'égal'ds qu'il avoie pour
elle, par les mauvais eraitemens qu'il lui avoit ~uvent fàit
endurer. Cetre perfpiaIve am'aya la Dame Giraud, &
ajouta etrcore à, fa répugnance à partir pour les HIes. Le
commerce du lieur Giraud p-ouvoit être aIdrs une' caufe de
repar'ltiori; ne doit-il pas empêcher la réu'nion de {a femt;rre avec lui? Tl renverra Claudine, il l'a mê'lne déja fait.
Mais ne faut-il pa-s éprouVer ce'tte volonté prefque irNmifembhlble , puifqû'élle contra'tÎe un att<rc'hement co-nihmt? Ne
faut"ilp'a-s que" le temps ait agi pelIr faire fupporter au freltr
Girauà line' fépf(niiGn q\lÏ con'tJ!ari~ des habitudes; & l'em~ê_
dier de regaid-er b rétinion de' fa.femme',quoiqoe' dmmrndée
par tûi, dnl'rne. en érant 'te 'léoitl1'bie mom? Ne' fam-il pas an
moins que la' Dame Giraud ait pu oublier {es 'outrages que
lui a fait [on mari? EŒ"ce iéi un'e' (de 'ces fanrai'J.ies paifa'"
geres que l'imta-Iit qtii le-s voit 'éHe5~ i promet~ pOlJ~ a!infl
dire, cre vOfr éVa:nolfir?' N'efi':ce ",as att 20mra',re' t1rr de
ces aOta'Cliemens lo-liaes, devenu itlCéreKant p-ar :la Jrai1fa~fl)e
de plufieuis enfa'ns, n'éceffaiie mê"rrre', peirt~êtrè par l'hibitud'e , pn d'es .foms &: par tle-s -acuenvrC1hs? be fleur Gi~
�PB.OVnN'C!!~
1f1
i'au(I ; qui dans le com,mencemem de fon mariage traitcit .
durement fa femme d'après les infpiraûons de .Claudine,
traitern-t-il mieux [a femme, quand Claudine ay~nt acquis.
bien des d,roits, voudra en ufee? Quand, comme mere',
elle cherchera à faire valoir' les dr.oils de feli e9fans, qu'opporera la Dame Giraud à fes foliicitations? Ses reffources
fe1:ont .va.ines, dès qu'eUe fera ren,crée entre les ma.ins d'un
tfran.
M,. 1'4.v.ocat-Général de Cali1fanne obf~n'a que le mariage
et!: un, & doit être inliliffoiuble ; le bien de la fociété, l'intérêt
de~eofans , le repos des familles, le vœu de." conlraétans , tout
le demande, colltPexige ;,auffi lI(~hle, auffigr-andll'un que Vautre,
Vhomme&lafemme rci!gnenttollS ~eulC fur Ja nature par u,n efprit fait p01!l1' conlloiue , &
cœur fait .pour aimer; unis
par le maria.ge, ,ils uanfmettent à des êtns comme eux cet
:lvantage & œ·t empire que donnent aux hommes .le fen'f-iment & la l'aifon, C'eft dQnc [ur Iii- caifon & l'amollr ~ue
.doit être établie 11uoion d'es qoUl6. Que cette union eft
beUe., qui dérive de~ ,pr.incipes fi p,urs, créées pour la
eonfer.vation commune1 La femome ne ,fait le b,ien de touS
qu'en formant' le bonllellr CII'un f~u}, pal' lIuni.cé, Findlviduite, (ou$.1e$ deux pt=incip:wx carall:eres ~'une ~~ia-nce f.I'
éliroite & ii lâge. Il ·ne falilt dnnc 'pas- fe portel' lr.op -légérement à aCCQl"dep derfépal'ation,s encie Ol.'lii & femme; mais\
il ne filut ,p,as auffi autorifer des, pméautions & des- \'liaient"
~es li}ui aillent jufqu-'à la ry~annie. N ne faut pas. qu'une [em·
me f0it fufceptible & crie au déshonneur pour la .ingindF~.
cho~; mais il fa,ut 'lu/elle pLÛffe. approcher ion rI.mi fan~
fo.ug,r.
.
. La qualite deS' perfonnes ea.une cil'çonfil:ance importante·,
parce q,ue dans des perfonnes fans éducation, O(l doit attend.e moil;ls cl?auen.rioo ,de la part .d'un mari, moins E!e
~n!ibil.ité de lot part de la fllmme. Dans quetque état qu'elle
fe tr.ouve, faut-il qu'elle en ait aflèz peu pOIlF voir .fan mari'
avoie un commerce fcanda~ellX &; public avec une au,re femme -, pour en v.oir .les ,fi;uirs 3\1..tO•..ut d'elle, & être forcée
les y fouffrir, pour ne pas éprouver les .mauvais- t-raite;:
DU
PALAU
D,Il
un
pe
�lllr
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Jb
U .R"N A L
mens d'un ~pOllX? Il êe1t une aveugle jalouiie 'quI fe voile'
fans 'raifon; & empoifqnne les démarches les plus inno'centes; mais il ef!: ulle feniibilité juf!:~ & raifonnable qui
s'éleve avec indignation contre une préférence qui dégrade
une, femm~ légitime. 'La Loi, non feulement le permet,
majs même l'aùtorife : quod maximè caflas uxores eX'dJPerat;
qi~ la Loi! 8, Cod. de repud. Comment olJliger une femme
de vivre avec fon mari, quand elle le voit prodiguer toute
'fa tendrelfe à une autre? Sans doute il n'ef!: pas permis à
lll)e femme d'intenter contre Jon mari une al:l:ion d'adultere', c'ef!:-à-dire , de lui faire faire fon procès pour raifon..
(je· ce crime; mais il.tef!: des circonf!:an.ces dans lefquelles'
elle r peut s'en faire urt moyen de féparation; & la principale ef!: lorfque le mari fair habiter dans fa propre maifon
l'objer de fes criminelles complaifances. La Loi le décide
trop précjfémenr, pour qu'on puilfe le révoqQ.er en doute.
Si quis in eâ.domo in quâ cum fuâ conjuge manet ,. coneenzlIens eam, _:CÙ/Jl a~a .inveniatur in .eâdem' domo manens.'
.j!:n effet, ,qu'un mari' préfere dans fon cœur une érrangere à
fon époufe ,. c'ef!: une foibleffe qu'on pardonne à J'huma- .
. nité; mais qu'il: faire trophée de fapaffion, qu'il infulte fa
femme ju,Cqu'à. placer à côté d'elle celle à laquelle il fac'ri_
fie t9YS le:; devoirs .de fon état; qu'il al\gmente fes. malheurs .parJa 'VlUl d'un objer qui lui rappelle fans· celfe ce
qui eil! ef!: la caufe déplorable;' en un' mor, qu'il déshonore le féjour d'une femme de vertu, en faifant "de fa
propre m;li[on un afyle de pr.of!:itution, voilà ce que les
Loix ,regardent ·c.omme •une. ca?fe trop, légitime de divorce,
Mais ce n'eit pas feulement dans les circonftances. qu'on
-.:ient ·de rappeller, qu'une femme eH autodfée à deman-'
der ta féparation [ur le fondement d'un mauvai's commerce
entretenu par [on mari: ilfuffit (dit Cochin) que ce éommerce foit une fuite de lialfons qliÏ ait précédé le mariage,
quand Dien même le mari ne feroit pas 11enu J cet excès d'indi"/'
gnité 'lqe de loger. dans la maifon le but de fa paJlion -criminelle; c'eJl ce, qui a été jugé par différtns, Arrêts ( ajoute le
même Auteur.).
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PIlOVENCI!;
En l'état exifte-t-il des caufes de féparation alfez graves
pour ne pas faire droit à la demande du fieur Giraud, ou y
a-t-il quelque danger dans la réunion demandée? Y avoitil des caufes de réparation en 1768 ? En exifie-t-il encore
aujourd'hui? Toutes ces quefiions ne préfentent que le même
point de vue. L'expédient offert par la Darne Giraud eft-il
concluant, ou cette preuve eft-'elle non-recevable?
S'il a exifté de mauvais traite mens en J7 68 , pourquoi
la Darne Giraud auroit-elle perdu le droit de s'en plaindre?
Parce ( dIt le mari) qu'il s'efi pa1Té un interValle de douze
ans, & que la Jufiice n'ellt ordonné qu'une féparation bien
plus courte ; parce qu'en n la demande en rejonél-ion du
fieur Giraud fait ce1Ter rous'les torts? Quel fyfiême! Quoi!
il fera permis à un mari de maltraiter fa femme, & parce
qu'il fe fera abfenté, &. qu'au bout de cette abfence il
viendra re.demander fa femme, la Jufiice rejettera la plainte
de celle-ci!' Sa voix ne pourra plus être écoutée! L'abfence
& l'éloignement ,font-ils donè devenus de nouveaux moyens
de reconciliation , & le m.ilri , après avoir maltraité fa femme, c'eH-à-dire, ayant commis un délit envers elle, auroit-il donc plus de droit pour po1Téder Fon époufe, qu'au
moment même où il s'eH marié? D'ailleurs la DUe. Ginud
avoit f.1it a1Tez pre1rentir en 1768 les mauvais'traitemens
de fon mari, dont elle offre aujourd'hui la preuvé; fon aéi:ion
fubfifie donc en fon entier.
.
Mr. l'Avocat-Général conclut à la réception de l'expédient de la Dlle. Giraud, & à une-provifion de 2.00 liv.
Par Arrêt du 18 Avril 1780, prononcé par 1\1. le Premier
Préfident , la Cour, fans s'arrêter à la requête incidente de
la Dlle.· Peiron, ni à Fon expédient interlocutoire, ordonna
qu'elle joindroit fon mari dans un domicile qu'il choifiroit
en France, & dans trois mois. Plaidant Mes. GalIier & Simeon fils.
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E pr~l1}i,er l}1ars 1769, Sebjl!l:i~'1 Rev~fi:, Ji3.,egr<j.rFie; dli
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, ;~ieu de ,Ro!u,~iers, pa~e uJ;1e. rqwfa§l:ioIJ ~reç Touffai~t,
li eg.ocla~t qu met;ne lieu. Ils termIn~nr l,es cog,..
t,el,l:a,ripns _qu'i.I~ Sl).,r ,()n{e,tp8Ie; &,ll}~ye"f1anr ,la J:.op,1Jl1e de
60 Itr. , M~r.rIn ~e'pe~f1e de roure p,ryrc;pp~lO.
Par exploit ,du la S~pr,embre !773 ,To\lffaint Martin Elir
flgqifi,er à llev.eH: pçs f.,ertres de ,rptci{Jpn el).VC';rs I~ tra!!fflç~
t.i0n , ïV,ec ajourn~1}1eQt à comJwoir 'pard~vjlnt I~ ltiyyt~
n;Int <je I}r~gnHM pqur IFS v9i!: ·YnFérjQ~r. Par Septenç~ d
1 1 J all.vie,r F77 ~ ] If ;J;.~e!lEeQ,!nr fait Arpit ~ fçs fins , art~J1q,u
l~ confentetp,ent %WII}é par le
ocpreur de Sebafiien ~e,.
veil:. Ç,ell/~-,.ci re1,eve 'ippel pard~y~Pt la Cpur. Pensiant les
po,ur(uites l,es R~rfie~ tranftgYl!.t ~e pquveaflle HJilOvier 1772,
oujfa4I~ l\J.~rHn p~cla[e f~ dé.paFsir de: la Sente~ce qfl'i~
'a,yoj't 0pfenu"e ,du J:.jelJ\!~n,!l}t ~e I}rigJ101y~. Se9a~ien Reyef§
fe départ de fon appel, & ils cçlDfent~\1t l'\lP §ç l'autr,e .~
l'e1ll~c~tion ~ ~a trslnfaél:iop dll premier lYlars 1799.
Le j Février 17709, An,t,oin~ l\Jjartin l he.r~ d~ TOJ.lJfi'inr,
préfep~e req~êtt1 à ~a ç<jl,ur, Pllr laql,lel1~ , en e,xljiP~At ,d'une
cef10n par I~i r~pp0Ft~Je PC; fgQ. fr§r,e I~ 19 S~t~!11.bre 1773;
i) demjj.pde Ip .r:~'69i a~ \jl,~!Ui~rj<WJ ~Jl jp~JtmhfJt ,. P9,.!l! Y,
œqtrérir p'êtr~ reçu Pilr~i<1 joig!!: ~ il1t~r~enflnt~. ~n l'in[tilOce p~np~n ~, po!}r ççre P9!!rfuivi~ ~n fon npm el} qu~:,
lité de ceffionnaire de fon frere, qui, au moyen ge çe, f~
roit tiré de qualité; & par une requête incidence il demande
la caffation de la derniere rranfaél:ion comme nulle, frauduleufe & faire au préjudice de la ceffion. Sur le rout, il feut renvoi en jugement.
1,,~rr~Ç1,
r
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�ni PROVENCE;
9t
On d!ifeit J'OUr Antoille Marri-n-, EJu'en- ~onfllltant le1dè.ules
lumieres de la raifqn , Pan datt ènvifager éomme odieux,
comme f'rauQuleex, le' département fait al!' préjudice de ceffionnaire ; le cédant n'dl plus propriétaire de ce qu'il a cédé;
la, ceffion eft une vente. Ainu Toulfaint Martin n'a pas eu
plus de drait de recéder la terre dbnt s'ag-itfoit à Reveft,
qu'il n'en auroit eu de la vendre à tout autre.
Il en eft d'e l'intimation des ceffions comme de la pubJ:ication des fuMlitutions , d'e l'infinuation' des donations. Le
tiers profite de ce qu'on n'a pas procédé à ces formalités;
mais ks contraB:ans ne làuraienr s'en pré"a~oir. Le défaut
a'întimatidn de la- ceffion :ruwrife le débiteur- cédé à fe libérer, & fe cédant ne peut pas refufer de recevoir le remllourfement, fous le prétexte d~ .Ia ceffion qui n'a pas
été acceptée. Le débiteur ne connoît que lui; par la même
raifon le ceffionnaire qui n'a pas intimé fon aéte , ne peut
fe plaindre; fe débiteur cédé a ufé de fon droit en payant
le cédant.
Il ne s'agit pas ici d'un paiement que Revefi:, qu'il faut
fuppofer n'avair pas connu la ceffion, ait fait de bonne foi; il
s'agit du' département quJil a obtenu d'une aB:ion jugée jufie;
if s'agit, d'une terre dans taquelle il s'eft m"intenu, au préjudrce a' Adtl'line Marrin à qui elle a,-,:oit été· céd~e., avec le'~
aélions' refcidames & refcifoires. Ce département de Toulfainç
Martin, cette maintenue, ont été accordés' fans raifon- même
âp1?,arente, uniquement en fraude. Olea, daçs fon '.fraité de
ct:JJione jurium, liv. 7, exaltline fi le cédant peut, après la_
ceŒon-, traiter avec,le débiteur cédé au préjuaic;~ dll cef~
liaon-aire, & il décide que cùicrrs non fotcfi pofl ceffionl:m
DU
PAtAI·g-
li6~rare gratuito dehitorem dolosè
& in frajldem c1Ji-q,n alii.
Cet Auteur dill:ingpe deux cas principaux, celui où 13 ceRion
efi faite à l'avantage du cédant, & celui où elle efi à l'aV<ln~
tage du ceffionnaire. Selon lui, la ceŒon efi à l'avantage du
cédant, lor/qu'ill demeure garant de la cellion, parcequ'alors
il a cédé pour fcbroger quelqu'un à fa place, & é iter des
pourfuJtes.ll prétend au contraire que la ceffion ell: à l'avan.
rage du ceffionnaire , lorfqu'il n'a point de garantie à pré..
Ml,
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te!1dre~ car s'il a libéré le céd;lllt' du :momeRLde. -la q~Jli911;
'c'efr qu'il a cru y trouver fop intérêt.
.
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•
Si )'on vellt placer la ceffion dont s'agit dansJa Rr~.miere
daffe défignée par Olea, il Y a dol &. fraude; car, oÙ dl: le
motif ,dy péfifremen,t? Si 'elle ~efr, r~gat~ée_ cO~l1le, érant Il
l'avantage du ceffionllaire, attendu 9u'il s'agit d!une aél:ian,
d'un droit à exercer en jugement, dont la pourfuire. devQit
fe faire aux frais d'Antoine Martin, les, aél:ions refcindantes
& refcifoires de fgn frere loi ayant été tranfportées, ,celui-ci
ne les ayant plus, n\ pu tran,figer.
,
Ou il s'agir d'.ul!e jderse à exiger de quelqu'ur" ou d'un
droit à exercer contre lui. S;agit-il d'une dette?, le débiteur
qui ignore la ceffion, peur, fe lil~érer; c'ef1: le cas de la Loi
3,· cod. de novat. Le cédant peut acceprer le paiement;
il ne peut même le refufer de fon débiteur" quoiqu'il ne
joue daps le~el)-~bo~rfement qu'un rôle paffif. On n'a donc
aucun reproche ~ lui/aire; point de fraucle, & par cOl)féguent
le ceffionnaire ne peut s'en prendre qu'à lui-même de n'av~oir
pas intimé la ceffion.
. Mais s'il s'agit d'une aél:ion à exercer, clu moment du défif, tement de' cette a~ion, le cédant ne peut plus agir; l'aél:ion
une fois cédée., le cédant la perd, & ne peur plus ni rrairer;
ni, contraél:er. En vain c~lui avec qui il a ~raité, réclamerait
fa bOl)ne foi; elle ne lui ferviroit pas plus qu'elle ne Jerét da,ns
les acquifitions faites à non domin.o dans les frellionats. .
On .répondoit pour Sebafrien Reve.fr, que la ce1JiolA
qu'Antqine Martin a rapportée de fan frer.e, n'a P)J avoir [on.
effet qu'a'u moment oÙ elle .a été fignifiée; &. à l'épQqul.'; (le,
cette ,lignification, le procès ,étoi r déja terminé 'par trjl.n~
fa,él:ion: la ceffion ne .peur donc'~vC?ir fon eJ'écution visià7yis.
Sebafl:ien Reveil qui ne la 'connoiffoit pas; & par une 'conféquence néceffaire l'inter~ention cl' Antoine Martin efr non
recevable.
•
, .,.
.
En effet, qu'éll-ce que la ce~on ou, rranfport? C'efl: ( die
Ferriere en foc! Diél:ionnair.e -de' Droit, va. cejJion ) un con~rat par lequel on cede & trati[porte quelques droits ou actians, au moyen duquel tranfporr le ceffionnaire, c'efl:-à-dire
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PAL-A1S
DI!
,PROVENCll:
93
Clllui .au, pr fi~ d'lguel' l'J s~fii.9n ;e~ .§o1jt~· et): (llbrog# alj d~oie
&;plaç~ Au/c~dant ontre)e !!~bjfeur'1
,,1, : L'
. Mais fomme cette ~ffion fe fûit toljjourh ou J'refque toUjours en abfence 'dû débiteur, il a'été établi gue)a ceffion
ne fuffifoit, pas ,Il.0ur tiny.efriç 1~ qrffiqnpaire ; qUt; 1 ngnificatiql}.,l9u l'accep11!tion.: en é~oLt. nécen:~i.r~ .E9U!, i~ ,transférer
la grppriéré,~.§c. gu~ ju[q~~'1i1.9rs )eyaé\iol}s ~eIipQillnt t9.~jours {ur la tête. qu cédanr..
'.0 r
~:..,
_" ·'.If
L,a Loi, 3, ,au cod. d~ novat. §' de/egat., s'e,xR!lque. à cet
.égard qe la fIlaniere la plus précife; elle éta~lit .. gi.!e. le cédanr !"e.~ienç toujour} l'ex.e~cice~ des aéli()ns cédée~, J~ peue
!les f?ire valoir, exceJlté en. twis 'cas; (avoir, s'il y a ,ep liti,sconreftation de)a part du; ceJIionnaire) li une p.Jrtie de.!,!:
{omme cédée Ipi a ét~ payée, & enfin Ii la cellion a été ngnifiée; ju{ques alors le cédant n'eH pas dépouillé, & le ceffionnaire n'a aucun droit à faire valoir.
La ngnification de la ceÎIion eft telJeil.1~nt nécelfaire ppur
inveHir le ceffionnaire ,. gu'i] .eft de maxime que' le .pJjiemene
f<yt au c~dant par le debit~ur eft, \'alable" nonob!l:anç le
rran{port, quand il n'a pas. été f lignifié, & qu'un ëtéancier
du cédant, même celui qui a, une hypotheque pofiérieure au
.tranfport, peut faire {ainr & arrêrer la {omme cédée. Ji:n
partant du même principe, il eft unive.rfellement> reconllu
.que de deux ceffionnaires, l~ dernier qui a faiclignifier {on :tran{:port, eft Ytéférable au premier qui 'n~a pas fait la lig!1ification. C'efi)e {enriment de Bacquet en fon Traité desldroits
,de Jull:ice, chap. :2.1, n°. 288; de Lacombe en fa JurifprLI,
d,ence civile, vO. tr,anfpo!t, n°. 17; de Decormis, tOIJl. ~,
col. 870; de Mr. de Bezieux, liv. ,,4, chap. 13, §; 6 & 7 ;
.& Çhorier {ur Guipape, pag. 2 JJ', •
Dans le fait préfent, la tranfaélion était intervenue bien
avant que la ceffion eùt été ngnihée de la part d'Anroine
Martin. Il ne peut donc exciper eq aucune maniere de cette
ceffi.on, p!'ur demander la calfation de la ,tranfaélion; & on
peut d'aura nt moins en {ufpeéler la validité, qu'elle a été
pa/fée riere un Officier public qui en alfure l'authenticité.
La Loi derniere ,jf. de tranfaa. décide en termes exprès,
~u'ell Cil~ de vente d'hérédité, la tranfaél:ion pa1fée -e9t1e
o.
j
...
.,
�-r r: .1 0 u: R'.N )t ~ A '"': ,-'
•
lë V~\~êtfù;&'!Û1\ ~êb1~èUr-Jel'1tdifie' eŒ' V'a4iabJe Jm~me 'ail
préjudic.e de l'acheteu.r~· fi· le è~b'ite~l' igb'orbi - fal vl!nr:e. raem:
{eiftiuni; fèrterius 1\11' Jà:queft.. ~ 36 dè Çuip!a-pe, ~ Ftomental
eeJ!ion. . ,
- En 'V;111"~oudroit!Jo~.1 fa irè édvlfager ia" rranfuéliolY e'otfltn'e,
tin'a8'e èè déJiar menr. Lês·'Loix di(em'1 qu'il y- à tranKiétion
roil'i!esl,re~ 'f6i\;- qu~' f~a'"B'e- 'a c eu" en 'v'u~ ~ UBI procès· e,x'iŒant-j ou
'§4 ,
. _.. :
T/f"T
",o.
J
imminent, & qu'il a pqur objet·QI! téirilinér ou ne- prévenir ~né"aoh1~~atiun "judi'eià1.re: CJU'Î 'tt'a f1iglt quaji (le re dabiâ:
&- tite /itifèr(tf .ne't:fùe jiniiâ', tT'anfigit, di~ rl"Ï' J1.,.oi l ,Jf. de tranJaél., Là <c!Rotë':!jugré'e R'eff 'pas-titi'- o'bila'ële'~ M tl'ànfûl:ion,
s>~ y 'en 'a" appHi ou' fi' 6n- p'éu~1 ippëll@p'; pal["e:é Q!'1& ·l'ilppel
fait> ~eyiv-té;~"flnêmes ~dn(te/hitià11s ;~&' pcf! -rem juâieatam
tranfàÇ?io' valet;' fi 've~ appellatïd, i'ntde'e.ffetf~, vd appeltarî
pot/gril;
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' . "
i
-".
Antoine Martin ne feroit pas mê'me fandé Ir opp'i>fer qu~une
Ua-nràd'ion=-;ne'pè'tit~'~'<I6'?t iieu ql:1:~n- dfllmant, 'prorftwa-ne al;!
rêféflaHé qtler~e éHofe p~r l'uliè '9ë~fJ p:trties, & à Y iilVoquel'
Ii Uo~ 38 {'cod. ~dd' triinftzc7. .Ce &fi)it mI.Jl'1 fatllrre' lhs de
Jà" Urj-, "illfffi fa -glo{e 'ot}fêrve'--t-etfè 'que le indt data s'enl!ënd"pt'rY 'lO" qllorl rem-ittïtllr. C'~fi' i!'fpfr ~\:Ie POli1: péIffé' F romentlŒ; 0. irdflfiJ..'élldr}; Dornac en {es. Lo-lx €iviles, Hv. r:,
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ptéVetlir. un praèlrs /eft !aônc une \1érrtalHe tra'hfa-'8:iofl , çians
JaqIJellê il à déperldu <les partÎ'es d'inférèr l'otltes le~ daufes
& toutes les I:ô'Hditlôçs qu'e1tés ont VGlli1-tl. Ces aaes jl:lliifi.
féM' d@ la plus gra-npé -faveÇlr; pa<rçe qff"11'9 mettent fin li des
c6me{fatidtlS~& '11.' 1:l2s"FroL-4Sl q tii- pOl:lr~ent minei: leS' parties. Les Loix .n'qnt, pas .m~rne·vO'ùJltl·q'l:l.e la IéfioÏ1;j <'jue-fqoo
côn'fide-raDle qU'dre' -fCi!:',: pdt, '-èn, 'dpé're'r- la ca1Taflon; 't'lies
leur ont déférlf 1 même auto~it.é i1u'aux Juge-rnen;,,~ iJ'I1'~{I:
pas permis d'en'lenfrerndre Ibnl-ffiJofirïons: non tninorèm1 alltoritatim: tranfaRionrrm, '1.aam r~r.lir[! jüdicatarllm t!JfeJ, F{fla ra:ti01lr' jlricm(, did~ Loi! i!,o', cda. de tran{àc1. Nu7fNis etèniia
crit litiilm finis, Ji 'à, tran-faç?ibnihus f;Iinà'jidê, ïrlté'lfJOfitts- 'cœ
perit facilhfijéedi, det la' Loi ia, ~od: eod." 1 . " 1.. t
La eranfaéHon pa1fé é~m: les parties'dort donc Gere·en.:.
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QIl. ne Pfut prO(l,Ofl er /Hf plf'ipt~ en, ca!omJuf , 'iu'rf.pr~s {e'
1 JugeTllent de l'acC!ffflt;Ofl'Jlfip.qP~·"1
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Vil Français '1'efl.l?Oi'1,t,ri~~i# d'alJer Pif, ger.ftl entll![l,!~ pl.
pays étrgnger.
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T!E~~f..'.\" ""p. rigjqair~. ~lJ)ie,l/. fie ~ur e~ pauphiqé,
'._ s',eHb)Jf ~ Lyo'} ~nlijI pour M[.'We le ..c0mtl!erce çir- la
E
g~aRl~r,i~ iA y.J.lf.oqn~ Illgs ~,Çié~é ~~t . Pierr~ .. , .. qlji)ù~
Qiffo te en. ~ H8; jl fe ç;hargei\ des m,a~chapWe$ de la [0;-,
ciété & des dettes a~ilies & l?,\fiives.
,
Daq~ la fuiç~, .~tje!)o~ ~'a(lre!fa ~ 1!.~ per~, qlli l~ préta
qu,elg~ fomJPe ; Ji:!~o,ne.: .... pret~odit fluq :P, lui, av<;*
fait {}iHJl~r ~~s irn.~!tçts u[ur~~es, au PPÏ01: g~ les créances
qui ne .s',élçvoient .en n6~ -!l~'à !Wop liv., forrqoienc en
.n6~ la Comme de S0)76 liv. 16 f.
.
Etienne n'étoit point à Lyoo, lorfque P. & foo fils qè-,
tinre~ 'i0ntr~ lui UI1C:: Syptellce à la Confervation, av~q co\1- .
trainte par corp~. A [on retour., ~ le 26 lI1ars 1768 ,jl fu~
fo,rcé de leur paffer vente. de la généralité de tous fes biens>
le prilf en ~t porré à 80000 liv. quoiqu'il f eût qn domaine
pe plus de S 0000 éçus!
.
�'9' .
il. N A2i>~}
cr
L P. 'perè C&, fifs dcfnneren"è conncl>iir~hce' de"éetrêlveiire-âux 1
autres' èf~illtéi~rs-·(f'Etïenne ...':!~i'<j\ii le' prelfer~nê"&'1'6bligefent1 de-{èl ~erit'er en- Savoie. p..-pere & fils-fùrenr Ity rrou-'
.11~ '"1"(;J'O U
vériniotfr Pëngaierl~Jleur M'nuée-la raribcatidihdê J'"aéte de,
vente qu'il leur avoit paffé. Sur {on refus, le fils répandit
da6s J'le rA!blic qUè ~(:)rs,rdel {OI(der.pjb·c ·.y~yàge:}~.Etiênne:!'. '..•
avdtf\iol!tl à:tt€mer r~Hes')j(jJrs- pèn&arît lâ'iitJÎt,t'& qu'à·l.'até
de trois hom~és')ar'fuésde fllfils,· il avoit v~Jlu lui -ah.lacher
une.qllinanœëâe S006"6' l"iv. Etienne ..... , aYd-lJt,fin' . ve,C; (es réprnciers, rendit plainte
contre P. fils le 1d1Mars 176'9 pardevant le Juge de Bour':'
!?:oirx ()n._r;r;\0i~ ~pr~s, P. fils fit inFQrmer .p~{deva~~, le ~ême
Juge 'fur' fe-'P.t; tendu affidunat. (L~etar.\\lè\)detreIfe ou (e. rro volt Etieime .. :. ~\: lLJli permetià t' 'pas "de poùrfilivre à
grands frais p;u'deva~t\\él[fféreqs~'Tribuiia'ù'x; {e 'ërut aütari é,
et! 'vè,rru l1ife l'btd6nnahc~;\ d'Abbèvil!e ~ dlé~oqueÎ'"1ès dell'"
plaintes refpeétives au Parlt!ment tle!~1fenoble; 'il. ni. inrçriùer
e~ ~~m~ t~mps pa~d~v~Ilf cett~.c~our {ur les ·u(!J.I~s,> la vi lënce ,..le' dol, -la \t'fil/lie, '&' 'l'extodidn dont P.. 'pere ''& fils
s'étaient rendus coupables lors de la vente, '& fur la prévari~ation 9u Juge de Bourg$>in. Ces ~ifférentes ~ro.cédures fu-:
rent. inŒruite'sde- parr &' d'autre ;"& pi1r ftrrêr ejù rs .Mars
1773, Paél:e de vénté fut éaffé, 'Erienne ~I~ .~T. ~ dê'chargé. de
l'accurarion en alfaffiilar"; P.~p-ete &: nlS déclares calo-mnta~
reurs; condamnés atôus le$ 'depéfrS', ij.' ô~o li'v. ê)é'd.om:
m~ges-i.nr~rêts, & à 1" réfiitution dés'fruirs.:
,
_ •
." P. fils fe pourvut ;lU Conreil <éri ~_affarion dé cet Arrêt; &-. pendarlt :I~ ";êours de' prn'ftance;,; if fe pqurvut' -~ri
Savoie pour fèGcfi-ine d'affaffinat!r 12rièrrne!I.;: J.-. • infrfuit des
màyen~ odieUJ( éj~l'dÎ1- ~errbil 'è'ù ùrigè 'po~r obteqir, ~ne
condamnation, cqntre ~ui',
poJrvllt âu Parlement de Grenoble en fubomarion de témoins. L'informarion fùe prife j
P. pere & fils furent d~crérés de prife de IJ corps, de mê,me
que Je; nqmmé Chefne , leur Agent & leur; éorhpfice. P. fil5
conrinuâ' cependant à fàire indru-ire fa procédure en Savoie:
Le Parlement d-e Grenob'le fit' défenfès, fur la t~quiftrion
pu miniHere public, à Etienne .... :. de fatisfaire à aucuns
dé<;rers
he
te
�DU
PAL AIS
DE
'91
PRO VEN C li.
'décrets ou Jugemens rendus par un Tribunal étranger, & au
pourfuivant de les mettre à exécution.
Le Sénat de Chambery rendit le 2. Mai 1775 un Jugement par contumace ,qui condamna Etienne .... " aux Galeres pendant trois ans. L'infl:ance pendante au Confeil en
calfation de l'Arrêt du Parlement de Grenoble fut pourfuivie. P. fils obtint un Arrêt le 12 A06t 1776 qui l~ calfe,
fur le fondement qu'en matiere criminelle on ne peut procéder en premiere infl:ance que pardevant les premiers Juges,
& les parties & matieres furent renvoyées à la Sénéchauffée d'Aix, & par appel au Parlement de Provence.
Le renvoi reçu, P. fils porta fa plainte en aifaffinat ; il
fit procéder à l'information; Etienne •••••• fit informer fur
les ufures, la violence, l'extorfion , le dol, la fraude, la
prévarication, la calomnie & la fubornation des témoins,
tant contre P. pere & fils, que contre Me. Jofeph ..••.•.•
Notaire, & Pierre •.•.... Le Lieutenant d'Aix accéda à
Lyon, à ,Bourgoin, au Pont Beauvoifin, & fur le vu des
charges, P. fils fut décrété d'ajournement perfonnel; le
pere & Me. Jofeph ....•. Notaire, d'affigné pQur être ouis,
& Pierre
~ de prife au corps.
.
Le 2. l Ao6t 1778, P. fils préfente une requête au Lieutenant; il demande 1°. qu'il lui foit concédé aél:e de l'emploi qu'il defire faire de l'Arrêt du Sénat de Chambery du
2. Mai 1775 , & des autres pieces par extrait, pour être
jointes à fa pwcédure en alfaffinat; '2.°. d'être ordonné qU'ah
rendu les circonfl:ances, il fera dit n'y avoir lieu de donner
fuite & exécutioh à fa procédure en alfaffinat, fauf à Mr.
le Procureur du Roi d'agir ainli qu'il avifera; 3°. qu'au
moyen de ce, fans s'arrêter à l'accufation d'Etienne ...••
en diffamation & calomnie, il fera déchargé de l'aCCllfation, avec dommages-intérêts, fuivant la liquidarion qui en,
fera faite aux formes de droit; qu'il lui fera permis de faire
imprimer la Sentence " & qu'Etienne ..•..• fera condamné
à cous les dépens, fi mieux il n'aime aller purger fa comu.
mace au Sénar de Chambery.
Sentl';nce du 17 Mars 177'} qui le débou.te des fins de fa.
N
�98
Jou RNA t
requéte; avec dépens. Appel pardevant la Cour. V Appellant
reproduifit dans un expédient les fins de fa requête principale.
.
On difoit pour lui que depuis plus de deux ans il s'érait
confiamment occupé du foin de faire venir les témoins
en France. Après des premieres démarches, rendues inutiles par I~ refus confiant du Sénat de Chambery, il fe
propofoit de demander que le Minifiere public lui procurât
l'audition des témoins en France. Il n'en avoit pas eu befoin. Mr. le Procureur-Général s'êtoit prêté avec zele &
aél:ivité à raut ce qui pouvait procurer cette audition. Tous
les moyens de Jufl:ice, & même les moyens minifiériels
avaient été employés; rien n'avoit pu réuffir; après deux
ans d'attente, de foins, de mouvemens & de procédures
inutiles, il avoit cru devoir prendre fon parti fur la plainte
en affaffinat; & dans l'impuiJfance d'amener les témoins
effentiels en France, il s'érait départi de fa plainte. D'où
vient ce département, fi ce n'efi de l'impuiffance de fuivre en France la procédure fur un fait à raifon duquel il
exifie 'une condamnation légitime & compétente contre
Etienne? ....• Ce dernier n'a donc d'autre reffource que
de purger fa contumace, & de fe juHifier pardevant le Sénat
de Chambery.
L'AppelIant ne préfentoit pas le Jugement rendu par le
Sénat de Chambery comme un titre légal, à l'effet d'en
faire ordonner l'exécution -en France contre un François.
Ce n'érait pas pour lui un titre d'attaque & ,d'agreffion
contre Etienne •...•. à l'effet de le faire punir. Cet Arrêt
n'érait dans fes mains & dans l'état aél:uel de la caufe, qu'un
titre d'exception & de défenfe contre la plainte en calomnie. Jamais il ne pourra être déclaré calomniateur dans
aucun Tribunal de l'univers, tant qu'il exiHera un Arrêt qui
déclarera Etienne
coupable d'affaffinat.
Le crime a été commis en Savoie; les trois complices
d'Etienne
font Savoyards par leur naiffance & par leur'
domicile; ils ne peuvent donc être punis par d'autres Tribunaux que par ceux de Savoie. La procédure prife par le
�DU
PA.LAIS
D·E
-PROVENCE;
99
Sénat de Chambery a été requife par le Minifl:ere public; l'Arrêt que le Sénat a rendu, forme donc un titre légal fous tous
les rapports; la regle non !lis in idem ne peut pas avoir lieu,
Lorfque le premier Jugement dl: nul; le Sénat de Chambery
étoit, dans les principes du droit des gens & des Nations,
le feul Tribunal compétent; il étoit au moins le plus compétent de tous: ainfi cette procédure dl: légale pour fervir
à l'Appellant d'exception & de défenfe contre la calomnie.
Faudra-t-il que, fuivant l'Arrêt du Sénat de Chambery,
Etienne ...... & fes complices foient jugés affaffins, & que
par l'événement d'un Jugement Franc;ois, l'Appellant foit réputé calomniateur pour s'être plaint de l'affaffinat? Faudrat,.il que , l'Arrêt du Sénat de Chambery fubfill:ant, & ce
Tribunal s'obll:inant , malgré la réclamation du Minill:ere
public, à ne pas laiffer paffer en France les témoins
<J.ui compofoient l'information prife en Savoie, & à ne
permettre l'audition des témoins Savoyards que [ur la frontiere, Etienne
obtienne, à raifon de cette impoffibilité, qui n'ell: qu'une force majeure, un triomphe qui n'dl:
dû qu'au citoyen opprimé?
On répondait pour Etienne ...... que fi l'Appellant n'avoit pas fait entendre les témoins de Savoie, c'étoit parce
qu'il ne l'avait pas voulu; il craignoit de fournir la preuve
des forfaits qu'on lui imputoit. Sans do me il étoit dans l'impoffibilité de trouver des témoins capables d'établir [es chimériques imputations; mais les preuves de l'infame [ubornation dont il s'était rendu coupable, des horribles prévarications do.nt il avoit été le moteur, des manœuvres crim.inelles qu'il avoit employées pour perdre un innocent,
n'auroient pas manqué. Il avoit le plus grand intérêt de
[e mettre dans l'impoffibilité de pourfuivre [on accufation.
Mais en fuppofant même comme réelle cette impoffibilité,
elle ne pourroit jamais lui tenir lieu de preuves, parce que
cet inconvénient eIl: [on propre ouvrage; il dérive d.e [on
propre fair. Si fes démarches à l'égard des témoins de Savoie n'en étoient pas un fuffifant témoignage, on pourroit
ellcore invoquer f:l conduite à l'égard de ceux qu'il pouvoit
N2.
�'Iod
Jou RNA L
fe procurer en France. Après les avoir fait affigner, il n'a'
pas daigné les faire entendre; il s'efl: précifément attaché
à ceux qu'il lui étoit impoffible de fe procurer.
.
Aux termes de l'arr. 2 d).! tir. l de l'Ordonnance criminelle, celui qui aura rendu fa plainte devant un Juge, ne
pourra demander fon renvoi devant un autre,. encore qu'il'
foit Juge du délit; car quand on a une fois: (dit le Commenrateur) reconnu une JurifdiBion , il n' dl plus permis de
la décliner. Au refl:e, cela ne s'entend que du cas où la
plainte efl: rendue devant un Juge incompétent, d'après le
rexte précis de l'Ordonnance; l'appellanr ayant porté fa
plainte en a1Taffinat devant le Juge de Bourgoin, Juge compétent à raifon du domicile de l'accufé, n'aurait pu demander fon renvoi, pardevant rour autre, bien qu'il fût Juge
du lieu du délit. Or, s'il eût été non recevable à demander
le renvoi pardevant un autre Juge de France, à plus forte
raifon il n'a pu reproduire fa plainte pardevant un Juge d'une
Monarchie étrangere.
Tous les' Auteurs attefl:ent' que quoique le délit ait été
commis dans une Monarchie étrangere, il peut étre cependant pourfuivi & puni en France, lorfque le Tribunal faia
fe trouve Juge du domicile de l'accufé. Jou1Te dans fon
Traité de la Jufl:ice criminelle, tom. l, part. 2, tir. 2,
fea. 4, art. 3 6 , pag. 424; l'Aureur des Loix criminelles,
tom.
pag. 8.
Il Y a plus: non feulement l'appellant n'auroit pu deman..:
der le renvoi, après avoir porté fa plainte pardevant le Juge
de Bourgoin, mais la révendication n'auroit pu en être re:'
quife par le Juge même du lieu du délit. G'efl: l'opinion de
Farinacius, quefl:. 7 , n. 28.
C'efl: une maxime générale, que celui qui a été accufé
d'un crime, & qui en a été renvoyé abfous, ne peut pas
une feconde fois être accufé du même crime. Leg. 7, §. de
accufat. Cette maxime prend fa fource dans les raifons d'humanité, qui ne permettent pas que pour le même crime,
la vie, la fortune ou la liberté d'un accufé plli1Tent être mis
deux fois en péril. On a craint (dit Muyart de Vouglans 1
l,
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DU
PALAIS
DE
PROVENCE,'
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Tnllir. crim. tom, 2, parr. 3, ch. 4, feél:. 3, pag. ')8) 'que
par l'événement des différentes accufations, la peine ne furpafsât le crime. On a penfè de plus que l'état des perfonnes
ne devoit pas être trop long-temps incertain; qu'admettre faccejJivement diverfes accufations pour le même délit, ce ferait
anéantir l'autorité des chofes jugées, & occajioner, fouvent la
corruption & la fubornation des témoins, ce qui efl contraire
l'ordre &
l'intérêt public. (Joulfe, rom. 3, parr. 3 ,
liv. 3, tir. l , arr. 2, pag. 12; Catelan, liv. 9, ch. 1 l •
Bouchel, vo. *bfol~tion, p~g. 12; Papon, liv. 1J' tir. ~ ,
Arr. 10; Jovet, v. Accufe, pag:. 12. :Albert, v. Requete
civile, pag. 441; Journal des Audiences, rom. 2, liv. 6.;
ch. 38. )
La plainte & les procédures pardevant les Juges de Savoie
font illégales; le Jugement du Sénat de Chambery eft radicalement nul; non feulement cét Arrêt ne peut pas être envifagé comr:te'un titre fégal, mais l'appellant ne peut pas
même en exciper comme d'une preuve légitime du crime qu'il
impute à Etienne......... La Cour ne peut adopter c04rûe une
preuve de conviél:ion, un Arrêt fondé fur des procédures
illégales, & dont elle n'a ordonné l'appo t qu'avec une reftriél:ion capable ce prévenir l'abus que l'on pou.rroit en Faire.
. Par Arrêt ,du ,1 Avril 178q,' au .r;apport' de .Mr! fe Gonl
feiller l de Ballon, la Cour concéda aél:e"à l'appeffa'nr de'
fon département de la procédure en alfaffinat prire par le
Lieutenant d'Aix enfuite de la ca1fation de celle' prire par
le Juge de Bourgoin, dont. il fe départit en tant que. de'
hefoin; au moyen de ce, mit fon appellation & ce dont étoit
appel au néant fur ce chef;'& par ,nouveau jugemen[ , au')
bénéfice de l'aél:e concédé, & eC\ concédant aéte à l'appellant de l'emploi qu'il déclaroit faire des pieces mentionnées en fa requête du 21 Août 1778, qui feroient jointes
à la procédure, 'Ordonna que la procédure en alfaffinat [eroit pourfuivie à la requête du Subftitut de M.le Procureur-Gé!!
Déral en la Sénéchaulfée d'Aix, fauf & réfervé à·Etienne........
tous fes droits contre l'appellant , le cas échéant; 'confirma
le furplus de la Sentence du Lieutenant d'Aix; condamna
a
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l'appc!llant ~'tous les dépens des fuf<Htes qualités~ j,ufqtl'au
jour <le la 'communication' de fon expédient, à la %l'loitié de
toUS ceux faits depuis, l'autre moitié entre les parties comRenfée. Ecrivant Mes. Guieu & Gaffier.
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XIV.
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L'aïeule peut dans certains ccp,
à difaut du.p'ere & de la
" mere, s'opp,0fer (lu ,!!,ariage e f6{l petit-fils.
,
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,
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:E fieur Pierre Millandou du 'li~u de Barbentane. fut en-
, voyé par fon 'pere à A.vignon' chez le fieur Hugues,
-!\pothicaire, pour y faire fon appremiffage; il Y fit con!!oiffance de Jeann.e, Chau~E.; .il fut enfuire ra,ppellé & env.oyé à Monqiellier•. Son? pere ~tanD mort, 'il revint à Barbentane~ & de 'là il p'lffa à AVlgn~~, où il vit de nouveau
lequel il déclare
Jeanne, Cll'juffi , & l~i fit, un,;billet',
il
exécute
enfuite fon
qu'il, e!l: dans l~intention de l'enlever;
,
pro)e.t.
'
,
.~.Le )~ndem~i d~ 1\~~lév,e\Ueqt ,,-le pere de Jeanne Chauffi
y~ .c e~l ~1.: ~'.Arcqevêqlle ,.lui: pr~ftrnte,le ,billet ;rce Prélat
ordo n,ne; que, l'qp,IaWife M;lla,nqpw~& .9u'on ·l'emprifonne,
c~ qu~ fut, execute le mêrne, jour.
::Le 2. .SepterPQr.e In9, '.t;eqllêre à l'Official de la part de
Ç4a~ffi) Ber~ ,}. en. ·d~flor~tiqn.'d~,.f.q ~lle fous promeffe. ~e
1!la~!jlg~. '~I)Üq tpa~lO,n dl Jl~fe ') &., le lepdel).1ai\l~ 31' •d~ ..
ret l de p[Jf~ 'de, comsé9~reoMillj\ll,d~ ; qeà:tanqe L.en elar-:
&,j!fer!ept'.O}~ 3f'%P!!1l\lpr~r) ~a~5'"" f !Js,",~lc_oh.'l UfPy,:fenf' à
~ou[e,r l~ !=Pauffi.; !,al~\lly S~Y1 qRpqr~,; af1ig;nee enrd,ebourement, elle.s'adre1f~à la Cour, & demançle qu'e,n lui soncé<!ant aél:e ..~e fO,n roppofiriol\.au mar;age dr [O{ll peti,r-fil~ ,
inhi~itio!\, 'l&f d~f~nfej1 fero r, fajtes. à.., Mil!~?ou' Ôf à. la
Chauffi Idep~fl.:erl ourre ~u !11,:r~M~ d.9CJf' .s'agit" à pein~ de
Ijullité. !,-tI~,t co~lfor?\e. Requête en J;evPÇ9rion de,la part
de .LVfillandou. Le l,) Février 178o,. renvoi en ipgemenr.
.
par
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PALAIS'
Dl!
PROVl!NCJ!:
10'j
On diroit pour lui, qu'il s'agiŒoit d'un homme libre, qui
vouloit époufer une perfonne honnête qu'il avoit déshonorée.
"II n'efi permis d'enchaîner la liberté de l'homme précifément dans l'a8:e le plus libre, & qui appartient à lui feul;
que lorfque le bien du contrat focial l'exige. Dans tout
autre cas, c'efi attaquer l'homme dans la partie la plus
chere de fon eŒence, c'efr-à-dire, dans fon opinion, dans'
fa liberté de Centiment, feule Cource du vrai bonheur, qui
même dans le plus cruel efclavage efr la feule chofe qui ne
puiŒe être aŒervie.
Il n'y a que le pere, la mere & le curateur qui puiŒent
valablement s'oppofer au mariage des enfans, iufqu'à ce
qu'ils aient atteint l'àge requis par les Loi/" avec ce tempérament néanmoins, que quand ce n'efr que la mere
qui s'oppofe, ou le curateur, l'enfant peur les appeller en
Jufiice pour les faire débouter de leur oppofition, fi elle
n'efi pas fondée.
Du vivant du pere", Il fufllt de requérir fon confentement,.
fans avoir befoill de celui de la mere. (Recueil dés ArrêtS
du Parlement de Touloufe, tom. l, pag. :2.43,) Après la
malt du pere, le confenrement de la mere efi nécelfai.re;
mais fi la mere & le tuteur ne font pas d'accord, il faut
:recourir au Juge. ( Lacombe, Jurifprudence civile; va. Matiag~. )
,
_:
Les Loix & les différentes Ordonnances qui font inrer'venues au fuiet du confentement des peres & meres, ne
parlent point de l'aïeule. Or le filence de la Loi efi un
déni formel, une exc1ufion pofitive de la néceffité du con_
"Cours de l'aïeule & de tout collatéral. Il n'y a qu'un cas où
l'aïeul & les plus proches parens pourroient s'oppofer au
mariage; ce feroit celui où l'enfant épris d'amour pour
une fille déshonnête, porteroit dans fa famille une honte
qui rejailliroit fur tous.
Mr. Joly de Fleury difoit, dans une caufe rapportée au
Journal des Audiences, qu'il étoit inoui qu'une aïeule prétendît devoir difpofer de fa petite-fille, quand elle avait une
-mere, tandis que l'Ordonnânce ne comprenait que les peres
�J
04.
.
"-
l
O' U RNA L ,
,
& les meres~ fans parler des aieuls. ,Mr.l'Avocat-Général Le
Nain obfervoit dans une autre, que la puiffance d~s peres
& meres dl: enriere & de droit'.narurel; en forte que leur
confenrement fuffit; au lieu que celle des tuteurs ou des curateurs eft 'une autorité étrangeré; on leur confie feulement·
cette autorite; & pour qu'ils n'en puiffent. abufer, il faut
gl,le le confente ment des parens intervienne.
. Millando,u eft ab[olument libre; il ne peut donc y avoi~
qu'une exception des plus fortes qui puiffe autorifù à lU,i
refufer la perfonne qu'il a choifie. Il eft prouvé que fon inclination ne peut pas être plus grande; s'il étoit polIible qu'il
y eût quelque irrégular~té dans ce fait, c'eft-à-dire dans le!i
procédures du Comtat, dans quelques démarche.s des parries, cela n'affoiblie ni l'amour ni la volonté de Millandou,
& ne peut fonder une exception aulIi forre que cellè qu'il
faut pour empêcher un homme libre de fe marier..
On répondait qu'on [ait que le droit exclufif & incommuniçable de con[entir au mariage des fils de famille, étoit
\îne pré.ro~ative de la puiŒlnce paternelle; mais il ré[ulte
de là'une preuve en faveur des aïeuls [ur leurs petits - fils,
de la même puiffance. En effet, dans la Loi 2 , .If. de
ritu nupiiarum, Paulus y parle des parens; il Y prefcrit la
nécelIité de leur confentement, & les pareils étoient ceux
qui avolent droit dé pûilfance fur les futurs époux. Même
preuve dans l~ Loi 9, if. ead. Elle décide que fi le pere eft
e'n démence, '& que l'aïelJl foit dans [on bon [ens, le COll. fentement de ce dernier fuffit. L'on trouve les mê01es prin,..
cipes dans la Nove,lle 22, chap. 19, & dans les Infiitutes,
liv. l , tit.X de fluptiis; dans la Décl'lration du 26 Novembre
1639'; dans l'E,dit du mois dé Mars 1697. dans l'Ordonnance de Blois, art. 41, & dans ,l'Edit de Melun, art. 25,'
Les meres, qui dans' le Droit Romain 'n'étoient ja'mais
conmlrées, ont re~u le droit de l'être, ~ 1'00 n'a jamais
douté des pouvoirs que la Loi leu.r- donne à cet égard..Il dl:
vrai que la mere n'en jouit dans- toute \eljr étendue, qu'après
le décès du pere; elle le remp,lace alors, & [on con[enre:ment eft de néceffité publique. C'eil ce au'avoient jugé l'Arrêt
.~
.
d~
�DU
PAL A: 1 S D JI:
PRO v li Nell.
~ 0 'i
du Parlement de Dijon du 'i Mars 169 l , & ceux du Parlement de Paris des 31 Janvier 1737, & 2. Août 174'i ,rapportés dans le Code matrimonial, pag. HI & [uiv. La
maxime efi la même en Provence, ainli que l'attefie De_ cormis, tam. l , col. 1 1 :2.2..
On ajoutait qu'il n'était pas au pouvoir de Millandou de
faire contre le gré de [on aïeule-, en dépit de [es parents,
une aliance aviliffante & honteu[e.
Louis XIII dans le préambule de la Déclaration de 1639,
obferve que la révérence due aux parens n'a pas été affez
forte pour arrêter le cours du mal & du défordre qui a
troublé le repos de tant de familles, & flétri leur honneul',
par des alliances inégàles, & fouvent honteu[es & infames.
Louis XIV. dans l'Edit du mois de Mars 1697, dit que
les Rois [es prédéceŒeurs ont autarÎ[é par plufieurs Ordonnances l'exécution d'un Réglement fi [age qui pouvait contribuer auffi utilement à empêcher ces conjonél:ions malheu_
reufes qui troublent le repos & f1étri/fent l'honneur de plu_
fieurs familles par des alliances [auvent encore plus honteu[es par la corruption des mœurs, que par l'inégalité de.
la naiŒance.
Mr. d'AgueŒeau, tom. 2., pag. 166, & tom. 4, pag. 98,
dit que fi l'inégalité des conditions ne peut plus donner at. teinte à l'eŒence du mariage, elle [ert toujours à faire pré_
fumer qu'un homme qui contraél:e un engagement indigne de
[a nai/fance, n'a pas été libre, & que [on con[entement n'~
pas été volontaire.
On ob[ervoit enfin qu'il n'était pas à pré[umer que Millandau voulût réellement épou[er la DUe. Chauffi; [on affirmation n'ef!: pas libre, parce qu'il efi dans les fers, & quec'efl: l'envie d'en [orcir qui le fait pader; s'il était permis à
des mineurs ou à des {ils de famille de contraél:er des ma~
riages dans le Comt<lt, & de forcer les parens à donner leur.
confenrement, fous prétexte qu'ils ont enlevé une:: fille qu'
les a fait mettre en priron, on ne ferait plus maître de!l
jeunes gens. Dans le fait pré[e.nt, MiUandQ\I efl: enCo(e mh
Q
�'106
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Jou
RNA
r:
neur. &: fous l'autorité de l'aïeule, curatrice nommée dans le
tefl:ament du. pere.
.
. Mr. l'Avocat-Général d'Eimar de Montmeyan obCerva que'
la déciIion du procès dépendoit de l'exa'men de deux quef~
tions; la premiere, fi à défaut du pere & de la mere l'aïeul
QU l'aïeule Cont inveilis d'un pouvoir égal au leur, & s'ils
ont Cur-tout le droit de s'oppoCer au mariage de leur petitfils mineur: la Ceconde efl: une quefl:ion de fait; il· s'agit de
{avoir fI dans les circonfiances où le Iieur Miliandou Ce
trouve, Cuppofé même que l'oppoIition de [on aïeule fût légale, la Cour ne doit point décider qu'il n'y a pas lieu de
s'y arrêEer.'
,
j
Les ,Romains avoient d'abord été trop loin. C'efl: le défaut de tolites les premieres infl:itutions d'être exceffives;
encore barbares eux-mêmes, il falloit bien que leurs Loix [e
reffentiffent de leur premier état. Ce n'efl: pas que le premier principe de cette dureté, extrême ne paroiffe puifé dans
une politique profonde; il efl: certain que dans un Etat républicain, ou qui, tend à Jlêtre, le pouvoir des peres doit
toujours être plas grand, en proportion de ce que celui des
Magifl:rat,s efl: toujou~s moindre, parce qu'il efl: plus fujet à
être contredit avec quelque apparence de raifon; mais enfin
une [odété de delpotes raffemblés, n'eft ,point propre non
plus à former une République; & l'on ne con90it pas- trop
c;omment ces enfans fi [ubjugués, & l'on peut même dire, fi
avilis, devenoient enfuite de grands & généreux citoyens.
Auffi les Romains eux-mêmes tempérerenr-ils bientôt la
rigueur outrée de leurs Loix; le joug de l'autorité paternelle fut adouci, dès le temps de la République, de maniere
qu'il ne pût flétrir ces ames fi fieres & fi énergiques; il refl:a
encore affez fort pour. filppléer au filence ou à la douceur,
& quelquefois même àï'impuiffance des Loix civiles; & fous
les Empereurs, cette autorité, devenue toujours plus néceffaire, perdit bien plus encore de [a force & de fon érendue
primitive; elle tenoit à 'la confl:itution républicaine, & pour
ainfi dire, au caraaere national des Romains, on ne peut
en- difcouvenir; mais corrigée de [a premiere rudeffe, on
�DU
PAL A I"s
D Il
P'R 0 V Il N C l!.
rr. 01
étoit fondé pour la maintenir, & même pour s)en glorifier,
fUr des motifs fages & fur des vues profondes, fur l'utilité
qu'en retiroient les mœurs, & peut-être même fur l'importance dont elle étoit pour l'ordre & la tranquillité générale
de la République; & fur ce point, comme fur bien d'autres,
ce n'ell: quelquefOis que faute d'en appercevoir les vrais principes & les liaifons cachées, qu'on critique trop légérement
les incencions de ce peuple, aulli jufiement célebre par [es
droits que par fes conquêtes.
S'il efi re~u parmi nous que les peres ne [ont plus au milieu de leur famille que les minifires & les repréfentans du
Prince & de la Loi, ils en font du-moins des minill:res ,
des repréfencans bien refpeél:ahles & bien facrés; l'autorité
qu'ils tiennent de la Loi, qu'ils n'exercent, fi l'on veut,
qu'au nom de la Loi, n'dl: pas moins augufie ni moins
étendue que celle qui dans Rome étoit en quelque forte
inhérence à leur perConne. En un mot, s'ils ne peuvent plus
aÙjourâ'hui abuCer de leur pouvoir, il n'ell: pas plus permis
qu'autrefois à leurs enfans d'abuCer de leur liberté.
L'humanité & la douceur de nos infiitutions dégénéreraient en imprudence & même en cruauté, fi elles avaient
accordé une liberté trop étendue à des perfonnes trop jeunes
"encore pour être cenfées n'en pouvoir ufer jamais qu'à leur
avantage, & trop tyrannifées par les pallions pour n'être pas
plutôt portées à en abufer fouvent.
Les Loix Romaines paroilfoient trop ne s'occuper que
des peres; elles fembloient vouloir en "quelque forte en faire
des Dieux; on eil: prefque tenté de croire qu'e!Jes ne leur
avoient départi leur autorité [uprême que comme un mgyen
de plus de fe faire refpeaer & prefque adorer. Nos Loi~
Fran~aifes femblent au contraire avoir eu beaucoup plus en
vue l'utilité & la sûreté des mineurs & des pupilles. Leur te.
cond motif ell: enfuite de veiller en même temps au maintien
de l'ordre en général, & de l'honneur, de la tranquillité particuliere des familles. L'autorité paternelle n'eil: point leur
idole, mais un moyen sûr & doux qu'elles emploient pour
la confervation de tQUS c<:s différens intérêts fi préçieux & ft
wan~
Q~
�Jou
L
De cette diltinél:ion puifée dans l'efprit de nos Loix; corn::,
paré à l'efprit apparent des Loix Romaines, il s'enfuit que fur
tous les objets pour lefquels l'exercice de l'autorité paternelIe
ne tendroit, pour ainfi dire, qu'à R.mer fan orgu~il (fi toute~
fois on peut l'en foupçonner), nos Loix l'ont réelIem~nt
refireinte. Mais pour tous les points qui touchent à l'intérêt
réel des mineurs (quoique la foibleiTe de leur âge ou le
preHige des pallions le leur faiTe méconnaître) & qui peuvent même être de quelque conféquence pour la fociéré générale, leur autorité toujours auffi néceiTaire, n'a auffi reçu
aucune diminution.
II 'y a plus, & il femble qu'à proportion même de ce qu'elle
émane aujourd'hui d'un principe plus pur & plus imparrial ,
elle doit avoir acquis un caraél:ere plus augufie & plus énergique encore. Quelle Loi en effet doit être plus impref·
criptible que celle qui n'efi faite que pour le bien de ceux
même qui fe plaignent pourra nt de fa rigueur?
Les peres ne font plus aujourd'hui les propriétaires defpbtiques & perpétuels de tous les droirs, & pour ainfi dire
de l'exifience de leurs enfans; mais il importe aux enfans
qu'ils en foient pour un temps les gardiens & les dépofiraires
facrés ; & la douceur de nos Loix dégé,néreroit en foibleiTe
& en imprudence, fi elles leur ordonnaient de s'en deiTaifir
avant cet âge de maturité où les enfans font enfin préfumés
pouvoir en faire un bon ufage.
Eh quoi! la Loi leur prohibe ju(qu'à cerce époque l'ad:"
ininifiration libre & indépendante de leur forrune, & jamais
per(onne ne s'efi avifé de réclamer contre cette; gêne faJutaire! jamais fur-tout ceux à qui on a ôté ainfi le pouvoir
de fe ruiner par légéreté, par emportement ou par imprudence, ne fe font plaines de ce qu'on les prive de cene funefie liberté! & l'on voudroit qu'il leur fût permis de die·
pofer de leurs perfonnes avant même qu'il leur fait permis
de di fpofer de leurs biens.
,
Rien au monde n'efi plus important & plus augufie que
le lien inviolable & perpétuel du mariage: mais loin de
prouver que les Loix doivent avoir fur ce point plus de con..
1 08
,
RNA
�DU
PALAIS
DI!
PilOVIlNC!:.
109
fiânce ou plus de complaifance pour les mineurs, en en relevant la- dignité & l'Importance, il femble au contraire
qu'on ne fait que démontrer toujours mieux la lléceffiré d'une
furveillance plus attentive & p.lus rigoureufe de leur parr.
e'el!: relativ.ement à la natLlEe & aux conféquences de [es
démarches, que Je mineur, quL el!: tDujours cenré devoir être
plutôt entrall1é par la fougue des paŒons & par l'impéruoliré de l'âge, que décidé par la prudence & par les réflexions, doit être gardé de plus près & retenu avec plus
de foin.
C'el!: donc fur un principe de jul!:ice & d'équité narurelle,
que le droit d'oppofition accordé par la Loi aux pe!"es &
meres, lorfqu'il s'agit de l'établilfement de leurs enfans, eU
fondé; il n'eU pas nécelfaire de répéter que ce qui le rend
plus refpeél:able encore, c'el!: qu'il a fa fource auŒ dans l'utiliré
même des mineurs, & que rendus un jour à eux-mêmes, ·ils fe
féliciteront d'avoir été arrêtés par cerre [oumiŒop (aorée,
contre laquelle, dans le délire de leurs paŒons, ils s'épuifent en déclamations injul!:es & en efforts inutiles. Mais ce
qu'il faut obferver ( parce que ceci tient réellement à nos
mœurs & à nos ufages ), c'el!: que cette Loi el!: encore
fonaée. fur tlne autre vue également [age .& judicieufe, de
mainteriir.' plus facilement la diftinél:ion nécelfaire des rangs
IX la prééminence des· familles. Tels {ont les priricipaux
motifs qu'on peut donner à la Loi fur laquelle eU fondée
l'autorité des peres; motifs fi rerpeél:ables & d'un ordre fi
élevé, qu'jl n'eU aucune <!U~Je conGdération qui pllilfe les
affoiblir.
En }fain s'appuy:e-t~ori fur lê Ii.lence des Loix, relativement
au pouvoir arbitraire qUè l'aieule réclame aujourd'hui, &
fur l'impoŒbilité d'étendre jllfqu'à elle, & de lui appliquer
les motifs qui ont décidé le Légi!lateur à invel!:ir les peres
IX les meres d'un pouvoir fi formidable. Les Loix fe taireut
fur les autres afcendans, lorrqu'elles parlent des peres & des
meres, parce que ceux-ci les J\lppléeJlr, & parce lJ-u'i} n'el!:
pi naturel ni ordinaire que l'on perde (on pere & fa mere
tivanr ron aïeuJ ou [on aïeule. Mais çaps J:~ dernier cas, le
�'1~o
)
l'JOURNKL1.T _''f
T"
lilence [des Loix n'ell: pas abfolu; & ne p~ut f.lire peéfu~
mer l'entiere indépendance des mineurs; elle fubfiitlTeLaUX
peres &, meres les tuteurs & curateurs; à pll1s fortesaifon
leur. auroient-elles ~fubfiitué Jes afcendans , fi 'elles avoient
cru que l'ordre de la nature permît lui-même cètte fubfii ..
tution. Il fuffit que la Ldi n'a/franchiIfe point le mineur à
.Ia mort de' fes pere, & mere, ,pour qu'on ne fôit pas fondé
à fe révolter plutôt concre le joug de fon aïeule, que contre
cel~i d'un curateur qu'iLlui faqdroic fubiE à défaut du premier.
A défaut de tuteurs & de curateurs, les mirieurs, plutôt
que d'être al:iardonnés à ~eu'x-mêrries ~ retomber:oieiJt'Jous la
turelle -du .minifiére public; ils forment une partie de l'Etat
trop -eifentielle & trop précieufè ; pour que l'Etat lui-même
ne veille pas à leur confervation , '& ne les'fauve pas de leur
propre foibléIfe.. "
L'aïeule 'du -fieur Millandou' .n'a fa~t, 1 en s'.nppofallt' à fon
maeiage I,~que ce que les ",Loix l'amorlfenr dé faire en; fa
Gualiêé d'aïeule; que ce que Je tèfiament rdu fleur MilJandoll
l'autoriTe. plus paniculiérement encore à faire; que ce qu'un
curateur eut 'pu faire 11 fa place, & qmtce, que le minifiere
public a droit de faire 11 défaut- de curateur.
_ Mc. l'Avocac':'Cénéral ajouta qu'en France, fi te mariagè
d'un mineur' étoit le feul moyen de le foufiraire à la 'peine
':capiiale :qu'il 'auroit encour.ue par fes, attentats fur une fillé
mineure', quelque défagi-éable que pût être ce mariage à
{es parens', loin que leur oppofition pût être accueillie en
pareil cas ; '~lIe devroit ·au cOht.raire 'être rejettée avec' une
efpe.ce d'indignation.
1 Le lieur_Millandou eft accufé' pir la. Dlle. Chiuffi &, toute
fa famille d'I)t:1.enlévement avec'!viole'nce;, ce premier etime
a été fuivi d'un fecond attentat' non moins déshonorant" &
plus décifif encore [ur la perfonne de la Chauffi.; l'un &
l'autre ont été précédé's &; en quelqâe.fo~te ,éommis fous la
foi d'une promeife Ile mariage. ' I , ' ~
11
1 • On ne pent fUivl1.e dans Ille
Comtàe cpour l'la plmition dè
cette efpece de Cfime', que 'deux Loix différentt!s'; 1· L i
Romaine, ou la Loi Canonique -du 'Concile ·de T!en~.e·~
�PAt AIS D E P~lO VEN C 1l;
'II t l
celle-ci n'a imp'ofé au crim~ d~ .rap~, que la peiQ. cCilif'l-mie, l'excommunication ,& l'e'mpêchem~nJ diômallt Q\J,;ma- :
riage, jufqu'à ce que la fille enlevée ait éré remife eu liberté:
La Loi Romaine prononce la peine de mort conne le Tavitreur; inais ce ne peut. être dans toute (orre de éirconf-:
tances.
.,
'
.,
n difcuta enfuite les faits .concernant -la féduaion. & l'en';
lévement de Jeanne Chavffi; il érablit que la détention du
fieur Millandou ne devoir point intpirer tant de pitié " &
que l'oppoGtion de fon aïeule ne lui ôroit pas tout efpoir
de voir brifer fes fers, ou d'éviter le dernier fuplice. Il
n'étoit point apparent que les Juges eocléGafi.iqués où [écu-'
liers le çondamnatrent à une peine auffi f<>rte que le 'paroit
aux yeux de fa famille ie facrificequ il veut s'impofer luimême; .on peut préfumer d'àilll1'urs que .1e~ .crainres qu'il
affeél:e ou qu'il retrent, ne font qu'un preaige ou qu'une
Tufe de fon amour, comme l'êtoient àuffi fi!ns doute les cri':
mes qu'il' fe reprochoir.
L'amour: relie
l'idole à laquelle vraifemblablement le
fieur Millandou facrifie tour, & à laquelle- il prétend avoir
le droit de tout facrifier. Le pouvoir de l'amour ea en effet
très-grand; il ell: pour aÏ'nfi dire l'àme de la jeuneffe, l'éêueil
d'un âge plus. moÛr,. fouvent ,même le tyran des vieillards ~
fuais enfin doit:" il prévaloir fur rout? Le frein' de l'hon':'
neur,' les liens qui nous attachent à·nos familles, la' ~onfi':
dératloll des bienféances, l'ambur 'Ide la Patrie· n'ont .. ils
eux-mêmes aucun droit fur· nous? Tels font les gralids obfracles qui s'oppofent à la farisfaél:ion pafi"agere du _fieur
Millandou, & qu'il ne peut franchir" !qu'il n'eft pas méme
(le fon inrérêt de franchir. Le mariage qu'il veut contracter', n'eil: afi"drti ni à fon 'état, ni It fa fortune, ni à fa
qualité de Fran«ais & de fils de famille. Il fulfit _que ce
mariage foit peu convenable; il fulfit que le fieur Millandou
foit II)ineur; il fulfit fur-t<?l1t qu'!' paroifi"e qu'on a manœuvré
contre lui, & qu'il eil: plutôt fait pour être le jouet de la
féduél:ion , que féduél:eur lui-même,
Mr. l'Avocat-Général conclut à ée que fans·s'arrêtec à ·Iali U
ea
�J O:U
1 1 2.
RNA: t-
requête du lieur' Millandoll; tefidante en ,déboutement. 'de.
l'oppolirion formée à fon mariage- par la Dame Ferrier, fon
aïeule, & en 'révocation du décret de la Cour, la Dame
Ferri-er fi'tt" mife hors de Cour & de procès.
Par Arrêt du 2. Mai 1780, prononcé par M. Je PremierPrélident, les conc1ufions furent fuivies; le lieur Millandou'
fut condamné a'ux dépens. Plaidant Mes. Eil:rivier & Arbaud.
( :
ARR
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J
1
l
.'
XV.
SUR une 'luejlion:1qeJcompétenee.
,Une Sentence qui, ordonn.e de nonoijlant.appel fans impofer la
condition de d;onner.rca,utîon ;' efl-eNe:Jlulle ?
.
Les procédures faites depuis' l'appel 4tfèlaré doivent-elles être,
• fT:!
caJJees
•?
La deml~Jl,re,
'J
•
en fait de rq.chfltJ çonv.entionne! , peut - elle être
purgée pendant trente ans, lorique le rachat a été"convenu.
fans jlipuldtlàn d1allcJlT!.elpein'e;' ti't/làl n'efl poin~ intervenu
de déc/zéal(t:.r;:)udiçiaire.
, '
.,
L
E 9 Oél:obre 177 1 , André Torcat & Louife Sauva ire:
du, lieu de Gars vendiren à Anlle Oliv,ier, avec filculté.
de rachat, une .maifon firu~e au même lieu, au prix' de
127, ljv. avec pouvoir d'dl prendre la pojJèlJion /fans deux anllées, ,comptables du jour de l'ac7e, pendant leqIJel temps les.
vendeurs s'en rifferverent le racluu.
Les vendeurs n'avoient cefTé de jouir de la maifon; &.
le,r2.8 Mars .r77 6 ,Jang', t~jflPS après l'expirafign du rachat;
il~ furent al\igrié Par Anne..,élli,vier dévan't Je Li~menant
des' Soumi$.ons aù Siege de' Graffe, '; en: ',(uiciang.e ,de. la
maifon, & en paiement du loyer fixé à 6 Uv. 7 f. fi 'mieux
ils n'aimoient que l'appréçiation' en fût fllice ,parr Experts.
Le 9 Août 1777 intervi~[ ll,l1e Sel)rence renqu,e; en [j:OlJ;:::
tradiGloires: d~fenfes , A1.li .f1t droit à~ laI -d(j)ll~npe d' Apn~
Olivier, & qui porta q(klle feroit 'e~éc.\\t~e· nQnobfianr ~
{.111S préjudil;e· de l'appel,
~
1
A,noe
�DU
PALAIS' Dl!
J)'
<;Olli\ .
.PlloVJ!NC:!.
Anné Olivier fe fuit en ppffef40n -de {a' maifon·,. & fit
mandepient à fes ve!1de~s 4e.-lui PJlyercille·t!oyer.Juqjugé "
ceux-ci appellerent de 1a Seqten9.e ~ allrpréj!.1dice de cet appel-,
elle obtin~ une, Ordonnance ,de _calQul de; dépens, dont onappella ég?lelJwnt. . 1 _: '. J
,_
UO, a J
André Torcat & Lol,!' fe l;SijJV;jjt~ ?.réJepjer.~t ll!l.e reql)êre·
incidente, & delll,inderept Jjl-,)~a!iQn s:l~I·tQ !e!$ le~,prdcé-l
dures fl\ites pardev<lot' I.e J:,\ettr~nant ges. S9utûi~or1s QQl1lme,
incompétent, & des exécutions 'fait~s. au préjudic.e de {jappe!.
Ils requirent d'être admis à ufet Idu ra,chat conventionnel
infér~ dans, l'aéJ:e· du 9,Qél::Qbrec 1,7. l, ~ Ja, charge par (tuJ(.,
e rendre le psixd:Ol1Venu ,&. le,,!.,freti .. &,joya!tlçcQÛ!S ,
el) conféquence qu'Anne Qli~i!:~·. fffoitJ\;Qnqamnée 'à leur dé-laiffer la maifon. •
.r rI ~ • J 1 b
Les appellans difoient que te J:,ie.utenaljt des Soumiffions
de Graffe étoit incomp.étenr. En effet, de quoi s'(lgiffoit. il?·
De la vuidange d'l\ne maiiO:n-19uée &; 4u paierneqt,,~lj loyer :.
or ,. c'en-Ià une aaiohlPyre p~rfonneJI~" qui ne popvQit être'
portée que pardevaA~.le Juge ~dujldomi.cile du .Qéfendeur~
Ac70r ftquitur Joram, rei. Si ,la location étbit écrite, li l'aae
étoit foumiffionné, certainement Cf'auroit été au Lieutenant des SO!J.miffions, qu'Ol). fauroi! d~l s'adœffer en expolitioq c;Ie clameur, parçe qu'alprs il {e 1uît)l!gii,deil'exécuriol1
d'un aél:e foumi/Iionné.- Mais. dans l'hypothefe~ aauelle 'Jpoine
d~écrit, 'conféquemment p6int de .renoQcia~ion au ,privileg~
d'être jugé par ,le Juge nature!. Le !Çlujlge pe la 'maifon :l.
commencé à l'inftant de t'expiration des deux :1l1~ées; ce.
n'était donç pas, comme velldeurs <Ju'ils, devoient, être i;Qn~
1idérés ,[mais ,c0!Vme locaraire-!i: or la loçaçidO' ~rait ver!:lale ~
les différens qui en naiffoiens ,.ne pOllvoient ~t~ q\f€ cje 1
compétence du Juge de Gars·: .à la Xérité on n~av,oit pas dé-,
çliné 'Ia Jurifdiaion du Lieutenant des Soumiffions de Graffe; •
mais çe Juge, qlji n'érait pas çOll1pé\eot dans le principe"
n'avoit pu le devenir par- le cODf~ncement vqlontair~_des
partiefi.. La Loi 3 , au cQd. de JuSifdi!:1ioTje omnium 'udicum"
en précife : privatorum co~fenfus' J~dicem non Jadt 6ttm, dit.
~ette Loi, qui nulli prώfi.lud,itiO, nec fju d~ is. jla!Jfit-, r,'
l'.
�ff<f
',' l'~I. '1 UJR Ni),. t
judiC?ltt21c<j,ét Îltl1fl'oriratêm l' 11 cfant ô'i!l:iligtler ·je ~TribuÎ1at
incQmpétel:îl', à[ r:ilf01iY {I I~ '6a:t·idè l du-Tribûnàl -qui i~ <Juoi-
que ,ëomp~(enl:} ipmfftblt); êfriJtivé de laicohùdiffan'ce du
procès par ,J'el\erciée dù,fpr'ivik>gé.du committimas. Dans' le
premier cas, toutes !es pro~édu::.es i. tou,s !es' co~entemens
rie iWuroiéI1t lI15ftÎltféJ JiJtlfél1a'lon à tun -Juge' qui ne l'a pas;
1e- dét1inatdire~uf-t-ér:tê';fo"t1tifé '6n'ctôut êt«.~ de iaufe, ,même
fur l\lppel~),lel[Mi1rlfl:.eie Jpùh,li,,' lut-même pourroit d'oiliee
re<Jùérir -la t-aIraiion Ide lâi Sentence & de 'tout· ce qui l'a
pré&dée ;"â':lns'Ie -fecdnd cas, fa moindre procédure opere
urie; r-enohc'iâtlèn;:,atf. pr:i{(ilege, . &{ forme lm: obfiacJe à fon'
èXercièe~ Jlèi -le''LÎeucenant des Soumiffions étoit incompé-'
re'nt à 'raifon de li 'matière; dORe tout ci qui a écé fait par-"
'
devane lui efi nul,
Les 'appèllans ajouto'ient que la Sentence avoit un vice
pdrticulier, en ce qu'elle ponoit' le nonobfiant appel fans,
d6AQer éàution;.Jeiî~ jleglè générale l , t6uc"'appel éce'ignant la
S~Î1tence ,'& faifant reviNce',les ébntefiations cerminées, a un
eJfet-4l!ltpe'nfi:6; maisfH"é-fi.JHes, as part1èuliers où les Jugern~lis fane; provif6iÙnïerfê S èxecùroires; les faits de Police,
les matie1'es fO'mmaires, joui'fiènt de ce privilege; la vuidang~ d'une mail0fl émit fans doute une matiet('~ fommaire,
mais la L0i e~ike;<J1ié.I'on:~onne'cau_tidn.Van. 13 du cit: 17
de I~Ordohri{nE:e.de. l'8p7, potf&pr~ci[ément: " Les Jugeroens
'1 définitifs dofihés~s 'matie-res [olnmàires' [ont exécutoires
,~ pàr proviGéjn, en donnant ·caution. " Cette cmition, dic
Jouffe, doit non feulement être offerte, mais encore 'Eire rëçue,
av~n~ que l'0t?- puiJfi -eidè.uter la ~entàiet. Or la Sentence du
9 Août Il''17 n'oracnn" point "la caution;' on ne l'a poine
ôffene après 1'app"èl déclaré l,' & cependant on -a. fair: ·t-axé
les dépèn~~ 6n il {<tit' ~o'mhlandêment de ;lès· pa,yêt.
'(
Enfin, 'fini1toiene par dire les àppellahs,& c'était ici
l'objet qùi 'les intérêffoit lé plus: foic qùe l'on calÎ'e '& les
procédUres &l'les Sentences, foit <J;u'àn lés rriaintienne; dans
l'un comme ..dans l'autre .cas nous ·devC!lns étre admis à,
l'exercice du rachat cenven-rionhel.
.
'J
otite vente à faculté de réméré efi préfumée 'aite ~a"ec
-r
•
�~1'
10000' c'eŒlordinâirerhent:.lè, bèlOin id'argènt,'cjul
dtl1111J
lieu, & Ce' befoin CUIIOU femMe -au'tlrrifer l'acquèreur à s'a~
vantaget: conGdérablement,; auffi ces. fortes de contrats (ont
ordinairement ufuraires; &> dans la . lupart es "Parlemens' du
Rbyaume, on permet- au '".ennéu 'de 'plJfger' <la 'demeure;
dans les autres, 1 on::l1~ !admet1 dans 1'C~rtainS'J cas plt'rticu:.{
liers.
-•
.9Y _ "lil.p -:',,1 "'9:):' , , , . ,
'- )
• Le Parlement de, Paris .fir..un. Rég~'ment en =1<6)0,
rapporté par Brodeau fur Loueq lett~.V, chap. 12." qui
déclara!que le- feuLlaps.. .chntelf1p :nel fOffi 'Oit pa~ pour 'pref-,
crire le rachat conventionnel, s'il n'J'.. aV6Ït" pas. eu une
defaut)' de ttét:liéa~ 'déSentence
conéradiaoite
r
..
. _ .ou~lpar?
nttlve.
:
.
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ul
J •• _
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Il en ef!: de même au. Parlement dé Touloufe. Mr. de Catelan, tom. 2, liv. 7, chap. 3, .attefie que la faculté du rachat;'
dure trènte' ans, J quoiqu~ellè ,n'ait été .fl:ipulée que po~r UltE)
année feulement ou pour.un' moindre temps, & que la Faifon
de cette déciGon ,eft que- celai qui vend fous cette condition',
ef!: préfumé aliéner à vil prix, dans l'efpérance de reéou,Vrel"
un jour les biens qu'il tranfporte.
.
En Provence; on ef!: plus rigide; on y fuit, à quelques'I'ef,
triaions près, la Loi magn..am, aO' cod. d'ê'cont,ah. Ci, commit.
fliplli. Cette Loi '{eut. que celui qui a. ptomis. de, faire quet.:; ,
que chofé,. & qui a confenti'qu'otl attoichât une peirle à l'inob1.
fervation, ne pui/fe 'Point ,. llprès le ternie convenu, fe fouftrairé à la peine fl:ipulée. D'après' cette Loi, qui a fervi de
fondement aux différens_ Arrêts rendus par le Farlem-ent
lorfqu'en fixant un terme on n'dt convenu' d~aucune ·peine"
on peut purger la demeure; puifque , comme l'on voir~ .U~
exige le conçours de deux cbnditiofis: ID. la prome1te de
faire; 2 0 • la peine déterminée l 'ces deux conditions doivenll:
néce/fairement concourir. Ainfi, quand en aliénant ·un do,
maine" & qu?en fixant le temps du rachat, on conviendr~
qu'après l'expiration dù terme. oh fera déclaré déchu, la de,
meure ne pourra pas être indifféremment purgée. Elle pourr<\
l'être dans les dix jonrs, fuivant l'Arrêt rapporté par Bonnet"
lete. D, Arret 1 ; elle pourra !'.Çtre m~e après,- s'il y a l.i!1.(i
DU
PAL'!r:s"nJV
.ROVENC1!.
J
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•
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'TOl1:iOUJ!l;!foo'l':.Ilq U
léfiprf conH.déra:ble , fui\lanedlbp;ibion' de) neë1:irrn?S~' tom;,.f.;
col-. l 's i6. ( Voyez' Bpniface,. t6rn:I4i"ldiv. 8; tir::li, ch. 10. J
Or, daos le faie, Q,n ne voie que la fimpler1pTOmeffe' de'
racherer, fans 7.<!IlCUIlS!, fripula tian.. dé ,dé€'héance ude plus,~' -la
mai(on, aliéoée.;,p<:!l\r ~t~7JJJli'" ',en Ulvaloir lplus ,de éJoos; [ lés
v.e!Jâeur~ J!l:.ce.!lQieOLdll;:UéurJle.ao iPaft:aloà tkÎene~d'écliaoge ~
celui-ci l'avoie récemmenr acqllife de Me. Guerin ~ Noraire';
au_ prjlC d.e; 2oQ.r!ivU ,& avoir- "faic' beaucoup des réparaëions ;
ils )il~e.tl'avqien:c reçïré.pt:éciCé.mene q.u'e ce qu'i1s"furene obligés
de . a~er; au fieur frifé.alsnils 1 en ,cd.ncluoiént 1qu'ilSl[devo.ieric
çrœ admis,!au-rjlc.hat:1I l'~ tlH.nll n:)'1110) lL J~'l el ~1'-.)
-:,J,Annll,'olivie.r répondait qlle-JeILieute.rmilt.des ,Soumiffions
de Graffe étoit compétent, puifqu'il s'agiffoit, non d'une1de..
n)~llciè, en. rvllidange d'une' mai(ôn.'arrerrrée,.'maÏs;d'une demaode "eù dél.aiif~ment ç1~\,In,e. '!Ua,ifon: vendue 'par~ .contrae
jjw.!J1ijJi.n ni!""<jJ.le, ,ce COlmat éroit,Je feu!. titr.e&q.u'elle pou
Jf,<M~ ÎJ1N'p!J.ller)'P0ur expulfér lesuvendeurs; c'était l'exécution
dd'a;Ç}e qu~elleJollieiloit; elleid'ayoie ja'mais loué la· maifon
aux. VelJdeurs ; Jeur occupatioli étaie une éxten'fion de la jouiffance qu'ils avaient fripulée-en l'aliénant: fi>-elle avoie de- .
fu.llndiluru ,101er:; ·ce, n'é~Qitlpas parcej qu'il avoit été conY:llQlh 'mais ~érojtr_U()è j11demu\ré. ; aL!ffi elle'doilOOit ~ fes :Ad,.;
veJf,!i~.s,l'qcJ~rJ.1~tiv. .d?ein l'fàire faire' eappréciation;pa ,clÇ'S~
El'pert~; ~ti.~ ql!.'ih·rietoic intervenU aucun nouyd laae, au€un
notlve ,a,ccGrd, on ne pouvoie agir 'qu'en force du ,preinier ,
/5<.lé/piemiér éç6it -foJlmi/Iiobné.;-il .déférait drinc 'àu' Liéu~epanr'd:e.~, Soplni/Iioos lesJ difi&etids.qlÜl:.e,O ',po,uvoiene naître,
oLar·Sentence} d!I,'9 .AoQt Î.777j n'efbpas J nulle ';' l'Ordon":
I}al\c~ 4e l tS,67'o ne (oumet pas)e Juge à..,brdonnemlf ~autiCllru
çà,ns)es -e,jlS 'qL1i en fOAt fu(ceptibles ô') l11ais~ elle· fe ,coht<;nre
d~ ,dire queJe.s Se.mencesc·ferpnt exécutées en c)onnanc· caution, ce qui (qum.et la p.arLi~ c.ondamnée à la requérir, ou
tqUJI ail phjs çel1ç :.qu~ ,obcieJlt la! p.erJ'l1iflion d',exécutér pJ1o:vifQ.i};ernem, à l'Qjfril); c'dt c.e:!<1uï. f~ vérjfie ,tous les jours. J]n
:lp'pellant ,vieot d~mandell·à:,)à. COÛF qu'il foie lfurfis à l'exécution provi'{Qire d'un Jugement; 'iL fonde fa dem'ande fur ce
que le Juge n'a pas QrdooQé.l.e,cautionllemenr. La COUr dé.0'1:
�hü
PALAIS
DI!
P oviNe!:
'rI;
boutt!'(je la furféance demandée, en foumettant Pintimé ?t
donner caution; donc la caution peut être requife ou offerte
après le Jugement qui' ordonne le nonobfiant appel: il
fuit de là -que la nullité- ne frapperoit pas même comre le
chef de la Sentence qui ordonne l'exécution provifoire; elle
toucherait tout au"plus aux aél:es exécutifs.
[ Au. fqnds, quel efi le motif de' l'Ordonnance, en foumettant à donner caution celui qui demande à exécuter provifoicement une Sentence? C'efl d'affurer le rembourfement de
l'appellant., aU cas qu'il parvienne à faire réformer ce Ju-geinent: or, quand il efi queIl:ion .d!un immeuble qui ne peut
point difparoÎtre, l'affurance réiide dans la qualité même de
l'objet accordé; on' peUt alors fe' difpenfer d'ordonner un
cautionnement, puifqu'il n'y a aucun rifque à courir, Le
grief devient donc fans intérêt, & n'efi conféquemment pas
admiffible. La Sentence du 9' Août 1777 accorde, il efi vrai;
"Outre le délaiffemènt de la mailOu, une adjudication de' l 2
Ii.v. & quelques fols, & des dépens, il' efi vrai encore que
ces dépens ont été taxés après l'appel déclaré, mais on n'a
fait aucune exécution, aucune faifle; les appellans ont donc
eu tart de fe plaindre. D'ailleurs la maifon ou le prix qu'ils
en offrent leur tient lieu de caution.
Le rachat'qu'lls demandent d'exercer n'efi plus admitIible;
on a quelquefois examiné fi lorfque le\.rachat étoit conventionnel, il ne fallait pas l'exercer dans' le temps fiipulé, &
fi après le terme donné on pouvait y être admis & purger
la demeure; on diflinguoit à cet égard le cas où l'on avait
attaché une peine à la claufe réfolmoire, & celui O~I le rachat avoit été fimplement fiipu\é. Dans la premiere hypothefe, la déchéance était· encourue.dès le moment de l'expiration du délai, parce que dies interpellat pro homùze; mais
quand il n'y avait aucune peine Il:ipulée, parlJ,li les Auteurs, eles
uns penfoient qu'on avait ttOis. jours, les autres dix, pour
pouvoir purger la demeure; mais jamais perfonne n'a imaginé qu'après trois ans on pût' être admis à ufer d'un rachat auquel on n'avoit donné 'que deux ans de vie.
Cene prétention n'ef!: pas admiffible. Bonnet, à l'endroit
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'ldl
.,
1~
10U,RN'AJ..l'
tité, rapporte divers IArrêts i 'lors du d~rni~x ,. Qn têjeJ1.a lé
concours de la prome/Te de .racheter; & de la fiipulation ,de
la peine au défaut du rachat; pag. 62., il dit: " qlJand la
" çlaufe réfoluroire du cont~at ef} conventionnelle ".comme
" au càs que je viens de. rapporter, le défendeur n'a: .Ot...
" dinairement qu~ dix jours pour purger la 1demeu,re ,Jflli- ,
" va nt les Aurorités alléguées" ; & l'Arrêt qu'il l'apporté, le' '
jugea ainfi, quia meliùs agitur cum lege, fjudm cum homùze.
Depuis, I.a quefiion a encore été jugée par Arrêt du 2.6 Avril
:176" au profiç du lieur de St. Antonin, contre le fieur Robion de la vjlle d'Annot;j Ainfi' il efi indiffére,nt ql)'on< n'ai;
point inféré dans l'aéte, qu'après l'expiration des deux arr""
nées, les vendeu.rs feroient déchus de la faéuIté qu'ils fii'puloient de racheter la maifon. Cette claufe étoit de droir.
Dans le fait, rien ne prouve que la maifon acquife pour
12.7 liv. en ,valût beaucoup da\(antage; le fie ur Pafcal, .de
qui les vendeurs la tenoient, PQllvoirJ'avoir furpayée, l'avoir
détériorée;. les ve.ndeurs eux-mêmes pouvoient ravoir dépréciée : ils ont donc tort d'exciper d'une léfion. énorme '.
fi elle ~xiQe réellerrtenti ils (ont encore dans les dix années;,
ils pourront (e pourvoir en rdl.itution" mais l'aétion en, rachat ne leur compete plus.
".1
'Arrêt du la. Mai 1780, au rapport de, Mr., le GonCeiller
de Raouffet de Vintimille, qui ,confirme les Sentences, &
~ui rejette la requête de's appellans en ca/Tati,on des procédures & en racha t. Ecrivall.t Mes. Aguillon & Sauvaire.
.,
2
-
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,
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••.••
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"
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• L.1.
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.A;R:R ~;
"
l'. X V J.',
,
Il n'efl da aUCll.Tb lQd,.s ail Rpi fi,tr le prix des. biens
"
~
; l1iendus
t,
41JCC' le.
(. .
.
Fief..
r'
.,
'C: ar
r
roturier~
' ,'1"
.
1
E. Régi/Teur des, Domaines éle.va.lat contefl:ati~n con,cre
le Marquis· de CafleUanne Mazaugues; mais on 0ppOÛt
pour le Marquis de C<Ul:ellann.e, que les queftions de.s. lodsj
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" au càs que je viens de. rapporter, le défendeur n'a: .Ot...
" dinairement qu~ dix jours pour purger la 1demeu,re ,Jflli- ,
" va nt les Aurorités alléguées" ; & l'Arrêt qu'il l'apporté, le' '
jugea ainfi, quia meliùs agitur cum lege, fjudm cum homùze.
Depuis, I.a quefiion a encore été jugée par Arrêt du 2.6 Avril
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point inféré dans l'aéte, qu'après l'expiration des deux arr""
nées, les vendeu.rs feroient déchus de la faéuIté qu'ils fii'puloient de racheter la maifon. Cette claufe étoit de droir.
Dans le fait, rien ne prouve que la maifon acquife pour
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détériorée;. les ve.ndeurs eux-mêmes pouvoient ravoir dépréciée : ils ont donc tort d'exciper d'une léfion. énorme '.
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'Arrêt du la. Mai 1780, au rapport de, Mr., le GonCeiller
de Raouffet de Vintimille, qui ,confirme les Sentences, &
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E. Régi/Teur des, Domaines éle.va.lat contefl:ati~n con,cre
le Marquis· de CafleUanne Mazaugues; mais on 0ppOÛt
pour le Marquis de C<Ul:ellann.e, que les queftions de.s. lodsj
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�DU PAL AIS
D Il ,p lt 0 V Il Nell:
II 9
font 'toutes locales, ainli que l'atteftent Niger, d( laudim.
quell:. 4, art. 1, nO. 1 & fuiv.; .Decormis, tom. -I, col. 9"'7; 1
Albert, litt. L., chap. 20; d'Argentré fur la Coutume de
Bretagne, art. 71, not. 1 , nO. 12. TousJes FéudiHes difent'
que, foit pour ce qui concerne la quotité, foit pour ce qui
concerne les cas & les objets fur lefquels le lods eft pris,'
c'eft par la coutume des lieux qu'jl faut fe régler, à défaùt
de titre conHitutif; (;. celte coutume, dit Decormis, tom. 1,
col. 990, ne ft prend point, tant par maniue de prefcription,
'lue pour explication & interprùation de la 'Volonté des parties
lors de r ar7e. La coutume dans ce cas, quand elle eft de
tous les temps, quand elle eH univerfelle, mas regionis, n'eft
pas feulement interprétative; elle efi de plus confiitutive du ,
droit.
En Proven~e, le Roi n'a jamais perc;u le lods des biens
roturiers enclavés dans le Fief, & vendus avec lui. ( Voyez
le nouveau Commentateur de nos Statuts~ tom. 1 pag. 327,)
Cet. ufage ne préfente pas feulement un fait négatif, mais
bien un fait très-affirmatif; les aéles de vente s'y font toujours faits en deux manieres, ou en féparant le prix des droits
féodaux & du bien noble, d'avec celui des bîëns roturiers,
ou en confondant les deux prix. Dans l'un & dans l'autre
de ces ,deux cas, la perception a toujours été limitée auJ
prix des biens nobles '& deS' droits féodeaux, avec entier
~onnGjffance de ,caufe. Au premier cas, le Fermier bù le
Régiffeur du Domaine a eu fous fes yeux l'ade de 'vente;
diHingant les objets & le prix; il n'a perc;u le lods .qu'e fur
le prix des Diens nobles '& des droit~ féodeanx, & 'cefte
perception ainli limitée, eft bien marquée dans lé fens volontaire & réfléchi d'une preHation référée & limitée au
prix des biens nobles & féodeaux, dans le fens d'une preftation qui ne peut pas s'étendre fur le prix des biens roturiers enclavés dans le Fief & vendus avec lui: Ce caraélere
s'eft enCOTe mieux développé dans le fecond cas, c'eft-à-dire
lorfque les ventes du tout ont été faites par un feul & même
prix; alors on a fait faire par exprès une ventilation du prix
total, p,our connoître la porcion du prix qui devoit corref-.
�Jou RNA:t . '"
pondre aux biens nobles & droits féodaux, fur laquelle le
lods devait être pris, & pour la réparer de l'autre portionqui correfpond aux biens roturiers fur le prix defquels le
Roi ne prend rien. Cette op.ération a toujours été faite
vis-à-vis le Fermier ou le Régiifeur, lorfque les prù ont
été confondus dans,l'aél:e. Tel dl: l'ufage de tous les temps.
En point' de' droit commun, l'aliénation des Fiefs ne
doit point de lods ~ les Féudiftes dirent bien que ,le,s lods,
font de la fubfl:ance & de la nature de l'emphytéofe. L'obligation de payer le lods dl: portée par la Loi, au titre du
Code dl! jure emphyt. Mais nous n'avons aucun tt;xte qui
porte la même obligation fur le cas des mutations en ma~
tiere .de Fief. Aufil [ous les F~udifl:es, [ans. exceptio;n, atteftent - ils qu'il n'eft dû réguliérement aucun lods .pour
la venre des Fiefs. Telle eft là Doéhine d'Amedée apOl/te
dans [es queftions [ur les lods, queft. 3+, nO. 8 i de Niger.
dans fon Traité Magiftral de laudimiis, queft. 40, arr. Ii,
de Guipape, conf. 2 l 3 , déoif. 'fI h & de 1?apo n. en [es ârréts, liv. ! 3 , tit. 1, Arrêt 3.
,
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J
Delà il ne faut. pas être furpris fi les Auteurs plus modernes
ont conflamme nt ,décidé que le lods n'étoit pas dû ex jure;
en matiete d'aliénation d,e Fiefs, pui(qu'.il n'ex·ifte aUCljn
texte qui les y [oume~te. C'e1l: le [entim~nt de Sanleger
dans fes RéfolutiollS civiles, chap. 7~, na. 71. de ,Ger.au,d
dans fon Traité des,dro.its feigneuriaux, liy. 02., ch·ap... 13, ,fi);
15, pag. 121, & de D4perier, corn. l , que{l:. 25,. liv.~4~
Par Jugement de 'MM. Jes, TréfQriers de Franee du 18,
Mai )78.0, le Régiffeur fut; ~é.bou.té pe (iln em9nde, &:ÇOll •
d'\.lJloé lIUli. ~peps.
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ARR Ê T
PRO VEN C
n.
121
XV II.
Simulation d'un ac7e oppofte par une des parties contrac7antes.
A Dlle. Marie-Anne Bec de la ville de Marfeille gagna
4000 liv. à la loterie de l'Ecole Militaire. Elle confia cette
Comme à la Dlle. Viél:oire Souliers fan amie, qui lui en paffa
un aéle le 3 l Juillet 1776. Trois années après, la DlIe. Bec
ayant eu connoiffance que la DlIe. Souliers devoit recouvrer 12000 liv. qu'elle avoit fur le Clergé de France, préfenta une requête au Lieutenant de Marfeille, par laquelle
elle demanda que la DlIe. Souliers feroit condamnée à lui
donner bonne & fuf!ifante caution jufqu'au concurrent de
4000 liv., fi mieux elle n'aimoit laiffer entre les mains du
Receveur du Clergé jufques au même concurrent; elle demanda
provifoirement défenfes au Receveur de payer.
. La Dlle. Souliers contella· les fins principales & provi{oires; elle impétra des lettres de rellitution envers fon engagement. Le Lieutenant accorda par fa Sentence du 2
Janvier 1779 les fins provifoires. La Dlle. Souliers el appella au Parlement, & la Sentence fut confirmée.
Le procès au fonds fut pourfuivi; la Dlle, Souliers demanda de faire répondre cathégoriquement la DUe. Bec ;,
c;elle-ci prêta fes réponfes, & en cet état l'inllance fut évoquée pardevant la Cour. La Dlle. Souliers prit des fins fubfidiaires, pour être admife à prOljVer, 1°. qu'en 1776 ~ ~lle
était attaquée d'une maladie de vapeurs qui avoit affoibli
conCidérablemeot fa tête; 2°, que la DUe. Bec; l'appelloit .fà
fol/e, difant qu'el//; avait un colltrat, & qu'a préfent elle la.
tenait.
Pour le foutien des 'lettres de refcifion, on difcutoÎt les
réponfes cathégoriques·de la Dlle. Bec; on relevoit les conrraditl:ions qui pouvaient s'y rencontrer, pour en induire la.
{imulation de l'aél:e; on faifoit valoir l'invraifemblance <1.u'il
L
Q
�!l2.
Jou
RNA L
Y avait; qu'ayant gagné, d'après fon aveu, les 4000 liv. ?l
la loterie en 1768, elle eCu gardé cet argent fans y raucher, randis qu'elle manquoit de nippes; delà l'on concluait
que la Dlle. Bec ne pouvant rendre compte de fon prérendu
prêt, affignant à fan argent une origine au moins équivoque,
& une ancienneté invraifemblable; fe fuppofant une parcimonie incroyable qui le conferva inraél:; variant fur l'époque
& le morif de fan prêt, elle n'avait dit vrai, ni fur l'exiftenee de l'argent, ni fur le prêt.
On répondoit pour la Dlle. Bec, que la limularion ne peut
être alléguée par les parties qui ont ligné l'aél:e; elle ne peut
êrre propofée que par un tiers qui auroit un intérêr auquel
on voudrait préjudicier. Mais l'on ne doit point écouter la
parrie conrraél:ante, li elle ne rapporre un aél:e contraire ou
une contre~lertre. C'efi ainli que s'explique Mr. Cochin,
tom. S, pag. 330.
Quel trouble, quel défordre dans la fociété, s'il étoit
permis aux parries elles-mêmes de quereller de limulation
les aél:es aurheneiques qu'elles auroient paffé devant un Notaire! Quel ferait le défordre de ces Loix parriculieres que
la Loi générale protege! Si c'éraient la force & la violence
qui euffenr arraché l'obligation, il Y auroit un crime à punir,
une viél:ime à venger, le bien public à raffermir; mais il ne
s'agitde rien de pareil dans cette caufe.
La limulation ell: une efpece de délit qui ne peut être dé.
montré que par des préfomptions, des conjeél:ures, des indices capables de faire preuve: Dolum, dit la Loi 6, cod.
de dolo malo, ex indiCiis perJPicuis probari convenit. Il faut
obfè.rver, dit Pere71ius fur ce titre, que l'aRion de dol ne
compeu que quand la fraude efl évidente; il n'efl jamais préfumé; il doit être prouvé; il doit l'être par des indices induhitaDles.
Il faut donc pour prouver la limulation d'un aél:e, des
indices manifeHes. Que faur-il pour qu'un indice fait déciGE? Une conféquence néceffaire de l'indice iîu fait; il faut
que l'indice une fois établi, on fait au cas de conclure
qu'il efi impoffible que le fait argué ne [oit pas vrai; il faut
�DU
PALAIS
DIl
PROVIlNCIl;
Je
123
une induél:ion telle qu'elle foit indubitable, ut res aliter lzahere lion pojJit.
On ne peut prononcer fur le fort d'un aél:e accuré de firnu1ation, fans prononcer fur l'honneur de celui qui le préfente. On ne peut annuller l'aél:e, fans convaincre le créancier de furprife ou de fripponnerie. Sera-ce fur des conjectures trompeu[es qu'on ravira à un citoyen le bien le plus
jaloux?
Dans les affaires de cette ndture, l'âge & le caraél:ere
des parties font à confidérer; ils peuvent former des indices propres à établir ou à détruire le fait argué. Quelle
dl: donc la partie qui fe plaint de furprife ? C'efl: une femme
très éclairée, très-méfiante, alors âgée de 47 ans. De qui
s~en plaint. elle? D'une jeune fille mineure, fans expénence.
L'aél:e du 3 I Juillet 1776 fut recru à dix heures du matin;
les témoins font deux honnêtes Bourgeois. Si la DUe. Souliers eût été malade, elle ellt mandé le Notaire; elle n'eut
pas fait une courfe de trois quarts d'heure pour fe rendre
de fa mai[on, qui efl: fituée au fauxbourg Saint-Lazare, chez
un Notaire près le Palais. L'aél:e efl: drelfé; la DUe. Souliers le figne, paye le Notaire & fe relire. Deux jours après,
eUe entre chez les Dames Dominicaines, qui la trouverenc
fe portant bien, & jouilfant de toutes les facultés de fou
ame. Ces faits font conllatés par différens certificats.
Par Arrét du 20 Mai 1780, -rendu au rapport de Mr. le
Con[eiUer de Mons, la DUe. Souliers fut déboutée de [es
lemes de refcilion & des fes fins fublidiaires, avec dépeu~.
Ecriv'lnt Mes. Sauv'lire & Simeon fils.
�JOURNAL
ARR È T-
X VIII.
La novation n'efl pas opérée par un fecond ac1e paffi avec
l'héritier fur l'exécution cfun acte paffi avec le défunt.
P
Ar aél:e du '29 Décembrè 17 6 7, Jean - Jofeph Blanc
afferma de Mr. le Chevalier de Peirolles deux bafiides
pour le terme de fept années, moyennant le fermage convenu. Il décéda le 31 Mars 1769, après avoir inftikué pour
fon héritiere univerfelle Marie Beylieu fon époufe, à .la
charge d'inftituer fes enfans mâles qui fe trouveroient viyans lors de fon décès, de façon que les. biens reftans de
fa fucceffion fu{fent à cette époque partagés entr'eux par
égales ponions. Il permit à fon héritiere d'en vendre tracrativemenc & fans aucune formalité de juftice jufques au
concurrent de fes dettes, avec prohibition aux héritiers
qu'elle inftitueroit à fon décès, d'inquiéter les ftens ni les
.acquéreurs ; il la difpenfa de rendre aucun compte, & d'en
payer le reliquat.
Après la mon ~e Jean-Jofeph Blanc, fon époufe continua l'exploitation du bail jufqu'au terme fiipulé dans l'aél:e
de 1767, Etdnt en arriere des rentes du fermage, Mr. le
Chevalier de Peirolles leva des lettres de clameur, & fit
procéder à une faifte, donc les frais furent ablotés avec les
arrérages du fermage dans l'aél:e de compte arrêté du 24
Mai 1772. Par cet aél:e elle fe déclare débitrice de 992livo
en[emble des rentes à écheoir, & de tous les capitaux de
la ferme exprimés dans le bail de 17670 Etienne Beylieu
fon frere fe rendit camion. A l'époque' de la fin du bail,
Marie Beylieu fe trouva débitrice envers Mr. le Chevalier
de Peirolles de la fomme de 234') liv.; & ufant de la faculté qui lui éroit attribuée dans le teftament de fon mari,.
elle vendit à Etienne Rey, par aél:e du 23 Novembre 1774,
une maifon de l'hoirie au prix de 1200 liv. qu'elle indiqua
de payer à Mr. le Chevalier de Peirolles.
�'n u
PAL AIS
DE
PRO VEN C
I!:
'l'2~
Marie Beylieu ayant convolé à de [econdes nôces, dé(empara à fes deux enfans par anticiparion, les biens, droits
& aétions de l'hoirie de fon mari. En force de ce tirre,
les freres Blanc fe pourvurent contre Erienne Rey en caffation de l'aéte de vente du 2.3 Novembre 1774. Une Senrence des Officiers de Meirargues du 30 Oétobre 177) pronon~a cette caffation, [auf & réfervé à Rey de répéter de
Mr. le Ch<:valier de Peirolles les 1200 liv. du prix qu'il lui
avoit payé fur l'indication de Marie Beylieu. Mr. le Chevalier de Peirolles rembourfa les 1200 liv. à Rey, & [e
pourvut pardevant le Lieutenant des Sourn iffions au Siege
d'Aix le 2.) Janvier 1776, rant contre Marie Beylieu &
Etienne Beylieu [a caution [olidaire , que contre Jofeph &
Jean-Jofeph Blanc freres, en leur qualité d'héritiers de leur
pere; favoir, leur mere & fa caution pour [e voir condamner folidairement au paiement ou remplacement des
1200 liv., & les enfans pour voir dire qu'ils fouffriroient
[ur les biens de leur pere la commune exécution des 2S4)
liv. La veuve Beylieu & fon frere firent défaut, & les
Freres Blanc contefierent la commune exécution. Par Sentence du 4 Oél:obre 1779, elle fut ordonnée avec dépens.
Les Freres Blanc appellere·nt de cette Sentence pardevant
la Cour. On difoit pour eux, que la mort de léur pere &
leur féparation de la maifon maternelle avoient opéré le
réliliment du bail qu'il avoit [oufcrit par l'aél:e du 2.9 Décembre 1767; que les aél:es des 24- Mai 1772 & 23 Novembre 1774 avoient fait novarion au premier bail, & in.troduit un nouvel arrentement en faveur de Marie. Beylieu
& de [on frere , dont fes enfans & les biens de leer pere
.devoient être affranchis.
Les freres Blanc n'ont point participé à l'exploitation de
la ferme héréditaire; leur mere & fa caution [Ont perfon.nellement & exc1ufivement débiteurs des fermages. Le remariage de leur mere a opéré la déchéahce des libéralités
foncieres de fon mari en peine de l'injure faite à fes enfans. Après la mort du pere, Jean - Jofeph Blanc fon fils
cadet mineur rdb avec [a mere, & Jofeph l'ainé s'en [é...
�l'2.G
1 0 U RNA L
para; il envifagea dès-lors l'arrentement palfé à [on pere
comme ne le regardant pas; & Mr. le Chevalier de Peiralles ne le penfa pas aurrement, fans quoi il ne lui aurait·
pas permis d'aller prendre une mégerie ailleurs; il accepra
donc pour Fermiere Marie Beylieu ; l'aéte de compte arrêré
du 24 Mai 177'2. n'ell: pas équivoque, & il n'y fut plus
queHion des hoirs de Jean-Jofep.h Blanc fon mari; les quittances du paiement du fermage ne furent faites qu'au feul
nom de Marie Beylieu. Le bail de Jean-Jofeph Blanc avait·
tellement fini, qu'ayant lui-même exaél:ement payé tous les
fermages échus pendant fa vie, Mr. le Chevalier de Peiralles avait reconnu n'avoir plus d'autr.e tirre que les aétes
de 1772. & 1774, en verru de/quels il avoit -fait affigner
& condamner Marie Beylieu & fa caution au paiement des
1345 liv. dOM ils lui rell:oient débiteurs par la Sentence du
23 Août 177),
En droit, les engagemens du Fermier font tranfmiffibles
à fes héritiers, à la diffërence de la fociéré ,dont la morr d'un
Alfocié opere la réfolurion. Coquille fur la coutume de Nivernois obferve néanmoins que le Fermier n'ayant laiifé qu'une
veuve & de petirs-enfans, le locateur ne pouvait les con·traindre à l'entretenement du bail. Ici Mr. le Chevalier de
Peirolles .n'a pas voulu continuer le bail de 1767 tel qu'il
avoit été palfé; il a voulu en faire un objet perfonnel à
.Marie Beylieu fous le cautionnement de lOn frere par l'aéte
.de 1772, dans lequel il n'.ell: fait aucune mention des hoirs
de Jean-Jofeph Blanc, dont le bail fut intercepté par l'aéte
de 1772., par celui de 1774, & dans les pour[uites judi_
ciaires filr ,Iefquelles Mr. le Chevalier de Peirolles ne réclama
d:autres titres que les tirres nouveaux qui ont éteint l'an_
Cien.
L,'aéte de [772 fait intervenir 'Etienne Beylieu à la ferme
comme un nouveau débiteur à Mr. le Chevalier de Peiralles, qu'il n'eut pas été en droit d'exiger, s'il eût voulu
s'en tenir au bail de 1767; & d'après les principes qui
difpo[ent [ur la novation, l'inrenrent.Îon d'un nouveau débiteur opere l'extinétion de la premiere obligation. C'efi le
�1
nI! PROVENCE:
Ii7
fentiment de d'Argentré, de Domac, de FelCieres & de
Pothier.
On répondoit pour Mr. le Chevalier de Peirolles, qu'il
faut difringuer l'aéte de fociété, du contrat de louage. Suivant les Loix, la fociété efr diffoute par la mort d'un des
Affociés; mais le louage tranfmet les engage mens du locateyr & du locataire à leurs héritiers refpeétjfs; ils font obligés
en droit de le maintenir. Dans Je cas préfent, Je bail de
1767 a confervé fon exi!lence après la mort de Jean-Jofeph
Blanc preneur. Marie Beylieu fon héritiere s'efr volontairement liée à [on exécution; l'aéte de compte arrété de
1772, où l'on trouve le cautionnement folidaire d'Etienne
Beylieu, n'a pas plus opéré que l'aéte de quittance de
1774, une novation au bail de 1767'
Le droit qui compete à un créancier hypothécaire, e!l
indéfini fur tous les biens de fon débiteur: hypoteca non
dividitur; tota dl in toto_ & in fjuâlihet parte. Tel efr le privilege de l'hypotheque. A ce premier droit réel [e joint
celui du choix des biens que le créancier veut defriner 3fon paiement.
L'aéte du 24 Mai 1772 n'e!l que l'exécution de celui
de '1767; il contient Je compte des fermages promis
parle bail auquel il fe réfere indiviiiblement. Ce fecond
aél:e confirme Je premier, Join de Je détruire, & n'a pu
opérer d'autre effet que celui d'un titre nouveau, qui, fuivant la Loi Paulus refPondit 29, ff. de pignor. & hypot. &
la jurifprudence des Arréts , étoit indifpenfablement néceffaire pour lui acquérir hypotheque fur les biens propres de
l'héritiere, & la réunir à celle qu'il avoit déja par l'aéte de
1767 filr tous les .biens de fon mari. Il ne forme donc
pas novation: novatio dl prioris dehiti in aliam ohligationem
'DU
PALAIS
transfifio atfjue tranJlatio; hoc dl, cùm ex prœcedenti mufa
ita nova conJlituatur, ut prior perimatur. Telle e!l la définition que la Loi 1, if. de novat. nous donne de la novation. Il faut que par la feconde obligation', la premiere foit
anéantie; il faut de plus, dit la Loi 2, if. eod. que les parties aient eu l'intention de faire novation : fi hoc agatur ut
novemr ohligatio.
•
�Jou R N Ir. L
La novation e!l: un des moyens par lefquels les obllga':
tions fe détruifent ; elle eu affimiIée à la folution effeél:ive ;.
mais il ne' fulEt pas de paifer un fecond aél:e pou'r former
une novation; il faut que ce fecond aél:e renferme une nouvelle obligation dans laquelle on ait tranfmué la premiere.
Deux chofes font donc abfolument néceifaires pour opérer
une novation; rO. qu'il exi!l:e une feconde obligation fur le
même fait; '2.°. que les parties aient eu l'intention d'éteindre 'la premiere, & de la tranfmuer en la feconde.
L'aél:e de 177'2. ne renferme aucun accord nouveau, &
moins encore une dérogaçion au bail de 1767 qui en fut le
principe, & lui fervit de fondement, fuivant la regle de referemi ad re/atum. Le cautionnement d'Etienne Beylieu ,..
qui fut !l:ipulé en fupplément des premiers droits, ne peut
être conficléré que pour ce qu'il vaut, c'e!l:-à-dire, comme
une sÎlreté' de plus qu'il était permis à Mr. le Chevalier de
Peirolles de fe procure.r, en traitant fur la confirm.ation de
l'aéle de 1767 auquel le cautionnement fe rapporte.
Mr. le Chevalier de Peirolles n'a rien donné par l'aél:e
de 177'2. à la veuve Blanc ni à fa caution; il ne s'y dl: pas
obligé de les faire jouir de ce qu'il ne leur donnoit pas;
il n'y a âéterminé aucun temps ni aucun prix; tout s'y e!l:
rapporté au bail de 1767, tant pour la chofe & pour le
temps, que pour le prix. L'aél:e de 177'2. n'e!l: donc pas
un nouveau bail à ferme d'où l'on puiife induire l'anéantiifement du premier. C'ef!: un aél:e ampliatif & purement
exécutif du bail de 1767'
Par Arrêt· du '2..3 Mai 1780, au rapport de Mr. le Con[eiller de Sajm:Martin, la Sentence fut confirmée avec dépens. Ecrivant Mes. J. Bernard &
.
J'2.8
ARRÊT.
�D U
PAL AIS
D E
ARRÊT
PRO VEN C E.
1,29
XIX.
Les Juge-Confuls ne peuvent pas connottre d'une oDligation
pure & fimple qui ne dérive pas d'un fait de commerce.
OUIS Deluy prêta à Jofeph Caudiere la fomme de 670
liv.; il fut dit dans le billet fait à Cagnes, que Deluy
re'iut de~ effets en nantiiIement; il fut ajouté qu'arrivé à
Marfeille, il recevrait les 670 Iiv. en remettant les effets, &
qu'à défaut de paiement il ferait permis à Deluy de les vendre
au plus grand avantage de Jofeph Caudiere, de concert avec
Louis Caudiere fan frere, établi à Marfeille.
Deluy n'étant point payé, vendit les effets, & le 6 Décembre 1779 il préfenta une requête aux Juge-Confuls, dans laquelle
il expofa que les effets qu'il 'avait re'iu en nantilfement de
Jofeph Caudiere n'avaient pas fufi'i pour fan paiement; il demanda la condamnation de 260 liv. qui lui re!l:oient dues, &
par provilion la permiŒonde faire arrêter entre les mains de
Cuilin routes les fommes qu'il pourrair devoir à Caudiere ; il
demanda ,en mêC1Je temps Je rembourfement de 18 liv. que
Caudiere avait reçu d'un Patron pour [on compte, & de 24liv; qu'il avait payées à des auberges pour lui. L,e décret
rendu par les Juge-Confu1s fut conforme à fa d~mande.
Çaudiere préfenta une requête le 21 du même mois en
révocation de ce dé cre! , & déclina enfuite la ]uri(diél:ion.
Par Sentence du r3, il fut débouté du déclinarojre; Caudiere en appella pardevant la Cour; il préfenta une requête en
furféance qui lui fut accordée, & fur le fonds les partie~
furent renvoyées en jugement. Les Juge-Confuls_ ayar;Jt rendu
une Sentence de défaut (ur le principal, C<\udiere en déclara également allpel.
On difoit pour Caudiere, que l'on connaît les Loix ql,ll"
en fixant les bornes de la Jurifdiél:ian des Juge-Coofuls, on!:
~o>Jlu pr~venir les abus d'une ufurpation fUJ la ] uri(diél:iQQ
L
R
�j
u' Ii- N 11. 1.
univerfelle; le Tribunal Confulaire a des principes rigoureux;
,il fliit une procédure quelquefois auill violente que prompte;
le bien du commerce qui l'a autorifée, la jufiifie : mais c'eft
une raifon pour rte pas 'l'étendre a'u-delà des matieres de
commerce. Tous les citoyens ont des droits à profiter de
la procédure qu'on obferve dans les Tribunaux ordinaires,
& ceux-ci '11 -leur rola: font en droit de réclamer leurs jufticiables, d'après la maxime qui veut que les Juflices foient
patrimoniales· parmi nous.
,II réfulte de l'6rdonnance de I673 , que les Ju'ge~Confuls
ne peuvent devenir' compétens que par la nature au titre,
ou par celle de la matiere'. Ils [ont cômpéteds par la nature du titre', lotfqu'il s'agit d'une lettre de change. Tel eft
même leur privilege , que dans ce cas leur Jurifdiél:ion s'étend
[ur touS les citoyens, même [ur ceux qui ne [ont pas Négocians; .ils [ont compétens encore par la nature du titre,
lor[qu'il s'agit d'un billet de change; mais alors il faut que
ce billet ait été fait entre Marchands & Négocians. C'ea la
di[pofition éxprerre des art. 2 & 3 du tit. I2 de l'Ordonnance de I67~'
MaIS quànû on n'efi point porteuT d'un titre de cette nature, on Je peut connaître fi les Juge-Con[uls font compétens, qu'en appr Iondilfant l'objet de l'obligation.
Le billet dont 's'agit ne peut point être de la compétencè
des Juge-Con[uls; c'eil: une reconnoilfance réciproque. Caudiere reconnoit 'avoir 670 liv. à De1uy; celai-ci reconnoît
avoir réçu en nanti!fement divers efféts qui [ont détaillés;
c'efi un fimple prêt, ôu 'fi l'on veut; un prêt [ur gage. Peuton dire qu'une olfJ,ligation de cette n'ature [oit de la com~
pétence des ~ Jge-'Con[u'ls?
En 'bornab t la Juri(diaion Confulalre à la connoilfance de
la vente des objetS que l;acheteur eft ,pré[umé employer à
fan com'me'rte, l'Ordo'nnance a exclu tous les engagemens
entre Négocians dont la relation à leur commerce ne feroie
'pas prouvée. l''att'riliutibn aux Juge-Con'fu-ls eH un démembrement de la Jurj(diél:ion univetfetle : c,tefi une exception con'traire au arbit commun; exc'eption utile pour tout ce qai
13b
0
�~ 1 S D n PRO V 1J N C H,
I~ 1
,a rapport au cQlJ:lm~rçe, rnaj~ ql,l'il [,lUt refi,reil1gre dal1~ fes
vérita:91e~ pQ)"lle~.
'.,
DU
PAL
L'obligation de Caudiere a été coQtraété\: à Cagnes, lieu
de fon domicile; il doit donc être affigné pardevant les
Officiers de ce .lieu, l!lc ·les Juge-COQfuls n'ont pu être corn.,
péte!1s à raifon de la demande ql,le Deluy a formée contre:
lui.
.On répondoit pour Deluy, que Caud.iere étoit jufriciable
. des Juge-Confuls à raifon du domicile. Il efi natif de "Iar~
feille; il Y efi domicilié, quoiqu'il ait yne ha!]itation à Ca~
gnes; il paITe or.di.nairement à Marfeille uqe partie de l'année ~
il n'efi établi que depuis pell de ,temps à.Cagnes, ~ jl n'a point
fait la déclaration 8u'exige le Stjltllt, JorCqu'il efi allé s'y
établir. La demande que Deluy a formé.e COnJre Cal-\diere,
efi de la comp.étence liles ~uge~Confuls; la dette dérive d'une
obligation pa.ITée en,tre Négo,Çiëns, & ces forres d'obligations!ont toujours préfum.ées faites pour caufe de CQt1lmerce ~
d'ailleurs celle-.ci efi JJ.1ercanÜlle, puifqu'il étoit queHion d'Un
échang.e, d'une vente conditionnelle. ;rÇlutes les obligations
paITées parmi des Négocians font cle la compétence des
Juge-Confuls; elles font toujours préfu.mées faites pour caufe:
de marchandiles, .à moins qu'il n'y ait éJlon.çîation contraire:
dans l'aéte.
Mr. l'Avocat-Général de Magalon obferva que la Jurifdic~
tion .C.onfulqire n'efi qu'une JJ.lrjfdiét)on d'attrjblj:ripn; l'au~
tarité des luge.-Coufuls n'dl: qu'une exception; leur exifience
-n'efi qu'une ,clb-ogation à la regle générale, & c,erre ej(œp",
.tion, .cette .démg:a:rion .n'one lie.u que pour les a,Jf"ire§ relatives
au commerce. Tel el!: le vœu de la Loi qui a donné l'e1ii.(l:enc~
aux Tribunaux COlilfulaire.s" Pour que les Iuge-Confyls puif~
fent .connoÎtDe d'uo~ obl.igat.ion palfé.e parmi des Négo~
cians, il faut qll'on foit certain que ceJte obLigariol1 détiv~
d'un ,fait de commerce; ,ce n'ell: .que lo.rfqu'une cII,btigatiol\.
a eu pour p.riocipe uQ.pM"eil fait, que l'on pel,lt çtre fon.d~
à fe foufiraire à la Jurifdiaion ordinaire. çe n'eft que.
pour lors que l'on peut déroger à. la regle générale ~ !;'i:~
o écoit "utrement; .fi, çomrne le {lrétend Deluy) po.u.r
:R ..
·
�'I3i
' Jou RNA r.
s'adrefter aux Jllges ordinairess, il falloit que dans l'obHga.:o
tion il fût dit qu'elle n'a point été faite pour. caufe de mar.
chandife ; fi les luge-Confuls pouvoient connoître de toutes
les obligations où cetre énonciation ne feroit pas, les JugeConfuls deviendroient alors les, Juges ordinaires des Négocians, & ce ne feroit plus que par exception que les luges
ordinaires auroient quelque autorité. Ce feroit renverfer l'ordre des Jurifdiél:ions.
' •
Ainli, lorfque la caufe d'une obligation paffée parm ides
Négocians ef! inconnue, il faut fe pourvoir pardevant les
Juges ordinaires; il faut fe conformer à la Loi générale. Si
connue, & li l'obligation dérive d'un fait de
la caufe en
com merce, les Juge-Confuls doivent en connoître.
Dans le fait préfent, le principe de l'obligation n'ea
point connu; on voit feulement que Caudiere déclare avoir
reçu de Deluy la fomme de- 670 liv., & que ce dernier lui
a donné des planches, une charrette & un tombereau en
nantiffement; ce n'ea point-là un échange. II réfulte de
J'acl:e, que Caudiere promit de payer à Deluy les 670 liv.
lorfqu'il feroit à MarfeiIle; il ne lui permit de vendre les
effets qu'il lui remit, que dans le cas où cette fomme ne lui
feroit pas payée. On ne peut non plus regarder cette oblipas
gation comme une vente conditionnelle, puifqu'il n'y
même parlé du prix des effets remis'; elle doit donc être
envifagée comme un dépôt, ou un prêt fur gage, dont les
luges ordinaires étoienc feuls compérens. Mr. l'Avocat-GénéraI établit, d'après les mêmes principes, que les JugeConfuls ne pou voient connoître des deux autres chefs de demande.
Mr. l'Avocat-Général conclut à ce qu'il filt dit & ordonné
que l'appellation & ce dont étoit appel 'fu{fent mis au néant,
& par nouveau lugement, le décret & les Sentences des
Juge-Confuls fuffent déclarés nuls, incompétens', & comme
tels caffés, & les parties & matierë délaiffées à pourfuivre
ainli & pardevanc qui il appartenoit.
Par Arrêt du 30 Mai q80, prononcé par M. le Pre~
mier Préfident, les conC!ufiol1s furent fuivies, & Deluy
ea
ea
�DU
PAL AIS
D l!
PRO V l! N CI!;
133
condamné aux dépens. Plaidant Mes. Chery & Verdet
neveu.
ARRÊT
XX.
On peut répudier une fucctjJzon ,.tant qu'on ne l'a pas acceptù,
ou qu'on n'a pas fait des tiaes formels d'héritier.
La détention des effets héréditaires n'dl point un ohJlacle à la
répudiation, Ji l'on peut rapporter celte détention à tout autre
titre que celui d'héritier.
RE. Silvy-Jofeph-André. de Raoux Raoulfet, Comte
de Boulbon, fit fan teilament à Avignon le la Août
1761. Il légua à la Dlle. Julie de Fleury une penfion annuelle & viagere de ')00 liv., & inilirua Mre. Louis-Zacharie
de Raoulfet fon fils fon héritier univerfel. Après la mort du
Comte de Boulbon, nombre d'années s'écoulerent, fans que
la penfion léguée à la Dlle~ Fleury fût acquittée. Comme
elle fe trouvoit dans un Couvent en Normandie, elle la réclama de l'héritier; celui-ci l'invita à venir prendre dans fa
maifon C:l nourriture, fan logement &Jon entretien; elle s'y
rendit, & demeura quelques années- chez le Comte de
Boulbon; elle quitta dans la fuite, & le fit affigner pardevant la Cour en qualité de pauvre, en paiement de la penfion échue. Le Comte de Boulbon fe fit concéder aéle de
ce qu'il avait toujours abilenu de la fucceffion de fon pere.
On difoit pour la DUe. Fleury, que parmi nous, conformément à l'Edit du Prêteur, il efl: de regle que nul n'efl: héritier
qui ne veut; que tous les héritiers font volontaires; ce qui convient, tant aux enfans émancipés, ou non, qu'à tous autres
héritiers.& fuccelfeurs ah intdlat & tefl:amenraires; mais il faut
que l'héritier qui ne vel)t être héritier, le témoigne par une déclaration exprelfe; à défaut de déclaration, l'hérédité qui lui
efl: acquife dès le moment qu'elle lui efl: déférée par la regle
le mort faifit le 'Vif, repofe à pe~pétuité [ur fa tête. Il y a plus~
M
�, 134
' Jou
RNA I.'
& pour Jiju"Lpuiffe exercer la faculté -d'accepter ..a.lI de renoncer, il faut qu'il n'en foit point exclu par un aae con- .
traire; pom accepter, il faut qu'il n'aie pas renoncé; & pour
renoncer, il faut qu'il n'aie pa-s accepté. Ces regle? s'appliquent autant aux enfans qu'à tous autres héritiers. C'eH le
fentiment de Serres dans [es 1l1flitutes, pag. 306.
Il eH de principe non moins inconteHable que l'addition
d'hérédité renferme un .quaJi-contrat, par lequel l'béritier
eU affiljetti aux charges héréditaires. L'héritier fien & l'héritier étranger font irrévocablement liés & obligés perfon-nellement à Jes acquitter, en fqrce de la regle qui [emel efl
hœres, l1umquam definit ejJè hœres. Dornat , des fucceffions,
tit. l , fea. na. 10, feE!:. 6, n°. l , & tit. 3, feél:. 3; Furgole, tom. 3 , pag. 412. Cela eH fi vrai, que quoique J'héritier aie pris la qualité d'héritier par inventaire, s'il ne
conl!1e pas qu'li ait été re~u héritier bénéficiaire, & qu'il
aie fait procéder à l'inventaire, .remanet hœres purè,.fi de il1ventario legitimè fac70 non doceat, comme dit Faber, déf. 8
& 13, cod. de jure deliber.; Decormis tom. 2, col. 1437 ,
& Mr. de Bèzieux, pag. kf46 & 448 .
• Il eil: convenu que le Comte de Boulbon n'a jamais eu
recours à la voie du bénéfice d'inventaire; qu'héritier tefl:amentaite de ü>n pere., il n'a jamais répudié; il Il'a déclaré
s'abHenir de la fucceffion 'que .dans le cours de ce procès.
-Depuis 18 ans il jouit de la fucceffion paternelle, fous
la 'foi du teHament qui l'inftirue heFitier.. Il en exerce tous
les atl:es quelconques; il en paffede .J.eJmohilier.&.ies iillmeu..ble·s ;.11 a vendu, 1ellé ;tbàiHbIQ-fèrme comme'vrai p.ropriéNlite; il'eU:~aonc 1ié '& -eng~-8 au' paiement Ide tOures les
dettes d.e Jeette fllccemon par 1a! c:on'fulion ,.<:Phérédttés dont
il '3 vOlllll courir' les rifqlle-s. ' '
" .
L'héritier qui 'réunit rom -à la fois la -qualité de er6ancier
& celle d'ltér-itier, 'fie ,reut oppofer qu'il a poffédé &' agi
-comme créancier, & flO.fl-E'omme!hù,tt-ier, auJC alltreS ëréan~
cier,s de l"hoirie & aux q-égaraires .qui l~attaql!lent com;me Jhé~
ritier, & îlne peut lellroplWfeI'lme dédàration cf,âb,Hetuion
-ou de (éfludiation ,de -çette hérédité, dans la 'pGffeJli0n dt:
�i: 3)
laquelle il s'ell: maintenu. La Loi final. §. in computatione,
Cod. de jure deliher. dit que rien ne pouvoit le difpenfer,
s'il vouloit abdiquer la qualité d'héritier, & fe porrer pour
créancier, de répudier ou de prendre la voie du bénéfice
d'inventaire, pour former enfuite fa demande & fe fdire
colloquer. Suivant ce §. l'héritier peut bien, fans faire aél:e
d'héritier, retenir en fon pouvoir rout ce qu'il a avancé
après la mort du défunt à Ia..décharge de fon hoirie. Mais.
à l'égard des droits & aél:ions qui pouvoient lui compéter
contre le défunt, il efl: à J'inflar des autres créanciers,
obligé de rapporter un titre d'adjudication. C'efl: auffi ce
que dit Duperier, tom. l , liv. 1., quo 4; Furgole, des
Tefl:amens, rom. 3, pag. 480, & l'-art. 317 de la coutume
de Paris. La DlIe. de Fleury ajouroit que le Comte de
Boulbon ne pouvoit oppofer qu'il étoit fubfl:itué & créancier dans l'hoirie de fon pere.
_ L'héritier fidéicommiifaire efl: tenu, ainli que les légataires, à- former demande du fidéicommis, & à en pOUf",
fuivre l'ouverture & la liquidation, avant d'centrer -en poffef...
fion des biens fubfl:itués; c'efl: le fentiment de Fiurgole,
ch. 8 ,feél:. l , n. 16; Duperier, 'tOm. l , liv. 4, qu. 8.
Ricard, ch. 6, feél:. 6, n. 786; Decormis, t0m. 2., col.
l S7 , & les Aél:es Ide· ~otoriété de ce Parlement.'.
On répondoit pour le Comte de Boulbon, que la diffé.Tence établie pat' 'Ie droit entre ies .héritiers tiens r& les héritiers étrangers, fublifl:e encore. Cette dillinél:ion efl: rappellee par' Me. Julien dans fes Colle6l:ions manufi::rites, va.
hœres , fol. 2 , lett. A, adire 4 extrane.orum , fe immifcere
fuorum., rl!'pudiare extraneomm, fi .tibftinere fuorum. Ce fut
d'après ce pri'ncipe & '{ur. cette difl:inél:ion, que !fut rendu
au rap.port de Mr. de.iBal1on l'Arrêt. .du ~1 A\~il 1776, en
faveur du Marquis. de CaHelane Maj.afl:res, contre Me.
Garron , Avocat de la ville de Riez. Ce dernier étoit créancier d'Henri de Caftelane, aïeul du Marquis, qu'il .pretell-doit 'être héritier de fan aïeul. Le Marquis de Caflelane
fe fit .concéder aél:e dans fes conc1ufiens de 'ce qti?iL s l ab1tenait & s'étoit abfl:enu de 1a fucceffian d'Henri de CafD li'
:PA L A 'I S·
DE
P R () V Il NeE.
�136
TOURNAI.
cela ne ,. dans laqueIle il ne s'éroit jamais immifcé. Jit ob""
fervoit qu'en fa qualité d'héritier fien ou de defcendant du
débiteur de Me. Garron, il n'avoit pas befoin de répudier
la fucceffion, qu'il lui fuffifoit de ne s'y être jamais immifcé.
Le Marquis de Call:elane fue mis hors de Cour & de procès
au bénéfice de.fa déc!ara:tion.
,
'
Il ne fuffit pas que l'aéte dont on prend droit puur' placer
fur un citoyen la quaHté dlhéritier, puiife être indicatif
de l'intention d'accepter; _il faut de plus qu'il ne puiffe fe
rapporter qu'à cette intention, quod fieri IIOfl poifit citra jus
(; flomerz luuedis. 'C'ell:' ainfi que s'expliquent Decormis ,
tom. 2, col. 160; Lebrun, des SucéeffiGns ~ liv. 3, ch. 8 ,
feét. 2, n 9 • 7 ; Duperier, liv. l ,.qu. 7, & Furgole, rom. 3 ,
pag. 438 & fuiv.
- Quand l'acceptation n'efl point formelle, il faut un aéte
précis, non équivoque, qui prouve l'intention d'être héritier; & qui ,ne puiffe pas s'appliquer à tour' autre principe.
L'11éritier, foit ah illteJlat, fOÎt teHamenraire, ayant le' dro~t
~e rapporter la détention des effets' 'héréditaires à toùt autre
titre, à tl?ute' autre intention que ceIle de vouloir être héritier, efl' toujours le maître de dire qu'il ne veu.t pas l'être,
parce.:que tom ;poffeffeur quelconque & en route matiere a
confl:amment le' droit de 'référer fa poifeffion au tirre le plus
~. '
fruétueux: ;> , ~ .'
- On faifoit enfuite vàloir tous les' titres ,'pour prouver
que le Cointe de Boulbon ne poffédoir. rien de fon pere,
& que' hi fucceffion qu'il avoit recueillie,' fe référoit 11"' fes
'aïeux & à,fa. mere.. Or peu,;--on pen[er que' dans l'état· d'une
héréditédélah'rée,.notoïrein.el1t onéreufe; le Comre de Boulbofl
ait voulu fe"'porter péur héritier'de fon' pe're, & joindre
jlu .facrifice de. fes cré:rnces, l'obligation de payer c.eIles rdu
tiers,'& d'englouti,r ainfi. lés; dëbris deS .fuh!1:icutions auxquelles "il étoit appellé?" C'ef:l: l'oJjfervation que fait MI'. le
.Pré6dent Faber, Cod. de l'ep'ud. vel ahjhnelld. hœred. déf 3.
Tous les Auteurs' p.rdpofenr ,la quefiion dellfa:voi.r li le
.créancier domefiique', l'.enfant hénitier ·dè la, mere -:.derileu.rant en p.offeffian des biens piuernels, fournis où paf exprès:,
.
ou
�DU
PA.LAIS
DE
137
PROVENCE:
ou méme par hypotheque générale, à la reHitution de cette
dot, fait ou non acre d'héritier. JI en ell: peu qui ne difent que la nature & la faveur de cette créance mettent
l'enfant ou le defcendanr en droit de retenir les biens jure
pignoris , & que dans ce cas, on ne peut pas préfumer
qu'il ait voulu faire acre d'héritier ,. parce qu'en tolite màtiere ,il eH de principe prédominant que le po/fetreur qlù
fe trouve avoir deux titres fur fa tête, peut toujours rapporter fa potreffion à celui des deux titres qui lui dl: le plus
utile ou le moins onéreux; il conferve cette liberté précieufe , tant qu'il n'a pas décliné pofitivemenr le ritre auquel
il encéndoit fe référer. Cette quefijon efl: traitée, difcutée ,
décidée fur cette bafe par Barri dans fon Traité des Succeffions, liv. I l , tit. 3, n. 9, & Furgole_ dans fon Traité
des Tefl:amens , tom. 3 , ch. 10, fecr. l, n. 106.
Par Arrêt du ') Juin 1780, au rapport de Ml'. le Con.."
féiller de Ballon ,'la Dile. Fleury fut déboutée de fa demande
avec dépens, au bénéfice de l'acre que s'étoit fait concé..:.
der le fieur Comte de Boulbon. E.crivant Mes. Pa[calis &
Gaffier•
•
ARRÊT
XXI.
Peut-on- Je faire rtflituer envers .la vente d'un Office?
AR convenrion privée du 10 Ocrobre 1776, Me. PierreJacques Chantre vendit à Me. Noel-François Rabaud,
Avocat en la Cour, fan Oflice de· Confeiller du ROI JlIge~
Garde en la Monnaie d'Aix, pour le ptix de l S000 liv. relativemenr Il l'évaluation que Me. Chantre en avoit faite
le 27 Décembre 1771 par ordre du Roi.
Dans le mois de Février 1777 ,_ le Diretl:euf- de la
Monnaie fut informé qu'on avait procédé à la liquidation
des Offices de toures les Monnaies. Me. Chantre recut un
modele de quittance de financ.e 1 daté de 1776 ,. ave~ reI-
P
s.
�DU
PA.LAIS
DE
137
PROVENCE:
ou méme par hypotheque générale, à la reHitution de cette
dot, fait ou non acre d'héritier. JI en ell: peu qui ne difent que la nature & la faveur de cette créance mettent
l'enfant ou le defcendanr en droit de retenir les biens jure
pignoris , & que dans ce cas, on ne peut pas préfumer
qu'il ait voulu faire acre d'héritier ,. parce qu'en tolite màtiere ,il eH de principe prédominant que le po/fetreur qlù
fe trouve avoir deux titres fur fa tête, peut toujours rapporter fa potreffion à celui des deux titres qui lui dl: le plus
utile ou le moins onéreux; il conferve cette liberté précieufe , tant qu'il n'a pas décliné pofitivemenr le ritre auquel
il encéndoit fe référer. Cette quefijon efl: traitée, difcutée ,
décidée fur cette bafe par Barri dans fon Traité des Succeffions, liv. I l , tit. 3, n. 9, & Furgole_ dans fon Traité
des Tefl:amens , tom. 3 , ch. 10, fecr. l, n. 106.
Par Arrêt du ') Juin 1780, au rapport de Ml'. le Con.."
féiller de Ballon ,'la Dile. Fleury fut déboutée de fa demande
avec dépens, au bénéfice de l'acre que s'étoit fait concé..:.
der le fieur Comte de Boulbon. E.crivant Mes. Pa[calis &
Gaffier•
•
ARRÊT
XXI.
Peut-on- Je faire rtflituer envers .la vente d'un Office?
AR convenrion privée du 10 Ocrobre 1776, Me. PierreJacques Chantre vendit à Me. Noel-François Rabaud,
Avocat en la Cour, fan Oflice de· Confeiller du ROI JlIge~
Garde en la Monnaie d'Aix, pour le ptix de l S000 liv. relativemenr Il l'évaluation que Me. Chantre en avoit faite
le 27 Décembre 1771 par ordre du Roi.
Dans le mois de Février 1777 ,_ le Diretl:euf- de la
Monnaie fut informé qu'on avait procédé à la liquidation
des Offices de toures les Monnaies. Me. Chantre recut un
modele de quittance de financ.e 1 daté de 1776 ,. ave~ reI-
P
s.
�'138
' -.
1~
'10
U RNA 1.
pace du îour & du mols en blanc, par laquelle il était dit
qu'au moyen de la réduél:ion des gages, la finance était
réduite, à 5000 liv. & le centieme .denier à 50 liv.
Me. Chantré' n'eut pas ,plutôt reçu [on modele de quittance, qu'il la éOJjJmùJniqua à Me. Rabaud pere, qui avait
différé d~ Elire loe~evoir fon fils, parce 'qu'il n'avait pas
"Hei nt l'tige requis. pdor obtenir des provilions.
Le 6 Mars 1778, requête de Me. Rabaud en entérinement des INHes- royaux de refiitution envers la vente de
J'Office, & en réintégration dans la propriété des capitaux
défempâré's à compte du 'prix.
,
- Peu· '<l.vant le jugement, 'Me. Robaud prit des, fins [ublilfiaires ,J& -il comîllJt à Ce que le prix de.I'Offit:<! porré à
l SOOO liv. dans la' convention, fût réduit à 5000 liv. conformément à' la fixation ou liquidation faite par' le Roi avant
la vente " avec re,fiitu~i~n du furexigé.
'Par Sentence du il. Janvier 1779, Me. Robaud fut débouté de {es fins principales en reHitution, de Ces fins fub1idiaires en quanti mirlOris, avec dépens. Appel pardevane
la Cour.
On difoit pour Me. Rabaud, que Me. Chantre lui avoie
vendu Je. 10 Oél:obre 1776 au prix de 15000 liv. un Office
dont la valeur érait fixée à 5000 liv. par Edit du premier
Janvier 1772, &,qui ne pouvoit pas être vendu au delà,
fuivant l'art. 16 de l'Edit de 1771. La convention & l'aél:e
de vente ne pouvoient dlilI1C être entretenus.
Il érait convenu qu'en exécution de l'Edit de 177 r, qui
donnoit· lix mois pour raut délai aux titulaires d'Offices
pour envoyer -à M. le C0ntrôlelir-Général leurs déclarations
é-valuâtîves ,'MeldChanr-re ne fit & n'epl/oya là fienne que
le 27 Décembre' It77I. 11' éroit prouvé-& convenu par
Me. Chantr~, que la or(!{fe des rôles ou l'état général de
tous les. Offices déclarés ou évalués da,ns le' Royaume ne
pouvoitWêire"':[llit que long temps après, pui[que le Souverain re'Mvoya la p(!rceptioFl du centieme denier au mois de
Novembre 177'-." C'eH précifémem. à une époque où
toute les- déclarations évaloatives des Offices du Royaume
�DU
PAtAIS
DEr PROVENCE.,
Îj9
auxquels l'Edit de 177 l était applicable, n'étalenl point
encore paf\'enus à M. le Contrôleur - Général, & à l'éPb-'
que du premier Janvier 117'1., que le Roi eut des vues
particulieres fur les divers Hôtels des Mon noies- & les
Offices qui y écoient attachés.
Suivant l'Edit du mois de Février 177I~' les intérêts du
montant de la liquidation qui, devoit êrre faite pour fervir
de regle au rembourfernent des Oflîciers fupprimés , étaient
fixés au cinq pour cent. Il eH donc vrai qu'à compter de
.Ia même époque , les gages des Officiers de! Monnoies
confervés furent fixés au cinq pour cent de leur finanee
elfeél:ive; il eH donc vrai que la liquidation qui devoit êtrè!
faite tant polir ceux-là que pour ceéx-ci, était cenfée eon-;
{ommée depuis le premier Janvier 177'1.. Comment en
douter, dès que les uns & les autres ne reçurent plus ni
intérêts ni gages ju{qu'à la confommation des liquidations,
& que quoique ces liquidations n'aient été faites que long'
temps après, les Officiers fupprimés & les Officiers, con-'
fervés n'oDt reçu leur-s intérêts ou leurs gages qué {ur le'
pied de ces liquidations, à compter du premier Janvier
In'1.?
Quel fut l'objet de la liqu.idation qui devoit être faite
{ur les quittances de -finances des Officièrs {upprimés?
Elle n'en eut point d'autre' que de Ilquioer leur financé
eifetl:ive , & de les rembourfer {ur le pied de cette finance,
malgré la déclaration évaluative qu'ils avbient faire de lems
Offices en 1771. Le fait eH certain; puifque', de l'aveu de
Me. Chantre, ces Officiers n'ont été rembourfés que du
montant de leur finance elfeél:ive. Quel fut. l'obiet de la
liquidation qui devoit être faire {ur res quittances- de finance
des Officiers confervés? Il femble d'abord que le Roi 'ne
voulut que diminuer leurs gages, en les réduifant au cinq
pour cent de leur finance eifeél:ive. Mais il n'en eH pas
moins vrai qu'il voulut en même temps {ubHiruer la valeur
de la finance effeél:ive, à la finance évaluative, qu'il n'avoit
point voulu adopter. La preuve de {on intention eft bien
formellement conlignée dans le ré{ultat de cetre même liqui-,
S2,
�I~
JOVRN~~
dfltion clore le 3 Septembre 1776 , puirqu'il confiàte ID. que
les gages font réduits, à compeer du premier Janvier 177'1.,
au cinq pour cent de la finance; '1.°. que la finance de l'Office de Me. Chancre ell: fixée, à compeer du premier Janvier 1772.,·à )000 liv. ; 3°. qUil le cencieme denier dû par
Me. Chancre n'écoie que de ) 0 liv. à compter du premier
Janvier 177'1..
.
II efi donc prouvé & démontré que l'Office de Me.
ç~ancre étoit invariablement fixé à ) 000 liv. à compter du
premier Janvier 177'1., par l'effee de l'Edit & de l'opération de finance exécutiye & cIofe le 3 Sèpeembre 1776,
19rfqu'il le vencjit, par convention du 10 Oél:obre même
'Innée, à Me. Robaud fur le pied d'une évaluation que le
Roi avoie formellement ,rejeccée. II efi donc vrai que cecce
convention & l'aél:e qui lui donne le' caraél:ere de publ~cité
font nuls ~ 1°. parce qu'ils font contraires à l'Edie de 1771,
qui prohibê de vendre les Offices au delà de la valeur qui
çorrefpond au cemieme denier; '1.°. parce qu'ils renferment
en foi la vente d'une cP0fe qui n'avoie plus, aux deux eiers
- p.rès, cette' valeur réelle, fixe & invariable que le vendeur
y a expreffément donnée.
De l'aveu de Me. Chantre, la nouvelle évaluation du 31
Décemb~e 1777 a fixé à toujours la valeur que fon Office
pourrait avoir dans le commerce, à )000 liv:, & a conféquemment confiitué Me. Robaud en perte de 10000 liv.
qu'il en a payées en fus, foit dans le cas de fuppreffion ,
foit dans celui de vente. Or cette nouvelle évaluation dl:
un fait qui lui eU: perfonnel. Il a donc lui - même ;anéanti
aux deux tiers la valeul intrinfeque de la chofe velidue. La
convention & l'aél:e de vente doivent donc être rémiés.
Qu'ont & que peuvent avoir de commun les augmentations de profits avec le prix inrrinfeque de l'Office? Les
augmentations de profits peuvent bien balancer la diminution des gages; mais ils n'entreront jamais en confidération
pour fixer le prix de l'Office. En fuppofant, ce qui n'eil:
point impoffible, que parmi les Officiers de la Monnoie il
y en ait un qui foit titulaire d'un Office acquis par [es peres,
�D U
PAL AIS
D:Il
PRO V B Nell;
I,P
au prix de la finance effeé1:ive, ne jouit-il pas de l'augmentation des profits, fans avoir rien compté de plus? Pourquoi faudroit-il donc qu'en exeniant le même Office, Me.
Robaud fils payât 10000 lïv. de plus pour jouir de ces
profits?
Sur les fins fubfidiaires, on obfervoit que fi la Cour ne
trouvoit pas à propos d'annuller la convention & le contrat,
elle ne pouvoit fe difpenfer au moins d'accorder à Me. Rabaud un des deux dédomma"gemens qu'il a fucceffivement
demandés. Il ne peut pas être jufl:e en effet que celui-ci
fupporte l'effet d'une opération de finance, qui depuis le 1
Janvier 1772 avait frappé fur la tête de Me. Chantre. La
jufl:ice de ces fins porte encore fpécialement fur ce que Me.
Chantre a laiffé ignorer à Me. Robaud, 101"s de la convention & lors de l'aél:e, les difpofitions de l'Edit de 1772,
l'opération de finance qui avait été commencée en exécution de cet Edit, le réfultat de cette opération configné
dans le modele de quittance qu'il avait reçu. Il y a un certain dol appellé bonus dolus, qui ef!: toléré dans les contrats
de vente; mais la réticence par laquelle on laiffe ignorer
un fait décifif qui a diminué aux deux tiers la fubf!:ance de
la chore vendue, n)efl: fûremenc pas de cette c1affe , même
10rfqu'il s'agit d'Offices.
Me. Chantre ayanc expreffément déclaré à Me. Rabaud
'<Iue l'Office qu'il-lui vendait, avait une valeur évaluative de
isooo 1iv., en vertu de l'Edit de 1771, a induit Me. Rabaud
à efpérer qu'il retireroit le même prix de fan Office, fait que
le Roi le fupprimât , foit qu'il fe déterminât à le vendre. Cene
déclaration n'étant rien moins que vraie le 10 Oélobre 1776,
époque de la convention de vente, & ayant induit Me. Rohaud en erreur, donne néceffairemenc lieu à un quanti minoris. Le vendeur efl: toujours au moins tenu de fan propre
fait, fur-tout quand il peut être affimilé à un piege tendu.
On répondait pour Me. Chancre, qu'il ef!: de regle qu'en
rnatiere de vente d'Offices, on n'admet point de ref!:itution
pour caufe de lé fion. Le mineur lui-même ell: foumis à cet~e.
•
�142.
.
•
Jou
RNA: L
-.
.
regle; on pellt VOlr.Comment elle fut difcutée lors de l'Arrét
du .2-3 Avril 171 z, rapporté par Bonnet, let!. M, pag. 270,'
& ce qu'en ont dit Loifeau en fon Traité des Offices, liv.
3, chap. 2., nO. 33, & Mr. Talon dans le Journal des Audiences, liv. l , chap. 89.
II n'en efl: pas des Offices comme des autres eJfets commer9aqles qu'il eH facile d'apprécier. Les Offices n'one pas
un prix certain & déterminé; les honneurs, l'éclat, la di- \
gnité qui leur font attachés, l'affeél:ion des acheteurs, les
difpolirions & les talens qu'ils apportent dans leur exercice,
les rendent plus ou moins eUimables. On les affimile aux
pierres précieufes, dont le véritable prix conliHe bien plus
dans l'opinion & dans le cas que les acheteurs en font, que
dans leur objet matériel.
Un effet quelconque peut contenir des taches ou des défauts occultes; mais dans un Office rien n'dl: caché, parce
que tout efr de notoriété. II n'eU pas poffible que le vendeur diffimule rien à l'acheteur, parce que l'acheteur a la'
liberté de s'informer des qualités de l'Office, en remontant
à l'origine des titres de fa création, & en fuivant l'ordre périodique des changemen~ que la fuite des temps peut avoir
amenés. 'Ces époques, ces accidens ont toujours pour bafe
des aél:es du pouvoir légiflatif ..le la volonté du Souverain,
revêtus de l'authenticité la plus légale ~ notoires au moins
dans le reffort & l'arrondiffemenr attachés à l'Office; il
n'eU jamais à préfumer qu'un acheteur concllle pareil marché, fans avoir été préalablement à la fource des inUruél:ions
& des preuves.
Delà vi nt que l'aél:ion réfultante des vic('s rédhibitoires
n'efr point" admife envers la vente d'un Office. La vente
d'un Office eU irrévocable, li l'Office fubfil!:e , li le vendeur
en 'el!: propriétaire, s'il n'el!: point hypothéqué. Hors de là
le vendeur n'efrfoumis à aucune efpece de déclaration; l'acheteur doit vérifier tous les titres, prendre toutes les mefures
que fon intérêt peut exiger. C'eU d'après ces principes g.ue
fut rendu l'Arrêt rapporté par Bonif:lce, tom.
liv. 4,
:l.,
�DU
PALAIS
DB
P"ROVllNCIl.
143
1, chap. n, & qui jugea que le endeur d'un Office
chargé d'une taxe faite par Edit du Roi, n'dl: point tenu
de la payer, quoiqu'il ne l'ait point déclarée à l'acheteur.
Chacun fait que Loyfeau avoit con<;u, fur la quenion concernant la fuppreffion des Offices, une opinion bien étrange,
& que les meilleurs Auteurs & les Arrêts l'ont condamnée.
Il a été tane de fois jugé que la fuppreffion furvenue après
la vente étoit à la charge & au péril de l'acheteur, qu'aujourd'hui on ne dillingue plus fi le vendeur a pu favoir ou
s'il a ignoré que cerre fuppreffion dût arriver. Lacombe,
va. Vente, feél:. '\ , art. 19; Denifart, va. Office, na. 43 ;
Brillon, va. Office, n. 10); Lapeirere, lett. 0, n. 17;
Bafnage , coutume de Normandie; Catelan, liv. )' ch. 4,
Le moyen tiré du dol ou de la réticence frauduleufe ne
feroit plus une bafe de réfiliment de la vente. Comment
en effet prouver que le vendeur a eu à cet égard une notice
fpéciale & formelle? Toutes celles qu'il peut fe procurer,
fone fondées fur des renfeignemens qu'il n'dl: pas plus difficile à l'acheteur qu'à lui d'acquérir.
Me. Robaud eil: non recevable à fe plaindre d'une prétendue léfion qui n'eil: jamais un moyen admiffihle en matiere de venee d'Office : il eil: non recevable à fe plaindre
d'une réticence qui en fait n'eil: qu'une fuppofition, puifqu'il ne lui dl: rien arrivé qui ne lui ait été annoncé à
lepoque de la vente par Me. Chantre; il dl: encore non
recevable, en ce qu'il a volontairement exécuté l'aél:e de
vente, même après que la liquidation de la finance eftective lui fut dénoncée , & en recevant les émolumens de
l'Office fuivant les diverfes quittances qu'il a expédiées après
l'époque du mois de Février 1777. Me. Robaud eil: epcore
mal fondé.
L'aél:e de vente ne parle de la finance ni de près ni de
loin; il n'y eil: fait mention que de l'Office & de fon évaluation. Or un Office financé à 1 )000 liv. & un Office évalué
à 1 )000 liv. font deux objets bien dilférens, puifque la
finance n'eil: qu'un démembrement, une portion de l'Office,
tit.
�Ï44
Jou RNA L
_
& qu'au contraire l'évaluation comprend la totalité de TOf.
fice, c'ef!:-à-dire, non feulement la finance, quel-le qu'en
foit la valeur, mais encore tous les émolumens cafuels-,
l'honorifique, les privileges & cette maffe d'attributs indépendans de la finance, & qui vaut quatre fois plus que la
financ:e. C'eil: donc l'évaluation qui forme la mete & le
prix de la vente, & non fimplement la finance. Obfervons
même que l'évaluation doit tellement être di!l:inguée de la
firnple finance, & qu'en vendant fur le pied de l'évaluation
on entend fi peu vendre fur le pied de la finance, que
l'évaluation offre l'idée & les propriétés d'un prix e!l:imatif
& arbitraire; ce qui ne peut s'adapter à la {impie finance
qui eft fixe', déterminée, & qui n'eil: pas fufcep-tible d'une
eftimation incertaine.
Le Roi, par fon Edit du mo,is de Février 1771, a voulli
que chaque propriétaire fît entre les mains de M. le Contrôleur-Générai l'évaluation de fan Office, c'eH-à-dire, non
de la finance féparée, mais de l'Office en total; Sa Majeflé
a, laiffé cette faculté au,x propriétaires, parce qu'elle ne peut
pas connoître la valeur intrinfeque de chaque Office, laquelle
dépend de la quotité de fes émolumens-, de la fomme de
fes attributs. La valeur des finances des Offices ef!: fixe, le
Roi les connoît: s'il, avait donc entendu, n'exiger d'autre
évaluation que celle de la finance, il n'aurait pas voulu s'en
rapporter à la difcrétion des Officiers; il leur auroit 'enjoint
de' repréfènter leurs quittances de finance, & on auroit
fait l'évaluation- fur le pied de ce,s mêmes quittances. L'arbitraire eut été exclu de pareille évaluation; mais J'intention
du Roi tendait à s'affurer, une connoiffance exaél:e de la valeur totale des Office-s, pour en exiger un ceoticme denies,
'proportionné.
'
C'eil:, s'abufer étrangement, que d'induire, foit de ces mots;
finance & prix, mentionnés à l'arr. t de J?Edit" foit de la
promeffe de rembourfer le montant de l'évaluation en cas
de fuppreffion il:ipulée dans l'art. 17, que le mot évaluation
<mporte l'idée d\me finarn:e effèébve. Ce ferait raifonner
c?nt[~
�DU
Il ALAIS
DI!
'I4~ ~
PROVENCE.
contre le fens & l'efprit de l'Edit, que de prétendre que
l'évaluation opere finance. Pour prouver que l'évaluation totale de l'Office déGgné par ces mots, finance & prix, n'a jamais, dans l'efprit de l'Edit, opéré établiffemene d'une finance effeaive, il n'y a qu'à réfléchir & voir ce qui en ré,
fuite, quane aux gages. On fait que les gages payés par le
Roi aux propriétaires d'Offices, fane communémen~ Je pro_
duit de la finance effeél:ive. S'il fallait conclure que tel Office,
done la finance effeél:ive n'étoit que dl; telle fomme, s'e(l:
accrû dans le moment de l'évaluation, & s'ell: porré à une
fomme plus forte, il faudrait, par égalité de rai fan , attri_
buer le même acçroiffement aux g~ges qqi en font le pro_
duit
P~r l'art. 16 de l'Edit du mois de Février, Sa Majell:~
veut que tous les gages excédans le denier vingt dont jouir~
fent les Officiers des Monnoies , foient & demeurent ré_
duits fur le pied du cinq pour cent de leur finançe eifeél:ive.
C'ell: pour opérer cette réduél:ion du taux des gages, cette
fixation au cinq pour cent, que le Roi veut en conféquence
que tous les Officiers des Monnaies, même ceux dont lel'
gages feroient au-deffous du denier vingt, envoyent à M.
le Contrôleur-Général leurs qqittances de finance, pour, fUr
l'état qu'il en rapportera au Confeil, la réduél:ion des gages
être faite conformément à ce que deffus. La fixation deji
gages au cin_q pour cent exigeait une nOllvelle liquidation i
jl falloit par conféql,lent la repréfencation des quittançes de
finance. Mais il ell: cerrain que la réduél:ion ne tombe que
fur les gages, &. ~l'el1e n'incéreffe pas même la fini!nçe
effeél:ive qui rell:e intaél:e fur le pied des quittances.
Or, cette réduél:ion des gages ne fauroit avoir l'effet de
. détruire les évaluations couchées dans les états en cxécue
rion de l'Edit de 177 l, Comme dans le principe les évaluations des Offices n'ont rien eu de commun aveç les finances effeél:ives, ni avec les gages qui en dépendent, le Roi
a pu établir un Réglemenr particulier fur ces gages, fans
coucher, fans porrer atteinte aux évaluations. Il a pris dans
l'Offiçe] ~ C:Q a féparé cette: finance e:ffeél:ive qui en ell: 1I1l1:l
T
�l~
,
JOURNXE
portion; il en a réglé, limité les gages; comme il aurait
pu en diftraire les émolumens, le droit de logement, l'ho·
110dfique, pour en former la matiere d'un Rég'lemel1t, d'une
réduél:ion particuliere. Mais les évaluations des Offices pris
dans leur totalité, ont toujours [ubfifté telles qu'elles avoient
été admifes & couchées fur les états, en exécution de l'Edit
de I n ! .
L'Edit de 1772 n'attaque pas la finance & prix des Offices
des Monnoies; elle n'attaque que les gages provenanrs de
la finance effeél:ive. Par l'~rt. 17 de l'Edit de 1771, qui ordonne les évaluations, le Roi ne garanrit & ne promet de
rembomler, en cas de [uppreffion, que celles qui feront couchées fur fes états. Et en effet, ceux qui n'ont pas porcé fur
les états du Roi leurs évaluations, n'ont pas payé le centieme denier à concurrence de la valeur eHimative de leurs
Offices. Pourquoi donc le Roi 'leur auroit-il garanti cette
<valeur totale de l'Office qu'il ne connoiffoit pas, & à raifon
de laquelle il n'avait point encore fubi d'engagement? Me.
Robaud erre donc fenfiblement, lorfqu'il avance que l'Edit
de 1772 a détruit les évaluations & qu'il a réduit la finance.
Sur les Em fuhfidiaires de Me. Robaud, on répondait qu'en
matiere d'Office, la léfion n'eft point reçue, parce qu'elle
n'eft pas matiere à refcifion. En fait, la prétendue diminution dont Me. Robaud excipe, lui étoit connue à l'épol:J.ue de
la vente,-foit parce qu'elle procédait dans [on [yftême d'un
Edit qui lui était légalement connu, & qu'il a pu & dû con-naître effeél:ivement, foit parce qu'elle lui fut annoncée par
Me. Chantre lui-même en préfence de Me. Collet, par l'entre~
mife de qui la vente fut faite, [oit parce qu'après que la liquidation fut faite & qu'elle eut été dénoncée à Me. Robaud,
il exécuta la vente en recevant les émolumens de l'Office;
il n'a effuyé aucune efpece de léfion; il n'a pas acheté un
Office financé, mais un Office évalué à 1) 000 liv. Cette
évaluation fubfifte virtuellement, intrinféquement, puifque
l'Office vaut toujours dans fa finance & prix 1) 000 liv. Cette
évaluation n'eft plus couchée [ur les états du Roi; elle a
été remplacée par celle de )000 liv., parce qu'il étoit inté-
�DU
PALAI'S
DÉ
PROVENC:r;.
147
relfant. à l'Office de payer un moindre centieme denier; certe
feconde évaluation n'a eu d'autre caure que le plus grand avantage de l'Office, bien-loin de l'avoir détérioré; le propriétaire érait le maître de ne pas la faire; le Roi fe contentait
de l'y inviter" comme à l'u[age d'une grace qu'il lui accordoir. Il en fi vrai qu'il érait le maître de ne pas la faire,
que deux années s'étane pa/Tées après la liquidation de la financ~ e/feétive de l'Office,. fans que cette nouvelle évaluation
fût faite, le Roi n'en a pas réclamé, & a continué de percevoir le centieme denier [ur le pied de l'ancienne, au grand
détriment du titulaire, qui pouvait épargner cent livres [ur
cent cinquante. Il n'y a donc point eu de léfion ,eu égard à
la nouvelle évaluation; donc point de quanti minoris fous ce
rapport.
Par Arrêt du 6 Juin 1780, au rapport de Mr.le Con[eiller
de Gras, la Sentence fur confirmée avec dépens. Ecrivane
Mes. Alpheran & Roux.
AR RÊ T
XXII.
l;es Juges - Confuls- ne peuvent pas ordonner qu'une partie
comparoîtra pardevant eux par main mife , pOlir être ouie pal'
fa bouche.
E 20 Mai 1778 , le fieur Ricard, ancien Capitaine de
Navire de la ville de Mar[eille , tira une leure de change
de xsoo liv. [ur le fieur Laporte, Marchand Bijoutier à Aix,
en faveur du fieur Chabert, Marchand bijoutier à Lyon,
payable par tout Mai 1779, & pour vflleur reçue comptant.
Le fieur Chabert endolfa cette lettre au fieur Amiel, Chirurgien à Marfeille, & celui-ci aux fieurs Ducros & Mora[fany, Marchands Drapiers de la même ville, pOllr valeur
recrue en corn pte.
A défaut de paiement, les porteurs de la lettre de change
s'adrelferent aux Dlles. Ricard, héritieres du tireur; ils le
L
T.
�148.
10
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RnA i
affignerent pardevant les Jùges-Confuls le 26 Tuin; elles dé..:
nierenc la fignature de leur pere. Les Juges-Confuls ordonnerent qu'avant paifer out~e, il feroit procédé à l'avération
& reconnoiifanee du feing.
Le 8 Juillet, le Lieutenant nomma des Experts, & le 3
AoÎlt la fignarure de Ricard fut déclarée véritable. Les parties retournerent aux Juges-Confuls, & le 19 Août les Dlles.
Ricard préfenterenc requête en ca{f.1tion de la lettre de
change, eomme étant faite contre le difpofitif de la Déclaration du Roi du 30 Juillet 1730, confirmée par celle du
22 Septembre 1733. Le même jour les Juges-Confuls ordonnerent que les lieurs Amiel & Chabert ferqient appellés
pour être ouis en perfonne. Le· 2 l ., les fieurs Chabert &
Amiel furent affignés pour faire entretenir la lettre de
change, & pour fe voir condamner, en cas contraire, au
relevement & à la garantie. Le 23 , Sentence qui condamne le lieur Chabert à la refl:it\ltioll de la lettre de
change, avec intérêts, dépens, contrainte par corps, &
c1aufe de nonobfl:ant appel. Le 26, Sentence qui déboute
les lieurs Dueros & Moraffany de leur prétention contre les
Dlles. Ricard, & qui ordonne qu'il fera pourfuivi en exécution des Sentences précédemment rendues.
. Les fieurs Ducros & Moraifany appellerent de cette Sentence pardevant la Cour. Le 4 Septembre, les Dl1es. Ricard s'en départirent. Le 1 l , nouvelle affignation au fieur
Chabert, pOlir fe voir condamner de nouveau fans gémination de condamnation. Le 13 du même mois, les fieurs
Dueros & Moraffany demanderent, au rifque ,·péril & fortune des Dl1es. Ricard, de faire arrêter & amener le fieur.
Chabert par main mife pardevant les Juges - Confuls, pour
être oui par fa bouche. Le l'Î , Sentence qui accorde ces
fins, & qui en permet l'exécution 'en tout temps & en tous
lieux, les Fêtes & les Dimanches, même de nuit. Le fieur
Chabert appella à la Cour de ces deux Jugemens contre
les fieurs Ducros & MorafIàny; ceux-ci amenerent au procès
les Dl1es. Ricard, pour les faire condamner à les garantir.
On diroit pour le fieur Chabert, que la Sentence· des
�DU
PALA:J::S·.,DIl
149.
P1\OVIl.NCIl;
luges-Confuls qui pèrmet de le. filirt':. affêter en tllllt t!1!tlPSl
& en tous lieux, pour le ,conduire pardevant eux" pgur être")
oui par fa bouche, efi un attentat aux .droits facrés de la
liberté, & aux Loix bienfai(antes de l'Etar.
En fuppofant que le fieulj Chabert eût dû comparaître,
comment le défaut de cpmparution devoit-il être puni? Ce
n'était qu'en permettant ayl' DlIes. _Ricard d'en tirer- lames,
les induél:ions de drqir. Dans les matieres orditlâires" les
plaideurs qui refufent de prêrer des ~réponfes cathégoriques,
n'encourent d'autre peine que_ ,de voir,leur partie préfenter
les faits articulés au procès pour _avérés (l,ç. reco,nnus. pans
les affajres merca1ltilles on ne pro'nonte pas pri.cj(émeJK
de cette maniere , parce !1l!e, très:-(ouvent les faits ne font 1
pas tous. articulés; mais on y fupplée, en pe~1J1ettant de
tirer du défaut de comparution toutes les induaions de.
droit.
Oll efl: la Loi qui ait qécerné une peine auffi humiliante.;
que celle qui a été prononcée par les Juges-C.opfuls? Un~
Négociant pourrait-il ainfi voir fa probiré compromife, fan,
qédit perdu, fes efpérances ·évanouies, fa perfonne humiliée?
Une pareille peine ne pourroit êrre 'prononcée qu'en tant.
qlie la Loi l'auroit précifément établie..'
,
La Sentence qu'on attaq\le , efl: plus féve,rè qu'une con-',
trainte perfotmelle, parce qu'~lIe ne pottrrait, point être-.
exécut~e les Fêtes & Dimanches, aVilnt &- après le Soleil)
couché. Elle efl: plus terrible qu'un décret force, parce
qu'en payant on peut éviter l'humiliation d'être fai.fi. El!
vertu d_e.ce Jugement le fieur Chabert peut ê.tre faifi dans]
un moment où l'accè:; du T.ribunal çonfulaire J!,li. fera în- q
terdit : que (era-t-on de lui? le conduira-t-ol:l enJ priJ:Qn ? 'l
OQ aggraveroit la peine prononcée. Le retiendra-t-on d'ans ')
des maifons particulieres? Ce feroient des chartres privées,
hautement prohibée,s par les Ordoni;lançs. Le Jug.ement,
qu'on attaque, réunit donc en lu~ & aggrave mémt':. tO teila
T
;rigueur des autres Jugemens. ,
. i, _
On répondoit p~ur les fieo.rs Ducras
l.\1pr;t.flàoy ,'que "
quoiqu'on ne connoiffe pas de. Loi qui permette de foUté
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JIQ.U R N A~LJ.. l
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trapûire ùfi· ciwy@n- aux~ pieds des-.'Iltiblln:i~lX
matiere':
civile, il eG:- certa,in' que les. Joges-C0hfuls fent en ufage de
faire- arnene·r pardilvant eux. un juitidiahle ohfiiné qui refufe
de comparaître dans l'origine; ils ne s'éwient permis d'ufer
de cette tigoureufe Qontraint(l' qu'envers. ceux . qui leur
conduire L ~ajfbit foupgonner le dé/fein de fuir; & il faut
converiir'q1Îe slil dl' un- feul: cas oa cette rigueur pui/fe être
jufttfi.é"e--,: o'eff. lorfque celui qui en T eft 1'0bj~t, fe prépare,
en fuyant,,- d'enlever à fon créancier le gage de fa créance,
& à la· liQi le moyen. de le forGer à remplir fes· obligations.
S~.~_ -inJU'~~e en:èrs. fG~' ~réancier-'; .r~n mépris e~verSc là·
LoI-fèmhlenj: le''iiendre 'llldlgne des prwlleges que réclamerail: av:ec ,fuccès le citoyen honnête & paifible.
})I:s- le 2·P Adû't IfJ79, le· fieur Chabert' fut affigné en
per.fonne; l'exploit porte qu'îl reçut lui-même la copie; cependant il ne daigna point comparaître à la Jurifdiélion
côMulatre:.Le 'VJ; a'utre affignation> faite également parlant
à fa pt:r[oizn~: -' Nouveau refus dè fa part; le fleur Chabert- a
demèllr~' 'liuit jours à· M.arf~ille, ilt aurait- bien pu- comparôÎtre; dès-lors fan refus devoit être puni par un décret
qui permît de l'amener en tout temps & à toute heure.
Sur la garantie ils difoient que les· DlIes. Ricard devaient
y-être foumifes-,-:. quelque événemeb~ qtii> pût arri.yer. Ces
D.emoifelles , -àprll qvoil' Gonte{lé la flgnature de leur pere,
ont accufé laI leru-.e 'de change elle- même de· fraude. En
fuppofant que'les Juges-€onfuls- ne pu/fent paffer outre au
jugement fans- entendre le fleur Chahert, c'était pour l'avantage 'Ceul de9-;E}lIes. Rii;ardJ qu'il' était, appellé , puifque c'étoiil
peue Tufiifi€c ,lèu/-, fy.ltême.; leS diverfes. injonélions pro...
noncéèso contteJle' fleur,cC:;haber~, le-'.décrec- de· mûn: mife'
qui fes' , a-couronnées, ont donc été rendus· au profit. déS
Dlles. Ricard, & à-leur' rifque, péril & ·fortune; oelui, qui
retire l'avantage qui .rifu1te d'un Jugement-,. d'un contrat- oude,.toutJa\ltre> en-g'dge-JÙent, doit ·en courir" également' les.
rifques; les fleurs Ducros & Mora/fany ,'en- requérant· le •
décret d.e 'main mire, -avaient' donc une garantie' intonEet
table contre les·'Dltes-. Ric'lrd.,
~.
~
�bu PA tAIS
Dl!
PROVENCE;
'rH'
On obfervoit pour les Dlles. Ricard à peu-près les mêmes
,t'ai[ons pour le fou tien du décret de main mife; & fur la
garantie, elles difoient que la comparution perfonnelle de
Chabert était à la charge de Ducros & Moraffany. C'el1:
une obligation qui dérive de la lettre de change qu'~ls préfentent i c'el1: donc à eux à mettre en œuvre les ,moyens de
-le faire comparaître. Qu'ils l'amenent de gré ou de force,
la chofe dt iodifférenre& étrangere aux Dlles. Ricard; elles
ne peuvent point étre garantes d'un fait qui ne les concerne
abfolument en rien. Les Juges - Confuls ont ordonrié que
Chabert ferait appellé pour, lui oui par ft houche., être dit
-droit aux parties. En exécurio-n de cerre 'Sentepce, Ducros
& Moraffany l'ont fait affigner. ils ont dbnc reconnu eux,.
,mêmes que la comparution de Chabert était à leur charge:
~l el1: donc jugé que l'exécution de la Sentence ne -les regardait qu'eux, & jamais les Dlles. Ricard.
Mr. l'Avocat-Général de Califfanne obferva que s'il el1: vrai
.que le Légiflateur & la Loi nJont dû arrenter qu'à regret
-à la liberté des citoyens; s'il eil: vrai que ce,s cas, tous rares
.qu'ils font, font déja bien cruels pour l'humanité; ces cas
ne doivent pas étre érendJls par les Juges, & la volonté impérieufe de la Loi peut raffurer le citoyen, quand ils en. or'donnetit l'exécution. Peut-il y avoir en matiere civile d'autre
-contrainte par corps que ceBe cancre les débiteurs, & même
pour un certain genre de dettes? C'en demander, comme
, dit l'Auteur de l'Efprit des Loix, quel feroit dans ce nouveau cas le change de la liberté d'un citoyen.
Pour les detres ordinaires même, la con-tr'linre par corps
;a été abolie, parce 'que la fortune d'un homme ne v.lloit
-pas fa liberté; la Loi rigoureufe a fubfifté pour le commerce,
"Farce qu'on le confirlere comme la fortune de l'Etat, &
.qu'un auffi grand intérêt peur exiger uo auffi grand facrifice;
eac.ore combien de refhi8:ions, de limitations que l'humalIité réclame, & qu'une bonne police exige; {):lais qi-le peut
craindre le citoyen qui n'efl: ni débiteur ni coupabl~? Quel
feroit .pour lui le prix de fa libené? Où trouver çontre luj
l'exception déja fi terrible faite aux Loix générales? Com.-
�1)i
'
JOUltNAL
-
-
prolt)et-il 'la fortune publique, Ji on ne le pour[uit pas comme
débiteur? Alarme-t-illa sûreté de fes concitoyens, fi l'on ne
l'accufe d'aucun crime? Dans quelles circonfiances peut-il
donc fe trouver, qlTi, le mettant en oppofition avec le bonheur
de tous, exigent le facrifice d'une liberté que de plus grands
intérêts ne permettent plus de protéger?
Qu'on rapproche toLlt ce que les Loix les plus cheres, nos
Statuts nationaux ( ces dépôts facrés de nos privileges ) ont
fait même pour les débiteurs ~ comme elles ont refpeété leur
liberté! combien elles ont cherché à adoucir leurs malheurs
'dans le cas de la fimple contrainte! Ces principes font bien
plus facrés, lorfqu'il s'agit d'un décret forcé, exception quelquefois dangereufe à des Loix qui n'en devroient point avoir,
ïnterprétation permife aux grandes vues des Cours Souve-raines; ïnais il faut que les circonfiances [aient d'une évidence qui ne permette pas au Juge de s'égarer. Un homme
fans état, que rien n'enchaîne plus même à fa patrie l on
étranger & prêt à fuir à cha'que in fiant , chargé des dépouilles de îes créanciers, voilà l'homme que les Loix défignent comme pouvant être l'objet d'une plus grande rigueur; res malheurs auroient intéreffé pour lui, mais fa fuite
l'a rendu coupable; & même dans ce cas extrême, combien
d' Ar~êts ont défendu aux Juges [ubalternes de décider fu,r
des exceptions qui peùvent être d'une fi dangereufe conréqùence! Ce droit, dont les Juges - Confuls [e font fervis
'contre un citoyen dont tout devoit affurer la liberté, on
auroit pu le leur c,ontefter, s'ils en avoient ufé même contre
un homme 'que tom eut annoncé comme coup.able.
Van. 1 du tit. 16 de l'Ordonnance de 1667, porte que
,ceux qui feront'affignés feront tenus de comparoître en per~
fonne, pour être ouis par leur bouche. Mais le Légiflateu.r
à prévu la double circonfiance oÙ celui qui aurait, été affigné,
ne comparaîtrait pas, & oÙ cependant fa comparution [eroit
• néceffaire. Il;t ordonné par l'art. 4 que les Juges-Confuls poUl'roient, s'ils jugeaient néceffaire d'entendre la partie 'non
comI5arante '. ordonner qu'elle [eroit ouie par fa bouche à
l' A\\di~l,we l enl1JÏ -donnant un délai com~étent., Y a-t;il là la
mQinqr~
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PAL AIS
D E
1 53
PR.O VEN C E.
.moindre trace d'un décret de main mife? Le Juge ordonne
que la partie fera ouie; mais fi elle ne comparoÎt point, l'Ordonnance dit-elle que le Juge pourra la forcer?
Comment feroit donc puni ce défaut de comparution?
C'ell: en vain que l'on cherche à pallier le décret de main
mife rendu contre le fieur Chabert fous le nom de fimple
contrainte; il ell: dans le fait un véritable décret de prife de
corps. Qu'on juge de la folidité de ce fyll:ême pour ce qui a
lieu lors des affignations à répondre fur faits & articles. Si la
partie ne fe préfente pas, on ne la force pas de comparoÎtre
par un décret de main mife. L'autre partie obtient feulement le
profit du défaut, & les faits fonc tenus pour avérés. Ainfi
dans une affignation, le défaut de comparution fait obteni~
à la partie les fins de fa demande.
Les Juges-Confuls ont fans doute le droit de décerner la
contrainte i mais c'ell: après leur Jugement, c'ell: en exécution
du titre, & non avant qu'il foit rendu. Comment pourroient-ils,
avant d'avoir ll:atué définitivemenc, rendre une Sentence provifoire, bien plus févere & plus étendue qu'ils n'auroient pu
1a rendre après avoir ll:atué en pleine cOl1llOiffance de caufe ~
Ell:-c~ parce qu'ils voudroient punir une efpece de défobéif~
fance ou de rébellion à leur Jugemenc? Sous ce p.oint de
vue, ils ne pouvoient pas en connoÎtre, ils euJfenc été in~
compétens. Pareil décret auroit pu avoir lieu vis-~.-vis d'un
étranger [ufpeé\: de fuite, & non vis-à-vis d'un Français cont(~
lequel il n'y ayoit eu aucune condamnation.
Mr. l'Avocat-Général conclut à ce que faifant droit ~
l'appel du lieur Chabert, les décrets. rendus par les JugesConfuis de Mar[eille fuffent déclarés nuls, & comme tel,
caffés, & à ce que fai[ant droit à la requête en garantie des
fieurs Ducros & MoraJfany, la Dlle. Ricard fût condamné~
à les relever & garantir de tout ce qu'ils pourroient fou/frir.
Par Arrêt du 7 Juin 1780, prononcé par M. le Pre~
mier Préfident, la Sentence des Juges-Confuls f!Jt déclarée
nulle & incompétence, les fieurs Ducros & Moraifany con_
damnés aux dépens, & la Dlle. Ricard à les relever & garantir. Plaidant Mes. Sauvere 2 Collombon & Verdet le ie",,,e.
y
�10VRNAL
ARRÊT
XXIII.
a
A
Le retrait féodal a lieu en cas de vente fonds perdu, meme
après la mort du vendeur.
H
Onaré Jure, Fermier de la terre de Pierrefeu, acquit le
27 Mars .1764 une terre au prix de mille livres. Le 17
Juin 1777 le Marquis de Pierrefeu l'affigna en défemparation
par voie de retrait féodal, fous l'offre de lui rembourfer tout
ce qu'il avait payé.
L'inll:ance liée, Jure fit répondre le Marquis de Pierrefeu
fur quatre chefs: 1°. s'il n'avait pas été inll:ruit de la vente
pour en avoir reçu l'extrait ; 2°. s'il n'avait pas gardé cet extrait
pendant fix mois, . & s'il n'avait pas fait confulter pour favoir fi le lods était dû, comme s'agifTant d'un tranfport à
rénte viagere; 3°. s'il n'était pas vrai que de retour d'Aix,
il reçut le lods en préfencé du fieur Brun fan Procureur, à
qui il dit de faire la quittance; 4°. s'il n'avait pas cédé le
droit de prélation, & ft le nommé Audibert ne courait pas
tous les rifques.
Le Marquis de Pierrefeu dénia les trois premiers; & quant
au quatrieme, il répondit qu'il n'avait rien à dire. Sentence
qui déboute du retrait; appel de la part du Marquis de
Pierrefeu.
On difoit pOllr lui que quiconque achete dans la direél:e
d'un Seigneur, s'expofe au retrait féodal. L'exercice de ce
droit dure deux mois, à compter du jour que l'emphytéote
a notifié fan acquifition au Seigneur, qu'il lui en a fourni
l'extrait, & qu'il en a demandé l'invell:iture; il dure trente
ar:Js, fi l'aél:e n'ell: pas notifié, ou fi l'on n'a payé le lods
perfonnellement au Seigneur, .ou fi· le Seigneur n'a pas formellement approuvé la vente. La réception du lods par le
F erm~er, par l'Agent, ou par le Procureur qui n'a pas un
mandat fiJéciaJ, ne prive pas le Seigneur du retrait. D'après
�D U
PAL A 1 S
D Il
PRO V Il N C Il.
1
H
Dumoulin, le Seigneur ayant l'option du lods ou du retrait,
dès qu'il ne tranfmet pas à fan Fermier la faculté de choifir,
il fe la réferve. Delà cette foule d'Arrêts que l'on trouve dans
les droits feigneuriaux, tom. 2., pag. 187, qui ont indifférem·
ment jugé que le lods reçu par l'ufufruitier, par le Fermier,
par l'Agent ou par le Procureur général, n'excluait pas le
Seigneur du retrait, & qu'il ne l'était que par, un mandat
fpécial.
La raiCon de cette Jurifprudence ell: fort fimple; elle fe
trouve dans le Diél:ionnaire des Fiefs, va. retrait: le droit
de prélation eflfi feigneurial, 'lue le Seigneur n'efl jamais cenJé
s'en dépouiller, fi cela ne paroît d'une maniere claire.
L'exhibition du contrat de la part de l'acquéreur emporte
ce que nous appellons ohfequium reverentiale; il ne peur être
prêté que par l'exhibition du contrat, faite perfonnellement
au Seigneur.
Le retrait féodal & le lignager ont lieu en cas de
vente à fonds perdu; c'eil une vente ou un tranfpon; elle
fait fortir le bien de la- famille; elle donne au Seigneur un
nouvel emphytéote. C'eil ce qu'arreH:ent- tous les Auteurs.
(Decormis, tom. 1, col. IOS6 & 1082., & tom. 2., col. 168 1,
Soefve, Brayé, I~ Journal des Audiences, Lacombe. ) Ainft
jugé par deux Arr.êts de la Cour, l'un en 1726 en faveur du
fieur- Pàvillon, Orfevre de la ville d'Aix, contre le neur Ef.
mi 01 ; l'autre - en 1736, plaidant Mes. Chery & Dubreuil
pour Seba!l:ien Arnaud, Marchand de la même ville, cOfltre
la Dlle. Martin.
Le Seigneur à qui le droit de retraire eil: acquis, ne peut
pas le pndre par le décès de l'un des contraél:ans à fond!!
perdu. Il ell: ft peu vrai que la mort <lu penfionnaire falfe
ceffer le retrait, que -s'il meurt dans l'année de la notice,
un fimple parent expulfera l'acquéreur.
Il e!l: certain qu'on ne peut pas obliger le Seigneur à jurer
qu'il retient pour lui. Dès qu'il a la faculté de céder fan
retrait, le ferment ne peut être exigé.
En droie , le Seigneur auquel l'Agent, le Procureur général
ou le Fermier fait compte du lods, n'ell: pas exclu du re
V2.
�1')6
JOURNAL
trait; 1°. parce que l'emphytéote qui ne paye le lods qu'à
l'Agent ou au Fermier, fait qu'il ne remplit pas fes obligations, & qu'il ef!: par conféquent toujours expofé au retrait; 2°. parce que l'emphytéote ne peut être à l'abri du retrait que par l'exhibition de fan contrat au Seigneur,· & les
arrangemens entre le Seigneur & fon Agent n'ayant rien de
commun avec l'emphytéote, ne peuvent pas lui profiter,
d'après rous les Féudifl:es, cUms debet adire patronum; 3°. parce
que le Seigneur ayant l'option du lods ou du retrait, & s'étant
réfervé cerre option à lui feul, quand il ne donne pas un
mandat fpécial à fon Procureur fondé, il conferve cette même
aétion, tant qu'il ne s'en dépare pas vis-à-vis de l'emphytéote.
Il efl: même de principe que le Seigneur qui reçoit le
cens de la main d'un nouvel acquéreur, & qui lui en concede quittance comme nouvel acquéreur, n'efl: pas exclu du
retrait, ainLi qu'il a été jugé par une foule d'Arrêts que
l'on trouve dans les droits feigneuriaux de Provence.
On répondoit pour Jure, que le Lieur Marquis de Pierrefe"u ne faifoit que· prêter fon nom à Audibert; d'abord la
firuation, le peu de valeur de la terre forment une premiere préfomption. Quel intérêt pourroit-il avoir à exercer
fon drait? La propriété de Jure ef!: un effet précieux dans
la fortune de ce pere de famille : elle n'ef!: rien pour le
Seigneur. Eloignée de fes poffelllons auxquelles elle ne
pourra jamais être réunie; placée dans un endroit qui n'eft
du tout point agréable, elle ne fauroit être à là convenance.
Un Seigneur n'acquiert pas pour lui des propriétés ifolées,
fur-rout lorfqu'elles ont une médiocre valeur. D'ailleurs fi
Mr. de Pierrefeu, par raifon d'intérêt ou d'agrément, avoit
pu avoir en vue de devenir propriétaire de ce domaine,
eut-il attendu fi long temps de le retraire? Quand Jure en fit
l'acquiLition ,. il éroit Fermier de Mr. de Pierrefeu; il eft
de notoriété qu'il avoit toute fa confiance; il n'aurait pas
laiJré cet acquéreur confondre pendant quarorze ans fa fortune & fon travail da.us la culture de fa terre, pour venir
enlù.Îte l'en dépouiller quand elle auroit été en valeur.
" Le retrait féodal étant celllble, .à la différence du retrait.
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE:
157
lignagër , il ef!: fenlible qu'on ne peut interroger le Seigneur,
pour favoir s'il retrait pour un tiers ou pour lui-méme ; mais
quand l'acheteur a un intérêt réel à faire conf!:ater fi le
Seigneur retrait pour autrui; quand l'acquéreur peut dire au
Seigneur, fi vous retraye'{ pour tel, vous êtes non recevable,
pnrce 'lue celui pour 'lui vous exerce'{ votre droit, &
'lui
vous prête{ votre nom, a perdu le droit d'agir lui-même, dans
ce cas le Seigneur el!: tenu de jurer. Le Seigneur exclut le
retrayant lignager; mais fan t:effionnaire ef!: exclu par le
lignager. On peut donc faire jurer le Seigneur, parce qu'il
importe au retrayant lignager -d'érre in!huit d'un fait qui
peut rendre le retrait non recevable. On trouve plufieurs
Arrêts dans Mourgues, pag. 142., qui l'ont ainfi jugé; &
c'ef!: le fentiment de Mr. de la Touloubre dans fan Recueil
de Jurifprudence féodale, tom. 2., tit. du retrait, n. 33.
Le retrait féodal a lieu dans les ventes. à penfion viagere
(continuait Jure) mais il ef!: éteint après la mort 'du penfionnaire. Si quelque cbofe s'oppofe à ce que l'acheteur fait
pleinement indemnifé ; fi les chofes ne fane plus dans leur
entier, le retrait ne peut plus être exercé. Il y a fans doute
moins d'inconvénient à ne pas l'admettre, qu'il y en aurait
à dépouiller l'acheteur fans l'indemnifer pleinement. Il n'y.
aurait qu'une maniere juf!:e & équitable d'indemnifer pleinement l'acheteur à penfion viagere, quand on vient retraire
l'effet acquis après la mort du vendeur. Ce feroit de fuivre
la regle que la Loi 68 ,ff. ad Leg. falcid. donne pour ef!:imer
la valeur du legs d'un ufufruit. Cette Loi calculant la durée
ordinaire de la vie de l'homme, donne à ce legs une valeur
relative à l'âge du légataire. Elle efiime la valeur du legs
de l'ufufruit légué à un homme de cinquante ans, neuf fois
la valeur de fan produit annuel. D'après ce calcul, Mr. de
Pierrefeu retrayant un effet vendu fous penfion viagere à
un homme qui avait cinquante ans, aurait dû, venant après
fa 'mort, payer neuf penlions à Jure, quoiqu'il n'en eût
payé que deux & demi. Par ce moyen on l'aurait indemnifé, ainfi que la Loi entend que le foit celui fur lequel
on retrait un fonds à penfion viagere. Porhier dans [on
a
�1 Sil
'J OUR N A L
Traité des'Fiefs, ch. 6, pag. 227, le penCe de même.
'Par Arrêt du 1 S Juin 1780, au raptJort de Mr. le Con·
felller d'André, la Sentence fut réformée avec dépens, &
le retrait admis. Ecrivant Mes. Pafcalis & Aguillon.
-
L
ARRÊT
x XIV.
Le Procureur du Roi peut être récuft, même lorfqu'il ejl [eul
partie.
.
Le J!lge qui s'ahflient fur une requête en récufation, ne peut ft
plaindre ê' faire informer fur les faits injurieux ou calomnieux qu'elle peut contenir, avant que la partie récufante
ait· été admi[e a en faire la preuve, & avant que fa récufation fait Jugée.
L
E 2 Novembre 1779, plainte de ta part des Dlles.
Rofalie & Therefe....... en 'prévarications contre Me.
Etienne....... Procureur au Siege de....... Enes en délaiffent
la pou.rfuite au miniG:ere public. Le Procureur du Roi fait
informer. Me. Etienne....... le récufe , & donne pour moyens
de récufation qu'il avait ahuft 'de [on -miniflere à l'appui
a'une dénonciation injurieu[e qu'il s'était 'fait porter; que la
plainte portée contre lui n'était qu'un complot odieux; que le
Procureur du Roi était fan ennemi déclaré, parce qu'il l'avait
ohligé ·à acquitter p(ufieurs lettres ,de change....... que l'accufation était nulle, irlJuJle & oppreffive ; qu'il eut été à fauhaiter
que le Procureur du Roi eût moills écmaé [on reJfèntiment ,&
qu'il eût refPec7é les .Loix & les Ordonnances.
Le -Procureur du Roi, fur la communication de la requête de Me:Etienne....... déclare abHenir. Il préfente enfuite requête au Lieutenan~, demande qu'il lui .foit eoncédé
iiél:e de ce-qu'il emploie- pour -information littéraire & -pour
piece de conviél:ion la req!lête en 1'écufation, & r.equiert
que la piece foit paraphée & jointe' à ·fa -requête,. fauf ·la
preuve par témoins; décret qui ordonne le paraphement &.
1
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PAL AIS
DB
P 1l. 0 V B Ne B.
159
la jonaion. Au bas du verbal Me. Etienne....... ell: décreté
de prife au corps; il appelle pardevant la Cour, & attaque
toute la procédure.
On difoit pour l'appellant que d'après les premiers principes, la permiffion de faire informer porte bien moins
fur l'emploi des preuves que fur le droit d'en faire ufage.
Toute accufation, comme l'a dit Montefquieu, menace la
liherté des citoyens. C'efi une voie rigoureufe qu'il n'efi
permis de prendre qu'avec le confentement exprès du Magilhat. La permiffion qu'il en donne, efi un des caraaeres
les plus frappans de nos Loix criminelles ; c'efi plus que
bien d'autres formalités, la fauve-garde des citoyens.
Cette permiJfion d'il/former (dit Sallé, tom. 2, pag. 242)
efl ordonnée pour tous les crimes en général. Elle exige que
la plainte fait répondue d'une Ordonnance de foit permis
d'informer; pratique recommandée par les plus ancieTInes
Loix du Royaume, & exécutée en conféquence. II cite l'Ordonnance de 1)36,l\rt. 2, celle de Q39, art. 14';' celle d'Orléa'ns, art. 63, & celle de Blois, art. 184; idem fentit
Muyart de Vouglans, inflit. crimin. part. l, tit. 3, pag. l79'
Si cette Ordonnance n'étoit pas toujours d'une néceffité
indifpenfable , ce ferait fur - tout dans la procédure du faux
qu'elle paroîtroit pouvoir être plus facilement négligée,
parce que les preuves font toujours acquifes par l'emploi
même des pieces. Mais comme l'Ordonnance de fait permis
d'informer porte moins filr l'emploi des preuves que fur le
pouvoir de s'en fervir criminellement, cette permiffion y
efi également néceffaire, comme le remarque Sallé au lieu
cité, -& comme l'exige l'art.· 3 du tit. 1 de l'Ordonnance
du faux.
Tous les jours on demande aae de l'emploi d'une piece
comme information littéraire, mais on demande auffi & en
même temps la permiffion d'informer. Le Juge fait droit
à ces deux objers de conclufion par deux réponfes difiinaes:
par l'une il permet d'informer, & c'efi alors qu'il donne la
fanaion de la Loi aux pourfuires criminelles : par l'autre, il
concede aae de l'emploi de la .piece; ce qui eft une fonc,
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JOURNAL
tian bien diJférente, ce qui même n'efl: pa! l'ohjet d'une'
Ordonnance. Auffi voyons-nous dans celle du Lieutenant,
qu'après ces mots avons ordonné, il n'dl: plus queHion que_
du paraphement. Ce n'efl: pas l'aél:e d'emploi d'une preuve
qui conHirue la procédure criminelle , mais la permiffion de'
faire urage des preuves quelconques que la recherche d'un·
crime peut oJfrir. _
.
D'ailleurs (continuoit l'appellant) fi l'on donne au Procureur du Roi le nom de partie, ce n'efl: pas qu'on veuille
dire qu'il puiJfe re permettre rout ce que re permet un accurateur ordinaire, puifque les fontbons du minif!:ere public
font même toujours plus [éveres que celles du Juge.
Si le Procureur du Roi B'ef!: pas obligé à moins d'iinpartialité que les Juges, il peut être récuré comme les Juges,
lorfqu'on a lieu de ne pas en attendre cette Ünpartialité.
Or le Procureur du Roi, lors même qu'il ell: partie principale; doit n'exercer res fonél:ions qu'à charge' & à décharge;'
il ne doit pas 'ceJfer d'être le protééleur de l'accuré·; il ne
·doit. pas aban~onller le citoyen, même lorfqu'il 'eH feul
partie.
Les Gens du Roi, dit Ferri'ere, font les premiers Juges'.
On peut donc les récufer comme tous les· Juge.s, puifq-ue l'Ordonnance n'en exceptf! aucun.
Dans certains cas ( dit Airaulr, iof!:it. judic. liv. 3, art. 3 ;
n. 14 & 1 ~ ) la preuve de l'innocence de l'accuft dépend de
la fidélité ou prévarication de la parûe publique. Ces principes [ont auffi développés par Mornac [ur la JLo-i l , ff. de
cifJicio procur. cœfaris; par &rnage, coutume àe· Normandie,
pag. 10 ; par Jou1lè [ur l'art.. 1 du tir. 26 de l'Ordonnance
de 1667; par Lacombe, matieres criminelles, part. 2.,
ch. 3, n. I I ; par Brun~au, matiel'es criminelles, tit. 3 ,
max. I I .
I! ell: vrai que la récurarion efl: une voie légale dont les
parties peuvent abu[er. Le Juge récuré peut s'en plaindre &
demander des réparations. Mais par cela même que la récufarion efl: un moyen de droit, & qu'à l'exception du cas
dt: paremé, il efi: impoffible de récurer un Juge, ~ans Iu-i
UIlJ?utet:
,
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PALAIS
DE
1·61
PROVENCI!.
imputer des faits déshonorans; il n'en ef!: pas de la récufation comme d'un libelle, qui par lui-même elt un délir.
La Loi elle-même punit, quand il le faut, la partie réeufante par une amende. Le Juge, ourre cette peine, pent
demander encore une réparation. Mais on ne peur s'écarter
de cc premier principe, que ce n'ef!: que lor[que la LGi
punit, que le Juge récufé peut être vengé; il ne peu-t pas
être quell:ion de réparation, fi. la Loi elle-même n'a déjilinfligé l'amende.
Les articles 29 & 30 du titre '2.4- de l'Ordonnance ée1667, font la répétition formelle de ces principes; ils fixent
deux cas qui donnent lieu à l'amende, & chacun de ces cas.
peut donner lieu à une réparation.
Il ne peut donc y avoir de réparation qu'après qne les faits.
ont été jugés; il fant un jugement qui précede la réparation~.
parce qu'il en faut un qui précede l'amende. En un mot, he
procédure en réparation ef!: celle d'un Juge déja difculpé, &
non d'un Juge que l'événement des preuves pourra montrer:ou fufpeél: ou coupable.
En effet, de quoi [e plaindroit-ii avant ce jugement? Dece que les fairs [ont déshonorans? Ce n'elt pas la faute de·
la partie; c'eH précifémenr dans ces faits que rélide I.e droie.
qu'elle a de récufer, & fa réCufation eft d'aurant plus iuHe,
qu'elle eH plus grave. De ce que les faits [onr impertinens?
il faut les faire déclarer tels; de ce qu'ils [ont faux? il faut
les faire juger,
.
Il n'eH plus. néceffaire de faire juger la récu[arion, dèsque l'abll:enrioll eH volontaire;, cette. ab/1ention prQuveroitbien plurot. que les fdits font perrin.ens & vrais, qu'elle ne
proulteroit qu'ils font impeninens & faux. Mais il faut, li leJuge, malgré [on abHenrioo, veut fe plaindre, juger cettemême récufarion, pour [avoir fi cerre .plainte e/1 fondée;. j~
faut découvrir fi. c'ef!:. légalement que la parr·ie récu[ante s'elt
fervie d'un moyen légal; il faut enfin ne pas la priver d'u-ne
preuve, dans l'inUant même où el1.e lui devient plus que
mais nécelIàire.
Eu dler, ou c.etre. abfienrîon. volontaire équivaut 1i nO'..
ra-
X.
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162.
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Jou 11. N A L
jugement, ou elle në peut le fuppléer; il faut rejetter le pre';
mier cas, parce que toutes les Loix interdifent au Juge récufé le jugement de fa propre récufation. ( Ordonnance de
Charles VIn, art 64; RebuJFe, de recufat. &c. ) Si fon abftention pouvoit préjuger la récufation, ce feroit donc contre
lui-même. Dans le fecond cas, les chofes refient entre le
récufant & le récufé, comme elles éroient avant J'abHention;
de routes les hypothefes, c'efl: certainement la plus favorable pour le Juge après fan abfiention volontaire. Mais elle
laiffe au récufant tous fes droits; elle les augmenteroit plutôt
que de les diminuer; il faut donc un jugement, malgré cette
abfl:ention, fi le Juge veut fe plaindre. Rhodier, fur l'art. 30
du tit. 2.4 de l'Ordonnance, queH. 2., parle ainli de tous les
cas où il efl: permis de demander des réparations. ( Theveneau, pag. 780; Lacombe, matieres criminelles, pag. 190;
Papon, liv. 8, tit. 9, & liv. 9, tit. 3 ; Denifart, vO. récufation, nO. 26. )
Il ne ftlffit donc pas que les faits foient déshonorans, POUt
que le Juge puiffe s'en plaindre; il faut de plus qu'ils foient
o~ faux ou étrangers; s'ils font faux, il efl: obligé de le
prouver; s'ils font étrangers, il ne peut les déclarer tels luimême. Tels furent les motifs de l'Arrêt que Papon rapporte, qu~ défendit d'informer pour récufation calomnieufe,
finon après le procès & l'Arrêt de 17)I, qui décida que le
Juge qui ne vouloit pas reconnoître les faits, ni les nier, ne
. pouvoit pas fe plaindre de l'injure.
On répondoit pour le Procureur du Roi, que quand le MiniHere public n'eH que partie jointe, quand il doit balancer
les raifons des deux parties civiles & prendre un parti enrr'elles, fes fonétions approchent de celles du Juge; il dl:
alors récufable. Au contraire, accufe-t-il comme partie publique & principale, la néceffité de pourfuivre l'éleve au
deffus des recufations. C'eH la diHinétion que fait Defpeiffes,
tfe l'ordre judiciaire, tom. 2., tit. 4, pag. 16 l 1.
L'art. 12 du tit. 24 de-l'Ordonnance de 1667 fiatue d'abord
fur la récufation pour parenté & fur les autres moyens qu'elle
énonce, fans entendre exclure les autres moyens de fait ou
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PAL AIS
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16'3
de droit. Les moyens de fait ou de droit réfervés ne comprennent certainement pas les moyens injurieux & ne les
autorifent pas. Les moyens de fait portent fur la parrialité
du Juge, & non fur la prévarication.
L'Ordonnance n'a point llamé fur le cas où le Juge, fans
attendre le jugement d'une récufatioJl injurieufe, fe départitoit pour demander réparation. A-t-elle entendu que le Juge
qui dans ce cas ne demeure plus fur le tribunal, doive,dévorer l'affront qui l'a forcé à en defcendre? A-t-elle voulu
que le récufé fût forcé à faire juger une récufation calomnieufe, inadmiffible & impertinente par fon atrocité, mais
utile au récufateur, parce qu'elle ne permet plus au Juge de
connoître de l'affaire?
De ce qu'en jugeant la técufation, on doit punir le récufateur, fi fes moyens ne font pas trouvés bons, raifonnables & vérifiés, comme dit Rebuffe, s'enfuit-il que le récufé,
lorfque le jugement de la récufation n'a pas lieu, ne puitre
demander des réparations- pour l'injure qui lui a été faite?
L'on fait que fi le Magil1:rar, en déniant les faits, veqt
reller Juge, ce n'el1: qu'après la preuve fommaire des faits;
refufée ou non remplie, que l'on punira le récufateur de
~'amende portée par les Ordonnances; ce n'eH qu'alors que
lè Juge aura le droit de pourfuivre une réparation.perfonnel1e Eeadant que la demande en récufation 'pelld li juger,
le récufé n'a rien à demander. C'el1: le cas des deux ,Arrê,ts
de Papon & de Denifarr.
Les récufations doivent être propofées en termes qui
n'offenfent point les Juges, aUFrement tels récufans font
condamnés en l'amende. (Defpei.ffes., tom. 2, pag. 462 j
Bruneau dans fes matieres crimigelles tit. 3 , max. 20.)
Il paroît par ces Autorités, qu'autre chofe el1: l'injure
de la récufalion , autre chofe fa calomnie; préalablement à
la vérification de la calomnie, s'il y a injure dans la maniere de propofer la récufation, il y a lieu à punition & à
plainte.
La récufation eH une voie légale, lorfqu'elle porre fur
des moyens fufceptibles d'être admis en preuve i mais
X2.
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JOUR~At
quand elle embraffe des moyens de prifeà partie,. des'
prévarications; quand 10n coaréte des délits, elle n'efi plus
ni pertinente ni admiffible. On n'autorifera pas quelqu'un à.
prouver par voie de récufation que fon Juge a malverfé à
.fon égard. Il n'y a que l'accufation direéte qui puiffe répondre. à la gravité de cet objet; il n'y a par conféquent
de légal que cette actufation, & jufqu'1 ce qu'elle foit intentée, -la. récufation efi un libelle diffamatoire, déguifé
fous la forme judiciaire; c'eil: une offenfe faite fous l'apparence de.Ja défenfe.
Mr. l'Avocat-Général de Califfanne difcuta deux queil:ions;
la prem.iere, fi le Procureur du Roi peur être récufé; la
[econde, fi le Juge qui s'abil:ient fur une. requête en récufation, peut fe plaindre des faits injurieux ou calomnieux
qu'elle peur contenir, avant le jugement de la récufation, &
f.àire informer fur les faits, avant que la partie récufante
ait été admife à la preuve.
Il ne' s'arrêtà poin't au moyen tiré du défaut de décret
Ge foit informé; il obferva feulement que l'aéte requis &
Goncédé , que la reCJuête ferait jointe comme information littéraire, tenoit lieu de décret de foit iuformé. Ce n'étoit
qu'une fimple information littéraire; la jonétion de la requête
eomplettoit pour ainfi dire l'infiruétion; le Procureur du
Roi fe réfervoit fimplement la preuve vocale fans en ufer;
aÏnfi l'on ne pouvoit pas dire. que cette procédure eÎtt été
fans décret de foit informé, & conféquemment fans bafe
aucune.
Sur la premiere quefi:ion il obferva qu'il faut di1l:inguer
deux fonétions qui occupent le mini1l:ere public. Par les
unes, il fe joint aux citoyens & aux parties civiles; il requiert les peines Bont la pourfuite n'eft confiée qu'à lui
feul. Dans les autres, le miniftere public (mais non pas
rel & tel Officier chargé d'en exercer les fonétions) eft feul
accufareur; partie nécelfaire, mais toujours impartiale, [es
foncrions tiennent toujours plus du Juge que de la partie,
& éloigne de fes devoirs rout ce que pourroit fe permettre
uu aCCllfateur ordinaire; en un mot, fon mini1l:ere n'eil: ja-
�'n u PAt A ts b E P 1t 0 VEN C P;:
'1 65'
mais étranger à celui du Juge: ne jamais admettre vis-à-vis
de lui la poffibilité de la récufation, ce feroit, ce femble,
le priver emiéremem d'un titre augufie qu'il ne peut pas
, perdre. Un délit, un crime ont excité fon minifiere, à la
bonne heure; dépoutaire de l'intérêt public, il va le venger;
c'efi dans fes mains que nos Loix Ont remis les aaions
populaires dont nos mœurs nous firem femir de bonne
heure le danger; les citoyens favent qu'il veille au bonheur
de reus, & ils font tranquilles. mais parce qu'il efi accufateur, mais parce qu'il exerce fes fonaions à charge & à
décharge, parce qu'il ne ceffe jamais d'être le proteaeur
de l'accu(é, fi cette impartialité fait la tranquil1ité du citoyen,.
celui--ci pourrait-il ne pas le récufer , quand il craint infidélité & prévarication?
Le danger des délations, tout funefie que nous l'annon-'
cent les Annales Romaines, ne [eroit pas plus terrible que
'celui de l'impunité des crimes; auffi en nous dérobant au
premier par l'abolition des aaions populaires, nous avons
prévenu le fecond par l'infiitution de cette partie publique
qui, Juge, & par con(équent dépouillé des paflions humaines,'
RIt chargée de la vindiae des crimes, qui prêtàt (on nom
à des pourfuires que le zele [eul pour l'Etat & l'ordre public ne ce1feroient d'épurer, & qui pût raffurer tous les
·citoyens fans en alarmer un [eul. Ainu les pourli.lites de
fon miniHere ne font pas pour(uites de choix ; forcé de
veiller au bien de tous & de pourfuivre le crime par - tout
où il le découvre, c'efi fon minifiere feul qui efi lIaif dans
lui; c'efi la perfonne publique qui agit; il repré(ente les
droits de la fociété entiere. Mais la voix de l"l,1omme, le
zele même du citoyen fe taifent dans lui, & fes devoirs ne
font jamais mieux remplis, que lorfqu'il ne montre que la
per(onne morale du corps focial dont il efi l'organe.
er~
feule partie en matiere criminelle, ou plutôt il ne l'ifl
jamais (di(ent quelques publidfies) parce 'lu'elle ifl toujours
défintéreffie , que {on o.fflce principal (ajoutent - ils) efl de
chercher la juflification & l'innocence, bien plus que la con....
damnation de l'accufl.
.n
�166
Jou
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Cependant il femble d'abord que vouloir fe foulhaire par
la voie de la récufation aux pourfuïres de ce minifiere , ce
ferait vouloir échapper même aux pour[uires de la [ociéré;
& comme un ciroyen coupable ne pourroir pas récufer la
fociéré donr il dl: membre, fi cetre fociéré vouloit le punir,
il [emble qu'il n'a pas plus de droit de récurer la perfonne
à qui cetre [aciéré a confié [es pour[uires. Un accufé ne
peUt pas [ans doute récurer [on accufareur; il ne pourroir
pas récurer en général le minifiere public, c'el!:-à-dire, cerre
portion de Magiftrars qui rempliffenc les fonél:ions publiques; l'ordre des Loix [eroir alors inrerverti, -& la con[rirurion de l'Etat alrérée; mais le minif1:ere public ne rélide
pas roue entier dans la perfonne d'un [eul Magifirar , & les
regles érablies par nos Loix mêmes, pour que ce minil!:ere
ne [air jamais vaquanr, nous annoncenc affez que la récufarion el!: poffible : récurer un de ces Magifirars, ce n'eft
point récurer le minil!:ere public, ni fe fou{1:raire aux pourfuires de la fociéré.
En effet, les privileges accordés au minil!:ere public ne
font pas enriéremenc accordés au Minifl:re; ce n'efl: pas
l'homme qui eft l'accufareur ni partie publique; ce n'eft
pas l'homme dont les pourfuites fon't néceffaires: & fi nos
Loix one prévu le cas où il peut être remplacé, quand eftce que ces Loix peuvene avoir une application plus fenfible
que dans les récufations ?
La néceffité des récufations, fondée [ur le droit naturel,
a dù fe faire connoître dans l'origine de toutes les [ociétés,
& dans l'inll:itution de roures les Magill:ratllres. Les hommes ont dû [entir qu'en confianr à une portion d'enrr'eux
le droir de juger & punir leurs concitoyens, ils ne pouvoient pas les founraire aux paffions humaines, toujours
prêres à altérer & à corrompre les plus fages inHitutions.
Delà les Loix fur les récufari ns, qui fervene tour à la fois
à conferver la fplendeur & l'inrégrité de la lufl:ice, & à
raffermir la confiance des cir yens. Or en s'arrêrant un
inll:ant à cetre fuppofition, qu'une [ociété raffemblée Ht des
Loix fur les récufations, pour prévenir les abus de pouvoir
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67
dans les Juges, en excepteroit-elle alors le' Magiitrat chargé
des fonél:ions publiques, en exigeant que ce miniHere feroit
toujours rempli par le même individu? Ne permettroit-elle
pas que la perfonne pût être quelquefois récufée? Ce qu'elle
craindroit dans les autres MagiHrats, ne le craindroit-elle
elle pas dans ceux-ci? Non (dira-t-on) parce qu'ils font
parties; une partie eit-elle donc impartiale? Et tout, dans
l'e1fence du miniHere public, ne prefcrit-il pas cette impartialité? S'il n'étoit qu'accufateur, s'il n'exiil:oit pas autant pour défendre que pour pourfuivre l'accufé, pourroit-il
être chargé des aétions populaires, & ne faudroit-il pas les
faire renaître? La néceffité de pourfuivre n'éleve donc point
les Gens du Roi au de1fus des récufations; & la fociété
ayant voulu prévenir les abus dans les foétions de Juge en
général, [e refuferoit - elle 1L ne pas les écarter- auffi d'un
miniil:ere également confié 1L des hommes? Oui fans doute,
& ce ferait outrager le miniil:ere public, que de penfer
que tenant lieu d'accufateur, il emprunte les mêmes armes.
Si c'eH pour épurer les Loix populaires que nous les avons
tranfmifes dans les mains des MagiHrats, quel auroit été
l'objet de nos Loix, fi ces MagiHrats n'avoient été que des
accufateurs ordinaires? Les anciennes Ordonnances en ont
toujours parlé comme d'une Magiil:rature; les conc1ulions
du miniil:ere public ont toujours été regardées comme un
-premier jugement préparatoire. Les Capitulaires de Charlemagne, en parlant de la pourfuite des crimes qui lui eil:
confiée, difent expre1fément qu'il doit faire attention à ce
que la partie puhlique & la partie civile [oient également
fatisfaites , & que [es pourfuites font toujours à charge & à
décharge.
Or, s'il eil: vrai que le Miniil:ere public a des devoirs 1L
remplir; s'il eH vrai que l'aecufé lui-même a le droit de les
réclamer, qu'il doit trouver un proteéteur même dans celui
qui l'accufe; s'il n'y trouve plus qu'une partie & qu'un accufateur, il a donc droit de le récufer, parce que ce n'eil:'
plus la perfonne publique qu'il découvre en lui, ce n'dl: plus
le Magifrrat dont les Loix lui difent qu'il n'a rien à crain-
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are, s'if n'dl: pas coupable; c'eft l'homme, & l'homme pat'..
cial, & par conféquent l'homme récufable.
Il eft certain que che2l le peuple où le droit d'accufer
étoit commun' à: tous les citoyens, l'accufateur, quel qu'il
fût, n'étoit point récufable; mais c'étoit précifément parce
que cet accufateur n'avpit pas des devoirs à rempli.r envers
l'accufé; c'étoit un combat d'égal à égal, lme lutte' d'homme
à h{)mme, qui s'engageait fous les yeux des Loix. Mais combien ces Loix ne favorifoient-elles pas l'accuré! Les témoins étoient emendus en fa préfence; B pouvoit leur ré~
pondre, les interroger lui-même, leur oppofer un défenfeur;
il n'en eft pas de même parmi nous, & nos Loix lai!fent bien
moins de re/fource· à: l'accufé. Les dépolitions feules des té.·moins le juf1:ifiem ou le condamnent; pa.rmi les témoins d'ull
même fait, les uns peuvent être favotables à l'accufé ,. d'autres lui être contraires. Ces témoins, lmfque le Miniftere
publIc eft partie principale, ne font appellés que par lui feul;
il peut donc s'occuper plus ou moins de la jufl:jfication de
l'accufé; il peut donc, on ofe le dire à la honte de nos Loix
Criminelles, préparer la perte d'un citoyen, en ne produi.
fant que des témoins qu'il fait lui être contraires. Dans certains cas·, dit Airault, la preuve de l'innocence de l'accufé
dépend de la fidélité ou de la prévarication de la partie pu1Jlique; Ainli· l'on voit que par l'inconvénient même de notre
procédure, l'accufateur public a aujourd'hui bien plus. d'avantage que le citoyen accufateur dans Rome; {icelui-ci ne pouvoit
pas être recufé, c'eft qu'il rell:oit à l'accufé a/fez de moyens de
fe défendre. Ainli donc nulle comparai!On à faire entre le;;
pourfuites du Miniil:ere public & les accufations plilpulaires';
donc récufation permife. Ce feroit cependant abufer· de ces
principes, que d'en eontlure que tous les moyens de récuration qui'peuvent être propofés contre un Juge, pufIènt l'être
3uffi contre les Officiers chargés du Miniil:ere public; il en·
efl: qui n'étant fondés que fur des rapports de parenté, ne·
portent au.cune atteinte à l'impartialité de fes fonél:ions. Ull
Procureur du Roi rempli/fant le Miniil:ere public, n'eil: cellfé
~re' parent de perfonne; il ne Ce doie qu'à la fociété, qu~à,
.
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PRO VEN C P.
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la vérieé qu'il follicice; il e!1: à taus également; il ne peuepas, comme les autres Juges, fufpendre fes fonél:ions à fOI1
gré; fa récufaeion n'e!1: pas exclue par l'Ordonnance, mais
elle n'y e!1: pas déeerminée comme les autres par des cas
précis & prévus. Il refie les principes du droit narurel, ceuJe
de l'honneur & du devoir; & dès-lors il doit êrre convenll
que le Magifirat rempliH'ant les fonél:ions publiques ne perd
pas enriérement le caraél:ere de Juge; au contraire, plus fon
milJil!:ere el!: délicat & imporeant, plus il doir, s'il el!: permis de p:rrler ainli, voler au devant de la poffibilieé de· la
récufarion. Si les moyens propofés rouchent à l'honneur- de
fa pe.rfonne; s'ils entachent fes renti.mens; li au lieu d/êrre
la parrie publique, on l'accufe de n'êrFe que J.'ennemi caché
fous le caraél:ere augufie de Juge, alors la raifon & l'équieé
difent a1fez que fa récufaeion efi légitime, ou du-moins qu'ell'Q
peut êtr.e propofée. Ceete difiinél:ion., fondée en principe,
difpenfe. d'examiner les divers Aureurs qui one écrit fur cette
quefiion. Les uns ont admis la poffibilité de- la récufariofl
de la partie publique dans rous 15 cas; les autres, lorfqu'i~
n'étaie que partie jointe. Ceux-ci dans ce cas ne permeNenr
la .écufariGn qu'au dénonciateur;. ceux-là li l'accufé, comme:
fi ce miniHere ne confervoi.t pas, partie joinre ou principale,.
la même impartialité, mais ce ql:li a donné lieu. fur-taut lt
ceeee va.iété d'opinions, c'efl- qu'on a nr.ouvé· qlle l-es fonctions du Mi11,ill:ere public étaient véritablement & en biert
des chofes, différentes des fonél:ionS des Juges; & c'eft d'après cette différence, qu'on a conclu que les moyens de ré-cufarion fuffifant contre le Juge, ne devoient point l'être
vis-à-vis dl\.. Minj!1:ere public; c'eut été Daifonner plus conféquemment de difiinguer les moyens de récufarion, fans les;
tous exclure, pour deux minifieres diifél'ens;Jes mêmes moyens:
ne peuvent pas produii'.e· les mêmes effets;. mais s'enfllit-i~
de là qu'aucun de ces moyens ne puiiTe êrre COmml}n aux:
deux minifieres? Leur différence porc.e-t-elle fur l'honneur;,
fur la déli,ate1fe, fUE Pintégricé ,.l'impartialit-é & le devoi. ~
Si tout cela eH: commun entre les Juges & les Offici.erSl
chargés du Minifie.re public, pourquoi les moyens de r.écu.-
.
y
�Jou
t70
RNA L
fation qui auront pareils motifs pour <>bjet, ne feroient-i1s
pas communs aufIi? Cerre diainél:ion a été prévue par Boerius,
décif. 58; par l'Annotateur Imbert, liv. 3 ; Vouglans; M. le
Chancelier d'Agueffeau dans fa lettre S , & dans une autre
lettre, pag. 1°9, & par Mr. de Reguffe dans fon Recueil
d'Arrêts notables.
11
donc des circonaances otl ceux qui fi nt chargés du
Miniaere public peuvene être récufés, fans que l'accufé foit
obligé dans coutes les occafions de prendre le moyen rigoureux de la prife à partie. La pofIibilité de cerre feconde voie
aucoriferoit feule celle de la récufation, & l'on rie peut pas
en induire & donner même pour motif de l'impofIibilité de
récufer le Miniaere public, que la récufalion vis-à-vis de ce
miniaere ne peut être qu'une véritable récrimination; la définition feule de la récrimination, les premieres notions en
matiere criminelle, réfiaenc à ce fyaême. Récufer n'ell: pas
accufer; la récufation Iaiffe fubLiaer l'accufation en eneier;
elle n'écarte que la perfonne, & ces principes fone vrais visà-vis du Miniaere public, comme vis-à-vis de tout autre Juge.
Rien n'ell: dirigé contre l'Officier pour faire ceffer fes pourde la voir continuer
fuites; l'objet feul de la récufation
par un autre.
Il
encore une obfervation parriculiere qui fe déduit aifément des circonaances de la caufe; il faut faire une grande
différence entre le cas où le zele du Miniaere public agit de
lui-même pour l'ordre & l'intérêt public, & celui où il
excité par une dénonciation; il Y a plus encore, quand il
pour ainLi dire, le défenfeur fubftdiaire de la pauvreté, quand
le plaignant qui lui a délaiffé, adminiare les preuves, fournit les inaruél:ions & fait tout, excepté les pourfuites publiques; quand ce plaignant, qui doit répondre des dom!llages
& intérêts, reae partie tacite, dans cecce derniere hypothefe, l'on croit que la parenté du Minia~re public, quoique
partie principale, peut feule af!è2 influer dans la caufe, pour
qu'il y ait lieu à la récufation; ailleurs & toujours le Miniaere
public peue & doit être récufé, quand il s'agit de moyens de
fait, de partialité, ou d'un autre objet pouvant nuire à [es
fentimens & à fa délicateffe.
ea
ea
ea
ea
ea,
�171
Sur la feconde queftion , Mr. l'Avocat-Général examina ce
qu'eft en génér~l la récufarion. C'eO: un moyen de droir
( dit-il) une voie légale pour écarter fon Juge, fans en faire
fa parrie: Les récufarions doivent être vraies, réfléchies, &
non injurieufes; l'Ordonnance énonce une quantiré de motifs
de récufations, tels que la parenté, l'inimitié capitale, & elle
ajoute n'entendre exclure les autres moyens de droit & d~
fait. L'aél:ion n'eil: jamais que civile, ainli que l'objet, puifque ce n'eil: que la récufation. Mais néanmoins l'on peut al·
léguer pour motif de récufation un délit, un crime; l'intention de la partie qui récufe n'eil: pas de faire punir; elle ne
veut pas pourfuivre fan Juge, ni l'attaquer; elle ne veut que
le ,écufer, & non pas le prendre à partie. Rien ne peut lui
en faire une Loi, les circon~ances même peuvent lui rendre
cette dernier pourfuite impo'ffible ; pourroit-elle donc êrre la
viél:ime de fon impuiffance, & ne pouvoir pas récufer un Juge
dont la probité & les fenrimens lui feroient fufpeél:s? Lorfqu'on récufe un Juge, fous prétexre de parenté, ks termes
de la récufarion doivent êrre modérés & décens; fi l'on agit
autrement, le Juge a droit de fe plaindre; mais quand on
reproche au Juge des prévarications, quand la récufation eil:
fondée fur des motifs déshonorans, les injures fartent, pour
ainli dire, du fonds de la caufe, & néce/litent la preuve des
faits injurieux.
.
Le récufant par fa requête eft toujou.s cenfé demander
deux chofes : la premiere, de n'avoir pas pour Juge celui
qu'il récufe : la feconde, de prouver la juil:ice de la récufation, fi elle dl: conteil:ée. Si fur la communication de la
requête qui eil: un préalable, le Juge récuré s'abHient, le
premier objet du récufant eH rempli, & le fecond paroît
l'êrre au/li, parce que cerre abil:ention femble annoncer que
la preuve qu'qifroit le r~cufant n'eil: pas néceffaire. Cette
preuve éroit relative & fubordonnée au cas de conre!l:ation 1
fi l'abil:ention fait ceffer toute conrefl:ation, cette preuve
devient inutile; mais fi la conteftation pouvoit renaître
malgré l'abil:ention, alors le recond objet du récufal,t, 'lui
C{lnfiftoit à être admis à la preuve de la 1écufation, renait
DU
YALAJS
DE
PROVENCE.
y~
•
�172.
Jou RNA t
à fon tour; l'infiance liée par la requête 1en récufation fuh.:
fifie & doit êrre vuidée, tout comme fi le Juge récufé
n'avoir pas abHenu. Si les faits fone injurieux ou calomnieux,
on ne fauroit fans doute refufer au Juge le droit de fe
plaindre & d'exiger des réparations. Comment & quand le
peut-il? L'Ordonnance s'efi expliquée là-deffus aux arr. 24,
25 & 30 du titre des récufations.
Plulieurs Auteurs penfene que pour que les fairs injurieux
puiffelH permettre la demande en réparation, il faut qu'ils
laient conreHés & jugés; il faut avant toutes chofes qu'il
y air eu prononciarion, & il n'efi permis de faire informer
fur caufes de récufations ignominieufes qu'après le procès.
Dans l'alterna rive de l'Ordonnance, ou l'on conrefie la récufarion comme frivole, alors le Juge fair condamner le
récufant à l'amende; ou l'on comeHe la récufarion comme
frivole, & en même temps injurieufe & calomnieufe, alors
il y a amende & droir, après le jugement, de demander
répararion; ou enfin l'on conrefie non fur quelques motifs
de récufation pertinens & admiffihles, mais filr d'autres
moyens injurieux, ou fur de fimples calomnies inférées
dans la requête; & alors, quoique la récufarion foit admife même fans amende, l'on peut après la récufarion
j~gée, & fur.la preuve des faits, demander des réparations.
D'alltre part" l'aveu des fairs peut êr!e général oü partiel, ,exprès ou racite. Efi-il général? Tout dl: fini par le
jugement de la récufation, ou même par une fimple abftemion. En-il partiel? La preuve des faits conrefi:és èfi:
admife " & alors s'il y a déboutement faute de preuves, il Y
a poffibililé de réparations. Si l'aveu eH racite, il laiffe
auffi la contefiation incertaine; il femble que ce foit -là
l'hyporhefe de la caufe. En fair, d'après le 'texre de l'Ordonnance , le Juge ne peut fe plaindre fans cantefier les
faits; l'effer de cerre conrefiation efi de favoir fi le récuf:,nr fera ad mis à la preuve, ou fi cette preuve réuffira; le
Juge ne peut donc fe plaindre, fans s'engager dans cet
examen que la Loi elle-même a rendu néceffaire, puifqu'elle
�nù l'ALAΧ nI! PROVIlNctl:
'173
'n)a actordé des réparations qu'à défaut de preuve, & outre
les condamnations d'amende, conféquemment aptès un jugement.
L'ahftention fait cefi"er la poffihilité de l'amende, parce
que l'Ordonnance ne prononce l'amende que dans le cas du
déboutement de la récufation, & que l'on ne peut plus débouter d'une récufation qui a été acceptée i l'abHention a
également rempli l'objet du récufant ; mais fi le Juge ré'cufé, & au bénéfice de fon abHention , introduit une aél:ion
accefi"oire en réparation des faits injurieux, dès que la récufation elle-même avoit néceffité de les coarél:er, ils ne
doivent point être féparés ni de cette récufation " ni de
l'inHruél:ion qui lui eH propre. Qu'il y ait injure ou non,
elle eft ·ahfolument dépendante de la récufation; elle n'a
pas été commife d'une maniere ordinaire i. elle n'eft pas
dans un libelle quelconque; on la trollve dans une requête
en récufation : il faut donc, fi les Loix ont déterminé une
maniere parriculiere de procéder pour l'inHruél:ion des récufat ions , que l'injure qui en eft dépendante, foit jugée
[elon cerre marche particuliere.
S'il en étoit autrement, pourquoi la Loi eut-elle fait de
la récufation un moyen de drait,. une ,voie légale, un privilege fpécial, une exception aux regles. générales? Poùr-r
quoi la Loi eut-elle donné aux parties la fàtale p~rmiffion
de récufer, fi par cela feul que le Juge s'abftient, il eut eu
le droit de faire informer, fans que la parcie récufante eût
pu prouver la véri,té des faits que le Juge attaque? Avoir
la permiffion de récufer, n'eft - ce pas avoir le droit de
prouver la récufation, d'en montrer la juHice, la nééeffité"
la vériré? Comment donc ce droit pourrait-il êrre c,oncilié
avec celui du Juge récufé qui s'abŒent & fair informer?
S'il fait informer, il Y a donc un délit; & comment peuril yavoir un délir avant que, la récufatJon fait prouvée ca-,
lomnieufe? La récufation elle - même ferair - elle donc un
délir ? Non: toutes les notions repugnent à cette idée. En
effer, Me. Etienne....... a bien ou mal récufé; un jugement
[eul peut avoir ~atué fu~ cet,te_ alternative. Mais avant ce
�Jou
174
B. N A L
jugement, Me. Etienne....... ne peUt être cénfé placé dans
l'une plutôt que dans l'autre. L'abfiention du Procureur du
Roi ne peut point faire ceffer cette incertitude, 1°. parce
qu'il 'n'avoue ni ne défavoue les faits; 2.°. ,parce que quand
même il les défavoueroit, ces défaveux feuls ne prouveraient pas la calomnie. L'abfiention du Procureur du Roi
laiffe donc l'état du récufant incertain, c'efi-à-dire, qu'elle
ne décide pas s'il a bien ou mal récufé. Or, tant que cela
n'efi pas décidé, comment peut-il y avoir lieu à des pourfuites, criminelles? Il faut avant toutes chofes ; que le récufant foit placé 'de fait & de droit dans l'une des deux
hypothefes. Une feule le rend coupable, & c'efi le jugement de la récufation qui feul peut le démontrer tel; fi
ce jugement n'efi pas rendu, toutes les pourfuites doivent
être fufpendues.
Le délit du récufant n'efi donc pas d'alléguer les faits
de récufation , mais d'échouer dans la preuve des faits. Or,
fi le feul délit efi de manquer la preuve, il faut donc, avant
de pourfi.lÎvre ce délit, qu'il exifie, c'eft - à - dire, que la
preuve ait été admife, & que le récufant foit débouté faute
de preuve. Touées les poulfuires qui pourroient précéder
le jugement &' la preuve des faits', ne porteroient que fur
la !impIe allégation de ces faits; & dès-lors ces pourfuites
,
feroient illégales, parce que ce n'efi pas cette allégation
qui en le délit. Le Procureur du Roi pouvoit fans doute
s'abftenir , fans que cette abfiention fût l'aveu de la vérité
des faits, & fans le priver par conféquent du droit d'en
exiger des réparations; mais il falloit pour y parvenir, qu'il
déc1ar~t que ,les faits 'étoient faux, qu'il accept~t la preuve
du récufant, qu'il lui enjoignît de ,qa remplir, fans quoi il
prendroit lui-même la voie criminelle. Dès-lors le récufant
étoit forcé de remplir la condition qu'il s'étoit impofée, &
cette condition prévue & exig~e par la Loi ne peut 'dans
f
j1
aucun cas etre 'aggravee.
.
Outre les faits de la récufation, il en exifie de plus graves
encore, qui ont été coartés fur' le barreau, & une inHruc,..
tion fommaire ne pourrait pas être fuffifante. Un Magifirat,'
.
A
,
�Dl1
PALAIS
DB
PROVENCll;
17)
un Officier chargé du miniftere public eft dénoncé à la
Juftice comme un prévaricateur, un homme ayant abufé de
fon état, vendu fa p-roteél:ion, & par-là indigne de l'état
honorable dont il eft revêtu; il doit compte de fa conduite
à fes fupérieurs & au public dont il eft le vengeur; il a
attefté à la Cour qu'il était honnête. L'éloignement de tout
foup~on de la perfonne facrée du Magiftrat !le permer pas
de douter un inftanr qu'on ne life dans fon ame, & qu'on
ne lui rende le plus grand fervice, 'en le mettant à portée
èe rendre compte de fa conduite à tous fes concitoyens.
Ainu il faut informer; & fi le Procureur du Roi n'eft pas
coupable, fi Me. Etienne....... n'eft qu'un calo'mniateur hardi,
un accufateur téméraire, la fociété doit être vengée, la
Magiftrature raffurée, & Me. Etienne....... puni.
Mr. l'Avocat-Général conclut à ce que l'appellation & ce
dont étoit appel fuffent mis au néant, & par nouveau juge~
ment le décret de prife de corps, ce qui l'avoit précédé 4:.
fuivi fuffent déclarés nuls & comme tels carrés, fans dommages-intérêts en l'état; & de même fuite il requit qu'il
lui fût concédé aél:e de ce qu'en prenant pour dénonciation la requête de Me. Etienne....... il rendoit plainte des
faits inférés dans la requête & autres dont Me. Etienne.......
avoit demandé aél:e fur le batreau, & que fur les faits il fût
informé là fa requête, avec permiffion à Me. Etienne.......
de fournir rôle des témoins, fauf & réfervé après le jugement de la procédure à Me. Etienne....... fon aél:ion en dommages & intérêts; & tant à lui réquérant qu'au Procureur
du Roi celle en calomnie & diffamation, le cas y échéant.
Par Arrêt du 1') Juin 1780, les conclufions furent fui":
~ies. Plaidant Mes. Gaffier & Simeon fils.
(
\
•
�JOURNAL
•
ARR Ê T
XX
v.
En matiere de vérification d'écriture privée, la preuve par
comparaifon d'écritures & la preuve par témoins ne peuvent
point marcher' enfemUe. La preuve 'lJocale ne doit être admife qu'a défaut de la premiere , & l'enquête ne peut être
prifi: par les Experts.
L
E 25 Février 1779, Marguerite Lieutard fit protefl:er
.
une lettre de change de 6500 liv. tirée fur François
Laburthe de la ville de Touloure, payable au 20 Janvier de
la même année pour valeur reçue comptant, & par le même
exploit elle l'affigna pardev3nt les Juges-Conruls de la ville
de Touloufe, en avération de la lettre de change, & en
condamnation du montant.
Laburthe déclara au bas de la fignification, que le feing
ni le -corps de la lettre n'étaient 'point de fan écriture ;, il
fut ordonné qu'avant di:re droit, les parties fe pourvoiroient
pardevant qui de dr0it pour être procédé à l'avération de
la lettre de change.
Six mois après, .la DIre. Lieutard s'étant pourvue à la
Jurifdiél:ion Confulaire de la ville" de Marreille, & ayant
obtenu une Semence, fit- fignifier un aél:e extrajudiciaire à.
François Laburthe, par lequel, en défavouanr les aél:es de
la procédure qu'ellé avoit fait jufqu'alors, elle-déclara qu'elle
alloit pourfil.jvre en vertu de cerre derniere Sentence.
Laburthe répondit une feconde fois' n'avoir ni écrIt- ni
figné la lettre de tohange, dédara former 'ôppofition an.
commandement qui lui étoit fait de payer, & affigna la.
Dlle. Lieutard à la Jurifdiél:ion Confulaire , à l'effet de venill'
voir révoquer la Sentence de défaut.
Laburthe mourut, & la Dlle. Lieutard obtint une feconde Sentence de défaut des Juges-Confuls de Marfeille,.
qui confirma la premiere. Sur la fignification qui en fut faite·
~ la veuve & ~ fon fils, ils en appellerenc pardevant la,
-,Cour)
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
'77Cour,. & offrirent un expédient,. portant qu'axant dire
droit à l'appel des Sentences, la DHe. Lieutard ferait pm-:
céder dans le mois, par Experts convenus ou pris & nommés d'office,. à la vérification tant de l'écriture,. que de la
fignature de la lente de change,. eu conformité de. l'Edit:
de 1684;.
La DUe. Lieutard en offrit un conforme à celui des hoirs
Laburthe
, en y ajoutant le. pouvoir aux Experts. d'auie-.
,
.
temOIns.
La feule quefiion ql11 divifoit tes parties, coniifl:oit à<
favoir fi la preuve par comparaifon d'écritures & la preuve:
pal: témoins pouvaient marcher enfemble 1 & êtœ faiteS>
<jans le même temps.
On difoit pour la Dite. Lieutard,. que pour la vérihcatjo Dl
d'une écrite privée, les Ordonnances exigent la préfence dU!
~uge. L'art. 5 du titre 12 de l'Ordonnance de 1667, porte:
exprefiément que les reconnoiffances fi vérific.ations d'écritures:
privées fe feront partie préfente ou duement appellée. parde.vant:
le rapporteur, ou ùl n'yen, a point " pm·devant.l'ull des.luges;
lJ.ui fera commis ,.pourvu fi non autrement que la partie comre.
laquelle Ofl prétend fe ftrvir. des piece.s, foit domiciliée ou. pré:fente au lieu où l'affaire tfl pendante, Jinon la reconnoijJànce:.
ft fera pm'devant le Juge RoXal- ordinpire du. domicile de 1Cl'.
partie..
Ce~te'attribution au Juge Royal du domicile de la par.tie:
efl: conforrne à l'art. 16 d.e l'Edit de Cremieu de 15:36,. 1t.
la Déclara.cion. du. 15. Mai 1703, r.appor.cée par Boruier. fur'
l'arr. 1 du titre· 5 de l'Ordonnance de 1673; elle efl: atrefiée:
Rar le Sty.te g.énér.al de Gauret fur le titre. 1..2. de 1'0rdonnance_
lie 16.67, tom. 1" pag.274"
• La Nove.lle 73 déclare expreIrémeot que la comparaifore
d'écritures efr un: examen inférieur à la. dépofition des tfmoins ~ que cependant. on ne doit point la rejener,. dès qu'oll'.
peut la confirmer. par le· témoignage des. témoins:. mm qucdJ.
pœnitùs rejicie.nda fit épIa jèrépturœ pel' comparatianem ex:zmÏTlfltio, fed quià {ola nOtl fufficit, fi per accejJianern uj/ium co
frmpndlz eJl. JufijQien. fait voir dans le P,TéambuIe. de ~
Z.
�J,if
.,
!
0 U RNA L.
,
•
J:.oi par combIen d'eveiiemens le femg & l'ecnture d'une
perfonne peuvent recevoir du changement. Il n'dt donc rien
qu'on ne doive mettre en ufage dans une matiere fi délicate
pour découvrir la vérité. Quelque fujet, dit Catelan, que [oit
ti erreur & il équivoque le jugement des Experts, il faut hien
le jùivre, quand il n'y a rien de mieux pour éclaircir le fait
cOlueJlé. Mais cette preuve doit céder l'autorité plùs fûre de
la pr~uve qui réfulte des témoins.
L'art. 7 du tit. 12 de l'Ordonnance de 1667 porce, que
l'écriture tdi de la main du défendeur, elle fera tenue pour
reconnue aa profit du défaut, & que fi elle efl d'une autre main"
( comme dans le cas d'un héritier) il fera permis de la vérifier, tant par témoins que par comparaifon d'écritures puMiques ou authentiques j ce qui dl: encore aneHé par Jouffe fur
cet article.
L'art. 12. du titre des teconnoiffances d'écritures en matiere criminelle de l'Ordonnance du mois de Juillet 1737,
s'explique en ces termes: pourrront en outre être entendus
cOmme témoins ceux qui auront vu écrire ou .figner les écritures ou fignatures privées, ou qui auront connoiJfànce en quelqu'autre maniere des faits qui pui.flènt fervir en. étaMir la_
'Vérité•
. Cette décifion était ttès-bien établie par Bornier fur l'art.
7 du tit. 12 de l'Ordonnance de 1667, avant que celle de
1737 en eût fait une nouvelle Loi; de forte qu'il n'ell: plus
permis aujourd'hui de Ja révoquer en doute.
En vain oppoferoit-on l'opinion contraire de Boucher
d'Argir dans fes notes fur Bornier. Cette opinion, qu'il autorife fur ce que la Déclaration de ,1684 ne donne pas exprelfément le pouvoir d'ouir témoins, n'ell: fondée ni en
droit ni en raifon. En effet, la caifon dit alfez qye la vérifkation de l'écriture d'un tiers, par la feule comparaifon de
fes écritures, peut induire à erreur j elle n'eH fondée que fur
des conjeB:ures , au lieu que celle qui à ces conjeB:ures ajoute
la dépofition des témoins, entraîne une entiere conviB:ion•
.La premiere des preuves, & qui fert de fondement 11
tOUtes les autres, eH la preuve tell:imoniale des chofes qu'on
a
Ji
a
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
179
a vues, quit funt oculis fuhjeaa jidelihus; le Juge qui la reçoit
de vive voix, en pefe les circonfrances, en voit la néceffité.
Or, cette voie efr li fa~orable dans ces circonfrances, qu'il
a été jugé, par un Arrêt rapporté par Catelan, tom. :l.,
liv. 2., chap. l, que l'enquête, qui prouve la vérité de
l'aél:e, doit même prévaloir fur le rapport des Experts qui
le déclareroit faux. Il efr vrai que Vedel, en rapportant un fecond-Arrêt femblable & pofrérieur à la Déclaration de 1684,
femblë, au tom. 2, pag. 314, refi:reindre l'enquête aux té~
moins numéraires ou infrrumencaires; mais outre que 1'0r-:donnance pofiérieure de 1737 décide expretrément le contraire, cet Auteur donne à entendre, 1°. que les témoins
qui dépofent avoir vu ligner, font préférables à des Experts;
2.°. que la dépolition des autres témoins que ceux de l'aél:e
doit être admife, quoiqu'inférieure à la vérification des Ex7'
peres.
Ainfi le fyfiême de l'Annotateur de Bornier, qui tend ?t
exclure dans ces circonfrances le fecours des témôins, man,
que en droit, parce que fi la Déclaration de 1684 ne dit
pas qu'on ouira des témoins, elle ne dit pas non plus qu'on ne
pourra en ouir. Nous avons pour maxime que les Déclarations étant de droit étroit, ne reçoivent aucune extentiQn i
ce qu'elles n'ordonnent point_ en laitré à la difpofition du
droit commun. Or, i,ci l'Ordonnance de 1667 fait notre droit
commun; elle veut que l'écriture d'un tiers puitre être vérifiée par témoins & par Experts. Cette Ordonnance n'a été
abrogée ni par une décifion contraire, ni par un ufage op-pofé. En effet, à l'autorité de Bornier & de loutre, on pellt
ajouter celle de Mr. de Montvalon & de Gauret, qui ont
écrit apres la Déclaration de 1684' Le premier dans [ail
Précis des Ordonnances, vo. à'Vératioll , pag. 4 l , attelle l'ufagé
de faire cette vérification par comparaifon d'écritures & P"lr
témoins. Il y a (dit le fecond dans fon Style Univ,erfel , tom.
l , pag. 249 ) deux fortes de vérifications il' écritures pt:.l'mifts
far l'art. 7 du tit. 1:2. de 'l'Ordonnance de 1667, J'Uni: par
t~moills) (( f autre. pat comparajfan d'écdtures. Les Experts dol--
Z2.
�1110
"
Jou RNA L'
vent avoir le pouvOir de les ouir; cette preuve efl: néce1Taire
"{Jour les éclairer dans leurs opérations.
On répondoit pOUl' les hoirs Laburthe, que quoique le faux
& la limple vérification 4'écritures offrent dans la découverte
certaines nuances de correlation, il efl: néanmoins certain
que ces deux aB:ions , dont l'une tient au criminel & l'autre
au civil, font gouvernées par des principes di/férens & par
,une forme oppofée.
Le faux qui fe peut, pourfuivre' tant par comparaifon d'écritures que pal' témoins, ne comporte pas dans la premiere
'ae ces preuves une vérité intellettuelle ; il faut que les Experts ne fe déterminen l' que par une connoiifance abfolument méchanique. Delà l'on voit que dans [Qurfs les procédu'res en faux, il ne leur a jamais été permis d'appeller
(les témoins' à leurs 'opérations pour les éclairer & pour les
affermir.
La preuve vocale n'efl: point incompatible; les Ordonnances la delirent même, mais elle ne doit paroître que
fous la forme de \,information , fans pouvoir être, pour
ainli dire, aifociée à celle qui fe tire de la comparaifon
d'écritures..
La {impIe vérificatio~ d'écri'tures efl: au contraire toute
civile; & de même qu'un demandeur eH tenu, de libeller
fon exploit, ici il doit prouver que la lignature fur laquelle
il fe fonde eH véritable. Auffi aucun Tribunal ne prononce ./
fur une demande qui a pour principe une promeife ou une.
<>bligation privée, fans que la vérification ,s'en faife contradiél:oirement ou par défaut.
Cette vérification doit-elle fe faire par comparaifon d'écritures ou par témoins? Les Loix ne rejettent ni l'un ni
l'autre; elles delirent feulement que la feconde foit .admife
'à défaut de la premiere. L'art. 7 de l'Ordonnance de 1667
annonce que cette preuve fe fera tant par témoins que par
comparaifon d'écritures publiques ou authentiques. Et l'art. 8
'Veut que la vérification par comparaifon d'écritures fait faite
'par Experts fur les 'pieces de comparaifon dont les parties
conyiendront:
/
�hu
PAL A: 1 S ·:D-Il:: PRO VEN C n;
dJr
L'art. 7 de l'Edit de '1684 porte, que' fi ail prétend que
la piece ef!: écrite ou fignée d'une autre .main que celle du.
défendeur, le demandeur nommera un .Eipe.rt, & le Juge
en nommera un autre', pout prQcéder à la vérification de la
piece fur des écriturès 'publiques & aUlhèmigues qui- ferono
repréfentées par le demandeur.
)
'. •
r
Quoique cet article ne parle pointe de la preuve vocale,
où ne prétend point lui donner l'exclufion dan~ toutes les
hypothefes; mais on obferl'e avec le .texte de ce.tte Loi, ,
que le premier genre de preul'e requis ef!: celui tiré .des.
'pieces authentiques. Si l'Edit affigne 'd~abord .celle-là;.c'elb
POUt lui donner le pas, & non pour• .condamner l'autre;
c'ef!: auffi fous ce rapport que le' fens 'en ef!: expliqué par
Bomier fur l'arr. 7 de l'Edit de 1684, & fur l'art. 8, du
titre 12. de .l'Ordonnance de 1667; paT Rodie.r en fes quef-.
{ions fur 'l'Ordonnance de 1667, pag.: i8J"; par, Serpillilli
en fdn Code cil'il. fur la même Ordonnflllce ,. pâg.' 17"H par
Salle fur l'ar.t,- 9 'de. ce _titre, pag. 19'i', -& 'par Domat en
(es Loix civiles au fupplémem , pag. 232. Les Commenta"
teors , en, admettant la preuve vocale, 'doiment pour motif
nécelniire' llin'exifience des titres; d'où il._ faut condure. que
ce n'eit qulà leur défaut qu'on a recouçs aux, témiJins•. '. )
'L.a p~êfence du Juge- au verbal n;ef!: requif<i que' pour la
reconnoiffance.'volontairè de .l~écriture, pour ,le paraphement
des pieces en cas de dénégation, pour les autres formalité,s
préalables ou préparatoires., & non pour la vérification.
(Boutaric, fur l'Ordonnance de 1667; tit;,,2, des'.compulfoires
& cal1àtions ,'pag. '102.) •
'".
"...,"
Il ef!: tellement vrai que,fa.préfence· n'elb pél.int 'néée1faire
à la vérification, que la comparaifon d'.écritùres ,étant le
propre fait 'des .Experts , tombe uniquement {iu' une opéra~
lion infirumentale , où les fens participent moins que l'ar't
expérimemal; b. Dlle. Lieutard en co.nvient dan~ {ou- expé<lient, puifqu'elle renvoit les témoins aux Experts, & non
au Juge: mais les Experts peuvent-ils les entendre? La
çompulfion d'une écriture peut-elle être affimilée à ces au-
,
�1-«2.'
, J6
U:lt N Ji. ,L
tres aél:ions expérimentales 0\1 PaffiaaDl;~ pes témoins ai
des fapiteurs peut influer?
Le témoin & le fapiteur ne fQnt c1ellinés qu'à aider les
Experts dans les ,mêmes Qbjeos qui foqt fournis à leurs opé.
rations; !Uais le .témoignage d'une perfo!lne qui a vu écrire
le billet, n'a rien de commlln ni de relatif à ce travail ou
à ces connoiffances ,méchaniques qui tendent à déchiffrer
une 'écriture. 'L'un certifie un .fait, l'autre deffine une forme
d'écriture. ,Or comment marier ces, qeux preuves, & les
faire Iccvir l'une à l'a\ltre, .QU pour mieux dire, cOIDment
des deux n'en compofer qu'une feule·? .
Bi elles font contraires, fi l'Experr s'en tient à la defcription matérielle que fon rapport renferme, & le ,témoin.à fa
dépolition verfée dans l'enquête, alors chaque preuve paroit
fous fon vérital>le jour, fans rien emprumer l'une de -l'autre!
Delà chilcune re~oit .fon caraél:ere parfait, & ne fe-trouvant
plus, pour ainli dire,1 amphibique dans fa formation, elle produit l'effet qu'on doit en attendre. Mr. Levayer,. en fon Traité
de la preuve par comparai[on d'écritures, rapporté par Danty,
pag. 649, fait très-bien [emir ce mélange monfirueux de la
déclaration des Experts, ratione.materiœ, & de la dépolition
des témoins qu'on p.céte.ndoit y acooler, pour du tout en
dfe{fer un,rappoFt.d'avis. En effet, ne feroit-il pas inoui qu'un
Expert s'avisât Ide dire qu'une telle fign;ltuce efi fauffe, parce
qu'il le conjeél:ure de ce gu'on eil venu, lui. affurer? Dans
ce moment fa fcience réclamée par la Jufiice, & qui doie
feule prononcer, feroit ~ire à l'écart; il n.e' parleroit plus
de lui-même; & compofant fa détermiQation fur des pré.,
fomprions infpirées', il aurQit l'air de dexiner ou de réfléchir
l'opi'nian des autres plutôt 'que la uenne.
Par Arrêt du 17 Juin 1780, au rapport de Mr. le Confeiller
de Vitroles, l'expédient des hoirs Lab.uÎ:the fut re~u, aVCQ
d,épens. Ecrivant Mes•.JRey.Jlaud &. RQubaijd.
t
�DU
PALAIS
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ARRtT
J
PROVBNCE,
183
.,
XXVI.
Une Sentence peut-elle. être exécutée nonohJlant rappel, même
" pOUf les dépens, IOffqu'ils font confidérahles?
Es habicans du hameau des Roches, terroir de Claret,
s'écant fyndiqués pour demander aux formes de droit &
causâ cognitâ l'écabliIfemenc d'une Succurfale, le College
d'Embrun & le Commandeur de Gap décimateuts furent
appellés; il Y eut defcence fur les lieux, verification, < dé~
lIombrement, enquête, rapporc de commodo
incommodo.\
Les décimateurs confencirent dans une requêce incidente à
à ce qu'il fût accordé un fervice aux habitans du hameau
des Roches; mais ils demanderent que ce fervice Rtt fait
par le Vicaire de la ParoiIfe de Claret, qui feroit transféréau hameau. La Communauté de Claret s'o~pofa à ceue
transférence. Après l'inO:ruél:ion, imervl.nJ le 7 Qél:obre
1773 une Sentence de l'Official de Gap, porcant qu'il ferait
établi une Succurfale au hameau des Roches. Les. décimateurs furent déboucés de leur requêce incidence avec dépens.
Appel (impie de cette Semence au Métropolitain de la part
du College d'Embrun. Les habicans des Radies appellerent
dans cette inO:ance Mre. d'Oliva ri , C.ommandeur de Gap,
en commune exécucion, & demanderent le nonobftant
appel. L'Official forain de Gap rendic une Ordonnance le 8
Février 1777, portanc le nonobftanc appel. Les ;décimateurs
attaquerenc cecte Ordonllance par la voie de l'.appel comme
d'abus. "
"
On difoit pour eux que le nonohfla"nt appel ne peut avoir
lieu qu'autant qu'il eO: prononcé par une Loi précife. Ne
pas déférer à l'appel eft- un attentat; ordonner l'exécution
d'un jugement au préjudice d'un appel dédaré & connu "
c:'eft renverfer l'ordre des Jutifdiél:ions; c'eft fe donner un
d!'0it qui !le peut dériver que de la Loi; c'e1J: contrarie~
L
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18'of
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l'Ordonnance qui limite les cas & les hypothefes dans 1efquelles':l . ae1iobŒant a-ppel- peut àvoir lieu. Mr. de Montvall~u .dans fon 'pr~çis. d~s Ordonnances,
11°. appel, n. 3, b'Ù il a raifemblé tdus les cas de nonobftant apRel, obferve, in fine qu'il a lieu en Jutifdiétion EccIé.fiafiique (\lor(que ·Ia. Jomme' n'excede 25 li\". , &·qu'è1le efi:·
due par un tiffe. If cite"l'aft. 62 de. l'Ordonnance' de Blois.
L'Auteur du Diétionnaire canonique établit la mê.me regle•.
L~Ordonnatié6· d'ê '16/57- i'~itu titre' .œsi 'matiere,ç, forri,maires;
a6t.I 13 , fi:œ" l'éS! eas 'd à Ils ,lefquels le nonobflallt llPpel doit
avoit .l'téu ~aaos' IPes' 'di'lèrs 'Tribunaux' " foit ordinaires, foi~.
d'.aHtibLftiôîJI~,Le~Juge4~'Eg:Jife-.rl·e s'Y' trouve pas compris.,
.,..Ii,'~rt·hire:.3''6'jil-e I?Ed~t ete '1695, qui.n'efl-que le _développe~
mèm'de1~t'ârt:) ~,r'de 1 OrlionnanCü de' Blois, ,porte: que-les.
a'pp'ellatforts comme d'abus' n'auront auclll~'efI~t fufpenfif,mais re-ulel1'leu.t dévolutif en. 'cas de correétion & difcipline·
e:édéliàHique. C'eil: aufl1' .ce que le Clergé a. r,éCumé aù.
t'cil' • 'v;·~e:i(eslM~hlpües';)pag. J:5-4"f. ' : .
, . 1 " '1
!û'l:-ne kitJtl:p'as' dônfo drb le S.el'vice Divill & ·les 'oBjetS:
de!Xfiféiplitle j'all'€c.i,ulie augmentatiou, de fi>rvjce."ç,e,sJobjets:
differ nèt'enrr,'eux norablèmenn.. L'es'Ordonnanc,es fur le Service Divin LUppofe[.)t, 8es établiifemen.s (aits, des fQndations.
établies. lb n'efl pas, étonnant que les O~dotJ.nances rendues flida> nÙlnie'te dont :le Service· Divin 4oiq· être célébré ,.
[oient exécuwires; 'l1onobflarit l'appél. .ill fallU'q.u'.e,n ~àtten.,
datft:,ilo/' ait ,U.[flrord.re~. Airiff, les}Ordollnapces, palU' .IiI.l fQur.,
niturel des .ornèn1ans iJéceffiiires POU.l{ le Ser\!ice· D,ivin doi\(ené êtreerrexécurees pTo.",i[oirement &,' nonobl1ant. rappel.
Dans~oé)dlS':llèxifi e un titte ,...un .étabJ.i{fem~nt ..· dont·.l'exi[t'emre! ml! IàiFlP'is5t\,la'tieue .de. cçnteflatio:ti•• 0ll) r.~p-al:è .non?bf-.
tant appel une Eglife qui tombe en ruine; mais Q!l. .-ne"
cODfiruit~Ras uh ,~J,ife Ihcbncl>1buit~'Ppel ,} tapt- q~;e. ~~ que[.
tion de favoiti s.'il 'faut"Ja c:onflmtire el}: Mcore in p~ndulo;,
CèDàl1d~ eU exifle:,' lril 'eft: -<terrain 1 qu'elle'ldQi~ ftr~ .réparée.:
4-infi & par le mêmeQRt:incip.éi, ljllà!ld un l\!l1nifire., parbiffiat
1è trouve établi, ~Jefu ceiiaiii;qutil;:fauc -le, ndjlrlj!JL ~j1·'Jl.otlne,
~ I,>rovifioœ de.s, àlime.ri.s ~ uI1IMinifi-r~~. e}illr11;t fty, d~ntJ
.
.
.
I:é.tablijfemepq;
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PALA'ys'
DE
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,
PROVENCj!.
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IS~
l'établiffement n'ell pas contefié; mais' il efi fans exemple
& contre tout ordre qu'on établitfe une Paroiife provifoirement, fur-tout au contentieux.
Fallût- il appliquer ici l'art. 36 de l'Edit de 169'i, qui
porte que le Juge d'Eglife peut ordonner Je nonobfl:ant
appel, auroit - il jamais pu l'ordonner pour les dépens &
pour les arrérages paifés du non fervice? En fuppofant qu'il
l'eût pu, il auroit fallu en aifurer la refiitution en ordonnant le cautionnement. L'Ordonnance de l'Official efi donc
abufive quant à ce; elle l'efi de plus en elle - même. Les
dépens forment-ils objet d'exécution provifoire & nonob[tant appel? La chofe efi bien douteu[e. Ferrieres, v<>. anticfper; Bornier & Rhodier fur l'arr. 14 du tir. 17' de POrdonnance de 1667; Sallé fur l'art. 10 du rit. l'i de l'Ordonnance , concernant la récréance & fequefl:re des Bénéfices; Lacombe, vo. récréance; Jou1fe fur l'Edit du Commerce, pag. 272, foutiennent que le nonobHant appel ne
peut pas avoir lieu pour les dépens dans le cas de l'Ordonnance.
.
Ainfi l'abus perce 'de tous tes côtés; défaut de pouvoÎr;
contravention à la Loi; défaut de cautionnement préalable.
préjudice irréparable en définitive; novarion dangereu/e.
On répondoit pour les habitans du hameau de.s Rqche5;,
que le chapitre ad audienûam extd de Ecclpis œdif. di! clairement que nonobfl:ant l'appel du décimateur , on doie
porter des fecours fpirituels dans 1111 lieu éloigné de la Paroi1fe, lorfqu'il efi vérifié que vii/a tantùm diflat ah Eee/pœ
parroehiali, CÙf/1. pluviœ inundant, ut non POjJillt Parrochiani'
fine magna dif1ieultate ipfam adire, undè non va/ulnt congru!>;.
<empore ecclpaflicis c1fhiis intereffi.
Quelle eH la nature de l'Or.donnance que l'üffiEiaJ a per-.
mis d'exécuter nonobfiant appel ~ Ou elle forme UA réglement de police, d'ordre & de décen~e eccléfiaHique, ou;
un régi ment fur le' Service Divin: dans ces deux cas ~
l'Edit de 169'i n'eH-il pas exprès? L~exé~Ulion proviwir~
y efi récommandée par-tour. Le Souverain veut cerra1ne_
tr..ent maintenir le cuJte daps [es. Etats; il veut donc o)l'eUt
Aa.
�~ 86
10
't1 RNA L
porte des (ecours dans les endroits qui en (ont privés, 8è
il le veut, parce qu')l fou met {es peuples à en payer le
,prix. Y a-t-il plus grand établilfement de police eccléfiaftique que celui qui ordonne la célébration du Service
Divin dans un e,ndroit où il eH: impoffible que les ouailles
en projjtent? Et comment dès-lors déclarer abufive l'exécution provifoire prononcée par l'Official?
Ici non feulement les fecQurs fpiritllels n'éc.oient point
, contefl:és; non feulement les décimateurs convenaient exprelfé.ment que le hameau des Roches en manquait, & à
ce titre l'Official ne pouvait fe difpenfer de .les leur accorder
par provifion , mais même taures les Loix canoniques,
& tous les motifs fe réunilfoient également pour les leur
faire accorder. Quand il s'agit de mettre à exécution les
Jugemens émanés des Tribunaux eccléfiafl:iques, fans contredit iJ faut implorer le bras du Juge_laïque; mais à l'igârd
du Jugement qui pron,once l'exécution provifoire, c'eH-là
une procédure intérieur,e de l'Offici<\lité, procédure dépendante des difpolitions foncieres du premier Jugement dont
on' demande l'exécution. S'il fallait que le Juge Royal ordonnât lûi-même le nonobil:ant appel d'un Jugement qu'il
n'al!roit pas rendu, il faudrait qu'il entrât en connoi1fance
de caufe, qu'il examinât fi les difpofitions foncieres comportent, ou ne comportent point l'exécution provifoire; il
faudrait donc payer ce nouveau Juge, tandis que fan miniftere n'elt borné qu'à en permettre 'l'exécution. Quelle bizarrerie de recourir à un autre Juge qu'à celui qui 'a rendu
le Jugement, pour décider s'il eil:,. ou nop', au cas d'être
exécuté par p,rovjfion!.
"'
Les inconvéniens qu'on p.ropofe".,pour éluder cette exécution font chimériques;' ils manquent en fait & en droit.
En fait, parce qu'il exiil:e une Eglife; on eil: en état de fe
(aire concéder aéte de ce qu'on n'en demande aucune pendant l'appel. En droit,. parce que la. la Sentence de l'OfficiaI ne porte ni l'établilfement d'une Eglife, ni la fourniture
des ornemens ; 'La. parce que ce n'eil: pas par les conféquences qu'enrraîne !'établi1fement, qu'on peut déclarer. la Sen-
�197
tênce abufive. Si l'Official n'a contrevenu à aucune Loi, fa
Sentence ne peut pas être abufive; elle ell: conforme dans
tOllS fes points aux Conf!:itutions Canoniques, & à l'art. 36
de l'Edit de 169)'
A l'égard des dépens, il ef!: inconcevable qu'on ait propofé cet article comme un moyen d'abus. Les jugemens
exécutoires nonohll:ant l'apeel s'exécutent pour le principal,
comme pour les dépens; ils en font l'accelfoire; ils ont la
même hypotheque. On trouve la décifion hien précife dans
l'.artic1e 6 du titre 2) de, l'Ordonnance de 1670, qui fuppore la reg,le générale. Quand le Légillateur a dit que tels
ou tels jugemens feront exécutoires pa~ provifion, il n'a
point entendu .excepter les dépens. D'aillçurs la regle particuliere ef!: établie par l'Ordonnance de/provence que rap.
pelle Mr. de Montvallon, va. appel, na. 6.
Mr. l'Avocat-Général de Magalon oblèrva que lorfque l'Of..:
ficial avoit ordonné l'exécution provifoire de fa Sencence,
ce n"éraie point l'étahlifièment du Prêtre qui formoit un objet
de concell:ation encre les parties; ce n'érait point la nou.
velle inll:itution qui les agitoit, mais feulement le point de
favoir fi ce fervice feroit fait par le Secondaire de Claret ou
par un autre Prêtre. Il réfulroit des pieces, que les habitans
du hameau 'des Roches demandoient l'étahliifement d'un
Prêtre. On procede aux formalités ufitées, pour voir fi, cet
étahlilfement' ef!: nécelfaire; ces formalités remplies, les Dé_
cimateurs ne le conref!:enr point, ils demandent la transfé-'
rence du Vicaire. L'établilfement ell: ordonné, la transférence refufée. Un des Co-décimateurs appeile" de' la Sen.
tence qui prononce ces deux chefs ,," & n'appelle qu'au chef
de la transférence. Le; feul point contef!:é étoit pone la
transférence du Vicaire.
Tel ell: le point de vue fous lequel il faut envifager l'Or.'
donnance dé nonohf!:ant appel. Si l'établiifernenr d'une Suc.
curfale-, fi la conf!:ruél:ion d'une' Chapelle avoit été l'objee
contentieux, il ef!: incontèrl:able'que l'Official n'auroit pas pLI
ordonner l'exécution' provifoire de fa Sentence. Mais l'éta..
blitfement, ou du-moins ta néceffité du Prêtre étoit CQlweD t1
Il A LAI S
DE
PRO VEN C E.
A a :l.
�138
'J
0 V RNA L
nue, la' Chapelle étoit confiruite; il fallait feulement orliO!lner que le' fervice reconnu inl!ifpenfable felt rempli. Dans
cette hypothe(e, bien différente de la premiere, le Juge
a-t-il pu ordonner l'execution provifoire?
Les-LégiDareurs en fixant les cas où. les'premiers Juges ont
le droit d'ordonner l'exécurion'provifoire de leurs jugemens,
~Jnt conGciéré en 'premier lieu, fi les objets fur lefquels les
Juges avoient à prononcer, requéroient célérité, & s'il y
avoit du danger à retarder l'exécution, du jugement; en fecond lieu, Ji de l'exécution de ce jugement il n'en réfultoit
pas pour les parties un préjudice irréparable. Ce font les
mêmes motifs qui ont déterriliné nos Rois à accorder le
même privilege aux Juges d'Eglife aux cas compris dans l'art.
36 de l'Edit de I69~'
Les habitans des Roches demandoient des fecours fpirituels, la célébration du Service Divin, l'adminifl:ration
des Sacremens ; cette demande exigeait de fa nature la
plus grande célérité; chaque infiant eJ1 précieux pour ceux
qui faifoieDt cette réclamation; les événemens fâcheux qui
pouvaient en réfulter, des perfonnes mortes fans Sacremens,
des mans privés de la fépulture , font fentir combien ces beJOins étaient preffans.
. Les Décimateurs difent que le préjudice efi irréparable;
mais fi l'on confidere qu'on leur a accordé une caution,
comme il efi d'ufage en pareille c!rconH:ance , on fera étonné
de leur voir faire cette objeél:ion. Ce garant ne leur répondil pas des avances qu'ils peuvent faire? D'ailleurs le point
contentieux efl: de [avoir fi les Décimateurs payeront le fervice dont il s'agit, ou fi ce fera la Communauté qui fera
privée <f.'un Prêtre. Si les Décirilateurs obtiennent gain de
caufe, ce fera contre la Communauté qu'ils auront à répéter
.les dépenfes déja fa ires.
La demande des habitans du hameau des Roches exigeait de fa nature la plus grande célérité; le préjudice qui
pouvait réfulter de l'exécution provifoire ordonnée n'eH point
irréparable. Ce n'efl: pas feulement les jugemens concernant
la céléjJration du Service Divin qlÙ doivent être exécutés -
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P AL Ils 1> Il
PR ùVlD,êi;
'189
nonobllant l'appel, mais encore ceux concernant la réparatibn des -Eglifes & l'achat des ornemens. Il ell: encore dit
dans l'art. 36 de l'Edit de 169)' que les jugemens concernant la fubfillance des Curés jouiront du même privilege.
Or, de quoi s'agit-il dans cette caufe? De la fubliil:ance d'un
--- Prêtre qui doit adminiil:rer les mêmes fecours qu'un Curé
dans fa Paroitre, qui doit remplir les mêmes fonarons, &
dont le miniil:ere eil: aulIi important pour les habitans du hameau des Rothes. Le jugement dont il s'agit peut être alIimilé à celui dont parle l'Ordonnance; l'objet eil: le même.
Les principes font donc en faveur de la réclamation.
Quant aux dépens, Mr. l'Avocat-Général obferva que fi
quelquefois on a ordonné fur cet Çlhjet l'exécution provifoire, <;'a toujours été dans des circonil:ancs où les dépens
n'étoient pas conlidérahles. Ici ils montent à 2800 liv., &
l'Official ne pouvoit pas prononcer l'exécution provifoire
d'une pareille fomme. Dans les circonil:ances que cite Mr.
de Montvallon dans fon Précis des Ordonnances, la condamnation aux dépens ne montoit qu'à 2) liv. D'ailleurs le
fecond chef ne mérite pas.la même faveur que la demande
fonciere; il n'exige pas la même célérité.
II conclut à ce qu'il fût dit n'y avoir abus au décret de
nonobHant appel, en ce qui concernoit l'exécution ordonnée
de la difpofition fonciere de la premiere Sentence, & y avoir
abus au même décret en ce qui concernoit les dépens.
Par Arrêt du 19 Juin 1780, prononcé par M. le Premier
Prélident à l'Audience du Rôle, les conclulions furent fuivies, les dépens furent compenfés. Plaidant Mes. Gailler &
~ollombon.
~
�ARR Ê T
X X V'l J.
L'élec7ion tacite comprife dans l'injlitution révoque l'élec7ion
expre.f!è contenue dans un premier tif/ament.
E 14 Novembre 172.6, la Dlle. Claire Roumete fit fon
tefiament; elle infiitlla pour fon héritiere univerfelle DlIe.
+Vlarie Auzet fa belle-fille, époufe de Fran~ois Touche, Marchand- de la ville d'Aix. fon fils, à la charge de, rendre les
fonds·héréditaires à teLou tels de fes. enfans qu~elle voudrait
é!ire-,·dout elle lui·lailfa·le choix.
.
La DIle-. Auzet, par fon tefiament du 3 Décembre 1773,
infiitua la DlIe. Touche fa fille, époufe du lieur Alamelle,
fon héririere univerfelle, & notamment aux~biens & droits,
meubles & immeubles délailfés par Claire Roumete fa bellemere. En 1778, elle fit un fecond tefl:ament; elle infiirua
pour fon héritier univerfel Barthe1emi Touche fèm fils, &
à fon défaut fes enfans, révoquant fes précédens tefiamens,
cpdicilles .&. autres difpoIitions.
Après la mort de la Dlle. Auzet, la DlIe. Touche Alamelle fit affigner fon frere pardevant la Cour, pour voir dire
qu'elle fero.io maintenue.en la ·poffeffion & jouiifance des biens
compris dans là nomination Jaite par la Dlle. Auzet, & dont
.
l'avoit chargée la Dlle. ROulnete.
On .difoit pour: elle qu'une· éleélion expreife, non feule..;
ment en tolites lettres, mais avec toutes les expr~ffions qui.
peuvent démontrer combien la teHarrice a été foigneufe
d'éviter qu'il yeilt le moindre doute fur fa volonté, ne peut
être révoquée par un tefiament pofiérieur, où il n'el! pas
dit un mot de cette éleélion en faveur de l'infiitué.
Dans"le tefiament de 1773, la tefiatrice parle de fes
biens propres; elle parle enfuite de ceux de l'éleélion ; elle
{avoit qu'en faifant une limple infiitution d'héritier de touS
[es biens, fans fpécifier ceux qui faifoient l'objet de l'élec~l
L
~
�bu
PALAIS
DoE
PROVENCE;
19r
'tion, on pourroit inquiéter fon héritiere. Une volonté fi expreffe n'a pu être révoquée par un tefiamem poHérieur.
Les legs, les fidéicommis ne font pas les feules difpofitions qui peuvent faire la matiere des cefiamens; on peut
mêler dans ces aél:es de derniere volonté des difpofirions
qui tiennent de la natllre des contrats, quoiqu'ils y foient
abfolument étrangeres. L'affignation des affranchis, qui dans
l'ancienne Rome fe fairoit par le Patron en faveur de fes
enfans, pouvoit être faite par tefiament, quoiqu'elle ne fût
regardée ni comme legs, ni comme fidéicommis; & parmi
nous, celui qui efi chargé d'élire à un fidéicommis, peut
faire fon choix dans fon tefiament ou dans tout aùue aél:e;
il peut encore y faire des déclarations, des confeffions de
dettes, & autres difpofitions femblables: ita [enliunt Mafcardus en fon traité de probationibus, concluC. 3 S8 , na. 1;
Ricard, des donations, part. 3, feél:.
na. 1°7; Journal du
Palais, tom. :2., pag. 963 ; Maynard, liv. 3, chap. :2.; Guipape,
quefl:. I :2.9; Latouloubre fur Dl.Jperier, tom. 3, liv. I, quefi. I4'
Ces difpofitions contraél:uelles, quoique jointes avec les
difpofitions tefiamentaires, font pourtant de différente nature; elles n'ont rien de commun entr'elles; elles font abfolument étrangeres au tefiamenr. L'éleél:ion ou la refiirution
du fidéicommis n'efi qu'un fimple miniHere, qu'une dédaration de la volonté du fondateur du fidéicommis. L'élifant
n'exerce point une libéralité; il. ne donne rien du fien; il
n'a d'autre qualité que celle, de dépofiraire; il efi le prépofé du fondateur du fidéicommis: eleaus non capit ex tertamento, [ed ex voluntate ejus qui jlif1it rejlitui.
'
,
L'éleél:ion n'étant autre chofe que la fimple déclaration;
'qu'une fimple application de la volonté dll fondateur du fidéicommis, prend fa force du tefiament qui donne pouvoir
d'élire: delà elle peut être faite dans tout aél:e; delà eUe n'a
pas même befoin, pour être valable, d'être revêtue des formalités effentielles dans les aél:es de difpofition de derniere
volonté, & fur-tout dans les tel1:amens; delà elle ne laiffe
pas de ptoduire-fon effet, quoique le teftament qui la renferme foit nul ou révoqué••
I,
�19 2
10
U-R N A t
.
Celui qui eft chargé d'élire, & qui fait [on choix dans
fon tefiament, fait deux aél:es; il difpofe du bien qui lui étoiil:
confié, & en cette qualité il fait un atte d'élettion; il difpofe de fes biens propres, & en cette qualité il fait un
tefiament. Ces deux aél:es, quoique renfermés dans un feu!.,
[ont pourtant abfolument diftintts & réparés l'un de l'autre;
l'élettion n'a rien de commun aux autres difpoutions tefiamenraires; non pertine! ad jus teflandi; elle eH autant étran~
gere au tefiament par fon objet que par fa nature.
Si l'élettian peut fubufi~r fans le tefhment qui la renferme, fi. elle n'en fait pas partie, elle ne peut donc pas
être révoquée de plein droit par la feule révocation du tefiament, lorfqu'elle y efi expreffe. C'efi ainfi. que le penfe
Vulfon en [on Traité des élec7ions, quo 16. Julien en fon
Code, vo. fuhflîtutio, cap. 2, len. E, demande fi l'élettion
expreffe peut être faite & fubfi.fier dans un atte nul; il ré- .
pond qu'oui, & cite un Arrê.t rendu par la Cour qui le décide ainu. L'Auteur des ob[ervations fur Duperier, toUl. l,
pag. 4&8, eft du même fentiment; ita Boniface, tom. 2,
liv. 3, tit. 2, ch. 1 ; Buiffon en fon Code, liv. 6., tit. 42;
Fromental, pag. 282..
Il faut feulemeiu difiinguer avec La Touloubrè fur Duperier iDe. cil. l'élettion expreffe, de la tacite. S'il s'agit d'une
élettion tacite, c'efi-à-dire, de celle qui efi comprife dans
l'inflitution d'hêritier, elle crollleroit avec cette même infii~
tution.
Le pri~cipe qui veut que l'infiirution d'héritier dans le
tefiament de celui qui avoit été chargé d'élire, & qui n'éliepas, vaille élettion en ·faveur de l'inflirué, efl <bon lorfque
ce.lui qui a été .chargé d'élire, & qui n'a pas élu, n'a faitqu'un te fia ment ,. parce que la Loi préfume alors que le
Teflateur a appellé tacitement celui qu'il inflitue, puifqu'il
ne l'a pas exclu; & comme cette élettion ne fubfifie' que'
. par l'infiirution" u le [econd tefiament où il y a auffi'
éleél;ion tacite révoque le premier, l'élettion qu'il cOlHenoit
ro.mbe avec l'infiitution; d<!ns ce cas. l'infiirution lui donnant l'être & tombant, elle tombe avec. elle. Mais lorfque.
d.aM
/
�DU
PALAIS
DE
PROVENC E.
193
dans le premier tefiament il y a une ,éleél:ion expreife, le
fecond tefiament où il n'eft pas parlé de l'éleél:ion, ne
touche point à celle qui a été fdire, parce qu'on ne peut
dans ce fecond tefiament faire valoir la préfomption contre
un tItre.
Julien en fon Code, va. fuhflitutio, cap. .2., litt. D, examine fi l'éleél:ion expre1Te elt révoquée par la tacite qui
réfulre de l'inltirution d'héritier; il dit que non. Il cite la
Loi unum ex familia, .ff. de legatis & jideicom. .2.°.; Cambolas, liv. S , ch. 36, eft du même fentiment; Cate1an,
liv. 1, pag. 307 ; Bretonnier fur Henris, tom. 3, pag. 372.;
Serres, liv. 2., tit. 2.3; & Aymard qui a commenté l'Ordonnance de 173') fur l'arr. 64, obferve que l'éleaion expreffi du Teflateur ne peut être emportée que par la nomina.
tian expreJfè de l'héritier, & non par une donation ou inflitutian qui" n'efl jamais cenfèe contenir Nlec7ion que par pré{omption.
On répondoit que les legs & les fidéicommis ne font pas
le~ feules difpofitions qui peuvent faire partie d'un teHament. On peut mêler dans ces fortes d'aétes d'autres difpolitions qui tiennent de la nature des contrats; mais ces dif.
politions contenues dans un tefiament prennent le caraél:ere
de l'aéte qui les t'enferme; unies à cet aél:e comme une partie
l'efi à fon tout, elles participent à fa llatllrè & fuivent fOIl
fort. Il feroit en effet dérifoire que.le principal filt [ubordonné à des regles dont l'acce1Toire fût excepté, & qu'une
difpofition parriculiere qui n'elt qu'une dépendance, confervât toure fa force, tandis que l'aél:e qui la contient, & fans
lequel elle n'auroit jamais eu lieu, fetoit détruit.
Delà il réfl/lte néceifairelnent que tout ce qui efi inféré
dans un aél:e entre-vifs, eft régi par les mêmes principes
que le conn'at auquel il eft attaché, & devient irrévocable
comme lui. Par la même raifon tâures les difpofitions qui
fom partie du teltament, peuvent être changées à chaque
inltant comme le teltament lui-même, & ne prod\lifent leur
effet qu'après la mort du tefiareur. De ce que le tefiateur a
i!lféré çett~ difpourÎoQ daus un aél:e qu'il pouvait révQq\l~r
Db
�194
1 0 ,ù RNA L
à fan gré, il parolt qu'il a voulu fe réferver la liberté de
pouvoir changer auŒ toutes les difpofitions qui en fone
partie. Et en effet, s'il avoit entendu que ces difpofirions
fu{fent irrévocables, ce n'el!: pas dans un teHa!Dem qu'il
les auroit mêlées, tandis qu'il lui était libre de les renfermer dans un contrat, entre-vifs qu'il n'ef~ plus permis de
changer.
C'efl: d'après ce principe que la Cour jugea en 1779, au
rapport de Mr. de Saint - Martin, en la caufe de Jofeph
Bieule & Marguerite Marc, que la 'confeŒon d'une dette
contenue dans un tefl:ament avoit été révoquée avec le teftament qui la renfermoit; & par un autre Arrêt de la même
année la queHion dom s'ag~ fut jugée contre le nommé
Mercurin. Or l'éleél:ion doit être régie par les mêmes principes. Elle n'eH qu'une fimple defl:ination, qu'un fimple
projet mentionné dans une difpofition finale, une fimple
démo.1f1:ration d'une volonté préfente, ou une fimple deHination des biens fidéicommiifaires. Cette defl:ination peut
être anéantie par une nomination contraire, ou par un
changement de volonté.
L'éleél:ion n'efl: qu'une difpofition particuliere qui peut
être inférée ou dans un aél:e entre-vifs, ou dans un teHamem. Dans le premier cas, elle eH irrévocable, parce que
l'élifant & l'élu fe font liés par des obligations réciproques;
il Y a donation de la part dé l'un, & acceptation de la
parr de l'autre. Dans le fecond cas, l'Ordonnance de 173)
n'a pas exigé la formalité de l'acceptation dans les aél:es de
derniere volonté; elle a voulu par-là conferver à l'élifant le
droit de rétraél:er fon choix jufqu'à fa mort; c'efl: auffi le
fentiment de Henris & de Mr. Cochin, tom. 2 , pag. 666.
Fernandus, cap. unie. de filiis natis ex matrimon. pag. 9, établie
que l'éleél:ion ne produit fon effet qu'après la mort, qu'elle
prend la nature du teHament qui la contient, & qu'elle efl:
révocable comme lui. Fromental, va. éleaion, el!: du même
fentimem.
L'élifant n'exerce poine une libéralité en nommant au
fidéicommis, parce qu'il efi obligé de donner le bien qu'il
�DU
PAL AIS
D II
PRO v II N: CE.
J 9 ')
donne; il n'en ell: que le dépofitaire; il ne feroit pas en
fon pouvoir d'en difpofer en faveur de tout autre que de
ceux que le fondateur lui a défigné; mais le fondateur, en
le chargeant de rendre ces biens, lui a laiffé la fac~lté du
choix. S'il a la faculté de choifir à fon gré, pourquoi voudroit-on lui interdire la liberté de varier? Voilà pourquoi
l'éleél:ion produit fon effet, quoique le refiament qui la
renferme foir nul; ce n'eH pas le reHareur qui a contribué
à ces nullités; elles ne font que du fair de celui qui a rédigé l'aél:e; quoique !'aél:e foir nul, la volonté de l'élifant
'paraît toujours; & comme l'éleél:ion n'exige pas autant de
formalités que les au l'es difpofitiol1s, elle ne iaiffe pas de
fubfif!:er. La même raifon fait que la nullité du tef!:ament
n'emporte pas toujqurs celle du codicille, puifque la c1aufe
, codicillaire foutient plus d'une fois le tef!:ament. Mais peuton induire- de là que le codicille & l'éleél:ion ne font pas
anéantis, quand le teHament qui les contient a été détruit par un changement de volonté? Ex teflamento revocato,
dit Faber, colligi non potefl volul1tas teflatoris.
Il ne faut donc pas confondre la nullité du tef!:ament avec
la révocation; la nulliré ne dépend pas du tef!:ateur; c'ef!:
la _Loi qui la prononce; c'ef!: le teHateur au contraire qui
annulle lui-même le teHament; en le révoquant, en chan':
geant de volonté, il a voulu anéantir toutes les difpofitions
qu'il avoir faires précédemment, fans -en excepter aucune.
Quand un homme chargé d'élire n'ufe pas de cette [,1.
cuité, qu'il meurt fans avoir fait cette éleél:ion, alors tous
les éligibles concourent à la fubfiitution. Mais il n'en eil:
pas de même ici. Il n'y a plus d'éleél:ion dans le premier
tef!:ament, puifque ce teH~ment a été révoqué. Il y a un
tef!:ament pofl:érieur qui prend la place du prem ier, & qui a
la même force qu'aurait eu le premier, s'il n'~lt pas été
révoqué. S'il ef!: vrai que ce teHament pof!:érieur révoque
l'antérieur & l'éleél:ion qu'il renferme, par une conféquence
néce1faire ce refl:amenr po!l:érieur ef!: regardé comme une
difpofirion qui, en détruifant le premier ref!:ament, en prend
toute la force, & produit le même effet.
Bb~
�196
Jou
RNA L'
L'infl:itlltion générale faite en faveur de Barthelemi
Touche dans le tefl:ament de Marie Auzet fa mere, lui
tient lieu d'éleB:ion. Le premier refl:ament & toutes les
difpofitions qu'il contient étant anéantis, le fecond refiament lui fuccede; il prertd la place du premier, & renferme
tacitement l'éleB:ion qui y était contenue. Cette maxime
e.fl: attefl:~e par Decormis, tom. 2,> col. 7 ; par Boniface,
llv. 3, tlt. 2 , ch. 2, & par Bonnet, lett. F, n. 2. Elle
efl: fondée fur ce que les hommes ne déclarent pas feulement leut volonté par les paroles, mais auill par les effets.
Quand un homme inl1:~tue un des éligibles pour fon héritier univerfd, il témoigne clairement par-là qu'il entend
laiifer à celui qu'il choifit pour fucceifeur en taus les biens
qu'il poifede, les mêmes biens dont il a la diHribution' &
l'éleB:ion•
. Il faudroit fuppofer dans le tefl:ateur une contrariété d'intention , fi, en infiituant un de fes enfans fon héritier univerfel, il n'entendoit pas l'élire pour les biens donnés ,
puifque ces biens font partie de fon hérjtage , puifque ne
s'étant réfervé le droit d'élire que pour fe déterminer en
faveur de celui qu'il chériroit le plus, il marque aifez fa
prédileB:ion par l'in!titution univerfelle. C'efl: le cas précis
de l'Arrêt rapporté par Barri, des fuccejJions, liv. 6, tit. 6,
n. 2).
'
Par Arrêt du 14 Juin 1780, la Cour fit regifl:re, qui fut
vuidé le 19 du même mois au rapport de Mr. le Confeiller
de Thorame; la Dlle.· Touche Alamelle fut déboutée avec
dépens. Ecrivant Mes. Jauffret & Arbaud.
�·
DE
ARR Ê T
PROVENCE.
X X VII J.
'Ardt de la Cour des Comptes, Aides fi Finances de Provence, portant Réglement pour les Encheres des Fermes des
Communautés.
Du
2.0
Juin 1780.
Extrait des Regiflres de la Cour des Comptes; Aides fi
Finances de Provence.
E jour, les Chambres affemblées, les Gens du Roi font
entrés, & Me. Jofeph-E[prit d'Autheman, Avocat-Gé-:
céral du Roi, portant la parole, ont dit:
C
MESSIEURS,
, Parmi les dilférens objets qu'embraffe l'adminifrration des
Communautés, la maniere de percevoir leurs impofitions &
leurs revenus mérire une attention particuliere.
La nécellicé de les donner à ferme a été reconnue dans
tous les temps pour prévenir les inconvéniens & les déprédations prefque inévitables dans les régies des deniers publics.
En fe décidant pour les baux à ferme, la fageffe du Lé.
giilareur a pourvu en même temps à ce qu'ils ne puiffent'
être paffés qu'après certaines formalités, & après des précautions capables d'affurer l'intérêt des Communautés.
Tel efr l'objet de toutes les Loix & de toutes les déci'Gons émanées fur cette matiere; elles exigent qu'on donne
1cI plus grande publicité aux encheres & aux offres; que les
concurrens [oient attirés, & que leur émulation foit excitée;
elles enchaînent le pouvoir des Adminifrrateurs toutes les
fois qu'ils voudroient en u[er avec partialité, & préférer des
p.ffre~ moins avantageu[es.
�'I~
,tOURN'A'L'
,'"
Elles n'ont cependant jamais été raffemhlées dans un m~me
Code; on les trouve éparfes Jans divers textes du Droit
Romain, dans des anciennes Ordonnances de nos Rois, &
dans quelques Auteurs, notamment dans le favant Ouvrage
que nous a laiffé Mr. de Clapiers, ancien Magifirat de la
Cour, dont les lumieres ont le plus contribué à nous éclairer
dahs cette partie.
,
L'Ordonnance de -168 '1, concernant les fermes du Roi,
entre véritablement dans bien des détails fur les adjudications
aux encheres; mais les formalités qu'elle prefcrit pour des
'objets auffi importans que les fermes & revenus du Roi,
feroient'impraticables, & que1quefqis nuifibles, fi on les appliquoit à de petits objets, tels que les fermes de la plupart
de nos Communautés; c'elt pourquoI nous ne 'l'avons pas
fuivie dans les points ~Ù elle -fe trouve contraire au Droit
Romain & à nos ufages.
Quoique par le moyen de ces diverfes Loix, Ordonnances
& Doé1:rines, à l'infuffifance defquelles vos Arrêts ont fuppléé,
il fe foit formé des maximes affez fûres pour mettre les 1urifconfultes 'à portée de réfoudre les doutes de ceux qui ont
eu recours à leurs c0nfeils, ce n'ell: point affez dans une
matiere ufuelle comme celle-c-i; l'Admini/lrateur doit avoir
fous les yeux, & pour ainfi dire fous fa main, le guide de fa
conduite.
C'eil: pour n'avoir pas eu 'un Réglement qui contînt, dans
un même tableau, tout ce qu'il faut ohferver dans cette
partie, qu'il s'e/l élevé bien des procès par l'elfet de la cabale ou des monopoles des prétendans aux fermes, enhardis
pat l'ignorance ou l'inattention des A~mini/lrateurs qui dirigeaient les encheres; il n'e/l pas même fans exemple qu'on
fe fait permis de paiTer pardeiTus des reg,les qui n'étoieht pas
aiTez connues, d'après ce faux préjugé qu'il n'y a point de
regle à obferve:r, quand il s'agit de procurer du bénéfice '1\
une Communauté.
Nous venons vous propofer aujourd'hui de fa,ire ce RégIe.;
ment, fi néceiTaire , qui, én ind'iquaht d'une man-ïere claire
& précife les formalités préparatoires dèS, baux à ferme des
�~
bu
PAtAIS
DI!
PROVENCE:
'19~
Communautés, atrure leur intérêt contre l'erreur, la mauvaift: foi, les monopoles d'une maniere conforme au vœu de
]a Loi, puifque c'ef!: une vérité auffi conf!:ante en Jurifprudence qu'en politique, que les privileges doivent toujours
être bornés par la Loi, & que .c'efl: nuire aux privilégiés euxmêmes que de leur donner une extenfion arbitraire, fur-rout
dans une matiere comme celle-ci, où la foi des contrats efl:
une confidération prédominante qu'il ne faut jamais perdre
de vue.
Tels font les motifs des conc1ulions quê nous avons pris
au bas du préfent requilitoire, que nous laitrons fur le Bureau.
Eux retirés.
Vu par la Cour, les Chambres atremblées, ledit requili~
toire ligné Autheman; & oui le rapport de Mre. Jofeph de
Mene, Chevalier, Seigneur de St. Jerôme, Confeiller du
Roi en la Cour; rout conlidéré.
. DIT A ÉTÉ que la Cour, les Chambres atremblées, a
ordonné & ordonne ce qui fuit:
ARTICLE
PREMIER.
Les Communautés qui voudront expofer leurs rêves ou
leurs autres impolitions aux encheres., ne pourront le faire
qu'en vertu d'une délibération du Confeil municipal, laquelle
contiendra les conditions auxquelles les prenneurs feront tenus
de fe foumenre. Ces conditions feront tranfcrites au corn":
mencement du procès-verbal des encheres.
II.
Dans le cas où il efl: d'ufage d'appofer des affiches, elles
contiendront une énonciation fommaire des mêmes condi~
tions.
III.
Les encheres fe feront en préfence des Officiers qui font
en potreffion d'y affifl:er, fans entendre, ladite Cour, rien
innover à cet égard aux droits, foit des Communautés, foit
des Seigneurs féodaux, lefquels refl:eront dans leur entier.
1 V.
Les procès-verbaux des encheres feront dretrés dans les
�Jou RNA L
Regillrès à ce defiinés, ou dans celui des ,Délibérations; li
fait & fait inhibitions .& défenfes aux Communautés de
dreffer lefdits procès-verbaux fur feuille volante.
'200
V.
- Les encheres feront annoncées au Public, à fan de trompe,
ou à la forme ufitée dans chaque Communauté.
VI.
Il Y aura trois encheres de huitaine. en huitaine. La huitaine fera comptée du Dimanche ou de roUI' autre jour de la
femaine , à pareil jour de la femaine fuivante.
VII.
Les offres qui furviendro'nt dans le cours des èncheres,
ferom proclamées en la forme portée par l'art. ~ ci-deffus,
fans qu'il fait néceffaire de les notifier aux précédens offrans;
& du roUI' il fera fait mention dans le procès-verbal des
encheres.
.
V II 1.
Les offrâns feront tenus de nommer leurs caurions dans
les vingt-quatre heures qui fuivront les offres, & icelles faire
pré/ènter pour figner lelte cautionnement, fi elles favent
écrire, finon il fera fait mention dans le procès-verbal d'enche (eS , qu'elles n'ont fu ou qu'elles n'ont pu écrire.
IX.
La caution de ceux qui ne feront des offres
niere. enchere, fera nommée fur le champ~
qu'à la der-
X.
Les cautions ne feront difcutées que lors de la paffation
du bail.
XI.
Faute par les offr,!ns de nommer leurs cautions dàns les
délais ci-deffus fixés, ou fi la caution difcmée n'ell pas
trouvée fuffifanre, leur offre fera comme non obvenue. La
précédente fubfiHera; & là où le prix de la ferme n'arriverait pas définitivement à celui de l'offre déclarée non
obllenl\e, l'offrant dont l'oll;'re eH déclarée n.Qn obvenue parla difpofirion du préfent art}cle, fera contraint, par forme
de d<:!mmages-intérêts', PQl,lr le déficit, en fon;e <lu préfenl:
Réglement,.
XII,
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PAL AIS
D E
P lt 0
VEN C E.
1.0.
XII.
Les encheres feront c1ôrurées par la délivrance qui fera
palfée le jour de la derniere enchere, fauf huiraine comptée
comme ci-delfus, & qui fera proclamée fur le champ, avec
déclaration que le bail définirif fera palfé le dernier jour de
ladire huiraine, à l'extinél:ion de la chandelle, & avec déclaration encore de l'heure à laquelle la chandelle fera .allumée;
le rout fera proclamé. Il fera fait mention de ladire proclamation à" la fuire de ladite délivrance.
XII I.
La délivrance fera lignée par le délivra taire & fa caution,
s'ils favent écrire, linon il en fera fait mention dans le
procès-verbal d'en cheres.
XIV.
Dans .cette derniere huitaine, les oJFres qui furviendront fe
feront par comparant, lequel fera lignifié aux Confuis , au
délivrataire, & à celui ou à ceux qui auront fait, après la dé,
1Jvrance, l'oJFre la plus avanrageufe.
XV.
Le dernier jour de ladite huitaine, Je bail fera .palfé à
l'extinél:ion de la chandelle, pendant laquelle routes .oJFres
verbales feront reçues, & le bail définitif fera acquis irrévocablement au dernier oJFrant dont l'oJFre p'aura pas été couverte pendant la durée d'une' chandelle ftlrabondante qui fera
à cet eJFet allumée & renouvellée jufqu'à Ce qu'il n'y ·ait plus
.d'dJFre.
XV J.
. A fait & fait inhibitions & défenfes aux Communautés de
proroger la huitaine ci-delfus, de donner aucune autre expeél:ative, & de recevoir aucune oJFre, pour quelque caufe
ou prétexte' que ce puilfe étre, après l'extinél:ion de la fufd.
chandelle furabondante, à l'exception néanmoins des cas de
nullité du bail ou de la procédure.
XVII.
Les baux ne pourront être attaqués pour raifon de nullité,
lorfque la moitié de la durée du bail fera écoulée.
C"
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10
U RNA L
X VIII.
Tout cè que deffus fera obfervé 11 peine dè nullité, nonobU:ant tous tlfages ou coutumes 11 ce conrraires.
XIX.
Ordonne ladite Cour que le préfent Arrêt feta imprimé,
publié & affiché par-tour oÙ befoin fera, & que copies collationnées d'icelui feront expédiées au Procureur-Général du
Roi pour être' envoyées à routes les Communautés de la
Province; enjoint aux Confuls d'icelles de le Elire lire dans
un Confeil général qui fera à cet effet affemblé, & enrégill:rer dans le livre des délibérations, & d'en certifier ledit
Procureur-Général au mois. Fait en la Cour des Comptes,
Aides & Finances du Roi en Provence, féant à Aix, les
Chambres affemblées, le vingt Juin mil fept cent quatrevingt. Signé, AILHAUD fils.
ARRÊT
XXIX.
Le Lods ejl dû fur le prix de la vente des hois de haute-futaie.
E fteur Viél:or Gaucher, Fermier général des Terres &
.
autres droits du fieur Comte du Luc en Provence, ayant
appris en 1769 que la Communauté des Arcs avoir fait plufieurs coupes & ventes de bois de haute-futaie fans payer
les droits de lods qui étaient dus à l'occafton de ces ventes,
tiClt un aél:e extrajudiciaire aux Adminill:raèeurs, & les interpella de déclarer la quantité de bois qui avoit été veqdue·
depuis l'époque de 1762, temps auquel il étoir entré en
poifeffion de la ferme.
Les Confuls n'ayant fait aucune réponfe, ils furent affignés
pardevant les Officiers des Arcs en condamnation des droits
de lods fur les ventes qui feroient par eux avouées ou vérifiées par Experts. La Communauté contefia c~tte demande;
& par Sentence du ) Mars, le Juge des Arcs adjugea lë
L
�J!;
2;03
âroit de lods pour les ventes dont la Communauté donneroit le rôle dans la quinzaine, lequel temps paffé, le fieur
Gaucher pourroit en faire la vérification par Experts.
La Communauté appella, & le Bailli du Luc réforma la,
Senrence. Appel de la part du fieur Gaucher pardevant la
Cour.
On difoir pour lui, qu'en principe le lods dl: dl! pour la
coupe des bois de haure-futaie. (Mourgues fur le Statut,
pag. 1,6 & fuiv.; le nouveau Commenrateur de la même
Loi, tom. l , pag. 345 , n. 28; Aaes de Notoriété de MM.
les Gens du Roi, n. IDO ; l'Auteur de la Jurifprudence féoda le , tom. 2, pag. 92; Niger en fon Traite de laudimio,
quo 2}, pag. 347') Une longue fuite d'Arrêts du Parlement
de Provence atteHe une Jurifprudence auŒ conHanre que'
fage, auŒ juHe dans fes motifs, qu'utile par fes rapports au
bien public & au droit jaloux & facré de propriété. .
Comment refufer d'ailleurs au Seigneur propriétaire primordial de tous les biens foumis à fa direae , le droit .qui
lui eH dl! par la vente des bois de haute-futaie? Ces bois
ne font-ils point partie inhérente & inrrinfeque du fonds?
Ne (one - ils pas mis dans la c1alfe des immeubles? La
Loi 10 & I I ,if. de ufufruc7u, & le §. 4 de la Loi 13 font
précis. Lepretre, cent. l , arr. 12; Duperier, tom. l , liv. 3,
quo 10; la Loi 7, §. 12, if. falllto matrimonio; Dumoulin ,.
§. 18, glof. l , Va. manoir, n. la; Brillon, va. arDres &
va. fruits; Niger en fon Traité de laudimio, décident que
les grands arbres ne font qu'une même chofe avec le fonds.
Le lods eH un droit légitime occafioné par la vente dtl
fonds emphytéotique, qui n'eH que l'exercice de la pro~
priété légale du vaffal; la détérioration du fonds emphy.
téotique eH au conrraire un délit, il eH fournis ~ une peine.
(Brillon dans fon Diaionnaire des Arrêts, va. commifè;
Lacombe en fon Recueil de Jurifprudence civile au mot
emphYléofe; Loîfeau, du déguerpiffèment, liv. 1) ch. ))
n. 8, & Defpeilfes, rom. 3, pag. 1°9, n. 8.)
La [ranfaaion du 12 Mars 1632 que réclame la Corn.
munauté des Arcs ne peut lui fervir de titre pour l'exempte&'
D U
PAL AIS
D E
PRO VEN C
C,:a,
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Jou, RNA
L
,
du droit de lods qui lui efl: demandé. Pal' cette. tranfa8:ion
le Seigneur cede à la Communauté. touS les droits de domaine, fonds & ,propriétés des Maures, pour en ufer &
difpofer à fon plaifir & volonté. comme vrai maître, la
fubrogeant à fon lieu &. place, &c. fauf & réfel'vé au Seigneur le droit de Jurifdi8:ion, dire8:e, lods & préi:uion
en caS çl'alién~tion & ·tranfporr de tour ou en partie.
.
Il feroit difficile d'ajouter à la force de ces expreffions ;
l'attention du Seigneur de borner au domâine utile le tranf- .
port & la ceffion qu'il f.1it, la réferve expreffe de la dire8:e
& du droit de lods en cas d'aliénation de tour ou en partie,
font des c1aufes trçp claires pour avoir befoin d'inrerpréta. rion.
Le Seigneur des Arcs fe réfervoit le droit de lods en
cas d'aliénation en tout ou en partie; il fe réfervoit la dil'e8:e (ur le domaine par lui vendu; cette réferve lui affuroit
tous les droits que le droit commun donne au Seigneu. fur
les biens emphytéotiques. Parmi ces droits on compte lè
lods dû à l'occafion de la vente des bois de haute-futaie;
ce lods étoit donc compris dans fa réferve.
•
II femble même que cette réferve fripulée dans le cas
'de la vente en tout ou en partie, avoit eu en vue par cette
dauCe particuliere la vente des bois, la 11ente en tout" c'efr·
à-dire, la vente abfolue de l'immeuble, la vente en partie,
c'efr-à-dire, la vente parriculiere &. féparée des bois; la
réferve étoir donc !!:ipulée dans l'un comme dans l'autre
cas.
, On convenoit pour la Communauré des Arcs, que tous
les baux à emphytéoCe portent la c1auCe d'améliorer, &
non détériorer; elle e!!: même de droit, parce qu'elle dérive de la nature, & confritue l'effence même de ce contrat.
, Delà on auroit pu induire qu'il n'e!!: jamais permis à un emphytéote de couper des arbres de haute-futaie, parce que
ces coupes détériorent les fonds où ils font radiqués, en
diminuant le peix en cas'de vente. Mais fi on en avoit tiré
cette conféquence, & qu'on l'eût érigée en principe, combien de terreins fru8:ueux ne feroient d'a~çun produit pour
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PALÀÜ' nE
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OVEN CR.
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res emphytéçJt'es qui ep' Rài~t d~~ cen{~d. La [urfàêé dé
la terre [eroit encore en grande parrfé couverte 'de Dois
inutiles: à quoi ferviroient-ils , fi on ne les coupoit jamais?
Les arbres vieux pourriroient filr la place', & empêcheroient
les plançons de croitre '& de, devenir propres aux b,efoins
des races futures.
'
L'obfervation de ces différens préjudices & de pluGeurs'
autres a été faite par Coquille 'fur la coutume de Nivernois,
tit. des bordelages, art. 1), & par d'Argentré fur la coutume
de Bretagne, tit. des Loix du Prince, art. 60. Ils en ont
conclu qu'on ne peut pas interdire aux ernpllytéotes la coupe
& la vente des arbres de hame-futaie., & qu'il n'efl:'dû pou~
raifon de ce aux Seigneurs dire&s aucune indem'nité', lods
ou autres rétributions Tquelconques) 'excepté dans' les cas
d'une fraude évidente, c'e1l:-à-dire ,.Jlorfque l'emphytéote',
{ans avoir pour objet de' convertir le terre in d'une forêt en
une meilleure culture, en ven1i prématurément- les àrbres ~
& peu après aliene les fonds.
~ lil', l"
,''')'1 ~J ',;1
Mais en cette Pr?vince " oÜ:'lés, 'arbres de hàute - fu'taie
font fi long-temps à venir, les Seigneurs conçurent dans le'
fie cie dernier le projet de [e prO'curer ul1 dédommagement
pour rai[on de la détériOl:at,ien que' leur coupe caufe ,aux
fonds dont ils ont le doma'ine dire&.J( Mourgllés -fur les Stlt~
tuts, pag. 16 l de l'éditio'n de 1642,) La G6ur']tlgea: qJ'i(1
étoit juHe que les Seigneurs fulfent indemnifé's,' qt!anl:l leyr's)
fonds emphytéotiques étoient' mis à, nud par la êoupe des
arbres de haute-futaie; & pour prévenir les difficultés qu1il
y auroit eu, s'il avoit fallu que. çerre indemnité fût fixée par'
des rapports toujours longs, difpendieux, & fufceptihles
de mille conte1l:ations, elle~ fué- réglée à un lods, c'efi-à-dire
à' un droit proportionné au prix des ventes. Tout cela eŒ
indiqué par Mourgues & par le nouveau Commentateur.
. Duperier dans [es deciGons, tom. 2, liv. l , nO, '-76, pag.
,49 de l'~dition en trois volumes, tient le même langage.
L'Auteur de la Jurifprudence féodale, tit. des lods, art. 43
aux notes, déclare avoir trouvé dans les Ilotes de Me. Saurin,
Avocat, la ci~atioo d'un Arrêt qui adjuge ho Seigneur un lods
\
�2.06
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.~hel11ens.·
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u. R N ~ 1'. •
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p,gur 1J9'e vente d~ ~q~nSJ qifperfés avec la Mc1.aration dl! matin
de .ce~ f\rr,6t ·en ces.termes: le f.onds empgytéotiques' étant
par la dété(ioré. MM. le~ Gens QU Roi dans le 100 e.. Aél:e
de N:ot~riété afteHent que les coupes de bois de chên.es &
4~ pins. gros ~ 'petits, les, petits étanr en quantité, foot des
dégradations & des détériorations, auffi bi~n qu~ les défri-
J; .- .
..
,
Les'\lrbr.es de haut,e-futaie 'n~ peuvent donc pas être confidél:~~_~oIT)m~ faifat1t partie d.\.s fomjs; il faut néceifairement que les lod,s qu:on paye e9 cas de vente d'iceux foient
dus à tjtre. de dégra,gat\on i car la Jurifprudence de laquelle
il s'agit ,all Hrqç:~s'!} Jl~ut ,êt.re fondée que fU,r l'une de ces
deux.' ç,aufe s.' l >,: i
. >
'.
"
La Tranfaél:ibn de 1632 confl:itlle 1°. la Communauté des
·.Arc-s ac~eteur , & la fu;b~oge aux droiçs du vendeur, pour les
exercer "omtW; il'I~s ~1'erçoit lui-même. 2°. Elle permet nomlI)él,lle.n§ de! cpqper ,des. pins (gules les, fois que la Commu-.
nauté voudra, (ans que le Seigneur ni fes O,fficiers de Juftiçe puilfent y [!lettre ~uçun ob1~ac;~ direél: ou indireél:. 3°. Le
Seigneur y renonce à tout ufage &; faculté dans les Maures,
4-0. Il met expreifément les pin~ au rang des fruits. So. Il
ne fe réferve des lods qu'en cas. d'aliénation en tout ou en
p.3rtie des domaines qu'i,l vend à la Communauté. 6°. Il ne
f~ !es réfe\"Ve que tels qu'il avoit jLJ[qu'alors été dans l'ufagé
lieu des Arcs. Or, à cette époque
de les percevoir dans
il n'en avoit jamais exigé pour les coupes de bois de haute:"
futaie. 7°, Il flipuJe une pehGon féodale annuelle de 7So Ev.;
(om'me l'unique prix du tranfport opéré par cette tranfaction. 8°. La, vente çles ins forme 'Ie principal & prefque le
feul Produit des domai es vendus. Enfin un ufage interprétatif d'un Gecle & demi ne permet pas de douter de l'in",
tention des parties contraél:anres.
Un vendeur qui, comme au cas préfent, tranfporte tOIll;
les droits de propriité, & fubroge l'acheteur à fon lieu &.
place, dt cenfé avoir tranfmis tous Cl.s droits, & notamlr,ent le j1roduit des fl"uits des domaines. vendus, hors ce,
qu'il f-: ~~fe(ve J19p;lmém~nt ~ &. il ne peut dl;mande~ d'aurn;
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PROYBNCll:
prix que celui ~u'il a fiipulé, au 'poiht qiJ'ij 'n'Mt (Ea - filême1
c'urage dans les aéres de vente de Ce lérvlr de il ë1aoCe ,
fàns 'lue le vendeur puiJfè rien prétendre 'de 'plur; 'n 'efl: -el(""
'clu de toute demande ultérieure, par cela feul, qu'il ne trouve
pas à la 'fon,der' fur un paél:e exprès.· 1 '~l J; 1 ~.I •
Par Atrét dU,27 juirr 1780, aprè~ partagêt, Mrrle 'èonfeiller de Forcis 'Rappdrceur, & Mr. le Con1'e(fler de'SaÏ11tMartin Cornpartiteur , la Communauté des Arcs fut condamnée au paiement des droits de lods, & aux dépens, conformément à l'avis de Mr., le Compartireur. 'Ecrivàht Mes.
"1 J • ,
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Sen'aire & Verdet'neveLT.
\J .. :
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ARRËT
xxx.
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Cura'tûle de l'interdit ne 30ie poEnt lir/: déférée
.remariée.
.... - .
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•
c.
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L
A Dame
'
de Gars, épou[e en [ecdnaes nôces du fleur
de Bonval, ayant un garçon du premier litlquléioit de"
venu imbécil1e, fut nomrtJée curatrice de cet enfant par
Ordonnancé du LieutenaîÎt de Toulon, & enfuite de l'af-'
[emblée de, deux parens',& de 'deuic,voiflns.·
, .
Il Y avo,it dans la famille de Gars un Paffon.age héréditaire. La Dame de Gars nomma au bénéfice Mre. Martelly.
Le fleur Brun qui était au/li (le la famille, nomma fon fils
au même Bénéfice.
Le fleur Brun appella de l'Ordonnanèe d~~ nomination
'de la Dame de Gars à la curatelle'de' fon fils,' &: fit a/lifl:er
dans l'infiance Mre. Martelly pour voir ordonner la comnmne executlon.
On dirait pour le fleur. Brun, qu'il était le pius proche
parent de l'interdit, la mere prélevée; qu'il !1voit aérion
en cette qualité pour attaquer la nomination à la curatelle
par l'abus qu'on en avait fair.
.
.La curatelle des interdits eil: comme la tutelle des pu~
,
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..n un:J O,U.R ~r-}.·ft. (1 11r
pi11<:.s;, n;~fP~ pop~o~r, m~m~\ pr!~cipr,l ~,~n;e liFre d:~xcIu.::.
ljon) La ~,ere. wçnc~ .eft ophgEie d'abdIquer, fi. e11e fe re'::
mane <} p~o/ fei;/ffldor: nupta non poteJl effi tfl.lrix.., !!rgo '1 ec
cu,ratr/~;l qt!t 1 Aifp'?fition de la.. L?i ~n qu _~r~\~t: _, .J
<:Jn repon oit pour (a pa,m,<:) d~:.9arf J .q~e.pCiuoJflu~.u2 f~.
~~m~r::lF\~M N!~ ;rr.~}f~! );~Jf~,t. de Il'Y ~ut:\!~ ~51ga]~11J-(a..~.ere
r.eli!a~e_ E~\ \~:n,e,a ~~lll~" ,d aPF~3J):~P.t d~'jf'lr~ s., lrf:t
prenpre p~e"q~ah:e qu elle avoit.perdue I:'H Iq1l C? t1Vrl· H'a
poél:f1pe,,~e.s Aute~l's el} pr~f~fe fll;r c~ pOJl1rn't-eFJ;Jer~S dansf~~.(Tf i.~lhgf! t1f~~41s, B r,S 1., ~e~i 1 ~ ~t<~96 ;1,P.qr~~ty.,.
quo 6'5 ; DümoullO , cOlltùme de Far.KJ tthlJ,;I"'! 22 "';P'j 1 ;
Bautaric, inJlitutiohs au droit françois, pag. 89; Serres,
irYt..it,lIt. gag. 73,
'"
:El'!:=il -avanragêüx qu'une nîere fendr -qui -n'a lllj-pèrdte
dans les bras d'un .R~veau m:ari l'aifeél:io,n qu'elle portoit à:
fes enfans, foit chargée de la tutelle? Dans ce cas, nul
dou~e' ,tl'un/eso]>d ~riag~ ~e doi ,POi~lt ê,rr,e: u!1 o~Hacle\ 11
cerre eleél:ion. La Loi peur à la .verite retirer fa confiance
d'une mere remariée; mals le r~ge éclairé par des circonf-'
ta,nces locales.., par l~avis d,es par~?s " s'empre!f~. de la lu-i
z:e~dre a}l·I).1pmegt"ou lle en eÎ!: Jugee .digne,. • . :
. J,a .r,~clama.tjor;jl~fie F,1}rul1 }1'~1l:,I~erta.inenle~r pa~ f~vo?
ra!?l~ ?puifq 'el,Je send ~ :P iv~rJ un~. m,ery, ge, Îa. ,dou,ce'iconfolation de veillern~)IS'iI1)6%e <. l~j conferva,r~ol~ ~e~ b~ens &
d,e,)j111perff;ln1]e d.e jl'unigue Ji s ,qHi )ui feQe ;,)elle n'a !?our
objet que fon ·intérêt:J?erfonnel.
,c
"Quant au flrééendu v;ce -tiré' ·du défaut de convocation de
tôus les parens, on difait qu'on avoit convoqu,é tous .ceux..
9~Vel;t;r~u.yo~~nt;,alo~s'jhTr3~lon" ex<;ellt.,è ~f~IX qui ,à l~ép~~
sue 4e ~la~rv~!~e/.fe, tr.?~\\er~nt ~~Ia?e;.. ~r ~ "
:Jf.
e
" ?n obf~~Yo~~t>,?ur)\1re:~arlelly, '. ~u:r la )~ame
Vflrs:
etolt héritlere de !On premier man; que fon fecond ma-l
riage; ne lui 2voit pas enlev~1 l'J,lfufrui,t.de cerfe fucceffion;
qu'eiJe ~t8it
rP!U?,h.~~~~crM L~~,:fpn,~ls')~i~;. Daqs c:s _~ir-o;
~OItl,~d~Ces fo? liJ~ CAlder !omé5/~ ~elI\~nce~ QH~J ooHade
a ce que la curatëlle lui fût dekeree? (!uelle adirliniHration
potlvgit- ê~re J?,1u~ fl1~~L~?l à it~é~êj
!~ÔEErdirql)e :,~~Ile
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�DU
PALAIS
DE
PROVENCll.
209
d'une mere qui, dans tous les temps,. mêmé après fon remariage, avait fu fe concilier l'eHime & l'affeél:ion de tous
fes enfans, & qui réuniffoit encore l'entiere jouiffance &
une partie de la propriéré de tous les biens de la famille.
D'ailleurs la Dame de Gars n'avoit point d'enfans de fan
fecond mariage qui pût faire craindre que fan affeél:ion fût
partagée.
Deux objets importans exigeaient que la nomination à
la curatelle rut faite avec célérité. D'une part, le Roi ayant
accordé au fieur de Gars fils une pennon de retraite, il
étoit néceffaire, pour qu'elle fût acquittée à la Dame de
Gars fa mere , qu_e la démence fût confratée; de l'autre,
les quarre mois accordés au Patron laïque pour préfenter,
étoient fur le point d'expirer, & il était important de conferver au fieur de Gars fils le droit de préfentation. Il était
donc impoffible de donner à l'affemblée des parens taute la
{olemnité qu'on auroit pu lui donner, en y convoquant les
parens qui étoient abfens, fans laiffer périmer les quatre'
Ulois de' la préfemation, Il ajoutait que le tuteur ou le cnrateur une fois nommé henè veZ malè , a pour lui un tirre.
qui captive la confiance publique. Une juHe opinion foutient fa gefrion, & tant qu'un jugement n'intervient pas.
pour l'en dépouiller, il eH lié envers la fociété, comme
la [ociété eH liée en'vers lui. Son pouvoir dérive plus de la .
poffeffion 011 il efr d'adminifrrer, que du droit même. Ainli
11 agit validement, ju[qu'à ce que l'adminif1:ration lui fait
enlevée.
MT. l'Avocat - Général de Ca!iffanne obferva qu'il n'y a
pas des Loix auffi [éveres & peut-être auffi injufres envers
les femmes que les Loix Romaines. On ne voyait dans.
. Rome République que l'auEorité a,es peres; routes les faveurs étaient pour les bras qui défendoient l'Etat. La retraite des femmes exigée par les mœurs & l'inconf1:ance
des mariages ne permirent pas de prendre beaucoup de
confiance en elles, & durent les exclure de tautes les foncrions qui ne pouvaient être exercées qu'en public. Par des
{;liCous contraires, les Loix des derniers Empeteurs du.reuc
Bd
�~IÔ
JOU~RNALL
J
leur étre plus favorables. II 'fall~it d'autres Loix pout d'au..
tres mœurs & pour- uue autre confiitution.
ToutesJes femme~' en génér~l fur~nt exclues des'tutelles
par les premieres Loix Romaines, & par deux motifs bien
différens; le premier étOit la fragilité même du fexe, L. l,
Cod. quando mulier. tut. offic.'fungi poteJl. Ce motif, il faut
en convenir, efi de tOus les. temps, de tOuS les pays &
de tOus les peuples. Le fecond étoit les fonél:iol}s publiques attachées à la tutelle. Il étoit digne d'une République
qui étoit la mere commune des citoyens, de fe regarder
perfonnellemenr chargée de tous les enfans de l'Etat, & de
fuire du foin des pupilles une efpece de Magill:rature. On
fent que les fonél:ions de la tutelle envifagées fous ce noble
point de vue ne pouvaient pas convenir à des femmes à
qui les Loix, pour l'intérêt des mœurs publiques, n'infpiroient que la -retraite & la modefiie.
Dès que les changemens arrivés dans la Confiitution de
l'Etat eurent rendu cette confidération moins forte, il parut
bien dur de refufer à la mere & à l'aïeule la tutelle de leurs
,enfans; cette -premiere exception fut confacrée par la Novelle I I 8. Les Loix qui fuivirent, furent encore plus favorables à la maternité; les meres furent préférées non feulement à l'aïeule, mais à l'aïeul qui n'avoit, pas le pupille
fous fa puilfance.
D'autres Loix refiraignirent cette premiere exception;
elles obligerem la mere, avant de fe méler de l'adminiHration de la tutelle, de renoncer avec ferment aux fecondes
nôces. L. matres 2 , Cod. quando mul; tut. Jung. poteJl. Les
Novelles la déchargerent du.ferment, mais non pas de la
renonciation; & nos Loix, en a-brogeant l'un & l'autre,
n'ont pas moins compris la celfation de la tutelle parmi les
peines des fecondes nôces. La mere qui forme de feconds
nœuds, doit quitter la tutelle par une difpofition générale
de la Loi; elle doit faire nommer un fecond tuteur &
rendre fon compte. Une conduire contraire la rendrait fufpeél:e, & la priverait méme de p!ufieurs avantages; mais
ces difpofitions mémes de la Loi fuppofent qu'elle efi déja
'"l
" .
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
ZIr
tutrice; elles font ceffer la tutelle qu'elle avait; cette tutelle
légitime & teil:amentaire qui fembloit ne lui avoir été déférée qu'à condition qu'elle reil:eroit en viduité.. Mais ces
mêmes Loix ne donnent point une exc1ufion formelle à la
tutelle poil:érieure; elles ne doivent même pas l'avoir pour
.objet; il fuffit qu'elles remédient à celle. qu'elles avaient
donnée; il füffit que ne pouvant pas juger des inconvénienSl
.que le convoI peut faire naître, elles falfent ceffer une
:tutelle dont la continuation peut être dangereufe. "
Après la tutelle déférée par la Loi, il en eft une donnée
par le Juge fur le fuifrage des parens alfemblés, & les fonctions de celui-ci fqnt bien différentes· de celles de la Loi;
le Juge pefe les .inconvéniens & les avantages; il confuhe
les paréns, les circônil:ances; il juge le cas particulier, &
décide l'exception. La Loi, forcée d'être générale, ayant
des craintes' officieufes, .& ne pouvant pas juger des cas
particuliers qui pourraient la ralfur\lr, fait celfer la tutelle
qu'elle a donnée, précifément dès que ces craintes commencent; elle ne veut plus être le garant d'une mere qui a moins
de droit à fa confiance; mais le Juge peut l'être enwre &
avec ccnnoilfance de cllufe. La Loi n'a point exclu des tutelles les femmes remariées·; elle les a privées de celles
qu'elles. exerçaient pendant leur viduité, & en quelque forte
même viduité. Il fuffit d'examiner ouels
fous la foi de cette
.
fane 'les motifs de la Loi, pour fentir que tout dépend ici
des circonil:ançes, & que le Juge, dans les tlltelles datives:. .
a.le pouv~ir de les apprécier; changement d'aifeél:ion dans
la mere, & crainte de fes diffipations, mutata affec7io & prœfumpta dilapidatio; v~ilà les deux craintes de la Loi ; Dien
ftuveni, dit-elfe, elles faèrifient leur nouveau mari, non feulel12ent la fortune·, mais la '!.'ie même de leurs- enfans: {PlI!!;
plenim'lue novis maritis, non folùm res liherorum, fed etiam..
vitam addicunt.
Il .eil: certain que ie pere qui n'a pas fes enfans fous fa
puilfance, n'eil: pas privé de la tutelle par fan fecond mariage. La raifon qu'en donne Defpeilfes, tom.. l , page 495 ~
,'eil: qu'il peut ré{iil:er aux rnallVai~ fQnfeils d'une fecolld~
.
a
D cl
2..
�'212..
Jou R N"A,t
femme. Mais dans certaines circonf!:ances, peut-il ne pas
en être de même de la femme par rapport au [econd mari?
Peut-on ne pas être raffuré tout à la fois ~ & filr la tendreffe de l'une, &Jur l'honnêteté de l'autre? Ce qui ef!: bien
.plus décifif, c'eH que la mere n'ef!: pas privée de la tutelle
par les fecondes nôces, lorfque le tef!:atel.lr a ordonné qu'elle
ferait tutrice, bien qu'elle fe remariât. \
• Cependant s'il ne fallait juger que par les craintes de la
Loi, ne (emble-t-il pas que l'éducation devrait être bien
plutôt refufée à la mere ren)ariée que la tutelle? Car, comme
le remarque le Préfident Faber, les dangers de la tutelle ne
peuvent porter que fur la fortune du pupille, & les dangers
de l'éducation menacent la vie. Dans les deux cas) la crainte
de l'afcendant du vitric ne ferait-elle pas égale? Et fi eUe
ne doit pas empêcher qu'on ne défere l'éducation à la mere
remariée, comment pourrait-elle empêc,her la tuteUe?. C'ef!:
le [enriment de Mr. Boyer,' quef1:. 124; de Papon , liv. 1'),
tit. '), na. 3; de Dupin, traité des fecondes Nôces, pag. 227.
Il y a des colltumes particulieres qui ont expreffément
adopté les meres pour tutrices après le'Jr viduité; teUe ef!:
celle de Bourgogne rapportée par B<?uvot, part. 3, na.
quef!:. unique; par Ferrieres en fan traité des Tutelles, part.
l, feél:. 3, na. 106; par Durand, quef1:. )); par Defpeiffes,
tom. l , pag. 49')'
,
Tout confif!:e donc à décider fi la mere remariée eU en'"
core digne de la confiance de la Loi: & quels meiUeurs
Juges, de cette quef1:ion que les parens ra{f~mblés qui lui'
donnent leur fuffrage! Les Auteurs les mieux verrés dans le
Droit pen[ent qu'eUe peut l'être. Dumoulin fur la Coutumè
de Paris, tit. 8, §. 99, na. 1; Boutaric & Serres, inJlitut.'
au Droit Fraf)çais, pag~ 89, & ,inJlitul: d~ Jujjinien, pag.•73,'
La curatelle n'ef!: pas auffi d~pendante des Loix que les
tuteUes; le pubere a déja une volonté que les Loix re[pecrent; il peut fe faire entendre, [on choix ef1: pre[que toujQurs
retpeél:é; il ne reçoit pas [on curateur, il [e le dOllne en
quelque forte.
La qualité
pas de f~ir.e
....de l'interdit ne. permet [ans doute
.
2.,
~
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE;
2.q
Ge ce principe une application entiere à la caufe; la curatelle d'un interdit, comme tous les 'Ameurs l'ont obfervé,
<juoique foumife à plus de foins qu'une curatelle ordinaire,
n'en ell: pas pour cela régie par les mêmes Loix que la tutelle. La feule différence que la qualité de l'interdit doi~e
.menre dans la nomination du curateur, c'efl: que l'interdit
,ne pouvant plus faire un choix par lui-même, fes parens
doivent fuppléer à ce choix; ils doivent concilier fes intérêts avec fa volonri préfumée; ils doivent, s'il efl: poflible, deviner des intentions que l'abfence de fa raifon ne
lui permet pas de manifefl:er; ils doivent fe demander à euxmêmes: fi l'imbécille pouvait Je faire entendre, choifiroit-il là
mere pour curatrice? Et nous ne faurions nous diffimuler,
d'après les bienfaits de la Dame de Bonvalenvers fon fils,
que ce choix n'auroit été que l'expreffion de fa reconnoif·
fance.
.L'interdiél:ion du lieur de Gars, bien-loin d'être contraire
~ux prétentions de fa mere, lui efl: favorable, parce que 'dans
ce cas précifément les Loix Romaines fe font relàchées de
leur févérité; la c.uratelle -ne fuit plus alors que les regles de
de la nature; elle n'a plus d'autre principe que l'intérêt du
mineur, que fa perfonne plus encore que fes biens. La' Loi
ayant befoin de plus grands fecours, les cherche dans le fexe
& dans les perfonnes qu'elle avoit d'abord exclu. Aina dans
les Loix Romaines, les enfans font donnés pour curateurs à
leurs peres imbécilles. Aina dans notre Jurifprudence, pluGeurs Arrêts, & enrr'autres celui du Parlement de Dijondu
2. Août 1608, rapporté par Defpeifles, tom.
pag. 49);
ont fuivi la même regle.
.
. La Dame de Bonval a donc pu être curatrice; l'ordon~
nance n'efl: point nulle, elle n'efl: point frauduleufe & clandefrine. En droit, y a-t-il quelque Loi, quelque Ordonnance
qui exige que pour une nomination de curateur à un interdit, moins encore à celle d'un minear, on appelle tous
les parens de la famille, abfens ou non abfens? Efl:-:iJ au
moins quelque Statut qui fixe un nombre déterminé, à peine
~ fraude & de clandefiinité? Non fans douce; il efi même
l,
.
"
/
�214Jou RNA L
des occalions où ces procédures, toujou.rs faites par l'auto';;
rifation du Juge, fous les yeux du minifiere public, ne peuvent pas avoir un certain degré de publicité, fans pouvoir
cependant être regardées comme frauduleufes. Ici le verbal
d'afTemblée fe trouve compofé de quatre parens .ou voifins; il Y
a fuffrage unanime, il Y a adhéfion de la part du Minifiere pu~
blic; ce même Minifiere qui, lors du fecond mariage de la
Dame de Bonval, avait cru devoir requérir d~ fan chef la
nomination d'un tuteur, l'afTemblée de la famille, & qui fur
le défaut de préfence des parens avoit requis la nomination
du fie!!r Brun pour tuteur.
Mr. l'Avocat-Général conclut à ce que l'Ordonnance du
Lieutenant de Toulon fÛt confirmée.
Par Arrêt du 27 Juin 1780, la Sentence du Lieutehant
de Toulon fut cafTée, & la Dame de Gars fut condamnée
aux dépens. Plaidant Mes. GalfJer, Alpheran & Meiff-cet.
ARR Ê T
X X X I.
La claufe ,'permis au Capitaine de coucher & faire échelle en
tous les lieux que bon ·Iui femblera, ne lui donne pas la
faculté de dérouter & changer [on voyage.
D
ANS 'Ie mois de Septembre 1775, Philippe A.udiffren;
Négociant de .la ville de Marfeille, arma & expédi<t
Je Navire Le Joli-Cœur, fous le.commandement au .Capitaine
Terraj{on, avec un chargement de marchandifes, pour allet>
en Guinée faire' la traite des Negres, les porter aux Ifles
Françaifes de l'Amérique, les vendre & employer le produit
en marchandifes de retrait; il fit prendre à la groffe, fous,
fon cautionnement, .]6000 liv. Iur corps & facultés de ce
11. T
•
,
"",aVlre.
Ce Capitaine ayant fait fa traite heurelifement, vint d'a..;
bord. aborder à la Guadaloupe, & de :là aux Cayes-Saint•.
LOl,(is) où il arriva.le 2.6. Juillet 1.77G! il vendit les Negres;.
�214Jou RNA L
des occalions où ces procédures, toujou.rs faites par l'auto';;
rifation du Juge, fous les yeux du minifiere public, ne peuvent pas avoir un certain degré de publicité, fans pouvoir
cependant être regardées comme frauduleufes. Ici le verbal
d'afTemblée fe trouve compofé de quatre parens .ou voifins; il Y
a fuffrage unanime, il Y a adhéfion de la part du Minifiere pu~
blic; ce même Minifiere qui, lors du fecond mariage de la
Dame de Bonval, avait cru devoir requérir d~ fan chef la
nomination d'un tuteur, l'afTemblée de la famille, & qui fur
le défaut de préfence des parens avoit requis la nomination
du fie!!r Brun pour tuteur.
Mr. l'Avocat-Général conclut à ce que l'Ordonnance du
Lieutenant de Toulon fÛt confirmée.
Par Arrêt du 27 Juin 1780, la Sentence du Lieutehant
de Toulon fut cafTée, & la Dame de Gars fut condamnée
aux dépens. Plaidant Mes. GalfJer, Alpheran & Meiff-cet.
ARR Ê T
X X X I.
La claufe ,'permis au Capitaine de coucher & faire échelle en
tous les lieux que bon ·Iui femblera, ne lui donne pas la
faculté de dérouter & changer [on voyage.
D
ANS 'Ie mois de Septembre 1775, Philippe A.udiffren;
Négociant de .la ville de Marfeille, arma & expédi<t
Je Navire Le Joli-Cœur, fous le.commandement au .Capitaine
Terraj{on, avec un chargement de marchandifes, pour allet>
en Guinée faire' la traite des Negres, les porter aux Ifles
Françaifes de l'Amérique, les vendre & employer le produit
en marchandifes de retrait; il fit prendre à la groffe, fous,
fon cautionnement, .]6000 liv. Iur corps & facultés de ce
11. T
•
,
"",aVlre.
Ce Capitaine ayant fait fa traite heurelifement, vint d'a..;
bord. aborder à la Guadaloupe, & de :là aux Cayes-Saint•.
LOl,(is) où il arriva.le 2.6. Juillet 1.77G! il vendit les Negres;.
�D U
PAL AIS
D:!
PRO VEN C :!.
il ')
il-én employa le produit à l'achat de diverfes marchandifes,
& en donna connoi1Tance à Audilfren.
Par police du 7 Décembre fuivant, Audilfren fe fit a1Turer
pour fon compte la fomme de 30400 liv. de fortie des Hles
Françaifes de l'Amérique, jufques dans le Port de Marfeille,
fur corps & faculté du Navire.
'
Le Capitaine Terralfon, au lieu de faire fon chargement
de retrait à Saint-Domingue pour Marfeille, partit des CayesSaint-Louis le 7 Novembre; & comme il avait le projet de'
fe rendre à Philadelphie, il fut rencontré le 14 ,Décembre
par la Frégate Anglaife Le-Perfée. Le Capitaine lui ayant
démandé l'exhibition de fes papiers, fit pa1Ter fur fon bord
deux Officiers Anglais, & lui ordonna de le fuivre; le 20
du même mois, il en fut féparé par les vents contraires, &
le 26 il fut rencontré par un Vai1Teau Anglais qui s'en empara & le fit conduire à New-YorcK, où il arriva le 12
Janvier 1777.
Là, le Capitaine Terralfon demanda d'être relâché; mais
le I l Février 1778 fon Bâtiment fut déclaré de bonne prife.
Le 1 ~ Février précédent, le Capitaine Terralfon avoit inftruit Audilfren fon beau-pere de fa capture & de fa détention. Sur cette nouvelle, celui-ci notifia le finilhe par un'
aél:e du 1 ~ Avril fuivant à fes A1Tureurs & à 1fes 'Donneurs à la'.
gro1Te. N onobftanr cette lignification, les Donneurs à la gre1Te
fe pourvurent contre Audilfren & le Capitaine Terralfon, pour
les faire condamner folidairement au paiement des fommes
pour lefquelles ils s'eroient obligés envers eux. Le 19 AoÎlt
même année, Audilfren préfenta une Requête contre {es propres A1Tureurs, après l'abandon à eux fait, en condamnation
des fommes par eux refpeél:ivement a1Turées. Sur les défenfes
des parties intervint Sentence du Lieutenant de l'Amirauté le
19 Septembre 1779, qui débouta les Donneurs à la gro1Te de
leur demande, tendante à faire condamner Audilfren au paiement des fommes qu'ils lui avoient prêtées, ainfi qu'au Capitaine Terralfon, & les A1Tureurs, tant des Donneurs à la
gre1Te, que d'Audilfren, furent condamnés au paiement des
fommes par eux refpeél:ivement.a1Turées, avec dépens & con,trainte par corps.
'
�-'2. Ils
.
JOUR.NAL
Les Affureurs & Donneurs à la groffe appellerent" de:
cette Sentence. On difoit pour eux, que nonobltant la:
daufe que portoient les polices d'affurance, permis au Capitaine de toucher & faire échelle en tous les lieux & endroitsque bon lui femblera, le rifque que les Affureurs avoient pris ,_
ne les rendoit pas refponfahles de la confifcation du Senaulc
Le Joli-Cœur, fi le, Capitaine TerrajJon, au lieu de faire
fon retour, à Marfeille, était parti des Cayes-Saint-Louis
pour aller direél:ement à Philadelphie.
Si le Capitaine avoit eu deffein de retourner en France ,:fon équipage de fortie eut été le même que celui qu'il avoit
lorfqu'il partit de Marfeille en 1-77S ; il eU: néanmoins certain que lorfqu'il a mis à la voile des Cayes-Saint-Louis ,.
il n'avait de fan ancien équipage que fon premier Chirurgien & fon Pilote. Il elt prouvé que le Capitaine paya fon.
équipage fous le prétexte qu'il défarmoit. Or, !\'il n'avoit pas
eu cette intention, il ne l'auroit pas pu fans contrevenir à..
la Déclaration du Roi du 18 Décembre 1728, & à l'Arrêt
du Confeil du 19 Janvier 1742, rapportés par Vallin, tom. 1,.
pag. 714, qui défendent expreffément ~u Capitaine de laiffel'
aucun Matelot de fan équipage dans les pays étrangers, dedonner, en auçun endroit aux Matelots des à- comptes de·
leurs falaires, de leur payer les falaires ailleurs que dans le
lieu de l'armement, excepté dans le feul c;as du dé,farm.ement,
En retournant à Marfeille, le Capitaine avoit intérêt &.
'droit de garder fon ancien équipage; voulant aller à Philadelphie, il ne pouvait l'obliger à le fuivre ;. il avoit intérêo.
de le renvoyer, de ne garder avec lui. que ceux de fes Officiers fur la pifcrétion defquels il pouvoit. compter, & qu'il
jugeait être capables d'entre~ dans fes vues. Il efl: convenu.
que quand le Capitaine TerraJ{on étoit p2rti des Cayes-SaintLouis, il avait un vuide, puifque ne fe propofam pas de
venir en France, il ne pouvoit embarquer fur fan. Navire
que les marchandifes qui lui appartenoient; il ne pouvoir
pas porter à Philadelphie des marchandifes qu'on l'eut chargé
de configner à Marfeille, & il ne pouvait apponer à Mar-.
• feiUe.
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
217
feille des marchalJdifes de contrebande. En effet, pourquoi
le Callitaine Terraifon elit-il rompu par un défarmement le
voyage qu'il avoit entrepris; fi fon intention avoit pu être
de le continuer tout de fuite? A quel propos, tandis qu'il
avoit un équipage, l'eut-il congédié, pour en faire en même
temps un autre? Dans le temps de ces opérations, fon
Navire étoit à demi chargé. Toutes ces préComptions décifives abouti1Tent à démafquer la fraude du Capitaine Terrajfàn , & à diffiper les nuages dans lefquels on a tâché de
l'envelopper.
On répondoit pour Audiffren, que le cas fortuit ou la
force majeure qui obligea le Capitaine Terraifon & fon équipage de faire route vers le Port le plus prochain de la nouvelle Angleterre pour s'y remettre en état de navigation,
étoit arrivé pendant le temps & dans les lieux du rifque,
que la prife du Navire Le Joli-Cœur par une Frégate anglaife, lorfqu'il faifoit ainfi forcément cette nouvefIe route,
& la confifcation qui s'en étoit enfuivie, étoient au rifque
des A1Tureurs.
La police d'affilrance détermine & fixe l'étendue du rifque de fortie des HIes françaifes de l'Amérique jufques dans
le Port de Marfeille. Le Journal de navigation jufiifie que
le Navire fit voile des Cayes-Saint-Louis, HIe & Côte
Saint-Domingue, le 7 Novembre 1776, pour venir à Marfeille, & qu'il fui vit direél:ement fans s'en écarter, la route
prefcrite & connue jufques au ') Décembre d'après; que le
Capitaine ne put pas toucher au Port-au-Prince, fuivant le
projet qu'il en avoit, parce que les vents avoient porté le
Navire à une trop grande hauteur, & ne lui permirent pas
d'y revenir. Telle fut la caufe majeure qui fit prendre au
Capitaine la réfolution de relâcher dans un Port prochain,
Hour y chercher des fecours indifpenfables, & pour fe re-.
mettre en état de reprendre la route de Marfeille, lieu de
fit deHination; qu'il n'y avoit aucune preuve du défarmement du Navire; qu'il étoit évident qu'il y avoit eu une défertion de la plus grande partie de l'équipage, ce qui n'arrive
q!le trop [Quvel1t aux lUes fran 1aifes de l'Amérique. Le N~~
. .
Ee
�1.18
]
0 U
RNA
L
vire, en partant des Cayes , avoit environ 90 tonneaux de
marchandifes, & il n'en manquoit que lO pour completter
fon chargement; les 94 bariques tafia pou voient être portées à Marfeille par traufit, filivanr la déci lion du Confeil
du 1,2. Juin 1758, & la Déclaration du Roi du 6 Mars
1777·
Les préfomptions de la fraude imputée au Capitaine fe
diffipent par le procès-verbal qui fur dreffé & ftgné par les
Officiers du Navire. Le dol e!1: un délit qui n'en jamais
préfumé, s'il n'dl: pas connaté d'une maniere claire &
évidente : dolum ex indiciis perfPicuis probari convenit. L. 1,
Cod. de dolo.
Celui qui prétend que la faute du Capitaine ou des chargeurs a donné lieu au cas fortuit, doit le prouver. ( Vinnius
ad Leg. Rhod. pag. 34,) Il fuffit que le maltre connate le
lininre, & ft l'on fe plaint que le flninre fait arrivé par la
faute du -Capitaine ou autres, on en obligé d'en rapporter
la preuve. (Srracca, de naut. part. 2., n. 6; 5typmanus-,
pag. ~ 58, n. 351; Targa, pag. 2.46; Santerna, part. 5 ,
n. 14; le Guidon de la mer, ch. 3, n. 2..) Et c'en aiiJfi
. que la Cour l'a jugé par Arrêt du 15 Juin 1746, au rapport de Mr. le Con{eiller des Crotes, en faveur des lieurs
Arnaud, le Magner & Bernard la Parade,' contre leurs
Affureurs {ur le vaiiTeau Le St. Bernard; par un {econd
Arrêt du 'l:l. Juin 1746, au rapport de Mr. le Confeiller de
Coriolis, en faveur des fleurs Michel, Grou & Libaud;
Négocians d'Hambourg, contre leurs Affureurs {ur la Galette Notre-Dame; par un troilieme du 13 Août 1748, en
faveur de Charles Cutayer Maltais, contre {es Affureurs
filr le Schebeck L'Immaculée Conception, & par un quatrie me du 2.0 Juin 1756, en faveur des fleurs Abraham &
Daniel Nunés Tavorés d'Amnerdam, contre leurs Affureurs
Iùr le Vaiifeau L'Amflerdam. r'
Par Arrêt du 2.8 Juin 1780, au rapport de Mr. le Confeiller de Ballon, Audiffren fut condamné au paiement des
fommes par lui empruntées à la greffe; les AiTureurs furent
mis hors de Cour {ur la requête d'Audiffren, qui fut con-
�DU
PALAIS
DE
PROVEN CE:
219
'èamné aux dépens envers toutes les parties. Ecrivant Mes.
Pafcalis & Maffe!.
ARR Ê T
X X XII.
CajJàtion d'un Verbal de per'luiJition & de toute la procédure.
L
E Procureur du Roi au Siege de la ville de Graffe
porta plainte contre Guillaume....... comme donnant àjouer fréquemment en plufieurs lieux différens, & levant
même un tribut fur ceux qui donnoient auffi à jouer. Guillaume....... fur emprifonné avant l'information; il fut enfuite
décrété de priee au corps fur le réfultat des charges. Il appella du décret de foit informé & de rout ce qui avoit fuivi.
On difoit pour lui, que la procédure éroit en elle-même
exce3Jjve dans fa rigueur, partiale & même oppreffive; que
'fan état ·de domel1:ique d'emprunt & d'occafiQn l'obligeait
à tenir une conduite réguliere, & à conferver la réputa ~ion
la moins équivoque.
On l'av·oit emprifonné avant d'avoir fait précéder aucune
information contre lui, ce qui efi auffi illégal en lui-même,
qu'intolérable dans les circ.onHances, qui ne comportoient
pas tant de précipitation & de févérité. On ne s'étoit pas
contenté d'entreprendre fur fa liberté & de fe faifir de fa
perfonne ; on avoit violé les droits [acrés de l'afyle de fa
mailOn , fans aucun mandement de jufiice, fans aucun décret. Des Huiffiers, des Records s'étoient: fait ouvrir les
portes, en menac;ant de'les enfoncer. Rien n'avoit échappé
à leurs regards indifcrets, & ils avoient exercé dans l'intérieur de fon obfcure retraite, fans daigner même prendre
la précaution d'appeller des témoins impartiaux qui puffent
prononcer entr'eux & lui, l'inqui1ition la plus redoutable &
la plus dangereufe. Ce n'avoit été que par cette complication d'auentats au droit des citoyens & même à celui de
la· nature, qu'on étoit parvenu à raffembler contre lui çe
Ee2.
�220
Jou
RNA L
qu'on àppelle des témoins muets & incorruptibles, mais cè
qui forme en effet la plus équivoque & la plus incertaine
de toutes les preuves. Quelques jeux de cartes neufs, un
nombre un peu ,plus confidérable déja vieux, d'autres cartes
éparfes, voilà ce qu'on avoit trouvé, voilà tout ce qui formoit contre lui le corps de délit & la bafe de la procédure
qu'on avoit enfuite illHruite. Point d'autre preuve. Tout homme qui a des cartes dans fa mai fan , n'dl: pas pour cela réputé joueur des jeux prohibés; il ya des jeux permis, & l'on
pem même, fans jouer, fe fervir utilement des cartes.
Ml'. l'Avocilt-Général de Montmeyan établit qu'une procédure eH excefIive dans fa rigueur, lorfque l'infl:ruél:ion
n'eH point dans une proportion exaél:e avec le délit que
l'on pourfuit & qu'on veut faire punir. On fi nt que la fé.:.
vérité qui convient pour les grands crimes éH déplacée,
quand il s'agit d'une faute beaucoup plus légere. Si cette
diil:inél:ion eil: vraie, même pendant !'inil:ruél:ion de la procédure, qui eil: après tout régie par les mêmes regles, elle
l'eil: bien plus encore pOUl" tout ce' qui précede cette infhucl'ion.
'Ainli , quoiqu'une Loi générale a/Ture à tout citoyen la
joui/Tance pailible & inviolable de fa liberté, tant qu'il n'y
a point contre lui d'information préalable, il eil: quelque.fois permis d'arrêter préliminairement l'homme violemment
& univerfellement foupçonné, lorfque la voix publique le
défere, lorfqu'il dl: à craindre que le cri de fa propre
confcience ne l'écarte & ne l'éloigne pour toujours, lorfqu'il s'agit fur-tout d'un crime énorme, & qu'attendu les
circonfl:ances ce crime efl: en quelque fortê fon dénoqciateur.
,
Mais appliquer cette exception à toute forte de délits &.
'd'hypothefes, ce n'efl: plus établir une exception, mais une
regle nouvelle aufIi cruelle, anfIi funeHe à la sûreté & à
l'honneur des citoyens, que leur étoit favorable la fage
maxime qui veut que toute préfomption, que toute faveur
foit d'abord pour l'accufé.
Ainu, par exemple, il fembleroit que celui qUI n'efl:,
�DU
PAIrAIS"Djl,.,'!?ROVENCJl;
2.21
~ccufé ql1e >'de llmple. contravéntion à la polièe des jeux,
rlor[qu'il n'eft point 'pris en flagrant délit, ne devroit, point
.être [aill avant l'inftruaion, qui ne le conduit qu'à une
_peine qu'il n'évite guere par la fuite, & à laquelle il n'a
ldonc prefque aucun intéi'çt de fe foufiraire. Cependant des
copfidérations puiffantes. ont prévalu', & la' néceffité d'em. ployer toute forte de moyens l'0ur arrêter les progrès
effrâyans d'une paffion funefte, a fait qu'on a cru pOLI voir
dans ce cas encore déroger à)a regle générale, fans que
cette dérogation fût fpécialement fondée' cO,mme toutes les
,antres', fur la gravité' int.rinfe,que du délit, mais feulement
fur fon. imporrai1Çe. re1.a1ivè. '
:
Sous ce, point pe vue, t'on,a voulu que la févérité e,l(cef!ive des ppurfuites. 2îl~ d.u-moins co'ntribuer à conte nir ceux
contre le(quels il n'e(t pas Roffible d'établir des peines proportionnées aux fun(!Hes fuites que peuvent avoir leurs premieres fautes, quoique ces pourliJites paroiffent quelquefois
,trop dures pour ce.s fautes elles-mêmes.
Une autre raifon ql1i ,a fait regarder comme indiÎpenfable
de.• perlJ1e~tre l'emprifopnem.e,llt .préliminaire de ceux qui
font foupçonnés de donner à jouer ,. c'ef!: le myf!:ere & les
précautions extrêmes qui accompagnent ordinairemen~ ce
~élit.. C'ef!: çl'après Ges motifs que les derniers. Arrêts> de
;Régie ment ont autorile à faire failir & confiituer prifonniers ceux que l'on foupçonne de recel~r ,des parties de jeu.
Ces Arrêts donnent même au minif!:ere public un terme
affez long pour fàire leurs recherches, & raffembler leurs
preuves, après s'être préalablement affurés de la perfonne
de~ ..a:ccufés; & ce n'ell: qu'après .que çe délai n'a rien produit, que ceux-ci peuvent non pas r~clamer contre leur
emprifonneme(lt, à moins qu'ils ne puffent l'attribuer à
une partialité évidente & caraaérifée, mais demander feu~ement leur liberté.
Si en effet il avoit fallu attendre d'avoir raffemblé un corps
complet de preuves contre ceux qui tiennent des académies
de jeux ou qui les favorifent, on peut affurer avec certitude
gue ces homme.:;
funefies à la faciéré, n'aura,ient jam,ais.
fi
�'lil.'2,
,
10
U'RNA L '
" '1
été {Ii pom-CuivlS ni puais. Car ce n'dt" qlre,dd~ beut"'he' de
leurs voifins, ou de ceox qye la foif du gari! ou la pàllion du
jeu a rendu en quelque"forrè leurs cdmplices, qu'on peut favoir la vérité qui les démafque & qui l'es perd. 01', une ,efpece de crainte lie la I~ngue des' ,uns ~ & l~lntér,êt aveugle,
l'efpoir chimérique de 're.gagner 'èe .qù'ils -ont perdu, ou le
delir non moins infenfé d'accroître IllUrs profits-, fafcine toujours les yeux .de" au\~es. De maniere qu'on joueroit en quel-'
que forte fous les yeux des Magifl:rats, [am qu'ils puffent
'néanmoins parvenir à conHater juridique'ment ce d~lit fi dangereux, du-mûins par rapport à fes conféquences. Ce n'dl:
que lorfque celu~ qui donne à iouer a été faili, q.ue cette illuuon & cette ivreffe qu'il i-épand autour 'de lui, peuvent
ceffer. Ceux qui ont perdu n'ayant plus l'efpérance' de fe dédommager de leur perte, laiffent enfin parler leur dépit &
'leur douleur. Ceux même qu'il a enrichi ne c.roient lui devoir
aucune reconnoiffance, parce qu'ils [entent dans ce premier
moment de calme, qu'il auroit pu auffi bi~n les ruiner; les
voiuns à leur tour viennent dépoi"er librement contre ces affemblées importunes & querelleufes dont ils ne redoutent
plus le reffentiment & la vengeance, & dont ils veulent prévenir le' retour.
Çerre efpece de rigueur cutrée dont on a cru devoir ufer
contre ceux qui précipitant les ho'mrrles dans la mifere, les
mettent, pour ainli dire, à portée du écime, eft donc auni
bien fondée fur la fageffe que fur la jufl:ice : autant il ea néce1t1ire pour le bIen & le repos de la fociété, que ces infiituteurs de frippons & de dupes, qui finiffent fouvent par devenir des brigands, foient connus & punis; autant Jle~-il
pOU'f. affurer leur découverte & leur punitièn, de permett're
au premier Juge de s'affurer de leurs perfonnes [ur de fimpIes foupçons, & avant même toute infl:ruél:ien judiciaire.
Mais la Loi, qui proçege la maifon de chaque ciroyen i
qui en faie comme le fat,J'él:uaire de [a liherté ,qui y reprend
en quelque forte' toute fon érendlie p,rimitive, e,fl: encore plu,s
générale & plus expreffe qu.e éelle qui met fa perfoflne' 11
couver.t de tout. Pour pouvoir être b:ifées, ées barrieres fa",
,
�"u
PAL AIS
D E
PRO VEN C E.
2.2
r
créès aux pieds defquelles le pouvoir le plus defpotique expire, & qui garantiffent à chaque ôtoyen la jouiffapce paifible & parfaite de lui-même & de tout ce qu'il lui plait d'y
cacher aux regards curieux, indifcrets ou malins, il faut plus
que de fimples foup~ons, & il faut filr - tout que le crime
dont il efr accufé, foit bien révoltant & bien atroce; dans
tout autre cas, ce n'efr qu'avec connoi!fance de caufe, ce
n'efr qu'après l'information, que le Juge peut décider s'il efr
néceffaire & jufre d'aller chercher des preuves èontre l'accufé jufques dans le lieu même qui lui fert d'afyle.
On n'en a pas ufé de même avec Guillaume •.... comme
fi l'ordre verbal du Procureur du Roi eLlc- valu une condam--t
nation définitive; en même temps qu'il- l'a fait faifir -d/un
--.. côté, il a fait ouvrir de l'amre fa maifon à des Huiffiers, à
des Records; ainfi on l'a traité à la fois, & comme un granù
criminel, & comme déja prefque convaincu. Il n'y avoit ni
flagrance, ni même gravité extrême dans le délit pour léquel
il étoit dénoncé au Minifrere public. Quelle raifon a donc pu
autorifer la dérogation aux Loix les.plus fages & l'interverfion de tomes les formes?
Les Arrêts de Réglement ont autorifé l'emprifonnement
préalable de celui qui efr accufé de tenir des affemblées de
jeu; mais oh ne peut pas en conclure, par firnple raifon dé'
parité ou de conféque.nce, qü'iJs aient auai permis d'accéder
chez eux fans mandement de jufrice, dès qu'il ne s'agit plus
d'y furprendre une p-artie de Jeu. Car' lr quoi bôn llcêéder-·
dans la maifon d'un homme foup~onné de donner à jouer,
dès qu'il n'eH: point quefrjon d'y filrprendre les joueurs. Mr.
l'Avocat-Général" obferva au furplus, que les cartes qu'on
avoit .jocnt à la procédure, au comme formant le corps de
d'élit, ou cemme defiinées à devenir contre l'accufé le témoin le plus fort & le plus irréprochable, ne pou voient cepéndant rien prouver par elles-mêmes. L'éclat anticipé &
extraordinaire qu'on s~étoit permis de faire contre Guillaume ..•. " étoit donc auffi' inutile qu'irrégulier & indécent. L'accufé étoit donc fondé à fe plaindre de ce qu'on
avait accumulé & employé contre lui tous les aél:es de ri..,
�224
J~o U RNA L'
. cr
Tl
~
gueur qu'on ne déploie d'ordinaÎre que contre les gran'eJs.
{célérats, & dans les cas d'extrême nécelIité.
Mr. l'Avocat-Général conclut à ce que le verbal d'accédit.
& de perquifition dans la maifon de Guillaume ..... enfem15le tout ce qui avoit fuivi, fût déclaré nu), & comme tel
calfé, fauf & réfervé au Subflirut de la ville .de Gralfe de
faire informer contre tous ceux qui auroient contrevenu ou
qui contreviendroient à la police' des jeux, foit en jouant euxmêmes, foit en donnant à jouer; foit en louant les maifons
oÙ les joueurs [e ralfemblalfent, & même contre Guillaume ....•
notamment fur ce qu"il étcrit publiquement foupçon!lé de
lever un tribut [ur. ceux qui don noient à jouer, en les menaçant de les dénoncer., & fur ce qu'on l'avoit vu autrefois préparer frauduleufement des canes.
Par Arrêt du premier Juillet 1780, prononcé par Mr. le
PréGdent de Saint-Vincent, les conc1ufions furent fuivies~
Plaidant Me. GalIier.
x XX l II.
ac7e ,a penfion vzagere,
ARRÊT
Si la lrifion a lieu dans un
peut fe faire rejlituer.
'p
•
& fi Pan
J
AR aéte du 3 Mars 1767, Pierre Roubin, Ménager
du lieu du Luc, vendit à Noe1-Jean .Amic plllfieurs hérjtages .au prix de .4000 iiI'. , dont' il reçut 800 IiI'. Jofeph
Aune, Négociant du même'lieu, allié du vendeur & de l'ache-te ur , fe préfenta pou.r exercer leI retrait lignager. En c'on[é-.
quence, & du con[entement de Roub!n, par aé1:e du 7 Avril
fuivant, Amie d.élailfa à Alln.e les biens qll'il avoit acquis; il
reçut le rembourfement des 800 IiI'. payées à compte du prix,.
& 96 IiI'. pour les fi:ai§ &. loyaux-coûts. .A.une fe chargea qe
payer.à Roubin les 3200' IiI'. teflantes ;,& par a\ltre.aé1:e du
même jour, ROllbin Jailfa à Aune, tantfcerre fomme, qu.e la.
terre de la Paillete, évaluée à 96 liv., à perte de finance~.
. .
Q10yennanç
�DU
PAL-AIS
DB
''l2.~
PROVENCE:
lhoy.ennant lâ rente viagere de 180 liv., & certains travaux
de campagne qu'Aune s'obligea de faire toures les années.
Par une déclaration fous feing privé, Aune déclara que cette
rente viagere feroit réverfible à la femme de Roubin après fa
mort.
La femme de Roubin étant morte, celui-ci fe détermina
à attaquer l'aél:e du 7 Avril 1767", & impétra des lettres
royaux de &eHimtion en entier; il fit affigner Aune pardevant le Lieutenant de Draguignan, pa,r exploit du 2..5 Avril
1775, & demanda qu'il fût procédé à l'e-{hmation de la terre
de la Paillete, ce qui fut ordorn.é par Senten(;;l du 7' Novembre même année; le rapport porta d'un coté le pri'" de
cette terre à 48.0 liv., & èn y joignant les 3200 liv. dnes
du reflant prix des autres terres, le fieur Aune tut déclaré
débiteur de la fomme de 1608 liv.;. & de l'autre, la penfion vjagere de 180 liv. & les travaux annuels du prix de·
4 [ liv. turent portés à une penfion de 22r liv~, ce ,qui [aifoit, à peu de chofe près, le fept pour cent du capital-, dans
un temps où le taux du Prince n'étoit qu'au quatre pOUf cenr.
Le Lieu'tenant, par fa Sentence· du 25 Juin 1779, ann-ulla
Faél:e du. 7 Ayril 1767, Aune eu décla.ra. appel pardev.anl::
la Cour.
On difoit pour l'a-ppellant, que l'aél:e d{] 7 Avril 176'7 ne'
formoit pas deux contrats diflinél:s & fé-parés •. Cet aéte avec:
celui de la rétention par retrait lignager des biens que Rou.,..
bin avoit vendu à Amic, fe fuccedenI dans le Regi{he, dl!)
même Notai&e; il efl clair que tout avoir été convenu aupa-.,..
ravant, & qU.e par les mêmes accords Roubin avoit confenti·de
bailler à Aune à rente viagere, non feulement les 3200 liv.du:
prix reflant de fes biens, mais encore fa terre de la Paillete"
moye.nnant la penfion anl1l\elle de 180 liv. & les travaux néceffaires pour la culture de fes autres fonds E,endanr fa vie~
Tour cela ne faifait qu'une feule & unique convention ;.'mais;;
~1 falloir eflimer la terre de la Paillete pour le droit de lods:.
& les droits royaux, de même que les travaux qui faifOient:
Farcie de la relite vîag.ere, & de là- eeQimation de 20 liv~
Ff.
.
�•
'2.2.6
10
UR N A L
qu'on donne à l'une, & celle de 24 liv. qu'on donne ~
l'aurre. Ces deux efiimarions n'éroient que fiél:ives.
II efi de principe que de leur nature les aél:es fonr indivifibles, que roures leurs difpofirions fom cenfées corrélatives,
& qu'il n'eH jamais permis de les fépàrer pour en prendre
une partie & laiffer l'aurre. C'efi ainfi que s'expliquent Mr.
Cochin, rom. l , pag. l S
Me. Decormis, rom. l , col.
1004; Grotius dans fan traité du droir de la guerre' & de
la paix, lib. 3 , cap. 19 & 24; & le nouveau Commentateur
de nos Statuts, rom. 2, pag. 2 II , na. )7. C'eH ce que la
Cour jugea en 1776, au procès entre les nommés Giraud &
Barri. A la fuire d'un échange de deux héritages, Barri avait
vendu à Giraud une autre terre, & peu de temps après ce
dernier attaqua la feule' vente, fous prétexte de léfion. La
Cour jugeant que l'aél:e éroit indivifible, & que Giraud ne
pouvoir pas fe prévaloir du prix fl:ipulé dans l'aél:e pour le
fonds vendu, fi d'ailleurs il n'avoir pas été léfé dans l'enfemble, ordonna l'eHimation, tant du fonds vendu, que des
fonds échangés, pour voir fi du rotaI il réfulreroir la léfion
uIrramédia ire pour l'un des conrraél:ans.
Les conHituJions de renre viagere font des aél:es par lefquels, moyennant une fomme d'argenr ou un fonds qu'on
aliene, on acquiert une renre qui efi payée pendant la vie
de l'acquéretir; il Y a de l'incertitude dans l'événemenr. Ces
comrats font donc dans la claffe des contrats aléaroires; c'efi
le caraél:ere que leur affignc Porhier dans fan Trairé dit
contrat de conjlitution de rente, chap. 8, pag. 222, na. 2 l 8.
Or, filivant rous les principes, les comrats aléaroires ne font
point fujets à la refcifion pour la léfion d'outre - moitié du
jufie prix; il eH, même impoffible que cette léfion fe rencontre dans une conHiturion de renre viagere, donr le ta,ux
eH au deJfus du taux du Prince.
Le Souverain ne fixe un taux à l'intérêt de l'argent, que
pour défendre d'en exiger un plus fort; mais il efi très-permis de fe régler fur un raux plus bas. Ainfi on ne peur pas,
fans rom ber -dans le crime d'ufure, placer fan argent à
rente confiituée à un taux fupérieur à celui qui efi autorifé
4;
�DU
PALAIS
DI!
PROVENCE.
227
par la Loi; mais on peut légitimément prendre de l'argent
à un taux beaucoup moindre. Il s'enfuit de là qu'en combi,nant cette faculcé de donner ou de prendre au deffous du
taux légal de l'intérêt, avec l'incertitude qu'il y a fur le
terme de la vie des hommes, il ell: impoffible de faire avec'
ju!l:effe le reproche de lélion d'outre - moitié à toute rente
viagere qui e!l: établie 1t un taux fupérieur à celui de la Loi.
, Quelques Auteurs, & entr'autres Dumoulin, ont examiné
fi lorfque le taux d'une rente viagere eil: exceffif, eu égard
au capital, comme par exemple, de dix ou de douze pour
cent, on ne devoit pas le regarder comme ufuraire; ils
ont décidé que cela dépendoit des circonil:ances. Mais il
n'eil: aucun Auteur qui ait ofé dire que le créancier de la
rente fût autorifé à revenir contre fon engagement pour
caufe de lélion , dès que le taux de fa rente eil: au defIiJs
de celui du Prince; tout ce qu'on trouve à ce fujet dans les
:boix & dans les Doél:eurs, tend à établir le contraire.
On voi!-d'"abord que fuivant l'Edit du mois d'Août 166r,
il étoit défendu aux Corps & Communautés de recevoir à
rente viagere à lll\ taux plus fort que celui du Prince. Donc,
fuivant cette Loi, les contrats de con!l:itmion de rente
viagere au taux du Prinèe font légitimes, & ne peuvent
pas être attaqués pour caufe de léfion; c'e!l: ce qu'atteil:e
Denifart dans fa colleél:ion de decifions nouvelles, va. 14fion.
C'eil: aux mêmes conféquences que conduifent les principes que pofe Pothier ci-devant cité. Expliquant d'abord
la .nature des contrats à rente viagere , cet Auteur obferve
au n. 216, que lorfque la rente excede le prix légitime des
intér.êts de l'argent, c'eil: une efpece de contrat de vente,
& il obferve qu'il faut pour cela que la rente excede affez
l'intérêt légitime; mais lorfque la rente n'excede pas l'intérêt légitime de l'argent, le contrat eil: cenfé renfermer
une donation qui eil: faite au conflicuant de la fomme d'argent qu'il reçoit, fous la referve de la jouiffance pendant
le temps que doit durer la rente, pour le prix de laquelle
jouiffarice le con!l:ituant s'oblige à payer la rente. On peUl:
donc, fuivant çet Auteur) réduire le taux d'une rente '1ia-
F f
2.
�~~
JOURNAL
gere au' taux du Prince; dans ce cas l'aél:e particIpe à la
nature des donations : il n'efl: donc pas poffible de proporercontre ces fortes d'aél:es la léfian même ~'oU(re-mOlrié.
On obferva furabondammenr pour Aune, qlle s'JI érait
poffible d'affimiler les conrrats de co Hitution de reme
viagere à de fimples aél:es de venre, & de les atraquer par'
voie de léfion, il efl: certain du-moins qu'il faudrait une'
Iéfion d'ourre - moitié pour y donner atteinre; une lé IOn
qui ne feroit pas au delà du double feroit impuilfante, Telle
efl: la décifion de la Loi 2, Cod. de refl:indenda vendl. Il
ne fuffiroit 'donc pas dans l'hyporhefe de prouver une léfion
quelconque, une léfion très-confidérable; il faudrair montrer
dans l'aél:e une léfion d'ourre-moirié. Or certe leGon peurelle fe renconrrer dans un aél:e qui porre la renre au delfus
du fix pour cenr du capiral, randis qu'à l'époque du conrrat
le taux du Prince n'érair qu'au quatre pour cent?
Par Arrêt du 3 Juillet 1780, au rapporr de Mr. le Con"':
feiller du Bourguer, les lettres de refl:itution furent rejetrées
.
avec dépens. Ecrivant Mes. Barlet &
ARR Ê T
X X XIV.
Le Billet à ordre efl négociable, quoique celui qui fa fait ne
[oit point Marchand.
L
E fieur Lafaveur remir au fieur Goulard, Négociant de
la ville de Lyon, un biller à ordre filr le fieur Pef-,
chevin de la fomme de '1000 liv. conçu valeur reçue comp-
tant.
Ce billet n'ayant pas éré acquitté à fon échéance, le
fieur Gaulard fe pourvut pardevanr le Lieurenanr-Civil de
la ville de Marfeille. Senrence qui condamna Pefchevin au
paiemenr du montant du billet. Il en appella pardevant la
Cour, & fourine que le biller tranfporté ne pouvoie êrre
coofidéré comme un billet pe commerce,
mais comme une
. ,
�nu
PALAIS
DE
PîtovENCIl.
1..19
'lllbligati'onoroinaÎre qui n'étoÎt point 1 mercautille. Il établie
la différence qu'il y a entre les billets payables au porteur,
ou à ordre, qui fom faits entre Négocians & Marchands
dont parle l'art. 1.. du tit. 11.. de l'Ordonnance de 1673 , &
un.billet d'un particulier qui n'ell: ni Négociant ni Marchand,
fait à l'ordre d'un autre particulier, qui, fuivant l'arr. 3 ,
n'ell: qu'une fifriple promelfe dom les luges des Marchands
ne peuvent poine connoitre, parce qu'il n'ell: point mer~
camille. Ces deux fortes d'obligations operenc des effets
différens.
.
. Les. bille.ts ·de, <:hange ou à ordre faits entre Marchands
& Négocians étant négociables & mercantilles, on ne peue
point oppofer au porteur les mêmes exceptions qu'on aurait pu oppofer à celui à qUoi le billet à ordre a été fait, à
caufe de la .faveur accordée au commerce qui a donné lieu
au priirilege de pareils billets. Mais il n'en eft pas de même
d'un billet à l'ordre des parricu1iers qui ne fone ni Négo-'
cians ni Marchands, c'efl-à-dire, d'un billet qui n'eft. pas
mercaneille, qui n'eft pas un titre de commerce; il peut
être cédé comme toutes les aurres obligations & promelfes;
mais celui qui a confemi un pareil billet, a toujours les
mêmes exceptions contre les ceffionnaires de ce billet, que
celles qu'il aurait pu oppofer à i::elui en faveur de qui l'obligation a été faite, & qui en était originairemem propriétaire.
L'Ordonnànce du Commerce qui a établi le .privilege des
billets de change ou à ordre, établit en même temps que
les billets à l'ordre des particuliers non Négocians ni Marchands ne jouilfent pas de ce privilege, & que ce ne font
que de fimples promelfes.
.
Or il eft de regle que tant que la ceffion n'eft pas lignifiée, elle ne peut rien opérer, fuivant la Loi 3, Cod. de
novat. & delegat. , & le cédant peut exiger la chofe cédée;
le. débiteur cédé peut la p(l.yer au cedant, & lui. oppofer
routes les exceptions qui lui competent, ainli que l'établi.c
Matha:us, de a.fflic1is, dans fes notes fur la décifion 73,
§. 7, Duperier en fes no~es manufcrites au mot cejJion acte He
l~ même prÏ11Çip.e~
�~30
Jou
R N·A L. J •
On répondait pour le fieur Goulard, qu'un billet a''Ot'd're>
eH celui par lequel quelqu'un promet· à un nurre de payel'
quelque chofe à lui ou à fon ordre, c'eH-à-dire, à celui
auquel il aura paifé fon ordre au dos du billet. C'efi la définition qu'en donne Pothier dans fon Traité. du contrat de
change, n. 2 l 6.
.
Ce billet de fa nature n'efi donc pas payable précifément
à celui en faveur de qui il efi foufcrit, mais en général à
celui qui s'en trouve le porteur. Cette maniere de Je concevoir fuppofe que celui qui le reçoit, peut le tranfmeme
à un tiers par un fimple ordre ou endoifement ; il peut donc
etre negocle.
Le nouveau Commentateur d'Orléans, fur l'arr. 3 l dl.f
titre') de l'Ordonnance de 1673, après avoir dit que les
billets faits au profit d'un particulier y dénommé, fans'
ajouter ces mots, Oll li ordre, ne peuvent fe négocier,
ajoure : la [econde efpece de hillets efl de ceux qui font payahies li un particl/lier y nommé ou li fon ordre; ils font jUjets
aux même s formalités que les précédens, & ils peuvent ft négocier. Le Parfait Négociant, tom. l , parr. l , Iiv. 3 ,
ch. 7, pag. 19') , atteGe la même chofe. Comment foutenir qu'on ne peut négocier les billets à ordre que lorfqu'ils
font foufcTits par des Négocians? Seroit-ce d'après la nature de ces billets? Mais qu'ils foient Coufcrits par un Négociant ou par un Bourgeois, le Bourgeois qui a foufcrit
un billet à ordre, a-t-il eu moins l'intention de le payer,
ou, à celui auquel il l'a donné, ou à celui qui s'en trouve
le porteur? A.t·il moins enrendu qu'il pôt être tranfmis à
un tiers, dès qu'il a promis de payer à celui plJCluel il l'a
remis ou à fon ordre? Ne s'eG.· il pas obligé par cerre
claufe de payer également à ce dernier comme au premier?
Et par cela feul qu'il a fait un billet à ordre, n'a-t-il pas:
eu l'intention que ce billet pôt être, tranfmis d'une main à
l'autre par un {impIe ordre, c;.e qui efi le vrai caraél:ere
de la négociation?
.
Les billets à ordre font négodables en général par qui
<.lue çe foit qu'ils a.ient été foufcrits 2 parce que~ telle eU· lat,
A
,
• ,
•
•
�DU
'PALAIs
DB
PRO'O'IlNCll:
:1Jt'
bature de ces fortes de papiers. Ils ne produifent la contrainte par corps & ne foumerrent à,la Jurifditlion l.Oufulaire qu'encre Négocians , parce que ces deux effets ne .dérivent pas de la nature des papiers, mais de'la qualité des
parties. Il n'y a aucun rapport encre ces deux "objets. On
ne peut pas dire qu'ils ne foient pas négociables, par cela
feul qu'ils ne foumettent pas à la JurifdiéHon confidaire &
à la contrainte par corps. Cerre différence ef! établie par
Pothier au lieu déja cité, n. 222; par Savari, rom. J,
part.
liv. 3, ch. 10, pag. 224, & rom. 2, pag. 39) &
J,
57)'
Celui qui foufcrit un billet en faveur de quelqu'un feulement, fans ajouter ou il [on ordre, ne s'engage qu'envers la
perfonne en faveur de laquelle il le foufcrit; fonintention
n'ef! pas que -ce billet puiffe être tranfmis à un tiers fans
fa participation. Lé tranfport ne peut donc fe faire que par
une ceffion qui n'a fon effet qu'amant qu'elle ef! connue du
débiteur, & approuvée par fon acceptation. Jufqu'alors le
billet ef! roujours cenfé ,apparténir à celui en faveur de qui
il a été fait; la ceffion, le tranfport ne valent que comme"
mandat ou procuration; lè porceur, le ceffionnaire ne font
regardés que comme les mandataires ou Procureurs; auffi
le d"ébitcur peut oppofer au porteur ou ceffionnaire les mêmes exceptions qu'il eut pu oppofer au créancier originaire
en faveur duquel il s'ef! obligé.
Le billet à ordre au contraire, contient, par la maniere
'dont il ef! conçu, un engagement plus étendu. Le débiteur
qui le foufcrit, s'engage non feulement en faveur de celui auquel il le foufcric, -mais généralement en faveur de tous
ceux auxquels il ef! tranfmis par l'ordre mis au dos du biller.
L'ordre équivant dans ce cas à la ceffion, & il a cet avantage pardeffus la ceffion, que celle-ci ne vaut qu'autant qu'elle
ef! fignifiée & acceptée, parce que telle ef! la nature du
fimple billec & l'intention de celui qui l'a foufcrit; au lieu que
l'ordre.rend celui à qui il ef!, fait, propriétaire incommutable,
fans qu'il foit befoin d'en donner connoiffance au débiteur
~riginaire, qui en [oufcrivant un billet à [on créancier ou 'à
�2-32.
fOURNAL
,-
.
fon ordre, lui a permis par-là de le tc,anfmeccre par un fiin'';
pIe ordre, & conféquemment par toute autre voie que par
la voie ordinaire de la cellion. ( Bornier fur l'art. 30 du titrë
I2. de l'Ordonnance de 1673,) De là il fuit que le débiteur
du billet à ordre ne peut plus oppofer au porteur les mêmes
exceptions qu'il eut pu eppofer au créan.cier originaire. Dans
l'un.e & l'autre efpece de billets, le ceffionnaire ou porteur
·tient également fon droit du cédant & du cédé, mais avec
cette différence qu'au cas du {impIe billet, le concours, le
cOl)fentement du cédé n'interviennent qu'au moment du tran6port accepté, parce qu'il ne l'avoit pas aurorifé dans le biHe.t
même. au lieu que dans l'autre, ce cencours, ce c6nfentemen!: fe trouvent dans le billet lui-même, en permettant de
le tranlmettre par un {impie ordre; claufe qui équivaut à une
acceptation expreffe du tranfport qui pourra en être fait.
Ces réflexions font évidemment fondées fur la nature dll
hillet, & fur la différence de ce billet avec le billet {impIe;
elles ne peuvent donc recevoir a.ucune atteint.e de la qualité
des patties. Que le billet à ordre ait été foufcrit par un- Négociant ou par un. Bourgeois, leur in.tenrion n'a pas moins
été qu'il pût être tranfmis par J10rdre de celui en faveur de
qui il a été foufcrit.
Par I\.rrêr du 4 Juillet 1780, au rapport de Mr. le Confeiller de la Baume, la Semence fut confirmée avec dépenS'~
Ecrivant Mes. Dubreuil cadet & Verdet.
ARR Ê T
X.X X V..
la femme mariée fous Itne conflitution générale ne peut- ac";
cepter une donatiorz,Jfins l'al/t.orifation de [on mari Olt dela jufiice•.
.
B
I:aife OHiv~r, fils de ~ierre, ,du lieu d'Ifl:res, fit do.na~
t10.n à Mananne Bournllon., epoufe fous une confi.ltulÎO~ de qot géné.rale cl,' An~oi..ne. F aJ;i{ie.n., de tous les drQir~'
q,u'~
�DU
PAL AIS
D E
:l. 33
PRO VEN CE.
qu'il poûrroit exercer contre Olivier & Garcin, acquéreurs
des biens de Pierre Ollivier; la donation fut faite & acceptée moyennant 18 liv. & une chemife.
Marianne Bourrillon demanda contre Garcin--& Ollivier la
défemparation des immeubles dont ils étoient en poifeffion,
avec rellirution des fruits. Sentence du 7 Avril 1778 du Juge
d'Ilhes, qui fait droit à cette demande.
Garcin & Ollivier en appellerent pardevant le Lieutenant
du Martigues; Antoine Farifien prit alors le fait & caufe de
fa femme, & approuva l'acceptation qu'elle avoit faite de la
donation. Le Lieutenant, par fa Sentence du 27 Mai 1779,
féforma celle du Juge d'IHres, & mit Ollivier & Garcin hors
d'inHance & de prQcès, aVec dépens; Farifien en appella
pardevant le Cour.On difoit pour lui, que les femmes mariées qui, en Provence, çomme dans plufieurs autres Provinces du Royaume, fonecapables de toutes fortes de contrats, ne peuvent être frappées d'une incapacité abfolue, lorfqu'il s'agit d'une libéralité; c'eH fur-tout aux femmes mariées fous une confl:itutiol1!
générale que l'on n'a jamais contefl:é la capacité de faire
des contrats quelconques; le cautionnement excepté, leurdroit de propriété les y aurorife, quoique aifurément leurs;
maris aient & l'adminii1:ration & l'uCufruit de tou.s leurs biens.,
Les Arrêts ont jugé mille fois qu'elles peuvent en difpufel"
même par des dona-tians emre-vifs, pourvu qu'elles' ne tou-.
çhent point à l'intérêt perfonnel de leurs maris, ou en rapportant leur confentement. On en voit un très-grand nombre dans les Recueils de Boniface, de Mr•. de Bezieux, &.
dans Duperier , tom. l , liv. J ,. quefl:. 3.
Telles font nos maximes, en, ce qui concerne les aHénations même que la femme mariée peut faire de fe·s biens;
dotaux. Jamais la _Loi n'a imaginé de les en déclaver incapables; jamais elle n'a entendu les priver abfolument de la.
1i.berré de difpoCer des biens dont elles c;onfervent la propriété, nonobfianc leurs confl:itutiolJs dotales;. elle a feule-.
ment voulu prévenir les abus que pourrait amener un. ex:cès;;
(le. façilit~ i 'le fi d'un côté elle. a (au,vé les, in.térêts dl! ma.ri.-
Gg;
�'2.34
10URNAL
en ce qui concerne fon droit d'ufufruit, elle s'ell: occupée
en même temps d'empêcher qu'il ne pût abufer avec fuccès
de fon empire ou de fon crédit fur l'efprit de fa femme. '
Les femmes mariées one toujours confervé bien plus de
liberté en ce qui concerne les libéralités que l'on a trouvé
bon de leur faire. Ici on n'a pas vu ~ue la Loi ait jamais
pris des précautions done elle connoiffoit toute l'inutilité.
Une feule chofe raffuroit fa juHice & fuffifoit à la fageffe de
fes vues. Le mari nanti de l'adminill:rarion & de la jouiffance des biens dotaux, ne peut en êrre privé par le fait de
fon époufe. Que lui importe donc que celle-ci accepte des
libéralités, & fe foumette en même temps à des charges
quelconques! Le mari conferve tous fes droits fans diminution; & fi la femme ne remplit point les engagemens qu'elle
a coneraél:és, c'elt au donnant à reprendre fa libéralité.
Il y a plus: l'inutilité de toute efpece de précaution ën
ce qui concerne' les intérêts de la femme, érait démontrée
par la nature même des aél:es contenant libéralité. La maxime
a toujours été telle qu'elle ell: encore aujourd'hui, même
. dan> le fyfl:ême de l'Ordonna~e de 173 1. Une donation
quelconque ne peut devenir onéreufe au donataire. C'efl: un
aél:e qui ne doit lui apporter que des profits; & s'il craint de
perdre, s'il apperçoit des rifques quelconques, il efl: reçu
dans tous les temps à répudier les biens ou à renoncer à
l'aél:e. On peut voir ce qu'en anefie Futgole en fes quell:ions
fur les donations, quefl:. 8 , & fur l'art. 18 de l'Ordonnance
de 173 r.
,
De là point de préjudice à craindre pour la femme mariée; & fes intérêts étant conféquemme'nt fauvés par la nature même de l'aél:e, comme les droits du mari le font par
le texte du contrat de mariage, il n'y avoit nulle raifon
d'empêcher la femme d'accepter à fon gré les libéralités que
l'on trou voit bon de lui faire.
L'article 9 de l'Ordonnance de 1731, après avoir prohibé aux femmes mariées le pouvoir d'accepter des donations fans autorifation de leurs maris, ajoute: ou par jufiice,
li [on refus, fans néanmoins rien innover d l'égard des dona-,
1
�D U
PAL AIS
DE
PRO VEN C E.
23 ')
tions qui feraient faites à la femme pour lui tenir lieu de bien
paraphernal, dans les pays où les femmes mariées pourront
avoir des biens de cette qualité.
Si la Loi avait entendu frapper les femmes d'une incapacité quelconque, fi elle avait eu d'autre objet que celui
de prévenir les fraudes, la verroit-on dire en même temps
que la femme mariée fera autorifée par jull:ice, lorfque le
niari refufera de l'affill:er lui-même? C'dl: le Juge, ce font
fes parens que la Loi eut chargé de l'acceptation, fi IL
femme mariée avait pu lui paroître incapable d'accepter ellemême.
La femme mariée n'a befoin ni de l'autorifation de fon
mari, ni de celle du Juge, fi les libéralités qu'on lui fair,
doivent lui rell:er à titre de biens, paraphernaux. Elle n'dl:
donc point incapable d'accepter; & c'ell: en eJfet ce que Mr.
d'Agueffeau marqua plus d'une foîs à ceux des Parlemens du
Royaume qui lui obfervoient combien il éroit inurile en pays
de droit écrit, que la femme mariée fût aurorifée par fan
mari ou par jull:ice-; & c'ell: ainfi que l'one penfé Boutaric &
Furgole filr le même art. 9 de l'Ordonnance de 1731.
L'aél:e même que l'on rrouve bon de quereller, porte avec
lui la preuve de fa validiré. C'ell: au Juge que les parries fe
fane adreffées; c'ef!: à lui <jue Marianne Bourrillon, don'Jraire)
a demandé de mettre & inrerpofer fan auroriré à la donation. Le Juge l'a fàit de même; il a ordonné que cette donation fercit gardée & obfervée fuivant fa forme & teneur.
Il "a donc amorifé l'acceptarion de la donataire; il a donc
jugé formellement que la donation étoit emiéremem parfaite. C'ell: donc un jugement que l'on attaque en dépit même
de la Loi.
/
On répondait que les femmes ne font pas à la vérir6
dans certe Province auffi érroitement foumifes à la puiffance de leurs maris, qu'elles le font dans les pays coutumiers : le mariage ne les frappe pas d'interdi8.:ion ; elles
font capables de roure forte â'aél:es; roure la gêne qu~ la
Loi Romaine leur a impofée, fe réduit à ne pouvoir Confencir aucune obligarion qui affeél:e leur dot, fans l'apprab<\
Gg2.
�236
Jou
RNA L
tian du mari qui en a le domaine civil; mais ce'tté liberré
qu'elles conCervent après le mariage, n'ef!: pas auffi indéfinie qu'on le prétend: il eH: certains aél:es qui font abColument interdits à la femme mariée fous une conHitution générale, même filÎvant les principes du droit commun &
l'ufage général de cette Province. Ainli, par exemple, la
femme n'a aucune aél:ion contre le poffeffeur de fes fonds
dotaux, tant que le nlariage filbfiile, Cuivant la Loi 49 in
fine, if. de furt. Le cas de la répétition excepté, elle ne
peut aél:ionner ni fan mari, ni le débiteur de fa dot. (Perezius , Cod. de rei vindie. n. 2; Buiffon, Cod. eod. ; Boni[1Ee, tom. 4, pag. 601.) C'eil pour cela que nulle prefcriptiot:J ne court contre la femme; elle ne peut pas mieux
être affignée en juilice par un tiers, fuivant l'Aél:e de Notoriété de MM. les Gens du- Roi, n. 132.
Il eH donc vrai que fuivant nos propres maximes, il eil
une efpece d'interdiél:ion qui affeél:e la femme- mariée fous
une conHitution générale. Il eft donc vrai qu'elle eH en
certain cas cenfée ne pas exifter, puifqu'il faut -Cuivre après
Je mariage la m~J11e procédure qu'on fuivrait après {on
décès. Il eH donc enfin démontré qu'une Loi qui lui refuferait la faculté de con{entir certains contrats fans l'aurorifation de {on mari, ne {eroit point une Loi deHruél:ive de
nos principes; que le changement particulier qu'elle ferait
à notre droit, n'en altérerait point Je fyHême général.
Tel eH le caraél:ere du changement qu'a fait à nos ufages
l'Ordonnance de 1731. Cette Loi a eu deux objets; le
premier, de développer les véritables principes de la matiere ; le {econd, de rétablir dans cette partie de la Juri{prudence eetJ.« uniformité parfaite, qui n'efl pas moins hono:"
raMe au Légiflateur, qu'avantageufe a fes fujets. Ce {ont les
termes du préambule de l'Ordonnance de 1731.
Il ne faudroit pas croire qu'on ait perdu cet objet de
vue dans la rédaél:ion de l'art. 9. Il ferait bien étonnant
que le Légifbteur eÎIt diHingué les u{ages des pays coutumiers, de ceux des pays de droit écrit, & qu'il eût laiffé
fubfiHer une diverlité de Jurifprudence dans la même Loi
�bu
PALA:fS
DE \JPR~OVENCE;
~37
"Iuî n'a;'éte 'faiée 'que pour. l'abolir. C'efr ainfilque l'attefre
M. d'Ague1feau, tom. 9, pag. 360.
Tout ce qui ell fait contre la prohibition de la Loi, dl:
néce1fairement nul. Une femme mariée fous une conHitutÏQn générale ne peut accepter feule unè dOJlationr.(ans conuevenir à la Loi; il fa~lt donc que fon, accep'tation foit
nulle, & qu'on regarde là donation dans laquelle.' elle db.
intervenue, comme une donation qui n'efr pas valablement
accepté,e. Il le faut, d'autant mieüx que l'Ordonnance commence par refufer aux femmes la faculté d'accepter, ne
pourroTlt. Vient enfuite la condition fous laquelle cette faculté leur efr rendue, c'efr l'autorifation du mari qui en efr
la matiere; c'efr donc cette autorifation qui donne à la
femme le pouvoir d'accepter. Elle eŒ donc e1fentiellement
néce1faire , puifque fans elle la femme ne le peut pas, &
fi elle ne le peut pas, elle en eH incapable. C'eH le fenti-.
mem de Furgole fur l'art. 9 de l'Ordonnance de 1731.,
pag. 7) ; de Serres fur les infritllts, liv. 2, tit. 7; de Damours; C~lI1férences de l'Ordonnance avec le'D'roit Romain,
p.ag. 100; Bomaric, Sallé & Lacombe fur cet art. 9 ; Mr.
de Momvallon, Précis de Ordonnances, va. donation, n; 2.
! Il faut, dit le Commentateur de nos Statuts, tom. l,
pag. 18), pour la validité des donations entre-vifs, outre les
fOT:mes prefi:rites par l'Ordonnance de l73l, celles qui font
requifes par le otatut de la Province. La forme du Statut
tend à bannir la clandefrinité, & à .faire ce1fer la préfomptjon de fraude. Le Juge n'a d'autrè fonél:ion que celle- de
faire c9nnoÎtre au donateur la force, l'irrévocabilité de 1
l'engagement qu'il ,va contraél:er; fes devoirs fe. bornent à
l'jmerroger. ' S,uivant les réponfes du donateur, le Juge l'autorife à faire la donation; il e!l: fon proteél:eur, tellement
que le choix du Juge n'appa!,tiem qu'au donateur. Jamais le
Juge ne s'adre1fe au donataire; c'eH même comre lui ou
-Contre fes manœuvres que fe dirigent toutes fes opérations•
• L'objet de l'art. 9 de l'Ordonnance de 1731 efr bien différent : il n'efr plus queftion d'infrruire le donateur de fes
è:0its, il ne f'lut que veille~ à l'intérêt de la donataire; le
�"38
.,
JOURlI"AL
u-
mari, ou foit'Ie Juge qui le repréfenre, n'efi plus 'l'hommedu donateur; c'efi le proteéteur de la femme, c'efi lui qui
donne cette capacité d'accepter, que l'Ordonnance. a craint
de lui accorder par une loi générale : il n'efi donc pas
poffible que des fonéèions auffi difparatês pui/fent être remplies cumulativement, & qu'on préfume que le Juge a aUtorifé la femme ,. par. cela feul qu'il' a interrogé le donateur..
Par Arrêt du 4' Juillet 1780, au rapport de Mr. le Confeiller de Saint-Martin, la donation fut ca/fée avec dépens.
Ecrivant Mes. Efirivier & Cappeau.
.
ARRÊT
XXXVI.
Ac7e attaqué comme fimlllé ne. peut être détruit' par des
préfomptions. ,
1
Archelemi Billon du lieu de Berre contraéta une fociété
en 1776 avec fleur Jacques MicHel, Marchand de hi
ville d'Aix. Il fut convenu que le commerce fe feroit en
commun fous la Raifol1 de Michel & Billon, & que Billon
fournirait la fomme de' 12.000 liv.' pour fa "mife de fonds. .,
Bi)fun ne pouvant rempiir fa mife de fonds" eut recours'
à Jean Billon fan frere confanguirt, qui lui prêta 3874 liv.
10 f. fur uri billet cautionné par la mere de Barchelemi
Billon, payable en fin d'Avril 1717.' Il retira dé Jean Pafcal
du lieu de la Fare 32)0 lw. que celui - ci devoit à Jean
Bîllon, & il erflprunla d'ailleurs: 1200 liv.
La {ociété de Michel &' Dillo'n ne fubfifia pas long temps~
BarlIlelemi Billon fe chargea des effets & dettes de la· foCiéré ; il promit une indemnité à Michel, & le rembourfe..,.
ment des 3600 liv. de fa mife en fonds.
Barchelerni Billon emprunra une nouvelle fomme de Jean& Jofeph Billon fes Freres " & il leur palfa un aéte d'obli..
gation le 2.'f Mars 1'777 de la fomme de 16joo liv.
Le 28. Oélobre 1777, Barchelemi Billon epoufa la Dl1e~'
B
�"38
.,
JOURlI"AL
u-
mari, ou foit'Ie Juge qui le repréfenre, n'efi plus 'l'hommedu donateur; c'efi le proteéteur de la femme, c'efi lui qui
donne cette capacité d'accepter, que l'Ordonnance. a craint
de lui accorder par une loi générale : il n'efi donc pas
poffible que des fonéèions auffi difparatês pui/fent être remplies cumulativement, & qu'on préfume que le Juge a aUtorifé la femme ,. par. cela feul qu'il' a interrogé le donateur..
Par Arrêt du 4' Juillet 1780, au rapport de Mr. le Confeiller de Saint-Martin, la donation fut ca/fée avec dépens.
Ecrivant Mes. Efirivier & Cappeau.
.
ARRÊT
XXXVI.
Ac7e attaqué comme fimlllé ne. peut être détruit' par des
préfomptions. ,
1
Archelemi Billon du lieu de Berre contraéta une fociété
en 1776 avec fleur Jacques MicHel, Marchand de hi
ville d'Aix. Il fut convenu que le commerce fe feroit en
commun fous la Raifol1 de Michel & Billon, & que Billon
fournirait la fomme de' 12.000 liv.' pour fa "mife de fonds. .,
Bi)fun ne pouvant rempiir fa mife de fonds" eut recours'
à Jean Billon fan frere confanguirt, qui lui prêta 3874 liv.
10 f. fur uri billet cautionné par la mere de Barchelemi
Billon, payable en fin d'Avril 1717.' Il retira dé Jean Pafcal
du lieu de la Fare 32)0 lw. que celui - ci devoit à Jean
Bîllon, & il erflprunla d'ailleurs: 1200 liv.
La {ociété de Michel &' Dillo'n ne fubfifia pas long temps~
BarlIlelemi Billon fe chargea des effets & dettes de la· foCiéré ; il promit une indemnité à Michel, & le rembourfe..,.
ment des 3600 liv. de fa mife en fonds.
Barchelerni Billon emprunra une nouvelle fomme de Jean& Jofeph Billon fes Freres " & il leur palfa un aéte d'obli..
gation le 2.'f Mars 1'777 de la fomme de 16joo liv.
Le 28. Oélobre 1777, Barchelemi Billon epoufa la Dl1e~'
B
�DU
PALA IS ':DE
PR.OVENCE.
2s9
Feràud' (ous ul\e-confiitution de dol: de 1'2000 fiv. Le 1'0
Juillet 1779, il remit fon bilan. Feraud, au nom de fa'hlle,
demanda dàns l'infiance générale la répétition de fa dot, &
les freres Billon obtinrent le 20 Décembre 1779 du Lieurénant des Soumiffions â' Ai" la condamnation du mOQtane
de leur contrar.
'
Feraud, au nom de fa fille, appella deJ'terte Sentence,
pour faire ordonner que l'aél:e du 24 Mars 1777 feroit déclaré nul & fimulé, quant à lui,.& qu'au moyen de ce ,- la
Sentence feroit réformée, & les freres Billon déboutés d~
leur demande ~ avec dépens. Ils' affig'tI@rent Barthelemif,Billôll
pour affifter en l'infiance.,.& \foir dite que J'Arrêr -qui in':)
rerviendroit ferait déclaré cOrTmiun, tic exécutoire contre lui:
On 'difoit pour Feraud, que là. Sentence eroit nullé èn la
forme, parce que la faillire de Barthelemi Billon ayant éré
fuivie d'un concours -de- crianciers, de la mife de fcellé &
de la demande en répétition de la dot de fil- femme, formoit une infl:.ance &énérale dans laquelle feule tous les créanciers devoient former leur' demande & porrer leurs exécurions.'
,
Au moment de la' failHré, le débiteur failli efi dépouillé
de fes aél:ions & de fes biens qui font annotés fous la main
de la jufiice, Curia poffidet. Toutes les créances deviennent
éxigibles, quoique 'le terme du paiemènt ne foit pas échu.
C'éroit dans cette infiance généra!e,que les intimés auroient
dû porter leur demande, au lieu qu'ils fe font adreŒés au
Lieurenant des Soumiffions, incompétent d'en connoîrre &
de difpofer des biens de la faillite•
• La Sentence efi irlfufie' ( ajoutoit Feraud) en ce qu'elle
canonife un contrat fimulé qui renferme un myfiere d1iniquité qui enrichirbit le débireur failli aux dépens de fes créanciers, de fa femme & de fon beau-pere.
C'efi une maxime inconrefiable érablie en la Loi do/um,
cod. de dola, qu'on n'exige point de preuves juridiques de
la collufion, de la fimulation & de l'interpofition de nom
des contrats; la Jufiice fe contente des préfomptions & des
conjeél:ures preIfantes, aiou que l'obferve le jlidicieux Co."
�Jou Il -N A L l, :r , r~ v ,
.
quil1e fur les coutu,mes> de Nivemol'S, tom.~2.,' tit. des 'Fiefi}
arr. 40, pag. 68.
. l'
Cette maxime ell: encore plus fcrupuleufement obfervée,
q~and il s'agit d'lin tiers qui n'dl: pas intervenu dans un acre:
qui préjudicie 1) fon intérêt, & qu'il argue de fimulati,on &:
de col1ufion, fuivam la Docrrine de Dumoulin, conf. 3,
nO.,2.1, & du Préfl.denè d'Argentré fur, l'art.. 2.96' dé la coutume de Bretagne.
"
-r
La principale, & pour ainll.dire la feule (otemnité élfen~iel1e q\l,i puiffe dQnuer au comrat d'emprunt l'autorité de
fixer la' ,foi publique" confill:e én ce que le' Notaire & lestémqins :inll:rum~ntair~s>ajil/U u (oQmbrer les deniers em"
pruntés "',~ que le d~bi~ul'Jles- ait emportés c1fez 'luÜ.
Içi le' Notaire.& les, témoins attell:ent feulement que
Barthelen1i' Billoni letlr- a déclaré avoir reçu de- fes deux<
frere~ peu avaQtnl:acre la forpm~J de 16390 liv. point de
déclaratjÇln dl! JOUS de Jje.mprllnt , âu. 'Ii~u où iL a.été fair"
d!,s alturances al) précautiOlJs ,ptifès par· les prêteurs, & de·
çe, q4e. chacun; a prêté. J..'empril)1t n'tll: qonc point conflaté,
par un acre qui captive la foi publique '. & qui forme là
preuve 'même 'de la- Lo'i : ,il n'y a pas"'cafus Legis & profJatio
prohata. Il n'y a- q;Je }a fimple affertion du prétendu débitl;ur, qui." ne peut pas, préj~dicie~.& nuire à' des créanciers,
1.égitimes, ~ qui ell: éyidemment .fl}fpeé1: e , fur-tout l'aéle)
étant paffé entre RaTens , inter conjgnaas 'perfo/Jas. C~ell: ta>
J:emarqll,e de Dumoulin en fon Traité. de ufuris, qu. 16"
n. 2.36 ; de Ricard-, dès donatio(ls, tom. l , part. l,. ch. 3"
feél. 16, n. 757..
,',.
)
.,"La }:.~i [upp0fe com~-e. une vé'rité de principe, que celui
qui'a paffé de!! a.;J:es d'obligation,. ou qui s'ell: dépouil1é de,
. [es bie~s en faveur de. fes ef1fans, de [es freres, de fes au..,
tres parens, de [es. efclaves qu de [es a/;franchis, l'a fait-.
en fraud~ de ,[es créanciers: préfen,s & à venil:, fi les acres
qu'il a pa~és leur préiud,içi~n.t, & leur IJuÎfelF, quand .même
[es 'lffranGhis, [es e(claves ," (es p,arens , [es freres, Jes
t(nfans n.e participeroie~t, pas Lla fraude, C'ell: la, Ç-écifion.
du, §. l,ucius::Titius d,e la: Loi 17 ' . .If.. 'i,uœ. in fra/Jdem cre4.i.(or.ulJ4
2.40
,
•
�DU
PALA1 S
DB
PROVENCB,
241
ditorum. La même Loi déclare nulle la reaitution antIcipée de la dot de la femme, fi elle préjudicie aux créanciers du mari.
n n'y a rien de plus odieux que l'efclavage ,.rien de plus
favorable que la liberté; la Loi néanmoins déclare fraudu- '
leux & nuls les affranchiifemens ~ui préjudicient aux créanciers. C'ea la difpoûtion du §. in fraudem du ,titre des lnaitutes quibus ex car1/s matlum. non [(cet.
Scheneidevin obferve fur ce paragraphe, qu'il n'ef!: pas
befoin en pareil cas de prouver la colluûon & le dol, parce
que le défaut de paiement forme lui feul une preuve infurmont able de la fraude: eventus, damni, quia bona debitoris
non fujJiciunt ad fatisfaciendum creditoribus.
_
Cette maxime ea encore plus particuliérement établie· par
le paragraphe ita demùm de la Loi la, If. qUal in fraudem
creditorum, & par la Loi l, Cod\ qui manu miuere non:
poffint. n fut jugé ge même de :+) Juin 17)7, au rapp'Jrt
de Mr. de MoncvalloJ1, au profit des fieurs Montagne ~
Compagnie, contre Bar~helemi, M.archand.de la ville d'Aubagne.
Une autre circonfiance qui fait. toucher au doigt la
fuppofition & la fauifeté de cet el1lprunt,
tire· de, ce
qu'on ne voit ni l'encrée, ni la [ortie de cette [omn111 Ül1portante ~e 16;)00 liv. dans aqçun r,egiHre, çi dallS aalJ~un
jnvenraire, ni dans aucun des, papiers du d,~kiteu~ (ailli' l '.
Les freres Billon ~épondojel'lt, Gue la" Sentence qu'i'!s
avaient obtenue contre leur frere écoic. du mois Ge SepteQ1.bre 1779; [on conco~dat écoit du..~mois 9'O~Çlbre"f' il
fut homologué lei 2 D~cemhre :, Billol1l~toir-llibre. !or[qj.le
la Sen,tence fut renque. Les frer~~ Billon fqnt .créalllciers.
hypothécaires; rien ne pe!1r.)e$. ar~~ter, ftant "'l:L]'il n'e~fi,e
point d,e difcu.Œon ,ouverte! la demande n_ répétition .de
dot & li. mife de. [cellé ne forrneJjlt poin,r une çlifcyŒol'i,
La (e\TIrne arr.ête dans '.If cas de, I(erge!lce 1es exécutions;
des ~réaQciers J20ITérieurs à [on h}'po.th.eque ;"elle ne 'jJCl\t
pas auêter ,elle. des antérieurs. D'aiUc:.u.rs .Jef frere3 lNlo
..l;Pl.
1
re
�~42.
•
Jou
RNA L
n'avoient encOre rien exécuté; s'il exifleic une inflànce gê~
nérale, leur tirre pourroit y être référé.
Sur la fraude & la collulion, ils obfervoient qu'en faifant
-le compte exaél: de ce que les deux Freres avoient fournis,
on trouvoit que Jean Billon avoit donné de fan chef 9034liv. 3. f., en y comprenant néanmoins ious les changes jufqu'au 2.4 Mars : 177~, temps du paiement pané par l'aél:e;
& Jofeph Billon fournit 726 S liv. 17 f. en y comprenant
'auffi les changes jufqu'au même jour 24 Mars 1778.
A l'égard de la réelle numération, il efl trop facile aux
partie~ qui contraél:ene en fraude, de faire figurer des deniers, & cette· confidération ne fauroit êtr{) d'aùcun poids;
d'aill~urs, l'aél:e ne devait point renfermer cette numération-; les emprunts avoienr été faits auparavant en trèsgrande panie. Les Freres Billon prêterent à Barthelemi pour
furvenir non feulement à la diifolution & liquidation de
fociété avec Jacques Michel de la ville d'Aix, fous la
R~ifon de Michel & Billon, que pour furvenir à la nouvelle R'aifon que Banhelemi devait contraél:er fous la Raiton de Barthelemi Billon & Compagnie dans le commerce
de draperie dans la ville d'Aix.
Tels -furent les motifs de l'emprunt exprimé dans l'aÇl:e.
"L'expreffion en efl ' vague dans le titre, on en convienr.
Les 'Ereres' Billon ne crurent pas"qu'i1 fLIt néceifaire d'entrer
dans aucun 'détaiL' Pouvoient':i1k' prévoir que, leur créance
ferait un jour 'conteflée? J Quoi qu'il en foù, 'les motifs de
cette créance font réels; ils' font de 'plus. néceifaires. Les
Freres Bill0!l n'avoien~ - ils pas fourni- -rôus. les fonds, fOI,t
pour l'établiifeme!?t, foir pourlla dHfolôtion de la fociété?
'Ne fallut-i~· pas alors en fournir en'core =(Je nouveaux, pour
mettre BaNhelemi Billon en' état .de repr~ndre & de éontinuer fo~ 'cômmerce? Ses 'Fretes 'ènténdoienç qu'il contracrerait une fociéré. II -le promit de même'. Delà vien't que
l'aél:e mentionne une nouvelle 'Raifon de Barthelemi BilloJi
& Compagnie; Rai(on
de~enoit néceifaire pour le cas
OÙ Banhelemi Billon viendroit' eJfèél:ivement à former une
nouvelle fociété.
qui
�DU
PAL AIS
DE
PRO VEN C Il.
~4l
II dl: certain que la fociété de Michel & Billon a exifié,
qu'elle a été enfuite réfolue, en tranfportaDt le commerce
& les effets à Barthelemi Billon; il efi certain que ce dernier a continué le commerce fous la Raifon nouvelle de
Barthdemi Billon & Compagnie. Les motifs de l'aél:e fonr
donc établis fur des faits confians & qui ne peuvent pas
être déniés. Que fuit-il de ces motifs? Que non feulement
il a été donné des fonds conIidérables pour toutes ces
opérations, mais que de plus il efi impoffible qu'ils n'aient
pas été donnés, puifqu'en fait ils one éré employés par
Barthelemi Billon, & que d'ailleurs il n'a pu les prendre
ailleurs que dans la cailfe de fes freres.
La qualité des perfonnes contraél:antes ne fait pas toujours pré fumer la fraude; les parens ne pourroient donC'
jamais s'obliger entr'eux, & il leur feroie défendu de conrraél:er des obligations? La Loi feroie - elle alfez injufte
pour contrarier l'ordre & le vœu de la nature, & pour
déclarer nuls les tirres d'obligation. que les parens proches
contraél:ent entr'eux à raifon des fervices qu'ils fe rendent
mutuellement? Mais, oppofe-t-on, le contrat dont il s'agit:'
nuit au tien. O~I eil: ici la fraude? Ce contrat peue nuire
à la doe, parce qu'il efi antérieur, & que fon hypotheque
l'emporre fur l'hypotheque pofl:érieure de la dot. Les. em_
prunts exiil:oient avant la conftitution de la dot•.
Par Arrêt du 7 Juillet 1780, au rapport de Mr•. le Confeiller de Vitroles , la Sentence (ut confirm.ée avec dépens.
Ecrivant Mes. Arnulphy & Gaffier.
ARRÊT
XXXVII.
Le dem ndêur en complainte qui fuccomhe, n'efl pas tou/ours
condamné à l'amende.
L
E 20 Oél:obre 1779, la Dame Marie MalTot, veuve
du lieur Huard, Bourgeois de la ville de Graife, f~
Hh.::..
�~"
JounNAi
pourvut au Lieutenant au Siege de la m~me ville en !l:atut
de querelle au premier chef comre Scipion Artaud, Marchand Parfumeur; elle requit l'accédit fur les lieux, leur
vérification' & defcription, l'audition des témoins, pour
que, ces op.érations faites, elle· pût être réintégrée dans la
poifefIion du chemin qui avoit été barré par Artaud, &
qu'à cet effet la démolition des nouveaux ouvrages fût ordonnée avec amende & dépens.
Le Lieutenant accéda. La Dame Ifnard excipoit de la
poifefIion, & offroit fubfidiairement de la prouver. Le Lieu- ..
tenant, par fa Semence du ro Novembre, déclara la
Dame Ifnard non recevable, la débouta tanr de fa demande
au fonds, que de la preuve, & la condamna à une amende
de 20 fols envers le Roi & aUx dépens. Elle appella de
cette Semence pardevant la Cour.
. On difoit pour elle, que l'amende ne doit être pronon";
cée, fuivant l'article 6 de l'Ordonnance de 1667, rit. des
complaintes, que fuivant l'exigence des cas. Or une prétention
fimple, dégagée de toure circonftance aggravante, n'ell:
certainement pas amendable. AufIi Rhodier obferve-t-il fur
cet article " que dans l'ufage il efl très-rare qu'on pouffi la
rigueur jufques là. Cette amende, fuivant Boutaric, e!l:
tirée de la difpofition du droit canonique au chapitre gravis
extra de reflit. fPol. & ce chapirre ne parle que d'une indemnité due à la parrie par la voie de complaime.
La Dame Ifnard a pris la voie de complainte à raifon
d'une voie de fait portant trouble dans la poifefIion où elle
étoit de jouir du paifage contentieux pour les befoins &
commodités relatives
fan jardin. Elle avoit la poifefIion
d'an & jour; cette poifefIion devoit êrre refpeaée. En
cas de trouble, les Loix ménagent aux poifeifeurs un
moyen fimple & prompt pour être rétabli dans l'état où
ils fe trouvoient auparavant. (Leg. l,.If. de itinere aRuque
priv. Ordonnance de r667 , rit. 18.)
Qu'exige l'Ordonnance pour donner cours à la complainte? Le trouble en la poifeffion d'un droit réel. Or
qu'eotend-on par droit réel? Les fervitudes réelles fur les
a
�l!:
ln ti PAL AIS D n PRO VEN C
'2.4)
héritages; c'el!: ainfi que s'expliquent Rhodier fur le mot
droit réel, & Ferrieres dans [on Diél:ionnaire de droit & .
de pratique. Delà vient l'Arrêt rapporté par Pele us dans
fes quel!:ions , quo 108, qui fut rendu dans le cas d'une
complainte exercée pour trouble fait dans un droit de paff<lge, & qui fit droit à la complainte.
La coniidération du' fonds el!: inutile à traiter, parce
que la complainte qui n'el!: qu'un interdit po1fe1foire, rétablit feulement dans la po1feffion le citoyen dépo1fédé par
attentat & voie de fait du droit réel qu'il a fur la' chofe.
Le Juge ne s'occupe dans ce cas que de l'objet unique de
rétablir la po1feffion troublée ou contrariée par voie de fair.
Il verroit clairement que le demandeur en complainte n'a
point de droit au fonds, & il n'en devroit pas moins le rétablir dans [es droits po1fe1foires; il arrive fouvent que le po1feffeur dépouillé gagne [a caufe fur la po1feffion, & la perd
fur le pétitoire; nous en avons l'exemple récent & local
dans la caufe des fleurs Le More & Bonafons de la ville
de Gra1fe, jugée en 1779.
La po1feffion précaire n'el!: comptée pour rien ni dans le
pétitoire, ni dans le po1fe1foire, parce qu'en toute matiere
la po1feffion ne peut avoir effet qu'autant que le poife1feur.
utitur jure [uo; s'il ne po1fede que par la volonté & la permiffion de la partie, il n'acquiert aucun droit. Mais à quel
titre, à quel caraél:ere peut - on reconnoÎtre la po1feffion
précaire, & la dil!:inguer de la po1feffion proprement dite?
La polIeffion efl: précaire par paél:e ou par convention, c'el!:à-dire, quand celui contre qui on po1fede, prouve qu'il en
a donné lui-même la permiffion, & que les aél:es po1feifoires
ne font qu'une exécution de cette permiffion. La Dame
Malfot n'el!: pas dans' ce cas, puifqu'eIle n'a jamais demandé aucune efpece de permiffion au fieur Artaud .ni à [es
auteurs.
Dans le fait, il s'agit d'un chemin voifinal qu'Artaud a
barré de fon autorité privée. Il efl: de principe que le chemin voifinal qui exifie de temps immémorial, & fans qu'on
puiffe [avoir de quelle maniere & à quelles conditions il a
�,
1~
JOUaNAL
éré confiruit, doit être rangé dans là c1a/fe des chemin;
publics. Ce texte efi exprès dans la Loi 3, if. de locis &
itineribus publicis; dans Cœpola, Trairé de fervitutihus,
traa. .2., cap. .1, de fervitute viœ , où il établit qu'un chemin
voifinal peur devenir chemin public de deux manieres;. 1°.
lorfqu'ayant été pris fur les fOnds voifins , il exifie depuis fi
long remps que fan origine fe perd dans la nuir des temps.
2. 0. lorfqu'il a été confirulr fur un fol public.
De ces premiers principes découlent des conféquences
cerraines qui font elles-même-s des prjncipes fecondaires:.
dès qu'un chemin voifinal a par l'un de ces moyens le caraél:ere de chemin public, il n'efi plus au pouvoir de qui.
que ce fair de le barrer & de s'en arroger la propriété exthillve, fur-tout au préjudice des riverains. Le Cardinal de·
Luca, de fervitut. cap. 14, n.. 4 , parlant de ces chemins
voifinaux, dit qu'il n'efi pas permis de les clorre fans le
confentement exprès de tous les riverains. Cœpola va encore plus loin;. & traitant la quefiion de favoir s'il eH quelque cas où de reis chemins voifinaux peuvent êrre barrés,
il réfout qu'on doit tenir pour regle invariable, qu'il n'efi
jamais permis de les clorre. La Doél:rine de ce Jurifconfuite efi fans contredit la plus conforme aux vrais principes
du droit. En effer, dès qu'un chemin voifinal a acquis le
caraél:ere de chemin public, ce caraél:ere de publicité qui
efi i·nelfaçJble, efi un obfiacle éternel à ce qu'un feul particuUer puiffe s'en emparer.
Le .chemin dont s'agit (concinuoit la Dame Ma/fot)
exiHe depuis des temps infinis : fi dans fon origine il ne
fur pas defiiné à paffer d'un grand chemin dans un autre,.
il fut du-moins canfané à l'ufage de plulieurs fonds, &
particuliérement à celui des riverains. Il a par cela même
le caraél:ere de chemin public'. Ce chemin efi réparé des
fonds latéraux par des murs de clôture qui l'en détachent •.
dans tous les titres il efi indiqué comme leur confront ,
& jamais comme faifanr partie d'aucun des fonds;. & ce
qui efl: encore plus remarquable, c'efi qu'à l'infiar de tOI,1~
les. fols publics ,. il ne fut jamais encadafi~é.
�nu PALAIS DE PROVENCE;
'"41
Le droit d'avoir des portes fur un chemin public ou voi'final appartient à tous les riverains; c'eL!: un droit purement
facultatif dont on peut ufer à fan gré, & que l'on conferve
toujours, quoiqu'on n'en ufe pas. D'ailleurs, chaque riverain
peut fe fervir de ce chemin pour veiller à l'entretien & à la
confervation d'un mur de clôture; le chemin ne peut donc
étre barré.
On répondait que la condamnation à l'amende eL!: autorifée par l'Ordonnance de Charles VIn de 1493, arr. 49;
par celle d'Henry III de l 'iS'i, art. 1'i; & par celle de 1667,
Le motif de la Loi fut d'empêcher qu'on ne prît la voie de
complainte fans fondement ou fans intérêt.
Ici la Dame Ifnard n'était privée de rien. En fe pourvoyant au pétitoire, elle auroit pu faire juger fa demande
avant que d'exercer le moindre aél:e utile dans le cul-de-fac
qui venoit d'être fermé. La prononciation de l'amende n'eL!:
donc ni nulle ni injuL!:e; c'efl: la' Loi qui la prononce, &
qui la prononce envers le Roi.
Nul douce que les fervitudes étant un droit réel, ne' puiffent être révendiquées par complainte. Mais quelles fervitudes? Celles que l'on poffédoit publiquement & à autre titre
que de poffeffion précaire, celles qui font établies d'une maniere certaine. C'eL!: ainli que s'explique Ferrieres dans fon
Diél:ionllaire de Droit, vo. fervitllde. En Provence, où les
fervitudes s'acquierellt par la poffeffion, il ne faut pas de
titre pour la complainte. Decormis, tom. 2., col. 1730, établit que le fl:atut de querelle n'a lieu en chofe commune, ou
lorfqu'on n'a qu'un droit de fervitude, qu'on a feulement l'actian: confejJôria veZ negatoria fervitutis, aio tihi jus non eJfè
/zoc facere, veZ feciJfè.
,
.
Il faudrait néanmoins excepter le cas où il n'y aurait q~e
le chemin ou paffage barré pour fe rendre à la propriété,
& même celui où la propriété aurait une porte fur le chemin. Dans le premier cas, pendant procès, faudrait-il bien
que le propriétaire pût aller à fan champ, & continuer fa
jouiffance d'an & jour. Dans le fecond, la pone formeroit
un titre au préjudice duquel rien n'aurait pu être fait pro..,
�~~
JOURNAL
vifoiremenc. Mais quand il s'agira d'un p:.tfage qui ne (err
ni pour encrer ni pOlir fortir du fonds dans lequel on n'ell:
'àJlé que comme on vil tous les jours chez fon voitin, ou pour
faire le tour de fon domaine, ou pour cueillir quelques fruits
qui tomberonc au dehors, qu'on aura eu d'autant plus de facilité à faire ces aél:es de voitinage & de familiarité, que le
terrein fur lequel on a paffé, ell: un terre in non cultivé, enfermé de mur dans lequel crès-fouvent on n'a pas été vu, &.
fur lequel il aurait été ridicule, tant qu'il ell: demeuré ouvert, que l'on empêchât un voitin de venir, comment admettre la complainte? De quel droit réel ell: privé celui qui
trouve ce paffage fermé?
Artaud peUt dire à la Dame renard : vous veniel dans le
<u/-de-fac, parce que je ne /'avais pas fermé; prouve l - moi
'lue vous ave l le droit de m'empêcha de le fermer; prouve l moi à cet effet quelque aéle. poJfeifoire fait titre de fervitude
ou d~ propriùé? Il efl convenu par tous les Auceurs, qu'il
ne filffit pas, en matiere de fervirude patence & difcominue,
de prouver qu'on 11 p0ffédé dans l'an & jour; il faut encore
prouver qu'on a poffédé jure fervitutis. La poJfejJion immémoriale ou d'url très-long temps, dit Dunod, pag. 29, exclut
hien le foUPÇOIl de la cland4linité ail du pré.caire ; mais celle de
dix ou de vingt ans n'a pas /a même force. C'ell: au/Ii le fentimel,t de rothier dans fan traité de la poffijJion, chap. 6,
feél:. l, §. 2.,' de Dumoulin fu.r l'arr. 414 de la coutume
d'Anjau; & du Cardinal de Luca, de fervitut., dife. 9';' nO. 3.
A-t-Ol1 un droit réel, lorfqu'on n'a qu'une fimple faculté?
QU<lnd l'Ordonnance a parlé d'.un droit réel, par cela même
ell.:: a exclu tout ce qui ne ferait pas un droit. Donc, fi le
drait que le complaignanc révendique n'en a pas l'apparence,
ft fa poffeffion a l'air· de dé-river plutôt de complûfance, de
fdmiliarité, de voifinage, d'opportunité que du droit, il n'y
a pas lieu à complainte: fi 'luis jure familiaritatis amici
fun.dum ingreditur, non videtur poJJidere, guia non eo anima
iT/greJfù.s eflut poflideat. L. 4 1 , ff. de acguir. vel omitt. poJf.
& L. 7'ff. d.e itinere aéluque privat. Il faut donc qu'il n'y ait
~u.~UI\ cj.ou _e .(I.!.' l~ na.t(jre. <}e. l'ufas;e. ~l faut que. cet orage,
.
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P A DAIS
D-Il,:r R 0 VEN C Il. .
'149
quand méme il aurait été connu, ait écé pris à titre de droit.
Il faut une poffeffion exc1ufive de familiarité. Dans le dome,
-il fam pencher contre la voie rigourelJfe de. la complainte
& pour la liberté.
Par Arrêt du 8. Jtlilfet 1780, au rapport de Mr. le Con-·
(eiller de Fonfcolombe, après partage vuidé le 10 du même
mais, la Sentence fut confirm~e au chef pl'incipal ,'& réformée au chef de l'amende enver~ le Roi; & les partiescondamnées aux dépens c.hacune les. concernant. El.Eivant.:
Mes. Gailler & Simeon fils•.
J
ARRÊT.
X f{ X V 1 J J..
Si·la demanae en miferahle ceJJion, des lliens) fuivie d?un· de..cret portant des défenfes provifoires aux créancius. de fairedes exécutions fur la perfonne du débiteur.,.le Wive. de fairevaloir pendant procès fes a8ions a8ives.
.
Si le cédant peut. ,:!cZamer la fomme cédée, quand pojlérieu;'e~
ment a la/ignijzcation de la cejJion, il rifl furvenu de nou~
veaux arrangemens ignorés du débiteur cédé..
Sile débiteur peut refufer le paiement, fur le fondement que la,
fomme due doit être placée, & 'lue le tiers au profit de 'l~i>
elle doit l'être, confent, a.c;e qu'elle l'rifle entre [es maias., en.:
en paypnt .les. intérêts .au, créancier•.
J
Acques-François Laugiér, Cordonnier_de là. villé· de Màrfeille ,. vendit une propriéte à la DUe. Marie-Mag,deleine~
Cougourdan, époufe de· Jean-Pierre GUEel,de la même ville"..,
par- a&e. du 7.' Oél:obre.. 1.:77 l ;. on.Hipula.. que. de. la fommeque la DUe.. Cougourdan comp.ta, Laugier, en placerait 2.'590
liv. fUr un Corps ou une Communauté, ou. quelque, particu-lier folvable, pour felvir d'affurance.. à la dot ·de Ma6e-Anne:
SaHre ,. époufe de Laugier ~ & à Pacquifition de la DUe. Cougou.rdan;- & de plus, que - l'aél:e_ de placeme.llt épQl1cel:oit:
.l'emploi de l'argent.
L.e.16 du fil_ême mois, Laugier p}a'ia 3uS liv. fùr Antojo~
-
•.
Li.
'", . . . i'
�.2')0
,10URNJAL'"
Bellon ,1 maltre,Armurie.r de- Mar(eille ; il fur convenu que cetre
[omme feroit -pa.yée.-'dâns cinq années; que les quatre prer
m,iers pa.ieme l1li fe,éoiërtl,(J,de 12) liv.-chacun, & le derÎ1ier
de 2625 lil'.; il fut encore convenu que de ce dernier paiemenc, 2)00 IiI', feraient placées [ans divertiJ/èmer;t (ur un
Corps ou une· C0t1,lffiUriauté oucquelqûe particulier, p.our a(furer & la doc de' fa Dlle. I1augier, & l'acquiCt~on, de la
_
. t
•
Dlle. Coug0'llfdan-C\}tel: ''',:
Laugier déclara dans l'aéte que là (omme Tluméréé procédait du prix de ladite propriété ,ve-TId",e.
Bellon fut exaél:. à acquitter les quatre premieres paies, &
lors de l'échéanEë-de_ Ta- cin9~ieiiIe, J-~lUgier céda 14c6 IiI'.
au fieur André· Michel, Négociant de Mar(eillè. L'aéte de cer, fion con(enti le 10 Février 177) fur fignifié à Bellon le ;13
du même· mois'; cèiui~ci répondit qU'Il n'accelnoit point la
ceffion; Laugier tran(porta ainfi'une partie des 2)00 IiI'. qui,
fuivant l'aéte- du 16 Oétobre 1771, devoient être placées.
L,e ) Mai 1779, Laugie'r pré(enta requête àu Lieutenant
'de . Marre~lle contre fes créanciers,,, aul' fins d'être reçu à
" là ceffion & abandon de- (es biens, & demanda des dé" fen(es à (es créanciers de palTer ourre' à aucunes exécu" tions (ur- fa perfonne. " Le Lieutenant accorda l'ajournement & les défen(es.
Le '13 Août', Laugter pré(entà requête au mêm'e' Lieutenant contre Bellon, en paiement des i62 S IiI'. qui lui étoient
dues; _il offrit d'en pJacer 2)00 IiI'. (ur la Communauté de
Marfeille, ou (ur quelque rarticulier-(olvable gu'il indiquerait;
le 13 Septembre, il obtint urie Senfence par défaut; Bellon
appella de cette Senience parde,\ant la Cour.
I! dirait d'abord que-13aûg'ier érait fans aélion, attendu
la ceffioi1 -qJ'oil avoit fâit ,de fes biens à [es créanciers. Le
bilan de Laugier' porte [es dettes paffives à 10000 'liv:, & {es
dettes aétives à 2. S00 liv.; fan pajJif excede de beaucoup fan
ac1if. Il a COli[ abandonné à fes créanciers; il a demandé &
obtenu aére de la ceffion & des défen(es de faire des pourfuites (ur (es biens & (ur (a per(onne. Cette ceffion l'a dépouillé de roue.es ~es .aérions aétives, & les a tranfpoNées à
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fes créanciers; il ne 'peue dollc plus les faire' valoir. Là Loi
a prononcé contre lui une efpece d'interdiaion. Le Lieutenant, il efl: vrai, ne l'a pas encore admis·à la miférabJe 'cd·
fion; mais l'abandon n'éxifl:e pas moins., il -a été dépofé
entre les mains de la Jufl:ice; les créanciers en ont .été avertis
par la lignification & de la requête &1 diJ décret. Dès ce
moment, ils ont fu que les biens de leur débiteur étoient
fous la garde de la Loi, & que Laugier ne pourroit pain t
violer un. dépôt qui feul lui garantit la. liberté. "
./., .
Qu'oh ne dlfe pas que Bellon excIpe du dro!t du tiers;;
il a intérêt, il peut donc faire valoir cette exception; s'il
payait aauellement, il ferait foupçonné, peue-être 1 mêm~
accufé d'avoir favorifé la fraude d'un débiteur faillt, d'un
homme qui tente d'enlever à fes créanciers les miférables
dépouilles qu'il a déclaré lui abandohner, &. au prix defquelles la Jufl:ice a 'bien voulu pratégerlfa liberté ;-il-pourl'oit même être ç~nu de repayer. Jouffe fur l'Orddl1uance de·
167:3, tit. 1[, art. 'h pag. 177.
'
Dans le fait, La:lgier dreffa fan bilan au commencement du mois de Mai l 779, le préfenta au ILietHel~ao.t le1), & le communiqua à fes créanciers le 18: 1 Dès ce
fnoment fes biens devinrent les gages communs de [es' cré,anciers, comme dit Jouffe; fes débiteurs cefferenr de l'être;;
ils ~e peuvent donc point être forcés de le payer. Il offre"
à la vérité, de placer 2)00 liv., m~is il en réclame 262).
liv. : il veut donc foufl:raire à fes créanciers 12) liv. La,
réclamation n'efl: pas fondée en partie; elle n'efl: pas recevable , parce qu'il ne peut ni rec<:voir ni placer., n'ayan~
point d'aaion •.
Bellon ajoutoit qu'indépendamment de ce moyen, il en
avoit un fecond dans la ceffion faire au lieur Michel le 10,
Fevriel' 1675 , lignifiée le 13 du même mois, & conIéquemme-nt antérieurement à la mîCérable ceffion•.
La Loi 3 au Cod. de novat. & de legat., {'x la Loi ~
auffi au Cod. quœ l'es pignori obligari poJfùnt, décidem précifément que le lign ification de la ceffion opere une novation & ua. changement dans la p.er[onne du créancie.c- ~
1 i ...
�1~2,
•
JOUltNA~
le cédant perd entiéremeüt fes droits; le ceffiol1nai're feut
peur les fàire valoir ': auffi Barthole fur cetre derniere Loi
diltiqgue 1<1 ce,ffion ignorée, de Ja ceffion dénoncée, Dans
Je ptemL~t cas, Je, -cédal1t <:on[erve {es. aél:ions; il pt;ut les
intenter 0$:: recevoir fon paiement; mais ·dans le fecond il
devient à l'inlbr qe .cel~i <JU! ne fut jamais créancier:
·Nometl dehitoris ante denunciatiollem fac7am floi il creditore
{ui creditoris potefl falvere [uo creditori, pofl denunciationem
autem fac7am non potefl falvere , fed. exigi potefl utili ac7ione.
Le Préfident Faber .dans fon Cod. de hœred. vel ac7.
vendit. déf. 2" -pag. 417, étilblit. la même doélrine.
J,ci. la ,ceffion avoit été dénoncée au débit~ur; le ceffion~
naire feul auroit donc pu agir, & l'aél:ion n'auroit pu
,compéter de nouveau' à Laugier qu'après J'accompli.lfement
de deux préal<rbles .indifpenfables; la. la rétroceffion de la
{Dmme cédée; 2 0 • la fignification de 'cette rétroceffion. Or
à l'époque de la re<Juête il -n'en confloit point; il n'en
.conlte pas même "él:uellement. La répo[).f~ de Bellon fur
la fignification de la ce'lIion était inutile; il ne vouloit
pas reconnaître le fieur Michel pour fan créancier, mais
la Loi l'y forçojt. Le confentement du débiteur cédé n'elt
point de l'e.lfence de la ceffion; c'elt un contrat qui peut,
s'opérer loin de lui & fans lui; conféquemment il étoit le
débiteur du fieur Michel; & quand même Laugier n'auroit
pas perdu l'exercice de fes aél:ions par l'abandon de fes
biens qu'il avait fait à fes créanciers, il auroit trop. demandé, trop obtenu; & la Sentence attaquée devroit être
'C
'
rerormee.
Enfin Bellon articulait un troifieme grief d'appel; il le
fairoit cOIlGlter el} ce qu~ Laugier ne pouvoit point réclamer les 2) 00 IiI'. pour en faire un placement ailleurs fans
J'aveu & l'agrément de la Dlle. Cougourdan-Curel.
Le placement doit être fait pour J'a.lfurance de la dot
de l'époure de Laugier, & pour la folidité de l'acquifition
de la Dlle. Cougourdan; celle-ci était feule intére.lfée au
placement, puifqu'au défaut de biens c'était fur la propriété qu'elle avoit acquife qu'on pouvoit revenir. Elle a
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l'Aiùs DB
PItOVENéll.
'~pprouvé celui qui fut fait fur Bellon; elle
'2.}J'
étoit cenféè
l'avoir avoué, foit parce qu'il avoit été fait dans un temps
voifin de l'acquifition, foit parce qu'elle n'en avoit pas réclamé depuis; elle devoit donc être confultée dans le chan'gement du débiteur; fans fon aveu on ne pouvoit point
le faire ordonner.
.L augier répondoit au premier grief, que la ceffion des
biens eil: un contrat entre les créanciers & le débiteur. Celui-ci s~engage à leur abandonner tous fes biens; & en vue
de cet abandon, les créanciers s'obligent à ne plus pourfu:vre leurs exécutions. Deux efpeces de ceffion des biens font
connues; l'une eft volontaire, l'autre eO: judiciaire; la premiere n'eil: confommée, n'a lieu qu'aurant que les créanciers l'ont acceptée; l'autre doit être prononcée par le Juge,
& manifeftée par une Ordonnance. Dans ce' dernier cas,
le Juge foumeç les créanciers à accepter l'abandon; leur
confentement & acceptation font forcés; mais foit que l'acceptation des créanciers foit volontaire ou forcée, la ceffion
des biens n'eft opérée que par elle: telle eil: la regle; <;.lle
eH atteil:ée par Savary, tit. de la ce.ffi.on des biens.
Il y a plus: pour que cette ceffion des biens opere un
engagement entre le débiteur & le public, il faut que l'accord l'airé par les créanciers, ou l'Ordonnance rendue par
le Juge, aient été rendus publics. Quand la ceffion eil: volol1tair~, le contrat doit être homologué, il doit même être
publié; quand elle eft jurliciaire, il faut également qu'elle
foit publiée en jugement; les formalités font retracées par
le même Auteur. Mais tant qu'il n'y a point 4e contrat
pa1fé entre les créanciers, ou d'Ordonnance qui les aient·
foumîs à accepter la ceffion, l'engagement entre le débiteur & les créanciers n'eft point formé; ce n'eil: que par
l'une ou l'autre de ces voies qu'il peut être dépouillé de
l'exercice de fes aétions; jufques alors il demeure integriJlatils;
il eG: capable d'agir, d'eHer eo jugemen,t. L'exercice de fes
aétions ne peut que lui être confervé; car enfin les aétions
ne peuvent pas encore réfider fur la tête & àu pouvoir des
fIéanciers: elles reil:ent donc au pouvoir du débiteur.
�.
"+~'
JOURNAL
~
Le déCret provifoire rie porre pas fur la cèffion (Je§
biens; cette quefl:ion dl: renvoyée en jugement; elle eft
lIonc encore toute entiere. Il n'y a de provifoire que les
défenfes accordées d'exécuter Laugier en fa pèrfonne; mais
ces défenfes ne forment point une acceptation de la ceffion.
La demande en miférable ceffion a fans doute l'effet de
dépofer les biens du débiteur fous la garde & entre les
mains de. la J ull:ice. A cet égard un contrat judiciaire fe
forme entre la Iull:ice & le débiteur. La Iuitice lui dit:
Je vous accorde provifoirement la faculté de vous folffiraire
aux exéClltiollS de vos créanciers , à condition que vos biens
ne feront plus entre vos mairis qu'à litre de dépôt. Si le débiteur après cet aqandon fe portoit à quelque aliénation,
elle feroit frauduleufe & criminelle; elle l'expoferoit aux
recherches les plus graves & les plus férieutes ; mais autre
chofe ell: de diffi per fes biens, autre chofe ell: le droit de
}(~s gérer, de les adminill:rer; tout aél:e d'aliénation lui eft
pro ibé, mais tout aél:e d'adminill:ration lui ell: permis.
Dans le fait, la ceffion des biens n'ell: pas encore confommée; à peine l'ajournement a été donné; il n'eft intervenu ni contrat ni Sentence. Laugier a donc pu exercer
l'aél:ion; la Sentence qui l'a accueillie doit d'autant plus
être confirmée, que Laugier offre de placer l'argent qu'il
recevra.
Le fecond grief d'appel n'ell: pas mieux fondé; le point.
de droit ell: certain; la ceffion lignifiée opere une novation dans la perfonne du créancier: mais dans l'hypothefe
aél:uelle ,-la ceffion n'eut aucun effet, puifque la fomme
n'étoit pas cédable, puifque le débiteur ·ne voulut point un
nÇluveau créancier, puifque de nouveaux arrangemens fOnE
intervenus entre Laugier & le lieur Michel, ainli que cela
réfulre du bilan,- puifqu'enfin.le lieur Michel l'avoue paE'
fon fiJence.
Le troilieme grief d'appel eft également contraire aux
principes. Bellon n'eft pas acquéreur; il n'eft que débiteur; en payant il fera libéré; aucun créancier ne pqurra
le rechercher, puifqu'ou u'a, fai~ entre fes, mains al1l.:un.e
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PALAIS
DE
PR(')\rENCE:
!.H
forte d'ar~êtement; il n'a point contraél:é d'obligations avec
la DUe. Cougourdan; elle n'dl: pas même intervenue dans
l'aé!:e : or fi le paiement doit opérer fa libération, il doit
être contraint de le faire, dès que le terme qu'il avoit pris
ell: expiré. Il offre de garder entre fes mains les 2)00 liv.
<1:en fupporter annuellement les intérêts: mais Laugier peut
refufer cet établiffement; il ne veut point de ce débiteur,
& celui-ci ne peur point continuer à l'être malgré lui; le
confentement donné par la DUe. Cougourdan eIl: inutile;
elle ne peur point empêcher Laugier -d'améliorer fon fort,
& de p~ofiter qe la faculté qu'il s'eIl: réfervée dans l'aél:e
de pla.cer cerre fomme fur tel Corps ou Con;ll1;lUnauré qu'il
voudra; l'intérêt de la Dlle. Cougourdan ne fouffrira pas de
ce placement folide à tous égards, & fori intérêt eIl: tout
ce qu'eUe doit confulter.
Par Arrêt du 10 JuiUet 1780 , au rapport de Mr. le Con.[eiller de Thorame fils, la Sentence du Lieutenant de Marfeille fut confirmée avec dépens. Ecrivant Mes. Alpheran
& Sauvere.
AR RÊ T
XXXIX.
.Partage différé jufques après l~ mort de l'un des cohéritiers.
Un cohéritier ne peut, avant le partage, vendre un fonds de:
l'hoirie, [auf de garder le prix pour [on lot.
L'acheteur 'lui connoît le vice du tranJPort, n'a aucune garantie
• contre le vendeur.
L
ES fie urs Antoine - Philippe d'Armand de La Tour;
Efprit d'Armand, & fhilippe-Antoine d'Armand de
Saint-Montant, freres, de la ville d'Avignon, avaient à partager quatre fucce/Iions; les deux derniers en avaient eu la
jouiffance pendant long temps. Le fieur d'Armand de La
Tour fe pourvut au Lieutenant d'Arles dans le mois de Noeml>~e 1767 en partage. Les parties tranfigerenr, & p~~
,
�'2,~6
Jou
RNA L
l'atte qui fut palfé, il fut dit que le fieur' de La Tour âvoi~
une emiere connoiŒlnce du ciers lui revenant. En conféq.uence, il remit & abandonna à [es freres le même tiers,
avec donation de toute plus-value, moyennant une penflolT
annuelle & viagere de 1200 liv., payable en deux paiemens ;
il fut convenu qu'au décès du fieur de La Tour, fes héritiers entreroient dans fes droits au [ujet du tiers abandonné.
Le fleur de La Tour ayant quitté' le [ervice & s'étant'
marié, demanda la calfation de la tranfaél:ion , le partage des
biens, & la commune exécution contre le lieur Fourneri,
acquéreur d'un domaine faifant partie de la [uccellion. Par
Semence du 13 Mars 1779, le Lieutenant d'ArIés calfa la
tranfaél:ion, ordonna le partage, & calfa l'aél:e dé tÎ'anfport
palfé au fieur Fourneri, en déclarant la Semenc.e commune
& exécutoire contre lui.
On diroit pour les fieurs d'Armand freres, appellans, que
la tranf3él:ion, bien-loin de préfenrer l'idée d'un aél:e de partage, n'étolt qu'un accord par lequel les fleurs cl' Armand
confentoient à ce que le partage fCit différé jufques à la mort
de l'un d'eux. Amant il en prohibé de s'interdire à jamais
faculté de procéder à un partage, parce que nulla focietas
in œternum coiri potefi., amam il en reçu que le partage fera
différé jufques 3' un certain temps. C'en ainfl que le décide
la Loi 14, §. 2,.ff. commun. divid. Gdt auJ.Ii leJemiment
de Denif:lrt, vo. partage; de Pothier en fon traité des fuceejfzons, chap. 4, §. 1; & de Lacombe en fa Jurifprudence
civile, vo. partage.
Les fleurs d'Armand avoient voulü vivre d'intelligence, &'
dans cet objet ils avoient renvoyé à un autre temps un par.,tage· qui auroit pu altérer l'union & l'amitié qui régnoit entreux. Ce marif a fait dire à Craveta, lib. ~, conf. 89~. ,.
n. 7, & à Sardus, lib. 3, conf. 37 'j, n. 13-' qu'on pouvoit
convenir de ne pas divifer des biens polfédés en commua.
I! faut bien diHinguer le paél:e par lequel on s'interdit à
jamais le partage, du paél:e par lequel on· s'engage à rene.r
dans la communion des biens pendant fa vie. Le premier
'eQ nul~ & à ce ~aél:e doit. s'appliqlJer la. regle nullajOcieuts
ra-
-
~
-
...'
~.
�D'U
PALAIcS
DE
PROVENCI!;
257'
in œternum. Le fecond ell valable, parce qu'au vrai la vie del'homme n'ell pas l'éternité. L'individu s'éteint, la perfonne
meurt, mais [on exillence civile relle; elle fe proroge & fe
perpétue en la perfonne de fes héritiers: auffi voit-on. qu'en
matiere de fociété, on n'a prohibé que celles 'luœ non extinguuntur morte, fed tranfeunt ad hœndes. S'obliger à- vivre
dans une communion, dans une fociété par foi & par fes:
héritiers à jamais, c'efl: fe lier à un enga,gement éternel ,
réprouvé par les Loix. Mais les Loix ne prohibent pas- roure'
communion, route fociété qui a, pour durée la vie des affociés. ( Perezius fur le tirre du code de focietate, nO•. 3; &
1?efpeiJI:esl Üt. de la fociété, fea.
nO.. 3. )
Le lieur de La Tour ( continuoient les appelbns ) étoit.
majeur lorfqu'il contraaa duns J!aae de 1'767; il ne peur pas
dire qu'il a été furpris; il ne pourrait pas même exciper d'un~
I~GDn , puifqu'il efi de reg1e que la léGon n'ell pas un mOJelb
de refciGon dans les baux à loyer. En fait, il devrait au<
moins prouver cerre léfion: & commenc pourrait-il fe flat.ter"
de foumir cette preuve, lui qui n'ignore pas que le tiei:s:
des fucceffio/1s ne pourroit j_amilis lui procurer un r.ev.enu. de}
1200 liv.?
On répondait pour le lieur· de La Tour, que l'aéfe de~
1767 était nu}; parce. qu'jl étoit l'effet du dol. &. de la filr-.
prife. D'abord on X fuppofe que le partage que le [Ieur del
La Tour follicitoit, avait été fait, & qu!il était en p(')ifeffiol1\
de fon tiers depuis plulieurs anné.es. Et il ell aujourd'hui,
c,onvenu que le partage n.'a jamais été fait, & par eonféquenc qu'il ell impoffible que le lieur de La Tour ait jama~
é.té en. poifeffion de fan ti.ers. Ce même aéle étoit encor~
nul, parce qu'il perpétuait une communion que l'incérêt des;
p'arries exigeait de diifoudre.
1
En droit, il n'ell pas dout-eux qu'il faut diffoudre toute'
fociété & route commnnion, fi fit damnofa,- & li elle r.épugne à l'intérêt de routes les parties; par.çe qu'après. tout"
ni la fociéré , ni la communion., ne fom pas faites pOUI: opérêI't'
le préjudice de. ceux qui les confentent,- & par c.onféqtleot<
~ momell{ 'lue cette c_ommunion" QIt foc.iété· répugne à.l1in.-
l,_
Kk.
�2)8
•
.'
Jou
RNA' Il
térêt re(peélif, rien' de plus naturel, rien de plus ûmple, &:
rien de plus juf!:e'que d'en aurori(ei' la· renonciation. 11a' Loi
ne refufe cerce renonciation, qu'aurant qu'elle eH: intempefrive; elle dit: fi tamen renuncietur 1 focù:tati intempeJlive. Et
par con(équenr dès' que la renonciarion devienr néceffaire ~
l'intérêt de routes· les parcies, elle eH non (eulement juil:e, .
mais néceffaire.
En fait, qui peut douter qu'il. ne (oit de l'intérêt de routes
les parties de dilfoudre la communion, même d'après le fyftême des fleurs d'Armand? Si la penflon du fleur de La Tour
ef!: trop forte relatiyement aux revenus des biens, raifon de'
plus pour anéantir l'aéle &. rétablir entre les freres l'égalité
qu'il doit y avoir.
L'aéle efl: encore nul ( ajourait .l'intimé·) (oit pa~ée que(uivant la Loi nulla focietas in œternum, ou, comme on di~.
communément, nemo cogitur in communione remanere. Il importe à chaque' C'iroyen dé conholtre la conflfl:ence de (on'
patrimoine, de (avoir quelle efl: (a fortune, de pouvoir adminifl:rer (es biens, & de régler (es difpofltions parmi (es
héritiers, enfin de ne pas vivre éternellemenr dans le cahos;
& cet inrérêr o'efl: pas moins celui des lieurs d'Armand,
que celui du lieur de- La TOl'lr.
L'aél:e efl:' nul,. parce· que l'on traita en bloc, non vifis,
neque difPunc7is ratÙiJ!1iDUS ~ il eil: encore nul, parce' que le
fleur de La Tour ne il:ipula. en qualiré d'héritier de (on
aïeule que pour un tiers, randis qu'il était héritiér pour la
moirié. Or, il eil: inconteil:able que le parcage fait ou la
convention con(entie en trairanr (ous une qualiré erronnée,
no.n nO.cet, comme le di(enr les· diffétens 'rexres (ous le tirrefamil. ercif::; enfin,Paéle eil:.encore'nul, parce qu'au préjudice de la communion qui devoit (ubliil:er entre les freres ;
les fleu.rs d'Armand vendirent le domaine de La Tour au
fieur Fourneri, & l'on n'a pas ,ofé difconvenir que la contravention au paéle de communion n'e·fi -opérât la diffoluriôn.
La communion & la (aciéré n'étant établies que pOl'lr l'ihtérêt des conrraél:ans, dès que cet· intérêt ceffe, la communion doit néceffairement çelfer, parce que le défaut d'intérêt
�DU
PALAU
DE
,PROVENCE.
259
dans ·Ia continuation eft une jufte caufe de calTation. Auffi
les Auteurs ne manquent pas de dire que le paéle ne fubflfte
que durante caufa remanendi in focietate; mais que lorfque
fuhefl ali'lua jufla caufa diffolvendi, il faut le dilToudre, ne
fût-ce que parce que l'abus pourroit réfulter ex perfeverentiâ;
Cœpola, .de fervit. cap. 9, nO. 39; .Pothier en [on ·traité de
la fociété, §. 8, chap. 4, Fnfin il eft également .certain qu'il
faut dilToudre la [ociété toutes les fois ,que fit .damnofa.
Ce n'eft pas proprement pades Loix du digefte qu'il faut
décider du paéle ·de communion pendant -la vie; c'eft plutôt
par la Loi du code, qui, quant à ce, a dérogé à -celle du
digefre.. L.a Loi )., commlini divid. pous .dit 'que in cammu/liane, vel in focietate, nemo compellitur.invitus detineri. Pourquoi? rO. Parce que c'eft engager -[a liberté, & l'homme ne
le peur pas: 2°. parce que la vie de l'homme eH pour lui
l'éternité civile: 3°. parce qu'il en fort inl:lifférent à l'homme
que la [ociété ne puilTe pas durer "après Ja mort, quand il
fera obligé de la continuer pendant toute fa vie:. 4°. parce
qu'il importe à la !ociété de tarir ces,occafions de di[corde)
de haine & de querelle, [ur-tout .entre 'freres, que la communion entraîne toujours. ( Lebrun dans [on traité des fuccejJions, pag. ) 99; le Cardinal de Luca de Jeudis, difc.
r2o. )
Ici, combien de raifons pour dilToudre cette communion ~
changement d'état de la part du fleur de La Tour, vente
du domaine le .plus précieux dépendant de' la [ucceffion,
contravention 'au paéle de la communion, néceffi(é de n~
pas lailTer vieillir les affaires.
Quant à la qualÎte ,concernant le fieur Fourneri, on di[oit;
qu'il avait connu le ,vice du ,tran[port qui lui avait été fait,
pui[qu'il avait .col1fenti à n'avoir aucune -garantie vis-à-vis
des .fleurs d'Armand, vendeurs, ê1ans le cas où il ferait att~qué. On pouv~it. donc lui dire avec la Loi: frudens emiflq
vltlofum, duta tlhl Lex dl.
Il refte donc deux points; le premier,.fi .I~s fleurs d'Armand ont pu vendre irré\'ocablement-le domàîne de La TOll!.'·
lX le nom., Caus efpoir:de tetour1p:our le :fleur La Tour. le
Kk~
�~OO
JOURNAL
fecond , fi ce domaine ne doit figurer dans le partage que
pour le prix, & fi on peut l'affeél:er ainfi 11. la portion des
fie urs d~Armand. Ces deux queHions ne fouffrenr pas plus
de difficulté que les autres, parce que, fuivant la Loi quod
,commune efl, meum efl, jamais il n'a été permis au tiers de
vendre mon bien; s'il le vend, il doit m'être permis de le
revendiquer.
La Loi 3, çod. commun. rer. alienat., dit qu'on peur bien
vendre fon droit au fonds indivis, mais jamais le fonds luimême, parce qu'on ne peur pas vendre au préjudice du copropriétaire. C'eH auffi le fenriment de Buillon fur le même
Lirre du code, & de Perezius ; de Serres filr les initiruts, pag.
') 00; & de Corvinus in codic., tit. ')2..
Par Arrêt du 10 Juiller '780, au rapport de Mr. le Con-[eiller de Ballon, ta Semence fut confirmée aux chefs concernant tes Geurs d'Armand freres, avec .dépens, &: il Y eut
parr·age fur la commune exécution. Le partage fut vuidé pour
le furplus de la confirmation de la Sentence, avec dépens,
. & ledit Fourneri fut débouté de fa demande en garantie.
Ecrivant Mes. Pafcatis & Alpheran.
ARRÊT
XXXx.
L'information doit être convertie en enquête, lorlque la procédure ne préfente aucun attentat ou délit déterminé.
R. te Marquis de Simiane el/pofa dénonce le 19 Février 1776 comre Maximin Milliere, pour avoir trouvé
{on troupeau daps l'enclos des Baflidonnes, terroir de Simiane.
Le 22 du même mois il expofa une feconde dénonce, &
le 23 il demanda 11. la Cour, tenant la Chambre des Eaux
& Forêrs, la confifcation du troupeau, la condamnation
du prix & l'aniende , avec inhibitions & défenfes à Milliere
d'aller dans fon enclos, à peine de 1000 liv. d'amende ,d'en être informé & de punition exemplaire, & cependant
M
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PAL AIS
D II
P'R 0
V II NeE.
26r
'que par les Efiimateurs de Gardan~ il feroit fait rapport
du dommage.
Le rapport fut fait; la Communauté de Simiane intervint
dans l'infiance, & préfenta un expédient, par lequel elle
{e fit concéder aél:e de l'aveu fait par Mr. de Simiane,
que les troupeaux n'avoient point été trouvés dans les quartiers prohibés par l'Arrêt de Réglement du 27 Janvier
'1:731. Elle, cpnfentit à la réparation des erreurs qui auroient
pu fe gliifer dans le rapport pro modo jugerum , & demanda
qu'il feroit procédé à la vérification de la cote cadafirale
dn Marquis de Simiane & de fes titres d'acqui{jtion, à
l'effet de favoir s'il avoit une plus grande quantité de bétail que celui que lui donne la tran/àél:ion.
Cet expédient offert, Mr. le Marquis de Simiane expofa
environ vingt-deux dénonces contre pluGeurs habitans, toujours pour l'introduél:ion de troupeaux aux Bafiidonnes,
tantôt dans un quartier, tantôt dans un autre; & enfuite il
fe pourvut par information pour le même fait contre
Maximin & Jofeph Milliere, Franc;ois, Jean-Jofeph, JeanBaptifie & Jofeph Pal y freres, Vincent Etienne, Ménagers, & Jean-Jo{eph Charpentier, Berger. Ils furent décrétés les uns d'ajournement, les autres d'affigné; ils demanderent la révocation des décrets.
On difoit pour eux, que celui qui a fouffert un dommage dont il efi en droit de demander la réparation ou
civilement ou criminellement, parvient également à {on
objet par l'une ou par'l'autre de ces voies. Son choix une
fois fait, pourquoi lui permettroit-on de le révoquer? Pourquoi {eroit-il autorifé à une variation qui, fans utilité pour
lui, en prolongeant le procès, augmenteroit la peine des
parties?
Il efi d'ailleurs généralement reconnu dans notre Jurifprudence, que dans le cas où l'on peut fe pourvoir indifféremment par la voie civile ou par la voie criminelle,
le choix de l'une emporte renonciation à l'autre. (Ordonnance' de 1667, tit. 18, arr. 2, & Bonnet vo. aRion.) Il
.fàut donc refu{er l'aél:ion criminelle au Marquis de' Simiane"
�a~
JOURNAL
.qui ·s'étoit déja pourvu civilement poUt le même ob jet';
C'eil: un autre principe auffi certain, auffi utile~, plus
favorable ,& (plus humain 'fans doute, 'que lorfque par l'inf,truél:ion, criminelle ·on voit l'objet de ·la plainte difparoÎtre,
& le corps du .délit ceirer, on doit fe hâter d'interrompre
cette inil:ruél:ion rigoureufe; la Juil:ice., 'fuivant M. d'Aguef,feau, s'empreire de celfer des recherches dont il -ail: évident qu'elle ne peut plus rien fe promettre, dès que le
corps de délit a difparu.
L'exiil:ence ,du crime peut feule motiver ,les démarches
de la Juil:ice; 'ce fait eil: préalable à lli nil:ruél:ion , parce qu'il
la rend néceiraire. Le fondement de route procédure criminelle eil: donc l'exiil:ence du délit. De cette vérité certaine fuit la conféquence que fi dans le cours de l'infiruction, le corps du délit difparoît, cette inil:ruél:ion manquant
alors d'objet raifonnable, la furprife faite à la Juil:ice par
la plainte eil: démontrée; il faut donc ,réparer cette erreur
par la cairation d'une procédure qui ne peut plus dès-lors
rien produire d'utile, & qui dans le principe fut fondée fur
une erreur.
Par la requête de plainte, le 'Marquis de Simiane a dé..,
noncé à la Juil:ice les .accufés comme des gens qui par des
voies de fait auffi violentes que repréhenfibles, avoien t
attenté à fon droit de propriété. Ce n'eil: qu'en préfentant ce' droit comme établi d'une maniere inconteil:able,
~n dénoncrant à la Juil:ice le rro.uble caufé., comme .un
attentat réflééhi, qu'il.eil: ,parvenu ,à juil:ifier la néceffité
de l'inil:ruéHon -rigoureufe qu'il folliciroit. 'Celui qui connoiirant ·Ie droit de propriété d'autrui, le trouble fciemment & .malicieufemenc, qui n'agit· qu'enfuire .du deirein
injuil:e de lui nuire, foit pour ufurper fes droits, foit pour
l'en priver, eil: criminel; c'eil: un ennemi de l'orBre [0cial , ,un perturbateur du .repos ,public; il fa.ut le .livrer à
toute la févérité des ,Loix. Celui <lU contraire qui combat
une prétention par une prétention .oppofée, n'eil: ni criminel ni ennemi .de l'ordre public. Dans le.cas .de concours.
de prétenüons ..refpeél:ives lfur le :fonds .contentieux, aucun
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DU
'P A LAI S
D B'
PRO
v Il Nell.
2.63
Ile pouvant fe prévaloir d'un droit exolufif, aucUn ne peut
préfenter à laI Jufrice le trouble qui lui elt caufé· comme
un crime. Les droits font les mêmes, le do me efr égal;
chacun d'eux peut fe tromper, mais l'erreur n'efr pas un
crime; leurs contefrations tombent uniquement en difcuffion civile qui efr du l'effort du Tribunal civil.
Ici les particuliers contre qui s'efr pourvu le Marquis de
Simiane ont ufé d'une faculté qu'ils croyoient avoir. La
tranfaétion du 22 Novembre 16)7 attribue aux hab/tans
un droit de compafcuité fur la totalité du terroir de Collongues ,. aujourd'hui de Simiane. Ce titre n'exoepté qu'un
enolos qu'il permet de faire au fieur· dé- la Brillane,·dont
la contenance fera fixée par un rapport: Il s'agit de vérifier
cette contenance ; les acoufés ri'.ont donc· point attenté
fciemment au droit de propriété du Marquis· de Simiane~
Dès qu'il efr évident que par l'événement' du procès
civil, on adtnetrra la vétification des limites des 'enclos que
le Marquis de Simiane prétend défenfables, & qu'on fera'
dépendre le droit des parties de cette inrerlocution, feroitil .po.lIible que
le mêm,e fait on ~ontinuit l'infrruB:ion
cnmlOeIIe, & qu on perfifrat à pourfulvre comme un cnme
l'exercice ?'un dr\lit que le .Marquis' de Simiane peut' tout
au plus prefenter 'comme douteux?
Dès que le Juge appenioit' par la dépolition dés témoins,
ou par les réponfes' des accufés , que le' fait a· été exagéré
dans la plainte, qu'on lui a préfenté comme un délit un'
fait. qui ne méritoit point une dénomination rigouteufe, re-'
connoiffant la furprife faire à fa r~Iigion, il fe Mte de' la
réparer., en commuant le procès criminel en proeès civil',
& par une conféquence néceffaire' la procédure en enquête;
c'efr la difpofition précife de l'art. 3 du tit. 20 de l'Ordonnance'de 1670.
Pour connoître fi une contefration efr du l'effort de
l'infrruél:ion civile ou de l'infrruél:iori criminelle, il fuffit de
[avoir quel' efr l'objet ordinaire de ces deux aétions. On
pourfuit l criminellement les délits, c'efr-à-dire les attentats
réfléchis ·aux droits de propriété, qui déterminés par l'-in~
POt
�j,6<j.
Jou
RNA I;
jullice & la fraude, affichent le mépris pour les Loix-, &.
tendenc à troubler l'ordre facial. On réferve pour l'inHruc-.
tian civile ces contellarions qui s'élevent encre· deux parriculiers fur lm dro-ir doureux, dans lefquelles il y en a un,
qui fe trompe, quoique cependant ni l'u!} ni l'aurre ne
méprife l'aurorité des Loix., C'eft ainli que l'onr penfé le
Commel1rareuJ: d'Qdé·ans & Lacomhe fur, l'Ordonnance
criminelle. '
On répondoir pour le Marquis de Simiane, que le dommage avait éré fait par bê,res & à {jaJlon planta, ce quiforme un aél:e de dol & de délir, fuivant Serres dans fes
Iollirutes, pag. S82 , fur-tour en mariere de bois & de
contravenrion pour chevres. Le Marquis de Simiane fe
plaignoir d'affeél:arion, d'obfiinarion, de jaél:ances, d'occupation de fes bergeries, de feu allumé dans fes forêrs ,.
d.'un complot & arrroupemenr;, tous ces fairs forment'
matiece à informarion. L'aél:ion civile prife par la voie de'
la dén.on.ce n'a rien de commun avec .les autres fairs qui
donnenr lieu à l'information. .après la dénonce 011 avait:'
z:écidivé, on avait commis une voie de fait; cela· formait,
de nouveaux délirs indépendans les uns des aurres.
MI'. l'A.voq,-Gé,néral de CaliffiJnne obrerva qu'il ell cer-,
tain en droit, que elec7d und via, npn recurritur ad alct:.ram)'luan,d. la partie civile, qui. ne peut fe plaindre que dupréjud.ice à eUe porté, peut obrenir par la voie civile les
clommages. & inrérêrs qu:'eUe a à prétendre,. quand elle,
ne peut fe nuire en la prenant, quand le délie eft privé,..
& que la, faciéré n'a r,ien à venger. Quand on a pris unefois la voie civile, dirent les A.ureurs, Oll ne peut plus ufèr,
d<1 la voie criminelle;. il ne peut plu.s y avoir de doute,. le
cllOix emporte renonciation.
Dans la caufe préfenre, y avait-il un choix, de, la part du
Marquis de Simiane?, Etait-ce pour la même dénonce &
pour le même fair, q,u''Iprès avoir chain. la voie civile, il'
avait- pris la voie criminelle? Il Y avait des dénonc,es nou-,
velles faires dans le défens de la BaHidonne, ou àu clos deh Roq,ue re,n:oir c.on.re,ft~" c;onféq,uem,naent déponçes. (aires.,
-
~~
�D- u PAL A i: 5 n E PRO V Il N C l!;~6):
fUr le m~me local, fait dans le procès criminel, fait dans le
Frocès civil; mais il y avait ( difoit le Marquis de Simiane)
danger, jaél:ance, affeél:ation, incendie même; donc nouveau.
délit indépendant au moins fous quelque rapport; il ne s'était
lié par la voie civile que fur le fait fur lequel portait la dénonce; les autres étaient abfolu.ment étrangers. Ce n'était
donc pas le même délit; & quoique ce fût un délit de même
nature, les droits du Marquis de Simiane étaient entiers;
il n'avoit commencé à le venger ce délit; dès-lors il. n'y;'
avait point de choix à faire; dès-lors il pouvait prendre la:
voie criminelle•.
D'ailleurs le délit de Milliere pouvait être regardé comm~
aggravé; c'était lIne récidive; il Y avait· eu des jaél:ances"
des propos, de l'affeél:ation; il Y avait donc d?aurres délits..
fur lefquels le Marquis de Simiane n'avait encore rien dit··
donc point de choix. Le Marquis de Simiane avait cru que'
la voie civile & de fimples inliibitions fuffiroienr; l'expé-rience lui prouva qu'il s'était trompé; il prit la voie crimi-·
nelle. Il ne diffimula pas dans fa requête qu'il. avait déja<
pris la voie civile, ma is que rien ne pouvait contenir fes,
vaffaux, & qu'il fallait un exemple. Les circonfiances pa-roiffoient donc aggraver le délit & autarifer la poffibilité.. de:l'information•.
. Ce n'était donc pas un véritable cas fùr lias; lès circont;:.
tances, quoique fonciérement les r,nêmes, avaient changé~
l'objet.; celui qu'avait le Marquis de Simiane de faire ref-.
peél:er fa propriété, pouvait exiger une infl:ruél:ion plus rigoureufe, parce qu'elle était arraquée avec plus de fcandale lt,
parce que la voie la plus douce fembloit avoir autarifé l'impunité; la récidive· érabliiroit fan intérêt; il lui était e1fentie·Lt
que fes habitans fuirent contenus, & des décrets pouvaient<:
mieux arrêter & avoir plus de force que de fimples inhibitions. Le décret de [oit-informé n'érait donc pas radicalement nul; l'infiruél:ion criminelle pouvait être légale•. Mr.:..
l'Avocat-Général examillil enfuite fi le décrer de foit-infGrmé::
pouvait fubûfter~
Le MarqU;Ïs de Simiane avoit eXI!.0fé que les hahitaos>
L..t
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iU
JOURNAL
s'étoient introduits dans fes clos. Ceux-ci foutënoient qu'ils
en avoient le droit. Dans ce cas, peut-on dire qu'il y air un
délit? N'dl-ce pas une aél:ion réelle fondée fur des rirres
ile part & d'aut..e, dont l'ufage, jufqu'à ce qu'il foit fixé,
ne peut être regardé comme un délit? Or, dès qu'il n'y a
plus de délit, l'infiruél:ion criminelle n'a plus de bafe; l'accufation & l'infiruaion ne peuvent donc plus en conferver
la rigueur; elle doit ceJfer, puifque le fait qui y avoit
ilonné lieu n'en exige plus aucune, puifque ce n'efi plus
réellement qu'une quefiion de propriété; elle n'eil: pas reconnue, elle eil: même comefiée; dès-lors en l'état plus
il'attentat.
Dès que le Juge reconnoît, dit l'art. 3 du titre 20, de
-l'Ordonnance de 1670, que le procès ne doit plus être pourfùivi au criminel, il doit renvoyer les parties en procès ordinaire, c'eil:-à-dire, commu~r les informarions en enquête.
Mr. l'Avocat-Général conclut à ce qu'ayant rel égard que
de"raifon à la requête en révocation du décret de foit-informé, les parties pourfuiviJfent en procès civil l'information
commuée en enquête, & jointe au procès civil, pour y être
dit droit par un feul & même Arrêt.
Par Arrêt du 1 1 Juillet 1780, les concluuons furent fuivies; les dépens furent joints au fonds. Plaidant Mes. Verdet
neveu & Gaffier.
ARR Ê T
X X X X I.
Pour ~tre reçu maître, il ['!/fit de jufiifier qu'on a rempli les
formalitis prefcrites.
,
~
Le Corps ne peut point détruire ces preuves par des faits
négatifs·
L
:lUX
E lIeur Jean-Claude Ifnardon voulant être recu dans le
Corps des Marchands de la ville de Marfeille, préfenta
Syndics, qui le renvoyerent à la premiere aJfemblée; il
te
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iU
JOURNAL
s'étoient introduits dans fes clos. Ceux-ci foutënoient qu'ils
en avoient le droit. Dans ce cas, peut-on dire qu'il y air un
délit? N'dl-ce pas une aél:ion réelle fondée fur des rirres
ile part & d'aut..e, dont l'ufage, jufqu'à ce qu'il foit fixé,
ne peut être regardé comme un délit? Or, dès qu'il n'y a
plus de délit, l'infiruél:ion criminelle n'a plus de bafe; l'accufation & l'infiruaion ne peuvent donc plus en conferver
la rigueur; elle doit ceJfer, puifque le fait qui y avoit
ilonné lieu n'en exige plus aucune, puifque ce n'efi plus
réellement qu'une quefiion de propriété; elle n'eil: pas reconnue, elle eil: même comefiée; dès-lors en l'état plus
il'attentat.
Dès que le Juge reconnoît, dit l'art. 3 du titre 20, de
-l'Ordonnance de 1670, que le procès ne doit plus être pourfùivi au criminel, il doit renvoyer les parties en procès ordinaire, c'eil:-à-dire, commu~r les informarions en enquête.
Mr. l'Avocat-Général conclut à ce qu'ayant rel égard que
de"raifon à la requête en révocation du décret de foit-informé, les parties pourfuiviJfent en procès civil l'information
commuée en enquête, & jointe au procès civil, pour y être
dit droit par un feul & même Arrêt.
Par Arrêt du 1 1 Juillet 1780, les concluuons furent fuivies; les dépens furent joints au fonds. Plaidant Mes. Verdet
neveu & Gaffier.
ARR Ê T
X X X X I.
Pour ~tre reçu maître, il ['!/fit de jufiifier qu'on a rempli les
formalitis prefcrites.
,
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Le Corps ne peut point détruire ces preuves par des faits
négatifs·
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E lIeur Jean-Claude Ifnardon voulant être recu dans le
Corps des Marchands de la ville de Marfeille, préfenta
Syndics, qui le renvoyerent à la premiere aJfemblée; il
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PALAIS
DE
PROVENCE;
'1..67
leur tint une fommation le 1 t Décembre 1778; & fur' le filence des Syndics, il fe pourvut aux Lieurenans - Généraux
de Police, en injonél:ion aux Syndics de déclarer le jour O?l
l'a/femblée ferait convoquée pour la réception, autrement
qu'ils feraient affignés pour voir dire que par tout le jour d.e
la fignification de la Senrence, l'a/femblée feroit convoquée ,.
qu'aLHrement la Sentence lui tiendrait lieu de réception;. &
qu'au moyen de ce, il lui feroit permis d'exercer la profeffion de Marchand, avec inhibiti9ns & défenfes de le troubler, à peine de mille livres d'amende, & d'en être informé ;.
il réclama en même temps les dommages-inrérêts foufferts parle retard, fuival1t l'état qu'il en donneroit & la liquidatioIill
d'Experts, avec dépens.
Décret en injonél:ion; fignification;. Sentence en contradiél:oires défenfes le 8 Janvier 1779,. qui ordonne que le~
Syndics. convoqueront ince/fammenr les Membres du Corps'
réuni des Marchands, pour procéder à b réceptiotl' & à la'
rnaîtrife du lieur Ifnardon, les dépens compenfés. Cette Sentence fut fignifiée le II du même mois, & le 30 il fur ré10Iu dans 1o111e affemblée de ne point admettre le fieur If-·
nardon à la maÎtrife. Le t 9 Février, les Syndics requierent:"
la communication des pieces jufiificatives de la capacité' dw
fieur Ifnardon. Cette communication ayant .été faite, il' intervint Sentence le 9, Mars 1779, qui ordonne que le fieu!."
lfnardon fera admis à la maîtrife par< tour le jour de la, fignificatiou de la 5enten<:;e ,. autremenr· que la Sentence lui
tiendra lieu d'aél:e de réception~ Les Syndics font mis hurs>
d'infiance & de procès fur les l'lus amples fins de la re-·
quête,. mais ils font condamnés aux dépens. Ils appellent:
pardevant· la Cour, & le fieur IÛlardon appelie in quantù(7l.!.
ontra du chef concernant. les dommages-intérêts.
Le fieur Ifnardon n'ell: çonnu à Marfeille ( difoient· les>
Syndics) que comme Emballeur; il exerce ce· métier en fcciété avec le fleur Blanc; il efl: reçu dans le Corps d'es· EmbaUeurs, il en a payé les cotes jufqu'auiourd'hui. Sa femm _
~ft Frippier.e; elle éraie des ",ieux. meubles-,.. elle. court les.
ne,s: pOlit' montre.r- &; vendl:e des: brer0'l.t1e:r. aux- curieux j;
L.li. :<L
�2~
JOURNAL
elle. fait m~me depuis long temps un commerce fous main·;
en fraude des Staruts -des Marchands; & comme elle a é'é
-quelquefois inquiétée par le Corps, elle a imaginé de [dire
recevoir fon mari Ma-rchand, po.ur <;ommercer elle-même
fous fon nom.
Si le fieur Ifnardon n'a pas difconrinué fa profeffion d'Emballeur, il n'a pu remplir les obliga ions que lui impofoit
l'aél:e d'apprenriffage qu'il montre; d'ailleurs cet aél:e efl Gmulé. Le fieur Bois eft en ufage de paffer de pareils acres,
n'étant pwpremenc qu'un prête-nom, un Marchand fans magalin, homme inconnu depuis long temps fur la Place.
Après les aél:es d'apprenriffage & de compagnonage, on
-eft obligé de rapporter un certificat de fetvice ligné pù des
Marchands de la même profeffion que celui chez lequel l'afpifant a fervi, fuivanc l'arr. IO des Réglemens. Celui du lieur
Jfnardon eft figné par les fieurs Ifnard & Depras, qui n'ont
.aucun magalin depuis long temps; le fieur Depras n'a même
jamais été Marchand drapier. Ces certificateurs font donc:
rans qualité pour certifier.
L'aél:e d'apprenriffage d'Ifnardon & fes certificats de fer_'Vice font frauduleux & contraires aux Réglemens. La Sen-tence qui lui a permis d'exercer la profèffion de Marchand
.doit être -caffée.
-Ce n'eft pas feulement la capacité du fujet que le Légiflateur
a eu en vue; il a voulu encore éprouver fa probité. Le commerce
produit des effets publics; un magalin s'ouvre, s'achalande, le
crédit s'acquiert; le Marchand contraél:e dans un moment
mille engagemens qui intéreffent le tiers; & s'il n'écoute
alors que le delir de faire fortune,. il paye fes créanciers par
un bilan. L'expérience journaliere nous prouve malheureufement que la plupart des faillites viennent de l'inexpérience
.ou du défaut de pwbité.
Les Syndics ont offert de prouver que le prétendu magalin
exiftanr fOlls l'enCeigne d'Auguflin Bois dans le fonds du coridor
de la maifon de la Dame de Rofac, a journellement été régi
par la femme du fieur Ifnardon, Frippiere , & non par Bois, ni
_par Iillardon. Le fieur Iillardon répondoit que chaql,le profeffion
�DU
PALAIS
DE
FROVENCIl:
2.69
~n gouvernée par des Réglemens qu'elle s'dl: impofée fous
l'infpellion & l'aurorifation du Prince. Ces Réglemens forment une Loi particuliere qui lie touS les Membres du
Corps, & affervit encore ceux qui afpirent à la même profeffion.
Les Marchands drapiers, mer.ciers, toiliers, dentelliers,
;ouail1iers & c1incailliers de la ville de Marfeille réunis par
un Arrêt du Confeil d'Etat du 3 Août 17')0, compofent
une feule communauté, qui efl: adminifl:rée par des Sta, -tuts du 8 Mai 17') 2, revêtus de Le[tres-patentes enrégifl:rées
au Parlement.
.
L'article 9 de ces Régle~ens porte, qu'aucun ne pourra
,à l'avenir parvenir à la maÎtr,ife, qu'il </1'ait atteint au moins
.lItige de vingt ans, qu'il n'ait fait apprentiffage de trois, ans
confécurifs chez un maître de la Communauté, & qu'après
l',apptendffage fini, il n'ait fervi pendant deux années chez un
GU diJférens m"Îtres.
I"e ,lieur IIfnardon s'efl: mis en apprentiffage chez le lieur
Augufl:in Dois, Marchand drapier, le 7 Juillet 1773. Il
Y a demeuré pendant tmis .années confécutives; ce qui efl:
jufl:ifié par l'alle d'apprenriffage du 6 du même mois & an,
recru par Me. Laugier le jeune, Notaire à Marfeille. Il a
-effellué [011 ,compagnonage, [uivant l'alle du ') Août 1778,
recru par le même Notaire.
Sur les moyens de rejet propo[és par les Syndics, le fienr
Jfnardon di[oit qu'en droit le Réglement ne prononce pas
l'exclulioll contre le mari d'une Frippiere & d'une conrrevenante, pui[que la feule exclulion portée par l'art. 17 concerne ceux qui ont été forcrats [ur les galeres de Sa Majefl:é.
On impute au lieur If/lardon d'étre Emballeur. JI efl: pour
·tant certain qu'il n'exerce plus cette profeffion depuis une
époque antérieure à [on apprelltiffage. Suivant la loi & l'ufage
ob[ervé parmi les Emballeurs, il Y a une différence entre
la cote & la cotité. La cote efl: [upportée par l'Emballeur
.qui n'exerce pas; la cotité efl: [upportée par l'Emballeur qui
exerce.
Ici il efi confiant que depuis huit années le fie Ur,
.,
4
�~o
JOURNAL
Ifnardon ne paye pl\1S 'ni cote ni coticé; le certificat qu'if
a rapporté des Prieurs &. Maîtres Jurés-Ga 'des le prouve.
En fuppofant que le fieur lfilatdon eCJt continué 1a profelIion d'Emballeur, ce fervice n'auroit pas empêché le fervice requis par les Statuts des March;mds. Un 110mtrte aaif
peut être Emballeur, &. remplir en même 'temps fon apprentilfage.:lD,ltls le' fuit, il lliffit que \'apprentilfage &. le
compagnonage aient été effeaués; il fuffit que le maltre foit
content de fOI1 apprentif, &. qu'il caricelle l'aae d'apprentilfage dans le temps légat~ l'apprentilfage eft Ul,e opération
relative du maltre 11 l'apprentif; fi celui-ci a fait fon temps,
fi fon mahre eH conten:! de lui ,-fa tâche eft remplie, fa con.
duite eft 11 l'ahri de toute autre. infpettion ou d'une critique
étrangere. La canceUation de l'aae d'apFlrentilfage eft l<l
preuve littérale de f0n travail, de fon affiduité.
Il ne faut pas comparer la profeffion de Marc·hand drapier à.vec les arts de Sculpteur, .Graveur, Cifeleur, Horloger,
Orfevre, Ménuifier &. autres. Dans ces arts, il' faut créer,
fabriquer &. mettre quelque chofe en œuvre, mutare formam.
IL 'eft indifpenfable d'apprendre les regles &. les connoifÎances. de l'art;. à la fcience de la fpéculàtion, 'Ce joint la
fcience de la pratique. Il eH néceffilire que la main exercée
'Par un travail long &. fuivi; exprime par un travail vifible les
cO'nnoilfances acquilès; il faut inventer, perfeélionner un ouvrage , exercer la théorie &. la pratique, j,oinJre la main aux
efforts de l'imagination, &. du tOUt enfémble en faire réfuiter un ouvrage propre 11 l'art de celui qui l'exerce. Voilàpourquoi', avant d'accorder la ma1trife. dans ces arts, on
exige un chef-d'œuvre. Ce chef-d'œuvre, qui ('onduit à la
maltrilè , eft le fruit de la fcience &. des connoiifances acquifes; cette fcience, ces connojifances l'le font acquifes .que
par un travail habituel, que par un long exercice.
Dans la profelIion de Marchand tout eft, pour airuî dire;
pallif; on ne crée rien, &. on n'exige pas un chef-d'œuvre.
Il fuffit de conno/tre la qualité &. le prix de-s marchandi{es.
Le. travail rrntnuel conIifte à fe fervir de la canne, à alonger
. aune fur une piece d.e toile
de draperie, & aifurémen,.
ou
�l' A L-A 1 S
2.71 '",'cette fcience n'ell: pas dans la c1~lTe des fciences obfcures
& énigmatiques. Le. travail intelleétuel confiHe à acheter de
la marchandife à un prix modique, & à la vendre à un prix
plusconfidérable, à l'eHet de trouver dans la vente un bénéfice. Cette fcience n'exige pas à coup-sûr un travail continuel, de cinq années.
La profeffion d'Emballeur n'ell: pa~ incompatible av~c celle
de Marchand; elle y elt inhérente par fa connexité & fa' relation. L'office d'Emballeur confilte à arranger la marchan<Iife vendue par le Marchand. Sous ce rapport, cette· profeffion feroit avantageufe à ce dernier, puifque, fans un miniltere étranger, il pourroit lui-même & fans frai~ emjJaller
la marchandife de fon commerce.
Le fieur Ifnardon prouvait enfuite que le fieur Bois éraie
Marchand à l'époque des aétes d'apprentilTage & de compagnonage; qu'il avoit magafin vis·à-.vis la Loge daps la
maifon de la Dame de Rofac aux années 1773, 1774, 177~,
1776, 1777 & 1778; qu'il -y étal9i;c des marchandifes en
draperie, railerie, merçerie, c1incaillerie & bi.jouterie; que
fa maifon avoit toujours confervé la même enfeigne; que
les Syndics n'avoient point ,ignoré ces faits. Le fieur Bois
n'avoit donné aucune démiffion; il n'avoir point abandonné
fan magafin: il avoit donc continué d'être Marchand, & il
avait pu recevoir & faire un apprentif.
L'interlocution demandée par les Syndics elt mal fondée
( ajourait le fieur Ifnardon ), puifque quand même la D,le.
Ifnardon aurait régi le magafin du fieur Bois, l'apprentilTage
du fieur Ifnardon ne ferait pas moins valable; elle elt encore
inconcluante, parce qu'elle porte fur un fait négatif. Les
Syndics demandent à vérifier que ce magafin n'a point été
régi par le lieur Bois: faaum negantis, per rerum naturam
Dulla eft prohatio. Loi 2.3, cod. de prohat.
'
A l'égard des fieurs Ifnard & Depras, certificateurs, il dl:
indifférent qu'ils aient magafin. La celTation du magafin
n'emporte pas contre le Marchand la privation de fon état.
Une fois parvenu à la maitriCe, il ne celTe d'être Marchand
~ue POU: ~ démiJIion. :J:ant ql;le cette démilfion ne para.!;
DU
b E
PRO VEN C l!.
�Jo .U·R 'No A':dJ.,
pas, il ell: réputé Marthand ; a paye la cote, lX ell: à l'inflar
d'une foule de fes Confreres qui' [ont dans la même po~
fitipn.
.
Sur fon appel in 'luantùm contra., le' lieur Ifnardon difoit·
que fuivant les Loix, la raifon & l'équité, celui qui a caufé·
un dommage ell: t~nu de le r~parer,; il ne fam pas que pat'
fon fait ou par fa faute, un citoyen 'reçoive un préjudice dans
fa fortune ou dans fon état.
Cette caufe, fuivant Ifnardon, n'étoit pas boinée à l'intérêt'
d'un' feul individu; elle intéreffoit la sÎlreté du commerce ,.
la confervation mftme des JtJrindes~ La prérention des Syndics tendoit à- un empire funefte, à un u(;1ge pernicieuX'
. des Jurandes. Ils vouloient refireindre' la liberté nationale-,.
étouffer l'indufirie.. Il n?ell: que rrop ordinaire de voir les
Communautés des Jurandes, arts & métiers fe livrer à l'oppreffion, cacher une jaloufie particuliere fous le voile de.
la jull:ice, exercer le defporifme foos les apparences de laliberré, bouleverfer l'ordre focial fous le faux. prérexte dubien public, & anéantir le commerce & l'indufl:rie , en fei~
gnant les protéger.
'
Par Arrêt du 13 J uilter 1780, au rapporr de Mr. le Con';;
feiller d'Efpagnet, la Senrence fur confirmée au premier chef;-.
il fut adjugé à Ifnardon 30 liv. de dommages-intérêts, avec_
dépens. Ecrivant Mes. Bremond & Collombon.
'
'l.7'L
XXXXII.'
..
J
Qurtflion d'AJ{ut'llnce maritime.
P
Ar police clofe le 9 Seprembre 1776, les lieurs Roi":
land ainé, Bouge & autres Négocians de.· Marfeille,
affurerent au fleur Jofeph Miojaud, Négociant de. la même
ville, la fomme de l'lOOO liv. dom 8000 liv. pour fon
C6Il1pte, & 4000 liv. pour celui du Capitaine Auffan, moitié
:fur. c.orps) & moitié fur facultés du Senault Le St. Jofepf}
. _.- _..
Marie;
- - ._-
�2.73
'Marie commandé par le Capitaine Auffan. Le rifque étoit
de fortie des iDes de l'Amérique jufques dans le Port de
Marfeille, à commencer du jour & heure que le Vaiifeau
prendroit charge.
Ce Senau1r fut un de ceux qui eifuyerent l'ouragan qui [e
fit reifentir le 6 Septembre dans l'iDe de 1a Guadaloupe.
A la premiere nouvelle de cet événement, M+njaud fit
abandon à fes Aifureurs tant du Navire que de fes facultés,
& dans cet aae il déclara qu'il'avoit pris à groife aventure
la fomme de 9900 liv. Le 2.0 Avril J777 il fe pourvut
contre eux au Lieutenant de l'Amirauté en condamnation
_des fommes affurées, avec contrainte provifoire, en donnant par lui bonne & fuffifante camion.
Les Aifureurs conteHerent cene demande, & par Sentence du J7 Juin le Lieutenant ordonna que les Affih
reurs feraient provifoirement contraints au paiement des
.fommes par chacun d'eux affurées, en donnant par Minjaud bonne & fuffifante caution.
Millot pere & fils fùrent re~us pour caution. Les Aifureurs appel1erent enfuite pardevant la Cour, & préfenterent une requête en tout en état. La Cour mit un fait
montré a partie, demeurant tOllt en état jllfqu'a la répon/è.
Minjaud préfenta une requête contraire, & fur les requêtes
refpeaives il intervint Arrêt le 31 Juillet qui fouleva Je rout
en état. Minjaud fut payé, & les Aifureurs pourfuivirent
fur Je fonds pardevanr le Lieutenant de l'Amiramé, qui
rendit une Sentence le 9 Septembre 1778, par laquelle
il condamna définitivement les Affureurs au paiement des
fommes aifurées, avec intérêts tels que de droit & dépens.
Nouvel appel de leur part..
On difoit pour eux, que l'aifuré qui veut exiger le montant de l'aifurance , doit prouver & le éhargement & ha
perre. (Art. 16 & 57 de l'Ordonnance de la Marine, tit.
des aJ!ürances. )
L'article 62. au même titre foumet le maître qui aura
fait affurer des marchandifes chargées dans fou vaiffeau
pour (on compte, à en jufiifier l'achat en cas de perre ')
Mm
DU
PALAIS
DE
PROVENCE:
/
�274
•
Jou
RNA .t
& à en fournir un connoiffement figné de PEcrivain &
Ju
Pilore. Minjaud fourient que la difpolirion de cerre Loi
ne lui ell pas applicable, parce que le Capitaine a c!mrgé
pour compre des inréreffés, & non pour le fien. Mais le
maÎrre ell-il moins affujerri aux formalités dé la Loi, lorfqu'il fair affilrer fous le nom générique d'intùeffis dom il
fair parrie, que lorfqu'il fera dénommé dans la police d'affurance? Aina les inréreffés érant effenriellemenr unis &
indivifibles dans l'affociarion, doivent l'être conféquemmenr
dans l'obligarion de prouver le chargé.
La fignarure ifolée du fecond Capitaine n'a pu fuffire
aux· yeux de la, Loi pour conf!:arer l'exif!:ence du chargemenr. Ce n'efl: pas là en effet la précalHion que l'Ordonnance a eu en vue, en exigeant la lignarure de l'Ecrivain
& du Pilore, dans le cas où le Capiraine ferait fufpeél:
pour donner le connoiffemenr. Elle a prétendu au main!;
exiger l'arrefl:arion éclairée & exaéle de deux Officiers impartiaux, & non la fignarure ifolée d'un feul Officier.
C'ell le 6 "Seprembre qu'on donne pour l'époque dll
finifl:re. C'ef!: le 9 feulement que le Capiraine donne requêre pour fe faire aurorifer à décharger fon Navire, &
pour faire confl:arer des avaries foufferres ranr par la cargaifon gue par le Navire. Suivant l'expofé de cerre re ....
quêre il c<;mfl:e qu'il n'y avoit rien de déchargé lorfqu'elle
fut préfenrée. Le Juge., le Procureur du Roi & deux Experts accedenr le même jour 9 Seprembre à bord du Navire; le rapporr ef!: dreffé, & ne dit pas le mot de la
cai-gaifon. Ce filence abfolu des Experrs fur les prérendues
'bariques de fucre ef!: véritablement frappanr & meurtrier
_
pour la prérention de Minjaud.
Il ef!: cerrain d'après l'Ordonnance, qu'on ne peut fe
faire affurer des effers déja affeélés au paiement des deniers
'pris à la groffe. C'ef!: enfuite de ce principe 'que l'affuré,
en faifant fan délaiffemenr, ef!: tenu de déclarer les -fommes par lui priees à la groffe; s'il en réeele, il doit être
privé de l'effet de fes affurances, & même il doit Ï!rre
puni exemplairement., s'il pourfuit le.paiement des fomme~
affurées.
-
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE;
'27)'
Quelle el!: d'abord la confifiance du prétendU chargement? Suivant le connoiffement il efi de 36 bariques;
fuivant la faél:ure il n'efi plus que de '23, Quel efi d'un
autre côté le montant des fommes prifes à la groffe &
par Minjaud & par le Capitaine 4uffan? Minjaud a déflaré lui-même qu'il ,!voit été pris par eux la fomme de
9900 liv. argent de France. Mais indépendamment des
f10nneurs qu'il a dénommés dans fon a'él:e d'abandon, il eH:
conl!:até au procès que le Capitaine Auffan' avoit reçu Il
)a groffe 1800 liv. du lieur Hubaud de Lineau pour lé
,même voyage & avec la même aifeé}ati6n. Et par cela
feul ces affurés font toQ'lbés dans iè' cas' dé la' difpofition
a·n•.) & S4 de .1'0rdonn;lUce, qui les privent des.
,effets de leur affurànce.
Fût-il vrai qu'il y eût eu un chargement, & fût-il en.co.re vrai que les facultés chargées euffent fuffi pour cou.vrir & le mootant des billets de gr,olfe, & le. montant
des affurances, l'accident effuyé par le Navire n'aurait pas.
pli autorifer l'abandon des facultés; rO. parce que l'événe-·
ment dont s'agit n'efi poim un des fini(tres marqués p~I"
l'Ordonnance, & dès - lors l'abandon du Navire ne peut
pas entraîner celui· des facultés. 2,0. Quand même ce feroit·
un des finil!:res prévus par l'Ordonnance, il ne pouvoit y
avoir lieu à l'abandon des facultés. dans l'état où elles fe
trouvoient.
. Il ~fi vrai que le Senault effuya l'ouragan qui [e fit reffentir le 6 Septembre 17-7.6 à la grand terre iDe de la
,Cuadaloupe. On voit même par les procès - verbaux qu'il
fut maltraité par la tempête; mais il eH: encore vrai qu'il
l~'eff~ya aucun des finifires warqués par l'Ordonnance_
Minjaud a beau vouloi.r prétendre qu'il, a naufragé,. échoué·
,& qu'il a été brifé. f..-e n.aufrage fuppofe la perle du Navire, & le Sen 'luit en quefiion n:'effuya v.éritablement que:
des domm:lges. D'un. autre côté·, il n'y a bris que lorfqqe le Vaiffeau eil: mis en piece, & qu'il y a impoffibilité de le relever> il faut en un mot que dans le cas 0m
büs &. du naufrag,e,- le Navir.e foit perdu fans rerr:our~e_
Mm ~,
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11 n'y a non plus eu d'échouement complet, parce que
le Vaiffeau fut relevé fans fecours étranger, & il fllt remis
à flot, fuivant la déclaration du Capitaine & de l'équipage,
par le feul moyen des pompes.
On répondait pour Minjaud, que la Sentence provifoire
éroit non feulement conforme à la difpofition de l'Ordonnance de la Marine, mais encore à la loi que les parties
s'éraiem eux - m€mes impofées librement & volontairernem.
L'article 61 du tit. 6 du liv. 3 -porte que l'affureur fera
reçu à faire preuve contraire aux arref!:ations, & cependant condamné par provifion au paiement des fommes
affurées, en baillant caution par l'affuré. Cette difpofition
ne préfente certainement aucune ambiguité: il faut payer
avant que de pouvoir être écouté.
La convention des parties n'ef!: pas moins énergique;'
les affureurs fe font foumis " à ne pouvoir dire, alléguer
" ni controuver aucune chofe contraire à la jufiification que
" Minjaud donnera, qu'ils ne lui aient préalablement garni
" la main des fommes par eux refpeél:ivement affilrées. ,~1
'Le Tribunal de l'Amirauté ne pouvoit point refufer à
Minjaud l'adjudication provifoire qu'il avoit requis contre
les affureurs.
Sur l'appel de la Sentence définitive, on difoit que l'ar":
ticle 62 de l'Ordonnance de la Marine fur lequel les affureurs érayoient leur premiere objeél:ion, n'érait point applicable à la caufe. L'obligation impofée à Minjaud par
les affureurs dans la police c10fe ne frappe pas fur la juftification de l'achat des marchandifes; ils n'ont exigé de
lui autre chofe finon qu'en cas de unifire ou de perte, il
leur en fit apparoir par police de chargement ou autre
forte d'écriture; de forre qu'au befoin ils auroient dérogé,
quant à ce , à la difpofirion de l'article 62.
Minjaud auroit pu fe borner à produire le connoiffe-'
ment des 36 bariques de fucre, pour être affuré d'avoir
rempli la juf!:ificarion du chargement. C'érait la loi du
çonrrat d'affurance fuivant lequel la police de chargemellS
�-
n II l' A LAI S
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P il. 0
VEN C E.
2-77
~oit. tenir iieu de' preuve vis-à-\"is des aifureurs; il n'eH:
fournis d'en produire d'aurres qu'en tant que la premiere
lui' manquerait. Cependant il a encore communiqué les
lettres du ~ Capiraine , écrires tant avant qu'après le dé[aHre. La premiere du 26 Aoûr contenait le connoiifement des 36 bariques fucre chargées dans fan bord. La
feconde du 12 Seprembre fait menrion du bonhenr que
le Capitaine a eu de fauver ce chargement.
Ce n'eH palO tout: le naufrage arrive le 6 Septembre..
Dès le 7, le Capitaine Auffan fair fa déclararion au greffe
de l'Amirauré, & il arreHe à ferment qu'il a à bord 36
bariques de fucre. D'autre parr, le verbal d'accédit qui
f)lt fait par le Lieutenant de l'Amirauré & la relarion des
Experts conHarent que les 36 bariques one éré déchargées,
& qu'en conféquence le Vaiifeau s'eH remis à f1or.
N'imporre que le connoiifement ne fait pas ligné de
l'Ecrivain & du Pilote ;cetre formalité n'eft requife qu'à
l'égard du maîrre qui charge pour fan cO,mpte des marchandifes qu'il s'eft fait affilrer, & non pas vis-à-vis du
Capiraine qui charge pour corn pre des ineéreifés à la cargaifon ; dès qu'il n'y a point d'Ecrivain ni de Pilote à bord,
le Capiraine en fecond qui eft un Officier neurre, ligne le
connoiifemenr. C'eH ainli qu'en a ufé le Capitaine Auffan;
il a fait tout ce qu'il fallait pour rendre le connoiifement
aurhenrique.
IIeft certain & prouvé que d'abord après le naufrage;
le Capitaine s'occupa, du déchargement, & ne préfenra
fa requlre pour être aUrorifé à le faire que pour remplir
la forme. Il le pouvait & il le devait en conformiré de
'l'arr. 4'5 du rir. 6, liv> 3 de ,\'Ordonn'ance de la Marine,
qui porte qu'en cas de nalifrage Oll ichouement, faJ]ùré
pourra travailler ail recouvrement des ~lfets naufragés. Sur
quoi le Commenrateur obferve que non feulement l'affuré
peut faire rravailler au fauvement des effers, mais même
qu'il le doit en rigueur jufqu'à l'arrivée des Officiers de
l'Amirauré, li la chofe eft en fon pouvoir, comme s'il
eft f,:: le ~ayire, fur:- ~o~~ s'il en eft le Capitaine. 1!
�~78
1
0 U Il. N ~
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ajoure que l'ina&ion !ln p<lrejl QjlS f~Foit .r~;l!t4utclÏi~; ~
pourroit être imputée li délit.
''',
Dans les circol.l1tances oÙ ft! trouvpit le CllPi!aine
'AlI;ffan, il Y avait d'autant pJus .d.e né~~fliEé ge fJ3V9ill~L1
au fauvement des effets aY;Îl1t Facrivé.e Il;l,e§ pfflcieg; de
l'Amirauté, que le grand -'lombre .de.$,Naiffeayl' !tayfr",g.é~.
ne permetwit pas à ces QJJici@i"~ Jie ~ port€lr flJ.r to).lS
dans le même Lemps. li !J'dt gODC Ns .é;tonnAnç que I.e.
débarquement d,es 36 bariq.ue>5 /pere. ~i.t été tro,l/yé ClJgié-.
Femept confomm.é lors de J'...c.cédit lies Ofliciers de !'Ami-.
rauté & des Experts.
Il.en: juftifié 1°. que le ,chargeJl:iegt étQit de· ]6 bari-.
ques, .fuiv'anc le .cono.oj1fero'enJ & tes .auJr~s prepves mifes
au procès, & non pas feulement .de 23 fujy,l;lm 190 (aél:ure.,
2°. Que les fommes prifes à groll::e 'i,v,ej1tur.e, ajpji que
les 12000 liv. affiJrées" font moiti.é f\!-F cor,ps, & I;l10irié
fur faculrés. 30.. Q.lle le corps .d.u Yajffean il été invariablement .eihimé à 1)000 Iiv. pil'F la po~ce ,d'aJrurance. 4°.
que le rifque qu'ils ont pris fur eux, dare du jour &
heure que le Senault auroit ,colllUlencé de preJ;],dre charge.,
Or les pieces du procès pr.OJllv.,eUt que la ,vaile]Jr du Senault,
jointe à celle ,de la cargaif.o.o·, exc.ede vifjbJe,IPeQt l~. le
monranr' des fommes .pri(es, à 'la g,llo!fe·, &: k· mOlltant ,des
a{furances. D'ailleurs il ne ,faut paJ> jug?r .de ,li! vale.ur du.
chargemenr par ce qu'il étoit lors du naufrage, l)1ai s nOIl.
par ce .qu'jl aurait été·, !i le 'Seoault j~t lIrs~vé ]1 bail,
f;lUvement da.ns le Port de Marfeille.
Les Arrêœ inteFlrenus fur ~Ia JIYl=[ljoll de (av9ir li l'innavigabiliré du Vailfeau POllY!Û!.t aJ.ltillifer l''l.baQ~on des
facultés, ont ,jugé,qulun YaiJreau qe>l,e'i!u ÜllJavig~le par
quelque ,vice intérieqr, Pilr' véruHé C\ll ,pa.r quelillle autre
événe rn nt ,. autre que le ,c..as de .p,ri/.è _, 'OJmfrilge, bris,
échouement., Arrêt de .Ynince QU p.eJ'te ,<gtiere ..de$ effets
aŒJ.rés par -fortune de ,nrer, ne donnait pas lieu à J'ilbandon
des .fJcu!rés. ,Pourquoi cette, différence.? C~ell; ,pa(ce que
bars des cas prévus par .l'Ordonnance, rI n"è (peQt pas y
4l.'lojr Lieu à l'ahandon, mai~ [euIemen.~ ~u rég,al~ment des.
�'Du PA,LAIS DE PROVENCE.
.279
avaries. Dans le cas du bris ou du naufrage, qu'on fauve
peu ou beaucoup a~ marchandrtes, qu'elles foient plu~ ou
moins avariées, c'efr tant pis ou tant mieux pour les
affureurs. Quand l'article' 46 pafle dë la perte enriere des
effets affurés, c'efr que ce cas efr le llxieme de ceux
que le Légi!lateur. a marqué pour aurorifer le délaiffement,
& que toutes les fois qu'il y a lieu à le faire d'après cee
article, il doit l'être nbn d'une parcie, mais du total;
ce cas n'a rien de commun, & efr abfolument indépendant de tous les autres déja énumérés, lors defquels le
.délaifferiiem du corps du Vjl1ffeàu emporte, néceffairemene
l'abandon des facultés. n n'dl: pas néceffaire que les effets
affurés foient entiérement perdus. pour ,denner lieu à l'a'bandon; car l'0rdonnance [n'à pas 'exigé ,que -le ,naufrage fîJe
joint à la perre eritier'e • .des ~ffets; elle les a fé'parés
comme deux circonfrances difrinél:es qui autorifent ,l'une
& l'autre, & chacune en pa.rtioulier, le délaiffemeut, fans
-pouvoir le faire~ d'une partie, & retenir l'autr,e.
I! ne s'agit point ici d'uh· Vai1feau qui fait devenu innavigable par un événement non prévu par l'Ordonnance.
Si, fans être pris, naufragé, brifé, &c. quelque vice intérieur ne lui avait pas _permis de continuer fa route &
d'arriver à fa defrination, alors fan in navigabilité ne ~pro
-èédant pas a'un cas 'fortuit" èu ile ce -qu'art appelle, for'tune xie Imer" rie pourrait pas donner lieu à l'àband9n des
-facultés, parce que dans de pareilles circonfrances on dé.
bargue les marcnandifes, & on les charge (ur d'autres
Vaiffeaux, fauf de fair~.füpp;orter aux affureurs le montant
-des avaries, lorfque: les Imar"handi(es arrivent heureufement;
mais hors de là'i1~n'y a pa5·,moyen de s'écarter du vœu
de 1'0rdonharrce.
,
Par Arrêt du .13 Juillet 1780, rèndu au rapport de
Mr. le Confeiller de Saint - Marc, les Sentences furent
confirmées avec dépens. Ecrivant Mes. Verdollin & Ville<crofe.
!
�}OURNAL
J
:.
sc
ARRÊT
XXXXIII.
J
On ne'peut attaquer un aéle après Pavoir figné•
.LE
o
Corps des Marchands Orfevres de la ville de Mar..
. feille paye fes charges par c1alfe; il- s'alfemble toutes
les années dans le mois de Décembre pour en régler I:a
répartition. La maniere de procéder àJ ces impofitions eft
d'autant plus équitable, que tous les membres y font aptpellés;- chacun convient des avantages. qu?il retire de fon
état, de Con trava-il.& de fon indulhie. Le 17 Décembre
1779 011 procéda à cette taxe; le lieur Salony y fut taxé
300 liv. comme étant de la premiere c1alfe, & figna la
Délibération fa:ls proreftation.
Le: 27 Janvier' 1780 le fieu~ Salony préfenta une re;quête 11 la Cour, & demanda qu'en lui concédant aél:e de
l'oppolition gtl'il déclare former à. la Délibération & à
l'Arrêt d'homologation, elle Coit déclarée nulle & injufte
ail chef qui le taxe dans une c1alfe 'fl<lrtièuliere à la. Comme
de 300 liv.
"
Suivant lui', cette Délibération eft .extraordinaire, jrré..
guliere, injull:e ~ nulle; elle parcît être l'oubli des regles
& de la jull:ice; elle annonce un ouvrage infpiré par la
prévention; elle jette dans un incon'lénient dangereux, qui
ell: ce·lui d'une fixation a~bitr.aire., tandis que -tontes les
Loix' & l'ufage établiffent. une .maniere de procéder uni~
forme, une· cottiCation propo.rti'onneJlement. égale.
Ce Cercit ouvrir la porte aux plus grands abus, fi l'ml
pouvoit fQrmer autant de c1a1res qu'il y auroit d'individus
dans un. Corps; l'ouvrier qui trav.ailleroit moins,. cherchel'oit à Ce venger de. l'ouvrier qui auroit un travail :abondant
& lucratif, en lui faiCant fupporter la majeure partie de&
impofitions.
.
On répondoit que celui qui a acquieCcé à un aél:e, eft non
recevable
�D U
PAL AIS
.D E
PRO VEN C H.
2\h
recevable à l'attaquer. C'eH le fentiment de Ferrieres dans
fon Diél:ionnaire- de Droit & de Pratique. Il n'eH pas befoin que l'acquie[cement foit formel,. c'eH-à-dire que celui
qui conrent aux dirpofitions d'un aél:e,. dédare y acquiefcer;
il fuffit que l'acquiefcement réfulte de quelque f:lit ou de
quelque démarche. C'eH l'obfervation de Rhodier {ùr l'Ordonnance de 16th, tir. 27, art. S. Barthole établit fur la
Loi 26, if. de pignoribus & hipotheâs, que celui qui a· écrie
une obligation eH cenfé l'avoi~ approuYée. Guipape,. dans [a
quefl:. 364, examine le point de favoir. fi la partie qui a
comparu avec protefl:ation pardevant le Juge qui a [entellcié,.
eH recevable à appeller,. il décide pour l'affirmative•. Parla rairon des contraires,. la pa.rtie qui comparoÎt [ans pro-.
tefl:er, doit être non œcevable en fon appel,. parce qu'ell~
efi cen[ée avoir acquiefcé à la Sentence.
.
Ici le fieur Salony a comparu à lia délibération; il Y a coopéré lui-même, il n'a pas protefié ftlr la fixation de là taxe.,..
il a !igné. Peut_il y avoir un. acquiefcement plus formel?
La forme de l?impo!ition a été telle qu'elle alloit étépratiquée lors. des précédentes délibérations;_ on a pro-céM
. par voie' des fulfrages à l'impo!ition de chaque membre ;~
on a divifé les claires, & la fixation du lieur Salony n?a pas
.été plus arbitraire que celle des autres membres.
: Par Arrêt du J9 Juillet 1780, la délibération filt connl:lPée. Ecrivant Mes. Sellon & ~ .. '. ~
•
�•
JOURNAL
ARR Ê T
X XX X IV..
plzéritier gre.vé .ejl partie légitime pour ejler en jugement, &
l'on peut exécuter vis-a-vis de lui fur les biens fubflitués.
Le délai de dix jours fixé par le Réglement de la Cour pour
,déclarer recours d'un rapport d'ejlime dans un procès exécutorial , n'efl pas fimplement comminatoire.
E fieur Francois·Cofme Beau de la ville de Marfeille
met en 17)6 'fes biens en générale difcuffion. II y avoi.t
deux fortes de créanciers; les uns l'étoient du débiteur difcuffionné, les autres d'une fubfl:itution. Une Sen'ence du
Lieutenant porte qu'il fera vendu des biens fubllilUés jufqu'à
la concurrence des dettes, pour en employer le prix à leur
,acquittement. Sentence d'ordre, rapport d'eHimation générale. Le rapport eil: déclaré exécutoire par Ordonnance du
Juge du confentement de tous les créanciers. Il y a trois encheres qui produifent la délivrance de deux immeubles, fauf
huitaine, fur le pied des offres qui avoient été faites. La délivrance devient définitive; les créanciers plus privilégiés optent
.fur le prixde la vente. Il relloit fept créanciers non payés, dont
les créances s'élevoienr à Ja fomme de 12000 liv. Le fieur
Jofeph Veirier, Négociant, rapporte ceffion de ces créanciers; & ufant du droit qui lui avoit été cédé, il intervient
dans la Sentence d'ordre. Après avoir opté fur un immeuble, il recourt du rapport d'elllmation générale; une Ordonnance du Lieutenant l'admet au recours; les Experts recurfaires font une diminution fur la valeur qui avoit été
donnée à cet immeuble, & colloquent par le même rapport de recours le fieur Veirier pour le montant de fa
créance, en principal, intérêts & dépens fur une grande
partie du même immeuble.
Après la mort du fieur Beau, fon époufe, en qualité de
tutrice de fes enfans, offre au fieur Veirier, par un aél:e extra-
L
�D U
PAL AIS
D Il
PRO V Il NeE.
28)
judiciaire, le prix que les ceffions lui avoient cotlté, ave c
intérêts & dépens; elle l'interpelle, au bénéfice de cette
offre; de lui défemparer les biens fur lefquels il s'étoit colloqué. Sur le refus du lieur Veirier, la veuve Beau & le
curateur d'une de fes filles appellent de la Sentence"du Lieu-,
tenant de Marfeille, qui avait reçu le fieur Veirier à recourir'
du rapport d'eil:imation générale, demandent la ca1fation du
rapport de collocation; & dans le cas 011 ils feraient déclarés',
mal fondés, ils demandent à être reçus au rachat Harutaire.,
Par Arrêt ils furent déboutés des unes & des autres flns.Après l'Arrêt, la veuve Beau & le curateur déclarent recours fimp-le, tant envers le premier rapport dont le fieurVeirier avait recouru, que contre le fecon~. Par Sentence
du Lieutenant de Mar[eille du. 9 Juillet 1778', le recours'
eil: admis.
'
Les hoirs du fieur Veirier appellent de' cette Sentence. On,
difoit pour eux que ce ferait une erreur de craire que le titre qu~
la JuHice donne à un créancier, n'eH qu'un titre précaire &,
fujet à infl:abilité. Dans une difcuffion, on traite av.ec la,
J uil:ice elle-même, & le titre qu'elle donne eil: au moins.
aulli irréfragable que celùi que J'on peut tenir de la main, dUl
débiteur.
Or, fi le fieur Beau avait vendu, le domaine dont' s"agit
au fieur Veirier, il ne pourrait y former aucwne forte d~
regrè.s" à moins qu'il n'oppofât la lélion de droi{; de mêmele lieur Veirier ayant été colloqué par autorité de JuHic_e"
il ne doit pas dépendre des hoirs de venir arbitrairement:
renverfer fon 'titre au bénéfice d'une fi!l1ple déclaration de
recours. S'il, en était autrement, que!. ferait le créancier,
qui pourrait fe' flatter d'être tranquille & affuré dans fa 1'0[fellion? Quel eH celui qui ayant acquis de la JuHice ellemême, pourrait regarder comme, à lui propre le bien que-Iâ-l
JuHice lui a défemparé ?
EH-on. recevable ~ anéantir par la voie du recours fimp~
la même collocation que ron n'a pu. anéantir par la voie du,
rachat fiatutaire? On foutient que non, parce qu'e.o fuiv3nt:
le, procès el{écutorial, la colloc.ation ne peut qu?être défi.-N n. 2..
�2.84.
Jou il. N A L · '
•
nirive. Dès-lors elle n'dl: plus fujene au recours1 quana ce
Fnême recours n'a pas été déclaré auparavant & dans les
dix jours. Il eft injufte de vouloir que la même Loi qui
Gblige le c.éancier à [e colloquer & à prendre des fonds
au lieu & plJce de l'argent qui lui eH dü, tienne ce créancier pendant trente ans fous .le joug du recours: On peut
voir à ce fujet les articles 6 & 7 'du titre du procès exécutorial du Réglement de la Cour. Le premier porte que
fi le débiteur veut recourir de l'eftimation ou racheter les
biens, il pourra le faire dans les dix jours de la lignification du rapport, mais que ce temps paifé, il fera procédé
aux inquants ,. à la délivrance & à la collocation, fauf un
nouveau délai de dix jours pour rédimer les biens [aifis. Le
[econd, que le débiteur qui déclare recours, le fera vuider
dans les dix jours.
Delà, fi le recours n'el! pas déclaré ou vuidé dans le
délai fixé par le Réglement, il n'efl: plus recevable. Ici dixhuit ans Je [ont écoulés depuis la collocation, & les hoirs
du fieur Beau ollt été déboutés dans l'intervalle du rachat
!l:atutaire.
Il efl: iocontefl:ahle en droit ( ajoutoient les hoirs Vei-'
riel' ) que. les jugemens intervenus contre le grevé [ont exé.
cutoires contre le fubfl:itué, à moins qu'ils ne [oient par
défaut 011 le fruit de la col1ufion. ( Fufarius, de fuhflitut. ;'
quefi. 62.2.; Peregrinus, art. S3" & Cochin. ) Or, fi le ju.·
gement rendu contre le grevé efl: exécutoire contre le fub[.
rimé, l'exécution du même jugement dirigée contre le grevé
ne peut être qu'obligatoire contre le [ub{l:icué. Il [eroit ab.
fiJrde que le .grevé ayant toutes les aél:io-ns de l'hoirie, l'on
pôt rapporter un jugement contre lui, & qu'on ne püt pas
l'exécuter fur les biens [ubfiitués; le préjudice, s'il en exifte
quelqu'un, l'élide dans le jugement, & non dans l'exécution.
Le' même grevé qui efl: partie légitime pour [ubir le juge-.
ment, ne peut être que partie lègitime pour en [ubir l'exécmion, autrement la condition du créancier [eroit empirée
par le fait du fondateur du fideicommis; on ne pourrait pas
pas être payé avec sûreté d'Une créance [ur des biens fidéi.,
commiifaires.
�DU
1> A LAI S
DE
PRO VEN C E.
~8)'
Les enfans ùu fieur Beau éraient encore dans le neant
Pépoque de la collocation. La [ubf!:itution en faveur de [es
enfans érait donc très-incertaine. Comment pouvoir imaginer,
de faire nommer de curateur à des enfans qui n'exilloient
pas encore? Ce n'étoit pas même le cas de la nomination
d'un curateur, parce que le pere ef!: le tuteur de tous [es enfans, celui qui [eul en peut exercer tous les droits.
On répondoit que le recours n'étoit pas exercé par le
débiteur di[cu/Iionné ni par [es héritiers, mais par des héritiers [ubf!:itués à raifon du bien dépendant de la fubf!:itution contre un créancier de la [ubf!:irution, il ef!: vrai, mais
à la collocation duquel il n'y a eu lieu que parce que l'héritier grevé ef!: tombé en difcu/Iion. Cette collocation rendue
néceifaire par la mife en difcu/Iion de l'héritier grevé, étoit
un préjudice qu'il faifoit à la [ubfl:itution.
L'article S du tit. 2 de l'Ordonnance des fubf!:irutions'
veut qu'en cas que le premier fubf!:itué foit fous la puif-,
fance paternelle dans les pays où elle a lieu, & que le pere
foit chargé de fubf!:itution envers lui, il lui foit nommé un
tliteur ou curateur à l'effet de proceder à l'inventaire, &
que fi le premier fubf!:itué n'ef!: point encore né, il fera
nommé un curateur à la fobfl:itution , qui fera appellé à l'in~
J
vel1t<fire~
Cet atticle ef!: conforme. aux principes du droit, (uivant
lefquels le pere ceife d'être le légitime défenfeur de fon fils
toures les fois que leurs intérêts different. Dans ces cas, fi
le fils ef!: majeur, il efi: aut~rifé par la Juf!:ice; & s'il el!:
mineur ou pupille, il ef!: pourvu d'un curateur ad hune ac1um;
le pere ne peut autorifer fes enfans pour lui-même ou contre
lui-même; nemo poteJl ejJe auaor in rem fuam.
J
Ici le pere, héritier grevé, érait difcu/Iionné ; les enfans,
comme héritiers fubftirués, avoient donc un intérêt contraire'
au fien. Ne s'agiifoit-il pas de veiller à la confervation de
la fubfl:itution qui étoit menacée par la difcuffion? Et celuilà pouvoit-il la défendre, qui l'avoit expofée au péril? Il
&oit bien plus iméreffant qu'elle eût en ce cas un curateur,
-
•
�~6
JOURN~t
que lorfqu'il n'efr quefrion que du flmple inventaire pour re~
quel l'Ordonnance prefcrit la nomination & la préfence d'ul1
curateur à la fubfritution.
D'ailleurs l'appel; filivant le droit, a trente ans de durée, à
moins que les parties n'aient formellement acquiefcé à la Senten.ce. S'il ne faut pas que. la partie renonce expreffément à l'appel, il faut au moins qu'il y ait de fa part quelque fait, quelque
dé.marche qui fuppofe l'approbation donnée au jugement.
Dans le cas de la vente fubhajla, l'acquéreur efr expofé
à en être dépouillé pendant dix ans. pour raifon de la léflon
d'outre-moitié, & même s'il s'agit du bien d'un pupille ou
d'un mineur, pou.r une moindTe léGon & pendant un plus
long temps. Dans le cas du retranchement pro plus dehito.,
le .créancier colloqué eH: expofé pendant trente ans à rendre
une parrie de la collocation. Dans le cas du recours en droie,
.il efl: exp0le pendant trente ans à refiituer la collocation
entiere. Dans, le cas de l'aél:ion révocatoire, il efi expofé
pendant trente ~ns à être dépouillé par un créancier antérieur. L'aél:i'on en droit d'offrir contre· le . créancier colloqué a également trente ans de durée en faveur QU créancier perdant.
En vain dans tous ces cas on voudroit abréger Je temps1.
par la raifon que ce long temps tient les biens & les fa-.
milles dans une trop longue incertitude. Pourquoi lui.refufer
le recours pendan.t trente ans?Le recours efr comparé J l'appeh il efr, comme l'appel,.
reçu pendant trente ans. Telle eH la regle générale; il fau-.
droit fuppofer une exception à cette regle, lorfqu'il s'agit'
d'un rapport- d'efiimation fait pour· fervir à une collocation ,.
& lorfqu'il a. été fuivi de la collocation.
D'ailleurs le rapport dOQt il s'agit n'a pas été flgnifié avant·
les dix jours; les Experts, par le même rapport par lequel
ils firent l'efiimation , procéderent à la collocation una- eodemque colltextu. Le débiteur ne conQut l'efrimation qu'en
connoi/fant la collocation. Le RégJement de 1678, tit. des
inlJances générales, art. 2,0 & 2,.1, yeut 'lu'après 'lite les Ex,..
�:1.87
pèrts auront remis leur rap.port au Greffe, le Procureur o.d
lites en prenne extrait, pour en donner copie à deux des
Procureurs convenus ou plus anciens, & que huitaine après
avoir donné copie du rapport, il en demande l'exécution à
-l'audience. Ces formalités n'ont pas été remplies; on n'a pas
donc procédé à la forme du procès exécutorial.
Enfin ( difoient les intimés) le délai de dix jours porté
'par le Réglement de la Cour n'ell: que comminatoire; c'eIl:
dans le cas feulement où le débiteur a déclaré recours
dans les dix jours, & a négligé de le faire vuider dans autres
dix jours après fa déclaration, que le Réglement dit qu'il
fera paffé outre à la collocation, nonobll:ant la déclaration
du recours. Dans ce cas, comme dans celui où le débiteur
n'a pas recouru dans les dix jours, l'ufage eH de faire prononcer la déchéance; le Réglement ne la prononce point;
& n'y ayal\t point de déchéance encourue de plein droit,
il faut néceffairement qu'elle foit prononcée par le Juge.
Il ell: également de principe que ni le recours en droit,
ni la demande en caffation, ne forment obll:acle au recours
fimple. Les deux aél:ions font totalement différentes; l'une
n'exclut pas l'autre; il en: même ·décidé que pendant qu'on
exerce la premiere, la prefcription de l'autre ne court pas.
Decormis, tom. 2, col. 1537.
Par Arrêt du 20 Juillet 1780, au rapport de Mr. le Confeiller de Saint-Jean, la Sentence fut réformée, avec dépens.
Ecrivant Mes. Pafcalis & Roman Tribu.tiis.
DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
/
ARR Ê T
X X X XV.
On ne peut acquérir la fervitude de paJJage que par un temps
immémorial, & la pr~uve de la poffiffion ancimne indique
la preuve de la poffiffion immémoriale.
L
E
lIMai 1775, Aman Tamifier du lieu de Gordes
dénon~a le -fils ~e Louis Silveftre., Tanneur, qui trave~~
�d8
JO~RNAi
fo!t fa terre en conduifanc deux mulets, &. y [ai fait un dH!~
mm nouveau.
Silveftre forma oppoIition à la dénonce, & foutine que
le patrage exifloit lors de la vente patrée à Tamilief;., & laps
de la dénonce, tel qll'il avait été dans les temps les plus
reculés; il offrait de le prouver. Tamilier appella Pierre
Roque fan vendeur en garantie; celui-ci confentit à la preuve
immémoriale;, mais Silveftre reduiJit fa. potreffio n à la pre~
cription trenrenaire, qui fut conceftée.
Le Juge de. Gordes ordonna que Silveftre' prouverait & vé~
rifieroit par toute fane & maniere de preuve dans la quinzaine
précifémem, que dans la terre & pr-ed vendus par les freres
Roque à Aman T"milier, & dans laquelte il, avait été dénoncé, il Y avait anciennement fur le· bord. de la terre &
dans le pred un viol. ou fentier frayé depuis le chemin public; que ce viol avait exiflé avant & après la vente & la
dénonce, & que Silveftre & fes auteurs avaient anciennement patré & repatré par le viol ou fentier avec bêtes char'gées ou· non chargées, pour aller à. leur propriété.
L'enquête fllt faite; la poffeffion trentenaire fut prouvée.
Silveftre préfenta une requête incidente, par laquelle en dédatant Tamilier non recevable & mal. fondé dans fa. dénonce, il demanda à être mainrenu dans le droit de paffage, & que le viol ferait rétabli en fan. premier état.
Ces fins fu.rent adjugées par Sentence du I3 Juillet l 779~
Appel de la parr.· de Tamifier, comme pauvre, pardevanc la
Cour.
'
On difoit pour lui que rout interlocutoire préjuge ;' une Epis
que les parcies ont acquiefcé à un jugement, il ne leur ell:,
plus permis de,revenir fur. leur-s pas, in judiciis 'luafi con....
trahitur. La Sentence interlocutoire, en prefcrivant la preuve
de la potre/Iion ancienne., a-t-elle voulu incl'iquer, la prercription de t.rente anné.es, ou celle d'an temps immémo..,
rial?
'
Pour fixer ~ tel'me de la prefcription en matiere de fer-'
vjrudes, il faut en difiinguer les clatres. Les ferv.itLldes fè
4i.vjfent e!l continljes & en difcominues. Les prern·ieres unI:
un.
�DU
P ALAIS DI! P RD V ENCl!.
2.89
un fait Hable & permanent, tel qu'une fenêtre, un Hillicide, une enfeigne, &c. Il y a une continuité d'exiHence,
elle parolt à chaque inHant aux yeux de celui qui la fouffre.
Cerre efpece de fervitude fe prefcrit par le laps de trente
ans.
Les fervitudes difcontinues font celles qui fuppofent une
interruption d'exercice, & qui n'ont pas une durée conftante, invariable & permanente, telles que le paffage [ur un
chemin, le bûchérage dans une forêt, & autres de cerre
nature. Serres en [es In.Jlitutes au droit Français, liv. 2., tir.
3, pag. 143, & Dunod en fon traité des prefcriptions, pag.
19 l , arreHent que pour acquérir une [ervitude di[continue,
il fàut une poffeffion immémoriale; il eH juHe de mettre
une différence dans la prefcription , puifqu'il y'en a une dans
l'aélion.
La poffeffion ancienne dont parle la Sentence interlocutoire, poffijjio vetus, veZ tempus antiquum, eH celle qui fe
'puife dans la mémoire la ,plus reculée de l'homme: [eptima
fuit, interpretum [entelltia, tempus centum annorum effi anti<]uum, difent Menoch, de arhitr. Judie. lib. 2., cent. l , pag.
110; Mafcardus, de prohationihus, concluf. ~ 47; Cujas, de
[ervitutihus prœd. & urhan.; Dumoulin , tit. des fiefs, §. 8,
vO. dénomhrement, pag. 338 & fuiv.; Bellus, conf. l , nQ. 62.
& 63 ; Gamma, décif. 88, pag. 132.; Sabellus [umm. trac?,
tom. l , pag. 1 2. ~ , §. antiquitas ; Julien en fon Code, titre de
Za prefcription, pag, 1, litt. P.; & le nouveau Commentateur [ur le Statut, tom. 2., pag. ~ 48, qui rapporte un Arrêt
du 30 Avril 17~o, qui fournit Claire Bonaffe du lieu du
Bauffet à la preuve de la polfeffion immémoriale.
Mr. de Saint-Jean, déciL 7'" nO. 8, & l'Auteur de l'inftruélion fur les conventions, pag. 343, cerrifient que pour
remplir la preuve immémoriale, le témoin doit avoir au
moins cinquante-quatre ans, doit avoir vu lui-même la poffeffion depuis quarante ans, doit avoir oui dire à [es anciens
qu'on l'avait toujours vu ainli, & que les uns & les autres.
n'ont rien vu de contraire ni entendu; ita [eMit Dunod eG
(on traité des prefcriptions , pag. 2. 14 & 2. 1).
OQ
�~o
JOURNAL
On répondait pour Silvel!:re, qu'il devoit lui fuflire de
prouver l'ancienneté du chemin & du paffage, ce qui dans
ces circonfiances ne pouvait pas excéder le terme de
trente _ans; & la preuve (j'avoir paffé confiammenr & pe11'dant trente ans par le fonds de Roque, fans qu'il apparût
qu'on eût jamais paffé ailleurs, fans mêmè qu'il conHât
qu'il y eût poffibilité de paffer autre parr, formoit une
preuve bien fuffifante pour déterminer la poffeffion. Il citait
Bomy dans fon Recueil' de nos coutumes, ch. 9, qui dit
que fi, quelqu'un a une poJ{ejJion clo[e, en forte CJu'il n'ait
aucun chemin pour y aller, il faut CJue le Juge accede fur
les lieux avec Experts & [apiteurs, tous les propriétaires des
poJ{ejJions voi/ines appellés, & étant fur les lieux, le Juge
Je doit mettre en devoir & faire tout fon pojJihle de [avoir
& apprendre tant par injlrumens CJue [apiteurs, où anciennement était le chemin par !eCJuel On allait a la poJ{eJlion clo[e,
G' l'ayant appris, il le doit confirmer par Sentence, & ordonner que le demandeur-ira & viendra en [a pqffeJlion par
un tel chemin, [entier ou viol par lequel anciennement [es
,aqteurs foulaient paJ{er, avec inhibitions au maître de la
poJ{ejJion [ervile de le trouhler.
Or (difoit Silvel!:re) on ne- trouve dans cette procé.
dure àucun des caraél:eres de, la preuve de la poffeffion
immémoriale; ce font des voifins que l'on appelle devant
le Juge pour indiquer le chemin dont on ufoit autrefois.
II fuffit qu'ils dépofent d'avoir vu paffer autrefois le propriétaire par tel ou tel endroit, a6n que le Juge foit autarifé à ,lui permettre de continuer de prendre le même
chemin. Ces fortes de fervitudes, que la nature des lieux
& la néceffité de l'exploitation établilfent, font préfumées
auffi anciennes que le fonds lui-même, & porrent par con- .
féquent toujours avec elles la preuve de la plus longue
poffeffion.
Où el!: d'ailleurs la Loi qui ait fournis celui qui n'a
qu'un chemin pour l'exploitation de fon fonds, 'à rapporter
la preuve. de la poffeffion immémoriale? N'efi-il pas évident qu'alors la preuve de fa poffeffion 'remonte néceffai,
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
~9I
Tement à l'époque où ce fonds a re~u un maître? Cette
preuve ré[ulre de l'évidence du fait, & eil: fupérieure à
toutes les autres.
A. la bonne heure que celui qui veut exercer une [ervitude [ur [on voian pour fa plus grande commodité, fait
foumis rÎgôureufemenr à cette preuve, parce qu'il n'a pour
lui ni préfomption de droit, ni raifon de néceffité, &
qu'on peut croire qu'il ne cherche qu'à convertir en obligation ce qui. ne. fut dans [on principe qu'un aél:e de complaifance ou de familiarité. Mais il en eH autrement de
celui qui n'a abfolumenr que ce chemin pour· aller & venir
de fa propriété, dont le paffit:e eH un acceifoire néce[faire de fon fonds, & qui ne paife jamais [ans manifeiler
à [on voifin qu'il ure de [on droit, & qu'il'entend en jouir
comme d'une chofe qui eil inféparable de fon domaine.·
La diilinél:ion de celui qui n'a, qu'un chemin, & celui
qui plaide pour en avoir un plus commbde, lè trouve
établie par Lauriere en fon Traité des fervitudes. réelles,
liv. 3 , ch. 7. Cet Aureur dit que dans les coutumes les
moins favorables aux fervieudes, & où l'on a admis la maxime, qu'il n'en eil: dû .aucune fans titre" on excepte néanmoins celui qui n'a qu'un chemin pour- aoolltir à fan dama ine , & on le lui conferve ·à la faveur de la preuve
qu'il. y pa1Jôit depuis, trente· ans.. Cet· Auteur rapporte le
fenriment de Pocquet de la Livoniere- en fes· obfervations
fur la coueume d'Anjou.
11 fam un chemin" le roilin ne peut pas le refufer, &
une poifeffion trentenaire eil fans com·redit bien ·fuffifante
pour déterminer l'endroit oll le paifage a été fixé. Il
ne peut donc plus être queHion que de l'indemnité que
le poifeifeur du fonds fervile a droit de prétendre, &
après trente ans- toute réclamation à cet égard doit être
interdite; c'eil aina que cela fut jugé par Arrêt du Parlement d~ Touloufe du 21 Mai 1723, rapporté dans le:
Journal du Palais de ce Parlement, rom. 4, pag. 2 S3.
A l'appui de cette confidération fi pujifante en droit, que:
le domaine de Silveftre eft cen[e avoir eu un chemin du moOQ2,
�192
Jou RNA L
ment qû'i[ a reçu un maÎrre, l'inrimé joignait l'énonciarion
de l'aél:e de vence qui fit encrer, il Y a foixance & dix ans,
cet immeuble dans fa famille, avec fes entrées & iffues.
BaŒ:t, tom. 1, liv. '1-, ch. 19, dit que pour prejèrire la
fervÉlude, pecaris pajèendi, i[ fàut qu'il y air prehiprion
tanci /emporis cujus in concrarium non fil m:!moria; mais il
ajoute que s'il y a un titre, & qu'il ne foir quellion que
de l'inrerprérarion, il fuffit de la prefcription de trenre
ans, ainli qu'i[ fut jugé le 6 Juillet 1639 en [a caufe des
Confuls de la Fare, cancre ceux de Poligny, fuivant la.
doél:rine de Guipape, qu: '573. Mr. Julien fur le Sratut,
tom. 2, pag. 547, établir la même doél:rine, en ajoutant
qu'elle fut jullifiée par un Arrêt de la Chambre des Eaux
& Forêrs du 13 Août 17'56, au rapport de Mr. de Beauval,
en faveur de l'Econome des Charrreux de la Verne, courre
la Communauré d'Hieres, par lequel les Charrreux furent
reçus à vérifier que depuis dix & même rrence ans ils
avoient envoyé leur bérail dans les rerres galles de la
Communauté.
. Ainli (courinuoit Si[vellre) en admertant que la preuve
ancienne doit s'expliquer par la matiere qui en fait l'objet,
la preuve trenrenaire feroit toujours fuffifanre, parce qu'il
s'agit ici d'une fervirude réfulraure de la narure du lieu,
de la néceffiré de l'exploitation & de l'évidence du fait
qui en fait remonter l'origine à foixanre & dix ans.
Par Arrêt du 20 Juillet 1780, au rapport de Mr. le
Confei!ler de Franc-Taffi, la Sentence des Officiers de
Gordes fut réformée; Silvefl:re fut condamné à la peine
du han, & il fut dit· n'y avoir lieu à prononcer fur la
garantie; Silveftre fut condamné aux dépens envers toutes
les parties.
�DU
PALAU
ARRÊT
DE
PlfOVENCP::
~93
XXXXVI.
Procureur fOl/dé peut être inflitué héritier.
L
E teltament de Jean - Baprilte Blanc de la ville de
Riez fut arraqué par les héritiers ao inteflat, 'qui foutenoiene que Pierre Feriaud, Procureur fondé du tellateur, n'avait pu être inltitué héririer. Mais on répondait
pour Feriaud, que la prérendue incapacité de l'héritier,
fondée fur ce qu'il avoir la procuration générale du tefiateur, était une chirnere. Quelque exrenlion qu'on ait donné
aux Ordonnances de 1'>39 & Q49, qui n'one eU en vue
que les difpoIirions faites en faveur des adminifirateurs
judiciaires, parce qu'ils exercent une autorité légale fur la
perfonne & fur les biens de "ceux qu'ils adrninillrene,. il
elt cerrain qu'on n'a jamais appliqué ces Ordonnances aux
{impIes mandataires & aurres adrninifirateurs de cette efpece, parce qu'ils font fubordonnés à la volonté & au
caprice de leurs mandants. C'efi ainli que s'explique Denifarr, vo. incapahles, n. 13.
II n'elt pas poffible que l'adminiltration volontaire qu'exer~oit Feriaud, qui ne pouvait avoir d'autre principe qu'une
confiance libre & méritée, ait opéré l'incapaciré pronon.cée par les Ordonnances. Ce ferait brifer les liens de la
[ociété parmi 'Ies hommes, & les mettre dans l'irnpoffibilité de [e prêter de mutuels fecours. D'ailleurs avant que
Jean-Baptilte Blanc 'chàrgetit Feriaud de fa procuration,
il avait déja fait deux teltamens en fa faveur, ce qui
ptouve que cette procuration n'avait nullement influé fur
[es difpolitions.
.
Par Arrêt du 2.I Juillet 1780, au rapport de Mr. le
Confeiller de Fabry Borrily, le tefiament fut confirmé.
Ecrivant Mes. Pochet & .......
�tE
ARR Ê T
X X X X V U.
L'in,xécution d'une cOllventiOTl< de la part de rune des parties n'en opere pas la réfolutiol! de droit; il faut recourir
au Juge pour hl faire prononcer.
Lës claufes pénales & dfolatoires infèrées dans l'es conventions
ne font jamais réputées que comminatoires, G' la pm:tie
. qui n'a point rempli [cs engagllmens 1l toujours reçue à.
purger la demeure dans tel délai que le Juge trouve Don
de lui accorder.
La partie qui fe laijJè condamner par défaut ,.doit toujours
les dépens du défaut, quand même la Sentence viendroit à.
être réformée en caufe d'appel.
l,
'
Ofeph Genfolin , Menuifter 'de· Marfeill~, & Louis Ale. zard, Tilferand de la même ville, s'obligerent refpectivern;ent, favoir, Genfolin de faire une garde-robe bois çe
n,oyer à Alezard , & celui-ci de faire une, piece de.•toile
à Genfolin; & il fut convenu. verb~lement entr'eu~ q~e le,
l'rix d'un ouvrage feroit compenfé avec celui de l'autre,
fauf la plus-value à qui de droit.'
."
La gard.e~robe faite" Genfolin la fit porter chez Alezard ,.
qui .lui deman,da un, p,rix exorbitant de fa toile. Ils ne,
p.urent wmber d',accord. Gepfolin. o.ffrit de 'prenqre des,
amiables Efrimateurs; Alezard. vou)p~ l'efiimeç lqi-même à
fa fan,tai1ie.. Genfol~n le $t, affigner par exploit, du pre!tlier
Oél:obre 17.79, en condamnation de, la~ fomme de 18o, liv~
du montant de la garde-robe, prix d,'abord conven,u entre
les parcies, "& auquel elle avoit été évaluée p.ar pn premier'
rapport du 28 Septembre.
'!
l' ri'
Sur, cette demande 'il y eut.,des ,réponres &, cont~e-ré-,
ponfes refpeél:ives, dans lefquelles Genfolin obferva que le
prix de la garde-robe étoit jufie, & ne pouvoit être contefié; qu'à l'égard de la piece de toile, l'Adverfaire n'ayant
J
�DU
pas
PALAIS
DE
PROVENCE.
2.9~
voulu la .faire el!:imer dans. le temps, puifqu'il l'avoit
faite retirer de la chambre de police où ,elle a~oir d'abord
été portée, il n'érait plus fans doute dans l'intention d'en
compenfer le prix avec celui de la garde-robe, & qu'il
ne pouvoit plus l'obliger à s'en charger aujourd'hui.
Genfqlin confentit cependant, pqur éviter contifJation , à
'ce que tant la piece de toile que la garde - r<>be fulfent
ell:imées par Experts, pour retirér fur.le pied de l'ell:imation chacune des parties l'objet 'la concernant, fauf de
le régler entr'elles fur le plus ou le moins de valeur.
, .II fut procédé en conféquence à un rapport d't;l!:imation.
Genfolin qui avoit envie d'aller avant, tient un aél:e aux
Efl:ilIlareurs de la garde-robe. pour les obl'ige,r à n,mettre
leur rapport; ceux-ci déclarent être divifés en opinions, &
demandent d'être. autoriCés à prendre un tiers-Expert.
. Enfin le rapport el!: fait par trois MenuiGers, qui évaluent
la g'lrde-robe à 173 .I!;;'. Il falloit auffi el!:imer la piece
<I;e toil~; des Exper.ts Ti1rerands "& convenus par les parties te préfentent à '~et effet ch 2: Alezard; celui~'ci répond
qu'il n'a point de' toile à fairê éjiimèr.
.
Genfolin fait lignifier à Alezard le rapport concernant
la garde - robe, la déclaration }es . Experts!. qui devoient
efl:imer la toile';' il lui iôrip'e
Jf~Pf.~ndre ,les
pqurCuÎtes du proc~s, en r,eq,ui{;tn~n[~<: dt;.m~~~te à. 173 }lV.,
& le .10 Février 1780 il, imervient;. Sentence, par defaut
rendue par le Lieutenal1t-Civiï de Mar[e'in~, qui" accorde
à Genfolin les fins' de fi' d:émande- avéc. d~pens. .
Alezard appelle de cette Sentence,' & préfente une requête incidente par:devant la Cour, par l\lqùeÎle il demande
la compenCation du prix de lai piece de toi e avec celui
de la garde-robe, &:' tous les iiépens. j
On difoit pour Alezard, que les parties ayant tranGgé
fur la demande introduite pardevant le Lieutenant, &
étant convenu què la'garde-robe ferolt écJ;1an'gée contre
la piec~ de raile, ~ qu'ils s'en rapporteroient à la décifion des Experts, Genfolin n'avoit, pas pu, au préjudice
~e cet ·accor.d) obte,nil: ime Senfence {lat défaut con~re
' :-qélif :ra-'
..
�Joli il: N À i:
, .
Alezard, & fous ce premier point de vue il ènvifageoit la gén:!
. rence comme ahfolument nulle. Elle eft encore inju!l:e;
difoit-il, en ce qu'elle condamne Alezard à payer une
fomme d'argent à Genfolin, tandis que fur le pied de leurs
accords, qui e!l: la loi felon laquel\e il faut les juger, ce
dernier ne peut prétendre qu'une piece de toile en paiement de fa garde-robe.
Toutes les fois que' les parties litigantes ont tranfigé
fur leurs conteftatiolls, ou ont compromis l'eurs différens
à f:!es Arbitres ou à des Experts, le Juge qui en étoit
faifi [e trouve entiérement dépou.illé, & ne peut plu.s
juger'
f
' r •
les ~cèords 'convenus entre Al'eza·rd' &' Genfotin' portent précifément fur ces deux objets. En confentant· à
l'efrimation de' la piece de toile, &' en l'acceptant en
échange de la garde-robe,' Genfolin s'étoit départi de la
dem'ilnde par lui formée devant le Lieutenant de Marfeill~,
puifqu'elle confi!l:oit 9alls- lé paiement en argent du prix
de cette gardé-robe. En sIen rapportant 1'11.11 & l'autre à fa
décifi'on des Exp~rts 1 ils 'les ~voient choifi's pour Arhitr~s
de leurs conteltatJOns.. q'enfohn n'a donc pas pu, au mepris de ces accords, furprendre une Sentence' par défaut
du Lieutenant He Marfeille;lqùi n'étoit plus Juge de leurs
différents', Jvèé'id'aurànt p-IVs-,3de' raif6n qlle ces accords
étoient 'déja exécutés en' partie; puifque lés Experts avoient
déja procédé- à Peftimation' de la garde-l'ohe; & par une
fuite néceffaire ce,tte Sente'o.ce en donc tout à la fois
nulle & injull:e.
' ! ' ,
,
En vain pour colorer Ta nullité & l'inJultice' qui réful:"
tene de ce jugement, Genfolin prétend qu'il' a pu réfoudre
des accords figu'Ilamatiques, & fe délier des engagemens
par h,i contraél'és, attendu qu'Alezard s'étoit oppofé à
l'e!l:imation de hl' piece de toile. Ce fyftême manque en
fait & en, d r o i t . '
1
En fait, il eft faux qu'Alezard a-it jamais refufé aux
Experts l'ifferands de leur montrér' la' piece de: toile; la
dédaratioD des' deux Experts dom 'Gènfolin: excipe ne mé..,
rite
2.96
0;
�DU
PAL A l S
D Il
PRO V Il Nell.
'2-97
rite aucune foi en jultice; 1°. en ce que toas les Experts
n'attellent point unanimement ce prétendu refus de la part
d'Alezard; 2°. en ce que les Experts certificateurs fone
figurer dans leurs déclarations BruneI l'un d'eux, & lui font
atteO:er ce prétendu refus, lors même que celui-ci n'a pas
feulement vu cette déclaration ~ & qu'il ne l'a pas {ignée
quoiqu'il fache écrire.
En droit, fallût-il fuppofer contre la vérité même ce
prétendu refl15 de la part d'Alezard, Genfolin n'auroit jamais pu fe délier lui-même de [es engagemens; il devoir
reCOl1l ir à l'aurorité du Juge; fur ce point du procès
Alezard a pour lui la Loi, les principes & la doarine
des Auteurs.
L'obligation qui réfutte d'un contrat e{l; un lien de droit
qui ne peut être détruit que par l'autorité de la Juflice,
lorfque l'une des parties refufe d'en confentir l'exécmion.
C'eO: la difpofition de la Loi premiere, Cod. de re[c-ind.
vend. de la Loi 9 au rir. fol. matr. Sille auc70ritate , dit,
cette Loi, competelltis Judiâs nul/am habes facultatem. Et
c'ell le fentiment de Domat dans fon Traité des Loix €iviles, liv. t , tit. 2, fea. l, n. 1'5. Ce point de droit efi
fi certain, qu'il eH encore de maxime que les claufes pénales & réfolutoires inJeré.es d'lOS les convemions, pout"
qu'elles foiem mieux exécutées, ne difpenfel1t pas de recourir à l'autorité du Juge; elles ne fone jamais réputées'
que comminatoires, & la partie qui n'a point rempli fes
engagemens, e!l: toujours re~ue à purger la demeure dans
tel délai que le Juge trouve bon de lui accorder: admittitur morœ purgatio celeri prœjlatione. Telle ell encorlt la
dilpofition de la L9i demieFe, ,ff. de rev. credo de la Lei 8,
fi quis cautionibus in judicio .fzjlendi, & de la Loi 73, §. 2.de verb. oDlig. Bartole fur la derniere Loi citée s'explique
en ces termes ; ubi ejl dies & pœna, admiuitur flurga!Ïi»
morœ intra mddicum tempus. Serres aux InHit. §. '5 de empt•.
& 'vend. Hourar;" fur le même §. Cate1an, liv. '5, ch. 10;;
Mr. de Montvallon dans fon epitome juris, .n. 'UT!, Coll!;;
dq même avis,
~
0'
�'~98
Jou RNA n
En fuppofant qu'Alezard .eût refùfé de faire efrirner la
piece de toile, Genfolin n'auroit jamais été en droit de
réfilier de fon autorité privée les accords convenus; dans
ce cas il auroit fallu me.ttre en demeure Alezard, le comminer, lui déclarer que faure par lui de purger fa demeure
dans tel temps, c'efl:-à-dire de faire procéder au rapport
d'efl:imation, les accords convenus feroient & demeureroient de nul effet.
C'efl: en regardant ce jugement comme nul, qu'Alezard
a conclu en caufe d'appel à l'adjudication des dépens de
premiere inf!:ance, quoique ce jugement ait été rendu pat
défaut; il ne faut pas confondre la réformation avec la
caffatibn d'un Jugement; les dépens du défaut fobt toujours dus par le défaillant, quoiqu'il gagne fan procès pardevant la Cour, quand la Sentence efl feulement réformée; mais quand elle eft déclarée nulle, l'appellant ne
doit point les dépens du défaut.
Enfin la requête incidetJte & fublidiaire d'Alezard el1:
de t'etHe juflice; fi la Sentence n'éroit point caffée comme
nulle, il faudrait du - moins qu'elle fût réformée comme
injufte.
Il ne feroit ni jufle ni équitable d'obliger Alezard de
payer en argent le prix d'une garde-robe qu'il n'a commandée à Genfolin que fous la condition que celui-ci accepterait en échange une piec.e de toile. Si Alezard doit
demeurer chargé de la garde-robe, ne faut-il pas que Genfolin Ce charge de la piece de toile? La réfolution des
.conventions dans les cas oil elle peur a.voir lieu, ef!: toujours générale ; elles ne peuvent pas fubfif!:er dans une
panie, & être réfolues dans l'autre: or par le premier
accord fait entre les panies, & en force duquel Genfolin
le pourvut pardevanr le Lieutenant de Marfeille, il fut
convenu que le prix d'un ouvrage feroit compenfé avec
celui de l'autre. Genfolin ne prétend pas que cet accord
foit entiérement réfolu, puifqu'il ne demande pas que la
garde':robe lui fait tendue. Il faut donc néceffairement que
le prix en foit compenfé avec celui de la piece de toile.
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
'-99
On. répondoit pour l'intimé, que 1;1 Sentence étoh auffi>
juile que réguliere, fait qu'on confulcât les principes géné,
raux de la mariere, al! les circonf!:ances particuli-eres de
la caufe, & la requête incidente de l'Adverfaire ne pouvait être fondée.
Une convention ou un paéte n'dl: autre chofe que le
confenrement de deux ou de pluGeurs perfonnes, ou pour
former encr'elles quelque engagement, ou pour en réfoudre un précédent, ou pour le rp.odifier : Ejl pac?io' duorum pluriumve in idem plaeitum eonfenfus. L. l , §. l , .if.
de pae?
L'efpece de convention qui a poue objet de former quelque engag.ement, eil ce qu'on appelle courrat: Il y a,
fuivant Mr. Pothier, plu Ge urs efpeces de contrats.
Les' contrats on conventions finalagmatiqtles, comme
celles. dont i~ s:agit au~ proc.ès, .ne r peUlVen" fub-filter que
par l'accomplilfemenr des obligations mutuelles. La LoÎJ
~4°, ffi' pl'O Iocio, établit que. l'on peut. fe [éparer de l'affocié qui ne rèmplit pas fes engage mens.
Les conventions fubfiilent par le feul confentement des
parties; elles ne s~exéclltent que par l'accomplifiement refpeétif des obligations. .De ce. qJ1'un d'es contraétans n'a
pa~ tenu ~ce Iqu'iI' a~bit pwmis, il s'enfuit, gu~ la convention eil réfdlue de droit. C'eU: la décifion de la Loi &
le [entimént des Juri[conIultes. (Mêlanges de Jurifprudence
in-8°. p. 260; L. 1 S , .ff. pro fodo, & Domat , liv. l ,
[eét. 6, n..1 ~. )
f[,es contrat.s. font nuls, s'ils ne font exécutés de par; &
cilaurr'e :. dccedere enim' debec effec1us aontraheruium, Jine quo.
impe,fec1a efl conditio. L. ÙZ omnib. jJ. de. oblig. & ae7. L.
l ,jJ. de pac7is; Remarques manufcrires de Duperier au
mot demeure.
Il '}' a .deux forres de conventions; fa voir " le fimple
paéte , & le contrat.
Le paéte eH: une convention -Due qui n'a point de nom
ni de caufe, & qui ne produir qu'une obligation naturelle
dont l'accompli1fement ne dépend que de la bonne· foi de
Pp4
�3°0
JOURNAL
celui qui e!l obligé. Ferrieres, Diét. de droit, au mot con·
~'ention.
Suivant Defpeiifes, tom. l , p. t & 239, l'échange e!1:
un des quatre contrats connus dans le Droit romain fous
le nom de contra8us innominati; c'ell:èelui do ut des: cecontrat permet à celui qui de fa part l'a accompli, ou
de contraindre la partie de l'accomplir, ou de s'en départir. Enfin Boniface, tom.
liv. 3 , p. 278, n. ~ , dit
que la Loi permet aux parties de réfoudre & révoquer les
ventes même, non feulement quand le vendeur ne peut
pas faire jouir l'acheteur de toutes les chofes vendues"
mais auill quand il y en a quelqu'une dont il ne peut pas
le rendre jouiifant, quoiqu'il jouiife des autres. L. fi duos'
44, if. de contr. empt. L. cùm ejufdem 35, §.
if. de
œdil. ed. L. fi 'luis aliam 4 6 , if. de [aZut.
Les Publicill:es tiennent le même . langage que les J urifconfultes.
.
" Si l'on vient à découvrir par des indices certains,'
" que l'autre contraél:ant ne penfe qu'à fe moquer de
" nous, lorfque nous aurons effeél:ué ce à quoi nous nou"s
" étions engagés en fa faveur, il ne fera pas en droit de
" nous y contraindre. " (Puffendorf.)
" Celui qui a été trompé, a droit de rendre à celui
" qui l'a trompé ce qu'il 'en a reçu, & de lui demander ce
" qu'il lui a donné. ", (Principes du droit & de la politique. )
Il fuit de toutes ces Autorités, que fuivant les principes
du droit, le contrat, le paél:e, &' à plus forte raifon la
c<lllvenrion verbale, font réfolus par l'inexécution de la
parc de l'un des conrraétans.
Or dans le fait, Alezard s'ell: délié le premier de fes
engagemens; il a refufé pendant différentes fois, c'efi-àdire, à la Police & d(lvant les Experts, d'exécuter la convention dont il excipe aujourd'hui; la preuve en e!l con!ignée au procès dans une déclaration authentique &
légale.
Il fallt diflinguer les certificats que la Loi appelle men.,
l,
l,
�DU
'd~ala
PALAtS
DE
PROVENCE:
30l
[u./fragia, d'avec les arrefiations données par des
Experts ratione ç/ficii. Ces fortes de déclarations font
pleine & entiere foi en Jufiice; elles font faites pour fixer
l'opinion du Juge fur le point contentieux, Peu importe que
l'Expert d'Alezard, fans doute par un excès de condefcendance blâmable, n'ait pas voulu figAer la déclaration, dès
qu'elle l'a été par les deux autres, Son affercion feule &
ifolée ne fauroit l'emporter fur celle de deux de fes Confreres, dont l'un efi Prieur du Corps.
On a tort d'avancer que l'inexécution de la colfventièn
de la part de l'une des parties n'en opere pas la réfolutian de droit, mais qu'il faut recourir à l'autorité du Juge;
que les claufes pénales ne font réputées que comminatoires , & qu'elles ne font point exécutées à la rigueur; que
la partie enfin qui n'a pas rempli fes engagemens, eU
raujours relfue à purger la demeure.
Cerre objeaion relfoit plufieurs réponfes également péremptoires. 1°, Il ne s'agiffoit point ici de refcifion ni de
caffation d'aae de vente, où de quelque contrat comme
dans l'efpece des Loix rapportées. Le minifiere du Juge
n'érait donc pas néceffaire; il n'étoit quefiion que d'un
accord verbal, & dès-lors les parties pouvaient fe délier
verbalement comme' elles s'étaient liées, fuivant la regle
du droit : ul/um 'luodque diJ{olvitur eodem modo quo colligatllm efl; ideo verborllm obligatio verbis tol/itur.
'2°, Suivant le plus grand nombre des Auteurs, l'inexécution de la part de l'un des contraaans peut réfoudre de
droit le contrat.
3°. Genfolin avait fuffifamment mis en demeure Alezard
par l'aae inrerpellatif qu!il lui avait fait fignifier à l'effet
de convenir d'Experts, & par le fecond aae par lequel il
lui mit en notice la déclaration de ces mêmes Experts.
" Si le Juge, dit d'Argou, tom. '2, liv. 3, donne tou" jours un ou plufieurs termes au delà de celui qui eU
" porté par le contrat avant que de confirmer la peine
" qui a été fl:ipulée, cela efi injufie, & ne fert qu'à au-.
~, corifer la mauvaife foi. "
.
�3° 2
. Jou Ii N A fr
Au moy~n d~, quoi, fous· ~ous les points de vue 1'0[fibles', Genfolin a pu repr~ndre les fin~ de fa demande, &
obtenir une Sentence par Mfaut, non pas aU préjudice.
des accotds convenHS, mais après le r'éfiliment de ces
mêmes accords; réfilimeHt opéré' par le refus i:!ll'a faie
conftamment Alezar,d de les exécuter ') après avoir été mis 1
en demeure d'une maniere légale.
Les cOhteftations des parties n!éroient plus corrtprom,ifes
aux Experts, puifqu'Alezard les avait empêché de remplir
leur co
illion; le Lieutenant ne pouvait pas être arrêté
par des accords qui ne h!pli1J:oient plus.
Alèzard a demandé pardevant la Cour (ajoutoit l'intimé) que Genfolin fÎle condamné au paiement de fa plece
de toile, fuivant le rapport d'e!l:.imation qui en feroit fait,
& que le prix en fùt compenfé avec celui de la garderobe; il a demandé dt< plus les dépens du défaut, &
fublidiaireme'nt 'Ia compenfatiqn"de ces JTIêmes dépens. Les
fins de cette requète contrarient tous les principes. La
:l!mpenfation, comme dit Livoniere, eft- une libération
JU un acquittement réciproque entre deux perronnes qui t
fe trouvem cré'anciers & débiteurs l'un de l'autre" laquelletient lieu de paiement•
•Mais pour que la c.ompenfation puiffe, avoir lieu, il faut
le concour.;; de deux 'pÔnaip.ales cÎrcon/l>ances; 1°., que les,
deux fommes que' l'on veut compenfer foient certaines &
liqDides ; 2°, qu'eUes foient exigibles en même- temps.. Ici:
les deux fommes ne font. pas liquidées.
Enfin il ell: de principe que les dépens ç!u délàut fonlt
toujours dus, quand mêine le défaillant en premiere inaari~e
aurait 'gagné- fa caufe parde\lam la') Cour'; on n'efr· pail;'
même reçu à fe pourvoir en rabattement du défaut, fans
avoir auparavant refondu les dépens. Les dépens font dus
in pœnam contumaciœ & in contemptum judicis~
)
Il n'y a qu'une feule exception à cette regle ; c'.cft lorfqu'on eft alligné devant un' Juge notoirement iôcompélent;.
& c'ef!: le cas de l'Arrêt rapporté pal' Bonnat. au mot ;dé-,
pens.
~.
J
�'nu
l'AI,A.IS
DE' PROVENCE;
303
'Par Arrét rendu le 2..1 Juin 1780, au rappo~t de Mr. le
Confeiller de NeoulJes, la Sentence du Lielllenam de Marfeille fut réformée, Genfolin fut condamné à payer le prix
de la toile, Alezard fut mis hors de Cour & de procès fur
la demande de Genfolin, Genfolin fut condamné aux dépens feulement de l'infiance d'appel, ceux du défaut tenant.
·Ecrivant Mes. Rambot & Silv)'.
ARR Ê T
X X X
1
.,
X VIII.
,
Si celui. à qui on a accordé If!. fervitude de pa.f1àge dans un
viol pour les négoces de fa propriété, peut fen fervir
"
pour l;imroduéliorz d'un troupeal~ de h1l.iaux.
Si la poffiJlion de _trente ans fuffit pour l'interprétation d'~n
titre ohfcur.
_ .
L
A DIJe. Rouviere polfédoit un domaine dans le territoire de MarfeiIJe, au quartier de Saint-Barnabé; eIJe )'
;allait par un viol de la largeur d'epviron fept pans, bord~
.de deux murailles, dont le COA.Hl1elicement efi au chemin
,public. aIJant de Marfeille à Sainr-B'amabé; eIJe le divifa.
-par un aéte d'infolurondation du 27 Juin 1591 ; eIJe )' .con:céda à la DIJe. Seguier fa fille, époufe de Nicolas Bonnet,
la faculté de palTage pour les négoces de la partie de propriété qu"e:IJe lui départoit; la daufe ell: comiue en ces termes: à la charge que ledit Bonnet, fa 'femme, enfemhle leur
famille pa'!feront par le chemin accoütumé pOllr les négoces de
la propriété.
Le 31 Oétobre 1777, .le {jeur Blaife .Perrimond, Bourgeois
<le MarfeiIJe, repréfentam la .Dlle. Rouviere, préfenta requête au Lieutenant contre 'Antoine Ourdan, repréfenranc
la DlIe. Seguier, en inhibitions &: défenfes de faire introduire à l'avenir aucun troupeau de meutons ou autres bef-
�3.04
Jou
Il. N JI. L
tlaUX par le viol en quefl:ion, & il obt nt le 19 Novembre
1779 une Senrence favorable.
.
Ourdan en appella. Il prétendit d'abord la co-propriété
du viol, & il Ce borna enfuite à la fimple faculré de paffage; il (ourint que l'aél:e du 27 Juin 1 ~91 lui accordoit une
. fervirude indéfinie pO.llr touS les ufages relatifs à la propriété
qu'il poffédoit; on n'avoit pas limité les différences efpeces
de négoces, les diverfes fortes de befiiaux qu'il pourroit
introduire; l'objet éroit défigné, mais cet objet éroit généraI.
Or, la faculcé d'inttoduiœ un troupeau de, befiiaux peutelle être confidérée comme une forte de négoce? En efielle une? Dans ce cas elle eH néceffairemenr comprife (ous
la dénomination de négoces. Eh! comment dout~r qn'eUe ne
foit un négoce. de la plus jaloufe & de la PIus lucrative efpece? Il s'étend à deux objets; 1°._ à la vente d'une partie
des fruits; 'l!:. 11 l'engra.is de la propriété qUI les pcodui.r.
Ollrdan retire annuellement de l'une près de 200 liv., &
par le moyen de l'autre, il fertili(e fon domaine; en lui ôtant
cerre nlani,erè de l'exploiter, non feulement on gênerait (Gn
négoce, mais même €ln le I.ui interdirait. Le domaine en
ceffant d'être engraiffé, pro.ciuiroi t des. fruits moins abondants;
les herbes, les :feuilles vendues chéremenr fur la place deviendroient prefque à charge. Privé de la faculté d'introduire
un troupeau, Ourdan n'<lureit plus un chemin pGur les négoces de [on domaine; il ne l'auroit que pour. une partie de
[es négoces. Or, cela réfif!:e au titre, qui, par fa di[pofitioll.
générale, accorde UI1 cben,,in pour route forre de négoces.
Ou il faut fou tenir que Ja faculcé d;inrroduire. un troupeau
dans un domain,e pour· l'y faire fejourns:.r-,. confumer les herbes & l'engraiffer, n'efl: pas une efpece de négoce; ou avouer
qu'elle efi néceffairement comprife fous ~a dénomination
indéfinie de négoces.. On n'avoit pas befpi-n ·dans l'aél:e ce
parler de l'introduél:ion d'un troUj}eau; aUCUl)e défignation
n'éroit néceffaire, dès' que la conceffion étoit générale; il
n'el,t que[):io.Q ni d'exte.ofiolJ ,. ni de couverfiol" de fervitu~le.,
nl<U~
�D U
PAL Â 1 S
D E
JO 1
PRO VEN C l!.
mais feulement de favoir fi la faculté particuliere réclamée
eIl: comprife dans la faculté générale accordée: or, elle y
eIl: comprife, parce que l'introduél:ion d'un troupeau eH un
négoce; il efl: indifférent qu'elle fait faite par le propriétaire lui-même ou par un Berger; l'un repréfente l'autre.
Ourdan argumentait de la qualité des parties qui avaient
traité ùans l'aél:e du 27 Juin 1') 9 l, & de l'objet de l'aél:e;
c'était une conceilion faite de la mere à la fille; il n'étaie
pas vraifemblable que l'une eût voulu gêner & limiter les
u(ages de l'autre; il (e prévaloit de la circonilance que le
viol étoit le (eul endroit par où il pouvoit introd.uire des
bêtes, puifqu'il n~exiiloit aucun autre chemin, & de ce que
dans le doute il faudroit interpréter l'aél:e contre le veodeur.
Si la Cour, ajoutait-il, croit le titre ob(cur, elle doi~
defirer de (avoir comment il a été interprété; c'eH de là
qu'elle doit faire dépendre fa décifion. L'exécution eil la
plus fidele, comme la plus (ouveraine interpréta.trke des
aél:es; elle dilIipe les nuages qui (embleoc les environner,
elle leur redonne ce degré de clarté qu'ils avoient à leut
formation, & qlJe le laps de temps leur a ravi. La quefiioll,
de la poifeilion devient donc néceifaire. La poifellion n'a
pas pour objet, dans l'hypothe(e aél:uelle, d.'acquérir un,
uouveau droit, ·mais {implemenc d'expliquer celui exi...lJ:ant.
déja.
.
LorfiJue l'ac7e eJl ambigu, die Mr. Decormis, tam 1, col.
990, l'ufage & la coutume ne fe prennent point tant par ma-·
niere de prefcription , que par explication & interprétation de 14.
v.olonté des parties lors de l'ac7e. Dans ce cas, quelle e(pece
de po1felIion doie prouver le demandeud Tous les Auteurs,
fe (on.t réunis pour attefler que la polfeilion d'un temps im-·
mémorial n'étoit pas néceifaire, mais que ceBe de lQ,. 2.0.
& 30 ans (uffi(oit, /le tous les Parlemens régis pat le droit::
écrit ont confacré une Doél:rine allili (age..
Guipape, fur la quefl. '>73 de prœfcript. fervit.. pecoris. paF
cendi, 0 0 • ') , fe contente même de la po1feilion de 10 a.ns;;
Baff~t, tom. 1, liv. 2, tit•. 29, chap. 19, exige la pre(crip-
.
Qq,
�306
Jou lt N A L
tion trentenaire; Me. Julien, dans fan Commentaire fur nos
Statuts, tom. 2, pag. 'i 47, n°. [3, s'exprime ainfi: celui 'lui
Je fonde fur un titre, n'efI: pas obligé, pour Je maintenir dans la
ftrvitude, de prouver 'lu'il en a la po.iJèffion depuis un temps immémorial; il fujJit alors de prouver 'lu'il en a joui depuis lO,
20 {: 30 ans. Guipape & Ba!fet rapportent des Arrêts du
Parlement de Grenoble conformes à cette Doéhine ; & Me.
Julien en rapporte un rendu le 13 Août 17 'i 6, au rapport
de Mr. de Beauval, en faveur de l'Econome des Charrreux
de Laverne, contre la Communauté d'Hieres, par lequel les
Ch<!r~ furent re<;us à vérifier que depuis 10 & même 30
ans, ils avaient envoyé leur bétail dans les terres gafies
de cette Communauté.
Ourdan concluoit principalement à la réformation pure &
fimple de la Sentence; & fubfidiairement, à ce qu'avant dire
droit à l'appel, il prouveroit que dans les 30 dernieres années qui avaient précédé la requête de fan Adverfaire, il
avait introduit par ce viol un troupeau dans fan domaine.
Le fleur Perrimond répond,oit que la faculté de pa!fage
d'Ourdan étoit limitée à lui, à fa famille & aux négoces
de fon domaine; elle ne peut point être communiquée à un
tiers & à un étranger.
.
Le droit de pa!fer fur le fol d'autrui n'a pas par lui-même
une extenflon indéfinie; les Romains le limitaient par les
termes qu'ils employaient dans les conceffions qu'ils en faifoient. Tantôt ils employoient le mot iter, qui donnoit la
~culté de pa!fer à pied ou à cheval ( Leg. 7 & 12".If. de
fervit. prœd. ruflicor. ); tantôt ils employaient le mot ac1us,
qui donnoit le droit d'introduire dans les pa!fages des bêtes
de faume ou des voitures de tranfport ( Leg. l eod. );
tantôt ils' employaient le mot via, qui, outre toutes les
facultés précédentes. donnait encore celle de faire tranfporrer des pierres & des bois par le lieu deHiné au pa!fage
( Leg. 7 eod. )
.
Parmi nous, qui ne fommes poiDt en uGlge de nous fervir
. de ces mots, & qui n'employons que le mot pajJàge, lorfque le droit de pa!fage n'eH pas réglé par le titre, nous
�DU
PALAIS
Dl!
PROV.llNCll.
307
le fixons par l'état du chemin fur lequel ce droit a été accordé.
Ainu, lorfqu'un chemin n'a de largeur que pour le parfage d'un homme à pied ou à cheval, le propriétaire du fol
efl: cenfé n'avoir concédé que le droit de palfag~ connu fous
le nom iter.
Lorfque le chemin n'a de largeur que pour le palfage d'une
bête de faume ou d'une voiture, le propriétaire du fol efl:
cenfé n'avoir concédé que le droit de palfage connu fous le
nom aclus.
Le viol contentieux n'a que fept pans; il n'efl: donc propre que pour un homme à pied ou à cheval & pour une
bête de faume; il ne l'efl: pas pour une voiture, attendu les
coudes marqués dans le plan.
Dès-lors il dl: vrai de dire qu'Ourdan n'a fur le viol contentieux que la faculté iter, & une partie de la faculté aclus.
Il n'a & ne peut avoir dans aucun fens la faculté via.
.
Son droit de palfage e{l: donc limité par l'état des lieUJc.
Si ce droit eH limité, & s'il ne s'étend ni à toute la faculté
aclus, ni à la faculté via, comment peut-il afpirer à jouir
d'un droit de paŒ~ge que n'auroit pas eu parmi les Romains celui à qui les facultés iter, ac7us & via auroient
été cumulativement concédées. Car il e{l: décidé dans le
Droit Romain que ces trois facultés ne don noient pas celle
d'introduire un troupeau de brebis, de chevres & autres
petits be{l:iaux, lors même qu'on avoit le droit de faire palfel'
jumentum ou armentum , parce qu'il falloit que les menus befti?ux fulfenc fpécifiquemenc défignés, ainfi que l'obferve Vinnius fur les InJ1itutes, lib. 2., tit. 3 in prœm., nota 3, où il
dit que fous les mots jumentum ou armentum, non continehitur aclus ovium, caprarum & reliquorum minorum pecorum~
ljuiDus prapriè gregis, non armenti aut jumenti appellatio canvenit.
On fene facilement pourquoi le droit d'introduire de menus befiiaux devoit être exprimé nommément. Chacun fait
que leur palfage e{l: tout à la fois incommode & dangereux
dans un petit chemin, foit parce qu'ils le gitent, foit parce
.Qq
2
�3 0S
Jou RNA L
.
qu'ils y (oulevent la pouffiere, (oit parce qu'ils occopent tout
le p~ff~ge, & obligenr par fois le propriétaire à s'arrêter
ou à (e dévoyer, fait enfin parce qu'ils s'écartent facilement
dans les propriétés voHines.
Le lieur Perrimond concluoit de là que ·le titre excluait
l'introduél:ion d'un troupeau par le viol. Paffant enfuite aux
fins fublidiaires de fon Adverfaire, il foutenoit qu'il eil:" de
maxime parmi nous, que les fervitudes difcontinues, au nombre defquelles el!: celle de paffage, ne foot acquifes -fur le
fonds d'autrui que par une poffeffion immémoriale. ( SaintJean, décif. 72; Boniface, tom. l, liv. 8, tit. 2, chap. 10,
tom. 'h liv. 9, tit. l , chap. 20; de Bezieux, pag. 600, chap.
3, §. 2; Decormis, tom. 2, col. 1729; Cate1an, liv. 3,
chap. 6; Ferrieres fur Guipape, queft. ')73, )
Guipape, Baffet, Julien, décident, il eH-vrai, que quand
on a un titre exprès, l'ufage de la fervirude difcontinue pendant 30 ans fuffit pour l'y maintenir, parce qu'il ne s'agit
pas alors de l'étahliffement d'une nouvelle fervitude, mais
de la· confervation de celle qu'on a déja. Or, Ourdan n'a
aucune forte de titre, ni exprès ni ohfcur, puifque l'aél:e du
. 27 Juin 1) 9 1 exclut la fervitude de l'introduél:ion cafuelle
d'un troupeau, par cela feul qu'il ne l'énonce point.
Par Arrêt du 21 Juillet 1780, au rapport de Mr. le ConfeiIler de Neoules, la Cour adoptant purement & limplement les fins principales d'Ourdan, réforma la Sentence i
& le maintint dans la faculté d'introduire ou faire introduire un troupeau dans fa propriété par le viol en qùel!:ion.
Ecrivant Mes. Roux & Sauvere.
�, -.1
DE
ARRÊT
PROVENCÉ!
XXXXIX.
te fils émancipé peut faire des aC'luifùions en [on nom, quoiqu'il habite avec [on pere, & il n'ejl pas obligé de les recombler pour la fixation de la légitime de [es freres.
Onoré Chiris , Aub.e~gifie du lieu d'Efcragnoles,. maria
fon fils Pons ChIrls avec There[e Saffis du lIeu de
Seranon. Dans le contrat de mariage du p~emier Fé\'tier
175 l , il J'infiitua fon héritier de touS [es biens préfens &
à venir, & promit de le nourrir & entretenir, [a. femme &
fa famille, 'en travaillant au profit de la maifon; & en cas
d'infupport, il s'obligea de lui dé[emparer la Comme de 6000
liv. en biens fonds, 'penfions, argent ou bétail.
Le 10 Avril 1758, Honoré Chiris émancipa fon fils, & il
continua de vivre avec lui. Pons Chiris émancipé fit des acquHitions en fon nom; Honoré Chi ris mourut enfuite en
1774. Urfule Chiris, époufe de Louis Roufrant, & les hoirs
de Catherine Chiris [es filles, firent appofer le [cellé, & formerent, le 2. Mars 1775, une demande en [upplément de
légitime. Parmi les articles de compofition de J'hérédité paternelle, ils firent entrer les acquifitions faites par Pons
Chiris depUIS [on émancipation & pendant la vie de [on
pere; celui-ci contefi<i le recomblement; & par Sentence
arbitrale du 23 Décembre 1777, il fut adjugé à Pons Chiris
~a moitié des acquifitions faites après J'émancipation, & il
fut ordonné que l'autre moitié feroit fonds dans l'hérédité
paternelle pour la fixation {)es légitimes. Pons Chiris appella
de cette Sentence pardevant la Cour.
On citoit pour lui le texte de la Loi cùm oporut, cod. de
bonis quœ liberis, qui efr le fiege de la mariere. Cetre Loi
.décide en faveur du fils de famille non émancipé. Or, fi les
.acquifitions du fils, in patris facris conjlituti, lui appartiennent en propriété, li fortiori appartiennent-elles au fils
~mancipé.
.
H
�31°_
Jou RNA L
On rappella les Arrêts rapportés par Boniface, tom': ,:;
lïv. 4, tit. 17, chap. 2., qui, conformément à la Loi cùm
oportet, ont jugé que le fils de famille étoit capable d'acquérir par fon indu{hie. On n'examina pas fi conformément
au §. cùm autem de la même Loi, le pere qui émancipe fon
fils, conferve la moitié de l'ufufruit de fes biens, ùz prœmium
emancipatîonis. Duperier, qui l'a difertement ~raitée, liv. 3,
quefl:. I:l., reconnoît que ce feroit combattre l'efprit de la
Loi, que d'étendre l'ufufruit du pere aux biens aventifs qui
arrivent à l'enfant émancipé, ou par fon indu~ri:e, ou par
quelqu'autre aventure indifférente au pere; mais l'on conclut
de fa Doél:rine, qu'il eft de maxime invariable que le fils de
famille, & à plus forte raifon le fils émancipé, eft capable
d'acquérir par fan induftrie. C'efi même ée qu'a jugé l'Arrêt
du 30 Juin 1766, au rapport de Mr. de Thorame, en la caufe
du fiellr Clericy de Trevans, contre le fieur Boufquet, enfant
.
d'Augufiine Clericy fa fœur.
Dans le fait dont s'agit, on voit d'un côté un pere malade arreint depuis long temps d'une maladie mortelle; d'un
autre cÔté, un fils agiJfant & laborieux tournant fo.n commerce vers mille objets, ayant des fermes dès les· premieres
années de fon émancipation, commerçant en grains & en
beftiaux. Dans cerre hypothefe, les acquifirions faites par
le fils:peuvenc-elles provenir d'un au tre fonds que de celui de
fon indufirie? Si le pere avoit été en érat 'de commercer,
& que l'on vît en même temps le fils voué au commerce,
on adjugerait au fils fes acquifirions en prop_ri~ré. A plus
forte raifon doit-on' les lui adjuge.. , quand on voit un pere
infirme d'une part,. & de l'autre un fils commen;:ant par lui..,
même.
Quelques favorables que foient les droirs des légirimaires~
la Loi n'avoit fournis au rapport les libéralités du pere à
l'un de ces enfans, qu'en tan~ qu:elles éto.ient immenfes &
faites en fonds & non en fruirs. C'eft 'ce qui fe collige de
la Novelle 92. de immenjis donationibus in filios celebratis.
Er fi parmi nous la Jurifprudence a érendu ce rexte à t9ure
forte de libéralités, a~ moins faut-il convenir qll'elle 1'~
�}, u PAr. Ag
'ô B PRO V B N C I!;
'3 rr
horné aux libéralités en fonds; & delà le principe que le
pere peut renoncer à l'ufufruit en faveur d'un de fes eofans, fan's que l'enfant foit obligé de le rapporter pour groffir
la légitime. C'eil: ce qu'a établi Serres fur le titre des 1nftituts, per 'luas perfonnas cui'lue ac'lu iritur, & Decormis,
tom. 2, col. ~ 40.
On répondait qu'il n'y a pas d'aé!:ion plus favorable que
celle qui a ppur objet de procurer à un légitimaire la portion facrée que la nature & les Loix lui alfurent fur les biens
de fan pere. C'eil: une injuil:ice intolérable de chercher à en
diminuer la conliil:ance par .quelque voie que ce fait, &
fur-tout par des aé!:es qui ayant en apparence le fuffrage des
Loix, ne font dans le fonds que des aél:es collufoires &
frauduleux qu'elles profcrivent. ün emprunte alors leur langage, mais on s'écarte abfolument de leur difpofition: ùz
fraudem legis [acit, 'lui falvis verhis legis Sententiam ejus circumvenit. Leg. .2.9, if. de legihus.
Auffi toutes les fois que les Tribunaux ont à juger des
·demandes de cette efpece, ils· ne s'arrêtent jamais aux aé!:es
qui leur paroilfent être d'un arrangement concerté entre le
pere & l'héritier, pour faire palfer une partie de la fubil:ance
du premier fur la tête du fecond au préjudice des légitimaires. On en juge par les circonil:ances; fi elles font exc1ulives de tout foupçon, on les entretient; fi elles annoncent quelque chofe de fufpeé!:, le doute eil: toujours réfolu
en faveur des légitimaires, & contre l'héritier dont le fort
eil: beauc.oup plus avantageux. Il n'y a même que ce moyen
qui puilfe prévenir ou réparer les injuil:ices multipliées que
tant de peres, uniquement portés pour l'héritier, fe permettent fi fréquemment, & prefque toujours, fans fcrupule contre
leurs autres enfans.
Le voile dont on fe couvre le plus fouvent, eil: celui de
l'émancipation. On imagine que c'eil: le moyen le plus aiCé
& le plus efficace pour faire palfer avec sûreté fur l'enfant
qu'on affeé!:ionne toutes les épargnes qui fe font dans la
maifon de quelle part qu'elles procedent. Le pere n'eil: plus
;ùors que l'économe de ce.t héritier favorifé; il lui facrifie
�Au
JOURNAi
non feulement fa propre. fubfiance, fur laque1fe les autre'
enfans ont des droits incontefiables, m.ais encore celle qui
leur efi perfonnelle, & qui procede de leur travail.
C'e(t ain{i que Pons Chiris avoit combiné fes arrangemens avec fan pere. Quoique lié par une loi refpeél:able pour
l'un & pour l'autre à travailler au profit de la mai(on, quoi.,.
qu'il ne pÎlt élu.der l'exécu,tion de cette loi, qu'alitant qu'il
furviendroit entr'eux un i.nfupport, i.I fe fit émanciper. Cet
aél:e n'a. pas opéré l'anéantiifem.ent du paél:e Hipulé dans les
articles de mariage; en forte qu'avant comme après, il a dû
travailler, ainfi qu'il s'y était fOQmÎ.5, a.u profit de la maifon,..
puifque de fon côté fon pere n'a ceifé de remplir envers lui.
l'obligation qu'il s'était impofée de le nourrit & entretenir
avec fa familfe, en confidération du ttavail qu'il, aVQir exig~ •.
Pons Chiris pouvait fi, 'peu. fe procurer un pécule particulier,
qu'il n'avait pardevers lui aucun fonds qu'il pùt négocier &
faire va~oi'r à fon profit. Son pere ne lui avait ri.en. défem,.
paré, pas même la dot de fon époulè. Ainfi., malgr.é rémancipation, le pere & le fils n:ont jamais ceJTé de vivre enfem,.
bl.e fous Je même tait & à 1<\ même. table, & conféquem,.
ment en l'état des engagemens qu'ils avoient conrraél:é dans,
les conventi()ns m.3rri m oniales q~'ils ont conûnué d'e.xé-.
cuter.
Par Arrêt du 2,1 Juillet 1780, au rappo~t de Mr.~ le Con-.
feiller de Ballon, la Sent~nce fut réformée, les articles. de..
compofition furent rejettés à plein, avec d.épens.. Eçrivant:
M.es., Verdo,ll.io & Barle.r...
�DU
PALAIS
DE
ARRÊT
PROVENCE.
L.
La preuve par témoins ne peut être reçue colltre la preuve
écrite.
La Délihùation d'un Corps fulflle, quoique non revêtue d'une
formalité prefcrite par un titre primitif, mais ahrogée par
un long ufage.
H
Onoré Mathieu; après avoir fait fon apprenriffage de
Setrurier à MarfeiIle, fe préfenta aux Prieurs du Corps:
pour être admis à la maîtrife; on lui donna un chef-d'œuvre
à faire, & une année pour le finir.
Le premier Février 1779 il fe préfenta aux maîtres Serruriers de la ville d'Aix, & leur demanda un chef-d'œuvre
à faire, à l'effet d'être admis à la maîtrife. Le même jour le
Corps s'aifembla, & lui donna le chef-d'œuvre, avec un délai
de trois mois; on lui indiqua la boutique de Jofeph Maffie
pour y travailler; après le délai fixé, il préfenca fon chefd'œuvre, & fut admis par délibération du Corps.
Muni de ce tirre, Mathieu demanda aux Lieutenans-Généraux de Police de Marfeille la permiffion d'exercer fon
métier dans cette ville, comme ayant été recru maître dans
\lne ville de Parlement. Les Syndics des Serruriers de Marteille s'y oppoferent, & demanderent la caffation de fa réception à la maÎtrife. Par Sentence du 4 Juin J779, ils furent déboutés de leur oppofition. Ils en appellerel)t parde_
vant la Cour; Mathieu forma une demande en garantie cODtre.
les Syndics des Serruriers d'Aix.
On difoit pour les appellans, que les maîtres recrus dans.
les Corps d'Artifans établis dans une ville de Parlement ,.
Ont le droit de travailler de leur métier par-tout où ils veulem; mais il ne s'enfuit pas de là qu'abufant de ce privil'ege,.
le Corps puiffe recevoir fans difiinaion rous les ouvriers qui[e préfenrenc; auffi routes les fois que l'on a pu craindr~
que la ré.ception d'un anifan danS une ville de Parlemen.c ~
Rr:-
•
�314
JOURNAL
& de!l:iné à aller travailler ailleurs, n'avoit pas éré faite avec
l'artention & les formalités prefcrites, la Cour l'a anéantie,
ainfi qu'on le voit pàr l'irrrêt du 2) Mai 1778, qui catra
la réception d'Honoré Vallon, Tailleur de pierre, qui s'était
fait recevoir en b ville d'Aix POUt aller travailler à Toulon.
( La délibération faifoit menrioq d'un contrat d'apprenritrage,
quoiqu'il n'en eût point été fait. )
Il e!l: nécdfaire de prévenir les inconvéniens qu'il y aurait à ne pas tehir la mai n à ce que les réceptions de ces
ouvriers fumont tàites avec le même foin que les autres.
Quand un ouvrier de la ville d'Aix fe préfente au Corps,
l'intérêt des oma~Hes e!l: un sûr garant pour lui taire fubir
les épreuves & les formalités'établies; la crainte de ne trop
multiplier les ouvriers & de diminuer le mivail ne prévaut
pas à l'envie de gagner le droit de maÎ;rif~, & dans ce cas
les chofes fe font ùécetrairement en regle; mais quand on
fait que l'ouvrier qui fe préfenre fe deHine à aller travailler
ailleurs, cette crainte ceife, les portes [am ouvertes, & il
n'y a que de l'avantage à recevoir l'afpiranr. Voilà pourquoi
les ouvriers incapables prennent le parti de s'éloigner du
Corps oll ils favem qu'ils feront bien examinés, pour fe préfenter à un autre qui n'a d'autre intérêt que de recevoir l'argent de la maîtrife, & °qui fe foucie fort peu de s'atrurer du
raient de l'ouvrier.
Pourquoi Mathieu n'a-t-il pas rravaillé au chef-d'œuvre
qu'on lui avait donné à Marfeille, & qu'il avait demandé luimême? N'était-il pas naturel que cet afpirallt à la maîtrife
fe fît recevoir par le Corps auquel il voulait fe faire agréger, & qu'il lui procurât le bénéfice de fa réception? Pourquoi dl-il venu s'adreifer au Corps des Maîtres Serruriers
d'Aix, fi ce n'e!l: parce qu'il ne fe fentoit pas en état de
fubir les épreuves qu'il aurait été obligé d'eifuyer à Marfeille,
& dont il était atruré d'être difpenfé à Aix?
Le chef-d'œuvre que le Corps des Serruriers d'Aix a obligé
Mathieu de rapporter, devait être fait à Aix & fous les yeux
d'un maître Serrurier; mais il s'e!l: montré fi peu foucieux
de remplir cette condition, qu'il a été travailler à Marfeille
1
�D U
PAL AIS
D E
PRO VEN C E.
3 I)
pendant le temps qui lui avoit été donné pour faire le chefd'œuvre; il n'a pas même attendu l'expiration des trois mois
qu'on lui avoit donné; il s'efl: préfenré cinquanre-quarre jours
après avec un chef-d'œuvre, pour lequel les trois mois auroient été infuffifans pour le perfeB:ionner.
L'arricle 2. des Staruts des maîcres Serruriers d'Aix
exige que l'afpirant apporte fon chef-d'œuvre, & qu'il le
fa!fe viuter en préfence des Confuls & d'un Seigneur-Commi!faire. Cette formalité elfentielle n'a pas éré obfervée lors
de la réception de Mathieu.
S'il efl: vrai que pendant le temps donné ~ Mathieu pour
faire fon chef-d'œuvre cet ouvrier a été ~ Marfeille, qu'il y
a travaillé, qu'on l'y a vu journellement, il n'efl: pas poŒble qu'il ait fait fon chef-d'œuvre ~ Aix & fous les yeux du
maître qu'on lui a indiqué. Si ce fait efl: vrai, que devient
la réception de cet ouvrier? La bafe fur laquelle elle porte
manquant, il faut qu'elle croule nécelfairemenr. Sur toUS
ces fairs, les SerrurieRS de Marfeille demanderent fubfidiairement d'être admis à la preuve.
On 'répondoit pour Mathieu que les réceprions de grace
. & de faveur ne font point impoŒbles, lorfque les afpirans
qui ont befoin d'indulgence font alfez heureux que de trouver
dans la Communauté qui doit les recevoir, des hommes capables de trahir les fonB:ions qpi leur font confiées; les inrtirutions les plus fages font fujerres à l'abus. Mais de ce qu'il
efl: poŒble qu'il puilfe fe glilfer quelques abus dans les réceptions des afpirans, il ne s'enfuir pas qu'elles [oient abufives. Ainfi les exempJes ne font ici d'aucune confidération.
Les fonB:ions des Jurés ne roulent pas toujours fur les mêmes
têtes, elles ne font qu'annuelles. D'ailleurs la Jurande qui
reçoit un a[pirant ~ la maîrri[e ne peur pas [avoir fi cet afpirant une fois devenu maîrre voudra jouir du privilege de
f:1 maîtrife dans la ville où il aura été reçu, ou s'il ira
s'établir ailleurs; de forte qu'il efl: de l'intérêt de toutes les
Communautés d'artifans établies dans les villes de Parlement d'examiner avec foin fi les [ujets qui afpirent ~ la mat-
R
r 2.
�316
JOURNAL
nife font capables d'y être admis, & s'ils ont toutes les qua.:
lités requifes par les Ordonnances.
Ce n'en pas que les Serruriers de Marfeille craignent de
compromettre le crédit de leur fdbricatioll, en adoptant
Honoré Mathieu pour leur confrere; c'en parce qu'ils ne
voudroient pas rivalifer avec un ouvrier qui certainement ne
leur cede pas en talens ni en expérience; c'en parce qu'ils
regardent comme des intrus tous les maîtres qu'ils n'ont
point créés; c'en parce qu'ils regardent comme vicieufes
touees les réceptions dont ils n'ont pas gagné les droits j
c'en que ne ,pouvant pas difputer aux maîtres reçus dans
cerre.. ville le privilege de s'établir à Marfeille, ils voudroient
en emp~cher l'effet en contenant la validité de leurs récep'
tions fous cous les prétextes poffibles.
L'allégation des Serruriers, qui conÎtfie à dire qu'Honoré
Mathieu a été reçu maître fans faire aucun chef-d'œuvre,.
fe trouve détruite par la délibération qui -le reçoit; elle porte
que le chef-d'œuvre qui lui a été prefcrit & auquel il a travaillé dans la boutique d'un maître Serrurier, a été vu, examiné & approuvé comme conforme acx regles de l'arr. Les
délibérations des Corps d'arcs & métiers font pleine &
entiere foi en jufiice, par rapport à cout ce qui a rr:iit aux
réceptions des afpirans. Les maîtres qui procedent à ces
réceptions ont un caraél:ere légal qu'ils tiennent de l'étahliffement de leur Jurande; ils rempliffent dans cette partie des
fonél:ions qui leur font confiées par les Loix qui régiffent
leur Communauté. Comme Juges du chef-d'œuvre ou comme
Experts, ils font crus fur le.ur affertion, en tant que leur jugement ou leur rapport n'en point attaqué.
L'Arrêt rendu en faveur de Touchart, contre les Serru-'
riers de Marfeille, jugea que fa réception ne pouvoit pas
être débattue de nullité, fous prétexte qu'il n'avoit pas pu
faire le chef-d'œuvre qui lui avait été prefcrit. On jugea que
la preuve par témoins ne peut pas être admife contre la
preuve écrite réfultante des délibérations des Corps d'arcs
& métiers.
�DU
l)ALAIS
DB
PROVENCE.
317
Quand les maîrres d'un art prefcrivenr un chef· d'œuvre ,
i!s ufent de précaution, pour que l'afpiram n'en préf'::nte
pas un autre lors de fa réception, ou pour qu'il n'emprunte
pas le fecours d'une main étrangere. Dans la plùpart des
Corps d'arts & métiers, l'afpirant efi: obligé de travailler au
chef-d'œuvre dans la maifon d'un maître, qui deviem fon
furveillam jufqu'à ce que l'ouvrage foit fini; l'on enferme le
chef-d'œuvre dans une cailfe à trois clefs, dom deux fom remifes à deux des Syndics, & la troilieme à l'afpirant, où l'on
marque du poinçon du Corps coutes les pieces qui doivent
compofer le chef-d'œuvre. Chaque communauté a {es ufages,
mais toutes y apportent les précautions nécelfaires pour obvier aux fraudes & aux abus qui pourroient fe commettre.
De forte que quand les maîtres Jurés d'un Corps difent avoir
vérifié & approuvé le chef-d'œuvre qui leur a été préfenté
par l'afpirant, MS certifient par-là qu'ils ont vérifié fi les formalités d'ufage ont été remplies, & qu'ils ont reconnu le
chef-d'œuvre préfenté par l'afpirant ~our être fon ouvrage,
& pour être conforme à celui qui lui avait été prefcrit par
le Corps.
L'article '2. des Statuts des Serrurier'!;, qui veut que la récep.tion des maîtres fe falfe en préfence des CO:lfuls & d'un Seigneur-Commilfaire, efl: tombé en défuétude; depuis un temps
immémorial il n'efi: pas exécuté. Or, fi les Loix publiques perdent leur force & leur autorité par leur inexécution, comme
s'en explique la Loi 32, §. r ,if. de legibus, en ces termes,
,Leges rempare fenefcunt & evanefcunt, & comme l'anefl:ent
Cujas fur la Loi 1 de jujlitia & jure, & Boniface, tom. 1;
liv. 2, tit. 26, nO. 22, à combien plus forte raifon une
Loi privée, de pure formalité, telle que la difpofirion d'un
article inféré dans les réglemens d'une communauté d'arti.
fans, ne doit-elle pas être abrogée par un ufage, par une
coutume contraire, dont l'origine fe perd dans l'obfcurité des
temps; à combietl plus forte raifon ne faut-il pas regarder
comme abrogée & entiérement éreinte une Loi dom l'inobfervance efl: moins l'ouvrage des Serruriers d'Aix que de la
Loielle-:-même, qui n'eL! point praticable dans nos mœurs.
�318
Jou RNA L
Il Y a plus: la difpofition de cet article ne ftlt. elle pas
abrogée par fon inexécution, l'omiffion de cette formalité ne feroit jamais capable d'aonuller la réception d'Honoré Mathieu; l'erreur commune excufe des infraaions à la
Loi; elle tend à valider tout ce qui ell: fait contre fa difpo:fition, quand il paroît par un ufage ancien & conll:amment
fuivi que l'on efl: en coutume de s'en écarter, error communis facit jus.
.
Par Arrêt du 2. l Juillet 1780 , an rapport de Mr. le Confeiller de Thorame fils, la Cour, fans s'arrêter aux fins fub:fidiaires des Syndics des Serruriers de Marfeille, confirma
la Sentence; il Wt dit n'y avoir lieu à prononcer fur la demande d'affill:ance en caufe & garantie contre les Serruriers
d'Aix; ceux de Marfeille furent condamnés à tous les dé.
pens. Ecrivant Mes. Gaffier & Rambot.
ARR Ê T
LI.
Le luge jugeant mlme confulairement ne peut cumuler le
déc!ùzatoire avec le fonds.
E 2. Avril 1773' le fieur .Inguimbert, Chirurgien du ~ieu
de Roquebrune, fit un bIllet à ordre au fieur Rhoudler,
Négociant du même lieu, de la fomme de 2.)49 liv. valeur reçue comptant. Il paya quelques à comptes à différentes
reprifes; & fe trouvant en arriere pour 13 l 9 liv., Rhoudier
le fit affigner le 14 Avril 1778 pardevant le Lieutenant de
Draguignan, pour fe voir condamner confulairement au paiement de la fomme.
Le fleur Inguimbert déclina la Jurifdiaion, fur le fonde..;
ment qu'il n'érait pas Marchand; & le Lieutenant, par [;'1
Sentence du 28 Tuillet, jugeant confulairement, débouta le
. fieur Inguim~ert de fon décli'l1atoire, & le condamna à payer.
dans trois jours les IJ 19 liv., avec intérêts, dépens & con..,
trainte par corps. Appel de la part du :fieur Inguimbert.
L
�318
Jou RNA L
Il Y a plus: la difpofition de cet article ne ftlt. elle pas
abrogée par fon inexécution, l'omiffion de cette formalité ne feroit jamais capable d'aonuller la réception d'Honoré Mathieu; l'erreur commune excufe des infraaions à la
Loi; elle tend à valider tout ce qui ell: fait contre fa difpo:fition, quand il paroît par un ufage ancien & conll:amment
fuivi que l'on efl: en coutume de s'en écarter, error communis facit jus.
.
Par Arrêt du 2. l Juillet 1780 , an rapport de Mr. le Confeiller de Thorame fils, la Cour, fans s'arrêter aux fins fub:fidiaires des Syndics des Serruriers de Marfeille, confirma
la Sentence; il Wt dit n'y avoir lieu à prononcer fur la demande d'affill:ance en caufe & garantie contre les Serruriers
d'Aix; ceux de Marfeille furent condamnés à tous les dé.
pens. Ecrivant Mes. Gaffier & Rambot.
ARR Ê T
LI.
Le luge jugeant mlme confulairement ne peut cumuler le
déc!ùzatoire avec le fonds.
E 2. Avril 1773' le fieur .Inguimbert, Chirurgien du ~ieu
de Roquebrune, fit un bIllet à ordre au fieur Rhoudler,
Négociant du même lieu, de la fomme de 2.)49 liv. valeur reçue comptant. Il paya quelques à comptes à différentes
reprifes; & fe trouvant en arriere pour 13 l 9 liv., Rhoudier
le fit affigner le 14 Avril 1778 pardevant le Lieutenant de
Draguignan, pour fe voir condamner confulairement au paiement de la fomme.
Le fleur Inguimbert déclina la Jurifdiaion, fur le fonde..;
ment qu'il n'érait pas Marchand; & le Lieutenant, par [;'1
Sentence du 28 Tuillet, jugeant confulairement, débouta le
. fieur Inguim~ert de fon décli'l1atoire, & le condamna à payer.
dans trois jours les IJ 19 liv., avec intérêts, dépens & con..,
trainte par corps. Appel de la part du :fieur Inguimbert.
L
�1.,
DU
PALAIS
DE
PaOYENCE.
319
Le
Seprembre, Ordonnance du Lieur~llanr de nonobl:'
tant appel; le 26, requêre à la Cour en appel 5 deux Sentences & en tout en état, & Je 3 Mars 1779 décret de
renvoi en jugement, le tout en érar continué.
On diCoit pour le fieur Inguimberr, qu'il n'éroit ni MarI>hand ni Négociant. Il n'avait donc pu êrre affigné con fulairement pour le paiement d'un fimple billet à ordre, qui ne
Coumet à la JariCdiél:ion Confulaire qu'autant qu'il eH fouCcrit par un Marchand à l'ordre d'un autre Marchand. On obCervoit que le fieur Inguimbert ayant marié Con fils en 1772
avec la Dlle. Amic, à laquelle il fut conflitué en dor la
fomme de 1 )000 liv., avec promeife de la part du fieur
Amie d'aifocier Con beau-fils dans Con commerce, les créanciers du fieur Amic ne recevant pas le paiement de leurs
créances, firent appoCer le Ccellé Cur tous les effetS & marchandiCes du magafin. Des amis communs râcherent d'arranger cette affaire, mais leur projet ne put êrre rempli;
les pourCuites devenoient plus violentes; pour les terminer,
il fut convenu entre le fieur Rhoudier & le fieur Ingimbert
pere, que ce dernier lui feroit des obligations pour la Comme
de 9163 liv., moyennant quoi Rhoudier Ce chargeroit de
payer aux différens créanciers les Commes à eux dues; les
fcellés furent ôtés à cette condirion. Ces billets fUrent fairs
en forme de billets à ordre. Cette circonHance ne Cauroit le
confliruer Nég<;>ciant. Ces différens billers fouCcrirs le même
jour & pour la même caufe ne peuvent lui êrre oppoCés
comme des aél:es de commerce. Il a communiqué des aél:es
par leCquels il confle qu'il n'a jamais eu la qualité de Négocianr.
On répondait que l'art. 2 du titre 12 de l'Ordonnance du
Commerce veut que les Juges-ConCuls connoiifenr de tous
billets de change faits entre Négocians & Marchands, ou
dont ils devront la valeur. Pour le Courien de la compétence, le fieur Rhoudier communiqua 1°. le rôle des mar.chandifes livrées par le fieur Inguimbert pere, tiré de Ces livres de compte; il commenc;oir le 24 Janvier 1776, & fini!foit au 10 Mars 1778. Le prix de tous les différens .ar-
�32.0
Jou RNA t
ricles expédiés dans le courant de ces deux années (e mon':
toit à 247 liv. 7 f. que le lieur Inguimhert pere re~ut des
mains du fie ur Rhoudier, & pour laquelle il concéda quittance;
le compte éwit écrit de la main du lieur Inguimbert pere,
& ligné par lui. 2°. Une lettre écrite par te lieur Inguimbert pere le 8 Mai 1 n
au fieur Larmodieu, 'Négociant
à Toulon. Dans cette lenre, il Y parle en (on nom & en
celui de (on fils; il parle des marchandifes qu'ils ont achetées conjointement avec fan fils à Lorgues, Draguignan,
Saint-Tropés; il ajoute avoir tout payé, à l'exception du
ref1:ant du billet du lieur R:houdier qu'ils n'ont pu acquitter,
attendu le défaut de vente.
n communiqua un certificat des Confuls de Roquebrune,
qui déclaraient que le lieur Inguimbert profelfoit conjointement avec fan fils unique la profeffion de Chirurgien & de
Marchand; qu'il achetait annuellement des cocons & autres
marchand ifes ; qu'il vendoi't ég'alement les marchandifes qui
étaient dans le magafin de fa mai[ofl; qu'il était réputé Négociant dans le lieu & dans la contrée.
Me. Meriaud, Subf1:itut, portant la parole, obferva que le
billet dont s'agilfoit était caufé pour valeur reçue comptant;'
ce n'était point un. billet de change, ni pour valeuT' reçue en
s
marclza ,zdifes.
L'art. 2 du titre 12. de l'Ordonnance de commerce porte
que les Juges-Confuls connaîtront de tOUS billets de change'
faits entre Négocians & Marchands, & entre toutes perf'Onnes pour' lettres de change, avec rerrlife d'argent faite de.
Place en Place. L'ar-t. J défend aux Juges-Confuls de connaître des billets de change entre particuliers autres que Négo.cians & Marchands,' & veut que les part,Ïes fe poupvoient
pardevant les Juges ordinaires, c;omme pour de limples pro-,
melfes.
Telle ef1: la tegle que le lieur Inguimbert réclame en fa
faveur; (a qualité de Négociant n'eH: point alfez conf1:atée·
pour le (oumettre à la Jurifdié!:ion Confulaire. On ne hli, oppofe qu'un feul billet à ordre foufcrit en faveur de (on créançier. Un feul aéte ne conf1:itue p<lS la qualité de Négociam j'
il;
�f
DU
PALAIS
DB
PROVENCE.
32r
il en faut pluGeurs; & li réellement le lieur Inguimbert étoit
Négociant, on n'auroit pas eu de la peine à fe procurer des
aél:es de commerce réitérés depuis l'année 1774 que le billet
dont s'agit avoit été foufcrit par lui; ceux qui lui fone oppofés ne font pas affez caraél:érifés pour établir la qualité de
Négociant. La prétendue fociété avec fon fils ne paroît nulle·
parc, rien ne la conflitue; le fleur Inguimberc fils prend
feul la qualité de Négociant; ce titre lui efl donné dans
une foule d'aél:es.
C'efl pour arranger les affaires de fon fils, que le lieur
Inguimbert pere foufcrit cette obligation; c'eH vis-à-vis
le lieur Roudier qui n'avoit aucune qualité .par lui-même ~
n'agiffant qtle pour les intérêts des lieurs Lebmn, Marchands de Brig-noles, que l'obligation efl concraélée; ce
n'étoit pas même pour un objet de commerce; depuis
cette époque il étoit narurel que le lieur Inguimbeft s'in.térefsât au commerce de fon fils, puifqu'il avoit fotlfcrit·
pour lui des obligations conlidérables; delà vient la caufe
de la lettre qu'il écrivit au lieur Larmodieu; cette lettre:
fe rapproche de l'époqlle de l'aHangemen.c; elle n.e prOlJVe:
aucun commerce.
Le certificat ·des Confuls ne peut être d'aucune confidération, parce que ceux qui l'one donné paroiffent fufpeél:s:
aux yeux de la Juflice, d'a pres la preuve de parenté qui
exiGe entr'eux & le fieur Roudier;. & cette circonHal)ce
ne permet pas qu'on y ait égard, fur - tout 10Ffqu'il n'y
a d'autre preuve dans le procès pour conHater l'état de:
Négociant.
Toute perfonne peut prendre· des affurances fans' êtreMarchand; & quand même le débiteur feroit l'épuré tel
par rapport à quelque aél:e de commerce, ce ne feroit.
que p~r accident; il faudroit toujours en revenir à fon
érat ordina ire, ûnG qu'il eG décidé par Savary, tom. 2,
pag. 488. Le billet à ordre· ne change pas la nature de
l'obli<Tation; il dl: toujours regard'é comme limple pro.me
lorfqu'il ne touche point au commerce,
D'aprè.s cette difcuffi.on, on Il'héfireroit pas à· pron(}n.~e~
Ire",
S. ~
�32.2.
Jou RNA 1) <
la caifation de la Sentençe, fi elle avoit été renoue pitr
le Tribunal confulaire; mais Inguimbert ne peut être pourfuivi ailleurs que pardevant le Lieutenant de Draguignan;
c'en: le Juge naturel ·d~s panies; tout ce qu'il peut efpé'rer, c'en: de n'être pas condamné avec contrainre par
corps; cette prononciar,ion ne doit, être envifagé~ dans
la Sentence du Lieutenant jugeant confulairement que
~omme une injlill:ic~, &. non comme une nullité, parce
qu'il pouvoit feul connoître de la matiere. Il n'en eH pas
du Lieutenant jugeant confulairemenr comme des JugesComuls; ce dernier Tribunal ne c.onnoît que des caufes
qui lui font nommément affeél:ées par fon Edit de création. Le Lieutenaot au conrraire remplit toujours le même
Tri\>una1. L'intérêt du commerce, le défaut de territoire
des Jurifdiél:ions cpnfulaires a été le motif de la Déclara~
tion du Roi de t7S9, qui attribue allJ! Lieutenans la faculté de juger confl:1la,irement les caufes de Marchand à
Marchand avec tes; formalités obfervées dans les Jurifdictions confi.llaires; on ne lui
pas cepeadanr donné le
même privilege, pu.ifqu'il ne peur prononcer le nonobllanc
appel, & qu'il ne peut juger fouverainement jufqu'à la
fomme de soo liv. Ces privileges appartiennent au Tribunal, non point à la perfonne; a.n6 fous ce point de
vue OR ne peut attaquer la Semence du Lieutenan.t comme
nulle, puifqu'on ne peut renvoyer à tout autre qu'à lui
pour pourfuivre, & qu'il n'y a que la comrainte par corps
qu'on doive retrancher de la Semence.
Me. Meriaud obferva enfuite une nullité eifentielle, qui
eil celle qui réCulte dé la prononciation du Lieurenaut,
qui a cumulé dans la même Sentence le déclinatoire, & le
fonds.
Rodier , fur les fins de non procéder, pag. 72, dit que
les Cours fouveraines peuvenc juger en la même Audience
les fins l'le n.Qn procéder & le fonds de la caufe; elles le
font ordinairemem par deux; Arrêts féparés, pour ne pas
cumuler l'un avec l'au.rre. Il n'en eH pas de mê'me des
Juges inférieurs; ceux-ci, s'ils déboutent des fins de non
a
�DU
PAL AIS
D E
PRO VEN C E.
323
procéder, doivent renvoyer au premier jour pour plaider
fur le fonds i cette différence fondée fur ce que dans les
JurifdiB:ions inférieures il faut donner le temps ~ la parrie
, d'appeller, fi bon lui femble, du Jugement qui l'a déboutée des fins de non procéder, & il ne convient pas
d'obliger la parrie à dédarer cet appel à la fùce du Juge.
C'ell: précifément ce qui fut jugé lors de l'Arrêt de
1769 fur la requilition de Mr. de Colonia, Avocat-Général,
où dans la même Audience on pronom;a par deux Arrêts
différens fur le dédinatoire & lï.lr le fonds.
Mr. le Nain, Avocat-Général au Parlement de Paris ~
dans un plaidoyer fur lequel int&vint l'Arrêt du 28 Novembre 1707, rapporté. dans la continuation du Journal
des Audiences, dit que quand celui qui a propoft des fins
de non procéder n'irif'zfle plus au renvoi, & conclut au fonds,
le Juge peut prononcer de fui!e fur le fonds; à plus forte
raifon le pourroit-il, li On fe départoit expreffément du
dédinatoire; mais il paroît plus régulier de rendre un premier appointe ment fur les fins de non procéder, & de
renvoyer à un autre jour fur le fonds. C'efl ce qui fut encore jogé par l'Arrêt du 13 aB:obre 1729, qui conformé..;
ment aux conclulions de MM'. les Gens du Roi, calfa la
Sentence des Juges - Confuls entre la DUe. Petit & le:
fieur Coll:e, Négociant de la. ville de Marfeille, où le dédinatoire & le fonds avoient été cumulés.
Me. Meriaud obferva qu'avant de permettre à l'une des_
parties de plaider au fonds, il faut juger le déclinatoire-que l'autre propoCe; fi eUe n'efl: point admife dans fa demande en renvoi, les Juges lui ordonnent de plaider pardevant eux, & la condamnent avec dépens. Si au contraire le demandeur a incompétemment fait affigner, il doit
être renvoyé pardevant les Juges qui en doivent connoître"
& condamné aux dépens. Le déclinacoire jugé, la Sentencedoit être lignifiée à la partie déboutée ou renvoyée. QU2.nd:
c'ell: le demandeur au principal qui fuccomhe, il efi trèsrare qu'il appeUe de la Sentence, pour folltenir une compéte.nce que les Juges pardevant IcfCluels il a affigné n'on!::
Ss~
�32.4
J 0 'II RNA t
pas reconnué. Il n'en efi pas de même quand il efl ordonné
au défendeur, malgré fan déclinatoire , de plaider pardevant
ces mêmes Juges; airez fouvent il en appelle comme de
déni de renvoi & d'incompétence; c'efl: pourquoi il faut
néceirairement lui !ignifier la Scntence, avec fommation
de .comparaître de nouveau pour plaider fur le fonds.
Me. Meriaud conclut à ce que l'appellation & ce dont
était appel fuirent mis au néant, que la Sentence fÎlt déclarée nulle, & les parties renvoyées pardevanr le Lieutemm de Draguignan, comme Tribunal ordinaire pour pourfuivre' fur le fonds.
Par Arrêt du ') Août 1780, prononcé par Mr. le Pré!ident de Saint-Vincent, la Sentence fut déclarée nulle; il
fut dit n'y avoir lieu à prononcer fur la furf~ance, & les
parties furent renvoyées au L,ieutenant de Draglllgr'an,
autre que celui qui avait jugé, pour être procédé confulair.ement pardevant lui filr le fonds; Roudier fut condamné
aux dépens. Plaidant Mes. Gaffier & Dut5reuil cader.
ARRÊ.T
LII.
Tout Juge efl-il compàent pour connaître de l'avération d'une
prom4fe privée?
.
On ne peut faifir provifoirement en force d'une promeJfe privée;
•
quoique reconnue & avérée.
M
E. Barri, Doél:eur en Médecine du lieu de Meaunes;
fit un billet à ordre à la Dlle. Trell:our, Marchande
d'indiennes de la ville 'de Marfeille, de la fomme de 72.0
liv. conçu valeur reçue comptant. A l'échéance, la Dlle.
Tr~aour fe pourvut au Lieutenant - Civil de Marfeille en
avération & en condamnation du montant du biller.
Le 17 Mai 1779 le billet fut avéré par défaut; le 2.8
elle_ demanda la permiffion de faiul' pl'ovifoirement les biens
du [jeur Barri; décret qui le lui accorde. Appel de la part
�DU
PALAIS
DE
PR
VENCE;
32)
u fieur Barri; il el!: anticipé le 18 Juin; le 30 Novembre
il fe _départ de fan appel. La Dlle. Trefiour rejette fon
département, parce qu'elle avait deja préfenré, & préfenre
le 17 Décembre une requête en évocation du fonds. Le
fieur Barri tétraél:a alors fan département, & préfenta une
requête incidente en appel du décret rendu rar le Lieutenant de Marfeille qui permettait la hlifie provifoire.
On difoit pour lui, que lorfqu'on n'ell: pas originaire d'un
lieu, on n'en peut être réputé citoyen, & Y acquérir domicile qu'après y avoir demeuré l'efpace de dix ans, & y
avoir tranfporté, pour ainIi dire, fa famille & fes biens,
à moins que par aél:e public accepté par la Communauté.
on n'ait déélaré l'intention d'y vouloir fixer fan domicile;
c'ell: la difpofition du Statut de Provence, & ce qu'on
collige encore du chapitre 8 des Statuts particuliers de la
ville de Marfeille.
La circonll:ance du lieu où la promeil'e a été faite, &
où le paiement doit être préfomptivement fait, n'ell: pas
attributive de Jurifdiél:ion, fi ce n'ell: entre Mrrchands &
Négocians.
Les voyages que Me. Ba'rri fait par intervalle 11 Marfeille
ne font qu'accidentels; il loge dans une auberge, & loue
à courts jours une chambre garnie; il n'y efi qu'en qualité
de voyageur ou de paifager. Le Lieutenant de Marfeille
étoit donc incompétent pour connaître de la demande de.
la Dlle. Trell:our.
L'article 10 de l'Ordonnance de Rouffillon porte, à la
vérité, que tout Juge efi compétent pour l'avératioll ou reconnoijfaoce des écritures privées; mais fa difpofition n'ell:
pas indéfinie; elle ell: rell:riél:ive contre les perfonnes trouvées fur les lieux hors de leur domicile. Cette compétence accidentellement & rell:riél:ivement déférée à tous
Juges n'ell: cependant pas attributive de Jurifdiél:ion pour
le fonds de l'aél:ioll.
L'Ordonnance de 1667, tir. 12., art. '5, s'explique enc-ore plus difertemenr; elle dill:ingue trois cas fur le POllv{)ir des Juges en fai~ de reconnoiifance des' écritures pri-
�3~6
Jou
Il.
NA L
vées; elle vellt d'abord qu'abftraéHon faite du princlpâl i.
l'avération ou la reconnoiffance des écritures foit faite
pardevam le Juge ordinaire du domicile de la partie contre
laquelle on demande la reconnoiffance. EUe ordonne enfuite qu'en cas de comeftation ou de dénégation de la,
piece, le Juge du domicile renvoie les parties pardevant le
Juge où dl: pendant le procès principal; elle ne permet
enfin au Juge faifi de ce principal de connoître incidemment ou par provifion de l'avération d'une piece privée,
que lorfque la partie contre laquelle on ..,eut s'en fervir,
eft domiciliée ou préfente au lieu où l'affaire eft pendante;
autremmt, dit Mr. l'Avocat-Général Talon fur les conférences de cet articl'e-, il feroit déraifannable d'obliger une
partie de quitter fan domicile pour venir. faire une jimple reconnoiffance. qui peut il moins de· frais s'opérer volontairement'
pardevant Notaire, ou invitâ parte pardevant le Juge de fall
Mmùm.
.
On répondoit que celui qui va établir une maifon hors.
de fan domicile d'origine, en acquiert un nouveau dans
le lieu où il s'établit. Ainfi il a deux domicile~, ce qui.
ne repugne ni à la Loi Romaine, ni à la Jurifprudence
fran<;aife~ Fromental le décide ainli va. domiâle; il rap-.
pone. deux Ar.rêts qu i ont jugé que la même perfonne peut
avoir deux domiciles aél:uels dans deljx différens lieux. La,
Loi Laheo ,if.. ad muniâpalem, le porte de même.
Delà vient que tous les jours l'on affigne hors du lieu'
de leur domicile d'origine des perfonnes qui auroient faie.
rélidence dans une ville, & qui y auroient contraaé des
obligations. La 'Cour le jugea ainli le ~6 f.uin 1766 ful"
les conc1ulions de Mr. l'Avocat- Général de Colonia; ill
s'agilfoit d'un Berger de Velaux qui avait acheté des herbages limés dans le terroir de la ville d'Aix; il fut affigné,
en paiement devant le Juge Royal; il déc1i,na, fGlUS pré_
texte que l'aél:ion étant perfonnelle, ou tout au moins mixte i
il f.1UoiI l'attaquer à Velaux. Mr. de Colonia foutint &
l' I~~rêt jugea que le féjour fait par' le Berger dans la pro_.
~n~t~ dont il avoit acheté les herbes, lui avoit.ac<1.uis do.~.
�DU
PALAtS
DE
PROVBNCE.
32 1
rnicile dans le terroir d'Aix à l'effet de pouvoir y être
a/Iigné.
Dane une affaire jugée le 20 Juillet 1771 entre le lieur
Audran & les freres Pourret, il fut arrefié par Me. Cauvet
porrant la parole pour MM. les Gens du Roi, que pour
avoir deux domiciles il fuffit d'avoir maifon garnie en deux
lieux. C'el!: fur ce principe que filt rendu l'Arrêt rapporré
au Journal du Palais, tom. l, pag. 1°4, qui jugea que le
Prince de Guemené avoit deux domiciles, l'un à Paris,
l'autre en Anjou, parce qu'il avoit maifon garnie à J'un
& l'autre lieu. C'eft auffi la décilion de Rodier fur l'Ordonnance de 1667.
Lorfque notre Statut a dit que pour être réputé citoyen
d'une ville, il faut avoir déclaré fon intention ou y rélider
depuis ,dix ans, il traite le domicile relativement aux privileges municipaux, & il ne s'occupe nullement du domicile par rapport aux alIignations. Auffi les Commentateurs
attel!:ent que les alIignations doivent être données dans le
domicile de rélidence, que l'alIignation feroit nulle pardevant le Juge du domicile d'origine où le défendeur ne feroit
plus fa demeure, & que comme on peut avoir fa fonune &
fa demeure partagées en différens endroits, on peut avoir
deux domiciles.
Le lieur Barri faifoit des affaires à Marfeille; il Y lignoit
'àes aifurances, il Y avoit maifon j il n'a même quirré Marfeille qu'à la mort de fan pere; il avait donc domicile dans
cette ville, & il Y a pu être alIigné pour une obligation qu'il
y avoit contraétée.
D'ailleurs il el!: de maxime que tout Juge el!: compétent
pour l'avération; c'el!: la déciGon de l'Ordonnance de 1539,
arr. 92 j de celle de Rouffillon, art. 10; l'article 5 du titre 12de l'Ordonnance de 1667 n'a rien changé à ces Loix. Le
but unique de cet article el!: que la partie affignée en avé·
ration puiife être préfente; ce n'el!: que dans le cas où la
dénégation el!: faite pendant procès qu'il faut aller au Rapporteur. Mais tout Juge rel!:e compétent pour avérer une
prome1fe prépara~oirement à l'aérion qui el!: à introduire.
�JOURNAL
3~8
C'ef!: aiofi que le décide Joulfe, jujlice ci'Vile, tom. l, pag~
171.·
La même Loi décide l'appet incident àu décret portant
permiffion de faifir par alfurance. L'art. 10 de l'Ordonnance
de RoiJffillon dit que quant à la garnifon, fi elle ef!: requife ,
les Juges la pourront donner, en baillant dél-ai compétenr.
La reconnoilfance ordonnée par le Juge change li! cédule
en contrat, qui a dès-lors exécution parée, avec cette dif·
férence reulement qu'elle n'a lieu qu'avec la permiffion du
Juge; au· lieu que fi le contrat était foumiffionné , il fuffiroit
de prendre des lettres de clameur.;· c'ef!: encore ce que dit
Jou!re, pag. 210. Lorfque la reconnoilfance d'un billet ef!:
faite pardevam un· 'Juge Royal, elle- rapporte garnif(;)n de
main; c'e.fl: ce que dit Serpillon dans fon Code civil fur
l'art. 'î du titre 12 de l'Ordonnance de 1667, où il· cite The.veneau" ·Boutaric & Lapei·rere.
S.ur l'évocation du fônds on difoit pour l'intimée, qu'îl y
avolt lieu de· procéder au jugement du fonds, parce qu'il s'agiifoit d'une promeffe reconnue depuis le mois de mai 1779:
Les évocations n'ont été introduires précifémem que pour
mettre un terme aux chicanes. Toures les fois ,que la matiere
peut être jugée à l'Audience., elle peut être évoquée ; l'OrdQnnance n'y met que cette condition. Ici le titre dl: clair,·;
le fieur Barri el!: débiteur, fa condl1ite prouve qu'il veut tergiverfer. Le condamner, ce fera lui épargner des frais, &
à la Dlle. Trefiour de nouveallx délais. Il efi d'ailleurs de
maxime conf!:ame· au Palais, que lorfque l'incompétence
n'efi propofée que par griefs, elle fe cumule avec le fonds i
par conféquem en jugeant pour la compétence, on peilt juger
le fonds.
Me. Meriaud, Sllbfiitut, obferva que pour demander te paie";
ment de la fomme que le billet à ordre renferme·, il faut néce!rairemenc que la partie connoilfe. d'une ma-niere non équivaque, qlle la fignamre qu-i fe trollve au bas du billet-, e!li
précifémenc la figoatllre de celui contre lequel on réclame.
Dans les aétes. publics la foi ajoutée au Notaire & aux rémoins. dif~enfé de· t.outes f~rmali.tés. Dans les aÇl;es privés
Qtl
�DU
PAL AIS
DE
PRO VEN C E.
32.9
on procede par la voie de la reconnoiifance & d'avéra tian.
Les écritures privées ainG reconnues & vérifiées, deviennent
comme des aél:es publics.
Rodier examinant la quefiion de favoir devant quel Juge
doivent être faites les reconnoi1fances d'écritures, obfervè qu'il
faut dillinguer les reconnoi1fances qu'on demande indépendamment de tout procès, de celles qu'on demande incidemment à une condamnation. Les premieres peuvent être demandées non feulement devant le Juge dn domicile de la partie interpellée, fait Royal ou Bannerel, mais même devant
tour Juge laïque du lieu oÙ la partie interpellée fe trouve,
quoique hors de fon domicile, parce que tout Juge ell compétent pour l'aveu ou reconnoi1fance, fuivant l'Ordonnance
de RoulIillon, art. X. La raifon en eH que la reconnoi1fance
n'ell qu'un préparatif de l'aél:ion. Les reconnoi1fances incidentes doivent être demandées & faites devant le Juge oÙ le
procès eH pendant, fi la partie qui doit la faire dl domiciliée là oÙ le Juge tient fa (éance, finon elle fe fera pardevant le Juge Royal du domicile de la partie.
Il ell fi vrai que tout Juge eH compétellt pour avérer, qu'il
a été jugé par un Arrêt rapporté par Boutaric, que fi un EcdéfiaHique fe trouvoit affigné devant le Juge féculier en reconnoi1fance & condamnation d'une prome1fe , & qu'il demandât fon renvoi devant le Juge ecc1éfiaf1:ique, le Juge féculier prononcerait préalablement fur la reconnoiffance.. Cet
Arrêt va même plus loin;· car il ajoute que le Juge féculier, en renvoyant pour difcuter l'effet de la prome1fe ,. pourrait néanmoins prononcer la condamnation provifoire. Mais.
nous ne pouvons reconno1rre cette exécution provifoire quant.
au fonds, lorfqu'elle fe trouve émanée d'Un Tribunal incompétent; l'ordre des Jurifdiél:ions doit être inviolablemen.t obfervé; les feules Jurifdiél:ions confulaires ne peuvent point::
connoÎtre de la reconnoiifance des billets; elles fom obligées:
de renV<lyer les parties pardevant le Lielltenant, & cela:
parce qu'elles n'ont point de territoire.
D'après ces autorités, qui ne fauroient être plus c1air.es~
T
t.
�330
Jou Il. li' A L
le Lieutenant de Marfeille a pu procéder à la vérification
du billet dont s'agit; fon Ordonnance ne fauroit être attaquée par moyen d'incompétence, puifqu'il a fait un aél:e
néceffaire, préparatoire de toute aél:ion. Cette Ordonnance
n'obligeoit pas Me. Bi;lrri à le reconnoître pour fon Juge
fur la condamnation fonciere ; il pouvoit propofet fes moyens
d'incompétence, décliner fa Jurifdiél:ion, fans qu'on pût lui
oppofer la procédure en vérification comme un aél:e propre
à déterminer la qualité du Tribunal.
Quant au décret de faifie provifoire rendu par le Lieutenant, Me. Meriaud obferva que l'art. 2 du ti re 33 de l'Ordonnance de 1667 veut qu'il ne fait fait des faifies & exécurions' que pour des chofes certaines & liquides en deniers
ou en efpeces ; fur quoi le Commentateur ajoute que pour
qu'une faifie fait valable, il faut qu'elle foit faite en vertu
d'un titre exécutoire, c'efi-à-dire en vertu d'un contrat ou
d'une ohligation en forme authentique, palfé fous fcèl
]toyal ou de Seigneur, ou en vertu d'un Jugement dont il
n'y a point d'appel, ou qui s'exécute par provifion nonobftant appel; ita fenlit Rodier.
Il n'efi cependant pas totljours néceffaire, pour pouvoir
{;1ilir & exécuter, d'avoir un titre authentique & en bonne
forme; les propriétaires des maifons, métairies & rentes
fàncieres peuvent faifir & enlever par exécution les meubles de leurs locataires, fermiers ou débiteurs pour sûreté de
leurs loyers, rentes & fermages; ce privilege forme une
exception à la regle, & efi bne fuite de celui qui affeél:e
tous les meubles du locataire à la sûreté des lieux qu'ils garnilfent ; c'efi queiquefois le feul bien qu'il poffede , & le
tranfport ou la vente priverait à jamais le propriétaire de fe
procurer le paiement.
,
Il efi d'autres occafions 0(1 l'on efi également difpenfé
-de recourir à l'autorité du Juge; lorfque le débiteur efl: fufpeél:
de fuite, lorfqu'il ne donne par lui même aucune sûreté,
le créancier a le droit de s'affurer par faifie préalablement
& avant routes condamnations, fur les meubles & effets qui
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
331
lui appartiennent. Cette poffeffion préparatoire le raffure fur
les pourfuites qu'il en: obligé de faire pour légitimer fa créance
& en obtenir la condamnation légale.
Mais hors de ces cas vraiment favorables, & lorfqu'il ne
s'agit entre les parcies d'aucun contrat foumiffionné, qui de
fa nature oblige & affeél:e les biens du débiteur, on ne peurpoint obtenir de faifie provifoire con.tre lui.
Une promeffe privée n'a pas cecaraélere d'authenticité que'
la Loi defire; il n'eH pas décidé que le particulier contre lequel on fe pourvoit, foit véritablement débiteur; fa fignature peut avoir été furprife; il peur oppofer des objets de
compenfation ; il peur ne rien devoir, & dès-lors à quels.
abus ne donnerait-on pas lieu, fi dans le commencement
de l'affignation èn procédoit à une faifie ? Cet excés de rigueur renfermeroit cour à la fois la violation des droits du.
citoyen & des regles établies.
Me. Meriaud conclut à ce que l'appellation envers l'Ordonnance d'avération fût mife au néant, & que faifant droit
à l'appel du décret qui permettoit la faifie provifoire, le décret fût déclaré nul & comme tel caffé, & la DUe. Trefrow::-"
débourée de l'évocation.
Pal' Arrêt du 9 Août 1780 , prononcé par Mr. le Prél1dent de Saint-Vincent, les conc1ufions furent fuivies; la Dlle~
Tre!l:our fut condamnée à la moitié des dépens , l'aut~e:
moitié compenfée. Plaidant Mes. Gaffier & Simeon fils~
e
ARRÊT
LII J.
La Cour efl dtpouil/ù de. la lTUltiere par L'Ardt fui ren.1I.oïe:
ail premier Juge.
L
Es fieurs Dufour Freres étoient en procès pour fixerquels éraieot les droits qui revenoient à chacun d'eux:
fur la fucceffion de leur pere dont ils étoient héritiers par:égales parcs, & pour fixer. en même temps la légirime due:
Tu..
�332
Jou
RNA L
au cadet fur la fucceffion materneU~ Toutes leurs contertations avoient été déférées à des Arbitres qui réglerent
leurs prétentions refpeél:ives p<lr leur Sentence du 17 Septembre 1774, homologuée par le Lieutenant d'Arles. Cette
Sentence porroît enrr'autres' difpofitions, qu'iJ feroit procédé par Experts au rapport de parrage des biens. Me.
Dufour avoit formé diverfes demandes; il releva appd de
cerre Sentence pardevant la Cour; & par J'Arrêt qui fut
rendll le 16 Mai 1776 au rapport de Mr. le Confeiller de
Beaulieu, la Cour faifant droit fur les den13ndes des parties, & après avoir adjugé à chacune d'elles différentes
fommes , confirma la Sentence au chef du rapport de partage, & en conféquence les panies furent renvoyé s pardevant le Lieutenant, autre que celui qui avoit homologué.
pour faire exécuter le furplus de la Sentence & l'Arrêt
fuivant leur forme & teneur.
Le renvoi fut reçu, & les parties procéderent en exéclltion de l'Arrêt pardevant le Lieutena'nt d'Arles. Mes.
Martin & Guibert, Notaires d'Eiguieres, furent nommés
Experts pour procéder au rapport ordonné.
Me. Dufour préfenta requête au Lieutenant, pour demander qu'injonél:ion flit faite aux Experts de remettre le
rapport par eux fait en l'état où il étoit. Les Experts remirent leur rapport; il en fut expédié copie à Me. Chapus?
Procureur du fieur Dufour.
Le' fieur Dufour préfenta enfuite une requête à la Cour
en prov,iGon contre Me. Dufour fon frere; celui-ci déclina,
& fur les requêtes refpeél:ives la caure fut renvoyée à l'Audience.
On diroit pour Me. Dufour, que la Cour avoit accordé
à Pierre Dufour deux provifions, mais' que c'éroit avant
la levée de l'Arrêt au fonds, dont l'exécution avoit été renvoyée au Lieutenant d'Arles, & avant la réception du
renvoi; que Pi<:rre Dufour ne pouvoit être regardé comme
pauvre, puifqu'il poffédoit une bafiide à Auron de la valeur
d'environ 1200 liv. & une roaifon à Sallon' de 12000 liv.;
que d'ailleurs il ne s'étoit point prérenté comme pauvre
�DU
PALAIS
DE
PROVIlNCE;
333
lors. de la demande au fonds, & que par conféquent il
fallait s'adreŒer au Lieutenant d'Arles qui éroit le vrai Juge
des parties par le renvoi que la Cour lui en avoir fait.
On répondait pour Pierre Dufour, que la Cour était
réellement compétente, puifqu'elle avait déja adjugé deux
provifions. Il efr de regle que tout Juge efr compérent
pour accorder provifion alimentaire, venter non patitur dilationem; à plus forte raifon la Cour qui efr le Juge de
toute la Province. On faifoit valoir la qualité de pauvre
confratée par le certificat pes Confuls de Sallon ; que d'ailleurs il devait 10000 liv. du prix de ·fa maifon, & que
celui de la bafiide d'Auron éroit encore dû en entier.
Me. Meriaud, Subfiitut, obferva que la Cour n'êtoit invell:ie de l'affaire des freres Dufour que par l'appel que
l'un d'eux avait relevé de la Sentence du Lieutenant
d'Arles ; l'Arrêt qu'elle a rendu, le renvoi néceŒairement
ordonné l'a dépouillée de route connoiŒance; la preuve
en ell: dans les pourfuites refpeél:ives des parties. S'il en
éroit autrement, on pourroit avoir deux procès pour le
même objet, l'un pardevant la Cour, & l'autre pardevant
le Lieurenant; il n'y aurait plus aucune regle, & chaque
jour on fe rrouveroit expofé à eŒuyer des jugemens différens & contradiél:oires. Mais le fieur Dufour oppofe des
préjugés; il préfente ·différentes provifions que la Cour lui
.a accordées au préjudice du renvoi.
Il ell: vrai que ces différentes provifions ont été comptées
au fieur Dufour de l'autorité de la Cour; mais peut-il s'en
prévaloir aujourd'hui pour établir la compétence fur laquelle
on ne difpuroit pas à ces différentes époques, & que l'on
contell:e à ptéfenr? Les fins de non recevoir peuvent-elles
être oppofées pour détruire & intervertir l'ordre des Jurifdiél:ions? Les parties elles - mêmes ne peuvent leur nuire
par leur acquiefcement; à plus forte rairon lorfque· l'une'
d'elles veut faire prononcer fur la compétence. Le fieut
Dufour ne pouvait que s'adreŒer au Lieutenant d'Arles,
{oit qu'on envifage fan intérêt, fait qu'on envifage la com~
pétence du Juge.
�33~
J
O· U RNA L
En droir, ce ne fonr que les perfonnés pauvres, dénuées de rour fecours ,qui peuvent venir en premiere inftance pardevant la Cour; c'efr la difpo!ition de l'Ordonnance
de Francroi'" Premier.. Mais cette Loi n'a poinr entendu.
que fous prérexre de pauvreté, le parriculier pût dépouiller'
les Jurifdiélions inférieures; l'Ordonnance ne s'applique
qu'aux perfonnes véritablemen.t pauvres, qui vivent fans'
état comme fans facultés. Quelles dangereufes conféquences.
ne réfulteroienr pas du fyfrême contraire! Tous les jours
les ciroyens feraient diHra.irs de leurs Juges naturels, &
les Tribunaux inférieurs perdraient une partie de leurs.
juHiciables. L'ordre public exige que l'on arrête un. abus.
qui le troubJ.erait ouverrement. Les Jufrices inférieures ont
toujours fait à cet égard les plus vives réclamations, & la,
Cour qui: leur' doit proteéli'ou, les a. toujour·s fa.vorable-.
ment accueillies: on pourrait cirer des Arrêts fans nombre
qui ont éré rendus fur ces forres de matieres, & qui n'ontpas permis que fi" hiérarchie des Tribunaux pû.t être arbi-trairement méconnue.
Les certificats de pauvreté expédiés par les Confuls du
lieu ont toujours é.ré euvifagés comme elfentiels pOUl' fixerla compétence de la Cour; ce point de fait ne peur être
mieux connu de perfonne que des Con fuis , qui font Juges
locaux fur ce point. n eH cependant arrivé des occanons
où l'on n'a eu· aU.cun égard à, ces certificats;. on les a
regardés plutôt comme l'ouvrage de la complaifance & de
. l'humanité, que de la juftice, & la partie qui a voulnles
détruire, a communiqué 4es preuves contraires pour conf~
tater l'aifance de fan Adverfaire.
Celui que le fieur Dufour a préfenré· des €onfuls de·
Salon & dl) Curé du lieu, fe trouve détruit par divers aéles:
que Me. Dufour fon frere a communiqués, qui conftatent
qu'il. poifede dans le lieu de plus grands biens que ceux
dont ils parleur, outre qu'il en polfede. d'autres' .ailleurs ,.
& fur-tout en Amérique.
Me. Meriaud conclut à ce que faifant droit au déclina--.
~ la requêJ.e'
.lQire propofé par--Me. Dufour
--- 1 fan.s... s'arrête!:
- ...... _ .
�DU
PALAIS
DB
PROVENCOZ:
~u
33~
lieur Dufour du 2.9 Mai 1779, les parcies & matiere fuffent renvoyées au Lieutenant d'ArIes pour y former teIles
demandes qu'elles aviferoient.
Par Arrêt du 12. AOl'!t 1780, prononcé par Mr. le Pré(ident de Saint - Vincent, la Chambre des Vacations fit
droit au dédinatoire , & condamna le fieur Dufour aux dépens. Plaidant Mes. Leder<: & Dubreuil cadet.
ARRÊT
LI V.
Comment fixer le' domicile d'une partie en fait d'aJlignation?
E fieur Chevillon, Négociant de la ville de Toulon;
était porteur d'une lettre de change de 603 liv. datée
de Toulon le 18 Juin 1774, tirée fur le nommé Gueit,
Négociant de Mar[eiUe, & payable par lOut le mois de Septembre fuivanr.
La lettre de ch.ange fut protellée faute de paiement, &.
fur la fignification du prorêt la femme de Gueit répondit
'Ciue fon mari ,étoit abfent depuis quelque temps. Les endoffeurs de la lettre de change donnerent des à-comptes,
& Chevillon ne rella plus créancier que de 3 S8 liv. Le S
Janvier 1779 il affigna Gueit pardevant le Lieutenant de
Toulon jugeant con[ulairement, pour le faire condamner
au paiement des 358 liv. L'Huiffier déclare avoir laiffé
<:opie en parlant à la perfonne de Gueit en domicile à
,Toulon.
Gueit foutinr que fon véritable domicile étoit à MarfeiUe i
'& non à Toulon, il demanda fon renvoi. Le 26 Janvier,
le Lieutenant rendit une premiere Sentence; il ordonna
que Chevillon prouveroit fommairemeot au premier jour
d'Audience par toute forte & maniere de preuves, que
Gueit faifoit fa rélidence à Toulon, & qu'il y avait aauelternent fan domicile, & partie au contraire.
~ur les preuves refpeaivement fournies par les parties,
L
�336 .
Jou RNA L
il intervint Sentence le 23 Mars fuivant, qui fit droit au
déclina coire propofé par Gueit.
Chevillon appella de cette Semence. On difoit pour lui,
que ce n'efl point tant la rélidence qui dérermine le domicile , que le deffein & l'intenrion ; <;>n peur faire un féjoUl.'
même conlidérable dans un lieu fans avoir le deffein de
s'y établir; on peur y être retenu par des affaires particulieres dont on arrend la fin pour retourner enfuite dans fa
véritable patrie; le fair feul ferait dQnc lm rrès - mauvais
guide pour dérerminer le véritable domicile : lbi qui domicilium habet, dir la Loi, ibi larem rerumque ae fortunarum
fuarum fummam eonjlituit
undè rursùs non fit difceJJurus,
fi nilzil avoeet....... undè eùm profec1us eJl, p;regrinari videtur,
quo fi redût, pcregrinari jam dejlitit.
Le domicile eU donc le lieu où un citoyen a établi le
centre de fes affaires, où il efl avec fa· famille, où il efl
préfumé devoir refler, lorfque rien ne l''appelle ailleurs.
le lieu enfin qu'il ne peut quitrer fans êrre regardé comme·
un homme qui voyage.
Gueit a éré reçu à Toulon parmi les Boulanger~; il a
éré marié d·ans cerre vil'Ie; il a arrenté une boutique qu'il'
occupe aéluellemenr. Comment méconnoÎtre (di!àit Chevillon.) fon vérirable domicile?
Me. Meriaud, Subfl:itut, obferva que l'art. 17 du tit. u
de l'Ordonnam'edu Commerce dit que dans les matieres
attribuées aux Juges-Con fuis ,le créancier peur faire donner l~affig-nation à fon choix, ou· au domicile du débiteur·,.
ou au lieu auquel la promeffi a été flite & la marelzandift
fournie, ou au lieu auquel le paiement doit être fait.
Il eJl jlljle , dir' le Commentateur, ylie le lieu où la pro":
meJfè a été faite & la marelzandife fournie, étant le' lieu oùle débiteur a eontrac1é, il puiJfe y être· ajJigné. Mais en ·matiere de lettres de cha.nge on ne peut faire affigrrer que
pardevant le Juge du domicile du débiteur, ou bien au
lieu auq.uel le paiement doir être fait, parce que c'efl celui
où le débiteur s'eft obligé de payer, & que c'efl: -là que··
le contrat a fan exécution & fa perfeébon, fui'lanr h
LQi
�~oi 19,
DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
3'37
§. 4, ff. de judiciis, & la Loi premiere, ff. de eo
fjuod cerlo loea.
Ici il ne s'agit pas d'une fourniture de marchandifes
livrées à Toulon, mais d'une lettre de change tirée fu-r
Gueit à Marfeille, par lui acceptée, & dont Je paiement
.ne pouvait êrre fait qu'au lieu de fon domicile, ou au lieu
où elle devoir êrre acquittée.
Le domicile de Gueit ef!: donc la feule qllell:ion qu'il fal1t
examiner. En général le domicile des Marchands ou gens-d'affaire 1 dit Rhodier, efl cenft le lieu où ils ont leur commerce &
leurs mag,,:/ins, à moins qu'ils n'eu.f!ènt un domicilefixe ailleurs;
& s'ils ont leur commerce ail magafins dijlrilmés en pluJiellrs
li~ux, ils [Ollt cenfts .avoir pll{fieurs domiciles.
On diHingue dans Je droit deux domiciles; celui d'origine , & celui qu'on s'ell: établi; on ne peut pas 'perdre le·
premier, c'ef!: le domicile naturel; mais il n'ell: prefque
d'aucun ufage, fi Eon s'en ef!: choill un autre. Le vrai.
.domicile ef!: celui all l'ou a érabli fa demeure, où l'on a
le uege de fa fortune & le centre de fes.affaires.
Cependant comme on peut avoir fa fortune & fa demeure partagées en différens endroirs, avoir fa demeur~
& fes affaires une partie du temps en un lieu., une parrie
du temps daus un autre, on. peut avoir deux domiciles. Me..
Julien dans fan Commentaire fur les Statllts rapporte
l'Arrêt du Parlement de Paris du 6 Septembre 1670, qui
le jugea a.inu da ns le partage de la fucceffion de M. le
Prince de Guemené. Dans le cas des deux domiciles., ajome
Me. Julien, l'ajournement peut être donné va!ahlement dans
fun ou dans !'m{tre, {" devant le Juge éle l'lin ou de l'autre-..
(Le Prél1dent Faber, déf. 2, n. l, cod. de in jur. vocand.)
Mourgues, Bornier & Decormis difent égale.ment qU'aIl<
peut avoir deux domiciles, & qu'on peut êrre affigné à 1?ulli
d'eux.
Me. Meriaud difcuta enfuite· les différentes pie ces produites par les parties. Pour confiarer ou détruire le domi-.
eile de Gueir à Toulon, il établit que ce domicile n'avointien. de réel,. & il conclut à ce que l'appellarion. [fit mi.~
v
'1,
�338
Jou RNA L
au néant, que ce donc ell appel t-iendroit & forcirait fan
plein & entier effet, & les parries renvoyées au Lieutenant
de Toulon, pour faire exécurer fa Sehrence fuivant (a forme
.& teneur.
Par Arrêt du 2.1 Août 1780, prononcé par Mr. le Préfident de Saint-Vincent, les conc!uGons furent ruivies, &
Chevillon fur condamné aux dépens. Plaidant Mes. GJffier
& Ve·rdet neveu.
ARR Ê T
LV.
La récufation d'un Juge doit être propofèe par requête, & les
faits doivent ùr:: détaillés.
L
E 2.5 Mars 1780 , Me. Arnaud •••••• Notaire Royal
.
de la ville de ..•••. rendir plainte au Juge du lieu
contre les fieurs ••.••. pere & fils & fa fille, à raifon d'in.jures qui avaient éré proférées contre lui, <& pour des excès
& voies de fait auxquels ils s'éraient livrés à fon égard. Le
Juge appointa la requête d'un déctet de foir-Informé, & fur
les charges de la procédure, il intervint un décret d'ajournement contre ..•••. fils, & des décrets d'affigné contre les
autres accu rés.
Pendant l'audition des ·témoins & avant les décrets, le
pere avoit tenu un comparant de récuration au Juge, qui
ne fit aucune réponfe, & décréta trois jours après; appel
des décrets de la part des accu rés ,.qui foutenoient que le
Juge n'avoit pu poutfuivre aucune inftruél:ion ni décréter au
préjudice de la récufarion.
On répondoit pour le Notaire, qu'il ne fuffit pas pour
récufer un Juge de lui expofe~ quelques prétendus bits de
lùfpicion dans un comparant·; ils ne peuvent être propofés
que pat requête; il faut faire juger enfuite fi les faits qui
donnent lieu à la récufation font perrinens & admiffibles;
il faut en rapporter la preuve verbale ou par écrit, felon
�33;}
'que l'Ordonnance en a difpofé ; il faut enfin une infiance & un
jugement de récufarion. C'efi la difpofition expreffe des art. 23
& 24- de l'Ordonnancedc 1667, titredesrécufations. Touteautre
forme de procéder efi illégale & ne peut opérer aucun effet.
Ici le Juge a déclaré au bas d'un aéte exrrajudiciaire qui lui.
fut tenu par Me. ~rnaud ..••.. qu'il n'a connu en lui aucune efpece de récufarion ; il défavoue même les fairs de fuf-.
picion allégués. Si le Juge n'a pas éré valablement récufé,
& n'a connu en lui aucune caufe de r~cufarion, il a pu, il a
même dû pa1fer outre 11 l'infiruétion de la procédure maJgcé
le comparant, a,vec d'autant plus de caifon, que le Juge qui
a été valablement récuré peur continuer l'infrcuétion de la
procédure jufqu'au jugement définitif exclullvement, & tant:
que la récufation n'a pas été jugée.
Me. Meriaud, Subfiitur , obferva que l'Ordonnance, au titre
des récufatùms, marque divers cas où le Juge peur être récufé, & eHe n'entend pas exclure les autres moyens de fait.
ou de droit.
Le Commentateur ajoure qu'il eŒ de la prudence d'un Juge'
de fe départir de la connoiffance d'une caure Ol! fan ami efr:
inrére1fé, [ur-l'out fi cette amitié ea intime; & il Y a mêm~
[ouvent plus de raifon de [e l'écurer pour cette caure q.ue pourcelle de ·parenté..
.
Lorfque le Juge efi récufé, fes fociétions doivent tHe fufpendues jufqu'après le jugement de la récufation, parce qu'il
ne feroir pas à propos qu'un Juge fufpeét connûr d'une affaire dont la furpicion peut l'exclure, indépen.damment de
la p.révention que ces fortes de démarclles infPirenr aux.1uges:
contre les parties qui les fufpeétenr.
L'Ordonnance emegd que la récufation foit claire·,. &.
qu'eHe pane /i!r des objets certains & dérerminés. L'arr. l
du tirre des faits 'lui gijJènt en preuves, v.eut que les fairs qui;
gi1fenr en preuves foient fuccinétement articulés,. & Bornierobferve: pour 'lue le. Juge puijJè les hien examiner, afin 'lu.e
s'il y en a d'imperûnens, il les rejette.
L'expo[é des moyens de récufalion ea à l'infrar d'une- accufation qui doit être circon tanciée pour êrre reçue, autr.e.DU
PALAIS
DE
PROVENC E.
'\lv.2..
�3~
JDURNAL
ment elle ell: roujours rejercée, fuivanr la LOI & l'opinion
des Doél:eurs, & fur-tout de Dargentré, qui dir: non Liat
vagari 'in aliena exiJlimatione.
Lorfque l'on oppofe l'inimirié du Juge, il ne fuffir pas de
l'alléguer en rermés généraux, mais il faut en exprimer la
caufe & le fujer.
Une demande en récufation indéci{e, dit Lacombe, ne peut
tzrrêter & fufPendre l'inJlruc7ion d'un proces criminel, p.zrce qu'il
faut toujours ajJiJrer,.fixer & conJlater los preuves 'lui pourraient péricliter pendant cette inflruc7ion, fauf faire droit fur
la récufatùm. avant de procéder au jug~ment drifinitif du
•
proces.
De là il réfulre que jufqu'à ce que la récufation foit jU;jée;
le Juge récufé, propofé à l'inHruél:iol1, pellt continuer d'y,
procéder jufqu'au jugement définitif exc1ufivemenr.
Serpillon veut qu'un Juge ne puiife fe ré~urer fans une
taufe jugée légitime par le Siege; autrement, aj<.lure-t-il, il .
,y aurait de la ldelleté de la part d'un Jug: d:: quitter {es fonctions par crainte. On ne peut fans raifon val·able quitter fon minifl:ere; il faut dans un Juge de la ferm~[é; aucunes conG.dérations particulieres ne doivent l'empêcher de remplir fon
devoir.
L'art. 23 du titre de l'Ordonnance porte que les récufarions feront propofées par requête, qui en conriendra les
moyens, & fera la requête fignée de la partie ou d'un Procureur fondé, pour requérir que le Juge ait à abfl:enir , en cas
que lui ou la partie ait reconnu quelques caufes de récufation. L'arr. 24 ordonne que les récufations feront propofées
au Juge, qui fera tenu de déclarer fi les faits font véritables
ou non; après quoi il fera procédé au jugemént des récufations, fans qu'il puiife y affifl:er.
L'on trouve dans le procès-verbal de, l'Ordonnance, que
M. le Premier Préfident & Mr. PulTon étoient divifés fur la,
quefl:ion de favoir fi l'on préfenteroit la requête au Juge
récufé ou à tout autre; Mr. PulTon donnant pour motif de
fan opinion que le Juge qui affeél:eroit de juger, retiendroit
la requête fi elle lui éroit préfeotee) au lieu qu'érant mife
a
�bu PALAIS DB PR·OVBNCll.
HI'
\lux mains d'un aurre Juge, ou entre celles d'un Praticien du
Siege qui ne feroit pas intéreffé à la fupprimer, ils feroient
obligés indifpenfablement de la lui communiquer; & après
cette communication le Juge auroit les mains liées, & il n'y'
auroit point de furprife.
Malgré tautes ces confidérations, Mr. Talon dit que c'était
l'ufage de préfenter la requête de récufation aux Juges; qu'il
ne s'en érait point enfuivi d'abus. Sur ces obfervations, il
fut ordonné que les récufations feroient communiquées au
Juge, qui déclareroit fi les faits étoient véritables ou non.
Telles font les regles prefcrites pour la forme de la récufation. Cela fut ainli décidé en 1744 en fave\lr du Juge
d'Apt, & par l'Arrêt du 3 l Mài 1765, au rapport de Mr. de
Gras, en faveur du fleur Honoré Robion, Bourgeois de
la ville d'Annot, contre Me. André, Notaire de la même
ville, qui fe fondoit fur une récufation par lui propofée contre
le Juge fur un /impie comparant. La Cour n'y eut aucun'
égard.
Me. Meriaud conclut au déboutement de l'appel, à la
confirmation des décrets, avec renvoi pàrdevant le Juge.
Par Arrêt du 23 Août 1780, proponcé par Mr. le Pré/ident de Saint-Vincent, les conclufions furent fuivies, avec
dépens. Plaidant Mes. Gaffier & Rambot.
ARRÊT
LVI.
Les affaires de commerce, & jugées confulairement, doivent·
l'être l'Audience.
a
F
Rançois Sicard & Jofeph Maurras du lieu de Roque-'
vaire étant délivrataires de la boucherie du même lieu,
Claude Julien, Ménager de Puyricard, fe chargea de leur
faire la fourniture de la viande. Devenu créancier de ces
deux Fermiers d'environ 12.00 liv., il les fit affigner parde!".ant les Officiers de Roquevaire, p ou~_ venir voir prononcer_
�bu PALAIS DB PR·OVBNCll.
HI'
\lux mains d'un aurre Juge, ou entre celles d'un Praticien du
Siege qui ne feroit pas intéreffé à la fupprimer, ils feroient
obligés indifpenfablement de la lui communiquer; & après
cette communication le Juge auroit les mains liées, & il n'y'
auroit point de furprife.
Malgré tautes ces confidérations, Mr. Talon dit que c'était
l'ufage de préfenter la requête de récufation aux Juges; qu'il
ne s'en érait point enfuivi d'abus. Sur ces obfervations, il
fut ordonné que les récufations feroient communiquées au
Juge, qui déclareroit fi les faits étoient véritables ou non.
Telles font les regles prefcrites pour la forme de la récufation. Cela fut ainli décidé en 1744 en fave\lr du Juge
d'Apt, & par l'Arrêt du 3 l Mài 1765, au rapport de Mr. de
Gras, en faveur du fleur Honoré Robion, Bourgeois de
la ville d'Annot, contre Me. André, Notaire de la même
ville, qui fe fondoit fur une récufation par lui propofée contre
le Juge fur un /impie comparant. La Cour n'y eut aucun'
égard.
Me. Meriaud conclut au déboutement de l'appel, à la
confirmation des décrets, avec renvoi pàrdevant le Juge.
Par Arrêt du 23 Août 1780, proponcé par Mr. le Pré/ident de Saint-Vincent, les conclufions furent fuivies, avec
dépens. Plaidant Mes. Gaffier & Rambot.
ARRÊT
LVI.
Les affaires de commerce, & jugées confulairement, doivent·
l'être l'Audience.
a
F
Rançois Sicard & Jofeph Maurras du lieu de Roque-'
vaire étant délivrataires de la boucherie du même lieu,
Claude Julien, Ménager de Puyricard, fe chargea de leur
faire la fourniture de la viande. Devenu créancier de ces
deux Fermiers d'environ 12.00 liv., il les fit affigner parde!".ant les Officiers de Roquevaire, p ou~_ venir voir prononcer_
�r 0 U RNA L'
contr'eux confulairement la condamnation fdidaire du mon:'
tant de lèurs billets, avec intérêts, dépens & contrainte par
corps. Le Lieutenant de Juge oFdonna les pieces mifes.
. Julien appella de cette Ordonnance pardevant le Lieutenant d'Aix, avec daufe d'évocation du fonds & principal ~
Maurras déclara n'y prendre aucur:Je paFt; il ofFrit mêm.e un,
expédient par lequel il prononçait la réformation de cette
Ordonnance; & évoquant le fonds & principal, il faifoit
droit à la demande de Julien. Le Lieutenant, en. concédant
aél:e à Maurras de ce qu'il confentoit au paiement de la..
fomme due à JuLien, fans s'arrêter à J'appel de ce dernier,
confirma l'Ordonnan.ce de pieces mifes, & renvoya les parties & matiere à pou,Cuivre en exécution devant les Officiers de Roquevaire, condamna Julien aux dépens. Juliellappella pardevam la Cour.
On difoit pour lui ,.que s'agiffant d'une matiere mercantille lil-n'écoit pas permis. all Juge de ta dù;ider autrement qu'à.
l'Audience, & fans épices.
Jamais on n'a mis en doute que les.Jl1ges-Confuls ne foient.
tenus de procéder fommairement & fans figure de procès
au jugement des affaires dont la connoiffance leur efr attriQuée. L'arr. 6 de l'Edit du mois de Novembre 1563 le leur
prefcrit d'une maniere très-étroite. Le Légifiateur, en créant
les Jurifdiél:ions copfulaires, a eu en vue le bien public &
l'abréviation de tGUS procès & difFérens encre Marchands
qui doivent négocier enfemble de bonne foi, filns être af~
traints aux fi.lbtilités·des Luii & dés Oraonnances.
Les Juges otdinaires, jugeant confulairement, n'ont pas, à
là vérité, le p'cuvoir d'ordonner 'le nonobt!:ant appel de leurs
juge mens ; ils ne jugent pas non plus fouver."inement jufqu'à.
çinq. cent livres, ain!i que le font les Juges-Confuls, parce
qu'bn regarde ces deux objets comme UQ privilege du Tribunal, qui n'et!: pas communicable. Mais pour oe qui efr privilege de la matiere , pour' c~ qui concerllle la forme de proééder, il n'y a aucune différence. Toudes Tribunaux' quel_
conques qui font inve!1:is d'une caufe mercantillé, & à qui..
J;' on, d.em.and.e. de la juger confulairement, fonJ: oblig.és de le:
'Hi
�u PAL AIS D E PRO VEN C E.
343
-faire de la même maniere les uns que les aurres. L~ Dé.
c1ararion du Roi du ') Avril 17S9, rapportée par Jou{[e e.n
.fon Commenraire -fur l'Ordonnance du Commérce, pag...86,
'eH précife fur ce poinr. Cette Loi n'eH que le renouvelle-_
ment de l'arr. 40 de l'Ordonnance de Blois, qui en !ùppriIttanr les Jurifdiél:ions confulaires érablies dans lèS villes inférieures, avoir renvoyé les affaires qui y éraient indéc'ifes
aux Juges ordinaires, en leur prefcrivant de vuider les caufes
de Marchand à Marchand, pour le fait de inarchandife &
négoce, fommairement, & fans que les parties fuffenr. chal'gées de plus grands frais que ceux qu'elles auroient fupportés
devant les Juges-Confuls.
En fuppof,wr qu'un Lieutenant de Juge ne puiffe pas juger
une affaire donr la décifion dépend d'un po.inr de droit, il
ne s'enfuir pas qu'il faille néceffairement la régler. .Quand
un Lieutenant de Juge ne fe croir pas affez éclairé pour juger
un procès porté à fon Triliunal, il renvoir ·la c.aufe au' premier jour, dans lequel remps les partie;; font venir le Juge,
s'il n'ell: pas réGdanr fur les lieux; s'il y demeure, elles le
prienr de tenir l'Audience fuivame; quelquefois rnêrr: e il
rend une Ordonnance, ponant qu'il délailfe la mariere au
J\lge; par ce moyen l'intérêt ,des parties fe concilie avec les
regles.
On répondoit pour Sicard, que l'Ordonnance <:le pieces
mifes était légitime; rO. parce que les Juges ordinaires n'ont
pas les mêmes privileges que les" Juges-Confuls, & qu'ils
ne doivent pas par conféquent être aHrainrs aux mêmes regles; 2.°. parce qu'outre l'importance de la fomme, s'agiffam d'examiner une queHion en droir qui érait au deffus des
lumieres d'un Lieuteo'anr de Juge, il était indifpenfable de
régler la cau-fe pour la décider aveç une emiere connoiffance
de caufe.
Les billets, n'étant foufcrits que par Sicard, Maurras excipoir de ce qu'il n'y avoit aucune fociéré entre lui & Sicard, & par conféquenr .qu'il ne devait rien à Julien; il Y
avait une queHion. de droit à juger, qui érait ce'lle de (a~oir fi la ca~.cion é:oic cenfée aiIOciée à la ferme, & elle e~~
D
�344
JOURNAL
cédoit les bornes d'un Lieurenant de Juge; il fulloit d'o!ÎC
régler.
Par Arrêt du 23 Août 178o, prononcé par Mi". le Prét1>dent de Saint-Vincent,· la Chambre évoquant condamna
Sicard & Maurras folid-airement au paiement des billets, avec
dépens. Plaidant Mes. L~g.et & Verdet.
ARRÊT
LVII.
Peut-on ajJigner un étrangu ailleurs. qite parde1lant le Juge de
fan domi':ile ?
Dans quels ms peut-on. décerner contre lui décret de main
mife ?
L Eà
10 Janvie.r 17 77 ,. la Maifon de Jean-Ftanf0is LafaU'B
. &. Compagnze, eJab1Je ~ Lar,t.a dans l'Albal1le Turque"
prêta
Jean Chidonachi, Négociant Grec, la fomme de
7°.00 piafl:res qui, devoiént être rembourfées en envoi de
bois, av.ec foumiŒon d'hypothéquer une partie des envois qui
feroient f'aits filr une maifon que Chidonachi poffédoit à. Prevefa, & une Polacre nommée Le St; Spiridion Albania du
pOli de 5'000 quintaux, & de la valeur d'envi·ron. 1 GIDO p.iafl:res ,
& de plus fous le nantiffement de deux billets faits par des
naturels dl1 pays très-folvables, s'élevant à 3650 piafl:res•.
Outre la foumiffion des hypotheques portées par l'aél:e, iLy
avoit la c1aufe qu'en cas de défaut de' paiement & de fâcheulC
événement', la Maifon Lafalle feroit· autorifée ipfa faao à fe
mettre en poffeffion des. biens. de Chidonachi, & de s'y .
payer fans formalïté, avec intérêts au dix p0L:/r· cent dans les
quatre premiers mois, &( " douze pO,ur cen.c jufqu'au rem~
b.ourfement. c:ifeél:if.
La plus grande partie des bois apportés à Toulon aprèsce contrat' fouifrirenr rebut; la Maifon Lafa/le établie à
Marfeille reçut divers à-comptes; & par le compte anêté le
,:1 5 Oaobre 1'178., Chidonachi eft déclaré débiteur de 3 r 9-7
pia!l:re.!i-
�DU
PAL AIS
DE
PRO V l! NeE:
341
piaf1:res I I 6 afpres, & promet de les payer; favoir, .2.1 8 l
pia ares I08 afpres en trois hypotheques fur des vaiffeauJC
& chargemens de bois à expédier pour Toulon, & lOlO
piaihes 8 afpres en argent à payer ou à Larra ou à Mar{eille.
.
En l 779, Chidonachi prit des arrange mens pour couper
un bois confidérable à Simatra vis-à~vis Corfou. Sur la pa-·
l'ole de la Maifon Lafalle de Larta, il avoit fait fes apprêts,
arrêté cent cinquante ouvriers, & leur avait donné des arrhes.
Chidonachi vient en France, & le 30 Juin de la même année il s'oblige par contrat avec Je Roi de livrer pendant
quatre ans & toutes les années 60QOO pieds cubes bois de
chêne & toUS \es bois d'ormeaux qui lui feraient demandés•.
Ce marché dl: fait fous le cautionnement du fieur François.
Aguillon fils, Négocian.t à Toulon.
Pour parvenir à cette fourniture, il fallait de nouveaulC
fon.ds, qui furent fournis par Je fieur Aguillon; il acheta ell.
conféquence & fit embarquer pour Chidonachi des nJarchandifes de toure efpece fur des VaiffeauJC neutres. Avant·
de fe rendre à Marfeille, ChidOliachi donna. avis à Lafal!e·
des nouveaux engagemens qn'il venait de comraéter avec le
fieur Aguillon. Lafalle lui répond qu'il en eH bien aife, qu'il
ea charmé de le voir lié avec fan ami Aguillon, & lui dit:
qu'en cas de néceffité il fera de nouvelles fournitures.
Chidonachi vient à Martêille pOUL' fe régler avec le fleur'
Lafalle, & trouve à redire. fur fes comptes. Quelques jours·
après étant à la Loge, il ea arrêté par un Hlliffier & trois
Records, qui l'obligent à venir répondre perfonnellement::
pardevanr les Juges - Confuls; le fieur Lafalle fils, pré-.
fent à l'audience, demande par ll.ne requête la condamnation de plus de quatre-vingt-dix mille livres qu'il doit à.
fOll pere; & comme il avoit apPJ'is que Chidonachi devoirpartir empor'tant avec lui certaine quanriré de marchandifes.
qu'il avoit achetées au préjudice de fan créan.cier, & qu'il.
e!l: étranger du Royaume·, il. demande qu'il lui fait permis.
de s'affurer de lui par main mife, pour le faire condamner à.
payer ou à cautionne.r, &. à. déJa.ut qu'il foit emp(ifonné,
:Kx.
�34{
-
To
U RNA 1:
Chidonacfii répond qu'il avait des comptes ~ régler &
des contenations à terminer avec LafaHe. Les Juges-Confuis, fur le compte arrêté le 15 Oélobre 1778, par lequel
il connoit qu'il ét-oit dé.biteur de 3 t 97 piafl:res I I 6 afprès
envers Lafalle, ordonnerent qu'il donneroit caution pour
cette fomme, à déflUt de quoi il feroit conduit en prifon.
N'ayant pu remplir la premiere difpofltion du décret, il fut
emprifonné. Chidonachi fe pourvut par requête en calTation
du décret, avec dommages-intérêts; il fLlt confirmé par
llne autre Sentence des Juges-Confuls, avec permiffion au
fleur Lafalle de faifir les marchandifes embarquées pour le
compte de Chidonachi, & achetées des avances faites par
Je fleur Aguillon; celui-ci demanda la calTation de la faifie,
& Chidonachi fe pourvue à la Cour en appel du décret des
:Juges-Confuls qui ordonnoir fa détention. & de tout ce qui
l'avoit -Cuivi.
On difoit pour le fleur Chidonachî, que les contrats qui
tlonnoîent lieu à la créance du fleur Lafalle avoient été palTés
en pays étranger, avec une Maifon de Marfeille établie dans
-le même pays. Suivant la' regle ac70r fequitur forum rei, il
falloit donc aller attaquer le fleur Chidonachi au lieu & par'devant le Juge de fon domicile. C'ef!: ce qui ell: établi par
Ayrault, il1fl:ruélion judiciaire, liv. 1, nO. 1 1; Mornac fur la
Loi derniere , if. de judie.; Boullel1ois, traité des Statuts réels,
'tom. l, pag. 607 & fuiv; Traité du Corps Politique, édit. de
1764, tom. 2, pag. 53; Brillon, 1,0. étranger, jurifdic7ion;
Journal du Parlement de Brétagne, tom. l , pag. 295.
Pour rendre inutile ce principe général pour touteS les
Nations, en vain réclameroit-on le privilege que le Français
prétend avoir d'arrirer à fes Juges touS les étrangers avec
lefqueJs- il a des affaires.
En violant le droit facré d'afyle que les étrangers doivent
trouver en France, en manquant à la confiance qu'ils nous.
témoignent, lorfqu'i1s y viennent voyager, ou pour raifon de
leur négoce, on porteroit un coup morrel au commerce; on _
tlétflliroÎt cerre confiance réciproque que les Etats, comme
les particuliers, fe doivent mutuellement; on éloigneroitles
�DU
P À LAI S DE P-R a v Elfe E:
'3'17
'étrangers de chez nous; on les forcerait à porter leur correfpondance dans des pays plus hofpitaliers; on fe préparerait
à fni-même , dans les pays étrangers, le fort qu'on ferait en.
;France aux fujets des aurres Prïnces.
Si dans des cas pre1Tams, li dans des c)rconl1:ances particulieres on, accorde en fublide de jul1:ice' la permilIion.
d'arrêter un étranger, il faut que la nécelIité fait bien ur-·
gente; il faur qu'il y air foupçon de fuite préméditée, dol,.
fraude. Le lieur Chidonachi pellt-il être dans ,ce cas, après.
les lettres que les lieurs Lafalle am reçues de lu,i, (${ celles qu'ils
lui ont écrites? D'ailleurs, c'ef!: avec Lafalle' ~ Compagni~
de Larra, & non avec le lieur Jean-Erançois ,Lafalle de Mar-.
feille, qu'on a contraél:é. Bien que ce dernier air un intérêt:
conGdérable, un intérêt connu dans la Maifon de Larta, cela
ne fait pas que les obligations contracrées avec cette Maifon
l?obligent vis-à-vis de lui. Suivant l'ufage, le même Négociant
peut avoir deux Maifons, fàire des affaires fous deux Raifons:
différemes, fans que les créanciers & les débiteurs de, L'un~
fvient créancier.s & débiteurs de l'autre.
Au liJrplus, qu'el1: venu demander te lieur Lafalle aux:
].uges-Confuls? La condamnation des fommes dues, cau-.
tionnemem ou emprifonnemenr., La cond,\mnation des f-ammes dues n'a pas été accordée, elle ne pouvoir ni devoir:
l'être.. Le cautionnement a été· accordé.. Mais li les JiJges-.
.Confuls avaient daigné conlidérer que Chidonachi aVQir donné·
en hypotheques & en gages un cautionnement beaucoup•
.plus fort que celui qu'on pouv.oir lui demander; que fa Mai_
fun, Ion Navire & des billets pour environ dix mille livres:
.étoient une alfurance. alfez con!idérable pour ne pas en avoir·
.befoin d'autre, il~ n'auraient pas rendu le déc.ret e.n. fQrc.e;
duquel le lieur Chidonachi a été mis en prifon..
On. répondait pour le lieur Lafalle, que c'éroit pou·r le,
_.montant du folde du c.ompte arrêté le 1') Oél:obre 1778,.
<jue Chidonachi avoir été affigné pardevanr les J uges-Con-_
fuIs de Marfeille;. que c'étoir parce qu'il. érair étranger &
fur le poillr de partir, qu'on avoir demandé la failie pt;ovi..:
foire de fa l2er[onne, & 'l.u'elle avait été accordée., Le [old~
x.4.
�3~
JOURNAt
de ce compte e!l: payable à Marfeille; c'était donc aux Juges..:
Confuls de cette ville d'en connoître, fuivant l'art. 17 du
titre de la lurifdic7ion des ConfuIs de l'Ordonnance du Corn.
merce.
Mr. L'Avocat-Général de Califfanne obferva que te privilege du Français dl: de ne pouvoir être di{l:rait de fes
Juges, tant en demandant qu'en défendant. Mais fi l'étranger
e!l: défendeur, & fi c'e{l: à l'occafion de quelque enJagement conrraél:é crans le lieu de fon établiffement, ou qui
doive y être confornmé, dans ce cas il faut fe déterminer
par le principe général, qui efl: de fuivre le domicile "du défendeur. Le principe ac70r fequitur forum rei dl: le principe
de touS les peuples. Comment pourrions-nous avoir. cet avantage fur les autres Nations, fans le con(entement de ces
mêmes Nations & des Souverains qui les gouvernent? Quelle
feroit la bafe de cerre prérogative inadmiffible en principe
politique, barbare & tyrannique en droit naturel? Comment
les autres peuples fouffriroient-ils cette efpece d'Jfferviffement & d'efclavage? D'où dériverait cette prétendue fuzeraineté? Le droit des gens, la fociété ne rend-elle pas tous
les peuples égaux & indépendans? Quel efl: le traité en vertu
duquel les. étrangers défendeurs feront obligés de quitter
leur pays pour venir fe jufl:ifier pardevant les Juges de notre
Monarchie? Et comment ferait-il arrivé que les étrangers
euffent perdu cet avantage précieux & naturel de ne pouvoir
être jugés que fur leurs foyers, quand ils (ont défendeurs?
Chaque Nation forme dans l'ordre général un corps féparé dont la légiflation eH indifférente à tout autre Corps
qui oppo(e une puiffance & une autorité égale dans l'établiffement des Loix. Ainfi l'art. 17 du titre 12. de l'Ordonnance de 1673, qui permet au créancier de donner l'affi·
gnation à fon choix, ou au lieu du domicile du débiteur,
ou au lieu auquel la promeffe a été faite & la marchandife fournie, ou au lieu auquel le paiement doit être fait, ne pouvoit
pas rendre les Juges-Conf,lls compétens vis-à-vis un étranger.
L'arrêté de compte fait à Corfou le 30 Oél:obre 1778 dl:
le titre qui feul, d'après l'Ordonnance .des Juges-Confiils, a
�DU
PALAI S
DE
349
PROVENCE:
fait perdre au fiéur Chidonachi fa liberté; c'eH donc le feul
titre qu'il faille examiner. Cet arrêté de compte eH le con~
crat qui forme le titre paffé en pays étranger, entre un
étranger, & une Maifon françaife établie en pays étranger.
C'étoit donc une matiere étrangere à la Jurifdiélion des
Juges-Confuls de Marfeille. C'étoit un con5rat hypothéqué
par des nantiffemens exiHans, conféquemme~t inapplicable
à tolite difpofition particuliere de l'Ordon'nance. Quels étoient
les Juges naturels du fieur Chidonachi? Ceux de fon pays,
de fon domicile. C'écoit donc-là que le fieur Lafa Ile devoit 'l'attaquer, fans craindre qu'il lui opposât que c'étoit à
Marfeille qu'il fafloit le traduire.
Mais n'eH-il pas des circonfbnces où tout Tribunal devient, compétent, où la néceffité force, pour ainfi dire, à
reconnoÎtre qu'un Tribunal, quoique fonciérement incompétent, a bien agi? La Cour n'a-t-elle pas ordonné quelquefois qu'une faifie nulle, parce qu'elle étoit faite par un Juge
incompétent, feroit caffée, mais qu'elle feroit refaite fur le
champ? N'eH-il pas ,des' faits auxquels il n'eH pas poffible
de réfiHer ? La maxime uhi te invenero', ihi te judicaho, n'ell:elle donc pas fouvent néceffaire & d'une exécution auffi juIle
qU'utile vis-à-vis de l'étranger?
Pour que le décret de main mife puiffe avoir lieu ( établit
Mr. l'Avocat-Général) il faut dol, mauvaife foi; il faut que
le débiteur fe cache, qu'il cherche à fouHraire à fes créanciers le feul gage qui leur relle ; fa perfonne. Il faut que les
eirconllances ne permettent pas de refufer le décret; il faut
prefque toujoUtS que ce foit en exécution d'u ne condamnation précédente; il faut que le créancier n'ait plus d'autre
reffource, & que fans elle la dette à raifon de laquelle il ob,tient un décret de main mife comre un étranger foit 'perdue;
ql1e l'étranger par fa conduite fe faffe foupçonner de fraude;
fans cela il relle à l'ombre des Loix du Gouvernement où il
fe trouve, julliciable des Tribunaux de fan pa ys.
Mr. l'Avocat -Général conclut à ce que faifant droit à
l'app'el de Chidonachi envers le décret de main mife, ce
•
�'J10
Jou
RNA L
décret fût déclaré nul, oppreffif.&; incompétent, & comme,
.
tel calfé, avec, dommages-intérêts.,
Par Arrêt du 16 Décembre 1780, prononcé par Mr. le·
Confeiller de Montvallon, les con'cluGons furent fuivies, les.
dommages-inté1-êts fixés à 1200 liv. , & le fie ur Lafalle fute
èondamné aIlle dépens. Plaidant Mes. Gaffier & Roux.
ARR Ê T
LVI l 1.
~Le
binéfice de la fubrogation 'lue rapporte le tiers-acquéreUl'
qui paye, u.,n crean.cier antérieur ou préférable 'lui le menace'
d'éviélion, conj'zfle le maintenir dans la poJfejJion de l'effet"
contre les efforts des créanciers pciflérieurs ,r celui qu'il a,
pqyé.
Ce tiers acquéreur n'a dans ce c.as d'hypotheque 'lue du jour de,
fan acquifiiion pour le fru,it de la garantie f]..ui, lui eJl ouverte:
contre fan vendeur.
"
a
N l'année 17S 6 , les ûeurs Efcoffier·pere & fils., tuteurs:
,des Dlles. Turin de la ville de Cralfe, prêterent à conf-.
titution de rente à Louis Aubin la Comme de 1SOO liv.des
deniers de leurs pupilles, fous l'obligation de tous [es biens.,
Le 22 Jilin 17S9, Louis A,ubin vendit à fieur Jean Gai-.
mard, Marchand, une maifol1 qu'il polfédoit à' GraJre au prix.
de 1300 liv., dont il indigua une partie. à' des créanciers"
i!.: reçut le [urplus comptant. Aubin devoit.à la Dlle.. Mar-.
guerire Lautier 7So liv. en prindpal ;.cette créance remon-..
toit à l'année 172 r , & dér·ivoit de partie du prix d'une
ancienne vente de la maifon acquife par Gaimard. Celle-ci:
fe pourvut contre Aubin en révocation du précaire fiipulé,
dans le contrat, en condamnation de 7So liv. du capital,
des i-ntérêts \ors échus, &. demanda; que la Sentence qui;
interviendrait reroit dédar'ée commune & exécutoire contre·
Gaimard, avec' dépens. Ces fins lui furent accord~s pa~
Sepren.ce de dé.faut du 23 Mai 1760..
"
E
•
�DU
PAL AIS
DB
PRO v
il N C B:
3 sr
Gaimard fe pourvut à fan tour contre Aubin, aux fins de
le faire condamner à le relever & garamir de tour ce qu'il
pourroit fouffrir de la part de la Dlle. Lau thier, ce qu'il
obtint par Sentence de défaur du 20 Juin 1760, qui fut confirmée par Arrêt de défaut du 30 Juin 176r. Gaimard paya
la Dlle. Lauthier du montant des adjudications qu'elle avoit
l"apporrées, & fe fit fubroger :'i fes droits.
Dans ces circonil:ances, & pendant que Gaimard faifoit
procéder à des exécutions contre Aubin, ce dernier décéda,
& fan hoirie fut prife par bénéfice d'inventaire.
Les Dlles. Turin, créancieres encore du capital de r 500
liv., furent affignées dans l'inil:ance bénéficiaire, & Y formerent leur demande. L.e lieur Gaimard y forma la lien ne , &
demanda d'être déclaré préférable. pour les fommes acquittées à la Dlle. Lauthier, & pour celles qui lui avaient été
adjugées en principal, intérêts & dépens par la Sentence &
par l'Arrêt intervenus [ur fa demande en garantie contre
Aubin. Par la Sentence d'ordre du 16 Avril 1771, le Lieu~
tenant de GraJre rangea le lieur Gaimard au fecond degré
pour le tout.
.
Cette préférence ayant mis les Dlles. Turin dans le cas
:de perdre leur capital de 15°0 IiI'. , attaquerent leur tuteur
pour le rendre refponfable de ce placement, ce qui obligea
Efcoffier d'appeller de la Sentence d'ordre au chef qui con·
cernoit Gaimard.
Efcoffier difoit qu'en fait de rangement des créanciers;
on doit fuivre l'ordre de leurs hypotheques. Le contrat de
conil:itution de rente des DUes. Turin remonte au 18 Mai
1756, & l'a8:e d'acquifition du lieur Gaimard n'eil: que du
'22 Juin 1759. L'hypotheque établie fur tous les biens préfens & à venir d'Aubin auroit inconteil:ablement donné au
fleur Efcoffier l'a8:ion de regrès fur la maifon acquife par
Gaimard, fans la fubrogation que celui~ci avoit rapportée
poil:érieurement de la DUe. Lauthier. Or, tout créancier à .
qui la voie de regrès compete contre un tiers acquéreur, el!:
llécelfairement antérieur & préférable à lui.
.
~i le fieu~ Gairnard aJruré, d'une part, par fa [ubrogation
�3')"2.
JOURNAL
dans la polfeffion de fa maifon , a éré fondé, nonobibnt cet
avanrage, à fe dire créancier d'Aubin & à pourfuivre fur [es.
biens le rembourfemem de ce qu'il avoit payé, il n'a pu â
'cet égard réclamer d'autre hypotheque que celle de fon contrat d'acquilition du 12 Juin 17~9 , & pour ce qu'il avait
payé à autres qu'à la Dlle. Laurhier.
La fubrogarion de la Dlle. Laurhier ayant mis le fieur
Gaimard, jufques à concurrence de ce qu'il lui avait payé, à
l'abri de taure aél:ion de' regrès, & ne pouvant faire une
double face, elle n'a pas pu lui procurer l'avantage d'être
payé fu·r les autres biens d'Aubin préférablement à ceux des
créanciers de ce débireur, dont la créance hypothécaire remonroit au delà du 22 Juin 1719.
La Loi examine le droirqui compete à un acquéreur fu.brogé. à d'anciens créanciers qu'il a payé de fes deniers,
& elle décide que c'eH celu·i d'être i-nconrefl:ablement à
l?abrÎ de l'aél:ion de- regrès de la part des créanciers du même
vendeur, qui font pofl:érieurs en hyporheque, ou moins privil.égiés que ceux qu'il a payés: contra eos 'lui inferiores hi.s
fuerunt, jujlâ defenfi.o1ll: te tueri p o t e s , '
,
La Loi eum 'lui, if 'lui poti"rm in pignor. Ita15eantur, dédare
que l'acheteu·r d'un fonds fournis aux hypotheques des créanciers du vendeur, doir être maintenu dans fan acquili~ion,
à· concurrence de ce qu'il a payé à· d'aurres créanciers plus
anciens qu'eux: eatenùs tIlendus ejt qua.tenùs ad priorem creditorem ex pr-etio eecunia pervenit. .
n. elt décidé par-là que le bénéfice de la fubrogation POUl.
un acquéreur con{jfl:e à fe maintenir dans la. pr0priété qu'il
a. acquife, contre rous les eflorts que pourroient employer
contre lui des créanciers pofl:érieurs à celui qu'il a payé. Il
ne peur donc pas fe prévaloir. de la même fuhrogation pour
agir à leur préjudice fur reus les autres biens. de fan vendeur, puifqu'il n'a. pas plus de droi.t que fan cédant. C'e!ï
ce qu'obferve d'Ar-nulfon en fon traité des fubrogarlons, ch..
S, n~. 19; Cujas fur la Loi 3, cod. de his 'lui in prior. cr.ed. ;
Laçombe, vu, fubrogation, nU, 8; Dornat ell fes Loix c;iviles."
ho..
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
3B
liv. 3 , rir. l, fetr. 6; Denifart va. fubrogation, & Dupener, rom. l , liv. 4, 'lU. 4, S'il en éroit autrement, le
tiers-acquéreur fubrogé ferait doublement rembourfé ce ce
qu'il auroit 'payé au créancier préférable, en fe maintenant
dans l'effet acquis, & en fe faifant rembourfer fur les autres
biens du débiteur.
Le fieur Gaimard , ajoutoit Efcoffier, n'a ni la même
préférence, ni la même hypotheque pour les dépens qu'il
a obtenll fur la demande en garantie contre Aubin fon vendeur. Celui-ci n'efl: fon garant que pour le rembourrer de
ce qui a été payé à lui ou à des créanciers pofl:érieurs , &
à rai[on de cet objer, Gaimard n'a d'autre hypotheque que
celle de [on acquilition; il doit s'imputer d'avoir mal payé.
Le Sr. Gaimard répondoit que le procès confifl:oi·t à [avo ir
fi un tiers-acquéreur qui a entiérement payé le prix de [on
acquifirion, venant .en[uire à être recherché par un créancier antérieur & préférable fur la cho[e acquife, & ayant
payé encore ce créancier aux droits duquel il a· été [ubrogé par la quittance du paiement comme par la dirpofirion de la Loi, ne peut pas en force de cette [ubrogation, qui efl: rout à la fois conventionnelle & légale, re
faire rembourrer au débiteur fur [es biens dans une inHance
bénéficiaire à l'hypotheque du créancier qui avoir été payé·
de [es deniers; ou fi par contraire il l1e doit venir qu~après
tous les créanciers intermédiaires au. titre du créancier qu~
a été rEmbourfé, & à celui de· [00 aél:e d'acquifition, pOUl:'
améliorer par conféquent la condirion de ces créanciers.
qui n'auroient pu venir qu'après, s'ils avoient eu à il.mel'
~iireél:ement avec celui. qui. avoit éré rembourré, ou avec:
un étranger à qui il avoit cédé fes droirs, que la Loi regarde cependant d'un œil beaucoup moins favorable 'luele tiers-acquéreur & celui qui éroit déja créancier, & qui
ne payent l'un & l'amre que pour ne pas fouifrir l'é..iction , ou pour conferver la créanœ.
Or rous nos livres arrellent que la fubrogation a<:qtlierc::
au fi.lbrogé rous les droits de celui qui le fubroge, mêm~
IlG md-;iere de rigueur, & par cOllféqueM la moios fuk.eE-
YY.
�314
Jou RNA J.
tible d'extenlion, etiaT[/. in mauriâ Jlric7,f & rorrec7oriâ'
comme l'obferve de Luca en fon Traité de regalibus:
di[c. 33, n. 12-; Dumoulin, quo 49, n. 347 ; Debezieux,
liv. 4., ch. 13, §.
Journal du Palais, rom. 2., pag. 3 0
& fuiv.; Fromental va. fubrogation; Duperier, tom.
liv. 4,
qU'.4, & Sabellus va. fubrogatio.
En effet, fi l'on fuccede aux droits d'un créancier antérieur, ce ne peut être que pour les exercer avec les
mêmes avantages, fans quoi on n'entreroit pas en fa
place, & on ne rrouveroit plus à pouvoir remplir le defir
de la Loi, qui ne met aucune diflërence entre le créancier fubrogé & le créancier qui le fubroge, cetre [ubrogation d'une per[onne à une autre ne changeant rien à la
condition des aurres créanciers.
S'il en érait autrement, il en réÎulteroit que dans un
acte qui efl: vis-à-vis des autres créanciers' res inter alios
& qui par cela même ne doit ni leur profiter ni leur
porter aucun préjudice, leur droit [eroit néanmoins confidérablement amélioré, en ce que la créance paffant par l'effet
de la fubrogation fur une tête différente, elle ne compterait plus pour rien pour ces autres créanciers pofl:érieurs
qui libéreraient, de l'argent du tiers-aÇAuéreur, des biens
qu'ils n'auraient pas pu foufrraire aux exécutions du créancier antérieur, s'il n'avait pas été mis hors d'intérêt au
bénéfice du repaiement qui lui auroit été fait de la chofe
<lcquife au préjudice_ de fan hypotheque privilégiée. Il en
réfulteroit encore qu'il ne compéteroit plus d'aél:ion en
contre-regrès, puifque cene aél:ion .n'efr accordée qu'à ce
tiers - acquéreur, qui après avoir été oblig~ de payer un
créancier antérieur qui ne rrouve plus rien dans le patrimoine de [on débiteur, cherche à fe venger à fan tour
fur des aliénations pofrérieures qui avoient été -faites au
préjudice de fan hypotheque; & delà quels inconvéniens,
ou plutôt quelles injufl:ices!
La Loi 17,.ff. qui patio,.. in pigno habeantur, ne peut
trouver fa place que dans le cas de l'éviél:ion demandée
par la voie des regrès, & à rai[on d'une aél:ion qui n'a pas
été intentée.
s;
aaa,
l,
�s D E PRO V Il N C l!.
3') ')
cod. de his 'lui in prior. credit. dit d'abord
DU, P A I. A î
La Loi 1,
qu'on n'ell pas toujours aux droits du créancier que l'on
a payé de fes deniers, & que celui qui paye volontairement & fans néceffité un autre créancier, ne fuccede à
fon hypotheque qu'autant que cela 11 été ainfi convenu
enrr'eux : fZOU omnimodà [uecedunt in locum hypothecarii creditoris hi quorum peeunia ad creditorum tranjit. Hoc enim
tunc ohfen·atur, eùm is 'lui peeunia'11. pqfleà dat [uh hoc
pae70 credat, ut idem pignus ei o61igatur, & in loeum ejus
[uecedat.
La Loi 2 du même titre décide que le fils émancipé
payant au fifc la derre de fon pere, avec paéle qu'il entrera en fa place, jouit du même titre de préférence &
d'hyporheque que pourroit exercer le fifc: filius, dit Salicet fur cette Loi, folvens pro· patre ut in ejus loeum fuecedat, eonfe'luitur jus prelationis & hypotltecœ quod hahehat
fifeus.
La Loi 3 du même titre décide que celui qui achete
un fonds à la charge d'en payer le prix à des créanciers:
de fon veo:leur, & qui les paye en exécution de ce paéle,
fuccede dans tous leurs dro.irs, & qu'il ne peut êrre troublé
par aucun des créanciers pofl:érieurs à ceux qu'il a mis
hors d'iMérêt par le paiemem qu'il leur a fait de leurnéance : Si potiores ereditores pecunia tlla demifli [une'l/Jihus o61igata fuit poffiffio quam emiJJè te dicis, ita Ut pretium pervJniret ad eoJaem priores ereditores, in jus eorum
fùeeeffifli, & contra eos 'lui injeriores illis fuer/mt, juJlâ. deftnfionc te tueri potes.
Enfin il efi décidé dans la quatrieme & derniere Loi de
ce tirre, qu'un créancier qui paye au fifc ce q.ui lui écoie:
dû par fon débiteur, fuccede par cela même qu'il étoiedéja créancier aux droirs du fifc , & hoc ipfa- jùecedit ln locun::..
jus. Builfon dans fon Commenraire fur cerre rub.ique détermine ce qne les Loix ont entendu décider.
Il réfulre de ces Loix, que l'étranger qui. paye ta dew~
d'autrui, ne jouit pas des droits & de l'hypotlleque cl
téanc.ier q,u'il a payé, & llu'il o'a d'autre rirre llue fun
Yy20.
�3)6
JOURNAL
contrat, s'il a négligé de rapporter ceffion & Cubrogation
du créancier à qui il a fait le paiement, nifi ac?um fit qllod
fuccedat in ipfa lzypoteca. Celui au contraire qui éroit déja
créancier ou tiers-acquéreur, eH vu de route autre fàçon
par la Loi, puifqu'elle le met ipfo jure & fans convention
quelconque, dans ra us les droits du créancier qui eH payé
de fes deniers, in jus eorum fuccejJzJli; & pour fuccéder
dans tous les droits de quelqu'un, il faut par conféquent
pouvoir les exercer avec la même faveur &' avec les mêmes a\'antages, faire en U1l mot tour ce qu'auroir fait ou,
pu faire le créancier qu'on avait fatisfait de fès propres
deniers.
Il eH vrai que celui qui paye eH un tiers-acquéreur qui
fe libere en même temps de ce qu'il devoir à fon vendeur;
il ne peut pas fe faire de' ce paiement une créance fur
celui à la décharge duquel il a compté les deniers, puifqu'il n'avait fait par-là qu'acquitter fa propre dette, & le
paiement ne peur lui fervir alors que pour repoulfer les recherches qu'il pourrait elfuyer de la part des créanciers
poftérieurs à l'hypotheque de celui qui avait été payé, &
aux droits duquel il avait été fubrogé par le vœu & la diCpofition de la Loi: mais s'il ne devait plus rien à fan vendeur, ce paiement qui ne peut pas dès-lors s'appliquer au
prix du fonds qu'il' avait acquis,' doit fervir par conféquenc
à lui établir une créance fur fan \'endeur dont il peut Ce
faire rembourfer à la même hypotheque du créancier qu'il
avoit payé.
Sans cela il ferait vrai de dire qu'il n'y aurait ni fuc~
ceffion, ni fubrogation, & il en réCulteroit cetre injuHice
bien patente, que l'étranger, c'eH-à-dire celui qui n'éroit
pas créancier, & qui ne peut prendre la place de celui
qu'il paye qu'en vertu d'une [ubrogation & d'un tranfport
bien formel de droits & ù'aél:ions, feroit néanmoins traité
d'une màniere plus favorable que çelui que la Loi fubroge
au lieu & place de celui qu'il paye fans fiipulation quelconque.
'.
Car en effet, fi un étranger éroit venu offrir [on paiemen5
�D'V
PALAIS
DII
PROVENCE;
3f1
?l la DUe. Lauthier, & qu'en recevant fes deniers, elle
eût déclaré en fa faveur cout ce qu'elle fit pour le lieur
Gaimard dans la quittance du paiement, nul doute que cet
étranger n'eût pu en vertu de cette fubrngation., al1er former fa demande dans le bénéfice d'inventaire d'Aubin, lX
fe faire ranger dans la Sentence d'ordre à l'hypotheque de
1721, qui écoit celle de la DUe. Laurhier; & on ne veut
pas que la même chofe ait pu être permife à un tiers-acquéreur que la Loi elle-même met à la place du créancierantérieur qu'il paye, & qui joint encore à· cette fubrogation
légale la fubrogation exprelfe & formelle qui lui a été
faite par' le créancier qu'il ,a payé. Où lèroit de bonne
foi la raifon de cette diJférenœ, car s'il y en a une à
adm~ttre, elle eil toute, comme Von voit, en faveur ,de
ce dernier, puifque li! Loi Jui accorde fans convention une·
fubrogation qll'elle refufe formellement à cet autre qui n'a~,
voit rien acquis ,,& qui n'était pas créancier dé c.eltJi dOllt'
il avoit acquitté la dette ~
Tel feroit le droit du fieur Gaimarà, à ne' confidér-~r'
flue celui que lui donne fà qualité de tiers-acquéreur-, eru
payant un créancier antérieur' à fon acqujation i: mais il- en.
a un autre, qui Ce tire des cJrconfianc.es, da os lefquelles fe'
trouvait la Dlle. Lauthier lorliju'elle reçut fan paiement;:
eUe 'avait rapporté un titre d'adjudication contre fbn. débiteur, & il n'écoit plus queIl:ion que de le mettre à exécu:~
tion: TI écoit alors jugé qu'Aubin était le principal débiteur des iOmmes dont la DUe. Lauthier poutfuivoie le' recouvrement" & que fes biens étaient chargés de C-ette'
dette à J'hypotheque de 1721. ·C'étoit donc Aubin qui de~
voit payer i il Y avoit titre fuffifant pour l'y conrraindre ,..
& ce' titre ayattt palTé avec tous les autres droits de la,
DUe. Lauthier fur la tête: du fieur Gaimnrd, nul- doute que
~e1ui-ci n'ait pu fe faire rembourCeu da'ns l'hoi1"ie d'Aubia:
avec les mêmes droits & à la même hypotheque de la
DUe. Lauthier, ce qui 'eIl: conforme à la doél:rioe de Bafl'lage en fan Traité des hypotheques, part. 1, ch., 1 J'.
Par Artêt du 28.- Avril, 171h ,_ au, rappo!;t de Mr. le Con'feille!; des erotes, l'a Sentence d'ordre fut réformée;; la.
c.o.ur ne rangea, -Gaimard pour les dépens à lui adjugés, R~
.. ..
�3SS,
JOURNAL
la Semence d'ordre concernant la garantie introduite contre
Aubin fon vendeur, qu'après le degré accordé à Anne
Turin, & à l'hypotheque du 23 Juin i7S 9, jour de l'acquifition, fauf & réfervé audit Efcoffier la voie hypothécaire ou de regrès fur la maifon vendue par ledit Aubin, &
audit Gaimard fes défenfes contraires, & notamment à
raifon des créances privilégiées ou ayant hypotheque antérieure, comme auffi réfervé audit Efcoffier le droit d'offrir
fur ladite maifon, & audit Gaimard fes défenfes contraires, dépens compenfés. Ecrivant, Mes. Serraire &
..
ARRÊT
LIX.·
De quel jour courent les délais à faire enquhe?
Effet de la déchéance définitive.
UR les conte!1:ations qui s'éroient élevées entre les
Freres Ripert de la ville d.es Baux & Jean Imbert, au
fujet de l'expilation d'une cailfe appartenant à feu Joreph
Ripert, il intervint Sentence interlocutoire qui ordonna
que les Ripert 'prouveroiènt fommairement qu'Imbert avoit
recouvré & retiré quelques dettes aaives du défunt, &
quels pouvoient être le négoce & les facultés de ce, dernier.. La Sentence permit à Imbert de prouver que la cai!fe
avoit été. retirée par l'un des héritiers.
.
.Cene 'Sentence fJt'fignifiée au Procureur des Freres, Ripert, & enfuite au Procureur d'Imbert. Les prem.iers firent
~ffigner leurs témoins, & produifirenr quelques, aaes d:qbligation pour jufiifier' -les facultés de l'hoirie; les parties
comparurent par le minifiere de leurs Procureurs.
Le Procureur d'Imbert requit le· rejet des 'pieces communiquées, & la déchéance définitive de l'enquête, attendu
que les Ripert n'y avaient pas fait procéder dans les délais de droit. Le Procureur des Ripert contefia la déchéance. Renvoi à des Arbitres; Sentence qui déclare les
Riperr déchus; appel pardevant la Cour.
On diroit pour eux, que la Sentence interlocutoire ne
leur ayant pas été fignifiée pe.rfonnellement, mais à leur
Procureur) !e délai pour faire enquête rie p;>uvoit courir
S
�DU
PAL AIS
D JI:
PRO V JI: NeE.
3S9
contr'eux; ils ajoutaient [ubfidiairement, que fi la lignification au Procureur étoit [uffi[ante pour faire courir les
délais contr'eux, elle devait également [uffire coutre Imbert, qui, comme eux, étoit chargé de faire une preuve
principale, & qui également ne l'avait point faite dans les
délais.
La quel1:ion de [avoir de quel jour devaient courir les
délais à faire enquête, a divifé les Auteurs; les uns ont
penfé que ce devait être du jour de la fignification au Procureur, du jugement qui l'ordonnait; les autres ont foutenu que ces délais étant fàtals, la partie ne pouvoit être
définitivement déchue par l'oubli & la négligence de fan
Proèureur; que conféquemment le délai ne devoit courir
que du jour de la fignification du jugement à perfonne ou
à domicile.
Il en: vrai que l'Ordonnance (tit. 2.2, arr. 2) veut que
le délai coure du jour de la fignification au Procureur.
Mais on ne peur fe diffimuler 'Ia contradiél:ion que renferme cene Loi avec [es autres difpofttions. Elle veut à
l'art. I l du titre des Rajl/êtes âviles, que le délai, pour
pouvoir les impétrer, ne coure qlle du jour que l'Arrêt
efl: fignifié à perfonne ou domicile.
Le motif de la fignificarion à partie de tout jugement
définitif en:, felon tous les Commentateurs, de la mettre
en demeure de l'exécuter : car, ajoute le Commentateur
d'Orléans, s'il fuffifoit de le fignifier au domicile du Procul'eUT, la partie pourroit n'être pas avertie. Pourquoi une difpofition différente en matiere d'enquête? La déchéance
efl: également fatale dans. les deux cas.
Cene cOl)tradiél:ion dans la Loi a faft établir en Provence
une maxime qui regle tout felon l'ordre de l'équité. On y
a reconnu que les juge mens définitifs, les jugernens interlocutoires & ceux qui ordonnaient des preuves, devaient
toujours être fignifiés à la partie en perfonne ou à. domicile, malgré l'option de lignifier à partie ou à .Procureur
que laj{foit l'art. 2 du rit. des enquêtes, & malgré que le
Réglement de la Cour renfermât une difpofition équivoque, au titre des annotations générales, art. S, en ce qu'il
porte indéfiniment que tous délais à fàtisfaire aux Arrêts
�~~
JO~RNAi
courent du jour des (ignifications à Procureur; on a tou';
jours refpeaé l'ufage qui a ·rendu· -néceffilire la lignification
à partie. Le Chevalier <le Lincel ayant voulu faire décheoir
définitivement Bodoul, Marchand Confifeur, d'après une
fimple fignification à Procureur, il fut débouré par Arrêt
rendu au mois de Janvier 1712. Autre Arrêt du 28 Novembre
1736, entre Antoine Sauffe du lieu de Merargue, & Etienne
Blanc.
"
Dans les inf1:ances qui fe pourfuivent fur requêtes refpectives,. on fe contente de fignifier les premieres comminations à Procureur; mais la derniere, qui contient la c1aufe
irritante, des maintenant comme pour lors, efr toujours fignifiée à la partie en per[onne ou domicile, & ce n'dl:
qu'après les délais du jour de cette lignification que l'on ne
reçoit plus fa requête contraire; ce cas efr fans doute bien
moins favorable que celui d'une enquête, parce que la partie
peut toujours venir par la voie de l'oppofition; au lieu que
dans le cas d'une enquête, les délais font fatals & péremptoires, & que, fi le Procureur à qui l'unique fignification a
été faite, oublie ou néglige d'avertir fa partie, il ne ref1:e à
celle-ci aucun moyen contre le préjudice que cette négligence lui caufe.
.
Donc, concluaient les appellans, la Sentence interlocutoire qui les foumet à faire une preuve, n'ayant jamais été
fJgnifiée qu'à leur Procureur, ils n'ont" pu être légitimé ment
" déchus par les Arbitres du droit de faire cette preuve.
On répondoit pour Imbert, que le Légiilateur, dans J'art.
2. du titre 22 de l'Ordonnance de 1667, a laiffé l'option de
faire la figuification du jugemen t qui ordonne une enquête,
à la partie ou au Procureur. Il rappelloit la difpolition du
Réglement de la Cour, art. ~ du titre des annotations; qui
veut que tous délais courent du jour de la lignification à
Procureur. Les deux articles de l'Ordonnance portent fur
des objets différens. Le Légiilateur a voulu d'une part que
les Arrêts, les juge mens en dernier reffort & les Sentences
Prélidiales au premier chef de l'Edit foient fignifiés aiix perfonnes ou domiciles, pour en induire les fins de non-recevoir contre la requête civile, & de l'autre, que tout jugement qui ordonne une enquête, foit fignifié à la partie ou
à
�. .
bu l'AL.A:LS 'nBJ PjtOVnNCE.
.36'x'
-à Procureur. L'on voir',_en lifam la fin de l'àrtJc1e, que bien
toin de conerar·ier l'an. 2 du rir. 22, il le confirme: ,,_ fans
gue cela, ajoute la Loi, puiJfe être tiré
confèquence aux
." hypothegues, faifies, exécutions & autres chofts
l'égard
'l' defiJuelles les Arrêts, Jugemens &. Sentences contradic?oires
'l' donnés l'Audience, auront leur effet, guoù/u'ils lIlayent
'l' été jignifiés, & ceux par défaut donnés eri l'Audience
&
" fur proces écrit, à comprer du jour .qu'ils aurone été fig'" nifiés aux Procureurs. "
De tous les Arrêrscirés, le dernier el!: le feul qui ait
quelque rapport au procès; mais cet Arrêt ifolé ne fauroit
-dérruire le difpelitif de j)ürdonnance. La .fignificarion à
panié de's decrers de la Cour, ponane décheance définitive,
el!: une maniere de procéder que l'ufage a introduir; mais
'Cet ufage ne peut êrre affimilé à un cas di./férent fur lequel
l'Ordonnance & le Réglement de la Cour one prefcrit' le
contraire.
.
.
En vain les appellans opporent qu'il dépendl'a d'un Pro'Cureur indolent de biffer cou·rir les délais & facrifier ainli
fa parrie, fans qu'elle en ait conooiffance; en fuppofant que
certe raifon d'équité apparente pûr rendre inu~ile la, difpb"
firion de l'Ordonnance & du Régleinent de' la Cour, bn
-ne fauToit. s'en appuyer, parce que les: Ripert 'ont eu une
parfaite connoiffancc de l'interlocutoire, puifqu'ils l'onr fait
lignifier au Pmcureur d'Imbert, & qu'* ont donné affigna'tion aux témoins pour procéder à la preuve contraire. Ainû
tombe le prétexte de négligence du Proc'ureur ou d'ig~orance
de la partie.
':
.
. Sur les fins fublidiairës prites par les' Ereres Ripert, ils
obfervoiem que les parties n'ayant rempli ni l'une 'ni l'aurr.e
la preuve qui leur étoit impofée, on de\'oi~ mettre à l'écart
Ja Sentence ineerlocutoire, juger d'après les preuves qui fe
·trouvoient au procès, & ne pas perdre de vue que le Juge
des Baux n'avait pas fait un interlocutoire pour faire) prouver
i'expilation qui était déja proL!vée, Illais pour connoÎJte les
facultés de Jofeph Ripen, & s'il exil!:oit une feconde caiffe
qui contînt des effets précieux de- .fa fucceffien, & par ce
moyen pouvoir déterminer jufql!es à quelle fd'mme on de-.
voit accorder le ferment. e..n plai4J aux,Ereres .Ripext.
a
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a
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-
Zz
�.362.
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JOU. RNA J..i'
-
"
On répondoit pour Imbett, quetla Sentence interloca:.
rajre, avoit fubordonné le fort de la demande des Freres
Ripett à ',une preuve qu'elle les avOit chargés de rapporter•.
Cette Sentence, acquiefcée par les parties ,. avoit la même
a.utorité 'qu'une tranfaétion, Les Freres Ripert n'ayant point
fait la preuve .ordoI1née, les Arbirres av oie nt dû les débouter' d'une demande faire fans jufiificarion, q.uoiqu'Imbert
n'eùr rapporté aucune preuve. ctlntraire; la preuve à laquelle
les freres Riperr éraient obligés, étoit un préalable- à rem,plir;, avant cellé' ·d'Imbert.
Arrêr ,du 6 'Juillet 17&1, au, mpport de Mr. le Confeiller
del,Garidcl, qUÎ..confimfe .Ia· Sentence avec dépe·ns.
Sur les' fins principales, la 'plupart des Juges con.vinrent
de 'la· néceffiréi de la fignificarion à partie; mais touS pen~
fer~nc· que la fignificarion à Procureur fuffi[oir, rlès que les
Ripèrt av,oienr eux..linêmes exécuré l'i.nrerlocuroire•.
Quant amc fins Cubfidiaires, en reconnoiŒant qu'Imbeu
étoir ,chargé. d'Lrpe' prepve pofirille dont il pouvoir ê.tre
déchu, parce 'que lè retard' des> Ripen ne pouvoit occa!ioner le fien, on crut que la Sentence interlocutoire avait
été rendue pour _prollNeD le délit ~ con.noîrre les facultés
<le Jofeph Riperc "" &. 'que n'ayant pas rempli, l'incerIocu:roire..,,; G!I!'ne,poavoirJes admettre \lU f~nnenr en plaid pour
quelle Comme' que lie fùr. '
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Dans les aJlùrances maritimes, comme aans lés. autres çon~
, tr~,ts.,. f'i!fl{JncgatiQ.I}Ji.mylé.e 'Ou; /auj[e ne nuit point il la
,c/ifPcifitLOn~: .
" _' .! :1'
~'
~
Ar- police c1oCe' du 8 Mai 1'778 par Pèntrem.iCe de Me•.
Lang1ade, Notaire à MarC'eille, les fieurs Dllhamél &
Haguelon, Négodafls: de'Jla· mêm'e vil!e " Ce 'firent affilrer'la
fomme de 4000 liv. d'ordte & pOUf "ompre du fleur Yves
Leclerc dé Sain~' Malo l,! & d'é [ortie' des' Colonies' angloaméricaines juCqu'à Saint-Malo ou 'autre Porr d:Europe-, CUl"'
corps & facuités du Navire La Pofie commandé par le Capitaine Roger, ou autre pour lui, .à la prime de trl!ote pOUl"'
~ent) <;Qmpel1~ble.et).' oas-:de perfe 2 ou. rembQurfable. un.
P
�DU
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ALAJS
DB
PROVENCll;
3'6)'
'triais après l'heureufe arrivéé. Le lieur Ronalf(i~.ain~;. Né.,
gociaur de Marfeille, prit dans .cetée police un rif.gue de'
24'00 liv.) les '1600 liv. refiaores furent divifées ; favoir ,
'1000 liv. au fieur Ge1frier, & 600 liv. au fieur.Kick.-·
J, Avant
le départ du Navire,laffuré; lei fieur. I:.-eclerc "fachane'qu'il étaie attendu par les AnglaillS avoir. cru' devoir.
prendre la précaution de changer 1e: nom du C'ap'itaine .&,
celui .de fan Navire. La guerre alor,s' n'étain 'pas déclarée,
'elle n'exiHoit pas même en fait; mais' Îes Ariglais' avàient
été infiruits que \e. Vailfeau La Pofle. commandé par le
Capitaine, Roger:' f1voit .été, armé' pour lesl Inforgens;. ils
l'attendbienu. Le 'changement de nom; .foit du .Navire , dOit
du Capitaine" n'eut d'autre principe & ne pouvoit)Jpas.m~me
en avoit' d'autre.. \ .
.
: .;~.
Ô!,
ïJ':
Les fieurs Geffrier & Kick, qùi furent infiruits-d ' ce' fait.;
dédarerent àu bas de la police'qu/ils avoieur .été prévenu·s..
le 3 Août que le Navire La Pojje, 'Capitaine Rôgér;, éwit.
dénommé dans les expéditions le~ Navireilei,Cefi,." Capitaine
Mr. de La Tournerie. Le fieur Rolland rèfufa Jl'y foufcrire ,.cé'
qui obligea les. fie urs Duhamel.& Hague10n de.-faire fignifier
au fieur Rolland le 17 Août 1778' un 'exploit interpellatif,
par lequel ils lui déclaraient qu'ils venaient d'apprendre' par
une ·lettre écrite par le. fieur , Leclerc le 1121 Juillet d'aupara'vant, que le Navire La Pofle; commandé par le Capitai.ne
Rogér, avait été nommé dans·les expédid<i>'6s E,e Cefar, CapItaine de La Tournerie.,.-ce qui n'avoiLété pratiqué de même
que pour fe prémunir contre taute mauvaife rencontre, attendu
les circorifrances. -Ils .lui donnerent! connoiffance' de la déclatation que les Affureurs avoient figné.
,fieur 'Rolland; ré:"
pondit' fur li fig-nificatlon .de. cet exploit", qu/il. avoit l.pris ,le
rifque fur le Navire La <Prjle, -Capitaine Roger,ï'&ê. & dé:l
clara qu'il h'enrèndoj~ 'courir le rifque priS! fur le Navire. què '
fur fa prerni~re délignation, qu'il' r.enon~oit db ce m,ornent
à la prime, & qu'il'dëclauoit à 'l'affûré' ,qu'il ne 'payeroit pas
en èaS de perte, conIidéranr' le rilque comme 1 non advenu
pdur .lui.
\ .,
~.
1 c l ; ')~
•
Après cette réponre, 'les lieurs iDuham&1 :& Hûguelon fe
pourvurent le même jour au Lieutenant:d<tfAmiral,lté, en de~
]i.e:
Zl;~
�364
1 OUR
N A. L
<
mandant contre le fieur Rolland que le rifque porté dàns fa
police fubfifleroit pour la fomme· par lui· affurée fur le Navire Le Cefar,' Ca?itaine La Tournerie, qni n'é.roit autre chofeque le Navire La Pofle, .capitaine Roger._Uaffàire fur.plIidée,
& le u! Août ~ 778.il iritervint. Senténce, portant que-le fie.ur
Rolland 'continueroit à courir' le -rifque par lui) pris d.1ns la.
p.olice, faufià lui rnéanmoins de prouver que le- VaiŒeau. Le:
Cefar, GJpirainè de La TOllmerie, étoit. t.out autre que le;
Navire Lâ Pofle, Capitaine Roger.
Le 26 du même mois, la nouyelle vint que le Navire affuré:
avoit éré· pris par la Frégate Le Porcepi, qui l'avo·ir conduit à-,
Porrfmourh.: Lès Srs, Duhamêl:& Haguelon. firen.t alors figni .
fier' la Semence'dq 211,' enfemble une déclararion. de la nouvelle qui venoit d'arriver au, [ujet du finilhe, &.une annonce que·
l;abandon. &'Ùéla.iffémenrlui feroit fait au premier jour:. Le Sr ~
Rolland appella alorS' de la ,Sentence du 21. Août ;.Ie délailfemen;t .lui· fue,[àiC: (~nruire', & Le :Lieutenant le condamna:
au 'paienJ'ent provilOire des fD'mmes affurées,. en. donnant par·
l'affuré bannez & fuffifanre caurion,
..
On difoit pour le Sr~ Rolland·, qu'il n-'a\'o.it pris aucllnrifque,
fur le Navire Le Cefar, Capitaine La TOllmerie,.& qye '1>0-.
féquemment il/n'en de'loir f0!lffrjr aucun
1
1
On: répondO.ii: que -là démonflrarion ou défignation erron-·
née, flInulée; ou' même fauffe' è1és. chofes' ou. de_s perfolJnes_
n'alrere point· le (fonds' de ..la· difpbfirion, s'il confle d'ailleurs des chores 9u <les perronn,eLfur. lerq.uelles la difpo....
fition. doit. tomber..'
~.
,
,- ~
Efi-ii rien. de:rphl'S!I indiŒérenc< .eri effet d~ns l'objc't·~
dans les'rp·rin.cipes. .des .alfuran.ces, -que -la circonllance: du;
non;' du Nav~re om;ceU-e· du· GapitaineLCe. Navire· ·qui '~,
fuivan:t .1'âlflj.ance , devoit porter 'pal/iUoo, fran<;ais, pouvoicil être plus refpeétabie.pour· les' Anglais fO\ls'le .nom de·
La Pofle porté par .l'allùranae ,. & . qui~ étoit ·(o!l~,yér.ira.bte:
J)om , que fous celui: du .Cefar qui lui [ifut d'onné par occation pour tromper le~ AngUi·is 2 Lë Capitaine. éroi.t-.il plus;
r-edoutable rous le nom de La Tournerie énoncé daps. les.
expéaitions, que rous celui de' Roger porté dans 1'<1 ffur;i Il ce ~
I..e.s. AJfure.ur:s. n:ônt pas é.té. trompés ~ le. Navire. LI:.. Cefalt
�1> U
l' A L A'JS
1> B
P Il 0 V B N C B:
36,'
& le Capitaine La Toumerie pris par les Anglais ne font
aurres que le Navire La Pofle & le Capitain.e Roger énoncé
dans l'a{[urance. La fubll:ance de l'aifurance a toujours été
telle qu'elle éroir lors du comrat, ut non cortex fi formula ver6orum, comme dit le Cardinal de Luca, de credit.
& de6it. difc. 108. n. 4 , fed fu6flantia veritatis attendi de6eat. Il ell: vrai que cet Auteur après avoir convenu du
principe, établit que l'erreur du nom peut être d'une cerJ'aine confidération, comme fi, par exemple, on fubroge un
Port à la place d'un aurre, fi l'on met un perit Navire à
la place d'un Navire ordinaire. Cara-Regis arrell:e la même
maxime, dirc. l , n. 27 : fi fuit afficurata Navis , & erat
pincus, fi fÎlit afficurata Fregata, & erat Barca. Vallin fur
l'article 27 de l'Ordonnance de la Marine, ritre des affirances, rapporrte un Arrêt du Parlement d)Aix du 2 Mai
17)0, qui déclara valable l'a{[urance faire fur le Brigan-·
tin nommé Le Lion Heureux, déGgné dans la police fous
le nom feulement de Brigantin l'Heureux.
Par Arrêt du 10 Mai 1780, au rapport de Mr. le Confeiller de la Baume, la Sentence fut confirmée avec dépens.
ARRÊT
LXI.
Les acquifitions faites par la femme durant le mariage ou
pendant l'année du deuil font préfumées faites avec les deniers du mari, fi elle ne montre unde habuerir.
Secùs de celles faites après l'année du deuil, quoique peu de
jours après.
A
Ndré Tirat, Ménager de la ville de Salon, étant décédé le 3 Janvier 1774, fes trois fils procéderem au
partage de fa fucceffion. Il fut convenu dans l'aéle qui fut
rédigé ~ cet égard, qu'ils fupporteroiem au profit d'Anne
Na\in que leur pere avoit épouré en fecondes nôces, une
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l' A L A'JS
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P Il 0 V B N C B:
36,'
& le Capitaine La Toumerie pris par les Anglais ne font
aurres que le Navire La Pofle & le Capitain.e Roger énoncé
dans l'a{[urance. La fubll:ance de l'aifurance a toujours été
telle qu'elle éroir lors du comrat, ut non cortex fi formula ver6orum, comme dit le Cardinal de Luca, de credit.
& de6it. difc. 108. n. 4 , fed fu6flantia veritatis attendi de6eat. Il ell: vrai que cet Auteur après avoir convenu du
principe, établit que l'erreur du nom peut être d'une cerJ'aine confidération, comme fi, par exemple, on fubroge un
Port à la place d'un aurre, fi l'on met un perit Navire à
la place d'un Navire ordinaire. Cara-Regis arrell:e la même
maxime, dirc. l , n. 27 : fi fuit afficurata Navis , & erat
pincus, fi fÎlit afficurata Fregata, & erat Barca. Vallin fur
l'article 27 de l'Ordonnance de la Marine, ritre des affirances, rapporrte un Arrêt du Parlement d)Aix du 2 Mai
17)0, qui déclara valable l'a{[urance faire fur le Brigan-·
tin nommé Le Lion Heureux, déGgné dans la police fous
le nom feulement de Brigantin l'Heureux.
Par Arrêt du 10 Mai 1780, au rapport de Mr. le Confeiller de la Baume, la Sentence fut confirmée avec dépens.
ARRÊT
LXI.
Les acquifitions faites par la femme durant le mariage ou
pendant l'année du deuil font préfumées faites avec les deniers du mari, fi elle ne montre unde habuerir.
Secùs de celles faites après l'année du deuil, quoique peu de
jours après.
A
Ndré Tirat, Ménager de la ville de Salon, étant décédé le 3 Janvier 1774, fes trois fils procéderem au
partage de fa fucceffion. Il fut convenu dans l'aéle qui fut
rédigé ~ cet égard, qu'ils fupporteroiem au profit d'Anne
Na\in que leur pere avoit épouré en fecondes nôces, une
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10
U RNA
L
penlion viagere de 30 liv. à raifon des droits qu'elle avoit
à prétendre dans ceue hérédité.
André Tirat, l'un d'eux, ne payant pas le tiers· qui le
concernait, ni la fomme de 226 liv. qu'il devoit en outre
à Anne Nalin, fuivant [on obligation fous feing privé, celleci fe pourvut contre lui en avération de l'obligation, &
en condamnation de la fomme y contenue, ainli que des
arrérages du tiers le concernant de la pen lion viagere.
Le débiteur n'ofa pas contefl:er la demande; mais il
cherLha à la compenfer' avec le prix d'un fonds de terre
acquis p~r Anne Nalin le 13 Janvier 1775, f01ls prétexte
que cette veuve avait payé des deniers de fan mari. Il
offrit le paiement des fommes demandées, fous la deductian du tiers de l'argent employé à l'achat. Cette com-·
penration fut rejettée, & le. Juge de Salon le condamna
au paiement des 226 liv. & des arrérages. du tiers .de la
penfion viagere.
Appel de cerre Sentence pardevant la Cour. L'appellanr
foutenoit que l'acquifitioli avait été faite avec les deniers:
de [(JIl pere dont il avait été facile à Anne Nalin de s'emparer, foit avant IJ mort de celui-ci, parce que dans la·
caduc.ité de fon tige elle le dirigeait felon fes defirs, fait
:après fa mor'. li alléguait qlfAnne Nalin n'avait aucune·
re{follfce qui eu" pu lui procurer la partie du prix qu'eHe
avoit COI~lptée Jars du c.ontrat d.e vente, n'ayant point de·
biens, ne f"irane aucun commerce, & pe n10ntrant pas la
voie par Jaque1le ejle' .avoit eu ces deniers; d'où il concluoit
,u'ils. étuiem cente~ venus ex rehus mariti, li Ion la difpofition d la Loi Quinws-Mmius, ff. de dO/Jat. int. vir.. &
uxor. où' hi Iuriîconfulte écide q.ue· les acquilitiol)s fàites
par la femme dunrnt le mariage font préfumées' êne faires:
des effets du mari, evitandi turpis quœjlus gratia; cetté:
même préfomp.tion ayant li~u. par rap.port aux ac.quilitions
faites. pe~daut l'a.nuée de ,deuil, fuÎvant les Ar.r{:ts, & ent:r'autres ,c;e!ui du l ) Décembre Il 'i)'8 ~ tin~. des Mél;l1oires
d~ Mr. le Pr.élident de..C@riolis, & re.matqué .par Dupe~~er 1 ((lm. 2. , pag. Ji: lit, n. 61. Enfin Anne Nalin ne s'eJl;
�'p A LAI S D E PRO VEN C E:
J67
pas mife à l'abri de la préfomption du droit, pour aVOIr
palfé le contrat quelques jours après l'année révolue du
deuil. Elle a voulu faire fraude à la Loi par la coupable
précaution qu'elle a eue d'atrendre cette époque.
Le Défenfeur d'Anne Nalin convenoit en faveur des
principes, que par la préfomption de la Loi, tout ce que
la femme acquiert pendant le mariage, ou même pendant
l'année du deuil, eH: cenfé acquis avec les deniers du mari.
Mais la Loi ne fe décide que fur une préfomption légale
juris & de jure, à laquelle elli donne le caraé1:ere de preuve.
Ainli, lorfqu'une femme fait des acquilitions pendant le
mariage, ou pendaat la pr miere année de viduité que le
mariage el!: encore cenfé durer, elle efl: pré fumée avoir
acquis avec les deniers du mari, li elle ne dé[ruit cette
préfomption. On aime mieux croire a lors qu'elle les y a
employés, que de préfumer qu'elle fe les foit procurés par
des voies déshonnêtes & au prix de fa pudeur. Le ~upçon
même feroit une injure & pour la femme, & pour le mari
ou fa mémoire. On doit donc chercher à l'écarter. Au
contraire, fi elle a entrepris quelque commerce dont le
profir air pu lui produire le prix ·de l'achar, fi elle a des
biens paraphernaux ou l'ufufruir de ceux de fon mari, dont
le revenu air été fuffifant pour le lui procurer, dans ces
cas & autres femblables, cette feconde préfomption l'emporte fur la premiere qui s'évanouit.
Telle efl: la difl:iné1:ion établie en cette matiere, comme
on le voit dans le Code de Mr. le Prélident Faber, liv. 4,
tit. 14 de proDat. & prœfùmpt. déf. 41 ; Menoch, de prœfùmpt.
liDo 3, cap. SI; Boniface, tom. 4, liv. S, tit. 14, ch. 1;
Mr. de Bezieux, liv. S , ch. 1, §. Ir.
Or (ajoutoit - on) la partie du prix qu'Anne Nalin a
compté, procédoit des droits légitimaires qu'elle venoit de
recevoir. C'en-là un fait certain dont elle rapporteroit la
preuve, li elle pouvoit être néceifaire.
Mais ces principes & cette preuve font ahfolument étrangers à l'hypothefe dont s'agir. La préfomption du droir
~egarde feulemen~ les acquilitions faile~ confl.antc l1Ultrimonio ,
DU
�3~
JouaNii
ou pendant l'année du deuil, fans qu'il en puiffe étrê
quell:ion à l'égard de celles qui font faites hors de ces deux
temps; car le lien du mariage étant diifous par la mort du
mari, ou l'année de fan décès s'étant écoulée, la femme
rentre dans les droits de cout citoyen; avec la liberté, elle
recouvre la faculté d'acquérir en .[on nom & pour elle, fans
qu'elle puiffe être inquiétée à raifon des achats ou des
paiemens qu'elle fair. Elle jouit alors du droit commun,
qui veut que perfonne ne fait renu de déclarer ou juftifier
de quelle maniere font venus les deniers employés à quelque affaire que ce puilfe être. Le temps a jetté fur fes
aaions un voile qu'il n'eft plus permis de pénétrer. En un
mor, il fuffit que le. rerme fixé par la Loi, & prorogé par
la jurifprudence des Arrêts, fait expi.ré, pour que fes acquiGtio.ns. lui appartiennent, quoiqu'elle ne prouve pas d'où
viennenr les deniers, comme ra établi Benedia. ad cap.
raynutius, in vu. 'lui cùm alia matrimanium, n. 144, elapfo
tempare luc7us....... de [ua mulier acquifiviJfe vel folviffe pl'œ[umitur. Ce fom les propres termes de Boerius ,. décif. 8 l ,
n. S.
De forre qu'il eft très-indifférent d'obferver {;Jue la date
du contrat de vente faite à Anne N alin n'eft poftérieure
que de dix ou onze jours à l'époque de l'année révolue· du.
deuil. Elle n'eCl pas obligée de juHifier undè- haDuuit, puifqu'elle n'eft plus dans. le cas de la préfomption de la
Loi".
Il el!; inutile de fuppofer que fan mari avait eu J.'imbé-"
ciHité de lui confier fan -argent. Si l'on prétend qu'elles'en ell: emparée. elle-même, fait durant la. maladie, foit
après le décès, la voie eH ouverte pour fe plaindre régu,":
liérement du recelé, & pour en rapporter la preuve.
Mais fallait-il. bien avoir recours au reproche bannaI- que·
les héritiers apparent ordinairement. Une veuve a-r-elle desdroits à exercer dans la fucceffion de fan. mari, & les faitelle valoir·, on fe plaint d'elle; on l'accufe vaguemenr &
au hafard d'avoir commis des expilations, de s'être entiç!J,ie, couverte des dépouilles de (on mari; comme:
�DU
PAL AIS
D E
PRO VEN C E.
369
ëè parerlles allégations devoient fuffire pour l'en - convainçte, & pour fuire prononcer la compenfation de ce qu'on
prétend avoir été par elle fouffrait, avec les demandes qu'elle
a intentées.
Par Arrêt du la Mai 1780, rendu au rapport de Mr. le
Confeiller d'Efp~gnet, la Sentence fut confirmée, avec dépens. Ecrivant Mes. Perrinet & ...•.•
ARR Ê T
LXI I.
Accédit fans information précédente•.
Rançois Martin, Maréchal ferrant de la ville de Saignon:"
préfenta une requête de plainte le 13 Août 1778 au Jugede la même ville, fur un vol de pois chiches fart à une de'
fes terres, & requit l'accédit à la terre & à tous autre.s
lieux que befoin feroit, pour y découvrir les chofes \l0lées.
Le Juge fe rendit à- la propriété de Martin, où après quel-.
ques obfervations, il le requit d'accéder en la ville d'Apt
dans les maifons de François & Efprit Beffe pere & fils ,.
& enfuite dans une petire maifon de campagne fituée dans,
le terroil~ d'Apt que Beffe avoit en .arrentemeqt de la veuv~
Roux•.
Le verbal conffata que l'on trouva des pois chiches dans'
la ma ifon des Beffe; ceux-ci appellerent pardevanc la Cour ,.
demanderent la caffation du décret qui ordonnoit l'accédit"
& de tout ce qui avoit fuivi, avec dommages-intérêts.
Martin offrit un expédient; il caifa le verbal d'accédit faieaux maifons & propriété des Beffe, confirma le décret,
refufa les dommages & intérêts, & compenfa les dépens•.
. On obferva pour François & Efprit Beffe, que le décret
du Juge de Saignon qui. permettoit d'accéder à. la propriété
de Martin & ailleurs où befoin ferait, étojc un décret in-.
défini, quant à ce, & ne limitoir aucun lieu; il fuffiloit àt
F
.
A. a. a.
�370
1 0 U RNA t:
Martin de repréfenter au Juge de Saignon que dans tel lieu;
·dans telle maifon, chez les Beffe, il foupçonnoit les vefiiges
du prétendu crime, pour .que le Juge, lié par fan décret, ne
pût pas s'y refl/fer. Or, d'après les Arrêts de Réglement, il
efiprohibé aux Juges d'accéder aux maifons des particuliers
pour y faire des perquiutions, fous prételite de vol ou de
recélemenr, s'il n'y a information précédente ou flagrantdélit.
Martin avait requis par fa requête, & le Juge avait ordonné par fon décret qu'il ferait accédé par-rout où befoin
feroit. On n'a pas bëfoin de filire fentir les conféguences
d'une conduire auffi irréguliere. Outre la calomnie atroce qui
en efi prefque t'Jujours le fruit, trop d'abus peuvent s'en enfuivre, tels que ceulC d'une 'ntroduél:ion furtive par la perfan ne qui a intérêt de con(J:ater le larcin; il n'y a que la flagrance & l'information précédente' qui puiffènt garantir ce:;
recherches, parce qu'elles éloignent jufques aux foupçons
d'une démarche volontairement fauffe.
En requérant la caffation du décret, au chef qui permet l'accédit, & de l'accédit fait aux maifons & propriétés
àes Beffe ( continuaient ceux-ci ) on n'a point entendu
vouloir donnetatteinte à la partie du décret qui aurorife
l'information & l'accédit à la terre de Manin; on a feulement eu en vue de s'oppofer à cet accédit vaguement ordonné, qui emporte une application générale, & qui devient plus vicieufe, quand on la fait fervir aux cas prohibés.
Sur lèS dommages & intérêts, on difoit pou~ les Beffe;.
que la calomnie & la diffamation doivent être punies ,avec
rigueur. Les Ordonnances n'ont pu déterminer précifémena
la peine que l'on pouvait infliger aux calomniilteurs. Incertaines filr la gravité de la punition, après les avoir affujettis
aux dommages & intérêts qui forment la moindre punition
dans l'ordre des peines, elles ajontent, a plus grande peine,
s'il y écheoit. Delà on a vu, felon le rang des perfonnes,
l'importance de la diffamation & le deffein du 'calomniateur,
,
�DU
PAL AIS
DE
37 l
PRO VEN C Il.
varier les jugemens, qui tantôt ont ordonné la peine affiicri e, & tamôr des dommages & intérêrs.
La noirceur de la diffamarion ne fauroir êrre plus grande
que celle dom Marrin s'efl: rendu coupable, & les dommagesintérêrs doivent êue proportionnés à J'intention maligne d'accufer un homme qu'il favoit êrre innocent de la fauife accu-·
fation contre lui intentée.
On répondait pour Marrin, que le Juge en rendant le dé-cret dont s'agit, n'avoit eu d'aurre objet que de connoÎrre
le lieu du délit; ce préalable éroit eifentiel & indifpenfahle_
Ciceron a dit dans un de fes plaidoyers, que roure accu-·
fation fuppofe d'abord un crime dont elle détermine la quaIi.ré; elle cherche enfuite un coupable fùr qui doive frapper'
la condamnation: accufdtio erim~n d~fiderat, rem ut deji.niat"
hominem ut notet, argumenta praDet, tefle confirmet. C'eft
encore ce que dit Mr. d'Agueiféau dans fan cinquante-uniemec
plaidoyer.
Le décret du Juge. de Saignon· ordonne l'accédit fur lal
terre où le délit avait été commis, & ailleurs où hefoin.
fera. Il efl: impoffible de fe diffimuler que le Juge n'avoic'
d'aurre vue que Je cOJlnoÎtre le lieu du dél.ir ; certe connoi(-.
fance éroit nécdfaire, elle ponvoit feule l'infiruire de fan;
exifl:ence. Il fàlloir donc fe lran(porter fur le lieu où il avoic'
é.ré commis, pour vérifier ft les plantes avoient été coupées._
Toutes les fois que le Juge voit par la plainte qu'on lui
porre, que l'afpea du local peur offrir quelque ren(eignemenc·
utile à J'infiruaion, taures les fois gue Je délit efl: de nature·
à: avoir biffé des traces, on acc.:ede (ur les lieux; ces preuves"
qui réfulrent du fait, font plus slJres que celles que le Jugerecroie des témoins. Infl:ruie du fait par le local lui-même"
il d.irige l'in!1ru5l:ion plus utilement; il a déja dans les COIl-·
noiffances perfonnelles, des moyens d'éviter la furprife. Ainlii
l'accédit ordonné éroie conforme aux regles; le décret du..
Juge, quant à ce premier objet,. efl: donc à l'abri de route.:
critique.
,Quant à la derniere claufe, portane, & ailleurs par-tout
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A-a a
2..
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JOURNAL
/Jefoin fera, il e!l: certain qu'elle n'a aucun rapport aux Belre
pere & fils. On fait que ces c1aufes générales, qui n'ont
aucun objet déterminé, fone toujours interprétées par les
véritables regles. Lorfque le Juge ne s'eH point expliqué alfez
dairement pour que fon intention fe manife!l:e par les paroles, la Loi vient à [on fecours; on interprete [on jugement par la regle, fecundùm intellec7um juris. Ce n'dl: jamais qu'à regret que l'on ufe de févérité à l'égard de l'ouvrage des Juges fubalrernes, & l'on doit, lor[qu'on peut les
juHifier, urer d'indulgence à leur égard. D'ailleurs, les parties ne font-elles pas affez malheureufes d'être obligées de
répondre des erreurs des Juges, [ans qu'on permette encore·
à l'accufé d'exercer fa critique fur les c1aufes qui pourraient
être équivoques, & de fe venger ainfi d'un accufateur &
d'un Juge, dont l'un, en le pourfuivant, n'a fait qu'ufer d'un
droit légitime, & l'autre,' en accueillant la pourfuite, que fatisfaire au devoir de fa charge?
Sans doute cette maxime dl: auill [age que certaine. Quelles
font ici ces regles d'après lefquelles il faut interpréter le
décret du Juge de Saignon? Avant que l'information lui ait
défigné les coupables, le Juge ne doit s'occuper que du délit
en lui-même; la découverte du corps de ce délit doit être
fon objet unique. Le Juge de Saignon en ordonnant l'accédit fur le lieu où celui qu'on lui dénonçoit avoit été commis, annonçoit bien clairement cette intention; lor[qu'il a
enfuite ajouté qu'il accéde~oit également par-tout ailleurs où
befoin feroit, interprétant cerre c1aufe par l'intention qu'il
auroit dû avoir, il faut donc croire qu'elle ne fe rapportoit
qu'aux lieux où il pourroit également trouver des traces du
délit. Le décret n'a point défigné les maifons de François
& Efprit Beffe; il n'ell: donc pas contraire aux Réglemens
qui prohibene les- perquifitions dans les maifons fans infor'mation précédente.
Mr. l'Avocat-Général de Montmeyan ob[erva, que les regles..les· plus elfelltielles de la procédure, fondées [ur la raifon & fur l'équité, antérieures à toutes les Loix, [ont l'impartialité, la mpdération, la prudence; tels fone les trois
�'nu
PALAn
nl!
PROVB~CR:
37j
-goide que le Juge ou l'accufateur public ne doit jamais perdre 'ife vue dans cerre partie importante de fes fonélions;
peut-être tnême doivent-ils l'un & l'aurre porrer la circonf~
peélion jufqu'à la timidité & la défiance même, fur - rout
lorfqù'il s'agit de pefer & de fiJÏvre la plainte & l'impuHion
de l'accufateur privé, ou du dénonciateur que quelque paflion
peut féduire, que l'intérêt perfonnel échauffe roujours; c'elt
pour leur rappeller fans celfe ces grandes maximes, que le
Légiilateur a introduit ces formes précieufes, de l'obfervatian defquelles le falut & la tranquillité des citoyens dépendent réellement, &: qu'il n'efl: permis qu'aux efprits fuperficiels de méprifer.
Le loge & le Procureut du Roi de Saignnn en s'en écartant, ont-ils compromis fans raifon & fans motif l'état &
la réputation des deux ciroyens contre lefquels il n'exiil:oit
encore aucun foup~on légal? Les ont-ils traités & pourfuivis comme coupables, lorfqu'ils n'étoient pas même
encore accufés.? Tout le monde fait que c'ef!: le décret lui
feul, & non la requête de plainte, fur-rout lorfqu'elle émane
d'un accufateur privé, qui fait defcendre dans la clalfe des
accufés celui qu'un autre ciroyen a déféré à la Juil:ice; ce
n'ef!: qu'alors qu'elle paroÎt avoir donné quelque attention
aux foup~ons qu'on s'efforce de répandre concre lui; ce n'ell:
qu'alors qu'on peut dire que, quelle que puilfe être au fonds'
fen innocence, il ef!: cependant réduit à remplir par provifion le rÔle humiliant d'accufé, nomen ejus receptum efl inter
reos. Quand on applique cette définirion du Droit Romain
à notre JurifJ:irudence Criminelle Fran~aife, ce n'el!: pas"
qu'on veuille foutenir qu'elle ait eu dans l'origine la même
.acception chez les Romains que parmi nous, ni que ce fût
par un décret proprement dit que les accufés apprilfent alors
'<ju'ils alloient être obligés de rendre un compte judiciaire de
leur conduite.
Les accufations, telles qu'elles étoient re~l1es chez les Romains, n'ont aucun rapport avec les nôtres; la procédure
s'y infl:ruifoit d'après d'autres regles, peut-être plus propres
~llcore à maintenir une égalité entiere entre les parties,
�374
Jou J..t"" ri A J)
•
peut-étre plOs av.antageufes -encore aux a~oufés; m'<lii~ ib ~&
certain parmi nous, que la décrétation fil(e feuJe::: la cmbj.,"
bution des rôles d'accufateur & d'accufé, lor(qu'il y a, plainte
refpeél:ive·, & lorfqu'il n'y a qU'fin feul accufareur, l'époque
fatale à laquelle l'accufé a commencé d'êr-re ir-révocablement enchalné à l'inftruél:ion, de la procédure. Or, que dit·
l'Ordonnance fur ces décrers? Qu'ils doivent être propor-.
tionnés à la narure du délit, à la qualité des perfonnes &
à l'importance des charges réfulranres des informations';.:
toures les précautions que la prudence, la modéra{ion, l'im-,
partialité: peuvent fuggérer, rentrer,t néceffaire.ment dans;
l'u11e de ~es rrois. c1alfes.
Des précautions fi fages' & fi multipliées font, bi,en éloignées & bien différentes de cette févérité imprudenre & ré-J
méraire. qu'on pourroir reprocher à lJl1 Juge, qui non feule-.
ment pour décréter, mais pour fixer même la nature & la
graviré d'un décrer, .s'en. rapporterpir emiérelP-ent à la pa-role & à la bonne foi de l'accufateur, fans vifer feule men .
les charges. de la proc6dure; on a peine à croire que la con-.
fiance, ou plutôt l'aveuglement d'un Juge, puilfe aller juf-.
ques-Ià, loin de foup~onner que c'eH: le tableau de la con-_
duite du luge de S.lignon qu~on vient de faire.~
Il eft certain qu'il n'y a point eu, & qu'il n'y a point en-·
core d'information;. c'eH fur la plilinte, fur la fimple requÎ-.
fition de Martin que l'Ordonnance portant accédi~ eH: inrervenue. Or,' cerre Ordonnance e(t plus injurieufe aux Beffe,
plus fcandaleufe, p.1us grave qu'un. déCret d'afIigné & même·
d'ajournement. Il ne ~ur pas être cOlltefié que Li le moin-,
dre de ces deux décrets eClt été rendu conrr'eux dans les,
lll~mes circonftances, c'eH-à-dire fur la feu.le plainte de
Martin, il fexoit éyidemmenr nul, comme injuHe, parrial &
Q,pprefIif. .
Quel dl: l'effet ordinaire du décret d'afIigné & même·
d~ajournement? D'annoncer d'une maniere quelconque au
public que l'efprit impartial du Juge adopte·& partage jufqu'à un certain point les foup~ons & les préfomptions que
I.:açcj.lfa~eu,r l\li préfenr.e. Quel. eft. çel,:i d'une Ordonllançc;·
�Du
PALAIS
DB
PROVENCE:
'37')
'Pa'reille à cel e ue le Juge de Saignon a rendu? D'annoncer d'une maniere beaucoup plus éclarante, be"ucoup
plus fcandaleufe eucore, une fufpicion plus forte, des pourfuires plus rigoureufes, & par conf~quent un crime plus
grave.
.
Quant à la claufe du décrer porranr accédit, Mr. l'Avocat.
-Général obferva qu'elle fe rapporroit aux Beffe pere & fils,
1°. parce que Martin avoir requis le Juge d'accéder dans
les maifons des deux Beffe; '2.°. parce que, d'après l'expofé
de la requête elle-même, il étoit impoffible d'affigner à cetre
c1aufed'aurre bur que celui que fe propofoit l'accufareur;
'3°. cerre claufe efl: abfolumenr infolite & extraordinaire,
filr-tout lorfqu'il ne s'agir pas de crimes exrrêmemenr graves;
4°. enfin parce que loin de penfer que cerre claufe efl: oifeufe & inutile, appofée comme par mégarde ou par habitude dans les conclufions & dans le décret, donr la premi~re
partie a feule paru eifentielle à l'accufareur, on eH plutôt
tenré de croire qu'il n'a même demandé l'accédir fur le local,
'qui n'a rien produit, & qui ne pouvoit rien produire, & qui
d'ailleurs n'éroit pas néceifaire, que pour avoir l'occaGon de
-demander auffi l'accédit dans la maifon des appellans; accédir auffi fcandaleux que !luI, donr l'effet cerrain éroir du·
moins de les inquiéter & de les déshonnorer en quelque
forre.
Le décret du Juge ne peut être fcindé; on ne peut en
conferver une parrie & alléanrir l'autre, parce qu'il femble
que le Juge a erré & a commis nulliré dès le premier pas,
en s'ouvrant à lui-même une trop vafl:e carriere, & qu'il ne
doir pas êrre permis de légitimer quelques-uns des pas qu'il
a fair, fous prérexre qu'à la fuire d'un décrer plus modéré &
plus prudenr, il lui auroir éré permis de le faire; il n'exifl:e
pas moins une relarion inte_nrionnelle & maligne enrre les
deux parties du, décret, fait par le narré de la requête de
Martin, foit par fa requilition lors du verbal d'accédit. Ces
(;onfidérarions paroiifent aifez fortes pour avoir pu aurorifet
•
�37<1/'
l' OUR FA L
les Beire à demander la cairation de la totalité du clief dlù
décret qui ordonne l'accédit.
Mr. l'Avocat-Général conclut à ce que- le décret du Juge
de Saignon fût, déclaré nul, au chef qui ordonnoit l'accédit
par-tout où befoin feroit, & comme tel cairé, enfemble cout'
lie qui l'avoit fllivi, comme injurieux & diffamatoire, avec
t~ls dommages & intérêts qu'iL plairoit à la Cour d'ac~,
corder.
Par Arrêt du 20 Mai 1780 , prononcé par Mr. Je. Préu-dent de Saint-Vincent, les conclufions furene fuivies, &
Martin condamné à 12 'Iiv. de dommages-intérêts envers
chacun des Beire, & aux dépens~ Plaidant Mes._ Reynaud )',
Gaffier & Verdet neveu.
ARRÊT
LXIII..
Sur un décret forcé•.
E-fieur Benoit-, Négociant du lieu de Roquevaire, fournitau fieur de Flote des bariques pour un tranfport de
,
vins, & p_our le prix de 664 Q liv'_l (Jont il lui fit [on billet
valeur reçue en marchandi[es. Benoir n'étant pas payé, [e
pourvoir aux Juges-Gonfuis de Marfeille; le fieu!' dé Flote'
oppofe un déclinaroire, il en el! débouté. Appel. à la Cour;
Arrêt le 18, Juillet 1777' qui confirme. En 1778' Benoic
n'ayant pu trouver à [e payer [ur les biens du: fieu!' de Flote;
demande à la Gour un décret fo!'cé, qui lui efi accordé le
10 Avril, enfuîte des trois procès-verbaux d'ufage, confia-,
tant que le fieur de Flote ne fe montre nulle parr. Demande
en révocation de ce décret de la parr du fieur de Flote.
On difoir pour lui, que le Statur défend à, toute perfanne
d'arracher de [a mai[on, un débiteur pour de,tte civjle. s'a
pouvoit ,être permis de s'écarter de cette Loi d'humanité
~ de hie.nfaifance, ce ne Eourroit, être que dans des cîr-,. , -- ,
c_onfiancel>;
L
�DU
1
PALAIS
DiE
,P·ROVENCE.
377
wnfi.ances oùJe _débir®r fe ferair rendù indigne de ce rrille
privilege par des procédés malhonnêres & frauduleux; mai3
(Jn n'a à cel' égard aucun reproche à lui faire. Il fera il' lui
feul fondé à re plaindre d'un créancier qui s'ef!: monrré auffi
avanrageux dans les affaires qu'il a eues avec lui, que barbare
& inhumain dans les exéèurions qu'il lui fair elfuyer, puirque ce n'ef!: que fur un faux expoJé & par ftlrprire qu'on a
obrenu cerre permilIion, à laquelle rien n'a éré capa hIe de
f.aire renoncer Benoir; il efi remps que la Cour la révoque ~
& qu'elle lailfe ail fieur de Flore J'unique aryle .que la Loi,
lui accorde_ 1 .
JI.
;
, •
, On répondoir qlle peu imporre que: le débireur ne fe dé:robe pas. à fan créanc.ier par la iuire, s'il ne fe' joue. pas
moins de lui; fi renferme dans fa maifon. ou dans fes domaines, pO\lvanr en forfir plufienrs heures dans le jour, & plulieurs jours dans le 11lOis, il s'âccourume au joug de la con':'·
trainre, & fe ~ir. de celui q.ui. l'a vainem.enr obten·ue. Pourquoi, après qu'on a ,éprouvé (on inuriliré, n'elfayer.oir-on pas
les rigueurs de la priron? C'ef!: le feul moyen qui reHe ;.&
s'il eH employé ,.la ceffion des biens introduire en faveur de
celui qui ne peur payer,. garanlit qu'on ne fera pas long'
temps l'l'Op .dur ~nvers lui; il, pourra fe ~libérerl en mêm~
temps que s'affranchir. Mais fi on' ne le cDoduir. pas ,de degré
en degré jufqu'à cette épreuve, qui efl: ce qui a1[urera qu'il:
ne [e conferve pas injullement dans la polfeffion du bien. •
d'autrui, dans laquelle la contrainte lui apporte un peu de:
gêne, mais lui ·Iailfe encore beaucoup d'agrément? Tel efl: le.·
marif qui a fait introduire les décrets forcés; c'efl: un der-·
nier reniede donné à des créanciers légitimes contre la mau-·
vaire foi & la rergiverfation.
.
Une Loi ancienne & juftement refpeéloée jugea qu'il étoit,
du bien du commerce que les obligations en foire de Dyan,
fulfenr exécurées avec contrainte. par corps, fans diainél:ion,
des jQurs de fête, ,des heures du jour & de la nuir ,. & fans;
égard pour le domicile. Si cette Loi ne doit pas êrre éten-.
4ue hors de fon cas, n'a-l'-on pas pu prendre un milieu:
.
.
Rb~
�378
. ! , 1" J·o UIR N A L
entre fa 'difpolition & les iefhiél:ions qui avaient adbuci la
conn'ainte?
Les décrets,forcés lailfent filbfifter le Statut, qui défend de
faiftr dans les maifons pour dettes civiles; la permiilion du Juge
donnée en connoiifance de caufe n'y apporte qu'une exception
louable & avantageufe, Quand une dette eft ancienne, qu'il.y a
rergiverfation 'ou mauvaife foi, quel' autre moyen'? C'eft
protéger la liberté publique, que de violer dans cette occafion le privilege des maifons; cetre infraél:ioll faite de l'autorité de-s, 'lVLagiftrats, n'a, plus les ïD':onvéniens que le,SratuO
a vbulu éviter. C'eft la Loi qui enleve à fan dernier aryle
un homme' qui n'dl:' plus) digne de fa proreél:;on, ou qui 'ne
pourra plus h réclamer que dans la prifon, par le moyen honteux de la ceilion.
Me. Aguillon, Subfiirut, portant la parole, ob[erva que
les) Loix qui ont été faites contre les ~débiteurs, comme.
celles qu.i l'ont 1été en lelir faveur, ont) varié !uivanc .les
mœurs des peuples qui les am renduès. ILes p.rinci'pes que
les anciens Romains avaient adoptés fur cette mariere dans
leurs premieres Loix fe relfentenr de' la' barbarie dans laquelle ils fe trouvaient encore plongés à cette époque. Il eft
difficile de lire fans 'frémir ces ILoix crllelles qui, après avoir
fixé le poids de la. chaîne dont· elles .furchargeoient les débiteurs infolvables, livraient leur 'perfonne J à la ,férocité de
leurs créanciers, & réglaient avec une froideur révoltante
Je partage de leur corps qu'elle leur permettait de faire
enrr'eux.
.
Ce .font néanmoins ces rtlêmes Légifiateurs qui,' après
av.oir trairé fi inhumainement les débiteurs infolvables, ont
rougi eux-mêmes des Loix qu'ils avaient portées contr'eux"
& fe font empreifés d'en adoucir la rigueur. C'efl: dans cet
objet que le. domicile du débiteur fut déclaré un afyle aifuré
pour lui, & qu'il fut défendu au créancier d'aller l'y troubler.
C'efi à la Loi 18, if. d~. in jus vocand., que Je débiteur infolvable doit ce reHe de liberté.
Nos Loix, encorel plus humaines que celles du Droit Ro-
�DU
PALAl,S
DE
PROVENCE.
379
main, ont abrogé la contrainte par corps, & h'ont laiffé
d'autres reffources aux créanciers que celles que pouvoient
leur oifrir les biens de ceux auxquels ils avoient prêté leurs
deniers; il dl: vrai que le bien du commerce a forcé nos
Rois 3 s'éloigner de ces principes d'humanité fi, conformes
à leurs vues & fi relatifs au caraétere du peuple fur lequel
ils regnoient. Ils ont vu, ainfi que l'obfe\'ve l'L,\ureur de l'Erprit des Loix, que li dans les affaires qui d~riv~nt des contrats civils ordinaires, la Loi ne doit pas donner la contrainte par corps, parce qu'elle fait plus de cas de la liberté
d'un ciroyen que de l'aifance d'un autre, dans les conventions qui dérivent du cOmmerce, la .Loi dÇ>iç faire plus de'
cas de l',!ifance publique, que de la liberté d'un ciroyen.
, Une de ces reHriétions que l'humanité a fait adopter, effcelle qui, d'après la Loi rappellée, a défendu, d'inquiéter le'
débiteur & d'arrenter à [a perfonne dans> [a propre lOai[on.,
Cet ufage général ell: fondé dans cette Province fUr une Loi,
pal'ticuliere de 1469, donnée fur la demande Ides Etats, qUL
établit 'que perfonne ne peut être [ai fi pour dettes civile~
dans [a propre maifon, ni da'ns li). maifon qu'il tient à loyer ~
ou dont la jouilfance lui a été gratuitement accordP'" ;~'tI;
.J
' d urant d"IX Jours, à compter d "',uùr 'lu J
uans
une '1'
lote Il eFIe
(l.'
C '
r ~tC entre, excepte, tourefOls
e,n cas de,d'l'
e ". ... crime.
. d 'fc
Le Parlement.de Pa,ris. a .plulieurs R,!",cmens qUI ~ endent aux créanciers d'arrêter les .déb;··cltS dans leu~s malfo?5'
'-& les jours privilégiés làns perr·,110n du Juge., C dl: la dlC.,..
poiition précife du Réglemp·' de 1702. Des Reglemens poC.rérieurs fom défe.nfe a'" Juges-Confuls d'acco,rder ces permiRions, mais ils ,,",1 laiffent la liberté aux Juges or9inaires.,
Le Pdrlement de Touloufe & plufieur,s autres Cours [e fone
réfervés à euX feuls cerre faculté, & elles en ufent quand'
Qn le l.eur demande, ainii que les circonHances l'exigent.
Il feroit inutile cie contener que parmi ·nous cet ufagene [oü en vigueur., Mais comment concilier cet ufage avec.
le Scatut de Id Province, avec cette Loi· li précife & li gé- •
nérale ?' Comment adopter cette abrogation formelle du
Statut? Un ufa[e ancien. & conil:amment fuivi, appuyé [Ull:"
B b b 2...
�~b
JOU~NAi
la Jurifprudènce des Tribunatix, efl fans contredit uri moyeh:
connu qui fait tomber la Loi en défdétude & qui l'abroge.
·Combien de Loix, combien de ~églemens pourroit-on citer,
,qui, fans avoir été expreifément abrogés, ont reflé néanmoins fans exécution! Quoique les Côurs n'aient pas le
droit de p;omulgller des Loix, on ne leur a jamais difpLlté
'celui de juger 'de leur application, de décider fi da,1s l'ufage
'qu'on en fait,' on contrarie ail l'on fuit l'intentiof.l du Légifiateur: Ainfi il efl toujours vrai qu'en regle générale le
aéancier .ne peut pas porter la main fur {on débiteur, lorf~
-qu'il fe tient renfermé dans fa maifon; mais cia ns le ca~ parl:iculier où I,e débireur -fe fera rendu ihdig e <;le cerre f1veur, quand, en lui cohfervant'le'droit d)~{yle dans [on domicile, on favorife [a fraude, fes chic~nes, fes rergiverfa. tians, faut-il le Iailfe; abufer de la Loi? C'efl la qneflion
<Iue les Cours ont pris fur elles de décider dans tous les
temps -& dans toutes les oecafions.
Ainli, en fubordonnant la gracè que la Loi accorde à
l'u{age què.le débiteur en fait, en fè ré{ervant le droit de
<lécider s'il efl: <ligne <le l'afyle gu'il réclame. ou s'il faut
, -. Driver, les Cours ont établi une exception à la Loi,
" Ce lont
t:
1es clrcon
. ' fl ances d ans
1ma{( 1S Il•. l'ont pas a b
rogee.
le que,es
-'olive le créancie~, c'eH la. conduite, c'efl la
o~aute,: es pn"-qés .du débiteur' que l'on, confidere ,'lorf<ju OH a. a, d~nner ~u... -.Fufer de pareilles per.miffions. L'état,
!a qualIte cl un debHeur }'--'.-' encore des confidérations qui
mflllent le ~lus fll.r la ?eclfion. ~es Tribunaux. Aïnli, quand
tll1e dette n ·efl: ni ancIenne ni cOI.Gdérable quand l'e juge. ment qu.i en prononce la condamDatJu~ en récent, quand
J'impoffibilité de payer eH réelle, quand on v"it que le créancier, en demandant un décret forcé, cherche à fe venger de
l'infolvabilité de fan débiteur, fans pouvoir efpérer d'en être
payé, dans tous ces cas le débiteur re!l:e fous la proteél:ion
des Loix, & les Arrêts lui aifurent la liberté dans le domicile où il s'eH retiré. II en efl: de même lorfque le dé':
biteur n'efl pas Négociant par état. La contrainte par corps
n'a .été accordée qu'en faveur du commerce; ce n'efl donc
t-
�bu P,ÜAlS bÊ
PROVENCli:
38t'
'~ue tontre des Négocians que l'on peut s'écarter de la regle
générale, & il faut, pour que le créancier fait écouré, que
fon débiteur Je fait rendu indigne d'un relle de liberté.
Le fieur Benoit a teint à fa requête les trois verbaux de
perq?i!ition que .l'on exige avant toute chofe. Sa cré~nce
eU de 6640 liv., augmentée par les intérêts & les dépens;
elle a été contraél:ée depuis le 16 Mai 1770. Il ell juHifié
par plu!ieurs aél:es de commerce que le fieur de Flote négocioit; mais il ne paroÎt pas que les procédures du fieur
de Flote aient· été multipliées & affez fruHratoires ponr lui
avoir fait perdre le trille privilege de pouvoir refl;er. avec
[ûreté 'dans fa maifon. Si les biens font infuffifans pour la
dot de fa femme, il eH donc réputé. infolvable. Les rigoureufes exécutions que l'on pourrait faire fur fa perfonne ne
pourraient le forcer à payer. D'ailleursc'ell contre le
Négocï'anr par état feul qu'i.J faut déroger au Statut; le fieur
de Flote n'ell pas dans ce cas.
Me. Aguillon conclut à ce que fans s'arrêter à la requête
nu lieur Benoit, faifant drait à celle du fieur de Flote,
le décret rendu par la Cour le re Avril précédent fût révoqué , fans dommages-intérêts.
Par Arrêt du 30 Mai 1780, prononcé par M. le Premier
Préfident, le 'décret forcé fut confirmé, & le fieur de Flote
condamné aux dépe.ns. Plaidant Mes. Simeon fils & Meifret,
ARR Ê T· LXI V.
On Tle peut, hors' les cas prévus par la Loi, enlever à un pere
L'éducation de [es enfans.
L
Ouis Danillon, Négociant de la viUe de Toulon, époufa
Magdeleine-Urfule Pomme fous une conllitution de dot de
la fomme de dix mille livres; elle tomba malade dans le mois
de Septembre _1771, pendant l'abfellce de fon mari, & fit
�382;
J'OURNAI>
\lne donation li caufe de morc à [es deux filles, avec fÛD[~
ritution en faveur de la Dlle. Montagnier fa mere._ Après [a
mort, Danillon réclama fa. fille cadette, qui était chez [on
aïeul paternel. Il Ce pourvut au Juge Royal de Toulon con-rre le fieur Pomme, en injonél:ion de lui remettre [a fille._
Cette demande fur contefl:ée; & par Sentence du 31 Mars
même année, il fur enjoint au fieu·r Pomme de remettre la
Dlle. Qanillon à [on pere, & à [on refus permis de la pre ndre par main_ mire. Le fieur Pomme appella de cette Sen~·
tence, & néanmoins remit la fille à [on pere fous due pro~re{]:atio_n.
,
On difQit pour le fieur Danillon pardevant la Cour, I(); que;
l'appel de Pomme érait non recevable. ~près que la Sentence, qui ne portoit point- de nonobfl:ant 'appel, fut rendue'
& figpifiée, PQmme pouvoit en appeller ou acquiefcer en'
l'exécutant; mais_l'ayant exécutée, en· faifant la rémiffion de'
la fille au fieur Danillon, la, protefl:ation contraire à cette,
exécuti!JQ' ne p-ou\'oit pas anéanrir l'acquieftemefit : proteJlt:ltio
contraria fac70 non ju-vat protejlantem, - dit Mr. le Préfident:
Faber, _cod.. liv'._ 7 , tit. 26, déf. 14:;, & cela 3" lieu, [ur-tout
lorfque l'exécution n'efl: pas forcée, & qu'il n'y a point da.ns.
le Jugement une· difpofition, expreffe que la Sentence fera
exécutée nonobjlant G' fans préjudice de l'appel; parce qu'alors
l'exécution éta nt forcée, la protefiation d'appeller pourroit
étre faite. utilement; mais lorfque l'exécution n'eH paS forcée
& qu'on a la liberté d'appeller."fi. on exécute le Jugement"
l'appel n'efi plus recevable._
Sur le' fonds, on ob[ef\'Oit que d'après les Loix, l'édu-cation appartient ÎnconteHablement a'u pere en vertu de la.
puiffance paternelle, qui s'étend fur les biens & fur la per-fonne de [es enfans : qui igitur ex- te·& uxore ·tua nafcitur, in'
tua potejtate ejl. ( Initir. de patrid potiflate, liv. l ,tit. 9. ),
C'ef!: au pere à conferver & à perfeétionner l'être de ceux
à qui il l'a donne. La Loi :2,', cod.-·de li'beriuxnibendis; ,d0lllle·
tlroit au pere ,_ quand quelqu'un détie!lt (es enfa,ns à [eJl1 préjudice, de les faire rétablir dans les ,droits 'de 101 _puiffance:
paternelle; adi Rrœ.fr-dm, ~rov~n,~iiC 0/ ,paJJ.ula fjJios tuos exhi:;-
�-
'D't1 PALAIS DE
PROVENCE:
383
Jl,erl. Auffi n'y a-t-il jamais eu de concours pour l'éducation
'<les enfans entre le pere en la pui1Tance duquel ils font,
& l'aïeul ou aïeule maternelle qui n'ont aucun droit fur eux;
& la queilion s'étant préfentée dans un cas où il y avoit
même U'l~e circonfiance qui paroi1Toit autorifer l'aïeule maternelle à demander de garder fa petite lille, elle fur déboutée par l'Arrêt que Brillon rapporte, tom. ') , pag. 147Cet Arrêt, fondé fans doute fur ce que le perè ne doit
pas être traité avec rigueur, & qu'on ne doit pas [e délier
de lui, parce qu'il n'y a point d'affeé1:ion qui furmonre, ni
'qui égale celle d'un pere pour [es enfans., nul/us a.ffec7us l'in~
cit paternum, & le pere eH toujours préfumé prendre un bon
'parti pour ,fes enfans, bonum concilium pro liberis capit.
On oppofoit à Danillon la Loi 1, §. 1, if. de liberis exhi·
IJendis; mais il répondait que cerre Loi ne pa'rle que de
Ja mere; qu'on ne devait pas non plus s'oppuyer fur la Loi
3 du même tit. au §. '), qui donne la raifon de cette pré.
férence: obtinuit enim mater ob ne'luitiam patris ut fine diminutioue patrice poteflaûs apud eam filius morarellll'. On ne
coarte aucun fait dont on pui1Te induire que Danilloll a
été méchant envers fes enfans, & qu'j! s'eH: rendu coupable
de quelque excès. L'on convient que, quelque faveur, quelque
étendue que les Loix aient donné à la pui1Tance & à l'autorité
paternelle, & quoiqu'elle ait fon principe dans la nature,
néanmoins elle a fes bornes, & fon exercice fe faifant fous
l'autorité des Loix, les MagiH:rats peuvent avec connoi1Tance
de caufe réformer ce qu'elle a d'abufif. Voilà pourquoi on
a vu qùelquefois, lorfque les peres étoient remariés, & que
les enfans du premier lit étoient maltraités ou par la marâtre
ou .pdr le pere, les Tribunaux de luilice ordonner qu'ils
feroient mis en penfion chez quelque parent. Ce fut fur ce
,motif que fut rendu l'Arrêt cité par Decormis, tom. 2, col.
cI 132, qui préféra au pere l'aïeule maternelle. Il s'agi1Toit
d'un pere remarié, & ce fut pour éviter que l'enfant ne retombât dans l'exinauition où on l'avoit vu dans la maifon du
pere & de la marâtre qui voulait favorifer les enfans qu',elle
pourroit avoir. C'eCl: alors feulement que les Loix & les
�} 84,
/
r
0 U R N,A D
Arréts ont pourvu au plus grand avantage. des enfans,. a,f.....
tendu les abus; & Pexception ne fait que mieux confirmer la
œgle, lorfque le pere n'efi coupable d'aucun. excès.,. & qu'il
{e comp0.rre en- bon pere.
_
Quelle dl:· la Loi, quel efi l'Arrét qui ait· décidé qu'un
pere ne puilfe pas réclamer & garder· une fille, parce qu"elle
ne feroit fevrée que depuis trois mois, ainfi que le fieuu
Pomme le prétend, ce qui n'eH pas exaéLen. fait, puifque
la fille avoit plus de trois ans lor.fqu'elle fur réclamée? Où
a·t-on vu qu'un pere qui a elLdu malheur, dans fes affaires,
doit étre privé' de l'éducarion de fes enfans, lors même qu'il
y pourveir? Où a~t-on trouvé que· contre les, droirs & le·
privilege dè }a puilfance paternelle, cerre éducarion doive
êrre donnée, de préférence il une aïeule materneHe qui> a
une fubHirurion en fa faveur, au moyen de laquelle la I.o»
Een exdur fonciéremenr, lors même qu'elle el! en concours. '
avec un aurre parent, ce concours ne pouvant jamais avoir'
lieu aVeC I.e pere' qui n'e#. point remarié & qui ne maltraite:
pas fes enfans?Le recond: mari·age ne fuffit même pas pour' faire fi maJ,.
pré fumer du pere qu'o.n. lui ô,re la nourrirure & 1'.éducatiolL'
, de fes entans..Il ne fuffir pas. d'offrir, il lin pere de le fou-.
luger & méme de le décharger· de, la dépenfe, de la nourriture & de l"entretien,de les en fans ; ·il ne fùffir'pas il un parent'
d'expofer 'à la Jufiice qu'il efi plus, riche, & mieux en état de:·
p-ourvoir à cette dépenfe, pour étre. autorifé il les lui enle-·
'ler & le priver de leur.éducation.:jl faue prouver des févices,
&' un. danger prelfllllt,
Par l~rrét du .23 Juin· 1780, au rapport de Mt. le. Con";.
~jl~r de Periet, la Sentence fut confirmée ,. avec dépens._
!6: RitT
�DU
PALAIS
DE
AR RÊ T
PROVENCE•.
LXV.
l}exercice de la 'lutte dans des jeux folemnels & publics ne
donne aucune aBion pour les dommages éi' intérêts réjùltans
des hle.f1ùres.
Mais cette aBion compete pour les hleJ{ures reçues dans. une
lutte particuliere.
Celui contre lequel on demande des dommages & intérêts pour
excès & hle.f1ùus ne peut pas ft pourvoir en biffèment des
termes qu'il prétend lui être injurieux dans la requéte de
plainte, lorfilue ces termes font relatifs au fait qui a donné'
lieu la plainte..
a
Laude Sautier de la ville de Salon, âgé d'e feïze anS';
affifl:é du Sr. Bertin fon curateur, expofe dans une requête
préfentée au Juge d'Orgon, que tandis qu'il étoit occupé à
travailler dans la favonnerie de F ran~ois Laugier fon oncle·,.
Louis Breguier du. même lieu d'Orgon, âgé de dix-neuf ans"
vint lui propofer de fe battre à la lutee, & que malgré les
prieres qu'il lui fit de le lai1fer travailler tranc;uil1ement, il:
lui fauta au 'col & le for~a de fe battre; que dans ce combat, il fut renverfé fur le bord. d'une pile à tenir liuile;' qu'il.
repréfenta en vain à Breguier qu'il fouffroit bea~coup au bras
gauche, <]ui étoit preffé· violemment; que Breguier, dont lecaraaere turbulent, vif & emporté efi..!t:onnu, loiD de céderà fes cris & à fes repréfeotations, le preffa davaotage, cequi lui occafionna une fraaure au bras. Il demande des dom-·
mages & intérêts contre Antoine Breguier, en qualité de
pere & légitime adminilhateur de Louis~
Il fait dreffec un capport de rérat de. (00. bras,. & pourfuit:
fa demande.
·Breguier ayant oppofé que la demande n'ell pas jUfl:ifiée"
Sautier confent à prouver, attendu le manque de témoins dw
combat, que" quelques infl:ans après fa cheue Breguier filS(
C c. c
C
�386
Jou
RNA
r:
.
" a convenu d'en avoir éeé l'auteur, & qu'il eut beau l'avereir
" & lui crier qu'il lui faifoit mal lors de ladite chûte, Bre·
" guier ne ceIra de le tourmenter. "
Breguier croyant fan fils injurié & diffamé par quelques
termes inférés dans la requête de Saurier, pour exprimer fan
<:araél:ere & l'acharnement qu'il avait montré dans le com.bat, en demande le biffement, avec une amende de 1000
liv.
L'enquête prife, le Juge condamne Breguiet à des dom~
. mages & intérêes, filivant la liquidation d'Experts, avec dépens, & le déboure de fes 'fins en biffemenr; Breguier appelle de cette Sentence pardevant la Cour.
Pour le foutien de fan appel, il dit en premier lieu que
la lutte ef~ un exercice permis, & que l'amufemenr entre
<leux jeunes gens qui n'ont eu aucune querelle enfemble, &
qui n'ont aucun deIrein de s'injurier., ne fauroit aurorifer une
,<lemande .en dommages-imérêts. C'eU pour la premiere fois
-Gue le vaincu ineente en J uaice une aél:ion qui e{~ réprouvée pa r le droit en la Loi quâ aaione 7, §, fi quis 4, if. ad
Leg, Aquil.
En fecond lieu, toute ineer1ocurion préjuge, & l'enquête
ne fournie aucune preuve du fait dont Sautier a forrDé plainte;
le fecond chef fur-tout n'ef!: point prouvé; car jl'n'y a aucun
témoin qui ait dépofé que Sautier eut beau avertir Breguier & lui crier qu'il lui· faifait mal, celui-ci ne ceŒ1 de
.
le tourmenter.
En troifieme lieu, l'injuaice de la Sentence
évidente,
'en ce qu'elle refufe à Breg,uier la fatisfaél:ian qui lui ef!: due
pour le porrrait injurieux &. la cliffamation que l'on s'eH permife dans la requête de Sautier. ,
Celui-ci répç>nd, 1°. que l'on n'a jamais donné la qualification d'exercice à la lutte, -au procédé d'un mrbulent qui
vient dans une maifon porrer le défordre, détourner un ouvrier qui s'occupe & le battre. C'eH bien moins le caractere de luceeur que celui d'un effréné; caraél:eres qu'il ne faut
pas confondre.
La lutte en ufage chez les Grecsdan~ les jeux olympiques.
ea
�DU
P ALAIS
DR
38'1'
PROVENCE.
'~u'ils établirent pour donner au corps de l'agilité, de la
fouple1fe , de la vigueur, & préparer l'homme aux fatigues
de la guerre, a été conCervée parmi nous, quoique portés
à la molle1fe , pour célébrer la Colemnité de certains jours.
Le peuple Ce ra1femble en ptéCence des Magiil:rats chargés
de décider de la viél:oire, & de décerner le prix au vain-·
queur.
Si , dans cet exercice, celui qui fùccombe e!t ble1fé ou
tué, le vainqueur n'eil: pas tenu de cet événement, & le
vaincu ou fes héritiers ne peuvent pas s'en plaindre. Com-·
me la gloire e!t le but des combattans, la déf:lite du.
vaincu, quoique accompagnée de circonfiances fâcheu Ces ,
ne rend pas Je vainqueur criminel. C'efi la rai Con qui en,
efi donnée dans la Loi citée; Si 'luis in colluc7atione, vel
in pancratio, vel pugiles dùm inter Je exercentur, alius alium
occiderit; fi quidem in puMica certamùze alius alium occi-·
duit, ceJfàt Aquilia, quia gloriœ caufa & virtutis non in-·
juriœ gratta 'videtur damnum datum.
Ainli un combat ouvert à toUS ceux qui veulent- entrer'
en lice dans des jeux publics & folemnels, livré par desathletes qui fouvent ne fe connoi1Tent pas, que l'émulation.
ra1Temble, & dont le but e!t l'amour de la gloire, ne·
donne auc~ne aél:ion pour Ce plaindre du dommage qui en
réCulte. C'efi dans ce Cas feulement que ce1fe la difpofi-rion de la Loi Aquilienne; car lOutes les fois que la bleC{ure eH faite hors de ces circonlbnces, & extra locum,
pugnœ, Celon l'expreffion de Bartole fur cette Loi, le motif"
de gloire diCparoît, & celui qui a occalÎoné ou la mort ou
une fimple ble1fure, en devient reCponCable.
Ici c'eH une bleJJi,re fuite dans une querelle qu'un témé-.
raire a ofé faire dans l'aCyle le plus facré, au mépris de la_
[écu ri té qui doit y regner. C'eH un délit qu'il ne faUl'oit
coloret du prétexte de l'émulation. S'il pouvait s'en pro--'
mettre l'impunité, il (eroit donc permis d'aller chez un.
paniculier pour y porter le trouble, y [emer l'effroi, pourle dirtraire de {es occupations, l'atlaquer .[ans [ujet, &.
le for~er lâchement à fe battre, ou pour mieux dire à.!è.:
.
.
Gc C
2.
�388
Jou
RNA L
défendre; affuré de la viél:oire par l'avantage des années, de
la caille & du tempérament.
0
2 • L'interlocution ell: remplie. Son objet e!l: d'avoir la
preuve que Breguier eH convenu d'avoir caufé des fraaures
au bras de Saurier. Or il e!l: juHifié que Breguier a dic à
un témoin qu'il étoit bien fâché de cet événemenc; un
aurre l'ayant vu conduifant Sautier à la maifon de Laugiet
oncle de ce dernier, & s'étant fait rendre compce du fujet
des pleurs de Saurier, ayant vérifié les fioaél:ures & fait
des reproches à Breguier, celui - ci lui fic l'aveu ordonné
par l'incerlocmion, en lui témoignant tout fon regret.
C'en-Ià tout ce qu'il étoit important de connoÎcre. En
effet, ce qui fuir la premiere difpolicion de jugemen: , fans
êcre écranger au fait, eH très-inutil~ en ce protès où il
ne s'agit que de dommages & intérêcs. Pour I~s ob'e1lir, il
faut prouver que Breguier les a occaCionés, & la preuve de
ce premier chef fuffit pour en faire prononcer l'adjudication. Celle du deuxieme, c'e!l:-à-dire , que malgré les cris
de Saucier, Breguier ne ceŒ'l de le tourmenter, ne pourroit
tendre qu'à exciter la vigilance du miniHere public pour
requérir de plus grandes peines; car il faudroic être un
rnonHre deo narure, pour ne pas êrre attendri des cris d'un
homme à qui on a déja rompu un bras & qui pouffe des
fanglots : cette dur,eté annonceroit un deffein prémédité
d'affaffiner Samier , & prouveroic un véritable guet à pens
qui mériteroit une punition rigoureufe•.
QU3l1t au troiCieme moyen d'injuHice allégué par Breguier,
il eH tour-à-fait chimérique. Les précendues injures inférées
dans la requêce de Saurier n'ont pas même l'apparence de
la réalicé, & ne gifent que dans l'imagination de Breguier.
Chacun connoÎt la diHinél:ion qui eH reçue en certe matiere , fi l'injure en faite animo injuriandi, .ou feulement
dans la légitimité d'une juRe défenfe , & qu'elle conGHe
véricablement dans l'intention, ex affic1u facielltis: Or comment ell: - il poffible d'expofer de, pareils faics & de fe
plaindre au moins d'une violence de cette narure, fans
placer quelque expre/Iion qui ne frappe point fur le carac."
,
�DU
PALAIS
DE
PROVENC~.
389'
tere de la perfonne concre laquelle une plainte auffi juHe
'e-ll: dirigée? Il étoit important de faire connoitre Breguier,
& de dépeindre l'emportement & la violence de fan humeur, qui a néceifairement influé fur l'atrocité de l'outrage
qu'il s'dl: permis.
Arrêt dn 6 Juillet 1780, au rapport de Mr. le Confeiller
de Ballon, qui met l'appellation & ce dont ef~ appel au
néant quant à ce; & par nouveau jugemenr, ayant tel
égard que de raifon à la requête de Sautier, condamne
Breguier comme procede à lui payer la fomme de cent
livres pour frais de médicamens & temps perdu; condamne
Saucier à un quart des frais de l'Arrêt, les trois quarts
reHans & ceux de l'infl:ance compenfés; ordonne la reil:iturion de l'amende, & renvoit les parties & matiere au
luge d'Orgon, autre que· celui qui a jugé, pour faire exécuter le Curplus de fa Sentence & l'Arrêt fuivant leur
forme & teneur. Ecrivant Mes. Gaffier & Perrinet.
ARRÊT
LXV J.
Les termes mis dans un contrat d'a.f1ùralzce, prenant le rifque
du jour & heure que le Navire fera ou aura fait voile
de tel lieu à tel lieu , dijignent un temps prochain, ,& n'autorifent pas en faveur de l'Affiré contre l'Affireur a rompre
ou changer le voyage.
a
P
Ar trois différentes polices des 140 & 10 Mai 1778,'
les fieurs BelIon & Maife atfurerent au fieur Barthelemy de la ville de la Ciotat pour compte du neur Terme,
de [ortie de Damiete & de Syrie a Marfeille, les marchandiCes ou denrées, corps & agrêts du Vaiifeau La Marie
Egyptienne, prenant le rirque du jour & heure 'lue le Navire fera ou aura fait voile de Damiete ou de Syrie pour
111.arfeille , & jufrJues
[on heureufe arrivée en cette ville.
115 avoient également aifuré au même fur le Navire La
Marie.
a
�DU
PALAIS
DE
PROVENC~.
389'
tere de la perfonne concre laquelle une plainte auffi juHe
'e-ll: dirigée? Il étoit important de faire connoitre Breguier,
& de dépeindre l'emportement & la violence de fan humeur, qui a néceifairement influé fur l'atrocité de l'outrage
qu'il s'dl: permis.
Arrêt dn 6 Juillet 1780, au rapport de Mr. le Confeiller
de Ballon, qui met l'appellation & ce dont ef~ appel au
néant quant à ce; & par nouveau jugemenr, ayant tel
égard que de raifon à la requête de Sautier, condamne
Breguier comme procede à lui payer la fomme de cent
livres pour frais de médicamens & temps perdu; condamne
Saucier à un quart des frais de l'Arrêt, les trois quarts
reHans & ceux de l'infl:ance compenfés; ordonne la reil:iturion de l'amende, & renvoit les parties & matiere au
luge d'Orgon, autre que· celui qui a jugé, pour faire exécuter le Curplus de fa Sentence & l'Arrêt fuivant leur
forme & teneur. Ecrivant Mes. Gaffier & Perrinet.
ARRÊT
LXV J.
Les termes mis dans un contrat d'a.f1ùralzce, prenant le rifque
du jour & heure que le Navire fera ou aura fait voile
de tel lieu à tel lieu , dijignent un temps prochain, ,& n'autorifent pas en faveur de l'Affiré contre l'Affireur a rompre
ou changer le voyage.
a
P
Ar trois différentes polices des 140 & 10 Mai 1778,'
les fieurs BelIon & Maife atfurerent au fieur Barthelemy de la ville de la Ciotat pour compte du neur Terme,
de [ortie de Damiete & de Syrie a Marfeille, les marchandiCes ou denrées, corps & agrêts du Vaiifeau La Marie
Egyptienne, prenant le rirque du jour & heure 'lue le Navire fera ou aura fait voile de Damiete ou de Syrie pour
111.arfeille , & jufrJues
[on heureufe arrivée en cette ville.
115 avoient également aifuré au même fur le Navire La
Marie.
a
�~o
JouRNAr
Dans' le mois d'Août fuivant, le N aviré fié voilé pourMarfeille de Lataquié en Syrie, & dans fa rouee il s'ar-.
rêta .en Chipre pour y former & compleerer fon charge-.
ment, d'où il partit en continuation de route le premier"
Oà:obre. Dans ce voyage il fut pris & conduit à Mahon.•
Le lieur Barfhelemy ayant eu connoi/fance de cet événement, le notifia·. aux Aifureurs, avec interpellation de
lui payer dans le temps de droit les fommes par chacun
d'eux a/furées; il fe pourvut pardevant le Lieutenant de l'A-·
miraueé en .. condamnation des fommes ;. il demanda que
ks Aa'ureyrs fu/fent folidairement contraints par provifion,
même. par corps, pour le capital' des fommes affurées, en.
donnant 1 par lui bQnne & fuffifante caution. Le Lieure- .
nant .pàr fon. Ordonnance· joignit la provifoire au princi-.
pal, & enfuite par Senrence définitive condamna les Aifu-·
reurs au paiement des fommes a/furées.. Appel de la part
des Affureurs pardevant la Cour...
On difoit pour eux, que la Sentence était injulle, 1°. en
ce que le voyage qu'ils avoiem garanti avoit été rompu;
'2 o. en ce que l'aifurance avoit été faite en Mai 1778 de
[ortie d~ Syrie ou de Damiette juflJu'a Marfeille, & cepen-dant le Navire était parti de Chi pre. Ils concluoient de là
que le voyage à./furé n'ayant pas eu fon effèt, les a/fu-·
rances du_ mois de Mal étoient tambées en caducité. Pour'
le foutiel1> de ces. de,ux . moyens ils rapportaient les leerres .
du lieur,:rerllole Armateur, pour prouver fon prochain re-tour à Marfeille•.
Le terme, fera, inféré dans la police d'aifurance, ne dé- .
ligne pas, difoit-on, un temps reculé; fal conjonél:ion avecla clau(e, ou ·aura fait ,. .défigne au contraire Ul1" temps pro-;c,h'aihl qu'on ne' fait .pas.même 's'il d'ell: . pas deja arrivé..
II' eH ('de prin'cipe que les. Alfur.euI's ne fone garants que·
'du voyage convenu (Rote de Gênes, décif. 2), n.. 2 ) &
ce voyage col1venu. s'earend du, ,premier .iVoYilge qui dl:·
en'!ri!pris aprè's l'alTurante faite. (Roccus, pag. 16'j; Roce de'
Gênes, dé if. 2).; 'no '3 , décif. '63 , n. 4; Santerna, part. 3 "
n. 30'; Stracca, glof. l'2, n. 3; CaCa - Regis, dife. l 'n. 70 , &. Loeçenius, pag:- 980 , n. 6.)
�1>U
t
PALAIS
DB
l'ROVllNCB;
'391
ne forte que fair que l'ôn conCidere la circonlhnc du
'temps auquel les polices d'affurances -ont été fa fcr ites ,
ou les lettres fur lefquelles· elles ont été faires , ou les
conféquences . qui réfulteroient de ·l'interprétation du lieur
Barthelt'my, ou la bonne foi de l'aéte d'affurance qui n'a
pas befoin d'être prouvée, ou le principe qui veut que
route affilrance fait cenfée faite pour le premier voyage,
ou les c1aufes de renonciation à la lieue pac heure qu'on
trouve dans les polices; on ne peut douter qu'elles n'aient
été faites pour un voyage prochaiu. Il n'dl: Pps ponible
fur-tout qu'on ne foit pas frappé des conféquences qui naÎtraient de toute autre interprétation fuivant laquelle l'Affureur fe ferait mis à la difcrétion de l'Affuré.
Si le Navire fllt parti par tout le mois de Mai ou dans
~es premiers jours de Juin, il feroit ,arrivé en France avant
Je commencement des ho{l:ilités anglaifes. Le liniil:re dont
on vel!t· renverfer le préjudiqe fur les Affureurs, ne ferait
point arrivé, puifqu'un mois de navigation fuffifoit po.ur le
voyage; au lieu qu'en entreprenant le voyage au mois dJOctobre , on l'a placé dans un temps de rifque non prévu en
Mai, & même à l'époque la plus d.angereufe pour les hoftilités, puirque c'e{l: dans ces 'p'remiers temps que ,les Corfaires ont fait. Je plus gtand mal au .commerce. nationna[
dans la ·Méditerranée.
"
Dans le temps où les affurances ont été faites, on crai"
.gnoit la guerre; mais an la voyait de loin. ,Cette crainte
·ne pouvait influer fur les alfurances <:l'un voyage auni court
'que celui pour lequel elles -.voient été, faites. En' faifant
;remonter le temps des rifques le plus ·haut. ponible, il' eil:
'toujours vrai de dire que le Vaiifeau La rMarie EgyptiefJne
,n'en auroit point couru, s'il était parti à l'époque annoncée
par l'Armateur; d'où il fuit 'que les aifurances faites au
mois de Mai n'ont été faites que p-our un rifque de paiX'.
Les Affureurs obfervoient encore que le voyage avoit
été rompu par' le fait des Affurés, & qu'il y avoit lieu
à l'application ·de l'article 37 de l'Ordonnance de 168 l , tit.
des ajJûrance..s , qui ,Pilr la rupture du voyage, annulle le~
�j~JoU~NAi
aIfurances , & ordonne la ref!:irution de la' prime', 1i fa réferve du demi pour cent; ce qui' dl: confirmé par. Vallfn
fur cet article de l'Ordonnance.
L'article 36 de l'Ordonnance au même' titre décharge
l'A1fureur des rifques, lorfque l'un des. termes du voyage·
fe trouve changé. Il fuit de ces deux. différelltes difpofit·ions "
qu'autre chofe ef!: rompre le voyage, autre chofe· dl: chan-ger un des fetmes de ce voyage.
Qu?eH-ce que rompre le voyage? Le LégiŒlteur', ni même'
les Commentateurs., ne le difent· pas. Rompre- un voyage'" .
fuivam les Diél:ionnaires de la langue, c'efr ne pas faire le
voyage qu'on avoit réfolu de faire. Le changement de ré~
folution décidé fuffit donc pOUl' la- rupture du voyage. L'Armateur du Vai1feau La Marie Egyptienne' a-t-il- changé· de·
réfolmion fur le voyage· projetté? Ses lettres rapportées au
procès fuffifent pour le prouver. Il écrie d'abord qu'il fé
propofe de fe mettre en route dans les premiers jeurs de'
Mai ;_ enfuite qu'il' a formé un autre plan, qu'il differe fan
retour & qu'on falfe des nouvellés a1furances'; il ne pouvoit.
marquer d'une maniere plus- expreffe un changement. de ré-~
fbluJion_ fur f'On. voyage.
'
Le changement. de Iloyage annulle également les. a1Tu-·
rances : .mutatio viagi d!f!àlvit contraaum afficura'tioniS, dic
la', Rote de Gênes, déeif.. 40, n. '3,.& Clairac ,- pag. 3'i8;Cafa-R-egis, dife'. 67, n. 24 , dit 'qu'il' y a changement de
voyage, lorfque le Capitaine, au lieu de faire voile pOllr
fa premiere def!:ination avec fa charge ,_ s,'arrête. même entre les limites· rle fon voyage.,
'
Les. A1fureurs rapporçoient la preuve qU'e le' voyagë af":
furé avait été rompu. Cette preuve étoit légale, elle réfultoit des lettres de l'Armarelllo lui-même. (;;omment peut-on
fuppofer (d ifoient-ils)qu'entrepretldre d'aurres voyages,cen'efl:
pas changer le voyage ?-Le Vai1feau La Marie Egyptienne. a été
nolifé à L~t.taquié pour' Damiece ; .il a cOl11pletté fan voyage
par le déchargement entier dps marchandifes chargées. A
Damiett~ il a encore été nolifé pour compte d'autres Négo.cians 1 & expédié pOlir Lattaquié; vqyage qui a eocore
-
.
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J93
eu lieu jufqu'au déchargement qui y a mis fin. De Lartaquié il a de nouveau éré chargé pour Damiere, & Je voyage a encore eu fan effet par le déchargement. Il el!: encore tétourné chugé à Lattaquié , & de là il s'el!: rendu
à Chipres. Si ce ne fone pas là de nouveaux voyages, il eLl:
difficile de rrouver des fignes auxquels on puiife les reconnoÎrre. Il n'yen a point de plus clair & de plus précis que le chargement & le déchargement du Navire.
La permiJJion de dérouter, dir Vallin, rétrograder, toucher
& faire échelle, n'emporte pas la faculré de changer le
voyage & la deHinarion annoncée du. Navire;, elle donne
feulement la faculté de détourner un peu de la roure pOUl'
roucher à quelque Port, érant à la droire ou à gauche
filr la roure. C'eU ce que dit auffi Cafa-Regis, difc.
O. 131, di[c. 67, o. 23, & difc. 134 & 193.·
_ Il eH permis de dérouter, lorfqu'on y el!: forcé par lesvenrs ou par quelque finil!:re; c'eH dans ce fens & à ces
candirions que Cafa - Regis affure qu'il arrive quelquefois
que la divergence conduit le Capiraine plus facilement &
plus sûrement au Port pour lelJuel il el!: chargé. C'el!:
cerre efpece de changement qu'on regarde comme n'en
étant pas un, parce qu'il n'en Rlet poinr dans la réfolutian, ni dans le voyage entrepris.. On el!: cenfé continuel'"
fon ,,:oyage, lorlqu'on rend fans ceife vers le terme indiqué, & qu'on n'eH écarté de la roure que par des raifons,.
des motifs & des forces fupérieures. C'eH à quoi revienc
le fentiment de Sryprnanus ad j}LS maritimum, cap. 7, n.
413 , fol. 4 6 3,
.
Pour changer de· roure il faut s"être mis en· roure : m"
quand 1e voyage n'eH pas commencé, comment peue-cru
dire qu'on s'était mis en route,·& qu'on a profiré de la
permiffion de rétrograder? Le voyage ne peur commencer'
que par le chargement qui indique la del!:ination. Avant ce·
chargement on ne peur dérouter. Donc fi alors on fail::'
d'autres voyages, on ne peur pas dire que ce fait dérouter"
,'el!: changer de voyage, rompre le voyage par de ·nou,-'
ve\.1es eorreprifes; c'el!: le cas prévu par l'Ordonnance•.
Ddd.
l,
�JouR~~i
Le préjugé rendu par le Lieutenant de la 'ville de Mar..:
feille en 1778, en-faveur du fieur Jean-Antoine Gay de la
même ville, n'dl: point applicable à la caufe. -On oppofoit
aux AiTureurs qu'ils avaient connu le contrat de nolifement & fes conditions; que la licence donnée au Capitaine
avoit des bornes fixées par le contrat, & que l'époque de
fon départ avoit été fixée & prévue d'utle maniere certaine.
. Mais quel préjugé plus frappant que celui des aiTurances
du fieur Terme, déclarées caduques de fon confentement
fur la demande des_ AiTureurs, ce qui l'a obligé d'en faire
de nouvel.les tant fLir La Marie Egyptienne, que fur La
Marie! On ne peut pas dire que les circonHances foient
différentes. Ce font les mêmes VaiiTeaux, même'S Armateurs, même voyage, mêmes termes dans les polices,
mêmes époques dans les fignatu"res, mêmes raifons de décider.
Il doit donc demeurer pour certain & incontellable,
non feulement que le voyage pour lequel les aiTurances
ont été faites, a été rompu par le fait & la volonté de
;1'AiTuré, mais même que la chofe a été reconnue par
celui qui était intéreiTé cdmme lui & plus que lui fur le
aiiTeau.
On répondoit pour le lieur Barthelemy, que le contrat
.d'aiTùrance enriérement inconnu chez les Romains doit fon
origine aux Nations commerçantes; auffi fonutilité l'a accrédité au point qu'il ell en urage che~ rous les peuples.
La nature de ce contrat confille. en ce qu'un Négociant
qui n'ell ni propriétaire d'un Navire, ni de la cargaifon ,
prend néanmoins pour lui, moyennant un éertain bénéfice,
(Ous les rifques que le propriétaire du Navire ou des marchandifes auroit couru lui - même; en forte que les pertes
qui furviennent de tout autre fait que de celui du propriétaire, ju,(qu'à ce que le Navire foit arrivé à bon fauvement au lieu de fa def!:ination, font perfonnelles à celui qui
s'ef!: roumis à tous les rirques ; c'ef!: la définition que nouS
t'n dOllnent tous les Auteurs qui ont écrit fur cene ma-
3M
.v
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
39~
liere, & parriculiérement Loccenius ; de jure maritimo,
lih. 2, cap. 5, n. l , & Stypmanus en fan traité de jure
maritimo, cap. 7 de ajJecuratione, n. 262.
Les polices d'affurances dont s'agit difent 'qu'il fera per,.·
mis au Capitaine de dérouter, rétr.ograder, toucher &
faire échelle par tous les lieux & endroits que bon lui fem-blera; que moyennant la prime à tout événement, les.
Affureurs prennent le rifque de l'affureté du jour & heure
que le Navire fera ou aura fait voile de Damiete ou de:
Syrie à Marfeille, & jufqu'à fon. heureufe arrivée à Mar-feille.
Il ell: convenll que le Navire La 11farie Egyptienne eŒ
parti ~e Lattaquié en Syrie;. qu'en route il a relâché en
Chipres pour y complet ter fon chargement; qu'il a fait
voile pour Marfeille le premier Oél:obre 1778, & qu'il a;
été pris dans t'a route p'lr un corfaire anglais qUL l'a con,...
duit à Mahon..
Cet événement dl-il un de ceux qui concerne les Afftireurs, ou la prife du Navire doit-elle être pour le comptede l'Affuré? Il n'y a perfonne. qui, à la leél:ure des polices ,.
ne convienne que les Affureurs ne peuvent fe fou!h·aireau paiement du montant de l'affurance , par cette raifon;
fans replique qu'en prenant le rifque de l'affureté à tout·
événement, ils ont également pris à leur· rifiIue la prire'
du Navire.
'
.
Le paél:e à tout événement· ne fouffre aucune forte de·
reUriél:ion ni de !.imitation, parce que le contrat d'·affu-·
raoce ell: fufceptible de tQutes les c1aufes' & conditions'
que l'on veut y inférer, aiofi qu.e l'obferve Vallin fur l'art. 3
dll titre des a.lfùrances de l'Ordonnance de la Marine,
pourvu toutefois <Ju'elles ne bleffent point les bonnes..
mœurs, la nature & l'effence de ce contrat, ni le droit:
_ public irritant & prohibitif.
Dans les polices, les Affureurs prennent les rifJues de,
Jla.lfùrete du jour & heure 'lue le Navire fera ou. aura faic'Voile pour Marfeille. Rien n'eH plus propre à écarter toute.,
idé.e d'un voyage aél:uel o~ imminent, & par conféqJ,lent;:
Ddd2...,
�396
J
0 t1 lt N A L
<Jue le Navire était préfumé parti, que ces mots, du jour
'& heure 'lue le Nal'ire fera, qui indiquent par eux-mêmes un'
temps futur, éloigné & avenir, non un temps prochain,
aauel & préfent.
Si les parties contraaantes avaient entendu parler feuJement d'un voyage affirmativement préfent, aauel, il
aurait été fort inutile d'employer la premiere claufe' fera,
encore moins d'y ajouter la fortie de Damiete où de Syrie,
parce qu'elles auroient nommé définitivement le Port o(!
Je chargement fe faifoit, & elles auroient fixé invariablement le temps auquel le Navire devait pareir. Mais en f1ipulant que les rifques commenceront du jour & heure que le
Navire fera voile, 'elles ont indéfini'ment & fans aucune
forte de préfiaion de temps voulu & entendu parler d'un
voyage à faire, avec faculté de charger indifiinaement 'en
Egypte ou en Syrie, non d'un voyage aauel, puifqu'on
ignorait dans le moment la Province, le lieu & le Port
dans lequel fe trouvait le Navire & où fe ferait le chargement.
S'il était pofIible que ces deux claufes fuifent fufceptibles de quelque explication ou iI}terprétation, il faudrait
toujours, comme l'obferve Dumoulin fur la coutume de
Paris, tir. l , §. l , glof. l , n. 3 l , fe tenir 11 celle qui
va à foutenir l'aae, non 11 celle qui tend 11 le détruire:
qualitas & interpretatio per quem ac1us fuflinetur, femper
ajJùmitur; & après lui Menoch, de prœfumptionibus, lib. 6,
prœfumpt. 5, n. l , qui dit qu'il faut chercher avec foin
tous les fens & toutes les interprétations qui peuvent entretenir & faire valoir un aae omni' ifficaciori modo.
Pour démontrer (continuait Barthelemy) que les parties n'ont pas entendu borner leur convention, ni parler
indéfiniment d'un voyage aauel ou imminent, 11 faire préfumer que le Navire éroit parti di'reél:ement pour Marfeille,
mais indifiinaement d'un voyage éloigné ou retardé & de
'Iong cours, il faut joindre à la' cla'ufe fera la permilIiorl
donnée au Capitaine de dérouter, rétrograder, toucher &
faire échelle par tous les lieux & endroits que bon lui
fernblera.
�'il t1 P AL AT S
D Il
PRO V Il Ne
ii:
391
'En fuppofant que lors de la police, le Nâl'ire érait
t:hargé 11 Damiete ou en Syrie, & prêt à faire voile, fi
le Capitaine avoit la faculté de dérouter, rétrograder,
coucher & faire échelle, il lui érait libre par conréquent ,
en confervanr l'intention de fe rendre à fa defl:inatiul1, de
courir pendant fix, huit; dix' mois & même plus, fuivant
l'occurrence des temps, les côtes de l'Egypte & de la
Syrie, de paffer même dans d'autres Provinces fur fa rome,
d'aller d'un Porc à l'autre pour completter fan chargement,
d'y décharger & d'y vendre fes marchandifes pour en prendre d'autres en remplacement.
Pour pouvoir foutenir' que le voyage. â été changé, il
faut prouver que le chargement du Navire a été fait dans
l'endroit défigné dans la police & pour le _compte des
Affureurs; que le Capitaine, au lieu de faire voile pour fa
deHination , 11 changé totalement fa. route; 'qu'if n'a eu
aucuqe force d'intention de fe rendre au lieu de fan refie,
& qu'il ne s'y efi pas én effet rendu. G'eil: la défi,nition
qu'en donne Cafa-Regis , de commercio, dire. 67,- n. - 24.
Lès aililrances ont été faites fans aucune limitation de
temps fur les facultés du Navire, La Marie Egyptienne, de
forrie de Damiete ou de Syrie à Marfeille. Ce Navire a
chargé à Lattaquié pour rDamiete, & pour compte des
gens du pays,. du tabac dont l'entrée ef!: prohibée en
France; le chargement n'érait donc pas pour le compte
des Affureurs & des Affurés. '. Il s'efi rendu de Latta-quié à Damiete, & de Damiete à Lattaquié, pour même compte
des gens du pays, fans ·fortir de la gyrie ni de l'Egypte.
Ce n'efi donc' point' le voy~ge de forcie de Damiete ou
de Syrie à Marfeille qu'ils ont affuré à cout événement. '
Il dl: dit dans les polices que l'affurance eH faite de
fortie ,de Damiete ou de Syrie indifiinél:ement. Relative-~
ment à cerre faculté il 'écoit libre au Cap-itaine de charger
lé. Nàvire dans tous les Porcs de la Syrie ou de l'Egypte,
fans que les Affureurs puffent former la ·moindre pla inte à
ce [ujet. Il n'en ferait pas de mêrlle , fi la police défignoit
nommément & expreffément le feul &1 unique Port dans.
�398
10U'RNA'"L'
lequel le chargement devroit être fait, attendu là grandi!différence qu'il y a à faire entre affurer les marchandifes
qui feront chargées dans un tel Port, & affurer de fortie
d'un tel Port ou de telle Province~
Dans le pre.mier cas , le lieu ùu chargement ne peut
pas êrre changé, parc.e qu'il a ét~ fpécifié, fixé & déterminé. Mais dans le fecond, on ell: libre de faire le char-·
gement dans rel Port de la mute que l'on trouvera bon ,.
parce que la police n'a pas reftreinc, cette liberté à. un Port.
dérerminé.
La claufe, faire éc;helle en tous lei lieux & endroits 'lue,·
han lui ftmblùa, inférée dans' les polices, a donné l'e droit
au Capitaine d'y négocier, d'y faire des achars, d'y vendre
des. marchandifes & d'en prendre d'autres en remplacement.
Tous les Allteurs fe réuniffent.1t fourenir que le mot faire
échelle Îlgnifie à un Port de mer où l'on tj"ouv~ magaÎln ,.
correfpondant, & qui ell: de{l:jné à y charger un Bâtiment
en tout ou.. en paitie. GeEl:. ce qui eft ubfervé da.os le
Ditl:ionnaire du Commerce in vo. échelle; par Clerac, tit. 2<
des contrats maritimes, art. l, & par Cafa-Regis ,. difc. l"
IJ.129,I3 o &q2.
,
.
"
Si en force de cerre.. permiŒon te Capitaine a lé pouvoir d'aller de droit à gauche dans les Ports qui .font fur.'
fa roure & dans' différentes Provinces, d'y charger fan,
Navire ou le décharger, d'y acheter oiJ vendre des marçhandifes, & dlen prendre d'autres en. remplaç.ement, 11.-.
combien plus forte raifon eft:.il en droit de faire fon.char-·
gement dans le Porc .le plus· prochain de fon refte ou de
fa. deftination..
'
.
. . .
On ne peur difconvenir que Da~ie\:e eft plus éloigné
de Marfeille que Chipres. On ne peut d'ifcon.venir auffr
qu'il ell: permis p,!r l'Ordonnance de racc.ourcir le voyage~_
Le Capitaine n'a point' a-bufé des pouvoirs que lui attri-huaient les polices;.' il n'a point c.q>l1ru rous les Ports de·
la Syrie;. & bien-loin de' dérourer & de relfOgrader, it
.:'?e!\:. au conrraire rapproché de fa deftipaEion, par où il a
�nû
PA·tAIS
nE
,
PROVENCE:
399
~jininue les rirques, en fairant fan chargement 11 Chipres,
l'ort fur la route, & plus prochain que celui de Damiete.
Le fieur Bartpelemy citoit une Sentence du Lieutenant
-<le l'Amirauté de Ma.rfeille, rendue en 1777 en faveur' des
.fieurs Pelel1:an contre des Affureurs, qlli avoit jugé que le
Capitaine Auffan avoit pu faire trois voyages en caravane
<lans le levant, & faire enfuite celui du levant pour venir
à MarfeiHe, qui avait fait le fujet des affurances. Il citoit
encore l'Arrêt du 14 Juillet 1779, rendu au rapport de
Mr. le Confeiller de Franc, en faveur des fieurs Vague pere
& fils, contre ks Affureun fur le Canari Le St. François,
qui avoit jugé que la feule condition de touchet & faire
.teh"elle laiffoit la liberté au ·Capitaine de faire fon charge.
ment où il trouvoit bon; que le voyage n'étoit ni Tompu,
,ni changé, & qu'il pouvoit le raccourcir.
Pour répondre fur le temps du rifque que les Affureurs
.()ppofoiem, le fleur Barthelemy difoit que fi la déclaration
,de guerre furvenue, depuis le contrat d'affurance, el1: dlt
nombre des rifques dont font tenus .les Affureurs, à com:bien plus forte raifon en font-ils tenus lorfque le rifque a
été prévu, qu'il a formé une des conditions de l'affurance,
flan feulement par la l1:ipulation du paél:e, mais encore par
ia fixation & le prix de la. prime.
Le rifque a éte prévu par le paél:e, puifque l'affurance a
·été faite à tout événement, c;:'efi-à-dire , à tous les rifques,
:à tous les finil1:res ,à toutes les pertes quelconques, de
quelque nature qu'elles [oient ou qu'elles procedent, citrJ
fraudem contralzentium, ce qui efi au tarifé par j'Ordonnance
de la Marine, qui permet la l1:ipularion général~ment de
toutes .les autres conditions dont les parties voudront con:venir.
Les Aifureurs ont eu en vue par leur engagement un
-Voyage prochain, & un voyage éloigné tout à la fois par
la c1aufe fera ou aura fait voile. Ils ont encore eu en vue
·l'un & l'autre voyage, .par la permiffion accordée au Capitaine de dérouter, rétrograder, toucher & faire échelle. En
,forte que fi la police n'avoit renfermé que la feule claufe
�4~
JOUR.At
aura fait, qui dans ce cas n'aurait indiqué & déiigné qu'un.
feul temps, le Capitaine ayant effeél:ivement fait voile lors
même de l'affurance, & ayant difFéré de {e rendre à {a
defiinatjon en déroutant, rétrogradant, touchant & fai{ant
échelle pendant cinq mois con{écurifs, {uivant les circon{tances qui lui auroient paru plus ou' moins avantageu{es,
la guerre étant {urvenue dans l'intervalle, & le Navire
ayant été pris, ils n'auroient pas moins été {()urnis d'en
garantir la perte, _pa. cerce raifon {ans replique que le
temps de l'arrivée du Navire à Mar{eille étoit illimité.
Mais, dirent les Affureurs, le iifiJue _CL été prévu par le
taux de la prime.
.
•
Per{onne n'ignore (répondait Barthelemy) que l11 prime
de paix pour les échelles du levant n'efi que d'un ou d'un
& quart, ou cout au plus d'un &: demi pour cent. Pour~
quoi auroit-eHe été· portée à- trois pour cent d'lns les. polices don.t s'agit ,. & li tout événement fi on n'avait pas en~
tendu ftipuler une prime de guerre, ou tout au moins une
prime m,oy.enne relativement aux circonfiances? En effet,
à l'époque des aifurances iL couroit depuis plus de dix-huit
mois des bl uits de rupture entre la France & l'Angleterre,
qui annonçaient ul)e déclaration dé guerre prochaine, & pal'
con{éqllent des hofiilités. .ce {ont toutes ces. ci:rcon.fl:ances.
réunies. dont les Affureurs étoient parfaitement initrllits,
qui oeit déterminé le prix de la. prime li .tout événemen~
de trois pour cent~
Le. fieu.r Terme n'a. point varié filr l'affurance qu'il demandait de· faire faire pour {on compte, à rai{on de fan'
l;etour à Mar{eille, il n'a pas déclaré {es premieres affu-.
r-an<;es. nulles. pour caure de changement de voyage. Sail;
intention a toujours été de {e faire affurer pour ce même
re.rour à Mar{eille, qui n'a pas été' interrompu, changé ni
alréré; il n'a été· différé que par. les. prix. exor.bitans d,es riz.
qui {e JOnt toujou.rs. {outenus..
.
Les dellx Arrêts du Con{eil rendus en IÎ48- &. n49 ,.
rapportés par' Vallin, tom. 2, pag. 48, ne ,{ont point ap~
pliçables à la caure p.r.é{ente ,. I.o.-.parce. qu'ils ont été. reQdus.
,
~
,
�PALAis' DE PROVE,NeE..
"4or
«ans des éirconllances particulieres, & relativement à ce
que les affurances étoient portées à un prix extraordinaire;
'2. 0. parce que les affurances dont s'agit font des affurances
moyennes, & non de paix, attendu qu'elles fom faites à
tout événement, fans limitation & hors de proportion avec
la prime de paix.
Qu'ell:-ce en effet qu'une prime de paix? C'ell: nn prix
modéré auquel l'Affuré fe foumet envers l'Affureur, artendu que l'un & l'autre n'ont que' les finill:res ordinaires
de mer à courir. La prime de guerre au contraire efi porrée à un haut prix, à caufe des hollilités certaines qui augmentent les dangers; en forte que les rifques erant plus
grands, les dédommagemens. doivenr êrre, par réciprocité
de raifon, plus conûdérables. La prime moyenne rienr le
milieu enrre ces deux extrêmes; elle ell: par conféquent
'fixée au deffils de la prime de paix & au deffous de la
prime de guerre, aHendu l'incertitude où fonr les parties
contraétantes, dans le m0ment de leurs obligations, fi du
départ à l'arrivée du Navire, il y' aura de vraies hofl:ilités, & rout à la .fois rifques ordinaires de' mer, & rifques extraordinaires de guerre.
On n'a pas nommément ftipulé une prime de guerre ~
parce qu'elle n'étoit pas déclarée dans le moment; mais:
on a prévu & pourvu à tour, en fiipulanc une prime ~
tout événemenr de trois pour c.enr.
'•
Ainû, de quelque côté qu'on envi.fage les prétentions des.
fieurs Beffon & Maffe, elles ne peuvent qu/être condamnées. Leur réclamation contre les affurallces eH tardive,
fimulée & affeél:ée; il's 'om gardé le ûlence, & Ont rené
dans l'inaél:ion pendanr fix mois confécurifs, pour attendre le fort & l'événement des Navires, & quand ils oneété certains de la prife de l'uB & du f-auvement de l'autre ,.
leur réclamation n'eH: tombée que fur le perdu, pour toueà la fois fe fou!1:raire au paiement de J-a perte, & re.rirerle profit du fauvé.
Par Arrêt du '18 Juillet 1780, an rappon de Mr. le COIl'feiller de Thorame, la Cour fans s'arrêter aux. fins prin.DU
Ee:e
�,!-02.
.
.
Jou
R. N
AL.
cipales & provifoires de Michel Barthelemy; mit les Afiù..:
reurs hors de Cour & de procès; & de même fuite faifant
droit à la requête incide\lte des Affureurs, condamna Barthelemy au paieme\lt du demi pçlUr cent d'efiourni des affurances caduques dont les primes n'avoient pas été payées,
avec dépens. Ecrivant Mes. Jaubert & Raybaud.
ARRÊT
L X V II.
Sur un droit de fuite.
L
E 18 Août 1768 , Jean Salvadon, Négociant de la ville
de Marfeille, acheta de Feraud & fils 39) charges
bled de Satalie, payables un tiers comptant, un tiers par
tout Novembre, & le tiers refiant p.ar tout le mois de
Janyier d'après. Le 19, il acheta de Leclerc pere & fils
220 charges & demi feigle d'Hollande, payables dans fi"
mois, & le 2.0 il acheta de Salkli & Beneke 329 charg-es
un quart mi"ture, pour payer par tout le mois de Septembre fuivant.
Par traité de Me. Pons, Courtier, du 6 Septembre
même' année, Salvadon vend au fieur Nicolas Manen environ 395 charges bled de Satalie, 559 charges mixture,
& 200 charges feigle comptant, en mandats en compenfation, pour retomber le tout dans les mêmes magafins
où ils fe trouvoienr.
Après la faillite de Salvadon, les premiers vendeurs non
entiérement payés du prix firent procéder à la faifie de
ces grains en force d'une Ordonnance des Juges-Confuls,
& ils fe pourvurent au même Tribunal contre Salvadon &
la maffe de fes créanciers, en condamnation des fommes
dues à chacun d'eux', & en révendication de leurs grains
par droit de fuite.
Manen demanda la caffation des faifies. Les premiers
vendeurs oppoferellt une requête incidente en ca1fation de~
�nu PALAIS D-E PROVENCE.
lj.03
traités des "feconds achats & des acquits dès paiemens
dont Manen était porteur, comme feinrs & fimulés en
fraude de leur droit de fuite & par preHation de nom.
Autre requêre de leur part, pOllr faire répondre Manen
fur faits & articles. Les réponfes furent prêrées. Troifieme
requête en repréfentation des livres de Manen, & en cas
lie refus, permis d'en tirer les induél:ions de droit. Cette
demande fut conreHée; la repréfenration fut néanmoins,
ordonnée. Manen déclara appel pardevanr la Cour" & néanmoins repréfenra les livres; enfin par Senrence définitive
le droit de fuite 'fut adjugé. Les achats & acquits faits
entre Salvadon & Manen furent déclarés nuls à l'égard de
Feraud & fils, Salkli & Beneke, & Leclerc pere & fils.
Manen & les autres feconds acheteurs appellerent de cette
Senrence. Elle fut confirmée par forclufion conrre Manen"
& conrradiél:oirement conrre les autres.
Manen impétra requête civile qui fut ouverte; les dépens fl'uarés furent joints au refcifoire.
On difoit pour Manen fur l'appel de la Sentence définirive, que le droit de fuire n'a pas toujours éré le même
parmi nous. Les Loix Romaines qui nous régi Ife ne , ne
l'admertent pas en faveur du vendeur qui a fuivi la foi de
l'acheteur; elles veulenr que le vendeur d'une marchandife
fait faus efpair comme fans privilege. La raifon qu'elles.
en donnenr, c'eH que la vente eft parfaire, lorfqu'on ell
convenu de la chofe & du prix, & que la perfeél:ion de cet
aél:e fait palfer irrévocablement à l'acheteur le domaine de
la choCe : fed Ji is <fui vendidit , jidem emptoris fecutus fuerit,
dicendum efl flatim rem emptoris fieri, §. venditœ., Innie.,
de rer. divif. Le feul cas où, felon le .droit romain, le vendeur écoit admis à réclamer la marchandife, c'était lorfqu'il l'avoit vendne comptanr, .& qu'il n'était point payé
du prix; alors la réclamation était permife, non pas pal)"
une {impie hyporheque, .mais par une vérirable révendicatian.
Manen convenait que le droit français Il dérogé à la dir-.
poLition du droit romain fur certains poinrs, & qu'il ad~
E ee
2..
�~4
JOUANAi
Juge une préférence au vendeur à terme fur la marchan:::dife, lorfqu'on la trouve dans les mains de l'acheteur',
dans le même état d'intégrité qu'il l'a re<;ue, extante &
en nature.
Suivant un Statllt particulier & municipal de la ville de
Marfeille, il écoit d'ufage autrefois que dans le cas où celui
qui avoit vendu des effets mobiliers, & n'avoit pas été
payé du prix, fi l'acheteur venoit à faillir, ce vendelir pouvoit révendiquer les effets, quoique la forme en eût été
changée, s'ils fe trouvoient encore enrre les mains de cet
acheteur, ou de ceux à qui il les avoit remis pour les
garder ou pour les revendre, & même s'ils f~ trouvaient
enrre les mains d'un tiers à qui cet acheteur les eût donnés en gage ou en nanriffemenr, ou à qui il les eût revendus, pourvu que ce ne fût pas depuis une année.
Mais il' inrervint ,dans la fuite la Délibération de la
Chambre du Commerce du II Août 1730, qui fixe trois
cas où le vendeur non entiéremenr payé peut réclamer le
droit de fuite fur les marchandifes par lui vendues; 1°. lorfque les marchandifes vendues [ont en nature & extanres
entre les mains du premier acheteur ou de [on commiffionnaire; 2.°. lorfque les marchandifes font enrre les mains
du [econd acheteur qui n'en a pas encore payé le prix;
3°. lorfque le premier ayant vendu pour être payé comptant [ans jour & fans terme, l'acheteur fait la revente avant
l'expiration des trois jours. Elle refufe le droit de fuite [ur
les marchandi[es qui feront trouvées entre les mains d'un
fecoud acheteur qui les aura achetées de bonne foi par
vente publique faite par le miniHere d'un Courtier, & qu'il
_
en aura payé le prix au premier acheteur.
Il. faut d'abord confidérer en matiere de réclamation ou
de fuite le titre de celui que l'on veut dépouiller de la
marchandife. Manen [e trouve dàns le cas. porté par la Délibération .du Commerce qui exclut le droit de fuite. 1°. Il
eH fecond acheteur de bonne foi. 2.°. Il a" acheté par vente
publique faite par le miniHere d'un Courtier royal. 3°. Il a.
payé entiérement le prix au premier vendeur.
�DU
PAL AIS
D E
P 1l. 0 VEN C Il.
40 ')
Il Y a plus: le droit ,de fuite n'a pas lieu, lor[que le
~.endeur
a retiré des a/furances. Aioli l'atrefient Brodeau
fur Louet, litt. P , fomm. 19, & il le prouve par une
foule d'Arrêts & d'Auteurs qu'il cite; Catelan & Vedel,
~oltl. 2., liv. S, ch. 33; Lacombe, JurifPrudence civile,
v~. vente, n. 8, & Fromental en fes décilions.
Les premiers vendeurs éroient donc non recevables &
mal fondés, puifqu'ils avoient été payés en partie comptant, & que pour le furplus ils éroient camionnés par Me.
ReveUy. Le cauüonnement efi incontefiable, & il a été
avoué par Me. Revelly lui-même, puifqu'il en a pris occafion d'intervenir dans' le procès.
Comme camion, Me. Revelly n',a fuivi que la foi de fan
débiteur. 11 efi certain que la marchandife ne pouvait pas
lui être remife, parce qu'elle n'a jamais été fan gage, &
'que le droit de la révendiquer ne lui a jamais été acquis,
par la raifon fans repli'ljue qu'il n'appartient qu'à celui qUi
a eu la propriété de la chofe. Il ne faut donc pas que Me.
Revelly confon'de fan droit avec celui des réclamataires.
Il efi de principe que les aaes qui font revêtus de
~outes les formalités fagement établies par les Loix, font
pleine & entiere foi en Jufiice. L'intérêt public exige que
cette Loi [oit fcrupuleufement gardée; le' bon ordre 'ne le
réclame pas moins. Quel trouble dans les familles! quelle
perplexité dans les affaires! quel danger dans le commerce,
fi la fiabilité des aaes dépendait de la fanta·ilie ou de la
malice d'un plaideur! Rien. ne feroit déformais a/furé parmi
les hommes; on détruirait les conventions les l'lus authentiques; on anéantirait les accords les plus facrés : delà
naîtrait le défordre & la confulion, fur-rout dans le commerce où on n'efi pas afireint à fuivre, les regles étroites
& établies pour les autres affaires.
On voit dans les Capitulaires de Charlemagne, liv. 7';
ch. 136, qu'un Juge ne doit jamais condamner qui que ce foit
fans êt~e fûr' de la jufiice de fon Jugement, & qu'il doit
[avoir qu'il n'y a rien de li dangereux ni de fi injufie que de
{e hafarder à juger fur des conjeaures & fur des [ouP'i0ns;
�~6
JbURN~L
pericu!a'jùm namque efl (; peJlimum 'luemquam de. JUfPicionejudicare. La Jufl:ice [e méfie de tout ce qui va contre'
l'aél:e; c'efl: ce qui nous efl: attefl:é par FromenraL vO•. preuvl:.,.
pag. )7 1.
Or (continuait Manen ) quelles font les préComptions.
que les réclamataires oppo[ent pour faire déclarer nuls &
fimulés les traités de vente & le prix du· paiement du
bled que Me. Salvadon a tivré au fieur Manen? Ils dirent
1°. que les traités de ven.re & l'acquit du paiement [ont
limulés; 2°. que le mandat que le lieur Manen a donné:
à Salvadoll en paiement du bled, a été remis par Salvadon.
à Me. Arnaud [on ctéancier, & que Manen a 'prêté lenom à Me. Arnaud, qui'a tâché de [e payer des avances·
qu'il avoir faites à Salvadon pour l'aider à faire le paiement de quelques ach.ats de bled; 3°. que Manen prétend.
avoir fait des fonds chez Me. Arnaud en c.omptant, dans'
un temps de d,j,[ette d'argent, ce qui' n'efl: pas· à pré[umer.:
4°. que Manen n'a point tenu des livres de commerce, le
journal qu'il a pré[enté n'étant pas légal ;. 5°.. que tout ce
qui s'efl: palfé en'tre Me. Arnaud, Salvadon & les autres.
acheteurs, prouve la limulation de tous les traités & des.
pale mens.
Sur le premier fair, Manen diroir qu'il avoit acquis les.
grains par traité du 6 Septembre, fur le pied des traités
de vente. En les comparant avec ceux des réclamaraires,
Salvadon a fait un 'bénéfice ;, s'il n'avait agi que par limu-·
larion, il auroit payé le même jour, & il. aurait dénaturé
les grains dans le même temps, en les fai[ant tran[porrer'
ailleurs; au lieu qu'il n'a payé que {ept jours après la 'vente "
[ans que per[onne en réclamât, quoique les ventes fulfenll.
publiques.
Sur le [econd, Me. Arnaud était un Agent de change
pour être en compte avec tous les Négocians de la Place•.
Manen à l'époque de [on achat ignoroir très-fort que Me..
Arnaud fllt en compte avec Salvadon; 'mais 'l'èût - il [u,
pourron-on en induire une limulation dans les traités de
Vente à l'époque que Manen a fourni fon mandat à Sal-;
�n
u PAL AIS D Il PRO V Il Nell:
407
'VaClon. Ce n'e!l: qu'une fuppo_fition de la part des réclama.
taires de dire qu'Arnaud n'a été qu'un prête-nom. Où e!l:
la vraifemblance qu'il l'ait fait aux dépens de fa probité, de
fa tranquillité & de fan bien? C'eft fur ce fondement auffi
fage qu'humain que toutes les Loix défendent d'admettre les
plaintes qui imputent_ des fautes ou des crimes à ceux qui
n'ont eu aucun intérêt à les commettre, parce que ce ferait
le dernier trait de folie de préfumer qu'un homme a commis_
une fripponnerie fans intérêt, & qu'il a voulu rifquer fa réputation, fan bien fans motif.
Sur le croifieme-, on faifoit valoir la dangereufe conféquencê
pour le commerce, qui mérite tant de fav.eur, fi on pouvait
quereller les achats d'un Négo.ciant, en -alléguant qu'il n'était
pas en état de faire les fonds au moyen defquels il prétend
avoir fait l'achat, & que ce Négociant ne peut fe tirer
du défilé de la caffation qu'en donnant le détail de fes fonds
-& qu'en en indiquant la fource. Cannait-on dans le corn..
merce de pareilles entraves? Quell~ eft la Loi qui oblige le
Négociant acheteur à développer fes affaires & à manifèfter
fes fonds? Da_ns l'ordre naturel des chofes & parmi ceuxlà même qui n'étant pas Négocians, n'ont pas un état néceifairement lié avec le crédit, celui qui achece ou qui paye
ne peut pas être fournis à déclarer où il a pris l'argent qu'il
a compté.
_On difoit fur le quatrieme, que la tenue des livres n'e!l:
point de rigueur ni d'obligation vis-à-vis du Négociant qui
n'eft comptable de fa conduite qu'à lui feul; les Négocians
& Marchands ne font fournis à tenir des livres que pour
rendr_e cOIT!pte de leur infortune dans le cas d'un dérangement; mais le Négociant & Marchand qui n'achete &
ne vend qu'en comptant, n'e!l: point dans le cas de cette
difpofition. Tel e!l: le fentiment du Praticien des Juges-Confuis, chap. 2, liv. 2, pag. 47, en rappellant la difpofition
de l'arr. 1 du tit. 3 de l'Edit du Commerce; de Savari en
fan Parfait Négociant, tam. l, pag. 248; de Toubedu, tom.
2, pag. ') l , & de Bretonnier fur le même article.
Sur le dernier moyen Dl! obièrvoit que tout étoit légal dans
�'4 0 .8
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la conduite de Manen; que les aél:es dont il était' por eut"'
réuniffoienc le confencement des parties, la fixation de la qualité, de la quantité & du prix de la chofe ; qu'ils avaient été
fuivis de la tradition & du. paiement; qu'ils étaient munis du
fceau de l'au&henticité; qu'ils étoienr dans la forme ufitée dans
le commerce, & requife par la délibération de 1730; que
par conféquenc ils étaient irréfragables & à l'abri de coute
attaque.
On répondait pour les réetamataires, que ra quefiion coniill:oit à [avoir fi les grains révendiqués par droit de fuite
avaient celfé d'être entre les mains de' Salvadon. Si l'es fe-·
condes ventes éwient finceres ,. les premiers vendeurs n'allraient rien à prétendre ~ mais fi elles font fauffes & fimulées,
les grains réclamés n?étoient point entre les mains des feconds acheteurs; & dans ce cas il n'y a pas lieu. à examiner,
ni fi les premiers vendeurs avaient reçu des fûretés, ni s'ils
pouvaient céder le droit de fuite· à. Me. Revelly, qui avoiu
cautionné leur achetem.
.
C:eft une maxime générale en Fran{;e, que- les meubles
ne peuvent pas être fuivis par hypotheque,. lorfqu'ils font
fortis des: mains du débireur, & qu~ils ont paffé entre les
mains d'un. tiers. ( Cate!an.,·liv. 'Î,' chap. 33 ;-& Brodeau ful'
Louet, Iett. P', n°. 19.. )
Ge n'ell: pas dalrs les principes àu Droit Ramait) & du
Droit colltumier qu'il faut chercher la folution, des queHions
fur le droit de fuite, quand. nous avons un Statut qui préfente la feule & unique loi> qui. fait à co'n!ùlter; le dwit de
fuite. n'ell: point perfonnel, mais l'aél:ion eH rédIe·, & la délibérari.on modificative· du Statut ne lui. a donné aucune atteinte. pour ce qui concerne la difficulré qu'on oppofe.
La d.élibération de 1730 porte que le droit de fuite à.
Marfeille s'exerce par le vend-eur non. payé du prix, lorfqu'it
~rouve. la chofe extante & en nature eorre les mains du fecond· acheteur' qui ne l'eft pas de bonne foi, ou qui' n'en a·
pas. pay.é. le pt:iiO'. avec ce même caraél:ere de bonne fqi. en
argent comptant, lertres de change ou billets à ordre;. que
l!-exe.rcic.e de. ce droit ·a. li.eu.,. foit 'lue le premier vendeur ai~ donnl;
�DU
PAL AIS
D E
PRO VEN C E.
409
Clonné tetme ou non au premier acheteur, foit qu'il en ait
exigé des affurances par cautionnement, garantie ou autrement; que le droit de fuite efl: réel, & non perfonnel ; d'où
il fuit qu'il efl: ceffible & fufceptible de la fubrogation de
droit & de fait. Me. Revelly, qui n'a cautionné ou garanti
aux premiers vendeurs dive~fes parties du prix, que fous la foi
du droit de fuite, & qui, fans la connoiffance d'une difpofition auffi immuable, n'auroit pas contraél:é une pareille
obligation, fe trouve donc fubrogé de droit à leur lieu &
place & à leur privilege pour routes les fommes qu'il avoit
garanties & qu'il a été forcé de payer en vertu de fon cautionnement.
Manen ramene inutilement la quefl:ion de (avoir, fi lors
des demandes des premiers vendeurs, Salvadon étoit ou
non en faillite. Ce n'étoit pas la faillite de Salvadon qui
donnoit naiffance à leur aél:ion, aux fins d'arrêter le cours de
la fraude. Toutes les quefl:ions que Manen reproduit, ont été
jugées en faveur des premiers vendeurs & de Me. Revelly
par l'Arrêt de la Cour du 13 Juin 1771, & même par les
Arrêts du Confeil qui ont débouté de leurs demandes en
caffation les prête-noms qui s'étoient pourvus contre l'Arrêt.
Le feul & unique point du procès efl:, fi Manen ef!: complice 'de la fraude dont Me. Arnaud & les autres prête-noms
ont été convaincus; s'il n'efl: pas complice, il n'a pas befoin
de recourir aux exceptions qu'on vient d'écarter; s'il l'eH, il
y aurait inutilement recours.
Il y a une difiinél:ion à faire entre les parties contractantes qui voudraient arguer eur propre aél:e de fimuJarion,
& le tiers au préjudice de qui l'aél:e auroit été fimulé. 'A
l'égard du tiers, il faut encore difiinguer entre l'écrirure des
aél:es, & le fait qui s'efl: paffé, le fèriptum & le gllum, la
convention que l'Officier public rédige par écrit, & le fait
qu'il atteHe. Ce n'eH qu'en la convention que le tiers peut
attaquer l'aél:e comme fimulé. C'ef!: l'obfervation de Mr. Cochin, rom. 'l, pag. 130.
'
Dans le cas du procès, les Courtiers qui ont fait les traités
des feconds lIchats n'ont vu ni nombrer ni délivrer les e[-
FH
�4ro
JnUR.A~
peces, & les reconds acquéreurs qui ont fait ce's achatS par.
fimulation & prefiatioh de ,hom ont trompé les Courtiers;
le faux eH par rapport aux reconds acheteurs, qui ont dit,
,contre la vérité, àux Courtiers, qu'ils achetoient pour eux·
mêmes, & non par rapport aux Officiers publics qui ont ré·
'tiigé les convootions 1eUes qu'eUes -leur ont été di&ées.
La foi efi due à l'atl:e jllfqu'à l'infcriptioh de faux, parce
qu'elle eH: due" à l'Offic-ier public qU'i a re~u i'a&e. M-a~'s cette
Tegle cerre en matiere de convent.ionsfimulées, <lui font
fauffes par rapport awx 'parties, & vraies quant à l'Officier
,public, Lafimulation ell: un genre de '.faux'; 'mais ce faux ne
tombe pas fur l'.a&e en lui-méme, & ce n'ell: pas le faux
propremènt dit, a/iud merum fal{uf[l., aliud jimulatio. Sïle tiers
n'eH: pas· tenu de s'infcrire en fallx contre la 'convention fimulée, il faut bien qu'il fait re~u à conll:ater par tome autre
voie la fraude dont il fe pl·aint.
L'a&e a pour lui' une grande pré'Comption; ·mais pour le
'tiers ,ce n'dt qu'uae pre[omption {je droit. A l'égard d'u
tiers qui l'attaque de limulation, l'aél:e n'a pas mêtpè la force
ordinaire d'une pteuve éaite, puifque le tiers ell: re~u à le
dé·mentir· par la prellve \loca'le. D'Argermé fur l'art. 229 de
la coutut'l1ede Bretagl1e le dît expreffémént.
La fraude Ce ca'che) eile marche par des voies 'détournées;
il ell: vrai que (jolus non prœfumltur, fed pro6atur·; mais il
n'en ell: pas moins vrai que la fimùlation fe pteùve par les
préfomptions de fait & de droit.
L'es préfomptions, les indices font p1lls forts que des
foup~ons; & la Loi en fait la différence, pu·j'fque, fi el.le dit,
:nec de fu'/picionibus 'luem'll1am condem'nari apportet, elle 'die
auffi , dolus ex indiciis perJPi"cuis pro'Da'ri convenit. Urre pré[omption, un indice peut h'être pas affez concluant; plulieurs
de ces préfomptions reûhies operene la conviél:i'on; féparées,
"elles ne don-nent qu'une foible Itleur qui "peut être trompeufe;
réunies, ellès forment tin faifceau de lumiere qui met' la
fraude en évidence.
L"orfque "la fraude -éfl: p'rduvée 'ex indiciis pt:f/picuis, elle
tIl'efl: pas condamnée fur une' fimple fufp'icion. Chaque indice
�D U
P' A
L ArS
D E
PRO VEN C E~
4Tt:
réparée peut n'aucorilêr que des foupS'0ns; mais leur concours'
changeant les foupçons en certitude opere la conviétio n; &
lorfque la parcie q\li allegue la fraude a pour elJe ce concours, elle n,e produie pas fimplement ce· gue la Loi appelle
fuJPiciones;. elle prouve le dol ex indiciis perJPicuis. Ai nfi plufleurs effets il,1diquent une caufe commune; quoique chaque·
effet puiffe également fe rapporter à un~ autre caufe indépendante, la vraie caufe eH cependant celle que tous indi-·
que nt , la co-exiHence de c~s effets ne pouvant êrre a ttri-·
buée qu'à la même caure. Il y a plulie~rs vérités qui ne font
pas '1utrement démontrées•.
Ici, déja un Arrêt a j~gé irrévocablement qlle te comp!"ot··
avoit eu lie.u.. entre Me. Arnaud & quatre prête-noms, &.
Manen. convient que ce complot a exiHé encr'euxo- Les fe-conds achats qui'pourroient [éparérnent avoir une autre caufe"
ont co-exiHé avec les autres qui écoiel1t f'lits pour prtx:urerMe. Arnaud le bénéfice injüHe q.u'il fe propofoir. N'eH-ce
pas ici un. de ees effets. q,ui indiqllant enfemble une caufecommuqe, prouvent. cette. qufe? La Cour doit fe rappellerfur quel fondement elle a jugé que les feconds. acheteurs,
n'éroient qlJe des perfonnes interpolees•.
La .fimulation conjzjlf!., dit Mr. CQc1ün, en ce 'lue les' par-·
ties déclarent 'lu'elles font· u.ne convention, é;, en exécutent url/:
autre. S'i.1 eH ptQuvé que les parties ont exécuté une con-·
vention 'lucre que celle qu'elles avoient déclarée, la preuve·
de la fimulation ~H acquife. C!eH la preuve que les A-uteurs _
.appellent confilium ex eventu• .Les livres de· Me. Arnaud prou.voient fon ancienne créance fur S~lvadQl1 de feptance-trois"
mille livres, & fa nouvelle avanç~ de lilu;lrante mille;. en.
takulant le montant des reventes avec. celui des créances
de Me. Arnaud, il fe trouvait payé de cent neuf. mille neuf'
cent quatre-vingt-quinze livres quatre fols.
Ce n'eH pas là une préfomption, une {impIe indice de Finrerpofition des perfonnes;. c'en eH une preuve complette••
Les bleds n'étaient pas fortis des magafins où les premiers vendeurs en avaient fait la livraifon; c'ef!: dans ces..
même.s magafins qu'ils les ont tr.ollvés extans & en nature_
a
-
-
Eff2..
�4.t:l.
Jou
RNA L
Les pl'ête-noms ne s'étoient nantis des clefs que figurative":
Illept & pour mieux mafquer la fimulation.
Sur l'obligation du fieur Manen d'avoir des livres, on répondoit que l'art. 1 du titre 3 de l'Edit de 1673 , porte que
les Négocians & Marchands, tant en gros qu'en détail, auront un livre. N'd!:-ce point là commander, & non fimpIement confeiller? Bornier obferve fur cet article que 1'01'donnanée el!: fi exaél:e, qu'elle veut que leur grand livre contienne les deniers employés à la dépenfe de leur maifon.
Tout ce qu'entend Boutaric fur le même article, lorfqu'il
n'envifage fa difpofition que comme un confeil, c'e!l: que
l'Ordonnance ne condamne ceux qui n'en ont point à aucune
, peine; ils s'expofent néanmoins d'être réputés banqueroutiers frauduleux; & dans toutes les conre!l:ations qu'ils ont,
tant en demandant qu'en défendant, routes les préfomptions
pag.
font contr'eux. C'ef!: ce qu'atte!l:ent Toubeau, tom.
~ 2, & Savari, parere 3 I.·
Tant qu'il n'y a pas lieu à la repréfentation des livres,
la Loi ne va pas s'informer fi le Marchand en tient; & c'eil:
en ce fens que l'on peur dire avec Bomaric, qu'après tout
l'Ordonnlnce ne condamne ceux qui n'en ont point à aucune
peine; elle ignore le délit, & n'a pas voulu, pour le confl:ater,
une inquifition odieufe. Mais toutes les fois que les livres
doivent être produits, fi le Marchand n'en a pas tenu, la Loi
le lui impure; il eil: réputé de mauvaife foi toutes les foi!
qu'il dit en Jufl:ice qu'il n'a point de livre.
Par Arrêt du 21 Juillet 178.0, au rapport de MI'. le Con":'
feiller . de Beauval, la Sentence des J uges-Confuls fut confirmée, & Manen condamné à tous les dépens. Ecrivant Mes.
Verdet & Roman- Tributiis.
.
2,
�'DU
PAtÂIS
ARRÊT
DI!
PROVENCE.
'P3
LXVIII.
Q!Jiflion de compétence.
E 1) Sep-tembre 1779, Jofeph Ferini, Patron Napolitain, tinr un aél:e à Martin du Martigues; il l'interpella
<le lui refiiruer .les 2100 .Jiv. qu'il lui avoit remifes en dépôt,
& le 3 l du même mois il le fit affigner.à la J urifdiél:iOJ1
'Confulaire en condamnation de cette fgmme. Martin préfenra, & oppofa qpe Ferini ne lui avoit donné les 2.100 li\'.
que pour payer une portion du prix d'une Tartane qu'i1.lui
avoit donné commiŒon d'acheter; il demanda d'être renvoyé au Lieutenant de l'Amirauté s'agiffanr de l'achat d'une
Barque. Par Semence du 10 Janvier 1780, les Juges-Confuls
renvoyerenr les partiés à pourfuivre pardevaAt qui de droir.
Ferini fe pourvut au Lieutenant Civil du Siege. Martin
·déçlina la Jurifdiélion; il fut débouté par Semence du 24Février. Il en appella pardevant la Cour, & offrit [ur le B.,rreau la preuve de quelques' faits relevans & décififs; il demanda à jufiifier que Ferini avoit confommé la veme de la
Tartane; qu'il avoit traité feul avec les ouvriers qui l'avoient
réparée; que quoiqu'il ne fût engagé fur cette Tartane que
~omme !impie Matelot, il agiffoit néanmoins en vrai propriétaire.
On propofait pour Martin deux moyens pour le foutien de
fon appel; le premier, fondé [ur l'indivifibilité de l'aveu; le
fecond, fur l'autorité de la chofe jugée.
Sur le premier moyen, l'on difoit que c'efi un principe
certain que, !i l'aveu efi divifible en matiere crim ineI!e .;
il efi indivifible en matiere civile. La raifon de cerre .différence efi fenfible; la découverte des crimes eH difficile,
parce que les coupables enveloppenr toujours leur conduite
-<lu, voile le plus épais. Dans les engagemens civils au contraire, il ne tient qu'aux parties de s'en procurer des preuves.
L
�'4 1 4,
J, C1 U R'N Ao
fi, •
écrites j d'où il fuit qu~ fi dans le premier cas la Loi' doitf\lvorifer les preuves qui font ordinairement rares, dans le·
fecond la. partie n..e peut Te plaindre que de fa négligence.,
D'ailleurs dans une inil:aJ;lce civile ,. per(onne ne peut être,
forcé à fournir' des preuves contre lui-même; au lieu; que,
les con/ldér,aripns fupérieures de Fordre public, intér.effé à,
la pourfuite des crimes" ont fait rejetter cette·m.axime des
inil:ances criminel1es•. Tous les A.uteurs, n'ont qu'un même·
langage à cet égard. ( Grivel fUr les. décilions Qu. 5>énat de,
Dole; Dumoqljn fuda. ~outume d~< Pa,ris ;", Lacombe en fes,
matieres çiviles. .)
L''Ivéu, celfe d'êrre indivi'fible en· deuJ1 lil:a~;' I~ lorfqu'il!
porte fur de,s {aits'QifféreM qui fe font paffés en Qivers temps;~
2°. lQr(q\l'i1 y. a une PaHie I!e l'aveu qui eil:: combattue par·
.que!ques, préfompüolls ou même par. quelque: pre.uYe ;;;Grivet:
réunit· ces, deux exception.s.
Le motif pe CeS excep,tions. eil: aifé à reconnpirre,. Dans:
Je premier cas ,. lorfque 1!i1ve\l embraife des. faits paffés en.
différens temps ,.les (éparer., Ce n:eil: pas proprem,ent divifel' l'ave,u, puifqu?oll peut compter, alors autant d'aveux qu'il!
y a d.es faits avoués•. Dans le fec.Qnd cas·, le motif de la,
l.paxime n'exi.!l:e p!\ls. Pourquoi a-l'-on .établj l'indivifibilité..
de l'a.veu] C',e/]: parce. q~'.Qn ;1., cru, q.u'on n,e devoit pas préfumer que celui tlui avojt eu la bonne foi d'.avouer.,un.e dette·
dont on n'avoit a,UCU!1e preuve fût de mauvaifè foi, Iprfqu'il;
.exçÎpe enlilke d'uJ;le ciFCon!l:ance ~ayorable pour lui. L.orf-.
qu'il exifre des préfomptions, foit en faveur de l,il dette,
foit con,tre-Ia c,ira.onfl:ance qui fait 1\1 ltbéra{Îon, loin qu'on,
p,uiffe faire uu. l):Iéri,r,e à l'alJteu-r de J''1veu,. de f:j. bopne foi"
on, peut croire qu'il.n~ l'a fait liJ.\-Je pour détrui·re les pré{dinptions .qui !yi ét.oient .èGlluaires à la. fav,el,lJ' de l'ip.diviGbi-..
)i~é.de l'aveu, /k c'eil: ain{i.ql,le l\l.di[poûriOQ de 1" L9i c.dfe"
parce que fon m.otif n'.ex,îf;1;e plus.. Mais hors de ces cleu",
~as, c'elt,à-dire, Iprfque les' faiLs porqent· fur ,def> faits qui fe·
faut pa1fés en même temps., q\l'ils fo.nt re1:lJt,Îfi> l'lln ~ -1'aI,lL.r e ,
&:: qll',il n'y a pas plus de préComptions.à p-ppofer à :l'un .%l'à!
l'a\1trs:, 'l'av~ ~eH iu,divi!ibk.~
, .. ,
�~v 'P ALAIS fi RPR OVENC l!:;4t~"
lofeph Ferini a fait a/Iigner Martin en retl:itution des '2.100
'qu'il lui avoit remis; il n'avait abrolument aucUil titre Contre
·lùi. En niant larémr/Iion de cette fornme, tout étoit dit»
1a preuve n'etoit ni po/Iible ni recevable. En avouant d'avoir
reçu cette Tomme, il ajoute rout de fuite qu'élie lui avait
,été re·mire à compte du 'prix Id'une Barque qu'il ·avCJ.i't fourni.
La ténlÎ'/Iion de la 'Comme & de fll 'defiination -font deu·x
cfaits conilexes', relatifS, in.(éparâbles Pun de l'autre. C'efi ce
'qui efi dbfétvé par Batdet., tom. l , liv·. '2., .chap. 109, pag.
'465, en rapportam un Anêt rendu par le Parlement·de Pa6s.
Le différend dGir donc être jugé par le Lieutenant de l' Ami~
.ratlt~.
C'ifi la di:tpG!ltio'h de 1'art. '1 du rit. hAie .l'Or.donna·nce
<de la Ma'rine., Je l'a compétence des lutes ,fie il'·Amirauté.
Sut le fecbnd mdY-eil, l'ln foutenoit que ~a p~emier'e dé·
'maréhe de Ferini füt ulfe a/Ii.gnation db'nvrée -au:X Jug'és~Co'n
fuis·; il y avançbit qu1il avoir ternis la fomme de ·2,'100 liv.
polir être employée à des tnarchandifes. 'M'ardn :repondoit
-qu'il l'avoit reçue, mais qu'elle devoir fërvir 'au prix d'une
Barque adlétée. Le renvoi fart l'ar les 'JlJ.ges~Confuls 'ne
pouv{)'it fe dir'iger que patdev.al'lt le Ttibül'l:altlle l'Amit-auté;
puifque n'y ·ayant qu-e deu:x eKpo'fiddns ·cle f.aits·, dont l'u'ne
êtabliilbit 'fatls 'Confredit .Ia com:p&ence ·des, Juges-Confuls,
& l'àutre 'ceUe ·Gle i'.Amit·âu~é>, la ·q~ecfljbn ·n'e roulant ql:lè
fur le peint '<le 'f'avo·it leq()el dèS deux de 'ces ::rribunaux·.feroit
·préféré, ,les '1uges"Confu'ls é'n fe dép0u.iI1â:Aot 'n'l'lnt·l'fu ·avoir·
'en vue que d'invefiir ·le Tribunal cle ·1'Ârncit·auté, 'Puifqu'il
·n'y a.voit p;rs ile terme rnl;>yen entre'·ces deux ·Tribunaux.
'Cette 'intention -eft non feulement de 'Jeûr pllrt la pll3s vrai·
!em:bl 'ble-, ~rna'is au/Ii la ''PIus "onforme au-x "pr·incipes.
tOn répondoit pour 'Ferini, qlhe le fonds 'de ·la-centeRa·
'tron' n'àvo1t i-ien ,de co'naej(e au commerce mal'itime; qu'il
n'y avoit aucun enga:g(jm'eRt qui pût fonder la ·compétence
'<les -Officiers de l'Aminuté, '& <Ju'une ·démande en reŒtudon d'un "d~p'6t ne peuvoi't, ê~re intentée ailleurs -que paTclevant le Juge au domicile. .
Martin n~' fenclé fén dédina:Coire' que fur une· eltcept'ioil
�416
Jou RNA L
fonciere, à la faveur de laquelle il a prétendu que le "Lieute"
nant devoit renvoyer la matiere.. C~tte prétention ne pouvoit manquer d'être rejettéeo, comme contraire à romes les
regles de l'ordre judiciaire; & le Lieutenant .de Marfeille,
qu.i étoie compétent ponr le fonds de la demande principale"
étoit néce1fairement Juge de l'exception; cette exception
d'ailleurs ne changeoit point la natur~ de la queflion fonci.ere; elle contenoit au contraire un aveu qui confirmoit la
vériré de la demande de Ferini·, & qui concouroit par conféquent à établir toujours. mieux la. compétence du Lieutenan~
.
Les pieces que Martin a communïquées ne tendent qu'à,
juflifier fa déferife fQriciere ,~elle n.e fauroit avo'ir aucune influen.ce fur l'inddent; il a voulu fans ceffe le confondre avec.
le fonds de la contefration, mais la compétence du Tribunal·
doit être décidée auparavant, & dlune manier~ qui ne préjuge pas.. Il faut s'en renir' à la demande. principale, & déterminer par la nature de la demande q).lel eft le Jug.e qui·
a droit <je connoirre de la mariere..
Les Juges-Confllls n'one point préjugé par leur Sentence.
que la~caufe dût être porrée au Lieutenant de l'Amirauré~
'Ce n'éroit point' à· eux à pronon.cer eon:e ce~te Jurifdiétion &
la Jurifdiétion. univerfelle i.. auffi n'ont-ils fa·it que décI-arer
leur propre· incompérence ;. leur jugemèJl' n'expr-ime & n~
peut exprimer rien de plus. Ferlni a donc pu y acquiefcer ,,_
.clns craindre qu'oo le lui qpposât COJIlme une ~econnoi1fance.
de la Ju·rifdiétion de l'Amirauté.
L'àdmiffion. cl,es fin~ fubfidiaires ne porte 'P'lS fur des.
moyens plus folides.AlJ.e Vappel de la Se.nreJ;lce,qui a dé~,
bouté du détlin'ltoire,; les fai·rs que Martin demande fllbfi--'
qiairemenr 11 prouver; fonr les mêmes qu'il-a fait cerrifier au
procès, & les mêmes raifons qui ne permerroient pas au ~ieu
tenant de· iuger de.s fins déclina·roires par une exc~prion fon-,
<;,iere, ne permemoient pas, d'admettre aujourc\.'hui Marrin.
à. en faire la preuve; ceçte preuve' feroit abfolurnenr fuper--flue, puifque ce n'eft point par l'exception que la qpt:lHion
"qe compétence doit êrre iugée. Il s'agit d'une demande en
. ~eHüuÜQU
�417
reflitution de dépôt; le Lieutenant en eH feul Juge compétent. Le moyen tiré.de l'indivifibi!ité de l'aveu & les autres
défenfes foncieres doivent pareillement être traitées pardevant lui, comme n'étant que des exceptions oppofées à une
aélion dont il ell: inconteHablement Juge.
Me. Bermond, SubHitut, obferva que les Officiers de l'Amirauté, créés pour l'avantage & pour l'intérêt du commerce
maritime, doivent juger privativement à toUS autres dans les
matieres qui leur font dévolues. Un commerce auffi vaHe ,
auffi imporrant que celui qui fe fait fur la mer, avait befoin- d'un Tribunal particulier, uniquement occupé à terminer les conteHations auxquelles il pourrait donner lieu.
La nature de ces conteHations exigeait auffi une procédure
parriculiere, une marche plus rapide que celle qui eH ob[ervée pour les matieres ordinûres.
Ces confidérations déterminerent le Sotiverain à créer le
Tribunal de l'A mirauté, & à lui attribuer toutes les caufes
qui tenaient effeélivement au commerce de la mer. L'art. l
du tit. 2. de l'Ordonnance de -la Marine donne aux Juges de
l'Amirauté la connoijJànce privativement d: tous autres, & entre toutes perfonnes, tant en demand.ant qu'en défendant, de tout
ce qui concerne la coliflruc7ion, les agrêts & apparaux, avituaillement & équipement, vente & adjudication des Vaifleaux. Ce
font ces derniers mots, vente 1$' adjudication des Vaijfèaux,
qui ont donné lieu à Marrin d'élever la conceHation, & qui
lui font [outenir que la demande de Ferini ne peut être traitée
que pardevanr les Officiers de l'Amirauté.
Cependant l'affignation donnée à Marrin pardevant lé Lieu-,
tenant de Marfeille, ne préfente rien qui ne [oit de la compétence du Juge ordinaire; c'eH une !impie demande en re[litution de dépôt; il n'y el!: fait mention d'aucun objet,
d'aucune circon!l:ance qui fait relative au commerce maritime, & qui rende le Tribunal de l'Amirauté compétenr.
L'aélion en reHitution de dépôt eH une aélion ordinaire qui
ne foumet par fa namre à -aucune Jurifdiélion parriculiere.
Il el!: vrai que Martin a prapo[é une exception par laquelle
~l a prétendu établir l'incompétence du Juge namrel; mais
Ggg
DU
PALAIS
DE
PROVIlNCE.
�418
JOURNAL..
le Lieutenarlt d'e Marfeille bien inve!l:i par la demande de
Ferini, ne pouvoit renvoyer les parties à 1'Amirauté fans
préjuger le fonds de la contell:ation, & fans [e dépouiller
d'une matiere dont la connoiifance appartenoit à la Jurifdiction univerfelle.
Les pieces dont Martin s'e!l: étayé ne font point conCiues
de maniere à prouver évidemment & fans replique qu'il eût
acheté le Navire dont s'agit pour re compte de Ferini. Les
certificats & déclarations qu'il a rapportés, n'établiffent point
que Ferini ait acheté lui-même la Tartane & qu'il en fût
lui-meme le propriétaire, ni qu'il ait remis une fomme à
Martin pour en payer une partie. Sous ce premier point de
vue, la Semence du Lieutenant de Marfeille, qui déboute
des fins déclinataires, e!l: juŒe.
Ce n'ell: qu'à rairon du commerce qui fe fait fur la mer,
que le Tribunal de l'Amirauté devient compétent & acquiert
jurifdiaion. Il paroît par toutes les difpofitions de l'Ordonnance de la Marine, qu'il ne peut connoître que des queftions qui ont une relation, une raifon intime avec cette
erpece de commerce, & qui y tiennent effentiellement. Ainfi,
par exemple, l'exécution de taus les contrats maritimes, les
aaions intentées par ceux qui ont con!l:ruit ou fourni
les agrêts & autres chores néceffaires à l'armement & équipement d'un Vaiifeau, doivent fans difficulté être lIonées
pardevant les Officiers de l'Amirauté; ils ont effentiellement
contribué à la navigation, & par conféquent au commerce
que les propriétaires du Bâtiment s'étaient propofés. li en
e!l: de même de ceux qui prennent des intérêts dans les armemens, & généralement de taures les perfonnes. qui concourent à l'expédition des Navires & à la navigation; ils
acguierent par-là le privilege de porter leurs conte!l:ations
au Tribunal de l'Amirauté; & ce privilege, qui e!l: ainfi
fondé fur la nature particuliere de leurs créances, ne peut
être étendu à d'aurres perronnes.
La preuve que les Gfficiers de l'Amirauté ne font conftitués compétens que par le commerce maritime même &
par les rapports que peuvent avoir les contefl:ations avec ce
�D U
PAL AIS
D .!
P ROVE N C E.
.4-19
commerce, [e rrouve conlignée dans le Commentaire de
l'Ordonnance & dans la difiinél:ion que fait Mr. Valin filrle titre de la compétence de l'Amirauté, & -fur l'Arrêt de la
Cour rapporté par Bonnet [ur le même titre.
Dans le cas préfem, on ne peut pas dire qu'il s'agiife
d'une aél:ion formée en[uite & en exécution d'un contrat maritime. Il dl: que!l:ion .entre les parties de la réclamation
d'un dépôt. Telle e!l: la premiere demande & la principale
qui a donné lieu à leur conte!l:ation. L'exception de Martifl>
(fût-eUe pleinement jull:ifiée ) ne le place pas dans aucun
des cas exprimés par l'Ordonnance. Quelle e!l: l'origine de
la créance de Martin, & dans quelle hypothefe fe ttouve-t-il
placé? Il a acheté une Tartane pour Ferini, qui ne lui a
donné encore qu'uo à-compte, & qui e!l: re!l:é [on débiceup'
pour une portion du prix;. l'aél:ion qui lui compete en· paiemem de la portion du prix qui lui. re!l:e due, n'dt-elle pasune aél:ion ordinaire réfùltante d'un fait particulier qui n'a
aucune liaifon avec le commerce maritime, & dont la connoiifance doit par conféquem appartenir au Juge ordinai.re:
des parties?
La preu.ve demandée fublidiairemenc par Martin ne pourroit être d'auc'une milité pOUf. le jugemem du déclinaroire;;
il ne pourrait employer cerre preuve qu'à [outenir fa défenfe fur le fonds du procès;. mais s'agi1lànI feulemenr de,
déterminer quel et!: le Juge qui doit en connaître, il' e!l:,
évidem qu'elle ferait inutile & frull:raroire, la compétence·
ne pouvam être fixée que par la nature de l'aél:ion principale,
fans qu'on puilfe avoir égard li des exceptions qui ne !On...
que des défenfes fonaieres.
Me. Bermond éonc1ut à ce que fans s'arrêter aux fins fubfidiaires de Martin, la Sentence fût confirmée.
Par Arrêt du 12 Janvier 178 l , prononcé par Mr•. le Pré:!idem de Saint-Vincent, les conc1uiions furent fuivies, &
Martin condamné aux dépens. Plaidant Mes. Verdet nev.eu. &:
GaHier,
.
�JOURNAL
ARRÊT
LXIX.
La condition impofù d l'héritier d'habiter un certain lieu, ne
produit aUClln effet ,Ji elle ne tourne al'avantage de quelqu'un.
E. Barri, ancien Procureurau Siege de la ville de Toulon,
fait fan tefiament le 29 Septembre 1772; illegue à Rofe
Gavarri fa fille de [ervice une terrê qu'il poffédoit au terroir
de Lagarde, plus les fruits & ufufruits de fan héritag~, la
chargeant de le rendre à Balthafard Barri [on neveu, aéèuellement aux Indes, lor{qu'il fera venu hahiter Toulon, ou
M
a
a
quelqu'un de [es enfans mâles, voulant 'lue qui que ce foit ne
puijJè en jouir par procuration ou autrement, que fan héritier
en perfonne ou [es enfans mâles, difPenfont Ro[e Gavarri de
faire inventaire, de rendre compte, & généralement de toute
formalité de juJlice; il ordonne que touS [es meubles & effets
mobiliers foient vendus par Ro[e Gavarri pour payer les
legs & autres frais; il 'lui legue le furplus en pleine propriété;
il in!l:itue pour fan héritier unÏl'erfe! Balthafard Barri [on
neveu, & en cas de prédécès, les liens, les mâles préférés
aux filles, en tant qu'il viendra habiter Toulon ou [es' enfans mâles; & audit cas, étant en poffeffion de l'hoirie, il
fera obligé de payer à Rofe Gavarri une penlion de 300
liv. [a vie durant; & dans le cas que [on héritier ne vînt
point habiter Toulbn ou quelqu'un de [es enfims mâles dans
le temps & terme de douze années, à cQmpter du jour de
fan décès, il inftitue les pauvres de l'Hôpital la Charité de
Toulon [es héritiers, prohibant à [es héritiers de donner
aucun trouble ou empêchement à 'Ro[e Gavarri, ni de faire
faire aucun inventaire, fous quelque prétexte que ce fait, à
peine contre celui qui conrre\'iendra, de la privation de fan
héritage, qui fera acquis à Me. Julien ou les liens, qu'il inftitlle audit cas pour [es héritiers.
Le teftateur mourut dans cette volonté le 27 Novembre
�bu l'>ALAÎS tE PROVENCE:
4tt'
~i779. RoCe Gavarri prit po1feffion de la fucceffion du mobilier comme légatrice parriculiere, & du furplus de la fucceffion comme ufufruitiere. Trois mois après, & le 4 Mars
178o, Balrhafard Barri, à la pourfuite & diligence d'Etienne
Barri fon fondé de procuration, préfenra requête pour être
maintenu en la po1feffion & joui1fance de h fucceffion, avec
défenfe de l'y troubler; le 9 du même mois, il demanda
la défemparation des fonds, papiers, aél:es & titres de l'hérédité. Décret qui accorde les fins, fauf l'oppoution. Rofe
Gavarri forme oppofition; l'héritier en demande le déboutement & le rejet de la c1aufe qui oblige l'héritier à habiter
Toulog.
Le 'i Mai, Sentence qui la déboute de fon oppoIition, & fait
droit aux fins du fieur Barri. Rofe Gavarri appelle pardevant
la -Cour; elle tient un aél:e extrajudiciaire à deux Reél:eurs de
la Charité, pour venir fe joindre à elle dans l'inHance: l'Hôpital ne répond rien & ne fait aucune démarche.
On difoit pour Rofe .Gavarri, que la condition d'nabiter
dans un cerrain lieu eH valable, quand elle a pour motif
l'utilité publique ou le grand avantolge de la perfonne à qui
cette condition
impofée. C'eH le fentiment de Furgole
en fon traité des teJlamens, rom. 2, pag. 1°7 & fuiv. Là
condition d'habiter dans un certain lieu
légitime, quand
elle n'eH pas pour la vie de l'héritier du légataire, quand
elle eH limitée à un temps donné, quand elle n'eH pas entiérement deHruél:ive de la liberté. C'eHI'opinion de Ricard
dans fon traité des difPcifitions conditionnelles, nO. 284. Alors
la liberté de l'homme n'ea point anéantie; elle re~oit feulement pour un temps une gêne qui n'ea pas incompatible
avec les principes. ün fent qu'il n'y a point de condition
qui ne captive en quelque fa~on la volonté & la liberté,
puifque la pluparr des conditions roulent fur des chofes que
Poô ne feroit pas volontairement, fi elles n'étoient ordonnées; mais il fuffit, pour qu'une condition ne foit pas illégale, qu'elle ne détruife pas la liberté dans le fens abfolu &
indéfini marqué par les Loix.
Dans le te/lament, le domicile de l'héritier à Toulon fe
ea
ea
•
�4221
JOU' R N Ji. l;
réfour en d'eu.'.: difp04tions di:fl:inél:es. S'agit-il' dé l'héritier'~
Cer. u(ùfr.uit eH légue à Rofe Gavarri. pl!remenr '§c. fimplement, jufqu'à- ce que l'héritier vienne ha'biter Toulon ,.
ou quelqu'un de [es enfans' mâles, & cet ufufruit doit fe..
proroger 'jufqu'à douze années, fi l'héritier ou. quelqu'un,
de fes enfans mâles ne paroît pas. S'agit-i1 de l'héritage
en lui-même? L'héritier en ell: déchu, fi, l'hér-iciel' ou quel-.
qu'un de fes enfans mâles ne vient habiter· Toulon, dans
le rerme de douze années, & dans ce cas les, pauvres de
la Charité font in!l:irués pour jo.uir rout de· fuire des fonds
& fruits.. Voilà deux difpofitions effenridlement différences,
qui regardent des perfofll1es ditl:inél:es', qui ont chacune leur'
hYflothefè particuliere. L'une de c.es difpofitions e!l:. indé-.
pendapte de l'autre, puifqlle l'une peut être exécutée fans
llalltre, & 'lu chacune d'dies peut exiil:er féparémenr_
L'uGe"en: licite, l'aurre ne l'eil:· pas;, car le reHac.eur ,.
d'après les Loix., n'a pu vouloir que fon. héritier fût obligé·
. de venir à perpétuité & pour la vie habiter Toulon; mais'
il a pu vouloir, [ans bl.effer nos maximes, que Rofe Ga-.
varri eM pendant douze· années l'ufufrui.c de [es biens, fi'
}?héririer ne venoit poinr avant ce t-erme habiter Toulon.
QuuÏ1d dans une condirion, on peur exécuter une panie ,.
fans pouvoir exécuter l?aurre, il. faur accomplir ce qui eL!:.
[aifable , & rejecter ce qui ne l'eil: pas•. C'eil: ce qu'obfer-.
vent BJl:thole fur le §. l de la Loi 6 de cond. f" demon.flr•.
Furgole dan.s (on traité des tefiamens, tom. 2, pag. 74"
& Decormis ,. rom. l, col. 12°3..
lj:n point de droit, 'il ne faut pas conrondre les difpofitions;
pénales avec les difpofit.ions faites en. faveur. , L'on appelle
difpofitiol1s. pénales, ceUes ttites pœnœ caufa·, ê'e!l:-à-dire ,.
celles faites pour punir l'héritier. d'âvoir concrevenu. a la
loi que lui impofoir le te!l:ateur. Il en eil: un ritre exprès
dans le code de his q.uœ. pœnœ. nomine. in teflamentis fcrihuntur.. L'on. appelle difpofitions en faveur., celles dans.
lefquelles le légasaire ou la ~r'fonne gra.tifiée· en enrr.ée-·
direél:emenc & par lle-même d'lns les vues de li\:lêralité &;.
de. hienfaifançe aallQnç~e.s
'Eat le ...tenareur"
.
.
.....
~
~
--.~
..,
�'nu
PALAlS
nE
PROVENC~;
4'2-3"
Une 'difpofition pénale ne doit pas naturellement profiter
âcelui qui ell défigné pour en recueillir l'effet, quand la
peine ell fondée fur un fait impoffible ou contraire aux
Loix. Alors la chofe doit demeurer à celui qui étoit
chargé du fait impoffihle ou contraire aux Loix, puifqu'il ell difpenfé 'par les Loix même d'accomplir ce fait.
Quand il s'agit au contra,ire d'une difpofition en faveur,
cette difpofition eit valable par fa nature. Elle fuit le
fort du titre même qui la renferme; exiJlit per ft. Si elle
dl: unie 3. que-lque c1aufe infolite ou illégale, cette c1aufe
ell cenrée non écrite, & le fonds de la difpofition fub'fille. On J'exécute daGs tout ce qui ne hleffe pas les
Loix. Cette dillinél'ion eH amplement développée par Fur~
gole, rom. 4 dans les additions & correél:ions, pag. 467
& fuiv.
On répondoit pour le fleur Barri, que la condition d'habiter à Toulon n'ell: écrite ni pour l'imérêt du tellateur, ni
pour celui d'aucun légataire. C'eH précifément l~ cas de cette
-condition abfolumem réprouvée, que le droit rejette comme
attentatoire à la liberté des vivans; ainfi toutes les difpofi....
tions attachées à cette condition doivent être confid€rées
-comme pures & fimples par la chûte & l'anéantiffement de la
condition. Toutes les libéralités fubordonnées au cas où
l'héri'tier ne viendra, pas habiter, font également non écrites,
parce que le tellateur qui n'a pas pu impofer direél:etnent
la condition de venir habiter à Toulon ,_ n'a pas pu le faire
-non plus indireél:ement.
La condition d'e réfider in certo loco, quand elle ell in'dé'terminée, & que non reJPicit tltilitatem certo!' perfona!., ell
nulle, fuivant la Loi Titio 7I , §. 2, ,.If. de cond. & demonJlr.
-( Cancerius, var. refol. part. 3, cap. 7, n. 2,; Decormis,
tom. l , col. 12,02, ch. 4) ; Fromental va. condition, pag.
, 12,7 ; Ricard, des difPofitions conditionnelles, parr. '2 , ch. )'
feél:. 2" n. 282,. ) Si la volonté des défunts eil: refpeél:-able"
la ,liberté des vivans l'ell encore davantage; delà toute
'condition d'habiter in certo loco ell tenue pour impoffible
& non écrite.
Mr.l'Avocat-Général de Calilfanne letta d'abord un coup,
�~4
JOUR N
4
L
d'œil général fur l'enfemble des intentions du tefl:ateur;.
& s'arrêta enfuite à chaque point de la difpofition particuliere qui' filifoit la matiere de la contefl:ation..I1 examina
ainli s'il y avait condition dans l'ufufruit, li cette condition étoit en faveur de l'ufufruitier, fi elle étoit licite, fi
étant nulle, l'ufufruit pouvait fubfifl:er.
Il faut d'abord (dit - il) voir le tefl:ariJent en générar.
Quel dt le fceau que le tefl:ateur met à toutes fes intentians? Quel efl: l'objet qui l'affeae le plus vivement? La
néceffité qu'il impofe à fan héritier de venir habiter Toulon.
Cette condition paraît être l'objet de toutes fes intentions;
elle porte fur le legs d'ufufruit, fur l'infl:itution d'héritier,
fur la déchéance même de l'héritage par le défaut d'option
dans l'efpace de douze ans. Mais comment porte - t - elle
fur routes ces différentes hYP9thefes? Vis-à-vis de la déchéance, elle eH pénale (a-t-on dit) : donc elle eH illi:.
cite & anéantit la difpolition qui prive le fieur Barri de
l'héritage. Vis-à-vis de l'in!1:ituticin d'héritier, elle efl: nulle
& cenfée non écrite; elle biffe donc cette in!1:itution. pure
& !impIe & fans condition aucune. Mais vis-à-vis du legs
d'ufufruit, elle ne porte pas fur le fOJlds dll legs; elle y
e!1: étrangere; elle le laiffe donc fubfill:er, & ne fixe que
l'événement & l'époque de cet ufufruit.
'E!1:-il donc poffible (obferva Mr. l'Avocat-Général) que
cette condition ,. qui n'e!1: qu'une dans fa caufe' & dans f()Il
objet, pùiffe avoir des e1tèts auffi différents? Etant d'e
la même nature dans tous les cas, peut-elle être pénale
pour celui-ci, nulle pour celui -là, inutile enfin pour uri
troifieme , tandis que toutes ces hypothefes fe trouvent dans
le même aéte? Si elle duit être cenfée non écrite, ne
femble-t-il pas que tout ce qui pourrait être acceffoire à
cette condition & en dépendre, ne peue fubfi!1:er? Ecrite:
pour toutes les difpofitiOTls., rel étoit .,fétat de la volonté du
tefl:ateur. Supprimée pour toutes" tef doit être celui de la
Loi; il examina en[emble le.s difpofitions du leg,s d'ùfufruit.
Il crut ne devoir pas s'arrêter au mot plus qui fépare,
dans le te!1:ament le legs en propriété, du legs d'ufufruir"
& que l'on avait cher,hé à faire valo.i: comm,e ~lOe preuve
qll~
�DU
PAL AIS, D E
PRO VEN C E.
42.')
'que c'étoit un legs affirmatif de la même nature que celuî
qui précédoit, qui ~toit une libéralité en faveur de Rofe
Gavarri. Rien de Ii indifférent que ces deux legs (dit-il);
l'un ell: un don pur &. Iimple que fait le tef!:ateur, &. qui
ne dépend que de la ,libéralité; l'autre ef!: une jouiifance
précaire, momentanée, dépendante d'une condition impofée à l'héritier, &. qui ne doit avoir lieu que jufqu'à ce
qu'il l'exécute, qui conféquemmenr doit être plus l'effet de
la volonté de l'héritier, que de la libéralité du tef!:ateur.
Le mot plus n'indique donc qu'une nouvelle difpofition du
tefl:amenr.
Il ne s'arrêta pas non plus à ce que le legs d'ufufruit précédait l'inf!:itution, &. conféquemment n'étoit pas lié à une
difpoIitian conditionnelle comme l'inf!:itutioll; il établit que
quoique placée la premiere, cerre difpofition n'étoit réellement qu'une conféquence de l'inH:itution dans les vues &.
l'intention du tefl:ateur ; l'inf!:itution même y étoit rappellée,
l'héritier ci-après nommé Cy ef!:-i1 dit); on y voyoit les mêmes
difpolitions que dans l'inHitution. Or toutes les difpolirions
d'un tef!:amenr ne font qu'un corps, &. li celle-ci fe trouve
la premiere, c'eH que l'ufage a confacré que l'inf!:itution
d'héritier, comme faifant la bafe du tef!:ament, devait être
la derniere des difpolitions.
L'ufufruit ef!: donné jufqu'à ce que l'héritier ou quelqu'un
'de fes enfans vienne habiter Toulon. Or il ell: de regle
en droit que le terme à un jour incenain eH conditionnel:
di(s incertus in tefiamento conditionem facit, dit la Loi 7 S,
ff.
de candit. & demonJlr.
, Il Y a condition toutes les fois que le legs peut exifl:er
ou ne pas exiHer, felon que le terme défigné arrivera ou
n'arrivera point; ainli ces termes, cùm pubes erit, 'ùm in..
familia nu?fèrit, cùm MagiJlratum inieFit, défignenr condition dans les Loix Romaines.
Ici l'ufufruit dépen-d de l'habitation à Toulon, qui e!l:
elle - même vis - à - vis de l'ufufruit, époque, conditioQ &.
peine : peine, puifque l'héritier eH privé des fruits jufqu'à
ce qu'il foit venu habiter à Toulon 1 époque, puifque l'ufu"';
.
H hh
�4~
JOURNA~
fruit n'a lieu que jurqu'au moment de l'habitation; côndi.'
tian, puilque fi on répare l'ufufruit de l'habitation, & qu'elle
fait déclarée inutile ou impoffible, il n'a plus abrolument
auc6ne exiitence. La condition du rerour de l'Inde & de
la néceffité d'habiter Toulon porte tout à la fois re &
rempore rur la durée & rur l'exiitence du legs de Rore
• Gavarri.
Sur ra durée, parce que l'urufmit celfe, dès que le fieur
Barri paraît à Toulon. Sur fan exiitence, parce que l'ufufruit même ne commence point', fi le fieur Barri re trouve
à Toulon lors du décès de fan oncle. Or certainement une
c1aufe quelconque, dans quels termes qu'elle foit conçue,
qui porte fur la durée & fur l'exilfence même d'un legs,
qui le fait vivre ou le détruit, eH une condition des plus
formelles.
Les Auteurs font 'encore une diltinél:ion adoptée par l'u{age filr le terme à jour incertain; ils le regardent comme
une condition, quand il e'it uni en la fubitance du legs,
mars non quand il eit mis feulement au paiement, ou à
l'exécution, parce qu'au. premier cas étant fubfiaocicl au
legs, il ell: de fan elfence; au fetond ,cas, ce n'èft qu'un
fimple délai féparé de la fubitance ou effence du 'legs.
Sous ce point de vue l'ufufruit de la Gavarri ell: cer-'
cainement conditionnel, pu'ifque le délai n'ell: pas féparé
de l'exifience du legs; puifque le legs n'exifie que par ce
délai, & qu'autant que ce délai continue; puifque te n'eit
point une époque de fait fixée & limitée à tant d'années,
mais une époque de droit qui ne hit qu'un feul & même
corps avec la condition, qui eit la condition elle-même.
Une condition fondée fur un jour certain peut être favorable à un légataire, lorfque ce délai porte fur la durée
d'un urufruit ; mais Ull délai à jour incertain, lorfqu'il porte
fur la fubfiance du legs, ne peut être ni favorable ni contraire, puifqu'il peut arriver à chaque in1l:ant, comhfe ne
pas arriver; puifque, comme dans cette occation, lé legs
d'Ilfufruit dépend encore plus de la volonté de l'héritier que.
de la libéralité du tefiateur.
�DU
PALAIS
DI!
411
PROVIlNCIl.
I;e cerme de dQuze ans. auraic été favorable à RoCe Gavarri, fi la ceŒacion de l'ufufruic n'avoit été fubord.onnée
qu'à cette époque; mais ce n'ell pas ce qu'a faic le cella.
teur; il l'a faic dépendre de la condition du domicile. Comment donc donqer le nom de faveur à une condicion d'après
laquelle l'ufufruit même pouvoit n'avoir jamais lieu, d'après
laquelle il pouvoit ceŒer à chaque inllam?
Pour favoir fi la condicion impofée à l'héricier eU une
peine, il faut examiner fi le tellaceur s'ell fervi de ces
termes: je prive mon héritier de l'ufufruit, s'il ne vient point
Il Toulon; ou de ceux-ci: Gavarri aura l'ufufruit jue'lu'a ce
'lue mon héritier vienne a Toulon. Cependant dans l'un & l'autre cas, l'héritier ell privé de l'ufufruit ; dans l'un & l'aucre
cas il en ell privé par la même caufe, c'elt-à-dire , par fori
abfence. Aïnli la peine réelle ell la même, quant à fon
intérêr; il n'y a de différence qu'en ce que dans le premier
cas, le teflateur fail: de la nécefIité de venir à Toulon une
loi plus expreŒe; il faut donc voir par les cermes & l'efprit du teHament) quelle importance le teflaceur meccoit à
ce recour.
S'il lui efl indifférent que fa condition arrive ou n'arrive
'point, fi cet évéhement ne lui cient point à cœur, alors
Qn pourra craire que cetre condition n'eH point une peine.
mais cet héritier qui eH privé de l'ufufruic, s'il ne vient pas:
à Toulon, ell même privé de la propriété des biens s'il n'y
vient pas dans douze ans. La peine eft moindre avant cecce
époque, mais elle n'en eH pas moins réelle; l'intention du
teHateur eH donc bien marquée; il artàche donc une grande
importance à ce rerour; ce n'eH donc point un événement
indifférent pour lui, & qu'il n'ait prévu que pour l'avantage
du légataire•.
La peine ell plus force 11 l'époque de douze ans, parce
que le refus de venir à Toulon ell plus conHant & plus.
long ; la peine eH: moin.dre dans les premieres années"
parce que l'ahfence de l'héritier n'annonce point encore
le refus formel de fuivre la volomé du teHateur; mais
fiillS toUS les cas 1 l'objet de celui-ci étoit de rendre ce
H hh
2.
•
�,p.B
Jou
RNA
r:
rerour nécefraire par les privations méme qu'il pronon~
éoit contre [on héritier.
• Indépendamment de l'évidence des préfomptions, cette
peine eU littéralement prononcée par ces mots; ne pourra
jouir ,. ne prendra poffijJion par procuration. C'eH par cette
peine direél:ement infligée contre l'héritier qu'il faur expliquer la maniere donc le legs dt conçu. Par cela feul que
Rofe Gavarri ne jouit de l'ufufrujt qu'aurant que le fieur
Barri ne vient point à Toulon, celui-ci dans l'efprit du teframenr ne peut donc la dépouiller que par ce rerour. Or
fi ce rerour ea une peine, la condition du legs
donc
une peine: donc l'üfufruit dont il s'agit n'a point été accordé in favorem legatarii, ma is in pœnam hœredis. MI'.
l'Avocat - Général examü1a enfuite fi la condition éroit
licite.
. La condition du féjour a été formellement prévue dans
les Loix Romaines, & elle ell: déclarée nulle fans aucune
diftinél:ion. Titio centllm reliaa jùiu, ita ut-a monumento
non recedat, vel uti in il/a civitate domicilium haheat; poufl dici non ejJè loeum cautioni, per quam jus Mertatis inFingitur. L. 7 l ,§. 2. ,ff. de condition. & demonJlr. Duperiel', rom. 2., décif. liv. 4, n. 100, & MI'. de Montvallon,
regardent de même une pareille condition comme nulle, fans
di!l:inguet fi la provifion qui en en la fuite en perpétuelle ou
pafragere.
Ce n'dl: pas la durée de la peine qui rend la condition
licite ou illicite; fi elle ell: nulle, elle l'elt par elle même,
.& elle ea nulle, fi elle hlefre la liberté. Si le teftateur n'a
pas dû faire une loi à [on héritier de venir en France, la
condition
nulle par cela feul· qu'il l'a fil ire , [oit que
la privation qu'il a mife à l'ipexécution de cetre condition
[oit conlidérable ou légere, parce qu'une condition illicite
ne peut avoir aucun effet. La raifon feule ne dit-elle pas que
la liberté n'ea pas moins gênée dans un cas que dans l'au- _
rre? Que le lieur Barri vienne à Toulon pour empêcher que
la fucceffion de fon oncle ne pafre à l'Hôpital, ou pour
jouir de l'ufufruit, il ne faut pas moins qu'il viennede l'Inde;
ea
ea
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PAL AIS
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,p 9
qu'il y abandonne fa fortune; qu'il vienne fixer fon domIcile à Toulon & Y' habiter, & pour cela qü'il s'expofe aux
dangers des mers & à ceux de la guerre. C'ell: par là qu'il
~aut juger fi la condition du retour en France ell: licite, &
non par la peine qui y ell: arrachée. Car, s'il -ell: décidé que
cette c.ondition gêne la liberté; s'il ell: convenu qu'elle en:
contraire à l'intérêt du fieur Barti, qu'elle peut lui être
funell:e, qu'elle n'a eu pour fondement aucun motif rai(onnable, dès-lors elle ell: anéantie même avant de connaître les fuites d'une pareille condition dans l'efprit dutell:ateur. Qu'importe alors que la peine foit perpétuelle,
ou qu'elle ne le foit pas? La condition ell: donc nulle par
rapport à l'ufufruit, tout comme par rapport à l'inll:itution.
Delà nalt cerre conféquence invincible, que Ii la cundi~
iion efi nulle, fi le fieur Barri n'ell: point obligé de venir
à Toulon, il faut juger de fes prétentions comme s'il y
étoit réellement;- car autrement ce n'ell:- rien lui accorder;
c'eU 'tomber dans une contradiél:ion révoltanté; c'ell: le
juger comme abfent d'un lieu où il ne doit point venir;
c'ell: fuppofer une abfence là où il ne peut plus y avoir
âbfence. Si la condition ell: cenfée non écrite, l'inHitution d'héritier ell: donc pure & fimple &
réalife; il n'y
a point d'obligation de venir à Toulon; il Y a p(ife de
poift,ffion fans cette néceffité de domicile; dès qu'il y a
addition d'héritage, il n'y li plus d'ufufruit : donc la condition étant nulle, l'ufufruit l'ell: auffi, indépendamment de
toute condition appofée dans le legs; la condition annullée
doit avoir pour les fruits lé même effet que pour le fonds
de l'héritage; l'héritier recueille la fucceffion fans habiter
à Toulon : donc il a l'ufufruit qui n'ell: réellement que la
peine de la non - habitation à Toulon, ou "au moins la
jouiffance précaire jufqu'à l'inll:ant de la fixation du domidie à Toulon.
Mr. l'Avocat - Général conclut à la confirmation de la
Sentence.
Par Arrêt du 26 Janvier 178 l, prononcé par Mr. le"
re
,
�'43 0
1. 0 V R ~"~ L,
Préftdel}t de Saint-Vin,cent à l'Audience du r:ôlE:<, Ie~ qm':
c1ulion5 futent fuivies, & Rofe Gavarri fllt condamné~, aUJ(l
dépens. Plaidant Mes. Gaffier & Portalis.
ARRÊT
LXX.
DifRrence du relax d'ajJignation ti au retax d'i'nJlanct.
El! matiere criminell~, on ne doit point appeller dans un~,
inJlance d'appel, pour voir déclarer l'Arrêt commun et·
exécutoire," les accufés qui n'ont point appellé.,
N Oélobre' I77Cj, requ~te de plainte en' Injures, préfentée de la part d'Etienne....... au. Lieurenant de Draguignan contre plufteurs particuliers du lieu de....... L'information, fut prife.. Quatorze furent décrétés. ils prête~
rent leurs réponfes, & le procès extraordiQaire fut ordanné~
Etienne....... tint un aéle aux acc~fés ,. & les interpella de:
déclarer s'ils, confentoienr que la Sentence de procès ex-·
traordiqaire· filt fans effet, ou s'ils voulaient qu'elle fûc'
mife à exécution. Jacques....... l'un des accufés ~ requit l'exé-,
curion de cette Semence, fous la protefration: de touS [es;
droits. Les autre,s querellés ayant appellé pardevant la Cour.
du décret de, fait infQrmé & de tout ce q,u4 avait fuivi "
Etienne....... fit afligner Jacques....... pour venir affi1l:er, en,
l'infiance d'appel, & vQir déclarer l'Arrêt qui interviendrait contre les autres,. commun &: exécutoire contre lui:
avec dépens, li mieux il n'aimoit conLèncir à la commune'
exécution de l'Arrêt, auquel cas & non autrement iL feroic
difpenfé de préfenter. Jacques....... répondit ne prendre auc).lne part à l'ajo'urnemel1t ,. &: il ime!pella de nouveau<
Etieane....... de pourfuivre. en ('J(écution de la S~ntence de·
procès extraordinaire. Pardevant la Cour il. préfenta en.
relax d,'affignation fur la d.emande en com,mune exécution~
L'appellant convenoit que le principe de l'indil,'ifthilite
'de l"ir,illruélion &: des jug,emeo~ fom;ier~ n'a iamais. ét~
E
�D Û P.U At S D B P R (; V UT CE:
4- ~ ri
~jrputé. C'eft une regle prefcrite par l'art. 7 du tit. 2.6 de
l'Ordonnance de 1670•.
Toutes les procédures, tous les coaccufés, en quelque
'état que foit le procès, doivent être fous la main du Tribunal qui doit achever l'infiruaion, ou qui va prononcer
fur le délir. C'eft alors que fe forme le corps des preuve5
de conviaion ou de' décharge; c'efi alors que chacun des
coaccufés dl: puni fuivant ce qu'il a fait dans le délir que
tous les accufés ont commis enfemble. Mais c'eH à cela
même que fe borne la regle d'indivilibiliré, parce que cela
feul eft de l'etrence des procès criminels; elle ne porce
point fur rour ce qui va au delà de l'infiruaion prefcrire
par la Loi pour la réunion des preuves '& pdur la validité
des jugemens fonciers.
Dans le Diél:ionnaire des Arrêts au mot proddure on
trouve un Arrêr du Parlement de Paris du 18 Février 1699,
Gui fait défenfes aux Procureurs de la Cour de former incidemment aux appellarions inrerjetrées des procédures extraordinaires, aucune demande, ni fouffrir qu'il en· fOIt
formé aucune pour voir déclarer les Arrêts communs
contre des accufés qui ne fonr pornt appel)ans, quoique
compris dans les mêmes procédures faires pardevanr les
premiers Juges, defquelles d'autre's accufés ont inrerjercé
appet , à peine de nulliré des procédures '& des dommagesintérêts ,des parties. Aurre Arrêt du même Pal4ement du
'-7 Août 1708, rapporré par loutre, 'tom. 2., pag. 424>
par Denifard au mot appel, n. 48 , & dans le Code criminel, pag. lIS.,.
•
Chacun des accufés doit conferver la liberté de fe défendre comme il le rrouve bon; les moyens employés par
l'un d'eux ne font que des réclamarion~ purement perfonnelles, & la démarche de celui qui croit qu'il n'y avoit
pas même lieu d'informe'r, efi abfolul'nent érrangere à cet
autre qui attend en illence un jugement d'abfolution ou de
décharge.
La Cour l'a jugé de même par fon Arrêt du 26 Août
~ 776, rendu en fayeut d'Hubert Suulés, "Ollivier, Ricord
�432
.J 0 U RN", L
& aùtres de la ville de GraŒe, contre Antoine & LotUs
Fabre pere & fils de la même ville.
On répondait pour Pintimé, qu'il ne faut pas confondre
le relax d'affignation ave.c le relax d'inil:ance. Le premier
n.e fe détermine que par des moyens relatifs à l'affignation,
fans examiner l'aérion 'qui en eH l'objet; le {econd ne. {e
détermine que par les moyens du fonds: aufli le premier
eil: préalable & préparatoire, l'autre eit définitif.
Pour le relax d'infl:ance on pré{ente purement & limpie ment ; le défendeur eil: toujours défendeur; il eil: relaxé
d'infiance, il eil: mis hors de Cour & de procès; tout dl:
terminé par-là.
POlIr le relax d'affignation, il faut avoir pré{enté dans
cet objet; l'affigné devient demandeur. S'il eil: relaxé d'affignation, ·tout n'eil: pas. din tout ne l'eil: pas, s'il n'a~été
relaxé que. pour des nullités de l'affignati<m, ou pour défaut de qualité dans le demandeur'- Cef!: le {entiment du
Commentateur du .B.églement de. la Cour, tom.
pag.
199·
Tous les Praticiens conviennent que les moyens qUI
donnent lieu au relax de l'affignation, fane indépendans
du mérite du fonds;. ils s'appellenr fins de non - l'aloir.
(Rodier fur l'art. 5 du tit. S de l'Ordonnance de 1667,
qu.. l, pag. 7'2; JouŒe fur l'arc. 2. du même titre de l'Ordonnance, n. 4, pag. S6; le Praticien Français, Ilv. 2,.
tit. des exceptions, pag. 279 ;. Guenois fUr Imbert, praeique
judiciaire, liv. l , ch.. 31 "pag. 2°4")
En affignaoc en affiHance de cau{e. & cemmune exécution, Et·ienne....... donne 11. Jacques....... la faculté d'y cO.n{enrir {ans plaider; il ne lui a point impofé l'obligation,
. de la folidaire. L'objet des Loix a toujours été de limplifier, d'abréger, d'éviter la multiplicité des procès, d'étouffer la chicane. L'appel d'un des iocéreŒés doie nuire
c'X profiter aux autres; il faut incètve.nir, li l'on craint d'être.
léfé : continentia cau[(e dividenda non efl. Les matieres cril1Jùlelles font indil'ifiMes, dic J-ouŒe, traité de [a Jtiflicti
crimin,lle de. la France i tom. 2" liv. 1 l '- tit. 37' n. 5S-"
l,
.
rag·
7'P"
�nu PALAIS DE PROVENCE:
433
pag. 742.. Il ne faut jamais divifer l'idhuâion & le jugement, propter unam caufam defenfionis, Leg. fi quis feparatim ,ff. de appellat. & parce qu'il peut arriver qu'on ordonne fur l'appel que les accufés ou quelques - uns d'en,.
tr'eux feront confrontés les Un! aux autres; c'ell: ce que
dit encore Serpillon, tom. 2. , pag. 1I7'Î fur l'art. 7 du
titre 26 de J'Ordonnance de 1670.
_
La commune exécution demandée contre Jacques
dl:
auffi réguliere que jufie; elle efi d'ailleurs de néceffité. Les
appellans demandent la caffation de la Sentence de procès
extraordinaire; Jacques....... au contraire en demande l'exécutIOn.
Me. Bermond, Subilitut, portant la parole, examina
deux quefiions : 1°. la demande en commune exécution
introduite contr~ un accufé llon appellant doit - elle être
entretenue, ou faut-il âu contr~ire faire droit au relax proporé. par cet accufé? 2°. Cet accufé s'ell:-il pourvu dans
une forme légale, & érait-il fondé à prendre la voie du
relax d'affignation?
La quefiion de la commune exécution deviendroit indifférente p.our le moment (obferva-t-il) fi l'on pouvoit dire
que Jacques....... a procédé dans une forme illégale qui doit
le faire débouter en l'état de fes fins en renvoi; il ell:
donc indifpenfable d'examiner préalablement fi la voie du
relax d'affignation lui compérait, ou s'il auroit dû venir
affill:er en l'inll:ance, fauf à lui d'y propofer enfuite tels
moyens que fa défenfe auroit exigé.
11 établit ce que c'ell: que relax d'inll:ance & relax d'af~
fignation ; il obferva que ces mots foDt inconnus dans le
l'effort du Parlement de Paris, ainfi que dans plufieurs
autres Parle mens du Royaume; de fone qu'on n'en trouve
la définition dans aucun titre de l'Ordonnance, ni dans
aucun Commentaire. La regle ell: cependanr la même dans
c.ous les Tribunaux; par-tout on ell: dans l'ufage de renvoyer les parties qui ont été ajournées mal- à - propos,
fans les faire affifier dans l'·infiance du fonds.
Les fins de non procéder, les exceptions péremptoirçs
1i i
�~4
JOURNAi
concernant le fonds, & celles concernant la formë; font
dans les autres Parlemens ce que npus ap~llpns relax d'ar
.fzgnation & relax d'inJlançe. La différ~lJce n'efi que daps les
lermes; l'effet & le réfultat de toutes les manieres de fe
pourvoir &-de procéder, font exaél:ement le.s mêmes.
L'Ordol)nance nous apprend que ce.s forte.s .c!'el'ceptions,
quand elles ne concernelJt pas le iond~, doiY~nt oêtr.e jugées
fans entrer dans le mérite de J a dem.ande , !$c. (j.lle I.a partie
<lui n'a pas dû être affignée, obtient fon renyoi fans être
obligée d'être en qualité dans l'iofiance.
Les appellations de déni rJe re/lvpi & d'incompétence (porte
l'art. 4 du titre des fins de flon procéder )feront inceJfàmment vuidées par ravis de nos Avocats G' Procweurs-Géliéra!Jx., &
les foUes intimations & défertions d'appel pqr l'.avis d'un.
ancien Avocat. Rodier fur c.et .article dit, que lor.hu'on (l
intimé une partie qlli n'a aucun int.érêt en .la caufe., pu qui n'étoit ,partie dans l'appointement dOlJt eJl app.el., cet intimé
pourjùit en l' 4udience, ~n la forme ordinaire, UIJ. Arrêt pour
Je faire décharger de l'ajfignation. L'Auteur ,du Diél:i.onna.ire
de Pratique cite deux exemples de la {oUe intirrta.tion; favoir,
·quand on prend un Juge à partie & qu~il J;1'y avait pas lieu
de l'intimer, & quand on do.nne une aŒgnation à celui
qui ne doit ,pas .être partie dans Ull lprocès.
Ainfi ce n'eH pas feulement quand il y a .quelque nullité
dans l'exploit, ·que l'intimation eH rép\l.té~ ma.uvaife; il en
eQ de mêm~ quand on a donné ajollrnemellt à celui qui
ne doit point être partie. Le relax d'afiignation connu &
étâbli parmi nOllS en faveur d'une partie qui a été mal.affignée, 'OU qui n'avoit pas pu l'êrre, équivaut à la folle intimation dont parle l'Ordonnance, puifqu'il produit un effet
femblab!e pour eintimé, & qu'il lui Eo.urnit le moyen de
fe faire .décharger de l'affignation, fans entrer dans le
mérite de la demande.
Le relax d'infiance, au contraice, .dl: comparé parmi nous'
au Jugemellt qui met la partie hors de Cour., & il n'eH
prononcé par le Juge que fur la connoi1fance du fonds. Il
a l.ieu quand la partie affignée repoulfe la demande par
�D'U
PALAIS' DB
PROVllNCE.
43):'
'd'es moyens fonciers & par une jufiificatioÎ1 !ùr le fonds.
Ainli celui qui efi affigné en paiemeut d'une fomme qu'il a
déja. payée, ne peue fe pourvoir qu'en relax d'inl1:ance; il
efi obligé de fournir au Juge le titre de fa libération.
Mais celui qui, fans être débiteur, feroit .affigné pour
voir déclarer commun contr:e lui le jugement qui intervien-·
droit contre le débiteur d'une fomme, pourrait. attaquer l'affignation elle-même, fans s'occuper du fonds de la demande& obtenir fon renvoi-,. fans être obligé de- défendre fur le
fonds.. Il fe trouveroit précjfément dans le cas prévu parRadier; il n'aurait aucun intérêt dans l'infiance;' il ne pourroit pas y être en qualité ~ & il fer.oit autorifé à· demanderfon relax d'affignation., comme ayant été maL-à-propos intimé.
Ce moyen compete' tout à la fois à ceux qui' ont été:· af-·
lignés d'une maniere nulle, & à ceux qui n'ont pas dû l'être;;
chacune de ces parIies efi éga,lement favorable & doit trou"
ver dans notre procédure les mêmes' avantages;' il fèroiccontraire à: la jufiice que celui qui· n'a point d'intérêt.' dans;
une caufe, pÛt Y être amené c.omme partie, & ne pût:
obtenir fon. relax qu'après avoir. effuyé les longueurs d'uneo
infiance•.
Voilà ce qui difiingue le· relax d'i1ffignatioll', du relax d?inÎtance•. Le demandeur. en relax d'affignation opporé qu'bn n'a:
pu, Paffigner & le conl1:ituer partie; le demandeur e~l, relax;
d'infiance reconnaît l'affignation, donne fes défenfes fur' le·
fonds, & conclue au débou.temenr des fins principales•. Le
premier.: demande fan relax, fans vouloir entrer dans la di{cuffion. de la caufe; le fecond ne le réclame qu'à la faveur'
de fa défenfe fonciere;. en un· mot·, l'un n'affiHe poim' dans.
l'infiance, & l'autre s'y vient rend.re partie..
Jacques
a fou.tenu qu'il n'avait pu ê,rre affigné' dans.
l'infiance d'appel, parte' que cette infiance lui était totalement étrangere ,. attendu fa qu,!-lité de non appellanr... C'eŒ·
-donc ici le cas· de Eintimation prévue' par Radier, & c'ell
le cas d'appliquer la ùifpofitioll de l'art. S du titre S de l'Or-donnance de 1667' 'lui Eone que ces fortes d'exc.eption
Iii z.
�~6
JOUANAi
.feront" employées dans les défenfes, pour y étre préalable::
ment fait droit.
Il ferait fort inutile & fort inju11:e de tenir en qualité une
partie contre laquelle il ne peue intervenir aucune condamnatian, par le défaut d'intérêt qu'elle a dans la "caufe. Ce n'e11: pas
feulement l'inju11:ice de [a commune exécùrion que Jacques ....•
a voulu établir; il a voulu démontrer encore l'injufl:ice de
l'affignation qui lui a éré donnée; il n'a point dit à Erienne .....
que fa demande écoir mal fondée, & qu'il falloir l'en débouter; il efl: allé plus loin, il a fourenu que l'in11:ance lui
écoit étrangere, & qu'il ne pouvoir point y être amené, puifque c'éroit la déclararion d'appel qui pouvoir feule confl:iruer
-partie dans une inftance de certe narure. C'efi donc là ( obferva Me. Bermsmd ) un vrai moyen de relax d'affignat'ion.
: . Sur le fecond moyen, il érablit .que l'infiruaion des procès
criminels a paru dans tous ·Ies remps êrre l'objet le plus digne de l'attention des Légifiareurs. Il n'éroit pas moins néce1faire de ménager aux accufés des moyens de défenfe &
.de jufl:ificarion, que d'érablir des regles sCtres pour parvenir
à la découverte de la vérité & à la punirion des crimes.
L'inconvénient le plus dangereux, & dont on a le plus
{ouvent à fe défendre en mariere criminelle, c'efl: l'abus que
quelques décrérés peuvent faire de"s difpofirions des Loix,
.dans· l'objet de retarder le jugement du fonds, & de faire
naître à chaque pas des longueurs & des obfiacles. Delà
nous efi venue cette maxime, que le même jugement doit
prononcer [oJr le fort de tous les accufés, & que la procédure qui leur efi faire pour arriver au jugement leur eH:
·commune. ( Arr. 7 du tirre 26 de l'Ordonnance criminelle. )
Quelle confufion, fi, qnand il y a diverfes parties accu fées
& pourfuivies pour le même fair, il intervenait un jugement
définirifà l'égard des unes, randis qu'il n'auroit rien éré prononcé à l'égard des autres, pour lefquelles il faudrait un
nouveau jugement, peur-êrre même une nouvelle infimc"tion!
La néceffité de faire infhuire & de faire prononcer
�'nu PAi',Ais :l)I! PRÔVIlNCE.
437
'dans le même temps contre tous les accufés a donné li li
à la regle qui les fait jouir également du bénéfice de IJ réformation, & qui ne permet pas qu'un jugement de condamnation, s'il vient à être réformé, foit exécuté à l'égJrd
même de cenx qui n'en ont point appellé; quod refcriptum,
dit la Loi 10, if. de appel/al & relat., in communi causâ,
quoties alter appel/al, alter non, alterius' viRoriam etiam ei
proficere qui non provocavit. C'efl: auffi ce que décide Buiffon
fur le titre du code fi lLnUS ex pluribus appel/.
L'indiviubilité dans les matieres criminelles ell: donc fondée fur l'équité, fur la néceffité d'écarter les obfiacles que
-les' Juges peuvent' rencontrer dans le jugement' des procès
& fur nos Loix.
Ma'is quoique tout foit commun entre des accufés pourfuivis fur un même délit, l'on peut '& l'on doit néanmoins
les difiinguer, quant à l'appel, qui efi une procédu,re libre,
volontaire & entiérement indépendante de l'infiruél:ion. Le
remede de l'appel a été introduit, fujvant l'expreffion de la
Loi " pour fairé corriger l'injufl:ice ou l'ignorance du premier :Juge. C'efi un droit créé en faveur de l'accufé; & fous
i:e premier point de vue, on ne peut le rendre appellant,
s'il n'y confent, & s'il ne le déclare d'une maniere expreffe,
parce que nul ne peut être contraint d'ufer de fon droit.
Il efi jufie qu'i'I puiffe réclamer d'un premier jugement toutes
·les fois qu'il. le regarde comme contraire à ·fes' intérêts;
-mais de ce que le Légiflateur lui a fourni ce moyen, pour
·faire réparer les injufiices dont il pourrait fe plaindre, il
ne fuit pas qu'il doive prendre cette voie, quand le premier
~ugement ou décret n'a rien qui le blefre. En le fou mettant
malgré lui à la formalité de l'appel, on ferait tourner à fan
.préj âice une ·regle qui en toute à fon avantage, & dont
l'objet a été uniquement de venir à fon fecours.
Ce qui, en matiere criminelle, dill:ingue effentiellement
l'appel du rene de l'infhuél:ion, c'ell: qu'il dépend de l'accufé
de n'en déclarer aucun. Toutes les autres parties de l'inf:l:ruél:ion font au contraire néceffaires & forcées; il ne dé-'
.
�ys
JOURNAL
pend ni de l>accufé, ni de l'acl!ufareur-, de fie pàs y faire:
precéder; c'ell: cette inilrùél:ibn établiè par les· Ùrdonnahces,.,
& dont les parties ne peuvent s'écarter, qui- eil commune·
aUl{ accufés, & qui les foumet tous également à des dépens.
vis-à-vis le p.laignam.
Mais l'appel n'eil point de l'eifence ,de l'inftruéIion;' il
n'eil poinr néceifaire pour préparer le jugemenr de ta caufe;'
& roures les fois qu'un accufé fe rend appellant, il, engage
entre lui & l'accufateur une nouvelle- quefl:ion qui lui eil puremenc perfonnelle, & qui eil étrangere aux autres ac-·
cufés.
La pofition· des accufés feroit bien. fâcheufe ,. s'ils' étoient
refponfables des mauvaifes procédures que- peuvenc faire leurs;
corrées, & s'ils éroi.ent tenus d"e· concourir aux appels des,
permiffions d'informel', qui font déclarés fans leur participa-tion & malgré eux~
L'Arrêt qui fera rendu entre Etienne .. '" •.• ~ & lès ap-. -,'.;
pellans pourra en· quelque (orte être regardé comme commun,,"
à Jacques u . . . . . & alix autres accufés qüi pourooient ne pas .
avoir appellé, fi ces accufés venoienc propofer enfuite les/"
mêmes moyens envers le décret de foir-informé;.. cet Arrêt,leur feroit oppofé non.feulement comme ptéjug~, mais mêmecomme fin de non-rec.evoit•.
Me•. Bermond conclur à ce qu'îl fût fait droit au rellix d>-a{:.
fignation propofé padacques .•• '.' • & il r.equit qu'il
fàit,
défenfes aux Procureurs de la Cour de former incidemment,
aucune demande, ni fouffrir qu'il en fût formé· aucune, pourvoir déclarer les Arrêts communs concre des accùfés qui nefont poinr appellans, quoique compris dans les mêmes- pro-cédures faires pardevanr les premiers Juges,defquelies d'autres accufés auront inrerjetré appel, à peine de nullité des;
procédures faites de part & d'autre, & des dommages· &:
inrérêtS des parties, & que l'Arrêt qui.interviendroit fût pu..,.
hUé, imprimé & affiché.
Par Arrêt du 17 Février 17'llr, après regill:re vuidé au;
tapport de Mr•. le Confeille~ de la Boulie ,.. le~ c.oncl~!ion§
mt
�nu
PÂtAis DB
PROVI!NCI!;
,439
lUrent fuivies, & Etienne ....• fut condamné aux depens.
Plaidant Mes. Eflrivier & Gafiier.
ARRÊT
LXXI.
Le nouvel aCÇfuéreur ne peut expulfer le Fermier pour fannée
'Courante.
M
E. Ifoard de Manville, Avocat du lieu de Mauffane;
arrenta le S Février 1774 les biens qu'il y poffédoit
à André Giraud, Ménager du lieu de Mouriés , "pour le terme
de neuf années, & moyennant la reme de 3S00 liv. En
1779, Me. Ifoard vendit à divers particuliers les terres qu'il
avoit données en arrente ment.
Le fieur Manfon, Milrc Coye, d'Armure & Paulet, oou:,
veaux acquéreurs, firent des aaes de propriétaires dans les
biens ilrremés, & Y inrroduifirent leurs troupeaux: Giraud
demanda & obtint des inhibitions & défenfes de le troubler
~ans "a jouiffance des biens. Les nouveaux acquéreurs lui
firent fignifier I,eurs titres d'acqui"fjtion, & fe pou~vurent en
"expulfion. Giraup répondit' qu'il forti~oit après,la p~rception
des fruies de l'année commencée ,& le rembourfemem des
avances qu'il avoit "faites, foit en cultures, foic en papiers
fO!Jrnis à Me. Ifoard. Le 7 Avril 1779, les acquéreurs préfemerent une requête incidente en expulfion provifoire & en
rapport préparatoire·; le 18 M;lÎ, Sentence qui ordonne provi(oiremem l'.e.xpulfion de Giraud, & qui accorde à chaque
;lcquéreur la jouiffance des biens, pour les tenir pendant
procès comme fequeflres & dépoficaires de juflice, nQnobftam & fans préjudice de l'appel.
.
Giraud appella pardevant la Cour, & foutint que u..Sent.ence .écoit nulle, parce qu'elle ordonnoit fon expulfion provifoire, fans foumettre les demandeurs à donner caution,
ce qui efl contraire à l'Ordonnance, citre des matieres fommaires, & à l'Arrêt de Réglement du lS' Aotlt 1736. L'obli-
�nu
PÂtAis DB
PROVI!NCI!;
,439
lUrent fuivies, & Etienne ....• fut condamné aux depens.
Plaidant Mes. Eflrivier & Gafiier.
ARRÊT
LXXI.
Le nouvel aCÇfuéreur ne peut expulfer le Fermier pour fannée
'Courante.
M
E. Ifoard de Manville, Avocat du lieu de Mauffane;
arrenta le S Février 1774 les biens qu'il y poffédoit
à André Giraud, Ménager du lieu de Mouriés , "pour le terme
de neuf années, & moyennant la reme de 3S00 liv. En
1779, Me. Ifoard vendit à divers particuliers les terres qu'il
avoit données en arrente ment.
Le fieur Manfon, Milrc Coye, d'Armure & Paulet, oou:,
veaux acquéreurs, firent des aaes de propriétaires dans les
biens ilrremés, & Y inrroduifirent leurs troupeaux: Giraud
demanda & obtint des inhibitions & défenfes de le troubler
~ans "a jouiffance des biens. Les nouveaux acquéreurs lui
firent fignifier I,eurs titres d'acqui"fjtion, & fe pou~vurent en
"expulfion. Giraup répondit' qu'il forti~oit après,la p~rception
des fruies de l'année commencée ,& le rembourfemem des
avances qu'il avoit "faites, foit en cultures, foic en papiers
fO!Jrnis à Me. Ifoard. Le 7 Avril 1779, les acquéreurs préfemerent une requête incidente en expulfion provifoire & en
rapport préparatoire·; le 18 M;lÎ, Sentence qui ordonne provi(oiremem l'.e.xpulfion de Giraud, & qui accorde à chaque
;lcquéreur la jouiffance des biens, pour les tenir pendant
procès comme fequeflres & dépoficaires de juflice, nQnobftam & fans préjudice de l'appel.
.
Giraud appella pardevant la Cour, & foutint que u..Sent.ence .écoit nulle, parce qu'elle ordonnoit fon expulfion provifoire, fans foumettre les demandeurs à donner caution,
ce qui efl contraire à l'Ordonnance, citre des matieres fommaires, & à l'Arrêt de Réglement du lS' Aotlt 1736. L'obli-
�44~
JOlI Ît -ri A L
gatlon imIiofée aux acquéreurs de compter à Giraud, comme'
fequef!:res , dans le cas où il auroit gain de caufe au fonds,
n'étoit pas auffi sûre pour lui que l'auroit été un cautionnement. En 'ne lui donnant point de .caution, on a diminué
[es sûretés, & on les a diminuées dans une matiere de rigueur; car le nonobf!:ant appel étant un privilege qui dé.rage aux regles ordinaires de la hiérarchie des Tribunaux;
on ne peut l'ordonner que fous l'exécution littérale des con'"'
ditions auxquelles l'Ordonnance en a autorifé l'ufage; c'el1:
pour cela que dans les matieres même de peu d'importance,
la Cour caffe l'exécution permife fans donner caueron; elle
juge que l'Ordonnance l'ayant exigée fans dif!:ihél:ion, ce n'el1:
pas au Juge inférieur à en difpenfer.
.
Sur le fonds, on difoit qu'il ef!: sûr que la vente réfout
le bail. L'acheteur n'dl: pas obligé de l'entretenir; mais un principe d'équité a fait introduire en même temps que l'ache'teur ne pouvait expulfer le Permier, lorfque l'année était
commencée; il ef!: jufie que celui-ci jouiffe des travaux qu'il
a faits, qu'il perçoive la récolte qu'il a préparée. C'ef!: le
fe.ntiment de Potier en fan Contrat de louage, pag. 272,
& Bonnet, lett. F, fomm. 9. L'Arrêt rapporté par ce dernier fournit deux principes: 1°. l'obligation naturelle &
d'équité de la part de l'acquéreur, qui le foumet à fufpendre
la jouiffance du droit qui lui e{l: acquis pendant un court
efpace', dans lequel le Fermier cherchéra une autre ferme,
diminuera le préjudice que fan expulfion imprévue lui caufe;
préjudice qui ferait bien plus grand, fi l'expu.Hion érait précipitée: 2°. l'obligation civile de la part de 'l'acquéreur, lorfque, conme dans l'hypothefe de la caufe, la plus grande
partie des cultures a été faite. Dans ce cas, le Fermier ac~
quiert fur I(/s fruits' de l'année courante un droit fpécial &
privilégié; il lui compete non feulement une aél:ion per'"'
fonnelle contre le bailleur à ferme .qui a vendu, mais erlcore une aél:ion réelle fur les fruits de la ferme dont il a
préparé & favorifé la produél:ion.
On a vo.ulu· faire une di!hnéhon entre l'année commencée
~epuj~
�D U
PAL AIS
D E
P It 0 VEN C !J.
44 [
'depuis peu, ou avancée de moitié; mais éette diftinétion ,
qu'aucun Auteur n'a faite, qu'aucun droit ·n'a confacré, eH:
infoutenable. L'expuHion du Fermier à la veille de la récolte
[eroit plus injufie, plus atroce qu'une expuHion faite après
les femailles; mais celle-ci eft encore injufie, parce que le
Fermier a fait les labours, les cultures & les femailles,
parce qu'il a le privilege de totites ces chofes du moment
qu'il les a faites, parce qu'il faut· lui donner du temps pour
fe chercher un autre fermage, fur-tout quand il s'agir d'un
fermage important, d'un fermage compofé de beaucoup de
capitaux. En matiere de loyer de maifon, où. l'expullion efi
moins dommageable, l'année commencée· appartient tou:
jours au locataire; à plus forte raifon l'année commencée
appartiendra-t-elle au Fermier.
On répondoit pour les acquéreurs, que les conclulions
qu'ils avoient prifes étoient autorifées par les principes reconnus par Giraud lui-même, que tout aéte de vente calfoit
le bail d'arrentement; & quoiqu'ils pulfent contefter au Fermier la perception des fruits de l'année courante, ils avoient
cependant adopté ce principe d'équité, qui ne veut pas que
le Fermier foit privé de fes peines & de fes travaux, & ils
avoient demandé d'être jugé d'après lui.
. D'ailleurs Giraud ne pouvoit point réclamer ce principe.
Il efi certain que la polfeflion du bien litigieux doit être
adjugée à celui qui a le" titre le plus apparent & le plus
fort. Giraud n'étoit que Fermier; il s'agilfoit de favoir s'il
devoit refler en polfeffion des biens vendus; fes droits à cet
égard étoient douteux; les titres des acquéreurs ne l'étoient
point; ils éroient certains & incontefiahles, foit à raifon
du droit commun, foir à raifon de la fupériorité de leurs
titres. Le Juge ne pouvoit fe difpenfer d'accorder la polfeJJion
provifoire aux acquéreurs, fauf au Fermier de faire valoir fes
droits au fonds, à la confervation defquels le Juge eut foin de
pourvoir, en confiiruant les acquéreurs feq\leHres & dépofitaires de juflice. Le nombre des acquéreurs, leur folvabilité connue, les fonds même dont il s'agit, defquels la propriété ne leur efi pas concefiée, formoient au befoig une
•
Kkk
�~~
JouR*~i
a
caution plus qùe fuffifante pour l'affurance C!ès fruits per~
<evoir. Giraud au contraire n'eH que Fermier, homme fans
biens; & s'il avoit per9u les fruits, s'il avoit continué l'exploitation des terres, les acquêreurs fe trouvoient fans affurances, tant pour la reHitution des fruits, que pour les
dommages & intérêts réfultans des dégradations.
On ne pouvoit d'ailleurs laiffer l'exploitation au Fermier,
puifqlle deux procès exiHans à raifon des dégradations qu'il
avoir commifes dans les cerres, le rendoient au moins fufpeét dans cette partie, & le privoient dé la confiance de
la Loi.
Mettre les biens en fequeftre en des mains étrangeres,
c:eur été faire confumerles récoltes en frais inutiles. L'objet
fur lequel la Semence du Juge des Baux avoir prononcé,
étoit tout 11 la fois un objet provifoire & fommaire ; il
étoit provifoire, parce qu'on appelle tel ( dit Mt;; JOllffe )
toures les affaires qui requierent- célérité; il étoi, fommaire,
. parce que l'Ordonnance met au nombre des matieres fommaires les fermes & les aétions pour les occuper ou exploiter, ou aux fins d'en vuider" tam de la part des pro. priétaires, que des locataires ou Fermiers. Le Juge a pu
ordonner la provifoire, fans obliger de donner caurion. La
sûreté étoit dans les fonds même '; Giraud a toujours hypotheque fur eux, pour fe payer de ce qui pourroit lui
4-. être
dû. Sous ce premier poim' de vue,' la Sentence n'dl:
point nulle.
Elle n'eH pas injufie, puifque l'intérêt de Giraud efi confervé, & qu'en définitÎl'e il trouvera de quoi fe payer, s'il
obtient gain de caufe. En vain Giraud voudroit-il prétendre
qu'il lui efi dû des dommages & intérêts pour la non jouiffance du bail d'arrentemem pour les années pofiérieures aux
ventes-dont il s'agit. Cette queHion ne fauroit regarder les
acquéreurs; il peut fe pourvoir contre Me. Ifoard qui lui a
paifé l'aéte d'arrentement.
Me. Meriaud, 'Subfiitut, obferva qu'il efi' de principe
que la vente caife le bail d'arrente ment. Le nouvel- acquéreur veut quelquefois habiter- lui-même la- maifon dont
�DU
PALAIS
D.E
443
PROVENCE.
il 'went de faire l'acquifition; il veut expluiteren perfonne
les domaines qui lui ont été vendus, ou les faire exploiter'
par tout autre que celui que fon prédéceffeur avoit placé,
& s'il n'a été fait mention dans l'a&e de vente que le locataire ou le Fermier continueront leur a&e d'arremement ,.
on ne peut pas fou mettre le nou·veau propriétaire à l'entretenir ;: l'obligation ne peut regarder que celui qui l'a fou~
crite ou confentie.
Dans ce cas, le loca'raire peut s'adreffer au vendeur
pour fes dommages & intérêts. Si le vendeur ,. dit Lacombe, n'a Jlipu~é' que l'acquéreur ferait tenu d'entretenirle bail, lor. locataire.expulfè- en vertu de la Loi emptorem,
qui a avancé des d~niers pour les réparations, n'efl tenu de'
fe départir de la ]oitilTance, qu'en le rembowfant..
Celui qui aura ét[ condamné, porte l'arr. 9 du tit. 27
de l'Ordonnance de r667 , de lai.ffir la pojJèjJion d'un héritage, en lui rembourfant quelques [ommes, efPeces, impenfes ou méliorations, ne pourra être contraint de 'luitte/~
l'héritage qu'après être rembourfè.
Le locataire, le Fermier qui abufe de {on bail peut être
expulfé, parce qu'il doit jouir en pere de famille; maisil ne peut l'être d'autorité privée. Quand un Fermier ell::
expulfé avant -l'expiration de fon bail, fuivant Denifard ,
fait par un fingulier fuccelfeur, fait pour d'autres. caufes:
donc le bailleur eH: refponfable, il lui efr dû: une indemnité
par celui qui devait le faire jouir..
D'après ces autorités, nul doute que Giraud ne· fait
fondé à prétendre des dommages & intêrêts comre Me.
Ifoard, fi ce dernier ne parvient pas à prouver les dégra-dations donc il fe plaint, & qui, d'lns fan. fyfiênle, ont été
caufe de fa demande en. rémiment de la convention d'arrente ment & de la vente de plufieurs des fonds arrentés.
Mais les dommages & intérêts que le Fermier efi: en:
droit de prérendre contre le vendeur ne peuvent être op-pofés de fa part aux nouveaux acquéreurs qui n'ont rien_
à démêler avec le Fermier, & qui réclament feulement:
contre lui le privileg<: de leur a&e_ de vence; privilege qui;
Kkk
2..
�-
4#
JOUR~Ai
leur donne la fqculté de fe' mettre en polfeffion des bien!:
par eux achetés, fans confidérer l'a8:e d'arrente ment ' palfé
au Fermier: mais peuvent-ils ufer de ce même privilege
pour demander l'expulfion du Fermier au moment où la
vente leur a été palfée, ou ce Fermier peut- il réclamer
la jouilfance des fruits de l'année qu'il prétend avoir commencée?
,Lacombe dit que' lé nouveau propriéraire doit lailfér
finir l'année au Fermier. Ceux qui deviennent titulaires
par toute autre voie que par permuration ou réfignarion,
peuvent évincer le Fermier qui jouir en vertu du bail fait
par le précédent tirulaire, en obfervant néanmoins de lui
lailfer la jouilfance des fruits, fait naturels, foit induftrieux, afférans à l'année courante de fon bail, fans pouvoir l'expulCer avant. C'eU: ce que rapporte Denifard qui
cite plufieurs Arrêts qui l'ont jugé de même. Il ajoure
que', fi le nouveau titulaire d'un' bénéfice fouffre que le
Fermier enCemeuce pour entamer une feconde année, fans
l'avertir judiciairement de celfer fan exploitation, il faut
fuivre les mêmes regles qu'on érait obligé d'obferver pour
, la premiere année. C'eft ce qui fut épbli par Mr. l'AvocatGénéral de Fleury lors de l'Arrêt db S Mai 1714, qu'on
trouve au Journal des Audiences. Si, dit ce ,Magifl:rat, le
nouvel ufufruitier laiffè jouir, c'efl une reconduélion pour
clzafjue année 'lue le Fermier a commencé de jouir, à moins
qu'il n'y ait des circonflances' fjui [affint préfumer la reconduc7ion pour un temps plus long.
Il y a des J urifconfultes qui prétendent qu'il faut difringuer les fruits natllrels) des fruits induU:rieux. Le Fermier
qui ne jouit que de bois, de dîmes, de droits feigneuriaux
& autres fruits qui n'ont pas beCoin de culture, peut (difent-ils) être évincé après la prife de polfeffion du pourvu
pel' obiwm ou par dévolut; au lieu qu'il faut laiffer faire
la récolte à celui qui a cultivé.
.
Cette cjuefl:ion de favoir, fi l'acquéreur peut expulfer le
Fermier, même pour l'année cohlmencée, a été jugée par
la COtir en faveur du Fermier par Arrêt du l S 08:obre
�,
Du PALAIS DE PRovBNcn:
445
8
rapporté
par
Bonnet.
Il
s'y
agiffoit
d'une
collocar7I
tion que le fieur Richaud avait été obligé de faire fur un
fonds de terre appartenant au fieur le Camus, & qui
avait été donné à ferme pour trois ans à Jean Augier &
Pierre Julien.
Il ne feroit pas jul1:e que le Fermie~ qui aurait enfemencé les terres dans l'efpoir de recueillir la récolte, qui
les aurait cultivées, fumées & miCes en état de le payer
de fes peines & de fes travaux, fe vît frul1:ré de Ces eCpérances, & que tout autre moiifo'nnât & recueillît des fruits
qu'il n'aurait pas pris la peine de cultiver. La Loi n'a
pas voulu cependant que le Fermier Ce maintînt dans le
_ bail d'arrente ment , lorCqu'il re/l:oit encore plulieurs années
après la vente. Elle lui a feulement réCervé de fe pour-voir pour fes dommages & intérêts contre le vendeur,
pour l'indemnifer de fes avances & du préjudice qu'il peut
effuyer dans cetre ceffation d'exploitation ; le nouvel acquéreur n'el1: tenu de rien à cet égard; ce n'dl: pas fan
ouvrage, & il doit jouir de l'immeuble dont jl a acquitté
le prix. Mais cette reffource n'dl:. pas la feule que la Loi
a ménagé au Fermier qui fe trauve ainli évincé de fan
'exploitation ;, elle a encore voulu que ce Fermier fût maintenu dans la jouiifance de fa ferme, lorfque l'année fe
trouverait commencée à l'époque de l'aél:e de vente, &
que les travaux néceffaires à la terre auraient été faits,
& qu'il en retirât les fruits.
,Il el1: des circonl1:ances encore qui exigent cene néceffité. Le Fermier expulfé même pour l'année commencée
fe trouverait privé pendant plufieurs mois d'une exploitat-ion-, parce que les -loyers & les baux ne fe renouvellent
qu'à la St. Michel ou à la Touffainr, & il ferait expoCé à
n'avoir aucun afyle jufqu'à cette époque. Que deviendraient
les capitaux qu'il avait été obligé de fe procurer pour les
terres qu'il avait prifes à ferme? Des bœufs, 'des mulets,
des troupeaux font des capitaux néceifaires pour la cultllre
& l'engrais des fonds; le Fermier trouve leur nourriture
dans les Eerres qu'il Eient en a:renrernenr; s'il était obligé
t
�446
J'OU"RN'Jr.L
de fortir.'& de céder la jouiirance <des biens arrentés au·
.nouvel acquéreur au moment de la v.ente, il fe t.r.ouveroit
expo[é aux plus grandes pertes par la .mortalité de [es capitaux, m'anquailt tout à la fois de moyens pour les nourrir
& pour les loger. La juftice & l'équité ont concouru égaIement à la conlèrvation des oeftiaux, & ont ménagé au
Fermier les moyens de retirer le produit de fes travaux.
Il efl:' jufl:ifié par les certificats donnés par les Fermiers
pré~édents, qu'à leur fortie, les terres n'avoient reçu aucunes
cultures; il leur avoit même été défendu d'en faire jufqu'à
ce que I.e partage des biens de la Dame- Ifoard ellt été
fait. Ces certificats prouvent que Giraud avoit donné lui~
même les cultures; qu'il n'émit pas obligé dlen donner
aucune en fortant, &. qu'il avoit payé au Fermier ·précé'"
dent le prix de celles qu'il avoit faites. Ce point de fait
éclairci a auto-rifé Giraud à réclamer le produit de l'année
1779 , puifqu'il' n'avoit donné tes cultures que dans l'efpé-.
- rance de percevoir la récolte & de jouir des fruits que [on
induHrie & Ces travaux devoient faire naî'rre dans le couIant de la même année.. Puifqu'il. eH de principe & convenu encre les parties, que le Fermier doit prétendre les.
fruits de l'année commencée,. Giraud peut fe flatter de
jouir de cet avantage, s'il parvient à. prouver que l'année
de fon bail étoit commencée lors de la vente des biens.
qu'il tenoit en arrentemenr~ Or le bail eft pairé en. 1774.
pour le terme de neuf ans 1 ne deyant finir qu'en 1783;;
les ventes. font fuites en 1'778 dans le mois d'Oél:obre &
Novembre, & elles n'ont été fignifiées que I.e 20 Février1779. Il efl: donc certain que les cuLtures pour Pannée:
1779 étoient toutes faites à cette époque, & que l'année
qui avoit commencé pour le Fermier I.e 1 &ptembre, devoit être cominuée li fon profit..
Enfin l?expulfioll pendant l'année 1779· a .occafioné li·
Giraud une perre confidérable, par\"e qu'en ne donnant
pas lui-même fes foins à la ferme doDt il rédame les
fi-uits, il a effi'yé un dommage évident; parce que les
acquéreurs ont liv.ré. à des b,as merc.enaires un' travail
....
•
...... ~ ~ .
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�'D u P Â L À l s l') Il ,P R 0 V l! NeIl;
441
qu'ils ont payé à un haut prix; en un mot, [es bétes de
labour, [es troupeaux, en trouvant leur nourriture dans les
biens, auroient également [ervi à l'exploitation. Privé de
tous ces avantages, il s'dl: vu obligé de [e procurer un
nouvel a[yle, 'de renvoyer [es valets, de vendre [es capitaux, lui étant impoffible de trouver une nouvelle ferme
.pour les placer.
Me. Meriaud obferva que la dikuffion du grief d'injuflice rendoit inutile celle du grief de nu111ité. Il conclut
à ce - que l'appellation & ce dont étoit appel fuffenc mis
au néant; & par nouveau jugement, fans s'arrêter à la
requête' incidente des fieurs Manfon & Con[orts, Giraud
fût mis' fur icelle hors de Cour & de procès, & qu'en
conféquence ils' fuffent condamnés à lui rendre & refiituer même par corps, les fruits par eox perçus ou qu'ils
avoient dû percevoir dans les biens tenus' à ferme par
Giraud en l'année 1779, à compter depuis qu'ils l'en avoiene
expulfé, enfemble aux dommages & intérêts par lui foufferts & à fouffrir pour raifon de l'expulfion, fuivant la
'fixation & liquidation qui en feroie faite par Experts' convenuS ou pris. d'office, fous l'offre qu'il faifoit de tenir
compte à Me. Ifoard jufqu'à concurrence du montant de la
ferme de la même année [ùr les fommes done celui-ci lui
étoit encore débiteur.
Par Arrêt dL! 2. l Février 17S l , prononcé" par Mr. le Pré·fidene de' Saint'- Vincene, les conclufions furent fuivies,
Manron & Conforts condamnés aux dépens. Plaidant Mes.
Simeon fils & Gra.ffan.
�JOURNAL
•
Compétence des Lieutenants en matiere de tailfe.
On ne peut faire informer, s'il n'y a délit.
Le créancier faifiiJànt répond du fait du feeJueflre vis-à-vis l~
débiteur faifi•
.AU
mois d'Oél:obre 1779 il fut procédé à trois failies
différeotes, dont deux pour tailles fur les olives d'un
verger limé au terroir de Gardanne; appartena.nt à Vincent Car. Gafpard Fabre fut député fequefl:re. Deux jours
après Etienne.....:. chargé de la procuration de Vincent Car
fut avec fon époufe & quinze femmes' cueillir les olives
faifies. Fabre en fut témoin, & ne s'y oppota pas. 'Le
lendemain Etienne....... y retourna avec fon époufe & trois
autres femmes pour le même objet. Fabre fe' pourvut en
information au Lieutenant-Criminel d'Aix, requit l'accédit
fur les lieux, & la permiffion de reffaifir les olives, ce
qui lui fut accordé. L'informarion fut prife; Etienne.........
& fon époufe furent décrétés d'affigné. Pendant l'inihuction, Capus & Deleuil, Tréforier de la Communauté &
caution, furent payés avec protefiation' d'es droits du fequefire. Le procès extraordinaire fut ordonné. Les décrétés
appellerent. pardevant la Cour des Aides du décret de foit
informé & de tout ce qui avoit fuivi, & appellerent au
procès en commune exécution pour les dommages-in té'rêts & les dépens le Tréforier & fa caution. Pendant l'inf·
tance d'appel, il intervint Sentence qui mit Etienne....... &
fon époufe hors de Cour & de procès.
On di[oit pour les appellans, 1°. que la procédure étoit
nulle comme incompétente; 2°. qu'elle étoit injufie, parce
qu'il n'y avoit pas lieu d'informer; 3°. que Deleuil & Capu5
devoient par cpmmune. exécution, leur répondre des adjudications qu'ils rapporteroient comre Fabre fequefire.
. -.
Il
~-
~
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE",
449
11 falloit venir pardevant la Cour (difoient - ils) parce
que la failie etoit faite en force des lettres de contrainte. Il
,dl: bien vrai qu'elles ne font point attributives de Jurifdiél:ion ;
mais l'attentat aux lettres de contrainte ef!: une injure direél:e faite à la Cour. Le Tribunal quelconque ef!: exclufivement compétent, à l'effet de punir & de venger l'in-jure qui lui ef!: faite direél:ement. Le Lieutenanr n'étoit
'encwe faifi de rien. La faifie faite en force des lettres
-de contrainte avoit mis les effets faifis fous la main de
la Juf!:ice; mais aucun Tribunal en particulier n'avoit été
învef!:ï de la faifie; le choix du Tribunal étort in pendula;
il dépendoit de la nature des aél:ions qui pouvoient s'en
enfuivre.. L'exécution de la faifie auroit appartenu au Lieutenant; mais ici le fequef!:re fe plaignoit de la - non exécution ; il n'avoit pu & dû venir que pardevan.t la Cour de
qui les lettres de contrainte étoient émanées.
Sur le fecond moyen ils obfervoient qu'il n'exif!:oit point
de délit. Etienne....... avoit une procu-ration de fon frere.,
il ignoroit les faifies; il avoit offert de laiifer les olives,
en payant par le fequef!:re les femmes qui les avoient cueillies. D'ailleurs on avoit fait une procédure criminelle; il
fuffifoit au fequef!:re de faire conf!:er de l'enlévernenfpar une
procédure 'fommaire. Il avoit fait procéder au procès exuaordinaire, quoiqu'il ne fût intervenu qu'un décret d'al:'
figné; il avoit préfenté une requête en fubornation des
témoins, & cette requête n'avoit rien produir. Que falloitil de plus pour démontrer l'injuf!:ice & l'oppreffion?
On répondoit pour Gafpard Fabre, que tout Tribunal
peut & doit venger fa Jurifdiél:ion, & qu'il n'appartient qu'à
lui de punir l'outrage direél: qui lui eH fair. Mais quel ef!:
donc cet outrage direél: qui rend le Tribunal outragé, exc1ulivement compétent? Les exemples en font faciles à
trouver. Si les lettres de contrainte avoient été injurieufement déchirées, foulées aux pieds; fi Etienne....... avoit
mal parlé de la Cour; fi Gafpard Fabre avoit déféré ces
excès ou d'autres de pareille nature, fans doute que dans
,te cas il n'eut appartenu qu'à la Cour d'en connoître"
,Lll
�~6
~OVRN~E
Ear~e qu'é!le elle été direél:el11ent outràgée. Ainu l'on tient
\
pour maxime au Palais, que les Arrêts d'hqmologation
des Délibérations prifes par les Commuqautés ne font pas
non plllS attributifs de Jurifdiél:ion. Ces Arrêts portent des
peines, des faiGes ~ans le cas de contraventipn; quelquefois encore ils renfeqnent la p,ermifI\on d'informer. Or
quels font les Juges orpinaires de ces contraventions? II
ne peut y en avoir d'all.tres que les Jug~s locaux. Si cependant la contraventio.n étoit commife avec injure, fait
contre la Cour, fait contre l'Arrêt portant l'homologat10.n, la Cour devrait in~ubitablel11ent en coC\noître, parce
qu'il y aurait o\ltrage direél: cpntre fpn autorité ou contre
fa digni,çé. Mais Gafparc\ Fabre n'a déféré qu'lI..n attentat
aux exécutions faite.s en force des lettres de con,trainte,
&. cet attentat ne rend pas la Cour compétente, puifqu'il
efi certain que les lettres gén,érales de c.ontrainte ne [ont
point attributives de Jurifdiél:ion.. S,ans la (aiGe, il n'y aurait point d'attentat. C'ef!: c;lonc à la fa,iG~ qu'Etienne.......
a attenté; i.I n'efi coupable d'aucun excès, d'aucun outrage dir~él: contre la Cour; & il eH certain qu'à raifon
des contefiations élevées ou par le feqJl,éHre ou COJ;ltr.e le
fequeHre, on ~oit fe pourvoir aU Lieutenant.
Si I~ f~queHre a des provifioos à gem~J;l.der, s'il veut
faire gar~ér les fruits, craignan.t qu'ils J;1e foient enlevés ,
n'e.H-ce pas au Lie,ute.na!;\t qu'il doit s'a.drelfer, s\\ v,euç fe
faire réintégrer dans les fruits dont· on l'a c;lép.o\I-Î.!lé? ne
faut il P.as aller au J;.,ieuteoant? n'eH-ce pas au Lieuten,anç
qu'appartiennent encore les demandes en red,4ition de
compte, & en expédition? Do.nc le Lieutenant efi invefii du proçè~ exécutorial. Les le.ttres généra.Ies de çooo::
trainte. font à la place du Jugement que le LieuteniJ.nt auroit rendu en premiere infiance ; 'l'exécutio(l doit s'en faire
comme d'upe 5lentence ql,le le Lieutenant auroit rendl,l<:l j
la JaiGç ~(l: cenfée fai~e d'auto.rité dl,l Lie1.!tenant. COIJ.:!.m<:ll)ç
fe çjffimuler que tol)te-<:onçefiation qui naît de la fai(ie, &
~out trouble fa.it à cette faiGe , ne peuvent être ponés
qu'au Li~lJçeoant JlJge de. l'exé~ution?. N'a-t-:on p,aS w de
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
4')I
tOus les temps les fequeftres fe pourvoir au Lieutenant
pour les reifaifies & réintégrandes dans les fruits faifis? Ft
qu'eft-ce que l'information, fi ce n'eft la réintégrande aa
criminel?
Il eH confiant qu'Etienne....... a connu la failie , puifqu'elle lui a été montrée fur les lieùx par Fabre qui s'y
trouvait. Etienne....... lui dit: prener les olives & payer les'
femmes. Fabre n'accepta ni ne refufa, & s'en fut; là deffus Etienne....... loue le même jour mulets & voiture pour'
tranfporter & vendre le lendemain les olives à Aix, à l'infu
du fequeftre. Les traces du délit fe prefentent de tous les.
côtés, & la preuve en eft entiere dans le dèrnier fait. Les
Tréforiers affirment qu'on n'eft venu vers eux pour payer,
qu'après la procédure commencée. Dira-t-il qu'on ne luiavait pas intimé la faifie? On ne le devait pas; elle a été:
fignîfiée au débiteur faifi; la forme était remplie.
Le défaut de délit dl: un moyen de caifation, quand le délit·
eft fauifement expofé par dol & fraude, quand le fait expofé ne
conftime pas &: ne peur pas même conftimer un délit. O.
ici qu'a expofé Gafpard Fabre? Que les olives fequeHrées
avoient été enlevées au préjudice de la fequeftration, qu'elles.
avaient été tranfmarchées & vendues à Aix: le délit ex.He·
donc néceffairement dans touS les cas. Mais fût-il do~teux ,.
ce ne ferait jamais par la voie de la caifation qu'no pour-·
rait établir le doute, & faire valoir les induél:ions qui peuvent en naître. On caffe, quand la procédure eft évidemment:
frauduleufe. On caffe encore, quand le fait ne peut pas:
ex.iHer comme délit, ou qu'une expofirion captieufe fait un
délit de ce qui n'en fait pas un, dans le fait ou dans l'ordre
des chofes; ma-is quand le délit ne pem difparoître que l'acles exceptions & par les défenfes de la partie, il tombe en
juHification. Dans cé cas' on convertit' en enquête, ou l'on.
juge au fonds; telle eft conHamme'nt la regle. Dans le fàit
aél:uel, il ne peut y avoir oppreffion , parce que les faits contenus dans la plainte, & convenus dans les réponfes d'Etienne
étaient d'une nature à donner lieu à l'information~
Etienne
n'a pu fans crime enlever & vendre les oIi!leso
.
-
LIb.
�4~i
en
JOURNAL
-faifies; ce fait
criminel en lui-même; il ne pourroit
celfer de l'être que par la voie des exceptions, des défenfes
&, de la juHification , &' fous ce point de vue on pouvoie'
informer.
"
On ,foutenoit pour hi T réforier & fa caution, que le
fequeHre n'eH pas l'homme & le repréfemant du créan-'
cier fa ifilfanr. La fequell:ration eH une charge publique;
celui à qui elle ell: conférée par l'Officier chargé de l'exécution des jugemens , ne peut donc pas être l'homme &
le repréfentant de celui en faveur de qui ce jugement a'
été rendu & qui le fait exécuter; il ell: au contraire l'homme & le repréfentant. de la Loi, l'homme & le rep'ré-fentant de la Jull:ice & du prêteur fous la main duquel la
faiGe met les biens qui ont été faifis. Il eH vrai que le
créancier faiGlfant répond de la folvabilité du fequell:re;
ce n'eH pas parce qu'il efl: fan homme & fon repréfen-.
tant, mais parce qu'il répond du fait de l'Huiffier qu'il
avoit chargé du foin de faire des exécutions, & qui en
les faifant ,. devait prendre garde de ne pa~ confier la fequell:ration à. une perfonne notoirement infolvable; & dans·
ce cas il faut conGdérer deux chofes; la premiere, que
l'Huiffier, & conféquemment le créancier faifilfant, n'ont
rien à fe reprocher, fi le fequeHre établi n'étoit pas no-,
toirement infolvable; la feconde ,que le créancier faifilfant
ne répond de la folvabilité du fequell:re qu'à certains.
égards, ou, pour mieux dire, qu'il n'en répond que' jufqu'à
concurrence de ce qui a été faifi au. débiteur, & dont il
faut qu'on lui falfe compte; mais hors de là il ell: abfurde
de vouloir, que dans aucun cas le créancier [,lifilfant réponde du fequefl:re, & qu'il foit tenu de ce que .celui-ci
fait & peut faire fans fan avis, fans fa participation, &
fans même qu'il puilfe y mettre obHacle. Ce ne feroie
donc que dans le cas où il ferait prouvé que par le fait
Deleuil & Capus font les carrées de Fabre, que celui-ci
n'a agi que comme leur prête-nom, & qu'ils font les parties fecretes d'Etienne....... que la demande en commune
.A exécution [eroit
[outenable & fondée.
•
�bu' P ,üA:Is'
DE
PRO\'BNCn:
4)~'
Les faits qu'Etienne....... oppofe comme preuves du con.-·
plot, pour foutenir fa demande en commune exécution,
ne font rien moins que conc1uans; ce ne font que des
allégations qui, dénuées de preuves, ne doivent être regardées que comme de's menfonges, & qui font même démenties par la vraifemblance. Comment pem-on imaginer
que les prétendus refus de recevoir le paiement des railles
Il'ont eu pour objet que de donner le temps au fequeHre
de rendre fa plainte & de faire procéder à l'information?
Si cela étoit, Etienne
ne les auroit pas omis dans fa
requête en commune exécution; il n'auroit pas négligé 'ce .
moyen infaillible, ce moyen pa·r lequel ·la commune exé<:'lltion étoit inconte!!:ablement jufl:ifiéé, pour ne le hafarder que fur le moyen le plus futile, pour ne l'établir que
fur des fonde mens ruineux. .
Me. Turrel, Sub!!:itut, obferva que par les Arrêts du
Confeil du 19 Janvier r6, '}, arr. ro,. & du 30 Juin
d 672, arr. r7, les caufes des tailles (ont jugées en dernier reffort par les Lieutenans des Sénéchaux en Provence
jufques à cent fols en principal, & les caufes qui excedent font jugées en premiere in!!:ance par les Lieutenans ,
& par appel en la Cour des Aides.
L'homologation n'e!!: pas attributive de Jlirifdiél:ion; elle
n'a d'autre effet que dè donner au titre.C en force de l'autorité du Tribunal fouverain) la coaél:ion que le Juge inférieur ne pourroit lui donner; mais ce' dernier en demeure toujours exécuteur en premier re1fort, fauf le recours direél: au Tribunal qui a homologué, fi ce titre e!!:
attaqué; s'il en étoit autrement, les premiers Tribunaux
feroient dépouillés par cette même autorité qui leur doit
au contraire proteél:ion & vengeance de· toutes les enrrep.rifes fur leur Jurifdiél:ion.
Les lettres de contrainte font néce1faires pour conferver
aux impofitioDs que nous faifons nous-mêmes fur nousmêmes en force de la con!!:itution du pays, le privilege
& l'aél:ivité d'exaél:ion des deniers royaux proprement dits.
)?ar l'effet de ces lettres, les çol!eél:eurs vont droit aux
�Jou li. N Ir L ~
redevables ,~& les pourfuivent' more fifcaliùti1 deliitôrum; ifs:
font difpellfés de filivre les farmes & lès délais des affi:'·
gnations ordihaires, & même, s'ils voulaient s'y a!l:reiildre"
ils ne le poUrro.ieht pas; de peur que d'ùli côté la marchede la perceprion qui rient au régime de- la choCe publique
ne fCIt arrêrée', & què de l'aurre les redevables inexaéls~
ne fulfent accablés de frais.
Par ces letrres taus les taillables font impticitement:
condamnés d'avance à payer; il n'e!l: plus que!l:ion que de:'
les exécurer; ce qui, dérogeant à la défenfe' naturelle &
_civile que les Loix garanrilfent à tout individu qui vit
fous leur proteélion, ne peut parrir que du Tribunal qui.
ayant la plénirude de l'autorité publique, peut feul pefe])'
& fiKer les cas 011 il faudra, pour le plus grand avantagede touS, déroger aux droirs de quelqùes-uns; mais en.. Ies.
accordant, la Cour dépofitaire de cerre même aurorité n'a
voulu ni pu détruire abfolument la défenfe des taillables,
dont elle a borné & coml>le diminué l'exercice pour' le.
plus grand. bien~ S'ils fe prétendent exemp'rs, r-axés injuf-~
te ment ou exorbirammenr, Ii en un mot ils attaquent le:
titre,' elle les écoutera, & ce fera elle feule qui pourra~
accueillir leurs doléances ,. parce que nulle aurorifé que la.
fienne ne peur déterminer, interprérer ou fufpendre 11,
l'égard du plaignant, l'effet & l'applicarion du rirre auquet
fon attache a donné l'exiHence légale; mais fi le titre eft.
ju!l:e ,la taxe raifonnable, & fi cepehdant il. s'éleve des
contellations dans la perception, c'efi-à-dire, dans la nue
exécurion de ce même titre, dans ce cas, comme le début
'qui furvient lailfe fubfifier le titre avec toure la plénituded'autorité & de coaélion que l'homologation lui a conféré, ce n'eH plus au Juge J quo qu'il faut aller, mais à.
celui ad quem mandata efl executio. Ces principes étaient:
avoués par routes les parties.
11 ne s'agit donc plus (conrinua Me. Turrel) que de-favoir
fi, cueillir des olives faifies, c'efi attaqu'er le titre & rnép.rifer ou contrarier les lettres de c'onrrainte en vertu defquelles la faille a é.té
faite
j. ou fi au contraire c'eft furiple~
>.'
... - .
.
•
4H'
�'],Ü PALAis DB PROVENCE:
4)')'
htent empêcher, quant à ce, l'exécution de ces mêmes lettres. Contrarier l'exécution des contraintes données par la
Cour, eft fans contredit un aél:e bien moins repréhenfible,
que d'agir direél:ement & par voie de fait contre l'autorité
qui donna le titre.
En vain les accufés ont foutenu qu'un fequellre doit s'a()reffer au Lieutenant, à l'effet d?obcenir une provifion, ou
.pour lui demander des gardes qui le garantiffent de toue
enlévemenc des· fruits; ce n'ell-Hï[ ont~ils dit) qu'exécu'tion du titre. Mais l'enlévement de ces fruits, avant furtout que les parties fe foient ptéfentées au Lielltenant, eft
auffi un aél:e de fraude & de violence qui attaque l'autorité
qui décerna la contrainte; c'eft donc à elle qu'il aurait fallu
s'adreffer. Ee qu'on ne dife pas que la faifie avoie mis les
<Jlives fous la main du Lieutenant, cui e;œcutio erat mandata.
Toute faifie met les effets fur lefquels elle por-te fous la main
de la Juftice en général; mais cette main ne fera celle du
Lieutenant, qu'en tane que les parties conteftant entr'elles
pour des objets tombant en pyre exécution, s'adrefferont :\
lui & l'inveftiront par l'oppofition. Si au contraire elles
viennent à conte!l:er d'abord à raifon d'un fait qui contrarie
direél:ement la contrainte, cette attaque, qui porte fur le
titre, conftituant une vraie révolte contre l'autorité qui donna
le titre, il n'y a <1!:Ie cette même autorité qui puiffe &
doive être invoquée; & alors. ce n'dl plus: la main du Juge
tl' exécution qui poffédera les effets f~ifis, qui protégera la
faifte & punira le réfraél:aire; ce fera la main du Juge fupérieur, fous laquelle le délit commis amenera néceffairement la cQnteftation en naiffam. Ce fy!l:ême ( reprit Me.
Tunel· ) eft fans doute fort ingénieux, mais il eU bien
fubtil.
L'Ol,1 ne fauroit admettre qu'une faifie mette feulement
les effets faiUs fous la main d~ la Ju!l:ice, comme par une
fimple métamo.rphoCe, fans qu'il y ait au moment un Juge
déterminé pour être, quant à çe, le Mini!l:re de cette même
Iu!l:ice; & le Lieutenant étant commis par les Régl~mens
pour furveiller les faiftes & concourir de fan autollité à leur
,
�,
4S6
Jou R N" AC I.
exécutÎon, c'dl: lui fans doute qui dl: ce Minifrre de la
Juf!:jce fous la main duquel les effets faifis font cenfés mis~
L'exécution des contraintes qui ef!: confiée aux Lieutenans,
comprend nécelTairement tous les aél:es du procès exécutorial, depuis le commandement, jufques à la vente, s'il s'agit
des fruits, & à la collocation, fi on a faifi des fonds. Or,
fi l'oppofitiol1- fimple au commandement va· au Lieutenant j.
'fi c'ef!: à lui qu'il faut s'adrelTer pour demander des pravillons., des inhibitions de troubler le fequef!:re, il parait
conféquent que la· plainte à porter, même au criminel,
pour raifon du trouble donné, puilTe être auffi déférée à fan
Tribunal.
L'on connaît des Tribunaux improprement dits, qui ne
font tels qu'à raifon de certaines attribution~ & qui compétens, quant à ce, ne le feraient pas au criminel" à raifon
m.ême des matieres à eux attribuées, parce que ne formant
pàs partie de la hiérarchie des Jurifdiél:ions, leur pouvoir fe
trouve ref!:raint précifément aux chofes & aux genres d'actions qui leur ont été délégués•. Mais les Lie'utenans font·
partie de la chaîne des Tribunaux, dont le dernier anneau
eH arraché, pour ainli dire, à celui du Juge local., & le premier au. pied du Trône; d'où il fuit que Juges elTentielg
comme les. autres dans l'ordre & la place que les Loix
leur ont affigné , leur compétence permanente par elle-même;
& n.on cafuelle, fe" porte naturellement fur les matieres dom
ils doivent connaître, & cela tant au criminel qu'au civi!l
Delà il fuit que Fabre, qui aurait pu & dû s'adrelTer auLieutenant pour obtenir au civil des inhibitions & défenfes
de le troubler dans l'exercice' de fa fequef!:ration, a pu auffi,
& dû aller à lui au criminel pour fe plaindre du trouble qu'on
lui avait donné.
Sur le fecond moyen, Me. Tun"el obfèrva que toute plainte
au c6 m inel fuppofe un· délit, fans quoi' elle' n'a point de,
bafe. Il ne faurait y avoir de vrai. délit fans intel1tio.n de·
le commettre; & pour qu'il y ait lieu à faire· informer, il,
faut que les faits extérieurs ptéfentent cetre intention.
l.ei rien ne p.rouve au procès. que les faiLies pour taille:
-'
aient;
. .
.. - .
�DU
PALAIS
.DE
PROVENCI!'.
4)7
aient jamais été notifiées au faifi. Or, quoiqu'il fait vrai que
le fequefire ne répond pas des nullités, il l'efi auffi que le
défaut de notification donne au faill deux aél:ions difFérentes;
l'une en caffation, dont le failiffant doit répondre, mais que
le faill qui ne le connaît pas encore juridiquement pour rait
toujours oppofer au fequeHre, fauf à celui-ci d'app~l1er luimême le créancier qui l'a député; l'autre efi l'oppofitioll
ou juridique, ou même de fait, à toute régie de lès bien,.,
laquelle oppoiition le faifi ne peut diriger que comre le fe. quelhe , qu'il elt en droit de regard~r comme un intrus, ou de
méconnoÎtre fous la qualité qu'il fe donne, fans que les aél:esqu'il fera ou qu'il fe permettra da us fan état de jufie igno-·
rance, puiffent jamais tomber en délit.. En effet, comment·
un faill peut-il h1voir que fes biens font fou·s l.a main à'e
la Jufiice? Comment peut-il- reconnaître le gardien prétendu qu'elle aurait député, s'il n'a pas été duemem infhuit
par l'intimation? Et ce qui eH vrai vis-à-vis le faifi, l'dl:
L'ms contredit vis-à-vis fan procureur fondé, non à l'effet
qu'il faille· une intimation perfonnelle à ce dernier, mais.'
pour qu'il puiffe fe prévaloir auffi du défaut de notiflcatioa·
à· fan mandanr~
.
Telle efl: exaél:emenr la pofition d'Etienne....... cueillant
&. faifant cueillir les olives de fan frere le 1') Novembre;:
auffi le voit-on procéder à cette opération en plein jOllF,
fans fe cacher, lui, fan époufe & les femmes qu'il avoit·
louées pour cet objet. Il lùit delà qu'Etienne....... qui ne fe
cachait pas, ne vouloit ni ne croyait commettre aucun délit,..
& qu'il annonçait dans fi s procédés la bonne foi & la fécurité la plus entiere.
Me. Turfel difèuta enfuite les dépofiüons des témoins,
& obferva, d'après cetre di[cuHion., que fous aucun rapport
ni prétexte, il n'y avoit eu lieu à informer comre Etiellne......_
que la procédure de Fabre émit infeél:ée·dll plus grand de tous
les vices, le difaut de di/il; qu'ell.e devoit être caffée comme
nulle. Etienne....... avoit cueilli de bonne foi, dans l'état d'une
confcience erronnée, fi l'on veue, par fon ig·norance, mais:
non avec le deiTein de mal faire. Averti, il avait offert. d~
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bonne foi de rendre les olives; il a."oit véritablement man::
qué à un point de forme, d'offrir par fommation les olives
à Fabre ~i les avoit déja refufées. Ce dernier favoit
qu'Etienne....... fe mettoit en devoir de payer les tailles. S'il
n'avoit voulu que confl:ater le fort que les olives avoient eu,
pour fe difculper, il n'avoit sûrement pas befoin de faire
informer. Une fommation à Etienne.:..... pour qu'il eût à les
lui rendre, au plus, une fimple requête en re1faifiifement ou
en paiement, eut paré à tout. C'efl: donc fans objet qu'il
avoit faie informer. Me. Turrel démontra toujours plus l'oppreffion par l'enfemble des démarches du f~quefl:re, telles
que l'accédit & le procès extraordinaire.
Sur la quefl:ion de la commune exécution, Me. Turrel
établit que le créancier faifi1fant répond indubitablement du
fait du fequefire vis-à-vis le débiteur faifi; il rapporta d'ailleurs les pieces produites par Etienne....... qui prouvoient la
connivence qu'il y avoit euenrre Deleuil, Capus & Fabre,
telles que des aétes; des comparans, des fommations &
des quittances, & il conclut à ce que l'appellation & ce
dont était appel fu1fent mis ~u néant; le décret de foit-in- ,
.' formé fîlt déclaré nul, pour n'y avoir eu lieu d'informer,
enfemble t<;lUt ce qui avoit fuivi; à ce que Fabre fût condamné envers Etienne....... & fon époufe à telle fomme que
la Cour arbitreroit, par forme de dommages & intérêts,
pour lefquelles adjudications '. enfemble pour toutes celles
i.1ue l'Arret accorderoit aux décrétés, en principal, intérêts
& dépens, Gafpard Fabre feroit contraint par toutes voies
de droit, & même par corps; & de même fuite, que l'Arrêt
fût déclaré, en toute!> les adjudications, commun & exécutoire contre Deleuil & Capus, avec même contrainte.
Par 'Arrêt du 23 Février 1781, prononcé par Mr. le
Préfident de Mazenod, les conclufions furent· fuivies ; les
liv., avec dépens.
dommages & intérêts furent fixés à
Plaidant Mes. Portalis, Gaffier & Laget.
sa
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PALAIS
ARR È T
DE
PROVENCE,_
K<'''
-rJ.;<>
L X XII J.
Pendant l'injlance en refeifion, la prefeription pqllr l'exercice:
da retrait ne court pas.
_
Le retrait lignager a-t-il lieu dans l'échange de plt1ùllrs fonds"
lorfJll'il y a fixation des prix?
E 2 l Mai !772, fieur Pierre-Dominique Barry, BGlur-_ geais de la ville de Cuers, échangea avec Honoré Gi-raud, Marchand Cirier, une baftide qu'il polfédoit dans leterroir de Cuers, avec des terres, baftide & coins de terre
-que ledit Giraud polfédoit dans le même terroir.- le prix des
haftides fut refpeétivement fixé. Par le même aél:e, le fieuÈ:Barry vend à Giraud une autre rerre fhuée au çe:rroir- de·
Fierrefeu. Quinze jours après, le fie ur Barry impérra - des
le.ttres de refcifion envers l'échange feulement, & en. 1776
intervint Arrêt qui ordonna une eftima;ion préalable; les:
parties tranfigerent le 23 Juillet de la même année; le con-trat du 2 l Mai 1772 fut confirmé. dans toutes fes parties"
Le 12 Août, Me. Jofeph-Roch Barry afIigll a· Giraud en défemparation par voie de retrait lignager. des terres par lui.
acquifes, rant dans le terroir de Cuers, que dans celui dePierrefeu, fous l'offre de lui rembourfer tout ce qui devroitlégitimé ment l'êrre.
Giraud rapporta ceJIion du droit de prélation-. du SeigneuL
de Pierrefeu pour les biens limés dans fa terre; Me" Barry
fe départit alors de fa demande en retrait fur' ces mêmes·
biens, & fe borna à ceux fitués à Cuers. Il inteivint une·
Sentence des Officiers de ce lieu qui admit le rerrait. AppeL.pardevant le Lieutenant de Toulon;- Sentence qui confirme,
la premiere. Autre appel pardevant la Cour.
On difoit gour Giraud, que l'aél:ion de retrait n'àvoit pas:
été intentée dans le temps. La queftion de favoir- fi l'aél:iom
e8 retrait çourt ou ne ç.OUrt pas pendant l'inftance en. œ[.-
L
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JOURNA~
-cilion, el!: fort controverfée. ( Duperier, tom. 2 ,p. 37)' )'
Le plus grand nombre de ceux qui l'ont traitée, la décident
contre le retrayant lignager, qui doit, difent-ils, fe charger de l'événement du procès, n'étant pas juf!:e que l'acheteur que l'on veut évincer, fatTe des pourfuites dont un autre
doit profiter.
Il ef!: de principe, quoique Dumoulin dife que pendaht
l'jnll:ance en refcifion la prefcription ne court pas, que
pendente refcifione contraélus tene!. L'aél:e ef!: parfait par -le
feul confentement des parties, configné dans la forme prefcrite par la Loi. Peu importe qu'il contienne pour un des
contraél:ans une léfiun airez forte pour le faire annuller.
Avant qu'il fait refcindé, il dt parfait; il fubrf!:e comme
tel, & fun exécution ef!: pleine & entiere. Cela réfulte même
de la prononciation du jugement qui intervient dans l'infrance en refcifion; car, fi le vendeur ef!: débouté de fa demande, la vente n'dl: poinr ratifiée; elle cil: au contraire
déclarée bonne & valable du jour qu'elle aéré pairée. L'acheteur n'acquiert point de nouveaux droits; il eil: jugé feulement qu'il les avait tous après la fignarure de l'aél:e. Or,
s'il les a eu dès ce moment, l'aél:ion en retrait Il dû courir,
parce que cette aél:ion naît à l'inf!:ant même où. l'achereur
devient propriétaire.
Qu'on regarde, fi l'on veut, une vente attaquée par léfion
comme une efpece de vente conditionnelle qui peut être
anéantie par un év·énement encore incertain; alors elle aura
lll1e parfaite ana!ogie avec les aliénations fous claufe de rachat ou de réméré, & devra être foumife aux mêmes regles.
Or, tous les Auteurs attef!:ent que nouobf!:ant la faculté de
rachat inférée dans l'aél:e, l'aél:ion' en retrait courr contre
le lignager; elle court même pendant le rachat ftarutaire.
Ç'eH le· fentiment de Defpeitfes, tom. l , part. l des contrats, feaion 6, nO. 10, pag. 7 'J; de Dunod, des retraits,
chap. S, pag. 26.
En effet, qni de deux perfonnes doit pourfuivre un procès,ou celle qui en recueillira un droit utile, ou cette autre
'].\"on obligerait de s'en dépouiller en faveur de la premiere?
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P ALAÎs
ni
PROVÈN'Cl!:
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Nè repugnerait-il pas autant à la raifoh qu'à 1'équité de
foumettre l'acheteur à fuivre une inil:ance longue & ruineure,
tandis qu!un tiers feroit aucorifé à lui enlever les proRts
qu'il pourroit y bite? Auffi 'la plupart des Auteurs fe font
élevés 'contre une pareille injuil:ice. 'C Pothier en fon traité
des retraits, pag. 22 l , '& Pail:our. )
Quel que puilfe être l'événement du procès, le fonds ac,quis par le retrayant lui repond toujours de ce qu'il a payé
pour l'acquérir, & le vendeur ne peut l'obliger à le lui reftiruer, qu'en lui rembourrant avant, tout ce qu'il a reçu. Dans
le cas prérent, il Y avoit' encore une rairon particullere qui
donnoit une nOllvellè sùreté au tetrayam. L'aél:e de vente
écoit attaqué fous prétexte de léfion d'outre-moité; quand
même l'aél:ion du vendeur eût été fondée, il ne pouvoit
pas exiger la reil:irution du fonds, aliéné, puirque la Loi
lai'ire an choix de t'acheteur de refcinder l'aél:e ou de l'entretenir, en ajoutant ~e fupplément du prix. Le retrayant qui
efl: 'à fan lieu & place, qui doit ufer de fes draits , 'jouit
de 'la même altemative.
D'ailleurs ~e retrait n'a pas lieu au contrat d'échange,
,in permutatione cejJàt jus prœlationis. Si le Seigneur ne peut
pas retraire, à plus forte raiion le lignager ne le pourra
pas, puifque celui-ci eil: bien moins favorable que le premier. Si de part & d'autre on a ell:imé les fonds, ce n'eil:
que pou.r fixer les droits qui pOl1voient être dus au tiers.
Une pareille ell:imation ne change point la narure du contrat; les Auteurs ont feulement examiné, fi lorfqu'il y avait
de la part de l'une des parties 'le retour d'une fomme 'confidérable, le rerrait ne devait pas avoir lieu. Plufieurs ont
penfé que lorfqu'on ne pouvoir pas préfumer la fraude, quelque confidérable que fût le retour en argent, le retrait devait être rejetté, parce qu'il eil: impoffible au retrayant
d'indemnifer, ainfi que le fouhaite la Loi, la partie qu'on
dépouilleroit du fonds acquis par échange. Mais cous s'accordent à établir que quand la fomme donnée en retour ne
fllrpa.ife ,pas la valeur du fonds, le contrat fornY;: un vêr!.
�4~
JOURNAL
table échange, & que conféquemment le lignàger & mêmèle geigneur ne peuvent pas retraire.
On répondoit pour Me. Barry, qu'il ne devoit former une'
demande en retrait, & regarder comme valide, comme· exiftant un contrat fur lequel les parties élevoient une conteftation. Pouvoit-il donner à l'aél:e une exifl:ence & un effet
que la Loi pouvoit lui refufer? Dumoulin fur la coutume de·
Paris, §. 2.0, glof. J 2., nO. 8, a penfé & attefié que pendant
le temps de l'infiance qui compromet la validité de l'aél:e de
vente, le retrait ne doit pas être intenté, & conféquemment que la prefcription de cetre aél:ion ne doit pas courir.
Mourgues, pag. 13 l , parlant des ventes faites par les mineurs fans formalité de jufiice, anefie, d'après la Loi, que
la nullité de ces ventes empêche que la propriété ne palTe à
l'acheteur.
La vente nulle à caufe de la léfion d'outre-moitié efl: tout
auffi nulle 'que celle que le mineur fait de fon bien fans formalité. La Doél:rine de' Mourgues s'applique donc à un cas
comme à l'autre, & i~ en réfulte que pendant l'inHance fur
la validité de la vente, le parent ne doit ni ne peur agir.
C'eR le fen.timent de Duperier, rom.. 2, pag. 37'1'
L'Arrêt de Duperier n'efi pas le feul que la Cour ait
rendu fur cette queHion, il en efi intervenu un en 17'1)'
Le procès en nullité exifiant, le lignager tint un aél:e, par
lequel il déclara à l'acheteur qu'il entendoit exercer· le re-·
trait lignager, dès que le procès concernant la. validité de
la vente ferait jugé. L'acheteur lui répondît qu'il écoit prêt
à défemparer la. maifon, & foutint que malgré la circonftance du procè.s, le retrait devoir être exercé dans le terme
~é par le Statut. Le Lieutenant de Marfeille adopta cene·
défenfe; mais fur l'apPel, Arrêt du 15 Mai 17'1). qui ré-.
fOrma & jugea en conformité de l'Arrêr rapporté par Mr. deThoron & de la Doél:rine de Dumoulin. Ces deux Arrêts
font auffi rapportés par Larouloubre dans fon Recueil de:
Jurifprudence, tom. 2, nO. 17Par Arrêt du Q Mars 1781" au rapport de Mr. le Con,'
�'nu P Ài:AIS
DE
P ROVÈ NCl!:
4'63'
feiller de Saint-Martin, le retrait fut adjugé en l'état où
.tes biens fe trouvoient le 21 Mai 1772, en rembourfant
par Barry à Giraud les frais & loyaux-coûts & légitimes
acce/foires, fuivant la liquidation & fixation qui en ferait
faite par Experts; les dépens furent compenfés. Ecrivant
Mes. Pafcalis & Portalis.
ARR Ê T
L X XIV.
,La moitié de la dot conflituée par le pere lui faifant retour,
Juivant le Statut de la ville de Mar[eille, en clis de prédécès de fa fille & de [es petits-fils, Jupporte par moitié
les charges & les hypothe'lues.
ANS le mois de Mai 1772, fieur Pierre Blanc, Bourgeois de la ville de Marfeille, maria fa fille Catherine
'avec fieur Alexis-Boniface Jubelin, Marchand Drapier; il
lui confiitua en dot 7200 liv., qont 1200 liv. en valeur dll
'trou/feau, & 6000 liv. comptant. Les époux fe firent donation de furvie; favoir, Jubelin de 1000 liv., '& la Dlle.
Blanc de ') 00 liv. Quelques anuées après, la Dlle. Blanc dé>céda, laiffant deux enfans qui décéderent aulIi, l'aïeul maternel & le pere furvivant.
Le 2') Juin 1778, requête du fieur Blanc au Lieutenant
<le Marfeille en, condamnation contre le fieur Jubelin de la
fomme de 3 'i0o liv. pour la moitié lui faifant retour de la
dot confl:ituée à fa fille, fous la déd\lélion de 'Î 00 liv. de
la donation de furvie, avec hypotheque du jour des époufailles; & attendu la faillite du fieur Jubelin, ajournement
contre la ma/fe de fes créanciers pour alIifter en l'inftance,
fi bon lui fembloit. Sentence de défaut conforme à ces fins.
Les créanciers ne répondirent rien. Jubelin en appella pardevant la Cour. -'
On difoit pour lui, que la queftion dl) procès connfioit
à favoir fi la moitié de la dot conflituée par un pere qui
D
�'464
Jo
U'R:" N li. r;
,
furvit à: fa fille. &. à fes petits-enfans, lui fait retour franerIe'
de routes charges. Il· ne s'agit pas ici de confuiter les principes g.énéraux qui régiffent le droit de retour dans cette
province. Le Statut de Marfeille porte,. 1°. que quand une
femme meurt délaiffant des enfans, ceux-Gi fuccedent à ·leur
rnere, & recueillent conféquemment la do.t,. au préjudice. de
leur aïeul qui l'a conftituée;
que s'il nrrive que les enfans.
prédécedent leur aïeul maternel, la moitié de la dot conftituée
par celui-ci lui appartiendra, & l'autre moitié refter<l au pere,
de maniere que la do.t fera également par.tagée entre l'aÏèul
maternel & le pere: Quod fi prœdic7i li/m'i, fùpellito dic7o'
avo mâtemo, omne-s dec.eJfèrint, medietas il/ius ·dotis ad prœ.dic7um avum matemum dic70rum lioerarum, tl/nc fi'pe.lflitemredire
de6et; alia verà medietas apud patrem dic70rum libel'Orum, tunc
fupellitem remaneat; & fic pe.r hoc Statutum i!lam dotern profeè1itiarn di'vidimus inter patrern & a1lllrn dic70rum liberorurn.
L'intention de ce Statut a été qu'il. Y eût un IJ<1rtage égal
entre le. mari & l'aïeul; le mot. redire. n'a été employé que
d'une maniere indifférente ~ les mors qui fuivenr indiquent
d'une rnaniere c1a,ire & précife que c'eft un partage égal qui
doit être fair: dividimus inter patrem. & avum dic70rum libel'arum. Sur q.uoi en effet dt. établi le droit de. retour.,. qui
en lui-même eft c.ontraire li l'ordr.e des ch.ofes ?"Sur ce qu'i,l
ne, faut pas donner à.un. pere. déja trop affijgé d'avoir perdu
fa fille, cette autre affiiaion de lui faire perdre-la dot qu~il
lui ay,oit conflituée, aff/lao; non.. dall/r a..ff/ic7io; fur ce que
bien-lpin de refroidir- la générolité. des- par.ens, en leur faifant craind.re ce double inconvénient, il convient au con~
traire de les encourager à l'exercer, en leur préfentant
comme une. conîoJation l'efpoir de reçouvrer ce. qu'ils peuvent donner.
Le droit. de rerour·efi-accordé-à·!a- mere,·parce·que rien
ne l'obligeant à confl:iruer une dot à fa fille, il eH: juRe
d'établir dei> moyens pour l'engil.ger à favorifer fon établiffement; mais il n'en efl: pas de même du pere,_ parce qu'en
érabliffanr fes filles, il fait fon avantage autant que le leur;
il fa..tisf<lÎt ~ c;;e qq~ le~. LQix. e.l<ig~nt de luü iL remplit le
,,0.
-
• -
..·d
- . v.œ'1
�DU
PALAIS
DE
PROVENCJl:.
46}
'vœu de la nature, de la religion, de la [ociété; les Loix
impofent au pere l'obligation de conll:ituer une dot proportionnée à [on état & à fes facultés; s'il fe refufe à remplir
cette obligation, la Jul1ice l'y [oumet & l'y contraint. Auffi
n'el1-ce qu'en faveur de la mere que notre droit commun
a adopté & établi le retour. Le Statut de Mar[eille, qui s'dt
écarté de [es principes, qui favorifant moins les mariages,
met déja trop d'obl1ades à ce qu'ils [e multiplient, ne doit
pas être interprété d'une maniere qui rendroit [es difpofitions
plus fâcheu[es.
Si l'aïeul el1 malheureux de perdre fa fille, le mari ne
l'ell: pas moins de perdre une femme & des enfans, & il
ne faut pas ajouter à cette affliél:ion celle de le priver d'ua
bien qui de droit commun doit lui appartenir. C'el1 bien
affez qu'une Loi partil.Uliere l'oblige à admettre au partage
de la dot qu'il a reçue, celui qui, en la conl1ituar,t, a de!
defirer qu'elle flit perdue pour lui. Il [eroit tout à la fois dur
& injuRe de ne pas établir entr'eux dans ce partage une entiere & parfaite égalité.
.
On répondoit pour PaÏeul, que la Loi 4, cod. [olut:. matrim., décide que fi la fille qui a été dotée vient à mouriravant le pere, la dot retourne au pere qui l'a conl1ituée:
dos il patre profeaa, Ji in matrimonio decejJerit mulier, jilia
familias, ad patrem redire debet. Cette Loi renferme tlne
difpofition illimitée; elle ne parle pas du cas ot! la fille qui
prédécede [on pere, laiffe des enfans; ce qui fit naître une
grande difpute entre deux interpretes du droit, Martin t;.
Bulgare. Le premier [omenoit gue l'exil1ence des petits-fils.
faifoit ceffer le droit de retour; l'autre, que cette exiftence
n'y mettait aucun ob!~acle.
Il rel10it encor.e à .décider fi les petits-fils ayant prédécédé leur aïeul, la dot faifoit alors retour à cet aïeul; ces
deux quefl:ions ont été expreffément décidées & en termes'
fort clairs par notre Statut, qui ordonne que les enfans
fuccedem à la dot de leur mere; qu'ils peuvent la rranfmettre à leurs héritiers, & que venant à décéder ab ill&eJlat , leur pere, qui dt le plus proche des afcendans, filCNnn
�466
Jou RNA i
cédera à cette "dot. Ce Statut pa"roît bien rigoureux, parce
que l'exifl:ence des petits-fils ayam mis ohfl:acle au droit de
retour, il femhle que cerre exifl:ence ceJTam, ce droit doit
renaître; il combat d'ailleurs la volonté préfumée du pere
qui n'a confl:irué la dot que pour fa fille & fa pofl:érité.
Le Statut de Marfeille a pris un jufl:e tempérament;
il n'a ni accordé ni refufé entiéremem à l'aïeul le droit de
retour, lorfqu'il furvir à fa fille & à fes petits-enfans; il
veut dans ce cas que la moitié de la dot retourne à l'aïeul,
& que l'autre refl:e au pere. Mais cette moitié doit - elle
retourner à l'aïeul franche de toutes charges? On ne doit
pas confondre le droit de retour établi par la courume, &
celui qui dérive des Loix Romaines; ils produifent des effets
bien différens.
Suivant l'art. 113 de la coutume de Paris, & Ricard dans
fon traité des donations, parr. 3, chap. 7, feB:. 4, n. 766,
ce n'efl: que par droit de fucceffion que les dots retournent à ceux qui les ont confl:ituées. Dans les pays de droit
écrit, le droit de retour en faveur du pere & autres afcendans, n'efl: pas confidéré comme un droit de fucceffion ; il efl:
fondé fur une fl:ipulatiQn tacite & légale: parenti enim tacitam, ex Jlipulam ac1ionem damlls. L. unique, §. accedit,
cod. de rei llxoriœ ac1. Furgole, quefl:. 42, na. ~8, ')0 & ')6.
Le droit de retour efl: comparé au jllri poJlliminii dont
parle la Loi. Les biens donnés doivent néceJTairèment faire
retour fans aucune charge, hypotheque, limitation ou condition, parce qu'ils fom cenfés avoir refl:é" toujours au pouvoir du donateur; & comme le tiers n'auroit pu impofer des
charges & des hypotheques fur un bien qui ne lui auroit
pas appartenu, il ne le peut fur un bien qui appartient toujours au donateur, ju(qu'à ce que le retour ne puiife plus
avoir lieu par la furvivance des enfans ou petits-fils du donateur. Cependam le droit de retour ne produit pas des
effets exaél:ement conformes à fa nature; il efl: fournis fubfidiairement par la jurifprudence des Arrêts à cerraines
charge'>.
Ainfi, dans le reJTort du Parlement de Touloufe, les biens
�DU' PAL A 1 50
D E
PRO VEN C E.
467
donnés qui font retour, ne font fubfidiairement affeél:és qu'à
la dot & conventions matrimoniales; mais en Provence le
droit de retour a moins de privi!ege. Les biens qui en fone
l'objet font fournis indifiinél:emene aux hypotheques contraél:ées par le donataire, mais ce n'ell que fubfidiairemene
& à défaue de biens de ce même donataire. ( Serres, liv.
2., tit. 7, pag. 182; Duperier, tom. 1, liv. S, pag. 518;
fon Annotateur, pag. S2 1 ; & Mourgues, pag. 273. )Le principe eil: donc certain; les créanciers du donataire
ne peuvent attaquer le donateur & porter les exécutions fill"
les biens donnés, qu'après avoir difcuté les biens propres du
donataire; car li celui qui exerce le droie de retour n'eil: pas:
confidéré comme un fucceffeur, il s'enfuie qu'il ne doie fupporter les dettes que fubfidiairemene & à défaue des biensc
du donataire.
_
Id, d'après le Statut de Marfeille, la moitié de la dot
reil:e au pere qui furvit à fes enfans: remanet. Le pere recueille donc cette moitié par droie de fucce/Iion; l'aïeul ma-·
ternel au contraire recueille l'autre moitié par droit de retour: redit. Donc, d'après les principes généraux, l'héritierd'une moitié doit payer les charges, & l'aïeul maternel ne
peut y être fournis que fubfidiairement ,. & en tant que l'autre:
moitié ne fuffiroit pas.
L'a/Iiil:ance de. l'aïeul au contrat ne lui a point fait perdre les hypotheques' ou les droits qu'il avoit fur les biens;
confiicués. C'eH le [entiment d'Anne Robert dans fes Arrêts, tit. 4, chap. 14; de Brodeau, lett. N, fomm. 6.. Le
pere n'a/Ii!l:e au mariage de fa fille que par devoir & pourlui conil:ituer une dot; il faudroit, pour opérer une renon-·
ciation à fes droits, que fa préfence & fa fignature. ne pul:'.
fent fe rapporter qu'à cette renonciation. ( Decormis" tom.
2., col. 1 0 S6; Duperier dans [es Maximes de droit, pag.
5 1 7. )
Par Arrêt du 7 Mars 1781 , au rapport de Mr. le Confeiller de la Boulie, Jubelin fut condamné à refiituer à B1an~
la moitié de la dot, déduél:ion préalablement faite fur laL
totalité d'icelle 1 de la donation de [urvie gagnée par Jubelin"
Nnn20.
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Jou ll. N A L
_
des frais de la derniere maladie & funéraires de Catherine
Blanc & de fes deux enfans, fuivant la liquidation & hxa- .
tion qui en feroit faire par Experts; Blanc fut condamné
aux dépens. Ecrivant Mes. Emerigon & Laget.
..
ARR Ê T
LX X V.
Sur la compétence des Juges Confervateurs de Lyon.
Es fleurs Giliberr & Compagnie, Négocians de la ville
de Lyon, fournirent aux fleurs Ducros & Moraffany 7
Marchands à Marfeille, une partie de draps, en paiement
defquels ils avoient tiré fur eux une lettre de change de
1286 liv. qui fut acceprée , & enfuite proreflée. Les fieurs
Gilibert & Compag-nie affignerent Dueros & Moraffany
au Tribuual de la Confervarion de Lyon, & obtinrent une
Sentence de défaut qui les condamna au paiement de la
lettre de change.
.
Sur la lignification, Ducros & Mora1fany préfenrerent
une requêre à' la Cour, aux fins d'êrre déchargés de l'affignation au Tribunal de la Confervation de Lyon, comme
étant doublement incompétent : 1°. parce qu'on n'aurait
pas dÎl les dill:raire de leur Juge narurel; 'L 0 • parce qu'en
fuppofant qu'on eilt pu les affigner à un Tribunal érranger,
c'éroit aux Juges-Confuls de Lyon, & non aux Juges Confervateurs, qu'on eut di! recourir. Décret de foit montré
à pa rtie, demeurant rout en état jufqu'à la réponfe. Les
fleurs Gilibert & Compagnie demanderent la révocation du
décrer, & fur le concours des requêtes refpeétives, la
caufe fut renvoyée en jugement.
On difoit pour Dueros & Moraffany, que le Tribunal
de 11 Con[ervarion ne pouvait jamais devenir leur Juge,
parce qu'érant Provençaux & ayant droit en cerre qualité
de réclamer les privileges de la N arion, ils ne pouvoient
être aétiollnés que pardevant leurs Juges narurels. Les fleur~
L
�È PRO V B Ne B;
4159'
Gilibert & Compagnie n'avoient aucun titre, aucune oblig-ation particuliere qui pût rendre ce Tribanal compétent.
La lettre de change devoit étre acquittée à Marfeille;
,<:'étoit donc aux Juges-Confuls de Marfeille qu'on devoit
s'adreITer pour en faire ordonner le paiement; la nature
de la créance que la lettre de change préfentoit, ne lui
donnait aucune faveur, aucun privilege. Tous les Marchands
de la Province qui fe fournilTent à Lyon, n'entendent pas
fe foumettre au Tribunal des Juges Confervateurs. Il faut,
pour opérer cette foumiffion,' une fiipulation précife &
exaél:e que les fournilTeurs achetent ordinairement au prix
d'une rem ife de dix pour cent. Ici ces deux circon!lances
fi. décifives manquoient à la fois.
Mais euITent-ils eu le droit de les appeller fi loin &
devant des Juges étrangers, c'étoit du-moins aux JugesConfuls de Lyon qu'ils devoient s'adreITer. Les Juges Confervateurs forment un Tribunal beaucoup plus rigoureux &
beaucoup plus circonfcrit, auquel le créancier ne peut à
fon gré donner la préférence; rien ne l'amorifoit dans la
caufe'; les marchandifes n'avoient point été livrées en temps
de Foire, & la lettre de change n'étoit payable à aucune
de ces époques privilégiées qui fondent la Jurifdiél:ion des
Juges Confervateurs chargés d'aITurer les paiemens fiipulés
ou à échoir en temps de Foire.
Aux moyens de forme les lieurs Ducros & MoralTany
ajoutoient une défenfe fonciere. Il leur avoit été fourni
des marchandifes qui n'étoient pas de recette, & ils avoient
payé prefque en entier la lettre de change. Et c'étoit à
tort que pour fe conferver le privilege d'un pareil titre
de créance, les lieurs Gilibert & Compagnie avoient appliqué le paiement à d'autres articles.
On répondait pour les lieurs Gilibert ,que c'étoit fur un
expofé faux & auquel ils avoient été enfuite obligés de
renoncer, que les appellans avoient furpris de la religion
de la Cour un décret de tout en état provifoire. Ils avoient
.p'abord expofé qu'ils n'étoient pas eux-mêmes, les tireur
bu» A LAI S
D
�~a
JouR.Ar
de la lettre de change; qu'une contell:ation rurvenue eu'='
n'eux & les prétendus tireurs étoit la {eule caufe du défaut de paieme'ot, & que les fleurs Gilibert & Compagnie,
qui n'étaient repréfenrés que comme des ,tiers à qui la
lettre de change écoit parvenue par la voie de la négociation, n'avoient pas dû' ignorer, en's'en chargeant, qu'elle'
n'était payable qu'à Marfeille. C'était au contraire les fleurs:
Gilibert & Compagnie qui avaient tiré eux-mêmes filr les
fleurs Ducros & Mora1fany, non un fimple mandat, mais,
une lettre de change.
La lettre de change avoit été faite & acceptée à Lyon,
en paiement de marchandifes livrées à Lyon; elle devpic'
échoir le 10 Décembre, époque comprife dans le cours.
du paiement de Touffaint, l'un des quatre paiemens pour
la' sûreté de{quels les Juges Confervateurs ont été princi-paIement établis.
Me. Bermond, Subll:itut, examina fi des Marchands éta-.
blis dans la ville de Marfeille peuvent être convenus pardevant les Juges Confervateurs de Lyon pour le paiement
d'une lettre de change {oufcrite & acceptée à Lyon pour:prix de marchandi{es qui y ont été livrées.
Pour la décilion de cette quell:ion, il obferva que les'
Loix établies {ur le faü des lettres de change ont fixb.
les Tribunaux pardevanr léfquels il était permis d'en pour-·
fuivre le paiement.
On tient comme un principe facré & incontell:able;
que les Provençaux ne peuvent être clill:raits de leurs Juges,
naturels, pour être obligés de plaider devant des Tribunaux
étrangers.. La Cour n'a jamais permis que cette Loi fût
rranfgreffée, & elle a déchargé des affignations données
au préjudice de cette maxime. Mars cette regle {ouffre
néanmoins des exceptions, & l'on ne peut pas dire que:
toutes les affignations données à des Provençaux devant
•
des Juge-s étrangers, {oient généralement nulles.
Les Négocians font jull:iciables des Tribunaux établis.
dans les différens lieux otl s'étend leur commerce; la nature'
de leurs opérations le,s foumet à leurs jugemens, & c'efr.....
-
.....-.
.-
--
-
�bu
PALAIS
bE
PROVENCE:
'471'
fcl'eux qu'on peut dir'e qu'ils ne font étrangers danS aucun
pays. On peut dire auffi que par la nature de leurs obligations, ils renoncent tacitement à tous les privil ges de Ju.
rifdiaion qu'ils pourroient réclamer.
, L'Ordonnance du Commerce, tit. 12, art. 17, porte
'que dans les matieres attribuées aux Juges-Confuls, le créan:cier pourra faire donner l'ajJignation li [on choix ou au lieu
du domicile du débiteur, ou au lieu auquel la promeffi a été
faite {;. la marchandife fournie, ou au lieu auquel le paiement doit être fait. Cetre difpofition n'a. rien d'obfcur;
elle efl: d'ailleurs confirmée par la jurifprudence la plus
confl:ante ; de forte qu'il n'efl: quefl:ion que de [avoir fi les
.fieurs Gilibert & Compagnie étoient précifément dans le~
circonfl:ances portées par cerre Loi.
La lettre de change fut tirée à Lyon fur Ducros &
Moraffany de la ville de Marfeille, qui fe trouvant à Lyon
dans le même moment, en firent .l'acceptation pure &
fimple, conformément au vœu de l'Ordonnanct':. Quoique
la lettre de change ne faffe point mention des ma rchandifes livrées, & que cette circonfl:ance ne foit point conftatée dans le corps de J'obligation, le genre du commerce
de Ducros & Moraffany, & fur-tout J'aveu .qu'ils ont fait
eux-mêmes dans le co.urs de leurs défenfes., ,jufiifie que
cette lettre n'a été fournie qu'en paiement de marchandifes. Les fieurs Gilibert & Compagnie réuniffoient le concours des deux circonfl:ances prévues par l'Ordonnqnce; ils'
ont donc pu jouir de la faculté qu'elle accorde pour lors
au créancier de choifir le lieu· où il veut affigner fon débiteur.
,
.
Il efl: vrai que Jouffe dans fon COlllmentaire de l'Qrdonnance du Commerce femble avoir attefl:é le contraire,
en difant qu'en matiere de lettres de change, on ne peut
faire ajJigner 'lue pardevant le, Juge du domicile du débiteur, ou au lieu auquel le paiement doit être fait. Mais
outre que la réflexion de 'cet Auteur ne fauroit jamais
porter atteinte à une' difpofition de l'Ordonnance, claire,
�472.
Jou RNA r;
précife & obfervée, elle ne préfente point une opinîan
déterminée & certaine. Cette réflexion qui fe trouve à la
fuite de quelques raifonnemens de l'Aureur fur cet article,
n'ell: fourenue ni par ce qui fuit, ni par ce qui précede ,
puifque cet Auteur obferve immédiatement auparavant,
que le lieu!-tù la promeffi a été faite &. la marchandife four~
nie, étant ft; lieu où le débiteur a contraaé, il eJl jufle
qu'il puiffi y bre ajJigné.
L'origine de la lettre de change· qui donne lieu à l'incident, eil: parfaitement connue, elle a été véritablement
titée à Lyon, acceptée & fournie à Lyon pour des marchandifes qui y ont été livrées; l'Ordonnance n'a pu exiger
d'aurres circonil:ances pour autorifer le créancier à porter
fa demande ou devant le Juge du domicile du débiteur,
ou devant le Juge du lieu où l'obligatiou a été faite & la
marchandife fournie; tollt ce qu'on peur dire touchant
l'obligation d'affigner le débiteur au lieu de fon domicile ,_
ou au lieu auquel le paiement doit. être fait, ne peut re-·
cevoir dans cette caufe aucune application.
Ces maximes, quoiqlle vraies en général, & quoique
obfervées dans les matieres ordinaires , celfent de faire
regle en matiere de lettres de change, parce qu'il exifie
une Loi particuliere qui a déterminé les Juges qui pouvoient
feuis en connaître. AinG les Geurs Gilibert & Compagnie
ont pu fe difpenfer d'affigner leur débiteur pardevanr te
Juge du domicile, ou pardevant le Juge du lieu où le
paiement devoit être fait; ils réuniffoient les deux cir-confiances q.ui. donnent aux créanciers le droit de porter
leur aél:ion pardevant le Juge du lieu où lamarchandife a
été livrée; & le Tribunal de la Confer'.'atjon de Lyon apu connaître de leur demande.
La défeél:uoGté des marchandifes alléguée par Ducros
-& Moraffany eil: un moyen foncier qui. ne peut être èm- ..
ployé ni pour obtenir une· dé.charge d'a>ffignation, ni pOUl:'
obtenir la furféance à un- Jugement confulaire; mais ·indépendammen~ de ce.ete réflexioll, Ducras & Moraffany:
'~eroien;
"
�DU
PAL AIS
DE
PRO VEN CE.
'4-73
feroient toujours non recevables à propofer cette exception, parce qu'ils n'ont pas fait conflater de cette défecruofité par aucun rapport.
L'allégation de Ducros & Moraffany, portant qu'ils auroient dû être a/Iignés pardevant les Juges - Confuls de
Lyon, & non pardevant le Tribunal de la Confetvatiof1 ,
te trouve détruite par le '"parere rapporté par les fieurs"
Giliberr & Compagnie, qui prouve qu'il n'y a à Lyon
aucune Jurifdiaion confulaire, & que la feule qu'il y air;
pour le commerce, dl: la Confetvation des privileges royaux
des Foires de Lyon.
Me. Berrr.ond conclm à· ce que fans s'arrêter aux requêtes & recharges des fieurs Ducros & Moraffany, dont
ils feroient démis & déboutés, les fieUFs Giliberr & Compagnie fulfent mis fur icelles hors de Cour & de procès.
Par Arrêt du 7 Mars 178 l , proooncé par Mr. le Préfident de Saint-Vincent, les lieurs Ducros & Moralfany
furent déboutés de leur demande, avec dépens. Plaidant
Mes. Laget & d'Eymar Deoans.
ARR Ê T
L X X V J..
Lorfilu'il s'agit d'une écrite prit'ée, la formalité de l'avùation doit-elle précéder t,ouCes les autres procédures?
P
Ar écrite privée du 2 Avril 1777, Mre. Jean-Baptinelolien , Prêtre, céda à Jofeph Louche du lieu de Bras_
la fomme de 800 liv.. à prendre fur celle de sooo liv. à
lui due par Jacques Julien, fon frere, fuivant le contrat du.
9. Septembre 1776, avec la penlion de 40 li\'. en dépendant. Mre. Julien le fubrogea à tous fes droits. Louche·
fit contrôler le 17 Mai 1779 & eorégiflrer cette écrite,
aux écritures de Me. Aubert, Notaire à Bras; il la fit:
enfuite intimer à Jacques Julien, qui ne r-épondit rien~
LQuc;he n'étant pas payé_ de. deux renGo.os échues).. fit:
OOQ
�DU
PAL AIS
DE
PRO VEN CE.
'4-73
feroient toujours non recevables à propofer cette exception, parce qu'ils n'ont pas fait conflater de cette défecruofité par aucun rapport.
L'allégation de Ducros & Moraffany, portant qu'ils auroient dû être a/Iignés pardevant les Juges - Confuls de
Lyon, & non pardevant le Tribunal de la Confetvatiof1 ,
te trouve détruite par le '"parere rapporté par les fieurs"
Giliberr & Compagnie, qui prouve qu'il n'y a à Lyon
aucune Jurifdiaion confulaire, & que la feule qu'il y air;
pour le commerce, dl: la Confetvation des privileges royaux
des Foires de Lyon.
Me. Berrr.ond conclm à· ce que fans s'arrêter aux requêtes & recharges des fieurs Ducros & Moraffany, dont
ils feroient démis & déboutés, les fieUFs Giliberr & Compagnie fulfent mis fur icelles hors de Cour & de procès.
Par Arrêt du 7 Mars 178 l , proooncé par Mr. le Préfident de Saint-Vincent, les lieurs Ducros & Moralfany
furent déboutés de leur demande, avec dépens. Plaidant
Mes. Laget & d'Eymar Deoans.
ARR Ê T
L X X V J..
Lorfilu'il s'agit d'une écrite prit'ée, la formalité de l'avùation doit-elle précéder t,ouCes les autres procédures?
P
Ar écrite privée du 2 Avril 1777, Mre. Jean-Baptinelolien , Prêtre, céda à Jofeph Louche du lieu de Bras_
la fomme de 800 liv.. à prendre fur celle de sooo liv. à
lui due par Jacques Julien, fon frere, fuivant le contrat du.
9. Septembre 1776, avec la penlion de 40 li\'. en dépendant. Mre. Julien le fubrogea à tous fes droits. Louche·
fit contrôler le 17 Mai 1779 & eorégiflrer cette écrite,
aux écritures de Me. Aubert, Notaire à Bras; il la fit:
enfuite intimer à Jacques Julien, qui ne r-épondit rien~
LQuc;he n'étant pas payé_ de. deux renGo.os échues).. fit:
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�474 _
J
0 11 RNA L
affigner Julien au Liéutenant des Soumiffions de Brignoles.'
Celui-ci répondit qu'il avait payé fan frere, & prétendit
que Louche n'avait aucun titre contre lui pour l'affigner
devant le Lieutenant des Saumiffions. Louche appella au
precès Mre. Julien, & fit affigner l'un & l'autre pour
venir avérer & reconnaître l'écrite privée & la fignature
mife au bas. Sentence qui déboute Julien du relax, & 01'dOlJne qu'il fera pourfuivi fur le fonds & principal. Appel
de la part de Julien.
On difoit pour lui, que Louche n'avoit pas un titre qui
pôt l'autorifer à fe pourvoir au Tribunal des Soumiffions.
Ce Tribunal eil: une Jurifdiél:ion cartulaire & de rigueur,
devant laquelle on ne peut fe pourvoir que quand on ell:
porteur d'un aél:e par lequel les parties s'y font foumifes;
il faut encore ou que cet aél:e fait public, ou qu'il ait été,
3-véré & reconnu devant le Juge compétent. Ici le titre de
Louche était la ceffion qui lui avait été faite par Mre.
1ulien; cetre ceffion était un aél:e privé, il ne l'avait pas
faire avérer & reconnoîrre avant d'intenter fan aél:ion; elle
n'avoir aucune aurhenticité; il ne pouvait conféquemment
pas. s'en fervir pour inveil:ir le Tribunal des Soumiffions.
C'eil: aina que le décident MalTe fur le Sratut, pag. 2.) l
& 233, & Mourgues, pag. 397. Julien s'était fournis à ce
Tribunal par l'aéte du 9 Septembre 1776; mais par cet
aél:e il n'avait contraél:é aucune obligation. en faveur de
Louche; il ne s'était obligé que vis-à-vis Mee. Julien. Ce
titre n'a pu être celui de .Louche que par acceffion; fan
véritable litre eil: le tranfport qui' lui a été fait, & tant
que ce tranfpoi'[ n'a pas été reconnu & avéré, tant qu'il
n'a pas été authentiqué, il n'a pu lui fervir à porter fan
aél:ion devant le Lieutenant des Soumiffions.
On répondait pour Louche, que le titre en venu duquel il avait agi, érait l'aél:e du 9 Septembre 1776; &
de même que Mre. Julien était fondé en vertu de cet
aéte de fe pourvoir contre fan débiteur devant le Tribunal
des SoumiHions, Louche l'était auffi , parce qu'en fa qualité
de cefiionnaire il était devenu l'image & le repréfentant -
�T>
DU
PAL AIS
DE
PRO VEN CE.
4
de fan cédant. En difant que cette ceffion n'écoit ni avéré~
ni reconnue, quand Louche a intenté fan aél:ion, Julien
n'a fait qu'une objeél:ion frivole; il excipe du droit du tiers.
Il n'y au'roit eu que Mre. Julien qui, en conrell:ant ou en méconnoiffant la ceffion par lui faite, eut pu en rendre néceffaire l'avération; tant que Louche n'a pas eu à s'en fervir
contre lui, il n'a pas eu befoin de la faire avérer; le feul
titre authentique dont il a eu befoin pour inveIl:ir le Tribunal des Soumiffions, eIl: l'aél:e de 1776.
Mr. l'Avocat - Général d'Eymar de Montmeyan obférvaque la queIl:ion du procès confiHoit à favoir de quelle nature eH la formalité de l'avération, & fi elle doit, de /
la part de celui qui n'a pour titre qu'un, écrit privé, précéder indifpenfablement toute autte démarche contre le
débiteur.
L'on trouve dans l'Ordonnance de 1667 un titre entier
relatif à la matiere; c'eH celui des compul[oiFes & collations des pieces. Les quatre premiers articles ont uni'quement rapport au cas où une partie ayant iQtérêt de
rapporter une piece qu'elle n'a pas en fan pouvoir ,. eIl::
obligée de recourir au Juge pour en faire ordonner la compulfion & collation. Le cinquieme article fe ra pproche ml
peu plus de l'hypothefe aél:uelle. Il eil: queIl:ion de reCOI1-·
noiffance & vérification d'écritures privées;. l~ Légiflateury regle la forme dans laquelle ces reconnoiffances & véri-.
fications doivent être faites, & quels font les Juges pardevant lefquels on doit les demander; mais rien dans cet·
article ne fixe & ne détermine d'une maniere irrévocable
l'inHant précis où l'avéra tian , ou la reconnoiifance d'une·
écriture privée doit être faite, fur-tout à peine trle nullité·
de toutes les procédures qu'on aura pu faire avant d'avoir'
rempli cette formalité.
L'Edit de 1684 peut être regardé comme explicatif de:
cet article; le Légiflateur y entre dans de plus grands détails filr la forme des avéra tians ou reconnoiifances &
vérificarions d'écritures privées. Son but, ainli qu'il l'annonce lui-même ~ a été. de cemédier aux différen5. UC1g,es
0002..
�~6
JOUR.A~
abuGfs qui s'étaient glilfés en plufieurs Sieges & Jurifdic;
tions du Royaume, de rendre uniformes & de modérer
les frais qu'on avoit pris occafion d'augmenter. Mais rien
encore dans les dix articles dont cet Edit ou Réglement
dl: compofé, ne fupplée ail filence de l'Ordonnance fur la
,fixation de l'époque précife & péremptoire à laquelle l'avération doit être demandée. AinIi, s'il dl: dit dans l'article
premier que le créancier par aél:e privé fera tenu d'en
faire donner copie avec l'exploit d'affignatioll, l'article 2.
porte feulement que ce même créancier pourra faire déclarer en même temps à fa partie qu'après un délai qui
ne fera jamais plus (ourt que de trois jours, il demandera à l'Audience du Juge devant lequel il le fera affigner.,
'que la promelfe ou billet foit tenu pour reconnu. Ce mot
pourra eH Iimplement faculcatif, & annonce par lui-même
'que le demandeur dl: libre d'obferver ou non la formalité qu'on lui indique.
'
II Ya plus, & l'arr. 6 du même Edit ou RégIe ment fuppofe
que le demandeur a ufé de la liberté qu'il a de négliger
d'abord cette formalité, puifqu'iI porte que dans le cas où il
. s'agira de vérifier une écriture contell:ée, s'il y a défaut de ,
comparution de la parc du défendeur, il fera ordonné que la
-piece fera tenue pour reconnue, fuppofé que le deman'deur n'eût pas déj'l obtenu un premier jugement à l'Audience qui l'ordonnât ainG. L'arc. 9 ell: bien plus fort encore; car il donne à induire que l'on peut même obtenir
-une Sentence définitive avant d'avoir 'rapporté un jugement
préparatoire qui ordonne que la piece privée fera tenue
pom reconnue. En effet, cet arcicle dit feulement que
lorfqu'on aura pris cette précaution, on aura après la condamnation fonciere hypotheque du jour du jugement d'avération. Si le Légifiateur eût entendu qu'à faute d'une avération préliminaire, toutes les procédures fubféquentes,
& même la Sentence définitive, feraient nulles, n'auCrait-il pas dû le déclarer dans cet article, qui femble pré-[enter un tom autre fens?
Dans l'hypothefe aél:uelle (continua
Mr. l'Avocat-Gé"";
,
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A LAI S
D Jl
PRO VEN C E:
477
néral) le défendeur n'a pas même befoin d'exciper de ce
lfi1ence, ou d'en tirer des conféquences fi érfndues; un
jugement qui déclare la 'ceffion dont s'agit avérée & re~
'Connue, Il précédé celui qui déboute Julien de fan relax.
Il n'dl: donc plus quell:ion de décider fi l'avération doit
'précéder, à peine de nullité, la Semence définitive, mais
feulement fi. elle doit être la premiere des procédures &
le début du demandeur fous la même peine.
Loin que le réglemem de 1684 femble le décider ainu ,
il paroît au contraire par ce même réglemenr que le de·
mandeur ell: libre de différer tam qu'il vem, ou même peut~
être de négliger taut-à-fait cette formalité qu'on veut faire
regarder comme effentiellement préliminaire. L'arr. 9 porte
en termes exprès la feule peine dont le Légiflareur ait menacé de le punir, en· cas de délai de fa part; ,'eH: le retar-clement de fon hypotheque, qui ne peur dater que du jour
<le l'a.vération, & non, pas de celui de la fimple demande~
Tel eil: en effet le véritable caraél:ere de l'avération; il
<onufte à donner au titre privé pour lequel on, la demande"
une publicité entiere qui le fait monter au rang des aél:es
paffés pardevant Notaire, & qui donne naiffance à l'hypotheque du moment 'qu'elle ell: acquife. Mais on ne voie
nulle part. ni dans la Loi de 1667, ni daRs celle de 1684,
'Gu'il fait de fon effence de précéder routes les' autres procédures, & que fan omiffion fuffife pour les annulle~. D'ailleurs
l'une & l'autre de ces deux Loix paroiffent ne prononcer que
dans le cas 0(1 la piece privée dont on fe fert, dt de la
main même de celui contre lequel on l'emploie: or dans ce
'Cas, la demande en avération paroît bien plus naturelle, &
d'ailleurs bien moins difpendieufe, puifqu'elle n'amene
point de nouvelles parties au procès.
,
La ceffion que l'on faifoit valoir contre Julien n'étaie
point de fan écriture; la demande en avération de cette
,piece entraînait par conféquem des frais plus confidérables,
puifqu'il fallait affigner de nouvelles parties. Si Julien avait
-eu originairémem quelque fcrupule fincere fur la vérité de
'.,la piece qu'on hJi oppofoit ,. depuis J'époque de la .fignifi...,
�~B
JOURNAL
cation, n'avûit-il pas plus de temps qu'jllui en f<il1oit pour'
s'en éclaircir lui-même avec fOll· frere? Les Jouees -qu'il a,
voulu conferver fi long tems , & avec tant d'affeél:atioll, ne
pourront être regardés ni comme légitimes, ni. comme:
honnêtes.
La Loi ne dit nuIte parr que le créancier par titre privé
foit tenu de faire avérer fon tirre·, préliminairement à tout &.
d'abord après l'affignatioll ; elle dit feulement & expreffémenc
qu'elle le pourra: or une fimple faculté n'dl: point un ordre exprès, un ordre fi rigoureux, qu'il emporte de plein
dro.it, en cas de contravention ,. la peine de nullité, & qu'il
donne au défendeur le droit de fe faire relaxer.
Mr. l'Avocat-Général condut à la confirmation de la Sentence.
Par Arrêt du 9 Mars 178 l , prononcé par Mr. le Préfident de Saint-Vincent, les conclufions furent fuivies, &.
Julien condamné aux dépens. Plaidant Mes. Laget & Leclerc.
&
ARRÊT
LXXVII.
On ne peut délibérer que dans un Confèil' général c.ompofè de.
tous c.hefs de famille, filr un objet qui intére.f!è chaque·
habitant en particulier, fingulos ut {jngulos.
L
E Confeil de la Communauté de Bargemon tenu· le
24 Août 1777 délibéra de mettre awc. encheres les
berbages & glandages de la CommUliauté peur ,le temps
de quatre années. Baude, fous le cautionnement de Iofeph
CaIl:ellan, fit une oftte de 170 liv., fous la réferve d'une
coline pour le Boucher feulement ;.1a délivrarnce lui en fut·
paffée par aél:e du 2 l O&obre fuivaot. Les fieur,s Ifuard ,
Jean-Baptifl:e Cahaffe & Marc-Antoine Fenin fe rendirent
oppoG1ns à la Délibération, & la caufe fut porrée pandeyao.tla Cour. Ils, firent affigner Ba).lde, Fermier, pour affine,
�'bu
PALAIS
DE
PROVllNCi:
479
.nu procès, & venir voir prononcer la nullité tant des DéJibérations, que du bail qui lui avait été paifé, fi mieux
il n'aimoit renoncer au bénéfice de cet aél:e, & fe foume~tre à l'événement de la demande en oppofition ôr ca(ration des Délibérations, auquel cas il feroit difpenfé de
préfenter. Baude déclara qu'il laiifoit à la Commun'auté le
foin de défendre, fauf tes dommages-intérêts conrre qui
de droIt.
On difoit pour les oppofans" que, pour qu'une délibération produife fan effet, il faut qu'elle ait été prife dans la
forme prefcrite, légale & ufitée; c'eH-à.dire, qu'après que
le Confeil a été convoqué, le Conful qui dl: le chef de
l'adminil1:ration, propofe l'affaire qui donne lieu à l'aifem·
blée; 'lue cette affaire foit examinée, pefée, - & qu'on y
'<1élibere. Rien de tout cela n'avoit été fait dans le cas
préfenr '; en forte que les aél:es dont s'agit n'avoient ni la
forme, ni l'apparence de délibérations. De plus, parmi
les affaires communes il en el1: qui n'inréteifènt que la
Communauté, & qui n'affeè1:ent les habit:ll1s & poifé·
dans-biens que comme membres de ce Corps; il en efl:
d'autres' qui intéreifent chaque individu, chaque habitant'
en particulier. Les premieres n'ont befoin d'être préfen·
fées 'lue dans les Confeils ordinaires, &: quand elles [ont
plus importantes, dans des Confeils généraux; & c'eil:
,alors le ëàs de la Loi 19, jf. ad municipalem, qui veut
-que les réfolurions ou délibérations prifes dans un Confeil
duement convoqué, lient & obligent l'univerfaliré ~ quod
major pars curiœ effecit ,pro eo habetur ae fi omnes egerint.
Mais les dernieres ne doivent être traitées que' dans un
Confeil compofé de tous' chefs de famille: quod omnu
fimiliter tangit, ab omnibus comprobetllr. (L. S, Cod. dt::'
auc7orit. prœjland. &: Godefroy fur la Loi 19, jf. ad municip. )
La difpofition de cette Loi a été confirmée par l'opinion des'Aureurs. (Bacquet, des droits de jul1:ice, ch. 29,
n. 24, & Dumoulih [ur la couru me, de Paris, §. 3, glof. 4,
n. l S.) Elle eft exaél'enient fuivie dans la p':atique. L'on
'Voit tOUS les jours que dans les cas majeurs, comme
�4 80
JoU' RNA .B
qUJnd il s'agit d'établir un c'apage ou autre impolltion ei:!'
traordinaire & perfonnelle, de foumettre les habitans à
une tafque ou à la direél:e générale, à la banna lité ou
autre fervitude pareille, l'on exige un Confeil de ~ous
chefs de famille, qui ne' peut être convoqué qu'avec con.(loi!fance de caufe, & après en avoir obteml la permiffion
de la Cour, comme 1'0bCervent Mo.urgu.es, pag. 366 , & Me.
Julien dans fon nouveau Commentaire [ur les Statuts, com.
pag. 373, oll il cite p\uGeurs Arrêts, & entr'aucres celui
du 3 l Janvier 1716, rendu par la Cour des Aides qui, après
avoir caffé une délibération qU.e la Communauté de Senés
avoi.t p,rife, fit inhibitions & défenfes' aux Communautés
& lieux de la Province de célibérer aucun capage, [ans
y avoir été préalablement autorifées par la Cour•.
Ici (continuoienc les oppofants )- le droit de compafcuité eH un de ces droits ul1iverfels, qui n'appartiennent pas
[euleme.nt aux hJbitans comnie membres de la Commul);lUté , jingulis ut wziveTjis ,. ma·is qui intéreffimt chacun de
ces habitans perfonnellement & en particulier, jillgu/os ut<
./il/gu/os, comme l'affure Fagnan [ur le troifieme livre des,
l)écrétales, rom. 3, ch. l , cùm ill c/Jl/c.7is, pag•. 20 7, n. 9'
& I I , & Covarruvias, var. refol. lib.. l , cap. 17, n. 'I l :.
ius pa[ce.udi e./l commune pluribus ut jingll/is, 710n ut Unl-·
Tedis .
L,e Confeil' de la Communauté ne peut rien innover· delui-même touchant les pâturages publics; c'eH ainG que la
Cour l'a jugé le
1,780 au rapport de Mr. le Confeiller'
de la Roulie, contre la Communauté de Cucuron. Cette,
Communa.uré avoit délibéré de fufpendre pendant fix ans la
çompafcuité étahlie ; quelques'particuliers (e pourvurent enoppofition, & par l'Arrêt, la délibération fut caffée , fauf
~ la Communauté d'y fiatuer dans un Confeil général de·
tous chefs de famille.
•
Indépendamment de ce que l;e droit c~mmun donne à,
chaque habitant l'uf:àge dans les p~tura·ge.s: publics, il exifie..
'tne- Loi & un Réglement, qui fixe & déteFlnine l'exercice,
q~ l;ec. urage; & çec.te. Loi, publiqlle" qui eO:. le t.ifre de,
.
<;ha'lue
2,
�DU
PALAIS
Dl!
PROVllNCl!.
481
chaque 'habitant, ne peut pas être changée, violée, fans l'aveu de chaque intéreifé , ou du-moins de la plus grande partie.
C'ef!: dans ce fens qu'on doit entendre l'arr. 7 du tirre
2) de l'Ordonnance des Eaux & Forhs, qui dit que fi dans
les pâturages, marais, prés & patis échus au triage dr:s lzabitans, ou tenus en commun fans partage, il ft trouve CJuelCJues
endroits inutiles & fuperflus dont la Communauté putffi pra-_
fiter fans incommoder le pâturage, ils peuvent êt;'e donnés
ferme, après une réfolution d'aifèm61ée faite dans les formes.
Une aifemblée faite dans les formes efi un Confeil générai de tous chefs de famille, & ce n'efi que dans ces fortes de Confeils que peuvent fe prend;e légalement les réfolurions qui intéreifent chaque habitant en particulier, parce
que chaque intéreifé y donne fan fuffrage, comme l'a décidé l'Arrêt de Cucuron. D'ailleurs, ce n'efi qu'autant quedans les pâturages, il fe trouve quelques endroits, inutiles
dont la Communauté peut profiter fans. leur porter préjudice, qu'on peut les donner à ferme, ce qui prouve toujours mieux que les habirans ont un droit certain fur les
pâturages, droit auquel la çümmunauté ne peut porter atteinte. Il faut donc qu'avant de donner à ferme une partie
des pâturages ou des défens, tous les ufagers, c'ef!:-à-dire ,
tous les habitans, foient con fui tés & entendus, pour favoirfi tels & tels endroirs leur font inuriles.
D'ailleurs la tranfaétlon du 14 Juin 1'582, paflëe entre'le Seigneur & la Communauté de Bargemon, porte que le
Seigneur ni les liens ne pourront à l'avenir rroubler la Communauté, manans & habirans en la jouiffance de la terre
gafie, paifage, pâturages, ribé rages & défens. Or, il efl:certain que quand il s'agit de réformer/ ou de modifier ua
Réglement municipal, il faut a1fembler un Confeil de rous:
chefs de famille.
On répondoit pour la Communauté, qu'il efi de principe:
que les Communaurés d'habit ans font des Corps dom lesdélibérations liellt rous les membres. Leurs intérêrs étant
€OffimUnS, il faut néceifairement que le vœu de la pluralité
faife la loi; parce que l'intérêt de quelques particuliers fe
a
Ppp
�487.
Jou RNA L
trouvant ptefque toujours en oppofition a'lec l'intérét gé":
néral, l'adminiHration des Communautés tomberait dans
un état d'anarchie continuelle, fi la réfi!l:ance de quelquesuns. fuffifoit pour mettre des entraves à l'exécution de ce
qui e!l: déterminé à la pluralité des voix dans les Confeils
municipaux. C'efi ce que dit la Loi 19, if. ad mUlliâpalem.
Delà, fuivant les Loix conf!:itutives de la Province, les
Confeils municipaux des Communautés reglent & modifient,
fuivant les circonf!:ances, la maniere dont chaque particulier doit ufer des droits communs à tous, déterminent la
forme & le taux de leurs contributions aux impôts publics,
& fixent le régime de leurs biens patrimoniaux. Ainfi, quand
les Communautés polfedent des fours, des moulins & d'autres objets de pareille nature, c'e!l: par les délibérations de
leur Confeil municipal qu'elles reglent le taux de la mouture . & du foumage. Ainfi, quand elles tiennent de la main
du Seigneur, ou qu'elles font à tout autre titre, propriétaires
des terres incultes & des pâturages de leur territoire, elles
font les ma1crelfes de fixer par leurs délibérations, la maniere dont les habirans peuvent en ufer, d'établir des défens , d'en défendre l'entrée aux be!l:iaux dans tous les temps,
ou feulement pendant certaines L1ifons de l'année.
L'Arrêt d'Ongles que Boniface rapporte, décida qu'à
l'égard des pârurages & hérirages, le droit d'en jouir, d'en
ufer & de les vendre ou affermer entiérement, appartenoit
aux Syndics & Communautés, manans & habitans du lieu
d'Ongles. L'Auteur du Recueil de la Jurifprudence féodale
arreHe la même chofe.
Ourre les terres ga!l:es qui font abandonnées aux ufages
illimirés des habirans, & foumifes à la compafcuité de ceux
de Favas, la Communauté de Bargemon polfede de route
ancienneté, à rirre de bien patrimonial, deux défens appellés
de Tubac & de la Cofle. Par une ancienne délibération en
forme de Réglement de l'an 1432, elle en avoit permis
l'entrée à l'avérage de fes habitans depuis le commencement. de Décembre jufqu'à la fin de Mars, & elle leur avait
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
48'3-
défendu de l'y introduire pendant les huit mois reHans de
l'année, pour en réferver le pâturage aux bêtes de labour qu'un
gardien commun y menoit paître. Depuis long temps les
habitans one abandonné l'ufage d'établir ce gardien & d'envoyer leurs bêees de labour dans ce défens, & c'eH ce qui
a déeerminé la Communauté d'en bailler à ferme le pâturage
& la glandée. Cette détermination a été prife, approuvée
& exécurée en vertu de plufieurs délibérarions du Confeil municipal de la Communauté. Le premier objet de l'érabliffement de ce défens avoir éré d'avoir en ré[erve des pârurages
pour les bêtes de labour. Cerre deIlination n'ayanr pas lieu, il
devoie entrer dans les vues d'une [age économie d'en rirel'
un autre parci. Le premier bail n'a produie qu'une renre de
170 liv.; mais quand l'expérience de quelques années aura
faie connoîrre les profits dont cette ferme eH [ufceprible,
elle aura bientôe doublé de revenu.
Les Doél:eurs enfeignent ( il eH vrai) qu'entre plulieurs
propriétaires d'une cho[e commune, les uns ne peuvent y
faire des changemens fans le confenrement des autres, &
un [eul peur empêcher conrre tous les autres qu'il ne fait
innové; car, -comme dir Domat, chacun d'eux a la liberté de conferver fan droit tel qu'il eH. Mais il ne faut
que confulrer les lumieres de la faine raifon, pour fenrir que
.cerre regle n'eH applicable que dans les communions ou [aciérés privées, & lorfque chaque affocié & communiHe a
un droir de co-propriéré qui lui dl: propre & indépendant
de celui des autres. C'eH l'obfervarion de Ml'. Marc dans
fon Recueil de décifions, parr. 2, queH. 68 r.
La propriéré des pâturages réfide enriere dans le corps
-des Communautés; les membres n'ont que la fimple faculté
·d'en ufer. C'eH ce que décide Loffœus dans fan trairé de juribus univerfit., parr. 2, cap. 1, n. S(;;. feq. L'Arrêt de Cucuron
n'a pas décidé que toures les fois qu'il s'agir des pâturages,
il faille affemhler des Confeils généraux de toUS chefs de
famille. L'Orponnance des Eaux & Forêrs n'exige que le
réfultat .d'une affemblée faire dans les formes, ce qui ne
peut nullement s'appliquer à cerre forme extraordinaire
Ppp2
�~4
JOU~NAt
qu'ont néce1fairement les Confeils généraux de tous chefs
de famille.
. Par Arrét du 16 Mars 1781, au rapport de Mr. le Con[eiller de la Boulie, la délibération prife par la Communauté
de Bargemon le 24 Août, & l'aae du 21 OB:obre 1777,
furent déclarés nuls, & comme tels caffés, enfemhle ce qui
s'en étoit enfuivi , fauf & réfervé aux Con fuis de convoquer,
avec la permiŒon de la Cour, un Confeil général de touS
chefsjde famille, pour y étre délibéré fur l'arrentemellt dont
s'agit; les Confuls & Communauté furent condamnés aux
dépens envers toutes les parties. Ecrivant Mes. Bovis, Paf·
calis & Badet..
ARRÊT
LXXVIII.
Appel comme d'ahus d'un mariage colltrac1é il Nice fans le .
confentement du pere, avec difPenfe des trois hans , & hors
la préfence du propre Curé.
E 28 Juin 1778, Marguerite-Barbe Brun fe maria li
.Nice avec Antoine Vial de la ville d'Antibes, après
difpenfe de trois bans énoncée dans l'aae des époufailles.
Le 14 Février d'auparavant, elle avoit fait fon expofition
de groffeffe pardevant le Juge Royal d'Antibes, & elle ac....
coucha d'un fils au mois d'Août. En vertu du privilege des
pauvres, elle fe pourvut pardevant la Cour le 30 Mai 1780
contre les fieurs Vial pere & fils, en condamnation de 650
IiI'. pour frais de couche, agobilles & dépenfes faites pOUt
l'enfant pendant vingt-un mois; elle demanda une penfion
de 400 IiI'. pour elle, de 200 IiI'. pour fon enfant jufqu'à fept
ans, & 400 IiI'. de provificin.
Les Vial pere & fils préfenterent une requête incidente,
& demanderent la caffarion du mariage de Barbe Brun, avec
inhibitions & défenfes de fe qualifier époufe de Vial ; ils
offrirent un expédient qui pronon~a cette ca1fation; ils fe
L
�h u P A LA 1 S
DB
Ji If 0 VEN C li:
48{
l:ondamnerenr à 1 SO liv. pour frais de couclle & agobilles
de l'enfant, aux frais des mois de nourrice depuis fa n~if
fance, fuivanr l'état & rôle qui en feroit donné, à la liv.
par mois tant que l'enfant feroit en nourrice, à 12 liv. par
mois dès qu'il n'y [eroit plus, & jufqu'à l'âge de fept ans,
pour, après ce temps, être de nouveau fiarué fur l'entretien, nourrirure & éducation de ce même enfant. Ils prirent enfuire des lettres d'appel comme d'abus envers le
mariage de Barbe Brun; celle-ci conclut fubfidia,irement que
là où la Cour déclarerai t le mariage abufif, il lui fût accordé
'2.0000 liv. de dommages & intérêts.
On difoit pour les appellans, que le mariage contraél:é à
Nice par Antoine Vial, âgé de plus de ving-cinq ans, fans
le confentemenr & à, l'in[u de [on pere, éroit ab[o!ument
nul. Mr. l'Avocat-Général Talon, lors de l'Arrêt rendu par
le Parlement de Paris le 18 Février 1664, ob[erva que
le pere pouvoie faire ca{fer le mariage de [on fils contraél:é
fans fan con[entement à l'âge de 27 ans, & qu'un majeur
de 2) ans & au de{fous 'de 3é ne peut donner un con[en·
tement valable, fans avoir celui de [on pere.
Le Droit Romain défendait aux enfans de famille de fe
marier [ans le confentement de leurs peres. ( Gillet dans
fon traité des tutelles & curatelles, chap. 1°3. ) Deni[art,
va. mariage, obCerve que les Arrêts anciens & modernes
<iu Parlement de ToulouCe le' décident de même; idem
Catelan, liv. 4, chap. 30. Cette JuriCprudence du Parlement
de Touloufe & de tous les Parlemens de droit écrie a deux
ba[es bien reCpeél:ables: 1°. le Droit Romain, auquel 'il n'a
été dérogé, quant à ce, par aucune Loi Françaife, & qui
ne permetroit aux enfans de famille de Ce marier qu'avec
le conCenrement de leurs peres: 2°. l'arr. 40. de l'Ordonnance de Blois, qui enjoint aux Curés, Vicaires ou autres
de s'enquérir de la qualité de ceux qui [e voudront marier,
& qui, s'ils Cont enfans de famille ou en la pui{fance d'autrui, leur défend de pa{fer outre, s'il ne leur appar~ît du
con[entement des peres, meres, .tuteurs ou curateurs. En
'provence la regle efi certaine; & c'eft 'ainfi que.la Cour
�~~
JbURNil
S;
l'a décidé par l'Arrêt rapporté par Boniface, tom. l , liv.
tit. 3, chap. 2. Cet Arrêt eft rapporté comme Loi vivante
par Decormis, tom. l, col. 1121. On peue citer encore·
celui du 16 Février 1719, rapporté dans les difcours de·
Mr. l'Avocat-Général de Gueidan, tom. 3, pag. 120, qui
déclare y avoir abus dans le mariage de F aventin fils, célébré à Avignon dans les mêmes circonftances. On trouve
la même décifioo dans les Œuvres de Mr. d'AguelTeau., tom.
2, plaid. 7, pag. 161.
Le vrai fens des Ordonnances efl: fi"é parmi nous parl'Arrêt de Réglemellt de 1664, qui exige le confentement
du pere, à peine de nullité, & qui certainement n'a jamais
œlTé d'avoir exécution & force en Provence. On trouve
même dans Boniface, tom. 4, liv. S, tit. 1, chap. 2, &
dans Mr. de Bezieux, liv. 2, chap. 4, §. 18, l'Arrêul-u--'lO'
Novembre 1670, qui jugea, en calTant le mariage, que le
pere étoit én outre en droiLde prononcer l'exhérédation ,.
& qui fit défenfes aux Curés de palTer outre aux mariagesdes fils de famille, s'il ne leur apparoilToit des conIente-.
mens par écrit des peres. Le corrfentemem des peres eit
de droit naturel; & quelle que foit la force du Sacrement,
ce feroit le dégrader, l'avilir & le profaner, que d'ell faire'
le fruit de la violation du plus faint & du 'plus facré de tous.
les devo irs.
Il en eH de même du défaut de confentement Ol! d'interpofition ,du propre Curé. Ce moyen eH public, ahfolu, il
attaque le fonds même du Sacrement, qui exige le con [entement ou l'interpofition du ·Curé., Minifl:re unique.& même exdufif. Les parties elles-mêmes peuvent faire valoir ce moyen,
ainfi qu'on le voit dan's Colet, des difPenfes, liv. 2, chap.
13 ; dans Deni[art, v~ mariage; dans Cochin, tom. 1, col•.
143, & tom. 2, col. S8'!:; dans Mr. d'AguelTealJ, tom. S,
plaidoyer SS. On trouve un Arrêt dans Boniface, tom. 1,
liv. S, tit. 4, chap. '1, qui déclara nul un mariage célébré
par tout autre que par le propre Curé, nonobfiant trentehuit ans de cohabitation. ·En 17S 6, un Arrêt calTa le maüage de .Me. Augier" 'Doél:eur'en médecine 1 parce qu'un de~
�Il U PAL A l ~ Il B PRO VEN C E:
4S.7
C!eux Curés des deux parties n'en avoit pas eu connoi/Tallce.
C'eG: d'après ce principe que la Cour ça/Ta également le
mariag~ du fieur Bompar, majeu.r l!c libre, contraél:é à Nice.
Par un Arrêt plus récent, du 30 Avril ;770, rendu fur les
conclufions de Mr. l'Avocat-Général Le Blanc de Caftillon,
le mariage de la Dame Viccard fut déclaré abufif, quoique
célébré par le propre Curé de cette derniere. Mais ce mariage n'avoit pas été connu du propre Curé du mari. On
trouve dans le Code Matrimonial, va. Curé, § 2" qu'il faut la
préfence ou la permiffion des Curés des deLJx p~rties qui
.contraél:ent.
Le prétendu domicile à Nice ma!1q\le ici fous tous les
rapports; il manque par le droit, puifque le fils ne pouvoit
jamais acquérir domicile hors de la maifon p\lternelle, &
fur-rout dans une Monarchie étrangere, fans le confentement
& l'aveu du pere; confentem~l!t que ce dernier n'a certainement jamais donné. C'ef!: contre le gré de fan pere qu'il
s'échappa de la maifon de ce dernier pour fe cacher à Nicé,
en attendant le temps fixé pour l'acquifition & la conftitution d'un nouveau domicile. Ce n'eG: point ainfi qu'un fils
de famille acquiert domicile; il faut des faits publics, conftans & corroborés par le confentem~l\t <lu pere, pour établir domicile en pareil ças. C'ef!: dans des circonHances
moins favorables qu'on n'eut auçun ~gard au domicile d'un
fils de famille, dans l'efpece de l'4\rrêt rapporté dans les
plaidoyers de Mr. de Gueidan, tom. 3 ~ pag. :L2 3. D'ailleurs,
c'eG: le comble de la dérifion que de préfenter un féieur
frauduleux & clandeHin de fix mois dans une Monarchie
étrangere, comme une circonG:ance légitime & fuffifante, à
l'effet de foufl:raire un Paroiffien à l'autorité de fan vrai
Pafteur. Si ce fait de la demeurance était p"ur, libre &
dégagé de tout efprit de fraude, il ne faudroit pas qu'il fLLt
de fix mois feulement; l'Ordonnance n'exige fix mois que
pour ceux qui [e trouvant dans la même ville, ne foÏlt que '
palfer d'une ParoiJfe à l'autre; mais elÎe exige un an pour
ceux qui palfent d'une ville à l'autre. C'eft la difpofition de
r~dit de 1697. Cet Edit ne parle p.as de ceux qui palfen~
�-~8
JOURNAt
•
d'une Monarchie 11 l'autre , parce qu'il entre dans l'efprit Jé
toutes les Loix Françaifes' de ne pas le permettre.
Enfin la difpenfe de la publication des bans donnée par
l'Evêque ne peut être autorifée que quant à ce qui concerne
le mariage des perfonnes libres & majeures, mais jamais
quant à ce qui touche celui des perfonnes fubordonnées à
l'autorité d'un tiers. C'ef!: elfentiellement pour elles que la.
formalité des bans [e trouve établie. La difpenfe ne pouvant être accordée que dans le cas de néceffité ou de grande
& apparente utilité, ne peut jamais qu'être abufive & accordée dans l'objet de fouHraire la perfonne au dwit du tiers.
Si les bans avaient été publiés 11 Antibes, le pere auroit
fu que fonfils étoit encore li-bre; il en auroit eu des preuves
publiques, il aurait empêché le mariage.
Le mariage forme un engagement -folemnel dans l'ordre
des Loix, facré dans celui de la Religion. Un contrat de -cette
efpece doit avoir pour hafe principale la décence & l'honneur. Le mariage ef!: un état d'élevation dans la [ociété, &
que la religion fanétifie. Souf!:raire un fils de famille 11- l'a\!torité paterneUe, l'expatrier contre fan gré, lui- faire contraéter un mariage que le pere ignore, & qu'il a déja réprouvé-, c'ef!: renverfer l'autorité paternelle & la fouler aux
pieds; c'eH affliger le pere par l'endroit le plus fenfible,
c'eH lui ravir la plus chere portion de fon patrimoine; c'efi
fouvent détruire toutes les efpérances & routes les douceurs
qui peuvent l'attacher 11 la vie; c'eH d'ailleurs précipiter le
fils dans l'abyme & dans l'ignominie; c'eH donner à une
famille entiere des parens dont elle peut avoi-r à rougir. n
ef!: difficile d'imaginer un plus grand mal, un plus grand
défordre dans la fociété civile, que celui dont la caufe préfente l'exemple, & fur lequel Barbe Brun ore placer les prin~
cipes d'un mariage légitime.
Barbe Brun répondoit, qu~étant mariée à Niee, elle devoit être jugée d'après le Concile de Trente, qui n'exigeoic
point le confentement du pere, à peine de nullité;- que nos,
Ordonnances même ne l'exigeoient que jufqu'à la majorité,
<;'e!l-~di(e, à z) aus 1 que d'après toutes les I.oix, les Auteurs_
c
�PAL AI S D E PRO VEN C E;
489
teurs & une Jurifprudence conHante, le majeur de 2) ans,
même le fils de famille, contraél:oit un mariage valide &
n'étoit fournis qu'à la peine de l'exhérédation; que c'étoitlà la différence qu'il falloit faire entre la majorité de 2)
ans, & celle de 30 ans; qu'ici Vial fils avoit connu Barbe
Brun & l'avoit époufée étant majeur, qu'ainfi le premier
moyen rell:oit fans force en France; à.bien plus forte raifon
vis-à-vis d'un aél:e paffé .dans une Monarchie étrangere, fuÎvant les Loix du pays: pareils aél:es avoient été confirmés
par des Arrêts, toutes les fois que l'on en avoit demandé
la caffation.
Quant au défaut de publication de bans, la difpenfe peut
en être accordée fans abus; & il ne peut être un moyen
relevant, que lorfqu'il s'agit 'du mariage d'un mineur. Ces
principes font de maxime; le fieur Vial étoit majeur, & il
Y a eu difpenfe accordée pal le Grand-Vicaire ayant tous
les pouvoirs de l'Evêque.
Le défaut de préfence du propre Curé ell: inapplicable à
la caufe aél:uelle ( continuait-elle). En droit, tout majeur
peut fe choifir un domicile; le mineur même le peut, en faifant des aél:es qui manifell:ent le projet qu'il a de changer
fon domicile d'origine; & alor.s fa décbration, jointe an plus
court efpace de temps, le fait vrai Paroiiiien du Curé fur la
Paroiffe duquel il a pris logement. D'après ces principes,
Vial, majeur, ayant paffé fix mois à Nice, ayant conHaté
par des déclarations, par un aél:e d'arrentement de magafin
& de faciété,. fan projet de continuer fOll domicile à Nice,
en: devenu le vl'ài Paroiffien du Curé qui l'a marié. Ainfi point
de contravention.
.
- La Dlle. Brun propofa des fins fubCidiaires en dommagesintérêts, & fourénoit que Vial l'avoit forcée à en demander;
qu'il l'avoit fédui-te, lui avoit ravi fon honneur, fait perdre
fon état, l'avait abulee fous la qu'!lité d'époufe légitime, l'avoie enfuife reléguée dans la claffe des viles concubines, avoit"
rendu fa honte publique & ineffaçable, & qu'enfin fan pere
avait une fortune conlidérable. .
.
Mr. l'Avocat-Général de Caliifanne difcuta les trois moyens
Qqq
DU
�490
] 0 U RNA r;
d'abus propofés par le fieur Vial; défaut du confentement du
pere, défaut de puhlication de hans, & défaut de préfence du
propre Curé.
.
Le défaut de confentement de Vial au mariage de fon
fils annulle-t-il fon union, ou cette violation, ce mépris de
l'autorité paternelle lailfe-t-il encore fupfiHer l'engagement
contraété, & exiHe-t-il d'autre peine pour la violation de
ces Loix?
Les Auteurs les plus verfés dans la connoilfance du droie
naturel ( obferva Ml'. l'Avocat-.Général ) ont regardé cet attribm particulier de l'autorité des peres, comme lIne difpofition des Loix pofitives, non ex naturâ, fed ex jurifconditorum voluntate, dit Grotius. L'interprete Infaillible du texte
facré fembl(l avoir condamné dans le Concile de Trente
l'opinion de ceux qui vouloient que les mariages des enfans
contraétés fans le confentement de leurs peres, fu/fent nuls
par eux-mêmes & de droit divin, que la nullité n'eût pas
befoin d'être prononcée. Mais foit que ce Concile n'ait eu
en vue que la profcription de cette erreur, foit qu'il n'aie
prétendu établir qu'une loi de police & de difcipline à l'égard des mariages des fils de famille qui feroient déformais
contraétés fans le confentement de leurs peres, ou même à
l'égard de Ceux qui auroient été comraétés jufqu'alors fans
ce confemement, il eft du-moins fûr que ce Concile n'a
pas dépouillé les Princes du droit attaché à leur couronne
de la main de Dieu même, de marquer le confentement
des peres au nombre des empêchemens dirimans qu'ils peuvent établir dans les mariages 4e leurs fujets.
Les Papes les plus faims, les Conciles les plus refpectables, loin de condamner ce pouvoir, fe font fait un devoir de le reconnoître, quelquefo1s mêm~ de l'invoquer. Les
douze premiers fiecles de l'Eglife ont vu fleurir "dans toue
le monde chrétien cette fage difcipHne que le torrent de
l'ignorance & du relâchement pflrvint enfin à entraîner parmi
tant de m.onumens précieux de la difcipline primitive; on a
voulu nous faire douter de la difpofition des Loix du peupIe, fi jaloux des droits de la puiŒ1nce paternelle.
�DU
PALAIS
D!:
PROVENCE.
491
te Jurifconfu1te Paulus femble dire, à la véritê, que les
mariages faits fans le confente'ment des peres, quoiqu'illégitimes, doivent être entretenus par la confidération dlt
bien public: jure non contrahuntur, fed contrac7a, non fol'Vuntur. Mais une autre maxime tirée des livres du même Jurifconfulte, adoptée par Jufiinien, femble attacher au confentement des peres la validité des mariages: nuptiœ cO'!fi/tere non poffint, nifi confentiant omnes, id eJl, qui coeunt, quorumque in poteJlate funt.
Diverfes Loix du Code & du Digel1:e concourent en faveur de cette explication; les Elémens même du Droit ont
placé cette condition parmi celles dont le défallt rompt le'
lien, & ne laiffe plus rien fub!iHer de raut ce qui le forme.
Il el1: donc certain en principe de Droit Romain, que le fils
de famille ne pellt diCpofer de fa perronne fans le conrentement de fan pere. r
Mr. l'Avocat-Général paffa enfuite à des Loix plus nouvelles, & il obrerva qu'avant les Ordonnances de nos Rois,
la difpofition du Droit Romain, abolie, pour ainfi dire, pal:'
le non urage de plufieurs fiecles, avait paru céder à celle
du Droit Canonique; & par un autre abus, les mariages
irréguliers fe fairoient avec trop de facilité. Les mariages
clandel1:ins éraient devenus fréquens; auHi la puiffance civile
chercha-t-elle à remédier à l'infuffifance du Concile de Trente;
& alors Cujas & Godefroy entreprirent de concilier l'un &
l'autre Droit par une interprétation mitigée des, Loix Romaines & des Ordonnances; ils firent revivre la néceffité
du confentement des peres, en rubfiiruant au Droit Romain
une regle plus fimple & plus uniforme.
Le Droit Romain fairoit durer autant que leur vie le
droit des peres fur les enfans non émancipés; & quelque-fois"
par le moyen de l'émancipation, il [airait ceffer ce pouvoir dès:
l'âge le plus tendre. Nos Ordonnances ont attaché certe indépendance à un âge fixe, indépendammenr de l'émancipation.
Le Droit Romain n'affujettiffoit le fils émancipé à aucune mar.-'
que de déférence & de refpeB: filial. Nos Ordonnances." el1l
difpenrant après l'âge marqué, de la néceffité du cOll(ème-
Q q q 2..
�'492.
Jou RNA L
ment, exigent au moins des démarches refpeaueufes par 1erquelles on le follicite, & puniffenr même alors l'oubli de
ces démarches par la poffibilité de l'exhérédation.
Cependanr la Jurifprudence conllante des. Parlemens a
déclaré les mariages des mineurs, enfans de famille, nuls,
& quant aux effets civils, & quant au Sacremenr, foit parce
qu'ils préfumoienr rapt de féduél:ion dans les mineurs) par
le feul fait de s'être l11ariés en minorité, fans avoir requis
le confentement de leurs parens, foit parce que la volonté
de la perfonne féduite n'ell pas libre, foit parce qu'il ne
peut pas y avoir de mariage, quand il n'y a point de volonté,·
& qu'il n'y a point de volonté dans un mineur non affiHé
de fes pa·rens.
Le Concile de Trente, en parlant du rapt en général,
n'exclut pas le rapt de 'féduél:ion; le défaur de confentement
fait préfumer ce rapt, quand il y a minorité. Les Parle-'
mens, en déclarant ces mariages nuls, fe rapprochent donc
de l'intention de l'Eglife & de l'Etat, & fuppléent au filence de nos Ordonnances; mais comme c'ell par une fiction, c'ell-à-dire, par la préfomption de rapt; dès qu'elle
ne pellt pas exiller, le mariage ne peut pas être nul par
le feul défaut de confentement; & de même que la minorité feule fait préfumer le rapt de féduaion, la majorité
feule doit la faire ceffer, & rend le confentement valable
dans la perfonne du majeur.
.
Nos Rois en effet prohibent aux enfans mineurs de vingtcinq ans de contraél:er mariage contre le gré & confentement & à l'infu de leurs parens, & cette prohibition s'étend
aux veuves mineures qui veulent fe remarier; ils prohibent
aux garçons de trente ans & aux filles de vingt-cinq, de meurants avec leurs peres, de contraaer mariage fans avoir requis leur avis par écrit. L'effet de la premiere prohibition
ell la nullité du mariage; l'effet de la feconde eH: l'exhérédation. Dans l'âge intermédiaire de vingt-cinq d trente ans,
le garçon (dit topiquement l'Auteur du traité de l'autorité
des parens fur le mariage des enfans de famille) peut ft ma-,
rie,. [ans le conftntement de fan pere; fal! mariage efl. valide.
�DU
PALAIS
DE·
PROVENCE:
493
:& indiffoluhle; mais la fommation reJPec?ueufe qu'il ferait ne le
mettrait point il l'abri de l'exhérédation.
Il n'y a ( difoit en 1778 Mr. Chauvelin dans une caufe où
le pere formoit oppofition au mariage de fon fils, âgé de
vingt-fix ans) il n'y a, apres vingt-cinq ans, 'lue le danger
de l'exhérédation, lorfqu'on fe marie fans le confentement. Nous
n'avons pas la puiffance paternelle en France comme d:lns.
le droit romain, mais feulement telle qu'elle ell: étaQlie
par nos Ordonnances. Et en effet, la Loi a marqué un
âge où elle a voulu que l'homme fût maître de fa perfonne & de fes biens; l'homme à vingt-cinq ans auroit la
liberté de tous les contrats, & n'aurait pas celle de fon
mariage. Il peut donc fe marier. Il ell: vrai que nos Rois,
pour empêcher les mariages difproportionnés ou déshonorans, ont voulu que depuis la majorité jufqu'à trente ans,
le pere eût le droit de déshériter fon fils : à la bonne
heure; mais il ne peur plus aller au delà de cette peine;
il n'a plùs le droÎt de refulèr fon confentement & de
rendre le contrat nul; par ce refus, le contrat civil fubfill:e ; le mariage ell: indiffoluble; il ne peut plus que priver
de fes biens; & ce droit même ceffe à trente ans, dès
que le fils lui fait des fommations refpeaueufes.
•
D'un autre côté, la condition la plus effentielle & la '
plus expreffe pour le mariage des fils de famille fut dans
nos Loix le confentement des peres: enjoignons aux Curés,
dit l'art. 40 de l'Ordonnance de Blois, de s'enquérir foigneufement de la qualité de ceux 'lui veulent fe marier, & s'ils font
enfans de famille ou en la puijfànce d'autrui; nous leur déla célibration defilits
fendons étroitement de pajJer outre
mariages, s'il ne leur apparaît pas du confentement des peres
& meres.
Toutes les Ordonnances pofiérieures né firent qu'ajouter
à ces difpofitions, celle de 1606, art. 12, celle de 1629,
art. 39. Mais maIgre tous ces textes, il Y eut encore des
Auteurs qui héfiterent à ·trouver dans l'Ordonnance la peine
précife de nullité prononcée pour le mariage de tous les
a
�494
Jou RNA L
fils de famille contraél:és fans le confentement des peres'~
Tel fuc le raifonnement de d'Hericourt.
Mr. l'Avocat-Général rappella les Arrêts rendus par le'
Parlement de Paris, & ce qu'avoient établi -lors. de ces
Arrêts MM. les Avocats-Généraux.
Mr. Joly de Fleury attelloit en 1701 que les peres &
nleres font toujours favorablement écoutés, lorfqu'ils implorent la proteél:ion des Loix pour venger leur autorité
méprifée, & rompre un engagement conrraél:é fans leur
confentement.
Mr. Bignon en 1661 dit qu'il falloit, autant qu'il fe pouvoit, obferver l'Ordonnance à la rigueur contre les enfans.
qui s'engagent dans des mariages contre la volonté de leur
pere, & en 1668, que c'étoit une maxime confirmée par
les Arrêts, qu'un fils qui a fan pere & fa mere, doit"
fuivant l'Ordonnance, être mineur jufqu'à trente ans.
Mr. Talon en 1663 attella qu'il falloir dillinguer entre·
les fils de famille qui n'avaient point de pere & qui pouvaient fe marier avant vingt-cinq ans, & ceux qui étoient
fous la pui1Tance paternelle, qui ne pOllvoiellt fe marier
qu'après trente ans; & que c'étoit aïnli que devoir s'entendre l'Ordonnance. Enfin en l,66ft i~ atteila comme certain que le mariage d'un fils de famille conrraél:é avant
trente ans fans le confentement de fan. pere, étoit néceffairement abulif, parce qu'un majeur de vingt-cinq ans &
au deffous de trente ne peut donner un confentement valable fans celui de [on pere, que le pere pouvoit le faire
déclarer nul & le faire caffer.
L'Al rtt de Réglement de la Cour tendu en 1664, rapporté par Mr. de Reguffe, fait inhibitions & défenCes à.
tous enfans de famille majeurs au deffous de trente ans,
& aux filles au de1Tous de vingt-cinq, de contraél:er aucun
mariage fans le confentement de leur pere & mere, fous.
peine de nullité, & à tous Vicaires, Curés & Prêtres de
paffer outre aux époufailfes, qu'il ne leur apparoi1Te 'au'
préalable dudit' confentement_, fous les; peines panées par
les Ordonnances.
�DU
PALAI'S
DIl
PROVIlNCIl:
49,
tes mêlnes inhibitions & défenfes rorent renouvel1ées
par un autre Arrêt rendu en 1670, 'lui exigea de leur
part le confentement par écrit des peres, pour pouvoir
palfer outre aux mariages des enfans de famille.
Olim diJlinguebatur, dit Me. Julien dans fes Notes manu ferites, inter. majorem & minorem, jèd hodie indijlù.c'lè
minores 30 annis nabere Tlon pojJùnt fine conjèn[u parentunz ,
Jùb pœna nullitatis. Decormis, Morn;lc, Fevret & Defpeilfes tiennent le même langage.
La fociété, jaloufe de maintenir l'autorité paternelle, refufe de confaerer des liens où elle a été violée. C'eft
ainli que les peres {ont ralfurés contre Ia corruption & la
foiblelfe de leurs enfans; c'el1: ainfi 'lue l'Erat veille fur
la pureré d'une fource qui doit les régénérer; ce n'ell:
plus feulement la réclamation des peres qui rend les mariages nuls; c'el1: le défaut de confenrement de la fociéré
enriere : tel el1: l'anathême de nos Loix.
Mais cet anathême, a-t-on dit, el1: purement local; un
fils de famille n'ell: point environné de la puilfanee paternelle all delà des limires de l'Erat; il eU des bornes
où certe puilfance ne peut l'atteindre. Ici le mariage de
Vial s'ell: fait à Nice, pays étranger, où le confentement
àes peres n'el1: pas requis à peine de nullité, puifqu'on y
fuit les difpolitions du Concile de Trente.
On pourroit anéantir ce fyl1:ême d'un feul mot, en invoquant les difpolitionl des Déclarations de 168 'i & l'Edit
de 1724, puifql1e les parties font françaifes. Le Souverain
y défend expre.lfément aux peres, meres, tuteurs ou' curatellrs de confentir que les enfans qui font fous leur
pl1i.lfance, fe marient dans les pays étrangers fans fa permillion expre.lfe, fous les peines affiiél:ives & infamantes
les plus graves. Le but de cette défenfe, dit d'Hericourt,
# d'empêcher que les Français s'itabliJ/ent dans üs pays
é.trangers au préjudice de leur patrie.
En principe, dire qu'il el1: des homes où la puilfance
paternelle ne peut pas atteindrft le fils de famille, c'el1:
prefque dire qu'il y a des moyens par lefquels le fils peut
�.496
Jou
RNA t"
ceffer d'être fils; (ans doute les rapports de là: nature· dé..:
fignés parmi nous (ous le nom de puijJance paternelle, (ont
protégés par des Loix locales; mais ils ne font point déterminés ni circon(crits par elles; ce n'eH ni la préfence
ni l'éloignement des peres qui les fa.i.t ce1Jèr ou revivre;
ces liens invilibles enchaînent par-tout le fils de famille;
par-tout le nom de fan pere doit le fuivre & lui prefcrire
des devoirs; le nom de fils, plus enCore que le nom de
citoyen, eH confervé au delà des frontieres de l'Etat qui
nous a vu naître; pour ceffer d'être fils de famille, il faut
en quelque forte ceffer d'être Français.
Si l'on pouvait détruire des rappores auffi intimes pat'
un fimple changement de domicile, quelle ne ferait pas
la contradiél:ion des Loix! D'un côté, l'on ne pourrait
fe choilir une époufe fans le confentement de fan pere;
d'un autre, (ans ce même confenremenr, l'on pourrait fe
choilir un domicile qui permettrait d'éluder & de braver
la puiffance paternelle. Ainfi, l'on deviendrait plus fort
contre elle par un outrage de plus; ainfi, les peres ne pouvant prévenir par le fecours des Loix la fuite de leurs
enfans, les verraient revenir avec les complices de leur
corruption ou les auteurs de leurs foibleffes ; & ces nœuds
qui, contraél:és (ous les yeux, mais fans le contèntement
des peres, auraient été réprouvés des Loix, deviendraient!
légitimes, parce que l'aurorité paterneJ.le aurait été deux
fois violée. Ne croyons pas de pareilles abfurdités. Quel
ferait alors l'objet des Loix.? Que deviendraient les précautions qu'elles ont prifes pour écarter les alliances· hon-·
teu(es? Qu'auroiént- elles· fait pour les peres & pour les
enfà.ns eux-mêmes, fi l'éloignement de quelques lieues &
l'ab(ence de quelques mois détruifoient les rapports qui les
lient? Des enfans rébelles, des amans coupables retourneraient dans le fein de leur famille fous le titre d'époux·
légitimes, & la fociété aurait plus d'égards à des· mariages
contraél:és dans des pays étrangers, qu'à ceux qui fe fèroient formés dans (on rein, & qui du-moins auraient été
environnés de l'honnêteté publique.
Il
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
497
TI efi un ufage de force & de raifon où l'enfant de
famille mérite affez par lui-même la confiance de la faciété, pour qu'elle adopte fan mariage fans le confenrement ·de fan pere; c'efi alors en quelque forte le moment de l'émancipation naturelle; mais ce n'efi point encore celui de' l'émancipation civile. Cette différence ea:
remarquable dans la progreffion de rios Loix. Dix années
de féparation & d'abfence fuffifent à peine pour faire préfumer le confentement des peres à une émancipation tacite.
Or comment une abfence frauduleufe de llX mois, ou
même d'une' année, pourrait-elle fuppléer au confentement
paternel dans un cas bien plus grave ~ bien plus important que celui de l'émallcipation , puifque l'émancipation ne
difpenfe. pas du confentement des peres?
.
Il ne ferait peut-être pas exaél:, il ferait peut-être rigoureux de décider en principe qu'un fils majeur de vingtcinq ans ne puiffe jamais fe choifir un domicile fans le
confentement de fan pere. Mais il y' aura toujours fux
cette matiere deux regles inviolables. La premiere, qu'un,domicile frauduleux ne peu! fervir de moyen au fils de
famille, pour fe dérober à la puiffance paternelle., La feconde, qu'il ne faut pas juger de la durée de ce domicile
par celle qu'exigent les Loix., lor[qu'il s'agit de connaître,
le véritable Curé des parties.,
.
Dans le prell)ier cas ,. il· ne, s'agie pas feulement de
favoir de quelle Paroiffe on eH cenfé faire partie;. mais.
il s'agit d'un domicile qui, ayant pour objet de difpenfeI
les enfans du confentement de leurs peres, doit par fa,
durée " par fa bonne foi, par un concours de circonitan~
ces, tenir lieu d'une forte d'émancipation; il ne faut pas,
qu'on puiffe craire que des liens auffi facrés aient été:
rompus frauduleufement par le fils, mais plutôt qu'ils ont'
été infenG.blemem déliés par le confentement tacite des:
peres; ce n'eit qu'alors que la fociété peut reconnaître.
<ies mariages faits en pays étranger-s; ce n'efi qu'alors;
qu'aya nt à prononcer entre les fils & les petes ,. la bonne:
fo.i des l?rerniers pourra la faire décider.. contre les feconds~
.
.
Rrt'
�'498
10
U II :If A L ,
aè
Que l'on jette un coup d'œil fur le fyfléme général
nos Loix. S'il s'agit de priver un citoyen de la moindre des
propriétés; s'il s'agit de confacrer la moindre ufurparion ,
quelle durée ne fixent pas les Loix pour établir la prefcription ? _Quelle bonne foi n'exigent-elles point? Or de
toutes les propriétés, la 'plus facrée, la plus inviolable,
n'efl-ce pas la puiffance paternelle? Les biens les plus che rs
des peres ne font-ce pas leurs droits fur leurs enfants? Èt
comment ofe-t-on fomenir qu'une courte abfence, qu'un
domicile frauduleux peut les en priver? On ne fe fait pas
des titres à foi-même, & il, lorfqu'il s'agit des mariages, les
droitsînviolables du pere font de confentir au choix du fils,
.nulle fraude ne fauroit l'en priver; la durée même du domicile, il elle potte l'empreinte de cette fraude, ne fervirait qu'à montrer la continuation des délits du fils, fans
établir la ceffation des droits du pere.
Quand 'on réclame la maxime générale, qu'un contrat
doit être conforme. aux ufages des lieux ,- & que l'on veut
s'en fervir pour anéantir la puiffance paternelle, on ne dit
qu'une abfurdité révoltante. Le lieu ne régit le contrat
qne pour la forme de l'aéte, & non ponr la capacité, on
l'incapacité des perfonnes, qui les fnit par-tour; le fils qui
fnit fon pere pour fe dérober à (.1 pniŒ1nce, & pour former
des nœuds qu'il défefpere de lui faire approuver, viole les
Loix, dès' l'inHant qu'il forme ce projet; il fe dérobe aux
regards de fon' pere, fans fe foufiraire à fon autorité, ni à fes
- .
jufies réclamations.
DéilOncé à la fociété comme un fils transfuge, les Loix
nationnales le fuivent par-tout; les Loix l'attendent pour le
punir; & de quoi lui fert alors d'invoquer la forme étrangere qu'il- a fuivie ? Cette forme même qu'il n'a recherchéqu'au mépris des Loix de _fon pays, ne fert qu'à le rendre
plus coupable. Cette' forme n'excufe que celui que la bonne
foi juHifie• Qu'un fils abfent depuis long-temps dans des
pays étrangers, où le commerce. ou fOIl intérêt l'ont appellé, y contraéte des nœuds folemnels fans le confente~!1e!1t exprès de fon pere, ce n'eH' pas le cas de celui qui
�D U
PAL AIS
D 1!
499
Pao VEN CE.
'ne fLiit fan pays que pour former ces nœuds, que pour rendre
inutiles J s jultes refus de fon pere; l'un s'ell: pu regarder'
en quelque forre comme ciroyen du pays qu'il habiroit ;
l'autre n'a pas pu oublier les Loix de fon pays qu'il ne
cherchoit qu'à enfreindre; le premier peut être excufé, le
fecond doit être puni.
C'efl: dans cette premiere hypothefe que fe trouve l'Arr€t de 1662, rapporté par Boniface, antérieur de deux
ans à l'Arrêt de régie ment de 1664 : ce premier Arrêt ne
peut plus avoir aucune aurorité. D'ailleurs, la fille érait
d'Avignon, & le garçon y étudioit depuis pluCleurs années ,.
de l'aveu de fon pere; le domicile n'éroit donc pas frauduleux.
Dans l'efpece de celui rendu en 1749, fur les conclunons de Ml' l'Avocat-Général de Cafl:iIlon, il Y avoit des
acquiefcemens au mariage, qui faifoient évanouir le défaut
de confentemenr, & qui conféquemment ne donnoient pa,s
lieu à la difcuffion du principe.
Ces Arrêts ne nuifenc donc point à nos maximes. Inutilement a-t-on oppofé l'autorité de Boutaric , qui cite uo
Arrêt du Parlement de Paris qui a jugé la que/lion, puifqu'elie fe trouve réfutée dans Serres, qui difcutant l'Arrêt
rapporré par Boutaric, ajoute: cette JllrifPrlldence a changé,
{; l'on juge a,préfent le mariage contraBé par un Français mineur fans le confentement de fon pere en P(l.Ys étrangers, où l'on
fuit ahfolument le Concile de Trente, & Oll par conftquent
il ne ferait pas nul de plein droit, nul 6' ahuj'if jùivant Ull
Arrêt du Parlement de Paris de z7z6, rapporté par d'Hericourt "parce que les Loix de la minorité, qui efl une qualité perfonnelle comme celle du fils de fi mille, fuivent le mineur & le-fils de' famille, & le lient dans quelque pays
qu'il aille.
Pourroit - on en effet fouffrir une efpece d'expatriatio[}
momentanée, faite en fraude' de routes les Loix, occa. :lionée prefque [OujoLirs par l'efferve[cence des paflions ~
quelquefois même n'ayant d'autre motif que la débauche
& le libertinage, irnpoffible en politique, odieufe & révol-
Rrr
2.
�,. 00
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tante relativement au mépris de l'autorité paternelle; auto;:
rifant l'infraél:ion publique des Loix les plus facrées?
Pourroir-on, en violant dans une Monarchie étrahgerè
t'Outes les Loix fran~aifes, & ce que la nature offre de
plus précieux, acquérir par un lien indi1foluble ce que le
mariage même colltraél:é en France n'eue pas pu donner?
Eluder ·malicieufemem la Loi, n'efl - ce pas l'enfreindre
ouvertement? Un crime peut-il donc en couvrir u.n autre,
& la mauvaife foi ajoutée à l'infraél:ion de touees les Loix
de l'Eglife & de l'Erat, peut-elle difpenfer de la peine que
les Loix impofent?
Mr. l'Avocat-Général pafTa enfuire au fecond moyen tiré
du défaut de publication des bans; il obferva que l'Ordonnance de Blois qui déclare non valablement contraél:és
les mariages faits fans proclamation des bans, efl appliquée
par la Jurifprudence univerfelle du Royaume, aux mariages
des mineurs; & cerre maxime dl: fi affermie, que l'on croirait ne lui rendre qu'un hommage imparfait, fi on la fuf-·
pendoit par la fimple apparence du douce.
Sur le troilieme moyen tiré du défaue de préfence du
propre Curé des parcies, il rapporrait l'aurarité de Mr.
d'Agueffeau, qui obfelve que ce défaut efl effentiel dans
le droit; car il n'eH pas de Loi plus fainte, plus inviolable
dans raut ce qui regarde la célébration du mariage, que la
néceffiréde la préfence du propre Curé. Elle fait en même
temps & la sûreré des familles, & le repos des Légillateurs.
Il fuEfit de reconnoître une tradition conflante, qui fait
remonter l'inflirurion de cette fainte cérémonie aux premiers jours du Chriflianifme, de la trouver érabli~ fur [es
témoignages de Tertulien, des Ambroife, & des Papes
les plus dignes des premiers fiecles, de la voir recommandée dans les Loix des Empereurs Chrétiens, reconnue par les Capitulaires de Charlemagne, & rappellée au
fprtir des liecles d'ignorance pendant lefquels la clandeflinité s'érait répandue fur ce lieu facré; l'on ne peut
douter au moins que la célébration en face ·de l'Eglife ne
�bu
PALAIS
Dl!
."
·
PRovB!fCE.
~OI'
'De fêtt mife au rang des conditions elfentieHes à la validité
ilu mariage, même avant l'Ordonnance de 1639, fuivant le
témoignage de Mr. Servin, qui refufoit de reconnoÎtre pour
légitime tout mariage -contra8é ( difoit ce grand Magifhat)
fans la hénédi8ion des Anges, c'efl:-à-dire, des Annonciateurs de l'Evangile, des Evêques, Prêtres ou autres qui ont
l'ordre ecc1éfiaHique.
Le Concile de Trente eft, à la vérité, le premier qui ait
renfermé ce minifl:ere dans la perfonne du propre Curé'des
parties; & quoique ce Concile n'ait point décidé la difpute
qui partage encore les Doéteurs, ft les parties ou les Curés'
font Minifl:res du Sacrement, ceux mêmes qui refufent au
Curé la qualité de MiniClre, le reconnoilfent comme le témoin principal qui repréfente l'Eglife, à la face de laquelle
le mariage doit être célébré, qui accepte & bénit en fon
110m 'l'union formée par le confentement des parties, &
dom la préfence peut feule rendre le contrat légitime & fuf..
ceptible de l'impreffion du Sacrement.
L'on ne fauroit diffimuler que les rermes dans lefquels ce
décret du Concile établit cette nullité, & qui affeétent le
contrat civil, qui femble être principalement du relfort de la
puilfance féculiere , alarmerent d'abord les amateurs de notre
liberté.
La France unie au Concile dans la profeffion de la même
foi, refufa conftamment d'en reconnoÎtre la difcipline; nos
Rois réftfl:erent généreufement aux infl:ances que la Cour
de Rome ht pour en obtenir la publication; & s'ils y ont
fuppléé en partie par leurs Ordonnances, ce n'eCl que dans
ces Ordonnances même qu'elle a l'autorité de la Loi.
Mais de quel ufage font ces principes dans cette caufe,
fi la difpofition du Concile, impuilfante par elle-même, a
pa'lfé dans les Ordonnances de nos Rois, fi formelles par la
néceffité de la préfence du propre Curé? S'il falloir juger le
mariage dont s'agit d'après les Loix obfervées à Nice, c'eftà-dire, d'après le Concile de Trente, le mariage ferait nul
~e plein droit; mais c'eft d'après les Loix Fran<taifes que
�~O'l.
JOURNAL
l'o~
a à prononcer, & l'on ne peut varier fur leur appli..:
t:atlOn.
On voit qu'à peine le concile de Trente fe fut déclaré pour la nécelIité de la préfence du propre Curé,
que l'Eglife Gallicane applaudit à cette difpofition par fes
Conciles Provinciaux de Bordeaux, de Toulou[e & d'Aix en
15 8 ).
Les Parlemens, pour feconder les vues du Clergé, condamnerent d'ufurpation de la parr des Curés les mariages
ttits entre· les parries qui n'éwient pas leurs ParoilIiens, &
leur en firent d'expreffes défenfes, malgré la poffelIion immémoriale. Enfin l'autorité immédiate du Vrince à laquelle
il étoit réfervé d'attacher à cette formalité le fort même
du contrat civil, produifit filccelIivement diverfes Ordonnances; celle de Blois avoit déja défigné le minill:ere des
Curés, en attribuant à eux feuls le foin de s'informer des
qualités des parries contraél:antes, & celle de 1639 expli. que dans le préambule ce que celle de Blois Iaiffoit entrevoir.
Le Légi!lateur y déclare que fes prédéceffeurs ont VOUlll
que les mariages fuffent publiés, célébrés en face de l'Eglife
avec les jull:es folemnités & les éérémonies prefcrites comme
effentielles par les Saints Conciles, & par eux déclarées être
non feulement de la néceffité du précepte, mais encore de·
la nécelIité du Sacrement. Il rappelle enfuire plus dill:inctement les Ordonnances, qui defirent, ell:_il dit, la proclamation des bans & la préfence du propre Curé; & à.la fuite
de ce préambule, qu'il ne faut pas féparerdu difpofitif, il
fait d'expreffes défenfes à tous Prêtres de célébrer aucun
mariage, qu'entre leurs vrais Paroifliens, nonobfiant les privileges & coutumes immémoriales.
Qui peut méconnoltre la relation au Concile qu'un motif
d'Etat ne permettait pas .de nommer; & qu'on aihla mieux
envelopper foùs le nom générique de faints Conciles., quoique' celui de Trente fait le feul général qui ait .p·rononcé·
fur le défaut de. préfence du propre Curé? La dédaratio.n
�DU
PAtAIS
DE
PROVE;"CB:
')03
(Je la nullité dl: donc fuppléée, ou plutôt elle paroît de toute
part par la nature de la folemnité, par la relation au Con'cile qui l'introduit: & le LégifJateur ne la prononce-t-il pas,
lorfqu'il reconnoît que l'Eglife en a déja fait dépendre la
validité du lien?
Dans l'intervalle qui fépare cet" Edit de celui de 1697,
un Arrêt rendu au Con(eil en 1601, pour obliger les Curés
dont les Paroiffes font fituées dans des Diocefes étrangers,
à fe conformer dans les, mariages aux Loix de l'Eglife &
de l'Etat, commence par déclarer que fuivant les regles de
l'Eglife, les mariages ne peuvent être valablement célébrés
'qu'en préfence du propre Curé de la Paroiffe de l'une des
parties; & l'Edit de 1697 réfout tout doute à cet-égard.
Mr. l'Avocat-Général d,fcuta enfuite les divers moyens de
féduél:ion propofés par Barbe Brun; il obferva que les pa rties éroient mineures jufqu'au m.oment même où Barbe Brun
a fuccombé. D'ailleurs, quand on ne trouveroit pas la minorité de routes les parties, la différence de l'âge efi fi peu conudérable ,:eu égard aux connoiffances dès deux fexes, que la
préfomption feroit bien foible, & ne pourroit établir qu'une
féduél:ion réciproque. Il n'y a point de difproportion de
naiffance & de fortune affez forte pour laiffer foupçon ner
de la part de Vial un projet de féduél:ion vis-à-vis de Barbe
Brun: au contraire, s'il y en avoit à préfumer , elle retomberoit fur elle, qui en fe mariant avec Vial, faifoit pour la
fortune un mariage au deffus de fes efpérances. Quant aux affiduités, on n'en voit pas la plus légere trace de la part
de Vi"l ; c'efi Marguerite Brun qui femble aller au. devant du
danger; c'efl: elle qui vient chez Vial voir fa mere & fa fœur.
& la premiere fois qu'elle trouve le ueur Vial feul, elle fuccombe. Efi-ce donc là la conduite de l'être féduit, qui ordinairement conduit, fans s:en appercevoir, au bord du précipice,
voit s'évanouir imperceptiblement à fes yeux les obfiacles qui
le retiennent. Enfin il efi une derniere préfomption, c'efi que
la féduél:ion l'efi fans l'acceffion & le con(eil des parens. Il
efi prouvé que Vial pere a réprouvé & rejerté avec indignation l'union qu'on lui avoit propofée de Barbe Brun avec
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fan fils; c'e!!: elle qui a engagé Vial fils d'aller rélider à Nice;,
afin de .mieux réuffir dans fan projet. La féduél:ion e!!: donc
de fan côté; ce 'lui la rend non recevable à ùn. plaindre.
Mr. l'Avocat-Général conclut à ce qu'en concédanr- aél:e
aux Vial pere & fils de· la commuat·ion. qu'ils avaient fait
de leurs fins de calfation du· mariage, en appel comme
d'abus envers la célébration d'icelui ,. faifant droit aux. lettres d'appel comme· d'abus, il- fùt dit y avoir abus dans
la célébration. du mariage d'Antoine Vial & de Barbe·
Brun fait à Nice ,. avec inhibitions & défenfes aux: Rarties
de fe fréquenter, & à Barbe Brun de fe qualifier. époufe de
Vial, à peine d'amende, & d'en ê.tre informé; & qu'au moyen
de ce, ayant aucunement égard aux fin:; pr,incipales de
la requête de Barbe Brun, Vial pere· & fils fulfent condam~
nés à lui payer la fomme de 4.0.0 lil/•. pour frais d.e c:ouche,
agobilles de l'enfant & dépenfes faites pour icelui· jufqu'à
l?époque de la requête du. 3Q Mai 1780, & depuis cette époque 12. lïv. pat mois pour la nourriture· & e.ntretien de
l'enfant jufqu.'à.l'âge de [ept ans, pour, ce temps arriv.é, être
de nouveau !!:atué [qr l'éducation,. nourriture & entretien
dudit enfant; & au moyen de ce ,. qu'il nIt dit Il'y avoir
lieu de fiatuer [ur les fins provifûires de la œquête. de Barbe
!lrun.
'.
. Par Arrêt du. 4 Avril 178 1, prononcé· par Mr, le· Fré.;
{ident de Saint-Vincent, les conclufions furent [uivies, déJ)ens entre les parties compenfés•. Plaidant Mes•. G;lffier ~
MeiJfr.e.t...
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P A LAIS
ARRÊT
DE
PR av ENC E.
'SOj'
LXXIX.
Le demandeur en ceJlion de hiens doit être
de la demande.
10
vinculis lors
D
ANS le mois de Septembre 1774, Louis Marron;
Emballeur de la ville de Marfeille, fe maria avec Marie
Raymond, Marchande Merciere, qui fe confiima en dot la
fomme de 4000 liv., dont 1000 liv. au prix des hardes,
& 3000 liv. àu prix & valeur des marchandifes de fa profeffion; elle continua le même commerce après fan mariage. Marron foufcrivit avec elle diverfes obligations en faveur de JeanBaptifie Allaffio, Négociant. Il était dit dans les billets, que
cette fomme leur avait été amiablement prêtée pour leur
commerce.
Marie Raymond décéda fans faire aucun tefiament; it
fut procédé après fa mort à un inventaire juridique; les
effets furent délaiiTés au pouvoir de Marron, pour les garder
comme fequefire & dépofiraire de Jufiice, avec ks inhibitions & défenfes accoutUmées. Les deux billets foufcrÎ'ts en
faveur d'Allaffio n'érant pàS payés, il Ce pourvut pardevant
les Juges-Confuls en condamnation folidaire, tant contre
Marron que contre les héritiers de fan époufe, qui avaient
pris fa fucceffioll par bénéfice d'inventaire; il obtint une
Sentence le 2 Avril 1778', qui prononça la condamnati011l
folidaire contre les hoirs de Marie Raymond & Louis Marron, avec intérêts tels que de droit, làuf trois mois à l'é_
gard de Marron feulement, & fauf d'être pourv.u à la contrainte par corps requife.
Louis Marron fe pourvut pardevant le Lieutenant au Siege
de Marfeille, & demanda d'être reçu à faire ceffion de fes;
biens aux fo(mes de droit, & provifoirement des, inhibi tians
&. défenfes à tQUS fes créanciers de paffer outre à aUC1lcne.s
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exécutions fur fa perfonne; il offrit de fe delI'ailir de tous
les effets dont il avoit été député fequeil:re. Le Lieutenant,
par fon décret du 19 Juin 1778, accorda l'aiourn~ment fllr
le fonds, & les inhibitions & défenfes provifoires.
Allallio fe pourvut en révocation de ce décret, fur le
fondeme'nt 'qM Màrr'6ri' n'éti:;it point' Ùl vinculis~ Le Lieù":
tenanr, par fa Sentence du 26 Mars 1779, débouta en l'état
Marron de fa demande en miférable cellion, & révoqua le
décret portant inhibitions & défenfes provifoires.
Marron n'appella point de cette Sentence; mais par une
nouvelle requête du 10 Avril 1779, il demanda d'être admis à la celliou de fes biens, & des inhibitions & défenfes
provifoires; il s'aurorifa du déboutement en l'état qui avoit
été prononcé contre lui; déboutement occalioné, difoit-il,
par le défaut de rémillion de fon bilan & de fes livres au
Greffe. Il fit cerre ré million , & il obtint fur fa feconde requête le même décret que fiIr la prèmiere. Allallio fe pourvut
de nouveau en révoC<ltion; il fomenoit que le débiteur devait' être in vi.7culis; néanmoins par Sentence du 1) Avril
J779, le Lieutenant ordonna qu'il ferait pourfuivi fur le
fonds & principal, & cependant que le tout en état ferait
continué. Allaffio appella de cette Sentence pardevant la
Cour.
Marron devoit-il être in 1}inculis, pour pouvoir être re9u à
la cellion des bi'ens? C'étoit l'unique queil:ion qui div ifoit les
parties.
Mé. Meriaud, Subil:itut, obferva qu'il était inutile de remonter à des temps antérieurs à l'introduétion de la miférable cellion. On auroit à fouffrir de rappeller la dureté &
la barbarie des premieres Loix des Romains contre les débiteurs, d'après lefquelles les créanciers, érigés en vrais
defpotes, avoient droit de difpofer fouverainement de leur
vie & de 1ë'ür liberté. Les mœurs s'adoucirent avec le temps;
& à l'aide de la raifon & de la réflexion, on jetta un coup"',
d'œil favorable fur les viciilltudes & l'inconil:ance de la fortune; & la Loi par laquelle on fut admis à la cellion des
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PAL.pS
DE
Pft0VENCE.
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'biens, devint un moyen avantageux à celui dont l~s rpalheurs,
fouvent imprévus & peu mérités, aggravaient la fituation. Le
malheur fut refpeél:é, & le crime feul puni.
Ces avantages introduits par les Loix Rom<lines ont été
reçus parmi nous, en dif!:inguant toutefois les créances qui
de leur nature refufent toute faveur aux débiteurs. Telles
font, par exemple, les créances provenant des deniers provenus d'une adminifl ration publique; telles font certaines
fommes privilégiées, les reliquats des comptes des tuteurs,
les dettes procédant de crime, dol ou fraude. Les banqueroutiers frauduleux, les f!:ellionataires & tous ceux qui détournent leurs. hiens en fraude de leurs créanciers, n'y font
point admis.
Le demandeur en ceffion doit donner un état exaél: de
fes facultés; il ne faut pas qu'on pU,i1fe !ui oppofer I~ dol
& la fraude. De pareils titres le priveraIent pour rouJours
de la faveur d'une Loi dont la bonne foi fait la bafe, &
que l'humanité nous a fait adopter pour le débiteur plutôt
malheureux que coupable.
Mais ces formalités font-elles les feules que le deman'peur ell ceffion doive obferver? Ne doit-il pas être in villculis lors de fa demande? Telle ef!: la quef!:ion qui a été
jugée pluueurs fois, & que, par une fuite non interromflue
d'Arrêts, on peut regarder comme une Jurjfprudence certaine, l'obligation impofée au demandeur en ceffion d'être
en prifon lors de [a demande. Cette rigueur, qu'aucune Loi,
qu'aucune Ordonnance n'a prononcé, a [ans doute été déterminée par des circonHances eifentielles, & on s'ef!: vu
forcé de l'adopter, comme le feul moyen d'arrêter le dol
& la mauvaife foi des débiteurs: l'homme n'ay.ant rien de
.plus· précieux que fa liberté, occupé làns c.:eife des moyens;
qui peuvent la lui conferver, ne pouvait être arrêté que par
la crainte de la perdre.
C'ef!: un principe reconnu, que la févérité d'une Loi pénale produit naturellement deux effets dans la [ociété; elle
prévient Couvent le c!'ime par la crainte qu~lle infpire, &
.excite chez l'homme coup"ble l'induClrie pour en élud.~
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l'autorité. Il n'èfl: donc pas douteux que la nécefIité Îm=
pofée par les Arrêts aux demandeurs en ceffion d'être en
prifon, n'arrête néceffairemeut la multiplicité de ces fortes
de demandes, & ne prévienne les abus les plus dangereux,
principalement dans le commerce, plus fufceptible que toUt
autre établiffement, de dol & de mauvaife foi. C'eH à regret fans doute que l'on voit renfermés dans ces trifl:es
réduits des citoyens qui ne font qne malheureux, qui fouvent même ne le font que par la mauvaife foi & la perfidie de leurs compatriotes, livrés à tous les excés de la
pauvreté & de la mifere, privés de tous les droits les plus
précieux de l'humanité, confondus avec des fcélérats qui
détruifent l'ordre & la tranquillité de la fociété, participant
en quelque forte à leur crirne par une affociation auffi dangereufe. Telle efl: le vice de toutes les infl:itutions, de ne
devenir parfaites qu'après pluueurs fiecles de réflexion.
L'on ne trouve à la vérité aucune Loi, aucune Ordonnance qui impofe au demandeur en ceffion la néceffité de
fe mettre en prifon pour y etre admis; & à cet égard il
paroît qu'on_ devroit difl:inguer celui contre lequel il n'efl:
inret\'enu aucune condamnation avec contrainte par corps•
.Le premier n'a point à craindre les pourfuites de fes créanciers fur fa perfonne; il n'efl: pas au cas de fe cacher, de
prendre la fuite pour éviter des exécutions rigoureufes; il
aggraveroit fon fort, s'il étoit obligé de fe confl:ituer pri[onnier pour être reçu à l'abandon de fes biens; il s'impoferoit une Loi plus dure que celle que fes créanciers n'auroient jamais pu rapporter contre lui; il fe foumettroit volontairement à tolites les fuites de la contrainte par corps,
tandis qu'elle n'aUroit point été convenue à fon égard, &
qu'elle n'auroit point été prononcée par un jugement qnelconque. Celui-ci, en abandonnant tOut ce qu'il poffede, n'à
point à craindre des pourfuites plus dures de la part de
[es créanciers; ces dèrniers font même obligés de lui laiffer un lit & autres meubles mentionnés dans l'art. 14 du
titre 33 de l'Ordonnance de r667. On y ajoute encore les
outils & infl:rumens avec lefquels celui qui a fait ceffion
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PALAIS
DE
Pn.OVENCt;
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à cet
égard la dureté des premieres Loix, oÙ les créanciers avaient
le droit d'emporter chacun un membre de leur débiteur.
Dans les premiers établiffemens de la fociété, il a fallu
néceffairement des Loix dures pour arrêter les dé[ordres
que les droits du plus fort avaient fait naître.
Dans le fecoud cas au contraire, & lorfque celui qui demande à faire ceffion fe trouve dans la contrainte, il doit
néceffairement, pour être admis au bénéfice de la Loi, fe
remettre dans le même état où il aurait dû fe trouver, s'il
n'avait mis obHacle par fa fuite ou par tout autre moyen
à l'exécution de cette même contrainte. C'eH auffi le fentiment de pluneurs Auteursl qui foutiennent que la ceffion
a été imaginée pour délivrer le débiteur des horreurs de la
prifon, ce qui fuppofe néceffairement que ces mêmes débi.
teurs étoient déja conHitués prifonniers par des titres ou
par des jugemens. Ce remede n'a été introduit qu'afin que
le débiteur qui n'avait pas affez de facultés pour fe libérer
de fes engage mens , .qui n'avait aucune reffource pour s'en
procurer de nouvelles, ne reHât toute fa vie en prifon, &
que cette punition, qu'il lui étoit impoffible de faire finir,
ne devînt plus aJfreufe pour lui que la mort même.
C'eH par une fuite de ce même principe que la prifon en
France n'eH point regardée comme une peine; c'eH un lieu de
fûreté où l'innocence & le crime font également renfermés
jufqu'au jugement définitif. L'Ordonnance de Moulins, arr.
48, dit: fi les condamnés a des fommes pécuniaires, foit en
matiere civile ou criminelle, ne fatisfont pas dans quatre mois
aux condamnations a eux lignifiées, ils pourront être pris au
corps 6' tenus prifonrziers ju.flu' a la cdJion ou abandonnement
des biens.
La ceffion des biens èH un abandonnemènt qu'un débireur fait de fes biens à [es créanciers pour avoir la liberté
de [a per[onne, & pour éviter les pour[uites qui pourraient
être faites contre lui, lor[que fa mauvai[e fortune le met
hors d'état de payer [es dettes. Bornier, [ur le tit. la de
l'Edit de 1673, ob[erve que la ceffion judiciaire en celle
li gagné fa vie. Des mœurs plus douces ont corrigé
�~IO
JOURNAL
qui Ce fait par Ordonnance du Juge, nonobf!:ant l"oppofitioŒ
des créanciers, lorfqu'un Négociant ef!: détenu ptifonnier,
& que fe trouvant dans l'impuilfance d,e les fatisfaire par·
les pertes ou par les malheurs qui lui font arrivés, il demande, pour n'être pas réduit à finir miférablement fa vie
dans la prifon, d'être recru à leur faire ceffion & abandonnement de fes biens.
L'Ordonnance n'entend parler que de ceuli qui font déja
en prifon. 'C'ef!: ce qu'obferve d'Olive, liv. l'' chap. 3 l , &
Savary. Dornat dans fes Loix civiles, & Ferrieres, fou tientiennent que celui qui demande à faire ceffion, doit être en
priCon. Les Arrêts l'ont décidé de même. Tel ef!: l'Arrêt
du 29 Janvier 1649' qui confirl1le une Sentence du Lieutenant de Marfeille, & qui en déboutant de la ceffion, parceque le débiteur n'était pas en prifon depuis alfez long-temps,
condamna néanmoins le créancier à lui payer cinq fols pal'
jour tant qu'il le ·tiendroit en prifon. L'Arrêt du 8 Oél:obre
i764 ordonna que le nommé Durbec, Marchand Tanneur,.
qui avoit été admis à. la miférable ceffion par Sentence du
Lieutenant de Marfeille dont un créancier avoit appellé, devait
fe remettre pour défendre fur l'appel, & demander la miférable ceffion, quoiqu'il eîlt offert de fe remettre lorfqu'on jugeroit;.
l'Arrêt de la Cour des Aides du IS Juillet 17S9, qui, à la
demande d'un créancier, ordonna le rejet de l'étiquette,
parce que Je demandeur n'étoit pas en prifon ; un autre Arrêt
du IO Juin 176S, prononcé par Mr. le Prélident de SaintVincent, qui débouta, en l'état de la miférable ceffion, fur:
le fondemene que le demandeur n'étoit pas in vinculis.
D'après une Jurifprudence auffi conftame, on ne peur s'écarrer d'une regle qui peut paroître dure à la vérité, mais nécelfaire pour éviter les abus fans nombre qui fe multiplieroient
chaque jour, fi des débiteurs le plus Couvene, de rnauvaife
foi n'étaient arrêtés par quelque crainte. Ce n'étoit pas
fans raifon que les Loix anciennes impofoiene les obligations les plus dures aux débiteurs obligés de faire ceffiou
de leurs biens. Autrefois celui qui avait fait ceffion étoit
obligé de porrer fur [a tête un bO!1net ve.rd) comme une
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ëfpece de note d'infamie, autrement il étoit permis aux créan~
ciers de l'emprifonner. Il eft même des Provinces aujourd'hui
dans le Royaume oà cet ufage dl: obfervé, comme on le
voit dans un Arrêt du Parlement de Bordeaux rapporté par
Lapeirere.
On obfervoit autrefois à Paris une autre cérémonie. Le
·ceffionnaire étoit conduit par un Sergent au bas du pilori
un jOllr de marché, tous les créan ciers appellés; & là
le Sergent, en préfence. du ceffionnaire, publioit à haute
voix que le particulier préfent avoit éré re~u dU bénéfice de
ceffion, afin que perronne n'en ignorât & n'eût à faire aucun
commerce avec lui, dont il dreffoit procès verbal, figné
de deux témoins.
Toutes ces différentes formalités ne s'obrervent plus au...
jourd'hui ; on a cependant confervé celle que le demandeur
fût en prifon. Il eft des tirconftances oà l'intérêt général
de la fociété doit faire taire les fentimens de l'humanité.
La prifon peut feule raffurer le créancier, & déterminer le
débiteur de ne cacher aucun des effets qui lui appartiennent.
Détruire un frein auffi falutaire, ce feroit porter le défordre
dans le commerce, & faire naitre les plus grands abus; les
demandes en miférable ceffion ne fe multiplient que trop;
elles deviendroient innombrables, fi elles n'étoient arrêtées
dans leur naiffance. Mr. le PréLident de Lamoignon étoit tellement convaincu du dangereux urage qu'on pouvoit faire des
demandes en ceffion, que l'on voit dans fes arrêtés, qu'il vouloit abfolument qu'on les abrogeât, ainLi que les Ordonnances, les Loix & les coutumes qui les autorifoient.
Me. Meriaud obferva que cette dircuffion le difpenfoit d'entrer dans le mérité des différentes exceptions propofées de
la part de Louis Marron pour fe faire admettre au bénéficé
de la ceffion, comme auffi d'examiner fi le décret rendu
fur fa requête, par lequel il lui étoit accordé des inhibirions
~ défenfes, étoit nul pour avorr été rendu fans ouir partie.
Le déboutement de la demande principale emraîne tout ce
qui s'en eft enfui vi; auffi ce n'étoit qu'en tant que cie befoin qu'Allaffio avoit conclu à la révocation de ce décret.
�5I2.
JOURNAL
Il conclut à ce que fans s'arrêter à la requête de Loullt
Marron, en laquelle il feroit déclaré non recevable & mal
fondé, Allaffio fîlt mis fur icelle hors de Cour & de
procès.
Par Arrêt du 24 Avril 1781, prononcé par Mr. le Préfident de Saint-Vinccnt , le décret du Lieutenant de Marfeille fut déclaré nul, & comme tel. caffé ; Marron fut déclaré non recevable & mal fondé en [a requête, & il fu~
<:ondamné aux dépens. Plaidant Mes. Jouve & Guerin.
ARRÊT
LXXX.
Le créancier du défimt a deux aRions colltre les liéritiers;l'une perfonnelle fur leurs viens propres, & contre chacun,
feulement pour ta portion le concernant; l'autre hypothécaire & pour le tout contre chacun des héJ-itiers, [ur les
Mens délaiffès par le défunt.
A
Ntoine Legier époufa en 1741 Catherine ArnouX' ,fous la confiitution de dot de 700 li". dont L}OO hv.
en argent, & 300 liv. au prix des hardes. François Legier
pere préfent au contrat promit d'infiitller fon fils fan héritier pour la quatrieme porfion des biens qu'il délaifferoit
lors de [on décès, & lui fit en outre tin prélegs._
Après ta mort de François Legier, [es héritiers procéderent le 13 Septembre 1752 au panage de fes biens. On
dé[empara à Antoine Legier un domaine qIY01l évalua
9693 liv. à condition qu'il acquitterait diverfes dett-es de
l'héritage, & entr'aurres celle de 6000 liv. à Mr. de Sai-ntJacques; qu'il ferait payé oe 198 liv. qui refioient dues de
la dot de fan ép0tl[e; il déclara avoir reçu les autres 502 liv.
au prix de [-on trouffeau. En 1779, Pîerre Legier, fils
émancipé d'Antoine, voyant que fan pere avoit d-iffipé la
èot de fa mere, fit affigner deux des héritiers de Fran'{ois Leg-ier fan aïeul pardevant le Lieutenant de Marfeille i
e~ çoudamnation des 700 li\'. de la dot._ Ceux-ci excipefeos
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P:R 0 V H NeE;
')1'3'
fent du défaut· de difcuffion des biens d'Aritoine Legier j,la caufe fut évoquée pardevant la Cour. Les freres Legier
offrirent un expédient; ils fe fournirent à prouver qu'après
le décès de Catherine Arnoux, fes enfans s'étoient appropriés les meubles, linges & ,joyaux ment-ionnés lors du partage; qu'ils ne devoient d'ailleurs être tenus que des deux
ciers des 198 liv., attendu que J'autre tiers devoit être
fupporté par le fils de Jacques Legier autre cohéritier.
On difoit pour Pierre Legier, 1°, que François Legiel:
fon aïeul étoit tenu, de refl:icuer la dot de fa belle-fille parfa préfence au, contrat de mariage, .& parce qu'il J'avoir:
reçue; 2.": qu'il avoit pu attaquer fes hoirs, fans difcuffion.
préalable des biens du mari, foit par;ce que le beau-pere
paroiffoit être J'unique débiteur, foü parce qu'il avo·it renoncé expreffément à toute divilion d'aétion & 'de difcuffion; 3°. que le paiement de la dot fait au fils après le
mariage n'avoit point libéré le pere; 4°. qu'un créancier
.de J'hoirie peur n'attaquer qu'un des, cohéritiers." & bi;
demander le paiement de tout ce que J'hoirie doir•.
On obfervoit fur le premier moyen ,. que le' §. tranfgrediamur· 12 de lâ Loi fi cum doum 2>2, if. faluto matrimonio "
a· pour objet unique. de fixer les perfonn~s ,contre qui com~
pete Faétion en refhrution 'de la dot.. Il' décide; d'abord
que l'aétion direéte efl: contre le mari, foit qu'il J'ait reçue·
lui-même, foit' qu'il ait confenti qu'un autre la reçût; mais·
dans eette premiere décilion, la Loi fuppofe que le fils.
efl fui juris, &, non foumis à, la puiffance paternelle.. Cette
Loi propofe enJui;te le cas où le mari efl: fils' de famille;;
& à ce fi)jet elle fait trois diftinétions : ou c'eflle pere de'
ce fils ,de· famille qui. a reçu la dot; ~ alors le· pere efl
tenu de· la refrituer : jè.d Ji filius familias Jit maritus, &
dos facero data Jit., adversùs fac.erum agetar....... ou le fils'
de famille J'a J:eçue du c,onfen.teme~t de fan pere ,. & en.
ce cas ce dernier en efl enCQ.re, tef1u.~ planè· Ji jilio· datajjt ,Jiquidcm juf1ù fqceri ,. adhuc 4!Jfalutè jQw; tenehitur; l~
rnoç juJfù , .gui fignifie J'ordee que le, pere donne à fon fils.
de reçec.oÎr la dot" efl pris pro promiJfù, comme nous;
,
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t. t.
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JOURN'AL
l'apprennent les interpretes, par [011' confentement à la
récepnion de cerre dot: ou enfin le fils de famille a reçu
la dot fans le confentement de fan pere ; & dans ce
dernier cas le pere en efi tenu, par la raifon que la do't
efi pré(orflée avoir rpa!fé entre les rnai'I1S de celu i qui,. e(1
vertu de fa pui!fance paternelle, Jouét de tous les autres
biens du nl~: quod Ji jilio data fit , non juJ/ù patris, FaDianus & CalJius reJPonderunt, nilâlominùs cum patre agi
oportere, videri enim ad eum perveniflè dôtem, penes fJ"em
11 peclllium. La Loi refiraignir enfi.lire eette refiitlltion au
pécule du fils que le pere avoir· entre les mains, ou à la
fom me qui avoir tourné à l'avantage du pere : fujJicit autem
ad id damn'(1/[dllm quod efl in peculio, vel .fi quid in rem
parris 1l èrfum. Mais la juri(prudence des Arrêts a rejerré
cerre refiriél:ion; le pere du fils non émancipé efi indifiinél:ement ren-u de la dor, fait qu'il l'ait reçue ou non.
Anraine: L.egier n'érair pas émancipé; s'il avoir reçu luimême la dot de fan' époufe, il n'en ferait pas tenu perfonnellem'ent; F radçois ,Legier (on pere devrait la refiiruer, pa.ree qu'elle feroit cen(ée avoir pa!fé entre fes
mains; il devrait la rendre non comme caution, non
comme débiteur fubfidiaire , mais comme' débiteur principal, ou 'plutôt comme, débiteur unique, déclaré tel par
la L6i; à plus. forte raifon le pere l'ayant reçue luimême.
On di(oit fur le fecond moyen, que fuivant les Loix
des Inflirutes, du Digefl:e & du Code, rit. de duolJUs reis
jliplllandi & promittendi, deux perf6nnes, en reèevant une
fomme', & ·en promettant de 'l'acquirter au créancier, con~
traél:oient' la folidité entr'elles par la (eûle nature-dé l'engage ment; elles pouvaient être pourf~ivies chacune pour
la totalité de la fotnme, fans pouvoir alléguer la divifion
d'aél:ion & de difcuffion. Mais' l'Empereur Jufl:inien dans
fa novelle 99, chai>: l, app~rtll deux changetnens aux
Loix exiftàntes àlors -fur cette matiére. Il vou'1ut d'abord
'que l'obllgàcion' conjointe- 'ne' devlnt pas' par -là, follclaire ,
& que' deux citoyens, en récev'aot' conjointement une· foni-
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PRO VEN C E.
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&. en promenal1t de l'acquitter, ne putfent être ~~nus
chacun que de la portion le concernant, à moins qu'ils
ne fe fulfent obligés folidairement l'un pour l'autre. Il voulut
en fecond lieu que dans le cas d'une obligation folidaire ,
tous les débiteurs fulfent convenus, condamnés & difcutés,
à moins qu'ils ne fulfent ou infolvables ou abfens; dans
ce cas les débiteurs folvables & préfens devoient payer la·
portion des autres.
S'il y a dans l'aae la renonciation au bénéfice de difcl,llIion & de divilion, le créancier pourra demander à un
feul de fes débiteurs la totalité de la dette; il n'aura plus
à redouter le privilege que les Loix avoient introduit en
faveur de ce débiteur qui a pu y renoncer.
Sur le troilieme moyen, on difoit que la femme qui <r.
apporté une dot dans la maifon de fon mari ou de fon
beau-pere, ne peur ppint demander caution à l'un ou à
l'autre. Il ne faut pas que des époux puilfent fe troubler'
·par des débats, par des défiances. Si le mari penche vers
fa ruine, les Loix n'abandonnent pas la femme; elles lui
préfentent le remede de la répétition de la dot. Il efi eu.çore vrai que le débiteur de la dot que la femme s'eH:
con!l:iruée, ne peut exiger aucune forte de cautionnement ,..
fuivant les Arrêts rapportés par Boniface, tom. l , pag•
.38 l , & tom. 4, pag. 284, Mais il n'en efi pas de même
.de celui qui répond de la dot; il peut demander une cautian; il le doit, quand il craint l'infolvabilité du mari. La
crainte de la redotation motive le cautionnement qu'exige
le pere de la fille; la crai,nte de la dilIipation d.e la dot
motive aulIi le cautionnement que follirite le pere de
l'épo~x; l'un & l'autre refponfables de cette dot ont le.
droit de veiller à l'emploi des deniers.
Sur le dernier moyen, on difoit que le créancier d'un
<léfunt a deux aaions contre les héritiers; l'une réelle, l'autre
perfonnelle. La premiere aiFeae touS les biens délailfés, &
les rend tous refponfables de la de ne ; elle efi conféquem,:ment indivilible. La feconde, nailfante de la fimple adirioll
.d'hérédité, fe divife en autant de portions qu'il y a de.
Ttt2.
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J
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perfonnes inCl:ituée·s. Delà cette conféquence que les héri.:
tiers po!feifeurs des biens du défunt font tenus de la totalité
de la dette fur ces mémes biens; mais fur leurs biens propres, ils ne font tenus que de la portion qui les concerne.
La mort enlevant le débiteur, ne porte aucune atteinte au
contrat qu'il avait confenti; fes biens qui, entre fes mains,
étoient touS au choix du créancier, ne ce!fent pas d'y demeurer, en pa!fant atJtlauvoir des héritiers.
Mais comme la [ucceffion peut être partagée, & qu'il ne
feroit pas juf!:e qu'un cohéritier fût dépouillé de fan lot fans
avoir eu la faculté de fe défendre, le Jugement ne peur être
exécuté que contre les cohéritiers qui étaient en qualité; à
leur égard , l'exécution [ur ce qu'ils ont reçu du défunt,
peur avoir lieu pour la totalité de la créance. (Leg. 2, cod.
fi unUS ex plllriDUS hœred. Mr. ·de Montvallon dans fon
traité des [ucceffions, tom. 1, pag. 276.)
Chaque cohéritier affigné, défendu & condamné dl: farcé
<l'effilyer les exécutions pour la totalité de la créance, fur
<les biens qu'il a reçus de l'hérédité qui en était chargée;
il ef!: permis au créancier d'opter pour ces biens, puifqu'ils
font tous fournis à fon hypatheque; & dès qu'il les préfere
aux autres, il peut [e difpenfer d'amener au procès les au.tres cohéritiers. Tour l'inconvenient attaché à cette forme
de procéder, c'ef!: de ne pouvoir fe colloquer [ur la portion de celui qui n'a été ni affigné ni condamné, parce qu'il
peut fou tenir que la Sentence lui ef!: étrangère, & qu'il ne
doit conféquemment pas en e!fuyer la condamnation.
Les freres Legier ne s'·arcacherent point à combattre les
trois premiers moyens; ils oppoferent fur le quatrieme, que
dans toute dette d'une fomme d'argent , il Y a néceifairement une aébon perfonnelle, & une aétion hypothécaire.
Ce qui conf!:itue la dette per(onnelle, c'ef!: l'obligation en
elle-même du déb.iteur; le contrat pardevant Notaire ne
fait qu'ajouter J'hypotheque .fur les biens, tout comme la condamnation prononcée d'une dette chirographaire y ajoute
l'hypotheque; maisni le comrat, ni le Jugement, ne changent
en rien la nature de la deue en foi ,qui ef!: tQujours per.,
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1
PALAIS
DE
P1\.OVENCll,'
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fonelle, par cela feul qu'elle conufl:e dans une fomme eB
deniers, diviuble de fa nature enrre pluueurs per(onnes,
entre deux débiteurs ou enrre deux cohéritiers d'un débiteur; c'efl: le fentiment de Ferrieres dans [on Diaionnaire
ci!e droit, tom. 1, pag. 40. Delà il filit que le créancier
hypothécaire d'une hoirie doit faire affigner & condamner per[onnellemenr tous "les cohéritiers, parce que l'aél:ion
principale qu'il a contr'eux eft per[onnelle, & que l'aél:ion
hypothécaire n'efl: que [ubudiaire & acceJToire; ce h'efl:
qu'après avoir rapporté concre tous une condamnation, qu'il
peut exer<;er une aél:ion hypothécaire, & porter fesexécutions
fur tel immeuble de l'hoirie qu'il juge à propos. Il n'en
efl: pas de même lorfqu'il s'agit de deux tiers poJTeJTeurs de
biens hypothéqués; le créancier n'efl: pas obligé de les faire
affigner & condamner l'un & l'autre, parce qu'il n'a point
d'aél:ion per[onneHe contr'eux, mais feulement une aél:ion
réelle; il pem donc convenir le tiers poJTeJTeur qu'il veut,
& porter [es exécutions [ur les biens de celui qu'il a fait
condamner fans attaquer l'autre.
On ne doit pas confondre les débiteurs folidaires avec
des cohéritiers; à l'égard des premiers, on peut affigner ,
pour[uivre & exécuter l'un des deux pour la totalité, parce
qu'au moyen de la folidaire, chacun s'eil foumis à la re!ponuon de la dette eotiere; alors les demandes, les lignifications faites à l'un, les aél:es inrerruptits de la prefcription
contre l'un, valent contre tous; mais à l'égard des cohér.i.
tiers, il faut les faire tous affigner & condamner; les affignations, les lignifications fa ires aux uns, ne fervent point
pour les autres; les aél:es d'interruption de prefcription ne
peuvent valoir que vis-à-vis de ceux contre qui ils font faits,
parce que les aél:ions entre cohéritiers fe divifent néceJTairement, attendu qu'ils font tous perfonnellement débiteurs;
&. ce n'eT!: que dans l'exécution que cette diviuon ceJTe, &
que le créancier hypothécaire, aprè·s les avoir tous fait con-'
damner, a le droit de porter & de fixer fes exécutions fur
l'immeuble qu'il veut; delà le créancier d'un homme décédé fait affigner tous les héritiers de fon débiteur &
�~18
JOURNAL
en individùs, pour fe venir voir condamner perfonnettemenrchacun pour fa portion, & hypothécairement pour le cout"
fur les biens de J'hoirie qu'ils repréfentent; & s'il obtient
un Jugement conforme à ces fins, il eft en droit, après
avoir fait commandement à celui des héritiers fur la portion
de qui il veut porter fes exécutions, de la faiGr cou te entiere & de s'y colloquer, fauf le recours de ce dernier
contre fes co-débiteurs.
AinG le créancier d'une hoirie a en même temps contre
les cohéritiers deux aétions; J'une perfonnelle, qui eft
principale; l'autre hypothécaire" qui n'eft que fubfidiaire
& de pure exécution; il ne peut faire valoir celle-ci, fans
avoir exercé J'autre contre tous les cohéritiers; & quoiqu'on puilfe exécuter pour la totalité de la dette fur J'un
des fonds hypothéqués, il faut toujours que les préalables
aient été remplis vis-à-vis les débiteurs, c'eft-à-dire, qu'ils
aient tous été affigoés & condamnés. On citoit l'Arrêt
rapporté par Boniface, tom. 3, li\'. 3, tit. 4, ch. ).
Par Arrêt du 14 Mai 1781, au rapport de Mr. le Confeiller de Beauval, les Legier furent condamnés chacun.
pedonnellemenr au paiement de la portion les concernant,
& 'hypothécairement chacun pour le tout fur les biens délaiiTés par le défunt, des J 9& liv., fous la déduétion des,
frais de la dernieie maladie & funéraires de Catherine Arnoux, à la charge par Pierre Legier de faire intervenir
fes deux famrs dans la quittanee qu'il concéderoit,' & de
leur compter, la légitime qui leur compétoit fur la dot de
leur rnere; & avant dire droit au paiement des )02 liv•.
reftantes de la dot, les Legier furent chargés de prouver
. que Pierre Legier avoit reçu les effets après le décès de
leur mere; ils furent condamnés aux dépens faits jufqu'à
leur expédient, à la moitié de ceux faits jufqu'à l'Arrêt ,.
même à la moitié des épices; la moitié rei,l:ante fut l:é.fervée. Ecrivant Mes. Sauvere & Emerigon..
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PAt AIS
ARRÊT
D 11
PRO VEN C l!~~ 1 §
LXXXI.
-La Tranfac1ioT:l entre majeurs n'eji pas filjette Il refcifion pour
. caufe de lijion.
Quid de la vente des droits fucceflifs ?
Quid des autres contrats, lorfqu'il y a des ac1es exécutifs &
appro6atifs?
'ROUX
1748 ,
du lieu de Cotignac décéda ab ifltejiat le 20 Juin
laiffant deux garçons & deux filles. Jofeph RoulC
fon fils ainé fe mit en poffeffion de fes biens, & décéda
',a6 intejiat le I l Mai 1761. Mre. RoulC & fes fœurs ré~
pudierent fa fucceffion; la Dlle. Barrille fa mere l'accepta
par bénéfice d'inventaire. En cette qualité elle était tenue
au partage des biens dli pere; Mre. Roux le demanda par
'requête du 16 Juillet 1763. Les parties s'arrangerenr par
aél:e du 18 Septembre [uivanr. La Diie. Barrill.e céda à
Mre. Roux la fucceffion de fon fils ainé, fauf à lui de faire
procéder dans le bénéfice d'inventaire au partage des biens
,paternels. Mre. Roux s'obligea de lui payer la fomme de
'1900 liv. pour fa dot. & droirs; il lui uromit une penflon
-annuelle & viagere de /100 liv., & la défemparation de
-divers meubles. Les légitimes des fœurs furent fixées à
800 liv. chacune, qui, jointes. a!lx 1900 liv. de la mere,
faifoient 3 SOO liv. que Mre. Roux s'obligea de payer dans
.quatre' ans " & jufqu'alors il leur céda par forme d'intérêrs
la jouiffance de deux propriétés; il fe départit du droit de
légitime qu'il au l'oit à prétendre après la ,mort de fa tnere
-{ur fa fucceffion; il vendit enfuite les deux .propriétés, &
'chargea l'acquéreur de payer fa mere & fes fœurs.
Mee. Roux fe pourvut contre fa, mere pardevant le
prémier Juge, en défemparation de divers effets qu'elle
~éten'6it encore, dépendans de la' fuéceffion du pere. Celleci évoqua l'in!l:ance pardevan t la Cour; elle forma siemande
des arrérages de fa penfion avèc le femel pro femper. Un
•
�~2.0
Jou RNA L .
.premier Arrêt de 1768 lui adjugea les arrérages par fOImé
de provifion; elle en forma de nouveau la demande. UI1.;
nouvel Arrêt du 23 Décembre 1776 joignit cette demande·
au fonds. Mre. Roux prit des lettres de refcifion envers
l'aél:e dll 18 Septembre 1763, & la Dlle.. Barrille préfenta requête. le 6 Juillet 1780, en, paiement de tous les
arrérages de penfion qui pourroiem hû être dus..
On di!àir pour Mre. Roux, que l'exécution d'un. aél:e
quelconque
toujours forcée & inévitable, tant que cet
aél:e fubfiae, & il fubfiae jufqu'à ce que la refcifion en:
ait été prononCée.' Les. voies de· nullité n'one pas lieu
en France;. l'aél:e n'ea jamais nul de plein dr.oit; il faut
en faire prononcer la nullité; jufques alors la partie eil:
obligée de l'exécuter; elle y. ea même obligée pendant
la durée de l'infrance en refcifion, [uivanr ce principe,
pendente ~efè:iJione , contrae?us tenet~
. La Loi. donne d'ix ans. pour' fe pourvoir en refcifiotl
d'un aél:e;, le demand'eur en' refcifion peut [e pourvoir le
dernier jour de la dixieme année ~ comment le pourroit-.
il, li l'exécmion de l'aél:e étoit un obflacle à cette refci~·
fion? E1l:-il un aél:e quelconque, fur-tout un aél:e de partage, qui, pendant l'efpace de dix ans ,. n'ait. pas reç:I
quelque exécution? La jouiifance n'eR qu'une fuite natu.relie du parcage; le paiement des penfions en_ ea l'exécution forcée; tout cela ne fuppofe pas un acquiefcement
à l'aél:e, & ne fauroit par. conféq!!ent former obHacle à
la refcifio-n..
.
La' vence faite de porcion du· lot n'exclut pas la refritmion contre le partage. (Lacombe, va. partage, feél:: 6 ~
n. 2., & Lebrun dans [on' Traité des fucreflions, liv. 4.~
ch. l , D. )3.) La' vente faite des deux. proprietés par
Mre. Roux, ri?eil: qu'une fuite de' J'exécution for.cée de
l'aél:e. Mre. Roux s'étoit obligé de payer 3 soo liv. à. fa.
roere ou. à fes [œurs' dans quatre· années;. le défaut' d'argent l'obligea de vendre' les 'Proprieté.s,. & il chargea l'ac~;
quéreur de ce paiement.'
' .
D'aille.urs l'éQ"alité. eft rame, du partage ~ tout ce qui'. la
bleife ,_
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PAL A: l S
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PRO VEN C Il.
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hlefre, en contraire à la namre de l'aB:e , & doit être
rejetté. Dans les contrats ordinaires, on peut fuppofer
aux parties l'intention de faire un marché avantageux;
dans le partage, on ne peut leur fuppofer d'autre intention
que de partager avec égalité les biens qui en font l'objer.
Auffi, tandis que les Loix déclarent que dans les premiers,
il eH permis aux contraétans de s'avantager réciproquement
l'un fur l'autre, licitum mutuà fefe cireumvenire , qu'en con~
féquence elles n'y admettent la. refcilion, que lo.rfque la
Iélion en d'outre moitié, ces mêmes Loix déclarent, qu'une
moindre lélion fuffit pour faire refcinder un partage inégal:
majoribus , etiam per fraudem veZ dolum, vel perperam jin~
judicio faais divijionibus, falet fubveniri. Leg. 3, cod.. comm.
urr. Judie.
.
Quelle que fair la forme que les parties aient donné à
cet aB:.e, leur objet a toujours été de procéder à un par.rage; & delà s'en établie' cerre maxime, que rout premier
aB:e entre cehéritiers dl: _regardé comme un pattage fujét
à refcifion : eo jure utimur, dit Mornac, ut 'luoeumfJue nomine donetur, feP. uaJl[aaio ,'oer:.tur, pro. divifione. aeeipi"
debeat.
On a douté quelquefois s'il en était ainfi de la vente
des dr.oir.s fucceffirs; & fur ce poin·t il en une dininérion.
bien fimple : ou cette ·vente eH palfée à un étranger, ou
eile eft confentie par. un cohéritier en faveur de fan cohé,.
ritier. Dans le premier cas, la léfion ne .fuffit pas pour la
faire refcinder, parc;e que c;e contrat tient· alors de la nature des contrats aléawire,s dans lefquels l'incertitude des
événemens 'a fait ér.ablir, que l'on ne pouvoir être reftitué
pour fimple caufe de léfion. Dans le fecond., l'objet des.
cohéritiers a été de procéder à un partage. L'aéte ea forcédans fan principe; la vente· n'en eH que la forme; elle
n'eft intervenue .qu'à 1?occafion. du panage. C'en ce q.u'en-.
feignent d'Argentré fur l,'arr'.;>3 de la co!ltllme de Bretagne; Lebrun 'dans [on. tçaité.- des [ucceffio,ns, liv. 4"
ch~ l,. n. S,\-; Duperier,. ~0.Jn, '2" (liv. 2., 11. 67; Louet~
.
,y,~'
�""'i2.~.
t-o,
E. 1.
n'opere
1'0 UR :N kL
hm. H; n. S,;, Dumoulin, tit. 1· des Fiefs, §. ~ 3, glo!f. t
in va. droit de rdief, n •. 69.
Inutilement oppo[e-t-on que l'aél:e a été qualifié de tranfaél:ioll , & qu'il n'eft, à propcement pader, qu'une ce/Iion
.qu·e fa mere fit de tous [es droits [ucéefIitS. Mre. Roux
pe pouvoit alors avoir pour objet que le partage, & non
l'acquifition de la [uccefIion de [on frere dom l'aél:e lui. même conftate l'in[olva!:lilité. Oi' ce parrage ne pouvoit
pas être l'objer d'une cran[aébon, par,-e qu'il n'y avoit rien
de litigieux entre les. parties. Au furplus, la refcifion n'a
été impérree que contre la mere; l'Abbé Roux ne contefte pas l'exécution de l'aél:e vis-à-vis [es fœurs. L'aél:e
dom .s'agit eH donc un vrai partage; comme tel, il peut
être refcindé pour caufe de léfion. Nulle fin de non re~evoir ne peur faire obHacle. Mre. Roux établiffoir enfuite
la léfion [ur le détail de la valeur des deux hoiries..
0fll rép.ondoit pour la Dlle. Barrille, que. Mre. Roux
--étoit non reaevable d'après l'approbation, la' ratification
& l'exécution que l'aél:e reçut' de [a parr dans routes [es
parties. A peine eut-il été paffé, qu'il agit en tout tant
comme cohéritier de [on pere, que comme héritier bénéficiaire de [011 frere., enl force de la ceffion que lui avoit
fait [à mere de. totis [es droits. [ur. leurs [uccefIions. C'eft
à cet. aél:e que [e réfere. [a jouiffance & la difpofition qu'il
eut de tous les biens de [on. pere & de [on frere. C'eft
en· .force du. même titre qu'il fit procéder au panage de
la [uccefIion du pere, qu'il fit afIigner à la ponion de
fon frere tout ce qu'il ne vou1ut. pas, & qu'il, s'affbra tout
ce qu'il avoit intérêt de préférer. C'eft èncore en vertu
de ce même titre, Gu'il [e pourN'ut en recomblement comre
certains créanciers qui s'étoient fait payer de ce qùi leur
étoÎt dû, qu'il aél:ionna les débiteurs dé l'hoirie, & qu'il
les fit tondamner: c'eH à~ce titre, que l'Abbé Roux doit
'ls.les biens de> la famille qu'il poffede.
, vain oppo[e-t-il que toblt ce qui n'eft qu~exécutif,
pas fui pe .110n recevoir.' On diftingu~ fur cette
�DU
PAL-Al'S
Dl!:
PROVENCE.
-:5,2"3
matière le mineur, du majeUl:. Ef!: - ce le' pt mîer ql1l a
conrraél:é, & qui, parvepu en majorité,. exécute, demande
énfu-ite à revenir de-l'aél:e qu'-il a .fbufcrit? Il le peut nonob'f!:ant qu'il ait retiré les intérêts-qui lui avoient été promis.
Ef!:-ce au contraire ,un majeur qui ii'ef!: obligé? On ne trouvera nulle part que l'ellécution ne forme pas obHacle à [a
réclamation. Bien plus, Li les aél:es ftmplement exécutifs ne
comptent pas contr.e le majeur qui a eontraél:é en minorité,.
ce n'eit qu'à l'égard de ces ,aél:es qui ont trait de temps, &
qui étant commencés en minorité, ne re<;oivent leur perfeél:jon "qu'en majorité, &' non de ceux <jui [ont parfait!>
au moment qll'ils font pa4fés, vis-à-vis defquels toute exécution Vaut 'approbation, -& opere fin de non recevoir.
C'ef!: le fen~iment de Lacombe en fon Recueil de Jurifprudence civile, va. reflitution, feél:. 2, n. 17.
En fait, la -tranfaétion n'avoit aucun trait de temps; elle
fut parfaite au n'loment 'qu'elle fut paiTée. En ·droit, le
paiement volontaire, la fouini/Iion au droit de lods, la délégation & tant d'autres aél:es font bien plus approbatifs
& ratificat'Îfs, que iimplement exécutifs, & ne fauroient
mieux établir le droit de la Dame Barrille.
, Au -fonds, l'aél:e ef!: une véritalJle tranfaél:ion; les fines,
n'étoient ni cohéritieres inf!:imées, 'ni c'ohéritieres 'légitimes.
de leur pere. La légitime écoit la {eule chofe qui leur
compétoit; elles n'étoient pas mieux cohéritieres de lellr'
frere ainé, depuis qu'elles en avoient répudié la fucceffion.
Leurs droits fur l'héritage de leur pere étoient certains"
& ne tomboient point en partage. Vis-à-vis de la mere ,
il Y auroit eu lieu à partage en fa qualité d'héritiere bénéfiëiaire de [on 'fils ainé,. ft elle ,avoit voulu en faire ufage ;
,n.ais d'après l'abandon qu'elle en fit & la cellion de tous
[es droits fur cette fuccellion, la matiere de partage ne
manqua pas moins de fon ch f. Il étoit donc impoffible
-de méconnoître dans' cet aél:e une' véritable tranfaél:ion.
C'ef!: de ce nom que la Loi & les Auteurs allP~llent tout
-accord foufctit dans l'objet de prévenir ou de terminer'
un procès Juper lite mota G' movellda. C'ef!: ainIT que nous
Vvv.2.
�,~
JOURNAt
l'apprend d'Argout, tom. 2., pag. 413; Faber f cod. dd
tranfaélionibus, déf. 6.
Il eH cenain que la vente des droits fucceffifs n'ell:
pas fujette à refcifion ; c'eH le fentiment de Potier dans
fan traité du comrat de vente, part. '), ch. 2., §. 2., n.
34I. Si l'aél:e de 1763 ne contient ni partage, ni vente
d'hérédité, non p!ùs que de droits fucceffifs, il dl: néceffairement tranfaélion; & en cette qualité c'el!: une témérité de l'attaquer fous le frivole prétexte de .Iéilon. Il n'y
a point de conventions plus folides ni d'engage mens plus
refpeél:ables, que ceux garantis par une tranfaélion. C'el!:
ainfi que s'explique Denifart, tom. 4, pag. 661; & les
rranfaél:ions faites entre majeurs ne font point fujettes Il
iefcifion, dans quelque temps que ce foit, fous prétexte
de quelque léGon que ce puilTe être, ou de titres nou.
velle ment recouvrés : ne quidem pretextu infirumentorum de
novo repertorum, L. 19, cod. de tranfac1., parce qu'il n'el!:
pas permis de faire revivre, ni de paner de nouveau en
jul!:ice une contel!:ation terminée par un aéle auffi folide.
Par Arrêt du 2.3 Mai '78 I , au rapport de Mr. le Confeiller de Nicol<lY, Mre. Roux fut débouté de fa demande
en refciQon; & il fut condamné au paiement des arrérages de penGon dus à fa mere, & aux dépens. Ecrivact
Mes. Dubreuil cadet & Cauvet.
ARRÊT
L X X X 1 J.'
L'Aubergifle répond également vis-tl-vis de ceux qu'il loge;
& de fan auherge, & des lieux qu'il indique, comme pou.
vant en difPofer.
Ofeph Simeon, Voiturier d'Aix, vint loger au mois
de Juillet 1777 avec des charrettes chez Linfola, Aubergil!:e de Tarafcon. Celui-ci lui indiqua pour remifer fes
charrettes, une Cour à portée de fan auberge, qui faifoit,
J
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE:
p.}
pârtie de la maifon de l'Hôpital de la Charité; Linfola re~ut
les lettres de voiture. Des voleurs s'étant introduits dans
cette cour, errleverent une partie des marchandifes, firent
un dégat conudérable, qui fut conilaté par un procès-verbal
du Juge de Tarafcon. Le fieur Perrin, Marchand de la ville
d'Aix, à qui ces marchandifes appartenoient, fe pourvut au
Juge du Bourg St. André de la même ville, & demanda
contre Simeon qu'il fût fait rapport de vérification & eltimation des marchandifes volées & de celles qui avoient été
endommagées, & la condamnation du prix. Simeon appella
en garantie l'Aubergifie Linfola, à l'indication duquel les
marchandifes avoient été placées dans la cour de l'Hôpital
la Charité. Linfola préfenta un expédient, par lequel il fournit Simeon à prouver que fur la demande qu'il lui avoit
faite d'un magaGn, il lui avoit dit qu'il en avoit un à fa
difpoGtion, qu'il lui en répondoit, & que les Gx livres d'aumône qu'il donnoit toutes les années à l'Œuvre, lui donnoient
droit d'en difpofer. Le Juge voulut entendre les parties
elles-mêmes, dreifa procès-verbal de leurs dires; & par
Sentence du 3 Août 1778, il condamna Simeon envers
le lieur Perrin; & avant dire droit fur la garantie,· il ordonna que Simeon prouveroit dans le mois, que vers les
derniers jours de la foire de Beaucaire de l'année 1777,
ayant demandé à Linfola un magafin pour dépofer les marchandifes qu'il devoit faire fortir, Linfola lui avoit dit qu'il
en avoit un à fa difpofition, & qu'il lui en répondoit.
Simeon appella de cette Sentence pardevant le Lieutenant d'Aix; & après s'être départi de fon appel envers le
fleur Perrin, ilolFrit fubGdiairement de prouvér que Linfola étoit locataire de la cour de la Charité, & qu'ayant feul
droit d'en difpofer, on devoit regarder cecce cour comme
faifant partie des remifes de fon auberge. Le Lieutenant,
par Sentence du 20 Mai 1780, n'eut aucun égard à la preuve
olFerte, & confirma la Sentence du Juge du Bourg. Simeon
en appella pardevant la Cour; il demanda à prouver, 1°. que
dans fes divers paifages par Tarafcon durant la foire de
..peaucaire 1777, i\ avoit toujours logé chez Linfola, ailla
�·
,
~6
JOURNAL
qu'il le 'fairoit auparavant, & notamment le jour de' l'àrrj....
vée de fes deux charrettes à Tararcon; 2.°. que jurqu'en
l'année 1776, Linrola avoit. exigé plufieurs fois un droit d'entrepôt pour les charrettes qu'il mandait remifer à cette cour,
recevant des uns 2,4 fols, des autres plus ou moins; 3°. que.
le nommé Fran<;ois, Valet de Thibaud, fur la demande qu'il
fit à Linfola, à qui il fut fe préfenter, de l'endroit où S'!ge,
premier Charrettier de Simeon, avoit remifé [es marchandifes, Linfola l'accompagna à la même cour, lui montra
les marchandifes que Sage y avoit déporées, auprès defquelles il pla<;a les fiennes; que Linfola compulfa en fa préfence fur les lettres de voitures les balles des deux charrettes qu'il avait re<;ues, & qu'il les trouva conformes au:
contenu des lettres.
On dirait pour Simeon, qu'en plaçant fes marchandires
dans la cour de la Charité, il avoit cru les remifer dans
l'auberge de Linfola; il devoit le' croire, parce que cet Aubergifie lui répondoit de la fûreté du lieu, parce qu'il favoit
d'ailleurs qu'il faifoit une rente de fix livres à l'Œuvre, & qu'il
avoit fait payer plulieurs fois I)ne rétribution à ceux qui y
venoient repofer des marchandifes; que s'il n'avoit pas payé
pour cet o~jét, c'efi que lui. ou fes Voituriers logent toujours chez Linfola. Cette circonf!:ance feule prouve l'obligation qu'il s'étoit itnpofée en indiquant à Simeon cette cour.
Il y avoit donc eu entre lui & Linfola ce contrat tacite qui
fe forme entre l'Hôte & le voyageur; Linfola efl: donc tenu
à la garantie.
,Simeon 'foutenoit, 1°.' que le Lieutenant étoit parti d'un
point de fait faux, pour confirmer la 'Sentence du premier
Juge; 2,0. qu!il y avoit affez' de preuves au .procès pour foumettre Linfola à la garantie; 3°, qu'en fuppofant les preuves.
infufllfantes, il falloi-t admettre celle qu'il avoit offerte, préférablement à celle ordonnée par le premier Juge.
.
Que porce la Sentence? Que Simeon prouvera que Linfola lui ,avoit dit que la cour 'de la Charité étoit à fa dlC"pofititln, & qu'il lui répondoit de la fûreté des march"n~
difes qu'il y repoferoie; or, le Juge ne peut avoir- ordonné
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE:
'')11
illne tel1e preuve, qu'en fuppofant que Linfola ne doit ré..
pondre des marchandifes que dans le cas qu'il y ellt eu une
promeffe de :G'l part; ce qui dl: contraire aux princip s de
-droit, qui n'exigent aucune prome!fe de l'Hôtelier pour le
[oumettre à cette refponfion; fa qualité feule d'AubergiHe
le lie envers le voyageur; raus les événemens, hors les cas
fortuits, doivent lui être imputés, à la dIfférence du locataire & du dépofitaire, qui ne font refponfables que culpâ
'VeZ doZo. Ici le procès verbal con{l:ate qu'il n'a été fait
aucune effraaion par les voleurs pour s'im roduire dans la
cour.
Ce principe, quoique rigoureux, e{l: néce!faire. Il e{l: jufl:e
que le voyageur trouve de la flIreté dans celui auquel la
néceffité le force d'avoir recours. Si la Loi e{l: telle, pourquoi interloquer pour foumettre Linfola à la garantie? N'avaitil pas re<;u les marchandifes que les Charrettiers de Simeon
avaient voiturés de Beaucaire à Tarafcon? Ne lui avait-on
pas remis les lettres de voiture? N'avoit-il pas indiqué luimêt1;le à Simeon & à fes Charrettiers la cour de l'Hôpital
comme un fupplément à [es remifes? Ne difpofoit-il pas
de cette cour comme de fonauperge? N'érait-il pas dé.
montré par le verbal d'accédit des Officiers de Tarafcon,
que le vol & le dégat des marchandifes ne provenoient que
de l'infuffifance de la clôture & du défaut de garde? Toutes
ces preuves ne fuffiroienH~lles pas pour faire droit à la
demande en garantie, fans avoir recours à un interlocu·
toire?
Linfola répondoit qu'il fe forme un contrat tacite entre
le voyageur & l'Auhergifl:e; celui-ci re<;oit un falaire pour
le logement & la nourriture qu'il fournit au voyageur; de
cet engagement découle une feconde obligation; c'e{~ de
rendre la marchandife & les effets dans un état d'intégrité 1
la moindre altér.ation efl: à la ch<trge de !'Hôtellier, parce
que, dépofitaire de ces effets, il doit y veiller & les ref·
'titper dans le même état qu'il les a re<;us; fi cependant le
vol efl: fait avec effraaion, fans aucune négligence de la
part de l'Aubergifte, la Loi & les, Arrêts font moins rigou~
-
,
�~28
Jou RNA J:
reux à fan égard, pàrce que le faup<;an -ne peut tomher ni
fur lui, ni fur les perfonnes de fa maifan. Mais ces principes
ne peuvent être applicables à la caure; il faudrait que les
man:handifes eulTent été repofées dans l'auberge de Linfula;
elles ont été mires dans un lieu qui ne lui appartien.t ni en
propriété, ni à titre de locataire, fans que lui ni perfonne
de fa maifon aie été les recevo·ir. Pourquoi le rendre refponfable d'un vol fait dans la cour de la Charité, ouverte
à tout le monde, oÙ tous les Voituriers qui palTent VOnt remifer leurs voitures, quand les remifes des Aubergifies de la
ville [ont remplies?
Il efi vrai que Lin[ola donne toutes les années fix livres:
d'aumône à l'Hôpital de la Charité; mais cette modique
Camme ne peut pas être conlidérée comme le paiement d'ua
loyer:. Le matif, fi Von veut, eH d'engager les perfannes
de cette mai[on à bien accueillir le·s Charr:ettiers qui viennent de fon auberge y r:epofer leurs effets. Jamais Linfola
n'a retiré aUŒne rétribution de la part de ceux qui ont
été remifer à la cour de l'Hôpital. Il n'efi donc point à
l'égard de Simeon, ni locataire de cette cour, ni un Aubergifie qui eût re<;u· dans fan' hôtellerie les marchandifes
dont on veut le r:endre· refponfable. La demande en. garantie eH: encore plus infoutenahle, eu ce qu'un des Char-.
rettiers qui ont remifé les marchandifes dans la caur, &
• précifémeRt celui à qui le vol a. été fait, n'a pas logé ,chez
Linfola. Ce point de fait [ouleve toute difficulté. Commen2
Linfola [eroir-il refponfahle du vol, puifqu'il n'y a pas eL!.
entre lui & Simeon cet engagement réciproque qui Ie forme
entre l'Hô.re & le Voyageur, cette efpece de contt:ar tacite
qui lie également l'un & l'autre, & d.ont l'exécution. efi fi
rigoureufe pour l'Aubergifie ?
Linfola, en délignam la rour de' la Charité, ne doit pas
.être regardé comme un Auber:gifie, mais comme quelqu'un
q.i.!i donne des' indicarions à celui qui lui en demande ;Jaucun
de fes gens n'a aidé les Charrettiers à décharger ces'marchandi[e.s; deux Porte-faix ayant connoiifance du local ont
été 1 à la. v.écité, défignés par Lin[ola comme propres à cette
opération 1;
�DU
PALAlS
DE'
PROVENCE.
"529
. 'opération; mais Linfola lai-même n'a donné aucun' ordre
à cet égard; & pour le rendre garant, il faudroit prouver
qu'il avoit répondu de l'endroit.
Comment fuppofer que Linfola ait affigné la cour de
l'Hôpital comme un fupplément d'auberge, tandis que taus
les Marchands & autres perfonnes qui veulent f;lire fortir
des marchandifes de Beaucaire pendant la foire, choifilfent
de préférence cet entrepôt? Ce local n'était donc qu'un
entrepôt de marchandifes pour quiconque en avoit befoin,
& non un fupplément d'auberge, dont la manutention &. ta
garde fulfent· à la charge de l'hôtelier. Donc Linfola n'a
défigné qu'un entrepôt, & non un lieu accelfoire à fan auberge. En qualité d'Aubergifie', il ne fauroit _être· ref. ponfable des marchandifes repofées à cet entrepôt; il efi
alfez indifférent qu'on lui ait remis la lettre de voiture;
ce n'efi point comme Aubergifie qu'.il l'a reçue, c'efi à titre
d'ami, & on ne peut pas dire que par la rémiffion de la
lettre de voiture, l'engagement qui fe forme entre l'Hôtelier & le voyageur, ait été confommé.
Par Arrêt du 7 Juin 178 l , au rapport de Mr. le Confeiller de Garidel, la Cour réforma la Sentence, concéda
aéle à Simeon de ·ce qu'il acceptait les aveux de Linfol",
comme Judiciaires & irrévoCables, & reçut la preuve offerte
par Simeon, fans préjudice des preuves réfultantes du procès ~
Linfola· fut condamné aux dépens..
ARRÊT
LXXXIII.
Quels font les inventaires auxquels les Notaires' peuvent procéder?
Quels font ceux auxquels il doit être procédé par le Juge?
E .la· Avril 17 6 3, la Sénéchaulfée de Marfeil\e fè pourvut à M. l'Intendant; elle demanda injonélion contre
les. Notaires de la même Ville qui. avoient reçu des im.~en.-
L
Xxx.
�'î 30
Jou RNA. L
taires, d'en remettre les minutes riere le Greffe de la Séné.:
chauffée d:Jns trois jours, la reHirurion des droirs qui auroient réfulté des invenraires, s'ils avoient été fairs par les
Officiers de la Sénéchauffée, & des défenfes aux Nora;res
de s'immifcer à l'avenir dans les fonél:ions de Commiffaires
& Çreffiers des inventaires, & de rroubler la Sénéchauffée
dans l'exercice des mêmes fonél:ions. L'Adjudicataire géné.ral des Fermes fe j'oi~nir à la Sénéchauffée.
Les Notaires fe pourvurent à la Cour, & obrinrent un
décret le 7 Août même année, qui les déchargea de J'affignarion, & fir inhibirions & défenfes de rranfporrer fa J urifdiél:ion, & de traiter la matiere ailleurs que pardevant
elle.
Le T ~ Mars 1780, les Noraires firent aiourner les Offi,ciers de la Sénéchauffée pardevant la Cour, & demanderent d'être maintenus dans le droit de procéder à la confeél:ion des inventa,ires, avec défenfes de les troubler, à
peine ,de 3000 liv. d'amende, dépens, dommages & intérêts , & d'en être informé; ils demanderent la commune exécution contre le Greffier. La Sénéchauffée demanda
de fon chef, par une requête incidente dn 2.1 Juillet, que
conformément à. fon ancienne poffefIion, & en exécurion
de l'Arrêu du Confeil de I?39, inhibitions & défenCes fuffent
faites aux Notaires de la troubler dans l'exercice de's fonctions à elle exclufivement .attribuées par les Arrêts du Confeil.
Le 2.3 Février 178 l, la Sépéchauifée préfenta une nouvelle requête incidente; elle demanda qu'en lui concédant
aél:e de ce qu'elle reél:ifioit & commuoit, en tant que de befoin, les fins de fa req'uête du II Juillet· 1780, & de ce
qu'elle déclaroit confentir que les Notai'tes' puifent procéder
à la confeél:ion des inventaires volontaires, conventionnels
entre les parties toutes intéreffées, majeures, libres, pr,éfentes
& requérantes, fans prefiation de ferment ni autres formalités
judiciaires. elle fût mife fur la requête principale des Notaires
hors de Conr & de procès, & au moyen de ce, qu'inhibitions & défenfes fuffent faites aux N otair<ts de procéder à
_
�DU
PALAIS
Dl!
PROVIlNCIr.
)JI'
]a confeaion d~s inventaires, autres que les inventaires volontaires & conventiolmels) fous quelque prétexte que ce
fût, même dans le cas où il en auroit été ainli dit & ordonné
par les tefiateurs.
On {outenoit pour la Sénéchau!fée, qu'elle avoit par attribut exc1ufif le droio de procéder {eule à tous inventaires:
des biens des pupilles, mi·neurs, & autres per{onnes joui!fant
des mêmes privileges; elle' tient cet attribut du Droit Romain, du Droit municipal & du Droit François; elle le tient
auffi de la conce.lIion exprelfe que le Souverain lui en a fait,
en lui faifant acquérir les Offices de Commi!faires - Examinateurs & Enquêteurs, & en lui en départant routes les
fonél:ions; elle le tient encore d'une conceffion auffi expre!fe'
que le Souverain même lui a fait des fonél:ionsdes Commiffaires
aux inventaires, par deux Arrêts du Con{eil de 1739 qui
ont eu leur pleine & entiere exécution jll{qlles en 1758.
Elle invoquoit d'abord le Droit R~main.. La Loi 24-, cod.
de adminiJlratione tutorum ,. oblige les tlilteurs & curateurs,
dès qu'ils font nommés ,. de faire l'inventaire' des biens en
pré[ence des per[onnes publiques & avec [olemnités ~ tutores:
vel curatores mox quam fuerint ordinat;', fub prœfentia puhlicarum perfonnarum, inventarium rerum omnium & inJlrumentorum folemniter facere curabullt. La Loi 13, cod. arbitrium
tute/œ, les oblige de faire lm inventai·re public, inventari(J>
pllhlicè fac7o. La Loi 7,' cod. de curatore fUFicifi vel prodigi",
§. 6, exige un inventaire public. La Loi 27, cod. de epifcop.
audientia, {oumet les curateurs à la même formalité.
Godeftoy {ur la Loi 24, cwd. de adminiJlrat. tutor., dit que
l'inventaire pupillaire doit être fait en jugement; & fur la
Loi 27, cod. de epifcop. audienr, i} ajoute que l'intervention d'une' perronne privée, on d'ull Notaire, ne fuffiroit pas
pour la dre!fe de 1''inventaire.Ita Balde, tom. 1, conf. 385;
Cujas {ur la même Loi 2.4, cod. de adminiJlr. lUtor. ,. tom. 5"
o.per.poflh., pag. 594, & dans [es ob{ervations, tom.. 3, oper.
prior. liD. 15, cap. 14On convenoit que, filivant la Loi 32, cod. de Epifeopis &Clcri'Ès" il était permis aux. adminillrateurs des mai{ons de
X x x 2.
�~3';
JOURNAL
chariré qui y recevoient de pauvres orphelins, de faire pro':
céder à l'inventaire de leurs biens par un tabulaire; mais
on obfervoit que cerre Loi étoit fpéciale pour le cas qui en
étoit l'objer. C'étoient les Adminifl:rateurs eux-mêmes qui
avoient la confiance de la Loi, & non le rabulaire, qui, par
étar, ne méritoit aucune foi en matiere d'inventaire: tabulariis enimfolis, fjuantùm ad id competit, non credimus ( Novelle l , cap. 2, §. 1 ); & s'il avoit un caraél:ere fuffifant
pour écrire l'inventaire des biens des orphelins en préfence
des Admini{hateurs, lorfque ceux-ci trouvoient bon de le
d1Oifir, il falloit alors que l'inventaire fût approuvé & confirmé par le Juge, ainfi qùe l'obfervent le Gloifateur & Godefroy.
Rien n'efl: plus indifférent que la difpofition de la Loi
22, cod. de jure deliberandi, qui appelle un tabulaire pour
faire l'inventaire de la fucceffion, lorfque l'héririer veut connoitre les forces de l'hoirie avant que de l'acceprer. Cette
Loi ordonne en même temps que l'inventaire fera fait, non·
feulement en préfence des tabulaires, mais encore de tous
ceux qui font néceifaires pour la confeél:ion de l'inventaire,
c'efl:-à-dire, de toures les perfonnes intéreifées, tels que les
légitima ires , légataires, fidéicommiifaires, &c. Cet inven-'
taire devoit en outr'e être fait, en cas d'abfence d'une des
perfonnes intéreifées, au moins en préfence de trois témoins,
fuivant le §. 2 du chap. 2 de la Novelle L La Loi avoit,
pour confier cette efpece d'inventaires aux titulaires, des
motifs qu~elle n'e'ut pas pu avoir pour leur confier ceux des,
pupilles & mineurs. Toutes les parties intéreifées furveilloient
fuffifamment les tabulaires. Le pupille & le mineur fuivoient
au contraire. paffivement la foi du tuteur ou du curateur.
. La Sénéchauifé ciroit enfuire le droit municipal. La
Communauré de Marfeille, difoit-elle, avoit fes Juges
& fes Notaires à l'époque où fon Statut .municipal fut
rédigé. Ce Statut regle les diverfes fonél:ions des Ngraires, & les émolumens de chaque aél:e qui étoit d~ ,leur
re{fon; il ne parle cependant jamais des inventaires., Ce
même Sratut parle enfuire des tuteurs & curateurs, & de'
�1
DU P AL Ai: s n p; P R t> v II N C ll~
.
)3.3 '
l rMentaire qu'ils font obligés de faire des biens des pupilles
& mineurs, & il dit: inventarium legitimè faciant , vel fa-
cere curent: & in cartam pu61icam redigant vel rèdigi faciam;
illamque cm"tam vel tranJlatum indè curiz affignent, vel reddant cujus exemplum fcri6atur in cartulario curiœ. ( Lib. 3 ,
cap. 4), §. ) , pag. 3 2 4. )
Le Statut de Marfeille ne mettant pas les inventaires au
nombre des aél:es qu'elle départ aux Notaires, n'en fixant
pas la taxe comme celle des autres aél:es, ne fuppofant d'aucune maniere & nulle pitrt que les Notaires puiffent y procéder, n'arcribuant enfin qu'à la Jurifdiél:ion·le droit d'y donner la forme publique, les Notaires de Marfeille pourroientHs foutenir que la difpofition de ce Statut el!: indifférente
au procès? Quoiqu'il foit vrai que le Statut ne donne pas à
la Jurifdiél:ion le droit de procéder elle-même à l'inventairedes biens des pupilles & des mineurs, & qu'il laiffe au tuteur le foin de le faire lui-même, il ne l'el!: pas moins auHi,
qu'elle n'attribue qu'à elle le droit d'y donner une forme puhlique .& d'en être le dépofitaire.
Il y a dans le même Statut, lib. 3, cap. ) l, pag. 347;
une autre difpofition fur l'inventaire des biens des abfens.
Il n'y el!: pas queHion des Notaires; le droit d'y procéder
n'y eH accordé qu'au Reél:eur ou aux Confuls de la ville,.
& ce droit a paffé, fuivant le Commentateur, au Magiftrat & au Procureur du Roi. Les Notaires font exclus de tous
inventaires quelconques par le Statut municipal de Marfeille,
par cela feul qu'ils n'y font appellés à aucun.
Le Droit Français ( continuoit-on ) établit le même
privilege. Suivant l'Ordonnace de Blois, art. 164, les
Notaires & Tabellions font admis en concours avec les
Juges pour procéder aux inventaires, fur la requifition des
parties majeures; s'il n'avoit pas été dérogé à cette difpofition, les Notaires auraient au moins un tirre apparent,
quoiqu'inutile, pour procéder à ces mêmes inventaires, que
la Sénéchauffée ne leur a abandonnés que pour la plus
grande liberté publique. Dans le même article de l'Ordonnance, il efl: ajouté, Jau! de procéder par voie de [cel,
Ji
�534
] 0 UR N A :r.
faire ft doit, pour la conftrvaticm des b~ns d'es mfneurs. Ce;
p'e/l: donc p'oint aux Notaires. à. procéder aux inventaires des
biens des pupilles & mineurs. C'efl aux Officiers de Jufiice
à le faire, puifqu'ils ont feuls le droit de procéder par voie
de fcel, & de faire les inventaires- à la fuite, de la levée des
fcellés. Charondas en [es pandeél:es, liv~ 2, chap. 7 des tuteurs, réferve al>x Officiers de Juftice les inventaires des
biens des pupilles & mineurs, à. l'exclufion des, Notaires•.
V Arrêt de Réglement du Parlernem de Paris, rapporté dans.
le Journal des Audiences, rom. 2, liv. 7, chap. 2S, art.
19, veut que les inventaires des ab{èns ne puiffent être faits.
que par les Juges.
Dans le droit, ce n'efl pas la requjfition du tuteur qui
donne million aux Juges; ils l'ont par attribut fpécial, coutes
les fois qu?il y' a lieu d'inventorier les biens des pupilles.
& mineurs.. Voilà pourquoi, dans le cas même où le te[tateur a défendu au tuteur de faire un inventaire, on l'en.
a difpenfé; les Parlemens laiffent aux Juges le foin d'exa_'
miner & de décider s'il y a lieu d'obliger le tuteur à le
f~ire, anendu que les intérêts des pupilles & des mineurs.
étant de droit public, les Loi,x qui permetto,ient aux teftateurs de prohiber ou remettre l'inventaire au tuteur, ne·
font point obfervées parmi nous, fuivant Duperier, m:zximes'
de droit, tit. de l'adminif!:ratiol1 des biens. Ita; Mourgues,.
pag. S4; le nouveau Commentateur du Statut, t-om. 1" pag.
12:1, na. 2J;' Serres, inflit., pag. 78; Guipape, que fi. 354.
Buignon, des Loix ahragées , chap. 16, ,. part. 4;. Julius Clarus,.
§. teflamentum, quefl. 64'; CovarrulJias, lib., 2, cap. 14.
Cette opinion a même cet avantage " qu'elle eft fondée furIa difpoHtion. de pluneurs aunes Loix Romaines" fuivanc
lefquelles l'intérêt des pupilles & des mineurs efi fupéFieur à,
la volonté du teflateuJ!.
IJ ar la Déclaration du 12" Août, 17°2, if a· été enjoint à:
tous les Officiers de Juflice, revêtus des Offices, de Commiffaires aux inventaires, de procéder d'office & faRS en être:
requis par les parties, aux in..en,raiJ.:es. des, biens. des abfens:opupilles &: nùneurs.
�'b \J
PAL A 't 'S
nE
PRO V E li' C E:
' 13 )
Celle du. 23 Janvier 1717 porte que les Offices d'En~
'quêteurs & Commilfaires-Examinateurs créés pa~ les Edits de
Mai 1 )83, Juin 1 )86, Mars 1) 96, enfemble ceux créés par
l'Edit du mois d'Oétobre 1693, qui font polfédés & réunis
par les Juges & Officiers des J urifdiétions des lieux où ils
'ont été établis, feront & demeureront exceptés de la fup~
preffion ordonnée par l'Edit du mois d'Aoilt 1716; Sa Majefl:é vellt que ces Officiers jouilfent des mê mes fonétions,
(alaires & vacations qui leur font attribués.
On trouve dans Chenu, tom. 2, part. 3' -chap. 46, plu.
neurs Arrêts de Réglement qui ont maintenu -les Ccimmif·
faires Enquêteurs & Examinateurs dans le droit de faire
les inventaires des biens· des mineurs & ceux ordonnés en
Jufiice, à l'exclufion de tous autres Officiers, & n'ont lailfé
·aux Notaires que le droit de faire les inventaires volontaires
entre majeurs. Bardet, tom. l , liv. l , chap. 92., pag. 1 [7,
rapporte un Arrêt du Parlement de Paris du [0 Février
1622. Le même Parlement en a rendu un pareille 10 Avril
168).
Depuis que ces Offices ont été réunis à la Jurifdiétion
principale de chaque lieu, les Juges qui les ont acquis moyennant finance, ont été maintenus dans les fonétions qui y,
éraient attachées, c'efl:-à-dite, dans le droit de procéder
aux inventaires des abfens, pupilles, mineurs & autres
privilégiés, à l'exclufion des Notaires, par divers Arrêts du
Parlement de Paris rapportés pat Denifart, & par l'Arrêt du
Confeil du 21 Février 17)2..
L'Edit du mois de Juillet 1639, portant 'création des
Commiifaires aux inventaires, leur donnoit pouvoir de faire,
privativement.aux Juges & autres perfonnes quelconques dans
les villes de leur établHfement, les invelltaires de tous biens,
meubles & immeubles, titres & documens qui tomberaient
en fuccéffion ou difcurtion, de quelque autorité & par quelles
perfonnes qu'ils futrent ordonnés.
Quelques Sénéchaulfées de la Province réunirent' ces Of6ces, en en payant la finance, fuivant Mr. de Regulfe,
tom. 1, pag. 163 & 164; quelques-uns furent levés par des
�'~36
Jou RNA L
particuliers qui abuferenr de leur attribut illimité, le Roi
fut obligé de fupprimer ces Offices, & de les recréér en
Mars 17°9, avec pouvoir aux titulaires de procéder feuls,
à l'exclufion de tous autres Officiers, aux inventaires des
biens, meubles & immeubles, titres, papiers & renfeignemens des patticuliers qui viendraient à décéder, même à
ceux qui feroient ordonnés par jull:ice , lors des banqueroutes
& autres cas femblables.
Pour prévenir tous nouveaux abus de la part de ceux
qui leveroient ces Offices, les Sénéchauffées furent invitées
à les réunir, ce qu'elles firent, à l'exception de celle de
Marfeille, qui n'étant créée que depuis 17°°, n'étoit point
encore formée.
Le droit exclufif des Commiffaires, aux inventaires fut
reconnu par un Anêt du Padement de cette Province,
rapporté par Mr. de Reguffe, tom. 1, pag. 163, en fa ...
veur d'une Sénéchauifée qui avoit réuni en 1642. les premiers Offices créés en 1639. Ce niême droit exc1ufif fut
reconnu par un Arrêt du Confeil d'Etat du 12, Déc.embre
17°2" qui fit défenfes à tous Notaires & Officiers, autres
que les Commiffaires créés à cet effet par l'Edit du mois
d'Aoùt précédent, de faire 11 l'avenir aucuns inventaires,
fait volontaires ou ordonnés par jullice.
Ces Offices n'one jamais été acquis par la Sénéchauffée
de Marfeille; ils. ont même été abfolumentextingués par
Edit du mois de Septembre 1714; mais le Roi a ordonné
par deux Arrêts de fon Confeil des 3 & 2.9 Mars 1739"
que les Officiers de la Sénéchauffée de Marfeille & fon
Greffier feroient comme auparavant l'Arrêt du 9.Novembre
1734,. les fonél:ions de Commiifaires & Greffiers aux invenraires dans la ville de Marfeillè;, &. il. Y ell: fait· défenfes à touS autres de s'immifcer. dans l'exercice des
mêmes Offices, & de troubler les Officiers & Greffiers
clans leurs fonél:ions, à peine de to.us. dépens ,. dommages &
jn~~ts.
.
Des-lors il ell: vrai de dire que la Sénéchauffée. de Mar':
feiUe a. fous '-e.. oouve.au Eoint de vue l'attribut univerfel
.
lk
�DU
PAL AIS
DE
PRO VEN C E.
·s 37
"& exclulif de donner la forme publique à roùs les inven-
taires ,même volontaires, fait entre majeurs, fait entre
pupilles & mineurs, & dans le cas d'abfence.
Il el!: oe principe que le tenateur ne peut pas contrevenir aux Loix dans fan teHament : nemo potefl facere quill:
Leges locum haheant in [UO teflamerzto. L. SS ,.If. de legatis la. Tout ce qu'il ordonne contre les Loix & les Edits,
ne peur point avoir d'exécution, L. 112,.If. eod. Ses volontés en pareil cas font cenfées non écrites. L. 14 &
1 S , .ff. de condition. inflit. Ces Loix étant toutes faites
.pour l'intérêt des pupilles, la volonté de l'homme ne peut
pas les vaincre; fuivant la Loi utilitatem pupillorum prœtor
{equitur, non jèripturam teflamenti vel, codicillorum. L. 10,
if. de conjirm. tutor. vel curatOI'.
D'après ces principes, on n'a aucun égard à la volonté
exprelfe du tefl:ateur qui a prohibé au tuteur ou curateur
des héritiers pupilles ou mineurs de faire un inventaire,
ou qui.1'a déchargé de cette obligarion, & on lailfe aux
Juges la liberté d'y procéder, quand ils peuvent le croire
néceffa ;re. C'elt en vertu de ce même principe, que
l'Arrêt du premier Juin 1629 a"'.oit défendu aux Notaires
de procéder aux inventaires des hoiries prifes fans le bénéfi<.e de la Loi, bien que les tefl:ateurs l'eulfent ordonné.
Lorfque le tenateur a commis le même Notaire qui a
;reçu le [e{bment, fa volonté en d'elle-même une contravention aux Loix; elle en entachée d'un foupçon de capt3tion, & comme telle, réprouvée par les faines maximes,
qui ne permettent p'as aux Notaires de recevoir des difpo~
fitions en leur faveur; & fi on ne peut pas regarder 1:1
.oélégation que le teltateur fai.t du Notaire pour inventorier
les biens qu'il délaiffe, comme un legs proprement dit,
il n'en efl: pas moins vrai que le Notaire' en lui-même
l'infl:rument d'une délégation produélive, faire en fa faveur',
.& que fan intérêt rend cette délégation fufpeéle. C'efr
ce qui fut jugé bien précifément par l'Arrêt du Parlement
de Paris que Barder rapporte, tom. 2, liv. 2., ch. 23.
Les Notaires répondoient qu'il étoit uniquement que[~
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.fion de {avoIr fi tes Inventaires font du relTort des No..;
raires, & s'ils ont le droit commun en leur favrur.
'.
Franc;ois Premier avoit décidé la queHion en faveur de~
Notaires, par fes Edits des ~5Décembre 1543 & 14Juillet 1544-; il avoit même interdit à tous Juges & Gref..
fiers de s'en mêler. Henri II. avoit ordonné la même
chofe pour les douze Notaires de la ville de Sens; &
l'Ordonnance de Blois, dans la panie concernant l'adminiftration de la Juftice (art. 164) pone qu'après le decès
de quelqu'un, fait qu'il y ait des enfans ou non, les Izéri..
tiers du defunt ne feront contraints Il mettre aucune garnifan, ni il appeller les Juges & Procureurs du Roi, ni pareillement le Greffier de. la Jujlice, pour faire inventaire;
mais pourront prendre Notaires & Tahellions Il leur c1zoix
& commodite, Jinan en cas de prétendue confifcation, auhaine ou contention f!ntre les parties, ou 'lue par aucun y
ayant intérêt, il fait requis il fes depens, péril & fortune;
~ auifi de proceder par voie de fcel, fi faire fe doit pour
la confervation des hiens des mineurs ou ahfens.
Tel eft tellement le droit commun, que quand les be..
foins de l'Etat ont exigé la création des Offices de Commilfaires aux inventaires qui ont été fucceffivement créés,
ifupprimés, recréés & anéantis, pour affurer l'exercice des
fonél:ions aux tiçulaires qui devoient êrre pourvus, les
Arrêts du Confeil ont fair inhibirions & défenfes aux Juges
& aux Notaires, chacun en ce qui les concerne, d'en
faire les fonél:ions. L'on reconnoiffoit donc alors qu'il y
avoit des inventaires qui concernoient les Noraires, &
d'autres qui concernoient les Juges. La fixation en en:
toure dérerminée par la difiinél:ion des inventaires volontaires & .des inventaires judiciaires. .
Enfin l'Edit du mois de Décembre 1691, portant création des Offices des Noraires Royaux Apofioliques, dont
trois furent unis à la Communauté des N oraires dé Ma-rfeille, porte également le droit de faire les inventaires
des Eccléliaftiques concurremment avêc les autres Notaires
déja. créés. Denifart, va. inventaire, rapporre vingt -deux
�DU PALAIS DE PROVENCE.
')3~
Arn~[s rendus pour les Noraires des diffirenres villes dll
Royaume, depuis le 3 Avril 1699, jufqu'au 7 Juillet 176 l,
qui toUs ont confirmé les Notaires dans le droir de faire
les invenraires volonraires. On en rrouve de femblables
dans le Journal des Audiences, dans Barder & dans Theveneau. Le Réglemenr de la Cour du .1 Juin 1629 porte, que
les Notaires procéderont aux inventaires- auxquels ils feront
commis par la difpcifùion des tdJateurs, {: aux autres auxquels ils feront volontairement appellés & employés par les
parties; appartiendra aux Gre.fliers, privativemerzt aux Notaires, de faire & recevoir les inventaires 'lue les héritiers
feront pour accepter les héritages a eux délaiJ!ès par hénéfice d'ùlvpuaire, hien que .tes teJlateurs en eujJènt autrement
ordonné; enfemhle. les inventaires qui feront faits par autorité de Juflice, par les tuteurs , curateurs & autres adminif/rateurs, Ji par le teJlateur n'en a été autrement difpoft.
Cè Réglemenr rend hommage aux principes. N'y a-r-il
rièn de éonrenrieux? n'y a-r-il poinr de procès? Les invenraires fonr aux Notaires. Y a - t - il procès? Le Juge
doir y procéder. Car enfin qu'ell - ce qu'un invenraire ?
Ce n'eU qu'une defcriprion de ce qu'a délaiffé le défunt
ad· pe/petuam rei memoriam. Lorfque cerre defcription n'a
trait à aucu ne (orce de litige, il efi inutile d'employer le
tninillere du Juge, qui. ne peur être néceffa~re qu'aurant
qu'il y a reus & aaor. Eh! qu'a-r-on à faire de l'inrervention du Juge, là ON il n'y a Iii procès ni conrenrion ?
Inter fonfentientes nullœ Juill Judicis- partes, Judex ad llOfl
petira venire non dehe't.
. Dès qJe ce n'dl: pas l'intérêt d'un procès pendanr,
ou la volonté des pa,nies ~ui appelle le Tribunal ,
ce n'ell: d.onc plus .que l'inrérêt burfal de ce même Tribunar qui le fait' agir ,. & cet inrérêr ne doir jamais être
le~ mobile d'un T-ribunal de Jufiice. ,Brodeau rappella les
vra:s principes, en plaidant lors de l'Arrêr de Réglemenr
du- Parlemenr dé Paris du 7 Août 1617' qui fit défenfes
AUX Officiers d'Angouleme de fe mêler d'invenraires;)
'1yy'2
�JOÜRNAL
auroit
des mineurs, tans en être requlg
même quànd il y
par les parties.
Enfin combien d'inventaires qu'il importe de ne pas
manifeller, & par conféquent de ne pas conagner dans
un Greffe, ne pandantur fècreta familiœ, dit la Loi l Combien d'autres dont les frais abforberoient la valeur du mobilier! Ce n'ell pas fur d'autres motifs que les Arrêts
& les Auteurs craignant avec raifon que la proteél:ion que
l'on doit aux pupilles, ne tourne aina à leur préjudice,
ont laiffé la confeél:ion des inventaires au choix des teflateurs & des tuteurs. C'efi aina que l'obferve Henris,
tom. l, pag. 6)0.
.
,
Auffi la Loi derniere, cod. arbitrium tutelœ, permettoitelle au tefiateur de prohiber la confeél:ion de l'inventaire,
nifi teJlatores ./pecialiter inventarium confcrihi vetuerÎnt. Il
faut convenir cependant que la plupart des Auteurs atterrent, que la prohibiçion faite au tuteur de procéder à j'inventaire prête trop à la fraude, & qûe nonobHant cette
prohibition, le tuteur fait toujours bien d'y faire procéder,
ainG que l'établit Furgole,. des ~eJlamens, tom. 4, pag.
120 & 477.
Mais de ce qu~ le teHarepr ne peut pas
prohiber l'inventaire ut fic, il ne faut pas en conclure
qu'il fait afireint à un inventaire judiciaire, ou qu'on ne
puiffe pas y lllppléer, foit par un inventaire domell:ique ,
foit par un inventaire pardevanr Notaire. Par l'un ou par
l'autre, tous les intérêts font remplis, & l'on fe prête
encore aux vues du pere de famille. Il n'efi donc pas
permis de douter que la confeél:ion des. inventaires volonta ires , ou de ceux auxquels les Notaires font appeltés par
les tefiateurs, ne foient de leur reffort ou de leur cotppétence.
Les preuves que la Sénéchauffée produit pour établir
la poffeffion oÙ elle efi de procéder à la confeél:ion de.s
inventaires, conafient à des inventaires faits depuis l'Arrêt
du Confeil de 1739; mais il efi prefque toujours queHion
d'inventaires faits à la fuite d'appofition de fcellés ou q'iQventaires requis, & prefque toujours .requis par des fetp-.
HO
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�iï u P ÂL A ySDn P R<; VEN c n;
mes; c'ell:-à-dire,
'H y'
par des :veuves. L'on n'a jamais contellé
à 13 Sénéchauffée de faire les inventaires qui doivent fervir
aux bénéfices d'inventaire, ni même les invenraires qui
feront requis par les tuteurs ou par les parens. Le Réglement
de 162.9 lui en accorde le droit; mais quant aux autres
inventaires, qui font précifément ceux que l'on contelle,
on ne peut méconnoitre la poffeffion des Notaires à cet
égard. On. trouve des inventaires de I2.71, de 1316, de
1471, & dans les temps pollérieurs. Que l'on en juge
donc par les Ordonnances, par le droit, par la poffeffion, par l'intérêt pécuniaire des citoyens, par l'intérêt
de la liberté publique, par les Réglemens de la Cour;
les Notaires font aptes à recevoir les efpeces d'inventaires que la Sénéchauffée leur contelle.
L'ancien Droit· Romain connoiffoit deux efpeces d'héritiers ;. ceux que l'on appelloit fui, c'ell-à-dire, néceffaires, tels que les enfans & les efc1aves; la crainte de
mourir fans héritier (& c'étoit une tâche à la mémoire
du défunt) avoit infpiré cette dillinél:ion à la vanité romaine. Il y avoit encore les héritiers étrangers, c'ell-àdire, ceux qui avoient la faculté de ne pas vouloir de la.
fucceffion.
[
_ On ne connoiffoit point alors le bénéfice d'inventaire ~
& c'érait pour y fuppléer & ne pas s'expofer à l'aveugle
dans une fucceffion fouvent critique, qu'on donnoit à cet
héritier étranger le temps de délibérer, afin qu'il, pût dans'
l'intervalle s'enquérir des fonds de la fucceffion. Le délai
qu'on l':1i donnoit, é,toit de cent jours au moins, fauf d'augmenter cum jufld causd, & dans l'intervalle le prêt,eur lui
faifoit l'exhibition des titres, fuivant la Loi 5 , cod. dç' jur.
delib. afin qu'il pût examiner s'il lui importait ou non d;accepter ou de répudier.
. En attendant, comme on n~ cqnnoiffoit pas la 'regle;,
l~ mort faifit le vif, l'héritier n'était poin~ faiu; tellement
hien que, s'il mouroit ~vant d'avoir fait (on. lldition, il ne.
tra9fmettoit point,à [es h.ériti~rs, & il Y avoit li~u au droit
d'accroître, s'il avoit un eohéritier; ainÇ1 qu: le décide le
�HZ
•
J '0 U RNA r:
,
§. 4 d"e Senatufeonf orphie. jaeefJat hœreditas. C'étoft aprèS
s'être bien infl:ruit, que l'hééitier voulant enfin accepter,
demandoit la potre/Iion des biens, fecundiJm tahulas, au.
prêteur; & la potre/Iiop des biens nihil diffèrt ah hœreditate"
dit la Loi 3, if. de Donor. poffiJJ. C'ef!: enfin parce que
jacehat hœreditas, en attendant que J'héritier étranger fe,
fût déterminé, que l'oh nommoit à l'hoirie jacente le
curateur dont parle le tirre du' if. de eurat'. hem. dando.
Il n'éroit donc pas étonnant que l'on ifnplorât l!aurorité du prêteur, quand, il n'y avoit que ce m oyen pou r
parvenir à la po/fe/Iion des bien's. Mais J'on ne connoît plus
cette forme de procéder; & depuis l'introduél:ion du hé..
néfice d'ihvenraire, l'on a adopté la regle, le mort faifit
le vif, & à la po/fe/Iion des biens jèeulldùm tahulas, l'on a
fubrogé cette autre maxime, hœtes.fùeeedit in univerJitm jus
defune7i. Or par une jufl:e conféquence du principe' de la:
Sénéchautrée, tour de même qu'il faudroit fàire inventaire
de J'autorité du Lieutenant, par la feule raifon que l'on ne
pOllvoii: potrédér que de fon autoriré, par la même raifon
auill, dès que J'héritier fe patre de fon intervention pourla potre/Iion, il doit s'en patrer au/Ii pour l'inventaire;: J'un
n'ef!: que la conf~q~ence. de l'aune.
,.
. Par le Droit Romain, les inventaires dlis 'biens des pu-·
pilles dé oient-ils être 'faits auc7ore'prretore ? . Tour le monde
fait jufqu'à quel point les R mains avoiént porté la prévoyance pour l'intérêt des' pupillés. II y 'a une foule de
textes dans r te é-r0i~ qui p~rlent d;e -l'ioventai-re ,:& il n'yen ,a ..pas· la,l ~qui ex·igé -quril {( it fait au't7ore >lp;-'œlOre ~ ils
nl~xigent lamais, qlle)'inv.e:~[arre fait par uné \pe~fàlln~ p~~
b!J~lIe, o-u'-par: un- ftnbe,. & aucun1 de ces d~tfX ntot~ ,~ne
c:omtfpond là celui· de prêteur.' L;r Loi 24', cod. de perieulatutor. dir : tutor~s., fuh prœfentia perJon'arum f?u6Jiedrum , in";
wntaflunJ faéèrf' C'fifal'Ü,,!t. .~à ECO \"ae,rniè~e', cod. drhit. 'tUt
§, )l1~ '6, tlu! rit:, de eu'rai:. jtûio-ji; la' ,Loi d'érpjerè ;"'ëoq;'
de jur, dêlihe'r. '& la 'Loi j-'2 ,,-éod. dr'Epifcop:& Cleri!::
n'attribuent' !pas aux jugés, la confeého~ des invent~ifes' (le,$'
bie~~ g,es pupille~~"
- , ':
�bu PALAIS DB PROVENCE,'
Hl
Dans Je Statut de Marfeille , ch.
hv.
intitulé, de
'J.ecedentihus ah inteflato, il eft parlé ,des inventaires; & s'il
exige que l'on fa1fe invemairede leurs biens, ce n'eH pas
in cartulario puhlico; terme qui n'a aucun rapport direétni
indireét avec la Juri[diétion. Dans le chap. 4'5 du même
livre qui parle de tutorihus dandis & p~r curiam adjunger.zdis,
il efl également fait mention de l'inventaire; on y voit
que la nomination dl! tuteur ou [on expulfion doit être
confignée nan in cartularia puhlica, mais in cartularia Curiœ,
& que les tuteurs doivent, faire inventaire: inventarium legi-
sr,
2,
lime faciant tlel facere curent, & in cartam pUhlicam eadem
redigam vel redigi faciant , illamque cartam, vel tranJlatum,
indè Curiœ ajJignent, vel reddant, cujus exemplum fcrihatur
in cartularia Cllriœ..
Le tuteur nommé par le Juge, le feul dont parle le
Statut, a donc la liberté de faire ou de faire faire l'inventaire. Cet inventaire fait, on doit le con!igner in cartarn
puh/icam, & c'eR enfuite un extrait de cette carte publiGue que l'on doit remettre au Greffe, afin qu'il foit tranfcrit
dans les regiflres. Il efl a1fez jufle que le Juge qui a nommé le tuteur, [ache qu'il a fait inventaire; mais il n'dl:
pas néce1faire pour cela qu'il y procede lui-même : auffi le
Commentateur de ce Statut dit, pag. 106, que ce font
les Notaires qui procedenr à la confeétion des inventaires.
Theveneau fur l'art. 164 de l'Ordonnance de Blois,
pag. 320, cite deux Arrêts qui ont attribué les inventaires
aux Notaires, privativemenr aux Juges & aux Greffiers.
Papon, liv. 1), tit. 6 des inventaires, n. 9; Filleau, part. 2,
tir. 6; Journal des Audiences, Arrêt du 21 Avril 1633;
Bardet, tom. l, pag. 7; Ferrieres en fon traité de tutelles,
pag. 143; Graverol [ur la Rochetlavin ,pag. 466, rappor..
·tenr plufieurs Arrêts qui ont également confirmé la maxime.
Mourgues fur notre Statut, pag. 36, & Mr. de Mont..
"alon en [on Précis des Ordonnances in vo. inventaire ~
a1furent qu'il peut être fait par un Notaire fans J'intervention du Juge. Le nouveau Comm·entareur de nos Sratuts
tient le même langage. :Voici enfin cO!Jlme s'explique M.
"
�Jou R-N A'L
d'Agueffeau, tom. 9, pag. 487, dans une hypothefe où
le teflateur avoit difpenfé le tuteur de faire inventaire ':
la vérité, dit-il, tout cela ne peut autoriftr votre 8uhjlitut
(la lettre étoit écrite à Mr. le Procureur-Général) ni les,
OJficiers de Draguignan
faire cet inventaire judiciairement, parce 'lue fui vant les véritaDies regles, 'lui apparemment [ont ohfervées en Provence comme ailleur.s, les Procureurs du Roi ne peuvent requérir, ni les Juges ordonner
pareils inventaires; fans en être requis ou par les héritiers,
ou par les créanciers du défunt. Mais le tuteur n'en efl pas
moins oMigé pour fa décharge & pour l'intérêt de ceux qui
[ont l'ohjet plus ou moins éloigné de la difPofition dIE
tateur:-, de fixer l'êtat de la fuceejfion par ua inventaire
fidele & fait par un Notaire en préJénce de ceux 'lui y [ont
int éreJJès.
. Delà une foule de conféquences. 1°. Les Juges n'ont
,donc point d'inventaire à faire, s'ils n'en font requis,
2°. Le tuteur ou rout .autre peuvent faire inventaire; il peut
donc y faire procéder par un Notaire. 3°. Il n'dl: donc
pas néceffaire, pour que le Notaire puiŒe procéder, que
toutes les parries foient majeures, libres, &c.; enfin fi
l'on doit procéder à l'invent.aire en préfence de ceux qui
y font intéreffés, on doit donc les affigner.
Par Arrêt du 13 Juin 178 l , au rapport de Mr. le Con.
feiller de Mons, les Notaires furent. maintenus dans la
poJfeffion de procéder à la confeéiion des inventaires volontaires, & de ceux même .des mineurs, quand ils en
feroient requ.is par les parties. Il fut ordonné- que les Offi.
ciers de la Sénéchauffée procéderoient feuls aux inventaires
ordonnés par Juflice, où le Roi aura inrérêt; ceux dans
les cas d'aubaine, de déshérence, de bâtardi(e; ou de bénéfice d'inventaire, difcuffion oucàntention entre les parties; ceux des abfens , ceux des pupilles & autres per(onnes
.jouiffanc des mêmes privileges, fors & excepté dans le
cas où le tefbteur auroit nommé une ou plufieurs perfonnes
de confiance, & même les Notaires pour. faire lefdits inventaires domefiiques, auxquels ca~ le~ N oraires infcrironr
')44
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PAL 'A l S
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PRO VEN C E.
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les inventaires dans leurs regiftres, avec àéfenfes d'y inférer
,d'autres inventaires', -à moins qu'ils n'en foient requis pa-r
les parties; la Sénéchauifée fut condamnée au quart des
dépens, les autres trois quarts entre les parties compenfés;
la Cour déclara l'Arrêt commun & exécutoire contre le
Greffier, & le condamna aux dépens de cette qualjte~
Ecrivant Mes. Pafcalis & Raux.
- -
•
ARR Ê T
L
L X X XIV.
Preuve pflr témoins de la démence. du teflateur rejettü.
(
E 22. Avril 1767, teftamenc de Catheri-ne Danillon.;;
elle légua 1000 liv. à Louis Danillon [on frere, &
inHitua pour [on héritier univerfel Jo[eph.-François Danillo.!l<
.fon autre frere avec qui eHe demeurait. Le 21 Mai 1768,
la Dlle. Danillon fit un codicille; elle révoqua le legs de
1000 liv. fait à Louis Danillon ,. & elle mourut le 26 du
même mois. Le .21 Juin. 1779, Louis Danillon [e pourvut
pardevant le Lieutenant de Toulon en caffation. du codi-·
cille; la caufe fu't compromife à des Arbitres, qui rendirent· leur Semence le 23 Février 1.780; Louis Danillotl.,
fut débouté dè fa demande avec dépens.
LOUIS J).lnillon. appella pardevanc la Cour, demanda la,
caffation du te!rame.nt & du codicille, & offrit de prom;er que
la Dile. D'lnillon était dans un état de démence & d'imbécillité avant lors & après le te{):ament & le codicilleh
. On difoit pour lui, que d'après la derniere Jurifprudence- "
]a pre UNe par témoins de la démence du te.ftateur eft reçue,
quoiqu'il n~y ait point de commencement de preuve par écril\.
Le Parlement le jugea ainfi par Arrêt du la. Mai 1746, il]'Audience du rôle, en faveur de Jacques Maifot; c.ontre Ba-.
lechan de la ViHe d' Arles. "'~
. La même chofe fut jugée, & la preuve par témoins fut:
~,::.ue par Arrêt du ,3Q Juin. 17S6, au. rapport de Mr•. da:
L
.
Zzz
�HG.
Jou RNA ri
Montauroux; en faveur d'Honoré .& ,Catherine Ifnard, con'.:
tre Jacques Domergues, & lors de l'Arrêt rendu à l'Au- .
clience des pauvres, le 13 Avdl 176'h fur les concluGons de
Mr. l'Avocat-Général de Cafiillon, entre Pierre Pourcin ,
& Pierre Florens. M. le Premier Prélident avertit les Avo.cats de ne plus foutenir qu'il fallût un commencement de
preuve par écrit, pour être re~u à la preuve par témoins
de la démence des tefiateurs.
Il efi vrai que celui qui efi tombé en démence; peut refier,
s'il recouvre l'uf.1ge de fa raifon & de fa volonté; mais alors
c'efi à celui qui. foutient la difpoGtion, à prouver que le teftateur jouiffoit de fan bon fens lorfqu'il a difpofé; & toures
les fois que. celui qui attaque un teltamenr, efi reçu à prouver l'imbécillité du teltateur, la preuve contraire eH réfervée
à celui qui le foutient.
A inG jugé par Arrêt du 30 Mars 1775, en faveur des en.
fans de la fœur d'Antoine Leél:, charretier du lieu de Rians,
contre Honoré Leél:' leur oncle, conformément aux con-'
clulions de. Mr. l'Avocat·liénéral de Montmeyan.
Cet Arrêt n'eut aucun égard à l'exception tirée de ce
que les demandeurs en caffation n'articulaient pas les faits
de démence; on ne rifque rien de recevoir la preuve par
.témoins de la. démence en général; les témoins peuvent
toujours. développer le fait par les circonfiances particulie.;.
res qui fervent à .l'établir; en propofant les faits, on ôte
là liberté aux' témoins de déporer des faits plus relevanrs
dont ils font infrruits; en propofant les faits, on prévient
la partie adverfe fur- fon enquête contraire, & on ouvre la
voie de la fubornation.
• Il efi univerfellement convenu que l'affettion du Notaire,
que le teflatwr étoit Iain d'efPrit, de mémoire & d'entendemellt, ne pem fervir de rien. D'Olive dans fes que fiions
notables de droit" liv. 5, ch. 9, rapporte deux Arrêts qui
J'ont jugé de même : Par la raifon (dit-il) que la charge.
des Notaires les oblige" retenir jidellemellt ce que les td/at~urs leur déclarent être leur intention, pour. régler la fucc'!/fion de leurs biens; mais ce .n'eft P(ls Il eux -juger de
a
a
�DU
PALAr'S
DE
PROVENCE.
H7
léur hat, fi ahfàrument que léur témoignage exclue les parties
de prouver le cantraire, & que leur jugement néceJlite les
Juges de paffir par leur avis. Ita Boerius, décif. 27, nO. 47;
Mantica, de conjec7uris uhim. volunc., lib. 2, tit. S, n°. 17;
Graffus in §. teflamentum, qu. 22, nO. 8.
On répondait pour Jofeph-François Danillon, qu'en principe géNéral, la demence: ell: un pur fait dont la preuve
dépend, comme celle de t,ous les autres faits, des dépoficions des témoins. La folie, dit Mr. d'Agueffeau, tom. 3,
pag. S20, efi-, pour ainfi dire, un délit innocent, un déréglement impuni, un, défordre purement phyfique; d'où ce'
grand Magill:rat conclut- qué la preuve par témoins en ell:'
admiffible.
L'on fait auffi que pour l'admiffion de cette preuve, il
n'ell: pas néceffaire de rapporter un commencement de
preuve par écrit. Le· commencement de preuve par écrit
n'ell: requis que dans les cbofes qui, d'après les Loix, doivent être conll:atées par aél:es ou par' inll:rumens. Mais la'
demence ell: un fait qui gît tout en adion, & dont la preuve
naturelle ell: le témoignage de ceux qui on t été témoins de
la conduite ou des aétions de la perfonne réputée infenfée,
furieufe ou imbécille. ( Mr. de Montvallon dans fan traité
des fucceJlions, tom. l , chap. S, art. 3 l , pag. 472. )
Mai~ de ce qu'on n'efl: pas'obligé de rapporter un corn·
mencement de preuve par écrit, pour pouvoir être admis
à la preuve teHimoniale en fait de- démence, s'enfuit-il que
dan~ ces fortes de n atieres la preuve par témoins doive
être indifféremment admife dans tous les cas.
)
Mr. d'Agueffeau dans la célebre affaire de l'Abbé· d'Orléans, tom. 3 de fes Œuvres, pag. 362, après avoir établi
Gue le fait de démence peut être prouvé par témoins, ajoute:
Nous croyons qu'on ne doit pas en faire une maxime fi générale, qu'on. ne puiffè jamais refuftr la preuw par ,témoins.
Louis Danillon n'avait d'abord attaqué que le codicille,
& il ne l'avoit attaqué par aétion principale que [ur des points
de forme. Le moyen tiré de la prétendue démence n'étoit
propofé que fubfidiairement. Il avoit convenu en premiere
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infrance -que le tell:amene étoit bon. Ce tell:ament renter.:!
moit un legs en fa faveur, que le codicille faifoit paffer fur
la tète de fa fille. En caufe d'appel, le tell:amene & le codicille fone frappés du même anathème. Quand ell:-ce que Louis
Danillon vie ne offrir de prouver que fa fœur étoit en démence? Environ dix ans après la mort de la tell:atrice: dix
ans fans foupçonner la démence! Elle étoit réelle; il étoit
bien plJS aifé de s'en affurer dans les premiers momens, &
de la conll:ater dans le principe.
En général, rien n'ejl plus difficile que de prouver le fait
de démence, dit Mr. d'Agueffeau, tom. 3, pag. S14, fiJr-tout
dans une perfonne que la nlON a mis hors d'état, ou de s'accufer ou de fe juflifier elle-même aux yeux de la leif/ice. Non
feulement il faut alors attaquer une préfomption naturelle, il
faut encore rendre vifihle & fe'!fihle, pour ainji dire, une qualité toute invifihle & toute intérieure. Les yel!x ne peuvent en
être les premiers Juges; ::lle récufe ,fi l'on peut s'exprimer ainfi,
le jugement de tous le~ fens; on ne l'envifage. point en elleméme; on n'en voit fiue de fimples copies, que des portraits
Jouvent imparfaits, qui fe tracent dans les ac7ions fenfihles &
apparentes. Les Juges même ne voyent point ces ac7ions; ils
ne les apprennent que par le récit des témoins.
Suivane les Loix du J?igell:e & du Code dont nous avons
adopté les difpolitions, l'on ell: non recevable à atta-··
quer l'état d'un citoyen cinq ans après fa mort, ne de flatu
defunc70rum pofl quinquennium quœratllr. On ne doit plus après
ce temps troubler la cendre de ce citoyen, ni venir jetter
des foupçons fur fa mémoire.
'
Quelle preuve offre Louis Danillon? Aucune; il n'entre
dans aucun fait, dans aucun détail; il demande vaguement·
& indéfinimene la preuve de la démence. Que deviennent
les regles fi connues, qu'il faut coarter des faits clairs, précis & concluans, qu'il faut éclairer la Jull:ice par un expofé
d'étaillé & raffurane? Les Arrêts qu'on a. cité font intervenus dans des hypothefes où celui qui offrait la preuve, la
[amenait d'une' foùle de faits majeurs', d'une foule de préfomptions décifives. Il ne fuffit pàs de pronon,:er le. mot
�ri ü PAL AIS D E P ll. 0 VEN C P;
H9
'âémenèe, pour en accréditer le reproche; il faut" pat un ré·
fultat des circonHances, rendre l'état du tefl:ateut jufl:ement
douteux. Or, ici rien de femblable ne fe rencontre; on
n'ofe .même rien alléguer qui puiffe faire préfumer la folie.
S'il s'agilfoit d'une perfonne qui eût été interdire pendant
fa vie pour caufe d'imbécillité, il feroit plus facile d'ébranler
les aél:es qu'elle auroit fait dans un temps moins fufpeél:.
Mais la tefl:atrice eH morte dans la poifeffion de' fbn état:;
rien ne fe préfume alors conrr'elle; & quand on demande
-des preuves, il faut les étayer d'une manlere qui puiffe pleinement raffurer la Jufl:ice. C'éfl: la Doél:rine de tous les
Auteurs. ( Denifart au mot interdicnan.) En droit, la fageffe des difpofitions eft une grande preuve de la fageffe
de la perfonne qui les fait. ( Mr. d'Aguelfeau, tom. 3, pag.
3 66. )
.
Quand la difpofition d'un teHateur eft abfurde, il eH na. curel, dit la Loi 27, if. de candit. inJlitut., d'examiner s'il
éroit fage lorfqu'il a difpofé; mais quand la difpofition dl:
fage, il fallt, pour être admis à la preuve de la démence,
qu'il y ait des circonHances graves qui puiffent fervir de.
véhicule à cerre preuve. C'efl: le vœu unanime de la Jurifpruden ce & des Auteurs.
Que deviendroient les difpofitions des mourans, fi on
pouvoit livrer à quelques témoins le fort de leur validité,
.fi le mot démence ne pouvoit être prononcé dans une caufe
fàns ébranler les titres les plus facrés & les plus refpeél:ahies. La preuve eH admiffible; foit: mais il faut qu'elle foit
aidée de faits & de préfomptions; il faut que l'état du
tefl:ateur foit rendu douteux par le réfultat des circonil:ances;
il faut que la Ju!l:ice foit déterminée par de faits graves "
à admettre une preuve ju!l:e, raifonnable & néceffaire, autrement il n'y a que du danger à l'ordonner. Ici cette preuve
évidemment offerte en fraude de la vérité; eU ~ e!l: d'ailleurs décriée par les propres démarches de Louis Danillon;
l'intérêt public demande qu'elle foit rejerrée.
Par Arrêt du 19 Juin '178 1; au rapport de Mr: le Con-
en
�s
~o
Jou RNA L
feil1er de Gras, la "Sentence fut confirmee avec dépens. Ecri~
vant Mes. Verdet & Portalis.
.
.
, .
.,
ARR Ê T
L X X X V.
Indemnité due au Fermier d'une Communauté, quoiqu'il m:
lui eût pas dénoncé le danger évident de perte.
L
A Communauté de Tarafcon donna la fourniture de la
viande à Michel Chauffe, depuis le mois dt; Décembre
1777, jufqu'en Décembre 1778, moyennant la rente de
8000 liv.
Après. le bail paffé, la Gafcogne manqua,nt de befiiaux,
caufa un renchériffement dans les pays qui ne lui en fourniffent que dans des cas extraordinaires; les armemens faits
à Toulon & le grand nombre d'ouvriers employ.és à l'arfenal en augmenterent la confommation. Le mauvais état
des pâturages fut caufe que des vaches achetées dans le
deffein de les engraiffer, donnerent une perte conGdérable;
il fallut de plus fournir de la viande à 1800 Matelots enfermés aux Cafernes.
Ces caufes de perte étant fucceffives, leur effet ne fe
faifant pas reffenrir tout d'un coup, la guerre pouvant ne
pas amener à Toulon les armemens confidérables qu'elle y
fit faire, Chauffe dut efpérer jufqu'à la fin que fa perte pourroit fe réparer.
"
: Vers la fin du bail, Chauffe com.muniqua fans fuccès auX.
Confuls de Tarafcon une Confultation de pluLieurs Avocats ,.
pour établir le fonde'ment' de l'indemnité qu'il était en droit
d'obtenir; il leur produiGt fans fruit un étdt des pertes qu'il
avoit effuyées, & qui montaient à 171 S8 liv. Il fut obligé
de fe pourvoir à la Cour des Aides POUt obtenir une jn~
demnité.
On difoit pour la Communauté de Tarafcon, que Chautfe
•
�DU PAL A Î s 'n il PRO V B N C l!:~ pl
etoit non. recevable, parce que, dès le moment qu'il avait
vu changer l'ordre des chofes, & qu'il avait apper9u la paf.
fibilité d'une perte intolérable, il auroit dÎ! la dénoncer à
la Communauté, à l'effet qu'elle fît elle-même la régie,
ou qu'elle pilt filrveiller celle qu'on lui confioit; ayant négligé cette précaution, il avoit pris fur lui tous les rifques,
& ne pouvoit rien demander à la Communauté, qui n'avait
pas eu la liberté de pourvoir d'ailleurs à fa nourriture,
qui n'avoit pas même pu fuivre ou éclairer l'adminiHralion
de Chauffe.
Dans le §. 7 de la Loi 13, if. locati G' conduc1i, l'Oh voit
que le Fermier qui ne dénonce pas le cas forruit, ell: obligé
d'en répondre: exercitu veniente , migravit conduc7or ; les Soldats ont emporté les porres & les fenêtres, la Loi nous dit:
fi domino non denunciavit & migravit, ex locato tenehitur, Il
faut deux chofes pour que le Fermier aie quelque aél:ion
contre le propriétaire; il faut qu'il dénonce, & qu'il n'ait
pas pu réfifl:er; & la glofe nous dit: notanda efl hœc diftinc1io, fi dominq non denunciavit & migravit.
Carrokius en fan traité de locato & conduc1o , examinant
dans quels cas on doit ou on ne doit pas faire remilJionem
mercedis, il conclut que conduc1or per vim, vel alio modo
coac1us ad falvendum à principali dehitore non liheratur, n!fi
ei denuncial'erit. Même langage dans Thefaurus, décir. 108;
dans Grat.ien en fes differrations forenr., cap: 376 & cap.
na. 9; dans Sabellus, va. conduc1or, na. ]0; dans Raviot fur Perrier, tom. 2, fol. 48 I.
Du momen.t qu'un Fermier s'apper9ciit ql.\e les événe.
mens font tels qu'ils peuvent conduire au même point
que fi le bail était réfilié, & qu'au lieu d'être Fermier, il.
peut bien n'être que Régiffeur, au moyen du compte de
clerc-à-maltre qu'il fera dans le cas de donner, il doit dire
à la Communauté: voilà votre fourniture; ou charger-vousen, ou je n'adminiflre plus qu'à votre rifque, péril & fortune,
ou du-moins furveille{ & concourer avec moi pour. tirer le
meilleur parti polJi61e des circonflances.
Si un Fermier en agie autrement, il en arrIve, JO, qu~
sn,
�'~~2.
JOUR:NAL-
s'il en de bonne foi, la Communauté peut être b dupe:.
de fon impéritie ou de fon inexpérience; 2.°. que s'il en
de mauvaife foi, il peut prendre fur la Communauté tous
les avantages qu'il veu,t; la moindre connivence entre un
Fermier & un Régiffeur fuffit pour enrichir l''un & l'autre;
JO. que la Communauté peut être obligée de payer une four,niture beaucoup plus cher que fi elle fe l'étoit procurée ;,
4°. que la Communauté ne peut ni employer des, prépofés,
vi- fe procurer fa confommation, & on tâche de la force~
de paffer par des marchés qu'elle n'a pas fait, dont elle n~
peut pas alloir une conno.iffance légale, & pour lefquels elle
e!l: obligée de s'en référer à des Fourniffeurs, quand ces
Fourni/feurs n'auroient dît traiter qu'avec elle-même~
, Il eft de toute ju!l:ice 'que, lorfque le Fermier [ouffre une
tle~te intolérable occafionée par quelqu.e é,vén.ement qui n'ell;
pas dans la nature des choIes., cet événement ~etombe fur
le propriétaire. On fuit cette regle , lors même que le Fermier
a renoncé à touS cas forruits, par la raifon qu'il n'e!l: pas jufl:e
'1u'un Fermier alimente toure une ville, & qu'il paye le prix
d'une rente dont il n'a pu jouir, ou qui ne lui' a pas rap-.
porté la moitié· du produit qu'il devoit efpérer.
, Quand- il s'agit d'une ferme dont le produit confifl:e en
fruits, rien n'eH plus facile que de fix;er. quand dl-ce que
la perte eH intolérable. Quelque variation qu'il y ait eu à cet
égard parmi les DéJél:eurs, il faut cependant dire aV.ec Mr,
de ChJpiers,' cauf. 44, quefi. uniq., qui en concilie les,opinions, que la, perte devient intolérable, lorfque conduêlor ex
"e loeMa perei'pit minùs dimidiâ. fru.êlimrn 'lui. confùe.verunt percipi. annuatlm, & que le prix qu'il en reçoit, non, fufficit ad
folutionern dimidùe pe'lfionis, vt:l rnercedis.. lJlis d<to/ms conmrrentibtts, fine dubio, [e.m.per fieri. debet rerniffio rnercedi",
prorata darnni. Mais d'aprè,s tous les principes,. le Fermier.
doit d.énoncer dans un temps opportun.,
On, répondoit pour Chauffe, que celui qu.i ne fait pas que
{es p.ertes continueront, n'dt pas tenu de donner d'avance
\ln averriffement, qui peut-être fera inutile, & qui certai..,
~e.me.nt. .Q.~.oit. 1\ fon crédit. N'a:l'ant dr.oit de. demander, le
•
- .
ré.illiment:
J
�DU
PALKIS
DE
PROVENCE.
553
'c'éfiliment ou une indemnité, que par une perte intolérable
qui ne fe vérifie qu'après le bail fini, il feroit étrange qu'il
·dût dénoncer' fon aél:ion avant qu'elle fût ;rée, & avertir la
Communauté d'un fueur contingent. Cj'il: à elle à prendre
'.ies précautions pour les événemens fâcheux, qui en meJaçant fon Fermier, peuvent retomber fur elle. Il eil: inoui
lue ceux qui ont un droit de garantie, foient alfujerris, à
(eine de le perdre, à déclarer que peut-être ils auront à
Pexercer & à dénoncer l'éviél:ion non encore arrivée. Le girant pourroit dire pourtant, comme la Co.mmunauté: fi
j'avois été prévenu, j'aurois furveillé, j'aurais empéché qu'il
n'y eilt connivence. On lui répondroit que la connivence ne
fe fuppofe pas, qu'il fam la prouver, & jufques alors garantir, quoiqu'il n'y ait aucune dénonciation.
Si le Fermier n'eil: plus recevable à dénoncer fa perte
vers la fin du bail, quelle eil: l'époque où fe complettera
cette prefcription fi reiferrée? Sera-ce d"ns le cas d'une
ferme d'tm an, au dixieme, au neuvieme mois? Où feroit
la raifon de choiGr l'un plutôt que l'autre? Faudrait-il, pour
éviter cet embarras, que le Fermier fe plaigne à la prerniere perte? Mais une premiere perte eil: rarement concluante dans cette matiere. Car alors, comme dans l'exploi.tation des fermes, il y a toujours des variations; il n'yen
au l'oit .point où les Communautés ne fuifenr fommées de fe
tenir en garde.
.
La Loi 13, §. 7 ff.locati. & conduBi, eil: dans une hypothefe
toute différente; elle porte fur le foin que le locataire doit
avoir de la chofe qui lui a été louée, fur les détériorations
dont il eil: tenu, foit qu'il ait mal ufé llli-Illême, ou qu'il
.ait laiifé donner un dommage comre lequel il pouvoit pren.ore des précautions, ou recourir au .fecours· du locateur.
Carocius, pag. 193, verf. 11°. 88, concluf. .2.4, le dit de
même.
Si Thefaurus prétend' que le Fermier doit dénoncer dans
l'année au propriétaire la fiérilité qu'il a éprouvée, fa décifion eil: reHreinte, & il convient que fi l'evénernent qui
donne ;lieu au rabais efi connu) comme le font néceifai.re~
Aaa a
�.~ H
Jou
RNA
r:
ment l'augmentation du prix des be!l:iaux, leur rareté, le
manque de fourrages, la dénonciation n'el!: pas néceffaire.
Gratien, dans fa differration 3) 4, na. 32., dit que pour que
le défaut de dénonciation nuife au Fermier, il faut que le
propriétaire prouve qu'il lui eut évité le mal dont le Fermier demande garantie. Le fentiment de Sabellus & de Raviot ell: relatif aux mêmes principes.
De Luc<I", de regalibus, difc. 91, na. I I , dit que les Fermiets doivent gagner; que cela importe à la République,
pour que fes fermes ne tombent pas; elle ell: bien plus fîJre
de leur gefl:ion que de celle des prépofés; qui, quelques fideles qu'ils foient, feront toujours plus négligens dans une
régie dont les rirques ne les regardent point. Il ajoute, difc.
6), na. 17, qu'on tient en Italie que dans les fermes publiques, il Y a léfion intolérable, lorfq ue le Fermier ell: en
perre d'un fixieme.
Quand le bail d'une ferme efl: compliqué de fourniture
& de rente, pour favoir fi le dommage efl: intolérable, il
faut fe régler fur l'une & fur l'autre, & même uniquement
fur la rente, fi elle el!: affez forte pour que la rente payée,
le F erm ier ne puiffe efpérer que de modiques profits qui
n'égaleraient pas la moitié de la rente.
Par Arrêt de la Cour des Comptes, Aides & Finances
du 2.6 Juin 178 l, au rapport de Mr. le Confeiller de Miolis ,
la Com~unauté fut déboutée de fes fins de non-recevoir.
elle fut condamnée à indemnifer Chauff;, à dire d'Experts,
de la perte par lui foufferre fur le bétail qu'il avoit préparé
à l'occafion du paffage de 1800 Matelots, & aux dépens de
ces deux chefs; & avant dire droit ault fins de Chauffe en
indemnité pour la fourniture de la boucherie, i' Arrêt ordonna que les comptes communiqués par Chauffe feraient liquidés par Experts, lefquels déclareroient là où, de la liquida tion des comInes, il pourroit réfuIrer une perre foufferte
par Chauffe, quel érait le bénéfice qu'il pouvoit fe promettre de faire dans 'le cours de l'année de fon bail, dépens' de cette qualité réfervés; il fut ordonné, au requis de
la Communauté, que Chauffe remettroit tous· les livres &
�DU
PALAIS
D:I!
PROVENCE.
H~
comptes faciaux -relatifs à la ferme, où déclarerait 11 fer. ment n'.en avoir aucuns. Ecrivant Mes. Pafcalis & Simeon
fils.
ARRÊT
LXXXVI.
A quels jignes reconnolt~on une Paroiflè ?
L
'Eglife paroiffiale de Saint-Remy el!: la feule Paroiife
pour la ville & fon ·terroir, & le dil!:riél: de cette Paroiife comprend les lieux de Lagoy & de Romany, qui forment aujourd'hui des Fiefs indépendans, mais qui autrefois
fa ifoient partie du terroir de Saint-Remy. Mre. Montfort
impétra en Cour de Rome ·la Cure du lieu de Lagoy; le
Chapitre Métropolitain d'Avignon, qui a toujours poifédé
l'Eglife de Làgoy comme \ln fimple Prieuré rural, contella
-l'impétration pardevant le Lieutenant d'Arles, oti la caufe
fut d'abord portée;. elle y fut réglée. Mre. Montfort appella pardevant la Cour de l'Ordonnance de pieces ,mifes,
avec claufe d'évocation du fonds & principal; le Chapitre
appella aulIi in Cjuantùm contra de la même Ordonnance,
avec la même c1aufe d'évocation, & il releva appel comme
'd'abus envers J'exécution des provifions obtenues par Mre.
Montfort. Mre. Noailles, Curé de Saint-Remy, intervint
dans l'inllance, & demanda aél:e de fan adhérence à l'appd
'Comme d'-abus incident émis .par le Chapitre, & que faifant droit à fan intervention, il fllt maintenu dans la qualité & les fonétions' de propre Curé du quartier de Lagoy.
On difoit pour le Chapitre, que tomes les différentes·
branches du procès fe' réuniifoient à un feul point. Y a-t-il
une Cure à· Lagoy, n'yen a-t-il point? S'il Y a une Cure,
Mre. Montfort a pu l'impetrer, & il peut inconteHablemem:
demandér une portion congrue; s'il n'yen a point, l'impétration de Mre.. Montfort elt eifenrieIJemenr abufive, parce
fIu'on ne peUt çonférer une Cure ou un Bénéfice qui n'exiüe
.
'A a a a :z..
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PALAIS
D:I!
PROVENCE.
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comptes faciaux -relatifs à la ferme, où déclarerait 11 fer. ment n'.en avoir aucuns. Ecrivant Mes. Pafcalis & Simeon
fils.
ARRÊT
LXXXVI.
A quels jignes reconnolt~on une Paroiflè ?
L
'Eglife paroiffiale de Saint-Remy el!: la feule Paroiife
pour la ville & fon ·terroir, & le dil!:riél: de cette Paroiife comprend les lieux de Lagoy & de Romany, qui forment aujourd'hui des Fiefs indépendans, mais qui autrefois
fa ifoient partie du terroir de Saint-Remy. Mre. Montfort
impétra en Cour de Rome ·la Cure du lieu de Lagoy; le
Chapitre Métropolitain d'Avignon, qui a toujours poifédé
l'Eglife de Làgoy comme \ln fimple Prieuré rural, contella
-l'impétration pardevant le Lieutenant d'Arles, oti la caufe
fut d'abord portée;. elle y fut réglée. Mre. Montfort appella pardevant la Cour de l'Ordonnance de pieces ,mifes,
avec claufe d'évocation du fonds & principal; le Chapitre
appella aulIi in Cjuantùm contra de la même Ordonnance,
avec la même c1aufe d'évocation, & il releva appel comme
'd'abus envers J'exécution des provifions obtenues par Mre.
Montfort. Mre. Noailles, Curé de Saint-Remy, intervint
dans l'inllance, & demanda aél:e de fan adhérence à l'appd
'Comme d'-abus incident émis .par le Chapitre, & que faifant droit à fan intervention, il fllt maintenu dans la qualité & les fonétions' de propre Curé du quartier de Lagoy.
On difoit pour le Chapitre, que tomes les différentes·
branches du procès fe' réuniifoient à un feul point. Y a-t-il
une Cure à· Lagoy, n'yen a-t-il point? S'il Y a une Cure,
Mre. Montfort a pu l'impetrer, & il peut inconteHablemem:
demandér une portion congrue; s'il n'yen a point, l'impétration de Mre.. Montfort elt eifenrieIJemenr abufive, parce
fIu'on ne peUt çonférer une Cure ou un Bénéfice qui n'exiüe
.
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'J 0 U 1l N A L
pas, fuivant le principe atteHé par Pinfon dans fon traité
des Bénéfices, pag. 314, n°. 2, & pag. 38j, nO. 4; & par
Fevret, liv. 3, chap. 1, nO. 2.
Ce n'eH point au Chapitre a prouver que la Cure n'exif!:e
pas; c'ef!: à Mre. Montfort à prouver qu'elle exiHe, 1°. parc.e
qu'il ef!: demandeur; 2°. parce que c'ef!: à celui qui affirme
un fait, à le prouver, & non à celui qui le dénie; 3°. parce
qu'on ne préfume pas l'exif!:ence d'un Bénéfice fans preuve,
&, parce que de droit, lors même qu'il y a déja Un Bénéfice exiHant, ce Bénéfice ef!: préflJmé {impie jufqu'à ce
qu'on ait jufiifié qu'il e,fi curial. ( Garcias, de Benef., cap.
l 6, nO. 8; Gonzales, ad reg. 8; Cancell., glof. 6, n°. 9 1;
Mafcardus, de prohi:u., condur. 589')
Pour pouvoir fuppofer l'exif!:ence d'uné Cure" il faut
l'éreétion, ou trois proviGons qui aie~t été exécutées pendant 40 ans. Ce font les deux feuls moyens pour connaître
l'état d'un Bénéfice. C'efi le fentiment de Duperray, des
droits honorifiques, pag. 160 & fuiv.
Le lieu de Lagoy forme-t-il un lieu féparé, une municipalité difiinéte, un fief indépendant? Rien de plus indifférent. En matiere ecdéGafiique,' les argumens tirés de
tout ce qui ne tient qu'à la temporalité, n'ont ni force
ni valeur. ( Seraphinus, fur la déciGon 1422 de la Rote,'
nO. 17; & Oldrade, conr. 17.) Rien n'efi fi fréquent que
de voir des fiefs très - étendus & très - peuplés ne tonner
que la moindre partie d'un 'territoire paroiffial. On peut
citer le fief de Trebillane, où il y a une habitation conftdérable, une dîmerie; cepepdant les habitans font adminifirés par le Curé de Cabriés.
La croix plantée, les tombeaux, le cimétiere &' les fonts
baptifmaux, ne prouvent rien; c'ef!: ainli que l'établi1fent
Brillon dans [on diétionaire des Arrêts vO. Paroiffè; l'Auteur de la Bibliotheque Canonique, tom. 2., au mac Religieux, pag. 457; Mr. Camus dans fon traité des portions congrues, rom. 1, pag. 2. 58. Ce qui caraétérife la paroiffialité,
c'ef!: l'obligation commune & réciproque, qui lie ceux qui
adminifirent les Sacre mens dans un territoire circonfcric &,
�.
_
bu
PALAIS
DE
PROVEN-Ci:
·H1
limité, & ,ceux à qui ils font adminifhés. Ainu l'attellent Staphileus, trac? de fiat. & qualit. henef. §. pater igitur; Gonzales, n. 3'); le Cardinal de Luca, de prœeminentiis fumma,
n. 18; Duperray, des droits honorifiques, pag. 1)7; & c'ef!:
ainli que la Cour le .jugea; par Arrêt du -8 Avril 1745, en
faveur des Jéfuites du College d'Embrun, contre Mre. Albert, & par un autre du premier Avril même année, en
faveur de Mre. de Callelane, Prévôt de Chardavon, contre le prétendu Curé d'Entrepierres.
En matiere de paroiffialité, on n'entend par Egli.ée indépen~
cante, que celle où il y a un titulaire qui, jure proprio, adminillre les Sacremens au peuple, & dans laquelle le peuple ef!:
.obligé"de recevoir les Sacremens de la main de ce Titulaire.
Quand on trouve une Eglife ainli établie, nul doute que l'on
trouve un vrai Bénéfice-Cure, lors même que l'on ne trouve
pas le titre d'éreél:ion; & é'ell alors vraiment le cas de dire
que la Cure revit par le feul ret~ur des h~bitans, li eUe
n'a été que fufpendue. C'e!l: le fentiment de d'Hericourt
cans fes Loix ecc1éfiafl:iques , pag. 220.
Ainli dans la Cure de Verquieres, il Y avait cous les fignes de paroiffialité, & il ne paroiffoit pas que les habitans de Verquieres euffent dépendu du Curé de Noves,
ni d'aucun autre. Dans la Cure de Lamanon, on avait dé·
.couvert tous les lignes de paroiffialité; les habitans de Lamanon recevaient tous les Sacremens fur le lieu ,. & n'étaient dépendants d'aucun Curé voiun. Dans l'Arrêt rapporté par Cambolas, il Y avait grande apparence que c'était une ufurpation que le Chapitre d'Auch avait fait de la.
Cure de Valenties, fous pretexte de l'union du Prieuré.
Cabaffut dans fa théorie & pratique du Droit Canon,
liv. l, ch. 17 - de parochis, n. l, dit que tous les Docteurs font d'accord, qu'il ne fuffit pas pour établir la paroiffialité, d'établir l'exillence des Fonts baptifmaux; mais
qu'il faut tout à la fois Fonts haptifmaux, droit de flpulture ,for pénitentiel, & droit d'admirziflrer les Sacremens;
.lJue dans l'Eglift dont on cherche a connaÎtre l'état & la
(Jatu", on ait toujours fait " qu'un vrai Curé rJl. ohliz.é,
�- s-~g
Jou RNA L
,
de faire :envers le peuple confié
fa follicitude. -C'e{f ce'
qui fait dire _à l'Auteur -du Codé des Curés, tom. 1, pag.
438 , que pour confiiruer la pafoiffialité, il. faut que dans:
l'Eglife que l'on veut faire répurer paroiffiale, on, ait
rempli toutes les fonc7ions curiales _comme dans' les autres
ParoiJfes. Il dl: fans doute poffible que là où l'on ad minill:re les Sacremens, il n'y ait Paroi{fe, parce que l'Eglife'
même où on les adminifire, peut n'être encore qu'une annex<r
d'une Eglife mere. Mais on peut du-moins convenir que
?annexe ou la dépendance ne fe préfume pas, là où il
y a adminifirarion de touS -les Sacremens & où l'on
" de paroiftrouve la réunion de tous les fignes extérieurs
fialiré. Quand les fignes font anciens, quand. on rapporte·
des regiHres qu-i -remonrent à des temps reculés,. & qui
prouvent 'l'adminifirarion de tous les Sacremens, on' peut
plus facilement fuppofer une Paroilfe, c'efi-à-dire, une
Eglife indépendante & exiftante par elle-même. Mais tout
·cela n'eft point applicable 'iet, puifque l'on ne voir à la
Goy aucun ligne 'ancien de paroiffialité', & que dans_ tous;
les remps connus on trouve le Curé' de Saint-Remy adminiftrer 1es Sacre mens aux habirans de la Goy. Une
même Eglife ne peur être tout à la fois paroiffiale & non:
·paroiffiale. La paroiffialité fuppofe l'obligation du Pafl:eur
d'adminifirer les fideles, & l'obliga'tion des fideles <le re-·
cevoir les Sacre mens du Pafl:eur. Donc p01nt de paroif-.
-fialité là où cette 'Obligation ne fe vérifie pas, là où les.
fldeles vonr fe laire adminlll:rer ailleurs. Dans une 'pareille·
h-ypothefe , que1s que foient les lignes extérieurs de ,paroiffialité, ces fignes -[ont nécdfairemenr équivoques. On ,peut
trouver des Fonts 'baptifmaux, & 'ne pas 'rrouver le 'droit
de baptifer. an 'pourra trou-ver un cimétiere,;_ 'mais on ne
trouvera pas le droit d'inhumation. Or ç'eft le droit de
baptifer, & non les Fones baptifmaux; c'eft le droit d'inhllmation, & non l'exifience ,p'hyfique du cimétiere, -qui
conll:itue la paroiŒalité. D,UTS 'les 'EgHfes de {ecours, il-y
a des 'Foms haptifmaux, tandis -que le droit de haptifern'appartient qu'au ~afieu~ de l'Eglife m~re 1 -& ''lue c~
a
�nu
PALAIS nii
PRO VENCE;
r~9
h'eG: qu'au nom de ee Pafieur, & non pas jure proprio"
que).e Prêtre de fecours admin ifire le baptême; il faut
dire la même chofe du droit d'inhumation. Donc les lignes
exté~ieurs font ab[0lument inconcluans & équivoques;. il
faut ou éreél:ioll, ou trois provilions exécutées dans. l'efpace. de quarante ans, ou du-moins exercice de toutes les
fonél:ions curiates fans exception, lorfqu'il eil: joiQt à touS
les lignes extérieurs, & qu'îl n'efi affoibli par aucune préfomption d'annexe ou de dépendance.
La Goy peut être Qonlidéré fous deux rapports;. [DUS
un rapport temp.orel, & fous un.. rapp-ort reJjgieux. ,Con...
fidéré fous un rapport temporel, d fa.ifoit aJlciennémenb
partie du territoire de Saint - Remy. L;on' v0:in cWllS les.
Lettres patentes. donnée.~ en 1., 1.) par F~ançois P'remier,
que les. habitans de. Saint-Remy expofoient ql;le.. Roman~
& l'J Goy fairoient, corps a,veç teur Coror:nU!llluJ;é;; que de..
puis lors, la Goy & Romaniy aVOd,ef)t été d:émfmbrés, &
que cependant la CQmmunamé J.ie Saioe-Remy. payait. les
mêmes chat:ges comme s'il' n'y avoit point e.u. de démembrement. A ces Lettres patentes fe joiN l''1ttefia,ion' de
.l'Abbé Robert dans fon état de P{oven<;e, qui ne place la
Go.y que '!:ans la. ~lpŒe ,d~ bien.s nouvellement affouagés.
Si' l'ori confidere la Goy fOlls un raRpere. re.lig<iellx, les, titres.
les plus' précis nous. .apprenn__e nt qu'il y avoit de.lllf Man:;l[tere!> dans. le Diocefe d'Avignon, le MOna{te.re de Sr.
Michel de Frigolet,. & le Monafie.re de St, Palll du Mau..
folée près Saint-Remy. Ces deux. MQoi!leres a'loient de
petites cellules ou obêqience.s•. L'Eglife_ de· la Goy ~ ceU~
de Romany étoiènt de la dépen8ançe du M.onafiere de Sr.
Paul du Maufolée; c'étoient deux Eglifes purem.en mo!lachales.
En 13 16, le Pape Jeari XXII. érigea deux Archidia..
connés dans le Chapitre d'Avjgnon, comporé de Chanoines
Réguliers; ilfo~ma ces deuiBenéfices dé to.us les bie.ns & revenus des deux Mbnafieres de St. Michel de Frigolet & de St.
Paul du Maufolée, & les Religieux de ces deux Manafreres
furent unis & mis dans le corps des Chanoi1'\es de la Cathé,,:
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Jô
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il.
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-,
draie. 'Ce Pape voulut cependant que' l'on continuât d'en~
tretenir dans le Monafiere de Sr. Paul' du Maufolée huit
Chanoines réguliers, avec un Prévôt à la tête pOUF former
.ne Collégiale. C'efi ce que nous apprend Noguier dans
fon Hifioire des Evêques & Archevêques d'Avignon, pag.
98. Depuis ce temps le Monafl:ere de Sr. Paul du Maufolée fut régi par les huit Chanoines, & l'Obédience ou
le Prieurêruràl de Lagoy originairemencdépendam de ce Mona.fiere fut régi par l'ouvrier de l'Eglife d'Avignon. Le Prieuré
de· Romany, autre dépendance du même Monafiere , fu t
régi. par le Prieur daufiml de la même Eglife. Cet érat
des choCes dura juCqu'en 1480. JuCques-Ià, poinc de Cure
ni, de ParoiŒe, puifque le fervice des. dèux Prieurés ruJ;aux éroit fait par des Officiers daufiraux._ En 1480, le
Chapitre de l'EgliCe d'Avignon fut féculapifé en venu d'une
Commiffièm du Pape Sixte IV. On fit la féparation & divÎ1ion, des biens & revenus -qui furent affignés aux Dignités ,.
Chanoines ~ manfe capitulaire de l'EgliCe d'Avignon., ~
- Le titre qui fait cette féparation ou divilion, efi remarquable; 011 n'y voit figurer l'EgliCe de la Goy & celle de
Romany que· comme de !impies Prieurés; quallC1 le même
titre parle des Eglifes paro.iffiales, ~I ajoure la qualificarjol1'
fuivanre ,.paràclûalem Eccltfiam;, & quand li parle' des
Eglifes qui font rout à' là fois Pr·ieuré- & Paroitre , il' dit;
parochialem Ecclefiam., Priol'atum nuncupatum. Voilà donc
trotS_ différentes. difl:in~ions, fimple Prieuré, Eglife paroifftale & Prieuré-Cure. La Goy & Romany ne font défi~
gnés .que par: la dénol!Jination. ·.fimple de Prieuré;'- ',- • Depuis la fécu!arifarion Bu, Chapitré, d'Avignon, ce Chapitre commit,)a régie du Monafiete .de Sr. Paul &. celle
des deux Prieurés de la Goy & de Romany à d-es Prêtres féculiers pour acquitter des fondations de Meffes.
C'efi ce qui réCulte de l~aél:e de 1 )42. Von. y voit que la
miffion. des Prhres dépmés fe bornaie. 1- célébrer- quarre
l\1effes par femalne dans l'EgliCe de' Sr•. Paul du Maufolée;
&. une Meffe les 'Fêtes, & Dimanchès. f(fulemenr dans l'E"";
glife de la Goy & de ~omapy;.
t
�DU
PALAIS
DE
PROvnNcE,
561
En rGS3, vifite pafiorale de M. l'Arehevéque d'Avignon,
qui, fur les plainres de quelques propriétaires des quartiers de la Goy & de Romany, donne le fervice de
Romany aux Religieux Obfervamins établis dans le Mooafiere de St. Paul du Maufolée, & celui de la Goy aux
Religieux Trinitaires de Saint-Remy; il permet à la Goy
l'admlnifl:ration des Sacremens de Pénitence, d'Eucharifl:ie
,Je d'Extréme-Onél:ion; il déclare formellement qu'il n'entend point établir une Paroiffe, mais qu'il entend laiffer
les chofes dans leur premier état; il veut enfuite que les
habitans de la Goy continuent de recourir à la Paroj!fe de
.~aint-Remy pour les Sacremens de baptéme & de manage.,
L'on voir par-là qu'il n'y avoir jamais eu de Paroiffe;
& qu'il n'y avoir point de Fonts baprifmaux, puifque l'Evéque n'en parlë pas dans fan procès-verbal, & qu'il fuppofe au contraire que le droit de baptifer n'avoir jamais
exifl:é à la Goy.
On ajourait pour Mre. Noailles, que l'Eglife paroilIiale
de cene ville efi la feule Paroiffe pour la ville & fan
rerroir; que le difiriél: de cene Paroiffe comprend les lieux
de la' Goy & de Romany, qui forment aujourd'hui des
Fiefs indépendans, mais qui autrefois faifoient parcie du
'terroir de Sainr-Remy.
Le Curé de Saint-Remy avait, pour intervenir dans le
,procès, l'intérét majeur d'empécher le démembrement de
,fa Paroiffe & la feél:ion de fa Curt}, On ne peut nier que
les habitans de la' Goy ne re<;oivent aél:uellement les Sacremens &. les recours fpiriruels du Curé de· Saint-Remy;
~c'efi l'état aél:uel, & cet état exilloir avanr l'année 16n,
époque d'une Ordonnance rendue en cours de vifire par
,l'Archevéque d'Avignon. Depuis cene Ordonnance, le Curé
·de Saint-Remy a toujours baptjfé, marié & enterré les
.g~ns de la Goy; il ell donc en poffeffion des droits du
!propre Curé.
'
On répondait pour Mre. Montfort, qu'en principe, fi
la paroilIialité avait exifié une fois à la Goy, y ayant
Bbbb
�'~6'2
10 U R N'A L'
p'euple t il falloit la rétablir; qu'il étoit ae-s fignes oarat:
téri!l:iques de paroiffialité qui devaient être convenus 1 furtout au Parle'm'ent de Provence l dont la jurifprudence étoit
nxée par les Arrêts de Verquieres & d'Efc1ans; qu'ici le
lieu de la Goy étoit un Fief [éparé, appellé da'ns tous les
titres anciens, cafirum villa'; qu'il formait une Communauté féparée, comme le prouvent les aél:es de 1257 &
de 1294';' qu'eil .un mot, il éto'ir Pa'roître, d'aprè's ia Bulle
d'A&ien ,en II)
qui i. fJ.ifaflt l'énumératidil de plulieuts
Patdiffes; y camp'reiJd celle de Ste. Marie dt! ta- Goy; &
que c'écoit aina qUê B6uche & l' i\bb~ Rohe'rt la. qualino'ient; qu'ell 1 6~S- on trbUvé un'ê tranfattibîi avec le Chapitre de Saint-Remy,' qui recoit une fomme pour faire
adrniiJilf~er lés Sài::rémeds &: y' faire le fèrvlce divin. Il y.
a 8dtic Olire d'aprM tes titres.
, D"ailteurs on voit ait lieu de la Goy d'anciennes tl'âces
i:l'hab'îtàtlôn; li Y â ut1 cimétiere, des foms haptifmaux
que le Chapitre a été obligé c de faire rétablir par Arrêt
de 1131, des vefiiges de pllilieurs befs, iJrie croix; enfin
dimerie indépendante; il f a Eglife & peuple ~ &lonféquemmeht néceffité de Curé; que malgré l'avis d quelques AluëiJrs qui difoient qu'il falldir éreiR:ion o~ trois col.
làtiàhs, toüs les autres Cadoili!l:es &: la J utifpfudenee conftante, appuyée par les maximes dévëloppées par ceux qui
remllHffoielÎt les fortél:ioh$ tiu mini!tëre public; démontroient le éorttraire; que cettê regle avoit été reconnue
pat les Arrêts de Vetquü!res &. dé Neràntès, qui, fans
exiger ni l'é~a:ion, ni les trbis c'ollari6I)s, avaient adihis
la ptèuve des flgnes matériél's cl'é pârdiffialité, & aVaient
jug~ 'd'après elÎx; ~uè ~ dans l'Arrêt d'Entrepiérres, il était
prouve que cette Eglifè était une dépendatiee dé MéZieres,
& dans celui dè Rèffet, unè dépenaance de cellè de
Curoan; qu'ainû' il était pour aïnli dite èo!!ve~u ~llé ces
dernleres Egli/:es n'étoIerli: que de Iimplès Egli(es 'dé fecours; qu'il avoie été recoqnLl pat le Chapitré', lors de fa
confefration ,\vec le Curé de LadlaÏ1011, Jqùe t'réis, figne~
de par6iffialité fuffifent,
s;
�~ ,• n u PAL A 1.S D i l i ' R 0 V Il N C R:
.)03
JamaIs la Harojjfe .de la 60y n'a .dépendu de SaintRemy, qui, d'après 'l'Ordonnance de 1653, n'eil: vis-à-vis
de lia Goy qu'une Cure de convenance & d~pportunité.
D'ailleurs ces dewc .ParoiHès font diflinaes dans cous les
monumens , dans cous les ·citres..Le? aaes de 1542' &
J 688, qui il:aruem fur.les fer\'ices de la ,Goy, font paffés.
fans .le Curé de Saint~Remy; ainu indépl:ndance prouvée ~
1$(. dès-lors .la paroiffialité doit être .convenue.
'Mr. l'Avocat-,Général de Califfanni .examina, fi,. en principe, il exiil:e .quelque rLoi précife qui établiffe les vrais
fignes auxquels on ,doiv.e r.ecpnnoître la 'Paroiffialité, &
obferva 'qu'il étoit ,obligé qe recourir aQ:x !Amems, ou plutôt
chercher les vrais principes dans une j.u.rifprudence uniforme. Il eil: certain, difoit - il , .que quelqul:!s Auteu·rs one.
cru qu'il falloit ,.pour prou\'cr la paroiffialité, ou·titre d'éreaion, ou trois collations, '& il exiil:e qudques Arrêts:
rendus d'après ces principes j -mais ce feroit empêcher l<t
preuve de cous ces Bénéfices .antiques , &. dom l'origine
ou même la poflèffion [e. perd dans .la nuit des fieeles.·H
exiil:e une foule de Cures que les circonfiances & la filite.
des temps ont Vll établir fans aucune éreaion précife•. n .
exifie auffi des Bénéfices-Cures qui ayant ceiré de l'être
ac7u depuis très-long temps, ne pourraient plus l'être h:abitù
par l'impoffibilité de produire des collations. Au 1ft. fans.
critiquer ces .AuteUEs, l'on, trouv.edans ceux du· pays,. qu'il
fuffit pour prouv.er la par.oÎ'ffialité,. d:av.oir des· fignes. univoques ,réels, -& non . imparfa'its ou équivoques, des.
fignes qui ne puiffent conl'enir qu'à .Ia: p·a,roiffialité;: que
wnféquemment cous les fignes étrangers à elle, tels :que'
la difiinaion des Fiefs.-&: la percëption -des dîmes ,. OlL
qui, fans être totalement ét~angers, peuvent être regar,dés:
comme communs aux .S,uccurfales, Annexes & même à.
d'autres Eglifes, font impurffans.
II· eft certain. que la dillinajon des Fiefs & l'a pereeptian des dîmes font. étrangeres à· la pai'oiffialité. Qu'a decommlJ.n l'ordre des Fiefs '& 11'établiffement des Cures?Ces deux. obiers fo~ - ils ~onféquence néce!faire les, uns;Hbbb2l.
�'f64
Jou
RNA
i.
des auttes? Ne voit-on pas tous les jours_ plulieurs Fiefs
ènclavés dans la même Paroiffe, quoique Fiefs très-diftinél:s? Quelquefois même ne voit-on pas le même Fief
dépendre de deuX" Paroiffes à la fois? La direél:e feigneuriale, Juri[dic1io temporalis, a-t-elle la moindre dépend~nce
de la Jurifdiél:ion eccléliaftique & du foin des ames? Non
fans doute. En principe, n'en eH-il pas de même de la
perceptiôn des dlmes? Eft-elle une préfomption plU5 décilive pour la paroiJIialiré? Combien d'Eglifes paroiiIiales
n'ont pas la perception de la dlme! Combien qui ont le
droit de la perceVoir ou par donation parriculiere, ou
par tout autre tirre, Oll même par ufurpation, fans avoir
j<)mais été Paroiffe!
. Les lignes communs aux Succurfales, ou même à d'autres Eglifes, ne peLlvenr être des ritres de paroiffialiré, 'ou
plutôt, quoique néceffaires pour certe preuve, ils ne fuffifenr pas. Que difent. les Auteurs? Il Y a ordinairement
des Fonts baptifmaux dans les Succurfales, & Jouvent des
cimétieres; on y garde le St. Sacrement & l'Huile des infirmes; il eH plus rare qu'on y marie, parce que cela fe
peut faire à la Paroiffe fans crainte d'inconvéniens. Les
F onrs baptifmaux & le cimétiere ne font donc vis-à-vis
de la paroiJIialité que des lignes très-équivoques & cam·
muns avec une foule d'autres Eglifes : confentiunt Doc1ores,
dit Cabaffut , lion dici Ecclifiam parochialem, hoc [010 fJuod
fit in ea Fons bapti[malis. L'on trouve ces principes rapportés dans des défenfes du Marquis de Lagoy lors de
l'Arrêt de 1731, qui Ont éré communiquées par Mre:
Montfort.
Mr. l'Avocat-Général de Saint-Marrin,' lors de l'Arrêt
'de 1681, difoir que Barbofa qui avoir examiné toutes les
opinions des Doél:eurs fur cerre queftion, foutient que la
perception de la dîme, les fonts baprifmaux, le cimetiere
& autres chofes femblables peuvent êrre des marques trèséquivoques; & l'on trouve les mêmes principes dans
Brillon, dans l'Auteur 'de la Bibliorheque canonique; que
ces lignes conviennent a~ffi bien à une Succurfale qu'à
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
~65
bne Cure. Les Auteurs, après avoir parlé de la réunIOn
de ces titres, difcment encore plus particuliérement l'inutilité de chacun; -ils fou tiennent que Eccltjia non probatur
parochialis ex fepulturii & ac7u fepeliendi, parce que la fé.
pulrure accordée dans une Chapelle ou dans un cimétiere
voifin, eIl: de tous les fignes d'une Paroiffe le plus équivoque ; l'éloignement feul des lieux en rend fouvent l'établiffement indifpenfable , & il, peut y en avoir dans des
Eglifes qui ne font ni paroiffiales ni fuccmfales; il peut y
avoir titulus aut confuetudo.
Quels font donc les véritables caraél:eres' de la paroif.
fialité (continua Mr. l'Avocat-Général)? Il en ell: un cer·
tain, indiqué par touS les Auteurs, confacré par tous les
Arrêts; c'eIl: le troifieme qu'exige Barbofa : 'luod Rec70r
adminiflret Sacramenta de necejJùate, & populus ab eodem
de neceffitate recipiat. Qu'efl:-ce qui prouve la certitude de
ce figne? La définition mênie du nom de Paroij/è; c'efl:
~ne certaine quantiré de fideles réunis fous la conduite
d'un Pafl:eur qui efl: chargé du foin de leur adminifl:rer les
Sacre mens. Ainli, fans cette efpece de réciprocité, fans
cette obligation refpeél:1ve & commune qui aflè&e le paI:Oiffien à un terrein particulier & circonfcrit, & qui lie
le Pa!l:eur à des fonél:ions indifpenfables dans ce territoire;
en un mot, fans l'admini!l:ration des Sacremens non générale, mais réciproque, non volontaire, mais néceffaire
& forcée, point de paroiffialité, parce qu'elle feule peut
'donner des indices certains; elle feule fait évanouir les
doutes que peuvent laiffer les préfomptions fimples; parce,
que d'après cette 'bafe, on peut examiner & fe convaincre, fi l'on a fait dans l'Eglife comentieufe tout ce qui a
lieu dans ul!.e Eglife paroiffiale & indépendante; parce que
même, li l'adminill:ration des Sacremens a éré générale
& univerfelle, fi elle a été indépendante & faite non
pour la commodité, mais pour la néceffiré des habitans,
fi elle a eu lieu non comme à une Eglife de fecours ou
plême d~ choix, mais à une Eglife néceffaire, la paroif-
�~"65
1 0 t7 JI. N A i
f1aliré en eft la 'conféquence abfolue.; eUe tie.nt Jieu_, pout:
ainfi dire, d'éreél:ion.
Lors de l'Arrêr de Verquieres folliciré par .les ,habirans ;.
& conféquemment Bans une hyporhefe bien plus favorable
que èelle dont il s'agit., ·on cOTl-Vient, difoit ,Mr• .l'AvocatGéneral de 'Saint -Martin, que l'Eglife a été qualifiée ,du
nom de PaFOiflè" t;. rconfidùù .comme telle dans les. pJ:ocès-.
verbaux de .vifite des Arche1lêqu.es d'Avignon;..& il ajoutoit : il n'y a aucune preuve que- le Curé de Noves fût
chargé du foin de l'admirliJlration des 'Sacremens. ill ne paroiifoir donc pas que les paroiffiens euifenr re~u, d'un autre
les fecours fpiriruels; ,le Miniftre local avoit donc toujours
adminill:ré les Sacre mens ; auffi l'Arrêr ordonna-r-il la vé1iification .des vell:iges locaux d.e l'ancienne paroiffialjré.
Dans l'affaire d'Efelans, qui ne fur cependant pas jugée,:,
il Y avoit pillfieurs coUarions ou provilion5 anciennes de
la Vicairie" figne bien plus 'décilif encore, & d'ailleurs:
c'étoir le pmlrvu qui, ·érant Chanoine ailleurs" vouloir fe:
fouHraire 'à la paroi1Iialité· pGU[ CQn(erve.r 'les deux Béné:Gces.
Dans l'affaire· de Laman0n , que l'on a routenu abfo111_
ment la même que celle. de Lagoy, oÙ l?on a .dir qu'il<
n'exiHoit iju.e les mêmes fignes ,de paroiffialiré, l?adminiftrat·ion des Sacre mens étoit convenue.; eUe l'étoir au1ft:
dans l'Arrêt ciré par Cambolas, aioli que l'exifience dé,
la Cllte; elle l'étoir, d'après ·Mre. Montforr, 'lors. de la·
Cure de Norante;: ainli jurifprudence conHante.
Mr. l?A:vocar-' Général examina en[ilite fi·., d'après Jes;
titres ou, les agn.es déclararifs., il exifioit un.e paroi'llialiréà Lagoy. li mit de côré -Jes tirres ;de Dst·,' de' u'94 '&
& de 1 sr S "parce qu'il n'avait pas à.. difcurer fi ILagoy
& Romany font des ·Fiefs 'diHinél:s '& féparés.. La 43ulle
d'Adrien" d,onnée, en Il),) , qllli, en, confirrnan.r la ipoffeillon., non 'des Cures de l'Archev.êque .d'AvjgnOn, ,mais
de [<ftJ-<; les bjens de ce P.rélar, énonce .avec une foul~
Q,:..q,t.I:e& Eg,l.ifes" Ecclejiam Sanéla:. Maria:. de. J Lag,odini.s.,.
�DU
PA LAtS
DR
PROVENCH:
_
~~1
~e peut fervir de titre il Mre. Montfort, parce qu'outre
;(jue le mot Ecclejia ne veut pas toujours dire une PaToi1fe, on trouve dans la même énumération, des Eglifes
qui n'one jamais été & qui ne font même encore aujour-d'hui que de fimples Chapelles. Le moe Capellania employé avec celui Ecclefia, n'cfl: poine une preuve pour la
Cure de Lagoy, & ne peue lui être appliqué, puifque
le Pape Adrien ne diHingue dans fa Bulle ni ce qui ef\;
Paroiife, ni ce qui ne l'ef\; pas; il parle confufément de
toutes les Eglifes & de touS les Monafieres. Ce premier
titre, ecdéfiafiique à la vérité, dl: ab[olumenc éeranger à
la preuve d'un Bénéfice-Cure.
L'aéte de 1481 (car on ne doie pas mettre au nombre
(Ies vrais titres ecc1éfiafiiques la eranfaétion pa1fée en 12. S7
entre les habirans & le Seigneur- de Lagoy, tran[aétion
qui [e trouv\: fignée comme témoin par Bertrand Seguin,
Prieur de l'Eglife de Lagoy) il n'étoie donc pas Prieur~
Curé) ; le titre de 14-8 [ eH la fécùlarifation de l'Eglife
<1'Avignon par le Cardinal Julien, fuivant la Commiffion
que lui en avoie donné le Pape Sixee IV; on y trouve
_<!ans le plus grand détail l'énumération des différens Bé...
néfices, Eglifes ou Priêurés dépendans de ce Chapiere. On
y voie de fimples Eglifes paroiffiales, d'autres qui fone à
la [ois Prieurés & Eglifes paroiffiales; on y voit de fiml'les Prieurés ou des Eglifes que l'on nomme Prieurés;
on y voit enfin des Prieurés dans le.s Eglifes defquels la
cure des ames n'eH plus habituelle: cecce derniere difiinc..
. fion ef\; bien décifive.
Quand il n'y a plus d'habitans dans une Paroi1fe, dit
-d'Hericourt, foie que léS guerres ou quelqu'autre raifon les
aie faie difperfer & retirer, le Bénéfice reHe paroiffial; c'ef\;
une Cure que les Canonifies appellent Cura hahitu, ou Beneficium hahens curam animarum hahitu. Ainli, puifque dans
le eitre de 1480 l'on a la di!l:inétion explicite & précife
des Cures a&uelles & habituelles, toute Cure dont on veut
prouver l'exifience aneérieure à cee aéte ,doit fe trouver
~àns cet aéte, QU comme Bcde/ia parodtialis ac1u, ou comme
�,~
JOU~NAi
Ecclejia habens curam animarum habitu. Ou de deux choies
l'une: ou le Bénéfice dont s'agit n'était ni curial ni paroiffial
avant 1480, ou il l'dl: devenu depuis cette époque. Il eil:
certain qu'il ne l'était pas dans l'aél:e de r 480, puifqu'il eil:
placé dans les fimples Eglifes appellées Prieurés; il ne l'eil:
pas devenu pofl:érieurement; il n'efl: donc Paroilfe, nec aau,
nec Izabitu.
.
L'on trouve en 1 ~ 42 une convention du Chapitre d'Avignon avec deux Prêtres, relativement aux Prieurés de
Lagoy & de. Romany, qui, en fixant les obligations de ces
dèlfervaos, ne peut pas manquer de lailfer conclure l'état
réel du Bénéfice. Que doivent faire ces Prêtres in divinis?
Ecclefias Sanai Pauli de Lagodinis & de Ramanint> de.ffèrvire, feilicet in Ecclefia Sanai Pauli, jingulis hebdomadis
Cjuatuar mljJàs· celebrare, feu celebrari facere, & in aliis Ecclejiis de Lagadinis, de Ramanina, qua!ihet die daminica &.
aliis fefli1-ù maDilibus, jimi!iter unam mljJàm pro qualibet
Eede/ia cele13rare, nec non pravidere .fingulis diebus· feJlivis
de una prœshitera qui celehrahit mijfam in altera prœdie7amm Ecelefiarum de Lagadinis cS' de Ramanina.. On fixe enfuite les falaires à trenre florins, trois charges de bled, &
une coupe de v.in. Trouve-t-on dans ce ·citre la plus légere
t·race de parroiffialité? Il l'exc..1m au contraire formellement;
fimple fervice de melfe les dimanches & fêtes par un Prêtre
quelconque; fimple rétribution qui n'efl: pas portion congrue;
nulle adminifl:ration quelconque des Sacremens jufqu'en r6)3,
époque de la vifite de l'Archevêque d'Avignon; fimple {ervice, réfil!rat de quelques fondations: donc jamais le Prieuu
n'avoit été obligé de faire delfetvir in divinis & adminiftratiane Sacramentarum. Enfin {Joint de presbyrere, point
de mai{on pour le Prêtre delfervanr, mais permiffion à lui
d'habiter une chambre dans le èlilltre du MonaH.ere de
Saint-Paul, qui n'efl: ni à Lagoy, ni à Romany ; & encore
fimple faculté, point d'obligation de réfidence-: donc point
de curialité ju{qu'en 16S3, mais fimple Prêtre obligé de
faire Un {ervice de melfe.
Dans la Supplique des Seignel:lrs de I;agoy & de Romany,
�DU
P ALA1 S
DE
PROVENCE.
569
many à M. de Ma"rinis, Archevêque d'Avignon, faifant fa
vilite pafiorale en 1653, on voit' que l'état du Bénéfice de
Lagoy était fimple fervice de meffe les dimanches, & ah
aLiquo tempore, c'efi-à-dire, depuis 154-2, les jOllfS de fêtes.
Où efi donc cette Cure ancienne? oÙ efi cerre paroiffialité
'labituelle, exclue nommément par les titres qui font pro1uits? Qu'ajoutent les Supplians à l'Archevêque d'Avignon?
'-~ue des habitans font morcs fans Sacremens; donc point
d'adminiHration locale d'aucun Sacrement avant 16)3. Que
fait l'Archevêque? Il commet un des Moines du Couvent
de St. Paul dans le terroir de Saint-Remy pour dire la meffe
les dimanches & fêtes ad prœfatam Ecclifiam, feu CapeLLam, y entendre les confeffions, y donner l'euchariHie, faire
le prône, donner des inHruétions, vifiter les malades, porter
le viatique & l'extrême-onétion, fous une rétribution de 100
liv., déclarant qu'il n'entend pas hâc [uâ difPrfitione & de.creto novam Parrochiam flabiLire, fed omnia in [UO antiquo jure
& flatu re/inquit. L'ancien état était qu'il n'y avoit POillt de
Paroiffe, mais un fimple fervice de meffe; il n'établit point
une Paroiffe, mais fimplement une Eglife de fecours pOllr
la néceffité & l'urgence des cas; en un mot, une fuccurfale.
D'après cet état des chofes, tranfaétion en 1688 entre
le Chapitre d'Avignon & le Chapitre de Saint-Remy, par
la1uelle le premier remet, moyennant une rétribution de
162 liv. à l'aurre, le droit de faire ou faire faire le fervice
des Eglifes des terroirs inhabités de Lagoy & Romany.
C'efi dans ce premier titre où il en: parlé d'adminiHration
.des Sacremens , parce qu'il efi poHérieur à la vifire de M.
l'Archevêque d'Avignon qui en faifoit mention.
En 1699, la Cure de Lagoy fut impétrée par Mre. Crefpin; il demanda au Lieutenant de pouvoir continuer le fervice; & alors, depuis 1700 jufqu'en 17°9, l'on voit queI.ques traces de paroiffialiré; mais en- 17°9, Arrêt qui décide
la non· paroiffialité de Lagoy. Les Arrêts de 1726 & de
173 l , l'un pour forcer Mre. Crefpin neveu à rendre les
clefs après la mOrt de [on oncle, l'autre qui condamne le
.
Cccc
�-~70
, j 0 U il. N i. ri
Chapitre d'Avignon à faire rétablir les fonts baptifmaux qu'il
avoit fait abatre par voie de fait à Lago}", ne peuvent égàlement être d'aucun fecours à Mre. Montfon.
Mr. l'Avocat-Général réfuma en deùx mots toutes les pré_
fomptions fur lefquelles s'appuyoit Mre. Montfort. La premiere efr l'exifrence ancienne d'un peuple; ce feroit un moyen
d'éreél:ion, màis il ne l'établit pas. La feconde, un territoire paniculier & limité; préfomption localement étrangere à la paroifIialité, & abf61ument inutile, fur laquelle,
d'après une difcufIion exaél:e des titres, fi elle eût été néce1faire, on eut pu jetter des doutes. la troifiertie efr la per-ception indépendante de la dlrne; préfomption prefque auffi
nulle en fait de paroifIialité, que ceUe de la féparation des
fiefs; dime d'ailleurs. dont l'indépendance n'efr pas prouvée,
puifque le Chapitre de Saint~Reniy po1fecle des di mes à
Saint-Remy, Lago)' & Româny; comme ancien Curé de
Saint-Remy, & comme chargé depuis l'éreél:ion des vicai'ries perpétuelles d'une ponion de la ponion congrue de ce
Vicaire. La quafrîeme, l'exifrence d'une Eglife que le Décimateur a conframment été tenu de faire de1fervir in divinis & in adminiftratione, une Eglife oÙ 'il y avoi t un fervice de me1fes avane 16)3, & depuis cette époque une
Eglife de fecours où l'on adminifrroit quelques Sactemens.
Voilà ce que prouirent tous les titres; mais ér-ablir ainfi
une Eglife paroifIia1e', & ,à ce titre, de1fervie par des Prêtres
qui adminifrreient tous les Sacremens', c'en une a1fertion
que tous les titres contrarient. La 'cinquieme, l'exifienc,è
'des fones baptifmaux, probatoire du droit debaptifer; mais
ils ne font pas énoncés dans l'Ordonnance de vifite, &
conféquemment ils ti'exifroient pas alors. La fixieme efr
f'exifrence du cimetiere, qui étal>liè le droit d'enfevelir;
'mais point de cimetiere dans le procès-verbal de vifite.
Ainfi Mr. l'Avocat-Général étàblït que l'Eglife de Lagoy
'n'étoit point Paroi1fe. Il ne rèfioit plus que la quefrion de
la dépendance de Lagoy, du Curé de Sàint~'Remy, qui parût,
:pour ainfi dire, fixée; dès q'u'il n'y a point de paroifIialité à
Lalloy, il n'y a plus -de 'Contradiél:eur. Auffi Mr. l'Avocat.
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P ALAJ5
iDl!
57r
PROVllNC·E.
Général ne difcuta que furabondamment les preuves' de la
dépendance de l'Eglife de Lagoy à la Paroi1fe de Saint-Remy,
& il obferva que cette dépendance é[Qit prouvée, ra. par la
vifite pafiorale de l'Archevêque d'Avignon en r6S3' Ce
Prélat, en lai1fant les chofes dans l'ancien_ état, entend qqe
,les habitans de Lagoy aient recours au Curé de Saint-Remy
pour l'adminifiration des Sacrem.ens de baptême & mariage,
& n'établit à Lagoy, attendu fa difiance de Saint-Remy,
qu'une Eglife de fecours pour les autres Sacre mens & en
0
cas de maladie. 2 • La tranfaél:ion de 1688 prouve que Jeafl
XXiII. avait établi une vicairie perpétuelle à Saint-Remy,
& l'avoit dotée d'une portion de la dîme de Saint-Remy,
Lagoy & Romany. 3°. Une Sentence arbit-rale de l'Arche:'
:vêque d'Avignon avoit décidé que le Curé de Saint-Remy
ne pouvoit percevoir les novales du terroir de Lagoy; mais
le fucce1feur du Curé d'alors s'étant pourvu au Lieutenanc
d'Arles, la Sentence arbitrale fut ca1fée, & une foule d~
titres pofiérieurs ont confirmé l'exécution de ce dernier Jugement. Donc le Curé de Saint-Remy a 'été, avant & depuis
'1653' & efi encore aujourd'hui, le véritable Pafieurdes habitans
de Lagoy. Il conclut à ce que faifant droit aux lettres d'appel
comme d'abus du Chapitre d'Avignon, & à la requête d'intervention & adhérence de -Mre. Noailles, il fÎlt dit Y avoir
abus dans les provifions de Mre. Montfort; au moyen de
ce, que faifant qroit à la requête incidente du Chapitre, à
l'appel de Mre. Montfort, & aux fins d'intervention de Mre.
Noailles envers l'Ordonnance de pieces mifes, les appellations fu1fent mifes au néant; & par nouveau jugement, retenant le focds & principal, le Chapitre fîlt mis hors de
Cour & de procès; & au moyen de ce, Mre. Noailles maintenu dans fa qualité & fonél:ions de Curé du quartier de
.Lagoy.
. . Par Arrêt ,du 28 Juin 178.r, prononcé par Mr. le Préfident de Saint-Vincent, les conclufions furent fuivies, &
Mre. Montfort condamné aux dépens envers toutes les parties. Elaidant Mes. Portalis, Roman-Tributiis & Gaffier.
Ccc
C 2.
�JOURNAL'
ARRÊT
LXXXVII.
L'offre il den.iers découverts efl fatisfaaoire ,fi elle
le premier délai de l'ajJignation.
L
efl fpite
dans
E 3° Oétobre 1776 , fieur Jean-Claude Ricard, du lieu
de Peliffan.ne, prit des lettres de clameur; il fit procéder
à une faifie de fruits appartenans à fieur Jean-Jofeph Demon.' .ceux, débiteur de cinq années d'arrérages d'une penfion de
37 liv. S fols; il demanda la condamnation de cette fomme,
avee contrainte feme! pro femper pour les penGons à écheoir.
Dans le premier délai de l'affignation, le fieur Demonteux affigna le fieur Ricard chez un Notaire, pour y recevoir les cinq années d'arrérages, les dépens & légitimes
intérêts; il protefia , en cas de défàllt, de dépofer la fomme
riere le Receveur des confignations. Le fleut Ricard. n'ayant
point comparu, le fleur Demonteux demanda la main levée
provifoire de la faiGe, qui lui fut accordée en donnant cau.tion; il offrit ènfilire un expédient; il déclara n'empêcher
que le fieur Ric.ard rapportât une condamnation contre lui
avec la claufe Jernel pro fernper; & au bén~fice de fon offre,
il demanda que les dépens lui fuffent adjugés. Cet expédient fut reçu par Sentenc~ du 3 Août 1778. Appel du fieur
,
Ricard pardevanr la Cour;
On difoÎt pour lui, que les oJfres du fleur Demonteux
n'étaient pas fatisfaétoires; 1°. elles ne comprenoient pas
tout ce qui était juHement demandé; 2°. elles obligeoient
le fleur Ricard à former une nouvelle dem~nde pour être
payé à l'avenir.
.
Le débiteur gagé dt-il libéré, en faifant en abfence du
'créancier, des offres qui ne font fuivies d'aucune conflgnation? Si le créancier fa iflffant fe contentoit .d'oJfres fans
ré,alité, le débiteur gagé qui pourroit abufer de cètte .con~_
defcendance, lui feroit perdre tautes les affurances que la,
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..
PAL AIS
D Il
PRO V Il Nell:
~73
faille lui donne. Dans le cas d'une faifie, le créancier a
plus d'intérêt à être affuré de la réalité de l'offre, parce
qu'il a plus à perdre, s'il arrive que l'offre foit vaine; &
comme il lui importe d'entretenir fa faifie, il faut qu'il fache
où il prendra la fomme offerte. Il faut donc dans ce cas,
plus que dans tout autre, qu'il y ait configna tion réelle de
la fomme.
On trouve plufieurs Textes du Droit Romain, qui déci'dent que la conGgnation ef!: néce1faire. La Loi acceptam,.
cod. de ufuris, exige, pour la ceffation des intérêrs, non
feulement l'offre réelle, mais même le dépôt: at, fi non
fùfcipiant, corifignatam in puhlico depone. Dans la Loi 9 ,
cod. de folutionibus & Liberat. le Légiflateur, après avoir
établi qu'il n'y a d'autre libération que celle qui ef!: opérée
par le paiement effeél:if, excepte feulement le cas d'une
offre fuivie du dépôt de toute la dette; obfignatione totius
debitœ pecuriiœ fo/emniter fa8â, liberationem contingae manifeflum eJl. Enfin la Loi 2, cod. debitorem vendit. pign.,
établit que pour que le débiteur puiffe demander la ref!:itution du gage par lui donné & en empêcher la vente, il
ne fufEt pas qu'il ait offert le paiemenr au creancier; il faut
qu'au refus de celui-ci il ait dépafé la fomme & les inrérêts, & qu'il le prouve: debitoris denuntiatio, qui creditori
fuo, ne fibi rem pignoris obligatam dijlrahat, vel Izis qui ab
eo volunt comparare denuntiat, ita tifJicax efl, fi univerfum
tàm fortis quàm ufurarum offerat debitum creditori : eOifue non
accipiente, idoneà fide probationis ( ita ut opporut ) depofitum
oflendà't.
Julien dans (es notes manu(crites, vO. Judex 69 C , après
avoir rapporté l'opinion de ceux qui croyent que l'arrêtement empêche la demeure, ajoute que cela ef!: contràire à
nos u(ages & à notre droit, (uivant lequel le débiteur ef!: en
demeure ju(qu'à ce qu'il ait dépofé; il ef!: jufques au dépôt
condamné aux intérêts & aux dépens, & on peut même
le pourfuivre par voie de clameur. Il l'affirme de même au
nO. 7 2 C, où il cite un Arrêt de la Cour qui le jugea en
167 1 •
,.
�~7'f
JOURNA-L
Or, comme une chofe ne peut appartenJr en mémè temps
à pluÎleurs, tant que le débiteur ne s'ef!: pas exproprié des.
deniers, fon créancier ne peut pas êrre cenfé payé; la demeure du débireur continue donc dans ce cas; il faut abfolument, pour la faire ciller, l'expropriarion des deniers
<jui ne s'opere 'que par le dépôr. Tant qu'il n'y a point de
confignation, le créancier ne peut pas êrre en demeure de
recevoir, puifqu'il ne rient pas à lui qu'il ne reçoive; au
lieu que le créancier ayant formé fa demande, le débireur
ef!: toujours en demeure; il ne rient qu'à lui de payer. Mr•.
de Be.zieux; pag. 20'), rapporte un Arrêt qJi jugea que le'
créancier peur conrinuer [es exécurions, nonobil:ant l'offr.e.
<jue le débireur lui fair des fommes qu'il lui doir.
On répondoir pOlJr le Sr. Demonteux, que la condamnation
feme! pro femper n'dl: que la peine de la conreil:ario.n , puifque ,.
ex confejJis, elle ne peut être prononc.ée que par le Juge ,.
puifque fOIl objet n'dl: autre que d'éviter au créancier un·
nouveau procès. C'eil: une forte d'indemniré que.la Juil:ice.
lui accorde, pour le dédommager des chicanes' que fon débiteur lui a fair elfuyer, & auxquelles il pourra.it être encore expofé. Taures les fois qu'il n'y a pas comefiation ,
il n'y a donc pas lieu à cetre e[pece de prononciation; foit
parce qu'il 'n'y a que la c.onteil:ario·n qui donne.au Juge le droit
d'inrerpofer :fon autorité-, foit encOre parce .que le créancier auquel on n'a rien contefié, n'a aucune indemnité à
demander.' Il ne .peut :donc pas exige.r la 'claufe fèmei .pro
femper, quand le, débireur s'el/écure "dans :Je's premiers délais; ce qui eil: fi vrai, Gue le Commentateur du RéglemeQ.t
de la Cour, tom. l , pag-. li8 i', aneHe 'que .quand' le ,créancier a aemandé 1,a daufe .femd pro ifèmper., l?offre faite exrrajudicÎ1irement après le pr mier .délai de l'affignarion, ef!:
rejertée. Elle doir donc être acc~prée, 'quand .elle .ef!: faire
dans le premier délai, '& il ne pèut dtre -queij:io.n alors de
la claufé femel pro ftmper.
Tomes les Loix dirent .que:Ie débiteur.peue', dans 'les·pre";
miel"s délais de Eaffign;fcioll-, .offrir:ce qui lui.eft,demandé.,
&: q l1 e fi fes offres font fatisfaéloires) les pour[uites du Gté,au"
�DU
PALAn
DE
P-ROV'ENCtl;
~7~
cier ne retomberont que fur lui-même; & il n'en efl: au~
·cune qui dife que dans le premier délai le débiteur dépofe
b dette au Greffe des conlignations. Celui qui demande, doit
dans tous les infl:ans être prêt à recevoir; il ne peut pas,
par un refus dénué de motif, aggraver la condition de fon
-débiteur, & lui faire fiJÎvre une procédure en conlignation,
quand il ne veut même pas préfenter fur l'affignation qui lui
a été donnée; les premiers délais ne tODt acèordés au débiteur que pour qu'il puiffe faire fes offres; il faut donc que
quand il les a faites, le créancier De puiffe plus le pour..
fuivre, ou la conceffion des délais ne ferait plus qu'u.ne inutilité; il le faut d'amant mieux, que ce n'ell: que parce que
le créanci'er doit t'O_ujours être prêt à ·recevoir) fans que
le débiteur fait obligé de lui aUer au devant, que la Loi
l'oblige à faire éle6l:ion de domicile dans le lieu Ge l'affignatian. Gette obligation dev·iendroit iHufoire, fi, quand il-1ui plait
de refufer l'offre du débiteur, celui-ci était obligé de fa-ire
ordonner le dépôt. Dans les articles ) & 6' àu 'titre 31, &
2. & 3 du titre 3" de l'Ordonnance de 1667, il Y efl: diC"
que celui qui efl: condamné aux dépens ou à des dommages, peut, dans la huitaine de la fign.j,ficGtion de l'Arrêt, .faire
des offres; mais il -slen faut de beaucoup qu'en l'oblige à
éonfigner la fomme: L'Ordonnance ajoute ad oontrair-e que
fi nonobfl:ant les offres, le demandeur .fait procéder à la taxe,
& qu'elle n'excede pas la fomme offerte, il· doit être
perfonnellement condamné aux' dépens.-depuis le jour 'de
l'oHre.
- D'ailleurs ( continuoIt le fieur Demon'teux ) H s'agit ·id
'd'une fomme ql:ler:able & non 'portable. "Or-, telUS· -les Auteurs conviennent, qu'à l'exception au c~ns ou autres rede\'ences 'honcrrifiques qui emperter1tjignum fuperioritatis, toutes
les autres dettes ou penlions doivent être· acquittées dans la
maifon du débiteur, qui d~ droit commun n'ell: point obligé
ae les porter à fon. créancier, s'il ri'y 'a pa&e êontraire"
non tenetur debitor adire domum creditoris, dit Dumoulin ;
ità Defpeiffes, tom. 3, pag. 41; nO, 13; t)lea, de cejJione
tit.
quefi. 6, n°. 6R.1 Decorrois, toro.
ccl. 80b
iur.,
I,
1,
�2,
576
JOURN'AL
& tom.
col. 1431. Ces Auteurs vont même plus loin;
ils affurent que quand le capital' dt au cinq pour cent, le
paél:e que la rente fera portable au créancier, ferait ufuraire,
parce qu'il contiendrait effeél:ivement une furcharge qui aggra.veroit la condition du débiteur.
Si, fur l'affignation à lui donnée, le fleur Demonteux avait
offert à l'Huiffier le montant des penlions, & que le fleur
Ricard eût refufé de les recevoir, il efi certain que fan
débiteur n'eut pas été obligé de les conligner; parce que,
d'un côté, celui qui demande, doit être toujours prêt à recevoir, & que de l'autre celui qui refufe, dit affez expreffément qu'il ne veut pas accepter. Il en efi de même de
l'offre faite dans le premier délai; elle a le même e&èt que
celle qui fe vérifie le jour même de l'affignation. Le fleur
Ricard, qui ne l'a' pas acceptée, a par cela même déclaré
qu'il ne voulait plus êrre, payé; & dès ce moment, le fleur
Demonteux" qui n'avait aucun intérêt à preffer ce paiement,
a. dû reflex tranquille, & attendre qu'on le lui demandât
encore.
La Loi acceptam 19, cod. de ·ùfuris, exige la conl!gna[ion; mais elle ne laiffe pas. ignorer qu'elle l'exige fe,u!ement, ut curfus legitimarum ufùra.rum inhi6eatur; ce qui prouve
que le dépôt n'efi pas néceffaire' pour arrêt~r le cours d<;
toute efpece d'intérêt. La gloffe de cette même Loi ac-.
ceptam dit, in verh. pecunia, litt. S: oMatio Jola ufuras,fu-,
(uras impedit; parce, qu'il ,n'y a, que l'i!} é[êt conventionnel,
ou celui qui efi dû par la nature même du contrat, comme
télui' dtl prix d,e, la vente qui ne. foit arrêté que par la confignat'ion.- Le COIlVi A:e ce!loli qui n'~!t que la peine de la de~
trleure; el):, entiérerpent illtercepré par la féule offre. ( L.
gui Romœ l'2.2, §. Jèja '), if. de ver6vr o61ig,; Cujas fur la
Loi ji JoluturiLs'1 if. dç ,[olut4oni6us; Faber, ,déf. 1'), cod. de
cc? empt. wnd.J
. La Loi o6jignatione 9 '- cod;, de Jolutioni6us, ne 4.it p.ol,s
que la cp.nlignation fait nécdfaire., mars feulement q4e c'dt
une m~ni~re de Ce lib,érer, qu'elle vaut paiement. Mais ce
-1l'eft p.as .l'hypothefe de la caure ; il efi 'queihon uni uement
.
d~
H,
_
•
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
577
(Je favoir fi les dépens des procédures faites' au préjudice
des offres fatisfaél:oires. doivent ou non tomber fur. celui
qui les a faites. La Loi 2 ,cod. deDit. vend. pign., ne vient pas
mieux au procès; elle n'ell: que la conféquence de la précédente. Les véritables Loix qu'il faut confulter, font les
73, §. 2, 9 1 , §. 3, 122, §. 5, if. de verDor. ohligat., qui
décident que la fimple offre purge la demeure, & conll:itue
le. créancier dans une nouvelle demeure qui efface la premlere.
Dès qu'il ell: démontré que la fimple offre à deniers découverts con!l:itue le créancier en demeure de recevoir; il
efl: par cela même établi que les dépens qu'il a faits dans
un temps où il étoit en demeure, ne doivent évidemment
retomber que fur lui: iniquum efl enim judicium accipere,
qui vult falvere, difent la Loi 73 ,if. de procurat., & la Loi
16, if. judic. fal.
Par Arrêt du 13 Juillet 178 l , au rapport de Mr. le Con(eiller de Charleval, la Sentence fut confirmée avec dépens. Ecrivant Mes. Jaubert & Efmenard.
.,
ARRÊT
LXXXVIII.
Le c~!Jionnaire du droit de prélation ejl pré/éraMe à l'acquêr,'l." 'lui r.:.pp:Jlîe poJlérieurement la même celJzon.
E 6 Jin [780, François Lambert, Négociant de la ville
ue i"l:lrf'd e, ac'heta d'Etienne Muraire une partie de
DW!ü l 'elev~,H de la direél:e des Chanoines Réguliers de la
Sainte-J'rllllté, pour le prix de .2.700 liv., que l'acheteur de\'oir gardLr en main pour la sûreté de la dot de l'épDufe
du vtndeur, en fupporrant les intérêts au denier vingt. Lambert rapporta le même jour le droit de prélation des Seigneurs direél:s, reçut l'invefiiture .. rapporta quittance du lods)
& paffa reLonl1oiffan.ce.
Le 13 du. même mois ,. il lui fut fignifié un aae de la
D ddd
�'~78
.
JOURNAL'
...
part d'Innocent Ricaud, Marchand Toilier; en date du 2.7
Janvier 1762, par lequel Ricaud avoit rapporté des Cha-!
·noines Réguliers de la Sainte-Trinité, exifians à cette épo~ue, la ceffion du droit de prélation pour la premiere vente
qui fe feroit de la !Uême partie de maifon. La notification
de cet aél:e fut fuivie d'un aél:e extrajudiciaire; Lambert fut
interpellé de défempa rer à Ricaud la partie de maifon par
lui' acquife, avec affignation à cet effet chez Me. Maurel,
Notaire. Lambert fe rendit à l'affignation, & apprit à Ri'caud qu'il avoit rapporté la ceffion du droit de prélation, .
reçu l'invefl:iture de la main des Seigneurs direél:s, & payé
le droit de lods. Ricaud préfenta une requête au Lieutenant de Marfeille; il demanda que fans s'arrêter à l'aél:e de
ceffion faite à Lamqert par la maifonde la Trinité du droit
de prélation, cet aél:e feroit déclaré nul & de nul effet, &
que Lambert ferait condamné de lui défemparer, en fa qua:lité ·de ceffionnaire, à titre de .retrait féodal, la partie de
maifon par lui acquife de Muraire. Par Sentence du 1 Août
1780, Ricaud fut débouté de fa requête avec dépens. Il ell'
appella pardevant la Cour.
On difoit pour lui, qu'entre deux ceffionnaires du drait
de prélation, le premier en titre devoit l'emporter fur celui
dont le titre était pofl:érieur, quoiqu'fi eût exercé le premier. P;!r le droit naturel & civil, toutes les obligations,
tous les contrats font confommés par le confentement des
parties, confenfu fiunt obligationes. Quand un Seigneur a cédé
un droit de prélat ion , tout efi dit; l'engagement efl: irrévocable.
Chez les Romains, le plein domaine ne s'acquéroit que
par la poffeffion. C'efl: ce qui réfulte de la Loi ·8, cod. de
aaionih. 5P,pti & l l enditi; il Y avait des regles & des formules ét>ablies. Un domaine ne pouvait être acquis nudis
paais·; il n'y avoit que la tradition proprement dite qui pût
lier les parties dans le for civil. Delà il n'dl: pas éto'nnant
qu'entre deux acquéreurs d'un immeuble, la Loi préférât
celui qui étoit le premier en poffeffio 11 , quoique le der-.
nier en titre. En France, 'nous n'admenons point toutes
�"
')79
ces fuhrilités. Nous tenons en principe qùe le cOn(ente,.
ment fuffit pour opér.er u ne vente ( infiit. liv. 3, tit. 23),
& qu'une vente efi con(ommée du moment qu'on efi convenu du prix: emptio & venditio contrahitur, jimul aUjue d~
pretia convenerit.
La tradition n'ell: donc pas neceffaire pour achever le
contrat. Delà, après une premiere vente, on ne peut plus
. revendre légitimément la même cho(e, parce qu'après la
premiere vente, la cho(e vendue ne peut plus êrre au pouvoir du vendeur. Delà la Loi quoties n'efi plus admiffible
dans nos mœurs. C'efi ce qui a été remarqué par touS les
bons Auteurs. L'Annotateur des lnfiituts de Mr. de Valff,
wm 3, ·pag. 296 & fuiv.; Raviot, tom. 2, quefi. 2,2'5 ~
pag. 2'58; Faber .dans (on code, Jiv. 3, rit. 2, déf. 4,'
La Jurifprudence Romaine était conféquente; elle donnait
la préférence à la tradition, parce qu'elle ne donnait qu'à
la tradition l'effet de confommer la vente; mais' nous ne
ferions plus conféquens avec nous-mêmes, fi nous admettions les regles établies par le Droit Romain, fans admettre les principes d'où ces regles dérivenr. La Loi quoties
ne doit donc pas être admife parmi nous, au .moins en tane
qu'on la préfenre comme une Loi générale qui donneroit
dans tous les cas la preférence' à la poffeffion. Admettre
une pareille Loi dans un fens auffi étendu,. ce ferait ébranler
la foi des contrats; les conventions ne feraient plus qu'un
jeu, elles feraient d~s pieges que les hommes 'lè préparerai nt les uns aux autres; il n'y aurait plus de slirelé dans
le COl1lmerce de la vie <rivile.
N'importe que nous foyons régis par le Droit Ecrit. Ce.
droit, dit Maynard;.liv. 3, (hap. 2, n'ell reçu que tout ainfi
qu'une ,police juflement ordonnée. Duperier, tom. l , liv. l ,
quefi. 14, obferve que -nous n'avons embraffé les Loix Romaines que comme des regles' jufl:es & équitables, & defquelles nous pouvons nous départir, quand nous y trouvons quelque chofe: qui répugne à nos mœurs & à l'équité
naturelle.
D'ailleurs nous ne pouvons admettre dans notre Jurif~
Dddd2,
DU
PALAIS
Dl!
PROVENCIl.
�•
" go
Jou
i:.;
prudence fans -inconféquence & fans injuflice; l'application:
que certains Auteurs veulenc faire de la Loi fjuoties. La
\éritable maxime parmi nous efl que la vence dt parfaite
du U;omenc qu'on eH convenu du prix, & conféquemment
Gue Je vendeur ne peut pas difpofer une feconde fois de
ce qui n'dt plus en fan pouvoir; d'où il fuit Gue le fecond acheteur demeure fans titre & fans aucune efpece de
droit.
Dans la caufe il s'agit de la ceffion du droit de prélatian, c'e!l:-à-dire, de la ceffion d'un droit incorporel.
Dans ces fortes de matieres ou de chofes, la ceffion du
droit vaut tradition. C'e!l: ce qui nous efl appris par
Domat dans fes Loix civiles, liv. 1 du COl/trat de vente,
tit. 2 , [eél:. 2, §. 9; ülea, de ceffiane jurium, tit. l ,
GU. 4, n. 3. Barbofa dans [on Code, en traitant précifémenc de la Loi fjuoties, dit que cette Loi ne peut point
être appl iquée dans la ceffion des chofes incorporelles, &
qu'en pareille ceffion, il faut préférer le premier ceffionnalre.
Tous les Auteurs ont enfeigné que la ,ceffion d'un droit
incorporel vaut tradition; l'exercice d'un droit incorporel
ne peut pas être comparé à la tradition d'un objet corporel. La tradition d'un objet corporel e!l: un aél:e qui fe
palfe encre le vendeur & l'acheteur. On peut donc dire
à certains égards, qu'avant la tradition, le vendeur n'e!l:
pas entiére.menc & phyliquemenr dépolfédé, & que conféquemment la tradition confomme la vente. Mais l'exercice
Gue peut faire un ceffionnaire d'un droit incorporel, e!l:
un aél:e qui appartient tout entier au ceffionnaire lui-n ê ne;
il n'a befoin de perfonne pour exercer un droit acquis;
il n'a plus rien à faire avec le cédant : donc avant l'exercice du droit, tout e!l: moralement & phyliquement confommé entre le cédant & le ceffionnaire par la feule force
de la ceffion.
Inutilemenc oppofe-t~on la regle de l'intimation; cette
. regle e!l: bonne, quand il s'agit d'un tiers déterminé qui
R. N A
�'n~ PALAIS Dl! Pito\rENcn:)8t
lié que par cetre intimarion; mais dans le
fair préfenr, Ricaud avoir rapporté le droir de prélarion
pour l'exercer contre le premier' achereur. Tous les citoyens pouvaient acheter, parce que le propriéraire pouvait vendre à rout le monde. Falloir-il donc inrimer la
ce/Iion cuilihet de populo? fallait-il procéder par voie d'affiche? On fent roure l'abfurdité d'un pareil fyllême.
Le droit d'invellir appartient au Seigneur; il en inhérent au Fief; mais le Seigneur peut inconrellablement
céder ce droir, ou, ce qui en la même chofe, il peut Je
f<lire exercer pa~ autrui. (Decormis ,l rom. l , col. 848.)
Quand le Seigneur a cédé le droit de percevoir le lods
& le droit de prélation, il ne peut plus ufer du droit
d'invefiir au préjudice du riers ce/Iionnaire. Lié par
un premier conrrar, le fecond ne peut êrre que nul;
voilà les vrais principes & ceux qui dérivent de l'équité
& de la jufiice naturelle & civile. Si quelques Aureurs
ont penfé le contraire, c'ell en appliquant abufivement la
Loi fjuoties, c'efi-à-dire, en l'appliquant à la celIion d'un
droit purement incorporel. Les Jurifcol)fultes qui ont le
plus donné d'étendue à cette Loi, ont remarqué qu'elle
doit ceffer, quand le fecond acheteur, ou le fecond
ceffionnaire a été infiruit de la premiere venre ou de la
premiere ce/Iion; alors, difent les Auteurs, le premier
ce/Iionnaire doit être préféré au fecond, & il a l'aél:ion
révocatoire conrre la feconde vente ou' la feconde ceffion
faire en fraude de la premiere. C'efi ce qui nous en enfeigné par Barbofa fur le code rom. l , liv. 3, tit. 32,
pag. 451; par Mornac fur la Loi fjuoties; par Lacombe,
vente, feél:. 5, n. 16; par Bouvor, tom. 2, pag.
11192; par Defpeiffes, tom. l, pag. 58.
Le fecoud acquéreur n'ell pas un tiers vis-à-vis le premier contrat qui lui a été connu; & rout comme le vendenr ne peut pas faire une feconde vente au préjudice de
ce premier contrat, l'acquéreur ne' peut pas l'accepter valablement , parce qu'il parricipe à la mauvaife foi du vennon domino, & fan tirre
@eur; il acquiert fciemment
he peut
~tre
,,0.
a
�582.
J6UltNAL
eft par c6nféquent nul, [uivant la Loi 1", cod. de re!Ju$
alienis non alienand. & les aUrl'es textes du droit réunis
dans les Loix civiles, liv. 1 de la vente, tir. 2., feél:. 2. ,
art. I l & fuiv.
La fraude ef!: un vice ahfolu que les Loix ne fOl.J;ffrent'
dans aucun cas, qui infeél:e la feconde vente, & qui donne
]e droit au premier acquéreur de la faire révoquer, par
cela feul qu'eHe a été faire à' fon préjudice. C'eU la regle
univerfelle établie par l'Edit 'du ,prêteur, & par les rubri.
ques du droit de revocandis his quce in fraudem. La chofe
a été jugée formellement par un Arrêt de la Cour' du 6'
Juin 1749, au rapport de Mr. de 'Ravel des Crores, en
faveur de Me. Pierre Laurent, Notaire Royal ,du lieu de
l'Arche, réfidant à Faucon, contre les lieurs Paul-Jofeph
Caire & Jofeph Pafcalis, Bourgeois du, même lieu. Dans
l'hypothefe de cer Arrêt, Me. Laurent, premier acquéreur
par convention privée, fut maintenu contre le fi-eur Caire,
fecond acquéreur par contrat public fuivi de I:J. 'tradition.
La Cour fe fonda fur ce que 'par la contexture des deux
ventes, On voyoit que le fecond acquéreur avoit éré inllruit
de la premiere, & qu'il avoit confequemment· acquis en
fraude.
La ceffion rapportée par Ricaud était véritaHemenr uhe
ceffion à titre onéreux; il a fiipulé & payé la fomme de,
100 liv.; il a perdu les intérêts' de cette fomme pen..l
dant dix-huit ans', attendu que p'endant ce long efpace de'
ren.p<', l'occâfion d'è'xerèer le droir de prélation ne s'eft
p'as préfenté. Pir fon contrat il s'éroit engagé i:L!ns le tas
'où par le 'pri,x-d,e 'ta vente qui poùrroit être tàite 'de l'immeuble, le lods s'élevéroit au . defTus' de "100 hl'. de 'payer'
l'excédant; & il avbit.·été dit que les Trinitaires n'auraient
rien à hii teftiruer, fi le 'Iods s'élevoit à u'ne moindre
fomme. Les Trinitaires qui s'éraient engagés par un 'pa-'
reil titre, ne pouvoiem plas revenir' de leur eng gemenr.
Toutes les aB:ions utiles avoient palTé entre les mains
du ceffi'Onnaire, & les aél:ions direél'es, 's'il'Ieur en.reftmt,
demeuroient abfoluniem -infruétueufes entre 'leurs ma'Ïns;-&
�nu PAiAls
'l)i!
PROVENCE:
'~g3-
l'exercice ne pouvoit plus leur en compéter fous quelque
prétexte que ce fîlt. Les !frinitaires Ont cédé une feconde
fois la même, chofe; d'où il efl: aifé de conclure qu'ils
--n'ont pu céder un droit ou l'exercice d'un droit qu'ils
-n'avoient plus.
On répondoit pour Lambert, qu'il efl: certain en droit
que l'antériorité du titre ne peut être oppofée à la poffeffion réelle. Le premier mis en poffeiIion eU toujours préferable, lorfqu'un immeuble el!: vendu 11 deux; la préférence efl: toujours accordée à celui à qui la tradition réelle
- en a été faite; ce n'efl: pas le titre qui donne le droit
de propriété; c'efl: feulement la polfeiIiol1. Sanleger fur
cette Loi; Defpeiffes, tom.
pa$' ')8; Boniface, tom.
tir. 19, ch. 2.
La Loi a voulu que ce fût l'exécution du contrat, &
flan pas le cont·rat lui-même, qui dépouillât le propriétair~,
& qui rendit inutile les titres qu'il pourrait donner enfuite ;
fa déci/ion a lieu pour les vernes & pour les celIj.ons. Tous
les Auteurs fe réuniffent à dire, que la Loi quoties efl: applicable au)( ceiIions, & que c'·efl: dans ce cas plus parriculiérement qu'elle doit êt-re ·obferv·ée. C'efl: la déci/ion de
Defpeiffes, tom. l, pag. 1'3 ; de Pallour, de jure feud. tir. !I,
pag. 47; de Charondas, liv. 3, refp. 6, & de Façhinœus,
liv. 7 , cap. 32.
Il n'dl: pas vrai en droit que le Seignèur direél: ayant
une fois cédé le droit de -prélarion, fait devenu incapable de
le céder ·une feconde fois. 'Par le droit commun, le retra,ie
féodaloll le droit de prélat-ion n'efl: point ceiIible; il .l'ell:
èlevenu par un Statut parr-iculier ~à cette Province, qui ve.illant
~ l'intérêt des Seigneurs direél:s, n'a pas voulu que lorfqu'ils
manqueroient de fonds pour retenir -pour eux, on pûe leur
donner des emphyréotes malgré eux, ou qu'on pût les tromper impunemenr, ·en fiipulal1l une moindre valeur aux imme.ubles, & en diminuant par-là le droit de lods; mais
notre Statut, en permettanr la ceiIion du droié de prélation,
n'a pas renduceffihle les droit'S inhérents à la Seigneurie, qui
l,
2,
�s~
JOURNAL-
ne le [ont pas & qui ne peuvent être exercés que par tê
Seigneur ou en [on nom.
Le~ Auteurs de ce pays, après avoir affuré que le droit
de prélation cfl: devenu ceffible par une Loi locale, établ'ffent précifément que cette ceffion ne dépouille pas le
Seigneur des aél:ions direél:es, .qui demeurent toujours dans
fa perfonne ; il n'y a que les droits uriles qui font ceffibles.
( De Clapiers, cauf. 100, quo 1. } Il reO:e donc pour conf·
tant, qu'en Provence le droit de p.rélation eO: ceffible ,
mais que celui de donner invelliture ne l'eIl: pas;, que la
perception du lods ne peut jamais être faite qu'au nom du
Seigneur, qu'à lui feul appartient le 'droit de faire paffel'
reconnoiffance.
Le Seigneur qui a cédé le droit de prélation, n?en eft pas
moins Seigneur direél:; l'acheteur n'en devient pas moins
fan emphytéote. Si le ceffionnaire n'exerce pas le· retrait,
n'exiO:e-t-il pas toujours dans le Seigneur la faculté d'agréer
ou. de refufer un aurre emphytéote? Il fàudroit d"ailleurs
que la ceffion fLIt parfaire au moment où l'aél:e qui la con.tient, eH dreffé; le qui eO: contraire à tous les principes,
puifqu'il n'y a que l'intimation, l'exécution ou l'acceptation de la part du cédé, qui rende la c.effion parfaite, ce
n'cft qu'alors qu'on peut appliquer l'axiome, quia jus extinctum, vel quod nrJn efi, cedi non POlefi.
Il y a des Auteurs qui, pour la ceffion du drott de pré:"
lation ,vont plus loin; ils ne la regardent que comme un
limple m:mdat; tel cf!: le fentiment de Porhier dans fan traité
du retrait, part. 2, feél:•. 2. Mais l'on n'a pas beLOin de cette
difiinél:ion. pour valider la feconde ceffion, & pour prouver
que le cédant peut avoir tort de céder de nouveau., mais
que fa f.1ute n'empêche pas que le plus diJig.ent des ceffionna ires n'obtienne la préférence. Il ne re{te aux aurres
qu'une aél:ion de garantie comte le cédant; ,'eH la décifloG
précife d~ F,l(;hiuœ..s daus fes cQntroVerCèS,. liv. S, ch.. 32•
. ,f.es ceffions, de quelqlle nat4re qu'elles Coient" t;,e donneut t ~aUt <1;ll\:Ues ne font pas fig.niliées, q.ue jus. ad. WI)' ,
&
�DU
"&
PALlIs
DI!
PROVEN"Cl!~
'S8)'
'non jus in re. Jufqu'à ce que cette formalité fait remplie, elles font à l'égard des tierces perfonnes c0trlme fi
elles n'exifioient pas; le debiteur peut toujours fe ibérer;
les créanciers du cédant peuvent faire faiiir la ~omme cé,lée; & le cédant même peut l'exiger, nonobfrant la ceffion qu'il en a f.1ite. L. 3, cod. de novationi6us; Fer.. ieres fur l'art. 108 de la coutume de .Paris; Raviot fur
Perrier, tom. 2, quo 219, n. 2 & 3; Decormis, tom ..2,
col. 870; Mr. de Bezieux, liv. 4, ch. 13, §. 'Î; I\1r. de
.Lamoignon dans fes arrêtés, tit. des tranfports, art. l ,
'Î & 8, pâg. 178; Argout dans fan infiitution au Droit
Français, tom. 7., liv. 4, ch. 'Î des cejJions, pag. 442;
Bacquet, des droits de juflice, arr. 2 l , n. 2.88; CateIan,
tom. 2, liv. 4, pag. 123; Augeard en fon\Recueil d'Arrêts, tom. l, pag. 602; Defpeiffes, liv. l, pag. 13,
Ij.
4,
Ce n~èfi pas la premiere fois que le Seigneur a donné
l'invefriture, au mépris de la ceffion du droit de préla,ion. Tous les Auteurs qui raifonnent filr cette hypothefe,
affirment' que la préférence doit' être. donnée à l'acheteur
invefri. Corradin, de jur. pradat. quo 3 l , n. 99 & 100
.après avoir pofé la même queflion, décide que la récept·ion du droit de lods de la part du Seigneur & l'i1pprobatian de la vente excluent le ceffionnaire, & cela par une
raifon bien fimple; parce que, quoique le Seigneur ait
cédé le droit de prélation, il peut toujours en libérer
l'emphytéote, parce qu'il a droit de percevoir le lods, &
que les. aél:ions direél:es font· encore à lui. Le même Auteur -entend fi bien parler .des ceffions' à titre onéreux,
qu'il, affure qu'il relte au ceffionnaire. l'aél:iOll. en garantie
p04,r [es dommages & iutérêts contre le cédant. (Sanlege~, ,réfol. i::iy. ch. 23 ,.n. 10, '& Fachinœus, liv. 5,
ch. 32.) Le premier. affure que celui qui eIl: invefii &
qui a Pilyé le lods, eH fans contredit préférable au cef.
fionoaire du retrait. Qu~nd même ce ceffionnaire auroit _
les aél:ions du Seigneur, il fe détermine fur ce que la
ceffioll I\'accorde aucun droit réel, & que l'inveil:iture &
Eeee
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la p.oiféffio[l ac.ql1ierent un ~al1tre droit bien plus qécif1f &
plus puiifant, parce que l'acheteur s'acquittant de fes ebli-'
gations envers lei Seigneur, il ell: d'autant plus jufl:e qu'il
fait maintenu, que le Seigneur avoit l'optÎ"on & la liberté
de le refufer ,& que le Seigneur étant pri\!é de fan droit,
le c,elfionnaire n'efl: pas plus favorable. Le fecond 'c!écide '
bien précifément, que l'inve!l:iture n'efl: pa's dérruite par'
un~ ceffi?11 du droit 'de prélation; antéri,eure r mais, 'tu'eIle
dOit aVOir [011 effet, & que le feul droIt du preml~r ce{:.
fionnJire fe réduit aux dommages & intérêts envers, le cédant, ce qui efl: une nouvelle pl\'euve; q\l'il .n'y a auéune'
qifférence entre 1\1 ceffion, onéreufe & la ceffion gratuite.!
On trouve la m.ême dé.cifion dans Rafiour, dé jur. feud.
n. 47, La Cour n l'a jamais jugé autremel)t. :0n' trouve'
ces Arrêts, rapportés par Me. d'Aix à la fuire du. Statut de
Marfeille, ch. 16, pag. 66"'9; par Decormis, rom.' 2, col.
1082; par Me. Julien en fon Commentaire. du Statut de
Rrovel~ce, tom. 1 , pag. 3-3 I.,
:
On ne peut (epr'ocher à Lambert de s'être trop preifé
d'acquitter leI droit de lods. Tous les Au.teurs q,ui traitent
: d,u droit de, prélatiQn, recommandent à l'emphytéote de
s~empreifer à faire le paiement du dr.oit de lods: /it· di-·
ligens, in falvendo laudimium; ut. dominus remaneat' exolufus
Il jure prœlationis." L'emphytéote qui fe .Jibere elH H, favorable, fa diligence efl: fi. fort approuvée, qu'il lui eR: permis de traiter & de. compofer des droits [eigneuriaux avant
l'acquifition'.
Tous les Auteurs ont enfeigné qU,e nonob!l:ant la ëelIion
du droit de prélation faite à un tiers fuI' la premiere vente:
à· faire" ou fur une vente déja faite, I~ Seigneur de.meure
roujours.le maître d'accorder l'invefl:iture à l'acquéreur,
& de le mettre par-là à l'abri .des recherches du ceffionnaire, pourvu qu'il le faife avant que celui-ci ait mis.fon
droit en aél:ivité par la fignification de la ceffion. Sanleger
eil: un de ceux qui ont décidé la que!l:ioll in- terminis ;
c'efl: dans fes réfolutions- civiles, ch. 32., n. 9 & 10';"
Corradin en [011 traité du droit- de prélatioQ., quo 3, n.
�DU
PALAIS
DI!
PROVENCE.
SS1
99; F achinœus da ne fes controverfes, liv. 7, ch. 32;
Olea, de ceiJione jurium, tit. 6, quo 8, n. 18; Charondas, liv. 3, rerp. 6; Me. d'Aix fur le Statur de Marfeille, décif. 16, pag. 669; Decormis, tom. l, col.
1082 ; le nouveau. Commentateur de nos Statuts, tom. l,
pag. 330, n. 21.
.
Il eH: certain qu'on ne peut pas foupçonner les Trinitaires d'avoir connu la cellion de Ricaud faite en 1762;
il n'exiftoit plus en 1780 aucun des Religieux qui l'avoient
faite; c'étoit donc une ce/Iion parfaitement ignorée : on
pourroit même dire que c'étoit une cellion illicite & incapable de produire quelque effet; parce que, ainfi que le
dit le Commentateur des Statuts de Mar/èille, & que le
jugea la Cour par fon Arrêt du 26 Oél:obre 1617, il ne
doit pas être permis à des Adminiftrateurs de céder le
droit de prélation des ventes à faire, fi elles ne tombent
pas d~ns le temps de leur adminiftration ; principe fi vrai,
que les livres font pleins d'Arrêts qui cm défendu am,
Eccléfiaftiques & à tous Corps quelconques de faire des
baux à ferme par anticipation.
Par Arrêt du 17 Juillet 178 l , au rapport de Mr. le
Confeiller du Bourguet, la Sentence fut réformée; la Cour
fit droit à la demande principale de Ricaud, déclara l'aB:e
de cellion faite à Lambert de nul effet, & condamna ce
dernier aux dépens. Ecrivant Mes. Portalis & Barlet.
FIN.
ERR A T A.
Pag. 15, lig. 19,' Bourgeois; lifez, NoMe. Même ligne;
Noble; Iifez, Bourgeois.
Eeee21
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https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/2/88/Janety-V5.pdf
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JOURNAL
D U
DE
PALAIS
PROVENCE"
o u
A
RECUEIL DES ARRETS
RE N DUS depuis les derniers Journalifles, par le.
Parlement & la Cour des Aides de cette Province.
Par Me.
JAN E T Y.
~==~;~.~==!IlQ
ANNÉ E S 1781 &
~-
~~~==~
A l X,
A
Chez
1782.
Imprimeur du Roi,
le College•.
ANDRÉ AD IBERT,
M.
DCC.
vis~à-vîs:
L X X XIV•
.liVEe APPROBATION ET PERMISSHHl.
�•
,.
;
�593
,
tt(:===:::=~;===~~====~:;:::::::=;~.
TABL-E
I
DJeS SOJJ:/lMAJ(RJEJ
CONTENUS DANS CE VOLUME.
I. Le mandant n'efl pasoDligé de ratifier lefait dw
mandataire, s'il a excédé [on pouvoir.
Le mandataire efl-il alors tenu de garantie? Page
J
ARRÊT II. L'accufé, mis feulem~nt hors de Cour & de procès,
peut-il faire déclarer la plainte calomnieufe, & obtenir des
dommages-intérêts?
- 8
ARRÊT III. Appel comme d'abus de l'Ordonnance rendue parl'Evêque de Marfeille, rO. fans entendre les parties inté-reffies, ,:0. ftr un fait po.JfeJJoire, 3°. fur un ft:Jux ex~
pofé
,
14
ARRÊT IV. L'Huiffier peut-il demander fls vacations, malgré
44le [olvit mis au bas de l'exploit?
ARRÊT V. Le Prieuré de la Celle eflCil mafculin ou feminin? Le cartulaire de St. Vic70r fait.il foi en Jujlice?
.
les dilPofitions des Arrêts , Jugemens 6, conirats doivent-elles
être entendues dans tous les cas, ou rebus {ic-exranribus? 49
ARRÊJ;' V1. La dénonce doit être figl1ifiée dans les vingt-quatre·
heures.
r 0 5ARRÊT VII. Le tireur & l'endojJèur d'un papier de commerce
en [ent garans en· tout temps, quoiqu'il n'ait·pas été pro.
teflé dans les dix jours, fi celui fur lequel il cft tiré r('a à:
Nc.heaTjce lllJcun fonds pour. l'acquitter.
ARRÊT
F fff
�•
~ 94
T A il L E
Différence entre un billet à ordre, & un billet 11. domi.;
cile.
107
ARRÊT VIII. Les Juges-Confuls ne peuvent connotue des dettes
contrac'1ées entre Marchands, ji elles ne le font à 'raifon du
commerce.
Ils connoiJfént des lettres de change entre 'toutes, perfonnes.
113
ARRÊT IX. Pieces nouvelles & décijives, moyen de requête
civile.
12.2.
ARRÊT X. En matil?re de complainte, il faut prouver qu'on
a poffidé contre celui à qui on oppofe la poffijJion annale.
On ne peut cumuler le pétitoiFe avec le poffiJfode, quoique
toutes les parties y confinunt.
12.9
ARRÊT XI. En fait d'aJfùrance maritime, qu'entend-on par jiniflre qui donne lieu à l'abandon du Navire?
Formalités Cjui doivent être obfervées pour conflaur le jinifire.
136
ARRÊT XIf. On ne peut prouwr par témoins la confujion'
des intérêts avec le principal.
1'52.
ARRÊT XIII. Peut-on pourfùivre le faux-témoignage avant le
récolement du témoin?
1'54.• ARRÊT XIV. LorJèJu'en matiere de menues dtmes la poffiJlien
anciwne efl conflatù, le laps de trente ans fuffit pour établir la poJli:jJion récente & continuative.
Les habitans peuvent-ils dépofer dans l'enCjuête de la Commu·
nauté?
.
164ARRÊT XV. Sur un droit dl? fervitude.
178
ARRÊT XVI. La prefèription ne peut courir contre le légitimaire qui vit en communion avec l'héritier.
187
ARRÊT XVII. L'héritier bénéficiaire qui paffi un concordat,
dans lequetil promet payer les· créanciers, peut être contraint
perfonnellement, & les exécutions peuvent être portées fur
fès biens propres.
19 1
ARRÊT XVIII. Formalités qui doivent être obfèrvées lorfqu'il faut donner un chemin à une propriété clofè.
2.0 l
ARRÊT XIX. Sur la Jurifdic?ion des Prud'hommes.
~08
�DES
~9)
SOM MAI RES.
XX. On ne' peut prouver par témoins le paiement
d'une fomme au deJfous de lOCi liv., fait li compte d'une obli2 13
gation écrite.
.
ARRÊT XXI. Sur une ac1ion refcifoire.
219
ARRÊT XXII. L'ufufruit légué fur un legJ tenant lieu de légitime, ne pouvant O/voir lieu jufqu'au concurrellt de cette même
légitime, doit-il être remplacé fur les autres biens de
l'hoirie?
Apres la mort de celui fur la légitime de qui portoit l'ufufruit
retranché , ce même ufufruit petit-il revivre fur l'entier
legs?
227
ARRÊT XXIII. Le locataire n'efl pas tenu aux réparations foncieres , s'il n'y a claufe expreffi, & <juoiqu'il ft fait obligé à
toutes les réparations.
238
ARRÊT XXIV. La fubrogation faite par écrite privée lie peut
nuire au tiers.
24+
ARRÊT XXV. Ufage des habitans de Lançon de donner a
nouvetlu bail leurs fonds, quoique foumis a la direRe univ'erftlle du Seigneur.
Les baux emphytéotiques ne donnent pas ouverture au retrait
lignager.
Celui 'lui veut exercer le retrait lignager efl admis aprouver
la jimulation de l'ac1e de baIÏ a_ emphytéofe.Mais pour y être reçu, il doit propofer des faits tellement
concluants, que l'on puiffè en tirer cette cO'!ftquence, 'lue:
les parties contrac1antes ont voulu faire fraude a fon
2)4droit.
ARRÊT XXVI. Le cohéritier qlli a fait des frais pour l'utilite
commune, peut prételidre le remboltrfement de la portion 'lui.
' 'l.63;
coll/pete chaque cohéritier.
ARRÊT XXVII. Sur. la péremption d'inflance.
La préfentation couchée dans le regiflre par la partie elle-mêmeeft-elh légale?
267
ARRÊT XXVIII. La quarte facidie que l'héritier prend fur les'
legs\ ne peut faire partie des 'biens compris dans l'injlitlltionuniverfelle, ni du fidilcommis dont l'inflitution univerfelle. ejJ:
ARRÊT
l
a
F Hf
:<,.'
•
�~96
T A B L-E
gret'ée ; & le retranchement qui a lieu fùr les legs efl ail
profit de l'héritier, 6- non du fidéicommiffaire.
27~
ARRÊT XXIX. Dans quel cas y a-t-il lieu au rachat d'une
créance cédée viliori pretio?
290
ARRÊT XXX. Oll ne doit Jurfeoir
un Jugement Conjùlaire fùr motif d'incompétence, fi elle n'ejf évidente & notoire.
300
ARRijT XXXI. Information convertie en enquête.
304
ARRÊT XXXII. Le fils de familte, majeur ~. émancipé, peut
contraaer avec [on pere.
309
ARRÊT XXXIII. On doit fe pourvoir aux Juges ordinaires,
& non aux Lieutenans de Police, raifon d' une injure faite
dans une AffimMée de Corps, mais 'lui n'a auculle relation
avec la police du COIPS, pu avec l'ohjet de l'Aj{emblée. 321
ARRÊT XXXIV. Tejfament attaqué pour caufe de captation &
de concuhinage.
32)
ARRÊT XXXV. Le creancier, le tiers-acquéreur peuvelll-ils
exciper de la prétérition du légitimaire ?
Vmte faite par l'héritier uJufruitier bénéficiaire fans formalités,
.fans garder J'ordre des hypotheques, déclarée nulle.
Le pojJéffiur de mauvaife foi ejf condamné la reJlitution des
fruits depuis [on acquifition.
337
.\RRÊT XXXVI. En Provence les Bâtimens de mer ne peuvent
être mis la taille.
3'i0.
ARRÊT XXXVII. Sur le privilege qu'a la Nation SuiJJe d'exercer une profe/fion en France. ,
3'i 9
ARRÊT XXXVIII. Teflamens attaqués comme faits ab irara,
& capté~.
36).
ARRÊT XXXIX. En matiere de loyers de maifons, on ne fllit
pas la regle aB:or fequirur forum rei.
4l 9
ARRÊT XL. Sur une prife # partie.
422
ARRÊT XLI. En .matiere criminelle, c'eJl d'après la nature du.
délit, des preuves 6' des circonflances, 'lue le Juge doit
l'accufateur le procès extraordinaire.,
accorder ou refufer
Il peut· le relufer par ./imple décret.
440
A.RRÊT XLlI. Appel comme d'ahus de l'u,7ion du. Prieuré de
a
a
a
a
a
�DES
SOMMAIRES.'
191
Notre-Dame de Cœlis au Monaflere - Cure 'de lac'iJille -de
Saint-Maximin.
'
" "
,'~ '451
'ARRÊT XLIII. Le contrat de pacotille n'efl"'pas. de fa na-ture, ni d'après la difPofition des Loix, un véritaMe contrat
maritime, dont la connoijJànce foit dévolue au Tribunal de
l'Amirauté
468
ARRÊT XLIV. La femme qui plaide avec [on mari, peut refufer de le rejoindre pendant procès.
'_490
ARRÊT XLV. Sur la cejfion de droits litigieux.
498
ARRÊT XLVI. Le paiement pendant plufieurs années de fuite
des intérêts d'une fomme adjugée, 'ne peut faià: préfumer la
çonflitution de rente.
Les intérêts payés au de/a du double d'une fomme adjl!gée.
ne font ni répétihles , ni imputa41d au principal.
5°7
ARRÊT XLVII. Les Communautés ne peuvent ni racheter, ni
faire encadaflrer les biens par elles aliénés en faveur des'Seigneurs en département de dettes, & avec fralichift de tafNe,s,
t;. qui ont été démembrés du fief depuis le 15 Décembre
155 6.
51 6
XLVIII. La rémiJfion _de l'obligation privée, volon-
ARRÊT
tairement faite par le créancier au débiteur, ,opere fa libé..
ration.
L'e~lévement du billet doit être prouvé.
,
La plainte calomnieuft donne lieu des réparations convena-'
/;les.
,
529
ARRÊT XLIX. Les Evêques connoiffint de la néceflité de
l'agrandiffiment de l'Eglife ParoiJfiale.
537
ARRÊT L. Pour pouvoir s'infcrire en faux, il faut que le fait
argué pl'éfente l'altùation de la vérité, le dol perfonnel ,
& le préjudice d'autrui.
_
'
HI
ARRÊT LI. L'ac7e pa1fè par le curateur ad hona, au nom &
en faveur de la maffi des créanciers, ne peut l'être par
un Notaire proche parent du curateur.
55°
ARRÊT LIl. Le Négociant peut prêter
jour & avèc intérêts
un Bourgeois.
555
a
a
a
�1 •
"
.~ 9~
, ','
'1' A BJlL E '
AR.RM. LID:.'lmpDjitirm d~ :cinq. pOUl' mIl. fur l~ paùz 'lui ft(oit cuit & confommé dans 1e lieu & terroir de Valauris ,
",'.
~ Tl.'
ARRÊT LIV. ABe d'éc1tange' attaqué comm~' étant une vente
déguifée.
La fraude ne Je préfume point.
,
k'inflance en retrait n'entretient point l'aBion des parens 'lui'
[Qnt au m4me degré 'lue le retrayant. Ayant un drait égal,.
ils doivellt venir' in' concours.
S80.
conftrfllee.
"
Fin de la 'l.'able des Sommaires.
ERRATA.
l'ag. S::z.8., Iignè 3'1: 17 63 ; life1..: 178J'
,
"
,
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JOURNAL,
DU
PALAIS'
JD JE lP JK 0 VE N C~JE~
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ARR Ê T
P R EJM lE R,
Le mqncfan't n'efl pas obligé de ratifier le fait du mandataire."
s'il a excédé [on p0l,lvoir.
Le mandataire ejl-il alors tenu de garantie?
'
E
Tienne Pellegrin' réiidant à Malte envoya le 29, Novembre h63 une procuration à Antoine Truc [011>
beàu - frere fe trouvant à Cabris; il lui donna pouv0ir'
d'exiger de tous fes débiteurs tout ce qui pourroit lui être
dli, tant par contrats qu'autrement, & d'en donner qu,ittance, d'arrenrer & affermer tous fes biens fous les charges ~
claufes & conditions qu'il trouveroit à propos, & 11 défaucde paiement, de pourfuivre les débiteurs jufqu'à Sentence.
&. Arrêt définitif, appeller des illgemens, ou prêter tous;
A 2..
.
�4
JOUR NAt
con[entemens, & généralement faire tout ce qui pourrait
concerner les intérêts du conil:ituant; tout ce qu'il feroit &
pourrait faire lui-même s'il étoit pré[ent fur les lieux, même
dans le cas où il faudroit un mandement plus fpécial, promettant d'agréer tout ce que par le Procureur [eroit fait en
fan nom, & de le relever.
Enfuite de cerre procuration Truc expo[a dénonce le 19
Août 1767 comre l'un des enfans de Jean Pellegrin,
Tailleur du lieu de Cabris. Les fuites de cerre dénonce
étoienc le rétablitrement d'une muraille, les dommages-intérêts foufferts. Truc en forma dem,\nde; il requit en même
temps que les arbres trop voifins de la propriété d'Etienne
Pellegrin futrent arrachés. Le p-rocès fut terminé par tranfaétion, & au moyen de l'échange de deux mauvais fonds
de terre évalués 4'5 liv.
En 1776, Etienne Pellegrin revenu à Cabris a/Iigne Jean
Pellegrin en dé[emparation du fonds échangé; celui-ci appelle en garantie Truc. Sentence le 17 Mars r777, qui
déboute Etienne Pellegrio de [a demande, avec dépens envers toutes les parties. Appel au Lieutenant de Gratre.
Truc eil: encore mis en caufe. Sentence le 2.6 Mars 1779,
qui réforme, catre la tranfaétion, & met Truc hors de
Cour & de procès fur la demande en garantie. Appel de
Jean Pellegrin pardevant la Cour.
On difoit pour lui, que Truc avait une procuration cpm
liberâ, c'eil:-à-dire, indéfinie; que pareil Procureur a droit
de vendre, & que fi Truc ne l'avait pas eu, il faudroit
nécetrairement qu'il fût fan garant. D'ailleurs qui peut acquiefcer ou appeller, peut nécetrairemeot tranuger, puifque
la tranfaétion eil: fouvent moins qu'un acquiefcement.
Pareil Procureur peut donc faire tout ce qui eil: relatif
aux affaires, au bien & à l'intérêt du conil:ituam ; il peut
f~.ire, t<;>"t c~ que ~e conil:itua~t pourr~it faire lui-même ;
5 I~ ~tOlt pr~fent; Il p~ut le faIre, qUOIque le mandat plus
fpeclal ne fait pas porre par l'aéte. Enfin, quoi qu'il fatre .
le conHituant promet d'agréer tout ce qui [era fait en
[0;
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PAL
AI S
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PRO VEN C
I!:
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hom L)on défie de voir une procuration plus ample, plus
'étendue, plus générale que celle paffée en ~aveur de Truc,
quoique Je mot cum liber;â ne s'y .trou~e polOt.
Le mandat cum lzbera eft celUl qUI comprend tour; le
mandant s'y réfere aveuglément ~ la. volon:é ~.u m,andataire. SubroO'eant le Procureur à [Ol-meme, Il lUI transfere
tous les po:Voirs que le citoyen a pour l'aciminiftrarion de
fes biens. Ce mandat équipolle au mandat particulier que
pourroient exiger les citconftances. Ç'~ft la do~rine q,e Sa~
bellus in ~o. manddtum, n. 13;; d~ .B~'~q,?fil: èp·0n~::r.raité
de claufulzs ùfufceq. clauf. 3'Î; du Car~l:nal Tufcus v • tnan.
'datum, n. 1 'Î , & de Defpeiffes, tom'. l , pag. 66.
La Loi 'Î 8 , if. de procuratoribus , s'explique àin[1 al! fujet
du mandat cum liberâ : procutator cui generaliter Jibera admi-:
niflratio rerum commijJà efl, potefl exigeré taliud pto' alio
permutare. C'eft pour diftiogj.Je'[ le l'roëUreÙt_. c~I'{l.liberâ ,
du Pro-cureur général, qui n'eft qu'adminiftrat~u~" q!le le
fommaire de la Loi 63 du même titre dit ::. p'':oèuratot
generalis (ine liberâ veZ fine '/pcciali mandato', non potefi ven·
dere. Même langage dans le §. 4 de la Loi 9 , if. de acquir.
rer. domino dans les §. 42 & 43 des Infiituls, tit. de ret.
divifione.
Les Auteurs qui connoilTent véritablement le droit, &
qui. fe font attachés à approfondir les principes, atteftent
tous que le Procureur cum liberâ peut vendre; ita Perezius
fur le tirre du Code de procurat. n. 19; Pothier en fon
Traité des contrats de bienfaifance, tit. du mandat, pag. 303;
d'Argentré fur l'art. 26'Î de la coutume de Bretagne, ch. 8,
n. 2 ; Julien en fon Code in va. mandatum, ch. l , litt. M.
On répondoit pour Etienne Pellegrin, qu'il eft de principe que celui qui en; conftitué Procureur, doit s'en tenir
firiél:ement aux pouv,oîrs que fon mandàt contient. Pour
vendr~, p~:lU~ aliéner', pour échanger, pour tranfiget, un
pouvoir general ne fllffit pas i. Il faut un pouvoir fpécial &
exprès. Telle eft la difpofition précife des -I:oix & des
Auteurs. (L. 63, if. de procurat. Lacombe, 1vo. Procureur l
�6
JOURNAL
n. 9; Doma,t, lïv. l , tit. l S, feét. 3, n. I I . ) Aïnli uni
Procureur ne peut faire aucun aéte qui tende à diminuer ~
à changer la propriété fans un pouvotr exprès. Vouloir foufenir le contraire, ce feroit vouloir détruire la regle; il eft
néanmoins très-elfentiel de la conrerver, puirqu'elle fait la
fûreté des abfens, aux iutérêts defquels la Loi veille ellemême. Pourquoi faire dépendre de la nature d'un mandat
qu'il faut interpréter, la queHion de favoir fi un Procureur
peut vendre, échanger les effets de la fucceffion dont il
eft chargé? N'eH-il pas pIUs {impIe, n'eft-il pas moins
dangereux de n'aur.orirer ces aétes de propriété que lorfqu'ils.
font faits par, ceux à qui on a donné exprès &, fpécial
mandat de vendre?
Vinnius traire cette quefrion avec beaucoup de foin dans
fes que Hions choifies, quo 9. Cet Auteur établit que les
termes de procurator' omnium honorum, omnium rerum, &
ceux de procurator cui Lihera adminiflratio rerum aut negotiorum cOllce.f!a Jit, ne ftgnifient pas plus les. uns que les
autres; que les Adminillrateurs, à qui on .donne ces qualifications , ont le même mandat, & que ce qui excede le
pouvoir des uns, excede le pouvoir des aucres.
Pourquoi fe réduire 11 des difl;inétions là où la Loi n'en
a pas fait? Pourquoi fe fier à de ftmples conjeétures là ou
elle n'admet que l'expreffion bien claire & bien littérale de
la volonté du propriétaire? En ne permettant les ventes ,.
tran(aétions, échanges qu'aux Procureurs qui exhibent un
mandat fpécial, on ne 'court pas le rirque d'agir contre·
la volonté du maître. On peut l'outre-palfer, la méconnaître, en admettant la diil:inétiou entre la procuratio~
générale, & celle qui eft tout à la fois libre & générale.
Dumoul'n, fur la èautume de Paris, §. l , n. 6,. fait connotre le' d nger de cette diil:inétion.
Quand on donne plufteurs pouvoirs à un Procureur, que
ces ,Jouvoirs peuvent entra/ner des aétes qui exig~nt un
mandat exptès, & que l'intention du mandant eil: de donner
it. w!QU des uns 14 libre &; indéfinie faculté de faire les:
�PAL AIS D li Pao v l! Ne 'Il;
7
{lutres, on termine la procuration comme l'eG: ceIle de
Truc; mais ces pouvoirs, quoique indéfinis, quoique généraux , ne fortent pas de leur objet, & s'y réferenc toujours.
Ainfi donc, quand Je mandant dit au Procureur qu'il conflitue, vous lerel telle chofe & généralement tout ce que ,mon
intérêt exigera, il faut toujours fous-entendre, & pour raifon
de ce, parce que le pouvoi, libre & indéfini n'dl:
donné que pour les aél:es qui ont déja été exprimés. C'eft
ainli que fe concilienc les deux parties des l'aél:e & les
principes que l'on a fur cette matiere.
Le pouvoir générill de faire tout ce que le ,conftituant
pourrait faire lui-même, donné dans le même aél:e à la
fuite de plulieurs mandats particuliers, efi: concédé pour
les étendre; il s'y réfere uniquement. C'efi: ce qui eH attefi:é par Sabellus, §. S ,vo. mandatum; Tufcus, litt. M,
concluf. 4'5 , n. 1'5.
Etendre pareille daufe à tous les aél:es poffibles, ce feroit
méconnoître la volonté du confi:ituant; ce feroit prendre
la fimple permiffion de gérer, d'adminifirer des biens, pour
celle de tranfponer le domaine & la propriété des mêmes
biens; ce qui ne peur fe fuppofer dans un aél:e où elle n'a
pas été donnée expretrément.
On obfervoit pour Truc, qu'il n'étoit tenu à aUCune
garantie, attendu que lorfqu'on lui avoit fait foufcrire
la tranfaél:ion, on avoit connu la procuration en vertu
de laquelle il concraél:oit; s'il a fait plus qu'il ne pouvoit, c'eH parce qu'on le lui a fait faire; l'erreur dl:
commune, & en pareil cas on n'accorde jamais de garantie. Il eft de maxime que le mandataire qui contraél:e
procuratorio nomine, n'oblige que celui qui l'a confiitué.
Quoiqu'un Procureur doivè connoître les bornes de fon mandat, quoique la Loi impofe à celui qui concraél:e avec lui
la néceffité de le connoître auffi, L. 19, de diverf. regul.
jur., néanmoins il n'eft pas étonnant que des gens peu
verfés dans les affaires, n'aient pas été en état de mefuret les pouvoirs contenus dans la procuration; Ruflicis
D t1
�ft
JOURNAL
jus pleruTTlfue ignorare permijfùm ejl, Cujas, defin. Papin. liIi:
4, pag. 630' ':o~l~ pourquoi les Aute~lrs dé~ident que vis~
à-vis des gens J1hteres, l'erreur de droIt deVIent erreur de
fait, & ne leur nuit pas.
,
Par Arrêt du 21 Mar.s 178 [; au, rapport de Mr. le Confeiller de Fabrv, la Sentence du .Lieutenant fut confirmée"
& Jean Pellegrin condamné aux dépens envers toutes les
Parties; écrivant Mes. Pafcalis, Aguillon & Collombon.
ARRÊT
I I..
L'Accufè , mis feulement hors de Cour & de procès, peutil faire déclarer la plainte calomnieufe, & obtenir dés
dommages-intérêts .1
L
E 27 Juin 1778 , plainte :au Lieutenant d'Aix de la
part de Me.' .!;Iugues....• ; Notaire Royal de la ville
de ...• contre les N:oraires, le ;Jûge & le Procureur du
'Roi de la même ViHe.· Il fe plàignit des vexations'qu'il
elfuyoit de la parr des Noraires, dû com'p'lot formé entr'eux
& les Officiers de Jufl:içe pour- le dépou iller de fes emplois;
de l'expédirion faire; au Minifl:re d'un Mémoire des Notaires & du certificat ~es Officiers, enfin de diffamation
& de calomnie; il'démanda l'information.
, ....
Les Notaires, ,préfehrerent de leur chef une requtte de
plainte contre Me. :Hugues ....• en abus de [a qualité de
Contrôleur aux aél:es, én divulgant les tefl:amens, en donnant connoilfance des acres aux parens, & les excitant au'
retrait, en forçant les particl'lliers à s'adrelfer à lui pour
recevoir les contrats; en cachant à ceux qui les palfoient
ailleurs les [ervitudes, & en leur faifant payer [ans modération les lods & les autres redevances. Ils demanderent &
obtinrent l'information [ur tous ces fdits, & la [urréance à
~elle ~e Me. ~ugues •. " Sur les charges de la procédure
mt<:~VI[~t un decret de propofera en jugement.
Me..
�DU
PALAIS
Dl!
PROVENCI!;
9
Me. Hugues..... fit alors procéder à fon information,
enfuire de laquelle Me. Jofeph....... fut décrété d'ajournement, le Juge, le Procureur du Roi & les freres....... d'af·
ftgné.
Requête en continuation d'information de la part des Notaires, fùr plufieurs autres faits; 1°. fur la fubornation des témoins; 2.°. fur ce que Me. Hugues....... fe jaél:oit d'être le
feul Notaire de....... en état de bien faire un aél:e; que
les autres Notaires étoient tous des bêtes, des C ....... ; que
fachant tout par le contrôle , il feroit repentir ceux qui ne
s'adretreroient pas à lui; 3°. fur ce que quelqu'un ayant pré.
[enté à Me. Hugues....... ~n compte de Me. Jofeph ....... il ré.
pondit que c'étoit un compte peu délicat; enfin fur ce que,
quand on envoyoit les mains courantes chez Me. Hugues......
pour faire contrôler les aél:es, il prenoit la licence de lire
les tefiaments ; & quand on vouloit lui repréfenrer qu'il n'en
avoit pas le droit, il répondoit que quand une main-courante était fous fa main, il avoit le droit d'y lire tous les
aél:es. Sur cette procédure Me. Hugues....... fut décrété d'af_
figné. On procéda au procès extraordinaire; Me. Hugues......
préfenta une requête en fins civiles; il demanda d'être déchargé de l'accufation, & que fes accufateurs futrent condamnés à 3000 liv. de dommages & intérêts, fauf & fans,
préjudice de fes dommages & intérêts réfultans de la calom_
nie. Sentence qui met Me. Hllgues....... hors de Cour & de
procés, avec dépens fur la plainte des Notaires.
Me. Hugues....... reprit fa procédure; il préfenta deux requêtes en continuation d'information; l'une fur des menaces & fur plufieurs chefs de diffamation; l'autre fur la fubornation des témoins. Second décret d'ajournement, &
enfuite Sentence définitive qui met les Notaires hors de·
Cour fans dépens. Appel de la part de Me. Hugues.......
On difoit pour Me. Hugues....... que les accufés ne fe ptoporoient rien moins que de lui enlever une partie de fon.
état, & de la lui enlever non fur une fimple rairon d'incom_
patibilité, que l'Qn favoit ne devoir pa; réllffir 2 mais en
Années z78z & z78z..
B
�10
Jou
Il. N If. ];'
l'in~rimjnan~ d'abus & de- malverCati"on -dans {es fonél:ions:
N'ell:-ce pas là faire injure & diffamer? L'injure dl-elle
autre chore que deliRam. in alterius contumdiam dolo mala
adm!/fum, ou l'intent'ion de' nuite au tiers, animus propo-fitus contumeli'œ inferendœ ? Vouloir priver quelqu'un de Con
état, c'eft lui, faire injure- & du côté de l'honneur, & du
côte de la fortune; vouloir l'etr priver, parce qu'il abuCe
de Ces fonél:ions, c'ell: encore p-Ius que lui faire injure, ,puiCque c'eO: l'incriminer & l'accuCer de prévarication.
Me. Hugues....... a été infl:igué une premiere fois, mais
déchargé de l'accuCatiou par Arrêt de la Cour; il a été accuCé au -ConCeil de prévarication dans l'exetcice du contrôlle
& renvoyé à M. l'Intendant. Le dernier Mémoire & le certificat dont· il Ce plaint, furent préCerrrés à Monfieur lors
de fon palfage à Aix. Le Juge & le Procureur du Roi ,
écrivirent d'office à M. le Garde des Sceaux à raifon de
ce, & enfin les faits renfermés _ dans le certificat font
tous faux & la plupart calomnieux. Or, ce font ces fortes
de délations que les Tribunaux doivent punir févéremenr ;
lOi parce que
l'injure faite aux pieds du Trône eH: né.
celfairement plus grave; 2°. parce qu'il efl: plus facile d'opérer une CurpriCe & d'opprimer; 3°. parce qu'il el!: prefque impoffible d'aller juCqu'à la main qui a porté le coup, .&
que s'agilfant d'utré injure fecrete, il el!: bien difficile d'être
in/huit; & par conCéquent de fe défendre. Auffi les Parlemens n'ont iamais celfé d'uCer de rigueur, 10tCque ces 'fortes de délations ont été foumifes à leur Jugement. Denifart, vO. calomnie; rapporte un Arrêt du Parlement de
Bordeaux du 'l Février 1734, qui, à raiCon d'un placet diffamatoire préCenté à M. le Chancelier, condamna à des réparations à l'Audiente, tête nue, à genoux, les fers aux pieds;
à des dommages & intérêts' & au l:iannilfement.
On répondait pour les intimés que leur procédure jugée;_
& Cur leur plainte, Me. Hugues....... avoit été mis hors de Cour _
avec dépens, mais n'avait point été déchargé de l'accuCatian; qu'il n'était point abfous du délit dont il étoit accufé ;
�DU
PALA1S
Dl!
-Il
PROVENCI!.
çu'il étoit formellement débouté de fes dommages & intérêts fans aucune efpece de' réferve, parce qu'il eut impliqué contradiéii?~ de ,juger .q~e Me. !fugues....... n~ét~it pas
innocent du deht qu on lUI Imputolt, & de lUI referver
néanmoins fes dommages & intérêts pour fa .plainte en calomnie; il eue impliqué contradiéiion dll juger que les Notaires n'étoienc pas des calomniateurs, & de les livrer aux
peines de la calomnie.
'Qui efi-ce qui ignore que l'accufé mis feulement hors
de COllr, n'efi poiQt difculpé & qu'il n'efi point entiétement rétabli dans fon honneur ,? Qui efi-ce qui ignore
qu'il y a une différence remarquable encre l'hors de Cour &
la décharge de l'accufation, & que 'cette difiinaion fondée
fur l'opinion de tous les Criminalifies, efi reçue dans la
plupart des Tribunaux de lufiice, & fur-tout dans ce Parlement? La premiere prononciation fuppofe qu'il n'y a pas
atrez de preuve pour aifeoir une condamnation contre l'ac...
cufé, mais qu'il y en a pOllrtant aifez pour ne pas l'abfoudre & le, déclarer innocent. La feconde confiate au
contraire l'innocence de .l'accufé. C'eft là le fencimenc de·
Serpillon dans (on Code. criminel ',tom. l , pag. 409; de
Denifare dans fes collealOns de lunfprudence, au mot hors
de Cour; de iLacombe " traité des masieres criminelles, part.
3, ch. 2.4, n. 2.3; c;Ie Ferrie.re dans fan Uiaionnail'e de.
droit & de pratique au mot hors de Cour.
Il faut donc diftinguer en matiere criminetle rlwrs dec
Cour d'avec la décharge de l'accufation; & de cette difs
~inéiion ,il ré{ulce que l'accufé qui n'dl: 'point déchargé de.'
l'accufation, loin d'être abfous & reconnu. innocent, efk
au pontraire fOllp'fOnné du délit, & n'efi point rétabli;dans
fan honneur. L'accufé qui n'efi pas déchargé de l'accufation,
ne pe~t donc pas fe plaindre de calomnie & demander de$
domrt;lages ~ intérêts coptre l'accljfateur, attendu que par
ç,e\a feul,ÇJu'i;! ·n'a pas été abfous & 'rec.onnll 'innocent , l'aç",
çufation n'a ·pas été jugée fauife & çalomnieufe.
L'accufé mis feulement 40rs de COllr n'eit point i;u...
B~
�1'2.
10ÙR.NAt
·fame par cette prononciation, parce qu'elle ne le fuppofê
pas coupable, & fous ce point de vue l'accufé n'ell point
incapable de remplir des fonél:ions publiques dont la privation
ne peut être que la peine de la cOllviél:ion du délit; mais elle
ne l'abfout pas, & fous ce point de vue il n'efl: point rétabli dans fon honneur, parce qu'il n'ell pas à l'abri du
foupçon, parce qu'il n'a pas famam integram; & s'il a été
décidé par les Avocats au Parlement de Paris dans une
affaire célebre, que l'hors de Cour ne bleffoit ni l'honneur,
ni la délicateffe, ce fut fans doute par rapport aux circonfiances & à la nature de l'accufation ·que l'on ne connoît point. Au refie , que l'hors de Cour laiffe tine tache
fur la réputation de l'accufé, ou qu'elle n'en laiffe aucune , rien de plus indifférent à la quefiion.
C'efi un autre principe non moins certain, que l'accufé
peut être renvoyé abfous & déchargé de l'accufation, fans
que l'accufateur foit pour cela déclaré calomniateur, & condamné comme tel à des dommages & intérêts envers l'accufé. L'accufateur qui ne prouve pas fon accufation , n'elt
pas toujours réputé calomniate,ur. Les Loix difiinguent la
calomnie d'avec l'erreur. Si elles punitrent févérement celui
qui par dol & malicieufement a intenté une accu ration
en Jufiice, elles ont de l'indulgence pour celui qui s'y elt
engagé par erreur & dans la bonne foi. C'elt· la" difpofition
expreffe de la Loi 3, Cod. de calumniatorihus ; de la Loi
i, §. 3, if. ad Senat. Conf. Turpill. & de l'Ordonnance de
l 'l39, art. 88.
.
L'innocence de l'accuré n'ell pas toujrlurs une preuvê
certaine de calomnie; il peut arriver que l'accufateur ait eu
une jufie ~airon de pourfuivre la vengeance d'un crime, &
d'en croire coupable celui qu'il a accufé; il.peut arriver que
la dépofition des témbins tombe par les reproches contre eux propofés; l'effet de ces reproches ne - rend pas les
dépofitions fauffes, mais feulement fuipeél:es; alors l'acufateur n'efi pas réputé calomniateur, & n'efi point condamné à des dommages & intérêts envers l'acéufé. Qu'elle
�'13'
'nu PALA1S DB PROVll!;Cit;
foule d'Arrêts ne voit-on pas, qui pour les crimes les plus
graves ont renvoyé abfous des accufés, fans infliger aucune peine contre leurs accufateurs. Tel efi l'Arrêt célebre
qui fut rendu fur les condulions de M. l'Avocat-Général Ser~
vin, en préfence d'Henri IV. & du Duc de Savoie, &
~ui déclara l'acc~fé innocent .fa.ns punir l'ac~ufat~ur. Tel ell:
1 Arrêt du 17 Jum 1693, qUI JufiIfia la memOire du fieur
Langlade, fans condamner le Comte de Montgomery à
~es dommages & intérêts.
Que Me. Hugues
appelle, s'il ofe , du Jugement intervenu fur la procédure des Notaires, de cette Sentence ,
qui non feulement ne l'a pas déchargé de l'accufation, mais
qui encore l'a débouté des dommages & intérêts qu'il follicite à préfent dans fa procédure en diffamation &. calomni<; qu'il prouve la fautfeté & l'injufiice des plaintes de
{es confreres; qu'il manifefie fon innocence, alors il fe pré[entera fous d'heureux aufpices; il invoquera avec fuccès ces
Loix qui font la fauve - garde de l'honneur ,& de la Sllreté des citoyens, & il obtiendra les réparations les plus
folemnelles; mais tant que ce Jugement exifiera, tant qu'il
ne fera point attaqué, on lui dira toujours avec raifon,
qu'il fe préfente à la Jufiice plutôt comme un coupable
heureux, que comme un innocent perfécuté; qu'il lui demande une rép~ration qu'elle lui a déja réfufée, & -qu'elle
ne lui accordera jamais fans être pleinement' convaincue de
fun innocence.
1
Par Arrêt du 4 Avril 1781 ; au rapport de M.le Con{eiller. de Perier, la Sentence fut confirmée. Ecrivant Mes,
;Fafcalis & Ramboc,
1
�ARR Ê T
Il J.
:Appel comme d"ahus de l'Ordonnance rendue par l'Ev!que â~
Ma~feille, lO. fans entendre les parties intéreffies, '].0. jùr'
un fait poffiffiire, 3°. fur un faux expoft.
I
L exifioit depuis ·long temps .à Marfeille deux Commu-
. nautés de 'Religieux de la Sre. Trinité; la maifon de l'une
étoit iituée fur le -territoire de .la Major. L'Eglife & le.
Couvent ,de l'autre :étoient litués au quarrier .de la Palud"
Paroi./fe Sr. Eem!ol. En 1777, les Triniraires de la Pa,..
lud furènt réunis aux ,Chanoines ,régulie,rs, & dans le courant du mÇlis d'Agût, Ie$ deux Communaurés. furent rranf.
férées dans la maifon .de.s Trinitaires Déch!lUffés. On· y
tranfporra toutes les ~u.vres & confr_airies arr,achées à l'Eglife
des .Chanoines rég1!li~rs, & notamment l'œu.vre ou l'Hô.
pital .$,t. Eutropt: pour les hydropj<jues. Le t 2 Ja.nvier t 778 ,
les Reéteqrs de cet Hôpiral ach,ererent une partie de terrein
limée au quartier du Rouet dans le d~nriél: de la Parroi1.fe,
, St. ft1a,rtin ,P9ur fervir d;emplacement au ,çi,metiere de l'Hôpital; les Çhanoines réguliers ilvoiem préfenré auparavant
un ,comparant à M. l'Evêque ,pour obtenir la Jper;miffion
d'établir ce cimetiere, & d'y enfevelir tant les pauvres dé-;
cédés daqs l'Hôpital St. !if/trope, que les fideles qui y !lU~c:ient faitéleét,ion?~ fép,ulr~re. P,a~ Or?09~a;nce du 9 Jan;:,
vIer 1778, ~. l'Eveque aVOIr permIs l'erabh./fement du 'ci
meriere & la fépulture tant des pauvres que d~s autres fi.
dele~. B~entôt a~rès un Paroi~en de l'Eglife Cathédrale y
:fit eleétlOn de fepulture; la levee du corps fut fa ite par le
Chapi;re ~e la Major? 9~i accompagna ,le convoi jufques
d'a~s 1Eghfe de la Tnnlte. L'abfoute fime, le Chapitre le
rerlra & abandonna ~e cadavre aux Chanoines régulie·rs ,. qui
~u tirent le tra.ofpotC Jufques dans leur cimeciere) revêcus. d'é]
�bu
PALAIS
DE
PROVEN,CV:
Tf
t'ales, chapes & dalmatiques. Pour parvenir de l'~gtife de
b' Trinité· à ce cimetiere, il faut traverfer ·un efpace de plus
{}e deux mille Vas fllr le territoire de la Paroiffe St. Ferréol. Les Chanoines réguliers s'attribuerent ainfi dans l'enteinte d'une Parroi!fe les marques diffinél:ives de la Jurif.
diél:ion curiale. Mre. Olive, Curé de la Paroi!fe St. Ferréal, fe pourvut au Lieutenant de Marfeille contre les Chanoines réguliers. Le Chapitre St. Martin intervint dans
l'inftance qui fut terminée par Sentence du 20 Septembre
1779, dont il y eut appel pardevant la Cour.
Les Chanoines réguliers oppofoient l'Ordonnance de M~
l'Evêque, homologuée par la Cour. En conféquence l'Ad.
rniniftrateur du Chapitre de l'Eglife collégiale & paroiffiale St. Martin, & Mre. Olive, Curé de la Paroi!fe Sro
Ferréol, fe pourvurent contre cette Ordonnance par la voie
de l'appel comme d'abus, & [e rendirent oppofans au dé~
'Cret de la Cour qui l'homOloguait. Ils établi!foient quatre
moyens d'abus; 1°. ( difoient-ils ) cette Ordonnance eft
attentatoire à la Jurifdiétion des Curés; 7.°. elle prononce
fur un fait po!fe1foire; 3°. elle a été rendue [ans ouir partie; 4°. elle eft intervenue fur un faux expofé.
Sur le premier moyen on difoit pour les appellans que
de droit commun, ce n'd! qu'aux Paroi!fes qu'il appartient véritablement de pofféder des cimetieres; les Réguliers n'ont pu dans la fuite partager ce droit avec' elles;
que par une dérogation expreffe à ce droit, par un ti tre forrnel & [pécial qui leur en donnât le privilege, ou par
prefcription.
Dans les premiers fiecles de l'Eglife, dans ces temps
'de ferveur & d'enthoufiafme, quelque refpeél:able que fût"
aux yeux des fideles le foin de leur fépulture, on avoir cru
pourtant devoir éloigner du rein des Eglifes confacrées àu Dieu
vivant, les dépouilles mortelles de la créature. Les rangs &
les dignités n'étoient point un titre pour pénétrer dans ces
afyles facrés, qui, ainfi que le dit un ancien , ne devaient
pas être profanés par les [ouillures de fattouchement des
�'J6
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Il N A L
'corps morts, ne funeflentur facra civitatis. Les Pr~tres deO
fervant l'EgliCe avoient alors Ceuls le droit d'inhumer .les
fideles; & ce ne fut que 10rCque les Religieux eurent acquis celui d'enterrer dans leurs Monafieres, qu'ils partagerent ces fonél:ions de religion & de charité avec les Clercs.
Ce ne fut en effet que dans le huitieme fiecle, que cé'dant à la piété des grands qui vouloient fe rapprocher des lieux
conCacrés par les cendres reCpeél:ables des Saints & des :\1artyrs,
l'EgliCe accorda.à quelques perConnes conlidérables la permiffion d'être inhumées dans le veLlibule des Eglifes;, &
c'eLl à Confiantin que l'on attribue cette innovation, lequel, ainli que l'obferve le P. Thomaffin, difcipline dl!
l'Eglife , parr. 3 , liv.
ch. 66 , 3, voulut après fa mort
fervir comme de portier au Temple des Apôtres, au tombeau defquels, durant fa vie, il avoit mis bas fon diadême,
& abailfé fa tête couronnée.
Bientôt la même faveur fut accordée aux Evêques &
aux Prêtres, enfuite aux Patrons & aux Fondateurs, & par
fucceffion de remps à tous les fideles. On bâtit alors des
portiques autour des Eglifes, & ce fut, ainli qu'il réfulte
du canon 6 du Concile de Nances, pour fatisfaire au delir
des fideles, & empêcher néanmoins qu'ils fulfent inhumés
dans le' fein même de l'Eglife. JufqlJes à cette époque le
'droit de fépulture érait donc attribué aux Curés, puifque
ce n'étoit qu'amour des Eglife! delfervies par l'Evêque &
par fes Prêtres, qu'avoient été, établis les portiques dan!>
lefquels fe faifoient les inhumations.
Vers la fin du neuvieme fiecle , de nouveTles révolu t,ions
filr le lieu des ~nhumations. ame?erenr de grands change-'
mens,fur le~ ~rotts des ~ures & des Paroilfes. Par une prérog;atIve fpeclale accordee aux Prêtres pans k Concile de
Tnbljrce, canon ~7, il leur fut permis d'avoir leur fépulture dans, les Egltfes. Les Peres du Concile de Meaux &
du ConCIle de Mayence s'efforcerent en vain de réprimell
cet abus. (Perard CaLle!, définiûons du droit CaflQnÙjUe,
pag. 750, n. 1.)
1"
Il.
�DU
PALAIS DI! PROVENCI!:
17
Ce fut à cette époque que les fideles acquirent tous le
"droit d'être inhumés dans les Eglifes; & ce fut 11 cette
même époque que les Moines commencerent à partager
avec les Prêtres des fonél:ions qui jufqu'alors avoient été exc1ufivement attribuées à ceux-ci, ainfi qu'on le voit dans le
Traité de la difeipline de l'Eglift du P. ThomafIin, corn. 3 ,
part. 3 , liv. I.
L'ollentation & la vanité de quelques particuliers qui,
dédaignant ,une fépulture commune, voulurent
fe donner
,
l
chez les Reguliers des combeaux affeél:es à eux feuls, la
dévotion de quelques ames pieufes 11 certains lieux confacrés
11 des pratiques de religion, firent naître des exceptions à la
Loi générale. Les autres Eglifes ne pouvoient d'abord enfevelir que cum conftnfu. parrochi, comme l'obferve de Roye,
inflit. canon. liv. 2 de parrochis -; la Clémentine dudum le
leur permit non petitâ veniâ. Les follicitations des Moines
multiplierent l'ufage de ces privileges, & l'on vit naître de
coute part des éleél:ions de [épulrure qui tendoient 11 priver
le véritable Pa!l:eur des honneurs & des droits donc il
avoit couiors ioui. C'el! contre ces abus que fe recrie St.
Bonaventure dans [on épître 2, écrivant à [es provinciaux.
Ce furent ces abus qui engagerent Clement V. dans le Coocile de Vienne 11 en diminuer la caufe principale.
La Décrétale dudum foumet les Religieux :1 payer aUle
Curés la quatrieme portion, non feulement des offrandes
funéraires, mais encore des legs faits en leur fal/eur palt
les fideles. Cent ans auparavant le Pape Luce III. adjuO"ea
aux Curés la troifleme partie des biens légués par un fidele
qui choififfoit fa fépulture hors de la Paroiffe où pendant fa
vie il avoit re~u les fecours fpiriruels. (.A.ppendi~, Conci!.
Later. part. 43,) Les mêmes regles furent c;onfacrées dans
le Concile de Londres. tenu fOlls Pafcal IV. qui défend ex~
preffémenr d'enfevelir les fiddes hors de leur Paroiffe.
En l'année 1260, le Concile de Cognac défendi~ d"~
poner les morts dans les autres Eglifes où la fépuhure:
I).voÏt été choifie, avant que de les avoir apportés d,aA$
Années 178z & Z782..
C
�'l,g
10
U R N ~ L'
l'Eglife paroiffiale. Il eft enfuite défendu aux Pr~tres "& aux
Réguliers de-recevoir aucun corps dans leur Eglife, s'il ne
'leur eft préfenté par le Curé. ( Ca'non l'Î & 16.) En 1326,
-le Concile d'Avignon permit d'élire fa fépulture chez· les
Réguliers, pourvu que le corps fût premiéremem poné à
la Paroiffe, felon la· coutume. Enfin le Concile· de Trente
ordonna que le quart des droits funéraires, qui avoit appartenu aux Eglifes cathédrales ou paroiffiales, & qui avoit,
depuis moins de quarante ans, été pollëdé par des MonaHeres ou des Hôpitaux ou autres lieux de piété, reviendroit aux Eglifes cathédrales ou paroiffiales, quelque privilege qu'on eût pu obtenir.
C'eH par ces redevances honorables que la Jurifdiél:ion
des Curés fur leurs Paroiffiens a été confervée, lorfque des
motifs louables ont fait naître les privileges. Mais on ne
fauroit induire de la faveur accordée à la liberté du choix
des' fépultures , que les conceffions faites aux Réguliers puif{ent être affimilées au droit préexiHant des Paroiffes : non
omnis Eccle/ia, die Barbora de votis, vot. l03, n. 17, cœmeterium hahere potefl, fed [olùm illa quœ populum hahet, vel
cui privilegio particulari hoc fiit conceJlùm. C'eflle Curé (dit
l'Abbé Gueret, Recueil de Confult. canon. pag. 107) qui a
adminiJlré les Sacremens au défunt, qui a offert le faint facrifice poùr lui, qui doit en conji!.quence faire dans la cérémonie de [on enterrement les prieres établies par l'Eglife.
Cironius fur la Décrétale d'Honoré III. tir. de fepulturis,
foutient que c'eH faire injure au Pall:eur, que d'enlever à
fa Jurifdiél:ion le corps d'un fidele atraché pendant le cours
dé fa vie à fa Paroiffe. Enfin felon Van - Efpen, rom. 2,
pag. 2)2', l'inhumation des fideles eft une fonél:ion dépendante de la cure des ames, & ce droit, ne peut êrre reffreint que par un privilege particulier; ainli il n'y a que les
Paroiffes qui doivent avoir un cimeterie.
Telle eH donc la diJférence du droit qu'ont les Paroilfes
de pofféder des cimetieres, d'avec celui des Réguliers. Le
premier tient e1femiellement au caraél:ere paftoral. L'inhu-
�DU
PALAIS
DI!
P
ROVENel!.
J?
mation des fide1es ef!: pour le Curé une fonél:ion attachée
à fon minif!:ere, dont on ne fauroit le priver qu'en rendant
hommage à fa Jurifdiél:ion par les redevances défignées
dans les Canons; & c'ef!: ce qu'a décidé le Cletgé de France
dans l'article 2. du Réglement porté contre les Réguliers.
Les Eglifes paroiffiales peuvent feules avoir des cimetieres; les autres Eglifes ne peuvent jouir de ce privilege
qu'en vertu d'un titre particulier. Cette opinion ef!: celle
de touS les Auteurs. (Goard, tom. 2 , pag. 334 & fuiv. i
Hericourt, part. 2, ch. 1 l, pag. 129; Durand de Maillane,
Di8ion. canonique, va. cimetiere & va. fèpulture ; Denifart ,
va. cimetiere, pag. 472; Répertoire cre Jurifprudence, va.
cimetiere. )
Or, dès qu'il ef!: démontré qu'aux Paroi/fes feules appar.
tient de droit commun la faculté de po/féder des cime-,
tieres, & que le droit des Réguliers à cet égard ne peut
être fondé que fur un titre particulier & un privilege fpé.
cial, l'Ordonnance de M. l'Evêque de Marfeille ef!: évidemment abullve. Quel eU le tirre que les Triniraires produifent? Celui accordé à Sr. Jean de Matha, Inlliruteur de
leur Ordre en 12°3. Ce Fondateur ayant voulu former un
établi/femen.t à Marfei!le, follicita auprès de Reynier, alorSo
Evêque de cette Ville, & auprès du Chapitre de la Major,
la permiffion de bâtir une Eglife dans l'enceinte de la Pa.
roiife de la Cathédrale, & il demanda en même temps:
qu'il lui fût permis d'avoir un cimetiere. L'Evêque & le"
Chapitre, après avoir conféré fur cene demànde, fe déterminerent à l'accueillir; mais elle ne le fut qu'avec le
confentement de l'Evêque & du Chapjrre. Le. Curé de la
Cathédrale confent & concourt lui-même à l'établiH'ement
d'une Eglife & d'un cimetiere dans le territoire de la Major,
C'efl: dans les bornes de cene Paroi/fe que cene concef.
fion efl: renfermée; c'ef!: UQ droit limité dans le dillriél: ,
in Parrochiâ noflrâ. L'Evêque l}'accorda rien de plus,. &
le Chapitre de la Major n'avoit ni la volonté, ni le pou~9ir d'en accorder davi!ntage. C'ef!: un privilege purem.ent
C2,.
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JOUR.~~
local, fubordonllé à des conditions capables de conferver
Jes intérêts de la feule partie intéreffée à cette innovation.
Dans cette conceffion les Trinitaires font fournis à remettre à l'Eglife cathédrale la moitié de toutes les offrandes qui fe~ont faites à leur Eglife; il leur ell: fait défenfes
d'enterrer les Paroiffiens de la Cathédrale, finon les Clercs.
Enfin on exige que toutes les donations de meubles oit
d'immeubles qui pourroient être faites à la Communauté
des Trinitaires, foiem partagées avec le Chapicre. Telles
font les conditions que le Chapitre crut devoir appofer à
une conceffion qui, parce qu'elle devenoit une faveur infigne, pour les Trinitaires, ne devoit pas tourner au préjudice de la Paroiffe. Aujourd'hui (continuoient les appel~
lans) l'Ordonnance de M. l'Evêque du 9 Mars 1778 accorde
aux Chanoines Réguliers plus que ne leur accordoit le
titre" fur lequel ils ont étayé leur demande. Elle viole
encore les droits du Chapitre & du Curé, qui" avoient
été cotifultés en 12°3, & qui ne le font pas aujourd'hui.
Enfuite elle autorife des entreprifes journalieres fur la Jurifdiétion de plulieurs Curés. On ne peut mieux apprécier
l'étendue d'une conceffion, que par la poffeffion qui s'en
enfuit & par l'exécution qu'on en fait. Or, depuis 12°3,
c'eil-à-dire depuis l'origine"de la conceffion, les Trinitaires n'ont jamais eu qu'un cimetiere intérieur. Cette Jurifdiétion réguliere, exercée à l'ombre du myilere & dans l'in~
térieur , ne portoit aucune atteinte à la Jurifdiétion majeure
du Curé. Leur poffeffion eil donc devenue la regle & la
mefure de leur droit. C'eil par le genre de leur poffeffion
qu'il faut juger de la nature de leur privilege.
Il réfulte des différentes circonilances qui ont précédé
& accompagné l'aéte de 12°3, que lorfque les Chanoines
Réguliers [e [ont pré[entés à M. l'Evêque de Marfeille pour
lui demander la transférence du cimetiere qu'ils poffédoient
dans l'ancien local, ils n'avoient le droit de pofféder ce
cimetiere que du confentement du Curé [ur le territoire
duquel il étoit emplacé, que dans le diilriét particulier de
�nu
1
l'AL'AIS
DE
PROVBNCE.
211
PEglife cathédrale; qu'ils ne le poifédoient qu'à des contEtions très-onéreufes, & que ce cimetiere étoit établi de
fa'i0n à prévenir de leur part toute enrreprife fur la Jurif-,
<iiél:ion du Curé territorial.
Or bien loin de demander le con[entement du Curé,
les Chanoines Réguliers ont affeél:é de le dédaigner; ils
ont cru pouvoir impunément acquérir filr le territoire du
Curé de St. Martin un droit tout nouveau pour lui, puifque
'jamais il n'avoit concouru, à le leur accorder. Le titre fur
lequel eR: fondée cerre transférence, n'accordoit aux Chanoines Réguliers qu'un cimetiere particulier fur le diR:riél:
de la Paroiife de la cathédrale. Seroit-i1 donc poffible que
parce que dans des temps reculés, le Curé de la cathédrale
'crut pouvoir colérer fur fon terriroire un établiifement dont
il fut prévenir les abus, ils fuifent en droit d'exciper de
cette conceffion particuliere, à l'effet d'impofer une pareille charge à un Curé qui n'a jamais traité avec eux?
De tous les vices qui infeél:ent l'Ordonnance de M. l'Evêque de Marfeille, le plus intolérable e!l: celui où il permet aux Trinitaires l'étahliifement d'un cimetiere extérieur,
lorfque l'ufage immémorial dont ils s'étayoient, ne conftacoit de leur part que la poifeffion limitée d'un cimeiiere
renfermé dans les bornes de leur Monafiere. On a vu en
effet ces Religieux traverfer le terricoire de plufieurs Paroiifes, revêtus de cous les arrributs caraél:érifiiques de la
Jurifdiél:ion curiale; & lorfque Mre. Olive a dénoncé un
attentat auffi repréhenfible, ils ont répo~du que puifqu'il
leur étoit impoffible d'exiger du Curé du défunt qu'il ac...
compagnât l'on Paroiffien jufques au cimetiere, il étoit
juHe qu'ils fiifent le convoi avec la décence qui convient
aux cérémonies eccléfiaHiques. Mais dès qu'il eH vrai que
dans l'ancien local ils n'ont jamais joui que d'un cimetiere
intra claufira, fur quel motif veulent-ils aujourd'hui le pof..,
féder hors l'enceinré de leur Monafiere, à une difiance
fort éloignée de la ville, & de maniere à 3lltorifer les
lJfurpations don~ les Curé~ fe plaignent? Les Chanoine~
�ii
Jou. RNA
L .
Réguliers franchilfent les bornes de leur Monafiere··, {li
exercent publiquement fur le territoire d'une Paroilfe tous.
les aétes de la Juri[diétion paHorale. On les voit offrir au.
public cet étrange fpeétac1e d'une Communauté de Réguliers attentant impunément aux droits les plus refpeétables
& les plus facrés. Le peuple confondant aifément l'abus
du droit avec le droit lui-même, fuppofe un titre à cette
innovation, & diHingue à peine le vrai l'alleur, de celui
qui fe cache fous les attributs caraétérilliques de la Jurif.
diétion. ,Peut- on comparer ces attentats fcandaleux avec.
ces aél:es obfcurs qui n'avoient pas fur le territoire de la
Cathédrale l'air de la nouveauté & les fuites dangereufes
d'une entreprife évidente fur les droits du Curé? Il filut donc
conc1me qu'en accordant aux Chanoines Réguliers un cime··
riere placé hors l'enceinte de leur MonaHere, M. l'Evêque
de Marfeille a évidemnient contredit le titre de leur privilége, auquel il ne pouvoit donner une extenfion que ce privilége ne comportait pas.
Sur le fecond moyen jls ob{ervoienc que c'ell: un prindpe incoocell:able, que la connoilfance de route matiere
polfelfoire appartient exc1ufivement aux Tribunaux féculiers.
La Jurifdiétion de l'Evêque ne s'étend pas ju[qu'à décider
une quefiion dans laquelle le droit réc1amé dépend uniquement des faits fur 1efquels il eft étayé, & dont il en elfen-.
riel de prendre une connoiffance exaél:e & préalable.
L'art. 4 du rit. 1) de l'Ordonnance de 1667 porte que
if! connoiJJan~e du poffiifoire en matiere de Bénéfices appar•.
tient aux Juges Royaux prÎ1lativement aux Juge;s d'Eglife'~
~'art. 3: de,l'Edit" du mois d'A",ril.169) contient la même,
d,ifpofition • & Joulfe fu~ cet <jrtic1e dit que dans ces fortes
de matieres, 'il y a toujours du fait mé16 avec le droit, dont
le Juge d'Egli[e ne peut .jamais connaître.
Il en également de principe. que to.ute. qpeftion polfef-,
foire, nié,me dans, les. matier~: eccléû'!Hiques '& .pi.ll:emençl "
fpitituelles', appartie'nt au Juge' làïqué. ,C'eft ainli que l'ont:,
tlecidé l'Abbé de Foi) maximes fur l'abus, pag. 295!
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PAt A lS
D!!
PRO V:Il N C li:
".
0
'1J
fevret, de l'abus; Dumoulin, ch. 2 de reJlitut. zn 6 . v •
poJfejJio, & l'Arrêt du 3 Février 1777, en faveur de Mre.
Olive, Curé de Saint - Ferréol, qui s'étoit pourvu contre
une Ordonnance de M. l'Evêque de Marfeille , qui conférait aux Curés de la Cathédrale le privilege exclufif &
exorbitant de baptifer dans leur Paroiife les adultes qui fe
trouvoient dans l'enceinte du territoire de tous les Curés.
Or l'Ordonnance de M. l'Evêque accorde aux Trinitaires
la maintenue d'un droit fondé [ur titres & ufages; c'e!!:
donc la maintenue qu'elle accorde; elle prononce donc fur
le poifeifoire; elle les autorife à transférer le cimetiere de
~k Eutrope. Or on ne transfere qu'une chofe exi!!:ante,
& dont on a le droit de jouir. Donc elle les maintient
dans la poifeffion de ce cimetiere; donc elle prononce fur
un fait poifeifoire.
"
Il e!!: certain (diroient - ils [ur le troilierne moyen)
que tout Jugement ne peut être légitimémenL rendu,
qu'au préalable on n'ait entendu les parties intéreifées.
Cette maxim"e e!t inviolable; elle tient au droit de la défenre naturelle, qui ne veut pas que perronne fait condamné fans être entendu. Delà les Ordonnances & les
Réglemens particuliers de la' COllr ont frappé de nullité
les décrets portant profits [ans ouir partie. Ces regles doivent être rigoureurement obrervées même dans les Tribunaux de l'Officialité; c'e!!: la dirpofition de l'Ordonnance
de 1667, tit.
art. 1.
Il étoit donc ab[olument néceifaire d'appeller le Curé [ur
le territoire duquel la transférence était demandée; il eut
fait valoir res droits & contredit une prétention qui n'étant
fondée que [ur la poifeffion d'un cimetiere intérieur, ne
pouvoit donner lieu à une conceffion plus étendue; on ne
pouvoit dépouiller un Curé de fa JurifdiB:ion rans ron confencement, ou du-moins [ans avoir apprécié la validité de
fes exceptions.
"
Enfin les appellans obrervoient rur le quatrierne moyen,
'!lue l'Ordonnance de l'Evêque" de Marreille était ÎlIter~
l,
�:i4
Joli
RNA L
venue [ur un faux expofé; il eft dit dans le comparant qu'if
y avoit dans l'ancien local un cimetiei-e attaché à l'Hôpital de St. Eutrope, où la Communauté des Trinitaires,
en [a qualité de Curé, a toujours enfeveli les fideles qui
ont le malheur de décéder dans l'Hôpital. Or tout efr
faux & infidieux dans cet expofé ; tout a nécelfairement in.
duit M. l'Evêque à erreur. 1°. Les Chanoines Réguliers
veulent per[uader que l'ancien cimetiere appartenoit à
l'Hôpital St. Eutrope; premiere fuppofition. 2°. Ils difent
que la Communauté a toujours enfeveli dans le cimetiere
ceux qui font morts dans cet Hôpital; feconde fuppofition.
3°. Ils, préfentent comme un Hôpital, une œuvre unique,ment de.fbnée à des pratiques de dévotion; troilieme fuppofition.
Dans la permilIion accordée en 1203 à St. Jean de
Matha 1 de pofiéder un cimetiere & d'y enfevelir les fideles
qui y feroient éleél:ion de fépulture, on ne parle pas des
pauvres de l'Hôpital St. Eutrope. Ce ne fut qu'en 1270,
qu'à 1'o'ccafion d'une foule de conte!l:atious qui s'étoient
élevées entre les Trinitaires & le Chapitre- de la Cathédraie, ils obtinrent le droit d'inhumer dans leur. cimetiere
les pauvres décédés dans cet Hôpital. Ils en ont donc impofé à l'Evêque , lorfqu'ils ont avancé dans leur comparant
que le cimetiere dont il s'agit appartenoit à l'Hôpital. Aufurplus, lorfque pendant l'efpace de fix fiedes on ne voit
pas que les Chanoines Réguliers aient iuhumé dans leu Il
cirnetiere aucun pauvre décédé dans leur Hôpital, ce dénU.ernent abfolu de preuv.es fur un fait aulIi eifemie1 n'ea
pas étonnant. Depuis très -long temps cet Hôpital n'eft
plus qu'une maifon de dévotion; il a effuyé une foule de
fév<ilutio~s qui- en Ont varié la deftination ,& l'ohjet. Ce
n'dl; plus aux pallvres feuls qu'il offre un hofpice &. des
fecours; c'eH une mai[on de retraite où un malade fe
rend pour obteniF une guérifon par 1''î'ntercelIion du faino_
Patron de l'œuvre. On n'y reçoit qu'une- feule perfonne i
~ çe ~'dl; pas d.e la ~ain de.s !lomme.s ~ d.es fe<:o!lrs
-
dé
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
2.5
lIe l'art qu'elle peut attendre quelque foulagement; une neuvaine employée à des prieres ferventes doit opérer ce pro. dige. Ce n'ef!: pas ici un Hôpital où l'affluence des malades
occafione des inhumations fréquentes qui puilfent néceffiter
un cimetiere particulier. C'ef!: fimplement une maifon de
retraite. Si la dévotion y conduit quelqu'un, le hafard peu t
l'y faire mourir; mais dans ce cas la fépulture de ce fidele
feroit de droit dans fa Paroilfe. On ne perd pas fon domicile pour aller palfer une neuvaine dans la' maifon de St.
Eutrope. On ne celfe pas d'être paroiffien du Curé fur le
territoire duquel on a fon domicile.
C'ell: donc l'expofé du comparant qui a induit M. l'Evêque de Marfeille à accorder la permilIion dont s'agit. Il n'ell:
pas douteux que fi les Trinitaires eulfent demandé en leur
nom & en vertu d'un privilege perfonnel à leur Communauté, l'établi Ife ment d'un cimetiere extérieur, le Supérieur ecdéfiall:ique auroit héfité à accorder à des Réguliers
un droit uniquement attribué aux Paroilfes. En préfentant
au contraire ce droit comme .perfonnel à l'Hôpital donc on
a fait [urgir les Reél:eurs, M. l'E.vêque a pu croire qu'i~
s'agilfoit d'un cimetiere. attaché à cette œuvre, & acquis par'
des titres certains & incontellables. Le comparant des Trinitaires contient donc une obreption elfentielle, q.ui vicieroit l'Ordonnance qui ef!: intervenue, s'il n'étoit prouvé
d'ailleurs qu'elle ell: évidemment abufive. Enfin l'on demande·
par le comparant l'emplacement du cimetiere dans un local ;;
jl ell: de fait emplacé daus un aurre.
On répondoit pour les Trinitaires, que le dreit d'établit
un çimetiere, quant à la fpiritualité, dépend de l'Evêque, & ne dépend que de lui. Barbofa, de officia parrochi"
part. 3 , ch. 26, n. 14, attelle, d'après une foule de Ca-.
nonifies, que toute Eglife, même non paroi.ffiale, ef!: néanmoins capable d'avoir un cimetiere, foit par coutume, foit:
par la perrniffion de l'Evêque. Le Cardinal Tufcus atteHe
cette maxime, en difant que quand un Hôpital fe trauve
IIvec un oratoire & un çimetiere, il faut pr.éfumer qu'il eŒ
4.;lfli.eS. t 7.8,z. ~ l78z..
D .
�16
Jou
RNA L
érigé auRoritate Epifcopi, parce que 1?oratoire & le cime.;
tiere /llppofent néce1fairemont l'interpofieion primordiale du
mini!tere épifcopal. C'eft aux Evêques à bénir les citnerieres, ou à les faire bénir, après que les droits & les préalables de la temporalité ont été gardés. Dans cette matiere
toute la pui1fance fpiriwelle rélide dans les ,mains des Evêgues; les Curés n'y encrent pour rien: & quels pourraient
être là-de1fus les droits des Curés, & comment" pourroientils y être inrére1fés? L'étahli1femenc d'un cimetiere n'ajoute & n'ôte rien aux droits du cimetiere paroiffial. En le
multiplianc, le peuple eft foulagé d'autant. On en eft moins
expofé aux conteltations qui ne fonc que trop fréquences,
fait à raifon de l'iufuffifance, foie à raifon de l'emplacement des cimetieres.
Les Hôpitaux peuvent avoir droit de cimetiere; il dépend des Evêques de le leur accorder. Le chap. cùm dicat
aux Décrétales, tit. de ediff. & repar. Ecclef. eH formel làde1fus; il ne faut pas qu'un cimetiere non paroiffiaf inCulte'
à ceux de la Paroiife, ni qu'il en empiete les droits. Le
cimetiere d'un Hôpital ou d'une œuvre quelconque n'a droit
acquis que fur les pauvres & les cadavres de cette œuvre;
:U ne peut recevoir les autres qu'en force du choix que chaque fidele peut faire, & ce choix doit être refpeél:é, quand
il dt légitime. Delà vient. la décifion des Canonifl:es (de
- _Luca, de regular. difc. l , n. ) l , & difc. 39 de parrochiis )confirmée ar l'ufage univerfel. Gibert dans fan cours de
droit canonique, tom. 2, tir. 16, feél:. 3 , pag. ) )6, rappode les textes du droit canonique.
Il efl: certain que les Réguliers peuvent avoir un cime..'
tiere, fait par titre, fait par po1feffion; ils peuvent y ·enterrer les fideles qui veulenc y faire éleél:ion de fépulture ;
c'eH le droit coml:\lun du, Royaume, conforme au draie
romain, ainfi qu'on peut s'en convaincre par les décifions
de Barbofa en fan Traité de jure Parroch. de Van-Efpen,
parr. 2, 'tit. 28, ch. 3, n. 23; de Î.m:a, dife.
n. 47 ;,
Decormis, tom. l , col. 1)8, & les Métnoires du Clergé,
.rom. 3, pag. 400, tom. '), pag. 16)7, & tom. 6, pag. 14)-2:
l,
�D U
PAL AIS
D Il
PRO VEN C E.
27
c'ell: ce 'que la Cour jugea par fan Arrêt du 30. Juin
1778, en faveur des Don1Ïnicains de Barcelonette contre
.le Curé.
Le droit de cimetiere a été accordé aux Trinitaires,
par l'aéte de leur établiffement à Marfeille en 1203. La
conceffion en fut faite par l'Evêque & fan Chapitre
en faveur du bienheureux Jean de Matha; ils ont encore
ce droit par le droit commun, par la Tranfaétion de
1270, & par l'établiffemellt de l'Hôpital de St. Eutrope
dans leur maifon.
Qu'importe que le cimetiere fait dans un dillriét ou
dans j'autre; que fait la localité de l'emplacement dans
les quell:ions de cette efpece? Chacun fait que les Paroiffes n'ont point de territoire, mais des dillriéts; que la
Jurifdiétion Curiale s'étend non fur le glebe, mais fur les
perfonnes, que les difl:riéts font marqués pour la féparatian des domiciliés perfonnellement fournis à la Jurifdictian de chaque Curé : or, quel que foit l'emplacement &
le local d'un cimetiere, fait de Religieux, fait d'Hôpital,
il n'ajoure & n'ôre rien à la JuriCdiétioll du Curé.. 'La piété
des fideles- ira chercher le cimetiere dans quelque difl:riél:.
qu'il fe trouve, quand elle Ce tournera vers cet objet. Ce
n'ell pas le local ou l'emplacement du cimetiere qui donne
droit d'y enterrer comme Hôpital; la fépulrure de draieell dans ce local pour tous les membres de l'œuvre. Ce
cimetiere, en quelque endroit qu'il fait placé, n'a nul droit'
fur les paroiffiens étrangers à J'œuvre. Les cadavres de ces;
étrangers ne lui appartiennent pas; il ne peut les recevoil.'
qu'en force du choix qu'ils fom là-deifus, & ce choix qu.
ell tout.à ·la fois de droit commun & de droit public"
ne bleife en aucune maniere les droits de la Paroiife.
Il ell: certain que les Trinitaires ne pouvaient pas établir un cimetiere dans la clôture de leur MOllafiere;. 'Jes;
Lettres-patentes les ont transferés dans l'intérieur de la.
"il1e > mais ces Lettres-parentes. n'one pas entendu qu?~J;s
perdiffenr auc.un de leurs droits ~ eUes on.t uansferé- .b
&
D2.
�:1.8
J
0 U"R N A L
Monall:ere, l'Hôpital & fes dépendances; dès· lors dans
Fimpuilfance d'établir le cimetiere dans l'intérieur & la
clôture, il falloir, fuivant les Lenres-parentes, remplacer le cimetiere par-tout ailleurs. Conlme Hôpital, les
Chanoines Régùliers reçoivent des malades de rames les
Paroilfes; ils font très-capables du· droit d'avoir cimetiere
dans tous les diftriél:s, fait dans leur enclos, fait ailleurs;
on en trouve deux exemples dans la ville" d'Aix. L'Hô·
pital général a un cimetiere féparé de fan, enclos. Le
cimeriere de l'œuvre des fuppliciés efr également féparé
de la Chapelle de cene œuvre.
Quand le Curé & les Réguliers font en débat pour
leurs droirs refpeél:ifs, & fur des objets même fpiriruels,
(di[oient les intimés fur le fecond moyen) cette conceftation appartient au Juge Laïque; voilà le fens & le cas
de la maxime. Mais il n'a jamais été dir que l'Evêque
ne pûr pas régler les marieres fpirituelles de fan Diocefe
dans les objers où il n'exifre aucune efpece de contefratian. Alors il exerce une Jurifdiébon volomaire qui lui
appartienr, & qui n'appartient qu'à lui. La queftion ne
peur devenir polfelfoire qu"e par le moyen de la conte[tation. Là où il n'exill:e rien de contentieux, l'Evêque
difpofe & peut [eul difpo[er in fpiritualibus. Ici l'Evêque
le pouvoir & le devoir avec d'autan t plus de raifon, qu'il
éroit exécuteur des L~nres-patentes porrant la transférence
du Couvent de l'Hôpital & de fes dépendances.
On entend les parties dans le contentieux; mais a-t-on
hefoin d'entendre & d'inviter des contradiél:eurs dans l'exercice de la Jurifdiél:ion volontaire (ob[ervoient les Trinitaires [ur le rroilieme moyen d'abus) ? En a-t-on entendu
dans tous les cas des cimetieres des Réguliers exifrant
dans la Province, & qui ont été [ubrogés aux anciens?
Le Chapitre de la Major a-t-il été entendu, quand celui
de St. Martin efr venu placer [on cimetiere dans [on di[triél:? En fuppofant que même au contentieux, un Juge
d'Egli[e eût fratué fur un fait polfeifoire, [ans entendre
�• DU )'ALA1S" brf PRpVENèE.
'29
.:Patties, 8(; qu'enfuite les Parties euffenr pourfuivi & plaidé
,
-pardevaot le Juge du fait poffeffoire, les moyens, tirés de
la non-audition ou de la non-vocation ne feroient-ils pas
anéantis, dès qu'il canHeroit au fond que la partie n'au'rdit 'aucun moyen légitime d'oppofition?
Ils diroient fur le quatrieme moyen, qu'on opporoit envain que l'Ordonnance avoit été tendue fur de faux expofés.
Ici l'on n'accufera pas de fraude les Trinitaires, & l'on
(lira que fi l'on s'érait trompé, l'erreur feroit impunie, dès
qu'elle n'attaqueroit pas la fubHance de la grace & du
titre, & que la vérité connue ne l'auroit pas rendue plus
difficile. C'eH le principe de cous les Canonifres, c'e!l:
celui de la raifon ; l'erreur indiflërenre n'arrêta jamais la
marche de la Jufrice. Aina l'on a expofé dans le comparant à M. l'Evêque , que l'on avoit fait choix & acquifition d'un local dans le quartier de St. Suffren. Ce quartier e!l: limitrophe de celui du Rouet, cela n'efj: pas contefré. L'on ne connoit pas bien, li l'on veut, la ligne
divifoire de deux difiriél:s & de deux quartiers. Le Curé
de St. Ferreol a partagé la même erreur 'pendant près de
deux ans; les Trinitaires ont donc pu fe tromper fur un
objet à l'égard duquel Meffire Olive fe trompoit lui-même.
Cette circonHance eut-elle rendu· le titre 'plus difficile?
Point du cour. M. l'Evêque a connu le local; fon délegué
l'a vilité; l'on ne l'a donc pas trompé ni voulu tromper!
On n'a erré que dans la défignation du quartier, & l'erreur dans la défignation ne fut jamais nuilible ; modo de
l'e veZ de perfonâ confiet.
M. l'Avocat-Général d'Eymar de Montmeyan examina
[ur le premier moyen, quel étoit le droit ancien des paroiffes & des Réguliers avant l'Edit de 1776, enfuire
quelle efr l'influence que cet Edit doit avoir fur ce droit
re fpeél: if.
Il obferva que le feul denr de favori fer la liberté des
éleél:ions des fépultures n'e!l: pas un motif fuffifant pour
accorder indi!l:inél:ement des cimetieres à tous les Corp!i
�30
Jou
RNA E
Religieux' qui pourraient paraître fufceptibles d'en. a'{oir ;
puifqu'on voit au contraire que cette liberté elle-même pourroit avoir les plus funeL1:es conféqu~nces , fi elle n'étoic refferrée dans de juL1:es bornes..
Dans l'ordre de la Religion, & l'on ofe dire, dans l'ordre
politique, toute Paroifiè ne forme qu'une feule & même
famille dont le Curé eL1: le PaL1:eur ou le pere univerfel~
Si d'un côté il faut que toures les ames s'y falfent régénérer
fpirituellement, pour .acql,lérir des droits fur le Royaume
céleL1:e qui doit être un jour leur commun héritage, il faut
auffi que chaque nouveau né aille s'y faire infcrire fur le
catalogue des citoyens, pour jouir inconteL1:ablement de fan
état & de fa place dans la fOQiété civile; c'eL1: encore au
Çuré lui feul à légitimer l'union des deux familles, & à
donner ainfi PexiL1:ence léga,le à la troifieme que cette union
ya former, & c'eL1: fur~tout COlDme MagiL1:rat fpiricuel que
[es fonétions font ~tendues & multipliées: inHruétion affidue·
pendant l'enfance; adminiL1:racion des Sacre mens dans tous
les âges; prédications, prieres, recours rpiricuels dans les
maladies, & même fecours tempo~eJs dans les adverfités;
fOUt relferre fans ceffe entre le Curé & res paroiffiens ces
liens fi facrés & fi puiffans qlli. datent du premier moment
même dé leur exifl:ence. POjJrquoi toutes ces circon!l:.ances
n'auroient-el\es pas déja formé au moment 0(1 cette exif-.
~ence, va finir, autant <le cbaînes indilfolubles, ou que dumoins la mort feule devroit brifer, fans qu'aucun étrangerpllt prétendre avoir le droit d'en faior quelques anneaux? n
s'en faut cependant· de beaucoup qu'aux yeux de la foi, la
mort elle-même a~al1tilfe l'union myfl:érieufe ,mais éternelle
du PaL1:eur &. çe. -[es ouailles j fOl/vent après ce moment ter~ible· & décifif, les befoiQs fpiricuel.s de ceux~ci font encore
l~s n1 êmes-, & ·le· Paneur leur doit les mêmes recours. Tout'
les rapproche donc, & rien ne les fépa re, puifque.la mon
eUe~rrlême n'a pas ce' peovoir; clonc rien n'dl: plus 'aifé
à, con.cevoir & à établir en tàveur des Curés, que le droit
q>~nfev.,li.r~ il tiçnt ll.q droit. p.tim.iti{ &. iA{..onte!laPle .de,
�DU
PALAIS
l'l E
Plt,OVENCE,
31
:régénérer, au devoir d'infiruiee , à l'obligation d'àdminifire~
& de fecouril', Pourquoi, fi eh effet l'inhuma tion efi à la
fois la. moins embarraffante & la plus fruétuèufé dé toutes
les foné!:ions curiales, ferait-elle précifément la felJle dont
les RéO'uliers pourroient les dépouiller? Entre les Réguliers &" les fldeles, aucun des rapports que l" on appe r'lOlt
enere le Curé & fes paroiffiens n'exifie; ce font cependant ces rapporrs & ces liens qui amenene, comme une
conféquence naturelle, le devoir & le droit d'en(evelir.
Mais, dira-t-on peur-être, tel n'ell: pas auffi le droit
commun dont les Réguliers excipelit; ce n'efi poine pour
y enfevelir les autres, qu'ils ont un cimetiere, mais feulemen't pour y être en(evelis eux-mêmes; s'ils y reçoivent
enfuite les fimples fideles ,. ce n'efi <J.ue patce que~ceux - ci
~nt d'ailleurs la liberté d'y choifir leur fépulture. Ce n'ell:
donc plus que d'une fimple difiinél:ion honorinqueo ou fpiriruelle qu'il s'agit, encore faùt-îl 'Lue cette 'difiinél:ion foit
fondée fur quelque cho(e, & que ~'on apperçoiv~ les motifs
qui ont déterminé les Loilt, ecc1éÎ1à'l1:îqùes à féparer la fépulture des Religieux de celle des aurres fideles. Dira-t-on
que c'e!l: pour ent;eterur jufqu'au derrlier monient, jufqu'après la mort n}ême;, cette féparation itl'1fortfè du monde'
dans laquelle lèS vrais, Rej ~ieùx doîve.nt viVté &: mohrir ~
Mais il femble que ceftel,rrtêmê' ràifon del/toit exclure les
Séculiers des citnetieres afféél:és aux Rèllgit!ux, ou ql;'ellè'
n'efi pas fuffifante pour faire féparer les clmetie.rès, dèfiinés
aux Religieux, de ceux défiinés aux laïques &- Même' au'
€lergé féculi1!r.
\
.',,:
-;"
_'
Infifiera-t-on & di'ra-t-on' que lés liehs dé·1Ït' pk'r6'illîalité
font rompus erme ,le Curé & 'les Moinès, entre la IPiirdiffe& l'Oratoire régulier? On fene bien en eHèt' q!!e fqumis'
par leur regle & par leurs fèrmeM.à la correél:ion de leurs
Supérieurs, à l'infiruél:ioti de leurs Freres voùés à 'l'éfùde ~
à la prie~e, au recueillem~nt" le,s Moines peuven & doi
vent avoir moins fàUvent befoinlie fécours & dÜ'itünifière
d'un, Pa!l:eur; ·mais c'eU pourtant toujours l d~ léurs mains'-
�31.'
Jou
RNA L
facrées qu'ils ont reçu le caraél:ere de Chréûe-n's; c~e!l: tut"
leur témoignage qu'ils ont été reconnus citoyens, & qu'ils:
ont pu devenir Religieux; les prieres & les [acrifices
.leur [ont dus & appliqués comme aux au.rres membres.
de la Paroilfe; tout les rapproche en.fin, & les [ubordonne en m~me-temps, jufqu'à la participation au même
minif1:ere, puifque les Religieux ne peuvent, (ans l'agré.ment du Curé, en exercer les fonél:ions, du-moins de la:
maniere la plus· auguf1:.e, c'efl:-à-dire de celle qui la remi
la plus utile à tous. les. fideles de la Paroilfe. En un mo.t,
plus on approfondit, (& plus j1 paroit que· la chaine [acrée.
de la Parojffialité n'a été- réellement brifée que, par l'inlroduél:ion du prillilege de l'exemption, & que' les Curés
ont [l1cçombé, comlTIe le~ :f:vêques leurs [upérieurs immédiats, [ou? les coups ~ par Jes l1furpations de l'autf(rité
Pontificale,.
•
'
Auffi ,. fi 1\)0 vouloit prendre pour' modele l'ancienne
'pureté de la di[ç.ipline EccléliaUique, con fuIter' I€ premier-;
régime & les antiques ufages de l'EgLj[e, on verroit bien~
tôt que t'DUS ces· privileges aujourd'hui· li anciens des Ordres Monafl:iques, tous ces droits qu'arl regarde COjTIme
elfentiel1ement arrachés à leur conÜimtion &. à leur exif-.
rence, ne [ont cependant .!J.ue· d.es n,ouveaurés. Que de'
fiecles [e [ontJécoulés ,.ayam ql/OIl: ait même imaginé que
les fideles pulfent' être enfevel'is ailleur-s' que dans le cime-.
ri~re de la Paroitre, avant que cetre· [ainre ,. !I,lais higubrebabiration des ,motes, [~ [qit rapproc;.h,ée de celle des yi-,
vans, avanr qu'elles aienr été en[uire toralelJ1enr. confon-,
dues a;u_dérri~lJtc de laj[ûreré. & de la "[qnlé~.'publique "
au gran.d [san,dale IlJR.me <je J-a ReLigion., qui veyoit·les:
Temples .les plus aj.Ig.uQes <levenus des chàrpier:s infeél:s ,.
où les [aints myf1:eres.' ne pouvaient plLls lè célébrer avec
~é.cence , .. 8{.' da\1t les.,fiql{le_s.. ne. pouvoienJ plus approc.he r:
,,1 ,1r: f _
~
H'
•
fans. d'Inger..
II parolt Elv.iden! q~le )~s"lt'eligi~ux ont eu k drQir d'in..,
b.lWl.aÜo.l.' d;il.Q.s, lçll~s. E&Ii(;;s." qY.<lA~ d'oQEenj(. çellli .d}ava.i
des,
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�DU
PALAIS
Dl!
33'
PROVENCl!.
des cimerieres; qu'ils ont acquis l'un & l'autre à-peu-près
dans le même temps, & qu'avant ce renverfement total 'de tous
les principes religieux & politiques, ils n'avaient vraifemblablement ni l'un ni l'autre, & étaient eux-mêmes enfevelis dans le cimetiere Paroiffial & commun. On ne voit
point en eIFet que dans les premiers fiecles de l'Eglife,
les cimetieres aient été en grand nombre; ils ,n'auroient
pu fe multiplier fous les Empereurs payens, fans être expo[és à des infultes & à des profanations continuelles, &
dans les fiecles qui fùivirent, l'on voit, foit les Supérieurs
Eccléfiaf!:iques, foit les MagiHrats civils, quoique remplis
encote de toute la ferveut d'une Religion nouvelle, &.
inf!:ruits par fes préceptes à refpeél:er les corps oe ceux
qui font morts dans fon fein, témoigner néanmoins pour
leur vue & pour leur voilinage, cette horreur. invincible
que la nature nous infpire,.& prendre contre les dangers
de ce voilinage des précautions trop multipliées, pour qu'ill
[oit poffible de dourèr :qu'il n'y avoit encore alôrs qu'un
cimetiere, uniql!le, fpacieux &' éloigné de l'habitation commune. Ce ne fut que quand l'ignorance & la barbarieeurent étolllFé jUfqu1allX notions les plus communes',! & fait
négliger' les précautions les 'plus !impIes & les plus l'agès~1
que la' vanité, la' fuperf!:iti6n aveugle,' folliciterenr. des lli[-~
tinél:ions que la· foibleffe ne fut 'point leur refu[er 1;" que'
1
. . '
l'intéret perfonnel leur vendit.
On commenca à vouloir .être enfeveli au miliè-u de fes
concitoyens, à 'l'entour des temples; il fallut dabord des
titres & des vertus pour obtenir cer honneur frivole:' &
funef!:e. Bientôt on n'eut plus befoin que de l'or pour'l'a:cheter. Enfin', après 'avoir long-temps frémi de le voir
accorder même aux plus grands hommes, parce qu'enfin
leur vertu ef!: toujours doureu[e, & qu'il ne l'ef!: pas' que
leurs corps répandent des exhalaifons, empoifonnées dans ·le'
lieu où ils font enfevelis, & rougi de le voir vendre aux..plu~:
indignes, les Paf!:eurs les plus fages & les plus éclairés
p'oférenr plus le refufer à perfonne; c'étoit une fervitude
.Anniçs l78l &
l78:l.~
--
-
E
�3+
JOUR NA L
barbare & fune!l:e que l'uhiverfalité des fideles avoit prercrit contre l'Eglife ; ce fut alors que les Eglifes des Réguliers furent appellées en quelque forte au fouldgement
& au fecours des Eglifes Paroiffiales. L'on ne veut pas
dire par-là, que les curés firent d'abord porter eux-mêmes
à ces Egl ifes les corps de quelques-uns de leurs paroiffiens; mais il paroît certain que le delir d'être enfevelis
dans les temples étant devenu une pallion générale, d'un
,côté les Curés durent voir fans reclamation, & même pour
ainli dire, avec plailir, ce qu'ils auroient regardé dans
tout, ~utre temps comme une enrreprife fur lellrs droits.,
& que de l'autre la crainte d'être exclus du temple commun par la foule des autres morts, dût porter plufie urS"
mourants à choifir leur fépulcure dans que)que temple
moins· fréquenté; on conçoit encore que les' premiers 'qui
furent enfevelis dans ces Eglifes, durent être . les Moines
pour qui elles n'éroient pas des .Eglifes étrangeres, fi
même ils ne commencerent pas à fe faire inhumer dans
leurs temples en même-temps que les autres fideles fe
firent enfevelir dan~ les Paroiffes•
. L'abus d'enfevelir dans les Eglifes une fois. toléré &
univerfel1ement établi, l'étabüffement d'un cimedere, iiltérjeur dut paroître une opération 'prudente & 1 fage. Le
moinqre de deux. grands maux eft en effet toujours à
préférer; on ne voit pas clairement par quelle conféquence les' Réguliers durent obtenir de leur côté, &' en
même-temps qlle les Paroiffes, des cimetieres intérieurs;
auffi peut-on avancer, fans crainte d'être déf1lenri par les
preuves, que. ce ne fut que long-temps aprèS', '1uê les
Réguliers obtinrent & polfédererrr de pareils cÎmelieres *
ce qui prouve rout à la fois, ~ que les inhumations hors
du lieu delliné à la fépulture commune avoient été plutôt perlt)i(es comre les Réguliers qu'en faveur des Réguliers, & pour le. foulagement de la- Paroiffe déjâ .(un:ha.rgée & p~vée de cadavres, pIutôt: qu'à, (on. préjudice, &.
de plus, que ces whumations. furent même d'abord rrèsrares.
�DU
PALAIS
DI!
3~
PROVENCI!;
Il ne fallut cependant pas long-temps aux Moines, pour
découvrir que fi ces inhumations, dans J'intérieur des rempies & des villes, pouvaient devenir funeHes aux habitans ,
elles étaient du-moins aél:uellement très-utiles à ceux qui
louaient à ces morts ambitieux leurs Eglifes ou leurs cloîtres, & affuraient un revenu conlidérable aux propriétaires;
auffi ils ne -tarderent pas à folliciter comme une faveur,
ce qu'on leur avait d'abord accordé par néceffité j & à ce
double titre, ils ne purent d'abord que l'obtenir" trèsfacilement. Mais l'effet réuni de tant de révolutions différentes ne peut jamais êrre d'établir une efpece de
droit commun & narurel, comparable ou même feulement relatif à celui des Paroiffes.
L'inhumation chez les Moines paroît avoir été un privilege accordé aux fideles, avant que d'être devenu un
droit des Moines. Dans ces premiers temps, il étoit moins
un droit honorable & utile, qu'une fervitude & une furcharge; & c'en à ce tirre que plulieurs d'entre les Ordres Religieux l'ont acquis ou prefcrir; c'ell: à ce titre
que les Paroiffes les ont vus d'abord fans regret" & fans
jaloulie, partager avec elles ces triHes fonél:ions, devenues depuis pour les uns un objet de fpéculation, un
principe d'aifance & de richeffe, & pour les aurres une
reffource néceffaire. Ce changement n'a pas dû rendre la
prétention des Réguliers plus favorable, ni faire étendre
leurs privileges ou leur poffeffion. A tirre de rétribution
& de bénéfice, les Curés ont & doivent en effet avoir
pour les convois funebres toute forte de préférence fUl'
les Moines; telle eH auffi la décifion des faims Canons,
& l'opinion des Auteurs les plus éclairés. Ce vœu uniforme eit abfolument exclufif de route efpece d'idée de
droit commun établi en faveur des Moines.
Tout ce qu'on peut réellement extraire du droit commun fur ce point, de plus favorable aux Ordres Religieux,
c~efi ~u'en cette qualiré ils fom capables de pofféder tIn
clmetlere; & que quand les Curés ont une fois confenti 1
E
2.
�~
.
JOURNAL-
ou exprelfément dans quelque aél:e ancien, ou tacitement
depuis une longue fuite d'années, qu'ils jouilfent du privilege d'avoir leur cimetiere particulier, ce privilege doit
être refpeél:é, fans qu'il puilfe cependant jamais être regardé
comme une .émanation du droit commun, puifqu'il doit
uniquement fon exifl:ence au titre ou à la polfeffion., ou
à l'autorité Epifcopale.
Mr. l'Avocat-Général difcuta enfuite, fi la .conceffion
-d'un cimetiere efl: un pur aél:e de Jurifdiél:ion gracieufe,
dépendant de la feule volonté de l'Evêque, & pour lequel
il n'a pas befoin de confulrer perfonne; & il obferva, que
les bornes pofées par nos loix & par nos libertés, enrre
la Jurifdiétion gracieufe & contentieufe, ne font poinr incertaines & changeantes; ce qui peut devenir- du relfort
de l'une, n'a jamais été du relfon de l'autre; fans quoi
il eft fenfible que par leur autorité & leur afcendant, les
Evêques étendroient fans celfe la premiere aux 'dépens de
la feconde. Ce n'efl: pas qu'on ne range parmi les objets
qui appartiennent à la Jllrifdiétion graciellfe , diverfes matieres fur lefqnelles l'Evêqne pent fe décider à {on gré,
& d'après lui feul; mais il eft tenu d'ouir diverfes parties, & il ne doit pas fe déterminer fur la feule fupplique du Demandeur; relies fonr les éreél:ions & feébonsde Bénéfices même Curiaux; & c'eft feulemenr en la rengeant dans cette derniere clatre, que la conceffion d'un
cimetiere pourroit être regardée comme une dépendance
de la Jurifdiél:ion' gracieufe, quoiqu'on ne la trouve pas
'nommée àu nombre des aél:es que tous les Auteurs Teconnoilfent en dépendre elfeétivement, .& quoiqu'il fût peutêtre plus exaét d'attribuer à la Jurifdiél:ion conrenrieufe
- tous les aétes de l'autorité Epifcopale qui font réel1ement
fufceptibles de concours & de contention.
Il eH .certain que, même dans plufieurs aél:es qui dépen·dent _indubitablement de la Jurifdiél:ion gracieufe, l'Evêque
ne peut fe décider légalement qu'après avoir oui routes
les Parties. inré.relfées. En effet, que deviendront les droits
,
�DU
P,ALAIS
DI!
PR,O':I!#C~;
'37
facrés & imprefcriptibles des Curés? Si l'Evêqûé' peut:, 'à
fon gré, où plutôt au gré de folliciteurs avides, a&orde~
& bénir chaque jour un nouveau cimetiere, où ,chaque
fidele aura la liberté de fe faire enfevélir, le Curé fera
réduit à un hommage flérile, à de vains honneurs; ou
plutôt, cous 'les devoirs onéreux & penibles de fon état
lui refl:eront; & quand il ne s'agira gue de ce qui eH purement honorifique ou fruétueux, les Moines envahiront tout
comme une proie affurée.
Les Curés de Sr. Martin & de St. 'Ferréol auroient
donc dû être appeIlés, à raifon de leur intérét: N'eH-ce
pas par cette raifon qu'o'n coofulte les -Curés', 'lorfcju'il
s'agit de divifer une' Cur,e trop étencluè'?·Encofe la, ·dimi
nution qu'ils fou/flelit dans ce 'fecoh~H cas' ,','efl-eIle'; d'u':
moins compenfée par la· diminution de leurs èharges &
de leurs travaux, & par conféquent plus jufle., & plus fupportable que le préjuaice gratuit Rüe leur porce .la' c.onl
ceffion d'un nouveau cimetiere. Il eŒ vra~ que- l'Evêque
efl lui-même lè' Curé univerfel de .fon Diocefu; de ma"
niere qu'il ne rient qu'à lui d'en exercer les fon'étions dàns'
chaque Paroiffe où il fe tranfporre, & d'éclipfer par fa préfence le Pafleur ordinaire; mais fan droit & fan autorité ne s'éténdent pas jufqu'à J poùvoir 'tranfmettreà un
aorre la plénitude, ou feulement uné partie de la JuriP
diCèion paflorale, à 'l'effet' que. ce 'Délégu.é pÙi@,riv,!lifer
avec un Pa fleur ordinaire, morceler' fa 'Paroiffe & parca-'
ger fes fonétions fans fon confentement & fans fon 'concours; & telle fut préciférnent la maxime qui fervit de
bafe au célebre Arrêt qui maintint' le Curé d'e Sr. Ferréol dans le droit. de baptifer les adultes qu'il auroit
inHruit, lorfque l'Evêque ne voudrait pas les baptifer luimême.
Le droit d'enfevelir efl une dépendance incontel1:able' dela Jurifdiétion ,curiâle; le droit d'av'oir un cimetiere elt un
droit attaché à la Paroiffe, & par conféquent au .Curé.'
Pourquoi ces deux' droits feroient-ils les feuls que l'Eveque:
�'3 8
. ' Jou RNA L
•
pût comtnuDlquer 11, d'autres, fans confulter le Pallellr ordin'l'ire? Ce n'ell pas ql:!e fon confentement foit indifpenfahIe ment nécdfaire; il peut [e trouvet des Curés trop avides
ou feulement trop jaloux de leurs droits qui le refufent injull:ement; il peut fe renco~trer .telle c~rconqance. o~ l'établiffement d'un nouveau / Clmetlere qUI deVIent Inç!JreÇiement un cimetie,e de fubilde, ell: un bien pour la Pa,oiffe
& pour le public; mais enfin il faut du,.moins entendre le
Palleur; il faut effayer de concilier fes droits, [on intérêt
avec l'utilité publiq\le, & n.1ême, il l'on veut, avec la
faveu, due q4elquefois aux Réguliers. '
La liberté des é~aions d~ fépuhure doit être favorifée;
c'ell-~-dire , que lorfqu',il dl; pien çertain ,qu'un. mouraflt a
préféré d'être i·nhutné d'lns tel cimetiere particulier, fa vo!enté doit l'el,"Oporçer fans contredit fur le droit du Curé;
mais voilà tout ce qu'on peut accorder à cette liberté ilnguli~re §€ "la prétendYe faveur qy'on lui, doit, n'ell: pas une
qif()n, fl,1ffifante de lui,fqurQir un plus gqnd. nombre d'ocçafion§ de l'exerçer, de ,l'li donner un 'plus grand nonlbre de
choix ~ faiçe', ~ien n'emp~c!Je dohc encere de ce côté
que. le Curé ne pl\ilfe & ne doive être entendu; tout prOUVe
mêl,"Oe Fju1ilAoiç r~tr~.;J fon droit primitif & impre(criptible
fu. leS fU!Jér,!illes, l'attejnte au moins indireél:e que cet
étapltffelTIent :PQ~,t~ à. fes ,d,oits & à fon cafue!, enfin le
facrifice, qu'i~I(~Q: obligé de fij.ire, & le !ilence même qu'il
dl forcé de gaçder, lorfqu'une fois l'établiffement ell confom!11é ; le cOIl[en.temllnt de l'Evêque, quoique Curé univerfel de. fon J)ioce[e, ne fupplée pas à celui du Curé,
parce que ~~il a 1" pli.nit\lde des droit$: & même des fonctions curiales, ,il n'en a pa.s pourtant la difpoiltion arbitraiçe , & qIJ'il ell. d'ailleurs ab(olument illégal que "la même
perfonne figure en même temps comme Juge & comme
repréfeotanr.
.
Les, Curés de la Cathédrale ont pu donner leur confentement e.n 1203 p.Que- l'établiffement d'un cimetiere dans
rin~érie.ur d~ la. milifôn' des 'l'rillitaires j mais ont ~ ils pu
�DU
PALAIS
DI!
PROVBNC!:~
3'1
obligèr également & par parité de raifon touS le~ dilférens Curés qui fe font enfuire parragés leur territoire ou
leur diftriél:? En confentanr à la conceffion d'un cimeriere ,
les Curés de la cathédrale ont'eu un motif; ils ont exigé
conditions & dédommagement; ils fe foDt fait payer en
un mot leur confentemenr; & li rous leurs fuceelfeurs·font
liés par le traité qu'ils ont fourait, ils peuvent auffi le
faire valoir & en recueillir le fruit; mais il n'en eft pas
de même des nouvelles Paroilfes qui fe font élevées dans
la valle étendue de lellr ancien difiriél:-; les Curés de ces
Paroilfes fouffrent de la rivalité - de-. cès Religieux, '& cependant rien ne les el1 dédommage" Quelle· jufl:ice y atiroÎtil eu de les obliger ainli d'avance, avant même qu'ils exit...
talfenr ,. de faire graruitement ·Ies, m'ême [aerifices doot les
Curés de ,la carhédrale ont eu foin de ·fe faire indemnilèr? J
- Les' Trinitàires ont én l'eùr f.iveJr 'un -ritre, expres, un
tir,re émané de Fauroriré épifcopa~e f -titre ilcqui~fèé &
fenri par !e'-Ctiré de la 'cathédrale lui:mèmé 1; mais ce firre'
J
peut":i1 êrré oppofé âux' Curés de Sr. Marrîn & de
Ferréol? pem-il les-' lier , puifqu'ils' nly' one- donné auéuné
forre de confenrelnent? D'ailleurs -l'aél:e· de 12°3 'donne'
un.cimeriere en·général,- fans expliquer fi ce eimetierb doië
être intérieur &: renfermé Idans l'e~ceinre 'duJ'Morla/le~e ,
ou extérieur & public. enfin la polfeffion a expliqué' fur
ce point le texre équivoque de l'aél:e; les Triniraires ri'ont
jamais polfédé qu'un eimetiere joignant leur mairon, renfermé dans l'ené-einte de leur c1oîtr(~'; par contequent on eU
fondé à croire & à· fourenir que tel était auffi le: cimetiere qu'ils, avoient demandé· & obtenu. Aujollrd'hùi c'efl:
un cimetiere extérieurl &. public que l'Evêque de Marfeille
leur a accordé; il leur a donc; plus donné que ce que là
conceffion. leur. accordoit. Un cimetiere exrérieur & public
a bierl plus Vair <de rivalifer IIvec le cimeriere paroiffial j
qu'un cimetiere obrcur & c'aché dans l'enceinte- du cloître,
donc la plus grande parrie des fideles peut même ignoret:
l'eXifience ~ tandis' que le cimetiere extétieur frappant fans
eonSr.
�40
.
' J 6 U 1l. N A L
celfe', le's' yeux de tOUt le monde, éveille le caprice &
avertir la fingularité de ceux qui ne cherchent qu'à fe difringuer des autres 'au moment même qui anéaÎltÏr routes
les djjHqél:ions.
L'Ordqnrl<iiJce de l'Evêque de MarCeille ne ble1fe pas
(e,ul~ll)en.t' l~ droir, des' Pafieurs., en' ce qu'elle prononce
{ur un.,,objer qui les intére1fe, fans qu'ils aient été entendu.s, jc5ç .~Ji. c~ qu'elle donne au privilege des Chanoines
réguliers d.e<la Triniré une extellfion préjudiciable à la Jurifdiéti:on . Pil!toraJe «i~s 1 Curé,s de ;So, Martil)'& de St. Ferréol' lI)a;is .~),\e ;peut:, encore, par les' conféquences riaturelles,'IIlu'elle]'doit avoir, blelfer Un 'jour ~a police' publique'
& iutérêlfer la tranguillit.é & la sûreté des' .citoyèIlS.
.
~ Lesr Chanoinesl Réguliers fuccédan:t à rous les_droits , à
tou,~es, le~ fo;n@:iR'ns ,des C\!rés, la dicence chrétienne 'les'
{qfce~a'" t;l1}lgr.éï~ro.l,lte. leur:humilité, ,à.revêtir çe .q\i'ils a'ppell~ns·lè~.gfpe!IJel1,~. (acerdotaûlf :' ils filY~OQt. bi~n' <!uJond'
çu.~œ!1:r qij'ils ',n<'lilfonti point C\lrés;, mais ~Is .auront la' J"",
tisfaéJ:jon d'en jO;U,er,publiquel1)e[lt le .rôle" & le peuple'.igno"l
rane..l~urs. d.ifpofi~ions()ntérieures, & ne jugeant jamais que
4:ap,rç,s rceçqui frappé fe~ Jens, les~met,tra dans fon,efprit
~(Il! pl\iC~<Cj\;ise!!!j qu:jl~'f~ fep,>nt cepen~i!~t,qpe r~mplacer,.J
< .1\1r. crJ-Ô.WCëfrGénéF l, PFl1fa..au ~emps ,pl,lll:#rieur./ll'Eqit de.
\l~7~,~,éti!blit Rl!~"I~lJ;,égiQ.ateur ,dan§,~'!~dit ge I776 n'a eu.
d~autre;9!-lt q4~ de pourvçirl~ la sûreté & à la fauté publique.;.
c'efi une' 'loi d,e police & de l>.ienfaifance; elle' n'a pas été
!1Jgefi;e aux. RéguJi~rs.; on .n'y trouvE! 'Roin,t la :profcriptiotli
générale! de t0ur(l~yr~~,privileges. ·Sô,n,;'- s;e le$ Cur.és qui,
r~nt de{tla-ndée'~ .tQp.rellye]) & dem_a:ndpieilt-i.lseri elfe~ à.J
cette époque leA~jç nouveau qu'ils Rr~teQdeJ1t:qu'el1e'leuli"
a donné?) Le préambule de cette Loi, l'enfemble de fes'
djfpofitj9n~ n;~. préfenre d'abord rjen' qui foi.r relatif à un
régle.Q1e,J;lt !lQtreAle~ Qur '.~.& les "RéguJiers'; qLlqui l'an~
nonce 'pofitiv~tp~9S, I,.(1 dr,Qir ·exÇ.lufif"d'_ênfevelir, ou. plutôt
l~ drC?~t ~excl\lfif,A1avoir.} ,un ·cimetiere ,~f~.roit peutrêtte aujourd'liui,oppr le~iCurés :elix-mêmes un droi~ nO.\:lveau, quoi..
,.~
..
qu'il
�DU
PAL AIS
DB
PRO VEN C B.
4t
qù'i1 ne fût" certainement qu'un recour affez naturel au droie
ancien & au premier état des cho(es. Mais ajllIi le droie
d'avoir un cimetiere extérieur n'eH pas moins nouveau pour
ceux qui ju(qu'à préfent n'ont eu qu'un cimetiere intérieur.
Si donc la concelIion de ce droit eH une con(équence néceffaire de la Loi de 1776, il s'enfuit aulIi néceffairemene
que cerre Loi a innové, qu'elle a voulu ajourer aux privileges des Réguliers. Rien ne prouve en effet qu'il ait voulu
anéantir les privileges des Moines; mais rien ne prouve
aulIi qu'il ait voulu diminuer ni affoiblir la Juri[diélion des
Curés. Si l'un ou l'autre ".de ces deux inconvéniens eH une
fuire néceffaire de l'exécution de la Loi, pourguoi préférer
le plus grave? pourquoi ne pas pench r en faveur de ceux
qui méritent réellement une fàveur plus grande à rai[on de
leur plus grande milité? Il eH poIIible que le Légiflareur
n'ait prévu 1 en la promulguant, ni l'une ni l'autre des deux
con(équences inévitables que Id Loi devait avoir; aIfèz
d'autres vues plus eIfentielles & plus intéreffantes devoient
l'occuper alors. Mais s'il faut en effet choifir pour lui, eHil po/Iible de choifir autrement qu'il n'eut choifi lui-même?
S'il faut prendre néceffairement oti fur les privileges des
Moines, ou [ur la J'lri[diélion & les droits des Curés, &
que la Loi de 1776 garde le filence (ur ceue alternative,
ce filence lui-même n'eH pas équivoque, & ne doit produire aucun embarras. Et comment pourrait-on juger qu'il
eH plus juHe d'étendre les privileges des Réguliers, que de
rendre au droit primitif & naturel des Curés une partie
de [on ancienne étendue?
Les Trinitaires ont bien fenci que Ii une fois on envifageoit la quefiion fous ce point de vue, coute la faveur
qu'ils peuvent mériter, fait comme Ordre Rédempteur, fait
comme Ordre Ho(pitalier même, ne pourrait jamais l'emporter (ur celle des Pafieurs des peuples.
Mr. l'Avocat-Général obferva en[uite que l'admilIion &
l'importance de ce premier moyen le di[pen[oit d'entrer
dans l'examen détaillé des trois autres, dont le fecond, qui
Années 1781 & 1782.
E
�42.
Jou RNA t··
ccmlifie en .ce que l'Evêque de Marfeille a rendu fans ouir
partie une Ordonnance porrant profit en faveur des Trinitaires, fe confond avec le premier, & 's'étahlit par les
mêmes raifonnemens; celui qui réfulte de ce que ce Prélat
a prononcé fur un fait poffeffoire, dénonce une entreprife
particuliere de la Jurifdiél:ion ecc1éfiafiique fur la civile.
II n'y a point eu contention fur notre demande (difent
les Trinitaires) parce que les Curés de St. Marrin & de
St. Ferréol qui l'auroient conteHée, n'ont point été ouis.
Aiofi (obCerva Mr. l'Avocat-Général) par une iingularité
r-évolrante & qui en décele tout de fuite la ,foibleffe & l'ab..
furdité , il réfulteroit du fyHême des Trinitaires, que pout
prévenir toute réc1amation fur un premier abus, & même
pour le faire difparoîrre, il ne ferait befoin que d'en commettre un fecond plus grave encore, & il dépendroit toujours de la Jurifdiél:ion ecc1éfiafiique de fe. conferver par
une ·mauvaife procédure la connoiffance des que fiions que
norre droir public, nos maximes & nos liberrés lui interdifent. On ne peut guere méconnoÎtre dans la quefiion
aél:uelle le véritable caraél:ere d'une quefiion poffeffoire. Les
Chanoines Réguliers de la Triniré, en demandant l'éta.
bliffement de leur nouveau cimetiere , .fe fondoient égaIement & fur une ancienne conceffion, & fur leur poffeffion immémoriale. Il s'agiffoit donc & d'interpréter ce
tirre antique, & de confiater la poffeffion de fix' fiec1es.
Qui n'apperçoit tout de fuite dans une pareille 'caufe ce
mêlange, cetCe confufion de .fait avec ,le droit qui rend le
Juge ecc1éfiafiique abfolument incompétent, & ,qui 'met les
parties d'ans la .néceffité 1Ie' recourir, au T ri:bunal .civil ?
Mr. JlAv-Ocat-Général 'paffa au.::quatrieme .moyen d'abus,
& 'It: 'régarda comme moins imp-artant. ,II 1 efi impoffible
(dit- il) de fotipçOllne'r.de fraude, l'eneur.dans laquelle
les C~anoine.s Réguliers de lia Triniré 'font tombés ·fur la
localité de leur cimetiere; ,il paroîtau .col1tr.aire qu'ils fe
font tronipés eux-"mêmëS for'ce,point, écomme le Curé de
t.>Ferréol s'ell:J<l~abora tron~pé.-a(JJIi & par la 'même.raifon,
�DU
PAL AIS
D l!
4< J
PRO VEN C E.
c'efl:-à-dire, parce qu'on ne connoiffoit pas d'une maniere
bien précife les limites de la Paroiffe St. Ferréol, ou la
dénomination exaél:e & les bornes du quartier fur lequel le
cimetiere efl: placé; la fraude feroit -plus aifée à foupçonner, li reconnoiffant la néceffité d'appeper le Curé, &
ayànr en effet appeIJé celui de St. Ferréol, on pou voit croire
qu'en déguifant le véritable emplacement de léur cimetiere,
les Chanoines Réguliers de la Trinité ont politiquement
cherché à diminuer le nombre de leurs Adverfaires; mais
dans le fyfl:ême qu'ils ont adopté, la prétendue ·fraude qu'on
lellr a reprochée ne leur fert abfolument de rien (il ferait
injufl:e de croire qu'ils l'ont commife volontairement :. ce
n'efl: pas qu'eIJe ne produife par eIJe-même, & indépen~
damment de l'intention des parties, un moyen particulier
d'abus dont les Trinitaires eux - mêmes -ont paru redouter·
le fuccès, quoiqu'ils affeél:affent la plus grande confiance
fur le moyen principal. Il en réfulte en effet évidemment
que le cimetiere efl: placé fur un difl:riél:, tandis que, la
permiffion de l'Evêque porte fur un autre. Et qu'on ne dife
pas que l'accédit du Délégué de l'Evêque, le rapport de
defcriprion & le verbal de bénédié1:ion ont couvert fuffifam_
ment cette erreur, parce qu'il confl:e par toutes ces piec s,
que l'Evêque a approuvé précifément le même local où le
cimetiere efl: réellement placé; il ne réfulte pas moins de
tomes ces pieces que l'Evêque a cru le placer d'Iris le difl:riél;;
de St. Ferréol, & l'on couvient aujourd'hui qu'il en enc1.avé:
dans celui de St. Martin..
. Mr. l'Avocat-Général condut à ce qu'il fût_dit y avo_~
abus dans l'Ordonn<lnce .de l'Evêque de Marfeille.
Arrêt du 7 Mai '178 l , prononcé par Ml'. le Préliden'c de
.Saint-Vincent, qui déclare y avoir abus, & condamne les;
Trinitaires <lUX dépens, PlaidaJl,t Mes•. Portalis, G.uieu. ~
Gaffier,
.'
,.~'
,
)
�44
JOURNAL
ARR Ê T
IV.
L'Huijfier peut-il demander [es vacations, malgré le falvit
mis au has de l'exploit?
"!'!
l'année. 177 8 , Jean-Anr~ine Billon, Bourgeois du
heu de SIgne, s'adreffa à Mes. Bernard', Charles
Roux & Louis Bertra.nd, Huiffiers en la Sénéchauffée de
Brignoles, qui faifoient bourfe commune, & les chargea
de faire des exécutions contre Bouet, du lieu de Signe:
en conféquence un premier exploit lui fut intimé le 1)
Juin 1778; il fut fuivi d'un exploit de commandement du
) Juillet fuivant; ces deux exploits furent remis à Billon
avec le folvit au bas; il fut fait auffi d'autres exploits pour
parvenir à la collocation fur les biens de Bouet, avec les
folvits.
Le 28 Avril J 780) ces Huiffiers fe pourvurent en concrainte contre Billon pardevanr le Lieurenant de Brignoles, pour la fomme de 84 liv. 7 f. 6 d. qui leur érait
encore due, déduél:ion faire des 72. liv. n~'iues en deux
diverfes fois. Sur la lignification des lettres de contrainte,
Billon forma oppolition, & répondit qu'il avait payé. L~
Lieutenant de Brignoles le débouta de fon op polition ,
& ordonna que les exécutions ièroient continuées. AppC;1
de la part de Billon.
'
On difbit pour lui, que, s'il vouloit invoquer la rigueur
• des regles, il pourroit oppofer aux Huiffiers la prefcriptian de lix mois. Chacun 'fait qu'à l'égard de diverfes perfonnes, comme Mercenaires, Artifans, Maîtres d'Ecole,
Chirurgiens, &c. la Loi les préfurne payés après i!x mois.
Cette prefcription n'eL! pas établie comme une peine
de la négligence du Créancier, mais fur une limple préfomprion de paiement. On penfe que des gens qui ont
E
/
�DU
PALAIS
DE
PRO VENCE.
4)
beCoin i:le leur falaire, ou de leur travail pour vivre, n'acreudeor pas long-temps à s'en faire payer, ou du-moins
à le demander. Il elt vrai qu'il n'y a aucune Loi qui limite le temps de l'aél:ion pour les falaires des Huiffiets;
mais, comme dit le Légillateur : Non poJfùnt omnes articuli figillatim, aut legi6us, aut fenatusconfultis comprehendi; fed cùm in ali'luâ cauJà (ententia eorum manifeJla eJl,
is qui Jurifdic1ioni prœefi, ad fimilia procedere, at'lue ita
jus dicere de6et. .Il n'y auroit donc aucun inconvénient
d'appliquer à des Huiffiers la regle qui a établi la pref-.
cription 'de llX mois.
-.
Tous les Auteurs, & notamment Pothier, difent qu'il y
a une autre· efpece de preCcription contre les Huiffiers,
qui réfulte de la rémiffion qu'ils oor faite de leurs exploits : il en réfu(te une préfomption de paiement. Billon·
ell: d'ailleurs nanti des quittances de fes créanciers; les
principes foor connus, folutione tollitur o61igatio, & la
quittance du créancier ell: la preuve la plus légale du paiemenr. On ne peut révoquer en doute un paiement qu'un
HuifIier arrell:e au bas de fon exploit lui avoir été fait:
ce folvit forme une preuve irréfragable fous deux rapports;
1°. comme donné par un homme public: 2°. comme l'ouvrage propre du créancier.
Au furplus, l'époufe de Billon offroit de jurer, 1°. que
dans Ces divers voyages à Brignoles, elle avoir toujours
donné de l'argent ou à Me. Roux, ou à Me Bertrand;
entr'autres, dans l'un des voyages, 21 liv. pour eux, & 18
liv. pour Me. Maquan; 2°. ql.o'elle n'avoit jamais reçu aucune le~tre de ces Huiffiers depuis le 22 Juillet 1778, &
filr-rout depuis l'exploit de mife en poifeffion, dans laquelle
ils lui demandaifent de l'argent... Rien de plus concluanr,
& qui aille plus direél:ement à détruire les allégations des
Huiffiers. En droit, le défendeur doit être renvoyé abfous,
quand le demandeur ne proflve pas fon aél:ion; il n'ell:
pas obligé de jurer, excepté, difent les Auteurs, dans le
(:as où la Loi l'exige pour la déchat;ge de fa confcience. Quand
�Jou
46
RN. A L
le différent ne peUt étre vuidé que par le -ferment de l'une
des ParrieS, bn l'adjuge préférablement au défe~deur. ~
parce qu'en le déférant au demandeur, on le conlbtuerOlt·
JuO'e en [a propre caufe ;. le ferment n'efL..,adjugé au dem~ndeur, que quand fa' demande n'é:ant p~s ple.inement
jullifiée, les indices & les préfomptlOn:s. refultantes d~s
preuves qu'il fournit; forment quelque dÇlute dans l'e[pnr
du Juge.
On répondait pour les Huiffiers, qu'il ell vrai que t'Ordonnance de 1667, tit. "" art. )' & le Réglement de
la Cour de 1678 , tit. 7, art. "'7, foumettent les Huiffiers'
de mettre au bas de l'original des exploits les fommes
reçues pour leurs falaires. Mais quel a été le principal
motif de cette forcnaliré? Les Commenrateurs de l'Ordonnance expliquent les principes de certe. légillation. Oeil
iD. afin que les Huiffiers n'exigent pas au-delà du juHe
[alaire; 2 0 • afin que le Juge pui!fe connaître s'ils ont trop.
exigé, & en ce cas en erdonner la reHi[Ution & les punir; ]0. afin que la parrie qui doit payer les dé-pens,
voie ce qu'il en a coûté pour les frais de l'exploit. Le
Légillateur a donc confidéré la taxe de l'Huiffier, & nllI•.
Jemene l'inrérér de la parrie qui empmnte [on miniHere•.
L'Ordonnance d,e .1667 & le Réglemene de la Courfont des Loix de Police relatives à l'exercice de cerce
partie de la Jullic,e; elles ,ont voulll garantir le public de
toute efpece d'incertitude dans les taxes; elles furveillent
la taxe des Huiffiers, mais elles n'one pas pefé les droits.
du citoyen pour lequel ils agi lfe nt. L'Huiffier qui met le
folvie , obéit uniquement aux Loix -, & leur rend par cetteattellation publique, un compte fidele de fan intégrité.
Sous, c:e rapp?r~. le. folvit n'e!l:. dqnc ,pas un témoignage.
aifure de la lJberation. Pour former cette libération il
fa~t d'ailleurs le concours 'de deux per[onnes, du débi:eurSUI paye, & du créancier qui reçoit.
La 9uittance concédée par un citoyen, le folvit déclaré par
u.u RLlI{J\er ~ ne formen.t véritablement la preuve du pa.iemen~_.
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i:jue quand le créancier ou l'Huiffier abando11nent cette
'quittance entre les mains de la partie intéreifée; Cet
·abandon volontaire confomrne fa libération. Mais la p.artie
-qui quittance dans [a maifon, l'Huiffier qui met le [olvit
dans [on bureau, n'eHèél:uent pas un quittus ou décha rge
·de l'obligation. Si ces pieces écrites font rem'ifes entre les
mains d'un tiers à titre de dépôt, ou par des caufes particulieres, la quittance n'dl: pas mieux elfeél:uée ; le paiement ne devient fiable & permanent, le clébiteur n'ell:
libéré de [es engagements que par la tradition réelle &
elfeél:ive de la quittance faite par le créancier au débiteur,
que par la remiffion libre & volontaire de l'exploit, avec
la déclaration du folvit confentie par l'Huiffier entre les
mains du plaideur. Donc une quiqance n'e!l: pas toujours
un argument' irréfi!l:ible en faveur de la libération.
Cela eH fi vrai, que nous voyons tous les jours attaquer & profcrire une quittance. A-t-elle été enlevée?, la
violence e!l: un .moyen d'exception. A-t-elle été furprifé ?
le dol e!l: encore une exception. Ell:-elle faulfe? le faux
ell: auffi un moyen d'annullation. La' quittance n'efi véri.
tablement inexpugnable que quand elle ell: tranfmife avec
liberté & avec fincérité par le. créancier au débiteur.
. Le dol ell: une exception. contraire à la libér.ation. 11
ell: dans la c1affe de ces moyens ex'traordinairés .que le
tiroit. indique. contre la mife du folvit. Ici les exploits
revêtus des folvits ont été dépofités par un ufage local,
non pas 'à la Partie, mais aux e!l:imateurs: Billon a. violé
ce _dépôt facré; cette violation ell: un dol caraél:érifé, qt.iÎ
attaque la fubll:ance même des quittances, & en détruit la
"Validité apparente; dès-lors il ne faut plus confidérer que
la qualité des cirçonll:ances, & voir fi Billon a commis
réellement un dol.
Par un ufage. obfervé dans l'artondiffement de la Séné'chauffée de Brignoles, .les IHuiffiers font tOllS lies a8:es
-du Procès exécutorial, qu'ils remettent avec les folvits au
ba~ aux e!l:imateurs chargés de la collocation i & apr~
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JOURNAL
la collocation ils retirent les aél-es, & dreffent le rôle de leur$
vacations, qui ell: acquitté par le créancier mis en po/feflion. Cet ufage a été attefié ratione cfficii par le Greffier
de l'écritoire de la Communauté de Brignoles, & par 'les
Procureurs de la Sénéchau/fée.
Les Parties doivent être jugées fur l'exifience de cet
ufaO'e, qui paroît fondé ea raifon & en jufiice. L'Huiffier
qut efi chargé de la direél-ion du Procès exécutorial, devient le principal agent de la procédure, & rient la place
du MagiJler litis; il fait tous les exploits & toures les
lignifications néceffaires; il n'abandonne rous ces titres,
fur-rout lorfqu'il. n'a pas été acquitté en totalité de [es
vacations, qu'au moment où il faut dre/fer le tdbleau de
la liquidation de la créance, & procéder à la collocation
du créancier. Dans ce moment l'HuiHier fe deffaifit, par
néceffité, de ces pieces, & les remet aux Experts que
la Loi & leur minifiere réputent honnêtes. Pour rendre
l'opération de la liquidation plus facile, moins compliquée, le folvit eIl: mis au bas de chaque exploit, comme
une note légale de fon coût. La liquidation efi-elle faite?
le rapport de collocation dl-il achevé? "l'opération des
Experts eil:-elle complette? l'Huiffier reprend fes fonél-ions,
ces' pieces; reçoit -le rapport de collocation; met en paffeffion du bien faifi le créancier colloqué; dreffe le rôle
de fes vacations. Le compte n'eH pay que lorfque le
Procès exécurorial ell: fini.
Cette maniere de procéder efi très-rage. Elle tend tout
à la fois à la fûreté de la procédure, à l'avantage du
créancier, & 11 la facilité des opérations expérimentales.
Mais elle efi en quelque fone néceffaire, routes les fois
<jue l'Huiffier n'eil: pas payé' de chaque aél-e à fur & à
me[ure de fan intimation, ou qu'il eil: obligé de faire des
avances. Ces pieces [ont l"s titres de fa créanc.e & les
garants de [a [Llreté perfonnelle. S'il met les [olvits au
bas de chaque exploit, c'eil: un hommage Couvent involontaire, que l'habitude lui fait rendre aux Loix. Cette opération,
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49
ration, qu'un ufage fréquent rend familiere, ne jGfiifie en
aucune forte le paiement, puifqu'elle n'a ici d'autre motif que celui d'éclairer les efl:imateurs fur la liquidation
à laquelle ils font commis. C'eU pour .cet objet que les
pieces quittancées leur font remifes. Cette confiance eil:
celle de la loi & de l'honnêteté publique. Il ell: fans exemple qutün en air abufé.
Arrêt du 2~ Mai 1781, au rapport de Mr. le ConfeiI1er d'André, qui déboute les Huiffiers de leur demande,
en jurant par l'époufe de Billon, que dans les voyages par
elle faits à Signe, elle avait donüé en diverfes fois de
l'argent à Roux ou à Bertrand; les Huiffiers furent con':'
damnés aux dépens. Ecrivant Mes. Bremond & Alpheran.
ARR Ê T
V.
Le Prieuré de la Cf/le efl-il mafculin ou féminin?
Le Cartulaire de St. Viélor fait-il foi en J,iflice?
..
Les difPc!fitions des Arrêts, Jugements & Contrats, doiventelles être entendues dans tous les cas, ou rebus fic extantibus ?
AR Sentence du 8 Juillet 1746, rendue par l'Official
de Marfeille Délégué par le Pape, le Prieuré des
Sres. Perpétue & Félicité, du lieu de la Celle, fut uni 7
avec le confenrement du fieur Abbé le Blanc Titulaire,
au Chapitre de l'Eglife infigne & nohle Collégiale Sr.
Vittor de la ville de Marfeille, pour les revenus du
Prieuré, eft-il porté par la Senrence, être employis à la
dotation & formation du has-c~œur de la nouvelle Collégiale St. Vic7or, prifirahlement à toute autre deJlination,
en conformité des Bulles & Arrêts du Conftil y dénommés.
Cette Sentence, enfemhle les Bulles & Arrêts du COD j
Annùs 1781 &. 1782,.
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1èil, en 'vertu defquels la procédure d'union avoit été faite,
furent, fuivis de Lettres-patentes du mois de Juillet 175 l ,
~nrégi(hées par la Cour.
• Après la mort ,du fieur Abbé le ,,Blanc, les Dames
[lrie.ure & Religieufes du Monafiere réformé de la Celle,
.transferé ·en la ville d' ~ix, leverent en Chancellerie le IJ
Mai 1757, des lettres d'appel comme d'abus du .décret
d'union de l'Official de Marfeille du 8 Juillet 1746, &
de la fulmination qui en avait été faite, ainli que de la
fulmination & exécution de toutes Bulles qui pourraient
~tre oppofées, enfemble des provilions de feu Meffire
lofeph le Blanc, & des autres Religieux ou Commendataites qualifiés Prieurs du Prieuré de la Celle, & de
toutes - Ordonnances, fulminations, Bulles, refcrits, provifions , collations concernant ce prétendu Prieuré, avec
daufe de refiitution, en tant que de be[oin ferait, envers
tous aél:es & tranfaél:ions que le Chapitre pourroit leur
oppofer.
. Le 19 Janvier 1759, les Damès de la Celle préfenterent une Requête incidente, par laquelle elles demanderent d'être re<;ues oppofantes envers'l'Arrêt d'enrégifire- '
ment des Lenres-parentes adreffées à la Cour, en exécution de l'Arrêt du Confeil du 7 Novembre 1745, au
çhef où l'Arrêt du Confeil ordonne l'union du Prieuré des
Stes. Perpétue & Félicite du lieu de la Celle, & qu'à cet
elFet l'Arrêt d'enrégiHremem feroit & demeureroit révoqué
audit chef & comme non-avenu.
Les parnes Religieufes fo'ndoiem leur appel comme d:a-bus fur cette .propofition : il n"y a jamais eu il la -Celle
iJu'un feul Prieuré' conventuel, dont la conventualité a toujours 'ùé formée par la Communauté des Religieufes de la
Celle, & c'efl ce' Prieuré -tonverltuel féminin qui a été
f,mique titre des prétendus Prieurés de la Celle & de l'Ul1ion
attaquée; ce qui rend,; ajoutoient-elles, -l'union nulle au
fonds, parce que ce ~rieuré ùant jé:ninin , n'étoit pas fùfceptiMe d'union a un Cha-pitre d'hommes, & en la forme,
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PRO VEN C E.
en ce que l'union ne pouvoit pas être faite (ans qu'elles
fuj/ènt appel/ées & entendues.
Le Chapitre répondait que le Prieuré de la Celle était
& avoir roujours été' un Bénéfice mafculin. originairement dépendant du '\1onafiere Sr. Viélor; que Ct: Prieuré
éroit conventuel & attaché à une communduré de Moi-'
nes y réiidans long-temps avant l'établi(fement des Religieufes à la Celle; que ces Religieufes confondent le
Prieuré & le MonaHere, qui fom deux êrres diHinéls &
féparés j que routes ces queHions ont été jugées par l'Arrêt du 8 Avril 170~ , intervenu entre les Religieufes &
le Prieur, & que la poffeffion paifible, depuis plus de huit
fiedes que le Chapitre avait de ce Prieuré, formait un
titre contre lequel les Dames de la Celle tenroient inutilement de s'élever.
Plufieurs pieces éroient produites de part & d'autre
pour autorifer ces fyHêmes; & les défenfes refpeélives
roulaient réciproquement fur deux points; la. interpréter
chacune de fes pieces ; 2 0 • combattre celles produites par
la Partie adverfe.
Le Chapitre faifoit remonter fon établlffement à la Celle
dès le 17 des Kalendes d'Avril de l:an 1000. Josfredus
& fa femme Scotia, avaient donné au MonaHere Sr.'
Viélor l'Eglife de Ste. Marie, dans la vallée de Camps, qui
faifoit partie du terroir de Brignoles, & ce qu'ils poffé":'
doient dans certe vallée par une autre donation de l'an
101 r. Guido & fa femme Gualdrada donnerent aux Moines de Sr. Viélor la part qu'ils poffédoient de la. vallée
d'Avolenna 1o, qui forme aujourd'hui le lieu de la Celle,
& qui faifoit alors parcie du terroir de Brignoles, ainû·
que leur portion de l'Eglife de Ste. Perpétue, qui était
dans ladite vallée. Facimus donationem omnipotenti domino,
& [anao Vic10ri [UO martyri, ejuflJue Monaflerio haud procul Il civitate Maffilia fundato, & AMati/JUS ac Monachis
1!erpetuà in i6i militantihus, de alode noflro fJuem hahemus.
ln comitatu Ilquenft intra '"minas de 'Villa quit 'IiocatuJ;
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Bruniola, id efl, EccleJiam fjuœ fundata eJl in honore Dei
fanaœ que Perpetuœ in valle'fjuœ voeatur Avolenna'{o, cum campis & illCultis, vinâs, pratis, eultis pafcuis , jilvis, garricis,
aquis, afjuarumve decurcihus....:. fjuantum intra terminos iflos
nahemus jine ullâ diminutione donamus fupra dic10 Monafterio.
Dans la même année Ingilran, Evêque de Cavaillon,
donna, conjoinremel)t avec fa femme Adalguda, la part
qu'il poifédoit de la même vallée d'Avolennazo, & la
même Eglife de Ste. Perpétue.
En l'an 1016, Nevelong & fa femme Tevcennia donnerenr égalem~nr l'Eglife Ste. Perpétue, & ce qu'ils poffédent dans la même vallée. Ces deux derniers aél:es font
con<;us en rout dans les mêmes termes que celui de Guiguo, à la feule différence du nom des donateurs.
Une autre dona-tion fans date, faite par Pomius, fils
de Rainaldus, confirme & donne de nouveau ce qu~fon
pere avoit donné au Monafiere St. Viél:or " videlico:t ea,
tj,!œ jùnt in territorio Eec/ejiœ fanc1..e Perpetuœ. Ces quatre
dernieres donations prouvent que l'Eglife Ste. Perpétue,
qui forme le citre du prieuré done il s'agit, a été donnée aux Moines de Sr. Viétor, fans aucune menrion des
Religieufes qui n'exi{i:oient pas alors. En 1030, Rainaldus
& fes enfanes Ponrius & Nevelongus donnerent aux Moines'
de St. Viélor deux mas & leurs dépendances dans la vallée
de Gareoult, & la partie qu'ils aV'lienr de l'EO'life de Ste.
Marie. En 1°36, Fulco leur donna ce qu'il a~oit recu de
l'héritage de fes pere dans la même vallée. Le 8' des
Kalendes de Juin 1°42-, ,Guido" Els de Truan, & fes
Freres Heldeberr & Hugon, firent donation au même
Monallere de St. Viél:Qr, (j'un héritage à eux obvenu du
chef de leur pere dans la terre de Gareoult. Enfin en
1 °5 6 , Arnulfus & fa femme donnerenr encore aux Moines de St. Viél:or deux mas dans la 'mê'me terre.
Les titres concern'anr 'Ca ha ife' foor au nombre de deux.
1q}6 par Aicardus & fon
D'al?or,d une ponariàn faite
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. frere Josfredus au Monafl:ere de St. Viaor, de la troi!ieme partie de cette terre, & de la Paroilfe qui leur
était obvenue du chef de leur mere, fous la réferve de
l'ufufruit pendant leur vie. Le_ fecond eH un te!bment de
l'an 1069, par lequel Pons, fils de Guilleaume, Vicomte
de Marfeille, legue aux Moines de St. Viaor cette même
terre de Cabalfe.
Enfin, en l'an 10')6 Gosfredus de Riannis & plulieurs autres particuliers donnerenr au même MonaHere
l'Eglife de St. Jean, dans le terroir de Brignoles, & différents biens fitués dans le difl:ria de cette Egfife. Et en
106') Villelmus & fon frere Ponrius lui donnerent encore
la terre de la Gayole & l'Eglife de St. Benoît.
Tels font les aaes tranflatifs de propriété en faveur du
MonaHere de St. Viaor, de différents biens qui formerem dans la fuite trois Prieurés; celui de la Cene, celui
de Gareoult & celui de Cabalfe; ces deux derniers font
aujourd'hui entre les mains des Religi~u[es; celui de la
Celle fait la matiere du procès.
Aux aaes tranflatifs de propriété le Chapitre joignit
des aétes de confirmation. L'ancien MonaHere avoit envoyé des Moines pour régir & faire valoir les biens qui
lui avoient été donnés.
En l'année l07i, les enfants de Gualdus, petits-fils d'Ingilrao. voulurent troubler le MonaHere de St. Viaor. dans
fa polfdIion. Bernard, Abbé de ce Monafl:ere, exhiba la
doniltion d'Ingilran; [es petits-fils la contefl:erent. Les
Moines prodnifirent alors une autre donation faite par
Geraldus, fils d'Ingilran & leur pere; ils produifirent enèore les témoins de'· cette .donation qui étaient vil'ants; &
wmme les petits-fils ne Ce· rendoient pas à ces pr lives,
Exclamaverunt omnes l'iri honi & feniores qui aderant, quia
peccatum thefaurifabant Jibi prœdic1i filii Geraldi, quia dey
truebant ele.:m jinam patris fùi & avi fui. En conféquenc'
il fut tran!igé le 4 des Nones de Juillet 1074, & il fut
convenu que les p~tits-fils d'Ingilran auroient la jouilfance.
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de ce que leur aïeul avoir donné à Sr. Viél:or, avec droit
de rerour au Monall:ere dans le cas où ils décéderoient
fans enfants. Mais après la morr de Bernard les petirs-fils
d'Ingilran déclarerenr fe non confultè ftcijfe, quia pueri effint ;
& moyennant· l 'î 0 fols malguires, qui leur furent cO!r'prés
par le Monafiere de Sr. Viél:or, ils approuverenr & confirme rem la donation faire par leur aïeul. Cer aél:e fut
paffé in· Cellâ qua: vocatur ad fanc1am Perpeturrm > ce qui
prouve qu'il y avoir alors des Moines à la Celle; parce
que fuivant Ducange, au mor Cella, ifl:a vox ufurpatur
pro Monachorum domicilia, pro plo Monaflerio; & c'eH
. ce nom de Cella qui lui a fair (lerdre celui d'Avolennajo,
. que ce lieu avoir lors des donarions.
JUne femblable conteilarion formée par les perirs-fils
de Guilleaume, Vicomte de Marfeille, au fujer du legs
de la terre de Cabaffe, qui avoir éré fair au MonaHere
Sr. Viél:or par Pons, fils' de Guilleaume, donna lieu à un
jugement folem!lel rendu par Raymond Berenger en 1 l'i3 :
il ordonna que les enfants de Pons rendroient au Monaftere de Sr. Viél:or quidquid Willelmus de Maffiliâ & uxor
ejus in 1;illa feu in territorio de Ca6acia detine6ant, & invefth'il eos; & in perpetuum in pace Jine aliquâ contradic1ione
ha6ere ac pollzdere. Monachos prœcepit. Il n'éroir pas encore
quefiion de Religieufes à la Celle; ce n'eH que quelquetemps après qu'on voir leur érabliffement. Il faur joindre
. à ces différents tirres deux autres qui fonr énonciarifs. de
la propriéré de tous ces biens en faveur du Monailere
de Sr. Viél:or. Ce fonr deux Bulles, l'une de Gregoire VII,
expédiée en l'an 1079, & l'autre de Pafcal II, de l'an
1114"; ces Bulles renferment la confirmat'ion des privileges' & des poffdlions du Monaltere Sr. Viél:or, & dans
l'én~mération. qui ~ e~ faite des différents Mona!l:eres,
Egbfes & bIens qUI .IUl apparrenoient, on y trouve dans
la premiere, au diocefe d'Aix, Cellam Sanc1œ Mariœ (}
(}. S.ana~ Perpe?ûœ; dans lè diocde de Toulon, Cellam
Sanc7re ]Harùe de Gare/do, & dans celui de Fréjus, Eccle~
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{zam de Cahaeîa. Dans la feconde on trouve dans le dioce!e
d'Aix, Cel/am Sanaœ Perpetua!, Parochialem Ecclejiam de
Brignolla, Ecclejiam Sanc7i Joannis, Sanaœ Marite· de
Camps, Sanate Marite de Gare/do, & Sanc7i Medardi ;
& dans le diocefe de Fréjus, EccleJiam P4rochialem Sanaœ
Marite de CahajJà.
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Ces Bulles, fuffiroient au befoin pour p,rouver que toùs
les biens qui forment la dotation de ce Prieuré apparte,..
noient au Monallere St. Viétor, fuivant la regle de' dro'Ît
que in antiquis enuneîativa prohant. Mais la preuve efl:
complette . au moyen de tous les titres qu'on vient de
rapporter. Il en réfulte que taus les biens ont été donnés
li St. Viétor. Il convient li préfent de voir comment' ces
biens fe font formés ou ont formé un Prieuré, parce que
la feule donation des biens ne forme. pas 'un titre de bénéfice. Les revenus ne font J que l'acce1foire du bénéfice;
le titre ell purement fpirituel. .
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Les Auteurs attellent que quànd les Monafl:eres,. furtout ceux de l'Ordre de St.. Benoit, recevoient dé la li·bé,ralité des fideles, des bi~ns répandus .dan!>. des Provinces éloignées, ils envoyaient un Religieux. dans ces domaines pour avoir foin de la .culture des terres & envoyer
les fruits li l'Abbaye. Ce Religieux ét.oit. toujours révocable à l'ordre de fon Supérieur. Dans la fuite on. crut
qu'il érait néce1faire d'a1focier un ou deux Religieux à
celui qui avoit été envoyé d'abord, afin que l'efprit de
la regle fùe plus aifémenr confervé entre ,ces Religieux;
il Y en .avoit un ,qui avoit,' la .principale autorité., & qui
par cette caifon ét6it appellé Prior ou Pr:œpofitus. Mais ce
n'éraient toujours que des commiffions. amovibles' que
l'Abbé révoquoit quand il le jugeoit à propos. Ces petits
Monalleres furent appellés d'abord grangiœ, Cel/te, parce
qu'én ,effet ce n'étaient que des ferm~s .que· quelques Religieux.Ja.ifoienr valo.ir. Dans la fuite ces. commiffions t'oujot.:rs révocables devinrent. des titres perpétuels par l'id"
dépendance dans laquelle l'éloignement tenoit les Moines
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de lèur Monaftere. C'eft ainu que fe font formés les Prieurés
conventuels, les Prieurés - Cures, & ceux qu'on appelle
Prieurés umples.
Mais quand le Prieuré de la Celle fe feroit formé de
cene manierè , les Religieufes ne pourroient pas s'en plaindre, parce qu'étant prouvé que les biens appartenoient au
MonaUere St. 'Victor, ç'auroit été fur ce Monaf1:ere que les
Prieurs auroient ufurpé, & non fur celui des Religieufes qui n'y
avoient aucun droit, & qui même n'exiftoient pas encore.
On connoÎt une autre maniere ,d'ériger un Bénéfice; c'eft
un -décret de l'Evêque, ou de l'Abbé., ou du Monaftere
dom .eI~ dépendant le Bénéfice qu'on veut ériger, ou trois
coJlarions conCécurives qui fuppofenr ce décret. Ici on n'a
pas, il eft vrai, ce décret d'érection; rnais il fallt néceffairement'que ce décret ait été (ait par le Monaftere ou l'Abbé
de),Sr. Victor i _puifqu'on vqit un Prieur conventuel de la
Celle exiftant dès le onzieme uecle. C'eU ce que l-apporre
Zurùa, Auteur 'Efpagnol , qui ~ écrit· de rehus arr~goll. &
<lbnt les annales font eftimées. Il dit qu'en l'année 1°96
l'Eglife d'Huefca fut confacrée par plulieurs Prélars, & par
..Richard, Abbé de St. Victor près de Marfeille, affiné des
'Prieurs .éonvenruels _de, Ste. Perpetue & de' St: Geniés :
cu'm eo Fr{orihus ronventualihus Sanaa!. Perpetua!.
Salle?;
-Gelldii ajfzflentibus. JI y, avoit donc en 1°96 une Communauté, dê Religieux à, la Celle, puîfqu'ir y avait un Prieur
convenruel.
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C'eH d'après cetre autorité, que les favans Auteurs du
Gal/ia ,ChriJlianu ont avancé qu'il y ayoir à la Celle <les
Moines. Voic,i ce qu'ils difent en parlant de ce Prieuré:
Hanc; Cell.lm Sane?;' Viaoris Monachis incolendam traditam
Ahh,ueseeleherrimi klljus Monajlerii per Priores ftu Pr.zpoJitos 'rexerul)1, meminitque ZlIrita cujllfdam Prioris de Cel/a
'lui ,adfu.it anno. 1O.9~ dedicationr Ecclejiœ de Huefca. Ces
AutetJrs donnent enfuire la lifl:e des Prieurs, ell commençant ~!lr celui dom; il \'ieàr d'être tait memion. Ils prouvent
l'e.\i!lence de chacun d'eux par les dilfétens actes qu'ils ci-
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te
tent. Leur chro'nologie arrive' à ceux dorn
Cha~itre <t
communiqué les provifions ; ainfi il eO: hors de doure que
depuis le onzieme fiecle jufques au Geur Abbé le Blanc,
il Y a eu une fuire non inrerrompue de Prieurs rirulaires
de la Celle. D'où ré fuite la preuve de ~'exifl:ence d'une
Communauré de Moines anrérieuremenr à l'établiffement
des Religieufes; de cetre exiHence réfulre la preu.ve de la·
poffeffion par les Moines auffi antérieure à l'exiHence des
Religieufes ; & de la conrinuité des Prieurs réfulre la (on-.
rin\lïré de la poffeffion.
\
En vain tenreroit-on de critiquer ces"pïeces'& ,d'en îufpeéler l'aurhenricité, [ur le fondemenr que la plupart· d'èn--:
ir'elles fone,.extraites du cartulaire de St. Vi&or, e difant
que ce carrulaire 'n'à aucune aurhenritité par Iu-i-mémef ;
parce qu'il ne fe trouve pas dans un lieu ,public defl:iné, à
[crvir de dépôt à des chartes aurhentiques, & commis à,.
la garde d'un Officier public député à. cet effer , fuivant la.
Doélrine de Dumoulin fur la' courume de Pa6s, tir.
§. 8, va. dénombrement, n. 2.) in fine, & que ces cartulaire's
ne méfirenr aucune créance,. comme on peu.r le voir dans
le chap. 6 extra de fide infirum. Cette objeélion manqueTOit p:u le droit & par le fair. En dro·i" ce feroit aera-.
quel' de front tous les Hilloriens, tous. les Aureurs qui
ont écrit pour expliquer les anciens documens & les Arrêrs
de la Cour.. Ruffi, Bouche, Ml'. de Gaufridi, Pinon,
l'Hiltorien de la ville de Marfeille, celui de [es Evêques,.
. s'autorifenr à chaque page du cai-rulaire de Sr. Viélor. Les
Auteurs du Gallia C1zrifliana- fondenr auffi fur ce carrulaire·
leurs principales. preuves. Ducange en fon gloifaire le cite
auffi. Combien d'Arrêts ont pour fondemenr les pieces
exrraires èe ce cartulaire, enrr'aurres celui du Parlement
de Dauphiné conne le fleur de Puilobier; celui de· ce Par·
lemen.r conrre Ml'. de Bouraffy Marquis de Châreaularc ';.
celui coorre le Seigneur de Bru.e ,. & pluGeu!s autres.
En regardanr ce carrulaire com.me les livres terriers des;,
Seigneurs auxquels les Religieufes l'ont affimilé" on trouve
l,
Anné.c.s. z]8z & z 78:l,~
H
�.s8
Jou RNA L
dans Dumoulin loc. cit. n. 2 l , que ces livres font foi,
même contre le tiers : 'luando illi lihri Jullt. anti'lui & 01'dinatâ ferie confcripti; encore doit-on ob[erver que les ReI;gieufes de la Celle qui étaient fous la dépendance du Monafl:éFe de St. Viél:or, ne doivent pas être regardées comme -des 'tiers à l'égard de ce Monafl:ere, & que le cartulaire efl: pour ainli dire à leur égard un livre domefl:ique.
. Barbofa en [on Commentaire fur les Décrétales, rit. de
fide inJlrum. obferve 'luod chronicis anci'luis, 'luihus à majorihus noflris fides communiter adhihita dl, credere deheniuS'. Les archives de St. Viél:or font dans ce cas, puifque
tous 1es Hiftoriens y ont ajouté foi•
• De', Cardinal de Luca en fon Traité de iudieiis, difcurf.
2.8, Ii. 2.2, obferve que Junt 'luœdam archivia Monafleriorum, 'll!œ ratione anu'luitntis ac pr.nhatœ fidei & di/igentis
cuflodiœ puhfica l'eputantur. Il cire pour exemple célebre
Arf:hivium CaJ/inenfe cum /imilihus. Certainement le Monafrere de Sr. Viél:or mérite bien d'être affimilé à celui du
Mone Caffin.
Enfin Boerius, décif. lOS, décide en termes exprès, que
lihri 'lui repaiuntur in archivis Eechjiœ, faeiunt de conJuewdine fidem. Pel' textum in cap. ad audientiam {; ill autentica ad hoc, Cod. de jide in/Imm. nec de conjùetudùze 6- }li/o
Franciœ' re'luiritul' 'luod archiviis prœ(it aliquis Ojfieiarius vel
Notarius puhficus , 'luando extrac7um fuit auc70ritate Judieis,
veZ litterarum regiarum, parte 'I!oemit.
En fait, le Chapitre ne produit pas les extrairs de fon
carrulaire pour acquérir de nouveau, mais feulement pour
fe conferver dans la poifeffion qu'il a. Er l'on [ait la différence qu'il y a eorre ces deux cas; quand il s'aait de dépo~iller un ~ier~,.il -faut un titre eXPTès & a~thentique.
MaiS quand JI s agit de fe conferver en une poifdIion ancienne, l'on efl: moins rigoureux fUr le titre qui ne ferc
r
fi
,,
aI or~ qu( po_u~ xer I.epoq.ue de la poifeffion, qui efi préfl;lm~e s y referer, :fuh·antla regle ad primordium titulurn
omms fot:matur e~entus.
�DU
PALAIS
DE
PROVENCl!.
59
En fait encore, le Chapitre produit en original 1°. la
donation de Nevelongus & de fa femme Teucennia de l'an
10,6 , par l-aqu Ile ils donnent au MonaHere St. Villor
la Vallée da Volenn:ljo, & l'Eglife de Ste. Perpetue; 2°. fa
tranfallion de 1°74 paffée avec les petits-fils d'Ingi!ran.,·
ce qui confirme & prouve la vérité de la donarion fajre
par ce même Ingilran de l'an 101 1; 3°. la çharre de Raymond Berenger de l'an 1 l 53, qui confirme les Moines de
Sr. Villor dans la polfeffion du legs qui leur avoit éré fait
par Pons fils de Guillaume, Vicomre de Marfeille, d'o~
ré fuite la vérité du teHament qui renferme ce legs. Enfi!1
le Chapiue produit en original les r \llles de Gregoire VU.
de l'an I079, & de Pafcal II. de l'an II 14, qui prouvent qu'à
ces époques le Monaftere de Sr. Villor polfédoit tous les
biens & toutes les Eglifes qui fOfmoient les Prieurés de
la Celle, Cabaffe & Gareoult, & qui fom l'objet des do-nations dont les originaux font perdus, mais qui fe trouvent dans le cartulaire. Toutes ces pieces fane antérieures
à l'établiffemene des Religieufes. Ainfi elles confirment les
pieces extraites du cartulaire, & elles détrllifent tous les
raifonnemens que font les Religiellfes pour en détruire la
foi, ce qui les rend authentiques en droit & en fair.
Après avoir ainfi établi l'état du Prieuré de la Celle, le
Chapirre palfe à l'état du MonaUere des Religiellfes. Elles
répetene fans celfe que le Prieuré a été érigé pour elles:
mais où eU le titre de leur fondation? Pourquoi ne pas le
produire? Si elles ne l'ont pas, quel eU le fondement de
cette affertion? Ont - elles comme le Chapitre les provi":
fions des Prieures qui ont rempli ce prétendu Bénéfice.?
Elles n'en produifent aucune; cependant il en e!l: des Bénéfices féminins comme des mafculins; il faut ou un décret d'érellion, ou trois collations qui fuppofent ce décrer.
Or, fi les Religieufes ne produifenr ni l'un ni les aurres,
comment peuvent-elles juUifier l'affertion que le Prieuré
a été érigé pour elles? D'ailleurs eU-il vraifemblable qùè
pour ériger ce Prieuré, on eût dépouillé les Moines d'e
H2
�,60
Jou
RNA L
Sr. Viél:or des biens qui leur apparrenoient depuis plus d'un
fiecle? & c'ef!: ce qu'il faudroir fuppofer, puifqu'il ef!: déja
prouvé. que tous les biens avoient ~ré donnés aux Moinc;s
de. Sr. Viél:or long temps avant l'etabldfement des Rel,gieufes.
. Le Chapitre fixe l'époque de l'établiffement des Reli'gieufes à la Celle après la charte de Raymond Berenger
de 11)3' Dans certe charre il n'ef!: pas fait mention des
,Religieufes, & cependanr il ef!: f!:amé fur la terre de Ca;;baffe 91.1i faifoit partie des biens donnés au Monaf!:ere de
ISr. Vi.él:o r. Le premier tirre où il foit, parlé d'elles, en:
la Bulle d'Alexandre III. Ce Pape a r.empli la Chaire d.e
St. Pierre depuis Ir S9 jufqu~en l r8 r; c'ef!: donc dans
cet intervalle qu'elles ont été fondées, & il Y avait déja
plus d'un fiecle que les Moines de Sr. Viél:or exif!:oient à
,la Celle.
La fondarion des Religieufes ne paroilfant pas, on Ile
peut raifonner fur fes difpolitions. On Ile peut que déférer,
aux pieces communiquées, & aux fairs convenus entre les
parties. Or c'en ef!: un que qui que ce foit qui ait éré
leur fondateur, elles ont éré établies à la Celle fous la dépendance de l'Abbé & du MOllaitere Sr. Viél:or. De cerre
premiere' circonfiance il fuir une préfomprion !impie, .que
le MonaGere Sr. Viél:or devoir avoir néceffairement des
droits antérieurs dans le lieu de la Celle, & Y avoir déja
un Prieuré érabli; aurrement il n'y aurait eu aucun morif
raiÇonnable d'y fonder plu rôt d~s ~eligieufes Bénédiél:ines
que celles d'un aurre Ordre.
Une aurre preuve de l'antérioriré des Moines de Sr.
,Viél:or à la Celle) c'eG que le Mona Gere de Sr. Viél:or a
fourni dans le principe à ces 'Religieufes le bled & le vin
nécelfaire pour leur fublifiance; il leur donnait encore le
'vefiiaire ,,& leur ,payoit, en ourré 200 florins. Toures ces
redevances acquittées par le Prieur ou le MonaGere indiquenr I~ vériré de ie',l qlle dit IJfi'florien Pirron, ou que
les Momes de, Sr. Viél:or ont ~rabli les Religieufes., op
�15 D J! RR a VEN C E.
/) r
du-tnoitis qu'ils 'Ont contribué pour be'aucoup'à leur établir.
fement.
De l'établiifement des ReligieuCes fo,us la dépendance
_de St. Viél:or & dans 'le lieiJde ·.la . CeBe qui avoir déja
un Priel<lr, Il s'enCuir qu'eUes éroienr fous .la Jurifdiétion
de ce Prieur, comme on voir tam d'aurres ReligieuCes fous
la JuriCdiétion des Supérieurs de leur Ordre. Mais de ce
.que le Prieur de la Celle éroit le Supérieur immédiat de
_ces ReligieuCe~, il ne s'enCuit pas qu'il
pût conferver
Je 1 patrimoine 'qu'il avoir auparavant. Le ritre de .supérieur
qu'il acquérait,. ne pouvait abCorber la qualité de Prieur
qu'il avoir déja ; car 'Ce n'éroit qu'en [a qualité de Prieur
qu'il éroit Supérieur.
.
Dès le principe de leur établilfement les ReligieuCes eurent à leur ~ête une" Prieure perpécuelle, à laquelle l'Aute1.!r du Gallia Chrifliana donne le nom d'Abbeife. Si le
,Prieuré de la Gelle avait, été féminin,. cette' Prieure aurait été pourvue ou par, des collations faites par' le MonaHere de Sr. Viétor dont le Prieuré était dépendant, ou
par des provilio.ns accordées par l'Abbé ou par le Pape.
A aéfaut de ces pre'uves)' c'efi-à,dire , du décret d'érect.ion du Prieuré féminin ou des trois colla rions , il faudrait au moins jufiifier de l'union faite 'du Prieuré de la
Celle au Monafiere des Religieufês.
C'efi par un de ces moyens qu'elles jouilfent encore des
Prieurés de Cabalfe & de Gareoult, qui formaient des Prieurés diHinéts de celui de la Celle; le premier avait été
uni ~ leur Monafiere par des Lettres-patentes de l'Abbé de
St. Viél:or du 26 Février 13°7. Cette union eut pour!objet de libérer le MonaHere de St. Viél:or de l'obligarion de
fournir le veHiaÎre des ReligieuCes. Cela réfulte des Lettres - parentes d'union.
. Le Prieuré de Gareoult avait auffi un Titulaire partieu.
Jier; il .fur ,également uni au MonaHere des ReligieuCes
par uoe tranfaél:ion du 4 Qél:obre. 1460, dans laquelle o.n
voit que s'étant. éleYi .des _conre!l:ations ,egtre.le .'Prieur.. de
D 11
PAL A
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�62
Jou RNA L
la Celle & les Religieufes, pour les 200 florins 'qui devoient leur être payés annuellement, & que le Prieur foutenait être dans l'impuiffance d'acquitter, pour finir cette
contefl:arion., le Prieur de.la Celle, avec 11 permi/lion de
l'Abbé de St Viél:or, céda aux Religieufes le Fie'f de Gareoult ,moyennant quoi il demeura quitte de la redevaf.lce
annuelle; & comme par cette tranfaél:ion il cédott ce qui
ne lui appartenait pas, puifqu'il y avait un Titulaire particulier à Gareoult, l'Abbé de Sc, Viél:or préfenr à la tranfaél:ion promet que vacation avenant du Prieuré de Gareoult par le décès de Pierre de Aleaffis qui en érait pourvll ,
il unira le Prieuré de Gareoult au Prieuré de la Celle, à
l'effet que par une autre union, ou par la ceffion que le
Prieur de la, Celle venait d'en faire, ce -Prieuré de Gareoult
pui!fe être uni & incorporé au Monaltere des Religieufes,
pour qu'elles elli jouiffent tranquillement & fans trouble.
, De cette. tranfaél:ion réfulteot plufieurs induél:ions ~ rD,
fi le Prieuré de la Celle avoit appartenu aux Religieufes',
il auroit été inutile d'unir le Prieuré de Gareoult à celui
de la Celle; pour le faire paffer de ce Prieuré de la Celle'
aux Re1igieufes, il auroü fuffi de faire l'union au Prieuré
de la Celle, au moyen de quoi les Religieufes poiTédant
ce dernier Prieuré .auraient au/li poffédé celui de Gareoult.
2 o. Si le Prieuré de la. Celle avoit appartenu aux Religieufes, elles n'auraient eu aucune demande à former pOUF la
penflon de 2QO florins, parce que éette penfion étant due
par le Prienté qu'elles ,diraient avoir toujours eu, elles au'J'oient été elles-mêmes leurs débitrices. Enfin le Prieuré
de la Celle a toujours été diHinél: & réparé des biens du
Monaltere; de tous les temps le Religieux de St. Viél:or
qui a été pourvu de ce Prieuré, en a joui au vu & fu,
des Religieufes, & de leur confenremenr; & s'il a eu de~
oCoriteHations à foutenir avec elles, ces contefl:ations n'ont
roulé' que fur les draits qu'il prétendait avoir fur le Mo.oafl:ere des Reli.gieufes comme leur Supérieur, ou fur les
~enrées. & les peniions qu'il devoit leur payer: ces con,..
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PRO V Il N
cl!.
63
ten:Jtions ont 'commencé de très-bonne heure. L'Auteur
du Gallia C/irifliana fait mention d'une tranfaél:ion de 12 14.
Pourquoi dans ce temps voifin de l'établiŒement ·des ReJ
ligieufes, pourquoi encore, dans d'autres occafions où elles
fe font plaintes avec fuccés, que le Prieur ne leur don-·
noit pas ce qui leur revenoit, n'ont - elles pas dit que le.
Prieuré ~toie à elles, & qu'il falloit les réintég~er dans
la poŒe/Iion de ce .Bénéfice ? Il 'y a plus: lors de 1a réforme du Monaflere des Religieufes & de leur transférence en la ville d'Aix, à laquelle concoururent le Cardinal Grimaldi, Archevêque d'Aix, & le Cardinal Majarin ,
Abbé de St. Viél:or, c'était bien le temps ·de faire rendre aux Religieufes ce Bénéfice, s'il leur avoie appartenu.
La Sentence de réforme porte feulement, qu'au nouwau
Monaftere appartiendront tous & chacuns les hiens du Monaftere dit
préfent de la Celle. Il n'y efl pas parlé
du Prieuré, & on n'aurait ·pas manqué d'en faire mentian, s'il leur ·avoit appartenu.
Le dernier prétexte que prennent les Religieufes pour
prouver la fémioinité du Bénéfice, dl: de dire que les
Prieurs de la Celle one toujours été pourvus & fe font
toujours appellés Prieurs conventuels du Monaflere de la
Celle: or, à la Celle, il n'y a jam'ais eu d'autre conventualité, qu'une conventualité de filles; donc le !Prieur
a joui d'un Prieuré féminin; d'où il fuit que la poifef-:
fion des Prieurs, quelque longue qu'elle fait, tous les ac-'
tes & taus les accords paŒés avec lui font ahufifs, & doivent être c;omptés pour rien. Ce fyflëme manque par le
droit & par le fait.
D'abord au 'Cujet de 'Ia qualité de Prieur conventuèl, il
faut fe rappeller que dans les Bulles de Gregoire VII. &
de P~fcal II., il efl dit que le Monaflere de St. Viél:or
poΎdoit Cellam Sallaz Perpetuee', & que ce mot Cella efl
pris pour le MonaHere & l'habitation des Moines•.. Il y
avait· donc alors des Moines à la CeIle; & ·s'il y -avait
a
�164.
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:' A L .
.
fIes Moines, Il Y aVOIt un Pneur;. parce' que', comme te
dit Van-Efpen, part. l , rit. 31, chap. :J.; n. 6, & qu'il le·.
prouve d'après le livre de l'Ordre de St. Viél:or de· Paris, ch. SI, in quocumque loc~ ubi du? vel plures' jimul
habitant, unus eorum cui AMas hoc inJunxerit, Prioris ofjicium agat, & cœuri oqediant ei. Voilà 1'0rigine du Prieuré
conventuel..
) , lie
.
_ Les 'Auteurs du' GaUia 'ChrijJianll. prq,uveht '1 encore, la.
même ,,,hofe à l'endroit' qu?on a déja rapporré. Ils' ajoutent ; pojlea mutatis in Mmliales.li1Ionai:/iis., P-"ior tamen fem-.
per, prœeffi 'Vifus efl. L'érabhifement d.es Religieufes peut.
avoi.r '~çé· l'occafio,n de diminueE le nO{l'lbre l de.s Moines,
tpais.il en <,t',tÇlpjours .rené, en mè;nle.temp-s;qLÎ~lles.,. fous.
la d,é.pend:'jrrce, qu ~r-ie'ur:'- La preuve. en.. réfUlte: 1°.• de ·Ia
char~e .d'Ilde!phpns du. J;llois. de. Fév.rier 118.) produite.
par les- Religieu[e~,. ~ ,dans !aqueJ.1e on trouve"lU nom-.
b.re J1des, téIT/~n,,5 :}JTiflj;lmus de. Morerii:s , CJ'ame:"arius' de-.
Arcella : s'il y avait un C.amt;rier ,. il, Y a'loir oonc. plu~
:weufs ~R:eligi~lp(.~ !l.~" Les· m,ê.mes J\ureur.s.· font menrion
q'lll!e .J,3ulJe d''QLba)n V. de I:au 13.72,,, qùi donfle com-·
lpiffiolJ à .1'EvêqY~r' d~AI1)(~no. 'd'a,ccéder au M0nanere pro
P.a.ce. jjrmanda int~rl P.riorem. & MonachQs una ex parte, Pi'io-.
rif1àn;fj,lI,eJ1; éiL Monjatf.S 'eX; ahera. 3°. Un ·a.él:e de. nouveau
bail pp 3-3 :,~nteI:11b-re ..' l'J8 ~ :i: où l'on trouv.e que le Cr.a-pine eJl L,?mp.ofé qU.1tp;j\\~ùr,; de"I~,PrJeure, des Relig.ieu{es" ,d~ ~1qinëS' .~ t;fe' Donars.' Prior,. p'riorifJà, Monia':,
lc:s, Mqnaclzi &, .porza.(i Capitujantes 6' Capitulum facientes. 'Op v.oie à la fin âe. cet aél:e le nom. des uns & des.
aùtres,' 4:0.:' Un' aél:e dû. 1 Janvier I43ô.,: pal' lequel il. pa.
roÎr i.que les· -ReJjgieùfes' fe rronvahl': trop· reJferrées dans
I~llr, habi~arion",~l~s manquoienr. d'ulJ appar-re01enr pour loger' leur, p~r,elJs.. ~ les érraogets. qui, léur ~endoient 'liure "
le Ppeu; 1<;\1.1'_ def~mpare- une partie· de l'habiration des
Moilt e ". CÙT1li,. propre;; 'adventum quotidiè· certorurz~ amicoT:iflTLc. jÇ( ~arelJtum renf!abilillm; Refigjoftrum Dominarum. Prio-·
T:ijfèe;
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PAL A, 15
D Il' PRO V Il Nell.
6S'
riJJie 'fi Mànialium Monafierii arte Cellœ in diélo Monafterio, Dominus Prior dic7i Monaflerii t;. gentes fui hoJPitii
gravarentur.
Mais quarl'd il faudrait fuppofer que le Prieur n'a pris
la qùaliré de conventuel que par rapport au MonaHere des
filles, où a-t-on trouvé qu'il ne puiffe y avoir de Prieur
conventuel d'un Monaltere de Religieufes, & que cette
qualification indique néceffairement un Prieuré féminin?
Si on remonte à l'ancien temps, & à celui où la Regle
de St. Benoit commença d'être en vigueur en France, on
trouvera l'exemple de pluGeurs Monalteres compofés de
Moines & de filles. Le favant Mabillon fur la Regle de
St. Benoit en donne pluGeurs exemples; pree/ar in fecUildum
fœculum Ordinis Sanr7i Benedic7i, §, 3, pag. 71. La différence des fexes exigeoir pour la décence une habitation
{éparée; c'en ainG que l'ordonne le Concile d'Agde, donc
la déciGon en rapportée dans le décret de Gratien, cauf.
18, quen. 2, chap. 23. Mais cette habitarion féparée ne
faie pas que les Religieufes ne doivent être fous la direél:ion des Religieux de leur ordre. Au contraire " le Concile de Séville, qu'on trouve dans le même décret, chap.
24, o,rdonna que les Religieufes qui font dépendanceS" de
quelque Ordre régulier, feroient dirigées &; gouvernées
par des Moines. Conformément à ce Concile, les Reli:gieufes de la Celle éroient fous la direél:ion du Prieur.
& c'e!l: à l'occalion de cette direél:ion qu'il pouvoie Ce dire
Prieur Conventuel. Cette qualité lui donnoit. pendant que
les Religieufes éroienc à la Celle, la cure des ames, la
nomination & érablilfement des Prêtres & Confeffellrs ordinaires, le droit de faire l'Office aux fêtes folemnelles,
de convoquer le chapitre général, & autres droits extérieurs
au Monafrere. L'admini!l:ration intérieure, la pu.nition .&
la correél:ion des fautes des Religieufes appartenoit à la
Prieure. Qu'y a-t-il en cela d'extraordinaire? Le droit car:oniq\lC offre des exemples bien plus ftappans & plus fingu_
lIers. On trouve fous le titre des Décrétales de majoritatt:;
Années l78l fi l78z..
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& obedientiâ, une Abbeffe que lé Pape Honoré III décide
avoir le droit & le pouvoir de fufpendre de l'Office & du
Bénéfice, non-feulement les Religieufes, mais .encore les
Prêtres dépendans de fan Monaftere.
L'Eo-life de France offre des exemples pareils: L'Abbeffe
de Jo::rre 'luœ dicitur eJJè caput & patrona Prœsbiterorum
& Clericorum EccleJiœ Jorrenjis. L'Abbeffe de Fontevraulc,
qui, comme celle dont il eft parlé dans la Décrétale, a
le pouvoir Clericos Eccle[iœ fuœ ab OjJiciis & Bene.ficiis furpendere. Elle leur donne même des dimiffoires pour recevoir les Ordres. Gonzales fait mention d'une Abbeffe en
Efpagne qui approuve les Confeffeurs.
Et quand il ferait vrai qu'il ne peut y avoir de convenrualité entre un Prieur & un Monaftere de Religieufes , ce ne ferojt pas une rai fan pour dépouiller le Prieur,
mais bien pour lui faire quitter fa qualité de conventuel,
par la raifon qu'il étoit Prieur avant l'établiffemenc des
Religieufes à la Celle, & que la qualité de conventuel
qu'il n'aurait pas pu prendre, ne le priverait pas des droits
qu'il avoit auparavant. Et c'eft ce que la Cour a jugé par
l'Arrêt du 8 Avril 17°'5 dont voici le fujer.
Pendant que les Religieufes éraient à la Celle, elles
avaient raléré que le Prieur prit la qualité de conventuel,
& qu'il en exerçit les droits : transferées à Ai~, elles
difputerent cette qualité de conventuel que continuait de
prendre le Prieur de la Celle. Elles foutenoient qu'il ne
pouvait point y avoir de convenrualité entre un Religieux
& un Monaftere de filles. Mre. Limon prétendait le conrrair~; il s'érayait même d'une Sentence arbitrale, refpeéhvemenr acquiefcée, du 14 Août 1638, qui le déclarait Prieur conventuel. Les Relio-ieufes convenoient de cette
Sentence; mais elles difoient °que fa convenrualité n'érait
q.u'externe, & ne lui donnait aucune jurifdiél:ion fur l'in térI,eur du Monaftere; elles aj{)utoient que fur le tout, la reforme & la transférence qui avait été faite de leur
Mona!tere, faifoit ceffer 1a jlll'ifdiél:ion, correétion & dif":
�DU
PAL AIS
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PRO VEN C E.
67
cipline que Mre. Limon vouloit s'arro'ger pour raifon de
fa qualité de conventuel. Les Religieufes ne s'aviferent
pas alors de dire que le Prieur avoit joui d'un Bénéfice
féminin qui devoit· leur être rendu. L'occafion était d'autant
plus favorable pour foreper cette demande, fi elles J'avoient crue fondée, ,que Mre. Limon attaquoit leur état,
& vouloit les dépouiller des biens dont elles jouiffoient;
car il appella comme d'abus de la Sentence de réforme,
& il demanda qu'elles refiiruaffent la terre de Gareoult,
fur le fondement que fes prédéceffeurs n'avoient pu l'aliéner à fon préjudice. C'était bien le cas alors de lui dire
que le Bénéfice qu'il poffédoit était aux Religieufes. Bien
loin de là ; elles avouoient dans leurs écrits, que le Prieuré
de la Celle avait été fondé par le Monaflere St. Vic7or,
auquel il paie annuellement llne redevance de 2.7 charges
blé, & ne peut être pC!/fidé que par un Religieux ·du Couvent ou Chapitre St. ViRor.... Elles ajoutoient que l'origi,.
noire fondation de ce Prieuré était pour un Monaflere compofè d'un Prieur & de deux Religieux, qui vivaient en communauté ou conventuellement.
'
L'Arrêt du 8 Avril 170), rendu avec Mre. le Blanc,
fucceffeur de Mre. Limon, confirma les Religieufes dans
la poffeffion de la terre de Gareoult; rejetta l'appel comme
d'abus émis par Mre. Limon de la Sentence de réforme;
maintint le nouveau Monafiere transféré en cette ville en
l"ufage & obfervance des confiitutions & fiatuts & privileges
de la réforme du Val de Grace, fur }equel il a été établi
& fondé, & en conféquence déclara led. le Blanc Prieur
, de la Celle, & fes fucceffeurs aud. Prieuré, n'être, ni
pouvoir être, ni fe dire, ou qualifier Prieur conventuel du
Monafiere des Religieufes, & par même moyen démit
& débouta led. Prieur de toute jurifdiél:ion, correél:ipn,
adminill:ratiol1 du temporel, nomination, collation de places, vêtures & profeffions defd. Religieufes, & généralement de tous autres droits de conventualité par lui prétendus fur led. MOLlafiere ~ lequel demeurera perpétueJle-
1
2.
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JOURNAL
ment foumis à la jurifdit1ion & filpériorité immédiate des
Abbés de St. Vit10r & de leurs Grands- Vicaires.
Après cet Arrêt les Religieufes peuvent-elles prétendre
que le Prieuré de la Celle foit conventuel d'un Monaf!:ere
de filles? L'Arrêt de 170) a jugé qu'il ne l'étoit pas.
Quand on leur accorderait que ce n'ef!: qu'en conféquence
de la réforme que le Prieuré a ceŒé d'être conventuel,
il en réfulteroit toujours que la Cour a jugé que la conventualité ceŒant, le Prieur exifl:oit toujours. C'ef!: ainfi
que l'Arrêt qualifie Mre. le Bllnc, & il annonce que ce
Prieur aura des fucce1feurs, puifqu'il en parle.
A préfent que devient la difcuffion que font les Religieufes, " qu'on ne peut jamais prefcrire contre le litre,
" ni quand on a joui fous une qualité incompatible' avec
" la prefcription; que le Fermier ne prefcrit jamais, ni
" l'Adminifl:rateur contre celui dont il adminifhes les biens;
".que la poŒeffion du Prieur a toujours été contredire
" pa'r les- Prieures qui exifl:ent depuis le corn mencement
" du Monaf!:ere; que chacune d'elles a poffédé à chaque
" inf!:ant le Prieuré; qu'on ne voit pas que le MonaHere
" ait été créé à double chef de différents fexes, &
." qu'un tel accolement feroit monf!:rueux. " Tour cela eH:
déja répondu. Les Prieures n'ont jamais poŒédé ce Bénéfice; point de décret d'éreB:ion, ni d'union, ni de coLlations. Dès-lors où eO: le tirre contre lequel on prétend
qu'on n'a pas pu prefcrire? De fait, ce n'efl: point par
prefcription que le Chapitre po1fede, mais par des donations authentiques. Les Prieurs n'ont jamais éré les Fermiers des Religieufes, puifqu'ils po1fédoient en propre. S'ils'
ont adminiHré, c'ef!: leur propre bien, & non celui du
Monaf!:ere des Religieufes. Sur le tout, quand ils aurcient
adminiflré, du-moins il faut convenir que cette adminiftratio:n du temporel a ce1fé depuis l'Arrêt de lia). Or, depUIS cet Arrêt il s'eft écoulé S4 ans, & l'on làit que
pour la po1feffion des ?iens la poŒeffion paifible de 4. 0
ans acquIert une prefCrIption completee d'Eglife à Eglij~.
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PR 0 v Il Ne I!.
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L'union' efl: donc hors de route atteinee: Tel efl: lè' .fyftême du Chapitre, continuoit Sr. Viaor, il refl:e à faire
connaître fa défenfe contre les titres produits par les Religieufes; mais auparavant il eil à propos de faire connaître ces titres, & de donner une idée de la réponfe que
font les· Dames de la Celle au fyilême du Chapitre. Tout
ce fyfl:ême, répondaient les Da,mes Religieufes, porte. fur
une fauffe bafe. Le Chapitre pretend prouver que les bIens
qui forment le prieuré de la Celle, lui ont été donnés
avant l'érabliffemellt des Religieufes, qu'il y avait avant
elles une conventllalité de Moines, & que c'eil de cette
conventualité que le chef efl: devenu Prieur, & de fes biens
qu'il a formé le patrimoine de fan Prieuré. Or d'une part;
le Chapitre ne prouve pas ce point de fait fur lequel il
appuye [on fyHême. Les pieces qu'il a communiquées &
qu'il décore du nom de titres, bien loin d'être authentiques, fane au contraire dans un état informe qui leur fait
retùfer toute créance; de l'autre, les titres produits par les
Religieuf~s; titres done le Chapitre eil forcé de reconnaître l'authenticité, parce que la plufpart font des originaux revêtus de toutes les formes prefcrites dans ces temps
là, & qu'ils fe trouvent enrégifl:rés dans des dépôts publics, eotr'autres dans les archives du Roi & de la N atian Provençale, à la Chambre des Comptes; ces titres,
di foie nt-elles , prouvent la fauffeté de routes les pieces proàuites par le Chapitre.
Et d',Nord pour écarter la fin de non-recevoir tirée de
l'Arrêt du 8 Avril 170), on ne voit pas pourquoi le Chapitre a fàit tane de raifonnements pour y trouver que l'Arrêt avait jugé que le Prieuré éroit Mafculin. La Cour n'a
rien ilawé de pareil. Quelles éroient les contefl:ations qui
agiraient les Parties lors de cet Arrêt? Les' Religieufes
attaquoiene-elles la qualité de Prieur? Au contraire, elles
la reconnoifioienr au moios indireaement. Aiou il ne s'agiffoit point de favoir fi ce titre de Prieuré de la Celle
érait mafculin, on le fuppofoit de part & d'autre, ni fi
�7~
Jou RNA .t
1e Prieur étoit titulaire d'un Prieuré conventuel aau ou
habitu; mais fi. le Prieur étoit en cette qualité le Supérieur immédiat des Religieufes avec une pleine autarité,
fauf l'appel. L'Arrêt de 170) n'a prononcé ni pu prononcer fi,;r l'exif!:ence, puifqu'elle n'était pas contef!:ée, ni fur
l'état & la qualité fonciere de ce prétendu Bén.éfice do~t
il ne s'agiffoit point, mais feulement fur le drOIt de fuperiorité que le fieur Limon s'amibuoit fur les Religieufes
réformées. Dès-lors les difpolitions de cet Arrêr ne peuvent pas être étendues au-delà des conref!:ations fur lefquelles il a décidé. C'efl: une maxime générale que toute
difpolition, foit de contrat, foit de jugement, doit être
entendue par rapport à l'état où les chofes étaient lors
du contrat ou du jugement, & les chofes demeurant dans
cet état rebus fic flantibus. C'efl: Id remarque de Tiraqueau
fur la Loi fi unquam ,cod. de- revocandis donat. prœfat. n.
167, & de Surdus, conf. 418, n. 8. Enfin c'ef!: la Jurifprudence de tous les Tribunaux. On pourroit citer l'Arrêt du Parlement du 10 Juin 1) 96, au profit des Dames
du Monaf!:ere St. Sauveur de Marfeille, contre le Monaftere St. Viél:or, nonobflant routes les tranfaél:ions quiavoient
été paffées; celui du -Grand Confeil du mois de Septembre 1747, en ~faveur du Monafl:ere des Religieufes de la
Ste. Trinité de Marligni, ordre de Sr. Benoît, qui déclara le Prieuré féminin, nonobf!:ant qu'en 161) elles euffent plaidé & réufli à faire déclarer Dom Dormy titulaire
de ce Prieuré. Ainli l'Arrêt de 170) ne pellt être un obfracle à la demande formée par les Religieufes. Etant certain que les Dames ont aél:ion, il faut prouver que les
pieces produites par le Chapitre ne méritent aucune créance,
& que par conféquent cette aél:ion elt fondee.
Le grand motif qui doit faire rejeCter ces pieces, c'efl:
qu'elles font extraites du cartlllaire du Monall:ere de St.
Viél:or. Or, perfonne n'ignore que - les carrulaires, qui- ne
font que des copies non fignées ni certifiées, n'ont par
eux-mêmes aucune autorité; -parce que les Moines, fur-EDIl[
�'nV
PALAIS
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PROVENCE;
7[
iceux des onzieme & douzieme fiecles, ont été coonvalncus
tanr de fois d'avoir fabriqué des titres en tout genre-, que
tout ce qui fort de leurs carrulaires, ell: légitimément fufpeél:. La difcuffion que fait le Chapitre pour prouver que
les cartulaires font foi, n'e!l: pas exaél:e. Barbofa dit feulement fur le chp. 7, extra de fide inJlrum. ,n. 30, que l'on
doit ajouter foi aux anciennes chroniques, lorfque nos ancêtres y ont communément ajouté foi. Mais il n'e!l: pas
que!l:ion ici de chroniques auxquelles la foi publique ait pu
-donner quelque authenticité; il e!l: queHion au contraire
d'aél:es & de pieces privées, dont la plupart n'ont jamais
vu le jour, & que l'on prétend fe trouver dans un cartulaire _ qui a toujours été au pouvoir des Moines, & où il
été libre d1inférer tout ce qu'ils ont trouvé bon.
leur
Le Cardinal de Luca en l'endroit cité de Judiciis, difc.
28 , n. 22, pofe en regle générale, que lorfqu'il s'agit de
faits anciens, on a coucume de prendre des do cu mens dans
des archives publiques gardées par des Archivaires ou par des
Officiers à ce commis. Il ajoute que lorfqu'il e!l: quefrion
de favoir fi l'on doit ajouter foi à des archives, il faut
examiner d'abord, li ce font des archives publiques & de
Ju!l:ice; & enfuite en admettant qu'elles font telles, il faut
examiner encore fi les propriétaires de ces archives ont
intérêt dans la caufe; auquel cas on ne défere point à ces
archives contre le tiers : Super fide archivio prœJlanda , in
primis ejus qualitas infpicienda di, an liliat fit archiviumpublicum & Jurifdic1ionale, pofitâque publicitau, infpicie1zdum efl an ejusdem archivii Dominus in caufa de qua agitur ut collitigans , five aliquod intereffi habeat, cum tune
archivio non deferawr eo modo quo deferendum eJfèt in caujà
inter tertios, abfque iftius intereJfè mixturâ. Ici les deux circonfl:ances manquent; le -carrulaire de St. Viaor ne peut
être appellé archivium publicum atque Jurifdic1ionale, & il
s'agit de lui donner foi en faveur du Mona!l:ere lui-même
Contre le tiers.
Enfin Boerius, qui efl: le dernier des Auteurs cités par
a
�7"
. Jou :Il N A L
le Chapitre, requiert pour ajouter foi 11. un extrait tirf d'al'"";
chives authentiqnes, toutes les fois que la garde de ces archiv.es n'efi pas confiée 11. un Officier public, que cet ext1'ait
ait été fait qe l'autorite du Juge & partie appellée, 'luandrJ
extrac1um fuit autoritate Judicis, vel liuuarum regiarum,
parte 'Vocatâ. Le témoignage des Hilroriens ne peut fllppléer
J'authenticité qui manque à ce cartulaire, parce qu'il efi
cç>nnu de tout le monde que les Hifioriens copient affe7i volonriers les matériaux qu'on leur fournit;. cela efi encore plus.
vrai des HiHoriens qui ont écrit dans des fiecles où les faits
& les aétes n'étoient point encore épurés par une bonne
critique; & cela efi vrai en particulier de nos Hirtoriens; les.
Auteurs du Gallia Chrifliana n'ont travaillé que fur les matériaux qui leur ont été fournis par les Moines de St. Viaer ,.
qui avoient le plus grand intérêt de repréfenter le Priemé de
la Celle comme un Prieuré mafculin. Et c'eH 11. t:es pieces
& 11. ces Hilloriens qu'on doit appliquer l'autoriré de d'Hericourt dans fes Loix Ecciéfiail:iques, pan•. 1 , «h..1 1, n. 17..
" On doit encore avoir moins d'égards aux extraits des Bulles.
" & des privileges qui fe' treuvent dans les cartulaires. des.
" chapitres féculiers ou réguliers, parce que ces extraits.
" font fouvent faits d'une maniere peu fidele, & ne s'ac" cordent pas toujours entr'eux, & qu'ordinairement ceux
" qui Jes rédigent ,. ne fon.t pas affez habiles pour diftin" guer les fauffes Bulles des véritables; d'ailleurs ee· font
" prefque toujours les parties intéreffées qui rédigent ces
" fortes de cartulaires. On doit raifonner à peu près de
" la même manjere fur ce qu'on trouve dans les anciens.
" Hiil:oriens par rapport 11 ces privileges, parce qu'il y.
" en ,a un grand nombre qui font rapportés par ces Hif" toflens comme authentiques, quoiqu'on en ait depuis. re" connu la fauffeté. "
. Ce n,'eil: pas feulement dans ces derniers temps que
des. Momes Ont quelquefois produit des pieces fauffes pour
appuyer leurs p~étentions. Innocent III. après un fcrupu,...
Jeux examen, decla~a faux & fuppofés ~ous les titre.$. produits
�•
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DU.,
P A.L JI: r's ? E~ 1~ li. 0 ~ Il NeE.
'.
73
duits par des Moines de' Milan. Les exemples de I~E ~q.uè
d'A/liÎens contre-les Moines de S . Valery; de l'Evèque e
'SoiiIOns contre l'Abbaye de ST. MedarJ ,- du Duc de 'ViII roi, concre l'Abbé 'Ie Blanc Prienr.di·S~ult·, de' l'Eveque
de Sifieron' conrre l'Abbé de LUI'e" fonç plus -q\.Je /" rdl1S
pdu.; démo~trer}l <; les p:iec~s' tif{ë~:~es'!J .~~rula:fes ne
méritent aucune creance, fi on n en derrtonrre cl 8dfeurs
l'authenticité. On peût y joindre FArtét du 30' Juin litl,
au profit de Mr. le Préfidenr de Gritnaldy - m~guffe contre
Mr. de Barbentane grand Commandeur de l'OH:lrédé'lMahe~
. Qual1t aux' trois pièces que, lé ChfFlItre pré're,h~e:) 'o'rhme
l'originales, il s'en faut de beaucoup 'flu'èlfes ijent les cà
raéteres requis POliT ces forres dd pi~~es. f) aBord la pré!.
tendue donalÎoll faite par 'Nèvèlong' en 'l'an 'IOI~', 'èfl' à
1a vérité Coll;H~onnée' "p'ar'
Notaire -nommé Granier"
comme extraiÛ d'un vieux' i'lflrument en 'piife,'hémin' coié "Aix..,
'n, z, gardé & conferVé dans les Archi'ves' du MonaJlf.re St.
." & au reqUIS"d'I'E
.. " f v,Iccor,
e
conome d',IJ.,n
IatUI.
Mais outre que ce parche)Uin duquel éll: tiré 'èet' 'éxtràit
ne paroît pas, il s'en faut bien que tqùt -vieux paêcb'émin
foit authèntique & original. Ce qui. fuffiroit pour détruirè
'la foi de celui·ci, c1en que 1'extra-ie <iue·le Cha'pitre a pro:"
duit, eH intitulé ,. donario. PriOl'arûs SaTlc1œ. Pepet~céJ de orta
Cella; tandis qu'il eH certàin"qu'it' n'yJavoit encoté· 110rs:
'ni Prieur ni Ptieuré à: la Celle, & que le' nom de ~?ta
Cella ne fut donné 11 ce lieu que plus de cent ans après.
D'âilleucs cet aéle eH- coneru· dans les mêmes termes· que·
1es deux de, l'an IO}}, li la feule difféFencê1t,<!u ·nom'ldes
donateurs, c'ell:-à-dire que chacun y donne én.- emlèr
,vallée d'Avole.nnaio & l'Eglife de Ste. ,Pe"pe&le itandls
que pour concilier ces pieces,. le Chapitre a·été réduit li la
'nécelIité de di·re que chacun des donateurs n'en" dÔnnoit
:qu'un~ pa~~ie! 2.~. Là prérendu~ tranfaétioA' de l'an ~074 ell:
r~ml?lie PIOvralfemblances qUI fe re.ffentent de la. fuppofi:lIOU. L"aéte efi d'abord· dit paffé à la Celle de Ste.'P-er.,
perue, &\ le même jour à une autre· reprife à Brignijles;;
un-
'la
..1ané.e.s. l'l8: & :78:l...
K
-
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.~., ," '1 C J 'p u,,'h K tJ f '
u "
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lès FeP'l ,ePf.aRs, ,,!~ 1 G~ral~~ qUOIque pupilles ~ 3,U den:o~s
de quatorze ans "ne lallfe~nç, pas \lue de Y.guer 1aél:e"! ta9dl.s
qu'il eH connu que dans ces fiecles d Ignorance 11 etOle
ref<que fans expmple que l'on ftlt lire à cee àlre. Enfin· à. lâ
,
,~
,
él: q tr.'
"Il
P
Rpeue de c,ee a~e pretendp " un autre 1a eill?~lle. apr.:..s ~
mort de 1::4gbe Ber<?-ard, & par .~equel ces enfan,s ~on~ç7
ment la donation faIte par leur alt;ul,. fans que neanmoms
. dans celt aae,. il p~roilfe de leur fignature , tandis qu'elle
èlt mentionnée
âU: ,bas du .premier, ni de la fignature
.
d'aucun autre.
",
'
~. , Réffe, lé J~gement de 1 ~ 5.31. Mais.· cette' piece. eIl; dé:
Jr'!,itç .par 1<\; ch~r\e ;de Ch:u!!,s. II. J.~e· L2;9}-, 9U1 ,decl~re
.quel !e gief & l'Eglife de Cab~e app,arllynnent e~ eo:t}er
au Morraltere des Religieufes d~ la Celle ~ que les Momes
:de '~t. Yiél:or s'en écoienc ~rpparés, ·qu:i1s,font. co~~amn~:
à le.s ·J~efJ:ituet:. aux..Religieufes, ave~ des inhibitions iY. ~c;
.fen~~ proqonc.é,}s~aç~ par.le"\ ~ouverai~ ~ü~ ~ar J'Abbé de
St. Viétor préfent.: ~:: lié. pius .s'y immifcer fous quelque
pr.~çe~te,9u~ ce pui1fe être. D',ailleurs cette p'i~ce 'd,e I l S3
ne poneroit que fur une partie ,de Cabaire qui ne faifait
partie ,ni dei I!Eglife ni de la .Seigneurie , & qui ne peut
par !=onféquent (~ryir çe, titre au Chapitre pour poiréd~r
~,
·
l' autr~!..
1,..4.I1e.,;,gu
_j") \. '.J
)
\_.
l
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'1
_ V,ai.~el1w.!lt" le ~Ckapitre appeLle. à fon .recours les deux
pr,é,tendues ,Bulles: dè Gregoire VII., & de PafcaI. IL Ces
»olles" en le~ fuppofa.nt vér.itables & ,authenrique.!'., étant
eXi'ép'j~esjJa!:1.hcQnnoiira,!l9il,d,e calife, n~,peuvent. fervir de
,ciu-e,:n.9p 1 vpi!. mA!n~"p'!.r un Tugement, lcéle.br~ f(~n,~~,' par
l'Açc,\J,ev~êque g'Ar1t;s·en q}laUJé~4e Légat Idu·.PaEe le jour
-d.es Nqrtej;
~Qvetnbt5l Jl'4!i1 qui <>;rdonna 'Ia rell:.itutlon .al! ChgRltre .<1.' .fu:!è~.Jderq\l.elques Eg1JfeSl,que les MOllles
d~ Sc. YiÇtor avoient ufl.lrp.é, q\le .Ie.s citres Eroduics NF
Jes .4'19tn~S 'pgilr fe, 111a:inrenir, da1.'~' leurs uftlrp.a1ions étoien;
fau" ,\ & [q!l~ les"BQlles ,gu'ils, avoie.nt produ}tes , avaien,t
.été. qbcenues f!l~' de rfàuJÇ;lexPoJés. ,C'écoienc v~aifembl!\bleJ
'PJ~Dté ces' ~ew( .l}l\l.1<tS1.!l1l'O,n. prifente aujourd'h~ij puif-J.ue
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leur dàt~ de 1079'& 1 t 1.4' fe trouve 'dà'n;I Tés trolxàDteJ
dix années de poffeffion que 17.s Moines, de l~k Vitl:or réélamoient. 2.°. Quand les énonciations contenues ~ans' cès
Bulles feraient.: preuve' de la poffeffion 'de LJa ICelle -.Srê.
Perpetue, on ne pourroit rien' en[ in8liife pau prouv@' 1\
titre pe Bénéfice ni régulier', ni 'can\letl uel~ 'jJuift)u'i n'y
à eu de Prieuré' fimplé régulier 'recqnnu ~'(IlIns"I'.~~ire , <j~
plus de 'cent ans' après l'époque e èe'S Himes;. 'd'à'iIle~rS: il
ell: inoui qu'aucun Prieur d'obédience ait eté éta·Hli œn rittê
perpétoel! Ces'tit'nis' ne fe font' établis r'qoe'
là ·fbh:è
denla poffeffion; & enfin le' Gbtlcile gén'éral "'de Vi nne
il cohfirmé leur établiffement 'au c'ommencé'lnetit 1 d~l ' ua::'
torzieme fieèle. 3°. C'ell: une erreur 'de ~p~éte~Clrè' :<l!l'e lé
mot Cella emporte ~vec foi l'iaée d'une convenruà iré; ,il
n'emporte au.' contr~ire que 'l'idée -C!e~ eadmini{l:rat~op
(l'une ferme ou' grange confiée'à url' Moine; admini{l:ra-,
tion amovible & révocaol.é aarl~ c~s' temps-là, ,&"> q'uj'-à
êontinué de l'être long temps après.' Et 'ft. puur railOn de
cette adminiarànon il y avqit plus. q\le 'd'ut; )M~ine' dette
circonHance ne rôrmoif J pas' llrle"convehrtîàlirê; a~trëmeilt
il faudroit fuppof"r ..,que tou~ I~s p.rieurés ·{imples' régulieîl~
qui fe font formés dans l'Eglife', font ~0ur.autant de priebrés
èonvenruels, puifqu'il n'y 'en: 1 aucll ' gûi' ne)folr 'ne od~
l~adrI)ini{l:r~tion d'une)' Céll~,; "'&1 -Hà'ns"leqlle1 1.il.
àit!-'eu
ordin~irement plus que d'un Moine-, lN cêla on :p!!u-t 8Joutër
que la -Bulle de Gregoire VII. bien-loin' dti: prouver c,efte
conventualité, en exclut toote idée, puîfqu'on y 'di1li'n,gue .
très-bien les Monafieres des !impies Celles : Mo'julflerium
Sanai Genifii...... Sanc7re Marire &' Simai, -p-eràb, <il'. &
en parlant des Celles, Cella sanaœ Marik<& Sa.~aœ' 'p/;l
peture, Cellà Sanare Marire de G'drelde, '&~!'~ 1 1 ... 111 Li
Le nouveau bail du 23 Septembre 1'381'1, bien-loin dè
prouver -cette conventualiré de Moines, prouve au contraire
une feule conventualité formée par' la Corllm'unauté des
Religieufes. Cette conventualité ne pouvait êtfè fol'rtIée
,
' ) K '2. J .l,\
par
n'y.
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.!T:>U
OJqU~"N,,"L,.,.I,
110
~. Al!~.~el:1Jq ItÇ!p'gie~xj wais ~!~en pa~ I~~, c.wc ~u .JeF..,GI13;r.
r~l,Itç)SeJig)e'1f~~, <tU) Y9mppfOlent l€: Mo al1:ere_ S~IJr'XI ~VOIC,
~u un, Mo-n~fiere qouble;,. il y auroit ~eu un.' double Cha3
jl)Xte l"~ .. nqn tyI [eu'!, :~infi qu'il.., réfulte :de l'aae. Si les
Mo-j9~~l,'I-:io-j~m! ~9l':mé 1,\. cpny.entualifé, ils aur.oient été
·f9,nW1.~slll5lt .prSLIW}~r~., .fart ,à, ç~ fe ~e>,la pr_éé~inence. d~
r~J /~Ke, ,;,.qu~1 P9~ce, qlj'.* aHroJ~nt ~te les .vrals Capl~~1
li1t}~ L'I~' lep? qp;f!s ~'y (Ont nor:nm~s, qu'aplès les Rdl:giey[ts". teJq)lel.J~s y font qualifiées' Rominahus, ~Damès,
gngis ,que .les. Moines y [ont fans ilucune qualification. •
~. QI11 faifoi,e,n( d,ouç, à I~ Celle ~~s ~eux. Moines? Un l
~raJl[a§:iqn _dl!.-+ Oao,qre 146~[l'expli\lue. Prr cet #le 1
le r,f~U! 's'g!Jlige de lten~r [SlUjour~' ,à !a, C.ell~, dèu'x }\1oij
1Jes·j}lfIjfa!!~s" "idoines & tçnpêqjs, c.o,mn1e=-efi de coutume,
1?9)lf çélébr«;r: l'Office Diyin. Et primo habita -informationë
jiJPfo., divino, OfficiA, f.~leb:rando', ,.idem dominus Prior pro:
f[liJit~ &.éon'y.enit quod.,- 'lfJaf!,dQ.:Jéef I:ri~~ ipjius .prioratqs
!Ir/O., 4'I'Uœ ,Jafie! dlvi:luj7l- PiJic.llf'1f' 'luantu,'!! ad ipfum pel';
YneJ.' flf}git(;-IJc~l6h.!:ar.j,,, &,/(! pfil(plfrep 1 ten~;,~, continuè duos
~N~If.m ..Mon~G!l().s fufficientlf,{ ,
elis) &. honéflos., prout J
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MOl~S :qp,'on VQIÇ fig!jEl'r Ld~PJ le, nouvefu BaIl de )'ag:>
n§e.:;BS F. ,it l~ 'l céJ,é~r(lri9n_ de l'Qffic.e pnÎin. L'indu&ion
Olle J... "'hapit5ellw-eUtA
tirpr,' .de l'aéfè,du 1 Janvier 14'C', >t'
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',i,e ,"flSl'IJ;l,9,:l;~ ~ gente(ffû. ~rJPi!ii.'rn'eit pas ex.a~ë; jamais'~rs
mots.rt'onLPu eX-p'n}?pe[cle~ l'4?6 es,d.'un Clo~veFlt. .' ," ,
"'. R:.l1.': qeYle.nr ~O!)9 1l:)I[el1J!:)Ign~ge de Zl1Ht~, qU.I fait af:
f>jl:e'r'-':'u~i.1?m~~r f9!w<enruel d;ul\ Couvent de Momes à la
I;~l1e1'XJ~ M9içiIl:ti. <!~~!,~gl\[t;' ~'H~e[câ"ën -4°9)',' pen;
dane qu'il réfuJ[~ d~s' t~'res ,produits par le Chapitre Jui11lêlTIe,; qu'.~ . njYi ta' jà~ais èu, üne pareille conventùalité "
~Îrqup ~Wu[ ;ljJ'1"ontr~i!'t:, ~n exclu;' l'igée?, S'en" e~core
u.n~ ~~rreur <I.e' tPuten tqque ce pr-erendu Pneur ero[[ un
l': ill.ur. tj,tlll\lir-e. Q~tfe ::fiue;. c:e~' foSt1~ de' Bépéfiçes n'éwi'e 9
pas encQf<;,:c,ounus dâns l'Eglife ,& qu'iÎs ne lè furent que' p!us
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t1p..deux. Gedes après, le Chapit(e ne produit aucun titre
·avant l'année. l'Sa3 duquel on ,puiJI:e, conclure le titre] d~
Bénéfice en faveur du Prieur. I,.es j\uteurs dû, Ga/lia Çhri[r
-tian,a, bien-loin d~. fa.vorifer cene, idée, parlent d'une,
maniere tout-à-fait oppofée i puifqu'en citant la Charte de
Charles II de l'an 1292, ils, difent ,,!zoc tamen rempore,
p'rjores ;mfnimè aT1wi. funt. C~s. ~te,rmes fuppofent, nécelfai-rement que ces Auteurs étaient perfuadés que l,es Prieurs
pouvq.ient r.non-feulement être ,r~voqués, -mais, que leur co_m
million pouvoit être entiérement fupprimée; ce qU,i ne
peut ,fe concilier avec un titre de Bénéfice.
.,
j
E.h 1. comment ces Auteurs auroient-i1s regardé la Celle
comme ,un Prieuré mafculin '"eux qui" après avoir dit u~
mot de la réforrl}e, de 16 S8, donnent un catàlogue des
Prieurs dont ils avoient connoi1fance, & qu'ils repréfenrent comme les ritulairei du Mona!l:ere? Le titre de cè
cqtalpgue porte '; Series PrioriJ!àrum, quarum nonnullœ
dicuntur ,AhhatiJJœ. Aurait-on iam'ais donné le nom d'Ab~e{fes à des Prieures cl,!u!l:rales; comme les appelle l'Aa~.
mini!l:rate,ur du Chapitre?
.
:- La demiere de-ces Prieures dont' il foit fair mention:
dans ce catalç',gue, e!l: Hdiona de Cafl.eiana, fi/ia Hono~
t~ti de ÇaflelfInq de Monmayan, & Margaritœ de Giandeves di,e. 29 Januarii z 578, providetur de AMatia artce
Cellœ vacante pel' ohitum .Romanœ de Renco. Ces expreffions caraél:érifent avec énergie des _provifions, un titre
de Bénéfice' féminin, ,~une veritable titulaire. Quiconque
eH établi dans une Eglife à perpétuité, avec droit d'y
exer.cer certaines
fonél:ions, & percevoir ou adminiHrer un
J
temporel , eH: vrai tirulairi, vrai Bénéficier. Or, les Prieu{es de Li Celle ,ont t'?~jours été pe~pétuelles' jufques à
la ';éforme'; ellés' ~ll.t eu le gouvernément de leur Communauté,' avec droit d'admini!l:rer les biens' du Mona!l:ere:
fuivant la Regle de St: BenoÙ. Le Chapitre convient nom':
mément' de cette perpétuité, Donc la Prieu're a' été dès le'
princip-e ét'ablie en titre; donc le Prieuré était féminici.'
DU
DE.
,PltOVENC!l:
4
•
1.
1
�,8
Jou RNA L
Ces Prieures éroient infiiruéés par l'éleaion de teur éominunauté, laquelle écoir confirmée ou. par l'Abbé de Sc.
Viaur immédiatement', ou par le Prie.ur de la Celle en
qualité de Délégué,· ou comme repréfentant l'Abbé. Dès·
lors pourquoi demander des aaes de collation? Ignore-t-on
que de toures les voies introduites dans l'Eglife poue pourvoir .àux· Bénéfices, la plus ancienne & la plus réguliere efi:
telle de l'éleaion ? .
Li! 'preUl'e que la qualité de Prieure n'étoit pas un (impIe Ofliée c1aufiral, mais un vérirable tirre de Bénéfice,
& qu'elle étoit· exercée comme telre par les 'Religieufes
qui l<l remplilfoient, fe trouve dans la prire de polfefIion
de la Dame Honorade de Rouffan, qui fut élue pour fuciéder à la Dame Romaine de la Croix. Elle ob!:;;t enfuire de i forr éleél:ion, des lettres de pfc..-iGon de M. l'Archevêque d'Aix, Vicaire-Génér;>! cie l'Abbé de St. ViS:or;
enfuite defquelles elle pr!. polfeffion. En voici les rermes;.
ils prouvent que c'~fr avec jufiice que les Auteurs du Gallia
ChriJliana regardoient la Prieure de la Celle comme une
véritable tirulaire d'un Bénéfice. " Et en exécution de- ce
" auroit pris par la main lad. Dame Honorade de Rouf" fan, Prieurelfe dud. MonaHere , & icelle menée au grand
" Autel de q:glife dud. MonaHere, & fait mettre à ge," noux, & après avoir fait leur Oraifon; fe font levées
" & ont décbùvert l'Au'tel, & icelui baifé, & fait le fignè
" de la croh, & icelui couvert, & 'mis lad. Dame Prieu" relfe en polfeffion réelle, aauelle & corporelle de lad.
" place de Prieurelfe dud. MonaHere; & delà icelle menée
" au chœur, & mis la Dame Prieurelfe en la chaire &
" lieu accoutumé ol! fe fouloit alfeoir lad. Dame Prieu" relfe en figne de vraie polfe1Iion réelle, aauelle & cor" porelle dud. Prieuré, fes droits & appartenances.... &
" après ont palfé lefd. Dames devant lad. Dame Prieu" relfe, ayant un manon de verges à la main en figne
" de MagiHrac, & à, chacune a donné defd. verges en
" manicre -de correéhon & d'obédience, &c. l)
�DU
P ALAI,5
DI!
PROVENCE.
79
Reconnoît-on à. ces caraél:eres un fimple Office clauf,.
tral? N'y voit7on pas a~ contraire t~us les fignes qui dé..
fignent un vrai B~néfi,ce, ~ rous ~es cara~ere~ ~ui~le; difr
tinguent, la perpetuite, la J\lnfdlél:lOn & 1adnllmfiratIon ~
~e~ titre n'a:..t-il pas continué fur la tête de toutes les
Prieures qui ont été à la Celle?
Ainli de ce que le Prieuré féminin qui éroit éleél:if, & que le
prétendu Prieuré mafculin éroit collat if, c'efi une preuve
fans réplique que le Prieuré féminin éroit plus ancien que.
le Prieuré mafculin, & que c'efi dans le premier QU~ :~~de
la Prélature.
Vainement on objeél:e que li l~ ~rieuré féminin étant
.~Ieél:ifj ~'.'~~~ ~té un ':'~;:; ~;lre
Bénéfice, il feroit tombé
à la nomination du Roi. Plulieurs Communautés ont coo..
fervé, en vertu de titres particuliers, l'avantage d'élire
leurs Prélats : il y eo a d'autres où le Roi n'a exercé que
long.-temps après le Concordat, fon droit de nomination.
D'ailleurs on a douté pendant long-temps fi en vertu du
Concordat', le Roi avoit droit de nommer aux Abbayes
& Prie,urés des filles : Dumoulin & Rehulfe 01t penfé que
le Concordat n'attribue p_oint ce droit au Roi, fur le fondement que les Monafieres de filles ne [ont pas exprelIément dénommés dans ce traité. Telle, a rou;ours été &
telle ell: encore aujourd'hui la prétention des Officiers de
la Cour de Rome. (Mém. du Clergé, tom. XI, pag. 87,
ae
97· L
Mais Ii les Prieures de la Celle n'ont été que. des
Prieures claufirales; c'efi une conféquence néceffiiire. que
les Prieurs de la Celle aient été les titulaires du Monail:ere,
ou des Prieurs conventuels: or, Ii les Prieurs de la Celle
ont été ou prétendu être les titulaires du Mooail:ere des
Religieufes, ce foDt dés ûfurpateurs manifeil:es, parce que
Je ,Monafiere même ayant été poffédé en titre de Bénéfice, ce titre de Bénéfice eil: abulif, & ne peut fublifier.
~e fait, le Chapitre convient que ce Bénéfice. a été pof..
fede comme conventuel. Ce ne peut être crune con-
�.
tlo
J 0 V R N If. I; ,
ventualité de Moines, puifqu'on a prouvé qu'if n'y•.en ayoit
/ jamais eu à la Celle. Donc il~ poffédoien~ en titre le Mo:
naflere des Religieufes, & c eH là pnnclpalement ce' qUI
conflicue l'abus. Inntilernenc on voudroit concefler' que cè
Frieuré a' été poffédé comme conventLlet Il n'1 a qu'à.
voir les. différentes proviftons de cous ces prétendus.
Pri{ urs', qui cous en. ont éré pourvus comme d'un B'énéficeconventuel. D'ailleul'S ce Prieuré avoir éré· déclaré Prieuré_. convencuel du Monaflere des. Religieufès, par un Arrêr du·
Grand' Confeil· du mois d'Oaobre 16o~, rendu entre deux.
concendans, doill l'un en avoir pris des pr.ovilions comme,
lI'uo" Bénéfice conventuel ac7u.
Cerre Arrêt ne fut rendu qu'"après uri. verbal- de vérifi~
carion, qui. juflifie que " cout c.e qui efl néce!faire pou}""
" faire' qu'un Bénéfice foi.t cenventuel, fe rrouv.e· dans' ce·
" Mon·aflere de Religi~ufes.. " Philippe Tournier, ruer de·
ces Prieurs, difoit dans une Requête préfenlé~ 11' la Cour'
le :l l Mai 1635 ,. que " ce Bénéfice efl de fair un Prieuré
" conventuel· de Relig-ieufes de l:Ordre de Sr. Benoîr,
" dépendant de l'Abbaye de St•. Viél:or-Iès-Mdcfeitle, qui,
" doü être régi & . gouverné· par un. defd:. Religieux 'qut
" en prend le titre de Prieur cOlLventuel, l i Enfin. .Mré .
Limon 'Iui - même, après. s'être fai·r pourvoir de ce Bé'né.1.
lice comme d'Ull Prieuré conventuel, hahÏlu & non aRu ,.
reconeut· ,que .fon. tirre 'n'écoir pas régulier, & iT en:
prir de nouv.elles provifions avec. le titre de c.onvenruel.
Qc7u.
.
1
. .
•
. Preffé' par toutes ces preuveS', que le Chapitre ce replie
fur l'Arrêr du Parlement de 170) qui déclare les Prieurs.
n'être, ni pouvoir être, ni fe dire ou qualifier· Prieur.· con-.
ventile! .du. Monilflere· des Re!igieufes.. Cet Arrêr ne le
déclare que depuis la réforme ,. ç'dl:-à-dire' que· c'efl en,
con'féqùence de lierre réforme que la convebtualité· a ceffé•.
Ces mots. en conftr;uence, qui précedent la difpoli~ion ré-.
clamée par le Chapitre, le démontrent bien c1airemenr. AiDli
en: lè. bornant à eexamen du flfiême du. ,Chapitre, on,
ltOUY~
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P ALAIS
DB
PilOVENC 1',
8r
trouve la preuve 'ql'e le Prieuré de la Celle r'o;' !ln Bénéfice féminin. Pour prouv~r la jufie!fe de '~ous ces' r~i ,,1;nemenrs, les ,Dames Religieufes. s'aurorifôienl\ e.nl ore de
plufieurs litres par. lefquels elleS-I)fOUYO~~?r:; leur fon.d~t ion
par les anciens Comres ,de Provence, .& la propnele du
Prieure & de cous les me'mbres qui le compofenr.
_ Ces riU'es, ajoutoiem ~s Dames Re);gieufes, , ne fCllc
poinc . de fimples copies fufpeéles; ce' fbnt· des titres à
l'authenriciré, defquels ie Chapirre St. Vi&or efi obligé de
renU re, 'hÔffitflâge; originâux pour 'la, plupart ém'anés des
mains- de nos' an'ciens Souverains, 're,.vêr'us ~de· toutes les
formes pref.:rices dans ces temps-là, & enrégiHrés dans
tous les dépôts publics', & fu'r-tout dans les Ardiives du
Roi & de la Nation Provençale, confervées à Iii Chambre des Comptes·à 'Aix. Tous 'ces titres prduvehc. invinciblement -que' tous ~Ies biens qui' forment le Ptieur'é de
la Celle, om été donnés aux Religieufes, ou par elles achetés, & qu'elles en ont eu la po!feffiorr & l''adminifiration.
Le premier de ces titres efi la Charte d'Ildefons du 8
des Ides de Mai· II 67 ; elle efi conçue en ces termes :
Dona, laudo, conceda Domino .Deo & Sanc7œ Mariœ
SanBoque Vic70ri de Majfilia, necnon Abbati Petra cum
Monachis ihidem Deo ferl'ientihus, tam prœfentihus quam fururis, & San Bis Monialihus fcilicer quœ in A1.onaJlerio Sanc7œ
Perpetuœ funt tel deinceps erunt cuni Cellis jihi fuhjeBis atque l'illis. Cette donati'ln n'eH point en faveur des Moines
de la Celle, ni d'un Prieur de ces Moines; elle eH tome
en faveur des Religieufes qui font dans le MonaHere de
Ste. Perpérue; ce qui prouve 'lue ce MonaHere n'étoit
alors formé que par les Religieufes. Il eH vrai que cette
donation conjoint avec les Religieufes de la Celle , l'Abbé
Pierre, & les Moines voués au fervice de Dieu dans le
Monafl:ere de St. Viélor. Mais l'objeélion qu'en tire le
Chapitre efl: inconféqueme : St. Viél:or de Marfeille, Pierre
Abbé & les Moines de fon MonaHere ne font point ni
Je Prieur ni les Moines de ·Ja Celle. Ils étaient le chef
Années 1781 (( t78:l.,
L
�82
,
Jou' RNA L • l ,
d'Ordre; les .Religieufes étoient fQus feur obédience.. Sn'
Viél:or efr l'objet de la dévorion, tout comme Dieu & I~
Vierge. L'Abbé & les Moines fopt rappellés, parce 1 que
leur qualité de. "chefs d'Ordre leur attl'iQ.uoit la direél:i.oq
& la furint.endance du ,Monafrere. Mais les feuls & 'vrais
Donataires, ce fon.t les Religi.eufes, qui forPloient le Mor
n.afrere de Ste. Perpétue, Sanéjis Mania/ihus fii/leet quœ
in l\tlanafteria Sanaa ,Perpetùœ funt;. Cette diél:ion fciliee~
eH: refrriél:ive 4e. fà l)ature, comme le dit Ba!'bQfa en fon
Traité de 'JJic1ion. ufufr.eq. diél:. 357 ; 1 ~ ~omme, te.lle, elle
fixe & déclare t'objet de l'oraiJol}Q/l .~lle. .fe, trouve em'
p 1oyee.
,
. . " . J , Z ••.
Suit l'énumération des biens qui. fdnt la rpatiere de la
donation ou de. la confi,rmation; & .dJns çette .énumération on trouve toujours .plu.s là. p.re\iye· qu.e les Religieufes
feules en étoient l'objet. Les Eglif~s & lé.$,.Seigneuriesde Camps & de Gareoult; le.$ Eglif.es d.e·. S~",)Jean, de
Pierrefeu & de Colobrieres, & ce que les 3aintes Religieufes y. poŒede.ntj les Egli(es, de .St. Michel d'Hyeres,
de St.• Benoit & de St. George de Bormere , & ce qu'elles.
polfedent dans le lieu de Borme.; les Eglifes de See.. Marie.
de Salaratan, de St. Eucher. de. Bras., de Ste. Marie
de la Gayole, de St. Pierre de. Brignoles & .de St.,
Jean; l'Eglife &- la Seigneurie de Cabaife;. & tous
les hommageables qtl.e. les, ReLigiellfes poifedeoc. 11-.
defons confirme toutes ces Eglifes & Seigneuries avec
leurs droits ufi.tés & alberg.ues , .comme fon 'pere Raymond Bere.nger les a '.donnés ~ Dieu & aux fus nommes Freres. & faintes Religie.uCes. Ce don eU fait dans la:
fufd. Celle de Ste. Perpétue, dans Ie.s mains de Guilleaume,.
pour lors Prieur. dud•. Ii.e:u ,. & de. BonafejJIe .P.riellre. Or,
d'après la. le.éiur:ede c:e.ne,.Char.te on oe peut fe Jormer
I.e moindre doute. 'Q\ti fontli,ceux -qui,,{pnc'iappellés dans le
corps de la. donation t ce ne .font o~ l'Abbe Bierre,' niJ
les Mo.ines de S.a. Viél:or, ni Iles Moine.s de la Celle; il\,
n'en exilloit point ~pui.fqlUls, he foot·'pas appellés ;ce (onli
f::;Y'~' '{)
\"'. (:.~ ~ l
�DU
PALAIS
DE
83
'PROVllNCE.
les faintes Religieufes qui fane dans le MonaG:ere de, Ste.
Perpétue : quod il/ic Sanélœ Moniales habent j quidquid
poj[zdent in vil/a de Borma.... omnes homines quos, prœdic1te
Moniales poj[zdent..
.
,.
.
Mais, dit le. Cha pme ! Il Y av~l1t un, P.t1eur dans les
mains de qui cette donation eft, faite conjomtement avec
la Prieure. Er fans doute il y avait un Prieur, & il falloir bien qu'il yen. eûr un pour diriger les Re1igieufes
qui étoienr fous la dépendance de l'Abbé &. du Monafrere de St. Viél:or. Mais ce Prieur étoit-il un titulaire
en titre? 11 ne pouvoir pas l'être; les Prieurés fimples
:Réguliers étaient .inconnus, même long-temps après; ce
n'étoit donc qu'un Moine député par l'Abbé pour, régir &
adminiG:rer le MonaG:ere de la Celle.
Voilà pourra nt dans cette Charte tous les biens, ou
prefque touS ceux' qui forment le Pri'euré de la Gelle :, les
Eglifes & les fiefs de Camps, Gareoult, Cabalfe & au~
tres Eglifes; il n'eG: pas que!l:ion du Prieur pour cette
donation; il ne fait que la recevoir, & s'il avait été titulaire, ç'auroit' été lui fans doute qu'on aurait nommé, &
non l'Abbé Pierre & fes Moines.
La feconde piece e!l: une autre Charre du même Ildefans du mois de Juillet 1176; il prend fous fa protection tous les fiefs, tous les homm'ageables. & tous les
biens des Religieufes de la Celle: totum honorem & homines & omnes res Monacharum de Arcel/a. Il n'e!l: fait
aucune mention de Moines ni de Prieurs de la Celle,
quoique cet aél:e fait fait à' la Celle même, ac1um apud
Aral/am. Les Religieufes polfédoient donc des fiefs & des
'valfaux ; quels étoiene-ils ? Ceux dont il e!l: fait mention dans
.la Cha~ de 1167. du même I1defons. On trouve dans
c~tte feconde Charte une c1aufe remarquable, par la quelleil e!l:
d.lt q~e fi. quelqu'un de leurs vaifaux quitte leur Seigneurie,. Ji. faIt permis a~x Dames, au Prieur, & à ceux qui
o~t fom de leurs affaIres, de le faire retourner au fief ~
LlaAt Dominahus G' Prion.G' tis iJui çuram rerum fuarum
J
.L .2,
�84
Jou RNA L
telluerint. Les Religieufes y fone dénommées propriéraires;
Domina6us; le Prieur n'ef!: là que dans la claffe de leurs
gens d'affaire, Priori & elS qui curam.... Donc il n'écoie
qu'adminiilrareur, & non propriéraire, puifque rour eH déclaré appareenir aux Religieufes : totum honorem homnes
& omnes res Monacharum de Arcella.
La eroifieme dl: une Charre de Raymond Beranger du
29 Mai 1179. II donne au Prieur &. aux Dames de la
Celle Réguliere toue ce qu'il a ou .doir avoir dans le
village de Cabaffe, & veur que le cour foie renu & poffédé pour le Prieur & les Dames de la Celle. Une preuve
que_ le Prieur, quoique 1iénommé dans cet aél:e, n'écoie
jamais l'objet de la donarion, & qu'il n'étaie confidéré que
comme adminiilraceur , c'ef!: la reHirueion que Charles II fie
faire. de cette terre de Cabaffe aux Religieufes en 1292.
En la même' année des Commilfaires du Comre de
Provence adjugerene aux Dames Religieufes, le Prieur f!:ipulane pour elles, contre l'Abbé & les Moines du Toronet, le Château Grenon, comme fairane partie du terroir
.de Cabaffe. Le Prieur y ef!: qualifié Prior Monialium.
Donc il n'écoie que le Prieur des Religieufes, & Tlon Prieur
de Moines. Une Feconde conrefl:ation intervenue entre les
mêmes Parti.es donna lieu à un nouveau jugement de l'an
1218 , dans lequel il eil dit, Prieur {,. Couvent. Il n'y avare
donc qu'une conventualité; c'étoie ceUe' des fuligieufes,
puifque coures les difpofitions de cee aél:e fone relatives
au -Monafl:ere des Religieufes, & une fuite de l'aél:e de
1179·
.
1
En 1185 Ildefons copfirma de nouveau aux Religieufes
de ·Ia Celle les donations: qu'il leur. avoie faites de la
te~re de. Caba~e, & il leur donna de plus da Roquette',
qUI, quoique fà.fant partie de cette "cerre, en avoie été vrai..
femblablement démembrée. Le Prieur; quoique nommé
avec les .Dames dans cetre Charce, y avoir 'pourtant fi
peu .de. pa~t, que le même. Ildefons en Février 118 9,
rendit. un Jugement fur le procès qui s'çtoie élevé entre
�DU
PAL AIS
D Il - PRO VEN C Il:
SS
les Religieufes & Pierre Efciry, fur la propriété de la
Roquette, par lequel il adjugea la propriété de ce fief amc
Dames, Domina/JUs, fans que dans cet aél:e il foit die un
feul mot du Prieur.
.
En 1190 le Monall:ere acheta une parcie de la terre des
Pennes; l'aél:e a uniquement pour o,bjet le Monall:ere. Le
Prieur n'y ell: nommé qu'après le Monall:ere, Monajlerium
de Arcella, Priorem & Dominas. Les Sentences arbitrales
des 12 Novembre 12.00, & 1J des Kalendes de Mars
12. 18, confirment au Monall:ere cette propriété. Le rell:ant
de cette terre fut donné au MonaHere par Bermond des
Pennes, le 18 Oél:obre 1362.. On voit touj'lurs plus dans
cet aéte, que le Prieur n'étoit qu'un adminifl:rateur. Rouftan d'Efparron, Prieur, reçoit cette donation pour & au
nom du Monall:ere, attendu l'utilité dont [elle fera au Monaftere, & il en demande aél:e au nom du MonaHere. Priori
facri Monajluii arta Cellœ & nomine diai Monajlerii jlipulanti.... qui q.uidem Dominus Prior dOflationem ipfam nomine die1i Monajlerü gra!am ha6ens, & ipfam utüem die10
Monajlerio reputans.... de qui/JUs ipft dominus Prior. petiit nomine die?i- MonaJlerii ji6i fieri pu61icum inftrumentum.
Le 3 des Kalendes de Décembre 12.02, Ildefons II
reconnoiffant d'avoir opprimé injull:ement le Monafl:ere de
la Celle, confirme aud. Monall:ere -& aux Religieufes qui
l'habitent, co".firmo prœdic10 Monajlerio & fanc1i.ffimis Moniali6us, . tout ce que fon pere lldefons avoit donné au
même vénerable Mona[}~re, quidquid Pater meus Ildefonfus
eidem wnerando Monajleria nofcitur contulijfè. Il exempte
de toutes charges les Eglifes & les Seigneuries Arcellœ de
Campis , de Gareudo, de Cabacia. Il y eft auŒ parlé des
Eglifes de Brignoles & de tous les hommageables, foit
Clercs ou Laïcs: qui fœpe die?i venerahilis ae fanai Monajlerii dominio funl [uhjec1i.... 'luœ ad prœdic?i MonaJlerii
dominium pertinere videntur. Donc la donation de II67
étoit faite - aux. Religieufes, puifqu'elles poffédoient toUS les
.objets qui en font la matiere.
�J·o
'86
U R li' A. L
Au mois d'Avril 1208, Douce d'Efperei donne aux Religieufes tout ce qu'elle poJTédoit auprès de la ville de Brignoles. Le Prieur re<;oit cette donation au nom des Religieufes : dono... Monialihus Arcel/œ Sanaœ Perpetuœ, &
tihi G. de Cerveria, Priori dic1œ domûs prœdic1arum Monialium nomine. recipienti. Dans la même année, Sance,
Comte .de Provence, confirme cette donation faite Monaflerio fanai Monialium Arcel/œ. Donc le MOllaHere de
la Celle·& de Ste. Perpétue étoit le Monafiere des Religieufes; donc point de convenrualité de Moines..
Le 2. des Nones de Septembre 1213, l'Abbé de St.
Viaor & les Moines de fan Couvent envoyerent une
commiHion à Guillaume de Cerveria, Prieur de la Celle.,
,pour établir un Monafieie de Religieufes à St. Zacharie. II eit
.dit dans cette piece que cette nouvelle Maifon fera fous
.la dépendance du Monafiere de la Celle, & lui fera fou·mife comme une fille l'eH à fa mere, quod domui Ar·allte fuhfit tanquam filia matri. Le Prieur de la Celle &
.fes fucceffeurs foM appellés à la direaion comme peres
fpirituels : fufcipiatque correc7ionem tuam tanquam patrum fPiritualium. Le Prieur n'étoit donc, fuivanr l'Abbé & lès Moines de St. Viaor, qui connoiffoient & qui devaient con-noitre fon ét at, que le pere fpiriruel des Religieufes.
Donc il n'éroit point titulaire d'un Bénéfice, ni copropriétaire avec les Religieufes.
.
L'Abbé & ·les Moines' expliquent enfuite quels font les
droits qui leur compétaient à la Cene, & ils fe retiennent fur la. Maifon de St. Zacharie, tous & les feuls
-droits qu'ils reconnoiffent avoir eu jufqu'à préfent
fur la maifon de la Cene: omnio & [ola illa qute "in domo
Aral/ce ufque hodiè cognofcimus hahui.f1è, & qui ne font
que des droits de fupériorité. Reverentiam videlicet, correBionem & vifitationem, inflitutiones quoque ac deJlïtutiones
j'!flis oc rationahilihus caufis exigentihus, Officialium & Prio·rÎs. Le Prieur pouvait être rappellé; donc il n'émit pas
.titulaire;
donc il n'était que· le délégué de l'Abbé & du
.
.
..
/
�D U
PAL AIS
D E
PRO VEN C ~.
87
Monafiere St. Viétor. Il n'était donc que le Supérieur, le
Pere Cp irituel; donc il ne poffédoit rien, puifque l'Abbé
& les Moines dont il étoit le mandataire, déclarent n'avoir
que des droits de fupérioriré.
Le 17 des~kalendes de Novembre 1227, Guido & Hugue
de Roque Freres & Dracona leur fœur vendent à Guidan
de Mandagot, Prieur du Monafiere de la Celle, achetant
<lU nom du Monafiere, ,menti nomine Monajlerii, tout ce
qu'ils ont & poffedent dans le lieu de la Roque en fonds,
terres " maifons, fervices, juflices, &c. Toutes les c1aufes
de cet aéte font adreffées au Prieur pour le M.onaflere:·
Priori reepie1lu nom/ne die?i Montif!erii
nos te miJJùr.os nomine die?i Monajlerii in poffiffionem
cedimus tihi Priori
nomùze diai Monajlerii & parte ipfi Monajlerio. Enfin il dl:
dit dans cet aéte que dans la fuite le Prieur ou tel autre
au nom' du Monaflere pourra agir : ita quod deinceps 'tu
dù1us Pr.ior l'el alius nomine diai MOllajlerii polJit agere. Le.
Prieur n'agiffoit & ne pouvait donc agie qu'au ,nom du
l.\1011afiere , puifque c'éro.it le Monafiere qui achetoit.
Une charte de Raymond Berenger du 4 des nones de
Novembre 123') affranchit la terre de c;ampduemy de
t·outes. quêtes, levées, &c. Cette franchife .en: .accor.dée aUI
MonaHere de' -Ja Celle & à G. de Mandagot, Prieur dudit
Monafiere, recevant au nom du Monaflere, en fan nom,
celui de la Prieure & des Religieufes qui y fervent Dieu.
Au fujet de cette terre de Campduemy il exille un autre
aéte du, 7 ~es kalendes d'Avril 1238, par ·Iequel Pierre
Audibert vend à Guidon de Mandagot, prieur du Monaftere de la Celle, & au Monaflere de la même maifon
taus les. biens qu'il polfede dans le terroir de Campduemy,'
lelquels ten,hat fub dominio dic7œ domils Arcellœ.
, Le ., des ides de Juin~I236 il intervint un traité entre·
le Conu.e
ymond Berenger & le Monaflere, fur la Juftice des terr~s appartenantes au Monaflere. On y trouve la
Celle, Camps, Gareoult, Cahaffe, Campduemy & la Roque. Quolque dans ce traité le Prieur accepte Eour lui.
,t
••
�89
JOU
RNA L
le MonaRere, nomine [UO & nomine MonaJlerii, cependant
toutes les difpofitions font relatives au Mona,nere. La Junfdiaion defdits lieux appartiendra, excepte pour les cas
d'homicide au Monafiere, inugrè pertineant ad MonaJlerium. Quand la confifcation aur~ lieu, I~s meubles feront
partagés également entre le ROI ~ le MonaHere, & les
immeubles appartiendront en entier au Monafh:re ; mo.hilia inter nos vel noJlros, & diélum MonoJlenum aquls
portionibus dividantur, & immobilia omnia ~d MonaJlerzum
pertineant. De même, pour les amendes qUi ~er,ont par:agées entre le Roi & le Monafiere, & ce traite aura !leu
pour les terres que le Monafiere pourra acquérir dans la
fuite, telles que la Roque & autres.
Par une Bulle du 9 des kalendes d'üél:obre 1238, le
Pape Gregoire IX. prend le MonaHere.. de la Celle fous fa
proteaion, ainli que les biens qu'il polfede & qu'il pourra.
acquérir dans la fuite, & fpécialement les èhâteaux de la
Roque & de Cabaife ~ & autres terres.
.
Le 3 des ides de Novembre 1244, le Prieur, en confidération de la proteaion & de l'aifeaion que la Comtelfe Beatrix de Provence 'a toujours eu pour le MonaHere
de la Celle & pour l'utilité dud. Monaf!:ere, donne à la Comteife de Provence, pour en Jouir pendant fa vie feulement,
la terre de la Roquebrulfan, avec tous les droits temporels qua MonaJlerium arta Cellœ habet in diRo caJlro & ejus
tenamento; il Y retient pour lui & les Dames- du Monaftere , retinentes nobis f;' Domina/JUS l\rIonaJlerii Arcellœ, la
(;e~fe en bled, la cenfe. du moulin & celle en argent; il
retl.e?: encore . pour le -Monafie:e, dic70 MonaJlerio, la
moitie des Jufbces & autres droits, & que le Baile que
la Dame Comteife établira audit lieu, jure fidélité au
Prieur de la Celle; enfin que la Darne Comteife fera expédier au MonaHere une c.harte de ref!:itution de ladite
terre après fd mort. Au bas de ce traité la Darne Comtelfe promet vobis G. Priori arta Ce/hl!, & per vos toti
Conventui dic?um caJlrum, ad hono"m Dei ~ diai Monarter;
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PAL ArS
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PRO VEN C E.
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terii fideliur tenere & cuflodire, & diaum caJlrum die 0 .10naflerio reJlituere.
Le 6 des kalendes de Février 1246, R ymond & res
..freres payent le lods & lrezain d'une acquifilion par eux
faire à la Celle, & fe foumellenr à tous I·es fervices' que
les aurres habitans de la Celle font à lad ire maifon, &
facere a/ia ufatica qulZ fadunt domui a/ii homi:rles de Aralia.
Un Moine de SI. Viélor s'élant emparé de la lerre de Caba1fe, les Religieufes eurenr recours à l'aurorilé de Charles
II, qui accéda à la Celle le 22 Juillet 1292, accompagné
de l'Abbé de SI. Viélor. Marie de Nevis Frieure ayanr fait
a1fembler fa Communaulé, expofa au Roi que ce MonaCtere avoit été confhuit , fondé & doté par les Comres de
Provence fes prédéce1feurs, qui avoienr donné pour la fllbftenralion des Religieufes pllliieurs fiefS & pllliieurs lerres,
enrr'aulres la terre de Caba1fe pour leur vefiiaire, que cerce
terre leur élOit détenue de fac70, non de jure, par Jacques
de Barres Moine de Sr. Viélor, fous le nom de CatnérierPrieur, feu guhernatorem feu receptorem fruc7uum diai caJlri,
& qu'il ne leur donnoit que le plus pauvre vefiiaire. Charles II. fit lire en fa préfence les privileges des Religieufes, & voulant en procurer l'exécUlion, il ordonna, du confenrement de l'Abbé de St. Viélor, qu'à l'avenir aucun Camérier - Prieur, feu guherna~or, ni perronne aUlre fous quelque nom que ce fÎlt, ne pût fe mê1er de l'adminill:ration
de ladile lerre de Càba1fe j l'Abbé révoque ledit Jacques
de Barres de ladite Camérerie, & le Roi ordonne, conjoinremenr avec l'Abbé, que les Religieufes en jouiront
& percevronr les fruits comme elles le trouveront bon,
fans que perfonne pui1fe s'en formalifer. Huit jours après·,
le Prieur demanda & obtint de· Charles II. la confirmation des privileges accordés par les anciens Comtes ail
Monallere. Il fit cerce demande, tant pl'O parte fuâ, quàm
pro parte Monialium. Mais on ne peue conc1ure-de là que le
Prieur eût quelque droit qui lui fût propre, puifqu'il ea
prouvé par tous les aéles, que tous les biens appartenoien.t
Années z78z " '783..
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puiCque dans la charte du 18 Août meme anQée, il déclare que les habitans de la Celle & ~e Camps font les
valfaux du Monafl:ere : '!amines de campzs & de arta Cella
'luas prœdiaum ManaJlerium tenet & pojJidet.
Dn aél:e du 26 Mars 1313 contient l'enrégifl:rem~nt d'un
ftlandeme.nt du Sénéchal de Provence, porcant de decharger
les habitans de la Celle, Camps, Gareoult & la Roquebrulfane dépendans du Monafl:ere, des droits auxquels on
vouloit les Coumeccre. En 1339 le Juge de Brignoles permet
de rebâtir le château & les priCon~ de Camps qui étaient
fournis au Monàfl:ere. Le 3 Août même année Sentence
rendue contre un particulier de Camps par le Juge ordinaire de la terre du MonaHere ·de la Celle. Septembre
même année, Ordonnance du Sénéchal de Provence,
porcant révocation ·d'ull Bdile royal' qui avoit été établi au
lieu' de. Camps. Le Prieur qui la demande en fon nom &
au nom <les Dames ReligieuCes dudit Monaftere , dit que
de c<:rre nomination il r~lillroiç un préjudice pour le MonaHere, in prœjudicium MonuJlerii Arcellœ. En 131.0, le
Prieur réclame la connoilfance d'un délit commis au lieu
de Camps par ~n particulier dudit lieu, pro jure ll1onafterii confervando. Les 3 Mars. 13 66 & 30 05lobre 1367 ,
Ordonnances des Ma'îtres I{'lCion<lux de ceçte ville, qui, à
la requête de la Dame Prieu-re 1du Monail:ere cJe la Celle
déclarent les habitans de la Cell~, Camps, Ga reoult
Cabalfe , fes valfaux & hommageable~, exempts des cavalcades.
La Comtelfe de Provence, au lieu de rendre aux ReIigieufes de la Celle la terre de' la RoquebruŒIl;e dont la
jouilfance lui avoir él~ donnée par le lrailé du 3' des ides
de Novembre 1244, donna cene terre ·avec' plufieurs aut:es 11 l'Evêque de MarCeille, en échange de la JuriCdictlOn qu~ cet Evêque avoit filr partie de ce He ville; comme lors
de la renllffion à la Cortltelfe B~atri", 'le Prieur avoir réCervé
au Monafl:et'e la moi~ié de- la .J~lfbce & ,antres droits, I~ur
&.
..
•
�DU
PALAIS
DI!
PROVENCE.
91
exercice occafionoir de fréquenres conreHarions enrre les
Officiers de l'Evêque & ceux du Monafiere. Le Pape Urbai'n V, qui avoir éré Abbé de Sr. Viéior, pour me'me
fin à ces. conrefl:arions, adrelfa à l'Evêque une Bulle ldarée
d'Avignon du' 3 . des Ides de Juin, la' rroHieme aClné,e.de •
fon Ponrificar, par laquelle il permer à l'Evêque .de ven,..
dre tous les droirs qu'il avoir fur la RoquebrufIàne,' ~al1
Prieur·, à. la Prieure & au Monafl:ere de la Celle au prix
de'300 fltirins d'or. Enfuire de cerre Bulle le,df Jôin 1365.,
l'E'vêque ,Ide ·l'avis de fon Chapirre, vend au' Prieur & à
la P;'ieure, nomine tamen dic7i Monaflerii. Le 18 Juillet
fuivanr, un Moine de Sr. Viéior en fit· hommage en qua'.
lité' de Procureur fondé du Prieur, de la Prieure & du
Monaflere. Dans la' Bulle' d'Urbain V on lit ces mors
remarquables, en pàr1anr du MonaHere 'de la. 'Oelle ': per
Priorem & PrioriJJàm foliti guhemari..
.- "
~ •
Lé 13 Décembre 1390, la Reine Marie ,," Comrelfe
de Provence, accorda aux Religieufes de la Celle des
lertres de Garde.Gardienne. Dans cerre Charre on .rerrouvé
encore la preuve de la· fondation de ce MonàHere par
les Connes de ·Provence fes predécelfeurs ,:' &. ql1'e' e
Mbnafl:ere' éroit lun feul MonaHere de Religieufè's.•.• !41ffe-etu'm ad Prior!ffàm' & Moniales Monaflerii arta CellCe timquam opus manuum prcedeceJlôrum noflrorum..... prcedeèeffo11Jf71!"ncljlrorum operâ & dotatione, fundatum. ,II , n'y avo.it
'dénèl qu'uN MonaHere, & ce M6nafl:e re J étoir de Reli..
gieufes & il avoit éré fonaé 'par les ComtéS de Pro-vedce., qûi lui avoient donné -pour 'la' fubfifl:ance des Re:'
iigieufes multa hene.ficia.& pIura .càflra.
Le 18 Juin 1391, la Prieure & Pierre'Tardivl', ProéureUll de Ponce
Grimaud,
Prieur de la Celle, .donnerent
•
r
<à ferme la terre de Camps au nom du MartaGe're. • ,
L~ I I Ma'i 11392 ; 'les Religieufes demanderent à Pierre
Tardivi, Prdcureur ~e Ponce Grimaud,' fe -compte de
fon adminifl:rarion, & Î1 fût palfé un compromis. à cet
égàrd.J Sans (avoir s'il· eft intervenu quelque Senrente·enM2
Y
r
J
�91.
Jou RNA L
fuice de ce compromis, on pel\c affurer que le compte
fut rendu; puifque dans le traicé qui intervint le 6 Sepcem,hre 14°3, entre les Religieufes & Jean Affana, celui-ci
fe chargea des effets qui avoient écé rerr,is aux Religieu..l
• les par Ponce Grimaud. Donc ce dernier avpit rendu fon
-compte. Donc il n'écoit pas propriétaire du Prieuré. Donc
c'était le Monaftere qui poffédoit, puifque c'en à lui que
.1'0n rend compte & qu'on abandonne l'adm,inilhation•
.< ~e (21. Février 14°2., les Religieufes obcil)rent, de$ .
lettres de contrainte contre les ha~itans de la Roguebruff<lne qui refufoient de payer les cens & feryiçes dus au
Monaftere.
Le 2.0 Février 14°3, les Dames Prieure & ReHgieu{es, arrenterent tou,tes les terres du Momnere•.Leur mo·tif eft, qu'il fera _plus l:1lutaire de s'occuper ulliquemen~
de Dieu & du Ciel, que des chofes humaines ,. &. d'évi~
'cer .Ies facigues qui les accablent cous les jours ,. à caufe du,gouvernement & de la régie du Monaftere de la Celle.
Elles arrencent les terres de la Roque, de Gareoult, de
oCampduemy, de Camps & de, la Cçlle, 1" Vicairie
·de l'Eglife de Brignoles & ce qu'elles poffedent à Hieres.
_ .Lé prix de .la ferme en: parrie en arge.nc, p·arrie en dif.tributions quocidienes de pain, de vin, & de bois aux
.Religieufes; la fourniture du vin pour la Communion, cell~
·de la cire & .de J'huile pour l'Eglife, .le paiement .de la
.redevance de la Vicairie de Brign~Jles;' enHu i.l en di! que
li les fermiers peuveqc faire encrer \Ille Religieufe l aud.
MQna{!ere, la moitié de ce qu'on en el} CqutL;tl1<: de donner pour l'encrée appartiendra aux fermier~, &,l'~ucre moitié au Mpnan~re.
.
Le 6 SePtembr~ fuiva9t, lçs Dame? .Religieufçs promectent d'apprpuver cout [ce quç la Darne' J.?riej.lre & fOIl
Conf.:il feront" relacivemenc au prpjet de permutation
entre Pqnçe Grimaud, Priellr cie la Ct:lle, §ç JeU!} Alf'\lla,
,prieur de St. Z.acharie : en conféquence la Prieure & fOll
.Con[eil traicent, ,!v~c .<;e qernier, qui s:bblige. de ~ C.oI1[':;-
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P A L,A 1 S
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PRO V Il NeE.
93
lèS' privileges & les coutumes des Religieufes; de .leur
fournir les difhibutions quotidiennes en pain, '{in, &c. l!Ç
~e leuJ payer 1.00 florins d'or annuellement. Les Dames
Religieufes lui accordent par grace fpéciale 1 de n'en p.aye~
que 100 pendant dix ans, afin qu'il puiJfe furvenir aux réparations qu'il Ce charge de faire aux membres du Prieuré
& du Mona!1:ere. II el!: de plus COIlVt:llU que lors de l'èntrée en poIreffion dud. Jean AIrana, il ferait fait inventaire de tous les biens mobiliers <lpp,!rrenans au MonafJere. A }a fin de çette tranfaél:ioll' efl: cet inventaire,
tant de tout le mobilier de la Maifon I;lauJl:rale & du
.Prieuré, que de ce qui regardo.it le ménage des champs,
comme bœufs, chevaux, &c. Or, d<lns cet aéte ce font
les .Dame~. quj. donnent l~~dminiftr~tipn à'J:~an AIrana, qui
la lui donnent fous inventaire; donc elles é,toiJ:nt p~o
pyiétàires, & le Pri.~r p~étoiF 9~e le!!r, a:gmin,ifl:,rat~ur.
" En 1408 t !t; Juge "deI B.rig!,o}lt,sj aY;3~t ,:vol!lu faire lIéte
<le jurifdiél:ion à la Roqu~b~u,Jl!!"nn~:, I~ilq. Affana, Prieur
de 1a Celle, r:éclama).1 iurif~iél:ion , & l:obtinr d'ap~ès la
1Julle d'l.[rbain V? l'aéte p~_ ven~e _du. 1-8 Juin 1)1'5 &
l'.hommage du .16 Juillet. ~ ~
",'~: <1', J " J1
Jean (J\,ffana .tf,0qlpa l'attente des, ~,eligieure·s. q'~çgit. \1(\
diffip'at~ur qui le,s lailToit manquer du néceIraire': elles 'por~
terent leurs p'lainres à l'Abbé, de St. Viétor, qui députa
quatre Religieux. Ces députés, après avç>ir. enrengu 'Iej
m(nle~. re./peçrifs, c!,qdarpn.ereqç-:: Jean AlTmil à) d,~Jai1fer
penl4a~t cinq ilns l~admi~ifl:ration du ~rieu~é aux ~eligi~,u.
fe~;, & lui réferverent pour [a fubiif!:ançe, la ,Vicairie dé
Brignoles. Les Religieufes appellerent He cette Sentence
à, l'Abbé 1 lequel ordonna qu'elles pay.erpienr an1!uellement
!lenre florins d'or pour fa, filb~ftance pendant les cinq an.~
dé fan interditlion; lui fait défénfes de [e mêler de 1'.14,nii1ifhation du Monafl:ere '&' Prieuré; or.don,l.1e 'que je fOllt
apparLienpra a~x Religieufes;. & ,veut "qu~ Jean. AIra.na ne
puiJfe"' déplacer' ni bœ~fs , n~ chevaux, ,ni aucun eHèt 010"
bilit:r des terres du Monafler~ & Prie'uré de la Celle,
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jufqu'à ce qu'il ait rendu compte des effets contenus dans
l'inventaire. L'Abbé 'autorife enfuite les Dames de la Celle
à implorer' le fecours 'du bras féctilier, daps lè cas olt
Iean Affana ne déférerÇiit pas à ce- Jugement. Il commet
-pour fon exécution Antoine 'àe ChateàUbeuf, qui' fe tranfpone à la Celle, dreffe le 18 Décembre 1~j.l8 fan Procèsverbal, & attendu la réGllance qe Jean Affana, implore
ie fecours! du Juge de Brignoles, qui met les Rel,igieufes
en poffeffion de' tous!les fruits'; droits &: revenus du Prieuré.
Les Rel'i(telifes étaient donc propriétaires. Le Prieur f1'étoit.èlono"pas 'titula'i~é, ,puffqu~ l'Abbé' réforme la Sentence
des Commiffaires au chef où ils lui dvoienr laiffé un membre du Prieuré pour [a fuhf1llance. Là on trouve la ~reuve
qIJe 1 tol:lS I~s "revèrlüs l1 du lPric:uré étoienr defHnés ,POVI" 'les
Re1jgi\!Ufes~' " • .1!C>!J .' "
•" "
,d
. Enfih)l.le J 2's'l1Sèprernoéé' 4-2'4" les 'Dilmes !Prieure!-&
rlièlllès l dG lMonallere', Tans le conC'ours ni 'l'aHiflahce
Reli 5,
.,
or
t
du Prieur, donnerent ,à ferme la, terre (le' Camps.
Del/tous ces- titr'es, con'l'ihuoienr les Dames Rèlig,ieu.!.
tes ,'réfulte 'la <Jfreu e -inV:ïricible -de la, woprié(é- d~ o'rI'a(tere de tous les biens qui formenr'16' Prieuré de:'la Celle.
ParJi€~tir~que,nti')~~in < cre' Prieuré"·bl.~(c~lin '. "d'cinlc il' n:y a
ja.m'~is: eu: à la Cel,le q,u',un !f~ûl, PrJ;e~~é ?coovent \~I 'fém :,hm' 'dont ':Ia conventuahte 'a ete formee"par le' Mon fl:ere
(les RJéligieufesi'"
L . ( • t-'!>~"
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' •. Ji~ éomrr{e\1t. ~~s ·;prré~l'r -rre~ru 't;ili frrogé' ce titFé'~
C?n'{ :1, ~u"l'~lÎetè~~ 1M~ia~Oêto}è~~'1il~a! Ce4e. P9ùfll~i~iq~
l~s, ~~l!p~:ure~ ;~~sr. _~-l~l ~orn~rent: 'pas,}î l~' feule fp}nt,uahte ;. Ils et-enClire,nt leurs fOl9s Jufques fu le remporel i &
le"fec~ufs 'gu'Hs' ècord6ienr à' cit ''égard auX Religieufès,
lélfré!èit"'en qbél '!lé fàçt p néce{f<Îire', 'parce"que ne' po .:.
v nt! r~s'~eHes:dJêm ëffifr'i'::lpo'ur véiIle ,- ~Ieürs, affir,i'res 1
il1lèu 'ét'ô'iiJ va~ra'keux H'a'Jbit'-· cjll'l~li'uil' qui' plî~ 'Id (erÛ
liv~c z.)t œa~tac~~ni~iit'. -t'dt ée- qtI'êlles" roav.bielk.' a'n~
leurs Pr\eufs; <l'de 'ToTre que') ceu~!fÏ "'joignirent à 'la' ~&a'
litë de CôOfeifetir, ceRe o'âdhliHifirateùr:' Dè1à vlenr que
1
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DE
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9')
la Gharte da 117,6, & quelques autres, placent le Prieur
au nombre des gens d'affàires des Religieufes : Priqri 6eis qui curam rerum [uarum tenuerint.;.. ica quod deincep~
lU dic7us Prior, l'el alius nomine Mona.Jlerii. Voill encOre
d'où vient que les différents Prieurs pourfuivoienr les
affaires, fiipuloient dans les aaes. Les mots pro parte
jùâ, nomine [uo, qu'ils y faifoient inférer, ne leur don:noit aucun droit, puifque toutes les fiypulations fe· réfé:raient eofuite au nom & pour l'utilité du Monaltere. Cette
adminifiration qui, dans fon origine, avoit pour fondemer.t
un fenrimem de confiance perfonnel1e, devint aans la fuite
des temps une des prérogatives de la place de Prieur.
Quelques-uns d'enrr'eux voulant s'avantager & ~'approprier
une parrie du. revenu, leur. perfuaderent qu'il le\lr> feroÎ.t
plus avantageux de s'occuper uniquemept de Dieu & des
chofes célefies, que des chafes humaines. Il ne fût pas
difficile à un Direaeur de perfuader à [es 'pénitentes, qu'il
étoit plus convenable à le,ur état de recevoir jour P'lr jO!Jr
ce qui leur érait néc~Œ1ire pour leur fubliflance. Yoi14
l'origine des difiributions quotidiennes. C~s difiriburi0us
devoient abforber & ·abforboient dans les commencements
tous les revequs du Prieuré. Les Prieurs éraient tenus
de. rendre compte. On le voit .par le compromis palfé en
1392 avec le Procureur de Ponce Grimaud, par le traité
fait el] ,403 avec Jean Alfana, & par le procès qui fut
fait enfuite à ce Prieur; mais ils .ne le rendaient pas toujours; ils l'éludaient au contraire; d'autres plus adroits
fàifoient réduire par le l\1onafiere St. Viaor le nombre
des. Religieufes, pour être -dans le ,cas de faire. de moindres diihibutions. De ce manege vinrent les différentes
réduai~l1s de plus de 100 Religi~ufes à SO, & puis' à 40,
& puis à 24, & les Prieurs s'approprioient les difiributians des .places fupprimées. Ce manege leur était d'aurant plus facile, qu'étant les Confèlfeurs des Religieufes,
il) ne leur manquait pas de moyens pour fe foufiraire à
.la reddition de co'nlpre qu'on aurait pu leur ·oernanqet
�96
Jou RNA L
D'autres plus avides encore, diminuoient la portion qu'ils
donnoient rous les jours amt Religieufes, leur refufoiem le
néceffaire. Delà l'ufurpation de la terre de Cabaffe , que
Charles II fit rendre aux Religieufes en 1292; delà les
plaintes continuelles des Religieufes; delà les difFérens jugemens, qU-i tantÔt rendoient le Prieur plus docile, tantôt
le privoient ide fon adminiltration, & la laitroient aux Religieufes. Delà les différel1tes rranfaél:ions imervenues entre
les Religieufes & les Prieurs. C'elt par ces moyens que peu à
peu les Moines de Sr. Viaor Ont coofommé l'ouvrage. Ils fe
fonr tàir, un titre de Bénéfice des biens du MonaUere. La
meilleure preuve de cette vérité fe tire de l'incertitude des
'qualités fous lelquelles ces Prieurs en obrenoient des proviCions :,i'un comme d'un Bénéfice conventue~ ,. ac1u & ha-Mtu, l'autré feulement, hahitu , & non acru. Enfin pour avoir
une idée des défordres qui regnoienc dans ce temps-là,
il fuffir de (avoir qu"en 1 BIle Cardinal,Trivulce, Abbé
de Sr. Viaor & Collateur de ce prétendll Bénéfice, fe le
conféra à lui-même. 11 ell: donc évident que les. Prieurs,
qui bien-loin d'êrre titulaires, étaienr révocables, ont' changé
une fimple 'adminiUration en un ritre de Bénéfice, & que
eell: Hl précifément en quoi conulle l'abus.
Le Chapitre repoutroit ce fyllême" en difant qu'inurilement on cririquair les ritres par lu·i produirs, qlle le Cartlllaire de Sr. Viaor a obtenu créance dans toures les
occafions; que les pieces même qui fonr verfées au procès',
ont été reconnues authentiques par les Religiellfes lors de
l'Arrêt de 170) ; qu'elles s"en fèrvoient elles-mêmes, & en
avoienr communiqué la pluspart, & qu'au. moyen de ce
elles é.r~ient non-~ce"abI.es ,.. ~ a'voient tres- mauvaile grace
de crItIquer des titres authentiques de famille, & qui font,
communs aux' Religieufes & à St Viaor.
'
C'ell: ~aI-à-~ropos ~ forr légérement que les Religieufes ollr Invoque la Senterx:e de Guillaume, Archevêque
d'Arles de 114 I , pour en conclure que. les Moines de
,st. Viétor étQieat en ~OOltume' de fabriq~e. de faux tirres..
On
)
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
97
On pourrait répondre qu'une Sentence rendue ,par un Archevêque d'Arles., en faveur de fon Chapitre, l'a été par
un Juge fulpe&, iméreifc dans la. caufe, puifque dans ces
temps anciens les E('êques ne faifoient qU'lln même corps
avec leur Chavitre. Mais pour mieux repoulfer cette objeél:iorl, il fuflit de favoir qu'en 1166 il intervint ulle tranfa&ion entre les Chanoines d'Arles & le Monafiere St.
Viél:or, par l'entremife de Raymond III, Archevêque d'Arles, de laquelle il réfulte que fans déférer à la Sentence
de I 141, les Moines de St. Vi&or reHerent en po!feffion
des principales Eglifes que le Cha pitre d'Arles vouloit leur
enlever, & qu'on ne donna aux Chanoines que la feule
Egli!è de Faira6regoules, en avouant po.urtant que les Moines de St. Viél:or en avoient la poifeffion.
C'efi aux, pieces du procès à éclairer: il ne faut pas employer l'adrelfe dont fe fervent les Religieufes, c'ell:-àdire mettre de côté ou ·courir légéremene fur les titres
produits par le Chapitre, & ne s'appefantir que' fur ceux
des Religieufes. L'~n(emble des titres communiqués par
chacune des Parties forme l'enfemble du procès. Si on
ne confidere que ceux d'une Panie, on ne juge, on ne
difcute que la moitié de la caufe;' il faut les combiner &
les concilier en(embJe.
Les titres produits par le Chapitre détruifene ,cette premiere induél:ion des Religieufes, que les biens n'ont été
aumônés qu'à elles; ils jull:ifiene au contraire que ces biens
ont été aumônés à l'ancien Monall:ere de St. Viél:ôr, &
<Ju'ils ont fervi à l'étaLliffemenc du Prieuré. A préfent efiil hien d iflicile de concilier ces deux vérités avec les pie ces
(om uniquées par les Religieufes?
Cette cOIlLihàrion fe fait d'elle-méme, fi l'on réfléchit
que le Monail:ere des Relig,ieufes ayant été établi au lieu
de la Celle après les donations faites à St. Vi&or, &
après la formation d'un Prieuré, ces Religieufes n'one eQ
à prendre fur ce Prieuré, lors de leur établiffement, 'que
les diHriburions néçellàires à leur alimentation. Le Prieur
Awé,s l78 z t,; z 78~.
N,'
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JOURN~i
devenu chargé du paiement de ces difl:r~bu~ions; qui fou;'
vent abforboient cous [es revenus, eut IOterêt de conferver cous les biens qu'il poffédoit, & d'en ajouter d'aunes.
En confervant & en acquérant, il faifoit fon avantage &
celui des Religieufes; le fien, parce qu'il fe procuroit de
plus grandS moyens; celui des Religieufes, parce que le
paiement de leurs dif1:riburions en écoit plus affuré. Dèslors le Prieur propriétaire n'a plus féparé fa propriété des
charges qui lui écaient impofées; il a depuis lors demandé
& fiipulé, tant pour. lui que pour les Religieufes : nomine
fùo & nomine Monaflerii Monialium. Pro parle [ua & pro
parte PriorijJœ.
Et en effet, s'il efr prouvé que les biens aient été au.,.
mônés à l'ancien MonaHere St. Viél:or, il ne peut pas être
vrai qu'ils l'aient été, & ne l'aient été qu'aux Réligieufes.
Il n'efr pas poHible de croire qu'il y ait eu des Princes
affez in jufies pour enlever au Monafiere St. Viél:or & au
Prieur des biens déja acquis, pour les donner à d'autres.
C'efi donc parce que le Prieur étoit originairement propriétaire, chargé de prendre fur fa propriété de quoi payer
les difiributions des Religieufes, qu'il. rapporta de nos
anciens Souverains, Ildefons & Berenger, les différentes
Chartes qui font au procès. Il les rapporta pour lui, pour
{es fucceffeurs & pour les Religieufes. Leur Monafrere
étant entiérement à fa charge, enconrraél:ant, en acquérant pour elles, il conrraél:oit & acquérait pour lui. Et
voilà pourquoi en parlant des terres de fon Prieuré, il les
appelloit quelquefois terres du Monafiere.
11 .efi remarquable .que la plupart des Chartes verfées
au procès ne font que des confirmacions , & non des donations premieres. Or, la confirmarÏ'On n'acquiert rien de
nouveau; elle n'attribue rien de plus que ce que l'on avoit
auparavant. Ainli la confirmation étant pour le Prieur &
p.ou~ le Monafiere des Religieufes, les Chartes conhrma_
[J~.es ne ,donnent à l'un & aux autres que ce qu'ils avoient
deJa. Et etant démontré que primitivement les biens avaient
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PAL Al S
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il. 0
V B NeE.
99
été aumônés à l'ancien Monafl:ere de Sr. Viél:or, la confirmarion ne peut être que pour le mainrenir, & le Prieur
pour lui & après lui dans la propriété de ces biens; les
Religieufes ne peuvent y êrre. que pour les droies qui
leur avoient été affignés fur ces biens lors de leur érablilTernenr.
Qu'imporre que dans la Bulle d'Alexandre III, qui prend
le Monafl:ere fous fa proreélion, il ne foit pas parlé du
Prieur? Le Prieuré qui exifioit déja, n'avoit pas befoin
d'une confirmation du Pape, comme il en falloit une pour
rendre légirime l'érablilTemenr des Religieufes. D'ailleurs
il y a des titres particuliers & uniquemenr propres aux:
Religieufes. On ne leur a jamais difpuré d'avoir, en fus
des diHributions qu'elles pre noient fur le Prieuré, des biens
qui leur fulTent propres & dont elles jouilTenr aél:uellemenr.
Mais on obferve que de ces biens parriculiers le Prieur
n'en a jamais eu l'adminifl:ration. Il en efl: de même des
aél:es d'acquiution & des Sentences arbierales rapporcéès
par le Prieur ranr en fon nom qu'en celui des Religieuf~s. C'efl: toujours une fuire du même morif. Le Prieur
chargé de l'enrretien & de la fubull:ance des Religieufes ,
avoit intérêt d'accroîrre le parrimoine de fon Prieuré. Il
Hipuloit & inrervenoit pour l'inrérêt commun, & felon le
droit que chacun d'eux avoir.
C'eH toujours aux pieces à éclairer fur ce poinr. On voit
que le 4 AOllt 1292, Erienne d'Alayrac, pour lors Prieur,
ramalTa les Charres obtenues jufques alors, pour les préfenrer toures enfemble à Charles II, & lui en demanda
la confirmarion: (am pro parte [ua, quam pro parte Monialium.
Il efl: même remarquable que cetrè Charte de confirmafion efl: poll:érieure feulemenr de fept jours à celle du
27 Juillet, qui fit rendre aux Religieufes la terre de Cabaffe. Les Religieufes fe difoient propriétaires de cette terre
de Cabaffe, & non d'aucune autre. Donc elles reconnoif~
foient que les aueres ne leur appartenoient pas. Elles fa
N:o
•
�JOURNAL
100
plaignoient de ce qu~ ct;tt,e t~rre leur avoit été ufurpée••
Donc il ne leur a,vOlt ete faIt aucune autre ufurpatlon;
autrement elles n'auroient pas manqué de la relever. Elles
expofenc que cette terre }e~r avoi~ ~té donnée ,pour leur
veHiaire, & qu'elles en etalenc .prtvees ; donc ~l ne leur
en avoit pas été donné d'autres pOlir les fournir ~es autres objets néceffaires 11 leur fllbfi1tance, que le Prtenr de
la Celle leur fonrniffoit.
La donation faite par Douce d'Efperel en 12.08, lorfqu'elle prit l'habit de Religieu~e, r,eçoit la mê~e explication. D'abord dans cette donatIon 11 y avolt prefenc PIerre
d'Aller, Camérier de la Celle, ce qni juHifie la pluralité
& la convencualité de Religieux.
D'ailleurs les donations faites au MonaHere pour la do- .
tation des Religieufes avoient de tous les temps appartenu au Prieur. La preuve en eH dans l'acre du 6 Septembre 1403, produit par les Religieufes. La raifon en
eH que le Prieur devanc fournir à la fubfiHance des', récipiendaires , comme il fourniffoit aux profeffes, il étcit
juHe qu'il en etIt les dotations. Il les a eues jufques 11 la
transférence du MonaHere 11 Aix en 16)8; & l'Arrêt rendu
en 170') juHifie qu'il les demilndoit encore alors.
D~ ce que l'Abbé de St. Vicror aurait établi en 12.13
le Prieur de la Celle pOlir pere fpirituel de la Maifon de
Sr. Zacharie, il ne fuit pas que ce Prieur n'etIt & ne
dût avoir d'autres droits au lieu de la Celle. A fa qualité
de Propriétaire des biens qui formoient la dotation de fon
Prieuré, il a pu joindre fans incompatibilité, la qualité
de pere fpirituel, de fupérieur externe du Monaflere des
Religieufes. ,Il était naturel qu'il le ftIt, étant Religieux
du même Ordre, & de plus, fourniffant les diflribmions
aux Religieufes. Il eH: ungulier que, de ce que l'Abbé & le
MonaH:ere St. Vicror fe réferverent, fur la Maifon de Sr.
Zacharie, les droits de correcrlOn, de vifite, de defl:itution des Officiers & du Prieur, pour caufes jultes & railO nna bl-':..en conclue que le Prieur n'était pas pro~B1-I_0_~il J!Q
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PALAIS
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PROVENCE.
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priétaire. Certaine,?ent l'Abbé ~e St. ':i~or ne l:étoi~ pas;
il avoit, comme ctant le premIer Superieur, le droit de
corriger & de vifiter. Mais autre cho[e [ont les droits
du collateur & du chef d'ordre; autre chofe les droits
des titulaires des Bénéfices dépendans de cet Ordre.
La révocabilité du Prieur n'empê(;heroit pas qu'il ne fût
titülaire; puifqu'on tient en maxime que la révocabilité du
titulaire ne fait pas obllacle à la perpétuité du titre; ce
qui a lieu, [ur-tout pour les Bénéfices réguliers; ce qu'on
trouve établi dans Lotrerius en Con Traité de re benef. liv.
l , quefl:. 33, n. II. Ainfi, quand on accorderait que le
Eo';ieur de la Celle pouvait être révoqué pro juflis & rationahilihus caufis, il n'en ferait pas moins vrai que le Prieuré
formoit un vrai titre de Bénéfice.
L'arrentement de la terre de Camps en 1391, le compromis entre la Prieure & Pierre Tardivi en 1392, les
lettres de contrainte de 1402, la tranfaélion du 6 Février
14°3,' & la Sentence de i'Abbé de St. Viélor du 10
Décembre 1418, bien-loin de détruire les preuves réfultantes de toutes les pieces du procès, de la perpétuité du
titre mafculin, concourent au conrraire à l'établir.
On a déja remarqué que les revenus du Prieuré avoient
été en différens tems infuffifans POUt payer les diHributions des Religieufes. Ils le furent à la fin du quatorzieme
fiec1e. Ponce Grimaud étoit alors pourvu de ce Bénéfice.
Ne trouvant pas dans les fruits de quoi en fupportet les
charges, il s'abfenta & établit un Procureur, Pierre Tardivi, autre Religieux de St. Viélor. Les Religieufes, non
payées de leurs dilhibutions, obferverent avec raifon la
conduite de Pierre Tardi\'i, Procureur de Ponce Grimaud.
Ce Procureur ne fut pas mieux en état de payer. Il abandonna à fon tour la régie du Prieuré. Il laiffa aux Religieufes le foin d'adminiHrer & de régir elles-mêmes, pOlir
Ce payer, fi elles le pouvaient', de leurs diftributions. Alor.':
elles lui demanderent un compte. Pierre Tardivi répondit
qu'il ne leur en devoit point. Cette comellation fut com-
..
�:t02.
JOURNAL
promife à des Arbitres, & on ne voit pas s'il y eut une
décilion.
Les Religieufes dans cet état obtinrent des lettres de
contrainte contre les habitans de la RoquebruŒane, in
ahfentia Prioris ipfius MonaJlerii qui' gUbernationem ipfius
defemparavit.
Ponce Grimaud, que l'infuffifance des revenus avait
forcé d'abandonner fan Prieuré de la Celle, crut trouver
mieux fon avantage en l'échangeant avec le Prieuré de St.
Zacharié que poŒédoit alors Jean AŒana. C'était donc de
véritables titres de Bénéfice, puifqu'on les permutoit, &
que les titulaires étoient en droit d'en difpofer. Quan~
Jean AŒana fe préfenta aux Religieufes avant fa permutatarion pour traiter avec elles, elles n'avaient qu'à lui répondrè qu'elles n'avaient point de confentement à lui donner, ni de traitement à lui faire, '& qu'elles entendaient
fe maintenir dans la régie &. l'adminiHration des biens
qui leur étoient propres. Mais au lieu de faire une pareille
. réponfe, elles confentenc à la permutation. Ne reconnoiffent-elles pas bÎen formellement que le Prieuré formoit un
vrai titre de Bénéfice? Lorfqu'encore elles fe réduifent à
ce que le Prieur reprenne la poŒeffion des biens, en leur
payant les difiributions accoutumées, n'avouent-elles pas
que le vrai poŒeHèur, le vrai propriétaire' efl: le Prieur,
& qu'eHes n'avoient à prétendre fur les biens du Prieuré
que leurs difiributions, à l'exception du vefiiaire dont eUes
étoient remplies par la déferiJparation de la terre de CabaŒe dont elles ont toujours joui, fans que le Prieur de
la Celle s'en foit, jamais mêlé? Car c'eH une confidération qu'il ne faut jaroais perdre de vue. Les ReliCTieufes
ont toujours joui depuis l'union de 1307 de la te~re de
CabaŒe. Donc leur bien ,étoit différent de ceux du Prieuré.
Pone la premiere· leur appartenoit, & elles n'avoient à
prétendre filr les \lucres que des difirihucibns.
.
Quant à l'inventaire dont il el!: parlé dans cene tranfactiQn, il n'eft autre que ~elui des effets qui furent délaiffés
•
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DU
PAL AIS
D E
P 'R 0 v t! N c: 1!;
103
par Ponce Grimaud; & il étoit juil:e que celles-ci; en fe
départant de cette adminiil:ration, rendiffent au nouveau
titulaire le même mobilier qu'elles avoient reçu de Ponce
Grimaud. Et c'eil: ce qu'on trouve en termes exprès dans
cette tranfaél:ion: CJuœ in majori parte receperant in inventario, dùm receperun~_regimen & adminifirationem dic1i MonaJlerii.
Que trouve-t-on enfuite dans la Sentence de l'Abbé, &
le procès-verbal d'exécution de cette Sentence contre le
même Jean Affana? Il Y eil: qualifié Prieur & Seigneur
du Prieuré de la Celle & de fes membres : Priore &
domino Prioratûs diai loci arte Cel/œ & fuorum memhrorum.
Les Religieufes fe plaignent du defaut de paiement de
leurs difl:ributions, & le Prieur allegue l'impuiffance de
fournir, attendu l'infuflifance des revenus. L'Abbé vérifia la
mauvaife adminiil:ration du Prieur, mais ni les Religie'ufes,
ni lui, ne fongerent à le dépouiller du titre de fon Bénéfice. L'Abbé limita à cinq ans la fufpenfion de fa jouiffance. Mais par cela feul que la fufpenfion fur limitée, le
titre reil:a toujours fur la tête de Jean Alfana. Comme
titulaire, il continua d'avoir la propriété, airifi que l'ont
eue après lui ceux qui lui ont fuccédé au Bénéfice.
JeaD. Affana étoit tellement confidéré comme proprié-.
taire, que le Juge de Brignoles lui fit injonél:ion de fe
conformer à la Sentence de l'Abbé, fuh pœna temporali-.
catis filœ. Donc il étoit vrai propriétaire & vrai titulaire.
Le Prieur était tellement propriétaire, que par un aél:e
du 1 Mars 1430, il donna à nouveau bail, & fous une
cenfe à la Prieure, la permiffion de faire une dérivation
d'eau pour l'arrofage de fon jardin. Qui donc était le
propriétaire, de celui _qui concédoit & donnoit à nouveau bail, ou de celle qui recevoit la conceffion & le
bail?
On peut d'autant moins conteil:er que les Prieurs fùffeor propriétaires, qu'en différens temps ils ont ~ourni
leur argent pour accroîtres les biens du Prieuré. En 12 3-h
�J04
JOU~NAL"
Guillaume de Mandagot quitta au Comte Raymond Berenger n60 [ol,s que ce ~rinc; lui devoit, pour obtenir
de lui la franchlfe des drOits d Albergue & de Cavalcade
fur les terres de fan Prieuré. Claude d'Aifonville acquir le
20 Oétobre 1) 2.8, par retrait féodal, le moulin à farine
du lieu de Camps & le jardin joignant, & il lui en coûta
J 317 florins. Raymond Ponanie,r donna ,à prix fait ~e 16
Septembre' 1603, & paya le tiers de 1 Egbfe parOllIiale
du lieu de la Celle. Ce n'était qu'en qualité de propriét~ire qu'il al'oit fait tautes ces acquifitions.
Ainli donc taUt fe réunit pour prouver que le Prieuré
de la Celle efl: un Bénéfice mafculin, ce qui rend la demande des Dames Religieufes tOUt à la fois non-recevable
& mal fondée.
'
Le Chapitre avait préfenté une Requête incidente le 7
Mai 1781 en nt1S de non-recevoir, fondées fait fur les
tranfaétions & autres aétes dans lefquels les Dames de la
,Celle étaient intervenues, & fur l'Arrêt de 170), dans
tous lefquels Arrêts ou aétes el!es avoient plaidé ou traité
avec les Prieurs comme avec de véritables titulaires; fait
parce que l'union étant confirmée par Arrêt du Confeil &
Lettres-patentes enrégifl:rées par la Cour, celle-ci ne pouvoit connaître que de [on _Arrêt d'enrégiHement, ne
pou,-ant anéantir l'Arrêt du Confeil & Lettres-patentes
qui ne peuvent être détruits que par l'autorité qui les a
,créés.
La premiere' fin de non-recevoir ell: répondue, difaient
les Religieufes; quant à la feconde, comme l'Arrêt du
,Con(eil & les Lettres-patentes ne peuvent avoir d'exécution en Prove'nce .qu'au moyen de l'enrégill:rement, la
révocation de l'enrégifl:rement les rend de nul effet.
C'ef!: ,un principe. univerfellement reconnu & confacré paf
la Declaration du 24 Février 1673, où il efl: dit qu'on
pour'ra recevoir des oppofitions, & Y faire droit à l'enrégiÜrement des Lettres-patentes expédiées fous le nom &
au profit des particuliers.
Arrêt
�DU
PAL AIS
DE
PRO VEN CE.
105
Arrêt du 2.6 Mai 178 l , au rnpport de Mr. le Confeiller
de Meyronnet de St. Marc, qui faifant droie à la Requête
incidente du Chapitre du 7 Mai 178 l , déclare les R~li
gieufes non-recevable,s & mal fondées dans leur re1ief
d'appel ,& leur, Requête incidente, & déclare n'y avoir
abus dans le décret d'union; condamlle .les Religieufes aux
dépYlls. .Ecriv~!)t Mes. Simeon, Piales, de C~lonia & Ex':
pariat.
=
'\
.)
. _1
, ,
•
Il
1
A, R RÊ T
Il
,1: .
i
V J.
f
~.
1
....
,
La, dénonce 40it être' fignifiée, da.n.s le~"vingt-qpaf[e fteu[es.
~
E "6 AOÎl~ 1776, Me. ToulTa'int Rtlynaud, 'Avocat &'
L~f.lti!ire lloyal de la ville de Salo!), ,aYilOt été. informé
que j~ fieur G?fpard R:oufier, ~purg6ois", ~~it eXR9!<: dé:;
nqflce" coçltre lui, ayapt trouvé fan trou[?eaui,~a9S< .li "P$!:
f~s vergers, lui offrit le [?aiemenr du dommage {ùiv",nf.. r~f
limalion qui en ferait faire par des amis commpn,s , gui,le
~xerenr à 2.4 liv. Le fieur Roulier peu farisfaitj, ~t. fignifier
par ewloül du, 8 la délfonce du 6 avec ilffignasiGlll au lell,
demail).pourvoirlprocéderl~s.Efiimateurs.Ju\ésde.la
Communauté, qui évaluerent le dommage à,?>t .lj.... 16 .f.,
. Le fleur.Roufier fit,fignifier le Rapport à l\1e. ;Reynaud,
& demanda qu'il fût condamné. au paiement .de la peine
4u baIl & du dqf!llUage•
. .
..
.'. l
-.1ctt luge de )ialolf adopta [es fins~Î Me._R~ynaud appel!a",
l<:. L.i~~tepant d'Arles, par f1\ $enrence.9u J 5: ·M~rs I.7t7.9,
ljlfoS/ ~';y:rêter aux fins, Q\1..!'!; ploit. !iq~l~ ,du !i~lfr ~~llrJSr'l
;lU Bénéfice' de l'offre filit,e, par ,Me. ReYt,Iaud de la fçlllllpe
de. 24 liv:, ladite offre tenanr, le. mit hors ~'in!fal'/ce .&
9~, I?ro,cès '... {$c cop~amna! ~e. fieur, Roufi aux. ~épens. lJ ,,~~
Le fieur RouGer appella de cette Sentence .R~~d~l(a.nE
t'l'ù9o ur &.1 la; Communa~té de Salon, .inter,vipt dans I:inftal}~e po~r le foutien des griefs d'appel.
'. "
Années l78i & i78~.
q.
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DE
PRO VEN CE.
105
Arrêt du 2.6 Mai 178 l , au rnpport de Mr. le Confeiller
de Meyronnet de St. Marc, qui faifant droie à la Requête
incidente du Chapitre du 7 Mai 178 l , déclare les R~li
gieufes non-recevable,s & mal fondées dans leur re1ief
d'appel ,& leur, Requête incidente, & déclare n'y avoir
abus dans le décret d'union; condamlle .les Religieufes aux
dépYlls. .Ecriv~!)t Mes. Simeon, Piales, de C~lonia & Ex':
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limalion qui en ferait faire par des amis commpn,s , gui,le
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par ewloül du, 8 la délfonce du 6 avec ilffignasiGlll au lell,
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Communauté, qui évaluerent le dommage à,?>t .lj.... 16 .f.,
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& demanda qu'il fût condamné. au paiement .de la peine
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Le fieur RouGer appella de cette Sentence .R~~d~l(a.nE
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Années l78i & i78~.
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�Jou RNA L
On difoit pour le {jeur Reynaud, qu'il n'eil: point dano;
flotre Jurifprudence de principe plus certain que celui qui
veut que les dénonces foient Ggnifiées dans les vingt-quatre
heures, ~ peine d'être confidérées comme n?n expofées.
Telle eil: la difpofition de nos Statuts rapportes par Mourgues, pag. 289,.~ par le nouveau C:0mme?tateur qui rap·
por~e lltl Arrêt cite par Mr. de Bezleux, Iw. 2, chap. 'i'
§. 1. Ici la dénonce expofée le 6 n'avait été fignifiée que
le 8. D'ailleurs lefieur Roufier avait renoncé à la dénonce,
puifqu'il avait confenti que le dommage fût eHimé par
i!eux amis. .
Il Y a une différence effentielle entre un droit réel &
une peine. La renonciation à un droit téêl doit être expreffe, qu du-moins telleme:lt réfulter des circÇlnf!:ances,
qu'il ne reil:e aucun doute fur le facrifice qu'on prétend
que la partie en a fait; mais la renonciati~n ~ une -peine
fe préfume facilement; elle ef!: même certaine, toutes -lès
fois que celui qui aurcit droit de la prétendre, abandonne
volontairement l'aéHon ou la forme de procéder Il laquelle
elle eil: attachée. Ainfi l'aaïon d'i'njure qui dl: cigoureufe
& pénale, s'éteint par la feule diffimulation. A-t-on bu &
mangé .avec celui qui a fait l'injure ve~bale ? A-t-on laiffé
paffer un an fans en pourfuivre la réparation? On ef!: cenfê
l'avoir remife.
l '
Le ban eil: une vétitable peine, à la différence du dommage dont le paiement n'ef!: que la jull:e indemnité du préJ
judice qu'on a fouffe,rt. La peine du ban ef!: .donc remife
toutes les fois que la partie qui pourroit la prétendre, abandonne volontairement l'a'aiéll1' à laquelle elle 'eU arrachée
pour s'en rappbrte; à 'la médiatiop de dellX .Arbitres pour
fixer le dommage.;Le lieur Reynaud .difcuta (urabondamment -fi les ·Statuts faits pour la Ville d'Aix devaient être
exécurés ~ Salon, &. fi la-Communauté avait intérêt à~l'effet
d'intervenir.
.
.
·On répondoitpopr la C<$mmunal)té & pQ.ur le 'lieur Roufier, qu'elle était 'intervenue pour filire 4ire qùe .le Ré106
�DU
PALAIS
DI!
PROVENCE.
107
glement de 1574, fai pour la Cornmunauré d'Aix, continuerait d'être exécuté fuivant fa forme & cenellr dans le
terroir de Salon, en ce qui concerne la peine du ban pour
les dommages faÎts par Jes bel1:iaux. L'Arrêt géhéral de
la Cout de 1601 a rendu cort1mun à toute la Province
le Réglement de l S14. La Communauté a donc eu intérêt
à foutenit une loi qui avoit fixé la regle que l'on devait
fuivre. L'Arrêt rendu en 1780 , entre le fieur Grivet &
le fieur Truchement, n'avoit adjugé au fieur Crive-t dénonçant que la peine du ban relative aux anciens Statuts de la
Communauté de Salon de 1293, parce que la Cour ne
connut alors d'autre titre conlbtutif de la peine du ban
dans la Communauté de Salon que les Stàtuts faits à cette
anciènne époque; elle ignorait que la Communauté eîlt
adopté le Réglement de 1 S74, qui avait été rendu général pour toute la Province.
Arrêt du 29 Mai 1781, aij rapport de Mr. lè Confeiller
de la Baume, qui confirme la Sentence du Lieutenant
d'Arles; déboute en l'état la Communauté de fan intervenlion , & condamne Roulier & la Communauté aux dépens
chacun les concernant. Ecrivant Mes. Barlet & Gaffier.
ARRÊT
VII.
Le tireur & l'endo.f!èur d'un papkr de commerce en font ga-
rallts en tout temps, quoiqu'il n'ait pas été proteJlé dans
les dix jours, fi celui fur lequel il efl tiré n'a à l'écMance
aucun fonds pour racquitter.
Différence entre un ~i/let à ordre & un ~illet à domicile.
L
E 6 Décembre 1776 les lieurs Jofeph , Jean-Baptiae
Roux & la veuve Roux du lieu de Pelilfanne foufcriviren~ en faveur du lieur Roux, Négociant du même lieu,
un billet conçu en ces termes; au 4 Mai de l'année '778 J
,02-.
�I~
\
JOURNAL
nolis payerons dans Aix ail domicile de Mrs. Reynaud freres
& Archias, où nous üabliffons le nôtre, cl l'ordre de Mr. Roux
-ainé, 2500 /iv. valeur reçue comptant. Ce billet fut endoifé
à l'ordre de Mrs. Roux & Efij:ve, enfuite à d'autres Négociants, & revint encore aux fieurs Roux & Ell:eve. Lé
.billet fut protefié le 4 Juin 1778 aux perfonnes des !leurs
Reynaud freres & Archias, au dO(TJicile defquels il éroit
payable; ils répondirent n'avoir ni fonds, ni avis. Les
lieurs Roux & Ell:eve affignerent les tireurs & endoffeurs ,pardevant le Lieutenant d'Aix, en cond,amnation du.
l'non tant du billet, avec intérêts, dépens & contrainte par
cÇlrps. Le fieur Roux opppfa ·Ia fin de non;:reçevoir, tirée
de ce que le papier n'dvoit point été protefl:é dans les dix
jours d'après l'échéance; Sentence du 2.3 Février 1779,
qui le déboute de la fin de non-recevoir avec dépens.
Appel de fa part pardevant la Cour. Il fou tint qu'il ne
pouvait être garant d'un papier de commerce non protefié dans les dix jours.
On répondait pour les fieurs Roux & Ell:eve qu'il n'eit
befoin que de rappeller les divers articles de l'Ordonnance
de 1673, pour favoir d'une part le droit du porteur d'une
lettre de change qui n'a pas été protefl:ée dans les dilÇ
jours, n'y ayant eu ni fonds ni avis; & de l'autre, pour
di(tinguer le fimple billet cl ordre, du billet cl domicile, qui
fuit les mêmes regles de la lettre de cha nge.
La bonne foi fi néceifaire au commerce a exigé que les
Légiflateurs priifent tous les moyens capables de réprimer
la fraude; ainli celui. qui .ti~e une. ,lettre de. change fans
f?i~e les fonds aux mains .de la p.erfonne fur qui elle
tlree, en ell: re(ponfable en tout temps, parce qu'il a fourni
un .papier imaginàire. Mais fi le payeur .av.oit provifion' à
l'échéance, fan infolvabilité furvenue après ne peut con€erner _que le. porteur·, qùi n'ay.ant pas fdit protefier dans
Jesdix jours ,,' doit. s'impùter une négligence d'autant plus
iatale)~~·qu'el1e. prive lé, tjr~ur d'avoir vu fan papier acquitté
~o.rfqu'Jl' pouvait l'êtie..
l ..... •
ea
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�DU
PAL A 1 S
'.D Il,, PRO V Il Nell.
109
Le porteur d'une lettre rde {;ohange efi altreiot 1I:,Ia faire
protefier dans les dile 'jours, li· "Ile n'efl: point payée. 'C'afi
la difpolition' de l'Ordonnance de 1673, tit. S ,. arr. 4. Ce
préalable ne fufEt pas; il faut encore que dans la quinzaine , & felon la dill:ance des lieux, il pourfuive les ,.tireurs ou endoffeurs ( art. 23. }Si le porreur ne remplit P<fS
ces formalités, il efi non recevable à intenter garantie contre les tireurs & endoffeurs ( arr. l S. )
,1
•
Jufques-Ià l'Ordonnance ne comprend que le cas où celui qui doit payer, a des fonds en main; mais l'art. 16
s'exprime en ,ces termes': .le~ tireurs ou' endoffiurs des lettres feront tentis de prouver en cas 'de déTligation, que crox
fur 'lui elles étoient tides , leur ftoiefll·redevaMes , olL'f!.lJOien
provifion au temps fJu'ellès pm dû, étie proteJlées; jinonLils
ftront tenus de les garantir. ,
') .;
En fait, les lieurs ROJJX n'avoient point remis les fonds"
au domicile des lieurs Rey.naud freres & .An:hias·; .œlalf~
trouve pleinement -juftifié .•par...leur .déclaration Ils ne:<p:eù;
,v.ent donc pas fe .prél'âluir lie ce que. le 'papier ,foiti'de
leurs "mains,' n'a été protell:é que. le ,ç Juin, unrmois aptès
l'échéance. Qu'allroit opéré ce 'p(otefi? Abfcilument rien',puifqu'il n y avoit aucun. r,ifque ~à ~ courir J relativement" au
manque de fonds. l!afferrion. Aè .n'.avoir aucun fonds ,..1 ni
au€un 'avis aux époques du i protèil: & de jl'aél:e jn'térpella.~
tif qui 1 embraffent· le temps. d.e 'échéanceI; ell: affe.z foi
melle' Dour donner aux lieurs 'ROUle
. &:Efleve de MOrlr'
pellier Je genre de preuve que l'Ordonnance exig{t d'eux,
il l'effet de. leur affilrer un retour incbntefrahle contre leS!
tireurs &. endoffeurs; & tane: que ces derniers 1 ne parvieo~
droiJt pas à prouVer que les fieu!'s Reynaud freres & Ar.....
chias étaient leurs redevables, ou que les fonds éroient,flits
à leur domicile, lenr filence continuel fervira de 'démonftration pour les contraindre fur le pied de l'arr. 16, à garantir' en ,tout templi la traite qu'ils ont foufcrite & qu'ils
Ont donnée en paiement an porreuI:.
1 •
? 1
Inutilement a-t-on .diJ ...qlle'.cec
J6fne ,li'appliqlle,pojn§
.
art.
�lIé>
a
JOURNAL
au billet
domicile., que l'on ne peut envifager que corom eun limple biller. L'avantage' du commerce- a multip.lié le s
efpeces de papier qui' en 1 fonr, pour' ainli dire, l'ame; le
.billet à domicile long temps inconnu a été bientôt adopté
par (on utilité; il differe de la lerrre de change par .l'acceptadon; &: du fimple billet li ordre par le change de
Plalie en Plare qui e'nrraîne les effets d'unc! diverfité frappanre. Pothier, dans fan Trairé du contrat de' change ,"
parr: 2, pag. 223,. le définit: un hillet par lequel Je
m'ohlige de 'Vous payer, ou
celui qui aura ordre de 'Vous,
une certaine fo'mme dans un certain lieu, par le miniflere de
mon correfPandant, il Ja· place de celle ou de la 'Valeur q,1Je
j'ai, reçue ici de -Vous, or! que je, dois' receVoir.
,
.. n ell: tellement. renfible que le porteur n'a .pu croire
ici voir un !impie billet à ordre, que fi, .par un événement
pomble; il e' t faït demande aux:fiéurs Roux de Peii1Iànne,
çèux-c.i lui euHènr' bbjeélé que' l}1al-à-propos. on. venait les.
aétîonner., t<lndis que le ;paiemenr devait: "être effeétué:' dans
là, ville d'Aix ;.ç'émir l'acéord 'conre le -tireur & le prenéur d~ordre 1 &: jufqu'à' ce que l'on eût confl:aré qu'il n'y
avait aucun fonds au domicile élu, le porteur érait non
recevable à exercer 'une aél-ion direéle contre le rireur.
Les bitlers li, ordré n'exigenr pas ce t'ranfpon; ils offrent
une obligation" perfonnelle qui ne differe des prome1fes or;'
dinaires que Nr le cin:uit d'es' endo1fèrnens dont ils foot
fufcepribles; au lieu que le billet Ji domicile fe tire de
Place en P'lace, & produit ce fecond engagement prefcrit
par l'Ordonnance, de Elire les fonds au lieu défigné , & à
défaut le port-eur a toùjours la faculré de revenir fur ceux
qùi lui ont tranft~10rté le' papier. Pothier, au tieu cité,
dit que ce billet renférrne le contrat de change, de même
que la lettre de change, & qu'i-! eil: de même nature.
Il ajoure' (pag. 224) que ces billets entre Marchands &
tiaitans donnent au propriétaire du billet, lorfqu'il n'eil:
pas acquiné '. le ~êmè droit contre ceux qui l'one foumi J
a
sue donnent les lettrês de change.
.
�DU
PALAIS
Dl;
P.ROVEWCll;
a
-IIl
C'ell la promefIè de faire les fonds
un tel lieu, <lui
oblige le porteur à s'y adrdfer ; mais fi, pour ,leb~Iler d
domicile comme pour la lertre de change, celui qui fournir .Ia traire manque de faire la proviIion à,u lie~ 'conyenu ,
dès-lors il n'agir poinr de bonne foi; il trompe, & f1
furprife imprimanr au papier uri vice qui ne peur profiter
à {on auteur, il ell: de toute jullice que le porteur pui!fe
en [Qut remps revenir fur fes pas & attaquer fes éédans,
qui demeurent. refponfables de· l'événement; linon "il en
naÎtroir cette injufrice criante &. fi pernicieufe au négoce,
que le tireur attraperait un <lrgeht qu?il fauroir ne devoir pas
être rembourfé, &' qu'une fimple négligence de délai couvriro'Ït l'abus le plus révolranr l & rendroir impunie l'ufurpatian la plus m'anifell:e~
Pour découvrir les artributs qui ren'dent le billet à domicile infépal'able lies "regles de la ,lettre ,de change, l'on n'à
qu'à voir les morifs àe - l'Arrêr; du Pa~lement dè Paris èlù
2. Tuin 1707 , rapporté par le Praticien des Juges-Confuls,
liv. '-, chap. 4, pag. 1 [7, Cet,Arrêt conda~na un des endoffeurs au paiemen( de la fomme 'demandée avec con"
trainte par corps, i1près l'a.vis ddnné. par 1 les' Négoc,ians
nommés par la Cour:à ce.lfujer. La même quémon -ell:
auffi déterminée dans le ,traite ou exercice des 'Comme'f...
'tans donné. au public en ~ 776 ,pilr Mr."Nicodetbe , & dans
le Parfait Négociant, IiI': 3 ,pag.' '-47' Tous' ées t\:uieurs
ramenent les ~êmes faits fur, lefquels l'Arrêt du f'l"arlemenr de Paris fut' rendu, & ils l'invoquent éonffiie' abfdlument dtkiii'f. Lés Tribunaux Cbnfulai-re~ & ies"Bbhrfes
~tablies dans :le's' Places du ,RClyaumè le' jugenif'èle' même
)ourQellemeot; ils fé réunitfent rous à dire -que 'le "même
danger fe' re,ncontr-ant au biIle~ a doinicile- commè ~ la
lettre de change, il fal/t en- conclure que 'l'un & l'autre fOQt,
quant à ce, idenrifiés, & qu:il; les '~ut juger d'après les
mêm.es principes.! Cela en tc;llement' vrai; que Ji lé's lieurs
Roux de Peliffaimè avaient corlcu leur traite 'valeur en mar{;luzn~fis, on eut ét-é aHre~t à' ta [airé ,pfot~fier '!.~>~s 1I~s-
�:I X2.
• 'l: .,
,
Jou
RNA L
dix jours, parce que l'ilrr.· 4 du tit. 5 de l'O~don!)ancene
met aucune div~rGté .q~. délai touchant les lettres de change
pour valeur r.eç.lle .•comptant, ou pour val~ur reçue ell mar,handifts.;. JI!! ..lieu que pour I~s billet~ fJ 1 Qrdr~ valeur en
marchqndifès, lIe porrèur a.l.trois mois filivanc l~arr~ 3 I.
Ce . n'IiH paine le terme d'ordre qt,lÎ doie faire .préfumer.
que le billet
domicile participe agx bill~ts
ordJ;e" Si
l'on én ,eKc~p~e les promefiès ordinaires., tous .les' papiers
fluelconques .er;nployés .djlOS le c"olpmerce, contieoneor l'or:dre., fans ,lequel. ils.. n'qllroÎem ·auçun. C9ULS. Aullj voit-on
que, la lettr<~ 9~. Ç.ha:nge) mIe mandat·, 1<'l,.biJI~t· d~cha(lge.,
&c., fone cpn'ius pa); ~ordre.,Dès-lors.il (e~Qit y~~~}1tJi
fible lJ..u'pn t~ hâ. "de r vouloir confondre le billet d i/omicile dans la êlaffe des billets
ordre, parce qu'il enl reoferlT'eroit~un. ;r ~~'.Ia).pi/féren..cy qtji ~~gne ~~[re la "lettre
chap~e'lIf I~..pi~t;; ~-dqrn!~ile, çg~fi!te!C';n çe';.qlte le"~iJre.t
n'dl: 1 polDCh ~ll~H ,~I~;<['!.cewtlo.n 1 attend411lu~ c~lu·li H\111Je~
pr'fi:;nre. le < tÎre)!f) qI,1. aqcufl. int_~rê!. perfoQqel·cà 11'~4cép
. ter, .-?on mi~iAl~r.e efl: -Ba.(\if'l de p~rtl; refJ.~éfeoration... & (,ns:
--Je, c}raétere , dp. ~tW.><ya~Je. ~9ilà ce qui diaingue, ces deux
p'~pie,;~; -,~<..qn {~roi~·lg!.?ut"W:\ll~jn.'jl rplt"i~re) cEl\>tpQimide
~ifiirn~iEl}lJp'n ,m9Rlên}~b .~ ilfL:I} p,e4\AAl}e t~u"dçl1;li.,üle de.
l~qll.~Jlîh:I~? ·lIe i:yl!x~iré I!Mll'PVgpt ?8yqi!?}5\~~lfQngs., . u,.
~e, qui el-.Jfl: gl'9J e .h h9if!.l r.... J'ix Îsel\\jr a··U;lic:.r<ilu rédie
f4r,. ç;1~1\,? ~,tjr~,uf ~lJ~rç>.i~ d'çtJe:payeur ,j& ~u;~u.lieu d'un
!:>illje~ àlfjl,orpjç1e'; JI'~lHt, ~qpné ,en P'!~~ll)~pe"'f1llj porteur
~8 .. J~fF: xIP, ~~~ •. i'r~lP J~celt6,n ~atJ~l~ . ~~;~fr<!.!lpe' que
'':~'I,:a z5[~lJ9a.l!!F•• 000(\ gbl}-&,,!Hfl i, 1(lQ~ - ff~ib.1Jt.fJa {orme
~ tl~P%JI~o/lIilllJ #fgJ~sf§PlTl!J1u~e.s·I({U ,,1.!111~1j, domirJi;le
13.z,e!l nplqs t actGeptatlp.n ln pilS Jlell;l pa~ce, qlle lJe. pou~
van[ ~tr iaire-,gtl~.parl l ,r~ifoq (qui q. c~4é le biJleh~elle
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a
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f~ rq,qy L,!C}~o.n;:RI~Jf~o Hl. !,.<t';l ç~rt IPe, Jes. ,l}IVnSS1..&'
fI:. a~_l1t.f1lW. .:.J ~1.1J10
qPll~, ~ewr~~Nj:cewar~JOâm_
pYI.clfFm~~ Ja t1 ; fl,è~~~,.l~1 CJ :J' lIl J;i4 I~~,,?~yell) [put l~s:
pleP?~s. ,!r_~ttr vnllay'F' 9tU:>èl~ififj , ~ ~c~l?rati Oh <!r.mfri
t~ e,:~Ja e1~1 e J
t.,.pgl de kR!l1;-a '5i..~miçtlt:
lettre de change.
. IDguer de
ra
, ,pou(la
dif.
. Ainu
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PALAl1S/' BEl "PROVENCE.
i-r1t
Ajnfi fOUS 'rQusPles rapporr pi>ffiblè§ .1ëibill~c à'HoMl-[
eile ne s'alIimi1e: pas~'avéG'f1.ë':bll\e'"(nà "Wl1rf-'J :P.ë,. prêltlle~
emporte-'deux. 'enga.geln@~slpte'.féoonaA~'f.tt l!itifcèfl(il:i1è'qil~!i
d'&a ~feûl , je) jfayüa;.;bJI»oduj)ny~n ,1 !plI ,qùë' 'l'!tufr
rraite Jaffigneencorél Jrfè· f~t>oAéIe!I<'{t{hdM01?.'tri o~tan'(e~;l
que la fotnmefoii' pdyei':".>à' j Df1 0,É/!}1 k1!J,~Q>r l"
l~'qre??dP
change ne :p(.efc'rié rlê'd'-de .'\$lu-5I; ,&. il?11~ f>6ft u'r.. ld~ 'lai
lerrrè a fôn reto~r e "toilt- remp , jià,1'é&'EJuélilre!i fa!fcf~)
nlauront Ipas éré 'faits>~à ~I'ebd(oit :iatfl!tqilé',~ p11i§leP<Mé1
raifon'I,ellpode\ir .'du ; Dill~f· à d1>mi'cilèi'M\)it~ j~û1~ldUI rf.iëlliè?
privilege,L - '" 1 )
Il'','' . ~ ~~! ,'_ 1 1 'og sl1~dd ~ll 'J, ~l)
Arrêr .du' 30 Mai '17"Sr, a:u 'rappoj-lide'~l\1rll>lë' 2(!;'~I)
feiller de Beauval, qlli confirme la Setitenee du lLieutena'n~l
d'Aix avec' dépens,.& la déclare comhlÙne:· <'le exécûtolre
contre le ~rirel1rs. "E'Crivant' Mes. rl)afta1 isl, & .R"eYnauii. '(
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VIII.
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Les Juges-ContIs ne tPeiJvent ,connottrt ,des 'dûtes eont~àr7ëes:
entre Mar,chands, fi elles ne lidànb d raijim du tlOmmfr.ce.J
Ils connoi.ffènt des lettrr;s deli change entre: toutes .perfon"es.!
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OUIS .... Négociilnt de la "iHe de M_arfeille., faillit; [es:
depx fœurs lui fournirent de l'argent ; ~alJhafard Alexandre .... fe chargea de ,fa prQcurarion~ &ili1orranfige'a aveé.
les créanciers; pat J'a,rrêté 4e cpmj!te qù' ls pafferenD, en-'
fuite en 1770, Balthafard.... fut dé_claré}~rt!ancier "de fonJ
confiituanr de la fomme; de 2.300 liv: Aprè.s dix .ans d'at-.
renre Louis.... fur affigné à la Jurifdi8:ion Confu1aire,
en <:ond,amnation de cette fomme avec contrainte Lpar
c~rp:; il déclil)ll' la JL!tifdi,8:io,n i fur '~e' fondemlln <Jun s'a-l
glfI:OI,t p~ fimple. prêt, & OP[t de faIt ,det, marclJanaifes,; il
fut débputé; ilPpel ~e fa ,paFt pardeval'u la .GOUl;. ,'!, •
,On djfoit poyr lui que l'on ,eire ,d'être Nég,o,ciant ,.dès
.Anné,s z78z
& z78~..'
p
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1
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li A 21{ A.I (1 Il
ela ~~!llil fe,ul q~~ !'qn,._quitte -le commerce; . qu~ ce. 'çi,t-re i ne l'cornmujllq!le palOt un caraél:ere
i!l~jfas'!Ql<1 ;.;qll'9I11'rPe:u~ )~1!N\!.~rjr.. ~, l~~;perd,r~ tO\lr-~~tour;)
qpe ~,l'~t~~" ~ f'tiijile-, ~rr!!lu~.~nl:(td<\\ (:-elfat,oP totale de
l'éta,rrde :N~qjao~; rilu''l .ii\l; ,,qêpend l P'l~ même ,~es créanciers _d'uq ('lm; ,<...de. ~j r~40!1!.ler;. cette ~xil.tence publique,
mais' [eu\.ement • de~ n~,y ;f>P,i;nt mettr~ obfiacle; que deux
chofe's ~!JifiaIJJojv.el,)~ çoncourir·,..pQul) >Cjll\m 1iébiteur failli.
re~e~~ N.égoc;illimll: 10,qpe {es . .cjjéançiers ,lui aient 1
C[Oi1l3~1 l~b ibre' ~~~rciç~ d fes ~éÇiQ!ls~; ;10°. j(j\!~il ait profité
de cette liberté pour reprendre le commerce. Si ces deux cooditioqs mal)quent ~OJ,li à ·la, fois; fi ~oui-$,,;. Iéroit en~dJ.e fOlls
le joug de.....fes crçpl)çiers lorf\Ju'il aJ(j9l;1J les ferviëes que [es.
parens réçlaQJent i r ~'il étoit retiré d~ tout~s [es affaires
par . YI).- .a~,,"ndqnne.~eJlt gé,néral r fi tous fes h"i.en$.;létoien-t.
fous la main de la Jufl:ice; s'il ne pouvoit contraél:e
a!lcun epgagemel!.t; G l'ex<;rcice même de fes aél:ions lui:
étoit interdit, comment confervoit-il la qualité de Négociant ?
Le privilege qui rend jufiiciable des Juges-Confuls efl:
réel~daos un -feul cas, réel· & -perfonnel dans tous les au-·
cres; .il n'efi que réel, s'il -s'-agit de ,lettre de change,
parce qu'une o'bligation pareille;, indépendamment de la·
qualité des perfonnes, eH toujours de la compétence des
Juges-Confuls_; il eH -réel & perfonnel dans les a'\ltres cas,
parce qu'il faut, pour établir cene compérence, 1°. qu'il
s'agiffe .d'une .obligation':entre 'Négocians ·ou Marchands;
'2r~. que cette oliligatw:R J.[oit pou'r 'fait de ma-rcnandifes ou.
de ol1égoce~' Ces' -<lem( . conditions .cOAt prefcrÏ{es par les.
art. 2~ & 3 '-du 'titre rn, -de fOrdonnance du Commerce.
(J~H
• '" ,A
:....
. ~uifque
wefi 'que par une -exceptîon tt la recrle générale., [<j'ue daos les iettres de oha~é Ile ébitéLlr ~lJ't n'êtrè 1
ni. Mirchaoa: iIlj-" Négociant:, il 'HI~t donc' 'qu'il te fuit dans 1
tous les .aucres ~s'; fans qubi"'le prlvilege pahiculier' des'
lettres de .chànge [eroie comlnUQ à cous les genreS d'{)blit-IA:
l~nitant'.
•
' oIT :l -..r 'l V
H
&,jJ3~
-ce
.~r
.
.
.
�DU
PALAIS
DB
;':I.f')
PROVENCE.
gation; & alors quel feroit le fens dei çes4àTtièles ,de
l'Ordonnance? Sur 'quoi porterait cette. différence 'fi. ma"quée que le Légifiate,ur a voulu introduire en [;flleut dés,
lettres de change? Si cette premiere condition de la,'com'pétence des Juges-Confuls manque dans cene 'ca'ufé, 'la
feconde qui confifie' dans la nature de l'obligation" ne s'y
,rencontre pas davantage.
"
L'Edit de Charles IX, du mois de NOye01hre q 63,
portant création des Juges-Confuls, fixe leur pouv9ir;. une
Déclaration rendue dèux ans après , ,& .• l'Ordonnance du
Commerce, tit. 10, art. 12, limitent leur pouvoir d'une maniere claire & précife. La regle en connue: ce qui .dl:
un objet de c0lt1merce & d'indufirie, voifà rob jet du. pri!.
silege; voilà ce que l'Ordonnance a voulu.(foumertreHa<!'à
jufiice. rapide des Tribunaux Confulaires ~ elle a tlloifts
encore confidéré les perfonnes, que les liaifons d!imér-êt
, qu'elles pouvdient avoir entr'elles; elle a cru que des pr~.l
cès pour fait de commerce feroient plus facilement 'jugés
par des Négocians, qui par état en connoi1Tent le~dërail§:
elle a regardé' la contrainte par corps comme un fuite
prefque inévitable de ces contefiations, parce qu'un NégoCl.
dane étant cenfé jouir du crédit public, à rairolT de (ail
état, en cenfé à fon tour tromper la ,foi publique,' 10rrqu'il manque à fes engagemens; voilà l'efpece de, délit 'què
la Loi veut punir par la contrainte par corps. Il faut donc
pour rendre Louis.... jufiiciable des J uges-Confuls, en, vertu
d'un compte arrêté, que les objets qui le formene, aient
été pour lui un objet' de commerce, de trafic & d'induftrie; il faut que fes opérations aient eu pour bafe la, confiance publique.
',
',)
En fait, les paiemens que le compte concient n'ont' ~oinli
une deflination mercantille; ils n'oDt point fer.v'Ï 11 acquit'
ter des dettes privilégiées '; il n'en faut d'autre preuve que
1.a llruation même de Louis.... à l'époque où ces paiemens
ont été faits : il étoit alors dans un état de faillite &
fous le joug de la Loi i tous [es bie1.1s étoient céQés à
-
1)
2
�nif
" ,.[
.1
OUR N:A t
fes "reànciers i> il ,ne pouvait el) payer aucun féparément; les
articles du compte fout par eux-mêm~s équivoques, incer,tàins9'ils'lindiquenr: des paiemens, mais n'en déllgtieQt pas 'la
.natuse ; c'eH' l'arnache ,qui. refte à re'mplir à Balthafard...:.
€'eŒ à lui, comme à tout demandeur, à juftifier fa de'IÏlaodeè il ta,ut qu~il nomme quels font ces prétèndus créan~iers, & quel a été l'objet de ces paie mens ; dans le
,cas,·~ mêmé ' ,où il l'e prouverait, fan i pr.Îv.ilege ne' ferait
fQod~',ique (ur la fuorogation.; il' faw .donc 'qu'il en rap,porte. le tiùe; il faut qu'il foit devenu le porteur dé ces
l~ttres de 'change qu'il prétend avoir acquittées.
;l, Les,) fournitures faites dans lm .procès 1 ne fauraiént égal~me,ntêti'è.<le ,la co,rnpétence des luges.Gonfuls; ce n'eft
Rointe, là: une opération de,lcomnrerce;' u:né' 'nouvelle brah~
~,he d'induftrie' Balthafa rd
fa ifoit-il' de. pareilles, avan'ces
comme Négocianr? Louis
les. recev.oit~il comme Négocianr? Quel, eft le rapport marqué dans l'Ordonnance fur
~a' compétence .des, 1uges':Cènfuls "qui 'puiffe (onvénlr à de
J
J
,
pareilles.four;Oitures ? : J
~ 'Les deux' ·Iettres de cha'llge cômprifes dans le: compte
ne fauroient aumrifer cet.t.e compétellce; rO. parce qu'elles
pnt été payées; '2°. parce qu'elles ne formenr que la moin'dre 'pfrtie du :compte arrêté; 3°. parce que mute obligation' 'pour lettre' de change n'a pas le même privilege que
Les lenres ëie" change.
,,' ,
.
, Quand mëine. ces articles feroient de..la' ,compétence' des
1uges-ConllJls, celi les rendroit-ils. €ompétens pour mut
le refte, pour 13c majeure partie du: compte arrêté? Ne
feroit-il ,pas ,ab(urde .que; Balthafarc!... pour avoir eu: l'adreffe de joindre une lettre de change à vingt objets étranget? au com.merce, -eût aommu'll"iqué à t'oqs. les (articles le
priviJege d~u(l [eul,? cett place, cerce proximité purement
matérielle changeroit-élle la nature de ces obligations? les
rendrolt-elles 'mercanrilles? pourraient-elles transformer
Louis,... en Jl{égocianr.? Des articles 'concernant le nésooée i
quoi<l'Je li~,. lÎJloiquelenchaînés par le Jrnême titre à, d'aun
,
�DU
PAL AIS
D Jl:
P R q VEN C E.
117
-tres articles d'un autre genre, ne làu'roiem les attirer à ta
Jurifdiél:ion Confulaire; ce qui le prouve c'ef!: que' même
incidemment les Juges-Confuls ne peuvent connoirre des
matieres qui par elles-mêmes ne font pas de leur compétence.
Balthafard.... convient d'avoir fourni les lettres de change
dont il s'agit; elles étoient à l'ordre de fon coufin; mais
lui feul en étoit le débiteur; lui feul pouvoit être contraint
en verru de ces lettres de change; Loais.... convient qu'elles
lui one été fournies; il en a fair [on obligation, & ce titre eft l'arrêté de compte. L'Ordonnance donne un caractere parriculier à cette forte d'engagement; elle le dif!:ingue d'une manieœ expreffe des lettres de change. L'art.
27 du tit. ') parle d'une- ·obligation caufée pour des lettres de change qui ont été fournies; elle lui donne le
nom de billet de change. L'arr. l du titre des contraintes.par corps & les·Commentateurs font cene'différence
eirentielle.
•
.
Une obligation pareille, [oit qn'eUe ait la forme~ d'un
billet de change ou d'une promelfe ordinaire; ne fauroit
être de la compétence des Juges-Confuls, fi -le débiteur
n'eft pas Négociant; c'eH la difpoficion expreire des arr'.
2 & 3
du tit. 12 de l'Ordonnance. Rien de plus formel que la diltinél:ion que fait l'Ordonnance entre·Je- débiteur direél: d'une lettre de change, & le .débit.eut [ec'on~
daire d'une lettre de change qui lui· a été fournie : quelque obligation que contraél:e celui-ci pour une pareille
fourniture, le privilege de· la lettre de change n'eft plus
applicable à ce cas; un pareil engagement, elIt-il la forme
d'un billet de change, rentre dans la claire générale; la
qualité de Négociant redevient néceffilÎre pour donner lieu'
li la. compétence des Juges-Confuls.'
. J
Si le privilege de la lettre de change eH indépendant de la qualité des perfonnes, c'dt qu:elle ef!: un aél:e matériel de commerce; c'e!l: qu"elle forme par elle-même une affaire mercamille; c'ef!: qu'eUe devient en quelque forte papier mon-
.
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noie dont la circulation n'eLl: fondée que fur le crédit artaché au nom de Négociant; c'ef!: qu'elle ne permet pas
d'alléguer la qualité des perConn.e~, là ,où cette qu~lité a
diCpatu. Mais 10rCque pour la facIlite d un voyage, Ion fe
procure des lettres de c~ange, 10rCqu'on re~onnoî~ pa! un
arrêté de compre que 1on a reçu un pareil fervlce, cet
arrêté de compte partage-r-il le crédit des lenres de change?
.Ne forme-t-il pas Ilne obligation privée? Efl:-ce un engagement contraB:é envers l'Etat? Ef!:-ce le tirre protégé par
la Loi? Peut-on être comparé enfin, lorfqu'on figne un
arrêté de compte, à celui qui fou Cc rit des lettres de change,
qui les accepte ou qui les endoife?
On répondoit pour Balthafard que la qualité des Parties,
quant à ce qui concerne Balthafar ef!: incontefl:able; il ef!: a.ncien Juge-Conful; il ef!: donc Négociant. La Dame Arnaud
éroit Négociante en 1770, quand elle a fait des fournitures à
fon frere. Celui-ci érait Négociant lors de fa faillite; on
lui a prêté à raifon de fon commerce; fa detre a un trait
direB: à fa qualité de Négociam, puifque c'érait pour
.rolder fes affaires de commerce, que fes parens lui four:'
Jliifoient de l'argem, puifque c'ef!: pour défendre ra raifon
de commerce & lui procurer une remire, que le prêt a
été fait. Il n'a pas été befoin d'une fubrogation expreffe;
ceux qui om payé les créanciers, leur one éré fubrogés de
droit.
•
11 ef!: fi vrai que la qualité des perfonnes doit être confidérée à raifon de la JurifdiB:ion Confulaire à l'époque de
la dette, & non à celle de la demande, que l'Ordonnance permet d'y affigner les veuves & héritiers des Marchands; il fuffit que la dette procede d'un homme aurrefoi,s ~archand, & qu'elle foi~ ConCulaire, pour que le
creanc!er ne perde pas le drOIt de fe pourvoir à la JurifpiB:ion.
~a compérence que la mort du débiteur ne peut détru~re, ne ~e~t ceffer.à plus forte raifon par la ./impIe re~ralte du deblteur qu.1 ne 'commerce plus i. il ne fera plus
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fournis aux Juges' du commerce pour les obligations qU'II
'contraél:era à l'avenir; mais celles qu'il avoit contraél:ées
quand il étoit marchand, ne peuvent pas avoir changé de
nature par le changement' poHérieur de fa qualité.
Me. Aguillon, SubHimt, obferva, que l'Ordonnance de
1673, en renouvellant & ampliant la difpofition de l'Edit
du mois de Novembre 1563, fjl(e d'une maniere invariable les matieres dont les Jllges-Confuts peuvent prendre
connoi1faoce, & alIignent à leur Jurifdiél:ion des bornes fi
précifes, qu'il eH difficile de les méconnoÎtre. Suivant l'arr.
3 de }'Edit de rs63' .& pluGeuts des articles qui compofent le titee 12 de l'Ordonnance de 1·673, les Jurifdicrions ConfuJaires oht été créées pour juger les conteHarions qui na.i{fent entre, les 'Négocians, à raifon de leur
commerce. Pour' pOlivoir.·,iilveLl:ir ce ,Tribunal, -il faut que 1
les procès qui divifent les Parties foient mus 'entre deS')
perfonnes de cetétar,; & à ·raifon 'du négoce auquel 'elles
fe livrent.
La feule éxception à 'Cette regl!! réfulte de l'article '2 du
titre cité; ,elle a· .été établie 'pour les lettres" de change.
Lorfqu'il s'éleve. une contefbtion [à l'occafion d1un' 'pa_i.
pier de" ,cette 'narure, avec remife d'argent de place 'en
placè, l'état, la qualité des Parries ne font plus 'cotlfultés, & roure perfonne eH amenée au Tribunal Confulaire.
La conteHation que Louis.... éleve 11 raifon de fon érat,
ne paroit pas ,exiger une férieufe djfculIion; ce n'dl: que
parce qu'il ,étoit Négociant qu'il était en 'procès avec (es
créanciers; ce n'dl: qu'àraifon de ce procès qu'ont été
fa·ires! les fournitures dont le montant f-orm'e la créance
d'Alexandre..... c'dl: donc à cette époque qu'il faut remon. ter pour connoltre & fixer l'état de l'Appellant. Si depuis,
l'abandon' de [es 'bièni fait ~ (es créancier-s, il -s~efl: trouvé
dans l'impolIihilitéde [e livrer de nouveau au commerce
ou G. Al'autres morifs l'y <lot fait renoncer, ce n'eft' pa$
p.our lui une raifon qui puiffé l'autor,ifer à méconnoître fonancie,n ~{ar.
,1
�Jou R N A-L
En confidérant Louis.... comme Négociant, il faut 'exa-'
miner encore, fi les articles qui compofent le compte
c~urant 'peuvent être regardés ~omme formant une créanc~
mercannl.le. L'on y t.rouve; 1 • des lenres de ,change ql1l
s'élevem 11 7S0 livres '1. 0 • une fomme de 1000 hv,. c.umpré'e par Dalthafard.... lors de l'arrangement/.de la fallhte de'
fon coufin; 30. plufieurs fommes payées pour. les frais de
jul1:ice, contrôle de la tranfaél:ion. Or, qu'a de commun
le: 1prêt .que ~althafa,rd.... a fait à fon ctlulin ,. en payant
pôur.. lui les objets de dépen(e? Qu'a'de commu.n ce 'Prêt.
avec l'aél:~ de, comfTlerce qui peùt rendre ,la Jurifdiél:ion
C.onfulair,e compéte,nte? C'el1: un fervice rendu: Mais en 1
o1;>ligeant Louis..., croyoit-il filir.e une fpéculation de commercè Croyoit-il 'del1:iper .f~s fonds al) négoce? E,n ,efpéroit~il tq!Jelqu'autre. ',llvapt·age q\le, celui, de venir a.u' lecou~s qe fon parensr? "
'.
• . • '':'1
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Me•• AguiP9n d~fcuta enf\lite les articles d.el paiement
contenus dans
compte, & trouva 10. que Balthafard....
paffoit dans. le débit deux lettres de change qu'il avoit fournies ~ .I;-quis.... d,om 1)ll1e de 600 liv. & .1';lUtre de 1 SO
liv~és;, &. en~p'affanl; a,u crédit de ce. compte:, il vérifia
q~'~1 étoit cO}TIpofé. de deux feuls articles. c'el1:-à-diré que'
I.;oujs:... n'avoit exaél:emeüt fait que deux pâiemens',. l'un
de .. 600 liv. & l'autré' de 1 SO liv. & delà il étoit prouvé
que les lettres de change avoient été payées.
, '1.~. Suivant 1$l, compte, il étoit jul1:ifié.que Balthafard....
avojt payé It:,s ,1000 liv-;3ux créanciers de -[Oli cou lin lors de
l'arrangement que celui-ci prit avec eux Jors de fa faillite; mais
en ~onf~ltam l'aél:e du 14 Nov. 1770, l'on y voyoit que Balthafard.... y figura comme chargé de la proc'uration de fon coufin,
& .que·bien lo.in d'avoir avancé les 1000 liv., ce fut l'Appellant
qU11.);i l~ ._pale~\eN., de fe~ ,c)eniers; d'ailleurs ce paiementl
I)e pouve,lt.,operer une fubrpgation légale. Pour être fubrogé')
aux <jp:Y1tS des créancjers de celui pour qui l'on paie, il
fau~ ~.u qu~. la Loi nous mette à leur place, ou que nous
nous y trOU\'lons par l'effet d'une convention. Balthafard.... qui
a
1.20.
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PRO V lJ N C'E.
.I:l, 1
a pAyé librement pour fon coufin, ne lien~ a\lcune fubrogalion de la Loi, & n'en, a aucllne conventionnelle. Envain Balthafar.... diroit-il que toutes les fois qu'un
Négociant prête de l'argent à un autre Négociant, il eft
cenfé lui faire un prée mercantille, & que cette préfornIJtion fubfill:e jufqu'a la préuve contraire., En difcutanr. ce
fyltême, d'après le texte des Ordonnances, on ne peut fe
diffimuler que Balthafar leur donne une exœnlion dont elles
ne paroiffent point fufceptibles. En effet, l'Edit de 1 S63,
& l'Ordonnance de 1673, ne donnent aux Juges-Confuls
que la connoilIànce des différents qui naiffent entre 'les
Négocians, & à raifon de .leur commerce. N'ell:-ce pas
étendre trop loin la difpofition de ces Loix, que de porrer
indifl:inél:ement à ce Tribunal toutes les coiiteHa\ions, qui
s'élevent à raifon des prêts faits à un Négociaut, ~n pféfumant qu'il n'emprunte que pour fon commerce? Cependant' il faut convenir, qu'on ne s'en tient pas firié1;ement
à la lettre de l'Ordonnance; on a·cru que lé b.ien du commerce exigeait une. interprétarion moins'.rigourellfe , lX on
femble y a\'oir été aurorifé par une Déclaration interpré_
tative de 1611. La contexrure de cette Loi, parciculiere
foumet aux Juges-Confuls les diffërents entre Match<tods,
à raifon. des prêts fairs ,en argent; elle ajoute ces mets,
pour cauft de marchandifes; mais les Auteurs" & Jouffe
fur-tout, fe fervent de ces mêmes termes pour établir-que
quoique dans les billets il ne foit pas dit que le prêt
efi fait à raifon du commerce, on le pr'éfume tolljours
éntre Négocians. Cepedant en adoptant cette. exrenlion, en
regardant comme mercantille tout prêt fait L u,n Négociam, il ne 'faut pas trop légérement admettr nne.pré_
fomption qui pmtero.ir ,Il k1 Jurifdi~ioll' Cenfulllire, -des
caufes qui doivent lui érre (Otalement étrangeres. ,
Dans la .caufe préfente l'objet du prêt & l'empl'Oi des
deniers dt connu. Quant aux autres fournitures faites pour
la le\'ée de quelques atres, ponr les frais de procédures"
pour le paiement du centierne denier & cQntrôle de l'aa~
4n/l4~s t7 8 q ~78)..
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_d'arrangement, i1~ font fous tous les rapports po/Iibles, étran.:
gers à la Jurifdiél:ion à laquelle on les a porté. ,
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Me,' Aguillon conclut à, c~ q,ue falfant ?rolt au. decltnatoire, les Parties fulfenr delallfees à pourfulvre amli & pardevant qui de droit.
Arrêt conforme du 13 Février 1781, prononcé par Mr;
le Prélident de St. Vincent. Balthafar.... fut condamne
aux dépens. Plaidants Mes. Simeon fils & Pden.
,
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11.'::. -""
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Pie.es i nouvèllu &. décifives.
Moy,en de -R.equête civile.
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•
DAR, ~rrêt du .I~ Juillet 1779, Pierre ~,roquie,r, Soldat
~~) Invalide du ·.ROI de SardaIgne, fut remtegre dans la
polfeffion de trois propriétés de terre acquifes de Berenguier par Felix Bonneaud, les hoirs de Pierre l"eraud, &
les hoirs de Pierre Pellegrin, touS du lieu de Carnoules,
av~c refiirution des fruits & - dépens. Après cet Arrêt les
Parties palferent un aél:e; Broquier reçut 471 liv. 4 fols
pour les dépens taxés fur fimple rôle, & 3°1 liv. ) fols
pour la refiitution des fruits. Les débiteurs déclarerent ne
payer que ,comme contraints & forcés, pour éviter de
plus grands frais, & protefierent d'infiruire leur garantie
contre les hoirs de leurs vendeurs, ainli qu'il étoit dit par
l'Arrêt, & même' de tous leurs droits & aél:ions de regrès
contre les .tiers polfelfe~rs des biens aliénés par leurs
vendeurs après leurs, acquifitions.'
En I?~O, Felix Bonneaud & conforts, impo/erent Requête CivIle envers cet Arrêt, fur le recouvrement de nouvelles pieces; les héritiers des vendeurs intervinrent dans
l'in~ance,; on, difoit pour Bonneaud & conforts, que l'exécution d un Jugement efi un aae,; l'acquiefcement à ce
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PALAIS
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PaOVllNCB.
1-2.'3
jugement en elt un autre; l'exécution fait préfumer l'acquiefcement, toutes les fois qu'elle elt libre & volontaire;
tous les fois qu'aucun motif, autre que celui d'acquiefcer,
,n'a déterminé d'exécuter. Ici d'un côté, Felix Bonneaud &
conforts n'étoient pas libres d'éviter l'exécution. à laquelle
ils étoient foumis ; & s'ils n'y avaient pas été contraints
par la lignification des compulfoires, ils n'au l'oient 'pu l'éviter d'après l'article 18 du titre 3) de l'Ordonnanance de
1<667' qui Veut que les Requêtes civiles ne puiffent empêcher. l'exécution des Arrêts. D'un autre côté, Felix Bonneaud &. conforts avaient déclaré ne payer que comme contraints & for_cés. Donc point de préfomption d'acquiefcement.
Quand' même la quittance ne porteroit point de réferv~;
les nouvelles pieces releveroient .de l'acquiefcerpent le plus
abfolu, parce qu'il n'aurait été donné que d'après.u~e erreur
de tait. C'efl: le fentiment de Domat dans fes Loix civiles. Les impétrans Requête civile demanderent que l'Arrêt ne fût pas levé & payerent les dépens, parce qu'ils ne
croyaient pas être en état de prouver l'exifl:ence des collo. cations autrement que par les certificats d'inlinuation, que
la Cour avait jugés infuffifants. Ils ignoraient qu'ils pouvoient en trouver une copie; qu'ils ppurroient recouvrer
un nombre de pieces qui démontreraient la. réalité des
deux collocations. Ces pieces paroiffant, l'acquiefcement
qu'ils ont donné, quand ils ne les' connoiffoient pas, devient fa ns effet.
La Loi 4, cod. de re judie. qui concerne les Jugemens,
n'eU pas fuivie en France, puifque les pieces nouvelles y
font un moyen de Requête civile. Au/li Ml'. de Montvalon,
dans fan Epitome !uris, fous le titre de exeept. rci judo p,
469, après avoir rapporté les Loix qui ne permettent pas
d'attaquer les Jugemens, fous le prétexte des pieces nou.velles, avertit que notre ufage eU: différent: [ecus, dit-il,
in Gallia, Regiarum /itterarum heneficio. Quant à .la Loi 1 ~h
cod. de tranjàe? qui porte fur les tranfanél:ions .. elle s'CJC-
Q:l.
�Y~,T
•
) '/. l( ,( 'IJ'OUR NAt
pli'~ue' pli~~ c,es
/
-
termes,: {fenerali tr~nrizc7iohe finitâ refcin~i
prohibeht' Jura; & c'efi amfi que 1mterprete Domat, hl'.
1, tir. 1'3, feét. ~, ~. :3, pag. la).,
."
"
, Ain~",' œlu~ qU,1 rar un~. r'ranfaébon 'partlcu!~er~ deroge
:a un (hOlt' qUI '1\11 eft acqu!s par 'un titre- qu Il Igno~OIt',
dl: relevé de cétte dérogarion par' l'àpparitién de ce tirr "
fi 'touré [dis l'érre'ur dé fait a été ',la feure caufe de -la tran~
faél:io'n ou de l'acl2Juiefcement. Delà l'autorité de Radier
"& de-- Bo~n'ier fur 2 'le ,tirre de l'exécurion des jugemens de
.\lOrdorinarice; d~- 1-66'7 " art; ~. Lè prJmier d,it qu'il fut
-ju&:ê eh:'l,7}1 V~'~[f a(;q~ïelè~me'I'1,t do~né pa~j~rre,ùr ne
ntilt"p.aS. ILe recond, Ique }a pamé qUI a -acqUlefce à 'la
Sem~\1ce • dl:. non-recevable à appeller, à moins qu'elle
n'ait des l1Îoy~ns' ûe reil:irution cO,mre cet' acquiefcement.
;N'è!l~il' pâ(s:~vr~/l'que Ile fi!é~ce dé .fix m,ais après l'Arrêt
rOrm'ê ;une:' lin' 'dé bon~'reéevoir contre la Requêre civile,
,;trend~') que cèt efpace le rems paIré 'dans l'inaétion , on
cil: 'cenfé avbir' retioncé à feS droits conrre l'Arrêt? N'eil:il pas v~ai que les pieces nouvélles relevent -de cet acquiefcernent ~ rHultant du filence de fix mois? Or, fi elles reil:ituent "cohtre cet acquie(cement, elles doivent de même
re1l:ituer ,èontre l'acquiefcement réfultant du paiement. Il
,n'dl: pas pofIible qu'elles foient valables' contre une efpece
d'acquiefcement, & qu'elles ne le foient pas, contre l'autr~.
Il 'y a peJus': COtiS les Auteurs conviennent que le délai de
fix mois. ne -court que du jour de la découverte des pieces
nouvelles. Or, il n'efl: pas pofIible, fi le moyen' ne naît
9l;e: du jour dé'llad'ééollverte' des' pieces'; qu'il ait é,té
pen/hé Fiar un co.nfen1:ement, par un acquiefcement donn'é
,avan't qu'elles fuIrent connues.
On répondait pour Broqiuer, qu'en droit la protefiation contraire à, l'aéte n'opere rien. Quand on exécure un juge111é:it, lX' qu'o-n prorefl:e d'en appeller, l'exécution reHe;
elle ,efl: e4f~él:i~e ,: 'le jugement fublifie comme acquiefcé;
la protefl:anon dlfparoÎt; elle e'fl: emportée par la force de
l'a[te, par. l'exécùtion qui vaut roujou'rs acquiefcement,
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pour peu qu'elle foit volon.aire. Quand on ne veut )Joiot JCquiefcer, il faut lai1fer exécuter, & ne pas exécuter roi~
même: or, n'dt-ce pas exécuter foi-même, que de demander
que l'Arrêt ne foit point levé, que les dépens ne roient point
taxés, qu'ils roient réglés amiablement, & qu'on liquide auffi
fal)s formalités judiciaires les fruits qui tombent en refii~
tution? Ainli l'exécution volontaire n'a pu ici être détruire
par la proteil:ation contraire. D'ailleurs cette protefl:ation
ne tombe que tilr le droit d'infl:ruire la garantie & de faire
fouffrir regrès aux tiers-po1fefIeurs; ce qui, loin d'indiqner
aucun defir d'attaquer l'Arrêt, ne fert au contraire qu'à mieux
prouver que dans le fens des parties conrraélantes, il devoit
être exécuté dans tous les cas.
D'ailleurs ( ajouroit Broquier ) les pieces qui ont été produites ne font ni nouvelles ni décifives; elles ne font point
nouvelles, parce qu'elles devoient être connues par les reprérentans de Jean Berenguièr, vendeur, puifque ces pie ces
font des Sentences & des Arrêts obtenus par Berenguier,
& un rapport de collocation qu'il avoit fait lignifier luimême; elles ne font point décilives, parce que ces Jugemens ayant été obtenus contre fon frere & contre fa bellefœur, ils lui font parfaitement étrangers. Le rapport de collocation' n'ayant été lignifié qu'à fan frere, & ne lui ayant
point été fignifié à lui-même, il lui eil: auffi étranger. D'ailleurs ce ne font point les originaux des rapports de colfocation, mais feulement la copie d'un de ces rapports, qui ne
peut fuppléer à l'original, pu ifqu'il faut que l'original fait
enrégiil:ré pour faire foi. Enfin on ne voit pas quelle a été
la caufe de cette collocation. Comment Pierre Broquier,
étant abfent, a pu devenir débiteur de Jean Berenguier?
Les héritiers de Pierre Berenguier fondaient leur réclamation fur les mêmes motifs, les mêmes moyens dont
s'~toient fervis Fdix Bonneaud & fes conforts i ils ajoutOlent que la fin de non-recevoir leur était étrangere, &
Gue l'acquiefcement que l'on appofoit à Bonne<lud & conforts ne pouvoit les concerner.
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10
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Mr. l'Avocat-Général de Magalon obrerva que des piece!i
nouvellement produites ront regardées comme pieces nouvelles, lorrqu'elles n'ont pas été connues par .I~ partie q~i
les produit. L'Ordonnance renferm~ une condlt1?n plus fIgoureufe; elle veut qu'on ne reçoIve comme pJe~~s nouvelles que éelles qui ont été dét;nues p~r le faIt ,de la
partie adverfe; mais cerre regle n dl: pOInt obfervee e.n
Provence: des motifs d'équité ont fait accorder le droIt
de re pourvoir par requête civile, dès qu'on fe fonde fur
des pieces nouvelles, quoiqu'elles n'aient été détenues par
le fait de la partie; on exige feulement qu'elles aient été
inconnues à celui qui les produit. Pour que les pieces foient
regardées comme déciuves" il faut qu'elles préfentent un
nouveau point à décider, une quefl:ion différente. de celle
qui a été jugée lors de l'Arrêt dont on demande la rétractation.
C'efl: d'après ces deux principes, qu'il faut examiner aujourd'hui, ft les pieces que produifent Felix Bonneaud & fes
conforts font décifives. Ces pieces fom des Sentences, des
ArrêtS obtenus par Berenguier, la copie d'un rapport de
collocation, enfuite duquel les hiens avoient paite à Berenguier. Sans doute, ft Pierre Broquier eût plaidé en 1779
contre Berenguier, on pourroit dire que les pieces qui font
produites aujourd'hui ne pouvaient lui être inconnues, ayant
lui-même obtenu ces titres; mais ceux qui ont été ,ondamnés par l'Arrêt de 1779 avaient acquis des hériliers
de Berenguier; ils pouvaient n'avoir aucune connoilTance des
.Sentences, Arrêts & copie du rapport de collocation fur
lefquels ils fe fondent aujourd'hui. Lors de leur acquifition,
ils fe font contentés du titre qui leur transférait la propriété
de l'aél:e de vente; ils n'ont point demandé les titres en
vertu.defquels polTédoit Berenguier; ces titres n'éraient pas
elTenuels pour eux. Le contrat d'acquifition leur donnant le
~r?it de ga~anti,e ço.ntre Berenguier, c'efl: le feul qu'ils ont
ete emprelfes d avoIr. Cela paraît plus vrairemblable, furtout fi ou obferve que cette acquiûtion a été faite par des
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117
gens illitérés"" qui fe contentent fouvent de palfer un aéle
pardev~!lt
un N'Ctaire, & qui fouvent n'en demandent pas
un extrait. D'aY1eurs euifent-ils eu cerre précaution, euifentils demandé-1és titres de Berenguier, n'ayant point acquis
de Berenguier lui-même, mais de fes héritiers, peut-être
ceux-ci n'en avoientils- eux~mêmes aucune connoiffance. Enfin
Pierre Broquier ne prouve point que ces pieces aient été
connues en 1779'; il n'y a aucun indice, aucune raifon de
préfumer qu'elles l'aient eté; il dl: plus vraifemblable au
~ontraire que fi Felix Bonneaud & conforts les euifent connues, ils les auroienc communiquées. Quel intérêt pouvoient-ils avoir à ne pas les produire? Pourquoi ne les auroient-ils pas verfés au procès, lorfque Pierre Broguier ré- ,
clamoit les'propriétés dont ils jouiifoient? Pourquoi n'auroientils pas employé les moyens qui pouvoient le plus leur alfucer le' fuccès de leur caufe?
Il dl: vrai que Felix Bonneaud & fes conforts nè produifenc qu'une copie du rapport de collocation, n'ayant pu
recouvrer l'original; mais ils joignent à cerre copie l'extrait
d'une Sentence dans laquelle il eIl: fait mention de ce rapport de collocation, l'extrait d'un Arrêt d'expédient convenu entre Jacques Broquier & Berenguier, l'extrait de deux
Sentences confirmées par cet Arrêt; dans ces Sentences il eH
parlé d'une de ces collocations. Jacques Broquier demandoit
la caifation de la premiere collocation; il en fut débouté
par les deux Sentences; après en avoir appellé, il convint
d'un Arrêt d'Expédient. En 1779 on ne voyoit pas quelle
étoit la caufe de la collocation faite par Berenguier, Pierre
Broquier étant abfent. On produit aujourd'hui une Sentence,
où l'on voit que Berenguier avoit obtenu des adjudications
contre Pierre Broquier. Ces pieces paroiifent nouvelles &
décifives.
Sur la fin de non-recevoir, Mr. l'Avocat-Généralobferva
qu'~l eIl: une diIl:inélion à faire, lorfqu'on demande la rétracta,Clon d'un Arrêt; il faut diIl:inguer fi la demande ell: fondee fur des pieces qu'on dit être nouvelles' & décifives, ou
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JOURNAL
fur tout autre moyen. Payer les frais d'un Arrêt avant qu'il
ait été levé, c'eft y acquiefcer; c'eft renoncer au clci'!~t d'en
demander la rétraétation; mais lorfqll'il s'agit d'un moyen
fondé fur des pieces nouvelles, & qui n'on.t été recouvrées
qu'après le paiement des frais, ce .paiement n~ peut être. op~
pofé comme une fin de non-recevOIr. lien V!'<ll qlle celuI qUI
a payé les frais de l'Arrêt, a exécuté le Jugement, m'lis il
a exécuté -avant qlle de connoître qu'il avoir le droit d'en
demander,la rétraél:ation, avant que de [al'oir qu'il pouvait
ne pas y acquiefcer & fe foufl:raire au paiement de .ces
frais; on ne peut lui oppofer qu'il ait voulu renoncer à ce
dr-oit, puifque ce droit lui érait inconllU ,. puifque même ~l
ne l'avoit pas,
l'àyant acquis & ne pouvant en ufer que
depuis la découverte des pieces nouvelles. Cerre dlllinél:ion,
qui paroît bien déciuve dans l'hypothefe de la caufe, eil
une confequence du principe qui fàit entériner la requête
civile; lorfqu'on fonde cerre demande fur des pieces nouvellement recouvrées.
De ce que les pieces nouvelles & déciuves changent l'état
d'un procès; de ce qu'dies répandent un nou·veau jour fur une
caufe, • qu'elles en font connaître les véritables circonfiances,
les parties- ont le droit de porter une feconde fois leur con.
tefl:ation pardevant les mêmes Juges, & d'e-n artendre lfne
décifion différente, fi les circonftances l'exigent. Il en doit
auill réfulter néceffairement que les parties ont le droit de
révoquer ce qu'elles ont fait, tandis que ces pieces leur
éraient inconnues; qu'elles ne doivent pas être tenues des
démarches qu'elles ont pu faire, tandis qu'elles en ignoraient l'exifience. Cet-te' feconae maxime e.!l: une conféquence de la premiere.
. D'après les Loix Romaines, la promeffe faite par erreur
~fi dédarée null,e. D'après la Loi 6, ~od. d~ juris & faéli
~gnor., on peur reclamer ce qu'on a paye enflllte d'une femblable promeffe, & l'on pen allimiler à une prome1fe faite
par erre!)r, l'acquiefcelne'nr dont s'agit; Defpeiffes foutient
qu'on peut appeller d'une Sentence à laquelle on a confenli
ne
p-u
�D U
PAL AIS
D B
PRO V B NeE.
129
par erreur, moyennant des lettres royaux de refiicution.
Mr. l'Avocat-Général conclut à ce que faifant droit aux
lettres en forme de requête civile impétrée par Bonneaud
& conforts envers l'Arrêt du 19 Juille-t 1779, & aux lertres de refcilion & reftirution, les héritiers de Feraud, Pellegrin & autres, fuffent reftitués envers l'aél:e du 24 Oél:obJe 1779 , l'Arrêt fût rétraél:é, & les parties remifes au
même état qu'auparavant.
Arrêt du 22 Mars 178 1, à l'Audience du Rôle, prononcé
par Mr. le Prélident de Jouques, conforme aux conclulions,
Bouquier fut condamné aux dépens. Plaidant Mes. Richaud,
Simeon & Gaffier.
ARRÊT
X.
En matiere de complainte, il faut prouver qu'on a poffidê
contre celui d qui on oppofe la pojJe/fion annale.
On ne peut cumuler le pétitoire avec le poj[cj[oire, quoicjue
toutes les parties y confentent.
E 1 Septembre 177 8 , Mre. Jean de Raymondis, ancien
Lieutenant-Général au Siege de Draguignan, dénonça
Boyer, Fermier des Dominicains de la même Ville ~ pOUl'
avoir retenu l'eau qui lui appartenoit , & en avoir arrofé un
pred que ces Religieux avoient fait depuis un an.
L'Econome prenant le fait & caufe de Boyer, fonne
çppolition à la dénonce; il fe fonde fur la poffeffion de l'an
& jour, de prendre une raie d'eau pour arrofer le terrein
contentieux.
Mre. de Raymondis communique {on titre, & invite l'E~
conome à en produire, s'il en a j mais l'Econome répond
que la dénonce l'amarile à la complainte, qu'il ne veut ufel'
que .de. fa poffeffion." Je dois être maiorenu au poffeffoire,
'1 dIt-JI; Il n'eH pas permis de le cumuler avec le péri":
L
Arw~es
z78z & z78;),.,
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3è
Jou
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.
coire; il me fera plus a'lanrageux de. plaid'er au fonds, qU'and
j'aurai été maintenu en conformité du droit civIl & de
l'Ordqnnance; il m'eut fuffi d'arrofer une feule fois dans
l'année, & j'ai a"rr.0fé an & jour fur le terrein que j'ai converti en pré; ce qu~il offre de prouver par un expédient du
8 Mars 1979. "
Mre. de Raymondis foutient que· Pinterdit nIa pas lieu à
l'égard des fervicudes difcontinues; mais qu'en fuppofant le
contraire, il faudroit du moins" que la po1feffion dont fe
" prévaloit l'Econome, etÎt' frappé contre lui, qu'elle eût
" porcé fur fon eau, fur les jours, fur les heures que l'eau lui
" éroit affeél:ée. " En conféquence Sentence le 23 du même
mois, qui admet l'Econome à vérifier que Boyet a arrofé aux
jours & heures auxquels l'eau eft affeél:ée au fieur de Raymondis par le Réglement du 13 Août 168 S, avant l'époque
du premier Septembre 1777; la preuve contraire réfervée à
Mre. de Raymondis.
Appel-de l'Econome. Son principal grief portait fur ce que
par les Réglemens de la Communauté l'eau n'était attribuée
qu'en général" aux propriétaires des biens inférieurs; que
" ces propriétaires ne faifoient qu'un enfemble, qu'ils ne fe
" divifoient pas vis-à-vis des fupérieurs; d'où il concluoit
" que la privation de l'eau que l'un d'eux fouffroit par un
" propriétaire fupérieur, établilToit la' po1feffion envers &
" contre tous les inférieurs; d'ailleurs, difoit-il, la preuve
" de la polTelIion ordonnée eft impolIible, parce que les
" propriétaires fupérieurs qui prennent une raie d'eau, ne
" s'a1furent pas des témoins pour leur faire remarquer que les
" jours qulils l'ont prife étoient affeél:és à -un' tel propriétaire
" des biens inférieurs à la V.ille. "
Mre. de Raymondis répondit, que par le traité d'aliénation'
des moulins de 16'!-I , les eaux étaient attribuées colleél:ivement certains jours de la femaine aux propriétaires des biens
fupérieurs.à la Ville, & d'autres jOl:lrs aux propriétaires infé..
rieurs; mais qu'il y était dit qu'il feroit· fait un Réglement'
POUt la diHribution des eaux 'entc'eux i que le Réglement pout'
"
"
"
"
"
"
�DU
PALAIS
Dl!
131
PR(')VllNCE.
l'arrofement des biens fupérieurs fu.t fait én 1643' & renouvellé- en 1705; que celui pOllr l'arrofement des biens inférieurs fut fait le J 3 Août 168 S, enruite d'un Arrêt obtenu
par un de fes ançêtres le 17 Juin 1684; & que filivant ce
Réglement, il avoit droit d'arrofer fon pré durant dix-repe
heures & demie, à commencer à trDis ,heures du matin le
mardi, j~fqu'à huit heures & demie du foir du lendemain.
Il concluoit de-I~ que fon droie f~r les eaux écoie indépendant
pe celui des '!utres propriétaires inférieurs, & qu'ainli en
po1fédane contre les autres, les Jacobins ne pouvoiene pas
.<lire d'avoir p~Jfédé coot.re lui.
Si la preuve étoie impoffible, ajouroit Mre. de Raymondis,
ce feroit tant pis pour l'Econome; " mais i-l n'eH pas nécef" faire que les témoins fachent & dépofent que les jours que
" l'Econolfle a pris l'ean m'éeaient affeél:és; il fuffie qu'ils
" dépofent préçifémenr des jours & des heures que l'Eco,,' nome a pris l'eau; ç'eH fur ces titres qu'on examinera li .
" à ces époques l'eau m'appartenait.
" L'Econome doit s'ef!:imer heureux d'avoir été admis 11:
v la preuve çie la po1feffion annale; ce n'étoit pas le cas. Je
" pourrois appeller in quantùm contrà , parce qu'il dt do
" principe que lorfque dans une Communauté il y a un Ré" glement pour la diHribution des eaux publiques, pereonne
~, ne peut prefcrire contre ce Réglement, foit à caufe du
" caraél:ere public de l'eau & de la loi domeflique qui la
'J _dilhiblle entre les citoyens, & qui dès-lors fait partie du
" droit public & municip'al du lieu, foit par la nature de la
" fociété, qui tant qu'elle dure, eH exc1ufive de coute pref.
" cciption.. ", Il invoquoit la Loi cùm n~mo 5, cod. de aC'luirend. vel retia.poJfèjfione; Brodeau fur Louet ,'litt. E , fomm. 8 ~
l3oiffieu; de l'ufage des Fiefs, ch. 9'4, pag. 154: ; Vedel fur
Catelan, liv. 3, ch. 2& & 29,; Heocys, com. 2., liv. 3)
ch. 2.; Dumoulin, conf. 10, n°. 14.; d'Argentré; Cancécius, &c.
L'E.conome fe replîa alo.rs fur le pétitoire; & il conclut
à. ce qll.e l'appel.1atiou & l'appel mis au néant ,. fans s'arrête!/'
R:/>
�J.o v.lt NAt
, •
à l'expIait d'ajournement du fieur de Raymol1":
dis; [airant droit à (e~ moyens d'oppolirion, la dénonce fllt
Ij'2.
à la dénonce
.
nt
caffée, & Mre. de Raymondis condamné à tous les depens ,
& (ublidiairement à ce 'lue là où la Cour ne jugeroit pas néceffaire de fiaruer (ur le fonds, fan expédient fût reçu avec
dépens depuis le refus.
L'Econome foutenoit ces fins, en difant : " Suivant lei
" Réglemens de la Communauté, il Y a parmi les biens
" arro(ables, des biens privilégiés, des jardin-s potagers, qui
" (ont depuis le pontet de Marguiez jufqu'au bout de la Ville,
" pour le(quels on peut prendre l'eau durant le long de l'an" née, pour (uffire à une raie tant (eulement, (uivant l'an" cienne coutume." Le terrein que j'arro(ois était de ces
jardins; ainli Mre. de Raymondis n'a pas pu dénoncer; fi la
dénonce efi nulle, parce qu'elle trouble un poffeffeur pàilib le d'an & jour, elle efi bien plus infoutenable , quand elle
attaque une poffeffion fondée fur des droits certains. La nullité de la dénonce efl: préjugée par l'interlocutoire dont efi
appel, fi les Dominicains (ont en état de prouver une pof1èffion annale de fe fervir des eaux en quefiion. Le Lieutenant n'eut jamais dû ajouter à la preuve offerte, que les
Dominicains avaient u(é des eaux aux jours & heures affignées
à Mre. de Raymondis.
Au fonds, fi l'enclos des Dominicains efi dans la claffe
des jardins potagers, la dénonce ne peut pas fe foutenir.
Qll'on ne dire pas, continuoit l'Econome, que ce moyen
efl: nouveau, & qu'il efi: défendu par l'Ordonnance de cumuler
le pétitoire avec le poffe1foire. Les Parties peuvent dans tol;t
état de caure multiplier leurs exceptions: liat plurihus exceptionihus uri, in caufl1 appellarionis non deduc1a deducam , non
prohata prohaho. Si la po1feffion annale & le droit au fonds
forment deux moyens en faveur des Dominicains, rien n'empêche qu'il les employent.
Le pétitoire ne peut pas être cumulé avec le po1fe1foire,
pour empêcher que celui qui a fait un trouble ne tente d'échaper à l'aél:ion de complainte. ou de réincégrande par les,
�.
D.U
PALAIS
tH:
PROVI'!N~l;
.
IJ}'
. tàifons du fonds; mais quand une Partie invoque tout à la
fois la po1feffion d'an & jour & fes titres de propriété contre.
tin trouble de droit & de fait, loin d'être incompatibles, les
deux moyens fe prêtent un fecours mutuel' & fe renforcent
l'un par l'autre. Il invoquait à fon appui Dunod, Traité des
Prefcriptiohs, part. :L, cli. 3 ,pag. 138'; Rodier fur l'Ordonnance de 1667, titre des Complaintes & Réimégrandes,
art. 5; enfuite I! produifoit & il difcutoit plulieurs titres,
pour prouver que le terrein qu'il avoit anofé étoit privilégié.
Dans cet état Mre. de Raymondis préfenta une requêtê
incidente & fublidiaire le 19 Juin 1780; & après avoir conclu au fol appel & au renvoi , avec amende & dépens, il
concluoit encore là oÙ la Cour croiroit pouvoir juger ~llmu~
lativement le pétitoire avec le po1fe1foire, à ce que fans
s'arrêter à l'appel de l'Econome, tàifant droit à fa requêt~
incidente & fuhfidiaire, l'appellation de l'EconoI1)e & c~
done eft appel" feraient mis au ,néant ; & faifant droie à fa
dénonce & à fon exploit d'ajourneàietlt, 'l'E~onome feroit
débouté de fes moyens d'QPpo.fi.tion, & il ft:roit ordonné
que fes exécutions feroient continllées, avec dépens, contre
l'Econome.
.'
Il établit la jufiice de fes. fins provifoires en prouvant fon
droit fUr les eaux, indépendamment des autres propriétaires
arrofans, pour avoir prefcrit conere lui; il falloit donc que
l'Econome eût po1fédé contre lui. Rien n'étoie plus facile ,que
la preuve de cette po1feffion , fi elle eût été réelle; Mre. de
Raymondis avoit toujours dénoncé ceux qui avoient détournê
fon e'au, fans qu'on lui eût oppofé la po1feffion comre les
autres.
' .
~u fonds il difoit, l'Econome abufe de Ces brocards', ficet
plurzous ,exceptianious uti........ in cauflî appe!lationis....... Ces
maximes ne s'appliquent pas à la caufe; elles n'oor lieu que
quand les Loix n'y répugnent pas, quand les exceptions peu-'
vene fe lier' enfemhle: nifi lex impedit, dit la Loi nemo 43 ,
ff. de ~egulis juris; nemo prohioeturplurious ex,ception,io. ùti , dic
la LOI 8, ff. de exceptionihus; [ed ifla lex procedit [ecundum
�J 3110
Jou
.
JI. N A r:.
ern"'ae$, Jl0r,t ,la ~of,e , q~anf9 e"çeption~s non jÎ,tflt inlfl! (e con!rar,ù{, !J.0/l I!P)i;fll [e
~fLVlceJf! .f,qmpfl.tl . fi tame~ Iwn .mcompatihûe,s, dit G;odefrOl, hœc re~ula 1ac,u."1 ~ahet ln reo , cQ.n.ti~ue cet jn~erprete , Mf! in aé/q're, & dans ce C\lS l'Econome
fe prifel,lte ~ànZ'ft;m qRor.; ,c'.e~ c?m,me;t~l 9u'jl prétend, fuiy~?t lt?d~rr ,fu,J;n.uler aUJour4 ~UJ le. petltoU'e avec le poifeffOire.
J?'a,iJI,e~rs, ,c,omment l'E,conome \l-t-i1 (.;~ meme au. JOUi'
fon fy~ê.nv; 7 1ui ,qui.a fo~tenu. o,pilli~trement p~r~evant ~e
peuce~a.nt 7 f).-fl.~ quoIque Il p~t p,bfrlhlfs exceptlOnzhu~. utt,
" il ~y VOl/IOI,t QRP,ofer Alfe Ja polfe,IEol) annale; .qu Il ne
vqN'~* p'a~ fair~ valoir les ,rt}0yens d'inju!l:ice, '1i al!éguer
1>-, aucu,n tit el q,y,elque inép,ranlable ql,1e fCiF I:elfli qu~ ~UI aifu!! roi,t [on droit 'llf pétitOire. ,.
Il a ~o,u.lu être jugé par la poffeŒon ; une Seotence en ioterv1nue..C'e!l: [lfr·l fIl,érite de cette Sel).t~nce que .roule uni9ueme~t (OIJ aRpel; ce n'e!l: que 'le 1" PQ1fefi/on qUI a prodUIt la
Sel)ten,c,e l que la COllr dpit s'pccl/per, tantùm devolutull/. quanfùm -appel/atti"!' • .
,
Il ne peut pas cumuler le pétitOire avec le po1feifoire ~
Sur ce point de droie Mre. de Raymondis a l'avantage,
diroit-op poqr lui, cle réunir 11 l''lutprité des Loix, à
celle des Ordonnancet, 11 l'~yis des Auteurs, & 11 l'ufage
du Pa!ai~, le t~moignage le ,plus rfitéré de l'Econome.
En effet, l'Ecol1oroe' avoit conqaltJmenc fÇluten~l en pre.I1lie r e in!l:ance, ql~'il étolt défendu. de cumuler lé petitOire
~vec le poff~{foi~e. Il y ~ da-ns le corps de Droit plulieurs
titres fuI' cetfe matifre ~ plu.fieurs Lo.ix ~xpreifes, tir.
!Inde vi... ad leg. juliam.... de vi puMica.... de interdiRis. L. fi
fJuis 7,. cr~·..a4 L. jrf~VZ' Lt:g. u.n~c. cof. ~ti- pojJjàçtïs. L.37,
if.. d;e !ud.zcu,s. L,. ~ ~ cod. de appellafl!Jnlh. L. 3 ~ cod. de in«rd.l{lis. L. 35, If. q.e acquirend.,. 1ie{ amitt•. poff~ priûs de
~i? ~~ paJfeffiofle; 'llfflm' de; propriét~{e ((,1gnofcendum. Ce
pnncI.{l.e ~!l: con,lig'rl'é dan~ Ie~ \nijir4tS, liv. 'li' titre. 11"
~: t .~es ~4t~urs 'fa,nt, un~{1hV,~~ i le p.s>q"effeur tJ.e doit pas.
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~'+W.lM~~ 1<: f?.[e1f9ir<: av!:c 1
,p~~iç0Î!lÙ
difent~ils.
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, S.err!:~ ~
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4 des inR. Imbert, i1iltir. Forenr.liv. l ch~
PAI.A'IS "DI!
PROVENCE.
BoutarÎc, fuf le §.
33. Bornier, fur l'Ordonnance de 1667, tit. '18', ~rt. S' Ferl'iere ,.Diélion. déDroit & de Pratique, va. pétitoirè & va. plJffe./foire. L'Auteur des Maximês du Droit Français', &c.
Les demàhde's èn complainte ou réint'égran'i[e, porte' l'art.
~ du tit. 18 de l'Ordonnance de 1667, en ,<!onformité des
Ordonnances de Charles VII en 1'4)3,. art. 8;, dé Louis
XII en l ~o7, arr. 41 ; de Frari~dis l'en 153 'j, chap. 9,
;lrt. 1: " ne pourront être ji'Jintes'au pëtitoire ,·ni le' pétitoire
" pourfuivi, que la demande en cddiplainte ou réintégrandè
" n'ait été terminée, & la condamnation parfournie & dé." c./Ltée; défendons d'obtenir des lettres pour cumùler' le péti·
" toire avec le poffi./foire. "
Dunod, Traité des Prefcriptioris', part. ,2,. ch. 3, pag.
138, dit bien qu'on peut produire fan titre & alléguer les
taifons du pétitoire pour fortifier fa polfeffion; mais cela
ne s'entend & ne peut s'entendre, que lorfqu'il n'y a pas
une contefl:ation au polfe1foire. Si Radier ~ fur l'art. r du
titre des co'mplaintes & réintégrandes, pag. 3°1, déciélé' qù'il
n'y a pas d'inconvénient' à accorder par un même' jugement
la' réintégrànde & la maintenue définitivé au demandeur ~
s'il joint à la polfeffion d'an & jour, les titres évrdents' &
incontefl:ables de propriété, ce n'efl: que dans; le cas où la
éantefl:ation au polfelfoire n'aurait' pas été liée niJùgé'e; 'mais
on ne'pe'ut foutenir que le pétitoire &: le pàlfelfQirë péUVeO'!
êfre c4mulés' eh caure d'appel d'une. Sente'nce' rendue fur'
lé p,olfeffolre. Serpillon fu't'l'àre:. 'j' dé' l'Ordo/nnance de 166i,
28'2, pe1ffe' aulihlü:on ne Feift~ cumule'r' lé ,pélitQirè
avec le. p'of1elfbil'e.
.,
.
"
,
,,'Qui a 'Commis la 'Vbié'âlf:Gtr,c~eR 1'~è'6Ïl6niè: Qui a
" été 'fpolié'? 'c'efl: Mre. dé"Rhy'monâis: Qui s'efl: plaint? qui
,; a dénoncé'? c'eR Mte: dé Ray1n~ndis: Si l'Econome a:
'ô prétel1dû être' troublé" dans' fa ,pblfeffion annale, Mrè. de
Il' Ràym'ondis a prétendù être~ troublé dàns fa po!J:effion
,,' annale', dâns celle' dé~ 'tou{le,s' rems. Çe n'êfl: qpe 'parce'
,,' qe'il'dénioit 'la 'polfeffion'de l!.Ecoliome, & qu'îl ltrtiéll'loit
raite'
�13 6
Jou RNA ri
,
" po1feffion contraire, que le Lieutenant, en conformité
" de l'art. 3 du titre 18 de l'Ordonnance citée, a appointé
" les parties à informer. Mre. de Raymondis difcutoit enfuite
" avec.force les titres de l'Econome. "
Arrêt du 12. Mai 1781, rendu tout d'une voix au rapport de Mr. le Confeiller de Franc, qui confirme la Sentence avec dépens; il n'y eut des débats entre les Juges,
que fur la quefl:ion de favoir, fi l'on pouvoit cumuler le
pétitoire avec le po1fe1foire; mais à la pluralité il fut décidé que le pétitoire ne pouvoit pas être, cumulé, quoique
les parties y confemi1fem. Ecrivant Mt:,s. Barlet & Pellico t,
de Seillans.
'h
ARR Ê T
X J.
En fait d'a1fûrance maritime, qu'entend-on par finiflre qui
donne lieu' à l'abandon du navire?
Formalités' qui' doiven.t •€tre tJb[ervées pOilr conflater le
/iniflr(:
N l'anI:1é~ 1774·, Louis Aycard expédia de Marleil1e
le Navire le Conquérant, commandé par le Capitaine
Duchefne , pour aller faire la caravane dans la Méditerranée; il fit, affurer pour un temps 1imiré la fomme de 641 la
liv. fur,ce vailfeau, dont l'eHiination fm,ponée à 75000 liv.
franc' d'avaries. Le 10 Septéinbre même année, le Gapi~
taine Duc{Lefne fe troUVilnt à ,Alexandrie, prit à fret un
chargement de riz &, à'autre marchandifes p.our .les tranfportér à Confiantinople. Le 7 Novembre le vaiifeau le CO/ltjuerant naviguant'dans le' canal des Dardan,elles, fut CO'J1-.
traint pat la tempête d'c rarger la cote pour aller mo.uiller
à Kerner; en tenant cette côte il échoua à la dilhnce d~
c,inq cables aQ large. Le Ca.llitaine envoya fon canQt à terre
E
,
.
jlo~
�13 6
Jou RNA ri
,
" po1feffion contraire, que le Lieutenant, en conformité
" de l'art. 3 du titre 18 de l'Ordonnance citée, a appointé
" les parties à informer. Mre. de Raymondis difcutoit enfuite
" avec.force les titres de l'Econome. "
Arrêt du 12. Mai 1781, rendu tout d'une voix au rapport de Mr. le Confeiller de Franc, qui confirme la Sentence avec dépens; il n'y eut des débats entre les Juges,
que fur la quefl:ion de favoir, fi l'on pouvoit cumuler le
pétitoire avec le po1fe1foire; mais à la pluralité il fut décidé que le pétitoire ne pouvoit pas être, cumulé, quoique
les parties y confemi1fem. Ecrivant Mt:,s. Barlet & Pellico t,
de Seillans.
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ARR Ê T
X J.
En fait d'a1fûrance maritime, qu'entend-on par finiflre qui
donne lieu' à l'abandon du navire?
Formalités' qui' doiven.t •€tre tJb[ervées pOilr conflater le
/iniflr(:
N l'anI:1é~ 1774·, Louis Aycard expédia de Marleil1e
le Navire le Conquérant, commandé par le Capitaine
Duchefne , pour aller faire la caravane dans la Méditerranée; il fit, affurer pour un temps 1imiré la fomme de 641 la
liv. fur,ce vailfeau, dont l'eHiination fm,ponée à 75000 liv.
franc' d'avaries. Le 10 Septéinbre même année, le Gapi~
taine Duc{Lefne fe troUVilnt à ,Alexandrie, prit à fret un
chargement de riz &, à'autre marchandifes p.our .les tranfportér à Confiantinople. Le 7 Novembre le vaiifeau le CO/ltjuerant naviguant'dans le' canal des Dardan,elles, fut CO'J1-.
traint pat la tempête d'c rarger la cote pour aller mo.uiller
à Kerner; en tenant cette côte il échoua à la dilhnce d~
c,inq cables aQ large. Le Ca.llitaine envoya fon canQt à terre
E
,
.
jlo~
�DU PAL AIS D E PRO v Il NeE.
137
pour débarquer fes paffagers & faire demander du fecours;
en attendanr il commenc;a à débarquer les cordages, voiles
& vergues de rechange; fur ces entrefaites quatre bateaux
font amenés; le Capitaine y décharge fes marchandifes, &.
le navire fe trouvanr allégé fut remis à. flots. Cette opération achevée, il fit dreffer un Confulat par le Vice-Confui de France aux Dardanelles, pour confia ter le finiftre,
& qu'il avait payé 48) piaftres pour les frais. Le 6 Février 177) , le tems des premieres atfurances, étant expiré,
Aycard fe fit atfurer la fomme de 67700 li.... fur le corps
du Conquérant pour le compte des intéretfés au navire.
Dans la police il fut également évalué à 7.) 000 liv.
Par exploit du 1) Avril fuivant, Aycard fit intimer Il
fes <ltfureurs le Confulat fait dans la rade de Lampfaque i
il décbra leur faire abandon du vaiffeau le Conquérant, &les inrerpella de lui payer dans le tems de droit les fommes par eux affurées. Le Lieurenant de l'Amirauté, par
Sentence du ) Septembre 177'), ordonna au fonds &.
principal les pieces mifes, & que les atfureurs feraient
provifoirement contraints au paiement des fommes par eux.
refpeél:ivemenr atfurées.
Après quatorze mois de navigation le navire le Conqué~
rant arriva dans le port de Marfeille; les affureurs préfen.terenr le 3 Janvier 1776 une Requêre au Lieutenant de
l'Amirauté, pour qu'il accédât à Lord, du moment que le
vaitfeau aproit l'entrée 2 afin d'y chercher tous les papiers
conceroant le finiHre; toutes les lettres y filrent paraphées
&. remifes au Greffe. Aycard fit redretfer le ). du même
mois fan premier rapport pardevanr le Lieutenant de Map..
feille, & fir entendre en .témoins les Matelots & aurres
perfonnes de l'équipage. Les affureurs reprirent le procès
au fonds i lX. p'lr Sentençe du 11 Septembre 1778, ils fu.
rent déboutés ddlnirivement de leur requêre. en reftiruriol).
des ,fommes payées pal' eux provifoiremenr. Appel de leur
part parde.vant la Cour. Ils offrirent enfctite de cQntribueraux frdis par maniere d'avarie.
,/1nnées 178~ fi l 78:l..,
S
�13 8
JOUllNAL
On difoit pour eux qu'il s'agiifoit de favoir s'il exifioit
un véritablé finifire, un vrai cas d'abandon dans l'échouement eifuyé par le Conquérant, & fi ce finiil:re étoit légitimément prouvé.
L'Ordonnance de 1681, titre de.1 Confuls, arr. 27, pré.fente d'abord une -difpofirion qui n'eil: pas équivoque; elle
veut que les Maîtres ou Capitaines qui aborderont les ports
où il y a des Confuls de la nation Françoife, foient tenus,
en arrivant, de faire rapport de leurs voyages, & de l'état
& qualité de leurs chargemens. Valin, tom.
pag. 2H,
ajoute fur cet article, que dans les pay~ où il n'y a pas un
Conful de la Nation, ou un Vice-Conful, fi un Capitaine
'François eil: dans le cas d'y faire un rapport, il doit le faire
.devant le Magiil:rat du pays i·~ s'il y manque, ce défaut ne
peut être réparé.
On trauve la même difpolition dans la Loi 2, cod. de
naufragiis : fi 'luis navicularius naufragium fuflinuif!è affirmet,
provinciœ judicem, ejus videlicet in qua res agitur, adire fertiilet ac pra6et apud eum ujli6us eventum. Tous les Auteurs
-atteil:ent la même regle. (Roccus, de naut. pag. 9')' CafaRegis, difc. 23 , n. 12. Clairac, pag. 410. )
Le Légillateur a penfé qu'il étoit hafardeux de mettre
le fort des aifureurs à la difpolition du Capitaine, en donnant toute créance à fa dépolition ; & il a voulu que dans
ce cas, le Capitaine fit tout de fuite fon rapport pardevant
le MagiHrat le plus à portée du lieu où la chofe ferait
arrivée. D'abord point de délai, & parlà il rend l'altération des faits plus difficile. Tel eH le motif de la premiere
obligation à laquelle il les a fournis. En leur impofant la
feconde, il a cru les en.chaîner encore à la vérité par un
nouveau lien. Leur indiquer le Magi!l:rat du lieu le plus
voifin, c'était les adreifer à celui qui était le plus à même
de vérifier leur déclaration.
Cependant quelques indifpenfables que foient ces obligari ons, elles ne fauroient être remplies dans tous les cas
par les Capitaines. II eH tel accident qui les met dans l'im-
l,
�DU
PAL AIS
D Il
PRO V Il Nell.
139'
poffibilité de fatisfaire au vœu du Lég ill;ltel,lr; & fans doute
alors, il ne fauroit exiger d'eux ce qu'il ne leur a pas été
permis de faire. Forcé de croire à d'autres preuves que
celles qu'il auroit defirées, il ne peut que les a.dmettre"du
moment qu'il y a néceffité de s'y .réduire., Aillfi dans, une
plage lointaine, en ple!ne mer, dans'un lielJ il1b~bité, chez
l'ennemi, le procès-veTh,al du Cap!Faine fuffira '; la LQi 's'en
contente; elle fe contenteroit même d'une atrellation moins
forre. Elle va plus loin', pUifqu'elle' n'~xige alJcune forte
de preuve après deux an~ pour les vpnges. de longs cQl)rs,
& après un an pour les autres voyage:s..
Mais ddnS les cas ordinai;res, la'l pl'ani~le, indiquée pal'
le Légillateur, de prouver le finilhe, t{~;Ia feule ·qui f:<':m.'"
plilfe .complétement le: vœu d_e I~ !-oi1",§f"qui pyiffe.. être
ad~ire. $er.oit-il poffi~le que 1.a Loi d~1-'aut préférer cette
pr~uve comm~ 'étapt ll~ {eu!e, qui ,jluifi'~ mér:irer.fa ·con,.
~an'c~, l,a prefcrivjlut d.'une ~rhani~çe; ~J(prelft'! ~) fpéci.ale '"
rermit .cepËndanr au Çapitaloe 1 4.e ne, pas l''y ;Ijfl)j~tti.r, .
même le j'0uvant, pqur' lui. en ~ffi:ir. ÎJn~ autre qeaucoup.
Vlo}ns"propre à li! r.affurer.? \ Ce feroit là, unll:I}3érai(qn'qui
ntj pe,u~ pas le )ren_CO!?J~er ,A.aps~l~ v9fonté dUL~égiiJ,.ü:eur..
Il dOit donc d'ahfolue n~9ÎlIi[e. r,eJ~[:ter tou.r.t;s, ..1e~: .tt'
~efiaIj.~ns gue,);alfurc;, pe.ut ,R~~q~ite, ~u. ~?me.nt iqu11' ne
I1rodult. pa5 Feqe à la-qll~l\e li e,t91tJoUl11-ls,Hpél:eltlenQ ".po.lh
vant la rappo~ter. 1) devroit. encore.. les rejeçtéî' qljaod il
n'aur~it d'aetre, morif ·qlle Il! Iufpicion qui l doit réfulter"dè
Comi./upp f.'u~ aF,leiJa\ttll or~ipjlire'J:au~,J~.q,jle " a.uffi.u~~
çe{fal~e:;,qu un ConfuJat,l' ç~ttenfiO~le 10tm$OIhl' comme"dlt.
Çafa-Reg~~,.ne[~peukque renpf-e up')~i1J>iraiJ;lei fUlPe.8:.Jlilda:
Ï!!~li~()~lIffi ,. q~5>r,jferà$ra.indr
q!!~i n' ç Qu,'imaginé'_ou
exagére le finifire.
,
Le C<lp1ta.rne Duchefire a-t-il pu fe l:Qqfe()l]Ier. au vœu
de la ;Loi? ~'a.-t:il,f:Hr? Q~ ces pe,ux poil1ls.)'l.1.-n, ne (auroi!:,
~tre cont~fi<; paç l~ 4eu~ Aycard l ; l'au~re< [çJb;riJê!1J.e avoué;
Pilr.. lui. ,Il, r§f~lrr dç J~ i<!éclararion iu çl!pi[i!ia~r))uch.ffnql
qu'il
,~e.nu. flu'~ lui d~e-x~c!.IJ~r ~hjaème,J:\&1~ s:,'difpofitiQQs'
".1 ,
)
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�140
Jou
R. N A L ,
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de l'Ordonnance. Il fe troUVOlt ~ portee du VIce-Con fuI de
la Nation Franc;oife, réGdant au Château des Dardanelles;
rien ne l'empêchoit de s'y rranfporter; il avoir rechargé
toutes fes marchandifes; mouillé dans la rade de Lampfaque, où il n'aetendoit qu'un vent favorable pOlir concinuer fa navigation ~ il pouvoit fort bien fe rendre auprès
d.u Geur Surian , au IÎeù de refl:er coromodément fur fon
vaiJTeau ; delà la prevariciltion dont il s'ell: rendu coupable.
En fuppofanr qu'il n'ait pas pu remplir à cet égard le vœu
de la Loi, il ne'·lüi fera pas plus facile de jufiifier fa conduite. Ce qu'il n~aurdit pu fàire aux Dardanelles, _il pouVefit 'du mbins-- Ie''"fdire à COllll:antinople, où il y a pareillement un .éonful de la Nation. Là il étoit tenu, fuivant
Carticle de l'Ordonnance, de faire en arrivant un r'lpport
de fon voyagé; le pré rendu procès-verbal du Capitaine
Dtichefne ne' le 'difp8nfoi[ pas de fàtisfaire à l'obligatibn
qui .luiJéroit impoféè; elle ifen devenoit au contraire que
p'lus 1forre' Sachâné q'u"'Ï1 ~tiJavoir' pu faire qu'un procès-verbal,
& non n Confùlàt', il favoit auffi' qu'il lui reHoir' encore
à le faite vérifier par' l'audition du rémoignage des gens
de .fon bord;·il ~favoit' que fans cene vérification, la: piece
dont ~lls'agir ne pouVoit! fa-ire foi. ~
"~
,. _ '. " •
, Le -fieur Ayca'rd a prodlii en' preuve ,~ù') finiiHe.'; Urf
râpport -fair Jpardevant )le V'iêe~.Conrul jd~ jà)'Nati6rr l 'réli."
dant aux Dardanelfes; rapport11âJTermeJté, certifié p~r fon
équipage, têlen un mot que la 'Eoi pou·voîf1:exiger. Au-'
roit-il donc o\)f~(vé ce qu'éllè lui prefcrivoid' Non', li n'y
a eu ni rapport ,.lhi :témolns';entenaDs; il')n'ya eu;ni dé-'
claration, ni· vérifi.c3ti9n, quoique tout éelâ y foit en ap'pa:rence, ainfi qae' celaI réfulte' ces lettres prodpites au,
procès.
!-'~ Loi, dit'!e fieùr Aycard;,n'exige l'attefl:àtÎon qu'elle
fpeclfie, qûe demonI1:rarivement, & non exclulivemenr aux
autres attefl:atÎons équivalentes. Or, 'ces attefiations fe
teou~ent· dans celles qui {ont produites àu procès. Pro'cèsverbal <du' rcàpirain~ f'ait à 'bord d' va~JTeau j vérification
�il u ' PAL Ais
PRO V R NeE.
'14- t
Marfeille; ariclirion ~ cette preDE
lle ce procès-verbal faire à
ltIiere déclararion ; feconde addirion munie du témoignage
de deux Officiers; compte de dépenfes occauonnées par
l'échouetnent; dépolition de deux Capiraines & de leur
équipage, &c. Pour fuppofer que la Loi n'ait entendu
exclure que les atrefl:ations plus foibles, & non celles qui
équivalaient à l'attefl:ation délignée, il faut fuppoCer qu'il
y a effeél:ivemenr d'autres preuves rout auffi prOpres à la
'taifurer & à la convaincre, que celle fpécifiée da ns les diCpolitions. D'après la maniere dont on a développé les intentions qui ont dirigé le LégiIlateur, il efl: de route évidence qu'aucune autre voie ne peut remplacer celle qu'il a
prife pour remplir ces mêmes intentions. Il efl: fenlible
que d'autant plus un Capitaine s'écarte de la double obligation qui lui efl: Împofée, de rapprocher fa déclaration
du tems & du iieu, où le finifhe efl: arrivé, d'autant moinS
cette déclaration mérite la confiance de la Loi, d'autant
moins elle lui garantit la vérité de ce qu'elle lui apprend.
Comment donc la vérification tardive & fufpeél:e de l'aveu du fieur Aycard pourrait-elle équivaloir à celle que
le Capitaine aurait pu fàire dans le lieu du finifl:re? Comment: Croire après cela qu'il y ait effeél:ivement des atteCtations équivalentes?
Pour prouver la fauffeté du ConCulat, les aifureurs s'appuyoient, 1°. fur une minute de lettre du Capitaine Duch~jne au Vice-Conful Surial/; 2.°. fur l'extrait du compte
des dépenfes de la navigation du Conquérant; 3°. fur la
réponf~ du Vice-Con fui au Capitaine Duchefne; 4°. fur la
lettre de Mercenier & Compagnie au même; So. fur ce
que de la rade de' Lampfaque à Gallipoli, qui e'!l: de l'autre
côté du Détroit, & dans la partie la plus reiferrée, il n'y a
que trois quarts de lieue & demi, au lieu que de cette
mêm~ rade au Château des Dardanelles d'Alie, où rélide
l'~ Vlce-Conful de France, il Y a de g à 9 lieues en
!Igne droite. On voit par la proximité des dates de la
lettre écrite au Vice-Conful, qui dl: du 17 Novembre,
�142.
Jou
R li A L
& par celle du Conrulat, qui e~ du 18, que J?uchefne &:
fan équipage ne comparurent palOt devant le VJCe-Conful,
& que tout s'efi fait par correfpond~nc~. Par, le jo?roal
tenu par le Capitaine pendant la navIgatIOn, 11 en re(ulte
que le 18 Novem?re le navire étoit, mo~illé à Lam~(aque ;
qu'il n'en efi parti qu'après cette epoque j & les depenfes
faites à Confiantinople (ont datées du 20. La Let:re, dtt
Vice-Conful qui accufe la réception de celle du CapltalOe,
s'exprime ainli; elle efi fous la date du 19; Le Drogue-
maT! Elietir me remit hier votre lettre, qui renfermoit la'
-.minute du Confulat 'lue vous defiret. Je vous le remets aujourd'hui. Fut-il jamais un corps de preuves mieux (uivi~s
& plus parfaites pour démontre~ la fauifeté du Con(ulat faIt
aux Dardanelles.
Les aifureurs examinaient enfuite s'il exifioit un vrài
unifire, un vrai cas d'abandon dans l'accident arrivé au·
vaiifeau le Conquérant. En fait d'échouem~nt, difoient-ils,
il paroît difficile au premier coup d'œil de déterminer bien
précifément l'e(pece d'accident que l'Ordonnance de la Marine a prétendu mettre au rang des uniares, différent en
cela des autres cas de délaiifement dont 'le nom (eul déug-'ne (uffifammeor l'événement fpéci~é par la Loi; <;elu'
donc il s'agir préf~.ore dans (a dénomination même des
~cceprior:s aifez diflërences, pour qu'il foit néceifaire de
fixer l'incertitude au moins apparente que fembJe laiifel'
à cet éga~d la difpoûtion du Légiflateur. Il ne feroit pas
jufie, dit Mr. Valin [ur l'art. 46, titre des a{furançes, que
pour quelquè dommoge arrivé au navire ou aux marchandi.
fes, l'a.f!ùrt filt en drOit d'en faire l'abandon ou dilaiJfèment
aux a.f!ùreury, à l'e.ffèt de les oMiga de payer le' montant
des a.f!ùrances. Tout ce qu'il peut prétendre en ce cas, c'eft
.
le paierzent du dommage que la chofe a.f!ùrée à [ouffeT!:
Cet article de J'Ordonnance .de r 68 l " titre des <a.ffù~;
rances,' porte: ne pourra le délaiJfèment être'fait' ql~en cas
de prife, naufrage, bris, échouement,' arrêt du Pr;nçe<, ou
perte entiere des effits a.ffùrés, & tOIlS: autres dommages ne
�t4j
Teront réputés qu'avaries. Avant de chercher la volonté du
Légillareur dans fa volonté elle-même, il faut la chercher
d'abord dans la fource où il a dû néceffairement la pui"
fer; cette fource n'dl: autre que la nature du contrat dont
il avait à fixer les engagemens. En effet, qu'eH-ce que
l'affurance? Un contrat par lequel l'un des comraél:ans fe
charge du rifque des cas fortuits auxquels une chofe e!!:
expofée, & s'oblige envers l'autre contraél:ant de l'indemnifer de la perte que lui caufent les cas fortuits, s'ils ar·
rivent, c'e!!: la définition de Pothier, de Stypmanus & d~
Gibulinus.
D'après cette définition, il n'e!!: certainement pas dif·
ficile de fe former une idée bien ju!!:e du contrat d'affu.
rance & des obligations qui en réfultent. Ces obligation~
tiennent à l'objet même du contrat. Son objet e!!: de procurer à l'affuré la certitude de ne courir aucun des rifques
qui auraient pu menacer fes effets; pour que cet objet fait
rempli, il faut donc qu'à tout événeme_nt, le propriétaire
de ces effets fait mis au même état que s'il ne leur étoit
rien arrivé. Delà il fuit que l'affureur n'e!!: tenu à aucune
indemniré, dès qu'il n'y a aucun dommage; car il ne fauroit être fournis à payer une perre, lorfqu'il n'yen' a poinr;
Delà, il fuit encore que l'affuré de fon côré n'a rien à
demander, du moment qu'il n'a rien perdu; car il ne lui
a été promis autre chofe que la garantie 'du préjudice que
des cas fortuits pourroient lui caufer. S'il' pouvait exiger
une indemnité, lorfqu'il n'a effuyé aucun dommage, ou
même, fi effuyant un dommage il pouvoit' exiger une indemnité plus grande, il contredirait évidemment parlà l'effence du contrat dont il réclameroit l'exécurion, puifqu'il
trouveroit un gain là où il devrait feulement ne trouver
aucune perte. Or, tel n'eft point l'effet qui doit réfiJlter
pour lui de la garantie qui lui a été p"cmife. Telle n'dl:
point la conféquence qui dérive des définirions ci-deffus
rapportées; & cela eft fi vrai, que de ces définirions toUS
les Auteurs maritimes en ont déduit cette autre maxime ';
bù
PALAIS
Di!
PROVENCll.
�~#
JOURNAL
flue Paffirance n'efl point un moyen de gagner, mais ftule:;,
men1 un moyen de ne pas perdre. Donc les alfureurs ne
fauroient être fournis à indemnifer l'affuré que dans le feul
cas où il a fQuffert quelque dommage. Dooc celui-ci n'a
rien à prérendre, fi ce n'eil: d'être mis, en cas de finifire"
dans l'érat où il aurait été, fi ce unifire ne fùt pas arrivé.
Ces principes ont dÜ nécelfairement diriger le Légiflateur. En s'y conformant qu'avait-il à établir fur le fait des
abandons? Devait-il établir que cerre voie feroit ouverte
à l'alfuré, dans le cas même où fes effets n'auraient été
aucunement endommagés, & par cela feul qu'ils auraient
couru rifque de l'êrre? Devait-il foumettre ainQ l'alfu-reur
à garantir comme perdue, une chofe rendue faine & fauve
à fan propriétaire? Non fans doute i il efl: vilible qu'en
adoptant une regle pareille, il eut elfenriellernent contrarié les principes dont il s'agit, au lieu d'en faire la bafe
de fes difpofitions. Pour s'y conformer, il devoit donc
adopter une regle différente; il devoit ne permettEe le délailfement qu'autant qu'il y auroit effeél:ivement une perte._
Il devait même exiger que cette perte flu entiere; car la
voie de l'abandon n'ayant d'autre objet que de procurel'
à l'alfuré un dédommagement total, il faut, poor la lui
ouvrir, qu'il elfuye un dommage fi grand, que la voie de
l'avarie ne fuffife plus à le réparer. Pour qu'il fait en droit
de recourir à la premiere voie, il faut dortc que celle-là
feule puilfe l'indemnifer à plein. Or, une' indemnité pareille ne peut être néce!faire que dans le feul cas d'Uile
perce entiere.
Le Légiflateur a adopté la regle que lui diél:oient fut
la matiere des abandons, tous les principes qui régilrent
cerre matiere. POUl s'en convaincre, pour s'affurer' à cet
égard de fa volonté, il ne faut qu'examiner la maniere
dont il devait la déclarer dans l'article 46 où elle efi
con!ig née . Dans cet article, l'Ordonnance de la Marine
~VQJt ~ flatllcr, (wt {Ljr le dé~i1femellt du navire, que fur
celui
�DU
PALAIS
DI!
PROVENCE.
14;
doute les foum~ttre à la
celqi des effets; elle devoit fans
même regle; elle devoit les régir par le même princi. pe; mais ce principe, elle ne devoit pas l'énoncer de la
même maniere. En établiifant que le même finill:re feroit
néceifaire pour autorifer l'abandon du corps, comme pour
autorifer celui des facultés, elle devoit cependant s'exprimer d'une maniere toute différente. Une raifon eifentielle
J'y obligeoit.
Les facultés ne font jamais dans le cas d'occafionner
à leur propriétaire une perte totale, fi elles ne font ellesmêmes entiérement perdues. Si elles ne font englouties
par les flots, ou prifes & arrêtées en totalité, elles ne peuvent
fQuffrir qu'un dommage partiel; & dès-lors une indemni té
proportionée à ce dommage fuRit à l'aifuré. L'abandon
ne devoit donc avoir lieu pour les effets que dans le cas de
leur perte entiere. Il n'en efr pas ainfi du vaiifeau. Il
peut fubfill:er, naviguer encore, fe rendre au même lieu
de fa defiinJtion, & n'en être pas moins perdu pour fon
Armateur. Il peut toujours l'avoir en propriété, & n'en effuyer pas moins réellement une perte entiere, fans que
fon bâtiment paroilfe l'avoir elfuyée. Un bris, un échouement, une voie d'eau, pe\.1vent délabrer fon navire à Un
tel point, qu'il ne puilfe le r~tablir qu'en [aifant une dépenfe qui ex.cede fa valeur. Réduit à cette. extrêmité, il
fouffre un préjudice tout auŒ grand que fi fon vailfeau lui
avoit été phyfiquement enlevé, ou par un naufrage, ou
par une prife, ou par tout autre cas; & pourtant ce vailfeau
exilte encore, lui appartient toujours, lui efi même rendu,_
Si donc le Légiflateur, en fixant J'efpece de finifire qui
pouvoit dpnner lieu à l'abandon, s'étoit contenté d'exiger
indifiinél:ement la perte emiere, tant pour le corps qu~
pour les facultés, il n'eut pas mis dans fa difpofition toute
la clarté & la précifion néceifaires. Cette difpofition aurait pu
!l'être p4s entendue. On auroit pu croire qlJe le délaiJfemMt
(ldmiffible pour les facultés feulement, dans le cas où eUes;
étoient roralement enlevées à leur propriéuli.re, n'étoit
Annùs (78z & 1 78:l..
T.
�146
Jou
RNA
L
admiŒble que dans le même cas pour le corps. Le Jugé
trompé par la lettre de la Loi aurait pu rejetter la d~
mande du paiement des fommes affurées, formée par un
Armateur, fous le prétexte que fan bâtiment fubfiHanr toUjours, ne pouvait pas avoir effilyé une perte enriere; &
cet Armateur eut été repouffé ainfi par une exception victorieufe en apparence, quoique fondé réellement à faire
abandon à fes affureurs. Il étoit donc ..bfolumenr nécef-faire que l'Ordonnance s'expliquât d'une autre façon; ce
-qu'elle avoit de mieux à faire, étoit d'énumérer les diffé.rents évéoemens qui pouvoient mettre l'affuté dans le cas
d'effuyer réellement une perte entiere, fans cependant que
:le navire fût euriéremeot perdu pour lui. Par-là elle pré'venait toute incertitude, toute équivoque.
Des cinq cas d'abandon qui four énumérés dans l'arti·
>cIe 46 , pour le corps du vaiffeau, les quatre premiers entraîneur une perte entÏere; le cinquieme, qui eH l'échoue'ment, peut-il donc n'être pas de la même natu·re? Pour
fe convaincre que l'Ordonnance n'a entendu pa·r le mot
'échouemens qu'un accident affez périlleux, affez préjudiciable
-pour être équipollé aux autres finiHres, & pour caufer comme eux une perte entiere, il ne faut que jetter les yeux
fur les art. 3, 4, ~ & 6 du titre des naufrages, hris &
échouement, & fur l'art. 4~ du tit. des ajJùrances. Leurs
difpofitions proûvent au dernier degré d'évidence, que le
Légifhteur a regardé l'échouement comme équivalent au
Il:lufrage. Il les difiingue fi peu, qu'il ne croit pas même
néceffaire de les différencier par·l'expreffion. Dans l'un des
articles cités, il fe [ert du mot naufrage, en parla ur d'un
navire échoué. Dans un autre il ne dit point, effets naufragés ou échoués; il dit tout fimplement, effets naufragés,
rendant par-là commune aux deux cas l'idée attachée au
terme qu'il emploie, donnant par-là à entendre que dans
les deux cas, les effets ne peuvent qu'effuyer le même
dommage, & fe trouver dans le même état de ruine & de
délabrement.
�DU
PALAIS
DE
147
PROVENCE.
Le navire du fieur Aycard n'a éré que remis à flors;
ce font les propres termes du Confulat; il n'a pas foufferr le moindre dommage; on le tient du Capitaine luimême. Il en a été quitte pour quelques frais occafionnés
par la décharge. Ce navire n'a donc elTuyé que l'événement mis au rang des avaries par l'article 6 de ce titre.
Cet événement ne peut donc pas être celui que l'article
46 du tirre des ajJùrallces défigne comme un des finifires
qui donnent ouverture à l'aélion en délailTement. Vouloir
qu'un échouement rangé dans la clalTe des avaries foit le
même que celui qui avoit été rangé dans la c1alTe des abandons; prétendre qu'un unifire accolé à d'autres fortunes
de mer, qui toutes occauonnent la perte entiere de la
chofe alTurée, affimilé particuliérement au naufrage, confondu avec lui dans les mêmes difpolitions, comme entraînant les mêmes fuites, mettant comme lui I~ navire
dans le plus grand délabrement, & les effets dans le cas
d'êrre naufragés & recouvrés; prétendre que ée uniUre puilTe
être reconnu dans un événement qui n'a pas caufé le moindre Inal au vai/feau , qui ne pouvoit pas même endommager
les facultés, c'eil-Ià une de ces prétentions dont l'abfurdité
furpalTe encore l'injufiice.
.
Il eH fenlible que fi le LégiIlateur elÎt voulu que l'échouement donnât lieu au délailTement toutes les fois qu'il y
aurait fecours étranger, il n'eut pas mis dans la clalTe des
avaries l'échouemenc qu'il y a placé; car l'emploi d'un
fecours érranger ne peur qu'accompagner toujours cet évé.
ment. Faut-il bien qu'il ya,r une 'tffinance empruntée, puif.
qu'il y.a des frais? Pour que le déchouemem entraîne des
dépenfes ~ il fJut néce/fair~ment qu'il y ait d'autres forces
que celles de l'équipage, employées il l'effetluer.
On répond oit pour l'alTuré, que la preuve la plus ordinaire des liniUres efr la vérification que le Capitaine a dû
faire de fon procès-verbal au .premier parr; vérification qui,
lo.rfqu'elle a éri .faire pardevanr un Couful, en un Confnlat. MAis cetre pr~uve .orqinaire n'efr pas la feule que la
T
2.
�1~
JOUk.At
Loi admette; il n'efi pas dit que l'affuré, qui fera privé
de ce Con[ulat, quoiqu'il puiffe confiater d'ailleurs d'une m'l'"
niere indubitable que l'accident efi arrivé, folt frufiré de
tous [es droits envers [es affureurs.
Il s'agit de décider li le Con[ulat efi d'ab[olue néceflité, toutes les fois qu'il a pu être fait, ou li dJns ce cas
on peut admettre à [on défaut des preuves équipollentes.
Il faut d'abord écarter la Loi Romaine, qui ne prononce
aucune peine comre le maître du navire, qui n'dura pas
fa it preUl'e du naufrage dans le lieu Je plus procha i u; il
n'efi déchu de [es droits, [uivant ce texte, que lorfqu'il
a négligé d'introduire [on aétioll dans l'année. Prononçant
une déchéance contre cette négligence [eulement, cette
Loi indique [uffifamment qu'elle n'a pas entendu en prononcer une contre l'omiffion de l'aéte préalable & probatoire qu'èlle pre[crit. Il faut allffi écarter ce que dit Cleirac, parce qu'outre qu'il ne cite pas les Loix, il attefie
plutôt un u[age qu'un droit, & il ne dit pas que les maîtres du navire [oient obligés, fous quelque peine, à faire
':cetre attefiation judiciaire au premier porr.
L'arricle '2. 7 du titre des Confuls n'eG: qu'une Loi de
police. C'eG: la furveil1ance du Prince qui fuit le navigateur. Ce n'eG: pas le Légiflateur qui difpo[e fur J'intérêt
des fujets; Valin ne l'envifage pas autretnent. LorCque J'Ordonnance de 168I parle enfuite des preuves que l'affuré
doit rapporter de la perre, elle ne les [pécifie pas; elle
dit feulement en l'art. 57, tit. des aJJùrances : les ac7es furtificatifs du chargement & de la perte des effets affurés
ftront Jignifiés aux aJJùreurs incontinent après le délai.ffime1lt, & avant qu'ils pui.ffint être pourfuivis pour le paiement des fammes aJJùrées.
Ce n'efi qu'à propos du jet que J'Ordonnance prefcrit
I.e Confulat ùz eodem loco vel viciniori. L'art. 5, tit. du
Jet & de la contribution, porre: au premier port où le navire
abordera, le maître déclarera pardevant le Juge de l'Amirauté, s'il y en a, Jinon pardevant le Juge ordinaire, la
�nul' A LAI S
D l!
PRO V l!
Nell.
149
t:au[e pour laquelle il aura fait le jet, coupé ou forcé fis
mats, ou ahandonné [es ancres, & Ji' c'efl en pays étran·
[Jer qu'il ahorde, il fera fa déclaration devant le Conful de
la Nation Françoift.
La raifon n'enfeigne...t-elle pas que le Confulat, preuve
ordinaire, n'étant qu'une preuve par témoins, il ftroit fingulier & concradiaoire de ne pas admettre, à défaut de
cette preuve, une autre preuve juridique par témoins; que
les preuves du même genre peuvent fe fuppléer; que lorf~
tlue la Loi exige nommément une preuve, elle l'exige exc!ufivement à toute autre moins forte, mais démonlhativement aux preuves égales & plus fortes.
Pourquoi & comment l'omiffion du Confulat, de la vé~
tification du procès-verbal in eodem loco vel viciniori, ellelle imputée à l'affuré? C'eit que ex illil omifJione ac1ûs
foliti, facilis & neceJfarii, oritur fufPicio & prœfumptio quod
prœtenfum damnum navis non acciderit ex dic1â caufâ.. C'efl:
la raifon que donne Cafa-Regis. Donc fi la déclaration par
écrit envoyée par ce Capitaine auffi-tôe après l'événement au Vice-Conful du lieu le plus prochain, ell telle
qu'elle écarte cette préfomption & cerre fufpicion; rien
n'empêche qu'étant enfuite vérifiée au lieu du retour du
Capitaine, elle ne devienne une preuve juridique. Ici on
ne peue foupçonner que le Capitaine Duclzefne ait concerté
frauduleufement avec l'affuré la relation de l'événement,
dès qu'il a fait fa déclaration d'abord après, & qu'il conHe
de cette déclaration, relie qu'il la fit alors. Le Confulac
produie par Aycard, quoiqu'il ne foit pas un vrai Confulat, ell l'extrait de la déclaration par écrie envoyée au
Vice - Conful des Dardanelles, aulIi - tôe après l'événement.
Si dans le procès du 'fieur Guichard, le rapport du
Capitaine fait in eodem loco, quoique non vérifié alors,
a été jugé fuffifanc par la vérification qui en avoit été faite
pollérieurement à Marfeille; fi dans le procès des fieurs
yague on ne leur imputa pas l'omilIion du ferment dans
�ISO
JOURNAL
lè Confulat ~ Agde, parce qu'elle avoit été réparée dan~
un nouvéau Cônfulat fait à Cette, c'ell: que dans l'un &
l'autre càs il conll:oit que le C.apitaine n'avoit pu combiner fes déclarations avec les affurés. Il en ell: de même
dans le cas préfent. Pourquoi la Loi craindrait - elle- plus
à;un proeès-verbal envoyé par le Capitaine incontinent au
Juge le plus prochain, mais non vérifié dans l'infbnt, qu'elle
n'appréhende d'un procès-verbal fur _rébellion, dont elle
prefcrit feulement l'envoi au Juge fans délai, fans fixe.
le tems auquel ceux qui l'ont dreffé doivent y être répétés?
Le Capitaine Duchefne a fait & envoyé au Vice-Conful
des Dardanelles, d'abord après l'événement, la déclaration
de ce qui lui étoit arrivé. Ce font les faits contenus en
cette déclaration qu'il a affirmés enfuite, conjointement
avec fon équipage, pardevant le Lieutenant de l'Amirauté
de Marfeille. Il n'ell: pas p.offible qu'il ait concerté cette
déclaration avec l'affuré. Les mêmes faits fe trouvent affirmés par les Capitai~es Gueit & Meinette, & par leurs équipages, dont les navires fe trouvoient près de Lampfaque
]ors de l'échouement.
Paffant ellfuire à la qllef1:ion : exif1:e-t-il un vrai lini/he,
un vrai abandon dans l'accident arri\'é au navire? On répondoit pour l'affuré: dans l'article 46 de l'Ordonnance de
168 l , titre des affirances, le Légiflateur a conlidéré l'échoue ment , le bris, le naufrage, &c. comme étant chaçun un dommage en foi, indépendamment de fes fuites;.
& c'èft ce qui réfulte de ce qu'il, dit après avoir parlé de
ces événemens, que tous les autres dommages. ne feront
réputés qu'avaries. L'échouement ell: donc en foi un dommage qui donne lieu à l'abandon. D'après le fentirnent de
Val in , il faudroit fuppofer que chacun des quatre premiers
ças ne donne lieu à l'abandon qu'autant qu'il eft joint au
fixieme; c'efl-à-dire, qu'il n'y auroit lieu à l'abandon en
cas de naufrage, que lorfqll'il y a perte enriere.
L'Ordonnance diftingue flx cas, & les répare par I~
�DU
PALAIS
DB
PROVENCE.X,1
tlisjonéHve ou : prift, naufrv.ge, bris, échouement, arrêt
de Prince, ou perte entiere des effets a.f1ùrés. La confhuction indique que la disjonél:ive ou el!: fous-entendue entre
chacun des fix cas & celui qui le fuir. Il n'y a pas plus
de raifon de cumuler chacun des cinq premiers cas avec
le dernier que de les cumuler tous : à les cumuler tous,
il faudroit donc dire que l'abandon n'a lieu en cas de
perte entiere même, que lorfqu'il ya en même-te ms & cumulativement avec la perte entiere, prife, bris, échouement,
naufrage, arrêt de Prince.
Qu'entend-on par échouement? La jurifprudence n'a pas
pris ce mot dans fon acceprion commune. II y a eu phyfiquement un échouemenr, lorfque le vaiffeau ayant donné
fur un terrain, a ceffé d'être à ·flors, & ell néanmoins
parvenu à fe relever. Pour qu'il n'y ait qu'échouement, il
faut que le vaiffeau fe releve ; s'il ne fe relevait pas, il Y
auroit naufrage. L'échouement n'a, fuivanr la Jurifprudence,
l'eŒet légal d'autorifer l'abandon, ~Ie lorfque le vaiffeau a
été relevé par des fecours étrange~s. S'il éroit décidé que
lorfque le vaiffeau, quoique déchopé par des fecours étrangers, s'el!: relevé, ou s'ef!: relevé fans bris, il n'y a pas
lieu à l'abandon, il ferait décidé que l'Ordonnance.a malà-propos mis l'échouement au nombre des cas d'abandon,
& que des trois cas, naufrage, hris, échouement, il n'y
a , quoique l'Ordonnance ait marqué le troifieme, que les
deux premiers qui acquierent le droit à l'affuré.
Auffi la Chambre du Commerce de Ma.rfeille, donnant
fon avis, après avoir donné du mot échouement certe définition, l'échouement du nal,ire, c'ejl-à-dire cet accident
par lequel un vaijfèau ft trouvant intégralement arrêté fur un
fonds quelconque, dans toute l'étendue de fa quille, devient
comme immohile, & .parlant des Sentences & Arrêts qui
Ont admis l'abandon dans les cas d'échouement, quoique
les navires s~en {uffent relevés, dit que ces décifions ont
été déterminées à caufe de la précifion du mot de 1'0r..donnance, qui veut que l'abandon pullfe être fait ·en cas
�,
l'i"
- JOUltNJ.L
d'échouement. Telle ef!: la Loi exif!:ante depuis 168 t ; Lo~
qui employoit un mot précis, non (u(ceptible d'équivoque.
Ce mot fignifioit l'accident qui met le navire en danger de·
périr, & que le navire n'a pas moins fo.uffert, quo.iqu'il n'y
ait pas péri. La Déclaration du Roi du 17 AoCit 1779·, qui a
interprété l'art. 46 de l'Ordonnance de 168,1, ne peut être
appliquée au cas préfent, parce que l'échouement avoit eu
lieu avant qu'elle flit rendue.
Par Arrêt du 3-Q Mdi 178.1, au rapport de M. le Confeiller:
de Fabri, au bénéfice de . l'offre faite par les Alfureurs.,
Aycard fut débouté de fOll abandon, & condamné à la ref!:itution des fommes aITurées & pJyées en vertu de l'Arrêr- de
\ contrainte provifoire, & aux dépens. Ecrivant Mes._ Guieu &Roman- Tributiis. .
,
,.(1. R R Ê T
X l J.
On ne peut prouver par témoins la confufion des intérùs avecle principal..
E 13 Septembr~ I n I Jofeph..... emprunte d'Etienne.....;
la Comme de 1200 livres, payable dans quatre années:
l'aél:e porce la réelle numération. Long-temps après l'échéance
Jofeph........ eH ajourné pardevant le Lieutenant des Soumiffions en condamna.tion de la fomme, avec intérêts., tels que
de dro-it & dépens. Jofeph....... oppofe qu'Etienne....... ne lui
avoit prêté que 1000 livres, & que les 200 liv. ref!:antes
avoient été inglobées dans l'aél:e pour les intérêts. Il demande
la déduél:ion des 2QO livres, & il offre' de prouver par témoitIs la confufion des intérêts avec le principal. Sentence
qui le condamne au paiement des 1200 livres, avec intérêts
& dépens. Il en appelle pardevant la Cour, en renouvellant
la même défenCe.
On répQndoit pour Etienne........ que l'on ell: revenu en
.Provence;
L
�DU
PAL AIS
D l!
PRO V B NeE.
1
n
Provence de cerce ancienne erreur, d'après laquelle la perception de l'intérêt du prêt à jour étoit réputée ufuraire &
criminelle, & pouvoit conféquemmeor être confl:atée par
tolites les voies de droit, comme l'ufure proprement dite.
Si on n'y a p~int encore autorifé la fl:ipulation publique des
intérêts du prêt, du moins on y en tolere tellement la perception, qu'à moins que le débiteur ne préfente la quittance
du créancier, on le déboute, foit de la répétition, foit de
l'imputation au principal, quelqu'autre preuve qu'il puiffe
être en état de faire; il ne feroit pas même recru à fe prévaloir des lettres du créancier, ni à lui demander l'exhibition
de fon livre de raifon, ni à lui faire préter ferment, ni à le
faire répondre cathégoriquement.
"
Telle efl: la maxime confl:amment fuivie parmi nous, &
fondée fur divers Arrêts rap\,ortés par Duperier, tom. 2 ,
pag. 487, n. 32; par Boniface, tom. 2, part. 2 , liv. 4,
tit. 4, ch. 3; par Latouloubre, fur l'aél:e de notoriété du
Parlement, n. 2. L'Arrêt du 26 Juin 1728, rapporté dans les
Dotes de Me. Gueiroard, nleut aucun égard à la preuve réfultante des dernieres quittances. L'Arrêt du 28 Oél:obre
1729, rendu au rapport de M. de Volonne, en faveur des
Doél:rinaires de la ville de Senez, débouta Mre. de la
Palud, débiteur, de la pre\lve qu'il vouloit faire du paie"ment
des intérêts. Autre Arrêt du 6 Juin 1733, au rapport de M.
Leblanc d'Uveaune , en faveur du lieur Reverdit de Fréjus,
qui débouta le débiteur de la même preuve. Autre Arrêt du
16 Mai 1766, au rapport de M. de Trimond, qui débouta
le lieur Gourjon de Grignans de fa demande en repréfentation
des livres du lieur Benjamin de Lefl:or, négociant de Lyon.
Autre Arrêt du 21 Juin 17"69, qui jugea en faveur de Me.
Richerme, Avocat de la ville de Marfeille, contre le fieur
Jean-Baptifl:e Gafl:inel, de la même ville, que le créanciet'
n'efl: pas tenu de répondre ca,thégoriquement.
M. de Montvallon attefte la maxime dans l'une des notes
qui font à la fuite du précis des Otdonnances, verb. ufùre.
Arrêt du premier Juin 178 l , au rapport de M. le Con,...
,4nnées 1781 & 17[1:1,..
V
�I~<f
JOURNAL
feiller du Bourguët St. Ell:eve, qui confirme la Sentence
avec dépens. Ecrivant Mes. Laget &........
ARRÊT
XIII.
Peut-on pourfuivre le faux témoignage avant le récolement du
témoin?
Ofeph........ & Antoine........ ayant eu difpute enfemble, il
fut préfenté des requêtes refpeébves au Lieutenant de
Toulon en information: ils furent décrétés tous les deux
d'affigné. Jofeph........ fe pourvut pardevanr le même Tribunal
en faux témoignage contre Pierre........ , l'un des témoins,
qui dans fa dépofition avoit dit être préfent à la rixe, tandis
qu'il était par-tout ailleurs. L'information fut prife, &
Pierre........ décrété d'ajournement pirfonnel. Par Sentence
du 8 Mai n80 ,.la dépoiltion de Pierre........ fut déclarée
faulfe, & comme telle rejettée. Il fut condamné à un bannilfèment pendant dix ans, à une livre d'amende envers le
Roi, en 300 liv. de dommages-intérêts envers Jofèph........ ,
& aux dépens.
Il appella du décret de foit informé, & de tout ce qui
avoit fuivi; il en demanda la calfation. On difoit pour lui;
que la dépoiltion d'un témoin n~acquiert fa perfeél:ion que par
le récolement. Jurques-là il peut varier, pourvu que les
change mens qu'il fait ne détruirent pas entierement fa dépofi~ ion. L'Ordonnance criminelle, au titre des Récolemens;
ne permet de pourruivre que les témoins qui fe rétraél:eront
après avoir été récolés; parce que le récolement efi donné
au témoin, fuivant le procès-verbal de l'Ordonnance, pour
rappeller fa mémoire rur les; circonfiances du fait qu'il a
avancé: juCqu'a!ors il peut re redreffer. Les Auteurs diCent,
il eH vrai, que fi la variation dans le récolement efi importante, elle peut donner lieu à une accuCation de faux témoi~
J
�DU
PAL AIS
DB
PRO V B Ne B.
1H
gnâge; mais c'eil: uniquement dans le cas d'un changement
prefque total, auquel le témoin ne pourroit donner aucun.
motif ( Serpillon, pag. 710, & Jouife dans fa Jufiice crimi.
nelle, tom. 3 , pag. 4 2 4 ).
Pierre
avoit dépofé avoir vu Jofeph
aborder Antoine,
, en le défiant à l'épée, au pifiolet & au fil iii.
Jofeph......... foutenoit que Pierre........ étoit un faux témoin,
parce qu'il était à demi-lieue loin au moment de la querelle.
- Si le faux témoignage en général efi un délit, ce n'eil: pas
à raifon du menfonge que les Tribunaux humains ne puniifent
pas; c'efi à raifon du préjudice que peut caufer la fauifeté de
la dépolition & du dol qui l'a diél:ée. C'ell: un principe des
matieres criminelles, attefié par Jouife, tom. 3, pag. 433 ,
que pour être pourfuivi comme faux témoin, il faut que la
dépolition nuife. Or, celle de Pierre........ ne pouvait faire
charge que par fan concours avec d'autres, qui n'étoient pas
attaquées, & qui concenoient la même chofe que la lienne.
Dès-lors accufer feulement Pierre........ de faux témoignage ,
c'étoit ne-rien faire; c'étoit dénoncer un menfonge non 'nui~
fible, qui par cela même ceifoit d'être délit. Si le LieUtenant
de Toulon eût examiné de près la requête de plaince de Jofeph
, il eut vu qu'étant dirigée uniquement contre
Pierre
, elle ne préfentoit qu'une imputation de faux té.
moignage, détruite par plulieurs dépolitions qui fortifiaient
celle de Pierre........ ; un délit par conféquent incroyable;
jufques 11. ce que toutes les autres dépolitions fuifent attaquées.
L'ali/Ji de Pierre........ eût~il été prouvé, fa dépofition n'au.
roit formé qu'un menfonge , prefqu'indifférenr pour les Tri.
bunaux, du moment que le fait qu'il dépofoit était confiaté
d'ailleurs, & que la fauifeté ne conlifioit pas à fuppofer I~
délit prouvé, mais à dire, j'avois t:ntt:lldu aulE. C'ell: dans
ce fens que la requête en informari on manquait par ce qui
devoit en faire la bafe, par un délir capable de fixer l'acrention
de la J ufiice, & de la porter à recevoir une plainte.
- .D'ailleurs, il n'y avait pas encore lieu d'informer cOntre
. PIerre........ , parce que Jofeph...,..... étoit cenfé ignorer mêm~
V
- ?
..
�IS6
JOURNAL
qu'il eÛt dépofé, & ~ plus forte raifon ce qu'il avoit déporé.
A quel propos attaquer un témoin non récolé, qui jufqu'alors
peur, en fe réformant, éviter les pourfuites? Ou le récolement efl inutile, ce qui eft abfurde, puifque la Loi l'a établi,
ou il faut attendre; pour fe plaindre d'un témoin, que par [on
récolement il 'ait perfifl:é dans le fait que l'on [ourient faux;
qu'en confommant fa dépofition, il ait confommé fon menfonge. Avant le procès extraordinairè, avant que les témoins
foient connus, on ne peut les pourfuivre. Le principe contraire feroit fujet aux plus grands abus; ce feroit admettre
d'avance la preuve du plus fore des objets contre le témoin 1
, ce feroit lui ôrer la reffource que lui a ménagée l'Ordonnance,
de fe 'corriger dans le récolement, s'il s'efl: rrompé; ce feroit donc faire un double mal, l'un au témoin, qui a encore
le remps de fe repentir; l'autre à l'accufateur, dont on affoibliroit les preuves avant le temps auquel la Loi permet de
les combattre. On citoit l'Arrêt rapporeé par Boniface, tom.
S , liv. 3, tir, 2., ch. 4.
Quand il feroit permis de confondre le faux témoignage.
avec la fubornation, la demande de Jo[eph....... aurait toujours été inadmiffible, parce que la [ubornarion n'efl: regardée
& admife comme fait péremproire, qu'autant qu'elle embraIre une bonne partie des témoins, & qu'elle ne [e refl:reint
pas à un feul , lorfqu'il y en a plufieurs qui chargent; c'efl: ce
qui fut décidé dans l'affaire de De[rues, rapportée dans les
Caufes célebres. En effet, la preuve de la fubornation d'un
feul témoin, quand il y en a d'autres qui chargent, loin
d'être péremptoire, ne [eroit pas même jufl:ificative. Ce n'dl:
pas pour éviter la récrimination, qu'on ne doit pas admettre
en tout état de caufe l'accu[ation en faux témoignage; c'efl:
à raifon de fes inconvéniens & de fa nature. La diflinél:ion
entre le faux témoignage & la fubornation efl: abfolument
néceffaire, quand ils ne font pas préfentés l'un comme effet,
& l'aurre comme caufe. Quand on les coarte tous les deux,
ils·ne font qu'un feul & m~me délit, qui Ce divife [ur plufieurs
têtes, entre J'accu[ateur corrupteur & les témoins corrompus.
�'P~OVENCE.
157
LèS lnanœu res de l'-accufaleur pour la !ùbornation ayant
befoin d'être confiatées, détruifarit la preuve qu'il ralfemble ,
n'y ayant de délit que le fie!1 , puifqu'il fubo~ne pour prouver
celui dont il a rendu plainte, on palfe fur toutes les regles
ordinaires, & on infiruit de ce fait elfentie1 & majeur; mais
lorfque l'accufé n'of7 pas argue.r de,.fubornation fon accufateur ; qu'il fe refiremt à foutemr qu Il y a faux de la part des
témoins, la Jufiice ne peUl pas aller plus loin que lui, &
s'occuper d'une fubornation que la partie intérelfée ne lui
dénonce pas.
Enfin, le faux témoignage féparé de la fubornation, efl:
un reproche fait conrre le témoin, quoiqu'il fe termine. en
accufation. Or, rout ce qui tombe en objets & reproches,
ne peut être propofé qu'à la forme des faits jufiificatifs. C'efl:
ainfi que l'obfervent Muyart de Vouglans dans fes Infiituts au
Droit criminel, pag. 300, & Serpillon, pag. 12'16.
On répondait pour Jofeph
, que 'la dépofition
Pierre......... porroit ·évidemment 1'empreinte du parjure. Il
fait débuter Jôfeph par un défi; il l'accu(e d'avoir le' premier
jetté des pierres; il prétend même qu'Antoine......... n'en a pas
jetté. Comment le f«ait-il? puifque le jour & dàns le moment
de cette querelle, il éroit occupé à travailler!dans un lieu
éloigné confidérablement.
Il efl: dit, il dl: vrai, dans l'arr. 1 t du lÎt. 1) de l'Ordon.....
fiance de 1670 , que les témoins qui depuis leur récolement
, rétraaeront leurs dépofitions, ou les changeront dans des
circonfiances elfentieHes, feront pourfuivis & puni~ comme
faux témoins; d'où il femble d'abord qu'on pourroit induire
que ce n'efi qu'après le récolement qu'il n'eil: plus permis 'au
t~moin de varier & de rétraaer fa dépofition, & que toutes
les variations & les changemens avant cette époque font impunis. Mais tel n'eil: l?as le fens de la Loi, .ainfi qu'on doit le
préfumer du procès-verbal, où il eil: dit, qu'après le récole~
ment le témoin n'eil: point admis à changer, même en ren~
d~?t ~ompte de fon changement; Raree que dans ce cas il a
d.eJ3 Juré deux fois. Au lieu que s'il rétraae fa dépôfitiôn 1
bu
PALAIS
DE
de
�15 8
Jou R. If -A L
avant cette époque, ii en cft quitte en donnant une raifon
farisfai(anre de fon erreur. C'eft ce qu'obfervent louiI'e &
Serpillon (ur cet article de l'Ordonnance; Lacombe, Matieres criminelles, part. 3, ch. 13, n. 20; & ·Decormis,
tom. ;l., col. 1952.
Le' faux témoignage eft fans contredit un délit fufceptible
d'informarion; mais la plainte peur-elle êrre portée avant le
récolement des rémoins? On douroit aurrefois en Provence
au fujet de la fubornarion des témoins, & quelques Arrêts
anciens l'avoient regardée comme un fait juftificatif. Mais
depuis I~Arrêr de Réglement de '1745 , on juge confiamment
que la, fubornarion & le faux témoignage forment des exceptions péremptoires, qui peuvent êrre vérifiées en rout érat
de caufe. C'efi ce qu'on trouve dans Denifart, verb. Subornation; dans louiI'e fur l'arr. premier du rir. 2.8 de l'Ordonnance de 1670; dans Serpillon, pag. 2.07; dans Lacombe,
Matiues criminelles, parr. 3 , ch. 13, fea. 1, n. 20; dans
.vouglans, parr. 1, rir. 15, j>ag. 515. Combien d'Arrêrs
récents n'avons - nous pas fur cerre matiere; celui de la
Meilfonier conrre la Ravel de la ville d'Arles, du 17 Novembre 1764; celui du 17 Juin 1775, dans l'affaire de Pou.
pian, & plufieurs aurres.
.
La hlbornation & Je faux rémoignage font des crimes qui
doivenr être in!l:ruirs par la voie de l'information, fur-tout
quand il s'agir au fonds de l'accufation principale, de"ces
délirs qui n'onr point de corps, & quine laiiI'ent point de
traces après eux; délits rranfitoires, s'il efi permis de parleraina, qui ne prennent leur exifience que dans Ij.bouche des.
témoins, & qui n'ayant d'autre bafe que la confcience &
l'aiI'ertion de l'homme, font de narure à ne pouvoir jamais
fermer à l'accùfé la voie de la plaime conrraire en fuborna-.
tion & faux témoignage.
q;
Ce n'eCl qu'en confondant les idées & les principes, que
l'on a pu quelquefois fe permettre de préfenrer les plaintes
cm fybornarion & faux témoignage, comme des traits. de
,·fécriminatiQQ. La récrimination eft la plainte d'un nouveau'
�,
DU
PALAIS
DB
PaOvllNCll;
,T,)9
délit, faite par l'accufé contre l'accufateur; elle fuppofe deux
différents délits qui peuvent être pourfuivis l'un après l'au~
tre, & dont, l'un n'exclut pas l'autre; au lieu que la fu~
bornation & le faux témoignage font des faits deHruétifs
de l'accufation principale; quand on attaque le corps même
du délit, quand on dit qu'il ,n'exifte pas, quand on propofe une défenfe péremptoire de l'accufation, dès~lors ce
n'eft plus un fait juftificatif; c'eft une exception fonciere
qu'on ne peut propoCer que par information.
Mr. l' Avocat~Général de Magalon obferva, que trop fouvent une calomnie odieufe contenue dans une dépofition
(calomnie d'autant plus dangereufe qu'elle eft tenue fecrete) porte un préjudice irréparable à un citoyen innocent. S'il ell un délit digne de la Œvérité des Tribunaux
de Jufiice, c'eft celui-là fans doute,; auffi nos Loix le puniffent-elles avec rigueur; mais d'après ces Loix, quel eft
l'inftant auquel il eH permis de le pourfuivre? Ell-ce lorf..
que des foupçons l'indiquent, lorfque des indices de lueur le
décelent? ou ,faut-il attendre que l'accufé l'apprenne de fa
confrontation avec fon calomniateur, & qu'il en ait déja
fubi les malheureux effets?
L'arr. Il du titre 1'5 de l'Ordonnance de 1670 fixe une
des circonila:nces dans lefquelles il eft permis de faire informer contre un faux témoin; mais il n'y eil point' dit
que dans tout autre cas, ce délit ne puiffe être pourfuivi
qu'après le récolement.
Les criminaliiles ne fourniffent aucune autorité fur cette
queilion particuliere; il en eil plufieurs qui, en parlant du
faux témoignage, le réuniffent à la fubornation, & traitent de l'un & de l'autre en même-tems. On voit dans
Lacombe une maxime qui paroît parriculiere au faux témoignage; cet Auteur dit, 'lue l'ufage if/ de faire l'il/Jlruc..
tion du faux témoignage dans l'inJlant même qu'il yale
moindre foupçon colltre le témoin; il cite enfuite un exemple qui fe rapporte à la fubornation, & il ajoute: ail/fi la
,jùéornatirm de. témoins rfl regardée comme un fait péremp-
�I~
JOURNAL
taire; ce qui prouve qu'il confond auffi la fubornation aveC"
le faux témoignage. Ces Aueeurs fuppofent fans doute,
que le faux témoignage el!: toujours précédé de la fubornation, & c'el!: d'après ce fyl!:ême qu'ils raifonnent en·
même-tems fur ces deux délies, & qu'ils avancent que le .
faux témoignage & la fuhornation font des faies péremp~.
CO.lres.
Mais il el!: des· circonl!:ances où il peut y avoir faux
témoignage, fans qu'il ait éeé précédé de fubornation. Lorfque dans un.e requête de plainee, le fait de faux témoignage el!: le feul fait expofé, lorfque celui ql}i préfente cette·
requêee ne fe plaint que de ce qui el!: contenu dans la
dépofition, & qu'il ne demande pas à prouver quel en a été le·
principe, en ce cas le faux témoignage féparé de là fuhornation peue-il êere prouvé avant la confrontation? EH-il un.
fait péremptoire?
Il paroît que la permiffion d'informer doit dépendre
dans l'hypoehéfe préfente, des circonHances; fans doute:il feroit dangereux _de permettre l'informaeion dans eous.
les cas; ce feroie fo.urnu à l'accufé le moyen d"arrêeer l'inftruél:ion de la procédure prife contre lui; des plaintes en.
faux témoignage feroient fufpeél:er tous. ks eémoins, les
preuves deviendroient prefque impoffi-bles, & la marche dela procédure criminelle, loin de tendre à h punieion des'
délies, favoriferoit les. coupables, & leur procureroit lesmoyens de fe. foul!:raire aux peines qu'ils auroient méritées. Mais s'il
des inconvéniens' à ne reearder dans
aucune circonl!:ance, l'informaeion fur le faux' témoignage,
le fyfl:ême contraire auroit auffi les liens; il feroie également dangereux de -ne jamais ordonner l'information fur
ce délit, qu'après l'inll:ruél:iôn de la procédure où fe trouve
conligné le faux témoignaR'e. Lorfque la fa-ulfeté de la dépoueio.n eft frappante il y auro.ie de l'injull:ice à différer
de faire informer. Pourquoi lailferoit-on fuhir à l'innocent
aççl\fé les rigueurs~ & le.s .longueurs .d'une inltruél:i'on cri~
roÎnelle. ~ rOu.r<.\UQÎ" &'il t aVQit qllelql\e indice qui fit pré-.
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fumer/ fon innocence, lui laiiferoit-on partager la honte
des coupables aux yeux de la fociété enriere? Pourquoi
retarderoit-on l'inaant où il devrait recouvrer fa liberté
& fon honneur? Il Y aurait encore à craindre que les
preuves du faux témoignage, & par conféquent les preuves
de l'innocence de l'accufé, ne dépériifenr.
vrai, que le témoin a le droit
On peur objeéler, il
de reélifier fa dépolition lors de fan récolement, que fa
dépolition n'ea parfaite qu'alors; mais il ea des dépourions qui contiennent des allégation, fauifes, qui ne peu.vent être reélifiées; lorfque le témoin dit àvoir vu com-'
metfre le délit fur lequel on informe, & qu'on demande à
prouver qu'il étoit abfent, c'ea envain qu'il prétend alors
avoir le droit de reélifier fa dépolit ion ; la conrradiélion
trOP
qu'il y a entre le fait allégué & ce qu'il a dépafé,
frappanre pour qu'il puiife le faire.
Lorfqu'une dépofirion. eH entiérement contraire aux autres charges de la procédure, & que les fdits qui font ar(·iculés dans cette dépolition fone d'une efpece à ne pou-'
voir être reélifiés, pourquoi refuferoÎr-on à l'~ccufé incriminé par cette dépolit ion , le droit de fe juHifier dans le
moment'? Mais on peut dire encore, & c'eH ici l'objec...
rion qui paroit la mieux fondée : il faut que l'accuft ait
u.ne connoijJànce légale de la dépqfition, & il n'a cette connoif!ànce 'lu' la confrontation. Il eH vrai, continua Mr.
l'Avocat-Général, que, d'après le fyHême de nos Loix
criminelles, les charges de la. procédure font inconnues à
l'accufé; fyflême bien rigoureux, quelquefois utile, mais'
f-ouvem dangereux, & qui pourrait peut-être faire préférer
la procédure obfervée chez les Rom~ins, où les témoins étaient entendus publiquement en préIence de l'accufé.
Il eH cruel de faire gèmir dans les prifons un malheur.eux, fans lui dire quelles preuves l'y font détenir, fans
lui faire connoitre quel motif exige la rigueur qu'on obferve envers lui. Si cerce marche dl: rigoureufe envers le
Af.ll1écs z78z & Z78:l..
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JOURNAL
coupable, combien .n'eH-eJle pas cruelle envers l'innocenè
qui [ubit les peines des coupables & ne peut faire connoître fan innocence; mais fi cette rnaniere de procéder
eO: e1Tentielle, fi les· Loix l'exigent, on ne doit pas encore.
aggraver ce qui pourrait la faire regarder comme odieufe;
il ne faut point s'en. fervir cnntre l'accufé pour le priver du
moyen de fe juO:ifier. La procédure eil fecrete, il eil vtai,
mais fouvent, & prefque toujours', les dépofitions font connues; le public en eO: in/huit, le témoin l'a dit lui-même;
& lorfqu'une calomnie odieufe, conlignée dans. 'une dépoli-'
tian fer~ connue, que la fociété en fera inHruiLe, qu'elle
fera conlignée dans les dépôts facrés de la Juilice, l'ac'"'
cufé, viaime du fàux témoignage la [aura " & il ne 'pourral
pas [e plaindre aux Tribunaux de Juilice; & les' Loix lui
en interdiront l'entrée dans le moment. Cet infortuné n'en
fera donc inilruit que pour en gémir. Le Juge qui aural
fous fes yeux cette dépofition, entendra inutilement qu'on
veut en démontrer la fauffeté; il rejettera les preuves que
l'accufé offrira, & ce fera du vœu de la Loi dont il s'autarifera pour être inexorable. Nos Loix ne font point des
Loix fi dures; ce ferait leur donner une Eauffe interprétatian; . ce feroit Qutrer un principe déja' tr.op rigou [eux; ce'
ferait en fair·e des Loix: cruelles donc .il faudrait demander:
la révocation au LégiHateur. On doit 'les' mieux interpréter. Elles veulent, il eH vrai, que la procédure fait fecrete,
mais elles veulent auffi que la moindre trace du faux témoignage fait pourfuivie dès qu'il ef!: poffible; que toute
variation dt; témoin, fi elle eil e1Ten~iélle " l'expofe à la
rigueur des Loix ,. dans le moment qu'elle eLt connue; c'eil·
à la prudence & à la fage1Te du Juge que ce foin eil confié. C'ell à lui. à pefer les circonilances, à examiner fi
d'après la nature des dépolitions qui font fous fes yeux tfi d'après les autres charges réfnltantes' de la procédure, &
d'après les faits qu',articmle l'accufareur en faux témoignage,'
cette plainte. doit 1 être reçue .ou. retar?ée. Ce n'eH .point
ici un fyfiême ,nouveau que l'on veuille préfenter; il.paroit/:
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PRO VEN C IS.
163
que c'eft ainli que l'on peut concilier la rigueur de la
procédure criminelle, & ce qu'exigent l'humanité &la
jultice.
Mr. l'Avocat-Génér~1 difcuta enfll.ite la dépolit ion de
Pierre
celle des autres témoins, & la plainte de Jofeph
il obferva qu'il n'en réfulroit pas UQ,C preuve du faul'
.témoignage, miis qu'il paroi/foit que le Juge lIvoit pu ordonner l'information fur la plainte qui lui étoit portée; il
Y avoit une contradiél:ion frappante entre le témoignage
contre lequel il s'élevoit, & les faits avancés <t~ns I~ requête de plainte. Dans la procédure, on voyoit des indices
legers, à la vérité, mais qui cependant pouvoient autorifer
le Juge à ~ccorder l'information, & qui devrpiem faire
conferver le décret de foit informé, s'il falloit décider
dans le moment s'il devoit être calré ou confirmé. Une
autre détermination lui parut plus équitable j ce fut celle
de joindre la demande en caifario o au jugement du fonds.
dont la Cour étQit {aiGe, au moyen de l'appel qu'avou:
déclaré Pierre,.... de la Sentence définitive. Il obferva
qu'il paroi/foit inconféquent de voir un délit dont les preuves auroienr fait prononcer une peine aflliél:ive , & cepen.
dant de défapprouver la !"ourfuire de ce même délit, oon
pas parce que les formes n'auroient pas été obCervées J
mais parce que ce n'auroit pas été le moment de le pourfuivre , & qu'il pouvoit encore être impuni.
Ml'. l'Avocat-Général conclut à ce que la demande en
calration fût jointe au fonds, POUt Y être dit droit en fia..
tuant fur la procédure, fauf de disjojndre.
Arrêt du 9 Juin 178
prononcé par Ml'. le Préfu:lent
d'Albert, qui caife la procédure en l'état. & condamne
Jo[eph..... aux dépens. Plaidant rt1es. GaRier & Simeon
l,
fils.
'
•
�JOURNAli
ARR Ê T
XIV.
LorfiJu'en matiere de menues dtmes la poffeJlion ancienne efl
confiatée, le laps de trente ans fuffit pour établir la poffeJlian récente & cantinuative.
Les habitans peuvent-ils dépafer dans l'enquête de la Communauté?
L
E Chapitre de Salon joui1fant h Merindol de la gro1fe
dîme, fit affigner le 27 Juin 1777 quatre particuliers
du lieu, en paiement de la dîme des agneaux & chevreaux.
Ceux-ci foutinrent qu'ils ne pouvoient.y être foumis qu'autant que le Chapitre juftifieroit du titre conHiçutif. La Communauté prit leur fait & caufe & offrit un expédient; elle
déboutoit le Chapitre de fa demande, s'il ne prouvoit par
témoins la po1feffion dans laquelle il érait de percevoir
pareille dîme. Le Chapitre eut recours aux anciens baux
dans lefquels la dîme des agneaux & chevreaux érait énon.
cée avec la même certitude que celle des raifins & du
bled. Lâ Communauté foutenoit que le Chapitre n"avoit
point de preuve de, po1feffion, parce que les aéles de baux
h ferme nepouvoient point en tenir lieU, comme étant des
titres étrangers h la Communauré dont elle n'avoit jamais
eu connoi1fance. Sur ces défenfes, le Lieutenant d'Aix par
fa Sentence du S Août 1779, ordonna qu'avant dire droit
le Chapitre de Salon juftjfieroit dans le mois, par toute
forte & maniere de preuves, que depuis au delh de 30
ans, il étoit en ufage & po1feffion de percevoir la dîme
des agneaux & chevreaux dans la Paroi1fe de Merindol, & ce fans préjudice des preuves extantes au procès,
& de faire entendre les certificateurs.
Pour éviter que la Communauté ne donnât h cette Sentence une ,interprétation équivoque, le Chapitre lui tint
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PALAIS
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PROVENCE;
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un aéte pour lui déclarer qu'il ne fe foumwoié-à ,; preuve
ordonnée par la Sencence, qu'à- caufe' 'qu'elle' n'étoit qué
continuative de fa poffeffion ancienne, fuivant les titres
produits, & pour corroborer toujours de plus en plus fa
poffeffion récente, également confl:atée par l'aéte de bail
à ferme de 17')6, & par les certificats dont le Tribunal
avoit voulu aiTurer la foi par le témoignage des certificateurs, fans que la Communauté pût jamais regarder cette
preuve comme devant être confl:icutive du droit de dîme,
mais feulement comme confervative du droit qui exifl:oit
déja, & fauf au Chapitre de faire valoir, le cas échéanr,
tous les objets de droit, contre les tém?ins que la Com~
munauté pourroit faire enrendre dans fon enquête contraire.
1 1
Cet aéte ne fut point contredit par la Communauté;
il fut enfuite procédé aux enquêtes refpeétives, après lef.
quelles la Communauté prérendit qu'il fallait retrancher
plu lieurs dépolitions comme inutiles, pour 'avoir é.té faites
par des témoins qlii n'étoient pas au moins f âgés de 44
ans, & ajouta que celles qui reHoient, ne prouvoient pas
la poiTellion trenrenaire, d'autant plus qu'en fait de droie
univerfel, il falloit un plus grand nombre de témoins concordans. Le Chapitre démontroit que fon enquête jufiifioie
autant qu'il le fallait, la perception confiance & non interrompue du droit de dîme; que, quoiqu'il ne parût pas'
que tous les redevables l'euiTent payée avec exaétitude, il
n'en étoit pas moins vrai qu'il ne l'avait point laiffé perdre
par prefcription, parce que s'agiiTant ~e la preuve d'une
poffeffion concinuative & confervative, & non d'une paffellion conHitutive, il fuffifoit d'avoir exercé le droit d'une
façon ou d'autre, pour qu'il fublinât toujours, & que la négligence des' Fermiers, ou la fraude de quelques redevables, ne pouvoient jamais nuire au droit déja établi. Par
Sentence du ') Août t780, la Communauté fut déboutée
de fa requête d'intervention; les quatre particuliers condamnés au paiement du droit de dîme demandé.
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.",.
1-0
U RNA L
, La qom}vunaut(pe. Merindol appella de cette. Sentence
,pardevant.: la:. 'ÇjOU! ; "lIe C,h'apitre y préfenta une Requête
,jncidellte', par laquellt} i~ .demanda t 1 0 , que la Communauté
fût condamnée au paiement.du droit de dîme ,dll par touS
~esl haQitans tenant troupeaux, à compter du 3 I~ai 1777"
& aux arrérages échus pendant procès, fuivant la liquidation & .fixation qui feroient faites par Experts, fur le pied
du 2 1, avec inréréts; 2 0 • que l'enquêre de la Communamé fût rejerrée du procès comme nulle & rufpea;:-.
_ On difoit pour la Communauté, que d'Hericourt, dans
[es Loix Eccléfialliqul;s '. chap. des dîmes, arr. 2, met la
dîme du pFOduit des t·roupeapx au rang des menues pÎmes.
Tournet .en' [es Arrêr,s', lett. D. n. 98, Ja regarde comme
une des plus odieufes.
.
: Il n'en. eH: p~s. d'une dime de ce genre, comme de la
groffe dîme; il faut. néc.eff.airement ou un tirre qui l'ait
établie, ou uqe poffelliolil qui l'ait prefcrite. Itfl Bruner,
Recueil des (jic!/ions fur les dîmes, tom. 1, chap. 3, § 4 ,
n. 26. ;DumQuli-n .at.telle que c'ell-là .vne maxime fondamentale dans la Jurifprudence Françoife ; & l'Ordonnance
àe Philippe IV de 13°3, dite la Phi1~pine, en prohibant la perception des Il,enues dîmes qu'elle appelle .inJOUtes, , & ,qu'elle regardé comme de .véri·rables fervitudes, .Q:exempte que IClS' dimes qui font de dwit, ou établies par la cpuçume. Le Concile de Latran avoit décidé
qu'il falloit , au. défaut de tirre, .une coutume locale pour
établir la dîme: Solvend.E, (JUiZ ex loci confuetudùze comprohatœ funt.
Il s'agit donc de, déterminer de quelle nature .doit être
la poifeffion qui doit fuppléer au titre conllitutif de la
dîme, Une CO\ltume locale doit. être continue, diuturni
mores legem imitantur.; elle doit être conllante, fervata
t<;naci{er ; elle ne peut être établie à l'infu de ceux ,qu'elle
doit obligE;r , puifqu'elle exige leur confentement, morces
confenfu atenlium <;omprohali;' elle doit ,avoir été 'obfervée
pendant UJ'1 tem~ cQIl{i4érable, cujus ;aitii mempria non..
�,p
VllN'Cn;
y@i r
~%tam -elle ,doi' énce>rfOrrdé flltirc\ës Ittell'>légï"tft ~l kgil:Q
timJ, rprœfcripta , ~lapi ICÙm., uJt18' extr& de ~Ofljl!tfd-. ;' ,ëlle, fup~")
DU
P,U,AU,
B'I
pofe, comme ,d-w Myniinge "qu~ If·'ne' ~ellrllJi -op'pofèt"l
aucun, ofdge cbntraiter, ql/drlrnlJlfrpIttht Jfit <ot!j;MJtumLe Tl ()
trarium j elle doit'; être enfin unfverfellel ', 1plJ i.fi]ù't!IIe 1 doit
obliger la généralité. C'ell. aina que lal'Cour)e jùgea 'par
fon' Arrêt du 6 Avril J 73 J',~ au 'rapport de Mr: de'. la 'Bi:J1:l1ie ,
en taveur de la Communauté de Puylobier , corme le Chapirre St. Viél:or de Madèille.
'
,
D'après ces principes, la po1fe/Iion néceifaire pour prou-'
ver I,L dîme 'doit êtrè'for~ anciéflAe , u:niverfelle ',' uniforrtfe "
paifible & conliante! ce fone les qualité d'une couru et
quelconque. Il fa t. également pouv0i~ app.liguer , à -la pof-'
fe1Iion de la, dîme; les regles généraJes des prefcriptions "
parce que c'efi réellem~nt prefcrire, que d'acquérir-, par' fa;
poife/Iion? un .droit "qu:o~. n'auroi~ pom~ eu- ~ar ïtre.''1>unocl ,),~fur'(ila dîmer,l pag., 10;' oet ?",'
,.
~('tj()" 1
Pour aliquétir) on 'droit quelt.onque"par- prefc.ription-, i·
faut une, poifeffion légale & paiable, poffiffio pacifica,; unel
poife/Iion connue ,de celui, fur' qui. " l'on prefcrit, 'alura
fciente f,' pa,tiente ; une polfe/Iion.à titre de droit', quafi
de re d~6ita ; une1 poffe/Iion imm~moriale, s'il "s'agit' d'une
fervit~de difcontinue; une poffeffion univerfeHe\ fi '1'00 veut
prefcrire conere Ilne Communaufé, quia tantum im:fcriptum quaTltùrrr; poffi.f{um ; une ip6ffe/Iicin continue, & • non
interrompue, parce que toute prefcriptioo efi détruite '1' fi
celui qui prefcrit celfe un feul' inflant de pofféder', ou fi
celui contre qui l"Of) pofféde confervè fon ,droit ,',ne fût-ce.
que pâr' une feulè' réc1a'mation. (,d'Argen'tré , "colttûme de
Bretagne y art. 277; '!J'o., en fa Seigneurie., lri. 3': Cate\an;
li". J, chap. J4, & H~nris, tom: J-, liv. I, 'lu. 38:Mor'Bac, fur- les Loix S & Il , cod. de ufurisi Baffet, tont. 1',
liv. J , tip. 6 ·,'.ch. 5 ; & Dunod, en fon ttaité des'd1meS',
pag. 20')'
. '"
'
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, ~
'f
i.
,Le Chapitre, continuoit la Ccrr.rr.unaut-é , a prcduir dl'vers baù~;à ferme), pll'r lèJqlJéls il ('onfie qu'il'a"afferrné,
�Ip"i,
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0 t1 RNA L
o.utre le5J~oits de la dîme, cel1e encore des agneaux &
chevreaux ;' mais ces aél:es font fon propre ouvrage; il ne
tenoit qu'~ 'lui d'y con[acrer, fans conrradiéteur, [ans
obl1:'lcle ,.les plus ab[urdes prétentions; ce [Ont des aéles
dont tqutes les Loix ont rejetté le témoignage', ,parce que
tOllre~ en' 9pt prévu le danger ; dès aéles qui offriroient
[ani,ce1Te. un~ v.oie fÎlre, impun.ie., pour favorifer tOllS les
g'enres d'!lfurpations.; preuve fi vicieufe -par el1e-même, que
fon ancienneté ne fauroit la corriger; fi dangereufe , que
fOùtesles Loix proteélrices des propriétés viendroient échouep
contr'elle ,fi on ofoit .l'.admerrre;' des aél:es paifés entre
le Chapitre &; [on Fermier, [ans que la Communauté int.ervien~e·, fans qu'ils lui foient fignifiés, fa'ns que l'exécution lui ait permis d'y meme obl1:acle; des aél:es paifés
à S lieues de Merindol,' & à ]'infn de la Communauté,
pourr<?ien~-ils form~~, 1\1le poifelIion légirjme.? Comment
les oppofer à un tiers non Qui ? Comment reprocher à
]a Communauté de n',!voir ppint fait de réclamation contre
ces prétendus titres" dont elle n'avoit aucune connoiffance.? alterius fac10 ,alius non debu pergravari ,.L. 74, de
Regul. jurif. ,Des bajlx à ferme ne fauroient prouver aucune forre' de poffe(lion ; il;s ·annoncent ; fi l'on veut, l'in~ention d~ pojféder" animum Domini; mais ils ne prouvent point une poifelIion J réelle" rei detentionem : Or il
faut, pour. la poifelIion civile, que l'iment,ion foit exécutée. La polfejJion, dit Cujas, efl juris & fac1i. Le defir,
la volonté, 1'opiniol.l même ne fuffifent point : nihil affec7io prodejl, nihii opinio, nihil volunûlS. ,
. La Loi 7,' cod. de probationibus, dit', qu'on ne croie
point à un ,titre que chacun peut fe former. à foi-même
.par fa pr,opre écrirure. Le fifc même ne pourroie établir
aucune prétention (ur une preuve dont t<lnt d'exemples ont
,d~mofltré I~ f!apger., De pareils titres, dit ~uiifon, ne
prou~'ent 'que contre celui dont ils font l'ouv'rage ~ mais ja.mais -en fa {avwr. . ,
Pir~~d\l~, fur Guipap~, quo 3 , dit expreifémenc que les
,
baux,
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PALAIS
DB
PROVBNCB.
169
baux 'à fermé ne' prouvent ni poifeflion ni propriété, i
Mafcardus , de probationihus, conclut: 1186 , dit la même
chofe ; fi le même Auteur ajoute que plufieurs baux à ferme
peuvent prouver la poifeflion, cela ne doit avoir lieu, 1°; que
lorfqu'il feroit t(OP difficile de rapporter un autre genre de
preuve, ratione dijficulwtis, ~ 0. lorfqu'i! n'dl: pas prouvé
J
1
qu'un autre ait joui.
Le Chapitre a produit lès affouagemens de 1698 &
1728, dans lefquels il ell: parlé de la dîme des agneaux,
L'énonciation ancienne, dit DJmoulin, fur la coutume
de Paris, tit. de fiefs, glolT. 8, vo. dénombrement, n. 76
& 79, n'efl point une preuve par elle-même, '11ais elle
fortifie ce qui e.fl déja prouvé. Elle ajoute une vraife.mltlanet:
de plus. C'e.fl une préfomption que l'antiquité fait 'naître.,
mais cette préfomption e.fl détruite par des préfomptions contraires. Ici, quelle préfomption plus fone comre 'la vérité de ces affouagemens , que l'em~ur même dont il$ [onl;;
infeél:és; ils font mention de la dîme du chan~re, .c;j).lJ)i..,
qu'elle n'aie été perçue dans aucun rems. Si l'énonciation'
efl: faulfe dans un çhef, pourquoi ne le feroi6-elle pas' dllns,
l'autre? Ce n'eH plus même le cas aujourd'hui d'employen
des énonciations antiques; elles ne font admifes' parI les:
Auteurs, & fur-cout COnere le ciers, q.ue lorfq\/il J~roit(
diffièil~·!,d'avoir des pre\)ves plus ceJuaines.~( Faber, cM.
de prahat. def. ,6 ~. Aufli Pafl:our, Jur.,feud. lib. '2, , tir., 15,1
a-t-il fagement remarqué que' dans çles c-irconfiances' ,pa,,!
reilles, lorfqu'il ne s'agit point de prouver un fait ifoté,
mais une continuarion d'aél:es PQlfelfoires, la feule énQneütion antique., fal)s prel!Y~ sie. poifeffion ,1 l(Ie)([~[t:J\o\\l ril'nol
S'il en écoit aurreme'nç , ce Jeroit dÇlnner à Ja:fim11le é))p.lJ.,
ciation la même force qu'au, titre"confiirurif.
llJ
~ J)
Il fuit de ces principes que la pr~fç>"tnPJion, 'iq).li jllaît)
des déclarations des Commiffaires qui Ont: proci~~ aux.
affouage mens , déja fi foible, par le peu d'exaél:,itude d~ ce:
~enre d'ouvrages, par le deifeiq connu deJ. Cqmll}u!!au~és.t
d'exagérer leurs chafg~;' par le ,peu de fiMliré- daJ!5.' le5.i
Années t78t & t78:4.·
.
. y.
.
�l?o.
'.
Jou RNA L
•
inHruélion'S que I~ Commitfaires font dans le cas de recevGir, & [ur-tout par l'erreur ·reconnue dans l'énonciation .du chan\'re, ne fect plus de rien, foit lorfqu'il s'agit
de prouver une con~inuité de poifeffion; foit lorfque l'on
a admis une preuve plus facile .qui ltli eH contraire ; foit
enfin lorfqu'une pareille prefomption pourroit cauCer au
tiers un préjudice réel.
: La poffeffion que réclame le Chapitre n'eH point prouvée '; il n'a point de titre conftitutif ,de la 4ime ; ce
nom ne peut convenir aux deux énonciations erronées des
affouage mens ; les baux à ferme ne {ont pas des aétes poffeifoires J' & laiifent douteufe la poifeffion réelle, qui feule
eften queHion ; cinq certificats qui, réunis, ne mon~
treot que quelques perceptions ifolées , ne forment point
une CO\ltume; les certificats contraires que la Communauté à rapportés en détr\liCent la foi; les baux qu'die a
communiqués prouvent même l'interruption de près d'un
fiecle.
'
l
1
, Par la difpofition de la Sentence; le Chapitre érait réduit à prouver fa poifeffion. n fut par-là décidé que fes
prétendus titres éraient infuffiCans & inutiles.. La Sentence
ne' fauroit pré Center un fens différent; car ne foumerHe
I~ Chapitre qu'à une (lreuve confervative , <;'aurQit été le
èi(pènfer d'ude preuve uniforme, continue & univerfelle.
C'eH donc le défaut. de. <jJ'reuv.e direéle ,<f'établiifement de
la dime "qui a' néceffité le 1 jugeme.nt interlocutoire.' '
t Y a-t·il un feul mot 1ilans la Semence qui permette au
Cli~p~(re de difiinguer la poifeffion récente de la poifeffion ancienne',' la' poffiHIlon conltitutive .de la poifeffio'!'P
coil(~rva~ive ?l c,~s' difliriélîons 'imag-inail'es n'ont été crééeS
que pour fa caoUfe &. pour fon em1uete.· Si la poifetIion
dû Chtlpitrê; aV01-e1 été pr!aùvée ,- c'émlt là qu'j.1 fatloit s'arrêter ~ la dfme· éwü tlu~ ,. & la coutume établie, pourquoi
le fournettre eacore à pr'ouver qu'Il érait en ufage & pof{ëffion ?-lI&i" t,)cOmmùnauté- ·n'avoit eu 'dlautre défen(e à,
;FGp&fer) ~fk;~elkkn~'t..jQn~!a'*ll{ife 'contre un droit. établi "
y
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....
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
17.1
le foin de la preuve ne feroit-il pas dès-lors néceffairement retombé fur elle? Ici le chapitre feul a été foumi.s à
prouver, & le Lieutenant n'a fait en cela que f uivre la
regle li connue ,. anus 'prohandi imcumbit aaori.
Ce n'eH: p.oinr (ajoutoit la Communauté) p:.rce que les
'temps antérieurs é.roient .prouv.és.,. que le Lieutenanr !'}'a ordonné que la preuve d'une poffeffiotl au-delà de trellte ans ~
mais parce que 1 fe10n quelques Auteurs, cet efpace de temps.
fuffit paur établir la dîme. La réferve des preuves extantes ne
déligne que les preuves telles qu'elles font au prQcès. L'interlocution, bien loin de les déclarer concluantes, dé01o.o.tre
qu'elles font imparfaites, puifqu'elles. ne peuvent [e[vir de
bafe au iugement définitif. Si les preuves du Chapitre font réfervées, celles de la Communauté le font auffi. Que le Chapitre réuniffe les fiennes à fan enquête, c'eU le feul avanrage
que lui offre la Sentence; mais il faudra toujours que l'en~
femble de fes p.reuves forme une poffeffion unjfo~me, univerfelle & non interrompue.
Le Chapitre ne peut tirer aucun avantage du paiement de
quelques particuliers. Pareils droits n'ont iamais été admiS'
que fur les preuves les plus rigoureufes. C'eil: ainfi que,
lorfqu'on ne prouve la banna!ité que par poffefIion, l'exemple
d'un feul particulier qui n'aurait pas été fournis, rendrait la:
preuve incomplette. C'ell ainli que dans l'efpeee d'un Arrê.t
rapporté par Bouvot, tom. r, part. 3 , verb. Dîmes, qu. r ,
quoiqu'il fût fotmellement convenu que quelques habitans
payoient la dîme, cene perception parut infuffifante, & le
Curé fut foumi!iaà rapporter la preuve d'une poffefIion immémoriale.
La Communauté foutel1oit fur le fecond chef de la requête
incidente du Chapitre, que lorfqu'i\ s'agit d'un fait qui ne
peut être prouvé que par les habitans d'une Communauté,
aJors, fans dillinguer fi l'affaire ne regarde que la commuI\auté des habitans en général, ou Li elle lesintéreffe en particulier, il eil: décidé que leur témoignage ell: admis. Ce
font des témoins néceffaires, aiofi que l'atre1h:nt Matq<l:us,
•
':' 2.
�Jou RNA L
.
de ajJlic1is , décif. 4°0, n. 1 ; & Loifœus, de jure univeTfitatum, part. 2 , cap. 1, n. 79. On fui,t dans ce cas la maxime
qui dl: rappellée par Dumoulin fur la Coutume de Paris;
§. 30, gloff. 2, in verb. aliéné, prix d'argent, n. 32, qué
les Loix fe conrentent toujours des preuves que l'on peut
avoir. C'eH ce qu'obferve encore M. de Monrvallon, Précis
des Ordonnances, verb. Ohjets, n. 2. Quoiqu'un témoin
foit fufpeél, parce qu'il a intérêt à prouver le fait fur lequel
il dépofe, on ne rejette pas pour cela les témoins néceffaires, lorfque les preuves fonr difficiles.
,
Ici nulle autre preuve Q'étoit poTIible; le Chapitre luimême l'a reconnu, puifqu'il n'a point fait entendre d'autres
témoins. L'emploi réciproque de ces témoins a été conf.1cré
par la Loi commune des Parties. Que le Chapitre indique
d'ailleurs un moyen de prouver l'ufage de la dîme par témoins, fans fe fervir du témoignage des habitans. Dans de
pareilles circon{bnces il a été admis toutes les fois que la
queHion s,'e!l: préfenrée, & notamment par l'Arrêt du 13'
Mai 176) , au rapport de MI'. de Montauroux, en faveur de
)
.la Communauté de St. Maximin.
On répondoit pour le Chapitre, que la poifeffion confti-'
tutive d'un droit univerfel doit avoir des caraéleres qui ne'
font point néceifaires à la poifeffion confervative. Pour acquérir la premiere il faut, fuivanr la Loi licet 4, cod. de'
acquirend. & raill. poJlèjJ. outre l'intenrion de poiféder , avoir'
la poifeffion de fait, requiritur anirnus & corpus; mais que
pour retenir la feconde , fiifficit falus allirnu,s. Dunod en fon
Traité des prefcriptions, part. l , ch. 4, pag. 24, dit qu'il
n'en eH pas de même, quand il s'agit de conferver le droit,
univerfel; les aéles d'une efpece lui conferveut la poifeffion
pour tous les autres & pour tout le genre.
Il eH certain que pour être fondé dans le droit de percevoir une dîme quelconque, il n'eH point néceifaire de repréfenter un titre confl:ilUtif; la coutume feule aurorife les dé_ 1
cimateurs à la prétendre, & fou met les redevables à la;
qui déclarepayer. Outre l'Ordonnance de Blois, art. )
.s. _
172 ._
.;
a
0,
�·
DU
PALAIS
DE
PROV.ENC!!;
173
que les dlmes fe leveront felon les coutumes des lieux & la
cote accoutumée, celle de Philippe IV, 'de l'an 13°3 , 'lui":
gairement entendue fous le nom de Philipine, ne permet aU),:
perfonnes Eccléfiafl:iques que d'exiger les dîmes qui font de
droit ou de coutume, prout de jure fuerit & hac7enus
dl confitetum fieri. Les Auteurs, tels que Dumoulin én
fon Commentaire fur le chap. 23 extra de decùiûs. La
Combe, en fon recueil de Jurifpr l1 dence canonique, v().
dîme, feél:. S , n. 2. Durand de Maillane, en (on Dictionnaire canonique, v(). dîme, § 3 & 6 , & Dunod ,:
en fon traité de la dîme, pag. 36, font taus dépendre de
la coutume, la quefl:ion de favoir Ii la dîme fur telle &
telle efpece de fruits eH clue ou n'efl: pas due; il n'en
eH aucun qui exige la repréfenration d'un titre d'établif-'
fement.
Le Chapitre fe préfente avec quatre anciens baux, en
date du 29 Août 1643, 23 Août 16'1,6, 30 Oél:obre 16)7;
9 Mai 1672., & un cinquieme pa1Té en 17)6 ; & il ajoutel'aveu de la Communauté, configné dans ·Ies procès-verbaux dre1Tés par les Commi1Taires de la Province lors des
affouagemens de 1698 & de 172.8: toutes ces pieces,
qui n'étoient contredites par aucune autre de la' Communauté, formoient certainement une preuve complette du
droit réclamé par le Chapitre. Inutilement ·oppofe-t-on
que les baux à ferme n'étant point paffés avec la Communauté lui étaient étrangers; car ne s'agiffant point de
prouver l'établi1Tement du droit de dîme fur les agneaux.,
par un titre confl:itutif, mais feulement par la po1Teffion,
id ne fallait que des baux pour. remplir parfaitement cet
objet, parce que perfonne n'a jamais difputé qu'ils ne
foient des aél:es vraiment poRdfoires, à tous égards fuffif:lns pour la preuve de la coutume. Des Fermiers qui fe
[oumettent au paiement d'une rente pour la dîme, tant du
bled & des raifins, que des agneaux, l'auroient-i1s payée,
s'ils avoient trouvé des obHacles à la jouiffance d'une partie
de la ferme? Il ne paroît pas qu'aucun d'eux - re- foir ra.;'
�J74
Jou RNA L
mais plaint du moindre refus de la part des habitans; s'ils
l'ont per~ue paifiblement & fans conrradiétion, la coutume
el!: conl!:ilOte & jul!:ifiée.
.L a prétendue ignorance de la Communauté n'el!: qu'un
prétexte, puifqu'il con He par les procès-verbaux drtdI"és
en 1698 & 172.8 , que les députés de la Communauré ,
enfuite des inHruétions qu'elle leur avoit donné, déclarerenr que les habitans étoienr fournis à paxer la dîme des
agneaux & chevraux ; d'ailleurs cerre ignorance eH-elle
vrai!èmblable, quand on voit que ce fonr des habitans du
lieu & des plus' qualifié.s qui figurent pour Fermiers dans
ces aétes de baux? Qui mieux qu'eux éroient à porrée
d'inl!:ruire la Communauté de la prétemion du Chapitre,
& de lui fournir les moyens de s'y oppofer?
Dès qu'il eH certain que les !impies énonciations contenues dans des aétes anciens font pleine & enriere foi,
même contre le tiers, ain!i que l'arrefient Dumou1in fur
la coutume de Paris, titre des fiefs, glo!f. 8 , in vo. dénombrement, n. 7S ; Bellus, conf. l , n. 6'2.; Faber in cod.
lib. 4, tir. 14, def. 6; Ferriere, fur la' coutume de Paris, tom. l , col. 2.71 ; que doit-ce être des aétes de
'baux que le Chapitre repréfente, dans lefquels il ne s'agit
pas feulement d'une éilOnciation vague de la dîme des
agneaux & chevrauJl, mais d'une difpo!ition expreffe fur
ce droit, puifque le ChJpitre l'afferme & en retire une
rente?
•
La Communauté ne jufiifie pas qu'il ait été un tems
oÙ la perception du droit de dîme ait été interrompue;
le Chapitre a pour lui toutes les préfomptions du contraire,
étayées fur un principe de droit inconreHable. Sa poffeffion ancienne que les baux conHatent, corroborée par celui de 17S6, lui donnent droit de rejerrer fur la COol mu!lauté la preuve de la. prétendue interruption intermédiaire.
Olim pojJejJàr, hodie poffèjfor prœfùmitur, &' ex pojJeifione
de prœterito arguitur poffiifio de prœfenti & medii temporis
lljfi confrari!Jm probetur. Si cette maxime dl: vraie, quand
�DU
PALAIS
Dl!
PROVENCE.
17')
il ne confie que de -la po1felIion ancienne, il Y a bien
moins de difficulté dans le cas particulier de la caufe, oùl'on voit la continuité de cene po1felIioo dans un aéie récene, qui eH de la même nature que ceux qui cooHatenc
la po1fellion ancienne; de forte que le Chapitre réunit les
deux extrêmes, & a pour lui le commencement & la fin,
prohatis extremis, prœfumuntur media; ce principe nous eH:
retracé par Dunod, en fon traité des prefcriptions , part.
l , ch. 4, pag. 18; &
par Boniface, rom. 4 , p3g. 624On voit d'ailleurs nne foule d'autres baux intermédiaires
qui excluent route prélomption d'interruption. Il efi vrai
qu'ils n'expriment pas nomtuément la dîme. des agneaux
& chevreaux; le Chapitre y donne à ferme les droits, rentes
& revenus qu'il a accoutumé de prendre & de percevoir
en qualité de Prieur de Merindol, & les mêmes perçus
pdr ci-devant par les précédens rentiers. Cette c1aufe fuffic
pour prouver que la dîme en queHion a réellement fait
partie des objets affermés, puifqu'elle fe réfere aux précédens baux où cetre dîme eft énoncée fpécifiquement &
individuellement.
.
Rd~e l'immémorialité de la po1felIion; mais peut-elle
être équivoque, quand on confidere que le premier bail
remonte au 29 Août 164-3, & qu'il énonce la coutume de
lever la dîme conteneieufe comme exifiante de tous les
lems ? Si, fuivant Dunod, parr. 2, ch. If, on peut
prouver la poffelIion immémoriale p3r des anciennes énonc-iations, fi cette preuve, comme il le dit, prévaut même
à celle qui fe feroit par témoins, parce qu'elle efi toujours plus affurée & moins fufpe8:e; fi enfin, lorfqu'il
paroit du commencement de cette poffelIion, il penfe qu'elle
peut être immémoriale, quand il remonte à cent ans, le
Chapitre a plus de cent trente fix ans de poffelIion avant
le procès.
Il n'y avait donc point de prétexte apparent pour conrefler avec fuccès la poffeffion ancienne du Châpirre ; auffi
le Tribunal de la Séné,hau1fée , qui en fut bien ~OhVâil1Cll,
�17
6
Jou
RNA L
n'héfira pas d'y rendre hommage par fa Sentence; mais
comme il n'étoit pas également ra1furé fur la poJlèffion
récente, atrendu qu'il ne la rrouvoit jufiifiée que par un
[eu! aél:e de bail, & par des certificars, il crut devoir
[oumenre le Chapirre à completter ,ce commencement de
preuve par une preuve, fans préjudicier cependant aux in.duél:ions ré(ulrantes en fa faveur, de celle qui exifioir déja.
Ainli, rien de plus clair que le vrai Cens de la Sentence;
les parties l'ont exécutée de part & d'aurre, dans l'idée
qU'Il ne s'agi1foit que de favoir li le chapitre avoir laiffé
perdre per non ufum pendant 30 ans le droit de dîme contentieux, ou s'il avoit eu foin de faire des aél:es confervatoires. Auffi le Tribunal, qui vit que la preuve de la poffeffion confervative étoit parfaitement remplie, maiutint
définitivemenr le Chapitre dans la jouiifance du droit de
dîme qu'il avait demandé.
Pour acquérir. un droit univerfel, il faur une poffeffion
immémoriale qui ait toujours été uniforme & jamais interrompue: pour le conferver, quand une fois il a été acquis, il fuffit de ne pas le laiffer perdre par une prefcription
de 30 ans; enforte que li on n'a pas ceifé de le percevoir dans le cours des dernieres trente années, & qu'on
le prouve, on efi parfairement en regle : mais faur-il l'avoir
exigé individuellement de chaque redevable, pour être aurorifé à fe dire en .po1feffion ? C'efi la difficulré que réfout
Dunod en J'endroit ci-devant cité, & d'Argentré, coutume
de Bretagne, art. 277, va. en fa Seigneurie, n. 3. Er en
effet, fi parce que quelque redevable du droir échapperait à
la vigilance du Fermier & ne payeroir pas, tandis qu'un
?rand n?m~re !eroi.t exaél: à s'acquirrer de fan obligation,
JI pouvoIr sen enfUlvre que la poffe/Iion du propriétaire
eLl: imparfaite , il n'efi aucun droir univerfel , quelque bien
~rabl! qu'il fût, qui ne pût êrre ébranlé, parce qu'il n'efi
.jamals polIibJe que des Fermiers portent une atrention a1fez
. fcr~puleufe dans l Il! perceprion, pour ne laiffer aucun reLdevable en .an:iere. Tou~ ce qui. en réfulre, <efi que l~
propriéraire
�:0 U PAL AIS
D l! PRO V Il Nell.
177
propriétaire perd les arrérages qu'il n'a pas demandé dans
un tems utile, mais le droit en lui-même fubfifie coujours.
C'efi encore le femiment de Dunod, en fon traité de la
dîme, pag. 20.
La perception- confiante de cette d/me efl: avouée par
la prefque cotalité des témoins que Je Chapitre a fair entendre, & leur témoignage efi d'autant plus fatisfaifanc,
qu'il en
plufieurs qui attefient avoir oui dire aux anciens du lieu, qu'ell~ écoit due. L'enquête de la Communauté ne doit êtr~ <;l'aucune confidération, parce qu'elle
compofée d'habitans de Merindol, qui ne pouvoient
point être admis ~ rendre témoignage fur un fait où ils
étoient iméreffés ut finguli, comme l'enfeigne Defpeiffes,
tom. 2, pag. 486 , n. 14. Guipape, décif. 193. Mornac
in leg. 6, § l , de rer. divif. De Clapiers, cauf. 3S, quo
l , n. 26. Boniface, corn. 't, pag. 801, & Deçormis, tom.
2 , col. 971.
Le Chapitre n'a pas été fournis de rapporter la preuve
d'une poffeffion prefcriptive & confiicutive, mais feulement
d'une poffeffion continuative & confervative, qui n'exige
pas les mêmes conditions; l'interlocurion a été parfaitement remplie , puifque l'enquête du Chapitre ne permet pas de douter qu'il n'a jamais ceffé d'exercer, à Merindol, fon droit de dîme [ur les agneaux & les chevreaux,
du moins fur une partie dES habitans, ce qui fuffit pour la
preuve de la poffeffion continuative.
Arrêt du 13 Juin 178 l , au rapport de Mr. l'Abbé de
la Baume, qui confirme la Semence; déclare l'Arrêt commun & exécutoire contre les redevables; déboute le Chapitre du premier chef de fa Requête incidente, & fur le
fecond rejette les dépolitions des habitans dans J'enquête
de la Communauté. Chaque partie fut co~damnée aux d~
pens des chefs la. concernant. Ecrivant Mes. Verdolliu &
Pellenc.
ea
ea
�ARR Ê T
XV.
Sur un droit de fervitude.
Es - Dames· Augufl:ines de la Ville de Marfeille furent
réunies, en 1748, aux Dames Préfentines de la même
Ville. Après la réunion, elles mirent leur emplacement aux
encheres. Tardieu en acquit une partie. Il fut convenu que
cet emplacement feroit divifé par des murailles qui feroient
élevée·s par Tardieu, & qu'il poùrroit exiger des acquéreurs voifins , la portion des 'murailles qui leur compéteroit :
qu'il feroit donné à Tardieu une partie de-l'eau du grand
b<jfIin , proportionnellement à la contenance de fon achat,
fuivant la répartition qui en feroit faite, au cas feulement
que la Communauté de M~rfeil1e n'y mettroit point d'obfl:acle.
L'emplacement par lui acquis était précifément celui où
on ayoit établi le canal de fuite de toutes les eaux quelconques du Monafl:ere des Augull:ines. En attendant que
l'entiere vente de l'emplacement- fût confommée, il fut convenu que tant que les Dames .Religieufes poiféderoient le
furplus de leur MonaHere,. jardin & maifons au-deifus-,
Tardieu feroit tenu de recevoir & donner cours & paifage
aux eaux qui en venoient par les conduits qui étaient dans
l'emplacement vendu ; & fi elles venoient à vendre le
reHant , chacun des ·acheteurs feroit tenu de donner cours
à fes eaux, tant pluviales qu'autres.
Devenu acquéreur de l'emplacement, Tardieu y fit bâtir
tour de fuite une maifon , & la vendit quelque tems après
à Ronardel, abfent , avec tous les droits, facultés, ufages,
[ujétions , appartenances & dépendances, le tout conformément
au premier ac?e d'achat.
En 1711 les Dames Préfentines louerent le furplus de
l'emplacement à des Teinturiers en indiennes & cotons,
L
�DU
PALAIS
DI:
179
PROVI!NCI!.
qui firent dégorger toutes les eaux par le canal de fuite
établi partie dans la cour, & partie dans la maifon de Bonardel. En 1776 Bonardel étant venu habiter fa maifon,
tint un aae aux Dames Préfenrines, & les interpella de
défendre aux locataires du furplus des bârimens, de faire
paffeJ. &_ dégorg~r, les eaux par eux employées à la teintllre, des indiennes, & corans, par les conduites qui éraient
Qans l'emplacemenr de Bonardel, pour faire ceffer les dommages & incommodités que les eaux lui avoient déja caufé,
4. pO\lrroient lui caufer. Les Dames Préfenrines ne firent
a)Jcune réponfe. Bc;>n.ardel le pourvut pardevant le Lieuten,ant aux fins de faire condamner les Darnes Préfentines
aux dommages & intérêts fouiferrs & à fou/frir à raifol}
du pa1fage des eaux chargées de teintures, fales, puanres
& infeaes, venant du domaine des Darnes Religieufes,
avec défenfes de continuer, & demanda rapport préparatoire de defcription de l'érat des lieux. Le rapport fut ordonné & fair; & par Senrence définitive du 27 Août
1779" le Lieutenant débouta Bonardel de fa demande,
avec dépens. Il en appella pardevant la Cour.
On difoit pour lui, que lorfque les Dames Pré{entine!p
avoient vendu à Tardieu l'emplacement dont s'agit, le canai de fuite qui y érait érabli ne recevoit abfolument d'un
côré que les eaux claires & lympides des Darnes Auguftipes, attendu que ceUes-ci éraient déja transférées &
unies; & de l'aurre, les eaux découlant des fontaines &
éviers de fix maifons bourgeoifes , fairant partie du domaine
de ces Darnes; ce n'étoit donc que pour les eaux claires
& pures qui éroient auparavant à l'ufage. des Augul1:ines,
& pour les eaux des funraines & éviers des MX maifons
bourge.oifes, que les Préfenrines fe réferverent la fervitll.de. Elles ne purent avoir l'intenrion de la réferver pOUl"
tous les locataires à venir, puifqu'il éraie jufrifié que loin
de defiiner ce furplu.s d'emplacemenr à des locataires, elles
l'~voient. mis èn vente, & qu'elles trairerent avec Tardieu fous. la foi dè_1a réfolution. formelle qu'elles aVQie~
.
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�180
1 0 t1 RNA L
de vendre ; en retirant de lui le prix de l'el1:imation, fanS'
avoir égard à la fervirude, en lui promettant de la faire
ceifer, dès que les autres parties de l'emplacemem feroient
vendues, enfin, en lui p'romettant une répartition propor·
tionnée fur les eaux. D'où il fuit, que non-feulement elles
n'entendirent pas impofer à Tardieu la fervicude de recevoir à l'avenir d'autres eaux que celles & telles qu'elles
étoient alors, mais encore qu'elles n'emendirent pas lui /
impofer celle de recevoir à toujours ces mêmes eaux•
. Cette réferve paifagere avoit-elle été faite auffi pour ces
mêmes eaux, lorfqu'écant employées à de nouveaux ufages,
elles changeroient de nacure & de couleur; elles feroient
chaudes, fumantes, & chargées de matieres glucineufes ;
elles feroienr puantes ~ infeél:es & corrompues.; elles dépoferoiem un limon plus fécide encore? Cette fervicude n'a
point écé écrite; elle n'exifie nulle parc. Si les Dames
Fréfencines n'ont fur le fol du lieur Bonardel qu'une fervitude de prefcription, relative à l'aél:e de 1748, elles n'ont
& ne peuvent avoir prefcrit la faculté d'y faire paifer les
eaux des Dames Augufiines, que dans l'état falubre où
eUes étaient en 1748, 1749, 1750 & 175 l , qui font les
_premieres années de leur poifeffion prefcriptive.
Il y a une grande différence à faire entre les eaux faines,
& celles qui ne le fom pas. Les premieres fom comprifes fous les mots génériques, (;- autres eaux j lès fecondes
ne peuvent pas l'être. Auffi voit-on que, fi la Loi oblige
le propriétaire inférieur à recevoir les eaux du fupérieur,
elle l'autorife à refufer ces eaux, lorfque le fupérieur, par
l'ufage qu'il en fait, les dénature & les corrompt. (Leg. 3,
ff. de aqlJâ & aqlJl% pllJviœ arcendœ).
.
Le mocif de cette Loi la rend également applicable à la
fervicude contraél:uelle, & à la fervitude de poifeffion, comme
à la fervitude naturelle. Il n'eH jamais permis, dans quelque cas que ce foit, de nuire à la famé d'un voifin,
ou de rendre fa poifeffion inhabitable. - C'ef!: d'après ce
prin ipe facré dans l'ordre focial, que Defgodets, dans fes '
7
�DU
PALAIS'
DE
PROVENCl!:
r8t
toix des hâtimens, obferve que' fi la maifon , qui a la fervitude fur l'autre de pairer les eaux du bourgeois, praticien, marchand, artifan ou autres de condition approchante, eH occupée ellfuite par des .perfonnes d'autte cond~tion, comme Rôtiireurs, Charcutiers, Corroyeurs, Tanneurs, Teinturiers, faifeurs de favon, &c. ils ne pourront
pas y faire pairer leurs eaux, à caufe de la puanteur, tit.
des fervitudes par prefcription, n. 13,
Les Loix n'autorifent le propriétaire à exploiter fon fond,
de la meilleure maniere poffible, qu'autant qu'il ne prive
le voifin que d'un avantage; mais elles gênent fa liberté ,
toutes les fois qu'il caufe un dommage réel. L. Proeulus,
ff. de damna. Grotius de jure belli & pacis, tom. 2, liv.·
2., ch. 2.I , § 10. Ici (continuoit Bonardel) l'Econome n'a
qu'à faire pratiquer une autre canal de fuite pour les eaux
ceinturées, & elle jouira paifiblement de tous les avantage5
de fa propriété. Ce nouvel arrangement eH t'rès-praticable ,
puifqu'il eH poffible & même fiipulé que chaque acquéreur de partie de cet emplacement, qui eIl: aujourd'hui occupé par des Teinturiers, donnera cours à fes eaux pluviales & autres.
Il eil: certain qu'on doit, avant toutes chofes , s'abHenir
de caufer aucun dommage. (Richard Cumberland, traité
philofophique des Loix naturelles, ch. 1 , § 7-,4'; principes.
du droit n'ature!, chap. l , arr. ""; Gairendi, Philofophor.
Epieur. jintagma, part. 3 , cap. "4. ).
Bonarde! peut fans contredit oppofer à l'attentat de
l'Econome la grande maxime-, Salus populi [uprema lex eflo.
C'eil: relativement à ce droit naturel & univerfel qu'il eil:
ordonné dans tous les Pays , à tous manufaéturiers qui
OIlVrent ou employent des matieres fumantes & fétides,
d'établir leurs fabriques dans des quartiers éloignés de la
Cité. (Cœpola, de fervit. ruflic. prœd. cap. 44, n. 1.
L'on convient que la Police fouffre les Teinturiers en
indiennes & cotons dans les murs de Marfeille ; mais elle
les. a tous. rélégués du ,ôté de 4 mer, afin que les eaux
�Ifh..
•
1. 0
U 'Il(N -' L
t~inturées, étant au fortir des chaudieres, refr(}idies & coo-'
fQndlies avec d'autres., n'iJ;lcpmmodent pas même les
vpifIns., I,a police peuç donc tolé,rer des, Teinturiers dans.
Ulle Vill.~ ,Jorfque les·voifins n'en fouffçent.pas;. mais le droit
naturel s!oppo(e à ce que de,s Teinturiers dirigent, leurs,
e~ux. inf~él:es d,e maniere à caufer du domm"ge.•.
• Suivaqt l'aél:e de 1748, ,~a,rdieu. ne fuç fqumis .qu'à une·
fervirude paffâgere : BO,narde! eut pu,. dès. le. moment. que
les Dames Préfentines eurent reooncé au deffeio de vendre
le, fu~pius' d'emp!acemeor, les foinrn~r, & 'en cas de
r~fu~". le,s faire. cond.amoer, à ~aire ceffer la fervitude,. &
à.rem'pli~ e\les-rnêmes toutes les o.bligations qu'elles avoient
r~jç~qie.s ,cporre .Ies autres ac,guéreurs. foo droit, ql!3nt,
à] ce, étant ré el,4 fondé en titre, ne pouvoit être perdu
Gge par une ppffeffion contraire de 30 ans, parce que les
a.;rions ré~lles & les droits defcendans d'un aél:e fynnal-.
lagmatiqu~ ne, peuveor être éteints que par, cette efpece..
de _prefcr~ptio.n. Or cette réclamation faiçe dans les 28 ans
d~ l'aél: e :Rrjmitif, &, dans les 25. ans de l'entrepri(e, pourro~r-ell~ êV~. repqu!fée par uJ;le prefcription moindre de
30 ans?
.
Il. ell:. certain, d'ailleu~s, que malgr~ l'autorité formelle
de l~l L9i, fi: 'luis djutufno, ~ Ji fervit. vindic. & des interpretesl"fuivallt .1~fqu~Js, l'ouvrage. f~it à main-d'homme,.
d~n (I~ fond d'a\ltru.i , p.q\lr.la direé):ion.des eaux, donne,
à la fervirude un effe~(qHl:tinuel , la Cour jugea en F~vrier
1~08., a')J rapport: de· Mr. de' Çharleval, que dès que l'eau
ne. pa.lfe" Ras. conti-nuellefiJent , il faut ou un titre, ou une
poffeffi()n immémoria\e. (,Mr. de Bezieux, liv, 8, chap.
3"
§ 2).
Quand même le.canal de fuite ou de dérivation, établi à
frJain d'homme dans le food d'autrui, donneroit un effet
continuel à la ferv.itude. {cont.iouoit .Bonarde1 } ce ne. fe,oit·
& ce ne pourrait être que lorfque ce callal. aurpit été
cQoUrui·t ad' hoc, c'ell:-à-dire, pOl,lr cette mçme fervi-'
lude ) parce qu~ c.e n'ell: que dans ce cas. qu'on Fe ut. fup~
�DU
PALAIS.
Dl!
P·ROVRNCR.
'i8J
-parer que le proprietaire du fond a confenti à la fervirude,
en confentant à l'établilfement de la conduite qui allait,
pour ainfi dire, lui donner l'être.
Ici Bonardel n'a point lailfé établir, dans fon food, de
canal de fuite pour les eaux teinturées. Il a trouvé un canal
exillant, & delliné de tous les tems à recevoir des eaux naturelles & oon fétides. Tardieu & lui ont été obligés de le
laiffer fubfi{~er, & ne l'Ont lailfé fubfiller que pour ces mêmes
eaux de Bourgeois, qui continuQient d'y couler. Puifqu'il faut
un ouvrage fàit à main d'homme dans le food d'autrui pour
caraél:érifer la fervirude continue, celle dont s'agit ne peut
pas être telle, puifqu'il n'a point été fait d'ouvrage ad hoc.
La quefiion s'étant préfentée entre Reibaud & Jaulferan, du lieu de Broc, de favoir fi l'exillence d'un canal
établi dans le fond d'autrui pour caufe particuliere, a.voit
eu un effet continuel pour celui qui s'était avifé d'y faite
paffer de l'eau de tems en rems, & lui avait acquis un
droit de fervitude dans le laps de 30 ans, la Cour, pàr
Arrêt du mois de Mai 1737, rendu au rapport de Mr. de Peinier, jugea que l'ouvrage n'ayant. pas été fait ad hoc, 30
ans n'avaient pas fuffi pour acquérir une fervitude qui· avait
·été difcontinue.
.
D'ailleurs, en fuppofant qu'il' fût queftion entre les
·parties d'une fervitude cO'ntinue, la prefcriprion n'aurait
pas pu avoir lieu par une efpace moindre de 30 ans. Les
anciennes Loix avaient admis.la prefcription de la ans pour
les immeubles & les fervirudes continues. Celles du di'gefte n'exigeaient qu'une polfeffion décennale. L. Ji 'luis
diuturno If. Ji fervitus vindic. L. quoties ult. eod. 1. l, § ult.
If. de aquâ t;. a'luœ pluviœ arcendœ. Celtes du code exigeaient un titre tel quel, & la poffeffion décennale L.
nullo juJlo titulo 24, Cod. :de rei vindic. L. diutina 4 , Cod.
de prefcript.longi tempo L"7 & 9 ,-Cod. de aC'luir. & retinend.
poffeJf. J ufiinien abrogea entiérement la prefcIÎptioo de dix
ans pour les immeubles & droits réels, & ne la lailfa. fubfifter que pour l'aél:ion hypothécaire. Depuis lors ·il el!
�1114
J 0 tI Il. N AL'
conŒant dans toUS les pays de droit écrit, qu'on ne peut
.acquérir. fans titre un immeuble ou droit réel par Ul1' moin1 dre
efpace de 30 ans. (Catelan & Vedel, liv. 3, chap.
6; Serres, inflit. pag. 143 ; Fromental va. fervitud<!, pag..
6S8 ; Lapeirere', lete. S. n. 62 & 77 ; Guipape, quo S3T;
Ba1fet , tom. 1, liv. 2, chap. 19 ; Julien, tom. 2., pag.
397, lett. CC. Mr. de Saint-Jean, décif. 72 ).
On répondait pour les Religieufes, que l'aél:e dont s'agit prouve q.ue la fervitude était Œipulée pour tout le tems
que les .Religieufes po1féderoient & qu'elles ne vendroient
point. On po1féde par foi-même ou par des locataires,;
donc Bonarde! ne peut fous aucun rap.port fe fOl:l!traire à.
la fervitude établie. Les Religieufes ne s'étaient point engagées à vendre; elles ne s'étaient liées à cet égard par
aucune convention formelle; elles 'avoient confervé l'en~
•
tiere liberté de vendre ou de ne pas vendre; on prévoit
dans l'aél:e le cas de vente, .parce qu'il pouvait fe' vérifier" & dans ce cas on fiipule que la fervitude ce1fera;
mais la prévoyance du cas de vente n'était que la prévoyance d'un cas qui pouvait arriver ou ne pas arriver.
En ne vendant pas, les Religieufes n'ont fait qu'ufer de
leur droit & de leur liberté. On ne peut. transformer en
o.bligation un aél:e entiérement libre & facultatif.
Il ne s'agit point ici, d'une po1felIion J'refcriptive-, toujours peu favorable en matiere de fervitude; mais il s'agit,
d'une fervitude établie par contrat; d'une fervitude qui a
- fait. partie du prix d'acquiution. Quand Tardieu po1fédoit
encore.,. les R eligi.eufes avaient déja loué leur domaine
pour un layoir public, & c'ef!: dans cet état de louage que
Bonardel a acquis de Tardieu; il favoie donc que cette '
fervitude n'était pas momentanée ; tam pis pour lui s'il
peut,croire que fan Procureur n'a pas vu les chofes comme
il aurait pu les .voir :lui-même ,. s'il avoit été préfent; il
n'cŒ pas moins vrai qu'il s'eŒ mis au lieu & place d~
Tardieu, & qu?il s'eŒ foumis à toures les conditions que
:rardieu" premier acquéreur, avait confemi envers les Religieufes~
�PALÀisl' DE' ~rrROVl!NCE.
'I-S'~
ligieufes. Les contrats font libres, qùandotÏ es palfe mais
l'exécution n'en elt plus ni libre, ni volontaire :" contractus ex principio, voluntatis, & ex pofi faao , necejJitatis.
Honardel elt forcé de convenir qu'il
obligé de -recevoir les eaux des locataires, 1 comme celles 'des Religieufes.
L'aéte [oumet Tardieu, que Honardel repréfente, à recevoir coutes les eaux qUI' viennent du domaine des Religieufes, tant qu'elles le polféderont. Donc, la fervitude fe
rapporte indéfiniment aux eaux qui viennent du .domaine au
deifus, foit que le domaine foit tenu par des locataires ou
par les propriétaires. Co'tmnent les parties; on't-elles exécuté le paéte? Elles fe font conformées au fens dans lequel
il a été écrit & rédigé: Tardieu & Honardel ont re~u
fucceffivement les eaux des locataires. On voudrait alléguer
une po!Teffion prefcriptive; mais .une l'o.1feffion prefcriptive
e.lt .celle qui ne fe 'napporte 'à aucun .titre.; 00 qui n'elt confécjuente' à- auc'un' paéte. Ici il y. 'a 1 un. contrat'" &. le fait
. des parties ne' p'eut 1 être regardé que ~omme .l'exécution
!impie ou interprécative de ce contrat.'
Il ne relte plus qu'à e1!aminer, continuaient les Religieu-fes, fi les eaux des locataices Teinturiers doivent. faIre une
exception à la regle. Le' contrat n'excepte rien'i il ernbraffe
les eaux tant pluviales 'que les autre's;; qui' viendront du
..domaine. 11 y a déja ~ingt-(!in-q aps :que les eaux teintu-rées ..paifdot par les conduites ferviles i pèut-on voir une
plus fone interprétation .d'un aél:e, -qu'une exécution aufG
formelle, auffi conl1:anre, auffi' fuivie?r 'Ce n'ell: point en
,force 'de la prefci-iptic)n:, mais: en'force d'un contrat con.f~rarnm~n.t .exécuté, que l,ès Religieufes dêmandent à êtue
maintenue, dans un droit acquis, & qu'elles ont expretféme.1t ltipulé en vendant leur propriété.
S'il ef!: porté indéfiniment dans le titre de fervirude, die
l'Annotateur de Defgodets 1 que les eaux d'une maifon s'écouleront par lln héritage vOlfin; il n'efl: pas poffible de pen.
fer que celui qui s'eH engagé à fouffrir indéfiniment l'écoulement des eaux de cerre maifon, puiife prétendre q'-'Q
Années 1781 <S' l78:1...
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~:t~e fi1aiÇoQ foit."perpétpelle.ment d.ans le mémé étgt qu'elle
.était OU pouvgit être lors de l'érabliifemenr de la fervicude. Ou peut dire, au cOntraire,' qu'il s'eH engagé tacire.rn.ent·à fouffrir les y,ariarions ,ordinaires, qui ne manquent
.jamais d'arri\éer, qlJ.aJld on .n'a pas mis des c1aufes de pré.caurion qui p,uiifent les prévenir. La fervirude indéfinie de
.rec.evoir les eaux d'uo.e majfon n'ell: pas feukment pour les
eaux pluviales;· eUe comprend encore les eaux des cuinnes
& celles .qu.e le comme.rce .de ceux qui occupent certe
maifon po.u'rroit ·occano.nner. Gelui qui el!: fournis à la fer-vi rude indéfinie eH entiére.rnent fubordonné aux événemens.
lL~s ,eaux qu'il~s'oblig.e de .recevoir peuvent ,augmenter dans
un teolS & .diminuer dans un autre; ce qu'.il y a de cer.tain, c'eH ..qu'il n~el!: pas probable que celui qui {tipule à
4"on profit & cjnr ...titre ,une fetvüude indéfinie & illimitée,
-aiL préiendll chaJ;g.er. fa.maifon .de la fervitude ~errible de
:n.e pouvoir ,en ,ohanger' la difp.ofirion, ,ou de ne pouvoir la
rmeure ..en .valeur".en fe privant du droit de la louer à
des perfonnes qui peuvent .lui en payer un loyer confidé-raDie j sryil en érojt autrement, la condition du propriétaire
éde la ma·ifon. p.ou'r laquelle la fervirude a été 1l:ipulée, de<'viendroje. pire I.qae'.cellelldu v.ailia fournis à I:écoulçment
•
,.des eaux il :y: as d~jà y,ingt-cinq .\lns. '
.Arrêt ,du 18. Juin ur8 l, ,.IIU rapport' de~Mr.le Confeiller
de Ballon, qui fait droit à, la .requête .de J~onaréld, con':damne l'Econome des Religieufes au paiement de.8 IiI'. pour
.dommages par lui foufferts; fait défenfes à l'Econome de dé'gorger .Ies eaux .dont s'agit par la .c'onduite ,de Bonatde!,
!..& condamne EEconome, aux dépens. Ecrivant .Mes. Barlec
-& Portalis.
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Dl! PROVENCl!.
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ARRÊT
Ld prefèription Île peut co!Jrir contre le légitimaire qui vit
en commrinion avec l'héritier.
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•
Ieuf Louis Mazet de la ville d'Aix, pk fon ref1:ament
du 2i Oél:obre 1724, ini1:irua' Me. Nicolas Mazet,
Avocat, fori fils" fon héririer univérfef ,. &. légua aux plies.
Jeanne &: A:nne Mazet fes filles" pour leur renir lieu de
légirime, la jàuiifance viagere. d'lin, appari-eme'nr' nieublé
dans fa maifon & quelques capiraux en' p"ropriéré. Après
la: mort du p'ere, les frere & fœùrs vécurent enfemble &
en· com'munion; Jeanne Mazet mourut en 1744, après"
avoir inf1:irué fa fœur fan héririere univerfelle; celle-ci,
conrinua d'habiter avec fan frere jûfques à fa mort arrivée
en 1778:
j
Le 30 AOllt 1779, la DlIe., Arme Mazet fit affigner\
(on neveu en condamnation de 375 liv. que fon pere avoit
exigées de la DlIe. Bain de Baulme, & qui fàifoient parrie
des capiraux lég'ués à la Dl1e. Jeanne Mazet fa (œur. La
caufe ayant été' compromife à des Arbitres, ils condamnerenr M~. Mnet au paiement des 375 liv. avec intér,êrs depuis la' demande. 'Appel dé (a part patdevanc la
€our.
On diroit pour lui que ce Jugement réfiltoit à tous
lès principes parce qu'il n'avoit eu aucun égi\l:d à la pre(-.
criprion étJblie en la. Loi fiçut.3, cod. de prœ[criplione 30
vel 4D' allllOr. qui éteint &. anéantit toute aél:ion réelle,
p.er(onnelle' & mixre, ,quand on n'en a poin't formé demande pendanr rrente ans confécûtifs : les femmes, les
ab(èl1S, le's gens' de guerre, les' m,ineurs, (ont (ou mis à
la Loi; les pupilles, feuls (ône garantis de la r,igueur de
la regle. 'Ce qui a fait dire à CalIiodore que la prefcrip.
Aa 2.
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tlon éroit l~' patrone du g~nre-humain, la fauve-garde des
familles, & ce port de faluc que la fageife de la Loi a
établi pour menre les hommes à couvert des troubles &
des agitations de la vie civile. Idem le favant Auteur des
lijJàis de Jurifprudence, quo 7,
Le rembourfement du capital de 375 liv. avoit été faie
à Me. Mazet le 2.8 Décembre 172.8, & fa fœur a gardé
le filence tant qu'il a vécu, c'efl:-à-dire pendam 50 ans;
la prefcription lui efldonc légitimément oppofée. La préfomption de dol.& de mauvaife foi fe convenit en démon{hation, quand le débiteur & fon créancier ont fait
diverfes affaires & réglé divers comptes enfemble, {ans
qu'il y ait jamais été fait mention de la prétendue créance
demandée après la mort du débiteur, ainli que le décide
la Loi -procula 2.6, if. de probationious , au {ujet d'un fidéicommis -qu'une fœur demandoit aux héritiers de fon frere
avec lequ~l elle éroit venue Couvent à compte, {ans jamais
avoir parlé de cene créance; la Loi décide qu'elle avait
été ou payée ou remife. Barthole attefl:e que la dette, quoique légitime & prouvée, ne pouvait plus être demandée,
1°. quand il s'agiifoit de proches parens, ratio fanguinis;
2.°. quand elle étoit due depuis long-rems, taciturnitas
longi temporis; 3°. quand les parties fe font réglées par
des comptes rendus, fans qu'il en foit fait aucune ITlentian, & [œpiùs fac7a compenfatio.
La Dlle. Mazet avait établi fan frere fan procureur;
avec pouvoir d'exiger les capitaux de penfion qui lui avaient
été légués par fon pere ; celui-ci lui a donné compre touces
les années des penlions qu'il recevoit, & des capitaux qui
lui avoient été rembourfés, jufqu'en 1762. qu'elle donna ce
foin au fieur Mazet fils, auquel elle en concéda quittance
finale en 1778, fans que jamais il ait été fait mention
de la créance dont s'agit.
On obfervoit encore que, fi les alimens fournis par un
frere à fes fœurs légitimaires doivent leur tenir lieu de
l'intérêt de leur légitime, à l'effet que nulle prefcription ne
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PALAIS
DB
PlU) \' llNèl!;
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pui/fe courir conrr'elles, il fuit que cerre interruption cerre
quand elles ont été payées de leur légitime, & que leur
frere leur a fourni des alimens à tout autre titre. Tous
les auteurs convienne,nt que cerre exception ne peut être
oppofée que par le légitimaire non payé de fa légitime,
parce que jufqu'à ce paiemen t, il dl: portionnaire de la
fucceffion paternelle, & communil!:e des biens; ce qui me.t
obl!:acle à la prefcription qui ne p~ut courir cootre l'alfocié
& le communil!:e; mais qqand il n'a plus rien à prétendre, la prefcription preod foo cours contre tout ce que fon
frere peut lui devoir de fon chef perfonnel, en force de
quelque titre que ce foit. Me. Mazet établilToit enfuite la
preuve qu'elles .avoient été payées de leur légitime, &
coocluoit qu'en adoptant qu'un &ere ne peut pas prefcrire
fur l'autre, quoique payé de fa légitime, par cela feu!
qu'il lui fournit les alimens pietatis intuitu, il faudroit toujours faire entrer en compenfation ce qui peut lui être dû
avec .les mêmes alimens & la même nourriture, ainfi que
l'établit le nouveau Commentateur de notre Statut, tom.
2, pag. s83'
On convenoit, pour la Dlle. Mazet, des principes qui
régilfent la prefcription; mais 1'00 difoit qu'elle était dans
le cas de l'exception. Il el!: certain qu'aucune prefcription
ne peut être oppofée au légitimaire tant qu'il a été nourri
à la table de l'héritier débiteur de foo legs, ou qu'il a vécu
en communion avec l'héritier, fuivant la jurifprudence des
Arrêts rapportés par d'Olive, liv. S , quo 31 ; par Boniface,
tom. 4, liv. 9, tit. l , ch. 17; & par le nouveau Commentateur de notre Statut, tom. 2., pag. )82. , parce que
les alimens qu'il reçoit ou qu'il confume à la table commune, étant fubl!:irués aux intérêts de fan legs, il el!: cenré
en avoir la polfelIion, & la prefcription ne pouvant jamais
courir contre celui qui polfede , l'héritier ne peut l'opporer
ail légitimaire, tant qu'il a cette polfeffioll. Or Me. Mazee
ayant retiré, en qualité d'héritier de fon pere, de la DUe.
Bain , la créance de 37 S liv. de Jeanne fa fœur; il ef~
�, ,l'; 0 U:' ~ N~ A r,..
'
.
-el! c"e'tte' qua-hœ: débiteur de ce' regs, tyotir1fe pàlë-'
menr daquel rtlll'S l'es i b'fén's hêrédtraifés~o'nr'écê légàlelfl'è'tit
fubrogés à (on remplaceme'nt.
El s'OHes-. Maze'r n'ont' poinr éré alimen'tées pietatis intuitll, p:uifque tant que' la Olle. Jeanne Mazet a, vécu
fans divifion avec (on frère, c'était lui qui retirair (es re-:venus', & joui'lfoiè des fruits dorl[ il fe aontenra'it" pour [a
contriburio'n aux frais de la nourriture, ai'nû qU"il s'y éraieobligé par la d"éclaration de 1728 ; ainfi, jufques à la more
de Jeanne, point de preftriptionà o'ppofer. Quane, à la
Olle. Anne Mazet, elle (e fourniifdit le pain, la vian'de,
J"huile & to'Ut ce qui érair néceŒiire' à [a nourtItute, à
l'exceptiàn' dù vint & du' felJ dont l'aclîat éra'ir à la. charge
du frere ,_ ainfi qu'eHe le jufrifioie pal' le cereifitae du
Boulanger.
,
Depuis' la mort de Dllé. Jean.ne Mazet, la DUe. Anne
n'avoit auoun intérêt 11 exiger le' capital; fan' filencè' ne peue
lui être opflofé; la cirtonl1:ance, tàdturnitasl6ngi' temporis,
requife pour que la Loi procula puiJfe ~voir lieu, ne peue
avoir aucune application contr'elle : Ji 'luis ijlorum defficeret ,
dit la rubrique, [ecus eJ{et. On ce peur pas dire qu'il y eût
de la négligencé' de la' parr' dé la DUe. Anne Mazer à de- .
marider la (orttmé' principale de 37') liv" parce qu'eHe en
reriroir alfnuel1emeht les 'intérêts', 'Dàns l'h}ipothe(e de la'
Loi' proéu!'rt" la fœur n'avoir jamais reçu ni intérêts ni
fruits "dcr-/-ideicornmis; cetre Loi (upp.ofe des comptes réciproques rèndus 'enrre le' frere & là [œur, dans le[quels
on auroit' pu cOh1pen[er le montant dù fideicommis. Ici la
DUe Mazét n'â j~niais eu d~aurre compee' a\;ec fan frere,:
qlle' celui qu'exigeoit" l'admînïfi~arion 'dé ,J'ès' biéns. Si la
Lni proc'uld pdù'voit être oppolèe à quelqu'un dans cerre
cau(e, ce [eroir à Me. MJZer pour lat compenfadbn qu'il
voudrait fàire des 37) liv., avec la' porrion d s alimens
fournis à (a (œur; ce fetoié à "lui à appliquer les trois circonfiances, rappellées par 'cerre Loi:'U efi vrai 'que la DlIe.
Anne Mazee ne peut ju'ftifier du"paiiuuènr dés intérêts,) parcelit"
k-;',,11U
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P'R 0 V Il N C H.
J 91'
que les quittances font au pouvoir du débiteur. Mais (obfi rvoit-elle ) de deux chofes l'une; ou les intérêrs Ont été
payé~ annuellement, & alors point de prefcriprion ; chaque
paiement l'interrompoit : oÙ les intérêts n'ont pas été payés,
& alors point de prefcription encore, attendu que le frere
& la fœur vivoient en communion.
Arrêt du 2.8 Juin 1781 , au rappprt de Mr. le Confeil1er de Cafl:illon, qui con6rme la Sentence avec dépens.
Ecrivant Mes. Bernard fils, & Arnulphy fils.
Le paiement des intérêts n'étant pas jullifié, la Cour
jugea uniquement qu~ la prefcription ne couroit p~s contre
le légitimaire qui vivoit en communion av~c l'héritier.
ARRÊT
XVII.
L'héritier hénéficiaire fjui paffi un conc.ordat, dans lefjuel il
promet payer les créanciers, peut être contraint perfonnellement, & les exécutions p,euvent être portées fur fts hiens
propres.
·L
E fieur d'Eyrpux, de ,P09teves-pevaudan, hériti~r Jefl:amentaire 4,u fleur Jeaç Gafpard Cefiier ,.-Capitaine d'Jnvàlides, prend cette hoirie pa~ bén~6ce d'inventaire. Il pa1fe
eBfuite un conco~dat ~vec noble François-Jofeph de Pochet,
Avocat en la Cour, & les autres créancie,rs & légataires, le
a.7 Avril 1774, p:L' lequel il eH dit qu.e l'inventaire domeftique fera rernjs au Greffe de la Jurifdi&ion de Manofque,
pour y avoir recours en cas de befoin; que les effets feront
efl:jmés & vencjus à l'encan public, & le produit employé à
,payer les droits Royaux, les cens, frais de la derniere maladie & ~es funérailles, c~ux de Jull:ice & d'adminillration,
".& !:n(uite les arrérages d',intérêts qui pourront être dus; que
l;ls imm~ubles feront, mis en vente, & le prix fervira à pay~r
.Jes' créanciers hy~o~hécaires, fuivant leur ,Jang; qu'il ne,
�'192.
Jou N A L "
pourra être fait aucune pourfuite pendant trois ans; dan!
lequel temps l'héritier s'oblige de payer les créanciers. Il efl:
ajouté que s'il furvenoit de nouvelles dettes, ou quelque
prétention à la charge de l'hoirie, non comprife dans l'état,
ou Ct quelque créancier s'opiniâtroit à refufer de foufcrire le
concordat, il feroit libre à l'héritier de pourfuivre l'infl:ance
bénéficiaire: le lieur de Ponteves oblige, pour raifon de ce,
,fes biens préfens & à venir. Les accords "convenus avec les
Légataires, furent con lignés dans un autre concordat; les
legs furent retranchés de la moitié, & l'héritier fe rélèrva
le même droit qu'envers les créanciers.
Le fieur de Ponteves prétendit enfuite que tous les créanciers n'avoient pas figné le concordat, & qu'il avoit découvert de nouvelles dettes chirographaires. Il fit rendre une
Sentence de défaut, qui le re~ut héritier bénéficiaire, fans
toutefois déroger au concordat, & fit ordonner par cette
Senrpnce, que les creanciers & légataires feroient affignés
pour voir procéder à l'inventaire par déclaration. 11 préfenta
une requête, par laquelle il déclara vouloir reprendre l'inf'tance bénéficiaire, & demanda que les biens de l'hoirie feraient arrentés aux encheres, au rifque, péril & fortune de
la maIre, & qu'il donneroit compte de fa gefl:ion pour fe
payer du reliquat de fes fournitures & avances fur les revenus, avec intérêts, reis que de droit, & avec préférence·
à touS créanciers. Il les fit affigner pour voir procéder à
l'exécution de la Sentence de défaut, & voir entériner les
fins de fa requête. Les créa'nciers & les légataires foutinrent
que l'exécution des concordats s'oppofoit à la demande du
fieur de Ponteves. Semenc,: du Juge de Manofque ,-du 16
Janvier 1776, qui lé déboute de fa demande en reddition
de compte; le déclare non-recevable & mal-fondé en l'état
à reprendre les pourfuites du bénéfice d'inventaire, & ordonne l'exécution des concordats. Appel pardevant le Lieutenant de Forcalquier. Evocation enfujte pardevant la C:;OllI;
de la part des œuvres pies", qui éroie~t cré~ncieres,
'
On difait pour le lieur de Ponteves, qu'étam jugé héritiér
bénéficiaire)
�D U
PAL AIS
D E
PRO VEN C E.
193
bénéficiaire, chargé d'adminifl:rer, & devant être payé des
frais d'adminifl:r,ltion, il devait être admis à rendre fon
compte; puifque c'écoit le feul moyen de calculer avec égalité les dépenfes qu'il avait faites, d'en connoÎtre le foromaire, & de parvenir au rembourfement. Pourquoi donc,
& fur quel principe, a-t-on pu le débouter de fa demande à
cet égard? Pourquoi le Juge l'a-t-il fait au moment où il
ordonnoit lui-même l'exécution des conventions?
La Sentence elt injuite, en ce qu'elle ordonne l'exécution
des concordats, même en faveur de ceux des créanciers &
légataires qui avaient refufé de les ligner, & de ceux encore qui s'écoient préfentés pofl:érieurement. Les conventions
regardoient feulement ceux qui les avaient lignées & confenries; c'eit une regle de droit commun) cS.: l'autorité de
cette regle étoit ici ralfermie par le texte même des conventions. On y voit qu'elles feroient nulles, & de nul elfet ,
fi quelque créancier venait à refufer d'accepter le concordat;
de forte qu'indépendamment de la nullité réfultante du fait
en lui-même, les Parties avaient refpeétivement avoué &
convenu que chacun des créanciers devait accepter pour
pouvoir être re<;u à exciper du titre; & cette acceptation
devoit être prouvée par la lignature de chacun d'eux. Il s'agilfoit donc de leurs intérêts ut jinguli. On avait donc confelfé ou reconnu que ceux qui refuferoient de ligner ne pourroient être liés par les conventions. C'efl: donc une injuitice
que le Juge les ait aucorifés à exciper de ces traités, & en
ait ordonné l'exécution à leur égard.
Il ne s'agit point ici de l'arrangement d'une faillite, qui
efl: fournis à des loix particulieres; ce font des conventions
paflées par quelques-uns des créanciers d'une hoirie bénéficiaire, fans que les autres aient voulu ni les foufcrire, ni
en fubir la loi. Peut-on croire que les créanciers lignataires
fulfent en droit d'oppofer ces fortes de conventions à ceux
qui fe refuferoient d'y adhérer? Et fi l'on elt forcé d'avouer
que cette efpece de contrainte feroit dérifoirement propofée ;
comment fe perfuader que les créanciers qui ont refufé de
Ann"s l78: (( l78:l..
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Jou RNA L
figneî' , puilf~nt dans aucun cas ni exciper des conventions
qu'ils n'ont pas voulu reconnoltre, ni être autorifés' à le~
faire exécuter à leur profit? La regle des concordats ell: donc
étrangere; on n'e~l poine placé dans le cas de l'exception,
qui ne regarde en e:flèt que -les tnatieres mercantilles.
Le fieur de Ponteves n'a pas celfé d'êere héritier bénéficiaire; il l'dl ~ncore à l'égard même des créarreiers qui
Ollt ligné le'S conventions; & ces traités étant devenus nuls
& de nul e/fet, ne peuvent pas leur fervir de prétexte
contre les demandes qu'il a formées. La qualité d'héritier
bénéficiaire lui a été confervée par le texte même des deux
conventions. C'eU en cette qualité qu'il a traité dans l'une
& dans l'autre; & l'on y trouve en effet des, difpofitions approbatives de cet état des chofes.
Des nouveaux créanciers ont fait cortnoltre leurs prétentions ; d'autres, déja connus à l'époque des conventions,
ont refufé de les ligner, & d'en fubir la loi; enfin d'autres
one demandé d'être payés, & le fieur de Ponteves a été
forcé de prévenir les pourfuires des uns j & de faire celfer
les exé'cutions des aucres. La plupart des créanciers nouvellementdécouverrs, ne fone point compris dans l'état fur lequelles conventions ont éeé faites. Inutilemene oppoferoit-on
que ces nouveaux créanciers n'ont pas formé des demandes
judiciaires, parce que le défaut de demartde judiciaire ne
difpenferoit pas le fieur de PO'nteves de payer ces créanciers,.
s'il deverroit héritier pu"! & fimple. Sa condition fetoit donc
pire qu'elle ne Pétoit à l'époque des conventions: l'état des
chofes ell: donc changé. Au/Ii M. de Montvallon, dans fon
Traité des fucce/Iions, tom. 1 j pag. 14S , obferve que le
majeur eO: refHtué, s'il furvielie des dett~s nouvelles qu'ir ne
connoilfoit pas, & qui foient confidérables.
Il n'y a qu'un feul point à exatni'ner. La conditibn s'eO:élie vérifiée? C'eCi la convention qui doit (ervit de bafe. On
y voit qu'elle fera nulle, & de nulelfet, s'il furvient de nou~
velles dettes, Ôll quelque prétention à la cha1"ge de l'hoirie;
Qe f<)Fte ,que rie« d'oblligeQit ~ fJéùr dé POnteves d'arcendre
û
•
'
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PAL AIS
D B
PRO" E
N C B.
19~
qu'il fût aélionné en JuCHee par le~ créanciers cerr,ins qui
fe font faits connoitre. Le refus de ligner de 1'1 part de
quelques-uns des créanciers IX légataires ~ '1 amené a'uŒ de:;
change mens réels, qui forJTlellt & donnent lieu 'Jlj ré,filiment
des deux traités.
On ne peut pas dire qu'un bénéfice d'invenrai~e foit une
faillite. Les Loix & les Auteurs ne parlent abfolument qUIl
du cas où tou~ les créanciers d'up mêl11e débite\lt s'a(fem,.
blent & pa~,;;:'nt fur lel,lrs intérêts communs, ,f~nl> que jamais leurs réfolutions qu~conques puiffent f.ieF ni les créan,.
ciers privilégiés, ni les créanciprs hypothécaires. La LOI 7 ,
§. 17, fI: de paRis, dit feulement que l'héritier aV'lnt <;l'ayoir
accepté l'héritage, paélife valablement avec les créancier:;
de l'hoirie fur la réduéli'Jn de leurs créances: Si ante q4icam
h.zredicatem pacifcatur quis cum creditoribus , ut minus folv(2wr,
paRum va/icurum ifl. La même Loi, §. 19, veur qlle pour
lÀ validité de ces forces de traités touS les créanciers s'affetpblenr en un même lieu, & s'obligent d'un cpm.mun accord
à la réduélion de leurs créances, & que, s'ils, font divifés ,
l'avis de la majeure partie foit fuivi.
Il faut donc que tous les créanciers s'aJfemblep't, ql.j'ils
examinent & difcutent les objets ~'intérêt fur le/quels ou
veut les obliger; & cela feul peUL former entr'eux ~ous le
germe de l'obligation qui peLlt réfulter ,enfuite de l'avis-du
plus grand nombre. C'efi un convemicule dont l'objet ef}
connu à chacun d'eux, & p,ar le fait duquel fe forme le .(onfente ment de chaque créancier de s'en rapporter à l'avis du
plus grand nombre; au lieu que dans le propr.e fyCl:ême de
ces Loix il n'eCl: point permis, que par des confentel)1~_ns
particuliers & des fignatures fucceffivement accordées, la
pluflarr des créanciers puiffent jamais obliger les a,utres.
Tout efi purement perfonnel, lorfque les créanciers agiffent
(éparém;lnt; & c'efi précifément le cas du procès.
Qnelle eH la nature des traités paffés eorre les créanc.iers
d'une hoirie & l'héritier bénéficiaire en cette qualité? Sont-ils
autre chofe que des apuremens amiables" faits dans le kil!
Bob
2.
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J .0 ~ R ~ A L , , • .
objet d'épargner les frais dune mfiance beneficlalre ? Mr. de
Momvallon, dans fon T ra ité des fucceflions, rom. l , ch. 4,
ar.r. 10 & 13, dit que l'on ne regarde pas l'héririer bénéficiaire comme maÎtre, mais feulemenr comme gardien &
adminifirareur.
Dans le cas de l'A rrêr célebre du Parlement de Paris,
du 10 Juiller 1599, rapporré parPeleus, quo 44, pag. 162;
par Charondas, en fes QueHions, rir. 5, cl•. 3 ; par Ferrieres, fur l'arr. 3 t6 de la Coutume de Paris, n. 89, un
héririer bénéficiaire fur condamné à pa}'er fur fes biens le
créancier d'une reme dom il avoir palfé rirre nouvel, c'efià-dire, nouvelle obligarion en qualiré d'héririer, fans faire
mention du mor bénéficiaire; on jugea qu'en prenant fimplement la qualité d'héririer, il éroir cenfé avoir renoncé
envers ce créancier au bénéfice dom il vouloir fe fervir auparàvant, & qu'au moyen de ce, il devoit payer de fes biens
propres, fauf IOUS fes droirs d'héririer bénéficiaire envers
les autres créanciers de l'hoirie. Ces Auteurs reconnoi1fent
qu'il n'y auroit eu lieu à nulle aél:i0 tl perfonnelle fur les biens
de l'héritier, fi au lieu de comraél:er feulemenr comme héritier , il l'avo"ir fai en fa qualité d'héritjer bénéficiaire. Ce rte
maxime efi attefiée par Me. de Laville, dans fon Recueil
des déci/ions du Palais, au mor héritier, n. 5285; par Le":
brun, des fucceffions, liv. 3, ch. 4, n. 23 ; par Fromenral, en
fes Décifions, au mor ùzwntaire; par Defpeilfes , Traité
'des fucceffions, parr. 3 , feél:. 2, n. 16; & par Mr. de Mont'Vallon, rom. 1, pag. 699 , & rom. 2., pag. 362.
Les créanciers & légaraires fourinrent au contraire que
l'exécution· des concordats qui formoient leur tirre,
ne dépendoit pas du caprice du fieur de Ponteves;
que d'après ces concordars, il ne pouvoit être quefiion
vis-à-vis d'eux ni d'arrenreme.nt des biens, • ni de reddition de compte; que nul créancier & nul légaraire n'avOlt formé des demandes ni fa.it aucunes pO\lrfuires en Jufiice;
que rous avoient exécuté & vouloient exécurer les concordats, & qu'en fubilfant de leur -côté la loi que .ces· mêmes'
�D U
PAL A t S
D E
PRO VEN C E.
t
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concordats leur avoient impofée, le {jeur de Ponreves éroit
obligé de la fubir du {jen; que ce n'étoit pas après les avoir
fait renoncer au droit qu'ils avoient de faire adminiCher les
biens de l'hoirie par rout autre que par lui, & après leur
avoir arraché des facrifices, moyennant lefquels il s'étoit
fournis foiemnellement à les payer dans le remps porté par
les concordats, qu'il pouvoir élever conrr'eux des conrefl:ations, pour faire confomme"r par des corn pres les fommes
qu'il leur :!Voir affurées fur rous fes biens préfens & avenir;
qu'en un mor ces concordars exifl:oient, qu'ils formoienr des
contrats aurhenriques &. fynallagmatiques, auxquels on ne"
pouvoir porrer aucune atteinte; qu'en attendant que le délai
de trois années, qui avoit éré donné au {jeur de Ponreves
pour les paiemens auxquels il s'éroir fournis, fût expiré," il
devoir êrre déclaré non-recevable & mal fondé en l'érar dans
fes demandes.
Les créanciers & les légaraires convaincus que l'exécurion
des concordats devoit enfin êrre confommée, puifque le
terme des paie mens qui y- éroir fl:ipulé, & qui n'éroit point
échu lors de la Senrence du premier Juge, éroir expiré depuis long-remps, avoienr demandé par une requêre incidenre, qu'en confirmant la Senrence du premier Juge, & en
ordonnanr l'exécution définitive des concordars, le fieur
de Ponteves fut perfonnellemenr contraint au paiement de
leurs créances, avec inrérêrs. "
Pour le fou rien de cette requête ils obfervoienr 1°. que
la Sentence n'éroit ni conrradiél:oire ni injufl:e : 2°. Que les
concordars avoienr lié perfonnellement le .lieur de Ponteves
envers rous les créanciers & légataires mentionnés dans
l'érat des dettes qui y étair joint, pour l'exécution & l'accompliffemenc des engagemens qu'il y avoit conrraél:és:
3°. Que ces concordars n'avoienr pas été réfiliés, & qu'ils
avoienr confervé roure leur exécurion.
.
" En premier lieu, le Juge avoir uniquement à juger {j le
fieur de Ponreves était recevable & fondé à violer & anéantir les concordats qui avoient fait novation, en lui inrerdi-
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Jou IJ.
N
A.
f.
fanr toute pourfuite de l'inHaoce bénéficiaire, & en lui impofant l'obligation expreffe de payer les créanciers & les légataires dans un terrne fixe, qui n'était pas encore échu•.
.C 'était-Ià tonte la quel1:ion que le Juge avait à décider. Le
feul article 8 des concordats, fuffifoit pour convainrre le
juge que ces concordats avoi~nt dérogé à toUS les droits &
acrions de l'héritier' bénéficiaire , bi~n loin que l'entérinement des lettres Royaux eût pu déroger aux concordat~; Il
penfa avec raifon que la demande que t:lifoit le lieur de Ponteves en reddition du prétendu compte de fon adminiflration
n'était pas admillible, dès qu'elle étoit un 3tlentat formel
aux concordats qui faifoient la loi des Parties.
En fecond lieu, il s'en faut bien que la reddition de compte
fût une fuite des concordats, dans taus les cas; ce ne
I?ouvoit être que. dans le cas où les concordats auraient été
réliliés par les événemens auxquels leur exécution était fuborQonnée ; parce que dans ce cas l'inl1:ance bénéficiaire auroit
pu être reprife , & dès-lors la reddition de compte en auroit
été une fuite; mais les çoncordats étant exécutés, & les
c:réanciers étant payés ou devant l'être, il ne peut pas être
lJueHion à leur égard de reddition de compte, d'arrentement
des biens, ni de rien qui' ait trair à l'adminiHration de l'héritier qui s'eil: obligé de les payer.
En rroilieme lieu, la prononciation du Juge eil: no~feule
ment réguliere dans la forme, mais encore elle eil: évidemment julie au fonds, même à l'égard des défaillans, parce
qu'aucun d'eux n'avait contrevenu aux concordats, & n'aurait pas même pu y contrevenir fans intérêt, & au préjudice
du tiers; car fi l'on avoit befoin d'invoquer la regle que l'on
~uit au fujet des concordats relatifs aux fallites, nul doute
qu'elle s'appliquerait à ceux que paffe un héritier bénéficiaire
avec le.s créanciers de l'hoirie; parce que cette regle, fondée fur la Loi majorem, ff. de pac7is, & fur la docrrine de
tous les Auteurs, eil: faite pour toute forre ·de matieres où
ii y a concours de plulieurs perfonnes qui ont un même intéaillfi que le déddent De{Feiffes, tom. l, pag.
,rêt. C'efi
.
�D U r A LA 1S
DB
PRO V B NeE.
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186, n. 29, & Grotius, de jure belli, lib. 2, cap. ) , n. 22;
d'ailleurs, un bénéfice d'inventaire de la part d'un héritier
étranger, dl-il autre chofe qu'une faillite?
On ne contelle point au lieur de Ponteves qu'il ne foit
héritier bénéficiaire, puifqu'il fuffit d'avoir impérré & fait
lignifier des lettres Royaul( pour acquérir cette qualité;
mais qui peut conteil:er aulIi que le bénéfice d'inventaire
n'étant introduit que pour l'intérêt particulier de l'héritier ,& pour qu'il ne foit pas lié perfonnellemeuc malgré lui envers les créanciers de l'hoirie, il dépend de lui de renoncer'
à fes droits, de paél:ifer avec les créanciers, de tranliger
avec eUl(, & de s'impofer à leur égard toutes les obligations
qu'il trouve bon? Par cela cela feul qu'il· paél:ife avec les
créanciers, il s'oblige perfonnellement ; ce qui eil: li vrai,
que les remifes qui lui font faites font à fon feul profit; &
il peut faire valoir contre tous les autres créanciers de l'hoirie bénéficiaire, tous les droits en principal & intérêts de
eeUl( qui les lui ont cédés, aux hypotheques & privileges'
defquels il ell fubrogé de droit; c'eil: ce qu'atteil:ent tous les
Auteurs: il y a même là-delfus un aél:e de notoriété, pag.
290 du Recueil. Qui pourroit en effet conteHer qu'une fois
que l'héritier bénéficiaire a p'aél:ifé avec les créanciers, il ne
foit obligé de remplir fes engage mens , à moins qu'il ne fûé
pupille, mineur, furieux, imbécille ou interdit, quand il les'
a contraélés ?
'
Les Loix n'ont pas accordé cet étonnant privilege 11 l'héritier bénéficiaire; elles font même plus rigoureufes 11 fon
égard qu'envers tout autre. Tellement qu'il fuffiroit qu'un tel
héritier eût promis à un feul légataire le paiement de fon
legs en entier, afin qu'il fût obligé de fuivre la même loi à
l'égard de tous les autres; ainû que l'obferve Me. Decormis;
rom. 2, col. 742. Mr. l'Abbé de Montvalon, tom. l, pag.
699, & tom. :1., pag. 362 , établit la même maxime fur une
fou le de textes du droit, & notamment fur la novelle 1,
ch. 3. Ce n'eH point avec un feul créancier ou un feul légz.taire que le lieur de Ponteve~ a pàél:ifé ~ c'e1l: avec télus. Le
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prétexte dont il fe fert, qu'on lui a donné la qualité
d'héritier bénéficiaire dans les concordats & dans des quittances, ne peut lui fervir pour fe foufhaire 11 fes engagemens. Cette qualité ne lui a été donnée, que pour le
mettre à couvert vis-li-vis des nouveaux créanciers qui
pourroient fe préfènter, autres que ceux mentionnés
dans l'état, & même vis-à-vis de tous ceux qui étoient
compris dans cet état; au cas qu'il y en eût parmi eux qui
vouluffent s'9piniâtrer 11 ne pas accepter & exécuter les concordats. Voilll pourquoi cet héritier bénéficiaire fe fit autorifer 11 adminiHrer les biens, à faire la rémiffion de l'inventaire au Greffe de Manofque, pour y recourir en cas de befoin; 11 faire entériner les lenres Royaux, &c. Mais ces
précautions, que 'l'événement pouvoit- rendre néceffaires,
pouvoient-elles avoir pour objet de rendre inutiles & illufoires les obligations qu'il s'impofoit envers les créanciers &
les légataires mentionnés dans l'état, dans le cas où les
concordats conditionnels qu'il paffoit avec ceux-ci opéreroient leur effèt & conferveroienr leur exécution?
Deuxévénemens pouvoient feuls opérer le réliliment du concordat avec les créanciers: 1°. L'opiniâtreté de quelques créanciers 11 refufer de l'accepter: 2.°. La furvenance de nouvelles
dettes, Ol1 de quelque prétention à la charge de l'hoirie. Tous les
créanciers & les légataires ont exécuté les concordats', noofeulement' peilC!ant les trois années de l'anermoiement,
mais encore après, & ils veulent les exécuter. Ceux qui n'ont
pas ilgné font iIlitérés; leur filence v.aut {jgnature J dès qu'ils
ne réclament pas. Au furplus, aucun nouveau créancier n'a
produit des titres ni formé des demandes qui pu iffenr être
11 la charge de l'hoirie ni ,à celle de l'héritier bénéficiaire; il
n'y a donc jamais eu lieu au r~liIiment des concordats.
, Arrêt du 4 Juillet 178 [, rendn à l'extraordinaire, au
'rapport de M. le Confeiller de Thorame; qui confirme la
Sentence du Juge de Manofque ; ordonne l'exécution définitiye des concordats, & que le {jeur de Ponreves fera per,follnellement contraint au paiement, avec dépens. Ecriv~nt
Mes. 'Pochee' & Efb'ivier. '
ARRET,
2.00
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PAL AIS
D II
ARR Ê T
PRO V B Nell.
2.01
X V l II.
Formalités qui doivent être o6fervées, lorfiJu'il faut donner un
chemin a une propriété clofe.
E. Dupré, Avocat du lieu de St. Chriflophe, requit
le Lieutenant de Juge du lieu le 30 Janvier 1777,
d'accéder fur une propriété de terre qu'il polTédoit dans
le terroir, & de fixer un palTage pour y aboutir, de huit
pans largeur, fur la propriété voiline la plus proche du
chemin public, le propriétaire appellé pour s'y voir con-'
damner, pour, le palTage ainli fixé, l'eflimation du fol en
être faite par les eflimateurs non fufpeél:s, & le prix en
être payé conformément au Statut; & au furplus ordonner
que ce même palTage aÏnli fixé feroit borné & limité,
& que l'exécution du tout feroit faite nonobflant appel
ou oppolition. Le Lieutenant de Juge accéda. Antoine Jean,
propriétaire de la propriété plus prochaine du chemin, fut
appellé & comparut. Il confentit à donner le chemin fur
la liliere de fon fonds. Ordonnance qui condamna Antoine
Jean à donner un chemin d'une canne largeur par 44 longueur; elle en déligna l'emplacement, & fixa le lieu où
chaque terme devoit être pofé. L'eflimation du terre in fut
faite par 'les eflimateurs, & il fut ordonné que Me. Dupré en payeroit la valeur à Antoine Jean.
Cette Ordonnance fut lignifiée à Antoine Jean, avec
offre du prix. Appel de la part d'Antoine Jean, Sentence
du Lieutenant de Sault, qui calTe celle du premier Juge
fans dommages & intérêts, & fait inhibitions & défenfes à Me. Dupré de troubler Antoine Jean dans fa pof-feffion, jufqu'à ce qu'autrement fût dit & ordonné. Appel
.
de la part de Me. Dupré pardevant la Cour.
On difoit pour lui, que la, route. que doivent tenir ceux
'.Anné~$.1781
& .178:l"
.
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JOULNAL
qui n'ont point de chemin pour arriver à leur domaine, el!:
tracée par Bomy, en fon Recueil des Courumes, chap.
9, page 26. Si quelqu'un, dit-il, a une poffiflion cloft,
en forte qu'il n'ait aucun chemin pour y aller, il faut que
le Juge accede fur le lieu avec Experts & Sapiteurs, appellés tous les propriétaires des poJJèflions voifines..... quand
le chemin fera étaMi, & appellé le propriétaire ou poffiffiur
de la propriété plus proche, le Juge condamnera à donner
chemin de tant de large, c'efi-à-dire de cinq pans ou plus
Ji ainfi lui femMe hon; fera horner de çà & de là leq.it
viol; ordonnera de payer au douMe ledit c.hemin au maltre
de la poffiffion fervile.
.
Toutes les formalités établies par cet Auteur ont été
exaél:ement fuivies par le Lieutenant de Juge de Sr. Chrif"
IOphe; la convocation de tous les voiGns n'étoit pas nécelfaire, parce qu'ils ne pouvoient donner au Juge de plus
grandes inîlruttions que celles que le local lui-même lui
donnoit. Un Arpenteur a mefuré en prHence d'Antoine
Jean; s'il n'ef!: poinr fait mention dans le rapport que le
Géometre ait prêté ferment, c'ef!: un oubli qui n'anéanrit
pas la déclaration des Experts. Dans le fait, il l'a prêté
entre les mains des Efrimateurs) qui, en qualité d'Officiers Municipaux, ont carattere pour le donner au fapiteur qu'ils prennent. La procédure a éré faire dans une
matinée; on a fuivi en cela l'intention du Statut qui exige
que cette procédure fe. falfe fur .les lieux & qu'elle foit
prompte, pourvu que tout ce qu'il ordonne foit obfervé.
Le nonobf!:ant appel était de droit, parce qu'il falloit que
Me. Dupré-, fes Valets & fon' 1 coupeau puffent arriver à'
fa propriété. Le cautionnement était inutile, parce qu'il
n'y avoit poinr à craindre qu'il emporrât le fol dont on
lui confiait l'ufage. La fignature des Experts ne vicie pas
la Sentence; elle ne prouve que mieux que tout a été fait
avec connoiffance de caufe, & que le rapport qui y ef!: rela-.
tif n'ei!: pas faux.
'
J
~}1 fonds, ~>n Q-ifS;j{) qll.e~ s'ihy -avait eu un autre endroit
)
�DU
PALAIS
DI!
.
P ROVEN-el!.
:pour',l'~mplacemen:t du chemin, AtHoine Jean qui
2.03
éto\t
préfent n'auroit pas manqué de l'indiquer au Juge;. il n~
.Je fit cependant pas; il en offrit un fur la liliere de faterre; IDilis. celui qu'il offroit ne pouvojt être açcepté,
parce qu'il étoit plus long de trois cent pas. D'ailleurs la
Loi du pays ne permet pas que le Juge p'réfere en.pareil
cas .de donner un chemin de deux cent cin'luante-ih: cannes
au détriment de trois particuliers, plutôt q.ue d'en donner
un de quarante-quatre cannes dans le fonds d'un feul.
On répondoit pour Antoine Jean. qu'il ne s'agiifoit pas
limplement de ces défauts de formalités extérieures qui
peuvent vicier une rrôcédure ou quelqu'autre aél:e que ce
foit, fans avoir trait au fonds. Il s'agit de ces formes
eifentielles qui conil:ituent la fubil:ance même des procédures juridiques, & fans lefquelles on ne peut pas leur don~
ner un caraél:ere légal ,de ces formes qui font appellées
/ùbflantialia judicii; de maniere que fi elles font violées,
Je jugement ne peur pas fubGHer.
Il eil: certain qu'il n'eH rien de G facré parmi les hommes que le droit de propriété; de là en reg-Je génér-ale,
nul ne peut être obligé à vendre ou à céder fon bien
malgré lui; ce principe qui dérive du droit des ,gens eil:
rappellé dans une foule de textes du droit écrit : non
·enim equum eJl, irlvitum fuo prerio res fùas vendere, dit la
.Loi 9, fI: rer. amot. On trouve la même chofe dans la Loi
1 l , cod. de contrah. empt. Dans la Loi l 6, cod. de jure
deliber. Dans la Loi 70, If. de Rei vindic. fur laquelle Godefroy ob(erve qu'en pareil cas, etiam juJlum pretium habetur pro injuflo. Ce n'eil: qu'en faveur de l'utilité publique que les Loix ont fait une exception, parce que le
citoyen ·doit tout, & (e doit lui-même au fervice de la
_Patrie: quifque Rei puMicœ magis oMigaturquam crediteri ,
dit Grotius; de jure belli & pacis, lib. l , cap. l , il. 6,
Mais le privilege de la chofe publique ne (e communique
pas aux particuliers, parce qu'il (eroit conçraj!,e au droi~'
Cc 1.'
-
�2. 0
4
JOURNAL
naturel que l'intérét d'un citoyen fût facrifié à celui d'un
autre.
Il faut convenir cependant qu'il efl un cas où cela peut
arriver. C'efl lor[qu'un voiOn ne peut parvenir de nulle
part dans [on bien pour le cultiver ou en percevoir les
fruits. Il paraît équitable que dans ce cas d'ab[olue néce[lité, les voifins lui cedent un patrage pour y aboutir. On
peut- même dire que c'efl là une obligation qui, quoique
contraire à la rigueur du droit, trouve [on fondement dans
les regles de l'honnêteté publique; de là vient que quoique- plufieurs Auteurs graves aient [outenu le contraire,
fur l'appui d'une foule de textes du droit, comme on peut
le voir dans Boerius, déci[. 322, néanmoins les Tribunaux de Juflice [e [ont relâchés de la rigueur de la regle
pour embratrer le parti de l'équité, qui exige que les hommes, & principalement les voifins, [e rendent des [ervices
& des recours réciproques, [ur-rout dans les cas de néceffité. Mais la plus [aine opinion des Doéteurs, & la J urilprudence des Arrêts, ont établi en regle, que routes les
fois qu'un particulier peut aboutir à [on bien par un chemin, quelque difficile, quelque long ou incommode qu'il
foit, il ne peut pas inquiéter fon voifin, & exiger de lui
qu'il lui cede dans [on propre hien un -chemin .plus court
ou plus commode. Si ce particulier n'a aucun chemin pour
aboutir dans fon fonds, il faut que les voilins lui en fournitrent un, moyennant une julle indemnité; mais en prenant ce parti forcé, à défaut de_ route autre retrource,
on doit avoir une extrême attention de n'établir ce chemin que dans l'endroit le moins nuifible & le moins préjudiciable au fonds du voifin. On ne cherche pas en pareil cas la commodité du particulier qui demande le chemin; on ne s'occupe que de ceUe du voifin qui doit le
fournir par pure néceffité; c'efl ce qui efl établi par Brodeau [ur Louet, lettre C. fomm. 1; par Maynard, liv. 4,
chap. 59, & liv. 7, chap. toO ,- n. 5; par·.Papon liv. 14,
-
�,
.nu
PALAIS
nn
P~ovJ!~cn;
'20~'
tir. 1, n. 3 ; par Me. Julien, en fan nouveau Commen'taire, rom. 1, pag. 506; & par Bomy, dans fes Mêlanges
ch. '9,
Me. Dupré a demandé l'accédit du Juge, non pour vérifier en préfence de tous les propriétaires voifins quel pouvait être anciennement le chemin ou viol de fa propriété,
mais uniquement pour fixer un paffage de huit pans de
largeur fur la propriété voifine, la plus proche du chemin
public. Le Juge ordonne l'accédit fans appeller aucun des
propriétaires voifins; & arrivé fur le lieu, Me. Dupré requiert la menfuration des propriétés vaHines, à quoi il fut
procédé par le confentement tacite du Lieutenant de Juge,
qui ne dit & n'ordonna rien. D'après cette requifition Me.
Dupré a dû & voulu procéder contre touS les yoifins, pu.ifqu'il a requis la menfuration de leurs propriétés, à l'effet
de déterminer fur laquelle le chemin par lui demandé devoit être placé. Me. Dupré prend à Partie tous les voifins,
& veut fe former un tirre concr'eux de la menfuration de
leurs fonds, & il ne les appelle pas pOur n'avoir aucun
contradi8:eur légitime. Cependant Bomy, au lieu cité,
obferve qu'il faut que tous les propriétaires voifillS foient
appellés, pour que le Juge puiffe vé).'ifier & s'inllruire s'il
exilloit, ou s'il avait exillé anciennement un chemin pour
aboutir à la propriété c10fe de Me. Dupré, parce que ce
n'ell que dans une abfolue néceffité qu'on peut obliger les
voiGns à fournir un chemin à celui qui le demande. Il faut
avant toutes chofes être bien affuré qu'il n'en a point, &
qu'il n'èn a jamais eu; voilà pourquoi tous les propriéraires
voifins doivent êrre appellés, afin qu'avant qu'on examine
fi l'up ou plufieurs d'entr'eux f~ront obligés de fournir un
chemin, ils puiffent tous enfemble en indiquer un qui les
'affranchilfe de cette fervicude. On efl: obligé de les entendre, & de leur laiffer Je droit de prouver en préfence du
Juge, par inllrumens ou par témoins, qu'il a exillé ancien~e,ment un chemin. Le Lieutenant de Juge a donc com-mIS un attenra~ en fiatuaIl~ fur. 11\ demi\Ilde de Me. 'Dupré
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fans avoir rempli ce préalable. Antoine 1eap n'a même été
appellé que lorfque le Juge étoit (ur le 'lieu', "&' par une
Ordonnance particuliere; ce qui eff contraire à l'ufage établi
par Bomy.
D'aitlellrs l continuoit l'intimé, l'Arpenteur qui a été choiû
par le tiemenanr de Juge n>al'oit aucun caraéter~ public;
il n'a point prêté le ferment en préfence dt=s Parries
intéreifées, en conformité de l'Ordonnance & du Réglemenr de la Cout; ce n'éè'Oit point aux Experts à le lui
donner, mais bien au Juge, qui devait en faire menrion dans
fon procès-verbal.
.
Peurquoi le Lieutenant de Juge, en ordonnanr le nonobftant appel, n'a-t-il pas pas fo~mis Me. Dupré à donner
bonne & fuflifanre càution, puifque l'Ordonnance de 1667,
titre 17, arr. 1'2. & 13, veut expreifément que dans les matieres les plus privilégiées l'exécution provifoire ne puiife
être ordonnée qu'à cette condition~? Jnutilement peut-on [e
'foufiraire ~ ceite Loi, en conGgpJant le prix du terrein
eflimé, parce que cela ne remplit pas enriérement l'intérêt du 'propriétaire; ce n'el!: pas pour le prix du chemin
que la caution efi donnée, mais pour les dépens, dommages & intérêts inappréciables qu'un Jugement injulle & une
exécution cruelle peuvent entraîner.
Sur le fonds) Antoine' Jean répondoit que fur les lieux
& lorfqu'on procéderoit en regle, il prouveroit que ce
.n'el!: pas toujours le propriétaire le plus proche du chemin royal ou voiGnal, qui doit fubir la fervicude, mais
que c'eH celui dans .Ie fonds duquel elle peut être établie
avec moins de, dam; il prouveroit qu'en faifant cinquante
ou éent pas de plus dans un chemin public qui fe trouve
du côté du couthant, on pourroit établir un viol fur la
lifiere des propriétés voifines, avec moins de dommage
que par-tout ailleurs, & que ce viol aboutirait prefque direétement à cene de Me. Dupré.
.
D'ailleurs, fi Antoine Jean pouvait être au cas de fouffrir l'éiabliffement'
d'un
chemin dans
fon fonds, il ne . pour'..
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roit jamais être queflion d'un chemin de huit pans de! largeur; tout au plus pourroit-fI être queflion c1'un viol, d'un
fimple paifage pour' gens_ & bêtes, & non d'uné carra ire
pour des troupeaux, ou d'Un chemin roulier pour des voitures. Le élémens du droit, liv.. l , inflit. tit. 3, di flinguent trois- fortes de chemins, iter., aBus, via; le premier'
n'emporte que le fimple droit de paifage pour gens & bêtes; 1
le [econd donne le droit de conduire des troupeaux & des
chariots. Inter aBum ê: iter, dit la Loi 12., if. de fervitut..
ruJlic. Tian nulla eJl diffimmtia, iter eJl quo 'luis pedes vel
œques commeare poteJl; ac7us vero, uhi apmenta trajiare &
vehiculilm ducere liceat.
Toutes les fois qu'il a été· queflion d'un· chemin que
les propriétaires voifins font obligés de fournir dans le cas
d'ab[olue néceffité, à celui qui poifede une propriété clofe,
on a toujours entendu le chémin appellé îur. Il n'y.a perConne de quelque état qu'il [oit, qui ne [ache qu'en pareil
cas ,'en: beaucoup qu'on accorde un fimple paifage, un
viol, parce qu'il ne faut rien de plus pour pourvoir à la
pure néceffité. S'il falloit établir des grandes routes, des
chemins rouliers & des carraires pour aboutir à toutes
l~s propriétés jfolées dans les. différents quartiers de cha-que terroir, on ne verroit par-tout que: de grands, cb~-.
m jns, & les trois quarts des terres demeureroient en·
friche.
Ce que Me. Dupré demande ne peut lui être acccordé
qu'à raifon de l'ab[olue néceffiré, & en verru d'une Loi
contraire au droit commun;! mais cette :Loi veut expreffémell.t qu'une fi dure rervjrude [oit fixée danS l'endroit ,le
moins préjudiciable à celui lqui efl forcé de la [ouffrir. Il
faut, dit Bomy, que le Juge avife de quel c6té ou de quel
haut on pourrait plut6t arriver de la poffiJlion au chemin
myal ou voifinal, & al'ec le moins de dam. Si Bomy ajoute)
que le Juge aura égard à la ,dillance qu'jl -y aura. depuis;
la polTeffiou clore, traverfant la) fervile ,'jufques' au ,che~i
min p_ubliç-, il n'.enten4 point ;que le ~io~ qui ;PQur;ra u1tr.8l
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établi ,pourra traverfer par le milieu la propriété fervile.
Bomy obferve feulement, qu'il faut conlidérer la diftance qu'il y a depuis la propriété c10fe jufques au chemin
public, en y comprenant la propriété fervile. En effet,
c'ell: le moindre dam qu'il faut 'conlidérer parde1fus toutes
chofes, & c'ell:-là ce qui doit déterminer & fixer l'emplacem.ent d'une fervitude forcée. Antoine Jean appella in'
quantum contra de la Sentence du Lieutenant, & demanda
fes dommages-intérêts.
Arrêt du 4 Juillet 178 l , au rapport de Mr. le Confeiller
'de Neoulles, qui confirme la Sentence du Lieutenant, condamne Me. Dupré aux dommages-intérêts d'Antoine Jean,
fixés à 30 liv. & à tous les dépens. Ecrivant Mes. Roux &
Pochet.
ARRET
XIX.
Sur- la lurifdiaion des Prud'hommes.
Es Prud'hommes &. Patrons Pêcheurs de la ville de.
Marfeille étant aurorifés par divers Arrêts du Con(eil,
& par des Ordonnances de M. l'Intendant,. à percevoir
la demi parr fur rous les Patrons qui pêchent dans les mers
de Marfeille, ou qui y viennent vendre leur poi1fon, rendirent une Ordonnance le 20 Mai 1777' par laquelle ils
nOmmerent deux Patrons du lieu de Caffis pour y faire les
fohél:ions de leulls Délégués & Prépofés, & de Commiffaires à la·.Ievee de la "demi part. Ils enjoignirent en conféquence aux Pêcheurs du lieu de leur obéir, & d'exécuter
les ordres .qu'ils leurs donneroient en leur nom. La même
Ordoimance défendit aux Pêcheurs de Caffis de fortir les.
jours de; .Dim.ancbes '& fêtes avant l'entrée de la nuit, &
leur enjDignit de payer exaél:ement à l'avenir l'impolition
de la .demi .pa"t ;' ils 'anoopcereot, qu'ils enverroient ipcef-.
famment
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PROVENCE.
209
famm..ent un regill:re coré & paraphé par le Subdélégué de
M. l'Inrendant, pour y infcrire les noms & contriburions
de chaqne Parron.
Ce regill:re ne fut point envoyé; & comme le droit
de la demi-part n'érait point payé, les Prud'hommes de
Marfeille fe pourvurent pardevant M. l'Intendant, aux fins
qu'il fût ordonné aux Parrons Jean Saume & Gafarel, de
rendre compte de l'imp06rion dans le délai de huitaine,
pour, le compte débarru, être condamnés au paiement du
reliquat; & faute par eux de le rendre, pour faire dire
qu 1ils feroi~nt condamnés à payer la fomme de 2000 liv.
pour tenir lieu d'indemnité. Les Patrons Pêcheurs de Caffis
prirent "en main le fait & caufe de ces Commiifaires; ils
prérenrerent à M.I'Intendant une Requête contraire, & abandonnerent enruice cerre infl:ance; ils déc1arerent appel pardevant la Cour de l'Ordonnance du 20 Mai 1777; &par une Requête incidence, ils demanderent des inhibitions & défenfes contre les Prud'hommes & Pêcheurs de
Mar[eille, de leur donner aucun rrouble ni empêchement
Qans le libre exercice de la pêche, & notamment d'entreprendre de leur faire quitter les places qu'ils auroient oc- "
cupées les premiers, d'urer d'aucune voie de fait à peine de
1000 IiI!. d'amende & d'information.
.
On diroit pour les Pêcheurs de Caffis, qu'il ell: vrai
que' les titres des Prud'hommes des Patrons Pêcheurs de
Marfeille leur donnent Jurifdiél:ion fur la pêche qui s'exerce
dans l'étendue des mers qu'embraifent le "Bec de l'Aigle,
& le Cap de la Couronne, & que le lieu de Caffis fe
tfouve firu~ dans cet ençlavement. En conféquence les
Arrêrs Ont déciçléjlque les Pârrons Pêcheurs de Caffis
~toient juHiçiables des Prud'hommes de Marfeille; mais
tes mêmes' Arrêts Qnt également jugé que les Patrons Pêcheurs de Caffis n'éraient pas membres de l'Aifociation ou.
Corps des Patroqs ~êcheurs de Marreille ; cela Ce trouve
décidé p.ar les titres & par l'ufage. S'ils ne font pas meml'Ires, s'ils ne participent pas aUX. honneurs, aLlx profits d~
.A(jné~s z78z () l782"
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la Communauté des Pêcheurs de Marfeille, coniment &
par quel principe pourra-t-on les faumenre à partager feS'
charges? Les Prud'hommes rempliffent un Tribunal; fous
ce point de vue, les Patrons Pêcheurs de Caffis ont des
rapports avec eux, & font en l'état jull:iciables pour le
fait de pêche de ce même Tribunal; mais les Prud'hommes à la tête des Patrons Pêcheurs de Marfeille, font fous
un aurre rapport les chefs d'une agrégation économique,
temporelle, qui a fes droits, fes intérêts, fes revenus, fes
dettes, fon adminill:ration; & Jous ce rapport les Patrons
Pêcheurs de Caffis leur font tout-à-fait étrangers.
Les Patrons Pêcheurs de Caffis ont toujours formé une
agrégation, une affociation féparée & indépendante de
celle de Marfeille; anciennement ils étoient unis- avec les
€apitaines des bâtimens de mer; il ne formoient avec
<lux qu'une feule & même Confrairie; ils fe féparerent en
1718. Depuis lors les Patrons Pêcheurs de Caffis Ont cont-inué d'exill:er féparément des pêcheurs de Marfeille, fans
avoir avec eux aucune relation autre que celle de la Jurifdiél:ion; ils ont leur Prieur, leur Sous-Prieur, leur JuréGarde, leur bourfe, leurs impofitions & leurs dépenfes à
part.
L'article 4 du titre 8, liv. 5 de l'Ordonnance de la
Marine, porte que les Pêcheurs de chaque port ou Paroiffe
où il Y' aura huit Maîtres & au deffus, éliront annuellement l'un d'entr'eux pour Garde-Juré de leur Communauté i
lequel prêtera ferment- pardevant les Officiers de l'Amirauté, fera journellement la vilite des filers &' rapport aux
Officiees, des abus & des contraventions. C'ef!: enfuite de
cet articl,e de l'Ordonnance, en force du droit commun,
que les Patrons Pêcheurs de Caffis exifient comme agrégation particuliere, locale & dans tÇlus les fens indépendante de toute autre.
A quels titres impoferoit-on les Patrons Pêcheurs de'€affis, pour l'adminifl:ration des Patrons Pêcheurs de Marfeille, & pour les dépenfes de leur agrégation qont ils
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ne font pas membres, ni par le fair, ni par le droit? Par
le fdit, pui[qu'ils ne Iom pas à porcée de jouir de cerce
ag~égarion, puiCque d'ail1eurs ils n'en [onr pas membres;
puiCqu'ils onr lell(s charges & leurs dépenfes à part. Par
le droir, plliCqu'ils ~'affill:ent jamais, & ne pourroienr pas
afijfter aux affemblées ~es Patrons Pêcheurs de MarCeille;
puifque les dépelIfes immenCes de ceere adminifl:ration, les
procès 'qu'el1e a foutenu, & qu'elle [outienr -encore, leur
fom en tour fens étrangers; puiCqu'ils n'en profitenr pas;
puifque contribuant, à leurs charges locales, il n'eft pas
julle qu'ils contribuent encore à celles de l'agrégario l1 de
Marfeille" qui le'ur efi:-à tous égdrds étrangere.
L'Arrêt -du Con(eil de 1728, ~ui homologue la délibé~
ration des Patrons Pécheurs de Mar(eil1e, portant impoCition de la demi part, -n'a pu porter l'effet de l'impôt
fur rous autres que -ceux fur lefquels le Corps l'avoit éta- Mi.. Comment le RQi l'auroit-il', voulu " fans appel1er les
Patrons de Caffis, fans les -entendre? Comment veut-oq
que .le Con(eil ait imaginé dans cette occalion de foumettre à l'impôt les Patrons Pêcheurs de Caffis, qui pêchent
,dans leurS, mers en pêchant dans celles de Marfeil1e-, &
qui n'oqn& ne peuvent avoir avec les Prud'hommes d'au;:
_
tre rapport 'que ,cèux :de la J ufl:ice ?
. On répondoit pour les Prud'hommes de' Marfeil1e , qu'il
n'ell pas poffible de ne point appercevoir la diJférence qu'il
y a enrre l'Arrêt du Conreil de 1728, & la Délibération
de 1721. -Çelle-ci ,pO'l'toic eKpreffémeht que chaque Patron
du Corps paieroir la demi-part; l'Arrêt y foumet ipdéfi_
nimént tOUS propriéraires de gros ou petits bateaux; foie
qu'il air regardé tOU5 ceUl( qui pêchoient dans les mers de
Màdèi11e -comme membres d'une même Société quant à
cet .objer, foit qu'il n'ai~ pas voulu laiffer fubli/1er une di[.,
férence de condition, qui ne permettoit plus aUx !Jns d~
fulltenir la concurrence des aurres, il n'en eft pas moins
vrai qu'il n'dl plus queftion dans l'Arrêt des Patrons dq
Corps 'des Pnid'hommes, & ~u'il affeé;le généralement tQQ~
.
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R'N :1 L' 1 • -
Patrons & propriétaires. de gros & petits bateaux. Si le'
Roi aVÇlit entendu que la :demi-part ne fût conGdérée què
com~e une {impIe in'ipoG:tion de Corps, il n'aurait pas
déclaré ex~rt:..ifément. que les contribuables feraienr contraints en la ma,oiere. accoutumée .pour -les autres impofirions.. Dans ~~ fyftême, elle éroit oaJurellement rangée
dans la claife des impo]itions ùu, Corps; e ·Ie, jO.llilIoit' par
celfl même des privilegesque les titres généraux donnent
aux impofirions du Corps des Pêcheurs de Ma'rf~ille; il
étoitinurile de les y appliquer expreifémeltr. D'lOS l'Arrêç
du Conreil du 28 Oél:obre 1729, il étoit'ludtion de don"
nér aux' Commiffiaires de la demi-part 1 l''lll.rorit~ qu'ont
les Prud'hommes eux-mêmes, ,de contraindrè les redevables
par faine des bateaux &. confifcation du poiifon; le Con/ feil la leur accorda; mais il n'elt pas poffible qu'il ait limité aux membres de la Communauté de Marfeille l'obligation de payer la demi-part, puifque pollérieuremenf à
cet ,Arrêt il y a fo.umis les Pêcheurs étrangers'vendant à
~arfeille ou en Provence la portée de leurs bateaux, &
gue, M. l'Intendant chargé. de l'exécution de ces divers
4,rr,êts, y a ob;igé tous les Forains qui pêchent dans les
mers d~ Marfeille, ou qui vî.enn,ent y. yendre leur 'poiifon"
& les y a obligés en exéçution ,- en conféquence ,des Arrêts
de 172.8 & 112.9. Si l'ipteQtjon d!J Confeil, lors de cerre
-d~rniere époque, avoit été qu'il n'y eût que les Pêcheurs
de Marfeille qui fuifent fournis à l'impofition de la demipart, jamais les Catalans, ni les Forains, n'y.1!uroient
été fOUillis, & ne l'auroient été en exécution de ce m'ême
Arrêt de 172.9, puifqu'ils ne font jama·is membres de la
çommunauté de MarfeiIle, lors même qu'ils viennent.y
vendre leur poiifon. Il faut donc conclure que lorfque l'Arrêt du ConCeil a ordonné aux membres de la Communauté
d'obéir aux Commiifaires de la demi-part, il a confidéré
tous les contribuables, .déja défignés dans celui de 1728,
comme compofant, ,quant à ce, un même corps; ou qu'au
moins le devoir de l'obéiifance a été direél:ement impofé
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~ùx membres de la' Oommunauté de Ma'rfeillé, parce que
les plaintes étoient direaement portées contr'eux.
,
Pour juger de la nature de l'J.. demi-:part..; d'après le
fyfiêmelldes Arrêts du C,!}pléil, il fle f~ut ~Ue ,cQPnoître
la qualité dans laquelle les Catalans" y fOi1~: condamhés ;
ce n'eQ poioc comme membres de la Communauté de Marfeille, ce n'efi point comme venant P'Jrtager à 1\1aff: ilIe e
prétendu bénéfice de l'agrégatiop, mais comm,e hé}~lIe/J..t
tant les mêmes mers. Cerre fréquentation dl: le [it~è-. de
la condamoation; cQmme elle rend jufliciable,.éllerr.end égale.(!l~nt contribuable; & puifque les ,PaJron9 de ,C'lffis1ne
peu'fept, exercer leurr art, que dans les men de JVlarfeille ,
il fapt qlJe, comme les Catalans, ils contribuent-.à ·l'impô'::
firion de la demi-part, puifqu'ils qnr comme eYf.>-J1!l:fltule
çualité qui repd contribuable. " JI
~ "'1" 'If', (_'rJUJ~l')
• Arrêt du 12 Juillet 171h, .au 'rapR0rt. de Ml;, le;l,Gôno;
feiller de Seillons, qui .calf~ l'Ordonnance dJ:~.Prud'h9m.~
mes de Marfeille comme incompétence , avec dépens. Ecri-;:
v·ant Mes. Gaffier & PaJc.alis. 1
'"
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On 11~ p~lIt prouv~r par témoins l~ pai~m~nt d'un~ fo.mm~ au~.
deJfous de 100 liv.. fait cl comp-t~ d'fl.n~ ;(Jbligation lécrit~.l1~~
.
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Ofeph.:
, de: la ville de Manofque, fait .un ·billet ~
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(
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Antoine
de la fomme de 413 liv. I l fols, payable
le 24 Août 1779. Sentence par défaut le 19 Oaobre fuivant,
au paiement. Appel au Lieutenant
qui condamne Jofeph
de Forcalquier. Jofeph
gema.nde la déduaion de 89 Jiv•
. . 1 fol5" gu'il dit avoir payées, & ·ofITe de. fournir la prenve
'~e ce pa'iement. Sentence qui le déboute, avec dépens.
f
Appel pardevant la Cour.
,
~n difoit pour Jofeph........ , qu'il devoit ~tre re~u à pro~j
�'u~
"1 ? " ~
N' A ·L: '.,
~:
,
:ver qu!~ tompre de fon ~l1et Il en 'aNOIt l'aye une pafrle~
L'Ordonnance de 1'667, arr. ''2, 'tir. des faits -fui gijJènl en
preuve,. por,ce verhablement -qu'il ne (~ra r~9u aucune preuve
par. témoins contré &. outre le 'Contenu aux aB:es, ni fur ce
qui" feroit allégué. àl,roir. éré 'dit avant, lors &' depuis les
aB:es ,.encorl! qu'il s'agît' d'une fomme t}u !Va1eur moindre de
"too !iV're's. Mai's.il eft facile de voir que la difpofition de cet"
article n'a abfolument aucune application au· fait dont"
s'agir,. J ')( ~)~
'r1
..
. ','
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J
-r·:9d 'péUcJ1(0utenir auJ!,contrai.,l! .qu'il n1ên: pas qüefiion' de
domi t -aw,finte.;aû· bille èbnfiitutif dè'la C1"C~ance, ni de
pr.oull'er n ~i( qùi. plÎl'lft! l'altérer. La preuve offerte tend'
plut~'dtJcGrl'obbrér le billet, j:>uifqu'il1réfultera de la preuvé
qùeJ .ce:bilwtI a .reçu de,] parr dw d'ébiteur une entièrë &'Hbt~
exécution par le paiement qu'il .;llfait departie·de la fomqJe;
enfo
qUè fe ~àie\lJ'i'é'nVétaiH vérifié, -il n?en peut rien réfultér qIJjC,feit)coime & J'otiie ':le' -contenu au billet ~ ni..quî
puiaè mettr::' la "preuve au cas' el!cluIif marqué par l'Ordon:',
nance. 'Peu importe que 10feph.........- s'en foit rapporté à fon.
créancier, & qu'il n'ait pas eu l'attention de faire noter au:
dPs_d .b:ille le.pllrement: deJa. fomme: reçue à compte. La
Loi 17, cod. de pa8is, nous apprend que le paB:e fait de
bonne foi fera entret' n', qUOIque ·non écrit, s'il y a d'ailleurs des preuves de la vérité du fait. Sur quoi Cujas obferve,
ex feriplurâ, paEi fubfiantia non corif'Ijlere. Lorfqu'un débi.
teu~41,la rliltuv,\l{e\foi de mécpnnoître. fgn obligation ve~ba]e,
ou lorfqu'il fe trouve un créancier alfez inique pour dénier
te pàiëment teçu ve.r.ba ~lPe t, il fl'e 'relte- plus..qu'à '·favoir. fi.
lé lléhiteur bu le 'créancie'r font au cas de reGourir à la preuve
par témoins, qui .étoit indéfinimeot permife par le déoit
Romain, & -qui eft refueinre pllr le <Iroit Francois•
. Les- Ovdot:lftances
q i ~nt' fix~\ la .reg-Ie <qu'on'
doit ,Cuivre
,.
•
,.'
,. •
r
pour1admetorre ourreJetrer 1a preuve 1par' (erhoins ~ ne l'onro
pwhibée qüe lorfqu'il eft qUdHon 'd'une fomme excédant'
100 livres. Telle eft la difpofition <le l'arr! H' de l'Ordon...
ftance de Moulins, renouveUéerpar l'art. ~.de cèlle de 1667,
"J
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D u 15 A 'L A YS D B PR.o 'V Il N C B.
2. T
ii-devant cité; mais cette preuve eft toujours permife, lorfque la fomme eft au-deffous de J 00 liHes. II n'y a à ceC'
égard qu'u!1e feule exception, qui ef!:, -lorfque la preuve!
'<ju'on voudroit faire _par témoins aboutiroit à changer la tc·neur d'un aél:e. Cette preuve dt alors défendue, quoiqu'il
s'agiffe d'une fomme moindre de 100 livres. L'on ne peut
pas dire', ici que Jofeph........ foit dans ce cas; parce q:H:',
comme on l'a déja dit., la preuve requife loin d'aller contre
& outre le contenu au billet portant établiffement de la derrè.,.
en démontre au contraire l'exécution. Cette preuve n'ef!: point
exclue par les Ordonnances, puifque le paiement fait à compte
ne va qu'à la fomme de 89 liv. II fols. D'ailleurs, s'agi!fant
de prouver un paiement, la preuve dertlandée ef!: encore plusadmiffible en faveur de la libération, lors fur-tout que le débiteur fou tient avoir payé de bonne foi, fans écrit, & (lIr la
foi & la parole que le créancier lui a donné d'en faire mention.
au dos du billet. Dans ce cas, la preuve par témoins doit
toujours être admife, comme l'obferve Boiffeau dans fon
Traité de la preuve par rémoins, part. 2, ch. II. Il ef!: vrai
que Danty, qui a commenté cet Auteur, obferve que cette
preuve feroit auffi périlleufe en matiere de paiemens qu'enmatiere de conventions; mais il reconnoit pourtant que cela
ne doit avoir lieu que lorfqu'il s'agit de prouver un paiement
qui ef!: au-delà de 100 livres, ainfi 'qu'il paroît par les différens Arrêts qu'il rapporte;. par ceux de Boniface, tom. l ,
liv. 8, tit. 27, ch. 3. La Cour en a encore rendu plufieurs
fur la même queHion; le premier, du 5 Août 1733, au rapport de Mr. de l'Ef!:ang, entre Touffainc Billet, de Brignole.s,
& Pierre Guillermy, qui réforma les deux Sentences, &
permit à Billet de vérifier par témoins d'avoir payé à Guiller.
my la fomme de 30 liv. de la main à la main; le fecond , du
25 Février 1734, au rapport de Mr. Conflans 'de Beynes,
en faveur de Stable, Perruquier, de la ville de Graffe , contre
Daver, Marchand de la mêm~ Ville, qui reçut la preuve par
témoins offerte par Stable d'avoir payé 39 liv. à Daver fur
pne fomme de 71 liv. contenue en une promeffe; le 'troi,
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fieme, du 13 Juin 1736, au rapport de Mr. de Gautier, qui
reçut Ant~ine Saulfe , Travailleur, au lieu de Meirargues,
à prouver par témoins d'avoir payé à Etienne Blanc S6 liv.
14 fols pour fix années d'arrérages d'une 'penfion établie par
contrat de 9 liv. 9 fols; le quatrieme, du S Juin 17B,.
qui admit Dauphin à prouver qu'il avoit remis à Colombe
Pin les 66 liv. qu'il avait -retirées pour elle, en vertu de fa
procul'ation; le cinquieme, du 9 Avril 17S6, par lequeL
Jofeph Decormis fut reçu à prouver le paiement de 96 liv.
par lui fait à compte d'un contrat de 300 livres j le fixieme"
du 23 Déc'embre 1779, jugea la même chofe en faveur de
Laurent Goiran, du lieu de Gignac, contre Therefe Goiran "
épou~ de Gheylan , Travailleur.
On répondait pour Antoine
, que d'après le Àroit
Romain & les Ordonnances au Royaume, on ne reçoit
point la preuve par témoins contre la preuve écrite: Contra_
fcriptum teJlùnonium non fèriptum teJlimonium fertur, dit la
Loi ~ , cod. de tdJihus. " Ne fera reçue aucune preuve par
" . t.émoins contre & QUtre le contenu aux aél:es, ni fur ce
,~. qui ferait allégué avoir été dit avant, lors ou depuis les
" aél;es; encore qu'il s'agît d'une fomme ou valeur moindre
" de cent livres." (Ordonnance de Moulins,. arr. S4, &
Ordonnance de 1667, tit. 20, arr. 2.)
~ Quoique la· faveur de la libération fait gJande, elle n'dt
pas .relIe, qu'elle doive faire palfer pardelfus cette regle, qui
a poyr 'principe la crainte de la corruption ou de l'erreur cres
témoins. Boiceau a été féduit par l'idée de la faveur de la
libération, quand il a propofé dans fan Traité de la p,euve
pa.r témoins, parr. 2, ch. 1 l , l'opinion, qu'on pouvoÏE prouvçr· par témoins le paiement d'une fomme portée par un
contrar. Son Glolfateut Dancy nous a:mis en garde contre
cette opinion & fan too.tif, en obfervant qq'elle ell contraire
à la maxime ,. contra fèriptum téflimonium.
Il n'ell: perfonne qui ne di{; dans le cas d'une obligation.
écrite, pourquoi le débiteur', dont le créanoier n'a pas fuivi
la foi, puifqu'il. en a exigé une obligation pair écrit, n'a pas
.
ufq
�DU
PAL AIS
D E
PRO VEN C E.
2. 17
ufé à fon raur de la même précaution lorfqu'il a payé, & n'a
pas rapporté quittance éc.rite au dos du billet, ou autrement? C'éroit à peu près dans les mêmes circonfiances que
Mr. le Prélident Duvair demanda à une Partie qui propofoit
la preuve par témoins, dans un cas où elle auroit pu prendre
un écrit: n'y avoit-il pas dans le lieu du papier & de l'encre?
( Dccormis, tom. 2., col. 988. )
Il eH fi vrai que, lorfque l'obligation ell: par écrit, le
paiement ne peut être prouvé que par écrit, que le droit
commun, le droit Romain même, d'ailleurs fi favorable à
la preuve par témoins, n'admerroit en la Loi 18, cod. de
teflibus, la preuve du paiement en tout ou en partie d'une
{omme donr il y avoit une obligation écrite, qu'autant que
la quirrance érait également écrite; & à défaut, qu'autant
qu'on s'érait afireinr à la formalité parriculiere d'appeller
cinq témoins au paiement, avec une efpece de formalité.
Cerre Loi étoit fondée fur deux motifs majeurs, qui one
égalemenr déterminé nos Ordonnances fur cette matiere;
l'un, efi la regle de droit, qui veut que tOute obligation ne
puiffe être diffoure que de la même maniere qu'elle a été
formée : Regula juris efl unum 'lllod'lue dilfolvi eodem
genere 'luo colligatum efl; l'aurre, eH la crainte des témoins
corrompus: Omnibus prœdicimus lit 'lui in fcriptisa fi debita
r,etulerint non faci/è audiantur, li dicant omnis debiti vel
partis folutionem. fine fcriptis fi feciffi, velintque l'i/es vel
foifitam corruptos tefles fuper hujufrnodi fo/utione prodllcere :
njfi tefles idonei & fummœ atque integrœ opinionis prœflo
fuerù/t fo/utione celehratâ hi'lue cum facramenti religione depofuerint fuh prœfintiâ fuâ debitum ejJè folutum.
D'après les précautions prifes par le droit Romain, faut-il
s'étonner que le droit Fran~ois, plus en gatde contre la
corruption des témoins & conrre la preuve teHimoniale , ait
exclu généralement & indéfiniment toute preuve par témoins, contre G' outre le contenu aux ac7es? Ce qui renferme le paiement, comme coure autre chofe contraire à
l'acre; parce qu'en effet il n'y a rien de plus conrraire à un
.Années l78: & l78:z..
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�:ù.8
Jou RNA L
titre d'obligation) que le paiement qui la dé.truit en tout ou
en partie. C'eU fe jouer des chofes & des mots, que de
dire que la. preuve par témoins du paiement, loin d'aller
contre & outre le contenu au billet portant établiffement
ete la dette, en démont,re au contraire l'execution, Il efi fenfible qu'une pareille preuve détruirait indireaement l'efficacité du. billet &'l'exifience de la dette, & que ce ferait un
moyen' facile d'éluder le texte exprès des Loix &: des Ordonnances ; au lieu de demander à faire preuve des faits &
des conventions contraires à l'aae, tous les débiteurs de
mau\1aife foi demanderaient à faire preu\'e du paiement. Au
lieu de corrompre les témoins pour dépofer que les Parties
ont dit ou fait telle chofe qui contrarie l'aae, on lèS corromproit pour dépofer que le débiteur a payé; & on n'en
parviendrait pas moins au méme but, qui ferait d'anéantir
en rout ou en panie une obligation écrite.
S'il exifie quelques Arréts qui ont admis la preuve par
témoins des paiemens des fommes contenues en des obligations écrites; ces Arréts ne font fondés, comme l'obferve
Danty, que-fur des circonfiances particulieres. Tels fi.nt
ceux rapportés par Boniface, tom. 1, liv. 8 , tit. 27', ch. 4;
& dans le Journal du Palais, rom. 2, pag. 364' Ce qu'il y a
de certain, c'efi qu'il n'exifie pas une Jurifprudence qui
difiingu.e, fi le paiement allégué excede 100 liv. ou noo ,poùr'
admettre la preuve par témoins au fecond cas, quoique
l'obligatioo fait par écrit, & pour la refufer au premier, celte
difiinaioo ferait diamétralement oppofée à la Loi & aux
Ordonnances. Il y a Iln Arrét exprès, rapporté dans le (econd
volume de Duperier, pag. 568, & par Duperier lui-méme ,
lett. T, n. 16; par Legrand, coutum, d, Troy'; & par
Danty.. Charondas " dans: lb notes fur l'article 54 de l'Ordonnance de Moulins '. rapporte des Arréts qui ont rejetté la
preuve par témoins d'un paiement inférieur à la fomme de
100 livres, parce que l'obligation écoit par écrit; & Me.
Julien, dans fes colleaions manufcrites, verb. probatio , pag.
2. , lett. B, dit, en parlant 'des paiemens , que ftriEtis probari
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PALAIS
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PkOVENCE.
&hent, fi fumma -e'Xc~dat ,fi o'hligatio fétiptis to'nrrdfla fit, ex
edic70 1667, tit. 2.0, arr. 2..
Arrêt du 13 Juillet 178 [, au rapport de Mr. le C<ln~
feiller d'Efpagnet, ui confifme la Sentepc€e ave-c dépenS:.
Ecrivant Mes. Aude & P-ellillor.
3
2' '93
' "Il..'"
au
ARRÊT
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Il
J'n'
pt! HW; Hl:) 'gq
XKJ,
S'lir une ac7ion reftifoire.
1
1
•
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1.
'
Ierre Bertrand filC délivrataire d~s impoûl'i'o?rs d'e la
Communauté de Salon aux anhées I76Jt & i76'S , fous
le €autionnement de Philippe LeIJet. BèFrran'd rîieui'u't eà
1766; fon hoirie fut prife par bétlé"fiee <tJ;'in'Veb!'àiré. Levét,
la veuve Giraud & David, tré'abders'-, pa·!fefem \lb- concordat le 6 Août 1767', ptJi'tallt de fairé là' 'véhté v610n1
.taire dé la bafl:rde & de-s ttbis maifons d\!'JIa (u~eemén,
efiimation préalablement faite. La véuve Giralld & .David
acquirent la bal1:rtte, & Levet acrqu.it I~s tt0i~' mltifoh~
Dans la .cuire Levet Ce croyant üé"ancie cle 'P'lus glran'des
fommes que celles fiipulées dans ,le cbaé'6fdar, p'/ir 'de
leures de refcifion envers cet" a6l:e. [
On difoit pour lui, 1°. qu'en foufcri\lànt le cbnèol'daf il
avoit erré en fait & en droit ,. &: que fan intér-êr ét-oit
confidérablement lélif. 2.°. Que la veliVe ·Giraud & David 5
li qui feuls ces a6l:es étaient avantagèuJc 1 lès 'fui avoie'nè
fait foufcrire, en abufant de [a fimplicité & de fà 'bonné
foi.
Sur Je premier moye-n il s'appuyo'ir fur la Loi 4, ·côcP.
de hœred. -vel ac1. v/fnd. qui, quoiqu'elle n'air été faite que
pour la ,vente des droits fucceffifs, trouve (ori applicatiOll
-dans la 1 caufe préfente. Qui , nondÙni arlUs di! qUI:Iiitita't~
hœreditatis, perfuadente emptore', quafi exiguam· quantitatem ,
<Ulm v~adidit) honœ jidei-judir;W .onwniri'1 -ut res tradJa't) vel,
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Arrêt du 13 Juillet 178 [, au rapport de Mr. le C<ln~
feiller d'Efpagnet, ui confifme la Sentepc€e ave-c dépenS:.
Ecrivant Mes. Aude & P-ellillor.
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Ierre Bertrand filC délivrataire d~s impoûl'i'o?rs d'e la
Communauté de Salon aux anhées I76Jt & i76'S , fous
le €autionnement de Philippe LeIJet. BèFrran'd rîieui'u't eà
1766; fon hoirie fut prife par bétlé"fiee <tJ;'in'Veb!'àiré. Levét,
la veuve Giraud & David, tré'abders'-, pa·!fefem \lb- concordat le 6 Août 1767', ptJi'tallt de fairé là' 'véhté v610n1
.taire dé la bafl:rde & de-s ttbis maifons d\!'JIa (u~eemén,
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Dans la .cuire Levet Ce croyant üé"ancie cle 'P'lus glran'des
fommes que celles fiipulées dans ,le cbaé'6fdar, p'/ir 'de
leures de refcifion envers cet" a6l:e. [
On difoit pour lui, 1°. qu'en foufcri\lànt le cbnèol'daf il
avoit erré en fait & en droit ,. &: que fan intér-êr ét-oit
confidérablement lélif. 2.°. Que la veliVe ·Giraud & David 5
li qui feuls ces a6l:es étaient avantagèuJc 1 lès 'fui avoie'nè
fait foufcrire, en abufant de [a fimplicité & de fà 'bonné
foi.
Sur Je premier moye-n il s'appuyo'ir fur la Loi 4, ·côcP.
de hœred. -vel ac1. v/fnd. qui, quoiqu'elle n'air été faite que
pour la ,vente des droits fucceffifs, trouve (ori applicatiOll
-dans la 1 caufe préfente. Qui , nondÙni arlUs di! qUI:Iiitita't~
hœreditatis, perfuadente emptore', quafi exiguam· quantitatem ,
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Jou R N A L
ac7iones mandet, non compel/itar. Trois moyens établis dans
cette Loi; le premier, que le vendeur ait été incertain
dans le tems de la vente de l'état & des forces de la
fucceffion, nondùm ccrlas; le fecond, qu'il ait été furpris
par le dol IX par les artifices de l'acquereur, perfuadente
emptore; le troifieme, qu'il [oufFre une léfion énorme, quafi
exiguam quantitatem. Il elt vrai que toute per[onne qui a
difpofé de fes droits en majorité & par un aéte authentique, eft en général peu favorable; mais quand les trois
conditions que la Loi réunit, concourent en fa faveur,
il mérite la proteétion que la Loi accorde à tous ceux qui
foulfrent une perre confidérable par le dol & par les artifices des perfonnes avec lefquelles ils traitent.
L'on découvre dans le concordat une double erreur.
erreur de fait, erreur de droit: l'une & l'autre ont toujours été regardées comme des moyens capables d'opérer
la refcifion d'un aéte. L'erreur de fait peut fervir de caufe
légitime pou~ obtenir des lettres de refcifion. (Argou,
dans fes inflitutions au droit François, tam. 2, ch. 14,
de riflit: in integ.) Lorfqu'un engagement n'a aucune cau[e,
~u lorfque la caufe pour laquelle il a été _contraété eft une
caufe fauffe, l'engagement eft nul. (L'Aureur du Traité de.s
9bligations, Rart. l , cp. l , §. 6. ) .
S'il eH un principe en Jurifprudence; s'il en eH un fondé
fur la raifon & [ur l'équité, c'eH fans doute celui qui admet à la reHitution en entier toure perfonne qui s'eH
obligée [ans avoir arrêté, ni même .examiné les comptes,
non yifis rabulis, non difPunais rationibus. (Aéte de notoriété de J!1M. les Gens du Roi du 7 Janvier 1738.)
Levet a-l'-il examiné les comptes avec la Communauté
de' Salon? A-t-il pu même les examiner? Les calculateurs
que la Communauté de Salon avoit nommé, ignorent même
~ncore la fomme à laquelle ils fe montent; Levet était
créancier hypothécaire, tandis que la veuve Giraud & Dayid n'étaient que créanciers chirographaires; il' était de
plus créancier antérieur. Creditoris arbitrio, dit la LQi 8,
220
..
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DU
PALAU
DE
PROVBNCIl;
22t
if. de pigno diJlraa., permittitur ex pignori!ius fiDi oMigatis,
quiDus velit diJlrac7is, ad fùum commodum pervenire. Quel
efl: l'effet des hypotheques (Ul" les biens qui en (ont (u(ceptibles.? La Loi qui les a établies, a (ans doute voulu que
toute préférence fût accordée à celui qui a la plus ancienne,
c!Lm de pignore utraque pars colltendit, prœvalet jure qui
prœvenit tempore. Delà l'Ordonnance du Commerce, tit. 1 r ,
arr. 8, dit: fans que ceux qui auront privilege ou hypotheque
puiJJent être tenus d'entrer en aucune compqJition, remife ou
attermoyement, li cauft des fommes pour lefquelles ils auront privilege ou hypotheque.; la ~axime efl: attefl:ée par
MM. les Gens Roi dans un aél:e de notoriété du 4 Janvier
r698.
Il ne (auroit y avoir aucun concpurs, aucune conrribu·tion, aucun attermoiement entre un créancier hypothécaire antérieur & un créancier chirographaire, pui(qu'il ne
'peut y en avoir entre ceux qui {ont cOfllme lui, créanCIers hypothécaires; s'il y ~n a qui 'le précedent, s'il y
'en a qui le (uivent dans l'ordre des hypotheques , comme
il ne peut contefl:er aux premiers aucune préférence, il
ne peut de même rien [ouffrir de ceux qui le [uivent;
chacun efl: confidéré dans [on rang comme s'il était [eul
créancier; cette préférence abfolue ne [e borne pas à le
faire payer le premier ; .elle lui donne en même-rems le
droit de [e payer [ur les meilleurs effets.
D'après ces principes, de quel droit la veuve Giraud &
David ont-ils pu lier les mains à Levét? De quel draie
ont-ils pu lui donner les effets les plus délabrés de la [ucçeffion de Bertrand, eux dont la créance n'était point conftatée ? Il efl: de l'équité que per[onne ne s'enrichiffe aux
dépens d'autrui : id quod noJlrum eJl, fine faao noJlro ad
alterum transfe"i non po/if!. L. I l , ff: de reg. jur. fac?i
autem nomine vel conftnfus, vel etiam delic7um intelligitur.
Nulle obligation [ans caufe : hœc conditio ex Dono & a!quo
ùztroduaa, quod alterius per alterum fine caufâ deprehenditur , revocare confuevit. L. 66)' ff. de condia. indeb. Cette
�2.22.
J a tr RNA L
répétition fondée fur la jullice & l'équité J fait ordinairement rentrer en notre pouvoir ce qu'un autre nous avait
pris fans caufe : fi ah initio non conflitit oh/igatio, 'll/ia
fine cal/jà promifJùm ~fl ante fO/utionem, ipfa obligatio pofl
fo-/utionem, 'l"antitas Jo/uca condicetur. L. l , ff. tk cond.
fine caujà. Si dans k principe il n'y a point eu d'obligatian, parce qu'on a contraaé [ans caufe av.ant de payer,
malgré l'obligation fuivie du paiement, on peut répétt:r cé
qu'on a compté. Hinc condic7io indehiti , kinc condic1io fine
caujà. C'eU la même chofe qu'une obligation ait été con.traaée fans caufe ou injunemenr, ou même fans que la
caufe Is'en foit enfuivie : conflat id demùm condici pojJë a/icui, 'luod vel non ex juJla caujà ad eum pervenit l'el redit
ad non juJlam callfam. De toutes les cOlufes qui font de
droit [ans valeur, ou qui ,n'ont point eu d'e1ftt, le paiement s'en étant fuivi par erreur, on pourra le redemander: juris ignorantia., fuum petentihus non nocet, L. 7, ff.
de juris & jaa. ignor.
Ce principe ayant pour bafe le droit narurel, ou Levet favoit qu'il était créancier hypothécaire antérieur, ou ill'ignorait: s'il le favoit; il éroit dans une erreur de droit qui ne peut
lui nuire·; s'il ne le favoir pas,. il érait dans une ignorance de
fait qui a toujours été regardée comme un moyen viaorieux
pour faire refcinder un contrat quel qu'il fait. De plus,
il ignoroit le montant de [es obligations envers la Communauté de Salon, à caufe de fan cautionnement pour les
.railles. Ainli double erreur: erreur de fait, puifqu'il ignorait
quelles fommes étoient encore dues à la Communauté,
puirqu'il ne le fait pas encore précifément : erreur de droit,
puifqu'il ignorait quel moit il avait [ur l'hérédité de BertraQd·.
D'ailleurs le concordat ne peut -étre envifagé que comme
un parrage, & fous ce point de vue fujet à révocation,
lorfqu'un des co-parrageans fe trouve léfé : telle eH la difpolit ion de la Loi majorihus, cod. commun. utriuf9ue judic.
~ Morn~, fur -ceue _Loi.. Tjraq,ueau, ,dans [0.11 T caité J,
�2.23
jure primogeniturœ, qu. 17, n. 95 , cS' feq. Imbert, en fon
Enchiridion fur les mots partage & divifion.)
.
. La Loi 2. , cod. de refcind. vendit. veut que celui qui il
vendu, fair reHirué comme majeur, s'il a foufferr dans la
vente une léfion au delà de la moitié du jufie prix. Pour
que la léGon d'outre moirié du jufie prix puiffe êrre le fondement d'une refiirution en entier entre majeurs, il faut
qu'elle foit certaine, & qu'on ne la faffe pas dépendre d'un
événement incertain. (Faber, déf. 9 & I I , aux notes cod.
de refcind. vend. Catelan, rom. 2, pag. 381. Breronnier'
tom. 2., pag. 945. Loix Civiles, feé!:. 6., arr. 9 des conventions.) On n'exige pas dans un aB:e de partage la même
léGan qui efi néceffaire pour faire refcinder un contrat de
vente. (Dumoulin, contraa. ufur. quo [4, n. 182. Brodeau,
filr louet, verb. hértdité & vente d'icelle, Comm. 7 & 8.
D'Argentré, Coutume de Bretagne, arr. 73, not. 4" n. 3.
Lebrun, des fùccejJions. Boniface, rom. 2, liv. l , tit. 13,
ch. 3. Dece, conf. S51. Henris, [am. 2, liv. 4, quo 173.
Papon, en fes Arrêts, li\'. 1 S, tit. 7, arr. 6.)
Or, fuivant le compte produit par Levet, la léfion dont
il fe plaint efi de plus de la moirié. Levet ajouroit, que
fi le moyen d'ignorance & d'erreur, fi celui de téfion énormiffime n'éraient pas capables d'opérer la refcifion d'un
concordat, le dol perfonnel efi une reffource contre les
tranfaB:ions même.
Par dol, on entend raute forte de fineffe, de tromperie ou de fraude concerrée pour furprendre & pour tromper un autre. Dolus malus ex propojito , efl omnis calliditas, fallacia , machinatio, ad circumveniendum, fallendum ,
decipiendum alterum adhihitâ. On a demandé, fi, quand
Je dol avait été le motif qui avait donné lieu au contrat,
ce contrat était nul de plein droit, ou feulement fujet à
r~lcifion. Perefius, cod. de dolo malo. Colombet ParaIt,
if. ead. tit. Dumoulin, contraa. ufur. quo 44, cap. 38,
décident que fi c'eH un contrat de bonne foi; il efl:
nul de plein droit. Ees DoB:eurs ajoutent même, que ta
DU
PALAIS
DB
PR:OVllNCE.
-
�'2.24.
Jou RNA t
qualité des perfonnes el! fort à confidérer Ita Argou, t. 2.,
ch. 14, des reflùutions en entier.
La fraude détl uit & annulle le contrat de bonne foi;
parce que la fraude el! tellemenr odieufe, qu'elle ne peut
porter du profit à celui qui la commer. (Henris, au mot
cejJions de droùs fuccejJifs, quo 3. D'Antoine, regles du
droù, reg!. 16. Damy fur Boiceau, chap. 7, n. 4 & fuiv.
Louet & Brodeau, letr. H. art. 2,!-, & leu. R. art. 2. 1 &
4')' Cha1fanée, Coutume de Bourgogne, [eét. 4, §. 2.1 in
verb. ayant fouflrait & recelé, n. 7. Coquille, quo 119. Boniface, tom. ." liv.
rir. 2.4, ch. 4, n. 2..)
Or, conriuuoit Levet, le dol éclate ici de toute part;
la fraude &l'infidéliré regnent dans le concordat pa1fé par
,les fieurs David avec Levet; tous les effets cédés à ce
dernier font exagérés; routes les dettes aétives font ou' chimériques ou enflées; ces droits dont on fait un fi porn-peux étalage dans le tranfpon, ne font réellement que des
vapeurs, & le tranfport eH fait fans garantie pour le
tiers, puifque les fieurs David ne fe chargent de bonifier
que les deux tiers des dettes aétives qu'on cede; en forte
que le ceffionnaire n'a pour ce tiers aucun recours, ni du
côté des débiteurs qu'on lui cede, ni du côté de ceux qui
font la ceffion, ni du côté des créanciers avec lefquels il
fe lie.
On répondoit pour la veuve Giraud & David, que quand
Levet avoit confenri aux concordars, quand il s'éroir obligé
de [e contenter des effets de l'hoirie qui lui ont été départis, bien~loin qu'il ftît dans l'idée que la valeur de ces
effets étoit à-peu-près égale à la fomme dont il pourroit
être créancier de l'hoirie du (eu fieur Bertrand, il croyoit
que la fomme qu'il feroit obligé de payer pour le fieur
Bertrand, étoit infiniment plus confidérable que ne l'dl:
celle donr par l'événement il s'el! trouvé. débiteur envers
la Communauté. La preuve de ce fait el!: dans la demande
·en rangement que. Levet donna dans l'inl!ance de bénéfice d'inventaire, avant que l'on fongeât à faire les concordats•.
1,
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PALAIS
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PROVENCE.
22)
cordats. L'ignorance dans laquelle il éroit, n'étoir donc,
pas telle qù'il pui/fe en exciper, pour dire qu'il s'eft
trompé lorfqu'il a foufcrir les concordats; .l'événement ,
bien-loin de lui porter préjudice, lui a éré avantageux, puifque la perre qu'il e/fuyera eft infiniment moindre que celle
à laquelle il croyait devoir s'artendre. Quan.d il a foufcrit
les concordars, il l'a·fair volontairement pour fan plus granq
avantage ~ il ~ fçu ce qu'il faifoir; on lui a donné plus qu'ilne pouvait eXIger..
•
II n'en pas roujours vrai que l'erreur de fait fait· .une
ju!l:e caufe de refcifion; rel eft le cas où les· de~x .Parties
ont paél:ifé' fur un fait incertain; elles pnt éré· l'une _&
l'aurre 1 dans la bonne foi; alors, comme 1?o!)ferve) Gode
froy furia Loi 19, cod. de tranfac7ionihus, le contrat
e!l: hors de roure arteinte, inter ignorantes tranfac7io inita
teneF; tel en encore, ainfi que,l'a[teHe Domat dans fes
Loix Civiles, part. l , liv. l , tir. 18, feél:. l , n. 8 , le
cas où l'erreur de fait n'a pa·s éré la feule caufe de la conventIOn.
Or ici, fi Levet ne favoit pas & ne po.uvoit pas favoir,
ni de quelle fomme il ferait créancier de l'hoirie du fieur
Bertrand, ni quelles étaient les facultés de cerre hoirie,
& conféquemment quelle ferait la fomme dont il ferait
en perte au moyen des accords qu'il a foufcrit, le~ fieurs
veuve David & Giraud n'en favoient pas plus, que lui. D'ailleurs où e!l: la preuve qu'en paél:ifant comme il l'a fait,
il ait ignoré fan droit? II n'en rapporte aucune; il n'a pour
lui fur .ce point' que fa feule a/fertion, & encore e!l:-elle
démentie par l'évidence.
II e!l: confiant. en droit, que chacun peut r,enoncer 11fes privileges; que quand 'on y a une fois renoncé, il n'ell:,
plus pofIible d'y revenir, parce que de routes les. Loix il
n'en en pas de plus inviolables que celles que l'on fe donne
à foi-même. La Loi 29, ff. de paais, décide non-f~ule
ment que quand quelqu'un a renoncé à un droit qiJ'il avait ,.
fa renonciation en irrévocable, elle porte encore, que fi,
Années t78t & '7S:?,
Ff
�~2.6
"
Jou
R If A L
celui qui eO: dans ce cas veut revenir de ce qu'il lt
fait, les Juges ne pourront avoir aucun égard à fa réclamation , 11 peine d'en répondre perfonnellement.
Le fy!lême de Levet fur ce point e!l donc infoutenable fous quelque rapport qu'il veuille le faire envifager.
Eut-il renoncé à l'exercice d'une partie de fes droits en
faveur des neurs veuve Giraud & David? Eut-il fait à ceuxci quelque facrifice en conlidération de ce que l'arrangement amiable de la difcuffion de BertrAlDd était en quelque
maniere leur ouvrage? Cette renonciation n'en [eroit ni
moins légitime, ni moins irrévocable.
Les lieurs veuve Giraud & David produifoient enfuite
les pieces jIJfiificatives' de chaque anicle de lelJr créance,
ce qIJi les difpenfoit de combattre les autorités citées
par Levet; mais ils llJi oppofoient diverfes fins de nonrecevoir: d'un côté, difoient-ils, les concordats que Levet
attaque ne font qIJ'une fuite, une dépendance, un accef..
foire de celui paffé avec la DlIe. Bertrand; or, ce dernier n'étant point allaqué, Levet ne peut pas fe faire ref'rituer envers les autres; il recueille'rair fans cela les avanrages de l'arrangement confenti par les Panies, fans remplir les obligations en conlidération defquelles ces avanta'ges lùi ont été faits. D'autre part, enfu.ite des concordats
qu'il attaque, Levet a reçu de l'hoirie de Bertrand les
trois maifons qui lui ont été iofolutondonnées; on lui a
cédé encore pour 3007 liv. de delles; on l'a enfin chargé,
fous une forte remife de cinq pour cent, de l'exaétion
des renes des impofieions dues à Bemand; il a vendu &
dégradé les maifons, exigé & diffipé le mont'ant des det-'
tes; & en demandant à être reO:itué, il demeure nanti de
ce qu'il a en mai ll ; iJ ne s'en deffailit pas réellement, if
n'offre' pas même de le faire; la veuve Giraud & David
ont payé plus de 300D liv. aux créanciers qui fe font préfentés après les concordats qu'ils, ont paffés; ils devroient
donc avant tout être rembourfés:
Arrêt du 14' Jumeu 78 r, au rappon de Mr. le Confeiller
�D U
PAL AIS
D!:
PRO V Il N C I!.
'J.'J.7
de Thorame pere, qui déboute Levet de fes lettres de
Iefcifion avec dépens. Ecrivant Mes. Laget & Jaubert.
ARR Ê T
X'X 1 J.
L'ufufruit légué fur un legs tenant lieu de légitime, ne pouvant avoir lieu jufilues au concurrent de celte même légitime, doit - il être remplacé fu, les autres hiens de
l'hoirie?
Après la mort de celui fur la légitime de qui port<>Ït fufufruit retranché, ce même ufufruit peut-il revivre fur l'entier
legs?
S
Ieur Pierre - Simon Gilly , Négociant de la ville de
Marfeille, fait fon tel!:ament le 9 Février 1777; il
legue à l'enfant dont la Dame Laplace, fon époufe, fe
trouvoit enceinte, la fomme de 300000 liv. pour touS
droits d'inHitution ) légitime) fupplément d'icelle, portion
virjle fur toutes donations & autres, duquel legat de 300000
liv. le tel!:ateur legue à fon époufe les fruits & ufufruits
fa vie durant, à la charge de loger, nourrir, entretenir
& éduquer le pol!:hume fuivant fon état; voulant' que fi fon
enfant el!: une fiUe, il lui foit compté lors de fon mari'age,
la fomme de 1 soooo liv. pour fa dot, de laquelle fomme
l'ufu&uit en faveur de fa mere finira; & fi c'el!: un gar'ion il lui foit compté à l'âge de vingt-cinq ans pareille
fomme de 1 soooo li\'. dont l'ufufruit finira pareillement;
& venant l'enfant à mourir en pupillarité, le tel!:ateur lui
fubl!:itue les DUes. Paillés & Vague, pour partager par égaIes parts & porrions, dès que l'lifufruit fera fini. Le tefrateur -in/htue la Dame Eydin fa mere fon héritiere univerfelle, après avoir fait d'autres legs aux Diles. Vague &
Paillés.
.
Le lieur Simon Gilly mourut) & la Dame fa mere vou,
JI f :z.
..
•
�22.8
Jou RNA L
Jant faire détraire fa quarte falcidie, prir J'héritage par
bénéfi.ce d'inventaire, & fe fit ranger pour (a quarte, &
les légataires pour leurs legs, fauf les retranchemens. La
veuve Gilly demanda & obtint, par, Sentence du 2.3 Mars
'1779, le remplacement de l'ufufruit que la légitime de fon
fils lui faifoit perdre; les lég;'taires appellerent de ce Jugement, & pendant l'infl:ance le fils de la veuve Gilly
mourut.
Celle-ci fe pourvut le I I Décembre 1779' & demanda
contr~ les Dlles. Vague & Pilillés, à être ilutorifée à jouir
de l'ufufruit des 300000 livres leguées à fon fils; elles
préfenterent de leur chef une' Requête incidente, par la...
quelle elles deman.derent la défemparation nune pra nu.ne
de la légitime de l'enfant pûpille, & des intérêts courus
pendant fa vie. Le Lieutenant, par fa Sentence du 15
Septembr~ 1':780, en entérinant les fins de la Requête
priJ:,lcipale de la Dame Gilly, débouta les Dlles. Vague &
Paillés de leur Requête incidente. Les Dlles. V ilgue &
Paillés en appellerent pardevant la' Cour; les. deux, ioitances
furent jointes.
'
On difoit pour les appellantes, qu'il s'agilfoit de favoir,.
1°: ij. la Dame Laplace ayant une fois demandé comme
tutrice, de fon fils, que fa légitime fût diftraire filt le legs
de 300000 livres, avoit pu demander enfllice' perfonnelle~ent qu'on remplaçât dans [on legs d'ufufruit c~ que la détracrion de la légitime en avoit di(hait, ou fi la légitime n'étant
qu'une charge du legs, l'ufufruit de la Dame Laplace avoit été
diminué d'i/utant, fans qu'jl lui. compétàt aucune forre ,de
recours fu\, les ,autres biens, du tell\lteur" & à plus_ force
raifon fur ,les legs formels que le tellâteur avoit, fait aux
autres légataires, ce ql!i aboutit à décider fi, un legs de
préfomption' p,eut acquérir quelque réalité aux dépens des
legs écrits au profit ,des autres légataires., 2.°. Si depuis. le
décès de: Gillyr.fils, la Dal}1e_,X,aplaçe.avpjt e.ll,!e ,droit de
jouir de la légitime donr elle ne pouvoit pas jouir pendant.la
vie de [on enfant.
r
Il
.,,,
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•
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE:
-
22:9
. Fallut-il faire le remplacement demandé, obfervorent les
appellantes fur la premiere queHion? La Sentence ne ferait pas .moins injune, parce que ce remplacement fur les
autres legs, atrendu l'infuflifance de l'hoirie, n'aurait jamais
dû être' ordonné jufqu~s au concurrent de 100000 .écus.
Les legs étant diminués pour payer ces 100000 écus, il.
falloir au moins que le legs de 300000 IiI'. qu'il falloir paye~
fur les autres, fouffrît en proportion la rédufrion que les '!utres
eiIilyoient pour acquitter celui-ci.. D'ailleurs il n'el!: dû aucun remplacement. De deux chofes l'une: ou le legs d'ufufruit porte, ou il ne porte pas fur la légirime; s'il 1':
porte, l'ufufruitier doit jouir de la légitime comme il jouit
du furplus; s'il n'y porte pas, l'ufufruitier ne peut danc pas
le prétendre. Mais dire que le legs d'ufufruit ne comprend
pas la légirime, de maniere 'que l'enfant fait inhibé. d'en.
jouir, & qu'il la comprend à l'effet que la,légitime aé-'
traite au profit du légitimaire, le légataire s'en 'ihdemnife
fur les autreS biens, .c'eH dire tout ,.à la' fois que j la légi~
rime elt & n'en pas comprife. dans le legs. "Ainli la Dame
Laplace eut été plus conféquente de demander à jouir de
la légitime de fan fils, que d'c:n demander le, .remplace., l'
, ,• u
nlent.
lit
t.J
,
rr r
~
. . Quelque cerrain ,qu'il fpit que ,Ja .légitimé ~e :iieçoit nec
onus, nec gr.avameIJ, jl. eil: cependant libre au tefiateur ,qui
donne à fan fils plus que fa légitime, ,de grever cette légitime d'uUlfruit, fauf au légitimaire d'accepter ou de répudier le legs. O~ ~exige'la difpofition formelle,.ft velle quod
ufufruc7us :tncludeFet'i'etiam legitimam~1 comme difent Barri,
liv. 16, tit. la. Surdus, de. alimeritis ,. tit:)2, q:q. 1'), n.
187. Merlinus, .de legitimâ.. liv. 4, tit. 2., quo 7" n; 3.
Ici n'y ayant aucune difpo]ition formelle, .& la légitime
n'étant pas col'tJprife, de 'ave\,! de la Dam'e Laplace, dans
fan legs, qu'a-t-elle.à pr.éJendre .!ioon ,l'ufufruî.t du legs fair
à l'enfant, détraé):ioq, f<lire de la légitiine.? ,E~ dès-~ors
.quelle en l<l; bJlfe. du. re.tnpl~llme(l r? Elle .n'a qiJe JàJfqfrtÜ,t
du legs;.li [op urufru~t pe oomp're,qd pas la légiti.me, eUll
L,
',.1,
,
'.'
�2.30'
Jou RNA L
ne peut dope pas mieux la prétendre vis-à-vis de l'héritier
que vis-à-vis du légataire. Il n'y a donc paine de remplacement à faire. Le teftateur n'a légué que l'ufufruit du
legs' de 300000 liv. fait à fan fils; or, l'ufufruit du legs de
300000 livres n'eft pas l'ufilfruit de 300000 liv. Le teftateur
a dit que le legs tiendrait lieu à l'enfant de légitime & de
toute prétention quelconque; fi la Dame Laplace n'a l'ufufruit que d'un legs tenant lieu de légitime, l'ufufruit ne peut
fubfifter que pour ce qui n'eft pas légitime; il eft cenie
non. écrit pour le furplus; ou fi l'on veut, il ne fubfifte.
que pour ce qui excede la légitime.
Le remplacement demandé n'a donc aucune bafe: Ne
fallut-il pas prélever la légitime fur le legs, ç'aurait été
la légitime eUe-méme, & non le remplacemenr, que la Darne
Laplace aurait dû prétendre. Il eft clair que le teftateur n'a
voulu deftiner à Jan fils & à fan époufe que la fomme de
300000 liv.; e'eŒ pour cela qu'il veut que legs de 300000
li\'. comprenne la légitime & tout droit généralement quelconque, & qu'au lieu de faire un legs particulier & indépendant à la' Darne' Laplace, il ne lui fait qu'un legs acceffoire compris dans la. même periode, ou pour mieux dire
il divife le même le~.s en fonds & ~n. fr~i[s; il affig.ne les
fonds à 'Hun, les. frùlts à l'autre; mais Il ne veut JamalS
qu'à raifon' de ces deux difpofitions on'prenne plus de 100000
écus fUF fa fucceffion.
. QU'and un teHateur legùe un fon.:!s qui ne lui appartient
pas, è'eft' alorsHe cas d'examiner fi le legs de la chofe
d'autrùi' eft ou. n~eftl pas valable; mais quand le teftateur
legue quelque'c1îofe-à fon héritier, & qu'il l'en récompenfe
d'ailleurs par le béôéfièe de l'inllitution, ou quelque chofe
appartenant au légataire, done il eft cependant indemnifé
par fQn Ikgs, alors le legs eft bon dans tous les cas, &.
le lég,ltaire n'a que le choix 'cu de répudier le legs, ou de
le l'rendré- avéc rfa charge\ En le recevant il n'a aucune indemnité ni, aut:ul'l reIÎJplae::etnent l à prétendre; 1 c'eft aina
que le dédde' Gralfu~, §. hiereditas, qU.:'I n. 7, & Ricard, .
1-,
�PAL A YS D E P Ii 0 V Il NeE.
~ 3t
pàrt. 3, ch. 3, feél:. 3, dilt. 3, n. 292. , & fi valet ii!g"tum.
Il n'y a donc ici aucun remplacement à faire', parce qu'il ef1
ridicule de remplacer ce qui ne vaut rien.
La Loi regarde comme non éçrite la charge impofée à la
légitime, parce qu'elle veut qu'un legs comprenant la légitime, ne foit cenfé fubGfier que pour ce qui exoede la légitime: eonditio, vel di/atio , vel aUa difpoJltio moram vel quodeumque onus introdueens tollatur. (Novelle 18, de l'authen..,
tique, noviffimè , ch. 3 ; ) la Loi fcimus & la Loi quoniam in
priorihus, cod. de ineiffie. ttftam.; Perezius fur ce tit. n. 4- 1 ;
Ricard, des donations, part. 3, ch. 8, n. 112.8 ; Duperier;
liv. l , quefi. 2. 1 ; Decormis, tom. 2, col. 347; Debezieux;
pag. 470 ; M. de Montvallon, dans fan Traité des fuccefiions ;
tit. l , pag. 427, & Me. Julien, dans fon Code, verb. legi.,
tima, pag. 7 , litt. C, D, E, foutiennent que legitima nO.fIeomprehenditur in ufufruau ut eonJlat ex ufu, onus expungitur
ah ipfd lege. Ce qui revient toujours à ce mot, que la difpo':
{hion efi cenfée non écrite.
1
Sur la feconde quell'ion, les appellantes' obfervoient que
la Sentence de rangement ayant adj~g.é le repmlacement.
à la Darne Laplace, & la légitime à l'enfant, il n'y a plus
qu'une feule chofe à faire; examiner au bénéfice de l'appel"
fi le remplacement a été bien ou mal ordonné, & regarder
la légitim,e comme irrévocablement' fixée en fonds & en fr,uitS'
filr la tête de l'enfant.
Dè's qu'il n'y a point d'appel de ce chef de la Sentence ~
que faut-il conclure? Que l'enfant devoit jouir de fa légitime;
que fes héritiers doivent en jouir comme lui, & que la- .
Dame Laplace n'étant pas feulement nommée dans la fubltitut ion pupillaire, n'a. ahfolumenD rien à prétendre fur cette
légitime.
L'ufufruir de l'enfant n'a pas changé de nature par l'événement de fa mort. Or, fi l'ufufruit de la mere ne faifoio
aUGun obfiacIë à fa joui/fance', elle ne peut pas non plu.s faire
oblta'cle à Ja, joui/fance de fes hériders, c'efi-à-8ire, de
ceux qui font à [es droitS'. Enfin, la légitime de l'enfant Jl'é~
D U
�2.32.
Jou
RNA L
tant pas cen[ée faire partie du legs d'u[ufruit, ou ce legs ne
fublillant que pour l'excédant de la légitime; comment
peut-il en arriver que, [ans un nouveau legs qui faffe rentrer
la mere dans la jouiffance de cette même légitime, elle pui1Te
en jouir? Il faudroit donc dire que l'u[ufruit de !a légitime,
que la" Loi répute non écrit, ou ne faire pas partie de l'ufufruit, en fait cependant ou n'en fait plis partie, [uivant que
l'enfant vit ou que l'enfant meurt, c'ell-à-t1ire, que la même
di[pofition que la Loi a frappée d'anathème, & qu'elle a jugée
non écrire quand l'enfant vivoit,fortira de l'a néantiffeme nt après
fa mort. Comme fi le fort & les difpofitions d'un tellament
n'éroient pas" irrévocablement fixées à l'inllanc même du décès du tellateur, & fi leur exif!:ence pouyoit être [ubordonnée
aux événemens. '
On répondoit pour la veuve Gilly, qu'il ef!: "conf!:ant que
fon mari a voulu qu'eUe jouît de l'ufufruit des 300000 liv.
léguées à [on fils; & cet ufufruit [e trouvant prefque enriérement détruit par l'immunité attachée à la légitime de l'enfant ; la' ',ieuve Gilly a d(l~en obtenir le remplacement filr les
autres biens'de la [ucceffion', ne pereat !egatum. Le fieur Gilly,
en léguant llu[ufruit de la légitime dè [on enfant, a légué ce
qui ne, lui ap.partenoit pas, & fa veuve fe trouve dans la difpofitio,n de la Loi, qui veut que le legs de la cho[e d'autrui
vaille, étânt' fait uxOri ve!'Proximœ perfonœ.
Quelle ef!: ici la légataire qui réclame? C'ell l'épou[e du'
tef!:areur. Un'e" ferillue qui a livré fa jeuneffe, [on état, les
affetl:ions de [on cœur, les momèns les plus précieux de fa
vie à un époux inquiet & valétudinaire. C'ell une femme qui
n'a obtenu, que par ce qu'eUe a mérité; qui a pJrtagé avec
autant de tend-reffe que de conf!:ance, le fort de celui auqud
eUe étoit attachée par le lien du mariage. C'ef!: un époux
julle, 'lors même qu'il ell prodigue. C'ef!: un époux qui répand [es bienfaits [ur route [a famille, au préjudice même
de [on fils unique, & qui ne réferve à la compagne de [es
inquiétudes qu'une aifance arrachée à la durée de fa vie; qui
pifper[e aux autres la propriété de {es biens, & qui n'affure
à
�D U
PAL AIS
D E
PRO VEN C n.
2.33
à celle-ci qu'un ufufruir. C'ef!: un époux qui farisfair aux loix
de la décence & de l'honneur, & qui croit que celle à qui il
ef!: redevable de tout, doit, après fa mon, jouir d'une opul~nce à peu près égale à celle dont elle jouilfoit pendant fa
vIe.
Les DlIes. Paillés & Vague, qui plaident avec tant d'<rcharnement contre la veuve du teflareur, n'étoient fes alliées
qu'en degré très-éloigné. Elles jouilfent en propriété du legs
de 160000 livres, fauf les rerranchemens de la falcidie.
Elles ont encore avec les fieurs Eydin la propriété du legs de
300000 livres, dont elles coriteflent aujourd'hui l'uCufruir:
c'ef!: cerre feule propriété qui met obf!:acle à cerre jouilfann;.
Or, en élaguant de la caufe toutes les vaines fubtilités de
legs démonltratif ou limitatif, de charge inhérente au legs,
l'on reconnoît que le fieur Gilly a légué à fa veuve un ufufruit
de ce qui appartient à fon enfant.
D'après ce point de vue, qu'a pu & dil prérendre la veuve
Gilly? Cum alienam rem, dit la Loi 10, cod. de legato quis
reliquerit ,Jiquidem jèie'rzs, tàm ex legato quàm exfideicommifJo,
ah eo qui legatum feu fideicommiJ/imz meruit, peti potefl. Quod
Ji Juam effi putavit, non aliter valet reliélum, nifi proximœ
perfonœ l'el uxori , vel alii tali perfonœ datum Jit cui légat/lrus
e.ffèt, G' fi jèiJJet rem alienam effi. Il dl: décidé par 'cerre Loi
que le legs de la choCe (j'autrui ef!: valable, fi le teflareur le
favoit, Jiquidem jèiens, & qu'il l'eH: également dans le cas
contraire, fi le legs ef!: fait à un proche parent, à l'époufe,
ou à toute autre perfonne à laquelle le tef!:ateur n'auroit pas
manqué de léguer la chofe d'autrui, quand bien même il
l'auroit fçu. C'ef!: auffi la décifion de Domat dans fes Loix
Civiles, liv. 3, tir. 2., fea. 3 , n. 6; Furgole, des tef!:amens,
tom. 2., fea. l , n. SI; Duperier, tom. 2, liv. 2., quo 9;
Decormis, tom. 2, col. 662; Julien, cod. liv. 3, tit. S,
ch. l , pag. 4, lett. A.; M. de Montvallon, Traité des fucceffions , tom. l, ch. 6, arr. 10, pag. 608; Henrys & Brelonnier, tom. l , liv. S , quo 43.
'
Ici l'exécution pleine & entiere des. volontés du tefl:ateur
Annùs '781 (( '78~.
Gg
-
..
�234
JOURN .... L
devenoit impoffible.' Le fieur Gilly avoit légué à fon époufe
J'tifufr.uit des 300000 Iiv. léguées à fon fils. Mais dans cette
.comme fe trouvoit comprife la légitime de l'enfant, qui de~
voit lui être tranfmife franche de toute charge & de toute
condition. En cet état des chofes, il falloit. donc, en fe con-formant à fes 'intentions, donner à fes difpofitions tout~
-l'étendue qu'il avoit voulu leur donner, & faire ce qu'il eût
,fait lui~même, s'il eût prévu le cas particulier qui arrêtoit
l'exécunion de fes volontés. C'eO: ainfi que le penfent Mantic a , lib. 9, tit. 1, n. 3, & Barry, liv. 10, tit. 1 l , n. 45.
Il eO:. certain qu'en léguant à fon é-poufe les fruits & la
,jouilTance' des 300000 liv. léguées à fon fils, & de la légitime
qui y étoie comprife, le teHateur a vraiment difpofé d'une
chofe qui 'ne lui appartenoit pas; & qu'alors, foit qu'il ait
connu le vice de fon legs, ou qu'il ait ignoré les bornes que
les Loix mettaient à fa puiffance, il n'en a pas moins fait une
difpofition qui, attendu la qualité de )a légataire, ne fauroit
être nulle & inefficace. En réfléchiffant furl'enfemble des difpofitions du lieur-Gilly, on voit qu'il n'a' jamais dû croire
qu'en foumettant le legs d'ufufruit fait à fon époufe au retranchement de la légitime de fan fils, ce legs fùt aioli
Téduit à une valeur très-modique, & qui ne rempliffoit plus
l'objet 'qu'i1 s'étoit propofé , en affurant ,à fon époufe U(l entretien honnête pendant fa vie. L'Arrêt du Parlement de
Paris, rapporté dans 1e Journal du Palais, tom. l , pag.
~ 10, déçida que lorfque le tefiateur a affigné pour paiement
d'un 'legs un elfet qui n'eH .pas relCigible " le légataire a droit
de fe pourvoir fur les autres biens de la fucceffion de ce
teO:ateur.
L'application de ces p6ncipes eH fenûble. -Le legs d'ufufruit de la Dame Laplac,e porte vra.iment fur une quantité;
c'eH à la fomme de 30.0.000 \iv. que le teO:ateur a voulu le
fixer. Le legs fait au fils ne. pe.ut pas être regardé cqmme
nomen legqtum. Çe ..n'e.{l: qu:u:ne ,démonO:ra~ion, pour faciliter
le paiement du legs d'ufufruit,[ait,à la veuve Gilly. L'eJUlréffion
de laJomme & déjla ,qu.an,r.iIe.fe trouvent après 1'jndicatioo
1,)
:..
...
�D U
PAL AIS
D E
PRO VEN C E.
2.
3f
du fonds légué. C'efl: le cas d'invoquer la regle que pofleriora •
reflrillgunt vel ampliant prœcedelltia, comme dit la Loi.!i cùm 1
fundum 126, if. de verb.fignif. Par ces mots, duquel legat, le
tefl:ateur a indiqué quel étoit le fonds qu'il affeél:oit fpécialement au paiement de l'ufufruit légué à fa veuve. Mais par 1
ces termes de trois cent mille livres, il a expliqué auffi' de
quelle valeur devoit être cet ufufruit, fur quelle quantité il
devoit porter, quel érait le revenu viager dont il vouloit
avantager la Darne Laplace. Celle - ci a donc' pu,
en fe confo~mant à fes volontés, prétendre que ce legs n'étant point limitatif, mais feulement démonfl:tatif, il devoit :
être pris, au défaut de l'affignat marqué par le tefl:dment, fur
les autres biens du tefl:ateur.
Il y a plus: lors même qu'il faudroit fuppofer que la dif- •
poGtion du teHament du Geur Gilly n'eH point alfez claire
pour en induite llne preuve non équivoque de (a volonté,
bien loin d'en conclure que le legs efl: limitatif, il faudroit au contraire l'expliquer dans le fens qui doit le rendre dé- •
monfl:ralif. C'efl: ainG que l'attefl:e Dumoulin fur la coutume)
de Paris, glof. 2 & 3, n.7. La raifon en efi, [uivant la
Loi, que des différentes inrerprét<.tions auxquelles une expreffion ambigue peut donner lieu, il faut raujours choifir
celle qui tend à valider le titre, préférablement à celle qui
n'a d'autre effet que de le détruire. (L. 12, if. derebus dubiis;
Menoch. de prœfùmpt. lib. 4, prœf. 24, n. 20 ; Furgol~, ram.
l , ch. 5, lèél:. 4-, pag. 28 9 j Mr. Dagueffeau, tom. 4., pag. 1
630; Mr. Debezieux, pag. 487. )
Il eH certain d'ailleurs que le leg<; pour alimens efi'toujours
regardé comme fimplement démonfl:ratif. C'er.: la difpoGtion
de la Loi 12, ff. de al.'vel cib.legat. & l'opinion des Auteurs.
( D'Olive, liv. 1, ch. 7; Loifeau, de la diflinaion des rentes, r
liv. l , ch. 8, n. 2 [; Lebrun, des fùccejJions, liv. 2, ch. 2,
.:t. l , n. 87; Fromen!al, verb. legç, pag. 45 r ; Lacombe, verb. legç , feél:. 24; Breronnier (ur Henrys, tom. 4, confuir. 2, n. 37 , & Ferrarius [ur Guipape , quo 8.)
, .,
011 ob[erveroit vainemem qu'il ne s'agit pas propremen~'
Gg 2.
r.
�:l.~6
Jou RNA L
icT d'un legs d'aliment, mais d'un ufufruit conlidérable. La
m"ême objeélion avait été oppofée à la Dame de Ventadour;
mais elle fut rejetrée par le Parlement de Paris.
Sur la feconde queHion on répondait, que la condition de
l'ufufruir ne fût-elle point répétée dans la partie du teflament,
où la fubHitution pupillaire a lieu, elle qevroit toujours
exiHer, 1°. quia pater hoc voluit, & qu'on ne peut faire lutter
con~re une volonté auffi bien défignée, la caufe des fubHitués ;
puifque cerre caufe n'emporte par elle-même aucune prohibition du legs: 2.°. Parce que le legs enveloppe dans route
fan étendue la vie de Ja Dame Gilly. L'exiflence du fils ne
pefe que fur quelques années de cet ufufruit, & non fur fan
entiere durée, fur le mode & non fur la fubflance: 3°. Parce
que ce qui était fans effet pour l'un, ne l'étoit pas pour les
autres, n'étant point queflion d'une nullité radicale, de laquelle on pui1fe dire, traau temporis convalefcere non pouf! ,
mais d'un défaut de pouvoir momentané qui exifle dans un
cas, & qui n'exifle point dans l'autre: 4°. Parce qu'on doit
être d'autant plus religieux obfervateur des volontés du pere,
que c'efl cette volonté qui dépouille la mere de la fucceffion
naturelle de fan enfant, de fa légitime même, & qu'on ne
peut être à fan égard plus dur que la Loi même: S0. Parce
qu'enfin la veuve nantie de l'enriere fucceffion de fan fils par
le.droit commun, ne perd que par ce qu'on lui enleve. L'ufufruit qu'elle Il dans la fucceffion de fan fils, n'eH point pour
elle une libéralité, mais fimplemenr un faible dédommagement de ce qui lui appartenait. Dès-lors comme elle po1fédoit
to.ut par la (eule force de la Loi, il efl vrai de dire qu'elle
n'a perdu qu.e ce qu'on lui a enlevé; & peut-on dire qu'on
l'a privée de l'ufufruit, après qu'on cannait l'expreffion littérale du te fla ment , duquel legs legue & laiJ{e Pufufruit fa
vie durant?
Il efl de principe que tout teflament, avec c1aufe de
fubHiturion pupillaire, renferme deux difpofitions abfolumenc
diflinél:es & féparées. Il contient rout à la fois le tefl:ament
d~ pere, qui difpofe en faveur de. fan fils, & celui du fils
�PR~Vl1NCI!:
237
impubere, que le pere fait pour lui en vertu de la puilfance
paternelle. ( Infl:it. liv. 2, tit. 16, §. 2.; Decormis, rom. 2,
col. 41 & )4) ; Mr. de Montvalhn, IOm. 2., pag. 16.)
En vertu de la fubfl:iturion pupillaire appofée dans le tefl:ament du fieur Gilly, les Dlles. Vague & Paillés doivent recueillir l'entiere hérédité du pupille; mais cette fucceffion,
qui ne leur efl: léguée qu'en fonds, ne peut leur appartenir
qu'après que l'ufufruit dont elle efl: grevée fera fini. Or, la
fùbfl:itution pupillaire peut être grevée d'ufufruit comme
roure autre infl:itmion. (Fufarius, de fuhflit. quefl:. 149;
Julien, cod. liv. 3) tit. 4, ch. l , pag. S , litt. T. ) Il efl:
également certain que la fubfl:itutÎon pupillaire comprend- la
légitime; la raifon en efl:, qu'elle comient le tefl:amem du
pupille. C'efl: la difpofition de la Loi fed fi plures 10, §. S,
if. de vulgar & pupill. fuhflit., & la décifion de Duperier,
tom. l , Iiv. l , quo 22 , pag. 118; de Decormis, tom. 2.,
col. 3°7; de Builfon, cod. liv. 3 , tit. 2.8; de Mr. de Montvallon, Traité des fucceffions, rom. l , ch. 2, art. 9,
pag. 80.
/
Par Arrêt du 6 Juillet 178 l , rendu au rapport de M. de
St. Marc 3. l'extraordinaire, il fut concédé aae à la veuve
Laplace de la déclaration par elle faite de ne pourfuivre
l'exécurion de la Sentence du 2.3 Mars 1779, au chef qui adjuge le remplacement des fruits de fan fils, que pour le
temps couru jufqu'au jour du décès d'icelui; qu'elle entendait fouffrir filr la fomme qui lui a été adjugée par la même
Sentence en remrlacement des intérêts de la légitime
jufques al! décès de fan fils, enfemble fur l'excédant de la
légitime, tant du vivant de fan fils que depuis fan décès, les
retranchemens ordonnés envers les aurres légataires & dans
la même proportion, ainfi que de droit; & encore de ce
qu'elle n'a jamais entendu retenir doublement l'entretien &
nourriture de fan enfant fur les intérêts de la légitime, & fur
les fommes adjugées en remplacement, & les deux Sentences
furent confirmées, avec dépens. Ecrivant Mes. Guieu &
Pafèalis.
DU
PALAIS
DI!
�JOURNAL,
,
ARR Ê T
X X J J J.
Lié Locataire n'eft pas tenu aux réparations fonciues, s'il n'y
a claufe expreJfë, & 'luoi'lu'il fe fait oblige à tolites les
reparations. '
N l'année 1777 Pierre~Louis Bouis, Bourgeois du lieu de
_ Tourves" qplJna en arrentement à Louis Latour, garçon
Tanneur" une fabrique de Tannerie pour le terme de fix années,
m~yennapt le loyer de 100 li\'. par an. Latour s'obligea à toutes
les réparations; il fut permis à Bouis de vendre la fabrique,
fans être fourpis à aucune indemnité, & il fut convenu que
Latoqr ache.v,eroit feulement l'année courante, & que pour
touS dommages &, iptérêts il lui ferait rembourfé des réparation~ qu'il aurait faites, la fomme de 48 li\'.
Le 16 Avril 1780 Latour tinr un aéte à Bouis, par lequel
il l'interpella de lui payer la fomme de 48 livres, de la valeur de diverfes réparations mentionnées dans cet aéte, &
le, fomma en, même-temps de faire rép'lrer le canal & la
porte d'entrée de la fabrique, avec protefiarion de fes d,om-
E
mag~s-intérêrs.
Boui~ n'ayant
l
,
,eu 'aucun égard à cette, interpellation, fut
:Jjourné pardevant le Juge de Tourves aux mêmes fins, &
par expédient, Latour, en fe départant 'de fes fins, conclut
à ce qu'avant dire droit au fecond chef, il fût fait un rapport de vérification pour confia ter fi les réparations étoient
fqncie,res ou locatives. La caufe ayant été compramife à des
arbitres, inte,rvint Sentence arbitrale le 7 Décembre J780,
qui débouta Latour de fa demande principale & de fon expédient interlocutoite, avec dépens, en jurant fuppléroirem,ent par Bouis que fon accord avec Latour avoir été que ce
d<;rni~r p~ierqit lOuteS .les réparations néceJTaires qu'il feroit
au cas de faire pour la fabrication, fans aucune diminution
,de la rente fiipulée dans la convention.
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
~39'
Latour appella de cette Sentence, & Bouis préfenta le
~7 Avril 178 [ un expédient, par lequel il conclut à la confirmation de la Sentence, & fubfidiairement à ce qu'avant
dire droit à l'appel, il vérifieroit par toute forte & maniere
de preuve, que lors de la convention, les accords avec Latour
furent que moyennant la rente annuelle de 100 liv. Latour
demeureroit chargé de toutes les réparations à faire dans la
Tannerie, fans aucune diilinél:ion des foncieres & locatives
ou d'entretien, & fans aucune diminution de la rente.
On difoit pour Bouis qu'en droit, & fuivant l'ufal{e
commun, toutes les réparations fQncieres font à la charge
du locataire. Ces améliorations concernent la propriété,
tendent à la confervatio'n du fonds. Mais rien n'empêche
qu'on ne puilfe s'éloigner de ces principes, & fouilraire
le propriétaire à la force de cet engagement. Il dépend
de la volonré des comraél:ans de déroger 11 cette Loi, &
d'établir un nouvel ordre des chofes. L'arrentement d'une
fabrique, d'une maifon, d'un champ, ne fait pas partie
du droit public qui ne peut être changé ni altéré par des
accords particuliers. Le contrat de louage eil: compris dans
la regle générale qui aurorife les citoyens à difpofer de leu's
biens, par les moyens & par la forme qui leur paroii[ent
les plus utiles & les plus convenables. Sous ce rapport, il
el!: fufceptible de modification, de changement, & de tous
les paél:es poffibles. Ce n'eil pas la premiere fois qu'en
atrentant un immeuble, le ]ocateur s'eil foulagé fur le
locataire de la dépenfe -des réparations foncieres.
Il a été licite à Eouis, en arrentant fa fabrique, de ilipuler que ·Lawur feroit alfùjetti cumulativemenr aux répations foncieres & d'entretien; cette Hipulation ne répugne en aucune maniere à l'inHitution civile, & à l'ufage
commun. La preroiere regle interprétative des contrats
exige une perquiution exatte de l'intention & de la volonté des -contraél:ans. Il faut d'abord ·cop.noÎtre ce qu'ils
ont fait, les engagemens qu'ils ont réfolu, l'obligation ~
laquelle ils fI'.' font fournis: femper in flipulatioTlibus & in
�~~
JOU~NAL
cœu:riS, contrac7ihus, id fequimur quod aaum efl, L. 34, if.
de regulis juris. Les Loix veulent principalement qu'on s'attache à l'intention & à la volonté, plutôt qu'à l'expreffion
& au fens des paroles : in convenientihus, contrahentium
voluntatem potias, 'lanm verha fPec7ari placuit "L. 21 9, if.
de verhor. ,fignificatione. Enfin, fi la convention renferme
quelque paél:e obfcur & douteux, les mêmes Loix nous
enfeignent que ces doutes & ces obfcurités feront diffipées
par l'interpretation de l'affeél:ion & de l'intention réciproque des contraél:ans. Qaod faaum efl, cùm in o6fcuro fit ,
ex a.ffeaione cujuhue capit interpretationem, L. 168, § l,
if. de regulis juris.
L'intention de Bouis, dans la convention, a été de s'affranchir des réparations foncieres & locatives; pour fe procurer cette exemption, il s'efl: contenté d'un loyer modique de 100 liv. , & il a fi peu apprécié ce loyer, qu'il s'ell:
l'éfervé la faculté de vendre, pendant la durée de l'arrentement, fans être fournis à aucune indemnité, n'ayant fixé
la Comme de 48 liv. que pour fervir de rembourfement aux
répdrations qui auroient été faites. Bouis rapportait diver[es déclarations des habitans du lieu, pour confiater qu'il
n'était fournis à aucunes réparations par les accords arrêtés par lui & Latour; d'où il concluait qu'on avait tart
d'infifier à ce qu'il fùt vérifié fi les réparations demandées
étaient foncieres ou locatives. Cette vérification feroit utile,
s'il étoit quefiion de fixer la nature & la qualité de ces
réparatio,ns ; mais dès qu'il efi démontré que ces réparations foncieres & locatives doivent être ,généralement [upportées par l'appellant, [on expédient [ollicitoit une opération frufl:ratoire.
Le ferment fupplétoire doit être déféré à celui qui a le
droit le plus apparent, filivant la Loi admonendi 3 l , if.
de jurejurando , & conformément au [entimenc de Jouffe,
fur l'art. la du tit. 17 de l'Ordonnance de 1667' Il efl:
encore de principe que le ferment efi accordé à la perfonne
�D U
PAL AIS
D E
PRO V Il NeE.
241
fonne la plus refpeaable, la plus élevée en dignité & digniori, fuivanr l'expreŒon des Jurifconfultes.
Bouis réunit en fa faveur l'efprit & la lettre de la convenrion, fon exécution, le fàit & l'aveu de l'adverfaire,
enfin le droit le plus fenfible; tandis que Lacour ne s'appuye fur aucun titre, fur aucune raifon plauuble. Bouis e!l:
un bourgeois qui poŒede une fortune conudérable, qui a
un domicile; Lacour eH un garçon Tanneur, dont on ignore
J'origine & la patrie. Le Juge doit, pour le choix de la
partie à qui il puiŒe déférer le fermenr, fe déterminer
infPec7is perfonarum , t;. caurœ circumflantiis.
On n'a jamais conte Hé la maxime qui admet la preuve
teHimoniale, lorfqu'il fe renconrre un commencement de
preuve par écrit. Une juHificatiQn dont l'objet inréreŒant
eH de manifefter la vérité, d'expliquer & de confirmer
le titre écrit, & nullemenr de le luppléer, ou de le contrarier, mérite d'être accueillie dans cous les Tribunaux. Il
ne peut y avoir de difficulté que fur la nature de l'aae,
ou du titre écrit qui forme le commencement de preuve.
L'Ordonnance a laiffé aux Juges à déterminer de quelle
qualité devoit être le commencement de preuve par écrit;
c'eft l'opinion de Radier fur l'art. 2 de l'Ordonnance de
1667, titre 20, quo 4 ; de Pothier, dans fon traité des.
obligations, part. 4, ch. 2, art. 4 ; & de Mornac. fur la
Loi 9, if. de reDUS creditis.
Ainu, l'Ordonnance n'a point établi elle-même les aél:es
qui conHiruenr le commencement de preuve par écrit. Cette
énumération écoit difficile, & peur-être impoŒble. La multiplicité des circon!l:ances, la diveruté des aaes, la bizarrerie des conrrats qui partagenr fi fouvent le caprice &
la fingularité des hommes, rendent variable & arbitraire
cette partie de l'inftirution civile. Mais les Commenrateurs
& les Jurifconfultes admettenr avec uniformité le principe
générai, que le moindre commencement de preuve par
écrit eft fuffifant. En effet, comme il ·n'e!l: quelbon dans
èette hypothefe que de fortifier l'écriture, il n'y a aùcun
Anntes 1781 & 1782.
Rh' '
�s~
JOUR~AL
danger d'admetrre, des ,témoi~s dO,ne, les dépolitions éclairées viennent à 1 appuI du titre ecrit.
On répondait pout Latour, 'que li en droit, & éx co'TZceJJis, toutes les réparations foncieres fone à la chnrge du
bailleur, comment & à quel titre pourrait-on difpenfer
Bouis 'de celles qui ont donné lieu au procès? Ou elles
étoieht de nature 'à le concerner, ou leur qualité étoit
équivoque. Au p"renrier cas, il devoit s'exéclller fur la limpfe connoilfance que lui en donna Latour, & fur fan interpellàtlon extrajudiciaire ; au fecond cas, il fallait les'
éclaircir, & fe 'rendre à la vérification préalable qu'en demandait Latour. Il efl: vrai 'que le bailleur peut mettte à
la charge du preneur toures les réparations quelconques; les
comrats fane fufceprihles de tous les acco'rds , & ces accords,
pourvu qu'ils ne préfement rien de contraire à l'honnête ré
& aux bonnes mœurs, font la premiere Loi qu'on doit fuiV're, & à laquelle bn a droit de ramener les parties quand
elles s'en écartem; mais il ne fulEt pas que Bouis eût pu,
en traitant avec Latour, rejetter fur lui le rifque & le
poids de toOtes les réparations; il faut encore qu'il érabliffe que telle efl: la Loi du contrat qu'il palfa avec lui,
pour pouvoir lui endo!fer les répa-rations foncieres qui,
fans le fecours d'un paél:e conttai're, font toujours à la
charge du bailleur: la COllVe\1tion d'a'rl"ememem ne foumet
pas Latour à cerre obligation, & 'ne to'uche pilr conféqueht pas à la dirpolitlon du '(f.roit commun, d'après laquelle Houis efl: tehuà cette elpece de réparations.
Que Bouis ait entendu ne fupporter aucune réparation
quelconque, ce n'e'fl: pas à lui à en décider , c'efl: à fes
accords écries; & dès que ces accords ne l'exemptent
pas des foncieres., e1les reftene ex jare toll'r auŒ bien à
fa charge, que fi fà conventÏ'on l'y foumetroit expreffément. En fah, rie'n d'équivoque dans la cO'n'veneion, point
de paél:e qui l'réfente crn double Cens ,'& qui ait heroin
d'être expliqué, & fUl" le tout, lès obfcùrités comme les il1éerc1t(id~s dl!s claufes, "!>~il y"en a'Voit, s'explTqueroient con-
,
�DU
PAL AIS
D :II:
'243'
PRO V I! Ne!.
.tre Houis, parce que ,. CQmme dit Domat Ibos fes Loix
civiles,. pag. 18, n. 13, il faut reUreindre l'obligation au
fens qui la diminue; car celui qui s'oblige ne veut que
le moins, & l'autre a dû faire expliquer clairement c.e qu'il
prétendoit.
C'eU une ridicQlité de donner la rente de. 100 liv.
qui fut Uipulée, comme une preuve que Rouis voulut s'a&.
franchir de cette' efpece de réparations llui était à fa charge;
Ja Uipulation fur cet objet ne prouve. que la forome .qui
devoit être payée annuellement. En admettant que la claufe
portant que Latour fil/irait toujours L'année, & fJ.u.I: pour
tout dommages Go intùêts., & remhourfèment des réparations
qu'il aurait faites, il lui ferait payé 48 liv. ,. ne doive s'ell~
tendre que des réparations foncieres , Houis en feroit ~'au
tant moins avancé, qu'il eH impo1lible de ne pas voir que
rien n'eU plus contraire à l'exemption de cette_ e[peoe de
réparations, que Je rembQurfemenr qo'il s'obligea d'en faire
jufqu'à concurrence de 48 liv., s'il venoit à vendre dans
le cours du bail. Cerre foumiffion de [a part ne fe trouveroit pas dans la convention, & on y liroit bien plut-ôt
un paél:e d'exemption générale de toute efpece de réparations.
On ne s'oblige pas à rembourrer des réparationsl , quand
on ne doit pas les fupporter, & rien ne prouve mieux
qu'on les doit,. que la ftipulatjon d'en rendre compte. Auffi,
tout ce que fuppofe l'obligation du rembourfement,. c'ef!:
que Latour [eroit mairre d'en faire, & qu'en en faifant les
avances,. il pourroit s'en récupérer. Etre obligé aux réparations, fauf le rembourfement, ce n'eU pas proprement
y être tenu, puifque ce n'eU ni les prendre fur fon compte,
ni en exempter le bailleur; c'eU au contraire les faire pour
lui & à fa décharge. L'exemption ne va pas avec l'obligation du rembourfement; ce font-là deux contraires qu'il et!:
impoffible de concilier; la claufe finale du titre ne porte
donc, comme on voit, que contre Houis.
.
Que reUe-r-il ? le ferment· fupplétoire dont les arbitres
fe [ont contentés,. & la preuve fubfidiairement offerte d'un
.
.
.
Rh
2·-'
�~44
. . Jou RNA L
:accord "que ne .renferme pas la convelltion. Mais fi le fefnlent eil: un moyen pour terminer les diifentions, ce n'eil:
qu'en matiere légere; ce n'eil: que pour le cas où l'on
n'eil: pas lié par écrit; au lieu que quand il exiil:e un titre dans lequel on a inféré fes accords , on ne œcourc jamais à 'cette voie, e.ncore moins pour y fuppléer un paéle
.auffi comraire au droit commun que celui dont s'agit. D'auire' parc, quel cas pourroit-on faire d'une preuve qui porte
contre un titre, après la profcription qu'en prononce l'arr.
2 du titre 20 de l'Ordonnance de 1667 ? Que la regle ceife
quand on oppofe un commencement de preuve par écrit, c'eil:
envain qu'on invoque ce principe, parce qu'il n'eH force de
_commencement de preuve par écrit que Latour fe foit obligé
.à toutes le s réparations foncieres, à pouvoir invoquer. La
convention à laquelle Bouis a d'abord recours, bien loin
'de renfermer ce commencement de preuve par écrit, ab[àlument néceifaire pour être reçu à la preuve vocale,
contient tout le contraire, puifqu'on a vu que fi elle prouve
.quelque chofe, c'eil l'obligation du chef de ce bailleur de
parfournir aux réparations , au moyen de fa foumiffion
à rembourfer à Latour celles qui étoient alors indifpenfables, jufqu'à concurrence de 18 liv.
. Arrêt du 14' Juillet 1781, au rapport de Mr. le Con[eiller de Gariùel, qui réforme la Sentence, & reeoit
l'expédient de Latour avec dépens depuis le jour de l'~x
.pédient. Ecrivant. Mes. Cauvet &. Bremond.
ARRÊT XXIV.
'La jùbrogation faite par écrite privée 'ne peut nuire au tiers.
E . ~ Août 1748 le fieur André, Courtier Royal de la
VIlle de Marfeille, vendit fon office au fieur Francois
Boyer., au prix de. 4°231 liv. ; il en fye indiqué l 1240 :liv.
L
�DU
P_~LAIS
DE
PROVENCll.
2.4)
?! l'hoirie de Me. Cha1Te, pour ref!:ant prix de l'office. La
Dame veuve ChaIre, pré[enrc à l'aEte, accepta l'indication,
& rerut à compte 1740 liv. Le liMai 1769, le lieur
Boyer paya les 9s00 liv. ref!:antes à la Dame Cha1Te, qui
lui en concéda un acquit privé, en date du ~ême jour:
il ef!: dit dans-cet acquit, que ce paiement ef!: fait des deniers du lieur de Lille, négociant, & le lieur Boyer & la
Dame Chaire l'y [ubrogenc à cous les droits & privileges
de cette derniere.
Par aEte public du 6 Août 1774, le lieur Boyer emprunta du lieur de Rouville, Chevalier de St. Louis, la
Comme de 11766 liv. 13 f. 4 d. pour jùrvenir, dl-il dit
dans cet aEte, aux affaires de Me. Boyer. Cet emprunt,
rembour[able en divers paiemens, dont le dernier ne devoit écheoir que le 31 Mars 178 l , fut f.it fous le cautionnement des lieurs de Liae & fils.
Par quittance privée du même jour, les lieurs de Lille
& fils reçurent les 9s00 liv. qui éraient dues au lieur de
Lille pere, [uivant l'écrite privée du liMai 1769, &
ils [e ré[erverent tous leurs droits, là où ils viendroient à
être recherchés par le lieur de Rouville à rai[on de leur
cautionnement.
Le lieur Boyer décéda le premier Juin 1777; [on fils
prit [a [ucceffion par bénéfice d'inventaire. Marguerite
Boyer [a tante, & Felix Boyer [on coulin germain,
créanciers de l'hoirie pour leurs droits légitimaires, formerent leur demande à l'hypotheque du 31 Mai J742.,
jour du décés de Jofeph Boyer leur pere & aïeul.
Le 20 Juin 1778, le lieur de Lille demanda d'être
.rangé pour la Comme de 9 SOo liv., avec intérêts & préférence [ur le prix de l'office; l'héritier bénéficiaire con.tef!:a cette demande, du confentement des créanciers; &
-par Sentence du 18 Avril 1780, le lieur de Lille fut débouté de [a demande en préférence. Il en appella .par.devant la Cour. L'héritier bénéficiaire offrit un expédient,
par lequel il adjugea au . lieur de Lille les 9Soo liy. pa-r.
�2.4 6
Jou Il N & L
lui payées au fieur de Rouville ~ avec intérêts du jour de
chaque paiement, ou de l'affignation du 1 ~ Juin 1769,
le rout à l'hypotheque du Il Août 1774, jour de l'aél:e
d'emprunt & du cautionnement.
On difoit 'pour le fieur de Lille, que le- vendeur d'un
office, tant qu'il n'eH pas entiérement payé du prix, a un
privilege fur l'office; le ceffionnaire de ce créancier privilégié
étant fan image, eft à fes' droits, & peue par conféquent
faire valoir le même privilege que lui. La fubrogation en
faveur de celui dont les deniers fervent à acquitter un ancien créancier, peut être faite ou par le débiteur, ou par
le créancier, ou par les deux à la fois'; les Loix, les Auteurs, & encr'autres Duperier, atteftenr que la fubrogarion opere également fon effet, foit qu'elle procede du chef
du débiteur, ou du chef du créancier, avec cette différence
néanmoins, que lorfque la fubrogation ne vient que du
chef du débiteur, elle n'opere que contre le débiteur luimême, & non conrre les co-obligés, au préjudice defquels
le co-<>bligé ne peut ni céder ni fubroger ; au lieu que lorfque la fubrogarion vient du chef du créancier, le fubrogé
devenanr alors l'image de ce créancier., en a tous les droits
& coures les aél:ions, & que dans l'exercice, ce prêteur fubrogé devienr pracuratar in rem fuam , ainli qu'on le voit dans
les favances notes mifes à la fuite de l'Edit d'Henri IV
de 1609, rendu à l'effet de donner à la fubrogarion qui
feroit fàire du chef du débiteur, le même effet qu'a celle
qui feroit faire du chef du créancier, & que l'on trouve
dans le premier volume de Néron, pag. 737.
P--our que la fubrogarion pui1Te valoir, il faut, fuivant nos
Loix, diHinguer fi elle vienc du créancier, ou fi elle vient
du chef du débiteur; au premier cas, rant qu'il ne confte
pas de la quittance du créancier, ce même créancier con{ervan·t fes droits originaires, eft le ma1rre de les rran(porter ainli & de la maniere qu'il lui plaît; & le débireur,
qui n'a pas encore acquis fa libérarion, ne peut s'en plaindre. 'Si la fubrogarion vient du chef du, débiteur, il faut
�PAtAB DY! PROVI!NCI!.
147
plus de précaution. Ou le prêteur confiant fes deniers aŒ
débiteur, en fuit la foi, ou il ne les lui confie pas; s?il
les l~i confie, il faut nécefTairement qu'il veille ~ l'emploi, & qu'il conHe de la fubrogation d'une maniere aurhentique, & dans un court intervalle; la raifonen efi que
l'obligation primitive fe trouvant éteinte par le paiement,
fi l'.on ne prenoit pas la précaution indiquée, il y aurait
à craindre que le débiteur ne fit revivre l'ancien pr'vilege,
au préjudice des créanciers intermédiaires; & voilà pourquoi on dit qu'en fuivant la foi du débiteur, il faut nonfeulement veiller à l'emploi, mais encore à ce qu'il foit
fait hrevi intervallo , & qu'il en confie d'une maniere authentique. C'efl: la difpofition de la Loi modeflinus, if. de
fa/ut. , qui ell: le fiege de la matiere.
.
C'efl: d'après ce texte & d'après ce motil1, que tous les
Auteurs dirent, que quand on a confié fes deniers au débiteur, avec promefTe qu'il les emploierait à l'acquittement
avec fubrogation, le prêteur feroit bien imprudent s'il ne
veilloit point à l'emploi, ou s'il ne rapportoit pas une [ubrogarion authentique. C'efl: toujours d'après ce motif que
DernufTon, Livoniere & Lacombe difent avec le Réglement du Parlement de Paris, du 6 Juin 1690, rapport·é
au Journal des Audiences, qu'il faut qu'il conlte de 1:1 [ubrogarion par atle authentique.
Mais il n'en efl: pas de même· au fecond cas, c'efl:-àdire, lorrque le prêteur ne fuit pas la foi perfonnelle du dé.
biteur, qu'il n'a pas l'imprudence de lui confier fon argent
fous l'efpoit d'une rubrogatiol1 à rapporter, & qu'il prend
;ru contraire la précaution de ne débourrer fon argent que
pour le compter lui-même au créancier, & rapporte'r fa
fubrogation au moins de la part du débiteur. Alors le
même titre fe'!'vMt tout à la fois à jufiifier & l'emprunt
& la libération du débiteur vis-à-vis du prêteur, il fero-it
ridicule d'~xiger une quittance publique pour la {obroga.tion , quand la quittance du créanCÎ'er originaire ne l'efi_pas j'
le même titre qui confrate la libération.du- débiteor -cpnfDU
�248 .
Jou R :Ii' A L
tatant la fubrogation , & ce même tirre ne pouvànt pas être
fyncopé, il eft vrai de dire que le prêteur a tout ce qu'il
faut pour valider fa fuhrogarion, c'eft-à-dire, le prêr &
l'emploi des deniers; voilà pourquoi les Aureurs difent que
le prêteur doir lui-même payer au créancier. (Dernuffon ,
traité de la fubrogation, pag. 340 ; Loifeau; des offices,
liv. 3, ch. 8, n. 70 & fuiv. )
Le lieur de Lille n'ayant pas fuivi la foi du fieur Boyer,
& ayant au contraire lui-même la fubrogarion, tanr de la
part du débireur que du créancier, à l'inflanr même où il
compta fes deniers, il eft impoffible de lui refufer gain de
caure, tant en force de l'une que de l'autre fubrogation ;
10. parce que ou le fieur Chaffe n'a pas éré payé, & l'hoirie efl par conféquenr débirrice vis-à-vis de lui; ou s'il l'a
éré , le fieur de Lille.a éré fubrogé ; 2 0 • parce que ou les
créanciers doi'vel)t convenir que la maffe doit encore au fieur
Chaffe; ou elle doit convenir de la fubrogation, & dèslors nul. préjudice pour les créanciers ; 30. parce que la
quittanc.e_a été tàite triple, & fait par conféquent le ritre
commun du fieur Chaffe, du fieur Boyer & du fieur de
Lille. Tel eft le point de vue de la caufe, que le fieur Boyer
ne fut libéré vis-à-vis du fieur Chaffe " que parce qu'il devint débireur du fieur de Lille' au même tirre , & il ne fe
libéra vis-à-vis du fieur Chaffe, qu'au moyen de la fubrogation au profit du fieur de Lille. Pourroit-on déracher
1.a libération de la fubrogation , divifer Îe titre en deux,
en adopter une partie pour rejerrer l'autre, & croire aux
paie mens comme faits des deniers du fieur Boyer, quand
la propre quittance donr on excipe, juflifie que ce paiement n'a été fair que des deniers du fieur de Lille, & avec
fubrogation.
On répondait pour le fieur Boyer, que quand même le
fieur de ~ille auroit éré légitimémenr fubrogé aux droits de
Ijl veuve Cpaffe '; par la quittance du lIMai 1769, il ne
ferait .pas moins certain que ces droirs ont été éreints
{lar le paiement qu'il il. ~eçu ; que la réfetve qu'il s'en ell:
faite,
�·
DU
PALAIS
DE
PROVENCI!.
'2.49
faite, par la quittance privée du 6 Aout 1774, ne fauroit
être d'aucun effet. Le fieur de Lifie ne fe préfente qu'avec
des titres fous feing privé; ces titres font toujours fufpeél:s
par eux-mêmes. .
Les obligations peuvent être confidérées fous deux rapports; elles lient les parties contraél:antes; elles peuvent
quelquefois avoir effet contre le tiers. Sous le premier rapport, c'efl: le confenrement qui les forme; l'écriture n'efl:
point de leur effence; elle efl: feulement néceifaire pour
la preuve, fides rei geJlœ; mais elle n'ajoute rien à leur validité. Dès-lors il eH indifférent, par rapport aux parties
contraél:antes, que cene écriture foit fous feing ptivé, ou
que leurs accords foient rédigés en aél:e public. Sous l'une
& l'autre forme, elles prouvent également leur volonté;
elles doivent donc les obliger également.
Il n'en efl: pas de même à l'égard du tiers ; les écritures privées font enriérement à Id difpofition des parties
comraél:antes; elles peuvent les annuller pour leur en fubftituer d'autres; elles peuvent les antidater, & filppofer parlà une obligation déja exi{bnte avant le tems où elle a
réellement exifl:é; & fi elles pouvoient avoir leur effet
contre le tiers, il n'eH point de cas où le tiers ne pût
être trompé, fans qu'il lui fùt poffible de prévenir. la fraude,
ni même de la découvrir. (Ferrieres, vo. feing privi.)
Cene dlHinél:ion en: fondée fur les principes du droit
Romain; elle efl: pllifée dans la Loi fcripturas z z , cod.
fj'û potior. in pigno hab.: quafi pllblicè confcriptas, fi perfonalis ac7io exerceatur, fuum robur habere decernimus. SÙl
autem jus pignoris toel hypothecœ ex hujufmodj inJlrumentis
vindicare quis jihi contenderit, eum fjui inJ/rumentis publicis nititur, prœponi d:zcernimus.
.
Si les écritures privées De peuvent avoir leur effet au
préjudice du tiers, comment pourroient-elles être fu/Iifantes
à l'effet d'acquérir la fubrogation ? Toute fubrogation dérive de la Loi, ou de la convenrion des parties; elle eQ
llcquife de droit en faveur de çelui qui paye fQrçément, ou
Années z78 z & z78:1..
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1
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J 0 '0 RNA. ~
pour fonifler fon hyporheque; reis font le créancier pofiérieur qui paie l'anrérieur, ou la caution qui paie pour
le principal obligé. Mais hors de-là, quand c'efi un érranger
qui paie, elle doir êrre expre1fe, & celui qui ne l'a pas Hipulée ne fuccede ni à l'hyporheque ni au privilege du créancier qu'il a rembourfé. C'efi-Ie fenriment de Bafnage, des
lzypotheques, ch. 1) , pag. 38 l , & de Dernu1fon, Traité de
la fuhrogation, c.b. 10, O. 6 & 7. Ce dernier Aureur Qbferve
au ch. I l , n. 19, que la fubrogarion efi de droit étroit, &
ne doir avoir lieu que dans les cas dans lefquels la Loi l'a
introduire, & il faut qu'il n'y ait aucune fufpicion de
fraude.
La filbrogation peut être fiipulée ou avec le créancier, ou
avec le débireur, ou avec rous les deux enfemble; mais
dans tous les cas, il faut qu'il conHe que le paiement a été
fait des deniers de celui auquel elle efi accordée; car s'il ell:
poffible de foupçonner que le créancier ou le débiteur fe foient
entendus avec le dernier pour faire revivre une créance déja
éteinte, il efi évident que cet dccord ne fauroit préjudicier
aux droirs des créanciers de ce dernier; itd Dernu1fon, ch.
l l , n. 8.
Il feroit impoffible de regàrder un aél:e fous feing privé,
comme capable de remplir la preuve que les Auteurs exigenr.
Quelle foi pourroit mériter un aél:e dont la date ne fauroit
avoir aucune cenirude, dont l'exiftence dépend entiérement ,
de la volonré des Parties qui ont concouru à le former, qui
peut être fupprimé, modifié ou changé à volonté? C'efl:
d'après ces principes, que la Jurifprudence n'a jamais reconnu
de filbrogations que celles qui conll:ent par aél:e public. Il y
a là-de1fus un arrêté du Parlement de Paris, du 6 Juillet
1690, rapporté au Journal du Palais, rom. 2 , pag. 780.
Tous les Aureurs fe font conformés à cetre regle; (LivoIliere, Regles du droit François, tir. de la fu6rogation, n. 7;
Dernu1fon, ch. I I , n. 22; Lacombe, verb. fuhrogation;
l'Aureur de l'Inll:ruél:ion facile fur les Conventions, liv. '1:,
tir. 8, §. 4, )
�DU
PAL AIS
D Il
PRO VEN C E.
251
Lorfque la fubrogation vient du débiteur feulement, il
faut qu'il promette dans J'aél:e d'emprunt d'employer les deniers qu'il reçoit au paiement du créancier aux droits duquel
il fubroge le prêteur. Il faut encore que dans J'aél:e du paiement il déclare que les deniers qu'il emploie à ce paiement,
font les mêmes que ceux qu'il a reçus du prêteur, qu'il a déja
fubrogé. Lors au contraire que la fubrogation efi confentie
cumulativement par le débiteur & par le créancier dans un
feul & même aél:e , qui contient tout à la fois & le paiement
& l'emprunt au moyen duquel ce paiement a été fait, il
femble d'abord qu'il ne peut plus refier de doute fur la preuve
de J'emploi. Mais à combien d'abus cette fubrogation ne feroit-elle pas fujette, fi elle pouvoit être confentie par un
aél:e fous feing privé! Seroit-il difficile de faire renaître au
préjudice des créanciers, une dette déja éteinte par le paiement? Et comment ceux-ci pourroient-ils découvrir cette
fraude ou s'en garantir?
Le débiteur d'une créance hypothécaire ou privilégiée
aura payé fon créancier & éteint la dette; des befoins particuliers J'obligeront de recourir à des emprunts. Les prêteurs, toujours attentifs à affurer leurs deniers, ne confentiront à les fournir qu'aurant qU'Ils feront fubrogés à l'hypotheque ou au privilege du créancier déja rembol;rfé. Celui-ci,
auquel la choiè efi indifférente, s'y prêtera d'autant plus
aifément pour obliger fon ancien débiteur, qu'en lui procurant par ce moyen une facilité pour trouver de l'argent, il
ne croit pas nuire par-là à d'autres créa'nciers , dont il peut
ignorer l'exi!1:ence ; & cependant ces créanciers fe trouveront
léfés dans la fuite, par la fuppofition d'une créance qui
n'exi!1:oit plus.
Le droit Romain accordoit l'hypotheque aux aél:es fous
feing privé, lorfqu'ils éraient lignés par trois témoins; le
droit Francois ne l'accorde qu'aux aél:es publics. Et pourquoi
fe feroit-ii méfié davantage de trois témoins, abfolument
fans intérêr dans la chofe, & qui n'auroient pu fe prêter- à une
antidate f<las une frijude évidente, qu'il ne fe méfieroit de la
Ii 2.
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facilité d'un ancien créancier, qui [ouvênt pourroit croire ne
commettre aucune fraude en obligeant un emprunteur dont
il connoîtroit les befoins urgens? La Loi doit être générale
dans fes difpofitions, parce que fes motifs s'étendent à toUS
les cas. A fes yeux, les Parties ne peuvent être préfumées de
bonne foi, lorfqu'elles contraél:ent dans une forme qu'elle
fufpeél:e. Leur bonne foi perfonnelle ell: abfolument indiHerente; le tiers ni la Loi ne peuvent pas la connoître.
Le fieur de LiGe el!: payé; [a créance el!: donc éteinte.
Le privilege de cerre créance, en fuppofant qu'elle en eût
quelqu'un, ne fubfiHe donc plus, corruente principali, corruit
acceJ{o~illm. Comment donc a-t-il pu fe réferver ce privilege
à raifon du cautionnement qu'il a con[enti envers le fieur de
Rouville? Celui-ci n'eH qu'un créancier ordinaire; 11 a une
hypotheque du jour de [on atl:e. Mais il n'a ni privilege ni
préfér~nce, parce que cet aél:e ne déGgne pas quel efl: l'emploi que le fieur Boyer devoit faire des deniers empruntés.
Le fieur de LiGe, qui s'el!: rendu caution pour la fùreté de
ce prêt, ne peut donc pas avoir plus de droit qlle le fieur de
Rouville lui - même; moins encore a-t-il pu fe réferver le
prétendu privi/ege réfultant d'une créance avec laquelle on
ne voit pas que l'emprunt fait du Geur de Rouville ait eu aucun rapport. Car otl paroît-il que telle ait été la condition
fous la-qu.elle le fieur de LiGe a cautionné? Seroit-ce parce
que les deniers provenant de l'emprunt devoient fervir à fon
paiement? L'aél:e n'en dit abfolument rien. Le prêt -el!: pur
& fimple; le cautionnement l'el!: auffi.
La Déclaration d'Henri IV, du mois de Mai 1609, rap":
porrée par Bafnage, des hypotheques, ch. 15 ,pag. 394, exige
pour la fubrogation deux conditions e1fentielles; la premiere,
la l!:jpulation expre1fe de la parr du prêteur de pouvoir fuccéder aux hypotheques des créanciers qui doivent être payés
des deniers empruntés; la feconde, la déclaration qui fera
faite par les débiteurs lors de l'acquit & rachat. Ces conditièlns étoient déja exigées par la glofe fur la Loi premiere ,
cod. de his 'lui in priar. credo lac. [ucced.; par Mr. d'Aguef,
�bu P ALÂts Dit PIlOVl!NCX:
2.Ü
1eau, tom. 8, lett. 442, par l'aél:e de nororiéré de MM.
les Gens du Roi, du 30 Mars 1697, rapporté au Recueil,
pag. 1S9, n. 113 1 & par l'Auteur du Journal du Parlt:menc
de Touloufe, rom. 2, pag. 3.
L'emploi pour être reconnu vérirable, doit être fait dans
un brief inrervalle; autrement on efi en droit de préfumer
que l'emprunteur a employé à rout aurre ufage les denitrs
qu'il a reçus, & que c'efi de route autre part qu'il a pris
ceux qu'il a compt~ au créancier. La regle eH certaine; la
Loi fi ventri 24, §. uft. If. de reb. autlz. judo polJid. exige que
le paiement fait fair fans délai: fi modo non pofi aliquod intervallum id faaum fit. Ces termes, dit Dernuifon, ch. 1 l ,
n. 7, marquent que le paiement doit être fait à l'infiant me
créancier, & fans intervalle de temps.
Ainli le fieur de Lille n'a pu fe réferver aucuns droits par
fa quittance; il n'auroit pu au moins fe les réferver que par
une quittance publique. Enfin, il n'a pu d'aucune maniere
fe réferver des droits qu'il n'avoit pas, parce que l'écrire
privée du liMai 1769 n'avoir pu lui en tranfporrer aucun.
Arrêt du 17 Juillet 178 l, au rapport de Mr. le Confeiller
de Franc, qui confirme la Sentence, & range le lieur de
Lille au dernier degré pour la fomme par lui payée au lieur
de Rouville en force du cautionnement, avec intérêrs depuis
chaque paiement, le tout à l'hyporheque de l'aél:e ce cautionnement : le fieur de Lille fut condamné aux dépens.
•
Ecrivant Mes. Pafcalis & Dubreuil cadet.
Les motifs furent 1°. que la fubrogarion privée du liMai
11769, ne pouvoit acquérir auéun droit au fieur de Lille
comme fubrogé à ceux de la Dame Olive, veuve Chaife ,
quoiqu'il fût dit dans cerre quittance qu'elle avoit été payée
des deniers emprunrés du fieur de Lille. Cerre quittance &
cette fubrogation n'ayant aucune date fixe, pouvoit avoir
été faite après coup, & ne pouvoit conféquemment nuire au
tiers; elle éroit vah.ble comme quittance envers les llOirs'
du fieur Chaife, parries fiipulantes en icelles j mais elle ne
(louvoit valoir comme fubrogation contre le tiers, _qui ne
�2.S4.,
lovllN.A.L.
.• ,
peut étre Ile que par un aéte pubhc, qUi a pour lUi la fOl le,.;
gale, qu'on ne peut pas donner à un aéte privé: 2.0. Le fieul"
de Lille ne pouvait pas fe fervir non plus de Eaéle du 6 Août:
177'b portant emprunt de 1 1766 livres , du fieur de Rouville,
parce qu'il ne paroi/foit point par cet aéte que le fieur Bayel"
eût emprunté cette fomme pour payer le fieur de Lille, mais
feulement pour furvenir à (es affaires; ce qui était une exprdIion générale, infuffifante pour (ervir de bafe à une fubrogation ; que le fieur de Lille, caution dans cet aél:e, ayant
- payé le fieur de Rouville, n'avait acquis qu'une créance fUl"
le fieur Boyer avec l'hypotheque du 6 Août :774, jour de
l'aél:e : 3 D ' Quoiqu'il fût dit dans une quittance privée du
même jOlir, que la fomme elOpruntée ,du fieur de Rouville
avoit été employée à acquitter pareille fomme au fieur de
Lille, qui fe réfervoit tous fes 'premiers droits, en cas qu'il
fût obligé de payer le Îleur de Rouville, en vertu de fon
cautionnement, cette quittance avoit encore le même vice
d'être privée & fans d~te pour le tiers.
ft R R Ê T
X X V.
Ufage des heibitans de Lançon de.donner a nouveau Dai! leur$'
fonds, quoiq.ue foumis a la direc1e univerfeZZe du Seigneur. .
Les Daux emphytéotitJues ne donnent pas ouverture au retrait
lignagner. ;
CeluLqui veût exercer le retrait lignager efl admis à prouver la
jimulation de l'aae de DaiL à emphytéofe.
Mùis pour y €tre reçu, iL d:JÎt propofer des faits tellement
concLuons, 'que l'on puif!è en tirer cette conftquence, que
.les Parties contrac1arltes ~nt vouLu faire fraude à fon droit.
•
P
AR aél:e du 20 .M:li 1776, les hoirs du fieur Jean':
J feph Jean & le fieur Charles Jean, avoient, avec le
c:oafeD.[emeac de là Parne' Leydec, veuve, légataire de~,
...
l
�bu PAr;AIS nE P1l.0VENCl!.
'1H
fruits, donné à emphytéofe à Me. TeiŒer, Notaire-Royal,
une écurie, un grenier & une cour & jardin fitués au )ieu de
Lançon, fous une accapte à la cenlive de 'i 'i livres, extinguible au capital de 1100 livres, avec établilfement de
direél:e.
Par exploit du 19 Juin fuivant, le fieur Jacques-AntoineGafpard Jean inteJpel1a Me. TeiŒer de lui défemparer par
voie de retrait lignager ces immeubles fous les offres & déclarations de droit, & lui donna aŒgnation devant Notaire
pour venir recevoir fon rembourfement; autrement, & en
ca~ de refus, il l'ajourna devant le Juge de Lançon pour s'y
vOIr condamner.
Me. Teiffier n'ayant pas comparu à l'aŒgnation, l'ajournement eut lien, & l'infrance fut liée. Le lieur Jean fuppofant que ce bail renfermoit une vente limulée, fit répondre
cathégoriquement Me. Teiffier, ainli que la Daine Leydec
& les lieurs Jean qu'il avoit appel1é au Procès, pour voir
ordonner la commune exécution de la Sentence qui feroit
rendue fur la demande en calfation de ce bai1, & adjudicationdu retrait.
Ces réponfes cathégoriques ne parurent point au Juge de
Lançon préfenter la preuve de la limulation ptétendue. Pat fa
Sentence du 21 Janvier 1780', il déclara le fieur Gafpard
Jean non-recevable & mal fondé, & le condamna aux dépens.
Celui-ci en déclara appel au Siege de Martigues, où il en
'demanda la réformation, & conclut fubfidiairement à ce
qu'avant dire droit à l'appel & aux fins par lui prifes, il flÎt
dit & ordonné que fous la réferve exprelfe des preuves réfultantes du procés, il prouveroit dans le mois 1°. que lefdirs
Jean, freres, en Mai 1776, avaient fait publier dans le
lieu de Lancon la vente des immeubles dont s'agit, argent
comptant; que les encheres en feroient faites pardevant le
lieur Limans, Bourgeois qudit lieu, & les offres par lui reçues, pour payer argent comptant : 2°. Que Jefdirs
Jean prierent & donnerent ordre au fieur Limans de faire:
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Jou RNA ,L
•~
les encheres & recevoir- les offres, pour' payer argel11
comptant , & non autrement; & qu'en conféquence le
fieur Limans fit les encheres & recut les offres du fieur
Gafpard Jean & de Me. Teiffier, àco~dition qu'ilspaieroient
comptant, lors de la délivrance & vente, le prix des
immeubles'; 3°. Que le 'fleur Louis Teiffier, fils de Me.
Teiffier; avoit déclaré qu'il avoit porté à la ba!l:ide de la
Merletade defdits J~an; de l'argent pour payer l'acquifltion
que fon pere alloit faire de l'écurie, &c.
Ces faits font les mêmes que ceux fur lefquels portoient
les interrogats qui avoient été requis & 'faits en premie_re.
infiance. •
.Le Lieutenant de Martigues crut devoir en admettre la
preuve. Il adopta les fins fubGdiaires par fa Sentence du 27Novembre 1780, dont il y eut appel à la Cour par Me•.
Teiffier , la Dame Leydet & les fleurs Jean.
Le fleur Gafpard Jean, pour menre la Cour à portée de
fbtüer fu~ le fonds, & pour obtenir l'adjudication de fa demande en retrair lignager, préfenta une requête incidente
en appel in quantum contra de la Sentence du Lieutenant de
Martigues, & prit des conclulions relatives au double objet
de faire profcrire également cette Sentence ,trop timide, &
la Sentence inju!l:e du Juge de Lançon; de forte q~'il fut
que!l:ion d'examiner le m~rite de l'une & de l'autre Sen":
tence, & les Parties fe trouverent au même état où elles.
en étoient en premiere inftance.
D'abord il étoit convenu par le fleur Gafpard Jean que le
bail emphytéotique en exempt du retrait lign'ager. Mourgues,:
pag. 114 , rapporte des Arrêts qui l'ont ainli jugé;. & c'e!l:
la maxime atte!l:ée par l'Auteur de la Jurifprudence féodale
de cette Province, part•. 2, tit. du retrait, n. 36; mais il
fourenoit que la vérité l'emporte to.ujours fur III flmulation •
que le tiers e!l: admis à quereller un aél:e public de
.Î1mularion, lorfqu'i1 a intér.êt à s'en plaindre, & qu'une·
foule de circon!l:ances Ce réunilfoient pour con!l:ater que par
l'aéte du 20 Mai 1776) les. Panies aVQien.ç déguifé une
vente.'
•
�DU
PAL AIS
DB
PRO V B N C B.
2. 57.
vente pure & umple fous la forme d'un bail à emphytéofe.
En parcourant les réponfes carhégoriques qu'il préfentoit
comme myflérieufes & contradiaoires, il difoit fur le premier chef, que les vendeurs & l'acheteur n'éraient pas d'accord fUr la quotité de l'offre de Me. Teiffier. Celui-ci la
fixait li 1000 livres; Charles Jean la réduifoit à 9So livres,
& Jean-Jofeph Jean la portait à 1100 liv.
Les vendeurs n'éroienr pas mieux d'accord fur l'offre de
leur couun; l'un la fixait à 800 livres, & l'autre la portait
à 9So liv.
Les vendeurs & l'acheteur différaient encore filr la qualiré
des offres. Un des vendeurs convenoit qu'elles avaient été
fair es pour payer argent comptanr; les aurres ou aflèaoient
de n'en êrre pas inflruits, ou difoient qu'il n'avait Jamais éré
queflion de vente ni d'offre argent comprant, & IJu'ils avaient
toujours été déterminés à donner & à acquérir à no,uveau
ba il. ,
.)
,
'.
_ Ils différaient encore ou fil.r la vente & les enche;e's·, ou
fur les candirions. La mere difoir qu'elle les avoi,r égalem'ent
ignorées; Jean-Jofeph Jean ignoroit les candirions; Me.
Teiffier n'avait jamais entendu parler d'encheres que pour Je
nouveau bait; Charles Jean convenait qué la venre avait éré
propofée, les encheres ou verres , & les offres faites pour le
paiement êrre fait au comptant.
. ~
Sur le fecond fait, Me. Teiffier & la veuve ~~an avaient
répondu qu'ils n'avaient connu aucun concurrent; Charles
Jean avait convenu que fan couun avait fait une offre de
800 liv. cçmprant; Jean-Jofeph Jean avait dit que la mere
de fan couun avait fait une offre de 9So liv. Ces r,épo~fes
P!ou~oient déja que Me. Teiffier avait eu un inté,rêt à Iein,dre:
d'acquérir par aae de nouveaLl bail.
.
Sur le rroiueme, Me. Teiffier convenait' qu'il-avait - fait
porter de l'argent par fan fils à la baflide des lieurs Jean,
quoiqu'il s'en fallût bien qu'il y eût la fomme convenue, &~
q~'il comprât.cet argent à ceux-ci avant de parti'r,pôur ~rans"
0).1 l'aae fut paffé.
'. .
,Arzné;:s ~78~ & Z78:L.
K'k -,
•
�, J 0 U R. N A L
L<l veuve Jeâd avoir dit qu'elle n'avdit point reçu d'argent'
ni da'os fà: balli'de ni aiHeurs j'que Me. Tei1Iier lui avait feulement preté 6 au 12 livres, & qu'eUe d'avait été payée quecinq ou
mOIS après l''aéte.
Charle-s Jean com"e'noir que Me. TeilIier avoit comptéde l'argem ~ fa mere & 11 lot ballide, qu'il dit qu'il lui prêtoit, pe fachant paS' ce qu'il lui compta; & que le prix ne
fut payé que quarre du cinq mois après l'atIe.
Enfin, JealT-Jofeph Jean avait dit que Me. Teiffier n'avoit
point compté d'a"rgent à la bafiide; qu'il n'avait pas l'li qu'il
y eût été compté de l'argent à la mere; que les I2 livres
furenr comptées à Grans' fur le- bureau de Me'. Courlet, Notaire, &: que Me. Tei/Iier n'avoit p'oint encOre affranchi la
cenfive.
Tel était l'état des chofes, larfque Ie- premier Juge & le
I,ieutenanr ont prononcé. S'fis avaient bien médité cês réponfes, & en avaient faifi toutes les contradiétions, - ils
fujfem reftés perfuadés que Me. Te~/Iier a,'oit payé comptant re prix des immeubles le jour de' Paéte, & que la forme
du Dai! emphythéotique n'avait été donnée que' pOlir barrer
l'aél'ion en rerrait de celui qui avait concouru avec lui' a'ux encheres.
Ne leu-r' fuffifoit-il pas- en effet pdur fixer leur détermination, filr ce point, de favoir que di:' l'aveu' ce Me. Tèi/Ii'er il
avait fait porte'r de' l'argent pa'r fan fils le jour de i'aéte', &
qu'ils l'avaient compté avant d'~l1er paif'èr c'et aéte? Pourquoi Me. Teiffier aurait-il fai'rporrer cet argent par f<:in' fils,
s'il n'y avait· p'as eu' dans le' fac one fomme un pl"U confidérable? Pourquoi aàrdit-il fuir porrer cette femme, fi- ce
n~avait' paS' ire dans l'intention de- payede I1rix de l'acqui{jtion ? P,ou~quoi l'aurait-il cO'mvtée avant' d'aller pa,jfer J"aét'e',
fi ce n'etolt pour p'ayer' ce même prix?
'
V'an voit en apparen'çe un' bail emphyrhéotique; Mais s'il
efi'prouvé que les freres J'ean & leUT mere' n'ont voulu vendre
qu'au 'compram , ' que-Ies' offres' onr été; faites au compran! "
& que le fils de Me. TeilIier a porté de l'argent li-Hl baftide J
25 8
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PALAIS
DE
2.'f9
'PROVENCE.
,des v~ndeurs le jour m,ême du conrrat, p'dl-il pas évident
que les Parties n'Qn.t jamais eu qu'une volonté, ceUe de
frauder le retrait lignager, & de paffe.r un aél:e de velite
proprement diJ J fous le voile .d'un bail emphytéoti{jue,
f\lr-tout fi l'ou confi:dere .que la cenfe a été affranchie .quinze
jO\lrs .al"rès ?
La fraude ne peut être prouvée que· par des conjeél:ures j
parce que ce\lX qui veulent faire fraude travaillent de tout
leur pOlJvoir à la couvrir. Coquille, fur la cout. de NiveJ[i.
chap. 4, arr. 40.
Il eH cellement défendu d'affranchir 1a oenfe dalls·le·mê-me
lIél:e 01,1 dilM un temps affez, vo~Ün pel.Û" faire f(!)u;~ot1l1er 1;1.
fimulation, que ce Parlement a toujours jug-é qu'en ce cas
. & fIléme eo celui où il feroir laiffé une cenl@ tfOp modique
& qui fait préfumer la connivence, l'aél:e de bail feroit préfumé \lne vente pure & fimple, & le rerrait jtureit 1ieu.
M~. de Clapier, cauC I.S , quen. 2., rapporte d,!,s Arrêts
qui jugerent qu'en cas .d'un affran~'hiffèment total, ·oÙ' même
d'une légere cenlè, modico cenfu, & d'une grande a~cepta
tian d'argent, acceplâ magnâ pecuniœ qual1lirote, le retraie
avoit lieu. S'il en étoit aurrement, il ferait téllement facile
de tromper le retrayant féodal l$< lignager, qu'ils ne pour~
raient jamais trouver lieu à retraire.
Au contraire, Me. Teillier & Ces conforts réponùoient
que tout aél:e fait foi, juCqu'à ce que la fimulation dont on le
foupçonne fait parfaitement prouvée. Mais quel genre de
preuve doit-on aamerrre pour déclarer un aél:e fimulé? La
Loi 6, au code
dolo malo, l'indique affez ; dolum ex indiciis perfPicuis pro1Jari convenir, c'efi-à-dire, per indicio
urgentio, comme les luriCconfultes l'enfeignent fur cerre
Loi.
Ainfi, quoique la fimulation puilfe être prouvée par des
conjeél:ures & des préfomptions , ce ferait abuCer de la Loi
que de CoU!eoir que de fimples indices, des Coupçons indét.erminés, des conjeél:ures vagues, ont alfe7. de force pour:
donner atteinte à un aéle , ~ difliper la foi qui lui e{~ due.
ae
Kk
2.
�Jou Il. N A L
On' exige des préfomptions & des conjeél:ures qui, par
leur poids, leur nombre & leur qualité, préfentent au Juge
une certitude à Jaquelle il ne puilfe réÎlfier. II faut qu'elles
foient établies & inconte{lable~, qu'elles ne foient pas dé_truites par des préfomptions contraires; que ces conjeél:ures
foient appuyées, vraifemblables & prochaines, prohahiles
& verifimiles, proximœ & non remotœ, comme s'explique
Dumoulin, couc. de Paris, tir. l , §. 20,. gloff. 4, n. 6
in fine; que ces indices ne puilfent s'expliquer qu'en fuppofane l'aél:e fimulé-; que ce qui a précédé, fuivi, accompagné
le contrat) foit inconcïli'able avec la foi qu'il entralne par
lui-même, foit quant à l'objet, foit quant à la forme qu'il
préfente.
Auffi le Cardinal de Luca établir-il qu'il faut un concours
de préfomptions tel, qu'il forme un corps de preuve qui ne
Jailfe pas au Juge la liberté de doucer, 'lUIZ concurrelltes judicis facultatem adimunt, & qui enchalne fon jugemenr.
En llJfet , il efi airé de comprendre qu'il n'eü aucun contrat qui ne flIt expofé à être attaqué, & fouvent avec fuccès, ÎI l'on fe relâchoit de la rigueur de la Loi; s'il éroit
permis de porter atteinte à un aél:e, fous prétexte qu'il efi
fi!1'ulé, & fi la fimularion pouvoit être prouvée par des indices' vagues & incertains.
_ De-là \,ient 1°. que les fieurs Jean fe feront propofés de
vendre argent comptant, fans qu'il en réfulte cerre futile
conféquence, qu'ils ont fait un aél:e de vente déguifée fous
la dénomination & la forme d'un bail en emphytécfe.
De-là vient, en lècond lieu, que Me. Teiffier aura offert
jufqu'à telle fomme, fans que 1'011 puilfe en conclure que les
fieurs J.ean Jui ont fait une vente abfolue & à tel prix. Son
offre ne peut pas fe rapporter mieux à la vente qu'au bail
emphytéotique; la relation n'efi:pas plus connexe avec le
premier contrat qu'avec celui-ci. L'offre ne fuppofe pas plutôt l'un que l'autre, parce qu'elle peut également être faite
pour une vente comme pour un nouveau bail. Enfin, la
preuve de ces deux faits interloqués, ne tombant que fur un
, . .
260
•
�DU
PAL AIS
D E
PRO V Il Nell.
'
'2.61
projet de vente & d'achat au comptant, & non Cur l'exécution du projet, ne fourniroit abColument rien de concluant.
De-là vient, en troiGeme lieu, que la preuve du dernier
fait ef!: [Qut à la fois inconcluante & illégale. En effet, il el!:
contraire aux principes de vouloir altérer la foi d'un contrat
par un oui-dire d'autant plus [u[peét, qu'il ne vient pas de
Me. Teiffier lui-même; que c'el!: un fait ancien, que les
témoins n'avoient aucun intérêt à graver dans leur mémoire;
que c'ef!: un de ces propos tenus vaguement & par un jeune
homme [ans réfl~xion. Il el!: inconc1uanr, parce que le port
de cet argent fût-il auffi vrai qu'il ef!: fuppofé , ne donneroit
pas la preuve de l'exécurion d'un projet de vente.
Les prétendues variations, les contradiél:ions [uppo[ées
que le fieur Gafpard Jean a remarquées dans les réponfes
catégoriques de Me. Teiffier, de la Dame Leydet & de [es
enfdns, font bientôt expliquées & détruites, quand on pere
& calcule les déclarations qui y ont été faites, quand on
dill:ingue chaque perfonne des offrans, & chaque époque
des offres, enfin quand on conGdere que le fieur Charles
Jean dirigeoit feul les affaires de la [ucceffion; que [on
frere, abfent du lieu, fe repofoit entiérement fur lui de ce
[oin, & que la mere commune n'ayant aucun droit à cet
égard, ignoroit fi ces immeubles avoient été mis aux encheres pour être vendus argent comptant.
La vicinité du temps auquel Me. Teiffier a affranchi la
cenfe , ne fait pas [ufpeéter le bail emphytéotique. Quoique
la date de ce contrat foit du 2.0 Mai, & celle de la qùittance
du S Juin, il n'en réfulte rien contre la vérité de cet aéte.
Les divers baux à emphytéofe qui ont été produits, juHifienc
que le rachat de la cen[e équivalente au prix du fond qui efl:
convenue, outre le modique cens qui el!: fiipulé inextinguible avec direéte, efi faite quelquefois en totalité ou en
partie dans le même contrat où elle a été établie.
Le fieur Ga[pard Jean veut en vain [e prévaloir de ce que
fJivant Mt. de Clapier, cauf. IS, quefl:. 2, les nouveaux baux
faits accepcâ magnapecunia quancitatl: G' ,etento. modiço çenfu,
�~6~
1
ft. L
fom regardés .comme des ventes abfolues & fOllmifes aux
droits féodaux. Cet Auteur ajoure, n. 64, qu'en cerre ma":
riere Jla/ur w6itrio judicis, & que l'on doit fe décider d'après les différentes circonflances, perpe'ifis diligenter &
confiderafis cif'cumjlanciis rerum, perfqnarqm G' tem,porum.
Or, fi on confulte l'aél:e du 20 Mai {776, il porte tous
les cilraél:eres d'un bail emphytéotique. On y voit l'impofition
c;i'un cens, la rétention de la direél:e, & les droits qui en
dépende .os; la promeffe de ne point vendre au préjudice
d'icelle, de ne point détériorer, &c. Si on confidere 1;1
quirrance privée du S Juin, elle ne préfenre que l'alfranchiffement de la cenfe de SS liv. On n'y {rouve aucune tracl:
de l'extiE\élion de la direél:e.
.
La natljre de l'aél:e dl: donc toujours la même. Il ne ceffe
pas d'être un bail en emphytéofe,1\c de produire tous les droits
\Irrachés à la direél:e. Pour le détruire, il faudroit anéantir li).
c;lireél:e qui caraél:érife l'emphytéofe. Mais tant que la qireél:e
fubfiflera; tam qu'elle pourra produire aux b'lilleurs un droie
de lods en cas de vente, tam qu'elle leur réfervera un çJroie
de prélation, tam qu'elle foumetua le preneur à l'obligation 'de reconnoître & d'améliorer le fonds, l'aél:e dl! 20
Mai I776 fera regardé comme Un véritable bail emphytéotique. Ainfi il feroie autant injnile d'enlever ~ M.e. Tejffier une
acquifition qu'il a faite de bonne foi, que de priver les bailleurs de la direél:e qu'ils fI" fane réfervee, & qui ef!: encore
exifl:ante; droit véritablement utile, & done ils ne recevroiene aucune indemnité, fi l'aél:e étoic caffé & le retraie
admis.
En un mot, fi le ueur Gafpard Jean offrait de jufl:ifier la
fuppreffion de la direél:e & des droits y arr~chés, il pourroit
être écoueé; c'eH la feule preuve concluante, la feule favorable à fa demande. Mais celle qu'il a offerte, & que le
Lieutenant a admife, doit être rejercée comme abfolument
fruf!:ratoire & inutile. Sans preuve, fans préfomption conçluame, dépourvu de rout indice pertinent, fondé unique~ent [ur des conjeél:ures vagues ~ indétermiJ;\ées, do~t i\
0 U R N
�DU
PAL -;( l S
DE
PRO VEN C R:
'1.61
eire des conféqueoces forcées, fon appel ne préfènte'-t-il pàs
une témérité qui n'eut jamais d'exemple? Et q'uand mêhïes
ces prétendues faits laifTeroient quelque légere impreffion,
dans le douce il faudroit s'en tenir à l'aél:e, refpeél:er fon autorité, en maintenir l'exécution.
Par Arrêt du 20 Juillet 178 l , la Cour, fans s'arrêter à
la requête incidente en appel in quan'tùm contra de là Sentence interlocutoire du Lieutenant, déclaré par Gafpàrd
Jean, non plus qu'à fes fins fubfidiaires, faifane droit ~ l'appel'
de Me. Teiffier, la veuve Jean & fes enfans, mit leur appellation & ce dont éroit appel au néant; & par nouveau Jugement, là'ns s'arrêter à l'exploit de Gafpard Jean eo retraie
contre Nfe. Teiffier, & à celui en commune exécution
conere ra veuve & fes fils, mit ceux-ci hors d'infiance &
de procès, & GaCpard Jean fut condamné aux dépens envers toutes les Parcies. Ecrivant Mes. Perrinet & Barlet.
)
(
ARRÊT XXVI.
Le co-héritier 'lui ~ fait "des frais pour l'utilité commune,
pwt prétendre le rembourfement de la portion qui compete à
chaque co...héritier.
Ofeph Journet', du lieu de Chateaurenard, ne recevant
aUcune nouvelle de Fabre, fon oncle, domidlié au fort
Dauphin, ifre St. Domingue, fe détennina en 1777- à faire
le voyage. 1'1 apprie en arrivant qu'il ét6it mort depuis 1769;
il prir extra'ie morrùai"rc', &. retourna en Provénce. Journet
& les autres héritiers pr-océ"derent au partage de la fuccefftàn. Le 9 Mars 1'780 fourner fit a-j6urner pardevane la
Cout", en ufane du pr'ivilege des pauvres, Etienne Perrin ,.
comme fbridé de procuratio'n des autrës co-héritiérs-, pour
Ce voir con-damn"er au paie'ment de la f6mme de 207 livres ,.
Itlo'ntà"trt de- 1« rtlt>irié" d'èS" frahl' du' voyage, &. autres,
J
�DU
PAL -;( l S
DE
PRO VEN C R:
'1.61
eire des conféqueoces forcées, fon appel ne préfènte'-t-il pàs
une témérité qui n'eut jamais d'exemple? Et q'uand mêhïes
ces prétendues faits laifTeroient quelque légere impreffion,
dans le douce il faudroit s'en tenir à l'aél:e, refpeél:er fon autorité, en maintenir l'exécution.
Par Arrêt du 20 Juillet 178 l , la Cour, fans s'arrêter à
la requête incidente en appel in quan'tùm contra de là Sentence interlocutoire du Lieutenant, déclaré par Gafpàrd
Jean, non plus qu'à fes fins fubfidiaires, faifane droit ~ l'appel'
de Me. Teiffier, la veuve Jean & fes enfans, mit leur appellation & ce dont éroit appel au néant; & par nouveau Jugement, là'ns s'arrêter à l'exploit de Gafpard Jean eo retraie
contre Nfe. Teiffier, & à celui en commune exécution
conere ra veuve & fes fils, mit ceux-ci hors d'infiance &
de procès, & GaCpard Jean fut condamné aux dépens envers toutes les Parcies. Ecrivant Mes. Perrinet & Barlet.
)
(
ARRÊT XXVI.
Le co-héritier 'lui ~ fait "des frais pour l'utilité commune,
pwt prétendre le rembourfement de la portion qui compete à
chaque co...héritier.
Ofeph Journet', du lieu de Chateaurenard, ne recevant
aUcune nouvelle de Fabre, fon oncle, domidlié au fort
Dauphin, ifre St. Domingue, fe détennina en 1777- à faire
le voyage. 1'1 apprie en arrivant qu'il ét6it mort depuis 1769;
il prir extra'ie morrùai"rc', &. retourna en Provénce. Journet
& les autres héritiers pr-océ"derent au partage de la fuccefftàn. Le 9 Mars 1'780 fourner fit a-j6urner pardevane la
Cout", en ufane du pr'ivilege des pauvres, Etienne Perrin ,.
comme fbridé de procuratio'n des autrës co-héritiérs-, pour
Ce voir con-damn"er au paie'ment de la f6mme de 207 livres ,.
Itlo'ntà"trt de- 1« rtlt>irié" d'èS" frahl' du' voyage, &. autres,
J
�2.64Jou RNA L
qu Journet avoit fait pour l'intétêt de la [uccellion:
II foutenoit que d'après les Loix Romaines, celui qui
gere les affaires d'autrui, & qui à raifon de ce, fait quelques
dépenfes, en: fondé à prétendre le rembourfement des frais
qu'il a fait, & à exiger même l'intérêt de fes avances. Ainli
le décident les Loix qui font fous le titre du code & du digefie de negotiis geflis.
D'après le même principe, lorfque p!ulieurs ont un intérêt
commun, & que l'un d'eux fait des avances tendantes à la
confervation de la chofe commune, il a l'aérion negotiorum
geJlorum contre tous fes co-intéreffés, pour fe faire rembourfer
des frais qu'il, a été obligé de faire. L'un des affociés a le
droit de fe faire adjuger contre fes co-affociés la portion des
avances qu'il a faites pour l'intérêt de la fociété. Les cohéritiers qui viennent à procéder au partage de la fuccellion,
font tenus de rembcurfer à leur co-héritier la portion des
dépenfes qu'il a faites, & auxquelles toUS les communifies
doivent contribuer. L. 18 ,§. 3 , ff. famil. ercifc.
"
-En rapprochant ces principes de la caufe, il efi vrai de
dire que le voyage de Journet a rourné à l'inrérêt commun
des co-héritiers, & que c'eH par fon fait qu'on efi parvenu
à la connoiffance du décès de Fabre. Ce dernier é[Qjt décédé depuis 176-9 : .aucune nouvelle de fon décès. Il s'écoit
déja écoulé huir années, & le Procureur fondé continuoit à
jouir en vertu d'une procuration, dont les pouvoirs avaient
ceffés depuis long-temps. Journet fe dérermine à fe rendre
fur les lieux, & parvient par" fes foins à fe procurer les renfeigne mens néceffaires. Il rapporte l'extrait mortuaire de fan
oncle. Cette piece éclaire les co-héritiers fur leurs vérirables
intérêts, & cependant ils fe refufenr à rembourfer à Journet
]a portion des avances qu'il a faites pour une caufe aulli jufie
& aulli favorable: leur prétention contrarie trop les principes de l'étjuité pour pouvoir être accueillie. Pour être en
droit d'exercer l'aérion negotiorum geJlorum, il ne faut pas
avoir reçu les ordres de ceux pour lefquels on a géré. Cette
aétion compete même d'après les Loix à celui qui a fair les
affaires
�D U
PAL A l ~
D Il
PRO v Il Nell.
26 ~
affaires d'autrui contre [on gré. Si Journet avait été chargé
par les co-héritiers de [e rendre en Amérique, c'eU par
l'aél:ïon mandati qu'il [e [eroit pourvu, & l'aél:ion qu'il
exerce aujourd'hui dl: celle qui eG: connue dans le droit fous
le 'nom negotiorum g~florum. Ces deux aél:ions ne doivent pas
être confondues; elles ont des principes qui leur [ont
propres, & de l'application de[quels il ne faut jamais s'écarter; C'ef!: ainli qu'on le trouve décidé par l'Arrêt que Boniface rapporte, tom. 4, liv. 8, tit. ra, ch. 1.
On répondoit que les principes qu'on invoquait, éroient
vrais, mais qu'ils exigeoient quelque explication. Pour que
celui qui a géré les affàires d'autrui, [oit volontairement,
[oit en vertu d'un mandat, puiffe répéter les dépen[es qu'il a
fait, il faut qu'elles aient été faites à propos, qu'elles
{oient néce!f.,ires , ou au moins utiles, & qu'elles tournent
à l'avantage de celui pour qui l'on a agi, comme l'obferve
Domat en [es Loix Civiles, liv.2 , tit. 4, feél:. 2, §. 3 , d'aptès
la Loi 2 , ff: de negotiis geJlis. Il en ef!: de même des dépen[es
qu'un des co-héritiers peut avoir faites. Domat au même
endroit remarque que ces dépenfes font de trois [ortes;
celles qui fonf néceffaires, celles qui [ont utiles, & celles
qui n'ont été faites que pour le plaillr ou le [eul avantage de
celui qui a agi [ans néce!llté ni utilité pour les autres co.
héritiers.
~'~près ces principes, JOllrn.et prétend a;oi: été en
Amenque pour prendre des rehfelgnemens [ur 1eXlfience ou
la mort de Fabre. D'abord il ne paroit pas que ce voyage
• ait réellement été fait, & il n'en exifie aucune preuve. En
le [uppofant véritable, Journer ne pourrait en prétendre les
frais qu'autant qu'il l'auroit entrepris à la follicitation ou de
l'aveu des héritiers préfomptifs, ou qu'il en ferait réfulté
quelque profit, quelque avantage, quelque chofe d'utile
pOur. çes hériti rs. L'on ne voit pas que les Parties [e trou.
vent dans aucune de ces circonfiances. Il ne paroh pas- qlle
Journet fe (oit déterminé d'aller à l'Amérique à la priere o~
~ la requili ion des cQ-héritiers, pui[q\l'il 0''1 pu exhiber ni
4nnùs z78z & l78;)".
LI
�~"
J~URN.'L
aél:e, ni lettre qui indiquât un mandat de leur part; ni la
-plus petite adminicule de preuve qui pût le faire préfumer. Il
s'y efl: donc déterminé de lui~même, pour fon feul plai/ir,
pour fa feule fatisfaél:ion & pour fon unique intérêt, puifqu'il
ne paroiifoit alors que lui qui eût des prétentions fUr l'héritage: il croyoit être le feul héritier de fon oncle. Il elt donc
certain qu'il ne fit ce voyage que de fon pur mouvemenr ,
fans avoir reçu ni charge ni mandat de la part de qui que ce
fut. Il ne paroît pas non plus que ce voyage ait été utile ou
avantageux aux co-héritiers; le feul avantage que l'on fuppofe, c'eR qu'il apporta l'extrait mortuaire, enfuite duquel
les héritiers de ce dernier fe mirent en poifellion des biens.
Sur quoi l'on peu! remarquer qu'il n'éroit pas befoin que
Journet fit le voyage de l'Amérique pour aller chercher à
grand frais cette piece; on pouvoit fe la procurer par une
voie plus /impie & moins difpendieufe. D'ailleurs, l'extrait
mortuaire ne fuffifoit pas pour aurorifer les Parties à réclamer
fes biens; il falloit juHifier d'une palot de fon décès, & de
l'autre qu'il n'avoit point d'enfans. Ce n'éroit qu~après avoir
confl:àté ces deux faits, que les collatéreaux pouvoient fe
mettre en poifeHion des biens du défunt. Journet n'ayant
fourni que la preuve du premier, par l'extrait mortuaire,
cette preuve étoit imparfaire & abfolument inutile. Les héritiers ne font parvenus à jouir de la fuccellion de leur oncle
que quand ils ont eu les autres pieces, qu'ils fe font,procurées
d'ailleurs.
On ajoutoit que Journet étoit non-recevable fur plulieurs
moyens: 1°. Quand le Procureur fondé rendit compte de
fon adminiHr;uion aux héritiers, du nombre defquels émit
Journet, on lui admit les 104liv. qu'il avoit payées à Mr.....
pour faire venir de l'Amérique les titres dont ces héritiers
avoient befoin. Journet reconnut par-là que ces titres étoient
vraiment utiles & néceifaires; & en allouant la dépenfe qui
avoit été faite à ce fujet, il renonça au moins tacitement
.aux frais de fon voyage, lors duquel il n'avoit rapporté
qu'une de ces mêmes pieces : 2.°. S'il eût cru être fondé à
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PAL A 1's
DE
PRO v B N C B.
"l.6i
réclamer ces frais, il n'auroit pas manqué de faire valoir fon
droit lors de l'aél:e de partage. Il n'en fit rien; il fe contenta d'inférer à la fin' une protel1:ation vague, tandis qu?il
s'étoir. obligé purement & fimplement eovers les autres héritiers ,& Etienne Perrin, qui, les repréfentoit, pour les
3'86 liv. 10 f. de la plus value de la portion de l'héritage qui'
lui étoit obvenue.- Cetre' vaine protel1:ation étoit démentie'
padui.même" contraire à l'aél:e & à fon obligation: 3°. Après
le partage Journet p'aya'enl très-grande partie la fomme dont
il. avoit' été d~claré' dé(jiteur. n avoit donc perdu de vue &'
avoit abdiqué fa, friv-ole' proreHation. Comment a-l'-il pu faire
revivre dlins la- fuite une prétention chimérique qu'il n'avoit
pas ofé faire valoir dans le temps, & à laquelle il avoit renoncé plufieurs fois & en plu1ieurs manieres?
Arrêt du 20 Juillet 178 l , au rapport de Mr. le Confeiller
de Montvallon , en faveur de Journet, avec dépens. Ecrivant
Mes. Mouans & Bovis.
ARRÊT
XXVII•.
Sur la p'éremption d'inflance.
La préfentation couchée dans le regifire par la Partie elle~m(nze
efi-eLlé'légale ?E J 5 Décembre 1774 Jean-Jofeph Perrin, Négociant'
du. lieu de Cabtiés" fit affigner pardevant les Officiers'
dll-lieu' Louis Ricard, Maître en Chirurgie, en condamnation
de la fomme de' 411 2.. liv. Ricard coucha lui-même .[a préfen~
tation au Greffe le 22 du même mois; il déclara vouloir
occuper en propre, & propofer des compenfations à la de~
mande. Cerre caufe demeura impourfuivie jufques au 9 N04
vemo-re 1718, temps' auquel, Perrin' tint un aél:e extrajudi
ciaire à. Ricar.c!·,- portant' interpellation de préfenter dans huiw
taine. précifêment fur Faffignation ,. avec déclaration q\l'en
L
4
,
-
LI~
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T6uRNAL
cas contraire, il feroit fiatué fur la denlande àu profit du
défaut. Ricard r~pondit qu'il avoit préfenré dans fon temps
fur l'affignation, & que s'érant palfé environ quatre ans
fans pourfuite, l'inllance éroit périmée; il lui déclara qu'il
ne défendroit point au fonds. Un pareil aae & une pareille
réponfe furent renouvellés le 14 Décembre fuivanr. Perrin
fit fommation à plaider; même réponfe de Ricard. Il intervint une ordonnance, portant av~ration des billets. Seconde
fommation à plaider, même réponfe. Sentence du 17 du
même mois, qui condamne le lieur Ricard au paiement de
la fomme demandée. Appel pardevant le Lieutenant d'Aix,
qui la confirma par fa Sentence du 20 Septembre 1780. Appel pardevant la Cour.
On difoit pour Ricard que la celfation de pourfuites pendant trois ans opere la péremption de l'Inllance. Le Réglement de la Cour du i) Mars 1672, tit. des pùemptions,
n. l , conforme à l'Ordonnance de Charles IX de I)63 ,
contient cette difpolition expr.e/fe.
La feule difficulté qui fe fait levée à cet égard, a éré de
[avoir de quel temps il falloit comprer les trois années. Dans
prefque tous les Parlemens du Royaume on les fait remonter
au jour même de l'exploit d'affignation , & on fe fonde fur
l'Ordonnance. On juge, ainli que l'attelle l'Auteur du Journal
du Palais, tom. 2 , pag. 493 & 8 l 0 , que l'ajournement luimême ell fujer à péremption, quoiqu'il n'ait pas éré fuivi de
préfenrarion. Parmi nous il y a toujours eu une Jurifprudence
conrraire ; mais elle a varié. Dans le principe, pour donner
cours à la péremprion, il falloit que l'inHance fÎlt liée par
la préfenration des Parries. lta Julien dans fes Nores manuf-.
crires, & Mourgues en fon Commenraire fur le Statur. Au-.
jourd'hui, &- depuis le Réglemenr de 1672, il n'efi plus
néce/faire que les deux Parries aienr préfenté; il filflit que
le défendeur aie rempli cette formaliré.
D'ailleurs, lors même qu'en regle générale il faudroit
que les deux Parries eu/fenr préfenré au Greffe, cela ne
feroit pas néce/faire dans les Jurifdiaions Seigneuriales, où
la confiitution de Procureur faite dans l'expIo'it d'affignation
�DU
PALAIS
DE
PICOVRNCJ!;
'1.69
'tiént lieu, 'depuis l'Ordonnance 'de 1667', de prêfemation
pour le demandeur. Ainfi la Loi de la péremption, éranr aufIi
cerraine qu'elle efl:, du moment que le remps s'ell: écoulé,
l'inl1:ance ne fubfiL~e pas plus que fi jamais elIe n'avait été'
inrroduire.
,
Perrin, _pour ·éluder l'effet de la péremption, foutient que
Ricard étant le Greffier ordinaire de la Jurifdiél:ion, n'avait
pu écrire lui-même fa préfenration dans la matricule du
Greffe. Pour repouffer ce moyen, on difoit pour Ricatd que
les premiers élémens de la Prarique enfeignent que la préfemation ell: un aél:e de la Panie elle-même ou de fan ProC!lreur, & nullement celui du Greffier. Se ptéfenter, di,c
Jouffe , filr l'arr. 1 du rir. 4 de l'Ordonnance de 1567, n. l ,
eft corel' fan nom & celui de fan Procureur fur le cahier des
pdfentations. C'el1:, fuivant Radier fur l'arr. 2 de la même
Ordonnance, un aél:e fait au Greffe !;le la Jurifdiél:ion
du Juge devant lequell'affignation eLl: donnée, par lequel un
Procureur de cerre Jurifdiél:ion déclare fe préfenrèr pour.......
On ne trouve nulle part que le minil1:ere du Greffier fait
n~çeffaire pour cerre opération. 'L'Ordonnance & 'le Réglement ne lui impofenr feulement p~s l'pbligation de l'écrire.
Ils fuppofent par conféquent que la Panie, ou fan Procureurpeuvent le faire eux-mêmes. Les fonél:iotls du Greffier font
bornées à repréfenrer la matricule dont il el1: dépofiraire à
tous ceux qui fe préfenrent au Greffe pour y infcrire ou faire
infcrire le nom qe leur Procureur, & il ne concourt ni de
près ni de loin à l'aél:e de préfentation. II peut comme toUt
autre'l'écrire de fa main. Il fe charge même .prefque toujours
de certe peine; mais il le fait volontairement, puÎfcju'aucune'
Loi ne l'y oblige. Si le Greffier peut laiffer à la Partie ou au
Procureur qu'elle-charge de fa défenfe, le foin d'écrire la
préfentation dans la marricule , il faut en conclure que, quand
il le fait lui-même, ce n'efl: pas en fa ,qualité de Greffier,
mais uniquement par honnêreté. Dès-lors, comment fuppo- .
fer que Ricard a été fufpeél: d'écrire la fienne-?' .
Qu'importe que Perrin ait connu ou ignoré certè préfen~ •
�');70
Jou RNA' L
•
ration ? Il ne tenait qu1à lui de parottre au Greffe' pour vé~:
rifier s'il y en avoie une. D'ailleurs, il eft auffi non-recevable que mal fondé à quereller la préfentatio'n, parce qu'il
l'avait expreifémene .approuvée, en pourfiJivant conlfadiétoirement, fans en exiger une autre de fa part. Au furplus, la
fignification des- préfentations· n'eft point néceifaire pour
leur validité, à· moins· qu'elles ne foient mifes après tous les
délais de l'affignation, conformément à l'art. 3 dts défauts.,
du Réglement de la Cour de 1672. Elle n'ajoute r·ien à cet
aéle , qui refte après. la fignification le même qu'il éroit
avant.
Perrin, excipe de fan a8:e inrerpellatif. Mais quel en fut_
l'objet? Ge. fut d!obliger' Ricard à mettre fa préfentation au
Greffe ',. &; de lui annoncer que. s'il ne le faifoit pas dans· la
huitaine, on· prendrait un défaut contre lui. li n'a point mis
de préfentation, & cependant on n'a point inHrùit dé défaut; au contraire ,. on a agi contre lui de la même maniere
qu~on' l'auroit fait s'il avoit déféré à cette interpellation', On
a donc reconnu qu'il exiftoit une préfentation, qui n'étoit
pas moins réguliere: que fuffifante; E'eft· fur cette préfencation
que' Perrin a pourfuivi.; il l'à donc approuvée.
La· pérempt.ion- (continuoit Ricard) eft une prefcription
comme routes les aut'res-;·quand elle eft accomplie, il n'exifte
pas plus d?infiànce qu'il' n'ex·ifl'e d'aétion à celui qui ne l'a pas
introduite dans;le témps'préfini par· la Loi. Telle eft la difpolition dé l'Ordonnam:e de Eharles IX, de l'an 15§3, &
celle du R~glementJ derJa Cour.
Il nlen pas'nécelI'aire' pour faire prononcer la péremption,
de faire ajourner là Part·ie, Le Réglement ne requiert Fa"
journemenc qu'en. matiere d'appellation de Sentence donnée
en contradiél:oire Jùgeme-nc; parce que comme la péremprion emporte dans ce cas, la confirmation dè la Sentence;
&. qu'un Juge me-u t' att-aqué par la voie de l'appel ne peut
êtTe confirmé que p31' un autre, il faut n~é:eŒlirement' le'
faire rendre. Il n'en ~ft pas de- même en premiere int~ance,
parce qu'alors- la péremption tombe en fimple ex-ception ~
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PA I. AIS
DI:
1'.Il 0
V H Ne!.
''2.71
cene n'eft qu'une fin de non-recevoir, que le défendeur faie
'v.aloir contre les pourfuites., & .qui n'exige pas l'introdutl:iorl
d'une qualité. Ici les deux Sentences ont fait revivre une
inHance qui étoit anéantie par la péremption, fans même
avoir jugé ni vérifié fi la péremption étoit ou n'étoit pas
acquife; ce qui forme une nullité d'autant plus grave, qu'elle
attaque diretl:ement la difpofition des Loix publiques. L'arr.
~ du tit. ) de l'Ordonnance de 1667, en ordonnant que
dans les défenfes on emploira les fins de non-recevoir,
nullités des exploits ou autres exceptions péremptoires,
ajoute: pour y étre préalahlement fait droit. Le Juge de Cabriés s'eH-il conformé à la difpofition de cette Loi? Le
Lieutenant l'a-t-il refpetl:ée? Ils ne l'ont fait ni l'un ni
l'autre; tous les deux ont palfé à .l'examen du fonds, &
l'ont jugé fans fe mettre en peine de la :fin de 'non-recevoir ,
que la péremption acquife fournilfoit.
On convenoit pour Perrin, que la celfation d.es'pourfuites
pend~nt trois ans opere la péremption ,d'inHance; qne pour
qu'elle ait cours, il fuffit, dans les JuHices Seigneuriales,
que le défendeur ait préfenté. Mais ( difoit-on) il eft uniquement quefiion de favoir fi la préfentation de Ricard eft valable ou non. Or, ou cette préfentation eH bonne, ou elle
eH illégale. Au premier cas, Ricard n'a pu acquérir la péremption, parce qu'il ne l'a pas propofée de la maniere qu'il le
devoie ; parce qu'elle a été couverte par l'aél:e interpellatif
da 9 Novembre 1778; parce qu'enfln elle a été interrompue
pade défaut de Lieutenant de Juge.& de Greffier, & par les
divers comparans en fubrogation de nouveaux Officiers. Au
fecond cas, la pér.emption ne peut être opérée que par l~
préfentation au Greffe, qui feule lie l'inHance.
Perrin' fe trouvoie dans l'impoffibilité de pourfuivre fa demande, puifque le Lieutenant de Juge avait couché fan
àbllention en 177), mais il avoit fait de nouvelles
pourfuites·en 1778. Il eH cerrain que le défaut de Juge ou
d'une feule perfonne nécelfaire pour le Jugement d'un pro.(lès, f~ffic pour interrompre la péremption. D'après cous Iles
•
�"17'- Jou R. N A L
Auteurs, la péremption celfe d'avoir fo"n cours toutes les'
fois que par 'quelque événement les pourfuires fe trouvent
néce!fairement interrompues; comme par la mort de l'une
de, Parties ou de l'un des Procureurs, & par la !impie muration de perfonnes néceffaires dans l'In!l:ance. Donc, le
défaut de-Lieutenant de Juge & de Greffier, fans lefquels le
procès ne peut ni s'in!l:ruire ni fe juger, e!l: un aél:e interruptif de la péremption. Quelle Ju(bce y auroit-il qu'un
créancier qui réclame un paiement légitime, & qui e!l: arrêté
dans le cours de fa demande par le défaut d'Officiers, fÎlt
refponfable d'un événement qui ne dépend que des circonfrances, & qui ne peut lui être imputé?
D'ailleurs, la péremption n'e!l: pas acquife ipfo jure; il
faut la faire prononcer. Il ne fuffit pas de la propofer par
voie .d'exception, il faut en faire une demande précjfe.
Ainu le décide Ferrieres dans fon Diél:ionnaire de droit &
de pratique, verb. pérempûon; & ai.nG il fut jugé par Arrêt
du 2~ Décembre 1779, à l'audience des Pauvres, entre
Augu!l:in TO.!J1me, d\l lieu de Valbelle, contre Nicolas
Tomme, du lieu de Peipin, fur la plaidoirie de Mes. Graffan & Jauffret.
Il ne faut pas co.nfondre les regles qui régilfent la péremption, avec celles des autres prefcriptions. Les motifs
qui ont fait introduire _la prefcription, one été d'alfurer
les fortunes des particuliers, en fixant l'incertitUde ~es domaines; d'obvier aux procès que pourroit faire naître cette
incertitude, & de punir la négligence de ceux qui ayant des.droits acquis, tardent trop à les faire connoÎtre & à les
exercer; mais la péremption n'a été fondée ni pour le même,
objet ni fur le ,même motif. Au premier afpeél: fon but paroît favorable, en ce qu'elle tend à mettre des bornes aux
procès, ne penè lites fiant inWlOrtales•. Dans le fonds elle db
odieufe, en ce qu'elle rermine un procès, & oblige en
1llême-temps la Partie à en introduire un autre pour le même
objer. Enfin la prefcription, en [aifant périr l'aél:ion , .met
\ln terme aux comeftatiQns des' pa.rticuliers. La péremptifl1 ,
en
�DU
PALAIS
D~ PROVENCE.
273
en n'interrompant que les procédures & en ne détruifant pas
l'aél:ion, multiplie les procès au lieu de ies terminer;
voilà pourquoi cette efpece de prefcription efl: l'egardée
comme odieufe , & tient à des principes paJriculiers; voilà
pourquoi elle n'efl: pas acquife de plein droit par le feul laps
du temps, & que celui qui veut s'en fervir doit la propofer
par une demande di!l:inél:e & féparée. Ce principe efl: attefl:é
par tous les Auteurs.
L'on fait qu'il y a une différence entre la péremption
d'appel & la péremption d'infl:ance. Celle-ci n'empêche pas
que l'on ne puiffe de nouveau intenter l'aél:ion , fi l'on el!:
encore dans les trente ans. La péremption d'appel au contraire éteint tout; de maniere que l'appel étant une fois
péri, il n'efl: plus permis d'appeller de nouveau, quoique
l'on foit enc?re dans le temps que dure l'aétion. C'eU la difrinétion qu'apporte Ferrieres, verb. péremption d'appel;
mais cette difl:inétion n'a point de rapport dans l'hypothefe
préfente, & la péremption d'in!l:ance doit être demandée,
& ne peut être fuppléée par le Juge. Ita Jou(fe, fur l'Ordonnance de 1667, tit. 27, art. ) , aux notes, & le nouveau Commentateur du Réglement de la Cour.
Il ne fuffifoit donc pas à Ricard de répondre au bas de
l'interpellation qui lui fut faite, qu'il avoit préfenré, &
que l'inll:ance étoit périmée, ni de renouveller cette exception au bas des fommations à plaider. Dès qu'il s'apperc;ut de celle péremption, il devoit faire ajourner Perrin,
ou préfenrer une requête au Juge pour la faire prononcer. JI
devoit au moins remplir celle formalité, lorlqu'il fut imerpellé de préfeuter. Telle efl: la route qu'il faut tenir, lorfqu'on veut jouir du bénéfice que procure la péremption. De
ce principe, il fuit que la péremption dont s'agit ,,' été
c.ouverte par l'aéte Înrerpellatif de Perrin à Ricard de préf"nter fur l'affignation. Quoique celle interpellation n'ait écé
fJire qu'après les crois ans du jour de l'affignacion, elle
n'interrompt pas moins la péremption, parce que n'ayant
p.oint encore été propofée de la pan de Ricard, & n'ayant,
,Annùs 1781 (/178:1..
Mm
�ry~
JOURNAL
commencé li: l'être que pofiérieurement à cette fommation ;
elle n'érait point encore de plein droit. On ef!: fondé à
fou tenir auffi, que fi le moindre aéle de procédure, même
{urabondant, opere l'interruption, comme l'enfeignent Ro...:
dier & Dunod, les comparans en fubrogation tenus par
Perrin avant l'expiration des trois ans, ont fuffi pour interrompre. On ne peut pas dire que des aéles tenus de la part
d'une Partie pour fe procurer un Greffier & un Lieutenant de
Juge, foient des aéles inutiles & furabondants; ils font au
contraire des aéles néceifaires, & qui annoncent de la part
de celui qui les fait une volonté bien expreife de pourfuivre
& de ne pas fe défiaer.
L'on avait fomenu dans tout le cours des défenfes de
Perrin, que la préfencation de Ricard érait nuite; parce
qu'étant Greffier ordinaire de la Jurifdiélion, il n'avait pas pu
dans fa propre cauCe. préCenter dans la matricule du Greffe,
dont il était lui-même dépofitaire. L'on avait établi que cette
déclaration au Greffe n'ea pas valable, fi elle n'ea acreflée
par le Greffier; que ce n'ea que cerre atreflation de l'homme
public qui lui donne l'authenticité néceJ[aire, & que s'il en
était autrement, il réfulterait toute forte de fraudes de la
liberté qu'auroit la Partie de préCencer Cans l'interpofition du'
Greffier. L'on ne difconvient pas que la Panie ou fan' Procureur ne puiifenc écrire eux-mêmes la préfentation ; mais
il faut raujours que le Greffier attelle qu'un tel s'eŒ préfenré;
& même dans l'ufage. du Siege d'Aix, le Greffier écrit raut
& figne feul les préfenrations. Quand l'Ordonnance & le Réglement de la Cour difent que les défendeurs feront tenus
de fe préfenter & coter le nom de leurs' Procureur fur le
cahier des préfenrations, ils défignent par-là que la Patti~
ou le Procureur one la liberté d'écrire eux-mêmes leur préfentation; mais ils n'ont jamais entendu difpenfer cet aéle de'
.
la préfence & de l'arrefiation du Greffier. .
Perrin a fait une procédure réguiiere & conféquente en'
pourfuivane conrradiél.oirement, après avoir renu les aéles.
imerpellatifS. & dé feimma~ioc! à" plâider. Pouvoit-on, au'
�D U
PAL AIS
D ~
PRO V ~ NeE.
2.7~
préjudice de la préfenration communiquée, infiruire un défaut conrre Ricard? Que cette préfenration fût légale ou non.,
.cela était alors indifférent, & il n'étoit pas quéfiion de
difcuter fur fa validité; il fuffifoit que Ricard eût répondu
qu'il avoit préfemé, & qu'il exhibât cette préfenration,
.dès-lors Perrin devoit pourfuivre comradiaoiremenr. Ce n'a
été que quand on lui a oppofé la péremption en cilufe d'appel,
& que la quefiion fur la validité de la préfemation a été engagée entre les Parties, qu'il a foucenu que la préCenratioll
de Ricard était illégale; que par conféquent elle n'avoit pu
lier l'inllance à l'effet d'opérer la péremption, mais pardevanr les Officiers de Cabriés, oÙ il ne s'agilfoit pas de pérem pt ion , où Ricard ne l'avoit oppofée que par de fimples
réponfes au bas des fommations, au lieu d'en faire pne qualité
difiinae & féparée, Perrin ne pouvoit ni ne devoit s'arrêter
à conrefler la validité de la ,préfenration, Cette préfentation
a donc fuff] pour l'au tarifer à faire une pourfuite contradictoire vis-à-vis de Ricard; mais elle
impuiifante pour faire
courir les trois ans de péremption.
Arrêt du 20 Juillet 1780, au rapport de Mr. le Confeiller
du Poet, qui déclare l'aae de préfentation nul, & confirme les Sentences, avec dépens. Ecriv.ant Mes. Verdollin
& Jauffret.
ea
ARR Ê T
X X VII I.
La quarte falcidie que fhéritier prend fur les legs, ne peut
faire partie des hiens compris dans l'inJlitution Ulzivedelle
ni du fidéicommis, dOllt l'inJlitution univerfelle eJl grevée ;
fi h retranchement qui a lieu fur les legs eJl au profit de
l'héritier, fi non du fidéicommiffaire.
Ie,rre-Simo.n Gilly, Négoci~nt, de la ville de Marfeille,
d.fpofa de [es bIens le 9 FeVrier 1777. Il fit des legs
pour .]e .monta.ot de 5700.00 lines, encre autres un de.
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Jou R N _, L
300000 liv. ~ l'enfant dont la Darne Laplace, [on époufe';
éroit enceinre; & dans le cas où cet enfant viendrait à
mourir en pupillarité, il lui fubflirua les fieurs Eydin & les
DlIes. Pallés & Vague, pour parrager également le
legs. Il inllirua la Dame Fran<;oife Eydin , fa mere, fan héririere univerfelle; il lui (ubllicua l'enfant dont fon époufe
éroit enceinte, & venant cet enfant à décéder avant fan
ayeule, il lui fubflitua les ,fieurs Eydin, DlIes. Paillés &
Vague, pour partager également.
La Dame Eydin fut héritiere par inventaire, & demanda
la quarte falcidie fur les legs & le retranchement des I"gs au
fol la livre. Elle décéda le I l Novembre 1778, après avoir
légué la légitime à Simon-Balthafar Gilly, fan perit-fils, &
tour fan mobilier, & après avoir inllicué fon héritiere univerfelle Claire Gilly, fa fille, époufe de Me. Correard, avec
fubflitution entiere & fan~ détratl:ion de quarre en faveur de
fon petit-fils, & ~ défaut, en faveur des trois Hôpitaux généraux de la ville de Marfeille.
La Dame Correard pourfuivit l'inflance bénéficiaire; il
:interv'int le 23 Mars 1779 une Sentence, par laquelle SimonBaltha(ar Gilly fut rangé au fecond degré pour fa légitime;
la Dame Eydin, veuve Gilly, repréfencée par fa fille, fut
rangée au qua trie me degré pour le montant de la quarre falcidie qui lui revenoit fur l'hoirie de (Oll fils.
Simon-Balchafar Gilly mourut peu de temps après en pupillarité. Ses droits, quant au legs de 300000 liv. qui lui
avoit été fait par (on pere, & quant à la fubflitution appo(ée
en (a faveur dans l'inflitution de la Dame Eydin, (on ayeule,
pa1ferent fur la tête des fieurs Eydin, DlIes. Pdillés & Vague, qui lui avoient été (ubflitués pupillairement; & tes
droits, quant au legs du mobilier qui lui avoit été fait par
la Dame Eydin, pafierent fur la tête de l'hôpital de
la grande Miféricorde, héritier (ubflitué. La Dame Claire
Gilly, héritiere de la Dame Eydin, (a mere, décéda (ans
eofans, après avoir inflicué Me. Correard , (on mari, (on
Mritier univerfeJ. Son décès donna 1.ieu au fidéicommis fait
'l.7 6
�I!:
DU
PAL AIS
D B
PRO VEN C
277
par fa mere en faveur des trois Hôpitaux généraux de Marfeille; ceux-ci demanderent contre Me. Correard l'ouverture du fidéicommis & la liquidation des biens fubll:itués.
M~. Correard appella au procès les fleurs. Eydin, les Dlles.
PaIllés & Vague, pour venir voir déclarer communes &
exécutoirés contr'eux les Sentences qui interviendraient &
tout ce qui pourrait s'enfuivre.
Les trois Hôpitaux ayant manifef1:é J'intention dans laquelle ils étoient, de comprendre dans la maffe des biens
de la Dame Eydin, veuve Gilly, qui leur étoient fubf1:itués
les 9133'; liv. 2 f. 7 d. qui lui avoient été adjugées pour
fa quart~ falcidie, les fleurs Eydin Freres, les Dlles. Paillés & Vague prétendirent que cerre fomme devoit leur être
délaiffée comme fubfiitués. Dans ces circonfiances le procès
fut évoqué pardevant la Cour.
On difoit pour Me. Correard & les Direéteurs des trois
Hôpitaux, qu'il s'agiffoit de favoir fi, lorfque le tell:ateur
a épuifé fa fucceffion par des legs, en forre qu'il ne refie
rien pour compafer l'hérédité fubfiituée, la quarte falcidie
acqllife à l'héritier grevé [ur les legs doit compofer la maffe
des biens fubHitués, fauf la détraélion de la quarte trébellianique en fa faveur.
Depuis que nous avons ·des Loix fUr la matiere des fubftitutions, il a été fait b~aucoup de traités. Une foule de
Doéteurs fe fane fucceffivemenr appliqués à prévoir & à
réfoudre tous les cas poffibles; mais l'on peut affurer que la
majeure partie n'a pas feulement eu l'idée d'examiner, fi
lorCqu'une hérédité CubHituée refl:e infruétueufe, attendu Id
multiplicité des legs, la quarre falcidie acquife à l'héritier
[ur les legs devoit lui être .enlevée après coup, pour en comparer l'hérédité fubfiituée; ils ont cru qu'il n'était pas poffible qu'on imaginât jamais de compafer une hérédité au
profit des fuhfl:itués, d'une quarre falcidie prife fur des legs
'lui ne fijfoient pas parrie de l'hérédité fubfiiruéè, 1 &
qu'on voylÎlt. dépouiller l'héritier d'u'n. patrimoine .acquis
éxtra h/?i-,ditat,m, pour le départir'
.J._.à, des_ fubfiir\.lés.:qui
1
�lL7 S
,JOURNAL
écoient '1Ppellés pour ·recueilli·r coute autre 'partie des
biens.
Il écoit autrefois permis aux tellateurs de n'inllituer un
héritier que pour la forme, &. de difpofer de fes biens
par .Iegs, de maniere qu'il ne reflât à l'héritier aucun bé~
néfic~ de l'in!J:itution. Telle ellia difpofition de la Loi des
douze tables. On reconnut bientôt l'abus de cet-te exceffive
liber.té accordée aux tellateurs , parce qu'il arrivoit fouvent
que Jes 'hé'ritiers s'abllenoient des hérédités, ou les répuçioient " plutôt que de· confentir à être revêtus d'un titre
illufoire} par-là les tellateurs écoient privés de l'honneur
de 1aiffer un héritier. On flatua qu'à l'avenir les tellateurs
ne po'urcoient plus léguer que les trois quarts de leur p.atrimoine, &. ·que l'autre quart refleroit en propriéré à l'héritier : Cum enim olim lege duodecim tahularum, lihera erat
legandi pot41as, lit liceret vel totum p,atrimonium legatis erogare : quippe cum ea lege Ïla cautum 4fet : uti quifque legaffit fuœ rei ,. ita .res ejlo :vifum ,ejl hanc legandi licentiam
coarc1are : id(jue ,ipfoFum tejlatorum gratiâ provifum ejl, oh id
quod pleru,mque intCftati moriehantur, recufantibus fcriptis hœredihus .,. pro nulla, aut minimo lucro hœreditates adire..... novi[fimJ lata efl lex falcidia, quâ cavetur ne .plus legare licea~
fluant ·dodFantcm ·totqrufn honorum! id efl, ut five unus !Lœres
injlitfJtlIs fit, fiv.e pillres, apud eum eofve pars quarta remaneat. (.InUir. lib. 2, tit. 2.2, de ·lege falcidia in prœm.)
. ~:f~l: ~on,c . de la Lo~ (l~ta eji tex falcidia) qu.e .l'héptler ltl{btu~ tient I~ drOit de .prendre la quarte falcldJe fur
les legs qui êpuilènt tbute la, fucceffion. C'eU donc pour
l'iht.érêt des tella·teurs (tejlatprum gratiâ) bien plus que pour'
celui de I~héritier, -que ce dro.it de quarte fakidie a été concédé par la L0i. C'ell donc pour déterniiner les héritiers
par l'appas d'un bénéfice, à accepter les fucceffion.s de ceux
qui les ·jnjlitu,Gient, qu~ ce droit de -quarte leur a été
a1fu~é~ Qr, fi la ~oi~ll~dé.parti la quarte falcidie à tout héritier d\une ifucceffion -épuifée pllr les legs; fi elle a .été déter~
in!né.e,p.àd'ioté.t'~t des.t.efl:~teurs, &. fi ;eIle .avoulu .amure.et.
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PAtAI~
DIl
'179~
PROVIlNCY!:
les héritiers p~r l'efpoir d'un bénéfice' affuré, il elr fenfiblequ'elle a accordé cerre quarre en toute prop.riété comme'
étant la récompenfe due à l'acceptation.He l'llérédité, & iitévocable ment acquife à l'héritier.
.
Tout héritier d'UlYe fucceffion grevée de legs qui l'ab.
(orbent, eH encore aurori(é parmi nou's, par la même Loi'
fàlcidie , à diflraire 1" quarre fm les legs, à moins qu'il'
n'ait accepté J'hoirie purement & fimplement, parce .qu'a-'
lors il a contraélé envers les légataires l'obligation de les'
payer; il eH alors cenfé avoir renoncé au bénéfice de la
Loi falcidie. Il eft vrai que depuis la Nbvelle
cap.
verl: fi vaG, le teHateur peut prohiber_d'une maniere ex-'
prelIè à fon héritier de retenir la quarre falcidie; mais il
n'èn ell: pas moins vrai, que lor(què cerre prohibition expréffe n'a point été faite, la Loi falcidie a (on plein &.
entier effet, & adjuge à l'héritier en propriété, & à titre
de récompenfe pour (on acceptation, le quart de' l'hérédité abfo-rbée par les legs.
Si quelques AurellCs ont cru que la prohibition tacite pouvoit'(uffire vis-à-vis des héritiers collatéraux & étrangers,
ils ont formellement parlé contre la teneur de la Novelle l ,
qui exige que la prohibition (oit expreife, non-feulement visà-vis des héritiers defcendans & légitimaires, mais encore'
vis-à-vis des héritiers collatéraux & étrangers, pui(qû'elle'
ne fait aucune diHinélion. Si vera exprejJbn drjigTlave'rjr non ,
velle hœredem retinere fàlcidiam, necijJàrium if!: tif!:atoris'
valere fententiam, &c. D'ailleurs ils D'OC tous ràifunnés dàns'
les cas où le tefiateur avoit o1fligé l'héritier dé payet les legs'
inûers, ou lui avoit prohibé d'accepter l'hoirie par lfénéJice'
d'inventaire, àu lui avoit ordonné dé tOlit payer jans détrac"':
tion. Ita Fchri'eres', (ur le$ quo
&
de Guip'ape ;
Maynard, liv. )", ch. 31; ~atelan, liv. 2, ch. 3'0; Soefve,
tom. 2, cent. 4, ch. 30; Mr. Julien (ur' les Statuts, tom. l',
pag; 418, n. 12; S'erre's, inftit. (ur le titre de legefalcidiâ;
Mantica, de conjea. uIt. volunt. lib. 9, tit; 13, n. 18'; CraC...,
l,'
sr
n7
2,.
�~o
JOURNAL
fus, de fucceJf. §. falcidia, quo la, n.2. & 3; Peregrinus; de
fideicommiffis, art. 3, n. 87'
.
Il n'ell: pas vrai que notre Statut femble admettre une
prohibition indireél:e de dét.raire la quarte falcidie fur les
legs; il l'exige expreIre, & regarde comme aIrez expreIre
la feule qu'il adopte, outre la littérale. Decementes 'luod
tejlatores exprejJim falcidiam prohihere pojJint; & videtur teftator fatis exp"ejJim prohihere, dùm dicit legata prœflari }ine
nli'lua detraaione. Mr. de Monevallon, dans fan Traité des
Succeffions, qui eH de l'avis des Auteurs cités, s'appuie
fur la Novelle l , fur nacre Statut & fur l'Ordonnance
de 173S'
L'héritier d'une fucceffion chargée de legs & grevée d'un
fidéicommis, n'eH & ne peut être grevé que dans les biens
Gui reHene après que les legs ont été payés. On voir e/feél:ivement que les legs précedenc toujours le fidéicommis,
& que le fidéicommis eH renreint par ces mots qui vont
3vec l'infiitution ; & en tous [es autres hiens, &c. à ges biens
3utres que ceux qui fane la matiere des legs.
Les biens légués ne devant point appartenir à l'héritier,
mais à d'aurres, ne fane & ne peuvent pas faire partie
ni de l'hérédité ni du fidéicommis. Auffi ell-il de .tegle dans
le droit, qu'on ne donne le nom d'hérédité qu'à ce qui
relle, toutes charges prélevées, Tlon dicuntur hona , niji deduc10 œre alieno; 'Ille' parmi ces charges on compte les
legs, hœreditatis appellatione neque legata continentur. L. 96,
ff. de hgat. & que le fidéicommis de l'hérédité ne peut
embraIrer que ce qui relle, après que toutes les charges
& les legs fane acquittés. Delà l'obligation de renituer l'hérédité ne peut jamais, & dans aucun fens, s'étendre à la
quarte falcidie qui eH prife fur une claIre de biens qui ne
fait pas partie de l'hérédiré fubniruée, & qui en en au
contraire un préciput ou Lln prélevement ordonné par le
te!l:ateur au préjudice, tane de l'héritier que du fubHitué; Le(Jata ji/flt delibatio hœreditatis.
.
Il
�2.8 J
-II eft vrai que l'héritier retient hœreditario jure la quarre·
falcidie, & qu'après l'avoir retenue, il peut être regardé
comme folcidius hœres. Mais on ne doit pas conclure de là
que cet héritier, parce qu'il a été chargé de rendre l'hérédité, foit obligé de rendre la quarre falcidie qu'il a reçue
hœreditario jure. La Loi a voulu accorder à l'héritier une
quarre falcidie fur les legs, en confidération de ce qu'il a
fait au teftateur l'honneur d'accepter fon hoirie; ces legs
D'ayant rien de commun avec l'hérédité fubftituée, la quarre
falcidie, quoique acquife hœreditario jare à l'héritier, lui
reUe en propriété, comme le furplus des legs aux légataires; & les legs n'ayant point été fubftitués, la quarre falcidie, qui dl: une détraaion faite fur ces legs, ne peut pas
l'être.
Si cet héritier eft chargé de rendre l'hérédité ~ uniquement compofée des biens qui reUent après la dérraaion
de toUS les legs, cette charge eH enriérement étrangere
aux legs & ~ la quarre falcidie. L'héritier rend ce qu'il a
trouvé dans l'hérédité, toutes charges payées, en rete-·
nant la quarre trébellianique. Il y a deux patrimoines différents dans la fucceffion d'un teflateur qui fait des legs &
qui établit un fidéicommis de fon hérédité; l'un eH la
malTe des biens légués, & l'autre celle des biens fidéicommilTés. Ces deux patrimoines font abfolumenr dill:inas, &
n'ont rien de commun l'un avec l'autre.
La Loi affigne à l'héritier, & hœreditario jure, une quarte
falcidie fur le premier, & une quarre trébellianique fur le
fecond. Quoiqu'il arrive, fi le teflateur n'a point fufpendq
l'effet de la Loi par une prohibition exprelTe, il faut que
l'héritier recueille chaque quarte fur chaque efpeçe de biens,
Et comme il. ne peur pas être privé de fa quarte trébellianique fur les biens fubftirués par !'obliga.ti~o de payer les
legs, de mêm.e il ne peu,t p~s ~tre prIVe de fa ~u~r~e
falcidie fur les legs par 1 obh~atJon de rendre } qere..
dité.
.
:, Si un reftateur, en Ifaifant des leg~ çonuqér,.bles, & en
!Jnnées z78z & Z78Z.
.
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PRO VEN C E.
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!ubllituant le fut'plus ùe fon hérédité, prohibe la quarte fal.
-eidie & la quatte trébellianique, les Jegs appartiennent ell
entier aux légauires, fans que le fLfbHitué en reçoive une
f'arnie, & le furplus de l'hérédité eU refiitué en eOtier au
!ubllirué.
Si le tellateur, en faifant des legs conGdérables, & en
fubllituant le furplus de fon hérédité, ne fait aucune prohibition de quarte, les legs fone fujets au retranchemens de
la quarte falcidie, & le fidéicommis au retranchement de la
.quarte trébellianique en faveur de l'héritier.
Si le teHateur, en faifant des legs conGdérables, & en
fubfiituane le furplus de fon hérédité, ne prohibe que la
quarte falcidie ou que.la quarte rrébellianique, dans le premier cas le fubllirué non-feulement ne profite de rien fur
les legs que les légataires reçoivent' entiers, mais encore
il fouffre le retranchement d'un quart fur les biens fublli.
tués; dans le fecond cas, les legs font retranchés d'un quart
en faveur de l'héritier grevé, & le fubllitué recueille l'hérédité entiere.
'
Si la quarte trébellianique accordée hœreditario ju~e fur
Je fidéicommis, & prire fur les biens fidéicommilfés, ne
fair pas partie de l'hérédité qui doit être relliruée, co~
ment la quarre fa1cidie accordée fur les legs qui ne font
pas fidéicommiifés, pourroir-elle faire partie de l'hérédité
qui doit être rellituée?
Peregrinus, dans fan traité de fidâcommiflis, art. 'h n.
43 , ~xamille fi l'héritier d'une fucceffion épuifée par les
legs, & néanmois -grevée de fidéicommis pour le furplus_
- de l'hérédité, peut, quoiqu'il ne relle rien pour l'héritier
fubfiimé, recueillir la quarre faléidie fur les legs; il répond
qu'oui : notandum efl 'luod fi detraafJ œre· alimo, foluiis
legatis, purè rdiais, nihil in rifiduo fupereffit, poffit eo ca./ù
hœres de iegatïs 'luartam detrahue 'luœ falcidia uit. Decor. mis, tc.m. 2., col. 7 l'3~ Mr. ~e M ontv,l1on dans (on trait~
des !ucceffions, rom. 2., ch. 8 , art. 2., !1" 1 2. , pag. 30'~ ~
& d-Aymard l'ur l'a.,rt. -')6' ·-dé l'Ordonnance
de I13S lont
,
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ArS
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PRO V J! Ne.;
élu même avis; ils direnc tous ,. que le retc{lnoh'emenr qui
a lieu fUll les legs, lorfqu'ils 'épuifenc l'hérédité-, tl'éf!: qu"en
faveur de Phériter, & non pas.en. faveur du fidéicommiffàire; qu'en cas d'épuifemenc, le retranchement de la, f"ollcidie demeure à l'héritier· fans charge de refbirurion, & que
le 'fidéicomrpitraire rie peut prétendre 1 que I~ (ur plus , s'il' y,
en a~
Il .n'eŒ pas vrai que, lor.fque le teftateur n'a-inftirué qu'un
héririer & lui a fair un prélegs, ce prélegs doive êrre re[rirué au fidéicommiifaire, dans le cas où 'il entameroir con Iidérablement,. & même abforb.er.oit l'héréditéfubHiruée, a
moins_que le refl:areur' rte- Eeût expreiférnent ordonné; c'efl:
ainli que le décide Mt. d~ Montvalloll dans fOll tràité des
fucceffions, tom. 1, ch. fJ, art. 3'1, pag. 7 i 3~
Il n'eft pas décid~ que le prélegs fait dans le cas où
il y a plulieurs héritiers, foit compris. dans la charge de re[limer l'hérédité, lorfque .celle~ci efl: etrentiéllemenc enraméepar ce prélegs. Si certains Auteurs le .foutiennent ainli, leplus, gn.nd nombre penfe le contraire, d'après la Loi 1,6;
cod. de fideicommiflis, lorfque le. tefl:ateur n'a rien dit don!:'
Qn p.uitre induire l'intention de· grever auffi le prélegs. Il Y'
a véritabl~ment quelques Aureurs qui ont préfumé· que leprélegs étoit grevé en faveur du. fubf1:itu,é, qtl~ eH- e.nfant'
du teHateur, lorfque le prélegs entame ~rop Fhérédlté; mais
ce n"ef!:I'que,dans le. cas '0f1 l'héritier inf1:irué·& 'ptélégaraireef!: un étranger. Decormis, tom. 2. col. 363 & fuiv. Ila fellle·
opinion re,;ue parmi nous efl: celle qui (éparé le prélegs· du
fidéicommis dans tous les· cas, dès que le- teÜateu~ n'a,
~ieD ditt pour les'oonfondre, & on ne lé fùppofé J grevé que'
tefiateur' al fàir. le fidéicommis de tout
qu~
16rfque
ll!léritier. 'percevra. de foil hérédité:, conformément' à la'
Loi 16, cod. de fiàeicommiflis. (Julien dans fes coHeél:ions.
man~fcrires, liv. 3, rir. 4, ch. 2., pag. 14. letr., H'; Sr~,
Jean,. dééi'( 46, o. 4> & ~; Dec{)rmis, tom. '2..,. col·_3 S~
& fuiv. '.l& Mr. de MOAtVa-IQIl, traité-des fucceffi'ons,. tom..
,.. , ch; ~., ;ltt. ;3 f,,. pa.g<'7 I 3;-
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Jou
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On répondait pour les Geurs Eydin & les DUes. Paillés & Vague, que pour décider la quefiion il ne fallait
que connaître le tefiament. La Dame Eydin eH infliruée
héritiere univerfelle, pour jouir & difpofer à fes plaifirs &
volontés d'abord après le décès du tefiateur. Le refiateur
lui a fubHitué fan fils, que les lieurs Eydin, Paillés &
Vague repréfentent; il faut donc que le fils reçoive des
mains de fan aïeule tout ce que fan aÏèule avait reçu de
la main du tei1:ateur: Difponat teflator, & ait Lex.
Les Romains connoi1Toient à la vérité deux efpeces d'héritier; ceux qu'on appelloit fui veL nece.f/àrii; & ceux que
l'on appelloit extranei, étrangers. La vanité Romaine avoit
imaginé cette dii1:inél:ion, foit afin de ne pas mourir fans
héritier, ce qui dans leur opinion enrachoit la mémoire
d'infamie, foit afin que la divifion qui fe faifoit de leurs
biens parmi les créanciers, ne fe fit qu'au nom de l'héritier, & non à celui du teflateur. (Perezius fur le titre des
inllit. de hered. qualit. & diffa.) On ne regardoit que comme héritiers néce1Taires les efclaves & les enfanrs, in potejlate morientis, & ceux-ci, jivë velint, jive nolint, hœredes fiullt etiam jille aditione, dit le §. l de la Loi 6, jf.
de acquir. hœred.; mais il n'en étoit pas de même des héritiers é..rrangers qui avoienr la liberté d'accepter ou de répudier la fucceffion.
On ne connoi1Toit pas alors le bénéfice d'inventaire; l'on
ne connoi1Toit que la po1Teffion des biens que l'on demandait au prêteur, après le délai qu'il avait donné pour s'enquerir des forces de la, fucceffion, & la fucceffion une fois
acceptée, on répondait de routes les dettes du défunt. C'e!l
dans l'état de ce droit que furent porcées les différentes
Loix qui nous ont enfin conduit à la falcidie & à la trébellianique.
Par la Loi des douze tables, le teflateur pouvait léguer
la totalité de fa filccelfion, & perfonne ne pouvoitJs'e.n formaiifer. Survint enfuite la Loi furia, à laquelle fuccéda la
Loi voconia, & définitivement la J,-oi faJcidia, qui p~rmet
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PAtAU
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PROVENCl!.
19i
"!l l'heritier de détraire le quart, quand la fucce/lion fe
trouve épuifée par les legs. Et enfin, à l'imitation de la
Loi falcidie, furvint l'idée de la trébellianique, qui adopta
la même détratlion fur les fidéicommis que celle que la
falcidie avait déja prononcé fllr les legs. Ces différe otes
Loix ne furent portées que quand on ne connoitroit pdS
le bénéfice d'inventaire, & quand il y avait par conféquent raifon ou prétexte d'engager l'héritier à accepter
la fucceffio!1' & à s'endo1fer le rifque néce1fairement réfultant de l'adition. Mais depuis l'introdutlion du bénéfice d'inventaire, & que l'on a par conféquent prévenu
la confullon des droits de l'héritier !lvec ceux du défunt,
la falcidie & la trébellianique n'ont plus eu la même faveur;. auffi voyons nous que les Loix fe font prêtées plus
aifément à la prohibition, & ainÎl fucceffivemenr notre Statut & l'Ordonnance de 173~'
Suivant le droit des pandetles, on ne pouvait pas prohiber à l'héritier la détratlion de la falcidie, parce qu'il
fallait véritablement l'en~ager à fe porter héritier. Mais
ce motif cetrant, le droit du code permit la prohibition
de la falcidie, & cette prohibition qui dans le principe
dévoit être expre1fe ou formelle, s'induillt enfuite des circonfiances, ainll qu'on le voit dans notre Statut.
Il faut dil1:inguer le fidéicommis univedel du fidéicommis particulier; le fidéicommis particulier œquiparatur legato; mais le fidéicommis univerfel n'dl: lui-même que
la fucceffion; il n'dl: pas charge de l'hérédité; il efl: l'hérédité elle-même, comme. le dit Furgole, pag. 47, d'où
l'on doit conclure que, s'il y a hérédité, tout comme il y
a eu infiitution, il pellt y avoir fubltitution, & que la
fubltitution ne peut pas être inutile, quand l'infiitution a
d'ailleurs profité.
'
Le bénéfice de la fucce/lion formé par le retranchement
'de la falcidie " n'dl: pas delihatio legati, qui conferve à la
fomme retranchée la nature ou le caratlere du legs; c'dl:
~~ contraire l~ porrion héréditaire que la Loi retranche fur
/
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J 0. U RNA L
~s legs, & qui bien \oil\ de c.onferv.er te earaélere.àu tègs ~
conferve- au contraire celui de pqrtion héré:ditair6, d!hél'é~
dité ou de f~cceffion. La preuv.e- en elb LO•. que la Loi & les.'
Auteurs nOIlS difent que falcidia r.eftaat ipjb. juu legata;, le
legs efl: cenCé moiQdre; l'hérédité eft cenfée diminué, d'au~
tan,t, & la. fomme procédant du retra~Qement l'eUe par.
conféquent dans la fucceffion: 2°. Cela ell fi, vrai, que te.
retranchement que le legs fouffre n'a jamais celTé d'être dans
le domaine de l'héritier: mmql1àm tranfit ad: legatarium, fe&
remanet< apud hœredem-, dit la Loi l , If. ad leg, fa/cid. :
( ltà GralI"us , Peregrinus.) 3,°. Cela el\: fi vrai encore, que
].es Auteurs nous difenr que falcidia dicitul! dehita jure injlitutiollis vel hœreditarib, &. 'lue l'héri~ier qui n'a que la falcidie, ejl falcidius hcues '. f?3rcè que ~a falcidie e.1I: forti;> hœ,reditatis ; & de.là Peregrmus, art, 3, n. 22, dit: capltur- Jurekœreditario, unde dicitur falcidius hcves. Or" l;e· que Von reçoi
à titre d'hér,itier peut êt-re Cubll:itué.
.
Le g.rev-é d'un fidéicommis univerfd doit rell:ituer tout ce
qu'il a reçu ex judicio. défunm, &. toùt ce, qu'il a re'i.U' jure
Il.œreditar:io•. Il rell:itue non-feulement tout ce qu'a a 1'e,u à
c.es de~x. titres, ftd' q.uod ex eventu auget patrimonium. Pourquoi ne· k rellitueroii--il pas? IJi en. le maître d'accepter ou.
de répudier; mais s'j), veut pr,ofiter du bénéfice de la difpofi~
tian-, il, faut qu'il en, Cupporte.la charge: in z;eflitUlione fid'eicommiffi· univerfalis wniunt, non fo/um quœ .gravatus. haheto
1J.J~r;èditatis & infiitutionis, fiel; etiam· incrementJ2 & acceflioncs.juris, & fàc1i; en un mot , 'luid'luief hahet>' ex difPofitioneteftatonis., ainfi que le clilènt .ami. en fon Trait& des fucceffions, tiv. 8, tir. 1.2, n. 1; Graffiis, §. jùkicommij{um,.
quo 47, n. l , & Peregrinus, de fidâcomm. art. 7, On n'excepte. de- cette regle .que ce que l'héritier tien.t de ~a main du;
reftareu; à alltre titre que celui d'héritier} ou- par la dilpof~
tion de-la Loi, comme la légItime.
La quarte poUl/oit ençore'être exceptée, qua·nd oO:'vivoi't·
fuus le dr.o~ des PandeB'es " qui n'en permettoient' pas lapro1ùbitio.n. mais. depuis que te tefiateUl' pell.t" fujv~ilr l'Ot:i
�DU
PA tAt S
J)
B
l' R t> V Il NeY!;
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.(fonnance 'de '173 S , la prohiber exprdfément ~ ceux qui ont
droit <le :Iégitime , & tacit~ment ~ ceux qui ne l'ont pas, il
eft fimple qu'on tient plus la quarre de la difpofirion de
l'homme que de celle de la L<>i, puifque l'homme pem la prohiber. Soutenir que l'on rient la quarte de la Loi, plulo.t
·que de l'homme qui peut la prohiber, c'ef!: faire 'revivre
l'ancien droit des Pandeaes; ce droit Gui dans les mœurs,
'ainfi que dans J'opinion des Romains, qui ne connoilfoient
point le bénéfice d'invemaire, pouvait être nécelfaire; &
·c'eft par 1e droit nouveau que nous devons être juges. D'où
l'on <loit conclure que la falcidie compofant toute la fucceffion, comme on ne tient la fucceffion ou même b falcidie
que de la libéralité de l'homme, il cft donc impoffible
qu'elle ne foit pas reftituée avec le fidéicommis établi par le
.:ceftateur. Ce reftateur n'a infritué l'héritier qu'à cette (andition : qu'il prenne ou lailfe; mais fa difpofition ne -peut
·être fyncopée.
. Sj l'on prend la falcidie jure Izœreditario, il -eft ,tellement
lIécelfaire qu'on la reftitue , que quidquid capieur jure hœre'ditario , venit in fideiCommiJfi reflitutionem. Il el!: fi peu vrai
que la falcidie, fur-tout lotCqu'elie compofe la totalité de la
fùcceffion, ne vient pas dans la ·rel!:irution du fidéicommis ,
que les Auteurs ont examiné fi l'héritier n'ayant pa,s fait inventaire, & a,yant par conféquent perdu la falciùie, le
fidéicoinmilfaire peut le faire pour avoir cette même falcidie ,
comme n'ayant pas pu fouffrir du fait ou de la néglige:nce de
l'héritier. Or, fi la fa1cidie n'étoit que pour 'l'héritier, &
qu'il fallût la détcaire du fidéicommis, on dirait au fidéicommi!faire : la. falcidie ne pouvant '(Jous apparlênir, Id
lJueftion de [avoir fi vous pouver fuppléer a l'inventaire que
f.htritier n'a pas fait efl parfaitement oifeufe. Cependant les
AuteUrs l'examinent; ils la décident en faveur du fidéi-·
commiffaire; ils fuppo[ent donc que la' falcidie p-alfe au
fubHicué. 11à Barthole, Alexandre, Gralfus, §. falcidia;,'
~u. 1'2, ,'n.
1.-
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3'"
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pans la -'rainee.que la fubfiitutioll fie devienne inutile, &
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que les vues du tellateur ne foient ainfi trompées; non-:
feulement on comprend dans la fuhll:irution la falcidie &
rout ce que l'héritier a re<;u jure hœreditario, mais encore
on y comprend les prélégats dans certains cas. Par exemple,
fi totum patrimonium diflributum fit ira ut reJIitutio fideieommiJJi reddatur quodammodo inutitis, nifi prœlegata reJlituantur, dit Mantica, lib. 7, tit. 7' n. 9. C'ef!: encore l'opinion de Gail, liv. 2,- ch. 13 S de fes ObrerYations, n. 2;
c'ef!: , fi l'on veut, ex mente tr:flatoris. Id Gralfus, §. fideicommiJfùm, quo 7, n. 6; Peregrinus, art. 7, n. 61 & 6&;
Ricard, des fubjlitutions, tom. 2, pag. 478 : ex intentione
fundata teJlato.ris prœlegata fuccedunt in loeum portionu~
hœreditariarum. Remarquons que fi les prélégats font cenfés
fubf!:irués, par la feule rairon qu'ils tiennent lieu de portion
héréditaire, il n'ef!: pas concevable que la falcidie, qui n'ef!:
eUe-même que la portion héréditaire, ne fait pas également
comprife dans la fubf!:irution.
La regle que l'on vient d'établir ef!: encore plus vraie,
lorfque le grevé ef!: chargé de rendre aux enrans du tef!:ateur,
ainu que l'obferve Peregrinus à l'endroit cité; & la faveur des
enrans ef!: telle fur ce point, que quoique le prélégat vienne in rejlitutionem fideieommiJJi, quand ils le réclament, ils
ne font cependant jamais fournis à le reflituer. Enfin, l'on
fait que la faculté de prohiber la quarte fait revivre la Loi des
douze Tables, qu'elle fait dirparoître tout ce qui avait été
imaginé par Falcidius, ou du moins qu'elle fubordonne
l'exécution de fa Loi à la feule volonté du tef!:ateur, ~ que
la prohibition de la quarte n'a pas befoin d'être formelle fuivant notre Statut, puifqu'il décide exprelfémeoc qu'elle el!:
cenfée alfez expretrément prohibée: dùm tr:flator dicit fuam
hœ.reditatem debere reflitui, fiu legata prœJlari fine. aliquâ.
detraBiolle.
On diroit en vain que fuivanc l'art. 60 de l'Ordonnance de
173S, la fa)cidie doit être prohibée en termes. formels. Cc.
feroir raifonner contre le fait & coorre le droir; cantre le
fair, parce que les légataires ayant fqbi le retranchement, la
quar~~
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
289
quarte a été vérirablem~nt acquife à l'héritier; conrre 1ê
droit, parce l'Ordonnance de 173) ne parle de prohibition
expreife que vis-à-vis de ceux qui ont droit de légirime , ainli
que le remarquent ~outaric & le nouveau Commentateur de
nos Statuts, tom. l, pag. 438; d'où il faut conclure que, quand
le teftareur charge un héritier qui n'a pas droit de légitime,
de reftiruer fa fucceffion à fes enfans , il ne peut pas entendre
que fa (ucceffion n'étant compofée que de la falcidie, l'héritier aura tout, & le fubfl:itué n'aura rien. Il faut enCGlre conclure que la falcidie étant dans la main du teftateuJ, qui peut
en priver l'héritier, l'héritier ne la tient que de la difpofitioh
Ç1e l'homme; & li le teftareur la donne, le même tefiateur
peut la prohiber. Enfin, il faut conclure que la· fubHitution ne
peut pas devenir inutile, & que la Dame Eydin, qui relativement à la pupillarité de l'enfant, à la confiao(.e que le teftateur devait avoir en elle & à la qualité même du grevé, ne
doit être regardée que comme héririere fiduciaire, ne peut
abforber les biens de la famille pour les foufiraire fuccetIivemem à l'enfant & à ceux qui le repréfentenr.
En réfumant touS les principes, la falcidie fait la portion
héréditaire que l'on re~oit de la main du tefiateur qui pouvait la prohiber. Le même teftateur, qui pouvoit la conferver aux légataires, peur à plus forte raifon la conferver à fon
fils (ju'il fubHirue.· La fubftiturion ne peut pas être inutile,
quand le grevé reçoit <::Jelque chofe. Qu'il prenne la quarte'
trébellianique fur ce qu'il re~oit, cela efi juHe; mais il )!éfl:
auffi qu'il rdtitue les trois qllarrs reHans. Il le faut d'autant
mieux, que ne recevant, rien que comme héritier, il ne reçoit que pour rendre.
Par Arrêt du 20 Juillet 1781, au rapport de Mr. le Confeiller de Thorame, les Direél:eurs des Hôpitaux Généraux
du St. -Efprit, la Charité & la grande Miféricorde, &
Me. Correard 1 furent mis hors de Cour &. de Procès fur
-la demande des lieurs Eydin & DlIes. Paillés & Vague,
avec dépens.
Ecrivant Mes. Barlet & Pafcalis.
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Ann"s 7787'& 7782..
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'A R R Ê T' X X Ut.
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Dans ;q~~l ~as; y a-t-il 1feu au rachat d'une cdance cédé~
viliori pretio? \
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'Hoirie' de J~Céph Maurin, ~a~qUJtr ~ Turin', fut pri(e
J
par bénéfice d'invenrai~e'; 00 éiâlilÏt un cbrateur aY.
{)o'na & :Un Jcurateur
'litJs; lè ipre:mier 'db'~'oâ ~ne 'procuration générale lt malrre }jami~,n" Do,~riÎ à~d; Mé3ècin du
lieu de" Jau{i~r , dms la vallée de Barcelo,n~rre, pour I1quî:'
der. aélionner & recevoir roures les Corrimes ë:l~ès à Fh&irie dans la vallée. En vertu de cetre 'procurarion, maître
-Donneaud fit commandemen't à I~ Dllè. Caire de payer
elle , avoit éré
les 27 r <} , liv. intérêts • & depens ""1auxquêlres
J
•
'Condamnee par Senr~nce du 1'5 JuJO' I"no;)e decès du
curateur fit ceffer les pouvbirs de m~îrfe Donneaud. 'En
177'5 on lui propofa de fe charger, èan,t "de èerre detre
que de celle dei 2403 liv. fur 'maîrre.. Pietre-Jacques Maurin\ moyennant la fl?Olme 1''5°° 'liv.'en 'argent çom'ptant;
'Cerre offre fut accé'prée'" & J'~éle. fur ~p'arré, le, '27)anvier
1776,: fous) la condjrion.Cjue 'cès. deux déàt\c'és ICeroient à
fon tiCque, peril & forr~ne, I:lns lui êrre'de rien tenu, quelque evenement gUI pllt artlver.
"
,
" Maîrrèl Donneaud fit' intimer 'ct;rte' cèŒon "à la 'Dlle. C~ire
&. à fl!l'n fils ~'cJuxo.'d' empru~nrerenj!i'i7d,? liv.'de'Me.'D'onneaud Avocat, pour fervir au rembQorremel,lt 'CIe 'êe:''il~'ils
'devoientlau Métlèélri\ avec :fuEfog'Htion 7d'àétiop\ fla' Dlle•
•Caire '&,fOtl 'fiÎs' be"~ayant" pas, T\es ri tér~'rs ,d<i.<Z70P li\'.
-& goo liv;r Ile 'paitie ~ Japi'ta\', 'qüi~é[Qie'nt éHiues, ' fur~nc
'",ffignés lol'id:ail'èmt!n ~ardevlI1Jt;-le Nge -Cle la tallée';'& éo FdallJn'és par Se~{~.nce'r[~dù If '; oéfpri'è; ~se-!lh appelle'reln 'au
Préfet de Bape.elo~elre~, :& l'prirènc d'és"lètrres 'de.r~féi'fiob
envers l'~rrêté de compte & arran.g~m~n.t pris.1 tant contre
1
Jo
L
aa
1
1
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....
•
�DU
PALAIS
DB
PROVENCE.
29r'
,l\1'e. Donne~ud Avocat, que contre màitre Donneaud Médecin, qu'ils appellerenr dans l'inHance; ,ils"éonclurem: à
être déchargés de touteS 'demandes r & pour[uires, rant envers 1'u'n qu'envers 'l'aùtre ; , à' la' charge' pal' euX' de rem"
boûr[ei-" au' Médecin' Donneauç! les' I)oo' liv, -quf"'avoi'eut
fait le prix de lâ"('effi'O?l'~ 'én[enfble tes intërêt>s, frais.<&
légitimés>-~c>c~/fairés"'a xquels'cetre"'cëffion l pouvait donner
lieu, à coii'dition~qlle're Médecih' Do~rJeaud,'I~ur'feroir cerfion &. a~à'nd6n 'de' tous Îes' élroifs ' à" lui' 'cédés -parr 'le curateur de la' ina/fe ifes créàricie'rs', [ur 'maître' Maurin' ou
'fon"'hoirie, fi mieux' le Médecin Donneàud < n'~imoit les
reternir r pour', [on compte" & en ce' cas' ciiminuer:& retranch,er [ur lès 1 S(j'd 'Iiv: br portion éorripétetfre à maître
MaùFin, relativement aux dr-oits' cédés, [UI alll' 'la divifion
par Experts',' avec dépens aél:lfs & de' l'affiHance' en'Icallfe.
Le èurateur dë'la riù/fe' des créanciers inrervint dllns'I'i/if'tance. Se'nrêncè dû . Prefet le 1'3 ;Juin :'l'78o;,,quindéboute
des lertn~s- de refcilion', confirme' la Senrélfce Idu ·Juge dè
la vallée, & condam,ne la Dlle. Cain! '& ron <fils"au'x,dé~
pens envers to'utes .les 1Pahies. Appel de ;letir parr'pardéVant
la Cour.
\
C
.
•
:
'
!In
(1....
r
On diroir pour eux, qu'un homme q1Ji pouvant exercer
une profeffion' égat'èd1ent honnêre 1&' honb'r3'bl~, la'ccepte
& fans doute follicirê d'une maffe r de créanciers étrangers
qu'il ne cannait pds,. avec lefquels' par cdnféquent ~I n!a
aucune forte de liaifon, une procufàtion pour pOLfrfuivre
d@ux familles'dé fes concitoyens, eft un folliciteur. Il n'éfl:
ni Procureur ni Avocat; en devenant l'agent d'une maife
de créanciers, pouvoir-Il àutre 'chofe pOlit' elle que de folliciter lès Juges & les MirliHres de la J(lHice ? Von fairrq'u'un
fondé de procurarion ~nOeHI pas toujours un folliciteur :'ma1s
'un fondé de procuration d'une maffe de 'créanciers écra'Ogers du Royaume, étant" un' homme qui n'a' a'ucua étltr,
'ni aucun miri;Here qui Pappellè aux ;ajfair~s d'oh autre,
-n'intervient que 'pOLIr: folliciter. Qu'enrénd on d'a-fIletlfs par
-follicirèur de procès, fi ce n'eH celui: qui n'àyant"aUcun
Oot2, ?,
'
•
�292.
.
Jou RNA L
écat ni profeffion du Palais., donne pourcant fes foins à la
pourfuite des alfa.ires concernant des ciers? Rien n'ell: plus
permis que pareille gefiion; mais auffi rien n'eH plus fufpeél:
auX yeux des Loix que l'acquilicion faice par un folliciteur,
des droits qu'il s'éroit chargé de pourfuivre.
Nos I"oix indulgences pour les débiteurs de bonne foi,.
ont favorifé leur libération autant qu'elles l'ont pu, fans
préjudicier aux droits des créanciers. Delà Cant de maximes
qui procegene ceux qui ont le malheur de devoir à d'aurres.
Delà tane de décilions qui leur facilitene le moyen de fe
libérer. Dans cet objet, elles repou!f~ne avec févéricé le ciers,
qui prenant la place de celui à qui il efi dû, s'invefiit d'une
créance, dans l'objet ou de vexer le débiteur, ou feulement
de. faire dans cene négociation un profit conlidérable. Tel
eH l'efprit & la décilion des Loix per diverfas & ab anartczfio, cod. mandati, qui aurorifene le débiteur à rachecer
L1 detce du ceffionnaire à qui elle a été livrée, en lui rem-bourfant le prix de la ceffion.
•
7 Ces Loix favorifent le débiteur, fans nuire au créancier
qui s'efi dépouillé de fa créance. Le ceffionnaire feroit nonrecevable à s'en plaindre, puifqu'il efi rembourfé de rout
ce qu'il a payé; elles font obfervées dans tous les pays de
droit écrit, ainli qu'on peur le voir dans Louet & Brodeau, len. C. fomm. 13. Henris, liv. 4, quo ~. Albert, en
fes Arrêt du Parlement de Touloufe. Mourgues, pag. 2.9.
Boniface, tom. 2 ,parr. 2., liv. 4, tir. Il, ch. 4. Mr. de St.
Jean, décif. 7 r, & Me. Julien, dans fes colleél:ions manufcrires, va. ceflion, folio 4 la, Ieee. T.
La Loi per diverfas porte qu'elle n'a éeé donnée qu'en
haine de ces hommes avides du bien d'aurrui, qui ache.tent des procês ou des aél:ions litigieufes. Ces Loix, dit Dumoulin, comrae? ufur. queft. 62, n. 413, ont été faites
conere les acheteurs des procès, puifqu'elles one éte ren.dues 'contre .ceux qui, par avarice, ou pour vexer les dé.biteurs, rapportent des c;effions d'aél:ions licigieufes ou douteufes à... vil prix:
�DU PALAIS
Dl!
PROVENCE:
293'
Mahre Donneaud a acheté â vil prix la créance donc
s'agit; il a eu pour 1500 liv. deux créances fe montant à
environ ,S0oo liv., & il a prétendu retirer d'un feul débireur 2700 liv. Peut-il dire que ce n'ell: pas par cupidité
qu'il a fair cette acquifition? L'ufage que maitre Donneaud
a voulu faire de la ceffion, renferme la preuve la plus
complette de l'intention dans laquelle elle a été rapportée,
confilium ex evenLU. Dira-t-il que la créance n'étoit point
litigieufe ? Mais 1°. tout droit ,qui ne peut s'exercer que
par une aél:ion judiciaire, eH par cela feul litigieux; c'eft la
définition qu'en donne l'authentique litigiofa, cod. de litigiofis. Lacombe, Gueret, cent. l , ch. 93, & Soefve, rom. 2,
cenr. 2., ch. 70. 2°. Maitre Donneaud peut-il foutenir que
la dette n'étoit pas litigieufe, lui qui a préfenté cette créance
comme fore imbrin<luée, & exigeant une difcuffion avec des
créanciers antérieurs, lui à qui elle a été cédée comme litigieufe par la maife des créanciers de l'hoirie Maurin,
dont le curateur déclare qu'elle eft de difficile exaél:ion?
On a déja dit qu'on pouvait regarder maitre Donneaud
comme un folliciteur de procès. Or, les Ordonnances fone
précifes fur ce point. Celle de Charles VIII de J'an 1436
défend ces fortes de ceffions, 11. peine contre le cédant de
la perte de fes droits, & contre le ceffionnaire d'amende,
de frais & dépens. Celle de FranC;Qis 1. de 1535 dit, que
ceux qui feront ces fortes de ceffions, & ceux qui les accepteront, feront privés de leurs biens & aél:ions. Celle de
Charles IX. aux Etats d'Orléans en 1 S60 , art. 54, renferme les mêmes difpolitions, & renouvelle ces défenfes
aux Avocats, Procureurs & folliciteurs des Parties, pour
le regard des caufes & procès donc ils auront charge, à
peine de punirion exemplaire. Même Ordonnance fous Louis.
XIII. en 1626, arc. 94, qui fait très-expreifes inhibitions
& défenfes à tous Juges, de quelque qualité & condition
qu'ils foient, Avocats, Procureurs, Clercs & folliciteurs,
de prendre aucune ceffion de dettes pour lefquelles il y ait
procès) droits ou aétions) foi~ eo le~~ nom ou d'autre~
�~4
JOURNAL
;perfonnès par eux interpofées, fous peine de perte des
ch~fes cédées pour lefquelles Sa Majel!:é veut y avoir répé.cition conir'eux jufqu'à dix ans ilprès que les Jugemens &
Arrêts ,aUrl:lOt .été rendus.
.
.On aurpit pu invPfluer ces Lo\x\contr.e ,!llfl.Îtr:.e .Qonneaud;
·on,a préféré ,d'u(er d.u re[lle~e fim'pJe i\ltro,d.uir par \e,s ,L,oix
pel' diverfas & ah anaflafio" .~ en conféquence on' a d.emandé que pour le furplus, fi.i\ucun en e1l: d}!, la DlIe.
Caire & fan fils fùifenr mis vis-à-vis de leur véritable créancier; cette demande eH par conféquenr trè~-favorable; elle
_eft appuyée fur le Ienrirnent des' Aureurs, & fur la décifion de,s Arrêts rapportés par Boniface, tom. 4, liv. 8, rit.
.}, ch. 9, & tom. 2., liv. 4, tit. 8, ch. 4, ,Un folliciteur de
,procès n:a, pas pu ,acheter ,à vil prix une cr:.éance illiquide
dont il étoit, chargé ,de .pourfuivte le paiement; créance qu'il
..a fuppofé être litigie!Jfe & imbrinquée. Maître Donneaud
a encore par dol, fraude & fimulation, rapporté la ceffion
donr s'agit, ce qui forme également un moyen pe refcifion contre ,cet aél:e. La Loi t, If. de dolo molo, d}t que
la reBitution a (lieu contre ceux qui ont ufé d'adreife, de
fineife & de Cupercherie enverS quelqu'un, afin que leur
malice ne leur profite pas, on que la fimplicité de celui
qui aéré furpr.is ne lui nuife pas. Les Loix Romaines entendaient, par dol, la machination, les rufes : Dolum ma.lum fervius ..quù/em.;de.finit machination~m '1uamdam alterius
decipiendi ca,ufà. La/Jeo aUlem ,fic definit; q.olum malum effi
omnem calliditatern, Jallariam , machinaliollem ad circumveniendum ,Jallaldurn ,.decipielldum alterum adhihitam. Leg.
If. de dolo malo.
Maître Donneaud, porteur d'une ceffion, cache cet aél:e;
c'el!: une fineife. Il fe fait faire une procuration par le curareur de Phoirie .qu'il avoir dépouillé; c'eH machination. Il
fe préfente comme n'étant que Procureur fondé de cette
hoirie; c'e{~ une rufe, c'eft feintife. Il employe ce moyen
pour furprendre la veuve Caire & 61s; c'e!~ un dol, il s'en
J'en p.our leur. çaçher )'aél:e de ceffion, .,& pour ies priver
l,
�DU
PA,l"-AIS
DE
PROVENCE:
'2.9~'
de l'avantage du rachat; c'el!: dolus malus. Il ttonque la
procuratIon fimulée' dont il eH porteur; il àltere, il falfifiè
la copie qu'il en donne; il fupp6fe qu'oh lè charge dé retirer
2800 liv. ou environ de principal, il effraye par ce moyen
es débiteurs, il abufe de leur dérangement & de la confiance qu'ils avoient en leur véritable créancier, & obtient
d'eux une obligation de 2700 livres, tandis qu'il n'éroit porteur que d'une ceffion de [822. livres; c'eH une fraude crihlinelle, dont le fuccès ne peut être que palfager. II feint enfuire d'être payé par fon gendre, ta'nais qu'il demeure
créancier du réGdu de ce compte , compofé de partie d'intérêts & a'e dépens. C'el!: une fimulatibn employée pour
faire fuppofer la novation, pour mafquer le dol, pour couvrir la fraude, & pour retirer un intérêt i.llégal & ufuraire
de ces Întérêts & de ces dépéns.
' ,
Me. D'onneaùd Avocat, qui eH intervenu dans cet aél:e, -a.
participé à la 1 fraude, & en a éié le principal inHrumenr.
C'eH par lui 'qu'elle a été confomhlée fraus cum elfec7ù , L.
l , If. de fltwi liber. C'ell: par l'événemept -qu'il 'f~ut juger la
fraude: li' evèntqm fra/is ha'buit, I,.. 10, §.' l ,'If. ~ui in fràu'{Ùln ctedlt. ; 1&. c'eH 'par lui que éelle' donc on fe plaInt a (été
confommée. L'intervention de Me. Donneaud à cèt· àél:e 'rle
'pent le valièler: en t'out ni en partie, 'parce que'lle-rô)e qu'il y
joue eH pareillement fimulé. Cette fi'mulation qui 'par fa natllre' fe prouve par fimples indices & cOrijeél:llres,' fuivànt
Dânty·, 'MaÎciidus', Menoch '& 'autres, eH iCI prouvée 'par
- i~ es &'p'l1r lés"c1réonftanèès 'les plus frappantes :[éet~'3ae
dqit flSnc êtfe refdindé.
.
, 1 Owréponabit'pbur Me. 'DbrliJeaudqùe fel6n la'Loi S, rif.
~ae' aBü5n. & 6blig. , lés aCles volontaires dans ·le principe ·de'viennent l5lîgatélirês '&~de néceffité lorfqu'ils ont été palféS' ,
'& l'un fdês cdn?faa'anstlne' 'petll--fe difpeRfer cl lés' éxêculer',
'à-mo'ins 'qt\e Paêtr n't éëiHëélte.' Il ne peutJCfc faj're"refiitû r
-foit' èriverlp/é's ~e'rlg3gêmens) qù'il; a comH'éfé, 'foit ooVèfs
tout ce qu'il~pèùt y'"aVcl'ir'fait én ma'jorité, 'fansJfdés" aürJs
va1ab
t
'
elt'ae~ reHn\ttfbn.I.BlUls-fàrrê
é 'ae-. compte"a1t èu~'ré' l~
�- Jou Il N A L
'2.9 6
Parries le I2 Mai 1776, le fieur & Dlle. Caire fe font reconnus débiteurs du feu fieur Maurin, aux droits duquel
Me. Donneaud fe trouve de la fomme de 2762 livres; & en
acquittement de cette fomme, ils lui ont payé celle de
2700 livres, qu'ils ne prouvem pas être indue en tout ni en
partie. Comment peuvent-ils prétend.e d'être re!l:itués? Ils
n'ont relfu aucun préjudice dès qu'ils n'am payé que ce qu'ils
<levaient, & dès qu'ils ne font recherchés par perfonne autre
à raifon du paiement qu'ils ont fait au Médecin Donneaud ,
qui les a quitté de leur dette, non-feulement comme Procureur des repréCentans de leur créancier primitif, mais encore en fon propre & privé nom; jls ne peuvent pas regarder
comme une recherche relative au Médecin Donneaud, la
demande que Me. Donneaud Avocat leur fait du paiement
d'une fomme qu'il leur a prêtée, & dont ils ont provoqué le
prêt, 11 raifon duquel ils fe font obligés envers lui au rembourfement de la fomme pr~tée. Il n'y a & ne peut y avoir
aucun dol de la part du Médecin Donneaud d'avoir relfu
d'eux une fomme' dont la dette a été reconnue légitime par
un aéle libre & volontaire, & qu'on ne peut dire avec la
moindre apparence de raifon, ni encore moins prouver excéder leur dette.
La prétendue vilité du prix peut fi peu donner au fieur &
veuve Caire aélion comre le ceffionnaire, que celle en r;lchat
qu'ils exercent fut jugée mal fondée par un Arrêt de la Cour
fur ce fail. Le fieur de Menc Campagne, ancien Capitaine
dans le Régiment des Volontaires de Provence, avoit rapporté du fieur Dernine, de la ville d'Apt, la ceffion d'un
,capital de 3000 livres, 11 la rente de 1 ~o livres, & d'un
nombre d'années d'arrérages dus par le fieur Feraud, avec
une hypotheque fpéciale fur un fonds, moyennanl la nlOdi.
que fomme de 1000 liv. Le fieur de Menc fil acclamer le
fieur Feraud pour les arrérages qui lui éloient dus. Celui-ci
excipa de la vilité du prix & d!lnanda le ras~a,r, en rembourfant les 1000 livres, fur le fondement des Loix pu
diverfas & aD anaflajio. Le Lieutenant d'Aix accorda le ra-• •
chat 1
�D U
PAL A 1 S
D E' PRO VEN C E.
297
chat, par Sentence du 9 Juil1et 1761; ~ais le fieur' de
Mene en ayant appellé, la Sentence fut réformée par Arrêt
du 18 Juillet 1768, au rapport de Mr. de Beauval.
La fuppolition du Médecin Donneaud dans'I'êdit qu'il
remit au curateur, que la ~ette était 'litigieufe &' imbrinqu'ée,
pourrait être un moyen de refcilion dé la ceffioÎl ; bien ou
mal fondé en faveur du cédant; mais el1e ne 1 làuroit' en 'être
un en faveur du débiteur cédé, qui n'a point été ble1fé par
cette prétendue fuppolition.
1
)
La qualification de folliciteur de procès qu'on veut donner
à Me. Donneaud ne peut lui être appliquée" parce qu'dn ne
l'a jamais vu à la fuite d'aucun Tribunal folliciter des procès
contre qui que ce foit. Il a fait relativement à la dette du
fieur & Dl1e. Caire, ce que tout homme comme lui peut
faire, [ans manquer à ce qu'il doit à fan état & à ·fes fentimens, & fans .pouvoir être -regardé.! comme folliciteur de
procès. L'acceptation 'd'une procuration pour ol)"ligér{es 'amis
ou fes connoi/fances , n'dl: pas un <iéte qui con/litue le [çlliciteur d,e Procès.
.
La ceffion que Me. Donneaud a rapportée après la procuration , n'efl: pas plus fufpeéte aux yeux de la Loi, qu'eft
méritée la qualité de folliciteur. Cette ceffion à forfait ac-'
quife par Me. Donneaud, ne peut paroltre fufpeéte qu'aux:
yeux du lieur Caire & de fa mere, parce qu'il n'étoit point
le Procureur fondé du curateur lorfqu'elle fut rapportée. Cette'
qualité, qu'il n'avoit eu que tranlitoirement, avoit fini en
lui par le décès du premier curateur, & par défaut de nouvelle procuration de la part du feconcl; en forte que lors de
la ceffion,. il n'éroÎt qu'un tiers étranger à la faillite & aux
adminifl:rateurs des biens qui en dépendoient. Le fieur ex:
DlIe. Caire ne peuvent pas dire que Me. Ùonneaud ait acquis'
la ceffion à vil prix, dès que le curateur de la faillite ne lui a
cé 1é que 1,822. livres,. & qu'il l'a prife à fon rifque, ,péril
& fortune, & [ans garantie contre [es cédans; ~e défaut de
garantie ayant une valeur qui diminùoit coofidéèliblement le
prix de la ceffiQIl.; .,.
"
-<
Anni,s '78z & lZ8:L:.
Pp.
�2.98
,', ..,
'- J ~
U RNA. L
, ,La quellion fi ll~ débite~r cédé ell aut\lrifé à rac hep:~r la
ceffion de fa dette" qflç .fon créancier a faite à un tiers' à un
moindre prix que la fomllle due, fe trouv~ d~idée par UQ
nomJ:>re infini de Loix qui (\lpt pan$ le~ titres du code &
du âige;i,te de ,h"6{ied. ~., ai). vend. Elles amorifent la vente
des aB:ions,; 'c'eft un commerce licite cQqJme l'achat dlune
balle de ,marchaJ,ldifes, dan? lequel chacun, des dè\Jx con~
traB:ans râch e ou de gagner ou de ne pas perdre. Interdire
ce commerce, ce feroit détruire la plupart des familles &,
le 'fomme,rce en général. L'homme le plusrri,che. en capjtaux
à copf!;itUC.iQll de,r.enre, qui, rr~~T,fouvent nI'! tro\l\'~ .~as à
emprpnrer" n~auroit d~ns fil fomme. au<;un~ rJl1fi)IlCGe pour Ce.
prpcurer du comptilnr, s'il ne pouvo,ir céd<;r fesi,conChtutions, en les f.aifant remonter, ou en les négociant. à forfilit ,1
QU fi en les cédanr le débiteur pouvpit racheter fa dette ,.
"
1
moyenrp9.ç le rembouJfel1}eJlt .pu,cejIiq(lnai·r . <Il 1·
; .Les. A~teurs Ofl~ été fort partag~s fur ,l,a queltion de favoir
.{i les ~qix per \d~v..t{rfts & qh anaJlajio fopt gqrdées en Fr,ance.,
Elles y font fuivies ,. & le débiteûr eft reçu à racheter la dette'
çédée" fi la ceffion porte, fur ,une de!t~ Q.Quteufe & litigieufe., & fi elle a été faite à un acheteur de procès pour
v~xer le' débiteur. Mais le rachat' n'en point reçu fi la dette
eil: ceçtaine i comme foncjée fur un aB:e, fur un jugement
dont il ç.'y a poin," d'appel, & q'elle n'eil: poiht véritablemenc
1itigieufe, quoique la moro(ité du qébiJeur, ou ut} efprit de.
chicane en lui ou d'impuiifance de s'i1cquitter, puilTe l'engager à ne pas fatisfaire fon créancier & à conceller la demande qui pourroi,t en être formée. I., Empereur ,Anail:afe ;'
auteur de la Loi. p,er divqfas, y annçll1ce qu'il ne l'a fait que
contre ces hommes avide,& t!f, yor,açes, ~o.rnme dit Godefroy,
vorantes, d,es biens & de la forrl/ne des allçres ,qui achetent
des procès ou de~ aB:ign§ !\tjgie,ufes., pqur vexer les débiteurs
de ceux donc ils rapporrent le~ aB:ions. La Loi ah AnaJlajio,
qui n'a, hë fa~te .çg,alemenç Aue ,Çontre. les apheteur~ des proçès, litipmfedemptor,es., renfeJ:!J1~ les lTlêmeSl,difpofitions que
la Loi per diverfas; eHe ne coniient de plus qQun femede
~
...
1)1.
1.
t
é..", ..
�DU
PALAIS
DE
PROVENCIl.
299
contre ces acheteurs de procès, qui payant uné p_at:tie du
prix, fe faifoient faire une donation du [urplus. Dumoulin"
en [es contrats uJuraires, quo 62, n. ,p 3, donne le motif
pour lequel ces Loix ont été faites. Plufieurs Auteurs difl:inguent la ceffion' d'une dette certaine de celle d'un droit incertain. Olea, de cejfione,jur. & oc? lib. 6, quo ta, n. ~ ~ ;
Charondas, en [es rt!ponfts, liv. 13, répont: 2,2, ; Defpeitres "
tom. l , pag. 14, n. 6 ; Lacombe, en fon Recpçil de JurifÈJI;udence, verb. tranfPort, n. 8; Brodeau fur Louet, lett. C,
[omm. 13; BouguieJ:, letf. C, ch. 2,; Cambolas, liv. 6:,
ch. 39; Mourgues, [ur les Statuts, pag. 2,6 & 27; Boniface,
rom. 4, liv. 8, tÎt. 3, ch. 9,-& tom. 2, liv. 4, rit. 8 , ch. 4,
Les Arrêts que ce dernier Auteur rapporte, intervinrent
dans une caufe où il s~agî1foit ·d'une dette litigieufe: , "10
Le fyfl:ême du fieur & Dlle. Caire, que lout droit quj ne
peut s'exercer que par une aél:ion judiciaire, efl: par cela
feul litigieux, feroit .applicable dans toute·fotte de Ctls: car
ii n'y a poiRt de droit. qui pui!fe s"ex~rcer falls,- une aél:ion
judiciaire, fi le, débiteur ne- fe rend pas juflice. Bj o.n..avoit'
vérifié les autorités qui fuivent la décifion de' L<Kombe;· qué'
la feule demande rend 1 la chofe litigieufe, on aur.oit vu;
qu'elles font étrangeres"aux droits & aél:ions perfonnelles"
& qu'elles font re{heintes & 'limitées aux aél:ions.. réelles,'
bien différentes des perfonnelles. Cett~ difrÎJlél:ioo .efl: faite
par Guipape ,.qu. 479, n. 3, & par l'Authe!1tiqlJe~I'' ~
Il eH donc démonrré en droit & en fait, que la .dette ac-'
<Juife par le Médècîn Donneaud n'étant ni doute'ure ni litigieufe , '& n'ayant pas même donné lieu à la moindre contefl:ation, après que la 'ce{flOn lui en eut éré faire, on ne
peut en demander le rachat; d'aiHeurs le cachat , dans les cas
autorifés par les Loix" ne peut avoir ·Iieu qu.e lorÛJue les
chores font encore dans leur entier, :rebus integè'is, & que la,
dene cédée n'a été ni liquidée ni payée. Car, felon Mr. le
Prélident Faber, fur le titre du code mandati, déf. 10, le
fimple paiement d'une partie de la dette faite au ceffionnaire,
fend le débiteur non-reêevable à exciper des vices' de la
Pp 2
�300
Jou RNA L
ceffion & à exercer le rachat; à plus forte raifon cette fin
de non-recevoir lui en-elle légitimément oppofée, lorfqu'il
a payé toute la dette.
Arrêt de partage, du 19 Juillet 1781, en Tournelle, au
rapport de Mr. le Confeiller de Ramatuelle, vuidé en Grand'Chambre le 21 du même mois. La Semence du Préfet de
Barcelonetre fut confirmée, avec dépens. Ecrivant Mes. Jaubert & Fauchier.
ARRÊT
XXX.
1
On ne doit furftoir a un jugement Conful'aire fur motif d'in~
compétence, fi elle n'ejl évidente & notoire.
E 17 Oaohre 1780 , Me. Ifoard , Garde de la Connétablie de France, fe pourvoit aux Juges - Confuls de
Marfeille conne la Dlle. Moute en condamnation de la
{Q~me' de 300 liv., pour la capture du Sr. Jeauffroy faite en
vertu d'une Semence Confulaire. Le 20 du même mois,
Sentence qui la condamne à 192 livres, avec contraime
par corps-, dépens compenfés. Appel pardevant la Cour &
requ~te en furféance; ,décret de renvoi en jugement. Dans
le cours de l'infrance, Me. Ifoard fe départit de la contrainte
par corps.
On difoit pour la DUe. Moute que l'incompétence des
Jùges-Confuls étoit fondée fur ce que, d'après Me. Ifoard
lui-même, il ne s'agi/foit que d'une convention faite entre
elle & cet Huiffier pour l'exécution d'un jugement Confulaire. Cetre convention n'ayant rien de mercantille, étoit
étrangere à la jurifdiélion des Confuls , & ne pouvoit être
portée qu'aux Juges ordinaires. Les Juges-Confuls n'ayant
pas l'exécution de leur jugement, ne peuvent connoÎtre des
contefrations qui s'élevent lorfqu'on veut les exécuter, &
fur-tout concre un tiel;.s qui n'eft pas jufriciable de ce Tribunal;
L
(
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PAt AIS
D Il
PRO V Il ~ C E.
3°1'
On répondoit pour le fieur ICoard que fa demande tendoit
à lui procurer le Calaire de fon travail. Il a capturé le débitéur en force d'un titre émané de la Jurifdiél:ion ConCulaire.
C'elt au Juge qui a Centencié, à taxer les procédures qui fe
font en exécution de fon jugement; d'ailleurs, la Dlle. Moute
avoit retiré les frais de capture; ils écoient inglobés dans le
billet de 1200 livres, que le débiteur faifi avoit fait.
Me. Aguillon Subfritut, obCerva qu'il y avoit eu entre
Me. Ifoard & la Dlle. Moute un accord à raiCon des captures
que cet Huiffier écoit chargé de faire. Ils en convenoient
l'un & l'autre; mais ils varioient dans la fomme promife•.
C'efr ce qui avoit fans doute déterminé les Juges-ConCuls à
la fixer à 192 livres. Au furplus, Coit qu'il y eût une convention antérieure fur les frais de capenre, Coit qu'il n'yen
eût aucune, cet accord particulier pourroit-il priver les
Juges-ConCuls du droit d'affigner aux Huiffiers qui exéèutent
leurs jugemens, les falaires qui leur Cont dus. Si c'efr à eux
qu'appartient cette taxation, il doit étre libre fans doute à
un créancier qui charge un Huiffier d'une capture de faire
fon marché avec lui; mais fi ce marché ne tient pas, s'il efr
méconnu, déCavoué par une des Parties, le Juge ne doit
pas étre privé du droit qu'il a de taxer les frais de cette
exécution. Quelle que foit la Comme qu'il accorde, on regarde
toujours la condamnation qu'il prononce, comme la taxation
du Calaire de l'Officier qui a exécuté fon jugement.
Il s'agit donc uniquement de décider fi la taxe de l'Huiffier
qui a Caifi un débiteur en force d'une Sentence des JugesConCuls, doit être faite par eux, lorfque cette taxe donne
lieu à une conteflation entre l'Huiffier & la Partie, ou par
les Juges ordinaires, comme fortant des bornes de la jurifdiél:ion ConCulaire.
Ên regle générale, l'exécution d'un jugement appartient
à celui qui l'a rendu; mais cette regle celfe-t-elle s'il s'agit
d;un Juge cartulaire, qui n'a d'autre pouvoir que celui qui lui
a été donné exprelfément? Les Juges-ConCuls étant refrreints
à la décifion des caufes
tout
_.' mercantilles,
..
_
L
. . .ce
. . .qui fort_ de ceJ
~
�302
Jou RNA L
cercle dl-il érranger à leur jurifJiélion? Les que fiions qui
s'élevenr fur l'exécution de leur jugemenr ne. [ont-elles plus
de leur compétènce, parce qu'elles ne leur ont pas été dévolues, fur-tout lor!qu'elles intéreffenr un tiers?
Pour affigner lès bornes fouvenr rrès-incertaines de la jurifdiélion Confulaire, relativement à l'exécution de leur
jugement, on peut confulter l'Edit de création des JugesCon fuIs de Paris, qui a été enfui te rendu commun pour
tout le Royaume. Il porte en l'art. 12: 'lue les faifies, étahliJ1èmens de CommiJfàires & venUs des hiens ou fruits feront
faites en vertu des lugemens & Sentences des luges-Confids ;
mais 'lue les criées & interpofitions de décret ft feront par
,autorité des Juges ordinaires des lieux.
De la difpofirion de cet article, il femble réfulter que fi
les faifies peuvent fe faire de l'autorité des Juges-Confuls ,
les frais auxquels elles donnent lieu doivenr êrre raxés pac
eux, parce que la raxe de ces procédures ne tombe qu'en
exécution de cette partie du jugemént; cependant une di[tinélion fondée fur des Arrêts & des autorirés affez précifes ,
femble mettre quelque difficulté dans cette con[équence.
Il faut difiinguer le cas où l'exécution du jugement ne [e
fait que d'une parrie à l'autre, ou la queHion ql:'elle préfente
n'intéreffe que le demandeur; dans ce cas nul doute que les
Juges-Confuls ne continuent à êrre compérans. Mais efi-ce
un tiers qui vient prendre part à la querelle? Dès-lors il faut
aller au Juge ordinaire. Ici !'e tiers efl: Me. Ifoard; la condamnation que la DlIe. Moure a rapportée [ur le fonds de
la demande ne l'inrére1Toit a1Turément pas; fon aélion procede d'un fait totalement différent & nouveau. Mais ( continua Me. Aguillon) doit-on juger la qu~fl:ion de [ur[éance
d'après ce point de vue?
Les jugemens Confulaires ont toujours la pré[omption
pour eux, & on n'en arrête l'exécution qu'en cas d'incompétence évidente & notoire, fur-tour lor[qu'il s'agit d'une
caufe jugée en dernier reffort. Ici la quefl:ion d'incompé~ence a-t-elll: ces caraéleres? Le moyen que l'on propo[e
�DU
PALAI~
,DE'
Pn,OVENCI!:
30J
e!l:-i1 tel, que l'on puiffe dire qu'il e!l: él'ident que la demande en taxation a été mal-à-propos portée aux JugesConfuls? La difcuffion dans laquelle on efl: entré prouve
fuffifammenr le contraire. La furféance à l'exécution de la
Sentence pourroit donc fouffrir des difficultés fous ce premi('r rapport; elle n'en efl: pas moins fufceptible fous un
fecond. La Communauté des Procureurs a attefié que
fuivant l'ufage confiant, & qu'ils ont toujours vu prati:'
quer à Marfeille, on porte aux Juges-Confuls la demande
en taxation des Huiffiers, & celles en réduél:ion de ce
qu'ils ont reçu à raifon des emprifonnemens faits de leur
autorité. Il efi vrai qu'un ufage n'efl pas une loi; que, de
ce qu'il auroit plu aux Procureurs d'introduire celui d'aller
aux Juges - Confuls dans dès caufes qui ne font pas de
leur compétence, il ne s'en enfuivroit pas que cet abus
pllt couvrir l'irrégularité d'une procédure, fur-tout fi dans
fon infi.ruél:ion on s'érait éloigné d'une Loi précife &
connue. Mais au cas pr.éCent, l'ufage n'éta.nt contraire à
aucun texte précis de l'Ordonnance, Me. Ifoard auroit
pu le prendre pour regle dans l'introduél:ion de fa ·demande. Non-feulement l'atteaa~ion des Procureurs rre contrarie aucune Loi fur le: point de compétence; mais elle
a pour bafe un Arrêt de la Cour qui homologue un Réglemenr des Juges-Coafuls. L'art. 13 de ce Réglement
pOrte: pour un empri[onnement pour caufe n'excédent 50 livres, 3 livres; pour plU'S grande [omme 4 livres, & en cas
de peine extraordinaire, fuivant la taxe des Juges. Ce Réglement efi fous la date du 2. Janvier 1716, & l'Arrêt qui
l'ho mologue du I2. Mars fuivant.
~e. Aguillon conclut ~ ce que le tout en état fût révo..:
que.
Arrêt du 28 Juillet 178 l , prononcé par M. le Préûdent
de St. Vincent, conforme aux concluûons. La Dlle. Moute
filt condamnée aux dépens. Phidant Mes. Gailler & Dubreuil cadet.
�JOURli.lI.
ARRÊT
XXXI.
Information convertie en enquête.
P
Ierre-François Faubert prit la ferme du piquet de la
farine de la Ville de Cuers. Jacques Garrel, précédent
fermier, imagina avant l'expintion de fon bail de diminuer les Boulangers & les habitans de 1 ~ fols par charge,
afin de les engager à faire des provilions de farine pour
deux ou trois mois. Faubert inf!:ruit de ce fait, fe pourvut le 14 Août 1780 à la Cour des Aides, & demanda
l'information, décret d'ajournement contre Garrel ; celuici prêta fes réponfes, & demanda la caffarion du décret
de foit informé, & de tout ce qui l'avait fuivi ; il fit offre de refiituer ce qu'il pouvoit avoir perçu par le moyen
de cet abonnement.
On difoit pour lui qu'il n'y avait pas lieu à informer par
la nature de la plainte, par la connoiffance que le lieur
Faubert eut avant (es offres, de l'abonnemenr, & par les
paie~ens qui lui avoient été faits, & qu'il avoit quirrancé.
Son accufation frappe fur un monopole, fur un vol.
Ferrieres, dans fon Diél:ionnaire de Droit, appelle le
monopole un trafic qui fe fait par celui qui fe rend feul le
maître d'une marchandife, en forte que touS ceux qui en
ont befoin font dans la néceffité de paffer par fes mains,
& de lui en payer le prix qu'il y met. Il y a loin de là à
la polition d'un fermier qui, par fan bail, ef!: le feul prépofé à une recette, & qui a diminué le droit de la rêve
au lieu de l'augmenter. Quand les fermiers, chacun à fan
tour, ufent de cette faculté; quand chacun d'eux abonne
& réduit, le ni"eau s'entretient· de l'un à l'autre, les cho[es vont à la même fin. La confommation étant plus grande,
~ ,ommu.oauté a plus d'efpoir de voir accroltre fes reve.o,!!s 1.
'.
�D U P ALAIS
D:a
PROV ENC ll.
30 '):
nus; c'ef!: un fait que l'expérience ne permet pas de révoquer en doute. La communauté de Cuers ne peut pas
avoir été grevée, & fes fermiers peuvent moins l'être par
ce principe d'égalité qui les confond tous dans la même c1afre,
& les tient attachés au même forr. Quant au parriculier ,
fon utilité perfonnelle fe rencontre dans le paiement modéré de 3 liv. , lorfqu'il devrait acquitter 3 liv. 1') fols pour
la charge de mouture. Ainli le fermier, la communauté,
le public & le particulier ne fallroient fOllffrir d'un ufage
pareil.
Les perfonnes qui afpirent li la ferme & -qui -l'acceptent,
font maîtres de leur fortune; ou elles ef!:iment que l'ufage
taleré de l'abonnement équivaut à une Loi commune, ou elles
croient ne pouvoir le mettre en pratique. Dans le premier
cas, cet ufage tendant, pour ainli dire, une main propice à
chaque fermier, lui attribue la même reffource pour s'indemnifer; il ne peut fe plaindre d'un fait qu'il peut pratiquer à fan tour, d'Une modération qu'il a également droit
d'imiter: dans le fecond cas, il leur ef!: libre de faire une
offre conditionnelle, & de courir le_ rifque qu'elle fait ou
non rejettée. Mais quand un parriculier aura été témoin de
cet abonnemenc, qu'il en aura même profité indire&emenr,
& qu'à fan vu & fu il aura vu pratiquer cet urage, s'il comparaît aux encheres pour faire une offre à cerre même
ferme dont il connaît la marche, il ne pourra être reçu à
s'en plaindre.
La namre de l'objet ne comporte pas la rigueur de l'information. D'abord la communauté ne fe plaint point, &
fan ina&ion ell: une preuve de l'indifférence qu'elle met dans
cerre forre d'abonnement. On difiingue d'ailleurs la volonté
rnanifeHe de frauder, de la limple erreur. Quand un particulier exige fciemment plu~ que ce qui lui ef!: dlÎ ; quand,
d'après fan bail qui ne l'autorife qu'à la perception de 3 liv.
1') fols par charge, il en perçoit 4 liv. ou plus, il ne faurait alors couvrir fan aél:ion; il fe rencontre dans ce cas
&ln véritable délit dont le public fou.lfre. II n'en dl: pas d~
~nné'$ %78% fi %'18~.
Q~
�•
306
Jou RNA L
mêmé d'une fimple contraveneion qui n'affeéte m~me qu'une
feule têre , c'ell:-à-dire , le nouveau fermier; ce n'eH point
le cas d'affimiler la forme des pourfuites en furexaél:ion, à
celle qui peut accompagner un abonnement dans lequel le
fermier, au lieu de furexiger, facrifie & abandonne une
portion de fon droie , fur-coue s'il y ell: autorifé par un ufage
de touS les tems.
Celui qui abonne une partie de fon droit, ell: cenfé remettre fon bien; cene premiere idée diffipe celle du délit; . il eH de bonne foi; il croit pouvoir difpofer du fien ;
quilihet eJl rei fùœ moderator & arhiur. Si de cette conduire il réfulee un préjudice conere fon fucce1feur , la coutume du lieu l'excufe. On ne pe,ue point appercevoir dans fa
manœuvre le caraél:ere du crime. Ce fera une erreur, ce fera
un abus qui ne fauroient jamais aucorifer l'information. On
juge le délinquant par les motifs qui l'one féduit ; mais on
ne le réputera jamais coupable, lorfqu'il a fait le facrifice
de ce qui lui appartient, lorfqu'un ufage adopté, & que le
plaignant a connu, concourt à faire difparoître le moindre
figne d'un délir. Delà, coures les fois que l'aél:ion ne fe
trouve pas fufceptible de peine, l'information ne compete
pas; tel eH le feneimene du Cardinal de Luca en fon traité
de Regalihus, difc. 79 ; de Mr. Julien en fon commentaire
fur les Statuts, tom. 2, pag. 367, Ita dans les mémoires
tnanufcrits de Me. Julien, tit. accufatio, cap. 2, fol. 6. Garrel demanda à faire preuve de l'ufige.
On répondoie pour Faubert qu'il y a lieu à informer toutes les fois qu'il y a délie, & qu'il y a délit toutes les fois
que l'on commee fciemmene un fait prohibé, par lequel un
tiers eH léfé. Telle eH la définition du délit; fac7um jure
prohihitum , quo 'luis dolo vel culpâ facientis traditur.
Le fait qui donne lieu à l'information, péut quelquefois
~tre excufé par la bonne foi du délinquani ; mais comme
fa bonne foi n'eH qu'un fait jull:ificatif, on ne. révoque pas
le décret de foie informé; on le décharge de l'accufation
$'il ell: innol;cnt, ou~ on diminue fa peine, s'il ell: moins
�DU
PALAIS
DE
307
PROVllNC:!.
{:oupable. On ne cefie ou on ne révoque le décret de foit
informé, que quand la plainte roule fur un fait purement
civil, injufiement ou artificieufemenr rravefii en - délit; il
fuffir que le fait en foi foit prohibé, & paroiife criminel ,
pour faire enrrerenir le décret de foir informé ; on peut
eivilifer l'information, lorfque les exceprions de l'accufé
amenent une quefiion civile., rendanre à favoir s'il a pu
faire ce qu'il a fait. Ainfi, en matiere de coupe d'arbres,
:e fait donne lieu à l'aél:ion criminelle, parce que c'efi un
attentat à la propriété. Si l'accufé dit , j'ai coupé dans mort
fonds, les arbres abattus émient a moi, on ne révoque pas
alors le décrer de foit informé; on re<;oit les parties en
procès' ordinaire; l'accufé fera preuve de fon exception;
l'accufateur fera la preuve- contraire.
Ici Garrel prend ce qui ne lui appartient poinr , par rufe,
dol & fineife ; il fe procure un bénéfice qu'il n'auroit pas
eu, s'il avoit lailTé les chofes dans leur état naturel; c'e1t
au préjudice du tiers qu'il fait ce profit; l'augmentation .qu'il
s'eH procurée, efi fouHraite à la confommation annuelle
qui appartient à fon fucce,lTeur. Donc le fer!'!lier à qui l'on
enleve 4 ou S000 liv. par un abonnement frauduleux, doit
être re<;u à pourfuivre la réparation de ce préjudice par
J'aél:ion ·criminelle.
Le Cardinal de Luca, dans fon traité de Regalibus, dire.
79, rapporte un exemple à peu près femblable. On avoit
établi à Rome un impôt fur les dez à jouer, qui devoient
être exclulivemenr marqués & vendus au nom de l'Hôpital
des vieux infirmes; le fermier de cet impôt, fur la fin de
fon bail, fit fabriquer une grande quantité de dez de qualité inférieure, qu'il vendit à moitié prix; l'Hôpital, qui craignit que cette quantité de dez ne ruinât fa ferme pour les
années fuivanres, fe pourvut en inhibitions & défenfes. Le
Cardinal de Luca établit à ce fujet que le fermier ne peut
rien faire durant fa ferme qui puiife nuire à fon fucceifeur
ou au propriétaire; qu'il ne doit pas_ proroger ra jouiflànc~
dans un tems qui ne lui appartient point, & percevoir l'im;
Qs
2., .
�3 08
Jou
RNA L
pôt au delà du te ms pour lequel il l'a affermé. La réduétion
eU une ftaude commife au préjudice du fermier fuivant ;
c'e'fl: un vol qui lui eH fait. Il y a vol, nous dit la Loi,
non-feulement lorfqu'on enleve la chofe d'auttui , mais lorfqu'on en ufe d'une madiere. contraire au droit qu'on a,
& à l'intention de celui à qui elle appartient.
Ce vol dont la Communauté auroit pu fe plaindre, s'il
avoir empêché qu'il fe préfentât des fermiers, retombe tour
entier fur le fermier qui a acheté d'elle la perception du
même droit; il a donc les aétions qu'elle auroit, puifqu'il
el!: à fes droits. La réduétion attaque le nouveau fermier
dans fa propriété, dans fes jouiifance5 ; elle l'attaque par
un fait illicite; elle lui porre un dommage confidérable qu'il
reifent tout de fuite; elle lui dérobe le premier quartier de
la ferme qu'il eH pourtant obligé de payer.
Arrêt du 9 Février 1781 , conforme aux conc1ufions de
Me. Pacquer, Subl!:itur , qui convertit l'information en enquête; permet à Garel d'enquêter au contraire , fauf de
reprendre l'aétion criminelle s'il y écheoit, dépens réfervés.
Garel fit procéder à fon enquête contraire, & Faubert
reprocha les témoins, fur Je fondement qu'ils avoient déja
profité, ou qu'ils pouvoient profiter dans la fuite de l'abonnement ; il étoit prouvé par cette enquête, que les précédens fermiers en avoient ufé de même.
Arrêr du 6 Février 1782., au rapport de Mr. de Miolis
fils, qui fait droit à l'offre de Garel, & compenfe les dépens. Sur la requifition de Mr. le Procureur-Général du Roi,
ïl fur rendu l'Arrêt fuivant;
,
Dir a été que la Cour des Aides pourvoyant à la re-quifition du Procureur Général du Roi, a fait & fait trèsexpreifes inhibitions & défenfes à tous fermiers & exaéteur5
des impofitions des Communautés, de percevoir les droits
à eux affermés fur un taux inférieur à celui porté par leur
aéte de bail, & d'accorder des rabais aux redevables & confommateurs au préjudice des Communautés & des fermiers
qui doivent leur fuccéder, & ce, nonobfiant tout ufage
�DU
PALAIS
DE
P-ROVENCE:
J09
contraire, à peine de cinq cent livres d'amende, des _dépens, dommages-intérêts des Communautés & des nou_
veaux (ermiers , & fur les contraventions d'en être informé-;
& au cas où les fermiers feroient expreffément autorifés
dans leurs aél:es de baux à faire des abonnemens avec les
redevables, ordonne, fous les mêmes peines que deffus,
que tant lefdits fermiers que les redevables, ne pourront ,
fous prétexte d'iceux, & à la faveur d'aucun rabais, anticiper fur la fin du bail les entrées & confommations fujerres aux droits qu'il leur fera permis d'abonner, ni porter en aucune maniere préjudice aux fermiers qui leur doivent fuccéder: Ordonne que le préfent Arrêt fera imprimé,
lu , publié & affiché partout où befoin fera, & que copies
collationnées d'icelui feront envoyées, ~ -la diligence du
Procureur-Général du Roi, à toutes lei Communautés de
la Province, pour être lu & publié dans un Confeil qui fera
inceffamment convoqué à cet effet, à la dilige nce des Confuis en exercice, lefquels le feront enregifirer dans le livre
des délibérations, & feront tenus d'en certifier la Cour
dans le mois.
ARRÊT
XXXII.
Le fils de famille, majeur & émancipé, peut contrac1er avec
[on pere.
Ean-B!lptifie Barbaroux, bourgeois de Brignoles, éman- cipa Jean-Honoré fon fils le 23 Novembre 1769, &
lui fit donation de 13400 liv., à compte de laquelle fomme
il s'obligea de payer à fa fœur 5000 liv. , & il fut déclaré
que le refiant lui avoit été compté pour négocier & commercer. En 1775 Jean-Honoré Barbaroux reconnut, dans
un aéie paffé au Château-d'If, avoir reçu de fon pere
3500 liv. pour lui en tenir compte- f~r le~ 4roi~s qui lui
J
�'3 10
•
] 0 U RNA L
,
reviendrolent fur fa fucceffion. Le 18 Decembre 177~, teftdmenr de Jean-Baptifre Barbaroux; il légue à Jean-Honoré
fon fils une renre annuelle, viagere & alimentaire de 400 liv.;
9 Mars 1776, tranraétion avec Alexandre fon frere, fur
la fucceffion du pere; il Y déclare êrre furpayé de fes droirs,
& rarifie les précédens aétes paifés avec fon pere. En 1779,
Jean-Honoré Barbaroux impétra des lettres royaux de reCticurion envers les trois aétes, & évoqua l'inHaoce pardevant la Cour. Alexandre Barbaroux confentit à la caifarion
de la tranCaétion.
On diroit pour Jean-Honoré Barbaroux, que l'aél:e d'émancipation & la donation y contenue éroienr le fruit de la
fimularion, de la crainte & de la violence la plus caraél:ériCée.
La cra :œe & la violence font des moyens puiifans de refticmion. (Leg. 7, de, his 'luœ vi metufve cauft, leg. 12 eod.)
Parmi les différ.enres efpeces de crainte qui peuvent donner lieu à la reflirution, la révérence par,ernelle eft un moyen
légal & fuffifanr. (FontanelIa, de poc? nupt. rom. 2, clauf.
7, glo!f. 2 , pan. S, n. 3 t. ) Il fàut néanmoins convenir
que la feule préfomprion de la crainre paternelle ne fuffiroir
point pour faire annuller un contrat, malgré ce qu'attefrent Gan.cerius, var. refol. parr. 3, cap. i S , n. 243 ; Graffus, traét. de except. excepr. 1 l , n. 24 & 31 ; Balde,
conf. 189, lib. ~ ; Decianus , conf. 217, n. 8 ; Cephalus,
conf. 642, n. 106 , vol. ~.
L'opinion de ces Aureurs ell: {ondée fur ce principe raÎfonnable, que l'on eft cenfé n'avoir aucune volonré libre &
déterminée, rant qu'on efl Cous le joug & la puiif,lnce d'autrui : velle non creditur , 'lui obfe'luitur imperio patris vel Domini. Cependanr en' vrai principe, la reHirucion n'a lieu que
lorfqu'il y a lélioo, ou lo.rfque l'atl:e dOCH on demande la
ca1IàrÎon aéré .dérerminé & forcé par des menaces: il,lotis ab eo 'lui folet 'lJJod minatur exe'lui. C'd!: le Cencimenr
de Menoch, de prefumpt. Jjb. 3, prée 126 ; de Boerius ,
decif. 100, n, 18 '& 21 ; de la Peirere, lerr. P, n. 102.;
de Dufre.oe, liv. l,. ch. J.23-; de BretollllieI fur ,Henris,
�DU
PAL AIS
D :Il
PRO V P; N C
l!:
3I!'
tom. 2., liv.· 4 ,qu. 17); de Covarruvias, part. % , §. 7 ,
n. 4; de Catelan, liv. 2., chap. .1); de Mr. de Bezieux,
pag. 3 r).
Une regle non moins certaine veut que, quoiqu'il (oit
vrai de dire en the(e générale, que c.elui qui demande la
ca1fation d'un aéle, doit (pécifier & prouver le fait de crainte,
par qui , les tems, lieux & moyens, la violence procédant de la
crainte révérentielle, & des menaces qui l'one excitée, peut
(e prouver par de fimples indices. Il ell: rare que les mauvais traitemens qu'un pere emploit vis-à-vis de (on fils,
éclatent a1fez publiquement pour que l'on pui1fe en fournir
une preuve claire d'ailleurs. C'efl: fouvent plutôt à l'habitude
des' mauvais traitemens qu'à un fait de violence proprement dit, qu'il faut attribuer un acquiefcement qui n'en eft
pas moins forcé " puifqu'il eft le fruit d'une féduélion préparée par la crainte. Ainli, c'eft principalement d'après les
circonftances, & relativement au caraélere connu des parties, à la néceffité abfolue où fe trouvoit le demandeur en
refcilion , de confentir l'aéle qu'on le for~oit d'approuver,
qu'il faut apprécier la juftice de fa demande. C'eft la remarque du Cardinal de Luca, de regal. di(c. 44 ,.. n.• 4,
Il ré(ulte des aéles du procès-, q\J'en 1769 Jean-'Honoré
Barbaroux étoit plongé dans des égaremens ; il avoit été
eneraîné dans rous les excès qui (one la (uite inévitable du
jeu & de la diffiparion. Dans cette polition , la voix du
devoir (e fait entendre; il reconnQît [es torts, ,il s'arrache aux dangers ,qui l'environnent ,. & court dans les bras
de (on pere & de (à famille abjurer (es erreurs t On devoit croire qu'une pareille démarche auroit ranimé, dans
l'ame du fieur Jean-Baptill:e Barbaroux, les fentimens que·
la conduite de (on fils y avoit érouffés. Un pere tendre peut
s'affliger (ur les qé(orgres de (a famille; il cherche à ramener un prodigue, en ufant de l'autorité que les Loix lui
ont confiée; mais fi ce' fils ret.ourne à lui, s'il implore
encore (a tendre1fe, en rougi1fant de (es excès, il.le recoit avec emprelfemeot -j il l'accueille
~vec
il oublie
"
... bonté,
-..,
.
�,
3[2."
JOURNAL
bient&t lès inquiétudes que lui cauCa le fcandale de fa vie
palfée, pour ne s'occuper que du foin de prévenir une rechûte , pour jouir des confolations qu'une vie plus réguliere
peut encore lui procurer. Ces fentimens font vrais, ils font
puifés dans la nature.
Or, quelle el!: la conduite du lieur Barbaroux pere, à l'inftant où, forcé de quitter Marfeille, fon fils (e rend auprès
de lui? Il n'ignoroit pas les motifs qui l'engageoient à quiccer
un féjour que le poids de fes obligations lui rendoit infupportable. Il (avoit qu'il avoit contraélé une foule de dettes;
qu'il était pourfuivi par fes créanciers; qu'il (e trouvoit d.IOS
l'impuilfance abfolue de les fatisfaire. Le parti le plus (age
eut été (ans doute d'arrêter leurs démarches par des arrangemens amiables. Charmé de retrouver un fils qui ne s'était
égaré que parce qu'il avoit trop tôt vécu loin de fa famille,
il eut du s'emprelfer de le retenir dans la maifon paternelle;
toUt concouroit à exciter fa vigilance ; il fe devoit à luimême de réprimer, par (es foins & fes confeils, l'ardeur
impétueufe d'un jeune homme dont il connoilfoit l'honnêteté, mais dont il falloit changer les habitudes. Point du
tout; c'el!: ,dans ce moment critique où route condefcendance devenoi~ meurrriere, que le fieur Barbaroux brife les
.liens qui retenoient encore fon fils (ous le joug de fon autoriré ; c'el!: dans ce moment qu'il le livre à lui-même, en
renonc;ant à rous les droits qu'il avoit fur fa perfonne & fur
fes biens ; c'eft: dans ce momént qu'il lui confie pour la
premiere fOIs, une fomme d'argent conlidérable, & qu'il
favori(e, par une libéraliré a.uffi mal entendue , les folles
diffipations qui avoient caufé fes malheurs. Qui ne voit qu'un
pareil aéle ne peur être que le fruit de la fimu!ation la plus
caraélérifée ; que le confentement du lieur Barbaroux fils ne
peut'Iui avoir été arraché que par la craime des mauvais traitemens dont il <Îtoit menacé?
• L'autorité d'un pere el!: fans doute refpeélable, mais -les
aéles de fa volonté ne doivent pas dégénérer en oppreffion.
~e~ ~o~ protégent également l'intérêt des enfans concre
l'injufiice
�n U PAL A J S D E PRO VEN C E.
3 T3
l'injuflice de ceux qui abuCeroient de leur foibleffe pour les
Tromper. Aink, en confiant aux peres l'adminiflration des
biens de leurs enfans , elles ont cependant appofé des bornes à leurs pouvoirs, quoiqu'il fait vrai de dire que pietas
patema optimum co!!filium capiat. De - là, fi leur adminiHratÎon devient trop déravantageufe, elle eH févéremem
réprimée par les Tribunaux, & rous les aél:es qui en dérivent font nuls. C'eH la remarque de Perezius, cod. lib. 6,
tir. l, 11. 9; de Barbara, lac. commun. va. pater, n. la; de
Pafcalis , de patriz potifl. viri6. parr. l , cap. 1., n. 3.
Ce n'eH donc qu'à J'exercice d'une autorité bien ordonnée, qu'il apparrient de fixer le degré de relpeél: & de confiance que l'on doit il la puiffance paternelle. Ce n'eH plus
ufer d'un droÎ"t légitime,. que d'ériger en pouvoir arhitraire
& tyrannique. une autorité purement domefiique & correcti~~elle. La rendreffe d'un pere peut exciter fa vigilance,
tenè!{e même indifpenfable une rigueur faluraire ; elle ne
peut ~mais auroriler les vexations. Le fieur Barbaroux abufait doh,c de Ion autorité, en forçant fan fils il confenrir un
aél:e qui' tendait à le dépouiller de fes droits légitima ires ,
de ces droits facrés qu'il n'érair pas en fan pouvoir de lui
enlever; & la reconnoiffance- que le fieu.r Barbaroux fils a
faite dans cet aél:e d'avoir reçu 134QO liv., a été le prix
de la liberré dont on voulait le priver.
Il efl impoffible de fe perfuader que le fieur Barbaroux,
qui avait conflamment refufé à fan fils les premiers fecours,
eût précifémenr choili le moment où fan dérangement ne
laiffoit pills aucun efpoir .fur fan compte, pour l'avantager
d'une fomme auffi conlidérable que celle qui efl porrée dans
l'atte. Une pareille libéralité ~evenoir meurt,iere vis-à-I'is
un jeune homme dont il fallojt arrêter les di/lipations, bien
loin de les favorifer. Il eut été bien plus fage de répare\'
fes faures, en appaiCHlt les créanciers les plus obflinés, Ce
en lui affignanr une pen Gan honnête pour fa fubfilhnce ~
fan entretien. On ore même dire qu'ici on ne devwit ja.
mais impllter , (ur.l<l légitime d'un fils lies fqmmes que fo"
.I1nn4es 178z & 178z,
Rt .
�3 r ,!,
JOURNAL
u?
pere auroit .eu la ~oible~e de lui coofie~ '. dans
iofiant où .il
ne pouvoit en faIre qu un ufage pernIcIeux. C eH It: fen[lment de d'Argou, tom. l , pag. 4)0. L'imprudence de
l'un ef!: bien plus repréhenfible que la prodigalité de l'autre : le fils même n'ef!: plus en quelque forte un prodigue;
il devient l'infl:rument des diflipations de fan pere.
. Le motif donné dans l'aél:e que c'eU pour donner des
facilités & des moyens au lieur Barbaroux fils d'agir pour
fan propre compte, de négocier & commercer pour lui, ef!:
limulé. Un Militaire, un prodigue devient tout de fuite un
commer~ant éclairé, qui fera un emploi utile des fommes
qn'on lui confie. Qui ne voit que, forcé de donner une caufe à
la prétendue donation fiipulée dans l'aél:e, le fieur Barbaroux pere fe fervit de ces expreflions, comme défignant
l'objet apparent d'une libéralité fimulée?
La conduite poll:érieure du lieur Barbaroux, à l'égard
de fon fils, jufiifie airez l'opinion que l'on doit avoir de
fes difpofitions envers lui. La crain!e a opéré ce que la
lufiice ne fauroit autorifer par fon fuffrage.
L'aél:ion refcifoire dure plus de dix ans, lorfqu'il s'agit
d'un fait de crainte & de violence; la prefcription ne court
alors que du moment que la partie qui réclame, a pu incenter librement fa demande; c'ef!: la difpofition de l'Ordonnance de Louis XII de 1) 10, art. 46, parce qu'on
préfume que la crainte a duré autant de tems que la caufe
a fubfiHé. C'efi le fentiment de Decius, conr. 2, 19; de
4VJenoch, prœf. Î 2,6, n. 2,8; de Boerius, quo 100; de
Bourdin cité par Lepretre, cent. l , chap. 48; de Denifart, va. crainte, n. 4 ; de Mr. de Montvallon, précis des
Ordonnances, va. refcifion. La maxime ef!: encore confa.crée par l'Arrêt du 4 Juin 17or, rapporté pat Mr. de ,Bezieux, liv. 4, ch. 16, §. 3, pag. 3 r '5'
Jean-Honoré.. Barbaroux paira enfùite à l'aél:e du l'i Mai
177) J & il foucint que la quittance des 3'500 liv. étoit
fimulee. Cet aél:e fut par lui confenti, lorfqu'il étoit détenu dans les prifons du Château-d'If. Les conerats doivent:
�D U
PAL AIS
D E
PRO VEN C E.
3r 5
étre le fruit de la volonté libre des parties. Cene maxime',
qui tient bien moins aux principes du droit poiitif que de
la morale, e(~ un hommage rendu à la liberté naturelle de
l'homme, dont on peut gêner les démarches, mais dont
il faut au moins refpeél:er les volontés. C'en: d'après ces
regles confiantes de bonne foi & de fùreté publique, qu'il
efi établi que tous les aél:es paifés avec un ciroyen qui [e
trouve dans les fers, font néceifairement nuls & réputés
frauduleux; c'efi la déci fion des Loix 22, ff. quod metus
caufd gefl. erit. & 5 ff. ad leg. jul. de vi public. Tel eH le
femiment des Aureùrs. ( Guipape , quo 53 , pag. 263 ; la Rocheflavin, liv. 2;' pag. 209 ; Defpeiifes , rom. l, parr. 4 ,
tir. 1 l , [eél:. 3, n. 3; Charondas, dans fes pandeél:es ,
liv. 2, chap. 40 ';. Lacombe, va. reflitution , [eél:. 4, n.
4 ; Denifarr, va. prifon, n. 52; Boniface, rom. 2, pag.
290 ; & Builfon, cod. tir. de his qUIl! vi metufve cauj7î.)
Dès que les aél:es. de 1769 & 1775 croulent (cC)ntinuoit Jean-Honoré Barbaroux) la tranfaél:ion du 9 Mars
1776 doit également crouler. Le premier aél:e paifé.enrre co.
héritiers n'eH jamais confidéré que comme un partage. (Mr.
de Montvallon dans fon traité des fuccejJions , tom. 1, pag.
223, qui cite Boniface, tom. 2, liv. l , tir. 13, ch. 3 ,
pag. 'P ; les aél:es de notoriété du Parlement, pag. 253 l
& Decormis, tom.. 2, col. 1397 & [uiv.) Un principe
également cerrain en pareille mariere, veut que l'égaliré
foit la bafe de tout aél:e de parrage: ut quos junxit natura,
dit la Loi, œqualis jungat gratia. Auffi la refciiion en:-ell~
ouverre, lorfqu'il y a léiion , fans qu'il foit néceifaire d'une
léiion d'outre moitié. Duperier, tom. 2, pag. 520, fon
Annotateur, & Mr. de Montvallon, traité des fucceflians· t
tom. r, pag. 222, difent qu'il importe peu d'examiner fi
le partage a été fait par forme & maniere de tranfaél:ion.
Dès qu'il y a léfion, la voie de la refciGon corn pete en.
vers j'aél:e fous quelque qualification qu'il ait été défigné ~
fu.lncumvis utantur tranfac1ioni' 'lIe.rQo.
- Eutin 2 l'aébQC\ refcifoire è01upete au légitimaire qui a êt6
Rr:t.
�3 16
JOURNAL
léfé dans l'aél:e qui contient l'efiimation des biens de l'hérédité fur laquelle il avait des droits. Son intérêt efi le
même que celui du cohéritier.
Ici la lélion efi évidente. La liquidation des droits légitimaires du lieur Barbaroux efi faite fur les aél:es dom on
vient de démontrer la fraude. La fucceffion du pere n'a paine
été évaluée à fa jufte valeur; on n'y a point infùé les parcelles de compolition & de détraél:ion ; l'eHimation de l'hé1'Îtage efi faite en bloc, & fans donner aucuns des édair~
<:iffemens qui auraient pu en garantir la légitimité. Il eH de
principe que les aél:es de partage d'une fucceffion, euffelH-ils
la forme d'une tranfaél:ion, font refcindables, s'ils Ont été
paffés non vifis tahulis nec diJPunc7is ratùH1ihus. Chacun fait
que le partage des biens d'une hoirie doit être fait fur une
efiimation en détail de chaque piece; aioG jugé par les
Arrêts rapportés par Boniface, tom. 2, liv..1, tit. 13,
ch. 4, pag. 42., & par Julien, dans fan Code, liv. 3, tit.
IO, ch. l , §. 4, pag. ').
On répondait pour Alexandre Barbaroux, que le fils de
fàmille eH capable de tous les contrats de la fociété civile.
Le principe efl: certain, il dérive de la Loi 39, if. de ohligat. & ac7. filiusfamilias talliluam paterfamilias obligatu r & oh
-id agi cum eo tanquam cum patrefamilias potefl : on en excepte feulement le comrat du prêt. pes Loix particulieres
relevene le fils de famille de cette forte d'engagement;
mais dans tous les contrats ordinaires, ils n'one d'aurres
moyens de refl:itution que ceux qui compéteroient à toue
autre particulier. Le fils de famille peue cautionner pour fan
pere; il peue s'obliger folidairemene avec lui ou pour lui.
~ L. 8, cod. de /idejuj[. & mandat. ) Le fils de famille maJeur peue à plus tarte raifon contraél:er avec fan pere fur fes
\ntérêts particuliers; recevoir de lui en avancemene d'hoirie,
& traiter avec lui comme il traiteroit avec un tiers.
Ici une circonHance bien déciGve valide les aél:es attaqués. Le fleur Honoré Barbaroux écoit non-feulement majeur à leur époque, il étaie encore émancipé. Dégagé des
�nu PALAIS nt PROVI!NCI!.
317
liens ~de 'la puilfance paternelle, il éwÎr le maltre de (es
'aétions , fui juris erat ; dès-lors il étoit à l'infiar de 10US les
hommes qui conrracrent enrre eux. Lès Loix admettenr dif:ficilemenr au bénéfice de la refiitution ceux qui (onr capables de conrraéter par eux-mêmes. On doir cerre \->récau~
tion à la fùreré des conrrats; il n'en, eH aucun qui ne rôt
donner prérexte aux Parties qui l'ont (oufcrit, de s'en
plaindre dans la fuite des temps. Il n'y aurait plus rien de
fiable dans la (ociété ni dans le (ein des familles, fi les
'Conrrats palfés en liberté & avec connoilfance de caufe ne
formaient une barriere' illfurmonrable à de nouvelles pré.
,tenrions. De-là on ne releve les pe'rfonnes majeures des
obligarions qu'elles ont contracrées en majorité, qu'en
prouvant par elles la léfion d'ourre moirié, le dol, la crainte
ou la violence. On exige des preuves claires & préci(es : de
iimples préfomprions ne fuffifenr pas.
Sur l'acre de 1769 on difoir que le fieur Barbaroux avoit
quitté la maifon parernelle contre le gré de fes parens pour
fe rendre à Paris; il s'y érait livré aux dépenfes les plus
, folles; il en éroir revenu criblé de dettes. Il implore & obtient fon pardon. On lui propofe d'aller fervir l'Etranger ou
d'y commercer: dans l'un & l'autre cas il faut de l'argent.
S'il préfere ie parti du commerce, il efi nécelfaire qu'il foit
émancipé; l'acre de I769 pourvoit à ces deux objets. Le fieur
Barbaroux pere émancipe fon fils, qui à cette époque étoit
déja majeur. Il lui fait enfuite une donation de I3400 liv. en
avancement d'hoirie. 1\ exige que cette fomme fait imputable
fur fes droits légitimaires. Quels font les traits d'oppreffion
& de dureté que ce titre préfente'? N'y voit-on pas au contraire la preuve des bontés d'un pere qui pardonne les torts
paffés, & qui fournit, fans y être obligé par aucune Loi,
des fecours pécuniaires à fon fils pour embralfer un état &
travailler à faire oublier fes égaremens? L'acre n'efi point
léfif, il ne peut par conféquent'être refcindé fur Ge motif en
faveur de celui qui l'a foufcrit en pleine majorité. On ne peut
~alement y trOllve~ auçun dol ~ il a une caufe jufie & légi-,
o
�3 1S
JOU~~Ar.
rime. LèS circonfiances pamculteres dans lefquelles le 1ieur
Honoré Barbaroux (e trouvait, néceffitoient (on expatriation;
il falloit aller chercher des reffources chez l'Etranger. Dèslors l'émancipation deve'noit néceffaire; dès-lors la donation
en avancement d'hoirie avoit un objet bien intéreffant; celui
de lui affurer un état.
Qu'importe que Cancerius '& d'autres Auteurs aient établi
qu'une donation faire par un pete à (on fils (ans aucune
cau(e, efi préfumée fauffe. Il refie au fleur Barbarou~ ~
prouver que .Ia donation faite dans l'aél:e de 1769 a été faite
fans caufe; d'ailléurs ces Auteurs parlent d'lllle donation faite
à un fils min~llr'& impubete; d'un aél:e paffé en l'ab(ence
du donataire, qui tenferme une léflon énorme, & le motif
de la crainte révérentielle. L'en(emble de ces circonfiances
peut opéter la caffation d'un aél:e ; mais c'efi donner une
exrenCion forcée aux principes, que de les faire valoir dans
l'hypothe(e d'une donaiion faire à un fils majeur & émancipé, qui était préfent à l'aél:e , qui ne peut alléguer aucune
léflon énorme, ni même apparente, & qui ne peut exciper de la crainte révérencielle.
La caure exprimée dans l'aél:e de 1769 n'efi point fauffe ni
fimulée ; il ne tenoit qu'au fieur Barbaroux de (uivre les vues
de fa famille, de paffer à l'Etranger, & de remplir l'objet
des libéralités paternelles. Aveuglé par fes paffions, il a pré. féré de con[ommer le monrant de cerre donation en des dépen(es inutiles. De quel droit (e formeroit-il un tirre de
l'inexécution volontaire de (a parr des caures de cet aél:e ,
pour en attaquer la (ubfiance? Il efi prouvé que le fleur
Barbaroux a reçu d'abord à compre des 1 >400 liv. )000 liv.
valeur en l'indication qu'il fit à fon pere en faveur de fa
tance, pour la charge de Gouverneur du Val, & le refiant
en mandats, billets & lerrres de change par lui tirées &:.
acquittées par (on pere dans un temps bien voiCin de la do~
nation. AinCi poinr de flmulation., point de léCion.
Sur la crainte & la violence, Alexandre Barbaroux rêpon...:
dQit que COUte crainte n'dl pas un moyen .de œftitution ~
�DU
PAL AIS.
D Il'
PRO V Il N C
l!:
319
erre exige le concours de plufieurs circonfiances. La crainte
doit être grave: metum accipiendum laheo dicit non fiuemlibee
timorem , fed maJoris mali, L. 5 , ff. de eo fiuod metûs caujà
gif/um erit. La craime grave eH celle qui efi capable d'ébranler l'homme le plus ferme, metum autem non vani hominis,
fed qui merito & in hominem conJlantiJfcmum cadat, L. 6, ff.
eod. L'homme timide ne peut oppofer pour moyen de refiitution, une crainte qui n'en eut point impofé à un homme
plus intrépide, L. 7, ff. eod. La liherté, dit Mr. Cochin,
tom. 1 l, pag. 135, doit être l'ame de ces fortes d'ac1es, &
dès qu'il paroÎt qu'on y a été engagé par les fenti'7lens d'une
crainte raifonnahle {,. capahle d'éhranler un homme conJlant ,
l'engagement tomhe & s'évanouit de lui-même.
.
Les Loix délirent encore que la crainte fait préfente &
aétuelle: metum autem prœJentem accipue dehemus, non
[ufpicionem inferendi ejus, L. 9, ff. eod. Elles veulent auffi
que cette crainte fait relative à l'aéte envers lequel on veut
être reHitué. ( Defpeiffes , tom. l , parr. 'h tit. 1 l , feét. 3. )
De fimples menaces ne fuffifent point pour induire la violence
ou la crainte qui a déterminé un aéte; il faut prouver la
réalité de ces menaces, il faut même démontrer que l'auteur de ces menaces eH capable de les exécuter', & qu'il lui
arrive ordinairement de les réalifer. ( Menoch, de prœ[umpt.
lib. 3, prœf. 1:.6, & Covarruvias, part. 2., §. 7, n. 4. )
Mr. de St. Jean rapporte un Arrêt qui débouta une femme
de la refcilion envers un aéte de fes biens paraphernaux,
paffé fous l'autorité de fan mari. Elle prérendoit y avoir été
forcée; elle en rapportait même la preuve.
Il ne fuffit point d'alléguer une crainte, il faut la prouver;
'dehet apertiJJimas prohationes ·violentiœ opponere, L. 2.3, ff.
eod. ; Boniface, tom. 4, pag. 648 . Le témoignage de celui
qui demande la refcilion d'un aéte eH toujours fufpeét; c'el!:
déja un préjuO'é défavorable que de revenir contre fan propre
fait. Il faut effacer d'abord ce préjugé par des prellves fuffifantes; il faut juger l'homme avant d'examiner l'aéte. On
~'efi point admis à réclamer contre [es engagemens, fi on
,
�32.0
Jou RNA L
ne prouve une violence ou une crainte grave & réelle. Ce
n'efl: qu'après ce premier examen, que la Loi permet aux
JU<7es d'examiner fi ces preuves font légitimes, & fi la viole~ce & la crainte dont on fe plaint vicient l'aB:e envers lequel on demande à être refiitué. Il faut enfin qu'on n'ait pas
ratifié les aB:es dans un moment de liberté : .fi per vim vel
metum mortis aut cruciatûs corporis, venditio vohis extorta
ql & non poJlea eam confenfu corrohoratis, L. 4, cod. de his
quœ vi metufve. Si la crainte & la violence font des moyens
de refl:itution, c'efi parce qu'elles font defiruB:ives de toure
liberté; mais cette liberté renaît au moment où la contrainte
& la violence viennent à celfer. Le confentement qu'on peut
donner alors à un aB:e , qui dans le principe aurait été déterminé par la force, en fait difparaître le vice; on préfume que l'homme rendu à lui-même a voulu que le contrat
fût obligatoire, puifqu'il l'a approuvé dans un temps où il
jouilfoit de fa liberté.
y a-t-il dans l'aB:e dont s'agit aucune apparence de crainte
grave & capable d'ébranler l'homme le plus ferme t Si on
appréCie bien les clameurs du lieur Barbaroux, elles fe réduifent à la crainte de perdre fa liberté, à des menaces d'une
détention qu'il n'avait que trop méritée. Or, de fimples.
menaces, dont la réalité n'efl: pas même prouvée, peuvent-.
elles confiituer cette crainte, qui cadit in conflantiflimum
virum, & qui feule peut ouvrir la ·voie de' la reLtitLltion?
E!~-ce là certe crainte majoris mali donc parlent les Loix?
Si le fleur Hanoré Bubaroux craignait de perdre fa liberté .
ce n'dl: ni à la haine ni à la dJreté de fes parens qu'il devoi~
attribuer cette crainte. Si le GeLlr BJrbaroux pere avait éré
tel qu'an le dépeint, eut-il manqué d'ocG.auons de punir [onfils & de le taire enfermer?
Sur-l'a.:te de 177'), on diCoit qu'il ne renlèrmoit élJ'ale-'
ment ni dol, ni léfion , ni fraude, ni Gmulation : il n~ flle
point l'effet de la violence & de la contrainte. Le ueur Barbaroux n'étoit point dans les fers 10rCq'J'il fouCerivit cet
aéte; il jQljilfoit de f4 libené : il étQit maie ur & émd.Qcipé.,
a
De
�DU
PALAIS
DE
PROVBNCE.
321
De nouvelles circonl1:ances nécefficoient fon expatriation;
il écoit toujours quel1:ion de palfer dans l'Etranger: c'érait
même alors un pani forcé. Les 3 S00 liv. contenues dans cet
aél:e eurent la même ddlination; elles furent comptées
réellement. Elles fervirent à dégager une malle, le linge &
les bijoux qui éraient entre les mains de plulieurs prêteurs
fur gages, & l~ rel1:ant devoit être employé aux frais du
voyage, à l'achat de quelques nouvelles hardes, à la fubIifrance du fieur Barbaroux, jufqu'à ce qu'il eût trouvé un
emploi dans le pays étranger.
- Arrêt du 21 Juillet 1781 , au rappon de Mr. le Confeiller
de Montvallon, qui déboute le Iieur Jean-Honoré Barbaroux
des lettres de 'refcilion envers les deux premiers aél:es, le
fieur Alexandre Barbaroux ayant confenti à la calfation de la' ,
rranfaél:ion de 1776; condamne Jean-Honoré Barbaroux aux
dépens des deux premiers chefs, les autres compenfés. Ecrivant Mes. Guieu & Ricard.
ARR Ê T
X X X l II.
On doit ft pourvoir aux Juges ordinaires, & n.on aux Lieutenans,
de Police, à raifon d'une injure faite dans une ajJèmhlée du
Corps, mais 'lui n'a aucune relation avec la police du Corps
ou avec l'ohjet de l'ajJèmhlée.
E 28 Janvier 1781, le Corps des Tailleurs d'Habits de la
Ville de
fut alTemblé en venu d'une Ordonnance
des Lieutenans-Gélléraux de Police, & en préfellce d'un
CommilTaire. On devoit y entendre le compte des Syndics
{orcane de charge. Le plemier ancien Prieur & Me. Jofeph......
Procureur enererent. Sur la demande de l'un des Prieurs,
Me. Jofeph........ répondit qu'il étoit venu au requis des
Comptables; on le pria de fe retirer. On lui dit qu'il n'avoit rien à faire dans l'alTemblée, & que fa préfençe y,
Années l78l & l78a.,
~s
L
�3U
J ? U R N A ~.
••
.,
érait inutile. JI y confentlt, pourvu qu Il en fut fait mention.
Le lendemain Me. Jofeph....... préfenta une requête au
Lieuœnant-Criminel en information fur l'injure qu'il prétend.oit ayoir rec;ue dans cette affemhlée. Décree d'affigné
cpnrre trois Maîtres Tailleurs. Ils prêterem leurs réponfes
pard~vant le Lieutenaor, & appellerenr enfuite du décret de
foit informé, &: de raut lie qui avait fuivi.
'.
On propofoit deux moyens popr les appellans : la. il n'y
avoit pas lieu d'informer: 2. 0 • en cas qtl'il y ~ût un délit capable de comporter l'aél:ion extraor,clio.aire, c'étoit al)X Juges
de Police qU'II falloit s'adreffer, & non aux Juges ordinaires;
l'affemblée dans laquelle s'était introduit Me. 10feph........
étant tenue fous l'aurarifation de la Police., & en préCence
d'un de fes Commiffaires, c'érai.t à eux qu'il falloit demaJJder l'information. Les Juges de Police avaient caraél:ere &
pouvoir pour informer; ils connoiffenr des rébellions faües
à leurs mandemells. Pourquoi ne connoîtroient-ils pas des
troubles apportés aux affemblées qu'ils ordonnent & qu'ils
aurarifent? Différens Arrêrs ont confirmé des procédures
qu'ils avoient prifes dans des cas pareils.
Me: ~ofeph........ répondit qu'il n'éraie pas membre du
Corps, & qu'en pourfuivam une injure perfonnelle, & nullement relative à la police & même à l'intérêt de ce corps,
il avoit dû s'adreffer aux Juges ordinaires; que d'ailleurs l'injure étoit grave, étant faite à un homme public, & dans
une affemblée de Corps.
Me. Aguillon SubHirut, obferva que les Juges de Police ont
dansplufieurs cas le droit de procéder pada voie extraordinaire.
Les Edits qui om créé ces Offices leur attribuoient en cette matiere une jùrifdiél:ion fort érendue. On a fenri la néceffité d'en
ref!:reindre les bornes, lorfque ces Charges, .par leur réunion à celles .des Officiers Municipaux, ont été def!:inées à
être exercées par gens peu inl1:ruits dans .les regles de la
procédure. De-là les Déclarations & Réglemens qui les
privent du droit deconnoître des grands crimes, que le tirre
de leur création leur attribuoit,; d'ordonner & de faire des
procès extraordinaires. C'ef!: fur ce .même motif qu'a été
�DU
PALAIS
DE
3~3
PROVENCE.
tendu l'Arrêt~ de Réglement de I~ Cour, du 19 Janvier
1742, entre les Lieutenans des Sénéchauffées & les Lieu...
renans-Généraux de Police. Ce Réglemenr reHreint ces
derniers, en matiere de Police, aux délits où i~ ne s'agit
<Jue de prononcer des aumônes, amendes, confifcation de 17Ulrchandifès & denrées. Tous les autres délits appartiennent aux
Juges ordinaires.
Les Juges de Police ont en outre, comme touS les autres
Juges, le draie de venger les rébellions faites à leurs jugemens. Ce draie leur a été éotlfirmé par l'art. 20 du tit. 1 de
l'Ordonnance de 1670, qui n'en prive que les Juges-Confuis. La Cour a elle-même pris (oin de le leur conferver, &
l'on trouve pluueurs Arrêts dans le Recueil de Bonnee qui
~ont confacré cette regle.
Mais s'il eH juHe de conferver à la Jurifqiè1ion de la Po"
lice les affaires qui lui appartiennent, il l'eH également de
ne pas lui donner tr'op d'étendue, de ne pas lui attribuer
des cau (es qui ne lui apparriennent pas, & de défendre les
Tribunaux ordinaires des entrepri(es qu'on peut faire fur
leurs Jurifdiè1ions. Il efi bon que certaines affaires (oient
traitées (ommairement & (ans grande inHruè1ion; mais il
ferair de la plus grande con(équence, en matiere criminelle
fur-tout, que le ciroyen perdît le droit d'êtré jugé par des
MagHtrats inHruits des regles & des principes.
Pour qu'un délit puilfe être porté à la Police, il faUt
donc, omre fa légéreté, qu'il (oit de la nature de ceux
qu'ils ont droit de punir, c'eH-à-dire, qu'il iméreffe directement la Police; qu'il tende à~ en troubler l'ordre & les
fonaions. Celui que Me. To(eph
a déféré li la JuHice eŒil de cette efpece? Il a éré commis dans une affemblée convoquée de l'autorité des Juges de Police; elle s'dt tenue en
pré(ence d'un Commiffaire par eux délégué; la matiere qui
en fairoit l'objet éroir de leur reffort; les Maîrres Tailleurs
étoient leurs jufticiables, à rai(on de l'objer dont ils a'lIoient
s'occuper. Mais fi le délie dont s'eH plaint Me. Jo(eph.......
avo~e intéreffé la Jurifdiè1ion des Juges de Police, le Corn.,.
55'
•
20
�31.4
Jou R N 1. L
milfaire qui les repréfencoit n'aurait-il pas été le premier à
foueenir & à venger fes droits? Un verbal drelfé par lui, en
confl:atant le délit, n'aurait-il pas mis le Tribunal à même
de pourfuivre les délinquans? Si la négligence d'un Cèmmilfaire , . peu zélé ou mal infl:ruit de fes devoirs, ne peut
pas fuffire pour déterminer la nature du délit, il faut au moins
examiner, d'après le fuit & la qualité de la fartie plaignante, s'il écoit de la compétence. des Juges de Police.
Me. Jofeph..... ne s'efl: pas plaint, & ne .pouvait pas même
fe plaindre du trouble apporté à l'alfemblée des Malrres Tailleurs; il n'était pas membre du Corps. Il venait à l'alfemblée pour prêter fan minifl:ere à fes diens; mais c'écoit d~ns
une opératiop qui n'avait rien de judiciaire. Le compte n'écoit rendu qu'à des Auditeurs choius parmi les Maltres Tailleurs; ce Procureur n'avait donc aucune efpece de relation
avec les Juges de Police. A quel titre & fur quel fondement
f~ ferait-il donc ad,relfé à I~ Police? Serait-ce parc~ ~'en
l'mfultanr, on aVait manque de refpeél: au Commllfalre?
'Mais Me. Jofeph........ n'avait pas intérêt à faire punir ce délit; c'était l'injure à lui faite dont il pourfuivoit la vengeance; & fous ce rapport, la plainte ne pouvait être.
/ portée qu'aux Juges ordinaires. Ce n'efl: pas le local dans Ie'quelle délit s'efl: commis; ce n'efl: pas la préfence ou Commilfaire qui doit fixer la compétence de! Juges de Police ;
c'efl: l'injure en elle-même; c'efl: la perfonne contre laquelle
elle a été commife. Ainu Me. Aguilloj. établit que Me. Jofeph........ avait pu' & dû porter fa plainte au Lieutenant, &
'que du côté de la forme, fa procédure étoit r,éguliere.
Mais il ohfèrva qu'il ne fuffit pas d'invefl:ir un Juge compétent; il faut que le délit done on fe plaine mérite la voie
rigoureufe de l'information. Il efl: certain que cerre voie n'ell:
pas rec;ue pour des injures légeres, des fautes done on peut
'avoir raifon par la voie civile. C'efl: pour prévenir l'ufage
trop fréquent & trop dangereux de cerre forme oe procé~
der, que par divers Arrêts de Réglement de la Cour, il a
été fait défenfes aux Juges de permettre l'information pour
des injures légeres.
�DU
l'A LAI S
D Il
PRO V 1l
~C E~
325'
Ici les torts des Tailleurs vis-à-vis' Me. Jofeph..:.... n'étoient pas de nature à mériter d'être pourfuivis par la voie
extraordinaire de l'information. La différence d'état ne pouvoit convertir les injures en délir. On ne pouvoit regarder ce
qui s'étoit palfé, que comme un manquement d'égard & de
bienféance.
Me. Aguillon conclut à ce que l'appellation des Maltres
Tailleurs, & ce dont étoit appel, fulfent mis au néant;
que le décret de foit informé fût déclaré nul, & comme tel
calfé, enfemble tout ce qui avoit fuivi.
Arrêt du 2 Août 178 l , prononcé par Mr. le Préfident .de
St. Vincent, conforme anx conclulions. Me. Jofeph....... fut
condamné aux dépens. Plaidant Mes. Gaffier. & Portalis. [
ARR Ê T
X X XIV.
Tefiament attaqué pour cauft de captation' (] de concuDinage•.
E 1) Septembre 1780, Jean-Baptil1:e Cavalfe fit fon
teframent; il infrirua Therefe Franc fon héritiere unfverfelle, & légua 3 livres à Anne-Gabrielle Vidal fa mere.
Après fa mort la mere attaqua ce tel1:ament; elle confencit
. au ré!iliment d~ la tranfaél:ion palfée en 1762 avec fon fils,
à raifon de fa dot & droits, & elle demanda fubfidiairement
d'être admife à la preuve ID. du concubinage de Therefe
0
Franc avec Cavalfe fon défunt mari: 2 • De fa cohabitation
avec fon fils: 30. ,De la vie déréglée de l'un & de l'autre, &
des mauvais confeils que Therefe Franc lui doncoit contre
fa mere. Therefe Franc préfenta un eXpédient ;. elle 'déclara
confentir au ré!iliment de l'aél:e de 1762., au paiement
des droits dus à Anne Vidal, & demanda le déboutement
des fins principales & fuhfidiaires d'Anne Vidal. La caufe
fut évoquée pardevant la Cour, attendu la pauvreié des
.Parties.
L
•
�26
1
0
U RNA. L
3 On dirait p6ur la mere que ce tefiament outrageait la
narure ; parce ~lle la nature, en préfidant à la formation de
l'état (ocial, a d'abord émané aux meres le premier des
pouvoirs (ur leurs enfans, & dans ce pouvoir, le premier
droit de propriété ql!i ait exifié in jlatu naturll!, dit Heber
en (on Traité du citoyen, ch. 9, n. 3, omrzis pueri, pueril!
jimul mater fit ac domina, la mere a la premiere le domaine
(ur fan fils, uriginale in lihero dominium marris ejl,
matre
Dd alios tranjit dominium. Les enfans ne peuvent en mourant ufer du droit de propriété (ur leurs biens (ans remonter à cette premiere origine. & rendre à leurs parens des
bienf;jits que I~ Prollidence (emble ne leur avoir confié que
pout s'acquitter d'un tribUt qu'ils n'ont droit d'exiger d'eux,
que parce qu'ils' doivent le leur rendre à leur tour. Tout eft
jntéreffé dans la nature; fi l'on a quelques bienfaits à répandre, on cherche ceux dont on attend le plus de reconnoilfance, & dont on doit l'exiger li ràifon de la puilfance
que l'on a fur eux. C'efi le (entiment du Philofophe Romain, dans [on Traité des hienfaits, tiv. 3', ch. I I . Or,
quelle puilfance ici que celle qai ne permettrait pas même à
une mere d'exiger (ur les biens de fan fils des alimens, &
le retour des bienfaits dont elle l'a cnmblé! de forre que ce
fils, ert .privant fa mère de fa fucceffion, femble l'avoir
voulu priver par-là de fes alimens, & avoir voulu affranchir
[es biens. d'une dette à laquelle la nature & les libéralités
même d'une mere les avaient affèéiés.
De l'intérêt dont la nature anime nos aélions, dérive la
réciprocité des devoirs; & fi les droits des enfans fur les
biens des pareos! font facrés, ceux des p'arens fur les biens
des enfans ne le font pas moins. TI efi vrai que. l'efprit de
propriété, err jntroduifant l'ufage des tefiamens, devoie
infenfiblemenc autorifer à rejetter ce que la nature lui pré[entoit, pour ap.prendr6J à nos proches 4u'il ne fuflifoit pas
de nous êrre attachés par -les liens du -fang pour fe prétendre
créancie'rs fut nos biens, &. faire de leur efpérance une véritable dette; mais cela n'a pas lieu arbitrairement à l'égard
a
�DU
PALA~S
DE
rROVENC~
3~
des parens & des enfans. En vain l'efprit de propriété pen-'
feroie à nous faire placer arbitrairement nos bienfaits ailleurs,
la nature, encore plus puiffante , dompte les réfolutions de
l'efprit, & nous apprend que nol,ls ne pouvons difpofer de
riet) , quand n9US ayon~ uC)e mere ou des eofans qui n'ont
pas démérité. Ce cri de la nature Ce retr.Dpve dans Wutes nos
Loix: jwa fanguinis, dit'Ie J\lrifconfl\he POmpOIlil,ls, nulla
jure civili dirimi pajJùnt. Auffi le fameux Légi1Jat~ur des
Athéniens, qui le premier leur accord~ la liberté de te fier ,
.en excepta d'abord ceux qui avoient d~s enfilns; parc~ qy~
les teHamens tirant leur origine de cerre .Jfeél:ioQ que la nature nous donne de nous rendre utiles à nos femblables, ne
doivent pas dégénérer arl>itrairement et) inju,fijce ; e:, hac
animorum aJfeélione, dit l'Orateur Romain eu (Ol) Traité
de finihlls, ujlamenta commendationehue mar,iel)tiym natz
funt.
Telle efi la fource & l'origjlJe de la Jurifprlldet)ce ,Qes
Arrêts à l'égard des teHamens en Jigne direél:e; çar c;'e:fi une
regle certaine qu'on ne juge pas de ces fortes de tefial)1ens,
comme de ,eux f~its au préjudice des collatérau){. D~ns ces
derniers, il fallt venir avec des preuves de captAtion claires
& confl:anres. Dans les premiers, le moindre vdl:ige de
captation fuffit pour les faire anéan.rir : ne fuccejJiane, dit
Mr. de St. Jean, décit: S6, am,ni jure illis dehilâ pri,ventur.
Ainfi on confidere li les enfaps peuvent avoir déqlérité, fi
le tefiateur étoit accablé de vieilleffe ou d'infirmités, s'il a.
difpofé en faveur de quelqu'un qui eût quelque afcend1!.llt fur
lui; parce que le préjudice des enfans, & par conféqueot
des parens, oe iàuroit être trop çon6déré, 4 il fallt toujours dans ledQute prononcer en lellr faveur, foit qu'il s'agiffe de -'aflèr ou de confirmer un t.e!lament; il faut toujours
dans le doute aller là où la jljlture & le droit çoml)1un nous
conduifenr.
La nature outragée fous oe pre:mier 'point ,de vue dans le
tefl:ament dont .s'agit, l'dl: .eoco.re plus. à caifon de la..pllJ:o
fonne qui .a été préférée .à lil mpre ; il fuffifoit rque l'béruierc
�3~
JOU1NAL
eûr éré odieufe 11 une mere, pour qu'un enfant reconnoiffant
évirâr d'avoir des liaifons & de la prédileaion pour elle. La
nature nous porte à hair les ennemis de nos amis & de nos
bienfaireurs ; l'alliance qu'on. fait avec nos ennemis ell: une
vraie déclaration de guerre, & lorfqu'on veur à nos yeux les
combler de bienfairs & eo faire le principal objet de fes
libérali,tés, c'ell: un outrage qu'on nous fait. Cet outrage
tombe ici contre une mere qui n'a eu d'autre démérite envers fon fils, que celui d'avoir voulu ufer de correaion, ou
plutôr d'avoir v<>ulu défapprouver fa cohabitation avec une
perfonne qui lui étoit odieufe.
Cerce prédileaion injull:e en ·faveur de l'héririere COOlre
une mere, annonce affez l'effet de la fuggell:ioo & de la ,
capration ; car le cœur de l'homme a une pente naturelle
vers l'aureur de fes jours: le dernier inll:ant de fa vie porce
encore avec lui le fouvenir de fa reconnoiffance. 'Dans
l'ordre de l'Êrre fuprême, cet inll:ane doit même accroîrre
cerce reconnoiffance; & fi en foulant aux pieds la nature,
l'homme s'oublie par lois dans ce momene, c'eft parce
qu'il ell: en burce à la captation, qui fait tenir aux mourans
un langage qu'elle leur prête, pour dépouiller injuHement
les vivans.
. C'eH une préfomprion de droit, que toutes les difpofitions tefiameneaires faites dU préjudice des enfans ou des
afcendans qui n'one pas démérité, font préfumées faires par
fuggeHion & captation; parce qu'il n'eH pas vraifemblable _
qu'une mere veuille ôrer le bien 11 fon fils, ni qu'un 'fils
veuille ôter le bien 11 fa mere. Cerce maxime, qui nous eft
arceftée par Mr. de Sr. Jean, décif. 56, eH fi certaine,
qu'elle a lieu même conere l'Eglife; ainG que l'obferve
Automne en fes. Conférences du droit François fur la Loi l ,
cod. de facrof. «cl., & Bonif.1ce, tom. l , liv. 7, tir. 1 l ,
ch. 2.
No~ mœurs exigene que lorfqu'une mere dé(approuve l'ineo.ndUlte de fon fils, elle foit exempte à fon égard du caprlce.& de la vengeance, qui pourroient la réduire à la
légitime.
�DU
PALAI5
Dl!
PROVllNCll.
329
légitime. La veuve Cavaffe a voulu contraindre un penchant
malheurenx que fan fils avait pour la concubine de fan mari;
elle a ufé rour à tour de promeffes & de menaces pour l'arracher à la fédutl:ion; elle a enfin porté des plaintes contre
lui: voilà rout fan démérite. Or, quelle mere voudra déformais ouvrir les yeux fur l'inconduite de fan fils, fi elle peut
perdre par-là arbirrairement & fans fujet fa fucceffion?
Faudra-t-il que les meres aillent au-devant des pl~ifirs défordonnés de leurs enfans, fi elles veulent déformais avoir
part à leur hérédité? Et pour qu'une mere puiffe trouver dans
le tellament de fan fils la place que la nature lui donne, faudra-t-il qu'elle en fouille auparavant le caraél:ere facré, e~
fermant les yeux fur les défordres de fan fils? .
Quand même le tefiateur n'auroit point eu de mere, n'os
mœurs ne permettraient pas que l'héritiere pût jouir d'une
fucceffion qui feroit le fruit de la débauche. Une femme fé~
parée de fan mari, & qui vit avec un jeune homme; une
femme qui a mis Je défordre dans une famille entiere, ne
peut ni ne doit jamais remporter la dépouille, quand même
elle ne viendroit pas en concours avec une mere. La Loi 14,
Jf. de his 'JUiZ ut Îndignis allferuntur, ne permet pas même au
Militaire de faire des difpofitions refiamentair-es en faveur de
fa concubine, quoique le concubinage fût une efpece de ma.
riage parr,ni les Romains, & qu'on permît quelque ch\lfe de
- plus aux Militaires, La Loi précédente du même titre, pro~
hibe même d'en faire en faveur de la femme adultere qu'on
a époufé dans la filite, & nos mœurs prohibent d'en faire
en faveur de la femme qu'on a épol,fé à l'article de la mort,.
pu dont le mariage a ~[é tenu fecret. Telles font les mœur$de tous les PèUP!<':S; 'Oc ç'efi ainfi que l'ont décidé Jes Ar~
rêts rapportés par Maynard, liv. 3, ch. 14;_,par Louet &
Brodeau, lett, D, ch. 43; par Bonifllce, rom;- 2., parr. 1. ,
liv. 3, tit. 4, ch. 1, n. ,2; par Me. Julien, verb. Înterpre~
tatio, cap, 7, §. l , & p<!r Ml'. de Montvallon, rom. '"
pag. 38').
QI1 rappelloit e.nfuite tous les faits qui avaient trait @~
,
4unées 178z & t 78:1"
'f i
�330
}
0
U R
N~A t
concubinage, & l'on concluoir que l'inil:irutlon univerfeife
par laquelle cet enfant avoit préféré une indigne étrangere à
fa mere, annon~oit affez l'empire qu'elle devoit avoir fur
lui. Les pallions font ce qu'il y a de plus oppofé à la libêrté
de l'homme; mais de routes les pallions, la plus fatale c'eH
l'amour déshonnête & le libertinage. A l'inllant où l'homme
s'y livre, fes fens font altérés, fa raifon difparoît, & il oublie
tout, jufqu'à lui-même, pour les plaifirs dont il fe rend
J'efclave. L'homme ne peur pas teil:er dans cette fituation ;
une femme mariée, une femme féparée de fan mari, une
femme du peuple, une femme qui s'éroit déja fouillée d'un
double adulrere, eil: indigne de rout ménagement. Le concubinage ajoute l'audace au crime; il offenfe ouvertement
les mœurs, -& mérite l'indignation des Loix.
On ajouroit que le reil:ateur avoit dit dans fon teil:ament:
Je réduis ma mere cl une inflitution partieu!iere , parce qu'elle
s'efl avantagée fur moi. Or, fi ce motif eH faux ou erroné,
la difpofirion doit néceffairement crouler; parce que la caufe
eflÎciante de cette difpofition ne peut pas avoir produit un
effer réel, fi elle n'exiHe pas réellemenr elle-même. L'argument cl contrario finfu eH admis dans le droit, fuivant
Decormis, rom. 2, col. 1069, effeails eognitio pendet cl
cognitione caufte & eamdmt invô!uit. Ainfi, fi dans les teil:amens, encore plus que dans les Loix, il faut enrrer dans le
but & Le motif de celui qui difpofe, pour en connoître la
véritable volonré; & s'il n'y a point d'interprétation plus
affurée que celle qui eil: fondée fur le motif d'une difpofition , il faut de nécellité que la perfonne étrangere qui a
occupé la place de la mere dans le teHament dont s'agit,
lui cede cette place. Or, le motif qui l'en avoit exclue eH
faux, injuHe, & la peine qui y eil: attachée n'a pas été mélitée. Pour prouver la fauffeté de ce motif, on difcutoil?
l'aB:e de liquidation de la' dot & droits de la Dlle. Vidal,
pa1Té en 1762 avec [on fils, & l'on difoit que l'imputation
de s'être avantagée éroit un prétexte fuppofé de haine, de ce
que fa mere avoit défapprouvé fa conduite. Or, ces fortes de
�331
âifpolitions ont été condamnées par les Arrêts du 10 Janvier
16)8, 30 Mars 1661 & 17 Septembre 1676, rapportés
dans le Journal des Audiences & du Palais; Mornac, liv. 3,
tit. 29 du Code; Lebret, liv. 3, ch. 1; Chenu, quo 41 ;
Bonnet, lete. T ; d'Argentré, fur la coutume de Bretagne,
art. 44 l , glof. la, el1 r,apportent plufieurs autres.
On répondoit pour la Dlle. Franc, qu'elle confentoit
1°. au réfiliment de la tr'lnfaélion pa1fée entre la Dlle. Vidal
& fan fils, pour qu'elle jouît de fa dot & droits avec intérêts, tels que de droit! 2°. Au paiement de la penfion
viagere de 24 liv. à elle léguée par fon mari: 3°. Au paiement de la légitime qui lui étoit due fur la fucceffion de fon
fils; de forte qu'il ne reitoit plus que le tefiamenr.
Quels fom les motifs de la demande en ca1fation hic &
nunc? Efi-ce la prétendue captation? Efi-ce le pférendu
tranfmarchement chez le Notaire? Efi-ce la prétendue haine
du fils & l'état de colere dans lequel on le fuppofe lorfqu'il
a tefié? Ell-ce le prétendu concubinage. du téfiareur mori:
à 37 ans, avec fon héritiere âgée de 6)-? On a dit que le
tefiament de Cava1fe outrage la nature, les mœurs & les
Loix.
, La nature: c'efi la Dlle. Vidal qui l'a outragée en délaif.
fa nt fon fils, en refufant de s'en charger au décès de fon
pere, de fournir à fon apprenti1fage, de le recevoir à fon
retour du Comtat, de le fecourir dans fes hefoins, dans [es
maladies.
Les mœurs : c'efi la DlIe. Vidal qui n'en a pas refpeélé
les principes, qui a refur~ d'avoir fon fils auprès d'elle, qui
s'efi ob(tiné€ à le pourfuivre avec fureur lorfque fes befoins
le lai/foiem arrérager, l'obligeant d'emprunter' pour payer
les dépens; refufant de le fecourir, de le voir dans fa der.
niere maladie, au lit de la mort.
Les Loix: dans les principes du droit Romain elles nl)
gênent point la volonté de l'homme, unuJquifque râ .fi<11t
modera/or & orbiter, dit Grotius, de jure helli t;, pacis, lib.
2., cap. 7, .0.. 3. Dans les pays de Coutume, les plus
nu
,
PALAIS
nE
PROVENCE.
Tt
~
�33 2
10
U Ii. N !L L
proches parens font appellés à la fucceffion; par cela feul
qu'ils font les plus proches parens. Da~s les pays de droi~
écrit les plus proches parens font appelles, parce que la LOi
préfume que le défunt ayant plus d'affettion pour fes plus
proches, leur auroit laiffé fon bien s'il avoit teHé. Cette préfomption feroie favorable à la Dlle. Vidal s'il n'y avoit point
de eeflament; mais le faie eH contre elle.
Quant· aux moyens propofés par Anne Vidal, on répondoit
fur celui de capration & de fuggeflion, qu'en droit il faut
vérifier les caratteres de la fuggeHion. Telle doir êrre la nature des fairs capables de carattérifer la fuggeflion, qu'il
faue qu'il en réfulre que la volonté écriee du teHareur eH contraire à fa propre raifon; qu'il n'a faie telle ou telle difpoûtion ~ que parce qu'il y a éré forcé par l'obfeffion d'autrui,
piir une foibleffe marquée, -{Ji: dont les fairs Ont édaté audehors 1 que cerre obfeffion a éré l'unique caufe de fa difpofieion, & que fi cette obfeffion n'avoir pas eu lieu, il en
auroit faie une contraire; en un moe, il faut que le eeflament contienne une volonté entiérement oppofée à celle
que le teflareur avoit dans le cœur, & que les feules fuggeftion; qu'on lui a infpirées, aientélé l'unique raifon qui a pu le
aérerminer. C'ef!: ainfi qu'on le trouve retracé dans le Journal des Caufes célebres, année 1774, tom. 4, page 93,
& tom. S, pag. so; ( Serres, inflit. pag. 293; Ricard, tom.
I , part. 3, ch. l , n. 47; Mr. de Monrvallon, Traité des
JùccejJions, tom. 1 , ch. )' art. 31, pag. 469, )
Il faut articuler des faits capables de la taire cQonoîere~
( Soehre, tom. 2, cent. l , ch. 7; Ricard, tom. l , part.
3, ch. 1 , n. 47 ; Serres, pag. 293 ; F urgole, des teflamens,
tom. l , pag. 261; Debezieux, liv. 6, ch. I , §. 4, pag.
39)' )
Dans le cas préfent c'ef!: la mere qui n'a jamais voulu du
fils: 1°. Point de féduttion de la pare de la Dlle. Franc;
amitié, fervices, attes de bienfaifance, oui artifice, nulle
obfeffion ; teflamene faie après I4 ans de fecours, de fervices; difpoûeions juf!:es envers elle, caufe vr.a.ie , jufiifiée
parle con~ntement au réfilimeot.
�Du
PAL A J S
D li
PRO V Il NeE.
33J
':J..~. Haine du fils. En droie, moyen foible contre le teHàment d'un fils. La colere ne le vicie pas, fi,ccejJzo maflis dercendit fjuam ajèelldit ; les Arrêts n'om pronon~é que (oorre
les tefl:amens des afcendans. Dans l'Arrêt rapporté au Journal
du Palais, tom. l, pag. 770, c'étoit un pere remarié, qui
avoit chaifé les enfans du premier lie de fa maifon, qui
donnoit tout à ceux du fecond lit, & les fubfl:icuoit des uns
aux autres : c'étoic, l'ouvrage de la marâtre. Mais Gillet,
tom. J , plaid. 6, pag. 8 S, en rapporte un autre, appli::cable à la caufe; Denifart, verb. ah irato. En fait, nulle
impulfion de la Dlle. Franc, nulle forte de calomnie, nul
efprie de haine. IndiHèrence du fils, amenée par la conduite
de la mere; devoir de récompenfer là Dlle. Franc. '
3°. Indignité, concuhine du pere, concuhine du fils. En
droie, preuve inadmiffible, nul commencement de preuve
par écrie, nulle nototiété de fait. Denifart, verb. concuhinage; Mr. de Montvallon, Traité des fucceiJions, tom. l,
pag. 387; Boniface, tom. ':J.., liv. 3, tit. 4, ch. l, page
168 , rapportent des Arrêts qui one débàuré de la preuv •
Dans le faie il y a invraifemblance ; homme jeune, vieille
femme;
nulle féduél:ion, puifque. la DlIe. Franc éroic
.,
manee.
. Mr. l'Avocat-Général de Magalon obferva qu'en principe;
les mouvemens de reifentiment & de haine qui font anéantir
les difpofitions du tefl:ateur, doivent être caraél:érifés d'une
maniere bien certaine; ils doivent frapper par leur évidence.
Il n'efl: pas permis de recourir à' des préfomptions, à' de
fimples fuppofitions. Lorfque le tefl:ament d'un citoyen
préfente quelque doute fur ce point, il doit toujours être
regardé comme un aél:e [age, que la Loi a promis .d'exécuter, & contre lequel elle ne reçoit des preuves que
lo!,fque la néceffité des circonfl:ances l'exige; à plus forte
raifon rejette-t-elle des indices que l'on voudroit tirer d'une
c1aufe indifférente.
t Ici le refl:ateur déclare, que s'il ne legue pas une plus
forçe Comme à [a mere, c'eft'.parce que la léfion qu'il a
�~H'
]
0
U R Il A L.
fouffert dans la tranfaél:ion de 1762, excede touS' les droits
qu'elle auroit à prétendre. Reconnoît-on dans ces expreffions
quelques mouvemens de haine? N'y voit-on pas plutôt une
efpece de compenfation que le tefiateur a voulu faire? Ce
qui fuit cette phrafe le prouve encore mieux : Voulant ail
furplus, y dl-il dit, que fi elle vient à demander fès droits,
la fomme dont il a été léfè foit compenfèe. EH-ce l'aigreur,
l'animolité qui fe, font entendre dans ce tellament? N'dl-ce
pas peut-être un julle intérêt?
Mais en fuppofant que. CavaIfe ait faulfement imputé à fa
m~re de l'avoir léfé dans. la tranfaél:ion, peut-on dire que
,cette prét'endue lélion l'ait engagé à Ce donner un autre
héritier? Il paroît plutôt que la lélion n'ell mentionnée
que pour aurorifer la réduél:ion du legs à 3 livres ; il a voulu
par-là fe jufiifier de lailfer une li modique fomme à fa
mere. On ne doit "as abufer de ce motif énoncé par le
efiateur, pour donner à fa mere la fucceffion; il faut le
regarder dans l'hypothefe la plus favorable à Anne Vidal,
çomme une c1aufe fauffe ou inutile, qui oe lui nuit point,
& qui par conféquent n'ell pas capable d'infirmer le tefiament.
La filggellion & l'indignité ne préfentent qu'une même
quefiion. On n'articule point de faits particuliers .de fuggefiion; on ne déduit la fuggefiion que de l'indignité; il
faut donc voir les faits de concubinage fur Jefquels on fonde
l'indignité. Nos Loix & nos mœurs rejettent avec indign:!_
tion les difpolitions faites en faveur des concubines; mais il
ne fuffit pas d'alléguer des faits vagues, il ne fuffit pas
même qu'ils foient notoires & publics, il faut qu'ils [oient
prouvés d'u.ne maniere certaine, & qu'ils ne puilfent être
révoqués en doute, &-fur-tout lorfcju'ils font allégués contre
une femrpe mariée, & pendant la vie de fon mari. Les
recherches odieufes fur la conduite d'une femme femblent
d'abord exclues, parce qu'il eH de principe que l'accufation
d'adultere n'appartient qu'au mari; elles palOi/lènt l'être
{ur-tout, fi l'on examine q~el trouble peut caufer une p a1
�...
:ou
PALAIS
DB
PROVENCE:
331
reille accüfation dans un mariage où regne la paix & li
tranquillité. Quelle efpece d'ignomini~ pel,lt jetter une' femblable accufation fur le mari de la femme accufée; la honre
qu'elle peut répandre fur le teil:ateur, fur la femme quel..
quefois, fur les enfans nés pendant le mariage, IX fi l'cn
confidere qu'un vil intérêt excite feul des héritiers à troubler
les cendres d'un homme qui leur éroit uni par les liens du
fang, à lui fufciter des torts, en rendant public après fa
mort des défordres incorinus peut-être dans fa vi.e!
Les Loix & les mœurs fe réuniifent pour pourfuivre ces
défordres , lorfque la décence publique a éré extérieurement
bleifée, lorfque le public:;, offenfé par un commerce ~ fCan~
daleux, demande une fatisfaél:ion; il ne fa.ut pas que la
femme qui s'eil: montrée complice des défordres du tefiateur foit honorée de fes bienfaits; une raifon d:inrérêt gé..
néral prévaut pour lors (ur l'indignation qll'infpire une pareille demand.e. C'efr dans des circo.nil:ances auffi,,graves ,
que plufieurs Arrêts ont adrpis à la preuve du co~cubinage
& de l'ildulrere. Il faut que le commerce criminel que l'on
y allegue. ait été public; qu'il exiil:e, non pas un commencement de preuve par écrit, mais du moins des préfomptions violentes; que la preuve ne foit qu'une confirmario.n des
foupçons établis par une foule de conjeél:ures;. &. qu'elle
tombe fur un fcandale qui a déja frappé les yeux du ,public.
Plufieurs Auteurs foutiennent que la preuve tell:imoniale de
l'adulrere & du concubinage, oppofée par fo.rme d'exception contre les donations, 'ne doit s'admettre que quand il y
a un commencement de preuve par écrit, ,ou au moins ,des
conjeél:ures fi puiifantes, qu'elles ne -laiffent .pas doUter de
la vérité du fair. Un de ces Auteurs ajo,ure., que cette .preuve.
ne peut pas fe faire à l'égard d'une femme mariée, lorfque
le mari ne fe plaint pas de fa conduite.
Le même principe a été atteil:é par Mr. Talon, dans une
caufe femblable. Un EccléLiafiique avoit fait un legs à une
rem me mariée; les héritiers ab inteJlat de~andoient la
~a1fatiQIÎ du legs, & foodaient leur moyen fur ut). .commercé
�'33 6
Jou RNA L"
,
adulterin qu'ils difoient avoir exill:é entre cette femme & cef
Eccléliall:ique. Mr. Talon obferva, que s'il exill:oit des Arrêts qui n'avaient pas rejetté une femblable preuve, c'eil:
que les legs & les dons avaient éré fairs à des femmes notoirement impudiques, & qui vivaient fcandaleufemenr. Il
ajoura, que les circonll:ances ne fe rencontrant point dans
la caufe, les fairs articulés n'éroient ni admiffibles ni recevables : l'Arrêt fut conforme aux conclulions.
Ici quels font les faits que J'on arricule? Les uns ne regardent que Cavaffe pere; ils font érrangers au tell:ateur ;
ils m~'peuvent avoir influé fur fes difpoûrions; ils ne peuvene
rendre Therefe Franc indigne des libéralités de Cavalfe fils;
ils ne peuvent êrre préfumés des motifs de fuggell:ion. Quant
aux autres, on demande à prouver qu'après.la mort de Cavaffe pere, Therefe Franc vivait à pot & feu avec Cavaffe
fils, &J l'indifpofoit contre fa mere; on demande à prouver
le déréglemem des Cavaffe pere & fils avec la Franc;
allegue-t-on> une nororiété publique de ces faits qui en puiffe
faire admettre la preuve? Le pot & feu articulé feul , fans
circonll:ance particuliere , ne fuffir pas pour prouver le con_
cubinage; il faut qu'il fait accompagné de quelque autre" fàit
qui prouve que cette cohabitation éroit fui vie d'un com_
merce criminel. Ces fairs ne fom point déraillés ni circonf_
tanciés, & s'ils- ne fane pas alfez graves pour faire admettre à la preuve, comment pourrone - ils faire regarder
cette preuve comme complete & fuffifanee p.our faire déclarer nul le tefiamene de Jean-BaptiH:e Cavalfe? Ce n'ell
donc ici qu'une recherche .vague de_la 'conduire de Therefe"
Franc & des Cavalfe .pere & fils; ~echerche que les Loix &
les mœurs réprouvent.'
J
Mr. l'Avocar Général conclur à ce qu'en concédant aé1:e li
Anne Vidal de ce qu'elle confenroir au réfilimenr de la trane
faé1:ion de 1762., & à 'Therefe Franc de ce· qu'elle acceproit
ce confeneemeut, la tranfaB:ion fùtdédarée nulle. & comme
telle calfée, & les Parties remifes au même état où elles
étaient auparavane ~ & qu'on" moyen de ce > Therefe
Franc;
�JIU
PALAIS
~37
D:Z JPJROVENCB.
Franc fût condam'née à' payéllcà Anqe Vidal 1°. fa not &;
droits ,avec intérêts,. fous là, déBuélion c\es à: compt'e f~çus
par elle~; 2°. Le& arrérages de la penfion viagere à élie legùée
par' Gava1f~ Ion' 'mari, & lës perliidns ~ échoIr;
Lè
droic'Jde'légitimer afféranL~;.An:ne Vid3lbfuf les,bjens .de (0.0
{ils, fur; le,pied ,d'un ,t'iellS , Ia'lêc (intér.êJS'j1ctelsique â.e~ilèo.if •
& à cerque fan~' s'arrêter aux pns ·p:rinoip.ales .d'Ann Vh
. dab, non plus qu:à fes .fins, fublidiairtls ,',Therefe. Fran fût
mife hors de €our & de Procès.
1
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; , ~ ~' ",~ •
Arrêt du s,.Février 1782, prononcé par Mr. lé J1?J'éJhiè(
l.'réfident, conforme 'au~ c.ondulions.:- Aone,V;idJdl filll~n"
damnée aux dépens. Plaidant Mes. Roubaud & E!l:ri:oeJ:., 1:'
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LI! créancier, le tierSr4cquélieur' peuve[lt,il~,,J.a..Cip5F. _4~ Ja
prétérition du.légitimaire?
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Vente faite par l'héritier ufufruitier. bénéfiC'iai~6 [ansfonna,lités ~
, fans 'garder l'ordre des h'ypothe'll~es , déçlq.rù nulle.• • d J
Le poffiffiur de mauvaife foi efl. conJiamf/{ il hl rr;Jlitujjon deI
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fruits depuis fàn {lc'lJJijition.
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'MEllire Louis-Balthaf<tr D~nW, Marqui~ cie 'Vd,lx " fai~
fon te!l:ament le 18 Septembre 172.8; ~ après' avoir
fait divers legs , il nomme pOUt fon hiritier ufliverfe! en'Jfes
biens, terres, feigneuries, contrats, ,1P~ubles, , v(l.i1fe!le
Itl'argeJl~ ,: pierreries i,J. bÎ.jo)lx" . ~q\!Xpage " -,l'un) qe;s . ,e,Qfa ns
.mâle..s, & J.égitimes de, (\1re. Erançois-Augu!l:.e :Qam(l.tlJog fjls
aîné, r.el que fon fils''vou,dra élire, & fapte c}'avQir nom\l1é
avant fon décès ~ le tefiateuT nomme l'ainé 'd'iceux,
voulant q.ll'il,y ait fub!l:itution apx mâles,du pommé par de:gré de primoginit\lr~; dorina.n~ .néanmoins ~ {oQ Jil.s-Ia-jpu~f
Jànce, tlJtale, fa'isie gur'lnt' ,) d~: l'ufqfr,uit;,~)revê~~ 'de .la
.fl1!lfi}tl1~jpll., &, ljl liberté;l"d'.en:!ploY~1; ~tu fo,qds d'.iGel~e··la
Annt,s 178z & 17//2.·
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fomme dè ./Joooo liv. pour rachat d'une charge 'd'épée ou de
robe à fan 'choix; ce qui lui tiendra lieu oe légitime.
Le te&areur mourut en 1733, avant le mariage de fon
bis; & .ce1ui-ci prit la fucceffibn paternelle en qualité d'héritier ufofiukief, fous '-Ie bénéfice. d'inventaire. L'infiance
bé8éficiaire~-[ut pOlfrfuivie , & les créanoiers furent rangés
pllr deux S~ntences d'ord~e, rendues 'en 1734- & 1737,
';'!En 17'38 Mre. Augufie-Fr,!nçois Damat fe maria avec la
DlIe. de Ricoux, qui lui apporta une etat de 60000 livres.
Il a.ffeéb dinrslè contrat -de mariage, pour le cautionnement
de 'cem~ dot, tOUS les: droits qu'il avait do chef de la Dame
fa Ille-re. .3 ~ , u ,
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Il y avoit dans la (ucceffion de Mre. Louis-Baltha(ar Darnat un âomaine dit St. Clement, dépendant de la terre de
Volx, érigé en ar!iere-fief dans un temps, & réuni au fief
dans un autre, par droit de prélation. Mre. François-Augull:e
Damat le vendit par convention privée, du 26 Mars 174-2,
~u ueul'> de Faul'is, de la ville de Mano(q'ue, pour le prix de
34-100 li~res, qui fut indiqué au paiement de divers créanô'e'is. Le 19 Avril fuivant, Mre. François Sauteiron, Curé
de la Paroilfe St. Sauveur de la ville de' Ma'nofque, & Me.
Pompée Sau'teiron, Avocat, fe firent (ubroger au lieu &.
place du fieur de Fauris , & palferent enfuite en \leur nom
une nouvelle convention de vente définitive avec le fieur
'François'-Augull:e Damat le 21 Août 174-3, au même prix
de 34-100 liv. Il fut dit que les fieurs Sauteiron payeroient à la
décharge du vendeur divers créanciers, qui furent nommés
dans la convenrioh.
Mre. 'Frllnçois-Augufie Daniat n'avoit point des enfans à
cerre 'époque,.' II lui natjlfit "Ull . fils e? 174-4? M~e. LouisAuguJle Danult. Le J B Avt.l 1"7-48 Il fut fait une nouvelle
<convention) où toM la pl'~X de la vente fut eonfOlnmé eh
;ndications ; '& cette convelltion fut rédigée en a:tte public
-en 171>3. Le véndeur ffiblltut infolvahle; (on fils Ipoudiiivit
le bénéfice d'invënt-air-e itmoduit par' (ôn pere ên; qualité
-d'Héritier Lit'titt-ùÏtier ilè~- biëns .-du' lieur lR>uis..Balthafar Daj
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PALAIS
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3-39-
P'ROVENCI!.
mat, & le 10 ~évrier 1778 il [e P9urvllt au Lieutenant de
Eorç"lquier en calfation de la vente faite de l'arriere-fiet
St. Clement en faveur des fieurs Saureiron, par convention,
privét: qu~ 18 A.vril 174-8, avec rellitutioo, qes, fruirs d-epçis,
l'aB:e de 1763; pa.r SJe1]~~pçe"idu 17 lIi1~rs 1780, 1
Lieljtenant tafffl la, vent~ ,. §Cl. ordo'nna let reco1U~lement,
avec I.:ellitutioq de-~ fcuits d\! jO\l!! de la demande. A~p~1 Iwr~
devant la- Cour d~ la parr des fieurs Saureiron, & appel i~
'luantùm cOlltrà' d~ la parr du fieur de V obc.
On difoit Rour I~ Marquis de Volx qutlla vt1nte érp,it nulle,
pour av.oir éré faire par U!! ufufru;tier fans pouvQir; puifque
l'héritier foncier & le propriétaire des bi~ns du teHateur
é.roit celui des enfans du fieur François-Augulle Pamat, que
celui-ci choifiroir, & à défaut d'éleB:~on, l'ainé.
Peu importe que le fieur Fraoçois-Augulle Damat ne fùt
p.oint marié à l'époque du d~cès de [on pere, & qu'en conféqueoce, celui de [es enfans qui, devoit êrrt'j l'héritier de·
l'aïeul ne, fût ni né ni. conçu. L'inftitution ne fut pas moins
inébranlab.le, parce qu'il étoit alors permis, d'ipflituer des'
eofans à naîrre. (Boniface, tom" 2, liv. 1" tit. 8, ch. 2;
Decormis, tÇlm. 1" col. 1 4 ~ 9. )
Si l'inllitution a été valable, les bieps n'ont jamais appal',
tenu en propriéré qu',,!'.! fils unique du, fieur Franço.is~Augufltl
Darnac, & celui-ci n'a pu recueillir" en vertu, du tellamen~
de Louis-BaltlJa[ar. [on pere" que la fimple jouilfance de. [es
bieos & revenus, & la régie des droits & aB:ions de l'hoirie
au nom, de l'héririer futur; il n'a donc pu vendre le domaine
de Sr. Clement, avapt la naiJfance de fgo fils, ni après la
nai{fance de ce mêm~ fils, & lorfqu'il avoit à, peine quarre
ans. L'u[uf~uit eft défini: jus rehus alienis u(endi falvâ ret:um
fuhflantiâ. Le curateur ne pept pas difpofer des, fonds de fil
propre autorité, & toute aliépaçion eft également prohibé~
à l'un & à l'autre.
En vaip fe prêvaut-:on de l'Ordonnance de 173.b & dè
tout ce que Mf. d'Aguetfeau, avoit écrit au, Parlewel)t ,d'Ai)j\
fur l'inllitution des .enf~o~, qui.n',écQient,oi n~s. ,ni ÇC(P'iuM gui
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eH aujourd'huI pro l, eé.
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II
au cas préfelÎCî Ills1agit d~unè in-Ltirlltion'quî a 'été'exécu-'
toire en 173:3; ép6que où l'infl:iturion des enfans 11. naîrre ,
qui n'écoienr pas même conçus, éroie" valable, en Provence
comme dans cous les pays de droir écrit.
'
( - Dan's le fair, le refiate~r a ~xpreffément déclaré, qu'il ne
vouloit' 'p~int 1d'aurre 'l1èririè'r' 'que l'uri des enfans de fan
bis!; r lX; q't'J'il lire ;do'/InoiE '11. fon fifs que l'u[ufruit; & pour
qu'on n~ pvt pas foupçonner qu'il nommait [on fils héririer
grevé, il I)e 'plaça le legs d'ufufruit qu'il lui fic, qu'après
l'infiitution du, Retit-fils, & il ne l'ho!,!ora pas même de la
qualité d'héritier:
"
- Ce perit-fil,s eut donc lui feul l'aptjtude de devenit l'héritier foncier & propriétaire des biens de [on aïeul. Il efi vrai
que n'étant point encore ni né ni conçu, & une fuccelIion
ne pouvant pas relter vacance, il fallait qu'il exifiât un poffeffeur civil, fur la rête duquel les biens & les aél:ions d'el
l'hoirie fe- repofaffent, en arrendanc que l'héritier naquîr &
recueillft lui-même. C'elt pour cela que lorfqu'un teltareur
avait inltirué un 1 enfant 11. naître; [ans difpofer de l'ufufruit
& de l'a~minifirarion, on avoir l'arrenciàn de nommer un
curateur qui repréfenroit l'héritier, faifoir cour en [on nom,
& lui écoit comptable de tous les fruirs. ( Decormis, tom.'
l, pag. 1459 & 166).)
Ainfi, quoique Iii Darne Françoife Damat, Marquife de
Soliers, eût fait une inl1:iturion en faveur des enfàns non
conçus de fan fils Augujle, & qu'elle eûr laiffé l'ufufruit de
fes biens à fon fils, le Parlement de Paris jugea par l'Arrêt
dé 1777, qu'Augufl:e n'avoir poini: l éré 'héritier in primo
grad,u, & que cet' Mritier n'avoit 'exifl:é' qu'en la pérfonne
du pefit-fils. Le legs d'ufufruir , fépa'rélae~ coute·quallfication
d'héririer; ne peut -équivaloir 11. ~une' inltitution iTi primo
gradu, fur-tout quand il exifie dans le même tefiament une
infiirurion eXpreife & univerfelle én faveur d'un autre, &
que terte inl1:irution précede le legs des fruits.
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pendre de l'ordre tles difpolitions. Mais, une inO:it!1t~op . .pré~
tàmptive n'a pas le même avantage; il faut qu'elle pui/fe être
conciliée avec ce même ordre, & li cet ordre y réliO:e, elle
eil: inadmiffihle. Or, comme il eil: de regle &- d'ufage que
l'héritier in primo gradu eO: nommé avant l'héritier if} {ecundo
gradu, il eil: permis de dire que dans ce cas où le teil:ateur
n'a point infritué fon fils ni avant ni après le petit-fils, où il
ne lui a légué que l'ufufruit, & après avoir déja nommé fon'
héritier univerfe!, il n'a pas pli avoir l'intention de nommer ce
fils fon héritier in primo gradu.
Si le lieur François-Augulle Damat a pris l'hoirie du lieur
Damat aïeul par bénéfice d'inventaire, s'il a fait une déclaration au papier terrier, s'il a vendu les falins en I7H, il eft
cenfé n'avoir agi qu'en qualité d'homme du teil:ateur & de la
Loi, c'efr-à-dire, au nom & pour l'intérêt de fes enfàns.
Dans tour ce que l'ufufruitier fait en fon nom, fa;ls en avoir
le pouvoir, il eil: cenfé agir au nom du propriétaire intére/fé. ( Dumaulin, coutume de Paris, tit. Ides fiefs, §. 1,
verb. le Seigneur féodal, n. 35', )
Avant l'Ordonnance de 1735 la daufe codicillaire opéroit
cet effet, même dans le cas. de la prétérition, que l'inil:itution d'héritier. étoit convertie en fidéicommis en faveur de
l'héritier écrit, & qu'en vertu de cette converlion, l'héritier ab inteflat, après avoir recueilli, étoit obligé de remettre
tout de fuite l'hérédité à l'héritier écrit, fauf fa légitime &
fa quarte quand il éçoit au cas de la retenir cumulativement.,
Id Mr. de St. Jean, décif. 83; Decormis, tom, 1, col.
1423; d'Olive, liv. 3, ch. 8; Cambolas, liv. 4, ch. 42;
Ricard, des donations, part. l , ch. 5 , fea:. 3, n. 1418;
Ferrieres, Dic7ionnajre de Droit, au ~ot claufe codicil-'
laire..
,
"
,
1
S'il étoit poffih'le que les lieurs Sauteiron pu/fent fe prévaloir de la prétérition du pere, on diroit toujours avec
fuccès, l'infritution du petit-fils s'eil: trouvé.e nulle" mai~ il
a recueiIliJa 'même <hérédité par ~pie de fidéicommis',; ainli
il a aaion poü~ r.exendiquer les. biens ~épendans. de .Cl; 'fidéi-,
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~ommjs. D'ailleurs, le fils preterit peut bIen faire cafiér le
teilament, & aemànder ta fucceffion ah, inte.flat ; le fils pré-
rérit ne fé pla'ignant pas de fa prérérition, fes freres peuvent
exciper dé fes droits, & demander le, pûtage ab inte.flat;
mais le fils .prétérit" qui ef!: feul , oil qui a, des fr,eres qui ne
fe plaignent' pas, s'il, a laiffé écouler trente ans fans fe
plaindre de la prétérition, n'ef!: plus recevable à qùereller le
reHainent de' fon 'pere. Ici Mre. Fran~ois-Augu{te Damat,
mort plus de trente ans après fon pere, ne s'ef!: jamais
plaint; il a au contraire approuvé & exécuté le teHamenr.
- II' eH vrai qUe Mr. de Be:iieux, liv. 6, chap. S, tom. l ,
pag. "PS, parait être d'avis que les créanciers devroient.
être admis à quereller le teHament lorfque le prétérit l'a
approuvé. à leur préjudice. C'ef!: à l'occation de cette opinion
particuliere de Mr. de Bezieux, que la Touloubre, fur la
quo 12. du liv. 1. de Duperier, tom. l , dit que les créanciers
n'ont pas cette aérion, quia Lex efl fcripta, & que les Arrêts
y font conformes', li 'l'on excepte celui que Mr. de Bezieux
lui-~ê~e .regardoit comme COl1traire à l'ufage du Palais.
Duperier, corn: 2., pag. 482." n. 17, rapporte deux Arrêts
qui l'ont jugé de même. lta 'Mourgues, pag. 286,- & Mr. de
Montvallon , Traité des fucceffions, corn. l, p.g. 440.
La velite paffée par le lieur Fran~ois-Aug\lHe Damar ef!:
donc nulle ( c'o'oc'inuoit le Marquis de Volx. ) C'éHle fentiment dé Buiffon fur le titre du Code de bonis, quœ liberis,
n; 14, de Pafcàlis, de, virlbus patriœ potefla'tis, parr. l , cap.
2, n. 7; de Clijas, ad lit. cod. eod. corn. S, œuvr. poJlh.
col. 971; de Dl!IiOd, des prefcriptions, part. 3, ch. 2.,
pag. 249; de Boniface, corn. 4, liv. 9, tir. 4, ch. 3.
Le lieur Damàt pere étciit héritier bénéficiaire urufruitier,
, c'ef!:-à-dire, au nom de l'héritier furur. En cette qualité il a
eu là faculté de payer tôus les créanciers fans garder l'ordre
de leurs hypotheques, tant qu'il ne les con'noiffoit' pas; fauf
& ré~ervé aux, cr~anciers 'non payés l'aérion révocatoire.
(B~D1face) tom. 5' liv.
tir. 24, ch.7,n.13 &.14; Dupener, to~. l, hv. 4, quo 2.4', tom.
pag. 47S, n. I:j
,tom. 3, hv. l , quo 2., pag. 7. )
l,
2.,
�DU
PALAIS
DRPROVBNCL
3B
En cette' qualité il a eu caraétere pour vendre valablèment
les biens meubles, immeubles de l'hoirie, pour leur en diftribuer le prix; mais il n'a pu vendre valablement fans la
participation des créanciers, fans eilimation & fans formalités de Juilice. C'eil la maxime arteilée par l'aéte de notoriété, n. 64, du 14 Février 1692; par Decormis, tom. 2,
col. 1144, & par Julien, en fis col/e8ions manufcrites, tom.
2, pag. 468 , lett. C. L'héritier bénéficiaire ne peut pas difpofer à fon gré des biens d'une hoirie qui eil fous la main de
la Juilice, qui eil également le gage de chaque créancier,
& qui répond à chacun d'eux de fan paiement 11 fan rang &
ordre. Il ne peut pas payer les créanciers poilérieurs au préjudice des antérieurs, qui lui font connus. (Duperier, tom.
2, liv. 4, n. 232; la Touloubre fur cet Auteur, tain. l,
liv. 4, quo 24. )
.
11 eil deux autres principes, fuivant lefquels 1°. les enfans
héritiers de leur pere peuvent revendiquer les biens qu'il a
aliénés à leur prejudice, lorfque l'acquéreur a connu le vice
de la vente, fans être tenu de garantie, quoique ieur pere
l'ait promife. ( Boniface, tom. l , liv. 6, tit. 2, ch. 8 & 10,
& tit. 3 , ch. 1; St. Jean, décif. 88; Decorrni$, tom. 1',
col. 1334; Duperier, en fis maximes, tom. l, pag. 'p.~.,
& tom. ')" liv. 4, pag. 173, n. 326.) 2°. Le complice d'un
aéte frauduleux n'a aucune garantie à exercer conrre fan vendeur ou fes héritiers, quand même elle lui ait été promife•
. (Barthole, ad leg. non Jolùm , §. fi mandato , If. de injuriis;
d'Argentré, fur la coutume de Bretagne, art. 146.) C'efl:
·alors autant le fait de l'àcheteur que celui du vendeur qui
.
donne lieu à l'éviétion.
Or; les fleurs Sauteiron ont connu le vie,e de la vénte ,
puifqu'i1s ont fucceffivement pa/fé quatre dilférèns contrats
pour le pallier. Ils font les Auteurs de la fraude, 'puifqu'ils
ont pratiqué toutes fortes de flmulations ~ de fuppofitions
pOl\r acquérir à vil prix & au-deIfous de la moitié dé fà jufl:e
valeur l'arriere-fief de St. Clemùl·t.
.
Sur' l'appel in '1uantùm contra, on difoit que les fieürs
•
�344
.'
J·o UR N-A L
'
Sauteiron avaient été acquéreùrs, & n'avoient jamais cerré
d'êrre polfelfeurs de' mauvaife foi, puifqu'ils avoient connl!
le vice de leur acqui{irion. Or ,.d'après la regle fuivie contre
les polfelfeurs de mauvaife foi, on les condamne à reltiruer les'
fruits du jour de leur indue occuparion. ( L. 4-0, §. 1, if. de
hœred. petitiomi; LJ 211.'; "cod. de ,:ei 1Iind,itatione i IL. 3, de
fIondia•.ex leg. inJlit:, dé rerum divifione, .§. 3) in fipe.) Les
Loix'vont même plus loin; elles les condamnent à re!l:ituer
non-feulement les fruits peryUS ,_ mais encore ceux que le
propriétaire lui-même auroir pt: percevoir s'il avoir' polfédé.
( L. go ,- 33 & 62, §. 1, If. de .rei vindicat.; L. 4, cod.
unde Lvi. iJiflit. de ·offic. judo §. 2 ; F aber; cod. de hœred. petitione ; Papon , liv. 18 , rit. 24, n. 2 l ; Care1an, liv. '), ch.
69 ; Loifeau, du déguetpijJèment, liv. )' ch. I l , n. 8 ;
d'Argentré, coutume de Breragne, art. 272., au mot chofe
mohiliaire ,. 'n.• 2.; Càncerius " var. réfol. part. 3 ,cap. 16,
n.< 100 & }{JI; Bacquet, des droits de luJlice, ch. 30, n;
14.)'
.ru
'\
,'.
,-
. ~i parmi no'us Ion fait grace .au polfelfeur. de manvaife foi
des intérêTS des. fruits ,- on ne lui en fair point pour les fruits
mêmes, toutes les .fois que le rjrre ell déclaré. nul &.calfé.
{ Duperier, tom. 2, liv. l', n. 211. ) Boniface, rom..4, pag.
1787, rapporte deux Artêrs qui, en caffant les a&es;, ordon.
·nerent l'a re!l:iturion des fruits depuis la polfeffion. L'Arrêt
du 14 Mars 1732, rendu en la caufe de Delvieux de Châ<teàurenard & la Dame de Silvon d'Avignon, jugea que le
créancier du -mineur, qui s'éroit mis en polfeffion fans forirt)al'irés d'un fonds appartenant à ce dernier, devoit re!l:ituer les fruits depuis l'indue occupation. Celui du 3 Décembre :173') ,'rendu au rapport de Mr. de Mons, entre
Peliffier i Garnier & Peironnet de Corignac, en calfanr la
.vente faite par urie mere d'un fonds appartenant à fes enfans.,
pour payer des dettes, condamna l'acquéreur à la re!l:itution
des fruirs ~depuis .Ia polfeffion. Celui du 3 Juin 1738., au
rapport du même Commilfaire, entre la DUe. Ifnard., veuve
Deêanis', 'de)1a 'Ciotat, condamna la veuve,Girauèl'à la refiitution des f;uits depuis l'a&e.
.
_. - - On
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•
�,
DU
PALAIS
DE
3H·
PROVENCE.
On répondoit pour les fieurs Saureiron, que l'inllirution
'd'un enfanr à naîrre , qui n'dl: né ni conçu lors du décès du
teflareur, efl une inflirurion nulle. Avant l'Ordonnance de
173 S c'étoir-là un fujel de difpute dans les Parle mens des
pays de droit écrir. Des Arrêrs avoient déclaré de pareilles
difpofidons nulles; d'autres les avoient maintenues: Un Arrêt
rapporté par Boniface, rom. 2., liv. I , rit. 8, ch. 2., confirma l'inflirurion. Mais un Arrêt particulier ne fait pas loi,
& c'eH d'après les Loix qu'il faut juger; ( Leg. Tlemo I ) ,
cod. de fenteTltiis & interlocutionibus omnium judicum , & Leg.
12., If. de officio prœjidis. )
Suivant les Loix Romaines, qui forment le droir commun
de cetre Province, il faut que l'héritier exifle, & qu'il foit
né ou con~u au temps du décès du défunt. ( §. infiit. de hœre~
ditatiblls quœ ab intefiato deferuTltur; Leg. quidam referunt
14, If. de jure codicill. ; Leg. fi eo tempore 4, If. de his qu~
pro Tlon fcriptis habeJztur. Et d'après Mr. le Chancelier d'A_
guelfeau, l'exiftence eH la premiere des capacités & le fon~
dement de routes les autres.
L'arr. 49 de l'Ordonnance de I735, déclare nl!lle J'inflitudon d'héritier d'un enfant à naltre , qui n'eH ni né ni conçu
lors du décès du teHateur; décifion qui n'a pas été donnée
comme ùne Loi introduél:ive d'un droit nouveau, mais
comme la confirmation du droit écrit, qui efl la Loi de cerre
Province. Nulle Loi en Provence, nul Srarur n'avoir aurorifé les infliturions d'héririer en faveur de celui qui n'exiftoir pas, qui n'étoir ni né ni con~u lors de l'ouverture de la
fucceffion.
. •
D'ailleurs ( continuoient les fieurs Saureiron ) l'inflirution
d'héritier prétendue faite en faveur du fieur Jean-LouisAugufle Damar efl nulle, parce que fon aïeul n'a pas donné
à fon pere le tirre d'héritier dans .Ie legs qu'il lui a fait, &
par f=e feul moyen.le refiamenc eH nul, quant à l'inftirurion
d'héritier, fuivanr la novelle II 5 ,ch. 3, d'où a, éré tirée
l'Aur henciq\le ex caufli, çod. de liberis prœteritis vel exhœre...
daûs, & fuivanc J'arr. 53 de l'Ordonnance de I735'
./tnnées 1781 & 178;1.,.
X li
�jOUIl~.A ..L ,
•
Quand même la claufe Codlclllalre opereraIt cet effet
dans le cas de la prétérition; que l'inll:itution de l'héririer
fût convertie en fidéicommis, & que l'héririer ah inteflat,
après avoir recueilli l'hérediré, fùt obligé de la remettre à
l'héritier écrit, fauf fa légirîme & fa quarre, cerre fubll:iturion ferait nulle à l'égard des fleurs Saureiron, parce
qu'elle n'a pas été publiée à l'audience,. ni enrégiHrée en la
Sénéchauifée de Forcalquier. Le lieur Damat n'a donc point'
de titre par le tenament de fon aïeul pour dépouiller les
lieurs Sauteiron.
D'ailleurs, il ell: de principe que l'héritier grevé peut
vendre les biens héréditaires pour payer les dettes de l'hérédité, même pour fe payer de fa quarte trébellianique &
de fa légitime; de maniere que les premieres aliénations
que fait l'héritier grevé s'imputent à fa légitime', à fa
quarre & à fes autres dérraétions. Il a le droit de fepayer
en ·biens héréditaires, fur le pied de leur valeur, au temps
du décès du tell:ateur. (L. filiusfamilias 114, §. divi, ff.
d~ legatis 1°. ; Leg. peto 69, §. prœdium, ff. de legatis 2°. ;
Leg. pater 38, fE de legatis 3°.; Peregri(Jus,. de fideicommiJJis, art. 39 , n. 1 , art. 40, n. 18; Graifus, de fucceJ.
jione, §. fideicommiJlùm., quo S8; Ful:lrius, de fuhjlitutio.
nihus, quo HI; ) ainG jugé par Arrêt du Parlement d'Aix,
du 22 Sept~mbre 16 rs , au fujet du fidéicommis du lieur de
Porcelet, Seigneur de Fox, & par autre Arrêt du 21 Mars
176 l , au rapport de Mr. l'Abbé de Montvallon, entre le
fleur de Mazaugues & le lieur de Call:elane fon frere. Le
fubll:itué n'ell: pas même reçu à racheter les chofes.vendues ,
en offrant d'en reUiruer le pril(, comme l'arreHent Peregrinus, art. 40, n. 27; Carelan , tom. 2, liv. 7, ch. 4, oc
- une telle aliénation n'exige ni le décret du Juge, ni aucune
autre formalité; ainli que l'enfeignent Peregrinus, art. 40,
23; Fufarius, de lithjlitutionihus, quo HI, n. 3, &
qu'il fut jugé par l'Arrêt du Parlement de Paris, du 28
AoÎlt 174S, en faveu!' de plulieurs acquéreurs, contre le
Duc de Richelieu, rapporté dans le fixieme tome des
Œuvres de Mf. Cochin.
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n.
�D U
PAL AIS
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PRO V Il Nell.
341
L'exception titée de' la nullité du te!l:amenr, par la pré.
térition du fils, peut fa'ns contredit être o'ppofée par les
créanciers & les acquéreurs de ce fils, lors même qu'il s'agit' non a'une exception, comme dans le cas préfent, mais
de l'aél:ion même. Cette nullité produit une aél:ion, que
tous ceux qui y one intérêt ont droit d'exercer. Cela e!l: fi
vrai, que lors même que l'enfant prétérit ne fe plaint pas,
les autres enfans, qui n'ont pas été prétérits., peuvent euxmêmes demander la caffation du tefiament, parce que la
nullité n'efi pas refpeél:ive. Elle e!l: abfolue & radicale,
comme l'attefient Decormis, tom. 1, col. 1633; Furgole,
des teflamens, tom. 3-, ch. 8 , feél:. 3, n. ~ 1 & 115. Ceux
'lui ont les droits de l'enfant prétérit, peuvent également
exercer cette aél:ion. ( Louet & Brodeau, lett. R, fomm.
19 & 20; Boniface " tom. 2, part. 3, liv. 1, tit. S,
ch. 5; Mr. de Bezieux, liv. 6, ch. ~, §. 1, pag. 425. )
Les aotorités fur lefquelles [e fonde le lieur Damat font
au cas de l'aél:ion intentée par un créancier, & non au cas
de l'exception oppofée par un acquéreur pour [e mainteni~
dans fa poffeffion. On s'efi fondé [ur ce que par le droit Ro.
main on pouvoit omettre l'occaGon d'acquérir, répudier une
hérédité, un legs, au préjudice de [es créanciers, [uivant
la Loi quod autem 6, & la Loi patrem 19, If. quœ in fraudem
creditorum j ce qui certainement n'a pas lieu parmi nous,
par la maxime le moN faifit le vif; comme l'one jugé les
Arrêts rapp'Drtés par Louet & Brodeau , [omm. 19 & 201
( Mourgues " [ur nos Sraturs, pag. 204 & [uiv.; Duperier,
dans [es Arrêts, lett. F, [omm. 26; Boniface, tom. 2.)
liv. 2, tit. 2, ch. 13; Decormis, tom. 2 , col. 190')
Ici d'ailleurs ce n'efi point une aél:ion qui foit intentée
par les fie urs Sauteiron, mais une exception 'pour défendre
leur poffeffion de plus de trenre ans.
Ils obfervoient encore que le pere, qui n'efi que l'admi.
ni{hateur des biens de fes enfans par le droit de [a puiffance
paternelle, les peut vendre pour en acquitter les dettes l
pa,rce ql<'il n'y a de biens que ce qui refie après le paiemenç
.
XX?
�348
Jou
RNA L
des dettes. C'efl: la déeifion de la Loi derniere , $. fin aut~m
4, cod. de bonis quœ liberis. La Loi lui donne dans ce cas la
pleine adminil1:rarion des biens adventifs, donr l'anci.n
droir lui donnait l'abfolue propriéré, & il les peur vendre
pour une caufe .jul1:e & pour l'acquir des dettes, fans aucune
formaliré ni décret du Juge; comme l'attellent le Préfidenc
Faber, déf. 3, cod. de bonis quœ hbuis; Peregrinus, de
jideicommiJJis, arr. 40, n. 24; Ranchin, dëcif. verb. pater. ;
Julien, tir. matrimonium, fol. 22.
.
Le - fie ur Damat eH non-recevable & mal fondé, parce
qu'il n'eH: point créancier de l'hoirie de Louis-Balrhafar
Darnat fon aïeul; il ne peur exciper du 'prérendu intérêr des
créanciers rangés dans les Sentences d'ordre, & cette exceprion el1: péremptoire; comme dir Cancerius, var. l'efol.
parr. l , cap. 18, n. 16; exceptio tua non interefl, repellit a
limine judicii.
Il y a plus, & les prétendus çréanciers feraient euxmêmes non-recevables & mal fondés; parce que, fuivanr
les principes 'du droit, un héririer bénéficiaire pent payer
des effets héréditaires les premiers créanciers qui fe préferitent. C'el1: la décifion de la Loi derniere, §. & li prœfatum
4, cod. de jure deliberandi; (Duperier, tom. l, liv. 4,
quo 24; Loifeau, des qffices, liv. ~, ch. 2, n. 63, &
du déguerpiJJement, liv. 4, ch. 6" n. 18; Brodeau fur
Louet, lett. H , fomm. Ir.) Les autorités & l'aél:e de notoriété de MM. les Gens du Roi qu'on a cité pour le Marquis
de Volx, ne parlent que du cas où il y auroit dol &
fraude, comme fi I~on avait aliéné les meilleurs biens &
les plus précieux pour payer. des créanciers pol1:érieurs au
préjudice des antérieurs.
.
François-Augul1:e Damat avait en qualité d'héritier bénéficiaire la rétention & la propriété des biens jufques à la
cbncurrence des paiemens qu'il avait faits à la décharge de
• l'hoirie. C'eH la difpofition exprelfe de la Loi jèimus 22,
c.a d• de Jure de/iber. ,. & la doél:rine de Duperier, tom. 1 ,
hv. l , qu. 4, pag. 28; d~ Lebr~n, des fucceJl!ons ,.)iv. 31ch. 4, n. 2~.
�~ Û PALAIS nI! PltOVllNc1!:
349'
Le lieur de Volx, continuoient les fieurs Sauteiroil, n'a
intenté [on aél:ion qu'en qualité d'héritier bénéficiaire j. il n'a
d'ailleurs formé aucune demande dans l'inHance j il n'a pas
été rangé dans les Sentences d'ordre. Il ne peut donc faire
valoir [a qualité de créancier.
L'aél:e de notoriété du 14 Février 1692., doit étre entendu
prout juris efl, c'ell:-à-dire, fi l'héritier bénéficiaire a vendu
à bas prix [ans formalité. L'Annotateur de ces aél:es obferv~
qu'il devroit [uffire de faire [upporter à 1 héritier bénéfi.ciair~
les dommages & intérêts, fans déclarer la vente nulle. Il rap~.·
porte l'Arrêt cité par Me.' Julien dans [es coll~c7io!!s, verb.
hœres, cap. l , §. 4, letc. Q, qui jugea qu'un acheteur du
fonds vendu par l'héritier par inventaire, étoit à l'abri de
l'aébon hypothécaire après dix ans. (Catelan , rom.
liv,. 6, ch. I I ; Bretonnier [ur Henris, tom. 4, liv. 6, ch.
4, qu. 1 l , & Fromental, verb. inventaire, pag. 419,)
Les fieurs Saureiron doivent donc être à l'abri de toute
~tcaque, leur polTeffion remontant à plus de trente' ans, &
étant fondée fur un aél:e de vente ou de bail en paie, qui les
autorife encore à oppo[er la maxime nulla repetitio efl ab la
'lui jùum recepit.
Sur l'appel in quantùm contrà du fieur de Volx, on répondoit qu'il auroit dû du-moins compenrer les intérêts du prix
avec la rell:imtion des fruits, & offrir le rembourrement des
réparations, qui [ont dues même au polTelTeur .de mauvaife
foi, & non pas renvoyer les fieurs Sauteiron dans l'inltance.
bénéficiaire pour y faire valoir leurs droits.
Arrêt du 8 Février 1782, au rapport de Mr. le Conreiller
de Beauval, qui confirme la Sentence, & faifant droit à
l!appel in fjuarztùm contrà de Mre. de Volx, condamne les
fleurs Sauteiron à la rell:itution des fruits depuis l'aél:e de
Î763; & aux dépens. Ecrivant Mes. Barlet & Pellicot
Seillans.
.
. La Cour crut qu'il\ n'y avoit pas prétérition dans le tell:ament de Mre. Louis-Balthafar Damat;. que d'ailleurs les
.qeli.rs Salt1teiron.a1..lroient .dû de!Ijan~er 10) çaffation du te.fi",~;
2,
�3~o
.JO.URNA,~ .•
"
, .•
ment. Ainfl la que!bon de- la pretertrI011. ne fut pa's Jugee.
Les fleurs Saueeiron auroient été condamnés à. la. reftitll'tion des fraits depuis l'acquilition; mais le Marquis de Volx.
ne l'avait demandée que depuis l'aél:e de L76.3'
1
•
ARRÊT
XXXVI.
En Provence, les Bâtimens de mer ne peuvent être mis à
la taille.
E 7 AoÜt 17 8T , le Tréforier de la Communauté de
Saint-Tropez fit faire commandement au Capitaine
Jofeph Hermieu de payer 28 liv. pour la taiHe de fon bâtimenç de mer, pour l'année T779' Le Capitaine Hèrmieu
{e rendit oppofant au commandement. La Communauté
de Saint-Tropez préfenca Reqllête à la Cour des Aides,
en déboutement de 1'0ppolition.
OR diroit pOttI le Capitaine Hermieu, que les tailles font
réelles & prédiales en Provence; c'eft un avantage que·
cette Province a fur plulieurs autres de France, & qui la
dédommage de la ftérilité de fol. De toutes Iles impolitians, la tàille réelle efi fans contredit la moins arbitraire,
& celle qui fe rapproche le plus de l'égalité. Il efi de l'etfence de cet· impôt de ne pouvoir être affis que fur des.
immeubles; il n'y. a d'exCept~6n que pour le bétail, parce.
qu'il efi cenfé faire parrie du fonds dans lequel on le fait
paître: delà les Arréts ·ont ,décidé que le bétail d'un cham?,
taillable efi 'fùje~ à la· taille l &. que celui d'un champ no-.
hie ou franc de taill~·en efi 'exempt.
S'il fallait remolHe'r-à 'l'ol'igine de ·Ià .taille, il ferait aifé:
d'en détermi,ner !,effepce & les caraél:eres. Le peuple qui.
nous a donne f1!s Loix:, connoiffoif qua·tre farres' de· revenus· publics; 1a' prenliere conlifioii: ·dans le produit des terres dont· l'Etat avoit'la propriété! la' feçonde, dans, la taxe:
L
�3~o
.JO.URNA,~ .•
"
, .•
ment. Ainfl la que!bon de- la pretertrI011. ne fut pa's Jugee.
Les fleurs Saueeiron auroient été condamnés à. la. reftitll'tion des fraits depuis l'acquilition; mais le Marquis de Volx.
ne l'avait demandée que depuis l'aél:e de L76.3'
1
•
ARRÊT
XXXVI.
En Provence, les Bâtimens de mer ne peuvent être mis à
la taille.
E 7 AoÜt 17 8T , le Tréforier de la Communauté de
Saint-Tropez fit faire commandement au Capitaine
Jofeph Hermieu de payer 28 liv. pour la taiHe de fon bâtimenç de mer, pour l'année T779' Le Capitaine Hèrmieu
{e rendit oppofant au commandement. La Communauté
de Saint-Tropez préfenca Reqllête à la Cour des Aides,
en déboutement de 1'0ppolition.
OR diroit pOttI le Capitaine Hermieu, que les tailles font
réelles & prédiales en Provence; c'eft un avantage que·
cette Province a fur plulieurs autres de France, & qui la
dédommage de la ftérilité de fol. De toutes Iles impolitians, la tàille réelle efi fans contredit la moins arbitraire,
& celle qui fe rapproche le plus de l'égalité. Il efi de l'etfence de cet· impôt de ne pouvoir être affis que fur des.
immeubles; il n'y. a d'exCept~6n que pour le bétail, parce.
qu'il efi cenfé faire parrie du fonds dans lequel on le fait
paître: delà les Arréts ·ont ,décidé que le bétail d'un cham?,
taillable efi 'fùje~ à la· taille l &. que celui d'un champ no-.
hie ou franc de taill~·en efi 'exempt.
S'il fallait remolHe'r-à 'l'ol'igine de ·Ià .taille, il ferait aifé:
d'en détermi,ner !,effepce & les caraél:eres. Le peuple qui.
nous a donne f1!s Loix:, connoiffoif qua·tre farres' de· revenus· publics; 1a' prenliere conlifioii: ·dans le produit des terres dont· l'Etat avoit'la propriété! la' feçonde, dans, la taxe:
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�btf PALAiS DB PltOVENCl!;
3~t
pertonnelle due à titre de capitation; la troifieme, dans
l'impofition réelle; la quatrieme, dans le produit des péa.
ges, domaines, confifcatiuns & dons volontaires. L'impoGtion réelle ou la taille fe percevoient fur un rôle qui conte·
noit la cottifation de l'arpent que les Romains appelloient
jugeratio ; le produit de cet impôt formoie la principale branche des revenus de l'Etat, & perfonne n'en étoit exempt.
La taille celferoit d'être réelle, fi elle n'avoit pour bafe
un allivrement qui n'a rien d'arbitraire.. Les vailfeaux &
les bâtimens de mer ont toujours été mis au nombre des
,!lofes mobiliaires ; ce font des corps flottans & mobiles
de leur nature, les plus périlfables de t·ous. L'Edit du mois
d'Oaobre 1666, & l'art. l du tit. Iode l'Ordonnance de
la Marine de 178 r, veulent qu'ils foient réputés meubles.
Les tributs publics ne peuvent être que réels ou perron~
nels ; comme réels, ils ne peuvent être établis fur les bâti.
mens de mer, & dès-lors .l'impofition eft illégale & injufte ; s'ils font perfonnels " ils ne peuvent -exifter' comme
taille réelle ou prédiale. Sous quelque dénomination que la
Ville de Saint-Tropez veuille préfenter fon impofition fur
les navires, il faut la profcrire. Ce n'eft point une taille
réelle, parce qu'il ne peur y avoir de taille fans allivrement
& fans eftimation, & que nos Loix municipales ne prefcrivent aucune regle fur l'allivrement des navires. Ce n'dl
point un impôt perfonnel, parce qu'il ne peur pas y avoir
de taille perfonnelle en Provence ;d'ailleurs la taille eft de
fa nature une charge du prC?priétaire. Hermieu n'étoit que
le Capitaine du navire; il appartenoit à des Armateurs de
Draguignan, de Toulon, de Brignoles & d'autres lieux;
'Ceux-ci pouvoient en donner le commandement à tout autre qu'à un citoyen de faint-Tropez. Cette Communauté
ne pouvoit mettre une tl\.xe fur des Armateurs étrangers
qui ne font fournis à aucune de fes impofitions. Il n'eH au
pouvoir de perfonne de lever des taxes & des contributions
(ur les fnjets du Roi. La Communauté de Saint-Tropez
n~ d'autre droit que d'impofer fur [es.cito,yens les c.harges
�352.
JOUItNAL
auxquelles ils peuvent être légitimément fournis; fuivant
nos Loix municipales.
La Communauté ne pourrait fe prévaloir de J'Arrêt du
5 Décembre 1674, qui- confirma une taille de 50 liv. par
livre de cadulhale, qui comprenoit les bâlimens de mer &
les filels de poiifon. Boniface rapporte cet Arrêr , rom. 5,
pag. 666, & en fait connohre les morifs; il fuffir de les.
apprécier, pour fe convaincre qu'ils ne fubtill:ent plus, &
qu'il ne fur jamais plus néceifaire d'inrroduire fur ce fujet
\Jn droit nouveau, ou, pour mieux dire, de fe rapprocher
des grands principes. En matiere de droit public & d'adminiltrarion, on ne peut confidérer les Arrêls que comme des
Loix du moment, & c'ell: peul-êlre le feu! objet fur lequel il foit au pouvoir des Cours de fe réformer, hors les>
cas de Requêre civile. Les circonll:ances fur lefquelles cet
Arrêr intervint ne font pas les mêmes, & les morifs onrceifé.
Par l'Arrêt dll 15 Seprembre 1660, il fut jugé que l'impotilion faire par la Communauré de Fréjus fur des bateaux
éroit nulle, ayant été repréfenré que les Bareliers font cantidérés comme des braffiers fur lefquels, ni leurs infirumens, on
ne peur faire aucune impotition , qui ne doir fe faire que·
fur des chofes fixes " & dont l'é.vénement n'ell: pas in4
certain.
La même queltion fe préfenta en 175 G dans la caufe
de la Communauté de Cannes; l'on avoir alors plus de· lumieres fur la faveur & les avantages du· commerce, (ur Ja,
liberté des mers, & fur l'adminifirariaf,J des finances. L'impotition fllr calTée par Arrêr du 30 Juin 17'j6, au· rapport de Mr. du Seuil. La Communauré prouvoii: envain l'ufdge
où elle émit de lever certe impotieion depuis 1507. Cet
Arrêt ell: rapporté pat Mr. Julien dans fon commenraire fur
les Stamts de cerre Province, rom. 2, pail'. 29'5.
L' Arr~t du 8 Février 1719 que la Communauré de· SaintT~opez JOvoq~e, feroir fufceprible des mêmes obferva~ions
faltes fur ,elu~ de 1674-) s'il ,ollrenoit le~ mêmes difpo.
- " - -"
.
firions.
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PAL AIS
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PRO V Il If C Il.
353
fit ions. Mais cet Arrêt n'a rien pu juger de parei), Les Navigateurs de Sai nt-Tropez s'éroient plaints de ce que la
Ville n'employoit point au curage & à l'enrretien du port,
le produit de la taille [ur les bâti mens de mer: en con[équence, l'Arrêt ordonne que les ConfuIs & Communauté
de Saint-Tropez employeroient le montant de cette impofition à l'objet pour lequel elle avoit été établie; le titre ne fut point attaqué, pui[qu'on en demandoit l'exécution.
Il efi de principe que les impo~itions fone de droit public, & qu'elles ne peuvent être régies par Ics Arrêts &
les déci lions particulieres. La Communauté de Gignac iQ1pofa en 1713 un droit fur les vins étrangers qui entreroient dans le lieu de Gignac. La Communauté de Marignane obtint un Arrêt le 17 Septembre 172.2, qui ordonnoit que cette impofition ne fubfifieroit que pour le vin qui
feroit con[ommé dans le terroir de Gignac.
Duperier, tom. 2.,
taille, rapporte un Arrêt du 7
Avril 162.8 qui caffe une impofition fur un commerce de
fruits que la Ville de Draguignan avoit établi. Le 4 Mai
1779 , il fut jugé contre la Communauté d'Hieres, que les
cenfives & les rentes foncie,res ne font pas fu[ceptibles
cl'allivremem. La Ville prouvoit la poffeffion immémoriale,
& l'ufage fut regardé comme un titre nul & in[uffi[am.
En Provence, toure impofition qui frappe fur le commerce, l'indufirie ou le travail cl'une certaine c1affe de particuliers, marchands ou artifans, efi nulle & injufie. C'efi
fur ces principes qu'ell: intervenu l'Arrêt du Con[eil qui a
caffé une impofition de la Ville de Graffe, faite fur un
arbu/l:e qui fert à la préparation du cuir vert. Un autre
Arrêt de la Cour des Aides calfa une impolition de la
Communauté de Correns, fur le fil employé à la fabrication des toiles. La Communauté de Graffe avoit établi
une impolition de 30 fols par cent pefam fur les huiles
étrangeres qui entreroient dans la Ville pour y être ven.clues & confommées ; les fabriçans de favon l'attaquerent
.Ann"s J78~ & J7 8:l..
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�JOURNAt
iu~4>le fondèment qu'ils devoient être exêmpts de cette im
pofieio n pour l'huile employée au favon delliné pour l'étranger. Les parties compromirent, & la 'déciGo,n de Mes. Si':'
meon pere & Pazeri du 18 Septembre 1770, donnée de
concert' avec les Procureurs du Pays, fut pOlir les ·tàbri..
cans. La Ville de Marfeille délibéra le 31 Juiller 1767' Llne
impoGtion fu! les charrettes, carroifes, chJifes & voirures
qui ene.reroient ou foniroient de la Ville, chargées de bJllors ou marchandifes. Un Arrêt du Confeil & des Lemes!)alentes homologuerent la délibération; les Procureurs du
Pays en demanderent la révocation ; & par Arrêt du S
!uin 1769 , la Cour des Aides faifant droit à l'oppofirion
des Procureurs du Pays, déclara la .délibération de nul effet à l'égard des habirans de la Province, & condamna
la Ville' aux dépens.
.
Les bâtimens de mer ne font fufceptible ni de ferNirude, ni de redevance, comme on l'induit de la Loi 13,
if. communiq prœdiorum. Ita Stracha, de navibus, part. 2,
n. 20; Roccus, n. 3 8 & 39; Mafcardus, ·de jure mercatorum , lib. 2 , cap. 6, n. 34; l'Aureur du Commentaire
fur les Statuts de Marfeille, pag. ))0 ; Clerac, fur l'art.
'1 de la Jurifdiél:ion de la Marine, n. II ; Cœpola , de fervitutibus ruflicor. prœdior•. cap. 29 ; Catelan , liv.' '1 ,
chap. 33. ' . .
l
'
Il Y a une très-grande différence à faire couchant l'afIietre
& la réalité de~ impofitions, entre les bâtimens de. mer qui
I}aviguent au gré des flots, & les bacs des bateaux & ri.:.
vieres qui font dans une pofition permanente; ceux-ci font
à l'inllar d'un pont de pierre ou de bois, & peuvent être
conGdérés COmme des' immeubles fiél:ifs, fuivant Livoniere
dans fon traité des fiefs, pag. ,249, §. 1.0., & Soefve,
tom. l , cent. l , <-h. 1'1'
. Si la taxe illégale, injulle & arbitraire' que la Ville de
Saint-Tropez veut perceyoir fur les' navires que peuvenn
commander, fes. habitâns', pouvoit être maiimwue, ils ne
pourr.Gie.o~~enfall'ranr.;hir, q,q1eJO ren6ru;aat.à rey.eniR fur leurs
.
.
.,
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PALAIS
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PROVl!NC!:.
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foyers, ce qui feroit contraire à la liberté naturelle; ce
feroit expofer la Ville de Saint-Trppez à une dépopulation inévitable; elle méconnoît dans cette caufe fes véritables inrérêts. Les grands Légiflateurs ont favorifé le
ommerce comme une fource inrariffable de richeffes & de
jouiflànce§; ils l'ont regardé comme la çhaîne qui unit les
hommes aux hommes par les' rapports de leurs befoins &
de leurs deurs , & qui joint les inrérêts de chaque fociété,
aUX intérêts de la fociété univerfelle.
On répondoit pour la Communauté, qu'il ne faut pas
regarder le fief de Sainr-Tropez comme les autres; le
terroir n'y compte pour rien, ou pour bien peu de chofe :
dans les autres fiefs, les habitans ont reçu la terre dans le
principe pour la cultiver & l'améliorer; ici les habitans
O,nt reçu la mer & fes rivages; chargés d'enrretenir la rour,
d'augmenrer & d'entretenir auffi les fortifications, fournis
ge plus à 19 copHruél:ion du Port, ils devoient, fuivar1t ce
nlême titre, être exempts de route forte d'impôts. Ils
avoient à cét égard un privilege folemnel accordé par le
Roi René, confirmé de regne en regne, & conHamment
refpeél:é jufqu'à Louis XIII; ils payoient même affez chérement leur contribution aux impoutions communes par la
c!)arge de l'éntretien des nouveaux ouvrages qui leur éroit
impofée , foit par l'aél:e d'inféodation, foit par celui d'habitation. La principale de ces charges étoit celle de la conftruél:ion & de l'enrretien du Porr ; le Roi a pris fur lui
le foin de l'entretien des fortifications, & enfuite Je lieu
de Saint-Tropez a été affouagé. Il lui, eH reHé la charge
irnmenlè, du Port & de toUS les ouvrages acceffoires, lIç
l'obligation de fournir le logement à la garnifon. La CQmmunauté de Saint-Tropez n'auroit pu fournir à tomes ces
dépenfes, par le feul produit de la terre condamnée pour
les trois quarts à une éternelle Hérilité, & dont l'induHrie
& le travail forcé, peuvent à peine arra.cQe-r quelque-s fruits
dans les endroits fufceptibles de quelque produél:ioQ.
pans le principe & lors de l'h,abitation, 0,11 comprit bie,n
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�3~6
Jou RNA L
que le lieu ne pouvant exifier que par la mer, c'étoit de
ce côté qu'il falloit fe tourner pour y chercher de quoi
fupporter une partie des charges de cette Communauté maritime. Auffi trouve-t-on dans l'aae d'inféodation, 'lu'il fut
cédé au Seigneur le droit d'encrage & de rivage, 'lui a
enfuite palfé à la Communauté; & dans tous les tems connus l'on trouve des traces énergi'lues de l'impôr établi fur
les navires. Cet impôt étoit dans le principe infiniment plus
confidérable qu'il ne l'ell aujourd'hui. On voit dans une délibération du 18 Juin 1)70, poHérieure d'un fiede à l'habitation, qll"il fut 'lueHion de faire un ou deux môles; les
gens de mer demandoient à grand cri cet établilfement ;
il fut délibéré,'lu'on leveroit le cin'l pour cent fur tous les
profits que feroie'nt les bar'lues & petits bâtimens , tant des
marchand5 que des mariniers 'lui feroient nolifés par les
gens de Saint-Tropez. Il fut de plus ordonné que toutes
les barques & petits bateaux apporteroient une barelée
de pierre. En 1674- 'luel'lues particuliers atta'luerent l'impôt' fur les biitimens de mer, il fut confirmé par l'Arrêt
rapporté par Boniface, tom. S, pag. 677,
'
En 17 l 8 la Communauté avoit délibéré des réparations
pour le Port; les Marins s'éleverent fur la fufpenfion des
ouvrages; ils fe pourvurent à la Cour, & excipoient de ce
qu'il exi!loit un impôt. fur les navires, que cet impôt de":
voit avoir fa deHination naturelle, légale & exc!ufive fur
les dépenfes du Port; la Cour le jugea de même. L'objet 'du Port intérelfe donc tous les citoyens, tant les hommes de terre 'lue les gens de mer. C'en par confé'luent un
objet d'utilité générale & commune; mais il n'en efr pas
moins vrai, 1°. que les gens de mer & négocians _maritimes en retirent le profit direa & principal; 2.°. que les
fonds du terroir & le produit des confommatioDs ne peuvent pas fuffire pour toutes ).es charges du Pays,. en y joignant celle du Port & de' la garnifon qui en un accelfoire
du Port.
L'impôt efr légal, puifque les Communautés qe Provence
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DU
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PALA'IS
D'JI
(PROVI!NCE.
3')11
ont inëontell:ablemenc. le droit d'en .établir de pareils; cet:
impôt ell: fonciérement ju!l:e; d'une part, il eH levé fur.
l'objet pour lequel la dépenfe ell: faire. Si la Communauré
.fournit un Porr & des môles pour fes Marins; fi la dépe\lfe du Port & des môles fe reno!)velle rous les ans'; fi
cerre dépenfe e!l: importante & même exceffive ,~pdurquoî
ne lui fçroit-il pas permis d'en prendre le monranf fur les'
navires, rouf comme l'on prend la dépenfe 'dés pavés fur
les maifons voifines qui en profirent, & le monrant des coupemens, alignemens & établilfemens des places' publiques·
fur les maifons qu'i profitent de ces' change mens t'Pourquoi:
ne pou.rroit-on pas lever t:et impôt fùr les nav,ires qu:i -fon~
confh,uits dans les Pons, par le même oroit' & par les
mêmes principes qui fervenr de bafe aux Communautés pou;
les impôts qu'elles érabliiIent fur le bétail de ceux qui viennent dépaîrre dans les lieux communaux, ou fur ceux qui
viennent ufer des lavoirs & aurres 'ou~ragès' érabli.s1pOl[r le
fetvice du public? L'impôr ell: fonciéremenc gériér~l;, 'pàice
que tout le monde à Saint-Tropez parricipe p'6ur péu ou
pour beàucoup. au commerce de la mer, & parcé iJué le
monta'nt de l'impôt ell: prélévé dans le compre- des profirs:
L'impôt en lui-même, eH en correfpondance narurelle' &
légale avec l'objet auquel il ëll: dell:iné' ; I~ charge au Port"
des môles & de leurs accelfoirs, 'n'a lieu que pour.!lé'foU'tien du commerce mari rime. Ce comm~rce fe'ul én profite;
il ell: jùHe que les navires en fupporrent au ,moids 'unè
~rrie.
'
,
Me. Turrel, Subilieut) obferva que la taille doit co,mprendre tous les fonds ruraux; la rêve porEe fur tous'les confommateurs , autrement il y a abus dans l'exercice du droit
d'impofer ; parce que l'aéte n'e!l: pas fondé fur l'égalité;
c'ell:-à-dire, fur l'elfence de tout impôr. Or l'impofirion
fur les bâtimens de mer ne porte que fur deux clalfes dè
citoyens, ou, pour mieux dire, fui' \lne fociété divifée en
!impies pêcheurs & en marinie~s, patrons &. capitaiues 1
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!Miv~n1' qyq :ǧuJ,-1J.:1JlQlIJil.nt; .Ml pJu~, grands ,0" -de' p-Ius
Ft:!i!s bâ~il!leJ!s.(
'1....' j;. ,.' '.
" 1
L'OJl çonnotr ~ll ~<rOVeI)C~ rrois fgrtlls .de rêves; fur les
cOllfo{ll{llation~ , fur les eqlr~es &: fOrIies, & les cl;nfelages qu ,drQÎ1s fltr Jes BQjps & O1efures : les CQl1Hll.unal1tés
pq!lveot ufe! c;l~ ç~s trojs rêves fuivant leurs befoins ; mais
~lIes ;\1~ P~!lv~pt être établic;;s qlJe dans le lieu, ou dans
l'étenslue cI~ le!lrs terroi,rs. L'impofitiQn fur les bârimens
de f1Ier .Ile l!~ut r~ntLer pans la cla/fe des rêves fur les con-
fomma\ions '- puifqu'eU~ n'al)'è8:e pas les Qbjets que confomq1ell't ~~, ~jll:i!li~rs... armant les bâtime\ls dans le POri ,
~u ceu~ ql!l 1 Ha6gu~Pl .de ces objers clans le lieu, Cette
'n}po{j(on n~!J: pa§ U!Je tajlle au fens direé\:, parce que les.
b~teal/~, 61.~t
~~ifell\lJ(., objees mobiliers, ne pel!vent êrre
fo~ aucuJ1 rgpp'p~ç .le fujet 'çle la taille proprement dite,
\lu~ efi rée.ll e ~ pr~diale el,!, l'rpvegce; elle n'eH pas une.
!'ftv~J' p~rc~,_q.u'g-!~e. o~ajfeé\:e pa~' les de/1rùs confom{llées
~'!Qs,!le, ,lj~.R i 0\1: pqf~~)L&' njefurées ; e.llê ne .fal!rp}L êtrè
onuf}Jpsll)',#X(l.J.~~çe.,,!le -quelqiJe .ceŒon ,de drOIts r~gu1J~rs
~uxGj\:leJl~~,~.* ge r~.(fe,lT\ble ~n nen, pUlfque ces droits font
~pomenr~.m;S_"Hfy§ls, naiifaor ou mouvant, pour ainfi dire,
n~lle,J?P.ft " ...qu lfoo... entrée ,& fortie ~ au lieu qu'ici 1'101~~ç" [Utl~ (\lis l(1)i~,:fijr,!e:s XiiiffeaUx, ojJibll.s; hœ~et , l'affeélé
~ ne ll~dluit!l; )P!U.SI; jl ne fait plus en .l1lielque forte qu'ûn
't0};~) v~lZ) \u.Î-i ~iy.'!.ot, lilpfillallJ, & (e communiquant rous
).çs'JaQ§· t~nt q~e:lçe lIa\1feau paviguera " & par-tout où les
vents le poneront. Or, c'eH une impoGtion qui for, de la
c1affe !-le q:llc;s qOI),t le .I:aYJi ufe &," droit ,çl'lIfer. Elle doit
fa nai[ Pf~ ~u. z~l<:l. ~~~, -M.9Jins qui offrirent dé payer vQlonrain;rqenc .el) J. no ." z~~ q'l!j a"eit bealJcoup changé & va~ié en 167+';.0~ ~IL~ fut cqJlÂ(m~e, "atJendy l'exiHençe alors
~auelle d~s pdnçipal~s.çaufes qui l'avoient produite; impoûtion qui , ;négale , injuHe, fauvage même dans nos
J:I1œur~. o5ç, datJ~ I~s [.principes du droit· naturel &. du coo1erc'~, ne pourroiç .être cOhfirmée aujo1Jrd~hui.
Me. Turrel eHima devoir être dit & ordonné qu'en coo-
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PAlUel
,DJ!
PROVENCE.
Yl9:
ant ~a à; '.Mr. le Procureur-Génér
u,:'~o'i oe -Eh!"
poÎ1tion qu'il déclaroit former à co te délibérations d'e là
Communauté de Saine-Tropez, ponant impofitions fur les
bateaux & filets des Pêcheurs , & fur tous autres bâti'"
mens de mer. qui feroient déclarées nulfes & comme te lies
carrées, déf~nfes fu{f~nt. faites aux Con[u &; Communauté
de Saint-Tropei d'impofer à l~a\'eôir. aucu'~e taille ou au.;
tre impofirion quelconque fur les li'âteaux & filets, &0
fur les. navires, à peine de IOO liv., d'amende,' & d'err être;
j <.
1.
J'
r
informé.
.
Arrêt du ,2.0 Février I782., prononc.ê pac,Mr, le 'Pr.éûdené
de Coriolis, confqrme aux conclufion;. La ,QQmrîlljn-auté
fut condamnée aux dépens.'Plaidano Mes: Gaffie &I,GU rim
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Sur le privilegl! 'lu'a la Nation SuiJfi (l'i!xe:rc"e't uné ItrôfejJio;'
en France.
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Agdelaine..Ripert, veuve de Dominique~ cEouine ;
, Suiffe de nation, vendait depuis .quelqyes. a'Apéés;. au"
environs de la pla'ce Saint-Pierre à, JToulon':,1 des mat'c'hat1~
difes de menue c1incaiUerie. Pour prévenir Fe trduble' dMe
elle écoit menacée, elle tint un aél:e aux Syndics' du cerpt
des marchands clincaillers le 23 Juin I77,9;1 eJle lelll'L dé...
clara qu'elle entendait jouir de tOUS le!; droitS! que:<luildc;(n
noit fa qualité de veuve de Suiffe, fous toutes les pr.oce'1tations de droit. Le. 19 Juin H/80, on.~rocéda' à la .faitie de
marchandifes êtalée~par la veuve FduiM ,,-&rotl PafoUl'îià
pardevant les Offioiers de Foi'ice pour len voir ~rdonn~r2l
confifcation: .Requête de l;r' veuve FOUIne en· caffamoh[;lld
cette faifie, avec dépens', dommages :&".inrérêts. Senteilli6
qUF lien 'cilé6olfre-;, ,&; qoi) d:ébOtltèJ aoffilllie ' S}mdt't5lr~éhi~ur
Requête 'en. ifthibirio11l#-1&rdéf~~fus..â-la V~lIq-eJ F.-ôUttWi\i~ll
M
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.
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lou&NAL
méler de la profeffion de marchand. Appel de la part de
la veuvepardévànt la Cour. On difoit POUt elle que les Suilfe&, leurs femmes, leurs
veuves ont toujours eu le dwit d'exercer en France leur métier ou profeffion. leur premier titre el!: dans les LettresPatentes du t4 Février 148 1, accordées par Louis XI,
pour récompenfer les Suiffes de leurs fervices, & pour fe
donner de puiff2ns alliés qui lui en rendiffent encore de plus
grands. Voulant attirer les uns à fon fervice, & engager·
les autres à venir s'établir en France, il leur accorda & à
leursfVeuves, durant leur viduité, l'exemption de toute taille
& impôts, aides & fubventions quelconques, pour quelque
caule'que ce; fût. Ces Lettres-Patentes furent confirmées
par Charles VIlI le 10 Novembre 1483 ; par Louis XlI
le 9 Oél:obre 1498; par Fran~ois Premier le 17 Mars 1 S14,
& 18 Oélobre 1sx6 ; par Henri II en Février 1SSO ; par
Fran~ois II en.• 1.s"s"9; par' Charles IX le 6 Août 1S6 1 ;
par Henri III, au mois d'Avril lS7S; par Henri IV en
Novembre 1602 ;. par Louis :XIlI en Décembre 1618, &
en Mai 1632; par Louis XIV le 19 Juillet 16S8, &
dans le traité d'alliance de l'année 1663.
L'exemption de tautes. impofitions comprenoit naturClllement de privilege d'exerc,er librement tous arts & métiers,
même fans' palyer aucune taxe j cela étoit général ement
rec6nnu dans le Royaume, & c'el!: ce qu'avoient jugé divers A rrêts du Confeil, & enrr'autres celui du 23 Septembre 1710, qui, après avoir déchargé Pierre Seigne, Pierre
Legelt & I~ veuve Vaunier Suiffes, établis dans la Ville de
Nevers, des. fommes pour lefquélles ils avoienr été impCifés) au rôte de là Ville, les maintint dans les privileges &
ellemp'tions accordés _à -la Nation Suiffe par les Traités, &
les déchargea clu paiement des taxes des-arts & métiers pour
lefquelles ils avoient été compris dans les rôles des Menuiiier~ & Epiciers de la Ville dé Nevers•
•- ;I;,.CJ prjvileg~ d,t libre elCercice, de. CQlIS arCs &: trJétiers à
é,e,,:,foic:iutléllero..ep, confirmé .C11:' .fav.eW',:_~ë§i S.~iff<;s par
l'art: :1.4
�DU
PALA.IS
.Dl!'
361
·P'ltOVllNC-t.
l'arr. 14 au Traité de Soleure du 9 Mai 17 1 S ; cet article
porte : s'ils ont quelqIJe mùiù bu profejJi'ori,1 ils 'pourrollt
l'exercer en toute libuté; poUrvu qu'ils Je foumettent aux rtgles étah/ies' dans' les lieux' où "ils éroh/iront leur domicile.
-Nonobfiant cette deJniere claufe, & malgré ce- qui ell:
'pané par l'arr. 6. du même Traité, que les Suiffes Je trozj...
veront confondus, {j.ne pourron't prétendre d'autres 'prérogà'lives' que ùlles dont les fujets du Roi IjoliiJfènq On 'avait
_continué de penfer que les Suilfes pouvaient exercer routes
forces de profeffions, même fans l'ayer aucunes impofitions
de corps dans les lieux où il y a maîrrife. Il y -a l111de.lfus·des
Arrêts è1~ rau's les Parlemens. Cerre Jurjfprudence exifioir encore en Provence en 17p.LaCour jugea le"30 Mai de la même.
année, en faveur d'un nominé Ulrik Frey Suilfe, contre -les
Prieurs des Aubergifies de la Ville de Marfeille, qu'Ulrik Frèy
pouvait y travailler 'de leur mérier, fans apprenliffage , ifans
réception 11 la matcrife, fans payer aucun droit ni ql{ofité.'
Cependanl on comprit dans la fuire qu'en ce qui ell: des iml'alitions, les Suiffes', malgré leurs privileges, ne" de oi~nt
pas être plus 'favorifés que les autres fujets du Roi, puifqu'ils
·participoient aux mêmes avantages. On fit plus d'attention
·aux articles 6 & :2.4 du Traité de Soleure; on fournit les
. Suilfes'aux impolitiolls Royales & des Communautés, & a~x
impofitions annuelle~ des cor~ 'de métiers en Jurande, dont
ils exer~oient les profeffions. C'ell: ~e qui fut jugé par l'Arrêt
du Confeil d'Erat du w Mars '7S7, portant calfation d'un
Arrêt du' Parlement de Dijon qui avoit caffé des failies faiees
par les f!1arcbands Mercie.rs de la même Ville contre un nomMé
'Ghar~~ Raymond JSuifl"e; qui avait ouven. boutique fà~s payer
les droits; mais cet ,Arrêt ne fournet pomt le ,suiffé '11 l'a prëDtilfage & au chef-tl'œuvre ; c'eut.ér~ contredire 'Ià'difpoorion -exprelfe du Trairé de Soleure, qUi permet aux SùilTes
le li1i-re exercice 'lie leur mérier & profeffion:' L'éxetèice de
ferait plûs libre', s'ir fallait apprentilTage, chef-d'œnvr~, 'exâ-·
-men &- réceprîon~ ') 1
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_profeŒQ.n, eJ;l ul?ayaoe les .impoficiQlls anouelles'1La Cour
,'~'~J'~liquad;1ire(Jlencpar Jon·A-u.êe du '11..M'li 17'7'1, rendu
:.,.\1 rMPPO$'Ctd~ Mr. ge Thorame, pJlr leq.!lel divers maç;oJls Sui[e§ fLire[i; (QlJrQis au paiement ;des c.olifations. ànnu~elles du
_Ç.orpj des :ml\jf1ies;M;I\ions de MarC! iUe.
• ,vQn Jrql.\Y~ \ln fémblaWe préjugé dans l'Arcée rendu le 3
~Juin ,17.9..8.., .!lU rapport du même Coromiffàire., dànsJa..l1allfe
~entr~ les fri!'lllrs QU corps~es mallres Cordonniers .de .Mar~feiUe ,lX. Ieill)-~e.nis· Gilliatd., Suiffe de.matiDn, qUi avait levé
_UlJe ;.bout-ÎAge qeLCo,cclopnief dep.lü s eQYÎr.on :20,,305. iL.a Cour
~d~clara ~es' Prieurs oon-recevibles en 1eur~er:n:<lJ1der.du levage
de houejque, en p~yane par Gilliard.les cotes..du'.corps à l'inftar des aucres membres. .
(t
l, "
(
D~ns.la leme du Roi au corps Relvitique du 3 A;riI1774'
S~ Majellé n'entend aut'rec chQfe, fi;c.e h'efi qué le.!> Suilfes
_ppivene; .coneribuer) commè fes aueres [ujets .aU)! impofitions
;;pe fEejle, & payer notamment la ,Qapitation. C'ef! dans cet
·efpcie qu'il y dje que les privileges dela Natipp$).Iiffe doivent
être l.imités, felativemem à la cOQçeffion de ch.aqu.e Souve,rajn., & aux derniefS'Traités, que e\fr.ai,eement.;doic être réciproquement égal entre les_deull: b{1!t'ioQ.s.,; ~ qlÙ1t .11ffujettif[anJ les Fraoc,oi5 q\lj V,ont $'é~atW.e!1 Sujtfe''tIJll: mêmes'impôts
que lçs jlut-res éJrJltiger$ ,-!ej .9alltl>-OS çO./lvel!oient:pJlr-là q!ie
léurs fujets ne devaient pas Ure 'Ct1"aités d'iff.êrlimm.eJlt en
france ,.& qu~e 'le Jtpi n'ayoiç~:p<!s 'perQu lç' gtoÎflf;!)jboIÎr'
l]exemp,tion de Ja çapit.atio;Q ;.e~mBçiQlJ.qu~ l':ert~:m~ll)e let1~re pro\lye ay.9,i,r ç'liJ!é juG:tl;\e~ en ('tRij.
I<'(,7E~ ..~que à
_laque!le te 8.Gi ayoie riJ9hl l1e J'~QIi:r •• ') ,Co i G.I )"3 • f
-(, .Magd~l':iIl.e;· J1ipe,~ç" .JlPElriée ~ .PD )jlli.lfe o s1~Blli~:1"l33',
.e~~;rbe depu~ près Ile 4~ '!J.Y! I~ pge!,t' ,çPlTI~rse J'i!akr &
yendre MJ tqvirppJi Ge I~ p.!~ç~;Sqil].q-P,ir,rr~ ~·,:r9UJ9!1 dês
~ID.'Y' ~:H.l4~ ·~~.p1tlJ,u.e ÇtÎP.9f1.i~llr~ r~ ~JJ;eJf~~. ~!J19.Qt~là
une epoque ou la Tunfprudence admetcOlç e~. tJlJ!lt [/l~~~r• S1.C!rJ~nLfr'!Jl~ '9P~ r~:.~mf!lBi(j!rfj\I)r.:;iI1CW1~n~~ece
"
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PALAIS
DE
PROVENCIl.
363
de formalirés, même [aps' payer aueuns droits; elle invoql\oic
l'Arxêr de 1'7 5 ~, eOQrre les Prieur"S des Aubergines de ~ar7"
[eille. Sa RÇ)ffdlïen ·remont~flr
un rems ur\le., ,forme.ua
droit a~quis, pouç p~ pouvoir plus êrre reG.herchée à l'avenir,
[ulvam 1 (JlJlxime Jernpel' initium, Î1lfpiciem;fum.,; ear" eomme~dit
la Loi 8-5, §. l , jJ. de regul. jur. non eJl npvum quœ Jemel
militer conjlltuta Ji4nt, durqlt, ljeet ille caJus extiterÏl li lluO initium cap{re non potuit.
On rép-ondoir pour le eorps, que la veuve_Riper[ Ile pouvoir êrre marchande dans une Ville de Jurande, par cela feul
qu'elle étoit veuve d\m Suiffe, Ma~o_n de profellion. On; convieil.t que les, Suiffe~ opt e.\l eeçr~ prét~ntion, & qu~ le, prefrige <leJ'Ô.ud.!enee- fit iJlulion.en I7P, qu'on fe.laiffa, Eour
ainli dire, enrraînerau torrent du préjugé que I~ Nation Suiffe
avoir eu le talent d'aççréditer parmi nous.
',r
Il dl: eêrr'!.in que fuivapr les llerFres-Paren e~ de 148 l , il
n:y avoit que les Sl!Îffes ,à la [aide•. du Roi qui fllffl:!nr réputés.)
Regnieo\es, ou qui jouiffenr de~ eJSe,mpr,ions & privileg.es dqnç;
les aurres Suiffe~ Qpr enrui[e renrq de jouir. Ce point. maje\l~'
& effenriel a éré fixé par le T.rairé de ~oleure, qui fait à eeç~
égard la Loi vivanre , çelle qui réunir toures les, aurres, &
eelle dont il faut par conféquenc parcir. L'arr. 6 !pope:, 'l,qu~,
" li les Solçlars S,uiffes , ,quqique auJervice,' enr~epFeqllenh
" par eux-mêm~s ou par leurs fe.mmes. deJaire llut;ll1u,e,ç.o.ll);
" merce, ou d'ex~rcer quelque profeffion, lequel mérier. ne
" regardâr pas direél:emenr le Cer~ice Rarciculier desrÇompa'~ gnies Suiffes à la fold,e de Sa Majefié, en ce eas ils Ce trou" veronr eonfondus, & ne pourront prérendre d'aurçes pré,)
.. rogarives que eellc:s d,onr les Sujers du Roi jplJoiropr'l'
Il n'y.a done que les, Soldars ~uiffes, rçavail1an pou.r.les
Compagnies Suiffes ~ 1;\ folde du Roi, qui puiffe.n~ r availler
de leur mérier. Hors ee eas unique, les Sui1f~ n'OIlt & n~
peuvent pas avoir plus de prérogarive que les !l/'arion.aux. :q.
feroit- rrop humiliant pour la Narion, que, ehez. nous. des
Er angers euffenr plus de privilege que nous-mêmes; e'eil:pien airez que nous les ,adoptions & que nous leur transfé.~
.
Zz :z.,
�'364.
JOURNAL'
rions, tous les privilég'es attachés à ,la qualité de Cftoyèn:
C'efi pour ne laiffer aucun donte fur ce point majeur & imporrant ,'que l'irr. 2/f du même' Traité porte: " que fi les
" SuijJes ont quelque mitiér ou profeJlion , ils pourront l'exer:" cer' en toute liherté , pourvu qu'ils Je foumettent aux regles
" établies dans les lieux où ils établiront léu/ domicile. "
'. A Toulen perronne ~ne peut être March<1nd, s'il n'elt
membre de la Jurande. Ou il faut que la veuve Ripert foit
gênée par cette même Jurande, ou elle feroÎt,au-deffus de
la regle ,établie dans le lieu où elle a établi fon domicile;
ce qui répugne non moins à la Loi qu'à la raifon. Guillaume
Rouffillon, Suiffe de Nation, - voulant travailler du métier'
dei Tailleur à Nifmes , fans être re<;u Ma-ître, fUt condamné.
par la Police ,! qui confirma la faille faite fur lui, & la
~entence fut confirmée par Arrêt du Parlement de Tou-.
loufe, du 21 Juin. i7H' Le PaHemeqt de Dijon ayant
donn'é aux privileges des ,Suiffes 'une exrenfion injurieulé
à la, Nation & contraire à la difpofition formelle du
Traité de Soleure, en permettant au nom nié Charles Raymond d'ouvrir boutique fans être recu Maltre, l'Arrêt ayant
, "
"
ete
attaque par le~ Marchands
Merciers, le Confeil le caffa
le 20' Mars 17~7, & confirma la faille' faite de routes les
rnarchandifes. En la même année la quetHon s'étant encore'
élevée entre.les Cordonpiers de· Nifmes & les Suiffes qui y
éxercent la même profeffion , ~r. de St. Priefi , Intendant
'du Languedoc, décida le ,18 Septembre en faveur des Cor~
donriiers. Sur ce fondement Denifllrt, au mot SuijJes,
if. 17, dit que leurs privileges ne les autorifent pa·s à s'éta:'
blil' & à tenir' boutique ouverte dans, les Villes où' il y a
Ma~Frife. C'efi ce qui (ut· décidé contre les Suiffes de la ville
d'Aix, qui vouloient s'exempter du' paiement de la rêve. du
vin. L'Arrêt que la Cour des Aides rendit efi rapporté dans
le cahier de l'Affemblée de 1767, pag. 109.
.
f Le Suiffe qur vient s'établir en Franèe, n'y yient.que pour
fon avantage., Il 'vient-profiter du oéhéfice de:la localité; il vit
follS la' p.tO~aion de 11 os' Le-ix; .c'efi-lQus ,Ieur-einpir-e qll'il
�DU
PALAIS
.DB
PROVENCB~'
j6t
eierce fa profefIion OUI qu'il fait fon commerce; il doit au~
moins être fournis aux Loix, & ne pas 'prétendre à des pr~.\
vileges qué le citoyen n'a pas.
Le Corps des Marchands de Toulon (continuoient les
Syndics) n'a jamais eu aucune forre. de connoiffance de la
contravention à fes 'Statuts; il ne feroit.cenfé I~avoir elle,
qu'autant qu'il en conneroit -pari écrit. 'lI nla j:\.mais reconnu
la veuve Ripert pour membre du Corps; il 'peut 'donc toujours faire valoir fes droits.)1 le peut avec d'autant plus de
raifon , que s'il l'avoit autorifée par délibération~ il pO"urrait encore en réclamer; ainli qu'il fût jugé par Arrêt' du t
2:8 Février 1726, au rapport de Mr. de IMondefpin; les'
Chambres a1fémblées, i après trois partages ,qui ; fur' la
délibération du Corps des Charrons de Marfeillè, -caffa la
délibération qui avoit re~u Antoine CarIes.
Arrêt du premier Mars 1782, au rapport de Mr. le Con"Ceiller de Montvallon, qui caffe la fai/ie , fans. domma-ges
& intérêts, & qui condamne le Corps aux 'dépens. EcrÎvant
Mes. Pafcalis & Aude.
- .l ) •
.
. ,[
,J
ARR Ê T
X X X VII J.
,
,
L. c._
- Trflamens attaqués comme faits ab irato & captés. r ;
Ieur Jean-François Bouis, du lieu de Beffe, fut marié
trois fois. Il ne lui reLla de fon fecona ,mari-age qu"tinJ
garçon~ & une fille, & 4u. 'troilieme un gluçé>tf imbétlilë'·'&'
une fille. Pendant la vie de fa feconde femme,il a-';oit faitllun)
teLlamenr.; il -inLlituoit fon 'fils unique fon hél'itièr [Le ~
Février I7-6~, & lors de fon tfoilieme mariage ~ JI inré~a
dans fon tivre de raifon la déélararion portant»tévô'cation de
Joll tefiarfie~ folèn'\nel;- Jait ën faveur t1e"Me. 'lBouiS'l,fQn~
fils, Avocat; & qu'attèmlu.b.· nai1fanèe d'îlUtre's 'enfàns 1&.
S
-
pour' d'ézutres raifon~. à ~ lui; connues, ~ il 'tïJOJilûil.mouri; a~
•
�16~
"
~
n.I
~
intell:at, jufrJUIS à ce; 'fU'il jûr fail,. uro filIItU. teflqm nt., &J
~'il eilt régli ft àJfojr..e~.' '1
i ' ;( J~ ,., ~:) ") ifliC'
Le 2S Juin 1766 le lieur Bouis fit' UllJ'a~reJ Eéfra.~en~. III
·1
Oc U R N A
légua. 130000' IiI{. à)[mn fils~dll.[econd lie ,'&.itillillja c~ltu du
tJ;oiûeme, lit" ([on héritier,.. a'lel:l [ubll:i{U.rion 'en, 'jE(veor' de~
l' iné. Le '8'1AOûntrtÎmé, année aptte tefl:ament, qu1jnHiru.e.l
l'ainé héritielll, lui [tlbftitQf;l fanj c;id<lc~. & Je. ~éd ir> 11. Ull' leg
de 120(10 'Jiv. ~ En ·ottqb.re~[UUTant' au.t1!e teft\lme.Fl,IÎJ, qui fait
revivre celui' du 2S Juin 17.&1. <Q.u.atre ,ans. ·apoos autre teH,amem , qui ,inilitueJe cadet',hécieier ",& Legue à l'ait é ,I S-000
livres~en·capitaux:. Le hiJm *ii!I1lf7~ A@JJVe.;m tefl:a.ment., par
leq1Je~ il<\egltet' à ,[an. fils "aioll du bitlDs fonds ·aifez. c,oofidérablesi ~ i!ù'Jpaqet 1·8~.oo Ji~r.Cls,. ~'; iJ,1fbtue rfe . épQu{er.(on
héritiere. ,Le 8.. NO'lembre Ii'P78: l.auJre tefiamenc,' p~ r
lequel après avoir légué la légitime ~ fon 6ls'c\ldet, il MITe
la fa.culté li fon ép.ou[eJ d'élue &1 de nommer .celui des énfans .du troi'ieine.: lio qu'il lui plaira l avèc faculté. 'de les
fll.btHtuer l'un lbl'auc4"e-..: le tefrateur fixe la portion de l'aioé.
Il fait enfuite une donation de 40000 liv:,à [0.0 6ls ainé, &.
l'émancipe. Il fait enfin un dernier tefiamenc, par lequel il
lui legu!L ! OQQQ. fur, pardeITus fa donation, & il infiitue
fon fils cadet [on héritier, auquel il nomme [a mere pour curatrice;
" 1... ,
.
,
Après la mort du lieur Bouis', fon fils ainé demanda la
caITation .de ~$ teQltméns , c'omme; faits ah irato. Le Lieutenant de Brignoles rendit une Ordonnance de pieces mifes•
.\p(l.eh de M:é"ll9uisJ pa.rdev<!pt la Cour, l!v,ec c1aufe d'évbC.iU;lQP ci ,fond:; ~(pJ'}iJQip-'!I..L'I UaOJe, :a~\ln acquief~a."à l'é,.
v~<uiQ' &i 'lP-a-e1l gUe".mç.me if/! qU4lltÎLll.l1 r ç,ontra .de l'OrqQlll)iUlc~<À!A tie\ttelO~iJt.C 'le •'\
.
Do t\i(~jbMl,(r Me. BOljÎs que ces tefiillnens ne pouvoient
fpbJUltIl; ,hien 'loin d~y. parler en. Légifiarl:JJ.r & en pere·, le
tefr'lUllU:: ~'ia'loi~) gril"1é en QarilÇler.es. trdpl frappan~ 1,. haine
jnjjlfic.q\l.U'anilTH~i. ,1 & cette hain~ trop:.énangere'au cCl(~lr
p,;}tlVMI., hli.a~~ été (liggérée pàrrJes <l[tifices -4, cles ma1la:~m$.d'uQ.e.mltrâtre~bitie\1[<!,Ce n'ét~it que 1'6\lvrage
�DU
PALAIS
.<DE
L361
FROVENCB.
de celle-ci; ce n'étoit çr~ le témoignage honteux dé l'~m
pire qu'elle avoit ufurpé fur. [on ttlpri, .& 4e l'ufagé .jnju~
qu'elle en vouloit fai~. 'On ne pouvoit, préfente,r ces aéies ~
la luflice comm6] pn~ loi dom~l!:iqu~" & (aerée: haine &
fuggeflion. Telles ~[oient le? -armes puiLfant..es ~yec lefquell~
11 les attaquoit " & foys l'eifo(t defquèllesJ ils d~voi\lDt fuc•r
fC_om-ber. .,°v ",
1 ..
!
".~10l ',)
En droit, la' preuve de la -haine-qui a animé le tel!:ateur'
doit anéantir les difpofitions qu1elle )Iui a diélées,. En vain
veuf-on établir (nr ce ,point un~ 9iJ.Jinél(iotl injul!:e & hafar'<!ée eptlle l'enfant lIhéréçlé &, rl'enf~nç 1"éduit, à fa .légitime.
-En v:ai'1 s'eiforce>-t-oo.de métafQorpbe(eJ:, la puilfance paternelle en .une ef~ce de defpotifme rigou~eux & arbitraire; il
dl: impolIible de ·la reco.npolt,~ à l'~ trait, quoiqu'il r foit
alfez naturel de YQir celui que les captjces d'un pareil defpoJe
one favOl:ifé.; s~eJfo~cer d'en défen.dre l'o,uvr,age. C
: lm
~ Chacùdifàiè,que! le. droit i\fè tel!:er &i~de' j;!{}e[ libr~tlle:l)t;
·app rtient'fans diffiçlllté 'âp,x p.ere-1 de fam~h~ dlt0uthgtn'm~
-maÎtre,de fes a&~oQ$" La:Jt.o', 1.o!;C?JTIme fff~lj~ vO!llqit.lutt~r
avec la Nature, confoler l'homme de fa tyranni<t" .<% le dédomm.age.r eo Quelque' forte de la terril;>\e &. hymiliantê
.c_ata!l:ropb.e>iqy'eU~ luj( PUlP'J,r'e., :.Ç:hG!fI ,ulPou. ; 'le~er ,j.!-p
plus 'haut piJiot de puiJlà9P<:.·& d grafJ~\I! ~ Je <llJ.PllJenr..qù
·celle-ciJI'ab.a.jlfe 1e p1;us' ~lX en 10' f<lit HJ1~.iaat~ur fouve:.rain &jmroQrrelià ;}~poq,uJ: ,même" u.ù i~ 1l:r,à peiRe ~co~
lin homme; & PY1il, H ~ffer de l'çtr,e. Ma.is'len.!Hi..• !!1 ':.lI !!niquarit tbut le pouyoir' d'uf!1Légif!iiteur, n"qil-i\.,pas na!urd,
,o'e.il.;l ;p,;tS;~\lfteJlIti.'lll~':,~Ilj e~ige. à1 l9.0: J~pr .!'9 ~ '~~t!a.rtiiH'
lite' ~:t~J,lt~-J~'(jge~ ) ~~f'l.UO' fe~OIHI 4IfPF.nfe,peJrrlil~Ji~;
~auigre d~û_[1 [iv yg! ça'pnq~! ,~ll:plu§i 99uç!!S.,~lPl?.lÙfio
BF
:fang! dj!l;!al Natliro , & l;pr41" ,qu'elle ~p-aro\, fYrPir... ~Ue
<même ét3bl' Le, d(6if·d'li"~ injuJ,l:e" arbltrair«; ,e~ricieljll,
·ne' fllt jampia p!JI.PJ~.J1f lp~ .h~~ .!'gif~l}~aJpJ~~ ~:AAmJ:~fP
..des a~1tii_l~~ il!iffi!~ ;
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cilllatérau~ n'on~ ni les rnême.s :dtoirs'ni.là même' fave'ur.que
les enfans; & la :plairite de cêux-d peut) être' .fondée· dan~
des cas où' l'on intèrdiroit même ·à . ceul(-I~ le {impie mur-
mure. On: peut toujours dire au col1<itéral mécontent de I~ou
bli ou de l'àvarice ·du te l!:a"te ur , que 'celui-ci ne .Iui devoit
-rien.' Il :faut:qùe l'intérêt public {e ·trouve lié. au ftep',. pa~ le
mépris des formes {acramentales de l'aél:e, ou des loix deJa
déêehcè &: .de' l'honneur", . pour pou.voir ,faire triompher fa
'réclamation i{olée Lie défa.vorable·,; 1 mais. l'enfane dépouilfé
-d'une {ucéemon à 'laq1iellè la voix d~ la· Nature (emble l'ap.:.
.peller, ne' 4a ~réclam-e, 1j>6UP ainfi dire, jamais {euIL ; -fa plainte.
'intéreffe touioürs 'Ie.s Tribunaux, &·retentit.en quélque forte
al~ fdnds, de, cous le-s CŒurs cornpatiffans &.fepfibles. On_peut
biel.l rem-être· alfo·ililir ju{qu'à un. certain 'point cet ïn'térét; en -objeél:ant' que l'enfant' qui n'el!: point enriérement dépouillé', m~·is feulement- réduitt.1i {a légitime, n'a
.'paÎnt ~ffuyé ,d'ihjui!:ice 'prop'relnenr:dice l' puifqu'ill,a tout ce
:qu~ 'Hlt~a'~pà~t-enliWl'~ :qu~e!Î privanc. du r~ll:e d~ ,ron ~é:i
tage l)lIfon pere o"a 'faltT qu1ufer''<iu dro/Ci qU'II avolt d'en,dl{po{er à" {on gré.'
. l '
,
Ii el!: certain' qu'il 'y :i
grande différence enrre cette
Ipbl'tion·.[acree·f{lufbÎenl.paternel, 'que)e.feul.drpit. tic; la naif'flloëeJalIUfe s& d'è'tffl.Bf l~&f le' rel!:ë1de'la '{ucéeffion; &' tel
-efiJPeffè'f d~ rcetre r(JHfér rice l ' que lorfqlle, le' pe~e urane de
'fonl'àmii:' ou pl~ltôé de 'fa pdiffanéé ~ 'de (a Jul!:ice patèrnèlle
'dans'toute ~ rig\le'ur, depou,i1Ie m~me' fon ènfant de certe
<proprïée~ imp-refcripeible & fainte, il, e~' obligé de jufiifier
~u:!,lige~b,nt:~(~~er~; fde: .rlÎo;iver up'e 'di~poli~.iou Ji'e~raya~te ;
,~1ils q!léiquë. maltk-, 'qu Ique IIl>re qu'.1 fOlt de,l dlfpofer 1 à
!fon'gré du'fÙfpllllflle fe'Sf'bie si il n'e-f~ lihre,' il n'efitmaître
.,Ue ,comme: uri. :LégiOatelJr & unl pere doivent l'étré. Comme
E~giflateU'r;i1 doit:êtreju{le ; 'comme peté ,~il d(jit-rnême.êtr.e
:;;odulgent' & 'dbux; "dès ilu'on voit que quetqlle>paffion,l'a. ~~llgl~ r? qu~ ."qu~lqu;. }mp'r~/Iion ~pj~~eHi fé~ujt<fon ~fprit.Ou
·enéllift'i fOri 'cœ~)ron -ce1re d'a'Vtilr en tUf aritle~, confiance,
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~ .oe4.ût'!d\Uliiti ~in'è :fOÙJniIÎlODii:En i'1failt~e::.tj{p;pfer
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PAL A 1 5
D 11
PRO V Il Nell.
.
369
en pere, il.a ceffé de commander en Juge & en LégiIlateur.
Jamais aucune Nation ne favorifa autant la puiffance des
peres que le peuple Romain; les Jurifconfu1res & les Tribunaux la foute noient avec une efpece de fanatifme; les Loix
en parlent avec enrhoufiafme. Cependant les Loix Romaines elles-mêmes n'ont pas voulu que tout ce qu'un pere
prévenu par fa propre paffion, ou entraîné par celle des
autres, auroit ~ordonné , fût dès-lors revêtu du fceau inviolaQle de la puiffance paternelle. Tout teHament qui ne portoit point l'empreinte de la tendreffe & de la piété d'un pere,
étoit un reHameut fufpeél: , & pouvoit être attaqué & anéanti.
Il eH vrai que l'aél:ion ab irato ne formoit point chez les Romains une aél:ion diil:inél:e & p'articuliere; mais elle étoit
évidemment comprife & inglobée , filivant tous les Interpretes, dans la plainte d'inofliciofité; & c'eJl des principes
même du droit Romain qu'on a fait ufage, dit Mr. d'Aglleffau , polir fonder cette aBion ancienne, & dont le nom
feul eJl ,!ouveau.
.
Des Loix précifes & textuellc;s, fans employer néanmoins
ces termes ah irato, devenus aùjourd'hui facramenrels, prononcent la nullité de toute difpofition faite dans le premier
mouvement d'une chaleur inconfidérée. II n'eH pas jufqu'aux
Jurifconfultes ultramontains, plus affervis pourtant que nous
à la Loi Romaine, qui n'y trouvent la réprobation tacite
d'un teHament fait ah irato. Ce n'ell donc point l'influence
des Coutumes, plus favorables à l'ordre ordinaire & naturel
des fucceffions qu'aux difpofitions te1l:amentaires, qui s'e1l:
infenfiblement étendue jufqu'à nous; ce n'eil: donc point d'a~
près elles feules que nous avons admis l'aél:ion ah irato. Qui
ne fent point la néceffité de ce remede falutaire ,. contre
l'abus d'un pouvoir auffi étendu, auffi defpotique, auffi immortel que celui des peres? Qui ne fent point que cette
puilfance fi exceffive & fi abfolue, a hefoin d'être tempérée
par tous les fenrimens de douceur, d'indulgence, de foihlelfe
même, fi l'on ofe.le dire, que la Na!ure a gravé dans le cœut;
,Années J78J & J78z.
.
Aaa .
..
�370
Jou RNA L
de cous les peres; & que, fi quelque paRion impétueufe &.
violente vient tout à coup à les obfcurcir ou à les remplacer,
rien ne feroit plus dangereux que de la biffer feule revêtue
d'une autorité tout à la fois fans borne & fans concre-:poids?
Tout ce qu'on peut accorder de .plus à la puilfance paternelle, c'el1: que l'amour des peres pour leurs en fans étant
lui-même une efpece de paRian, on ne croit pas facilement
(ju'une paRian étrangere puilfe prévaloir fur ce fenciment fi
jul1:e & fi fort; ainG la préfomption doit être pour eux,
quand ils condamnen't & dépouillent en lilence l'un de leurs
enfans, & l'Dn doit croire à l'inconduite & à ·l'indignité du
fils plus aifément qu'à l'injul1:ice & à la barbarie du pere.
Mais quand les motifs qui l'qnt entraîné font 'lp"parens & fenlibles; quand ils font écrits & qu'on les· voit évidemment
injul1:es ; prétendre que le jugement paternel doit fublil1:er ,
par cela feul que celui qui l'a porté était réellement juge &
pere, ce n'el1: pas feulement continuer mal ,à propos d'honorer d'un tirre qu'il ne mérite plus, celui qui s'en el1: dépouillé lui-même; c'el1: établir le plus abfurde & le plus dangereux de tous les paradoxes, en foutenant qu'il el1: un pouvoir fur la terre qui a même le droit de faire le mal & de
commettre des injul1:ices irréparables & immortetles. AuRi
tous les Auteurs & les Arrêts ont accueilli avec la même
faveur le reme~e unique & néceffaire que la Loi préfente à
l'enfant injul1:ement dépouillé par un pere, que la haine ou
quelque autre paRion a aVeuglé. Que fera-ce fi cette haine a
été fuggérée ? li au moyen imparable qu'elle fournit fe
joint le moyen de calfatioll lion moins invincible que produit
la fuggel1:ion ?
La fuggeHion a fur la. haine l'avantage d'être plus vraifemblable. Il el1: difficile qu'un pere puilfe en venir à cet excès
de délire & d'égarement, de hair celui à qui il a donné la
vie; mais combien el1:-il aifé & ordinaire qu'un homjTle
déja affaibli par'1'âge & cependant toujours emporté pat fes
goûts, fe lailfe fuhjuguer par une nouvelle époufe? Combien n'elt-il pas plus commun, que celIe-.èi emploie toUt fo(,l
�DU
PAL.US
DE
37r
PROVENCE.
afcendant à élever fa nouvelle famille fur les ruines des enfans de (es anciennes rivales, que la mort ne met pas toujours hors de la portée d'une jaloulie qu'elle peut confondre
jufquà un certain point avec la piéré marernelle? La fuggeftion n'ânéanrÎr pas moins la liberté & la volonré du reftateur, que' la haine ou' toute autre paffion auffi violente; elle
met à la place du. jugement impartial de celui qui reHe &
qui donne, le vœu furpe8: & intéreffé de celui qui reçoir ; elle
(ubftirue au doux com!Derce des bienfaits, la fraude & le
larcin même.
Que le teftament du lieur Bouis ait été capré; que la
haine qu'il refpire contre l'objet de (es premieres complaifances lui ait éré fuggérée, les preuves en fourmillent au
procès. le demandeur peut opporer avec (uccès à (a belle-·
mere l'événement qui a enfin tourné au gré de (es injuftes
efpérances, & les manœuvres odieu(es qui l'ont préparé.
L'événement! Et qui ne feroir point frappé du choix étonnant
qu'a fait le reHareur lorfqu'il a nommé fon héritier! Il ell:
clair que ce choix n'ayant pour morif aucune des- confidérarions humaines qui décident les hommes en pareil cas, ne
peut lui avoir éré di8:é que par la prévention la plus outrée.
A la bonne heure qu'un homme choififfe entre (es enfans
celui de la conduite duquel il a été le plus (arisfait, celui qui
lui donne le plus d'e(poir de fe voir revivre dans une longue
& vertueu(e pofiérité, & que celui qui n'aura pas eu en fa
faveur d'auffi juftes rairons de préférence, ne (oir pas fondé
à fe plaindre de la modiciré de (on partage.
Mais eft-ce un enfant ,tombé en démence, incapable de fe
conduire lui·même ,plus incapable encore de régir des biens
confidérables & de devenir le chef d'une famille nouvelle,
qu'un pere choifir en pareil cas, à moins qu'il n'air concre
tous fes autres enfans les griefs les plus terribles? Qu'on ne
dife pas que ces griefs exiHent , qu'ils (ont confignés dans le
livre de raifon du teftateur, & écrits de (a main même.
Tout homme raifonnable n'appercevra dans' les accufations
."agues ou plutôt dans les déclamations indécentes & 1àn~
Aaa
~
•
�372
Jou
RNA L
objet que ce livre renferme, que les infpirations paffionnées
d'une ennemie ardente & ambitieufe; le fiyle même de ces
injurieux écrits, trop indignes de la majefié paternelle i
trahit & décele l'auteur fecret qui les a diélés.
Au milieu de ce tas d'injures, deux faits feuls font coartés ;
ils font démentis ou expliqués par le tefiateur lui-même. II
s'agit de cette horrible accufation en parricide qu'on prétend
avoir été portée par le pere contre le fils, & de l'accufation
non moins grave fans doute aux· yeux de la Dame Brun de
l'avoir méprifée & maltraitée; on foutient que ce fecond
grief efi configné dans un tefiament. Mais le fieur Bouis a
été bien éloigné, taut emporté qu'il étoit pour df's paŒons
violentes & étrangeres, de vouloir laiffer fubfifier 11 jamais.
contre fon fils le (auporon d'un parricide; il explique lui-même
ces termes horribles, qui n'al.lroient jamais dû lui échapper,
& affure que lorfqu'il a dit que fon fils fui avoit mis le couteau fur la gorge, il n'a entendu parler qoe la. donation de
40000 J. D'ailleurs ce tefiament qui prouve, dit-on, démonftrativemenr les mau\'ais procédés de Me. Bouis 11 l'égard de
fa belle-mere ne prouve réellement rien, puifqu'il efi un de
ceux dans lefquels Me. Bouis a été le moins maltraité, puifque les termes que le tefiateur y emploit, font bien loin
d'avoir la terrible énergie que lui prête la Dame Brun.
S'il pouvoit refier quelque doute fur l'oppreŒon intérieure
& fourde fàus·laquelle ce pere infortuné gémiffoit, fur le
froiffement terrible & perpétuel qu'éprouvoit fon cœur entre
la haine étrangere, mais' aélive, qui l'obfédoit d'un côté, &
les fenrimens de la Nature qui le follitaient quelqu.efois de
l'autre, ne fufliroit-il pas pour le faire difparoltre, de parcourir les difrofitions contradiéloires de cette longue fuite
de tefiamens, qui font chacun comme une efpece de ,tribut
qu'il a fucceŒvemenr payé 11 l'afcendant d'une époufe irnpérieufe, & 11 la tendreffe invincible, quoique étouffée, qui
le lioit 11 fon malheureux fils; aveu plufieurs fois répété de fa
double foibleffe ?
Avant l'arrivée de la Dame Brl:lq dans la maifon, Me•.
�DU
PALAIS
DB
l'B.OVRNCll;
173
Bouis était l'unique objet de la pr~dileaion de fan per~
Long-temps même après la venue de celle-ci, il a conferve
tous fes droirs ; il a fallu que l'habitude d'une part accrût
l'afcendaqt de l'époufe, & qu'un âge plus orageux de l'autre
expo(àt davantage l'héritier aux reproches, aux inculpations,
à la calomnie. Dans cet état des chofes, la Dame Brun n'a
pu même ufurper l'empire fans récla!t1ation & fans réliftance;
l'amour paternel s'eft fouvent révolté contre le def,o:ifme
conjugal. Qui méconnaîtrait à tant de traits l'ufurparion lente,
mais fûre, mais irréfifbble, d'une marâtre auffi adroite qu'ambitieufe? Si le fieur Bouis pere a lui-même gravé en caracteres frappans la haine qui l'animait contre fan fils, la Dame
Brun n'a pas moins fourni contre elle-même des preuves de
la fuggeftion la plus violente & la plus odieufe, pu ifqu'elle
eft fondée fur la calomnie.
Quoique moins malrraité qu'il eut pu l'être, s'il euJ.. été
exhérédé ou même réduit à fa légitime, Me. Bouis avait été
cependant dépouillé de cette inftirution univerfelle que lui
avait fi long-temps affuré la volonté libre & conftante du
teftateur, & même de ce partage plus avantageux que lui
aurait déféré le vœu de la Nature à défaut de difpofirion
teftamentaire. Ayant reçu moins qu'on ne lui avait d'abord
donné, moins qu'il n'avait naturellement c;lroit d'attendre,
ayant été filcceffivement dépouillé avec la même injuftice de
ce que lui déférait le vœu de l'homme & le vœu de la Loi,
il a intérêt comme aél:ion à fe plaindre, & ne doit point être
privé du droit de faire réformer cette double injuHice.
Au fonds, c'eft par une fubverfion enriere des principes
qu'on a entrepris de faire regarder fa réclamation comme
illégale. Loin d'être profcrite par les Loix Romaines, elle y
puife au contraire fa véritable origine; elle eft une dépendance immédiate & néceffaire de la plainte d'inofficiofité
accordée aux enfans contre les peres par le droit Romain
lui-même; par ce droit qu'on prétend fi favorable au defpotifme paternel, fi contraire aux droits que la Nature affure
~ux enfqns" Sans doute, dans les premiers temps de la Ré.~
�,
374
Jou RNA L
pllblique, lorfqu.e les reClamens étoienr plut~r fuivant l'o~dre
politique que fUlvant l'ordre naturel; lorfqu'lls reffemblOlent
plus à une loi publique qu'à un jugement domeClique & privé
por é par un pere dans le fecret de fa famille, fur le partage
de fa fucceffion & la deClinée de fes enfans, leur fanél:ion ,
leur autorité étoit abfolument fouveraine & irréfragable;
elle participait ainfi à la fouveraineté de l'Affemblée auguCle
en préfence & de l'autorité de laquelle on teCloit. L'enfant
maltraité ou exhérédé même n'avait pas plus le droit de fe
plaindre & de réclamer, que ne l'a aujourd'hui un citoyen
fur le fort duquel un Tribunal fouverain & le Monarque luimême ont prononcé. Mais·lorfque de l'excès de rigueur dont
on était parti, on fut prefque ·tombé dans un excès contraire;
lorfque pour rendre enfuite aux pere,s une partie de leur
autorité, dont un excès de commifération pour les enfans
injuClement maltraités les avoit fait dépouiller -prefque en
entier, on décida que-l'enfant à qui le pere lai1foit fa légitime- n'avoit point à fe plaindre;' lorfque JuClinien voulut
que dans le cas même où il fe trouverait privé par le fait
d'une partie de fa légitime, on attribuât l'injufiice du pere à
une fimple erreur de calcul, & l'on fubClituât l'aél:ion en fupplément de légitime à la plainte d'inofficiofité, cela ne fit
point que dans aucuqe hyporhefe l'enfant inClitué pour fa légit.ime ne pût attaquer le teClament de fon pere, comme
fait dan!, la préoccupation d'une haine injuHe ou dans le premier mouvement d'une violente colere. La nouvelle Loi le
priva feulement de la preuve écrite que lui offroit auparavant
le teClament lui-même, de la colere ou de la haine du teClareur.; mais cette Loi n'empêchoit point qu'on ne pût &
qu'on ne dût même adm.etere fa réclamation, lorfqu'il étoit
a1fez .heureux pour .pouvoir en ra1fembler d'ailleurs des preuves
décifives & viél:orieufes. Tel eIl: le fens dans lequel les Commentateurs & les Jurifconfultes ont toujours entendu & expliqué la Loi de Jufiinien; ce n'eIl: point énerver l'autorité
lJaternelle, que de l'empêcher feulement de dégénérer en un
~efpotifme injuile. &- barbare. En
vain s'eJForce-t-on
de'don~
.-
�D U
PAL AIS
D E
PRO VEN C E:
37~
ner fi l'aétion ah irato une origine récente; li ne ferait point
difficile de prouver que dès le temps de Sr. Louis elle éroit
déja connue, ou plutôr elle el! auffi 2ncienne que la Loi
elle-même qU'dn veut lui oppoler, & dans laquelle la raifon
& la Nature ont appris à la puifer.
On répondoit pour la Dame Brun, que la réclamation
de Me. Bouis éroit défordonnée dans le fyllême du droit qui
nous régie, & qu'elle ferait profcrire & rejeccée par les
Loix courumieres elles-mêmes. L'objee de Me. Bouis
de
faire revivre un eellament faie en fa faveur; un eellament
unique & déja ancien, & pour arriver jufqu'à lui, il en a cinq
à anéantir, & ces cinq fe réferenc eux-mêmes à un fixieme
qui a précédé celui que Me. Bouis invoque. De ces cinq,
deux n'ont pas eifuyé le moindre reproche; le troifieme a
même reçu de fa pare un eri"bue d'éloges qu'on ne peut fufpeéter. QuelIe voloneé ferme & invariable que celle que Me.
Bouis veue faire regarder comme étrangere & fuggérée! une
volonté de quinze annees, une voloneé énoncée prefque
dans les mêmes eermes dans fix aétes différens l
La demande de Me. Bouis
non-recevable & mal
fondée; les cinq tellamens qu'il accaque & qu'il.veut faire
anéanrir , formeronr roujours encre lui & l'héri rage parernel
une barriere infurmomable & invincible. Elle ea non-recevable, parce qu'il n'ea point déshérieé, parce qu'il a une
porrion à peu près égale & équivalenee que celle que lui
auroie déféré le décès ah inuflat de fon pere; elle ea mal
fondée parce qu'il ne prouve point & ne pourra jamais prou- ver les fairs de colere & de fuggellion fur lefquels il s'efforce
de l'étayer.
Qui ne croirait en effee, à en juger du-moins par l'a~
merrume de fes plaintes , que Me. Bouis a éprouvé de la
parf de fan pere la plus cruelle injullice, l'ouerage le plus
fanglant ? qu'il
à peine déligné dans fon reaamene, ou
même déshériré avec injure; avec diffamaeion, &
qu'il y
ce que les Juri[confultes appellenecum elogio ? Me. Bouis a
cependane re~u ou par donation, ou par legs un tiers à peu
ea
ea
ea
ea
•
�37 6
.
Jou Il. N A L
près de la fucce/Iion ; à peine l'héritier a-t-il quelque chofe
de plus en fonds, il a certainement moins en revenus, &
cet héritier, c'efi fan frere.
Que l'enfant qui fe voit à la fois dépouillé & déshonoré
par le tefiament de fan pere; que l'enfant à qui l'on préfere
un collatéral, un étranger, faITe retentir les Tribunaux de
fes plaintes, & les intérelTe à fa caufe, à fa lituation; on
pêut le fupporter. Mais de quoi peut fe plaindre celui qui
hérite d'une porcion plus conlidérable même que celle que
lui alTuroit le vœu de la nature? Suppofé que le lieur Bouis
pere eût divi[é par porcions égales [on héritage entre tous
fes enfAns, Me. Bouis eut été moins bien partagé qu'il ne
l'~fi aujourd'hui; à peine I.e décès ah inteJlat du tefiateur
lui eut-il fait gagner quelques mille livres de plus en fonds,
& c;'auroit été aux dépens de fes fœurs; li aujourd'hui l'héritier efi un peu plus avantagé que lui, c'efi encore aux dépens· de celles-ci; mais il n'a rien perdu fur fa propre portion. Les plaintes, la réclamation de Me. Bouis manquent
donc ab[olument de prétexte; c'efi fans intérêt qu'il inCulte
à la mémoire & à l'autorité de [on pere, & qu'il veut faire
anéantir fes dernieres volontés ; eut-il été traité moins favorablement qu'il ne l'a été; il n'aurait pas le droit de fe
fàire entendre.
C'efi par erreur fans doute que Me. Bouis a cité les Loix
Romaines; le dernier état de ces Loix ell: contre lui, comme
le fut d'abord leur premier vœu. Ces Loix parcies d'un point
de rigueur peut-être exceffif, puifque les peres pouvaient
d'abord di[pofer de leurs biens arbitrairement, & fans confuiter les droits du fang & la voix de la nature, feraient peut-étre tombées dans l'excès contraire, fi l'on eût continué de
permettre indifféremment à tous les enfans qui n'étoient point
héritiers, de quereller d'inofficiolité & d'injutl:ice le tetl:ament
de leur pere. OQ prit un juHe milieu en décidant que l'intl:i"tution des enfans ne ferait forcée que pour leur légitime feu1ement; & Jufiinien voulut même que l'enfant à qui on n'au~oit lai1Té qu'une portion de fa légitime n'eût que l'aaion en
fupplément
�DU
PALAIS
DI!
PllOVENCll.
377
fupplément au lieu de la querelle d'inofficiofité. Tel el!: fuivant
la Loi Romaine, bien entendue & modifiée par les derniers
Empereurs, l'unique droit de l'enfant qui n'a été ni oublié ni
elltiérement déshérité. La Jurifprudence des Cours a-t-elle
dérogé 1t la Loi Romaine?
Ce n'dl: point celle des Pays coutumiers qu'il faut con fuiter ;
l'efprit des coutumes tend en -général 1t conferver les biens
dans les familles, & l'égalité entre les enfans ; il n'y a pas
cependant bien long-tems encore que le Parlement de Pa~
ris a adopté fur ce point des principes plus relâchés que ceux
de la Loi Romaine. Le célebre Mr: d'Aguffeau a été un de
ceux dont l'autorité & l'éloquence aient le plus contribué à
les faire admettre; & dans ces derniers tems, cette Cour
fouveraine a paru revenir à peu près à l'ancienne févérité.
Mais dans les Pays de droit écrit, on ne s'el!: point reffenti
de ces différentes révolutions ; rien n'y énerve, rien n'y
contredit l'influence & l'empire de la Loi Romaine; la puifrance paternelle s'yen maintenue dans toute fa force; quatre Arrêts de la Cour ont confirmé des tef!:amens qui paroiffoient avoir été faits dans un état frappant & prouvé de
colere ou de haine. Dans ces quatre diffërentes hypothefes,
on oppofa toujours avec la même force & le même fuccès le
principe du droit Romain à toute la faveur des héritiers naturels, aux plus puiffantes illduél:ions que pouvaient fournir
les circonl!:ances.
Jamais la préférence d'un enfant fur les autres n'a paru un
moyen fuffifant de caffation. Quel ef!:, dans une hypothefe fi
favorable, le Tribunal fupérieur à la nature? Quel el!: le Juge
qui aimera mieux croire qu'un pere s'el!: déterminé par la
haine qu'il portait à l'enfant qu'il n'a pas même dépouillé,
plutôt que par une jul!:e prédileél:ion pour celui qu'il a favorifé? & fi, de ce que fan mécontentement el!: écrit & prouvé,
on en induit un moyen de caffation, n'établit-on pas ce pa_
radoxe auffi dangereux que révoltant, qu'un pere fera prefque
toujours forcé d'avoir pour héritier celui de [es eofans dont il
aura le plus à fe plaindr~?
Armées 1781 & 1 78z,
13b1l
�378
}0
U Il. N' A L
Quelque favorable que fait ce principe d'égalité entre tous
les enfans, que l'efprit général des coutumes tend à établir, il
efl: autant dans le vœu de la nature qu'un pere puilTe récompenfer & avantager celui de fes enfans qui s'el~ bien conduit,
& punir au contraire ,. par quelque réduél:Lon, celui donc il a
eu à fe plaindre; favorifer la puilTance paternelle, Ç'eH conferver le dernier boulevard des mœurs.
Le moyen tiré de la prétendue fuggefl:ion n'efl: ni plus fpécieux, ni plus fol ide ; il fe réfute préclfémene par les mêmes
exceptions. S'il efl: impoffible d'appercevoir le caraél:ere de
la haine dans la plus naturelle & la plus jufl:e des difpofitions
tefl:amentaires, il efl: plus impoffible encore que cette haine,
done rien ne prouve l'exifl:ence, ait pu être {uggerée. Il faut
nécelTairement prouver la haine, avant de pouvoir prouver la
fuggeHion; mais comment prou\'er cette haine autremene que
par l'exhérédation, autrement du moins que par la réduél:ion
à la légitime? efl:-ce de la préférence donnée à un autre enfant qu'on peut feulement l'induire ? admettre un principe fi dangereux, ne feroit-ce pas répandre dans toutes les
familles un germe morrel de divifion & de difcorde, & réduire à rien l'autorité des peres?
Les preuves de haine que Me. Bouis produit font inconcluantes felon lui, puifqu'elles ne fone pas confignées dans le teftament lui-même; admettre fon fyfiême, c'efl: interdire toute
efpece de plainte à un pere fenlible & offenfé. A la bonne
heure qu'on les exclue de fon tefl:ament, parce qu'elles y dégénerent, pout ainfi dire, en inveél:ives & en diffamations publiques; mais il ferait bien dur auffi de l'empêcher de les répandre même dans de fimples lettres, de le contraindre à en
renfermer l'amertume au fond de fon cœur. Au moins faudroit-il difl:inguer entre ces plaintes, celles qui forrent en quelque maniere du relTort de la jurifdiél:ion paternelle, celles qui
compromettent l'homme & le citoyen, de celles qui n'inculpent que l'enfant; au moins faudrait-il examiner avant tout,
fi ce pere accufé après [a mort d'injufiice & de paffion, en
a donné des preuves dans le relle de fa conduite intérieure ~
•
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE~
379
s'il exille quelqu'autre aél:e de violence qu'on lui reproche,
& qu'on puiflè également rapporter à fes plaintes, à fes menaces; enfin, il faudrait encore difcllter fi ce livre {ecret dans
lequel un homme n'ell: cenfé parler qu'à lui-même, peut être
produit en preuve contre lui dans une efpece d'accufation publique, & fi Me. Bouis, qui fe recrie tant fur ce qu'on fe
fert pour fe défendre, des lenres qu'il a écrites, peut luimême fe fervir du livre de raifon de fan pere pour attaquer
fon teüamenr. Mais que fera-ce, fi, loin de prouver l'injuHice
du pere, ce, livre ne prouve que les torts du fils? Enrre le
pere qui accufe, & le fils qui récrimine, pourquoi conduJoit-on plut6t en faveur de la réalité & de la jufiice des reproches, que de celles d~ l'accufation ?
Mr. l'Avocat-Général d'Aymar de Montmeyan crut devoir
en premier lieu pofer les véritables limites de la pui1fance
paternelle, qui fut d'abord le principe & la fource de tous les
autres pouvoirs que l'ordre politique a enfuite établis, & qui
fervira toujours de modele à ceux qui en voudront faire un
bon ufage ; déterminer jufqu'où s'étend l'indépendance des
peres dans la difpofition de leurs biens, dans l'adminiil:ra. '
tian de leurs familles, & où doit finir la foumiillon bien
ordonnée des enfans; fixer ce que l'intérêt de l'ordre public,
de la fociété, de l'ordre intérieur & domefiique de chaque
famille, ce que la juil:ice qu'on doit aux enfans, ce que la
vénération qu'on doit aux peres exig,ent; décider enfin s'il
faut joindre à cette foule d'exemples & de faits qui prouvent
que l'autorité ne chercha qu'à s'étendre, & qu'il n'eil: mal~
heureufement que trop naturel & trop facile d'en abufer,
l'exemple de l'excès & de l'abus de l'autorité paternelle.
On l'a dit en faveur du defpotifme lui-même (obferva
Mr. l'Avocat-Général): fi les hommes devaient être gouver~
nés par des êtres fupérieurs à toutes les paillons, à toutes le!!
foible1fes de l'humanité, il ne fcroit point de régime plus
heureux que le gouvernement defpotique ; l'afcendant & l'em9
pire de la venu ne fauraient être en effet trop indépendan~
J3,bb~
,
�380
Jou
R. N A L
& trOP :!bfolus; & ce feroit alors la mefure même de l'auto-
rité qui deviendrait celle du bonheur public; mais obfervez ,
répondait-on à ces partifans, que ce font de fimples mortels
qu'il el!: que{l:jon de revêtir d'un pouvoir fi ctendu & fi redoutable ; que ces hommes privilégiés, qui doivent tout au
hafard de leur naiIfance, peuvent cependant être faibles &:
corrompus comme les autres hommes; & fi fouvent les paf.
fions d'un fimple particulier, fecondées feulement par la fupériorité de fes talens ou de fes richeIfes , ont fait tant de
maux 11 la fociété, ont caufé tant de ravages, que ne ferontelles point 11 l'aide d'une puiiTance illimitée qui, dans fes
plus grands écarts, pourra fe juHifier el1e-même 11 fes propres yeux, puifqu'el1e n'aura réellement fecoué aucun frein,
ni franchi aucune borne? Ne foyez donc pas furpris, concluoit-on, qu'on defire de voir régler l'autorité abfolue, plutôt relativement 11 la nature de ceux qui doivent en être reuêtus, que proportionnellement 11 l'utilité; il faut bien que la
fageiTe des Loix s'occupe du foin de prévoir & de prévenir
des abus qu'il ef!: fi naturel de craindre, pour peu qu'on
veuil1e réfléchir 11 notre foibleiTe.
Ce qu'on a (I.it de l'autorité abfolue d'un feul, on peut le
dire en général de la puiIfance paternelle; fi les peres n'étoient
pas des hommes, on ne pourroit trop accroître leur pouvoir;
fi la tyrannie des pallions n'étoie pas quelquefois aiTez violente,
pour l'emporter fur les plus doux fentimens de la nature, devroiton craindre qu'ils puIfent jamais abufer de l'autorité même
la plus abfolue & la plus indépendante, lorfqu'elle fe trouveroit fi heureufement & fi efficacement balancée par la een. dreiTe , la commifération , ou, pour fe fervir d'un terme plus
énergique encore, & qui exprime eous les fentimens réunis,
par la piété paternelle?
Mais quoiqu'on puiife fe repréfenter fans doute comme une
forte de pallion , l'arrachement invincible qui lie les peres àleurs enfans, n'efl:-el1e pas expofée 11 raifon même de ce.
qu'el1e ef!: la plus douce & la plus [aime q.e eoutes, à le cé-,
�DU
PALAIS
DI!
PROVENCE.
38 1
tIer ~ d1autres paflions plus impérieufes & plus violentes? &
ne tombe-t-on pas dès-lors dans le même inconvénient, en
armant du pouvoir le plus exceflif, & par conféquem le plus
dangereux , un être tyrannifé lui-même par elles, c'efr-àdire, le plus capable d'en abufer ? Il efr vrai qu'il faut remarquer, en faveur de la puiffance paternelle, que l'abus en paroît bien plus invraifemblabIe, & doit en être aufli bien plus
rare. Un defpote n'efr pas lié à fes filjets, ni retenu lui-même
dans l'exercice de fon autorité & de fes vengeances, par les
mêmes liens qui attachent un pere à fes enfans, qui l'enchaînent lui-même, p"ur ainfi dire, à la douceur & à l'indul,gence. Se trouvera-t-il beaucoup de peres qui commandent
& qui gouvernent impérieufement pour le feuI plaifir d'exercer leur empire, qui puniffent même pour la feule douceur de
fe venger? Un pere, en regnant fur fes enfans qui fom à fes
yeux la portion la plus chere & la plus précieufe de fan être,
ne regne-t-il pas en quelque forte fur lui-même, & ne doitil pas toujours les traiter avec cene condefcendance involontaire & prefque aveugle qu'on a fi volontiers pour foi-même ~
L'égoïfme, ce fléau moderne de la fociété,. ce fentiment
trifre & exclufif qui deffeche rapidement tous les autres, &
frappe tout à la fois de frérilité l'ame & le cœur: l'égoïfme
peut bien nous porter à nous ifoler, à nous féparer de tout
ce qui nous entoure; mais peut-il aller jufqu'à rompre le plusdoux lien de la nature, jufqu'à rendre étrangers les enfans
aux peres? Les Loix ont cependant prévu ce qui paroît prefque impoffible au fimple fpéculateur; elles n'ont pas craint de
calomnier la nature humaine, en fuppoCant que les peres,.
acceflibles aux paflions comme les autres hommes, pou voient
quelquefois Ce laiffer aveugler ou fubjuguer par elles, au
point de n'être plus les maîtres de traiter leurs enfans , &
de diCpofer de leurs biens felon les devoirs de la piété paternen~; hoc calore, de inq/ficiofo teflamento agitur, dit la Loi
Romaine, fjuqfi non fana: mentis fuerit teflator, non fjuaji ver.!
furiofus Pt.
C'auroit ét.é peu de prouver l'abus, fi on y eût apporté
�39 2.
Jou RNA L
le remede ; les Loix Romaines elles-mêmes, ces Loix fi
f.Jvorables à l'autorité, ou prefqu'au defpotifme des peres,
ces Loix qui, fuivant lesexpreffions du Légi!1ateur lui-même,
formaient en ce point l'apanage particulier & diftinél:if du
peuple Romain, plus jaloux de regner fur leurs enfans qu'aucun autre peuple du monde, n'avoient pourtant pas lailfé fans
celfource l'enfant injuftement maltraité ou dépouillé; elles
devenoient alors pour lui ce qu'auroit été le teftateur luimême, fans la paffion injufte qui l'entralnoit , un pere tendre, un juge équitable & même indulgent; elles lui permettaient de quereller d'inofficiofité le teftanlent qui l'avoit déshérité, ou qui n'avojt pas même daigné faire mention de
lui, & cé teftament étoit anéanti comme l'ouvrage d'un
homme qui n'avo.it pas joui en le fairant de toure la liberté
d'efprit? de toute la tranquillit'é d'ame, nécelfaire pour la
validité d'un aél:e fi important.
Il ne faut pourtant pas confondre fur ce point elfentielles
Loix Romaines avec les Loix Françoifes & coucumieres.
Celles-ci Ont été beaucoup plus favorables encore aux fils
de famille. Pour rétablir dans un plus grand nombre de cas
cette égalité entre taus les enfans vers laquelle elles tendent
alfez uniformément, elles ont peur-être énervé jufqu'à un
certain point l'autorité paternelle; 'elles ont peut-être donné
aux enfans la facilité de fe fouftraire en partie à un joug falutaire qu'elles ont elles-mêmes relâché. II eU d'aura nt plus
aifé de fdifir la diverfité qui regne entre les difpofitions &
les conféquences de ces différentes Loix, que cette même
diverfité éclate dans leur efprit général, & dans le but qu'elles femblent fe propofer.
L'objet évident des Loix Romaines, & leur véritable efprit, eft de favori fer & de maintenir la puilfance paternelle;
elles n'ont voulu que l'empêcher feulement de dégénérer en
une tyrannie aveugle & barbare; & c'eft dans ce cas unique. qu'elles tolerent qu'on lui porte atteinte; en forte qu'on
pourrait penfer fans trop de filbtlliçé, & en pénétrant, pOlir
ainfi dire, dans leur intention fecrete, que c'eU par refpea
�383
pour cette puitrance même, qu'elles fe' permettent dans quel.
'ques oecalions d'en .enfrein~re les droits; comme, par exemple, lorfqu'ils ont été évidemment ufurpés par une pallion
injufie & violellte ; que ce n'efi que par voie de conféquence
que les enfans retirent quelque avanrage de la fiél:ion qu'elles
n'ont imaginée qu'en honneur des peres eux-mêmes, ou que
du moins ceux-là n'ont tenu que le fecond rang dans leurs
vues & dans l'objet réel de leurs difpolitions. Il ell: au contrairé dans l'objet & dans l'efprit des coutumes de rétablir
le plus fouvent qu'il efi poffible le vœu primitif de la nature, qui efi l'égalité; elles doivent fe porter avec d'aura nt
plus de facilité à anéantir les difpolitions du tefiateur le plus
légerement fufpeél:, qu'elles peuvent y être déterminées par
le delir fecret de faire revivre leur propre ouvrage fur les ruines de l'ouvrage d'autrui, puifqu'elles ont elles-mêmes dif.
pofé & tefié pour taus les ciroyep.s.
Ce n'eH donc point le cas de dire, dans les Pays régis par
la Loi Romaine, comme dans les Pays coutumiers, que la
liberté des peres dans la difpolition de leurs biens 'n'efi pas
ahfolument indéfinie; qu'elle efi fubordonnée jufqu'!l un certain point aux droits qu'ont na<urellement les enfàns fur les
biens paternels, & qu'il ne dépend pas des peres de. les priver au gré de leur feule volonté de ce droit inhérent en quelque forte à leur titre; ou enfin, comme quelques auteurs l'ont
avancé, que l'autorité des peres n'efi même emiéremem fondée que fur l'opinion que l'on a eue de leur tendretre & de
leur piété paternelle. Ce ferait en effet bien mal entendre les
Loix de ce peuple altier & fuperbe, que d'y chercher dans
de pareilles maximes la fôurce & l'origine de la puitrance pa·
terne Ile; c'éroit chez lui un privilege national (car telle
était fa maniere de l'envifager) , dont il éroit extrêmement jaloux, un droit dom il s'énorguillilfoit, & qu'il croYQit à ce
titre être propre au citoyen Romain: rzulli [urzt alii homil/es,
dit Jufiinien, qui talem irz Ziheros hahearzt potdlatem qualem
nu
PALAts
DI!
PROVENCE.
nos habemus.
Si les Romains eulfent entendu que leur puiffance pater,,:
�,
384
Jou R N Jo. L
nelle n'écoie fondée que fur l'utilieé préfumée de leurs enfans, comme l'aucorité des Souverains l'eil: fur celle des fujets, pourquoi fe feraient-ils vantés avec tane d'emphafe
d'êrre fupérieurs fur ce grand paine à toutes les autres Natians, à touS les peres? La même caufe devrait produire
par-cout les mêmes effets. Mais ce n'étoit pas feulement
comme peres, & pour le bien de leurs familles, ,qu'ils regnoient avec tant d'empire fur elles; c'était comme citoyens
de Rome, & pour leur plus grand avantage. Etoit-ce en effee pour l'avantage de leurs enfans qu'ils avaient le droit de
les réduire à la fervimde, & de les vendre jufqu'à trois fois?
Quelle utilité pouvaient retirer ceux-ci d'un pareil traitement?
& ce droit, pour le conlidérer fous le point de vue le plus
favorable, n'eut-il été en effet qu'une peine d'un genre nouveau dont les Loix auraient voulu armer la vengeance d'un
pere offenfé ? Cette peine li aviliifante n'étoit-elle pas la plus
propre de toutes à manquer le but que les peines domell:iques doivent toujours fe propofer, celui de corriger fans détruire, & fur-tout fans flétrir?
Expliquer par quels liens feerets l'efcIavage domeHique, car il doit être permis d'employer cette expreffion, tenait à la liberté civile & publique, & en étoit peut-être le
fondement; éclaircir cette contradiél:ion apparente; obferver
comment, dans le fein de la foumiffion fans réferve & d'une fi .
longue fervitude ,fe formaient ces courages fi fiers & ces ames
ft fortes & fi énergiques; tout cela formerait la matiere
d'une diifertation plus intéreifante & plus curieufe que néceffaire à la caufe aél:uelle. Ce qu'il y a de certain & de conftant, c'e!l: que Je droit de difpofer de fes biens fuivant fa
feule volonté, le droit de fixer à fon gré la deHinée de
chaque membre de la famille, étoie un droit inhérent à la
perfonne de toue citoyen Romain, & formoie un des privileges attachés à ce beau titre: DifPonat teflator &- crÏl lex.
Tel e!l: le grand principe fur lequel porte principalemenc dans
les Loix Romaines le droie de tell:er, & l'ordre des fucceffions; ce n'eft, POUt ainu dire, que quand le ceLl:aeeur n'a
pas
�DU
PALAIS
DE
PROVI!NC:f.
38)
pas lui-même difpofé, ce n'dl: que quand il n'a fait qu'écrire
ce qu'une prévention aveugle, ce qu'un mouvement impétueux lui ont diél:é, que l'aél:e évidemment injufie qui en réfuite n'a ni le caraél:ere ni la caution d'une Loi.
Du refie, maître abfolu de fa fortune, juge indépendant
& fuprême de fes enfans , qu'il favorife à fan gré celui qui
a toujours trouvé grace à fes yeux, ou qu'il lui préfere toue
d'un coup celui qu'il n'avait long-tems paru regarder qu'avec
indifférence; qu'il fuiv~ dans fes libéralités l'ordre de primogéniture , ou qu'il l'inten'ertilfe; qu'il ne falfe que copier
dans fes dernieres difpofitions le vœu de la nature elle-même,
ou qu'il lui fubfiitue fan jugement fouverain & arbitraire;
qu'il préfere le fexe pour lequel il doit naturellement pencher,
& qu'il réalife en effet, d'une maniere moins imparfaite, l'efpair que chaque pere de famille a de revivre dans fa 'poHétité, ou que dans celles mêmes qui devaient un jour pOrtèr
un nom étranger & nouveau, il ne celfe point de voir fes
enfans de prédileél:ion, & la portion la plus chérie de luimême: dans tous les cas, il peut difpofer & ordonner avec
llne entiere fécurité; car il réunit dans tous les cas toute la'
confiance du Légiflateur, & toute l'autorité de la Loi.
Le pere de famille efi én effet, fuivant le droit écrit, un
magifl:rat intérieur & domefiique, une efpece de fouverain
privé. Suivant les coutumes, au contraire, il n'ell: que pere,
& peut-être même comme tel, ont-elles trop borné fan autorité , trop affaibli fan influence; peur-être à ce titre, qui
femble devoir l'élever 3u-deffils des foupçons, l'ont-elles
trop fouvent fufpeél:é; peut-être ont-elles lailfé entrevoir aux
enfans trop de facilité à appeller de leurs arrêts, & à échapper à leur vengeance. Des Auteurs qui écrivaient cependant
fur les coutumes, & qui devaient, ce femhle, avoir plus'_
l'habitude de penrer d'après elles, ont eux-mêmes remarqué'
que l'autorité des peres s'ell: beaucoup mieux confervée dans
les Pays où la Loi Romaine efi encore en vigueur. Er:dans,
quel rems fue-on plus intérelfé à conferver & à défendre ce,
premier rempart de la fociéré , ce tribunal des mœurs, le
Années t78t & t782.
~cc
�386
Jou
RNA L
feul proprê peut-être à maintenir l'obfervation des Loix de
rhonneui; & d~e. 13J pro.bité ; Loix plus rigoureufes au fonds que
les L.9Yc Civil.~& elles-mêmes, puifqu'ell,es impofent des obligations plus é.tenclll,e"s Il< des d~v,Qirs ylu& déljçats;, plus
foibles cepe.ndant & plus facIles à enfre)ndre par leur forme
& pa,r leur fanélion, qui ne con,fifle guere que dans la honte
& dans le blâme public" !Iu-deifus duquel on ne tarderoit
guere de Ce mettre" fi l'autorité & les fentimens domefliques ne oq.l!s avoient inf~nfiblemept pliés au joug, en
lui prêtant long-temps une nouvelle force. Dans quel fiecle
fut-il plus néceffaire de fortifier, par les préjugés d'une édu<i3tion ferme & vig6ureufe, dont la puiifance paternelle peut
c.ependant feule être le nerf, le frein de l'opinion publique,
celui des Loix, celui de la Religion même, que dans ces
jours de licence, de corruption & d'audace à la fois,
où l'égoïCme, l'incrédulité, l'eCprit novat~ur & Cyflématique
de la plupart des Ecrivains leur portent de tout côté tant
d'atteinte, où ces grands génies, appellés par la fupérioriré
de leurs lumieres &. de leurs talens à l'emploi fi noble de
précepteur du genre humain, femblent fe faire un jeu cruel
de le tromper & de le féduire; où chaque citoyen, à force.
de s'iColer & de faire confiner tout fon bonheur dans la
jouiifance obfcure & exclufive, & même dans l'abus dé fa
fortune, échappe tout d'uo coup à l'influence autrefois fi
puiifame de l'houneur de la renommée, & peu à peu même
à celle de l'autorité publique, qui n'a pas en effet aifez de
prife fur tout citoyen qui ,. pel! jaloux d'ailleurs de l'eflime &
de la confidération des autres, pre;od feule..ment foin d'éviter
les grands excès &: les gra.n,d~ crimes.
Seront-ce' nos Loix, atfoi.bJjes, nos m~urs co,rrompl1es ,
la Religion preCqu'éo§iéremen.t oqbljé~ &, dédaignée de nos
peres, la, Phi)oCQphie elJtcep.reoa..rtte &; au.dacieuJe. de nos
contemporains. qui nous pr.éP-'!1e.rQIl;t q.'h()ffime~ & !iJt bons
cito~ens , fll'oJl ô.le yo.e fojs au",p.eJ~ de &lPil,te le d.roir lx
le p-ouvoir de Ce fi;Jrro~rc une poMrJté ve.rttl,~k:.? ç~ droit
&. c<e. pouv~ie dUlIc; ,I:az Jociit~ .r~ueil1~ tom 1~1 fJiltÏ.L, &; qu~
�DU
PALAIS
DE
387
PROVENCE.
par con(équent (ont ejfemiellement fondés (ur l'intérêt & le
bien public, repofent néceJrairement eux-mêmes (ur la liberté de -teller, -comme fur I-eur ba(e. Otez aux peres la faculté d'employer à leur gré & fuivant le befoin, l'attrait -des
récompenfes & la crainte des fentimens; ôtez leur le mobile
li puilfant de l'intérêt, en lailfanc 'efpérer aux enrans que
leurs difpofitions te!1:amentaires pourront être aifément
anéanties; par quel reJrorc penfe-t-on qu'ils pourront gouverner & retenir l'ame naturellement indépendante & fougueufe de leurs jeunes fujets? Et de quelle utilité pourroit
être leur fage fecours , leurs remontrances, leurs menaces
même, li, quand la légereté feule de l'âge en combat fan-s
celfe l'effet, quand les pallions en infpirent fi fouvent le
mépris, aucpne crainte ne les dilfuade, aucun c11âtiment ne
les punit?
Telles font aulli les confidérations puilfantes, les motifs
fupérieurs qui chez des peuples plus humains & plus doux
que les Romains, mais qui comme eux ne fe glorifient que
d'être les defpotes abfolus de leurs enfans , . & de ,pouvoir
les traiter en efclaves, Qnt fàit néanmoins adopter &' confen'er les Loix qui établilfoient la puiJrance paternelle; nous
n'avons réprouvé que l'objet que paroi/foient avoir eu leurs
Légiflateurs dans l'établilfement de ceue puilfance , celui de
flauer l'orgueil des citoyens de Rome, de les dédommager
par le defpotifme domefiique, d'abord de leur indépendance
mutuelle, & enfuite de leur magnifique efclavage.
Mais comme cette in!1:itution peut & doit avoir d'ailleurs
une foule d'efFets utiles & d'heureu(es conféquences, nous
l'avons accueillie parmi nous avec une parfaite connoiJrance
de caufe. Les petes peuvent encore aujourd'hui pour "l'utilité
. & le bien de leurs enfans, (& ce bien n'eG: que trop fouvent
fondé dans le droit de .corriger & de punir) tout ce qu'ils
pouvaient chez les Romains pour fatisfaire, ce femble , lEur
vaniré & contenter leurs caprices.
- Tel eft fur cet objet, le plus important de la Iégi!lation
-r;ivile) l'unique différence qu'ua u(age fondé fur des mœurs
-
Ccc
1
:li
-
�~88
Jou RNA L
~lus douces, fur notre caraél:ere & ~orre régime particulier,
a introduite entre nous & les RomaIns, elle ell: roure dans
la caufe & dans les motifs que nous affignons à la puilfance
ab[olue des peres ;_elle difpaio1c abfolumenr, lorfqu'il ne s'agit plus que d'en fixer l'érendue & d'en énumérer les droirs.
Ce n'ell: pas que la Loi Romaine elle-même n'eûr reconnu
ou du-moins fenri l'abus de la puilfance parernelle, confidérée comme un fimple privilege des peres, donr ils pouvoienr ufer pour eux feuls & à leur gré, indépendamment de
ce que pouvoienr exiger les circonfiances & la conduire de
leurs enfans; nous trouvons dans ces mêmes Loix d'autres
palfages bien oppofés à ceux que l'on a cités, bien difficiles
à concilier avec l'orgueil, la vanité, l'égoïfme que femble
refpirer la définirion que donne Jul1inien de la puilfance des
\ peres.
Ce même Jul1inien qui accorde rour à hi liberté de tel1er ,
qui lui permet même de fe jouer des droirs de la Narure &
de ceux de la raifon & de l'équité, .dit cependant dans un
aurre endroit, que ce qui fuit que les enfans font rout de
fuire invefiis de la propriété des biens paternels après la mort
de leur pere, c'efi que cette prife de polfeffion A'el1 qu'une
conrinuarion du droir qu'ils avoienr à ces biens de fon vivant
même: Jlatùn poJl mortem parentum quaii continuatur domiIlium; & ailleurs, en caraél:érifanr la différence elfenrielle
qu'il faut faire des enfans du tefiateur, défignés par la Loi
fous le nom d'héritiers liens, d'avec rous les autres héritiers, cet Empereur dit encore: fui quidem hœredes appellall-
tur, quia domeflici hœredes fum, & vivo quoque patre quo.
dammoda domini txiflimamur.
"
Comment'accorder cetre efpece de copropriété des enfans
avec cette liberté abfolue, indépendante, capricieufe même
& déraifonnable que ces mêmes Loix alfurenr aux peres?
Ne faut-il pas avanr tout .être unique & libre propriétaire des
biens dont on difpofe? ou, après avoir permis au teHareur
d'érouffer la' voix de la Nature, de s'écarter même des loix
de l'équité & de la rai[on , le L~ginateur a-t-il voullJ portel:
;
�D U
PAL AIS
Dl!
PRO V l! NeE:
389
la condefcendance jufqu'à leur permeme encore dé ble1fer
les droits inviolables de la propriété? Il efi cependan~ un
moyen de faire évanouir cette contradiétion choquante, &
il ne faut peut-être pour cela que dillinguer les pa1fages O~l
la Loi définit feulement, de ceux où elle difpofe & où elle
ordonne. C'ell d'une fimple définition du droit de teller que
nous avons tiré ces conféquences fi étendues & fi extrêmes,
que quelques-unes même femblent ble1fer jufqu'à un cerrain
point le droit naturel des enfans; & ce n'ell aulli que quand
elle définit leur rang originaire dans la ma ifon & dans la
fuccellion paternelle, & ce.que la Nature feule avoit fait pour
eux avant que le tefiateur fubfiituât fon vœu perfonnel à fa
difpolition générale, que la Loi les appelle les copropriétaires des biens paternels.
Mais quand elle établie & regle enfuite la liberté de teller
& les droits fucce/lifs des enfans, elle fubordonne l'une à
l'entiere tranquillité d'efprie du tellateur., comme elle foumet les autres à l'animadverlion des peres. En prenant ce
fage milieu, elle paroît avoir évité l'un & l'autre excès;' celui de donner aux peres le droie abfolu de dépouiller leurs
enfans fans refiriétion &. dans tous les cas, ou tel en en
effet leur caprice, & celui plus dangereux encore de donner
aux enfans des droits trop cerrains & trop imperturbables fur
l'hoirie 'paternelle; ce qui feroie en effet leur en donner à
l'independance.
•
C'ell du foin de Œncilier ces droits, en quelque forre op-'
pofés & contradiétoires, que .les Légillateurs Ce font principalement occupés dans les titres du code & du digelle qui
traitent de l'inofficiolieé des tellamens; ces deux titres font
dans les Loix Romaines la fource la plus abondante où l'on
pui1fe puifer les principes qui doivent régir l'aétion ah irato.
-On ne trouvera cependant pas que ces eitres en fâ1fent une
mention exprelr~ '; mais il eft clair qu'on le ·peut & qu'on
le doit déduire des princ.ipes généraux d'équité & de juftice
[ur lefquels on a formé la plainte d'inofficiolité elle-mêm'e.
Cene plainte n~ fut pas connue &. .admife chez les Ro~
�39~
Jou RNA L
maIns dans tous les remp-s. Dans les pre:miers !iecles de la
République, le defporifme dè"s peres n'eut lpoinr de bornes;
avant de devenir ifèrme & magnanime, le 'carllél:ere de ce
peuple', né pour les guerres & pour les conquêtés, commen~a à paroîrre dur & barbare; peur-êrre même dt-ce un
befoin des Erats républicains, que les peres de famille y
foient fi arbirraires & f1 ahfolus; peur-êrre l'aétion moins
rapide de leurs Loix a-r-elle befoin du fecours & de la fanc'
tian des loix & des chârimens àomeHiques.
D'ailleurs, chez les Romains tout teltamenr fur d'abord
furveillé par le peuple e'ntier, en préfence & de l'aurorité
duquel le reltateur difpofoit; on préfuma que l'aifemblée de
la N'arion n'adoprero\r que difficilement l'ouvrage de la paffion
& de la 'haine. Er pardevanr quel Tribunal auroit-on appellé
des décifiolls de ce peuple Roi? Quoi qu'il en fait, ce ne
fut guere que fous les Empereurs que la plainte d'inofficiofité put devenir dans quelques cas la reifource des enfans
dont les peres n'avaient éré pour eux' que des juges iujultes
& des ryrans; reifource eQ effet néceifaire, donr l'équité
feule imploroir le fecours, & dont des Loix fi dures faifoient plus vivement feurir le befoin.
Les HiHoriens eux-mêmes n'ont pas dédaigné d'obferver,
combien il elt quelquefois d'une juHice extrême de venir au
recours de l'enfant 'injulterr:ent maltrairé. Tout le monde
connoir & fair prefque !"'lr CŒur le récit que Valere Maxime
nous a tranfmïs, d'un Jugement célebre rendu par Augulte
dans une caufe de certe nature, & le pompeux éloge qu'il
donne à ce Jugemenr. Il elt vrai que dans l'excès de fa colere Septimia n'avoit pas même nommé fes enfans dans fan
teltament; mais les meres n'éraient point encore alors
obligées de 'les i'nftir.uer. Ainu cetre prétér,ition Pilrticuliere
ne pouvoit êt'te affitnilée à une exhérédarion formelle & compIerre; ainu ce fut 'toujours par un principe d'équité & de
juftice naturelle, que la réclamarion des héririers du fang fut
admife, & non en' 'v.ertu d'un texte précis du droit, & d'une
aétion difiinéte & déja:connue. Un texre précis, u..ne aétion
�DU
PALAIS
DB
PROVENCE;
391
dilHnéte & particulière! qu'en dl-il befoin, lorfque c'ell:
la Raifon & la Jullice eUes-mêmes qui plaident la caufe de
l,! Nature,. & qui réclament en fa faveur contre l'ounage
des deux plu~ a\'eugles pallions?
Par quelle fatalité finguliere, au lieu. de donn,er une bafe,
fi refpeélable à, cette aélion nouvelle, les J urifconfultes Romains ont-ils mieux aimé la déduire d'une pure fubtilité de
droit? Ce n'écoit pas en effet parce qu'il étoit injulle, qu'un
teHament étoit anéanti e,n pareil cas; c'étoit parce qu'il étoit,
l'ouvrage d'un homme qui n'avoit pas l'entiere liberté de fon
efprit : non qu'il fut abfolument. fol, di,Coient-ils; car dans
ce cas le tellamenr auroit été nul dès l'origine. Mais quoique
légal il ne valoit rien; . parce qu'offufqué par une prévention aveugle, ou entraîné par qll.elql)e paffion violente, le
tellateur n'avoit pas, été en état de fuivre, ni même d'entendre & de .cQnfulter les dou,ces infpirations d,e la: piété
paternelle. Qu.e de fageffe & de juftice clans, le [e,ns véritable & dans les motifs réels de ceue déci(ion! Mais "lue de,
recherches, de circonlocution, d'ambiguité, ce femhle,
dans les exprellions & dans 'les cour,nures ! EJles peuvent:
cependant être jullifiées jufqu'à un certain poi,nt par' d;~s coo-,
certa.in qu'on ne peut tr9t!'
fidérations de prudence; il
pallier, trop déguifer même le facrifice de, l'a\lQere, q1ai'si
exaéte regle à l'équité ;, telle é.roit la rai[ol1> qlli avojr p~rt,é'
les Légiflateurs à affaiblir, à adoucir aQt'ln~ qu'il éwit pof-,
fible l'unique atteinte qQ'iJ~ perme.ttoient, de porter à l'auto....
rité, des peres, à 1:1' l·iher:té de teller. CeJ;1)'étojt don~' pas;,;
felQ~ la, Loj " le tefiatPent d'lm ho.mme., Ub.ce d'efprir qu~
étoj·t anéant'i , . UlJtÎs; .celui çl-?UI1. h,omm,e d,ont la r'lifon étoit(
altérée &0 tyrannifée' ,-' ,cel illét0,it: pa.;S le jl!ge.menr, re.Jldu par!:ln pere eo!re [es enf1tIl~, ql,li,éJPi~ ,méçQnnu) l\Iç. $épri[é-~
,'étaie: ce. pere, IYi.~,rpême. qpi €tQÏ):, '1ffr'@ochi .l(\.e, 1~im.preŒ0Jl
& eta la tyrannie: 'li usé H:tŒo.u: .érNl'lgete; " i .':
"
, TecHe: efb: unelde~ roanie;re s, d~expijque:r l'efj'lec.e- de' détoUli
q'1i'a 'prjs le; dr0Ï1iJR{liliatÏo PQùi.t'f<tite ):Q o mphe.11' 1<1 plaint.e
ea
d?j~ilifi"}oli~éjJ:Ca>1~oi. .a.vJ).itf'lGullli ~i:>n1;;ilie.r'
""'. t.
au.t<rnt
q~i1<éto.ilt
..
�391.-
Jou
RNA L
poffible, la jull:ice du'e aux enfans injul1:ement maltraités,
& 1.1 vénération due à la puiifance des peres, à leur indépendance· entiere & abfolue dans' la difpolition de leur bien.,
Le Légiflateur fentoit bien qu'en impofânt un frein, néceffaire' au defpotifme 'aveugle -& tyrannique de qttelques peres,
on feroit cependant le premier pas vers la licence & l'infubordination des enfans; il cherchoit en quelque forte à
cacher à ceux-ci toute l'étendue de la grace qu'il leur faifoit;
il la déguifoit, il l'exténuoit fous une' fauife & trompeufe
apparence.
Rien n'érait en effet plus important & peut-être plus dangereux que le privilege accordé aux enfans par la plainte
d'inofficiolité. Le remede étoit, pour ainli dire, auffi extrême que le mal lui-même', auquel on avoit voulu pourvoir. Que fallait-il en effet pour faire caifer comme inofficieux un tell:ament qui fouvent ne renfermoit rien d'ailleurs
que de jull:e & d'équitable? Une limple erreur de calcul
opérait cet effet terrible; l'enfant inll:itué pour un legs inférieur à fa légitime, érait affimilé à l'enfant prétérit ou exhérédé avec un éloge odieux & injull:e. C'étoit en [a faveur
qu'on feignoit de croire que 'le tell:areur qui n'avait pas f'iu
évaluer au jull:e la totalité de fa fucce/lion & la cotité de la
légitime, étoit apparemment maîtrifé par quelque paffion
violente, & hors d'état de tuivre les mouve mens de la
piété paternelle; tant ce Peuple, toujours li grand dans
l'établiifement des principes généraux, & li l'on peue s'exprime'r ainli , 'dans la partie morale des Loix, étoit quelquefois petit par fon' J'mour inné pour les fubtilités, par fan
refpeél: idolâtre pOLIr les formes. Aveo quelle timide & fervile éirconfpeél:ion les peres de famille ne devoient-ils pàS
rédiger leurs difpoliti0ns. tell:amentaires! Quel appas pour
l'humeur touJours confiante & préfomptueufe des jeunes
gens! Un feul inll:ant d'inattention ,. dardiltra'él:ion, 'an'éantiifoit le 'pouvou &. "le courroux paternel,. & tous leurs égareroens étaient ilès-Iors:expiéq ou du-iiiJoins impunis. Voilà
l'abus qlle l'Emp'ereùr 'lu!i:inien voulu' .profcrire, 10rrqu'i1
fubHitua
�DU
PALAIS
n.
PROVENCE.
393
fubIl:itua à la plainte rigoureufe d'inofficioIité, l'aél:ion plus
douce en fupplément de légitime, pour l'enfant qui n'avoit
aucun aotre tort 11 reprocher 11 fon pere, que de s'être
trompé dans la fixation de fa porcion légitimaire. Dès-lors
la fiél:ion de droit celfa d'avoir lieu; dès-lors on celfa de
fuppofer Ii facilement, & fur des indices auffi légers, qu'un
pere de famille, qui pouvoit être un mauvais calculateur,
fans être pour cela un pere moins tendre, un juge moins
équitable & moins éclairé, s'étoit lai/fé fubjuguer par quelque paffion aveugle, flU point d'oublier fes devoirs-les plus
facrés & les plus doux fentimens de la Nature; mais en
anéantilfant la plainte d'inofficioIité dans la plupart des cas
où elle étoit précédemment admife, Jull:inien enleva-t-il
aux enfans tout moyen, tout prétexte d'attaquer le tell:ament paternel, une fois qu'ils avoient été inll:itués héritiers
pour une porcion quelconque de la fucceffion. Tel ell: pr-écifément le point elfentiel dont dépend en droit la décifion
du procès.
En thefe générale, & à ne raifonner que d'aprèS'1es fimples
lumieres de la raifon & les principes innés du droit naturel,
admettre qu'un fils inllitué en fa légitime ne peut dans'
aucun cas fe plaindre de l'injull:ice ou de la dureté de foll'
pere, c'eH être, ce femble, bien rigoureux. L'enfant
exhérédé éprouve fans doute une plus grande injufiice que
l'enfant réduit à la légitime, lorfque l'un & l'autre n'om été
ainfi traités que pour des caufes injuiles. Mais pourquoi l'excès feul de l'injullice légitimeroit-il la plainte de celui qui
l'éprouve, en nécefficeroit.il feul la réformation? Pourquoi
y auroit- il une autorité fur la terre à laquelle il fùt permis
d'être évidemment injulle, pourvu que dans fon injuIl:ice même
elle gardât quelque modération, & ne palfât point de cer..
taines bornes, pourvu qu'elle s'arrêtât jull:ement au point où
l'injufiice devient atrocité?
.
Voilà, dira-t-on peut-être, un des inconvéniens attachés
11 l'autorité paternelle, rétabli dans toute fon ancienne vigueur j il 'y a~ra des peres qui p.ourronr en ahufer jufqu'à un
.dnné,s l78l & l78:l..
Ddd
�394 .
Jou
11. NA L
certaIn point. Mais qu'on voie auffi tous ceux qu'entratne
l'admiffion trop facile des plaintes & des réclamations des
enfans. Si les tef!:amens font trop [auvent anéantis, le pouvoir des peres, [uivant la judicieufe obfervation d'un Auteur
coutumier, perd dès-lors [on nerf & fa force; il n'y a quela raifon d'intérêt qui contienne encore un grand nombre
d'enfans. Donnez;-Ieur l'efpoir d'emporter par le fecours des
Loix, d'arracher un jour à leurs peres ce qu'ils font aujou.rd'hui obligés de mériter par leur conduite, de folliciter par
leurs [oins & par leurs refpeéts; tous les liens de la fubordination & de l'obéiffance Ceront bientôt rompus, & du Jein
d'une infinité de famil1es le trouble, la difcorde & la licence
fe répandronr dans route la fociété.
Tel en: certaine.ment le précis de ce qu'nn pelIt dire de
plus fort en faveur de la puiffance paternelle, & tout cela
ef!: exaét & vrai fans doute; mais:qu'on prenne garde que, li,
fous le prétexte de la maintenir & de la conferver plus inviolable, on lui paffe ainu une foule d'injuf!:ices particulieres
moins importantes, dit-on, entre elles toutes, que le mal
& le défordre général qui réCulteroit de fan affoibliffement ,
on ne l'établiffe fur une bafe ruineuCe; que l'on ne croie pas
qu'elle puiffe rien gagner en force réelle, dès qu'elle perd en
confidération & en ef!:ime. Si une fois il ell: établi, qu'elle
peut même abuCer de Ca force & déployer fa rigueur par pur
caprice; en ayant l'air de devenir plus redoutable, elle fera
& méritera d'être moins redoutée. Ses juge mens n'enchatneront plus l'opinion publique; les enfans rébelles , qui auront
réellement mérité d'en. éprouver la févérité , pourront
mettre une efpece de grandeur d'ame à la braver. Ceux
dont la vertu faible &' chancelante avait befoin d'être aidée
de l'efpoir des récompenfes, n'auront plus cet attrait & ce
fomien " & les plus vertueux même, peu [ûrs de n'être pas
traités avec la même rigueur que les plus ingrats, par un juge
abfolumenr contraire & tyrannique, tomberont dans le découragement.
(
Si l'autorité publique pouvait avoir le droit odieux d'in..
.
-'
�.t> u
PAL AIS
D Il
PRO V Il ft C l!.
j
95
fliger des peines injufies, croir-on qu'elle y gagnât un furcroit de force & d'énergie, & que ces peines fuffent ellesmêmes plus redoutées-? Non: c'eil: l'opinion qu'on a de fa
jufiice qui fait fa force, parce qu'eUe enrraine les fentimens
des gens é!=lairés, & l'obéiffance de la mulrirude ; pour que
les peines foient redourées , comme un événement que pré~éde & que fuit la honte, & non comme un mal auquel il
fuffit d'échapper, il faur qu'on foit intimement perfuadé qu'on
ne peut les décerner que pour de jufies caufes. Il en efi
fur ce point de l'autorité 'paternelle comme de l'autorité publique ; ce n'efi pas en lui irnpofant l'obligation d'être jufie
qu'on la refferre & qu'on l'affoiblit. Réclamer pour elle le
privilege d'êrre injufie impunément, pourvu qu'elle ne le foit
que jufqu'à un certain point, c'efi vouloir lui faire accorder
un droit dont l'exercice rourneroit fûrement contre elle-même;
c'eH à force de les refferrer, rifquer également de rompre
les liens de la fubordination & de l'obéiffance, qu'on crai~
gnoit d'affoiblir en les relâchaer.
Mais fi après avoir examiné la quefiion en Spéculateur, en
Philofophe, on l'aprofondit en Jurifconfu!re, on examine
fcrupuleufement jufqu'où s'etendoit le privilege accordé aux
enfans par les Loix anciennement portées. fur l'inofficiofité, & combien les nouvelles confiiturions de Jufiinieri l'ont
refireier; les doutes & les difficultés renaiffent de toute parr.
On ne voit d'abord de bien caraél:érifé, de confiamment
établi dans les titres du code & du digefie , qui traitent de
l'inofficiofité , que le cas hypothétique où l'enfant a été privé,
même par fimple erreur, d'une portion de fa légitime ; l'l
Loi décide clairement que dans cerre hypothefe il faut venir
à fon fecours par une fiél:ion de droir. C'efi précifément
cerre fiél:ion fi défavorable à l'autorité paternelle, fi propre
à refferrer le droit de tefler, ou du moins à en gêner l'exer~
cice, que Juflinien a aboli dans fes Novelles; il n'a plus
voulu qu'une fimple erreur de calcul, qu'un léger défaut
d'exaél:itude, pût être regardé .comme une injuHice affez
Ddd 1.
�39 6
_.
J ~. U Il ~ A. ~
force pour.falre foup'i0nner 1unpartlahte du pe~e, pour com~
promettre l'état même du citoyen.
Mais de ce qu'on ne peut plus préfumer aujourd'hui, fur
une indice qui ell: en effet li légere & fi équivoque, que le
. Teil:ateur ait été un pere injuUe & dénaturé, s'enfuit-il que
quand on a -d'ailleurs des preuves confidérables de la paffion
ou de la prévention qui l'aveugloit , ces preuves ne puilfent
plus être admifes? De ce qu'il a fupprimé la fiél:ion, s'enfuit-il
nécelfairement que Juil:inien ait touché à la réalité, & peuton ainli conclure du moins au plus? ou l'exiil:ence de cette
fiél:ion elle-même, introduite par l'ancien droit, eU-elle une
preuve qu'il n'avoit plus lui-même admis l'aél:ion ah irat()
proprement dice ? Il eil: vrai que les titres de l'inofficiofité
ne traicoient point fpécifiquement de l'aél:ion ah irato, &
c'eft une raifon de plus pour foutenir que Juftinien.n'a point
touché à cette aél:ion dans fes Novelles; mais on y trouvoit,
comme ailleurs, & beaucoup plus qu'ailleurs, les principes
qui doivent la régir & qui lui ODt donné nailfance. Le premier & le plus elfentiel de cous, eil: que coute paffioh violente dégrade un pere, & lui ôte cette liberté d'efprit, cette
tranquillité d'ame fi nécelfaire pour bien remplir les fonél:ions
de Légiilaceur & de Juge: fi jiliam tuam, dit la Loi, ~o
quod turpiter & cum flagitiojà fœditat~ vivit , jùcceffion~ ruâ
~xcludendam putes, fi non inconJjiltà calore, fed ex meritis
~jus ad id odium incitatus es, poflremi judicii liherum arbitrium
habebis.
JI faut remarquer jufqu'où s'étend la prévoyance de la Loi,
& combien cette' impartialité extrême qu'elle exige du pere
ae famille, pour que l'exhérédation foit valable, relfemble
en quelque forte à l'impartialité de Dieu même. La Loi le
place en effet dans de,s circonftance~ où fon relfentiment eft
fondé fur les plus jufl:es: motifs ; dans ce cas même, elle ne
veut pas que fa colere l'échauffe & le tranfporte à l'excès;
la jufte indignation du Teftateur ne doit jamais monter au
point de fermer tout accès à l'indulgence, à la miféricorde
paternelle ; elle doit toujours être la faime indignation d'un
a
�If;
~97
pere, ou prefque d'un Dieu; car le pere ne doie, comme
Dieu même, hair que le crime, fans jamais hair le criminel. A combien plus force raifon un re1fentiment injulle,.
une haine fans fondement, doivent-ils rendre fufpeél:es &
nulles les difpofitions d'un Telfateur, lqrfqu'on les voie ~
travers ces difpofitions elles-mêmes, ou qu'ori eri a ·des preu..,
ves d'ailleurs? Un fimple défàue d'exaél:itude, dans la fixation de la légitime, formoit avant Jull:inien une preuve fuffifante de haine & de colere; cee Empereur trouva cetee
preuve trop équivoque & trop légere ; le fils qui n'ell pas
inll:itué pour fa légitime en entier, n'a pas le droit aujourd'hui de conclure de cette feule erreur de fon pere, qu'il a:
été la viél:ime d'une prévention aveugle, ou' d'un injufie ref-,
Centiment ; mais ell-il également certain qu'il foit privé de
la faculté de fe plaindre, s'il a d'autres preuves de colere
& de haine? Le rejet d'une preuve incompletee fuppofe-til fuffifamment celui d'une preuve qui iroit jufqu'à la ~démonf
tration ? & Y a-t-il parité de raifon dans deux hypothefes fi
différentes?
,"
La plainte d'inofficiofité écoit une aél:ion toute de conceffion & de privilege ; elle n'étoit fondée que fur le droit pofitif; les enfans en avoient l'obligation entiere aux Empereurs Romains, qui avoient bien voulu venir à,leur fecours
dans des circonllances où l'injull:ice des peres n'écoit pas
après tout trop évidente..
1
L'aél:ion ab irato au contraire efi tout à la fois d'équité ai
de jullice ; elle tire fon origine du droie naturel qui profcrit
les pouvoirs exceffifs & tyranniques, & qui veut que contre
chaque efpece d'injufiice qu'on peut éprouver, la Loi prépare quelque remede ; il faudroit, pour anéantir une pareille
aél:ion, une Loi bien précife & bien formelle, fuppoCé qu'il
y ait même un Légi{lateur au monde qui pui1fe en avoir le
pouvoir. La Loi de Jullinien, qu'on a citée, ne prononce
que fur le fort de la plainte d'inofficiofité èirconfcrite à ce
feul cas de la fiétion de droie, par laquelle on s'apperç.oie
Q4'un enfant qui ne ~ece~oit pas la .~o~alité de fa légitime l
D t1
PAL A LS . D E
PRO VEN C
�398.
'J 0 U RNA L
avolt été inJuilemënt hai & malcraité ; il eil airé de s'en
convaincre, & par les motifs & les termes mêmes de la
Loi, & par la nature de l'aélion rublidiaire qu'eUe a fubrogé dans ce cas ~ la plainte d~inofficiofité. C'el!: pour ren(lee, ~it-eUe, alp: pères la' jullice & l'autoricé qui leur font
dues, pour diminuer la foule' innombrable des moyens de
ca1fation qu'on 'éleve tous les jours c.oncre les TeHa mens ,
que la Loi recranche déformais de ce nombre l'exception
tirée du limple défaut d'exaélitude dans l'évaluacion de la légicime ; premiere preuve•
. 'Là Loi lup fabFoge tout de fuice l'aaion en fupplément de
légÎtime ; feconde preuve qui équivaut à 'la démon{tration ,
qu'il n'y a de réformé, par le droit nouveau, que cecce fiction adoptée par l'ancien droit, qui fuppofoit un pere de famille ému de colere ou de paffion toutes les fois qu'il ne laiffoit pas à fon fils la totalité exaéle & rigoureufe de fa légitimé: Mais l'aélion 4b irato n'étoit pas fondée fur une
fiélion '; eUe. ne fuppofoit pas auffi gratuitement le Tel!:ateur
prévenu de fentiment & de haine; eUe l'accufoit formeUement de s'être lai1fé emporter par quelque paffion violente;
eUe en offroit ou eUe en adminiHroit la preuve.
Prétendra-t-on'que dans un cas fi différent du premier, &
fi favorable, 'Jul!:inien ait voulu égale.ment fermer la bouche aux ènfans; toatés les' fois, qu'ils ont à citre d'inl!:icucion
une por~ion quelconque de leur légicime ; qu'il ait voulu les
réduire indiilinélemenr, & dans toutes les hypochefes, ou
à l'aélion en fl;pplément, quand il leur manque quelque chofe,
ou au mence .quand le Tel!:ateur ne s'el!: pas trompé dans
fa fi ation? Prétendra-t-on .même que l'ancien droit n'avoit
point accueilli l'aél:ion. ab irato, & que loin d'en prouver la
légalité & l'exill'ence, l'admiffion de ceite tournure recherchée à laqueUe on avoit donné le cicre de plaince d'inofficiofité, plouve au contraire qu'on l'avoit rejercée comme crop
peu refpeélueufe de la. p'art d'un enf,lDc , & trop injurieufe à
la mémoire des peres? Mais que deviennent tous ces paLfages du droit Romain, ê'lui tous, averci1fant I~s peres de fa;
�DU
PALAIS
Dl! JPRQVl!NCl!.
3~9
mille de ne ~oint fe laiffer entrainer a,u,x premie'rs mouve.mens·
d'une pallion aveugle & lviclente, ulone ,pas par conféqueilt
pO,ur eux le refpeél: de croire qu'ils foient auffi impaiIi,oles que
DIeu même? EH-il d'ailleurs vraifembl1ble, eH-il poffible de
fuppofer que les mêmes Loix }loi aV,oient, aamis,en faveur
des enfans J'indice de haine 0U de calere ·la :plus équivoque,
& la plus légere, le'ur 'avoie'dt refufé le droit d'en coartd
des preuves graves & convaincantes? On a beau dire' que
la fiél:ion imaginée par la Loi fauvoit J'honneur du pere de
famille, au lieu que l'aél:ion ah irato le 'noce & le diffame
en quelque forte. L'on ne voit pas d'abord comment il était
beaucoup plus honorable pour lui de paffer pour un fou, que
, pour un homme emporté par le, premier ,mouvemellt d'une l
pallion impétueufe; & il n'ell: pas moins évident &. démontré par les faits, que les Loix ayant établi elles-mêmes les
principes fur lefquels ell: fondée, & d'où dérive naturelle-,
ment l'aél:ion ah irato, & en ayant admis l'effet naturel, quoi-.
que fous un autre nom, dans l'hypothefe la plus équivoque"
ne devaient & ne pouvaient point la rejetter dans des circon!l:ances beaucoup plus favorables, & lorfque la preuve
offerte était beaucoup plus forte que celle qu'elles avaient
déclàré elles-mêmes fuffifante.
Les anciennes Loix avûient trop fait peLit-être en favet.lr
des enfans, lorfqu'elles avaient, pour ainfi dire, prononcé
d'avance la nullité de tout teftament dans lequel le TeHateur fe feroit trompé fur la fixation de la légitime. Mais dans
quel excès le réformateur ne feroit-il pas tombé, & combien
l1'~uroit-il pas fait encore en faveur des peres, fi à,.l'obligatian d'être juftes & même indulgens, que toutes les Loi,x
Romaines leur impofent, il avait fubflitué feulement, celle:
de laiffer la légitime à leurs erifans, c'eft-à-dire, de oe pas
porter l'injuftice jufqu'à l'atrocité? Croirait-on accroître &
fortifier ainli la puiffance paternelle? Il eft un point.au-delà
duquel elle deviendrait tyrannique, & jamàis. la tyrannie né
fe fit plus craindre ni- plus, refpeél:er que l'autorité légitime
lX modérée.'
�400
Jou R-N A L
L'aélion ah irato ayant pour bafe ce grand principe que fa
colere, ou toute autre paillon violente. maîtrife les facultés
de l'ame, & offufque les lumieres de l'efprit, il eil évident
qu'elle peut avoir lieu dans un grand nombre d'hypothefes
différentes, & fuivant que ces mêmes paillons fe font produites fous telle ou telle forme.
Il eil vrai que donner aux enfans de famille un droit plus
étendu que celui de la Loi, c'eil -étrangement reiferrer, ce
femble, cette liberré abfolue, ce droit rigoureux de teHer
que les Loix Romaines accordoient aux citoyens comme un
privilege en quelque force attaché au droit de Cité. Que deviendra ce doux commerce de bienfaits, ce pouvoir d'être
libéral & généreux encore, au moment même où l'on a
prefque -déja ceifé d'être propriétaire, cette heureufe fiélion
qui ne prolonge en quelque forte la propriété au-delà de fes
- véritables bornes, que pour nous conferver à notre derniere
heure la plus douce maniere d'en jouir, en la tranfmettant,
en la donnant à notre gré, li le, TeUateur qui a des enfans
n'el! plus qu'un bienfaiteùr forcé, & fi la Loi déiigne & fixe
d'avance ceux qui doivent recueillir tous fes dons? Auill,
loin de tombe! a.infi en contradiél:ion avec elle-même, la
Loi a voulu au contra.ire conferver au Teilateur mourarlt,
dans toute fon intégrité & dans toute fon étendue, la plus
fûre & la plus puiifante confolation qu'elle ait pu lui ménager, celle d'être encore libéral & bienfaifant à fon gré,
& fuivant la feule impuifion de fa volonté ou de fa reconnoiffance : qu'il difPofe comme il voudra, a-t-elle dit, & tout
ce qu'il ordonnua fera exécuté auJJi ponauellement , fera auJJi
facré que ce que j'ordonne moi-même: mais cette objeél:ion
ne reçoit-elle aucune,réponfe?
Trouveroit-on, par exemple, fi l'on y vouloit réfléchir avec
attention, que ce droit de teiler dont on eil fi jaloux, &
qu'on affeéle de repréfenter comme fi facré, foit fondé fur
l,a raif,?n ~ fur i la nature? Eil-il un aél:e de propriété plus
etendu & plus defpotique que· celui par lequel on difpofe pour
l'avenir_, pour jamais? & quel eil cependant l'infiant que la
Loi
�D U
1'.~ LAI S
D E
PRO VEN C :8.
400-1
LOf a choifi pour nous re.vêtir d'une puilfance' fi illimitée,
pour nous élever fi fort au-delfus de nous-même, & pour
ainÎl dire à (on niveau? Celui où
Loi inévitable. de la nature nous abailfe & nous humilie le plus; celui où elle nous:
fait defcendre Ju-ddlou~ de n()u~-même , 3u-delfous du dernier de tous I~s êtres qui exillellt el1Core ; celui où elle va
nous anéantir. Dira-t-on que c'eft une confolation qu'elle a
voulu ménager aux mourans ? Quel prétexte frivole '& ridi'cule ! Falloit-il lui (acrifler le droit déja acquis, déja prefque réalifé de celui qui doit lui filrvivre ? Aurant valoir-il,
par la même raifon & dans Je même objet, lui donner le
pouvoir fùnefte de l'tntraîner avec lui dans le tombeau; or
c'eH, dit-on, une des confolatioos des malheureux d'avoir des compagnons à leur fon; la réflexion ne. peut
nous faire découvrir par quel morif la Loi, en établilfant
le droit de tefter , a facrifié la fagelfe générale & publique,
& l'impartialité nécelfaire de [es difpo!irions, à la fJgelfe
privée, ou plutôt au caprice arbitraire & fouvent fufpeB: de
chaque particulier. Il eft certain qu'aucun citoyen ne peut
avoir fur fes biens qu'un droit de propriété palfager, & réduit à ce petit nombre de JOUtS qu'il exilte lui-même, &
que la propriété perpétuelle & incommutable ne peut appartenir qu'aux Loix & à la fociété qui feules font éternelles.
Le pouvoir de difpofer des biens de la famille, fait par forme
de rémunération ou par forme de châtiment, doit être ab':'
[olument indépendant & libre entre les mains des peres,
pour que kur puilfance paternelle & domeftique ne perde
rien de [on énergie & de [on relfort : & voilà ce qui leur
appartient comme magiHrats & comme juges.
Comme' {impies propriétaires au contraire, le droit de
tefter, même s'il dérivoit naturellement de cerre qualité,
devrait être plus relferré pour eux que pour tous les autres
cjtoyens, attendu le droit auffi [acré & auffi imprefcriptible
que la nature elle-même donne à leurs enfans [ur leurs biens;
ruais, fous quelque rapport qu'on les confidere, & quelque,
titre qu'on leur donne, coqunent eu ioduire) comment eu
la
4nntes t'l8: ft
t'l8~
" " . ..
:Eee
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Jo, U R N: ~ r . . .
.
conclure qU'Ils dOIvent aVOIr le droit d'etre vlLiblement & lm';
punément injull:es? A· la bonne heure qu'on ne préfume point
leur injufiice, toutes les fois qu'après qu'ils auront commencé
par remplir la premiere & la' plus étroite de toures les obligations, l'infiitution pour la légitime, rien n'en préfentera
d'ailleurs l'image; mais où trouvera-t-on que cet hommage
imparfait & forcé, rendu au droit du fang & de la nature,
doive en faire rejetter dans tous les cas la preuve frappante
& fenLible ?
Les Loix Romaines, ces mêmes Loix qui ont parlé avec
tant d'énergie de l'indépendance ahfolue des Tefbreurs, dans
la difpofition de leurs biens, ne donnent en effet aux enfans aucun droit de copropriété proprement dite fur la
fucceffion de leurs peres; c'eut été tomber dans le double
inconvénient de fe contredire elles-mêmes, & de refireindre
à la fois le droit de tell:er & la puiffance paternelle; mais
combien ne leur en donnent-elles pas fur leur. cœur & fur
leur telldreffe ! Avec quels foins attentifs rappellent-elles fans
ceffe aux peres de famille que dans la derniere difpofirion
de leurs biens, ils doivent écouter la voix de la narure , &:
fuivre l'impulfion de le.lr piété parernelle! Avec quelle rigoureufe uniformité ne s'accordent-elle pas à regarder comme
r-adicalement nul, comme infetté du vice le plus grave & le
plus décifif, tout teHament qui n'a pas éré fait fuivant le devoir de cette même piété, ex qfficio pietatis! C'eH pour leur
rappeller av.ec plus d'efficacité encore, l'obligation d:être juftes, indulgens même à l'égard de leurs enfans, qu'elles one
impofé à tout pere de famille le rribut de la légitime. L'objet effentiel de cette inftirution eH de leur rappeller la dette
facrée qu'ils ont contraélée envers lenrs enfans en leur donnant le jour, plutôt que de leur fournir un moyen trop facile,
&, s'il eH permis de s'exprimer ainfi, une voie trop fordide
pour l'acquitter. Quelle différence ne mettent-elles pas encore entre cette foule d'étrangers, de collatéraux même que
lé Tefiateur peut choifi à fûn gré, & fuivanr fon feul capr,ice, & ces béritiers tiomeRiques ) <es héritiers Liens que la
'4°2,
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PAL AIS
DE
403
PRO V Il NeE.
nature elle-même lui a donné: jùi 'luiJcm A.ercdes appel/amur,
tjJJla dOTTUJlici hœredes funt, & vivo fjuofjuc patre, fjJJodammodà Domini exiJlimantur?
'
,
. Ce domaine fiélif que la Loi attribue à l'enfant fur le bien
du pere, n'ea point une copropriéré réelle, puifqu'elle efl:
fubordonnée à fa volonté, & qu'eh difpofant même en faveur d'un érranger, il ne dépend pas de lui de l'anéantir;
mais enfin ce domaine elt toujours quelque chofe, puifqu'il
exilte aufli indépendamment de la volonré du pere, puifque
celui-ci
obligé de le reconnaître jufqu'à un cerrain paine,
& de compofer en quelque forre avec lui par l'infiicurion ·légitimaire; puifque, s'il vient à mourir ab intd/at, ce domaine
fiélif devient tout de fuite un droit effeélif & réel de propriété emiere & abfolue. L'on voit au conrraire avec quelle
liberté le Tellateur difj:>ofe, lorfqu'il n'a que des parens collatéraux; le moindre aéle de fa volonté anéantit tour d'un coup
toures leurs efpérances, & pour pouvoir racherer le droie de
difpofer du rene de fa fucceflion, il n'a pas befoin de leur
faire hommage d'une partie.
Si l'inltirurion légitima ire étoit en effee la feul~ obligation que les peres euifent contraélée envers leurs enfans
en leur donnant la naiifance, quel befoin allroie la Loi de
leur rappeller fans ceife, avec tant d'emphafe, les devoirs
de la piété parernelle? Celle inltirurion ne feroit plus alors
qu'une formaliré de plus, ajoutée à toures celles qui confii..
tuene l'eifence d'un eeltamene, & dont il fuffiroie de leur
recommander formellement l'obfervarion; mais en leur difant 'Ille leur tenament fera nul 3 défaut de cetee inltitution,
parce qu'il portera dès-lors lui-même l'empreinte de la haine
& de la colere, elles ne difent pas que quand ces deux violenres paflions ne les auront pas aveuglés au point de leur
faire négliger une précaution aufli eifenriel!e, leurs difpofitions foien,t dès-lors inattaquables; elle leur donne feulement
un avis général, en les prévenant que CO,ut homme qui fuit,
dans fes derniers momens, les confeils da'ngereux & rrom..
peurs de quelque paillon injuHe) s'expofe à perdre, ayec la
ea
Eee
2.
�• ]OU~NA.L.
confiance de la LOI, le pouvoir fornlldahle dont elle l'a re~
vêtu, & qu'elle ne lui a tranfmis que fous cette condition llX-.
pre/fe qu'il en ferait ufage fuivant fes lumieres & fuivant
[on cœur. Du moment que le fils efi infl:i-cué _pour [a légitime , le tefiament ne fe dénonce plus, pour ainli dire, luimême; il ne prouve plus lui [eul que le Tefiateur ait difpofé dans un accès de re/fenriment & de haine; mais fi les
monumens de cette haine injufie exifrent d'ailleurs, comment
le teHament auroit-i1 l'effet de les contredire ou même de
les affoiblir? Comme il ne prouve par lui-même ni haine'
ni amour, comme il ne porre que l'ac.complitrement d'une
obligation naturelle & légale, fans lequel il ne pourroit pas
même exifrer, il n'e!!: pas po/Iible de rien conclure de fon
exifrence. Soutiendra-t-on que l'in{~itution pour la légitime,
& à plus forte raifon pour une portion hér~ditaire qui furpa/fe la légitime, prouve elle feule que le TeHateur n'écoutoit ni ne fuivoit aucune pa/Iion , puifque s'il eût hai, pui[que s'il eût été en colere, il auroit pu aller plus loin encore, & exhéréder l'objet de fa colere & de fa haine? .
Cette objeaion porreroit évidemment fur une fau/fe fuppolition. On fe trompe, quand on parle du principe que tout
Tefrateur prévenu de haine on de colere , peut exhéréder;
toute exhérédation doit être motivée, & les Loix ont réfervé aux Tribunaux de Jufrice le droit de juger dans ce
cas les motifs du Tefrateur. Aïnli, fi les mouvemens qui
l'agitoient, étoient inju{~es ou même [ans proporrion dans
leur vivacité & dans leur chaleur, avec les caufes qui les auroient produit, le TeHareur, en les confiant à des Juges impartiaux & féveres , compromettroient {es dernieres difpofit ions. Ainli, loin de pouvoir toujours conclure de l'infritution. l~gitimaire, que le TeHat.eur n'a été ~révenu d'a~
cune IOJufre paffinn, il peut arrIver que ce [Olt par le feul
hefoin de la cacher à tous les yeux, qu'il n'ait pas ofé re-trancher cette infritution néce/faire. Ainli, quoiqu'il fût trop
dur fans doute d'inférer toujours une préfomption de colere
ou.de haine de. la. filIlple rédu.aion . à la légitime, & que
-4 0 '!-
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PALAIS
DB
PROVBNCE:
40S
cette réduél:ion puilfe avoir en effet bien d'autres motifs,
ce qui paroît du Ipoins certain, c'eil: que lorfque l'une ou
l'autre de ces deux pallions perce d'ailleurs avec une certaine
évidence, on peut conclure, avec égalité de raifon, de ce
qu'elle n'a cependant opéré que la réduél:ion à la légitime,
ou qu'elle a été en effet modérée par la piété paternelle,
ou que c'eil: la [eule conviél:ion de fan injuHice qui a retenu
le Tefiateur.
Il fuit de tout ce qu'on vient de dire ( continua Mr.l'Avo.
cat-Général) que la légitime eH une dette [acrée , contraél:ée par le pere envers [es enfans" du moment que ceux.
ci ont vu le jour; que l'oubli ou la dénégation de cette dette
an nulle les dernieres difpoGtions d'un pere de famille, &
que le paiement qu'il en fait, par une infiitution rigoureufement réduite à la légitime, ne l'acquitte pas même entiérement envers eux. Il fuit encore que la réduél:ion à la légitime
n'eH pas une preuve formelle & fufEfante de colere ou de
haine, mais a:ulli que cette infiitution n'exclue pas la haine
ni la colere, puifqu'elle dt d'ailleurs une formalité abfolument nécelfaire pour la [anél:ion & la validité du teil:ament,
& que celle de ces deux paJlions qui, dans l'impétuoGté de
fon premier mouvement, auroit oublié de la remplir, fe [erait nui à elle-même par fon propre excès.
Une Loi du code enfeigne que le pere & le fils ne forment, pour ainG dire, qu'une feule & même perfonne ; un
pere croit en quelque forte triompher de la mort même,
q!.l3nd il laifiè après lui, en mourant, cet objet de [es plus
douces efpérances, de fes plus ambitieux projets, né pour
le faire revivre lors même qu'il ne fera plus; naturâ pater
& filius una & eadem effi perfona intelliguntur. Une autre Loi fait de l'enfant llOe patrie de la fubfiance même
du pere; elle les confond abColumenr ,pars fJuodammodà cor·
poris ejus. Une autre Loi du digeil:e dit que du pere au fils
il n'y a, pour ainG dire, point de fucceffion, mais feulement
une continuation de propriété; de maniere qu'après la mort
dè leur pere, Jes enfans (ont moins cenCés recueillir fon hé~
�~6
JOU~WA~
mage, qu'acquérir une- admil!illration plus libre fur cè qui
leur appartenoit déja, & réunir en quelque forre l'ufufruit à
la propriété : huila videtur hrereditas effi fluafi olim hi Domini
fuiJJent. ••. ~ .• Pc!fl mortem patris non videntur hrereditatem
percipere, fed magis liheram honorum poJlèJlionem. Une autre
Loi caraél:érife en deux mors feulement, mais bien expreffifs, la fucceffion d'un pere; elle l'appelle une dette naturelle,
dehitum naturale. Une derniere Loi enfin diHingue à la fois,
de la ma'hiere -la plus forte & la plus précife, les droits des
enfans de ceux des peres, quant à leur fucceffion réciproque; c'ell la réfle",ion, dit-elle, c'ea le deur bien naturel
de confoler un pere de la perte la plus cruelle, la plus fenlible qu'il puitre faire, qui a fait établir en fa faveur le droit
de fuccéder à fon enfant; mais pour tes enfans, c'ea la nature elle-même qui avoit roue fait, qui avoit prévenu fur ce
point routes -les Loix polirives; c'eH le vœu commun de
tous les peres qui les appelle à leur fucceffion : non jic parentihus liherorum dehetur hœreditas ut liheris parentum , parentes ad hona liherorum ratio miferatianis admiuit, liheros
narurajimul & parentlim commune varum.
Les peres doivent à leurs enfans jullice, équité, indulgence même, & ce pouvoir qu'ils réclament à fi ju!l:e titre,
& qu'on e!l: intére1fé à leur conferver par tant de confidérarions fi puitrantes, feroit ébranlé jufques dans fes fondemens,
fi une fois on laitroit s'établir l'opinion, qu'ils peuvent en
ufer fuivant leur caprice, & que- leurs difpofitions les plus
évidemment injufles feront roujours refpeél:ées, pourvu qu'ils
aient feulement eu la précaution de rendre un hommage imparfait & involontaire aux droits du fang & de la nature; il
-De faut pas même qu'on puitre les regarder comme inflexibles & inexorables; fans cela l'enfant inforruné , qui les auroit une fois oJfenfé, ne pourroit plus être rappellé de fon
-égarement par aucun intérêt, par aucune eîpérance ; il ne
faut pas même que dans un juHe fujet de retrentiment &
.de haine, un, -pere fe laitre trop emporter à ces paffions dan~ereufes~ l'OD en a pour garant la Loi qui, fuppofaDt un perl}
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PAL A t Il
D Il
PRO V Il Nell.
401
<1e famille a/fez malheureux pour avoir une fille déréglée &
di/folue, femble lui rappel1er encore dans (:I.e fi tri fies circonfl:ances la modération d'ull Juge & l'indulgence d'un
pere, en lui recommandant de ne point fe lai/fer aller à la
chaleur d'un premier mouvement.
Il efi bon fans doute qu'un pere de famille ait le droit de
punir un fils ingrat & indigne de fes bienfaits; mais que ce
foit pourtant avec tant d'impartialité & même de tranquillité
d'ame, qu'au moment même où il efi déterminé à le punir,
il . foit également libre de pencher pour la clémence; or,
tout homme atluellement agité de quelque paffion violente ne
jouit point de cette liberté précieufe. Ce n'efi en effet que de
fa qualité de pere, qu'un tefiateur tire fon double pouvoir de
légiilateur & de juge; il n'y a que les jugemens qu'il porte
comme pere, qui foient fans appel. Dépouillé de ce titre fi
refpetlable , aucun particulier n'efi a/fez abfolu, a/fez puiffant pour pouvoir ainfi décider lui feul & fans retour de la
del1:inée & de la fortune d'un autre homme.
Un homme tranfporté d'une violente colere, un pere a/fez
malheureux, a/fez dur pour être parvenu au point de hair
fes propres enfans, n'eH plus, pour ainfi dire, un véritable
pere; maîtrifé par la paffion qlli le tranfporte, il n'eH plus
même cet homme d'un efprit fain & cranquille , dont on a
droit d'attendre une difpofition fage, un jugement jufie &
impartial. Quand dans lin cas pareil fes enfans appellent de fa
rléciG.on, ce n'elt que J'ouvrage de la paffion qu'ils attaquent;
ils ne méconnoi/fent [on .autorité , que parce qu'il s'en ef~
laiŒé dépouiller lui-même; & par une heureufe fitlion, fondée fur la raifon & fur J'équité, & qui n'efi pas fans exemplé
en matiere religieufe, mettant alors à la place de leur pere
le Tribunal fuprême qui doit les juger, ils font cenfés appeller de leur pere entraîné par une prévention injufie &
aveugle, à leur pere affranchi de tyrannie & rendu à [on
indulgence ou du-moins à [on impartialité naturelle.
L'on fent touS les inconvéniens qu'il peut y avoir à foumettre à cette efpece de révifion tous les.. arrê·ts
du trihlUlal
~.
�~8
JOURNAL
domellique ; mais l'on peut croire qu'il y en aurait encore ~a-'
vantage à laiffer moncer & fiéger impunémenc fur ce tribunal,
qui deviendroit alors fi formidable, coutes les paflions différences auxquelles le cœur de l'homme peut être en proie, &
donc le pere de famille ne fait quelquefois pas mieux Ce défendre qu'un autre homme; & fi à raifon de la foihleffe de
notre nature, & des fréquentes filrprifes auxquelles le plus
[.lge ell: expofé, la majell:é paternelle doit en efl-èt foufl-rir
. quelque diminution, la honceufe tyrannie des paflions n'ell:elle pas plus propre à la dégrad~r & à l'avilir, que l'augufl:e
furveillance des Loix & des Tribunaux de Jufl:ice? D'ailleurs,
cene confidération n'a pas arrêté, lorfqu'il a été quell:ion
d'exhérédation. Quelque confiance qu'on ait & qu'on doive
naturellement avoir dans la tendreffe & dans .Ia jull:ice d'un
pere, on ne l'a pas moins fournis à l'obligation de donner fes
motifs, lorfqu'en exerçanc l'aél:e le plus rigoureux & le plus
étendu , "il exhérede un fils ingrat & ré belle : pourquoi la
même obligation emporterait-elle plus d'humiliation & plus
de gêne dans l'hypothefe de la réduél:ion à la légitime, qui ell:
une exhérédation parci'elle? L'on tair que la fimple réduél:ion
annonce ordinairemenr plus de modération, & infpire par
conféquenr moins de défiance; mais elle ne peur êrre aufli
qu'un rafinemenc de cruauté & d'injufl:ice, par lequel on a
cherché feulemenc à r~ndre irréparable le mal qu'on a fait.
Quelle reffource rell:e-r-il en effet à l'enfant réduit à fa
légitime, fans qualification & fans' morif? Quand le tell:ament n'efl: point écrit d'ailleurs d'un ll:yle pallionné, quand
le tell:ateur n'a laiffé après lui aucun aurre mouvement, aucûn aurre veltige de colere ou de haine, on aime mieux
préfumer qu'il s'ell: décidé par un motif de prédileél:ion pour
celui qu'il a favorifé, que de croire qu'il ait agi par antipathie
contre celui qu'il a trairé d'une maniere plus dure. Suppofé
même que fan mécontencement foit certain, comme dans
le cas où l'.on voir un collatéral, un érranger préféré à tous
les enfans de la maifon, la vénération due au titre de pere
fait que, n'en pouvant appercevoir l'iojufiice, on le croit
- .
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.. , .
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PRO V Il Nell;
409
jufie & fondé; & le liIence majefiueux dans lequel il s'eaenveloppé, plus puilfant que les déclamations les plus éloquentes & les plus vives, enchaîne la confia nce des Loix
& des Tribunaux, repoulfe les murmures & la réclamation
des enfans.
Mais pourquoi, quand le pere a parlé fans néceffité, fans
utilité quelconque, puifque la Loi lui avait· promis dans le
cas où il fe [eroit tû , de s'en rapporter à fa foi & ~ fa confiance; pourquoi feroit-il défendu de pefer les expreffions
dont il fe fere, de Juger les motits qui l'ont dirigé? PourqU'Ji, fi leur injuHice eH évidente, fermer voloLHairement
les yeux à la lumiere, refpeél:er l'ouvrage de la paffion & de
la tyrannie, & confacrer lems injuHes décrets?
.
De ce qu'il eH: certain que les hommes· ne font pas forcés
de donner les motifs de toutes les obligations qu'ils contraél:ent, & qu'en les donnant, ils ne font fouvent que furcharger les' aél:es qui les lient, d'une fûperfluité Hér.ile, il ne
fuit pas que, fi ces motifs fe trouvent enfuire être criminels,
ils ne celfent jamais d'être de pure fuperfluité, & ne vicient
point les engagemens dont ils ont été la caure déterminante;
ainfi encore, fi un pere de famille n'avait pas fait connaître
l'injuftice des caufes qui l'ont porré à réduire l'un de fes enfans à la légitime, la faveur ou plutôt la confiance due à fa
qualité de pere, & cetre multitude de motifs juftes & raifonnables qu'il pouvait avoir d'ailleurs, auroient pu empêcher qu'on en préfumât, qu'on en fuppofât l'injufrice fur un
indice auffi équivoque & auffi léger en effet que cette /impIe
réduél:ion. C'eH de l'inutilité même des vefiiges d'indignation & de haine qu'un pere laiife après lui en pareil cas,
qu'on tire la premiere préfomption de fon injuftice; fi lorfqu'il s'agit d'exqéréder fon enfant, il déclame auHi. cOl]tre
lui, du-moins la néceffité de motiver [a fenten.ce d'exhérédation lui ferr-elle d'excufe. Mais qu'après avoir fatisfait. fon
telfentiment, en réduifant fon enfant à la légitime, un pere
éprouve encore le befoin cruel de le répandre au-dehors,
de le faire furvivre à lui-même, de le tranfmettre à la pof-.
Armées z78z & 178z.
Fff
�4tO
JOURNAl.
térité, c'ell: une preuve qu'il en a été étrangement polfédé;
& la Loi ne réprouve pas moins du pere au fils les haines
N'iolentes que les haines injultes; il ferait donc bien cruel,
lorfqu'on croit déja entrevoir que l'enfant réduit à la légitime a été jugé avec trop de précipitation & de chaleur, de
lui refufer la faculté de prouver qu'il l'a été auffi avec injuftice & même avec dureté. Mais combien un pareil refus ne
feroit-il pas plus cruel encore, lorfque cene injull:ice & cerre
dureté font déja pre[que prouvées par les témoignages frappans que le teltateur en a fourni lui-même! Nulle Loi d'où
l'on puilfe inférer que la preuve de la haine doit être rejenée,
lorfque le reltateur en a lai/fé après lui des traces parlantes;
la Jurifprudence des Arrêts des Pays régis par le droit écrit
a accueilli l'aél:ion ah irato. Tels font ceux rapportés dans le
Journal des Audiences, dans Boniface & les Arrêts rendus
dans les caufes du fieur Broya & du fieur de Citra'ny cle
Marfeille.
Si la paffion anéantit en effet la volonté libre & véritable
du teltateur, la fuggell:ion fait plus encore, & lui fubftitue
une volonté étrangere, intére/fée; elle couvre une fraude
manifell:e, un larcin caraél:érifé. l'armi les moyens que le
captateur peut employer, il en eit de moins criminels, de
moins déshonnêtes les uns que les autres; il en ell: qui
attentent moins direél:ement à la liberté du teftateur; il en
ell: qui refpeél:ent du-moins fon cœur & fa raifon. Que penfer
de ceux dont le principe eH la calomnie, la diffamation; &
le réfultat, la prévention & la haine! Que penfer de ceux
qui pour ravir plus fûrement' à des enfans les biens de leurs
peres, commencent par leur fermer fon cœur & leur enlever
fa tendr~/fe! Le premier vol rendroit-ille fecond excufable,
& n'a-t-on pas au contraire en pareil cas un double crime à
punir? Ainfi l'aél:ion ah irato reçoit des circonHances une
nouvelle faveur, une nouvelle énergie, lorfqu'on peur faire
voir, lorfqu'on allegue que cerre haine ou cette colere dont
on fe plaint-, ont été infpiréès au tell:ateur par une bouche
étrangere,& ennemie ;' & la plainte de (uggell:ion tire à fon
�DU
PAL AIS
DE
PRO VEN C E.
41,1
tour une nouvelle force des, moyens criminels que l'on VOIt
que le captateur a employé. S'il faut en croire Me. Bouis, il
fe trouve précifément dans cerre hypothefe fi favorable & fi
privilégiée, pour ainli dire, dl il eft également évident que
li, paffion feule a di8:é les difpofirions du teftateur, & que
cetre p.1ffion injulle lui a été fuggérée par ceux qui vouloient
recueillir le fruit de ces mêmes difpolitions.
Mr. l'Avocat-Général examina ènfuite fi les faits de haine
& de colere coanés par Me. Bouis éroient affez graves, s'ils
étoient affez certains, & s'ils annon"oiellt fur-tout une prévention injufte & non méritée. Il faur, di(oir-il,que cerre prévention fait a{fez forre pour avoir fermé au réclamataire toures
les avenues du cœur pJternel ; il faut qu'elle paroiffe avoir feule
déterminé les difpofirions qu'il acraque.
. ~
Rien ne doit être plus frappant & plus fort que les traits
d'averfion & d'antipathie que le fieuT Bouis pere a lai{fé
éclater; fon livre de raifon , qui devrait n'être que le dépofitaire infeoGble & froid des détails de fon ménage & de fa
conduite économique, eft devenu entre fes mains un tilIu
d'horreurs & de calomnies. Depuis l'époque 'fJtale de la donation, le fils ainé de la maifon n'y eft plus nommé fans
injure; par-rout les épithetes les plus dures y font prodiguées
fans ménag,emens. On trouve d'abç>rd dans ce livre un premier trait dans la déclaration portant révocation du teftament
fait en faveur de Me. Bouis: attendu (jue j'ai des enfans de
mon troifieme mariage, & por d'autres raifons a moi connues.
C'eft de ces exprdlions obfcures, mais vives, qui' ne décelent point les fentimens fecrets & les motifs de celui qui
le's emploir, mais qui rerpirent pourtant une certaine chaleur, ql.i annoncent, ce femble , un certain dépit concencré ,
que Me. Bouis a cru "tirer les plus grands avantages & les
plus fortes indu8:ions.
Et quoi de plus indigne de la majefté paternelle, que ce
rnêlange de liardie1re & de timidité, d'empattement & de
retenue!' Un pere véritablement dig.ne de ce titre, un pere
qui veut conferver à fa jurifdiétion paternelle & aux aétes qui
Fff
10
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'4- le :%.
0 t1 Il N A. L
en émanent, toute la confiance des Loix & des TribunauX
d~ JuCl:ice, doit roujours demeurer le maltre de renfermer
à fan gré fon reff~1J[im~nt au fonds de (on cœur; & lor(qu'il
a commencé à le faire éclater, il (e doit à lui-même d'en
donnel' des motifs dignes de lui. Auffi trouve-t-on des Arrêts qui ont formellement condamné rom es ces expreffions
équivoques & énigmatiques, qui n'annoncene qu'une haine
timide & baffe, dès-lors (u(pette d'injuHice & de pareialité; ces Arrêts ont jugé formellement qu'entre le parti d'un
majeftueux Iilence & celui d'une dénonciation claire & motivée, il n'y avoie poine de milieu à choifir pour un pere.
L'Arrêe que Mr. de Catelan rapporte admie ~ prouver, que
les raifons a lui connues, & qu'il Ile pouvait mallifefler, in(érées dans le teHament d'un pere, éroient des [oupçons
injurieux adoptés & répandus tant par le refl:ateur que par
l'héritier, [ur l'honneur de (a femme & (ur la légitimité des
enfans.
Exiger des peres, qu'en puniffant leurs enfans, ils énumerent
en même-temps lellrs fautes & les dénoncent en quelque
forte au public, à la poftériré, c'eHcompromettre, ce femble,
l'honneur des familles, la tranquillité & la li'treté même
des enfans. Auffi eH-on bien éloigné de leur impo(er une
o.bligation fi cruelle, une obligation donc la conféquence la
moins funeHe feroie de produire l'impunité, en portant rout
d'un coup à l'exèès par l'écbt & le déshOllneur, la févérité
des fentimens domeHiques; une obligation qui réduiroit la
plupart des peres à la dure néceffité d'être injuHes & barbares•.
Qu'un pere puniffe & frappe en filence, il fu/Iit; la Loi
préfume en fa faveur la juHice & la douceur même du châtiment qu'il inflige. Mais que peue cette préfomprion fi favorable & fi forte qu'on la [uppofe, cancre la preuve concraire ?
Elle n'eCl: elle-même qu'un hommage rendu à la .digniré de
fan titre, à la majeHé de fan caraél:ere;' elle ne peue avoir
l'effee de chang~rJ la. na·ture I$c le Jens de~ cboks' Ce n'efl:
pas pour le difpenfer d'êtrer équieable & iQdulgem même,
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qu'on filppofe qu'il l'eH toujours; qu'il craigne donc de donner fes motifs s'ils font injufies, parce que la confiance de
la Loi, qui va jufqu'à croire bon & jufl:e ce qu'elle ne voit
point, ce qu'elle ignore, ne va pas pourtant· julqu'à dédarer
tel ce qui ne l'eH: pas, ce qu'elle voit clairement être contraire aux bon nés mœurs & à la jull:ice; mais qu'il évite furtout d'employer ces termes ambigus & obfcurs, qui ne lignifient rien de bien précis, qui font tout foupçonner, & qui
femblent annoncer tout à la fois le befoin de parler & ceJui
de fe taire; qui décelent également l'exceffive chaleur & le
peu de jufiice des mouve mens qu'ils expriment.
Mais quel fens donner à ces mots, & pour autres raifons à
moi connues? Pour peu que ces difpolitions s'éloignent de
l'ufage ordinaire ,.qu'elles aient trompé l'efpérance de celuiqui a à s'en plaindre, qu'elles paroitrent en contradiétion
1 avec
des difpolitions précédentes; quel avantage, quelle
induétioo ne tirera-t-il pas de la c1aufe infolite & énigtnartque qui les accompagne! Ne trouvera-t-il pas dans l'injulhce de ces difpofitions l'explication du fens injurieux que
la daufe renferme, & dans cette injure enveloppée, ·Ia caufe
& le principe des difpofitions? Telle fut la tournure qu'employerent avec fuccès ces enfans réduits à ne partager entre
eux touS que le tiers des biens paternels. Si cette difpofition,
toure extraorqinaire qu'elle paroitroit, eût été pure & fimple,
elle auroit été dès-lors inattaquable; mais le pere déclarait
dans fon teHament avoir des raifons de difpofer ~infi, fans
les dire. Les enf<ins demanderent à prouver que ces rairons
étoient injurieufes & injuHes; elles pouvoient en effet- être
relies, & ils y furent admis p'~r l'Arrêt que MI'. de Catelan
rapporte. Dans la caufe aétuelle, les termes de la dédaratlOn
du fieur Bouis font les mêmes. C'eH précifément ce filence
imparfait, ç'eH cette déclaration partielle qui annoncent
des rairons qu'on cache & qu'on ne dit pas, qui répandent
les dou,es & les nuages, qui ouvrent le champ aux plus vafies
conjeél:ures, & qui, fans exclure les intt:rprétations favorables,
fOht cependant fufceptibles des plus finifires. Dès-lors un
�414
Jou
R., N A
'i.'
pere de famille ne peur s'en prendr~ qu'à fa feule impru";
. dence, fi les réclamations de fes enfans font trop facilement
admifes; c'ef!: fa témérité qui les fait triompher, & non la
foiblelfe des Loix & la faveur des Tribunaux de Juf!:ice.
Il n'y a donc que deux feules obfervations à faire fur l'Arrêt que rapporte Mr. de Calelan; la premiere , que la c1aufe
profcrite par le P,ulemem de Touloufe fe trouvoit dans Ull
ref!:amenc, au lieu qu'elle n'ef!: aujourd'hui inférée que dans
une, déclaration privée de vouloir mourir ab inteJlat; la feconde, c'eft que Me. Rouis érend encore les difpofir.ions de
cet Arrêt qui admit à la preuve les demandeurs en cafIàrion ;
mais qui ne calfa' poim Jur ce feul fondement. Il feroir bien
dur en effet de comparer une phrafe obfcure & folitaire,
échappée à un pere de famille dans fon livre de raifon , avec
une c1aufe ajoutée à un ref!:ament revêtu de toures les formes
& de colites les folemnités ordinaires; & il eft clair que dans
celui-là le teHateur pouvoit & devait mé'me s'exprimer avec
moins d'anention & de réferve que dans celui-ci? Ce n~'eft pas
queJa déclara ri on dont il s'agit ne fûr par elle-même une piece
importante deHinée à remplacer un tef!:ament ancien, un
teftament de vingt années; elle devoit aux yeux du fieur
Bouis participer à l'importance de l'aéte qu'elle réduifoit au
néant. Mais cetre déclaration fait panie d'un livre, dans la
réda&ion duquel les hommes mêmes les plus habiles fe permettent journellement routes les négligences du flyte , routes
les impropriétés d'expreffions poffibles. D'ailleurs, ne devant
être que la loi provifoire & momentanée de la fdmille, ou
plutôt ne formant pas loi par elle-même, & portant'feulement
l'abrogarion d'une loi précédente, & le recour primitif au
vœu de la Nature, elle ne doit pas peut-être êrre difcutée
avec la même rigueur qu'un reflamenc qui contiendroir des
,djfpofirjo~s colltraires à ce même vœu. Que fera-ce, fi l'OIl
confidere de plus que cerre déclararian a éf~ apéanrie au bout
d'une année par un refl:ament en forme, qui aéré fLlivi d'une
foule d'aurres ?
Mr. l'.AYocat~Général difcuta enfuire les divers teflamens
�D U
PALAIS
DB
PROV ENCI!.
4I~
qui avoient fuivi cette déclaration, & il conclut à dire que
dans les circonllances ordinaires, & k>rfque les enfans nés
d'un même hymen ont tous les mêmes motifs de compter
fur l'impartialité de leur juge commun, lorfqu'ils ont tous
auprès de lui une même prote8:rice, lorfqu'ils n'ont point
fur-com dans la maifon, de concurrens jaloux fous le nom de
freres, favorifés par une rivale intére/fée à les abaiffer & à
leur nuire par l'amour même qu'elle doit à fon propre fang j
alors les difpofitions en faveur de l'un d'eux ne forment pas
un moyen d'injuHice. Mais quand un fecond mariage a divifé
la famille en deux partis, & donné, pour ainfi dire, aux
enfans du premier lit une ennemie domeHique, les LoÏJe
furveillent avec une attention plus févere les difpofitions d'un
homme fouvent obligé d'opter entre le repos & la juHice ,
l'amour conjugal & la tendreffe paternelle; elles deviennent
elles-mêmes les meres de ceux qui n'en ont plus, & s'occupent fans cefiè, avec une vigilance digne de ce titre, du
loin de défendre leurs intérêts contre des intrigues & des
manœuvres auxquelles l'amour maternel de la nouvelle époufe
prête fouvent lui-même une plus grande aélivité. Alors tout ce
qu'on pellt lui imputer avec. vraifemblance devient fufpe8: ,
parce qu'elle ef!: elle-même toujours fufpeéle. Alors les
fimples variations du pere de famille peuvent fervir de bafe
à de juncs foupçons, parce qu'on peut les attribuer à l'action continuelle de deux fentimens oppofés, l'amour conjugal & l'amour paternel; alors la moindre expreffion qui
femhle refIèntir la haine ou la colere, réveille en mêmetemps l'idée de la fuggeHion , & fournit par conféquent les
plus fortes armes qu'on pui/fe employer contre les tellamens. Ce ne font-là cependant que des conje8:ures j mais
loin de les rejet ter dans des caufes femblables à celle-ci, la
Loi non contente de les admettre, leur donne pour bafe
fes propres foupçons. C'ell la Loi elle-m~me qui avertit les
Juges & les peres de famille de fe défier des artifices féducteurs & des careffes perfides des belles-meres j c'el!: la Loi
elle-même qui nous enfeigne à reconnaître leur ouvrage dans
�4 T6
1 0 U RNA r:
les exhérédations injufies, dans des variations perpétuelles
fans caufe apparente & (ws motif connu, qui éloignent toujours davantage le pere de famille de l'enfant d'une amre
époufe, & qui s'écartent elles-mêmes ,toujours plus de f~s
premieres difpofhions.
On trouve enfuite des témoignages précis des regrets &
de la douleur du fieur Bouis; le premier, c'ell la réponfe
aigre au comparant que Me. Bouis tint à fon -pere, pour le
porter à autorifer & à cautionner un emprunt de TOOO livres,
-dellinés à lui atheter un équipage; Je fecond, ell la note
écrite par le fleur. Bouis dans fon livre de- raifon au fujet de
ce voyage. Il y ell dit 9ue fan fils efl parti contre fa volonté,
qu'il lui a donné bien de déjagrement, qu'il lui a toujours défabéi en tout, ne fuivant que fan caprice & [es l'O!olltés. J'ai
patienté tant que j'ai pu, mais je fuis très-mécontent de fa
conduite: pour la paix de la maifan- j'ai patienté tam que j'ai
pu; le troifieme , dl: le teHament fait en T775 , o~ le
fieur Bouis exhorte fan fils à honorer fa belle-mere, à ne
point la méprifer roal-à-propos, comme par le pa/fé : il le
menace de la peine d'exhérédation s'il y retombe; le quatrie me , c'eH une autre note inférée dans le livre de raifon ,
après la donation que le fleur Houis eut fait à fan fils. Jel'ai,
dit-il, émancipé afin 9u'il nous lailllit tranquille dans ma
niaifan , & afin de me garantir de la mort. Ce garçon, qui
de la premiere clajJe, fans religion, fans amour,
n'a jamais ceffi de me défabéir, &c.
efl unjléau
Mr. l'Avocat-Général releva d'autres faits rlrés tant du
livre de raifon, que des différentes lettres de Me. Bouis.
Des foupçons, dit-il, des doutes, des obféurités, des
incertitudes, fans doute il en exi!l:e dans ce procès, & il
en exifie même en grand nombre. Si l'on ne voit pas bien
clairement que les teHamens du fieur Bouis oot pn être
~aptés, du-moins on peut le craingre; & fur cet objet fi
Important & fi décifif, il eH impoffible qu'il ne reHe pas au
fond du cœur du Juge les plus <Trands regrets, les plus forts
[crupules. S'il n'eH pas fûr que" [es dernieres difpofitions lui
.
.
aien~
,
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PALAU
·DB
PROVENCE.
417
aient été diél:ées par la haine & par une haine fuggérée ,
on n'ell: pas [ûr non plus du contraÏre , & route la conduite
du fieur Bouis pendant les dernieres années de fa vie paroÎll
n'être qu'un tiŒu d'incon[équences & de contradiél:ions, qui
peuvent donner lieu [ur ce point aux plus uniHres conjec...
tures. Qui ne [eroit pas frappé de l'époque tardive à .la~
quelle le tell:ateur p~roÎt s'être enfin rappelJé, comme avec
une efpcce d'effort, toutes ces phintes, toutes ces dénonciations, qui [ont cependant fi violentes par elles-m~mes ,
& écrites d'un ton fi amer; du long intervalle qui s',eH
écoulé entre les faits graves qu'elles C'Ja rre nt , & le reŒouvenir de ces mêmes faits; de l'inv, ifemhlance qu'il y a que'
dans le temps même oÙ ils [e [ont paŒés, ils n'aient produit
aucune révolution, aucun trouble dans la famille, ils n'aient
paru faire, pour aillfi dire, aucune imprellion fur ce même
homme, qui les a cependant confervés avec tant de [oin,
gravés dans Cl mémoire, & qui les raconte fix àns après
avec tant de chaleur; de l'exill:ence intermédiaire de ces
aél:es de bienfaifance & de tendreŒe ,ou du-moins de réconciliation & de paix, qui coupent la communication entre les
délits & la plainte, & qui font néceŒairement préfilmer que
quand même le fieur Bouis auroit eu d'abord de jufies fujets
de reŒentiment, [a colere appaifée par une meilleure conduite, & enfevelie depuis long-temps fous la cendre, a eu
be[oin d'être réveillée & ranimée par un foume ennemi ; de
cette dillimulation [ombre & profonde dont il faudroit que
le lieur Bouis eût été capable, pour que dans le même jour
où il donnoit 40000 liv. à [on fils, où il lui témoignoit en
public affeél:ion & tendreŒe, où il l'aŒuroit même qu'il le
rendroit heureux & [atisfait après fa mort, il écrivit avec
plus de fincérité dans le filence de [on cabinet" & pendant
plus de deux heures, tout ce qu'un pere peut écrire (Je plus
injurieux & de plus terrible contre [00 fils?
.L
Mr. l'Avocat-Général [e détermina à penfer, que ce n'étpit
pas le cas encore d'ordonner l'inrerlocurion qui devoit p'réparer la caŒation des tell:amens qU'I;lO attaquoit; mais qu'on
Années z78z & z78:z..
Ggg
•
�,pB',
Jou lt N A ,L
• •
•
devait re[erver au demandeur le droit de [olllclter un 10ur'
cette preuve interlocutoire. Comment pourrrait-on rejettel'"
ce vœu de circon[petlion & de prude'nce qui conferve les
droirs de touteS les Parties, & rend, hommage aux [aines
maximes du droit, en reconnoi1Tant la légalité de l'atlion
àh irato, qui ne préjuge rien ni contre les principes, ni contre
l'honneur des Parties, comme [embleroit Je faire un Arrêt
qui, enlevant dès le moment tout e[poir au demandeur, [embleroit décider ou que [on atlion éroit irréguliere , ou
que [a per[onne même étoit extrêmement fu(oetle, pui[qu'on
auroit cru devoir le priver d'un remede que la Loi lui offroit ,
quoique le demandeur 'ettt point offert & demandé lui-même la preuve teftimoniale ? Il eft clair que cette demande
étoit implicitemeut & fubfidiairement comprife dans celle en
ca1Tation; que fa négligence apparente fur ce point n'eft
venue que de fa confiance .exceffive en la force des preuves
qu'il offroit lui-même, ou bien de ce qu'il a [enti qu'on lui
oppoferoit fans doute l'obnacle paffager qui nous arrête
nous-mêmes. Ainfi, obferva Mr. l'Avocat-Général, le parti
le plus fût & le plus légal eft celui de confirmer l'Ordonnance
de pieces mifes, parce que le Lieutenant de B'rignoles n'a
fait que Cuivre les con(eils de là prudence, en réglant un procès
déja fi vafte & fi embrouillé, & fi furcl1argé de pieces &
de produtlions.
Il conclut à ce que [ans s'arrêrer à l'appel de Me. Bouis
envers l'OrdÇlnnance de pieces mires, non plus qu'à celui in
quantùm contra de la. Dame Brun, l'Ordonnance forrÎt [on
plein & entier effet, & les P'arties fùlfent renvoyées' au'
Lieutenant de Brignoles.
\
Arrêt du 29 Avril 1781. , qui cafTe l'Ordonnance de pieces
mi[es, & reçoit l'évocation d'u fonds & principal, fur lequel
il y eut partage. •
Plaidant Mes. Portalis, Roman Tributiis & Jaubert.
Arrêt du 13 Juin 1782 à l'extraordinaire, au rapport de
Mc. le Confeiller de la Boulie, qui déboute le fieur Bouis de
fa demande en ca1fation deS'cinq refl:amens, avec dépens.
L
.1
•
�DU
PALAIS
DE
J?ROVI!NCI!.
41"9'.
Me. Houis fe pourvut en caffation au Confeil ; fa Req!fête'
fut cejettée.
ARRÊT
XXXIX.
En matiere de loyers de moifons, on. ne fuit pas regle àélor
fequitur forum cei.
~aire Giraud, .veuve d'Efprit Vautrier, du lieu de Marlgnane, devolt à Roux, marchand de bled de Ja Ville
de Marfeille, la fomme de I~4 liv. pour- huit paies de· loyers
de maifon ; elle lui pa1fa à Marfeille uo concra~ d'<obligati91l
le 24 Avril 177 S ; après cet aéle , la Dlle. Giraud Ce retire ~
Marignane. Le 24 Janvier 1778 Roux l'affigne pa~devanE
le Lieutenant de Marfeille, en condamnation de 111 fomme ;
elle décline la Juri{diélion; elle en efi dé,bolltée PilC Sentence du 9 Avril 1778,. App~1 pa.rq~vant la COllr.. :}dj) 1
Elle foùtenoit que Rl'\uX n',!voit qu'une aélion p\lrfonnelle
contre elle, qu'il n~avoit.puJa difiraire du Juge de fon domicile ; elle n'avait ni. état ni fortune à Marfeille; nul.droit t
nul 'indice de demeurance per·péruelle, nulle. intention à cet
égard; elle avoit pu. demeurer. dans un lieu p~l1~anr, fon m'l
riage; mais après I,! djifoluti~!l', ce n'étoit pl!lS .qu'une ré-·
fidence momentanée..Le domicile du contra·t n'a pas .li~4·
parmi nous en matiere perfonnelle. C'efi dans !=e fe,ns qu~~q,
.dit qu~ les lufiices fon~ patrimoniales au Seiglleur;, c'eU luj,
enlever fan vaifal & fQn ~ien que de le' traîner dans .\ln. r.i-:bupal éçranger. j\infi j\lgé par Arrêt !endu ~elJ ~ y,6q c9nt~e
MOli-fii~r.s .de Cotjg[lac.j§i l'on. exc!pt.e le~ ~j1ti~res~.nrer._
cantilles ,'Ie contrat n'efi point attriburif de Jurifdiélion. Il
n'y a que les Notaires au. Chât~le: de Fari~. 9ui. jouiifenc d"
ce opcivileg~. La DUe. GIraud ~tolt domlclhee depqis .dt;ux..
ans à ,MarignaQ~,.Iie!1_ deJa .pa)jfanc<:, & J elle .y. avoit. tp'ut~
tà fortune; elle de oit ·dOllC y être afiig,llée~' .
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-Cgg,2i.··-
�.p.o
Jou R. N A L
En matiere de Jurifdiél:ion, les regles font connues & cer":'
taines ; fi l'aél:ion qu'on a à intenter eft réelle, c'eH la fitua.
tion de l'immeuble fur lequel on a des droits, qui fixe le Tri.
bunal compétent pour en connoitre -; fi l'aél:ion eH perfonoelle , on doit l'introduire par~evant le Juge du défendeur;
fi elle efr mixte, & qu'elle tienne de l'une & de l'autre, le
demandeur a le choix d'aller au Juge du lieu où la chore eH
fituée , ou à celui du domicile du défendeur. Ici l'aél:ion de
Roux eH purement perfonnelle ; c'étoit donc pardevant le
Juge de fon domicile que Claire Giraud auroit dû être affignée.
On répondoit pour Roux, qu'il falloit remonter à l'époque
du comrat & dans le tems que la Dlle. Giraud, domiciliée
à Marfeille , avoit contraél:é pour décider de la compétence
du Juge pardevanr lequel on s'étoit pOlltVU. Lorfque la dette
dt contraél:ée à railon des .alimens que l'on a pris dans un
lieu, ou du raJ:aire des ouvriers qu'on y a employé, le demandeur ,a 'le drbit d'amener à fon propre Juge les perfonnes
domiciliées ailleurs. Ici Roux" demande le paiement des loyers
de maifon, œ -qui forme une créance des plus privilégiées
& des plus favorables, à l'effet de: Jégitimer la compétence
du Lieutenant.
Me. Aguill~n, StibHitut, ol:îferva- quel Roux pourr~ivoit le
paiement d'un loyer ~e maïfon'.fituée ~ Marfeille ; que, quoiqu'il y ait peu de regles au PaIà~'s auffi triviales que celle qui
aHreint lë demandeur à aél:ionner fan débiteur pardevant le
Juge du ·lieu de fon domicile, '& que les Ordonnances, d'accord fur ce poine avec le droit Romain, en aient fait un principe certain; il en n'éà~moins 'plulieur~:ex'ce'ptionsà la regle,
qui (e' trouvent établies -par les Ordonnances mê:nes.· A ioli,
la faveur du commerce' a' fait accorder aù demandeur le choix
du Juge du lieu ot les marc-handilès 'ont été livrées, ou de
celui où le prix doir ètre payé, où du domicile du défendeur. La dureté qu'il y auroit'- à oblige!" les principaux des
Colleges à aller aÇl:ionne'rlJes' peres'; dés Eceliers qu'ils ont
en penfion parpeVâtft:J urs JGges) leur·it faIt 'acèorder ,-'dans
�D U
PAL AIS
D JI
PRO V Il Ne 11.
421
l'Ordonnance des commitimus, le privilege de les aél:ionner pardevant le Tribunal du lieu où font établis les Colleges ou
Univerlités.
Suivant une Ordonnance enregifhée par la Cour en 1707,
les ouvriers qui ont fait des fournitures aux Gouverneurs de
Province, Commandans & Majors, ne font pas obligés d'aIler alIigner leurs héritiers pardevant le Juge de leur rélidence ;
ils peuvent les alIigner pardevant ceux des Villes où les fournieures ont éeé faites. Ces différentes Loix ne s'appliquent
pas direél:ement 11 la caufe préCeore ; mais elles prouvent
que la regle n'ell: pas li généra'le & li rigoureuCe, qu'on n'ait
pu y apporter des exceptions dans des cir~onl!:ances favorables. Il n'exi/le aucune Loi préciCe qui ait auroriCé les Boulangers & les Aubergi/les à faire condamner, par leurs propres Juges, leséerangers auxquels ils ont fait des fournieures.
LorCque ces éerangers Ce font ainli trouvés affignés pardevant
un Juge qui n'étoie pas celui de leur rélidence, ils n'oor pas
manqué de faire valoir la regle générale: en aél:ion perConnelle , a80r fequitur forum reL L'exception contraire a néanmoins éeé accueillie par les Arrêts; il en ell: un fur-tout qui
.ell:, on ne peut pas, plus précis; c'el!: celui du lieur FriCon,
Tailleur de la Ville d'Aix, coorre le lieur Devignon, anèien MouCquetaire. Ce dernier, rélidant à Berre, avait fait
faire pendant plulieurs années des habits à Frifon; quelquefois il lui envoyait Ces habics pour les réparer; quelquefois, venant en cette Ville à raifon d'un procès qu'il y avoit,
il conduifoit cet ôuvrier chez le Marchand, & lui faifoit livrer l'étoffe. Le Tailleur ne pouvant être payé de Con travail, fit condamner le lieur Devignon pardevant le JugeRoyal d'Aix; le -débieeur appella de la Semence qu'il prétendait incompéeeore. Frifon -Ce prévalut des Arrêts qu'avaient obtenu les Boulangers & Aubergil!:es; il préeendit
que la nourriture & l'habillement avoient la même faveur; &
par Arrêt du 27 Juin la Sentence fut confirmée.
Il n'ell: pas douteux que l'extenlion qu'on donne aux Loix
exiUanres, & fur-tout à celles qui. reglent les,JuriCdiél:iooS')
�42.2.
Jou R, N A L .
. .
ne foit d'une nangereufe confequence" & 'q.u'li ne faine fa
refireindre autant qu'on ie peut·;. .l',imêFet des !fucifdiél:ions,.
& plus encore celui du public, exigent filr c~ point la plus
fcrupuleufe circonfpeél:ion ; mais il s'agit iéi d'une obliga-~
[ion dérivant d'un loyer;. cette créance à -laquelle la Loi.
a, par un privilege particulier, affeél:é les meubles du loca-·
taire, n'efi-elle pas tout auffi favorable que celle que l'on.
comraél:e pour fe nourrir & s'habiller? Me. Aguillon conclut à la confirmation de la Semence.
Arrêt du 20 Avril, 1782, prononcé par M. le premier Préfidem, conforme aux condufions; la DlIe. Giraud fut con-·
damnée aux dépens. Plaidant Mes. Gaffier & Sellon..
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; Îr.'
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Sur une pri;e a par!le••
"E Seigneur de ..... poifede en. commun avec d'aurré~:
. particuliers, des Bordigues, & cette propriéré le foumet à l'obligation de recurer & de tenir en état les di/férepts canaux qui traverfem la VîIle; l'un de ces canaux [er-vit le 29 Juin 1781 de joûre entre les princ.ipaux Pêcheurs.
& Mard9ts•. Le Seigneur & ,IJe~ Syndic~ des Bordigues demanderent au Lieutenant de JlAmirauré , comre les- Pêcheurs,
des inhibitions de donner d'aurres jOlues, fans avoir auparavant obtenu leur agrément & la condamnation à une·
amende 1 tcam pour~ avoir jOlité le 2:9 Juin précédent [ans'
j1voir, rempli ce préalable, que pour les .voi~s .de faiê COtn,mifes par les Pêcheurs [ur le canal. Le Lie~tènant de l'A-.
mirauré déclara abfienir pour. rairons. L'es' Prieurs des Pê.cheurss'adrdferent à 'Ieur cour au Lieutenant de l'Amirau'ré , & e.n ~ obr~~~nt la permiffion de joûrer. Le Lieute_pa~t ne; lai1.fa p~~ wême ignorer, que c'écoit de [on aveu,
&, fo.us fon utor!fatio1j qp~les Pêcheurs jo~toient ; il affi[l,a,
L
�42 J
aux joûtes qui furent faites. Le Seigneur & le S11'ldic des
Bordigues voyant que d'un côté le Juge aVl!lir dédaré
abilenir fur leur plainte, & que de l'autre il avoir donné des
permiffions pour continuer les jOH-tes, lui tinrent un aBe
extrajudiciaire pour Îe faire expliquer. Le Lieutenant ne fit
aucune réponfe. Le Seigneur & le Syndic des Bordigues
demanderent à la Cour la permiffiofl de le prendre à partie; cette permiŒon fut accordée, & [ur l'oppofition du
Lieutenant, la caufe fut renvoyée en Jugement.
On diroit pour ~es demandeurs, que les procédés du LÎeu~
tenant étoient [ans doute très-offenrans ; les Pêcheurs-, en·couragés par Ull chef <!l]1Ii puiifant, publiquement échauffés
par [es regards, par 'fes applaudiifemens, ilipendiés même
à res frais, auroient [ans doute renouvellé leurs combats de
joÎHe de mois e·n mois, de quim:aine en quinzaine; & le tintamare affreux qu'ils fairaient alors [ur le canal, nui[oit eifeiItiellement à la pêche des Bordigues. L'affignation donnée à
leurs Prieurs pardevant le Tribunal de l'Amirauté les avoit
d'abord émus, & alll'oit fuifi peut-être pour tom arrêter, fi
le Lieutenal1t n'avoit ranimé & fortifié, par [a jonél:ion, leur
parti déja chancelant & déconcerté. C'éroitlui qui fairoit
rout, il ne s'en cachoit même pas j il alfeél:oit de dire qu'il
fairait de la caure des Pêcheurs [a caufe propre, que fous
[es aurpices ceux-ci ne ri[quoient rien, & qu'il étoit le [eul
maître de l'élément [ur lequel le combat de joûte [e donnait.
Il avoie cependant déclaré formellement ne vouloir point [e
mêler des conte/bI·tions que le Seigneur & les Syndics des
Bord igues allaient avoir avec les Prieurs du Corps' des Pêcheurs. Il avait d'abord abHenu dans cette alfaire, il en avait
abandonné la connoiifance à un antre Juge. Par quelle con.rradiB:ion, lié pat fa propre déclaration, dépouillé de fa
qualité de Juge, & réduit au firnple rôle ·de fpe8:ateur de la
querelle, continuait-il de donner toutes les permiffions que
les Pêcheurs lui demandaient; & fe montrait-il comme lé
proceB:eur le plus ardent de leurs [peaacles & de leurs fêtès?
Il voulait do!!c fe rendre lui-même partie 1 telle était la conD U
PAL AIS
D E
PRO VEN C l'l.
�42.4-
10
U RNA L
c1ulion la plus naturelle qu'on pouvoir tirer de fa conduite:
on voulut le faire expliquer fur ce point, & l'a8:e extrajudiciaire demeura fans réponfe ; mais ce ûlence éroit expliqué
par tous les faits qui avoient précédé. En demandaor de le
prendre à partie, les demandeurs ont cru fuivre fcn vœu fecrer; ils n'one pas cru demander d'être autorifés à le faire
defcendre dans l'arene , mais l'y rrouvant eux-mêmes rout
difpofé au combar, & fe voyant provoqués par des hoHilirés
conrinuelles, ils n'one en quelque forre demandé que d'êrre
aurori(és à fe défendre.
S'il pouvoit refier quelque doute fur l'intention fecrete du
Lieutenanr, & (ur les motifs qui l'oor dirigé, il ne faudroit
que recueillir quelques-uns des difcours qu'il a tenus, pour
être bien convaincu qu'en paroi1Tant folliciter le droit de
l'attaquer, de le faire defcendre de fon Tribunal, les demandeurs n'avoient demandé réellemeor que de jouir concre lui
du droit qu'ils réclameor. Il n'efi perfonne qui ignore dans
l'endroit, que de tout rems le Lieutenant s'y efi montré J'ennemi le plus ardent & le plus opiniâtre du Seigneur. Ce
(oor fes menées fourdes & fes déclamations publiqùes qui
one enfanté ces contefiations multipliées, que le Seigneur a
ou qu'il efi fur le poinr d'avoir avec les Pêcheurs.
Si le delir que témoigne le Seigneur de Îoutenir les droits
de fon fief & fes préteorions légirimes ; fi les préreorions
même qu'on éleve contre lui caufent quelque fermeoration
dans le lieu, le Lieutenant de l'Amirauté y joue encore un
1·6Ie. Défenfeur fanatique du fyfiême communifie & républicain, combien de fois s'dl:-il échappé en difcours, en
propofitions fédirieufes & révoltantes! Tout le monde fait
combien leur trace tùgitive efi difficile à (aiur & à fixer;
mais ce qu'il y a de certain, c'en que dans un lieu d'affemblée où le Lieutenant éroit, le délire fut porcé au point
d'avancer, que dans la tri1l:e utuation à laquelle le lieu érait
réduit, il n'avoit pas moins befoin d'un Brutus, que Rome
même, 10r(qu'elle fut fubjuguée par (on premier Tyran: le
Lieutenant efi-il l'auteur d'un propos fi atroce? Peut-être
la
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PAL AIS
DB
]:l1l 0 VEN C P.
iP ~
la preuve ne feroit pas complette; mais le [ou~on fublifie ,
& fur un fait fi grave, le [ouPlion el!: toujours beaucQup.;
~nfin, en [a qualité même de Juge, il a fouvent drayé de
nuire au Seigneur. Il efi des Loix {ages & confiantes Iftablies
Iùr le fait de la pêche, qui 1:l défendent dans de certains
temps; la Ville, dont l'une des pr.incipales relfources efi la
pêche, a encore fur ce point des Réglemens particuliers; le
poilfon eil [ujet à une certaine épidémie, lors de laquelle
on permet, par exemple, une pêche générale &' privilegîée i
mais on n'a pas même alors le droit d'employer toute forte
de filets, & de ravager la totalité des étangs; d'ailleurs, ce~te
pêche ne doit être permir~ qu'avec des précautions, q"u'après des vérifications exaél:es & des rapports préparatoires.,
Cependant deux pêcheurs demandent cetre pêche; il commet deux autres pêcheurs pour décider li elle en nécelfaire"
& [ur leur fimple alfertion ',. il la permet dans toure l'érendue des étangs jndiflinél:ement, & avec toute forte de filers.
Comment d'aineurs trou,ver une preuve plus marquée de
partialité? Il abnient dans la caure du Seigneur contre les
pêcheurs, & il prononce dans celle des pêcheurs coorre le
. Seigneur. Il fe réferve ainli le droit de lui nuire, quand if
reconnoît lui-même q.u'il doit renoncer à celui de le juger.
Quelle conduite plus inconféquente l Il ne peut la pallier que
par des [ophi(ines. Il a contellé .au Seignel,lr la d'Îl'~e' & la
Jurifdiél:ion fur le li:aDal; aux polfe1feurs des bourdigùes ,. la
propriété de ce même canal" & il reconnoit néanmoinsqu'ils [ont fournis à l'obligation de le récurer. On ne coorelle
point au Lieutenant de l'Amirauté le droit de donner la permillion de joûter; c'efi à tort qu'il [uppo[e cette conrènatio'll- : il eH démenti [ur ce point par la Requête même qu'on
lui a préfeorée, & au bas de laquelle il a mis fon, abftenrion.,
Tout tee qu'il s'agit d'éclaircir & de j"unifier auiourd~hui ,
t;'en Cette abllention partielle & frauduleu[e', par laquelle le'
Lieutenant renonce au droit de rendre jullice à la réclama-·
tion· des demandeurs, & [e réferve celui de les moleaer, do
les vexer.
Arm"s Z]8z & l782...
Rh.b.
�,
4i~
Jou R. N A L
Li! deitltrhlellrS rendaient enfuite hommage li la t;rgel1e
ff~s pnncipes J'tablis fù'r fa ptJre à paftfe,' &: ils cijn'V~n(ji'en-t
.~Je t'{j(ifé lëur riguLeur âp'pâr'èntë !!lH utile .&' rftêtn"è h€t~r
TiiH!., (X qu'!?" he peûe trop n'lénil'gér, trop refp'è"aer ceu~
q,ui fé rorl!' dévoüés aûx foriaions péhible-s di! Juge;, mals
t1s ôbfervolént qu'é plus leur taraB:eré dl: auguHe'&; faint ,
plds iëu'i aignité él!: éminente & _rélevée, plus léur tôndûlte
~o!~ W·~ purè & irféptochablè. Tout feroit perdu, fi lblJs le
~aid prétéxt~ dé là vénération qui leLlt efl: due, il n'étoit JÎâS
p'èrmis dé fé plaindre dé leur parcialité, Clé leur inJu(lic~
~~idë'lÎ~éL~. de fàiré punir leUrs pré\r~:ic~t1?ns. >-':-~~ Lbix,l!i
les Tnl5unaux de Jufbce les ont alIh dlfbugues des aurres
titéiyéiii;, en fixant d'avance les feuls cas où. ils reuvetlt êrre
attaqués; en impofarit aux 'Partiès qui s'éré\l~l1t contré
~ulè., l'obligiltion dé venir demander aux Juges fUpétieurs là
përmillion i:Ie lès faire êlefcen,?ré dahs l'al'e'rië , & ehfin en
foûmettaiÎt à ôèS condamn;/rions plUs ri~outeufb, à cid
i-tparàtieins plus, éclatantes, ëeux qUi -f~éc'l::iïTIb'Mt da-rls è'ett~
. grande èntrepÎ'ife. U~ drôle ic~ète
priîi' dé 'tarit d-é tliffi..
è:ùltés préliminairés IX. èMilité ô'é t~iît"tlè'.pJrils, D~ -doir pas
ètr/; un droit illùfëirë & tfop 'reiférré. O~9'dm1iJa:tés ~jr /ahc
~ë fa.tisfàél:Îons 1. lés Jûges I~~(jîveb~; t'ererfiQre ; -airez ,'è'ohipléè ..
f~r' leur ionoce~ce' &. fur l'à ju.tHtii & la t5f'Mé~ti<l1Î <'Ie!i
tours; poür né p"as 'rêfl~felt le 'é6lt\isat Mns toûre fatte. d'Hypbthéfe l, (louvr rië pas féclâiHer làuj6u'1-i> !~ p'nvil'e~g~ com::
mode, 't'aôs doütê , mais !yeu honorable, de Jrï'e p buVolr êtrê
i1~fle's. tel èh cèpéUnJdanl le gël1H! dë 'd'éfé'nÎ'ë Ii:jH~ Il! tieüt'é":
nilnt 'lt pfé~frê. Apfè's êrrë 1~i '-;'11tliiè ~efé'e~dq 'ik l'5rl
Triounal, dans ud temps o,ù l'~ Se*'héur' s'li<l'rëlI'ofr 'ê~'è&~
~ 1tii commé ~ ion -Ju"ge, il 'y-rerl-tohiè !itlf6'or8'lilii ' 4 iI "
é:1ëfie cô.mrriè rein lidvèffJifë. Lë :Sèlgrleiif h1îfurOî'r jam~i1
fongé ~ \'y âttaqüér' , s'il nê" fê f3'r jâmâis mis lüi-Iîi.ê'r?Jê ,îMs
~ la porfée de {ès coups; maJ~ après 1'!vDlr i7ù 'tbnfôndu aa'n~
là fa.tiré, &. tévû ~ Iâ I~tê ~~ l'es ën'iierhls s;éfi 'a'të6'ù~
tu'nfê .~ ré J&g'fifaér- él$ifJm~ VUl'! d"elfl1. è~èfi tâ" ëb'ritflfdlét'iO'q
choquante que le Lieutenant a mife dans fa,coodüitê, qU1
fournie te'prerexte de l'attaquer.
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421
PRO VEN CE.
On répondoit pour le LieutellaQt de l'Amirayté ,-gu~ riftfl
n'était plu§ pélPrdonné, rien de plus illégal qlly l'aa:!~
o4ieufe & r~~olta!lte que 110n avoit iqtemé c~mre lLli; eJle
fêrait f~it~ p_Que humilier & même apéantir à j~ll)ai~ tpU;; le~'
Tribunaux inférieurs ,/}<: fub.alt~rnes de la PrÇlvipSll, fi ;1,.;
Gour }le ieur dpnnojt çlans cette qccafigp UI1 .!1C?uv~a.u t~JtlQi
gn~ge 9Ë I~ .procecriel) ~clatijllte .qû'~lle l~pr ~ fO)),jqJ/!'§
:j.ccordée, lie qu'elle leur doit.
Il oppofa d'abord deux 6ns d~ non-recevojf qu'il prMeqt!J.
comm~ ,imp?rables; la premi~re, tirée d~ !:~ qu~ le -5ei,.
g.neur ~'~voit pas appellé des Ordglln!!nCeS dpot il (e pla,i~
gl)oiJ, & 'lui" felon lui, doivel)t !lonner }ieu ~ la .prir~ lt
Prait~r ,Wen qe plus cçrt,ain, rieQ, <je f!lie,!x fon,c,l,é fur I~
r,aifal} même, <iJu~ la maxime qui veut qu'çn çoml)l.e,nce a,Y
tn0ins par in,veilir par I~ voie de l'appel, I~ Tribun,al {J.Jprême apguel 0.0 défere l'injuflice & la partialité qu'un J.ug~
inférieur a laiffé éclater' dans [es J ugemens.
I-1 puifa 1,3 feconde fin ,de non-recevoir ,dans l'impoqibi1ité
même çù /e trollvoit le Sejgnel!r d'appe.ller, (ur-taut Cont.re
le Lieuten?nt perfonnellemeot, ,des Ordol)nanc~s ~omfe lefquelles il s'élevoit. Le griéf d'appel ne pourroit être .fopd,é
lJue [ur çe que le Lieu,tenant a f~it c~ qu'il ·ne pouyqi,t p,'!s,
faire, en permettant aux ,p,êc.hel,irs de joûter, fans ~)g.r.~
%!lent du 'Seigneur & des propriétair,es des l)l?u~digHef~':.9.~,,:
~ette prét<~otion imérçff9 nt le. Tr,i!?!lnaJ ent,ier, & compl)O,1
meçtaot .les droits de fa Jurifdiélion, c'eil çontre Iyi [e-u1lh-,
mellt qu'elle peut être élevée. C'ell e,n vai,n que popr él.U9.e:,·
l:Objeaion, le Seigneur répete ['IDS ceffe qu'iJ r~F.QnlJa-,i~ lil
C.9m'pét\lJ;lc~ de l'Amirauté IX le droit qu'elle a e!le-Jll~l'I;l~'p~i
d0I111eqje,s p,ept;lï,/Jipns de joûrer; en vai~1 il (~ r§qu}~:.à.di{e,
qye Joo, àgr~lpe11t d,ojt Ç,OllCOl1rir avec .le lien., Çe.lle, !\,ffijf'?
t!on, 9.,\lpiql1~ tpqins c,hoquanre & moi,o~ hafar$,é~ f<j-ps ~çl'J,,~,
que celle gui refuferoit .. ahfolumeot au Trip~lJjil le dra-tt .~§.
cpnpoÎtre ç1~s jPÛtes & de les permettre, J'igtéreffe PR~r
[!lot toujours, pui(qu'e,lle t,elt~ à donne.r au. ~ei,gt;lepr pqe
Ji1!ifd!~i9!) el} Ç~QC9!J s iW~F la" lienne 1; qir~fi c e~ti~m}ètt~"
Hhh
:2,
�~s
tOURNA~
ex c1uCive de toute autre; d'ailleurs (continuoit-on pOUl' 'l~
Lieutenant) qu'y a-t-il d'irrégulier dans fa conduite? Qu'y
a-t-il fur-tout d'aifez repréhenfible pour aurorifer le choix
d'une aél:ion rigoureufe " qui note & dégrade le Juge? Car
rel en le caraél:ere elfentiei de la prife à paJtie.
Il a abfieou dans le procès que le Seigneur &. fes adhél'ans voulaient intenter aux Prieurs des pêcheurs pour avoir
joûté fans le\lr agrémenr. Cerre abltenrion efi la fuite naru.
'relie du principe de délicateffe qui l'a pané à abfienir dans
tous les cas oÙ le Seigneur érait en qualité; depuis que le
Tribunal de l'Amirauté eH en procès avec lui, & dans l'hypothefe aél:uelle, le Lieutenant avait une raifon dè plus. Que
lui demandait en effet le Seigneur? Une amende contre les
pêcheurs, pour avoir précédemment joûté fans fan agrément; des inhibitions & défenfes de joûter à l'avenir fans
l'avoir demandé & obtenu. Quant au paffé, c'était le Lieutenant qui avait lui-même permis la joûte dont on leur faifoit·
un crime; quant à l'avenir, il croyoit lui-même avoir le droit
d'agir comme il avoit fait, & de permettre les joûres feul &.
fans concours. Le Seigneur vouloit lui faire décider préci Cément le contraire; il abHint pour n'êrre pas Juge '& Partie'
dans la même caufe, Mais fan abHention ne pouvait le dé-'
pou iller de 1a faculté de donner à l'avenir des permiffions de'
joûter;-il a cru pouvoir di~.inguer fa Jurifdiétio-n graciJufe de'
la conrentieùfe; il a cru que le droit de donner des permiffions)
de joûrer n'était attaché qu'à la premiere, & qu'en fe 'dé_ 1
l'ouillant de celui de juger la prérenrion élevée par le Seigneur contre les Prieurs des pêcheurs, il [l'avoit abdiqH.é que'
la feconde ; il a cru enfin', que rant que l'état des c'hôfes ne'
changeroit point par quelque Jugement définitif, ou du-moins)
par quelque décret provifoire, il ne devait pas' lui-même'
changer de conduite, & pouvoir conrinuer, fans fcrupule -&
fans crainte, d'en agir comme il avoit toujours· faft.
'
- La !impie demande du Seigneur' ne pouvoit' avoir ·l~elfet·
de tout intervertir, de dépouiller les pêcheùrs ,du privilege'
de joûter fans fqn agrément, &: l'Amirauté dé'celui de don\ler'
.i "
.
�DU
PA'tÀ(S
DB
PROVENCB;
~29'
des perrniffion"s de joûre fans fonconèofrts ; rel é oit" céPen-1
dant le demier état de toutes Ie~ Parties: L.e ~Séigrieur i'
ava'ncé le cOAtraire, 'fans le prouver; -un Arrêt fdlerrihel rendu
par la Cour, du con[elltement du précédent Séigneur, démen,t celui-ci fur ce point. Toujours l'Amirauté avait permis
les joÛ!es fans l'intervention des Seigneurs) toujours les pêcheurs avaient joûté fans penfer même à la demander. Pour
a'néantir ce double droit, ou du-moins cette double po.ffefnon ,il auroit filllu,que la Requêre du Seigneur fût à la fois
dirigée contre ·Ie Triliunal & contre les pêcheurs '; à défaut,
tout ce qtJ~n ·peut induire de plus fort des joûtes fubféquentes, c'eH que les p~cheurs ont eu to~t d'en donner de
nouvelles pendanc-procôs; mais on n'en>peut point tirer la
même i·ndllétion contre le) Lièute.nant, dont>!e droit dépeh'::
dant de la police générale de lâJ mer, n'étoit ni enta,mé par
aucun Jugement 'provifoire, ni ·même dire.:l:enlent 'attaqué
par la Requête du Seigneur. S'il eût connu de la conteHarion
é1evée par le Seigneur, on l'auroit r-ecufé, fufpeété avec plus
d'avantage; on lui aurait reproché [on y~u déja marqué, &'
l'inconféquence qu'il y avoir à vouloir prononcer {ur une pei!le'
demandée contre des gens qu'il a,voie lui-même autorifé.
En prenant le parti le plus délicat & le plus 'prudent, il a pu
éviœr ent·iérement le' piege qu'on lui avoit fendu; il n~a fait
que 'ce qu'il a cru pouvoir faire. Se .fûe-il ùompé, la '{impIe
e·rreut, guï.oe.precede p&int-d'une partialieé , d'une inimitié
évi<lente:& ,prouvée ,~ne. fournit point -un moyen de prife à
partie; mais tout prouve qu'il ne s'e.H point trompé. Le
Seigneur reconno1c lu~-même le droie qu'a le Lieutenant de
l'Amirauté de donner des permiffions.de joûter; touc fait·
même préfume-r qu'il n'a pas le d'l'(>it~concurrent & fecondaire
qu'il réchime tLa 'poffeffion contraire, J't'\rœt de la Cciur, &
le fileÀce' què 1es.Seigne.urs ione ..ùmjonrs.. ga-l'dé' depuis c'et
"
, r
Apreto
Mi". l'Avocat·Général d'Eymar de Montmeyan obferva
qu'en <lroie les principes qui réglffent l'aB:ion extraordinaire,
pa·r laquelle une partie demande la· permiffion de faire def~:
J"
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Cl!J1~r~ UR
J ~
U -R- N
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L,
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,-
1.oge de fon Tnbullal, -& p~ I?quvOIr le ÇO~Cue ,
wur ';linli g;r~. d,e cO,rps à COFpS, (OIJC ce'rcjil)s, rigou~eux ,.
i l~'ilrj\lI;lJM , ·in.fllfceptibI~~ -d'e-~c,enr!..on, Pilr la manie~~ précj(e & tenuelJ~ <Jqllt ils fonc, poCé;, /k. par !.e\1.r n'lr,pr.e·!J1~me.
J.,e Légifiat.e~r ~ les Lqi~, ,_ quoiqu'ils PUff~9~ sleJ1JilIlP9rM~,
Cl! fe;lIlple, [ur ,cç pqiJ.l,t; a~'~c' U;J,le c~olianç~ ,en~ie-r~; li J~r
p.rudèn~e. &;. à ~a. c,i rc,911 fI~e&jo.fl ~e$, C,ours ~QuYer;aine~ ,~ q~:i
fl~Ô [Je j1q'kecre en effet p,lns, c.hel'iqll~ 1 qOA~U5 ...&;;1ih.9!gtl!ri .qes prf'''liers Jpges, ·n\>nc pas négljgé qe 'f:i~~r If's ~a~
o.ù Iii R ire à partie ppuvoit êcre ad rn,ife. On fel)t qu;:1§ font
les .mqcifs quoi l'es y oor déte-rrninés.; rien nlaproit été plys j,n-,
dé ep·t & plps .4a8ger~yx, que d~ '1.aiifer à 'Fh,aque .plai~.eur
1; .droit dt: ,iuger la cQIJ"<iIpire ~ l.~. j~~tice ~e fo~ Jj.;~e. Il .~fl:
eV:I.9~fJL Il\! it n e!~, ~.ucuJile Ge (es ~eCJa9Q.>!i q.U1J~)'e faff~ aU
m9in§ PI) lUi<1Çlntf'nt; è3f. du 1l1~ConCenternen.t au dEipic, ~ la
PJ~.v~J1\io!:l , ~ la b~ine , à l'):njlJftice même, il n'y a pas loin
cJ:1e~ la "pIJ.I'pjlr~ ges, hornJ11es.•
. L,e!1>p.r&rujgr~ !\Ig.e§,[lg rom pilosinfaillibles fjl)1s goute. Et
<w. 1 ell: r:J1~rninfl <111 ·m.on.d~ qpj .p!}!{f~ fe valner p~ l'~cf~ l Il
1ùllt ,p~§lfi\liqlj~a.J.l~ Tljil:mn.aIJK. filpé.rieurs, jufqy'aux Çours;
qgj r~!!l.J}j{f~flLcep:e:.tjdqh_i·l·a p'!~llifUqe de l.u/l1ief,e~c.9rprn,f;! ~,eJle.
d.e,lil Iluiffilnçe" 'Glli' ne le [ojent .quelquef.ois t·ro1J)pé,s; mqjs
leurs elTellrp d9ive:ni· ~cr~ ~efpeitées, Ou dl!-m,oins" G J;es
J?~:fties d.nt(le .(lrcoj~ .de tes Jàire réfpr.mer j .eUe~; !le, d~~vel;lt
. l~. ·r.elti;vVllJqll'il~CI Àéçen,Ç<efl'~_ I<]jtlilcJér.a.r4Jln•..1 Quel. f~roit
l!ho~njme~q).li v~.dllOjtllremplirIe.sLfonltiop~pé~iQles·êl~;JlJgl! ,
li cha,q.ue 'Q.ilépnife(1qe"ojU'e~pQfer à la dégraQ'!tig.n, ~ ;à. co,us
l~~ $la..ng.elP, lt, io.ut.t!.-5 Je.s 'CQ.fld:MtJJlations ~1l?emp0rte d!·aill~p.rs .la ))lri{e.à :P-'jrtiJ:l?" .. 1..
,'.
~J ~r
;1",
• Çb!l1iJ~1l :B.oInliioSt 'un JJJge !lé p.o\l\l.oj.t lhre '~fldfiJ~ 'Qe,rte
h,.""lilil1A.tè .préMeJttjQO·~ ,qJ~e·llilriÀl.J~ibiJlwj6qdt>.!1Q.~r,.jit1J,1· ~ 1.11,Q)
gr,igf ··i rJ!f.p:llràJhlJ;l;ja[ll.<l.J [v.cV.e d/.!)l'~fl.ltltJ;. iQbEifr [ntlSJ~ oe~ cJe;> ,1
auffi braves que les Romains, mais moins habifes, l]1oin§.
~Jaj}és qu'-eV'f.• ,j@i'1$ lsllJr jn1lhlif-jol.ls çiyj~s 1&' p~!i~iqu.es ,
IF<lj.J~: ~l'Qit:'l ~tJ?'décider'J>~r Iles :ll<r1l}If~, Gerll(ag.e, fi
a4,lIpré,&l wwmrl<i51}ll( 1.n-m:llr,S -d~lln~::N~ioJl::i:nq,épe~,Q~nt!: _.
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,DU
PAI.,ÀICS: fH·,~til.OVl!~CE.
,:4i3}
& guérrtère jTàvair métrlèémp?rré (Ût I~Jnèbnré f1è6éi! ffappante qu'tl y avoir à faire è1épel1è1re4'flb{frièll1;,~ &! t'n~d1~~li
vie, d'uri Juge'! dtl' &.I~~i~e·à'llrlJ~lardèu~{\Pin1.!'lère&·niécoh
renr. Lè 'gIilivf éroit, lel féru, m,acé6~ Je'touteS ~les :JuH'icles ~êù
Royaumè'r ëotninè ïl 'étoii le Jugé r8iriàire~dé .la' plqpirt dd
procès, ' & ,èlWlue P'artÎe qui fe croy'ôit iéfée pàr \lh J!Jge2
filent, avoit ,le' dioit ungulier de défier -le fUgè qùi le pro~
ponçoit , ou celllÎ qui dObnoir Il:! prerliief lo'h 'fuHhgè 'coqrré
lui. Pour prévènir un p~rtlè :des ibcàb'qétMns Hue '/tevciit hé,Jo
ce1fairemerlr"érl~f:anei,J'Vn'e
JuriCpfù~énè~
"4
fa-rodëll~"
oli
n'avoit,poirlt in1àgirié d'-autte èxpeU,ietJt; H!ài:tt~ .H1ôyè,ti 'Of!
Hitiîihuer les dangers' des' Juges, que ,dé 'leUr pe\-nlèttre Hl!
prononcer rd us en!emble, ou du-moihs au hoèrl dé 'éous, lé
Jugement qu'ils portaient ;' il fallait que cèlùi~bi 'oCoit eli~re':
prendre.-:Hors l'épl'ellve du' c'omhat jtlHi'd:ii~, iléfi~t' le Tri;..I
bdria( éiJft~r, & e 'cbfub'att11 fuet:éffiv,elWe,Î'1I: toùs les '1\ieâi l
bres. ~amçu Uhè. lèule fo,is-; -il '-lui 'eÎt "lcou,roit~PhoHrfrtir -& hi
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1" l', ,1
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tè'trlps minrè ip'rès-què t~'cârl/a:~ 'éle P;i1 Niit!dhJe fil! Î1dolÎcij
tIlle lés' P1ild~brsl'èorlt'erv.êrèhdétlfl:l~q"-âPl?éIl~ . lè )5r&fu, rs
1
Juges par,dev~nt leu?s rtrp'ê~iéÙr~', 'pqhr vefi1 ef!ffèndr~ Be 'fb[J~
telliH ut JD!ti!lifè'~t.- Ürd15t1ml1fce'~!! Ro\HIHl~h"à"b'ali't c.ètte
l!nâh~<M!è:tle'-~rElAAl' F,;','~ai '1>àtHeil'ôlt'e-nt;,èml en 'grande .par.>.
t
H~ ~tia 'durei'é fauv~ë t1è-Padèie'Hrte: I::''Obii!f.tt-rori -encore 'im.:.
port!e'1f tbliHè~ILleutertab~ âtt l reIf6H: de ta 'C'6Ur, de-yétrit
~maef djUFà 'tdot à"11oùVéitlltl! -du ttrl~ tki ~all~s- qu'-ils i)tll:
j\lgêè's ~'tt'prèm!e~e i1'!ft~f1cè; noOs "fifltacè 'quelqtlè -itJ~ 'd'é
éërre !;lnHqbè-1~t';iH1~~ ilàht 'P.l ,Ul'i 'Hii'é 'l.'-t1n''1ietlc dé tilër
l~s Il àWà'r\cli-i's;\ ~/.S'èll "éta<i:tIFilepUisll1r's;'qlle l'âp\*rnh\~le rie
90l't ~trèdinlfê'que êbnHê ta 'P-à)'tiè Il ptoH!: de lâq'l1en~,à
~té r hdtl I~ ~ugêl1let\t qùfbrl atra~ùe.- Th.l.~à là .maxirt1l:": '-ft
fait'dû ltige--''èfl 'Çddi-'dë~d.Pflrtft! J, ph'ce qbe'i:'alê.t'ï ~!t[tbtfl
Tdt:rH ~tçU (i'~11 fa'ire Pa ëâ'ufe '& -fQn f:ii~ ph;iWè' ;là°rtlli'~
qll'éHè ,Hé \lè't't'oilèe llip't~fielnèn~ a'ù d}jénéfr~ au rtl~l\\~
fertthl'Jè'n<fafih/e6r;- j"J". '-' ,1, ,...
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'IOJ1-"ti V ft ~<!\:L • r. l
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.si cepenqant)e ~uge:s'efl:hcol])p~~~ d'q~S '!!1;an~te indigne
de fa qualité, .s'il n'a pas feulement erré en droit & en. fait,
mais s'il parole encore évidemment que le principe de [on
erreur ~olontaire a été I~ haine. ou.l~ prévemion,cont!e cellli
flu'il a condamAé', une partia)i~é mar<Jué~ en favepr de celui
(ju'il a favorifé, ou même ,quelque pallion pluS' ct'imipelle &
plus ba1fe encore; celui qui l'accufe d'une prévarication fi révoltante, n'a pas perdu. le droit d'en. demander vengeilnce &
{aeisfaél:ion contre lui-même, & de le bîre, conda.m.ner perfonnel!emen.t à réparer fes torts; mais, comme on l'a 'lit,
.les Loix n'ont rien voulu lai1fer d'arbitraire & d'incertain fur
).In obje.t fi impoFtant; elles ont elles-mêmes fixé à quels
craies on reconnoîtra le Juge prévaricateur & infidele, qui.
s'étant lui-même dégradé & avîli d'avance par l'indigo'iré o~
la ba1fe1fe de fa conduire '" devra être expofé 11 l.'humiliation
de f~ ..Îoli attaqué fur fon, p~opre . Trib'LJ!I~l, l'5ç foumis à 1'0~ligat.i.on d'en de[cendre ,. pp~ ~en~re co.mpte à [es p,rop.pes
Cliens de (es fenrimens & de fa julHce. C'eU lorfqu'il fe
laiife diriger par la faveur ou pa~ la haine. c'eH lopfque les
préfens ont f~it pencher fa balance,vénale, que le Juge _perd
~ la fois la·dignité de fon caEaél:ere, la confjanc~ des;Loix )
& la proteél:ion des Tribunaux fupérieurs.
. .
• L'Qlldonnançe' de' Blois permet de le. prendre à partie ,.
lorf(ju'il a jug~ par fraude, dol ou. concullion, ou lorfqu'il 'f
a faute a1fez manifefie dans fa conduite, pour' qu'il. doive .
.f tre co~diqiné en fon propre nom. Les prili(;;ipes qui ont prépdé ~ la ~édaél:ioll; qe cette Loi, font a1fe,z c.enformes à cellX
pefés .dan.s la 1 Loi ,Roma.ine :. judex tifnc. litem fua.m fac.ere
~(ItelJigitur " i dit Ferte Loi, ~um dol<t rrza!o in fraudem legi~
flntentiam dixerit, dp/o aW malo llidetur, /wc . facere , fi
evidens. argualf'r ejus.. vel gratia; vel illimicitia" vel fol:des~
Des. Loix' pofl.érieures ont, il eH vrai, étendu la prjfe à
i>i1i~ie à Ae~. ",as 51~ ~ faute, dullige paroîe êere ,& eH en effet
l>eauc,o~p, J;!JCjI,iesrJK~~~e. }?~{t"ainÎ1 qu.e le cit~e, 7~. de rOr. :do?nanc,~ J~. ~667'( enJpm~l~ tOllS les Juges mdJlhnél:ement
d.e proceder lll.Ce1famment au Jug~ment ~es procès qui font
en
J
�,
DU
PALA"IS
DE
PRO'VENC!!.
433
en état d'étre jùgés, à peine de. répondre en leurs noms
des dommages-intérêts des Parties. C'efr aïnli encore que
Je Juge, qui par un attachement excelIif aux droits de fa
Jurifdiaion, a.connu d'une affaire pour faquelle il étoit évi4emment incompétent, peut être également expofé au danger de la prife à partie.
.
D'après ces différentes l"xtenlions, la narure des griefs
que coarte .celui qui demande la prife à partie, influe fans
doute beaucoup fur celle de fon aaion même, & l'on fait
que, fuivani qu'elle paroît être plus ou moins déshonorante,
elle peut être 'admife avec plus ou moins de facilité. On n~a
pas ceffé pourrant de la .regarder comme l'uce des plus
figoureufes aaions qu'une partie puiffe intenter contre un
Juge, comme une des plus humiliantes épreuves auxquelles
œlui-ci puffe être expofé. C'ell: ce qu'annoncent bien expreffément les précautions que les différentes Cours Souveraines ont prifes comme de concert, pour empêcher que
l'honneur, & même le repos des Juges, ne fuffent trop
fouvent troublés par des informations téméraires. Il im-'
porte en effet à l'o~dre & au bien public, que les Juges ne'
foient pas trop fouvent dïfiraits des fanai ons auguHes qu'ils
exercent fOlls la furveillance de la Cour, par le foin de fe
défendre eux~mêmcs ,. & qu~, raffurés d'ailleurs par la per->
fualion intime où ils font qu'elle veille fans ceffe à leur
flJreté, & qu'on ce peut les traîner en accufés que d<lns.
les cas où elle les aura, pOUf ainli dire, jugés d'avance
coupables, ils puiffent les remplir avec cette fécurité qui
ne peut qu'infl\ler , même [ur la fage/le de leurs. déciuons.
Delà ces Arrêts de Réglements multipliés, qui ont défendll
11 toutes perfonnes, de quelque qualité qu'elles foient, de
prendre à partie aucun Juge, fans en avoir préalablemen.c.
obtenu' la permilIion de la Cour Souveraine à laquelle ils.
refforriffem; c'ef!: en verru de la difpofition de ces Arrêts.
qtJe la prife à partie dont s'agit a été intentée, & que pour'
Pimenter, les demandeurs ont été obligés de faire décider s'il.$.
en avaient Le droit.
Anaùs z78z '& z78:z..
Iii
•
�-
"3~
Jou RNA L
En vain le Seigneur obferve (continua Mr. l'Avocat-Gé_
nùal) que ce n'eR po;m du draie qu~a l'Amirautê de donner
des permiffions ete joûte, qu'il s'agit; on ne lui difpute point
ce droi~ dom elle el!: en po1feffion; il n'eft pas même queftian du droit en concours que le Seigneur réclame; ce droit,
qui conûl!:e à rendre fon intervendon auffi néce1faire que la
pel'!1liffion de l'Amirauté, fuit la matiere de J'iaftance qe'il
a introduite contre les pêcheurs pardevanr le Tribunal de
I~Amirauté lui-même; l'unique difficulté qui agite auj<lurd'liui les Parties, fe réduit à favoir, fi le Lieutenant de l'Aftlirauté ayant abHenu fur une requête par laquelle Je Seigneur lui demandait des condamnaI ions pécuniaires pour
une loule pafIèe, & des inhibitions de joûler à l'avenir laos
fa permiffion, a pu conrinuer de donner aux pêcheurs toutes
les permiffions qu'ils lui ont demandées, & fe monr·rer'
même avec affeélation à leur fête, fans [e rendre -€Cupable
de partialité.
.
Il hUI d;Uinguer, fuivant Je Lieufetlam, dans fa place,
les deux efpeces diilërenres de Juri(diél:ion qui )r font auachées. Quoique unies [ur la têre, elles n'en font pas moins
dHl:inél:es & réparées de lenr nature; la premiere à laquelle
appartient' le droit exdufif de prononcer fur roures les quefrions maritimes dom la cotl'noitrance a- éré attribuée atlX
Amirautés par-l'Ordonnance de la Marine, ef1: la Juri[diélion
C1>ITtemietUfe. La [econdle à hl'qtlelle appartient pfus [pécia-Jemem la pol-jce de la- mer, de [es quais, de !ès rivages, eft
une efpece de Jurj{diél:ion gracieufe, que le Lieuten<l'nt_ de
l'Amirauté, ou- tour- atltre Officier qui préfide- le Tribunal à
111 plaœ, peut exercer de pfan(J, & fans jrappareil folemnel
des formes judiciaireS'. C"e'1l d'e cerre efpece àe Jurifdiélion
que paroît dépendre l'e droit de donner des permifIions de
joûter fur la mer-, même av-e-c rambour & autres inftru~ents ; ,comme atlffi le- droi-r à~ connofrre fur le' champ_ deS'
diffi~ultes & des- rixes qui peuvent s'élever à l'occaûol1' d'un
p:rreü ry>eéhcle. Le Li'eurentll1't pllrtaogeoie fur ce point tous
les drOIts & touees les prérogatives des autres Lieueemrnts
�DU
PALAIS
DI!
PROVENCIl.
43~'
de l'Amiraueé, quoique éeabli dans une ville fimplement Sei.
gneuriale; la. localieé de fon Tribunal ne nuifoit point à la
dignité de fa place, à la liberté des fonél:ions qui y font rnatu~
rellement attachées.
Il ea vrai que les Seigneurs ont reclamé depuis long-temps
la ]uc-ifdiél:ion & It: haue domaine fur les bras de mer qui tra·
'\1erlèm la ville; mais cette réclamation IJ'a point encore éTé
accueillie; elle a' d'ln né lieu à un procès avec l'Amirauté, qui
demeure indécis & fufpendu depuis longues années; la déci.
fion provifoire du Confeil & la po1feffion [ont pour les Offi.
ciers de l'Amirauté. En conféquence les Lieutenants de l'Amirauté Ont toujours donné la permiffion de jo"Ûecr. Poue
prévenir même toute difficulté fia' ce point ,. le Lieutenant
prit, dès les premieres années qu'il fut en place, la précaution de fe faire confirmer par la Cour d.ms le droit de
donner à l'avenir de pareilles permillions; & l'Arrêt conforme à fes fins, fut rendu du confelHement du Seigneur
d'alors;
Si les Seigneurs n'ont jamais eu le droit d'être ouis, lor{..
qu'il a été queftion de permettre aux pêcheurs de joûter,
comment pourroient-ils aujourd'hui faire un crinie au LieuJenant de l'Amirauté de s'être lui-même pa1fé de leur agrément? qu'a-t-il faic de plus que tous ceux qur l'om rriécédé dans fa' place? Il ea vrai que le Lieutenant éraie ave:rt~
que cet état des chofes pouvoit changer; une requêee par laquelle le Seigneur & les propriétaires des BOtlrdigues demandoient qu'on ne plu plus joûter à l'avenir fans permiffion ,
avoit p.a1fé fous fes yeux, puifqu'il avait même. abfienu fur
cette requête; mais de ce que l'état des cbofés pourillit t'han
ger, s'enluit-il qu'il le fût? De ce que le Seigneur pouvoit
acquérir ou recouvrer le droit d'être . con(ulté toutes le!>
fois qu'il s'agiroit d'açcorder des permiffions de joûrer, fuivoit-il .que dès leur premiere démarche, & dll momen.c.
même où leur demande avoit vu le jour, on fin obligé' lie
les confulcer provifojrement, & .pen~anr .procès?
,,
l'o.ur pouvo~ operer un pareil eilet, il [em1lle ,q.ue ce n?e~
..
' . Iii:l,.,
�4~6
JOUR-NAt..
contre les pêcheurs qu 1une pareille demande aurait
dû.être dirigée. Il falloit intimer & meccre en caufe le Tribunal de l'Amirauté lui-même; mais dans ce cas écoit-ce
à lui qu'on devoit s'adre1fer? En n'attaquant au contr..ire que
les pêtheurs, le Seigneur alloit bien au même but, & Yparvenoit auffi ftirement, s'il faifoit une fois décider contr'eux
qu'ils ne pourroient à l'avenir joûrer fans l'agrément des Seigneurs & des propriétaires des Bourdigues; mais leur requête
ne pouvoit pas également dans ce cas avoir l'effet d'enchaîner provifoirement le vœu des Officiers de l'Amirauré, &
de fufpendre leurs fonétions pendant procès, lorfqu'il s'agiJ'oit d'accorder aux pêcheurs de nouvelles· permiffions de
joûrer. Il faut obferver que par certe requêre , le Seigneur ne
demandoir rien contre les Officiers de ce Tribunal; fon unique objet étoit de faire défendre aux p~cheurs de ;oùter à
l'avenir, fans avdir demandé & obtenu fon agrément; fuppofé même qu'il fùt venu à bbut de leur faire impofer cette
obligation, en quoi auroit-elle pn nuire aux droits de l'Ami·'
J'auté? en quoi en auroit - elle lié l'exercice? Le Lieutenant
n'auroir-il pas, même après le procès jugé en faveur du Seigneur, continué de donner comme auparavant des permif.
fions de joûter aux pêcheurs, fauf aux Seigneuts , fi au mépris de leurs droits reconnus, les pêcheurs après avoir rapporté cette perrniffion préliminaire, négligeoient encore de
demander leur agrément, de les faire punir d'un oubli fi
affeél:é; & s'il eH: vr:lÎ que le Lieutenant auroit confervé le
droit donc il a fait u(àge pendant procès, même après le
procès jugé; à plus fortel raifon n'en a-t-il pas dù être dépouillé, dès l'inaant où le Seigneur a formé fa demande.
~ Le Seigneur a diHingué lui-même dans fa requête le
droit indépendant de l'Amirauté, dedonnerdespermiffions de
joûter, ·de l'obligarion fecor.daire qu'il vouloit faire impofer aux pêcheurs, de Gemander en ourre fon agrément &
celui des propriétaires des Bourdigues; & ce n'a pu êrre que
parce qu'il regardoit le. droit de l'Amirauté indépendant de
Edui.. qu'il réclallloi.t-lui-même,.qu'il s'ea jldre1fé à ~lIe ..Une
COlt paS
.
,
�D tr PALAIS
D Il ,PROVENCll,
437
'fimple permiffion de jOÎlter, de dohner. Tur là mer ou fur les
canaux lme fête, un fpeB:acle -publit, 'ea une aB:e très-or~
dinaire & très-libre de la J urifdiB:ion gracieufe.
Mais, a-t-on dit, il Y a afièB:ation à abllenir fur un fait,
.& à en wnnoître dans la fuite à la requifition de la partie adverfe'; oui fans doute (obferva Mr. l'Avocat-Général)
quand c'ell exaB:ement le même fait; ainfi, par exemple,
fi après avoir refufé de connoître de la demande du Seigneur en inhibitions contre les pêcheurs de joûter fans fon
agrément, le Lieutenant eût décerné à la requête de ceuxci des inhibitions contre le Seigneur de les troubler 'dansleurs jOÎltes, fous prétexte qU'lis n'avoient point rapporté cet
agrément, il auroit connu précifément du même fait' dont' it
avoit d'abord refufé de connoître; il fe feroit rendu évidemment fufpeB: de partialité, & d'une prévention marquée.
Mais qu'après avoir fimplement refufé d~ .connoître du litige qu'alloit produire entre le Seignenr & le Corps' des pêèheurs la quellion' de favoir li ceux-ci' avoie(lt 'béfoin pOOl'
j'oûter, de fon agrément, le Lieutenant. iiiIJ c.onoinué de
donner aux pêcheurs des permiffions de jOÎlter, il femble
qu'il n'y a plus la même contradiB:ion, ni la même fraude
dans fa conduite. D'après .12' maniere même dont, le Seigneur avait dirigé fan iB:ion, .il ell clair que. cette permifHon ne 'pr.ejugeoit rien contre fan, fyllêmeJ ,C'étoit' aUl' pêcheurs 11 fe juger eux-mêmes, 'après J'avoir' obtenue. S'ils
redoutoient l'événement d'un procès qu'on leur intentoit.,
iJs devoient éviter d'aggraver d'avance leur condamnation,
& demander' l'agrément avec protefl:ation; {Lau contraire,
toute ..leur conduite:. prouve :qu'il,s 'redouroient péu l'i{fue du
litige, & qu'ils regardaient la r<éclamation d.u Seigneur comme une. prétention hafar.dée, pourquoi le Lieutenant femitil le feul qu'on: punirait? Pourquoi feroit:"il plus coupable
qùe les 'pêcheurs eux-mêmes" dans le cas où il auroit eu Ja
même .opinion!?, Sans doute il'l'a eue 'éette opinion, &c elle
fut mêm~ .unel des Gaufes .deJ"pn~:lttention j'fans ·doute.il l'a
manifelléè; parce qu'il la ,rayait jufie & fondée, &. qu'il
�' . ,. J 6 U R Il A 1
éroit perfuadé que n'érant plus Juge, il pouvoir pa·rler. Que
conclure d'ailleurs de COtiS fes difcours & de l'efpece de chaleur même qu'il a pu y meme, dès qu'il n'a parlé qu'après
foo abfiention, & depuis le moment qu'il a renoncé a~ droit
de juger la concefiation élevée ancre le Seigneur & le corps
qes pêcheurs? Son: droit de d.onner des perrniffions de jQûre;
étoit abfolument indépendant & de la Jurifdiaion contenrieufe qu'il avoit abdiquée, du-moins quant au procès intenté aux pêcheurs par le Seigneur, & de la demande même
de ce dernier,. celle qu'il l'avoir préfentée pardevanc le TriQl,loal de l'Amirauté.
1 b,infi
Mr. l'Avocat-Général établit, que. le fait ne
p<lrQilI'oit pas ,itre de nature .à incniminer le Lieutenant, &
que [a çondtl-ite [embloir être irréprochable; mais (contif)ua-t-~)) eut-il en effet quelque core réel, & ne fue-il pas
à l'abri de tO:ULreproche? Il Y a loin encore d'un tore conudérable, d?uo mauv-ais procédé,. d'une mépri[e en fait ou
en droir "à la prévarication, au~dol & à la fraude, & même
à cette faute dfentielle & grave pour laquelle le Légiflateur
a lailI'é au pOllvoir des Cours Souveraines d'accorder la
prire à parlÎe. D'ailleurs fera-ce [ur de [unples allégations
dont 1 plupar même fOnt étrangeres à [es fOllaions de Juge,
qu'on expo/-era le Lieutenant de l'Amirauté aux fuites de
l'a<!\ionJa plus rigoureufe qu'on puilfe intenter contre lui? Sera-ce d'aprcs. quelqlles' témoins fufpeéls 'qu'on prononcera
fur [:a: digniré , [ur [a réputation, fur [on .honneur, & n'eHi! pas mains dangereux de dilIimuler même quelques-uns de
ièS''écall[5~ que de l'expofer mal-à-propos à une dégradation
nhonteUfe ~ Rarmi,toms !eSJreproche's qu'on fait au Lieutenant,
on ne. ramene quer deux faifsl Gerrains : fa' prélènceaux joû~s, &! les encoiutagèm.ents pécuniaires donnés' aux'joûteurs;
m~is ces d~UOl f&ilS. peuvent être interprétés à tàn avantage,
c:omme ils peuMonLêtre ,pr.isl dans 1J00·mJWvaisJens; & rien
dé pll:l6, oermin:, &.'Ùe ':plll$'fage' àJU foi' èjue cet axiome.
qui \leo~ cqùe darls le: œucemo préfere-toujoul'51Joterprétation
!av9rabl~ à~imiD~.nrl!" Jio .:1~ :1'; ,,~11· --.
438
�DU
PAtAIS
DB
PaOVENCB.
4t~
_ Va11ifiance du Lieutenant aUJ( jolkes a- 'pli n'étte ÉJu?ud
effet de fa vigilance ordinaire, qu'une fuite de la prodenÉe
attention qu'il donne à tous les détails de fa place.
Le prix peut occafionner des rixes & des conteJ{la~ions
qu'il eft Couvent elfentiel pour la traoquillitf pubtiqtiè, &
toujours utile pour les parties, de terminer (ur le champ;
la préfence aétuelle du Jtlge' local peut' feule' leur pl'ol:ufer
cet avantage. Quant au' pri~ donné au", jo6rerrrs, il petit
n'être réellement que la récompe:nfe de fon àdn!ffe; & tel
dl: en effe~ la maniere dont on doit Yenvifager, 's;jl 't'ft: *r-aique cet argent n'ait été don-né qti'att n'rdmel'lf olt lès 1<5t1-te5
alloient- finir, ou pour -obtenir urie der-rrieré courfè ;) or ,
'
comme on n'a d'ameurs fur ce point ·d'autre -preuve qué l'a~
l'eu du Lieutenant, 1\ faut ou l'accepter daçs toute fof!' étendue, & avec l'explication qu'il cOdtien-t, ou t:enonèèr à l'a-vaMage qu'o ri' ~'efFon:e d~en tirer. SI dans- d'-3Ütrès çcc!lfi6ns'
le Lieuten:lnt a tenu dés propoS- féd'it-iem[ '& têtn"\Watrég; fi
dans plufrei.J1"s il m'a pas (çu -dlffimuler la harrle -qui ~'.rnime
contre le SeigneJr, & 51il en a lai-Ifé édl~pper de'!t tra-it9rév:ehaRts- & repréhenfibles, le Seigneur peut re'!! faire pU'"
nir, mais non pas par la voie de ta prife Ir plttrie 1 r~,
torts étrangers à fes fonétions font alors ceux d'un particulier, & nen d'un Juge; il pellt en dem-a-nd-er fatisfd8:-ion &
vengeance par une aétion plus rigoureufe ~ncore, par l'action extraordinaire & par l'i'llforrna'tiotl.
En vaill, pour affoiblir un fi grand intérêt & repouffer des
c'ol'JllidévadOiis fi puiflàn-teS' f Ie.Se'igliear a ré~l/ê l'extrê'me ftifF~
renc~qu'ily a r fèk>R:IUl" éfl(r'e'Ia:limple d\!m'<fndéleo'pl'ife'~' p'âr[ie, & fOll filccèsdéfidirif. J1'fa-u't (dît-ilT dés fk'euves-beà-uc~up
plus graves pour faire rraiter' u'" Jùge e1l.-doupal>le,- què l'lcllfl.'obtenir feulement le droit de l'arraquer j & l'on a vu (ouvent
d'es dell1allâ'eurs l1Ui' ravoient értlperré à'3Àg ce~eè efpeèe dl!
ahac prél-imjndF~; (ucctHhOér d'il'A!; le d'è1"l1ier com\ltat- ,\ &.
, pa-yel' très-'érret Ie-s pl'emier~ (U€'C~S de lèur té'méri6re 1 dé'-'
ma:rche. 'n rr'efl' pas- pas nldirts vràil cepé'ndant (oofenfà'- MI'.
l>;Avocat-Géné'r~} que' fà ~rltti1t1Ot\' de ptendté. n'a JUgé QI
�440.
,
. .
J
(S U IR N III .1.
•
,
partie ,-quoique purement préliminaire, note & dégrade'dàM
l'efprit du public celui contre lequel elle efi accordée; &
qu'on ne dife pas que les réparations qu'il obtiendra en défi-.
nitiy'e, lui' rendront tour ce q.u'il a perd,!. & le dédornm3geront de fes pe-rtes. Qui, ne fait qu:il efi prefque ünpoffible:
de rendre même à u'n fi~mple particulier cette fleu·r de réputation & de 1;lOnne Ire nommée , qu'une accufation même calomnieufe lui ravit pour un temps, & que l'honneur des Juges beaucoup plus délicat, & plus fenlible encore ,. ne coolifte pas feillement r,ians Pop\llion qu'on. a de leur intégrité& de leur jufiic~,. mais dans la perfuafion même où l'on doit.
être qu'ils [ont au-deffus du fimple fOl1pçon~
Mr. l'Avocat-Général conclut à ce· que fans s'arrêter aux..
fins renvoyées. en jugement de la requête en, permiffion de
p.rife à partie ptéfentée par le Séigneur & le Syndic des·
propr~étaires des Bourdigues,. le Lieutemi.n.t de l'Amirauté·
fût. mis (ur icelles hors de Cour & de procès•.
Par {\rrêt du, 23 Avril i7-82, prononcé par Mr. l'e Premier,Prélident, les conclufions furent fuivies; le Seig.neur & le
Syndic des propriétaires des Bourdigues: furent condamnés;
aux, dépens. Plaidant
. Mes. Simeon & Dubreuil..
..
'
ARRÊT
XXXXI.
au
En matiere criminelle, c'ifl d'après la ·nature
délit, des
prellve.s. & des circonjianJ'es, .Cfue le Juge doit accorder Oll
refu/à l'accufauur le procès extr(1,ordÎnaÎre.
Itpeut le, refuftr par fimple déc.ret•.
a
Tienne....... ~t affigner le· 18 Novembre f780 Jacque!
Durand p~~derant le Lieuten~nt d'Aix, en condamnarion
de la fQmJ1le~d~, 1!37.4:4 liv, Le 26 Janvier 178.1, Durand·
l,'réfente.\llne remlête,de plainte au Lieutenant Criminel, fur
~e ':I,~e JQ[~p~,,,,,, avoi~, déchiré le lQ Oétob!e 1772 le blanc,
.
[eing
E
�440.
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l'efprit du public celui contre lequel elle efi accordée; &
qu'on ne dife pas que les réparations qu'il obtiendra en défi-.
nitiy'e, lui' rendront tour ce q.u'il a perd,!. & le dédornm3geront de fes pe-rtes. Qui, ne fait qu:il efi prefque ünpoffible:
de rendre même à u'n fi~mple particulier cette fleu·r de réputation & de 1;lOnne Ire nommée , qu'une accufation même calomnieufe lui ravit pour un temps, & que l'honneur des Juges beaucoup plus délicat, & plus fenlible encore ,. ne coolifte pas feillement r,ians Pop\llion qu'on. a de leur intégrité& de leur jufiic~,. mais dans la perfuafion même où l'on doit.
être qu'ils [ont au-deffus du fimple fOl1pçon~
Mr. l'Avocat-Général conclut à ce· que fans s'arrêter aux..
fins renvoyées. en jugement de la requête en, permiffion de
p.rife à partie ptéfentée par le Séigneur & le Syndic des·
propr~étaires des Bourdigues,. le Lieutemi.n.t de l'Amirauté·
fût. mis (ur icelles hors de Cour & de procès•.
Par {\rrêt du, 23 Avril i7-82, prononcé par Mr. l'e Premier,Prélident, les conclufions furent fuivies; le Seig.neur & le
Syndic des propriétaires des Bourdigues: furent condamnés;
aux, dépens. Plaidant
. Mes. Simeon & Dubreuil..
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En matiere criminelle, c'ifl d'après la ·nature
délit, des
prellve.s. & des circonjianJ'es, .Cfue le Juge doit accorder Oll
refu/à l'accufauur le procès extr(1,ordÎnaÎre.
Itpeut le, refuftr par fimple déc.ret•.
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Tienne....... ~t affigner le· 18 Novembre f780 Jacque!
Durand p~~derant le Lieuten~nt d'Aix, en condamnarion
de la fQmJ1le~d~, 1!37.4:4 liv, Le 26 Janvier 178.1, Durand·
l,'réfente.\llne remlête,de plainte au Lieutenant Criminel, fur
~e ':I,~e JQ[~p~,,,,,, avoi~, déchiré le lQ Oétob!e 1772 le blanc,
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E
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
441
feing mis au bas d'une feuille de papier confiée à Gavot
Tonnelier, arbitre cboili pour finir & arrêter taus les
comptes qu'ils avoient enlèmble, & fur l'enlévement
de divers dtres juQificatifs des comptes. L'information
fut prife, & produifit un decret d'ajournement contre Jofepb
qui était mort, & un d'affigné contre Etienne.....•
Il y eut deux continuations d'information, après lefquelles
Durand demanda le procès. extraordinaire; décret de foih
montré aparti~. Etienne...... répondit que le procès extraordinaire était inutile, l'a' parce qu'il déclaroit vouloir prendre
droit par les cbarges : 2°. Parce que le fait de la plainte étaie
invraifemblable : 30 • Parce que Jofeph....... étant ,more, les.
0
témoins de ce fait n'avoient plus de contradiétellr : 4 •• Parce
que le procès extraordinaire n'ay.ant été établi qu.e pour la
juUification de l'accufé, on ne pouvoit pas l'ordonner" quand.
l'accufé n'en vouloit pas. Sur cette réponfe ,. décret de foit
pourfitivi , airifi que s'apparti~nt.
Le Lieutenant, par fa Semence définitive du I l DéceÇ}bre
178 t, déchargea E.tienne
de l'accufation, condamna.
Durand à 3 liv. d'amende envers le Roi, à 100 liv. d~·crom
mages.iOlérêts envers Etienne........ & au,x dépens. Durand
appella du décret du 27 Novembre préc,édeor, qui avoit; refufë le procès extraordinairre. II propQfa deux moyens; le
premier: le Lieutenant 'Ill ieu de le débouter par décret,
auroit dû faire une Semence;. le (t:cond: la O1'1tiere ét'ln.t
grave, le procès extraordinaire devoit être ordonné•
. Il obferva fur le premier, que 1;1 qlleHion de favoir, fi t~
procès extraordinaire doit ou ne doit pas être ordonné"
;;.vant de juger dé6n.itivemeOl: une pbiote, mérite l'eJt<lmen
le plus mûr, le plus. réfléchi. En la décidant) 00 ne pré:-juge pas la jufiice de la plainte, mais o~ en déda~e la graviré ,. l'imp{)f{ancej on dérermine la Rature de l'adioo. ~u<~
c.ompet~ qU plaignant\ Ce n'eU effeétivement ql,le pa,r le Réglement à.J'extrao,rd.in3ire , qu'uQe affaire devient véritabl.eUlent c[i~illell:e. Ce n'eU donc pas fur ,1In~ demandll "l-W:
p,réf<oote ~ juger c.eue·glfe(tion.,. que l'QI1 doi~ pFOOOll<.;e~ ~
4nné.~s. 178z & l·78:J..
Kkk,
�441
,
1 0 U, RNA L
._
un {impIe decret, par un decret rendu hors Jugem'enr, qui
ne convient qu'à des procédures de fimple infhuébon. Pour
protéder. r6guli~rement -& légalement fur une pareille Reqnête, il faut une Sentence -rendue dahs les fornies, in loca
maj01'um, c'efl::à-dire, après un-mûr examen d~ la plainte
& de6.charge~:"o:>
;
L'art. l du~itre 1') ·de l'Ordonnance- criminelle, veut que ~
fi la pla~nte mérüe 'd'être inH[uite, le Juge ordonne le récolement & la confrontation. L'art. 3 détend exprefIëment
de procéder au-récolement des témoins, s'il n'a été ordonné
par Jugemént. C'eit donc par un Jugement foletl}nel, & n04
par un;(fimple,deeret, rendu fommairement '& fatis examen
préalable', :que cette quefiion doit être décidée; de-là les
Arrêts· de Réglement prohibent aux Juges' de rendre des
Sentehces de procès extraordinaire un jour fériat.
.
Sur le fecond moyen il difoit què l'arr. 9 du titre 1')
femble dire que les feules plaintes qui doivent être infiruites,
(onr cel1t!S'où il s'agit de crimes qui méritent peine affiiél:ive.
La Jurifprudence & les Am'eurs ont ajouré, avec-raifon, les
cas où il peut échoir peine infamante; parce qu'une plaintequi compromet l'honneur drun citoyen, qui tend à l'avilir,
à le deg-rader aux yeux de ~a fociété e'ntiere, efi auffi grave'
que -celle qui medaceroit fa_ vie"Ç Serpillon, (ur l'art. l d~
tjr. l s- <le l'Ordonnance' de I670 i' le':Commentareur d'Orléans ,r.Bornier, Vouglans & B,?uraric fur-le même article;
, Denifarr, verb. récolement, n. 4; Lacombe, Jurifprudence
climinelle, parr. 3, ch. I3, feél:. I, pag: 330 , n. -:2,; Bruneau, rir.) l''l', pag. 13 8 . )
~1 f - _
Quels font 'en ~ffet les' aél:es 'quÏ-':confiirùentule procès
·extraof.din{lir~?' Ce font Fe récolement1 & la confrontarion.
Au réc101emem { -les tél~lOins revoïeht 'ce qu'ils' ont dépofé
lors dé l'information i ils reél:ifienr leurs dépolitions; ils
peuvenè y ajourer des circonfiances elTenrielles, "propres' à
juHiher la pJ.aiOle. Oene procédure: eH doh'e i'ntereffaOle'
pOUT l'aéclJfareur~, Jbiefl plus que pdur''I'accufé: elle ' èl1: pour
{(:Hl feul avantage. Ce R'ef~ qù'à la onfrontatÎon qùe l'accufé!
_
J
..u)
..
~
..
,
...
�D U
PAL AIS
D B
PRO VEN C E.
44,3
trOuve les moyens de fe clHendre; alors il objeél:e les remoins, & dérermine le degré de foi qui leur eH dû. On lui
fait connoirre enfuite leurs dépolit ions , qui jufqu'à ce moment ont été fecretes pour lüi : il a la liberté de les difcuter;
de les combattre. Mais cerre procédure, qui en quelque maniere a été établie en faveur de l'accufé, fert également à
mieux con(J-ater fon CI ime quand il eH coupable; elle d.onne
plus de poids, plus de force aux témoignages qui l'accufent.
Ce n'ell point aux Parties que l'Ordonnance lailfe la faculté
de régler l'inllruél:ion en matiere criminelle; elle ne s'en,
rapporte pas même au Juge pour un objer au/Ii elfentiel, aum
important; c'efi elle-même qui Ijxe, qui détermine cette·
inllruétioo, & qui prefcrit aux Juges les regles qu'ils doivent
fuivre. La feule dillinél:ion qu'il y ait à faire fur cerre ma..
tiere, elle la fait, pour qu'on ne puilfe pas s'écarter de fa
difpofition. S'agit-il d'un délit privé ?' Comme il n'inrételfe
que faiblement l'ordre public, il faut moio.s de folemnité
dans 'Ies pourfuites: elle ne veut confequemment pas qu'on
puilfe en pareil cas ordonner l'inilruél:ion extraord,ioaire. Mais,
s'il s'agit d'un délit public, d'un crime grave, dont la pour__
fuite & la punition importent à la fociété entiere, dont rim..,
putation compromet la vie Ou l'h,oQnel,l,r d'11n citoyen ,. elle
exige cette inilruél:ion, elle commande au Juge cie la faire,
Il dl: donc très_indifférent qu'Etienne.......... ait déclare
vouloir prendre drqit par les charges. En matiere c.ivile, les,
. Parties peuvent lier le luge par leurs accQrds, parce qu'il ne
s'y agit que de leurs intérêts: inter confintientes lIvlltt. filnt Ji./-<
dicis pÇ1rte,s; mais en matiere criminelle, l'ordre & l<li march.~
de la procédure font de droit pulilic.
.
On répondoit pour Etienne, que l'ufage & les Commen.,.
tateurs entendent par Jugement d'inllruél:ion rout ce .qui ~lt
préparatoire, les perrr, i/Iions d'infprmer, les décrets ~ ~§
Réglemens à l'extraordioa.ire.l Vp\lglans, fur le tir~ 15 , arr"
3', dit que le Réglemen·t à J'extraoldinl1ire peut ~(re reodt\
par le Juge (eùLde l'iotlruél:ion.
,
10ulfe, ·to.m~, 2<, pag. 3371 d,it C!ue l'appel du 1ugel1l~J;\t
.
KU~.
�444
,
u aN A L
qui ordonne le récolement & la confrontation, n'dl:
point fufpenfif, parce que c'efl: un hgement d'Înfl:ru&ion.
Par la même raifon, le Juge ne peut prendre aucunes épices
pour le Réglement à l'extraordinaire.
La demande en procès extraordinaire, lorfqu'elle efl: rejertée, n'a pas befoin d'une prononciarion & d'un Jugement particulier. Le décret qui, au lieu de renvoyer à
fia ruer en jugeant, déboute tout d'un coup de la demande du procès extraordinaire, fuffit; fi celui qui le demaAde regarde ce décret comme injufl:e, les voies de
l'appel lui font ouvertes. Le décret ne le prive de rien,
ne lui ôte rien : une Sentence ne lui donneroit rien de
plus. Il dt défendu par l'Ordonnance de procéder au récole'ment, fans qu'il ait été ordonné, comme il efl: défendu
de procéder à l'information, fans un decret préalable de
foit informé; mais il n'efl: pas défenùu de refùfer le
procès extraordinaire à l'accufateur, fur la Requêre qu'il
. préfente 'à cet effet. De ce déboutement ,par voie de
décret plurôt que par voie de Semence, il ne s'enfuit
aucune irrégularité dans la procédure; il ne réfulte aucune contravention aux loix de l'infiruaion, aUCJn préjudice pour la Partie.
On répondoit fur le fecond moyen, que ce n'eH pas
par la gravité de la plainte que le procès extraordinaire
eH déterminé; c'eil par les charges de la procédure.
Voilà pourquoi l'article 1 du tit. l'ide l'Ordonnance de
1670, veut que, fi l'accufation inérite d'être inHruite, le
Juge ordonne que les témoins foient récolés & confrontés. Le Lieutenant qui connoilfoit les charges de la
procédure que Dur'and avoit fait prendre, a été convaincu qu'elle ne méritoit pas d'être pourfuivie extraordinairement.
Si l'accufation avoit pris du corps par les procédures faites
jufqu'alors, li elle étoit devenue apparente & grave, alors
il auroit fallu la confirmer ou la détruire par le procès extra'ordinaire; mais dès que les charges ne répondent pas à
0
�b tl' -P À. L A j 5 ]) 'Il PRO V Il N è H.
44 ~
la gravité de la plainte, que les réponfes Ont adevé d'effacer
la légere impreffion réfultante des charges foibles, l'accûfa..
t-ion qui s'el!: évanouie dans ce premier examen, ne mérite
pas des recherches ultérieures. Il n'el!: pas befoin d'3nendre
de nouvelles lumieres fur un fait éclairci à la déLharge de l'accufé, de chercher à le convaincre; quand il ne peut plus
être foupçonné; il n'eH: pas befoin de donner à la plainte
une nouvelle conlil!:ance par le réglement à l'extraordinaire;
ce feroit aggraver l'injure qui el!: faite à l'accufé; ce feroit
fe prêter à la vexation qu'il éprouve.
Mr. l'Avocat-Général d'Eymar de Montmeyan établit fur
]a premiere -quellion, qu'il eH: certain qu'il paroît y avoir une
parité exaéle entre les deux différentes déci lions que le Juge
peut rendre, lorfqu'il s'agit de prononcer fur le procès extraordinaire, & que fi le jugement qui l'ordonne, préjuge
l'importance & la namre de la plainte contre l'accufé, celui
qui en déboute, préjuge contre l'accufateur; mais il ne fuit
pas nécelfairement de cette parité que l'une & l'autre de
ces deux prononciations foit également effentielle & délicate;
c'el!: principalement quand il s'agit de prononcer, même par
forme de fimple préjugé, contre l'innocence .de l'accuré,que le Juge doit montrer une réferve & une timidité extrême. Tout ce qui tend au contraire à l'annoncer en quelque forte d'avance, el!: beaucoup plus favorable.
Ainli l'on ne peut pas faire le même reproche au Juge, fi
l'on voit que, s'agiffant de prononcer eh faveur de l'accufé,
il paroît s'être décidé avec un peu plus de précipitation &
de zele, pour ainli dire, qu'iln'eut fait fans doute, s'il fe fût
agi de fe déterminer contre lui. Mais où trouvc"'t.on d'ail.
l~urs dans la Loi, que, même dans le cas où ïl s'agit d'accorder le procès extraordinaire, le Juge doive toujours prononcer par forme d'Ordonnance ou de Jugement, plutôt que
par fimple décret?
/
• QueUe el!: la différence e1fentielle qu'il y a entre le décret, & ce qu'on appelle un Jugement ou une Ordonnance,
~ès que l'appellanc eft forcé de convenir que le Juge .inf-
•
�446
Jou RNA L
truél:euf peut [eul, & [ans le concours d'àucun autre Officietde ju!1:ice, rendre u-ne Ord~dna.nce ou. Jugement qui accorde
le procès extraordinaire, ou qui en déboute? Il ne paroît
gueres y en avoir qu'une [eule; c'eH que le décret n'ef~
écrit qu'au bas d'une requête, au lieu que l'Ordonnance ou_
Jugement occupe une feuille réparée. E/t-ce d'une différence
fI légere qu'on induira une nullité qui n'a été ni prononcée.
ni prévue par l'Ordonnance?
Dira-t-on que dans l'Ordonnance ou Jugement qui. pro~
nonce [ur le procès extraordinaire, le Juge vife I.es. c.harges.
.de la procédure, & témoigne aïnli lui-même s'être décidé
avec maturité & réflexion; au lieu que dans le décret dont
il s'agit, le Lieutenant ne s'el1 abColument déterminé que
d'après.les raiCons des parties, puiCque l'information n'y eH
plS même virée? Mais le Lieutenant pouvait-il choilir, pour
éclaircir le point de ravoir s'il devoit y avoir ou non de
procès extraordinaire,' un guide plus affuré que la requête
de 1)urand? Toures les rairons qui pouvoient plus aiCé,ment
le déterminer à l'accorder, comme la gravité de la plainte ,.
l'eCpoir d'obtenir de nouvelles preuves, les prétendus Coup!jons qui s'élevoient déja de Iii procédure, s'y trouvoient ramenées; & li quelqu'un avoit à Ce plaindre, ne ferait-ce pas
plutôt Etienne
en reprochant au Lieure_nant de n'avoir
pas cherché dans la procédure ce qui pouvoit s'y trouver à
fa déçharge., ce qui pouvoit détruire les allégations, les exagérations de fon AdverCaire? Peut-on reprocher avec bienféance au Juge inllruél:eur qu'il ne, s'e/t point dél;idé Cur les
charges? Et qui peut les mieux connoître que lui, Cous- les
yeux & par le minil1ere de qui elles viennent d'éclor.re ?
C'eH pour la preu\iere fois qu'on a ofé. dire que le Jugement
qui ordonne le: procès extraordinaire n'eH point un limple
jugement d'inf!:ruél:ion, Il ef!: impollible de lui donner une
qualification différente, Coit que l'on conCulte l'Ordonnance
de 167Q, ou la définition q,u'en dunnen:t. tous .les. CQmmen~
,laceurs,
" , . "
:Mr. l'A~oçat-Géné.ral· examla:l enfùite la. queLlioo,'<te fa",:
�D U
l'A LAI S·
D li
PRO VEN C I!.
447
Voir de qui doit dépendre le procès extraordinaire;.fi l'a'(;cufé renonçant aux avantages qu'il peut en retirer, l'ac~
cufateur peur être privé de ceux qu'il pourroit en retirer luimême.
Si d'un c6té, à l'époque intéreffante & critique du procès
extraordinaire, l'accufé recouvre ennn le droit d'interpeller
& de contredire les téhl0ins qui le chargent, de difcuter
la vérité & l'exaél:itude de leur récit, de les interroger fur
les circonftances omifes, de les faire expliquer fur celles
qu'ils n'one pas fuffifamment éclaircies, d'effayer même de
les faire couper, & de leur reprocher comme une preuve de
ce qu'ils fone menteurs & fubornés, leur coneradiél:ion &
leurs invraifemblances; d'un autre côté, c'eft par la reconnoiffance que les témoins font alors de l'accufé; c'eH par
l'application qu'ils lui font à lui-même, & fans être retenus
'ou déconcertés par fes regards, de rout ce qu'ils n'!'voIent
d'abord dépofé qu'avec une forte de précaution & de myftere; c'eH par la rougeur ennn & la cdnfufion dont le couvrt; leur préfence & leur témoignage, qu'on acquiert contte
lui de nouvelles preuves, les feules même qui puiffent déterminer le Juge, pu ifqu'en matiere grave, les dépofidorts
des! témoins qui n'one pas été confroneés, ne doivent point
êtrè lues.
'
'D'ailleurs, ufi autre aél:e d'inftr~él:ion préce'de la confro'ntation elle--méme &. la prépare; c'eft le récolement. Quel
eft l'avantage que l'Adverfaire peut vraifemblablemement redrer du récolement? Affignés de nouveau pour ouir la lecture dè ieurs dépofifions, & pour déclarer s'ils perfiftene ,
s'ils, y veulent ajou'ter ou' diminuer quelque chofe, les témoins ont alors le droit incontefl:able de foumi'r de nouveUes preuves contre l'accufé; & fi leurs additions, leurs
éxplicarions, leurs conviél:ions, peuvent quelquefois lui être
favorables \ Uy a, autant à pade. q,u'elles ,lui feront contraire-~' Commerithra nouvelle leél:ure de fa dépoll.rion rap" peUeroi '-e'Ue plbtôt l\\1 témoin ce qui eft en faveUr 'de l'accuré, q'tl 'Cé 'qui: en.1éonrre lui? 5i :'a'Vant'le'prod:s extraor-
!
~
�44 8
Jou
RNA L
dln3ire, l'accuCé ne peut pas même fe défendre, puifqu'il
n'a avant cette époque aucune connoilfdnce du fecret des
charoes &. de l'inClru;rion, il ne peut non plus être convain~u ni con:llmné, pour peu que l'objet de la plainte foit
grave. Comment eCl-il dapc poffible de dire qu'une infhuction qui com?lette la preuve, qui feule même en matiere
grave opere & peut oflérer la co.nviaion, ef!: toute en. faveur
de l'accuCé? Sdns doute s'il a affaire à un calomniateur, à
un Ccélérat, & ·fi celui-ci a employé. contre lui des témoins'
corrompus & fuborn~s, il peut retirer du procès extraordi.
naire les plus grJn.:ls avantages; il peut, avec quelque habileté & quelque fang-froid, ne pas feulement y établir la.
preuve co.mplerce de Con innocence, mais renveder fur fes.
AdverCaires eux-mêmes l'édifice entier de la procédure qu'ils.
avoienr élevé contre lui, &. les écraCer Cmis fes ruines; il
peut tout cela, &. fa rénonciarion volontaire 11 un droit H,
honorable &.. fi certain, dans le feul objet de gagner un peu
de temps, ne forme-t-elle pas déja contre lui un. préjugé,.
un préfomp:ion vi~lente, qu'il compte pl.us fur l'inCuffiCance·
q.es pteuves que fur [on innocence? Mais d'un autre côré,
s.'il n'eCl. poinr la vidime de la calomnie ,. il peut par fan.
embarras, par fon trouble à. la concro.ntatioa., fourni( imprudemment des al mes contre lui-même; il peut s'égaret:
eofin, fe trahir lui-même dans Ces répunCes :. &. pourquoi dès-.
lors dépendrait-il de lui (ell! de. priver (on ac;c.ufateur de tant.
d'avantages?
Il confent, dit.on, à être îugé [ur ce qui cff te propre
. ouvrage de fon adv.erCaire & celui des. rémoins qu'il a produit fur ceere part.ie de l'inaruaion. q~'il a dirigée feyl &.
fans cDntradiél:eur, &. dont il a. (eul auill tout le (eeret. Qqelplus grand a'lautage peut-il lui fair.e ,. &. comment la confro~~
\~rl?n, .q~e~!e qu'eu. ~oit l'ilfu~, peut:elle jamais ~ug01ente[
Ilne~alHe G une pareille pofitlQo? MalS à forc.e d'Hilifler fut'
la fi 'leur que méri~e 11 fi ju I:e rim: l'accuré, n'exagere-t-on.
pas un peu l'~m?arras & les. difficultés de fa pofirio,ll.- pour
1~ Wl<lre plus. Inter Œulte encore~.Efl-jl) par eXen1i!ù:, bien
exa&
�DU
PALAIS
Dl!
·PROVI!NC!:.
449
'exaél: de dire qu'avant le procès extraordinaire, il ignore
enriéremenr le fecret des charges & de l'infhuél:ion? La légéreté d.u décret laxé contre lui, & fur-rout l'interrogatoire
qu'il fubit enfuite, ne le lui re\'elent-i1s pas en parrie, &
ne lui efi-il pas encore plus aifé de pénétrer, d'après. Cèt
interrogatoire lui-même, fi le peu de charges qu'il peut y
avoir contre lui a ou non quelque confifiance?
Ainfi, lorfque fur le petit nombre de quefiions qu'on lui
aura faites, fur le peu d'infillance que le Juge y aura' mis,
& principalement fur le peu de liaifons enrr'elles, il aura
pu conjeél:urer avec une efpece de c,ertitude, qu'il n'y a prer-:.
que contre lui que le5 fGup,;ons produits 'par la plainte ellemême; plus fllr de fà jullification que de fan innocence" il optera
tout de fuite pour le parti le plus prudent & le plus utile,
quoique moins honorable, & confentira à prendre droit [ur
les charges, & à être jugé en l'étar. Ainfi tout accu[ateur
échouera même dans l'accufation la plus jufie & la mieux fon_
dée, roure,s les fois qu'il n'aura pas été heureux dans le chail(
de [es premiers témoins, ou lorfqlie ceux-ci ne [e feront
pas rappellés exaél:ement, en dépo[ant, de [Out ce qu'ils:
avaient rée!letl)enr à dire.
'
D'un autre côté, quel point d'appui pem-on -prendre pour
décider s'il faut ordonner ou non le procès extraordinaire,
fi ce n'eH pas d'ar,rès les charges qu'on doit [e déterminer?
En fuppofanr Paccufé coupable, il eH à craindre en effet
que toutes les fois qu"il fera aifez hel~rel1x pour q~ les in~
formations ne produi[ent pas contre lui des charges' confi~
dérables ( & il faur convenir, qu'il en fera toujours à pe~
près infiruit ), il n'ure du droit qu'il ama d'efquiver une
preuve plus complecre en demandan.t d'être jugé en l'étar,
D'un autre côte, en le fuppofaflt innocent, .fou accufareul;'
qui n"ef1: cenfé dès-lors n'av<Jir d'zurr-e objet & d'aurre vue
que de le vexer,' ne fongefa ql~'à, prolong-er pour lui' le tems
de l'humiliation; & pour différer d'autant fon triomphe Ill;
fa jtillif:cation, il demander:\, toujours Je p-rocès extraordinaire,
4nné~s z78 Z & 17,8:l,.
L Il
�~~o
Jou RNA L
Tels font les inconvéniens qu'il y a à craindre de pan &:
d'autre, obferva Ml'. l'Avocat-Général; ils fOl)t grands., &
ils paroiffent difficiles, dit-on, à prévenir. Dira-t-on qu'il
vaut mieux s'expofer à ceux qui ne font pas, après tout, entiérement irréparables? que les ve;;ations légales qu'un accuf~
innocent éprouve de la part de fon accufateur pendant l'inftmaion, ne font que momentanées, & que l'on peut l'en
indemniCer par des adjudications de dommages-intérêts., au
lieu qu'en privant celui-ci de nouvelles preuves qu'il pouvoit
efpérer de rappor.rer, on lui fait un mal fans remede, on
lui po ne un préjudice immenfe & fans retour?
A la bonne heure que lorfqu'il s'agit de prononcer défi- .
nitivement, à parité de raifon & dans le doute même, on
fe décide plutôt pour l'innocence. Et quel plus grand malheur
en effet que de cqndamner un innocent! mais auffi quel inconvénient de laiffer un grand crime impuni! Lorfqu'il ne
s'agit que de prolonger l'inHruaion, que de fe procurer de
nouveaux éc1airci1femens, pourquoi facrifier 11j,ême aux préComptions qui peuvent commencer à s'élever en faveur de
l'innocence de l'accufé, les nouvelles preuves que le procès
extraordinaire peut fournir à l'accufateur? Cette objeél:ion efl:
fpécieufe & fone ( continua Mr. l'Avocat-Général) ; elle ferait peut-être même fans réponfe, fi l'accufateur' & l'accufé
fe trouvoient ici dans des circonHances ordinaires, & s'il
n'y avait contre la calomnie de l'accufation que les foupçons encore équivoques que peut donner l'innocence apparente de l'accufé.
Mais dans l'hypothefe aauelle, Durand a un intérêt grave
à tergiverfer, à vexer Etienne......;. celui de différer le paiement d'une créance importante, & peut-être çle fe mettre
à couvert dans l'intervalle de fes exécutions, de rendre
d'avance illufoires & inutiles les titres de condamnation qu'il
pourra rapporter contre lui. Mr. l'Avocat-Général difcuta
enfuite la plainte, la foible1fe des charges, & fit valoir le
long filence que Durand avoit gardé fur le prét.endu enlé"";
�DU
PAL AIS
D 1!
45 r
PRO V B NeE.
vement des titres, & l'intérêt qu'il avoit à ne pas être jugé.
Il conclut à la confirmation du décret.
Arrêt du 29 Avril 1782, prononcé par Mr. le Prélidene
de St. Vincent, conforme aux conclu lions ; Durand condamnê
à l'amende du fol appel & aux dépens. Plaidant Mes. Lageç
& Simeon fils.
.
ARR Ê T
XL J J.
Appel comme d'abus de l'union du Prieuré de Notre-Dame
de Cœlis au Monaflere-CuFe de la ville de Saint-Maximin.
RE. Andravi, Curé de Gardanne, fe rendit appellant
comme 'd'nbus d'une Bulle donnée par GregoiJ e Xl ei\
1376, portant union du Prieuré de Notre-Dame de Cadis au
Monaftere des Dominicains de Saint-Maximin; il fourenoir
que cette union éroit infeél:ée d'une foule d'abus; qu'elle
avoÏt été faite en forme gracieufe; qu'on y avoit procédé fans
appeller la Communauté, fans informarion préalable, fans.
caufe, & qu'elle choquoit routes les regles, en donnanr Ull
bénéfice féculier à un Couvent de Religieux;.' il inrima l'E1
conome; la Communauté de Saint-Maximin inrervint,
Les Bénéfices, difoit l'appellant, changent de nature, non
pat droit de prefcription,- mais per prœfumptionem tituli, POUL'
opérer cetre préfomprion, il faut rrois tirres fucceffifs, &;
quarante ans de poifeffion. En matiete d'abus, c'ell; le titr~
qui décide. Il elt peu de cas où la po1feffian foit abulive en
foi. Hors de ces cas, quand le tirre ne paroît pas, la pof,
feffion ancienne en fait préfumer l'exiH-ence, & la même pr~
fomprion fait admettre que le ritre qu'on préfume efi: légi,
rime; mais œrte préfomprion el!. anéantie, quand le tltI't)
paroîr. La regle "egil/aria rcgufaribus a commencé d'exille\"
du moment où l, 1.éguliers ont commencé de vOl,lloi.t s'a.t,
trib~er tous les ~ -' fic es l' & vers les; douzieme & treizie~
M
LU
~
�4~1
JOUlllfAL
fiec1es, comme dit Piales '. trairé des Commandes, tom. t t'
chap. 1, L'union dom s'agit contrarie une regle bien plus
authentique encore, d'aprè5 laquelle les mandians font incapables de polréder des Bénéfices, tam réguliers que féculiers, & les Dominicains de Saint-Maximin n'avoient encore
là-deffus aucune difpenfe lors de l'union. de 1376. La poffeffion des Bénéfices eH incompatible avec la mandicité à
laquelle les Religieux, tels que les Dominicains, fc font voués.
L'union a été faite fans que le Bénéficè fût repréfenté
par un Titulaire, ~ fans qu'il pût être défendu; on a condamné le titre fans entendre le Titulaire. Ce n'eH pas là
feulement nlanquer à l'ordre fubHantiel des juge mens ; c'ef!:
contrarier le droit naturel, & l'on a choiii le temps où le
Bénéfice était dans les mains du Pape, non pout l'éteindre,
mais 'pour y nommer.
Le Pape ne peut unir en France en forme gracieufe.
Les Commentateurs de nos libertés, pag. 49, obfervent
que ces unions font imprefcriptiblement abufives, qu'on les
déclare telles après deux ou troi5 cens ans. Tel eH auffi le '
fentiment de Piales dans fon traité des l'acances de plein
droit, tom. 2. in fine, & de Van-Efpen,. rom. l, parc. 2.,
feél:. 3, tit. J 2., cqap. 3 ,n°. ~.
Qu'eH-ce qu'un Bénéfice? Un titre eccléfiallique, fi. l'on
veut, mais avec annexion de biens & dr,oits temporels. Que
font les MiniHres eccléfiall:iques? Il faut les divifer en del1x
claires. Le Titulaire n'ell: qu'adminiHrateur. Le Supérieur
dl: infpeél:eur; ils n'ont l'un & l'autre que de fimples pouvoirs d'adminill:ration. Le Pape, fupérieur étranger, n'ayant
nul droit fur la temporalité, ne peut exercer fe5 pouvoirs en
France que fous les loix, conditions & limitations portées
par les maximes du Royaume. S'il procede à des unions fans
s'alrervir à ces regles, il agit fans pouvoir; c'eH un Mini{l:re
étranger qui demeure fans titre. L'union à laquelle il procede a deux vices capitaux & ineffaçables; 1°. elle eH dbu{ive en foi, parce qu'elle ell: faite à l'aveugle, par defpotifme;
PN faveur & fans raifon canonique ~ 2.°. elle eft attentatoire
�D U
PAL AIS
D E
PRO V E ?f C :K.
4~ 3
Loix de la Nation. Le Pape dans ce cas exer~e en
France lin pouvoir qui ne lui appartient pas. Cet abus peut-il
être effacé, n'eH-il pas eifentiel, n'eH-il pas le plus fon de
tous? Nullus major ifl defec7us, quam potejJatis.
Le plus fort de tous les vices, celui qui (:Je s'efface jamais, & qui triomphe de tous les temps poffibles, c'ef!:
celui qui fe tire du défaur de caufe. L'union n'ell: pas
une opérarion arbitraire; c'eH un des aél:es les plus férieulC
dont les Minifires de l'Egliîe puilfent s'occuper, fur-tout
- Guand elle efl:, comme ici, extinél:ive d'un des deux titres
unis. L'union fans caufe ne peut fubfill:er, le poids en devient plus aggravant par le laps du temps, & le droir de
l'impérrant efl: imprefcriptible. Il ne faut pas croire qu'il
fuffife au Minifire de l'union de fe propofer une utilité vague
& générale; il faut qu'elle foit précife & motivée; il faut
une caufe fixe. Ainu un Bénéfice fimple peut fervir à doter
une Cure, un Monafiere; il peut fervir à la redotation,
quand elle efl: néceifaire; les caufes d'union font marquées
dans le droit. .une Eglife favoia~le pe~t être ~ré.ée & foutenue par l'umon d'une autre mOInS utile; mais Il faut" que
c·etre union foit néceifaire pour créer & pour foutenir. Auffi
le Concile de Confiance révoque les unions du temps du
fchifme , quand elles n'ont pas été faires pro veris t;, pro rationalihus cal!/is. L'on trouve dans Cochin, tom. l, pag. 209,
un Arrêt qui déclara l'union d'un Bénéfice fimple abufive ,
quoiqu'elle eût été fàite en faveur d'une Maifon Religieuf~.
Chopin, de facra polit., tom. 2, liv. 2, tir. 6, pag. 216 &
:2.I 8 , en rapporre pluueurs autres.
1
Il efi certain que dans le doute, tous les Bénéfices. font
cenfés féculiers. Mr. Piales, traité des Commandes ,tom. 2,
chap. 4, pag. 64 & 136, & des Collations, tom. l , chap.
8, pag. 1)0, attefie qu'effeél:ivemenr l'exifience des Bénéfices fimples réguliers forme un étar d'abus, & de plus un
abus des derniers fiecles; mais il ne dit pa~ que les Prieurés
.ruraux foint préfumés réguliers & Bénédiél:ins.
Quelques Jurifcollfultes ont dit, que la voie de l'appel
'lUX
�'4H' .
Jou
RNA L
comme d'abus n'étoit point reçue contre les unions faites
avant le Concile de Confiance; mais la difpolition de ce
Concile i1è tombe que fur les unions intermédiaires du remps
du décès de Gregoire XI, au Concile de Confiance, tempore obitus Gregorii XI, & même pour ce temps particulier;
ce Concile exige la réalité d'une caufe canonique; on fent
bien que dans le fens du Concile, la caufe raifonnable n'efi
& ne peut être que ,là caufe canonique; pourquoi le Condie auroit-il difpofé limitativement fut les unions pofiérieu:..
res au déces de Gregoire XI, temps auquel commença le
grand fchifme? Pourquoi n'aurait-il pas remonté plus haut,
s'il n'avoit pas eu pout unique objet de frapper fur les.
unions du temps du fchifme, comme devant ê-rre feules exceptées 'des Loix établies dans rous les temps en matiered'union ? Voilà pourquoi le Concile ajoure, en fe limitant
aux unions pofiérieures '1u décès de Gregoire XI, qu..'a cet:
égard on ne pourrait fixer des- regles certaines, cum certa regula dari nari paffit, c'efi-à-dire que l'Eglife ayant été divifée, & n'ayant pas voolu prononcer fur le caraél:ere des
précédents Papes ou Anti-Papes, il éroit impoffible de donner une iegle pour fixer le fort des aél:es qu'ils allaient pu.
paffer relativement à la queftion du pouvoir. Le Concile,
quant· à tQus ces aél:es ,. voulut faire, ceffet' toutes les queftians de forqle ,. même celles de pouvoir;, & par une difpofition générale, roUtes les tln'ions du temps du fcnifme
furent confirmées, à la féferve de celles qui auroient ét~
faites fans caufe. -Les Arrêts rapportés par Fevret, de l'ahus, liv. 2., ch. 4, n. 6; par Bardel rom. 2., liv. 3 , ch.
97, ne font point applicables à la caure dont l'union porte
fur des temps antérieurs au grand fchifme. Mr_ de Lefonet"
n. 2.9, en rapportant l'Arrêt qui déclara y avoir abus dans.
l'union de la Cure de Draguignan à l' Archidiaconé d'Aix ~
quoique antérieure au f:oncile de Confiance, obrerve qu'avant ce Concile c'étoit l'urage de faire des unions dans la
Province par des Commiffa ires, & après une· information ~
çe oui prouve
que les unions fans <;allfe n'ont. iamais. été- tQ~
a
.
�.DU
PALAIS
DI!
PaOVENCI!.
4~~
lérées; Chopin, de la police EccléfiaJlique, rom. 2, liv. 2,
tit. 6, pag. 2. 18, en rapporte un autre, qui déclare abuftve l'union faite par Benoît XIII dans le remps du f(.hifme,
~e la Cure d'Iffoire avec la Collégiale de Moulins @n Bourbonnois.
Ici où trouve-t-on la caure? L'aél:e n'en exprime aucune 1
ce n'en efi pas une en effet, que de merrre trois Reltgieux
de plus dans un Couvent, à l'effet de prier Dieu pour le
(alut de Parne du Pontife, Minifire de l'union & de fon
prédéce/fellr. Regardera-r-on comme caufe valable d'union
l'a/ferrion de ce Pontife, fur ce que les prieres des Régulier~
font plus perçantes, plus aél:ives, plus agréables à Dieu que
celles de.s membres du Clergé féculier? Mais quand oil parle
d'une caufe, on entend un morif utile à l'Eglife en général;
un motif fur-rout de néçeffiré pour l'Eglife particuliere à
laquelle on unit le bénéfice qu'on fupprime.
,
On ne prouve rien en difant que le Monafiere de S.aintMaximin avoit la Cure & le College. Il eut po/fédé alors
l'un & l'autre, on n'en feroit pas plus avancé: car l'union
n'efi faite ni à la Cure, ni au' College, ni pour la Cure, ni
pour le College. Si ce Monafiere ce/foir aujourd'hui d'avoir
la Cure & le College, l'union n~ devroit pas moins fubfifler,
puifqu'elle ne dépend ni de la Cure, ni du College. Quoi-.
que l'Hifiorien Bouc~e, tom. l, pag. 213, dife que la Cure
leur fut donnée en I2.80 ou 1290, M. le Cardinal Grimaldy
l~ur prouva ditnS le temps, combien peu ils doivent s'ap-c
puyer fur la Bulle primirive de Boniface VIII de I2.9), &
de roures les autres qui l'ont fuivie jufqu'à celle de Sixte
IV, qui leur donna le droit de Cure qu'ils n'avoient point
encore, & qui leur fit ce don fur la demande du Roi René.
Avant cerre époque -la Curé étoit po/fédée par les Bénédiains. Et ce fut en 1461 qu'on vit finir le procès avec les
Dominicains, devenuspo/feffeurs de la Cure, ou, cequi revient
au même, du Prieuré de Saint.Ma"imin ou de Saint-Mirre,
qui ellie titre de laParoi/fe. Auffi le Co~venF de Saint-Maximin
paye-t-il 40 c~arges de b~ed tous lç.;s ao§ ~ Sajnf-Viè1or, en
�'4~6'
JOlI RNA L
repréfentation de l'ancien droit que ce Monallere avait {ur
la Cure. Ainfi les vrais principes fe réunilfent avec J~s énonciations du titre, pour donner à conclure que le Prieuré de
Notre-Dame de Ccelis étoir Séculier, & qu'il ne pouvoi~
pas même être Régulier. Aillfi l'union donr s'agir dl: abfolumen.r & ineffaçablemenr abufive. Tous les traits d'abus fe réunilfent fùr ce ritre. Qn y voit fur-rour prédo-.
miner le défaur de caufe; ce vice impérilfable ,. éternel"
qu'aucune confidération humaine· ne peut effacer. La faveur
de la caufe peur faire pamonner le vice des formes ;'l'mais
comment un ri.rre pourra-c-il mérirer indulgence, quand les
formes & la caufe lui manquenr également? Comment"
porra-t,on le bilfer fubGll:er, quant au défaut abfOlu de forme & de caufe fe joint encore le défaur abfohl de pouvoir,
& que l'union, ouvrage d'un Minifl.re étranger, n'ell: qu'u~
attentat formel aux droits de la Narion? On a vu quelquefois des Arrêts pJlfer fur le déFa,lt de caufe du temps d'a.lors, & s'-arrêter fur les caufes aauelles. Les Cours Sou~
veraines on.t dir alors, que fi l'union avoir été mal faire, on
pourrait la fàire aujourd'hui, parce que la caufe exiHe, &:
]a faveu'r des grands établiffèmenrs t'a quelquefois emporté·
dans les cas de cerre ef'[lece. Ain'fi par exempte, dans le cas
de l'Arrêt de Salon, rapporté par Bonifaèe, rom. 3, liv. 6,
tit. 4, chap.. l , l'abus érait clair, évident, quoique les:
moyens ne fulI'ènt ni fi f~rts, ni autant II:I'Jlripliés qù'ils le,
fane ici. Mrs. les ].lges, fuivanr l'obfervation du Compilateur, éroient touS d'avis de déclarer l'abus de l'union, mais
la pauvreté du Chapitre l'emporta.
On unit pOlir caujè de pauvreté, dir Augeard, tom. 2.;
pag. 148; la nécefljcé qui doit opérer l'union, conJzfle dans la.
pauvreté de l'Eglift, ou· lorfiiu' el" efi tombée dlms la. défolacion par les guerres; il ajoute que l'union eJ1utile, lorfque les
r~venl/s du bénéfice font fi modiques, qil'on ne peut trouver aifément d.~ Titulaire pour le deffèrvir. C'efl auffi ce qu'attelleRel)l)lfe, d.e l'ullion , n. 39. Tels fom les cas où l'on peut:
W'lt'Io.yel' un Bénéfice fimrIe à fOl!tentr un établiffemenr\Jtite:
�DU
l'A LAI S • D.E
PRO VEN C l!.
4~7
utile ~ l'Eglife ; dans ces cas le laps -du temps 'pëut faire paffer pardeffus' les formes, pour en conclure que l'union
non utile dans le 'temps qu'elle a éré faite, pourroit l'être
qeyedue, dans" la fuite. Mais hor~ de ces cas, Ipeu~-od fermer.
les yeux fur'l'extinction d'un' Bénéfice qui n'a' fervi, & qui
ne' fert encore qu'à l'enrichi{fement d'un· Monallere, qu'à le
mettre diU1S; un étar d'opulence exceffive, & même contrai,re,
à fa p.r.e!Jlière il.il:irution ?
"
., '- 1
'On répondoit pour les Dominicains 'IAu'il. falloir connçléFer l'acte en foi, fon époque' & le lieu O~I~ il a,ér~Ja,ir."n
s'agir de l'union d'un Bénéfice fimple à un Mpna!l:erecçul"§.
l'union· aéré fait"e antérieuremenr au Concile, ôe Conllpn:"1
ce, & même avanr le décès de Gregoire XI. .L'union aéré,
faire en Provence avant qu'elle mt réunie à Couronne de
France.
.
1
Les Bénéfices fimples ne fonr de\'enus r1'1s que p;lr une
longue fuire d'abus. Dans l'origine, tous les Béné.nces ,éraientl
charg~s de fonctions Ecclélialliques, & ils érojênr néceffairement fujers à rélidence. On ne trouvera aucun décrer des
Conciles, .foit anciens, ,foit· modernes f -qu,i air ordonné l'é-,
tabliffement d'un Bénéfice fimple. On peut fou'iller"dans .[bU.SI
les monumens EcdéfiaHiques connus & aUrorifén 19f1Jr.J»Y{
découvrira point de ritre d'érection de Prieuré·;,,;oj.I ~a!Jtre
Bénéfice fimple. C'eH le relâchemenr qui les a, jntrpdiJiçs
& maintenus. Delà on a conclu que l'ùnion, des ,Biné,fice
fimples étoit favorable, parce qu'elle diminue' un· des abus
qui affiigenr l'Eg1ife. On a penfé que les regk&~qeLul1jons
n'ét·oienr pas févéremenr applicables ,aux. Bé.né~ces, (jm~,le§,
C'efl: .ce.- q\Ji réfulte de la dqctrine du JCardinal ge. L,uca"
dans' fop Tr<liré de Benificiz's, difc. 47, arr. ,,'4 &:: Jt5 , p'~g.
RI Ï" de Van-Efpen, r.om. l , part. 2, rir. 29, ,ch~'p.~ 2,1AI:.
IJnione fJeniJiciorum, Pilg. 743.
.
r , . . . )'. ) "J_1
~ T9JI.s •. les 1 GaI1.QniHe~2ud.éclaren~ qge I~$ .!lé! éJi<lefuÛ{l1;p.JI;~
fQlJr ·<:eu,x que' l'Eglife u)lir,le pl.us yolqmier:; ~r4~~:~éi)éJiç!lg
u{jÏles' Ainfi· prenü~1' principe dt la mar{ereL: 11~L!nipn, p~~
nén§fiçc:~ {jl1Jples efl:,c:xrr.êlTlern.en~ ~vQJaQll ,. .';l!irê!tlSIDe~t'
J
Années l78i & l78z.
Mmm
�438
Jou
R If A L
defirée' par les Loix. Second principe: l'union des Bénén..;
ces fimples étant favorable,. les Tribunaux one prefque toujôurs fermé les yeux fùr la maniere dont l'union a été faite.
Mr. Piales,. dans fon Traité des Vacances de plein droit,
pag. 374,. àprès des obfervatioDs générales, établit 1°. que
la prefcription de 40 am. couvre les défauts de forme des
unions, lorfqu'ils font légers ou peu imporcans; zo. que la
prefcription de 100 ans couvre les défauts confidérables ,.
pourv.u que le titre ne foit pas rapponé; 3°. que quoique le
titre foit rapporté, là prefcripcion en c,ouvre les défauts dans
trois cas. Le premier,. lorfque l'unioneil: utile à l'Eglife. Le
fecon~ ,. lorfqu'on ne pourroit la révoquer fans de grands ·in'"
Convéniens. Le· troifieme, lorfque l'abus que l'union renferme n'intérelfe pas l'ordre public, comme il arrive dans la
plupart des unions des Bénéfices fimples.
Tous les Prieurés fimples font cenfés réguliers dans leur
origine. C'eil: ce' qui nous eil: atteil:é par Lacombe dans
fes matieres Canoniques. La Bulle d'union done s'agit fuppofe que le Bénéfice étoi~ à cette époque polfédé par un Séculier; mais elle ne' prouve pas la fécul,arité du ti~re. La'
regle,. regu/aria TI'gu/arilms,. [ecu/aria flcu/aribus., n'exiltoit
point à a'époque de la ·prétendue union. On d{)nnoit alor~
indifférémment rdus les Bénéfices au'x Religieux; on leur'
avoit 'même donné .roures les Cmes. Aujourd'hui par le feul·
laps de 40 ans un B'énéfice' fé€uliel' peur devenir' régulier &
'fIice verfâ. Donè, s'il éwit pdffible d'imaginer un abus,.
cet abus furGit de fa na,ture p-refdriptible, & une tJ0ffemofll
de plus <fu> quat're' ftedé'S' aUf~i[ 'certainemem fuffi pour le
Ci:ouv.rÏ>r. A: ~~épotJueJ dé I\lniolvle M011a'h~l'é de Saint-M.a.xi..l
min étoit 'MonaRere~G!lr~; 't'ef!? ce qÙI rtous cil: at~efié par
Boudie d'à:ns fI:/A .Hifieire d\'!,Provence,
l , pag. 2. q.
Les Cures font eifeneielleme-fu établiifemens fécuI.iers,. &.
elles font les plus favGt-lfbréS de-H,>Us.; Donc 'le Monafiere de
Saint-MalCimin{; <comme)M'0nàfl:-ere"Cul'e' ~.éC0it dans le vaS
de jouii'lIe! tôu~'la fàv~ér1 dé 't9us''les. priV'~leges, de [D'uS
rés dcoi'ts'inhérootS'> là> a.t fé~ulaTlt« Dohc' 1~.premiêl' moyen
rom.
Id ,;.i .,
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.. "".
...
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PALAIS
DI!
J> Il 1> VEN C li.
.
4~ 9.
d!abus cOté par Mre. All,.dravy manque fous touS ~s rap.
pons.
'
En recond lieu, Mre. Andravy prétend que l'union a été
raite fans information préalable; mais il aurait dû s'apper...
cevoir que le défaut d'epquête, c.omme l'en feigne PiaJes.,
~ft un ,lll0y,en de forme très-m,~prifable à l'égard de l'union
çl'un Bénéfice fimple. Il a été jugé ~n 1667 qu!il n'y ~vpif
~~~ a,bus dans l'union qui venait d'êue faite par M. Je çar...
dinal Grimaldy , Archevêque d'Aix, du Prieuré de Cabriere
à fan Séminaire, quoiqu'il eût omis la formalité de l'infor~ation fuper commodo fi incommodo. Dans le /llêlny cas le
,t>arlemenc de Paris avait jugé la même chaCe en 1649 eq
fa'leur du Chapiire de Champeaux.
Les Communilutés ne doivenr êtFe· n·i entendues ,. ni appelIées, g.uand it s'agit de l'union. d'un Bénéfice fimple;.
d'ailleurs Mre. Anciravy n'ell: pas ..:onféquent ,. puifqu'il oppofe d'abord que la Communauté de Sainr-Maxi!t1ilT' ne fut
ni app~lIée, ni entendue lors de t'union, & qu'il conreHe
enfl.1ite l'in,rervenrion aél:uelle de la Communauté; .cependant la çommunauté a ,~ien plus d'intérêt d'empêcher le
démembrement du 'Bénéfice depuis qu'il eH "lni à la Çure ,
q.u'elle n'en avoit d'empêcher l'excinél:ion d'un Bénéfice fim-·
pie, dont l'exiflence n'intére/foit en. rien le peuple.
Les Lenres-patentes n'étaient pas nécelfaires..Les Déclarations de 1718, & 17t9 déclarent formellement que t'on,
ne pourra attaquer, fous le prétexte du défaut de Lettrespatentes, les unions faites depuis 40' annéej. Le défaut'
d'annexe n'eH pas plus relevanr. Le plus ancien titre auqueh
on puilfe faire remonteF l'établilfement de l'annexe ,. date:
<le l'an.l)é~ 1 S82. Encore faut-il remarquer que ce titre n'.ef!::
qu'une. Ordonnance du Confeil éminenr ,. qui portait qu~
l'on ne pourrait exécuter fans paréatis. a.ucun a&e de Jurif~
diél:ion
étrangere. Le droit d'annexe eH poH.érieur à l'union;;
,
,
il n'ell: .venfl que plus d'un fiecle après..
,
Qu'importe qu'au moment où le :Bénéfice a é.'ré: uni, il!
fût vacant in Curid. De, cette circonfiance on al, voulu dé...
-, -
.
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11 RNA L
•
âu'! deux moyens -d'abus: le premier, que le Bénéfic; Ce
trouvait. fans Titulaire & fans Défenfeqr j le fecond, que le
Pape ~ abufé à certains égards, d'une {orre de dépôt qu'il
âvoit dans fes mains. Mais Il eU certain que le confentement du Titulaire n'efl: pas requis pour l'union; on l'entend quand il exjlte, mais on n'a pas befoit? de fon ad hélion. Gn peut unir, quoiqu'il contredife l'union. CoinmunéInent le ·tems ,de la vacance eU toujours choifi pqur unir,
parce qu'alors l'union s'elFeél:ue tout de fuite j au lieu que
pendant 1:1 vie du Titulaire, on e!l: obligé de lui faire un
fort; Je vrai Défenfeur des Bénéfices elt le Supérieur Ecdéfiaflique :qyi' unit; c'eU l'Eglife elle-même j car les Titulaires ne font que des ufufruitiers, qui dans les ~rocédures'
d'union ne font entendus que pour leur intérêt particulier,
& nullement pour l'intérêt général du Gouvernement EcdéfiaHique. Les Bénéfices n'appartiennent jamais.en propriété à aucun particulier; ils appartiennent toujours à l'Eglife; vacans ot! non, ils forlt toyjours fous la main 'des
Supérieurs qui peuvent 'les unir, les fu'pprimer pour le"plus
grand bien de' l'Eglife elle-même; on peut en rollt f terhS ,J
& 'en toure occafion, difpofer des biens Eccléfi~!l:ique.s;
quand l'milité de l'Eglife l'exige. Si l'union a été faite par
le Pape en forme gracieufe , c'eH parce que I.e Pape.
étoit alors le principal MiniHre des' unions, & que la
forme grâcieufe était la plus uGtée. Enfin la' caufe de
l'union elt fa néceffité ou fan milité; l'utilité eH de
plufieurs efpeces. Tout ce qui t~nd à faire '. ceffer un
abus par un aél:e licite & d~Grable , el\; utile': or ,
n'eU-il pas' vrai qùe c'eH Rar- ur ab'us 9ùe les Bénéfices'
J
yrai que fi la 'pr~rtription
1imples fubfiHent'? N'éH-il
~ aurorifé & confacré les Bénéfices' fimples, l'Eglife en
fait volontiers J'union à dès établiffemens né'ceffa:ires ?:Ici
c'eH un Bénéfice fimple qui ~ été uni à un Bénéfice-Cure j
donc la ca.ufe d~ l'.union fe frouve dans l'union même.
Au 'furplus r, 'des' Loix p1récifes oni-fermé la bouche à lout
impétrant' COrln'e des mOl1sTeh bables à celles què'l'or1 dife2
pâS·
�•.
DU
PALAIS
DE
PROVllNCE
461
cùte. Par cela feul qu'il s'agir d'une union faire à un-Corps;
cene union doit 'êrre refpéa·ée. Une Déclaration' du' 24Novembre 1737 confirme toures les unions faires à des
Abbayes, Chapirres, Corps ou Communaurés féculieres ou
régulieres de la Franche-Comré, lorfqu'elles fe trouveront
faires quarante années avant le p'remier Janvier J ') 64' Url
Arrêt du Confeil d'Erat du 12. Aoôt f 1711.2. a l'affuré les
.
Provinces de Guienne & de Languedoc fur les union's an'"
ciennes. Une Déclararion du 8 Mai -1769, donnée fur la demande des Députés du Clergé, a fait défenfes à toUS Collateurs d'accorder, & à cous EccléfiaHiques d'obrenir ou d'impérrer à quelque tirre que ce foit, de.s proviGons de bénéfites qui auroient éré unis en coU[ ou en partie aepuis plus de
100 ans à des Evêchés, Eglifes Carhédrales, Cures, Séminail'es, Hôpitaux pu Colleges. La même Loi déclare nulles & de nul
effet coure provifion des mêmes bénéfices qui fe.roient à l'avenir obtenues ou impérrées. Elle vellE que ceux quiauroient ob.!
tenu ou impétré les bénéfices, à quelque. rirre que ce fût,
[oient déclarés non!...recevab1es dans coutes les pourfuites qu'ils
pourroienr faire co'ntle les unions· ou défunions, & que les
Evêchés, Eglifes Cathédrales, Cures, Séminaires, Hôpiraux
ou Colleges , '[oient renvoyés de coures les demandes qui
pourroiem êrre formées conrr'ellX.
. Il dl: convenu' dans toure' la' Chrétienré, que le Concile de ConHance a fait révolurion dans la difcipline de
l'Eglife , & qu'avant ce Concile,i coures les vérirés éroient
oblCurGies.,· & toures les regle.s éroient dans le cahos.· Au
rapport de tous les Hifioriens, on avoit vu s'érablir les Mandars, les unions gracieufes, les anrÎates, les graces expectat·iv<es _,' tarit tgénér.ales que parriculierès, & généralement
tous les abus gui ~nt affligé la difcipliile. (Pafquier, dan~ fes
techeféhes de la France, tom. 1, liv. 3 , ch. 2'), col. 2') 9,)
Ce C0nciIe avoir à guérir. des plaies profondes; il avoit· à
réparer de grands maux; les Peres de ce Concile poferent
les grandes bafes du Gouvernement EcdéliaHiques; ils \définirenda .fupérioriré des Conciles fur les· Papes. Ils déclàr~
.
••
�4t)oz.
Jou RNA L
renr, par forme de Jugemenr doél:rinal, 'que l'autorité dell
Papes devoir êrre réglée pa-r les Canons ; & ils rendirent
encore hommage à l'indépendance des Couronnes.. C'eft de
ces grandi principes définis, & fixés par un Concile écumé~
nique, que font nés rous les Réglemens uriles fur les unions
& fur raus les aurres objets Ecdéliafiiques.
L'article 49 de nos lipertés rédigées au qu.inzieme fiecie , porre : que le Pape ne peut faire aucunes unions ou annexes des hénéfices de ce Royaume, la vie des Bénéficiers,
ni aautres lems j mais ftulement donner refcrits. délégataires
l'effet des' unions qu'on entendra faire, felon la ftrme contenue au· Concile de Confiance, & n.ofl autrement.
Il eft bien vrai. de dire que les unions gracieufes font l'aél:e·
d'un pouvoir mal ordonné-, (nais la légiilarion du rems ad·
menait ces unions, & cela fuffit pour ne pas juger des unionsqui ont ~ré faites 11 cetre époque ,. fur les Loix qui ne font
venues qU"lprès. Il feroit ab{urde de vouloir que l?ob[ervance·
de~ regles eût dévancé les regles. Ce n'efi que depuis lors
que l'on c.on.noÎt des maximes fur routes les matieres, & en~
tr'aut·res fur les unio'ns.. Del'à vient qU.e les premiers Arrêts.
qui ont dédaré les llnjon~ abulives , ont prononcé exprelfé.
ment qu'elles éraient ahulives ,. comme. contraires au Concile de· Confiance. L'Arrêt de l 'i4~ fut rendu fur l'appel
comme d'abus de llunion de· l'Ordre de Sainr-Lazare à celui de Saint-Jean. de Jeruf>llem, au fujer d'une Commanderie comeHée. Celui. de 1 S60 déclara abufive 1?union de la,
Cure de Saim-Sau.veur au Chapitre Saim-Germain-l'Auxerois. jugé de même par celui du 30 Avril 1 ~7t, au fujet de,
l'union. de la Cure de B10un à 1a Collégiale de Saint-Etienne:
de Limoges, & par celui ·q.ue Ba1fe.t rapporte, tom. l , liv•.
1., tit. 4, ch. 6 ,. pag. 62;._
.
Ce n'efi encore 'que depuis le Concil'e de Confiance, que:
Von a, commencé· à gêner le pouvoir des Légars du Pape'
en France fur les ulJions ;: on- peut voir les Lettres-Patentes
du. 17 Février l~i4, & du 2~ Novembre lBS, & l'Arrêe
d; ~gqjfication,du 2,3. Jilin ,15.4,:7,. C'efi. auj}i la, remarque des
a
a
�n.u
PALAIS
DI!
PROVENCE.
4&')
Auteurs. (Rebuffe, praxis hellef. de unionihus 6eneficiorum 1 ~.
49, pag. 199; Dumoulin, conf. 4'4'; Durand, de Maillane,'
tom. 2, pag. 192 ; Theveneau fur les Ordonnances, pag.
10 9.
)
Il Y a plus : les un.ions· faites même pofiérieurement au
Concile de Confiance, ont été ménagées pat le Légiflateur,
par les Loix canoniques & civiles. Le Concile de Trente,
[elf. 7 ,cap. 7, en défendant les unions qui ne Ce font pas ex
legitimis aut alüs rationalihuli caufis, & en chargeant les Evêques de revoir les unions précédentes, a renfermé cette recherche dans l'efpace de 'fo années avant 'Ia tenue du Con.cile; c'eH auffi ce qui. efi décidé dans le rappoFt du Clergé
de France de 17SS, pag. 140, & de 1760, pag. 108.
De ce que le Concile de Confiance efi la. véritable épo-que de [(')us les régie mens fur la matiere , les Tribunaux &
les CanoniHes concluent que l'on eH non-recevable 11 atca<Juer les unions antérieures à l'époque fixée par le Concile.
de Confiance. Papon en fes Arrêts, liv. 3 " tit S, des union$>
de hénéfices, pag. ~79 ; Ra,/licot dans Ces notes fur le Con..
cile de Trente, pag. 120; De-nifart, verb. rinron; Furgole
dans fon traité des CuréS primitifs, pag. HS ; Piales dans [(m
tr<bité du dévolue, tom. 2, pag. J4'6. Tous ces Auteurs at~
tefient que les unions faites, avant le décès de Gregoire XI
lOnt à Vabri de tome ce·nfure.
Les: exemptions, de quelque nature qu'el-les foient, inrére/fent le Gouvernement fpirituel de l'Eglife ; les unions
n'imére/fent que I!a temporalité. Ban.s les exemptions, il s'agitt
d'un pamge, de l'autoricé ; & dans touce [ociété àlile & re.
ligieuf'e,.la,diGribution de l'autorité tient à la .confiiMion même
du Corps; dans les unions, au contraire, il ne s'agit que d'UA am.
~Ie parcage de biens. L'examen d'une exemptioA efi une queLlion
de Police & de' Gouvernement; l'examen d'une union tombe
prinâp-alement en que~Hon de propriété; 011 doit juge, ,- pail
}a difFérence qu'il Y' a encre la nature des exemptions & c-e1le
des unions, de, la différence des principes. qui doivent gouv.erper ces _deux chofes. Auffi le Conçi1e.de Coofl:ance a, très,
�46+
.
Jou RNA L
bien remarqué cette différence: a-t-il fàllu prononcer [ur des'
exemptions? Il les a abolies d'office, & par voie de légifiation ; il a traité cer objet comme. une chofe qui intérelfoit le
gouvernement de l'Eglife: a-t-il fallu prononeer {ur les unions?
Le Concile de ConHance s'eH dirigé par d'autres principes;
il n'a point révoqué d'office; il a feulement reconnu le droit
qu'avoient les parties interelfées de demander la révocation
des unions abulivement faites. C'efi: ainli que 1e remarque
Mr. 'l'Avocat-Général Talon dans [on plaidoyer du 4 Juin
1674.
Ainli, s'agit-il d'un abus fubilantiel, d'un abus qui aH'eéte
l'aéte en [ai, qui fe perpétue dans les effets fucceffifs de cet
aB:e ? JI faut toujours pouvoir appliquer le remede, parce que
le mal exiHe toujours. L'abus eil alors tel qu'aucune puilfance
ne peut le légitimer, & qu'aucune conlidération ne peut le
couvrir. N'importe de favoir dans quel fiecle un pareil abus
a 'pris ·nailfance. Cet abus ne peut prévaloir contre l'elfence
des chÇlfes. Il eH toujours vivant. Quoique ancien, il efi: toujours récent par le préjudice qu'il perpétue. Il faut donc toujours pouvoir le réformer. S'agit-il au conrraire d'un abus
qui n'a exiHé que dans le procédé de l'aB:e, & non dans
l'aéte lui-même, d'un abus qui n'a plus de fuite, qui n'a plus
d'effets dangereux? Il faut alors favoir fe rranfporrer au tems
Otl la chofe a été faite, & ne plus regretter fur des manquemens doO! les .effets n'ont plus rien de préjudiciable, &
que l'erreur du tems doit faire excufer. Il fuffit donc que
l'union attaquée ait été faite antérieurement au Concile de
Confiance, .pour qu'elle fait inattaquable; d'ailleurs elle a été
faite dans la Provence, qui n'était "point encore réunie à la·
Couronne•
. On fait que dans la fuite des tems, la. Provence a forrement réfiHé aux entreprifes de Rome. Nous devons au courage & au' zele des M~giHrats, le droit d'annt'xe, & le
r.ecouvrement de notr~. liberté. Après la réunion de la Pro~
vençe à la Couronne, il ·a fallu une Loi parriculiere pour
rendre le Cdn,ile de ~Confiançe exé,utoire [ur le fait des
UOlOns.
�1)
U
PAL AIS
D Il
PRO VEN C E.
465'
unions. Cette Loi efi la Déclaration de François Premier,
du II Août 1 H3, enrégifirée le 8 Oé!:obre même année. Le
principal motif qui fit déclarer abus dans l'union du Prieuré
de Carnoulles, c'efi qu'il avait été uni pofiérieurement au
Concile de Confiance, & à la Déclaration de François Pre~
mier, & qu'il s'agiifoit d'ailleurs d'un Prieuré-Cure: c'efi ce
qui réfulte du plaidoyer de Mr. l'Avocat-Général de Lezonet.
On difoit pour la Communauté de Saint-Maximin, que les
biens de l'Eglife font ceux du peuple, non-feulement parce
que ce font des féculiers qui les ont donnés, mais encore
parce que l'Eglife ne les reçtlt que pour en être la difpenfatrice. L'entretien de fes Minifires prélevé, fan, efprit efi· de
ne poiféder que pour les pauvres. Plus d'une fois les Eccléfiafiiques fe font éloignés de cette intention; mais la maniere dont quelques-uns la rempliifent, l'efpoir que d'autres
fe feront un honneur de les imiter, fourniifent aux Com~u
nautés, dans lefquelles les bénéfices font affis, de juHés motifs de s'oppofer à ce qu'on n'en tranfporte pas la poifeffion
à d'autres pel [onnes qu'à celles qui les adminiJhent [ur les
lieux. Delà l'intervention des Communautés, quand on veuil
[upprimer un Evêché, un Chapitre, un Bénéfice cbnfidérable, & le réunir à quelqu'autre. Delà la regle d'appeller les
Communautés routes les fois qu'il s'agit de tqucher aux Bé''
ne'fi ces.
L'intérêt des Communautés augmente à me[ure que les devoirs des Bénéficiers envers elles font plus étendus & plus
étroits. Les Bénéficiers fimples voient de moins près les befoins du peuple. Leur charité n'eU pas follicitée par les 40nfidences de l'indigeilt ; elle n'ell: pas forcée par la -home de
prêcher ce qu'ils ne pratiqueraient pas. Mais les Bénéficiers
à charge d'ames ne peuvent éviter de faire des aumones. Ils
ne le voudraient pas, qu'elles leur feraient arrachées en
mille occafions par le fentimem, par l'honneur, ou même
par le refpeé!: Humain. Il importe donc au peuple que ces
Bénéficiers foient riches, qu'ils jouiifeut au moins' de tout
ce dont ils font en coutume de jouir. Quand. il ne partage~
Annél:s z78: & z7.8:J..
Nnn
�~6
JOURNAL
roit pas dans le moment leur forrune, il rravaillerolt pour fa
pofiériré, pour ,le rems où des Pafieurs plus rendres le régiroienr. Tels fom les moyens d'inrervellrion de la Communauré. 1°. Elle vient défendre un Monafiere qu'il efi de
fon intérêt de conferver riche, lors même qu'il ne feroii:
pas .curial.
Elle défend fon Curé. 3°. Elle défend le
Curé le plus charirable.
Mr. l'Avocar.Général de Cali1Tane, après avoir rappellé
les raifons refpeél:ives des parries, préfenra le rableau en raccourci .de ,l'érat de l'Eglife avant l'aél:e de- 1376; les enrreprifes de là Cour de Rome, les pouvoirs que les Ponrifes
Romains, . même les plus pieux,' voulaient s'arroger; les
khifmes dans l'Eglife, & les abus qui s'y éroient gli1Tés ; la
réforme opérée infenfiblement par les Conciles; celui de
Confiance rermina raur : il définir les plus grandes vérirés;
il pofa les bafes de rout réglement" & fit revivre le droit
Ecdéfiafiique auquel avoir (uccédé la volonré arbirraire ; ce
Concile décida qu'on maintiendroir raures les unions qui auroient été faites pendant le fchifme, ou plurôr qu'on dérruiroit toutes celles qui n'auraient pas eu pour bafe jufiam 6'
rationahilem caufam, fans examiner fi elles avoient éré faites
par une autoriré légitime.
'
. Mr. l'Avocat-Génér.a1 enrra en/llÎte dans la difcuffion des
'décrets porrés par les faints Canons, des opinions des divers
Auteurs qui ont trairé la matiere; il fir obCerver l'intervalle
du tems qui s'érait écoulé depu,is le décès de G[egoire XI,
jufques à la conclufion du Concile de Confl:ance ; il démonrra que l'union du bénéfice de Norre-Dame de Cœlis érait
l'union d'un Prieuré rural, bénéfice /impIe, poffédé par un
Sous-Diacre Bénéficier codécimateur du terroir, à un Couvent
de Religieux d'un Monafiere-Cure par fa fondation, & codécimateur du refie du terroir; une union faire fans information en forme gracieufe par le Pontife Romain; qu'en
fuppofant qu'il y' eût abus, il érait ptefcrit par l'efpace de
quatre fiecles; que cette union érait,faire avec une caufe ef{ègtieUe, inhérente à fécat du b.énéfiœ !impIe lui-même,
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PRO V ~ NeE.
1'6 7
caufe toujours juUe & légitime d'après toures les difpofttions canoniques; que cette union avoit été fuivie d'une paffeffion tranquille de la part du MonaUere, & d'une jouiffance utile pour les habitaus pendam quatre ftecles. La prefcripr ion pourroit-elle être réclamée dans une occalion plus
favorable & plus jul1e ,puifqu'il eH impoffible \j'appliquer à
cene cauCe' le vrai principe de l'imprefcripribilité., perpetua
clamat , Cfuia perpetuà gravat ? Qu'en.fin certe union étoit antérieure au Concile de ConHance , c'elt-à-dire , avant le rétabliffement de la regle, faire en Provence long-tems avant
la. pragmarique, inattaquable conféquemmem fous tous les
poims de vue.
.
Quant à l'intervention de la Communanté de Saint-Maximin, Mr. l'Avocat-Général obferva q.ue- jamais il y. eut action plus légitime & plus néceifaire; cette Communauté étoi~
intervenue pour empêcher la diminution des revenus d'un
MonaHere-Cure, qui fouvent a fait femir aux habita,ns corn.,
bien ces revenus lui étaient néceifaires pour les bienfaits &
les fecours extr'.lordinaires qu'il avoit répandu fur le peuple
dans des tems de calamité; d'ailleurs quand il s'agit de difpofer d'une partie de la dîme, la Communauté eU fondée à fe montrer, parce que cette dîme eH un bien que
chaque habitant pauvre fait être en dépôt pour fa fublif.:
tance; qu'il n'étoit pas des motifS plus preffans pour julliner une intervention juUe d'après les Loix, néceifaire par
reconnoiifance, & légitimée par les motifs qui om été ramenés dans les défenfes des parties. Mr. l'Avocat-Général
conclut à ce qu'il fût dit n'y avoir abus en l'aéte d'union de
137 6•
'
Arrêt du 7 Mai 1782, prononcé par Mr.le Premier Préa.
dent, conforme aux concluRons. Meffire Andravy fut c.ondamné aux dépens envérs toutes les parties. Plaidant Mes.
Gaffier, Portalis & Simeon fils.
�JOOltNAL
ARRÊ:r.XLIII.
Le contrat de pacotilles n'efi pas de fa nature, ni d'après la
difPo/ition des Loix, un véritable contrat maritime, dont la
connofjJànce [oit dévolue au Trihunal 'de l'Amirauté.
N Février 1777 François Rafpail, de la Ville de Marfeille, remit à Xavier Martin, palfager fur le' Vailfeau
l'Heureux, allant au Fort Saint-Pierre de la Martinique, diverfes marchandifes pour vendre pour fon compte, & en empl'oyer le produit à tels articles que Martin jugeroit le plus
convenable aux intérêts de Rafpaij; il fut donné pour la commillion 4 pour cenr fur la vente, & 4 pour cent fur l'achat des
retraits, qui conlifl:erent en tabac d'Efpagne & en une barique fucre. A fon rerour' à Marfeille, Martin fe préfenta à
RaCpail, & lui offrit le folde de [on compte; Rafpail le refufa, & fit alligner Martin pardevant le Lieutenant de l'Amirauté. Déclinaroire de la part de Marrin ; Sentence du 30
Janvier 1778 qui l'en déboute; appel pardevant la Cour; la
Chambre du Commerce, la Province & les Officiers de
l'Amirauté intervinrent.
On difoit pour la Chambre du Commerce & pour Martin, que d'après les Loix de rous les tems, la Jurifdiétion de
l'Amirauté ne porroit qJe fur le fait de la navigation, & là
où s'étend le flot de la mer, fuivant l'Arrêt du Parlement de
Paris, qui'ordonne l'enrégifl:remenr de l'Ordonnance de 1)43.
L'Ordonnance de 1681 & la Déclaration de 171 l , n'avoient
attribué à l'Amirauté que les aétions dérivant des contrats concernant le commerce de la mer; la Jurifprudence avoit canonifé l'exécution de ces Loix, notammenr l'Arrêt de 1727' qui
devoit dans cette matiere être regardé èomme un Arrêt de réglement; & les Arrêts rendus en 1724, 1738, 174-3, 177 l &
,1780 avoient confacré ces principes toutes les fois que la
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Il 0 V B N C l!:
469
'difcu/Iion s'en étoit préfentée. En fait, la pacotillè n'el!:
qu'un aéte de commerce pur & fimple, & de la Jurifdiétion
des Juges-Confuls, ne pouvant qu'être accidentellement dévolue à l'Amirauté, attendu le tranfport par mer qui étoit
l'accelfoire du contrat de pacotille, dont la gefiion & la
vente des marchand ifes étoit le principal; ainfi , toutes les
fois qu'il ne s'agit pas d'avaries ou autres objets concernant
le tranfporc, les J uges-Confills font feuls compétens.
L'intervention de la Province étoit foute nue par l'intérét
"du commerce en général, par la diminution des frais pour
les parties à la Jurifdiétion Confulaire, & par la célérité des
Jugemens.
On répondoit pour Hafpail & le Tribunal de r Amirauté,.
que la Province étoir non-recevable dans fon intervention,
parce qu'il ne s'agilfoit ni de l'intérét général/J ni du bien
public, mais feulement d'une quenion de compétence entre
deux Tribunaux; qu'il y avoit autant de célérité à l'Amirauté qu'aux Juges-Confuls ; qu'il n'en coûtoit pas plus à un
Tribunal qu'à l'autre; qu'il n'y avoit qu'Arles & Marfeille
011 il Y eût des Jurifdiétions Confulaires établies, & que
dans toutés "les au.res Villes, les Juges ordinaires jugeoient
confulairement, mais fans auc\;n des privileges du Tribunal
Confùl~e.
Au fonds, Rafpail foutenoit qu'il ne pouvoit jamais y avoir
incompétence, parce que quand même le contrat feroit
mixte, il Y auroit nécelfairement concours & prévention.
que conféquemment il dépendoit de la volonté feule d'inveftir tel ou tel Tribunal, que tel étoit le cas de tous les Arrêts cités, lors defquels les Juges-Confuls avoient toujours
été invefiis les premiers; qu'ici l'Amirauté l'ayant été la
premiere, il étoit impoffible de lui enlever la connoilfance
de la matiere.
Les Confulats & toutes les Ordonnances attribuent à l'Ami..;
rauté , exclufivement à tous autres Juges, la connoilfance de
tous les contrats maritimes ; le contrat de pacotille efi de
fa nature un contrat maritime) 1°. parce que le port & 1~
�~70
Jou B. N .A L
tranfport des marchandifes fur mer ef!: inhérent à l'e:lfence
de ce contrat; 2.°. parce qu'il coure les rifques de la mer, &
que fi la marchandife fe perd, le commiffionnaire perd comme
le commenant; ainfi ce connat éranr indiv.ifible, dès que
l'Amirauté, Juge de privilege, eft compétence pour lIn chef,
elle l'eH néceifairement pour tout, .parce que le Juge de privilege connoît incidemment des matieres ordinaires, & attire
tout à lui.
Mr. l'Avocat-Général de Caliifane examina d'abord quelle
étoit la bafe, l'objet & l'étendue de la Jurifdiél:ion de l'Amirauté, d'après le texte de toutes les Ordonnances fucceffivement rendues fur cene matiere. C'ef!: la mer (dit-il) &
par-rout où le flot de la mer s'érend, c'ell là fon reifort,
c'éll: fon empire; toUS les délits qui fe commetenc fur cet
élemene, quais, pores & rivages, font de fa compérence ;
elle connoîr de toures les conrell:ations concernane la navigation , & les conrrars qui one la navigation pour objet; elle
connoît enfin de tous les contrats concernant le fàit & le
commerce de la mer & qui en dépendent; en un mor, 'de tous
les contrats maritimes.
Quelle ell: d'un aurre côté la bafe, l'objet & l'étendu~
de la Jurifdiél:ion Confulaire ( continua-t-il) ? Le commerce
de terre, les affaires mercantilles qui en dépendent, rous les
procès.& différens mus entre Marchands & Négocians en fait
de marchandifes; toutes deux, Jurifdiél:ions carrulaires & de
privilege; toutes deux, Jurifdiél:ions univerfelles pour ce qui
leur elt atrribué, abfolument exclufives l'une de l'autre,
n'érant Juges pour les marieres qui dépendent réciproquement
de chacune d'elles, qu'avec défenfes à tous autres Juges d'en
prendre coonoiifance.
Dans quelle claife des contrats faut-il placer celui des pacorilles (examina Mr. l'Avocar-Général ) ? De quelle Jurifdiél:ion ell-il exC!ufif?à laquelle tienr-il plus pareiculiéremem?
ell:-il de fa nature contrat maritime? tient-il donc plus effentiellemene au commerce de la mer, ou ne doit-il être regardé que comme accidentel à cet élément, c'ell:-à-dire,
�DU
PAL AIS
DE
PRO VEN C E.
47I
comme un contrat ordinaire, mais tenant au commerce· par
mer, plutôt par une exécution paffagere , que par une fuite
néceffaire des obligations du contrat?
Avant de difcuter ce que c'eH qu'un véritable contrat maritime, il fixa les idées fur la nature de la pacotille. Qu'ell:ce qu'un aél:e de bail à pacotille? Une écriture privée par
laquelle le Capitaine ou tout autre Marinier s'oblige de charger fur un Bâtiment fur lequel il ell: embarqué, les marchandifes contenues dans la faél:ure qui la précede; de les
porter & vendre au lieu i!1diqué pour le compte & au rifque du propriétaire; d'en faire le rerrait fur le même Navire ou tout autre, & de rendre compte du toUt moyen.nant un droit de commiffion convenu entre lui & le pacotilleur ; c'ell: une procuration, un mandat, une commiffioll
donnée par un Négociant à un Marinier ou Paffager de négocier pour fon compte, moyennant un falaire, les marchandifes qu'il lui remer.
D'après cerre définition, qu'ell:-ce qu'un contrat maritime?
C'ell: un contrat paffé pour fait & entreprife du commerce
de mer: l'Ordonnance, en fixant les cas de compétence, ne,
les énonce pas tous; charte -partie, dit-elle, affrett:mens ~
nolifemens, connoiffèmens & polices de chargemens ,frais 011;
nolis, polices d' f?lfùrances, obligations Il la groffi aventure ~
ou retour de voyage. Mais on peut juger aifément, par les
exemples particuliers, de l'objet de la difpofition générale;
& en entrant dans le détail des matieres attribuées aux Juges
de l'Amirauté, il fera aifé de fe convaincre fi une reconnoiffance d'un· Marinier ou Paffager, à raifon d'une pacotille, ell: attributive de Jurifdiél:ion à l'Amirauté.
Les connoiffemens, par exemple, ou polices de chargemens,
les contrats à la groffe, ou obligations à retour de voyage, ne
font-ils autre chofe, relativement au commerce de la mer, que
les reconnoilfances des pacotilles, & peut-on les affimiler
comme l'a fait l'Amirauté? Le connoiffement ell: la reconnoiffance que le Capitaine d'un Navire donne à un Marchand,
des marchan;!ifes que celui-ci a chargé fur fon Navire pouE,
�472
Jou
RNA L
étre porté ~ un tel lieu moyennant un fret ou nolis, de telle
fomme par charge, tonneau ou qui mal , qui efi le prix du
louage du Navire en tout ou en partie, ou des frais de tranfport. Le Capitaine donne cerre reconnoi:/fance, & tout efi
borné de fa parr au tranfport & remife au lieu de la defiination des marchand ifes qu'il a chargé, moyennant un falaire appartenant à l'Armateur pour lequel il agit, & dont
il efi alors l'homme & le prépofé ; au lieu que la reconnoif- '
fance d'une pacotille peut étre faite par chacune des perfonnes embarquées fur un Navire, méme par un Pa:/fager
fous les foins duquel fe trouvem les marchandifes chargées;
fa million n'efi pas la même que celle du Capitaine chargé
des marchandifes par le connoi:/femem; il n'a aucune remife à en faire. Ses opérations fom de les expofer en vente,
employer les deniers de la veme en achat d'autres marchandifes & denrées, & donner compte au propriétaire de fa
gefiion.
, Dans le cas du connoilfement, tout porte fur le Navire
& la mer, l'empire des Officiers de l'Amirauté. Dans le
cas de la pacotille au contraire, tout fe fait, s'exécute, fe
confomme entiéremem fur terre al! ils n'am aucune Jurifdiél:ion. Le tranfport fur le Navire qui tienr ~ l'Amirauté,
occupe en emier le connoi:/femem ; il n'en eH pas de même
- du tranfport de la pacotille. La vente, le retrait & les dépendances des marchandifes qui font le principal objet de
ce corurat, lui fom étrangers. L'un eH louage à prix-d'argent du Navire ou en partie, qui en continuellement foûs
l'empire de l'Amirauté, & en faveur de l'Armateur; l'autre
n'efi qu'une fimple commillion, moyennant un droit acquis
par des opérations emiérement étrangeres au commerce de
la mer. Le chargement ou le connoi:/femenr en donc, dans
fon exécution & dans fes -effets, abfolument différent de la
pacotille. Les principes de l'un, fur le fait de la Jurifdiction, ne paroilfem pas pouvoir être ceux de l'autre.
Les comrats à la grolfe ont-ils plus de relation & de
rapport avec la reconnoiifance d'une pacotille? Qu'dl-ce que
cette
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PAL AIS, D Il
PRO V li N C I!.
47-3
cette obligation? Un contrat par lequel le maît~e, ,d'un'Na-,
vire emprunte de l'argent à un gros intérêt, pour mettre fon:
V,liifeau en mer ou faire un voyage, pour l'avitua}ller. ou
pour tou.c autre objet concernant le Navir,e, s'il reyienr~dll
voyage, les ~eniers prêtés fom rendus au créanci~r:eç,.prjn-.
cipal & intérêts Hipulés ; l'obligati0.t! ,ef1: éleinte " li 1e Vilif-_
[eau périt; le fort de l'obligation tient à Cé;lu~ 'Ùl ,Na~ire'"
qui eH continuelle,ment fournis à la Jurifdiéiion de l'Ami-·
rauté, & rien de tout cela ne' fe rencontre (dans le faif de ,lapacotille.
,
,
f J
.'"
Il eH donc impoffible d'après .ce.s qé,t~i\s,.., de' çomprel}"'.)
dre, dans la difpolltion générait!, tOU~J les ,cçntrals, c.9no.e/)-;
nant le commerce de la mer ;. difpolition générale: qujll1'~~l
que la fuite expreife des exemples particuliers dont,on.viene,
de rendre, compte; parce qu'en ,l).}3ti~re dlt !urifdjÇl:ion cal':rulaire, non fit exte'!fio de caJu ad, cafjJm, nec liEep r;rgume,ntari.
de caJu exprej(o ad nqn exprdfiim" etiarn ex n~qj!?fitate ratir/nis;i
à plus forte raifon ne peut-op pJ:; étendr~",i:l'un!cas .. 1:· un, ~u-·
tre, quand il y a minorité de motif,. ou que, comme dans.
l'hypothefe préfente, la ,raifon d~ la Loi ceife dans le faie,
qui lui a dont:Jé fon exiHem:e. Ce n'ef\ pa~ un véritable
contrat maritime, puifqu'il'n'y a pa~ lme relation d,ireae. &.
fonciere avec le comme~ce de lai mer; il n'eH pas de même.
narure que ceux fpécifiés dans l'Ordonnance, qui! ~iennent,.
ou à la contenance du· ~avire , ou cOlJcernent, touchent &.
dépendent cju fait de la mer & de la navigation.
.
En effet "Iorfqu~ le flpt. de la mer ne. s'é,tend .plus r.~r la~
p'1.corille ,,lorfqu'elle eH parvenue au lieu de fa ,qeHi,nation ,.
qu'eH-elle? Un envoi de marchandifes qui a bien..été (ait, par,
ruer, mais ne renant qu'accidentellement à· cet~.élément '"
c'eH.à-dire, comme voie de tranfport, comme lieu .~e paff:lge, mais non comme objet inhé~enr au,comm~rce .de li,
rue~. Une f\l'is qu'elle e11: débarquée ~ Je~ .parties nec(ont plus;
dans,le cas ,d'une pro~eife ou obligation. pour un, fait: de,'
~ommerce de m'er i c.'èH pour un; commerce de .terre ;', hll
ruer n'elt que le chemin par leq~el le~ man;handif~s.a~he~;
Années 1781. & 17..8:l...
O.o~,
�~4
JOURNA'L
tées àI terre~onr dt! étre tran(portées & vendues 11 terre pour
le eompte dLi pacotilleur. Il s'agit ou d'un compte & du prix
des march~ndifes priees à Marfeille pour être vendues aux
mes Françoifes de l'Amérique à titre de pacotille, ou de
1<1" qual·ité fonciere des marchandifes prifes eo retrait aux
l'f1e~ Frknçoifès, pOllr éne vendues à Mar(eille. Si les mardiatldlfe.s tbhe été· avariées, fi elles ont fou/tèrt du dommage
dans.'lê- Bâ'riment, fi elles om naufragé., fi, à raifon de leur
emba-rquemene fur le Vai1feau, il nalt quelque contefiation,
le Lieutenant de l'Amirauté eH compétent fans doute; &
c'eHJ'àlors le cas de l'Ordonnance, c'eH l'hypothefe des connoHfemen's ou des contrats à la grolfe. Mais fi, par exempIe, le Gapitaine ou le PalTager vend les marchandifes avant
qu/elles foient embarquées, Li après les avoir reçues ailleurs
que dans le Bâtiment ou fur le quai, elles lui font volées,
malgré la., reconnoilfance de la pacotille, les Juges-Con(uls
feront [euls 'compétens; pourquoi celTeroient-ils de l'être,
lurfqu'il' S!agira-, relativement à une pacotille, d'une demande
en reddition- de compte du prix, des marchandifes vendues à
rerre dans les mes Françoifes? Ni le lieu de la remife de la
marchandife', ni celui dL} contrat, ni celui de la vente n'étane
pas fous "1'empire de la mer, nulle raifon pour donner au Lieu-'
tenant de l'Amirauté la connoilTance de l'exécution qui s'en
eft farte; la caufe du proc~s n'eH plus qu'une dette ordinaire,
comme toutes celles qui fe concraél:enc pour fait de commerce, quoiqu'elles procedent de rnarchandifes tranfporrées
par mer; c'dt comme fi un particulier faifoie un aél:e privé,
par lequel un batelier d'une riviére navig<lble fe chargeroi'
de porter fur fon bateau des marchandifes pour les vendre
à tel lieu pour le compte & au l'ifque du propriétaire, d/employer le prix en telles ou telles marchandifes de retraie,
& de donner compte;' tour ce qui pourroit donner lieu à
des contefi~tions cela'cives au rranfpore pJ'r la riviere·, fero'it
de la compétence des eaux & forêts; mais lorfque le tranfpori feroie confommé par la vente, la Jurifdiél:ion des eaUle
&-forées n'auroit pll fuivre <r.llls·1es terres ~ domicile- du Ba1
�'-P..ft 0 VEN C I!.
47$
fe\ier, tao.t la marchandife (orue du .bateilu & vendu~., que
Je prix qui en ferait provenu .f, & ce Tribunal ne .pOUtfoit
connolrre de la demande fbnci.ere ou en redd,ftion de
compte.
Ainli (continua Mr. l'Avocat-Général) taO[ q)Je les mqrchandifes font fut le Bâtiment ou fur le Port, tout ce qui
arrive à leur égard eU de la compétence de l'Amirauté,
parce qu'elles font dans fan territoire; mais quand elles en
font forties, quand elles ont été vendues, quand les retraits
ont été achetés à terre, elles ceifent d'être dans la' JflCifdictian cartulaire au privilege de mer; elles rentrent dans celle
des Juges-Confuls , Juges ordinaires & univerfe!s en fait de
commerce, de laquelle elles n'étaient forties que pour reltet'
dans celle de l'Amirauté, feulement pendant. le tems qu'elleS
fe l'fouveroient dans le Bâriment ou fur le Port.
D'après cerre diHinéHon vifcérale & prife dans li! nature
même de l'obligation contraél:ée à raifon des pacotilles, il
ne faut jamais confondre le tranfport des marchandifes avec
la geUion & l'adminiUration d'icelles; on doit reconnoltre ,
avec la génétalité de tous les Auteurs & des Commentateurs,
que le feul tranfpon & rapport par mer ne conll:irue pas Je
contrat maritime; que conféquemment, quoique ce rapport
ou tranfport fait de l'eifence du. contrat de pacotille, il n'eft
pas pour cela artributif de Jurifdiél:ion; que de même que le
contrat à la groife ou retour de voyage qui eU tout maritime,
& dépend continuel1ement du fait de la mer, eU de la compétence de l'Amirauté; de même la reconnoiifance d'une pacotille n'éti\nt point un contrat maritime, mais exécutoire
fur terre, la connoiifance doit en appartenir aux Juges-Confuis' pour ce qui ne regarde pas le voyage & tranfport.
Une obligation eU paifée à Marfeille; elle doit être exécutée aux Hles, le réfultat de cette exécution doit fe v~rifier
à Marfeille: comment les conteUations foncier.es de cette
obligation ferpient-elles regardées par droit de fuite, comme
objet maritime, qui n'eH que le moyen d'exécution, tandis
~ue PobJigation de la pacotille poIte principalement fur d~
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.condi{ions exécutoires -lûr terre? Ici l'on peut appliquer l'Arrêt du Confeil obrenu par Mr. l'Amiral de Montmorency,
Arrêt qui juge que les Officiers de l'Amirauté doivent connpîr~e Su çranfporr & rappqrt des marchandifes par mtr;
111ais en fair, il, elt .incomeltable qlle l'objet principal de la
jlJcotille .& de l'obfigation qu'elle fait naitre, elt la vente
& a.chat des marcliandif(ls fa'ites à terre, fur routes lefyuelles
tonteltarions la Jurifdié1:ion de l'Amirauté ne peur pas s'étendre ; le tranfport par mer n'en elt que l'accèIToire. Si les
Juges
de l'Amirauté
font privilégiés, les Juges-Confuls ne le
.
J
•.
font pas moins. Le comrat de pacotille n'eH donc pas un
contr.at maritime de fa natu;'e; il eH vraiment mandat, parce
que le ,rnlnfpor,t ad lDeum defignatum, & le rapport in 'Deo
certD , elt e1fentiel & inhérent aux obligations du comrat du
mandataire.
On s'dt trompé quand on a dit que le contrat de paco-,
tille, dont ·.on ne partageroit pas les pertes & [es profits,
qui n'étoit pas fpécifié tel par l'obligation, éroit une véritable fociére; que tout était perdLl pour le commiffionnaire,
fi la marchandife péri1foit; que ,Conféquemment la différence
des commiffionnaires de tem~ étoit fenfible; que dès que
.ceux-ci avoient fait leur expédition, leur droit
.
,était acquis ,.
malgré la perte des marchandilès. '
On n'a jultifié ceue prétendue vérité par aucune preuve;
;{ln ne trouve de trace de ce fyfl:ême inconcevable dans auçune Loi', dans aucun Commentateur, dans Valin même,
qui a cependant réuni jufqu'aux moindres circonltances qui
pouvoient être favorables aux Amirautés, & celle-là l'e.ut
,été fans doute. On eH donc en droit de conclure que I~
commiffionnaire, pour fàit de pacotilles, a deuy. aé1:ions
pour la refponfion de fon droit; aé1:ion fur la marchandife
d'après la Loi Paulienn.e , aé1:ion fur la perfonne; la marchandife périt, fon aaion fur la marchand/fe . perit avec
elle; mais il lui refl:e celle fur la perfonne ; s'il en éroit au~remenè! fi 'le commiffionnaire couroÎt le même rifque que
le commetta,n~,
pourquoi n'énonceroit-on pas ce paé1:e dans'
,
.
.
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P ALA B
DE
PROV ENC!!.
411
les contrats de pacotilles? La condition ferait alfez extraordinaire, pour exiger une mention exprelfe, comme on le
voie dans les autres contrats; on trouve au contraire, dans
les cane rats à pacotilles, des difpofitions qui paroilfent détruire ce fyll:ême.
.
Quel en ici le droie de commiflion ? Il en fpécifié trèsdiHil1él:ement; '" pour 1 00 pour 'la venre,&4 poun 00 pour l'achat des retrails. Pourquoi ces deux époques font:..elles fixées? Parce
que ce font les deuxJeuls inaans ollIe Commiflionnaire exécute
fan obligation, fan mandat; les feuls inlbns où ildonne fes foins.
Mais qu'eH.•ce qui lui acquiert les' '" pour cent de la venre?
La vente elle-même des marchandifes, indépendamment des
retrairs: Si ce n'était que le rerour des retraits, on n'eût pas
diHingué la vente & les retraits. Qu'on fuppofe les marchandifes achetées, embarquées même; elles périlfent , roue périt fans doute pour le P~cotilleur; mais les", pour cene de la
vente fan· irrévocabrément acquis au Commiflionnaire, quand
même on pourrait faire des difficultés fur les 4 pour cent
des retraits, d'apr!::s la lettre même du contrOle de pacotilles.
Le Commiflionnaire ne court donc pas en entier les rifques
de la mer, le contrat de pacotilles n'dl: donc pas de fa nature
un contrat maritIme.
. '. Mais ( continua Mr. l'Avocat-Général) en prouvant que la
pacotille n'eH pas de fa nature un contrat maritime, l'on n'a
rien fait, fi. elle l'eil: devenue par la Loi; & c'ell ce que
prétend l'Amirauté, d'après la difpolition littérale de l'Edit
pe 1711. Cee Edit donné, dit le Légi!lateur, pourfaire ceJ}ër
tout conflit entre les Juges-Confuis & les Amirautis, ne peut
être un de ces Edits burfaux, qui celfent avec leur motif; c'eR:
une Loi vivante & enrégifirée, donnée pour interpréter
l'arr. 2. de l'Ordonnance de 1681. Une difpofition générale
~erminoit cet article, & pouvait occalionner des concefiations; le Légi!lateur a voulu les faire celfer, fans donner
plus de Jurifdiél:ion à l'Amirauté; il a voulu énoncer les cas
particUliers. Il faut do oc trouver dans cet Edit le cas précis
'& littéral qUI décide la compétence, ou, s'il ne s'y trouve,
�Jou ~ N A L
pas, il faut conclure que le contrat de pacotille n'eil pas
exclufivement de la Jurifdiél:ion de l'A mirauté.
Deux difpofirions dans cet Edit qu'il faut bien difringucr j
la premiere porte fur le fait de la navigarion & le commerce
de la mer, & c'ell le réfultat de la difpolition générale de
l'Ordonnance j l'autre au contraire l!:atue fur des objets particuliers j mais alors, s'il faut en croire l'Amirauté, le Légiflateur a donc mal fait de dire qu'il interprétoit l'art. 2 de
J'Ordonnance de 168 l , puifqu'il donnoit une nouvelle attribution bien plus étendue que les précédentes. Il faut voir
d'abord fes difpofit-ions, & enfuite li on peut adopter le
fyl!:ême de l'Amirauté.
La compétence y el!: fixée à tomes les aél:ions 'lui naîtront
entre Marchands, Négocians ou amres, pour raifon & exécurion des contrats, fociétés ou amres aél:es paiTés pour des
entreprifes concernant le commerce de la mer & la navigation j comme auill celles qui naîtront au fujet des ventes,
achats' & autres contrats concernant les marchandifes qui feront tirées, tranfportées & envoyées par la voie de la mer
entre perfonnes affociées pour en partager les pertes & les
profits.
Les terl'l}es trop génériques de cette Loi femblent attribuer d'une maniere expreffe aux Juges de l'Amirauté la connoiffance générale de toures les aél:ions qui defcendenr de
toutes fociétés, de tous contrats eorre affociés, pour raifon
des marchandifes tirées, tranfportées ou envoyées par la voie
de la mer. Mais toute- fociété n'ell: pas du reffort de l'A mirauté, par cela feul que les affoci~s ont fait des fpéculations
fur mer, ou qu'ils tirent par la voie .de· la mer les marchandifes qu'ils trafiquent. L'Arrêt de Bonnet el!: trop précis rel~tivement à cette hypothefe, qui el!: la feule qu'il décida,
pour ne pas forcer l'Amirauté à expliquer cette Loi par une
dil!:inél:ion jul!:e & raifonnable relativement aux Loix préexiftantes, c'el!:-à-dire, à conclure avec Bonnet que l'Edit de
1711 ne fait qu'interpréter l'Ordonnance de 168 l , fans lui
donner aucpne extenfion ni nouvelle attribution.
47 8
�J) U
PAr. ArS DI! P Il 0 VEN C !!.
4'79
Cet Edit n'ayant pour objet que les traités concernant
fpécialement la navigation & le commerce de la mer, on n'y'
voit nulle attributiou des aélions qui s'intentent entre Mar.
chands à l'occauon du trafic des marchandifes par mer. Ainu ,
d'après la difpoution textuelle de la Déclaration de 17I-I ;
d'après l'interprétation la plus naturelle que l'on puilfe donner
à fes différentes difpourions, la pacotille n'eH pas de fa nature un véritable contrat maritime; & quand même il faudroit abfoltimem la reconnoître à ces mots : marchandifes
tirùs , tranfPortées & envoyüs par la voie de la mer, on ne
pourrait. en conclure que toujours le contrat de pacotille ell:
de la compétence de l'Amirauté, puifqu'il ell: une difpolition
effentielle, fans laquelle cette efpece d'aélion n'ell: pas attribuée à la Jurifdiél:ion de l'Amirauté; il faut que cette marchandiJe tirée, tranfportée & envoyée par la voie de la mer,
foit entre per/onnes affociées pour en partager les pertes &
les profits. Valin ajoure même; pour les partager par moitié,
les frais-de la pacotille prélevés. Il exill:e alors quelque relfem-blance avec les comrats à groffe; mais fans cette circonftance, point d'attribution de ces fortes de contrats. Cette
difpolirion eH même fi effenrielle, qu'elle devient la hafe de
la loi prohibitive & de l'exclulion de la compérence , fans
'lue fous ce prétexte, ajoute la Déclaration, les Officiers de
l'Amiraute puiJ/ènt prendre connoiJ{ance des conteflations entre
pufonnes no/! intéreJlèes aux pertes fi profits du traité, eRvoi
(,~ tran/port.
.
Ainli la difpolition littérale de cet Edit ne décide rien pour
l'Amirauré. Donc, d'après Valin même, pour conHiruer un
engagement, un contrat maritime, pour fonder la Jurifdiélion
de l'Amirauré, il faut que le principal de la pacotille préievé ,
les profits & pertes foient partagés par moitié. Tel doit
être le- comrat; ç'eEl: felon lui la feule hypothefe qui puiffe être
attributive de cette JurifdiéHon; c'ef!: le cas prévu par l'Ordonnance; c'eft celui qui fe rapproche le plus du contrat à
la grolfe, qui y a au moins quelque analogie, quoiqu'il ea
foit encore pieo éloigné.
1
�~o
JOUKNAL
Ici point de fociéré pour parcager les pertes & les profit!;
poinr de fociéré même propremenr dite, & qui, quand même
elle pourroir être regardée comme relie, ne feroir jamais celle
qu'exige la Loi: fHTIple droir de commiffion. Il en donc impoffible de pouvoir affimiler les conditions encre un Commecrant & un Commiffionnaire, à des per(onnes affociées
pour parcager les perces & les profits.
Mais ( dit-on) le Commiffionnaire comme le Donneur à la
groffe perd cour fi la marchandi(e périt. Quelle différence
énorme! Que perd le Donneur à la groffe ? Son argenr &
fes fonds. Que perd au contraire le CommilIionnaire? Rien.
Point de fonds donné; la pacotille lui en ab(olumenr étran gere ju(qu'à (on débarquement. Ainli, li la marchandi(e périt
en allant, il ne perd rien; parce qu'il n'avoir rien gagné,
qu'il ne l'avoit même pas pu. Ses peines, fes foins n'auroient
RU commencer qu'al,l momenr de la vente. Si les retraits pé riffenr & que la marchandife foir vendue; on a prouvé par les,
paaes mêmes du contrar, que (on droir de commiffion pour 1a\
vente lui écoir acquis. On n'a rien produit pour détruire ces
preuves; elles fonr donc confiantes. Ainli point de pene ni
de ri(que de mer pour le Commiffionnaire; & quand même
il y en auroir, le ri(que de mer ne conHirue pas le concrat
maritime; s'iL pouvo~r le connituer., coures les opérarions
Gui fe feraient par mer, (ujettes aux mêmes rifque!, dériver.oient de contrats maritimes; ce qui en convenu exceffif &
au-delà des bornes de! Jurifdiaions. Rar l'Amirauté elletnême•.
Le. contrat de pacotille- ell:, {uivant ValiiJ , une obligation
c6ntraaée pour un commerce à faire hors du p.ays, quoiqu'il
ne pui/fe fe faire que par mer.; & alors, dir cet Aureur, il
faut - aller ,aux, Iuges-Confuls , parce que, quoique le com-·
rperce qui a été~objet de la fociété" n'air pu, fe faire que,
par mer, il n?é:ln,réfl!lre i~mais. aucun·.engagemenr ll;lari'rime.
1.1 faut.,-. Qutre 1" JJéc.e~lé du tranrpon., ourre la jl,offibiljré des.
r1fques de la mer" c0t.Jdirions· aeçidencelles &, effentielles al!'
~qlll\érc.e p,ae mér, mais ne. conni,tuant pas..p,ar elle-même
le:
�481',
Je fait de la mer, un contrat vraiment maritime; Valin ajoute ~
DU
PA'L'AIS
DE
PROVENCE:
fans cela ce n'cft au fonds qlJ'une foc;iété ordinair(; de'commerce, "
dont les ftuls Juges-Confuls doivent connottre.
: .
r Mr. l'Avocat-Géoél al· conful~a ,enfuite la Ju~ifpr~d~n'ce. 9n l
a cité une foule d'A.rlêt.s , dit-il, mais plufieurs ne fe trouvent
pas dans les mêmes circonfiances. Celui de Bonnet,. rendu
en 1727' Y ayant les mêmes Parties intervenantes, l)'a pas
jugé la queHion; il. s'agiffoit, hon d'une pacotille, mais.du
co~pte d.'une fociété générale & indéfinie, dont .les m,archandifes avoient ét~ envoyées par ,mer. L'Amirauté récla.moit les mêmes principes, le.s difpolitions, des Confulats ,
l'Ordonnance de 1681, l'Edit de 1711, qui leur attrib\loient
nommément la connoiffance des contrats concernant les
marchandkes tirées, tranfportées & envoyées par la voie de,
la mer entre perfonnes affociées pour en part~ger.Jes pertes
& les ·profits. Cette difpofition de l'Ordonnance, fel)l~ &
générale, éroit précife ; ~lIe étoit décifive ,1 s'il en, eût, fallu.
croire à l'interprétation de l'Amirauté; mais l'Arrêt ne jugea
que d'après les difpofitions de cette Déclaration; c~ n~étoit
pas des fociétés en général qu'il s'agilfoit, mais ,des f()ciétés,
concernant le fait de la navigation & le commer.ce de la mer;
& c'efi la fe~le & véritable qu~fiion qui fut' décidée .p~r cet
Arrêt bien voilin de l'époque' de la Déclaration de 17 II';
Arrêt qui fut attaqué au Confeil, & confirmé;" Arrêt qui
prouve qu'il ne .faut P'lS compre'ndre le contr,at de pacotilles
4,ians la difpofition,de la Déclaration de 1711, même quand il
y __ fociété; puifqlle ce contrat n'a Has, pour Opjeti dire,a: &
immédiat le commerce de la mer lSç. la !1avigation.. ," . ,
Il en efi de même (continua-t-i1) des Arrêts ;de 1739 &
de 1743 ; il n'y avoit ni délit ni contrat maritime.; mais les
trois Arrêts récens, rendus en 1771 & n8o, fdnt précifé.
m~nt dans les ~êmes circonll:ances que celleS: d~ la pyfe ;
elles étoient même encore plus favorables à eAmirauté que
ne font. celles 1 d'aUJourd'hui. Les trois hypothefes font les
mêmes; il n'y a que les nqms de changés: Il ne cita que celle
du Capitaine Arnaud, comme la plus récente.
•
Années z78z & z78:..
-
• •
••
PPP.
1
�49~
,
'
Jou RNA L
_
Les fieur'S·Blai'n & Bernard remettent diverfes marchandifes
en pacotille au Capitaine Arnaud, commandant le vaiffeau le
Guillaume, allant aux ifles F ran90ifes de l'Amérique. Au bas.
de la faél:ure drelfée, le Capitaine- fait· la reconnoiffance,
promet de les porter & vendre pour le rirque & compte de
fes commettans au voyage qu'il alloit faire; s'obligeant de
lés vendre· à leur profit & avancage, & de charger des retraits
en d'enrées du pays fur le retour du navire, ou de tout autre,
en donnant compte, moyennant 8 pour 100 de commiffion.
I:.è Capitaine Arnaud vend les marchandifes, envoit fes
comp·tes de vente, & revient. 0n le fil it affigner pardevant les
Juses-Confuls en reddition de compte de: la paeotille à lui
remife. Il décline la Jurifdiél:ion, & demande fon renvoi à
J?Amirauté. Les Juges-Confuls le déboutent du déclinatoire.
'
.
Appel pardevant' la Cour.
Dans' des Mémoires' imprimés lors de' cette caufe, on
rappelloit tous les principes généraux qu'on fait valoir aujourd'hui; on fe fervoii des mêmes titres particuliers, dont'
ce Tribunal veut faire ordonner l'exécution. Dans le procès
de Rafpail li de Martin, difoit le' Capitaine Arnaud, l'Amiraut'é a communiqué divers ac1es de notori'été 'lui juflifiellt la
poj[1fion où font toutes les Amirautés dit Royaume de-collnoÎlrede la matiere dont il s'agit' ici. La Sentence des Juges-Confuls
fut néanmoins confirmée.
La Jurifprudence récente & conllance, conformé'mem
aux Loix & aux Ordonnances, a donc déèidé' que le contrat
de pacotille n'étoit pas1 ,de fa nature,' ni d'après les difpolitions dès Loix, un' v,ériraBle' contrat maritime, puifqu'il
ceffoit de 'l'être du momen-t qu'i,1 ne's?agilfoit plus du tranfporr, &: que la marchandife n"étoit plus fujette aux rifques
de la mer, & que dès-lors les Confuls pouvoient' en connoÎtre.
II faut difiinguer dans'ce contrat deux objets bien dilférens ,
le tranfpor~ & la gefiioll'; oBj~ts qui' k' rendent contrat'
mixte; Ce-contrat, 'pour' 'céqui regarde la gefiion' ,- ne peutjàmais être regardé 'comme'maritime , '~,il elt de;'la compétence des Juge,-€onfuIs.; mais il n'en efi' pas de même'
..
'
�DU
PALAIS
.DE
PROVE1fCI!~
4Sa
pour tout ce qui regarde le tranfport, & ce qui a un rappo!t
,direa avec le fait de la mer & la navigation, qui eft ,de lla
~ompétence de l'Amirauté. Ce Tribunal a fenti combien ces
:préjugés récens & fucceffifs, rendus dans la 'même hypothefe
.abfolue, nuiraient à fan intervention; auffi a-t-il cherché
à créer un fyHême, qu'il n'a voulu cependant préfenrer qu'e
corn me:: obfervarions, qu'il ne rangeait cependant qù'avlI;
regret dans cette limple catMgorie; patce qu'alors elle ~
'détruifoit plus le préjugé des Arrêts.
Le contrat eft indivilible (a d'abord foutenu l'Amirauté );;
,ainli !i notre Tribunal doit en connoltre pour les frais d,e
tranrport, il doit en connaître dans toUS les cas exclu.!ive,ment à touS autres Juges. Sans cela, ce ferait jetter une incertitude cruelle fur le Tribunal où il faudrait s'adreffer. Jamais les Parties ne procéderaient avec fûreté, fi la lurifdictian de l'Amirauté n'était pas exc1ulive; il faudrait alors divirer la contenance de la ,caufe; ce qui ferait contre
toutes les notions re'iues en droit. D'ailleurs, l'Amir;tuté
étant Juge de privilege, attire à elle toutes les matierès incidentes; parce qu'elle [eule eft co.mpétente de la nature de
fon privilege , & que l'incompétence de toUtes les :j.utres Ju;rifdiél:ions eft notoire fur cet objet particulier. Ainfi, quand
même il pourrait y avoir quelque doute fur la nature du con-.
trat de pacotilles; fes effets, fes fuites, démontrent combien il eft maritime. Enfin, s'il eft contrat mixte, alors il
doit y avoir prévention, concours; les deux Trrbunaux peuvent en c'onnoÎtre : c'eft aux Parties à choiiir. Dans les circonftances préfentes on eft venu s'adreffer à l'Amirauté; elle
eft Juge néceffaire & de privilege : on ne peut donc pas la
dépouiller pour inveftir les Juges Confuls ; & cette obfervation répond feule ,à tous les Arrêts que l'on a voulu faire
valoir, tous rendus dans cette hypothefe. On dit ce contrat
indivifible ( obferva Mr. l'Avocat-Général) ; mais ce principe
en fait de pacotilles eft-il bien vrai? Ne peut-il pas, com.me,
dans la çaufe préfente, être confié dans fan exécution à dif..
férentes perfonnes; ,pour le tranfport., au .Capitaine,;..pou:r ~
:l'PP':!:.
�~~
JouaNAL
fait de la gefiion, au Pacotilleur? N'en nalt-i1 pas dès-lors
des obligations abfolument dilFnél:es & féparées; puifqu'elles
porte'nt fur des ëtres différens? Conféquemment le contrat
n'efi-il pas divilible? Les obligations étant différentes, ainli
que les individu!>" il faut néce1fairement convenir que les
:bafes peuvent ne pas être les mêmes; que les aél:ions qui en
nai11eJlt, que les contefiations qui en dérivent peuvent légi'timer deux Tribunaux difFérens. Si cela efi forcément vrai en
fait, relativement à deux 'individus; poutquoi. cela feroit-i1
faux en droit pour la nature du contrat & des aél:ions 'qui en
dépendent, relativement au même être? N'y a-t-il pas dans
tout contrat de pacotille, confidéré comme tel, des faits
maritimes qui concernent le commerce par mer, & de faits
de commerce ordinaire, qui font étrangers au commerce de
mer? N'y a-t-il pas dans tout envoi fait outre-mer des faits
de négoce & de tranfport? N'y a-t-il pas dans toute cargaifon,' des aél:ions qui participent à ces deux faits; & malgré
cette diverfité des faits, les Loix ont-elles accordé aux Amirautés d'autres connoi1fances que celles des contrats maritimes 'de leur nature" ou des faits maritimes dans les contrats mixtes? N'y a-t-il donc pas de l'injufiice à faire d'un
contrat de pacotille; contrat mixte de fa nature, un contrat
unique, qui, à raifon de fon indivifibilité , ne pui1fe aller qu'à
un feul Juge? Si cela efi, quel a donc pu être le fondement
des Arrêts rendus? Quelle étoit la poffibilité, l'ombre même
de compétenèe des Juges-ConFuls, fi le contrat étoit'indiviûble, & fi le tranft)ort, fi les rifques de mer attribuoient à
l'Amirauté, comme Juge de privilege & exclufif, la connoiffance ,de ces points de vue, tenant e1fentiellement au contrat
de pacotille? Comment les Juges-Confuls ont-ils jamais pu
, conno1tre de ce contrat s'il efi indivifible, & qu'il y ait pour
une partie de ce' contrat des Juges d'attribution firiél:e &
rigoureufe? Ne faut-il pas toujours avouer, comme le dit
Yalin, qu'il, ell: d~s co"ntrats ou engagemens qui partiêipent
egaiement , & font à la fois au, commerce de terre & au
fOmm\:rce maritime; 4c qu:i1 y a fouveqt lieu de douter ~e la
�D U
PAL AIS
Dl!
PRO V Il N CH.
48)
compétence, ell~ examinant les chofes fans partialité,~ relativement à la Jurifdiél:ion Confulaire ou à celle de l'Amirauté?
Et en appliquant ces principes particuliers à la caufe , n'eft-on
pas forcé de convenir qu'il eft deux obligations dans le contrat de pacotille; celle de négocier, vendre & acheter, &
celle de porter par mer; que s'il en eft une qui foit l'acceffoire, c'eH la derniere fans doute; qu'au moins il n'en
eft aucune de principale; que tout ce qu'on peut dire de
plus, c'eft qu'elles marchent d'un pas égal. Mais n'eft-on pas
forcé de convenir que chacune de ces obligations a fes Juges;
puifque l'une peut porrer fur le commerce par mer exC!ufivement; que l'autre au conrrair.e peue ne dépendre que du commerce par terre, & que foit pour .l'un ou pour l'autre objet,
il exifte des Juges cartulaires exclufifs de toute autre Jurifdiél:ion, univerfels pour leur attribution parriculiere; mais
tous deux ayant égalité de pouvoir; tous deux conféquemment
reftreints aux limites qui, leur ont été fixées par les Loix?
Ne faut-il pas convenir que chacune des obligations dont on
vient de parler peut produire un contrat féparé, qui peut
avoir lieu entre des perfonnes différences? Ne faut-il pas
avouer qu'il eft pollible que les deux contrats foient paffés
à l'égard du Pacotilleur par le même homme? Par exemple,
fi, comme dans la caufe du Capitaine Arnaud, jugée en faveur des Juges-Confuls, il donne fa ·pacotille au Capitaine,
<lui s'oblige de la porter ( premiere obligation qui dépend de
l'Amirauté), qui s'oblige de la négocier & vendre (feconde
obligation diftinél:e de la premiere , pour laquelle le Capitaine
peut être aél:ionné pardevant les Juges-Confuls, fans que
l'unité de la caufe foit divjfée , parce qu'il exifte deux obligations diftinél:es & féparées ); & conféquemment ne faut-il pas
convenir que fi la diverfité des aél:ions ne rendoit pas le·_ contrat divifible, ·alors toute demande ~relative au commerce
non-feulement de la mer, mais même de·terre par la voie de
la mer, fans égard pour fon objet, feroit de la compétence
de l'Amirauté, 'fous le prétexte qu'·il feroit po/Iible qu'on y
élevât incidemment des queftions concernant
le
..
. fait maritime ~
~
.
�~6
JOURNAL
On a demandé à quel Tribunal on s'adre!feroit, fi l'ori
avoit à aétionner pour les fuites d'un contrat de pacotille. On
répond, que fi l'exception porte fur la gefl:ion feule, alors
point de difficulté. Si 'l'on s'eH adreifé aUi\[ Juges-Confuls, il
faut y refl:er; fi l'on s'efl: adreifé aux Juges de l'Amirauté, rien
de maritime dans l'objet de la conteitation. Rien donc dans
l'exécution du c{)ntrat qui ait pu dans fon principe être attributif de cette Jurifdiétion, ni dans les concefl:ations fur ce
contrat, qui foit maritime; ainfi Amirauté incompétenre. Il
en e!l: de même fi la conteHation porre fur le fait du tranfport, ou fi elle tient de près ou de loin à la navigation; ce que
l'on a dit dans le premier cas pour les Juge.s-Confuls, s'applique néce!fairement dans le fecond au Tribunal de l'Amirauté. Point de difficultés fur ces deux hypothefes; il n'en
exifl:e donc que dans le cas où les- deux exceptions ferone
oppofées, où les griefs porreront tout-à-Ia-fois fur le tranfport & la gefl:ion ; alors la caufe doit-elle être divifée? Les
luges-Confuls inve!l:is du .principal, doivent-ils prononcer
fur ce principal,. & renvoyer fur l'incident? Doivent-ils au
contraire renvoyer fur l'incident, & furfeoir à la prononciation
fur le principal jufqua'u Jugement de l'incident? Doivent-ils
enfin renvoyer pardevane le Tribunal de l'Amirauté toutes les
conte!l:ations, ou fl:atuer fur toutes?
11 femble d'un côté, que c'efl: à tort que l'on a dit que la
Jurifdiétion Confulaire n'efl: ,pas une Jurifdiétion de privilege ..
elle l'eU tout autant que celle de l'Amirauté; elle e!l: toute
auffi cartulaire pour toutes les matieres de commerce; il n'y
a vraiment de Tribunaux ·ordinaires, que ceux qui ont la
Jurifdiétion univerfelle. Les Tribunaux des Juges - Confuls
font compris 'par tous les Auteurs, dans ceux qu'ils appellent
les Tri!>unaux extraordinaires : delà on pourroit conclure
qu'il ne feroit pas tout-à-fait jufl:e de faire· relativement al)
Tribunal des Juges-Confuls, l'application de cette regle :
iJue le Juge ordinaire Tle connoit pas même incidemment des'
matieres attrihuées aux Juges extraordinaires. En effet, en
force de l'art. fi de -l'Ordonnance de 1673., titre de la lu.-:
�D U
l' A LAI S
D li
P
Il 0 V B N C
i~
'i-tt7
rifdic1ion des Juges-Confuls, ils connoilfent des lettres de
refcifion incidenre, quoiqu'ils ne pui1Ient pas en connoitre
principalement.
D'ailleurs, quand méme les Juges-Confuls ne pourroienç
connoitre d'une quell:ion d'avarie qui naîtroit incidemment
.dans une demande en reddition de compte pour une pacotille, cela ne pourrait jamais établir qu'ils fulfent incompétens pour la reddiüon de compte en. général; 1°. parce
qll'en droit, il eft abfurde que la crainte que dans une queftian attriQ_uée à des Juges, il n'en naiife une différente qui
eft attribuée à d'aurres Juges, empêche de s'adreifet au"
Juges de la queftion née, & les rende même incompétens
de fait, quoiqu'ils ne le foient pas de droit, de peur qu'on
ne fût obligé de recourir à d'autres Juges pour une quell:ion
à naître; 2°. parce que fi cette que/lion venoit à naitre,
alors attendu la divifion des matieres faites par les Ordon-,
nances, il arriverait naturellement une div.ifion de la caufe
par exception au principe, ne contif/emia caufœ dividatur, le...
quel ell: fufceptible des exceptions que la diverfité des Tribunaux & des attributions entraine; c'eft ainli que dans uro
bénéfice d'inventaire, s'il 'Y a un créancier pour taille, on
porte l'appel de la Sentence de rangement aux Juges ordinaires, fauf de porter feulement aux Juges de taille l'appel
du degré accordé au créancier pour taille; auffi Jouife ditil à l'occaGon des incidents qui peuvent naître pardevant
les Juges-Confuls, que s'ils·en font incompétens, ils jugeront
la demande principale féparément, &_ renverront POUlt
l'incident", ce qui fe peut, toutes les fois que l'inôdent n'eit
ni préjudiciel, ni préalable; l'unité de la caufe ne fe divife
pas alors, parce qu?un contrat peut donner lieu à plufieurs
aaions. Ici la geftion de la pacotille ell: une chofe, l'avarie
1
en ell: une autre.
Cep:endant malgré ces'Autorités, on-ne croit pas ces principes
enriérement applicables en général au contrat de pacotille.,
même malgré la diftinaioll q.ui naît·du droit & du fait,lSans
doute les Juges-Coneuls font Juges cartula.j~es & circonfcqt~
�~ft
JOU~NAL
comme les Tribunaux d'Amirauté; cependant, vis-~-vis de
ces derniers, les Juges-Confuls connoi1fent de .tous faits de
commerce en général, font Juges univerfels vis-~-vis des
Amirautés,. qui ne font que Juges de privilege pour l'attribution particuliere du commerce de mer; ainli, il faut difiin·
guer, comme on l'a déja dit, dans le contrat de pacotille trèsdivilible, deux faits très-féparés. L'un, la geaion, fait dl!
ClJmmerce en général, conféquemment fournis ~ la Jurifdiction univerfelle en fait de commerce, c'ea-à-dire, aux JugesConfuls; l'autre, le tranfport & rapport, fait maritime &
concernant le commere( par mer, conféquemment exclulivement attribué ~ la Jurifdiétion de privilege en fait de commerce de mer, c'ea-à-dire à l'Amirauté.
Mr. l'Avocat-Général obferva enfuite, qu'il ne fallait pas
s'arrêter beaucoup au fyilême de concours & de prévention
allegué par Rafpail, & que l'Amirauté a offert comme fimpIe obfervation pour diminuer la force de la chofe jugée.
Peut-il y' avoir concours ou prévention entre deux TribuRaux cartulaires & exc1ufifs l'un de l'autre, pour les différents
objets qui les concernent réciproquement? Peut-il dépendre
d'une 'partie quelconque de rendre par fa volonté, par fon
choix, tel ou tel Tribunal compétent, quand des Loix précifes ont fixé des bornes invariables, relativement aux différentes aétions qui peuvent naître des paétes d'un contrat?
Le contrat
mixte fans doute, mais la caufe de l'aétion
toujours diainéte; elle fixe irrévocablement fon Tribunal; elle feule Je.décide, & non la volonté des Parties; tout
ce qui n'eil pas expre1fément donné au Juge de privilege,
ne lui ea-il pas abfolument prohibé, & peut-il y avoir plus
lieu li concours qu'à connoi1fance privative?
Dans le fait aét.uel, il ne s'agit pas même d'un véritable
contrat de pacotille; ce n'eil pas le commiffionnaire qui ea
chargé de tranfporter; ce n'ea pas même lui qui
obligé
de faire charger les' marchandifes j c'èa .le Négociant qui
prend.'ce foin:, {Sc qui s'arrange avec ce Capitaine', ~qui il
paye fans doute le fret, & dont le connoi1fement lui ré.
pond
ea
ea
ea
�DU
PALA-IS
DI!
Pl\OVENCll.
489
pond de fa marchandi[e; le Capitaine éroit donc feul chargé
du rran[porr, c'e!l:-à-dire de rout ce qui était maritime, &
ce n'd!: pas lui qui el!: aél:ionné; donc impoffibilité de la compétence de J'Amirauté. Que porre la déclaration du commiffionnai;e? D'avoir reçu des marchandifes. Pour quel obiet, quelle
eH fan obligation? Pour vendre. Rien donc de maritime dans
cet objet; rien qui ne foit fpéculation de commerce ordinaire; rout ce qui pouvoit placer ce fait dans une ca thégorie différente, eH étranger à Martin, & ne regarde q'ue
le Capitaine chargé de veiller au tran[porr. En effet, point
de contell:ation fur tous les objets qui pourroienr regardel!'
la navigation; le ,Capitaine à rempli fon obligation; la geftion du mandat de Marrin el!: la feule foumi[e à la déci/ion
de la Jull:ice: llne rartie des retraits qu'il a rapporré n'eltelle pas d'une qualité viCieufe? Ces retraits doivent-ils reffer
pour [on compte? Sont-ils convenables à J'intérêt du commettant? En un mt'lt la commiffion a-t-elle été bien ou mal
remplie? Ne fam-i1 pas rai[onner fur ces retraits, heureufe_
ment. arrivés à Mar[eille, comme s'ils n'en émient jamais.
forris ? Qu'importe qu'ils [oient venus par mer ,. puifque
leur mauvaife quali[é ne vient pas du tranfport accidentel,
mais de la qualité de la marchandife en elle-même?
Quelle érait [on obligation? De vendre, d'acheter, de
négocier des retraits. L 'obligarton étant rotHe mercantille,
peut-il donc en naÎ[re une aél:ion qui ne le foit pas? N'étant chargé que de faire de's aétes de commerce ordinaire,
n'en ayant pas fait d'autres, comment peur-il être devenu
jull:iciahle de l'Amirauté, pour juger fi ces aél:es mercantilles font bien ou mal faits? Ml', l'Avocat-Général ob[erva,
fur J'imervention de la Provinc~, que, s''iI n'el!: pas permis
de conlidé.rer f(;m intérêt piJr la célérité d.es jugemens rendu~
par les Juges-Con[ols, pdr les frais qui y font moins confi~
dérables " le bien général, finon de tous les Ciroyens
aumQios d'une gcande partie., e.l un mot le bien publi"
exige que, 1"on ne mette pas des t:<ntraves au commerce,
La richetL ~énérale ne dépend-elle pas de cette libert~
A(l.né~s l78z & l78:1",
.
Qqq
�490
Jou li. ); A L
précieure, qui ell: l'efpoir du Commerçànt? N'efl-il pas
elTenriel pour tous les Citoyens, qu'en fait de commerce,
la Jull:ice s'exerce d'une maniere fommaire & gratuite? Le
commerce des pacotilles n'eH-il pas un de ceux qui doive
~tre le plus protégé, parce que, plus divifé entre une ftule
d'individus, il peut occafioner fin on de grandes fortunes,
au moins beaucoup d'aifance dans beaucoup de familles?
Ces motifs ne peuvenr-ils pas légitimer l'intervention de la
Province? Il ell: une foule d'occafions fans doute) où cet intérêt peut être plus direél:, mais néanmoins il ne !emble
pas qu'il puiffe êrre regardé comme entiérement nul, & l'on
doit Javoir gré aux Adminill:rateurs de leur zele; d'ailleurs,
leur intervention lors de l'Arrêt de 1727, dans une caufe
moins favorable e'ncore, & moins direél:e, relativement à
l'intérêt général, approuvée par l'Arrêt, femble être le garant
!lue celle-ci ne peut pas être refufée.
Mr. l'Avocat-Général conclut à ce que fans s'arrêter à la
requête d'intervention de l'Amirauté de Marfeille, faifant
droit au déclinatoire propofé par Martin, & aux requêtes
d'intervention de la Province & de la Chambre du Commerce, les Parties & macieres fuflent renvoyées aux Juges-Confuis de Marfeille.
Par Arrêt du 17 Mai 1782, prononcé par Mr. le Premier
Préfident, les conc1ufions furent fuivies; Rafpail & l'Amirauté furent condamnés aux depens. Plaidant Mes. Gaffier,
Simeon fils, Alpheran, & Dubreuil cadet.
ARR Ê T
XL 1 V.
La f~11lme qui plaide avec [on mari peut refufer de le rejoindre
pendant proces.
B
.
I LLO N faillit à fes créanciers, & prit la fuite pour éviter
leurs pourfuites. Feraud fon. beau-pere fe pourvut le 4
�DU
PALAIS
nE
PROVENCE.
491
Août 1779 pardevant le Lieutenant d'Aix, en répétition
oe la dot & droits de fa fille. Le 7 Décembre même année, Billon fit lignifier un aéte extrajudiciaire à fon époufe
dans le domicile de fon pere où elle fe trouvait; il l'interpella de le rejoindre dans trois jours dans la ville de Berre
où il avoit établi fan domicile, & à la maifon qu'il y avoit
fait préparer, fous l'offre de la traiter maritalement. La D1le.
Billon n'ayant point fatisfait à l'injonétion, Billon demanda
le II du même mois injonétion contre Feraud pere de lui
renvoyer fa fille, autrement qu'il fût ajourné pour le voir
dire & ordonner. Le Lieutenant joignit l'infl:ance en paiement de la dot à celle en injonétion de rejoindre; & par
Sentence du 12 Mars 1780, il ordonna qu'il feroir enjoint
à la Dlle. Feraud de faire procéder dans trois mois' à la
liquidation de fa dot & droits & à fa collocarion, après
lequel temps elle iroit joindre fon mari, autrement permis
de la faire traduire etiam manu militari, à la' charge par
Billon de I~ recevoir & traiter maritalement. Appel de la:
parr de. Feraud, qui demand'a fublidiairemenr pardevant la
Cour à prouver les fervices & mauvais traitemens que fa
fille avoit effuyé de la part de fan mad pendant leur ça.
habitation:
1
Feraud retraça la conduire de fan beau-fils à l'égard da
fa fille. Il obferva que l'on cœur était auffi dérangé que fes
affaires; que. fès fenrimens pour fa femme & fa conduite
avaient marché d'un pas égal da'ns les deux années, qu'ils
avoient cohabité enfemble. Il rappella & offrit de prouvet'
les févioes les plus graves.
.
Quant aux lettres que fa fille avait écrit à fan marI, ii
obferva que fon call·r n'y ,avait eu aucune pan, qu'elle àvoi~.
été même dans l'intention de faifit le moment auque'] fon
mari lui faifoit parr de fa firuation, pour lui reproc!{er le!!
torts qu'il avoit eu à fon égard; mais qu'elle en avait ét~ dé..
tournée par fa belle- mere, qui. lui dit que fan mari avoil:'
bien plu rôt befoill de confolation que de réprimande·;. que
d.'a.illeurs le n'avait ia.m~i.s.été dans l'intention de le r"eiQiuQrIl:"
QH~
�492
Jou RNA L
On répondait pour Billon, qu'il éroit plus malheureUlc que
coupable; des circon!l:ances imprévues, des événemens malheurellx l'avaient empêché de remplir fes engagemens envers fes créanciers; roujours honnête envers eux, il n'avait
pas dépendu de lui qu'ils ne fuffent payés en entier de leur
créance; 'Continuellement perfécuté par un beau - pere inflexible, auteur d'un inventaire juridique qui avait fait con fumer en frais une partie de fan bien, il avoit rencontré ce
même beau-pere fur [es pas, lorfqu'il avoir demandé fa femme qu'une fuite néceffaire avait éloigné de lui. Dans [es
malheurs, il avoit CtU trouver une confolation & un remede
à fes maux; il avait appellé celle qui naturellement devoit
les partager, & qui, en les partageant, ne pou voit que les
lui faire [upporter avec plus de patience; fes démarches
n'ont été payées que du refus l~ plus ob!l:iné. Obligé d'ayoir
recours à l'autorité de la Jullice, ce n'a été qu'après avoir
épuifé rorrs les moyens que peuvent employer les bienféances, l'honneur, le devoir, l'anlour de la paix, qu'il s'efl:
enfin déterminé à paraître devant la Cour pour rendre (a
jullification aufli publique, que Feraud avoit donné de la
publicité à la diffamation. C'efl: diffamer un mari, que de lui
refu[er, lor[qu'il el!: doux, honnête & jul!:e, la poffefIion
des [euls biens' qui lui rel!:enr : [a femme &' [es enfans.
Les deux lertres que (on épou[e lui a écrites (ont marquées au coin de la plus vive tendreffe; elle partage le
(Ort & la fortune de (on mari; elle eH fâchée de vivre (éparée .de lui; elle lui parle de (es enfans, lui envoit des,
fecours dans le beÎoin; elle demande qu'il tranquilli[e [on
e(prit en lui apprenrtant (a demeure; elle finir, les larmes
aux yeux, en l'affurant qu'elle eJl pour la vie fa très-chere
épl>u[e; elle emprunte dans le corps de la lettre ce langage
qui fied fi bien dans la bouche çle deux' cœurs tendrement
unis. Billon oppo[e aujourd'hui ces lettres à la cooouire de
[on épou[e; il· Y trouve route (a jullification, & la preuve
que ce n'el!: PÇlint elle qui le pour[uit, mais [on pere qui n'a
ce.I:fé d'être (on ennep.1i. D'ailleurs (ajouta-t-il) elle en non-
�nu
PALAIS
DE
PROVENC~.
493
recevable dans la preuve qu'elle demande des [évices, il,
fallait que [on pere la proposât en premiere in!lance, fuivam les Arrêts rapportés par Raviot & B"fTer, 'lui ont jugé
que la femme qui n'avait pas demandé de faire 1" preuve
en premiere infiance des mauvais traitemens qu'elle avoie
effuyé de-la part de fan mari, n'étoit point recevable à les
prouver en caufe d'appel.
Me. Meriaud, Subftitut, ob[erva qu'il efi des occalions où
l'on n'attend pas que la preuve [oit faite pour prononcer la
féparation; lorfque les mauvais traitemens font graves, lorfqt!e la vie d'une femme ef!: en danger, la Juflice vient à
fan fecours, & on commence par raffurer' Ces craintes & la
mettre·à l'abri des fuites fâcheufes qu'elle peut éprouver:
tels font les exemples de pareille féparation que l'on trollve
rapportés dans Boniface, Decormis & autres Auteurs. Il ef!:
vtai qu'une femme ne peur pas demander féparation pour
toutes caufes. Lés LégiDateurs ne font aucun cas des petites altercations qui fe paffent dans le ménage, parce ,que
nous devons mutuellement fupporter nos défauts. Notre Jurifprudence, dit Denifart, n'accorde la jeparation de corps &
d'hahitation, que quand la femme articule & prouve les faits
graves qui font appréhender pour la vie.
En thefe générale, il faut qu'une femme articule des faits
dom il puiffe réfulter que fa vie eH en danger; alors lés
Juges l'admettent à la preuve, tant par titres que par témoins. Si les faits n'annoncent paine dans le mari une férocité de caraél:ere qui faffe craindre pour les jour~ de
la femme, elle ne peut être admife à la preuve; il faut
la déclarer non - recevable; l'ordre public, la dignité du
Sacremem & le repos des familles exigent cette févérité
dans les MagiHrats. Il ne fuffit même pas qu'une femme
articule des faits graves & fe Cou mette à rapponer une
preuve teHimoniale; il faut de plus qu'ils foie nt vraifémblables; car on examine la nature des faits & les circonftances dans lefquelles ils font articulés; lorfgue l'on trouve
~anli les faits quelque conrradiél:ion, lorfque l'on ne trouve
�49+
Jou R N k L
. .
point la vraifemblance qui ell: l'image de la vérité, la
Juftice' fe met en garde contre les pieges qui lui font tendus.
Lacombe néanmoins dans fa Jurifprudence civile n'admet
pas feulement, pour être re~u à obtenir une féparation, les
mauvais traite mens qui font craindre pour la vie; il fuffit,
(uivant lui, que les faits (oient graves, qu'ils rendent la vie
i.nfupportable, infiniment trifte & difgracieufe, & qu'ils foient
q'une nature à· pouvoir être admis.
Suivant les Loix anciennes & nouvelles, la femme mariée
dt foumife à fon mari; elle eft in facris mariti, c'eft-à-dire,
en (a puiffance; de forte qu'elle doit lui obéir, & fi elle
manque aux devoirs de fon état, il peut la corriger modér-ément. Cette fupériorité n'eH établie qu'à caufe de la foibletre
du fexe, du vice de l'éducation des femmes, qui leur fait
une loi de ne s'occupér que des affaires domeHiques & de
détail. Il ne faut pas diffimuler qu'ii s'eft rencontré des femmes d'un caraélere atrez dé (agréable pour mettre le défordre
dans le ménage. Pourquoi f.lut-il que la portion la plus ai.lllable de l'efpece humaine, celle que la nature femble avoir
deftinée à procurer le plus grand bonhèur à l'autre, à tempérer· fa rudelfe, à rendre fes mœurs plus douces & fon ame
plus fenGble, foit celle qui caufe fouvent les plus grands ravages da,ns le domeHique?Tel ea le tableau de la faciété; il ne préfenteroit que
l'image de diffemions & de dérordres , fi la rairon & l'~u
,ation ne venoient à fon recours. Le mariage offriroit le
même tableau, s'il étoit permis de le conGdérer de près, &
de faire attention à ces altercations qui nai1Tent & s'éteignent dan~ le même ŒOment, & qui font la caufe de cette
retenue dans la conduite des MagiHrats, qui produit trèsfouvent le déboutement de la preuve des févices.
Me•. Meriaud examina enfuite la qualité des faits dont fe
plaignoit la Dlle. Feraud, leur vraifemblance & la poffibilité de les admettre. Elle fe plaignoit que fon mari la
te·(loit renfermée dans une chambre au recond étage oÙ il
~I1Qit cleyx' ~iQolets. (y!; la: table dout il la. menac;pit fo~
r
�DU
PALAIS
DI!
PROVBNCP.
49~
vent. Que cinq ou fix mois après fon mariage, étant enceinte, fan mari étant couché avec elle, la pi'it au col
pour l'étrangler, ce qui l'obligea à crier au fecours; que la
domef!:igue accourut toute effrayée, en criant, Madame, ouvrej-moi; que Billon empêcha fa femme d'aller ouvrir, &
continua fes mauvais traitemens, fur quoi la domefl:igue ne
put s'empêcher de lui dire: Monfleur, tirej lui Ull coup de
fufll, & cela fera plutôt fait; que la domef!:igue paIToit les
nuits à 'la porte de la chambre à raifon des mauvais traitemens; qu'un jour fan mari lui donna un coup de poing fur
le nez qui lui mit tout le vifage en fang, étant alors enceinte
de près de huit mois.
Ces faits (obCerva Me. Meriaud) ne fauroient être plus
frappans; & felon le fentiment des Auteurs, ils annoncent
la férocité du caraB:ere du mari, qui fait craindre pour les
Jours de la femme; leur vraifemblance étonne, mais malheureufement elle n'ef!: pas nouvelle, & il feroit dangereux
de rendre la Dlle. Feraud à fan mari dans de pareilles
circonf!:ances, avec des traits de cenè nature dont on ne
peut que craindre les fuites à caufe de la publicité qu'ils
ont re~u dans le cours des Audiences. Ce ne ferait cependant pas la premiere fois qu'on aurait rejetté la preuve de
faits femblables; les Arrêts que Denifart rapporte confirment
cette vérité.
Dans l'un, quoique la Dame Rapaly prétendît que fon
mari l'eût renverfée" à fes pieds, qu'il fe fût jetté fur, elle,
qu'il lui eût donné plufieurs coups de poing, & qu'il lui
eût marché des deux pieds fur la poitrine, qu'elle eût vomi
le fang dans le cabinet de fan mari, qu'on l'eût tranCportée
dans fan appartement, cependant comme fon mari prouvait fa jufl:ification par la conduite de fa femme elle-même
qui s'étoit amufée quelques jours après à faire de la mufigue, il n'en fallut pas davantage pour faire rejet ter la
preuve. L'invraifemblance dans les faits, tirée de l'impoffihilité apparente qu'ils aient exifié, doit égalem"ent opérer une
fin de non-recevoir.
"
�, 496
Jou RNA L
,
Ici Billon nie tous les faits (continua Me. Meriaud);
mais (a femme en annonce des preuves certaines. Son mari
n'a eu aucun ménagement pour elle dans aucun temps; il
n'a poiar cherché à (e cacher aux: yeux de (on domefiique,
de (es ennemis, de la garde employée à veiller auprès d'elle
dans le temps de (es couches; fan caraélere n'a pu' (e con·
traindre, il a éclaté dans routes les occaflons.
Mais (obrèrva-t-il) peut-elle (e flatter d'être écoutée?Sa conduire n'el!:-elle pas démentie par les lettres qu'elle a
écrires? Peut - l'He avec décence rétraéler & méconnaître
les (entimens qu'elle a fait paraître à fan époux? Une femme maltraitée tient un "utre langage; la fuite de fan mari,
le iejour qu'elle fai(oit dans la mai(on de (on pere, les (ecours de toute e[pece qu'elle y trouvait, ra1Turoient (es craintes, & devaient l'engager natlirellement à reprocher à (on
mari les torts qu'il n'avait ce1Té d'avoir dans tout le temps.
de leur cohabitation.
Il eH: certain que la reconciHati'on prive la partie du droit
de (e 'plaindre des fdits antérieurs; la Jufiice ne favori(e pas
les fantaifies & les caprices; mais l'on doit ob(erver que
quelque rairon qu'une femme puiIre avoir de (e plaindre de
fan mari, elle héGte long-temps à recourir à la force de la
Loi; ce n'el!: qu'après avoir épui(é tous les moyens, qu'elle
fe détermine d'employer les rèmedes les plus violens; il
n'el!: pas étonnant même de lui voir faire j'ufqu'à ce moment
les plus vives tl'nratives pour ramener fan mari'; elle voudroit éviter un éclat toujours fâcheux; le public l'effraye.;
elle conferve pOLIr ce mari, avec lequel dIe était deHinée
à vivre, qui devait être fan fourien & fa proteélion, uo reHe
de cette tendre1Te dont l'He voudrait l'ncore lui faire
éprouver les effets; une fefnme (entant les douceurs de la
maternité ft effrayée du mauvais exemple qu'elle l'fi forcée
de donn.e, à r~s enfiles; elle craint que (a conduite ne corrompe dans la (uite les fentimens qu'tlle voudrait leuT inculper; ce motif p liifant arrête [es pour[uÎtes, quoique légitimes ~ <X
1J4a8;e à. çh.en;h.er de/' nO\lveaux moyens pour
ramener
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PRO V Il N C 1':.
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497
l'amener le cœur de (o'n mari '; c'ell: nne derniere épreuve
qu'elle met en ufage ; tel dl: le véritable motif qui peut
& doit dé·terminer une femme bi~n née à fe rapprocher de
fon époux.
Ici on ne trouve dans les lettres écrites par la Dlle. Feraud que des expreHions diétées par des (erllimens de vertu
& de religion; il n'auroit pas été généreux pour elle d'ac~
cabler (on mari de reproches, dans un moment 011 il n'avoit beCoin que de confo!ations & de moyens pour faire face
à (es affaires. Un Hyle différent au l'oit annoncé un mauvais
caraétere, & auroit pu mériter:' la DlIe. Feraud toute l'indignarion de la Ju{l:ice; elle ne [e repent point de ce qu'elle
a écrit, elle a cherché à rétablir l'état d'un mari auquel
elle devoit être attachée par devoir; eUe a crn profiter de
la circonHance malheureufe dans laquelle il (e trouvoir, pour
ramener la dureté de fon caraétere, en lui fai(ant connoître
fa fituation, & en l'y inréreffilnt par le fouvenir de fes
enfans.
Elle ne (e refu(eroir point à aller joindre (on mari dansle domicile qu'il lui a indiqué; elle fait que la femme efr
obligée de Cuivre fon époux par - tout où il juge à propos
d'aller; mais cette regle n'ell: pas fi générale qu'elle ne
puiffe recevoir des exceptions; il eH fans doute malheu-reux
pour la Dlle. Feraud de facrifier la regle aux exceptions. La
prétendue cohabitation que Billon réclame pour faire débouter fa femme de (a demande en preuve de févices, ne
[ert au contraire qu'à prouver la néceffité de l'admettre;
ce moyen n'eH pas toujours favorablement accueilli; il faut.
une fuite non interrompue de bons traitemen?,. cie (oins,
de complaifances, pour détruire tous les maux qu'un mari a
fait fouffrir à fa femme-.
..
.
Quant à la fin de non-recevoir tirée de la forme de' la
procédure, Me. Meriaud obferva qu'il e{l: de regle que l'ap-.
pel a le droit de faire revivre toutes les qualités que les.
Parties font intéreffées à produire; qu'on peut refpeél:ivement les étendre, les corriger, les fupprimer; il a été rendl.!l
Année.s l78z & l782.
Rr~
�Jou RNA ~
des Arrêts qui ont refufé à la femme de faire preuve des
févices en caufe d'appel; mais les Arrêts particuliers ne
peuvent détruire la regle générale, ce font coujours les
circonll:ances qui les déterminent. Dans l'Arrêt rapporté
par Raviot & Perrier, qui débouta la fille du Marquis de
Janfon de la demande qu'elle avait formée en caufe d'appel, quoiqu'elle articulât des faits graves &: qu'elle dit que
fa vie n'écoit point en fùreté, on oppofoit que la preuve
qu'elle demandait la veille de l'Audience n'avait pour objet
que d'éloigner le jugement, qu'elle avoit abandonné les pourfuites commencées, & que depuis cinq années elle avait
gardé le filence.
Ici ce n'ell: point pour arrêter le jugement que la Dlle.
Feraud demande à faire une preuve; obligée de plaider
avec fon mari pour la répétition de fa dot, ce procès ne
peur être que long', parce que le frere de Billon a été déclaré préférable à fa dot & n'ell: poin~ encore payé.
Me. Meriaud conclU[ à ce qu'avant dire droit à l'appel
principal, & fans préjudicé du droit des Parties, Feraud
fût recu à vérifier les févÎces.
A;ret du premier Juin 1782, prononcé par M, le Premier
Préfident, qui débome Billon de fel Requête en l'état, avec
dépens. Plaidant Mes. Simeoh fils & Bouche.
'498
ARR Ê T
XLV.
"
Sur,la cejJion de droitsAitigiet{x•.
•
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E fieur Jean-Baptill:e Fargier, pe là VilLe de Marfeitle,
•
mourut eo r'770, déjailfanr deux filles & un garçon fous
la tutelle de la, :Dame. ManlleJ "(dn époilfe. Les fieurs Marion
& fils l'avoienrétabli leur prépofé dans une de leurs l)1aitons de commef,e.e;, il fe trouva leur débiteur de.la fomme
,de 11000 Iiv, pour la.9.u~lle i!.fuE condamné par défaut à la
'.'
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
~9
Jurirdiétion Confulaire. Il fut propofé un accommodement;
[a mort furvinr avant qu'il pût être terminé. Sa veuve prit fon
hoirie par bénéfice d'inventaire. Par aéte du 13 Août 1777,
les Dames Fargier, tantes du débiteur, rapporterent ceŒon
des droits des fleurs MaritJn moyennant la fomme de 2101 1.
fans que les cédans leur ~uffent de rien tenus, même de défaut de biens, attendu que la ceffion étoit faite à fOIfait &
aux rifques, périls & forrune des ceffionnaires.
Munies de ce titre, les Dames Fargier fe préfentent dans
l'inH:ance bénéficiaire pour être rangées au premier degré
pour la fomme cédée, enfemhle pour les intérêts & pour les
dépens. La Da.me Manuel, en qualité de tutrice de fan fils,
conteH:e, fur le fondement que le ceffionnaire d'LIll droit litigieux ne peur ptétendre que la fomme par lui débourfée.
Sentence de rangement du 12. Septembre 178 l , qui range
les Dames Fargier au premier degré pOlir les fommes par
elles débourfées feulement, en principal, intérêts & dépells.
Appel de leur part pardevant la Cour.
On di fait pour elles qu'on appelle créance Iitigieufe celle
qui eH: imbrinquée, qui eH: domeufe , qui exige difcuffion,
qu'il faut apurer à travers des conreHations, ou qu'il Elut
légitimer à la fuite d'un procès; mais tous les Auteurs atteHene que la créance dont iJ conHe per injlrumentum, fèn-:tentiam vel alium titulum n'ef!: pas une créance litigieufe
( Olea , de cejJione jur.lib. C, quo 10, n. S
On ne pourroit
pas même regarder comme créance litigieufe celle qui, portée par un titre, donnerait lieu à un procès en condamnation, parce qu'alors le débiteur ne plaide que pour avoir
du temps, & il n'y a que la contef!:ation fur la créance ellemême qui la conftirue litigieufe.
La créance dont s'agit ef!: légitime & non litigieufe ; elle
n'a point été rapportée par les Dames Fargier pour vexer
le pupille, ou pour s'avantager fur lui, mais pour empêcher
que le pupille ou fa tutrice ne les vexaffent, & dans le feul
objet de fe garanrir des pertes qu'on voulait leur faire e!fuyel'.
La ceŒon a donc été rapportée dans une vue légitime, &
s. )
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RNA L
umquement pour faire ceffer le litige, &. terminer toutes
les contell:ations qui s'éraient déja élevées.
Si c'ell: un rachat que l'on exerce, il faut néceffairernent
acquitter le ceffionnaire ; il doit abire indemnis, & ce n'efl:
pas le renvoyer indemne, que de réduire fa créance, & le
Jaiffer expofé aux événemens d'un bénéfice d'inventaire.
En droit, rien de plus ordinaire & rien de plus licite que
la ceffion d'aél:ions, que ce qu'on appelle emptio nominis.
C'ell: précifément pour ces fortes de ceffions qu'ont été portés les titres du code & du digeHe de luered. vel acl. vend.
& que routes les Loix qui (ont (ous ces deux titres nous attell:ent, que nominis venditio , etiam ignorante wl invità eo
adverjùs quem ac7iones mandal/tur, contrahi folet ; c'eft un
commerce licite, légal, an commerce qu'il imporre de maintenir, enfin un commerce qui ne faj·t pas le préjudice du
débiteur, puifqu'il lui eft égal de payer (on créancier originaire ou (on ceffionnaire qui devient fan image, & qui
eft un autre lui-même.
- Il ell: vrai ·que quoiqu'il fait permis d'acheter une aél:ion ou
une créa·nce; rout comme il ell: permis d'acheter une hérédité, il eft cependant telle efpece d'aél:ion dont le rranfporr
devient prohibé, fait à raifon de la perfonne, fait à r;lifon
de la chofe. Ainfi, quand une créance eH li:igieufe, il n'cfl:
pas permis à des gens d'affaire de s'en rendre adjudicataires;
c'eft la difpofition de l'Ordonnance de Fra'nçois 1er. de l S31 ;
de l'art. '14 de celle d'Orléans & du Statut de Provence. NIais
il faut que la ceffion fait de biens àanc en querelle; c'eH le
terme de l'Ordonnance de François 1er., ou de proch é,~ droits
litigieux, fuivant l'Ordonnance d'Orléans, ou qu'il Y ait litige
imminent, (uivant le Statut. Ainfi, du chef du ceffionnaire,
la ceffion des droits peut' être prohibée à raifon du litige;
c'ell: une efpece de paél:e de qllotâ litis, qui ell: prohibé,
même à peine de punition exemplaire; fuivant les Ordonnances.
La ceffion peut être prohibée encore par rapport à la nature de la chofe, c'eH-à-dire, fi la chofe ell: litigieufe; &
�D U
PAL AIS
1):Il
PRO V
P;
NeE;
,OI
l'!n ce cas la ceffion n'efl: pas radicalement nulle, comme
lorfqu'elle el!: faite à un homme d'affaires; mais le débiteur
a le droit de la racheter, & de ft fù6roger au cejJi.onnaire en
remhourfant les fammes qu'il a effec7ivement payées. Ita le
nuuveau Commentateur des Sraturs, tom. l , pag. 87,
Mais il faut pou·r cela deux chofes; la. que la dette foit véritablement lirigieufe ; :2.°. que la ceffion foit faire dans l'objet de s'emparer d'une partie de la forrone d'autrui à la favet;r du procès. Et de fait, les Loix pel' diverfas & ah anar-.
tafio , cod. mandati qui ont introduit le rachat en quel!:ion,
ne dilpofent que colltra quofdam alienis fortunis inlziantes,
c{Jnrre ceux qui, comme le dit Dumoulin en [es contrats
ufuraires , quo 62, n. 413, pro avaritiâ vel alios vexandi /i6idùze, viii pretio redimunt ac1iollcs litigiofas vel duhias.
Delà deux confégueuces qui décident tollt le procès; l'une,
que fi la dette n'el!: pas Iirigieufe, l'on ne peut pas empêcher le ceffionnaire d'en profiter; l'autre, que lors même
qu'il s'agit de la ceffion d'un droit litigieux, fi le ceffionnaire .
a incérêr de la rapporter, & fi l'on ne peur pas dire qu'il
l'a rapportée animo vexandi, la ceffion doir encore fortir
fun effet. Les Loix pel' diverfas & ah anoflofio ne s'appliquent pas à la cellion de toure créance litigieufe; la. parce
que ce feroit inrerdire le commerce des aél:ions; :2.°. parce
que ce feroit anéantir les titres du code de hœred. vel oc7.
vend.; 3°. parce que ce feroit donner au débiteur un avantage qu'il ne mérite pas; il auroir la faculté de ne pas payer
fDn créancier, & le créancier n'auroit plus la faculté de
0
vendre; 4 • parce que les Lo}x pel' diverfas & oh anaflqfio
ne difpofent que contra litium redernptores, que contre ceux
qui [e chargent de pourfuivre un procès que le créancier
n'auroit peut-être pas pourfuivi lui-même; enfin, contre ceux
dont on peut dire avec Cujas, lib. 8, ohftrv. chap. l , qu'ils
ont plutôt acheré le procès que le droir. Delà cette
juGe conféquence, que quand il s'agit d'un droit qui n'el!: pas
comel!:é & qui ne fait pas mariere de lirige, il n'y a pas
lieu à l'anéanciifement de la ceffion. C'eft ce qui no~s eft
�Jou RNA L
acteflé par Mornac, Leg. 6 , if. de in illtegr. rd/itut. ; par
Mourgues, pag. 29 ; par Boniface, tom. 4, liv. 8, tit. 3'
chap. 9 ; par Mr. de Bezieux, liv. 4, chap. 13, §. I I ; &
par le nouveau Commentateur des Statuts, pag. 87,
Ainfi jugé par deux Arrêts bien récents. Le fieurde Mene
avait rapponé du fieur d'Hermine, de la Ville d'Apt, ceffion d'un capital de 3000 liv., & de nombre d'années d'arrérages {ur le fieur Feraud. Ce dernier acclamé excipa des
Loix per divufas & ah anaflafio; le Lielltenant lui accorda
1<; rachat; mais par Arrêt du 18 Juillet 1768, au rapport
de Mr. de Beauval, ta Sentence fut infirmée, la ceffion
maintenue, & le débiteur condamné à payer. Le {econd
Arrêt eH du 2. 1 Juillet 178 l , rendu au rapport de ML de
Rametuelle après partage aux enquêres, & vuidé taut d'une
voix en Grand'Chambre. Me. Donneaud, Médecin de Barcelonerte, avoir acquis de la maffe du fleur Maurin, de la
Ville de Turin, une créance {ur la Dlle. Caire, & à un
prix difproporrionné jufqu'à la viIi té ; la Dlle. Caire voulut
exercer le rachat; mais comme la cléance n'était pas lirigieufe, elle en fut débolltée par l'Arrêt:
Ici la créance de la maffe des fieurs Marion & fils ne
peut êrre envifagée comme lirigieufe, ni de fait ni de droit.
De fait, parce qu'il n'y avait réellement point de procès.
De droir, parce qu'il était impoffible qu'elle donnâr lieu à
litige, pJifqu'elle n'avait éré formée que de J'ordre exprès
du. fieur Fargier. Les Dames Fargier figurent comme débitrices & comme créancieres. Or le rachat compere-t-il contre le créancier qui, pour prévenir qu'il ne fait exclu par
un créancier à un d~gré antérieur, achete fa créance, ou
qui n'achete que pour fe maintenir: exceptis cejJionihus,
difent ces Loix, quas inter colzœredes pro aaionibus lzœreditariis fieri eontingit, & !lis quafcumque vel creditor, vel is qui
Tes aliquas polfidet pro debito , ,(eu rerum apud ft eoriflitutarum
muniminè ae tuitione aeeepit. Qu'il s'agiffe donc d'un cohéritier,
d'un acquéreur, d'un poffeffeffeur qui cherche à fe maintenir, ou d'un fimple créancier qui n'a rapporté la ceffion
,02
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
~o3
que pour l'intérêt de fa créance, la cellion., quand bien
même elle porreroit fur un droit litigieux, n'en doit pas
moins forcir fan effet; & c'elt ainli que l'attell:ent Boniface,
Mr. de Bezieux, Catelan, & le nouveau Commentateur des
StatLHs.
Jamais la viIi té du prix n'a été une rai fan pour autorifer
le rachat d'une créance non lirigieufe. Les capitau\', les immeubles, les créances, indépendamment de leur valeur
fonciere, ont encore une valeur arbitraire; ce font des objets commerçables que l'on n'ell: pas obligé de prendre fol
par f~l, comme quand il eH queHion de procéder par collocation. La difficulté de rerirer la fomme, le rifque de ne
pas la recouvrer, les contellations qu'il peur y avoir en pourfuivant l'exécution, conrenations qui ne conll:ituent cependant pas le litige, font autant de raifons qui autorifent la
ceffion de la créance au prix que l'on velHo
On répondait pour IJ Dame Manuel, que celu i qui achete
à vil prix une créance Iitigieufe, ne peut empêcher le débiteur de fe mettre à fa pLlce; celui-ci en libéré, s'il lui
rembourfe ce qu'il a débourfé ; voilà la véritable difpolition
de la Loi pel' dil'erfas & ab anaflafio: ufque ad ipfàm talltummodo fo/utarum peculliarum quantitatem & ufurarum, ejus
aéliones exercere pemziul1wr. Autant le citoyen pailible qui
fe préfente dans le fanél:uaire de la Jufiice pour réclamer le
fecours des Loix, en illtérdfant, autant efi odieux celui
qui ne s'y montre qu'après avoir acheté le procès qu'il vient
y pourfuivre. L'un ulè de fes droits, l'autre ne fait qu'un
trafic honteux. L'un n'afpire qu'à jouir dn privilege de tout
citoyen; l'autre ne fe préfente que pour ranimer l'inquiétude .d'autr.ui. Le premier ne court qu'après fon repos; le
fecond, par un goût marqué pour les procès, fe déclare
l'ennemi du repos des autres. D'ailleurs, en voyant un droit
abandonné par fon premier maître, accueilli avec empreffement, pourfuivi avec chaleur par un tiers, que peut - on
penfer, li ce n'dl: que ce dernier a un goût décidé pour
les chicanes, qu'il ache te les tergiver[atio.ns ? Enfin ~ fi le
�SOi
Jou RNA L
droit eflt été laiffé à (on premier mahre, (a haine pour l'es
procès eur peur-être ménagé un accommodement avantageux aux deux parties, utile à la (aci.été dont elle eut favoriré l'harmonie. De quel œil pourroit-on voir celui qui e!~
venu s'y oppo(er ? L'indignation des ames honnêtes, l'animadverlion des Loix ne doivent-elles pils être fon partage?
Tels furent les motifs qui déterminerenr la Loi qui déploya
la plus june févérité contre ces acheteurs de droits litigieux
ou de proch.
Rien de li (ufpeél: en effer que celui qui vienr Ce mêler
indifcréremenr & [lns fujer dans les affaires d'autfui ; la Loi
femble favorifei' elle - même cette préfomption ; nec enim
duhium efl, dir-elle , redemptores lilium alienarum videri , qui
tales cejJiones in Je conJPici cupiunt. A lès yeux il fuffit donc
de rapporter ces fortes de ceffions , pour être convaincu du
delir d'acherer les procès étrangers. C'en fur ce même
morif que fe fondent la coutume de Flandres, & les Arrêts
rapport~s par Cujas & Boguier, qui établiffetlr que raute
ceffion en au cas de la Loi per diverfas & ah anaflafio.
Le litige de la créance achetée par les Dames Fargier
éclare de toute parr; la narure même de la créance, la conduite du débiteur, celle des divers créanciers par les mains
de qui elle a paffé, enfin l'aél:e de ceffion lui-même, rallt
fe réunit à démontrer que c'érait la créance la plus 'verreuCe
qui Un jamais. Dans la demande des lieurs Marion, on y
voyait qu'ils avoient acqu.is cerre créance fur le fieur Fargier
en payant pour lui, & de fon ordre, à raifon de fon commerce. Sur quel ritre fe fondoir-on pour exciper d'une fourniture auffi ,importanre? Uniquement fur les livres des
prérendus créanciers. Il en pourtant certain & noroire
que jamais le fieur Fargier n'a faili de commerce en fon nom,
jgmais il n'a eu' de maifon fur fa rêre. IOn eH donc bien
éloigné de prouver un commerce auffi conlidérable que celui
qu'il faudrait fuppofer pour des avances auffi importantes.
Il avoir éré, il dt vrai, le commiffionnaire des lieurs Maliio.n & fils., leur pr.épo(é dans une maifon. de ,ommerce;,
'.0
.,
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mai$.
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PAL AIS
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P lt 0 VEN Cl!:..
~o.,)
mais ce genre de relation pouvoit le rendre leur créàncier, &
non point leur débiteur. On conçoir qu'un prépofé peur fe
faire une créance fur celui dom il fait les affaires, en lai(fant accumuler [es gages ;. mais qu'on lai!fe 11 un homme fans
re!fource ,fans forrune, une fomme conlipérable , qu'on refte
à cet égard dans la plus longue inaél:ion, qu'on paroi!fe oublier des avances auffi forres pendant un très-long intervalle,
c'eft ce qui feroit 11 peine croyable [ur les prel,lves les plus.
déciiives, fur les t.irres les plus conclua·ns.
En fe prêrant même à la fuppolirion de ces fournitures ~
chacun fait ce que ç'e!l: qu'un compte couran.~entre des commerçans ; des arricles de toure efpece le compofenr; ce font
des dérails fans nombre, tant que ces comptes n'ont pas éré
arrêrés, ran.t qu.e chaque article n'a pas été vérifié en détail, riem de moins liquide que leur ré fui rat , par c:;onféquent
rien de plus verreux q\le. la derre don.! il peut former la bafe;
fous quelque rapport qu'on envifage la nature même de Iil;
c:;réance , elle ne [ert donc qu'à pro.uver fan Iirige. Une
créance de plus de 11000 liv. en principal, & d'environ
;jurant pour les intérêrs pour laquetle on offroiE 2.570 liv•.
[uivant la lettre du lieur Fargier écrite 11 [a mere, n'eH_
elle donc pllS des plus verreufes ? Le fieur Fargier parloit
d'un accommodement; il fe flattoit que le fieur Lesbros'
ne [e refuferoit pas d'y adhérer. Des propofitjons avoienî:
donc éré faires entre tes p.anies ; les voies de conciliation
avoient éré OIlvertes ;' il Y avoit donc des conteftarions; ce·
n'était donc que parce que le fieur F argier fe propofoit de·
faire réuffir [es propolitions, qu'il différoit [on appel d'uneSentence {j çon.traire 11 fes vues.. Une circonHan.ce remarquable, c'ea que cette (am me , offerte alors par le (jeur Fargier, ea à-peu-près 1'1 mê.me que c.elle qu.i a fait enfIüre I~
prix de la c Q l I i o n . . ·
.
La conduire du. débireur offre eocore les pr:euves qlle Po~
a annoncées [ur le peu de (olidiré de cerle créance. Le fieurMarion, vér·itable créancier, ne fair aucune demqrche pourêtre payé, quoiqu'il fe ~rou.ve da.os <l.es c.Îrc.onfiances à fa.iJ;~
41~n~e.s l7,8z & l78:4'
S.S,S;
�~06
Jou
RNA L
ufage de toutes fes relfources. Le fie ur Lesbros, Syndic de
fes créancie'rs, obtient- Sentence; mais il attend cinq années
'de la mettre à exécution. Après une légere démonlhation
du de Gr d'être payé, cinq ans s'écoulent encore. Le débiteur meurt; une infiance bénéficiaire s'ouvre; le fieur Lesbros y efi appellé dès l'origine ; il attend fept ans pour
former fa demande; à peine l'a-t-il formée, qu'il abonne
[es droits à 2101 liv.; cette modicité du prix de la ceffion efi fans contredit un figne certain du litige de la créancé.
Si perfonne ne doit être préfumé renoncer à fes droits fans
motif; fi un aél:e auffi infenfé révolte la raifon, lorfqu'ol'l
voit un créancier vendre pour une fomme modique une
créance auffi confidérable en apparence, il faut croire que
cette apparence efi trompeufe ,qu'il craint quelque déduction. Lorfque l'inégalité efi confidérable, Iorfque la ceffion
a été rapportée à vil prix, l'application des Loix devient
donc nécelfaire ; le litige de la créance efi donc démontré,
fuivant Dumoulin, contrac1. ufur. quo 6:1., n. 413; & Boniface, tom. 2, pag. 274.
L'exception propofée par les Dames Fargier , fur ce que
Je créancier qui ne' rapporte les droits que pour les oppofer au créancier anrérieur , n'efi pas au cas de la difpofition
de ces Loix, efi une exception vraie; elle efi écrite dans
la Loi même qui établit la regle; mais il s'en faut bien que
les Dames Fargier foient créancieres; celui·là n'efi pas
créancier qui fur une dette a des. déd uél:ions à propofer qui
ne l'abforbent pas; il importe donc fort peu que le créancier pofiérieur pui1fe rapporter des ceffions litigieufes. La
créance dont s'agit étoit des plus verreufes; fa nature, les
circonlbnces dans lefquelles elle fut conrraél:ée, les propo{itions du débiteur, la conduite des divers créanciers entre
les mains defquels elle a palfé, tout [e réunit à l'établir.
Par Arrêt du 17 Juin 1782, au rapport de Mr. le ConfeiIIer de Robineau, la Cour, en concédant aél:e à la Dame
Manuel de ce qu'elle ,confenroitque les Dames Fargier fu1fent
rangées à leur degré pour les fraix & loyaux-coûtS de l'aél:e de
�·}tu
PALAIS D.E PROVEN"ct.
~01
ceffion confirma la Sentence ) avec dépens. Ecrivant Mes,
Pafcalis & Verdet neveu.
ARRÊT
LXV J.
Le paiement pendant plufieurs annùs àes intérêts cfURe fomme:
adjugée ne peut faire prifumer la conflïtution de rente.
Les intérêts payés au del/z du double d'une fomme adjugée ne:
font ni répétibles., ni impura6üs alJ, principal.
E:> fieurs Pierre & Jean Ruel pere &. fils, MarchandsFabricants Papetiers de la ville de Marfeille , s'obligent
folidairement par aél:e public du 2& Novembre 173.6, en faveur du lieur Jean-Baptifte Rey, Ecuyer, Seçretaire du Roi,
& Négociant de la même ville, pour la fomme de 23 1 ~ liv.
S f. , valeur reçue comptant, & à titre de prêt, pour furvenir'
à leurs affaires & négoce, rembourfable dans trois ans du
jour de l'aél:e. En 1743 le fieur Rey n'étant pas. payé, fait
affigner les lieurs Ruel devant les Juges-Confuls. Il obtient·
une Sentence par défaut, & fai, procéder à une faifie de leurs,
biens meubles & immeubles; les lieurs Ruel payent les frais,
& 1 S liv. ~ fols à compte du principal ; ils obtiennent du
temps pour le renant, fous l'offre de payer les intérêts des,
2300 liv. à chaque jour 28 Novembre. Cet arrangement·
eft exécuté jufqu'au 28 Novembre 1772, que le lieur Rey
voulut faire une quittance publique pour y prorefter avan~
l'expiration des trente ans, du drnit de pouvoir exiger les.
23001iv. Le fleur Ruel paye encore les annuirés de 1773 &
1774, & n'ayant plus voulu payer, le lieur Rey préfenr~
une Requête au Juge d'Aubagne le 6 Septembre 1777 pout
faire dire & ordonner qu'il lui fèroir permis d'exécuter I~
Sentence Confulaire du 14 Janvier 1743, & à ces fins que les,
hoirs du lieur Ruel feroienr contraints, tant pour la Comme
principale) que pour les imérêts. c;O<JNUS utilement Ikpl,lÎs l~
S SS :t.
L
�·}tu
PALAIS D.E PROVEN"ct.
~01
ceffion confirma la Sentence ) avec dépens. Ecrivant Mes,
Pafcalis & Verdet neveu.
ARRÊT
LXV J.
Le paiement pendant plufieurs annùs àes intérêts cfURe fomme:
adjugée ne peut faire prifumer la conflïtution de rente.
Les intérêts payés au del/z du double d'une fomme adjugée ne:
font ni répétibles., ni impura6üs alJ, principal.
E:> fieurs Pierre & Jean Ruel pere &. fils, MarchandsFabricants Papetiers de la ville de Marfeille , s'obligent
folidairement par aél:e public du 2& Novembre 173.6, en faveur du lieur Jean-Baptifte Rey, Ecuyer, Seçretaire du Roi,
& Négociant de la même ville, pour la fomme de 23 1 ~ liv.
S f. , valeur reçue comptant, & à titre de prêt, pour furvenir'
à leurs affaires & négoce, rembourfable dans trois ans du
jour de l'aél:e. En 1743 le fieur Rey n'étant pas. payé, fait
affigner les lieurs Ruel devant les Juges-Confuls. Il obtient·
une Sentence par défaut, & fai, procéder à une faifie de leurs,
biens meubles & immeubles; les lieurs Ruel payent les frais,
& 1 S liv. ~ fols à compte du principal ; ils obtiennent du
temps pour le renant, fous l'offre de payer les intérêts des,
2300 liv. à chaque jour 28 Novembre. Cet arrangement·
eft exécuté jufqu'au 28 Novembre 1772, que le lieur Rey
voulut faire une quittance publique pour y prorefter avan~
l'expiration des trente ans, du drnit de pouvoir exiger les.
23001iv. Le fleur Ruel paye encore les annuirés de 1773 &
1774, & n'ayant plus voulu payer, le lieur Rey préfenr~
une Requête au Juge d'Aubagne le 6 Septembre 1777 pout
faire dire & ordonner qu'il lui fèroir permis d'exécuter I~
Sentence Confulaire du 14 Janvier 1743, & à ces fins que les,
hoirs du lieur Ruel feroienr contraints, tant pour la Comme
principale) que pour les imérêts. c;O<JNUS utilement Ikpl,lÎs l~
S SS :t.
L
�')08
Jou RNA r.
28 Novembre 177'2., fous la déduél:ion de tous légitimes
paiemens. Sentence le 20 Juin 1778 , qui, fans ~'arrêter aux
exceptions des hoirs Ruel, accorda les fins de la demande
du lieur Rey, avec dépens. Appel au Lieutenant d'Aix. Sentence qui confirme celle du Juge d'Aubagne. Appel pardevant la Cour.
On difoit d'abord pour les hoirs Rue!, 1°. que la Sentence Confulaire érait incompétente & nulle; 2.°. Que la procédure tenue à Aubagne érait infeél:ée de nullités, 3°. Que le
paIement des intéréts d'une fomme exigible opere la conl1:itution de rente quand il a été fait pendant dix ans; 4°. Quand
même la fomme due au lieur Rey ferait exigible, il faudrait
y imputer tous les intérêts payés au delà du double. Les
hoirs Ruel abandonnereot les deux premiers moyens.
. La conteltarion {e réduilit à fàvoir li la fomme portée par
la Semence des Juges-Confuls av?it été convertie en contrat
de conltitution, & li la fomme fuppofée exigible avait pu
produire 'des intérêts au delà du double. Si la fomme principale n'a point changé de Ilature, le lieur Ruel a dll être
condamné. Si la fomme a été convertie en conerat de conftitution, les Sentences qUI ont condamné au paiement du capital font néceffairement in juiles , & la condamnation ne pouvait jamais tomber que fur les intérêts, en fuppo/âne toutefois
Gue Ruel fût arréragé.
Il eft certain, d'après les quittances expédiées à la famille
Ruel & par les lettres écrites par le fiellr Rey (coneinuoit
l'Appepanr) qui tout'es font mention, de la penlion d'un
capital ou rente conftiru~e , qu'on ne peut demander aux
héritiers des lieurs Ruel le paiement de ce capital, parce
gu'il n'eft paine exigible. En 'droit, rien de plus permis que
de convertir une fomme exigible en contrat de con/brutian; & fi le contrat a été une fois confenti, la fomme
qui éroit exigible, ceffe de l'être. C'ef~ ce que la Loi appelle priaris debiti in alienam abligatianem tranJlatia atque
~ransrtJjia. Celui qui a payé pendant dix années avec expreffion de caufe, el~ obligé' d'en continuer le paiement.
�'fi u ~ A L A J S D E PRO VEN C :Il.
)09
Çe paiement de 'fa part, pendant un fi long terme, fuppofe l'obligation, la remplace & l'oblige à continuer le
paiement ~ quoique le titre originaire ne folt point exhibé.
Or i fi telle eft la regle du débiteur au créancier, telle doit
·être auffi la regle du créancier au débiteur. Quand on fuppofe le titre en faveur du créancier par la feule preftation
de dix années, on ne peut, dans le même cas, que le
fuppofer en faveur du débiteur; la regle doit être égale entre
l'un & l'autre.
Chacun fait qu'en droit longum tempus ne lignifie que
dix an's, & que 30 années font délignées par longifJimum
tempus. La Loi 6, ft: de ufuris, nous dit: Imperator Antoninus ideà folvendas ufuras jlldieavit'luod eas ipfe Dominus,
vel pater longo tempore prœJliti/fèt; rien de plus clair que
cette Loi. La Glofe en donne la raifon: ex diuturna prœJlarione ufurarum prœfumitur eOfurac1a obligatio .... . ln hune
modum probatur debitum per diuturnam folutionem. Cenfius, en fon Traité de Cenjiblls, queft. 8 l , traite la queftion
ex profelfo. Telle eft encore l'opinion. de Dumoulin, en fes
contrats ufuraires, queft. 2.0, n. 2.09 & fuiv. ,& de Decormis,
tom. 2., col. l ~ 4 1; & c'eft conformément à ces principes,
que par Arrêt du 17 Juin 17)7, rendu au rapport de Mr. de
Coriolis, le lieur Rou{hn de Brignoles fut condamné à
éontinuer de payer au fieur d'Efparra la penfion qu'il lui
avoit payée. pendant dix années.
Suivant la pureté de nos principes, l'argent he doit pas
produire de l'argent. Le pret doit être abfolument gratuit,
ou l'argent ne doit produire de l'argent, qu'autant que le
fort principal eft aliéné. S'il ne l'dt pas, l'intérêt qu'exige
lè créancier devient ufuraire, & cette tache d'ufure n'eft·
pas effacée par la précaution que l'on prend de rapporter
un Juge,nent de condamnation; c'eft alors faire fraude à
la Loi, puifqu'alors même que le débiteur pdye "des intérêts, l'on a encore la liberté d'exiger le principal, & que
le principal ne peut produire d'intérêt qu'autant qu'il eft
fliéné. AinU, des intérêts payés enfuite d'une affignatiGI]
�FO
Jou
Il N A L
one été jugés imputables au principal, par l'Arrét rapportépar Soefve, cent. 3, chap. 39. C'eU pour prévenir cette
efpece de fraude que les intérêts ont été fixés au double"
in pœnam negligentiœo c.reditoris, fuivant la remarque de Catelan, liv. 5, ch. 70.
Il ne faut donc pas croire que par cela feul que l'on obtient une Sentence par défaut, qui peut être collufoire, &
qui l'eH quand on ne l'exécute pas, on pui{fe exiger l'intérêt d'un argent qui n'cil: pas aliéné; fi on l'exige, on
doit plutôt fuppofer le capital, parce qu'alors le foupçon
de fraude difparoîc, & les intérêts deviennent légirimes.
011 doit le fuppo!è.r, 11. plus forte raifon, lorfque les intérêts
ont été exigés au-delà du do.uble, quand on ne voit aucune
iniill:ance de la pare du créancier à, vouloir être payé, & à
plus forte raifon quand il a concédé 30 ou 35 quitrances
de penflon, procédant d'un capital conf!:itué: voilà pourquoi, lors même qu'il n'apparoît que du fimple paiement
des intérêts, fans énoncer qu'ils procedent d'un capital ou
'ît1ême d'un capital çonHitué, on· doit fuppofer la conf!:itutian comme le feuL moyen de légitimer des intérêts furrout exigés au - delà du double & d'une fomme exigible.
Ravior, tom. t, quef!:•. 16S, pag. 519, dit que c'ef!:la regle
que l'on devroit fuivre en pareil cas.
Les iieurs Ruel & leurs hoirs ont payé pendant 30 ans
la penlion d'un capital conflitué depuis langues années; ce font
les exprelIions dont le fieur Rey fe fere dans fes lettres. On
n~ doit donc continuer que la même peniion; le fort principal ne peut être exigé. Si la fomme principale püreée en
la Sentence Confulaire n'avait pas été convertie en conf!:irution, le fieur Rey auroit-il imaginé de demander une penfion, & la penfion procédant d'un capital? II exif!:oit donc un
l;ontrat de conll:itucion ; la fomme n'était donc pas exigible.
C;'ef!: Parce qu'elle ne l'était pas, que le lieur Rey n'a jamais
exigé que la p~niion. du capital, & du capical conf!:ilué par
contra.c depuis longues années: ou il faut qU'li dénie, contre
la teQe~r <le Ces propres h:ttres) qu'il Q'y a iamais eu de cQIl~
�n u PAL A IS n lE Ii R 0 V Il N C Il~
) ft
trat depuis longues années, ou il faut qu'il convienne de l'inexigibilité du capital.
Toute difcuflion fur les intérêts exigés âu delà du double
devient dès-lors inutile; le principal fe trouvant aliéné, il el!:
june qu'il produife au propriétaire des fruits. Ces intérêts
exigés au delà du double font une nouvelle raifon de fuppofer .\a conHitution. Il ne dépend pas plus d'un Marchand
que de tout autre de laiifer une fomme exigible aux mains du
débiteur pour en recevoir des intérêts qui naturellement ne
doivent être que la récompenfe de l'aliénation du fort principal.
On répondoit pour le fieur Rey, que le fieur Ruel étoit nonrecevable en fon "appel, parce qu'il conHoit par fes lettres
qu'il avoit témoigné plufieurs fois au fieur Rey l'intention
dans laquelle il étoit d'exécuter la Sentence du Lieutenant,
& qu'il lui avoit demandé du temps pour le payer. La fin
de non-recevoir ell: invincible, fuivant la loi S , cod. de rè
judieata , conçue en ces termes : ad folutionem dilationem petentem aequieviJfè Sententiœ manifeJlè probatur , jieut eum qui
quolibu modo Sententiœ aequieverit, & fuivant la remarque de
Godefroy: dilationem folvendi qui petit, taeitè fortem deberi
fatetur & Sententiœ aequiefcit.
"
Le fieur Rey pouvoit exiger le principal & les intérêts en
vertu de la Sentence Confulaire qui lui adjugeoit celui-là &
ceux-ci jufqu'au paiement elfeél:if, fuivant la loi l , cod. de
ufuris rei judicatœ, qui condamne le débiteur au paiement des
intérêts de la fomme adjugée tant qu'il ne l'a point acquittée.
Le fieur Rei confentit pour quelque temps de ne recevoir
que les intérêts jufqu'au terme convenu, & d'un terme à
l'autre les fieurs Ruel font parvenus à jouir fucceffivement
pendant 28 ans; la Sentence doit donc avoir encore le même
effet, puifqu'il n'y a point été dérogé, & qu'il paroît au
contraire que le créancier & le débiteur ont eu l'intention de
l'exécuter.
Il eH de maxime que là novation d'une obligation écrite,
non feulement ne peut jamais être fuppofée par fimple pré"':
�sn
JOURNAL
Comption indépendante de tout aél:.e ul.térieur, mais encor.equ'elle ne peut pas êrre induire de quelqu~ aél:e que ce fair,
s'il ne renferme pas le paél:e exprès de novation. Cerre regre
efl: conHammen.t fuivie. ( Boniface, tom. l , pag. 248 ; toll].
2, liv. 4, rir. 1 l , chap. 1 ; Decormis, tom. 2, col. 124) ;
Serres, Injlit., pag. ').2'9 ; Cujas dans fes l'araril1es fur le rir.
4e noval.;. Carelan , Iiv. 2 , chap. 48; Lapeirere ,. letr. N.,
nO.. 48 , ~ aux Nores, nO. )2 ; Mornac ad leg. ult., ff. de
paetis, & ad leg. 1 1, ff. de pignorat. aet.;' Dumoulin, de ujùris,
quefl:. 1) ; Louet ,.lerr.. N., (omm. 7';. Arrêtés de M.. de La.moignon, rir. de l'extinction des hypotheques, art.. 7' )
Dès-lors efl:~jl poffible qu'il fàiJ de maxime que le créan-.
cier, pl5rteur d'une Sen,tence a.d·judicativ.e du principal & des
intérêts, foit cel/fé avoir fair nov.arion à cerre Sentence par
la réceprion des inrérêts, & renoncé à la répéririon du prin-.
<;ipal jufqu'à.ce q4e le clébireur trQuve à propos de le œm··
bourfer~
La Loi l , cod. d~ ujùri:s rei judieatœ, décide que les intérêrs d'une fomme adjugée fom dus pour l'avenir jufqu'au paie.ment : is qui hona fecundùm dictam Sententiam profequitur ,
cas qUOijue rationes hahiturus efi ut qui poJllegitimum tempus
placitis non ohtemperavit, ujùram temp.oris quod poJlea jlwcerit
Jolvat. Si la loi elle_même condamne le débiteur à payer les
intérêrs ~ venir fans préfix.jon.de remps jufqu'au paiemenr, le
créancier a donc; le droit de les percevoir, en arrendant que
le débiteur fe libere ;. & fi. le créanc.ier a droit de percevoÎl;
ces intérêrs en arrendant le principal, comment aurait-on
p~ penfer qu'en recevant ces intérêts. pendant dix ans, ce
créancier aliénoit le principal en, faveur de fon débireur? Lit
ditpofirion de ce.tte loi eO:. fui vie ,. puifqu'elle a. fer.vi de hafe
:lUX deux A.rrêes rapportés par l'il1aulJ:, tom•. l , Arrêt 43,
& par l'Au,eeux du Journal du. Palais, rom. 1, pag. 3) 0, qui
ont jug,éqqe I.e d.é.bie,eur condamné par Semence ou Arrêt,
Qoit les intérêes à venir jufqu'au paiement efféél:if.
Les Loix Romaines:, & les Aueeurs d~après elles, one dé:.
çi<!~ 0\1.e celtli qtli a payé tes intérê.es l;1'L<ne forpme peljqan~
..
.
.
di.",
�DU
PALAIS
DE
PROV ENC E.
)13
dix ans, en: préfumé avoir contraélé l'obligation de les c(){) .
tinuer jufqu'au moment de fa libération; Leg. 6 & I3 ,if.
de ufuris ; ita Barthole & autres. Mais qu'a de commun cette
déci fion avec le point de favoir fi le créancier qui, pouvan t'
exiger fon capital ou les intérêts, ne perçoit que les inté~
rêts pendant dix ans & plus, a entendu placer fan capital à con!1itution de renre? Les intérêts d'une fomme
exigible étant licites chez les Romains, il n'en: pas extraordinaire que leurs loix aient obligé le débiteur de les continuer, quoique non convenus, quand il les avoit payé pendant
dix ans, parce qu'il n'était point à préfumer que le créancier eût lailfé le capital fi long-temps entre fes mains fans
fiipulatjon verbale des intérêts. Mais ces loix, toutes- fa~
vorables au créancier, & faites en haine du débiteur qui'
Jouilfoie du bien d'autrui, ne peuvent dans aucun fens ,_
ni fous aucun rapport, être opporées au créancier qui a la
complaifance d'attendre fon débiteur & de fe prêter à {.i
libéraeion. Si d'un côté les Joix attribuent au créancier un
droie légal & favorable, quoique non exprelfément Hipulé,
contre llO débitellr qui ne le paye pas, comment pourraientelles lui enlever un droit légirime en foi, & un droit fondé
en titre, fans qu'il y ait renoncé d'une maniere exprelfe ?
Les Arrê'tS rapportés par Perier & Raviilt, tom. r , queft
r68, ont jugé-que le créancier d'une fomme prêtée à jour,
recevant les intérêts, foit une feule fois, (oit plufieurs, pouvoit ,
lorfqu'il était inquiété pour l'imputation de ces intérêts aa
principal, renoncer à l'exigibilité de la fomme, & confentirli ce qtrelle reHât entre les mains du débitem à C0nf1:itution de rente. Dans le fens de ces Arrêts, ce n'ét.oÎt pas le
nombre des années pendant lefqueltes les' intérêts avoient éré-,
.payés qui opérait-la conf1:irmion de rente; c'était feulement.
'le délit du créancier, quand même il n'eut été commis qu'une
fois, qui l'expo fait à l"impllt;ltion des intérêts au principat ,.
& qui ne lui bilfoit d'autre voie pour échapper à cette impu"-.
'ta~jon, qlle· ceHe de confemü à la conftirution de rem .....
Années 178z & 178:l-.
Tt ..
\
�)14
JOURNAL
Ils font donc abfolumenc étranger;;, puifqu'ils ne jugent pas
que le paiemellt de~ illtérçts d'une fomme adjugée avec intérêts, ,quand il a ~té fait par le débiteur pendant dix ans,
opere en fa fayeur une confli[ution de rente.
Les trois ~rrêts d.u Parlement d'Aix ont jugé comme ceux
du Parlem,ent de Dijon, que trois créanciers qpi avoient reçu
J1es intérêts indus, & qui étoient inquiétés par le débiteur
qui en demandoit l'imputation au principal, avoienr pu renoncer à l'exigibilité de la fomme, & confentir à la conftitution de ren'te. Mais ici le lieur Rey a eu un titre bien
r~fpecrable pour exiger le principal, ou les intérêts jufqu'au
paiment du principal; il a confenci de ne recevoir que les
intérêts, & ces intérêts étoienr légitimes; il 'n'a fait aucun
acre dérogatoire à, fan titre primordial; il en a fait un au
contraire dans les 30 ans, qui était confervatoire de fes prem'ers privileges, relativement au droit d'avoir paiemenr du capital , & cet acre a été connu, approuvé & ligné par le débiteur.
II ellde regle que les intérêts d'une fomme adjugée
courent jufqu'à elfecrif paiement; le lieur Rey a donc pu percevoir les intérêts de [on adjudication, & conferver en même
~emps le droit d'exiger le principal. Perier, tom. 2 , quefl:.
211, pag. rôS' rapporte un Arrêt du Parlement de Dijon,
qui jugea que la demande pure & limple des intérêts d'une
fomme adjugée, dus depuis r sans, n'avoit pas eu l'eltèt,
ni annoncé l'intel?tion de convertir la fomme exigible en
conflitution de rente.
C'efl une erreur de prétendre que les intérêts d'une fomme adjugée par Sentence, payés au delà du double, font répétibles ou imputables au principal; il efl de toute certitude
au contraire que les intérêts d'une fomme adjugée courent
au delà du double, & perpétuellement ju[qu'au paiement
elfecrif. C'eU ce qui eU expre/fémenr décidé par ces mots
de la loi r, cod. de ufuris rei judicatœ ,ci-devant citée: ufuram temporis quod pofiea fluxait Jolvat. C'eU [ur cette loi
q'Je font fondés les Arrêts rapportés par Pinault & par l'Au-
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.
DU
PAL AIS
D Il
PRO VEN C Il.
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teur du Journal du Palais, qui ont jugé que les intéréts d'une
fomme adjugée courent jufqu'au paiement eŒeé!:if. Henrys,
tom. 2., Iiv. 4, chap. 6 , queH. 48, décidé que les intérêts
d'une fomme adjugée courent au delà du double jufqu'au paiement, & pour t·oue autant de temps' que la Semence er.: exécutoire. Lacdmbe fur Defpeiffes, tom. l , part. l , tit. 5 ,
feé!:. 3 , nO. 35, §. 10. Le Recueil des aaes de notoriété du
Châtelet, ade du 19 Juin 1708. Le Dié!:ionnaire des Arrêts, vO. Intérêts. Serres, pag. 440, & Graverol fur la Roche, liv. 5, va. Ujùre, arr.... attefl:ent la même maxime.
Il exiGe un Arrêt de Réglement de 1614, rapporté par
Boniface, tom. 2., liv. 4, tit. 4, chap. l , qui a décidé véritablement que les intérêts de prix de fonds ne peuvent pas
excéder le double ; Bretonnier trouve .que cet Arrêt n'en
pas équitable, & la Cour a été obligée de le modifier par
d'autres Arrêts rapportés par le même Auteur, tom. 4, liv.
8 , tit. 3, chap. 2.3 , qui ont jugé que les intérêts de prix de
fonds, quand ils étoiem encore dus, ne pouvoient pas être
demandés au delà du double; mais que quand ils avoient été
payés volontairement, ils n'étoient ni répétibles, ni imputables au principal, attendu qu'ils éroient légitimes & favorables en foi cam nie procédant ex natura reÎ. On laiffe au vendeur d'un fonds tous les intérêts per~us, parce' que l'acqué-.
reur a recueilli annuellement les fruits de ce fonds. On doit
donc laiffer au 'créancier, porteur d'un'e Sentence adjudicative
du principal & des intérêts, tous les intérêts qui ont été
payés, parce que le débiteur jouit des fruits d'un fonds capital, au paiement duquel il aurait pu être contraint, &
prive néceffa.irement le créancier de ceux qu'il en r~tireroit
lui-même.
Combien ne feroit-il pas in]ufl:e que parce qu'un créancier
ferait h,umain envers fan débiteur, & préférerait de ne recevoir de lui que dés intérêts, plutôt que de le défoler par
une collocation qu'il ne dépendroic que de lui de faire en
vertu du t'Itre p-aré dont il eil: porteur, fût enfuite expofé à
perdre fon capital par une imputation de preHations an-.
Ttt2
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116
JOURNAL
nuelles qui ne lui ont Elit aucun profit, & qu'il n'a reçues
qu<:: pour obliger fon débiteur. D'ailleurs, n'elr.-il pas même
i1e regle que la répétition des intérêts légi.imes qui one été
volontairement payés, vu leur imputation au principal, ne
peut jamais être demandée par le débireur?
ainli que
l'obCerve Duperier, tom. 1, liv. 2., queit. ro aux notes.
Par Arrêt du 18 Juin 1782., au rapport de Mr. le Confeiller de .Fabr.y-Borrilly, la Senrence du Jug-e d'Aubagne
fut confirmée avec dépens. Ecrivant Mes. Roux & Pafcalis.
,'ea
•
ARRÊT
XLVII.
Les Communautés ne peuvent ni racheter ni faire encada.Jlrer
les hiens par elles aliénés en faveur des Seigneurs en
département de dettes, C' avec franchife de .tailles, fi 'lui
ont été démemhrés du fief depuis le z 5 Décemhre z 556.
N 1643 la Communauté d'Eiguieres tranfporca pour
.
département de dettes, en exécution des Arrêts du Confeil, fi avec fraTlchife de tailles, une partie d'un cou!fou à
Mr. le Marquis de Saint-Tropés, & l'auc.e partie à la Dame
de Calviere, Dame du lieu; Mr. le Comre de Sade réunie
dans la fuite ces deux portions. En 1763 elle fe pourvut à
Mr. l'Inrendant, & demanda, en vertu de l'Edit du mois
d'Avril 1667, à rentrer dans la propriét~ & joui!fance de
fes cou!foux, attendu qu'elle m_anquoit de pâtl1rages. Elle fut
déboulée par Ordonnance de Mr. l'Intendant, qui fut confirmée plU Arrêe contradié1:oire .du Coufeil' du 9 Janvier
E
17 69.
Le 7 Juin 1780, la Communauté fe pourvut à la Cour
des Aides contre le Cornee de Sade fon ~eigneur,pour le faire
.condamner à fou/frir l'encadafirement du 'cou!fou par lui
po.!fédé dans le terroir d'Eiguie~es, & par elle aliéné en
�DU
PALAIS
DI!
P~OVRNCl!:.
517
1643', & aUJe ,al'rérages de taille a,veç)nrérêrR' ,fi p1ie~x i!
n'aim()it cpnfe;ntir au qélaiifem~_nt li< aL! ~cli.?:r"1"
"" [
On difoit pour la Gommunau:é r qu'i,I, n'y avoit, a~Jcun raPt
po~ç entre, la demande formée par la Communauté d'Ei.:
guieres, en rachat de fon cou{fou pris en collocation par
fes créanciers, jugée par l'Arrêt du Conf~il du 9 Jan\jier
1769, & la demande formée en 1780, en ellcadaHr~men~
de ce même ,cou{fou ,. fi mieux le Conlte de Sade n'aimoit,
le lui délai{fer à titre de rachat. La premiere eut pour bafe
unique l'Edit du mois d'Avril 1667,. & P9ilr objet .l'elfprq-;
priation du Comte de Sade. La feconde efl: fon,dée fur l'Ar,,,:
rêt du Confeil du l'i Juin 1668, fur celui dU,7 ,Février ~762."
& fur les Lettres-patentes de ~77 I. El,l,e.. la~1fe au Comte
de Sade la po{feŒon de Cl,JUifou qulil' ~ re5i~, ·de fe,s auteur~
en confentanr à l'encadaHremenr. Li premi~re. ne portoi~
que fur l'intérêt particulier des habitans; la feçonde, ,au
contr<iire, porte fur un intérêt rout public. L'Egit (je .1667perm~t aux Communautés de racheter le:; p'âtur~gesjP\l~ elle
aliénés. Son exécurion dépend, uniq!ù~,ment du poin(Jd~, fa.,
voir, fi l'habitation manque de pâruragesnéceifaire$ j' d',~il~
leurs il n'eH pas enrégiChé en Provence. Le ,rac~at d~mandé
pardevant Mo' l'InreQdanç était abfolu & bien, différent7dll1
rachat altern~tif.demandé en 1780, qui n'a d'"utr-e, objet
que celui de faire ce{fer route franchi(e de tailles aliénées à
prix d'arg~nt, & qui eH: autorifé par l'Arrêt' qu Çonfeil du
1 S Juin 1668.!
' ! , '.J l, . )
" Les pprtions du cou{fou de la Comm,unamé que le ConHe
ge, Sade pofiede, lui font 9bvenues à deux tip'es <jilférents;
l'une avoiF été prif~ en collocatjon en, 1643 par ,la Dame,de.
Calvrere, m~e du Seigneur d'Eiguieres, & l'autre fut achetée de Mr. le Marquis de Saint- Tropé~. La Commuoalué,
n'avoit pu ali.éner fon couifou en franc!life de tailles.- Cefte)
franchife efi nulle, d'une nullité zhfolue & imprefctiptible,
comme contraire au droit public " qui fou met rous les fonds
I:.oruriers ,à ,contribuer à l'impôt commun. Tels font le? principes. du Drolt .Ro~ain, 4eve~!-ls les principes, cl'>nfiitutifs
�,
~18
JouaNAL
de notre droit prôliincial en matiere de tailles; & d'aprèS
lefquels, par le fameux Arrêc du Confeil, du 1 ~ Juin 1668,
ren'du fur la Requêr~ des poff'édans fiefs en Provence, Sa
Maje!l:é permet" aux Commun"urés de rembourfer les Sei" gneurs & tous autres déten'ceurs, du prix pour lequel les
" domaines ont été aliénés, fi, mieux le\; poffeffeurs 'n'ai" menr payer les tailles des biens fur le pied des aurres Biens
" de même n;lture & valeur. Le Légiflateur veut néanmoins
" que le~ fiefs & doma'ines bâillés par les Communaurés aux
" Seigneurs des lieux, en paiement des dettes légirimes,
h demeurent aux, Seigneurs frants àe tailles, au cas qu'ils
" ju!1:ifienr qu'ils· onr été ci~dévanr· démembrés de leur Sei" giJeurie, &. qu'ils y fonc retournés par voie de collocarion
" où affignatioiJ en départemenr de dettes, en exécution des
" Arrêts du Confeil. "
De forte que, p'our ,être au cas de l'exceprion, il faur, aux
termes de cet Arrêt, que le Seigneur prouve cumularive.fnent; 1°. qu.'il a icquîs direél:emenr p'ar lui ou fes aureurs;
de fa Communauté; 2°. qu'il a acquis par voie de collocation en département de dettés én exécution des Arrêts du
Confeil; 3'0. que les domaines acquis dë fa Communauté
ont auparavanr fair part'it; du fief 'D'ès-lors le Coaite de
Sade ne peut fe refufer à l'ericada/lremelJc de la partie du
couffou dé la Gonimunauré, qu'il riel1t dl:l fieur de Suffi,en
de Sa:inr-'.t~opés, parce qu'il'ne lIa point rèçuè des mains
de la Communauté, parce qu'elle ne lui e/l point parvenue
p~r voie 'de collocarion ou affigria'ri~n dl département de
dettes, & qu'il' l'a au contraire acquife par voie d'achat pur
& fimpl~ d'un particulier qui l~ j1(J'ffédé'it en fbmre.
.
Le Comte de Sade iiir'oic inùiîl€mènt qu~iF e/l aux droits
d'un' aëq-uéf-èur qui tenoic dirèae~1J'e'nt dé hi Cçih1l1undu~6, &
qui avoil pt5ur ritfe ~ne c'ollodltion fai're en· àêp'àrtefnen't' de'
de/rés. On lui répondroir que le fieur l'le Suffren' n'éroir pas
Seigneur d'Eiguieres, mais un ûmple particulier renanr en'
rorure : or, de même 'que cêlui-ci n'aüf'oic pis p'u fe pré:,valuir concre Iii Goïfiniunaüté dè cé qu'il tenoit d'elle; &'
�DU
PAL A_I S
D J~
)',R 0
VEN C 1!.
5s,9,
de ce qu'il avoit ,!cqui~' pa.r -,voie de collocation en déparre:-'
ment de dettes la pattie ,du Cpu!r9,u donr s'ag,ir, ,aJtel;ldu
qu'il n'~roir Pils .':ieigneur, de même auffi le Comre de Sade
érant aux droits du rGeur (Je Suffren, ne peut pas avoir plus
de privilege que lui~ parce qu'il ne po!rede pas ,cette même
partie du cou!ro_u comme acquife par le Seigneur de la
Communauté en collocation faire en département de dettes;
mais comme acquife par voie ,d'achat ordinaire, d'un limple
particulier qui n'avoit aUCl-lIle ~xception à oppofer à l'encadaHrement.
La quefl:ion s'étant préfenrée en 1779, elle fut jugée conformément à ce principe. La Commullauré des Tourreteslès-Fayence avoit aliéné des domaine,s en départemenr de
dettes à plufieurs particuliers. Le Marquis de Trans, Seigneur du lieu, les avoit retenus par droit de prélation, au
llToment même où ils éroient fortis ,des mains de la Communauté. Lorfque celle-ci en demanda l'encadafl:rement,' le
Marquis de Trans le contefl:a, fous prétex,te' qlJe I~s ayant
retenus fur les premiers délivrataires, il avoit pris. leurs places, & était cenfé les avoir recus comme eux des mains de
la Communauté, par voie de c~llocation en départem~nt de
dettes. On lui oppofa que par l'effet du retrait il !l'étoit &
ne pouvoit être que l'image des acquéreurs fur qui !liI COmmunauté vendere!re, avoit cOQferyé rous fes droirs; & ,que,
tout comme l'aélion en rachat, auroit été iriconre(lable
contre les premiers acquét'eur;s , s'ils eu!renr conrinué de po[[éder, de même auŒ elle devoir l'êrr~ cqntre celui, 9\li renoit d'eux & po!rédoit pour eux les domaines qu'elle a,,:oit
aliénés. La Cour des Aide...,rdonna le rachat par fon Arrêt
du 21 JuilletI779'
,
Le Comte de Sade fe trouve (conrinuoi,t la çomml.lpauté)
dans une circonfiance bien moins tàvQrable, Ruifqu'il n'a ae;quis ni au moment , de la ç1élivJilnce,
ni par voie •de retrait
1
féodal, mais plus de cent ans ap.reJi l.a collQc~tion du lieur
~e Suffren, & par un achat, pur &)imple.
L'Arrêt du Confeil du 1 5 Décembre 15 S6 avoirt dé,idé
~
�)20
Jou RNA L"
qu'il n'y au(oit de'francs de tailles, que les biens qui reviendroient-aux mains des nobtes par commis, délailfemenr ou
cOlJfifc,ation " & ceux qui feroient affranchis' par la voie de
la compenfarî'on. L'Arrêt du rs Juin r668 accorda'la même
francliife aux biens qui reviendroient aux mains, des Seigneurs
p~r les v'oies indiquées dans l'arr. 4, c'efl:-à-dire qui leur fetojenr ~aillés par leurs Communautés 'en paiement de dettes légitimes , par voie de collocation faite en département de' dettes, en exécuti'on des Arrêts du Confel!, lorf':'.
qu'ils jllfijfiewient que ces biens avoient été démembrés de
IêiJrs fiefs.. Dès-lors il eH: nécelfairement vrai de dire que l'l
franchife de~ t~illes ayant toujours été bornée aux acquif!,..
dons forcées c\es Seigl'\eurs, ils ne peuvent pas la prétendre pout tes bien~. q,u'Hs acquiérent volonraireme.nr par les
"
r Or d'Imllres.
,
au:es
"
- 'Quant à l'autre partie du m~me coulfou, que le Comte
de Sade avoit 'recueilli par [üccemon de la Dame de Cal':'
viere, tfI~re d'o.n de fes auteurs, la Communauté obfervoir
qlle· d'aerès la Loi du r S Juin 1668, le Comte de Sade
étant cenfé avoir acquis lui même de.la Communauté par voie
de collocation. faire en département de dettes, en exécution
des Arr~rs du 'Confeil, fe croiroit mal-à-prop<ls à l'abri de
l'~ncadan~ement de cètte parrie du coulfou, s'il' é'toit en
état de jùfliner qu'elle avoit ~té démen1brée, QU qu'elle avoir
fait parrie de fon fief.' La p'rovince attaqua cet Arrêt du
Confeil, en c~ que l'art. 4, étoit formellement cont(aire aux
i,lroits'des Communautés;, voici ce q!l-'elle dif'bit à ce fujet =
" c'efl: u'n,e- injuO:ice en cet Arrêt, de priver les Commu- ,
" nautés du, racnat' à: ell'es accordé par les Arrêts du Con,..
" feil de leur,s dumaines aliénés avec franchifè de tailles
" p(),llf'c,aufe de département de leurs dettes, quand le Sei" 'gneur qui t~s. a 'pris: en paien,1ent d'une cré'a~ce ne v~ut
" 'pas) pour evuer le rachat; fe fbUme\tre à' payer la taIlle
. r.' J , ~ ' J ' , )
.
"
, Il'fi
qu "[
i 'JUnI era
,,"
iülvant' ces memes A.'sr ê'ts),", '"lbll,s"prerexte
~ qUe, t~.s..9omaihes aVQient oriïih,ai'r.;ment: procédé de [on
Il
fiçt;
l~
�1
DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
pt
Auffi (conrinuoit la Communauté) ce fut pour réparet"
ce grief, que le Confeil, par fon Arrêt du 7 Févrie~ 1702.
déclara nuls indill:inétemenr tous les afFranchiffemens de tailles faits à prix d'argenr, ou fous prétexte de droits Seigneuriaux ou arrérages d'iceux, & en quelque maniere que ce
put être, autremenr que par la compenfation, & nonobftant tout laps du temps. Ce nouvel Arrêt a emiéremenr fait
ceffer l'ancien privilege des Seigneurs; il les a confondu!>
avec les Jimples particuliers, & les a fournis à la difpoJition
de l'art. S du même Arrét de 1668. Il n'exiGe plus en faveur des Seigneurs d'autre privilege, lorfque les fonds qu'il~
ont acquis de leurs Communamés ont fait panie de leur!>
fiefs, & en ont été démembrés après l'Arrêt du Confeil dl~
1 S Décembre 1 SS6 , que celui de les pofféder en fran_
chife de taille par la voie d'une compenfation fei.nte, c'eH~
à-dire, par la \toie d'une compenfation faite de ces fonds
avec eux-mêmes. Ainu fous ce p0int de vue (eoncluoit la
Communauté) il n'y a pas plus de doute à fe former fu~
la juftice de la demande en encadall:rement de cette l'arrie
du couffou que de celle de l'autre.
On répondait ponr le Comte de Sade, que la Commu~
nauré d'Eiguieres émit non-recevable, & que tout avoit éré
jugé par l'Arrêt du Confeil du 9 Janvier 1769. Elle avoit7
d'abord intenté le rachat du ·couffou dont s'agit, en prenant
pour texte l'Edit de 1667, '& il efl: même évident qu'elle
ne l'avoit hafardé fur un pareil texte, .que parce qu'elle favoic
très-bien que J'Arrêt du Confeil du r S Juin 1668. ne pou~
voit pas lui en fervir; qu'au contraire, cet Arrêt & la Pé~
c1aration du 14 Septembre 1728 profcrivoiem fon, fyl) ê~
me; c'eft pourquoi elle faifoit tous fes eiForts pour peh
fuader au ConfeiJ d'Etat que J'Edit de 1667 & FArrêt de,
1668 avoient des objets & des motifs differents, & qtlO
ces Loix éraient indépendantes l'u.ne de l'autre;. eUe cl&.
c1areit dans [,oures fes défenlès, que l'Arrc~e de 1668. &.
la Déclaration (le 1728 n'éroient paine applicables à fa..
çaufe, & qu'elie ne vQul.oit. p.a~ çtœ iugée fur leurs diI~,.,
4.l(n~es l78z
Z7Sl"
v. \1
et
v:
�)22
JOURNAl!.
fitions. Mais dépendoit-il de la Communauté d'impofer des
Loix au ·Confeil d'Etat, pour lui lier les mains & hli prefcrire des bornes arbitraires? Le Confeil a précifémelll jugé
les Parties d'après l'Arrêt de 1668, &: d'après la Déclaration de 1728. Dès que les défenres rerpeélives juftifient
qu'elles fe débattoient fur l'application de l'Arrêt de 1668
& de la Déclaration de 1728, il.:ft connant que l'exception que fondoit le Comte de Sade fur ces deux Loix
vivantes, a été propofée , difcurée & jugée, & que le Confeil a reconnu qu'elle étoit non feulement applicable à la
caure, mais même très-déci live. Cette exception jugée par
le. Conreil, ne peut plus l'être aujourd'hui. En fuppofant,
continuoit le Comte de Sade, que le Conreil ne l'eût pas
penfé de même, & qu'il eùt voulu donner gain de caure au
comte de Sade filr tout autre motif, il n'auroit pu fans injultice prononcer un déboutement abrolu contre la Communauté, en la lailfanr à découvert fur la quefiion la plus
elfenrielle, qui fairoit la matiere du procès; il auroit fàllu
'Oéceffairement qu'il lui réfervât l'autre aélion qui lui étoit
conteflée, puirqu'aurrement le déboutement abfolu, & fans
reHriél:ian, auroit porté de plein droit fur toutes les contefiations mues entre les Parties. On ne le pratique pas
autrement -dans tous les Tribunaux en femblable occalion.
Il n'arrive jamais qu'on prononce un Jéboutement abrolu,
quand on reconnolt qu'il refie à la partie condamnée une
autre aél:ion utile & indépendante de celle dans laquelle
elle fuccombe, fur-tout quand cette aél:ion qui lui refie
efl: formellement contefiée dans le même procès fur lequel le jugement intervient. Or, c'efi dans ces circonfl:ances qu'eH intervenu l'Arrêt de 1769; le Confeil jugea que
le Comte de Sade était véritablement au cas de l'art. 4de l'Arrêt de 1668, & de la Déclaration 1728, & que
par conféquent, ni l'Edit de 1667, ni aucune autre Loi
quelconque, ne pouvoit fervir de titre ou de prétexte pour
le troubler dans là poffeffion; delà il refufa le rachat forluellement & d'une maniere ab[Q!ue.
�DU PAL A, 1S- DIl
PRO VIl NeE.
52. 3
Il ell: certain elli fait que le Comte de Sade< a voulu repouffer le rachat contre lui intenté, par la. difpofition de
l'Arrêt de 1668, & de la Déclaration de 172.8; & en droir,
il eH impoffible de fe refufer à l'applicarion & à l'empire
de ces Loix.
En effet, l'art. f de l'Arrêt du Confeil de 1668 veut que
les domaines baillés par les Communautés aux Seigneurs en
paiemenr de dettes légitimes, demeurent aux Seigneurs francs.
de railles, s'ils juHifient qu'ils ont éré démembrés du fief )& qu'ils y fonr rerournés par collocation ou affignation en
déparrement des dettes. La Déclaration de 172.8 veut qu'en
prouvant par les détenteurs des biens aliénés par les Communautés avec frauchife de railles, en paiement de leurs.
dettes & en exécution des. Arrêts du Confeil, que les biens;
Ont été démembrés du fief en rour ou en parrie avant le
15 Décembre 1556, ils foient & demeurent confirmés dans:
l'exemption, même pour les ponions des biens qui auroient·
été démembrés depuis ledit remps, au cas qu'elles foiene
jugées néceffaires ou utiles pour l'exploitation, & pourvu.
qu'elles n'aient point été données en compenfation; elle fait
défenfes aux Communalués de troubler les poffeffeurs de
ces domaines, & à tous Juges d'avoir égard à aucune~ demandes formées ou à former pour rairon de ce, fous prétexte de la facuhé accordée aux Communautés par les Arrêts,
des 1 S Juin 1668 & 7 Février 1/02., qui feront au [urplus.
exécutés fuivam leur forme & teneu.r. La difpolition de cette
Loi s'étend aux particuliers qui, (ms avoir aucune parr à Iq
feigneurie & à la Jurifdiélion, avoient acquis des biens des)
Communautés avec le paél:e de franchife de raille.
C'eH fur l'appui de cette déclaration que le Conreil a
maintenu le Marquis du Muy dans la pleine p.ropriété des>
fours, bois & défens d'Aubagne \lar fon Arrêt dU.7 Juin
172.9, rendu contre MM. les Procureu.rs du P-ay,s. &
par autte Arrêt du 20 Avril 176 l , il a mainrem,l M.r. d'AndI:é"
Confèiller aux Comptes, dans b. propriété des montagnes;
~ {'atula~es, aliépés. par 1.a Commünal,lté de ThQrame-l-~al.l.tl;~
.
Vvv:t,
�)14
}
0
U RNA I.
& ce nonobllant l'Edit de 1667' La Cour des Aides le
jugea de même en faveur du lieur Martin de la ville de
Digne, contre la Communauré de Courbons, par Arrêt du
20 Juin 173 l, au fujet d'un défens ou hermas dit de Meinier. Il ne ferait donc pas poffible que ni le Confeil, ,ni la
Cour vouluffent juger dans la caufe du Comte de Sade, que
l'Arrêt de 1668 & la Déclararion de 1728 ne merrent pas
obltacle au rachat abfolu des pâturages, défens, monragnes
& aurres biens aliénés par les Communaurés en département de dettes, tandis qu'ils Ont jugé en faveur de IOUS
autres que ces Loix, & notammenr la derniere , s'oppofent
à tout rachat & à toute e(oece de rrouble contre les poffeffeurs & détenteurs des mêmes biens. Il efl: donc vrai,
continuait-on, que l'Arrêt du Confeil de 1769 a jugé l'exception quele Comre de Sade fondait fur l'Arrêt de 1668,
& fur la Déclaration de 1728, & qu'il y a fait droit.
Quant à l'aélion en encadafiremenr inrentée par la Communauté, on difoit qu'aucune Loi ne donne aux Corn mu~
naurés l'aélion en encadafirement des biens par elles aliénés
en franchife de tailles de l'autorité du Roi, en département
de leurs derres. Une pareille aélion ne peut leur compéter
qu'à raifon des acquilitions des biens roturiers, faires par les
Seigneurs ou les particuliers par les voies ordinaires. Mais
quant ...aux acquilitions faires en département de deItes, il n'y
a point d'aélion direéle en encadafiremenr, & il ne peut
pas y en avoir. La Loi ferait renverfée; la foi publique
1èroit trompée. Tel efi le texte même de l'Arrêt de 1668,
qui régit cerre matiere, & qui ne donne que l'aélion du rachat. La Cour a jugé. piulieurs fois que l'Arrêt de 1668 ne
donne pas aux Communautés une aélion en encadallremenr,
mais feulement en rachar; elle le jugea par Arrêt du 28 Juin
1763, au rapport de Ml'. de Fulconis, en la caufe du Marquis de Briffac, contre la Communauté de Noves. Celle-ci
avoit demaotlé l'encadafiremenr d'un domaine par elle aliéné
en franchife' de tailles, en dépanement de fes derres, en
donnant au Marquis de Briffac qui Je poffédoic, J'option d'en
�DU
PAL AI!;
DE
PRO VEN C E.
f 2)
foulFrir le rachat; la Communauté de Noves fut déboutée
de fa demande en encadaftrem nt, qu'elle n'avoit intentée que
parce qu'elle n'avoit point d'attion en rachat.
La Communauté d'Eyguieres a pu aliéner le couffou ell
département de dettes, avec ftanchife de tailles; non feu.;.
lement elle l'a pu, mais elle l'a dû, en vertu des Arrêts du
Confeil qui l'y ont autorifée. Elle l'a tellement pu, que ce
patte, bien-loin d'être contraire au droit public & d'être nul
d'une nullité abfolue & imprefcriptible, eH invio!Jble par
lui-même, fuivant les regles du droit commun & la Loi municipale de la Province. Tous ceux qui oor fait,. débouter les
Communautés de la demande en rachu en force de l'Arrêt
de 1668 & de la Déclaration de 17'2.8, foor à perpétuité
pailibles po{feffeuts des domaines par eux acquis en dépar" '
tement de dettes avpc franchi[e de tailles.
Ainli ( concluoit le Comte de Sade) quant à l'acquilitioll
de la partie du couffou faite par les auteurs du Comte de
Sades, du Marquis de St. Tropés, l'on reconnoît fans peine
que le Comte de Sade n'ayant pas re~u direél:emeor des
mains de la Communauté cette partie du couffou en paiement des dettes légititnes, en exécution des Arrêts du Confeil, il feroit fournis au racha~, fi l'Arrêt de 1769 ne l'en
avoit irrévocablement affranchi en force de la Déclaration
de 17'2.8; & pour ce qui concerne la partie du couffou baillée
aux auteurs du Comte de Sade, quand l'Arrêt de 1769 ne fublifterait pas, & que les chofes feroient encore dans leur entier,
le Comte de Sade feroit aujourd'hui, comme auparavant,
dans le cas précis de l'art. 4 de l'Arrêt de 1668, qui met
les SeIgneurs à l'abri du rachat & de toute recherche, lorrgt,e
c'ell à eux qu'oor été baillés les domaines en franchilè de
taille, en paiement de dettes légitimes, en prouvant par eux
que ces domaines ont été démembrés de leur fief.
Il eft impoffible de perfuader que l'Arrêt de 1702 ait révoqué un Réglement auffi folemn~l que l't'Il celui de 1668,
fans qu'il en foit fait aucune mention expreffe. Les Lettrespatentes du 10 Septembre 1771, révocatoires de la Déc1a,
�~ 'Jo6
j OUR N A L
ration du 28 Septembre 1728, ne frappent que fur les p'al">ticuliers, & non fur les Seigneurs; elles maintiennent rout à
la fois la pleine & entiere exécution de l'Arrêr du Confeil
du 15 Juin 1668, & de celui du 7 Février 1702; elles décident donc que ces deux Loix font également fubfiftantes
dans toutes leurs difpoGtions. La franchife de taille en faveur des Seigneurs à raifon des acquifitions par eux faites direél:emenf des mains de la Communauté en département de
dettes, feroit donc légitimée au befoin, bien~loin d'être profcrite par l'Arrêt, de 1702, par cela feul qu'il autorife les af·
franchiffemens de taille par la voie de la compenfation. Le
Comte de Sade produifoit tFOis tranfaél:ions qu.i fe rapportaient les unes au,x autres i qui prouvaient démonilrativement
l'identité du couffou, c'efl:-à-dire, qlle celui dont il s'agiffoit
au procès étoit le même que celui qui fut concédé à la
Communauté par les Seigneurs dans la terre galte par l'aéle
de 1345, confirmé par celui de 1437, & par celui de 1641.
Il Y a plus ( continuait-il) les Lettres-patentes de 1771, en
frappant fur les particuliers, ne difpofent que pour l'avenir,
& laiffenc fubGlter les Arrêts obtenus par les poffeffeurs.
L'Arrêt du Confeil de 1769, rendu contre la Communauté
d'Eiguieres, c:;onferve donc route fa forçe pour les deu,x parties du couffou dont s'agit.
Peu impo,rre que les auteurs du ,Comte de Sade aient acquis leurs créances du Marquis de Goult ,& de la Dame de
Châteauren,ard; ce fut le S.eigneur lui-même qui fut colloqué
fur patrie du couffou pour ces créances légitimes & qui lui
étaient devenues perfon,nelles. Ce fut à fon nom & p0ur lui
que lacoHocacion fut faite, & ce ne fut pas au llom defes
cédans. Depuis la vente ou la. ce Ilion des créances, les cédans
n'avaient rien à demander ni à prétendre contre la Com-.
munauté. Toutes les conditions reqûlfes par l'an.. 4 de l'Arrêt
du Confeil de 166& fe font donc vérifiées en la perfonne
& fl/·r la tête du Seigneur d'Eiguieres, puifque c'eft le Sei..
gn,e\Jr lui-même q\Ji a été colloqué direélement fur le couf:...
fQ\! ~ en 'p,üemenJ <I.e dJ~t~es lé~times CJ,ui l,ui a{l~lltteo.oien.r"
�DU
PALAIS
DB
l'R,OVBNCB.
ft1
& que perfonne ne pouvoit lui conteller, & c'ef!: en exécution des Arrêts du Coufeil que cette colloca'tion a été
faire. L'Arrêt rendu contre le Marquis de Trans ne peut
être appliqué à la caufe, parce que ce Seigneur n'amit pas
reçu les biens des mains de la Communauté en paiement
de [es créances; il les tenoit d'un acquéreur. intermédiaire
contre lequel il avoit exercé le retrait.
Au furplus ( continuoit le Comte de Sade) le coutrou
dont s'agit n'ef!: pas fufceptible d'encadaHrement, parce que
le cou trou n'ef!: pas un immeuble; il ne confiHe qu'en fruits;
c'ef!: un droit incorporel, une !impie faculté, une fervitude;
il n'ef!: pas polIible de l'impofer à la taille, parce que, fuivant nos Loix conf!:itutives, la taille eH réelle, & ne peut
affeél:er, que les fonds & non les fruits, ni les droits incorporels, ni les fimples facultés, ni les fervitudes. Il ne dépendroit pas même de .celui à qui de pareils droits appartiennent de s'y affiljettir. Tel eH le véritable droit public
de la Province. Boniface, tom. '), liv. 4, tit. 3, chap. 1 i
Duperier, tom. 2, liv. l , n. 3') 4; Decormis, tom. 2, col.
1770 & fuiv.; Julien in vero. Civitas, cap. '); le nouveau
Commentateur des Statuts, tom. 2, pag. 296, rapportent
plufieurs Arrêts qui, par une fuite de nos maximes, ont· fait
rayer des cadaHres, des droits incorporels, des direél:es, des
facultés, des fervitudes qui y avoient été induement cornprifes. Il en ef!: un du 12 Juin 1736, en faveur de la Communauté de Miramas, qui la déchargea de l'encadaltrement
d'un droit de dépaÎtre, parce qu'un pareil droit n'affeél:e que
les fruits. Il en eH un autre du 30 Juin 17)7, en faveur
de Me. Chauvet, contre la Communauté de Châteauredon,
qui fut déboutée de fa demande en encadafirement d<:s fofles
fervant au patrage des eaux qui font tourner les moulins de
Me. Chauvet, parce que ce n'étoit-Ià qu'une faculté & une
fervitude établie [ur le terrein occupé par les fotrés. Il en
ell: un troi!ieme du 4 Mai 1779, en faveur des SIS. Amyot
& Barthelemy, contre la Communauté d'Hieres, qui avoit
impofé à 1« taille un~ cenfe de vingt-cinq charges de bled
�~2S
Jou RNA L
érablie fur le tiers d'un moulin bannai, laquelle cenfe en
abforooit rout le revenu; il fur ordonné que cetre cenfe
ferair rayée du cadaUre, nonoblbot que la raille en eût été
payée volontairement pendanr deux Gecles. Tons ces Arrêts
font fondés fur 1:1 maxime que les railles font réelles en
Provence, & qu'elles ne peuvent être impofées que fur les
fonds, & non fur le's fruits. Or, le cou{[ou dont s'agir con~
fille uniquement en fruits, c'efl:-à-dire, dans le droit excluGf
çe vendre ou affermer pendant Gx mois de l'année les her-.
bages provenus dans une partie des (erres gafl:es.
Arrêt du 2.8 Mai 1782., au rapport de Ml'. le Conkiller
de Pradine, qui déboute le Comte de S.aDe· des fins de·
non-recevoir, qui ordonne l'encadafl:rement du COU{[0l1
par lui acquis de Ml'. de s.t. Tropés, & qui déboute la
Communauté de l'encadalhemenr de l'au.tre partie du même
cou{[ou fur lequel les allteUl'S du Comte de Sade fureot colloqués.' La Cour condamna le· COmte de Sade &UX dépens
de deux chefs, & la Comnwnauté à ceux de l'autre chef.
Ecrivant Mes. Pochet & Rou.x.
Cel' Arrêt a ju~é 1°. que l'Arrêt du Gonfeil.de 1702. n'a
point dérogé à l'article 40 de celui de 1668,; 2.0. qu'il était
fuffifamm.ent ju!lifié au pracès par Ie-s tirres produits, que le·
couifou dont s'agir avait éré dém.embré du. fief depu.is le 1)
Décembre 1))6, & par l'aél:.e de 16,p. L'aél:e de 134) ne·
concéda le çouifou que pour la Gmple faculté· des herbages &
pour 4eux ans. Celui de 1437 oe dit rien de plus que le pre::miel'. Mais par l'aél:e de 1640 l , le S.eigneur Ce cl,épanit
irrévocablement en fJveur de la Commu.nauré & d~ fes
çréanciers de la p.ropriété fonciere de [ept portio.ns du
çou{[ou, & .il fut dit dans cet aél:e, qu.'il ne fe réfervoit que la direél:e, c.e qlli emportait l'abandon du domaine·
'Utile.
Uepuis ce.t Arrêt, le Roi a rendu une Déclaratioo le 24:Mai. 1763 ,. qui veut ql)e les domaines que· les Seignel1l:s ont
~qllis des Corn,munaut~s d,ireél:em,ent pour dettes & dans
4:e.s. d.i?,\r~~m.~.o.s.,. fQ.i~n.t l.es. fe.llls, 'l.ui ne (oi~l)t. pas [QUmiS au
l',!çhqC;
�.
v Il Nell.
f l 9,
rachat ou à l'encadaftrement, s'il eft juftifié qu'ils one ete
démembrés du fief après le 1) Décembre 1 SS 6.
D U
PAL AIS
ARR Ê T
D E
PRO
X LVI l 1.
La rémiflion de l'obligation privée, 11olontairement faite par
le créancier au déhiteur, opere fa lihération.
L'enlévement du hillet doit être prOllvé.
La plainte calomnieufe donne lieu à des réparations convenaMes.
Lexandre..... héritier de Jacques..... demanda à Pierre....;
une obligarion privée de la fomme de 8000 liv. que
ce dernier devoit à Jacques..... Pierre... répondit que le défunt
la lui avoit remife quelques jours avant fa morr. Alexandre.....
demanda l'information fur l'enlévem nt du billet. Requête
contr~ire de Pierre..... filr la calomnie; fur' l'information,
décret de propofera en jugement. Requête incidence d'Alexandre..... en reHitution des 8000 Iiv, avec intérêts tels que de
droit. Requête incidente de Pierre..... en réparation & en
6000 liv. de dommages & intérêts, applicables à l'Hôpital.
Sur ces qualités, Sentence du Juge de Cuers du 9 Janvier
178 ( , qui déboute Alexandre..... de fa requête en condamnation de la fomme de 8000 liv., & met Pierre..... hors de
procès &, d'inHance, a\'ec dépens. Appel principal d'Alexandre..... pardevanc le Lieutenant de Toulon. Appel in 'luantùm
contrà de Pierre..... au chef de la Sentence qui ne lui adjuge
pas les réparations demandées. Sentence du 2) Mai 178 t, '
qui réforme celle du Juge de Cuers. Pierre..... eft débouté
de fon appel in fjuantùm contrà; il eft condamné à la refiitut ion de la fomme de 8000 liv. & aux dépens des deux
inftances. Appel de cette Sentence pardevant la Cour.
Il s'agilfoit de décider, rO. fi Jacques..... ayant remis luimême à Pierre..... la cédule ou obligation privée, cette tra-,
Annees z78z & z782.
X X X
A
�0
0
Jou
R. N A L
dition réelle & eff~aivc , faire & confommée dans le m~me
jnfiant, avait produit la libération. 2°. Si Alexandre ...••
héritier de Jacques •.•.. fe piaignant d'un délit, de l'enlevement du bIllet, n'était pas tenu de prouver ce délit. 3°. Si
'information, qui était devenue piece civile par fa co verfion en enquête, prouvait l'enlevemem ou la remife du
billet. ~ 0. Si Alexandre..... ayant méchamment & fans intérêc
requis l'iofornlation pour con lb ter un fait qu'il connoiifoit,
même avant la marc de Jacques .••. que Pierre.••. lui avait
appris, qu'Il avouoitpubllquemem , & dom Alexandr.::....
avait la preuve civile dans [es aveux, il n'avait pas agi frallduleufement en empruntant la voie f1goureufe de l'information pour jufiifier un fàit civil & convenu, s'il n'avait pas
injurié & calomnié Pierre.....
. Sur le premier moyen on diroir pour Pierre.... que ia remife que le cré,mcier tàic à fan débiceur du tirre de fon obligation privée, forme pour le débHeur une libération p;;rf:lite.
Le §. dernier de la loi 2, if. de paais, dit que fi le créancier
remet au débiteur fan obligation, il eH: cenfé convenu enrr'eux qu'on n'en fera aucune demande: & ideà fi debilOri
meo reddiderim cautionem, videlUr inter nos convenijfe ne peterem, profulUramfJûe â cO{lventionis exceptionem placuit.
. Il ne peur y avoir en effet de libération plus entlcre que
~elle qui réfulte de la rémifiion du tirre ; elle ef!: aufli formelle dans cette hyporhefe que fi le créancier avait lui-même
déchiré l'obligation, ou :;'il en avait concédé quittance au
débiteur. En abandonnan t le titre, il abandonne la chofe:
èn renonçalH par ce flir volontaire au droir & il l'aaion qu'il
avoir de rédJmer la fomme qui lui eH due, il fe dépouille
néceifai(enlenr de fa créance & en libere fon débiteur. Auffi
rous les Interpretes fouriennent qu l'obligation privée étant
remife au dêbltel1r, la dette efl: préîumée lui avoir été reri"tife : c4utîorze chirotrapharùi d~bito,.i redditii) ipfùm debitum
rt"!iJJ.~m, intelligitllr. ( Datlty, t'lI fon Traité Re la Preuve pa:
Te. oms, pag. 240 ; Defpel1fes). rom. l , parr. 1, fea. 3, D •
4, ? pag. 2.0) ; D moulin ad: leg. mOdejlimlS , if. defàlut., no.,
�D U
l' A LAIS
D!:
P 11. 0
V !: N C l!.
S3 l
~o,tom. 3, pag. 393; Godefroy fur les loix 14 & 15, cod.
de jolut. ; Mornac lur la loi 24 ,if. de prohat., Traitt de la
Preuw par Tem~ins, pag. 2.4°.; Barder, rom. l , pag. ~34,
chap. 2.4 ; Dupener, tom. 2., !Iv. 3, pa"'. J 30 ; Rinertoire de
T
.r;
d
8 0
0
r
Jur~pru ena, tom. l ,y. Dette, pag. 49 0 , & tom. 42., yo.
061ig,llioll , pag. )48. )
Le Parlement de Provence a décidé cette quefiion fur
l~ mên:e principe.; ~n corrée folidaire , porteur de l'obliganon qUI lUI avolt ete remife par le créancier, demandoit à
fon coobligé le rembourfement de la moitié de la dette. Ce
dernier contefioit ce rembourfemenr , & fomenoit que la
tradition d l'obligation folidaire opéroit la libératiùn wmmune des deux corrées. AinG jugé par l'Arrêt du 't J"in
1746, au rapport de Mr. de Beauval, en f<lvelr de Mre.
Guigou , Curé de la Chapelle de Guinché, Diocefe de Macon,
contre le fieur Boufquet de la ville d'Aups.
La libération par acceptilation avoit pris fon origine dans
le droit Romain: Per acaptilationem tollitur obligùtio. L'acœptilation était un paiell1ent imaginaire. L'acceptiiation
fimple était ufitée pour l'annullation des obligations verbales.
Les obligations écrites étaient anéanties par l'acceptilation
aquiliene; le Droit François a {ecoué avec {ilgeife le joug
de ces formes inutiles; il n'a confidéré que la bonne foi
des aaes. On ne connoît plus les formalités de la llipulation ;
on admet la libération par-tout où l'on voit qu'elle s'opere
par la volonté & le fait du créancier, même fans aucun
paiement réel; c'eIl: la décifion de Ferriere, de Boutaric &
de Serres, In.Jlituts liv. 3, tit. 30, §. J.
L'acceptilation ou la remi{e de la cédule produit l'effet
d'un paae tacite entre le créancier & le débiteur, de ne point
réclamer la créanc}!. Celui qui remet la cédule renonce à
fan droit ; il déclare par un paae tacite avoir recru ce qu'il
n'a pas vérita)Jlement -recru: vim hahet taciti paBi de non peundo ; L. 27, §. 9, if. de pat;7is. Cette opération eO: comparée à ùoe convention paifée entre le créancier & le débiteur de ne pilS en former demande: videtur inter nos conX xx 2.
�532,
JOURNAL
veniJlè ne peterenz; Leg. 2" §. 9 ,if. eod. ( Pothier, Traité
des Obligations, part. 3, ch. 3, §. 2, nO. 608. ) La faveur
de la libération a fait accueillir tous les aétes qui concourent
à fon établi1fement: Proniores e}!è dehemus ad lihuandunz quanz
ad aflringendunz; L. 47, if. de oDliga.t. t;. aa. ( Julien dans fes
Notes manufcrites, vO. Donatio 382., letr. E. )
Un lIéte quelconque, exécutif de la volonré du créancier,
opere la libération. Le créancier a la faculté de libérer fon
débiteur dans la forme qui lui efr la plus agréable; la re'"
mife du titre obligatoire dl: fans doute la moins équivoque
& la plus pui1fante de toutes les libérations; cette libération
n'eH poine a1fujettie à aucune formaliré. Tout efr confommé
par la tradirion réelle & eflèétive de l'infirument original.
Ici la rémiffion du billet de 8000 liv. a donc opéré ipfo
fac1o, & fans le fecours d'aucune fiipulation ou forme judiciaire, une libération parfaite.
Sur le fecond moyen, on difoit qu'Alexandre ...• devoit
prouver l'enlévement du billet. Il arrive fouvent qu'une perfonne emprunte de l'argent, & foufcrir une obligation privée;
el:e paye enfuite, ne rapporte aucune quittance, & retire
feulement fan obligarion. Pour fe dérober ,lUX pourfuites d'un
héritier avide, il fera donc indifpenfable de fe munir d'un
aéte de libérarion. Cette quittance ne fera pas même pour
le débiteur une a1furance complerte. Un héririer injufle aura
le droit de la contefl:er, ou de [outenir qu'elle efr frauduleufe;
il n'y aura plus ni bonne foi, ni [(lIeté.
La loi penfe que le débireur n'dl: plus obligé, lor[que le
titre de [on obligarion n'exiHe plus. Le.fait de la rémiffion
en: un fait de libération; la loi ne voit que la franchife &
la fincérité ~ans les aétes ; elle ne pré[ume jamais la fraude.
Le débiteur a le titre de fan obligation en fan pouvoir; la
loi pré[ume qu'il en de bonne foi, & que la cédule ne lui en
parvenue que par des moyens licites.
'
L'héritier [e plaint de l'enlévement d'une prome1fe.privée;
cet enlévemenr efr la bafe de fa dema.nde, puifque la vérification de ce fait le conduira à l'adjudication de la valeur; il
�DU
PALA.IS
DE
PROVENCE.
,33
ef1: donc tenu de prouver. La loi 6, cod. de dola malo, veut
que le dol foit établi par une preuve certaine: dolum ex indiciis perfPicuis prohari convenit.
. Tant que la plainte en fouHraél:ion du billet n'elt point juftifiée, tant que le dol n'eft pas évident ,& que le débiteur n'efl:
pas convaincu du crime qu'on lui impute, celui-ci jouit de la
préfomption de la loi: la remilè du billet eft une preuve de fa
libération, la poifeffion du billet en eH le titre. C'eft aioli que
l'établiifeot rous les Auteurs; ( Lepretre, cent. 4, chap. 21 ;
Gueret & Boiceau, pag. 38) ; Danty dans fes Additions fur
le même chapitre; Patr J daos fon lixieme Plaidoyer; Livoniere dans fes Regles du Droit François, pag. 393 , §. 24;
Domat dans fes Loix Civiles, liv. 3, tit. 6, feél:. ) ,n°. 1 l ;
le Répertoire univerfel de Jurifpruclence, vO. Dette. )
L'information prouve la rémiffion volomaire du billet ( difoit-on pour Pierre •.•. fur le rroilieme moyen;) c'efl: dans
cette information qu'Alexandre .... devoit trouver les preuves
propres à conHater le délit; le dol & l'eolévement. Cependant elle ne préfente aucune trace de fouftraél:ion; elle renferme au conrraire avec évidence une foule de circonftances
déci lives qui éclairent la rémiffion libre & réfléchie du billet.
Que l'on parcoure coutes les dépolit ions des témoins; qu'on
les conlidere dans l'enfèmble, ou qu'on les analyfe dans le détail ; qu'elles foient app}~ondies par l'examen le plus rigoureux; qu'elles foiem épurecs par la critique la plus amere ; que
la prévention, l'inju!l:ice, la chicane, l'arc fubtil de la défenfe
& la difcuffioo épuifeot cous leurs traits fur ces dépolitions:
on n'appercevra ni preuve, ni apparence d'enlévement; on ne
verra pas un feul fait qui indique ce délit; on n'entendra pas
un feul mot qui f.life foupçonner le dol & la fraude; on ne
verra aucune apparence de foufhaél:ion dans une piece confactée à la démontrer•
.l)elà deux conféquences. 1°. S'il n'y a pas enlévement, la
plainte d'Alexandre•.•. ell: injull:e , calomnieufe ; il faut réfOrmer la Semence du Lieutenant, & accorder à Pierre•• ·les
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R. NA L
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reparatlons
convenana bl es. 2..
J
n' y a pas en l'evement )
donc il ya rémi/Iion, donc il y a libération. Dès que le billet
n'a pas été enlevé, il a ét' remis à celui qui le poffcde; l'exception de dol & de fraude n'étant pas vérifiée, la prefomplion de la loi s'arrête (ur la tête de l'homme vertueux) &
veille à (a confervation
On foutel1oit fur le quatrieme moyen, que la plainte érait
calomnieufe. Alexandre.... ( difoit-on ) s'eCl: mis dans la
fâcheufe alternative de vérifier fa plainte en vol, pour obtenir
l'adjudication de la fomme de 8000 liv. ou, en fuccomhant
fous [es efforts intéreJTés, d'être convaincu de calomnie.
Alexandre ••. COllDoilfoit pendant la vie de fan oncle la remife du billet; il en avoit été inilruit par les DomeHiques
e la maifon; pourquoi a-t-il attendu après fa mort pour s'en
plaindre? Pourquoi préfenrer une Requêre en information,
fe plaindre de vol, d'enlé\'ement, requérir avec l'.iclat d'une
inCl:ruél:ion criminelle la preuve d'un fair public & avoué? On
avoit de toute parc des llleuves plus que fuffifantes pour fe
pourvoir ,'ivilemenr. Pourquoi a-t-on préféré la voie extraordinaire & injurieufe de l'information? Pourquoi former une
accufation en enlévement d'un biller qu'on favoir avoir été
remis? Quelle raifon de défigner Pierre ..•• comme l'auteur
de ce délit? On a donc eu l'intention de le calomnier.
On répondait pour Alexandre.... que la quittan e eil une plus
forte preuve de la libération que la fimple remife du titre.
C'eCl: la décifion de'la loi 14, cod. de [oZut. 6' Ziberat. La
remife de l'obligarion faîte par le créancier au débiteur, efl:
fans doute une préfomption de Iibérati.on. AinIl décidé par
la loi 2.,.ff. de paais. Mais comme cette préfomption n'équivaut pas à la quittance, 'IUlE [oZa confert pZenam probationem ,
comme le créancier peut avoir, pour diver(es cau(es, remis le titre au débiteur [ans avoir intention de le libérer', nonobCl:anr la remife du titre, il eCl: re~u à prouver que
que le débiteur n'efl: pas libéré. Ainfi la différence qu'il y a
otre la quittance & la rémiffion du titre, c'eH que la quit-
�DU
PALAIS
DI!
PROVENCE.
'i3~
tance ef!: exc!ufive de rou e preuve contraire; au lieu qlje la
fimple rémiffion du titre n'ef!: qu'une préfomptÎon qui cede à
la preuve contraire.
Quand le rirre fe rrOU\'e entre les mains. du débiteur, fans
qu'il apparoifle de la maniere dOIH il y ef!: tombé, qlle fa til préfiHner? En-ce au débiteur à prouver que le q;re lui a
éré remis par le c.réancier? Ef1:-ce au créancier à ,prOllver
que le tirre ef!: rombé [:ms fa participation entre 1 5 mains
du débireur? La quefiioll en: porée dans la Glofe fur la loi
3, ff. d~ patfis: QuiJ ,fi aplld debitorem meum Învwitur cautio
cancellata, v.:1 IZon cancellata, nUl7iqllid pr.xfumitur fi reddita•
. R4pondea : IZon.' Ainu quand il conHe .de 1'exiftence du titre
entre les mains dudébite~r, fans qu'il apparoi/te que ce tit.re
lui a été remis par le créancier, on ne préfume pas que ce
fait le créancier qui ait lui-même remis le titre 1.. & dans ce
cas le débiteur
n'dl: cenfé libéré. qu'autant qu'il 'prollve
,
!
.
, la
•
rémiffion' vo.ontaire du créancier: prœfitmitur liberatus ,Ji pro,.
hu veZ alias c91Zflet redditam. Pourquoi la préfomption .ef!:elle cancre le débiteur? Le Jurifconfulte nOUs Ifexplique.
C'ef!:, dit-il, pour ne pas donner occafion allX fraudas qlli
pourraient être pratiquées par. une femme, Ol! pa~ to~t. autr!=
tiers qui pourrbit enlever ce [I,re pour le rendre au deblceur:
ut tollatllr occq/io infidiarum per uxorem vd per aZù,m qui fur~
rip'uet Înjlrumenta Es debitori daret C'efi .ce qui a fa}t dire à la
loi 1') , cod. de Jolut. & Me~at, que,le titre tom?e entre les
mains du débiteur' fans le faIr du creanCier, ne Ilbere pas ce
débiteur, & qtie c;elui-ci doit alors être condamné au paiement en force du titre qu'il exhibe pour fa libération.
.
Âinfi a-t-pn une quittance, on e!l: pleinement libéré:
Itahet plenam probationem liberationis . . A défaut d'une quit.
tance dl-Il convenu & avoué que le crél\ncier a remis I~
titre
débiteur, c,elui-ci e!l: prérumé libéré, jufqu'à ce- que
le créancier prou\'e q~e l;t rémi~o~ P~~I lu.i îajte n'a Foill~
été faite dans la vue d operer fa llbe ra t ldn, malS pour tout
autre caure qu'il doit jufiifier; fi aù co.nrrair~ le titre li
crouveentre te~ mains du aéIJiteur, fà~s qli'il apparoi.lfe d~
;u
�'B6
Joli R If A L
la maniere dont ce titre ell: tombé entre (es mains, la pré(omption ell: contre le débiteur, ur rollatur occajio irzjidiarum.
II n'ell: préCumé libéré qu'autant, qu'il prouve que le titre
lui a été rendu par le fait & par la volonté du créancier.
Non prœfùmitur liberatus, TliJi probet, vel alias conjler jib
redditum c1zil'Ographllm voluntate creditoris.
Ici non feulement ce n'eH: pas par le fait du créancier
que le titre eH tombé entre les mains du débiteur, mais
c'ell: par le dol & la fraude du débiteur. Si la fraude ne
fe préfume pas, la libération ne fe préfume pas nCln plus;
quand il n'y a point de preuve d'enlévement, on ne juge pas
le débiteur coupable; mais quand il ne prouve pas la rémiffion volontaire du billet, on ne le répute pas libéré. Il y
a un grand efpace entre le crime & la libération. On peur
être condamné comme débiteur, fans être reconnu coupable d'enlévemem. Pierre...... étoit débiteur de 8000 liv. envers Jacques....... il convient n'avoir jamais payé cette fomme. Il n'excipe de fa libération, qu'en fuppofant que le titre
d'obligation lui a été voloncairemel)t remis par le créancier;
l'on fomient au contraire,', que ce titre a été frauduleufement (oull:rait. Il ell: donc préCumé débiteur.
On difcutoit enfilite la dépofition de la fervante de la
maiCon, qui étoit préCence lors de la rémiffion du billet à
Pierre...... par Jacques....... & l'on croyait prouver l'enlévement frauduleux du billet fait par la fervante, par l'exhibition par elle faite de ce billet à Pierre....... & l'union de
ces deux perfonnages, qui dès cette exhibition ne fe féparerent plus.
Arrêt du 19 Juin 1782, au rapport de Mr. le Confeiller
de Beauval, qui déclare la plainte d'Alexandre...... calomnieufe, décharge Pierre...... de l'accufation en vol du billet
de 8000 liv.; condamne Alexandre...... à 100 liv. de dommages & intérêts applicables à j'Hôpital Saint-Jacques de la
ville de Cuers; permet l'impreffion & l'affiche de l'Arrêt,
& condamne Alexilndre...... à tous les dépens. Ecrivant Mes.
Portalis & Bremond.
ARRET,
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P A LAIS
D Il
ARRÊT
P llO VENCl!.
'537
XLIX.
Les Evêques connoiffint de la nicelJité de l'agrandiffiment de
l'Eglife Paroif!iah.
/
, L'Eglife fuccurLle du hameau des Imberts, terroir du lieu
de Gordes, fut érigée en Parqiife par Sentence du 8
Oaobre 1777. L'Evêque de Cavaillon étant en cours de
vifite, rendit une Ordonnance 'le 7 M~i 1780, ponanr que
le Prieur décimateùr fourniroir les ornement néce1Taires &
convenables pour le Service Divin, & feroit les répara~'
tions qui éraient à fa charge; qu'il ferait confhuit des Foms
baptifmalJx",.,,& gue l'Eglife ferait élargie de 8 pans, & alon~
gée de feize. Cerre Ordonnance fut lignifiée aux Confuls &
Communauté de Gordes, qui y fotmerent oppofition, & délibérerent de f:lire conHruire une tribune [ur la principale
pane, fans approbarion de l'Ordonnance. Trois habitans des
Imberts fe rendirent oppofans à l'exécution de cette délibération; ils demanderenr par une requête préfentée à la Cour,
qu'elle feroir déclarée nulle, & comme telle caifée, & que
cependant l'Ordonnance de l'Evêque ferait exécurée par provifion. Par décrer du premier Février 1782, les fins provi",
foires flirent jointes au fonds & principal. La CommunaUté
de Gordes ofFrir un expédien't, portanr qu'avant dire droit
il feroir fait rapport du 'nombte de perfonnes que pourroi.
contenir l'Eglile des Imberts; de celui qu'elle contiendrait
au moyen de la triblJne délibérée; & que dans le cas olI
elle Ile fcroir pas fufl1fanre, les Experts dédareroient l'étendue & la forme dé l'agrdndi(fement. .
On difoir pour les habitans de la ParoiIre des J mberts ,
qu'on ne peur contefl:er aux Evêques le droir de juger de
tout ce qui ". rapport à 1<1 commodité & à la décenc~
Armées I78 t & t 782..
Y yy
�)38
Jou R -N A L
du Service Divin; le droit d'ordonner l'agrandifrement d'une
Eglife, & de difpofer arbitrairemene de tout ce qui concerne
l'adminifiration des Sacremens, à une relation intime, elTentiel1e, nécelTaire, avec la commodité, la décence du culte,
& eH conféquemmene du relTorc des Evêques; elle fait partie de leur Jurifdiélion.
Les Archevêques, Evêques {; autres Supirieurs, dit l'art.
S2. de l'Ordonnance de Blois, en fuifant leurs vifitations pourvoiront, appellés les Officiers des lieux, ace que les Eglifes
[oient fournies de livres, croix, calices, cloches {; ornemens
néceJ{aires pour la célébration des Offices Divins, {; pareillement a la réfervation & entretenement des Eglifes Paroifliales,
{; que les Curés [oient convenablement logés; auxquels Officiers enjoignons tenir la main a l'exécution de ce 'lui fera ordonné.
La Déclaration du Roi du 18 Février 1661 enjoint aux
Archevêques & Evêques de viliter incelT3mment les Eglifes
& maifons presbytérales de leurs diocefes, & de. pourvoir
promptemene, les Officiers des lieux appellés, à ce qu'elles
foient bien & duemene réparées, même les maifons presbytérales bâties aux lieux où il n'yen a pas. L'art. 16 de l'Edit
sie 169S contient à-peu-près les mêmes difpolitions.
Si les Archevêques & Evêques one le droit incontefiable
de connoÎtre dans le cours de leurs vilites de routes les réparations mgentes & nécelTaires, fans qu'on puiffe porcer
atteinte à ce qu'ils one prefcrit & ordonné à ce fujet, fans
<Ju'on puifie s'en écarter; li on doit mettre au rang de ces
réparations néceffaires & urgenees, qui font du relTort de la
Jurifdiélion des Evêques, & ne peuvene être que de leur
compétence, toutes cel1es qui touchent effentiellement au
Culte Divin, il feroit difficile de concevoir comment la nécefIité de l'agrandiffemene d'une Eglife pourroit ne pas être
du nombre de ces réparations; il eH effeélivemene plus que
fenlible, qu'elle touche etTentiellemenc à la· décence du Culte
Divin. En effet, commene concevoir qu'une Eglife étant.
.trop petite, ne pouvant contenir le nombre des fide1es pour
�·
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PAL A IS
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PRO V Il 1'1 C Il.
539 .
tefqùels elle dl: dell:inée, le Service Divin pui/fe s'y faire
avec èommodité & ailec dél:ence?
Qu'importe que pour agrandir une Eglife il faille conftruire, & que l:ela tienne du matériel. S'il fallait retrancher de la Jurifdiaion des Evêques tout ce en quoi le matériel entre pour quelyue chofe , cette Jurifdiaion ferait
étrangement circonfnire; elle ne remplirait certainement
pas l'objet pour lequel elle a été établie. Il faut diHinguer
l'agrandiifement en lui-même, d'avec la maniere dont il
peut & doit être fait; l'agrandiffement en lui-même, ou la
connoiffance de la néceffité de cet agrandiffement, eH &
ne peut être que dn refforr de la Jurifdiaion Eccléfiafl:ique, parce qu'il efl: indifpenfablement lié à la décence, à
la commodité du Culte; l'Evêque feul peut l'ordonner. S'il
s'agit enfuite de la forme de cet agrandiifement, de déterminer la maniere dont il doit être fait, le local fUr
lequel il peut & doit être pris, ces objets font étrangers ~
la décence, à la commodité du Service Divin; ils font entiérement matériels; ils tiennent à la temporalité, & fOllt
du re/fort de l'autorité féculiere.
On répondait pour la Communauté de Gordes, que les
Evêques ne peuvent connaître dans le cours de leurs vifites,
que des réparations qui font néceifaires & urgentes, mais
non des nouvelles conll:ruaions; c'eH ainu que s'exprime.
Touffe fur l'arr. 2 l de l'Edit de 169)' On entend par réparations néceifaires & urgentes, celles qui touchent eifenciellement à la décence du Service Divin, & aux obligations
des Prieurs décimateurs. Quant à ce qui concerne le maté.
riel de l'Eglife , & la commodité du peuple, les Evêqnes.
n'ont pas ]urifdiaion; ils n'ont que le droit d'indiquer &
de confeiller ce qui leur paroîtnécetTaire. Cela réfulte de
l'art. 22 de l'Edit de 1695 ; feront tenus les habitons des Pa.
roijJès d'entretenir la nef des Eglife.ç ri la clôture des cimetie_
res , fi de fournil' aux Curés un 'logement convenable. Voulons·
(ju'à cet effet les Archevêques f;' Evêques envoient aux Inten~
dans des extraits des procès-verbaux de leurs vifites qu'ils a.u~,
:Yn2.
�,~
JOUANAL
.
ront dreffis a cet égard. Enjoignons aux Intendans de faire
viliter par des Experts les réparations 1 d'en faire dreffir des
del1is & eflimations en leur préfence 1 ou de leurs Subdélegués,
le plus. promptement qu'il fera poffiNe, l~s Maire & Echevins,
Syndics & Marguilliers appellés, & de donner ordre que celles
fjui feront jugées néceJfaires [oient faites inceJJàmment.
Il faljt donc (continuoit la Communauté) que les répara.
tions indiquées par les Evêques, & à la charge des Corn.
munautés, f~ienr jugées néceffaires; leurs Ordonnances ne
ftJffifenr pas. M. l'Evêque de Cdvaillon, après avoir indiqué
un plan d'agrandilfemenr, laiffe néanmoins aux Parties inréreliées la liberté de pourvoir à l'agrandlffement de l'Eglife
par ,telle aurre voie qu'elles trouveront convenable & moins
coûteufe. D'où il fuit que les habitans des 1mberrs n'ont
pas'le droit de forcer la Communauté à agrandir l'Eglife
d'après le plan de M. l'Evêque, qu'il a lui-même [ubordonné à l'intérêt & à la volonté de la Communauté; c'eft
plutôt un avis qu'il a donné, qu'une Ordonnance.
Lors de l'éreél:ion de la Succurfale en Paroiffe, M. l'Evêque de Cavaillon déclare que l'Eglife peut fubfiHer telle
qu'elle efi, fans qu'il foit befoin d'en conHruire une autre.
La population n'a pas augmenté confidérablemenr depuis
1778 jufques en 1780, temps auquel l'Ordonnance a été
rendue•. La tribune que la Communauté de Gordes offre de
faire conHruire, & qui contiendra environ cinquante per[onnes, remplit entiérement l'intérêt des habitans des lmberts.
.
Par Arrêt du 26 Juin 1782, au rapport de Mr. le Con[eiller de CaHillon, la Communauté fut déboutée de [on expédient; la Cour caffa ·la délibération, homologua l'Ordonnance de l'Evêque, & enjoignit à la Communauté de la
faire exécuter. La Communauté fùt condamnée aux dépens.
Ecrivant Mes. Simeon fils & Laget.
.
.
�DU
PAL AIS _ D B
ARR Ê T
PRO VEN C B.
54 1
L.
Pour pouvoir s'infcrire en faux, il faut que le fait argué préfente l'altération de la vùité, le dol perf2nnel & le préjudice d'autrui.
Alixte Parat, de la ville des Baux, tranfporta à Pierre
Fa,rat fon fi-ere, par aél:e du) Novembre 177;, une mai{on au prix de 700 liv. Catherine Parat, fille de Calixte, te
fit émanciper & affigna Pierre Parat, fon oncle, chez Me.
Blanc Notaire, pOlir lui défemparer la maifon par retrait.
Le 2. Décembre, jour de l'aHignation, Pierre Parat ne comparut poine; Ca-therine Parat fit les oft'res néceffaires, &
le fit enfllire ajourner le 4 du même mois pour le faire condamner à la défemparation de la mai(on; on lui donna copie
de l'aél:e de comparution du 2., qu'on affura être contrôlé,
quoiqu'il ne le fCit pas; l'exploit fut contrôlé le même jour.
Le 7 Me. Blanc préfema, au nom de Catherine Parat, (ur
l'aiournement donné le. 4; le 1) il fit contrôler l'aél:e du 2.;
& le 2.3 il coucha un premier défaut au greffe.
A l'audience du 10 Mars 1774, Me. Diveux, Procureur
de Pierre Parat, prétextant que la copie de l'exploit en retrait du -4 Décembre n'étoit point parvenue à fon client, de,manda que l'exploit original & l'extrait de l'aél:e de comparlltionlui fuffent communiqués. Le Juge donna à Me. Blanc
l'alternative-de communiquer ces deux pieces à Me. Diveux,
ou de les remettre au greffe. Da,ns l'intervalle du 10 Mars
au 8 Avril, Me. Blanc, pour fe fou{haire à l'amende qu'il
croyoit avoir encourue envers le traitant, refit l'exploit, en
retrancha l'afferrion portant, qu'on avait donné copie de l'aa,;
du :2. Décemhre, & ql/'il était contr6lé; engagea l'HiliHier &
le Contrôleur à appofer l'un fa lignature & l'autre la relation
du contrôle fur le nouvel exploit & le remit au-greffe.
C
�~ .p.
Jou R. N·A L
Le 12 Avril l'exploit fut paraphé, & le 16 Pierre Parat
préfenta requête au Juge; il expofa 1°. que l'aél:ion en re·
rrait ouverte le ) Novembre avait été prefcrite le 7 Décembre; 2,0. que l'e"Xploit fabriqué après le 7' Décembre
avait été daté du 4, uniquement pour rendre inutile
la prefcription accomplie, & faire revivre ainli un droit éreinr;
3°. que cette fauffeté avait été fuivie de la réfaél:ion de l'exploir, qu'on avait accompagnée du retranchemem de rour ce
qui éroit relatif à l'aél:e du 2. Décembre, & en conféquence
Parat demanda d'être autorifé à s'iofcrire en faux contre
certe piece.
Le 8 Novembre 1776, le Juge admit la réfaél:ion de
l'exploit pour feul & unique moyen de faux, & permit d'informer; l'information fur prife, enfuite de laquelle Me. Blanc
& Jacques Hui/Iier, furent décrétés d'ajournement; Me. Porcellet Contrôleur, & Catherine Paràt, le furent d'affigné.
Les accu rés prêterent leurs réponfes; le procès inHruit par
récolement & confrontation fur jugé par Sentence du 7
Juin 1777; l'exploit fut rejet té du procès comme nul, n'é.
tant pas celui par lequel la demande en ren'ait lignager avoir
été intentée, mais un exploit li.lbltitué à un autre qui avoil
été fupprimé, & il fut ordonné que les Parties plaideroient au
premier jour fur l'inftance en retrair; les accufés furent con·
damnés à l'~OO liv. de dommages & intérêts envers Pierre
Parat, & à une amende envers le Roi.
Me. Blanc appella de cette Sentence pardevant la Cour,
ainG que de celle du 8 Novembre 1776, qui avoit admis
les moyens de faux; Pierre Parat en appella in qlJantùm
.contra &
minima. Me-:- Diveux préfenta une requêre d'intervention; il Y requit la fuppre/Iion de deux imprimés que
Me. Blanc avoit produit, & des réparations; celui-ci demanda contre Me. Diveux, la commune exécution des adjudicarions qu'il efpéroit de rapporter, la fuppre/Iion de la requête J'intervention & de l'imprimé de Me. Diveux. Catherine P.arar déclara appel de la Sentenc;e qui avoir admis le~
moyens de faux, & de la définitive.
.
a
�DU
PAtAIS
DE
PROVEN,Cl!.
543
0n difoit pour Me. Blanc, que parmi les moyens de faux
qu'on donne contre une piece produite, il en efi qui doivent 'ê.tre admis, d'autres rejerrés, d'autres enfin joints au
procès principal. C'eH la difpoiirion de l'arr, 2.9 de l'Ordonnance de 1737. On ne doit admettre que ceux qui font pertinens, & ils n'ont cette qualité que lorfqu'étanr prouvés,
ils établiifent clairement la fauiferé de la piece arguée de
faux, & en néceffitenr le rejet; on doit rejetter ceux donr la juftification ne fauroit influer fur le fort de la piece; on doit
enfin joindre au procès principal ceux qui paroiifenr ne devoir pas préjuger la conrefiation; li le Juge s'occupanr du
procès principal, penfe qu'il ne fauroit dépendre de la vérité ou de la fauifeté des moyens de faux propofés, il ne
s'y arrête point.
L'application de cette maxime fe fait d'elle-même à la
caufe. Parat eH .pourfuivi en delaiifemenr d'un domaine
par voie de l'errait lignager; l'exploit du 4 Décembre eft
libellé; il offre l'accompliifemenr de routes les formalités
requifes; Parat afiure cependant que cet exploit a été lignifié, non le 4 Décembre, c'eH-à-dire dans un temps utile,
mais après le 7 Décembre, temps auquell'aétion éroit éteinte
par la prefcription. Quels moyens fe préfentent pour faire
rejetter cette piece? Son antidate, foit dans l'original, foit
dans la copie. S'il étoit vrai que formée après la prefcription acquife, elle eût été datée d'un temps utile, ce feroit
ut) faux dont la preuve en motiveroit le rejet; le moyen feroit pertinent, & confé,quemment admiffible. Dès que l'exploit éroit libellé, l'antidate éroit le feul moyen qui pllC être
propofé. Parat ne s'eH point plaint que la copie n'avoit
pas été laiifée chez lui le 4 Décembre; qu'elle n'avoit point
été attachée à la porre, ni que l'Huiffier n'en avoit pas averti
les voillns; le Juge n'en a pas non plus parlé dans fa Sentence; il ne peut donc alléguer l'antidate de l'affignation.
•Le 4 Décembre 1773, il fut conrrôlé un exploit libellé
d'ajournement en retrait' lignagel' , au nom de Catherine,
tOI1.~re l'ierre Parat; donc tet exploit exiftoit alors j donc
�5~
JOUANAL
il n'a pas été fabriqué après le 7. La relation du contrôle
repouffe l'accufation en faux; il faudrait qu'elle fût ellemême attaquée par la voie de l'infcription.
Le 7 Décembre Me. Blanc mit là préfentation au greffe
fur l'exploit en retrait du 4, au nom de Carhuine, contre
Pierre Parat; cette préfentation prouve l'exiltente de l' ,'xploit, car il en: impoffible de préfenter fur une citarion qui
n'a pas été donnée. Donc la préfentation du -7 Décemb:e
exclut route poffibilité que l'exploit n'ait été fabriqué qu'après
ce jour~là.
Les Loix & les Auteurs ont décidé que, pour qu'un citoyen pui1fe porter à la Juf!:ice une plainre en faux, foit
principale, fait incidente, il faut <,ue ,1'aél:ion dont il Ce
pl~int préfente le changement de la vérité; que ce changement lui ait préJudicié, & qu'il ait été commis par dol :
mutario veritatis dolus & 'luod alteri noceat; fans le concours
de ces trois circonf!:ances, la fauffeté, quoique réelle, eQ
réputée idéale & chimérique, & ne fauroit former un corps
de délit; les Loix font précifes. (L. 20, cod. ad Leg. Corne!.
de falfis. L. unique, cod. de mutatione nominis. L. 3, §. de fide
inflrumentorum). Tel en auŒ le femimem des Auteurs. (Julius-Clams, §. f/llfum, n. 7; Alexandre, vol. 7, conf. 53,
n. 14; Natta, conf. )88, n. 13; Theveneau, fur les drdonnances, liv. 4, tit. 17, arr. 1, pag. 335; Lacombe, matie·res criminelles, parr. 1, chap. 2, n. 14; Brillon, verb.faux,
n. 22; Decormis, rom. 2, col. 1968; Charondas, liv. 4,
réponf..30; Buiffon, dans fan code manufcrit [ur le tit. du
code ad Leg. Cornel. de falfis.)
,
L'Arrêt rendu en faveur du fieur Brignol & de Me. Raymond Notaire, contre le fieur de Rians, le fut dans la
même hypothefe. Le faux matériel éroit avoué, puifqu'on
avait paffé un trait de plume fur le nom de Jean-Jofèph
Borrely, que le fieur Brignal avait donné pour caution au
fieur de Ri~ns, pour y fubfliruer à fa place celui de Touffaim Borrel)'; la procédure en infcription du fieur de Rians
fLlt ca!fée , par cela fl:u1 que Jean-Jo[eph Borrely, qui avait
foufcrif
�nu PALAIS DE PROVENCP.
H~
foufcrit le contrat, convenait -d'être caution, ce qui rempliffoit l'intérêt du heur de Rians_; le Parlement de Paris
le jugea de même par Arrêt du 10 Juillet -1776, rapporté
dans les nouvelles Caufes Célebres, tom. 23, pag. 186.
Il eCl: cerea-in que dans le cas aauel (continuait Me. Blanc)
la vérité de l'exploit n'a pas été altérée; qu'en filppofant
qu'il exiHât quelque fauffeté, elle n'eût pu porter à Parat
aucune forte de préjudice, qu'elle ne lui en a jamais
porté, & qu'elle eut éte commi(e fans dol.
Le retranchement eH borné à l'affereion qu'on avait donné
copie d'un aae, & que cet ac1e élOit contrôlé: or, l'énonciation ôtée était étrangere à l'exploit; elle était hors de
l'exploit; l'affertion que l'aé'te éroit contrôlé, n'autorifoitpoint
l'induaion que l'exploit éroit antidaté, puifque le 4 Décembre on pouvoit donner copie d'un aae du fecond du même
mois, & dire que cet aae étoit contrôlé, quoiqû'il ne l'eût
été que le 1). Donc le retranchement de cette affereion n'a
ôté à Parat aucun de fes droits. Elle ne pouvoit pas lui
nuire, parce qu'il avait entre fes mains la copie de l'exploit;
la réfaaion de l'exploit, les changemens, les retranchements qu'il effuyoit ne s'étendaient point à la copie; elle
reiloit intaae & hors du pouvoir du demandeur. Son exiftence excluait toute poffibilité de dommage. Il eil de
maxime que la copie tient lieu d'original au défendeur j
c'eH le fentiment de Radier fur l'Ordonnance de 1667,
page 39.
La réfaaion de l'exploit ne pouvoit point être pourfuivie par la voie de l'infcription, parce qu'elle n'offrait point
un faux. L'altération de la vérité, le préjudice à autrui, le
dol en la perfonne, le conilituent feul; or, la vérité de
l'exploit n'avait fouffert aucune altération, il doit donc fubfifrer; l'affertion retranchée n'en faifoit point pareie; elle
éroit inutile par elle-même; toute altération était indifférente à Pa rat ; il avait une copie de l'exploit; elle éroit
exaae. C'ef! d'après elle qu'il avait droit d'être jugé. Point
de dol en la perfonne de Me. Blanc; il n'a refait cette
Années l78l & l78z.
Z zz
�5~
JOURNAL
piece que pour détruire la preuve de l'expédition & de la
communication d'un aél:e non encore· contrôlé, & pour (e
foufhaire par-là aux pourfuites du traitant dont il étoit me,
nace.
Sur la demande en commune exécution coutre Me. Diveux, on difoit que quand un Procureur chargé de l'inll:ruél:ion
d'une affaire n'excede pas les bornes de fon minillere , quand
il n'entreprend de faire triomper une caufe qu'il croir jull:e
que par des moyens honnêtes, avoués des Loix, quand il
ne fait aucune furprife, qu'il ne commet aucune rufe,
qu'il ne tend aucun· piege, qu'il ne fe fouille d'aucun dol
perfonnel, la Loi le garantit des pourfuites de fon client,
& de celui qu'il a combattu, quel que foit l'événemenr de
la caufe; mais lorfqu'il. donne dans coure forte d'écarrs,
lorfque les rufes, les pieges, le dol perfonnel, les moyens
honteux font les armes qu'il emploit, ou pour faire triompher une caufe injull:e, ou pour avoir l'occalion de nuire,
de flétrir la réputation des Parties adverfes, d'opérer leur
ruine, il ell: inexcufable, il abufe de fon minif1:ere; alors
on ell: forcé de voir dans le Procureur un homme perfide,
un coupable, d'autant plus criminel, qu'il dirige fes
coups, qu'il fe livre à des excès, à l'abri & fous la prote5l:ion même des Loix. Ces rufes, ces pieges, ce dol perfonnel aurorifent une aél:ion direél:e contre lui.
L'excès du mandat dont l'objet fe réduit à un préjudice
poffible ou réel pour le client, peut être défavoué par celuici; le PrÇlcureur ell: aldrs à découverr, il ell: fournis à dédommager la partie adverfe. Quand cet excès préfenre un
dol, il imporre peu .que le client l'adopte ou qu'il ne s'en
prévale point. Dans le premier cas, il devient le complice
du Procureur, & comme tel il ell: puni; mais le ·Procureur ne cefTe point d'être coupable, d'être le premier &
prefque l'unique coupable; dans le fecond, le client n'a d'autre cort que d'avoir mal placé fa confiance: A procuratore
dolum..•• prœflandum eJfè , juris allaoritate inanifeflè déclara::
tur. Leg. l3. cod. malldati vel contra. Quand on découvre,
.
�DU
PAL AIS DE Pit 0 VEN C l!.
547
dit Ferriere, Dic7ionnaire de droit, verb. Procureur, pag. S9h
les artiJiœs qu'a témérairement employés lin Procureur pour
rendre bonlle une caufe mauvaifè, il én efi tenu en [on propre
& privé nom, & les luges ne manquent jamais de le rendre
refpon[oble de Nvénement. Papon, dans fon Recueil d'Arrêts, liv. 6, tit. des Avocats & Procureurs, arc. 14, pag.
367, rapporce trois Arrêts qui l'one ainfi jugé; on en trouve
un autre dans le Journal des Audiences, tom. l, ag. 390.
Ce dernier Arrêt a précifémenc décidé qIJe le dol perfonnel du' Procureur autorife une attion direél:e contre lui, lors
même qu'il n'y a aucune f.Jrprife, aucun dol perConnel du
Procureur, mais la fimple adhéfion à liJivre a'veuglémene la
pallion de fa p3rlie. De> AUleurs eHimés penfem qù'il efl:
permis à ceux qui Ce trouvene léfés par de mauvaifes procédures, de [e pourvoir comre le Procureur qui eH forci
des bornes de [on devoir, & de pré[~nter requête conere
lui.
.
On rappelloit pour Cathetine Parat & Me. Porcelet, les
mêmes moyens que ceux pro!Jofés par Me. Blanc.
On répondoit pour Pierre Parat, que la [uppreffion d'un
exploit original, la {ùbfl:icution d'un autre original ~ [a place,
faite par le Procureur de la caufe, qui a fait concourir à la
réfJél:ion l'Huillier & le Contrôleur, forment par eux-mêmes
un faux public & caraél:éri[é i l'exploit [ubHitué doit donc
être déclaré faux, & non fimplement nul. La produél:ion
dans une inllance, de cet exploit contrefait & faux, & lil
déclaration de vouloir s'en fervir de la part de la Partie
au nom de laquelle elle a été faite, ayant engagé une inftance & une procédure en faux incident, la piece arguée
venant à être déclarée faulfe & contrefaite, & comme telle
à être rejettée du procès, il efi jufl:e que la Partie produifante, & les auteurs du faux qui ont donné lieu à cerre
procédure, foient condamnés, à titre de demmages & intérêts, à routes les adjlldications rapportées dans l'infiance.
Catherine Parat, {ornmée de déclàrer fi elle vouloit fe
fervir de l'original d'exploit produit en fon nom, en d.on~
. Zzz :z.
-iL;
�548
Jou RNA' L
nant fa' déclaration au Greffe' qu'elle vouloit s'en fervir, a
par-là même néceffité tou'te la procédure en faux incident
envers cene piece, pour la faire rejener du procès comme
fauffe & contrefaite, & comme une piece fubHituée qui
n'étoit pas l'original primitif. Elle efl: conféquemrnitJt foumife par cela feul à tous les dépens & dommages & intérêts
occafionnés par cene procédure, à laquelle elle a donné lieu.
Si cette piece étoit inutile, comme on le prétend, il falloit
confentir qu'elle fût rejenée du procès; dès-lors il n'y auroit plus eu de procédure en faux incident. Ce principe efl:
fondé fur les art. II, 12 & J3 de l'Ordonnance de 1737.
Decormis, tom. 2, col. 1983, obferve qu'après avoir déclaré
vouloir fe fervir de la piece, il n'y a pas lieu de repentir, & '
qu'il faut fubir la condamnation des dépens & de l'amende;
& telle efl: la difpofition de la Loi Ji falfos, cod. ad Leg.
Cornel. de fal[.
La procédure a prouvé, & les accufés ont avoué que cet
original étoit un original fabriqué après coup, & fubfl:itué
à l'original primitif, fupprimé ; il n'y a donc point de doute
qu'il. ne doive être rejené ,du procès.
C'eft une regle fondamentale, que l'original d'un aéte quel.
conque doit en tout temps être repréfenté pour juHifier
la vérité de la copie, à moins qu'il n'ait été perdu par un
cas fortuit & imprévu. Hors delà, la feule communication
d'une piece la rend commune aux deux panies, & celle à qui
la copie de cette piece a été donnée, eft toujours en droit
de demander la repréfenration de l'original dont celui qui en a
fait la communication, n'eft plus devenu dès ce moment que
le dépofitaire. C'efl: le femÎment de Faber, déf. 2, cod. de
edendo, not. 3; de Decormis, & de MM. les Commiffaires
fur le proLès-verbal des Ordonnances, titre 2, article 6,
page 14.
,
Les copies ne font donc au fonds que des doubles d,es
pieces pour faciliter la marche de la procédure dont la fidélité & la vérité doivent être perpétuellement affurées par
la repréfemation de l'original, dès qu'elles font révoquées en
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PAL A 15
D .Il
Ji R 0 V .Il NeE.
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doute. L'original en: donc toujours demeuré, malgré l'introduél:ion des copies, cette piece matrice & commune au procès, dont la vérité doit être fans ceffe juHifiée par elle-meme.
Ainfi l'origin~l primieif de l'exploit ayant été frauduleufement
foullrait précifément après que la repréfentation en avoit
été demandée pour en vérifier la vériré , il efl: vrai de dire
qu'il n'exifle plus d'exploit, & que la copie ne peur en tenir
lieu poi,;r aucune des parties, par la raifon que la fidélité de
cerre copie avait befoin d'être alTurée par la repréfentarion de
l'original.
.
La fuppreffion d'un aél:e public en par elle-même "un f~ux
grave & caraél:érifé , fur-tout fi l'auteur etl: un Officier public,
qui doir plus fpécialement veiller à la confervation de cet
aél:e; eum qui cela vit l'el amovit ujlamentum, committere crimen
fa!fi pu6/icè notum efl. L. 14-, cod. ad leg. Cornel. de fa!fis ,
'lui amoverit vel celaverit. L. l , if. eod. Cette fuppreffion ne
peut point exifl:er fans dol & fans altération de la vérité
qu'dn tâche d'enfevelir, commiuere crimefl fa!fi pu61icè notum
eft. Les reeranchemens dans les aél:es ont encore re~u par
la loi le caraél:ere du faux. ( Diél:. leg. l , jf. ad leg. cornel.
de falf. ) La fubflitution d'une piece à Ul1e autre, & la tentative de la faire paffer pour la piece fupprimée, efl encore une fauffeté ,"fuivant la loi, parce que cela ne peut
s'opérer fans changer la vérité & fans dol.
En fupprimant le vrai exploit, Me. Blanc a voulu priver
Pierre Parat d'un moyen propre à découvrir la fauffeté de
la date du 4 Décembre 1773"; l'objet de la réfaél:ion de
cet original & du retranchement de la c1aufe où il était
fait mencion qu'il avoir été donné copie de l'atte de comparution, efl: le niême. Cerre déclaration rapprochée du contrôle de cet atte de comparution, en date du 1 S Décembre,
formait un indice qne l'exploit était poflérieur au contrôle
d~un aél:e donc il n'avait pu être donné copie qu'après l'avoir
fait contrôler, & dont l'extrait, ainfi que la copie qui en
- avoir été donnée, portaient l'arceflation du contrôle. Il n'y
avoit en effet pas plus de raiCon de Cuppofer que Me. Blanc"
�Ho
Jou RNA L
eût faulfement déclaré que l'aél:e de comparution done il
[aifait expédier copie avoit été contrôlé, qu'il y en avait de
croire qu'après avoir fait contrôler le 1) Décembre l'aél:e
de comparution dont il fairoit expédier copie, avec attefiatian que cet aél:e étoit contrôlé, il ellt néanmoins fait antidater l'exploit.
On difoit pour Me. Diveux, qu'il n'avait pas bef'0in de
Cc jull:ifier, puirqu'il n'étoit paine accufé, & que d'ailleurs
les impucations dont on l'accabloit étoiene dénuées de preuves. Quant au fonds, il rappelloit les mêmes principes que
Pierre Parat.
Arrêt du ) Juillet 1782, au rapport de M. le Confeiller
de Perier, qui déboute Pierre Parat de fon appel in quantùm contra; réforme la Sentence du Juge des Baux, ainfi
que celle qui admet les moyens de faux, avec dépens contre
Parat ; ordonne que l'exploit refait fera déclaré nul, & que
la copie du premier exploit qui en au pouvoir de Pierre
Parat, tiendra lieu d'original, pour fervir & valoir ainli que
de raifon au procès pendant pardevant le Juge des Baux fur la
demande en retrait; déboute Me. Blanc de fa demande en
commune exécution contre Me. Diveux; fupprime cous les·
Mémoires de Mes. Diveux & Blanc, avec dépens ch.:lcùn les
concernant. Ecrivant Mes. Aude, Roman Tributiis, Barlet
& Sauvere.
ARRÊT
L 1..
L'aae paffi par le curateur ad houa, au nom & en faveur
de la maffi des créanciers, ne peut l'être. par liN Notaire
proche parent du curate.Ur.
L
A fucceffion d'Efprit Roux, du lieu d'E'ntrecafleaux,
étant furchargée de dettes, les héritiers légitimes s'en
abLtinrenc; Les ,réanciers folliciterent tour-à-tour la nomi~.
�Ho
Jou RNA L
eût faulfement déclaré que l'aél:e de comparution done il
[aifait expédier copie avoit été contrôlé, qu'il y en avait de
croire qu'après avoir fait contrôler le 1) Décembre l'aél:e
de comparution dont il fairoit expédier copie, avec attefiatian que cet aél:e étoit contrôlé, il ellt néanmoins fait antidater l'exploit.
On difoit pour Me. Diveux, qu'il n'avait pas bef'0in de
Cc jull:ifier, puirqu'il n'étoit paine accufé, & que d'ailleurs
les impucations dont on l'accabloit étoiene dénuées de preuves. Quant au fonds, il rappelloit les mêmes principes que
Pierre Parat.
Arrêt du ) Juillet 1782, au rapport de M. le Confeiller
de Perier, qui déboute Pierre Parat de fon appel in quantùm contra; réforme la Sentence du Juge des Baux, ainfi
que celle qui admet les moyens de faux, avec dépens contre
Parat ; ordonne que l'exploit refait fera déclaré nul, & que
la copie du premier exploit qui en au pouvoir de Pierre
Parat, tiendra lieu d'original, pour fervir & valoir ainli que
de raifon au procès pendant pardevant le Juge des Baux fur la
demande en retrait; déboute Me. Blanc de fa demande en
commune exécution contre Me. Diveux; fupprime cous les·
Mémoires de Mes. Diveux & Blanc, avec dépens ch.:lcùn les
concernant. Ecrivant Mes. Aude, Roman Tributiis, Barlet
& Sauvere.
ARRÊT
L 1..
L'aae paffi par le curateur ad houa, au nom & en faveur
de la maffi des créanciers, ne peut l'être. par liN Notaire
proche parent du curate.Ur.
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A fucceffion d'Efprit Roux, du lieu d'E'ntrecafleaux,
étant furchargée de dettes, les héritiers légitimes s'en
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PAL A rs· D Il
PRO V Il Nell.
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nation d'un curateur ad lites & d'un curateur ad Dona, les
·ûeurs Maffe, Benoit, Marguerit & Hypolite Roux nommés
judiciairement, remplirent fucce/livemenr les fonaions de
cette derniere d alge. Me. Hilaire Roux, Avocat & Notaire, éroit le Notaire ordinaire de la maffe des créanciers.
Hypolire Roux fan frere arrenta, le 20 Aoîlt 1779, les
biens de l'hoirie à Jean Jaffaud; l'aae fut reçu par Hilaire
Roux.
Le 3 Novembre même année, Jalfaud préfenta une requête au Juge d'Enrrec,tfl:eaux, & demanda la caffation de
cet aae ; il la fonda fur ce que le Notaire qui l'avoit reçu,
érait le frere de la partie avec qui il avoit traité; le Juge [ubrogé rendit fa Semence le 20 Juin 178 l , il calfa le
bail.
Le curatellr ad Dona appella de cette Sentence, & Jaffaud ufant du privilege des pauvres, évoqua l'inil:ance pardevam la Cour; il a/ligna en même temps Me. Roux en commune exécution, fi mieux il n'aimait déclarer qu'il la confenroit ; Me. Roux donna ce confentement à condition que
ce feroit fans fupporrer aucuns dépens de l'appel ; ce qui
fut accepré par Jaffaud.
On obfervoit pour le curateur qu'il s'agiffoit de décider:
l 0. fi un bail à ferme confemi par le curateur ad Dona d'une
hoirie en faveur d'un homme illitéré érait nul, parce que le
Notaire qui l'avoit reçu érait le frere de ce curateur. 2°. S'il
ne faudroit pas au moins fubordonner le fort de cette réClamarion au poim de favoir fi l'aae eil: avamageux ou nuifible au Fermier, & s'il a été rédigé tel qu'il avoIt été déterminé par les parties.
Les Arrêts de Réglement rapportés par Boniface, tom.
l , liv. l , tir. 20, pag. 72, par Mr. de Reguffe, tom. l , pag.
28~ , & celui du 19 Juillet 1776, qui défendent aux Notaires de recevoir aucuns aaes des perfonnes illitérées en
faveur de leurs proches parens ou alliés jufqu'aux coufins
germains inclufivemem, ne prononcent point la peine de
nullité. En fuppofant que la nullité des contrats dût être
�H'L
.
10
t1 RNA L
l'effet néceffaire de la prohibition, elle ne devroit avoir lieu
• que quand deux chofes concQurent égalemem. 1°' La parenté de la partie fiipulame avec le Noraire. 2,0. L'utilité
qu'elle retire des aéles. Si la partie fiipulanre n'dl: pas pareme du Notaire, ou fi eUe l'eH au delà du degré déterminé, la Loi n'a plus de crainte; elle affure elle-même
l'exécution des aéles re~us par des perfonnes qu'elle honore
de fa confiance; fi le comrat n'dl: pas avantageux à la partie
Hipulame , la prohibition ceffe égalemem, parce qu'il n'y a
alors aucune fraude à craindre, & il eft hors de rout doute que
eeJJànte ratione legis, eeJIàt legis difPofitio.
.
C'eft d'après ce principe inconreHable que Guipape, quelt.
3 18 , dit: Notarius tamen de jure potefl confieere injlrumentum
in quo ft obligat alteri ; que Boniface, tom. 1, pag. 72, répete: les Notaires peuvent prendre les contrats conir'eux-mêmes, & par eonji:'luent eotltre leurs parens; & que Mr. de
Reguffe conclut que la prohibition ne porte que contre les
aéles qui procurent du bien ou des avantages aux proches parens du Notaire.
Jaffaud eft illitéré ( continuait-on) ; Hypolire Roux, qui
a traité avec lui, eH le frere du Notaire qui a re~u l'aéle ;
mais ce n'eit pas en fan propre & privé nom qu'il a agi; il
n'a fiipulé que comme curateur ad DOna d'une hoirie vacame; il n'étoit donc que le Procureur, le Mandataire de la
maffe des créanciers; c'eft la maffe elle-même qui !1 contraélé en la perfonne d'HYPp0lite Roux; c'efi donc elle -feule
qu'il faut confidérer. Cette vérité réfulte même de nos Ordonnances. Celle du mois d'Août 1737 décide qu'on ne
peut pas évoquer fous prétexte que le Procureur fifcal qui
plaide ratione ojficii ,dt parent des Juges; Radier fur celle
de 1667, pag. 441, attelte qu'on ne peut pas recufer fur le
même motif; il en eH de même du tuteur; les Auteurs
décident que c'eH parce qu'il ne s'agit pas de leur intérêt
particulier & perfonnel, & qu'ils ne ftipulent qu'à raifon de
1eur charge; il faut envifager uniquement la perfonne au nom
& pour k compte de qui l'on agit. Ici la maffe des créancIers
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
sn
ciers que Roux repréfentoic n'écoit point parente du Notaire
au degré prohibé.
D'ailleurs la prohibition ne s'applique qu'aux te!l:amens,.
donations, obligations, reconnoiffances. L'Arrêt de Réglement de 1776 l'indique alfez, en n'énonçant que les aétes,
foit entre vifs ou 11 caufe de mort; elle ne s'étend donc point
jufgll'au bail 11 ferme, jufqu'à un aéte, qui par fa nature
peut être plus utile, plus avantageux au preneur qu'au bailleur. Si Je bail eH juUe, fi la jouiffance affurée répond au
prix promis .. fi les conditions écrites n'offrent aucune forte
de léilon ; fi, en un mot, le preneur n'ef!: pas traité plus févérement qu'il ne le feroit fans aéte, il eH hors de tour doure
que cet aél:e n'eH: pas prohibé par lui-même, CJ,uoique reçll
par un Notaire parent du bailleur.
On répondait pour Jalfaud, que de tous les temps & dans
tous les pays policés, il a été défendu aux Notaires de recevoir des aétes en leur faveur, ou en faveur de leurs parens. Les Ordonnances d'Orléans & de Blois fembloient
avoir borné cette prohibition aux tefiamens & autres dif_
pofitions pareilles; mais elle a été étendue 11 toute forte
de contrats. Ainfi Mornac fur la Loi Pater, if. de tdlibUs,
& fur la Loi 17, if. de teflament., dit que le Notaire ne
peut infirumenter pour fes pareos jllfqu'au degré de coufin
germain; il fait mention de plufiellrs Arrêts généraux du
Parlement de Paris qui ont défendu aux Notaires de recevoir les contrats dans lefqllels leurs coulins germains &:
autres leurs parens plus proches fe trouvent intére/fés.
Boniface, tom. S, liv. 2., tit. 1 l ,chap. l , n. S, cite UQ
Arrêt de Réglement de 1609' Mr. de Regulfe dans fan Recueil d'Arrêts de Réglement en rapporte un du 18 M,ars 1719,
qui, en renouvellant la dirpolition des précédens, fait dé_
fenfes à tous les Notaires de la Province de recevoir . .aucuns
aétes des perfonnes illitérées en faveur de leurs proches parens ou alliés, jufqu'aux coulins germains inclu{ivemenr, 11:
peine de faux, de privation de leurs charges, & de tous dépens, dominages & intérêts des parties. L'Arrêt du l 'J
AIlTlées 178z & 178~.
fi <\ '\ ~
�H4
JOURNAL
luillet 1776 a ordonné l'exécution de celui de 1719.
Le motif de cerre fage difpolition efi facile 11 fai/ir. Le
mipifiere des Notaires eH fort délicat; quelques honnêtes que
foient ceux qui l'exercent, il feroit à cralOdre que leur intérêt
perfonnel, ou l'intérêt d'afleél:ion pour leurs proches, ne les
portât à leur procurer des avantages qui ne font point entrés dans l'intention & les accords des parties conrraél:antes: ç'a été pour prévenir ces inconvéniens dangereux, que
les Cours Souveraines, par des vues d'ordre & de bien public, ont expreifément défendu aux Notaires de recevoir des
aél:es, de quelque nature qu'ils foient, dans lefquels quelqu'un
de leurs parens, jufqu'au degré de cou/in germain, fe trouve
intéreifé , lorfque l'une des parties en illitérée.
Il eH certain que tout ce qui e'fi fait au préjudice des Loix
ptohibitives, eH radicalement nlll, quoique la nullité n'ait pas
été prononcée. L'Empereur l'a décidé de même dans la
Loi non dubium, cod. de Legihus : ea qUa! a Lege prokihentur , .fi fuerint fac1a, pro iTlfec1is hahentur. Quando Lex prohihet aLiquid fiai, difent les Doél:eurs, etiamji non procedat
ultra annul/ando, tamen ac1us eJl nul/us. Tel eH encore l'avis
de Dunod dans fon Traité des PrefcriptioTls, pag. 17 , de
Mr. de RegufIe dans fes Arrêts notables, pag. 317. Dans
le cas préfent, les Ordonnances & les Arrêts de Réglement
prohibent expreifément aux NOlaires de recevoir les aél:es où
leurs parens font intéreifés; cette prohibition feule fuffit pour
emporter la nullité de pareils aél:es.
Peu importe qu'Hypolite Roux n'ait fiipulé que comme
curateur ad hona : le curateur ad hona efi l'homme de l'hoirie
vacante, il la repréfente ; c'en en lui que ré/ident toures les.
aétions aétives de cette hoirie ; il doit avoir le même zele,
il prend & doit prendre le même intérêt pour tout ce qui
concerne .cette hoirie, que pour ce qui lui en propre; les
affaires de cette hoirie lui fone en quelque maniere perfonnelles; en un mot, Hypolite Roux en fa qualité de curateur
ad hOlla étoit partie Hipulame & partie principale dans l'aél:e
de bail: par cela feul il était prohibé à Me. Hilaire Roux
fon frere de le recevoir.
�DU
PAL AIS
D Il
~ 55
PRO V Il N C H.
Les Arrêrs de Réglement ponent leur prohibition contre
tous les conrrars reçus par les Notaires en faveur de leurs
parens; ils les embrail"ent tous. Une vente, un arrentement,
un louage peut procurer également de l'avantage à l'achereur, au vendeur, au bailleur, au rentier, au locaraire &
au locareur. Tous ces aéles tombent donc dans la prohibition. On relevoit enfuire les diverfes obligarions auxquelles
JaIraud avoit été fou mis , & on en démontrait l'avantage
confidérable qui en réfultoit pour la maIre au préjudice du
locataire.
Par Arr~t du 8 Juillet 1782., au rapport de Mr, le Con- .
feiller de la Beaume, la Sentence du Juge d'Entrecal1eaux
fut confirmée, avec dépens. Ecrivant Mes. Sauvere & Hovis
cadet.
ARR Ê T
L J J.
Le Négociant peut prêter à jour & avec intérêts a1
Bourgeois.
u~
AR aéle du 31 Décembre 1759, les DlIes. Therefe &
Anne Nicolas fœurs de la ville de Marfeille, s'obligerent folidairement en faveur du lieur Jouve, Négociant de
la mêm~ ville, pour la fomme de 30000 liv. qu'elles déclarerent avoir reçues de lui en amiable prêt, pour employet
aux frais de la bâtiIre de deux maifons firuées en la même
ville. Elles promirent de rembourfer cetre fomme dans dix:
années & en dix paiemens, dont les neuf premiers feroient
de 1000 liv. chacun, & fetoient fairs annuellement à chaque fin des neuf pre·mieres années, & les 2. IOQO liv. refiantes
devoient être poryées à la fin de la dixieme.
Quatre années s'écoulerent, fans que les Dlles. Nicolas
fjffent aucun paiement. Jouve les fit afiigner en condamna
tioo de la fomme de 4000 liv.) avec; intérêts tels que qe
P
Aa.aa2<
•
�~S6
JOURNAL
droit; il obtint contr'elles le l S Mars 1764 une Sentence
par défaut ,qui leur fut lignifiée le 22 du même mois. Elles
obtinrent du temps pour le paiement, au point que route
la fomme fe trouvant échue, le lieur Jouve les fit ajourner
le 20 Janvier 1770 en condamnation des 26000 IiI'. relrantes,
auffi avec intérêts tels que de droit. Les Dlles. Nicolas payerent alors les 4000 IiI'. adjugées par la Sentence du l S Mars
17-64, & SO IiI'. à compte des intérêts & dépens. Sous la
promelfe , & enfuite à la faveur de ces paiemens, elles arrêterent les nouvelles pourfuites dlI lieur Jouve, qui décéda
en 1776.
.
Après fon décès, Mre. Barre fon beau~trere, fon exécuteur tefl:amentaire, n'ayant trouvé aucun extrait dlI contrat
du 31 Décembre 17S 9, trouva la note d'une créance imponante fur les Dlles. Nicolas; il voulUt en fa ire rentrer le
montant; illa fit extraire & la leur communiqua lui-même.
Munies de cette piece, de laquelle il paroiifoit réfu!ter qlIe
le lieur JOllve n'avoit prêté que 20000 IiI'. par le contrat,
& que les autres 10000 IiI'. éroient les intérêts de dix années qui précédoient l'échéance de 20000 liv.; munies auffi
de deux autres notes, defquelles il réfuirait également 1°. que
le prêt n'érait que de 20000 IiI'. , & que les 10000 IiI'. rertantes étoient le produit des intérêts; 2°. que les 20000 IiI'.
de principal procédoient, favoir, 126S6 IiI'. pour partie d'un
compte focial arrêté par le fieur Jouve avec la Dlle. AnneMarguerite Nicolas, 7002 IiI'. du prêt réellement fait aux
. Dlles. Nicolas fœurs, pour la bâtiITe & réparation de deux
maifons, & 341 IiI'. pour intérêts de cette derniere fommejufques à l'époque du contrat, elles crurent devoir en profiter. JI y eut appel de la Sentence dlI 1 S Mars 1764' Me.
Crefp, Avocat, héritier des Dlles. Nicolas, concllIt à la réformation de la Sentence & au déboutement de la reqlIête
du lieur Jouve; & par une requête incidente, il conclut à
ce que fans s'arrêter 11 l'aél:e du 31 Décembre 17S 9; qui
feroit déclaré nul & ufuraire, & comme tel calTé, les parties fuITenr remifes au même état où elles étoient avant
l'aél:e.
�DU _PAJ.A1S
DI!
PROVENCI!.
5'i7
Me. Crefp obfervoit qu'il ne prétendoit pas fou tenir que
quand il y a ufure dans un contrat, on efi dlfpenfé de payer
une créance légitime; il ne prétendoit pas 1J0ll plus que la
Hipulation de l'intérêt fût prohibée entre Négocians & pour
fait de commerce, & que deux chiffons de papier qui ne
feroient ni écrits ni !ignés par le créancier, fùlfent des preuves authentiques & légales; mais il foutenait qu'un contrat
ufuraire en elfentiellement .nul, & qu'il faut le calfer, fauf
le paiement des créances légitimes, & il ne peur y avoir
de preuve plus frappante de l'ufure, que celle q",i ell écrite
ou !ignée par l'auteur même de l'ufure ou fan repréfent·ant.
Il y a donc deux points à établir ( difoit Me. Crefp ).
y a-t-il ufure dans le contrat du 31 Décembre 17 S9? S'il'
i a ufure, re contrat efi·il nul? D'abord le contrat, qui s'éleve à la fomme de 30000 liv., renferme 10000 liv. d'intérêts à écheoir. Les 2.0000 liv. rellantes font compofées de
7002. liv. dues folidairement par Therefe & Anne-Marguerite Nicolas, des intérêts échus de cette fomme, fe montant HI liv. 13 f. 4- d., de IlS64- liv. 1 f. 2. d. dues en
particulier par Anne-Marguerite Nicolas, dans laquelle fo'mme
on comprend 2.87 liv. 18 f. d'intérêt, & finalement de 92. liv.
encore pour intérêt dé partie des 12.')64- liv. 1 f. 2. d. C~1a
ell prouv~ par le compte courant affirmé par Me. Barre,
exécuteut tefiamentaire, par une note écrite de la main de
feu Jofeph Jouve, créancier, & par deux notes qui fervirent
à la compofition du contrat, & qui font écrites par le
Commis du fie ur Jouve, fur lefquelles il y . a des chiffres
écrites de fa main. Il réfulte delà qu'il y a da ns le contrat
intérêts illicites échus & à écheoir ablatés avec le princi- .,
pal & intérêt de l'intérêt, d'où l'on peut conclure qu'il y a
ufure.
~
U [l aae de notoriété rapporté dans le recueil, pag. 3;
nous attefie que" l'ufage & la maxime certaine, inviobble
., des Arrêts de la Cour, efi qu'en matiere des intérêts
v" des funples prêts à jour & à temps des fommes en d~-,
�~~8.
JOURNAL
" niers pour quelque caufe & prétexte que ce foit, ils ne
" font jamais adjugés que depuis la demande judiciaire faite
" par le créancier qui ·a fait le prêt, nonobftanc que les
" intérêts eu1fenc été ftipulés & le paiemenc _d'iceux pro" mis par le débiteur, fait par des aél:es & prome1fes con" tenant led. prêt à jour, comme étanc la Hipulation defd.
" intérêts des limples prêts à jour illicite, concraire au
" droit & réprouvée par la maxime établie par les Arrêts.,,'
Le Commentateur ob[erve que cet aae de notoriété eH
1
fondé [ur les Ordonnances du Royaume.
Il eil: li vrai que la il:ipulation de l'intérêt pour limple
prêt eft illicite, que dans un pareil cas les intérêts induement payés font imputés au fort principal. C'eH la déci..fion de la Lor IndeZ,itas, cod. de uful'is. Aïoli jugé par plulieurs Arrêts rapportés par Duperier, rom. 2, pag. 44~' n
ne fauç!roit même, pour prouver l'illégitimité de la Hipularion de l'intérêt, que la maxime qui fait retiJ[er au débiteur le droit de faire interroger le créancier fur faits &
articles, ou d'être admis à prouver par témoins que les intérçts ont é~é ablatés ou payés. Car ces regles fuppo[ent que
les intérêts [ont indus, mais que tout genre de preuve n'eH;
pas admiffible pour en conil:ater le paiement.
Dans les aflàires de cpmmerce, l'intérêt ell permis par
les Loix; dans les affaires civiles, il eH prohibé. Il efl; permis dans le commerce, parce qu'on ne peut naturellement
y connaître les rentes çonllitllées, qui [ont incompatibles avec les opérations infl:antes du Négociant, & parce
que l'argent y dl: marchanetj[e. Il ell prohibé dans les af.;
faires civiles, parce que dans l'ordre commun de la fociété, où les emprul)ts font [auvent faits pour des cau[es
rien moins que lucratives, & où il feroit li facile d'opprimer le cultivateur, le pauvre, l'homme' de· famille dé-.
rangé, on doit en bonne police ne pas autorifer des inffitutions dont i1 [eroit trop facile d'abu[er. Si la fl:ipula~iou
de l'intérêt eH défendue dans· les affaires ordinaires, l'anatoc;ifme ou fintérêt de l'intérêt ea' défeddu 2 même dans
�n PRO VEN C H.
559
les aifaires de commerce. Les Négocians, Marchands & aucun
autre ( porte l'art. 2. du tit. 6 de l'Edit de 1673) ne pourront
prendre l'intérêt de l'intérét, fous quelque prétexte que ce [oit.
L'art. 1 du même titre défend aux Négocians, Marchands
& à tous autres de comprendre l'intérê avec le principal. '
Ici toutes les pieces qui ont été communiquées, prouvent chacune en particulier que le contrat ell: ufuraire. Leur
enfemble forme une démonUration complet te , car elles font
toures concordanres; elles font toutes relatives les unes aux
autres; elles fe foutiennent & fe prêtent une force mutuelle;
les billets, les notes du Commis, celles du maître, le compte
courant, font des titres qui fe réferenr les uns aux autres,
& qui s'uniifent pour prouver les mêmes faits d'ufure. Si le
contrat "eU ufuraire, il faut le caifer en entier. On a beau
dire qu'il n'eU que réduél:ible jufqu'à la valeur des fommes
légitimé ment dues. Cette objeél:ion n'dl pas conforme aux
principes. Les Loix qui prohibent l'ufure, prohibent néceffairement tout contrat ufuraire, & dans les Loix prohibitives, la nullité efl: fuppléée de droit: les Loix fonr plus
que d'annuller les contrats ufuraires; elles prononcent la
confifcation des fommes principales en faveur du Fife, &
elles ordonnent des peines féveres contre le créancier convaincu d'ufure; en un mot, les contrats ufuraires font fi
bien nuls, qu'on n'a be[oin ni de lettres de refcifion, ni
d'autres formalités femblables pour les faire refcinder. Le
contrat efl:· donc nul, par cela feul qu'il efl: ufuraire; la matiere du comrat efl: au"t>re chofe, elle efl: fimplement réductible, parce qu'il faut toujours que le débiteur paye ce qui
efi légitimément dû.
On ajoutoit qu'en fait' d'ufure, l'exécution ne rend pas
non recevable; tous les jours, après avoir payé des inrérêts indus, on eU reçu à. les imputer au principal. On trouve
clans Louet & Brodeau des Arrêts précis qui imputenr au
principal des intérêrs illicites' adjugés" par une Semence
rendue ex confenft. Les acquiefcemens ne fauroient COU~I
DU
-
PAL AIS
D
�)60
Jou
RNA L
vrir un vice qui ne peut être mJtiere à convention licite;
parce que le corifentement ell: infruaueux, là où il ne peut
être légitimémenr donné. En fait, la Sentence n'a jamais
été exécutée, & les 4000 liv. dont la Sentence prononce
la condamnation n'ont jamais été payées. En effet, la Sentence a été rendue en 1764; à cerre époque la DUe. Therefe Ni'colas ne devait rien, elle n'a rien payé. Si en 1770
elle a payé en plufieurs fois la fomme de 40So liv., ce n'dt
point en force d'une S~ntence qu'elle ignorait, mais c'eft
en force du prêt de 700'1. liv. qu'elle avait réellement re~
ç.ues & qui éroient échues. Auffi l'Adverfaire lui-même dans
fan propre compte ne paffe point le paiement comme exécurion de la Sentence, mais comme exécution de l'engagement des parties.
On rép.ondoit que, les Auteurs ont raifonnê longuement
fur la, quell:ion de f,woir {i les ll:ipulations ufuraires annul~,
loient le titre, ou s'il n'y avait que les Hipulations ellesmêmes qui refraKent fans effet. Il n'en dl: pas un qui ait
penfé que la fiipulation ufuraire annullât le titre; & voilà
pourquoi ils laiKent fubfifl:er l'hypotheque du contrat..
La Loi pecunÏte fune.hris 9, Jf.de ujil1'is, décide que celui
qui promet un in.térêt double, s'il ne rend pas le principal
au terme convenu, n'efi point obligé pour ce qui excede letaux ordinaire· de l'intérêt, mais qU.e· le contrat fubfifie pOUl'
le principal & l'intérêt légitime: pecUlzia: funehris intra diem
certum dehùo nOIl fnluto, dupli /lipulatum, in altero tanto,
fupra ,modum legitimœ ujim1!, re[pondi non tenere: quare pro
modo cujl/.fèum~ue remporis, [upedluo, ,dlWa8o flijJul4ti.o vires
hahehit.
La Loi ufùras 2a eod. dédàe auffi que ql1and l'es intérêts illégitimes fone ablatés avec le principal} les intérêtS
font déduits, & l'obligati.on principale fubfiHe.:. ufuras illiettas [alti mixtas, ipfas tantum nOIl de ae co,iflat, cœterum
[arienl non vitiare. La Lo.i placuit '1.9 dv même tiue décide
égdlemenr que foit que l'on ait promis des in'érêts au deffus
du (au<'l o;:din,\ire" foit 'lue l'QQ iè [Q' ( [ouru.i.s à.parer J'intérêt
g.~
�DU
PAL AIS
DE
PRO V:l N C H.
56 t
de l'intérêt, on n'efi déchargé que de ce qui excede le taux
ordinaire, & que l'obligation fubfifie pour le principal &
l'imérêt approuvé.
Les décifions du Code font conformes à celles du Digefie.
Suivant la Loi pro mutuâ 8, cod. fi cert. petat., quand on a
promis un intérêt illégitime, on ne peut pas s'en faire un
titre pour conteaer l'obligation, quant au principal & aux
intérêts ordinaires. La Loi cum allegas, cod. de ufuris, décide que le contrat ne peut valoir pour rout ce qui excede
l'intérêt légitime. La Loi eos 26, §. l , cod. eod., qui fixe
le taux de l'imérêt, dit que fi quelqu'un s'avife de fiipuler
un intérêt plus fort, il n'aura point d'aB:ion pour ce qui
excédera l'intérêt légitime: fi quis autem ali'luid contra modum hujus fecerit conJlitutionis, nulLam penitùs de fupetjlua
haheat ac7ionem.
Il eH donc vrai que fuivant le Droit Romain, le contrat
ufuraire n'ea point nul, qu'il fert de titre pour le principal,
J'intérêt légitime & l'h} potheque, & qu'il eH feulement réduB:ible pour [Out ce qui ea intérêt illicite. La Déclaration
de Philippe-le-Bel du 8 Décembre .1312, l'Ordonnance de
1339, celle de 1)l0, l'Edit du mois d'Août 1576, l'Ordonnance de Blois, art. 202., l'Edit du mois de Juillet 1605,
celui du mois de Mars 1634, celui du mois de Novembre
166S, celui du commerce de 1673, celui de 1679, celui
du mois de Juin 1725, qui remit la confiirution de rente
au denier vingt, celui du mois de Juin 1766, qui réduifit
la conaitution de reme au denier ving-cinq, celui du mois
de Février 1770, qui fit remonter la confiitution de rente
au denier vingt, prohibent toute forte d'ufures commifes ou
par fiipulation d'intérêts pour prêts 11 jour, ou par Hipulation
d'intérêts des intérêts, cu par Hipulation d'intérêts excédans
le taux du Prince. Ils les prohibent fous les peines les 'plus
graves, tant con~re celui qui les fiipule, que COOlre les Notaires.
Défendons, porte l'art. 2 de l'Edit du mois de Juin 1766.,
très-expreJJèment à tous Notaires, Tahellions IS' autres perfonnes
,Annùs l78z & Z782.
Bbbb
�~62
Jou
RNA L
pr,61il{cùei, ayant droit de paJfer t;. recevoir du ac?es & con~
trlOts, d':en pajJèr Li l'avenir aucuns portant intùêts fur un pied
plus fort 'lue le denier vingt-cinq, Li peine de privation de
leurs officeS, d'être le[dites ac?es & contrats déclarés 4ùraires
& d'être procédé extraordinairement contre les prêteurs. Dé.darons nulles, porte l'art. 3, &. de nul e.!fet lespromeJfes qui pour~
roient être ci-après paffies fous jignature privée, avec un intérêt plus fort que le denier vingt-cinq.
I! eCl: donc vrai que le Droit Fran~ois n'an nulle pas les
contrats ufuraires, & qu'il les laiffe fubfiller pour le principal & les -intérêts légjtimes. La Jurifprudence des Arrêts
ne les annulle pas non plus; elles les réduit feulement ad
legitimum .fTwdum. (Journal des Audiences, tom. l , IiI'. S,
111lap, 38 ; Bouvar, tom. 2., verb. rentes, quefl:. 6; Bouchel,
verb. ufùres; La Rocheflavin, IiI'. S, tit. S, Arrêt 9; Dufail,
IiI'. l , chap. 39 l ; Baffet, tom. l , IiI'. 6, tit. 14-, chap.
10; Pap.on, IiI'. 12., tit. 7, n. 30; La Peirere, lett. J, n. 7;
Graverol fur la Rocheflavin, IiI'. S, tir. S, Arrêt 1. ) Le
Parlement de Pr.ovence n'a jamais caffé un ccintrat ufuraire ,
& lorfqu'il a eu occafion de prononcer fur de pareils contrats, il n'a réprimé que les ll:ipulations qui les rendaient
ufuraires. Arrêt du 7 Mai 1619, rapporté dans les notes
mifes au bas de l'aéte de notoriété n. 2.
II s'eCl: élevé une difficulté entre les Auteurs, fur le point
de favoir fi un contrat de conftirution de rente qui.renfe.!'
moit des ll:ipulations uIur'bires, ou qui éJo.ir compofé d'intérêts ufuraires, ou. qui était compofé d'intérêts accumulés
avec le principal, était nul quant à la conllimcion en foi:
tons conv.iennent que 'l'aélie- & l"hypot11eque fub-filtent pour.
la fomme p,rincipale> Demonlin', 'de' u[uris" quell:. l S , &J desi
ufùres ,. o. 99. &. 180: .Qùehques!.uns on! penfé que la. confritmion étoië nelle e,ril fui; .qlaidlœ n'1<\toi!J _pas pU! puoùuire
des intérêts, & q,ue ceUJe qllÎ.. avo-ien.t 6é:.pnyés écoient imputables .au principal. Mais le plus grand nombre penfe que.
la conil:itutioiJ. de renne' fubfifle ju/gues an com:urrent des
intérêts légitimes;. qu~elJe. ef!:' feul'ernent réd1.ljte- pOUl' 1'ave·,
�DU
PAL AIS
DE
PRO VEN C E.
563
nir, & qu'on n'impure au principal que les intérêts excefiifs
qui ont été payés jufques au moment de la réduél:ion. De
ce nombre font Brodeau fur l'arr. 94 de la Cotltume de
Paris, n. 5; Mornac ad leg. 9, if. de ufuris; La Lande fur
l'arr. 191 de la Coutume d'Orleans; d'Argentré fur la Coutume de Bretagne, arr. 266, cap. 6, n. 26, cap. 7, n. 8
& 9; Ferrieres, Diaionnaire de Droit, au mot intérêt" pag.
77, col. 1 in fine.
'
L'aél:e efi querellé d'ufure avec le fecours de quelques
pieces qui réduifent le principal d'un côté à 7°02, liv., &
de l'autre à 12656 liv.; cet ai:1:e fubflfteroit donc à titre
d'obligation principale de 196.,8 liv. Il eH donc vrai de dire,
même dans le fyfl:ême de Me. Crefp, que le fleur Jouve
auroit pu demander en 1764, 4000 liv. à compre de cerre .fomme; que cette Sentence auroir pU,lui a .jug~r cetre fomme avec intérêts pour les caufes réfuhanres dt' Faél:e de"
de 1759; que cette Sentence feroit juGe & irréformable;:
que Me. Crefp feroit fans intérêt à en appe-Iler,' parce q\l'il
dt débiteur d'une plus forre fomm~; que ce ·te Sentence
ayant éré exécutée par le paiement de 4°')0 liv. que. les
DUes. Nicolas ont fair, aurait -acquis l'aurorité de la' chore
.
Jugee.
.
L'appel de "la Sentence a poM l:iafe la :double lifûre que'
Me. Crefp fuppofe dans l'aél:e ; elle doit être' prouvée avant
d'être propofée comre un aél:e public. Il fe prévaut d~"bord
de ce qu'il ell: à préfumer que les, 30000 liv. font compofées
de 10000 liv. d'intérêts, attendu que la fomme n'efl: payable que dans dix ans. Il femble qu'il aurait dû' favoir-qu'ullepréfomption de cette efpece n'était pas même capable d'crpérer le lI]oindre elFet contre un aél:e public; qu'elle avait'
toujours 'été rejerrée par la Cour, dont la Jurifp-rudence
conllante difpenfe le créancier d'exhiber [es livres, de fe'
purger par ferment comme il n'y a point d'intérêrs inglobés dans l'obligation, & le met à l'abri' de toute' preuve'
par témoins, quelle que foit la vraifemblance contraire, comme lorfque le débiteur promet. de payer 1'0')0 liv. dans Ull
Bbbb 2.
.
�564
Jou RNA L
an. (Mr. de Montvalon, Précis des OrdonnanceS, aux notés
verb. ufure; Boniface, tom. 2, liv. 4, tit. 4, chap. 3 , tom. 4,
liv. 8, tit. 23, chap. 6; La Touloubre Iur l'aae de notoriété,
n. 2.)
Tout ce que Me. Crefp a dit en fe fondant fur cette
préfomption, n'eŒ qu'une inutilité; il a communiqué enfuite quatre billets, une note prétendue écrite de la main
du fieur Jouve, quoique non lignée, & qu'il dit avoir été
remife aux- Dlles. Nicolas le jour de l'aae; une note en
forme de campee, prétendue écrite de la main du Commis du lieur Jouve, non lignée; enfin un extrait du compte
courant du lieur Jouve, duement affirmé par Mre. Barre,
fon exécuteur tellamentaire & adminillrateur de la perfonne
& -biens de fes héritiers. Il rérulte des billets, que les DlIes.
Nicolas devaient folidairement- au lieur Jouve, à l'époque
du contrat, 7002 liv. & qu'ils ont été compris dans la
fomme de 30000 liv. Il paraît réfulter des deux notes,
1°. que l'aae de I7S9 eil: comparé de 10000 liv. d'inrérêts; 2.°. que les 7000 liv. dues par les billets ci-deIrus
ont été comprifes dans le même aae pour 7343 liv. attendu les intérêts échus; 3°. que la dette de la DlIe~ AnneMarguerite Nicolas a été paIrée pour l'l.6S6 liv. y compris
le folde d'un compte précédent de SIal liv. C'eil: fur le
témoignage de ces chiffons que Me. Crefp croit prouver
que le principal du contrat n'ea que de 20000 liv., &
que ce principal ea même compofé d'autres intérêts échus.
Toutes ces pieces non lignées par le lieur Jouve ne
peuvent détruire la fo~ due au contrat. Il y a un premier
Arrêt du 12 Février 1629, rapporté dans les notes de Me.
Gueiroard, qui refufa au débiteur l'imputation des intérêts
payés précédemment, quôiqu'il .repréfentât la quittance des
_trois dernieres annuités. Il y en a un fecond de 28 oaobre 1729, rapporté dans les mêmes notes, qui refufa la
mê,ne imputation à un autre débiteur, quoiqu'il repréfenrât
également les quittances des dernieres années. Il y en a
trois dans Boniface, rom. 2., liv. 4? tir. 4, chap. 3, & tom.
�DU
PALAIS
nll
PROVENCl!.
,6)'
4, ·Iiv. 8, tÎt. 23, chap. 6, qui ont refufé la m~me impu.
tation à des débiteurs, quoiqu'ils repréfentaffent des letrres
dans lefquelles leurs créanciers demandoient le paiement
des dernieres annuités. Or, fi dans ces divers cas où il ne
s'agiffoit pas d~intérêts ablorés dans l'obligation, & où conféquemment les ,débiteurs n'éraient pas gênés pat la foi due
à un aél:e public, la Cour n'a fait aucun cas des induél:ions
preffantes qui forraient de ces quittances & lettres ·écrites
& lignées par les créanciers, Me. Crefp peut-il préfenter des
chijfons qui ne {ont ni écrits, ni lignés par le fleur Jouve,
comme une preuve contraire de ce qui eil: contenu dans un
aél:e public?
Me. Crefp ne peut également {e fervir du compte courant
du lieur Jouve, à lui remis par le tuteur, parce que, 1°. il ne
pouvoit le forcer à lui donner un extrait de ce courant pour
y puifer la preuve de l'ablotation faite des intérêts de dix
ans avec le principal de 20000 liv. 2°. Parce que le livre où
le pere de famille écrit tout ce qu'il veut & tout ce qui lui
plaît n'eil: pas {uffifant pour l'emporter fur un aél:e public,
où lui, l'autre partie conrraél:ante, le Notaire & les témoins
ont déclaré le contraire: ce pere de fam ille mérite-t-i1 donc
plus de foi lorfqu'il écrit {eul dans le fecret de fa maifon,
que lorfqu'il contraél:e en public? Sa déclaration privée eil:elle plus authentique que celle qu'il a faite dans un aél:e ?
Un {eul homme peut-il en démentir tant d'autres? Ce livre
dt vis·à-vis du tiers, pour celui qui le tient, le dépolitaire
d'un {ecret, ou un confident qui ne peut être con{ulté & interrogé que par celui qui y a tracé fes opérations vraies ou
fimulées -; il ne connoît que la voix de {on auteur, à qui
il rappelle tout; il ne répond qu'à lui ; il eil: {celIé & .muet
pour tout autre. Il eil: donc contre toute raifon , COtHre
toute bienféance, contre toute honnêteté, ·que Me. Crefp ait
voulu pouvoir profiter de la bonne foi d'un tuteur qui lui
a confié le {ecret de ce livre. C'eil: d'après ces principes que
la Cour a t.oujours rejerré avec indignation les demandes
en exhibition des livres du créancier, formées par des dé.
�Jou
566
RNA L
biceu~s
qui fe plaignoient ou de s'être obligés pour des intérêts- illicites, ou de les avoir payés. Elle a toujours penfé
que le fecretde tout homme étoit impénétrable, & qu'il
ne po.ulo'oit pas être permis d'épier dans une maifon ce que
le maître y fait ou y a fait en s'y croyant feul, 'ou y lire
-_
ce qu'il n'y a écrit que pour lui.
En fuppofanc que les pieces produites par Me. Crefp fuf.
fene légales & formaffent une preuve, l'intérêt du prêt à jour
au taux du Prince dl-il ufuraire entre le Négociant qui prête
& le Particulier qui emprunte? N'dl-il pas re~u dans les
Places de commerce & dans tous les Tribunaux que le
Négociant qui prête à un autre Négociant, que l'afIocié
qui verfe ~es fonds dans une fociété plus que. fes coaffociés, fiipule & per~oit légitimémenc les intérêt' de fes deniers? Il Y a déja long-temps que l'intérêt du prêt à jour
au taux du Prince ell déclaré licite entre Négocians. Philippe VI. par fon Ordonnance de 1349, article 19, -le fuppofe çel entre Marchands fréquentant les foires' de Brie &
de Champagne. Lorfque les foires de Brie & de Champagne furent transférées à Lyon, qui devint alors le centre du
commerce, l'exception déja faite pour les Commer~ans qui
~réquentoient auparavant les foires de Brie & de Champagne fut étendue par Louis XI. en 1442. aux Négocians
&. Marchands de Lyon, & à taus ceux qui en fréquenteraient
les foires. II leur fut même permis d'abloter les intérêts
dans les obligations. privées de commerce.
Ce priv.ilege étant accordé au commerce plutôt qu'au pays
'& aux perfonnes, devint commun à tous les vrais Marchands
&. Négocians du Royaume, qui en jouirent publiquement
fous la taléranc.e des Souverains & l'amorifation des TriQunaux; parce que le même motif qui avoit .fair accorder ce
privilege aux Négocians fréquentant les foires. de Brie.& de
aux Négocians de Lyon, de même qu'à ceux
Champagne
qui en fréquentaient les foires, fubfifioit en fa,veur de toUS
1.es vrais Négocians & Marchands du Royaume.- Le préjl]gé
~riompha eq 1').7'). H.enri
prohiba tout prêt à intérêt,
«
m.
�DU
,PALAIS
DE
PROVENCE.
5157
rn~mé fous prérexre de commerce ( arr: 202. de l'Ordonnance
de Blois. ) Mais la dlle de Lyon réclama, fans doure pOUf
le bien du commerce, contre cette loi; & par deux Edirs de
1')80 & 1)8 1, le même Prince rérablit les chofes dans leur
premier érat, & par-là tous les Négocians & -Marchands du
Royaume rentrerent dans leur droit de Hipuler légitimément
l'intérêt entr'eux. Louis XIU en 1634 & Louis XIV en 166'),
renouvellerent les Ordonnances de Philippe VI & de Louis
XI. Le privilege des Lyollllois & de ceux qui en,fréquentaient les foires, étant aioli confirmé de nouveau, tous les
Négocians du Royaume continuerent d'y parriciper.
L'Edit du Commerce [urvint enfnire en 1673. Il ne renferme aucune difpolirion prohibitive de l'intérêt du prêt à: jour
entre Négocians. Il le fuppofe au contraire licite, en défendant feulement, tir. 6, art. l ,aux Négocians de le comprendre avec le principal dans les lettres ou billets de change ou
aucun autre aae. Le but du Légiilateur, fuiva'nt Savary. dans
fon Parfait Négociant, parr. l , liv'·3' chap. I I , a été 'feu..
lement d'empêcher que les Négocians ne rel'Ïrafferrr,. enfoité
de la condamnation, les inrérêts des. intérêts déja compris
dans le principal. On voit en eff~t que l'art. 2 du.même tirré
prohibe aux Négocians & 'Ma~chands de prendre l'inrérêE
de l'i'nrérêr" Enfin, un nouvel ~dit de 1679 confirma eIl"
core Je privil'ege des Négocians de Lyon, & de ceux qui fré..
quentoient les foires; & depuis' lors touS les Commèr~ans
& Marcnands fiipulenr l'intérêt entr'emt au taux du L'rince,
& le comprennen.r même dans leurs obligations de commerce
'au vu & fu des Souverains & des Tribunaux. Il fut même
rendu en Sep.tembre même année· une Déclaration qui, ell
fixan,r l'intérêt de J'argent au 18, excepta les Marchands "
auxquels elle permit de prendre J'intérêt au de'llie-r 12. Il
cfi donc vrai- qu'on a reconnu de tous les temps que le prêt à
jour avec ÏLltérêns étoit licite enrre Négocians & Affociés.
DU! moins' dl-il vrai que le prêt à jour avec int·érêts a été
expreiférnent pe'rOlis au·x Négocians de Lyon, & à ceUle" qLll
fréquemoienE les foires, & que ce privilege e'ft devenu tom,
�'5'68
Jou
RNA L
mun ~ tous les Négocians & Marchands du Royaume. C'eO:
ce qu'attellent Savary dans (on Parfait Négociant, parr. l ,
liv. 3' chapitre I l , & Boniface, corn. 4, liv. 8, tit. 1,0,
chap. la.
Me. Cre(p ell préci(ément dans le cas de (ubir l'application des maxime~ conHantes du Palais quë Boniface attefte.
0
10. Parce que le fieur Jouve aurait prêté à (a (ociété. 2 •
Parce que la Dlle. Anne-Marguerite Nicolas auroit diverti
,à (on u(age particulier les fonds prêtés à la (ociété, pui(qu'ils
n'auraient plus éré exillans à l'époque où elle s'obligea par
contrat pour ne payer que dans dix ans. L'Evangile même
reconnaît que les Négocians peuvent retirer l'intérêt de leurs
deniers, pui(qu'il maudit le Serviteur qui avait enfoui (on talent au lieu de le remettre à un Négociant pour le faire valoir & en retirer en[uite lui-même l'intérêr pour en faire
compte au Maître. ( St. Marhieu, chap. 2S, verl: 27. ) Le
Droit Canon ordonne que la dot d'une femme (éparée de
fan mari (oit placée (ur un Marchand pour qu'il la falfe valoir, & que la femme en retire l'intérêt, cap. per vejlTas
extra de donat. inter ViT. & uxor. Notre Juri(prudence con(tante (uit la di(pofition du Droit Canon, quand la dor de
la femme ell en deniers. (Arrêt de Réglement du 30 0&0bre 1614, rapporté dans Boniface, tom 'h Iîv. 6, tir. IO),
& même pOlir le placement des deniers pupillaires, ( Dupeperiet, Maximes de droit, pag. 394; Decormis , tom. 2, col.
1326); enfin, pour le placement des fonds d'un bénéfice.
(Mourgues, pag. 440.) Tout cela (uppo(e que les N égocians peuvent retirer en coute (ureté de confcience, dans
le commerce, les intérêts de leurs deniers, quoique prêtés
à terme; c'eU ainfi que l'atrelle Henris, tom. 2., Iîv. 4, ch.
6, quo 90, pag. 843.
Il y a, (ur la légitimité & l'illégitimité des intérêts du
prêt à jour, une contrariété d'opinions qui doit [urprendre ,
, eu égard à ce que la vérité qui eU toujours d'accord avec
elle-même, ne peut pas admettre des conflits entre les
.devoirs & les intérêts de la (aciéré en général. On voit' d'un,
cQte
.
�D U
P li LAI S
D E
PRO VEN C E.
569
côté les Théologiens, échos les lins des autres, qui affirment que la ftipalation des intérêts du prêt à jour e!l: eCfentiellement contraire 'Ill droit naturel, pofitif, divin, canonique & civil: (la Morale de Grenoble, le CatéchiCme
de Monrpellier, les Conférl'nces de Paris, Benoît XIV &
autres.) On voit de l'autre les plus grands génies, Grotius,
Puffendorff, DUlTIoulin, Soumaife, Bacon, Monrefquieu,
Fermey, l'Abbé de Condilldc, Turgot dans fes Réflexions
fur la formation & la difrribution des richeffes, §. 7 h pag.
117, Mr. Lebret, Bretonnier fur Henris, tom. 2, liv. 4,
chap. 6, que!l. 49, & tant d'autres qui s'élevent contre
cerre opinion, & la frondent comme une erreur q~i n'eil:
pas même excufable. On voit des Théologit:ns & des
Doél:eurs de Sorbonne, l'Abbé Mignet, qui prouvent de la
.maniere la plus démonHrative que leurs confreres ont outré les chofes, & que l'intérêt du prêt à jélur l1'eft blâmable que lorfqu'il dl: exigé du pauvre qui a droie à notrt<
charité.
Cerre contrariété d'opinions invite à re~)onter jufques
a.u principe. On'y découvre que les Théologiens ont converti en principe de morale, une ancienne erreur d'Ariftote,
qui a été adoptée au treizieme fiecle dans les écoles, &
que cet événement a influé dans la Légifiation & dans la
Jurifprudence de plufieurs Tribunaux lùpérieurs. Ce Philofophe avoit dit dans fon Traité de Repu61icâ, lib. l , cap.
9 & 10, que la maniere de faire profiter l'argent, " qui con" fifre à faire courir & valoir fon argent, eil: juHement
" condamnée; car elle n'dl: pas cOnforme à la nature, &
" elle fait que l'un cherche à faire des profits fur l'autre.
" L'argent doit être laiffé à fa defrination, 'Ill lieu d'en re" retirer un gain. Il efl: deHiné feulement à fervir pour les
" échanges & achats, au liell que l'intérêt l'augmente &
" le multiplie. Dans la pratique de l'intérêt l'argent l'il: le
" fruit & la produél:ion de l'argent." AinG de toucesles manieres d'a<:quérir de l'argent, celle-ci eil: la plus contrair~
à la nature.
Almées l78z & l78z.
Ccce
�570
Jou
RNA L
Cette déci!ion plut aux ScholaHiques du temps où les
Œuvres de ce Philofophe parvinrent en occidelH. Ils voulurent l'adopter, & ce fut pOUl légitimer ceere adoption,
qu'ils ramafferenr dans l'Ecriture Sainte. cette fo,de de diCpolit ions qui prohibent l'ufure proprement dite, & mê(l1e le
prêt à jour avec intérêts envers celui qui a droit à notre
charité. Ils n'oublierent pas le mutuum date, nihil inde fperantes de l'Evangile qui n'écoit qu'un coofeil donné aux riches', de prêter même à ceux qui ne pourroient pas leur
rendre. (Janfenius in lucam , cap. 6, va. 3) ; Menoch , Tyrinus, Ell:ius, & Dumoulin, de ufuris, quelt. l , n. II.) Ils en
firent un précepte prohibitif, qu'ils expliquerenr d'une maniere contraire au fens de tout le Chapitre, en l'appliquant
au prêt à int·érêt. Satisfaits d'avoir pu établir l'opinion du
chef des Péripatéticiens fur l'Ecriture Sainte, ils foucinrenr
comme une véî'ité de' morale, que tout inrérêt de l'argent
dl: en foi chofe inique & crimil)elle, inféparable d'une malice & d'une inju!l:ice intrinfeque, & profcrite par le droit
naturel & le droit Divin. C'eft ainli qu'en amalgamant la
Religion avec les idées péripatéticiennes, on accommoda
l'Ecriture Sainte à l'erreur d'Ariftote, au lieu de modifier
cette erreur par les difpoutions de la Loi Divine. St. Thomas adopta l'opinion d'Ariftote, & tous les Scholaftiques
céderem devant un auffi grand Philofophe & un auffi grand
Doél:eur ; leur déférence en impofa aux Souverains, & leurs
ordonnances en impoferent aux. Tribunaux & aux Jurifconfuites.
Mais pouvoit-on le penfer ainli, dès qu'il n'y avoit aucun texte de la Loi Divine qui le prohibât, dès que ces
hommes illuftres ~ favans dont les décilions compofent le
Droit Romain, avoient autorifé l'inrérêt de l'argent, & que
ce Droit Romain rédigé dans un temps où le Chriftianjfme
étoit la feule Religion de l'Empire, renferme encore ces
décilions comme juftes & équitables? Auffi eft-il vrai que
l'erreur d'Ariftote n'a pas eu' un regne bien affuré. Elle a
été contredite dans chaque Hecle depuis fon établiffemenr,
�57 I
par des génies fupérieurs, & on voit que depuis l'année
1349 les Souverains y ont expreffément renoncé en faveur
des commerc;ans. Auffi dl-il vrai encore qu'en 1425 les
Papes permirent de faire produire de l'argent à l'argent par
la voie des °rentes volantes. Les Seaateurs d'AriHote firent
tous leurs efforts pour empêcher qu'on artentât à fa doarine.
Mais l'argent étant abfolumenr néceffaire dans la fociété,
& ne pouvant guere y être verfé qu'autant qu'il feroit fructueux, on imagina les rentes volantes, qui n'ont jamais ceffé
d'êrre en foi un argent produir par l'argenr, quoique le débireur ne puiffe pas êlre obligé à rendre le principal.
C'en pour tenir fans ceffe l'argent dans la roue du commerçe, que l'intérêt de prêt à JOUt eil autoriCé entre Négocians. On a reconnu que Cans intérêts il n'y avoit point de
prêt à jour, & que Cans prêt à jour l'argent reHoit enfoui;
que fans argent le commerce étoit impraricable; on a ouvert les yeux, & on a apperc;u l'erreur qui tenoit le commerce dans des entraves inrolérables. On y a renoncé, après
avoir bien fenti que l'argent étant utile comme toure autre
chofe à celui qui le loue, il étoit tout {impie qu'il pllt
produire un loyer comme toute aurre chaCe quelconque. (Dumoulin, des ufùres, n. 25'i ; Henris, tom. 2, liv. 4, chap.
6, queH. 110 ; Serres, inflit. pag. 438; l'ECprit des Loix
liv. 21. , chap. 19,)
Quoiqu'il exiHe deux anciennes Ordonnances de 13 l 2
& l 579, qui prohibent tout intérêt de l'argent comme
étant par Dieu & par les Saints Peres défendu, eH-il moins
vrai qu'en Alface il eH autoriCé? (Henris, tom. 4, pag.85')
En Lorraine on Hipule publiquement l'intérêt du prêt à jour,
même dans de limples billets. (Répertnire raifonné de
JuriCprudence, tom. 5, au mot hille!, pag. In.) Dans
tout le reffort du Parlement de Grenoble, fuivant Baffet
tom. l, liv. 6, tir. 14-, chap. 4; Chorier fur Guipape, fea. 7,
arr. l , pag. 246, & fea. 8, art. 1 l , pag. 273, & Expilly,
chap. 85; & dans le Reffort du Parlement de Pau, (Catelan,
tom. ;2., Jiv. 5, chap. l J.) Dans les Parlemeos du Lan;
.
Ccee.2,
DU
o
PALAIS
DI!
PROVENCE.
�,72.
Jou RNA L
gue'doc & de Bordeaux, les intérêts du prêt à jour qui ont
été volontairement payés après avoir été Hipulés, &
ceux 'même qui ont été feulement liquidés encre le créancier & le débiteur, enfuite de la Hipu!ation déja faite, font
cenfés légitimement acquis au créancier, & peuvent être
demandés en Jufl:ice. (D'Olive, liv. 4, chap. 19; Cambolas,
liv. l , chap. 40; Lapeirere, lerr. J, n. 45; Serres, inJlir. pag.
439· )
Arrêt du 8 Juillet 1782., au rapport de Mr. le Confeiller
de La Boulie, qui confirme la Senrence quant à l'adjudication des 4000 liv., & la réforme ,quant à l'adjudication des
intérêts, attendu que ces 4000 liv. prccédoient des intérêrs
(les 2.0000 liv. formant le principal du contrat; les Parties
furent condamnées aux dépens les concernant. Ecrivant Mes.
Roux & Portalis.
La Cour jugea uniquement que le Négociant peut prêter
à jour & avec intérêt à un Bourgeois, & que conféquemment l'aél:e du 3[ Décembre 1719 n'érait pas ufuraire. Cela
une fois jugé, il auroit éré inutile de s'arrêter à décider fi
le contrat ufuraire efl: nul, ou feulement réduébble•
.1+..... +
ARRÊT
fi
LI!'r.
•
lmpofitioll de cillq pour cent fur te pain qui ferait cuit &
cOllfommé dalls le lieu & terroir de Valauris, confirmée.
L
A Communauté ae Valauris délibéra dans un Confeil
général; enfuite de la permiffion de lâ Cour des Aides,
d'établir une impofi.tion de cinq pour cent fur tour le pain
qui feroit cuit & confommé dans le lieu & fon terroir. La
délibération fut homologuée par. Arrêt du 2.6 Juillet 1782.,
& le bail de cerre ferme. fut paffé à divers particuliers qui
commencerent ~ percevoin l'imp:ofi.tioll. Me: Jean<BapriHe
Peilhon & conforts, & l'Econome du Monaftere ide Lerins,
�_
D U PAL Ars n Il PR.O V Il ri' c F;
~73
fe pourvurent en caffation de la délibération, & en révocation de l'Arrêt qui l'homologuoit.
On difoit pour eux que l'impofition étoit inégalè, inutile, _
infolite, exceffive, illégale & attentatoire. Elle étoit inégale,
parce qu'elle portait plus fur une claire de citoyens que fur
une aurre. Valauris étant compofé de trois claffes d'habitans ,
de gros tenanciers, de particuliers peu riches en biens-fonds,
& de pauvres, clajJè la plus favorable, l'impofition eO: beaucoup plus accablante pour la premiere & troifieme claffe ,
que pour les citoyens qui compofent la feconde. En effet, le
pain étant un objet de pl'emiere néceffité, le feul aliment,
pour ainfi dire, du pauvre journalier qui ne gagne que pour
fa fubfi!tance, il proportionne le prix de fon travail à la plus
ou moins grande cherté du pain. L'impofition fait donc augmenter le prix de la main d'œuvre, & le gros tenancier
qui eO: celui qui emploie plus de bras, eH auffi celui qui fe
reffent le plus de la furcharge.
L'impofition était inutile : la Communauté n'avoit pas
befoin d'impofer pour la pourfuite du procès en rachat; près
d'une année enriere s'écoùlera avant qu'il puiffe être jugé;
d'ailleurs, elle devoit avoir en caiffe de quoi y fournir, elle
avoit déja impofé pour cet objet. Elle éroit exceffive : le piquet de la ville de Graffe, qui eO: l'habitation la plus confidérable de la contrée, eO: de trois livres;. celle de Valauris
eH au même eaux, & on y joint encore une Impofition de
40 fols; la charge de farine payera donc cent fols. N'eHce pas une horreur de voir le pain auffi cher, & même
plus cher dans un petit lieu tel que Valauris, qu'il ne l'ell:
à Aix dans la Capitale de la Province? L'impofition était
d'ailleurs illégale: elle préfentoit un double impôt fur la même
denrée; gémination d'impofition profcrite par plufieurs Arrêts, par la faine morale, & par route adminiO:ration bien
ordonnée. Pareille impofition répugne tellement à un bon
régime, qu'elle' ell: inconnue dans toute la Province. L'Econome du Monafiere de Lerins, en qualité de Seigneur du
lieu, ajoutoi,t que cett~ impofition étoit attentatoire, parce-
�"<
S7'l- Jou RNA L
qu'elle nuiroit à res droits, en érabliffant un préporé d'ans
les fours, & la Communauté n'en avoir pas le pOJvoir.
On répondoit pour la Communauté, que l'impolitio n
n'éroit point inégale, parce que rous y étoient foumis & la
payoient également; parce que le Statut porre, qu'il ell: permis d'imporer rur le pain, chair, &c., & que puifgu'il eft
permis d'augmenter une impolition déja établie, ill'el1: au/Ii
d'en établir une nouvelle; d'ailleurs le piquet eH détruit,
parce qu'il étoit onéreux & d'une perception cOlueure; ainli
plus de gémination d'impolitioll. Elle n'eH point inutile,
puirqu'elle rerr à payer les arrérages dus au Receveur de la
Viguerie; elle n'ell: point exceffive, parce que le produit en
ell: petit; que d'ailleurs elle eft prelque toute fupportée par
les étrangers qui abordent à Val au ris , & elle n'eft que pOllr
un .an; elle n'eft point infolite, pu ifqu'elle eH connue à
Antibes & à Vence. Le vice d'attentat qu'on lui reproche
dt faux, puifque la délibération ne porre point l'établiifement d'un prépofé dans les fours; d'ailleurs la Communauté auroit droit de l'y établir, puifqu'elle eH porrionnaire
de la bannalité.
Mr. l'Avocat-Général de Remufat obferva que dans un
pays fiérile, où la nature avare n'accorde qu'au travail in:
fatigable les richeffes qu'elle prodigue ailleurs avec tant de
générolité, où le commerce & l'induftrie fuppléent aux reffources que la terre ne peur Sournir & fonr tout le bienêtre des habitans, on ne peur établir loures les impolitions
fur les propriétés foncieres; ce ferait charger l'indulhie,
écrafer le culrivareur; il faur lai{fer à des habitans li mal,.
.traités par la nature, le droit de faire partager au commerce.,
au luxe & à J'aiGince, les charges que l'Agriculture feule ne
fauroit fourenir. C'el1: delà qu'eH venue cette précieu(e conftitution de nos Communautés, qui leur donne l'avantage
d'établir les impolitions à leur choix fur les fonds ou fur
d'autres objets, pour le loulagement des fonds. Conl1:itutian indiquée par la nature même, reconnue par nos anciens
~ouveraijJs, ,onlignée dans nos Statuts, confirmée par des
�DU
PAtAIS
DE
PROVENCE.
S7S
Déclarations de nos Rois, fourenue avec fuccès par tous les
Corps de la Province dans toutes les occalions, & coùfJcrée
comme Loi dans une infinité de circonf!:ances par les Arrêts
de la Cour.
Rien de plus clair que le droit des Communautés de Provence; elles ont le choix de leurs impotitions; mais quoique libres, elles n'en doivent pas moins fuivre les loix, quant
à l'affierre d~s impotiticins; elles ne doivent jamais être oppofées à l'intérêt des habitans, aux maximes du droit public. ~
La premiere qualité dans les impoGtions, c'ef!: l'égalité:
mais quelle eH cette égalité? On en trouve de deux genres
en fait d'impolitions; égalité par rapport aux divers' impôts
fubtiilans, & égalité entre les divers contribuables. L'égalité plr rapport aux divers impôts fubfif!:ans, eH celle qui
établit une proportion, linon exaél:e, du-moins fage & raifonnable entre un impôt parriculier & tous ceux qui fubIlHent déja; cerre égalité ell prefcrite par les Arrêts de la
Cou', Les Communautés de Sallonet & de Saint-Maximin,
pour foulager les fonds, prirent des Délibérations par lefquelles elles avoient doublé les droits fur le piquer. La balance ne fe rrouvant plus entre les tailles & les rêves, la
Cour calfa ces Délibérations, parce que, quoique les Communautés aient le droit de choiGr à leur gré le genre d'impolition qui convient le pltlS à leur état politique, elles ne
doivent cependant jamais fe trop écarter du principe fondamental en Provence, que les tailles y foot réelles & prédia les. L'établilfemenr des rêves n'eil pas pour'remplacer
ahfolument les tailles, mais pour aider à les fupporter ; cette'
égalité fe rrouve dans la caufe préfenrf'.
Quant à la feconde efpece d'inégalité, c'eG-à-dire à celle
qui exifl:eroit outre les divers contribuables, qui peferoiruniquement fur une c1alfe parriculiere de citoyens pour foulager
roures les autres, nul doute qu'elle ne foit profcrire par les
Loix, comme contraires aux juf!:es regles de proportion que
l'on doit fuivre dans l'affierre des impofitions publiques. Vile
Communauté, par exemple, impofera fur les olives i il Y
�S76
1 a U .Jt N A L
aura très-peu d'oliviers dans fon terroir, qui feront tous poffédés par trois ou quatre tenanciers; cette impofition fera
conrraire à l'égalité enrre les conrribuables, l'impôt ne fera
payé que par ces trois ou quatre tenanciers; il Y aura inégalité, & l'impofition fera dans le cas d'être caffée. Mais ce
genre d'inégalité ne fe vérifie pas dans l'impofition préfenre,
puifqu'elle porte fur raus les cirayens.
Dira-t-on qu'elle efi: inégale, parce que certains citoyens
confomment plus & d'autres moins? mais cet inconvénient
efi: inrrinfeque à la nature même des chofes. Dans l'ordre
de la nature, comme dans celui de la fociété, le bien eH:
toujours fuivi de quelque mal; il efi impoffible de trouver
cerre perfeél:ion, dont il n'ell point d'exemples dans les infriturions humaines. Que faut-il alors? Il faut refpeél:er les
Loix qui fonr de grands biens & de petits maux, qui pré~
parent le bonheur public, & qui rachetent des inconvéniens
momentanés & légers par des avanrages importans & durables. La feule inégalité en ce genre efi celle qui tendrait
à établir deux poids & deux me!ùres. Le citoyen n'eH pas
affligé des abus inévitables qui fuivenr la nature même des
chofes; il n'efi: fenfible qu'à ceux qui naîtraient d'une adminifiration arbitraire & défordonnée. L'inégalité donc on
fe plaint eH attachée à fa nature; & fi le riéhe & le pauvre
fentent davantage la [urcharge, c'efi qu'ils confomment davantage. Le droit de piquet établi dans tomes les Communaurés de la Province préfente la même inégalité; l'on ne
peut donc fe former aucun doute fur le droit de la Communauté de Valauris de s'impofer fur le pain; mais il ne
filffit pas que l'impoGtion foit égale pour devenir juHe: ne
feroit-elle pas exceffive?
Il ne fuffit pas de repartir également les charges publiques fur les citoyens; il faut encore qu'elles foie nt telles
qu'ils n'en fojem pas accablés. Il el! vrai que l'humanité
fouffre de voir Je pain, la fubfiance du pauvre, du malheureux, pouffée à un fi haut prix. L'impofition [ur les· conJommations, fi avantageu[e dans les grandes villes, eH peurêtre
�DU
PAL AIS
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PRO V Il Nell.
S77
être moins favorable dans les fociérés plus réduites. Nos
anciens. Souverains paroilfent l'avoir fenri ainfi, en n'accordant le droir de tout impofer en rêves qu'aux villes principales de la Province; les lieux où le commerce & la néceflicé d~s affaires obligenr les étrangers d'aborder & de féjourner, font les feuls auxquels ces forres d'impofitions puilfent
être falutaires. Par-tout ailleurs elles opéreroie'nt' dévaf1:arion.
Valauris 11 cet égard n'étoit guere, ce femble, fufceprible
de ce genre d'impôr; cepel1dant on a voulu prouver par des
certificars du Bureau de Santé & de celui des Fermes, que
les étrangers abordoient en quantiré dans le pays, pour en
emporrer les produélions'& les denrées.
,
Mais qU,elle que foir l'impofirion, dit la Communauté,
fan produit n'eH pas excefIif; & quan':! il le feroir, elle n'elè
que pour un an; ainfi le poids de l'impôt
bien compenfé
par fa courre durée. On pourroit lui répondre que rant que
Valauris formera une perire habirarion fans refTciurce ni com~
merce, tant que le piquet fubfiHera, & qu'en impofanr [ur
la farine on l'aggravera de cent fols par charge, quelle que
foir la durée de l'impofirion, quel qu'en foir le produit, elle
fera toujours excefIive; fi le produir eH minime, il fair preuve
contre la Communauté; il prouve le peu de (onfothmareurs
'qu'il y a dans le lieu. Il eH vrai GI1'en dérruifanr l'abus dll
pain de la .folle , ajoute la CommunJu,é, on a anéanti un
impôr auffi forr que celui qu'on a érabli. Le peuple ne payera·
pas plus (hérement la charge de farine, il n'aura qu'un peu,
plus de peine, quand il voudra cuire ron pai.,. Il ef1: vrai
que l'impofition n'a pas produir une nouvelle furcharge ; le
citoyen n'a pas payé le pain plus (hérement qu'avqnt; mais;
·il fdut convenir que ce font des délibérations poftérieures à
l'érabliffement de l'impofirion qui ont o(cafionné ces dou.
çeur~; l'impo(Jrioll en elle-même n'eo éraQlilfoit pas mo.in9,
un droir exceffif.
'Dans des momens de dérrelfe ( conrinua Ml". l'Avocar...
Général) il efl: perm)s de s'écarter de l'ufage ordinaire; il
eü Qes QéQ,larches qU,e 1<1 nécelJité légitime; auffi lailfa",t"'o.u
ea
P4dQ,
�S78
Jou
RNA
L
la CQmmunàuté d'Antibes s'impofer fur le pain. Mais elle
convenait combien peu elle était en droit d'établir un pareil impôt. Si pareille impofition étoit trop onéreufe dans
une ville comme Antibes, que fera-t-elle à Valauris; mais
on laiffe oublier que le piquet ne fubfilte plus.
Mr. l'Avocat-Général paffa enfuite au moyen tiré de l'illégalité, n'ayant pas cru difcuter celui de l'inutilité. La Communauté étoit arréragée vis-à.vis le Receveur de la Viguerie;
l'intérêt au lix & quart qu'elle fupportoit, étoit ruineulC pour
elle; il étoit du devoir des Adminillrateurs de fe libérer le
plutôt poilible. D'ailleurs, pour prouver cette inutilité, il faudrait un recours de compte.
On a cité des Arrêts pour établir que la Cour n'approuve
pas les doubles emplois fur la confommation. Il efi cependant des cas où cetre gémination d'impofition non feulement n'eH pas préjudiciable au bien public, mais peut lui
être avantageufe. On voit des Communautés qui y ont été
autorifées, qui, outre le piquet, impofent encore fur le pain
du Boulanger; par ce moyen le pauvre porte du-moins fur
le piquet ce que le riche, l'homme dans l'aifance paye de
plus fur le pain du Boulanger; mais fi le dôuble impôt porte
également fur le pauvre, & qu'il vienne à tomber dans l'excès, il tombe auili dans l'injullice; nul doute alors qu'il ne
doive être profcrit ; mais il femble que (;'eft plutôt à caufe
de la furcharge qu'il occafionne , qu'à caufe de fa gémination.
L'impofition pouvait être exceilive dans l'établifiement,
le piquet fubfifiant, puifque la charge de farine était grevée
de cent fols d'impôt; mais par la délibération portant impofition ,de la Communauté de Valauris du 8 Mai, le piquet
dt fupprimé; l'impôt fur le pain refte feul; on ne paye plus
que quarante fols par charge de farine; on ne peut plus le
quereller d'excès; il pourrait donc, ce femble, à cet égard
êcre maintenu.
Il relle encore à perer les moyens du Seigneur dans fan
reproche d'attentat à fes droits. En Provence, il eft vrai,
les Communautés ne peuvent établir un Prépofé aux fours
�DU
PALA.IS
DE
PROVBNCE.
S79
bannaux; cene Jurifprudence eft appuyée par une foule cl' Arrêts. La Touloubre, au chap. de la haTznalité, en cite deux,
l'un du 26 Juin 1669, entre la Communauté d'Aubagne &
le fle.ur de Felix de la Renarde, & l'autre du mois de Juin
1744, entre le Prévôt du Chapitre de Barjols & la Communauté. Une Communauté ne peut donc pas fans aucun
titre établir un Prépofé dans les fours bannaux, pa.r la feule
raifon qu'elle veut empêcher les abus; mais ici la Communauté de Valauris eH dans un cas tout différent; elle eHportionnaire de la bannalité; elle n'en poffede à la vérité qu'un
vingt-deuxieme; mais elle a autant de droit d'établir fon Préporé-, que le Seigneur l'a pour les vingt-une portions renantes.
Le Prépofé une fois établi dans les fours pour fa portion
de la bannalité, ne doit plus étre fufpeB: au Seigneur; il
Y per~oit le vingt-deuxieme de la Communauté; il eH en
droit de l'y percevoir; il peut encore y ajouter la recette
de l'impofltion fur le pain. Le Seigneur ne peut lui conteHer que le droit d'entrée, qui n'eH interdit aux Commu~
nautés qu'à caufe des conteHations qui s'en enfuivroienc
entr'elles & le Seigneur. Ici au contraire la Commu~
nauté eH elle-même dans le droit du Seigneur. On ne peut
donc pas lui défendre d'établir (on Ihép.ofé. D'ailleurs ce
Prépofé ne peut bleffer en rien le Seigneur, ni felon le droi~
commun, ni felon le droit particulier.
L'impofltion dans fan principe pouvait être à juHe titre
querellée d'excès; mais la Communauté ~yant levé le piquet ~
a" auffi levé toutes les difficultés. L'impoiition pouvoir êtfl:}
injuHe, & par conféquent fujette à caffation, fuhflfiant aveQ
le piquer; mais par l'événément elle dt devenue & Çomme
faire pour être maintenue.
Mr. \.' Avocat-Général conclur à ce que la pélibération fJ)~
confirmée.
,Pa.r Arrêt dU'IC> Juillet 17112, prononcé' pa·r Mr. le fréll..
dent de Coriolis, les condulions furent fuivies, & les de..
mandeurs en c~ffiîtion condamnés aux dépens. Plaidant .Mes"
Gaffiei-, Portalis ~. Gazan. .
Dddd~
�JOURNAL
ARR È T
LI V.
'ABe d'échange attaCfué comme étant une vente déguifèe.
La fraude ne Je pré(ùme point.
L'infiance en retrait n'entretient point l'aBion des parens Cfui
font au même degré Cfue le retrayant. Ayant un droit égal,
ils doivent venir en concours.
E fieur de Villeneuve, Seigneur d'Efc1apon, vend à la
Dame de Tbeas fa mere un jardin qu'il poIrédoit aux environs de la ville de Graffe, au prix de 11000 liv., qui furent compen fées fur fa dot; & tout de fuite, par acre du 4 Août 1764',
la Dame de Theas tranfporte le même jardin au fieur Maubert pour la même fomme, à compte de laquelle celui-ci
cede une campagne qu'il poIrédoit au terroir de GraIre ,
. quartier de Sainte-Anne, pour le prix de 6000 liv. Le même
jour la Dame de Theas revend cette campagne au lieur
Bartel pour le même prix; un mois après, le fieur Banel
fait une déclaration privée au fieur Maubert, conçue en ces
termes: " quoique par acre du 4 du courant, j'aie acquis de
" la Dame de Theas une propriété, la même qui fut donnée.
" en échange à la Dame de Theas ,par le lieur Maubert
" par acre du même jour, & qu'il ait été dit que ladite
" Dame a reçu de mes deniers la fomme de 6000 liv. pour
" le prix d'icelle, la vérité elt éependant que cerre (omme
" appartient en entier au lieur Maubert, & que là où je
" trouverois bon, dans le cours de deux années, de garder
" pour' moi la filfdite propriété, je rembour(erai alors au
" lieur Maubert la fufdite fomme de 6000 liv., & que là
" où je ne fairois pas ufage dans le fu{dit terme de ,deux
" années ·de. la-dite faculté, je ne ·ferois tenu' à 'aucun 'rem" bourfemenr envers le liel\r Maubert" ni à Ipayer les inré" rêts de la fufdire fomme, commen'ay.aut aucune, jouit:
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PALAI5
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PROVENCR.
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Canee, lequel aél:e fera, audit cas de non ufage de ladire
faculté, comme non advenu, la préfente dédaration devant feulement fervir au fleur Maubert d'aflùrance pour
la fufdite fomme de 6000 liv. qui lui appartient' en
,
propre. "
Le 2.3 Janvier t779, la Dame de Theas, fœur du lieurde Villeneuve, veut exercer le retrait fur ce jardin, qu'elle
dit appartenir au Geur Maubert; on lui refufe la défMlparatian. Elle préfenre une requête, aux fins de faire répondre
carégoriquement le fleur Maubert fur les faits & articles
qu'elle ·indiqua. Le fleur Maubert prête fes réponfes, dans
lefquelles il déclare qu'il avait prêré au Geur Barrel les 6000
liv. qu'il campra à la Dame de Theas, & qu'il avoir joui
de la campagne à -titre d'anrichrefe; & il ajoute que s'étant
Ilne fois exproprié de la baHide dont il s'agir, rien ne l'empêchait de confentir au contrat d'antichrefe pour l'a1furance
de fes 6000 liv. Après ces réponfes, l'inftance fut abandonnée. Seize mois aprèJi, la Dame de Saureiron, fœur de
la Dame de Theas, intenta la même aél:ion, & par Senrence du Lieutenant de Graffe elle fut déclarée non recevable & mal fondée. Appel pardevant la Cour.
On difait pour elle, 1°. qu'il y avait fraude dans l'aél:e
qualifié du nom d'échange; qu'on n'avait pris cette tournure,
que pour empêcher l'aél:ion en retrait; 2.? que l'aél:ion n'étoit
pas éteinte, mais qu'elle était encore vivante, quand la Dame
Sauteiron l'avoit exercée.
Le prétendu échange fiipulé dans l'aél:e de 1761 n'ell:
que flmulé. En effet, qu'eft-ce que la flmulation d'un aél:e?,
Elle cQnÎlHe en ce que les par'ties déclarent qu'elles font
entr'elles une certaine convention, quoique réellement elles
en exécutent une contraire. C'eG: ainG que le décide Cochin,
tom. ')', pag. '32.9. Or cette définition s'applique précifément
à la calife; car dans l'aél:e de 1764 les partie,s déclarent
qu'elles font un échange" & réellement elles n'exécutent
qu'une vente, puifque le Geur Maubert, nonohfl:ant ce qui
eO: dic dalis l'àél:e) continue de demeurer en polleffion de
�~g2.
Jou R li A 1.
la propriété qu'il feint de donner en contre-échange, &:
puifque cette propriété prétendue donnée en contre-échange
n'a jamais appartenu un feul in!lant à la Dame de Villeneuve.
1
Le contrat de permut{ltion e!l à couvert du retrait, parce
que les fonds co-permutés tiennent lieu de l'un & de l'autre,
& par cette fubrogation les héritages font cenfés demeurer
en la famille. C'e!l le langage de Mourgues fur le Statut,
pag. Il8 & fuiv.; de Dumoulin fur la coutume de Paris,.
§. 33, glof. l , verb. droit de relit:j. Mais pour mettre à couVert de l'aéHon en retrait, il faut, dans l'Efprit des Loix,
que l'échange foit fincere, & qu'il foit effeél:ué de maniere
que l'on puiJre dire qu'aucune des parties n'a eiltendu vendre,.
neurer inrendit vendae, mais que chacune n'a voulu que permuter, fed dumtaxat permutare e;. certam rem [oca certœ rei.
fubrogare. Il eH certain que ce n'dl: point la qualité extérieure ou apparente donnée à un aél:e qui en détermine la
nature; c'e!l la fubfl:ance de la difpofition même, dit Cochin, tom. l , p<lg. 619; c'efl: l'effet qu'elle produit que l'on
doit feul confulter; & Mourgues ajoute, que ,'e!!; fur-tout
en matiere d'échanges qu'il faut aller au fonds des chofes,
parce que relles permutarions font captées maintefois pour
frauder le Sei5"neur & le lignager, & empêcher le retrait.
Bouvot, rom. 2, pag. 95 l , rappone un Arrêt qui jugea que
s'il y a échange, & c;ue l'un au même in!lant vende le fonds
à un riers, il Y a lieu de retrait comme en vence, quoique
l'échange, dans l'hrpothefe de cet Arrêt, eût été .fait fans
[oulre.
Dans les c1rconfiances de la caufe, l'aél:e de 1764 femhle
préfenter un éçhange, puifque la Dame de Villeneuve, en
vendant au fieur Maubert le domaine contentieux, parolt
recevoir en conrre-éçhange une propriété polfédée par ce
dernier. Mais lamais la Dame de 'Villeneuve n1efl: entrée en
po/Ièffion de cerre propriér~. Le fieur Maubert, qui a eu
l'air de la donner en conrre-échang-e, a conrinué de la garder
dalls (<:5 m'lins, La Dame de Villeneuye YQu.loit d.e l'arg;enç-
�D t1 l' A LAI S D H P Il 0 V H N C n;
,83
& non un fonds. Elle ne vouloit donc pas aèquérir. Donc
l'échange n'étoit que dans la tournure, & non dans la fubf.
tance de l'aél:e. Les circonHances ne permettent pas de fuppofer un échange réel, puifqu'il ell: convenu que la propriété
prétendue échangée ne s'eH pas repofée un feul inftant fur la
tête de la Dame de Villeneuve.
La toumure que l'on a pris pour cacher la fraude, & qui
a confiHé à faire vendre la prop'riété prétendue échangée par
la Dame de Villeneuve au fieur Barcel, n'ell: qu'une fraude
de plus. Car, 1°. cette prétendue vente eH faite pour le
même prix, le même jour, au même inHant que l'aél:e fimulé d'échange,' & pardevant le même Notaire; ce qui
fuffiroit , fuivanr les Doéb'ines déja citées, pour prouver la
fraude de l'échange. 2 Il eft dit dans cette prétendue
vente, que c'eH le lieur Bartel qui compte les 6000 livres
à la Dame de Villeneuve; & on efi: pourtant forcé de convenir que cela n'eH pas vrai, & que c'eH le fie ur Maubert,
dont le lieur Bartel n'étoit que le prête nom, qui compta
lui-même cette fomme.. 3°. Le fieur Barcel n'achetait pas;
s'il faut en croire la contre-lettre; il ne fe réfervoit que la
faculté d'acheter; faculté pour l'exercice de laquelle il fe réfervoit deux années de délai, & on avait ftipulé de plus que
l'aél:e feroit regardé comme non avenu, li le fieur Barrel n'en
faifoit pas ufage. Tout étoit donc véritablement limulé.
Or, la fraude n'eH-elle pas caraél:érifée? N'dt-il pas vi.
fible que la Darne de ViUeneuve voulait vendre, & non pas
acquérir? N'eH-il pas vilible, attentâ hrevitate temporis, venditioTlefac7â eâdem die & identitate pretii, qu'au moment même
du prétendu échange, tout étoit arrangé pour la vente de la
propriété échangée? L'échange avait été concerté ah initia
id ac7um erat, non pour que la Dame de Villeneuve acquît
réellement un fonds en remplacement de celui qu'elle vendoit, mais pour raffurer le fieur Maubert contre le retrait par
un échange. Dumoulin attefte que dans une pareille hypochefe il y a véritablement fraude & limulation.
In contraaihus, dit la Loi l, co.d. plus Wllere quod agitur,
0
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,ei veritas poti4s quam fcriptura perfpici dehet. Ac1a jimulata f
die la Loi 2, 'veritatis fubjlantiam mutar.e flan POjJilllt. La .fimulation des actes ft prouve par conjec1ures fi par préfomptians, difent Tiraqueau en fan Trairé du Ret/ait lignager,
aux mors ou équivalent a la Vellte, Glor. 14, n. S7 ; d'Argentré fur l'an. 296 de l'ancieune Couru me de Breragne. 01'dinairemenr les fiél:ions & les fimulaeions ne fe fane pas à
découven. Une Loi à fraud"r, ou quelqu'aurre ineérêe caché,
en eil: l'objee. C'en pourquoi on l'enveloppe fous des apparences difficiles à démêler; la Juil:ice fe prête alors à la
difficuleé, & elle fe relâche fur le degré de preuve fdon la
naeure de l'affaire, & à proporrion que la fimularion aéré
ménagée avec plus d'artifice; c'eil: ce qui fe pratique pour
les donations enrre perfonnes prohibées, déguifées fous l'apparence d'un eirre onéreux. C'eH ce qui fe prarique dans
les rerraits , pour ouvrir les fraudes aux droies de La fàmille ou du Seigneur. On eil: quelquefois difficile fur les preuves de la limularion, quand ce fane les parties conrraél:anres
elles-nlêmes qu.i viennent atraquer leur propre ouvrage, &
dénoncer une fraude donc eiles O.nt été complices; mais visà-vis le riers, c'eil:-à-dire , vis-à-vis le Seigneur ou le lignager retrayant, de fimples préfompeions fuffifenr. C'eil: ainli
que l'arreHene Dumoulin, rirre des cenfives, pag. 83, Glor.
2"
va. Rachat, n: 86, pag. 81 l , & Henrys, com. 4 , p.
16, col. 2, in fine.
De la fimulaeion de l'échange il fuie que la Dame de
Villeneuve n'a faie qu'accommoder ftln nom, lorfqu'elle a
palTé veore au lieur Banel; elle vendait ce qu'elle n'avait
jamais acquis, & ce qu'elle n'avait jamais eu inrention d'acquérir. Tout yeft fimuJé, puifque c'en le fieur Maubert qui
donne l'al gent , ra.ndis que c'eH le fieur Barrel qui a l'air
i1'acherer. La Dame de Villeneuve ne voulant ni acquérir~ ni
échanger, n'éraie-il pas rout naeurel & cout limple que l'on
ne prîe pas la tournure de l'échange, & que l'on déclarât
dans l'aél:e ce qui fe palToie réellement, ç'eft-à-dire , que la
Pa.fi.!~ ck ViUe.nt:l.lve vendait .fOll domaine .au fieur Maubert"
q,u'eUe
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PAL AIS
D E
PRO V il NeE.
585
qu'elle voulait être payée en argent & non par l'échange d'un
autre fonds, & que réellement le fieur Maubert lui donnoir de l'argenr & non un fonds qu'elle nll voulait pas:
voilà ce que l'aae aurait pré!<:nté, s'il avoit été ftncere.
Pour établir que l'aél:ion en retr~it n'éroit pas éteinte,
la Ddme de Saureiron fourint que le fait qoi donne lieu
à des foupçons, ne fulEt pas pour conftituer le remn~ant en
de..meure, puifque l'aalon en retrait ne court pas du jour de
la fraude fimplement foupçonnée, mais du jour de la fraude
découverte, d die deteélœ fraI/dis. Il fa et donc pour conUi.,
tuer le retrayant en demeure, poüvoir au moins lui prouver,
par quelque fait qui lui foit perfonne!, .qu'il avait connu &
découvert la fraude, & qü'il a eu tort de ne pas rédamer
dans le temps requis. L'on trouve dans Grimaudet, J:raité
des Retraits, liv. 10, chap: 17, un Arrêt qui retrace les véritables principes ; il fut jugé que la fraude n'ell: 'cenfée dé.
couverte que du jour. qu'elle eH déclarée par un Jugement,
ou du jour que le retrayant a fait perfonnellemenr quelque
démarche, de laquelle il puiffe réCulter qu'il a connu & découverr la fraucle. Maynard, rom. 2, pag. 441, & Chopin,_
tom. 3, des Privileges des Ruflùlues, pag. 67, retracent les
mêmes principes. Or, dans le fait pré(ent, d'une part, la
fraude n'a été déclarée par aucun Jugement; d'autre parr,
on n'indique aucun fait perfol1nel au retrayant qui puiffe
prouver qu'il connoiffoir la fraude: donc point de pre(criprion. Il eil très-indiiférent de dire que la Dame de Theas,
[œur de la Dame de Villeneuve, avoit intenré fon aaion,
& que la prefcription avoir dû courir contre la Dame de Villeneuve du jour qu'il y avoir eu litifpendance, parce que 1'911 peut
répondre avec Chopin que le remps de la fraude découverte
ne fe prend du jour de la conteHation, mais feulement
de la Sentence donnée fur ce fujet. La raifon en eil que,
pour que la fraude ne puiffe profiter ~ fon. auteu~, on a
décidé que la prefcription ne pouvoir courir .que du jour
que la fraude eil découverte. Or, la frau~e n'e(\: pas certai~
.A.nnét:$ z?8z & Z782..
E e e 'e
�S86
JOURNAL
nement découverte tant qu'elle fair matiere à doute & li
contell:ariofJ. Cet état de doure ell: nn effet de la fraude
elle-même, car iJ n'ell: occafionné que par J'artifice dont la
fraude a été aetompagnée ; il ne feroit donc .ni jufie ni
raifonnable que la fraude pLÎt tourner au profit de celui qui en
a nfé. On ne peut donc pas faire courir la prefcriplioll du
jour que la Dame de Theas , fœur de la Dame Villeneuve,
avait intenté fan aél:ion. Il ne s'agir point ici du temps dt!
droit, du délai f!:aturaire. Quand il y a fraude, la prefcription n'dt cenfée courir qne du jour ùe la fraude découverte.
On répondoit ponr le fieur Maubert, que la Dame Sauteiron
étoit non-recevable, parce qu'eIJe-venoit rrop tard, & mal
fondée, parce que j'aél:e du 4 AoLÎr 1764 n'avoir jamais été
qu'un aél:e d'échange; l'événement dont on induit la fraude
a précifémenr confirmé cerre vérité. La prétention de la
Dame cie Saureiron efl odieufe, la. p'lrc.e qu'il ef!: évident
qu'elle cherche à profiter de l'augmentation réfu1tant du hé,
néfice du temps & des réparations immenres que le (ieur
Maubert a faites au jardin; 7. 0 • parce qu'elle ne peur rien
dire qui ne tende à incriminer la Dame fa n.ene, '& à fuppofer que par une conBivence frauduleufe avec le,fieur Ma~l
bert, elle a voulu faire le préjudice de fes propres enfam.
Le retrait lignager· efl: contraire au droir commun. Il
gêfJe la liberté du 'Commerce; .il ri 1efl d'ailleurs 'porté que
par une loi ftacutaire touj@urs infufc.ept~ble ,d'elXtenuon ; il
faut denc·le 1'dheindre plu[âr.que,l!Ie l'amI51ier, & ,damde
doute on ne aoit 1'a·s l'accueillir: .or/ia r4iringwda. Il .dt
vrl!'i que quelque f1êfa,'erilble -que fa-it le >r~rait, cflll\eH .ce~
pendant pas permis ail 'VellGel;1r l'le à <l'achet>eu;r .de pr.atiqller
quelque fraude qui ~rive les'retr"o/ans-de[~eur-dr0ir.;Ce..m~tpe
ëreit -Ieu·r érant acquis 'par ~Ie IStatut, ~1411dhpas 'futle-qu'iIs
le 'peràent'par.Je fait-du fiers: .altl~ri per(Jlt~rum,ini<Jua ()()l/dilia 'ltl.ftrri no'l/. potefl. M-&i-s la fr.auâe ne fe .prefume "P9iot, :&
fur-ro\wde lIa parc -<les-parens 'au"préj,lfdice .~e;.leurs ..p..r.6gs.;
il .faut' qu'1il -en 'cenft~ 'Ou- par) las ,cir-w!Ul:anoes .,/ionilob l~.
. : )
.... ' , . .
..~~H. . .
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
_
SB.,
duit en droit, ou par l'événement; il faut, en un mot, qu'a
y ait conJilium & eventus ; fi la fraude n'eft pas prouvée,
" on ne peut pas la fuppofer : fraus & dolus nuniquam pritjùmuntur.
.
En fait de dol, il faut prendre garde de confondre ce
qu'on peut faire au préjudice du tiers el1 ufant de fan droit,
avec ce qui peut nuire à autrui en fe permettant quelque
chofe d'illicite. Dans ce dernier cas, le dol ne doit pas profiter à fon auteur; l'abus ne peut nuire au tiers; mais dans
le premier, il faut dire avec la regle du droit: non videtuf
dolo facere qui [UO jure mitur. La fraude dans un COJltrat que
l'on déguife fous le nom d'échange, ne- peut pas être l'buvr'lge d'un feul ; de même que le contrat tif! conftn[us pluril/In ad idem placitum, de même il faut néceffairement que
la fraude que l'on argue dans le contrat foit l'ouvrage de
tous les contraél:ans ; fi l'un & l'autre n'ont pas concouru
à fa confommation, il dl: impoffible que le contrat foir fraudùleux ou firnulé.
L'antichrefe ne dépouille pas le debireur; ce n'eft qU'UA
tirre d'engagement qui n'empêche pas que la chofe ne refle
toujours in bonis dcbitoris. Ce n'dl: qu'une efpece de troc des
intérêts de la fomme prêtée conrre les fruits du fonds baillé
à antichrefe, & ce troc n'affeél:ant que les fruits, laiffe par
conféquent toujours la propriété fur la tête du légirime pof..
feffeur, & c'eft par cerre raifon que nonobftant l'antichrefe
on dl: toujours obligé de difcuter le fonds qui y eft fournis ,1
comme n'ayant pas ceffé d'apparrenir au débiteur. ( Brodeau fur Louet, lett. R, n. 9. Buiffon fur le rjrre du code de
pigno & trip. )
Le paél:e commiffoire, qui n'eft qu'une convention faite
enrre le creancier & le débiteur, par -laquelle il eft établi que
fi le débiteur ne rembourfe pas dans rel temps, la chofe engagée apparriendra au créancier, fupppofe auffi que la chofe
engagée apparrient au débiteur, & par conféquenr la haflide
Sainte-Anne n'appartenoit qu'au fieur Barrel, puifque c1érait
lui qui l'engageait au fieur Maubert. Or , il ne pouvoit l'enEeee 2.
...
�S88
JOURNAL
gager qu'autant qu'il J'avoit ; fi le ûeur Maubert ne l'a.
voit pas, J'échange du jardin était donc un véritable échange.
Il n'ea; donc, i?as polJible de le répure!' frauduleux, ou dégénéral1t en venre déguifée. Et ce n'eH: cependant qu'aurant que
l'aél: ~égé\\éreroit en vence dég\li(ëe, & que le fieur IVbubert
feroie, propriétaire des deux fonds, que le jardin pourrait être
fou mis au rerrait.
. '
. Pour qu'un échange foit réputé frauduleux, & dégénere en
v.ente qui donne ouverture au reIrait, il fallt néceifairement
q~e J'un des .contraél:ans refie propriétaire incommurable des
deux fonds ;.qu'il le foit 11une pro mine, OLl 11Une pro tulle;
dès que c'ea enfuite des arrangemens pris lors du coiltrat
primitif, rien de plus égal; alors il efl: vrai de dire qu'il n'y
a pas un rroc de fonds, mais feulemenc que J'un des fonds a
été troqué contre de l'argenc ; & c'en dt aifez pour adjuger le retraie. Mais fi au contraire le fonds a été échangé
contre le fonds, que la défemparation reCfleél:ive ait été faite
de bonne foi, & les deux propriétaires refpeél:ivement expropriés, l'aél:e eft véritablemenr un échange, & il n'y a pas lieu
au rerrait.
. ]1' ne faut donc pas feulement s'attacher à voir fi après
i'a,él:e du 4 A9ût 1764 le fieur Maubert eH rené en pofièf.
fion, & s'il avoit droit de pofféder; & c'ea ce qu'on ne peut
pas dire, tant fur l'aél:e du 4 Août 1764, que fur la déclaration dL] 30 du même mois. Enfin la Dame de Sauteiron excipant aujourd'hui de cette décla.çarion, & en [ai fa nt rout fon
çirre; il faut néceffairement la jug~r fur cerre piece, & J'on ne
peut difconvenir qu'en partanç de ce même tiue, le fieur
Maubert n'ait été véritablement dépouillé de Li 'baHide de
Sainte-Anne. .)
.
Pour juger fi le fietlr Maubert a confer,vi .I,e jardin & la
ba!tide, & fi par. conféquent il,n'ai fait que ·firt]lJ1er lin aél:e
d'échange, il n'y a qu'à voir les ,qe,ux aél:es , ils>ne font pas
fufpeél:s ; le premier, celui· d1l4, Août 176f, .porie illconteftablemef\t l'échange, l'on ·en COlfvient; fi l'échange n'a pas
été retondu par la déclaration, & qu,e I,e fiell~ ~aubert ne
.
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
589
foit pas redeVel1<l propriétaire de la baltidè, l'échankë a donc
fublifté j & s'il a fublilté, il ne pellt pas y avoir lieu au retrait. Or la preuve que la déclaration du 30 AOlÎt n'a point
anéanti l'aéte d'échange, c'eH que le lieur Maubert, au lieu
de redevenir propriétaire de la campagne, n'a été en droit
que d'en percevoir les fruits 11 titre d'anrichrefe. Au furplus,
qu'importe que la Dame de Theas ait tout de fuite -revendu
la baHide au lieur Barrel? Il IdEt que l'échange ait été réel
vis-à-vis le lieur Maubert, pour qu'on ne pui!fe pas lui imputer aucune limulation. Peut-on croire de bonne foi' que
ni Dùmoulin ni Douvot aient pu dire que l'un des 'co-permutans vendant tout de fuite le fonds qu'il a reçu, l'aété dégénere en vente? Ce ,,'ell qu'autant que le co-permutanr
rentre dans la propriété de fan fonds, que l'on regarde
l'échange comme frauduleux. C'eft la diltinétion que fon~
Tiraqu_eau en fil préface des retr.aits, n. 79'; Bafilage' lùr
l'art. 46 l de la coutume de Normandie, & Lepretre, pail'.
9 1 7.
Si le lieur Maubert eil reilé en po!feffion de la baftide
Sainte-Anne, ce n'a pas été 11 titre de propriétaire, ni en
force de l'ancien dr.oit primitif qu'iLavoie fur cette même
campagne; il n'en a joui qu'à titre d'antichref~, en· force
d'un paéte commi!foire, & l'on a vu que la po!feffion p•• r
antichrefe ou par paéte comini!foire fuppofe que le poffelfeur n'eft pas propriétaire. Parce que le fieue Maubert, prêtant de l'argent à l'acquéreur de cette baftide, en a con(ervé la polfeffion à titre d'antichrefe, peut-on con'clure-que
l'échange a été limuJé ou frauduleux? Les Auteurs ont répondu, feci , fed jure feci.
•
cSur la fin de non-recevoir, on difoit que les parens doiv~nc agir dans le, temps du Statut, à compeer du jour de
la fraude découverte, & que ce temps commence, comme
dit Gr'imaudet, .IiI'. 10, chap. 17, du jour, que -les lignagers
ont e>u ou dl! avoir connoilfance du contrat, aetendu qu'ils
n'one pu agir, quand ils n'ollt pu en avoir connoj/fance. Donc
dès qu'ils oot pli agir, & qu'ils ne l'ont pas fait dans le temps
�,90
Jou RNA L
de droit, leur aél:ion doit être pre(crice. Id le nouveau Commentateur fur nos Statuts, tom. 1, pag. 29 r.
Avant de favoir de quel jour la fraude a été découverte,
il faut nécelfairemeot f.1voir en quoi on la fait conIiller. Or
h Darne de Saureiron fai(oit confiiter la fraude dans les
deux aél:es d'échange; elle étoit donc devenue patente par
la continuation de polfelIion du Iieur- Maubert; elle aurait
eu tome la publicité légale que le Réglement de 1747 exige.,
pour que les parens foient dans le cas d'agir. Les deux aél:es
ayant été inIinués dans le mois d'Août 1764, la notice éroit
préfumée dans l'année. La Dame de Sauteiron aurait dû agir
par tout le mois de Septembre 176'), & ce n'el!: que dans
le mois d'Avril 1780 qu'elle a agi; (on aélion el!: donc prefcrite depuis 1, ou 16 années. AinIi, ou la fraude ré(ulte des.
deux aél:es du 4- Août 1764, ou elle n'en réfulte pas. Si elle
en réfulte, cette fraude a été découverte par l'inIinuation;
l'infinuation en a opéré la publicité; & d'après cette publicité légale, les parens doivent agir dans le tems du Statut. Si
au contraire la fraude ne réfulte p-dS des deux aél:es d'échange
& de vente, que devient le fyl!:ême de la Dame de Sauteiron?
Elle détruit fan édifice, elle eH en contradiél:ion avec ellemême.
Enfin (continuoit le fieur Manbert) el!:-i1 bien vrai, el!:-il
même polIible que la fraude déférée à la Jull:ice, & le premier
retrayant s'étant départi, un fecond puiffe venir prendre fa
place, que l'acquéreur fait expofé à autant d'inHances fucceflives qu'il pourra y avoir de parens, fût-ce pendant la, 20
ou 30 années, à cOlnpter du jour que la piece dont on a
induit la fraude a été découverte? Si la Loi punit la fraude,
ce n'ell que pflr la prorogation du temps du retrait jufques à
la décpuverce de la fraude; mais la fraude une fois connue, la
peine expire, le temps du retrait court néceffairement, & l'on ne peut proroger ce même temps, fans ajourer à la peine de
la Loi. Ghopin, Maynard & Grimaùde~ ne parlent que de
l'efpece de retrait intenté par le lignager contre Je Seigneur,
& qui efl:> en ufage dans la coutume dont ils parlent. Pai=-
�D U
PAL ArS
D Il
PRO v Il NeE.
~ 9t
tour dit feulement que lorfque le plus proche parene a été elCc!u,
celui qui étoit à un degré inférieur peut venir, cùm jura Jint
inureos fuhordinata, mais c'eH ce qu'on ne peut pas dire aujourd'hui. La Dame de Saureiron étoir au méme degré que,
la Dame de Theas,donr elle étoit Cœur; elle n'étoit donc
pas fequens de la Dame de Theas; le d,l'oit de l'une déraie
pas Cubordonné a.u droit de l'a.utrC1;eU;; /VeAoit en com:OurS
avec elle; elle pouvoit réclamer G-0lmne -€\.Ie la moitié du
jardin. Pour.quoi ne l'a-t-dle donc pa!> {ait? Elle devoit agir,
quand elle le pouv.oit.
Arrêt du 16 Juill!it 17·lh, au ra-p-por-t de Ml'. le ·Confeil~e.r
de Ramatllelle, après deu,x pa'rrjlge·s vuidés etJ lIa Ohaf)lbre
des Enquêtes, Mr.Je Confeiner {'je 6e.ay ve-i, Comparriœur,
<jui confirme la Sentence avec dépens. Ecrivant Mes. Portalis & PaCcalis. L'Arrêt paifa de l'avis de Ml'. le Rapporteur.
Les motifs de l'Arrêt furent, 1°. que la Dame de Sauteiro;l étoit mal fondée, parce qu'il n'y avait pas fraude, qu'il
n'y avoit tout au plus que de.s préComptions; que les f~its
defquels on l'induifoit, pouvoient n'être regardés que comme
des aél:es Je pnldence aurorifés par la Loi, & qui ne conftituoient pas le dol capable de fonder une aél:ion en retrait.
Le fieur Maubert n'avait jamais été réinvefli de la propriété.
La contre-lettre prouve qu'il avoit fourni les deniers; mais
elle prouve auffi que la poifeflion n'étoit que précaire, &
la venre palrée à Barrel avoit eu fon plein- & entier effet.
D'ailleurs la fimulation de l'aél:e d'échange érait inadmiffihie dans !:l circonftance, par cela feul qu'ilétoit impoffible de renvoyer Maubert indemne, puiCqu'on ne pouvoit lui
rendre la propriété qu'il avait donnée en contre-échange,
& qui avait figuré dans le partage des hoirs Bartel. On doic
remettre le retrayant évincé au même état où il étoit auparavant. 2°. Y eût-il fraude, la retrayante était non recevable, parce que la fraude exiftant dans l'aél:e de revente
du 4 Août 176'4-, & dans la continuation de la jouiifance du
fieur Maubert, elle avo.ic eu, par l'infinuation de l'aél:e de
�S9:l.
]
0 U RNA L
revente, la notoriété de droit, & par la poiTeffion du ûeur
Maubert la notoriété de fait, qui avoient fait commencer
à cette époque le cours de la prefcription. 3°, La Dame de
Sauteiron auroit dû fe pourvoir en même temps que (a (œur,
parce que' (on droit avoit été ouvert à la même époque,
& que l'on ne peut pas dire que l'inllance de (a fœur ait entretenu fon ac1:ion, foit parce qu'en principe l'infiance d'un
retrayant n'entretient pas l'aél:ion de ceux qui ont négligé
de fe pourvoir, foit parce que quand même l'aél:ion du premier retrayant entretiendroit celle de ceux qui ne fe font"
pas pourvus, cela ne doit s'entendre que des parens qui
font à' des degrés plus éloignés, & non de ceux qui ayarH
un droit égal, doivent venir en concours.
FIN.
�
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66c56a8999f4fbcc1ac5d9fab5ad14c3
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JOURNAL
DU
DE
PALAIS
PROVENCE,
o u
A
RECUEIL DES ARRETS
RE ND US depuis les derniers Joumalifies, par le
Parlement & la Cour des Aides de cette Province.
Par Me.
JAN ET Y.
~====~2!'====~
ANNÉES 1782., 1783 & 1784.
C:U:====~2~--
A
Chez
~
A IX,
Imprimeur du Roi, vis-à-vis
le College.
ANDRÉ AD1BER"T,
M.
DCC.
L X X X V.
"
Avec Approbation, "Pcrhliffion ft Privilegc du Roi•
•
�•
�~93
,
-T A BLE
DJ/ES
SO.JJ1[MAJ[)R..J~S
CONTENUS DANS' CE VOLUME.
ARRÊT
I. Y a-t-il moyen d'ouverture de re'luête civile,
lorfque le grief de nullité a été féparé de celui d'injuJIice,
& 'lu'en jugeant la nu(Uté, on a renvoyé ail premier Juge
Pag. 3
la queJlion du fonds?
ARRÊT II. Les Fermiers des rêves & autres impqfitions éta.
bUes par les Communautés de Provence ne font point foumis
à tenir des regiJlres & à expédier des 'luittances fur papier
timbré.
.
13
ARRÊT III. L'on peut fu/pendre le jugement de rappel d'une
Sentence interlocutoire, pOllr ordonner un fecond interlocutoire portant fùr un autre objet, mais 'lui tend à éclaircir
le. procès.
. ~2"
ARRÊT IV. Pellt-on confiruire des ouvrages dans le lit des
rivieres ou dans un endroit public, fur-tout fi ce$ ouvrages
.
-..6
peuvent nuire aux voifins ?
ARRÊT. V. Sur la différence 'lu'il y a entre les chemins 1'oi.
finaux & les viols ou jentiers privés à raifon de la faculté
31 .
plus ou moins étendue du droit de'palfage.
ARRÊT VI. Le pere, obligé de fournir des alimens à fa fille,
peut exiger 'lu'elle les reçoive che{ IlIi, 011 'l,t'elle fe retire
dans un couvellt.
39
Années l782. & fuiv.
G ggg
�•
'5~4
T A BLE .
VII. Il n'eJl pas permis aux Lielltenans & alltres
Juges inférieurs d'accorder des furféance s ent'~rs lin décret
de la Cour fJui laxe contrainte pour les épices & la levée
d'un Arrêt, fJuoifJue les conteJlations foncieres aient· été renvoyies pardevant les premiers Juges.
Les parties fJui am procédé, même volontairement, devant un
Juge notoirement incompétent à raifon de la mafiae, peuvent,
. en tout état de cqufe, demander leur renvoi, ou attafJuer lè
jugement pour caufe d'inco;npétence, [ans fJu'on puif!è leur
oppofer aucun aCfJuiefcement, ni aucuné fin de non recevozr.
.
Une créçmce certaine .f:.. tifJtlide ile peut être r:ompenféé avec
4{
celle qui ne l'eJl pas.
ARRÊT VIII. 'Le propriétaire du domaine fupérieur peut-il
dériver ou corrompre les eaux au préjudice de l'inférieur? 47
ARRÊT .IX. SlIr une 'demande en refcifion•.
Dans un teJlament, les claufts ohfcures doivent être inïerprétées
en faveur de l'héritier contre le légataire.
S6
ARRÊT X. Dans la levée d'une imPI?/ition par forme de capage,
4a répartition doit être faite eu égard aux facultés de' éhafJue
contrihuable.
64ARR!JT Xl;. Le dérangement du mari dans [a condllite ou' dan~
[es affaires, donne lieu, d la femme de répéter fa' dot, ou 'de
demander la défempararion des hiens dotàux.
, ' . -72
ARRÊT XII. Formalités qui doivent être ohfervùs par les Com(
munautés qui veulent difPofer 011 répartir les ifcle~ & pâtu77
rages fùpedlus.
ARRÊT XIII. Les Corps & c.ommunautés qui font capables
d'acquerir & de recevoir, peuvent-ils être légataires d'immeubles?
Les fondations teflamentaires peuvent-elles Élie doties des revenus d'lin immeuble?
•
84ARRÊT XIV. Sur ce qu'on entend par cas fortuit ,fur ce qu'opere
la renonciation d tous .les' cas·forzu.its. .
•.
Quand éfl-ce qu'il y .a lieu à l'indemnité en matiere de
fermes ? 9 4 ARRÊT
o
1.
~
•
�DES SOM MAI RES.
. 595'
ARRÊT XV. La demande en, fupplément de légitime prefcéitelle Jau profit de l'héritier, guoique le légitimaire vive en
commun avec lui, & aux frais de l'/wirie ?
100
ARRÊT XVI. Dans l'aliénation des hiens de l'Eglife, ftjite fans
aucune des formalités-prefcrites par les Canons & les Loix
du Royaume, la prefèription centenaire eourt p~nd(lnt la vi~
du Bénéficier gui a fait l'aliénatipn:'
104
ARRÊT XVII. En matiere d'affirance maritime, les délaiffèmens ~: toutes les demandes en exécu.rion de la police doivent être faits dans les trois mois de la nouvelle du ji,nif/re.
II6
ARRÊT X III. En cas de mangue ahfolu de paif] , Je co,rps
des Boulangers peut être pourfuivi ~. condamné Il Pamende,
fauf le remhollrfement contre les memhres.
131ARRÊT xrx. L'aïeul, fur-tout de l'état plehée 1 ayam payé l~s
derniers mois de groffiffi & frais de couche, n'efl pas tenu
de fournir des alimens Il fon petit-fils naturel, tant gue la
procédure en fèduaion n'eft pas jugée, mais feulement de 'le
faire conduire Il fts frais Il l'Hôpital
•
137
ARRÊT XX. Le contrat d'ajJùrance maritime, portant ftulement
fur l/rifque d'entrée, & celui de réaJfùrance portant fùr le
riflue de ret.our,. la réaJfùrance tient pour Ir:' rWue limité
dans le contrat .d'ajJurance.
146
ARRàT 'XXI.. En mettant les pêcheries ou les bordigues Il la
taille, les fedes doivent être impofèes pour toute leur valeur,
les hordigues ne doivent l'être gue pour la moitié de leur
1 S1
valeur.
163
ÂRRÊT XXII. Sur la vente & le déhit du {el.
.ARRÊT XXIII. Un Juge peut~iL être pris Il partie, fans avoir
.étê intimé jJJr,f.appel de fonjugement?
Pl!4Jt-il l'être dans une inflance féparèe de celle dans. laquelle
il auroit été pourfuivi?
.L'aaion en dommages - inlêr.êts paffi - t - elle contre les héri:'
;I 7 0
. .>tiers?
-Aiv<ÊT XXIV. ProflujJè poor caufe fauffi déclarée nulle. 18 9
.
Gggg2.
�~96
ARRÊT
TA BLE
XXV. La quarte ipifcopale efl-elle due fur toutes fortes
de dîmes que le Prieur perçoit?
La quarte que l'Evéque perçoit fur les dîmes, efl-elle foumift
aux charges?
193
ALRÊT XXVI. Le locataire ne pouvant, d'après le hail, fousautre fans la permiffion du proprù!taire, peut
arrenter
néanmoins faire régir la maifon louée par un repré[entant,
s'il.efl ohligé de s'ah[enter , même attendu le dérangement
de [es affaires.
2.05
-ARRÊT XXVII. Le Curé ohligé dans une Egli{e Cathédrale
remplir les fonc7ions du Chœur, ne peut s'en difPen[er
que pour des ca~ qui ne fouffrent aucun retard; il doit 'néannlOins en être cm fur fa Jimple affirtion, pourvu fJue' CI foit
2.I2.
fans fraude & fans abus.
ARRÊT XXVIII. Une femme mariée fous une conJlitution particuliere qui a des biens paraphernaux, ou un commerce indépendant de celui de fon mari, ou fJui fait des acquifitions
fon [eul
au vu f,' fu de fon mari, acquiert pour elle &
profit.
•
"
2.28
ARRÊT XXIX. Conventionfoufcrite parun mineur, & qui liquidoit des droits fucceififs & enfixoitle montant, caifèe, n'ayant
2.14"
été précédée d'aucune formalité de juJlice.
ARRÊT XXX. L'a8ion folidaire a lieu contre les Co-décimala c1zarge
teurs pour le montant des réparations qui font
de leur bénéfice.
243 t
ARRÊT XXXI. L'artifan eJl tenu de contribuer aux charges du
Corps, & de payer un droit non abuJif de levage de hou;;,
tifJue, quoique le Corps ne foit pas établi en jurande.
253
ARRÊT XXXII. L'héritier in re cerrâ fuccede in univerfum
jus, w cas que l'héritier univer[el prédécëde le teflateur,
[auf la reflitutiom des fidéicommis.
259
ARRÊT XXXIII. Le tireur d'une lettre de change qui n'a point
l'échéance, efl tenu pendant tr.ente ans de
fait des fonds
la garantir, quoique le porteur n'ait pas fait [es diligences
dans le temps de' drOIt, ,& fJu'il n'ait point rempli les for-.
a
a
a
a
a
�\
DES _5 0 M M A J RES.
.) 97
maUtés preji:rius par l'Ordonnance du .Commerce, pour
.. avoir [on recours contre le tireur; la reconnoiflànce d'une.
dette contenue dans une lettre empêche la pre[cription, 17S
ARRÊT XXXIV, La donation faite dans un contrat de mariage, même par un collatéral, aux enfans
naître de ce
mariage, efl [oumift
l'hypotheque de la dot conJlituée
dans le même contrat.
.
Un capital formé des deniers de la dot, & enfiûte déna:"
turé, efl-il fuhfidiairement dotal?
_
. Le créancier de l'héritier peut - il , dans une infiance bénéficiaire, demander la fèparation des hoiries, après avoir
pourfuivi en concours l'inJlance, & laiJfé rendre une Sen.
tence de rangement?
28)
ARRÊT XXXV. Délihéraûon prift
la pluralité des fuffrages ,
pour ajJùrer la continuité du fervice divin, & de l'entretien
de l'Eglift de la Valentine, paroiJJe St. Marcel, urroir de
307
Marfeille, confirmte.
ARRÊT XXXVI. Sur la demande en cajJàtion d'une vente
confentie par l'ufufruitier 6' un autre cohéritier, ralifiée
par un cohéritier, & attaquée par les cohéritiers qui ~toient
en même umps cohéritiers de ceux qui avoierzt confenti la
3 18
vente.
.
.
ARRÊT XXXVll. Peut-on répéter une (omme gagnée a un
.
jeu d'exercice & permis?
L'état du procès étant fixé par un jugement interlocutoire Cfui
efl acquieji:é, peut - on enfuite .recourir
de nouveaux
moyens?
3 2 ).
ARRÊT XXXVllI. L'ainé efl celui qui fe trouve effec1ive:"
ment l'ainé lors de l'éllénement de la condition laquelle
_ le fidéicommis efl fu~ordonné.
.- •
.
L'interruption des degres par le predecès de ceux qUl font
aux degrés intermédiaires, ri' empêche pas que la difPofition n'ait fon effet en faveur de ceux qui font appellés dans
des degrés poflérieurs.
33°
ARllÊT XXXIX. En matiere de 6énijices, la nature du titre
a
a
a
a
a
�,
J~9"8
T A il L E
d'érec1ion peut-elle ~tre fiLjette -il pre[cription ? -
Le iitre d'érec7ion ne paroijJànt pas, la pO/felJiOIl la plus
voijine du titre, 6' la plus cOliforme au droit canonique,
doit ~tre préférée pour fixer la nature du bénijù·e. .
La Chapellenie érigée fans le titre Ste. Catherine hors des
murs de la ville de 111arfeille, ejf régie par un .(eul Ree1eur,
& ne forme pas le patrimoine
, de c(eux titulaires différens.
_
34~
XL. La déclaration du teJlateur da;zs l'aae de furcription, qu'il a écrit lui - même ou fait écrire fan tejfament falemne!, doit être exaae & conforme. il ceNe .qui
ejf contenue dans le teflament, ù peine de nullité de la
t difpojitio fl • .
36 l
ARRÊT XLI. Le Prieuré érigé en l'Bglife St. Michel de la
,367
ville de Solli,ers ejf Prieuré fimple & régulier.
ARRih J'LU. S'il Y a nécelJité dans l'érec7ion d'une Eglife'
, , parQilJiale, la dotation du Curé efi il la darge du Prieur,
,fj,!oique les habitans s'en fiJJènt chargés.
- 392.
ARRÊT. XLII~. Lorfqu'il s'agit du dérangement des affaires
d'lin Négociant, les créanciers peuvent pourjitivre en direction marchande, & s'oppofer il l'oul;erture de la difculJion.
,Deux biges étant égaux, ·l'un ne peut pas ordonner des dél'autre de connoîtr-e d'une affair" dont il ejf faifi.
. fenfes
.Le Lieutefl/lnt ayant rendu un décret fur la requijition du
Procureur du Roi, il n'y a que le Procureur du Roi' qui
,398
puiffe être intimé {ur l'appel de ce décret.
ARRÊ-r XLIV. L'Artifan refu Maître dans. une ville 'cie
Parl-ement, ti dans un Corps même non étaMi.en Jurande',
peut tràvailler comme Maître dans tout le riffort.
429
ARRÊT XLV. Apz;ès avoir'ordonné que le procès jèra pourfuivi ap petit criminel, le Juge peut cil,iftfer l'a matiere,
& recevoir les parties en procès ortiinaire.
.
'439
ARRÊT XLVI. 'Un Prêtr.e régulier peut-il :être reçu dans la
,
446
Congrégation des Pr~tres dit St. Sacrement?
ARRÊT XLVII. Les pauvres peuvent--ils être, injlituts héritiers
ARRÊT
a
�~99
dans les biens immeubles & auiÎ:es prohihés par l'Edit de
DES
\
SOM MAI RES.
l749?
4H
XL VIII. En Provence les Communautés ne peuveu
impo[er fiu les objets de commerce & d'induflrie.
Les impofitions doivent pçJrl.:r fur la généralité, & ne peuARRÊT
. , vent êtr, établies fans néceJlité.
.
4:i~
ARRÊT XLIX. La Communauté d'Aix a le domaine direc1 &
utile des régales fÙ,. les tours, murs G' foffis de là 1'ille. 480
ARRÊ'l' L. La fauffi énonciation infèrée dans fac7e de hap~
tême ne peut rien contre la regle, parer eU quern nupria:
demonHranr.
.
498
LI. Le Capitaine d'un Navire ne peut, malgré les
Maulots fT autres gens de [on équipage, changer la der.
5 12
tination de [on voyage.
ARRÊT LIt L'ac1e de haptême dans lequel le pere G' la mere
d'un enfant [ont déc!c;rés mariéS-; joint la,poffiflion d'état
da cet enfant, forme une preuve fiiffifante de fa légitimité.
Autorité des ac1es de haptême dans les queflions d'état. 516
ARRÊT LIlI. Le Médecin a le privilege d'empêcher un Orfevre de troubler [es études par un hruit incommode. 557
ARRÊT LIV. La quittance du lods concédée pàr le Seigneur
per[onnellement efl une invefliture..
•
La quittance privée du lods efl aufli valable en Provence 'lue
fi elle étoit notariée.
.
L'acquereur d'un fonds emp!z:ytéotique 'lui releve d'une direc7e
indivifè, étflnt invefli par la quittance du lods Clfquitté per[annellement au Co-[eigneur, efl préféraMe au ceJlionnaiu
de la prélation de l'autre Co-[eigneur.
56 3
ARRÊT LV. Le Fermier d'une rêve ou d'une impcifition fil;
la denrée de confo.mmation ne peut pas réclamer une indemnité pour la perte occafionée par la contrebande.
57 1
ARRÊT, LVI. Le tiers poffiffiur attaqué par ac1ion hypothécaire
ou de regres ne peut oppofer aucune compenfation.
Les alimens donnés a titre d'amitié ne peuvent être répétés. 574
ARRÊT LVII. Les dénonciations ne doivent être reçues que
ARRÊT
a
,
,. ,
'.
�'600
T AB L E
pour crimes graves, & le dénonciateur doit fournir une ,caution folvable.
.
.
) 78
ARRÊT LVIII. On ne peut délihùer que dans un Confeil de
touS chefs de famille filr des ohjets qui intéreffint chaque
hahitant & poffidant-hien en particulier, ut fiogulos•
. L'oppqJition li la délihération a un effet fuJPenfif.
587
Fin de la Table des Sommaires.
J
•
�/
~====~====~
,
ARRET
PREMIER.
y a-t-il 'moyen d'ouverture de requête civile., 10rfèJlJe, le grief
_ de nullité a été ftparé de celui d'injujlice, & flu'en jugeant
la nullité, 011 a l'envoyé au premier Juge 'la queflion du
fonds?
E 28 Novembre ;I771, la Communauté de CabaITe pr~
- -' renta une requête au Lieutenant de Brignoles; elle, e:para qu'Antoine Cruvés, Honoré Chaix & Louis Bron,
fermiers du moulin à huile, n'avaient pas ouvert le mtulin
au tei}1flS convellab'Ie,;relle ùmanda que les fermiers f.ITent
condamnés aux 'dommages & intérêts rouff'erts & à buff'rir
par .les habirails,.à' caure' de ce retardemenr. Le S ~'Il mois
de Janvier filivanr, la Communauté prit 'une délj~ratiori i
L
A2
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10URNAt
rlJ0l'tant' de p'etm~t.f~e qtfx' lfabit'àIl, .I q fm'tie .des?1 J
terroir, .nlOyènoant un droIt .que 1on payerol~ aux fermIers
pour les indemnlfer, & de faIre grace auxJermlers des dommages & in érèrs aemandés.cQntr'eux, pour n;avoir pas ouvert le moulil1 bannai au temfs· marqué.
•
Les fermiers préfenrerent fur la demande qui avoit' été
formée contr'e le, & donnerent une requête incidente c.ontre
la Communauté en condamnation des dommages & in èrêts par eux fou Ife rts J attendu la permiffion concédée au
habitans de forcir les olives du terroir. Le 7. S"ptembre' IT12
il intervint Sentence du- Lieutenant, fur les conclufions de
Me. de Beaumon~, Procureur du Roi, qui avait voté pour ene
délibération, - quï déboute le~ fermiers, avec dépens. .1)&
appellerenr de cenè Sentence, & fur l'appeL, les conclu.,- .
fions de Me. de Beaumont furent déclarées nulles;..er.femble la "
Sentence; les parties & matiere furent renvoyées' au Lieu'"
tenant de Btignolés" utee que celui ql.)i avoit' jl.lgé, pour y
étre poul'fuivi fur'le"fotrds, & Me. de Beaumont fut condq.rnné
à relever & garantir la Con1tt1unauté d~ toUt ce qu'eile pourrait foulfrir & endurer de la part des fermiers àraifon des
adjudications prononcées-, enfez:nble, aux dommages, intérêts
& dépens, .aélifs, paffifs & de la garalltie.
,
Le 2 l Mars 1780 Me. de Beaumont prit des lettres en forme
·dè,~equê.te' civile,' ,& les ..fio. fignifier aux fe.rmiers &' à 1li
Communa'uté, avec ajournement. 011 difoit pour lui, qu'on
aurait dù juger-la nullité & l'inju!lice 'de la Sentence ,du
Lieutenant de Brignoles. L'on avait bleffé l'ordre fubaanJiel des jugemens, en fe contentant de prononcer fur' la
IUlI\ité & ~}QfJenMo~antlle'fQrld~t ail ;premier Jüge.' L'ordre
fonda me 1,1 talo.dcS, jugemens ea' que le.Juge cl quo ea dépouillé par ra Senrenée,"&' qu'au bénéfièe de l'appel tOllt
ce qui ea. jugé, ea poué àu Tribunal fupérieur. La caufe une
fuis jùgée ne peutlplus reyenir .u Ilr~JT\ier luge. Le Tnibunal
d'appel ca .établi pour donnero fan :,vceu.• fur :Ie- bien:" ob _le,
Jrialrîllgi. C'efl: la diCpouüoo )d~ J la Loi' Judex poJleaq'uam,
Çù en feroit-on, fi Je ~remier Juge fe contentait de dé.clarec
,
.
,{
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~u PALAIS DE PROVENC&
le mal ju~e, fans déclarer ·en même temps en quoïce mal
jugé peur 'conGner, & s'il ne faifoit lui-même ce que le premier Juge auroir dû faire?
Les. Ordonnances n'oot point diQingué; le premier Juge
ne peut plus juger ,:i& la. caufe ne peut plus :lui re.venir:,
jive benA, /ive male [unaus fit çfficio. Que la Sentence {oit
inj\lHe ou nulle, la chofe efi indifférente; le premier Tri.butial· 'ayant donné fon 'vœu fur le fonds, ne peut plus en
.çonnoîcre. On ne peut en exc,epter que le cas particulier
;de- t;i:'-nul1ité par jncompétence ,du .premier Tribunal, &
cette, exception ell: prife, foir dans la patrimonialité de nos
.jufi.i ces , fait 'dans' le mot de la Loi, qui nous apprend que
, :I~iJuge incompét,ènt nihil agit. L'appel d'une !impie nullité
.qui ne'-produi.t ~aucun préjudice, en un appel· fans grief. On
',Î:u,ùt'!voir ce,.qu'en dit l'Auteur dé l'Ordonnance de 1667
'mife ~n p'ratl.que', chap. 8, ·pag. 96. Il cite un Artêt dans
.l'e,fpece duquel l'appella!1t avait été bien & valablement
con,damn~;,la nullité étoit;-.de toute évidence. L'appellant
-concluait à la caffation, '& n'avoir point d'autre grief. Le
jugement du premier Tribunal fut confirmé par Arrêt du
Parlement de Touloufe de l'année 1649.
, ,La nullité de la Sentence n'empêche pas que le premier
Tribunal n'ait été rempli; & dès-lors la caufe rie peur plus
lui rev'enir. C'efi ce qu'a entendu l'Edit de Cremieu en l'arr.
23, qui.porte que le Juge d'appel ne doit pas fe contenter
de dire qu'il a été mal appointé & ordonné, & qu'il doit
.en outre juger au fonds, fans, en faire renvoi pardevant le
rrév'ôt qui aura. donné la Sentence, ni aurres Juges inférieurs.- Delà 1'Otdonnanc.e d'Orléans & telle de Blois, arr.
) 179, veulent que le Juge d'appel ne renvoye au premiel'
Juge que l'exécution. La Cour efi dans l'ufage confiant de
caffer les Sentences rendues par les Tribunaux des premieres
appellations qui féparént la queHion d'lnjuHice de celle de
·la nullité, & qui faifant deux procès de ce qui n'en doit
faireiqu'un feul, jugent en caffanr, Iji quefiion de nullité} pour
faire un nouveau .procès de la quefiion' d'iojufiice, fait
,
�6
louR~AL.
qu'ils la retiennent, fait qu'ils la renvoyent aux premiers
Juges.
"
,
•
Il eO: de princIpe que toute contraventIOn à la procedure
prefcrite par l'Ordonnance, donne ouverrure à la requête
civile. Bornier, Deni fart , l'Auteur de ,l'Ordonnance de 1667
mife en pratique, tous parlent unanimement le même langage. La requête civile ~O: ouverte, même pou~ ra,ifon de
Ja contravention aux Reglemens locaux & particuliers de
chaque Cour, parce qu'il eO: vrai .de di're que la procédu're
ordonnée par le Souverain' ou par fes repréfentans n'a pas
été fuivie.
.'
II ya encore moyen de requête civile, dans le cas de con~
travenrion à l'ordre fubllantiel & fondamental des jugemens.
II eO: cerrains principes qui ne font point dans les Ordonnances, & qui cependant en font la ba(e, & pour ai nu dire,
l'a me. Les prir.cipes élémentaires & fondamentaux ne (ont
~irconfcrits' pâr aucune loi. Les enfreindre, c'e'O: contrevenir à toutes les loix. Ici d'ailleurs la contravention ble1Te
une foule de maximes facrées & tenant au droit public;
elle renverfe l'ordre des Tribunaux. Sous tous ces rapports différens, l'ouverture de la requête civile ell: incontell:llble; elle l'eH: d'autant plus, que cette Iiullité préfente un vice encore plus .grave que l'omiffion de prononciation, pùifque le rénvo) à tout autre Juge que celui qui
devoit juger, & le dépouillement du Juge légitime, opere
de fa part, non un'e umple omiffion, mais, ce qui eO: eo- .
core plus grave, un.re-fus formel de pronon~er fur l'objet
principal & foncier du procès.
. QU'ant au fonds, on obfervoit que la délibération du ~
Janvier 1772 n'introduiroit pas le procè,; le litige était
formé; elle porroit, non un vœu fur ce procès, mais un
vœu tendaht à le 'finir, ufi vœu fur-'rout indépendant du mé:'
rite du fonds. Me: de Beaûmonr n'était eotré pour rien, dans
le procès qui fe trouvoit t6ut formé. Ainu Me. de Beaumont
n'étoit point fufpeél:: d'ailleurs comment auroit - il pu
l'être? Serait-ce comme habitant ou principal, allivré du
�DU PAtAIS DB PROV!NCi
7
lieu de CabaŒe?- Le Juge, membre de la Cité, n'en: poin~
fufpeél:;. il n'a pas à fe récufer lui-même; il ne peut pas non
plus êrre récufé. In caC/siÎ C/niveTjitatis alia ejl enim, dit la
Loi, caC/fa C/niveTjitatis, alia Jingu1orum, nec dehewr Jingulis
qC/od dehetur unive1itati, nec qC/od univeTjitas dehet, Jinguli
dehent. Si Me. de Beaumont n'éroit pas fufpeél: comme allivré,
il ne pouvoit non plus l'êrre comme vorant dans le confeil j
il n'exifie nulle différence entre l'allivré votant & l'allivré non
votant; l'un a.donné fon vœu, & l'autre en: cenfé l'avoir donné:
reftrtur ad univerfos quod pC/hlicè fit per majorem partt:m. Il en _
feroit autrement, fi les délibérans éroient mis en caure, ou fi
fans les metrre en caufe, on prenait des fins conrr'eux à raifon
de la délibérarion; alors l'Officier de jufiice délibérant aurait
déliLéré ou conclu dans fa propre caufe. Mais ici les délibérans n;avoient rien à craindre de l'événerpent du procès.
On né demandait rien, on ne pouvoit rien demander con[r'eux, nonobfiant leur affifiance à la délibération. Ce procès
~ les exceptions qu'il renfermait les laiffoient dans la claffe
des !impies allivrés; ils n'y prenofent & ne pou voient y
prendre intérêt qu'en cette qualité. Si l'allivré n'auroit pas
été fufpeél:, l'allivré délibérant dans le confeil du 5 Janvier
1772 ne pouvoit le' devenir.
.
On répondait pour les Fermiers, que les moyens de requête civile ne fon.t point arbitraires. On ne peut admettre
pour reIs que ceux énoncés. dans l'arr. 3'!- du titre 35 de
l'Ordonnance civile de 1667; fa difpolition efi précife; elle.
efi conçue en termes prohibitifs. Tout manquement de
forme n'efi pas un moyen de requête civile. Le Légiflateur
dit dans l'article ciré: Ji la procédure par nous ordonnée n'a
point été fuivie. Il n'y a donc qu'une contravention formelle
à la procédure prefcrite par les Ordonnances qui puiffe devenir un moyen de requête civile. Boutaric a même foutenu
que pour foaner un_moyen de requête civile; il falloit précifément contrevenir à l'Ordonnance civile de 1667, & que
la _contravention aux anciennes Ordonnances ne fauroit avoir
le même effet. Il dl: vrai que t(lUS les Commenrateurs n'ont
~as adopt~ ce~re opinion. Plufieurs ont appliqué ces mots 1
�8
JOURNAL
la procédur~ par nous ordonnée, à toutes les Ordonnances non
abrogées ou non révoquées:'
Or, il n'y a aucun texte de l'Ordonnance qui enjoigne au;:
Juges d'appel de cumuler les nullités avec l'injuftice du fonds,
& qui leur défende, en pronon~ant fur les nullités, de renvoyer le jugement du. fonds. Par la narur.e des chofes, le
fonds & la forme font deux chofes abfolument diilinaes &
féparables. L'une peut être jugée. fans l'autre. L'efprit des
an'ciennes Ordonnances, dans un temps où l'o'n avait un
refpeél: extrême' pour les formes, était de juger les nullités
préalablement aux conteHations foncieres. Delà étoit venU
l'ancien axiome: la forme emporte le fonds. L'on trouve dans
l'Ordonnance de 1667, que les Juges doivent préalablement
faire droit aux queHions d'e nullité, 'des procédures.
En matiere criminel1e, il. arrivè que l'on cafTe dtts procédur~s pour caufe de nullité, & que l'on renvoie le jugement du fonds- à tout autre Juge qu'à celui qui a jûgé. Si
en matiere civile l'on ne fuit pas la même maniere de procéd~r, c'eil que l'on ne veut p~s furcharger les parties d'une
double inHance; c'eH par principe d'équité que l'on a abrégé
& fimplifié à cet - égard la marche des procédures; mais
rien ne répugne à ce que la nullité fait jugée féparément
du fonds. L'inconvénient d'expofer les parties à de plus
grailds frais ne tombe qu'en confidération d'équité, & non
en infraél:ion des re.gles fondamentales de la procédure. Le
fecond inconvénient de renvoyer la même caufe à un Juge
qui jam funaus ejl qfficio, n'a pas toute Ja force qu'on lui
fuppofe. En effet, ce qui eH nul n'exi!te proprement pas:
nul/um dfè aut non effi funt quid unum & idem. C'eft un autre
principe que le Juge qui nul/iler agit, non agit. Conféquemment rien n'empêche qu'après un jugement déclaré nul,
le Tribunal d'appel n'ordonne Je renvoi; comme s'il n'y avoit
jamais eu de premier i~gement. Si, comme on l'a dit, Je
Juge qui a procédé nullement étoit dépouillé fans rerour,
comme étant fans pouvoir & fans Juri(diél:ion aucune fur Je
même fait, il s'enfuivroit qu'en matiere criminelle, on ne
pourroit renvoyer, après avoir ,airé une proèédure nulle.
.
,Cependant
�E 1\
fi C E. ,
9
Cependant pareils renvois font journellement ordonnés. Donc
ici rien n'attaque la hiérarchie fondamentale des Jurifdié~
-tions; car li la nullité & l'injufiice étoient effentiellemen't
& fubl1:antiellemenr inféparables, elles le feroient en matiere
criminelle comme en matiere civile. On' fépare le fonds &.
la forme en matiere çl'iminell,e, parce' qu'en matiere criminelle, où il ,s'agit de la liberté, de l'honneur, & fouvent
'de la yie d'un citoyen, on craint- mo"ins leS' lenteurs dans
la marche des procéd_ures; on cherche à maintenir fcrupuleufement toutes les formes qui peuvent contribuer à l'éclaircilfement de- la vérité. En matiere civile, où il s'agi"t d'inté~êts moins graves, on cuni'hle dans l'ufage la nullité &
l'injufiice, non pour fauver l'ordre des jûrifdiétions; qui n
feroie pas plus blelfé qu'en matiere c~iminelle, mais pour
épargner des frais aux parties, & pour apporter plus d'expédition dans l'adminifiration de la juftice.
~ Les aniC'le~ 142 de" rOrdonnance 'de Blois, & 2.3 de
l'Edit de Gremieu\ 'n.'ont point été faits pou"r prévenir ou
borner la' fréquence- ou la multitude des renvois ~ n)ais pour
prévenir & borner la faculté que les Cours ~'attribuoient
de retenir. 'Le IJégiflateur ne veut pas que l'on dépouille
arbitrairement les' premiers Juges. Toutes -les·fois que l'appel portoi~ fur quelguç ohjét -de procédLire ou autre -qui pou- "
\'oit~, être 'è!'iHinét de la caufe principale, le Juge d'appel ne
pouvait' rerenir la "cbnnoilfance de la 'caufe principale. C'eft
ce qui faifoit dire à Coquille que le droit civil différait en
cela du droit canon. "Quand les Juges d'appel cumulent la
nullité & l'injullice en jugeant, c'efi qu'il s'agit d'une nullité accidentelle & artachée à l'aéte mêrrie fournis à leur
jugement. Ainli une Sentence 'aura été rendue un jbur
fériat, le Juge d'appel calfera & jugera au fonds. Mais ici la
nullité fe trouv~ dans un aéYe diftinét & féparé de la Sen.
tence; elle fe trouve dans les concluiions du minifiere pu.
blic, c'efi-à-dire, dans un aéte préalable à la Sentence,
dans un aéte qui a dû la précéder. La Sentence ne s'efi
trouvée nulle que par 'raiton de conféquence, & non par
un vice qui lui fut propre ou inhérent. Le Juge d'appel 11
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Années 178z & jùiv.
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.(lHi le vice des _~onctll~o.n~ 1 ét~ .géfér§~,a _pu 1ne vqir ~e
ce Vice, [ans en~f~r dans le m~rite d'une Semence.• fjofil:l..rieure al,lX conc!ylions. Dans l'ordre de. la procédure, III
Juge d'appel auroi't pu prol10'tcer [ur le rout 'l~ retenir Ijl
'i:onnoi1fance dt; ~âr caure .prinçipale; Plais ilfJ'Y étqit pas
obligé, à peiqe 'd<: nullité.
n-' ~
,.. ,',; •
,
:Sur le fonds, on ,répo'ndoit que M_e.. d,e Beaumont 9~<EJOU
voit couclure comme Procureur du Roi dans une caure pan?
laquelle il avait y.pté .comme panie. Le défen[eur d'une ,c~uf~
'pourFoit~il êtr.:r Juge dags la m~me caufe, quoiqu'on n~
prenpe djreéh~ment & perfo:nllçllement contre lui aucune fil)
dans le procès? ·Jl n'dl- perfonne .qui.,ne conyienne qu'un
péfen[eur.ne peut d.evel1~r Juge. ~ci Me. de !3eaumont écoit bien
plus que défenfeur; il avait un i"térêt perfonnel & direét à
la chofe comnle' al1ivré. Il ,avoit voré comme partie intéreiTée, & il avo.it .:voté dans le confeil mUhicip~ll par conrraventioCj aUK Arrêts de R~glement, ,q~i dif6~den.t aux
Offi~i~~Si ,de' juf;!:' e~qe 's'immilèer dans les rehatges ,&1 dans
les affemblées wunicipales. p'ailleurs dès que Me, de Beaul1}ont
avoit prêté' [es lumieres comme délibérant, il ,ne pouvoit
plus pOFfer [on Juffrag.e comme Juge"de la délibératio,n. O~
la délibération ~rojr p~éci(ément l'objet.du,procès j1gité lpër~
devant le Lje.~telpnt, d~)3ri,gn9les.
,-1 " "J) .;0' ,c. ~ I,'{
. On r~pondoit 1'ou5,la Comt1\\l\1aut~!le Cabaffe, ql,le,ie9
loix font faites pour fixer les principes·lgéll~raux., & non
pOl-\r prévoir routes les hypothe[es. Si le Juge d'appel de~
vant lequel ori a infiruit le. fqnds & )a..forme coptrevienr,
en jdivi(ant l'un de" l'autre, aux prin~ip~s géQéraux de la
procédure, aux regles qui 'en réfulrenr, à l'ufage, à l'ordre
obfervé dans les Tribunaux, il aura aut.ant nY:jnqué .à la procédure ordonnée, que li par un texte précis cette divilion
fui avait. été interdite; il aura jug~. contra folitum judiciorum ordinem; & la loi romaine, à laquelle l'Ordonnance n'a
point dérogé en ce point, qu'elle a fuivi au contraire en'
établiffant ,ce moyen de requête 'civile, nous dit: prolatam
Sententiam, contra folitum Judiciorum ordinem, autorÎlatem
rei judicat~ non obtirlere. C'en précifémenr ce défaut d'all·
�DU
PAr; AlI S·
D Il ' PRO V B N C I!.
'Il:
toritë provenant dU,:manque de forme qui dbnpe lieu 'à 1a re·
'quête ,civile.
" .
1
1
Ce. moyen dl:. appuyé- d'ahord fur les -notions les plus
communes, fur l'u.[a!!'e conflant du Palais; les nullités lè cumulent -avec- le"fonds;' le Juge d'{Ippel qui connoÎt dè
nullitë,. doi~' connaître auffi' du' fonds;' la;'nullité d'~de Sèntence ne, peut pas âifpen(er di! pronodëer pàr' ~ÇlUve:lU iu 2
gement fur fan mérite f\lncier. Le premier Juge ayant connu
-du fonds, il n'y a pas de raifon pour que le Juge d'appel
n'en connoî/fe pas; renvoyer de n6uveau'j au' premier Tri.
bunal pour procéder au -fouât, non·feù.rem~rl[lc'eff,éternifer
les procès, mais c'eH tomber dans·1lihè iBêot\gruité 'monf~
trueufe; une même affaJre"feroit -pollrfLfiv·ie:ae~x fois dans, les
mêmes Tri!funaux:'
1;
',., < ,
•
Il n'eH'pas plus permiS aU' Juge d'appel-de ne-liatuer que fiJ c
les nullités, 'que .de ne prononcér que' fur une'partié du procès!
Le premier ifugë'aya'nt. IhtÎué, qu'oiqtle"d~une1'~'afJierç nulle,
le premier degré a été- rempli; 'dans le· fée 1 nd, lès parties
doivenr obtenir jufiice!r& fur la forme, & fur le fcjnds. Les
nullités de la premiere Sentence ne détruifent pas les défe~fes qui ont été ~onnée~. fur,le ~onds, ~ ~e premier Jup~
falfa!)t ce 911'e l'autre aurolt, dEI faIre, doit JUl1er le 'fcnqs. )
Il n'y a .que deùx ëxceptions Il ce principe'; Il'Ilne en mà-'
tiere criminelle:', &. l'aUlreen matiere d'incdmpétence, Au'
criminel l'importance de la matiere a fait regarder le moin(:1re manquement comme' préj.udiciel; le jùgement ne' peut
intervenir que ful'- ùtJe procédure fcrupuleufemènt prife; le
moindre vice ex~ge que.fllOti recommence.' li n1y a paim de
défenfes, point dlin-flruél:~ol}';-&: pa'r confé'quént point de jugement poffib1e; des qu'il s'eil gli/fé une" nullité. De même
dans l'hypolhefe de 'l'incompétence, le· 'Juge incompélent
ni/tif agit; il ne juge pa!/' hulleniem; il fait plus, il ne juge
point du lout; fan jugeîtHel?E n'a aucune autorité; tout ce
q~i a.'élé fait devant 'lui ~{ti comme, non advenu. Le Juge
d app 1 ne petit donc pas, Ilorfqu'll declare une Sentence incompétente, flatuer fur- lé fonds. Au contraire, lorfqu'i!' ne
rencontre qu'une Sentence nulle rendue par le Juge de la
la
B2.
�H.
~ ·r .. 1 0 N } l ! { A L I r
cr
inatier~ & t·d~$.l:pp~ties.;l' dev~Qt-I!l9ue1 I.e ,procès. a été inf*
truit la nullité ne faIt plus qu'une partie des grIefs; l'ap'"
pella~e ne releve.J~ nullité qu; parc~ qu'!l fe. plaine auffi
de l'injuHice. L'une & l'alltre etane dlfcu,tees, Il faue. donc
les juger toutes les deux••Or nulle ID) n ayant donne aux
Juges d'appel, pronopçane fur un jugenlent foncier, la faculté de déclarer n1.!lj &cde renvoyer au premier Juge pour
la réparation de la nullité & pour un nouveau jugement fur
le .fonds, il s'enfuit. ·que les Juges d'appel font aHreints 11
"juger. le fonds, p.~w~ q~l'ils font fai{is de tout ce qui a été
uaité pard~vam. le pr.elpier Juge, & que leur jugemene doit
prendre la place~ du fien.
Quel dl: l'efP.rie. des Ordon.nancees les plus recentes fur la
mariere judiciaire, celle de 1670 & 1667? Que tour ce qui
dl: d'innruél:ion, que tour ce qui ell: préparatoire & pré- .
judiciel foie porté 11 l'audience, parce qu'il ferait trop fâcheux de régler les panie? à éc.qir~ fur deux procès, l'un
fur la, forme "l'aurre fur le fo,nds. Si elles ont le malheur
de voir leurs conrellations Ce multiplier & fe divifer ainli
en diverfe.s branches, iJ ell de la fageffe du Léginateur &
,des Tribunaux d'a.doucir leur fon par la briéveté de l'inftruS:ion. Delà les arcic1e,s de .l'Ordonnai/ce de ;,1 670, qui:
veulene que' l'a!:!, porte à l'audience tout. ce qui ell appel
de décret & de taures autres ,inllruél:iolls. Delll les, ~rtic1es
de l'Ordonnance de 1667, qui veulene que l'on propofe
tout ce quj ell .exception péremptoire, incompétence, dé•
dinatoire, pour y être préalablemene faie droir. .
• Si en marief(~' d'appel on ,a nerrnis.-de cumuler les nullités avec le fonds, c'ell q1.!'on n'a pas penfé dans ce ..éas.
qu'il dûr y être préalablemene faie droit; s'il ne doit pas
y êrre préalablemene faie droir, il el!: inutile, il ell irrégulier, il ell nul de ne juger que la nullité. Delà un dilemme: ou la nullité a dû être jugée flparément, ou non;
dans, le premier cas, la caufe fur la nullité n'auroit pas dû
être réglée cumularivemene avec le fonds; il aurait fallu en.
faire la matiere d'un incident à l'audience; il Y a contraveneion & nullité dans le réglement de la caufe. Dans le
�D V
PAL AIS
J)
Il
P
li 0 V Il Nell;
113
recond cas, fi la nullité v'étoit pas un préalable' à juger,
]a nullité du jugement qui efr attaqué efr bien plus forte;
il n'a prononcé que fur une partie de la caufe, il en a abandonné la principale partie qui étoit route inHruite.
Arrêt du 1') Février 178 r , conforme aux conclulions de
Mr. l'Avocat-Général de Magalon, prononcé par Mr. le Préfident de Sr. Vincent, qui ouvre la- requête civile, condamne
les Fermiers aux dépens folidairement envers toutes les
parties. Plaidant Mes. S~meon fils, Portalis & Gaffier.
,
ARRÈT
II.
Les Fermiers des rêves & autres )mpcljitions établies par les
Communautés de Provence ne fom point foumis à tenir
des regiflres & à expédier des quittances fur papkr timbré.
N 17 8 • Henri Clavel, Régilfeur des droits qui compofent la régie générale, fit ajourner les Fermiers des
rêves impofées par la Communauté d'Aix, aux fins de les
.[oumerrre à tenir des regiHres & à expédier- aux redevables
des -quittances; marquées de fon timbre; les Confuls &
Communauté de la ville d'Aix prirent le fait & caufe de
leurs Fermiers, & la Province intervint dans l'infrance.
On difoit pour la Communauté d'Aix & pour la Province, que dans tous les baux à ferme, dans routes les
gefrions d~s Fermiers qui ont palfé, il n'eft jamais arrivé
ni que' la ville aie fournis les Fermiers de fes rêves, ni que
ces Fermiers fe foie nt fournis ou aient été fournis par qui
que ce foit à tenir des regifrres de leurs perceptions cotés
& paraphés par les Juges & fur papier timbré, ni à expédier aux redevables des quittances fur papier timbré.
Les Fermiers des baùx qui rombent en perception ne
'doivent compte de leur geftion qu'à eux-mêmes. Le prix
du bail une fois acquitté, fuivant les claufes convenues, leurs
obligations celfent; & pour les fO;Jmerrre au paiement du
E
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1:4
RNA L
•
• 'prix dé la' ferme, les Communautés n'opt be(oin que db
bail lui-même; la gel!:ion de la ferme el!: purement, d'adminil!:ration privée. A l'égard du redevable lui-même; le
Fermier n'eil & ne doit être tenu à aucune de ces formalités, qui n'ont été établies que pour l'intérêt burfal, &
qui ne rendraient qu'à impofer des en,traves fur, la ,levée des
impoutions, & à la rendre d'une exaébon plus difficIle & plus
, coûteufe.
En 1780 le Roi ordonna le renouvellement de divers
impôts déja établis, & notamment le renouvellement des
huit fols pour livre établis en 1771 fur touS les d'roits des
fermes. En la même année le Roi ordonna lIne mutation
de timbre par Lerrres-paténtes du 12 Août 1780; c'eil en
force dè ce titre qu'Henri Clavel perc;oit les dons gratuits
des villes, autremen~ dénommés droits réCervés ou les abonnemens faits par repréfentation de ces droits.
" Pourra ledit Clavel, difent ces Lettres-patentès, art. 9.,
" prendre communication, filême par fes Commis & Pré.
" pofés, tomefois qu'il le jugera à propos, des regiares
" tenans à la perception des droits de tarifs, oéhois &
" autres droits qui fe lel(ent au profit des Etats, Provinces,
" Villes, Communautés & Hôpitaux; des Princes, des Sei" gneurs particuliers & autres, & qui font affujettis aux'
" huit fols pour livre, 'conformément à ,l'E'dit du mois dè
,,' Novembre ln l ; à l'eJfet de quoi
enjoirit ~ tant aux
" corps des Etats, Provinces, Villes, Communautés, Hô" pitaux, Seigneurs particuliers, Officiers & autres qui font
" régir lefdits droits pour leur compte, qtl'aux adjudicataires
" qui les auront aJfermés & les percevront à leur, profit~
" de tenir & faire tenir par leurs Receveurs, Commis, &2
" Prépofés, des regi!l:res en forme, cotés & paraphés pal'
" les uges 9ui ont droit ,de connoitre de la perception
" defdlts droits, & d'en delivrer aux redevables des quit" tances due ment libellées, lefquels regil!:res & qUirrances
" feront, conformément à ce qui el!: prefcrit par l'Or:'
" donnance des Aides du mois de Juin 1680, en papier
" marqué du timbre dudit Clavel: voulons que 1 [dits Ré.
ea
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P A 1. AIS D Il ',P R a VEN C I!;
il)
gt/fel)rs, Adjudicataires ou Fe;miers' foient.' tenus de repréfencer lefdits· regiUres à routes reguifirions, & fans déplacer, aux Direél:eurs & Commis dudit Clavel, ainfi gue
les lerrres de voiture, acquits, foumiffions, congés &
J'•• autres expéditions relatives auxdites perceptions, à peine
" de 1000 liv. d'amende contre les Régiifeurs ou Adjudi" qtaires qui n]auront pas établi des regiHres, & de S00
;> Iiv. contre ceux des Receveurs & Commis. defdits droits
" qui auront négligé de tenir ces regi!hes ou refufé de les
" communiquer à la premiere. requifition.."
. L'ar,t. II veut qu'en conformité de la Déclaration du 20
JanY.ier 1699, les regi!1:res qui auront fervi. à la perception
des droits des termes du Roi & à celle'des droits, tant. de
[es' autres fermes ou régies paniculieres, que de celles des
.Etats, Provinces, Villes, Communautés & Hôpitaux, & des
Seigneurs fur les objets fujets aux droits régis par ledit
Clavel, foient confervés dans les 'bureaux defdites fermes
PJ.l régies pendant dix années après l'expiration des baux ou
traités, pour être repréfentés à route requifition.La Cour des Aides dans fon Arrêt· d'enrégiUrement inféra cerre claufe; fans approDatiiJ/l néanmoins des Edits, Déclarations, Lettres-patentes, Arrêts & Réglemens non enrégip'rés.. en la Cour. A J'arr. 14, qui accorde la faculté d'en~te'tenir ou' de réliIier. les baux, abonnemens ou compofitians qui pouvaient exifler, la Cour ajoute; la c1rarge 'lue
les aDonnemens des divers droits énoncés dans le[dites Lettt;es-patentes , faits par la Province, tiendront & fortiront leur
plein & entier effet, & continueront d'être exécutû. -A l'art.
8, qui accorde aux Prépofés, Commis & Employés de
Cl'!vel, la communication des éxemprions & privileges accordés aux Employés des fermes' & régies par diverfes OrQonhances, la Cour ajoute encore: la charge 'lue les Prépofès dudit Henri Clavel ne pourront jouir. d'aucune exemption ni d'aucuns privileges.contraires aux conflitutions du pays
de Provence, & notamment d'aucune exemption de la taille &
des autres impofitions r.epréfentatives ou fervant de fupplément
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d'icelle, & 'lui font, ainfi 'lite la taille, purement réelles en
I:?rovence..
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Une loi qui auroit exigé la néceffite des regmres
es
---- quirrances en papier timbré pour route efp~ce de perception de droits fans limitation, pour tous droHS quelconques
pereus au profit des Villes, Communautés, Provinces, Etats,
fan; défigner par quelque addition que les rêves aurorifées
par le droit municipal du pays en éroient exemptes, elÎt paru
à la Cour mériter une modification; elle ne l'auroit point
omife ; elle fut convaincue que cet article, quant à nos rêves,
n'en étoit pas fufceptible, & qu'il n'avait "ucun rapport à
la Provence, qui tacitement étoit "naintenue dans la fran':'
chife dont elle avoit joui jufques-là, relativement au timbre
de ces regilhes & de ces quittances. D'ailleurs cet article
ajoute que pour qu'Henri Clavel fait aurorifé à prendre' communication des regilhes de la perception de ces divers
droits, il faut que ces mêmes droits foient de telle nature'
qu'ils foient airujerris aux huits fols pour livre établis par les
précédens Edits.
Tels font donc les droits pour lefquels il ell: permis à
Clavel de faire des perquifitions dans les regiŒres des Fermiers, & à taifon defquels il fapt que. ies regifires & les
quirrances foient en papier timbré; ce font ceux. que l'ôn
peut difiinguer à ce double caracrere. Les droits que les Villes
'&' 'Communautés de Provtnèe impofent fur les confommations, ne (ont point airujerris aux huit (ols pour livre;
ces droits ne font donc 'point dans la claire de ceux pour
le(quels il était permis à Clavel de faire des vérificationL
'
,II eR de principe que la confiitution du pays, (on ré..:
g,.me, la forme en laquelle il contribue au~ charges de
l'Etat, font dirigés de telle maniere, qu'il n'efi permis à
p~t~onne de pénétrer dans l'exploitation de (es fermes munlclpales; c'ell: au corps entier ode la Province; c'ell: au
pays que le Roi s'adreire, toutes les fois que des néceffités
urgentep le forcent à recourir à des fuhfides 1 ,'ell: le pays,
c'e~
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PALAIS
DIl
PÎlovIlNCB.
17
c'eIl: la ...nation qui traite avec le Roi, qui' content à payer
le iuDfide qui lui eft demandé; c'ef!: le pays qui paye direél:ement au Roi, ou par un abonnement annuel, ou par
un contingent momentané. Le pays fait enfuite la répartition de la fomme acquittée au Roi fur les Communautés
d'habitans', & chaque Communauté a la' faculté de fe
procurer. à elle-même le montant de la fOlt)me à laquelle
elle efl: loumife, en établi1fant dans fan diHriél: le genre
d'impofitions le plus' relatif à fa pofition. Telle Communauté impofe fur les fonds, telle autre fur les fruits; il en
dt qui préferent une impofition fur les denrées & fur les
marchandife~. Ce droit leur appartient à titre de droit .conftitlltif, à titre de patrimoine. Attribuer à un Régi1feur un
droit de furveillance, un droit d'infpeél:ion fur la levée des
impofitions des Communautés, foit que ces imP9fitions
portent fur le fonds, fait qu'elles portent fur les confommations, ce feroit lui arroger un pouvoir delit le Souverain
lui-même. ne pourrait ufer fans attenter à cette liberté
confl:itu.tioilOelle, à cette ind.épendance nationale qui fait
partie de ces loix, de ces us & coutumes dont le 'SouveT"in lui-même jura de maintenir l'ob[ervation lors du trairé
folemnel qui unit 'le pays an Royaume.
Sous ce rapport, le Régi1feur n'db.. pas recevable dans fa
demande; fa prétention ne peut' qu~alioir' en vùe un motif
d'inrérêt pécuniaire; on ne peut lui en fùppoferl d'autre; fi
elle étoit accueillie, des profits immenfes lui feraient af. furés au grand détriment de ,toutes les Communaljtés, qui
déja fuccombent fous le poids de leurs charges; elle introduirait encore l'abus effrayant des taxes impofées filr les
r.êves, que plufieurs Communautés feraient obligées ,d'abandonne!' ,quoiqu'elles n'eu1fent d'autre re1fource que· cell? de
l'impoGtion fur les denrées que confomment leurs habitans.
Dès-lors que deviennent tous ces monu.mens anciens, tous
ces titres de la patrimonialiré de cette forme d'impofer?
Il. Y. a une différence fenfihle entre l'impofition en rêvesdont nos Communautés fe fervent pour acquitter leurs charges, & celleéonnue ailleurs' fous le nom _& la qualificaAnnées z78~ & Juil'.
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tion de deniers d~oél:rojs. Cell -ci n'ell: au vrài qu'une grace;
qu'une faculté accerdée par le Prince à 1 des Villès, à des
.,Corps, à des Communautés de percevoir un droit fLlr telle
.efpece de marchandife, comme il pourroit 14i-même le percevoir. Les rêves au contraire ne procedent point d'une
pure éopceffion; elles font parmi nous de droit confiitutif &
national. Le pay.slde Provence en a joui dès l'inilant, pour
ainfi dire, qu'il s'dl: fomié ; il n'en ef!: redevablë qu'à luimême, à fes loix. Qu'efi-ce donc que cet~e obligation à
laquelle 'on voudrojr,airujettir les Fermiers des rêves, fi ce
f n'ef[ un
impôt direél: fur les rêves? Il eil impoffible d'aCfujerrir les Fermiers à tenir des regifires, à expédier des
Auittances en papier timbré, fans érablir une furcharge de
~roits , ,qui néceiraire.ment tourneroit ·au détriment de l'impolition elle-même, qui en rendroit l'exploitation plus difficile & plus coûteufe.
, Ce n'eCl! pas d'aujourd'hui que la finance a tenté d'affujettir nos) rêves à· ,des impofitions royales. En 1704 le.
Roi établir. des Infp.eaeurs aux boucheries, & leur attribue,
à titre d'émolllmens, un droit fur chaque bœuf" vache,
mouton & a.utres befiiaux defiinés aux boucheries; Sa MajeHé réunit ces offices aux villes & bourgs pour lefquels ils
avoient été établis; la:. Pr.ovence fit des repréfentations, &:
'par Arrêe .du u'Onfeil !du, 1.9 Août de la ,même année, elle
fut m.aintenue dap$! leJ~dr.oit d'établir des impofitions fur les
denrées, même fur': la ,v:iànde ,. conformément à fes Statuts,
lluxquels il ne pourra ttre cl l'avenir dérogé ni fait aucune autre
impr!fition fur la viaude ou autres denrées, pour quelque caufe
& prétexte que ce fait.
l.
. En 1708 le Roi crée 'des offices. dè Confervaeeilrs de regiHres, des officl:s de Contrôleurs des exploits, & des offices de Contrôleurs des deniers d'oarois. 'Le pays abonna
les deux premieres claires de ces offices, mais elle réclama
contre la eroilieme; & .fur Cès repréfentaeioos, Sa MajeHé
la ,fupprima , & déclara que la Pr0v~nce n'étoit point flljette
à cette efpeoe ,de droits.
'.
En Septetbbre 1719 le Rbi don'n'a un Edit, portant éta-
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19
bli1fement d'une (\lbvention générale; il ordonne en l'art. 10
une levée de quatre (ols pour livre {ur les oarois; la ProYin,ce fit des remontrances (ur cet article, & l'Edit fut retiré. Lor(qu'en 1763 une déclaration du 2 N.gvembre eut
ordonné la levée de nouveaux (ols pour livre (ur les droirs
de fermes, oarois & autres de cette natu.re, Sa' Maje!té
excepra expre1fémenr, par une di(pofition particuliere, les rêves
& impqfitions fur les confommations & les fruits fjue les Communautés du pays de Provence déliberent d'établir fuivant les
ufages du pays.
\
Lor(que les (ols pour livre (ur les droits des fermes &
fur les oarois furent portés en 177 r à huit, Sa MajeHé fit
annoncer à l'a1femb.1ée que les droits des fermes des Communautés de Provence, leurs rêves & impofitions (ur les
confommations &. les' fruits ne pouvoient componer l'éra:"
bli{[ement des' fols pour livre impo(és fur les oétrois. L'intenrion de S,! MajeHé 'a donc été conftal)lment dans tous
les temps d'affranchir les rêves de toute éfpece de raxe ,
comme érant inconciliable avec. cerre (orte d'impofirion.
Comment donc vouloir aujourd'hui l'atrujettir à celle du papier tim~ré?
'
•
En 1762 le Roi donna une Déclaration, port~nr qu'à \
l'avenir les· rôles des tailles & autres impofitions acce{[oi.
res, enfemble les premierescontrajnres, démeureroient exempts
des droits de contrôle, papier timbré & petit (cel. Le motif
de cette détermination fe trouve dans le préambule de cette
Déclaration; le Roi y déclare fjue toujours occupé du foin de
venir .aù recours de [es jùjets taillables par tous lq moyens
'lui peuvent [e concilier avec les befoins de l'Etat, il a corifidéré que [on attention devoit principalement ft porter li diminuer autant qu'il ejl poffi'ble les frais qu'il a été d'Ilfage de
leur faire' jùpporter pour raifon de l'affieite & des recouvrem,ens de la taille ê' autres impqfitions acceJfàires: nous avons,
ajoute Je Légiflareur ,penfè ell confèquelice que de même que
celà [e prati'lue. par rapport aux rôle$ de la capitation & des
ving~iemes, ceux de la taille & autres impofitiolls accej[oires
.
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•
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10
t1 R. N AL,
ou 'lui la repréfentent fous d'autres dénominations; pouvoient
être faits en papier ordinaire G~ non timbré.
Un Arrêt du Confeil du 4 Février 1773 avoit fournis a.u
papier timbré & au contrôle les premiers exploits concernant
la taille & la capitation, quoiqu'ils en eutrent été a/fnlnchis dans tous les temps. Le pays de Provence rétlJffia
l'exécution de toutes les loix antérieures; & par autre Arrêt
du Confeil du 22 Novembre '1774, le Roi ordonna que lèS
contraintes & les premiers commandemens jignifiés la requête ,1
foit des Tréforiers, foit des Col/ec?eurs des tait/es d"s C0172/J1unautés .de Provence, & qui ont pour objet le recouvremen!
de la taille, capitation & autres imptfttiohS, enfem6le tous
autrl;s ac7es &. exploits qui feraient de nature
pouvpir être
faits par des chefs de gamifon dans les lieux où il y en
a, feraient & deniéureroient exempts de formule & de contrôle.
Or les regill:res des F~rmiets des réves & les quittances
qu'ils expédient .font aux rêves ce que font les rôles à la
taille; fi les rôles de la taille fone exempts du papier timbré, les regifires & les quittances employées à l'exploitation des· fermes des rêves participent à la même exemption, & doivent nécetrairement y participer.
On répond oit pour le Régitreur, que tous les Receveurs
de-droits aux entrées font affiljettis à tenir des regill:res &
quittances en papier timbré, fuivant les Lettres-patentes du
S Juillet 1780. Le Roi ne s'efi pas borné 11 exiger des re-.
giHres timbrés pour la levée des droits d'oarois; il ya fournis en même temps les Receveurs des autres droits. Les
droits de tarifs, les droits d'oarois font compris dans les
Lettres~patente's par une expreffion propre & particuliere:
pourra prendre communication des regiftres fervans a la perception des droits de tarifs & d'oc?rois, & autres droits qu,
fe leveront au profit des Etats, des Communautés, des Princes,
des Seigneurs particuliers & autres. Ce n'efi donc pas feulement pour les droits (Je tarifs & d'oarois qu'il faut tenir
des regiHres, mais encore pour les autres droits aux en~
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a
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PALAIS
DI!
PIlOVENCIl;
2.I
trées; 1'011 ne peut pas difputer .que les rêves ne foient
des droits de cette nature; ils font néce:tfairement compris
dans l'expreffion générale, & autres droits.
Ce n'ef!: pas non plus feulement pour droits d'entrée
levés au profit des Villes, Etats, l'rovinces & Communautés,
mais pour ceux encore qui fe levent au profit des Seigneurs
particuliers & autres, ce qui embra1fe les Receveurs quelconques de d'raits d'entrée en quelque qualité'& fous quelque dénomination qu'ils agi1fent; les Fermiers y font même
expre1fément énoncés par ces mots: tant à ceux qui fo;u
régir lefdits droits pour leur compte, qu'aux Adjudicataires qui
les auront affermés & les percevront à leur profit...... Voulons
que lefdits ,Adjudicataires ou Fermiers foient tenus, &c.
En faifant 't'énumération des droits fujets au timbre, Sa
Majeflé les a d'abord tous compris par ces termes, & autres; enfuite elle a dit, {; qui font ajJùjettis aux huit fols
pour livre, parce qu'elle a voulu y comprendre même ceuxlà. Ces mots {; autres font d'abord un fens à part qui embrafie tout j néanmoins s'ils avaient été fuivis immédiatement du relatif, ne fairant enfemble qu'un corpsj ils I)'auraient qu'un même fens; mais ils en font féparés par le
mot &, qui dans ce cas forme une disjonélive, & 110n pain t
une copulative j car la diélion & ef!: prife fouvent dans les
loix pour disjonélive, quand le fens évident du difcours
fexige: or elle fait ici une féparation ou disjonélion bien
fenlible, pllifque fi le Roi n'ayoit voulu foumettre au timbre que les droits dont on prend les huit fols pour livre,'
il n'avoit befoin que de dire, & autres qui font ajJùjeuis;
mais ayant mis un & entre deux, ce ne peut avoir été que
dans la vue de dire quelque chofe de plus que ce qui précédait, & d'ajouter à tous les droits énumérés ceux encore
fur lefquels on leve les huit fols pour livre. C'ef! le vrai fens'
de cette oraifon, & autres & qui font a.ffùjeuis.
La loi a fu qu'il y avait des lieux & des perfonnes où
fait par tin long ufage, fait par des raifons particulieres ,
comme celles de n'être comptables à qui que ce fait, on
était en coutume de fe pa1fer des regif!:res, & elle a voulu
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Jou
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qu'à l'avenir on ne pût s'en difpenfer; c'el!: pourquoi,. 11.
l'effet d'établir le timbre, elle a enjoint de tenir la matiere fur laquelle le timbre pitt être -appliqué: enjoignons
de tenir de·s regiflres, enjoignons de dilivrer des quittances
aux redevables. ,
, Par Arrêt du 1 S Février 1782, prononcé par M. le Premier Prélident, conforme aux conclufions port~es par 'Me.
Pacquet fubfiitllt, la Cour des Aides, fans s'arrêter aux •
procès-verbaux & exploits d'affignation d'Henri Clavel, mit
fur iceux les Maire, Confuls & Affeffeur d'Aix hors de Cour
& de procès; & ayant tel égard que de raifon à la requête
d'intervention des Procureurs des Gens des Trois-Er.at5 de
la Province, fit inhibitions & défenfes à Clavel de rechercher les Fermiers de~ rêves & impofitions établies par les
Communautés du pays de Provence pour raifon des regifires
de leur ,perception & des quittances qu'ils délivrel)t aux re~
devables, le tout en papier non timbré, à peine de- 1000,
liv. d'amende, caffàtion des verbaux qu'il pourrait dreffer,
dépens, dommages & intérêts des parties, & d'en être
informé; condamna Clavel aux dép~ns envers toures les
parties. Plaidant Mes. Alpheran; Portalis & Leclerc.
ARRÊT
III
L'on peut fùfPendre le jlfgementde l'appel d'une Sentence in~
terlocutoire, pour ordonner un fècond interlocutoire' portant.
'fu.r un autre objet, mais qz:i tend il éclaircir le procès.
Aurel, habitant de la Vallée de Rarèelonette, prétendait avoir un droir de paffage dans un chemin qui
traverfoit 'Ia propriété de Beraud; celui-ci le lui difpure.
Maurel offre à proùver que depuis dix, vingt, trente ans &
plus, lui & fes au'teurs avaient paffé par ledit chemin. .Reraud répond que le droit de paffage efi une fervitllde difcontinue qui ne peut prefcrire que par une poiTeffion im1llé~
M
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PAr. AIS
.n B
PRO V B N C B;
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moriale. Le Juge local adopte fon fyflême, & foumet
Meurel à une preuve immémoriale. Maurel appelle de cette
Sentence pa'l"devant le Préfet, -qui la confirme. Maurel appèlle encore pardevant la Cour, & renouvelle fon tyfl:ême,
difant que fa polfeffioQ de dix, vingt, trente ans & plus,
fuffit pour procurer un droit de palfage qu'il regarde comme
une fervitude continue. Beraud pediHe à· foutenir la jufl:ice
'.le la Semence. C'efl: une fervitude difcominue, dit-il; il
faut donc, pour la procurer, une polfeffion immémoriale.
Après ces premiers débats refpeél:ifs pardevant la Cour,
Maurel offre un expédient, par lequel il demande à prouver
que le chemin eH: ·public. Beraud offre un autre expédient
qui adopte la preuve de la publicité offerte par Maurel ; mais
il demaude la réformation de la Semence du Préfet, c'efl:-àdire que Beraud, qui avoit foutenu 'la jufl:ice de fa Sentence
jufqu'au moment de l'expédient, veut qu'on la réforme, &
Maurel qui avoit appellé de cette Sentence, la lailfe fublifl:er
pal".fori' nouvel expédient, jufqu'à ce qu'il ait procédé à la
preuve de la publicité.
La Chambre des Enquêtes fut d'avis unanimement de
recevoir la preuve de la publicité, & la réferve des dépens;
mais elle fit partage d?opinions fur le fon de la Sentence
p'appe1. .Les uns étaient d'avis de la réformer, les- autres
étoien~ d'avis'de fufpéndre le jugemem d'appel, & de prononcer par avàm dirè droit.
.
. Le partage fut porté en Grand'Chambre. Mr. le Confeiller
de Franc fils, Rapporteur, y foutenoit la réformation de la
Sentence, & Mr. le Confeiller de Garidel, Compartiteur,
fourenoit l'avis comraire.
. Mr. ie Rapporteur difoit, pour fou tenir fon opinion, que
Maurel offrant la preuve de publiciré, avoit 1 renoncé à celle
de la polfeffion. S'il eût voulu fe réferver la preuve de cene
polfeffion, il l'auroit offerte dans fort dernier expé;iient, en
offrant les preuves de la publicité. D'ailleurs, quand Maurel
fe' feroit réfervé la, preuve de la po1feffion, il fe feroit réfervé une, preuvé qu'il ne .peut plus avoir droit, de faire,
parce qu'en o·marit la preuve de la publicité, il faut re-
1
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JOURNAL
noncer 11 celle de la poffeffion. On ne peut pas founiettre
Maurel à ces deux' preuves, fans faire deux interlocutoires
pour le même objet, ce qui dl: contraire aux regles. Il
faut donc, en recevant l'expédient qui porte la preuve de la
publicité, réformer la Sentence qui porte celle de la poffeffion. Quant aux dépens que Mr. le Rapporteur réfervoit
en réformant la Sentence, il croyoit que dans ce cas-ci
cette façon de prononcer ne pouvoit para~{re irréguliere ,
parce que définitivement celui qui fuccomberoit payeroit les
dépens.
Mr. le Corn partiteur au contraire difoit que Maurel, en
offrant la preuve de la publicité, n'avoit pas renoncé à celle
de la poffeffion, puifque jufqu'au moment de l'expédient il
avoit demandé qu'on réformât la Sentence,. mais au depuis
il s'étoit bien gardé d'en demander la réformation, parce
que l'exiflence de cette Sentence lui confervoit le droit de
faire la preuve de la poffeffion. Le fyHème de MaureL étOit
de prouver que le chemin étoit public; mais dans le q~s qll'il
ne pût pas y parvenir, il fe réfervoit de prouver qu'il avoit le
droit de paffage dans le chemin qui trave'rfe la propriété de
Beraud. Il efl: poffible que le chemin ne foit pas public,
& que cependant Maurel ait un droit de paffage dans le
bien de Beraud ; & fi l'on réformoit la Sentence du Préfet,
on p~iveroit Maurel de faire jamais la preuve de la poffeffion, qui feule lui fuffit pour établir fon droit, & tout dé.,
Rendrait de la preuv.e portée par l'Arrêt, qt;i feroit celle de
la publicité du chemin.
Il eH donc jufie de fufpendre le jugement de l'appel. Si
Maurél prouve que le chemin efl: publio, alors on réformera la Sentence, parce que la preuve de la pQffeffioJ'l devient . inutile; & jugeant définitivement, on donnera ~f
Maurel un droit qui lui efl: commun avec tous les autres
habitans.
Si au contraire Maurel, ne remplit pas la pJeuve de la
• publicité, on ordonnera la preuve de la polTeffion; & fuivant comme les Juges regarderont la fervirl!Qe du paffage,
ou c0t:nme continue, ou comme difcontinue, f\livant la preuve
-
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v Il NeIl.
à laquelle on foum"eerra Maurel, de dix, vingt, trente ans,
ou immémoriale, on confirmera ou on réformera la Sentence.
La grande objeétion à norre opinio~ ( continuait Mr. le
Companiteur) eft celle de dire: vous voule l ordonner interlocutoire fur interlocutoire. Poinr du tout: ces deux preuves fane diHinétes & portent fur deux objets différens; l'une
tend à prouver la publicité, l'autrè tend à prouver la poffeffion. Celle portée par l'Arrêt tend à légitimer la queHion:
ou le chemin eH public, ou il eH dans la propriété de Be- ,
raud. S'il eH p~blic, Beraud n'eft p.oint partie légirime; il
n'eH .point recevable à venir s'oppofer au palfage de Maurel
dans ce chemin. S~il dl: dans la propriéré de Beraud, il faut
que· Maure! prouve qu'il eH dans le droit d'en ufer. C'el1:
la preuve portée par la Semence. Ce fom donc deux preuves
(éparées, qui tendem à deux buts différens. Ce n'eH donc
point ordonner deux. interlocutoires fur le même objet.
Mr• .le ,Compartireur obfervoit encore que l'avis de Mrl
le Rapporteur r~formoit la Sentence, & réfervoir" cependant les dépens. Ou une Sentence eft juH:e ou injuHe, ou
elle dépend de. certains éclaircilf~mens. D~ns le premier
cas " on la. confirme, ert condamnant l'appellant aux dépens.
Dans le fecond, on la réforme, en condamnant les intimés
aU)( dépens. Dans le fl'oilierne, on les réferve. Mais pour~
quoi, en réformatit la Sentence, réferver les dépens? Mr. le
Rapporteur entroir daQs ce fyH:ême, & il n'en différait que
par la prononciation.
.
L~ partage f\![ vuidé ,~l]. Grand'C\1arnbre, conform~ment
à l'avis de ,Mn. le_Compartiteur, préfidan,t;Mr.. d~ La Tour)
par Arrêt du ':7 Avril 17. 8
-2.,.
,
)
,
1
•
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''Années %782,
f)
fu/v.
D
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'
•
A R RÉ T
IV.,
Peut-on conJlruire des 1 ouvrages dans le lii des 'lVieres ou
dans'un endroit public, fur-tout fi ces ouvrages peuvent nuire
aux v o i / i n s ? '
'
E 19 Novembre 1776 , Jofeph Arnoux, Bourgeois du
lieu de Fayence,"fe pourvut pardevanr le Juge du même
lieu contre Jofeph L'augier, en 1 injonél:ion de démolir une
muraille conHruite ,dans le corrent ,de Banagon, d'enlever la'
terre & le gravier jettés dans la riviere de Camartdoule, &
de, rétablir les lieux dans leur ,premier état; il demanda le
rapport préparatoire, fauf les dommages-intérêts.
Les parties fignerent un compromis le 2, Mars 1777; ils
nommerent deux Experts-Arbitres pour décider le procès,
fes circon!1:ances & dépendances. !li y eut plufieurs demandes
& requilitions de part & d'autre, des -enquêtes prifes, un
rapport dreffé, un tiers Expert appellé, & une Seotenl!e arJ.
bit raie rendue. Arnoux appella du chef de la' Sentence qui
ne condamnait pas Lallgier 'à enlever les pierres qu'il avait
eota/fées dans la riviere de Camandoule l, ,&.de celui relatif
à la demande en démolicion de la muraille conHruite dans
le lit de Banagon, & au rétal::!lilfement des lieux dans ce,tte
partie. Laugier accorda le chef concernâ-!:lt l'enlévement des
pierres entalfées' dans le lit de Camandoule., .mais il refufa
la démolitioh de"la muraille ""s'lippuyant for. ,la ,déclaration
d'un des Experts & du tiers Expert', portant,que fa muraille
étoit con!1:ruite dans un fonds à lui appartenant, & qu'elle,
- n'a.voit pas nuit & ne pouvait pas nuire à Arnoux. Celui-ci
prit enfuite la voie du recours' en droit envers cette déclaration.
,On difoit pour lui, qu'il n'ell: pas permis de faire aucun
ouvrage dans les lieux publics; in loco puDlico prœtor prohibet œdificare & interdiélum proponit. LI, ff. n~CJuid in
L
�D U PAL AIS
DE
P'R 0 VEN C E.
2'7'
70co pub/ico. Uimérêt public & celui des particuliers s'y
appafent également, parce que les lieux' publics priwitorum
ufibus deJferviunt. L. prœtor 2., §. I I & 16, if. eod., & L.
6 eod.; Dornat, Loix civiles, liv. 2, tit. 8, fea. 3, n. 13,
pag. 19)'
C'eH fur-tout dans les' rivi~res & dans les torrens qu'il
eft défendu de faire aucune entreprife. Le cours des eaux
eft de droit public. Delà viennent les défenfes à tout ri.,
verain de faire aucun ouvrage qui nuife au' cours des eaux,
.& l'attention des loix à faire détruire tout ce ,qu,i peut s'y
oppofer, & à faire élargir & approfondir les lits des ri~
vieres. ( Ordonnance des Tréforiers de France du 29 Août
1743, n. 26; La Rocheflavin, liv. 3, tir. 22, & liv. 6, tir.
42, pag. 270 & 441; la Gazette des Tribunaux de 177), n.
l "pag. 1). )
,
'.
Tout ce qui peut porter le moindre dérangement au
cours des ellUX, non ad 'luantitatem a'luœ tantùm, fèd ad
- modum & rigorem curfils ?l'luœ, eft également défendu;' il
fufEt que depreflior vel arc7ior fiat a'lua, ac pel' !zoc rapidior,
fuivant la Loi ait .prœtor, llnica, §. 1, 2, 3 ,if. ne'luid infiu.
mine pub/ico fiat.
Les Expert~-Arbitres ont rendu hommage à ces principes,.
en conqilmnant Laugier à enlever la terre. & le gravier jettés
dans la riviere de Camandollle; Laugier les a reconnus, en
acquief/iant à ce chef de la Sentence. Pourquoi contefte~t-il
la démolition de la muraille conil:ruice dans le torrent d(l
Banagon.
Tout ce qui eil: fait da'ns un lieu public doit étre détruit,
fur-tout quand il peut en réfulter quelque .dommage pour
les voifins; le ,voifin peur toujours s'en plaindre: ne'liLe el/lm
rippœ cum incommodo accolentium muniendœ film, dit le §.
6 de la Loi ait prœtor l , ,ff. ne'luid in fil/min. S'il eft juil:e qu'un
riverain fe mette à l'abri des ravages des eaux, il ef! juil:e
auffi q~'il ne le faire pas au préjudice de fe~ voifins; ils
n'ont pas befoin pour fe.plaindre d'avoir déja fnufrèrt des dom~
mages, il fufEt qu'ils puiirent en fouffrir: de rippâ fiuminiSi
pub/ici munienda datur interdic7um ,fleut 6' datl!l' interdù;7um
1
D~
,
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10uiNAi
r
de viâ pUblicâ recipiendâ; ha:c ac7io locum habt:t in damno
nUlldùm fac7o, opere tamen jarn fac70, fLOc dl de eo op~re ex
'luo damnum limetur. Cel!: Id difpoficicn de la LoiJi 1I!is l ,
§. i ,if. de aquti & afjua: pllPViœ arcendœ ; de la Loi pr.uar 2, §.
)' 6, 7 & 8,.if. nequid in loC() puflico; de la LOI l , §.
q., 16 & 17 ,if. de novi operis nUlltiaiione : auffi·le riverain
ne peut pas munire rippam, qu'il ne pourvoie 11 l'imérêc de
[es voilins: qui rippam vuit munire, die le §. 3 de 1:1 Loi l,
if. de rippd muniendti, de damno futuro doDet ve! cavere,
vel fatifdare flcundhm 'lualitaum per(onœ......
. Tomes les fois que par ùoe nouvelle- œuvre un voiGn
touche au cours des eaux, de maniere que depreflior vet
arc7ior ac rapidior fiat, il eft dans le cas de l'inrerdic: nec
enim arc7a aqua concludi potdl, die Godefroy in reg. z ,if.
ne'1uid in flum., quin prejfior fiat feu arc7ior & ita rapidipr.
Il ell: permis munire rippam; mais ce doit être ne'1uid in
vieinum immiuatur , dit Duperier dans [es notes manu[crires,
va. rivage, d'après la Loi fic';'t ,if. fi ferviws villdic tur; autrement il eH tenu de roUt le dommage qui peut en réfulter;
qui occafionem damni dat, damnum dediJlè videtur.
Le fieur. Laugier a-t-il fait de nouvelles œuvres dans le
vallon de Banagon? Elles doivent être démolies; elles doivent l'~tre, quand même elles n'auraient pas nui & ne pourroieut pas nuire au fieur Arnoux, parce qu'il fulEt qu'elles
aient été faites dans le lit de Banagon, &"que cda' fait co.nftaté par l'enquête & par Je rapport.
Le recours en droit déclaré par le fieur Arnoux ea: de
loute jultice; ce recours aJieu, fi les Experts ont jugé un
point de droit, difent le Commentateur du Réglemenc de
la Cour, rom. 2., pag. 66, & le Commenrateur de nos
Statuts, rom. l , pag. 362, n. 2; s'ils ont mal interprété les
aL"'les, les enquêtes, les jugemens, s'ils-- en ont tiré des' conclu/ions fouffes. Deux des Experts ont décidé que la muraille
du lieur Laugier étoit.bâtie en partie dans le lit du vallon
en pa~tie fur le bord- d'une berge, ftlr un fonds apparte~
nant au fieur Laugier; ils ont décidé que la muraille n'avoit
pas nui & ne pouvoit pas nuire au fieur ArnOllS. Il ea: çe~
•
�D U
PAL AIS
D E l ' p. 0 v Il NeE.
1.9
pendant prouvé par l'aéte de I7~6, que le fonds du fieur
Laugier éroÏt limité par une muraille le long du vallon,
celle qu'il a conftruit a été creu fée & bâtie dans le lit du
, vallon, fur la rive faifant panie du vallon; il eft prouvé que
la conftruétion de cerre muraille a rerréci le vallon de plus'
de huit pans; les eaux plus relferréés ont entraîné prefque
route la rive qui foutenoit la muraille du fieur Arnoux, Dèslors l'opinion de deux Expens ne fauroie être entretenue;
celle de l'amre Expen, comme la plus juGe, la plus conféquenee am( titres, aux enquêees, aux vérifications', aux
principes & à la juHice, peut fonder la déciuon de la Cour.
On répondoit pour le fieur Laugier, que les Expens n'avoient
rien décidé en point de droit; ils n'avaient fait autre chofe
qu'une déclaration relaeive à l'état des lieux contentieux; une
déclaration qu'ils ne pouvoiene fe difpenfer de faire, foit parte
qu'ils en avaient été requis dans les comparans refpeétifs
des panies, foit parce qu'elle écoit de la plus grande imponance pour préparer le jugement qu'ils devoiene poner
comme Arbitres fUr la demande du fieur Arnoux en démoIHion de la muraille du fieur Laugier.
Quand le Juge ordonne un rapport, il n'entend certa inement pas faire faire une opération inutile; il l'ordonne
toujours, pour que les Expens, en, faifant le tableau du local
contentieux, lui donnent cous les éclaircilfemens, toutes les
inftruétions, tous les renfeignemens qui peuvent & doivent
le mettre en état de prononcer avec connoilfance de caufe
fur les di/férens des panies. Les vérifications que font les
Expens, & dont ils rendent compte, leurs opérations, leurs
inftruétions, leurs déclaraeions, font toujours elfentielles;
elles fervent à déterminer le Juge. On ne peut pourtant pas
dire pour cela que les Expens aient faie ce qui n'écoit pas
en leur pouvoir de faire, qu'ils aient prononcé eux-mêmes
fur la queftion que le Juge doit décider; ils Ont préparé
le jugement, ils l'ont le plus fouvene déterminé, mais ils ne
l'ont pas rendu. De rouees les opérations qu'avoient à faire
les Experes qui ont procédé au rappore dont s'agir, à ce
rapport par lequel devoit êere déterminée la Sentence ar i~
�30
Jou RNA L
traIe, celle qui devoit vérifier, conO:ater fi la muraile portait ou ne portoit aucun préjudice, était la plus e1f~ntielle;
elle était d'une néceffité indifpenfable; s'ils n'avaient pas
fait cette déclaration, leur rapport ferait défeél:ueux & inutile; il ferait impoffible de décider aél:uellement la que/tian
qui divife les parties.
Ici les Experts qui ont fait le rapport étant tout à la fois
Experts & Arbirres, Juges du fait & du droit, ont eu &
dû -avoir néce1fairement la liberté la plus indéfinie du côté
de leun; opérations. L'Expert nommé par le Juge doit fe
reftreindre à celles que lui commet le jugement qui le
nomme. L'Expert - Arbitre réuniffant filr fa tête tous les
pouvoirs, efl: fans contredit en droit de faire, comme Ex-,
J.lert, même fans le confentement particulier des parties,
tout ce qui lui parcÎt néceffaire & convenable pour fixer fa
détermination comme Arbitre. Le feul point de détermination des Experts a été celui
que la muraille dont il s'agit n'a pu ni ne pouvait pas nuire
au fieur Arnoux. Toutes les Loix, lOutes les Doél:rines décident que le droit de- fe plaindre des ouvrages confiruits
dans les lieux publics, ne compete qu'à celui qui reçoit ou
peut recevoir du' préjudice: ad11ersùs eum qui molem in mare
projecit, interdic7um utile competit, dit la Loi l , if. nequid
in loco puMico, §. 8. Mais ce n'efi, ajoute-t-elle, qu'à celui
à qui l'ouvrage peut nuire, que l'aél:ion eH accordée. Si l'ouvrage ne r.uit & ne peut nuire à perfonne, il doit être entretenu: ei cui forte hœc res nofcitura Jit. Si autem nemo dam-
?um fentit, . wendus
zn marI! Jeeu. Le §.
dl
is qui in liaore œdificat, vel molem
.de la Loi J, .If. nequid in fiumine,
efl: encore plus précis & plus formel, parce qu'il difpofe
12
exaél:ement fur le fàit du procès. Il décide de la maniere
la plus expreffe, que l'on peut faire des ouv~ages dans le lit
ou fur It:s bords des ruiffeaux ou des rivieres, & que fi ces
ouv:ages ne nuifent à qui que ce fait, pèrfonne n'efl: en
drOit de s'en formalifer ni d'en demander la démolition.
Toutes ces' Loix font fondées en raifon, en équité;
ellils ont pour hafe cetEe regle du d:oit, que l'on ne doit
�J!:
D U l'A LAIS :n:B PRO VEN C
~'t'
'pas rëfufer à quelqu'un ce qui lui ell: ùtile & ne nuit à
perfonne: q uod mihi prodefl 6' nemini nocet, facile. concedendwn efl. L'aél:iol'l ne naît que de l'intérêt & ne peut
exiHer fans lui. Il ell: permis' à chacun ml;nire rippam; il el!:
même avantageux rippas fluminum puhlicorum rejicere & munire, fuivant la Loi prœtor ait z,.If. de rippâ muniendâ.
Si la Semence arbirrale devrait êrre confirmée, lors même
que la muraille du fieur Laugier ferait entiérement bârie
dans le lit du torrent, pourvu qu'elle ne pût pas nuire au
fieu'r Arnoux, c_omment celui-ci ferait-il reçu à fan recours
en droit, fur le feul & un\que fondement que les Experts
ont fait une déclaration faùffe, contraire à l'enquête p'ar
eux prife & à l'aél:e de 17')-6, dès que le recours f-ondé f~r
ce moyen ne changerait pas la force des chofes ?
Arrêt du 30' .;\vril 1782, au rapport de Mr. le Confeiller
de Ballon, qui réforme la Sentence au chef fur lequel porrait l'appel du fieur Arnoux, & condamne Laugiet aux dépens. Ecrivant Mes. Pellicot de Seillans & Lager.
ARR Ê T
V.
Sur la différence qu'il y a entre les chemins voi/inaux & les
• viols ou ,{entiers privés il mifon de la faculté plus ou moins
étendue du droit de pajJage.
RE. Maneby, Eccléfial!:iquè de 1:1 ville de Marfeille,
poIrédoit un domaine dans le terroir, quartier de SaintBarthelemi; 'la Dame veuve -Cuien en polfédoit également
un au même quartier. Entre ces denx propriérés limirrophes,
& du côré du feptentrion, exiŒe un chemin qui confronte
les dOl1}aines de ces deux particuliers, qui ont chacun un
portail fur le chemin. Mre. Maneby fe pourvut le 18 Mars
:1778 au Lieutenant de Marfeille, & demanda qUe défenfes
fuIrent faites à la Dame Guien & à tous autres de paIrer
M
�•31..
'J
0 U R lT A L .
' _
en voitures, tombereaux & charrettes par le vIOl ou traver·
fier, à peine de toUS dépens, dommag~s ~ intérêts.
.
Il intervint enfuite une Sentence qUI mit la Dame CUlen
hors de Cour & de procès filr la demande de Mre. Maneby avec dépens. Mre. Maneby appella & fou tint que la
Dam~ Cuien ne pouvoit faire rouler fes voitures fur le
chemin dont s'agiffoir.
S'il ne s'agit que d'un droit de paffage, d'une fervitude
filr le fol qui m'appartient, difoit Mre. Maneby, la Dame
Cuien, qui n'y avoit jamais fait paffer de voilUres, n'a pas
pu y en faire paffer depuis 1778. C'efi: un principe établi
par les Loix, que le propriétaire d'un fonds pour lequel il
eH: dÎl une fervitude, ne peut en ufer que fuivant fon titre,
fans rien innover ni dans le fonqs affervi, ni dans le fien
propre, qui empire la condition de la fervitude. C'eH: ce
qu'obfervent Domat, Loix civiles, liv. 1, tir. 12, fetr. 5,
. n. 1, pag. 129; Duperier, tom. 1, liv. 4, quefi. 32, pag.
482 ; Lalaure, traité des fervitudes, liv. 1, chap. 1 l , pag.
60, 368, 390 & 5)3.
Pourquoi differre-t-on fur la nature d~s chemins, iter ,
aans & via? Pourquoi dit-on que la largenr de' ces chemins
n'était pas fixée) Si c'ef!: d'une de ces' rrois efpeces de
chemins donc il s'agit ici, il faut confulter les titres, rout
dépend des atres; à défaut de ces atres, c'ef!: la poffeffion
feule qu'il faut confulrer; dès-lors un interlocutoire devient
néceffaire. Si la Dame Cuien a toujours paffé en voiture
fûr le chemin contentieux, elle doit être maintenue dans
fa po/feffion; fi elle n'y a jamais paffé, il doit lui être
inhibé d'innover. Mre. Maneby ciifre de prouver que ce n'eG:
que depuis 1778 que la Dame Cuien a paffé en voiture
. dans ce chemin & y a fait rod~r fes charrettes. La Dame
Cuien a fenti la difficulté; auffi cherche-t-elle à s'y fouftraire, en differtant fur la nature du' chemin,
Comment la Dame Cuien veut-elle qualifier ce chemin?
Il n:ef!: pas, fuivant fon fyfl:ême, un chemin de fervirude,
neç uer, nec aélus, nec via. Il n'eH ni [entier, ni viol. Il
[erQit
�DU
PAL-dS
DE
33
PRO:'ENCE..
ferait donc, s'il falloir l'en croire, chemin voifinal, chemin
public: mais Lalaure n'appelle chemin public que le chemin
royal. En effer, il n'y a de chemin vérirablement public
que celui qui cft entrerenu aux dépens du public. Pourquoi
le chemin contentieux ne feroit-i1 pas un fentier ou viol,
comme il eH qualifié par le Réglement du forr & par le .
rapport d'arerminage du 16 Oél:obre I646? A ce titre les
voirures ne, pourraient pas & ne devraient pas y palfer ;
elles ne doivent pas y palfer non plus, s'il eft chemin voi.
final, & qu'il n'ait pas la largeur convenable.
Les Loix diainguent deux fortes de chemins voilinaux,
les privés & tes pub/ics; elles regardent comme publics CèUK
qui vont de loco pub/ieo ad IOClim pub/ieum , & ceux quorum
memoria non extat. Elles regardent comme privés ceux qui
font raccommodés aux dépens des particuliers & par con·
tribution entr'eux. S'il ea rétabli par conrri/Jution entre par.
<ticuliers, dir Lalaure pag. 529, n. 6~0', le chemin eft certainement <:onfidéré 'comme chemin pr\vé, & la répararion
'fe fair en commun, parce que 1e' chemin eft pour l'ufage
& l'utilité commune.
Mais que l'on appelle un chemin voifinal, chemin publie
.ou privé, il eH toujours vrai de dire qu'il y a beaucoup de
différence entre les chemins voifinaux & les chemins véri.
tablement publics, fuivant la Loi 3, §. l , if. de lacis &
itineri{ms pub/icis. Tout chemin public doit avoir une largeur
dérerminée, quand on veut qu'il ferve pour les voitures. La
largeur du chemin appellé via, dit Lalaure, étoit de huit
pieds dans les chemins droits, & de fei~e dans les chemins
rournans.
Ce n'eft pas feulement la Loi romaine qui détermine
cette largeur pour les chemins; c'eft le Statut de Marfeille,
au titre, infiruaions pour les différens 'lui peuvent arriver pOUl'
les chemins, pag. 101. Il faut qu'un chemin traverfier ait
deux pans de largeur, qu'un ch~min royal en air vingt-cinq
francS de murailles, & que celui qui n'eH ni chemin royal
ni viol, en air jufqu'à quinze.
Années 1782 & fuiv. .
E
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34-Les c hemlOs
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- 1e Ré'VOlllnaux ne dOlvent
avoir.,
ulvant
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glement de 172.9, que huit pans; cetre largeur fuffit dans
les endroirs en plaine où il n'y a ni haie, ni rive, ni muraille: mais s'il y a une muraille, rive ou haie d'un tôté,
il faut dix pans; il en fallt douze s'il y en a une' de th~que
côté; il en faur feize & même' davantage dans les contours.
Ici le chemin ef!: .bordé de haures murailles; il Y a de.s
contours, il n'a que neuf, onze & douze pans; il ne peut
donc pas fs;rvir aj.JlC voitures ,.cuivant le Réglemenr,de 17').9,
encore moins peut-il fervir à cet ufage, fuivant le Réglement du forr & l'Ordonnance rendue pilr .M. J'Inrendant
en 17.) 0 , qui exig.ent quinze & vingr pans pour les chemins voiGnauJl:1 dans le ·rerroir de Marfeille: Via/'I/m nOl1
omnium una eademque eJl conditio....... via, iter & ac7us non
formâ tantùm., fed etiam !patio in quo exercentur diflinguntur....... 1Jia Jefl quij ire vehiculum poteJl. V.oilà ce que
difent les Loix & les Jurifconfultes; il]le faut donc pas
appliquer les mêmes regles à tous ks cherriins. C'efl: par
leur largeur qu'il faut décider de leur ufage. pOlJr y faire
paffer des voirures, il faut que cela fe puiffe facilement &
fans nuire aux voiGns ni au public; cela réfulte de la difpofition de la loi qui fil/a 7, if. de fervïtut. prœd. ruJlic. Delà
l'attention des Loix à exiger pour le paffage des voiturés
de douze jufqu'à vingt pans. Les chemins voiGnaux, difept
les coulumes, doivent avoir vingr pieds;. c'ef!: fa difpoGrion de la coutume de Tours, comme on le voit dans le
Diél:ionnaire des Arrêts, va. chemin. On voit auffi dans
Bouchel, vO.-c1lemin, l'gttencioo qu'il faut avoir .de ne po.int
introduire des voitures dans des chemins qui ne fçJllt point
llffez larges'. Ici îI ef!: prouvé que la largeur du chemin
ef!: au deffous de celle que les Loix prefcrivent·,. puifque les
charrettes qu'on" y a introduit oor caufé du dommage aux
murailles de Mre. Maneby. Dans un chemin aufi.i étroit
~n paffilnt peut être écrafé par une voiture; une voiture
lOtercepte le commerce, la moindre bourrique ne peut plus
paffer: delà peuvent naître des rixes & des inconvén.iens ,
�~.
3~
'& c'eO: ce que la Loi a prévu, en défendant les voitures
dans les chemins' étroits: viœ debent effi fecurœ, dit la
Loi 1, §. 1, if. de fervitut. prœd. ruflic. PuMico enim utile
efl fine l]16t1l & periçulo- pel' itinera commeari, porte la Loi
prœtor ait l , §. l d~ his qui dejecerini t'el e{Juderint. Pel' vias
puMicas tuto commeari rei puDlicœ inter/ft, clit d'Argentré,
coutume de Bretagne, art. ~ 4, n. 6, pag. 2 I~. III viis riiari
110~ debent permiuere œdiles currules, lit-on dans le Lexicol!
DU
PAL AIS
DE
PRO VEN C
Jlll'ls.
1
On .répondoit p.our la Dame Guien, que de droit commun
chacun a la liberté de palfer par un chemin public, & per.,
fonne n'a le droit d'empêcher quominus ullllhuifilue Ilfùm
iUius ha/gat. Bellus, conf. 97, n. 1, 2 & 3; François
Marc, décif. 38 ~, & Cœpola, de fervitut. ch. 3, n. 19.
Cependant ce droit de paffage s'étend ou fe modilie fuivant la nature des chemins, filr lefquels on veut l'exercer;
& c'eH d'après les différentes regles qui nous gouvernent
fur cette matiere, que l'on pourra juger fi Mre. Maneby
ell: fondé à interdire à la Dame Guien l'ufage du chemin
dont il s'agir. .
'
, _On diflinguoit chez les Romains trois fortes de chemins
différ.èns; le premier, appellé iter ou petil chemin, donnait
à celui à qui iL était dû la faculté d'aller, de venir & de
fe, promener à pied & à cheval filr le chemin q'autrui,
Le deuxieme, appellé aRus; conliHoit à donner le droit de
faire pa.lfer chariots & charrettes, & d'y aller à pied & à
çheval. Le troiûeme, appellé via, donnait, outre le droit
d'aller, de venir & de fonduire des chariots de taures le!!
efp'ec.es ,~celui .de. faire palfer 'es poutres, des pierres, &
enfin il était d'une largeur plus ~[endue que celle des che.
mins appellés irer & aRus. La largeur de ces deux chemins
n'cltoit p,oint fixée, & dépendoit des aél:es; au lieu que
celle des chemins. appellés via étoit de huit pieds dans
les. chemins Groits, & de feize dans les chemins tourj1ans 1
c'eH l'explic,ation qu'en donne Lalaure dans fan traité d~iI
fervitude s , ch. 'l , pag. jI,
.J
�36
Jou
RNA L
Ces différentes fortes de chemins fOllt connus parmi
nous fous les noms de. chemins royaux,. chemins voilinaulC
& chemins privés qui ne (om qu'à .l'u(age d'un particulier,
& qUe l'on appelle alors viol ou (entier. Dans les chemins
royaux & voili.naux cha,que citoyen ,a le d~oit d'y ~aifer. ~
pied & en voiture; ce n'eH qu'à J'egard d un chemlll prive
établi dans le domaine d'un particulier, & entretenu à (es
dépens, qu'il faut fe conformer au titre qui a donné un
droit de paifage (ur ce chemin, ou à l'u(age qui a déterminé l'e(pecé de (ervitude que J'on eH en droit de prétendre.
Qu'dl-ce qu'un- chemin voilinal? La Loi 3, ff. de locis
& itin. public. nous l'indique; ce (ont ceux' qui (ont pris (ur
les fonds des riverains, qui condui(em aux propriétés de
différens particuliers, & qui font regardés comme publics,
(oit lor(qu'ils exiHent depuis un tems immémorial , (oit
lor(qu'ils condui(ent d\1ll lieu public à un autre. C'efl ainfi ,
que s'explique d'Argentré, coutume de Bretagne, arc. H.,
n. 4.
.
Cœpola dans fon traité des fervitudes, ch. 3, n. 18 ,
explique parfaitement les caraél:eres que doit avoir un chemin
pour être répuré public; il ne regarde comme privé qué
celui qui a été fait par le maître d'un fond••C'eH égale::
ment l'opinion de Sabellbs ùz va. via. Auffi ef!: - il dè
maxime qu'un chemi!J voifinal ne peut être barré que du
con(entement de touS les voifins; c'ef!: ce qu'atteHem de
Luca, de regal. di(c. 137, n. 4, & Cœpola, ch. 2, n. 28.
Quand un chemin ef!: commun à plufieurs per(onnes, tous
les voilins y ont le même droit, falum commune, ideà jus
vel dominium coœr;uale.
'.
Ces principes une fois établis, il efr certain que perfonne n'eH en droit d'imerdire à un particulier le paifage
avec fa charrette ou (a voiture dans un chemin voifinal.
Cela efl: fi vrai, que ·le Réglement de la Province fait
en. 1719 n'a eu d'autre objet que de procure.r ayx chemins
vOllinaux une largeur c~nvenable, de maniere que toutes,
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DU
PAtAts
'1)"B
PaOVllNCll:
37
fortes de voitures & chariots' traînés par un. che.val· ou
mulet pui/fenr y pa/fer. Aulli d'après les difpofitions formelles des im. la, 11 & 12 de ce Réglemenr, un feul
particulier peut requérir l'agrandi/fement du chemin voifInal· à. ~uit -pans; & Y faire p;focéder. par les Enill1ateurs ~
fauf de~prendre contr'linte contre tous les contribuables. La
Cour, par fan Arrêt du '17 Juin 1780, rendu eh ,faveur
dé Mre. Thy & autres po/fedans bien au quartier du Pradet,
terroir de la Garde, contre Mre. Jofeph Delor, Prêtre,
-de la ville de 'foulon, a jugé que:toutes les fois qu'il s'agit
'd'un èhemin 'voifinal ,.& fur-tout d'un ,chemin qui conduit
de./oco pub!ù:o ad loeum pub!ieum, perfonne n'étoit en droit
d'en ,interdire le paffage aux charrettes ,& voitures des différens propriétaires ·des domaines' circonvoifins.
Ainu ce n'dl: que dans le Ca"S où un particulier a acquis
"tille fervÎrude dans .Ie fonds de· fan vo\"fin, fdit par une eoncellion expreffe, fdit par uné po~ellion immémoriâle, qu'il
peur êGre tenu de fe conformer à fan titre, ou à J'ufage qu'il
a fait de fan droit; à cet égard, on peut même obferver
que toutes les f?is g,ue l:oA a acquis .une fervitlld~ de pa/fage
dans Un chemll1 fournt par un' vOlun, pour l'avantage &
'l'utilité ,de ·céllli à qui il eft concédé, il fufEu q1Je l'on ait le
droit ,d'f 'paffer, ;PQllr être fondé à y pa/fer à cheval ou
en v'oiturë; é'en ainu que le décide Cœpola dans fan [«lité
de fèrvîtutihus rufl. prœd. chap. 1, n. 4,
• Il eft en effet étonnant que Mre. Maneby prétende qu'il
s'agit aujourd'hui d'une fervirude impofée fur un viol' ou
traveruer, tandis qu'il rie prouve pas qu'il' fait le propriétaire
·du chemin; c'eft cependant à ce point de fait e/fentiel
qu'il faut en revenir, pour favoir, fuivant les Auteurs, fi
un chemin en public ou s'il eft privé:ji ex [UO fundo viam
feeerit & de hoc extet memoria.
Mre. Maneby. convient que le chemin dont il s'agit et!:
fupérieur à fan domaine. Or, de deux propriétaÎ"res dont
l'un domine l'autre, le fupérieur ou foubeiran en cenfé avoir
fourni le fol du chemin qui fe trouve entre deux. Telle eH:
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IL N A L
la maxime attellée par Bomy, chap. 11, pag. 4 1. Enfin
dans [Ous les atl:es verfés !lU procès, & da ilS les propres
tirres d'acquiiition de Mre. Maneby, le chemin lui eil: donné
pour confront. Or, jamais le confro!Jt don\lé dans le tirre
ne fut "ompris 'dans Iii chofe confront-ée; c'eil: ce qu'obferve
le Çardj.nilt Tufcu.s, Iw. ç. c9ncIur. 69S" & ,Gobius;' de
{/qui~, queil:. q, n. 7, .L<j. 'p9iitivn <lu chemin qui confronte
à droite & à gauche, & dans toute fa longueur, pluiieurs
propriétés apparrepantes. à divers particuliers, prouve qu'il
a été formé des fôgds sie différents river.ajns; d'autre part
il exiile .depuis un tems immémprial; il eil donc véritable.,.
menc réputé public. ,Le, prétendu viol donc Mre. Maneby
veut défendre l'entrée a;IjX V9itureS de la· Dame Guièn, efi:
un chemin. fpa"iellx, bord,é, de hautes murailles, battu.&
ferré comme. le font tous les cbeJXlins rouliers.. Il ne filffit pas
de craindre 1)11 .dômmage" pOl,lr,~qu.et I:pn foit fondé à empêcher l'exerc\cd~gitirt1ed'un grpit.qui poprrQit l'occaiionner;
toue ce que peut~ exjger Mr.e, rManehf; c'eil:, que l'on répare fes murailles tol,ltes les fois que' l'imprudence d'un
Voirurier les alir<\ endommagées; jl pOUFfa alors ufer de toutes les voies de drQir pour y conrraindre ceux q.uiJeroiene
teacés de s'y ref\l(et;; (Ù1_ai~ j.),n~:s'enfult pas delà 'que p.our
faire.cefferl:de~ <:fail1C~s, iJIufbires-;, il puiffe metçrer'obilao!e
à la .j9uiflànce ,pailiGlè d'upe fJ~ulté qui· ne tournera point
à fan préjudice.. Le .chemi!) contl"nrieux a. d-ans route fon
ét~ndue une largeur plus· que ~uffif-anre. pour le paffage des
voitures.
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LF.J :A'
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Ar(êt du ~4 Mai ~7:8;2.f au 'rappolit' de Mr. le Confe;ne~
de Thoram,e, par lequebla CQUr, fans s'aJr~ter aux fins fuh.,.
fidiaires de Mre. Mao't~y,; t€lnd?nres li, faire ordonner un
rapport interlocuJoire~ft)f1l'ét~tl<les lieux, & foumettre la
Dame Guién à la preuve de,la poffefliol1 jmmémoriale da os
laquelle elleétoi.t ~e,W!Jfer 'da)lS le· chemin c otentieux, li
Semence fut con?rméé, :lvec ·dépens. Ecrivant Mes. Gjlieu
&. Pellicot qe Seillans~
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I,;e per~ f!.~ligç de fourn.ù:'\d~~ aljmt.!IS 9 fa fille .,l'eu{ exiger
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rDAr le ç0n tr aç(pe trlllriage, d'El!fabeth Lambert 'f ;Pierre
,J, .. Grail~~ 1~~.l!a:vJll~, dJ<} Marfeille 'quo 6,_ Qél:obr~ 1i7T1di il
J'pt ,con(htue .en"dpt à l:epoufe la (qrnme de 6ooorllv.. g~
:3,rgept ou en hardes. Le 2 l Ju.in 1.77S ,.,Graille remi""fo[)
:biJan 'à la Jurifdiél:ion Confulaire; Lambert pere, pour l'inJérêt de la dot, s'oppofa à la levée des' fcellés, forma fa
;de'mande, & obtint, S~nrepce.; "
,. fI-6
!.l ,P,our) le~er HQbfracl~ 'flue ,ceu,e.· ;cré,ance POUV<>iE' mettre.
·Avl'a~ra.ngeme!;1Ldes aŒqires pu. failli, ,Gr;ail!~ pere cautionn'a
i1\ll prix, de"la dot par aél:e dU,24JSe,ptembre 1776, & L'ambert pere fe ·çlépar.tit de toutes pourfuites; ce défifrement
,produifit .1'arr~Jlg~ment des affaires de Pierre Graille,. qui
peu d,e tews. :tprçs .J>~(fa, .à ~ Çot).H?ntin.ople, j$c .I<\ilfil fQn,
lçpou[e ave.c _troi~, enfi!ns.
')
. ,: ..
Le 1'1 Jui:Jtet'I77.9,la, p~~e .. Çraille fe pourvut i1U Lieû.tenant de M,ar[eiHe, pour être mife fous la fauve-garde de
!a Jufrice & ~utorifie d'agir, & à ce qu'injonél:ion fln faite
au fiel:lr. Lilmbert pere d'agir tant contre le fleur Graille fan
mari, que conrre fan beau-pere pour réclamer uqe peniion
alimenrjlire' dei 1,20o.liv..,' & ,el1~ de!!Janda' un.~ provi,fion
çe '6qc;> !iv., autrement Permis à elle' de former. cerré ,de~
J;I1ande contre fan mari, & conrre fan beau,-pere; '& même
conrre fan pere à défaut de? biens des p.remiers.
: L,alpb~rt pere offrit à, fa fill~ de lui payer U,lle ptnJion
~.u Aans ,le, couvent de Saint-M~l'in1in., 09 d~n~. celpi de
$~int.:z,a.c)1aiie, ~ fan, ,choix., La plie., ,Lam1?ert gqrda le
(ilence jurqlJ~qtl 2$ Juin .178 Io"Elle"r~nouvella' i1lors' la mêltl~
, demande, & demanda le' nonobll:ant appel fur la pr'ovifion.
�'40
• J
! '0. U RNA . .L' ~ ~ u
Lambert, pere demanda la garantie contre les hoirs du fleur
Graille pere qui érait mort dans l'im~rvalle. Le Lieutenant,
par fa Sentente du 19 Jui11et. fuivam,. ordonna qu'il ferait
pourfuivi au principal fur la requête de la Dlle. Graille, &
fur celle du fieur Lambert, adjugea une f'rovi~on de 300 liv.
'à. la Dllé. Graille, & fournit le ûeur Lambert & les hoirs
Graille à la folidaire'; il ordonna le nonobHant appel.
Lambert pere appella, & demanda J'évocation du fonds &
principal; il offrit de recevoir fa fille dans fa mairon , ou
de lui payer une penfion de 300 liv. dans .un Couvenr. On
difo'it pour lui, quel c'eil: un principe généralement àdopté
dans 'le 'droi,t , què celui comre qui on forme une demande
en penfidn alimentaire, peur exiger que,'le demandeur vienne
recevoir chez lui les alimens. Une penfion aliment~ire dl:
une dette; ·n'y eût-il que cette circ~n{hnce, il n'en faudroit pas davantage p~ur que le choix lui HIt accordé. Il faut
qu'il foit perrnjs au dé15iteur, en s'a C<j ui'tttadt , de, ch'oifir la
'voie la plus douce ;' il
bien moins onéreux de recevoi~
quelqu'un à' fa table que)de lui payer u'ne penfion. Cel~i
qui doit les alimens y gagne; celei qui les reç oit n'y perd
P1s. L'équité ne p,ermet pas de négligér de prendre une voie
qui étant .indifférenre à l'un1 , en très·favorable à j'autre.
La 'loi naturelle, en obligeanr le pere de ,nourrir fon
fils, n'a pas dû fuppofer qu'il voudroit' s'Eloigner de lui.
Quel aryle plus décenr que c'e1ui de la maifon paternelle!
Décider. que les alimens doivent être payés ailleurs que
dans la mairon du pere, ce feroit donc contrarier le vœu
de la -Loi.
',
•
) .')
Il Y a'une 'différence à f~i!,e ,entre les alimerfs dûs ex [ege.,
& ceux dus e·x difj)(ljitione hominis. Dans les premiers, celui
qui les doit peut exiger qu'on vienne les prendre chez lui.
Dans les feconds', la faculté n'exille plus; ils doive,nt être
payés, & on -ne peut pas les offrir dans la mai(on de celui
qui les doit; 'c'eil: le: (emiment de Surdus 'en Ifon' trait'é'
de alimentis, tit. 4, quell. 14; de: <3ujas (ur la loi '4,-§" El/cil/S'
Titius, if. de' alirrieTltis & cihariis legatis; de BuiIron 'fUE 'lès.
.
loix
al:
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�,
D U
PAL A l 'S
D E
PRO VEN C E.
41
loix 3 & 4 du même titre, & de Fromental, - va. alimens.
Arrêt du 7 Mai 1782, prononcé pa'r M. le Premier Pré{ident , conforme aux concluGons de Mr. l'Avocat-Général
de Magalon, qui fait droit à l'offre de Lambert de recevoir
fa fille chez lui, ou de lui payer une penfion dans un Couvent, dépens compenfés. l'Iaidant Mes. GalIier & Verdet
neveu.
AR R Ê T
VII.
Il n'efl pas permis au Lieutenant fi auireS' Juges inférieurs
d'accorder des furfiances envers un décret de la -(;our 'lui
laxe contrainte pour les épices fi la levée d'un Arrêt, '1uoi'lue les conteJlations fOTlâeres aient été renvoyées pardevant
les premies Juges.
Les' partteS qui ont procédé même volontairement devant un
Juge notoirement incompétent
raifon de la inatiere, peuvènt, en tout état de caule, demander leur reT2voi, ou attaquer le jugement pour caufe d'incompétence, fons qu'on
puilfè leur oppofer aucun acquiefcement ni aucune fin de non
receVOIr.
Une créance certaine fi liquide ne peut être compenfie avec
celle qui ne l'efl Pl!s.
a
F
Rançois Givaudan, Jardinier du lieu de la Valette près
Toulon, avoit prêté à Louis Tripe, Maître Bridier du
même lieu, en l'année 177), la fomme de 4330 liv. pour un
commerce dans lequel il était intéreffé.
L'écrit de fociéré qui fut paffé à ce fujet enrre les parties un an après & le-premier Oél:obre 1776, renfermait
deux obligations pour Louis Tripe; la premiere de rendre
compte des profits & des pertes de la fociété ; la feconde.
de rembourfer dans llne année à Givaudan les 4330 liv. du
montant de fa mife de fonds.
Années l78z fi fuiv.
F
•
�'42.
.
10
U RNA t
Au lien de fatisfaire à ces engage mens , Tripe ferme fa:
boutique, & difparolt, ainn que fa femme, du lieu de la Va1erre quelque remps après cerre déclararion.
.
Givaudan efl: obligé de faire quelques pourfuires pour l'affurance de fa créance; il demande & obtient la failié provifoire des effets de la maifon & des fruirs de la terre de
fon débireur.
Tripe revient dans fon pays, & enfin après bien des procédures qu'il ell: inutile de rapporter, il intervient Sentence
du Juge de la Valette le 16 Mars 1778, qui faifant droit
à la demande de Givaudan, condamne Tripe à rendre compte
dans deux mois de la fociéré établie par l'écrit privé du
premier Oél:obre 1776, à payer le reliquat en argent ou en
effets fociaux, ainli qu'il ell: porré par ledit écrit, trois jours
après que la liquidation en aura éré faite aux formes de
droit; & faute par Tripe de rendre ledit compte, il ell: ordonné qu'il fera contraint pour la fomme de 4330 liv. du
mom3l1t de la mife en fonds dudit Givaudan par toutes les·
voies de droit, & même-par corps.
Appel de ce jugement---de la part de Tripe; Sentence du
Lieutenant de Toulon du la Février 1779 qui le confirme,
avec renvoi, amende & dépens.
Appel de cette Semence pardevant la Cour; Arrêt du
la Juillet 1780 qui la confirme, avec renvoi, amende &
dépens.
Le renvoi porté par cet Arrêt de la Cour ell: reçu par
Ordonnance du Lieutenant de Toulon du I l du mois d'Août
fuivant.
Le 2.2. du méme mois on leve, de l'autorité de la Cour,
des lettres compulfoires, en vertu defquelles on fait commandement à Tripe de payer 352. liv. 18 f. 6 d. pour les dépens de l'Arrêt du 18 Juillet.
Au lieu de fatisfaire à ce cemmandement, Tripe répond
au bas, qu'il efl appellant de la taxe pardevant qui de droit.
G,ivauda~ ufant ~Iors de la faculté que le Réglemellt de
la ,Cour lUI donnait, demanda, par une requête qu'il pré.
�D U
PAL AIS
D Il
43
PRO VEN C E.
fenta le 6 Septenlbre 1780, une contrainte pour la fomme
de 166 liv. 18 f. du montant des épices, levée de l'Arrêt
& acceifoires; il demanda en outre que le décrer qui inrerviendroir feroit exécuté nonohJlant & fans préjudice de
l'oppqfition.
Ces fins lui furent accordées par décret de la Cour du
même jour; en vertu de ce décrer, nouveau commandement
ell: fait à Tripe par exploit du 13 Septembre; celui-ci voyanl:
que fon appel de taxe ne pouvoit le founraire aux exécuTiops;
.
imagina un nouveau moyen de chicane.
~l fe prétendit créancier de Givaudan en vertu d'une 9bli..
gation qui n'étoir point émanée de lui, & qui avoir .été fà:briquée, de la fomme de 4'16 liv., fous la dare du '10 Décembre 1776; & à la faveur de cene piece, il demanda,
par une requête préfenrée au Lieutenant le 1) Septembre,
de éompenfer fur lefdites 4'16 liv. les dépens faits, tant pardevanr le Lieutenant, que pardevant la Cour; il demanda
en même temps l'avération de cene préténdue obligarion,
& une furféance envers le décret de contrainte rendu par
la Cour.
'
Givaudan foutinr dans une réponfe, que le titre que Tripe
. lui oppofoit n'était point fan ouvrage, & que quant à la
{urféance,' il n'y avoit pas lieu de l'acGorder, fait parce que
.l'écrit étoit dénié, foit parce qu'il exécutait un Arrêt de la
Cqur; à raifon duquel objet on ne pouvoit fe pourvoir que
devant elle.
•
Cependanr le Lieutenant de Toulon, après avoir accordé un décrer· de tour en étar jufqu'à la réponfe filr la requêre de- Tripe, trouva à propos de le conrinuer par la
Semence qu'il rendit le 22 du même mois de Septembre.
Givaudan s'empreifa de relever "ppel d\me Sentence aufIi
irrégulieFe.
. Me. Silvy, qui plaidait pour lui pardevant la Cour, difoit
que le décret & la Sentence du Lieutenant de Toulon
éroient tour à la fois lluls & injuHes': ces jugenfens font
nuls, pour avoir été rendus par U~I Juge incompérent; il~
F
2,
�'1-4-
JOURNAL
font injuG:es, comme contraires à tous les principes du
droir.
, Le plus grand défaut dans un Juge eG: [ans co~Hredit
l'incompétence ou le défaut de pouvoir: non efl majOr deleeCus quàm tielec1us poteflatis.
Le Juge incompétent n'eG: point revêtu du caracrere [aeré
de Juge; il eG:, pour ainli dire, à l'infiar d'ùn homme privé;
fes jugernjeos font fans force, parce qu'ils émanent d'un
homme fans pouvoir; ils font nuls, parce qu'il n'avait point
de miffion pour les rendre: delà vient qu'on n'eH pas obligé'
de comparaître devant un Juge notoirement incompétent,
carriOle l'on n'eft pas tenu de payer les dépens du détàur,
quand on a été affigné pardevant lui. Il y en a un .;\rrêt
bien précis dans Bonnet, litt. D. On peut même dire qu'il
n'y a point alors, à proprement parler, de jugement, fuivant cet axiome; Jlldex incompetens nihil agit.
Or, le Lieutenant de Toulon était notoirement incompétent pour connaître d'un titre émané de l'autorité de la
Cour; c'efi une entreprife, c'efi un attentat de fa part d'avoir
fufpendu l'exécution d'un décret qui laxoic contrainte pour
les épices & la levée d'un Arrêt.
La Cour ne lui avait renvoyé que le fonds de la conteftation, & non la taxe des dépens qui fe faifoient de fôn
autorité; l~ Lieutenant de Toulon étoit obligé de recevoir
le renvoi porté par l'Arrêt de la Cour, & de renvoyer luimême tout de fuite pardevant le premier Juge.
Le décret de la Cour devait être exécuté Donobfiant &
fans préjudice de l'oppolition; la Cour feule pouvait y furfeoir; Givaudan ne _pouvait jamais être arrêté dans fes exécution! par un décret d'un' Juge inférieur.
En exécution de l'Arrêt, Tripe pouvoit, li l'on veur, former
une infiance pardevant le premier Juge; mais en cas de
concefiarion, il ne pouvoit s'adreffer qu'à la Cour pour demander une furféance envers fan décrer; ,la même puiffance
qui avait ordonné la contrainte, pouvait feule la faire
ceffe r.
�DU
PALAIS
1)
Il
PROVENCE.
•
41
Inutilement l'Adverfaire tente de fe prévaloir d'un prétendu acquiefcement de la part de l'appellant, comme li en
matiere d'incompétence il pouvoit tenir lieu de pouvoir.•
Perfonne n'ignore que les Jurifdiél:ions font de droit pu.blic; il ne dépend point des parties de fe choifir des Juges,
comme il ne dépend point de leùr confencemenc de donner
un caraél:ere à celui qui ne l'a pas. Le Souverain a pu feul
fixer les bornes de chaqlJ.e Jurifdiél:ion, & on ne peut les
franchir fans attenter à l'autorité qui les a circonfcrites.
Tout ce qui appartient à l'ordre public eil au deffus des
convencions & des démarches des particuliers; & comme
leur convention expreffe ne peut y déroger, leur ignorance ou' leur négligence peut encore moins y donner atteinte.
'
" Il Y a long-temps, dit Mr. d'Agueireau, qu'on a ré" forme cet ancien abus, qui permettait aux parties de fe
" choifir des Juges. Ainli la compétence des Juges & l'ordre
" des Jurifdiél:ions [aifant partie fans difficulté du droit pu" blic, les déma'rches, les cbnfentemens, la collulion des
" particuliers ne' doivent avoir aucun effet' concre un ordre \
" qui n'eil utile qu'autant qu'il ea immuable; & malgré le
" nombre des procédures', l'intérêt public, qui tend à con" ferver cet ordre " doit réclamer dans tous les temps cancre
.
" ceux qui l'ont violé. "
~uivant le Commentateur du Réglement de la Cour, tom.
l , pag. 6, la partie qui aurait volontairement défendu pardevant un Juge notoirement incompétent, pourrait appeller
de la Sencence & cotter grief d'incompétence. La maxime
ea atteaée, dit-il, par M. le Chancelier d'Agueffeau, tom.
10, pag. 316. Il én feroit autrement, li le privilégié ne de-.
Il1andoit .point fan re'nvoi; il ferait bien j.ugé, parce qu'il
'peut ufer ou ne pas ufer de fon privilege. C'ea aulIi le fenriment de Mr. de Moncvallon dans fan Précis des Ordonnances, au mot incompétence. Cette diainél:ion eil encore
'admife par Ferrieres & par tous les Auteurs.
Le décret du Lieutenant de Toulon ef!: non feulement,
•
�~
JOURNAi
nul par incompétence, mais il dl: encore de la dernierë
inju!l:ice.
En effet, il n'y a pas de regle plus certaine que celle
qui veut qu'une fomme liquide ne pui1fe fe compenfer avec
celle qui ne l'e!l: pas.
" On ne peut compenfer, dit le judicieux Mr. Domat,.
" avec une dette claire & liquide, une dette litigieufè, ou
" une prét.encion qui ne {oit pas réglée. "
Il e!l: encore de maxime, fuivant Ferrieres, Lacombe,
Defpei1fes, &c. que IiI compenfation ne peut être admife,
lorfqu'il s'agit d'une dette qui de fa nature ell: privilégiée.
" Il ne futEt pas, dit Fromental, que la dette qu'on veut
" compenfer fait liquide; il ~aut de plus qu'elle fait avouée
" & non conteJlée. "
Or d'une part, la prétendue obligaIion dont on excipe dl:
litigieufe; elle' e!l: contefiée. & même déniée avec jull:e raifon. Cet écrit a été fabriqùé après-coup; ce n'efi point l'ouvrage de Givaudan.
D'alltre part, les épices, les frais de la-- levée d'un Arrêt
font des objets-privilégiés donc rién ne peut arrêter le paiement; il doit être fait nonobHant compenfatiou, appel de
taxe, oppofition -ou autre chicane." Dépens préjudiciaux,
" dit Brillon, ne fe compenfenc pas avec autres dépens ou
" ,dette liquide. "
On répondait pour Louis Tripe, que le Lieutenant. de
Toulon étant faiû par le renvoi de la Cour du fonds des
contefiations, pouvoit auffi connohre de l'acce1foire; qu'on
était non rece-vable à exciper de l'incompérence, après avoÎr
procédé volontairemens devant ce Juge; qu'enfin l'obligat-ion
'qu'on oppofoit pouvoit entrer en compenfation, parce qu'elle
était proximè liquiddnda.
Arrêt du 16 Mai 1782, prononcé par Mr. le Premier
Préfident de La' Tour, conforme aux condulions portées
par Me, Bermond, SubHirut, qui déclare- les décrets & la
Sentence du Lieutenant de Toulon nuls & ,incompétens, &
comme reis les ca1fe, avec dépens; ordonne que les partie~
�)
1 \ '
PA tAtS DI! J~ROVENCB;
4i
po·urfuivront pardevant la Cour ainfi qu'il appartient, & que
Dl!
les exécutions de Givaudan feront continuées. Plaidant Mes.
SiIvy & Portalis.
'.
ARR Ê T
VIII.
Le propriétaire du domaine jùpérieur peut-il dériver' ou cor·
rompre les eaux au préjudice de l'inférieur?
S
,
Ieur Jean Long, Bourgeois de la ville de Marfeille, pof.
tfédoit dans le terroir de cecce ville un domaine, au quartier appellé le petit Camas; Pierre Aubran en po1fédoit éga.
lement un. Ce dernier ayant fait con!huire un puits à roue,
appellé poufaraque, fit clorre' fon domaine, & le divifa en
deux parties; il dellimi la premiere à ·un lavoir privé, & la
feconde à une fabrique de crême de tartre. Long préfenta
requête au Lieutenant de Marfeille, & demanda des défenfes
contre Aubran de verfer dans le vallat les eaux provenant
de "fa fabrique & de· fon lavoir, à peine d'amende, & d'en
être informé.
Aubran offrit un expédient; il s'obligea de nécoyer le fo1fé
& de l'entretenir dans un état de propreté, de maniere que
les eaux eu1fent toujours un écoulement libre & naturel dans _
toute fa longueur. Long contella cet expédient; & par Sentence du 14 Mars 1781, le Lieutenant, ayant tel egard que
de raifon à la requête de Long & aux offres d'Aubran, ordonna qu'Aubran feroit cnrer le vallat dans trois jours, &
qu'il l'entretiendroit net & duement curé dans toute fa longueur, à peine des dommages & intérêts de Long; il con-damna Aubran aux dépens.
Long appella de ce jugement. On difoit pour lui, ID. que
le propriétaire fupérieur ne peut pas diriger par main d'homme
les eaux de fon champ dans celui de fon voinn; 2 0 • qu'il ne
peut point en changer le cours; )". qu'il ne peut point les
�•
~
JOU~NAL
corrompre ni méme les rendre fales. L'héritage inférieur
peut être a1fervi au fupérieur, ou, par conveorion, ou par
la nature ou la firuation du lieu, ou par la prefcription.
{ Leg. 2, if. de aquâ t;. aquœ pluviœ arcendœ.)
,
La fupériorité d'un domaine fur l'autre eH fans dOl:te une
fervitude defiinée à tenir le premier rang, parce que c'eH
la nature eUe-même qui femble l'avoir impofée. Ainfi le propriétaire inférieur doit fouffrir l'écoulement de cette partie
d'eau qui' ne fiIrre pas dans le domaine inférieur; il doit
fouffrir la foore des neiges, la chûte des pierres, l'éboulement des terres, quelque dommage qu'il pui1fe en réfulter;
il' doit moins être confidéré comme l'effet d'une .fervitude ,
que comme une incommodité natureUe. Ita Lalaure dans fon
traité des fervitudes.
Le propriétaire inférieur ne peut pas même, par quelque
nouvelle œuvre, boucher & barrer le pa1fage des eaux, les
forcer, au lieu d~ fuivre leur cours ordinaire, à refluer fur
le .champ fupérieur; L. l , §. 13, if. de aquâ & aquœ pluv..
arand. S'il lui eH permis de faire des améliorations dans fon
propre fonds, ce n'eH qu'àutant qu'il ne nuit point à fes voifins. Loi l , §. 4 eod.
Si ces Loix ont pourvu à l'intérêt du propriétaire ,fupérieur, il en efi d'autres fondées fur les mêmes principes
d'équité qui lui ont défendu d'abufer de fa fupériorité ; il
peut rendre meilleure la condition du maître de l'héritage
a1fervi; mais il n'eH point amorifé à la rendre pire, à moins
qu'il n'}' ait une convenrion expre1fe' qui ait changé la na{ure de la fervirude: G' omninà fciendum efl m,eliorem vieini
conditionem fiai poffi, detel'iorem non poffi, niji aliquid nominatim in fèrvituie imponendâ immutatllm fuerit• .L. 20, §.
5 ,if. de fervitut.
Ce principe de jufiice a donné. lieu à diverfes loix; les
unes défendent au propriétaire. fupérieur de diriger' les eaux
de fon domaine dans le terrein de fon voifin; les autres,
de détourner le cours de ces eaux; d'autres, enfin de les
corrompre & même de les rendre fales; eUes accordent au
propriétaire
1
�DU-
PALAIS
DE
P-ROVllNCJl.
49
propriétaire inférieur, rant6t l'aél:ion aquœ pluviœ arundœ,
& tant6t l'aaion négatoire. La loi 8, §. ) , fi fervitus Vifldicetur, décide précirément que l'on ne peut pas faire couler
les eaux de l'héritage. fupérieur fur l'héritage inférieur, ni
jerter rien de femblable, parce qu'il n'dl: permis à chacun
de fai~e ce que bon lui femble dans fan domaine, qu'aura nt
qu'il ne jerrera, ni ne fera rien palIer filr celui de fOll voifin: idemque ait; & ex fùperiore in inferiorem non aquam,
nec quid aliud immitti liare; _in [UO enim illi hac7enùs facere
licet, quatenùs nihil in alienum immittat.
_
. Si le propriétaire fupérieur fait des folfés pour recevoir
fes eaux & les verfer fur le champ voifin, l'aaion en recomblement eil: donnée contre lui: fed & fi foJfas feciffet,
ex qui6us aquâ pluviœ polJet noare, ar6itrum fi appareat fulIIrum, ut aqua pluvia noceret, cogere opportere fo.1fàs eum explere, f,' nift faceret -·condemI)ÇJje. L. 24, §. 2, if. de aqiJâ &
aqua! pluv. arc. Si quelque- ouvrage élevé ou détruit a rendu
le cours de I~au plus rapide ou différent de celui qu'elle
devoir naturellement avoir, l'aaion pluviœ arcendœ eH exercée avec fuccès: plane fi ProF ter ici opus [uMatum, vefzementior aqua profluat, vel corrivetur, aquœ pluviœ arceudœ ac7ioue
agi poJ/e , etiam la6eo confitetur. L. 1, §. 22, ff. eod. La Lot
dir même que fi~le .propriétaire du terrein qui en au de.flùs
du plus proche voifin a fait quelque œuvre qui falfe couler
l'eau fur le fonds de celui-ci, & enfui.te fur un fecond inférieur qui eil: endommagé, ce dernier peur attaquer l'un ou
l'a.utre: fi tertius vicinus opus fecerit, unde decurrens aqua
per fundum primi vicini mei mihi noceat ; !a6ùllls ait, poffimecum pûmo, vel cum tertio omijfo primo agere, quœ Sentenlia vera efi. L. 6 in principio eod~ tit..
'
Dans les §. 3 & 4- de la Loi 1, if. de aq.ua & aqUte plu1-'.
arcend" il eH quellion de favoir fi un laboureur peur, pour
cultiver fan fonds, faire des rigoles ou aUIre nouvellt' œuvre.
Dans l'un, le Jurifconfu1re Qufil/uS Mutius lui accorde ce
droit; mais Tre6atius les reHreint; il veut qu'on ne puilfa
. faire des rigoles qu'avec la cllarrue pour faire venir le bled,),
.dnné~s 2782 f,' [uiv.
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& il ël1:ime qu'il ne peut pas en faire avec la houe ou la
beche: TreDatius autem 'luod non agri, fed 'lliod frumenti dumtaxat 'luœrendi caufa aratro fac1u(ll fit fa/um excepit. Dans
l'autre Mulius eH d'avis qu'on peut fuire des folfés ù~ns fan
champ. pour en faire décou~er l'eau qui nuit au bled, mais
qu'on ne doit pas en faire pour recevoir l'eau & la faire
couler par rigoles dans le champ du voifin : fed t;. fo'/Jas agrorllm
ficcandorum ,caufd faBas, Mucius ait, fundi co/endi caufd fie ri
non tamen 'oportere corrivandœ a'luœ caujà fieri. Mais fi le
/ labour~ur, dit le, §. '), peut enfemencer & culciver fon champ
fans rigoles '; dans ce cas l'aéiion arcendœ pluviœ, tenslante
à faire détourner l'eau, a lieu contre lui, quoiqu'lI les ait
faites pour cultiver fon chnmp: fed & fi 'luis arrare & ferere
poflit, etiam. fine jù/cis a'luariis teneri eum, fi 'luid ex his,
lieu agri colendi càufa videatlJr fecijJè.
Il réfulte de ces trois paragraphes que le propriétaire peut
faire dans Ion champ, non de nouvelles œuvres dans le deffein de l'<lméliorer & d'y établir des fabriques, comme le
foutient Aubran " mais feulement des ri!Joles, non pour rece\'oir l'eau, mais pour enfemencer le champ & faire couler
l'eau qui nuit au .!?Iec\.
.
D'aucres Loix lui défendent d'en changer la direélion que
la nature elle-même avait affigriée. L'aélion a'luœ pluviœ
arcendœ a lieu, difent-elles, tOLITes les fois que par l'ouvrage de main d'homme, l'eau p'!uviale peur nuire au champ
de celui qui exerce l'aélion, c'eH-lI-dire lorfque les eaux, au
moyen de cet ouvrage, prennent un cours différent de celui
<ju'elles avoient naturellement coutume de prendre: toties'lue
. locum haDet, 'luoties manufac10 opere agro a'lua nocitlJra efl,
id efi, C/lm 'luis manufecerit quo Miter flueru 'luam natlJra
faleru. L. l, §. 1 eod. tit. L'aélion a'luœ p/uv. arcend. el!:
même fi favorifée, qu'un dommage poffiblè la fair naître.
Pour pouvoir fe fervir de cette aélion, dit le §. .( de la Loi
1, il fuffit que le voiCIn ait lieu, de craindre quelque dommage qui provienne de l'ouvrage déja fair & <jui peur en
cauler, fans attendre qu'il foit arrivé: ha:c alilem aaio loeum
�D U
PAL AIS
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PRO VEN C H.
~'1
lzabet in damna f1Q[ldumfaao, oprre t~1'nen jam faao hoc ejl
de eo opere ex quo damnum timetur.
Par cette aébon, dit la Loi l'h §. 2 eod. tit., comme
par celle appellée en droit damni infeai, on peut fe pourvoir pour le dommage qui n'eH pas encore arrivé; il fuffie
qu'on ait· lieu de l'appréhender, ce qui' eH bien différent
de prefque toutes les autres aél:ions qui ne s'intentent que
pour la réparation du dommage caufé. Les Loix ne fe conrement pas de défendre au propriétaire fupérieur de fair~
dégorger par màin. d'hoh,me les eaux de fan champ dans
celui de fan voiun & d'en détourner le cours; elles lui inhibent effentiellement de dénaturer, de corrompre celles que
le maître du domaine inférieur dai~ néceffairemént recevoir;
fi l'un ,contrevient à leur difpoutio'n, l'autre peut refurer les
eaux.
Dans l'hYPQthefe d~ la Loi 3,.ff. de aquâ & aquœ pluv•
.arc.end., il s'ag~ffoit d'un particulier qui ,avait fait conftruire
un moulin à foulon fur le bord d'une fontaine, dont l'eau
prenait fa fource fur fon fonds, & faifoit, couler fur celui
du voiun l'eau qui fanait de cette foulerie. Dans ce cas le
'1urifconfulte Trehatius penfe qu'on ne pem fe fervir conrre'
ce particulier de l'aél:ion aquœ pluviœ arcendœ; mais la plupart font d'avis qu'on peut fe pourvoir contre lui, s'il retient cetse eau dans une foffe, du s'il y jette, ou y mêle
des immondices ou autres chofes qui peuvent la corrompre
ou la falir.
Ne fit-on que faire paffer les eaux du domaine fupérieur
dans un' gaffin, & De leur communiqua-t-on qu'une tiédeur
qu'elles n'ont pas d'elles-mêmes, le propriétaire inférieur peue
les refufer, par .cela feul qu'elles ont été dénaturées, il
l'aél:ion négatoire, comme le dit Lalaure dans fon traité des
fervitudes, pag. SOI.
"
Ce n'eH pas feulement lorfque les eaux font dénaturées, que
le propriétaire inférieur peuç les refufer; mais il y eH ~n
core au tarifé , .quand des eaux étrangeres font mêlées avec
celles que le propriétaire fupérieur a droit de conduire. La
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r.
Loi 1 , §. 17 ,.If. de aquâ quotid. & œjl. dit m~me qu'on
peut défendre de faire patTer la totalité de l'eau. La raifon
en ell:, dit Cœpola, ch. 4, D. 68, pag. 239, que cette
eau mêlangée ea indiviGble, & qu'alors l'utile ea vicié par
l'inutile.
Véritablement les héritages inférieurs font atTervis aux
propriétés fupérieures; mais ce n'ell: que pour recevoir les
-eaux pluviales, tout ce qu'elles entralnent, le torrent qu'elles
peuvent former, les fources qu'elles peuvent faire naltre ;
mais ce doit être naturellement; il faut que ce foit' l'ouvrage de la nature, & non pas celui de l'homme: naturaliter
non manu fac7o, ce font les propres termes de la Loi 20 ,
§. r, .If. de ferviturihus. Il n'élOit pas permis de pratiquer
un puits fur fan terrein, dans le detTe in de verfer fur le
champ du voiGn l'eau qu'il en puiferoit; l'eau ne lortoie
point d'elle-même fur la fuperficie; elle avoit fOI1 écoulement peut,-être à trente pans de profondeur; trop fOUlerraine pour être nuiGble, elle n'avait peut-être pas même
fa direélion dans le domaine de Long. La feule altération
de fan cours motiverait la plainte de celui-ci. Il
prouvé
par le rapport que le mélange d'eau verfé dans le fofl'é
de Long ell: eratTeux, huileux, noirâtre & bourbeux, puant,
& l'on pourrait ajouter pe(lilentiel: l'eau
donc corrompue de la maniere la plus nuilible, la plus dangereufe
pour le voiGn.
.
.
qn répondait> pour le lieur Aubran, qu'on appelle [ource
l'endroit mê me d'où l'eau nalt: caput aquœ illud efl undJ
aC/ua nafcitur. On appelle [ource l'endroit d'où elle fort:
ejus hoc capu! dicemus /lM primum emergit. Or, li l'eau a
'été trouvée dans le fonds d'Aubran, n'e!1:-ce pas là qu'e!1:
la fource? N'eH-ce pas dans fan fonds qu'eHe a paru? Et
fi l'on convient, d'après Domat, que le propriétaire inférieu,r .
obligé de re'ce\'oir les, eaux nées dans l'héritage
fupeneur, comment Long peut-Il fe refufer à recevoir les
eaux, ~e la fo?rce dont il s'agit? Peu importe que 1a fource
ait ete trouvee à onze pans ou à deux, la chofe
in-,
ea
ea
,
ea
ea
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PALAIS
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PROVENCE:
,~3'
diiférente; la feule condition impofée au p,opriétâire fupé.
rieur ,eH que l'eau fait née dans fan fonds. C'e.ll: donc
une abfurdité de dire qu'Aubran ne pellt faire ufage de
l'eau trouvée dans fan fonds, parce qu'elle ne fortoi~ pas
'd'elle-même fur la fuperficie; il 'n'y a auCune Loi, aucun
-Auteur qui a'ir établi de la ~ifférence entre l'eau à laquelle
on donnoit un cours, & celle qui le prenait d'elle-même.
:1;'ous les Auteurs o'nt dit que le fonds inférieur était obligé
'de recevoir l'eaD de la fource trouvée dans le fonds fupé:.
rieur; autrement il faudrait admettre qu'un p'ropriétaire qui
'trouve de· l'eau dans (on fonds, ne' peut: en faire aucun
:ufage; par cela feul que l'eau ne fortira pas. d'elle-même;
'{yl!:ême qui contrarie toUS les principes de la propriété.
La Loi a dit qu'on pouvoit rendre la condition de fon
voifin meilleure, mais qu'on ne pouvoit pas la rendre pire•
.'Ce principe établi par la Loi el!: fans doute. un. principe de
droit naturel; il faut faire aux hommes le plus de hien &
'le moins de mal poffible; mais s'enfuit-il qu'on doive re·
.noncer à (es droits, qu'on doive abandonner une facu]ié
naturelle, parce qu'un voifin voudra empêcher d'en ufer,
parce qu'elle en nuifible quand on n'excéde. pas fan .droit ;
la c'ondition d~un voifin peut devenir moins avantageufe', fans
qu'il 'ait le droit de fe plaindre. Ce que l'on fa'Ït' av'ec droit
.n"eH jamais injul!:e, parce que rien n'el!: plus légitime &
pl~s naturel que d'Lifer de fon droit. L'abus feul en repréhenfible, & ne. doir pas être toléré
Tout préjudice caufé au voifin par une nouvelle œuvre
'doit être reparé; mais 00' Q'a jamais foutenu que dans le
cas même où elle ne portait aucun dommage au voifin,
. celui-ci pût la faire prohiber, fans autre motif q.ue fa fantailie ou l'animalité qu'il a conçu coritre fan voifin. L'eau
de. la pluye ne doit point être arrêtée dans le fonds fupérieur; le cours n'en doit pas être rendu plus rapide par
,des fofI'és, qui en refI'errant l'eau, lui donnent plus d'actjvité & de violence; au lieu qu'en lui laifI'ant leur cours
.nature), après avoir imbibé le fondsJupérieur, elles découlent
�")lI: 1 · 1 ô U RclT If' L .11 (
dans le fonds inférieur avec inoins d'impétuofité" en raifdil
de ce qu'elle prend une plus grande furface. Mais peut-on
dire la même chofe de l'eau d'une fource dont le volume
db toujours le même, & que l'on peut diriger fans inconvénient dans des canaux? Tome la difficulté rélide au
point de favoir s'jL en réfulce quelque dommage. pour le
pcopriétaire inférieur. .
.
. .
Ainli la loi l , de a'luâ & a'luœ pluv. arcend.; dit que li
par quelque ouvrage le pTOpriétaire fupérieur a rendu le
cours des eaux plus rapide, le propriétaire inférieur a droit
de fe plaindre: planè:fi proprer id 0PU9 fùhlaturf~ vehemeniior
aquâ ped/uat. La loi ~6 eft auffi da!?s le cas Oll la' nouvelle
œuvre porte pré-jlldice au fonds inférieur. Ce n'elt donc
qu'en r_aifon du préjudice que le cours des eaux caufe au
propriétaire inférieur qu'il a droit de fe plaindre.
Dans le chojx des opinions des; Jurifconfultes fur les §.
3 & 4 de la loil 1, il femble que celle de Quintus-Mutius
doit à tous Jgards avoir. la préférence ,. parce qu'elle en
fondée fur ce principe de droit nattlrel aucant que de droit
.civil, que chacun peut difpofer de ce qui lui appartient,
pourvu qu'il ne porte aucun préjudice au voifin; refiriél:ion
qui réfute affe.z. cout ce .qu'oh peut dj're pour l'opinion dè
.Trehatius; 'parce qu'il réline à cous les priticipes :de jùftice
d'empêcHer quelqu'un de faire ce qui peût lui être utile.
Toutes les précautions indiquées par Trehatius ne tendent
qu'à garantir le propriétaire inférieur du préjudice q~'il
pourrait foulfrir; mais l'avis' de Quintlls-Mutius y pourvoit
affez, en mettant à la faculté. de faire des ·nouvelles œuvres
pour l'amélioration des fonds, ou pour l'a~antage du propriét~ire, la condition expreffe, pourvu que ce [oit fans porter
préjudice au voifin. Que les nouvelles œuvres foient faites
pour rendre le champ plus fécond en bled, ou pour y
établir une fabrique dont le produit tourne au profit _au
propriétaire; c'eH toujours le même objet 'd'utilité que la
loi a conlideré La liberté naturelle qu'a tout propriétaire
~'ufer à. fan avantage de la chofe qui lui appartient, a donné,
heu à cette difpolition.
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PA!)A.IS
D.E
PROV.ENCE:
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La loi ni Trehatius n'ont pas entendu profcrire les canaux néceffaires pour conduire l'eau d'une fource; la loi 1~
du même titre_ décide en termes formels qu'on peut fe
fervir de canaux, quoique le titre de la f"rvitude n'en parle
pas, pourvu toutes fois qu'ils ne portent aucun préjudice
au voiGn.
.
,
AinG il en: de principe que le propriétaire qui fait une
nouvelle œuvre dans fan' héritage ufe.de fon. droit; ii n'ell:
pas tenu du dommage qui pourroit en réfulter pour le voiGn,
'dès qu'il ne fait pas ce changement pour lui nuire. ( Domat
'dans fes loix civiles, tit. 8, fea. 3, n. 9, pag•. l S3. )
En admertant pour un moment que les eaux de la fa'brique & du lavoir du Geur 'Aubran caufaffeni: quelque pré~
iudice au Geur Long, il ne pourroit pas même s'en plaindre; parce qu'en ufant de fon droit pour fon utilité, fans
efprit d'émulation & fans aucun objet de. nuire, le Geur
Lon~ feroit obligé de filpporter 'Ie préjudice qui pourroic
en réfulter. Mais ici on va plus loin; on .s'oblige de tenir
-le vallat duement curé; on veut donc prévenir le moindre
préjudice quelconque. Enfin Aubran verre les eaux de fa
fabriqlJe & de fon lavoir dans un foffé établi pour recevoir
les eaux de toutes les propriétés fupérieures ou contigues.
'Ce foffé n'eil: pàs feulement établi dans le fonds du Geur
Long; il n'eil: que la continuation de pareils .foffés qui ont
,également été formés dans les propriétés du même quar:..
rier : ce n'en: point un foffé établi à leur urage particulier,
mais à celui de tous les propriétaires des environs; c'en: un
foffé établi conftnfu omnium; c'en:' donc un foffé public
& à l'ufage de tous les propriétaires pour la décharge de
leurs eaux•
. Par Arrêt du liMai 1782, au rapport de Mr. le Confeiller de Montvalon, la Cour confirma la Sentence, compenfa les dépens jurqu'à l'expédient offert par Aubran, &
condamna Long à tous les autres' & à ceux f.1its pardevant
'la Cour. Ecrivant Mes. Sauvere & Sellon.
"
~.
�ARRÊT
IX.
Sur une demande en refcifion.
Dans un teJlament, les claufes ohfcures" doivent être interprétées en faveur de l'héritier 'coritre le légataire.
S
Ieur François René David, Bourgeois de la ville d'En..
rtevaux, .légua à fon époufe, en route propriété, une mai.fon de bas en haut qu'il poJrédoit à Enrrevaux, donnant fur
la place ~ avec rout ce qui fe trouv~roit dans icelle. Après
la mort du fieur David, fa veuve fir_ une quittance publique ,à Anroine David, héririer de fon mari, du mobilier,
& il fut dir qu'il jouiroir de la maifon do'nnanr !lir la place,
,communiquant par, poinre à une autre maifon de l'h,oirie par
deux portes de communication que le lieur David ferait
boucher -à: fe's dépens, pour que chacune des parties pût di{pofer ,de ·Ia lien'ne à fes volontés. La veuve David ayant
voulu fe mettre en poJreffion de la maifon, le fieur David
s'y oppofa, en foutenanr qu'il en exifloit deux, dont elle
, avoit confenri la fépararion par l'aél:e du 18 Mai 1778. Sur
ces conteilations le Juge accorda à l'héririer la jouiJrance pro,vifoire de la, partie de maifon qu'il récbmoit, & fur le fonds il
ordonna un plus amplement oui. Appel de la part de la veuve
David pardevant la SénéchauJrée de Cafie la ne , qui confirma
la Semence. NOll.vel appel pardevant la Gour. La Dame David
prit, en tant que de~befoin, des le'tres de refcilion envers
_
l'aél:e du 18 Mai 1 7 7 8 . '
On 'difoit pour la veuve David, que la maifon de la famille David étoit anciennement compofée 1 o. d'un bâtiment
firué à la rue fupérieure à la place, & de quelques ap~r
temens à côré; 2,0, d'une cave, boutique au deJrus, d' ne
chambre fur la bQutique, & d'une galerie. Ces quatre q ticles vifoient fur la place; les apparremeus laréraux de la ~r~- .
mlere
,
�DU
PALAIS
nB
PROVBNCB:
57
iniere pàrtie i faifoient àuffi face; mais il y avait entre
deux une petite ruelle dont la longueur égalait la profondeur de la boutique. Cerre maifon ainfi compofée avait toujours eu-deux portes d'entrée qui s'envifageoient & qui éroient
ouvertes dans la rue; il n'yen avait. jamais eu aucune du
côté de la pIJce. D'après cet expofé, la mai fan a été léguée
en entier à la veuve David, & l'aae dont s'agit ne peut
y mettre aucun obllac1e, parce qu'il n'a été mis au legs
aucune re!l:riaion ni réferve.
Il éroit convenu que tout ce qui compofoit la vieille maifan n'en était qu'une, & il éroit conllant en fa-it que le
lieur David n'avait acheté qu'une chambre au deffils de
celle qu'il polfédoit déja. Il n'y a donc jamais eu deux maifans; les deux ilfues que la maifon a ne forment pas une di·vi/ion,. parce. qu'elles n'ont été pratiquées que pour la corn.
modité du propriétaire, & non pour défigner qu'il avait
deux maifons.
'.
Lor[que celui qui tient tout' une maifon pour fan ufage,
dit Defpeilfes, tom. 2, pag. 230, fait tel legs à fa femme,
je legue
ma femme la partie de la maiforz erz laquelle nOliS
avons accoutumé de demeurer, ce legs comprend non feulement les chambres oll les mariés avaient accoutumés de
dormir, mais la maifon entiere. Dans le cas préfent, dire
que le legs doit être limité aux appanemens donnant fùr
la place, c'ell vouloir divifer une mai fan qui ne l'a jamais
été, & qui n'avait pas ceffé d'être poffédée par le teltateur
corzjwzmm & norz feparatim, puifque pour -en ufer plus li.
brement & plus commodement, il avait fait ouvrir des
portes de communication. L'énonciation du confront de la
place n'ell point une énonciation re{lriaive du legs, parce
que ce n'eIl point ce qui vife de ce côté qui a été légué,
mais la maifon qui eH un corps cerrain & qui embraffe né.
ceffairement routes les parries dont il efl: comparé; ce con.
front même erroné ne vicierait pas le legs, parce qu'en draie
il fuffit qu'il conHe d'ailleurs de l'identité de la chofe, poutqu'elle ne puilfe pas être difputée au légataire.
A'jn~es 1782. & fuiv.
Il
a
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1
JOUR.NAL
Dans le legs d'une maifotl on comprend tout ce qui;
en: arraché ou joint pour fa commodité, parce qu'on ne le
regarde que comme un feul eft~r. C'efi ainli que le décide
la Loi 9, §. s,.If. de legato 3 donr voici les rermes: 'lui domum poffidehat, hortum vicinum œdihqs comparavit ac po/lea
domum legallit. Si hortum domus cau{ti comparavit , ut am~
niorem domum ac faluhril)rem pojJideret, aditumque in eum
per domum' hahuit, & œdium lLOrtus addimentunz fuit, hortus
legato continehitur. Domat en fan traité des Loix civiles,
tom. 2., liv. 3, rir. l, feél:. 6, n. 14, & Dumoulin fur la
coutume de Paris, rir. l, §. 13, glof. in va. le jardin, n.
2., enfeignent que fous le nom d'une maifon, on entend
toutes les appartenances & les dépendances.
C'efi un autre principe également incontdiable, qui fe
trouve littéralement décidé par la Loi la ,.If. de legato &
fideicomm. z, que dans toUS les legs d'un fonds certain &
déterminé, lorfque le tefl:areur y a fait, même après le
tefl:amenr, quelque adition ldont il a joui conjonél:ivement ,
elle fe trouve comprife dans le legs fans aucune difficulré:
cfJm fundus norriinatim legatus Jit, Ji quid ei pofl tiflamentum
factum adjeaum efl, id quoque legato cedit, etiamfi illa verha
adjeaa non fint, 'lui meus ait: Ji modo teflator eam partem .
non feparatlm po.JJedit, fed univerJitati prioris fundi adjunxit.
- A plus forre rai fan la parrie acquife avant le tefiament
doit~elle y être comprife, lorfque le tefl:areur n'a fait) en.
faveur de fan héritier aucune réferve. Dans le cas où l'adirion el! pofl:érieure au tefl:amenr, iL femble qu'on pourrait dire que le tefl:ateur n'a pas entendu vouloir en faire
une libéralité, puifqu'il ne la polfédoit pas encore, &
qu'il' ne ravoit pas 'même devoir la polféder un jour. Cependant la Loi l'accorde au légataire comme un accroilfement inhérent à fan legs. Que doit-ce être quand l'adition
à la chofe léguée a précédé le teHament? On ne peut pas
dire alors que l'intention du tellateur fair équivoque, parce
que s'il avait voulu borner fa libéralité, il s'en ferait expliqué, d'une maniere claire & précife.
�DU
PAL AIS
DE' PRO VEN C E.
)~
Sur .les lettres de refcjGon, on difoit que le véritable
objet de l'aél:e éroit celui de quittancer à l'héririer la délivrance du mobilier légué à la veuve David;' c'eil: rour ce
qu'on lui demandoir, c'eil: auffi ce qu'elle crur faire; &
J'on fait que aBus agentium non operatur ultra eorum inte.nûonem, fuivant la Loi 19 de reh. credit. Pourquoi voudroiron qu'il fût obligaroire pour elle à raifon d'une c1aufe rout-à.
fait érrangere à l'objet pour lequel il éroit paifé, &. qu'on
n'apper~oit point dans le difpoGrif? Quand on contraél:e fur
un point fixe & déterminé, rout ce qui n'y 'a aucun rapport eil: un hors-d'œuvre qu'on rejette comme inutile, ou
.qu'on regarde comme le. fruir du dol &. de la furprife.
Ici c'eil: dans l'expofé de' l'aél:e, & en rappellant l'hillorique des legs conrenus au teil:ament, qu'on gliife très-finement le claufe don~ l'héririer fe prévaur; on fe garda bien
d'en faire une difpoGtion à la fuire de la quittance; elle
-auroit frappé l'attention de la veuve; au lieu que confondue
dans la partie narrative qui n'eil: point elle-même l'aél:e,
mais la préparation à l'aél:e, on jugea qu'elle p'!{feroit trèsbien fans êrre app'er~ue. D'ailleurs c'eil: d'un côté une veuve
illitérée & d'un caraél:ere !impIe, & de l'autre un homme
. entendu dans Îes affaires d'intérêt. Cet aél:e ne peut être en.vifagé comme une tranfaélion, parce que les aél:es de cette'
efpece n'ont lieu que ad extinBionem litis motœ aut movendœ, inter parres contendentes, proprer incertum litis even'tum. D'après cette définition, il faut donc que celui qui
JranGge, difpofe d'une chofe douteufe & incertaine, de lite
duhiâ, comme l'enfeigne la Loi l , if. de tranfac1. Il rte lui
eil: pas permis de recourir àCètte voie, qu~nd il s'agit de
re validâ -& induhitatâ. C'eil: la dilPofirion de la Loi 12,
cod. eod. tit. Or, il n'y avait rien de douteux & d'incertain
dans l'érendue du legs. Il n'y a jamais eu de procès, ni
aucun qui fût fur le point de s'élever; il n'y avoir donc pas
rnaliere .à tranfaél:ion.
On répondait pour Antoine David, que l'aél:e du .8 Mai
177 8 était une véritable tranfaél:ion paifée entre majeurs
,
H:l.
,
�'60
1011 It,N A L
avecconnoilrance de caufe; il étoit de plus une jnterrr~ttitjon
donnée librement & volontairement par la veuve à une difpofirion teüamentaire dont elle avoit pu & dû, mieux que
tout aurre, connoitre le fens & l'étendue._C'étoit une tranfaB:ion, puifque c'étoit une convention paffée entre les parties fur une chofe domeufe..C'eil: la définition qu'en donne
h Loi l , if. de tranfac7., & la Loi 28, cod. ead.: con l'en:;'
lia quâ l'es dubia data aZiqua vel retenta, veZ promijJ;} de ciditur.
Deux chofes font feulement effentielles dans une"trana B:ion; la premiere, qu'il y ait quelque c.:hofe de donné,
retenu ou promis. L. 38, cod. de tranfaB.,· &. L. 3, c·od.
de repud. veZ abJlinend. hœred.; la feconde, que la convention
diffipe le ,dame & ne le lailfe plus fubfiil:er. L. 24 , cod.
de tranfaB. Le, droit romain n'exige rien de plus., On voit
même par la Loi 2, if. de tranfaB., que dans l'ancien droit
la flipulation aquilienne n'étoit point néceffaire dans les
tranfaB:ions , pour éteindre les .âB:ions qui n'y étoient pas
nommément exprimées: quant à la forme, les Romains; fi
délicats & même fi minutieux fur les formalités que nous
avons abrogées, n'en exigeoient aucune dans les tranfaétions;
on voit même dons les Loix S & 18, cod. de tranfac7ianibus, qu'ils n'exigeaient pas qu'une tranfaétion fût écrite'.
Telle' fut, pour diminuer les procès, la légil1ation d'un peuple éclairé. Pour conferver la paix intérieure, ils admirent
facilement la preuve d'une tranfaétion; ils jugerent qu'il ne
fallait ·pas être difficile fur la forme & fur les preuves d'un
acre qui affure le repos des familles. Dès qu'on put préfumer que les parties s'étoient·rendues juil:ice à elles-mêmes,
on les déclara non reèevables à venir intercéder la juftice
du" Magifl:rat.
,
L'aéte dont il s'agit dt-il une tranfaB:ion? On ne peut
·le mettre en quefl:ion, quand on voit que les parties pactife.nt fur tous les objers qui pouvoient faire naltre des différents entre le légataire & l'héritier. C'eil: d'ailleurs, quant
à l'article de la maifon, une convention par laquelle une
�b u
PAL A·f S
l
])l'S"-' PRO V SNe il;
·dt,
'thofe doutebfé éll:· d<!cidée, èônvendo quf:' rê'sfd'ubia ?Îecidillir;
;la Loi ajoute; ali~'uocjdato vel Iretento , velf'pl'Omi.J/iJI; il faut
-qu'il y ait quelque chofè de donhé, 'retenu,oui-promis.' Dans
q'aél'e, d'ont il )'agit, l'héritier J~bnne" la 'maJfon fit'uée,' fUF
'la plaèe, 'il reiie.m 'celle 'qt1Î è{f·lhueé fut ~une autre rue,
-& il prom.et' decfaire b~uc,he(Jià -fesJrdépeJ\~"'Ia'rcdnllnUi1iC:a~
1tion ''èntre' 'les deux maifobs;; ifne-[feulè--de~~es ùl?Îrconfi'aric·es
'lfu!Efcorf'fur une qlleffioll d~ut-eufe; po.ur- fil:re'l~iré qu'il ;y' a
eu tranfaél:ion; il' fuffit donc d!exami·ner ,fiLles -parties' ont
'paltifé fur une quell:i?ri -<!ouieufe. ·Lé' doute 'ri~ na.i1fàitrp~int
fdl!sJ[termes J du-:tèlt1ment·;. lè~h tèltateutiJ1-legue. uné) .mai~~
'dondahi: f"lr j la .plac.!!, cela (ell:'claior·l'J il \<vè ~pouvoiê naître
que des c!rconll:anée~ .du faj~, é'efl::'à-dir~ ~e- :lil),'jeri,~i~
de la maifon' par 'un ·ponr. C efl: ·fur ce faIt, que~les partIes
:ont diffipé- tout ·dou,e· par' leurs atc6fds '; ~c'elt fur\te fa ft
'-qu'elles oht tra.nfigé; il 1 ne.. peue plus êrre .quell:ion eérf'elles
'dél favoirLs'il y àllcfuJ ou',nGb> ih orporadofI..,des ·déux'·m·àÏl~fo~sf & quelle' a' ét.é ·Ia- ;véritable 'inrentiôfl' dû') teIliaf<!:ur.
"Sa veuvè, 'légatairé~ qui connôilfoir niieux qlie perfonn'é' quelles
·étoient les inrentioos' de . fon mari; '.& cé qu'i1 ente'ndoit
I).ap fi maifon·donnant fllr,la place;, a fait di'fpar\oifre.lé' qoure
par fes accords· avec Phéritier,.C'e.fi: dgne uhe.véritable ùa~'faél:ien .fur ce.doulé. N ,) . l ':~ (' , l
,:.1 j " : è
La .rranfaél:ior: (uPP!J!e une c?nrefl:ation née ,ou ,à na1tre,
cela. efl: vrai: quand 'on:: dit ' '!~aître, c'éll: que peu importe
qU'D'n veu,ille décider des quefl:ions déja élevées ou feulement
à- élêven Le paél:e ftir 1es quefl:io'ns'à élever & qui les dé.eide ' , n'ell: pas moins- uneHt;anfatlion, lorfqu'i1 y a qûelque
.Clliof:}'de donné., Ide .retenu' Clll .de -promis; 'c'éH la· diffé·rende qu'il.y a.renrre la rtanfaél:ion -&, li fimple déclara~ion,
~u renonciation; IOU . ddnation. Le procès d'ailleurs étoit
:fans douce prêt à fe moùvoir entre 'Ia .veuve' & l'hépitier;
,il,y. avoit eu encr'eux des conrefl:atiO"'l1s'foTt vives. L'aél:é ell:
:donc'une tranfaél:ion, & doit être llonfiâéré de même fous
,- J
~
.
:tous rIé!l rapports poffibles.
• : J lies: Loix' 10 & ..2c>, cod. de tranfaéiionilms, donnénc aux
�'t2.'
""
,.J
0 V"R N
* i.
. "
'J'
tranfa,él:igns ,l'a\lcoriré de ·la chofe jugée. La Loi 39 "{eor
·donne la même .force 1 &, .là Lo! 1,6. décid~ .qlje les ,procès
finis par lranfaélion ne peljvent )'eyjvre par rercrip~ d~ Sou.verain; elles, les regardent· comme des aél:es facres conrr~
flefq~els ~n, !le :p.~u~ ,rellenjr~ f~us ,auçu? p'f(~~ex~~, ni ppur
.le{jpp, 01 :p~~r.Jgnorançe ge d'rOlt ~ 01 pour l'!leçe HouvelleIlJent reèOUYl;~. Lgs !J1oyens tires pe la crfli[l\e P4' d.u
dqi ,font le~"fe.ul~ e~.cepr~~: Ç'efi ~uffi ce qui efi porré-:pa.r
~l!Edtt ode· ,Cha:r1es ,1)( ,dl! IlJoip $1:Ayril 1)60.
• On.iexaminp,i.t ,enfuire ,fi .l'~ncorppçation des çleux maifons
rll'éroiç ~lfeélljée •.du .v,iv-ant du. n;lari, de 'lllânl.ere que lNanli
,il avoi~' dit ,je 'leguç une maifon, cela /~n{fioit t·am la,v,ie,ille
rqlle la m~qveIl~ JO'inrés ep'fembJe. par un pont, <".
" En 'droit, il éH:.çer.ta,in que l'héririer érant fuppofé'êrre
là perf~nne que Je tefiateur .aime ·le .plus, ,les claufes 91;>(cures da·ns un teO:!lment .dQivent frre interprétées en fa faveur
cQnrre le,s < l~g'~J~ires ••( Mr. de MontY!lllon, tcim,' 1, ~g.
;J; S2; Decptm,is, ~OIIl.t2, col. 62'1, ~7-4, & ita omne-§, ), Ç'~ll
une reg\e de groit, que in dU/Jlo p'7rcendum 1l hœredi,ji mens
-partium ji~ àm'bigua in te.fiametitis ,1 rçfPondendum .e.fi favore
hœredis', & Cjuod minimum e.fi ùgqtario datur. Semper in ODf.curis CJlIod 1 minimum· e.fi feCjuitlJr. L,. 9,.if. de regul. jur., &
les Loix 14, §. 1, 7S, 39, §.6 & .13, §.. I,ff.rde ,legari$,•. . :" •
1 !:~'f1r _ "
'lu"
•
• l
Celui qui .doline '~fi ,rpujou(:> préflJmé ~onnèr (lloins. q~
plus; ainfi quand un tlon n'efi pas-clairement exprimé, on
ne peur pa-s préfume'r ,qu'il .air éré fair. La. Loi ~fi fur ce
point le réfulçat de h H~cQ!Jnoiifance "morale des hommes.
L'interpréra(ion donnée ,pan ~a".veuve ·Davjd .doir .d'a'utane
,plus être confidérée ,.qu'elle, he. pouvoit ignorer les virirahIes intenriolls de fOlL !ll~ri" & qu'elle a 'dû f.wojr _Ce
qu'elle entendoit par maifon fur la place; de maniere que
~ l'aél:e du 18.Mai 1778 ne pouvoit v.aloir comme co.orrat;
Il vaudroit au moins 'Jcomme tléclararion & aveu. ferv.ant
d'interprétarion à ce que les hoirs du lieur Dav.id ,dbl~e~
entendre par ces têrnies, une maifon donnant /ur la prace~
'J
'
�,
DU
PALA.IS.'::J)JE:r J'ROVENCE;
~~'
La quenion de favoir quand en-cc que le legs d'un fonds
comprend celui que le teffiteur y a ~ni fe 'trouve par-.N)uh
tous les Auteurs ne fe décident pour l'affirmative que dans
le _cas où l'union a été fàite pour là perfeélion ou néceffité perpétuelle. Il faut que l'union ait été taite dans la vue
&' d'al\s l'efprit' de ne f<l'ire déformais' qu'un~' tout de< deuic
t;h'Çîfes qui éraient, déja fép~rées;_ il faue fur-tout '.que 1incqrporation ne puiffe pas .être révoquée en doutè.>: im,da1Jio,
indijlinc7è non prœfumitur incor oracio, dit Dumoulin in conf.
§. 37, glof.
n. iO.·
'.'
: '
. .
: Un aut,re 'principe général" .c'en que fi celui qui .avo~
deux maifons ',en legue une" ~fans dire laquelle, l'héritier eG:
tenu de donner' !fne des maifons, du teHateur à,.[on clraix.:
fi domus alieui ,!t"mpliciur fit legata, neque adjet1um,' qu~
domus , coguntur- hœredes quam volent ex his quas tejlator ha'hehat legatario dore. L. 7 l ,if. de legatis la. L. 32, §. l ,
&: L. 37, §. l, if. eod; ). ,.' ~ : .
,'
La meilleure maniere d'interpréte~.la, c1aufe. dont- il s'.agit,
c'en de 'chen,lier ce que ,le'tenateur entendoit communément par ;'lr màifon [ur la' place•. On voit dans [on livre
de raifon qu'il difiinguoit 'fes deux maifons, appellant l'une
fa vieille maifon, & l'autre [a nouvelle maifon" & il a
entendu n'en léguer qu'une, celle qui donne [ur la place.
L'ané & 'l'autre n'ont jamais é'té arrenté~s enfemhle; 'ëhacune a toujours. eu [a, porte' d'emrée & [on' efcalietS-;fé:;.
paré: donc la jonétion n'avoit pas été'faite ad perpetuam !le~
cejJitatem fi perfec1ionem.
.'
Arrêt de partage du 29 Mai 1782, au rapport de Mr. le
Con[eiller d'Alpheran, Mr. de Franc Taffi Corn'p'artiteur,
vuidé le 4 Juin [uivant; la Sente'nee fut ,eonfirm.ée avec dé.,
pens, & la' COUf n'eut aucun égard aux letttes dë- re[ciGonl
Ecrivant Mes. Verdollin & Jaubert. .
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T, ;X.
'Dans la levée d'une impo/itioll par forme de capage, l'a ré.partition doit être fdite; eu égal'd ,OilX facultés .de clicujue
,. tohtribuable. .
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.,
Ar délibération du 2) Février 1:?81, l~ Commun~uté
,
d'A.lIan délilJéra 4e faire c'oofiruire une horloge, & on
fixa le paiement.par la voie d'un capage; il fut nommé dés
Commilfairés' pour ~n .faire l<i répattitipp, eu égard aux facultés' des habitans; les Commiffaires .dretferent· le rôle
des contribuables, & firent différentes c1aiTes. Après .cem:
opération, il fut pris une fecond,e délibération le 28 Oc..,
tobre de la même année, portant de faire aurorifer par la
Cour lé capage', ainG. que'le. Jôle des èontribuaJ:>les; & par
Arrêt du ') No.vembre la délibération fu~, hQmologuée. Le
) Déaembre fuivânt Raymond- LllU'zier, Jean Peire & leurs
adhérans préfenrerent une requête en oppofition & calfation de la délibération, & en r~vocation de l'Arrêt. qui
l'.homologuoit.
"
. 1:
(
'..
1
,.On ]Drop.ofoit pour eux dèux moyens.;' le premier, le ca..,
page était, étaBli ·pour un objet non, nécelfaire'; le fecond,
il Y avoit ,inégalité .daos la répartition, & elle érait injufie
& partiale. On difoit que la confiruétion d'une horloge
pubJique. 'érait tout-à-fait inutile,' y en ayanr dans le lieu
de parti.culiere.s; que la Com:muna"ljté ni,fes,habitans n'éraient
pàs .daQS ~lJn étaLd'a'ifa!lce po(fr fe ·livrer à une dépenfe 'de
luxe & rde.;,commodité;, qu'en fair d'ohj'ets de dépenfe C{lpagere, il Y avoit toujoprs unê di!l:inétion à faire. S'agit-il
de la confiruétion d'une Eglife paroiffiale, d'une maifon
curiale, d'une maifon commune, d'une fontaine, ou enfin
d'autres objets d'une utilité fi générale & d'un befoin ah[olu? Dans ce cas, il n'y a aucune raifon d'impuilfance qui
puilfe
P
�DU
PALA"IS
DE
:P'ROVIlNCE.
n'y
65
··pùiffe empêcher de fe les procurer, pa~ce qu'X
a' aucune
raifon qui puiffe réfifier à la néceffité de les voir. Mais quand
il s'agit d'une dépenfe de luxe & de pure commodité, telle
que la confiruél:ion d'une horloge, il n'efi permis de la faire
que quand la Communauté & les particuliers fé trouvent dans
la plus grande' aifarice..
'
Il efi de l'effence du capage d'être reparti également fu'r
toutes les têtes contribuables. Les Communautés d'habitahs
font des affociations civiles formées par une fuite de la propriété des biens, & dont les membres fe font réunis p-our
veiller avec plus de force à la défenfe commune. Ces affociations bornées dans le principe à elles-mêmes, mais faifant partie dans la fuite d~une affociation plus confidérable;
avoient dans toUS les temps des dépenfes à faire pour remplir l'objet de leur établiffement ,. c'efi-à-dire pour veiller à
la défenfe commune. Cette défenfe avoit principalement
pour objet la 'propriété, & ce 'terme n'étoit relatif qu'aux
fonds de terre qui faifuient, & qui font encore la véritable
richeffe. L'ar-gent & les papiers n'en ont jamais été que
les lignes repréfent:ltifS, mais ils ne la confiituent pas; ne
produifant rien par eux-mêmes, ils he 'pouvoient être fournis
à uoe taxe qui ne peut jamais' être impofée- que fur le produit.
D'ailleurs il étoit, roujours facileJdè"les'lfoufiraire à l'impo-fltion en .les tranfp'ortant ailleurs:'Les~'funds·de terre (urent
donc les' feuls- objets de. "défeofe' '.&' de dépeMe' (le' la' patt
des Communautés, & par ~onféquent les feuls qui pJffenr
être impofés. C'efi de ce principe 'que· d~rive la taille impofée f~r les fonds; )mpofition qui dt' relative & proportionnée à la proprié(é de chacun, non ljar rapport à l'étendue', mais eu égard à fes proêuits, parce qu'è c'eH feule J
ment "fur les produ,its qu'elle peut être prife. Delà l'étabJiffement des cadaltres " pour confiarer ta valeur des .fonds &
en fixer les revenus, Comme ces', produits é'toient fouvent
fujets à ,des variations, & que ·par ,conféquef!t 00 ne' pou-'
voit les 1i.xer d'une maoiere invariable, qJlelqu'es (!;ommu;;.l
nautés, fllns fe /erv.ir de cadaltre ni d'apprécia lobs q~i font
Allllées z782 & fuiv.
1
�'66
1
10
U R
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A
L
fouvent inexaaes; établirent leurs impoûtions djreaemen~
fur les produits & en nature d'iceux, en levant une cotité
fur toUS les nuits, telle qu'un dixain, un vingtain.... Cette
'impolition paraît plus -jufre que la taille, parce que le cadafrre ne Ce renouvellant pas toutes les années., mais du/ Tant Couvent un fiecle entier, les terres changent de fdce,
Suivant les différens propriétaires qui les poffedent & leurs
moyens; d'où il arrive qu'une terre peu appréciée dans le
cadafrre, parce qu'elle écoit fans culture, devient très-précieuCe par les améliorations qui y font faites, & cominue
,de payer peu, tandis que cell~ qui écoit fort efrimée par::
vient à un état de dégradation fuccelIive" & continue de
payer beaucoup; au lieu que par le moyen de l'impolition
en fruits, chaque fonds 'ne paye que fuivanc fes produc-,
tlons.
Cette forme d'impolitio n n'eG pas cependant Cans inconvénient. Tel fonds produit d'abondances récoltes Cans
engrais & prefque fans culture par la qualité de (on fol &
de fon expolition,' tandis qu'on ne peut obtenit de pareilles
récoltes d'un autre fonds qu'avec beaucoup de peine & de
dépenCes; d'où il réfulte que ce dernier ne payanc que la
même quantité, fupporte réelle me pt davancage, parce que
le pr6duit net, eG moindre. On crut Ce CouJl:raire à ces in·,
~onv~niens , en y Cubfriwa!1t le!!:rêves, c'ef\~à-dire les impolitions (ur les cpnf'?l1!mations " qui, quàique 'mqins égales
_ 'que la taille ou la cotité des fruits, ont l'avancage trèsprécieux d'être payées en détail, & fans, pour ainli çlire ,
qu~ le concri\map;!e, s'en apperçoive. Il
1
. Tels ont é\~, dans tous .les temps l,es' mo-yen~ dOnE les
çommuna~tés parriculie;es fe font fervies pour fe proçurer
la défenCe commune ae la propriété, ,unique objet des impolit ions , 10rCqu'elles étoient chargées, elles-mêmes du foin
de Ce défendre; mais lorfqu~ par leurs liaiCons avec d'autres
'llfociations plus conlidérables, elles eurent tranfmis en d'autres mains le foin cledes gouverner & de les défendre,
l'impofition ne fut plus lev~e qu'au profit de la ,puilfance
�DU
PALAIS-
DIl,
PaOVRNC.E.,
~ qui ce foin fut confié; & fbUS quelque forme que
t1
ce.. fût,
elle fut appellée du nom générique de taille du impôt fon-
cier levé au profit de l'Etat.
Dans les différentes formes & viciffitudes que les divers
il ne put être '!utrement que les
Communautés n'y contribuaffellt; les unes palrerent fubitement
au pouvoirabfolu , perdirent le droit de s'impofer elles-mêmes, & les imp?fitions qu'elles percevoient à leur profit
dans le moment qu'elles furent foumifes, ne le furent dans
la fuite qu'au profit-de celui qui devenoit leur chef, qui lè
les appropria, en augmenta ou diminua le produit' à lfort
gré, & leur donna un c!lraél:ere de perpétuité; lès autres
eurent le bonheur de parvenir à un gou~erhement plus doul(
& plus modéré. De ce nombre fut la Proven'ce, qui paye'
en corps le produit de la tàille à titre de 1:lon gratuit,
& à titre d'abonnement les fommes que' lé Roi impo[eJ•
fur la Province, & dont les Communautés ont conlêrv e
le droit précieux de- lever chacune fa quote-part de la maniere la plus commode & la moi.ns onéreufe pou'r l'es habitans. Cependant quoiqu'il reliât une efpece de liberté dans
la forme de l'impofition, [on objet principal était rou··
jours le ·même , (.'ell-à-dire 'qu'elle étoiHevée pour le Gou':
.,'
."
! - -" ~
vernement.
Le ,pays formant un corps, & ayant url~ ..jh·dmihjliratiori
intérieure, dont l'objet fut de veiller'·à la 'confervation dè
fes privileges, & de lui procurer rous les 'avantages »dent il
étoie fufceptible" les dépenfes qui furent lk fuite dé cette
adminiltraeion furent reparties, ainli que les'qeiiiers dù Roj~
fur châqùé Corr,munauté, relativement 1i leur' impohan'ëe)
& chaque Communauté joignit [on contingent & celui 'qu'elle
fupportait pour le 'compte du ·Roi, & Je:- levoit de li même
maniere; par ce moyen il n'y avoit qU\lOe rèGle forrn~ùe perception commune aux deniers du Roi & du pays. Les CO.Olmunautés ayantenfuite divers befoins & chilrges pa~~iculieres à ac.:.
quitter'ou, à [atisfaire, il fa)lut,nécelrairem~n1: érablir 1 uné
diHinél:ion dans la levée <des Commes qui étoiem -nécelralrd
Gouvernem~ns éprouverent,
,
l
:l.
�'68
.'
'1 o' u
ft N. A .r,.
pour -Y fourni·r. La dépelJ~ qu'il y avoit ~ faire avoit·ellé
pour objet l'utilité des fonds, telle qu'un chemin qui facilite lês débouchés pour les l;!enrées ou autres de cette
efpece, les fonds en étoient pris fur .les biens qui en recevoielJt l',waIHage, ~ ·Ia levée en était faite conjointement
avec celle de..Ja· taiLle , c'eH:~~:-dire des fOl'nmes deHinées
pour le' Roj & le PilYs; par ce moyen chacun en payoil fa
portion proporrionnellement aux biens qu'il po{jëdoi~, & relativement ~ leur valeur, par la -raifon qu'il jouiifoit de
l'avantage que le chemin 0\1 aUlre dépenfe de cette efpece
procuroif" proporl~ç)IJnellelT}ent & relativement ~ b valeur
·de Ces biens. L,a d~penfe qu'il y avoit à faire n'avait-elle
pas pOljn pbjec,.1'u'tilité des bjens fonds, mais feulemenc la:
commodité de l'habitation, l'impofition ne ,pouvait pas en
être levée fur les Jonds, parce qu'il en ferait réfulté que
chacun all,t;Qit payé proportionnellement ~ fes biens, tandis
qu'il n~a,uroit. joui que relativement ~ fa. perfonne.~ Il fallut
d9Qc rençlrJl l'impp(itiQXI p.Flrfonnelle, & on établit alors une,
efpece qe capitation.} connue dans cerre Province Cous le
n0!!1 de capage, pour fournir à -ces. dépenfes qui n,e ,regardoienç que l'habitation. Telle en l'hinoire de pos impofitio~s, .qui dérive ta,nt de leur natljre que de la Jurifprudence de la Cour dont il eH: inUlile de rapporrer.l e§ exet):!p,les. ~l;,ep réf~'ge qlJe pour )'<\cq<lirrement des ch.arg~s. foncjeres, les Comm~ll\auçés' ont la liberté d'opter,' foùs le bOI1Rlaifir, ode la CQ4F i encre les trois 'if\1pofitions connOes eil
Provenç~, fil taille~, l'i!Upofitiot) en fruits .ou le~ rêv"es, pour
~~e 'il i ;le':l'~J.l?aro~t.,.la plus ,comm?d.~, 9: gO~J)l1 pe~cep-:
P9\l,t!~1 ~,\mollJs onereufe.~ l~UfS ha.bltanSi, mais les memes
~~g!)l:P1\lns d y la, CAur ,.> q~'i, fon,t le dépôt pe notre légifI~ation' poliùque ~ ,~elJT 9é~endent très-exprelfément. de lever
t~r les fond , &.aj.ltreJl1ent qpe par capage, le montant des,
charges ql~i. n,e' regaf9yJlt que j'habitation. De 'forte que)
la Iiberr~ . des f=~n munau,tés ne confine pas à impofer à)
leur gré & arb!trairen1el}t, mais uniquement à opter' entre,
troisJormehd';i~pofitioqs fOClcier~..s, & elles n'ont aucune
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A LAI S
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p R .0 V Il Nell:
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9
liberté à l'égard' des charges perfonnelles qui ne peuvent
être acquittées que par ~la voie du capage.
Il réfulte de la défenfe faite de lever par la voie de la
taille ou des autres impofitions qui la repréfentent, les fommes deflinées à acquitter les charges de l'habitation, qu'il
efl de la nature du capage d'être reparti également fur
chaque contribuable, fans égard aux facultés de chacun;
autrement la défenfe feroit dérifoire & inutile, puifque fi
la taxe capagere pouvoit & devoi~ être impofée eu égard
aux facultés de chacun, il auroit été beaucoup plus fimple,
fans établir un nouveau genre d'impolltion, de la lever
;lvec la taille. où la proportion relative des habitans enn'eux el! établie. Cette' conféquence dérive de la nature'
de la ch.ofe; l'impofition doit toujours être proportionnée
aux joujlfances. Dans les impofitions foncieres chacun doit
y contribuer fuivant l'étendue & la valeur de fes biens,
purce que c'efl en raifon de cette valeur & de cette étendue' qu'il jouir. Mais dans les charges perfonnelles, & qui
donnent lieu à un capage, l'impolltion doit être égale fur
toutes les têtes, fans égard aux facultés, parce que tous
les habirans, tant pauvres que riches, jouilfent égalemenr;
& c'eH fur ce principe qu'efl fondée l'autorité de MI'. de
Clapiers, cauf. 37, quefl. un iq.; de Mourgues & de MI'.
Julien. en fon Commenraire fur le Statut.
. Inutilement s'autoriferoit-on de l'exemple de la capitation
qui. efl levée pour le compte du Roi; il n'y a pas de parité d'un cas à l'autre. La capitation eH un impôt mis par
le ,. gouvernement, pour être levé fur tous les citoyens,
relativement à la figure qu'ils font, aux titres qu'ils poffedent, & aux dignités dont ils font décorés; fous ce point
de vue on peut la qualifier impôt jùr le luxe. D'aille\; rs la
capitation efl établie par voie d'autorité, & dès-lors on
ne peut pas en rechercher jufques à un certain point les
caufes pour les comparer avec les effets qu'elle peut produire; mais il n'en efl pas de même du capage; la caufe
~n efl connue; c'efl une dépenfe relative à l'habitation. Or~
�'70
Jou
RNA L
en regle générale l'lmpofition devant toujours être propor";
rionnée aux jouiffances, la répartition du capage ne peut
être faite qu'également, Cur toutes 'les têtes, parce que
rout le monde jouit également des objets pour lefquels elle
cft établie. .
On répondait pour la Communauté, que le premier 'moyen
'des oppofans ne pouvait plus être propofé, puifqu'il avait
"été jugé en contradiél:oires défenfes que la conllruétion de '
l'horloge avait été légitimément délibérée;- ils ne font au-jourd'hui que renouveller' pardevant la Cour les coniidérations qu'ils avaient fait valoir pardevant 'M. l'Intendant,
pour perCuader que l'horloge n'écoit ni utile, ni néceffaire.
Tant que l'Ordonnance de M. l'Intendant, qui les déboute
de l'oppofition qu'ils avaient formée pardevant lui à la conCtruétion de l'hologe , fubfillera; tant qu'un Arrêt du Confeil
qui Ceul peut cOünoÎtre de l'appel des jugemens rendus par
le Commiffaire déparri, n'aura pas réformé celui dont il
s'agit, il fera vrai de dire que l'utilité de l'horloge a été
·reconnue, & qu'il faut qu'elle fOlt conHruite.
En vain Coutient-on que le capage ell une impoÎ1tion
perConnelle & info!ite, qui doit être Cupporrée également
par tous les habitans riches & pauvres Cans aucune difrinél:ion, parce que tous profitent également de la chofe
pour laquelle le capage eft établi. On répond que l'impofition pour le capage ne diftère de toutes les aucres que
les Communautés ont le droit d'établir, qu'en ce qu'elle ne
peut pas être prife fur les deniers de la taille, attendu le
privilege Cacré de leur dellination. Du relle, c'efi aux
Communautés à en ordonner la levée de la maniere &. Celon
les proportions qu'elles croient les -plus équitables, & certainemeut il n'y a poim de regle plus ffire que celle des
facultés. En ordonnant la réparrition du capage, la Communauté a fait ce qu'elle pouvoit faire) Aucun RégIe ment,
aucune Loi n'ont jamais Coumis les Communautés à ét-ablir
une parfaite égalité entre tous le~ conrribuables; ellés ont
t.eujours eté libres de' prendre à cet' égard telle réfolutiort
�DU
,
P At AIS
]) Il
PROVIlNC Il:
71'
que bon leur a' femblé, parce qu'elles ufeDt en cela d'un
droit incontefiable, inféparab!e de notre' confiitution 1tlunicipale. Cette cODaitution feroit même vicieufe, fi elle
ne donnoit pas aux Communautés la faculté de proportionner les 'impoutions qu'elles établiffent à .l'état de ceux
qui doivent les payer. Il répugneroit de voir un. miférable.
fans biens autant chargé qu'un redevable opulent.
.
Ce n'efi pas la premiere fois que la Cour a vu paffer
(ous fes yeux des délibérations capageres dans le goût de
celle dont il s'agit; il en efl beaucoup où l'on fait trois
différentes c1affes, une pour le riche, UDe feconde pour
ies gens aifés, & UDe troiueme pour les pauvres; & jamai$
la Cour n'a refufé de les homologuer. Suivant l'ancienne
Jurifprudence atteaée par Mourgues & par Julien en fes
colleétions manufcrites, les pauvres, les veuves &_le~illes
étoient affranchis de toute contribution au capage. D'où
vient, par exemple, que perfonne ne fe recrie de l'inégaJité
de la capitation? C'ell: pourtant un capage, une impoution
perfonnelle. Les Con fuIs de chaque lieu en font la répartition, & ils en mettent beaucoup plus fur le compte du
riche que fur la tête du pauvre. D'où vient l'établilfement
de cette regle, fi ce n'ea de la conviétion intime où l'on
ea qu'il n'y' auroit point de juaice de taxer également le
pauvre comme le riche.? Il faut qu'il y ait entr'eux une
différence notable, parce qu'elle fe trouve dans les'facultés
refpeétives. Ce que les Communautés fom par rapport à la
capitation, elles peuvent- le faire pour le capage, parce
que pour quel objet que l'impofition foit levée, il ell:
toujours vrai de dire que tes pauvres méritent la plus grande
faveur. Si on levoit le capage avec la taille, on tomberoit
dans beaucoup d'inconvéniens, fouvent on le ferait fupporter en grande partie à 1 ceux qùi n'en auroient p-as la
force, t..ndis que les habitans les plus a.fés en feraient
exempts, ou ne payeroient preCque rien; ainli la mete la
plus conforme à l'équité eft celle de repa.rtir l'impofition
e.u ~gard aux. facultés de chacun; en un mot il n'y a point
�'7i
Jou RNA L' ,
de loi qui oblige les Communautés d'ufer rigoureufement
du pouvoir qu'elles Ont en érablilfant des capages , de les
repartir d'une maniere uniforme; il leur ef!: permis de S'attendrir fur les befoins des pauvres, & de ne point accabler fous le faix cette c1alfe de citoyens qui ef!: plus fpécialement fous leur proteétion. Quand elles le fom dans un
confeil général légitimétpent convoqué, & que c'ef!: en connoilfance de caufe, il n'appartient pas à quelques membres
inquiets de venir croifer le vœu général; il forme pour eux,
comme pour tous les autres citoyens, un loi inviolable
qu'ils font obligés de refpeéter, fuivant les-Ioix 3 & 4, if,
quod cujufq. univerf.
.
Arrêt du 7 Juin 1782, rêndu par la Cour des Aides, au
rapport' de Mr. le Confeiller de Bec, qui déboute de l'oppolition, avec dépens. Ecrivant Mes. Verdollin & Efpariat.
ARRÊT
XI.
Le dérangement du ma.ri dans fa conduite ou dans fes affaires
donne lieu d la femme de répéterfa dot, ou de'demandèr
la defemparation des biens dotaux.
'A. DlIe. A..... époufa en l'année 1759 le lieur G..... qui
venait d'être reçu Chapelier à MarfeilIe; elIe le choi{jt
elle-même; il n'avoit point alors d'état fo~mé, mais'il' était>
jeune, il n'nnonçoit des talens pour le commerce; elle pou.:
voit fe promettre d'être heureufe, pour-peu qu'il eût .eu de
la c o n d u i t e . '
•
Les conditions':du mariage furent toutes 11 l'avantage du
mari. La DlIe. A..... fut mariée fous une conf!:itution généraIe; f-a dot fe. monta à la fomme d'envir-on 15000 liv.
Les commencemens de cette union furent alfez' heurelll{;
I!lais le lieur, G..... fe dégoîna bientôt de fon époufe, & prit.
L
d~
�'7i
Jou RNA L' ,
de loi qui oblige les Communautés d'ufer rigoureufement
du pouvoir qu'elles Ont en érablilfant des capages , de les
repartir d'une maniere uniforme; il leur ef!: permis de S'attendrir fur les befoins des pauvres, & de ne point accabler fous le faix cette c1alfe de citoyens qui ef!: plus fpécialement fous leur proteétion. Quand elles le fom dans un
confeil général légitimétpent convoqué, & que c'ef!: en connoilfance de caufe, il n'appartient pas à quelques membres
inquiets de venir croifer le vœu général; il forme pour eux,
comme pour tous les autres citoyens, un loi inviolable
qu'ils font obligés de refpeéter, fuivant les-Ioix 3 & 4, if,
quod cujufq. univerf.
.
Arrêt du 7 Juin 1782, rêndu par la Cour des Aides, au
rapport' de Mr. le Confeiller de Bec, qui déboute de l'oppolition, avec dépens. Ecrivant Mes. Verdollin & Efpariat.
ARRÊT
XI.
Le dérangement du ma.ri dans fa conduite ou dans fes affaires
donne lieu d la femme de répéterfa dot, ou de'demandèr
la defemparation des biens dotaux.
'A. DlIe. A..... époufa en l'année 1759 le lieur G..... qui
venait d'être reçu Chapelier à MarfeilIe; elIe le choi{jt
elle-même; il n'avoit point alors d'état fo~mé, mais'il' était>
jeune, il n'nnonçoit des talens pour le commerce; elle pou.:
voit fe promettre d'être heureufe, pour-peu qu'il eût .eu de
la c o n d u i t e . '
•
Les conditions':du mariage furent toutes 11 l'avantage du
mari. La DlIe. A..... fut mariée fous une conf!:itution généraIe; f-a dot fe. monta à la fomme d'envir-on 15000 liv.
Les commencemens de cette union furent alfez' heurelll{;
I!lais le lieur, G..... fe dégoîna bientôt de fon époufe, & prit.
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d~
�DU
PALAIS
DE
"PROVENCE..
73"
(Ju goÜt pour une veuve qu'il mena à fa campagne, où il
vécut pluiieurs années avec elle.
La veuve B...,.. meurt, mais les feux de fon amanr ne
meurent point avec elle; le fieur G
avoir connu, à l'occaiion de la B..... la nommée A..... L
ancienne fervante;
ce fut celle qu'il choiiit pour tenir [a place; elle devint la
fervante maîrreife.
. .
Cerre nouvelle amante, dont "la jeuneife faifoit 'oublier
les défagrémens de la figure, lui donna bien rôt des preuves
de fon amour & de -fa fécondiré. Au mois d'Oaobre 1773,
elle accoucha d'un garçon, qu'elle eut le courage de faire
haptifer comme enfant légitime.
Privée de roure reifource, & réduire prefque dans un état
de défefpoir, la Dlle. A..... fut fe jerrer aux pieds des Direaeurs du Bureau Charirabb de Marfeille; elle-y fut accueillie avec cet intérêt que fa iituarion infpiroir. On examina fon affaire, & l'on accorda proteaion à cerre infor-runée, à l'effet de répéter fa dor, après avoir épuifé auparà:vanr, [uivant l'ufage, roures les voies de conciliation.
La Olle. A..... affifiée du Bureau Charirable, demanda,
par une requête, au Lieurenant de Marfeille la permiffion de
faire informer filr les diffipations de fon mari. Ces fins lui
furent accordées par 'le décret qui inrervinr.
Le fi.eur G..... infiruit de ce décret, eut recours à fa ref[ource ordinaire, c'efi-à-dire, à la chicane. Il préfenta de
fon chef une requête en oppofition envers ce décrer. Sur le
concours des requêtes, les, parties furent renvoyées en jugemenr; & enfin après les plaidoiries refpeélives, il intervint Sentence le 6 Septembre, par laquelle ,'" fans s'arrêter
" à l'oppoiition du fieur G..... dont il eH démis & débouté,
" avec dépens, le Lieurenant ordonne que fon décret du
" 29 Juin précédent fera exécuté fuivanr fa forme & re" neur."
Le iieur G.:... déclara appel de 'cette Sentence. Me. Silvy,'
qui défendoit la Dlle. A..... pardevant la Cour, établit deux
propofitions.
4'1nnél:s l78:z. G' {uiv.
K
1
•
�JOURNAL'
PRE MIE R E
PRO P 0 S l T ION.
Le dérangement du mari dans [es affaires donne lieu à la
femme de répéter fa dot.
Le mari n'el!: que l'adminil!:rateur des biens ae fa femme.
La Loi lui permec d'en ufer, mais non pas d'en abufer ni de
diffiper; dès qu'i,labufe de fan pouvoir par une mauvaife adminil!:ration, la L.oi le lui retire. En un mot, il n'el!: pas nécetraire que la doc fait entiérement diffipée, pour que la
femme foic re<rue à la répécer; il fuffic qu'elle foic en péril,
&.que le mari, par-fes diffipations, tombe dans la pauvreté.
Ces principes fonc confignés dans tous les Auteurs.
" Le fujet des féparations -.les biens, dit le Rédaél:eur
" des Caufes Célébres, tom. 14, pag. ~86, el!: la mauvaife
" adminil!:ration du mari qui mec la dot én danger & con" duic les époux au penchant de la pauvreté. Leg. 2.4, ff.'
" folut. matrim. Leg. 29, cod. de jur. dot. "
" La femme ( dit Lacombe, mat. civ., qe la doc, feél:. 6 )
" peut répéter fa doc contre fan mari pendanc le mariage,
" quand il devient pauvre. Leg. 24 fol. matrim. Leg. 29, Leg.
" 30, cod. de jure dot., même lor/qu'il commence il deve" nir mauvais ménager, Nov. 97, cap. 6. "
Il fuffit même, fuivanc le fens 'de la Novelle 97, que le
mari commence à mal-ufer de fes biens, pour que la femme
foic en droic de répéter fa doc, vira incohante malè [uhf-
tantiâ uti.
/
" Si le mari, dic Froment",l, devienc pauvre & obér.é
pendilOc le mariage, foic que ce foic par accident ou par
fa faute, les Loix permettenc en ce cas à fa f(!mme de
répéter fa dot, ou du-moins d'obliger le mari de la dépofer en mains tierces, ou de donner caution, fans gu'en
ce cas elle foic obligée d'atténdre qu'il foit réduit à la
/' " derniere mifere; mais il fuffic pour cela que inopiœ immi" neat periwlum, fans liquelle précaution il arriveroic fou"
"
"
"
"
,
•
�PRO V Il Nell.
7)
" vent que l'aél:ion de la femme lui deviendroit inutile,
" étant d'ailleurs crès-périlleux de lai1fer la dot entre les
" mains d'un mari qui néglige fes affaires. Leg.29 , cod. de
" jur. dot. L. 24 in prin.,.If. fol. matrim., Novel. 97' cap.
" ult.; Perezius fur le tit. du cod. de jltr. dot. ".
Ces principes femblenc faits pour la caufe préfente.
Qu'étoit-ce que le Lieur G..... lors de fon mariage? C'écoit
un Marchand accrédité, un garni1feur de chapeaux, Il avoit
un état, un commerce qui lui procuroit une honnête ai'Canee. Ses profitsl, joincs aux intérêts de la dot de fa femme,
lui fourni1foienc fuffirammenc de quoi vivre. Aujourd'hui fon
état confill:e à n'en avoir aucun; il nous apprend lui-même
qu'il a abandonné le commerce des chapeaux; il n'a plus
qu'un commerce criminel dans lequel il mange le bien de
!à femme, après avoir mangé le Lien.
L'adverfaire nous vante fà prétendue acquificion d'une
campagne de ~ooo liv. qui n'ell: pas payée; mais il fe garde
bien de nous parler de fes emprunts; il doit au Lieur Faucon,
maltre Boulanger, 1800 liv. à Rey, Jardinier, 1200 liv.; à
Guidon, Poree-faix, 3000 liv., fans compter mille aucres
detres criardes; il a aliéné l'argent comptant de fa femme,
parrie des fonds dotaux, le peu de bien qu'il avoit; il n'a
plus aujourd'hui ni commerce ni re1fource; il a le plus mau_
vais ménage du monde. Il fe trouve donc dans le cas de
pauvreté prévu 'par la Loi, puifqu'il n'.offre que le fpeél:acle
d'une infolvabilité notoire. La dot de la Dlle. A..... en non
feulemeilC en péril, mais même aliénée en partie; elle fera
obligée pour la recouvrer de faire fouffrir regrès à des tiersacquéreurs; il n'en faudroit pas .Ia moitié tant pour au corirer fon époufe..l répérer fa dot: non renetur muliu, dit
Perezius, expeRare donee maritus facultatihus lahatur, fed
DU
PAL A: 1 S
D Il
porefl fiatim dùm inopiœ imminer puiculum ad doris exaaio1
nem agere.
D'ailleurs c'ell: pa~ l'enquête ou l'informarion qui fera
prife en vertll du décret qui l'ordonne, que les diffipations
du mari feront prouvées ou non 1 fi l'information ne prouve
K2.
�,
'0 6
~
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..
0 U. RN'" L
il •
pas le 'dérange~lent du fleur G 1dans fes, affaires, le, J~gé
n'accordera palOt à la Dlle. A
la pernllffion de reperer
fa dor. L'adverCaire efi donc fans inrérêt, & par conféquenc fa.os aérion, à demander aujourd'hui la réformation de
ce décret, qui n'efi ~ pour ainG .dire, que de pure infiruc.rion , & qui ne, préjuge rien. On n'appelle poine d'un décret
de fait informé, av'ane que l'information fait prife. Le lieur
G..... fercit touj..<?urs non recevable en. l'état à attaquer le
décret.
SEC 0 N,n E ,p R 0 P 0 S 1 T 1 ü' N.
,,.-
;
l
,
;.1
Le dérangement du mari dans jà conduite donne lieu d là
fe,mme de répéter fa dot..
"
"
"
"
"
"
"
" La femme dont le -mari efi convaincu d'adultere, dit
Fromenta~, eH'oon feulem.ene en droit de'répéter fa dot,
mais elle peut enoo;rle exiger les libéralités qui lui avoient
été faites à caufe de nô ces , pere 2, in cod. ad leg. ful.
de adult., n. 9; on lui accorde auffi des dommages-intérérs, lorique l'adultere du mari efl public dans fa propre
maifon, fur-cout lorfqu'il y a menaces, mauvais traitemens & dilIipation' 'des biens.. Raviot, queH. 25 , n. 20
,,' & 24· ,,'
"
Or, le fleur G..... ne, pourra certainement pas nier qu'il
ne vive en ~dultere public avec la nommée L ..... qu'il promene par-cour, ainli ,que fon enfant. Nous avons rapporté
dan's le récit des 'fairs l'extrait baptifiere ,de ce fruit hon-teux, ,de fon comme-rce ,c(imine!., de ce ,bâtard adulterain,
bapçifé comme enfant légitime de la nommée L..... fa concubine du vivanc de la, Dlle A..... fon époufe.....
Il Y a plus: le fleur G..... a ufé de. menaces, de voies' de
fait envers fon' époufe; & fous ce [econd rapport, elle fe-'
. roit encore recevab'le 11 répéter fa dot, .quand elle n'y aurait
pas été aucorifée par [es diffipations criminelles.
'.
: L'on réponqoit pour le fleur J.' B. G.·.... la DI\e. A...... de-
1
�7"1
'mande de faire informer fur la déçadence de fon mari, à
D U
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DE
P Il. 0
VEN C E.
l'effet de. répéter fa dot & de la conferver.
Nous fommes d'accord fur les principes, que la femme
a droit de faire informer fur les diffipafions de fon mari,
lorfqu'il y a à craindre pour la ftJreté de fa dot, & que 'par
fa mauvaife adminifl:ration il la met en danger, fi maritus
-vergat ad inopiam.
'
Mais en fait, la Dlle. A..... ne court aucun rifque de fa
dot. Indépendamment de la bafl:ide que le fieur G..... a acquife ,.il a une adjudicalion de dommages-intérêts montant
10')00 liv. à lui accordée par Arrêt de la Cour. Il y a dans
l'hoirie foumife à cerre adjudication une maifon·& une campagne. Enfin fi le Geur G..... a difcolitinué fon commerce:,
c'elt la femme qui y a donné lieu, en le merrant dans l'impoffibilité de le continuer.
Arrêt du J9 Juin 1782, après un arbitrage par Magiftrats, qui ordonne la défemparation des biens dotaux, la
radiation de j'extrait baptifl:ere, la fubfl:itution du_mot naturel à celui d'enfant légitime, les dépens entre les parties
cornpenfés. Ecrivant Mes. Verdet oncle & Me. Silvy.
l,
ARRÊT
XII.
~
Formalités qui doivent être ohfervees par les Communautés
'lui veulent difPofer ou repartir les ifcles &. pâturages fupeljlus.
.
'
JI
.i
~
~
A Communauté de Malemoiffon poffede dans 'fon terroir des ifcles Gtuées au bord des rivieres de Bleaune
& des Duyes. Le 6 Mai 1666, elle reconmlt les tenir &
pofféder à titre de nouveau bail du Seigneur du lieu pour
l'ufage du Détail, fous la redevance de 2.Jiv. En 1722, la
Communauté fit un régIe ment qu'elle fit homologuer au
lement. L'art. 6 défend ~ tOUS les habitans & ~o1féda!1~
L
Par-
�7S
Jou
RNA L
biens à'allèr défricher dans l'ifc1e fans la permilIion expreife
du confeil général de la Communauté, par lequel il fera
donné pouvoir aux Confuls de marquer l'endroit & la quantité
de terrein que l'on doit défricher. Le 'Î Mars 1780 le confeil général délibéra, à: la pluralité des voix, de donner une
certaine quantité de l'ifde de la Communauté à chaque habitant du lieu, reparti par égales parts à tous ceux qui en
demanderoient, à la connoiifance & diligence des Con fuis
& de ceux de Baudun qui furent nommés pour en faire la
féparation, après toutefois en avoir fait part à MM. les Procureurs du Pays & reçu leur approbation. François Hugues
& 'onze autres habitans s'oppoferent à cette _délibérati<;>n,
comme contraire à la Déclaration du Roi touchant le défrichement des ifc1es en général & au nouveau bail, qui défend expreffément de les défricher, n'étant del!:inées que
pour le pâturage & l'entretien'des bel!:iaux. Enfuite des requêtes refpeétives, le procès fut réglé à écrire.
On difoit pour les oppofans, que rien n'd! fi prétieux
que les biens des Communautés; ces biens, appartenant à:
tous, ont befoin d'une attention plus particuliere de la part
du Souverain ou de ceux auxquels il a confié fon autorité;
il faut entretenir, aUtant qu'il el!: polIible, parmi les ha-:
bitans d'lm même lieu, cette égalité parfaite pour l'ufage des
biens communaux, éviter l'abus de l'ufage, & plus encore
l'aliénation & la difpofition des fonds de nécelIité.
L'Ordonnance du mois d'Août 1669 fait défe'rifes aux
Communautés de couper ou de rien entreprendre au delà
des coupes ordinaires, finon en vertu des Lettres-patentes
& enfuite de la permiffion de la Cour. Les Communautés
ne peuvent donc, de' leur propre aùtorité, difpofer des
biens qui leur appartiennent. Il y a plus: s'il y a des marais
& preds plus qu'il n'en faut pour les pâturages, l'Ordonnance,en l'art. 7 du tit. 25, leur indique de les donner à
ferme. Or, fi les Communautés ne p'euvent vendre la portion de leur patis fuperflue & inutile, e.lles doivent donc
à plus force ~aifon confe~er les portions inutiles & [upe~-;
,
"
�nu PALAIS DB PROVa~C~
~
flues des ifcles,' ne fClt-ce que parce que la même' riviere
peut reprendre demain ce qu'elle a délaiŒé aujourd'hui; le
cas arrivant, une fois que partie de ce terre in aura été départi aux habitans, où prendra-t-on des pat.is & des pâturages?
. Le Commentateur fur l'art. 8, qui défend aux paroilfes
de faire aucune coupe, obferve qu'il dl: également défendu
de faire aucun défrichement de bois ni de patis appartenans à
des Communautés d'habitaDs, & de les' mettre eD culture.
Les habitaDs des ParoiŒes De peuvent vendre les bieDs communaux; ils ne peuvent non plus les échanger, les partager
entr'eux; il cite un Arrêt du Confeil du 18 Mai 1724, & un
autre du 29 Mars 173~'
La Déclaration du 12 Avril 1767, qui permet les défrichemens, ne déroge en rien aux difpofitions de 1'0rdon. Rance de 1669. Il dl: donc certain l1u'on ne peut aujourd'hui défricher des lieux qui par leur nature fODt fous la
fauve-garde de la Cour, qu'eDfuite de fa permiffioD ,qui ne
l'accorde jamais fans un procès-verbal de vifite des lieux
fait par un CommiŒaire ou fOD délégué.
Le Réglement de 1722 prévoit l'abus que l'on pourroit_
faire des ifcles; il donne feulement le pouvoir au confeil
génér,!.1 de donner des ifcles à défricher. On voit par plufleurs délibérations pofiérieures à ce Réglement, combien
la Communauté étoit attentive à le faire exécuter, & qu'elle
avoit refilfé plufieurs fois de défricher; cependant le S Mars
1780 on délibéra le partage, à l'indication des Confuls. Mais
qu'efi-ce qu'un confeil général? C'efl: une aŒemblée à laquelle tous les chefs de famille doivent être appellés. En
effet, èfi-il jllfl:e què des forains, lorfqu'il s'agit de difpofer
des biens communaux, -roient confultés? & quand même le
Réglement de' 1722 n'en· ferait pas un devoir, la jllfl:ice
le di.t aŒez. C'efi dans un confeil particulier, qu'on qualifie.
mal-à-propos de confeil général, que la Communauté a dif-.
pofé dù bien le plus précieux qu'elle eût en fon pouvoir.
La délibération è10nt il s'agit efi: de plus injufi:e, parce
,
•
�~o
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J
JOURN"AL' -
que, fuivant la reconnoiifance de 1666, le Seigneùr n'a
donné les ifcIes à la Communauté pour une modique cenfe
de.2 liv., que pour le pâturage, fon objet étant d'augmenter,
la popularion de fan fief; elle eH donc conrraire à l'aél:e
de concellion: de forte que ces ifcIes, defiinées pour les pâClIrages de la Communauté, deviennent la propriété de quelques-uns ;' & ceux qui ont acquis avec le droit de l'ufage
de~ ifcles, ceux ql)i jouiifenc de cette faculté depuis des
temps immémoriaux, cantonnés rout-à-coup dans leur propre domaine, font obligés de vendre leurs troupeaux, &
privent par-là leurs terres de l'engrais qui les faifoit pro":
duire.
On répondoit pour la Communauré, Aue c'efi dans le
Réglemenc de 1722 qu'eJ.le rrouve les formalités qu'elle. doit
remplir. Pour donner à défricher dans les ifcIes, il efi dit
dans ce Réglemenr qu'on' ne pourra le faire fans la permillion expreife du confeil génùal de la Communaute. Par
la délibération du ') Mars 1780, c'eH: le confeil général qui
. parrage le liJperflu des ifcles, comme il en avoit concédé
autrefois à quelques habitans. Donc la Loi du pays a été
exécutée. Il eH: vrai que le Réglement fut déterminé par
un confeil général de tous chefs de famille; mais la délib"ération qui fait la matiere du procès n'efi qu'une application particulierç, un aél:e exécutif d'un des articles du Réglemenr. Or, certainelljen:: la {impie exécution d'une loi ne
demande pas autant de folemnité que la loi même, parce
qu'avant la loi il n'y a point encore de regle; pour former
une regle municipale, il faut canHatet le vœu de l'univer[alité; mais quand une fois ce vœu exiHe, qlJand il a été
donné dans une fo'rme permanenre & légale, tout eH dit;,
l'exécution n'efi plus qu"une conféquence de la regle éta. blie; il ne s'agit alors que d'un aél:e fecondaire, que d'un
aél:e de gouvernement, &' la direél:ion de pareils aétes ap-'
partienc au réginie ordinaire. Le Réglement de 172.2 n'a pu'
certainement entendre· par confeil général, le confeiL de
\Qus chefs de famille; on connoiifoit fon bien à ce[~e époque
-,
ces
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PAL AIS
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PRO VEN C E.
8l
'cés deux forres de cQnfeils, puifque celui même qui délibéroir, éroit un conlèil de tous chefs de famille, qualifié
tel; & fi l'on eût voulu faire dépendre les défrichemens
d'une permilIion univerfel1e, le Réglement l'auroit dit, &
ne fe feroit pas fervi du terme de conreil général de la
Communauré.
Bien plus, l'exécurion de ce Réglement difpenfoir la Communauré d'aucune permilIion de la Cour; celle-ci lui avoit
donné fon approbarion en l'homologant; el1e l'a fair avec
connoilfance de caufe ; elle a jugé que les ifeles fur lefquelles
ce Réglement difpofoir, éroient celles qui pouvoient êrre
deltinées à la culrure, & qu'il fuffifoit de rapporrer le fceau
de la Communauré, pour régler fagement dans les diverfes
occurrences les diltriburions à faire aux cultivareurs.
La Communauré ne donne à défricher que les ifcJes fuperflues; elle convienr que les ufages communs doivent êrre
refpeétés; il ne faut pas exécurer la délibérarion du ') Mars
1780, li l'elfer de cene délibération peut nuire aux pârururages &' aux autres ufages des habitans. Vainement e~e
tâcheroit de perfuader l'érendue de ces ifcles ; il s'agit ici
d'un objet local que la Cour ne peur juger de fa place, &
on offre. par avanr dire droir un rapport.
. En point de droir,· les Communaurés peuvent difpofer
de rous les endroits inutiles & fuperflus qui peuvent êrre
donnés ou aliénés fans incommoder le pâturage. C'elt ce
qui réfulte de l'arr. 7 du tir. 2') de l'Ordonnance des Eaux
& Forêts. Sans doute les communes doivent être inféparablement attachées aux habitans des lieux, poUt leur donner
moyen de nourrir des beltiaul< & de ferrilifer leurs terres 1
& les Communautés font autorifées à rentrer, fans aucune
formalité de jultice,.dans les fonds, preds, pâturages, bois,
terres, communes, communaux, droits & a'utres biens
communs par elle vendus ou baillés à baux, à cens & à
bail emphytéotique. Mais il faur diilinguer les propriétés
nécelfaires aux ufages d'habitation, d'avec les propriétés
inuriles & fuperflues; les .premieres ~ppartiennenr e1fencielAnnées 1782. & fuiv.
L
,
,
�1 0 11 RNA r.
au public; on ne pourroit les aliéner ou en difpofer
fans porter atteinte au bien commun; mais les fecondes
peuvent & doivent être mifes dans le commerce; c'eH
mêple l'intérêt public qui l'exige; car un corps de ComIt;Iunauté ne peut mettre en valeur des domaines en friche,
comme le fait un propriétaire particulier; ell~ doit même
en difpofer d'après le vœu de routes les loix écononliques,
qui ne voient qu'à regret des domaines confidérables &
jm,menfe_sentre les mains des Corps & des Communautés.
Il ell: vrai que quand une Communauté a de vrais domaines, elle ne peut les donner gratuitement aux particuliers qui les demandent; les corps de Communamés ne
font point aurorifés à faire des libéralités ou des donations;
ils ne peuvent aliéner fans caufe, fans forme & fans utilité; mais rout 'cela ne s'entend & ne peut s'entendre que
des biens patrimoniaux d'une Communauté, des propriétés
proprement dites qu'une Communauté poffede & q-ui lui
foor. aCG.;,lifes à titre particulier. Ce ferait pne abfmdité d'appliquer les mêmes regles aux terreins dont il s'agit, & qui font
moins le patrimoine de la Communauté, qu'une terre créée &
confervée à chaque in!laor. par les foins & par les contributions des habitans. Dans une pareille hypotheCe, la Comrnunatlté n'e!l proprement qu'un tiers arbitre entre les parties intéreffées, auxquelles il s'agit de di!lribuer le fruit naturel de leurs foins & de leurs travaux,
En général, dans les petites Communautés, il faut établir
fégalité ; & pour cela, il faut, tant que l'on peut, un partage
égal des terres à cultiver, lorfque dans une petite peuplade
il y a une loi agraire, & que les terres font également
partagées; le pays peut être peuplé, quoiqu'il y ait peu de
reffource, parce que chaque citoyen trouve dans le travail
de fa terre précifément de quoi fe nourrir. Dans une granc!.e
ville, un partage inégal ne peut être dangereux, parce que
les arts, le luxe y fuppléent aux reffources de la nature;
J~s gros tenanciers d'ailleurs ne peuvent cultiver par euxmêmes leurs domaines, ils ont recours à des journaliers;
82
lemen~
•
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83
PRO V Il NeE.
les artifans & les journaliers qui ne polfedent rien, trouvent
donc dans" leur induftrie le moyen de vivre aux dépens du
riche. Malemoilfon efi au nombre de ces petites Communautés; fi les pauvres n'ont plus, comme autrefois, part aux
bienfaits de la Communauté, ils abandonneront un paY5
qui ne leur offre aucune relfource, dans lequel ils ne poffedent rien, fans etpoir de rien polféder) & ces ifcles immenfes, devenues le partage du riche, n'en feront certainement pas mieux cultivées. La jufiice & le motif économique ne s'oppofent pas -moins à un partage à cotité cadafirale; ce partage enleveroit tout aux un's, pour tout donner
aux autres; il feroit contraire à l'ufage du pays. La délibération de 1780 ne fait aucune difiinétion e'ntre le pauvre
& le riche; elle eH donc juHe & doit être exécutée; elle
dépend du feul point de favoir s'il y a des ifcles fuperflues'
polir l'ufage des pâturages. Ce point de fait ne peut être
éclairci que par le rapport que la Communauté offre fubfi.
diairement.
Arrêt du 8 Juillet 1782, au rapport de Mr. le Confeiller
de Garidel, qui calfe la délibération comme nulle & inju"fie, & ordonne que le confeil général de la Communauté
de tous chefs de famille fera alfembJé, les forains appellés,
à l'effet "d'y délibérer s'il y auroit lieu ou non à difpofer
des ifcles, & audir cas il eft enjoint aux Cocfuls & Communautés de s'adrelfer à la Cour pour, fur Je procès-verbal qui
feroit drelfé de fon autorité par le Juge commis à ce fujet,
être Hatué ce qu'il appartiendroit, & en conféquence avifé
par la Communauté aux ~moyens de tirer de la partie-des ifcles
inutiles & fuperflues.,' s!'i1~y en a, le parti le plus avantageux
à la Communailté, -le tout aux formes de droit. Ecrivant Mes.
Mouans & Portalis.
•
L
2.
�JOURNAL
ARRÊT
X.
Les Corps & Communautés qui font capables d'acqllé.rir -& de
recevoir, peuvent-ils üre légataires d'immeubles ?
Les fondations tejlamentaires peuvent-elles être dotées des re1'enus d'un immeuble?
A
Ntoine Tournel, Tiffeur à toile du lieu de Fayence,
légna par fon teilament du 18 Oétobre J 766, à la Confrairie des Pénitens une propriété de terre qu'il polfédoit
au terroir du même lieu, avec permiffion d'aliéner ceue!
propriété, pour le produit être l'lacé à conilitution de rente,
& le revenu être remis à un Prêtre qui delferviroir la Chapelle\ & acquiueroit trois Melfes par femaine, a{Jplicables
pour le repos de fon ame & celles de fes parens. Il nomma
le Prêtre qui devoit être le' premier Chapelain.
Après la mort d'Antoine Tournel, Mre. Renoux, premier
Prêtre nommé par le teltateur, fit homologuer par l'Evêgue de Fréjus, & enfuite inÎlnuer, enrégifirer & contrÔler
le tefiamenr.' Les Pénitens firent ériger la fondation en
titre de bénéÎlc~, par Ordonnance de l'Evêque du 24 Octobre 1768, & le 7 Avril 1778 ils fi~enr homologuer par
la Cour le téfiament d'Antoine Tournel. Ils préfenterent
enfuite requête au Juge de Fayence contre les Freres Eyclier,
héritiers d'Antoine Tournel, pour les faire condamner au
~élailfement de la propriété légu4e'à leur Confrairie, avec
reilitution des fruits depuis la more de Tournel, fi mieux
[es héritiers n'aimoient retenir la propriété eJ:! payant le
pri?, d'icelle. Les freres Eyclier conreilerent ceere demande,
& préfenterenr une requête incidente en calfation du legs.
Senrence qui les en déboute, & fait droit à la requête principale des l'énitens. Appel de leur parr au Siege de Draguignan; Sentence qui la confirme. Appel pardevanr la
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PROVI!NCI!.
85
Cour, & requête incidente en révocation de l'Arrêt d'homologation.
On n'examina point pour les Freres Eyclier li la Confrairie des Pénitens Blancs' étoit anciennement établie pour
être cenfée capable d'acquérir ou de recevoir comme les
autres Corps & Communautés, fondés en Lettres-patentes.
On la fuppofa telle, & on lui dit: 1°. les Corps & Com- munautés qui font capables d'acquérir ou de recevoir, ne
peuvent pas être légataires d'immeubles; 2°. les fondations
tellamentaires ne peuvent pas être dotées des revenus d'un
immeuble.
L'art. 14 de l'Edit de 174-9 fait défenfes à t01,lS gens de
main-morre d'acquérir, recevoir, ni pofféder à l'avenir au'cuns fonds de terre, mai fans , droits réels, rentes foncieres
ou non rachetables, même des rentes conlliruées fur des
particuliers, li ce n'ell après avoir obtenu des Lettres-patentes pour parvenir à l'acquilition.
L'arr. 16 veut que la difpolition de l'arr. 14 fait exécutée, à quelque titre que les gens de main-morte puiffent
acquérir les biens y mentionnés, même par donations entre-vifs pures & limples, ou faites à la charge de fervice ou
fondation, & en général pour quelque caufe gratuite ou onéreufe que ce puiffe être.
L'arr. 17 défend de faire à l'avenir aucune difpoûtion de
derniere volonté, pour donner aux gens de main-morte des
biens de la qualité marquée par l'arr. 14, & veut que les
difpolitions [oient déclarées nulles, quand bien même elles
feraient faites à la charge d'obtenir des Lettres-patentes,
ou qu'au lieu de donner direél:ement lefdits biens aux gens
de main-morte, celui qui en aurait difpofé aurait ordonné
qu'ils feraient vendus ou régis par d'autres per[onnes, pour
leur en remettre le prix ou les revenus.
De forte que s'il ell vrai que les gens de main-marre
peuvent acquérir ou recevoir par donation entre-vifs des immeubles, après avoir rapporté des Lettres-patentes qui les
y aurori[enr, il l'ell auffi qu'iLs ne peuvent jamais recevoir
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86
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R li AL
des immeùbles par difpofition de dernlere volonté, quand
même la difpolition feroit faite à la charge par eux d'obtenir des Lettres-patentes.
Les feuls biens que les gens de main-morte puiffent acquérir ou recevoir, par donation entre-vif.> o~ par difpofit.ions'
de derniere volonte, [ont les rentes confbtuèes fur le ROI, le
Clegé, les Diocefes, Pays d'Etat, Villes ou CCJmmullautés.
C'eH ce qui réfulte bien formellement des --arr. 18 & 19
du même Edit. IL eH donc vrai de dire que la deftinatioll
même des revenus du fonds légué ef~ nulle de toute nullité, parce que le tefrateur n'a pas pu doter fa fondation
teframentaire du revenu d'un immeuble, & qu'il n'auroit p'u
la doter que du revenu d'une rente de la qualité marquée
par l'art. 18. Ainli la premiere nullité dtr legs, fondée fur_
l'incapacité' des légataires, devoit néceffairement être pro,pofée pour l'intérêt des freres Eyc1ier; il en fuit en effec
que quand l'applicatiou -des revenus du fonds légué pour-.
roic être légale, étant confidérée en [oi, elle croulerait néceffairement ave'c; le legs fait de l'immeuble à une Confrairie incapable de le recevoir. Tel efr le propre de l'incapacité, qu'elle anéantit le legs_en [oi, & dans la defiination des revenus du fonds légué. Le legs étant annullé de
droit, ne peut recevoir aucune efpece d'exécll-tion.
Sur la feconde quefrion, on difoit que' l'arr. 3 de l'Edit
de 1749 avoit difpenfé de la formalité des Lettres-patentes
les fondations particulieres qui ne tendraient à l'établiffement d'aucun nouveau Corps, College ou Communauté, ni à
l'éreaion d'un nouveau titre de bénéfice, & qui n'auroient
pour objet que la célébration des Meffes ou obits, la fubfifrance d'Erudians ou de pauvres Ecc1éliaftiques ou féculiers,
les mariages de pauvres filles, les écoles de charité, le [oulagement des prifonn)ers ou incendiés, ou autres œuvres
pieufes de même nature & également utiles au public, à
l'égard defquelles il fuffira de faire homologuer les aaes
ou difpofitions qui les contiendront aUX COUtS de Parle~
ment.
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PALAIS
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PROVENCE.
87
L'arr. 3 de la Déclaration du 20 Juillet 1762, inrerprétatÏl1e de cet Edit, déclare avoir entendu comprendre au
nombre des fondations mentionnées en l'arr. 3 de l'Edit,
celle des Vicaires ou des Secondaires amovibles, des Chapelains qui ne font pas en titre de bénéfice, des fervices
& prieres, des lits ou places dans les Hôpitaux, & autres
établiffemens de charité bien & duement aurorifés, des bouillons ou tables des pauvres, & autres fondations qui ayant
pour oojet des œuvres de religion & de charité, ne tendroient point à établir un nouveau Corps, College ou Communauté, ou un nouveau titre de bénéfice.
Parmi ces établiffement, il Y en avoit qui pouvoient
faire des epargnes, dans les caS' où la difiribution des fecours feroit inférieure aux revenus, & recevoir en nature
les fommes qui leur étaient léguées ou données, attendu
qu'ils formoient un Corps. Tels étaient les établiiremens
de charité, les Eglifes paroiffiales, fabriques d'icelles,
écoles de charité, tables ou bouillons des pauvres des Paroiffes; les Hôpitaux étaient encore dans le même cas. Le
Souverain pourvut, par l'art. 8 de la même Déclaration·, aux
moyens de rendre ces fommes & ces épargnes fruél:ueux
en faveur de ces établiiremens. L'arr. 9 veut que les difpofiti6bs de derniere volonté' par lefquelles il leur auroit été
dénné, depuis l'Edit de 1749, ou leur feroit donné à l'avenir
des rentes, biens fonds & .autres immeubles de toute nature, foient exécutées, dérogeant à cet égard à la difpofition
de l'arr. 17 dudit Edit, fous les c1aufes, conditions & réferves énoncées dans les arricles fuivans.· Ces réferves font
que les débiteurs des rentes pourront fe libérer dans l'année; que les héritiers, fi les débiteurs ne fe liberent pa.s,
p.ourront en rembourfer la valeur dans le même temps; que
les héritiers, s'il s'agit d'un fonds, ne pourront le retenir,
en en payant la valeur dans l'année; enfin que faute par
les débiteurs & héritiers d'avoir fait le rembourfement des
rentes, ou payé la valeur dans l'année, les adminifirateurs
des établiffemens énoncés en l'arr. 8 feront tenus d'en
vuider leurs mains dans l'an & jour fuivant.
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Jou RNA L
C'ell: de l'enfemble des difpofitions renfermées dans l'art. 3
de l'Edit de 1749, & dans les art. 3,8 & 9 de la Déclaration de 1762, que les Pénitens concluent que les fondations des Meifes & obits, peuvem être dotées d'un immeuble & du revenu qu'il produit, fauf l'exécution des c1aufes,
conditions & réferv<;;, inférées dans l'art. 9 de cette Déclaration. Mais il ne s'agit point ici d'un établiifement de
l'efpece de ceux qui fom mentionnés dans l'art. 3 de l'Edit.
de 1749, maTs au contraire d'un établiifement de l'efpece
de ceux qui font l'objet de l'art. l du même Edit, puifqu'on
voit que le tellateur a voulu fonder une chapelle ou chapelleinie avec patronage, pour devenir un titre de bénéfice:
Epifcopi homologatio & approhatio conJlituit henejicium. ( DiJmoulin ad regul. de infirmis, n. 147; Durand de Maillane,
Dic7iollnaire canonique, va. bénéfice. )
.
En fuppofant, contre route vérité, qu'il s'agit, non de la
fondation d'un titre de bénéfice, mais feulement d'un fimpie obit, le fyll:ême des Pénitens feroit contraire à la
lettre & à l'efplit des art. 8 & 9 de la Déclaration de 1762.
Peut-il étre permis d'ajouter à ces articles les fondations des
Meifes ou obits; celles des Chapelains qui ne font pas
en titre de bénéfice; celles des fervices & prieres, dès que
le Souverain a eu l'attention de les exclure des privileges
concédés par ces deux articles, en les limitant nommément
aux établiifemens de charité, & en ne parlant pas des fondations de religion exillantes par elles-mêmes fous la direction d'un Chapelain, fi dillinéterr.em placées à côté des fondations faites en faveur des établiifemens de charité, dans
l'arr. 3 de la même Déclaration.
C'ell donc aller contre la lettre & l'cfprit de la Déclaration de 1762, que de foutenir que l'arr. IX accorde aux
fondations de religion la même faveur des établiifemens
de charité. La difpofition de cet arricle ne peut être appliquée qu'aux inll:itutions ou legs en faveur des établilfemens de charité qui exillent déja, au moment que le teftateur difpofe, & non aux fondations particulieres de Meifes,
,
faites
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89
V B N C B.
f<iites pour exiHer par elles-mêmes [ous la direélion d'un
{impie Reéleur, & [ans adhélion à un établiffement de charité,
ni aux établiffemen's de nouvelles œuvres de charité. Ce [ont
les établiffemens de charité déja exillans, & ëlonf l'milité étoit
connue, que le Souverain a voulu favorifer, & non le's autres
établiffemens futurs qui [eroient fondés' & dotés· par des
tefl:ateurs pour exiHer en nature de fondations de Meffes
ou obits, & d'établiffemens de charité. Il a voulu que les
premiers puffent recevoir par difpofitions de derniere volonté
des rentes, des biens fonds & autres immeubles de roure
nature; 'mais il n'a pas voulu accorder le même privilege
aux fondations de Meffes ou obits & d'établifièmens de
charité qui feroient faites pour exifter par elles-mêmes, &
former un établiffement nouveau, & il les a laiffées fous
le régime de l'art. XX du même Edit, auquel il n'a -pas
dérogé.
_ La queHion fut jugée par Arrêt du mois de Juillet 1798,
au rap'porr de Mr. le Confeiller de Boutaffi, en fav-ettr' des
h,oirs du fieur Michel Sicard du lieu du Bauffet, contr'e la
Communauté. Il s'agiffoit d'une fondation fàite par le fieur
Sicard dans des difpofitions de derniere volpnté, pour habiller & doter des pauvres filles. Cette fondation éroit dorée
de deux capitaux établis fur des particuliers. La CommunJuré réclamoit l'exécution de cette fondation; les héritiers
du fondateur en den:andoient au contraire la caffation, parce
qu'elle avoit été dotée d'autres revenus que ceux affignés par
l'arr. XIX. de.1'Edit de 1749. La Communauté fe prévaloit
de l'arr. IX. de la Décla(ation de 1 76~ j elle fut déboutée
de [a demande.
~ Ce 'n'~fl: pas, une fondation de Meffes qu'Antoine Tournel
a voulu ordonner pour le repos de [on ame j c'eH un Chapelain inamovible qu'il a voulu établir dans la chapelle des
Pénitens, pour en fdire le fervice à perpétuité rous les jours
de l'année, à la charge néanmoins d'appliquer lui & les fiens
trois de fes Meffes par femaine. C'eU une chapellenie perpétuelle qu'il a voulu établir dans la Chapelle des Pénirens t
Années l78:z. & fuiv.
M
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'.
] 0 U R. N A r; . .
.
avec établitremènt d'un patronage alternatIf en faveur de fes
héritiers. C'ell: un bénéfice proprement dit qu'il a voulu
établir dans cerre Chapelle, & pour le fervice de cette Chapelle, puifqu'il en a réparé la dotacion de fan héritage, &
l'a léguée aux Pénitens pour l'adminillrer eux-mêmes & en
payer les revenus au tellateur, & qu'il a principalement docé
la Chapellenie perpétuelle qui doit êcre deifervie par un
Chapelain inamovible. Dès-lors il n'ell pas décent de conteller qu'Antoine Tournel n'ait eu l'intention de fonder un
vrai titre de bénéfice.
.
On répondait pour les Pénitens, que c'était une fondation de Meifes qu'Antoine Tournel avait faite; c'étoit pOLIr
le repos de fan ame, & non pour l'avantage des Pénicens,
qu'il avait établi ce fervice. D'ailleùrs fi LIn pareil legs n'étoit
pas fav'orable, on devrait au moihs convenir que ce !J'el!:
pas aux héritiers d'Antoine Tournel à faire cerre obferva":
tian; il devrait leue fuffire que leLlr bienfaiteur eût manifellé fa volonté, qu'il eftt témoigné, comme il l'avoit fait~
l'intérêt qu'il merroit à· cerre fondation ,po!Jr qu'au lieu ,ge
la cenfurer , ils fe fuifent fait un devoir de remplir fes pieufes
intentions. Le corp's auquel J'exécution de ce legs a été. confié, le droit qu'il peut avoir de recueillir des libéralités, la'
nature des biens dont on peut difpbfer en fa faveiJr, tout
cela ne vient pas au procès. Ce n'ell pas J'œuvrè' des PéJ
nitens qui profite du legs pie qui y donne lieu; ce n'ell' pas
cetce confrairie qui, a reçu, elle n'ell: que chargée de Ijexécution des intentions du tellateur. Les quellions que le pr0cès
prélente à décider: fe reduifent à favoir, 1°. fi pour fourni
à la dépenfe d'une fondation de Meifes, on a pu léguer le
bien dont Antoine Tournel a difpofé; 2 P• fi parcé que le.
cpoix de ce bien feroit contraire à l'Ordonnance, la fondation devrait ne plus exiller, & s'il ne faudrait pas au con.
traire que les héritiers en aifuraifent l'exécution, ëh fuppléant
par un autre revenu au produit du fo'nds dont ils fe mettraient en poifeffion.
, .
l)our l'examen qe la premiere qUéll:ion deux Loix Jont:
�PAL.U S DE, P 1l. a v l! NeE.
91
à éonfulter ~ l'Edit de 1749, & la Déclârarion de 1761. En
DU
les rapprochant & en fuivant leurs difpoGtions, on eft convaincu que rien ne s'oppofoit à ce que le fonds de terre de
Tournel fut légué pour la dotation de la fondation qu'il a
voulu faire. La permiflion donnée par l'arr. 19 de l'Edit de
1749, & par l'arr. 8 de la Déclaration de 1762 aux fondations de Melles & obits, de recevoir des rentes conftituées fur le Clergé, fur les Villes & Communautés, & Hôpitaux, & autre,5 érabliiTtimens de charité, aux Eglifes pa~
roifliales, fabriques d'icelles, écoles de charité, tables ou
bouillons des pauvres des Paroiffes, de placer fur les tailles,
fur le tréfor royal les deniers provenant des remboufemens
qu'ils auront reçus des dons & legs qui leur auront été faits,
ou de leurs épargnes, eft faes contredit donnée à rous les
établiffemens qui pouvoient avoir reçu des rembourfemens
& fait des épargnes. Ceux compris dans l'art. 3 de l'E9ic
& de la Déclaration font donc en droit de s'appliquer la
difpoGtion de cet anicle, puifque pouvant recevoir des rentes,
des capitaux, ils ont pu a.voir, comme les Hôpitaux, des fonds'
inutiles à placer.
Après avoir permis à .tous ces établiffemens de remettre
leurs épargnes aux Receveurs des tailles, le LégiOareur, par
l'arr. 9, accorde une autre faveur aux Hôpitaux & aux établiffemens compris dans l'arr. 8 j il veut que les difpofitions
de derniere volonté par lefquelles il leur aurait été donné
depuis l'Edit de 1749, ou leur feroit donné à l'avenir des
rentes, biens fonds ou aurres immeubles de roure nature,
[oient exécutées, dérogeant à cet égard aux difpofirions de
l'art. 17, &c. Les articles fubféquens viennent tous à l'appui de l'arr. 9, & du 4'ftême qu'iLfournit. La difpofition
de l'art. 8 eH générale, fait par fa contexrure, loit par
l'objet qu'elle a. Par, fa contexture, elle concerne les Hôpitaux & autres éta lilTemens de charité. Par fan objet,
parce qu'elle accorde une permiflion done fane fufceptibles
tous les établifferr:ens compris dans l'arr. 3 de l'Edit & de
la Déclaratiol). Donc celui dom il s'agit, & qui eft rappellé
Ml
.
�91.
10
t1 RNA L'
dans ledit arr. 3, Ce trouve dans la difpoûtion de l'arr. 8. Il
el!: répéré dans l'arr, 9,. qui difpofe en faveur des Hôpi.
taux & autres érabli1femens énoncés en l'article précédenr.
Ce même a..rricle confirmant le don des biens fonds qui.
auroit pu êrre fair, & ceux qui pourroienr l'êrre à l'avenir
auxdirs érabli1femens, a cerrainement aurorifé la difpoflrion
tel!:amentaire d'Anroine Tournel
Il faut dil!:inguer dans le tel!:ament. d'J\ntoine Tournel
la fondation des Me1fes, d'avec l'affignat du bien dont .Ie
revenu doit fervir à fon exécurion. Cerre diHinaion n'el!:
coptraire ni à l'Edir, ni à la Déclaration, puifqu'elle. s'y
trouve parfairement bien établie. On peur voir que l'Edit
de 1749 c.ommence par régler la forme de ces fondarions,
& les préalables qu'il y a à remplir pour a/liJrer leur exiftence. Ce n'el!: qu'après que le Légiflareur s'el!: occupé de
cet objet, qu'il pa1fe à celui qui concerne les biens & revenus qui peuvent leur être donnés. En parranr de cerre
dil!:inaion', l'aae porrant l'établi1fement dont il s'agit aéré
revêtu des formalirés exigées par la Loi. La fondarion
exifl:e, les deux puilfances ont concouru à l'autorifer; on ne
pourroit la détruire qu'en s'éloignant de la volonté connue,
bien exprimée du refl:ateur. Qu'on admette que la fondation
ne pui1fe pas être dotée par le legs d'un bien fonds ~_à la
bonne heure; mais dans cette filppo{ition, que les héritiers
s'en réfervent la po1feffion, en fournilfant les fonds néceffaires à une fondation à laquelle leur bienfaiteur a artaché
le .repos de fon ame & de celle de Ces parens. C'el!: ce
que la Sentence du Lieutenant aurorife. Qu'on fuive,
qu'on commente l'Edit, & l'on verra fi en défendant de
léguer des biens fonds à certains établilfemens, à certaines
fondations, le Légiflareur a prononcé la ca1farion de . ces
mêmes fondations. Il a prohibé ces libéralités, mais il n'a
ordonné nulle part que cette prohibit~on entraînât l'anéanti/fement de la fondation. Par-rout il fe borne à défendre
<jlJ e tels & tels biens foient donnés pour l'exécurion des
fondations: mais cela rouche-t-il à l'établi1femel)t de la fon~'
�DU
PA'tÂI:;;
DI!
PROV1?NCB:
93
nation, & à l'obligation oÙ font les héritie;s de fe conformer à l'intention connue des teftateurs?
Ce n'en pas la premiere fois que la que'ftion s'eft prérentée. Souvent il eft arrivé que des perfono.es fe font trom'pées fur l'affignat fait pour l'exécution d' <ne fondation, fur
le choix du corps ou de la perfonne auquel on l'a confiée.
Alors on a [uppléé par d'autres revenus à celui qui avoit été
légué. A la pl?,ce du corps ou de la perfonne incapable, on en a
mis qui pouvaient fe charger de la fondation, >& de cette
mahiere on eft parvenu à concilier ce que l'on de voit aux
Loix de l'Etat & à la volonté du teftàreur. Telle eH l'efpece de l'Arrêt rapporté par Denifarr, vO. fondations, n. 14.
- Il eft certain' dans le fait que les Pénirens n'onr point
fait fpiritllalifer la fondation; c'dl: Mre. Renoux, Prêtre.,
nommé par le teftareur, qui prit fur lui de faire remplir cette
furmaliré. Si le teftateur avoit voulu faire un bénéfice 'nouveau, l'auroit-il pu fans fe conformer à I~ difpofition de.s
arr. l & 'i de l'Edit? N'auroit-il pas fallu rapporter des
Lettres-patentes, & remplir toutes les formalirés port~es par
l'arr. 'i de la Déclaration? Rien de tout cela n'a été fair.
~ournel a voulu q'~'un Pr~rre qu'il défigne fût. chargi dT.
dIre les Melfes qu'JI fondOlt , & ce Prêrre devolt êrre celUI
qui auroit le fervice de la Chapelle dës, Pébitens. Il n'exine
&. n'exiftera jamais qu'un fimple obit, d' nt le Prêrre appellé au fervice de la Chapelle des Pénirens doit être chargé.
Pareille fondation doit donc exifter, puifqu'elle eft expreffément permife par l'art. 3 de l'Eait.
Dans l'affaire du Baùlfet', il. s'agilfoit de la' fondation
d'une école de charité, que lé fondateur avoit dclteé avec
des immeubles. Mais c'étoit un établilfemerit à faire, & non
un legs fait à un établilTemenc déja exiftanc; & par cela
feul il fut jugé qu'il n'érait pas dans l'exception portée par
l'art. 9 de la Déclaration de 176i, & que, la difpofition
étoit nulle dans fa [ubftance, & 'non pas [eulement' dans
l'affignat des ~iêns dOl,ln,és pour fa dotation. Le legs f~t
calTé au profit des héritiers. L'Arrêt rapporté par Deni~
,
�~
JOURNAL
ea
fart
antérieur à l'Edit de 1749, & ne peut par conféquent fervir à ébranler les difpofitions formelles de la Loi.
Arrêt du 12. Juillet 1782, au rapport de Mr. le Confeiller de St. Jean ,. qui fait, droit à la requête incidente
des Freres Eyclier, ca1fe le legs, & condamne la Con-'
frairie des P~nitens aux dépens. 'Ecrivant Mes. BarIet &
G~ffier..
-
'1
A R RÊ T
XI V.
Sur ce qu'pn enJend par cas fortuit, fur ~e qu'opere la renonciation à tous les cas fortuits.
Quànd ejl- ce qu'il y a lieu à l'indemnité en matiere de
fermes?
1 '
E 24 Oél:obee -17 80 le Corps des Maîtres Cordonniers·
de la ville d.e Marfeille donna à ferme à Jofeph Cha.
bert, l'un de [es membres, l'impofition de deux fols par
'femaine fur chaque Garçon, & vingt-quarre fols par an
,fur chllque Maître, moyennant 87 liv. 10 [ols par femaine.
;Chaqe t renonç.a,lI rpus cas fortuirs , fans pouvoir prétendre
aUCU{le, diminution de ·la ferme, fous quelque prétexte que ce
fût ou 'pût être, même fous prétexte de la guerre, cas imprévus, ou autre calamité puhlique.
.
Une Délibérarion pci~e par les ~.aîtres Cordonniers pour
la filiarLon de la ~çon d7s (ouliers ayant donné lieu à l'é!Jligrarion qe quelques-uns d'ellK, Chabert ce1fa [es paiemens
le S Mais Ï7llI. Les Prieurs fe pourvureil1: çonrre lui, pardeval]t les Lieutenans-Génér,aux de Police, à l'effet de le
faire ~pndamller au paiement des paies échues. Chabert ,demanda ·qu'~FelJdu qu'il fe rrouvoit dans l'un des cas ,majeurs qui réfilient un,e:{~rme de, pe'n droit, il fÛf au~ori[i
à donner compte d~) clerc à maître .pour tout le remps qui
avoit couru depuis ..la délivrance ju[qu'à ce jour. Les Lieu-
L
-
1
�DU PALAIS
D'1l ·PfROVllNCE;
'9$
tenans-Généraux de Police condamnerent Chahert à payer
provifoirement & nonobfl:ant appelles fommeS par lui dues,
dépens joints au principal. Chabert prit des fins fubiid iaires,
tendant à' faire condamner les Prieurs à lui payer .24Q.o liv.
pour lui renir liéu d'indemniré ou de dommages-intérêts,
à raifon des pertes qu'il avoit e/fuyées daM l'exploitation de
fa ferme, avec intérêts & dépe.ns.•.Sentence définitive· qui
le condamne aux paies échues, fous la dédllélion de 211-0
liv. à lui accordées.. pour -l'indemité des pertes qu'il pourrait. avoir foufFert par l'émigratIon ~xtraofdinaire des Garçons Cordonniers pendant un cerràin' tempS (je fon bail,
condamne Chabert à ·Ia moitié des -dépêns, l'amre moitié
compenfée. Appel de la part de Cliabert, & fubiidiairement
in quantùm contra des Prieurs envers la derniere 5entebce 1aux chefs où ils fe trouvent> léfés.·
On difoit pour Chaberr, que la Sentence définitive érait in"
juae & inconféquente. En effét, les Juges de Police tecort~oif
feqt qu'il érait' dû une in8emnité ail Férmiefà raif<1h des pertes
qu'~1 avoit' foufFertes; ces perres ne pOUVG'Ïl:!nt être que confidérables, puifque, de leur aveu, l'émigrati'&n qui les avoit
occafionées .étoit extraàrélinairè. Il' fllloit donc accorder à
<:ê Fermier un dédommagement cbhvenable.· ;Cette confidèration éfi fFaÏipante & déciiiv.e ; elle fufFÎtolt feule ·pour
montrer le vice de la Sentence & jufiifier l'appel du Fermier. .
l' .
.
."
Les Prieur~ conviennent que le bail peut être rétolu deficiente rei fuhflantiâ, lorfque le Fermier ne jouit' pas & ne
.peut pas jouir de ce qui llii a été affermé. te principal
obiet âfFermé éraie la petception de la' taxe· ét.ablie fur
lés Garçons; l'émigration èxtraordin'aite de ces Garçons a
fait que le Fermier n'a ni jbui ni pu jouir de la chofe affermée. La fubfiance & l'article le plus imporrant de la ferme
ont manqué. Il y avoit donc lieu ail réûliment du bail, ou
au moins à une indemnité. Les Juges de Police auroient
dû ia lui accorder, eu égard aux perres qu'il avoir foufferces.
�96
, _ il
,
Jefo
U R 'N fl\ L '
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•. r
. Il en. cerraiq, & convenu qu'à l'époque dù bail il. y avoir
à MarfeŒe un nombre conlidérable d'ouvriers; & c'eft fur
~ela que C/labert mefura fon offre, & que fut réglé le prix
de la ferme. Or, fi ~e nombre d'ouvriers, au lieu de fubfiller & d'.augmen,ter, a diminué après le bail, & li cerre
diminùtio'n:a été coolidérable, il eft évident que le produit
de la ferme ceffant, en.. très-grande partie, & le fermier.
nê pouvant ,plus percevoir la taxe de' ces ouvriers abfens,
il en eft réfulté une perte importante Cerre diminution
d'ouvriers .dl: conllatée: 1°. par l'arreftation de plulieùrs
maître5;;i ,2 ° par les..l,ér-~~s. pr:üc;luits des années précéq,entes ;
3°; par ,Iil, JSente,oçe des Jùges de Poliçe, qui porte que
l'émigràtibn, d~s, garljoQs. ,çordopniers fut extraordi,naire. Il
eft certain auffiq\l,e çe,H~ émigration aéré occalionnée par
fait & la faute des pri<:urs, <:n voulant diminuer le taux
ordinaire de la facon des fouliers. _ "
)
, En droir ,;Iil 6'lt de prin'cipe .que toutes les fois qu'o,ri
caure quelque'perte, 'quelque p.réiudice.~ que.l.qU'Uh de quelqu,e.
mal))ere que c~ fQit" on doit la réparer;, cQr'r:m~é. l'bbrervent
d'Argentré [ur"l",m. 'Î 99. de fla coutu(l1e de Bretagne, glof. l ,
n.' 2, & D9ftlaJ en fes Lo,ix 'civiles, liv. 1:, tit. 8, feél. 4,
Or, l'é!J1igration' qes Quvriers étant 1'01J~r.age des prieurs, .
ils font t~nus" de la perte qu.e ,c.erre émigration a ,occalionéè,
au fermier.
"
• _
• J:J
. . ' .... 1
Où arr-on trouvé qu"tm Fermier ne puiffe pas prétendre.
une indemnité, quand',il' n'a pas perdu au delà de la moitié
du prix de fa fermê, fur-tout lorfque la perte eft furvenlle
par' le fair du ,locarel!f? On; cP!)vief!.t qu'en' tpere générqle
lin rentier') n~ p.eut dernapder un rabqis 'qu'en cas de jlerte,
qlnfidérable",. propter,' ,pamnum intolérqhile,' &' cerre, partie.:
eft fixée,~, la, moitié ide 'la vente; mais cette' rt"gte n'~H:
établie gu,e 'p0urv les (erme~ des biens fonds" ou è)lli por';"
tent fur d.es denrées '& autres droits cafuels, fufceptjb!es
d.'une grande augmentatielO. COllJme d'une, grande' diminu,- .
tlon, & qui ne fone pas. données pour plufieurs 'arlO,~es.,
parce que le Fermier pouvant gagner & pouvant p.erdre
beaucoup"
te
)
�:r
DU,
A LAI S D Il (P R 1) V Il Nell.
97
beaucoup ~ ce rifque de gain & de perte poffibJes forme
une -efpece de compen(ation qui exclut tout rabais. Il n'en
ell: pas de même de la ferme dont il s'agit, qui ne devoi t
avoir qu'un a,n de durée, dont le produit 'étoit borné & à "
peù près connu, & dont le plus grao..d profit poffible n'avoit
aucune proportion avec la perte qu'elle a procuré au Fermier.
'
La daufe de la renonciation à tous cas fortuits ne doit
pas être prife dans le Cens le plus rigoureux. Cela efl: ft
,vrai, que Decormis, tom. 2, col. r 180, r r 84 & r 187 ,
Bernard, pag. 4°2, Boniface, tom. 2, part. 3, liv. 2, tit.
'r 3, ch. 3, affurent 'que fi le cas fortuit ell: extraordinaire,
le rabais ell: accordé, quoique Je Fermier tienne la ferme
à [es rifques: D'ailleurs il faut bien d,iHinguer les cas qui
donnent lieu à un rabais ou diminution de ferme, de ceux
qui donnent lieu à une aél:ion en indemnité. Les cas qui
donnent lieu au rabais, [one ceux qui precedent du ha[ard
'Ou d'une force majeure, & auxquels les parties n'ont aucune
part; c'ef!: de ceux-là feulement -que le Fermier [e charge.
Les cas qui donnent lieu à l'aél:ion en indemnité ou en
dommages-intérêts, [ont ceux qui pro~edent du fait de
l'homme, & qui ont été occalionés par I~ dol, la faute
ou l'imprudence de quelqu'.un; Chabert ne fe chargea pas
de ceux-ci.
On répondolt pour les Prieurs, que les contrats font des
Loix qu'il n'eU pas permis d'enfreindre: ils [e forment par
le concours des parties; ils ne peuvent être réfolus que
p~r le même 'concours. Il ne dépend pas d'un des contraél:ans de.[e fouaraire aux obligations qu'il s'eH impofées.
Un, bail peut être réfolu, mais dans les cas marqués par
les Loix qui [ont· fous les titres du digeHe & du code
locati conduéli & de locato. Il pellt être réfolu deficiente rci
fuhjlantiâ : il l'ell: alors néce/Tairement. Le fermier qui ne
jouit pas & ne peut jouir, doit~tre délié de [es obligations,
de même que le propriétaire doit être difpenfé de lai/Tel'
jouir un fermier qui ne le paye pas; mais la Yilité, ni l'exd:s
N
�98
·JouRNAL·
.
du prix,' ne peut pas faire anéantir un bail: priZtextu mi.:
noris penJionis, Ji nul/us dolus adverfarii probari poJlit, refcindi locatio non potefl. ( L. 2.3, if. locati conduc1i. L. 52.,
if. eod. Dornac, Loix civiles, liv. [, tit. 4, [eél:. [, n. 8,
yag. S8, & [eél:. 4, n. 4, pag. 62.; Clapiers, cauf. 44, n. 8;.
Pothier, du louage, part. 3, chap. l , art. 2., §. 1. pag. rs s. )
Ce n'el! pas de la perte ou du profit du Fermier que dépend la validité du bail.
Il peut y avoir lieu au rabais en matiere de fermes,
quand lè Fermier a [oulfert une perte intolérable, quand il
n'eH pas indemni[é par les profits d'u·ne autre année,
qll:md il \)'a pas renoncé aux cas fortuits; un bail à ferme
n'eH pas comme une vente, il efl: caruel; [Oh produit plus
ou moins grand dépend des év.éneniens; c'eH le [entiment
de Domat en [es loix civiles, li~·.' [ , tit. 4,. [eél:. l , n. 8,
pag. S8. C'ef! la déciCion des loix ex conduCto z 5, §. 2. ,
ff. locati conduc7i'.fi muces 2.5, §. 6, if. eod. fiflulas 78 , .ff.
de comrah. empt. penJionis remi//io non fit ob modicum dam.:.
num. ( Godefroy in leg. 2.5, §.6 ,ff. locati cond. Dornat, liv.
l, tir. 4, [eél:. 5, §. 5, p~g. 63. D'Argout, inflir. rom. 2., liv.
3, ch. 2.7, pag. 2.97,) La modicité d'une récolre ne ,donne
jamais lieu à la remiCe de la penCion. Ita Ferriere, yo. bail,
pag. 162.,; Duperier, yo. rahais) Sanleger ,. réfol. civ. rom.
1, ch. 3 [ , n. 7, pag. 65 ; Porhier, du louage,: parr. 3,
ch. l , arr. 2., §. l , pag. 13 S , [48. Pourquoi le Fermier
ne [upporteroit-il pas le,s pertes médiocres, quand tous les
profits, quelques conCidérables qu'ils [oient, ne le [oumetre,nt pas à une allgmenrarion du prix de la ferme?
Si par On cas fortuit & exrraordinaire le Fermier [oulfre
une perte intolérable, une perte qui excede la 'moirié du,
fermage ,il peut 'demander un ,rabais: vis major...... non
debet conduc1Qri damnofà effi, Ji plus quàm tolerahilis efi.
( L. merces 2.5, §. 6 ,if. locati conduc7i; L. 2. 5, §. 2., if.
eod.; Duperier, rom. 2. , yo. Fermier, n. 12., & yo. rabais,
pag. 537; Guipape, qu. 630, pag. 534; L. fiflulas 78, if.
de conrrall. empt. ; Sr. Jean, décif. 56; Clapiers, cauf. 4'h
�DU
PALA-IS
9?
DE' PROVENCE.
n. Il; Decormls, rom. 2, col. 1179: Jùlien, notes ma.nufcrites , vo. locatio, ch. l , pag. 4, litt. A & B; Defpeiflès,
tom. l , part. l , tit. 2, feél:. 4, pag. 10 7, n. 3; Fromental,
vo. bail; Boniface, tom. 2, IiI'. 7-, tit. 4, ch. 1.) Si le Fermier n'a fouffert ce damnum intolerabile qu'ùne année, &
que fon bail en dure plufieurs, il faut mêler routes les nnnées, & comperifer la perre d'une année avec le profit des
autres. Si uno anno remiflionem quis colono dederit. ob fierili.
tatem, deinde fequentibus annis, ·contigit· ubertas, nihit obejJe
domino remiflionem, fed integram pe'!fionem etiam ejus anni
quo remifit exigendam. (L. 1), §. 4, if. locati cond. L. licet
8 , cod. locati cond. & les Auteurs ci-detrus cités.) Quelque
perte qu'un Fermier ait faite, il ne peut afpirer à aueune
indemnité, fi elle pr<;Jcede d'un cas qu'il ait prévu ou pu
prévoir, & s'il a renoncé à rous rabais & à tous cas fortuits. (Cochin, tom. 6, v~. baux à ferme, pag. 507; Lacombe',
vo.. bail, feél:. 8, §. 4 & S, pag. 62; Boniface, rom. 2. ,
IiI': 2, tit. 14, ch. 3, pag. 4°5.)
La doél:tine de Decormis, rom. 2., col. 118) , toute favorable qu'elle dt à Chabert, lui eH inutile dans les circonftances où il fe trouve. Si pour autorifer un Fermier an
rabais il faut qu'il ait foufferr un damnum intolerabile, id efl
ultra dimidium jufii pretii, quoiqu'il n'ait pas renoncé aux
cas fortuits, il eH fehfible qu'il faut une perte fupérieure à
c.elle du juGe .prix, pour lui mériter un rabais quand il a
'pris la "ferme à fes rifques, qu'il a renoncé 'aux cai fortuits
-& à toute diminution, autrement ce paél:e. f~roit vain; &
un paél:e autorifé par les loix ne peut iamnis l'être. ~
Il n'éroit dû au.cune fo~re d'indemnité à Chabert; en cal.
'culant même' d'après fes fuppolitions, on ne trouve jamais
"qu'il ait foufferr/un damnum into'lerabile. D'après le calcul
'des garçons fait par Chabert, il efl: évident 'qu'il l1'a pas
fouffert une pene d'outre-moitié, même pendant les quarre
mois de la grande dé(ertion. Si Chabert al'oit fOldfert un
préjudice confidérable par -la défertion des ouvriers, il en
,<luroit fait corrftater daôs le' temps même, fuivanr le
N2.
�10
100
U RNA
t
fenciment de Faber, in cod. lih. 4, tit. 4:1. de locato -;
dét:
pag. 46), il n'a été excipé de l'émigralion des
Garcons qu'après que les Prieurs fe furent pourvus contre
lui; 'il n'avoit donc pas fouffert cette pene inroléraJ;le indiquée par la Loi. Il ef!: d'ailleurs prouvé que le nombre
des Garçons fut plus confid~rable après l'émigration finie,
que lors de l'aél:e de bail à ferme. Chabert n'ef!: donc pas
fondé à demander une indemnité. La diminution du produit
de la ferme pendant quatre mois dérive d'un cas prévu par
Chabert, d'un cas qu'il a dû prévoir; c'eH à ce cas fur-.
toue que fe rapporte 'la renonciation qu'il fir. Il ne peut donc
lui êrre dû aucun rabais. C'ef!: ainfi que le décide Faber,
déf. 30, pag. 4'i 8.
Par Arrêr du r6 Juillet 178:1., au rapport de Mr. le Con.
feiller de Perier, la Sentence fut confirmée, avec dépens. Ecrivant Mes. Bovis cadet & Pellicot de Seillans.
,6,
Le principal motif fut que là délibération dont fe plaignoit Chabert n'écoit que le renouvellement des loix ancIennes.
'.
AR RÊ T
XV.
La demande en jùpplément de légitime prefcrit-elle au profit
dè l'héritier, quoique le légitimé vive en commun avec lu~
& aux frais de l'hoirie?
F
Rançoife Bremond, en qualité d'héritiere de Denis Vin..;
cens, Curé du Bruis, fon oncle, fe pourvut le 18 Novembre 1769 pardevant le Juge d'Eigalaye, contre Mre. Mathieu Vincens, Curé de Rozans, en paiement de plufieurs
droits fuccefIifs dus à [on oncle, & entr'autres de la légitime
compétente à' celui-ci [ur la [uccefIion de fon pere. Mre.
Vincens conteHa cette demande, 1°. fur ce que la récep-::
'.
�DU
PAL AIS
DE
PRO VEN C E.
Ior
tian du legs l'empêchait de demander la légitime; '2,0. il
demandait l'imputation des frais d'éducation; 3°. il fomenoit que la deniande en fupplément de légitime étoit preC.
cri te. L'affaire fut compromiCe à des Arbitres; & par Sentence arbitrale il fut adjugé à FrançoiCe Bremond la légitime paternelle compétente à Denis Vincens, Calls avoir
égard à la prefcription ni à l'imputation des frais d'éducation à lui fournis, à l'exception feulement de 1') 0 liv. payées
pour fan noviciat dans l'ordre des Dominicains depuis vingtneuf ans avant la demande.
Appel de la part de Mre. Mathieu Vincens, pourfuivi enfuite après fa mort par fes hoirs bénéficiaires. On difoit pour
. eux, qu'il dl: vrai qu'il n'y a qu'une renonciation expreffe
qui puiffe priver l'enfant du droit qu'il a de demander fan
fupplément de légitime; mais on doit convenir que l'enfant
qui, en concédant quittance de fon legs, prorelle, comme J'a
fait Denis Vincens, de quelques autres droits qui lui competent, fans envelopper le fupplément dans fa prorel!:ation, y renonce par cela feul. Si cette renonciation pouvoit
paroltre jnfuflifante, il el!: cerrain que celle qui s'el!: opérée
par un filence de trente ans, ne le feroit pas. Le fupplément
de légitime, qui n'el!: pas plus favorable que la légitime
.elle-même, fe prefcrit par l'efpace de trente ans. La jouirfance du legs ne met aucun obl!:acle à la prefeription du
fupplémenr. Il fuflit qu'un enfant jouiffe tranquillement pendant trente ans du legs qui lui a été fait par fan pere fans
en réclamer, afin qu'il ne fait pas reçu à demander le fupplément. Ce foet-Ià deux aél:ioos différentes, comme le difeet les Auteurs, notamment Rouffilhe, tom. '2" pag. ') '2,.
L'un n'a rien de commun avec l'autre.
En droit, quànd même Denis Vincens· auroit demeuré
dans le fein de fa famille, la prefcription de trente ans'
n'auroit pas été interrompue pour la demande en fupplément, comme elle le feroit pour la légitime. Quoique l'enfant vive dans la maifon de l'héritier, la prefcription court
foujours contre lui pour le fupplémeor, à compter de la mor.t
�102.
JOURlIAL
du pere, ainli que l'attefie Mr. l'Abbé de Montvalon, tom..
l , pag. 106.. E~ demeurant ~ans la mai~on. de l'héritier,
Denis y aurOJt vecu fous la fOl du legs à lUI fait par {on pere,
parce que ce legs formait ron titre. D'ailleur.s dep~i~ 174~
ju{qu'en 1780, à laquelle epoque {eulement 11 a ete parle
de {upplément de légitime, il s'eil écoulé trente-quarre'
ans.
FallÎlt-il {uppo{er que cerre aélion en {upplémenr fÎlt admife, pourroir-on fe difpe.n{er d'y imputer les frais d'éducation qui 'ont été fournis à Denis pour parvenir à l'ordre
-de prêcrife? Il-eil certainl que tout ce qui parvient aux enfans par les di{pofitions du pere, en quelque façon que ce {oit,
eil imputé à leur légitime de plein droit, 3 moins qu'il ne
l'ait expreffément prohibé. Tous les Auteurs attefient certe
maxime. Duperier en (es maximes, pag. 4'P Mr. l'Abbé de
Montvalon, tol)1. l , pag. ) 6; de Bezieux, Decormis, Sr.
Jean & Julien tiennent le même langage.
Les frais d'éducation que le pere a légué n'ont-ils pas
procédé de fa libéralité & de {a {ubilance? Ne forment-ils
pas un bien que le fils a recueilli, & dont il a profité en
vertu. des difIiofirions de {on pere? Si celui-ci avoit légué
une penfion viagere, une fomme pour apprendre un métier,
des habits, des denrées, ne faudroit-il pas les imputer?
Pourquoi n'impureroit-on pas des fournitures beaucoup plus
imporrantes qu'il a fallu faire pour mettre un enfànr en érat
de parvenir à l'ordre de prêrrife qui eil un vérirable érabli{fement? Il Y a une grande différence eorre-Ies fournitures
que le pere fait de fon vivant, & - celles qu'il ordonne après
fon décès. De {on vivaor, il doit la nourriture & l'éâucation
à {es enfans; mais après {a mort, il ne leur doit que leur
légitime; & pourvu qu'il la leur laiffe en quelque maniere
que ce {oit, il faut que rout ce qu'ils reçoivent de fa fub{tance y {oit appliqué.
On répondait pour Françoi{e Bremond, 'qu~il eil cert'ain
e~ . dr~it que nulle pre{cription ne peut courir coorre le lé.
gltlmalre pendant qu'il eH nourri par l'héritier ou aux dé,
�DU
PALA,rs
Dil
PROVENCE:
1°3'
pens de l'héritage. C'ell: la décilion des Auteurs; tels que
d'Olive, Ricard, Catelan, Serres & Me. Julien dans [on Commentaire [ur nRs Statuts, tom. 2, pag. ) 82.
Dans le fait, Denis Vincens a été nourri aux dépens de
l'héritage, & l'héritier a pourvu à [es be(oins pendant douze
ans, ainfi que cela conll:e par diver(es lettres produites au
procès. S'il a reçu (a nourriture [ur le patrimoine du défunt,
il ell: donc cenfé en poifeffion de [a légitime, & la pre(cription ne pouvoit pas courir contre lui.
'
La quittance privée du 6' Mai 17) 6 ne renferme aucune
renonciation au (upplément de légitime. D'ailleurs un enfant,
en recevant le legs que lui a fait (on pere, n'e!t pas cenfé
avoir renoncé au fupplément de légitime. Comment feroit-il
poffible de préfumer qu'il l'ait abandonné, en protell:ant de
demander le paiement des autres (ommes qui lui étoient
dues?
E;ur l'imputation, des frais d'éducation à là légitime, on
répondoit que Duperier, Julien, rom. l, pag. )01, M~. de
Montvalon, tom. l, pag. ) 9, établiffent également que les
frais d'éducation ne peuvent point être imputés à la légitime:
Quand le pere a commencé à domier l'éducation à (es enfans, & que l'héritier acheve de remplir ce foin, il ne remplit qu'une obligation qu'il a contraélée en acceptant l'hoirie;
il n'acquiert point le droit de répéter ces frais; c'ell: en quelque maniere le pere qui eft c~n(é les fournir.
Mais d'après le titre qui a conféré la fucceffion de Mathieu Vincens à Antoine, & après lui à Mathieu Vincens,
l'héritier était chargé de l'éducation en fus de fa légitime.
Le tefl:ateur lui fait d'abord un legs pour lui tenir lieu de
légitime, qu'il fou met fon héritier à lui payer à des époques
déterminées, & il le charge au furplus de fon éducation,
en cas qu'il veuille parvenir à l'ordre de prétrife; les frais
de cette éducation foot une libéralité que le tell:ateur a voulu
faire à (on fils; en lui affurant la légitime, il n'a fait qu'acquitter une dette natutelle: il n'a donc rien donné, il n'a
fait que Ce libérer.
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JOURNAL
roÂrr~e du 2.0 Juillet 1782, au rapport de Mr. le Coofeiller
de Callillon, qui réforme la Sentence au chef qui accordo!t
le fupplémene de légitime à Marguerit~ ~remond? & la declare non recevable, attèndu la prefcnptlon. Ecnvant Mes.
Pochee & Sauvere.
.
A R.R Ê T
X V J.
Dans l'aliénation des hiens de l'Eglife faite fans aucund des
formalités prejèrites par les Canons ël les Loix du Royaume,
la prejèription centenaire court pendant la vie du Bénéficier
qui a fait l'aliénation.
N l'année 1661, Mre. de Valavoire, Ev~qLie de Riez,
Seigneur majeur du lieu de Bauduen, vendie à la Communauté du même lieu les deux tiers des terres galles &
en friches du lieu & foo eerroir, aioli que de celui de Sorps,
pour la fomme de 800 liv. Il fue die dans l'aél:e que cette
fomme ferait placée fur un fonds ou fur une Communauté
folvable, pour porcer annuellement SA liv. de penlion, &
qu'il feroit permis au Seigneur Evêque & à tes fucceffeurs
de racheter la terre galle toutes les fois que bon leur fembleroit, en rembourfant à la Communauté les 800 liv. feulement.
En l'année 1773 Mre. de Clugny, Evêque de Riez, fe pourvut contre la Communauté de Bauduen, impétra des lettres
de refcilion, & demanda la caffation de l'aél:e de 1661 ,
comme ayant été fait fans caufe, fans utilité, fans formalités, & contre le vœu de toutes les Loix.
On difoit pour l'Evêque de Riez, que tant que l'Eglife a
vécu des oblations des fideles, il était oaturel que fes Mini!tres en euffent la libre adminiHration; mais du moment
que les Empereurs lui eurent permis de pofféder des biens
fonds, & que fon patri'lloine fe fut accru par 'la libéralité
des Princes & des fideles) il devint important de veiller
E
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JOURNAL
roÂrr~e du 2.0 Juillet 1782, au rapport de Mr. le Coofeiller
de Callillon, qui réforme la Sentence au chef qui accordo!t
le fupplémene de légitime à Marguerit~ ~remond? & la declare non recevable, attèndu la prefcnptlon. Ecnvant Mes.
Pochee & Sauvere.
.
A R.R Ê T
X V J.
Dans l'aliénation des hiens de l'Eglife faite fans aucund des
formalités prejèrites par les Canons ël les Loix du Royaume,
la prejèription centenaire court pendant la vie du Bénéficier
qui a fait l'aliénation.
N l'année 1661, Mre. de Valavoire, Ev~qLie de Riez,
Seigneur majeur du lieu de Bauduen, vendie à la Communauté du même lieu les deux tiers des terres galles &
en friches du lieu & foo eerroir, aioli que de celui de Sorps,
pour la fomme de 800 liv. Il fue die dans l'aél:e que cette
fomme ferait placée fur un fonds ou fur une Communauté
folvable, pour porcer annuellement SA liv. de penlion, &
qu'il feroit permis au Seigneur Evêque & à tes fucceffeurs
de racheter la terre galle toutes les fois que bon leur fembleroit, en rembourfant à la Communauté les 800 liv. feulement.
En l'année 1773 Mre. de Clugny, Evêque de Riez, fe pourvut contre la Communauté de Bauduen, impétra des lettres
de refcilion, & demanda la caffation de l'aél:e de 1661 ,
comme ayant été fait fans caufe, fans utilité, fans formalités, & contre le vœu de toutes les Loix.
On difoit pour l'Evêque de Riez, que tant que l'Eglife a
vécu des oblations des fideles, il était oaturel que fes Mini!tres en euffent la libre adminiHration; mais du moment
que les Empereurs lui eurent permis de pofféder des biens
fonds, & que fon patri'lloine fe fut accru par 'la libéralité
des Princes & des fideles) il devint important de veiller
E
~
�DU. PAL AIS
-D E
PRO VEN C E.
105
à fa coofervation. Auffi voit-on que dans le cinquieme Concile de Carthage, tenu vers la fin du quatrieme fiecle, on
commen<;a d'ordonner qu'en cas de néceffité d'aliéner les
biens de l'Eglife, il en feroit délibéré par le Métropolitain
& un nombre fuffifant d'Evêques que le Concile d'Agde fixa
enfui te à deux ou trois. Le fameux Caoonjill~ exceptiolfe 52., cauf. 12, que fi. 2,
attl'ibué à St. Leon, rapporté par Gratien, & fuivi en France-.,
ainli que l'attefie Rebuffe in compend. alien. rer. Ecclej:, n,
4 & fuiv., prohiba aux EvêCJues de pouvoir aliéner les biens
de leuJ Eglife, même pour fon utilité, fans délibération,
& conféquemmenr de tout le Clergé, & fans la fouftrip-tion des Clercs.
Les Empereurs Leon, Anafiafe & Jufiinien firent des
loix dans le même objet; mais comme ces !oix n'étoient
point comprifes dans le code Thoédolien, publié en l'année
438, & que l'Eglife Gallicane ne connoi1foit d'autres loilC
que celles de ce code, fuivant le Capitulaire de Louisle-Débonnaire, tom. 1, pag. 690, ce ne fut que vers l'an
845 que l'alié(lation des biens d'Eglife fut défendue en France
pour la premiere fois par les Conciles de Meaux & de
Beauvais.
Depui5 lors on n'a jamais révoqué en doute que les biens
de l'Eglife ne fu1fe!]t inaliénables, hors le cas de grande
utilité ou d'évidente néceffité; encore faut-il alors, pour
que l'aliénation foit valable, qu'elle ait été précédée du rappore de commodo & incommodo, de la vilite du lieu, des
encheres & proclamations, & que l'on ait rapporté l'aurorifation -du fupérieur eccléliafiique:
'
L'art. 1') de'l'Edit du mois de Décembre 1606, donné
fur les remontrances du Clergé de France, déclare les alié~
nations fait~s par les EcclijiaJliques & M rguilliers du tem.
parei des Eglifes, jans les folemnités requijès par les Ordon~
nanees & les di(pcljitiolls canoniques, nulles (,; de lIul effet f;.
valeur, vèut qu'elles foient cajjèes, les partie.s, pour ce voir
faire, appel/às.
A!lllies 1782. e;. fuiv.
0
�•
7 0 l1 R: N:t r;
Par la' Déclaration du 12' Février 166 l, le Roi veut que
'les Eglifes & fahriques entrent de plein droit ~' de fait, fqns
aucune formaliti de jujlice, dans tou~ les .hle~s, rentes &
domaines qui leur appartiennent, & qUI dq!u!s vzngt ~ns aurOllt éti vendus ou engagés par les MarguIllzers, hahttans ou
Communautés des Paroiffis, fans fa permiJIion & fans avoir
gardi & ohfervé les ,autres formalités en tels cas requifes &
néceUàires, &F.
.
En France, dit Mr. Fleury, injlit. au droit canonique, parr•
. 2., chap. 12, on ne peut aliéner les hiens de l'Eglife fans.
l'autorité du Roi, qui ejlleprotec1eur des Eglifes de [on Royaume;
& quand il s'agit de hiens de bénéfices confzjloriaux, de fondation royale & autres grands bénéfices, il faut des Lettrespatentes enrégiflrées dans les Cours, fur procès-verhal qe commodo & incommodo fait à la requête de MI'. le' ProcureurGénéral.
'
C'eft fur ces principes retracés par tous les Canoni!tes,
& fondés tant fur les. déci fions des Conciles, que fur la
Loi juhemus, cod. de facrof. Ecclefiis , fur la Novelle 7, cap.
l , & fur le Canon nulli liaat extra de rehus Ecclejiœ non
atien., que l'on a toujours penfé que l'aliénaiion des bieiis
d'Eglife faite fans caufe , fans néceffité & fans les formalités
requifes, écoit radicalement 'nulle; aùffi voit-on que la Jurifprudence du Parl~ment de Paris, coilforme en cela à celle
du Grand Confeil, a toujours été de calfer de pareils aél:es
dont il a penfé que le vice ne pouvoit êt~e couvert .par
aucun laps de temp~. Il faut convenir cependant que moins
.rigoriHes, quant à ce, que le .Parlement de Paris & le
Grand Confeil, nous' avons adopté dans cette Province une
Jurifprudence plùs équitable. S'agit-il d'une aliénation 'dans
laquelle les formalités ont été gardées, & où l'Eglife ne
fe plaint que d'une !impie lé!ion? Elle doit réclamer dans
lès quarante ans; mais fi elle fe plaint d'une aliénation faite
fans caufe, fans néceffité, fans utilité, dans laquelle on n'"
cbfervé aucune des formalités, le vice ne peut en être couvert que par le laps de cent ans.
Delà donc la néceffité d'admettre deux termes pour ]a
106
1
�'-
DU
PAL AIS
D :Il
Pli ° V :Il NeE.
1°7
pre(cription; l'un moindre, parce que dans le premier cas
les, formes extérieures ayant été gardées, il Y a lieu de
préfumer la nécelfité de l'aliénation; l'autre plus confidérable, parce que toutes les regles ayant été violées, il ell:'
juile qu'un pareil aae ne jouiffe pas de la même faveur que'
celui qui :{~ revêtu de tous }es caraaeres qui en annoncent
l'amhenticHe.
La Communauté de Bauduen ne conteile pas que dans là
premiere hypothefe la prefcription ne commence à ,courir
que du 'jour du décès du Bénéficier qui a fait l'aliénation;
mais elle prétend que dans là feconde il faut néceffaireOlent
dontier cours à la prefcription du jour même du contrat.
Lorfque les Auteùr.s ont penfé qu'en in.atiere d'aliénation·
des biens d'Eglife la prefcription ne de voit commencer à
courir que du jour de la 'mort du mauvais adminiflratepr,
c'efl, comme ils nous' l'apprennent eux-même, '!ilnt à caufe
du danger qu'il y auroit à la faire courir du jo1Jr du contrat, que parce qu'on n'avoit pas lieu d'attendre de celui
qui avoit mal adminlHré le patrimoine' ~de fan Eglife, qu'il'
fe déterminât jamais à s'élever contre une aliénation qu'il
aurait faite lui-même, dont il feroit le garant, & qui l'expoferoit au défagrément de reniwer les fommes qu'il aurait
exigé pour prix de.la vente. Ils ont égal ment penfé, &. avec
rai fan , que 'l'Eglife n'ayant_ point de légitimes 'défenfeurs
pendant le cours de la vie' du mauvais adminiitrateur, &
étant conféquemment dans .1'impu·iffancè de faire entendre
{es juHes récl~mations, elle fé trouvait alors aù cas de l'application de la regle, contra non 'va7cntcm agcrc non currit
prœfcriptio.
•
fi cette .max.itiJ.e en vraie', lorfqu'.il s'agit d'une alié~·
nation faite avec les folemnités requifes, pourquoi refuferait-on de l'admettre, lorfqu'il conHeque les piens de l'E~
glife ont été .aliénés fans caufe & fans formalités. C'eil pré.
cifément· p.arce que le dernier de ces contrats eil infi.
niment. :nains favorable que l'autre, que l'on a prolongé le
.terme pendant lequel l':Eglife pourroit faire entendre Ces.
Or,
.
.
0 ..
.
�Jou
r.
rédamations. On, a fend qu'un aél:e paŒé fans formalités né
devait pas jouir de la même faveur que celui dans lequel
elles auraient été obfervées; & delà ell: venue la néceffité
de fixer. deux termes différens, l'un de cent ans, & l'autre
de quarante. Mais dans l'une comme da,ns l'amre de cés
prefcriptions, il ell: fenfible qu'il ne faut faire courir le délai
que tempore deeeJfus male alimantis, parce qu'outre que ce
n'ell: réellement que de ce moment que l'Eglife a pu faire enrendre fes réclamations, il efl: encore vrai de dire que dans
l'un comme dans l'autre cas, y ayant même raifon de 'déeider, on ne pem s'écarrer de la maxime d~ja retracée. Si
l'on violait une f\lis ,cette regle, il en arriverait infailliblement i 0. que la prefcription ne ferait plus de cent ans;
2.°. que relativément au temps qu'aurait furvécu le mauvais
adminill:rateur, l'aél:e le-plus vicieux ferait néanmoins celui
qui ferait le plus favorifé.
En faiHfnc courir en effet la prefcription de cent ans du..
jour -du contrat, il ell: évident qu'elle n.'allta plus de terme
fixe, parce qu'elle fe trouvera prolongée ou racourcie felon
le plus ou le moins de temps qu'aura ,vieu le mauvais adminill:rateur. De forte que s'il a furvécu cinquante ans à
l'aliénation, l'Eglife n'aura plus que le même nombre d'années; s'il n'a furvécu que trente ans, il lui en rell:era feptante pour faire admettre fa réclamati,on; mais dans routes.
les fuppofitions poffibles, elle ne jouira jamais de cent ans
qu'on a voulu lui ;recorder pour s'élever contre les aél:es
qui la dépouillent de fan patrimoine contre le vœu & la
prohibition de toutes les Loix, & notamment de la Loi ju!Jemus, cod. de facrofana. Eeclef., qui a voulu que /ieut ip[a
mater Eeclifta perpetua dl, ita & ipjius patrimonium jugiter
fervetur illœfum.
. Le Canon fi facerdotes, cauf. 16, quell:. 3, dic en termes
généraux,- que la prefcription ne court jamais qu'après la
mort des Bénéficiers qui ont mal adminiHré; non ex die quo
talia vivendo deereverunt, fed ex quo moriendo de.finita reli.
querullt, fiLpputationis ordo jùhflahit. Tel ell: auffi le fentimenc de
'108
RNA
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..
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PAL AIS
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R 0 V Il Nell.
109
Guipape, quell. so; de Mathœus &,de Ferrerius fes annotatateurs; d.u Cardinal de Luca en fon traité de jlldiciis, dire.
21 , n. 33 & 40; de Dunod en fon traité de l'aliénation
des hiens d?Eglife, 'pag. 27; du Journal du Palais, tom. l,
pag. S3 l , & totlJ. 2, pag. )09; de Derpeilfes, -tom. ! , tic.
4 çle la prefcription, pag. 72); d'Hericourt, Loix eccléJiajliques ,pag. 724; de Lacombe, JurifPrud. Canon. vo. prefcriptùm, n. 2; de Mr. d'Aguelfeau, tom. 2, pag. 467, édit. in-8°.;
Arrêtés de Mr. de Lamoignon, tic. de la prercription, n.
4 l & 42; de Decormis, tom. l, col. 1'-; S; de Pallour, de
honis tem.por. Ecclef.
,
• Il ell inutile de s'arrêter aux Arrêts qui font rapportés
par Mo~rgues, pag. _4°8, par Me. Juliell nouveau Commentateur, tom. 2, pag. ) 28, & par Boniface, tom. 1"
liv. 2, tjr. 6, chap. l , parce qu'ils n'ont eu d'autre objet
que d'établir la différence qu'il y avoit ,à faire entre la refcilion fondée fur la léiion, & celle qui réfultoit de la nullité du titre; c'ell-à-dire ,que ces Arrêts ont jugé que lorfque la refciiion n'étoit fondée que fur la léiion, la prefcription de quarante ans fuffifoit à l'acquéreur pour le raffurer fur fa polfeffion; au lieu que 'quand elle réfultoit de
la nullité du titre, il étoit dans le cas d'être recherché pendant l'efpace de cent ans. Ces Arcêts font abfolument muets
fur la ,qud1:ion de favoir fi les cent ans qui parmi nous couvrent le vice de l'aliénation, courent du jour du contrat, ou
feulement du jour du décès de celui qui l'a paffé. Dans
l'Arrêt en forme de Réglement prononcé par Mr. le Premier Pr~iident Duvair le 29 Novembre 1604, rapporté par Decormls, col. 173, & par Pallour en fan traité de jurifd.
Ecclef., tit: 8 de reyocand. alien. l'ci Ecclef.~ bien-loin d'y
trouver la preuve qu'on n'avoit eu alors aucun égard au temps
qu'avoit furvécu celui qui avoit fait l'aliénation, il n'avoit
fait que confirmer la maxime, que l'abus de l'aliénation réfultant du défaut des folemnités requifes ne pouvoit prefcrire que par le laps de cent 'ans., _
pn convient que Buiffon, en fan Commentaire manufcrit
..
�,
110
JOURNAL
fur le cod. tir. ·de facrof. Ecclef., cfl: d'avis de ne déduir~
le temps qu'a vécu le mauvais adminifl:rareur, que ~ans la
prefcription de quaranre ans, & non dans celle de cent;
parce 'lue, 'dit-il, parmi les Laï'lues, quand la prefeription
dl de trente ou de 'luarante ans, on ne fait âucune déduc-'
tian de la guerre, de la peJle, de l'ahfence ,.ni d'aucun autre
empêchement, fuivant la Loi t , cod. de prcefeript. 30 vel 4 0
anrlOr. Mais cette Loi ne dit pas ce que pré rend cet Auteur " puifqu'elle ne parle ql!e de l'"bfence; & enfin il dl:
certain, ainli que s'en explique Cochin, tom. l, pag. 206,
que la prefcriptiol1 efl: fufpendue en temps de guerre.
'
L'Arrêt du 20 Mai 1639, rapporeé par Boniface, tom., l,
liv' 2, tir. 6, chap. l, en catranc.:le nouveau bail fait par
un Evêque de Fréjus d'un fief de fon Evêché, ordonna non
feulerr.ent qu'il demeureroit uni à la manfe épifcopale &
inaliénable, mais fit 1Dême des inhibitions & défenfes aux
Evêques d'aliéner les biens de leur Eglife, à peine de nullité des contrats.
De l'état des chofes ( contrnuoit J'Eirêque de Riez) il
réfulte évidemment 1°. que J'aliénation des terres gafl:es du
lieu de Bauduen fut faite fans caufe, fans néceffité & fans
obferver aucune des formalités requifes; 2°. qûe le prix en
provenant fut employé à acquitter une dette perfonnelle à
Mr. de Valavoire; 3°, qu'il n'a jamais été placé au profit
du fiege épifcopal; 4°. que M. l'Evêque de Riez, qui 'Offre
aujourd'hui de le rembourfer à la Communauté, n'a pu avoir
d'autre objet dans ce procès que· celui de faire l'avantage
de fan fiege; ) 0. que le vice refultant d'une aliénation faite
fans aucune des .(olemnités de droit & fans utilité pour
l'Eglife, ne peut être 'couvere que par le laps de cent ans;
6°. que fuil'an't le langage de tous les Canonifl:es, il faut
toujours déduire, même de la prefcription centenaire, le
temps de la vie du mauvais adminiUrareur ; 7°. que fi cette
détraélion n'avoit pas lieu, - il en arriverait que dans certains cas une aliénation faite avec les formalités de dr.ô-ie
ferait rnQins favorifée que celle où elles. n'auroient pas ét~
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.~ardées ;
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PAL A 1
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PRO V Il Nell:
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go. que'bien-Ioin que l'Arrêt de 1604 puître fervir
de préjugé favorable ,à la Communauté, il elt au contraire
évident, par la maniere dont Decormis s'énonce en le rapportant, que l'on fe conforma alors à la regle qui ne donne
cours à la prefcription que du jour de la mort de l'aliénateur; 9°. qùe la rédaél:ion de cet Arrêt, eu égard aux circonlta.nces, ne préfente rien qui puitre étayer le fyltême
.de défenfe de la Communauté; 10°. que l'autorité ifolée
de Buiffon', auffi erronée que peu judicieufe dans fes motifs,
ne peut être mife dans la balance avec les Doél:rines magiltrales des Auteurs cités; 1 1°. que ce feroit violer ouve~
,tement 'la maxime, contra non valentem agere non currit
prœfcriptio, que de faire couriE la prefcript~on pendant la
vie du mauvais adminiltrateur; 12°. que l'aliénatiori des terres
galtes de Bauduen fut une contravention formelle à l'Arrêt
de la Cour du mois de Mai 1639; enfin que le Canon fi
{acerdous a été généralement obfervé en France, & que
dan's touS les temps les Parlemens du Royaume s'y font
conformés. '
, On examina enfuite fi dans le fait cette aliénation avait'
,été avantageufe au fiege épifcopal, & fi, eu égard à la naturè de l'objet aliéné, il étoit inutile d'obferver les for'malités de droir.
D'abord ( difoit;on ) il elt fenfible que les conteltation~
que la Communauté trouva bon de furciter en 1661 au
Fermier de l'Evêque, relativement au rélidu de; herbages
& à l'introduél:ion du bétail étranger dans 'le territoire,
n'étoient pas 'faites pour abrmer ce Prélat, qui réunitroit
au droit commun une potreffion que l'on fe garda, bien de
lui contelter. Il efi vrai néanmoins que fi la Communa~té
étoit parvenue à jultifier que les pâturages étoient à peine
fuffifall.5 pour la nourriture des befiiaux que les habitans entretenoient, elle auroit été en droit de s'opporer à l'inrro-.
duél:ion du bétail étranger. Il fera encore vrai qu'elle' aura
fait juger coritre Mr. de Ponteves, l'un des Co-feigneurs,
qu'il n'y avoit point de réfidu dans la portion des tet;res
"
�~r2
JOURNAL
gaGes qui lui ap~artenoit: mais ces, motifs, é,t~ient-ils /ilffifans pour autonfer Ml'. de ValavOIre à detenorer le fief
par une aliénation importanfe, prohibée par roures les loix
civiles & canoniques?
.
Par l'aél:e de 166 t, outre le tranfport de la propriété
des terres gafl:es & la franchife du -dtoir d'indemniré, la
Communauté fe fir concéder la permiffion de I~s donner
à nouveau bail en une ou plufieurs fois, comme elle rrouveroit bon, de les aliéner en rout ou en partie, à fan choix,
de les faire encadafl:rer ou non, de vendre à fan profit le réLidu des herbages ( preuve certaine_ qu'il y en
avoir ) & d'exiger encore ,de la part de Mr. de Valavoire, la renonciation, tant pour lui que pour fes /ilCce!feurs, à cour droit de lods & de prélation, là 'où la
Communauté viendroit à aliéner la terre gaGe, auquel cas
il ne feroir dû que lorfque les er:nphytéotes ou leurs fucce!feurs viendtoient enfuite à aliéner eux-mêmes les portions que la Communauté leur auroir rranfponées. J!J. des
conditions auffi dures, qui pourrait fe diffimuler tout le préjudice réfultant d'une pareille aliénation? Si à l'époque de la
vente le réLidu des herbages produifoit annuellement SO liv.
au Fermier de l'Evêché, Mr. de Valavoire ne faifoir certainement pas l'avanrage de fon Liege, en aliénant les terres
gaGes pour la modique fomme cie 800 liv. une fois payée.
Il le fairoit encore moins, en lai!fanr à la Communauté la
faculté de les donner à nouveau bail, fans pouvoir en exiger
le lods, ni 'urer du droit de prélat ion ; enfin en ne pla'iant
pas le prix de l'aliénation au profit de fan Evêché, il privoir fon fiege d'un revenu réel de SO liv. qui aurait pu infiniment augmenter par le bénéfice du temps.
AinLi, outre que l'aliénation de la totalité des terres gaGes
dans un terroir auill étendu que celui de Bauduen, e1l: tau•.
jours un objet de la plus grande importance, pu1fque c'e!!:
un démembrement du fief qui le déprécie infinimeol', il efl:
encore certain, même d'après ce qu'en ont penfé les meilleurs Canonifl:es, que l'exception du Canon terrlllas S3 ,
cauf.
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PA];' A 1: s
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PRO V Il Nell.
II 3
'Cauf." l'L'' qùefi. '2" tiré par Gratien du Canorl45 du Concile d'Agde tenu en 506, qui veut que les folemnités ne
foient pas requifes, lorfque les chofes aliénées font de peu
d'importance, & que l'Eglife ne fouffre point de préjudice,
ne fauroit jamais valider une aliénation faite fans caufe &
fans néceffité. Ç'ell ainli que le penfe Lacombe dans fa Jurifprudence canonique, vo. aliénation.
Pour que Mr. de Valavoire pllt être autorifé à aliéner
valablement les biens de fon Eglife, il auroit fallu; fuivant
tous les Canonilles, ou qu'il fllt obligé de payer une dette
valablement contraél:ée, ou qu'il eLÎt à fatisfaire à des devoirs de jullice, ou à fecourir les pauvres en temps de calamité, ou qu'il eLÎt en vue une acguiGtion ou un échange avantageux à fon liege, ou enfin qu'il fllt évident que le bien
aliéné lui étoit à charge. Dans l'un de ces cas, il avait'
encore à remplir les formalités de droit & à rapporter l'agrément du Souverain.
.
Les motifs de l'Arrêt du 7 Février 17 fI. , rapporté par
Denifart fous le mot biens d'Eglife, qui confirma l'aliénation
d'une partie de la terre d'Orvilliers, faite par les Religieufes
de St. Sauveur d'Evreux, furent 1°. qu'il ne s'agilfoit que
d'un objet· d'environ 20 liv. de revenu; 2°. qlle l'aliénation
avoit été faite par une tranfaél:ion fur l'exécution d'un Arrêt
rendu à 1'0ccaGon même de la portion du fief aliéné; 3°. que
cette tranfaél:ion avoit été exécutée pendant cent fix années
fans la moindre réclamation de la part de l'Abbaye; 4°. enfin
qu'il n'y avait eu aucune lélion dans la tranfaél:ion, qu'au.
contraire elle était avanta'geufe à l'Abbaye de St. Sauveur.
Ce furent les circonllauces particulieres qui déterminerent
l'Arrêr.
O'n répondait pour la Communauté, que le Canon fi facerdotes -était 'relatif à d'anciennes loix canoniques- qui ne
permettaient pas à un Eccléfiafl:ique de revenir contre fan
ferment, ~ en réclamant contre fa propre aliénation. Aujourd>hui les loix civiles & eccléfiaHiques permetten au Bénéficier aliéna.nt de, reyenir contre fon propre fait. Il n'y a
Années 1782 & fuiv.
P
�'II,!:
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10
U R 1l''A
1;-
donc plus' les mémes raifons d'adopter la. décifion d~ ce
Canon; & l'on fait que pour appliquer fagement un texte,
il faut d'une part remonter au tems de fan origine, & de
l'autre redefcendre aux mœurs préfentes. A l'époque du Canon
fi facerdous, qui a été fait dans le Concile de Tolede, o~
prefcrivoit contre l'Eglife par l'efpace de trente ans. Efr-Il
donc polTible d'appliquer aujourd'hui à la prefcriprion centenaire un Réglement pour la prefcriprion de rrente ans?
La prefcription a été introduire par un principe de' tranquillité publique; elle efr admife dans roures les nations.
La po1feffion centenaire efr d'une autorité que rien ne
peut affoiblir; elle ne forme point une !impIe prefcriptian; elle eH par elle-même un titre augufre formé par la
natu're, qui ne peut être abrogé que par une loi fpéciale. Du
fyfl:ême de Mr. l'Evêque il réfu1reroit un inconvénient gra,ve,
une furcharge intolérable contre la fociéré, parce que proroger le rc;rme d'une prefcription qui efl déja la plus longue
de rour'es, ce ferait aller au delà de rout terme connu, ce
ferait impofer aux membres de la fociété civile une furcharge qui n'efl & ne peut être avouée par aucune loi,
puifqu'elle pa1feroit les bornes que les loix de routes les
nations fe font de rous temps prefcrites en matiere de po[feffion. De ce [yA:ême il en réfulteroit encore un inconvénient grave, une extenlion abulive de privilege' en faveur
de l'Eglife. Qui ne voit que c'efl par un privilege exorbitant qJle l'Eglife ne peut -en de certaines occalions êrre
repou1fée que par la prefcription de cent ans? On peut même
dire qu'un pareil. droit efl: le plus fort de 'tous les priviLeges. Or,' en rnaliere de privilege, il n'efl: pas permis de
raifonner' d'un cas à l'aurre, ni d'étendre arbitrairement ce
qui efl établi.
Le Canon fi:facerdotes qui faifoit breche à un principe
de la tranquillité publique, n'a éré adopté qu'avec' les plus
grands .ménagen,lens. Delà quelques .Auteurs veulent que
l'~lD ne 'p~t1fe déduire fur la prefcription ·de quarante ans la
vie du Benéficier aliénant, qu'autant qu'il efl: prouvé que
�DU
PAL AIS
DE
' 1 1')
PRO VEN C E.
ce Bénéficier-étoit malJvais adminifirateur, & qu'il' étoit en
coutume de diffiper le parr.imoine de l'Eglife confié à fes
foins; d'autres, tels que Papon, veulent qu'on ne pui/fe
pas déduire la vie de l'aliénant, lorfque les formalités ont
été gardées. Si le Canon Ji [acadous n'a été appliqué ·à
la prefcription de quarante ans qu'avec des tempéramens
& de éertaines refiriaions , à plus forte raifon ne doit-on pas·
légérement & arbitrairement l'appliquer à la prefcriprion
centenaire. Guipape & Ferrieres fon annotateur ne déduifent la vie du titulaire que fur la prefcriprion de quarante
ans. Me. Julien dans fon Commentaire fur le Statut, tom.
2., pag. ) 2.6, le penfe de même.
Ce principe efi enfin attefl:é par un Aae de Notoriété
expédié par les Syndics & anéiens Avocats en 1689'" Sui" vant l'ufage & la maxime certaine & confiante, difenr" ils, établie par un grand nombre d'Arrêrs de la Cour,
" les ventes & autres fortes d'aliénations des biens & fonds
" des terres de l'Eglife, étant faites depuis plus de cent
" ans, ne font point fujetres à refcili:on, quelque défaJ:lt
,,' de formalité ou autre moyen de nullité ou de léfion qui
" pllillent s'y rencontrer; & d'après une paifible polTeffion
" de cent ans entiers &- révolus., les po/felfeurs & proprié" raires defdits .biens font à couvert de route recherche, ,
" comme auill a'près le temps & polfeffion de quarante
" années, lorfque la 'refcifion n'dl fondée que fur la 'firn" pIe léflon, fans aucun défa.ur de formalité, rdures les for" malités .prefcrites par les Saints Décrets ayant été en ce
" cas obfervées; & déduaion faite en ce cas d,.e tour temps
" de la vje de celui qui a fait l'aliénation, pareiTles ref" cilions font rejettées, & parce que nous l'avons vu ainli
'" juger & pratiquer. "
Cet a&e efl: précis; il fait très-bien la différence de la
prefcription de cent ans, d'avec celle de quarante ans. S'agit-il
de la prefcription de quarante ans? en ce cas il faut déduire la vie du Bénéficier aliénant. S'agit-il de la prefcription de cent ans? il fullit que les .cene ans foient entiers
P
2.
,
�.ù6
J.OURNAL
" & révolus, pour que les po1fe1feurs & propriétaires foient
~ couvere de coure recherche, quelque défaut de formalité,
de nul1iré ou de léfion qui puiife fe renconerer.
La Communauté de Bauduen n'auroit pas befoin ·de la
"prefcriprion de cent ans pour, fe mainrenir dans fa po{[effion; l'aéte attaqué fe. foutient par fa propre utiliré; c'elt
une tranfaél:ion du 14 Oél:obre 1661 , qui a fervi à érouffer
un des procès les plus graves & les plus difpendieux; tranfaél:ion qui fut rédigée fur les projets de Mes. Duperier &
Decormis, célebres Avocats; 1°. ellé ell: intervenue fur'
procès; 2°. tout elt à l'avaneage de l'Evêque 'aliénane, puifque le Prélat fe réferve pour lui & fes fucce1feurs le droi t
de racheter la terre gal1:e vendue touces les fois que bon
leur femblera; 3°. les 800 liv. du prix de l'aliénation ont
été utilement employées pour le Liege, ainfi que cela elt
jul1:ifié au procès.
Arrêt du 20 Juillet 1782, au rapport de Mr. le Confeiller
de St. Marc, qui déboute l'Evêque de Riez des lettres ref.
cifoires, avec dépens. Ecrivant Mes. Barlet & Portalis.
En matiere d'ajJùrance maritime,. les délaijJèmens & toutes
les demandes en exécl!tion de la police doivent être faits
dans les trois mois de la nouvelle du finiflre.
,.
D
Ans le courane du mois de Mai "1778, le' Capitaine
André Muller, Danois, nolifa le Senau Danois Les
Quatre-Freres, pour un voyage de Marfeille à Saine-Valery;
Muller pa{[a le contrat d'aJFrétement fous l'autorifation & en
pr.éfence des fieurs Auzèr & Compagnie, Négocians de Marfeille, & recommandataires du Senau; il éroit dit dans le
contrat, que les fieurs Hauler & Compagnie s'ohligeoient tfêtre
IljJùreurs au.'! fieurs Samatan fteres, aux mêmes paaes & con-
�D U
PAL AIS
Dl!
PRO V B Nell.
117
'ditians portées par les poljces d'aJJùrance, de la [omme de
50000 liv. fur les marchandifts chargées ou
charger fur le
Senau, a la prime de quatre pour cent, payahle comptant
lors de la rémiflion des polices d'al1urance, lesfieurs Samatan
s'étant ohligés de ne faire l'aJJùrance de l'excédant de leur découvert 'lue vingt-quatre heures après la mift dehors du Senau.
Après ce contrat, les lieurs Hauzer & Compagnie fe firene réaffurer pour le montant des fommes donc ils s'étoienr
rendus garans; Le Senau partit, il fut pris en route par un
corfaire anglois, & conduit dans le port de 1\1 Tamife. Un
Négociant de Londres écrivit le 2S Août au Conful Danois
rélidant à Marfeille, que ce bâtiment étoit au pouvoir d'un
Angfois. Les lieurs Sarilatan ayant appris cette nouvelle,
tinrent un aB:e aux affureurs des deux polices, par lequel ils
leur déclarerent faire l'abandon & délaiffement des façultés
affinées, fauf le découvert, avec interpellation de payer les
fommes affurées au temps de droit. Un des affureurs répondit,,, que fans entrer dans le mérite des faits expofés
" & de tout ce qui était relatif aux droits des parties, dé" rivant de la police d'affurance, à raifon defquels il pro" teHoit expreffément, il paroiffeit par l'expolition de ces
. " mêmes faits, qu'il ne s'agiroit que d'un Arrêt de Prince,
" puifque le navire n'avait pu qu'être conduit à la Tamife,
" où le Gouvernement Anglais en ordonneroit la main." levée, coriÎme ne pouvant s'agir de prife entre Nations
" amies, pour lequel Arrêt les lieurs Samatan devaient fe
" conformer aux difpolitions de l'Ordonnance. "
Par un jugement de l'Amirauté d'Angleterre du 27 Nov.embre, le chargement du vaiffeau Les Quatre-Freres fut
jugé bonne prife, & confifqué comme tel. Le 29 Janvier
1779, c'eH-à-dire quatre mois après le premier aB:e tenu
aux affureurs par les lieurs Samatan, ces derniers préfenrerent requête au Tribunal de l'Amirauté, par laquelle ils
demanderent le paiement des fommes affurées; les affureurs
préfenterent une requête incidente contre les lieurs Samatan
freres, & par aB:ion principale concre les fleurs Hauzer &
a
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.
Compagr:ie,' & Butiny, F olch & Hornboflel ,en caffatioh .d~
.contrat d'alfurance. Les ûeurs Samatan freres de leur cote
appellerent en garantie les fleurs Hauzer & Compagnie. Les
alfureurs oppoferent encore aux fleurs Samatan une fin de
non recevoir, pour n'avoir pas formé leur demande dans le
délai pr~fcrit par l'Ordonnance; & par Sentence du l Mars
1780 , le Lieutenant déclara les fleurs Samatan non recevables en leur requête principale contre les illfl;reurs , les' débouta de leur requête incidente contre les fieurs Hauzer &
Compagnie; il débouta auffi les a!fureurs de leur requête r
incidente en-calfation de la police d'affurance, & condamna
les parties aux dépens des qualités les concernant. Appel des
fleurs Samatan pardevant la Cour. .
On difoit pour eux fur la fin de non recevoir, que le. délailfement des facultés & la demande ,des fommes affurées
avaient été faits le I l Septembre 1778, avant mênie que
la perte devînt .certaine. Le jugement de l'Amirauté. de Londres était feulement intervenu le 27 Novembre, & le fieur
Amphoux dès le I I Décembre s'était porté fucceffivement
chez les affureurs pour leur exhiber les pieces jufiificatives
du chargé & du finifire, & pour recevoir les fommes alfu-'
rées. Chacun de ces faits était jufiifié par pieces. On ne
pouvoit donc oppofer aucune fin de non re·cevoir.
Si les prefcriptions de t~ente & de quarante ans fe fuffifent 1i elles-mêmes & deviennent parfaites par le feul laps'
de temps, c'efi une autre m.axime 'que les prefcriptions de
courte durée ne fe forment point au profit de ceux que l'on
p.eut fouP<i?nner de mauvaife foi.. Il faut, pour leur donner
caraétere, que le créancier paroi!fe avoir oublié fes droits;
il faut que le .débiteur ait .eu jufie raifon de fe croir.e libre
d'e fes engagemeos. Il y,en a des textes ç1ans le droit, &
c'eH le motif connu de la dif{lOfition de l'Ordonnance de
1681, fuivant ce qu'en dide premier Commentateur de.cetre
Ordonnance, tit. des ajJùrances. Ce qui fert de bafe aux di[..
pofitions de l'Ordonnance, ce Jont les prefcriptions dont elle
parle, qui font moins fondées fur la préfornp,tion '~e p.aie"':
"
"
•
�:D V ,P A r. AIS :D Il Pa 0 v Il N C Il~
}: 19
mens, que fur la préfomption de l'abandon de la créance.
Le Légillateur a voulu que les Négocians ne fuffent point
expofés à des 'incerticudes toujours préjudiciables aux opérations du commerce maririme. Il a marqué le temps au
delà duquel le Négociant débireur pourrait fe croire libre
de fes engage mens , & employer /Qn argent ~ de nouvelles
négociations. Mais le tégi!1ateur n'a point entendu offrir un
jufie prétexre à la mauvaife foi; il n'a point entendu que
le Négociant débiteur pût abufer de l'échéance du terme,
lorfqu'il n'a eu réellement aucune raifon de fe croire libéré,
lorfqu'il a fu au contraire que les circonfia~ces' obligeoient
fon créancier de différer l'exaélion de fa créance. La préfomption de !a loi, fage & bien entendue dans l'ordre généra!, ferait dans ce dernier cas, un trait d'injufiice & d'abfurdiré. On ne peut préfumer qu'un homme fe croie libéré,
quand il fait que fon créancier ne differe d'exiger fa créance
que pour attendre le moyen de le faire avec fuccès. On, peut
moins le préfumer encore, lorfqu'il s'agit d'un préalable indiqué & requis par le débireur lui-même. Il n'y a point alors
d'incertitude pour lui; il n'a pu compter férieufement fur fa
libération; il n'a pas eu juflam caufam quœjiti dominii, comme
dit Pothier, des prejèriptions, part. 1, chap. 2., art. 1. Il ne
peut donc être admis à prétexter de l'échéance du terme
marqué par la Loi, & il n'a point acquis le droit de refufer
le paiement de fa dette.
Comment jufiifier le refus formel de payer les fommes
que le fieur Amphoux demanda à chacun des alfure!Jrs? Pourquoi le prétex~e du laps de trois mois? Il n'y a pas de
milieu: la requifition des' affureurs fur l'exploit de fignification de l'aéle de délaiffement avoit-elle l'objet réel de renvoyer le paiement des fommes affurées au temps où la prife
feroit jugée? Etoit-ce au co~raire un leurre préparé pour
arrêter l'aélivité des (ieurs' Samatan, & laiffer écouler les
trs>is mois de l'Ordonnance? II y a fraude, fi les affilreurs
o;nt vQulu tromper la vigilance des fieurs Samatan, & cette
fraud'e ne peut leu~ avoir acquis aucun droit. C'efi le ju-
�':r 20
Jou
R N Â L
gement de la loi. Ont-ils eu l'objet réel de favoir, avant de'
payer, s'il s'agilfoit d'une prife? Il eH: évident dans ce cas
qu'ils n'ont pu fe croire libérés par le défaut d'exaél:ion
dans les trois mois. Il efi évident que le délai de l'Ordonnance ne pouvait commencer à courir que du jour où le
fait de la prife feroit conHaté par le jugement de l'Amirauté de Londres. Alors feulement les fieurs Samatan auroient été dans un état de demeure; alors feulement les affureurs auroient pu croire qu'on' renonçoit à exiger d'eux
le paiement des' fommes alfurées.
Il y a inju!lice dans le fyltême de la fin de non recevoir, même-en fuppofant que l'Ordonnance de 168r oblige
les alfurés de former des demandes judiciaires. Il y a injufiice, parce que dans le vrai le délailfement & la demande du I I Septembre 1778 fuffifoiem pour remplir l'objet
de la Loi. Falloit-il une demande judiciaire? Ce ne feroit
point une raifon de conclure que les droit"5 & l'aél:ion des
fieurs Samatan avaient été prefcrits par le temps qui s'écoit
écoulé du I I Septembre 1778 au 29 Janvier 1779, jour
de leur requête à l'Amirauté? Conçoit-on l'idée d'une prefcription -qui doive avoir fon cours & s'accomplir contre
celui qui ne peut agir valablement? Contra non valentem agere,
nulla currit prœferiptio. Ce n'eH pas feulement des empêche mens de fait que parle la Loi; elle porte fur les empêche mens de droit, fur toUS les objets qui. de foi foDt des
obfiacles à la validité ou au fuccès de l'aél:ion. C'efi le texte
de la Loi 30, §. omnis, cod. de jure dotium, & le fentiment
de Leprêtre, cent. l , chap. 39.
.
La lettre qui avoit annoncé .Ia prife du Senau n'écoit point
une piece probante & jufiificative; la Loi même défendoit
aux Geurs Samatan d'attaquer & de pourfuivre les alfureurs
avant d'avoir jufiifié d'une maniere légale le fait de la prife
ou de la perre des effets alfurés. L'arc. n de l'Ordonnance
de 168 l , tit. des aJlÏLrances, dit" que les aél:es jultificarifs
" du chargement & de la perte des effets alfur s [c'rollC'
" lignifiés aux alfureurs incontinent après le délailfement,
"• &
�D U
PAL AIS
D E
PRO VEN C E.
1 2. 1
" & avant qu'ils puiffent être pourfuivis pour le paiement
" des fommes affurées." Il falloir donc, avant de pouvoir
pourfuivre les affureurs, avoir en main l'aéle vraiment juftificatif de la prife. Il était donc indifpenfahle d'attendre
que l'Amirauté de Londres eût prononcé. Dans l'ordre général, les aél:es juHificatifs d'une prife arrivent en même
temps que la nouvelle 1 & c'eH dans ce fens que les ternies
prefcrits par l'Ordonnance pour-les délaiffemens, comptent
du jour de la nouvelle, comme l'attelle Valin , tam. 2., pag.
I l l . Cet Auteur ateene encore que la rai fan & la difpofitian de l'arr. 48 ceffenr en cas de prife ou de na'ufrage
entier & ahfolu; que la' Loi ne peut pas prévoir tous les
cas; que d'ailleurs il y a des prifes injufies dont il importe
de [avoir le [arr.
Il eH donc v-rai qu'une-incertitude quelconque-ferait -exélufive de toute prefcription; c'eH même le réfultat évident
de l'art. S7. Ici il ell prouvé que les affureurs ont nié le fait
de la prife, que la Chambre du Commerce refufa d'en recevoir la déclaration; il était donc indifpenfab~e d'attendre.
La police porte que les affureurs payeront rrais mois après
les nouvelles affurées du finillre. On ne pouvoir donc les
attaquer en jullice que fur des nouvelles affurées; & bienloin de regarder de cet œil la notice conreQue dans la lettre
écrite de Londres, ils déclarerent qu'il ne pouvait s'agir
d'une prife qu'autant qu'elle aurait été jugée telle.
Il eH certain qu'on peut convenir dans les polices d'affurance d'un délai -pour le paiement des fommes affurées.
L'art. 4 du titre des ajJurances porte, que" la police d'af" jùrance contiendra le nom de celui 'lui fait ajJùrer 1 & gé" nér(Jlement routes les autres conditions dOTlt les parties vou" dront convenir. L'art. 43 veut que les aj[ureurs [oient in" terpellis de payer au temps porté par la police. L'art. 44
" déclare que.fi le temps du paiement n'efl pas réglé par la
" police, l'aj[ureur fera tenu de payer trois mois après la
" jignature du délaiJfèment. " L'Ordonnance [uppole donc
en principe vrai, indubitable, que les parties peuvent con~
Années z78:z. & Juill.
Q
,
�J::l.2.
Jou
R,N A L
venir d'un délai pour le paiement des fommes a'lfurées; elle
juO'e donc que la fixation d'un délai pour l'échéance de ces
fo~tes de dettes efr au nombre des conditions dont l'art.
4 lailfe aux parties la liberté de convenir. Les Geurs Samatan auroient dû par conféquent ne pas préfenter leur requête en adjudication, quand même ils auroient eu d'ailleurs les moyens de le faire avec fuccès; ils éroient liés
par la promelfe de n'exiger qu'après l'échéance du délai convenu. Il ferait donc impofiible d'admettre à cet égard même
le fyfrême de la prefcription, parce qu'en effet elle n'aurait pris fon cours que du jour de l'expiration du délai c'onventionnel, & n'auroit pas été acqüife avant le 29 Janvier
1779, époque de leur requête.
L'Arrêt de la Cour du 30 Juin 1719, au profit. des affureurs fur facultés du vai1feau Le Prince Charles, n'a pas
jugé & n'indique à nul égard que cette maniere de procéder
foit dans le fyftême de l'Ordonnance de 168 L Les a1fureurs
obtinrent gain de caufe par la fin de non recevoir, parce
que s'agi1fant, comme ici, d'une prife faite fur les côtes de
France, l'a1furé n'avoit pas fait dans les trois mois., à compter
de la nouvelle certaine de la prife, ni le délai1fement des
facultés, ni aucuue forte de demande pour être payé des
fommes a1furé~s. La nouvelle érojt du 8 Décembre I716;
le délai1fement n'avoit été fait que le I6 Avril. I7)7, & il
n'y avoit pas eu d'aurre demaude que celle faite par une reqUête du 8 Juin même année.
L'Ordonnance de l 68 l ne dit pas qu'il faille une' demande judiciaire pour être à coUVert de la prefcription de
trois mois. L'Ordonnance contient dans cette partie, comme
dans bien d'autres, tout ce que les Loix de la matiere
avoient de plus utile, & l'on trouve le réfultat modifié des
Réglemens déja compilés dans le Guidon de la Met, chap.
7 , art. 1, pag. 288. Par les regles écrites dans ce traité,
& par conféquent, déja fuivies en Normandie, le délai-lfe"l
ment n'efr pas de nécefiité, & dépend de la volont~ du Marchand chargeur; le chargeur peut ne pas le faire, & s'arrêter
�DU
-PALAIS
DE
PROVENCE.
Il3
à !impIe proteil:ation de l'effeauer, s'il croit pouvoir recouvrer fes marchandifes. Il eil: de fan intérêt de le faire,
s'il a lieu de penfer que la pe~.te eil: fans efpoir de recou~
vremenr. Delà l'alternative que l'Ordonnance de 168 I laiffe
pareillemenr aux affurés de notifier le Îlniil:re avec proteHation de délaifl'e-r, ou de faire en même temps le délaiffemenr & la fammatio.n de -payer les fommes affurées.
Le Guidon d~ la Mer -fembloit accorder une année, &
pour les délaiffemens, & pour les autres objets d'exécuIion
des contrats d'ajfurance, tels que le paiement des avaries,
reffortirnens;. répétition de ce qui eil: trop affuré., contributions, &c. Mais cette difp0Îltion parut infuflifante &
dangereufe en l'état de notre commerce. L'Ordonnance de
1681 prefcrivit pour chacun de ces objets des délais proportionnés à la diil:ance des lieux, en continuant de diil:inguer, comme le Guidon, les d~laiffemens qui peuvent être
faits dans le cas de perre enriere, & les fimples demandes
qui fe fdnt à raifon des avaries & des contributions quelconques. C'eil: donc une maxime de notre commerce national, que le délaiffement doit être fait dans le tems prefcrit,
à compter de la nouvelle du finiil:re, & qu'à défaut l'affuré
n'eil: plus recevable à demander les paiement des fommes affurées; mais fi le délaiffement ell: fait dans le temps prefcrit par
l'art. 48 de l'Ordonnance, tit. des affùrances, quels font donc
fes effets envers chacune des parties? L'art. 60 du même titre
pt> rte , qu'après le délai.f!èment fignifié, les effets affùrés appartiendront l'alfureur, qui ne pourra, folls prétexte du retour
du vaiflèau, Je difPenJer de payer les fommes affùrées. Il n'étoit
pas poffible de rendre avec plus d'énergie la nature de l'atte
de délaiffemenc & [es effets. C'eft un tranfport abfolu, irrévocable, qui, en privant l'affuré de fan droit de propriété,
en inveftit auffitôt l'a ffureur ,de maniere que celui-ci refte
maltre des chofes affurées, & doit en acquitter le prix. Il
fe fait donc alors une novation bien formelle entre l'affureur & l'affuré. Il ne s'agit plus de l'exécution de la police
d'affurance; ce premier aae a été pleinement exécuté par
a
- . Q2
�12 4
Jou R )l A L
le tàit méme du délaiffement; c'èll le contrat, c'ell la ceC~
fion opérée par le délaiffement que les parries ont alors à
exécuter. L'affureur devenu propriétaire des choCes affurées
doit recevoir les aél:es juftificatifs , afin qu'il puiffe agir à
fan gré pour le recouvrem~nt, & l'affuré exproprié de fes
marchandiCes refte créancier effeél:if en force d'un tranfport qui ne peut que lui donner contre l'affureur une aél:ion
ordinaire, & telle qu'il l'aurait s'il lui avoit vendu les marchandiCes chargées.
y a - t :: il un terme réglé par la police pour le paie.
ment des fommes affurées? Il eft certain que l'affuré
ne peut demander le paiement des facultés délaiffées
avant l'expiration de cette Corte de repit. Voilà pourquoi,
en faiCant le délaiffement, il doit Ceulement Commer l'aCfureur de payer dans le temps porté par' la police. N'y
a-t-il pas de terme réglé par la police? Le Guidon accordait un délai de deux mois aux affureurs, & l'Ordonnance a porté ce repit jufqu'à trois mois. C'ell donc feulement alors que l'affuré peut agir contre les affureurs pour
être payé des chofes affurées. Il n'a, avant ces différens
termes, que le droit de 'faire' Commation aux affureurs de
payer dans le te ms , il n'eft donc & ne peut être en demeure' pour n'avoir pas agi' dans les trois mois; & c'ell
lIne erreur de croire que l'Ordonnance exige cumulativement que le délaiffement & la demande judiciaire des fommes affurées' foient faits dans les délais porrés par l'art. 4 8•
L'eCprit & 'la lettre de la loi réclament coorre cette interprétation abufive.
_
Il n'dl point d'Auteur qui ait jamais dit que l'affuré
doive former une demande judiciaire dans un délai de trois
mois, d'un an ou de quarre, lors même qu'il a fait le dé.
laiffement à l'affureur. Une demande judiciaire devait être
formée, fous un terme déterminé, dans les villes où l'on
n'admetroit 'pas la voie du délaiffement; au lieu qu'en
Fra.n~e I~ ~o}e du. délaiffemeor a roujours été connue, &
a ete preferee meme par l'Ordonnance de 1681, comine
,
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l'ALAIS
DB
PROVENCE.
11S
plus conforme aux regles de la mariere & plus urile aux
inrérêrs du commerce. C'eO: le délaiffement que norre loi
a voulu êrre fair dans des délais dérerminés, parce que
c'eO: par ce moyen que fe fait & fe confomme l'exécurion
du contrat d'affurance, bien mieux encore que par une demande judiciaire en paiement des fommes affurées.
Valin fur l'Ordonnance de 1681, liv. 3, rir. 6, arr. 48 ;
tom. 2, pag. Il l , en parlant des délais prefcrirs par cet
article, en' ce qni concerne les délaiffemens, obferve que
l'Ordonnance a marqué des rermes plus ou moins longs,
, afin que pendant ce remps l'affuré pûr prendre les éclairciffemcns: convenables. En parlant des demandes en exécution de la police, il obferve que l'affuré doit les faire
dans les délais prefcrirs par la loi, à raifon du dommage
-arrivé au navire ou aux marchandifes, avec réferve de faire
le délaiffement dans la fuite, !i le cas y échoit. Au moyen
de ce, l'affuré qui a fait la notification du !ihillre avec
{impIe prorellation de délaiffe~ , n'a point de fin de' non recevoir à craindre; dans ce cas même l'affuré pêuc fe difpen fer d'une demande en jultice, en engageànt les affureurs
à reconnoître au pied de la police qu'ils tiennent la nouvelle
de la' perte pour 'dénon,cée, fauf à l'affùré de faire fon dé;]lIiffement quand il le jugera à propos. Voila le vrai fêl1s
de l'Ord'onnanc~, voilà le réfulrat de la loi. S'agit-il d'une
perte enriere & capablê ce donner lieu' au délaiffement',
l'affuré doit le faire dans le temps prefcrit. S'agir-il d'une
!impie avarie, d'une contribution à des frais de jet, de
fauvetage, de nolis, &c. & d'auE-res événemens qui n'aurorifent point à délaiffer les facultés affurées, mais feulement
à obliger les affureurs à contribuer à Ùs forres de perres,
il faut alors que l'affuré forme fa demande en jullice dans
les différens délais porcés par la loi.
n ne faut donc pas lire dans l'Ordonnance que l'affureur
fOlt tenu de faire tout ~{ la fois fon délaiffement & une
demande judiciaire des fommes alfurées dans le terme de
,trois mois; il faut voir cette loi telle qu'elle dt. Les dé~
V
,
�116
Jou RNA L
laiffemens doivent étre faits dans les trois mois, avec [am;
mation de payer pour caratiérifer la ceffion & le tranfport
qui en réfulte : voilà pour les cas de p'ene entiere. Les
demandes en contribution doivent être faites' dans les trois
mois, pour contqindre chacun des nffureurs à fournir fon
contingenr ,: v'oilà pour les cas d'avarie, de jet, &c. L'Ordonnance les diftingue parfaitement. L'art. 44 ne dit pas
que l'affureur payera trois mois après la demande judiciaire
de l'affuré, ou trois mois après le jugement .qui, intervien,
dra; il porte que l'affureur fera tenu de payer l'affurance
Erois mois après la fignification du délaiffement. L'arr. 49
ne parle encore que du délaiffemenr) & c'eft à cet ati c
feul, qu'il applique la fin de non recevoir panée par l'arr.
48. Les fieurs Samatan produifoient divers certificats des
places mâritimes du Royaume pour le [outien de la dillinctian que l'on avoit faite.
Les affurêurs, pour le foutien de leur fin de non recevoir, répondoient qu'il' s'érait écoulé 'quatre mois & dixhuit jours depuis le moment que les fieurs Samat,an avaient
eu connoiffance du finillre; le navire avoit été pris fur les
côtes' de France, &. l'Ordonnance ne leur accordoit que
trois mois pour fe pourvoir en jullice. Suivant l'arr. 48,
liv. 3 , tit. 6 de l'OrdonnanGe',de 168 l , " les délaiffeme!Js
" & toutès demandes en, çxécu~ion' de la, police feront
" faits aux a1fureurs 'dans fix fema-ines après la nouvelle des
" 'pertes arrivées aux côtes dé I~' rr;ême,,;lr~O~!nce ~ù l'affu" rance aura été faire; & pour celles qui arriveront en une
" autre Province ,~u) RoyautIje., .dans trois mois; po,:r
" celles 'd'Efpagne, Italie, POr1;ugal ~. Batbarie, Mo(covle
" ou Norvege, dans uô ,àn ;i.&'your 'les côtes,de l'Apléri" que; Brefil, Guinée' & aljtres pays plus élojgnés, dans
" deux ans; ce temps pa1fé, les a1furés ne [ont plus re" cevables da!1s leur demande. "
,'.
Il (emble que le Légi!lat~ur ait vouJu~ pr~venjr raJls ks
domes', en défignant les ~ilférens 'aties que P9;t1yoit faire le
eropriétaire dLj navire, & qu'il renferJ11e tout,. dan~ le ,-cer-:-
/
�DU
PAtAIS
DI! "PROVE'NCB;
12.;-
cie fatal au delà duquel l'affuré eH abfolument déchu de fan
llétion. En 'effet, il ne dit pas feulement que l'alfuré fera
tenu de faire dans le temps déiigné j'abandon du> navire &
des facultés. Cet aéte qui tend feurement à inveflir les affu'_, reurs de la propriété de la chofe atTurée, & qui les aurorife à retirer per[onnellemenc tous les, dédommagemens
d'une pèrte qui efl à leur charge, ne [ufl1t'pas pour 'procurer au propriétaire la rentrée de [es fonds; il faut encore
qu'il s'adreffe à la juflice pour obtenir contre Ces alfureurs
un titre exécutoire à l'effet de les contraindre au (laiem'ent
des Commes affilrées. Ces différens a&es qui' ont un objet
indépendant & relatif à l'intérêt.•réciprbque' des parties,·
doivent êtr,e faits dans le délai préfcrit par 1'0rdollnàace;
c'eH: dans trois mois que le finif1:re doit être notifié aux
alfureurs, & dans le mêmê délai la demande en paiement
~es Commes affuré,es doit être formee.,
'
, En général,< les aétions' perfonnelles ne Ce prefGrivent que
par trente ans; cependant il en eH: dont le Légiflateur a voulu
refireindre la durée, en les limitant à un tems certain &
déiigné. C'eH: ainiique l'aél:ion refcifoire, celle en paiement
des [alaires, en répétition du prix des marchandifes fournies,
ont été bornées à un certain e[pace de tems. Des raifons·
d'intérêt & d',ordre public ont exigé que l~on fixât )un! terme
au delà ququel il ne fût pas poffible de s'en arroger l'exer_
cice. Dans le cas pré[ent, le Souverain a tracé aux Négocia,ns,
le délai dans lequel ils devoient intenter leur deman'de en
paiement des Commes affurées. Mais pour ,que (a ~i[poiition
ne 'pût être facilement éludée, il a voulu que l'on''ne ,pû't'
échapper à la. déché'anc~ que par une demande judiciaire',
indépendante de l'aél:e de délailfement, r qui n'ef1: ql!l'une fintpie [ommation dont l'effet ne [aurait être de contraindre 1
les alfureurs au paiement des Commes que l'on eH en droit
de répéter contr'eux. Cette double' difpoiition, qui tend à
prévénir les .abus des proteH:ations.firnples) avùit été: préJue'
avant l'Ordonnance d'e 16,g 1., par l'a'rt. t3 'de l'Ordonnanc'e. 1
d'Amfierdam ;' du mois de Janvier' i ') 98,.
'
• Tous les Auteurs difent qu'il faut néceffairement forme~
�29
Jou RNA L '
fd demande d'une maniere légale, lors méme que l'on a faie.
le délaiffement à l'affureur; c'eH: ainli que l'obfervent Cleruc,
. des contrats maritimes, pag. .2.41 ; Kuricke dans fon traité
de afficurat. n. 1
5rypman, chap. 7, n. 470; Toubeau,
inJlit. con/ÙZ." liv. 2., chap. 6. Le fed cas qui pouvoit donner
lieu à des difficultés, a même été prévu par l'O~donnance.
L'art. 49 du même tÎt-r.e veut, qu'en cas d'arrêr de Prince,
le délaif[ement ne puiffe. être fait qu'après fix mois, fi 'les
effets font .arrêlés en Europe ou Barbarie, ou après un an,
fi c'ell: enpays plus éloigné, le. tout à compter du jour de la
fignification de l'Arrêt aux Affureurs, & que la fin de nonrecevoir portée par l'article précédent ne courra contre les
affurés que du jour qu'ils auront pu agir. D'après cel article,
il n'ell: plus poffible de douter de la rigueur de la difpofition
dc l'art. 48, lorfque l'on voit le foin que le Légiilateur prend
de déligner le cas pa.niculier qui pouvoir en 'arrêter l'exécution li(rérafe, En effet, l'arr. 48 ayant ordonné que les
délaiffemens & demandes ·en exécution de la police feraient
faits dans quatre mois pour les finifires arrivés fur les côtes
d'Angleterre, ·il aurait été injufie que l'arr. 49 ordonnant
en même temps que dans le cas d'arrêt de Prince, les délaiffemens ne feroient faits qu'après fix mois, l'affuré eùt
é,té déetaré non-recevahle pour ne s'être point conformé aux
difpofitions de l'article .précédenr.
Quelque précife que fùt l'Ordonnance, l'on n'avait pas
été autrefois fort fcrupuleux à l'obferver en cette Province.'
~als. en 17 r 3 la quefiion s'étant préfentée, la regle fit taire
l'ufage abufif qui s'érait gliffé fut celte rnatiere. Blaife Marin.
a;.'~it fait ùne affurance fur le vaiffeau La Sainte-Marguerite; 1
ce vaiffeau fur .pris; la déclaràtion de la perre fur faite à la
Chambre du Commerce le J4 Janvier 1706; en conféquence
tous les affureurs payerent les fommes affurées, à l'exception dt; François 5ubain, qui fut affigné pardevant kT ribunal )
de l'Amirauté dt; Mar(eille le 3 Février 17r J. Seritence'l
qui le ,condamne à -ppy,er. ,Arrêr.re'ndu dans le mois de Mai;
,1713, au rapport de' )\1r. le Blanc, qui réforme la Sentënee,
&.
'1
s;
�DU
PALAIS,
DI!
12.9
PltOVENCI!.
& déclare l'alfuré non-recevable. Deuxieme Arrêt du
10
Juin même année, au rapport de Mr. de Valabre, en faveur du
fleur Bonnet contre les fleurs Hazard. Troilieme Arrêt du 17
du même mois, au rapport de Mr. Duchafaut. Quatrieme Arrêt
du ) Mai 1714" contre les hoirs de la Roque. Cinquieme
Arrêt du 30 Juin même année, en faveur de Goujon de
Nantes. Sixieme Arrêt du mois de Juin 172.4, au rapport
de Mr. de Gallice, en faveur des alfureurs fur la tartane
'i' Annonciation, Capitaine Rouflin du Martigues, contre Jofèph
Vefpin & Compagnie.
Le paél:e contenu dans la police efl: ahfolument inurile,
parce qu'on n'a pu par une convention particuliere dérogeraux difpolitions d'une Loi publique. Il n'y a point-de principe plus certain que celui qui veut que les citoyens ne
puilfent fe foufl:raire par des accords particuliers aux difpofltions d'une Loi d'érat; cerre maxime efl: rerracée par les
Loix 7, §. 7, if. de paais, & 38 du même titre; par la
Loi 6, cod. de paélis, & par la Loi'), cod. de Legibus.
C'efl: en vain que l'on voudroit s'étayer de la liberté que
doivent avoir les citoyens dans les contrats qu'ils palfent
entt'eux, pour en induire que des particuliers peuvem fe
difpenfer mutuellement de fuivre les Loix qui n'om été établies que pour leur procurer llO avantage auquel ils peuvent
renoncer. Dès l'infiam qu'une Loi eH promulguée, elle feule
deviem la raifon univerfel1e qui doit prélider à tous les accords privés; c'efl: un aél:e public auquel les conventions
particulieres font nécelfairement fuhordonnées; & lorfque
par une dérogation formelle à la Loi, 'on ne feroit qu'intervertir ces regles précieufes d'uniformité qui doivem regner
dans lin état bien policé, ce feroit toujours un très-grand
mal que de fubfiiruer au vœu du Souverain en qui rélide
cet efprii de modération qui efl: la bafe elfentielle d'une
bonne légiflarion, la volonté des particuliers, fouvent agités
par une foule de paflions & de préjJJgés qui déterminent
toujours leurs accords. Ce ferait ahufer des termes, que
de fuppofer que l'on ne contrevient pas à une Loi, toutes
Armées l782 & fuiv.
R
�/
130
J 0 V R "N A L
les fois que l'on fait quelque chafe qu'elle n'a pas expref.
fément défendu. Lex, dit Godefroy, multa jieri non 'Vult,
fJuœ exprèJlim rz~n vetuit. Fraus /i~ Legi, u.bi. id ji~ quod Le~
non vetuit, nO/Ult tameTl. lta F erneres, dlc7wnnazre de droit
& de pratique, tom. l , pag. 449.
Toute Loi qui a pour but de pOl)rvoir à la police générale de l'Etat fur un objet -important, celle qui contient
une prohibition formelle, ou. qui dl: conrrue en t.~rmes irritans & négatifs, n'ell: pas fufceptihle de dérogation. Il en
ell: autrement de celles qui tendent feulement 11 régler les
droits des particuliers, qui peuvent alors y renoncer. Il faut
bien' dill:inguer ce que la Loi ac,corde ou permet, d'avec ce
qu'elle défend ou ordonne en termes négatifs & irritans ;
ce qui n'efl: qu'une renonciation 11 'l'avantage que l'on pourroit en retirer, ou ce qui ble1fe fes difpofitions dans l'objet
qu'elle fe propofe. Dans le premier cas, on ne profite pas
du bénéfice de la Loi par fon inexécution; on peut même
dire qu'on l'exécute en y renonrrant. Dans le fecond cas
au contraire, on la viole dèsl'infl:ant même qu'on s'engage
11 ne pas l'exécuter. On ne renonce point 11 fon droit, mais
on ne remplit pas fon obligation.
Or, dans le cas préfent, il efl: impoffible de fe diffimuler
que l'Ordonnance n'ait prononcé la fin de non-reCievoir de
maniere 11 rendre inutiles toures les fiipulations contraires.
Les délaiJJemens {:;. toutes demandes en exécution de la police
feront faits dans trois mois. Voilà une difpoIition impérative.
Le Souverain ordonne 11 fes fûjets de fe fou mettre aux nouvelles regles qu'il établit; ainli il n'ell: pas douteux que lors
même qu'il faudroit fuppofer que llis parties eu1fent voulu
déroger aux difpofitions de l'Ordonnance par la daufe fiipulée dans la police, elles ne 'l'auroient pas pu, parce que
la force de la Loi conlifie principalement dans la pui1fance
qu'elle a de commander & de défendre. La police contient
fimplemeÎlt la prome1fe de payer trois mois après la nouvelle affilrée du Iinifl:re. Une daufe pareille prouve certainement que les affureurs fe fom fournis 11 payer dans trois
�v B Nell.
13 1
mois: mais il {eroit abfurde d>en conclùre qde Pa1furé ~it
été difpenfé par là de faire le délai1femenr, & de former
{a demande dans les delais prefcrits par l'Ordonnance. On
auroit dît ftipuler dans la police, qu'au moyen des arran- .
.gemens convenus entre les a1fureurs & les fieurs Ha?zer
& Compagnie, la fin de non-recevoir ne courroit pO~nt
contre les a1furés; une dérogation tacite ne feroit pas propofable; il en plus naturel de penfer qu'en promettant de
payer dans trois mois, les a1fureurs n'ont pas entendu délier
les a1furés de leurs obligations, parce qu'il n'exifte certainement aucune analogie entre cette promeffe, & la dérogation que Pan veut !iJppofer, en avoir été la conféquence.
Dans le cas même où les a1fureurs n'auroient pas exigé un
délai de trois illois pour le paiement de la perte, ce delai
leur auroit été accordé par la Loi. L'arr. 44 du titre des
affirances porte, que fi le tems du paiement n'e1l: point réglé
par la police, l'a1fureur fera tenu de payer l'a1furance trois
mois après la fignification du délai1femenr. La difpofition
de cet article. dérruit donc entiérement le fyftême des fieurs
Samaran.
Il en cependant vrai que leur fyfiême n'efi pas nouveau.
On avoit déja établi cerre dininétion du rerme légal & du
terme conventionnel; mais elle a été profcrite par un 4rrêt
de la Cour dans ces circonfiances. Par trois polices du 4
Mai 1756, le fieur Gèrmond, Négociant de Marfeille, fit
affurer pour co'mpte de divers particuliers dont il étoit commiffionnaire, de Marfeille à Saint-Valery, la. fomme de
. 9633 liv. fûr facultés chargées fur le vai1feau Le Prince
Clzarlès,' Capitaine Cfemellt Biens, imperial. Ce vai1feau fut
pris dans la Manche le 3 Novembre fuivant. Le 8 Décembre, la nouvelle de cette' prife parvint à Saint-Valery,
Abbeville, Saint-Quentin & Amiens, domicile des affilrés,
qui err donnerent connoi1fance au fieur Germond. Le 5. Févr.ier I7.-57:, les affurés firent leur déclaration à la Chambre
dit Commerce; l'abandon ne fut fignifié aux a1fureurs que
le. 16 Avril. Enfin la demande en condàmnation des fommes
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affurées fut intentée le 8 Juin fuivant, & par conféquent fi" .
mois après la nouvelle de la prife, en comprant du 8 Décembre, & quatre mois & trois jours en ne comptant que
du ~ Février, jour de la déclaration faite à la Chambre du
Commerce. Les affureurs fOUlinrent pardeyant le Lieucenant,
que les affurés étoient non-recevables, parce que ·Ieur demande n'avoit été faite qu'après les quatre mois qui leul'
étoient donnés par. l'Ordonnance. Sentence du 31' Janvier
17~8, qui déclare -les affurés non-recevables. Les affu(és
en caufe .d'appel s'appuyoiént fur le même fyflême 'des lieurs
Samatan, que fuivant le paél:e exprès des polices, la perte·
n'erant payable que trois mois après la. déclaration à la
Chambre du Commerce, les quatre mois de l'Ordonnanc.e
n'avoient pu courir qu'après ces trois mois. Mais par Arrêt
.du 30 Juin 1 7~ 9, rendu au rapport de Mr: le ConfeiHer
de Gras, la Sentence fut confirmée avec dépens.
Arrêt du 20 Juillet 1782, au rapport de Mr. le Confeiller de Perier, quî confirme la Sentence avec dépens.
Ecrivant Mes. EHrivier & Guieu.
1
ARR' Ê T
X VIII.
En cas de manque ahfolu de pain, le Corps des BOElangers
peut être pourfùivi & condamné à i' amende, fau! le remhourjëment cOllere les memhres.
N l'aunée 1740, la Communauté de la ville .de Graffe
fit un Réglement de Police, portant injonél:ion à chaque
Boulanger d'avoir fans Gelfe chez eux, dupain de deux qualités,
à peine de 10 iiI'. d'amende pour chaque contravention.
En Avril & en Mai 1778, les Boulangers fe plaignireM
de ce que les Meûniers ne leur faifoient pas l'e?,péditjon
requife; on donna à touS c.eux qui en demanderent des billets, portant ordre. aux MeÎIniers de détriter le b1.ed. de.
E
\
�nu' PALi.t~S DB P-aovBNcB.
131
chaque Boulanger; fans retardement, '& ,coute affaire ,ceffant. L~ 26 Avril, jour de Dimanche, le pain' manqua
ahfolument, & univerfellement dans routes les boutiques;
elles furent 'ro'mes 'vifité~s fans exception filr la clameur &
les -plaintes du public; le 7 Mai fuivant, le pain manqua
également; les Intendans de Policèufirent de nouveau leur
vilite, drefferent leur procès-verbal, & en firent leur rapport.
au ,Bureau. Les Boulangers furent m'lndés pour étre entendus
hlr les deux manquemens, & furent condamnéli eofuite Il
1000 liv. d'amende pour raifon de la contravention du 26
{\vril. Pour celle du 7 Mai, .les Syndic,s furent condamnés
Il l'amende de 20Q liv., en leur accordant néan,moins le r~m
bou~femelit comre les Boulangers par e-qx dénommés; il fut
ordonné que l'Ordonnance de Police feraie exécutée nonobftant appel ou oppofition. Les amendes furent payées,
& les Boulangers appellerent de l'Ordonnance, & deman(Ierent incidemment le rembourfement des amendes- par
;",
,',
eux payées:
.. J
o
, On difoit pour les, Syndics des Bouiangers'Ll • qU'QJI ne
pouvoit condamner le Corps pour le délit des particuliers;
'2. 0. que les' peines prono.ncées c;on~re. les Boulangérs iroient
exceffives & difproportionnées, au délit.
1 _
',;
cl On repondoit 'que ItQus. -fes'Bl'illangers ayadt !lélinqué·éga}elilent;& llniformémeqr., il:1falloit< auffi les pu.nir tous avec
égalilé; ,ils ont, eux-mémes (enti- la jul1:ice de cette condamnation dirigée contre les 'Syndics, c'eft-à-dire, cQvtre
tOUS les individus que les Syndics repréfentent, puifqu'ils
ont emprunté en commun pour paYllf les fommes PQrtées par
la.S,enrenlle; les ,procès;-verbaux des 26 Avril & 7 ·Mai 1778'
conftarent que rous les Boulangers en génér;,!l étaient en
contravention: comment peut-on fe plaindre de ce que b
condal11nation a été ditigée conrre le Corps?
Il eft .cetlj.in~ell droit qu'un. Co,rps peut, étre puni pour,
le délit de toilS, foit que à délit foit délibéré, ou qu'il ne
Ùl'(Q.ie p.as; ;cat, le,torps- n'~(anl:' 'rien ,.de plus que le re,pré!f!n~tiCde
,tQ~s' l.es)n"Uviç!nt .9Jli .) ICOlllPpfept, il eil jm~
,
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UR N ~ Il '
• ,..
ea
poiF.ble de- ne pas fe dire que ,le délit de tous
néceCfairement le délit du corps. Il dl m~rne plus caraél:ériHique
qu'une délibération j les délib~rans re~réfentent le corps,
arrendu la regle, ref,rtur ad ulllverfos lJuod puMicè fit per majorem partem. Alors, quand une dé,libérarion exiae, le corps
puni, parce que le délit des délibérans ea, par une fic.
tion de droit, le délit de tous. La vérité n'aura-t-elle pas
autant de force que la fiél:ion qui n'ea que fon imitation,
& ne faudra-t-il pas punir le 'corps, quand la contravention
fera réellement & de fait l'ouvrage de tous fes membres?
ÛQ a befoin d'une délibération pour rendre le délit propre
& èommun à toùs'; mais il n'a jamais, été dit qu'une délibération fùt néce1faire quand le délit dl: univerfel, & qu'il
eH fans difiinél:ion l'ouvrage de tous les membres' qui compofent l'univerfalité. Lofceus, dans fon traité de jurif. univer[.
part. 4, cap. 1, n. 14, en pa~lant des Communautés, exige
line délibération préalable, fans quoi la Communauté ne peut
pas être punie, mais feulement les contrevenans perfonnelle.
l'nent. Cela efl vrai pour ce qui éoncernè les Communautés
qui font repréfentées par un Confeil particulier d'adminiCtration. Pôur rendre le délit propre à tOUS, il fauo une dé. libération précédente, n'étant pas jllflre que ceux qui n'ont
aucune pârt 'à la contravention foient punis comme auteurs
d'icelle; & ils le fe-roient irijufiemen't, fi dans ce cas la peiné
tomboir fur tout le corps: Julius Clarus dit la même choCe
en fa pratique criminelle, lib. S, ~. fin., n. ,'8. Mais Gela
ne s'entend que des Corps & 'Colleges qui font repréfentés
p'-a~ de,s Admin~{hateurs." & au cas où le délil1 n?efl pas' uni.
verfel. Grorius dans fon· rra-Î!é de 'jur. he", Gl pac., lib. (1,;
cap. 2.1, examine le cas~où le délü d'une dettaine pepfonne
communicable à d'autres, qll<int à la néc~ffité de le ré.
parer pécuniairement. Mais il obferve que quand on a eu>
part au crime,~ on fi'efl' pas tané puni pour le èrime d'autrui
J
.
.;
que po,ur l'e fien propre.
Or, rous les BOulangers de Gr-atre étoien éga>lemenf!-Go~
pables dt\s conrraventions ,-ommifes· le- ~6 .&vril & Jè, 7,\
ea
ea
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PALAU'
nI!
PaOVENCIl.
't3~
Mai, ils ont dO tous' étre condamnés. Si ce corps avait des
revenus, des biens & des domaines, il pourrait naltre 'une
queGion pour favoir fi ~'amand~ pourrait être priCe fur les
fonds, ou fi les memores aaue)s ne devraient pas Ce cottiCer pour la Cupporcer. Mais toute queHion diCparo1t au cas
préCent, dès qu'il eG certain que les Boulangers ne poifedent rien en commun, & que l'amende doit être payée. proportionnellement par chacua d'eux.
On ajoutait que fi la faute & le manquement d'un feul
font amandables, s'il eG eifentiel pour l'ordre & le bien public qu'il y -ait des peines établies dans le cas de manquement d'un feul Boulanger, à combien plus forte raiCon \
doit-il en être de même, quand, comme au cas préCent,
par l'effet d'·un concert qui ne peut pas être indélibéré,
tous les Boulangers manquent univerCellement de toute ef- pece de pain, & que toutes les fources de la fubfiGance
publique fe trouvent ainfi taries. L'Ordonnance n'eG donc
point injuGe•. Il fallait u~e peine quelconque pour réprimer
& .contenir les Boulangers.
D'ailleurs la peine n'ell: pas exce/Iive. La premiere
amende eH de 1000 liv. Elle porte Cur un délit univerCel.
La peine doit être difiribuée également Cur chaque tête;
les Boulangers Cont au nombre de vingt-cinq; c'eG 40 liv•.
-d'amende pour chaque Boulanger: cette amende comparée au délit n'efi pas exce/Iive. Le manque univerCel de
pain efi un des délits les plus graves dent les Boulangers
puiifent Ce rendre coupables ; c'e~ une de ces contraventions
dont les Cuites peuvent é~re infiniment funefres.
.
Le Réglement de 1740 'prononce l'amende de 10 liv.
concre les contrave'ncions iColées & particulieres des individ'us qui Cont trouvés manquant du pain de l'une ou l'autre
des deux eCpeces qil'ils font obligés de tenir. C'eG une
faute que le Réglement a voulu punir par la légere amende
de la liv., d'autant que les Planquemens même privés ou
iColés font toujours fujets à des conféquences dans cette
partie eifentiellement li~e à la fuhfifiance ,. & par conCéquent
�.
"1,,6
J6UR'NA-T5"à~Ia néceffité du public. Mais une contravention génératë
qui ne peut qu'avoir été frauduleufement & criminellement
méditée dans l'intérieur du Corps eX par tous {es membres,
fera-t-elle affimilée, qU,ant à la peine, à un délit ifolé, ou
même, fi l'on veut, à l'imprudence d'un Boulanger qui fera
trouvé {ans pain ou même avec du pain d'une feule qualité?
Le. Réglement de 1740 frappe {ur ce dernier cas; mais les
Boulangers qui {e {oucient très-peu d'affamer une ville entiere, ne {eroient pas alfez punis fiar, l'amende de 10 liv.
chacun. Qui ne voit au co~traire qu'ils ne le {ont ,pas même
alfez pa,r celle de 40 liv. à laquelle l'Ordonnance du 7 Md
les condamne? Le Réglement de 1740 n'a pas décidé que
l'amende ne pourroit jamais être augmentée, & qu'elle {eroit
, fixée uniformément à la modique Comme de 10 liv. -Les
Officiers de Police n'ont pas voulu {e lier les mains, à l'effet
de ne pouvoir point prononcer une plus forte amende; on
trouve des Ordonnances de Police des années 1748 & 1714
qui l'!'nt po~tée à 24 liv. & à 60 liv.
,
Tout Boulanger qui n'a pas du pain pour le dî!lribuer &
le vendre à tout venant, efi en faure & manque à fon devoir, aux regl,es effentielles de {on, état. Suivant l'Arrêt rapporté par Papon, liv. 6, tit. T, n. 7, cerre obligation efi
,ancie,nne; elle dérive des premiers Réglemens faits fur cette
partie importa.ore de la police. On ·trouve dans le diél:ion,.
naire de la Police, va. Boulangers,qui dijèontinuent de vendre,
que quand un Boulanger s'efi établi dans une ville, & qu'il
a ouvert boutique avec la J permiffion des Officiers de
Police qui onLvifité {es _poids ,lil:eH obligé envers le public
de le {ervir, en' fai{ant & ,vendant du J pain, (ans pou'{oir
celfer de {on autorité & (ans en ,avoir obtenu permiffioQ.
des Officiers. On y cite deux Sentences du Châtelet de 1734& 173), rendues contre des BQulangers qui les condamnent à 3000 liv. d'amende, pour avoir ceffé de vendre à
leur place les jours de marché. Comment peut-on trouver
exceŒve l'amende de 1900 liv.. prononcé contre tes aoulan",
gers"de Gralfe, dans le cas, d'un ,manquement univer(el &
combiné?
.
, PaJ:
�•
DU
PALAIS
DI!. PROVENCE.
137
Par Arrêt du 20 Juin 1782, au rapport de Mr. le Confeiller de Gras, l'Ordonnance de Police fut confirmée, avec
dépen~. Ecrivant Me. Gaffier & ........
ARRÊT
XIX.
L'aïeul, fur~tout de l'étatplébée, ayantlpayé les derniernnois
de gro.JlëjJè & frais de couche, n'efl pas tenu de fournir
des alimens a[on pezit fils naturel, tant que la procédure
en fèduBion n'efl pas jugée, mais feulement de le faire conduire fes frais l'Hôpital.
a
a
E 22 Oél:obre 178 1, Magdeleine Pafquiet, de la ville
de Salon, fit fon expollti.on de' grolfeffe contre le fils
de Claude Cornille; elle fit iQformer fur la fu1Jornation,
& obtint le 22 Novembre un décret de ·prife de corps.
Arrivée aux derniers mois de groffellè, elle demanda, par
une requête préfentée au Juge de Salon, à'être mife en
dépôt chez une Sage-femme; elle fut conlignée entle les
mains de la nommée Reyne, Accoucheufe. Le I I Janvier
fuivanr, requête de la part de celle-ci pour faire condamner
Claude Cornille à une provifion de 100 ·Iiv. pOllr futvenir
à la nourriture, logement & frais de couche de Magdeleine
Pafquier. Sentence qui adjuge la provilion de 90 liv., qui
furent payées pàr cet aïeul. Le 12 Février Magdeleine Pafquiet ayant accouché d'une fille, lui tint un aél:e, par lequel
elle l'interpella de l.ui fournir par tout le jour les agobilles
de l'enfant, fans préjudice des alimens qu'elle fe pr(}pofoit
de demander. Celui-ci répondit au bas de l'exploit interpellatif, qu'ep payant les 90 liv. pour les derniers mois de
groffeffe & frais de couche, il avoit rempli toures les obligations que lui impofoit fa qualité rde pere du raviffeur-; il
offrit en conféquence de fe charger de l'enfant pour le placer
lui-même à fon choix en nourrice ou à l'Hôpital. Magdeleine
Années z78;z. & fuiv.
S
L
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IJS
1- 0
V RNA L
•
Pafquiel' fe pourvut au Juge PQur le faIre condamner à elC~
pédier les aga billes de l'enfant & à telle provifion que le
Juge voudrait fixer. Il intetv!nt le 1,2 Avril Sentence exécuroire nonob.flant appel, qUi fit drol[ à ces fins, & fixa la
provifion à 9 liv. par mois jufqu'au jugement du fonds. Appel
pardevant le Lieutenant d'Arles, & requête en rour en éiat
donr les fins furent accordées. Magdeleine Pafquier demanda
pardevallt la Cour le foulevement du tout en érat, évoqua
en même tèmps l'appel, & les parties furent renvoyées en
jugem_enc, rant fur les fins provifoires, que fur les fins principales.
' .
On djfoit pour elle, qu'une foule d'Arrêts ont fournis indiflinél:ement le pere & l'aïeul à pourvoir àla fubfiflance
du bâtard, -& qu'à défaut de biens de l'un, ceux de l'aucre
doivent fubfidiairement en répondre. Si cerre obligation
facrée ne liait' pas le pere du raviifeur tout comme le ra.
viifeur lui-même, il artiveroit que le bârard d'un fils de
famille qui ferait fans -biens, périrait faure de fecours. La
[ociété & la loi ont érabli des diflinÇlions entre l'exiflence
civile du bâtard, & celle du citoyen légitime; mais quand
il s'agit de pourvoir à fan alimentation, toute diflinél:ion.
ceife, & 1J confervation de l'un n'efl pas moins précieufe
& inréreifante que la confervarion de l'aurre.
Boniface rapporte plufieurs Arrêts qui ont confirmé cetre
maxime. Il en cite deux entr'autres à la pag. 107 & 108
du tom. 2, ~ont le premier condamna même le pere adulterin & l'aïeul folidairement à fournir des alimens au parr,
& le deuxieme foumit l'aïeule paternelle 11. donner une proviÎ10n au bâtard de fan fils. Telles font la doél:rine de
Faber, def. 3 en fan cod. ne filius pro patre, la décifion
de Bœrius & celle de Brodeaufur Louet, in litt. D. n. 1.
On diflingue les alimens définitifs qui font ceux qu'on
accorde au fils naturel jufqu'à ce qu'il puiife gagner fa vie,
des alimens provifoires. Les premiers ne peuvent être demandés, fait contre le pere, fait cancre l'aïeul, qu'autant
que la paternité ef\: jugée; c'ef!: ce qui fut décidé par l'Arrêt
�DU
PALAIS
J;>E
'139
PROVENCll.
'rendu le 14 Décembre 1756, qui débouta en l'état la Riouflel
qui réclamoit de pareils alimens pour fon fils naturel fur la
foi d'une !impIe expofition faite depuis long-tems, qui n'avoit été fuivie d'aucune procédure & d'aucune preuve de
paternité.
Les alimens provifoires ne peuvent être refufés au bâtard,
même pendant procès; quo~ue la paternité foit encore en
. Cufpens, il faut que fa fubflance foit aifurée; tout doit céder à la faveur de ces fortes d'alimens; la confervation de cet
être innocent & qui n'a pas démérité, doit prévaloir à toute
autre confidération; il faut néceifairement, en attendant le .
jugement définitif, lui adjuger des provifions, ne pereat;
c'ef!: le cri de la nature, c'efl: la difpofitioo de la Loi. Or,
qui doit être tenu du paiement de cette dette facrée à défaut des biens de celui contre qui s'élevent toutes les preuves
de paternité, fi ce n'ef!: l'aïeul qui ef!: le poifeifeur & le
dépo(jtaire des biens de fon fils, qui le tient fous fa puiffance, & qui ne fait avec lui felon la Loi que una & eadem
perfonna?
D'après Lacombe, Defpeiifes, le .Préfident Faber, l'Auteur du traité des injures, & une foule d'autres autorités,
l'expofition de groifeife fuffit pour foumettre l'accufé aux
frais d'une alimentation provifoire pendant le tems que dure
le procès. La Juf!:ice a cru devoir fe repofer d'autant plus
facilement fur ces déclarations, qu'il n'efl: pas à pré fumer
qu'une fille qui fe préfente à un Minif!:re public' pour lui
dévoiler un fecret qui coûte à fa pudeut, pour lui nommer
l'auteur de fa honte, ofe ajouter l'impofl:ure.à fon ignominie.
Un pareil excès. de confiance pouvoit entrainer des abus;
il pouvoit autorifer la fille déja corrompue à devenir parjure;
il pouvoit expofer le citoyen le plus pur à devenir viétime
d'une prof!:ituée hardie. Auffi la feule expofition de groifeife
ne produit-elle aujourd'hui d'autre effet que de foumettre
celui qui eH: nommé aux frais de parr. Mais ici la déclaration de Magdeleine Pafquier n'ef!: pas la feule preuve de
paternité qui s'éleve contre fon raviifeur; il exifte une iu-
52,
••
�JOURNAL
140'
formation en rapt fui vie d'un décret de prife de corps i il
exifre la préfomptiori qui dérive de la fuite de l'accule: ici
c'eft une mineure féduite qui fe plaint, c'elt une fille irréprochable jufqu'à l'Înfrant malheureux où elle fut trop foible &
trop crédule pour un [éduéteurartificieux; ici les condition~
des parties [ont les mêmes. Tout parle donc en faveur de
la mere , tout intéreffe pour l'~nfal1t. Tout oblige l'aïeul à
. lÎJi fournir ju[ques au jugement définitif la chétive penfion
de 9 liv. par mois fixée par le Juge local. _
On ajourait que l'offre de Claude Cornille de Ce charger
de l'enfant pour le placer à [on choix en nourrice ou à
l'Hôpital, devait être rejettée•
. Vouloir le placer chez une nourrice, c'étoit contrarier
tout-à-Ia-foi s le vœu de la nature & les principes con[acrés
par tous les Arrêts: étoit-il humain de livrer cet enfant à
une étrangere, à une nourrice mercenaire, plutôt que de le
confier 'à celle qui l'a porté dans [on fein?
,
C'efr une maxime incoocefrable que)a mere naturelle a.
l'éducation de [on fils, & les aifféreocs Arrêts qui exilfent
fur"cette m3tiere, ne varient que fur le terme de la durée
de cette éducation; les uns l'ont fixée ju[qu'à l'âge de deux
ans, les autres de quatre, & quelques uns jufqu'à l'âge de
fept ans.
.
.
Celui du 14 Juin 1766, rendu fur les cooc!uGons de Mr.
l'Avocat-Général de Colonia, en faveur de Viétoire Moulin
de la ville d'Apt, contre Jo[eph Cqrélonnier, Marchand Chapellier, laiffa l'éducation à la mere, '& débouta l'aïeul qui
i
réclamoit l'enfanr.
La' même quefrion fue jugée en 1768, au .rapport de
Mr. de la Baume, en faveur de Claire Abat· du lieu d'Entrecalteaux, CQnrre Bernard pere & fils.
,
Lors de ces deux Arrêrs on jettoit des [oupçons injurieux
fur la conduite de la mere , & cependant l'éducation de l'enfant lui fut confiée. Son âge encore tendre exige neceffairement taure la follicirude des fecours maternels; ·Ia main
maternelle efr plus faite que tout autre pour fournir à [es
befoins multipliés.
.
(
�DU
PALAIS
DR
PttOVRNCI!:
14r
L'offrè' de placer l'enfant 11 l'Hôpital el!: également 'injul!:e
'& révoltante. Nous dil!:inguons, à l'exemple des Romaios,
deux fortes de bâtards; les uns font appellés liberi lldturales
donc le pere el!: copnu & fuffifamment déGgné.
.
Les autres appellés fPurii, vulgà quœ/iti, font 'ceux nés
d'une rnere prol!:icuée, qui n'<l_nt d'aucre pere que le peuple,
11eque patrem /za1Jentlquem demonfirent nifi populum.
Ce font les bâtards de cette. derniere c1affe que l'on
dépofe dans les Hôpitaux ou la piété publique, fecondée par
le zele des adminillrateurs, leur a affilré leur fubGl!:ance.
Ce font ces êtresinfortunés.Gl,li font condamnés', par la honte
de leut:; naiffance, à paffer leur vie dans ces retraites obfcures,
ignorés de la fociété & des auteurs de leurs j9urs qu'ils ne
connoilfent pas eux-mêmes;.
•
Mais'lorfque Je pere ell connu, Jorfque, éornme ic;i, des
preuves irréGflibles le déGgnent fuffifamment, rejettera-t-on
fur un Hôpital l'obligation impofée au pere; confondra-t-on
cec enfanc avec ceux du crime, & de la débauche; rangêra(-on la mere dans, la c1affe des "iles pJoltituées? Une tIlle
qui n'eH coupàble que d'une foibleffe, fera-t-elle confondue
avec ces infames créatures qui, du plus doux fentiment de
la nature, font le plus honteux trafic?
, On répondoit poür ,Claude Cornille, que les aliments provifaires que les Arrêts ont cQndamné l'aïeul à fournir à fan
pecit-fils bâtard, n'ont jamais 'été que les frais des derniers
mois de groffeffe & ceux de couche; c'el!: à ces forces de
fecours que notre Jurifprudence à rel!:reint l'obligation de
l'aïeul, lorfque la pacernité el!: encore en fufpens. Ces alimens font urgents, privilégiés; ils font dus même p_endant
procès, ne partus pereat. Delà. vient que felon quelques
Auteurs, une déclarati.on méme fufpeB:e fou met l'accufé
à donner de pareils alimens au Mtard, quels que roient les
torts de la mere.- On ne doit pas les punir dans cet enfant
innocent; tout doit céder à l'intérêt de fa confervation. C'el!:
à cette obligation qu'a fatisfalt Claude Cornille, en payant
la fomme de, 90 Iiv. à laquelle· il a ,été condamné par une
prerniere Ordonnance du Juge de Salon.
�:'I 4~
Jou 'R N A L ' [ '0 r
~ Mais il ne doit pas être, fournis à fu,ppôrter la "rpe'nlion
,portée ·par la Sentence ,dént eil: lIppel. Cette penfion rentre
'dans la clalre des ali'mens èléfinirifs, qui ne fonrl dus que
lorfque la procédure en fubornation dt épurée,. & que la
'Paternité eil: cercaine. Ici il exiil:e une information & un décret contre le fils de Cornille ; niais pli e'fl: la preuve légale
de paternité? L'aïeul n'eil: pas tenu - de fournir de' pareils
alimens au bâtard dont tout autre que fan fils peut être
le pere. La confervatio'n de cet enfant' n'eil: plus faite pour
exciter la foUicitude du Magiil:rat. Il trouvera une fubfiil:ance
affurée dans la tendrelre maternelle·, ou fi la mere ne veut
pas le garder gratuitement, il la :trouvera dans ces étalllufemens.publics où la piété & l'humanité publiques fui oni:
alrurés tous les fecours nécelraires.
•
Meriaud, Subil:itut, obferva que la maxime qui foumet
l'aïeul, ainfi que le pere, à nourrir l'enfanr bâtard, qui les
confond en une feule & même perfonne, eil: ttop cercaine
pour pouvoir être conteil:ée. Quelle que p'uilre être là caufe
de fa nailrance, on ne peût lui en faire un crime, & le
priv.er de!! relrources &' d'es 'avantages qu',il-doit 'trouver dans
tout état naturel; trop malhe'üreux fans doute des diil:inél:ions
que la fociéré a établies à fan égard & qu'il ne connaîtra
que trop tôt', fa na'ilr~nce au-'X yeux de la lëin'e-fl pas différente
de celle d'un enfandégitime; ils rec,:oivent:t~un & l'autre à 'ce'tie
époque les mêmes fecours. Les Arr~ts '-om confirmé c.e'tte
max.ime. Il n'était pas juil:e,-eo effet, que cet enfant qui
pouvait trouver des fecours dans les biens de fan pere-, en
fôt privé par fan défaur de fortune; la Loi lui a ménagé
une reifource fur les biens de l'aïeul, 'elle l'a rendu refpon.J
fable de la conduite de f0n f fils'; elle lla puni de n'avoir pas
veillé fur '[es aél:ions, de ne lui avoir pas infpir-é des feh:
timens vertueux; les jours' du 'oitoye'n'-Tbnt précieux à l'Etat,
& il eil: d'une bonne politique de chercher, tous les moyens
qui peuvent les confe·rver. Delà, ces précautions fi fages, ces:
relrources fi abondantes pour"évitée un 'fecret fi dangereux,
& fatisfaire en même tems à'cé' qu'e la'cofifcience & l'honneur
Me.
<
i
�DU
PALAIS
DE
PROVBNC~
~r
,liél:ent èn pareille occalion. Des établiffemens publics font'
placés dans les villes principales de la Province po~r y re- .
cevoir ce dépôt de la honte & du crime; la nlifere & la
débauche Y. trouvent les mêmes recours; le but de l'intérêt
public efi rempli, & l'humanité efi fatisfàite.·
•
1 Magdeleine Pafquie
ne veut pas que. Claude Cornille fe
qha.rge lui-même de mettre fan enfant en nourrice, ou de
le placer à l'Hôpiral. Sa qualité de mere qu'on ne peut lui
çonteHer lui l'end précienx le fruit de fa féduél:ion; elle ne
peut confier à des mains érrangeres un gage auffi.cher.-Qu0ique fa préfence lui rappelle f~ns ceffe le fouvenir de fa fo;~
bleffe, elle trouve néanmoins dans 'fes careffes' un adqucirfement à fes peines. Auffi la Loi fecondant les vues de la
nalUre a-t-elle fixé le temps que la mere devoit· garder fon
enfant; elle veut qu'elle en fait chargée jufiJu'à l'âge de Irais
ans, & quelquefois jufqu'à! celui de fept ans; fa tendreffe
lui répond des foins qu'exige cet état· d'enfance que la foibleffe & la naïveté rendent inréreffanl.
Obligée de fournir la nourrirure à fan fils, ce n'ell: qu'à
regret qu'elle s'efi vue forcée de la confier à des mains étrangeres. Certe ~irconfiance ajoute à l'intérêt de fa demand'e;
elle a befoin de fecours, elle en demande à celui qui ell:
l'-aureur de fan malheur, qui a abufé 'de- fa Donne foi, & qui
l'a féduite fous les promeffes les plus facrées. C'efi fur les
biens· de fan raviffeur qu'elle réclame des alimens pour fan
enfant; c'efi conrre celui qui en efi le dépolitaire qu'elle dirige fes pourfuites..Occupée de venger fan honneur, un intérêt plus preffant l'anime en ce moment: ce font les jours
de fa fille. Lorfqu'elle aura pourvu à: ces premlers' befoins ,
elle fera juger fa procédure; elle fe flatte encore de ra ppeller
à fan premier ferment celui qui l'a féduire; elle ofe efpérer
que le gage de leur amour réveillera dans fon cœur des fentimens que la nalUre n'a pas enéOre éteint, & qu'il le dé~erminera à remplir fes premiers engagemens. Il efi donc
Intérelfant à Magdeleine Pafquier de conferver avec foin
l'enfànt donc elle ell: accouchée j de ne pas ·le perdre de
�144
Jou
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J' (
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vue. Elle ne fauroit donc confentir à le remettre à l'aïeul"
paternel; fi c'eH pour le faire nourrir lui-même, ce foin né
pourrait lui être auffi bien. conféré qu'à fa mere; obligé de
fournie également aux frais de nour.rice, il ne gagnerait rien
de ce côté; fi c'eft pour le placer à l'Hôpital, fa propoGtion eft
injufie. 'Si dans .la fuite fan fils lui demandait fan enfant,
qu'oppoferoit-il à cette demande? Quel reproch~ n'aurait-il
pas à fe faire?
Sur la demande en proviGon, Me. Meriaud obferva avec
les Auteurs, que dans les délits pareils, c'eft-à-dire en maûere de rapt de fédûélion, il Y a un intérêt fenGble qui ne
doit jamaisoêtre .indifférent aux yeux de la Juftice: c'eft celui
de l'enfant' né ou à naître. Quels que foient les torrs de la
mere, . il faut pourvoir aux befoins de l'enfant; s'il n'eft pas
enco.re n.é,.& que 1a /mere demande une prm'iGon pour ces
frais qu'on nomme de gijine, comme [auvent il ferait tro(>
long d'attendre à favoir quel eft au vrai le pere de l'enfant, la
déclaration de la fi!le, lorfque c'eft la premiere faute, doit
fuffire pour lui adjuger une cerraine fomme contre celui à
qui le fait de grolfelfe eft imputé, fauf à prendre enfuite'
des éclairciiJemens pour favoir à la charge de qui demeurera
l'enfant.
Quand mê(lle la mere au fonds n'aurait aucuns dommages
& intérêts à prétendre, cette provifion doit s'adjuger fans'
difiinélion vis-à-vis de toute forre de perfonnes; c'eft pour
l'iorêrêt de l'enfant qu'elle s'adjuge: au moyen de quoi toutes
confidérations doivent celfer. Ces principes ODt été reconnus
dans les Arrêts JIui ont été rendus fur ces fortes de matieres: on n'a eu aucun égard a.ux ellceptions qui ont été
propofées de la part des ravilfeurs; il peut s'en rencontrer
cependant qui aient refufé des proviGons à caufe de la qualité de la perfonne qui les réclamait, & qui rendait fufpeél:es
les déclarations qu'elles avaient faites à la Jufl:ice. T Iles
feroient, par exempl~, les filles ou femmes de cabaret ont
la Vertu efl: toujours fufpeae.
Fromental, Brode.au [ur Louet, difent que le ravilfe r dl:
f< u is
�DU
PALAIS
DE
I4~
PROVENCE.
fournis 11 fournir des alimens 11 fan fils bâtard. On trauve
un grand nombre d'Arrêts dans Boniface qui ont jugé la
queHion; à plus forte rai fan n~- peut-on pas les refufer, la rfqu'ils ne font que provifionnels, & qu\ils ne font accordés
que jufqu'au jugement définitif. L'aïeul y efi: également fournis comme fan fils; ce font les. biens de ce dernier qui en
répondent; c'efi: fur ces mêmes biens qu'on les demande;
ce n'efi: que comme polfelfeur de ces biens, lorfque le fils
n'efi: pas éma'ncipé, qu'il efi: obligé de les payer; il les devrait également comme aïeul à caufe de la puilfance qu'il
exerce envers fan fils & fes petits-fils indifiinél:emenr, qu'ils
foie nt légitimes ou non.
Me. Meriaud conclut 11 ce que Claode Cornille RIt condamné à donner &, fournir par tout le jour de la Ggnificatian de l'Arrêt qui interviendrait, le berceau, paillalfe, matel as , couffin & couvertures nécelfaires à l'enfant dont Magdeleine Pafquier avait accouché, & à lui payer en outre par
provifion , & jufqu'au jugement du fonds, la fomme de 6 liv.
par mois pour les alimens, nourriture & entretien de fan
enfant.
Arrêt du 31 Janvier 1783, rendu en Grand'Chambre, pré'lident Mr. de Cabres, qui, faifant droit à l'ofFre' faite par
Claude Cornille de fe charger de l'enfant pour le mettre
à l'Hôpital, réforma la Sentence du Juge de Salon, & condamna Magdeleine P.a{guier aux dépens. Plaidant Mes. Gaffier
& Jauffret. _
Autre Arrê,t du 7 Février fuivant, conforme aux conclulions de Mr. de Montclar., Subfiitut, par lequel il fut die
que l'enfant ferait remis à fan, aïeul pour 'le placer à l'Hô~
pital, fi mieuX' la mere du bârard n'aimoic le garder gratuÎlement. Plaidant Mes. Pellicoc & Ricard.
r.Année.s 1782. & fuiv.
T.
�]OURN4L
ARRÊT
XX.
Le contrat d'aJJùrance maritime, portant,ftulement fùr le rifrJue
d'entrée, 6' àlui de réaJJùranêe portant fur le riRue d'elltrée
& fur le rifrJue de retour, la réaJJùrance tient pOlir le ri/qlle
• limité, dans le contrat d'aJJùrance.
'LE
,
,
fieur Bailli ainé, Négociant de la ville de Nantes, fe
fit affurer pour compte d'Ami la fomme de 12000 liv.
fur la coque, agrêts ".apparaux du navire Le Bon-BafrJul!,
.commandé par le C,apitaine Pafcal, pour aller de Bordeaux
dans un des portS de l'Amérique feptenrrionale. Le fieur Nidelet prit un rifque de 3000 liv. pour compte d'Ami, &
chargea enfuite les lieurs Gautier & Compagnie de Mar,feille de le faire réa/furer pour 2,!-00' liv. Le fieur Rolland
ainé fit ,cerre réairurance de fortie de Bordeaux jufqu'au continent Anglo.Amériquain & de retour à Bordeaux, à la prime
,de cioquante pour cenr. On s'apperçut enfuire de la di/femblance qu'il y avait fur le temps- des rifques, en,tre la police
d'alfurance & la police de' r,éa/furance; on ~n parl-a au fie ur
Rolla,n,d "qui ne voulut pas corriger cette ,erreur. Cepend!!n,t
.le nav' r,e Le Bon-BafrJue fut obligé par une tempête de relâcher au port Louis, & fut pris vers le Cap H~nri par un
.corfaire Anglais qui le conduilit à Newyorch. Au retour le
Capitaine fit fan Conlillat en l'Amirauté de Guienne, & les
affurés demanderent le montant des a/furances aux airu.
leurs. Le fieur Rolland cru~ alors pou~oir ,fe difpenfer de.
payer, fur le fondement .que la _réa/furance portoit fur le
voyage & fur le retour, quand l'airurancé ellè-'même' ne' comprenait que le rifque de fortie de Bordeaux au conrinent
Anglo-Amériquain; on le mit en caufe pardevant le Lieutenant de l'Amiranté, & par Sentence du 17 Décembre
1781, il fut condamné âu paiement des 2,!-00 liv. & aux dé"pens. Appel au Parlement.'
-
�DU
PALAIS
DB
PROVENCE.
147
. On difoit pour le fieur Rolland, que l'objet de l'obligation doit être certain; le contrat doit prouver que le paél:e
qu'il renferme ef!: celui que les parties ont voulu contraél:er.
C'ef!: par cette raifon que l'Ordonnance a voulu qu'en ma'tiere d'a!furance, il ne pût y avoir lieu à aucune fone
d'équivoque, & que l'anide 3 exige que la police. contienne
le nom, le domicile de l'affuré, fa qualité de propriétaire
ou de commiffionnaire, le nom du navire, &c. Le principe
de l'Ordonnance à cet égard n'ell: que 'le ré{ulcat du droit
commun attefté par les Auteurs maritimes.
Les mêmes principes que l'on fuît en matiere d'a!furance ,
on ne peut que les fuivre en matiere de réaffurance. La
réaffur.lDce n'ef!: autre chofe que la fubrogation du fecond
affureur à la place du premier; c'el1: un cautionnement dont
, l'objet (Joit être dérernliné, une garantie que l'a!fureur ne
peut {e ménager qu'autant'" -que l'obligation primiti.ve ef!: certaine ; la' réa!furance ne pouvant fubfif!:er qu'autant qu'elle
porte {ur l'objet déja affuré, s'il n'y a poinr d'affurance., il
ne peut point y avoir de réaffurance; la réa/furance ne peut
exaél:ement porter que fur l'affilrance préexif!:ante. Le contrat de réa/furance ef!: nul, s'il n'ef!: pas la copie fidelle du
contrat d'a/furance, ou fi l'on y trouve. la moindre différence qui détruife l'exaél:e confo'rmité qu'il doit y avoir encre
l'un & l'autre. Dans le cas préfent, il Y a plu!1eurs différences entre les deux polices. 1°. Ce n'ell: pas Je fieur Nidelet qui fe fait affurer, quand il éroir lui-même a/fureur, c'eft
au contraire le fieur Bailli. 2°. La réaffurance porte, {oit
fur corps ou facultés, conjointemenr ou féparemenr, quand
l'affilrance ne portoir <Jue {u.r le corps.
La réaffilrance eIl:
d'enrrée & de {ortie du continent Anglo-Amériquain, quand
!'atfurance n'étoit que d'entrée; c'ef!: donc une différence
qui change la nalUre du paél:e. Enfin le ri{<Jue réa/furé n'eH:
pas celui qui avoir éré affuré; il Y avoir probablement
deux polices cPaffurance, & le fieur Rolland n'a été réa{-'
fureur que (ur la police d'entrée & de {onie, & non fur la
police d'entrée feulement, Ces .différences frappantes doi-
3°.
T2..
•
�I~
JOURNAL
vent d'autant mieux entraîner la nullité de l'alI'urance; qu'il
y a difproporrion évidente dans les primes, & que l'on fait
réaffurer un rifque qui n'érair pas affuré.
On répondoit qu'en droir rien de plus permis que la réaffurance. Tous les anciens Auteurs mercanrilles en aueftent
l'ancien ufage: Anlàldus, Cafa-Regis , de Luca, 8ç l'arr.
20 de l'Ordonnance de la Marine, au tirre des a.1J~rances, l'a
confirmé parmi nous. Il l'fi: juill' que li l'a (fureur a quelque
regret fur les fommes qu'il a mifes en rifque, il puiffe les
mettre à couverr par la réaffurance. En droit encore, les
primes de. réaffurances peuveIit être moindres ou plus
forres que celles des affurances; cela dépend de la volonté
des affureurs & des affurés. Ce fecond contrat efl: aulli libre
& volontaire que le premier: il l'fi: donc permis d'y tlipuler
telle prime que l'on juge à propos, ou relies conditions qui
font convenues entre l'affilreur & l'affuré. ( Article 2 t de
l'Ordonnance. ) Les primes de réajJùrance, y eH-il dit, pourront être moindres ou plus fortes que celles des a1fùrances.
Cela dépend, dit le Commentateur, de la convention" des
parties, comme de réa1fùrer pour le tout ou en partie; & celui
de la Rochelle ajoure: qll'importe en effet ail réa1fùreur 011 à
l'a1fùré que la prime de la réa1fùra uce Joit' moindre Oll plus
forte 'lue" celle de la premiere a1fùrance? Pourvu qtie l'objet
de l'affurance foit bien fixé, relarivement à l'arr. 3, & que
l'on fache quel l'fi: verirablement l'objet qui a éré mis en
rifque, le refl:e dépend de la convention "des parries.
"C'efl: donc une erreur de Cuppofer qu'il doit y avoir une
exaae conformité, pu foit une égalité mathémarique entre
l'affilrance & la réaffuranc~. Suivant la pplice d'affurance, le
fieur Bailli fe fait affurer 12000 liv. pour compre d'Ami fur la
coque du navcÎre Le Bon-BafJue, CapitainePafcal, allant de Bor..
peaux dans un des porrs des quatre Provinces de l'Amérique
feptentrionale, & le lieur Nidelet prend 3000 liv. de ce rifque
poùr corn pre d'Ami. D'autre parr, dl-ce ce même rifque déja
pris par le lieur Nidelet que celui-ci fait réaffurer? Car c'efl: à
quoi fe réduit tout le procès. La .police porte que le lieur,
•
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PaOVnrCL
~~
Bailli;- pour compte de qui' il appartiendra, fe fait affurer
de fortie de Bordeaux jufqu'au continent Anglo-Amériquain,
& de retour à Bordeaux, 2400 liv. fur 3000 liv. de rifque
d'affurances prifes à Nanres par le fieur Nidelet affureur. On
ne fauroit donc difconvenir que les 2400 liv. affurées à Marfeille ne faffent partie des 3000 liv. affurées à Nantes. Or
cela étant, la téaffurance de Marfeille porte donc fur l'objet
déja affuré à Nantes. Il n'ell donc pas poffible qu'il y ait
équivoque fur l'objet affuré à Marfeille; l'identité de la fomme ,
l'identité du navire, celle du Capitaine, & enfin celle du
voyaKe, tout prou.ve que la réaffurance porte fur 2400 liv.
faifant partie des 3000 liv. affurées, & que par conféquent
le finillre furvenu, le fieur Rolland doit payer les 2400 liv.
réaffurées, comme le fieur Nidelet A payé pour compte
d'Ami les 3°°0 liv. par lui affurées. Les différentes qualités
que le fie ur Bailli a prifes, en indiquant, tant dans la police
d'affurance que' dans celle de réaffurance, qu'il procédait
pour compte d'A'mi, ou pour compte de qui il appartiendra)
ne pet;.merroient pas de le repréfenter tout à la fois comme
affuré principal & réaffuré. Un affureur de Nantes qui ne
connaît perfonne à Marfeille, 'n'ell fans doute pas inhibé
d'employer le minillere du même Négoci.ant qui a fait les
affurances à Nantes, & qui par fes connoiffances à Marfeille peut lui procurer des réallllrances à Marfeille.
Il n'y a pas, fi l'on veut, une conformité parfaire entre
les deux contrats; mais que l'on prouve que cetée non conformité qui n'ell pas fubllantielle, imprime fur le contrat
de réaffurance au point de l'annuller. Le mot, foit fur corps
. ou fur facultés, & cet autre, conjointement ou ftparément ,
prouvent qu'en foufcrivant la police, le fieur Rolland s'ell
chargé du ri[què, fait que la fomme affurée fût fur corps
ou fur facultés, ou fur l'une & fur l'autre cnnjointement ou
féparément, & qu'il s'ell contenté de cerre défignation générique. Pourquoi fuppofer qu'une pareille diffemblance dans
le contrat d'affurance & de réaffurance annulle le contrat
& difpènfe de payer la perte, lorfque le navire a été pris
Du
PALAIS
DB
•
�t'jO
Jou
RNA L '
-,
en allant véricablement aux Infurgens? L'on conçoit fans
peine que·la réa!furance n'écant que la garancie de la fomme
déja a!furée, s'il n'y a point d'a!furance pour le rerour; le
retour ne peut pas faire la maciere d'une réa!furance; le
concrat ne porceroit alors fur rien; il dégénéreroit en' gageure. Mais de ce que l'a!furance feroit nulle pour le retour,
il ne s'enfuir pas qu'elle le foit auffi pour l'entrée; la réa !furance porrant pour l'encrée fur un objet véritablemenr affuré, elle ne dégénere plus en gageure; elle porce au con- .
traire fur un objet expofé aux événemens; & c'ea tout ce
qu'il faur pour légitimer parmi nous \'a!furance & la réa!furance. Auffi que l'on voie quelles font à cer égard les difpolicions de l'Ordonnance : on affilre pour'l'entrée & pour
le recour, & cependant on ne fait point de retour. Biel1loin que l'a!furance foit nulle, la Loi dir au contraire qu'elle
fubliHe pour l'encrée; & quant au rerour, l'a!fureur rendra
le tiers de la prime; c'ea l'arr. 6. De même que' li au lieu
d'aller à l'endroir défigné, on s'arrêce à un au Cre plus prochain fur la même roure, le voyage raccourci, le COntrat
d'affin'ance ne fera pas anriullé; c'ea l'arr. 36.
La véritable cQnféquence qu'il faudroir tirer de l'Ordonnance, c'ea que l'a!furance n'ayant pas pu être faite pour
le retour, elle ea nulle quant à ce, & que le lieur Rolland ea au cas de reHituer le tiers de la prime; mais il
répugne à toure raifon que la aipulation d'un ri[que qui ne
pouvoir pas fe vérifier pour !e retour, annulle le contrat pour
le rifque d'entrée, qui faifoit la matiere d'une convention
juae & licice.·
Arrêt du 22 Mars I 783 , au rapport de Mr. le Con[eiller
de Chenerilles, qui confirme la Sentence, avec dépens &
contrainte par corps. Ecrivant Mes. Pafcalis & .......
�J
T
ARR Ê T
X X J.
a
En mettant les pêcheries ou les bordigues
la taille, les
fedes doivent être impofèes pour tollle leur valeur. Les bor. digues ne doivent l'être que pour la moitié de leur valeur.
,
'
N exéclltion du traité d'union des trois Communautés;
de l'HIe; Jonquieres' & Ferrieres en, un feul Corps
de Ville & maifon publique;, fait le 2.1 Avril 1')8r, il fut
procédé en 1') 84 à un cadafl:re général, dans lequel tous le?
biens immeubles & les bordigues accoutumées à payer lil
taille furent allivrées; ce cadaHre fut renol1vellé en r ') 98,
162.6, r64') , 172.4 & 1730.
'
,L'Edit du mois d'Août 1776, qui permet la libre circulation du vin dans le Royaume, détermina la Communauté
,du Martigues de délibérer; le 2.r F,évrier 1779, une impofirion en fruits fur tous les biens qui pouvaient la fou tenir ,
& une taille fur les fonds qui n'en étaient pas fufceptibles,
fur les jardins, fur les moulins & aurres, & elle alfujenit
les bordigues à l'impolition en fruits. Les propriétaires des
bordigues s'éleverem comre cette délibération; des Arbitres
choilis la condamnerent. La Communauté offrit un expédient,
porram: fauf &: réftrvé
ladite Communauté d'impofer une
taille fur le pied.du dernier cadaJlre; & audit cas, Jau! t;.
réfervé aux propriétaires des bordigues leurs droits a raifou de
ce. Le Fer,mier fut en conféquence chargé de demander le
paiement de la taille aux propriétaires des bordigues: corn,.
.mandement au lieur Chaudy, propriétai~e de la bordigue
dite la Cabane BauJfenque. Oppofition de fa parr; ,requête
.préfentée -à la Cour des Aides a,u nom de? Syndics des pro.priétaire? des bordigues .de la ville & terroir gu !\J.ar.tigues,
,aux fins que l'alli,vreine.nt des bordigues fLIt Qé.c1ilré nul, &
qu'elles fulfenc tirées
. du cadaftre. Interven,tion 'de la,P,rovince,.
,
E
a
�1-)''1.
Jou
RNA L
On difoit pour les Procureurs du Pays & pour la Com~
munauté du Martigues, que les bordigües f'Ont taillables,
x". par leur nature & par la difpofition de la Loi; 2,0. en
force d'une coutume locale, d'une convention <lccordée' entre
des
même intérêt, que les mêmes obliga. perfonnes
, qu'un
.
tlons ont reum.
L'on connoît en Provence trois fortes d'impofitions, la
taille, l'impofition en fruits & les rêves; elles font ég:tlement réelles. Chacune de ces impofitions a fon régime, fa
police particuliere. En Provence la taille fe leve fur les
terres; les chofes mobiliaires en font exemptes. On regarde
comme fujette à la taille toure propriété produél:ive dont
l'indufirie ell: le principal reffort; les moulins, les martinets,
les fabriques ne font point des fonds de terre, & cependant on les foumet à la taille. Par quel renverfemenr l'induHriè la plus favorable & "la plus naturelle à l'homme,
l'agricuhure auroit-elle fupporté le fardeau des impofitions,
& en auroit-oD déchargé toutes les branches d'indufirie fecondaire? L'ordre des chofes ne permet donc pas d'imaginer qu'il fait de l'effence de la taille de n'être impofée
que fur les fonds de terre. .
Dans nos -Ç-oix municipales, fuivant notre confiitution,
la taillabilité dépend bien mieux de la coutume de chaque
pays, de fes reffources particulieres, du confentemel1t donné
par les habitans, que de tout autre principe. La liberté dont
les Communautés jouiffent à cet égard efi ahfolue; toute
forme d'impofitions, pourvu qu'elle ne bleife point les Loix
de l'égalité, eH à leur libre·difpoIitiol'l. La 'compofition des
cadafhes a dirigé les opérations des aJFouageurs; elle a fervi
de regle aux aJFouagemens: voilà précifement, au témoignage
de Mourgues, ce qui parmi nous confiitue la taillabilité;
elle n'efi autre chofe que l'encadafirement déierminé dans
. le fein de la Cité, auquel les aJFouagemens fu fi' quens ont
comme donné une fan.:lion publique & irréfragable. La novelle 168 vient à l'appui de cette vérité. Onus, y efi·il dit,
.irrogatur ru,7icis priTIdiis tantùm; & pourquoi? am, ajoute
.
l'Empereur
o
�'1'n
D U
PAL "A 1 S " D E ,p i a VEN C E.
- l'Empereur, hœc jôla .referuntur in cenfum. Dans les villes
foumifes à l'Empire Romain, on n'infcrivo.it dans les livres
terriers que les propriétés runiques, & c'en par cene
caifon que l'impôt n'affeél:oit que ces mêmes propriétés; d'où
il faut conclure que la coutume s'étane enfuire introduite
d'infcrire' dans les livres terriers d'autres efpeces de . biens
auxquels l'indunrie a donné une valeur égale à celle des
fonds de terre, ou même plus forre, le .même caraél:ere
de taillabilité leur a été appliqué: vis confuetudinis non efi
'minor 'lllam legis, cùm Jit altera juris JPecies, omnefque loci uM
viget incolas obligat ad fui obfervantiam.
.
Les Jurifconfuhes, après avoir tracé dans le titre de cenJibus
du digeHe la forme des livres terriers, & Y avoir aifujetti
les fonds agraires, raifonnent fur les diverfes efpeces de
potreffions qu'on peut affimiler à ces fonds, & qui font
comprifes fous la dénomination de propriétés runiques. Il en
queHion nommément des pêcheries & des falines., & la Loi
4 s'énonce en ces termes: lacus fJllofJue pifcatorios & pOrtltS
in cenfum Dominus deferr.e debet: falinx, fi 'Juœ jùnt in prœdiis,
& ip[œ in cenfum deferendœ fill/t. Dans un tems où les Loix
Romaines difoient que- les .poifeffions runiques devoient
feules fupporrer les tributs, parce qu'elles feules fe trouvoient
infcrites dans les livres terriers, il ~roit néanmoins décidé que
le propriétaire d'une pêcherie ·devoit fe faire infcr1{e dans
le livre terrier pour payer les tributs; lacus fJuoque pifèatorios
& portus in cenfiJm Dominus deferre debet; & cependane les
propriétaires des pêcheries. de, Martigues qui fe trouvent....
infcrits fur les livres terriers de la Communâuré 'depuis ce'nt
cinquante ans, one la _prétention de faire jùger que leurs
pêcheries ne font point ·t~illables.
'
Le Statut de 1410 porre qu'il'en permis à toutes cités,
villes & châteaux des Communautés, chacune- en leur lieu, ,
de fJir~ & ordonoe~ rêves, gabelles, capages ~ ,vingtains &
toutes autres irnpoiilionS' fur le pain, le vin, la cha'ir, boucheries, eaux, rivages, herbes, pâturages', huiles, poitron
& figue~, & tous autres paél:es & ~hofes impunément &:
Afmies l78;1. G' fuiv.
V
�'tH
.d
V
l b v
R. N:,A
,r.'
abfolument, tOl\ces les fois qu'jJ.·leur plaira & leur paroitrâ
convenable. .
•
'
. Le Droit Romain, en foumettant au paiement des charges
publiques lacus.pifcatorios {J.poriUs, la conHitution dl! pays,
.en permettant allX' Communaurés->de. faire & ordonner dt:s
:impolitions fur; les eaux & Jur les rivages, autoient 'donc
,attenr.é au droit naturel. On convient que la mer ell: commune à tous les hommes; il en eH de' même qe l'exercice
de la pêc'he; màis cette'liberté naturelle e!l:-elle exclu live de
tolite p.offt;,ffion fur .la 'mer.j de toute. pêche~ü~ privée, &
ces pêcheries privées~\ n'ont-e.lles 'aucun .des caraél:eresî qui
con{!itlJeht'Je iforids taillable?'
, (:.•
LÎi' Loi 2', 'ffJde 'rel': di1'iJ., a dit; nawrali jure omnium
communia Junt 'il/a : aer, aquâ 'perfluens & mare {; pel' hoc
littera maris. La Loi 4- du même titre ajoute: nemo igitur
ad littus maris accedere prohibitur pifcandi J caufâ. Mais ces
tllêines textes, ont interdit & la m~r & la pêèhe'aux endroi[s
qui, par quelque monument, fUPflofent un droit -de propriét~
,acq'uife par l'occupation; dùm tamen villis & œdificiis & monumentis abJlineatur. Elles ajour,ent qu'autant qù'il è!l: vrai
qlle l'ufage de la mer appartient au dro.it des gens, au-'
t311!' il eH: certain que ces portions de .mer occupées en
foni:: eXlïèjJtées : lquià nôn fun~ juris gernium " Jicut & mare.
J;..es Irivagé:s.' font. publics comme- les' fleuves ;' riparum urus
pub/icus eJl jure gentium, licut ipfius1flaminis. Cependant
la Loi S du' même. titre.ydéc1are que la propriété en appartient'à ceux dont -les .. domaines font contigus; fed proprieras il/oruro, eJl, CfUoram. pfœdiis. .h'œi:ellt. La I;oi 1 ci fournit
un argument~bien. décifif~ en, difa!)t' 'que tou't comme ce
qu'on édifie fur la mer ,devient privé, de ,m'ème tout ce que
la mer emporte d'un Ifodds particulier devient public:
Ariflo ait ficut id quod in mare 'œdificatum fit., fieret privatum;
ita quod rrzari. occupatum /it, Jieri publicum. L~ Loi 9, If.
de divenf. ,ten1p( fS1explique ~galement d'une mâniere claire'
& 'précife : ':fir~l(ifq.uam in' flurriinis pub/(ci- diverticu/,p' -Jàlùs
pluribus an'nis pifcatus fit, alterum eo jure lIti prôhibere "foteJl.
�DU
PAL AIS
D E
PRO VEN C E.
• l ') ')
Les t.oix, en déclarant que la 'mer & la.pêche font libres
à touS les homn)es, ne ,leur ont pas interdit le droit d'acquérir des pêcheries. Les Auteurs atte.flent que quoique la
mer foit commune à tous, cette commune propriété, qui
n'efl rien de plus qu'un uCage libre, n'eH: point excluiive de
poifeffions privées; qu'il eH permis de fe procurer des domaines fur la mer en force du droit du premier occ\lpant ,
de s'y ménager des propriétés, -des retranchemens où perfonne ne pu'iife ni aborder ni pêcher; que ces retranchemens
fur-tout, lorfqu'ils font pris fur un bras de mer ou un canal,
font en tous fens affimilés aux pro prié tes territoriales; telle
dt' la· doéhine de Grotius, lib. 2, cap. 3, n. 7, 8 & la;
de Puffendorf, liv. 4, chap..)., n. 8, de .Hein.ecius dans fes
préleçons fur Grotius & fur Puffendorf,. lib. 2, cap. 3, n. 8
& [el!.; de Peregrinus dans fan traité ex profelfo de aC'lui[.
qui fe trouve à la fuite du traité de jure fifci, n. '), HI,
24, 26, 37, 38 & 42. ; de Defpeilfes, des droits [eigneuriaux,
tit. '), arr. 3, n. 3 " ,
,
En France nous recbnnoijfons que la propriété des ohofes
dont le public a l'ufage & la ,pêche, font comprifes dans
les régales mineures; & l'Auteur de la Jurifprudeuce féodale,
tit. des régales, art. 7, atteHe que quoique nos Rois aient
pne-autorité fouveraine fur les mers qui borJ:!ent leurs Etats,
les Seigneurs & les par.ticuliers mêrile p'euvent:. y avoir dés
droits Qtiles Cl-ui font) parties des régales mineures. Nos Rois
ont conferve une pleine puiifance fur la mer; ils ont établi
des Réglemens, une police pour la sûreté de la navigation
& la proCpérité du commerce maritime. L'Ordonnance de
la marine déclare la pêche de la mer libre, cela efl vrai;
mais ces divers Réglemens ne font point exclufifs de toute
propriété privée fur le domaine .de la mer; on voit ao contraire que l'Ordonnance de la marine adopte l'érabljifement
des parcs, des pêcheries, des bordigues, des madragues;
elle fe. contente de difl:inguer celles qui ne peuvent exiGer
que par conceffion' du' Prince, de celles qui en font indé~
- pendantes. Le .Souve'rain n'a ,point ignoré' que nombre de
V2
�x-r;iS
J 0 'u RNA X; , '
(
.parriculiers avoient acquis le' droit d'en poiféder ou 'par titre
-ou par une longue poifeffion. Il a érabli une époque après
laquelle nulle pêcherie ne peut être poflédée. par des par. ticuliers fans une conceffion expreife aVant laquelle la poffeffion fait préfumer le tirre. L'arr. 4 du tirre des parcs {,pêcheries maintient les poife1feurs dans le droir dont ils
joui!foient avant l'année 1')44. L'Ordonnance regle enfuite
la forme dans laquelle ces pêcheries doivent être conHruires
pour ne point gêner la navigation, la police qui doir y être
obfervée pour ne pas nuire aux avantages que la pêche procure;
mais elle a refpeél:é les titres valables ou la pojfe(Iion fuffifanre.
. Des pêcheries, des bordigues fondées en titres ou en
po1feffion font. donc plus que des privileges &. des propriétés politiques. On peut leur appliquer la qualification des
droits civils· proprement dits. Elles font de nature égale
~ celle des fonds de terre. Elles forment des domaines.
La Loi les a affimilées aux propriétés agraires. Les Auteurs
les ont dénommées territoire. Elles .tombent en proptiété
privée, & c'ef!: fous ce rapport que les Loix & les Statuts
du pays. ont accordé aux C10mmunautés le droit de les
fou mettre à la taille, comme les autres fonds de leur
territoire.
Les bordigues du terroir du Martigues réuniifent touS
ces caraél:eres. Ceux qui les po1fedent, joignent à la po1fe'nion
des titres valables; c'ef!: la tranfaél::ion pa1fée en 1223 en.rre
Raymond' Berenger Comte de Provence, & l'Archevêque
d'Arles. On y voit qu'à cette époque très-reculée, l'Arche. vêque d'Arles & fes emphytéotes po1fédoient des pêcheries
très-précieufes dans le quartier de l'IDe. Delà vient que
les recherches les plus féveres du domaine n'ont jamais
pu détériorer la condition de ces bordigues, & que les
vérificateurs les ont toujours reconnues & déclarées non
des concenions, mais des propriétés patrimoniales, exemptes
de IOUle taxe royale. Ces établi1femens, quoique maritimes,
font véritablemellt à l'in/lar de toute propriété territoriale.
On les con/idere comme des porcions de tl:.rritoire: dùm
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PRO VEN CE:
'1 ~ 7
pars maris ad urritorium comparali non major fit , qudm diverticulllm maris comparatum ad magnitudinem fundi privati.
On les regarde comme l'acceifoire des terres : hoc intuita
mare fefe habet tamJuam accejJôrium terrœ. Il n'implique donc
pas qu'on les foumette à une adminiflration toute territoriale; il n'implique pas que ,les affouage mens généraux &
particuliers qui ne fe font que par territoire, les aient regardés comme une portion du territoire de la ville de Martigues; il n'implique pas qu'elles aient été affouagées comme
les terres; que la Loi aie dit qu'elles doivent être comprifes dans les livres terriers; que le Statut de 1410 aie
pe.mis aux Communautés d'impofer fur les eaux & rivages'
comme fur les terres. Quelque fignification , quelque étymologie qu'on veuille donner au mot territoire, on ne parviendra
jamais à dénaturer l'ordre des chofes & la difpolition des
-:Loix.
L'indufirie & le commerce qui tiennent à des immeubles;
fubilfent le joug des impolitions municipales; telle eft I~
Loi & l'ufage qui font confirmés par la Loi romaine, par
la Déclaration de 1715 , & qui Cent conformes à l'ordte 'des
chofes. Delà vient que la pêche eft libre en foi, & lor[-,
qu'elle ell: exercée en pleine mer. Mais les pêcheries, les
bordigues qui foqt des places fixes où l'indliflrie du pêcheur
fruél:ifie à l'aide de divers relforts & de machines artificieuCement difpofées, font fujetees aux impolitions, comme peut
l'être un champ qui produit à l'aide de l'exploitation & des
fueurs du cultivateur; c'eft ce qu'a entendu d'Olive, lorfqu'il a avancé que les eaux fur lefqueJ\es les pêcheurs
exercent leur métier étant de foi communes ou publiques;
ne peuvent recevoir aucune [ervitude. Les eaux de la pleine
mer font réellement en foi communes & libres; il en eft
de même des eaux d'un flellve; mais il faut en revenir
fans celfe à cette exception " que les eaux qui de leur nature font communes & publiques, fjuia nllllius [unt , deviennent privées, fi des particuliers ufant du droit de premier
occupant s'y ménagent des propriétés. Ces propriétés fOllç
�I~B
•
JOURNAL
fufceptibles de fervitudes, de charges publiques ou privées;
comme coutes propriétés quelconques. Si elles [ont pertnifes ou colérées, com)Jien mieux tolérera-t-on que ces
propriétés qui [Ont dans le commerce comme les terres,
foient partic-uliérement [oumifes à d'autres [ervirudes, & à
des [ervitudes auffi favorables & auffi nécelfaires que celles
des impoutions.
L'Arrêt qui calfe l'Ordonnance de police par laql)elle les
Echevins de Mar[eille avaient fixé un taux au thon pris dans
les madragues des Prud'hommes, ne contredit point ces
principes. Les Prud'hommes tiennent ces madragues d'unt:
conceffi.on des Comtes de Provence, avec la claufe [péciale
qu'on ne foumettroit jamais le' poilfon à aucune. taxe, particuliere.
.
Il ell: de regle qu'une Communauté ne peut pas faire
fupporter aux habitans d'une Communauté voiune ou. étran- .
gere le poids de' [es impofitions; delà vient que dans tous
les temps la Cour a calfé les impofitions établies non [eulement [ur le poilfon qui [orr , mais encore [ur coure e[pece
de marchanqi[e exportée, même [ur l'engrais. L'on convi'ent
qu'il n'ell: pas permis d'impofer [ur le poilfon pêché en
pleine lPer, qui n'ell: pas confommé dans le lieu, parce que
le poilfon pêché en pleine mer ne doit rien à la Communauté qui veut l'impofer, s'il n'y ell: pas con[ommé, &
qu'au cont'raire les potTdIions maritimes. comprifes dans u'n
territoire [ont tributaires _de ce terroir avant d'être de quelque recours ,_ de quelque utilité a~x étrangers. Les bordigues, établilfemens [olides, fixes, perrJ;lanens, propriétés
particll!ieres, [ont autant fous l'empire de' la Cité. dans
l'étendue de laquelle elles, font cantonnées, ,que les t~rre5.
II n'en ell: pas de même· du ,poilfon pris en pleine. mer; il
n'ell point fous l'empire de la Cité; il eH envers la Communauté voifine du lieu où, on l'a pêché, à l'inll:ar d'une
marchandife de. tranût; e;ette Communauté ln'~H pour elle
( qu'un lieu. de patrage.
c' •
.
• L~s ~ordjgues fon~ de vrais ~mmeubles j & l'~n doit con~
�DU PAL Al S DB
PRO v 2 N C B.
'r'~9
'venir que les corps permanens attachés au fol, qui ont par'
eux-mêtlles une valeur réelle & intrinfeque, font fufceptibles
<l'encadall:rement. Or les bordigues fom un compofé de ces
différens attributs; elles font établies fur un démembrement, fur une portion de mer, in diverticulo maris que les
Auteurs comparent ad territorium. Elles font permanentes.
Cette portion de mer appartient en propriété au partjculier;
perfonne n'ell: e,n droit de le dépoiféder. La pleine mer ef1:
commune à tous; cette 'portion de mer ef1: fufceptible de
parrimonialité, de fiabilité, cnmme tout héritage. Les bordigues ont une valeur réelle & intrinfeque, puifqu'elles font.
dans le commerce des ventes & des échanges, conlme. tout
fonds particulier. La ,mer en général n'e{~ point taillable;
mais ces retranchemens (ur la mer, ces fortes de lats, ces
ports confacrés à la pêche fom taillables comme les champs:
lacus.quO{f1lC piFatoi-ios G' portus in cenjùm dominus deferre
de6et.
Les, chofes mobiliaires qui ne tiennent point' à un corps
fol ide , qui ne font-point permanentes, telles que les filets
employés par les pêcheurs qui vont pêcher en pleine mer
ou fur les bords, [ans avoir une affiette fixe , 'ne font point
aujourd'hui & fuivant les Loix, modernes fufceptible~ d'encadaftrement. Mais les filets fixés filr· un retranchemenr de
mer, attachés à des cannes plantées dans le lit d'un canal,
& par .conféguent fur une terre fer.me furmontée d'eau, font
encadaftrables, parce qu'ils ont une valeur réelle & intrinfeque, foit par le produit qu'on en retire, oit par la valeur
inrrillfeque du fol de la mer, auquel ils font arracliés & unis·
individuellement.
- La prétention des propriétaires "des bordigues bleife encore l'aB:e le plus folemnel ; elle contrarie des aveux, une
poffeffion, des arrangemens économiques dont le renverfe_
ment entraîneroit la ruine ?e la Communauté de Martigues;
elle ell: en oppofition"à tout ce qu'il y a de plus facré dans
l'ordre focial. Par le traité.du 21 Avril 1 s8 t, les Irois quar_
tiers conviennent entr'eux de s'unir & de ne plus former à,:-
\
•
�~o
JOURNAL
l'avénir qu'une feule Communauté. Or, quel écoit le te'rroir
de l'HIe? Ce quartier n'en avait aucun; les bordigues étaient
fan unique rèlfource; il écoit forcé d'impofer fur les 'bordigues, & de n'impofer que fur les bordigues.
Il el1: démoDlré par tous les cadal1:res, par tous les
comptes tréforaires de la Communauté de l'IDe, par les
, cada{hes de Ferrieres, qu'avant ce traité & depuis 1398,
époque où les livres terriers ont commencé à fe former,
les bordigues étoient allivrées & avaient accoutu'mé de pàyer
la taille. Or, la coutume d'enc~dal1:rer les bordigues n'av oit
rien de vicieux; elle écoit fondée autant fur la loi de la 'néceffité, que fur l'ordre naturel des chofes, filr le texte des
Loix Romaines ~ des Statuts.
On répondait pour les propriétaires des bordigues, que
la Communauté du Martigues voulait que les bordigues
{ulfent encadal1:rées à plein, à l'inl1:ar des fonds de terre; elles
ne devoient l'être que comme engins. Ce qui fait l'engin...,
c'el1: la nature du fruit qui n'el1: que d'indul1:rie; car c'el1: la
faveur de l'indul1:rie qui fait la faveur de l'engin. Les bordigues ne font pas l'ouvrage de la nature, elles font uniquement l'ouvrage de l'homme; car il ne faut pas confondre
la mer & les bordigues confiruites fur la mer. La mer el1:
formée par la nature, cela el1: vrai; & ce qui l'el1: autant,
c'efi qu'il n'y a que la main de l'homme qui puilfe conftruire les bordigues: il faut la mer pour les bordigues,
comme il faut la terre & l'eau pour les moulins & martinets'. S'il faut des ouvriers" des gens de l'art pour conf.
truire les moulins, il faut également des ouvriers, des gens
de l'art & du métier pour confiruire les bordigues.
D'après les véritables maximes, on tient qu'il faut encadàfirer le [01 de la terre, & jamais celui de la mer, parce
que la terre feule tombe en véritable propriété, & parce
que la mer ne peut donner des fruits naturels. On ne trouvera nulle part la mer encadaHrée comme un a'c'elfoire de
la terre. Les Loix que l'on a citées n'ont aucun rapport
~yec la queHion pré[ente) ni même avec la matiere des enci\da!l~emeo~~
,
"
�DU
PAL AIS
DE
PRO VEN C E.
161
cadafiremens. Pourquoi vouloir difiinguer l'engin qui tient
à un édifice, de celui q\li n'y tient pas? N'd!:-ce pas toujours la main de l'homme qui difpofe l'engin, qui l'entre-'
tient, qui le conferve? N'eU-ce pas l'induHrie de l'homme
qui en perçoit les fruits tous arJificiels?
Ce n'dt rien dire d'utile que de dire que les lacs & les
rlvieres peuvent être infcrits dans le catalogue du cens qui
-n'el!: pas exaétement notre cadaftre. S'il faut les y comprendre, ce n'efl: & ce ne peut être que fuivant la Déclaration de 171). Le fruit artificiel eU plus coûteux à percevoir, il eH plus cafuel': voilà les motifs de la Déclaration de 17 I), qui veut que les engins ne foient enca'daftrés qu'à la moitié de leur valeur. Une bordigue eU emportée' annuellement, fouvent plulieurs fois d~ns une mêm e
année. Ainli le fonds du produir tl'une _bordigue en incertain; le fol d'une bordigue n'eU pas' fonds de terre;
les fruits en font ca fuels & indultriels. C'eU ce qui fait que
la valeur des bordi.gues diminue toujours, tandis que celle des
fonds de terre augmente.
.
C'eU' une abfurdité de préfenter le poiffon produit par
les bordigues comme fruits naturels. Sans doute le poiffon
eU produit par la nature, & il a cela de commun avec
tQut ce qui exiUe: mais il n'efl: pas produit par la bordigue. La bordigue n'en que moyen d'arrêter & de conferver,
& non caufe produétrice de la chofe même. Dans la bordigue c'eU l'indufl:rie qui fait tout; c'eU elle qui difpofe
& prépare le local; c'eU elle qui perçoit des ~ruits artificiels qui ne renaiffent pas dans le même local. Ote'l tout
ce qui tient à l'induHrie, que reftera-t-i1? Une mer f1uïde
& ouverte aux plongeurs qui n'y prendront rien.
. Dans les engins, c'd!: l'engin qui efl: moyen de produit,
comme ici ce follt les cannes & la main du pêcheur. Si
dans les engins on ne porte point la matiere, & fi on n'y
emploit pas la main de l'homme, Qn n'a fait aucun fruir.
II en dl: de même de la bordigue: li on n'y arrête pas lepoiffon de paffage; li on ne l'y attire pas, il n'y a rien
Années 178;l..
&'ftiv,
-
X
�t62.
JOURNAL
à Y percevoir. Delà les fruits de la bordigue. font néce1fai";
rement artificiels. Le poi!fon eU le fruit de la mer, comme
les oifeaux font le fruit de l'air. On appelle fruit 'luod
renafcitur, cela el1: vrai; mais ce qui vient par remplacement, ce qui peut venir ou ne pas venir, ce qui ne fe remplace que par indulhie, n'eH pas fruit naturel, mais arci~
ficiel & indufirieux. La mer réguliérement n'eH pas im po{able; elle peur cout au plus la devenir à raifon du profit
exclufif qu'on en retire; mais ce profit ne conGne qu'en
fruits cafu'els & indufiriels. La terre' coûte à exploiter, mais elle donne fouvent des produaions (pontanées; elle donne
-toujours des fruits naturels qui n'appartiennent point à l'indunrie dans leurs progreffions locales.
Qu'importe qu'avant 171) -les bordigues [u!fent encadaftrées _pour l~ tout? Elle's l'écoient mal-à-propos. Avant 171)
n'y avait-il pas des moulins encadafirés à plein? Cela dé- ,
pendait de l'ufage des lieux., Si aujourd'hui on trouvait quelque moulin encadafiré pour le tout, on réduirait cet encadal1:rement à la moitié; & loin de fe faire un faux fcrupole de coucher au cadanre, on le réformerait par prin,cipe & par devoir. Qu'importe que les bordigues aient été
mentionnées lors de l'<l1Iàuagement? Le cadaHre peut diminuer, l'affouagement refie; le cadaHre varie en bien ou en mal.
Il y a des fonds emportés, d'aurres qui font dégradés, n?importe; l'affouagement I.elte; à plus (orte raifon doit-il rener,
quoiqu'on ait mal-à-propos allivré les bordigues.
Les propriétaires des bordigues ayaoc demandé l'arbitrage,
il fut décidé qu'il y avait dans les bordigues deux parties à
diftinguer: les terres qu'elles bordent, qu'on appelle fedes,
qui font cultivées ou culcivables, & les eaux que les fedes
renferment; que les fedes devaient être mifes à la taille
comme les autres fonds, mais que les eaux ne devoient l'être
que pour la -moi,tié de leur valeur. Les propriétaires acquie{.
cerent à cette déciuon, la Corn munauté s'y refufa ; la Province retira alors fan intervention.,
Par Arrêt de la Cour des Aides du 10 Avril 1783, au
,
•
�DU
PALk1S
DE
P-ROVllNCE.
163
rapport de Mr. le Confeiller de la Galiriiere fils, il fu~ ordonné que les bordigues feroient impofées & mifes à la
taille; favoir; les ftdes pour toute leur valeur, & les pêcheries ou bordigues pour la moitié de leur valeur. Ecrivant
Mes. Alpherao', Serraire, Pafcalis & Porralis.
1
ARRÊT
XXII.
SUI; la vente & le déhit du ftl.
L
E 14 Février 1778 François Maurel, du lieu de RouifetJ'
fut arrêté à la Ballme, fauxbourg de Siileron, par les
Employés, qui lui faifirent foixante livres de fel qu'il avoit
acheté de Jofeph Imberr, Mulerier de la même ville, fous
le prétexte qu'il n'avoit aucun billet de gabelle ment , &
qu'un Arrêt du Confeil du 30 Juin. 1 63 1 défend expre1Tément aux mbitans des villages de Provence limitrophes du
Dauphiné, à deux lieues & au dt'1Tous, de lever du fel autr~
patt que dans les greoiers & entrepôts du Roi. Les '2.3 Mai
& 18 Juillet fuivant, pareilles faifies à François Ducors ,
Bourgeois de Vau me il , & à Jean-François Sanin. Ce dernier étoit nanti d'uri billet de gabellement. La Viguerie de
Sil1:eron prit le fait '& caufe de ces parriculiers, & la Province intervint dans l'inl1:ance.
On difoit pour la Province & pour la Viguerie, que le
[el efi en Proveoce une denrée de premier befoin; l'ufage
en efi néce1Taire à la faoté des habitans, il prévient des
maladies donc la chaleur du climat & la qualité des alimens
les menaœnt fJOS ce1Te. DJOS la' Haute-Provence, où les
pârurages font naturt'Ilement durs & âpres, on el1: obligé
de le prodiguer aux belliaux, & on [ait que les befiiaux forment l'uni'lue re1Tource de ces canto,ns, qu'ils y fou tiennent
l'agriêul[u_re p,lr'1l!engrais dont ils, fertililent des terres en
elles-mimes' froides & légeres, en qonnant une valeur aux
X2.
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.
montagnes, & en les préfervant d<:s défrichemens, & qu'ils
..
y établi/fent le comrt,Jerce de la lame..
Il importOit confequemment de favonfer la CIrculation
d'une denrée auill précieufe, & de ne point tromper le vœu
de la nature,. qui l'avoit mife au rang de nos propriétes territoriales. Si par l'établif[ement de la gabelle nos droits primitifs fur le fel ont fouffert des atteintes, il étoit au moins
juHe de confe,rver aux habitans un droit dont le befoin les
force à fe montrer jaloux; celui du trafic en gros procure
des avantages réels à la Haute-Provence; les, Ménagers font
les commerc;ans de leurs propres denrées, ils les exportent
dans les villes de la Baffe-Provence fur des mulets ou des
charrettes, qu;à teu'r retour ils ont l'attention de charger des
fels qu'ils achetent en gros aux greniers du Roi, & qu'ils
revendent en détail dans les lieux qu'ils habitent; c'efi un
bénéfice qu'ils fe ménagent par cette efpece de négoce véritablement digne de proteél:ion, & dans tous les temps protégé par les Souverains à l'ombre de nos libertés & de
nos franchifes. Indépendamment de cet avantage, la HauteProvence en général y g~gne celui de l'exportation de fes
fruits & d'une débite plus confidérable & plus facile du fel,
de cette denrée qui vivifie les campagnes.
Un des paél:es confignés dans l'Edit du mois d'Août 1661';
porte que le [el demeurera lihre & en commerce pour êtré débité par toute forte de perfonnes, a la charge feulement_ par
ceux qui le vendront de -n'en point ahufer, {,. d'ohferver les
Ordonnances & les Réglemèns généraux des gahelles. Peu de
temps après ce(te époque, le Fermier ayant fait établir des
regratiers pour la vente du fel dans toute la Province, ce qui
fembloit l'interdire aux habitans, les Procureurs du Pays en réc1amerent, & par l'Arrêt du Confeil du 6 Juillet 1666 la fuppreillon des regratiers fut ordonnée; on leur fubflitua des vendeurs de fel à petites mefures établis fur les côtes de la
mer, filr les frontieres, dans les villes & bourgs.confidérables, lefl;uels vendeurs de fel, efi-il dit, feront nommés par les
Confùls des lieux a la premiere retluifilion du Fermier, & à
164
�D II .p A L ~ l S D B PRO VEN ·c E~'
16,.
{on âefaut par le Fermier. Les Con fuIs des villes & lieux
du pays ont celfé d'ufer du droit qui leur étoit acquis, parce
qu'ils n'ont pas voulu répondre civilement des Prépofé.s.·
mais le droit de nomination ne leur en eit pas moins dé-'
volu, & n'en conlhve pas moins au commerce du f~1 ce
caraél:ere 'de franchife ,& de liberté dont il avoit joui & dû
jouir dans tous les temps. Quoi de plus propre à confolider
à perpétuité les droits du pays & à repoulfer les faulfes induél:iôns du Fermier, que cette difpofition remarquable: G'
néanmoins permet Sa Majiflé aux Voituriers de l-adite Province de vendre & déhiter le fel qu'ils auront gahellé aux
greniers de ladite ferme, dans tous les lieux de laditç Province, ainji qu'ils avaient accoutumé, d la mefiLre du minot,
demi minot t,; quart de minot feulement, & fans .en ahufer, &
en gardant les Réglemens faits fur ce fujet.
En 1764 le Ferfl1ier attaqua des Muletiers de Seyne, il
procéda à des faifies; la Viguerie prit leur fait & caufe, le
pays intervint; il réclama fes droits, l'exécmion de fes titres, b liberté acquife au commerce du fel. Le Fermjer reprochoit à ces Muletiers d'avoir fait des ventes fédentaires,
lorfque leur droit fe bornoit à aller de village en village, &
demandoit enfuite qu'il fût inhibé aux Muletiers de Provence
de'porter, à trois lieues_ des fronti,eres aucun fel, fans déclarer,
lors de la prife du biller de gabellement, le lieu de la deitination;'
la confommation y devant en être faite, & le fel y étant
parvenu, ne devoit plus en fortir. Il prétendoit que les
Muletiers ne peuvent pas vendre du fel dans les boutiques,
mais feulement dans les rues & aux marchés publics; qu'ils
ne doivent livrer leur fel aux étrangers. du lieu où ils l'expofent en vente, & il vouloit alfujenir tous les habitans de'
la campagne à n'en porter à leur demeure qu'avec des billets
de gabellernent; mais par Arrêt du 9 Avril 1767, la Cour
déclara maintenir les Voituriers de la Province, en con•
. formité de l'Arrêt du Confeil du 6 Juillet 1666, dans ledroic
de vendre & débiter le fel qu'ils auroient gabellé aux grepiers de la ferme, dans tous les lieux de 1.a Province , ain~
/
�166
Jou RNA L
qu'ils avoient accoutumé, à ia mefure du minot, demi mÎnot& quart de minot feulement, fans en abufer, & en gardant les
Réglemens fàits fur ce fujet; elle fit inhibitions & defenfes
au Fermier de troubler les Voituriers dans l'exercice de
cette faculté, à peine de 1000 liv. d'amende, & d'en être
informé; elle prononça la révocation du fecond chef d'un
Arrêt précédemment rendu fur requête; & interprérant le ..
fecond, elle ordonna que les inhibitions portées par icelui,
de faire des amas & entrepôts de fel fur les frontieres, ne
pourroient comprendre les dépôts & amas néceifaires pour
les ventes que les Muletiers & Voituriers font dans les lieux
limés fur les fromieres des fels par eux gabellés aux' greniers de la ferme, & ce foit avant ou après la durée des
ventes. Le Fermier fut condamné aux dépens. Il attaqua
cet Arrêt au Confeil, mais il abandonna fa prétention, &
c'efl: la même qu'il renouvelle aujourd'hui.
L'Edit de 1664 ne fou met les Voituriers aux billets de
gabellement qu'à raifon du fel gabellé aux greniers du ROI
où les Voituriers vont fe pourvoir; mais cet Edit ne difpofe
pas à 'l'égard du fel q~e les Voituriers revendent en minot,
demi minot ou quart de minot; les acheteurs de ce fel
vendu en détail ne font point fournis à· rapporter des billets
de gabellement: & comment.le pourroient-ils? Ceux qui.
vont fe pourvoir aux greniers n'en rapportent qu'à raifon de.
la quantité de fel qu'ils 'prennent à la fois; il leur efl: impoffible de les divifer & fubdivifer en autant de billets qu'ils
vendent de minots, demi minots & quart de minots. Le
Fermier trouve dans l'art. 2.8 de l'Edit de 1664, dans l'Arrêt
de 1738, dans les arr. 168 des Lettres-patentes du 18 Mars
1687,168 de celles du 19 Août 1726, & 167 de celles
de 1738, l'obligation impofée à tour acheteur de rapporter
des billets de gabelle ment ; la Province y trouve au contraire que cette obligation n'efl: impofée qu'aux vendeurs à
qui on délivre des quantités de fd dans les greniers. Ceux
donc qui achetent n'y font pas fc umis; car le Légilbteur.
n'ignorait pas que le fel était un ffiâ h~<I(.hfe libre & eg.
�DU PALAIS 'nB PltOVBNCIl:
tt;7
commerce; il n'ignoroit pas qu'il éroit permis d'en acheter
ailleurs qu'aux greniers. Les regratiers eux-mêmes ne font
pas dans l'ufage de délivre'f des billets à ceux qui vont fe
pourvoir chez eux: ils feroient donc en contravention.
EH-il vrai que lès Muletiers, après avoir gabellé du [el aux -greniers du Roi & s'y être pourvus d'un billet de gabellement, ne puiffent' vendre ce [el que dans les lieux de
leur paffage? Rien n'eft plus contra'ire à l'Arrêt du Confeil
du 6 Juillet 1666, & à toutes les Loix protearices du commerce du fel en Provence. Le Légiflateur n'a pas diilingué;
il a permis aux VOIturiers de vendre & débiter le fel ga,bellé aux greniers de la ferme, dans tous les lieux, ai'!fi fu'ils
avaient accoutumé.
Le Fermier excipera-t-il encore de l'art. 28 de l'Edit de
,1664, of! il eH: dit que tous gabellans doivent porter les
[els aux lieux pour lefquels ils prennent des billets de gabellement? mais il réfulre de ce même article qu'il eil expreffément permis aux voituriers gabellans de faire des ventes
féd.entaires dans les lieux pour lefquels les billets de gabellement ont été pris ~ & que tien n'eil plus indicatif de
" la permilIion des ventes fédentaires que cette difpolition.
Le même moyen était emplqyé par le Fermier en 1767,
& on lui répondoit que la nécelIité publique exigeant qu'il
y eût dans chaque lieu confidérable un débit affuré du [d
néceffaire à fes habitans" le Roi avait fort à propos fixé
le nombre des vendeurs de fel' à petites mefures. Mais comment le Roi auroit-il fixé le nombre des Muletiers, comment les auroit-il attachés à telle ,ou telle deilination locale? Leur commerce eft libre, dépendant de leur volont~;
les ventes qu'ils font font facultatives, & par conféquent
accidentelles. Il eft permis al!x Muletiers de vendre dans
tous les lieux de la Province: voilà la Loi; elle ne dit pas
qu'ils ne vendront qu'en paffant ambularoiremenl & fans
s'arrêter dans les' lieux of! ils porteront leurs [els; elle ne
fixe point' la durée du féjour qu'ils doivent y faire: elle
leur lailfe donc la liberté d'y demeurer jufqu'à ce que leur~
ventes foient a,hevées.
�~w
,
JOURNAL
La méme Loi ne dit pas que le fel vendu par les Vai':
turiers ne puiffe étre tranfporré & qu'il doive étre confommé
au lieu de la vente; celui qui fait une vente permife, peut
vendre à quiconque fe préfente, & il eH permis à route
perfonne qui trouve une marchandife licitement expofée en
vente d'en acheter. Tel eH le droit common, le droit des
gens; ft les achats en éroient interdits aux étrangers, aux
'habitans de la campagne, quel eH le Voiturier qui oferoit
entreprendre ce commer~e? Enfin, combien de -lieux où on
. ne trouve paine de revendeurs à petites mefures? combien
d'habitans épars à la campagoe? Ceux-ci n'auraient donc
point la liberté de fe pourvoir du fel qui leur eH néceffaire chez un Voiturier' qu'il leur eH lib-re d'aborder à toute
heure; cependant il -eH reconnu que cette denrée eH principalement d'un befoin abfolu pour les' gens de la canipagne;
on faie encore que les greniers royaux, que les boutiques
des revendeurs à petItes mefures ne fane pas libres à
t.out~ heu ré ; que tel Ménager qui ardve à Si!leron pour
charger un demi min,ot de fel, eil: obligé de le prendrechez un 'Voiturier qui en fait le co-mmerce, parce qu'au
grenier on lui en a refufé, ou on l'a -fournis à un délai qui
lui ferait très-coÎlteux.
Le Fermier excipe encore d'un Arrét rendu le 30 Juin
163 l , qui ordonna l'e,xécution de divers Arréts& Réglemens antérieurs, fit' défèrlfes aux Receveurs des greniers
du Roi d'expédier du fel autrement que fur le certificat des
Confuls des lieux limitrophes du Dauphiné à deux lieues &
au delfous, & qui enjoint aux Confuls de n'expédier de ces
certificats qu'à prorata de l'ufage des' habitans, & de l'exprimer avec leurs noms, furnoms & demeures. Cet Arrée,
ajoute-t-il, a été inrerprété par une Séntence du Viliteur des'
'Gabelles d'Aix, qui renferme les mémes difpolitions.
, D'abord cet Arrét fut ciré dans 'l'affaire de la Communauté de Seyne; le .fameux Edit du mois d'Aollt 1661 a
opéré un droit nouveau LOuchant la régie des gabelles, &
[on enrégifiremenc n'eue lieu que fous cerçaioes éondi:ions,
. '
"
parnl.~
�DU PALÂ1S DB PROVBNClI.
i09
parmi lefquelles on compte celle qui affure la libèrté du
trafic & du tranfport du' fel dans toute la frontiere. La
regle des lieues frontieres fut donc abrogée par ce paéle.
L'Edit du mois de Février 1664 ne porre aucune gêne fur
le trafic ou le tranfport du fel aux endroits fitués à trois
lieues des frontieres. Le Fermier ne peut donc faire aucun
ufage de cet Arrêt de 163 1: les temps font changés; un
nouvel ordre des chofes a fuccédé à ce jugement relatif à
des circonllances qui depuis long-temps ont ceffé d'être.
Arrêt du 19 Juillet 1782, au rapport de Mr. le Confeiller
de Bec, qui en concédant aéle' à L~urens David, ci-dev,!nt
Adjudicataire général des fermes & gabelles, de la rémi/Iion
par lui volontairement faite du fel & mulets faifis, déclare
n'y avoir lieu de prononcer fur les- procès-verbaux de faifie
dont s'agit, non plus que fur le premier chef de la requête
des Con fuis de Silleron, Chef de Viguerie; fans s'arrêter aux
fins prifes par ledit David.,.dont l'a démis & débouté, ordonne que l'Arrêt du Confeil du 6 Juillet 1666, & l'Edic
du mois d'Août 166 l , enfemble l'Arrêt de la Cour du 9
Avril 1767, feront exécutés felon leur forme & teneur; faifant itératives & plus amples inhibitions & défenfes audit
David & à cous autres de troubler les Voituriers dans l'exercice de la faculté de vendre du fel.qu'il.s auroilt gabellé des
greniers royaux, dans lOUS les lieux de la Provihce indifiinccement, foit qu'il y ait un grenier établi., ou qu'il n'yen aic'
point, ainfi qu'ils avoient accoutumé, à la mefure du minot,
demi minot & quart de minot feulement, fans en abufer,' &
en gardant les Réglemens faits fur ce fujet, & de troubler
les habitans de la Viguerie d'en acheter, à peine de mille
livres d'amendè , & fur les contraventions d'en être informé
de l'autorité de la Cour; condamne David aux dépens envers toutes les parties. Ecrivant Mes. Alpheran & .......
1
'Années 1782 & fuiv.
�ARRÊT
.
XXIII.
Un .luge peut-il être pris. 4 partie, fans avoir été intimé fur
l',!ppel de fan jugement'?
Peut-il!'être dans une inJlance fèparée de celle dans laquelle il
.
, ,!uroit été pourfuivi ?
L'aRion en dommqges-intérêts paffi-t-elle contre les héritiers?
E 3 Janvier 1768 Mr. de Rouffet fe pourvut pardevant
le Lieutenant de Forcalquier en condamnation conrre
Taffy & Amic, Fermiers de fa terre de Rouffet, débiteurs
de la fomme de 3317 liv.
fols pour prétendns arrérages
de rente. Le l 'Î ~u même mois Talfy & fes enfans vont
faiGr Amic à Manofque,.& le confriruem prifonnier. Tatry
préfente enfuite une requête de plainte contre lui au Juge
de Rouffet en banqueroute frauduleufe; l'information efr prife;
Amic efr décréçé de prife de corps & traduit aux prifons
de Rouffet; il Y eut plufieurs cO'ntinuations d'information,
qui produifirem un déçret de prife de corps contre Fournier,
& pluGeurs décrets d'ajournement ou d'affigné contre divers
l!ccufés de complicité:
Fournier & 1\mic appellerent du décret de foit informé
& de route la prpcédure,.& p<tr Arrêt du 20 Juin 1771 la
procédure fut calfée comme nulle & oppreffive, avec dé,pens, dommages & intérêts, Me. André, Lieutenant de J.uge
& le Procureur JurifdiaiQQnel furent décrétés d'affigné. Me.
André prêta fes réponfes le 'Î Décembre de la même année,
& fut confritué prifonnier 11 la requifition de Mr. le Procureur-Gén.éI:al; les Officiers de jufrice furent entendus; leurs'
réponfes amenerem d'autres décrets contre divers particuliers qui furent auffi entendus; ils fubirent le procès exrraordinaire. L'inUruaion traîna pendant près de quatre ans. Dans
l'intervalle Me. André ,après deux ans de prifon, fut élargi
L
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PALAIS
DB
PROVENCB.
171
Juin 1774 il fut condamné
pour caufe dé riJaladie-, & le S
à être admoneHé, pour être plus circonfpea à l'avenir dans
l'exercice de fes fonaions, & condamné aux dépens.
Le lieur Fournier, après avoir fait taxer les dépens que
l'Arrêt de 1771 lui avoit adjugé conrre TaITy, fit procéder
à la liquidation de fes dommages & intérêts; il fit faire un
rapport; mais lorfqu'il voulut le merrre à exécution, il fe
trouva arrêté par les failies & les procédures de Mr. de
RoulTet, & par l'inHance que la femme de Taffy avait formée en répétition de fa dot; il demanda alors, le I l Mars
177 3, la permiffion de prendre Me. André à partie, pour
faire prononcer contre lui la commune e.xécurion de l'Arrêt
de 1771, au chef des dommages & intérêts; cette permiffion lui fut accordée. Me. André fe pourvut en révocation
du décret, & il en fut débouté le 10 Novembre fuivant,
avec dépens. Il fe décida enfuite à arraquer l'Arrêt du 20
Juin 1771 par la voie de l'oppolilion "en tant qu'Amie prétendroit lui oppofer cet Arrêt dans .}'infiance en prife à
partie, comme ayant jugé qu'il était l'auteur de l'oppreffion
qui avoit donné lieu à la caifation de la procédure, lui étant
abfolument indifférent que cet Arrêt fublifiât, dans le cas
où Amic-reconnoltroit que cette oppreffion Ife procédoit que
du fait de l'accufateur. Fournier répondit que l'Arrêt de
1771 avoit jugé deux chofes: 1°. qu'il n'était point coupable; 2". qu'il avoit été opprimé, & que cette oppreffion
procédoit éga!emenr & du fait 'de Taffy, & du fait du' Juge;
le premie.r dans fon accufation, le fecond dans )'infiruaion
de la procédure; que la Cour, qui avoit vu cerre accufation & cerre procédure, avoit calTé cerre derniere comme
nulle & oppreffive; qUe cerre prononciation devoit s'appliquer contre taus les auteurs de l'oppreffion, quoique l'Arrêt
n'eût pas Hatué définitivement contre Me. André, qui n'était
pas au procès. Fournier obtint le déboutement de cerre oppolition le 1 S Mars 1774, avec amende & dépens, & enfuite la condamnation à la commune exécution des dommages & intérêts prononcés contre Taffy par l'Arrêt de
Y2,
�172.
JOUR.NAL
177 1 , avec dépens. Me. André en pourfuivir la caffiaion au
Confeil, il en fut débouté; il ptit alors la voie de la requête civile; il demanda & obtint de Sa Majefié, le 3 Juillet
1776, des lettres de refiitution envers ledaps du temps.
Fournier s'op pofa à l'entérinement de ces lettres, comme
obreptices & fubreptices; il fou tint de plus que Me. André
était. non recevable, fait parce que ces lettres n'avoiel1t pas
été vérifiées en la Cour, foit parce qu'il n'avoit pas' levé
des lettres de requête civile en chancellerie. Ces fins de
non recevoir fùrent adoptées par l'Arrét du 19 Juillet 1777,
fauf à Me. André de fe retirer au Roi pour obtenir de nouvelles lettres .de refrirueion envers le laps du' temps. Me.
André attaqua de nouveau cet Arrêt au Confeil; il mourut
le 13 Janvier 1778. Mre. André fan frere fut nommé euteur aux
enfans pupilles, & le 2 Mars 1779 il confentir en cette qualité
une tranfaélion avec le fieur Fournier, par laquelle il s'obligea
de lui payer encore la fomme de 7000 liv. ourre celle de 17))8
liv. 14 fols pour laqueJle celui-ci s'éroit déja colloqué. Après
cet arrangemenr, Amie vint à fan rour prendre les hoirs
de Me. André à panie, pour faire prononcer contr'eux la
commnne exécurion de , l'Arrêt du 20 Juin 177 1, qui en
calfant la procédure infiruite contre lui par leur pere à la
requêre de Talfy, avoit condamné, ce dernier aux dommages & intérêrs. .'
On .coanoit pour les hoirs de Me. André plufieurs fins
de non-recevoir; la premiere, un Juge pour êrre pris à parrie
doit êrre intimé fur l'appel de fan jugement; la fecond'e,
l'aélion de la partie civile devoit être intentée enfuite du
décret d'affigné; 3°. l'aélion en dommages & intérêts pour
délit n'efr pas donnée contre les héritiers du coupable, à
moins que la caufe n'ait été contefrée avec lui, ou que le
défunt n'ait profité du délit. Prendre un Juge à partie, c'el!:
l'intimer fur l'appel de fon jugement; c'eH le faire defcendIe de fOl) Tribunal, pour venir foueenir fon jugement comme
partie; c'efr le traiter comme une partie. Or, de même que
la partie efr appellée pour défendre le jugement dont el!:,
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PALAIS
DB
PIlOVl!NCl!;
173'
'appel, il faut que le Juge air la même fdCUlté. Si le jugement étoit réformé, & que le Juge ne fût pris à partie
qu'après, il arriveroit qu'il feroit déclaré bien intimé fur un
appel, fans avoir la faculté de défendre fur cet appel & de
foutenir le bien jugé.
Prife
partie & intimatlon de Jug.e font des mots fynonymes dans le langage des Loix; ils font employés l'un &
l'autre conjoinrement dans tous lestêxres qui, parlant des
cas de prife à partie, difent que les Juges feront pris à partie
& intimés en leurs noms. Le Juge pris à partie conclut à
la folle i~timation t comme la partie au fol appel. Comment, s'il n'ea pris à partie qu'après qu'un Arrêt a réformé
fon jugement, condurra-t-il à la folle intimation, au fol
appel?
Anciennement les Juges, tant royaux que fubalrernes;
éroient obligés de fourenir le jugé, fuivant l'Ordonnance du
Roi Philippe VI. de l'an 1334. Cela ne s'obferve plus à
préfent, & un Juge ne peut être intimé en fon propre, ni
puni pour le mal jugé, fi ce n'eil: qu'on ne fourienne & q'u'on
ne prouve qu'il a mal jugé, per gratiam aut Jordes. ( Bornier fur l'Ordonnance de 1667, tir. 2'), art. 4. ) Le Juge
eil: tenu aujourd'hui, dans le cas de prife à parrie, de foufènir le jugé, comme il l'éroit aurrefois dans. tous les cas.
Il faut qu'il foutienne le jugé, qu'il foit intimé en ce cas
fur l'appel de fon jugement, comme il· l'étoit dans tous.
La conféquence de ces principes
que le Juge n'ayant
pas été intimé pour foueenir le jugé, la prife à partie n'eil:
plus recevable, 1°. parce que la partie qui ,a fait juger
l'appel contre la partie feule qui a obtenu le jugement,
n'a attaqué ce jugement que comme injuae; qu'elle a déclaré par fon fait qu'elle regardÔlt le mal jugé comme le
fait feul de la partie, & que le Juge a contre la prife à
partie intentée après contre lui, l'exception de la chofe jugée;
2°. parce que n'ayant pas été appellé pour fOlHenir le jugé,
le Juge -ne pourrait plus le foutenir, & feroit expofé à être
,condamné (ur le fondement de l'Ar'rêt réformatif de fo.Q
a
ea
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174
.
Jou RNA L
jugement 1 lors duquel Arrêt il n'auroit pas été entendu~
Les Juges 1 filivant une Ordonnance de Fran<;:ois Premier
du mois de Novembre l ~40 1 ne pouvoient être pris à panie,
finon que l'on foudnt par le relief qu'il y avoit dol ou
erreur évidep.te en fait ou en droir 1 & qu'il en fùt fait expreffément mention dans le relief en cas d'appel. Quoique
cecce déclaration dans le relief ne (oit plus en ufage, cecce
Ordonnance prouve néan'moins que l'appel doit .être relevé
contre le Juge que l'on veut prendre à pàrtie.L'aétion qu'Amie intente ne lui étoit pas ré(ervée; il
prend le Juge à pa~tie fur la procédure caffée par l'A rrêt de 1771. Il demande que cer 'Arrêt foir déclaré
commun & exécutoire contre Me. André, quant aux dommages & intérêts; il demande le profit de l'intimation du
Juge fur cecce procédure; il eH non recevable à demander
ce profit, puifqu'il n'a pas intim,é le Juge filr cet appel,
Comment peut-il fe flatter de faire rendre commun & exécutoire contre Me. André un Arrêt lors duquel celui·ci n'a
pas été entendu? L'exécution de l'Arrêt demandée contre le
Juge qu.i auroit pu être intimé en (on propre n'a rien de
commun avec l'exécution dont l'Arrêt eH fufceptible; c'e!!:
un autre [dit, une autre partie, une autre queUion à juger;
fe Juge ne peur être condamné à [ubir l'exécution de l'ArrêG
qui a réformé [on, jugement, tandis que cet Arrêt nl; le condamne pas, & qu'il n'a pas jugé le nouveau fair, la nou-'
velle partie, la que!l:ion nouvelle que la commune exécution contre ce Juge préfenre à juger. Amie veut rendre
concre lui l'Arrêt COmmun & ,exécutoire; mais il ne 'pèut
faire encore Juger concre ce Juge l'appel de -la procédure
& l'intimer (ur cet appel. Il ne peut donc prendre le Juge
à partie, puifqu'il ne peur refever un /lutre appel fur lequel
ce Juge foit intimé. Ll-Arrêt de 177 l qui n'adj\lge les domJ'llages & intérêts que contre les querellans, feule~ par.ties;
n'efl: pas fufceptible d'une exécurion qui feroit (upponer ce's
dommages & intérêts à un tiers qui n'a pas été partifl & qui
n'y a pas ét'é condamné.
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PAL AIS
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PRO V Il Ne B.
'I7~'
Me. André fut par ce même Arrêt décrété d'affigné rur
la requilirion du minillere public; mais ce décret ne rérerve
pas ~ Amic la prire à parcie & fa demande en commune
exécution de l'Arrêt. Me. André a été accu ré par ce décret
d'un délit public commis contre des particuliers; ceux - ci
ont contre lui une aéHon en dommages & intérêts,
mais ce n'ell pas ~ rairon d'une prire ~ partie, & ces
dommages & intérêts ne font pas ceux qui ont été accordés ~ Amic. Il s'agit de faire condamner Me. André
comme coupable des délits dont il ell accufé, & non de
le fuppofer déja condamné par l'Arrêt de 1771. Le décret
d'affigné décerné contre lui par cet Arrêt répugne ~ ce.
qu'on fuppofe qu'il a été condamné; la Cour vouloit l'entendre, elle ne l~ condamnolt pas par l'Arrêt fans l'avoir
enrendu. Amic n'a pas intenté l'aél:ion en dommages &
intérêts, en fe rendant partie civile enruite du décret d'afligné; l'accufation a été jugée ~ la feule requête du minillere
'public; Amic n'a déclaré vouloir être .partie ni par la plainte,
ni par cet aél:e fubféquent, qui, fuivant l'article 5 du ritre 3
de l'Ordonnance de 1670, peut. être fait en tout état de
caufe. La procédure à la requête du minillere public a été
jugée, & Me. Andre a été abfous des prévarications, faux
& oppreffions dont il étoit accufé; il a été abrous des crimes
qui Juroient fondé l'aél:ion de la parcie civile: ainli l'aél:ion
de celle-ci après un jugement d'abC9lution eLl: non recevable.'
.
On ne contelle point les principes adoptés par l'Arrêt
du 3 Aoôt 168.5 rapporté dans le Journal du Palais, qui
a décidé que le jugement du délit, bien loin de Cervir à
faire abCoudre l'accufé de l'aél:ion civile, fert au conrraire
à le faire condamner. C'ell avec fondement que Joutre en
fbn traité de la jultice criminelle, parr. 3, liv. 3, rir. 5,
propofant la queltion de [avoir fi une parcie privée peut
agir après le jugement rendu fur la pourfuite de la parcie
publique, pofe pOllr la premiere re~le que fi l'accuCé a été
condamné par le jugement, la partie privée peut enfuit~
1
�'17 6
JOURNAL
intenter fan aél:ion pour fes dommages &, intéréts j quoi";
'lu'elle n'ait poin,t été partie, ni agi dans le ,cours du vrocè~;
mais fi par le Jugement rendu fur la plaInte de la partie
'publique, l'accufé ell: ab fous & déclaré innocent, alors la
partie privée ne ferait plus en droit d'agir & de faire juger
l'affaire de nouveau pour raifon de fes dommages & intéréts. Cette regle ell: encore attell:ée par Ferrieres en
fon Diél:ionnaire de droit & de pratique, va. ahfolution.
Me. André a été abfous fur l'imputation des vexations,
'des oppreffions envers les Prifonniers, par un jugement qui
l'admonête feulement d'être plus circonqieél: à l'avenir dans
l'exercice de fes fonél:ions. Or, fuivaIlt Ferrieres dans fon
Diél:ionnaire de droit ,. va. admonêter; la peine de l'admonition' ne, s'impofe qu'en matiere criminelle, & fe joint
ordinairement à l'aumône; l'admonition fe fait, toujours à
huit clo's, & n'emporte point de note comme la condamnation' au blâme qui ell: fuivie d'une amende. L'admonition
portée par le jugement ell: méme plus légere que celle
'lue Ferrieres met au nombre des peines; elle n'a pas été
jointe à une aumône; Me. André a été admonété', non
indéfiniment, mais fpécifiquement, d'étre plus circonfpeél:
à l'avenir; de forte que le jugement réduit à un manque de
circonfp~él:ion les faits pour l~fquels il étoit pourfuivi comme'
prévaricateur, & à raifon defquels ell: intentée contre lui
une prife à partie ou une· aél:ion civile en dommages &
intérêts. Ce n'ell:. pas même une peine que le jugement
lui inflige; c'ell: une admonition, une correél:ion en difcipline du fupérieur ~ l'inférieur.
La Loi donne contre les' Juges deux aél:ions différentes;
celle en prife à partie contre le Juge prévaricateur; l'aurre
en dommages & intérêts, lorfqu'il a enfreint des difpofitions
de l'Ordonnance dont l'obfervation lui ell: prefcrite, à peine
. de répondre en fon propre des dommages & intérêts des
parties. Ainu, quoique les Juges d'un Préudial n'euffent été
que réprimandés par l'Arrêt rapporté dans le Journal du
:ta.lais; tom. 2., pag. 'i3
fur la pourfuite du minill:ere,
public i
t,
•
�DU
P-ALAIS
DE
P.iOVENCE.
i77
'public, Ils furent juftement co!)damnés aux dommages &
intérêts de la partie. On les accufoit d'une contravention
à la Loi, & non d'un délit; infraél:ion dont la peine publique éroit rout au plus une réprimande, & qui éroit prouvée
par l'Arrêt qui leur infligea cette peine; infraél:ion qui les
foumetroit aux dommages & intérêts de la partie privée,
non comme caure de prife'à partie, mais parce qu'ils avoienc
enfreint une, difpofition qu'ils éwient tenus d'obrerver" à
peine de répondre en leur propre des dommages ~ intérêts des' parties.
Me. André n'eft pas appellé en garantie pout contravention à des difpofitions de la Loi qu'il fût tenu de garder, à
peine de répondre 'en fon nom des dommages & intérêts
des parties; il eH pris à partie comme prévaricateur; il eH
attaqué pour les dommages & intérêts de la partie privée, à
raifon dé faux, prévarications & opprelIions. Accufé ci-de- ,
vànt par le miniftere public des mêmes délits, il' n'en a pas
été convaincu; il n'a pas été condamné à la peine que ces
délits aumient méritée; il en a été abfous ; il a été limplement admonefté pour un défaut de circonfpeél:ion :: il n'y a
donc pas lieu à la prife à partie, aux dommages & intérêts
pour faux, prévàrications & opprelIions, puifque Me. André
.o'a été déclaré qu'imprudent.
On obfervoit eofuite pour les hoirs de Me. -André, qu'il
'eft inoui qu'une prife à 'partie ait été intentée contre un.
Juge après fa mort. Ml'. de Montvalon, en fon traité des
fuccelIions, tom. l , ch. 3, art. 24, après avoir examiné
cette quel1:ion d'après le droit romain, la dircute fuivant le
droit fran~ois, & pofe en principe que fuivanc narre jurifprudence & Je fentiment de nos Auteurs, J'aél:ion pénale
.. pour J'intérêt civil de celui contre lequel le délit _a été
commis, ne paffe contre l'héritier du coupable que lorfqu'il
y a eu conteftation en caufe du vivant du coupable & contre
lui, ou fi l'héritier a retiré quelque chofe de ce délit, encore qu'il n'y cLÎc conteftatioo en caure. Il cite Boniface,
rom. 2, liV. l , ch. 14; Buiffon en fon code, tit. ex de!. deff.
de Bezieux, Iiv. 9, ch.
§. 1.
Années l78:l. 6' fuiv.
Z
4;
...
�,178
Jou ri
N
A. i
On répondait pour Amie, que la prife'lI partie en fondéel
fur la conduite de Me. André dans le cours de la procé,dure, fur les oppreffions & les .excès en raut genre dont ce
Juge s'en rendu coupable 11 fan égard, & qui en le rendant le complice' de Talfy, oor dû le foumerrre folidàirenlent avec ce dernier aux mêmes réparitions. Les preuves
de ces excès font la procéd.ure elle-même; l'Arrêt qui l'a
déclarée oppreffive; le décret que ce, même Arrêt, en la
calfant, laxa, contre Me. André; le jugement qui, en terminant la procédure inHruite fur ce décret 11 la pourfuite du
miniO:ere public, le condamna 11 l'admone1tation & aux dépens; enfin l'enquête prife par .les Experts qui ont liquidé
les dommages & intérêts coorre Talfy, par laquelle la
preuve de ces divers 'excès a .reçu encore de plus grands
développe mens.
.
, Si enfuite du décret laxé contre Me. André par l'Arrêt,
du 2.0 Juin 177 1, Amie pouvoit avoir contre Jui u.ne aaion'
en dommages-intérêts, pourquoi n'eût-il pas eu égalem(~nt
la prife à partie? Sur quoi cette aaion en dommages-intérêts pouvait-elle être fondée, fi ce n'en fur les.. mêmes faits
qui ,avaient attiré 11 Me. André un décret d'affigné? Quels
éraient ces faits, finon la conduite de ce Juge dans l'inftruaion de la procédure, les vexations, l'oppreffion dont
il paroilfoit s'être rendu coupable? Or ces faits ne font-ils
pas les mêmes que ceux qui fonden~ la prife à parti~?
Qu'importe donc 11 Me. André ou 11 fes hoirs, qu'Amie ait
pourfuivi fan aaion par la prife 11 partie, ou par la voie
fimple des dommages-intérêts? Pourquoi faudroit-il que ce
Juge eût été en qualité dans l'Arrêt, pour qu'on pÛt en
ordonner contre lui la commune exécution? C'eH: précifément parce qu'il n'y éto,it pas qu'elle peut être ordonnée;
car autrement il eût été ou ab fous , ou perfonnellemenr con-.
damné. Pourquoi faudrait-il encore qu'il flu le repréfentant
de Taify? Ne fuffit-i1 pas qu'il fait fan complice & qu'on
, le prouve?
Tout Juge pouvait être intimé autrefois fur l'appel de
. fan jugement. Que ce jugement ftÎt attaqué fimplement
�DU
PAL.US
DB
179
PROVENCE.
:C:omme .injuRe, ou qu'il le fût par les moyens qui peuvent
fonder aujourd'hui la prife à partie, c'efl:-à-dire, que l'appellant ne fe plaignIt que du mal jugé, ou qu'il accufât fan
Juge d'iniquité & de prévarication, il pouvoir toujours l'in~imer en fo.n propre, & celui-ci étoir toujours obligé de
-comparoltre pour fomenir le jugé. La Jurifprudence a changé
fur ce point; le fimple mal jugé n'efl: plus un moyen pour
atraquer le Juge; il ne répond que de ce qu'il peut avoir
fait par corruption, haine ou faveur; en un .mot, il ne répond que du dol ou de cette faute groffiere quœ dola Il!.quiparatur.
_
IL fuit delà que rien n'efl: plus indifférent aujourd'hui de
la prife à partie, que l'appel !impie du jugement; J'appel
n'a d'autre objet que de faire réformer ce jugement} il ne
doit donc être dirigé que contre la partie qui l'a obtenu.
La prife à partie au contraire. a pour àbjet~ de faire condamner le Juge à la réparation du dommage qu'il a caufé
par fan dol; elle ne doit donc être dirigée que contre ce
dernier; ces deux llaions n'ont rien de commun; elles ne
peuvent ni ne doivent marcher & s'infl:ruire enfemble. Le
Juge n'a aucun intérêt à ce que fan jugement fait confirmé
ou réformé. Ce n'efl: pas parce qu'il efl: réformé qu'il peut
être pris à partie, mais parce que dans ce jugement ou
dans l'infl:ruaion qui J'a précédé, il s'eH rendu coupable
de dol ou de fraude. Que gagnerait-il à le fou tenir ? De
quoi peut-il être privé en ne le foutenant pas? Toutes fes
exceptions ne lui font-elles pas réfervées? Ne peut-il pas
l,es faire valoir même après l'Arrêt qui a fait droit à l'appel?
Ce n'eH pas de fon opinion dont il "répond , mais de fà..
conduite. Qu'aurait gagné Me. André à avoir été intimé fur
l'appel de fa procédure? Que perd-il pour ne l'avoir pas
été? Cet Arrêt, il eH vrai, l'a ca!fée comme oppreffive:
mais il n'a pas jugé encore que l'oppreffion procéd~< de
fon fait, puifque c'efl: ce qui efl: à juger. L'oppreffion
'exercée par Ta!fy lui efl: indifférente, s'il n'y" pas trempé;
il· pourrait fe plaindre, fi on voulait lui oppofer l'Arrêt
.
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�180
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comme ayant définitivement jugé qu'il en était lui - n,éme
coupable, parce qu'alors il pourrait dire qu'on l'aurait condamné fans l'entendre; il ne le peut pas du moment qu'Amie
fe borne à dire: l'Arrêt a caffé la procédure com,me opprelIive; j'en demande la commune exéuJlion contre Me.
André, parce que je prouve qu'il a été complice de l'opprelIion. En effet, non feulement il el! inutile, mais encore il el! contraire à toutes les regles, à touS les princip::=s,
que le Juge qu'on veut .prendre à partie fait appellé dans
l'infl:ruaion qui ne concerne que l'appel de fan JUg'emenr.
Celui qui prétend avoir été injultement condam/lé par
un Arrêt, fe pourvoit d'abord en caifation, & après que
l'Arrêt a été caffé par celui du Confeil, il préfente une
requête au Roi, par laquelle il lui demande de prendre les
Juges à partie. C'eH le fentiment de Ferrieres dans fan,
Diaionnaire de droit, va. prife d partie. Or, fi les Juges
fouverains ne peuvent' être pris à partie qu'après qu'il a été
fiatué fur la demande en caffation de leur jugement, pourquoi les Juges fubalternes & appellables devraient-ils être
intimés fur l'appel & tenus en qualité dans le jugement de
cet appel? Ne ferait-il pas bieq fingulier qu'ils euffent à
cet égard plus de privilege que les Juges fouverains euxmêmes? Sur quoi ce privilege pourrait-il être fondé?
II eH vrai qüe l'Ordonnance de 1) la .avoit établi que
les Juges ne pourraient être pris à partie, fi on ne foutenoit par le relief qu'il y avait dol ou erreur évidence en
fait ou en droit; mais il eH convenu que ce~te Loi n'efl:
plus en ufage. Depuis 1690 le Parlement de Paris renouvellant la difpofition d'un précédent Arrêt, avait, fur là
requifition de Ml'. d'Agueffeau Procureur-Général, défendu
de prendre les Juges à partie fans en avoir obtenu la permiiiion de la Cour. Le Parlement d'Aix imita cet exemple
par deux Arrêts de Réglement des 2) Juin 17 10 & 27
Oaobre 17 l 2. Cette précaution, en I,aiffant la Cour feul
Juge des 'moyens allégués pour la prife à partie, rendait
les autres précautions fuperflues ; & delà s'abolit l'ufage de
,
�'nq PALAIS n Il PRO'VENCE:
lItt'
faire mention de ces moyens dans les reliefs d'appel. 'Cet
ufage fut même profcrit par l'Arrêt rapporté dans le Journal
des Audiences, tom. ~, pag. 6 S6, & pal' celui du Parlement de Touloufe du 31 Ao4t 173S, rapporté par Denifarr,
vo. prife a partie.
'
Les Cours furent plus loin: juflement jaloufes de coÎlferver l'honneur & la dignité des Juges inférieurs, elles ne
voulurent permettre lès prifes à partie qu'en toute connoiffance de caufe; & delà s'établit la regle de ne les accorder que
par l'Arrêt qui fi~tue fur l'appel de leurs jugemens. C'el!:
ainfi que le décide Lacombe, matieres criminelles, parr. 2.,
n. 6, & Denifarr, vo. prife à partie.
Ainfi cette mife en caufe el!: inutile, parce qu'elle ne
donnerait au Juge aucun avantage, parce qu'il ne foulfre aucun préjudice de la pratique contraire, & parce qu'elle el!:
en plulieurs 'cas impraticable & même prohibée. L'aél:ion
intentéè aujourd'hui par Amie n'efi dans le fonds' qu'une
aél:ion en dommages-intérêts. Me. André n'était plus quand
Amic a été au cas de pourfuivre cette aél:ion. Celle qui
eût pu être intentée contre lui perfonnellemenr, eût été
la ptife à parcie propremenr dite dans route fan étendue;
celle qui après fa mort '1 été intentée ëontre fes hoirs ne
.pouvant plus avoir d'autre objet que la réparation civile du
dommage foulfert par Amic, n'a été qualifiée de prife à
partie qu'improprement & par la nécellité d'obtenir la permillion de la Cour, à· l'effet d'intimer en leur propre les
héritiers d'un Juge, leque1 ne peut l'être que par cette
yoie. Dans 'le vrai,. elle n'el!: &. ne peut être qu'une ac~ion purement civile en dommages-intérêts.
, Il efi certain que le délit donne lieu à deux aél:ions routes
'différentes, dont l'une qui n'a trait qu'à b peine, ne peut
être pourfuivie que par le minil!:ere public, dont l'autre
qui ne concerne que la réparation civile du dommage caufé
à l'offenfé " ,ne, peut être intentée que .par la partie civile.
Ces de,u~ aél:iotls ,n'ayant rien de commu,n, peuvent être
po~rfui,vies, par qes ina~nce~ fép~;ée.~ & !~ute~ différelltes 1
•
�•
'182.
Jou RNA L
puifque le miniRere public qui ne conclut qu'à fa peine.,
ne peut pourruivre ·que par la voie criminelle; au lieu que
la réparation du dommage peut être l'objet d'un procès
civil.
La partie civile qui peut peurruivre fes dommages-intérêts par la voie criminelle, qui pour le même objet peut
intervenir & fe rendre partie dans l'inftance criminelle
poudllvie à la requête du miniHere public, peut encore les
pourfuivre par une infiance civile & toute réparée, même
après rArrêt qui a terminé l'infiance criminelle, POUtVU
que cet Arrêt n'ait pas abrous l'accuré. La maxime non
his in idem ne peut trouver d'application dans ce cas, puirque
les Alél"ions ét"nt abfolument différentes dans leur objet,
il étoit bien égal que l'accuré fllt condamné & à la peine
& à la réparation civile par un feul & même jugement, ou
par deux jugemens différens. C'eR ainfi que l'ont décidé
Jouffe, traité de la JuHice criminelle, tom. 3, part. 3,
liv. 3, tit. l, n. ) 9; Vouglans, inftruél:.. crimin. fur l'arc: )
du titre 3 de l'Ordonnance de 1670, & l'Arrêt du 3 Avril
168) rapporté au Journal du Palais.
Ici on ne peut pas dire que Me. André ait été abfous
& déclaré innocent; il a été condamné à l'admoneHation
& aux dépens: cette peine, fi l'on veut, eH légere; mais
enfin c'efl: une peine; elle en feroie une pour un fimple
'citoyen; elle dl: bien plus grave, quand elle frappe fur un
Juge. On peut être plus ou moins coupable; la peine peut
être modérée; l'autorité des Juges à cet égard efl: inconte fiable en France. Mais une peine quelconque fuppofè un
délit. Ce n'eR donc pas le cas de dire que Me. André ait
été abfous, mais d'examiner fi le délit qui n'a donné lieu pour
la peine qu'à l'admonefiation, peut cependant donner lieu
à la prire à partie & aux dommages-intérêts. Or'c'eR-là
une exception fonciere. Comment cette fin de ·non recevoir pourroit-elle être adoptée? Fournier n'a-t-ii pas pourfuivi Me. André avec fuè.cès? Ne l'a-t-il 'pas fait condamnet:
~ la commune exécution qu'Amie demande', par , les même~
.
•
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PAL AIS
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PRO V Il Ne
:E:
18'.~
Juges, qui un mois auparavant ne l'avoient condamné fur,
la procédure criminelle qu'à l'admoneHarion?
,
On, n'a jamais douté que le dommage, de quelque caufe
qu'il procede, ne doive toujours êrre réparé; cerre obligation affeél:ant les biens comme la perfonne de l'auteur du
i1ommage, palfe par conféquent conrre fes héririers. Ce
n'eH pas parce qu'il jouit d'un bien injufiement acquis qu'on
le condamne à des indemnirés, c'eH parce qu'il a caufé par
fon délit une perte à l'offenfé, qu'il eH renu. d~s-lors à réparer. Si fes héririers n'ont pas profité de fon crime, ne
tiennent-ils pas de lui les biens fur lefquels la répararion devoit êrre prife? Ces biens éroient fournis encre fes -mains à
cerre répararion. Qu'eil-ce qui eôt pu les' affranchir dan's,
celles de fes fuccelfeurs? En fuccédanc aux biens, ceux-ci
ne fonc-ils pas renus à toutes les charges? Ne fonr-ils pas
tenus de fes obligations, de celles même dont il n'y avoit
aucun titre conrre lui au temps de fa mort, p.ourvu feulement qu'on puilfe en faire la preuve? Si fa voloncé l'engage
quand il s'oblige envers quelqu'un pour de juHes caufes, ne
l'engage-t-elle pas encore plus, dit Domat, Loix civiles,
des Mritiers, feél:. 10, lorfqu'il fe porte à nuire & à faire
du mal? La fociéré, les particuliers ne fonc-ils pas plus
intérelfés encore à la validiré de cet engagement, à la réparation du dommage caufé par un crif!le ou par un délir,
qu'à la validité & à l'exécution des obligations ordinaires?
Le Droit' Romain faifoit d'abord une premiere diHinction entre les délirs publics, c'eH-à-dire, dont la pourfuire
pou:-:oit êrre faite par cout cirayen, & les délits privés qui
ne pouvoient être pourfuivis que par ceux qui y avoient
incérêt. La peine des délirs publics érait toute publique,
'quelle qu'en fôt la nature; pécuniaire ou atHiél:ive, l'accufateur n'en pourfuivoit jamais aucune. Les délirs privés au
contraire donnoienc lieu à des peines pécuniaires qui éroient
prononcées au profit de l'offenfé, outre la répararion du
dommage qu'il avoit fouffert. De cerre différence dans ces
~eux. fortes, de délits nai1foi~ une différence bien naturelle l
•
�)~4_
J
0
t1 RNA L
au premier cas, ç'efi-à-dire lorfqu'il s'agiffoit d'un délié
public, les peines pécuniaires, telles que l'amende ou la
confifcation, ne pouvoient être demandées aux héritiers,
qu'autant qu'il étoit intervenu contre le défunt un jugement
de condamnation: il ne fuffifoit pas que ce dernier eût été
mis en caufe, que cette caufe eût été conte fiée avec lui,
il fallait encore qu'il ellt été condamné. S'il mourait avant.
la condamnation, comme fa mort éteignoit le crime,
les fuites n'en fub!iGoient plus. C'eG la décifion de la Loi
20 ,if. de accufat.: ex Judiciorumpublicorum admifJis, dit cette
Loi, non alias tranfeunr adversùs hœredes pœnœ honorum
ademptionis, quam Ji lis conteflata t;. condemnatio fuerit fecuta.
Au fecond cas au contraire, la même Loi décide que la
peine pouvoit être demandée contre l'héritier, lorfque le
procès avoit été, pourfuivi contre le défunt, quoique celui-ci
n'eût pas été condamné: ex cœteris verà deliais pœna incipere ah hœrede ità demùm potefl ,Ji verà reo accufatio mota
':fi, licet non fuit condemnatio fecuta.,
'
Il fembleroit réfulter de cette Loi que l'on ne pouvoit
rien demander à l'héritier, quand l'aébon n'avait pas été
pourfuivie contre le défunt; mais il faut prendre garde que
Ja Loi ne fe fert que du mot peine, & qu'on n'a jamais appellé de ce nom la !impie réparation du dommage cauré.
La peine n'écoit due pir l'héritier, qu'autant que l'aél:ion
avoit été pourfuivie contre le défunt; mais la réparation du
dommage l'écoit coujours. Une foule de Loix y condamnent
les héritiers qui avoient profité du délit, jufques à concurrence de ce dont ils avoient profité, in id quod ad eos pervenerit, & ce quand même l'aél:ion n'auroit pas été' intentée
contre le défunt. Leg. 38 & 44, if. de regulis juris.
Ce n'éroit pas encore 'affez; car, d'une part, comment
favoir fi l'héritier en avoit réellement profilé, & jufqu'à quel
point? Et de l'autre, quelle jutl:ice y avoit-il que celui qui
avoit fouffert un dommage ne pÎlt en obtenir la réparation,
par cela feul que le coupable .cu fes héritiers n'en avoient
pas profité? La Loi pourvut au premier inconvénient par une
aél:ion
•
�DU
PAL-ALS i
DE
Pa'OvEN.«E.
"8')
aétion connue dans le droit fous le nom 'de conditio furtiva',
en vertu de laquelle, dans le cas de vol, par exemple, 1'héritier écoir roujours renu de la r,efiirucion, foir que la chofè
dérobée fût en fon pouvoir, foir qu'elle n'y fllt pas. Le fecond ne fur pas moins l'objet de fes difpofirions; & roures
les fois qu'il n'éroir quefiion que de la fimple réparation du
dommage, indépendante' de la :peine pécuniaire, l'aél:ion,
quoique non contefiée, pa1foii: contre les héritiers. C'efi la
décilion bien expre1fe du §. his autem 1jubis, 9, infiit. de Lège
'Iujuiliâ.
"
_ Il dl: quefiion ,dans c~ §" d'un homme qui a tué l'efclave
~'un aprre. J~fl:inie,11 y d;écipe ,que ,celui-çi peur exiger le prix
de fon efclave, .non .pa~ 'r~lativem~nt à fa valeur aél:~elle au
moment où il a ,éré rué, mais relativemenr à la plus.grande
valeur qu'il,a.pu avoir. dans le co~rant de l'année qui a préçédé fa morr; En forte, par exer;n.p,le, que fi au moment.de
fil mort il éçoir 'depuis. moi liS d'un an d~venu boiteux, borgn~ cou manchot, l'efiimari.on -devqir· en. être faire comme
s'il n'avoit 'eu aucun de ces défauts. Mais cerre dl:imation
excédanr la valeur réelle', rendoir dès-lo;s l'aâion pénale;
& par cerre raifon ce §. dé,cide .qu~elle ne devoir pas pa1fer
contre l'héririer, comme e-Ile' y .eîJr palfé, dir-elle, fi elle
~'a~o}r eu po.u~ obj~r que la rép~riltion du dommage réel.
Ç'efi .pour .n'avoi·r .pas fait arrenti-on ,à cercé déçifion &
à cerre difl:inél:ion fi fimple, que quelques Aureur~ confondant raél:ion pénale al(ec l'ad ion en dommages-intérêts, ont
. Re_nfé que le proit Roma}n n'accordoir cerre derniere, qu'aut.4nt. qu'elle a,:oir été intentée contre le défunt. La Loi 22, if.
a,d .Jenacus Conlùlt., Silanian., décide que lorfqu~ l'héritier
n'a pas vengé la. morr qu. défunt, )'aél:ion qui n.aîr concre cet
héririer à raifon de là négligence .peut être intencée enco're'
apr.ès fa mort conrre fes fuccelfe~rs, par çette raifon. qu'il
'le s'agit que .d:une caufe pécuniaire; [ur quoi Godefroy érablir ce principe: mors ddùl'lueruis non impe(1ït -eaufam bonorum pofi mortfm ag{tari.
' .
Eh qu.oil .le Droir Rom~in déclaroir l'héririer refponfahle
Années z78z l$' fuiv. .
A a
•
�lS6
Jou RNA L
dans tOllS les cas du dol commis par le défunt en mariere
d'obligation ou de contrat: in comraaiDus, dit la Loi ad
ea 1 S7, §. 2,jf. de reg. jur., fucceJfores ex dolo eorum 'lUiD!JS
fucceffirunt non tantùm in id fJuod pervenit, verùm etiam infolidùm tenentur. Comment donc eût-il pu l'en exempter,
quand le dommage procédait d'un délit? Le coupable
lui-même n'auroit-il pas été foumis à le réparerer? Pour.
quoi fes 6éritiers ne le feroient-ils pas? Cur 'luod in principaliDus perfonis juflum ejl, s'écrie l'Empereur Juflinien ùans
la Loi 13, cod. de contrah. & commiu. jlipulat. , non ad I!lz~
redes & adversùs eos tran[miuitur. C'efl auffi le fentiment unanime de cous les Auteurs. Dumoulin, ad reg. 222, phil.
dec. j Covarruvias, variar. refol., lib. 3, .cap. 3, n. 7,
Le Droit Canon n'efl pas moins précis fur cette queflion.
Ce Droit, qui n~' connoît pas les aétions pénales, qui ne
!tatue que fur la réparation du dommage, y fOll;net les héritiers fans diflinél:ion: hœredes ejus moneas & compellas,
dit le chap. ') de raptor. & incend. , ut his 'lUiDUS ille pro ineendium, vel alio modo, damna contra jujlitiam irrogaverat,
jl1xta faeultaces fuas condignè fatisfaciant. Le chapitre dernier,
au titre de fepulturis, contient la même décifion au fujet des
héritiers d'un ho.mme qui s'éroir rendu coupable de meurtre,
d'incendie & autres excès. Julius-Clarus, §. fin.; quefl. SI,
pag. 2S S'; Vinnius fur le §. dernier, infiit. de perpet. ac1. ;
Imberr en [on enchiridion, vo. confejJion des aecu[és, pag. H;
d'Argentré, Coutume de Bretagne, art. 189, gloî. l, n. 3 ;
La Rocheflavin en fan Recueil d'Arrêts, liv. 6, tit. S
Arrêt 2; & Graverol, Brodeau fur ~ouer, lett. A, fomm.
t8, n. I2j Pothier en fon traité des oMigations, corn. 2., parr.
3, chap. 7, §. 3, n. 639; Boutaric fur le tit. 22 du liv. 4
des inilirutes; 'Ferrieres, Diétionnaire de droit & de pratique, vo. délit s'éteint par la mort de selui 'lui l'a commis.
Jouffe, traité de la Juflice criminelle, rom.
parr. 3 , liv.
l"
tir. l , n. 90, pag. S98; Coquille dans fes queflions,
tom..
quefl. 8, pag. 133, & Mr. de Montvallon, epitome
uris
, lib. 47, rit. l , n. 2310, établiffent la même maxime•
.1
2,
l,
l,
•
�DU
PALA-IS.
·s,
DB
PàOVENCB.
187
Boniface, tom.
liv. l , tit. 23', chap. 2, rapporte un
Arrêt qui accorda des dommages-intérêts à une femme contre
les héritiers d'un homme avec qui elle avait entretenu un
commerce illicite, quoique l'aél:ion n'eût été intentée du vivant de ce .dernier.
. L'Arrêt rapporté par Mr. de Bezieux fut rendu en faveur
de l'héritier du défunt, parce qu'il l'était en force d'une
fuqfiitUlion, & qu'il ne. tenait rien de lui. L'Arrêt de BuilTon
était au cas d'un délit qui ne peut être regardé comme une
injure. Celui de Boniface était dans le même cas. Ainfi ces
Arrêts n'o.nt rien de contraire au princ·jpe que l'on vient
d'établir.
Tout le monde çonnolt les principes de la priCe à partie.
On ne doit pas pouvoir facilement faire deCcendre un Juge
de fan Tribunal; ce ferait compromettre la magiHrature
enriere; le minifire des Loix mérite le refpea des hommes;
mais on Ce tromperait, fi l'on allait croire que les luges
peuvent impunément, à l'ombre de la Loi, vexer & opprimer les citoyens. La dignité de la place ne fauve pas les
excês de la perfonne; les M3gifl:rats [ont les minifires &
non les maîtres de la lufl:îee; il efi permis de les prendre
à pàrtie toutes les fois qu'il y a deI, fraude ou concuffion .
de leur part, fi per fraudem " gratiam, inimicitias allt fordes
egerint. C'efi le vœu, de' toUles les Loix & de toutes les
Ordan nances.
. '
Sous les mots dol f,' fraude, on comprend généralement
touS les excès donc un luge peut fe rendre coupable: l'abus
d'autorite, l'oppreffion, la violence, les exaél:ions, les procédés de haine ou de faveur, les fautes groffieres qui dolo.
Itquiparantur, ce font-là tout autant de moyens de prife à
partie. :Les anciennes Ordonnances y ajoutaient encore l'errellr évidente en fait & en droit. ( Ordonnance du mois
d'O:l:obre 1 HO, art. 2. ) Leur difpofition n'eH plus en uCage.
MJis, dIt Joutre, juflice civile, tom. 1, part. 2, tir. 2, n.
318, fi la faille ou errellr de fait 011 de droit commife par le
luge était groffiere ou cotifidérable, elle Eourroit donner lieu
A a 2.
•
�18B
.
1
0 lntGN,A L
el la prite el' partie, quia'lâta cu/pa dolàIl!!lfi~ipaf'atur, commé
le dit la Loi 226, if. de va. /ignif. lata cu/pa dolus ejl.
.
L'Ordonnance de Blois, art. 117, permet la prife à partie
là où tes Cours trouvent; qu'il y a faute manifefie du Juge
r
]
pour laquelle il, doive être condamné en fOti nom; ,ce 'que
Lacombe,. én fes:matieres' âi'minel1'es,' palli. 2, chap. ,S,'
1). 4, explique par 'une fa'ute fi:nota.bl~l&·'fi groiiiere, qu'elJé'
fait contre le, fens commun r& l'inreltigence de tous les,
hommes. C'efi aulIi le fentit!!enc d,e d'Argentré fur l'art. 34'
, de la coutume ce Bretagne, n. 2; de Cujas' fur la Doi l 'b
if. de judiéiis ,.& du. proFè;s~verbal 'de -l'0rdotinance d~, 1667fur le tit. 1.
•
L'arr. 1'9 <:lu rtit. T 0 . de' 'l'Ordorrnance de 1 670 défdn~
de décerner prife de corps codere les domicriliés, fi' ce n'eH)
pour crimes qui doivent être punis Je peine affliaive ou infamante. Jou'lfe fur l'art. 2 de ce titre obferve que le Juge
doit 'en cela lJfe.r d'une grande', circonfpeél:ion, &. ne pas!
décréter.;légérement, pour.léviter d'être pris-à parti~: Judex 1
temerè capiens ùllJocentem puniendus ejl, & tenetur ad damna'
& intereffi partis; Balde, in Leg. ;2., cod. de, iis 'lui 'larron.'
. 'I-1 eH; vrai que le Juge ne peut refufer l'information, quand
elle lui eH ,demandée; une plainte même calomnieufe n'an-:
nonce, fouvent gué le dol'de la partie qn~.porre (cetre plainte;)
l'événement ,feul <peut le' défabufer; en.actendant il ne peut J
fe déterminer que p~r l'expofition:' mais il n'en efi pas de)
même du décret; c'efl: princip~lement fur les charges qu'il
doit être rendu; &' d'après les charges le Juge doit con--'
noître s'il exiHe un délit. Quel eH le décret que la nature \
de ce délit & la force des pre,uves lui permettent de Jaxu? ,
, Or, ici il n'exiHoit point de délit ; l'Arrêt l'a jugé,. en caffant la plainte & les décrets; il ne pouvoit pas même en
exiller. On relevoit enfuite tout ce qui s'étoit palfé dan~ le
cours de l'infl:ruél:iqn de la procédure, pour con!l:ater les faits
d'opprelIion dont Me. André s'était· rendu coupable, & on '"
rappèlloit à ce fuiet les dépofirions' des témoins qui avoient"
éré entendus par les Experts nommés pour la liquidati0!1 .
des domUlages-intérêts adjugés à Fournier.
.
•
�P ~ LAI S D Il PRO V Il Nell.
'189
Par Arrêr du 13 Mai 1783, au rapport de Mr. le Con, •D U
[eiller de Beaulieu, la commune exécution for accordée
contre les hoirs de Me. André, jufqu'au concurrent de 'i 000
liv., & ils furent condamnés aux dépens. Ecrivant Mes. Roman-Tributiis & Dubreuil cadet.
ARR Ê T
XXI V.
Promeffi pour caufe fauffi déclarée nulle.
L
A DUe. Teiffeire, veuve Boyer, du lieu de Taradeau, fic
un billet à Antoine Teitreire, Ménager do même lieu,'
conçu en ces termes: je promets payer dans Cjuatorre ans, à
compter de la date du préfent, au fieur Antoine TeiJ{eire,
Auoergifle du lieu de Vidauhan, la fomme de 5000 liv.
Cjue je lui dois pour fournitures Cju'il m'a faites depuis long- 1
temps, foit .!n argent Olt en marchandifes, fous l'o61igation de
mes biens préfens &. à venir, foumis à toutes Cours. Au Puget
le 7 ORoore l764' J'approuve l'écriture cï-deJJùs. Bon pour
5000 Uv. Signé, TeiJ{eire Boyer.
. .. Après la 1101ort de la Dlle. Teiffeire, arrivée le 12 Août
176), Antoine Teitreire fir contrôler ce billet & en réclama
le paiement le 6 Janvier 1779 pardevant le Juge de Târade au , contre Boyer, héritier bénéficiaire ,de la Dlle. Teiffeire;
il fut nommé des Experts. pour procéder à 'l'avération du
billet; après cette opération Teiffeire obtint une Sentence
par forcluûon conforme à fa demande. Appel de la part de
Boye~
.
On difoit pour lui, que la contexture du billet en dévoilait la fraude; il n'ell pas caufé; & fi on y a feint une caure"
cerce caure' ell fautre; le temps de l'acquittement en prouve
l'invrairemblance. Teiffeire n'avoit rien, il n'a donc rien pu prêter; mais l'eût-il fait, il n'aurait pas voulu d'une reconnoiffance
par<tiUe ; il aurait exigé une affurance plus authentillue. D'ail~
>
�I~
JouaNAL
leurs comment (uppo(er que Teiffeire etlt voulu perdre l'intérêt qui donnoit pour les quatorze' ans 3 soo liv.? C'étoit-là
une feconde fortune pour lui. Les particuliers les plus riches ne
fourniffent & ne prêtem des (ommes infiniment moindres
que (ous des caurionnemens, & toujours par des aél:es ou'
contrats en bonne & due forme, pour avoir un titre valable
& affurer l'hypotheque fur les biens de leurs débiteurs: que
ne devoit donc pas faire un particulier pauvre tel que Tei([eire , qui n'avoit d'autre reffource pour vivre que celle d'être
au (ervice du Seigneur du lieu.
. .
Le billet dont s'agit ef!: écrit d'une main étrangere; il
avoit été mis en dépôt entre les mains d'une perfonne, d'après
l'aveu de Teiffeire; cela entroit, (elon lui, dans l'arrangement de l'héritier. La' Dlle. Teiffeire donne, emprunte,
s'oblige; Teiffeire ne dit pas le mot; la prétendue débitrice
meurt le 12 Août 176S, & ce n'ef!: que le 6 Janvier 1779,
c'eH-à-dire quacorze ans & trois mois après, qu'il en réclame
le paiement. On rappel!oit en(uite divers faits, pour prouver
combien TeitTeire étoit hors d'état de faire aucune avance.
pour qui que ce fût, puifqu'en 1760 il (e rrouvoit débiteur
de la Dlle. Teiffeire, ainli qu'il conf!:oit par une Sentence.
produite au procès, & par une tranfaél:ion de la même année,
par laquelle il (e déclare hors d'état de payer Jes 1200 liv.
d'arrér. ges, & en conféquence il défempare à la Dlle. Teif[eire les biensqll~i1 avoit à 'elle. Dans ce dernier aél:e, Teif.
[eire a conligné (on état de mifere & d'infolvabilité" & d'après
cet aveu il n'dt pas poffible de penfer qu'il eût pu faire la
.
moindre fourniture à la Dlle. Teiffeire.
Fût-il vrai que Teiffeire eût excorqué la lignature de la
Dlle. Teiffeire, ce ne pourrait êt~e que par J'effet de la
[urprife, du dol & de la fraude la plus caraél:é.rifée. Il n'a
rie.n prêté ni fourni, parce qu'il n'avoit rien. D'après ce
principe, le billet dont' s'agit ne peut êrre regardé que
comme une obligation feinte & limulée, dom la caufe el!:
fauffe, & conféquemment ,nulle. La Loi.juris gentium , §. 4,
If. de pail., déclare l'ob}igation pour non caufe nulle; elle
/
�DU
PAL A X S
DB
PRO V B N C H.
-X9t
permet au majeur de fe faire refiiruer; c'ef!: ce que difent
Coquille fur les coutumes de Nivernois, ëhap. 7 des rentes,
àrt. 8; Builfon, liv. 4 ,tir. S, §. 18; l'Aureur du Journal
du Palais de Touloufe, tom. 4, pag. 401, tom. 6, pag. 99;
_ Senes, aux infl:itutes du droit françois, liv. 3, rir. l S, pag.
3 ~ s; & Cujas parari!. in- cod. de canduél. ex Lege & /ine
caufii vel injuflâ caufii. Il ne fuffit pas de donner une eilUfe
à l'obligation; il faut -qu'eUe fait véritable, autrement il feroit
facile d'éluder la difpolirion de la Loi & de rapporter toute
forte d'obligations illicites en fuppofant une fautre caufe;
telle obligation efi nulle de plein droir; c'ef!: la décilion de
la Loi 1,.If. de candia. jine caufii. C'ef!: d'après le même
prIncipe que les Loix on-t également -profcrit tout aéte qui
ne contient qu'une 'caufe nulle ou une caufe injufie. L.
§. 3 ,.If. de candie? fine caufâ,.
Outre ce moyen d'injufrice, on ajoutoit que la Sentence
du Juge de Taradeau étaie nuUe, pour avoir été rendue par
forclulion contre Boyer, tandis que la vilion des facs avoit
été rétablie, ainli qu'il confie du reçu du Greffier communiqué au procès; car dès que les facs étaient entre les rr.ai-ns
du Greffier qui 'en eft le dépolitaire, Boyer n'a pas pu êere
jugé par forc1ulion.
On répondait pour Boyer, qu'en f<rit de limulation, comme
le dit Duperier, tom. 3, pag. 61 & fuiv., les déclarations
font toujours irrévocables en quelque aéte quielles fe trouvent
écrites; il n'y a qu'un feul cas auquel lemblables déclaration~
peuvent être rejettées; c'eft 10rfqu'el1es ont éte faites en faveur d'une perfonne prohibée ou incapable de legs ou de
donation; c'eft le cas de la Loi puhlia,.If. depajiti, de la
Loi qui teflamentum,.If. de prahat., & de la Loi cum 'J1iis,
ff. de Legatis 'l·
_
-La pauvreté n'eft pas un moyen pour faire annuUer une
obligation, fous prétexte que dans cet état cet homme n'a
pas pu fdurnir. Où 3-t-on trouvé en drOIt que cette circonf-'
tance pût faire annuUer une obligation, & qu'un homme
fait dans le cas de donnér fan bilan & de fe ju!!ifier pour
l,
,
�..l92.
'.
Jou
RNA L
légitimer une obligation? N'y a-t-il pas des 'exemples ana-'
10C7ues? Un tuteur eft pauvre en entrant dans la tutelle, &
q:and il la quitte il eft riche, fans avoir fait d'aûtre commerce: peut-on dire pour cela qu'il a volé le pupille &
faire des recherches fur ce qu'il avait ou fur ce qu'il n'avoit .
pas? La Loi & les Auteurs ont prévu ce cas, & difent.tous
que la pauvreté ,du tuteur n'eft pas une raifon pour incriminer fa conduite, ou fuppofer qu'il s'eH avantagé fur fa
pupille. Il en el!: de mênie' de la veuve;· il n'y a que les
.aèquifitions qu'elle fait dans l'an de deuil que la Loi fuf:peél:e; m~is ce te.p1S ·palfé, ne 'fût-ce que d'un jour, il o'dt
plus permis ni de s'enquérir où e!le a pris pour acquérir,
ni de fuppofer que c"eft de l'argel)t du mari quelle a acquis;
'& s'il en était autrement, quelle feroit l'obligation qui pourrait fuhfiCl:er, & quelle ne ferait pas l'inquifition que l'on
feroit fouffrir. à tout 'citpyeÇl'? Ce n'eCl: que dans des cas
particuliers où l'on oblige de jufiifier d'où l'on a eu; comme,
pa,r exemple, un mari concede urie quittance à fa femme;
il lui fait une reconnoiIfance de dot qui peut faire le préjudice des créanciers; 'On dir alors: il faut voir unde hahuerit ,.
parce que qui non poreJl donare, non poreJl confireri; hors de
ce cas lingulier; l'obligarion érant légale ,. cau fée , elle efl:
par cela même cenfée l é g i t i m e . '
,
Il eil: certain que la Jurifprùdence s'ell: quelquefois relâchée fur les obligations fans caÛfé; mais ici' la caufe fe ~
trouve dans le biller; d'ailleurs c'éroit une difpofirion , une
libéraliré, une donation que la Dlle. Boyer avoir pu faire.
à Teiffiere pour certains fervices qu'il lui aurùir rendu; il
était fan coufin & 'Auber~iCl:e dans le tems que les Efpagnols palfcrenr en Provence, & l'on fair rout ce que les
AubergiCl:es ont gagné d'ans ce tems l à . ·
'
Arrêt du 2 Avril 1783, au rapport de Ml'. le Coofeiller
de Mons, qui calfe le billet, & réforme la Sentence, &
condamne Teiffiere- ~ux dépens. Ecrivant Mes. Perrache &
Pafcalis.
1
ARRÈ:T,
�DU
PALAIS
DE
ARR Ê T
PROVENCE.
193
X X V.
La quaru épifcopale ejl-elle due lifr toutes fortes de dîmes
que le Prieur perçoit?
La quarte que l'Evêque perçoit fur les dîmes, ejl-elle foumift
aux charges?
Es anciens Evêques d'Apt avoient confié plufiellrs Paroi/Tès de leurs diocefes aux Moines de Sr. Benoit, à
l'Abbaye de Cluny, à celles de St. Viélor de Marfeille, de
Sr. André de Villeneuve-lès-Avignol}s & de Sr. Gilles, &
leur avoit attribué, pour la defferre de ces paroiffes, une portion des dîmes. Dans la tranfaélion du ro Novembre 1672,
il fut dit que l'Evêque d'Apt prendroit le quart de la dîme
au lieu de Simiane; les Evêques qui fiégerent après cette
cranfaélion, abonnoient leur <:Juarte à 200 IiI'. Le '2.9 Novembre 1748 l'Evêque d'Apt fe pourvut conrre Don Taufin,
Prieur d'alors, pour être maintenu dans la jouiffance de
percevoir en efpece la quarte Epifcopale fur tous les fruits
& revenus décimaux du Pri uré de Simiane, franche &
immune de toutes charges; cette prétention demem3 impourfuivie, & Mr. de la Mediere continua de jouir de
l'abonnement.' Mre. d'Eon qui lui fuccéda, forma la même
demande par une requête du 7 Janvier 1780. Don Demptos,
l'rieur de Simiane, prétendit ne devoir payer la quarte
que des gros grains, & que M. l'Evêque devait fupporter les
charges dé la Cure à proportion de la quarte; par une requête incidente, il demanda la caffation de la tranfaélion
de 1672.
On difoit pour M. l'Evêque d'Apt, que ce n'ell: pas par
le produit aéluel d'un objet décimable qu'on juge de fa
qualiré de groffe ou menue dîme, mais par fa pature. Ainfi
Id dîme fur les vins a toujours été' réputée groffe dîme,
Allllées l78:l. & fuiv.
Bb
L
�194-
10
U R JI A
ri
parce que les vins font un gros fruir. Les groffes cltmes fonc
appellées prédiales , ell: - il dir dans le lournal du Palais,
tom. l , pag. 328 , parce qu'elles fe levent fur les gros fruits
de rerres.
Il ell: certain que les Curés qui ne font que !impIes con·
gruiHes & qui n'ont point de gros fur les dîmes, ne peuvent
prétendre les dîmes de charnage, & que fuivant la Jurifprudence obfervée avant l'Edit de 1768, ils n'avaient d'autres
dîmes que les navales, s'ils n'éçoient pas fondés d'ailleurs
en poffeffion capable de former une légitime prefcription,
comme l'établit Goard, tom. 2; queH. 7, n. II in fine;
& quant aux dîmes vertes &- menues, le même Auteur dit,
n. 12, que le plûs grand nombre des Arréts du Parlement
de Paris & les plus récents les laiffent ault gros décimateurs,
fur-tout lorfqu'ils font fondés en poffeffion immémoriale.
La raifon-qui dans certains cas a pu faire adjuger aux Curés
les dîmes de charnage & les menues & vertes dîmes, tir~
de ce que les Curés adminiHrent les Sacremens, s'éleve
encore plus contre la prétention d'un Prieur décimareur qui
n'adminiHrè point les Sacremens , envers l'Evéque diocefain
qui les admin\Hre, & dont le droit à la quarte fur les dîmes
& oblations des paroiffes de fan diocefe n'ell: fondé que
fiil' l'adminiHration des Sacre mens les plus éminens qu'il y
exerce, & fur l'infpeél:ion qu'il exerce auffi à l'égard des Saqemens adminiltrés par le Curé lui-méme. Auffi lés conftirutions canoniques qui la lui accordent, n'en exceptent aucune forte de dîme; elles les embra1fent toures: quartam
decimationern, dit le Chapitre conquerente extra de offic. judo
ordin. Le Canon conc4fà, cauf. 12, queH. 2, s'e'.'plique encore plus ouvertement, puifqu'il dit que l'Evéque a droit
de retenir pour lui une quatrieme' partice de tous les revenus
& oblHions des fideles. Reditus & ob/ationes fidelium in
quatuor partes dividat, quarum unam jihi ipji retineat. On
peut voir ce que dir Barbofa fur cette quarte, en fon trairé
de' offic. & potefl. Epifcop.
l'eut-on douter que la quarte épi[copale ne s'étende fur
.
•
�D U
PAL AIS'
D Il
PRO V Il Nell.
19-5
toutes 'les efpeces de fi-uirs à la dîme, puiLque, fuivant les
conltitutions canoniques, elle fe prend même fur les nnvales,
fi fpécialement affeétées aux Curés qui vaquent à l'adminill:ration des Sacremens, que tandis qu'on le prive des
menues dîmes fuivant Goard au lieu cité, on lui accorde cependant toujours les premieres en entier envers les gros décimateurs. C'elt la difpoGtion exprelfe du Chapitre 'l/loniam
extra de decimis : 'luoniam a nobis follicitudo tua requirit quid
de decimis;, novalium tuœ diœcejis tibi fit flatuendum : re'!pondemus ut fi terrœ 'luœ arabiles [unt, infra certam alicujus
Ecclejiœ parochiam fuerint , decimas earum, tuâ parte retentâ,
eidem Ecclejiœ facias aJlignari.
,
En effet, les Ordonnances du Royaume ont refervé le
quart de l'Evêque fur les novales dans les paroilles ail il
prend ùne portion des dîmes; & elles fe font fondées fur
cette raifon du droit commun, que fi le foin des anles acquiert le.s nov.ales en entier aux Curés envers les autres gros
décimateurs , le même motif devait faire conferver aux
Evêques leurs droits fur ces fortes de dîmes; c'eH ce que l'on
trouve expliqué dans 1'art. 7 de l'Edit de 16,7, Or, fi le
Curé ne pouvait -contet1:er à l'Evêque la quarte des navales qui lui ,étoientexclulivement affeétées avant l'Edit de
1768 , -il pourro-it avec moins de raifon lui coorener celle
des menues dîmes; & -ce que le Curé qui fait le fen'ice ne
pourrait faire, le Prieur qui ne fait point le fervice le pourroit encore moins.
"
,
L'on en trouve la pre-uve dans l'Arrêt du 21 Juillet 1,06,
qui ma-intint l'E~que d'Apt d&ns le droit de percevoir quartam decimarum parochialium fans -exception; dan~ le bail à ferme du 19 Mars 1,84' rapproché de l'aéte d'éreétion de.la cllre
tie Simiane du 29 Janvier l S8o, puifque l'on voit dans l'un
tjue la quarte -de l'Evêque était afiermée '48 écus & dix livres
pmnes, & dans l'autre, que les .revenu~ du Prieuré étaient
d'environ l Sa écus; ~ans l'arrentement de la même quarte
donné en XS 96, où l'Evêque afferme la quarte des dîmes,
revenus & émolurnens du Prieuré de l'Eglife paroiffiale de
13b2.
,
�196
..........
10
V RNA
i
Simiane, & dans la requête du Prieur aux Tréfofiers de
}'rance du 17 Avril 1671, où il expofe que l'abonnement
dont il réclame l'exécution vis-à-vis les économats, a été
fait pour la dîme des grains & agneaux du Prieuré; dans
la tranfaél:ion du 9 Mars 1641, où l'on voit que M. de Villeneuve des Arcs s'érant pourvu pour faire condamner le Prieur
à l'entiere quarte de raus les fruirs décimables du Prieuré,
tanr à raifon des terres cultes, que de celles qui ont depuis
peu &. feront à l'avenir défrichées, le Prieur fut réduir à
augmenter l'abonnement de trois charges' grains à raifon de
ces navales. Or, li le Prieur reconnut qu'il devoir une augmentarion d'abonnemenr à l'occaGon des navales, falloir-il
bien que dans les abonnemens qui exilloienr entre 1',Evêque
& les Prieurs, on eÎlr égard aux autres efpeces de dîOJes qui
fe percevoienr dans la paroiife, qui n'éraient pas li excluGvement affeél:ées à celui qui adminillroir -les Sacre mens ,
& qu'on avoir encore moins de prérexte d'affranchir de la
quarte de J'Evêque.
Dans fan ancienne difcipline, l'Eglife avait propofé aux
Evêques deux manieres de faire le partage des biens des
Eglifes de leur diocefe, dans lequel il devait toujours y en
avoir une portion pour eux. L'une érait de faire cerre di;
viGon par tiers, &-dans ce cas J'Evêque éroit tenu aux
répararions fur [on tiers; l'aurre érait de la faire par quart;
& comme dans cerre forme de parcage il y avait un quart
affeél:é [pécialement aux répararions, le quart de J'Evêque
érair par-là même affranchi de cerre charge & de routes les
aUtres qui avoient chacune leur quarr affeél:é. C'ef!: ainli qu'on
le rrouve décirlé dans le chap. decernimus, cauf. ID, que Il.
1 l , tiré du chap. 8 du Concile de Tarragone; dans le cinquieme Canon du Concile de Tolede de l'an 693 rapporté
par Gratien, caur: ID, queH. 3, cap. unie., cauf. I2 , quen. 2,
cati. 27 & 30, & dans les capitulaires de nos Rois, rom. l,
liv. 7, chap. 37)'
Il faut encore ob[erver que les Evêques rel:1choient [ouvent aux Eglifes cette quarre que les Canons leur donnaient ~
�DU
-,
PALAIS
DE
PaOVI!Ncll.
19'7
qu'ils devoient même le faire quand leurs Evéchés éroient
fuffifammenc dotés; d'ailleurs c'efi ce qui réfulre des obfervations que fait le pere Thomaffin, difcip/ine de rEg/Ife ,
tom. 2, parr. 3 , liv. 4, chap. 12. Delà vient que peu 'd'Evêgues ont confervé cett~ quarte, & qu'une grande partie ~e
la dotation de l'Evêché d'Apt, dont les biens & les revenus
(ont des plus médiocres, confifie aux quartes réfervées fur
plufieurs paroilfes. Les Auteurs qui difent que l'Evêque ne
contribue point aux charges de la Cure, tel que Barbofa ,
de.offic. & poteJl. Epifcopi, parr. 3, alleg. 86, n. 34, parlent
du cas où l'Evêque eH ré~uit à la quarre, & ne jouit que
de la quatrieme portion;. & ceux qui établilfenr que l'Evêque
efi tenu aux réparations, comme Lancelot en fes infiit. ,
liv. 2, tir. 18, §. clern.; Bellus, conf. 99, & Van-Efpen,
tom. l , part: 2, fea:. 2, tit. l, n. 5 , fuppofe'nt que l'Evêque jouir du tiers.
Le Commentateur de l'Edit de 1768 a évidemment
parlé contre les principes du droit canonique, l'opinion
unanim~ des Auteurs & la nature de la chofe, quand il a
infinué qqe la quarte épifcopale peut être fujette à la contribution des charges; c'efi pour n'avoir pas alfez fait d'attention
;Itlx. Arrêts rendus concre les Evéques de Saint-Pons, de
.Glandeves & de Carpentras, qu'il leur a prêté cerre décifion. Il efi conltant au conrraircr que dans l'efpece d'aucun
de ces Arrêts, il n'étoit point juflifié que la portion de dîme
dont ces Evêques jouilfoienr, fût la réferve de la quarte
épifcopale, & qu'il y avoit au contraire plufieurs circonltances
dont on induifoit qu'ils en jouilfoient à tout a,utre titre. On
ne -peut donc faire aucune application de ces Arrêts dans
le cas préfenr, où il eH confianr & reconnu' par roùs les
titres, que la porrion des dîmes du Prieuré de Simiane donc
l'Evêque d'Apt jouit, efi une véritable quarre épifcopale,
& où la préfomption elt par conféquenr que les trois autres,
quarts dont jouit le Prieur ne lui ont été qélaiffés qu'avec,
leur charge naturelle du lervice & des réparations.
Il efi con!!ant qU€) Leodegarius qui a tenu le Siege d' ~pt
�~
'depuis no'- jufqti'é-li t 122, he donna âll PrévÔt & aull
"Chanoines de fdn 'EgHfe Cathédrale, qui ob[ervoient alors
,la vie commune, €lue la meîtié de la dime qu'il p0ffédoit
"dans plufieurs Pareiffes, parmi lefquelles on trouve celle
al! Simiane. Or, ëH-il peffiblè que tet Evéque [e fait dépouillé de cette ·moitié, [-ans aVi>ir [ou mIs le Prieur ~ acquiùer toutes ,les charges, fur-rout 'Iorfque l'on voit €lue
routes les 'char.ges ont éré elfe8ivement acquittées par le
l'rieur depuis 'Ce temps immémorial? C'e"ft auffi ce que la
Cour a 'jugé 'par l'Arrét du ~:81\ilai 17,9, au rapport de Mr.'
tle Chenerilles, entre le Chapitre dOApt & l'·Econome du Séininaire de St. Ch-arles d'e Lurs, Prieur de Banon.
La tranraaion du 10 Novembre 1672., qui rétablit le paie'ment de la quarte :en nature, avec fa franchife naturelle,
!Je doit étre regardée que comme un aae qui confacre cet'te
'vérité conHante, établie par la réunion de tant d'autres citconllances. M. F'Evêque d'Apt n'eppolè peim cet-fe +ran(saion comine ;un tirre conHltutiF au droit qu'i·l défend; il
ne la' fait valoir que comme un 'titre imerprétatif: or fous
ce pl'eI'ni'er point de vue, il nrye!1: rien de plus mal imaginé
que la rel1uê~e i=ideme en caffarion de cet aae.
'
On réoondoit 'que le Prieur Teceir'à Simiane Is'dime fur
tes ,tb.C'h~s '& les agnea'Ux &' flfr' qe vin. Or ces trois' d'if.
fé'rentes efpeces de dîmes Tant infelites. lX menues, favbir,'
les deux premieres en elIes-mêmes, & la troilieme par -la '
nature du climat. On rte peut pas douter 'que la di/ne du
charnag'e ne fait dÎm~ menue & infol'ite; on -n'a qu'à voir
ce 'qo'en dit "RoU'rièr dans fa pratique b'énéficiale fur -les
dîmes.., -que'!1:. '6. D'après Bleinian dans fa pratique bé.
néficiale, pag. 4'8, .& Forget 'da'ns fan ·t·taité des dîmes,
éhap. ') , n. '1 , -il Y a plus de diffiCll1ré dans ce qui concerne la dîme du vin. Régulién'ment elle eH groffe dîme;
on ne pèUt le coorifier. Dans la 'Co m'té ·de 'Sault & dans
la-Mdn agne ,'la vigne' é!1: à l'infiar des ~ruits de 'jardin; ori
ne p~ut la faire prdduire que 'dans qu'elques recoins bien
expo(és; la dîme n'eu e!1: pas due de droit: elle e!1:' donc
\I9"S,"
'.'
1•1
JOUlaN:AL'
�DU
PALAIS
DB-
PROVENCE.
199
,menue & infolite. Un feul objet efl: donc -à éclaircir fur
cette premiere quefiion. La quarte compétent à l'Evêque
d'Apt doit-elle fe prendre, tant fur les grains formant la
feule matiere des groffes dîmes de la Paroiffe, que fur les
.menues dîmes? Pour que cette quarre plu s'étendre am,
menues dîmes, il fdudroit
titre ou un ufage valant titre,
parce qu'effeaivement les dîmes font confidérées comme la
fuite & le fruit du fervice effeaif. Sous ce fapport elles
appartiennent bien plutôt au Curé qu'à tout autre. Me.
Camus, fur l'Edit du mois de Mai 1768 , arr. S, obferve
qu'après les premieres DécJarations fur les pordons,cong,rues,
Jes menues dîQles éroient confidérées, ai nU que les navales,
comme étant le partage des Curés: c'efl: aulIi l'obfervation.
que fait Goard, tom. 4, quell:. II, arr. S, pag. 223 & fuiv.
Mais les' Arrêts pof!:érieurs à la Déclaration de J 686 ont
fixé ce point de droit d'une maniere invariable. Les décimateurs, fur-tour quand ils font Curés.primirifs , foot main...
tenus dans la po/feffion des menues dîmes, parce qu'ils foot
cenfés fe les être réfervées dans la fonàation de la VicaiJie
perpélUelle. Les menues dîmes dérivant des offrandes, appartiennent naturellement au .curé, parce qu'elles font le
fruit du feevice ou préfent ou pa/fé: il fuit delà que celui
,des co.décimareurs ou' de prellant part à la dîme, qui n'a
jamais fait le fervice, n'a aucun droit à la perception des
menues dîmes. Il peut l'acquérir à.la vérité, foit par titre,
fait par poffelIion; mais quand ce ritre ou la poffelIion lui
manque, il ne peut avoir aucun droit [ur les dîmes de ceHe.
efpece.
En vain excipe-t-on de ce que M. l'Evêque d'Apt ef!: aD
antiqua co-portionnaire de la dîme. On peut lui répondre qu'il
·oe'l'a été dans le pr·incipe que de la groffe dîme; que les menues
dîmes fubrogées aux offrandes ne font v-enues qu~enfujte en rénurnéra{ion ,ou, fi l'on veut, en contemplation du fervice effeaif,
;& qu'eUes ont par conféquent été gagnées & acquifes par celui
.oes deux eo-décimateurs ou prenant part à la dîm.e qui s'dl:
-trouvé da-ns Je temps chargé du fervice. Le Chapitre con...
un
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Jou
RN." L
querente, én parlant des dîmes & en donnant aux Evéque$
fjuartam decimarum, peut fort bien n'être entendu que des
dîmes des gros fruits qui conltituent les vraies dîmes, & non
de "celle des menus fruits, qui, dans le droit & le fens de
nos o.rdonnances, font bien plutôt regardées commdoffrandes.
En France, l'établifIèment des menues dîmes n'elt venue que
long-temps après celui des quartes épi(copales; l'Evêque n'a
pas fu s'y retenir dans le principe le quart des dîmes qui
n'exiO:oient paine encote. Pour femir combien le chapitre
concelfo eO: ici mal appliqué, qu'il fait permis de demander
à M. l'Evêque d'Apt s'il pourrait fe fervir de ce texte pour
demander le quart des offrandes aél:uelles; & fi, de fan aveu,
les offrandes devraient appartenir au Curé, ne faut-il pas
qu'il convienne, par raifon de conféquence, que la quarre
épifcopale qui ne fe ptendroit pas fur les offrandes, ne doit
pas fe prendre non plus fur les menues dîmes fubragées aux
offrandes, & qui n'étaient rien de plus, lorfque le Prieur
a acquis & confommé le droit de les percevoir? Barbofa,
de offic. & po/ejl. Epifc., parr: 3, allég. 86, §. 2, parle d'abord
d'un tiers des dîmes & des offrandes, & enfui te d'un quart
des dîmes dont, l'expreffion ne compreud jamais les offrandes,
non plus que les menues dîmes qui leur font fubrogées. Tel
érait l'état de nos principes à l'époque de l'Edit de 1768.
Il relte à voir fi les Evêques d'Apt ont titre ou poffeffion
pour prendre leur quarre (ur les mêmes dîmes. La tranfaétion
du 9 Mai 16,p n"e peur fervir de rien; l'Evêq"ue d'alors s'éraie
pourvu pour demander l'entiere quarre de tous les fruits décimaux & même des navales. On s'accorda fur une fixation nouvelle. On prit prétexte des navales pour augmenter la rétribution
de trois charges grains; les motifs donnés dans ce titre
pour en affurer la folidité font bien indifférensà reproduire,
dès que le titre n'a pas fubfiHé. L'Arrêt du 21 Juillet 1506
porte vaguement l'énonciation du quart des dîmes. L'aéte
de bail à ferme rapproché de l~aél:e d'éreél:ion de la Cure
de Simiane comprenait auffi les fonds done l'Evêque d'Ape
jouit, qui fane confidérables, & fur l~ produit defquels ~.
l'Evêque
1
�,
DU
PALAIS' DR
PROVENCE,
-ZOl
J'Evêque d'Apt n'a certainement aucune quarte à prétèndre.
Ces fonds rendent' plus de ';00 liv. La même réponfe fe
préfence fur l'aae de 1'; 96.
La cranfaaion ~e 1672 ne prouve rien, ni en droie, ni
en fait. En droit, il efl:' certain que ce titre, lors duquel le
Prieur d'alors fut fubjugué & le bénéfice inIupportablement
léfé, ne peut pas fubfifter; & dès-lors toutes les claufes de
ce titre doivent difparoître. En fait, il en réfulte à la vérité
que l'Evêque d'alors prétendoit que la quarte devoit être
prife fur les agneaux, il avoit même paffé le bail de fa quarte
en con(équence; mais le Prieur ne con(entoit pas, à beaucoup
près" à cette extenlion de la quarte épifcopale ; auffi la quarte
fut ab'Onnée en graîns:
,
Il faut obferver la. que quoique la dîme des cochons foit
due au Prieur comme celle des agneaux, cependant les
Evêques d'Apt n'ont jamais pris leur.quarte là-deffus, ce
qui prouve, que leur .quarte, de leur propre aveu; ne. fé
prenoit pas (ilr' la dîme du charoage; 2-". que tous les
abonnemens n'ont jamais été filits,' qù'en gratns; & comme
les abonnemens repréfencent la chofe.abonnée, on peut en'
induire avec jufl:effe qu'au fonds, lors de toUS ces aaes, les
'Evêques ont reconnu que leur quarte ne portoit que fur la
0
dîme des grains; 3 • le dênombremenc de L674 ne parle
que. des grains, en délignant tout le .produit de la quarte ~
épifcopale. L'ufage de la concrée efl: favorable au Prieur.
Dans le diocefe d'Aix, la quarre épifcopale ne fe prend pas
fur les dîmes vertes & menues. Dans le diocefe d'Apt, parmi
plufieurs Paroiffes qui font foumifes à 'la quarte, il n'y ,en
,B 'que Irois éù la quarte frappe fur la dîme des agneaux &:
men\les' dîmes, mais diverfement & par des titres parti.
culiers, ou en forée d'une \coutume valant titre.
Sur la feconde quenion, on obfervoit qu'aucun texte dll
droit canonique ne porce que la quarte épifcopale fera franche
& immune des charges des dîmes. Le chapitre decernimus,
le chapitre unio & mus les autres leXteS du droit ne di.
fent .rien de pareil; au contraire le chapitre unio, au tiu'e
Années l782 & fuiv.
ç
'c
�2.02.
.
10
t/1l N A L
du décret quo nomin. Cathœdrat.fint à facerdotibus jùis Epjfcopus exigere deheat, en parlant du tiers que les Evêques
avoient autrefois fur les dimes dans quelque panie du monèle
chrétien, & qu'ils n'ont jamais eu par le droit commun du
,Royaume, décide que pO\lr raifon de ce tiers qu'il pe{~oit,
l'Evêque doit fupponer au moins fa P}lrt des réparations~
& qu'il ne peut s'en libérer qu'en abandonnapt le tiers.
Or, c'eft ce (itre qui a été enfuite réduit au quart, comme
l'obferve Barbofa en l'endroit ci-devant cité.
Il eft vrai que cet Auteur, & Bellus après lui, font forcés
de dire, d'après ce texte, que l'Evêque entre dans les charges,
quand il a fon droit' fixé fur le pied du tiers, ou en .eft
difpenfé quand il per~oit fur le pied du qU1/rt? mais cela:
eft-il bien exaél:? N'étoit-il pas plus raifonnable & plus
légal au contraire de dire que la ponion canonique des
Evêques ayant été regardée comme exceffive fur le pied du
tiers,. & ayant été réduite au quart, elle n'étoit pas dé-~
naturée, & qu'elle demeurait toujours foumife aux charges
de la dîme, en concurrence & proponionnellement à la.
quotité de la perception? C'eft auffi ce qu'a très-bien fend
Van-Efpen, rom. 1, part. 2, feél:. 2, tit. 1, n. )' où 1
dit que nonobftant l'antique divifion des dîmes, il efl: jufte
& conforme aux Loix canoniques qu'il cire, que chaque
portionnaire des dÎmes fuppone proportionnellement fa portion des charges.
.
Delà les Ordonnances qui veulent que les charges des
dÎmes foient fupportées proportionnellement & même folidairement par les co-décimateurs, jufqu'à ce qu'ils aient
convenu d'un Réglement encr'eux; difpofitions imprefcriptibles, tout comme le droit de percevoir la dime. Delà vien..
nent les Arrêts qui ont décidé dans toUS les temps que la
quarre épifcopale étoit foumife à proportion au fupport des
charges de la dîme. B&rbofa dit que l'Evêque pour fa quarte
habec jus œ'luale cum Parrocho. De Luca, de decimis, difc.
17, & rous les autres Auteurs qui ont traité les queHions
de la quarte épifc?pale, regardent l'Evêque comme un co~
•
..
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�\
DU
PALAIS
DI!
PROVENCE.
203
décimateur. Et comment la quarte épifcopale pourrait-elle
être affrançhie des charges de la dîme? Si le décimatellr
abapdonnoit les trois quarts de la dîme, faudroit-il que Ja
quart~ épifcopale ,demeurât à l'Evêque fans charge? La conféquence ferait trop dure, trop contraire aux mœurs francoifes. Par quelle Loi l'obligation fubfidiaire ne tombe- t-elle
que fur les dimes inféodées. par le nouvel Edit de 1768,
art. 6, Edit donné dans un temps oà l'on connoi/foit les'
conte!l:ations intervenues fur la que!l:ion aél:uelle, oà le Clergé
s'étoit inutilement montré pour obtenir une déclaration fur
l'exemption des quartes épifcopales? Ainfi l'Edit de 1768,
intervenu dans ces circonfiances, en déclarant à l'art. 6 que
routes les dîmes eccléfia!l:iques de toutes le~ efpeces feront
{-oumifes au paiement des portions congrues, & en n'exceptant de l'obligation principale que les dîmes inféodées qui
s'y trouvent néanmoins foumifes par fubfide, cet Edice!l:
e/fentiellement décifif fur la que!l:ion, & lai/fe la quarte
épifcopale comme ponion .de dîme eccléfia!l:ique, inconteftableme~t foumife, tant à laJportion congrue, qu'aux autres
charges de la dîme. On a beau fe battre ,contre les Arrêts
rendus contre les Evêques de Glandeves, de St, Pons &
de 'Carpentras; on fait d~inutiles efforts pour en écarter l'application.
M. l'Evêque d'Apt préfume qu'en donnant la portion des,
dîmes, fur-tout aux Moines chargés du fervice divin, on leur
en a tranfporté toute la charge. Mais d'abord il eH peu ,le
dîmerie dont les charges n'aillent à la moitié du produit.
Quand l'Evêque a a/Iigné dans le principe des biens DU teve.nus eccléGafiiques à un Corps ou à un Titulaire, il lui
a fait l'a/Iignat de fa portion, & rien de plus.; cela devient
encore plus vrai, quand il s'agit" comme.ici, d'un a{lignat
fait par l'Evêque en faveur de fon Chapitre. On ne vD.it
pas qu'un pareil alIignat pui/fe avoir d'aut're principe que
celui du partage ou de la divifi.on d'une ~anfe auparavant co.mmune. La préfomption du tranfport de la dîme
en partie fous la charge du fervice ne s'admet que comre
Cc:/.
�%04
1o UR N AL
le Vicaire perpétuel à gros, & qui a été établi précifémenl:'
pour le fervice; quand on voit au contraire deux co-décimateurs, ils font cenfés percevoir la dîme eodem & œquali
jure. Ici Paéle de 1122 porte tranfport de la moitié des
dîmes y énoncées, Don en faveur d'UD Prêtre pour deffervir, mais en faveur d'un Chapitre qui ne detrert pas &'
qui ne peut pas deifervir', - qui conféquemment ne reCioit
pas le fervice. Cet aébe lie forme pas un titre particulier à
une 'Paroitre, mais une ceffion de plülieurs portions de dîme
en faveur du Chapitre qO'11 fallait dotér, en l'admettant au
partage des biens de .la manfe épifcopale. Suivant l'aéle de
1122, l'Evêque d'Apt potrédoit toutes les dîmes; il les a
cédées, non par. cet aéle, mais en force de rout autre que
l'on ignore; :1 ne lui a refié que la quarte épifcopale dont
la namre eH à préfent connue & fixée.. Qu'importe que fes
pr6décetreurs aient été dans le principe propriétaires ou
difpeofdteurs de la dîme e'n entier? Il n'en en pas moins
vrai que depuis que les titres eccléliafiiques ont commencé'
d'exiHer, & 'qu'il a fal1u donner 'des dotations particulieres
à tous les Tirulaires, le~ Evêques d'Apt ont cetré de pofféder les dîmes qu'il a fal1u donner aux Eglifes qu'ils étaient
au cas de doter. L'Arrêt rendu en 1759 entre le Séminaire
de Lurs & le Chapitre d'Apt n'a rien jugé de plus qu'une
queHion de prefcription entre deux dilférens co-décimateurs.
Par Arrê,t d1l3 [Mai 1783, au rapport de Mr.le Confeil1er de
Thorame, 1" Cour débouta Dom Dempcos de fa requête incidente; & ayant tel égard que de raifon aux requêtes principale
& incidente de l'Evêqlle d'Apt, le maintint dans la potreffion
& jouitrance de percevoir la quarte' des fruits décimaux du
Prieuré de S(miane, franche & immune de tOutes charges,
condamna Dom· Dempcos aux dépens de ces qualités, déclara que cerre quarte ferait prife fur cous les grains, même
fur ceux des terres nouvel1ement défrithées, & fur les agneaux,
condamna l'Evêque d'Apt 11 la moitié des dép~ns de cette
qualité, l'autre moitié entre les parties compen[ée. Ecri-:
v nt Mes. Aude & Gaffier.
�DU
PALAIS
DE
PROV·ENCE.
1
2.0f
-
ARRÊT
XXVI.
Le locataire ne pouvant, d'après le hqil, fous-arrenter à autre
fans la permiflion du propriétaire, peut néanmoins faire régir
la maifon louée par un repréfentant, s'il efi oDligé de s'ah-,
fenter , même attendu le dérangement de fes affaires.
E 3 Septembre 17 81 le lieur Chaubry, Tréforier prin~
cipal de la guerre,·rélidam à· Toulon, arrenta pour neuf
ans à Jean-François Delorme, Cafetier, une partie de maifon
qu'il y polfédoit, pour le prix de 6')0 liv. par an; il fut convenu que Delorme ne pourroit fous-arremer fans la permi{Iion du propriétaire, qui par-là feroit libre d'en conferver
la jouilfance, & audit cas Delorme ne pourroit mettre à fon
lieu & place que des perfonnes de fa profeffion.
L'époufe de Delorme ayant obtenu un décret de vergence;
& fon mari étant abfent, le lieur Chaubry préfenta le 2.9
Juillet 1782. une requête au Lieutenant-Général, pour obtenir
le réfilimem de la convention, & affigna Delorme à cet
e1fet & deux de fes principaux créanciers pour voir déclarer la
convention nulle, à compter du jour de St. Michel lors pro- '
chain; à l'effet de quoi, dès maintenant comme pour lors,
• il lui feroit permis de jouir de la partie de maifon arrentée,
avec injonél:ion à Delorme & tous autres de la vuider ; autrement à défaut ou refus, qu'il lui feroit permis de les en
faire. déloger, &c.
. Sur cene affignation, la Dlle. Delormè, en vertu de la
procuration de Ion mari, offrit de donner' bonne &, fuffifante caution pour 1';1cquittement des loyers 'à venir, & même
des détériorations, & au moyen de cene offre elle demanda
que fon mari rÔt maintenu dans fon bail. Le Lieutenant
régla la caufe. Appel de la part de la Dlle. Delorme. Requête .incidente du fleur de Chaubry, pour êhe reCil! appellan~
L
�~o6
.
Jou
RNA L
in quantùm contra de la Sentence, pour la faire ca1fer, annuller, réformer avec dépens, & en évoquant & retenant le
fonds & principal, & (ur icelui fai(ant droit, -obtenir l'entérinement des fins par lui priees dans fa requête principale.'
_
On di (oit pour le fleur' de Chaubry, que la quell:ion pourroit fouifrir les plus grandes dilEculrés, en la réduifant au
point de favoir fi la faillite du locataire rompt le bail,
quoique l'Auteur du grand Commentaire (ur la Coutume de
Paris, & Ba(nage dans (on traité des hypotheques le pen(ent
de même; mais il fe fondoit fur la convention elle-même
& fur les conditions qui en fai(oient parti~. Delorme ne
pouvoir (ous-arrenter à d'autres que du con(entement du
propriétaire. Ce patte eft licire, d'après la LOI & les Auteurs , qui (outiennent que le bail doir être rompu par la
faillite du preneur, lor(qu'il y a patte prohibitif de le tran(porter à tout autre. La faillite tranfporte ce droit à -la généralité des créanciers. Ainli l'arrentement doit tomber,
parce que d'un côré le failli ne peut l'exercer per(onnelle- ment, & que de l'aucre il l'a cédé à fes créanciers, ce qu'il ne
pouvoit pas faire (ans le con(en.tement du propriétaire. Lor(que
ce patteexifte, il ne doit pas être permis de fatre fraude
à la Loi, fous le voile & l'enveloppe d'une procuration.
Inutilement diroit-on que la femme peut être conlidérée
comme incorporée avec le mari dans l'e(prie du patte; il
feroie fore douteux que dans le cas d'un patte prohibitif de
fous-louer à tout -autre, celui clont la perlànne a été choi{je
& fpécialemene approuvée par le propriétaire, & qui a confenti la prohibition, pûe être en droie de faire régir la
boutique par [Que autre avec une procuration; la cho(e feroit
fore dangereu(e par rappore à la fraude qui pàurroit s'en
en(uivre. Ce (eroit d'ailleurs contrevenir direttement à l'intention des parties contrattanres.
Le patte ell: que le locataire ne peue menre per(onne
à fa place. Dès l'inll:ant que la faillite exifte , dès le moment
où elle ell: formée, où le.s droits du failli font ex eo ipfo
1.
,
�"2.°7
&. dès l'iutl:ant tran[portés à [es créanciers, ces derniers ne
pouvant profiter du bail par le patte prohibitif qui en enfpêche le tran[port fur leur tête, il eft évident que ce droiç
ne peut que périr, fur-rout dans le cas d'un Fermier fugitif
qui lai/fe route autre perfonne que lui dans la maifon louée,
& dont il fait l'abandon dans l'état de fuite dans lequel il
fe trouve. On ne fauroit coorefler que Delorme ne foie
abfent, & qu'il ne le foit à caure du détangement de fes
affaires. Les pourfuites de fa femme, les termes de la procuration en [ont roUt autant de preuves; il n'eft pas naturel
qu'il a·ie quieté Toulon pour aller établir un café à-Geneve.
La collocaeion de Vittoire Garrus anéanei/foit le privilege
que le fieur de Chaubry avoit [ur les meubles & IJflenfiles
du café. Par l'Arrêt de Réglement de 1714 la femme éeoie
auto ri fée à les vendre pour en faire, un fonds qui porrâe
intérêt au profie dé fa dot.
L'offre de cautionner pendant procès eft infuffifante. D'une
parr, l'offre a éeé faite trop tard, &' quand on favoit que
le fieur de Chaubry avoit ufé du droit qu'il avoit de fe ménager un nouveau Fermier. L'offre des paiemens ve1l3OC
enfuiee, ne peut que furprendre, fur-rout en cOllfidérane
qu'elle eft faite au nom du débiteur failli, qui' eft fans
reffource, & par la femme de ce dernier, qui veut tromper
les cr,éanciers. Quand même l'offre de la caution [eroit
venue à temps, elle n'a"uroie jamais faie ceffer' la crainte
de voir romber la maifon en \ difcrédie dans les mains d'un
locataire f.lilli, abfent, & par conféquene décrié; d'un
autre côeé, les créanciers n'auroiene jamais pu arrenter la
maifon au profit de la mâ/fe , le propriétaire ne leur donnant
pas fon confenremeor.
"On répondoit pour la Dlle. Delorme, que le dérangement des affaires d'un locataire peut bien être une raifonpour lui demander des fûretés, mais qu'il n'en eft jamais
une pour opérer la réfolution de fon bail, lorfqu'il offre'
fur-toue de donner bonne & fuffifante caution. Le dérangement des affaires d'un locaeaire ne donne lieu qu'à de~
D U
PAL AIS
D B
PRO V B NeE.
�':2.08
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RNA L
craintes fur le paiement des loyers; ces craintes ceifent par
l'offre d'une c-aution.·
Dans le droit, c'eH une erreur de prétendre que la faillite
anéantit le bail. Lecamus, fur la' Coutume de Paris, penfe .
qu'en matiere de banqueroute, il Y a lieu 1i la réfolution
du bail; mais il ell: facile de s'appercevoir que c'eH feulement en faveur des créanciers, & dans le feul objet de
'diminuer leur perte, qu'il eH: quell:ion de réfoudre k bail,
lorfqu'.ils trùuvent qu'il feroit onéreux de le laiifer fubfiHer;
,mais ja~ais il n'ell: au pouvoir du propriétaire de l'anéantir.
Ainfi jugé par l'Arrêr 'rapporté par Denifart & par. celui
.r;endu par la Cour dans l'affaire dU fieur Fauchier, Allard,
~ Merell:ein & Compagnie, par lequel il fut jugé que les
créanciers n'avoient' pas même le droit de demander le' réfiliment duv bail de leur débiteur. Il a même été jugé par
un autre Arrêt rendu en 1770, au rapport de Mr. de
Thorame, entre le fieùr Beraud & Silvecane, que des locataires, bjen qu'ils euifent été légitimement condamnés
à donner caution à leurs créanciers, devaient néanmoins
être difpenfés de tout cautionnement du· moment qu'ils avoient
été rétablis.
Dans Je fait aétuel ( ajoutoit-on ) Delorme n'ell: '. pas
failli; il n'a aucun des caraéteres qui con Hi ruent la faillit.e;
iI n'y a eu aucune aifemblée des c~éanciers pour mettre feS
biens en difcuffion ou direétion metcanrille; fes créanciers
n'ont jamais fait aucun mouvement dans cet objet; fa
femme avoit bien commencé fes pourfuites deux ans avant
que le fieur de Chaubry en eût pris connoiifanèe, même,
avant que la convention eût été paifée, mais elle les avait
difcontinuées. L'abfence de Delorme,. ne peut lui nuire i
en convenant' même que le dérangement de fes affaires, l'aie
occafionée, puifque le café a toujours ,été ouvert.
Le' paéte de la convention porlant prohibition d'arrenter
à tout lautre ne peut fervir de prétexte pour faire rémier'
le bail. Il ne s'agit point ici d'un fous-bail que François
Delodne ait paifé à un tiers; ,'eH; [a femme qui le régit.,
Dans
�-
-
n u PAL A S ' ,n B P Jl. 0 V B N C B.
209
DaÎls lé droit ni dans la convention, il n'y a point de dil-poGtion qui prohibe au mari qui fait un 'Commerce & qui
a une maifon p.our l'y exercer, de le confier à fa femme
pendant les abfences qu'il efl: obligé de faire; il Y a une
grande différence eotre fous-louer llne maifop à un [iers, &
en laiHèr l'habi!ation à fa femme.
_,
Me. Meriaud h 5ubfl:itut, obferva que' d'après les Arrêts
qui avoie~t été cités, il était certain qu'il JJ'e~f1:e aucune
Loi, aucune doél:rine qui déclare le bail d'arremement réfaJu par la faiUite du locataite; la feule queHion qu'il s'agiŒoit
d'éclaircir, conGHoitLà .favoir fi Delorme, ,'étatt ou n'étaie
pas failli; G fon abfence, le pécr~t ,de,verge.nce obtenu par .
.fa femme, les pou'rfuites 'Ulot,lèées" par quelques uns de fes,
créanciers, étoient des preuves de faillite,
5uivanf l'arr. 1 du titre XI de l'OrdonnaJlce de r673 , ~
Ja faillite ou,'banque.route efl: ré,pmée ouyerre, du jour que
Je débiteur (e 'fera retiré, ou., que le fcellé .aUla, été appofé
{ùr fe:; bien,., Le ComnJéntateur obferve [ur (lès it!otSI' que
le débiteur :~ra retiré, pourvu que. cene ,retraite foit pour
éviter les contraintes, & que ceux qui font dans fa iriaifon
ceŒent -de payer_ en -fan nom; ~ar fi elle était o:ccafionée
par quelque .voyage ou ,naladie, ou que le débiteur fe fôt
,ab (enté . pour fes affaires, ou pour prendre des arrangemens
,à ,cau·Ce de quelque banqueroute 011 il fe trouverait impliqué,
fans avoir eu ·le teml'ls de lailfer quelqu'un chez lui pour
répondre fur fes affaires; dans ce cas, fi ce d,ébiteur revenoit
en fa maifon p~u de' jours après, & qu'il fatisfit exaél:ement fes créanciers; on ,ne pourroit -<le, regarder comme
ét<jnt en faillite; quand même le fcellé au,oit été mis fur fes
~~.
/
"
Cette 'quefiion de favoir li 'Iaretraite du débiteur efl: une
preu've de faillite, a été examinée par tOUS les Auteurs qui
,Qne. travaillé fur l'Ordonnance. du Commerce; ils attellent.
qu'elle ell fufceptible des plus grands doutes, parce qu'on
,lle peue difcon",enir qu'e Je I;etirer a difl:ërentes figuifications
appropniées a\IX circonfl:ances; & tous conviennent que la
Années 1782. & jùiv.
D cl
�(2.10
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10
U R'N' A I . '
,
remife du 'bilan en la feule preuve de lafaillite; tel en le fen.;
'timent {ur-tOut 'de .1'Auteur de 'l'ouvrage intitulé, l'Exercice
des CommerçaI/s.
On ne peut'{e diffimuler que les affaires de Delorme n'aient
été dérangées, & qu'elles n'aient été la caufe de {on abfence pour éviter les pourfuites de quelques uns de fes
créanciers; la preuve en eH conÎlgnée dans l'informarion
prife' enfui~ du décret de vergence, & dans la procura ion
qu'il paffe à Geneve en faveur de fa femme, par laquelle il lui
donne pouvoir de tranÎlger avec fes créanciers, de paiTer avec
eux un concordat; mais ce dérangement ne peut être regardé
,co'mme une {;Jillite , & l'on ne voit au procès aucune des
preuves qui la caraél:érifent. Les créanciers eux-mêmes n'ont
formé aucune- affemblée, 'n'ont pris aucune délibération,
n'ont donné en un mot aucune marque légale de leur intenrion à pourfuivre leur débiteur. Ces circonftances prouvent
le dérangement des affaires de ,François Delorme, & non
, point' {a1 faillite; fa conduite n'a aucun des caraél:eres de
fraude marqué 1 par l'Ordonnance; fa femme l'a toujours
'repréfènté dans fan commerce; elle a fait honneur aux entreprifes qu'il avait formées; elle a continué l'exploitation du
caffé & celui de la falle des fpeél:ac1es; elle en a payé aux
termes convenus les rentes échues. Pendant procès on a
offert à deniers découverts le paiement des penÎlons. Ce
n'cft ·donc pas, le défaut de paiement, ce n'eft pas même
la crainte dé ne pas être payé à l'avenir & pendant taure
h ,durée du bail que le lieur de Chaubry envifage pour fa'ire
l'émier fa convention. Les paiements ont été faits ou offerts
à leur terme; 'une caution folvable lui a' été offerte pour
le l'affurer fur les paiements avenir, & le dédommager de
l'hypotheque que la conVention iui donnait, {ur les meubles
& ,efFets qui fervoient à l'exploitation' du café, & qu'il
peut avoir perdu enfui te de la collocation accordée à la
femme.
La c1aofe inferée dans la convention, de ne pouvoir fous•
.arrenter à tout autre que du confente ment du propriétaire,
�DU
PALAIS
DE
PROVBNCE.
lU
ne fauroit opérer davanrage le réfiliemenr. Delorme n'a
point fous - arremé; le café n'a pas ce1fé un feul infiaoc
d'êrre fur fa têre, l'exploirarion en a été faite par rout autre
que par lui; mais la convention ne lui interdifoit pas cette
faculté, & il n'était pas fournis d'exploiter lui feul le café,
& de ne pas le faire régir par un commis, par un garçôn, &
à plus forte raifon par une femme· qui ne devait avoir
d'aurre intérêt que celui de fon mari, qui étoit dans celte
partie fon repréfentam & le feul capable .de faire 'valoircerre
efpece 'de commerce.
D'ailleurs, fuivant le fentiment des Auteurs, & de Lacombe
parriculiérement, le fermIer ou locaraire peut ééder fon bair
fans le confentement du bailleur,' pourvu que le ceffionnaire emploie la ma ifon au même ufage, lorfqu'il y a c1aufe
expre/fe que le fermier ne pourra céder fan bail que du confenrement du bailleur. Quoique celui-ci pui/fe faire déc1arer·
nulle la ceffion , on rient cependant au Palais, que nonobftant telle daufe le bailleur doit lai1fer fubfifier la ceffion faire
avec même avantage. Cerre déciGon ne fauroit être:' plus!
e1fenrie1Je dans la .caufe oÙ il ne s'agit point de fous-remier,
mais de la femme dé celui qui a pa1fé la convention, &
qui régit le café & en paie les remes au nom de . fOlï·
mari.
.
Me. 'Meriand l;onc1ut à ce que fans s'arrêrer à la requête
du fleur de' Chaubry dont il ferait débouté, Delorme fÛt
mis fur icelle hors de cour & de procès, en donnant par
1u.i, fuivant fes offres, bonne & fuffifante caurion pour le
paiement des loye.rs à leur échéance.
Arrêt du 3 Jujn, 1783., prononcé par M.. Je 'Premier Pré.
fldent, conforme aux conc1ufions; le fieur de Chaubry fut
condamné aux dépens: Plaidant Mes. Gilffier & Portalis.
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, ·fônc7ions au rchieu6 ,~lJe peut sen' difPeizfer que pour 'des'
,_ cas qui ne fouffi:efll;' aUCI/n . retara; il doit néanmoins ln
élre ,cru jùr fa /impIe' aj[ertion; pourvu 'lue' ce foitfans fraude,
& fans aDus.
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.. ~b ~() ,. "'''~1U ~ ?')b
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L r~ili!l . ·daos FEglife)<!er Toulon5 deux )IGurés\lqUj lS'Y
·tpouvend établis pour)! Templif alternativement le ferv.ice.
de. la Cure & du chq;ur. Le regle primitive écoit que chaque rfemaine un, des ,deux ,Curés étoië en entier M'i'ni/he
qU- J~Jiœur.; tanl:lis- qile,:J'aurr.e! dev~oic pendant le même.
~en\pSGMiniJlre ,dè' TH Cw:e'; ils~ Touloient. e ce tte:m an.ie'œ.
'l1rernative.menc, J& cHuné fémiühe. à:. 'Eaurre, dans l'un:-&
Ital,l~re"des ,deux fervices. 011. trou.ve même en .?;J 5 ','lm.
Ar·~êc. quiJc1eur prefcri~jt, paT alternation, l'aililtanèe aU'
çhœur, en conformité des titres de léur établilfement; les
~dejl){ eurés fe -<ljpenferent dans. la .fuiti de oel!e a~ltanC({1
affidue; le Chapitre voulut les y obliger; il fe pourvut!
même .contrel eux; & par "Anêt 'cHelqrédienc...i!u l,;, Mai .
. 1780 les Curés· fe foumirent 1°, à 'continuer ,oe, donnê.r Jal
hénédiélion au Maître ~ Autel ponr .Ies Agonifans' le jeudi
de dtaque femaine.; 2°. à donner la bénédiélion & faire l'ah-'
foute pendant l'oélave .des Morts; gO, à donner auffi la,
béuédiélion 1es dix -derniers, jours ç!e carnaval à l'ilfue' du
Sermon qui Ce prononce dans .l'Eglife; '4°. à donner la.
bénédiélion pour les fêtes des Confrairjes; 5°, à célébrer
à leur tour, comme le.:; Bénéficiers & Chapelains, la Melfe
Conventuelle; 6°, à entonner l'invocation & le premier
chant des Vêpres tous les Dimanches; 7°. à remplir les
fondions de Prêtre - affiltant, tant dans les enterrements
folemnels, que dans coutes le5 autres cérémonies dans 1er·
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PRO V B N C l!.
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queUes M. eEvêque., ou un des Chanoines, officie; go. à
annoncer aux affifians., à l'i{rue de la GraDd'Melfe, les
Indulgences attachées aux Offices du Prélat; 9°. à faire
l'abfoute à la fuite des Anniverfai.res chantés par le Chapitre;, 10°. à officier dans les ProçeffioDs que le Chapit(e fait. avant< la Melfe conventuelle tous les premiers
DjltJanches de chaq11e, mois; 11°. à fajre l'afperuon accou:tumée to,uS les Dimanches avant la Melfe conventuelle,
Je çORt fauf les empêchements de droit, fans abus & fans
fraude, . & fauf, en cas d'empêchement, & non autrement,
d~ (e lf~ire fyppléer par leurs Vicaires, fauf & réfervé auxd.
çUJ~s I~urs droirs J & aaions pour ce qui concerne .le cafuel
de la Cure, & au Chapitre fes exceptions & défenfes conttai(ès. L'Arrêt difpofe enfuite fur la jurifdi6l:ion du Chapitre,
à laquelle les Curés Ce trouvent fou mis. Deux, ans après, le
Chapitre croyant que Mre. Reveft, l'un des ~urés" affectoiû&e ,.vouloir fe, fOl,lftraire au~ fonaions qu'il étoit oblig~
de t6mplir, Jllrernativement au chœur, !ft. pourvut à la ~our
Je 2.6 li'j,vrjer 1.782., eq injonaion cÇlntre lui' de remplir
à fo_n; tour _perlPnn.ellement Jes fçm6l:i9.n.s du .chœur aux. qpelles il éroi! JoulI)is en fa quaJiré' de Çuré, foit par les
Jgix & .uf'lges_.de •.I'Egli(e, foit par l'Arrêt d'expédient dll'
3.~ /Mai ,-1.780" ·en t"pt q~'il ne feroit Foint ,empêch~ pour
fI,es cauf~s" pt~!f,!nles qul:ne pourmient ,êr!e rerardées, ~
pour les qefoins, urgens d~ la 0;ure, fans pouvoir prétexter
en aucune maniere <les confeffions à entendre dans la Paroilfe, & des autres fonaions curiales qui pourroient être
~etardées & renvoyées à, d'autres temps, à peine d'une
amende de ;390 liv. qyi n~ pourroit être réputée comminatoire.
_ï .
'1
: ,.Mre. Rev~fi préfenrÎl une, .reqpête cont~aire, par laquelle
il fe fit'concéder a6l:e de ce qu'il s'étoit toujour~ conformé
à l' A~rêt ex confenfu du 31 Mai 1780, & de ce qu'il ne.
s'étoit difpenCé, le cas échéant, des fonaions prefcrites par
cet Arrêt que pour j vaquer aux fonaions curialés & à l'ildminifiration d~~ ~acr.em~nti'; d~ .clliq\le e,ncore ,:en, }!e. ~.mj
�-'114
10URNAL
pliifant pas les fonélions par lui-même, il avait eu l'attention de fe fdire fuppléer par fon Vicaire" excepté dans les'
oecafions des 8eux fêtes de la Pentecôte, à la Meife tant
feulement, où il écoit le -feul à pouvoir vaquèr aux fonctions de la, Cure; comme encore de ce qu'il n'entendait
point que les conf~ffions ordinaires dans l'Eglife puifent
- le difpenfer defdites fonél:ions, & de' ce qu'il continuerojt
de les remplir, fatif l'empêchement de droit, fur lequel il
en ferait cru li fa feule aifertion; & il demanda que fans
s'arrêter, à la requête de l'Econome du Chapitre, donc il
ferait demis & débouté, il feroit mis fur icelle ,hors de
Cour & de procès, avec dépens. La caufe fut réglée à
écrire.
.
On difoit pour Mre. Reveft, que les devoirs des Curés
confinent en ce que tantôt ils font appellés au confe/Iion- '
nal, tantôt à la vifite des malades; l'adminiftration des
Sacrements en: une charge prerque concinuelle; les enterrements les tiennent en haleine, au point d'aller fouvent,
plulieurs fois le jour, au cimétiere fort écarté de la vjlle.
Les PrÔJ;les, la Mefie du peuple & celles 'que la dévotion
des fideles exige, fom un nouveau travail. Leur mininére
les appelle fbuvent à des intérêts de famille & à des œuvres
parciculieres. Outre ces emplois accumulés, Mre. Reveft
eft le dépofitaire de cous I~s regiftres de la Cure" & da'ns
une ville comme celle, de Toulon, cette partie eH' fufce'p~
tible d'une infinité d'expéditions qui prennenc beaucoup fur
le temps du Paneur. Dans ces circonnances (diroit-il) le fieur Econome eft nçlD-recevable 'dans les fins de fa requête;
car de deux chofes l'une: ou Mre. Reveft en contrevenant,
ou il ne l'eH pas. Si on le juge contreven~nc pour -avoir
manqué aux fonél:ions du chœur, 'lé Chapitre n'a par l'Arrêt
de 171~, qui fert de réglemenc, que le droit de le pone";
tuer; jufqu'à préfent fes plaintes oe roulent que fur des
abfeoces du chœur qu'il crait prohibées, & que 1'00 fOlltient permifes; it n'avoit qu'à exercer fa jurirdiélion correctionnelle, qu'à inflige'r la peine, qu'il eftimoit devoir prenon:'
/
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
21)
~ laquelle
cet Arrêt l'oblige étroitement. Il nair delà une fin de nonrecevoir pui/fante & bien caraél:érifée.
La ponél:uation eU le reméde contre les abfences; c'eft
une privation déterminée des droits que le Curé aurait eu
fur les anniverfaires & autres revenus attachés au fervice
du chœur, dont on lui retranche certaine quotité relativement au plus ou moins de manquements. Or, le Paneur
puni par l'Arrêe de 17 l S ~ perdre une panie de cette rétribution, ne doit point fe voir écrafé par un procès difpendieux: le Chapitre devait donc ponél:uer, & non pas fubftituer à cette peine une amende de 300 liv.
.
On obfervoit encore, que cette peine ne pourrait avoir
lieu contre les deux Curés de Toulon, parce que ces deux
Miniftres font ~ la Cure avant d'être au chœur, & il n'y
a que les intervalles libres d'une faculté attachée au fervice
du chœur, qui pui/fe alternatlvemenc y' appeller celui qui
fe trouve de tour. Ce feroie s'abufer & raifonner conrre
les notions les plus fimples & contre l'évidence des chofes,
que de vouloir que le Curé Hebdomadier au chœur fût
déchargé de toute fonél:ion curiale. Dans les occurrences
où Mre. Daumas ne peut fe multiplier, & où il eU occupé
lui & fan Vicilire,' fi les fecours fpirituels font implorés
par d'aurres paroifliens, que faut-il faire? Pour entonner
les Vêpres faut-il manquer Il fon troupeau? faut-il que l'adminiftration des Sacrements fo'it délai/fée? Ee fi Mre. Revè[~
lui-même ayant la confiance du pénitent eft ciré pour l'aller
fecourir au milieu d'une maladie dangereufe, faut-il qu'il
mol1i/fe, & ne doie-il pas toue abandonner? Combien des
cas femblables, & fur-tout da!1s ces faifons fâcheufes, où
'des maladies épidémiques tiennent en haleine non-feulement
les deux Curés, mais encore leurs Vicaires? Faudra-r-il
encore pour de fimples cérémonies "que les Pafieurs renoncent ~ des fonél:ions indifpenfables? Mre. Reveil célebre
la Me/fe' conventuelle & entonne les Vêpres Il fan tour
quand· il le peut; le Chapitre eft fans preuve; fes certificats
cer; mais il ne peut pas s'écarter de la route
�'216
'JouRNAr;
ne valent rien; on en a communiqué de contraires. L'Arrêt
de 1780 'lui impofe de fe faire fuppléer; il Y a fatisfait. Donc
point de manquement.
Les confeffions extraordinaires, bu de. précepte & preffantes, font celles qui exigent l'intervention du Mini!l:re .curial,
au moment ,que le Paroiffien implore fon fecours fpiriruel;
& cela dans l'une & l'autre de deux circon!l:ances. Dans la
premiere, le temps entraîne une obligation à laque\le le
Curé ne peut fe ravir, parce que l'Eglife en a fait une loi
écrite. Dans la feconde, l'obligation devient preffante, parce
<Ju'un malade, dO'ilt l'état dallgereux fe fait fentir,. autorife
le Curé à quiner le fervice du Chœur pour l'allér admini!l:rer
.& viliter.
Les confeffions ordinaires, c'e!l:-à-di,re, celles qui n'ont rien
" d'ordonné & d'urgent, ne doivent pas être écoutées pendant
leI' Offices, <Jui font alors le devoir attaché au Curé, &
auquel il n,e fauroit fe fàufhaire. Dans le concours, l'Office du Chœur, quant à ce, e!l: préférable; mais il faut faire
l'exception à cette regle générale, en retranchant les confeffions de précepte & preffanres qui mettent le Curé à même
de ne pas faillir; celles de la quinzaine de Pâques ou les
confeffions demandées par les malades, qui le font abfenter
pour ces deux cas feulement.
a quinza'ine de Pâques eft
indiquée pour recevoir le pénitent, n'étant que trop probable '
qu'un délai plus court feroit que la plupart des Paroiffiens
ne pourrait dans le grand nombre être admis au Sacrement
de la Pénitence; cet efpace circonfcr,it & limité veut·que .tout
cede aux fonétions paftorales ,qui fe multiplient alors plus que
jamais. Le Curé n'eH pas le maître de dégoûter les Fideles
en temporif.1nt, & même en reculant les travaux & e.n les
accumulant; il les expoferoit à cet éloignement voilin de
l'oubli ou de la renonciation abfolue à la communion pafchale.
Indépendamment du texte que l'Eglife en a fait d'lns fes
Commandemens, pour marquer l'obligation inévitable de fe
recueillir au moins une fois l'an, de- s'apprQcher ~u ,temps de
Pâques des Sacremens de Pénitence &. d'Euchariltie, ce
1
devoir
�DU
PAL AIS
DE
PRO VEN C E.
217
-devoir nous eU retracé dans tous les livres. On trouve dans
les Décrétales, liv. 5, tit. 38, chap. 12,' une difpoIition
femblable. Hericourt dans fon Analyfe des Décrétales, pag.
I~3.:-' expliquant les mots proprio Sacerdoti, efiime qu'on ne
fauroit s'ad1"elfer qu'au Curé de fa Paroîlfe. Or, li le miniftere
du Curé eU entiérement dévoué au Paroiffien, li les Commandemens de l'Eglife, toutes les Loix Canoniques, notamment le Concile de Latran, en impofent l'obligation la plus
étroite aux Paneurs, comment effayer de s'y fouUraire? Ces
devoirs ne peuvent être que réciproques. Si le Fidele eH frappé
d'itnathême en ne fe préfentant [las au Tribunal d~ la Pénitence dans le temps pafchal, il.raut lui moye-nner toutes les
voi~s propres à fuir ce mal, & cerre facilité n'efi aorre que
fon accès libre près du Paneur. En vain l'Eglife néceffiteroit
l'un à l'accomplilfement de cet a&e important de la religion,
li on le privoit de la faculté de contraindre en quelque forte
l'autre à y concourir; dès-lors le Curé étant prépafé au Sacrement de la Pénitence à une époque fixe, fubordonné à
recevoir & à enrendre le pénitent, contraint de fe montrer,
f~s momens ne lui appartiennent ~oint; il fe doit à fon tronpeau, & il devient, pour ainli dire, fon ,efclave; A la moindre
voix qui l'appelle " les fonél:ions de fa place, celles dd"Minifire
curial l'enchaînent à la confeHion; &. du plus loin il doit fe
hâter d'accourir au Fidele qui réclame fon intervenrion. On
peut d'autant moins in!~rrompre ce faint exerdce, que deux
Curés, Dir.eél:eurs de dix-huit mille ames, ne làuroient fans
inconvénient, fans péril & même fans une crainre certaine,
renvoyer ,le Paroiffien, qui ne reviendroit plus, foir parce
_qu'il auroil"élé rebuté,; foit parce qu'on ne le prendroit point
dans fon moment de liberté, éta nt le plus fouven~ filbalternlô,
& dès-lors.dans l'impoffibilité de revenir les jours ouvrables,
où fon fervice & fon travail le tiennent empêché; foit enfin
parce que l~ MiniHre, plus furchargé par des renvois 'réitérés,
{etoit obligé d'en factiffer -& d'en abandonner la maj~ure
partie: abandon qu'il ne peut favorifer, plehs jùh Curâ ejus
regitflr. Le fervice du Chœur n'offre qu'un objet ulrérieur«
Années l78:l. & fuiv.
E e
~
�us.
10 U,lt N Â L
de feconde, 'clalfe.; l'Evangile l!enfeigne. Dans ce temps
confacré, le p,afl:e.ur appellé par un malade non dangereux
ne doit-il'pa~ l'adminifl:rer, fans que la caure moins aaive de fes
infirmités le déJienne? Si le Curé y accourt, pourquoi ralentira-t-il qualld le FideJe pourra fe,. traîner à la Paroilfe?
Dans tou,S les cas on n'envifage que le devoir parchal; le
précepte n'efl: point, modicatjf; l'Eg!ife ne l'a pas non plus
interp~é,té, pour f~vQir fi ce ferpit pendant ou hors les Offices
que les confe.fi\ons parchales peuvent être entendues; la Loi
efl: impérative. &. n,e diHingue rien. Pourquoi glilfer alors une
diftinajoq que le titre co,ndamne? Tant qu'il n'y aura que
deux Curés., ils,peuyen.t être demanqés pour les befoins curiaux; les Vicaires même peuvent s'y trouver employés dans
la quinzaine de Pâque,'> comme dans des occalions prelfantes.
Il fuffit que le Curé vaque à des fonÇtions elfentielles &
premieres, pour qu'à l'excufe fe joigne l'abfence ; excufantur
qui ex legitima caufa ahfunt, dit Pa Hour , lib. 3, tit. 36, n.
9. Quelle excufe plus naturelle & pJus gracieufe que celle qui
dérive de l'adminiHration des Sacremens dans un temps où
l'Eglife en fait un devoir indifpenfable aux Fideles? Le Concile
de Trente, fe1f. 24 de reformat. cap. 12, admet l'abfence du
Chœur relativement à la néceffité d'un bien fpiricuel, ut fi
quis abfit ratione officii; il la reçoit même pour l'uti~ité du
Bénéfice & du Chapitre; item dicitur de illis qui ahfimt oh
negotia BeTleficii & Capituli. Les Théc~gaux ne peuv,ent être
ponaués aux jours deltinés à la leaure & à l'infhuaion, pour
ne s'être.. pas rendus au Chœur; Canonicus The.ologalis diehus
quihus legit ac concionatur ha,helUr pro prefènti pro totâ die,
difent la Bulle du Pape Gregoire XIII & d'Hericourt, liv. 3 ,
du Service Divin , §. 1 9.
.
~e Concile de Malines ell: celui qui a parlé le premier du
cas dont il s'agit; Inulligit Synodus Ecclifiœ negotiis occupari
non jà7ùm eos qui negotia traaant,fèd & Archidiaconum, pœnitelltiariulIl, atque illos omnes qui propriœ dignitatis vel prœhendarum filOrum munera Juheunt. Quelle eft la dignité propre
& direae du Curé? n'ell:-ce pas celle de fa Cure? quelle
�DU PALir's DE P'ROVENCE.
2r9
parfonnne contetnple-t-bn dans le pénitèncier? n'efi!ce pas
ce confeffeur général ddnt le Curé efi l'ifnage & le repréfentant? de quelle charge ddit·Î\ pr'éfér:Jblèment s'acquirrer,
munera Juhel/nt? n'efr-ce pas de celle qui corlc~rne la Cure
dans les 'confeffions de précepte?- n'efr-ce pas de ce devoir
que le Pafieur ne fauroit éluder fans olfenfer les loix de
l'Eglife? n'efl-ce pas en un mot de ceux pour léquel l'Eglife
-s'ef!: exprimée? Le titre 18 de ce Concile a plus d'énergie
& de relation à la quefiion préfeore: SimiZiter eos 'lui veZ
celehrant, veZ audiunt confeffiones , ipfâ horâ eJuâ hoc lacùmt ,
pro prœfentîhus hahendi Junt. C'efr encore ainG que s'exprimenc
le Concile de Trente, felf. S , cap. l , & felf. ~2, cap. 3 ;
Goard, ta,m.
pag. 666, & l'Affemblée générale du Clergé
tenu~ à Melun en l S69. _
Mre. Reveil: ajoutait que le Pail:eur ne peut être fournis
à expofer au grand jour les circonfran.ces de fes aétions & de
celles de [es Paroiffiens qui croient que leur nom demeure
enfeveli 'dans le cœur de ce MiniHre curial. En vain le Chapitre opporeroit que les abfences des Curés pour des caufes non
urgeores, fetoleor bientôt couvertes par un,e -affertion abuGve.
La Jurifdiétioncorreétionnelle du Chapitre s'étend fur les
Curés; il efr vrai; mais elle a des bornes; leur minifl:~re
admet dans les Paffeurs cerre foi & cette confiance qu'on
ne fauroit leur ravir fans enfreindre les loix de la morale;
il. faut fe repofer fur leur affertion, & admerrre cerre impar'tialité, ce fcrupule, - cet amour du devoir, cette juHice &
cette fidélité qui font leur apanage. Une réGgnatiol1 à leur
ferment doit être le tribut que nOUG arrache la dignité de
leur place & la pureté de leur minifrere.
'
Le PaHeur doit être cru 'à fan affertion, c'efi-à-dire, qu'on
ne peue arracher de fa- bouche d'autre aveu que celui d'avoir
été empêché par les fonétions preffantes de la cure. Le
Curé eil: à fa cure 'ce ,que la tête eil: au corps. 'Toutes les
parties, tous les état,s y ahomiffent; il n'y a prcfque aucune
maifon; aucune famille, aucun particulier qui dans l'efpace
d'une année n'ait recours à- fon - miniHere; & dans cette
.
Ee 2.
l,
,
•
�/-
10
2.:l.0
t1 Il. N A L
multitude prodigieufe de perfonnes, combien de dénnncia":
tions, de plaintes; de fecours & d'œuvres pies Ont befoin
d'être voilés du manteau de la di[crétion & de la chariré!
Ici, une di/fention domellique peut ,êt~e a/foupie- rar le Pa[teur; l~, un malheur, capable de fl~tnr une famille entiere
n'eH réparé que par [es [oins; ici c'ell un inforr;lOé qui [e
plonge dans l'abyme & [e dérobe à la lumiere par un principe de honte, de -délicate/fe & d'honneur, & qui dans certe
pofition Gnillre implore la bienfaifance des Fideles par l'organe de [on Chef; là c'ell un coupable à qui le remord
réclame la pui/fance, le crédit & les bons offices de ce
PaHeur. Pour complaire à une curiofité inconfidérée, pour
former une difcipline fi mal entend~e ,faudra-,t-i( éclairer ces
fombres romes où le Paroiffien tremblant & dans la confternation ~a [e cacher? Faudra-t-il' découvrir ces fituations
affiigeantes & de défaGre? Les perfonnes de rout [exe [ont
fufceptibles d'inconduite. Le Curé eft" mandé à l'heure de
l'office pour en vifiter une; viél:ime decette foible/fe qui l'expofe
au danger de mort, il vole,à fon fecours & s'abfente du Chœur.
II en coûte déja trop à cerre malheureu[e créature de dévoiler fa
firuation honteufe à [on Curé, quelque confiance qu'elle pui/fe
- avoir en lui. Si elle [ait qu'on doit la citer, à jamais le
citoyen préférera la mort ~ la moindre affiGance fpiriruelle
& temporelle. On pourroit. en dire autant de ce paroiffien
indigent qui redoute d'être COll nu , de ce fcélérat expirant
que la main de Dieu a rouché, de ces [oldats qui s'égorgent, de cette rumeur intelline qui divife les pa\ens, & de
ces cas inombrables tous follicitant le plus prompt remede
-& le filence. Si à l'avenir l'Econome, fans vouloir rien prendre {ur le fecret des confeffions, a le droit d'interroger les
confciences des Curés fur les per[onnes, fur les lieux, [ur les
aél:ions; li le Chapitre devient, pour ainli dire, le dépô't
public où iront fe manifeHer les révolutions les plus étonnantes , !Q!Jt eG' perdu; & la religion offenfée par l'endroit
Je_ plus re~outable, s'appercevra bientôt des maux & des
trilles effets qu'une innovation auffi cruelle ne tarderoit point
à opérer.
•
�DU
,
PALAIS
Dl!
l'RovENel!.
:aI
La réclamation de I,'Econome n'dt pas -nouvelle, mais
elle a été profcrite par deux Arrêts du Parlement de Paris.
Le premier, à la date du 1 Août 1673, fut rendu en faveur
du Curé & Vicaire perpétuel de St. Venans de Tours, porrant qu'il fer9it cru .fur fa fimple déclaration en cas d'abfence,
fans etre tenu -d'en rapporter d'autres preuves. Le fecond,
fous la date du 7 Janvier 168 l , jugea que le même Curé
n'écoit pas fujet à la poitlCe. Goard en fon traité des bénéfices, pag. 3 ~7, & Fleury en fes Inltituts Eccléfiafiiques,
corn. l , pag. 10~, rapportent ces deux Arrêts.
La Cour a plufieurs fois févi concre cecce introduél:ion
aupacieufe. 'En 172.3 on tenta ~ foumeccre les deux Curés
du Chapitre de La Major de Marfeille à la même néceffité
-de fe jufiifier, .à la même divulgation & à la même forme
de rendre compte de leurs aél:ions; ils s'y oppoferent vigouJ;eufement; & par Arrêt du 16 Septembre même année,
- rendu au rapport de Mr. de Meyronnet, il fut dit qu'ils en
feroient crus fur leur fimple alfertion. En 1-"]68 Mre. Ollivier, Prévôt de l'Eglife Collégiale St. Martin de la même
ville, fit un riouvel effort; il agita la mêm~,queltion, en la dérerminant pour lui, fur le fondement, qu'il y auroit trop de
liber~é & de danger de confier à un Curé fon propre juge,me.nt, que d'ailleurs le mot & l'alfertion du PaHeur proJtégeroienr l'abus & la fraude; mais l'Arrêt du 1 ~ Juin 1768,
'rendu au .rapport de Mr. de Guelcon, jugea que le Curé
devoit être'cru fur fa fimple alfertion.
On répondoit pour l'Econome, que' les deux Curés éraient
réduits & fubjugués fur les points de droit & fur la foumiffion qu'ils doivent aux Loix & Conltitutions de l'Eglife de
Toylon. L'Arrêt d'expédient de 1780 renferme & confacre
les reltes de cecce même confiicution que les Curés vouloient
détruire; il les fixe à leur place, en les déclarant fournis à
la Jurifdiél:ion du Chapitre. Il les rappelle au double fervice
dans quelques - unes des fonél:ions qui s'y trouvent exprimées. Mre. Revefi a commencé par' affeél:er de ne pas rem, plir prefque aucune ç!es fonél:ions auxquelle~ il fe trouvoit
r
,
�222.
>} .0
U'R .,. .A L
foumis par l'Arrêt t1'exp"édiènt; -[ès éot1frll\1'enrlons 11 cet
égard ont été conlhnre!\ & fyltênültiques. Il a affeélé de
ne jamais paroître aux VêpféS du >Châ~itte dont il 'devoit
entonner le premier chatt; il he fe préfentoit pas non plus
pour remplir les fonélions de Prêtre-affifiant aux offices faits
par les Chanoines dans les jours de folemnité; il n'étoit
pas plus exaél 11 célébrer à fnn tour la MelTe conventuelle.
Cette affeél:ation étoit outrée; le Chapitre l'a, tolérée_ pourtant, en efpérant tout du temps & ·des circonHances, &
il a fallu enfuite que l'Econome fe pourvût 11 la Cour pour
l'y obliger.
Tout ce que Mre. Revefi a avancé pour fa défenfe pourroit être plauuble, s'il régilfoit feul. fa Paroilfe; quoique
tOUt Curé fe doit tout à la fois 11 fes fonélions pafiorales ,
ainfi qu'à l'ordre & à la décence du fervic~ divin; quoiqu'il feroit vrai de dire, même pour ce CU.l'é qui régiroit 'feul fa Paroilfe, qu'il fatlt éoncilier les deux fervices
& difi-ribuer fon temps de maniere qu'ils foient remplis l'un
& l'autre. Mais en dt-il de même à Toulon, où il exifie
deux Curés prépofés pour le fervice alternatif de la cure
& du chœur, où l'on trouve toujours un 'Pafieur en exercice,
un Pa!l:eur uniquement deHirfé auie fonélions de la cure,
qui n'ett ni gêné ni diyeni par le fervice du chœur; &
tandis qu'un de ces deux Cures 're livre tout entier au fervice de la 'cure, l'aur're doit Je livrer auffi tout entier au
fervice du chœur. Le ininiflerè n'efi ainfi doublé fur deux
têtes ,différentes, que dans l'objet de mIeux établir le double
fervice, & d'empêcher ou que le fervic'e divin ne fafi'e manquer celui de la cure, ou que"celui de la cure ne faffe manquer
l'autre. 'Le fe>rvice divin, fa ponlpe; 'fès céréinon'ie!> appartiennent en quelque mani-ére au 'Chapitte; &: en payant un
fecond Curé pour cet 'objet, il étole en droit d'en exiger
rigoureufem.ent tous les fervice!> auxquels ce Minifl'te du '
chœur efl fournis par Ile cifrè âe fon ~tabl1ffement. Le Cha.pitre eH en droit d'exiger que chaque nîetnbre de [on Eglife
foit à fa place. bans la primitive jhll:ièu~ioh, il aûroir pu
�1
DU
PALAIS
DI!
PROVENCB;
2.2.3
dire & foutenir que le Curé de femaine devait être en entier
pour le chœur pendant fa femaine. Sa tolérance dans les
remps paifés a réduit le Curé de femaine aux aél:es de fervice comellés avant l'Arrêt d'expédient du 13 Mai 1780,
& à quelques autres qui ne fom que paifer, & auxquels les
Curés ne -s'éroient jamais refufés. Il efl: bien jufie qu'au
moins les devoirs des Curés_, quant au chœur ,Joient exactemens remplis en exécution de ce titre.
.
Ce n'étoit pas la peine d'imaginer une fin de, non recevoir; il n~ s'agit pas ici d'abfence, mais de refus de remplir les fonél:ions fixes & dérelJPinées. Ce n'eH pas. une q\leftian de fait; ce n'eH point une quefiion de préfence ou
d'abfence que l'on a à difcurer: c'eH un ppint de droit,
une que Ilion de titre & de devoir. Les confeffiQns non
preifées ne peuvent pas fervir de prétexte à Mre. Revell, non plus que les autres fonélions curiales dont il lui
plait d'exciper; & quand même les. objets de fervice donc
il s'agit feroiept fournis à la ponél:uarion, il aurait roujours
~ré légal de requérir injonél:ion contre le Curé pour établir le
droit. Mais ce qu'il y a de plus fort, c'ell que la ponél:uation
ne peut pas être un remede contre le mal dont le Chapitre
fe plaint. Les aéles de fervice dont il s'agit ne font pas
foumis à la ponél:uation. La pointe s'exerc;e à raifo.n de
l'abfence du chœur; mais quand il s'agit- d''lln- fervice quelconque,. comme il ne dépend pas de celui qui doit le remplir, de faire mànquer l'office, il faut par conféquem que la
voie de l'in jan t'ii on fait ouverte contre lui, pour que l'office.
fe faife, & que le fervice d.ivin ne fait ni empêché ni interrompu. La pointe contre les Curés ferait une bien foible
reifource; car étant jugé par l'Arrêt de 171 S que les Curés
I1.e peuvent pas être pointés pour leur portion congrue, mais
,feulement quant à leurs droits fur les anniver,faires & autres
rétributions ou cafuel, on fent bien qu'en fe livrant à route
]a rigueur de la pointe" ils feroient un bien petit facritrce,
& le remedè ne· ferait pas fuffif~m pour empêcher le mal.
On peut être empêché quelqyefois par dès événemens ir.nPJévus, quoiqu'il fait néanmoins certain que quand on veut
�1
224
•
Jou
RNA L
fe pique~ de rigidité, on s'arrange de maniere à trouver du
temps pour tout. Mais il n'y a pas moyen d'excufer un manquement coorinuel fur des fonél:ions périodiques & qui reviennent .fi fouvent. II efr impoffible d'admettre que des
obfracles non préparés viennent à point nommé uniformément & 'périodiquement au moment du fervice pendant près
de deux ans. Mre. Revefr a-t-il pu croire que le droit de
fe faire fuppléer éroit arbitraire? Ne fait-il pas d'abord qu'en
principe, chaque de1fo:rvant doit être dans fon pofre, & que
dans l'ordTe de la Loi, le droit de fe faire fuppléer n'efr
qù'un titre de difpenfe qui ft.ppofe l'impui.1fance aél:uelle de
remplil:..la Loi ? L'Arrêt d'expédient porre que les fonél:ions
y mentionnées font impofées aux Curés, fauf les empêchemens de droit, fans abus & fans fraude, & fauf, en cas d'empêchement,.& non aurrement, de fe faire fuppléer par leurs
Vicaires. Le droit de fe faire fuppléer n'efr donc pas arbitraire; ces cas d'empêche mens doivent fe préfénter fans abus
& fans fraude. Or, peur-il fe faire fans affeél:ation, c'efr-à-dire,
fans fraude & fans abus, qu'un Curé manque pendant près
de deux ans avec continuité aux vêpres des Dimanches &
Fêtes dont il doit entonner le premier chant? EH-il poffible que fans affeél:ation il manque auffi de célébrer à fon
tour & pendant toute la femaine la Me1fe conventuelle? Le
Chapitre produifoit divers cerrificats pour confiâter les manque mens de Mre. Revefi.
C'efr une dérifion ( continuoit-il ) d'ex.ciper de ce que les
confeffions font pre1fanres dans le temps palchal. Dans ce
remps la confeffion efr de précepte, on ne le contefie pas;
mais parce qu'elle efi de précepte, doit-elle faire manquer
le fervice, & fur-rout dans les jours de la plus grande folemoité? La confeffion efr de précepte dans tout le monde catholique; & néanmoins dans toutes les Eglifes le Service divin
fe fait avec toute la pompe & la folemnité que la faioreté
du jour exige. Dans toutes les Paroi1fes régies par un feul
Curé, c'eH le Curé, premier Reél:eur, qui officie par préférence à rous les Vicaires; c'efi le Curé qui fupporre touc
le
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lé poids de l'office, foit du matin, foit du foir; c'ef!: un
devoir que les Paf!:eurs ne manquent jamais de remplir, &
néanmoins ces Curés peuvent fuffire à tout. Les Paroiffiens
fe tiennent pour dit que le Curé ne peur confeIrer à l'heure
des offices; ils s'arrangent pour prendre des .tems plus
propres. Si tel ef!: l'ufage con (tant, même des Eglifes gouvernées par un feul Curé, à combien plus forte raifon les
confeffiolls, du temps pafchal ne dqivent-elles pas nuire au
fervice du chœur' dans une Eglife où l'on tr.ouve deux Curés
érablis pour le fervice alternatif du chœur &. de la cure.
La cure des ames paIre avant l'office divin dans l'ordre
général. Mais quand on a de'ux fonél:ions, l'une ayant des
rnomens fixes & déterminés, & l'aurre pouvant être exercée
en tout temps, 00 s'arrache à la derniere, quand l'heure de'
la premiere vient à fe préfenter. Cela eft inconteHable même
pour le Minil!:re curial qui régit feul fa paroilfe , & devient
encore plus vrai' dans les Eglifes oÙ deux Curés exiHent
[Out à la fois; l'un pour le fe-rvice de la cure, & l'·auti'e
pour celui du chœur. Dans ce cas le Curé de tour au chœur
el!: elfentiellement Minifl:re du chœur; il peut donner le
rel!:e de (on temps à la cure; mais à l'heure de l'office il
fe doit tour entier au chœur. L'heure du chœur fait ceIrer
le miniHere curial, & le fervice· du chœur ne peur êrre
empêché que par la force de ces circonllances' impérieufes
qui forcent le PaHeur à tout quitter pour fauver une ame
en danger. Comment Mre. Revel!: peur-il fe diffimuler que
'quand il elt de fervice au .chœur, il ne devient Minil!:re
de la Cure que par fublide, c'eH-à-dire, autant que les offices
lui lailfent le temps & le loilir, & que s'il peur fe difpenfer
de l'office ou le quitter, ce n'eH que pour des fonél:ions
importantes & requérant la célériré de l'inHant? Ainli rien
de plus inurile que les doél:rines que l'on a cirées; elles difent
que quand le Chanoine adminiHre ou qu'il remplit d'ailleurs
d'aurres fonél:ions utiles' à l'Eglife, il n'eH pas fujet à la
poin're; mais cela n'aurait pas lieu vis-à-vis uh ChanoineCuré qui fe déplacerait avec affeél:arion.
Années t782 & fuiv.
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Inutilement Mre. _Revefi, a-t-il élevé la quefiioo> de favoi~
s'il doit ou non garder -[on fecret dans le cas des fonél:ioDs
prelfées de la cure, c'efl:-à-dire, dans le cas des fonél:ioDs
qui ne peuvent fou/frir aucune efpece de rerardement. Le
Chapitre n'a jamais été jaloux de lui faire revéler fon fecret;
dans touS les temps l~ Chapitre a donné la préférençe à
ces fonél:ions urgentes & pre/fées, fans s'embarralfer de
pomper le fecret des Curés; il n'y a que les confeffions des
malades qui puilfent être dites fonél:ions prelfantes, & capables à ce titre de difpenfer les Curés des fonél:ions du
chœur ordonnées par l'Arrêt d'expédient du 3 r Mai 1780.
Le Chapitre ne veut rien prendre fur la force des déclarations qu'il pomroit faire; il fe réferve feulement tous
fes drÇJits le cas échéant. Rien n'elt donc plus inutile que
la do.:lrine des Auteurs & les Arrêts que l'on a cité; d'autres
Arrêts font plus analogues; à la quefl:ion.
La Cathédrale la Major de Marfeille a deux Curés pour
remplir alternativement le double fervice de la cure & du
chœur. Par Arrêt du 16 Décembre 1723, il fut ordonné
que pour les femailles que le[dits Vicaires feront defiinés pour
les fonc7ions du chœur, ils feront obligés d'y fatisfaire, IS' en
cas qu'ils foient extraordinairement occupés aux fonc7ions curiales, ils feront alors difPenfès d7 celles du chœur, en requérant quel'jues uns des Bénéficiers Ou. des Prêtres du nom6re
des huit de fuppUer il leur. défaut, de quoi ils avertiront le'
ponc7uateur, IS' il faute de ce faire, ils firont fiLjets il la ponctuation.
Après cet Arrêt, les Curés s'imaginoi-ent que toutes les
fonél:ions curiales, & notamment celles du confeffional, les.
difpenfoient de tout fervice du chœur; ils exaltoientl'éminence
de 'leur titre, la faveur de la confeffion, tout ce qu'elle poulIoit avoir de préférable & de p're/fant dans certains cas:
un fecond Arrêt du r 3 Mai 1724 enjoignit il l'un des Curés
de fatisfaire aux obligations il lui impofèes par ledit Arrêt aux
fèmaines qu'il fera de fervice Q/l chœur, fans qu'il puiJfe s'm
difPenfer fous prétexte des _confeflions de fes ParoijJiens qui'
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DU
PAL~IS
DIl
PaOVI!NCI!.
2'2.7
feront en fanté, le tout fous les peines portées par ledit Arrêt.
Cet Arrêt n'excepta pas les confeffions du temps pafchal ;
il décide tout &. répond à totH ce qu'a pu dire Mre. Reveil.
Arrêt du 9 Juillet 17"83, au rapport de Mr. le Confeiller
de St. Martin, qui déboute Mre. Reveft de fa requête; &
falfant droit à celle de l'Econome du Chapitre, fait injonction à Mre. ReveH de remplir à fon tour perfonnellement
les ronétions du chœur auxquelles il efl: fournis en fa qualité
de Curé, foit par les Loix & les ufages de l'Egiife, foit
par l'Arrêt du 31 Mai 1780, tànt qu'il ne fera point empêché par des caufes preffantes qui ne pourront point fouffrir retardement, -& pour les befoins urgens de la cme, fans
pouvoir prétexter en aucune maniere des confeffions à enten·
dre dans la Paroiffe dans les jours de folemnité, foit I?endant
la Me/fe conventuelle, foit dans tout autre temps & heures,
ainG que des autres fonétions curiales qui pourront fouifrir retardement & être placées & renvoyées à rout autre temps qu'aux
temps & heures du fervice des .fonétions du chœur attribuées au Curé de tour; & ce faifant, injonél:ion eft faite audit
Mre. Reveil de continuer dans tous les cas & jufques au bout
avec le Chanoine, l'office commencé avec l'Evêque, avec
inhibitions & défenfes de le quitter & de le remettre à un
fuppléant, quand l'Evêque le quitte; & de plus .injonétion lui
eft faite d'affifier perfonnellement' aux Vêpres du Chapitre
les Dimanches & Fêtes, à l'effet d'y rempli.r les fonétions
du chœur impofées aux Curés par les ufages & Statuts du
Chapitre, & par l'Arrêt du 3 l Mai 1780, le tout fauf les
empê.chemens de droit pr-océdant des caufes & befoins rela.
tifs à la cure, urgens & graves, & gui ne pourront fouffrir
aucun retardement, dont le Curé fera cru fur fon afferrion ,
le' tout à peine de 300 liv. d'amende, qui ne pourra êrre
réputée comminatoire; Mre. Revefl: fut condamné à tous les
dépens. Ecrivant Mes. Gaffier & Reinaud.
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�,JOV.~NI..L
228
,
ARRÊT
XXVIII.
Une femme mariée fous une conflitution particuliere qui a des
biens paraphernaux, ou un commerce indépendant de celui
de foll mari, ou qui fait des acquijitiolls au vu & fit de fOIl
mari, acquiert pour elle & li follji:ul profit.
A
Bonifay de la ville de Marfeille avoit époufé Jean
Lyon, qui l'infiicua fon héritiere, & qui fit quelques
legs à fes enfans; après fon décès elle continua de régir
l'auberge dont [on mari lui avoit tranfmis l'arrentement, &
en outre elle avoit une boutique de Saleufe où les Muletiers.
de la Montagne avoient la facilité de [e pourvoir. Elle acquit
en 1744 une maifon au prix de 67)0 IiI'. qu'elle s'obligea
de payer fiiÎvant les indications qui lui [eroient faites. En
effet, elle paya 4000 liv. en 1746; elle prêta par conrrat la
Comme de 800 IiI'. Dans le courant de la même an.pée elle
époufa Jofeph-Antoine Roman. Par fon contrat de mariage
elle fe conHicua en doc 7 l 10 IiI'. , au prix & valeur de fes
hardes & de tous les meubles meublans du 'Iogis des deux
Pommes, & Jofeph Roman Ce chargea de l'arrentemenc du
logis. Le- mariage confommé, chacun des deux époux continua le commerce qui lui étoit propre. Le 13 Mai 17) l
Anne Bonifay fit donation à fon fils Jean Lyon de la' Comme
de 2000 liv., à prendre fur les biens'qu'elle avoit avant [on
fecond mariage. En 1713 elle acquit en fon nom une maifon
au prix de 6) 0 liv., & Clans le~ années fuivantes plulieurs
terres du prix d'environ 1)000 IiI'. Anne Bonifay étant morte
en 1777, Jofeph Roman fe régla avec [es hoirs fur les droits
fonciers qui leur revenoient·, & le 3 [ Juillet 1778 il [e
pourvut au Lieutenant de Marfeille contre ces hoirs en défemparation de toutes les propriétés & maifons délignées,
fous l'offre de les relever de toutes les obligiltions concracNNE
�??-9
tées,' fi miéux ils n'aimoient lui payer les f~mrhes llmf/loyéës
à· ces acquilitions. Le Lieutenant le débouca de fa ,demande,
avec dépens. Il en déclara appel pardevant la Cour.
•
- On difoie pour Roman, que la préfom.ption de la Loi dl:
que la femme a acquis ex peeunia viri à moins qU"elle ne
prouve undè haDuerit; la Loi explique. fes IJlotifs ad e,,'Ïtando,lJ1.
turpis quœjlus fufPicionem. La femme 'lui .v~ut fe pl~cer dans
l'exception, doit donc prouver qu'elle a e,u des relfources
d'ailleurs, des biens paraphernaux capables d'avoir produié
les acquifitions. La Loi ne dit pas undè haDere potûerit,
mais undè lzaDuerit; il ne fuffit donc pas que la femme- aie
pu avoir; il faue qu'elle prouve, qu'elle démontr~ undè
haDuit; or~ une preuve, une démonfhation ne,fe firent jamais
par une fimple préfomption.
Lorfqu'on dit que la préfomption de la Loi peut être détruite par une préfomption contraire, cela s'entend de la
préfomption du paiemene qui. naÎr de la certitude des reffources de la femme; mais ces relfou~ces ne peuvent pas
êrre préfumées; elles doivent être prouvées, démontrées; &
la démonfiration faite, alors on préfume que ces relfources
ont fervi aux acquilirions faires par la femme. Si les héritiers d'Anne Bonifay prouvent qu'elle a eu des biens paraphernaux alfez conlidérables, & des relfources alfez multipliées pour payer 2.7000 liv. d:acq'uilitions, la S~ntence
doit être confirmée ; mais' s'ils ne remplilfent pas cette
preuve; s'ils n'ont pas même des préfomprions à oppofer;
s~1 efi confiant qu'Anne Bonifay n'a eu que des biens
p~raphernaux de peu de valeur, dont elle a même donné la
majeure. partÎe à fes enfans ; l s'il efr vrai qu'elle n'ait eu
ni pu avoir ,ac.cun commerce parriculiet ~ féparé de celui
de fon Dlari, la préfomption de la Loi s'applique dans toute
fa force; les acquilirions de cette femme font cenfées faitès
ex peeuniâ viri, & elles appartiennent à Roman.
t
Dans l'efpace de fepe années qui~vont jufques en 17'i3,
Roman a faie pour 36000 liv. d'acguifitions; à cette époque -celles ete.la femme coml1)egcenc. ($( selles 'lu mari cef-.
DU
PALA-IS
DBT rPltOVBNCE.
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•
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~ .1 ô
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J ? U R. N iA -r; , ,
.
•.
fent, bien qu l,l,eut ac1!J.Uls rfon atll"beyge., 'Gu'll n'eut 'Plus de
loy.et' à payer, &. que taures les dépenfes écant faices, il
n'eût phis qu"à gagner. Anne iRo'nifay s'écant dépouillée en
faveur de fan mari de l'atiberge & <le tout ce qui s'y trouvoit, ce qlli forme fa dot, n'a 'ell pour tous biens para"
phernaux"que 'j0-i l l~v. dont .elle a'i<>it déja employé une
parcie à -1~àblilititi6n de la maifon; c'omment av.ec ce modiqùe ·avoir 'a:uraLt~e\.le payé les intérêts du reitant prix de .
cèue maifol'l, nourri quacre ·enfancs du premier lit qui écaient
à 'fa charge ,donné 2000 liv. à fIOn fils en 17')1? Comtrient enfin aika-t-elJe fait des acquificÎons pour 27000
liv·res?
).
;. On, voit par le con'trat de mariage 'qu'Anne Bonifay fe
con!l:iCl1a en dot tout ce qui écait renfermé dans l'auberge,
.& que Roman fe chargea même du loyer. Il devine donc
àcquêreur de touS les effets & locataire de l'auberge. Anne
:Banifay celfa -dès-lors d'êcre chez elle., & ne fut plus que
chez '/{Jn mari• .s'iL étoit vrai que la femme qui accueille
fon m-ari chez elle, dût êcre exceptée des difpoficions de
la Loi Quintus--Mutius, i.\ faudroit au moins encendre cetce
exception d'une femme qui ayant une maiiOn & un commerce établi, recevroit véritablement fan mari chez elle,
fans fe confiüuer fa maifo'n ni fon commer.ce : mais peut-on
appliquer ébtte e1!cepcîon à ·Ia femme qui fe dépouille de
. fa ,tnaifon, :de fdn commerce, de tollt ce qui e!l: d:ans cette
Î71aifon-, & qui fait tout pa-Ifer filr la têce de fo:n' mari?G~tte femme ainfi dépouillée 'peut-elle eJ!ciperde fa renohciation à -tout -ce qui lui appartenait, -pour dire qu~elle a
Pl! Jaire des acquificîon~.à fan 'parciculie ? Ne diroit-on
pas avec -plus ',dè fondement que les 'bénéfices 'étant 'pour,
. le mari 'qui s'dl: chargé lie tout, la femme fi tiré de 'la
tallfe 'de celui-ci le 'prix des acquifitions qu'elle a ;fait? Si
les acquifition'~ d'Anne Bonifa-y 'ne .peuvent éDre .ju!l:ifiées
que par-db refl'ourcesJéDrangeres au'commer.ce.deJ 1'auherge,
ta circdri!l:ance -du rranfport.'fuit par' Anné Bonifay à fon
lnari,- 'oans leur contrat Jae mariage, ,eLl: toute cancre d'es
�DU
ho~rs.
P ALA~IS-
.DB T P~OYENCE;
être ma~iée [OlolS Ulle'
~3~
Une' fert1me peut
conftitlltion
parniculiere, & n'avoir aucun bien paraphernal;. il faut donc;
prouver que cette femme a eu des biens paraphernaux donç
eUe a pu difpofer" pour tirer quelque utilité d~ la conl!:itution particuliere.
.
, On répondoit que les acquifitions faites dans l'année de
deuil font cenfées, provenir ex fuDfiantiâ martti, parce que
le mariage el!: cenfé en quelque falion durer eJilcore, &
que la femme ne pouvant rien acquérir po~r eUe pendant
le mariage, ne peut pas mieux acquérir !lour eHe penclans
la premie're année de la diffolution du lien, le deu~1 de la
femme repréfentant encore l'image du même lien.
.
S'il eH d'autre part certain que la femme a pu acquérir
pour eUe conflan.te matrimonio, [ans. fournir matiere apx
fouPlions de la Loi, il fera également vrai qu'eUe a p~
acquérir ou payer pour elle dans l'année du deuil; la pré;
- fompt,ion ne .fera 'pas plu,'> forte pendaqt l'ann~e du çeuil qu.e,
pendant le mariage. Si la préfomptioq ne peut pas. Je véri- fier pendant le, mariage, elle ne peut pas à plus fmte raifon
fe vérifier pendant l'année dû deuil.
Rien n'efl: plus vrai que le principe général im~oGlué par
Roman; il tient"aux mœ.urs, à l'hon\lçteté publique, & it
faut pour l'honnell;r même du fexe, que ,cour ce qu?il acq~ierr,
tour cç qu'il paye, ou tout ce qu'il dépenfe confiante matrimonio, foit cenfé provenir ex fùhflantiâ mariti. TeUe eH la
d'[pofiriqn de la fameufe Loi Quintus-Mutius, ,ff. de donat.
inter viry Gr uxor. Mais plus cerre difpofition eH auHere &
rigoureufe ,. moins 'il faut. ~q abuf'er;. ainfi ce feroit une
~rreur de croire que quand une femme i;l acq,uis ou' payé!
~onfiante mqtrimonio, la Loi ne v<1\lIÎH: aBfolument rien voit
de plus , ou que la J u{hice ne voulûr connoître que les)
acquifitions ou les paiements faits par la femme, & ne pas
s?enquérir ni fi la femme aVQit d~s foads qt!i putrenr fO\lrnir
aux dépenfes ou aux acql,lifitions qu'eUe a faites ~ I\i fi eUe.
lIvoit d'autres relfources également honnêtes qui p,uffent l'
fuppléer. Et s'il faUoit ràppeller la regle dans co litt; [on éce.n~
�2.3 i
.C:
J~ U~iCN A L' :' 1.'
U cr
Bue, 'il ne feroit pas ëiffici,re de prou'ver d'après les Au':
ceurs, Guipape , Ferriere, Minzinger, Defpei/fes, que l'indufhie, quoique déshonnête, apparoi/fant les acquifieion3
faites -par 1a' femme ne lui fônt pas moins propres: Si tIlrpiter .fadt, no,! tamen turpiter accipit.
•
Si la femme, en acquérant pendant le mariage, acquiert
pour le mari, ce n'ell: que parce qu'elle el1:, cenfée avoir
acquis des ~eniers du mari. Ainfi, ou la femme doit prouver
undè hahuerit, ou tout ef!: cenfé prévenir ex fuhfiantiâ mariti;
c'ef!: I~ Loi elle-même qui ,nous dit l'un & l'autre.
La difpofition de l<l Loi n'eH donc fondée que fur une
préfomption , & cette préfomption s'évanouit, fi la femme
démontre undè haheat. Le (yf!:ême de Légiflateur ef!: encore
mieux développé dans la Loi -6, cod. de donat. inter vil'.
& uxor. Elle porce : Nec dl ignotllm quàd cùm prohari
flon polJit undè uxor,' matrimonii rempare hQnefiè quœjierit,
de mariti honis eam hahuiffè', veteres juris auc?ares merità
trediderurlt. Ce n'ef!: encore qu'une préfomption, veteres
crediderunt, mais une préfomption qui doit céder à la preuve
contraire, cùm uxar prohare non pojJit undè quœjierit.
. Mais comment remplir cerce preuve? Les Auteurs nous
l'indiqueiJt: La préfomption de la Loi n'a pas lieu lorfqu'une femme riche s'eU -mariée avec un homme pauvre,
ni lorfqu'elle faifoit du confentemenc de (oti mari, quelque' trafic & fes affaires à pa'rt, ni lorfque le mari pr'{enc &" confentanc, la femme en faifant un prêt, a dit que
c'éroït de fes deniers. Ita le -Préfident Faher, fur,le titre
de prohar'. \~ prœfumpti aM: 4 t ;' M. le Préfiden~ Boyer, décif..
8 t ; Vedel fur Gatelan , liv. 4-, 'th. 5; Defpei/fes, corn. t , tic.
Hu mariage', feét. 3, n.· 8; M. de Bezieux, liv. 5, ch.
§. t l ; Aéte de Notoriété, pag. 59.
Le' principe ef!: donc inconceHable. S'il ef!: vrai d'une
parr ,- que cout ce qui ef!: acquis par.la femme confiante matrimonio, ef!: cenfé- être acquis' des deniers du mari, de
l'.aûtre il n'eH pas moins vrai que la préfomption ce/fe:
,1°. fi la femme a accueilli le rn;lri chez elle; 2°. fi elle
n'ell:
l,
•
•
�DU
PALA..I~
D,B .• l?"aOYBNCE.
23:3
n'eft mariée .que' fous. 1un é, c,onftitutioq particuliere ,n ~ ..que
l'on prouve qu'elle avait des biens d'ailleurs; 3°. fi elle a
fait un commerce particulier indépendam de' celui de fan
mari; enfin fi fan l1}ari a fu & connu qu'elle. trafiquait,.
ou qu'elle· fi).ifoit, cjes acquifitions, dès-lors per(vnne q'ef~
en droit defe formaliter. d'~ll, la- femme a Pris l'at;genc"
parce que le mari le fachanc, . ,la ,femme r;r\'Tflj refp.onfabl~
de fa conduite qu'à lui. Par cela feul qu'elle J ne s'eft pas
affervie à une, conll:icution générale, elle a formellem"enc
déc1ar~, qu'elle ~n'en.tepdoiç pas '1]1ett~e d~ns l~, com1]1!1naut~
fes .biens pflraphernaux, qu'elle ~ entendait en jo.uir; & fi elle
a dû en, jouir, il lui a donc été permis fl'en placer les
fruits, & de faire des acquifitions qui Ile fùffenr que pour
elle..
,
.
Il en eft de même du trafic ou du' commerc'e
, ; , une
femme. doic fans douce fan traiTail à fan.. mari; mais' elle
~e doic qu'un' -travaiÎ re'lâtif au commerce de 'fo~ mari;
elle n'eft pas obligée de négocier pour 'lui', fur'fout q'uand
elle n~eft mati~~ que fous un.e conll:irution particuliere.
Quand elle négocie, elle expofe aux evénements du commerce fes biens paraphernaux:. Or, fi ~lIe rifqu.e de per. dre, il eft impoffible qu'elle ne rifque pas de gagner. Enfin
quand la femme. négoçie· ou acquiert, ai}·. vu & ".fil de foo
1tJari, qui e(l-cè, ql!! peut avoir draie' d'infpeéter',fa conduite & de lui demander unÇ,è habuerit?- Quand le !Uar.i le
fait, c'en eft affez; tout autre ne peut que jetter un œil
indifcrec fur; \a cond'uite de la (emme; il ne fam .4!!~ç pas
ê~r~ furprisl.fi" lors même que,.1a femme ;eft mar~é~ ,fous
pA,e con(licutipi) génâra.Ie, ies Arrêçs one jugé que, les acqlli1it,iQns qu'elle avait faites' au vu & fu de fan mari, !l'étaient
{x; ne pouyoiem être ,que pour elle.
Il réft.dre! du' cqnerat de mariage 'qu'Anne B09ifay'régiffait ulle, auqerge ; qu'.eJ!e inveftiç par fa qo,L Jof~ph ~pl:na9 •
.«le cous· ·les 'capitaux- & ge l'a'rrenceJl)em. d~ c~ aul?erge;
.voil~ donc la. premiere eliceprion de la Loi Quintus-lf.!.i1~{us:
jull:ifi.ée : .fi mulier inopi marito duxerit. La feççnd_e .pré{O'mp...
.Annùs i'18:z. & fuiv. '
H h
4
.
�::1.34
·-10URNÀir.
tian ell renforcée par l'efpece de conllitution. qu'Anne Boni":
fay s'établit dans fan contrat de mariage; elle fe réferva
tour ce qu'elle avait d'ailleurs, & notammene tOn commerce
particulier; elle avait la fuceffion de Jean Lyon fan premier
mari qui l'avait inllituée. héritiere, & ce Jeap Lyon était
tollt à la fois Hôte & Voiturier; elle avait une portion de
la fucceffion de Louis Lyon done fon mari avait hérité;
elle avait touS les bénéfices qu'elle avait fait depuis la mort_
de fan premier mari, en continuant d'avoir des voitures &
de tenir auberge; elle avait' un commerce particulier &
indépendant de fan auberge & de fes voitures: en .voilà affez
pOL.r iufiifier qu'Anne Bonifay n'était pas fans reffource,
& que fi elle a acquis des biens confiante matrimonio, ce
n'eH pas des deniers de fan mari.
.
Arrêt du 4 Juin 1783' au rapport de Mt. le Confeiller
de Mons, qui confirme la Sentence avec dépens. Ecrivant
Mes. Gras &' Pafcalis.
ARRÊT
'
XXIX.
.
Convention fou[crite par ~n mineur, G' ,qui liquidoit des droits
fuccejJzfs & en fixoit le montant, cajJèe, n'ayant été précédée
d'aucune formalité de jufiice.
A Dlle. (,;Iemens du lieu de Saint-Saturnin, fille mi~eure',
. fe tranfporta avec fa mere dans la ville d'Avignon, où
elle fit .en fa préfence & celle d'un curateur qu'elle fe nomma,
une procuration à fa mere, dans laquelle elle lui donna pouvoir de régler & liquider à l'amiable avec le fieur Clemens
fan frere, tane la légitime qui lui écoit due fUr la fucceffion
de fan pere, que la porcion héréditaire à elle due fur la fucceffion d'un autre frere décédé en pupillarité, & couees les
autres prétentions qu'elle avait fUr ces fucceffions, pairer à
ce fuiet tous aaes d'accord-, pattage, tranfaaion , &c•
L
•
...
"
�PAL AIS D B P RO V B N C B.
2. 3S
La veuve Clemens muni'e de cene procuration vint à St.
Siturnin, & préfenta le 6 Juin 1780, conjointement avec
le fleur Clemens fon fils, un compromis au Juge local, élans
l~que1 ils lui expoCerenr leur deffein, en lui déclarant qu'ils
avoient nommé deux Experts pour procéder à l'efiimation
exaél:e des biens, & le requirent de confirmer & aurorifer
ce compromis & cene nomination, ce qu'il nt par décret
du même jour. Le rapport fini, la DUe. Clemens fe rendit
de nouveau à Avignon, où elle fit une feconde procuration à fa mere, dans laquelle, affifiée de fon curateur &
d'autres parens, elle lui donna pouvoir de 'régler, compofer & liquider à l'amiable, paffer tous aéles d'accord,
partage, tranfaélions aux: claufes, paéles & conditions qu'il
trouveroit bon, recevoir même en argent comptant '1a valeur des droits, en cbncéder tous acquits varables, &c.
On dreffa enfuite les parcelles de compolirion & de détraélion ; l'on fixa les. droits de la Dlle. Clemens à 6400
liv. ; & dans la convention qui fut paffée en 'conféquence ,
il fut dit que le lieur Clemens garderoit cene fomme, en
fupportant l'intérêt au cinq pour cent jufqu'à ce qu'elle eût
aneint fa vingt-cinquieme année" ou qu'elle fe mariât. Il
fut encore convenu que moyennant la fomme de 300 liv.
comptables dans le mois & le jou~ que l'on rédigeroit cet
acc'~rd en tranCaélion publique', les intérêts & fruits des
hit;ns'légitimaires & cohérédiiaires feroient ~9mpenCés avec
l'entretien de la Dlle. Clemens jufqù'à ce' jour.
Le!i chofes aÏnli réglées, la Dlle. Clem~ns fut mariée le
16 Décembre fuivanr avec le lieur Michel. Lè 8 Juin 178 l
le lieur Michel, en qualité de mari de la Dlle. Clemens,
Ce pourvut au Siege d'appêaux ,du lieu de St. Saturnin,
contre le lieur Clemens fon beaù-frere', en'liquidation &
paiement de la légitime afférante à fon épouCe fur la fucceffion parernelle, & pour venir à panage' de la fucceffion
'du frere mort ab inteflat; il évoqua enfuite fes deman.des
pardevant la, Cour. Le fleur Clemens oppofa l'aéle privé
qui avoie été paffé fur ce ~ouble oh.jet, & conclue à faire
DU
Hh2.
�2.3 t.
, ':
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10
II
a2f AL'
, '
dêcla're~ I~ C{jeur''Mithel non recevable. Pour faire t't,mber,
cettè e~ceptJgh" Ii? {je~~ Mi~hel préfenta' une reguÛe inci':
dente en' ck1fation de l'aéte, comme contenant l'aliénation'
des biens d'une mi~eure fans ~fo·rm·all.té 'de juflice. Le fie ur
Clemens contlu'( au contraire ~~déDoutement de la reguête
~n' caffil,ii~ri <!ela: con~ention, fauf ~û fieur Michel l'aétion'
,'fi bon_, lui'
fembloit,
dans le temps de droit'
relèifoire
.,
r
f
"j
_
~nvers la conventIOn.
o~ .9![oi~ pour le {jeu~ Michel, 'gue la tranfaél:lon du 2
Oétobre 1780 éloit nulle, 1". parce gue cet aél:e renfermait
ùn prétendll parcat~' fait a la reguête d'une mineure gui
ne, pouvdit pas le 'q~mân,de~, gu'il,avoit même, été fai~ en
Bloc',
qùe daÎJ~ éous" les cas on ne pourroÏt l'.e~ylfager:
que' comiTIè'; provill'onnéli '2°. ,parce 'gue cet aéte gua\ifié
partage re-nfe~iti~it 'n~ahmoins une vraie aliénation de~ biens
patrimoniaux d"upe micieure fans aucune formalité de juflice,
& contra legum'[nt'erdic7a; 3°: parce que la mineure n'ayoit,
Ëas mê'ci,~é.it~ r!dIi.flée'de fon c~rateur en faifant cette ali~
~'ati;lJ ;·ro~·: :''lari~~'que' cet.te t~~iJCaaion privée re'nferrrioiè,
. des alté,~ilti6nsqut la 'rendo)ént' informe, fufpeéte & indigne~
". ... 1 .
l,
,.
1
d e rOI.
. Les' Loix n'~rit His voulu livrer le mineur. à fa prôpre:
foibleITe i1~Jlé§ ~~ ·pirh\e~teNt. PilS gu_'o~ co~traéte avec lui:
quln,d.)l· v&t. ~'e.iq~f,9piier q,ù. difpofer dé fesim.nieuples en
q'ueJque 'CÎ1ahle~~ ~qùeVlcé, fôit; él1es envifagent le pàrc~ge['
'doHe,
.~iJOb' -' i IJ ·'H '''for,
.'
"11':1'
d._ , une. h'ere,
,:' mm~ uqe e\pece "d' a1"lenatlO,n·;
e es UI
one: ~xp.relr4J1erifJ~défen'du de ,1 demanaer. Il y à.l fur- ce.
poillt une dét:jfion formelle dans la Loi 7, jf. de réh. eor.,
'lui [uh tilt. ~ !lilns)a
Loi' ~7, cod. d/ prœd. & aliis reh:
L
min. Chee' décifion Ja 'fuivÎe par tous' les Ameurs & pir
I:OUS \le~-""fgbl1rlau* ~àu .R'd'ykum~. ; E~- vain prendroit - o~.
pout prétexte l'int,érêt qJe'le mineur pourr.oit avoir de faire,
procéder aû pârrage , pour fe' pmcurer un mariage ou tout,
a{ltre établiffèment; ce ne font pas là des caufes légitimes·
'pour l'aurorifer à demander un parcage, & fur-tout un partàgë abfolu' & •définitif; il faudroit toue au moins en pareil
(.~
~f1#I·f'.
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cas quë
PALAis
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PROVBNCE.
le partage fût fait d'autorité de juftice & avec toutes
les formalités prefcrites pour l'aliénation des biens des mi, Lieurs, & encore un pareil partage ne ferait jamais que provilionnel, & il dépendrait toujours du mineur, devenu
majeur, d'en revenir; ce ne ferait qu'autant que le m~jeur
provoquerait .le panage, & qu'on y procéderait d'autorité
de jufl:ice, 'qù'ir pourrait' devenir défi!1iiif,. fauf la relliru[ion pour caufe de lélion. Tous ces principes font difcutés
dans Boniface, corn. l , liv. 4, tit. 9 , ch. 2, & confacrés
par l'Arrêt folemnel qu'il rapporte. Brillon au mot mineur,
n. 44; Denifart , va. partage, -no 8 ; Serres en fes inllit. du
droit franc;:ois, liv. 4, tit. 17, §. 4, pag. 60I, rapportent
des, Arrêts 'qui l'ont décidé de même:
'._
,~.
"" Après avoir conlidéré la tranfaétion dont il s'agit commè
un fimple partage (continuait Michel) il faut l'examiner
fous le point de vue d'une véritable v.ente d'immeubles
d'une mineu·re. Il eft certain qu'il en eH du fonds poffédé
en ..commun, par 'un minèur avec un majeur, comme de
ëebx qui appartiennent au .mineur en'·toute propr!été; l'a.1iébation des -uns n'ell pas illoins' prohibée' par les Loix que
r'aliénation' des autres: inter omnes minores, ·dit la Loi 17,
C\ld. dç f.rœd. &.., aliis ùh. minor., nec commune prœdium,
ji~~,-\Jccr~io prœfdls, Sentt!rlua ~ Seno,tû~~Con[ulti difirahi pàtiiü;'.JI :C"'ê{hfà~ 1.l,n(l 'rtiilxim'é 'q'ue ~Î"érfonI.1e 'n'oferoit coha <
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.~~en 'eil ane a.u-tr~' également' in'dùbiéabl~, que ni les' mitletirs eux-mirries;' ni''1eur curatel1r:,. ni leurs -parens ne
pêu'vent aliéner leur? 'immeubles pour quelque motif & en
qllelque maniere que' ce fait, -fans avoir préalablem~nt rempli
les :formalirés prefçdtes' .par les regles du droit-public. La
Loi .4 "du' même titre! a P9urvu 'à coùs lés' cas: ''Ne'lue
tranfaRionis ratione , dit - elle, nerjue "permûtatione & multà
magis donatione, vel alio 'luoquomoao ea transJefre ; jlne decreto à dom;nio [UO pojJùnt ; & parlant enfuite .du cas particulier Où 'l'on fe trouve, e)1e ajoute';' igitur & tu /iiratrihus
tuis per tranfaaionem fundum dedifii., vindicàre eum 'P0tes~ Il
,
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~38
Jou
RNA L
_ne fuffit pas néanmoins de· remplir les formalités de jullice
pour légitimer la vence des biens des mineurs; il faut encore que cette vente judiciaire foit faite pour caufe abfolument néceifaire; il eft même très-remarquable que la Loi
n'envif..1ge l'aliénation judiciaire comme néceifaire que dans
un feul cas: c'eH lorfqu'il s'agit de payer des dettes urgentes. La Loi 12. du même titre s'en explique' formellement: ob aiS alienum tantùin , causâ cognitâ, prœfidali deereto prœdium ruJlicum minoris diflrahi permittitur. Le mot
tantùm eft bien expreffif; il exclut tous les autres motifs
ou prétextes -qu'on pourroit alléguer pour exproprier les
mineurs de leur patrimoine, fût-ce d'autorité de Jufiice.
La Loi magis pUlO , §. 9, ff. de rebus eôr. qui fub tl/tel/.
porte la même' difpofition: non igitur paJlim diflrahi jubae
prœtori tributum efl, fed ira demùm, fi urgeal œs alienum.
Delà vient que quoique le pere feul foit difpenfé des fermalil-és lorfqu'il aliene les bien.s de Ion fils en confidération
de l'ufufrùit qui lui compete., néanmoins toute aliénation
lui efi p~qhib.ée, quand il n'y a pas abtolue néce1Iité. DupèJier en fes maxime~, rit. de la prefcrfpcion de dix ans:
Decormis, tom. 2., col. ,1416., & tous les Auteurs renden!!
hommage à cette maxirpe. Or ,.,la tranfaélion du 28 Oélobre
;1780 renferme une",aliéll~~j,dn ,q~s•.plus cara,élérifées; la pIle•
.Clemens vraie propriétaired',une portion des fonds' oe l'/ioirie"
eo 'qualité de cohérit'ier'~' de fon frere préde~édé , -a 'été 'dé~
pouillée de ces fonds moyennant une fomme d'argenr..
Il Y a plus: en faifant aliéner Ton patrimoine à la DlIe.
Clemens fans autorité de jufiice & fans aucune néceffité,
quoique ni elle, ni fon .
curateur,
ni f~s - parens' ~ pi tous
,
autres euifent pu l~ fa~re,. ni même r 9ue le Juge eût pu le
permett,re, 00 n'a 1 pas ,mê~~ fëit',f.ffinjeJ::. cette mi.~eure
de fon curateur dans un aéle, auffi Important. Or, JI ell:
de regle que le mineur "qui ef!: pourvu d'un curateur, né
peut paifer valablement aucun contrat fans en ,être afiill:é,
, {uivant la Loi 4, cod. de prœdiis & aliis r~bus min. Ce n'ell:
q.ue dans la ~mple admioia.ratio~ d,e [es' rev ous que. l~
JO
•
�DU PALAIS DE
PROVllNCI!.
~39
trIinêur peut' agir par lui - même fans l'intervention de fan.
curateur: Le mineur ne peut pas même, fuivant. Catelan ,
tom. 2,' pag. 273, exiger les arrérages de fes 'rentes qui fe
font accumulées pendant fa minorité; les débiteurs ne feraient pas libérés, fi le curateur n'y intervenoit. Un aél:e
de partage qui porre direél:ement fur la difpofition des fonds,
exige plus qùe toUt autre l'affifrance du curateur, quoiqu'il
ne puiiTe être que provilionnel.
Au furplus, le verbal dreiTé par Mr. le CommiiTaire conftate que l'originai .de cerre tranfatlion ell: altéré dans plufieurs endroits; il Y a même fur la fin une rature de deux
lignes qui ell: illilible" parce qu'elle a ~té faite avec. arr.
Cette rature porte & ne peut porter que fur une difpolitian fubfrantielle. que le fieur Clemens a eu intérêt de faire
difparoître. Cette même rature & les autres altérations pa1"oi([eot avoir été 'approuvées' après coup par .le fieu'r Clemens; mais elles ne ·l'ont pas été par le fleur TiiTot qui
était le curateur de la mineure. Il en hors de doute qu'une
piece privée qui renferme !Ïes altérations, ne peut faire
aucune foi en· junice.
On répondait que le majeur ne peut pas être obligé par
-le mineur de venir à partage d'une fucceffion commune';
'c'ell: cel qu'ont voulu les Loix & les Auteurs: mais fi le
majeur y èonfent, le p,artage qu'il fait en valable, pourvu
qu'il ne fait pas léfif au mineur. Tant de raifons peuvent
• rendre un partage néceiTaire au' minëur , qu'il ferait contre
~toute jull:ice & raifon de lui en ôter les moyens. 'Qu'on fe
figure un mineur qui Vt;ut entrer dans la Maginrature ou au
Servic~; qui veut fe livrer au comm,erce, ou remplir' un état
méchanique; une fille 'qui defire fe marier ou fe faire Reli-.
gieufe: c'ell: ordinairemeoc à dix-huit ou vingt ans qu'elle
fe décide pour le choix d'un état. Il y a pourtant ·delà à
vingt-cinq ans cinq à fix ans à lai([er paiTer, fi l'on ne
• veut permettre au mineur de partager folidemeot qu'à fa
majorité. Que faire en ,p,areil cas? Attendre que.ce temps
foit venu. Le mineur perd l'efpérance -de ,l'ancienneté dans
•
•
�~40
•
Jou
R N 'A L '
cr
quelque corps qu'il veuille entrer; &, quelquefois le goût du
travail fe perd; Je jeune-homme fe, dérange; la fille s'oublie ..
le malheur fuit communément les premieres fautes de la
jeune1fe~ Les vingt-cinq ans ,arrjvent, & l'état efi perdu,
ou.la fille ne trouve plus à fe mallier,. Quand toutes les
Loix imaginables auroient' défend,u au' mineur de demandec
le partage de fes droits po1fédés en -commun, entre uu
majeur & lui, il faudroit dans les circon'fiances dont ou
vient de parler les lai1fer de côté & aller au bien de la chofe.
Les Loix difent pat-tout qu.'il fa,ut confulter le bi_eu du mio'eur ;. & ~comme elles n'.ont en vue dans le's prohibitions
qui le regardent que, de. faite fon av.antage, routes les fois
que cet avantage s'y rencontre, elles veulent que l'on refpéél:e ce qui, a été fait. Dèlà cet axiome qui efi Je réfumé
de routes les Loix filr cette matiere, non tanquam mùlOr,
fid tanquamllœ!ils. (Delà ces, Loi){ qui d~f.;ndenl de l'écQu-'
i:er ,fi dans' ce qu'il a fait eJl mindrlté. il s'di conduit eu
homme fage & prude_nt: '.fi mQre· patrj'sfqmilias !J/ùs fit .. En
un mot, fi ,ce, qu'il a fait lui e.H utile, ôn, ne le. reHirue.
point, on ne ca1fe poinr. Serres & Lebrun difent, il dl:
vrai, que le mineur ne~peut pas qans les regles demander
le partage.; mals Je premier ajoute-cette exception, s'il n'y
a . nécelJité ou utilité pour le mù1eùr.; le fecond déclare
que cela ne lui paroît 'p~s fans ellce-ption; & donnant pour
exemple le cas où le majeur 'dégraderoit les biens de-.Ia
'fucceffion, il dit: pourql/oi le mineur ajJiflé de [on tuteurlne
pourra-t-il pas demander partage ,. & faut-il en ce. cas~ qu'une
difPofition établie en fa:vJ:lir des mineurs :tourne
,leUli préjli",
'dice? Lacombé., -JurijjmJdence ,cÎ,'Vile', v?; partage) feél:•. 1 ,
n. 6, apporre ·Ia même ',exceptio:n , ,nifi fit evide,!s militas
pupilli. Un Arrêt de la Cour rappo.rté dans Boniface, tom. 4,
'pag. 480, confirme rout ce que etifent c~s Auteurs: rraril'
faél:ion & département d'lin mineur, d~ routes fes 'prétentions fur une terre. moyennant un~; fomme de. i SO ·Iiv. II.
attaque enfuite fon dép<lrtejTIent pour. caufe _de nullité ou
de léfion. Il difoit : l'aél:e efi. nul, & il n'dl: pas hefoin
,
de
a,
•
•
�DU PALAIS DB
P'ROVBNC!..
'~4't
ne cônfidérer s'il y a léfion ou non, ayant été pa1fé par un
mineur fans affiilance de curateur pour l'aliénation de fan
bien, fans formalité & fans néceffité ni utilité. Sentence du
Lieutenant de Forcalquier qui ca1Te, & Arrêt qui ordonne,
avant dite droit, qu'il fera fait rapport par Experts de la
valeur de la terre, pour ce fait, être dit droit aux parties.
Le Compilateur remarque que le mineur avait été affillé de
fan propre Confeil & Avocat, & ici la Demoifelle Clemens
a été affiHée de (00 propre Confeil & Avocat, Me. Ti1for,
qui en outre avait pouvoir du curateur de la mineure &
de fes parents. Dans l'Arrêt rapporté par Boniface, tam. 1,
liv. 4, tir. 9, chap. 2, la Cour ca1Ta un partage, parce qu'il
avait été provoqué par une mineure de douze ans; elle vou__ lut voir la tranfaél:ion qui était attaquée, pour favoir fi c'était
un partage ou une aliénation, & ayant reconnu qu'il n'y
ayoit point eu d'ellimation, que les parents avaient réglé
les droits de la fille à-peu-près, fans avoir pris de regle
fixe, elle n'y reconnut plus qu'une vente en bloc, & pour
cette raifon elle fe décida à ca1fer l'aél:e. Mais dans l'e(pece pré(ente ,il y a une eilimation & des inventaires;
'tout a été fair en connoi1fance de cau(e; rout eH: entré en
compolition, & l'on n'a rien mis de trop en détraél:ion.
Lors du fufdit Arrêt on di(oit pour la mineure, que là
rranfaél:ion attaquée -par elle-même contenait une lélion de
plus de la moitié de fes droits; ici l'on n'ore pas fe plain..:
dre de lélion; il n'ell: donc pas applicable.
.
L'on ne diffinrulera pas que les Auteurs qui établi1Tent
l'exception de' l'utilité du mineur, ou de la néceffité du partage "ajourent, comme Serres, que c'eil: au Juge à en déeider; mais l'on foutient que quand même l'on n'aurait pas
eu recours au Juge local pour cela, fi d'ailleurs le Tribunal fupérieur connaît qu'il y eût effeél:ivement néceffité ou
utilité, il n'en faut pas davantage.. pour confirmer ce qui
a été fait; d'après ce grand principe que quand le mineur
a bien fait, que fon intérêt fe trouve à ce qu'il a f<Hr,
il ferait ridicule de carrer, pOUt, ne faire enfuite autre chofe
Années 1782 & fuiv.
Ii
,
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JOURN~~
que ce qui a é~é fait. Pourquoi le premier part:lge Ife feroit;
il que provifionhel? S'il a été jufre, utile & néce!faire, fans
léfion, & pour le plus grand avantage de la femme, il a
été & doit être abfolu & définitif. Ce partage a été fait
'pour faciliter un mariage à la Demoifelle 'Clemens; 'deHinée à fe fixer à Avignon, éloigné de douze lieues de Sr..
Saturnin, des biens fonds à la montagne lui euf[ent été,
~né(eux plutôt que, ptofitables, époufant fur-tout un Négociant comme le fieur Michel; & elle a fait à dix-huit ans,
affiflée de fa mere, de fes parents &, de fon cur,ateur, en
prenant une fomme d'argent pour fe marier plutôt que des
cerres, ce qu'elle eûr fair d'elle-mêm'e à l'âge de rrente ans•
. Commene vouloir après cela, qu'un aéte qui a tourné à
fan profit, qui a fecvi à la faire établir, contre lequel elle
n'arJicule aucune forte de préjudice & de léfion, fait déclaré nul ou fimplement' provifionnel, parce qu'elle était
mineure? car qu'importe la minorité fans léfion? La tranfaétion a été fàite avec tau tes les formes requifes; le Juge
en a été inflruit, les parents auffi; ils ont au tarifé ,& permis. Il y a eu un curateur. Que Ewt-jr de plus? Le Juge,
en confirmant la nomination des Experts, n'a-t-il pas approuvé le partage pour leqllel il leur donnait pouvoir d'agir?
qu'aurait fait de plus une a!femblée de parents & une requête au Juge en permiffion de partager? Elle aurait donné
notice de la chofe aux uns & aux autres·, & les auroit mis
dans le cas de connoltre s'il y avoit utilité ou non : eh
bien! les parents n'ont pu affiHer la mineurè dans fes procuracions qu'elle a. faite pour procéder au partage, de 'même
que fan curateur, fans déclarer par-là que le partage lui
était utile : '& pareillement le Juge n'a pu amorifer les
Experts à pa(rager , fans déclarer par-là ~ême qu'il convenoit
de faire ce partage.
La convention contient, outre le partage de la fucceffion du frere prédécédé, une liquidarion de la légitime
paternelle. Or, eH-il prohibé à un mineur de faire liquider
(es droits légitimaires? eH-il défendu à l'héritier de le payel:
�DU
P-ALA1S
DB
243
P1l.0vBNC'I!.
(je ces droirs- en' argent? Notre Statut lui donne expretfément le choix du paiement ou en fonds ou en deniers. Le
prétexte qu'on a aliéné les biens de la fœur fans décret du
Juge & fans formalité, tombe & ne peut rien opérer' à cet égard. Quant aux prétendues altérations de la piece, on ne
les réfute point, parce qu'elles ne portent fur 'rien; les mots
raturés ont été approuvés au bas de la convention " ce qui
fuffit pour rejet ter les obfervations q.ue l'on a faites à ce
fujet.
'
Arrêt du 18 Juin 17-83, au rapport de Mr. leConfeiller
de Franc, qui caffe l'aél:e, '& condamne le lieur Clemens aux
dépens. Ecrivant Mes. Pochet &. Lede}c.
-
-
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ARR Ê T
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- L'aaion folidaire a lieu contre le; ço-décimateurs pOlir le
montant des réparations qlli font
la charse de leur
Bénéfice.,
a
E [0 Mai 1779, Mre. Bnm, Chanoine du Chapitre de
Toulon,. réligna mew mOrlis- fan Canonicat à Mre.
Martelly. Le. 2 [ Nove'mbre 1780, Mre. Verrion, autre Chanoine de la même Eglife, opta fur la co-prébende dé Cuers,
vacante .par la rélignation de Mre. Brun; il devine dès-lors
déciinateur avec Mre. Moutet, qui avait l'autre prébende
du même lieu. Le 10 Mars 178 [ , Mre. Verrion expofa dans
un aél:e extrajudiciaire, que devenu co-prébendé de Cuers,
p~r la prébende de Mre. Brun à laquelle il avait fuccédé,
il avoit- intérêt que les réparations à la charge des co-décimateurs fuffent fa ires; il requit tant Mre. Brun fon pré'déceffeur, que Mre, Moutet, de faire procéder à celle de
la charpente qui fou rient la partie du toit correfpondant
au fanéluaire, rétabliffement qui avoit ci-devant occafio!\é
,un procès entre les co-décimateurs & le Chapitre de Cuers,
L
Ii
2 "
�~~
JOURNAL
leCquelles réparations n'ayant point _été faites, l'état ded
lieux avoit encore plus fouffert, leur déclarant qu'en cas
de refus il fe pourvoirait pour les y contraindre. Mre. Brun,
par fa réponCe à cet aél:e, certifia de n'être fournis à auCUne réparation quelconque depuis l'arrangement pris avec
le Chapitre de Cuers. Le ~ Juillet 178 l, Mre. Verrion fe
pourvut au Lieutenant de Toulon pour le même objet, &
demanda qu'il lui fùt permis de faire les répa(Jltions. à fes
frais, pour le montant defquels contrainte lui feroit lllxée
folidairement contre Mre. Brun & Moutet, fous la proteftation de la réparation & réfeél:ion des cloches, &. néanmoins qu'il fût fait rapport préparatoire. Mre. Moutet· offrit
àlors de faire procéder dans trois mois aux réparations néceffa~res au fanél:uaire de l'EgliCe de Cuers, qui formoient le
grief de l"ancien procès entre lui & le Chapitre, paffé lequel temps il feroit permis à Mre. Verridn de les faire faire
lui-même, & de contraindre Mre. Moutet pour fa part &
portion, fauf à ce dernier d'exercer dans ce cas fan recours
contre le Çhapitre de Cuers, confentant qu'il flIt procédé
, à un rapport de vérification des réparations, autres gue celles
qui faifoient matiere de l'ancien procès, au cas qu'il en
exiflât, pour lefquelles il fe fournit à payer fon contingent,
& au bénéfice de fes offres, il demanda d'êc.re mis hors
d'inHance. Le rapport préparatoire fut ordonné. Mre. Brun
appella le Chapitre de Cuers au procès, comme s'étant
fournis à la part le concernant. Le Lieutenant rendit (a
Sentence, par laquelle il condamna Mre. Moutet, (uivant (on
offre, à faire faire dans trais mois, ou par lui-même, ou
par le Chapitre de Cuers,. & ledit Mre. Brun, . à faire faire
pareillement dans le même delai, toutes les réparations
néceffaires au (anél:uaire, tant à la voûte qU'3 la charpente,
telles gue celles mentionnées dans le rapport, & ce pour
la moitié chacun le concernant, 3urrement permis à Mre.
Verrion de les faire à leurs frais & dépens, -avec contrainte pour
la moitié Cantre chacun d'eux, fauf le recours de Mre. Moutet
COntte le Chapitre de Cuers, s'il pouvoit y écheoir; con~
�DU
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PALArS
D'It
P1l.0VENCÈ.
~4~
-damna Mres. Momet & Brun à la moitié des frais de la
requête de Mre.' Verrion & de ceux du rapport & des' pro';;
cédures relatives. Et fur le furplus de la demande de Mre.
Verrion, tendante à la condamnation folidaire contre ledit
Mre. Moucet, le mit hors d'infiance, & condamna Mre. Verrion aux dépens de la contefiation envers.ledjt Mre. Moucet ;
'& en ce qui en: dudit Mre. Brun" 'attendu fon confentement; 'permit audit Mre. Verrion de le contraindre folidairement pour le tout, il bon lui fembloit; & faifant .droit à
la garantie dudit Mre. Brun, condamna l'Econome du Chapitre de Cuers à fairel faire totices les réparations à la charpente & au fanauaire de lad'ite Eglife, pour .!là portion
compétante audit 'Mre. Brun; aux termes des ,accords du
24 Mai 178 l , & à le relever - & garantir'de la condamnation prononèée contre lui. Mre. Verrion appella de cette
Sentence; le Chapitre de Cuers & Mre. Brun adhérerent
au' jugement; de forte que le procès fut potirfuivi feulement contre Mre. Moutet pour rapporter la folidaire.
. On difoit pour Mre. Momet, que Mre. Verrion étoit 1°.
(.1ns incérêt; 2.°. que la folidaire n'avoit pas lieu entre co:::
décimateurs.' La folidaire, quand la loi l'accorde, tend à
empêcher le créancier d'être perdant par l'infolvabilité .de
1'un des co-obligés, àJ'effet que dans l'obligation réun'ie'l'un
paye' pour l'autre; mais- quand ce motif s'évanouit, quand
le créancier dl: fatisfait, quand if ne lui en rien dû,' ou
quand la certitude morale & phyuque de fon paiement frappe
fon efprit & le raffure, alors il fe plaint fans titre, Si Mre. \
Brun a un' garant tel' que le Chapitre de Cuers, qui el1: un'
corps l1:able dont la menfe n'el1: fujecce' à aucune de ces
viciffirudes qui puiffent faire' redouter une' décadence & une
ruine; fi l'un ou l'autre a offert ou offre de faire procéder
aux réparations, pourquoi Mre. Moutet, auffi enclin que le
Chapitre de Cuers à, fournir fa porcion qui rend alors les
réparations entieres & parfaites, pourquoi 1 fera-t-il vaine-ment molel1:é par une aél:ion folidaire dont'l'inutilité-fe mbn-;
tre fi évidemment?,
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�!l46
1
Jou ll. N A L
_
Si le' Chapitre de Cuers a été afireint au rétablilfement
par l'aél:e du 29 Septembre 1777, auquel le Chapitre de
Toulon intervint,. c'eH par .l'intervention & par la fagacité
de Mre. Yerrion; il a choiG celui qui doit repréfenrer Mre.
Brun. Po.urquoi dès-lors s'acharner à une folidaire coorre
Mre. Mo.utet, pour, le contraindre. à faire ce qui appartient
au Chapitre de Cuers, & ce .que Mre. Verrion a mis &
rejercé fur ce Chapitre? Son fait n'eH· pas excluGf de la
folidité qu'il récla·m'e. Le Chapitre de Cuers a acquiefcé à
la Sentence pOllr fe foumettre vololltairement. Voilà donc
encore Mre. Verrion fatisfait pour cette feconde moitié;
il ne lui relle donc aucune excufe, aucun prétexte, / pas
même l'ombre du préjudice. La réfeél:ion de ces deux moitiés, formant le tout des réparations, doit dès-lors remplir Ces intérêts & lui interdire h moindre plainte.
Jurqu'à ce jour il n'efl: aucun Jurifconfulte qu{ n'ait penfé
que les décimatems doivent fournir aux réparations qui 'font
à la charge de leurs Bénéfices, proportionnellement .à la
portion' des dîmes qu'ils re~oivent. Statuimus, dit le Concile tenu à P.onteau en Normandie en 1279, can. 8, ut
Ahbate's, Priores é;- perfonœ Eclefiaflicœ quœ percipiunt majores
decimas in Ecclefiis Paroc;!iialibus, compel/antur ad reJlaurandam' fabricam libras & arnamenta, proraul quam percipiunt
in ei(dem~
.
La Déclaration de' t 686, fans celfe en vigueur dans le
Réglement des biens fujets à l'acquittement de la portioh
congrue, rejette l'aél:ion rolidaire, & elle ne fou met les
co-décimareurs. à Y contribuer qu'à proportion des dîmes
qu',ils levent; & afin qlle cette folidité ne pût abfolument
pas être follicitée, le Légiflateur enjoint aux co-décimateurs de faire le partage des biens & des dîmes dans trois .
. mois. Il [;lUt convenit que d'tte regle fouffre une exception dans le cas où les biens tranfmis à l'Eglife par les
fideles, font defiinés 'à la célébration du Service Divin,
& à' tO.ut_ce qui peut en procurer la décence & l'ehél:itude;
parce qu'alot'S l'univerfalité des dîmes ayant .été concédées
•
�DU P ALA 1 S D Il PIl. OVIlNCE.
~47
pour ces objets, les Paroiffiens 'ont un droit fur le r ut
indivis qu'ils ont remis en cer étar, & qu'on ne pourrait
fcinder à leur préjudice & contre leur voloncé. Cerre comnlunion ancienne & primitive fubordonne la généraliré ,de
la perception aux charges du bénéfice. Il n'en ell: pas de
'même, lorfqu'après avoir pourvu aux néceffilés de l'Eglife,
les co-décimareurs agitent parmi eux une quel!:ion pécuniaire, ou qu'ils viennent à répa~ririon despaie mens des
charges. Leur réclamarion co-relative fe divife, parce que
chacun n'étant tenu que, de fa portion, il ne fauroit équi- .
tablement payer pour tous.
L'artiCle 2 l de l'Edit de 169)' après avoir 'parlé de
l'entretien & des réparations auxquelles les Ecclélial!:iques'
pourvus de Bénéfices font foumis, ajoute : Voulons 'lue
le[dits décimateurs dans les lieux où il y en a plujieurs, puif
fint y ifre contraints fo{idairement ,[au!le recours des uns contre les autres. La folidité contre les co-décimateurs -el!: une
dépendance de leur oblig:nion folidaire, qui a été contraél:ée
dans l'origine de la dotation, & qui s'eH répandue à cette
époq,ue fur tous les biens par eux reçus lors de la conceffion
qui leur en a été faite; d'ailleurs elle affure' la continuité,
l'ordre & le refpeél: dû au cuIre, en écartant ce qui peut en
interrompre le cours.
'
Mais il faut attentivement conIidérer les deux parties
effentielles que renferme l'a~ticle 2 l : folidaire contre les
décimateurs; effet du dtoit des Paroiffiens & de celui du
miniftere public: recours entre les décimateurs; intérêt privé
& correlatif qui les tenant tous contribuables, éclipfe k
folidité. Me. Cochin, tom. 4 de fes Œuvres, pag. 648, dit
qu'à l'égard qes décimateurs encr'eux, il dl: incontefl:able
que l'aél:ion eft divifée de droit, & ne peut jamais être
exercée folidairement,; c'eft auffi le fencimenc de Duperray
en fan t-raité du partage des fruits, pag. 133; de Denifart
en fa colleét va. décimateur; de Piales , tom. 3, Traité des
céparations, pag. 388.
Il eft tellement peu vrai que les co-décimateurs peuvent:
�~48
.
Jou R N À L - ' être pourfuivis folidairement emr'eux, que ta folidité affignée
aux Paroifliens & au miniil:ere public a même befoin d'être
interprétée prout juris efl; car lorfque l'art. 2 l de l'Edit -de
169) la prononce contre les co-décimateurs, ce n'ell: qu'en
faveur de la caufe publique, & même la raifon de cet intérêt général n'ell: pas toujours efficace pour l'engendrer;
on ne l'accorde que lors de ces événemens inanendus, où·
la révolution des temps changeant la face & le fonds d'une
prébende, néceflite de r.e.courir à l'autre; mais en égalité
de produaion, chaque co-décimateur ell: appellé féparément. Le Parlement de ToulouCe Cuivit cette diil:inaion, en
recevant la confignati'on d'un co-décimateur pour Ca part &
portion des refeaions.& ornemens des EgliCes dont plufieurs
décimateurs per<;oivent les dîmes; l'Arrêt refuCa l'aaion folidaire contre lui, & il jugea que le tiers, ainfi que fe qualifie Mre. Verrion, n'a p:lS un caraél:ere & un pouvoir atrez
étendu pour rapporter la folidité que l'on ne décerne que
pour des cau Ces infiniment graves, des mutations des Bénéfices, des pertes excéflives, des defl:ruaions , & pour femblables faits où la caufe publique follicite l'application de
l'article 21 qui lui ell: propre & exclufif.
Joutre, fur l'Edit de 169), page 134, anefle que les
Curés qui font décimateurs, dOIvent contribuer aux réparations du Chœur à proportion de leurs dîmes avec les autres
décimateurs. Mr. de Regutre, dans fes Arrêts notâbles,
tom. 2, pag. 43, rapporte un Arrêt du 26 Mai 1739, qui
condamna les Dames ReligiepCes de l'Abbaye de St. Pierre
de la ville d'Hieres à payer leur part des portions congrues
& autres charges, &' qu'il fero.it fait un Réglemént général
de toute l.a dîrr.e du terroir d'Hieres, enCemble des charges
& portions congrues, pour que chaque co-décimateur y con- tribuât fuivant fa cot~-parr. L'art. 7 de la déclaration du mois de
Mars 1783 confirme l'arr. 21 de celui de 169) : lorfiJu'il
y aura, dit cet article, pll/(ieurs déeinzateurs jùr la même
ParoijJè, ils feront tenus folidairement de la contribution âdeffis fixée, [au!le recours & la répartition éntr'eux Il proportion
de
�D U
PAL A J S
D B
P Ir 0 V B N C B.
249
(Je ce flue chacun poffidera de dtme. La rai(on de la Loi.
conCille en ce que ce ne (ont pas les per(onnes, mais
les biens & le Bénéfice entier, qui (e trouvent alfeélés à cette
re(ponCion.
Mre. Verrion ayant (uccédé à la prébende de Mre. Brun,
c'ell à lui à en (upporter .les .charges tant anciennes que
nouvelles, (auf (a garantie contre (on prédéceffeur. Il y a
dans le terroir de Cuers deux prébendes, qui (ont dillinéles
& (éparées l'une de l'autre; chaque Chanoine prébendé a
(on Fermier; il pré(ente à (on gré (éparément ou conjointement aux Bénéfices vacans; l'option ne (e fait que (ur une
prébende; chaque prébendé paye (éparément (es décimes,
& ils (ont l'un & l'autre impofés en deux articles non
conjoints. Chacun acquitte (ans réunion &. (ans folidité
les congrues dues aux Curés, & la penCion appartenante
au Chapitre de Cuers. Enfin, lOutes les opérations relatives
à-l'exploitation de ces prébendes font divifes & dillinéles.
Par la conféquence de cette diviCion authentique, les deux
Chanoines prébendés contribuant aux impenfes des réparations auxquelles des tranfaélions & des accords particuliers
les affujettiffent, ont fourni leur quote part en deux portions
égales. C'efl: dans cet état des chofes que Mre. Verrion a
trouvé la prébende pour laquelle il a fait option.
On répondoit pour Mre. Verrion, qu'il falloit juger fon
aélion dans le mome.nt où elle a été ou.verte, parce qu~
c'ell alors qu'il avoit le plus grand intérêt de fàire prononcer la folidaire contre Mres. Moutet & Brun. Il ne devinoit pas alors qu'on prononcerait la garantie contre le
Chapitre de Cuers, qui a plaidé un an pour s'y founraire.
Il alloit à fon intérêt par lOutes les voies légales. Or, une
de ces voies légales élOit la folidité qu'il demandoit contre
Mres. Mouret & Brun. Pourquoi auroit':il négligé fa défenfe?'
Pourquoi aurait-il divifé une aélion que les Loix & les titres
rendent indiviCibles? La queftion fur Id folidité a occaCionné
des dépens conCidérables à Mre. Verrion, qu'il a intérêt de
ne pas perdre. Le Chapitre de Cuers condamné par la Sentence
Années l78z & Mv.
Kk
�2.')0
JOUR!lAr.
à la garantie, peut appeller de cene Senrénèe & la fairé
réformer. Ce même thapitre n'a été déclaré -garant que desréparations à faire au fanauaire. Le rapport annonce qu'il
y en a à faire d'aùffi effentielles au clocher & aux doches;
il a été reconnu dans le procès de (777 que le,s -co-déci·,
mateurs étoien't contribuables pour le .tiers à la rèfeaion des
cloches. Donc l'inteiêt de Mre. Verrion el!: entier, puifque
dans le clocHer il y a trois cloches rompues, & que le
èlocher a béfoin lui-même d'être réparé: quelle que foit la
garant ie à laquelle le Chapitre de Cuers eH condamné, Mre.
Ver(ion n'a pas moins le plus grand intérêt à la folidité
de Mre. Moytet & de Mre. Brun, parce qu'il eH toujours
plus expédient pour le créancier d'avoir à 'ne di(cuter qu'un
des débiteurs, que d'être obligé, après une premiere difcuffion, de recourir fur des garans.
L'art. 21 de l'Edit de 169) renferme deux difpoûtions
cffentielles: par la premiere, le Légif1ateur fixe les réparations dont les décimateurs font tenus à l'égard des Eglifes
paroiffiales dans l'étendue. defquellés ils levent leur dîme;
par la feconde, il veut que les décimateurs piii!fent être contraints à ces répar~tions {olidairement, fauf le recours contre
les autres. Ce tèxte affure l'aaioo folidaire éontre les décimateurs.
Nul doute que, les co-déeiniat~urs, déhiteurs des mêmes
réparations, n'ont point l'aaion folidaire entr'eux, puifque
la Loi ne la leur ddnne pa's. - Mais Mre. Verrion- ne vient
PilS comme 'co-débiteur exercer une aaion d'e recours contre
ceux qui doivent avec lui fupportà la même ch'ùge'; il vient
lm contraire coinme tiers exercer une' aaion prihcipale contre
'les feuls & les vrais débiteurs, des réparations à faire. Mre.
Verrion ne pouvoit fous aucun rapport être ·tenu· des réparations qui étoient à faire avant qu'il flit co-prébendé de
Cpers. Il ne venait donc pas comme étant débiteur lui-même
"d'une partie de ces réparations; mais il venait comme exerçant
les, aaions du créancier, qui eH l'Eglife à laquelle les réparations doivent être fajtes; il venoit comme exerçant encore,
�DU
PALAIS
Dl!
25~
PROVBNCB.
'li l'on veut, l'infpeaion & la furveillance du Chapjrre, qui
efi le vrai propriétaire de toutes les prébendes; en un mot,
il venoit comme exerçant cette aaion publique qui eût même
compété au Procureur du Roi.
J;,e principe réclamé par Cochin ne frappe pas fur la queftion, puifque Mre. Verrion ne vient point comn)e débiteur
ou' comme co-débiteur des réparations paffées, mais comme
repréfencant le créancier, & comme créancier lui-même;
car Cochin regarde comme vrai créancier celui qui entre
nouvellement en poffeffion d'un bénéfice, & qui a fait con fla ter
par un rapport les réparatIons qui' étoient ~ faire avant fon
entrée dans le bénéfice. De ce que Mr~. Verrion eH vrai
tiers créancier, il fuit qu'il ne peut y avoir à fon égard
aucun circuit d'aétions, ni aucun des inconvéniens qui ont
fait refufer l'aaion folidaire aux débiteurs entr'eux. Un Ecc1éfiaHique qui entre dans un bénéfice, a inconceHabJement
le droit de faire procéder aux répararions échues avant lui,
~ d'y faire contraindre ceux qui étoient chargés de les faire
faire. La cbofe eH décidée par toutes l,es Loix, & alteitée
par tous les Auteurs. Or, du moment que l'on eH ob1igé
de convenir que Mre. Verrion avoit aaion, on ne peut refufer
de re'connoÎtre que ceHe aaion eH /oJidaire, parce que 1\1re,'
Verrion agi~ comme vrai tiers, cÇlmme vrai créancier qui
exerce- une aaion principale, ~ non comme {JO co-débi:' teur qui exerce une aaioQ de re'cours.
•
~'Edit de 1695 veut i,ndéfiniment que les décimateurs
dans les lieux où il y en a plufieurs, puiffent être contraints
aux réparations (olidaire(l1enr. Cet Edit ne déiignè aucune
perfonne en particulier. Il porte une décifion générale fu~,
l'aaion, fans encrer dans les détails des pJrfonnes qui peuvent l'exercer. Le véritable efprit de la Loi èll: uniquement
dè diHinguer l'aaioÇl ptincipale & direae à exercer contre
les décimateurs, d'avec l'aaion recurfaire entr'eux: voilà
la feule diftinél:ion qüe flit le Légiflateur; voilà donc la
•
feule à laquelle il faut s'arrêter.
C'eil une err>:ur de prétendre' que la folidité ne doit être
,
'Kk
2.
�2.,2.
JOURNAl:.
attachée qu'à l'aél:ion exercée par le minillere public ou pat
les paroiffiens, attendu que ce n'ell: qu'alors. que l'on fe
propofe, dans l'exercice de cette aél:ion, le bien public,
l'avantage de la.Paroiife & celui du peuple. L'aél:ion en réparation, queUe que foir la per(onne qui l'exerce, a toujours
la même fin & le même but; eUe tend coujours au bien
commun des fiddes & des paroiffiens. Sans doute cette aél:jon
peut être exercée par la partie p.ublique & par les paroif.
fiens eux-mêmes. JYIais elle peur l'êt re auffi par cous ceux
qui ont un intérêt réel à ce que les réparations foient faites.
Il eH des aél:ions qui par leur nature ne peuvent jamais appartenir qu'au miniHere public, parce qu'eUes portent fur des
objets pour ïefquels un citoyen n'a pas plus d'intérêt légal
à réclamer qu'un autre citoyen, & qui conféquemment ne
tombe jamais dans ,le partage des aél:ions privées. Mais hors
de ces objets généraux, qui appartiennent uniquement &:
eifentieUement à 1:l police publique, tout ce qui peut to'mber
en contention entre parties privées, eH: néceffairement ma":
tiere à aél:ion pour les parties intéreffées, quoique les mêmes
objets puiffent d'ailleurs coucher eifentiellemem au public.
Le mini!tere public peut certa'ineménr veiller à ce que les
réparations d'une Eglife pàroiffiale. foiem exaél:ement fa'ites;
. mais les paroiffiéns le peuvent auffi; mais les fucceifeurs de
ceux qui font chargés de ces r'éparations, '& qui ont intérêt
que leur bénéfice' ne foit détérioré, le peuvem également,
felon le témoignage de tous les Canonill:es: ils Jom alors
autorifés par leur intérêt perfonnel à exercer une aél:ion vraiment publique. En 'fai(ant leur bien propre, ils concourent
au bien public & général: pourquoi' donc leur aél:ion dans
ce cas ne feroit-eUe pas folidaire?
Que deviennent aél:uellement les Doél:rines de Duperray
& de Deni(art? Le premier dit fimplemènt que quand il
ne s'agit que de répartir .la dette entre les co-décimateurs,
il n'y a plus de folidité. Mais cet Auteur ne dit-il pas que
ceux qui one aaion pour obliger les décimateurs aux réparations, peuvent attaquer celui qu'il leur plait, & exercer
1
•
�7.~3
éontre lui f'aéHon folidaire? Denifart dit la même cho{e ,
ainli que Lacombe. L'Auteur du Dic!:ionnaire Canonique, au
mot réparations, attell:e le même principe. Piales ne dit rien
non plus qui puilfe le détruire. On ajoucoit encore qu'en ne
confu!tant que les titres de la prébende, l'aélion folidaire
compéterait 11 Mre. Verrion, parce que la prébende de Cuers
n'eH qu'un même titre & ne forme qu'un même Prieuré;
que les droits honorifiques font exercés par indivis; que les
charges font fupportées par indivis, & que les revenus font
également per'ius par indivis. Donc indivifibilité -& folidité
par l'elfence, la nature & la conll:itution fondamentale du
Prieuré ou de la prébende.
Arrêt du 4 Juin 1783, au rapport de Mr. le Confeiller
de Perier, qui réforme la Sentence au premier chef, &
accorde la folidaire; condamne Mee. Moutet 11 cous les dépens. Ecrivant Mes. Reinaud & Portalis.
DU
PALAIS
DE
ARRÊT
Ifa6vnNCI1.
XXXI.
LIartifan efi tenu de contribuer aux charges du Corps, & de
payer un droit non abufif de levage de boutique, quoique
~. le Corps ne foit pas établi en jurande.
..
.,
_pAR Ordonnance des Lieutenans de Police. de la ville
de Marfeille du 20 Février 1782, il fut enjoint 11 cous
Jes Maréchaux-ferrans & de la grande forge, ayant boutique
ouverte, de fe faire infcrire dans un regilhe 11 ce dell:iné,
.& d'y déclarer leur nom, furnom, domicile, & le genre de
travail donc ils s'occupaient, Pierre Girard, Taillandier, fit
fa déclaration. Les Prieurs lui demanderent alors ·Ie droit é1e
levage que tous les autres membres du Corps avaient payé.
Sur fon refus, il fut affigné à- la .Police. Par les défenfes
qu'il donna, il obferv.a qu'il y avait deux années qu'il tra'vailloit fans avoir été reçu maître, & qu'on ne lui avoi~
�7.~3
éontre lui f'aéHon folidaire? Denifart dit la même cho{e ,
ainli que Lacombe. L'Auteur du Dic!:ionnaire Canonique, au
mot réparations, attell:e le même principe. Piales ne dit rien
non plus qui puilfe le détruire. On ajoucoit encore qu'en ne
confu!tant que les titres de la prébende, l'aélion folidaire
compéterait 11 Mre. Verrion, parce que la prébende de Cuers
n'eH qu'un même titre & ne forme qu'un même Prieuré;
que les droits honorifiques font exercés par indivis; que les
charges font fupportées par indivis, & que les revenus font
également per'ius par indivis. Donc indivifibilité -& folidité
par l'elfence, la nature & la conll:itution fondamentale du
Prieuré ou de la prébende.
Arrêt du 4 Juin 1783, au rapport de Mr. le Confeiller
de Perier, qui réforme la Sentence au premier chef, &
accorde la folidaire; condamne Mee. Moutet 11 cous les dépens. Ecrivant Mes. Reinaud & Portalis.
DU
PALAIS
DE
ARRÊT
Ifa6vnNCI1.
XXXI.
LIartifan efi tenu de contribuer aux charges du Corps, & de
payer un droit non abufif de levage de boutique, quoique
~. le Corps ne foit pas établi en jurande.
..
.,
_pAR Ordonnance des Lieutenans de Police. de la ville
de Marfeille du 20 Février 1782, il fut enjoint 11 cous
Jes Maréchaux-ferrans & de la grande forge, ayant boutique
ouverte, de fe faire infcrire dans un regilhe 11 ce dell:iné,
.& d'y déclarer leur nom, furnom, domicile, & le genre de
travail donc ils s'occupaient, Pierre Girard, Taillandier, fit
fa déclaration. Les Prieurs lui demanderent alors ·Ie droit é1e
levage que tous les autres membres du Corps avaient payé.
Sur fon refus, il fut affigné à- la .Police. Par les défenfes
qu'il donna, il obferv.a qu'il y avait deux années qu'il tra'vailloit fans avoir été reçu maître, & qu'on ne lui avoi~
�:l )
4-
1'-0 V RNA Il
rien demandé; ~u moyen de ce, il conclut au débourement
de la requ~le, & (ubfidiairement à ce que I~oppofilion par
lui déclar~e el)ver~ l'.(\rrêt de la Cour du 19 Août 1719,
qui homologue Ie~ SlaqJlS, vuidée, il ferait dil droil aux
p<lrlies.. Le ~Q Aollt 1782, il intervint Sentence, portant
qJ.l.e l'oppoutjcQn vuiM.e ,i1 ferait dit droit 'lux parcies.
Les Syndics <Ippellerent de c~lte Sentence; & comme
fur l'appel Pierr-e Girard s'étoit rabaltu fur ce que les Statuts établiIfoient une efpece de jurande, les Syndics demanderent, par requc;re in~igente,. qu'il leur fût concédé aae de
la. déclaC<ltipn p_ar eux faile au procès, &-qu'ils réitéro.ienc,
de ce qu'ils n'entendoient point fe prévaloir des Slatuts ni
de l'Arrêt d'homologation en tout ce qui pourrait concerner
le libre exercice de la profeflion; & au moyen de ce, que
fans s'acrêter à l'.oppoution formée par Gi~ard, do.nt il feroit
démis & déboUlé, le furplus qes St'!.l'!ts., & l}o.la\llment l'art.
8 d'iceux, enfemble l'Arrêt qui l'homologue, feroient, quant
à çe, exécUlé_s fuivant leur forme & teneur. Girard de fon
'ôté préfenla une requêle incidente, par laquelle "il appella
de la Sentence in 'lùantùm contea, & demanda que fans
s'arrêter à la requête des Syndics, dont ils feroient démis
& déboutés, il fû,t mis. fur icelle hors de Cour & de
pnid:~. ,
,
On difoit pour les. SynCJic.s.,· qU.e ql.loiqu?up Corps ne foit.
point établi en jurande, il n'en eil: pas moins Corps; il ne
lui faut pas moins u.ne police & des regles; & ,'eH {ilr ce
priDl,ipe que PEdi{· d-e 1 7.45 ~réa des offices d'Infpeél!eurs &'
d~ Connôleurs, Au.i ne fOllt au vrai qu'une taxe déguifée.
Les Corps, quoique non fondés en jurapde, ont été obligés
d'acquérir ces mêmes offices. Ur, fi les Corps non jurés onè
acquis ces offices, c'ef! parce qu'ils font véritablement Corps;
c'eU paree qu'ils -om une poLice; & s'ils font Corps, il leur
.faut néceifairemenr des regles & des Statuts.
Ces Statuts ne .peuvent à la vérité nr gêner. nL.l'eŒreindre
la liberté publique.; l'erreur des anciens temps à c'et égard
a dlfpaFu, & pet[onnene dOUlt; aujourd'hui qlle le libre
•
,.
�D U
PAL A l S
D B
PRO V E BeE.
'"H
exercice d'une profeffion ne puiife êrre ref!:rein{ que par une
jurande, & qu'il ne peut y avoir de jurande qu'elle ne foie
érablie par Lercres - parenres. Mais fi rout Corps quelconque ne peut pas s'arroger le privilege de la jurande, lors
même que ces Sraturs Ont rec;u la fanél:ion de l'homologation, il n'y a nul doure que ces mêmes Corps ne puiifene
fe donner des regles \'le des Sraturs pour toue ce qui con. cerne les 'aifemblées, la police, les charges ou les derces du
Corps.
,
Dès que le Corps des Taillandiers a déclaré qu'il.renonc;oit
"
à fes Sraturs dans 'rour ce qui puuvoit ·gêner ,le 'libre exercice'
de la profeffion, ces Sraruts n'ont donc plus rien qui puiife.
olfenfer l'ordre ou la loi, & il n'y a par conféquent plus
aucune raifon pour ne pas confirmer l'Arrêt qui les homologue. Quoiqu'un Corps ne fait pas fondé en Lettres-parentes,
il n'ef!: pas pour cela difpenfé de payer fes dettes ou fes
charges; & il ne peut les payer qu'en impofant [ur fes'membres: auffi ef!:-il de regle que quiconque s'ingere dans une
profeffion libre, doit contribuer aux c'harges & payer les cotes.
Peut-on exiger comme charge un droit de levage de boutique, ou le droit de levage de bourique doit-il êrre regard~
comme conférant all Corps le privilege d'unè Jurande qu'il
n'a' pas? Si l'on ne vouloit cohfulter fur ce point que les
anciens tirres du Corps, l'on diroit que le'droir de levage
de bourique avoit été confirmé par l'Airêt de la Cour du 3 t
Mai 1684, rappdrté dans l'art. 8 des Staturs; que le même
droie avoie été confirme par l'Edit portant créarion des Offices
d'Audireurs & Examinateurs', du mois d' vril 1694; que ce
droit a 'éte établi [ur chaque Afpirant des Villes où il y a
Sénéchauifée, pour 'pa-rvenir à l'acquittement des cM rges
courantes; & qu'en conféquence, tous les membres du Corps
ayant payé le même droit" Girard, 'qui 'n'el1: 'pas de !neilleu're
condition, doir néceifaire!nenr le payer.
Ce n'el1: pas d'aujourd!hui que l'on a 'élevé la difficulté de
vouloir comparer le droit $le levage de hourique au 'privilege
exclufif, ou de le repré[emer comme 'te'nàanc il fuppléer ·la
'
�~)6
Jou
RNA L
Jurande: mais il a été répondu que le même Corps qui ne
pou voit pas s'arroger)e privilege primitif, pouvoit établir
des impoficions [ur fes membres, fur-tout lorfqu'elles étoient
deHinées à l'acquittement des charges; & tout-Corps a la
faculcé d'établir ces impofitions [ur les membres, ou par droit
d'entrée; c'ef!: ce qu'on appelle dans les 'uns droit de bonnet,
dans les autres droit d'entrée, & chez les Arrif!:es droit de
levage 'de boutique. Pareil droit, autorifé de tous les temps ,.
a toujours été confirmé; Mornac fur la Loi 6, §. dernier,
ff. de Offic. Procur. difoit de fon temps: de iis qUa! pro introitll
pra!flantur, tolerantur hodiè vatiis in Ecclifiis, imà & Collegiis
ac Societatibus.
Les Cordonniers de Toulon, dont les StaWts avoient été
ealfés comme refiriaifs de la liberré publique, demanderent.
un 'p-areil droit" de. levage de boutique; & la contef!:ation
porrée à la Police, & de la Police référée à Mr. de Machault,
Concrôleur-Général, il fut décidé que fi le droit de levage
de boutique n'élOit pas rel qu'il dégénérât en prohibition,
qu'il fût d'ailleurs defiiné à acquirter les charges du Corps,
quiconque fe mêloit de la profelIion ne pouvoit [e di[pen[er
de le payer. Mais fi au contraire le droit n'élOit pas modéré,
& que les Corps le poriaffenc à te! taux que la liberré publique en fùt altérée, on devoit le modérer.
Cette regle a 'été celle de tous les temps, ainfi que le prouvent les Auteurs. M. Debezieux, liv. 7, chap. 8, §. l ,
rapporte un Arrêt de la Cour qui le jugea bien préci[émenr.
Un Boulanger d'Aix va s'établir à Mar[eille; on lui demande
\Jn droit de levage de boutique; il répond qu'en qualité de
Maître Boulanger à Aix, il a le droit de travailler à Marfeille
fans rien payer. Et M. Debezieux ajoùte; mais comme ce
droit ell burfal & qu'il e.fl établi dans tous les Corps pour
fùbvenir à leurs befoins, & qu'il n'a rien d'oppoft ou de contraire aux Ordonnances & aux Arrêts, ne touchant en rien à
fhaM/eté de l'oûvrier, la Cour confirma avec dépens par Arrêt
du 27 Mai 7770 , rendu au rapport de M. de Mons. Bonnet
litt. A, il.rr. 5 , établit la même regle•.
On
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PALAIS
DB
PROVBNCB.
257
On répond oit pour Girard, que les Corps des Artifans
étoient anciennement en ufage en Provence, comme partout ailleurs, de fe former des Staturs qu'ils faifoient homologuer par les Cours Souveraines. Ces Statuts avoient leur
exécution, & quoique ces Corps ne fuffent pas fondés en
Lettres-Patentes, ni érigés en Jurande, ils conféroient la
MaÎtrife, & ils levoient fur les Afpirans un droit en argent
tel qu'il étoit fixé par leurs Statuts. Dans la fuite, le Gouvernement a voulu maintenir & favorifer la liberté publique. On
a confidéré qu'il n'y a que le Roi qui puiffe donner une
exiilence légale à des Corps politiques dans (on Royaume,
accorder à ceux qai y: font admis le droit exclufif d'exercer
les profeffions utiles à l'Etat, & établir fur les Afpirans une _
imp.oGtion qui en eil le prix. On a prefcrit à cet effet tous
les prétendus Statues des Corps non patentés, & on a autorifé roUt particulier à exercer librement toutes les profeffions
qui ne font point établies en Jurande, avec defenfes de rien
exiger d'eux pour raifon de ce, à peine de concLlffion. Tel dl:
l'Arrét du CDnfeil d'Etat du 6 DécemD:re 1746, qui caffa
deux Arrêts furpris à la religi:>n de la Cour par les Serruriers
de Toulon. Depuis lors la Cour n'a plus voulu reconnoÎtre
les Statuts des Corps non parentés, & quand on lui en a
demand~ l'homologation, elle a ordonné que les panies fe
p.ourvoiroient au Roi pour rapporter des Lenres-Patentes;
<-eH: M, de Montvalon qui l'artelte dans fon Précis des Ordonnnances aux Notes, va. Statuts. Tous les Parlemens du
Royaume fe font prefcrirs la !!lême loi. Ils Ont maintenu les
c.it~y~ns dans le droit d'é'Xercer librement toUS arts & métiers,
&. oe) ver boutique dans les lieux où il n'y a Fo'nt de Jurande,
f~ns pouvoir être affujettis à aucun droit de MaÎCrife, ni
étre inquiétés (ous quelque prétexre que ce foit. On trouve
une foule d'Arrêts fur ce point dans Denifart, fous le mot
arts G' métiers, n. 5, n. 7, 20 & fuiv.
.
L'arr. 8 des Statuts établit un droit de 120 liv. fur chaque
Afpiranr à la Maîtrife. Girard répond qu'il ne veut point de
MaÎtrife , & que quand même il la demander oit , on ne pour~
J'lunées t 782. G' fuiv.
L1
�~)s
10UIlNAr.
rait fa fui donner, puifque les Taillandiers ne forment pas
une Jurande, & qu'ils n'one aucun pouvoir ni aucun caraél:ere
pour la conférer. Il ne peut donc pas être condamné à la
payer, puifqlle lé Souverain l'autorife à lever boutique fans
payer aucun droit; que ce fait droit d'entrée, droit de maîtrife ,
droit de levage de boutique, droit de bonnet, cela efi égal;
un Corps illégitime n'en peut prétendre d'aucune efpece.
En effer, qll'efi.ce qu'on pourrait prétendre conere Girard,
fi le Corps était établi en Jurande? Ce ne pourrait être autre
chofe qu'un droit de Maîtrife tel qu'il, ferait fixé par des
Statuts aurorifés par Lettres-Patentes. L'Ordonnance de
1673 défend expre1fément aux Corps établis en Jurande
d'exiger toute autre efpece de droit: on voudrait donc avoir
plus de privilege que n'en one les Corps établis en Jurande,
puilqu'indépendamment du droit de MaÎtrife qui n'efi pas dû,
& qui eft le feul que l'on pût lever fur les membres, l'on
voudroit lever un autre femblable droit fous le nom de levage
de boutique. Ainli par cela feul que le Corps des Taillandiers
n'a point de droÎ1: de Maîtrife à prétendre, il ne peut point
prétendre non plus de droit de levage de boutique.
Il eil [eBernene vrai que de tous tes temps le droit de
levage de boutique n'a été autre chofe que le droit de Maitrife, que quiconque a été exempt de celui-ci, l'a' é.té .Ilécef~
fuirem~llt de celui-là. L'on trouve dans les Arrêts rapp'ortés
par Bonnet, lett. A, fomm. )' que par cel'a feul que 'les
Artifalls qui one été re~us Maîtres dans Aix, font exempts
du droit de Maîtrife quand ils vone s'établir dans les autres
villes de la Province 011 il Y a Jurande, ils le font par uge
conféqllence néce1faire du prétendu droit de levage de boutique; c'eil ce que la Cour jugea formellement le 2) Sep~
tembre 1728 en faveur de Fran~ois Gerin, Marchand Linger,
contre le Corps des Maîtres Lingers de la ville de Marfeille.
Ceux-ci affeél:oient de ne pas lui demander direél:ement le
droit de Maîtrife; mais ils voulaient lui faire payer le prétendu droit de levage de boutique. La Cour envifagea ce
frivole détour comme une vraie dériIion, & elle débouta les'
�DU
PALAIS
DB
~59
PR·OVBNCB.
Maitres Lingers avec dépens. Bonnet obCerve que quoique
l'on [oit exempt du droit de Maîrrife ou de levage de boutique, on ne doit pas moins contribuer aux cotes annuelles
dont chaque membre efl: trihutaire à Con Corps, pour en
[outenir les charges & les dépenCes; c'eil: préciCément ce
que jugea un autre Arrêt du 21 Juin 173), qu'il rapporre
au même endroir. Celui de 1210 que M. Debezieux rapporre,
& qui condamna un Boulanger d'Aix à payer 30 liv. pour
droit de levage de boutique, intervint dans un temps où les
Statuts Iromologués avaient leur exécution.
Le Corps des Taillandiers peut impoCer des cotes, quoiqu'il ne forme pas un Corps légitime, parce que l'impoution
d-es. cotes n'a trait qu'à l'adminifl:ration intérieure & domeCtique; elle eil: égale & générale; elle n'arrente pas aux
loi x de l'Erat; elle ne gêne pas la liberré publique. Mais
comment veut-on que la COllr juge que les Sraturs de 17'9
doivent être exécutés dans l'arr. 8 qui fixe le' droit de MaÎtrife à 120 liv.? Un pauvre ouvrier ne ferait-il pas cruellement trompé, s'il érait condamné à payer un pareil droit,
quand les loix de l'Etat & les Arrêts de la Cour l'ont affuré
qu'il n'en dévoit point?
Arrêt du 3 Juillet ]:783, au rapport de M. le Confeiller de
Nicolay, qui condamne Girard au paiement du droit de
levage, avec dépens. Ecrivant Mes. PaCcalis & Pochet.
ARRÊT
XXII.
L'héritier. in re cerrâ fuccede in univerfum JUs, e~ cas que
l'héritier univerfel prédécede' le Teflauur, [au! la reJlituûon des fidéicommis.
Ean.BaptiO:e Pellicot du lieu de Seillans fit fan tefla. ment le 24 Février 17)2; il infl:itua Ces quarre filles Ces
héririeres univetfelles, & leur nomma pour turrice la DUe.
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1.. Rue fon époufe à laquelle il légua l'ufufruit de fes bién~:
Antoine Pellicot fon frere ainé, par fon tel1:ament du 17
Février 1755, légua à fon neveu Jean-Baptifte Pellicot, fils
de Jean-Jofeph fon amre frere, la fom.me de 1000 liv., 3c
en ce l'infiitua fon héritier particulier. Il infiitua pour fon
héritiere univerfelle la DlIe. la Rue fa belle - fœur, à la
charge par elle d'en difpofer en faveur de tous les enfans
de feu Jean-Baptifie Pellicot fon fi-ere, & non autrement.
L'une des filles fubHituées & la DlIe. la Rue héritiere
univerfelle moururent avant Antoine Pellicot, qui mourut
en 1778. Il fut procédé après fa mort à un inventaire
amiable, & le 12. Avril '1779 la DlIe. Claire Pellicot préfenta une requête al! Lieutenant· de Draguignan, en injonction contre fes fœurs de procéd.er au partage des fucceffions qui le"ur étoiertt échues. Jean-Baptil1:e Pellicot intervint dans l'infiance, & demanda, comme feul héritier d'Antoine Pelliçor., d'être mis en polfetfron de l'hoirie. Le fieur
Fouque, époux d'une fœur d'Antoine Pellicot, intervint
autfr. Les parties furent renvoyées à des Arbitres, qui par
leur Sentence déciderent qu'il feroit furfis à la demande en
partage formée par la Dlle.. Claire Pellicot, que JeanBaptifte Pellicot feroit maintenu en la polfetfron & jouiffance de l'hoirie, à la charge de remettre autfr-tôt la fuccetfron aux Dlles. Pellicot. en.vertl! du fidéicommis ordonné .
. par le tel1:ament, en retenant par lui 1°. le !egs de 10001.;
2.°. la quarte trébellianique, fuivant les parcelles de compoIition & de détraaion qui feroient données, & fur l'intervention du fieur Fouque. les. parties furent mifes hors dé
Cour & de procès. Les Hiles. Pellicot & le fieur Fouque
appellerent de cette ..sentence. Pendant l'infbn.ce d'appel,
Jean-Bapril1:e Pellico't fe dépar~it du chef de la Sentence
qui lui adjugeoit le legs de 1000 liv. , ne pouvant être tout
à la fois légataire & héritier.
On aifoit pour lean-Bdptil1:e Pellicot, que c'efi une 'IIé. rité conftante dans le droit, que lorfqu'il n'y a point d'hé.Tilier univerfel , l'héritier particulier, quoique inHirué en une
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PRO V El NeE;
16 l,
'choCe dét~rminée, en prend la place; de forre que la fuc<:effion entiere lui efi dévolue. Les Auteurs du Droit Romain ont diftingué deux fortes de fucceffions, la teHamentaire & la légitime, & iis ont jugé avec t'aifon que l'une
& l'a!!tre ne pouvoient avoir lieu tout à la fois par rapport à un même ,héritage. En effet, quand un homme a
difpofé de fes biens par LIn tefiament, il a manifeHé l'intention d'exclure .Ies héritiers légitimes, & de préférer les
tefiamentaires. Ce feroit donc aller contre fa volonté, que
de donner part aux premiers dans la fucceffion, & de ne
pas la déférer par préférence à ceux qu'il y a nommément
appellés. N'importe que ceux-ci n'aient été infiÏtués qu'en
L1ne partie, qu'en un objet certain & 'déterminé; il n'en
eH pas moins vrai qu'en les appellant, le tefiateur a témoigné
qu'il les préféreroit à fes fucceffeurs "légitimes, & qu'en
les nommant' fes héritiers, il a montré le deGr de leur
tranfmettre fes biens plutôt qu'à tous autres.
La Loi 41, §. 8.. if. de vulgo & pupill. fuhjl. dit: fui
certœ rei 'Izœres injlituitur colzœrede non dato, honorum omnium
Izœreditatem ohtinet. La même chofe fe trouve' dans la Loi [,
§. 4, if. de Izœred. inflit. Il y e'fi dit que !i quelqu'un a été,
feul inHitué' pour LIn certain' fonds, ceùe inHitution vaut
pour le tout, & comme s'il n'avoit pas été fait mention
d'un effet particulier: fi ex fundo fui.J1èt aliquis- Jolus injlitutus, valet injlitutio, detrflc1â fundi mentione. C'eH enfin'
ce qui réfulte d'une infinité d'autres textes, qui fuppofant
cette vérité con Hante , ont prononcé fur, diverfes queHions
,qui pouvoient en. naître. Tell~s font la Loi 9, §. 13, I:t
Loi 10 & la Loi 3) du même titre de Izœred. injlit.
Les Loix, il eH vrai, regardent communé'ment l'inflitué
in re certâ cgmme un !impie légataire: quos legatariorum
loco Izaheri' certum efl, dit la Loi tIt/oties, God. de Izœred.
iriflit. Mais ces Loix n'ont-eUes pas décidé que dans certains cas cet inHitué peut devenir héritier? Si eUes le
conGderent comme un Gmple légataire, c'en lorfqu'en même
temps il y a des héritiers univerfel,s par qui la fucceffioo,
,
�~52;
.
Jou RNA' L
foit acceptée;' & t.el efi le cas de la Loi quoties dont le
fommaire efi conçu en ces termes: inflitutus in re certâ
hahetur loco legatarii, univerfaliter inflituto Izœreditatem adeunte.
Cela n'empêche donc pas que d'autre part elles ne le déclarent ~éritier univerfel, quand il n'yen a point d'autre.
CateIan, tom. t , liv. 2, ch. 36; Duperier, tom. l , liv. ~ ,
tit. de l'inflitution teftamentaire ou ccntraéluelle, dit que la
maxime qui rend l'inilicué in re certâ héritier univer[el, a
lieu auffi quand l'inilitution particulière confiile en une
fomme d'.'lrgent, quand même l'inHitution [eroit accomFagnée de quelque mot taxatif, comme' feulement & autres
femblables, ce qui eil également remarqué par .Furgole
dans [on Traité des teJlamens, ch ..8, n. 30. Les Loix ne
rell:reignent pas cet avantage aux [euls légitimaires; elles
Farlem de tout héritier inHitué. Ita Catelan, liv. 2, ch.
36; Cambolas, liv. 6 , ch. 19.
'
Or que le teHamem ne concienne point d'inll:icution, ou
que celui qui avait été généralement infiirué, ait prédécédé
le tefiareur, n'a-t~on. pas toujours les mêmes rairons de
décider &. d'attribuer la [ucceflion entiere à l'héritier inHicué
in Te certâ? Quels [ont en .effet les motifs qui déterminent dans· Je premier cas! C'efi parce que la [ucceffion
légitime ne peut pas concourir avec la tell:amentaire ,- &
qu'ainu que s'exprime la Loi 39, if. de acquir. hœred.,
fjuandiù pOlefl ex< teJlamellto adiri hœreditas, a6 inteJlato non
defertuT'. La Loi préfere toujours les héritiers que le tefiateur a nomm.és, à ceux qu'elle poufFait lui donner elle-'
même; elle ne tolere pas que quelqu'un meure partim tcftatus ,partim in·teJlatus.' Mais ces mêmes motifs n.e [e ren.contrtmt·-lls pas dacns un cas C(Dmme dans. l'autre? Car
enfin, fi lor[que l'héritier univer[el imfiicué a prédécédé le
teHateur, on appelloir le fucceflèur ah inteJlat au p.réjudice·
de l'infl:itué in re certâ, ne feroitc-.on. pas concourir les deux
fucceflions? Ne préférerait-on pas les héritiers légitinies à
ceux que le tell:ateur a. nommés lui-même?' Ne le ferbit-on
pas .mou.ir partim tejlatus., partim intefiatus? p'ailleurs
�nu
PAL,US' Dl!
PROVnNCl!,
.
2,'63
qùelle différence peur-on rrouver enere les deux erpeces,~
relarivemant à la quellion dont il s'agir? Que le rell~tèur
n'ait point nommé d'héritier univerfel, ou que celui qu'il
avoit nommé ait prédécédé ,ou même qu'il répudie, n'ellce pas la même c-hofe? (Behediàus ad cap. Raynutius, vo.
eadem tefiamento ,.n. 266.) Tout' ce qu'on peut dire au
premier cas, c'ef!: que le refiateur 'avoit préféré l'héririer
univerfel qiJ'il avoit choifi; & il n'ef!: pas doureux auffi que
fi' cet héririe.; avolt (urvécu, ill'auroit emporré fur l'infiittlé
in re certâ. Mais il l'elle toujours vrai qu'il a préféré en(uite cet iiJfiitué in re certâ à tous autres; qu'il l'a appéllé'
à (a fucceffion; qu'il l'a nommé en un mot (00 héritier ,& qu'en conféquence cet infiitué doir exclure lès fucce1feurs'
,légitimes. C'ell auffi ce qu'one penfé tous les Aureurs , eon'autres Bellonus en fon Trairé de jure accrefcendi,. ch. 7,
qu: 9; Catelan, liv. 2, ch. 36; Bouraric en fes inf!:itU[ions
au droit fran~ois, liv. 2. , rir. 17, §. 3 ; Serres fur lè ri1éme
riere & le même §. des inllitures; Mr. de Motltval1on en
fon Trahé des (ucceffions, rom. l , pag. 44')'
On ajoutoit que l'infiirution de la DlIe. la: Ru'e n'étpic
point fiduciaire. En examinant le tellament d'Antoine Pel:ncot', .on n'y rrouvè en faveur de la DHé. la Rue' qu'une'
vérira151e inllir~rion d'héritier ,à laq\!.èlle efi attachée là chargè
d1urie fù'bHirution fitiércbmmiifaire en favellr des Dlles; Pèl'}icor;' t'elle ell la difpofirion, il n'el!: p'as' poŒ1J'Iet d'en' irrlaginer une qui foir plus nerte, pillS précife; ce que" te teftateur vouloit, il l'a dit lui-même, & d'une maniere fi
claire, EJu'il n'y :1: piuS' aucun doute à fe former. La' fiduc'e
ne fe préfume qu'autant qu'dIe el!: indiquée par cet'rains
fignes capables de déterminer cerre préfomprion; fuivant
tous les Auteurs, 1es principaux fignes font que ceux à qui
l'hél'irier qu'on prétend fiduciaire ell chargé dé rendre, toiwt
énfanrs ou defcendants du tel!:ateur; que l'inl!:itution fait
fuite par un mari en faveur de fa femme; que l'etat des'
{ubRitués ait exigé une telle difpolition; enfin que l'héritier
foit renu de leur remettre l'hérirage dans un' remps dérer~
�2~'" ,
Jou
RNA L
mIne. On peut ajouter que fi l'on n'exige pas toujours la
réunion de touS ces fignes, on veut au moins que les plus
effenriels (e rencontrent, & que les autres (oient rempla~ cés par des équivalens. Inutilement a-t-on cité Je §, 12
de la Loi 78 ,ff. ad Sel/. COI/fui. trehell., Decormis, t~m. 1,
, col. 16S (, Boniface, to,m. S, liv. 2, tit. 4, ch,ap. 2, n. ( 2 ,
pour prouve; 1°. qu'il n'eil pas toujours néceffaire que le
fubilüué (oit enfant ou de(cendant du teilateur; 2°. qu'il
n'eil pas néceffaire que l'héritier inftitué (oit époux ou même
parent du teilateur; mais qu'il (uffit qu'il y ait eU entr'eux
des liai(ons d'amitié. Leg. 46, ff., ad Sen. Treh.; 3°.' qu'il
faut que les (ubilitués (oient en bas âge, de (orte que le
teilateur ait eu un motif de différer la rémiffion de la (ucceffion. (Decormis, tom. 1, col. 164.1" 16S t; 1638,
1644, & (6)3; Aae de notoriété des' Avocats du 6 Sép•
tembre 176S); 4<>' POUt prçlUver enfin que la préfixion d'un
terme n'eil, point egcore une circonilance néceffaire.: (Julien,
dans (on Comm~ntaire. (ur nos Statuts, tom. 1, pag. 388.)
Dans toutes .ces citations il eil airé d'y voir que fi dans
certains cas on a.l:1é(um~ la Jiduce, malgré qu'il n'y eût
p~int de terme préfix, c'eil qu'elle étoit indiquée par une
foule d'aurres circonftances auxquelles on ne pouvoit réli(ter. Il réÎulre de la. di fcu ffio ri dans l'lquelle les. DÎles.' PeIlicot Cont entrées, qu'une. ,:les ,marques de la. fiduc.e peut
être rempl.acée par d'a~rres équivalentes; que dans les, diff~renres efpeces qui varieot à l'infini '. on peut être déterminé par différentes circonft~nces; mais il .reile toujours vrai
qu'on ne doit (uppofer qu'une' inftituriQn. cil fiduciaire qu'au(·ant qu'on y eft engagé par des lignes certains..
.,
_
Ces lignes doivent (ur-tout être bien frappants, lor(qu'il
n'eil pas que1l:ion d'un pere difpo(ant de fes biens dans (a
famille : car dans ce cas on manque précifément çe ce qui
forme la bafe de la préfomption. On croit facilement en
effet, que la plus vive affeaion d'un pere eil pour fes en-.
fants; qu'il les préfere à rome autre perfonne; que leur
avantage eil le principal objet qu'il fe P!opofe dans 1" di(polition
�.p A"r. AIS
PRO V Il N C:B.
265
polir ion de fes biens; & voilà ce qui fair que, lorfque d'ailleurs les circonf!:ances y engagenr, on eU porré à penfer
que s'il a inf!:irué fon époufe, c'ef!: une gardienne, ~ne
turrice qu'il a voulu leur donner, en· attendant qu'ils fuf.
fent eux-mêmes en érat d'admini!trer leurs biens. Mais les
mêmes fenrimens, les - même~ vues ne font point fuppofées dans un collacéral; il n'y a donc pas lieu à fon égard
de former les mêmes préfomptions: Auffi qu'on voie le-s
doél:rines & le~ préjugés que l'on a fur cette - mariere--; _on
trouvera que la quefiion de la fiduce n'a prefque jamais été
élevée que par rapport au ref!:ament d'un pere.
•
On difcuroit enlilire une troifieme propofition, conliftant à dire que la fubHiturion ordonnée en faveur des Dlles.
Pellicot n'était aurre chofe qu'une' fubHirurion fidéicommiffaire qui. ne pouvoit fe converrir en vulgaire. D'abord
il fufI-ït de lire
reflament d'J\ntoine Pellicor, afin de
reconnoltre que la fubf!:irurion qu'il ordonne en faveur de
fes nieces, ef!: réellement & purement fidéicommiffaire. A
la charge, y eH-il dir, d'en difPofer en faveur de tous les
enfants de feu Jean-Baptifle Pellicot. Ce font là précifémenc
les rermes qUI peuvent le mieux caraél:érifer le fidéicommis,
& ils reffemblent parfairement à la formule que nous donnenr les Loix: Rogo te, ut hœreditatem meam Caïo Seïo red.
das, refiituas. Le fidéicommis eH, ,fuivant la définirion qu!en
donnenr tous les Aureurs, une difpofilion qui fair paffer la
fucceffion, ou une panie, de la perfonne de l'héritier à
un aurre fucceffeur: Or, c'efi ce qu'operellr ces mors, il la
charge d'en difPofer. Il faur que l'héririer recueille, & enfuire
qu'il remette la fucceffion , qu'il en difpofe en faveu.r de la
perfonne que le reHareur a nommée.
La fubllitulion fidéicommiffaire eH, comme l'on vient de
dire, celle qui établir plulieurs poffeffeurs des mêmes biens
qui doivent. fi'cceffivement recueillir, en forre que le premier foir obligé de les remettre au fecond après en avoir
joui, le 'fecond au rroiueme, & ainli de f\lire. La vulgaire
-au conrraire eH célie qui appelle plufieurs héririers, - non
Années t782 & [uiv.
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26~
'OVaNAL
pas pour fe [uccéder mutuellement, mais pour recueillir aù
défaut les uns des autres, & immédiatement après la mort,
du tefiaceU1" : c'eft celle, en un mot, qui nous eH indiquée par cerre autre formule : Lucius-Titius hœres eJlo : fi
milzi Lucius,Titills hœres non erit, tune Seïus hœres milzi
eflo.
Il ell vrai qü'il ell poffible de les comprendre tou'tes les
deux dans la même difpolition, & c'ell ce qui forme alors
la fubllitution qu'on nomme compendieufe. L'on peur employer en effet telles cxpreffions qui'lignifient tout à la
fois, & que les héritier~ appellés recueilliront les uns après
les autres, & ,qu'ils recueilliront les uns au défaut des aUt res : fi hœres meus 'luandoeum'lue deeeffirit fine liberis, [ubftituo Titium. Mais quand le tellateur ne s'ef!: pas [ervi de
ces expreffions générales, tant qu'il n'a établi qu'une [ubfritution vulgaire ou fidéicommilfaire, il ef!: contre tous les
principes de [uppo[er que l'une _fait contenue dans l'autre.
Si Duperier a obfervé que la [ubllitution compendieu[e ell
la plus ulicée parmi nous, [a remarque ne lignifie point
qu'on doive la {ÏJppofer là où elle n'ef!: pas, & qu'il [oit
poffible d'imaginer qu'une [ubf!:itution évidemment & littéralement fidéicommilfaire contienne toutes les aurres. Il ef!:
donc ab[urde de prétendre que le' fidéicommis, tel que
celui qu'on trouve dans le tef!:ament d'Antoine Pellicot,
comprend la [ubllitution vulgaire.
Mais ce fidéicommis a-t-il pu changer de nature par le
prédécès de la DIle. la. Rue.? a-t-il acquis aux Dlles. Pellicot le' droit de recueillir l'héritage des mains même de
leur oncle, & de fe dire [es héritieres immédiates? Il [eroit
inutile de s'engager dans le long détail des di[politions des
Loix Romaines [ur ce fujet. Il [ullit de [avoir que comme
fuivant la nature du fidéicommis, le fidéicommilfaire doit
recevoir la fucceffion de la main de l'héritier, la Loi avoit
décidé que cet héritier ne recueillant point lui-même, [oit
parce qu'il étoir mort avant le tellateur, [oit parce qu'il
refufoit d'accepter l'hérédité, tOUt le droit du fidéicom-:
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PAL AIS
D E
PRO VEN C H.
2.67'
miJTaire s'évanouiRoir. Telle ell la décilioQ qui réfulte de
la Loi 13' §. 3,.ff. ad. Sen. Treh. de Dumoulin , conf.
~6, n. 8; de Cochin, tom. 1, Confult. 17, pag. 6Î~'
Quand un tell:areur a établi un fidéicommis, on peut
dire qu'il a voulu que le fubilicué recueillîr des mains de
l'héririer; il a fuppofé que cet héritier lui furvivroit, & il
a fait dépendre la fubll:irurion de cet événement. Par conféquent l'héririer l'a-t-il prédécédé? La condition n'a point
éré remplie, & ce feroir aller contre la volonté du reilareur que de faire' fublill:er en ce cas le fidéicommis. Mais
il n'en ell: pas tour-à-fait -de même lorfque l'héririer furvit,
& qu'il refufe feulement d'acceprer. L'on peut croire en
effet que le reilareur air' fubordonné fes difpolirio.ns aux
événemens de la nature; mais il n'eLl: pas vraifemblable de
même qu'il les ait livrées à la volomé arbitraire de fon
héritier: li donc dans un cas il" étoit rai(onnable de déclarer le fidéicommis anéanti, il paroiffoit l'êrre dans l'aurre
de donner quelque moyen de le faire fl,lblill:er. Voilà quels
font les vérirables principes de cette matiere , principes
qui ont été conll:amment reconnus & fuivis dans cerre Province, (uivant la répon(e dû Parlement à la queft. l'l.,
propo(ée par M. le Chancelier d'AglleJTeau, lorfqll'on travailloir à l'Ordonnance des fubfiicurions.
Quoiqu'en général, & fuivallt les principes que l'on vient
d'expofer, la caducité de l'infiiturion empone celle du fidéicommis; il peur arriver cependant qu'il 'fubGlte d'une aurre
mani~re. ·En effet, qu'un aurre héririer infiirué prenne la
place de celui qui eH prédécédé, foit en venu du droit
d'accroiffi ment, foit en venu des difpolirions du droit qui
déclarent l'héritier in re certâ héririer Gniverfel, la fucceffion ne paffe à cët a\ltre héritier qu'avec les charges réelles
qui y éroient arr3chéès. Telle eH 'enrr'autres la décilion du
§. 'f' de la Loi uni<]lle, Cod. de cod. toll. & de Ricard,
Traité des Dijpolitions conditionnelles, chap. 4, feél:. 2. F urgale dans fan Commenraire (ur l'Ordonnance des fiJbll:icu_
tions, tit.
art. 26, examine la quell:ion d'e favoir fi
l,
-
Mm'l.
�268
1 0 U R NiL
l'héritier in re certâ prenanc la place de l'héritier univerfel,
eH tenu d'acquitter les fubll:icutions donc celui-ci éwit
chargé, & il incline à pen fer que l'héritier in re certâ prend
la fuccelIion fans aucune charge; il appuye fon opinion
fur une multitude de raifons aflèz fol ides.
Quoiqu'il en foit" il y a un autre moyen par lequel le
fidéicommis- peut fubGHer malgré la caducité de l'inHicution;
c'eH celui de la claufe codicIllaire. Chacun connoÎt l'efFeç
qu'elle produit. Elle donne au tefl:ament où elle fe trouve
la nat~re & la validité d'un codicille, & entretient de cette
maniere les legs, les fubHitutions & les autres difpoGtions
particolieres. AinG un teHament ell:-il nul comme tel, ou
eH-il tombé' en caducité? La claufe 'codicillaire fera. que
celui' qui prendra la place de l'héritier inHitué, fera tenu
d'acquitter les charges, auxquelles cet héritier avoit été fournis. Il ell: vrai que quelques Ecrivains ont penfé que cela
ne devoit avoit lieu que par rapport aux legs & aux fIdéicommis particuliers, leur apparoiffant que de l'appliquer au
fidéicommis univerfel attaché à .l'infiitution, c'éroit la faire
revivre d'une part,' tandis que de l'autre elle éroit anéantie; mais enfin l'opinion contraire a prévalu, & il a paffé
en maxime que la claufe codicillaire entretenoit même le
fidéicommi,s univerfel. Telle ell: la Jurifprudence du Parlement de Provence, fuivant Boniface, rom. 2., liv. l , tir.
8, chap. l, n.
Duperier en . fes Maximes, pag. SIl,
& les Répo,nfes du Parlement aux queHions de M. le
Chancelier.
La claufe codicillaire n'appel1e perfonne; car certe c1aufe ne
peut par elle-même coorenir la vocation d'aucun héritier, voca[ion incompatible avec la nature d'un codicille. TOl)t ce
qu'elle opere, c'eH de faire fublill:er le fidéico-nmis, & d'obliger celui qui recueille la fuccelIion, quel qu'il foit, à l'exécuter. Que fi lorfque le tell:amenc ne peu.t exill:er comme
[el, mais feulement comme. codicille, les héritiers ah inteflat recueillent, ce n'ell point parce que la c1aufe codiciliaire les appelle, car ils ne recueilliroient pas moin.s
s;
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE;
269
quand elle n'y fercit pas; mais uniquement parce que la
Loi les nomme héritiers lorfqu'il n'yen a point d'autre.
Ainli cene c1aufe n'acquiert aucun droit aux fuccdfeurs légitimes; bien-loin delà, elle ne fert qu'à les grever; & il leur
feroit bien plus avantageux de ne la pOInt trouver dans le
teClamenr. Si en effet elle ne s'y renconrroit point, & que
d'ailleurs ils ne fuffent exclus par aucun autre héritier, ils
Ile lailTeroient pas, étant appellés par la Loi, de recueillir
_ la -fucceffion. Or, c'omme en ce cas le tefiament ne fubfiffant plus, pas même comnie codi~ille , tous les legs, fidéicommis & amres, difpolitions pareilles feroient anéanties, ils
fe trouvercient héritiers fans aucun~ charge. On peut ajouter
d'ailleurs que la c1aufe codicillaire demeure inutile, & n'dl:
point conlidérée tane que le tefiament fubliHe comme tel.
Or il fubliHe ainli, tant qu'il y a lin héritier teHamentaire
qui recueille, foit qu'il ait été univerfellement inHirué, foit,
que fon inflirution particuliere fe converrilTe en lIniverfelle.
C'eH pourquoi auffi l'on peut dire encore qu'en ce cas le fidéicommis el} moiqs entretenu par la c1aufe codicillaire que
par le principe que l'on a remarqué ci-delTus, & fuivant
lequel un héritier qui prend la place d'un a\ltre fuccede à
fes charges comme à [es avantages;
En effet, ,prenant la place de l'héritier univerfel, fuccédant à [es charges & à fes avantages, -il doit pouvoir exercer
les mêmes droits. Or, quèl étoit le drôit de l'héritie~ univerfel? Sans dome il avoit celui de retenir -la quarte trébellianique , & l'on n'imagine allcun prétexte fur lequel on
pût la lui refufer. D'ailleurs ce droit compere même aux
hériti'ers ah inteflat que la Loi appelle à défaut de tout autre,
& lorfque le fidéicommis efl: entretenu par la c1aufè codiciliaire. C'ell:-là une vérité conHante, pu ifqu'elle réfulte de
l'art. ~ 7 de l'Ordonnance de 173 ~ , c~ncernant les teHamens;
à plus forre raifon par conféquent doit·il compéter à un hé.
ririer appellé par le teHament même. Jean-BaptiCle Pellicot
eCl obligé de rendre, comme l'auroit été la DlIe. la ~ue
héritiere écrite. Or, comme celle-ci auroit été autorifée fans,
-•
�':1.10
Jou
Il N A L
contredit à retenir la quarte, il doit néce!fairement jouir du
même avaorage.
On répondoit pour les Dlles. Pellicot, que véritablement
le teftateur avoit appellé [a belle-fœur, mais à la charge de
difpofer en faveur des· filles de Con frere. Ce n'efl: pas [a
belle-Cœur; ce n'efl:· pas une étrangere qu'il inUitue fon héririere; ce n'ef!: pas à la Dlle. la Rue qu'illaiŒe fa fucceffion :
c'eU aux Dlles. Pellicot, c'eU à Ces nieces germainès , c'eU à
elles qu'aboutit [a difpofition: leur mere en appellée, mais ce
n'el!: que pour adminiUrer les biens. Son inftitution n'efl:
qu'un titre d'honneur, une fiduce j les filles auront plus de
reCpeél: pour leur mere, la mere aura plus de zele pour [es
filles: voilà l'expreffion du teflament; voilà l'intention du
tel!:ateur: in teJlamemis totum fadt voluntas teJlatoris. L. ~,
§. 1 ~ , de donat. inter vir. & uxor. L. 69, § 1 , ff. de legatis
30. L. 16 ,..ff. de cond. & demonJlr. Brillon, v·o..fidéicommis,
tom. 3, pag-. 291 & 293, n. 8; d'Antoine, regles du Droit,
·pag. 72,346 & 493 ; Decormis, rom. 2, col. '58,6; Guipape,
quo 469 & 499; Henris, rom. 3, liv. ~,chap. 3, quef!:. 1'4.
Sanleger, réfol. ciw, tom.~ l , cap. 77, n. 4Qu'en-ce en effet que la fiduce? C'ef!: une invention honorable & utile; c'en Une inll:.itlltion qui' a pour baCe la confiance du tef!:ateur aux Centimens de l'hétitier fiduciaire;
elle fait l'éloge au te{J:ateur & du confideotiaire; mais elle
n'ef!: que pour l'avantage du véritable héritier. La fiduce e{J:
plutôt un honneur qu'un ~roit acquis, une CuCpenfion qu'une
mutation, & une inf!:itution fiduciaire plutôt qu'une inf!:itution véritable. C'en plUlôt un dépôt honoraire & fiduciaire,
qu'un vrai avantag'e; c'ef!: une commiffion d'aàminif!:ration.
Tel eH le langage des. Auteurs. ( Henris, tom. l , Iiv-. 3,
chap. 3 , quefl:. 22, pag. 73 6 , rom. 3, pag. 71; Fdnranella, ,
de pac1is lIupt., ctaur. ~, glof. 8, parr. 4, n., 77, parr. ~,
n. 83 ; Cancerius, var. refol.; parr. l , n. 210; SI. Jean, déciJ.'_
90, n. 6; Be[peiŒes, pag: 39.1; Decormis, rom. 1, col.
1637; Julien, fur les Statuts,- tom. l , pag. 388, n. 20;
le Cardinal de Luca, diCc. 33., n. 3; Montvallon ,. tom.
pag. 24 2 • )
l,
�DU
PALAIS
DI!
PROVENCE.
271
En léguant la fomme de 1000 liv. à fon neveu, Antoine
Pellicot ordonne qu'elles ne lui feront payées que lors de
fa majorité; il fe méfie de fan bas âge, il étoit pupille. S'il
prend des précautions pour conferver à fon neveu le modique legs de 1000 liv., il ell fenfihle qu'il a dlÎ en prendre
pour conferver fa fucceffion entiere' à fes nieces; c'ell-là
l'unique motif de la vocation de la Dlle. la Rue.
Les Aureurs ont varié fur les' caraél:eres de la fiduce; les
'\lns en ont marqué deux, les aurres trois, & d'aurres quarre;
mais aucun n'en a exigé le concours. Peregrinus, de fideicommiJfzs, tom. l , arr. 3, n. 19, pag. 33, qui a le mieux
approfondi cerre mariere, s'exprime ainli: 1°. c;uod fideicommijfàrius fit de liheris teJlatoris i 2.°. c;uod agatur de hœreditate
non de particulari re/ic7o i 3°. c;uod hœres fcriplus fit amicus
te.flatoris, de c;uo fiduciam hahuerit; 4°. c;uod conditio fideicommijfàrii prœhuerit caufam dilationis, c;uia impuhes vel aliter
malè difPrfitus. En difcurant le cas d'une fiduce faire par un
fils narurel en faveur de fon pere, le C~rdinal de Luca, de.
te.flamentis, dife. 79, n. '3, décide qu'.iln'elt pas néce1faire
qu'il s'agi1fe d'un defcendant & de toure l'hérédité. Brillon,
vO.fidéicommis, n. 7. pag. 292; Decormis, tom. l , col. 16S 1;
Boniface, rom. s, li\'. 2, tir. 4, chàp. 2., pag. 244, n'exigent
point cette circonll:ance; ils reconnoi1fent -qu'elle eft indif.
férente. Mr. de Monrvallon, rom. l , chap. 3 ,ar·r. 'i 2, pag.
244, décide que la fiduce fe connoît, fur-rout quand une
pareille. inllirution el! faire pour conferver l'hoirie ~ un
enfant, à un pupille, ou à celui qui ell en bas âge•.
_ Quelques Aureurs ODt regardé la reHirurion de l'héritage
à un terme cerrain, comme une marque de la fiduce; mais
ils n'ont pas décidé qu'il ne pÎlt y avoir de fiduce fans cette
circonftance. La Loi Seïus Saturninus 46, if. ad Sen. Conf. _ tre~ell. & la Loi' in fideicommiffis 3, §. cùm pollidius 3, if.
- de ufuris, foDt dans un cas femblable; mais il n'efr point
dit dans ces Loix que cerre circonfrance foit néce1faire pour
former la fiduce, & l'infriturion peut être fiduciaire, quoique
le t.eHateur n'ait point mis de terme fixe pour la refritutioO,
/
•
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'l.7'L
Jou
RNA L U .
de l'hérédité, fi les autres traits de la fiduce fe trouvent
dans la difpofition. C'ef!: l'obfervation que fait le nouveau
Commentateur des Statuts, rom. l , pag. 388, n. 22 ; il
l'appuye de l'Arrêt du mois de Juin' '1742, rendu au rapport
de Mr. de Faucon, 'l.ui jugea que la fœu.r d'Antoine Philibert de Marfeille, qu'il avoit infiituée pour en jouir, ufer ,
difpofer à toutes fes volontés, n'éroit qu'une héritiere fiduciaire; il en rapporte un autre du 22 Juin 17,4, qui jugea
.
la même chofe.
Jean-Bapt;iUe.Pellicot prétend que.le tel1:ament d'Antoine
renfermoit en faveur de fes nieces un fidéicommis conditionnel qui s'el1: évanoui par le décès de la DlIe. la Rue,
de~ ma.ins de laquelle feule elles pouvoient rece~oir la fuc"
èeffion; & delà il réclame toute la fucceffion comme héritier unique & univerfel. Qu'dt-ce qu'une fubUitution? Une
feconde inHitution, la fubrogation d'une perfonne à l'autre.
C'eU dans ces matieres fur-tout qu'on écarte les fubtilités
du droit, poür s'e~ tenil' à la volonté du tel1:ateur. L. 16,
cod. de fideicommiflis. Le prédécès de l'héritier n'ébranle pas
plus le fidéicommis que fa négligence; le fidéicommis, comme
la fubilirution pupillaire, comprend la vulgaire; il - eil de
l'équité de confondre l'une & l'antre. C'eil fur-tout en Provence où la fubHitution compendieufe eil prefque la {eule
en ufage, fuivant Duperier, Maximes de Droit, liv. " pag.
) S6, que cette extenlion doit être admire. Le fidéicommiffaire, comme tout autre fubfiitué, fuccede au teUateur per
fideicommiflùm, comme difent les Auteurs, en conformité
des Loix: fucceditur teflatori flan Izœredi.
Delà vient que fi le pere fubilitue fes enfans à un étranger, fes biens· leur foot propres, & ils ne doivent àucuns
droits feigneuriaux. En effet, peur-on penfer que le teilateur qui a évidemment prouvé, en faifant un fidéicommis,
la préférence qu'il donnoit aux fU.bfiitués fur les héritiers ab
inteJlat, ait \'oulu néanmoins que le~ héritiers ab inteflat l'emportaffent fur le fubilirué, dans le cas où le grevé viendroit
à. le prédécédc::d La volonté du teilateur ne dépend pas plus
du
�DU
PALAIS
DB
PROVENCE.
273
du prédécès du grevé que de fon caprice. Si la 'Loi forçoit
le grevé à accepter l'hérédité, pour ne pas frufl:er le
fidéicommiifaire de fes droits, il efl: certain qu'en abrogeant
la formalité de l'aditiofi parmi nous, où le mort faiat le
vif, il eff conféquent à nos principes & à la raifon que le
prédécès du grevé ne nuife pas au fuhflitué. Telle efl: la Jurifprudence du Parlement de Touloufe, parfaitement conforme à l'intention du tellateur. La réponfe que fit le Parlement de Provence aux quefl:ions propofées par M. le Chan~
celier furl'art.. I2. de l'Ordonnance de 1747 ,.,fut fondée fur
ce que le fidéicommiifaire doit n.éceifairement recevoir des.
mains de l'inflitué. C'efl, d'après la Loi Romaine qui exi.
geoit l'adition que le Parlement parloit; mais fuivant notre
Droit, l'adition n'étant plus néceifaire, l'infl:irué ne pouvant p1us être forcé à accepter, il efl: certain que fon refus.
d'accepter, fa répudiaI ion ne feroit point crouler le fidéicommis; Comment [011 prédécès pourroit-il donc opérer
çè~' effet?
'
- Quoique Jean-Baptiile Pellicot ait été infl:itué· par le tef.
tateur, il ne doit pas moins être regardé comme un légataire: inflitutus in re certâ habetur loco legatarii, difent les
'/\uteurs..On ne peut regarder comme héritier que celui qui
[uccede in univerfum jllS, parce que l'hérédité efl fuccceffia·
in' univerfum jus. . L'inflitué in re certâ ne peut devenir hé- \
citier qu'autant que fon infl:iluti.on eH néceifaire, qu'elle
porte fur une quotité de la fuëceŒon; ou qu'il n'y a point
d'héritier univerfel dans le tefl:ament. Hors de ces cas,- il
n'el!: pas poŒble de lui faire reçueilli~ l'entiere [ucceŒon.
L'infl:irution n'el!: néceifaire que pour ceux qui ont droit de
légi.time, fuivant Duperier, liv. S,de l'inflitutioll tejlament.)
pag. S44; Decormis, tom. 2. , col. 487; Boniface, rom. 2.,
I liv. l , tit. 8, chap. 3, pag. 32.. Quoique particuliere, L'inf.
titll[ion peut alor~ devenir générale, parce que 'la légitime el!:.
quota pars hO/larum; alors l'inl!:itué efl: confidéré comme un
cohéritier, & l'accroiifement a lieu. Il fuit de là que fi l'inf.
titué in re certâ n'el!: pas un légitimaire, il ne devieot pas;
héritier univerfel.
Années.z 782. & fuiv.
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L'inllitu ill re certa peut encore eveOlr lerlrJer UnJverfel, nullo .olio hœrede dato. N'y a-t-il point d'héririe-i
univerfel appellé dans le teflament, le tefiateur eil cenfé
avoir voulu que celui qu'il a infiitué in re certâ le fûr. Y
a-t-il un héritier univedèl dans le reilament, le tel!:ateulf
el!: cenfé n'avoir pas voulu que l~héritier particulier le f6r.
Les textes du droit, qui font de l'héritier particulier un héritier univerfel, font tous dans le cas où il érait feul inf~
tirué. ( L. qui teJlatuF l , §. 4,.If. de hœred. inflitut. L. quoties
9' §·.fi duo i 3"ff. eod., & la Loi œquiflimum 2., §. pr()l
'luâ,.If. de Donorum poj[.;- Faber, rom. 1, décad. 15, errol'
5, pag. 197, error la, pag. 205 ill cod. lib. 6, tir. )','
déf. 1, pag. 586,1 C'el!: fur ces principes qu'intervint l'A'rrêt
du 3 Juin 1739, rapporté par Mr. de R.eguffe, tom. 2,
quel!:. 24 , pag. 44, ( Mr. de Monrvallon, tom. l , chap. 5 ,
art. 24, pag. 445. )
Tout concourt à écarter Jean-Bapriile Pellicot, la' vocation de la Dlle. la Rue, celle de fes coulines, fa qualité;
il n'eil que légataire; (es coufines font les vraies hériti'eres
inl!:iruées & fubilimées, ce qui exclut le lieur Fouque comme
Je lieur Pellicot: li le lieur Pellicot n'efi pas héritier. univerfel, il n'a pas plus de droit à la quarte qu'à la fucceffion
entiere.
.
\ , ~,I
Arrêt du 9 Juillet 1783, ali rapport de Mr. le Confeiller
de Beauval, qui confirme J.:jCSenrence arbitrale pour le fur~
·plus, avec dépens. Ecrivane~Mes. Jacob & Pellicoc-Seillans•
•
�DU
PAL AIS
ARRÊT
D B
PRO VEN C E.
27)
XXXIII.
Le
tireur d'une lettre de change 'lui n'a point fait les fonds.
eft tenu pendant trente ans de la garantir ,.
quoique le porteur n'ait pas fait [es diligences dans I.e temps'
de droit, t;. qu'il n'ait point rempli les formalitéS prefcrites
par l'Ordonnance du Comrrzerce ,pour avoir fan recours contre.
le tireur; la reconnoiJfànc.e d'une dette, çOf/tenue dans une.'
lettre empêche la prefcription.
a l'écheance,
E
N l'année 17)9 Me. Colas de Nit!y e!!lprunta du fieur
.
Dage-t à Marfeille la fomme de 4060 liv. pour former.
une pacotille qui pût le metrre à même de faire quelque.
chofe dans les ifles.
'Ce prêt fut fait fans -intérêt quelconque. Le fieur--Co!as
promit de faire p.ayer les 4000 liv. par Jacques fan ~rere."
habitant à la Martinique; & il'. tira fllr lui par pre!l1lere ,.
feconde, troifieme & quatrieme, une lettre de change de:
.
600,0 liv. argent d'Amérique, dont voici la teneur:
" Premiere; Marfeille le 1 OCtobre 17)9. Bon pour 600o.jiv•.
'MONSIEUR,
" Par cette premiere de change, il vous pJaira payer à
" l'ordre de Mr. Charles .Ardoin Daget la fomme de fix::
" mille livres, argent de l'Amérique, valeur re~ue corn ptant
" dudit fieur, & que pafferez fans aurre avis de votre rrès~
" humble fervireut. Signé, COLAS DE NITRY. "Er DU dos eH::
écrir, " .à Monfieur, Monfieur Colas, habitant .au Vauclain ,>
" Hle.Martinique. "
Le fieur Côlas s'embarqua avec ·le.Capiraine Ifnard, ami,
du Jieur Daget; celui-ci chargea le Capiraine du recouvremem de b lenre de change, & lui remit la premiere , dont,'
il lui paffa l'ordre le même lour, valeur en compte; il garda;
entre fes mains les trois autres qui ne [ont i;tmais {orties de [onl
porte-feuille.
. ~ n 2"
•
�\
176
Jou
RNA L
Arrivé 11 la Martinique le Capiraine rfnard préfente ra:
lettre; le fleur Jacques Colas n'avoit aucun fonds & ne devoir rien à fon frere; il refufe de l'acquitter; elle efi proteltée.
'
Le Capitaine fe, borne à charger Me. Pierrhugues, Procureur à Saint-Pier're, de veiller à l'acquittemenc de cene
lenre de change qu'il lui remit avec le protêr.
Depuis ce temps aucunes nouvelles du débiteur originaire;
il, quitte la Martinique, palfe à la Grenade, & court fucceffivement dans les HIes fans fe fixer nulle part.
I! repalfe en France, & en l'année 177S on le rencontre
à Paris au Jardin du Roi. I! prom~t au fléur Daget de lui
compter le lendemain sooo liv. & part dans la nuit.
Le lieur Daget n'av oit point alors la lettre de change
qu'il avoit remife au Capitaine Ifnard ; elle étoit refiée entre
les mains du lieur Pierthugues, Procureur à la Martinique;
il fallut même du temps, pour la recouvrer.
.
On écrit à, ce Procureur pour avoir la lettre & le protêt.
, On parvient .enfin ,dans le courant de l'année 177) à fe faire'
cemenre la lenre de change; mais le protêt ne fe trouva
pas.
Me. Pierrhugues,' qui déclara judiciàirement que cette
lettre lui avoit été remift< par le Capitaine Ifnard, ajouta à
celte déclaration, que le protêt 'lui en avait été fait & 'lui lui
avait été également remis, s'était perdu ou égaré foit lors de
l'ouragan, foit lors de l'incendie arrivée a la Martinique. '
Porreur enfin de cet effet, le lieur Daget s'adrelfe à "fon
débiteur qui lui écrit le 27 Novembre 1776, & invoque
contre lui les d'ifpolitions de l'Ordonnance; mais il ajoute
queji réellement la lettre n'a pas été payée par fon frere, ce
'lu'il va faire vérifier, il dl trop honnête homme pour exciper
de la négligence du porteur, G' qu'il payera.
I! ne fllt pas poffible au lieur Daget de /l,ivre le lieur
Colas; il mourut à la Martinique en Décembre 1777.
Examen fait des' papiers du feu fleur Daget , on trouva les
quatre leteres de change, deux leteres du Capitaine' Ifnard )
,
�P
P
'1.77
& enfin la lettre du 27 Novembre 1776; & la veuve, àprès.
s'être confultée , crut, d'après la lettre du lieur Colas, qu'il
ne s'agiJfoit que de lui repréfenter les quatre lettres de change
pour obtenir le paiement de cette créance: mais ce paiement
fut refufé.
Me. Duplanier, qui croyoit que le lieur Colas, éloigné
de trois lieues d'Auxerre, écoit domicilié dans ce Bailliage,
fit affigner le lieur Colas devant les Confuls d'Auxerre eq
17 80 . Moyens déclinatoires propofés par ce dernier; Sentence
qui l'en déboute; appel au Parlement de Paris; Arrêt qui
infirme & , renvoie les parties pardevant les Juges qui doivent
en connorrre.
Affigné de nouveau le 2 Novembre 1781 pardevane les
Juges-Confuls de Marfeille, lieu où la lettre avoit été faite,
le lieur Colas propofe encore des moyens déclinacoires,
tendans à le faire ren'voyer dev,ant fon Juge naturel, & des
fins de non - recevoir fondées fur le laps du temps & fur la
prefcription.
On lui répond que d'après l'art. 17 du tit. 12 de l'Or_
donnance de 1673 dans les Matieres Confulaires, le créancier
peut faire donner l'affignation à fon choix, ou alf lieu du
domicile du débiteur, ou au lieu auquel le paiemen_t doit êtri:
fait; & qu'à l'égard des fins de non-recevoir, il Y a renoncé
par fa lettre du 27 Novembre 1776.
Sur ces défenfes refpeél:ives les Juges-Confuls de Marfeille
rendent Sentence le 30 Avril 1782, par laquelle ils déboutent
le lieur Colas de Nitry & de fes moyens de forme, & de fes
moyens au fonds; & cette Sentence n'ell: rendue que d'après
la déclaration que Me. Colas a faite par fi! lettre qui ell: vifée
dans le difpofitif. Il ell: eJfentiel d'en rapporter la teneur:
" Vu les pieces, &c. & notamment une lettre écrite par
" le jieur Colas de Nitry au jieur Daget du 2.7 Novembre
" 1776........ après avoir entendu les parties, ordonnons que
" le lieur Colas de Nitry jull:ifiera dans un an précifément,
" que la lettre de change dont s'agit a été a~quittée, autre,
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li. 0 V Il N é ll'.
.
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lo~a~At
," m'ent qu'il fera'contraint mêtr.e "par cOlIPs, dès maintenant
" comme pour Idrs, pour ~Ie paiement ,de la fomme de
"
6000 liv. argent des HIes, enfemble pour les intérêts &
" dépens.~,
Me. Colas appeJ1a de cette Sentence au Parlement, tant
comme de Juge incompétent qu'autrement.
'C'eH dans cet érat que les parties filr l'appel limple furent
appointées. & renvoyées à l'Audience fur l'incompétence.
Me. Colas prit condamnation enfuite par un Arrêt d'expédient fur les moyens de forme, & la Sentence fut confirmée fur ,le chef de la prérendue incompérence, avec
dépens.
Mais il fit valoir plufieurs exceprions filr le fonds, qui fe
réduifirent à des fins de non-recevoir. Il fomenoir pardevant
la Cour: 1°. que la Dame Daget n'avait point de tirre pour
demander le paiement de. la lettre de change, parce que
l'ordre 'fXIlfé au lieur Ifnard avait delfaili le lieur Daget de
la propriété; 2.0. parce que la ~ettre de change n'avait pointété prote fiée , & que rien ne peut fuppléer au protêr; 3°. en
fuppofant qu'elle l'eût été, ce protêt n'avait point éré dénoncé à h Darne Simon Duplanier: elle avait perdu canféquemmeor lOut (on recours contre le tireur; 4°. enfin, Ion
aél:ion n'avoir que cinq ans dé vie, fuivaor l'Ordonnance, &
('ell: après vingt:un anS' qu'elle l'exerçoir.
La preuve de la premiere propofition élOit tirée d'un
commentaire que l'on faifoit fur 'différens articles de J'Ordonnance de. 1673, pour favoir li l'ordre palfé par le lieur
Daget -élOit ou n'était pas tran!latif de propriété; on puifoit
lés autres fins de non-recevoir -da.ns les articles 4, la, 13,
15 & 2.1: (lu rir. 5 de l'Ordonnance de 1673.
La 'Darne Simon Duplanier répondait fur le premier
moyen.
Le Capit31ne 'Ifnard étoit' porreur d'un orore valeur en
compte, c~efi-à-dire, qu'il n'avoit-poior fourni de valeur au
lieur Daget, auquel il devoir comprer du produit de la lettre
de change. Le-Capicaine n'était donc qu'un fimple manda-
•
�DU
PALAIS· DIl
PWOVIlNC2.
2.79
taire; s'il rece~qit,,~ le fieur Dagt:t avait une aél:ion contre
lui pour lui faire rendre compte! s'il ne recevait pas, il ell
-écoit quitte pour en 'juHifie,r, & ce.tte jufiitication fe faifoit
par la feule remife de l'effet non acquitté.
.
; L<l Lettre de changt; ,rendue au fieur Daget, fan aRion.
contre le Cap.itaine -a ~~!1ç été épui(ée ou ét~iqt~" !Sc il ~
eu inconflablemenr le dro.it·de fe pourvoir contre (on débiteu,.
Le.~ trois autres fins de non-recevoir s'écarlent" difoit-on ~
.par un feul mot,
.
.
D'abord la lettre de change. a été prorellée; c'ef!: un fait
·démontré par la déclaration de Me. Pierrhugl;les, Procureur ~
faite b 4 Novembre 1775 au Greffe de la Jurjfd-iél:ipn-[oyaJe
du Bourg St.. Pierre, &. p.ar deux lettres du Capitaine 1[pard. Ces pieces ne (ont point préfentées. comme devant
fuppléer le protêt: nous connoilfons alfez la loi, pour favoir
qu'un protêt ne peut êJ:re fuppléé par aucun aél:~; mais not<s
favons, al!ffi que fan exif!:en!=e peut. ~tre prouvée J. Rarce que
fexif!:e.nce d'ull aél:e ef!: un fait dont )a P.f~uve ef!: adn;Jife
pans 1 tous les Tribunaux, fur-tquc IQrfqu.e., co~me dans
l'e(pece, le propriétaire en a été privé par une force majeure.
Le protêt n'a point été dénoncé a\l tireur ~ ceM e!} ~oi1f
tant,
, , &. cçtte fin d~ nOA-recevoir n'en' ,el;! .pa,s moiqs, chim~rtque.
....
"'. ~.If1
,~
,
j En effet ,. il ef!: pe Principe certain, invariab~e, ç:anfaçré pa,r
Fufage , par 1'0rdonnance & 'par la Jurifpru,dence uoiverfeHe
de tous les Parlemens, que le tireur ef!: perpémëHemel\t
obligé, & qu'il ne peut ~p,pofer le défaut ,de dilig~nce,
qu'a,utan.t qu'il prouvera q\l'il y avait prolli(io.n th l'inJlant de la
p,éfèntation. Sans cette preuve il eft tenu de garantie 1 &,il
ef!: obligé de payer lorfqu'on lui repréfente la lettre; il ,n'a
d'autre ~xception da,ns ce ,cas que celle du paiement qu'il
doit prouver, non pas ave.c des préfomptions, mais ave.c uoe
quittance.
,
" L.es tireurs ou endolfeurs des lettres, parce l'arr. 16
n. du rir. 5 , feront renus de prouver, e.n cas·de dénégation)
n que ceux fur q\li. eJles étaient tirée~ leur étaient redevables 1
�'2.80
J
0
V RNA 'L
'
"
OU avoient provifion au temps qu'elles ont dû être proteflées,
" finon ils feront tenus de les garantir.
" Lor[qu'un enaolfeur ( dit Dupuy de la Serre dans [on
" excellent Traité des lettres de change, ch. 14, n. 38).
" pour[uivi en garantie oppo[e la fin de non recevoir, il
" faut qu'il paroilfe ou qu'il a donné la valeur de la lettre
" de change, ou qu'il fut créancier de [on auteur; & lor[" que le tireur veut oppo[er la fin de non recevoir, il faut
" qu'il prouve que celui [ur qui la lettre d~ change éroit
" tirée lui devoit, ou qu'il en avait la provifion; c'efr la
" di[pofition de l'art. 16 du tir. S de l'Edit du Commerce;
" & cela efr conforme à l'équité, parce que fi l'on n'avoit
" pas donné la valeur de la lettre de change, on n'était
" pas créancier de [on auteur.; & fi l'autre (qui efr le
.. tireur) n'avoit pas envoyé la provifion, ou n',émit pas
" créancier de celui qui' devoit' payer la lettre de change,
" ils [eroient tous deux aUX mêmes termès de ceux qui
" vendent ce qui ne leur appartient· pas, ou qui cedent ce
" 'lui ·ne leur efl pas dû; ce. qui e[t un dol & une mauvai[e
" foi contre laquelle il ne [eroit pas ju[re d'admetcre une
" fin de non recevoir. "
- Et à la fin :du chapirre. il ajoute cette- maxime: " Les
" epdoffeurs & les ti,reurs qui prétenden~ êere déchargé,s'
., de la garantie par la fin de non recevoir, faute de di" ligence dans le temps, doivent juHifier les 'uns d'avoir
" donné la valeur de la lettre de change, les autres que
" l'acceptant de voit .ou avoit provifion. "
Tous les Auteurs tiennent le même ·Iangage; on peut
confuIter Savari, rom. 2, pag. 34.4; Toubeau, ·rom. 2,
pag. 242; Lacombe, mat. civ. aux mots leures de change
garanties ; l'Auteur du Répertoire de Jurifprudence; Brillon
fous ces mots, & Pothier , du contrat de change, part.
ch. )' n. 6.
Les Commentateurs' de l'Ordonnance, Joulfe,- Bornier
Ont rendu hommage à cette maxime, qui a été Gonfacrée
par les Arrêts des différens Parlemens•. L'Auteur du Journal
l,
du
�rru
PAtAIS
Dl!
PROVBNCE.
281
'du Palais en rapporre un du 12 Aoûr 1681, rom. 2, pag.
243. Savari., rom. l , pag. 232, en rapporte un autre du
Parieme[Jt de Paris du 22 Juin 1707. On en rrouve auffi
• dans Augeard & dans Denifart au mot lettre de change.
Enfin le Parlement de cerre Province a adopté cerre
Jurifprudence, & la quefiion a été jugée conformément à
ces principes par Arrêt du 18 Mai 17')8, au rapporr de
Mr. le Confeiller de Mons, en faveur des fleurs Jofeph &
George Audihert, Négocians de la villé de Marfeille, contre
le fleurs Gautier & Compagnie. Cet Arrêt confirma la Sentence des Juges-Confuls de Marfeille du 2.1 Novembre 17')7,
par laquelle les fleurs Gautier & Compagnie avoient été
condamnés à garantir es ,fieurs Audiberr d'une lettre de
change de 9')3 liv. , quoiqu'elle n'eùt pas éré proreO:ée dans
les délais de l'Ordonnance, parce que les fonds n'en avoienr
pas éré faits par les rireurs. Autre Arr~r du même Parle.,
menr , fondé fur le même motif, rapporté dans le Journal
du Palais de Provence de l'année 1781, pag. I07.
Or dans le fair particulier de la caufe , Me. Colas n'a
jamais ju!l:ifié que fon frere lui dût un fol à Pépoque de
i7'l9 ou 1760, remps auquel la lettre lui a' éré préCenrée
& 'prote fiée ; & il efi conHant que le frere de Me. Colas,
n'avoit recru de lui aucune provifion: il ne peut donc pas
fe prévaloir aujourdJhui du défaut de dénonciation du protêt,
ni d'aucun défaut de diligences, parce qu'il n'a pas fait les
fonds de fa lettre.
A l'égard de la fin de non recevoir ou de la, prefcriptian tirée du laps de cinq' ans, on foutenoit qu'elle ne
pouvait être oppofée, ID. parce qu'il y avoit eu r~con·
noi'1Tance de la dette d'après la lerrre de l'Adverfaire du
27 Novembre 1776, & qu'en point de droir la moindre
recoonoi1Tance de la dette empêche la prefniption: agnilione dehiti tollitur prœfcriptio.
" lJ ne lerrre, dit Dunod dans fon Traité des Prefcripr.
parr. 2, ch. 7, pag.· 17 1 ,," par' laquelle le débirel.!! avoue" roit la dette, promettroit de payer, ou demanderoi~ dUl
Années l78~ & fuiv.
0 0
-
1
�2.9"
J0
t1 R. N A L
delai, aurait le même effet que la re9uifition par ~èrit:
parce qu'elle fuppoleroit & pr,quveroit une diligence de la
part du créancier; il en fel'Oit de même de tout aéle
par lequel on auroit reconnu ou fuppofé la dette; c'elt
auffi l'avis de Me. Julien dans fon Commenraire fur les
Sratuts ùe Provence, tom. 2, pag. S8s, n. 17, de Lacombe, mat. civ. au mot interruption , & de touS les
Auteurs. "
Or depuis le 27 Novembre 1776, époque de la lettre'
du lieur Colas de Nitry jufqu'au 2 Novembre 178 1, époqLle de l'affignation donnée pardevanr les, Juges-Confuls de
Marfeille, il ne s'elt pas écoulé cinq ans : donc point de
prefcription.
'
2°. Parce qu'il y a eu promelfe de payer. " Cependant
" mon intention ne feroit pas d'abufer de la négligence
" de celui à qui vous auriez tranfporté la lettre....... Je fuis
.. trop honnête homme pour cela ....... alors je prendrai des
.. arrangemens pour la payer. " Rien de plus précis.
3°. Parce que l'Ordonnance a moins établi par l'art. 21
une prefcription qu'une préfomption de paiemenr. Seront
réputées aC'luittl?es ne dit pas qu'elles feront acquittées de
droit; c'en: moins une certitude que la Loi donne, qu'une
préfomption de paiement qu'elle fuppofe , & cette préfomption 'celfe toutes les fois que, comme dans le cas préfent;
on repréfente le titre non acquitté; c'elt le fenrimenr de'
Joulfe fur l'art. 21.
4°. Enfin parce que pour pouvoir oppofer avec fuccès
cene fin de non recevoir, il faut être en état d'affirmer
que la lenre a été payée; cette exception fe trouve dans
la Loi même; néanmoins les prétendus déhiteurs feront tenus
d'affirmer, s'ils en font re'luis , 'lu'ils ne font plus redevaMes,
& leurs veuves, héritiers ou ayans-caufe 'lu'ils eJliment de
honne foi 'la'il n'eJl plus rien diJ..
C'ell: auffi l'avis de Me. Pothier, du contrat de ch.ange,
part. 1, ch. 6, p. 179 de l'in-4°.; de Maynard, liv. 6,
ch. 8; de Catelan, liv. 7, ch. 26; de Serres & Boutaric
fur les inHit. ,
..
"
..
..
"
"
"
"
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PAL AIS
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PRO V Il:li' C H.
'183
Or, Me. Colas n'a jamais ofé affirmer que la lettre eût
été payée o~ par lui, ou par fan frere, ni qu'il en dit rem is
les fonds.
Le défenfeur de la Dame Simon ajoutait pour derniere
répon.fe : il en ell: des fins de non-recevoir comme des
moyens de nullité; les uns comme les autres fe couvrent
par le fait des Parties; 11 je fuis porteur d'un billet prefcrit, & que le débiteur promette cependant de s'acquitter,
il ne peut plus oppofer la fin de non-recevoir réfultante des
laps du temps; ce Brincipe eH invariable, il efl: de tous les
temps & de cous les Tribunaux.
Le fleur Daget écrit au fleur Colas en 1776; il lui demande fan paiement: celui-ci répond, 1°. qu'il avait toujours préfùmé que cette lettre de change avait été acquittée, qu'il le croyoit d'autant mieux, qu'ayant vu le Capitaine pendant plus deux ans, il ne lui avait fait aucune demande; 2.°. qu'en fuppo(ant le non-paiement, il ne pourroit
l'attribuer qu'à une négligence impardonnable; 3°. que ces
fortes d'effet doivent être prote fiés & le protêt dénoncé
au tireur; 4°. que fi le porteur de la lettre n'ellt pas été
payé, il fe ferait mis en regle; So. que fi on vouloit prendre contre lui quelques voies chagrinantes, il s'infcriroit en
faux contre les aél:es qu'on auroit pu faire après coup: voilà
~out le Jyfl:ême du fleur Colas, qu'il a développé par écrit.
Il ajoute........ " cependant mon intention ne feroie point
" d'ahufer de la negligence qu'auroit eue celui à qui vous
" l'auriez tran(poreée, fi effeél:ivemenr elle n'avait point été
" payée, ce qu'on ne pourra vérifier qu'en revifant les
" comptes de mon frere avec fan commiffionnaire, com" me je vous l'ai déja dit; ce que je vais faire faire fans
" délai. "
Remarquons, continuait le défenfeur de la Dame Simon, que le fieur Colas ne prétend pàs que pour qu'il fait
affuré du paiement, il faut qu'on lui produife un protêt.
Il ne prétend pas non plus qu'il y a eu fix lettres de
change, comme i~ l'avance aujourd'hui; il ne veut que s'af0 a 2.
�1.84
Jou R N' A L
Curer d'un fait qu'il révoque en doute, & qu'il ne peut véri'"
fier qu'en revilant les comptes de fon frere. Ainli, que le
fieur Lfnard fût ou n~ fût pas porteur d'un protêt, 1e lieur
Colas n'en croyait pas davantage que la lettre de change
n'eût pas été acquittée; mais trop honnête homme pour:
ne pas payer, il déclare qu'il ne veut point fe prévaloir de"
la négligence, & que dès qu'il aura vérifié, il entrera en paiement. Ell-il poffible qu'après une pareille reconnoiffance on
aie ofé mettre en ligne de compte des fins de non-recevoir
réfultantes ete la négligencè, du porteur? Et fi on admettoit un femblable moyen, ne ferait-ce pas juger contre le
texte même de la Loi, qui rejette les fins de non-recevoir
dès qu'elles font couvertes par le fait de celui qui les'
oppofe?
. .
Arrêt au rapport de Mr. le Confeiller de Bàllon du 12
Juillet 1783, qui confirme la Sentence des Juges-Confuls
• de Marfeille, & condamne Me. Colas, de Nitry au plliement de la lettre de change par lui tirée en 17')9, avec
il)térêts, dépens & contrainte par corps. Ecrivant Mes. Silvy
& Perrin.
Me. Colas fe pourvùt au Co~feil en caffation de cet
Arrêt; l'on demanda les motifs; & d'après l'envoi des motifs & de la lettre de 1776 qu'on avoit diffimulée, il Y
eut Arrêt du Confeil au mois de Décembre 1784, qui
débouta le demandeur de tous fes moyens de caffation.
Cet Arrêt juge bien précifément, 1°. que le tireur d'une
lettre de change qui n'a point fait les fonds à l'échéance,.
el1: tenu de la garantir pendant trente ans; 2°. que la recon-'
n'oiŒ1nce de la dette contenue même dans une lettre, empê~
che la prefcription.
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P Il. 0 V Il NeIl;
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1."9)
.,
X X XIV.
La donation faite dans un contrat de mariage, même par
un collatéral, aux enfants
naître de ce mariage, efl
foumife cl l'hypotheque de la dot conflituée dans le même
contrat.
Un capital formé des deniers de la dot, & enfuite déna.
turé , èfl-il fu6fidiairement 'dotal?
Le créancier de l'héritier peut-il, dans une inflance bénéficiaire,
demander la réparation des hoiries, après avoir pourfuivi en
concours l'inftance, & laijJè rendre une Sentence de rangement?
a
Ar le contrat de mariage de Mre. Charles de Saurin,
& DlIe. Elifabeth de Thezan de Poujols, du 8 Mars
1712, l'époufe fe conll:icua en dot tous fes biens préfencs
& avenir, & Mre. Pierre de Saurin, frere de l'époux, fit
donation aux enfants qui naîtraient de ce mariage, de la
moitié de taus fes biens préfents & avenir, fous la réferve
·de l'l joui1Tance fa vie durant. Par une tranfaél:ion du 29
Mars 17[9, la dot de cette Dame fut fixée à '')0000 liv.;
& il confiait par une quittance publique du 30 Janvier 1737,
qu'il refioit pû la fomme de 2 [)3 ') liv. qui fut recue par
Mre. de Murat, Confeiller au Comptes, enfuite de la procuration qui lui avoir été faite par fes pere & mere. Pierre
de Saurin inll:itua ledit Mre. de Murat fan neveu héritier
univerfel, par fan tell:amenr folemnel enrégill:ré le 28 Oél:obre 1743. Il comprit dans cette inll:itution 'la moitié de
tous les biens qu'il avait donnée dans Je contrat de mariage
de fon frere aux enfans qui naltroient de ce mariage; il
établir une fubHitution à laquelle Dlle. Magdeleine-Renée de
Saurin fa niece était appellée préférablément aux filles de
Mr. de Murat, héritier infiitué. .
.
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U RNA L '
Mr. de Murolt fut marié avec Dlle. Louife de Paillez, à
laquelle il' fut confiitué en dot la fomme de 60000 liv.
La Dame de Thezan fa mere fit procuration à Mr. l'Abbé
de Saurin fon beàu-frere, pour affifier pour elle au contrat de mariage qui fut paffé le premier Mars 174'5; il fût
dit dans ce 'colitrat : " a compte de lacJllelle fomme ledit
" fleur de Murat fils feul a confeffi avoir' reçu comptant
" celle de 46000 liv........ laquelle fomme de 46000 liv. ci" deffus re~ue comptant par ledit fieur de Murat, icelui
" & ledit lieur.Baron dé Murat fon pere, & encore ledit
" Mre. de Saurin pour & au noin de ladite Dame de Thezan,
" tous les trois_folidairement l'un pour l'autre, & l'un d'eux
" pour le tout fans divilion ni difcuffion, avec renoncia" tion au bénéfice defdits droits, & qui mieux d'eux faire
" le peut, ont bien & dument reconnu & affuré au pr9" fit & faveur d~ ladite Dlle. Paillez, fur tous & chacuns
\" leurs biens meubles, immeubles préfents & avenir, fur
" lefquels, en la même qualité folidaire, ledit Mre. de
" Saurin, toujours pour & au nom de ladite Dame de
" Thezan, promettent de lui reconnoître & affurer tout
" ce que ledit fieur de Saurin fils recevra dans la fuite ,du
" refiant de ladite dot, déclarant ledit lieur de Murat fils,
" que des 46000 liv. par lui re~ues, il en eITlploiera 40000
" liv. au paiement d'une putie du prix de l'office de
" Confeiller aux Oomptes, & rapportera 'la fubroga" tion des -droits, hypotheques & llrivileges au profit de
" ladite Dlle. Paillez -pour l'afforance -de (a dot. Et à la
" faveur du furdit mariage, ledit Mre. Charles de Saurin
" "fait donation au fleur de Murat fon fils de tous (es
" bie'ns pré(encs & avenir, & le nomme' & l'élit ,pour re" cueillir la donation 'portée da'ns '(on contrat de mariage
.. du 1) Avri1 171'2.; lefdits ,fieurs Saurin prometrent de
" faire rarifier à la Dame de Thezan la refponlion de 'la dot
" folidaire."
La 'ratification doin i'extrait 'en form-e devoit être rapporté dans la huitaine) ne fdt jamais faite) & '/le devoit
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P À tAIS
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P R.O V il Ne B:
'2.87
pas l'~rre'; mais en fairant l'acqui!irion de' l'Qfljçe. de
Conreiller en la Cour des Comptes, on ne manqua pas ·de
déclarer, comme on l'avait promis, que les deniers pro.,
cédaient de la dot de la Dame de Palliez. Cet Office fut
fupprimé ; -la finance en fut payée par un récépiifé du Tréfor Royal, en vertu duquel .Mr. de Murat rappo~ta le 31
Oél:obre 1774 un cootrat de conftitution ,de" la (omJlle d~.
48224 liv. (ur la Province. Madame de Murat ne fit aucune démarche pout: (uivre (es deniers & con(erver (on privilege; (on mari réduilit ce capital en 1775 à 34543 liv.; il
en reçut l'entier paiement le 4 Juillet 1776; le ~ du même
mois il rapporta deux contrats de c.onfl:itution (ur la Brovince de 23°00 liv.les deux, en deniers comptans.
t
'Mre. Charles de Murat décéda le 15 Mai 1754. Mr. le
Chevalier de Saurin (on fils cadet mourut le 30 Décemb..re.
1757, après avoir inftitué Mr. de Murat (on frere (on héritier; il Et un legs de 3000 liv. à la Dame de Claret [a..
fœur, & il revenait à la Dame de Thezan le. t,iers de (a
fucce/llon pour (on droit de légitime. La Dame de 'Thezan
. décéda pareillement après avoir fait (on teftament, par lequel la Dàme de Claret (a fille fut inftituée héritiere univ.er (e Ile. Mr. le Con(eiller de Murat décéda le 10 Février
1779, après avoir infl:itué la Dame de 'Claret (a fœ.ur
héritiere univer(elle, & fait des legs à (on époufe.·
,_,
La Dame de Claret n'accepta la fucc:e/llon de (on frere
que (ous le bénéfice de la Loi. Elle forma demande de la
dot de la Dame de Thezan, fixée à la fomme de SOOQO
liv. 'par la tran(aél:ion de 1719. Madame de Murat. forgia
égale'menc demande de la totalité de la 1ienne, fi-xéé a'.
60ôoo liv., .de 4000 liv. pour la donation .de (urvie par elle
gagnée, de (es habits de deuil, de fon an vidual, & encore
d'une (omme de 3973 Jjv. p,rocédant d'un dépor par elle
fait entre les mains de (on mari, & demanda d'être _préférée
à la dot de la Dame de Thézan .fur tous les biens de Pierre
de Sautin, tant ceux par lui donnés dans le coorrat de
mariage de Charles·.de Saurin du 15 Av.ril 1"112, que ce.ux..
�288
.,
i ~
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donti!' avoit difpofé par fon tenament; & qu'à cet' effet
tous les biens de Pierre de Sautin feroient' féparés de la
maIre de ceux de l'hoirie du fieur Confe'iller de Murat; elle
demanda la ,même préférence fur le capital de 23000 liv.
érabli fur la Province fur la rêre, de Mr. de Murar, prérend(nt qu'il prpcédoit' de par.rie .•du prix de la charge de Con-,
feJ'lIer" acquife' des deniers de fa dot.
1
. Par la Sentence de rangement, la dot de la Dame de·
Thezan fut 'allouée au troilieme degré, & celle de la Darne
de Paillez au cinquieine. Il 'fut ordonné qu'il feroit furfis
à l'oprion de la Darne de Claret, ,héririere de fa mere,
fur les biens yrocédant du chef de Pierre de Saurin, anendu
la préférence: deman'dée par la Dame de Murat, fur laquelle'
préférençe il feroit natué, après que les Panies auroient
été plus amplement ouies. Et par une aurre Semence du
.2.3 Février 1782., il. fut dit que ladire Darne dt:; Paillez
feroit. payée~ de ,fa dot & .droirs préférablemem à la Darne
de Claret ~ fur les biens aont Pierre de Saurin ,avoit difpofé
par fon. teframeni: du 1 l Sèprembre 1720.[ Elle fut déboutée
de la préférence par elle demandée fur les biens' donnés
par 'Pierre de Saurin aux enfans à naître de Charles de Saurin
& de la Dame de Thezan, '& ,fur le capital de .23000
liv.. conHirué fur la Province; & elle fut condaqlOée 'aux
,
dépens. Appel de' fa part p.~rdevàl1t la CO,ur.
paur l'a Dame. de Paillez on établi!foit deux quenions :
la premiere confinoit à favoir fi la donarion faire par un collaréral, dans un contrat de mariage rédigé plus d'un mois.
après les époufailles, ,aux. enfans à naître de ce mariage, &
avec claufe, exprelfe de droit de' retour, e.H fubordonnée aux
hyporheqoes de .la dot de, la femme '; fi· la même donation
for laquelle :les futurs mar~és n'avoient. abfolumem .rien à
voir ni ·en. fonds ni .en fruit, .Reut ér(e foumife à une hypotheque quelconque en faveur de l'un d'eux. La feconde, fi on
cap iraI formé 'des' deniers doraux en 00 n'eH pas fubfidiairemenc dorai, & fi les arrangemens que la Province
prit avec MM. les. Offic..iers de la Coor des Aides pao'r le
remboorfement
..
-
J
�D U
PAL AIS
D E
P' R 0 VEN C !!.
'2.S9
rembourfement de la finance de leurs, offices , a fait le préjudice des femmes qui avoient une hypotheque fpéciale fur
les offices de leurs maris.
Sur la premiere quefiion, on convenoit que lorfque le
mari fait dans le contrat de mariage qUI lui tranfporte la
dot, une donation à fes enfans à naître, dans le concours
de la dot & de la donation il eH jufie que la dot fait
payée la premiere; parce que 1". l'obligation de rendt:e.la
dot a néceffairement 'précédé l'obligation d'affurer unè donation aux enfans; 2.0. parce qu'il eH: naturel de croire que
la femme qui exige une donation pour fes enfants de la part
de fan mari, n'entend pas que la donation fait aux dépens
de fa dot. Il repugne à toute raifon que dans le 'même titre
par lequel la femme confie fa dot au mari, elle voie fouftraire à fan hypotheque une panie des biens qui lui en garantiffent la reHitution. C'ell le cas de l'Anêt rapporté· par
Mr. de Catelari, liv. 4, chap. 4.
L'art convenait e-ncore que lorfque c'eH: le pere du futur'
conjoint qui fait donation aux enfJnts à naître de fan fils,
cette donation ne peu.t pas avoir préférence. fur la dot de
la femme. Le per.e répondant de la dot par fa feule· préCence au mariage de fan fils, 1'0'0 ne peut pas concevoill
que la donation qu'il fait aux enfants, & qui n'eH: fouvent
qu'une condition du mariage, pui/le faire le préjudice de la
dot~ Avant d'exercer une libéralité, il faut néceffairement
payer fes dettes, & par ccinféquent il eH: jufl:e que la ref-_
titution de la dot formant une dette dans la fut:ceffioo du.
pere, pa.ffe avant la dona·tion .. & c'efi l'hypothefe du difcours· 185 du Cardinal de Luca, & de Me. Decormis"
tom~ l,. col. l2.16•. L'on convenait encore que lorfqu'on faie
une donation en contrat de mariage au. mari lui-même, la:
femme a uIJe préférence fur les biens donnés à tou·s _les
créanciers antérieurs, quoique nous ne fuivions pas la Loi,
affiduis. Les biens donnés au mari ne l'étant qu'en conGdératiOA du mariage contraél:é, il ne feroit pas julle que les;
biens donnés ne répondiffent pas de la dot, ou fervillènt:
Années q8~
& ftiv~
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~.
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N A :t
11 acquitter des créanciers étrangers; la femme ne s'eit ma";
riée que fur la foi de cette donation. Quoiqu~ la quel~ion
ait éré jugée par quelques Arrêrs du Parlement de l:ouloufe conrre la femme, il n'en en pas moins vrai qu'ils
n'onr l'as éré fuivis , & que nos meilleurs Auteurs onr donné
la préference à la femme. Tels fonr Olivier Erienne en
fan Trairé des hypotlzeques, pag. 12.; Guipape en fa" Jurifprudence J..rir. du mariage, arr. 3, pag_ 2.2.2.; de Luca, dife.
S3; Duperier, liv. 4, queit. 3, & fan Annorateur.
Enfin l'on convenait que fi la donarion ell: faire au mari
& aux enfa~rs à naîrre du mariage, la femme doit êrre
encore payée filr les biens donnés préféra~lemenr aux enfans
à naîrre. Mais la femme n'ell: alors prétërable fur les biens
donnés, que parce que les enfanrs n'éroienr donaraires qu'en
fous-ordre, que parce que la donation éroit pour leur pere
avant que d'être pour eux, & qu'il ef~ par conféquenr jull:e
qu'avant que pareille donarion parvienne aux enfants, elle
ferve à acquirter les charges du mariage qui onr éré la caufe
du mariage. C'ell: ainG que l'obfeive Duperier & fan Annorateur; mais il n'ell: dit nulle par~ que le mari ne recevant rien, & "la donarion n'érant de la part d'un collaréral
que pour les enfants, la dot de la femme doive y êrre prife.
Bien-loin delà, les Aureurs, reIs que le Cardinal de Luca,
dife. 83, n. 19, érabliffenr le conrraire.
Les biens donnés font dans le patrimoine du mari, ils
n'y font que parce qu'il a re~u la dot. La femme n'a confié
fa dot, que parce qu'elle a vu que les biens donnés pouvaient & devaient lui en. répondre; il ne ferait pas jufie
que fes enfans fuffent préférés li elle fur les biens de fan
"mari, puifque fan mariage a éré la caufe de la donation.
Il ne faut donc pas être furpris fi dans cette hypothefe les
enfams, qui ne font donataires qu'après leur pere; ne peuvenr recevoir la donation qu'à la charge d'acquitter la dor.
Auffi l'Annotateur de Duperier ne manque pas de rerÎ1ar~
quer que par la donation au" mari & aux enfants, les biens
commencent d'entrer dans le parrimoine du mari, avec la
,
�DU
PALAIS.
DB
'PROVENCE.
2911
t1cihe de l'hypoiheque .de' la dot de la femme; hypotheque'
dont ils ne peuvent être affranchis que par le paiement:.
mais. il faut mettre. ,de côté les..différens cas que l'on vient
de parcourir, qui n'ont rien de commun avec le procès.
Il ne faut plus confondre la donation faite au mari, avec celle
qui n'elt faite qu'aux enfants; celle, qui efl: faite au m'!ri &
aux enfans ordine fucceflivo, avec celle qui n'efl: faite qu'aux
enfans exc1ufivement; enfin la donation qui ne feroit faire
qu'aux feuls enf<l.nts de la part de l'aïeul, avec celJequi elt
faite par un fimple collatéral. Si l'une n'efl: cenfée faire qu'en
anticipation d'hoirie, & atrurée aux enfants' contemplatione
filii, l'autre n'eil faite qu'aux enfants pour eux feuls, ~ le
collatéral ne devant rien à fes parents, fa donation ne pellt
jamais être' réputée anticipation d'hoirie. II ne faut donc raifonner que' fur le cas d'une donation faite par un collatérai
aux enfants à naître du conjoint, puifque Pierre de Saurin
.donne aux enfàns à naître; mais il ne donne abfolumem rien
à Charles .qui 'doit les procréer. Or, pareille donation ne
peut répondre de. la dot de la 'femme.
.Quelle eG: la nature de pareille donat.ion? C'e!l: une donation conditionnelle. Donner aux enfants' à naître, c'efl: ne
donner rien, s'il n'y a poim d'enfants; c'eil ainll que l'obferve Guipape, que!l:. 267, & Bafnage, des hypotheCjlles, pag.
17.9. Or, une· donation conditionnelle ne peut pas répondre
d~une dot;,
feroit nn~ refponfion conditionnelle comme
la donation elle-même, une refponfion fubordonnée à l'ex ifcence on à l'ioexiilence des enf'!nts; & c'eil ce qui répùgne à l'hypoiheqtJe. Une fois acquife, elle ne peut s'éteindre
que par le paiement. S'il érait donc poffible que la Dame
de Thezan n'eût rien à demander à Pierre de Saurin, ne
ftlt-ce que dans le cas où elle n'aurait point d'enfants,
il eil do né impoffible qu'elle eût hypotheque fur la moitié
des biens de Pierre de Saurin. Ainfi point d'hypor-heque
par la nature de la donation.
Point d'l1ypotheque encore, d'après les conditions' impo.
fées 11 la donation. Le donateur y fiipul~ le retour en cas
Pp2
ce
,
�192.
JOURNAL
l
de déiès fans enfans. Ce droit fe lie avec la natu're lie. la'
donation. Comme Pierre de Saurin 'ne veut rien donner', fi •
f~n ,t'rere n~a point 'd'enfants, iL ne veut rien"donner" non
plus, fi les enfants ne font que paroître & di[paroître; s'ils ne '
font p~s deHinés à perpétuer [on nom; à fes yeux, les enfans
qui n'ont que vécu, font cen[és n'avoir pas exiHé; '&" n'avoir,
pas exiflé, ou n'avoir que le trifle avantage d'avoir exiHé peu
de temps, font à [es yeulC la m"ême chofe: dans l'ùn comme
dans l'autre cas, il veut que la n10itié des biens donnés
reHe toujours dans [on patrimoine, & foit cenfée n'en avoir ~
jamais été [éparée; dans le cas de l'inexiHence des enfans
per defec1um 'coflditionis; dans le cas de leur prédécès [ans
enfans, à titre de droit de retour.
Dr, quel efl: l'effet du retour conditionnel? En droit, il
faut diHinguer le rétour légal & le retour conventionnel. Si
le retour légal ne s'opere jamais qu'à la charge des hypotheques, excepté dans le cas particulier de la révocation
dé la donation par [urvenance d'enfans, prévu p~r l'art. 40
de l'Ordonnance de [73 [, il n'en efl: pas de même du retour,
conventionnel; ce r'etour fait rentrer les biens dans le do·
maine du donateur, ni plus ni moins que s'ils n'en étoient .
jamais forcis. Auffi l'on dit que les biens qui n'ont fait que •
. fortir du domaine du donateur, & qui y [ont rentrés pa"r~
l'effet d'une condition qui faifoit parcie de la donation, [opt
cenfés n'en ê.tre jamais forcis. Si la Dame de Thezan n'avoit
aucune hypotheque vis-à-vis de Pie rte de Saurin, même fur'
la moitié de fes biens par lui donnés aux enfants à naitre,
elle ne peut donc en avoir aucune vis-à-vis des enfants qui,
tenant Jes biens de la main de Pierre de Saurin, ne peuvent que
les poffédercomme il a voulu les leur tran[menre , c'e fl:·à-d ire ,
auffi .exempts de toute hypotheque qu'il les poffédoit luimême, & qu'il entendoit les pofféder, tant dans le cas où
il n'y aurait point d'enfants, que dans le cas où les enfants
le prédécéderoient.
- •
La Dame de Thezan ne peut avoir de droit fur les'biens
donnés qu'en force de quelque hypotheqùe: or, on n'en
�D U PAL A J S Xll!" P Ii 0 v Il N' c,i: ,
'2.93CCllnno!t' qué' dé' dèùx ~éfp~ces: l' hypôtheq,uë, ëbriveiltionneUe, 1
&-l'hypoth-eque légale ou raéire. L'liypothequê" conv'en'tionnelle :dérive; de l'obligation..de la perfonne; 1'0b1jgation en
ell: .la ba.fe. &,Ie pr~n~ip~: là il ~ù n'y. a donc point d'obligatIon ; Il ef!:-do'nc lmpoffihle qU"11 ']' aIt hypotheque conventionnelle; L'lTyponhequé' légale ou tacite ef!: au contraire celle
'luœ efi indiclq
Lege; on la tient du bénéfice de la Loi;
la' Loi. ef!: en quelque fa'ion' préfùmée s'obliger po~r nous;
elle s'acquiert pa'r le feul bénéfice de fa difpofitiôiJ, fa ni;'
qu'il foit befoin d'une f!:ipularion expreife: hypotheca non
inducitur, 'nifi in cafihus a jure ,cxpreJlis. ( Surdus, décif. 261,
n. 9,) Il n'y 'a ni obligation de Pierré·dé Sallri'n, ni texte qui
aifurent l'hyporheque' de .Ia Dame' de Thezan' fur les biens
donnés par Pierre de Saurin; .elle n'a donc ni l'hypotheque
conventionnelle, ni l'hyporheque légale ou tacite; fa prêten-"
tian ef!: donc fans bafe, & la Sentence qui''i'a accueillie fans"
fo'ndemenr. " '_
.
. •
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,
r
: 1;a 'NoveIle 3'9", &- l'Authentique res qUa!, -cod. commun. de .
legatl & jidfic.;'donnent· bien' une hypotl1eque fubfidiairé-à ·Ià
femme fur les biens [ubf!:îtués. Mais autres chofes font les
biens fidéicommiifaires appàrrenant déja au mari, quoiqu'à'
la.charge de les refiituer, & autré chofe font les biens donnés'
aux ~nfans [ur lefquels le mari n'a -jamais eu 'aucune' forte
de droir. Les biens fubf!:it.ués appartiennent. a'ii mati; il en
ef!: le maître & le propriétaire, comme dit Cambolas, liv.
2, chap. 14; il a ce que l'on appelle jus in re, &-Ies biens
donnés à fes enfants ne lui appartiennent en aucune fa'ion;
il.n'a pas feulement jus ad rem. Y a-t-il aucun des motifs
propres aux biens fubf!:itués qui puiife s'appliquer à une do'·
narion faite aux enfants à naître' par un collatéral?
La femme qui ne voyait pas ces mêmes biens dans le
'domaine .de [on mari, comme elle y voyait les biens. fubftitués, pouvait-elle y compter? Pouvait-elle [e diffimuler
,qu'eUe ne pouvait avoir qu'un droit différent & [ur les biens
affeél:és aux charges du mariage " & fur les' biens qui ne
pouvaient pas y contribuer? La femme qui voyait que le~
a
�'-94-;-
':,
' " (' J O' U
;R(N
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biebs fubfti~ué~ p_ouv,oien,t deven.ir J.libres JlJr"lal tttl! dé fon<1
ma'ri; par, le ... non ~vénemèJ)t.,dè,'Ia conditIon ',. pOlJv.oit~élle·
égal~t;nent jamai~ coml?te~ qlle_l.es bien-s dQnjJé~L ilj.lX enfants.
_ appartiendJoient à fOl) ·rt)ari" & a$miler: les deu:x'efpeces?,
Gette m~!!ieJe~me qlll a fu que là Loi,permettait'au mari,
d~aliéner' P,l} 'd'pypothéquer 'les /:iiens [ubHitllis jufqu'au .concurrentrâe,con'.:entions matrimonial~s, a-t-ell~ pu''cohcevoir ,
qu'il fût également permis au mari d'aliéner ou d'hypotli~- ;
"',
quer les ,biens fur lefquels ,j\. n'avoit aucun d-roit? "
Le .fondateur d'un 'fidéicommis penCe au grevé avant.de
penfe,r ,à'les enfants; en cher,charit de ,perpétuer le lufire,
de)jl Jamille" il,'l}la> 'pas en. VUe de .chè~rçher à l'obfcurcir
e!11.'! 'p,er[onpe .qugrevé:, Le,· te!heeur a dooc eu en vue le ,
lufire de [a famille,' d'abord'·e!) la perfonne du grevé, enfuite ~n la perfonne ,de fes eefant5. L'ort doit donc Cuppofer
qu'illv~~r que ,le' grevé fa!fe lln, mariage fortable., & qu'à
raifon de ce il puilTê h}'p~théquer les biens fubfiitués à la
refpopGon d.e.'I'I:Jdpi..i\1ai.s. pe~t;-Qo·le!l'.l:Iire autant :des biens
do~oé~ aux ejJfaqts· ,dans' lin ontr;ü' Qe'm!l<riJJgâ.~Le dona-'
teur. q:a.rie.l).v.oull! donner àll'mari , & par con[éqlJent aux'
futurs, mariés•. S'il ne veut rien donner ni au mari ni aux ,.
futur;;. t!J'tr.!és; .~'jl ne, veut p~s feqlem,eJlQ 'que .Ie' mari'.em-L,
pl~i.e~les {rujes (Ie_Ja. ,donatioll aux char.ges du. mariage, jl i
ne ye\lt ,clop'! p<lS à pl11.5 >force> r~ifoiJ' que. la dot· de la ,femme)
prive les..el)fanes qui font l'objet excluG~ de [on affeélion,.
d'une partie de fa libé(alité. '.
• .'
II efi certain, d'après la N;ovelle 39 & l'Authentique res
gl,lal"ql,l'ij n'y a d'hypoche'que léga'le fur les biens" qu'autant'
que le~./l:lari les a ,.qu'aula.ne qu'il les pofiède; qu'il en jouit;
la Loi c6.mmenç·e; )d',alTurer 'la prQpt'iété; & elle dit. énfuire-: .
fcirtzusen;;n quod etiam dudùm de reflitutionibus dubitabatur;
de'là III Loi paffe aux biens fubfrirués, & elle-dit que J'aliénation ou l'obligation en cfi prohibée: Lege fcripfimus modis
omnibus prolzibentes reJlitutione gravatas' l'es, a/ienari alft obli- ,
gari; les biens font -dans' les mains du mari. Le Légi!lateur
reconnoît, enfuite que cette difpofition indigel ljuâdam eicep- ~
j
,.
•
�,
DU
ilon~
PALAIS
DI!
PROVENCll:291
; & de là il en vient à la difpolition corrcernant la légi-
,time de grace & la refritution de la' do(.
Quelle ell:, d'après ce préambule, I~ difpollrion du chapitre
premier: 1,0. la furveillance du droit dé propriéré: omnia quidem
.alia prioris a' nohis pojitœ' conJlitutionis rata manere volentes;
ce qui appartient à chacJJn lui fera refrirué ; c'efr le droit _
.narurel. 2°. Il peut cependant .arriver quelque' cas, ou ce
'qui doir êrre reHirué à aurru(peut être aliéné ou cbligé: ce
cas, la loi le prevoit; mais elle .prévoit en n::êmetemps qu'il
fera unique: hoc vero innovantes folummodo. 3°. La loi nous
dir ce cas: fi quis reflitutionem fecerit fuarum rerum. Le grevé
efl: donc maître; il a donc les biens qu'il doir rell:ituer, &.
lùr ces biens la 'loi l'aurorife , primo de prélever la légirime
des enfans , quide'!Z fervet filiœ legitimam ; deindè rout ce qui
,a rapport aux pattes par ri moniaux: legitima, dit la Glofe ,
prœfertur doti, hœc ante dedllcitur, pofleJ dos; c'ell-à-dire,
que quand on re!l:ituera le bien que l'on doit rendre, on
,pourra d'abord y prélever la légirirr.e de grace, enfuire la
dot, & l'innova,tion !le porte que fur ces deux cas, folum,modo ùi'lOvantes. L'Authentique l'es (juœ porte la même diC-!
'pofirion. ' .
,
Il efr certain que la femme n'a d'hypotheque fur les biens
fubll:itués, qu'autant qu'ils étoient dans le patrimoine du mari,
qui, à ce feul titr,e, a été autorifé à les lui hypothéquer, &
que quand le mari n'a pas les biens fubfl:itués à l'époque du
mariage, la femme ne pellt y prétendre aucune hypotheque.
C'e!l: le langage de rolls les Auteurs. (De Luca, de dote ,
dif. 83; Duperier, liv. l , quefr. 3, liv. 3 ,.quefr. 6, liv. 4-,
quefr. 3 & quefi, 29, & fon Annotateur; Decormis tom. 2,
col. 374 & 37 8 ; le nouveau Commentateur de no~ Statuts,
tom. 2, pag. 4'5 '5' )
E,n vain oppofe-t-on que la donation faite en cQntemplation de mariage efr cenfée faite aux futurs mariés.
, Quand on veut favoir dans quel cas une donatio~faite en
, contemplation de mllriage en faite pour le mariage, & lor[.~
�,
196
Jou RNA L
, que le mariage en eltla caufe finale, il elt un moyen de ne
pas s'y tromper; c'elt lorfqu'elle elt faite aux fmurs mariés,
& qu'ils- doivent en profirer: Ut maritus opulelitiùs fuflineat
onera matrimonii, dit Cancerius, cap. 7 de pac? n. I l T ; fi la
donation a été faire ad utilitatem filii, ut faciliùs onera matTÏmonii fuflineat.: Mais quand la donation n'elt pas faire aux
futurs eux-mêmes, le mot eT! contemplation n'elt que démonftratif, impulfif. En. effer, n'efi-il pas évident que Pierre de
Saurin ne voulant donner qu'aux enfans à naîrre, ce font
ces enfans qui [ont la caure final.e de la d9nat'ion, & qu'en
privant le pere, de tout u[ûfruit, il a moins eu en vue lui que
'
{es enfans ?
~
Pour favoir fi la contemplarion du mariage elt la caure
impulfive ou finale de la donation, ou fi la donation doit
répondre de la dot, fontanella en [on Trairé de paa. nupt.
clauf. 4, glof. l , n. 30, dir: fi 'Ia donation elt faite en
faveur du conjoint. Mais la donarion n'eH-elle faire qu'à l'ainé
des enfans à naîrre , mêlpe par l'aïeul, alors cett,e donarion,
cenfée faite contemplatione matrimonii, elt r"ellement propre
à l'enfant, quoiqu'il la tienne du chef de fan aïeul, que fes
Freres, n'y prennent point leur légirime. C'ell: ce qu'obferve
Fernandus ad leg. in quartam , cap. 2 , n. 13. Alors ex vi paal ,
]a donarion faite à l'ainé lui ell: propre; à plus forre raifon celle
d'un collatéral ne doit· elle pas répondre des deites du pere.
Sur la fec()ode quell:ion, on di[oit que les contrats de conftiturion fur l'emprunt commis à la Province par l'Edit du'
mois de Mai 17.73, [ubrogés, par l'autorité fupérieure, à
]a finance .de l'office, ne le furellt, Icomme de raifon,
qu'à la charge du droit du riers ,. & fous la réferve de.s droits
& privileges de ce riers [ur la finance de l'office c:lle-même:
fubrogatum [apit naturam fubrogati. Le créao.cier n'avait de
privilege que fur la finance de lioffice ; il ell: donc impoffible
qu'il ne le confer-ve pas, fait que cerre finance fait repré[entée par l'office lui-même, ou par le contrat de-conltitutioll
<Iui y fupplée;. & l'Edit de 1773- le fuppofe, pui[qu'il. y e~
di~
�Pll. 0 V Il Nell.
Z97
C3it que par cet.arrangement on veille à la fûreté des anciens
DU
PAL AIS· D-l!
titulaires & de leurs créanciers.
Chacup fait qu'ep 11,76 les inllrué'eions du R,oi à la Province portoi~nt de rembourfer les capitaux au denier vingt,
fi mieux les conllitutionnaires ne préféroient de reconHituer
au denier vingt - cinq. Mr. de Murat, au lieu du re.mbourfement, confentit la rédué'eion au quatre pour cent pour 33000
liv. de fon capital; en conféquence il fait deux opérations
avec la Province qui n'en font répucées qu'une feule. D'abord
il concede quirrance de 34)43 Iiv. qui formoient le principal
. de fa conllitution primitive & reIJréfentative du prix de fon
office: tout de fuite le même jour il n;place fur la Province,
& il eH dit que ces mêmes capitaux fone conHitués-moyennant
la fomme principale reçue comptant en louis d'or & d'argent,
par le fieur Pin, Tréforièr des Etats. Mais perfonne n'eH la
dupe de ,cerre énonciation, fur-roLlt quand on voit que le
même jour & au même inUant, Mr. de Murat concede
quittance de fa premiere conHiturion.
Qùand i,l eU quell:ion de dot, fu6rogatum [apit. n.aturam {uhrogati; il eU juHe que la même femrpe qui a.voit un p,rivil~ge
fur' l'office,.·& qui lors de fon comrat de mariage y avoit
prévu, conferve ce même privilege tant fur l'office J.ui'l'Ilême,
que fur tout ce qui le repréfente. Tous les; offices apparri~n
I]eoc au Roi ;,l'hypotheque ne peut affeé'eer que la finance,. &.
par conféquent cerre finance ell: repréfentée par l'office lui"
même, ou par la conll itucion que le Roi oblige le titulaire
d'accepter; l'hypotheque doit toujours être la même, puifque
c'eH toujours le prix de l'office, lX. par conféquent les ,deniers'
de la femme'. Ç'a ét~ par un fai·t Inajeur , par un cas vérit a·
blement fortuit, .donc perfonne ne doit répondre & qui ne
doit faire le préjudice de perfonne "que le prix des offices a
.d'abord- été convérti en conllitution, & énfuite en reconfii.
turion. Or, le' fait du Prince n'"fFeé'cant que le .titulaire, il
ell: impoffible que le créancier fur le prix de l'office ne
conferve pas le même privilege fur la cooHitution ou fur la
reconlliturion qui la repréfente i il ell: de principe que quand
Années l78:l. & fuiv.
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il ell quellion d'opérer la pe"rre ~e la dot pat' ~'inrolvabilité
du mari, on [uppofe toujours que le privilege· s'en prorogé
d'une chofe à l'autre '; c'en ainfi que l'ob[erve Duperier, liv.
3, quen. 4;
,
•
,
On répondait pour Madame de Clarer, fur la premiere quêftian, que les conventions 'matrimoniales peuvent être con lignées
dans un acte fous fignarureprivée comme dans un contrat public.
L'un n'a ni plus ni moins de force qne l'autre; il n'y a que les
illitérés qui ne puiifent pas jouir de cette alternative, parce
qu'ils ne peuvent pas dire qu'ils ont figné des accords privés
avant les époufailles; & dès-lors on peut leur objecter que
les donarions qui leur ont été faites dans un contrat public
après ·Ies époufaille~, n'ont pas la faveur des donarions
faites à caufe des nôces. Mais quand les panies ont pu [e
lier par écrit, il el1: indifférent qu'on faife rédiger plurôt ou
plutard les conventions privées en contrat public; leur date
& leur hypotheque ne remontent pas moins au jour des épouJ •
[ailles.
- Quand même cette donation auroit été nulle & révocable,
elle n'aurait pas moins été [oumife aux hyporheques de la
dot, fuivaor les Arrêts rapporrés par Boniface, tom. l , liv.
4' rit. 10, -& rom. 4, liv. 7" tit. 8, chap. 1. On y voit
'que quoiqu'il fait de maxime que les donations faites par un'
mineur à un tiers,. même en con~i'at·delmariage " & en faveur'
de fan frere ou de [a [œur, fdot nulles, d'une nullité de'
'droie public, néanmoins Jal Cour ne les a jamais calrées
qu'à la charge de l'hyporheque [ubfidiaire pour la .dot' de la
femme. La nullité' de la donarion ne peut donc, dans aucun
cas, & fous quelque prétexee que ce [oit, porrer la moindre
atteinte à l'hypotheque acquife à la femme.
Dans le contrat de mariage de Charles de .Saurin; le
donateur ne lui a pas prohibé l'ufufruit; il a voulu au contraire qu'il en jouir, par cela [eul qu'il ne lui en a pas prohibé la jouiifance , parce qu'il favoit que la loi la lui donnoit ;
il lui a conféré plus de droit que n'auroit pu en avoir un
héritier grevé, puifqu'il l'a lailfé le maitre ab[olu d'appliquer
•
�DU
P ALEIS' DB
-Pll.OVENCE.
1.l.99
fa libéralité à celui de fes enfans qu'il lüi plairoit de choifir.
Nous fuivons en Provence des regles paniculieres au fujee
du rerour des dots & des donations; c'eft ce qu'on peut
vérifier dans le Traité des Succeffions de Mr. l'Abbé de
Montvallon, rom. 2., chap. I I , an. 6. Nous n'accordons
pas le droit de rerour légal aux collatéraux ni aux étrangers
qui Ont fait des dopations, en quoi notre Jurifprudence efr
conforme à celle du Parlement de Paris, & non à celle du
Parlement de Touloufe, qui l'accorde de plein droit aux
collatéraux ainfi qu'aux afcendans. Mais dans tous les cas,
même dans celui où la donation eH révoquée par la ftJrvenance
des enfans, qui eH le cas le plus favorable pour le donateur,
le Parlement de Touloufe n'accorde le droit de retour qu'à
charge de l'hypotheque fubfidiaire de la dot de la femme.
( Catelan, rom. 2., liv. 4, chap. 44; Nouveau Duperier,
rom. l , pag. 380 ; la Rouviere, Traité du Droit de Retour,
liv; 2., chap. 18 , pag. ~ 6; Furgole fur-l'art. 42. de l'Ordonmnce de 1731; Ricard, des donations, part. 3 , chap. 7,
feét. 4, ) Ce dernier Auteur attefie que la fiipulation du draie
de rerour ne peut pas nuire à l'hypotheque de la femme.
Comment ferait-il poffible de donner un effet contraire à ce
droit fiipulé par les collatéraux, tandis qu'il efr le moins
favorable de rous. Boucher d'Argis, en fan Traité des Gains
Nuptiaux, chap. ::'3, pag. 182., & Mr.I'Abbé de Monrvallon,
Traité des SucceJlions, rom. l , pag. 449 , tiennent le même
langage.
Les mêmes loix & les mêmes motifs qui alfujettilfent le
fidéicommis établi en faveur des enfans -, à l'hypotheque
fubfidiaire de la doc de leur mere, y alfujettilfenr également
la donarion qui leur eH faite; c'eH-à-dire, que le donateur,
cout comme le fondateur du fidéicommis, n'a pas pu porter
fes v'ues f.Jr les enfans à naître d'un mariage, fans vouloir le
mariage, & par conféquent l'alfurance de la dot, qui en efr
l'accelfoire nécelfaire & inféparable. Il eH queftion dans la
Novelle 49 des leHitucions en général, de 'reJlitutioni6us,
Cette expreffion générique s'applique à routes difpofitions ~
.
Q q 2.
,
�30~
1 0 V 1\ N A ~
paél:es qui aboutilfent à tranCmertré les biens ~ la
poHérité; elle s'applique principalemenr aux fidéicommis,
par le moyen defquels on remplit communément cet objer.
L'Empereur JuHinien déclare dans la préface; que par une'
Loi anrécédenre, il avait abfolumenr défendu d'aliéner &
d'hypothéquer, en quelque maniere que ce fùt, les biens
fujets à reHirutioll. Ce Légillateur annonce que couché des
plaintes. qui lui onr éré portées, il a mieux aimé corriger
cerre Loi, que de lailfer les dots des femmes expofées à des
périls, fur-tout dans les contrats de mariage, qui font ce
gu'il y a de plus utile à la fociété, parce que ce font les ma·
riages qui feuls donnenr l'exiHence aux hommes: Hœc nos
- merito commoverunt & in meliùs arhitrati jùmus noJlram corrigere legem, 'luam fuhjec70s defPicere pàiculum fubJlinentes,
maxime in nuptiis 'luarum nihil eJl hominibus utiliùs , tan'luàm
Jolis [acere homùles valentibus.· Ce fue pour affurer la doe &
les donations entre mari & femme, & pour favorifer ,les
mariages, que JuHinien conGgna dans le chap. premier la
nouvelle Loi qu'il voulue établir. L'Authentique res 'luœ eut
le même objet en vue.
La Novelle & l'Authentique ne difent point que le grevé
foie maître & propriétaire des biens qu'il doie reHituer; il
n'y eH pas parlé de la légitime de grace; moins encore y
dt-il dit que lia légitime de grace foie préférable à la-- dor.
N'eH.il pas clair & 'évidenr que JuHinien ayant voulu accorder
un privilege à la dot, il faut néceffairement que ce privilege
porte fur quelque chofe qui n'eH pas conforme au droit
commun, fans quoi ce ne feroit pas un privilege? Ee c'eH
précifément parce que les biens fubHirués appartiennent aux
héritiers fidéicommilfaires, que JuHinien a dérogé au droit
commun, en les hypothéquant fubGdiairement à la dot de la
femme. Comment veut-on que ce Légillateur aie déclaré que
l'héritier grevé eH maître & propriéeaire des biens fubHitués,
& que ce foie fur ce fondement qu'il lui ait permis de l'es
hypothéquer à la dot de fa femme, tandis qu'il rappelle luimême, & qu'il ratifie & confirme une loi antérieur.e qui
à
toUS
�DU
PALAIS
DE
PROVENCB.
JOI
prohibe ~ l'héritier grevé toute efpece d'aliénation & d'hypotheque des biens fubl!:ieués, fur le motif que ces biens
ne lui appartiennent pas. Comment veut-on auffi que Juftinien ait préferé la légitime de grace qu'on accorde trèsrarement dans des cas particuliers aux en fans de l'héritier
grevé, ~ la dot de la femme de celui-ci, tandis que cette
dot el!: une véritable dette des biens fubllitués, & que la
légitime de grace n'el!: qu'une faveur qui ne peut jamais
être faite au préjudice dl! tiers? C'el!: ainli que le décident
Ricard, Traité des SuhJlitutïons, parr. 2.,. ch. 13 aux additions pag. 502.; de Bezieux, pag. 5°4; Henris, liv. 5, quo
29; Peregrinus de fideicomm. art. 42, n. 3 & fuiv.; Theveneau fur l'Ordonnance des fuhflitutions , tir. 6, art. l , pag.
301; quellions propofées par M. le Chancelier, pag. 49; ,
Boucher d'Argis, Traité des Gains Nuptiaux, ch. 2.3 n. 3;
Cochin, tom. 5, cauf. I 2 I , pag. 68; Mr. de Clapiers, cauf.
2, quo 4, n. 2.; Boniface, tom. l , liv. 6, tit. 8, ch. l , n.
13; Decormis, tom. 2, col. 1 la; Mr. l'Abbé de Momvallon,
Traité des Succeffions, tom. 2, ch. 7, art. 45,
. Le même motif de la Loi fe vérifie dans la donation
faite aux enfans à naître; ce motif el!: encore plus clair &
plus manifeHe dans u~ pareille donation que dans un fidéicommis; car ce n'el!: que par une volomé tacite que l'auteur du fidéicommis déclare fan vœu & fon pefir pour le
mariage, tandis que c'el!: par une volonté exprelTe que le
donateur manifefle les fiens, en engageant lui·même les
conjoints ~ fe marier, en affillant à leur mariage & en faifam en faveur d'icelui, pour en alTurer l'accomplilTement,
donation de fan bien aux enfans qui en naîtrom. Il n'y a
point de fidéicommis qui puilTe être exempt de l'hypotheque de la dot, & néanmoins il y en a eu de toUS les temps
& il Y en aura toujours d'une efpece fur lefquels l'héritier
grevé n'a pas autant de droit qu'en a communément un
pere fur une donation faite à fes enfans à naître. En effet,.
le pere a de plein droit l'ufufru;' des biens donnés à fes
enfans; il difpofe même des fonds de fa propre autorité,
t,
�302.
Jou
R N .(L
.
fi l'intérêt de fes enfans l'exige, & il .gagne la propriété
en leur fuccédant, s'ils le prédécedent fans poH:érité. On peut
ajourer qu'une donation -telle que celle que fit Pierre de
Saurin aux enfans à naître de, fan frere, auquel il déféra
le choix du donataire, fans attenter à l'ufufruit que la loi
lui déféroit, & qui pouvoit lui être acquis du jour au lendemain par le décès du donateur, d!: bien plus av'al)tageux à un pere, que ne pourroit l'être un fidéicommis quelconque à l'héritier grevé. Il en donc indubitable que les
biens d'une telle inHitution font foumis à l'hypotheque de
la dot de la femme, par cela feul que le teIl:ateur n'a pas
pu in{l:ituer des, enfans à' naître, fans avoir en vue lé mariage, &: par une conféquenée néceffaire,l'affurance de la dot
de la femme qui le coocraé1:eroit.
Dès qu'il eU confiant 'que la Novelle s'applique aux donations comme -aux fidéicommis, il faut qu'elle opere le même
effet. Dès-lors il efi très - indifférent que la donation fait
faite au mari ou aux enfans à naître; car puifque les fidéi.
comnlis en ligne collatérale, comme en ligne direé1:e, font
compris dans la Novelle in 'luocumque gradu, il faut néceffaireme~t que les donations y foient comprifes fous les
mêmes rapports & avec la même étendue; il fallt que, tout
comme les biens fidéicommiflàires répondent de la dot, quoiqu'ils appartiennent aux en(;Jns, les biens donnés aux enfans
en répondent auffi. Ce n'efi & ce ne peut être qu'en forCe
de la Novelle qu'une donation répond de la dot, nonobf·
tant le retour légal ou conditionnel, c'efl:-à-dire au préjudice du donateur lui-même. A plus furte raifon doit-elle en
répondre au préjudice de ceux auxquels la donation doit être
tranfmife.
C'ef!: précifément & uniquement aux contrats de mariage
que le Légi{1ateur a donné le privilege de ne pouvoir fouf,frir le moindre préjudicê ni la moindre atteinte pour ce
.qui concerne l'hypotheque de la dot, par la refiitution ou
la tranfmiffion des biens en quelque maniere que cette reftitution doive être faite. Sancimus enim excipi, modis am-
�DU
PALAIS
DE
PROVENC Il;
303
ni!Jus', ad reflitutionem nuptialia -documenta & fuper Izis faaas
alienationes aut hypothecas. N'efl:-il pas vrai que rOUle efpece
de paéle, modis omnihus, qui aboutiroit à tranfmettre les
biens aux enfans ouà tous autres, doit être de nul effet
& valeur quant à l'hypotheque acquife à la femme? Nihil quantum in his rehus riflitutione valente :/it'lue hoc OllptiaLhlls donationiblls & earllm exac7ioniblls privilegium. Ceùe difpourion générale qui porte [ur tout, & qui n'excepte rien, ne renferme· t-elle
pas les donations faires dans les contrats de mariage en
faveur des enfans, corn me elle porte [ur les infl:itutions &
fur les fidéicommis? C'ef!: l'ob[ervation qui a été faite par
Henris, liv. '), quo '29; par Mr. de Clapiers, cauf. 2, quo 4;
par Mr. de Catelan, liv. 'b chap. 49, & Vedel [ur le même
chapitre. Decormis, tom. l , col. 1217, rapporte un Arrêtde ce Parlement du ') Mars 1687, qui jugea que la doc
devoit être payée avant la donation de la moitié des biens,
faite par le même mariage à l'un des enfans qui naÎtroit,
quoique la dot, n'eût été reconnue expreifément que [ur
d'autres biens que la moitié donnée, tant la faveur de la
dot ef!: privilégiée.
La femme acquiert l'hypotheque contraéluelle [ur les biens
d'une donation faite en contemplation- de [on mariage aux
enfans qui en doivent naître. La donation de Pierre_ de
Saurin ,ell: faite. primarià en contemplation du mariage .de
fon frere, C: fecundarià en faveur des enfans à naître dudit
mariage; il ef!: donc certain que dans l'ordre des principès,
le mariage a été le premier objet du donateur; la pen[ée
dès. enfans n'ef!: venue qu'en[uite. Cette donation a été un
paéle facramental exigé par la femme comme par le mari,
& [ans lequel .le mariage n'aurait pas été fait. Quelles [ont
les Parties contraélantes dans cet aéle folemnel? C'ef!: d'un
côté les futurs conjoints, & le donateur de l'autre. Un tel
contrat peut-il fe former, & le donateur peut-il donner une
fanélion fi .folemnelle & fi expreife au mariage, fans qu'il
impofe ipfo fac70 fur le bien qu'il donne une hypotheque
pour la dot de la fc:mme? Tous les Auteurs penfent que de
�30 '!Jou RNA L.
pareilles donations s'appliquent encore plus' à . l'utilité pC! là 1
femme pour l'affurance de fa dot, qu'à celle du mari &-de_
fes enfans. (Cancerius, cap. 7 de pac1is, n. I I & ~9I.;
Fontanella, de pac1ii nupt. cauf. 4, glof. l ; Gui-Pape, décif.
143; de Luca, de dote, difc. 83, n. 19, & difc. 166,
n. 88. )
.
, La femme acquiert l'hypotheque contraél:uelle fur une
donation faîte dans fon contrat de mariage en faveur des
enfans à naître, parce que cene donalion eil: cenfée faile
en confidéralion de leur pere. L'on voit dans touS les Au~
teurs que les donations failes dans les contraIS de mariage
en faveur des enfans à naîlre, s'appliquent rarement à euxinêmes, fur-tout d'une maniere exclulive. On en trouve 'Ia . preuve dans Mr. de St. Jean, décif. l" n. 2 l ; dans Boniface, tom. 4, pag. 430; dans Duperier, rom.
pag.
aux obfervations où font rapportés plufieurs Arrêts de la
Cour, qui ont jugé que les donations' en faveur de mariage
au futur conjoint, & à fes enfans à naître cumulativement,
n'operent pas un fidéicommis, quand même les el'lfans feroient chargés de porter le nom & armes du donateur. On
y voit auffi que les Arrêts ne font. aucune différence "'en
pareil cas des donations faites-en ligne direél:e ou en ligné
collalé-rale. On trouve les mêmes principes dans Mr. d'Oli'le,
liv. 4, chap. ,; dans Mr. de .Cambolas, liv. 3, chap. 4"
& liv. " chap. 48; dans Ferrieres fur la queil:. 2,0 de
Gui-Pape; dans Furgole fur l'art. I I de l'Ordonnance des
donations, & dans Catelan Iiv. 2, chap. 14.
Sur la dern~ere quefiion concernant le privilege fur le
ea'pital de 23000 liv., on répondoit que ce 'capital- avoit été
confiitué filr la P'rovi~ce en fave'ur de Md. de Murat en'
deniers €0111prants par contrat du 6 Juillet 1776. Ce capital
eH donc perfonnel à Mr. de Murat, & fes créall€iers peuvent y exercer leur aél:ioll fuivam l'ordre de lel1rs hyporheqU(s. Que ce capilal appartienne à l'hoirie'de Mc, de Murat,
c'eil: un fait juftifié par les titres les plus fo'rmels, qui por..
tent <}vec el1X le caraél:ere de la foi publique. Il ne peut
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plus
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30')
pl'u's être 'queH:ion de fubrogation légale. On ne connolt dans
l'admininration des affaires publiques d'autre fubrogation
que la contraétuelle duement intimée. Ni les femmes, .ni
les mineurs, ni les héritiers fidéicommi1Taires, ne peuvent
rédamer à cet égard aucune forte dè privilege, pour déran.ger & bouleverfer le régime d'une Province, l.ni de quel.que
corps politique que ce fair. La confiance, qui dl le nerf
de leur admi.niltration, ferait perdue; la foi publique ferait
·trompée; la fortune d'une foule de citoyens dev.iendroit chancelante; le défordre ferait dans la fociété.
Quand même· la qui.ttance & 'la. nouvelle.. reconflittltion
feraient :faices le même jour, & au mê~e' rinflapc.,. .elles
"Ile .feraient pas moins e1Temieliement différemes;; .& ,s'il
pouvait y avoir lieu,. fous quelqué. prétexte' que ée .fi:iit, à
(une prétendue fubrogariori lëgale , MadaàJe deŒ'he;~an aurait
plus de droir que Madame de Mura! ~ la' réclaDle[.~·JAu1ur"
pIus, le, privileg.e 'de l, H,. JinanceJ~'un Qffice..eH.,fubdrdoimé
à des formalités, pr~[ctires par îl,E8it Ide. 1<II,&g'0, ,& par·la
Déclaration· du 17 1uih.,1703:liJI?,h!iiieurs -A rrêcs, ,de <.là çO.ur'
ont jugé-. que la· femme perd' fan privilege 'fur la..finance·
d'u'PI Office dotal, lorfqu'elle a négligé de le conferver à. la,
fbr-mêl d1I1tlroir.
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( Pai'de~alÎt' la C];Qur.Jla. Dame de' Mur.a,t dèmanda, plu" une
l'equete: ineideti'te du.vt) FéilFier: 1783 , que là où eI1e.,.ne·
fer6it 'pa's - dédlar.ée préférable fur le capiral de 2.3000 liv•. ,.
'i~s" biens' de l',hoirie de', M'r.. le ConfeiI1er~de' Mur.at·,fulIènc
fép·ar.és d'avec ceu~ dés hoiries,d'Ignace, de Charles de Saurin,.
& .du Chevalier de Saurin, qui avaient. été 'confondues fu~
i3'~tê'te"àu fieuPIJC-onfei'lIerr de MUfat, à l'effet 'par elle- de
Ce pâyer ,rexClu:fiveme.nt à.la Dame de <Llaretf, fude 'capi,cal de·
:llgOGlO 'fiv:;. cpmme"llppartènant.. à 1"ho11'ie du fleur' €onfeilIér:- ,de Murat fan mari.
"
.
. La Dame de Claret convenait que conlre la difpofition,
du Draie Romain., & d'après la Jurifprudence des Arrê.ts."
les créanciers de l'héritier peuvent, ainli que les héritiers)
'du défunt, demander la fépar<ition des hoiries. Mais elle::
Annics
'178~
& [uiv.
R
1l
�30~
1 0 t7 R. N '" L
•
obfervoitf.que 1a•.Dame-de Murat' ne pouvoit la deml!nder,
ayant fouffert la' confulio'ri des hérieages; ayùne pourfoivi f
en' concours avec la. Dame de Claree & les aotres créanciers, l'infl:ance. bénéficiaire' de l'hoirie de MI'. de Morae,
gui les confondaie. [o.'!e,es;, ayane acqLliefcé à la,SeneenceJde
. Ilang.emen't ;, .d~ns laqLlélle, eous ,les créanc~ers_ des di1férences
hoiries étoient rallgés., 'pouv ~er.e ray~s fur, [es biens r~uni~
fur la têee du ,lieur Conféiller de Ml1rae, & ayant laiffé vendre une.;parcie des biens. Elle citoi e les Loix l' & 2, If.
de feparat.; Lepretre; ceor.. l , chap. 76; Lacombe, vO.ftparatiol1!; parr. 2 i n. 2 & 4.; le Commeorateur.de nos Statuts,
rom. ~;1iag..l~23'~ & Boniface, -corn. ~, pag. 189; de {orçe
qùliLécoitürr.é:Yciaàbleeue.otJ jugé qüe la dot de laDdmlfde TI!ezan deveit être prife 'fur l'h~irie de Mr. de Murae, comrpe ne
formant qu'ûï1e feule & même hoirie avec celle d'Jg,nace,
de Charles. & .du Chevalier de·Saurin..
' ) " ' , iJ
.
::nliànE>arl1é l .de.. Claret .ajouJait, gu/ouere Qu'il écoit pr,efque
Împe$ble d~~faire la liq\iid:arioo ~ la fépa.rarion, 4es hoiries lés ~preniieres 'oe.:Conûfl:ant- qu'en. a-rgetJc comptant. &
en .effets pr6ci.eux qui avoieor:difparu , cette voie fe roi t, infmcroeufe_po.ur la Dame: de Murat, attendu. qu'avant fon mariage MI'. de Murat avoit coorraél:é -perfol)nelleOJ~oé,~une
hYlDoohequé.·en faveur de la· Da,n1)eh!dl: l'he~a.n, (a".m,e.re,
pOU'llllla !fomim:e cle tI)J ~oHv.'iqy'ibavoi( te,çue ~n;f~rçe pe .
la procuration gui lui .avbit été faîte, & qu'au moyen de ce
Jlhérieier.e' de la Dame de Thezan .avoie une hypothegue~!Inlé
rieure pour cerce fomme à celle de la Dame de Murat fur le
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caprral de 230.0Cl JiV.lW'
. , M r ê t du :d. Juillet '1783',' au rapPQcr,' de, MI'. ,le ,çonfeiller de ·Banon \' gUI confiDme ·Ià ISent~nc.e,,&._déb9ure 1;1
Dame d'e Murat de fa requêre incidenr,e avec dépens. Ecr,ivaDt
Mes. Pochet & Pafcalis.
' •
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PALAIS
ARRÊT
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-
DE
P1l.0VllNCE.
307
XXXV.
,
'
, Délihération prife q la pluralité d~s fuffrages, ·pour qjfurer
la continuité du fervice Divin, &, de l'entretien de l'Eg/iie
de la .valentine, ParoiJ/è St. Marcel, terroir de Marfeille,
confirmée.
.
D
1
•
,j
Ans le rerroir de Marfeille il y a plu lieurs Eglifes de
lécours, bâries aux frais des habiEans ~ po/fédans-biens,
des quarriers auxquels elle~ font ficuées; ces Eglifes on~
raujouts éré de/fervies par des Prêrre~ amovibles qui ln~:
fubliltoient que par des. quêres, des oblariqns ou des offrande,s. Dans la Paroille ,Si:. Marcel fe trou~e celle de la,J!illenrine; on y céleb-re la Me/fe; on X garde Je faipr..Sacrement & l'Huile des infirmes, & «n ,y, fair rour )eJervice
Paroi/IiaJ. Si l'Eglife a befoin d'être réparée ou réédifiée,
on fournir à la dépenfe par des impolitions & des cotifarions érablies par claRe; quoique ces dépenfes fu/fenr faites
par corifarion, on avoir biffé fubfilted'ufage des quêres pour
la rérriburion du Prêtre & l'entretien de l'Egh[e.\
\
Les Prieurs Marguilliers dénués d~ toute re/fource , &
frappés du rifque de voir le fervice difcontinyer, préfenterenr en 178 [ .une requête au Juge de St. Marcel, rendante
à. ce que tous les habitans IX poffédans-biens du quartier
de la Valentine fu/fent convoqüés au 22 Juiller de la même
a.nnée, 'pour délibérer, fous fon àUforifatiol} , fur les moyens
à prendre pour allùrer la continuation du fervice, de l'entretien de l'Eglife , de la facriHie & de fes 'dépendances.
Le Juge accorda l'a/fecnblée; elle rur t~nue_ le jour indiqué;
il Y fut déterminé " à la pluralité des 'voix, de fournetrr~ !1'ême
p4r contrainre au paiemenr d'une contribution per(o,n~elle
& annuelle, les habirans & po/fédans-bi~ns, payable par
moirié cha.que femelire; il fut nommé quatre Syndics pour
faire la répanition.
R r :l.
�j08 _
• ~,
:J '0
11 R- N 'A- t; l , --
•
Les Syndics munis de la délibération fixerent, fuivant le,.ur
pouvoir, la rétribution du Prêtre à 4,0 liv., non compris
[es Me1Tes & fondat}ons, & à 162. liv. la fomme néce1Taire
à l'enrrt'tien de 1'.J!:glife, orne mens de la SacriHie & dépendances. Tandis qu'on fe propofoit de faire homologuer par
]"a' Cour la délioér.ation, Cla).lde Mazer, Jean-François Carbonnel, Barthelemi Lion & 'Pierre Bouquier préfenrerent
unerequêre 3 la Cour , & obtinrenr un décrer porram oppofition à la délibération, & ajournemenr pour la voir ca1Ter;
dans la fuire il furvinr d'autres oppofants.
On difoir pour les oppof~nrs, qu'il eH 'hors de doute qu'une
délibédrion doir êrre le réfulrar des opinions de taures les perfonnes préfenres à l'a1Temblée; qu'die ne peur pas être
êcrite avant qu'on ait opiné, a,vam même l'a,1Temblée; s'il
en était autremenr, elle feroit non le vœu de tous les ilirére1Tés, mais un vrai monnre dans .fon efpece. Dans le fair,
celle-'Ci précéda les fuffrages; elle avoit été minurée avant
Ita1Ten1blée: donc -on ne peut pas la préfenrer comme le vœu
de tous les intére1Tés; donc elle efl: vicieufe. On ne peut' dif~
convenir qu'il y a eu dive,ruté d'opinions; or, fi la délibération n'eût pas été écrite, avant qu'on opinât, elle ne porreroir 'point: l'ajJémhliel a délibéré; on eûr dir : il a été délibéré à la pluralité des fuffrages telle & telle choie. Si l'on
n'a pris les fuffrages qu'après que la délibéra ri on a éré écrite,
fi la pluraliré n'a fait que confenrir au contenu de la délibération, ce que l'on appelle délibérarion n'dl: donc pas
délibérarion; car délibérer', c'ell di[cuter, voter, opiner, &
non' pas approuver. ~
En droit, il e[l; certain d'ailleurs que les per[onnes dont
l'autorité peut captiver ou gêner les fùffrages, ne peuvent
point affiHer aux a1Temblées; divers Réglemens l'ont établi
de même; les Curés & les Seigneurs font rangés dans cette
cla1Te; Serpillon, fur Vart. 3 du titre 2. de l'Ordonnance de
1667, pag. 29, rapporte plufieurs Arrêrs, & atteile que'
l'es Curés fone exclus par la même raifon que les Seigneurs.
Ici Mre: Efp'in'a1Ty, Curé de la Paroi1Te de _St~ Marcel,.
•
�DU
PAL.4.IS· DI!
PROVI!N'CI!.
affiŒa à l'affemblée du quartier, & figna comme
bérant.
- Il efi: certain encore, que les fils de famille ne peuvent affifi:er aux affemblées des Communautés ou d'un quar~
tier. Dans la délibération il y en eut trois. qui affiHerent;
elle efl: donc nlllle. Les Fermiers & les Mégers ne font
admis dans aucune affemblée. Dans le fait, lix-Permiers ou
Mégers affifl:erent à la délibération; alltre moyen de nullité.. Chaque délibérant qui fait écrire, doit ligner la délib~ration à l'infrant même qu'elle el!: achevée. Boniface,
tom. 4, IiI'. 10, tit. 2, chap. S, rapporte un Arrêt qui
l'exige. Dans le fait, plulieurs votans qui favoient ligner ne
fignerent point. Il efl: encore certain que rout titre. doit
porter' avec lui la preuve de fa légalité & de fa vérité. Or,
le Juge affure dans la délibération, -qu'ayant pris les fuffrages , la plus. grande pluralité a confènti au contenu dans
la préfènte délibération. Point de preuve de cette double
affertion; il exifl:e même une preuve contraire. Il y eut
d·ivedité d'opinions; il falloit alors prendre les voix des
délibérans féparément, & les détailler dans leur diverlité ; les
Arrêts rapportés par Serpillon le prefcrivent•.
La délibération attaquée efi: un ouvrage monfl:rueux où
préfiderent à fa formation le defpotifme, le fcandale, l'indécence, la cabale, l'inexaétitude; les loix, les bonnes mœurs,
le bien pu~lic en follicitent également la profcription. Les
. liabitans s'affembleront de nouveau; ils examineront s'il y
a néceffité de fupprimer les quêtes, s'ils doivent s'affervir,
s'il n'efi: point dangereux de rendre leur Prêtre entiérement
indépendant. Ils apprécieront à quelle fomme ils peuvent
porter la rétribution; quels pouvoirs ils pel,lvent donner aux
Syndics; ils concourront à la formation de la loi. qu'ils
f:eront déformais tenus de fuivre.
.
La délibération porte de fouméttre, même par contrainte,
les habitans & poffédans-biens au paiement d'une contribution perfonnelle & annuelle. Cette délibération tend -donc
à rendre forcée une rétribution qui jufqu'à préfent n'avoit
�3 JO
JOURNAL
celfé d'êtré volontaire. Il elt quefl:ioo ICI d'une Chapelle
;urale, d'uhe chapelle conféquemment de pure commodité:
or, tout établiffement de commodité eltvolontaire de fa narure; 00 ealibre d'en ufer ou de n'en pas urer; i.1s'agiffoit d'un objet
très-important, d'un objet qlli intéreffoit toUS les habitans en
particulier, fingulos ut fingulos ; il falloit donc le conrente""'
ment de chacun, comme l'établit Bacquet, des droits de
Juflice, chap. 29, n. 24; Dumoulin, Coutume de Paris, §.
31 glof. 4, n. J S; Craveta, de antiquitate temporum, parr.
4, chap. circa prœmiJ!à, n. 29. TOllS les Auteurs diainguent les objets commlinia pluriDus ut univeifis, des objets,
communia pluriDus ut fi,!gulos. Pour les premiers, quod major
pars efficit, pro eo haDetur ac fi. omnes eg~rint. Le conrente·.
ment de la plus grande partie ruffit-pour rendre valable ce
qui a été déterminé; pour les reconds, le confentemenr clé
tous elt ilbrolument néceffaire.
D'ailleurs cet objet D'eût-il pas intéreffé chacun en particulier, il étoit affez important pour exiger qu'il y fût déli.
béré à la plurdlité des deux tiers, comme le prefcrivent les
Auteurs, tels que Defpeiffes, tom. 3, des Droits Seigneuriaux, tit. 6, rea. 3, n. 3; Dunod, pag. 400 ; la Déclaration du J6 Décembre J764, fur l'adminiltration des Comtnunautés; & l'Arrêt du Conreil du 18 Novembre 1781,
ar.r. 1 t. La délibération attaquée ne réunit pas le fuffrage
de tous les habitJns & poffédans-biens du quartier, puifqu'il y a trente-quatre opporaots.
.,
Les Prieurs ne ceffenr d'affurer que cerre Chapelle el!:
une fuccurrale; niais ils ne le prouvent point; ils ne rapportent point d'Ordonnance d'ére&ion; cette OrdonnaDFe
étoit néceifaire, parce que c'ef!: l'affignat. du PaHeur, du
peuple & du territoire, qui coonirue.l'effeoce d'une Paroiffe ou d'une Succurfale, C'el!: ce qu'établiffent R~buffe .in
praxi, §. Siawimus 2, pag. 6)) , col. 1, litr. B', Pa Dorme
ad Ruér. tit. d~ Parochiis extra. n. 1; de Joano. Salva,
de Beneficio, quen. 42.. n. 3; de Dumoulin, tom. 4, pag.
97 1 ; Sdnleger, tjuœJ!. refol. Den.ef. patr•. 3, cap. J41,
/
,
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PAL AIS
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3 II
n. 4, [am. '" , pag. 4"', col. "'; Barbafa, de potifl. & Off•.
Parochi) parr. l, cap. 1; n. ",6 & '2.7.
Si cerre Chapelle eût été un vraie Eglife Succurfale, on
eût payé le Prêtre qui l'eût de1fervie, non en nature par
le moyen des quêtes du pain, du vin, des farmens, mais
en argent. On lui eÎlt payé non des fommes variables fuivant les faifons & la fatisfaaion que l'on avoir de fes fervices,
mais la penGon que les Edits & les Déclarations ont 'affignées aux Vicaire.s. Le titre qu'ont pris les Prêtres qui ont
fuceeffivement de1Tèrvi la Chapelle, jufiifie. que ce n'eH point
une" Eglife Succurfale; ils n'ont jamais ofé fe dire Secon'daires Pli Vicaires, mais roujours"Prêtres de1Tervans la Chapelle ou l'Eglife de la Valentine.
Les habitans de la Valentine- contrihuent, fur le pied du
cadaHre, à toutes les réparations de la ,Paroi1Te de St. Marcel.
Or, fi ,leur Chapelle eÎlt été une Succurfale, ou ils eu1fenc
été • ~écl]argés de, cette contribution, ou la Commu!lauté ~~ 1St. Marcel eût. elle-même fait conHruire l'Eglife
& la maifon du Prêtre, & les entretiendroit toutes deux,
ce qui n'arrive point~ Si la Chapelle de la Valentine eÎlt
ét~ une Succurfale, on eÎlt conHemment fait la Communion
1,>afc:!wle. Or, l\1re. Laurent, ancien Curé de St. Marcel,
el5igea ~ouj9ur!i que ,les habitans fu1Tent à la Paroi1Te. Ainli
r,exiltefJc~ , de' la Chapelle, fon état, la réGdence co'ntinue
(du Prêtre n'indiquent point une vra ie fuccurfale.
. La délibération étab1it quatre Syndics; elle leur donne
pouvqir de fe nommer des fucce1Teurs à la pluralité de leurs
luffrages; ,elle. contrarie par-là nos maximes les plus cer~aines,; c'éroit au quarrier à fe choiGr, d'une époque à l'au~fe, des Syndics; on ne pouvoit pas donner à ceux qu'on
élifoit le droie de fe perpétuer. En fuppofant qu'il s'agiffoie d'une vraie Succurfale, les habitans a1femblés pouvoienc
fixer eux-mêmes les honoraires du Prêtre'; ils n'avoient pas
befoin de nommer des Syndics pour ceUe opération; la
réparrieion feule néceffiroit des. combinaifons, des détails
donc il falloit fe remettre à des tiers: ·conférer à des Syndics)
•
�3I2.
JOURNAL
& fur-tout à des Syndics qui ont la faculcé d'élire leurs fuc-
ceffeurs, le pouvoir de fixer ces honoraires, fans. les affu-jenir à rapporter leur ouvrage au quartier & en obtenir
l'approbation, c'étoit les rendre les arbitres de la fortune
des habitans.
.
L'a forme de l'impofition ell: contraire 11 toutes les
regles; elle ne . pouvoit être que capagere ou réelle;
la taxe réelle el!: même la plus équitable, c'ef!: celle que
le quartier adopta en 1778 à l'occafion du cimetiere. La
forme prefcrite par la délibération e{l: arbitraire; elle e{l:
fujerte à mille abus, à mille ioconvéniens; elle autorife les
Syndics d'entrer dans des détails domefiiques qui doivent
être un myfl:ere pour eux.
On' ne vouloit plus de quêtes; on vouloit les toutes fupprimer; on vouloit' fixer la rétribution du Prêtre d'une maniere invariable; foit;- mais la fixation qu'en ont faite- leS
"Syndics, & que la délibération a approuvée d'avance, ·e{l:
exceffive. Mre. Mouren n'étoit ni le décimateur, ni le Çur'é
de la Valentine; il n'en écoit, d'après lui-même, que le
_Vicaire. Or, la Déclaration du Roi du l2 Mai 1778 fixe
la penfion des Vicaires à 250 liv., & les Lettres-patentes
du 15 Mai 1779 réduif.ent à 10 liv. les menues fourni.[Ures,. connues fous le .nom de (lerc & matiere. Durand de,
Maillane, vo. Succurfale, Lacombe, 11°. ér~c7idfl' art.. H;,
pag. 318, arteHent que le Vicaire qui deffert la Succurfale,
n'efi pas différent de celui qui travaille dans la même Paroiffe, qu'il el!: amovible comme lui " & qu'il 'n'a 1 que la
même portion congrue. Pouvoit-on fixer la rétributIon du.
Prêtre au delà de 260 liv., & fur-tout" la porter' à 450
liv.? La loi y réfifioit; la fixation qü'e-lle a faite efi- urie
regle dont on n'a pu s'écarter. -La fixation de l'entretien
de l'Eglife, des ornemens, de là facri!lie & des acéeffoires, offre les mêmes vices; tout: e(l: en bon état; l'Eg\ife a été récemment. reconfirujre. ·il en donc inutile~~de
lever une impofition pour des objets. qui' n'exiHent point
encore.' .
On trouve plufieurs autres inju!l:ices dans cette délibération ~
�DU
PALAIS
DE
PR'OVENCE.
313
ra.tion; outre le pouvoir donné aux Syndics de lever des contraintes pour pourfuivre ceux qui refuferoient ou différeraient
long-temps de payer leur taxe, on leur donne encore celui
de pourfuivre les oppofitions, même jufqu'au jugement; les
Syndics ne pouvoient pas être autorifés à pourfuivre les
procès qui furviendroienr fans confultation, fans l'approbati0!1
du ,quartier & même à fon infu. Il importe que le quartier
foit inHruit des oppofitions & des motifs fur lefquels elles
peuvent être étayées; il ne faut pas que quatre Syndics puif~
fent fou tenir aux rifques &; aux dépens du quartier un procès
qui peut être inj~fie, odieux, en un mot déraifonnable. "
On répondait' pour les Syndics & Prieurs, qu'on entend
par une Succurfale, fuivanc Lacombe, lurifPrudence canonique, va. érec1ion, art. la, une Eglife dans laquelle on fait
le fervice paroiffial pour la commodi'té- des habitans trop
éloignés de la Paroiffe; c'eH un fecours pour cette Paroiffe
ou plutôt pour les habitans..
Ce fervice dans les Succurfales confille principalement à
y garder le Sr. Sacrement & l'huile des infirmes; à Y célébrer .la Meffe de Paroiffe; à y faire les Prônes & les inftruélions paroiffiales rous les Dimanches & les Fêtes
Dans l'Eglife de la Valentine il y a la réferve du St. Sacre-'
<ment & des faintes huiles; on y fair, indépendamment des
'prônes', une domioicale, ainli que toutes les proceffions
de dévotion établies par les rits de l'Eglife; on y obferve
l'oélave de la Fête-Dieu; on y fait la bénédiélion des fruits
de la terre; on y inHruit les enfans fur norre religion;
on les prépare pour la premiere communion; on y donne
la Pâques aux habirans du quartier; on adminifl:re tous les
Sacremens aux malades; on y publie les bans de mariages,
ainli que les Ordonnances des Evêques & les monitoires;
enfin avant les Lettres-patentes du 15 Mai 1776, on y in!Jumoit les cadavres, & depuis la promulgation de cerre Loi,
l'inhumarion fe fait dans un cimetiere confl:ruit 11 cet effèt
par les habirans du quartier. Dès que tous ces exercices font
faits dans l'Eglife de la Valentine, peut-on dire décemment
AIlII(eS 1782 & fuiv.
Ss
�31 4
JO.URNAL·
que ce foit une fimple chapelle rurale deGinée feulement
il la commodité de quelques particuliers?'
Ce point de fait' ainfi établi, il fuit que l'Eglife de la
Valentine ell: véritablement. une Eglife Succurfale , qu'elle a
• ,toujours été reconnue pour 'telle dans touS les aaes qui font
dans les archives de fEyêché, puifquè dans l'.état des Paroilfes & Eglifes Succurfales ~tablies dans la ville de Mar- '
feille & fon terroir, elle y elt dénommée la premiere' en
'lJualité de Succurfale de la Paroilfe St. Marcel, parce ,qu'elle
eH fi ancienne, que fon éreaion, fa' fondation & fon établilfement fe perdent dans la nuit des. temps. Elle li toujoürs
été admillilhée .par des Marguilliers qui ne conviennent qu'à
des Eglifes paroilliales & à des Succurfales; elle a ~té qualifiée Eglife en 1723, lorfqu'il fut déterminé de conll:ruire
.une chapelle & d'ériger un Autel en l'honneùr de Sr. Roch';
la reconll:ruaion en ayant été ordonnée; elle l'a été fous
le titre a'Eglife, & elle a été bénie enfuite fous .le mêm~
titre; elle renferme dans fes arceaux, qui font diHinas &
féparés de la nef, lixdiiférentes chapelles dédiées à divers
Saints, ce qui ne fe .pr<ltique que dans les Eglifes', & non
dans les chapelles rurales.
Les Eglifes de fecours ne doivent leur origine & leur
établilfemem·qu'à·la q,pnimodité des habirans. Parmi les caufes
qui ont donné lieu 11 l'éreaion des Eglifes de fecours, les
principales font l'éloignement de l'Eglife matrice & la mort
de plulieurs 'habitans fans fecours des facremens. Le dillria
de la Paroilfe 'St. Marcel dt extrêmement valle., puifqu'il
renferme cinq Eglifes .de fecours, lefquelles fe fubdivifent .
en plulieurs hameaux, & que l'Eglife paroi~ale' ell limée
, au midi à l'extrêmité de fon étendue. Les limites du quartier de la Valentine commencent à un bon. quart de lieue
, de l'Eglife matrice, & ne fe terminent qu'au diHria de la
. Paroiife St. Julien, en tirant du midi au nord; ce qui forme
une diflance li' conlidérable, qu'il eH impoffible que les ha",
bitans du quartier puîifent alliHer <lUX offices 'divins & remplir leur devoir de religion à l'Eglife matrice, fans fouifrir
la plus grande incommodité.
�D U
,
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PAL AIS
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PRO Y B N C B.
3l S
Il réfulte,de Îa tranfaélion du 9 Août 1632, paIréè entre
le Prieur décimateur & les habitans poIrédans-biens de Sr.
Marcel, les Camoins & autr'es endroits, que le décimateur
prévoyant l'indifpenfable néceffité de confiruire des Eg.lifes
de fecours, indépendamment de celles qui ex.iltoient alors,
y-o\llut n'être renu & obligé que d'entretenir & payer à l'accoùtumée le' Vicaire, Sec,ondaire & Clerc par paéle exprès;
,& au cas que lefdits particuliers poIrédans-biens audit St.
Marcel, les Camoins & autres endroits voululfent avoir quelques Prêtres pour célébre, la fainee MeIre aux autres chapelles
dudit quartier, qu'ils feroient tenu~ de les entretenir & p~fer
à; Jeurs dépens. Cerre tranfaélion dél)1ontre i.urqu'à l'évidence
q.ue' les revenus du lieu étoient infuffi,fans pour fournir à ce
qui eH: nécelfaire à la confiruélion, réparati.O"n de l'Eglife
& entretien dq'.!1rêtre, el1fe1;llble de tout ce qui eH: dépendant. du Se(vjce,Divin.
,
"Cetre tranfaélion, concernant l'entrerien & le paiement
qu PrêCre de1fervant l'Eglife,, avoi! été rotalement négligée,
puifqu'au"lieu de' doter cette même Eglife pour parfo:urnir
au fervice & aux befoios du Prêtre, 00 l'avoit, fans fefpeél: pour la dignité de, fon minifiete, foymis à mandier de
p.orte en PQrt-e. Cet ufag~ qpj ,. .dans la primjtive Eglife "é-roit,
cOL),ftdéré CP!11.me pieult par laJ"4mP!içit~ qui ditigeoit les Pf~- •
miers fideles ,'efi dtlvenu odieUX- & indécent"parmi nous de-'
puis le relâcher.1ent dans la religion & le refroidi1fement de
la ferveur. L'Eghfe voyant que ce~ qyêtes" indépendamment
de ce qû'elle~'étoie!Jt iafrLjÇlue.ufes, !!:abOl~JiIroie:!f~ qu'à .eltpofér
fe:>.,.l\hnifirg,s au mépris .& à,(I\l.déJifiotlj, ,n'a voulu- ae~. ae):.
mer~rî! aUl;' ôr.dres,faj:rés que fous pp titre,J:!éül<a!, 'delP-raÎnte
qp'il~ !J~~,tQinbaIrent, d.ans c~t état' d'hu,miJia~io~ La IGOUÇ
~'.telJement-défaprouvé ces quêtes ,.qu'elle..,Je~ Il .•a,néll:llties
toutes l,es [disque l'oècaCion s'en efi <préfellt~é ,l téqiqill,
l'Arri!l~a~.. Ii7~9, r~..n.chbleQntre le Cllré Ide-St1 ~lJs,.vallie
àe,J3~JceÀ0Ô!l~tt.e ,_&,~eJiJi~d 30, Juil} !7-7.5, te!Jd4}'èn,f~Y~j,lp
des Prieurs du quartier des Acates, ParQilfe St. Marc.e1, qui·en'
c"lifirniaht là :d.éb1ié,ration portant profcr}ption & anéaoriIre:
SS2
�3 16
Jau RNA L
•
ment de la qéte, aUlOrife l'impofition établie fur les habitans
& po/fédans-biens audit quartier pour fubvenir à l'entretien de
l'Eglife, & plus encore à la fubfifl:ance du Prêtre dl:/fervant.
Après avoir difcuré le titre de l'Eglire .dè ,la Valentine,
& les revenus...du Prêtre qui la d.e/ferr, par uÎl calcul exaél:'
de tout ce qu'il retiroit, on obfl:rvoit qu'e le Curé- de St.
Marcel ne vint point dans l'a/femblée en qualité de délibérant,
mais feulement pour manifeHer à la même' ~/femblée les
làges & louables intentions de M. l'Evêq~e; qui ont pour
objet de profcrire ces quêtes indécentes, en prena'nt tles arrangemens convenables pour pourvoir à l'entretien des Eglifes'
& des' Prttres qui les de/ferv.enr, & affuter' par ce moyen
]e fervice divin dans les Eglifes de fecours repandues dans
les diflërens qbartiers du terroir de Marfeille.
Les trois enfans de f~mille que l'on voudroit rejetter;font tête pour délibérer, puifqu~ils font eux-mêmes petes è1e
fa'lnitie, & qu'ils ont été Prieurs '& Marguillier.s CIe l'Eglife;
leur Cuffrage efl: par conféquent valable & légitime. Parmi
ceux que l'on dit être fermiers ou mégers, & qui ne poffedent rien qans le quartier, il y en a un qui po/fede du'
• chef de fa femm,e, & les autres, quoique fermiers ou' mégers;
font devenus habitans du quartier, & 'ce(te qualité les (oumee
à lOuteS les charges & impofitioqs perfonnellés j1ux habitans, parce qu'ils, profitent, comme tous les po/fédans-biens,
de tous les avantages & de lOutes les commodités de l'habitation. Il s'agit, dans la délibération., de l'établi/femene
d'une·impofition. qui peût ~tr'e comparée à. un capage, à raifon 1
de. I)entre~ien'Ge l'Eg1ife & ,de l'eXercice db fervice ·divih
duqùèl 'on ne' pèut, fè' dipenfer; ils one doné ,intérêt àlila
délibérationl \ donc ils a,nt dû y être appellés ,pour y fuffrager.;
D~où il fuit 'sue les fermiers & mégers ont fu/fragé pour'
eux-mêmes-:& pour leur intérêt perfonne!., & non'. polJr les!
propriétaires qui doivent auffi' être impofés à 'x:aifon & eU'
égard à leur ,propriété.
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Au (urplus, on ne peùt difputer'que l'Eglife de 1a Valentine
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n!l .,P"R 0 V Il NeE.
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ne foit une Eglife de fecours pour le quartier, qui exifte'
depuis au delà d'un fiecle & demi pour l'utjliré de tous les
habirans & polfédans-biens qui forment un corps fournis,
non feulement de droit, ,à l'entrerien de l'Eglife, des ornemens de la' Sacrifl:ie & à fournir à la rérriburion du Prêrre
qui 'fair" lë' fervice divin; 'mais encore par la tranfaélion\du
Aoûe i63'2., par l:tquelle' tous le.s habirans & poffédans.-bieps
du terroir de Sr. Marcel abonnerent la dîme' moyennant
24000 liv.,· & s'obligerent, moyenn'lnt' cet abonriement,
d'enrrerenir leurs Eglifes, ou d'en confiruire à leurs dépens
&·de pàyer'ies 'Prê,rres pQ.llr en fa'ir~.Je.fe1Yj~e; en for-re que Lie
l'Eglife.n'exifioie pas, dix f!!milles fu$roielle p~ur demande~
féreél:ion d'une Eglife de fecours, comli)e l'acceftent tous
les huteurs, atte.ndu l'élQignement de .1'~gljfe m~t..rice, fan~
que l'oppofition des autres pûe former obftacle à cette érec,:
tion; à combien plus, forte raifon, ne s'agilfaqt.qu.e ;de ,l'en-,
tretien de celle rqlli· exi/l.e,' hl! pluralit~ doie-e)le~I',empprt~r!
fur les autres. Tel eft le prinçipe qui veut qlleJce qui "eL!:;
déeerminé par la plus grande partie d'une 'C,ommunauté dl,lèmen.r alfecmblée, d'une fodalité, d'un corps, d'un Çollege, fc:ii~
cenfé avoir été déterminé par tous celpçqui compofent ce même
College. C'eL!: ain(i qùe le décide la Loi 19 ,ft ad [Tl]tnicipalem..
&,de incoli~, & le §.,.~ .d~ la. L'9·.,16<1! if. d~, regp,lis,juris.
Il eO: éertam: que la. ~ehl>eratJl?n donc tl s'agie a palf~ A la
pluralité des fuffrages; ce qui eL!: folemnellemenc acce.!lé p'!r
I.e Juge qui a pris & re~u les opinions.
.
.
A~rêt du 17 Jl!iIIet, 1783 après partage, Mr. le COl)feiller
de CaQillon Commilfaiœ, & Mrde CQnf~iUe.r de ~am~{uell
CoèPRarrireur, qui déboqte_ les:,oppofans de leur.' s1emfl'1de
en calfation de 1<\ délibéranion, avec, dépens'J E.crivapt Mes.
'r
,-l'."
Sauvere,' Pellicot' Sei!lans & Raybaud.
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A ,R R Ê T
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X X X V J.
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Sur.la,· dèman.de e.q. caffi~i{)n d'une, vente confentie par. .rllfu~
frliitir.r,'·& ,un l1,u~re cohéritier" ratifiée par un cohéritiu;
&' attaqllée par. les cohéritiers qui étqiènt en même temps
çohéritiers de C/UJX 'lui, avoient confenti la vente. '
1
fpr'ien Jeal1', H\iiffier en-l'Amiraute de la- VIlle ae Toulon';
fait fôn t~fiâïnem ieb.8. Juillet: 1748,' par' lequel iUegue'
l'ufufrui't 'cile-,w ls'fès 13iens 'à 'fbn époufe qu'il'n'onime tutrice
& curatrice de: fès enfans, JOOO liv. à chacune de fes rrois
filles, & ·infiirue -pour fes héririers univerfels fes quarre
enfans- mâlès; il mourut da\\s cette volon ré, & après lui
lin gar'i0n' & bITe fille.. Dans' I~ fucceffion de Ciprieo Jean
i-l· y avoit' un maifon arre,ntée ''3) 0 liv. 'à Pierre Maillard,
Charpentier '& à \Jean Donâdef;' ceax':ci. en! firent l'acqui':'
fition,de la veuve->& de Sufanne Jean fa fille,.l'une.en qualiré
d'ufufruétere1fe; & l'~utre comme majeure & cohéririere de
fon pe"re; elles fe fifent'fort pour Jules.Jeaô leur fils & fré're,
auquehmes' pr\?l~irerit' ôeicfaire rAbfier le çonrrat à fon arJ'ivéè ';~fal vente· fut, pâ1fée: pour..r1e 'prix de 2)èd lil!.; à. '
éô,fupte "de laqûelle 1es àchJteu~s payerent 800' liv., '& pro.;
mi.rent de payer les 17°'0'< liv.' refiaD"tes dans une année"
avée promeffe de fà parr' des vepdeurs.de fqurnir éviél:ion
&: gahlIftie ' enve'r§I&I'~;nr-r'e.1tous"qu'ifl apparr,iendroit.
•
r
• :J\!àll 'aidé' ~rant 'revenû des' Hlé's dans' le ·mois de 'Jui
l''';
les 'a2quéreùts' fèfument",ira 'veuve' Jean de faire'.rarifier le comrat à fon fils aîné; ai'nli qu'eUe l'avoit promis.
Celui-ci s'y "refufe, & déclare qu'il ne fe fou mettra jamais
qu'à repondre de l'argent qui aura éré donné à fa mere;
& 'en conféquence les 'acquéreur~ anricipent de quarre mois
& demi le paiemèm des 1700 liv., qui ne devoit avoir
lieu que dans une année à compter du jou~ du ,oncrat, &
C
4,'
�DU
PALAIS
DI!
PaOVI!NCI!:
319
la mcre reçu,t cette fonime en préfence. &. du confe,nternent
de Jean fan -fils; elle feùle en donne quittance" Dix - fept
'ans après, Maillard & Donadei licitent entr'eux a maifon
& l'évaluent à 8000 liv. Les enfans de Ciprien Jean fes
héritiers fe ravifent & demandent d'être maintenus dans la
poffeffion & jouiffance de la maifo~ dépendantè 'de la fucceffion de leur pere. Donadei, for~e 'oppofitionau décret
de maintenue, & appelle enfuite Maillard en garantie. Les
hoirs Jean difent que la maifon ,apparrenam;, à leur 'Pere dont
ils fom héritiers, leur mere n'a pas pu la vendre. Les acquéreurs répondent au éontrair,e.que les enfans ayant été
héritiers de leur mere, ils fo'nt non-recevables à quereller
la vente qu'elle a faite de leur propre hien'; ils ajollten, que
Jean ainé eft encore plus non-recevable pour avoir, approuvé
la vente faite par la mere, & qu'a moyen de ce, 'ils doivent
être main}enus. O~, r~plique ~l c'§ fyll:êm~ 1°. que ?~an ainé
n'a pas v5lUfu apwçuver, la ~ye,nte; ,qu~JI ne [~ rendit, que
cau!ion du prix., &. que c'eU par cètte raif9Ï1 q~'l1< èn 'a 6ffë'r
la reftitl)tion. 2°. Qllé la me'fê 'n'ayant eu qlJ~ Sbo liv. 'de
dot, il ne trouvoit pas à s'ind'emnifer dal]s fa' fuccellion du
préjudice que pouvoit lui caufer la vente. de la maifon. 3°.
Par excès de préêalltion ils ,F.ép.udie'r,ent, él), fam que de befoin ferait la' fucceffion de léur m re; & enfin'il?; établirent
en poin~ â~ droit, que l'al;éna~ion' av.oi(~t~ piffée cont're ta
prohibition de la tbi. Il étoit forr ïndifférent que la mere
eût promis garanti~, ou que les enfans fuffent, fes hê'ritiers,
parce qu'il ell: tout {impIe que la Loi ne, peut autorifer une
garantie tendante à valider un aéle palfé coptre fj! proJ1i9i~
tion. Le Lieutenant fur ces' raifons,' au bénéfice' de 'leurs
offres, maintient les. hoirs dans la 'poffelftôn & jouiffance
de la maifon, ·enjoint à Donadei de la vuider, autrement
permis de l'en faire fortir uiam, manu militari, en lui rem,bourfant les 2')00 liv. du prix, les intérêts & les rép~rations
utiles, néçeffaires & permanentes, s'il y en avoir, ,C'ol!lpenfables avec les détériorations, au dire d'experts; Do'nadei ell:
en outre condamné à la reni{urion des fruits depuis le décÀ>
de l'ufufruitiere , & aux dépens.
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JOURNAL'
31.0
• JI
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Appel. de a part de
onadel, & demande fublidlalre
'<l'être maintenu dans la polfeffion de la portion afférante ~
Iules Jean pour une quatrieme, COlTjme coh~ritier de fon
pere pOllr un quart, plus ,pour la ponjon à lui afférante fur
la fuc~effion ~e Louis j~an fon fre}e prédécédé, & encore
pour la part à lui obve,nue par le décès ah inteflat de Louis,
rant à la DUe. Albert mere commune, 'qu'à la DUe. Suranne
Jean qui con[entirent, la vente; il demanda la garantie contre
le curateur nommé aux hoiries vacantes. Ce [yfrême fut fondé
li~. tur ce que la DUe. Albert &' !il DUe. -Jean s'éto~ent
obligées de faife' ratifie'r )'aB:e' de 'venté à Jules klrn, &.
avoient' pro'mis" garantie. Or,' fi les hoirs [ont héritiers de
la DUe. Albert, ils font' au cas de la regle: lJuemde eviaione
tenee aaio, eurndem agentem repellit exceptio. S'ils [ont héritiers de celui qui [eroit le garant exceptione doli mali, on
:r~poulfe l'a~i?~.~ çommé le'dit DIJP.eri~r. Il, eH,in,~tile 'qu'on
.rende à l'hentler du pere une' mal[ol1 qU'II ferOlt tout de
fui[e obligé' de rénare comme héritier de 'la ·inere. 2°; Le
'fieu'r b~nadëiJ s'éiève contre 'la répudiation de l'hoirie de la
mere, faite par les poirs Jean. 3°. Il s'appure encor davantage fur _,çe que' Jules~ean approuva la vente, en con{entant que, le pii]' ~n fût retjré;par {a mere. 4°. La mai{on
a pu être yendu1.Jnêrité par la mere, ou du-moins les hérηciers 'ne [ont fias. recevables à en réclamer jufqu'apres l'évé·.
Dement du parhge qu'ï'is" feroient enti"eux;' au-moins il fau'droit toujours· maiptenir la vente pôur la portion' ae l'a
mai{on afféranre' à Jules Jean, {5( pour celle afférante aux
DUes. Albert .& Suranne Jean fur la fucceffiçnr de Louis
"Jean leur -fils &"frl'rê.
. On répondoit'pour ies hoirs de Ciprien Jean, que fa mai[on
'appartenoit à l~ur pere dont les quatre enfans mâles étoient
les [euls' héritiers; qu'il étoit. indHférent que Suranne Jean
}lipulant dan~ l'aél:e 'eût figuré comme' cohéritiere de {on
.pere; de n'el1:' qu'une fraude pràriquée vis-à'-vis d'eUe &
-vis...à.vis .des hoirs : vis-à-vis d'elle" parce qu'il el1: notoire
qli"el~e' étoit hors' d'état de concraél:er., Cocnme héritiere,
co lIt
�DU' PAL AIS
DB
PRO VEN C B.
3:!. 1
tout acquéreur doit connoîrre la qualité de' celui avec qui
.
il contraae.
. En fait, il efl inconteflable que parmi les enfans- mâles
de Ciprien Jean, même lors de la vente, il Y av oit des
mineurs & des pupilles; la mere élOit tutrice & curatrice
des enfans; enfi'n le propre titre d'acqui{ition prouve qu'ils
n'acheterent que parfaitement inflruits que la maifon appartenoit aux hoirs Jean, puifque la veuve ne flipu.1e qu'ell
qualité de veuve &'ufufruauaire, & la fille en qualité de cohériti~re. Perfonne n'ignore que les aliénations des biens du'
mineur, & à plus force raifon ceux des pupilles, ne peuvent
être faires fans caufe, làns décret & fans formalités,' &
c'efl à ce propos que Duperier & fon Annotateur, tom. 3,
liv. '2., queH. 13, difent avec rai fan que quand les, formalirés
'n'one pas été obfervées, il eil lI1urjle de s'enquérir de la
lélion, parce que la Loi ./iqllidem au tir. du Cod. de prœd.,
fi aliis l'eh. minol'. fille decreto noll alien. dit que fi le fonds
du mineur a été vendu fans décret du Juge, fupetfluum !ffl
de viIi pretio trac7are.
'
Pareille vente peut-elle être d'ailleurs valab'le au bénéfice
de la garant)e qu'en a promis le mteur, ou lOut aurre
donc le pupille efl .J1éritier, & peut-on s'aider de cette cir.conflance, pour dire au pupille qui réclame, tjllem de
,evic7iolle tellet aélio, 'ellmdem agentern repellit exceptio? PerConne n',ignore au Palais que l'Arrêt rappor,é par Mr. de
Catelan, liv. 3, chap. 7, àccueillit la garantie, & que ce
Magiflrat tente d'établir une opinion qùi heurefemeot n~a
pas eu de feaateurs; il n'y a pas' même jufqu'à Vedel qui
ne Il! critique, & qui ne prouve par un A~rêt contraire, que
100 opinion eH erronée, & contraire aux vrais principes.
Il eH fans doute vrai que J'on ne peut pas attaquer lé
fait du défunt dont on efl héritier, & qu'alors on réclame
avec raifon 1:1 regle; que la néceffiré où l'on feroit de repondre de la garantie, interdit lOute aaion & la repoutre,
com:ne le dit Duperier, exceptione doli mali. Mais eH-il dtJ,
fur-rou t en Provence, quelque garantie, lorfque J'aae a été
Années l78:4 G' fuiv.
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1
�"3 2 2.
., 0 V RNA" r.
paffé contre la prohibition de ]a Loi, & '~'héritier de celùi
qui l'a paffé, ~ll-il non rece~abl.e à en ré~larner?
Quand la LOI prohibe l'ahenatlOn d'un bIen', cette mêml::
Loi ne peut autorifer un moyen qui ne ferviroit qu'à f<l'ire
fraude à fa difpofition; il n'ell p~s plus permis à l'homme
d'empêcher que la LQi n'aie lieu dans fes contrats que dans
fes difpofitions. La Loi fe réfervant la di~pofition des biens
des pupilles, il n'y a aucune forte d'autorité qui puiife
fuppl~er la fienne, ni aucune forte de moyens pour rendre
licite ce que la Loi défend. Aina, qu'il s'agiife de biens
fubllitués, de biens dotaux, de biens pupillaires, tout aumoins auffi favorables que les biens fubllitués, ou que les
biens dotaux, dans tous ces différens cas, lorfque l'acheteur
a acheté, fachant que le bien étoit de telle nature que la
Loi en prohibait l'aliénation, on lui dit avec raifon : fciens
emifli vitiofum, diç7a tibi Lex e.Jl; vous avez fu & dtl favoir
que la- Loi ne permet toit pas l'aliénation de ces fortes de
biens; vous n'avez donc pas pu les acheter; vous n'avez
donc pas pu exiger la garantie d'un contrat que vous faviez
~que la Loi ne pouvoit pas autorifer; en un m~t, vous
Gtes acheteur de mauvaife foi, à ce titre inexcufabJe, comme
le dit l'Annotateur de Mr. de St. Jean, & par conféquent
toute garantie ·ne fauPQit valider un contrat radicalernènt nul:
Notre Jurifprudence éll: étahlie par tant d'Arrêts qu'on
ne peut la méconnaître. Mr. de St. Jean, décif. 87, rap.porte le premier Arrêt qui ait jugé I~ quellion. Du perier
en fes maximes, titre de l'alienation de la dot, dit que la"
Cour l'a toujours jugé depuis l'Arrêt rapporté parMr. de
St. Je~n. Mr. de Bezieux, pag. 370; Boniface, tom. J: ,
col. 1334; l'Atte de Notoriété, pag. 102., attellent tous
que le mari peur lui-même réclamer de. la vente qu'il a fait
du fonds dota~, & on ne le foumet à la garantie pour les
dommages & int~r~ts, qu'autant qu'il n'a pas déclaré que le
• fonds était dorai; une infiniré d'autres Arrêts ont jugé la
même quefiion. Tel ell celui du 30 Juin 1760, rendu au
profit du Baron d'Oppede, cancre la Communauté de St.
/
�3"3
Julien; celui. du ::.8 Avril I7S6, au rapport de Mr. de Moiffac,
pour Maurel de Cabaffe; Celui du "3 Janvier 17S8, au rapport de Mr. de Fonis, entre Achard & fon coulin ; celui du
"2 Juin 1764, au rapport de Mr. de Gras, pour Breton de
la ville de Tarafcon; celui du 30 Juin 1766, au rapport
de Mr. de Beauval, pour Eloy de la Cadiere, & celui du
mois de Juin 1771, au rapport de Mr. du Poet. C'ef!: enfin
ce qu'atteHe Mr. de Montvallon, tom. 1 , pag. 16 l , &
tom. 2, pag. 279.
De ce que Jules Jean confentit que fa' mere retirât les
1700 liv. ref!:antes du pri~ de la vente ,. il ne s'enfuit pas'
qu'il l'ait ratifiée. En regle, la ratification doit être expreffe : requiritur quod jiat conjirmatio infPec7is verhis- prioris
cOfltrac7ûs; & on ne la préfume jamais, corn me le difent
Cancerius & Cafa-Regis : ubl alia caufa quam approhationis
pr-œfùmi potefl. Il. ne faut donc pas donner à la préfence &
au confentemenr de Jules Jean plus d'effet qu'il n'a voulu
lui en donner. Quand même il exifteroit une ratification
expreffe, où a-t-on trouvé que l'un des cohéritiers puiffe
vendre le fonds commun entre lui & des cohéritiers mineurs
ou pupilles? Tout le droit qu'a le cohéritier majeur fur le
fonds commun entre lui & des pupilles ou des mineurs,
conliHe à les provoquer à parrage, & à le faire ordonner
par décret du Juge; mais qoand il ne demande pas ce panage,
les fonds ref!:ent toujours communs; & dès qu'ils fonr communs à des· pupilles ou à des mineurs, ils font inaliénables.
La feule aliénation qui foit permife fans décret du Juge,.
c'ef!: celle qui réfulte du partage lui-même. Or, le fonds du
pupille ne. pouvanr pas être aliéné fans décret du Juge, l'aliénarion n'en en donc faite que COntra Legum interdiaa; elle
eft donc Dulie. Le cohéritier eût-il confenti, il ne faudroit
pas moins la caffer, ne fût- ce que parce que l'acquéreur
. Cachant que le fonds appartenoit également à des pupilles,
il ne pouvoit être qu'en mauvaife foi.
Dès qu'il en prouvé que Jules Jean n'a point approuvé·
le contrat, & que le fonds commun au pupille ne. peut pas
Tt 2
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PALAIS
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PROVIlNC'Il..
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10
U RNA L
être vendu, il feroit inutile d'examiner cet autre poiot, fi la
vente doit ôu ne doit pas fublifier en l'état. La quefiion a
ét'é décidée par Arrêt du 10 Juillet 1780 après partage, entre
les fleurs d Armand de la Tour fre,res de la ville d'Avignon.
Lors-de ce procès, les fleurs de la Tour avaient ven.du un
domaine commun que le lieur de la Tour réclamait; l'acquéreur voulait fe maintenir, fur le feul fondement que le
domaine, devait être affigné a,u lot des lieurs d'Armaod.
Tout le droit réfultant de la vente, difoit - on' aux Freres
d'Armand, fe borne à faire valoir celui qui compétoit aux
vendeurs, .mais jamais à dépouiller l'acquéreur; & c'efi ce
qui fut jugé.
,
Cette regle n'empêche pas que fl un des cohéritiers a
vendu ou diffipé, l'autre cohéritier ne puilfe imputer à fa
ponion fes diffipations ou fes aliénations; mais de ce qu'il
. le peut, on ne doit pas conclure qu'il le doive. Le cohéritier ne pouvant pas faire le 'préjudice de fan cohéritier, il
ne dépend pas de lui de fouflraire le fonds commun au
partage, & de l'enlever à fan cohéritier. D'ailleurs la fucceffion de Ciprieo Jean ne confifioit guere qu'en cette maifon;
il faut donc commencer de calfer & recombler le fonds, fauf
?J. J'acquéreur qui a acquis contra Legum interdiaa, d'attendre
{j'l'événement du partage affignera l'effet au lot de fan ve,n-'
deur. On obfervoit enfin que la différence des deux prix,
quand il oe coone d'aucune réparation, jufiifie elle feùle la
furprife pratiquée vis-à-vis de la mere, ce qui fuffiroit pour
calfer, parce que la Loi oe peut pas aocorifer que l'on
s'avantage autant que le fit Jean Donadei.
Arrêt du 11 Juillet. 1783' au rapport de Mr. te Confeiller
de Beaulieu, qui réforme la Senténce; déboute les hoirs
de Ciprien Jean de I~ur requête en maintenue & de leur
requête en déboutement d'oppolition en lefguelles ils font
déclarés' non-recevables & mal fondés; déclare nuls leurs
_ aéèes de répudiations déclare n'y avoir lieu de prononcer
fur les fins fubfldiaires de Jean Donadei, noo plus que fur
la requête en garantie; condamne les h.oirs de Ciprien Jean
à cous les dépens. Ecrivant Mes. Pafcalis
&........
,
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PRO V Il N C II.
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ARRÊT
XXXVII.
"'
, "
Peut - on répéter une {omme gagnée li un jeu d'exerci~e t;,
permis?
,
L'état du proces' étant fixé par un Jugement interlocutoire
qui efl acquiefl:é, peut-on enjiLile recourir li de nouveaux
moyens?
....
F
'Rançois Achard? PoilI'onnier de la ville d'Aix" fait u'ne
partie de boule au Martigues avec Thomas Gabriel,_
- Me6nier, vers la fin 'du carnaval 1778, & perd 7 à 8 louis
qu'il paye, foit en argent, foiten une montre d'argent.
Quelques jours après les joueurs s'attaquent encore, & Gabriel perd 69 liv, qu'il ne paye point. Achard redame fa
montre en paiement; après trois ans Achard fait affigner
Gabriel pardevant le Juge de Jonquieres en <;ondamn~tion
des 69 liv. Ce dernier préfente, & ne nie pas la premiere
partie de boule, ni le' g.ain qu'il y a fait, ni la rémiffion de·
la _montre; mais il fou tient qu'il ne doit rien à Achard,
que depuis l'époque de la rémiffion de la montre il n'a plus joué
avec lui, ni rené de fon débiteur, Le Juge rend une Sentence
interlocutoire, & renvoie les parties en propre avec témoi'nS, fi _
hefoin e!l:. Ce jugement eH communiqué à Gabriel, il n'en appelle pas; Achard produit deux témoins qui furent entendus,
ainli que les Procureurs des parties. Les plaidoyers furent remis
par écrit; Gabriel difcllta dans le fien les dépolirions, & fe
prévalut de fa minorité. Par Sentence définitive, le Juge
condamne Gabriel au paiement des 62 liv. à lu1 gagnées à
f la boule par Achard po!l:érieurement à l'épo'qlle du gain de
fon argent & de la montre, en jurant néanmoins fllpplé-toirement par Achard avoir véritablement après ladite époque,
de nouveau joué à la boule avec GabrieI , & lui avoir gagné
en deux fois 69--liv., & icelles lui être. dues. Gabriel appelle
�~ 26
JOlI.' 1\ N Ir. {:.
r
,-
de ce jugement pardevant le Lieutenant du Ma'rtigues, qui
le confirme; il s'en rend de nouveau appellant pardevant
.
la C o u r . ' ,
On difoit pour lui, qll.è l'appel de la Sentence interlocucoire
étoit auffi recevable que fondé, parce que coute aél:ion en
jy{hce ejl déniée pour argent gagoé 'lU jell, fuivaot les Qrdonminces du Royaume; on a même permis au mineur de
"épéter . ce. qu'il auroit, payé, & l'on a reçu la prellv~ par
t,émoins-,.ql1\lue prome../fe con'lue pou)' argent prêt~ provenoit
d'un argent gagné au jeu.
D'après ces difpofitions portées contre le jeu, on a refùfé
la preuve, pitr témoins d'une dette contraél:ée au jeu, quoiqu'oo.. l'ait accordée contre ces mêmes prome{f~s. Tout eH
favorable CQntre le jeu, rien ne l'ell pour le jeu. Gabriel
écoit mineur lors de la parcie de boule dont s'agit'; il eH
donc non feulement à' l'abri de toute recherche, mais il
pourroit encore fe faire reftituer, s'il avoit payé Achard; &
s'il lui'avoit fait une prome{fe, on recevroit la preuve par
témoins, comme la fomme qui y feroit énoncée, prQcédoie
d'argent gagné au jeu, & cette preuve remplie, Achard feroie
débouté de fd demande; comment feroit-il poffibJe d'admerrre
cootre ce même homme, que les Loix favorifent, la preuve
par témoins d'une demande q~li n'eO: fondée fur rien, & qui
eH contraire ~ la difpofition précife & lic{érale des Ordonnances? E;ar il ne faut pas perdre de vue qu'Achard n'eH
porceur d'aucune obligation, & qI/il fe préfenre comme une
jouellr ~ui a gagné un mineur, que celui-çj nie de lui rien.
devoir. Rien n'a.utorjfoix donc Je Jug~ à admerrr~ e.n faveur,
du jeu une preuve prQ(çrite par les OrdQnnaJlc.es:.
Inutilement diftingut:roit-Qn les jeux. d~ hafard & les jeux
'd'exercice; çar, à proprement dire, il n'en eH auc,un de
permis. Le jeu eft trop .contraire 11. l'intérê.r pnblic &. aux.
bonnes mœ.urs pour être toléré; ce n'eft que jufqu'à; Ul\l
certain poi,nt, foit pour ne pas priver les. cicoyens d'un,
exercice faJutaire, foit pour l~r laiifer un déJaŒ!ment, qu'un
joueur ne p.t:ut pas être po\!rfuivi p.ou)'. avoir jOll.é à un.. jeu'
,
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P ÂL*I's
n
':
DIl' 'P'itOVl!NCJ!.
'32.7
rolér.è, -comme' il le feroit s'j( avqir lQué"à un ljéii' Jéfendu.
Cette dilHn~ion celfe 10r[qu'i1 s"agit de' fe firire- payer un
argent gagné au jeu; on n'a pas plus d'-aétion pbur fe faire
payer une Comme gagnée à lin je\l toléré, que I~on en au!oit
pour s'en faire payer. une qui auroit éré' gagnéé à un jeu
de hafard. Le refus de cO\lre aétion n'ell: point fait à celui
q<li aura joué à rel ou rel jeu défendu; mais on la dente
pour le jeu en général; & par conféquem pour toute forre
de, jeux.. Brillon obferve que quelque innocent que fdir le
jeu de quilles ou le jeu de boules, il n'y auroit poi;;:t d'aétion
pour êrre payé du gain; cet Aureùr rapporre un Arrêt du
Parlement de Grenoble qui le jugea de même.
Le Commenrateur de Duperier obferve fur l'Arrêt que
cet Aureur rapporte, que par l'arr. 138 de l'Ordonnance de
162.9, les dettes & obligarious-èonrratté~s~à )'occaucid 'du
jeu fom déclarées. nulles. Dans l'Arrêr de Duperier il s'agif[oit. d'un majeur; & le Commentateur obferve encore qu'il
en feroit aurrement, s'II s'agilft;>it ,l'un mineur, puifque l'~rr.
~ 9 de l'Ordonnanèe de Moulins ordonne~ la répéririon; s'il
a payé. La doétrine du nouveau Commentareur de DOS
Statuts, qui cire également cet Arrêt de Duperier', n"ell:
pas-mieux' applicable que l'Arrêt lui-m~me; d'ailleurs il ell:
le, feul qui aie âill:ingué les jeu,x de hafa-rtl , des je~x d'exet'cice, pour ce qui ell: de 'l'attion compéteqt'e, ault 'joueurs
pour fe faire payer; le contraire dl: établi par rOU5 les autres
Aureurs.
En vain oppofe-r-on ·une fin de non recevoir à Gabriel,
pour avoir acquiefcé à la Sent'ence inrerlocutoire. Il s'agit
ici de l'exécution des Ordonnances, de l'arr. ~ 9 de celle
~e Moulins, & de l'arr. 140 de celle de 162.9; c'ell: d'après
ces Ordonnances que l'on dénie roure attion pdm:, dette
coorrattée au ieu; que l'on déclare nulles roures .promelfes
ou obligarions f-aites pour argent gagné au jeu; que 1'b11
reçoit coorre ces promelfes 'la preuve par rémoins de la
~érité de leurs caufes, lorfqu'elle elt déguifée fous le nom
de prêt, & q'Je l'on refufe la même pre'uve à celui' qui
�2.8
, Ju
1
U RNA L •
n'étant porreur d'aucune o.bligation, demande une foltfme
qu'il prétend avoir gagnée au jeu. Ce font ces mêmes Ordonnances qui pr!Jtegent le mineur" & qui l'auto'rif~nt lui"
_ fes pere, mere , tuteur & cUratEur, nOIl feulem~nt à ne pas
p2yer, mais encore à rép~ter ce qu'il a payé; ces .Loix
ont le bien p~blic & les mœurs pour objet. Le jeu entra'îne
avec lùi tant d'abus, & de malheurs, qu'il étoir de 'la fageffe
de nos Roix de ne point l'aurorifer. La fin de not! ~ecevoir
oppofée à. là demande d'Achard, & qui porte égale~ent
contre la Sentence interlocutoire, eO: donc unè fin de non
recevoir d'ordonnance, & de droit public. Or il ell: de prin'cipe que' nul acquiefcement ne peut couvrir ces fortes de
fin de non recevoir;. on peut les oppofer en tout temps &
dans tout état de caufe: c'el!: ainu que le décident Thevene<Ml, Charondas, Lepretre & Faber.
La Sentence interlocutoire doit donc être réformée, &
l'enquête prife en venu d'icelle anéantie. ,Il ne rel!:e donc
plus. qu'une demande fans preuve dont Achard doit être
débouré, foit" parce qu'elle n'el!: pas jufl:ifiée, foir parce
que,
elle l'étoit, Achard n'aurait .point d'aél:ion pour la
faire' valoir en Jul!:ice. Gabriel difcutoit enfilire les dépoutions des tém~:lÎns de l'enqu~te,- & le ferment que Ja Sentence accordoir à Achard.
,
On répoJldoit pour Achard, que la Sentence interlocutoire
lui impofoit l'obligation de prouver fi depuis la rémiqion
de la montre il y avoit eu une parrie de boule entre Achard
, & Gabriel, & fi c.e dernier y avoit perdu les 69 liv. qu'on
lui demandoit. Or cette preuve efl:-elle faire? Il ne faut que
lire les dépoutions des de'ux premiers témoins pour en êtrè
convaincu. Il efl: certain que depuis que Gabriel avoit reçu'
la mOJ]!re, il avoit joué -avec Achard, & qu'il avoit perdu
23 écus.~ Si la vériré de ce fait, n'était pas bien conl!:atée,
fi on po.uvoit conferver q'uelques doutes, ne feroient~ils pas
diffipés par' l'obligation que la, Sentence ~~npofe à Ac.hard
d'affiqner à ferment l'expofé de fa demande? Cel!: le fentimept de Danti dans fOll Tràité de la preuve par témoins,
pag.
9
,
�DU
PALAISY Dm ,.,p'.ROVENCI!.
•..
329
.pag·,43 , & du nouveau Cpmm,entateur dé'nos Statuts, tom.
,1, pag. 77, Ainfi donc Je, J ge 'a pu 'déférer. le fe'rment à
.Achard , quoiqu'il eût pu s'en difpenfer•. L'objet dont il eft
<Jueflion eft de peu de valeur ,. fur-co'ut vis-à-vis quelqù'un
qui avoit gagné le double de ce qu'on lui demande.
En fuppafant l'exception' de Gabriel bonne; il auroit fallu
qu'il la proposâtavaJ1c- la Se.ntence interloCL}coire,' & il ne
l'a pas fait: omnis Îrller!ocutio prœjudicat: 1 Cette regle et!:
triviale; les décifions de la JuHiee feroient illufoires, fi on
s'en écartoit. Auffi une fois qu'une Sentence inter1ocuto.re
il fixé l'état d'un procès, il n'dl plus permis de recourir à
de nouveaux moyens. Cette regla en fi certaine, que même
dans le cas où le Juge auroit rendu un jugement interlo- \
ëutoir'e qui feroit injufte, fi la partie n'én a pas appellé, fi
elle l'a lai1Té exécuter, tout dl dit, &-elle doit être condamnée
nonobf!:ant les nouveaux moyens & les nouveaux titres qu'elle
peur avoir rapportes.; c'enc~ qu:obfer-ve· Julien ~ans fon
code manufcrit, v~~ judex, cap, J, n. 2, litt. B.
L'exception que Gabriel propofe, & qoi eH :.:aujourd'hui
non-recevable, auroit été mauvaife, s'il l'eût opp'ofée quand
il Je pouvoit.. En effet, toutes les Ordonnances, toutes k.s
Loix défèndent les jeux de hafard; niais il n'en ell aucune
qui ·prohib.e les jeux d'exercice. Bien Ibin 1e là; <les Ordonnances lX les Réglemens ,en défendant. aux Maltr.es cies jeux
de' paümes de-donner.à jouer' pend'ant lèsoffiées divins,. à
.1oure.perfonne de jouer aux boules dans les chemins. publics,
permettenr ces jeux auX. jours ordinaires, & dans les lieux
4:jlli 'ne font. pas prohibés. On a donc.l'àifon de dire que tes
~oix, eh,refufant aélion pour· les dettes contracl:ées au jeu de'
pafardj ne la refufent pas'polIr l'argertt gagné aux jeux permis•.
Cerre dilt.i~ai-e1fé[ôi,ç;eoônue.~~ns I~ :droit Romain comm,e
dans le norre; c'ef!: ainli .que 1 etabht le nouveau Commen:-.
cateur du Statut, COrn. l , pag. ~ ~2.
• Pour prétendre qu'on ne peut pas renoncer. à nne loi
de poli~e_, il faut qu'elle exiHe; & en fait, il n'en eH aucunè;
qui défende le!\ jeux d'itdreffe. Pour ce qui eH du 'privilege:
Années %782. ~. [uiv.
V-v
�330
Jou
B. NA L
de 'l'âge, on ne conte fiera pas que le maJeur puiife y renoncer; c'eH ce' que Gabriel. a fût en jugement & en
majorité, puifqll'il n'a pas réclamé fon priyilege avant la
Sentence interlocutoire; & l'on connolt la regle in judù:üs
- _ ,'<
'luqfi contrahitur. 1
Arrêt du 21 Juillet 1783' au rapport de Mr. le Confeiller
de Lordonné , qui confirme. la Sente"oce avec dépens.. Ecrivant Mes. Agu.illon & Gras.
'AR,RÊT
XXXVIII.
L'ainé efl c~lui 'lui Je trouve effec1ivemtnt tainé "lors de
l'évéllement de la condition Il la'ludle le fidéicommis efl
fuhordonné.
2,0. L'interruption des degrés par le prédécès de ceux 'lui [ont
aux degr,és inte,rm,édiaires, n'empêche pas 'lue la difPqfition
n'ait [on effi.t en fa,yeur de ceux 'lui font appellés dans <les
degrés p'àjlérieurs.
1°,
E fie ur Louis d'AudiJFret, Capitaine au Régiment des
Gardes, par fQn tefiament du 24 "Janvier 1741 legue
au Marquis de Greollx fon neveu la, fomme de 66000 liv,',
& les intérêts qui lui éraient dus, s'il vient à mourir (ans
enfans mâles. Le refiareur fuhll:itue à fon autre neveu,
fetond fils du fieur Honoré 4.' AudiJFret fon frere, la même
fomme de 66000 liv. en" principal, & celle des inrérêrs
dus au fieur refiareur; & fi ce fecond neveu venoir à mourir
[;lns enfans mâles, le tefiareur fuhllitue la 'même (omme,
tant en principal qu'intérêts, à Mre. Fran'i0is de Bau1fet
[on neveu, fils d'une (œur du tell:ateur, & à fon défaut à
l'aîné de (es enfans mâles qui pourra (e marier; legue en.
core au fieur f ran'i0is de Bau1fet un contrat de 20000 liv.
fur les Et,ns de Languedoc, & eo cas de prédécès, à
rainé des enfans mâles qui pourra fe marier.
L
-
�DU
PAL~LS' .DB
P
OVIlNCll.
33 t
-'Louis Q'Audilfret lî)1ourUt en- 1744-; Fr3ncois de; Dauffec,
qui lui furvécut i, recuéillit le legs de '2.6~OO liv., &: le
tranfmit ~ l'ainé de fes enfans mâles. Le Marquisâe Greoux
recueillit ,également, le legs de 66000 liv. prinéipal &:. des.
intérérs. A fà ,mort furvenue au mois de Septembre '1781-"
il ne laiffa que deux ,filles, l'ainée mariéè' au Marquis
d'Albertas, & la cadete 'au Marquis, d'ArtignofC'. Le frere,
cadet du Marquis de Greoux ne recueillit point.
,
François _de Bauffer mourut' en l'année 17) 2. , délaiffanc
trois enfans mâles, Marhieu-Nicolas, Hilaire & Hipolire.
Le premier mort en 1767 Ambaffadeur en Ruille, laiffa'
deux fils. Hilarion de Bau1fet; Chef d'Efcadre & Com~
mandeur de l'Orde de St'. Louis, ayant vu arriver l'événement de la condition appofée au teHament,~e Louis 'd'Audilfret, réclama les 66000 liv. comme étant l'ainé des enfans de' 'Franc;ois 'eiuant à là. mort~ du Marquis de Greoux,
&: aYà'rn la faculré -de fe marier. 'Son- 'nev.eu, fils ainéide
Marhieu-Nicolas) intervint dans l'inIl:ant~, & réclama la
fub,fiii'totion ''è'otnme rep'réfenranl fan V'ete. Ces' d'emandes
furent portées 11 .;des nArbitres qui, 'par 'leur Sentence du
2)' Fé-vrier t:78g; déclarerent le fidéiéommi$., (J'uven en'
filveur' de,:Mr-e. de.BilUfil!t '1 & ~rdonneretlll,'q!le. fur les fins
conceJ"nao't' la compofirion do lidéicommis:, ,l'èS parûes- plus
amplenrent .ouies, il 'Y fero'ft pourvu. ~Appel' de cieue Senrence' de là pJtt des Marquis d'Albertas & d'Acrignofc.
Mre. de Bauffet en appella au chef du plus amplement oui
con~ceFna~r, la éompofir'ion du fidéicommis. vf
•
'oilcâifoir -pout lèsdieurs d'Alber'ta-s"& d7Artignofc, que
[(lute: :fubfHtution -emporte àe,foi une difpofirion conditionnelle; bl!, ,fi l'O'n v.eut; la::condirion tacite' que le fubfiitué
verra atrj\'er l'événement dé' la condit~on ,. & que dans -le.
cas où 'il aurait préd.éèédé, la fubfl:irurion fera nduque,.
le ,grevé li~éré de la c)lar!fe" & les biens qu'il é,toiflcharg~'
de rendré,- ,libres fur ,Cà "tête!
J"
' ,.
•
Si la fubfl:itlJtion parcourt dilférens degrés, il faut, que
l'un de 'ceull qui 'folit" appellés dans les dilférens llegêés
VV2.
�33~
furviv.
oJJ6. U 1tŒ. r. AI <r t1 <l
a.If grevé. ,'\ & ; s"l~ !1'OIlt cous-,rprédéj/édk, da- ·{pbHi.:
.'I:lI1!i"
Nltion dl: également lcaduquel & !l&\é'lqnottirlJ:J5J;~ûteifubf.
_ ,lir~rioo' eH; de drci étroit, ,'lij.mprorQgeabl<:li" jÏliflIrcep.ri~
hl . d~exteqlioo. LIon <!l.e~pe:u ' :ai ;(~'ppléer' lUlnde.gré ;qUt n'a
p~~été ;:p.reYiIaJJpic. ·Ié rMhre.\u· pni).ool aI'9tJ"1I(jjl ):1lllk19Urrei
qu:iho1i pas Qifi.gné. EJll Pfo eue', te réful.rac. @'rous nos;
pr.inéipe:s aéré d'en'yiGlge.r les ,fUltI.W:ltfioDS ioq.5, le vérj-,
rable point de vue qui leur efl: 'propre, c'efl:-à-diçe, de les
regarder cOl11me ç.Do~r.ajres. à. la 'liberfé. du commerce, à
l:in!~rêt_lde la. ipopplat/:oh"lI·à -l'égalüé .qlJ:il dait, y avoir
(llirrè treJes ,teamme .tendanr.• enfill. ,àtfa,ite {uryivre l'homme.
à, lui:.rnêil1e' .~lali. '1esl~géoé~ar;è>os fUNres, & .il gêner-, le
v~ritable 'propriétaire ·d-ans21':tdtnini!l:rariGil d'Ilo: bieo:lÔ0nt
il 'jQuit à l~oln'bre. •..de_Ia~,Loj .. ·.
". .
_f Delà, Villie
fu.hfl:.iturililO grad(Jeil~ 1!x. ,perpéwelle parmi
notl!iJ~ Delà ,!ilu"hie.u
uije31d:lljJf('l~ par.llPltrw aux"fpbfiiturions
.
quarte :cjegrés"r.l9infbiwtiQI1.n.6n ~:Çoti1prife:"(Qommè aill€(urs.
llOUS :n'eJ!. avon~ 1amaÎs(\idr;nis·que.ideJ]x. Dd:1P~RCO.œ, ,au.
lieu de fuivre l'exempleldtl Pa.r1e.l11èot3de· T<OlllsllIfe,: qui\ne.
compre .les degrés que pâ('i)giBér.~iipJl j,"d.e lJl<uûere que dix
frere.~dùr, 1a.-:tAte de{qllels.. rOlJle.,fvlcjljfiv,ep1ept la {llbfiitl,)
Liart oe .f-o.llt:qp'u.n-~ f~lJh~egré';J \loul>.~dîIoJis ,illI;ko.ntraire ;t
a.utant>.detêr~.s!,,:nil'am dèLdegth'Il'NJ~~S .qul'{ I~ldeg.r.é
été rempJi. cumJ~effec?I/"jvdeJlt .1Yt0'O.âri~nsi, l'inititl,)fjÇ\\Ii:(~QfjJ[;
c;omprife,' rendent ;lUX hiens"'&lJail ~ernierr fu)jfiit~éd.eun
liberté . natll~elle.. .
.~ 4 .r~ ~'i~ jq~ (
. du' -[ _0 .~ . ~
L'on peut doqc' .c.onc1ure. rdellX •td:)ti feSj ~t l~uQl'{ "qll:ib Fau
néçe lf:t?rs- u;'.é or 'c: u~ 1esdilcb-Jl:.J ,\lis ë ~p.p.è 1~ p.a Dùl~ 1(fli llanî.è nt
deofJihlî 1d}avdiJf~r aienri for i5C"·~lflYhlri1l1is.Jlh:: :Gte!!u~
liolJr tjuè .le ~fipé'cpmll1t4s'i:n~n~iUBas~:cs,adl,l(l, &t les pièn
P.lr <Co ofc\sJl~nt libres) fur (à l,tête; &. l'autre ,'f qu.e. pour dé- ,
eider. iL le tiPéicoO)rnis éfl: .pu n'efi pa.s ·,calJuc, il ·fa.lJt n6-1.
)
~Q'weITient fe' renfermer d3'ns.la t1ifppfiriQb !lllllt~Qal1Jent ,L
&-ne pas fe re;me[[~e d'amplier.la N'ocation oi f 4'IJQ! c;as" DÏl,
d'lm ~J;le1fèn:)~ à I;aurre. ',1' -,:,.
r
J1J:.··rcl,j 1,;:.~ .
C, ~ l~q\li
de- Greoux étp}c ~' abord. gl:iljvé 1v1,S~à-Nis ,d.e.
.
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�,)) u PAL A'\!i, -)) Il 1 P l1.. 0 VEN C E; ,
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fOj:),;fr~re, ènfiJit~ vi~-à·,vis de .:f,(.an9~i.: ;Fe BaulTet, & à
\
fpn défalit,'Cln fav,euT d~ l'aiqé des ~,nf:{np mâles de Fran'fOis de' Baulfet qui pourra fe, marier. tHilarion,de Baulfet,
véritablement, fils' puîné de 'Françoise "qui ne s'eH pa,s,
IParié jufqu'aujoyrd'hu.i, quj s'eH, ~ega.r9~, comme cadet de
l
lilr fam~lIe de Bilulfet" doit oil ~gurer 0\l1me l'aine.,. par cel,!-,
'feul,qpe ,[o'n frere ajpé" Machieu Nïc.olas., l'a prédécédé ,.
!\lais courefois en délailfam des enfans mâles? Il eH vrai'
qu'à l'époque de la morc du Marquis de Greoux, Hilarion
de Baulfet étoit le pIns âgé des enfans de. François; & l'on
convient que (i, la .difpofition de Louis d'Audiffret n'avoit,
~ti décidée que par l'ancienneté ou par l'âge, il ne devroit
• p~inf y avoir' de conte(tation; mais en droit, ainfi que,
dans les vues, de Louis d'Audiffret, l'âge de' ,Ces t,~ois neveux de .Baulfet q!J'il çonnoilfoit, n'eH entré pour rien; &
ce quhle prouve ,. c'efl: qu'il n'a pas appellé lec plus âgé.
'1. C~ .q.ui· Je
prolj~~> 'encore mieyx, ç'~,f~ que le, plus âgé
9P m~il.;Je' I;ail}é: pe,fû~:,i1 pas. le fujec apte & ,d~lli~é à 'pe;!'':
MOJe!:i·~e~l1Qroll!,:lCikllll!he,de la~fatpille '" (qn" âge o.u.. fil
qualité ne'{feroi~nç" gu'qn titr y .~lérile qUI ne p'Q\I,r.roir, j~rnais
!ui"mérice,r I~ .-bénéfiCie .de~la yo.catiqn i j::I;(l ". mW.',€\éG.,Me~t:r, b-je~ ewre.tréJ!lelJ~"'fes ,[PRts". l'Çli'1~ qu~, ppw,a, Je.
fJJ.tlrJ'eJ, -,rA,rnft, J:lue .l'~!pe- fOI~ fretre.• oJu, IÇh.eva.h~L qe
M1l1~e . ).L'JnSI (eJi\ PSls,.fct. ainéj.,d0n,~ pè-rlej I,e F~Q;a,Tent,
p~~{ie5flu'il,.·Q~ ,p~ORn}l) ,p;as.,:fe, Itla!:i~{ ;.. ~ s'il voit Ill' iver.le~
jourl"'d,e 'l.a cqndition·, 'la fubllitution fera nécelfairément
èadu,que,. ,quant à cè qui .le' concern~ ; & elle le fera,.
p-~r~~:rqp~.,J~i ainé~.n'il!i[a p~~ la, qu,a'lité. requife pour reèJJ~l~rl~); 't:nals ,la ,m.ê.me, fuqllmmon ne, fera' .pa~. c~duque
yik,hy!s( d!:!. f.on puJl)é~ qui, fcr .(er,a ,[parié, ,pu qui pourra,
fe marier:, parce gue, c~. puîn~ '. quojque ~oins âgé gu~;
fon, ainé, fera véritablement. l'ai né de la maifon, & il n'y ,
l!' que .c,et a,i,né que LO\lis. d'Au,diffret ait eu en vue; l<r
~Qt.,
pourra Je' 111grif~' ne laiffe aUfun.Aeut~1 fyr. J~
y4l'~t~: de c~[[elexplic~,ti0m
.~
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• i ;1. [If) , ' ;
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'Sj,Matllieu ~iç.Q)ashl) ~.jné étC2it 4ç~~dft; fans,entad, .~i
qui'
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JOURNAL
334
n".
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" b lement• l' aine,
• , & J'1 Jerolt
r.
"
arion de BaUllert'lero,lt
venta
Jltt·'•
po/Iible de conteHé'f'I'ouverture de la fubHitution en fa 'faveur,
parce qu'il a furvécu au grevé; mais Je véritable ainé, Mathieu
Nicolas, ayant délaiffé'des enrans mâles, Hilarion de Bauffet
peut-il encore fe dire l'ai né, quand il exiHe des enfans mâfes
de l'ainé? Me. Decormis, rom. 2., col. 122. & 42.3, examine
précifément en ces deux endroils, fi la vocation en faveur
. de J'ainé peut fe vérifier fur la tête de l'o'ncle au préjudice
du fils de J'ainé; il la décide en faveur du fils de l'ainé. Enfin la quefiion fouffre tellement peu de difficulté, que les
Auteurs latins' ,nous difent què verè apud omnes gentes &
Tlariones, cau[â nepotis adversùs patruum ftmper fuit potior.
( Molina, lib. 3' cap: 6, n. 2.; Sanleger, réfol. civil. parr.
1, cap. 89, n. 4,) ,
Que le vulgaire confonde l'ainé avec le plus âgé, l'on n'en
eH point furpris; mais en droit, ce fane deux qualités différentes. On pénetre la volonté du JeHateur, & on examine'
s'il s'eH décidé par l'âge ou par la faveur de la progéniture.
~uand îl.n'a parlé que d~ l'âge, fand douté J'oncle plus âgé
doit néceffaireînenc l'emporter fur le rieveu; C'eH l'hypothefe
q~ l'Arrêt .,:apporré par B3'iTet, 'où il n'y avait de' vocation
que pO,ur le plus âgé; mais quand Je teHateur a appellé
l'ainé,' c'tfi 3';1tre chofe. Hj.larion- de ·Bauffet n'e1l pas l'ainé
par pJ\lfieiHs ~aifons: la prem iere, parce que le droit d'ai.
nelfe, qùi n'eft pas un bénéfice de ,t'homn!e, mais une'pré.
rogative de la Loi, fe trouvant une fois fixé- fur un' individu,
t{lut autre ne peut l'avoir qu'en prenant la place de celui
qui l'éroit. La deux1eme, parce que Je mot ainé emporte
dans fa fignification naturelle major domâs,' celui qui eO!
defline à fouleni. le n{lm & le Mhe de Ja famille, commé
le dir Je CàrdinaJ de Luca-, de jure patr. difc. -2.1 , & Me.
E>ecormis. La troiliell]e, parce que l'exiflence des eofans
~e l'ainé radiquera toujours fur leur têre J'aineffe, qu'Hg;
{eronc toujours la branche ainéè; & il. n'ell pas poffil:iJe
qu'il y ait un ai né qui ne foit pas de la branche ainéei
Hilarion de Bauffet fera ou pourra étre l'ainé de la branche
1
�DU
PAL AI S
D Il
PRO V II NeE.
33 ~
'Cadette; mais il ne fera jamais que cadet vis-à-vis de la
branche ainée. La quatrieme, parce que dans la famille de
Bau/fet, comme dans toute autre, il ne peut pa s y- avoir
deuxainés, Tlon po.f1ùnt 4fè duo primogeniti, dit Barri, lib.
8, tir. 7, La cirtquieme, parce qu'Hilarion de Bau/fet ne
pouvant devenir l'ainé que par le décès de fon frere fans
enfilns, quand fon frere lai/fe des enfans, il ne peut donc
pas l'être. La fixieme, s'il ,s'agi/foit d'un fidéicommis en
ligne direél:e, & par' conféquent tranfmiffible, jl. n'eft pas
douteux que les enfans prenant la place de leur pere feraient
les ainés, & rec,:!eilliroient certainement plutôt qu'Hilarion
de Bau/fet. Or, fi Hilarion de Bau/fet ne devait pas être
l'ainé dans le cas de la tranfmiffion , cOmment le ferait-il dans
le cas de la non tranfmiffion? La feptieme, parce que le'
mot ainé. a toujours indiqué la premiere branche; & cette
"premiere branche fubfiilant, tant qu'il en exiile des rejettons,
-il' eH vrai de dire que le puiné n'eil jamais que le cadet,
'& que n'ayant pas les prérogatives de l'aine/fe,, il ne peut
pas en avoir le bénéfice.
,
Les enfans de l'ainé de François de Bau/fet ne font point
appellés ex proprio mpite, parce que Louis d'Audiffret n'a
'fixé fes vues ,& fa vocation qu'à 'leur pere, & n'a parlé d'eux
direél:ement ni indireél:ement; parce que Louis d'Audiffret
l1'a pas établi Un fidéicommis en faveur de la branche ainée,
& qu'il l'a au contraire reHreint à deux individus, François
& l'ainé de fes enfans; parce que le fidéicommis de Louis
d'Audiffret eil tellement peu prorogé dans la defcendance
des enfans de l'ainé de Francois, qu'il n'en parle feulement
pas, qu'il ne les met pas da~s b condition', Or, n'y ayant
,point de vocation expre/fe des enfans de l'aîné de François,
il ef!: donc tout de même que fi le tef!:ateur avoit dit: ou
le fils ainé de François recueillira; ou il n'y aura point dè
fidéicommis.
L'Ordonnance de 173), rédigée d'après les réponfes des
différens Parlemens du Royaume, porte en l'art. 62, que celui
'qui aura été infiitué héritier à la charge d'élire un des enfans
\
�3~
JOURNAL
du teHateur, ne poutra élire un des petits fils ou de(cendans,
encore que celui des enfans dont ils (ont ilfus fût mort avânc
que le choix eÎl! été fait. Et fi touS les .enf:1ns du premier
degré décedent avant ledit choix, le droit d'élire demeurera
caduc &. éteint, le tout à moins que le teHateur n'en aÎt
autrement ordonné. Il n'efr donc plus.permis de dire depuis
J'Ordonnance de, 173'5, que (0 US Je mot d'enfans. les petits
fils [.ont compris. L'Ordonnance a fixé à cet égard tous les
doures, [Qit parce que dans notre idiome nous di.fringuons
les enfa·ns des .petits fils, & que le mot enfans ne défigne
que ceux du premier degré, [oit encore parce que le petit
fils n'étant que dans le [econd degré, l'on ne doit pas' (uppo[er que le tefrateur a voulu proro'ger [a [ubltirurion même
au (econd degré. Auffi les ParJemens, dans leur réponfe à
la dix-(eptieme quefiion' propofée par M. le Chancelier,
di(oient que. ce n'eH que quand le te!l:ateur a donné à entendre qu'il, entendait appeller fes' enfans; .tant au premier
qu'au [econd degré, que Les petirs .fils font cen'fés compris
dans 13 vocation des enfans.
L'Ordonnance parle d'un véritllble fidéicommis; elle dit:
celui qui aura été inJlitué héritier, d la charge d'élire un des
enfans du teJlateur: l'éli(ant. étant héritier, l'élu e!l: donc
.IùbUitùé..Qu'il [oit gr.evé en faveur d'une perfonne dénommée,
ou en fliveur de telle autre qu''i1 voudra élire, il n'en eH:
pas moins grevé. Or, s'il e!l: grevé en faveur de tel des
enfans du teHateur qu'il voudra élire, & que dans ce même
cas il ne puilfe .pas élire un des petits fils, ou qu'en cas de
prédécès d~s enfan's la fub!l:iturion (oit caduq.ue, bien 'que
ces enfans délailfent des, enfans, il e!l: donc-da: . que'i.e mot
enfans ne wmprehd pas les petits fils, puifque l'exiHence des
petits fils n'empêche pa:> que l'élecrion ne [oit caduque, &
avec elle la [ubfiirution. Si telle efi la regle fixée par l'Ordonnance, quand il s'agit des enfans du tefiateur, & par.
(lon[équen~ d'urte>êle&ion ;f}déicommilfairé en di,recre, à' plus
forte rai[on la regle doit-elle s'appliquer, quand. il s'agit.d'ull
fidéicommis coUiltéral. Si la Loi fuppofe que les petits 1i)'s
du
�-
Du
PALAIS
DE
PROVENCE.,
"
337
du teHateur ne feront pas appellés par la dénomination générale d'enfans, à plus forte raifon doir-elle fuppofer que
le mot enfans ne comprendra pas les petits -fils dans un fidéicommis collatéral. Le t,eHament ayant donc été fait pollérieurement à l'Ordonnance de 1735, & ne parlant que des
enfans ou que de l'ainé des enfans, il n'dl: pas poffible de
comprendre dans cette vocation d'enfans les petits fils de
François; & Ml'. de Bauffee, fils de Mathieu-Nicolas, n'ef~
rien de plus.
Le eellateur a appellé l'ainé autanr qu'il exiHeroit au décès
du Marquis de, Greoux. Aina, quel que fait l'enfa!}t de François
qui aura été le chef de la famille, qui figurera comme l'ai né ,.
iL fera véritablement appellé;; & s'il voie -arriver le jour, là
fubllieution lui fera acquifè; mais par la même raifon, elle ne
peut être acquife ni à celui des enfans qui fe trouvant le plus
âgé au décès du Marqliis de Greoux, ne ferait ,pas l'ainé;
ni moins encore à l'ainé de l'ainé des enfans, puifglle ni
l~lln ni'l'autre ne font appellés. Le plus âgé ne l'eCl: pas,
parce qu'il n'ef!: pas l'ainé; & l'enfant de l'ainé ne l'ef!: pas
non plus, parce qu'il n'eH que le petir fils de François, &
les petits fils ne le font pas_ mieux. Delà point de néceffité
de choillr l'oncle & le neveu, parce que ni l'un ni l'alltre
ne font pas appellés; l'oncle, parce qu il n'dl: pas rë chef
de la famille, & qu'au moyen de ce que l'ainé a délaiffé
des enfans , il n'a pas pu le devenir; & le neveu', parce que
quoiqu'il fait l'ainé de la fami-Ue, il n'eH P'lS l'ainé des
en fans de .Francois.
, ün repondoi; pour Mre. Hibrion de Bauffet, qu'en général
la caducité d'un aéte quelconque ne fe préfume pas; que
dans le doute l'on préfume & l'on fuppofe tout ce qui tend
à affurer l'exiHence & l'exécution de l'aéte.fur le fort duquel
il s'agir de prononcer: d.:het voluntas fic intelligi maximè ut
aaus valeat. En nHriere de tef!:ament fur-tom, il ferait contl'e
l'efi~llce & la nanlre des chofes de fuppofer trop facilemen~
la Cd ducité, puifqu'il eH néceffairement dans le vœu du
teHateur de perpétuer l'ordre dans lequel il e~eend difpofer
Années z782 & fuiv.
X x
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- de fon patrimoine. Pour êrre aurorifé à foutenir qu'une fubftirmion efl caduque, il faur pouvoir réclamer bu la difpolition expreJre de la Loi, ou la volon ré' manifefle .de l'homme.
Dans le cas parriculier, il s'agir de confulrer la volonté
de l'homme ,. & de Juger de la durée de la fubHirurion par
'l'inrention connue de celui qui l'a faire, ou ce qui eft la
même chofe, par les rermes d~ reftamenr. La fubfl:iru~ion
eft jéi appofée à un legs; le légaraire eft le Marquis de
Greoux; s'il'décede fans enfans mâles, il eH grevé en faveur,
de (on frere cader. Ce frere cader décédant fans enfans
mâles, eil grevé lui-même en faveur de François de Dauffer,
& au défaur de ce dernier, en faveur dé l'àiné des ,enfans
lI)âles dudir François de Dauffer qùi pourr,a (e marier. Dans
une pareille (ubilirurion, l'inrerruprion des degrés par le prédécès de ceux qui fonr aux degrès inrermédiaires, n'empêche pas que la difpofirion n'air fon effer en faveur de ceux
qui font appellés dans des degrés poftérieurs: cela eil:' fondé
fur la regle fi connue, [ubJlitutus [ubJlituto if! [ubJlitutus inftituto; d'où il fuir que la (ubilirurion n'efl: pas devenue
caduque par le prédécès du frere cader du Marquis de Greoux,
ni par celui de François de, Dauffer, & qu'elle doir êrrel
recueillie par Fainé Aes enfans mâles de François de Dauffer,.
puifque le refl:areuF en a fair une difpolirion.formelle. Marhieu~, "
Nicolas de DauJret n'éroit PO!nt appellé par (on nom ,propre;
on lit fimplement que le reftateur, à défaut de François de
BauJret, appelle l'ainé des enfans mâles dudit François qui
pourra fe marier.
Le mot ainé en: un terme générique qui" en matiere de
fucceffion & de fidéicommis, (e rapporre à celui qui efl: le,
plus âgé des enfans au momeur 011 il s'agit de faire quelque
partage ou de régler quelque droir: C'eft, ce qui nous ell:
enfeigné par Coquille, queft. 2S7: la qualité ,d'ainé, dit Decormis, rom. 2, col. 428, étam générique, elle fait que l'ainé
manquant, le fecond devient l' ain~, quoiqu'il ne fût pas le
premier né, {on frere l'ayant prédécédé dans fa naiflànce au
monde j mais il [uffii: de l'être lorfque le fidéicommis arrive.
�DU
~ALA1S
DB
PROV,BNCB.
3'39
~a vocation en termes,généraux de l'ainé des enfans mâles
n'eiF donc pas limitée à La perfonne du premier né; elle
s'applique indéfiniment à celui des enfans qui, dans l'infiant
utile pour recueillir, fe trouve véritablement l'ainé, & dont
ôn peut dire-,.is ante'lu(jm nemfJ fuperefl allt exiflit, attendu
qu'ir n'efi plus alors précédé par perfonne autre dans l'ordre
de la filiation. Il fuit delà qu'Hilarion de Baulfet, qui dl:
enfant de Franc;ois, & qui s'efi rrouvé l'ainé des enfans de
Franc;ois au moment où le dernier grevé de la famille d'Audiffret eCl: mort fans enfans mâles, a un droit inconteCl:able
à la fubflitution. Il s'agit ici d'un fidéicommis imperfonneL
qui autorife le p!JÎné à prendre la place de l'ainé prédécédé;
il eU indifférent qu'avant Hilarion de Baulfet il ait exiCl:é
un ainé qui fe fait marié. La perfonne de cet ainé n'a
point été individuellement appellée; le tefiateur n'a regardé
que la qualité.
11 importe donc fort peu ·qu'il ait exifié un ainé marié,
&: que cet ainé ait été le feul à fe marier réellement. Lé
te!lateur n'ayant point exigé le mariage réduit en atl:e, &
s'étant contenté d'un ainé capable de mariage,' on ne peut
pas dire que la fubHitution fait devenue caduque par le pré-·
décès de l'ainé marié: il faut dire au contraire que la fubftitution vit, tant qu'il ya quelqu'un à 'qui, lors de l'échéance
du fidéicommis, l'on peut appliquer la-qualité d'ainé, & qui
peut fe préfenter aux yeux des Loix & des hommes comme
capable d.e mariage. Car enfin une délignation n'dl: point.
e~cl4five, <jlJand elle peut indéfini.ment convenir à plulieurs,
ou, ce !lui ell: la même chofe, quand elle peur fucceffivement fe v,érifier fur des perfonnes appellées, non par leur
nom, rT!ai,s par des qualités génériques qui peuvent leur être
appliquées dans un temps _utile & opportun.
Loin que les mots, 'lui pourra Je marier, puilfent particubrifer & perfonifier la dilpolition, il eU évident qu'ils foot
toujours une preuve plus convaincante que la difpolition efl:
générique & indéfini " pllifque' ces mots annoncent que ce
n'efi· pas une telle perfonne qui efi appellée, mais celui des
XX2.
�'~Hd
" "
J,ou Ii.
N A L'
J.
~
enfilns qui réunira les qtIalités i de, ma'niere -que Te premier
né fe :trOLl'lam Religieux ou-Profès'dans quelque ,Ordre, ce'
feroit le puiné 'capable de mariage qui pourroit récbmér~
la fubl!:irurion: Les mots, qui pourra Je' marier, font déciGfs.
Ils annoncent que le teflateur n'entend oit pas limirer fa difpoGtion à une telle perfonne déteqninée, maïs qu'il 'iouloit
l'appliquer à celùi des enfans qui auroit les qualités anndncées:
D'après Je teHament, ce n'el!: pas même proprement l'ainé
des enfans mâles qui ell: appellé; c'eil l'ainé qui pourra fe
marier. AinG, dans 'l'intention du Légiilateur domell:ique ,;
l'ainé incapable de fe marier auroit fait place au puîné
quï auroit pu fe marier, & qui feroit del!.enti, par le.s circonHances, le véritable objet de la vocation' , en devenant
véritablement le feul ainé capable, de mariage. Or, dans la f
circonHance préfente ,cet ai né des enfans mâles eH Hilarion
de Bauffet qui s'ef! trouvé l'ai né des enfans de François à
l'ouvertU1;e de la fubHitution, & qui n'a aucune - incapacité.
légale pour le mariage. Donc point de caducité poffible ,
puifqu'HilariÇl~ de Bauffet a & la vocation du tell:ateur, &
'la perfonne à laquelle cette vocation s'applique.
'
Par quelle raifon l'exiHence des enfans de l'ainé prédé-;
cédé rendroit-elle la fubHitution caduque? Dans le nombre
de Freres de. cet ainé, n'y 'en· a-t-il pas tç>ujours un' qU,i , à,J
l'échéance du fidéicommis, s'el! trouvé plus âgé que le's)
aut'res ? Et dès-lors. n'y a-t-il pas roujours un ainécâpahle'
de 'recueillir, d'après la difpoGrion imperfonrielle dont il J
s'agir? Quand on a. dit que les droits artachés à·-Ia -qualité'
d'ainé paffoiellt ·aux enfans de l'ai né , on n'a entendu parler J
que des droit~ que la Coutu,me attache à la ligne ou à 'la 1
br~nche de l'ai né ; mais quand il s'agit de pefer dans un tef.;. .
ramellt ou dans une fubl!:itution une queilion de volonté, il )
ne faut pas raifonner fur d~ {impies fiéiiàns; il faut e~aminer la volonté telle qu'elle ef! écrite dans l'acre.
'
Quand le teHateur appelle la branche du premier né, il'
faut le conformer à fon intention connue, & c'eH l'efprie de
routes les doéirines qU,i ont été citées, & qui fuppofent ..
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PRO V l!! Nell;
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qu'une branche doit être épuifée avant' que de paITer à' une
autre. Lorfqu'au contraire le teflateur n'a pas porté fes vues
fi loin, lorfqu'il s'efl contenté d'appeller indéfiniment l'ainé
des enfans d'un tel, dès-lors par là difpofition -ëlàire & manife lie du teflament , celui des enfans qui peut fe· dire l'ainé
à l'époque de l'échéance du fidéicommis, efl autorifé à fe
préfenter comme l'objet de la vocation, bien qu'il y ait un'
aioé pr.édécédé, & que cet ai né ait laiffé des enfans. Cette
queflion efl jugée in terminis par un Arrêt du ~ Août 1676,
rapporté par Baffet, tom. 2 , tit. 2, liv. 8 , ch. 6, pag.
46~ & fuiv.
L'exemple des enfans qui font dans la condition, &, qui
fo'ot défaillir le fidéicommis fans recueillir eux-mêmes, n'ell
point applicable. D'abord, dans cette hypothefe , les enfans
voient au moins accroître le patrimoine de leurs peres, &
conféquemment ils ont au moi'os l'efpérance' d'une plus grande
fortune. En fecond lieu, dans le cas de l'exrllence des enfans qui font dans la condition, le fidéicom'mis défaillit,'
parce que la condition fi deceffirit fine liheris ne fe ~érjfie pas.
Il ne s'agit ici que de choifir la perfDJ1ne à laquelle la défignacion peut être appliquée. La défignation en foi exifle dans
l'«éte, & elle efl., certaine. Donc il y a une vocation formelle , {$c la difficulté ne roule que fur ,la perfonne qui peue
fe- prêfenter - comme 'obj'et de cette vocation. L'ainé prédé-c'édé ri'exifle plus in rerum naturâ. Donc paine de caducité;
poffible, puifqu'il exifle une perfonôe à laquelle la défignatjOh d'ainé peut & doit êtrè' appliquée.
Par Arrêt du 21 Juillet 1783, au rapport de Mr.le Confeiller de Beauval, le fidéicortlmis fut déclaré ouvert en fav,eur d'Hilarion de BaufTee, & icelui porter, 1°. en la fomme
'de 66000 liv.· du principal liquidé dans ta tranfaaion du 4
Décembre 1773, & adjugé-par la Sentence de défaut du
- 6 Mars 17~0; 2°. en pareille fomme de 66000 liv. pour les'
intérêts dudit principal n'excédant le double, courus jufqu'au
20 Mars 1741 , jour de la fignification de la Sentence de
défaut; 3°. en la fomme de 10312 liv. 10 f. pour autres
�34'l.
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0 'U B. )1 A .L
intérêts de la fufdite ptemiere fomme de 66000 liv. courus
depuis l'époque du 20 Mars J7!l- l, jufqu'au ~ Mai 1744,
jour du décès de Louis d'Audiffret, & pour trois ans un'
mois & quinze' jours, au paiement defquelles fommes lefdits
Mres. d'Albertas & d'Artignofc furent condamnés, avec inté\êts depuis la demande, & dépens. Ecrivant Mes'. Pafcalis
& Portalis•
•
ARR Ê T
X X XIX.
E~ mati~re de Bénéfices, la nature du titre d'éreBion peutelle être fujette à _prefcription ?
Le titre d'érec7ion· ne paroijJànt pas, la po.1fèflion la pl:/s
voifine du titre & la plus conforme au Droit canonique
doit_ êt~e préférée pour fixer la nature dll Bénéfice.
La Chapellenie érigée folls le .titre Ste, Catherine, hors des
murs de la ville de Marfeille, eft régie par lin feul Rec.' teur, & ne forme pas le patrimoine de deux Titulcires
différens.
I
L exine dans l'Eglife de Marfeille une Çhapellenie érigée
fous le tic-re Ste. Cathecine, hors des murs de la ville.
Le fervice qui y en attaché,conli1te 11 célébrer fi" fois par an
le Saint Sacrifice de la Melfe. 'Mre. Fauchier, Doyen de
l'Eglife de Notre-Dame d s Accoules , fut pourvu par 1'0,(-_
dinaire de cette Chapellenie le 13 1uillet 1778. Dans l'année
de fa prife de polfeffion , Mt~, Meifredy, Prêtre-Chap.elain
de l'Eglife St, Lallrent , . prétendant que cette Chapellenie,
devoit être partagée en deux lots, qui avoient roujOUJS formé
autrefois le patrimoine de deux Titulaires différens , impétra
en Cour de Rome l'une de ces deux portions. Sur le refus
de la Cour de Rome, Mre. Meifredy demanda & obtint de
la Cour la penTItffion de fé retirer vers l'Ordinaire, pour en
obtenir des provifion~ qui aut9ient la même date & le même,
.,
�1
D"
•
PAtAIS
lU!
PROVBNCB,'
343
effet que celles que la Cour de Rome aurait dû lui accorder.
Muni de ce décret', Mre. Meifredy fe préfe11la à l'Evêque
de Marfeille , qui le pourvU! en effet de la Chap Ilenie Ste.
Catherine, fauf fan propre droit & celùi du tiers. Mr . M ifredy s'adreffa enfuite au Lieutenant, & lui demanda qu'il
fût enjoint à Mre. Fauchier de rememe dans lOUt le jour
riere Me. Corre, Notaire, le livre terrier & tous,les autres
titres de la Chapellenie, & de déclarer qu'à l'avenir il le
réduiroit au titre de Correéteur de la Chapellenie, au lieu de
celili de Reél:eur, & qu'il ne percevrait plus que Jo! moitié
des revenus qu'il retirait auparavant en· lOtalité , &, en réas
de refus fur ces différens chefs de demande, Mre. Fauchier'-devait être ajourné aux mêmes fins,-& pour fe voir contraindré
,à Y déférer. La conteftation s'engagea alors entre les Panies.
On produifit de part & d'autre ,un nombre confidérable de
titres, & la quell:ion du procès roula uniquement fur le point
de favoir fi)a Chapellenie Ste. Catherine devait avoir un
ou deux Chapelains. Mre. Fauchier ne fongea point à att<iquer
J'impétration de Mrè. Meifredy. Le Lieutenant, par fan Jugement, adopta les fins de ce dernier. Mre. Fauchier appella
de ce Jugement, & en caufe d'appel il querella d'abus le
titre de Mre. Meifredy, c'ell:-à-dir~, fan impétration & fes
provifions..
'
On difoit pour Mre. Fauchier, que l'impétration de Mre.
Meifredy était évidemment nulle & abufive, fi elle n'avoir'
point eu d'objet canonique, ni même d'objet réel. Mre. Mei-,
fredy n'avait point impétré en effet un titre réel & diHinét du
Bénéfice ex'ill:ant dans la Chapellenie Ste. Ca!herine, indépendamment de celui dont Mre. Fauchier élOit revêtu, mais
feulement l'~ne des deux porcions de cellé Chapellenie.
En droit, rien de moins canonique & de plus Înonftrueux
au contraire· que celle' divifion d'un feul Bénéfice en deux
moitiés. En fair", rien de moins prouvé & de plus chimérique
que celle mbme divifion dont Mre. Meifredy excipe. Aucune
des Panies n'a pu produire l'aél:e de fondation de Bénéfice.
On conje6l:ure feulement qu'il fut établi en 1374, Il ne refte'
�3H-
Jou
RNA L
"
donc qu'li examiner ce qu'il a éré depuis lors, c'efl:-lI.dire,
pengant. plus de quarre fiecles. Pour parcourir avec moins
d'embarras & plus de clarté ce long efpace de temps, il faut
le divif~r en rrois époques, la plus voiline de la fondarion,
l'inrermédi.a.iFe & la plus i"écenre.
.
.
.
A la premiere époque l'on vo.it .on feul bé{Jéfice , un feul
Chapelain. Dans coures les reconnoiifances paifées 11 cecce
ancienne date, il n'efl: jamais' fair menrion que d'un feul
Reéteur qui r.ecoÎt les aveux, qui donne les invefiirures &
pe"rçoit le lods' en fÇlD feul nom. En 1491, l'état du bé
- néfj.ce paroît. tOUt d'un coup changé, fans qu'on puiife,
favoir comment ce -changemenr s'ell: opéré. Deux Reéteurs
paroiifent 11 la fois fur la fcene ; ils contraétenr, ils adminifirenr, ils perlioivent en commun. En 1632. wut .change·,
encore, & coujours par des moyens inconnus. Il efi dit
dans un aéte daté ,qe cerre 'année, qu'lIonoré Jourdan
avoit tout. réuni fur fa tête; il avoit cependant un compétiteur : mais ce qu'il y a de remarquable, c'eU que celui·ci
fe fit pourvoir, comme' Honoré Jourdan lur-même, de la
tocaliré du bénéfice, & non d'une limple porc ion. En 1661"
Jean Bourguignon fut pourvu fm la démiffion de Jourdan;
]a poifeffion de celui-ci fut cependant troublée; mais fes
Adverfaires fe déliHerent, & Jean Bourguignon demeura.,'
comme Jourdan, feul titulaire. Cependant le compétiteur
de Jourdan étant morc en 1667, Bernard Bourguignon,frere
de Jean, impétra, non une portion. du bénéfice, mais la
Chapellenie -enriere; mais Jean Bourguignon continua de
jouir feul; ainli qu'il réfulte d'une ~enrence rendue en 1669,
d'une tranfaétion du '15. Novembre 1679, d'une quiccancedu 29 Novembre 1689, & de beaucoup d'autres pieces.
Jean Bourguignon mourut en 1691. Jean-Baptille Bouzal
fe fic cout de fuite pourvoir de la Chapellenie enriere vacante
par fa. mort; mais Bernard Bourguignon oppora à Bouzol,
[es antiques proviGons de [667, & le fit défiller; il eut)
enfuite recours à la Vice-Légation d'Avignon, & fe fit pourvoir en regale par le Roi le 2 Avril 1695.' Depuis Bernard
Bourguignon
•
�DU
PALAIS
DE
34)
PROVENCE.
Bourguignon l'unité du bénéfice ne fut plus conrefiée; il
pofléda feul, & en 1717 il n'eut qu'un feul fuccelfeur, qui
fut Mre. Guerin Vicaire-Général & Doyen des Accoules ;
Mre. Luce fuccéda à celui-ci en 1748, & Mre. Fauchièr
prit fa place en 1778.
Or , pendant un fiecle entier & dans les temps voifins de
'la fondation , l'on~voit la Chapellenie Ste. Catherine ne
former qu'un fepl Bénéfice, n'avoir qu'un feul Reaeur. Si
l'on trou\'e quelques Cbapelains contemporains de leurs fuccelfeurs, l~s premiers ont pu fe démettre en faveur des der~
niers; mais on ne voit jamais deux Chapelains agir à la fois
& concurremment en cette qualité pendant tout cet efpace de
remps. Depuis 1491 jufqu'en 1632, il ya deux Reaeurs;
'mais ce nouvel ordre des chQfes établi feulement par la pref~
cript ion , a pu être. renverfé par'une prefcription contraire. Or,
depuis 1632 il s'eU écoulé beaucoup plus de temps qu'il n'en
faut pour redonner à la Chapelle Ste. Catherirz.t: fa premier~
forme.
En droit, il n'ell pas vrai de dire que rien ne peur être,
prefcrit en matiere de B.énéfice. Si l'exillence même d'un
Bénéfice ne peut l'être·, fon état peut l'être cerrainemenr,
Or, ici il ne s'agit pas de l'exillence même d'un. Bénéfice ,
puifqu'il n'a jamais exiGé qu'une feule Chapellenie, mais d~
fon état feulement. Doit-elle former u,n tou.t unique, ou deuJ,:
portio~s dillinaes ? En fait, l'aae de fondation ne paroilfaD~
point, ce feroit par la polfeŒo.n la plus vé>ifine de l'époque
de l'aél:e lui-même qu'il faudrait le fuppléer & l'inrerprêter,
Or, ce premier état d.es chofes eH encore pour Mre. Fau';'.
chier. Si au contraire la prefcription efI: admife même contre
la teneur de l'aél:e de fondatioQ dans rom ce qui ell fimple ...
..ment relatif à l'état du Bénéfice, cette prefcription qui pen-.
dam l'époque intermédiaire avoit établi une efpece de du...
plicité, a depuis 1632 rétabli l'unité primiti\'e du Bénéfice,
Mais quelle force n'acquiert pas fur-tout cette prefcription Ii
puilfante par elle-même, lorfqu'elle rappelle les chofes al.!,
droit commun, lùrfqu'elle les rétablir dans leur ordre ni!'"
Années %782. & J!tiv.
Yy
\
\
�34 6
Jou
RNA t
turel, 10rfqu'elle anéantit quelque.. chofe d'auffi monfirueux
que la duplicité d'lm feul & ,unique Bénéfice, l~rfqu'e~le.
anéantit quelque chofe d'auffi defavorable qu'une feébon faite
fans forme & fans caufe, opérée par le Jeullaps de temps?
Jamais impétration plus défavorable que celle de Mre. Meifredy ; elle n'eH pas même dég'uifée fous l'apparence de ce.
zele pour le bien public, pour le maintien de la difcipline
eccléliaHique , dont ont foin de fe parer en pareil cas toUS
les réclamataires. On voit clairement que c'eH pour fan feul
intérêt que Mre. Meifredy s'occupe. du foin de morceler de
nouveau un Bénéfice auffi fimple & auffi modique.
On répondait pour Mre. Meifredy, que tout dépendait
de favoir s'il s'agit de l'exiHence d'un Bénéfice, ou feulement
de fan état. N'dt-il pas clair, n'en-il pas évident que lorfqu'on veut anéantir le titre même d'un Bénéfice, on contell:e
& l'on veut anéantir fan exill:ence, & non fimplement la mo• difier ? Doit-il y avoir deux Reél:eurs pour la Chapellenie de
Ste. Catherine? Voilà la quell:ion du procès. Ne voit-on pas
que l'exill:ence du titre d'un des Chapelains tient elfentiellement à cette queHion importante? qu'il s'agit pour ce titre
de Bénéfice d'être ou de n'être pilS , & non pas d'exill:er feulement d'une maniere différente? Car s'il. n'y a plus qu'un
. feul & unique Chapelain, le titre de Bénéfice qui conll:icuoit
l'apanage du fecond, n'exill:e plus d'aucune manier.e.
I! eH .vrai que pendant le premier fiecle qui s'ell: écoulé
depuis l'époque préfumée de la fondation, les aél:es qu'on
peut produire .ne parlent que d'Un feul Reél:eur; mais l'on
voit que chacun de c~s Reél:eurs a eu un contemporain auffi
Reél:eur. Or,ce premier état des chofes en extrêmement elfen.tiel & même décifif. S'il eft vt:li qu'il s'agit de l'exinence d'un
titre de Bénéfice, on eH à couvert du defpotifme de la pref.
cription. Dès-Ior~ ce ptemier état interprétatif de la fondation, & qui y équivaut en la fuppléant, eH celui-là même. qui
doit encore fubfiHei-, & au préjudice duquel aucun Titulaire
n'a pu tout réunir fur fa tête; & en admettant même la
prefcription, elle n'a pas encore eu le temps de changer l'état
�_
DU - PAL AIS
DE
PRO VEN C E.
347
-précédent du Bénéfice; cet état précédent, c'eft-à-dire, l'état
intermédiaire, eft convenu. Il y a eu pendant plus de ISO ans
deux/Chapelains, & depuis lors, c'eft-à.:dire , dèpuis Bernard
Bourguignon, car les deux Correél:eurs ne fe font réunis que
fur fa tête. Comment Bernard Bourguignon a-t-il réuni fur fa
tête la totalité de la Chapëllenie, fi ce n~ell en trompant
Bourrai qui fe défilla-, la Cour de Rome qui le pourvut implicitement, & le Roi qui le gratifia en régale? Avec auffi
peu de bonne foi aurait-il pu changer l'état du Bénéfice, &
le réunir le premier fur fa tête? Il Y a plus encore: & ne
peut-on pas dire qu'il ne l'a pas même poffédé comme réuni
& confondu, puifqu'il en a été pourvu fucce/llvement ? Or
depuis Bernard Bourguignon il s'eft écoulé, il eH vrai, Ull
peu plus de 60' ans; mais on ne trouve que deux collations
paifibles, celle de Mre. Guerin & celle de Mr~. Luce. Un li
court efpace de temps & del,lx collations feulement pourroientelles fuffire pour anéantir réellement un. titre de Bénéfice, en
n'en faifant qu'un feul de deux diftinél:s & féparés, ou pour
eri changer même fimplement l'état? Mre. ·Meifredy ne pourfuit donc ni un être dérifoire depuis long-temps anéanti, ni
un être monftrueux en droit canonique. Le titre de Bénéfice
qu'il a impétré a exiHé de tous les temps & depuis l'époque
de la fondation. En cetre qualité, il étoit imprefcriptible.
Eût-il pu être prefcrit, le temps de la prefcriptio.n n'a point
~té rempli, & l'ancien état des chofes fubfiHe encore.
En droit, nulle prefcription ne peut être admife contre
l'exiftenc-e d'un Bénéfice.- Dès que pillfieurs litres exifient
fous un même rapport, l'un d'eux a beau vaquer pendant une
longue fuite d'années; il dort feulement, mais il ne périt
point. Il ne tient qu'à celui qui le trouvera, de le réveiller. Sail
impétration fera bonne, même après pludeui-s fiecles. De
quelle importance n'eft-il point en effet que ce grand prin",
Cipé démeure à lamais inviolable? Quelle Eglifè ne fe trouverait pas à la fin privée d'un grand nombre. de fes plus utiles
ferviteurs, fi les différens titres de. Bénéfice fe prèfcrivoient
eotr'eux ?
Yy2.
�3~
JOURNAL
Mr. l'Avocat-Général d'Eymar de Moôtmeya n obfèrva
que les Parties fixoient l'époque de la fondation de la Chapellenie Ste. Catherine à l'année 1374 ; qu'il étoit difficile de
connoÎtre par quel motif on avorr choi~ cette année. Les
monumens les plus anciens ne s'en éloignent guere à la vérité; mais ils s'en éloignent poll]:tant de vingt années. Le
premier de tous les titres produits au procès, ell: un aéte de
nouveau bail palTé par Pierre de Saletis, Chapelain de la
Chapelle Ste. Catherine,. en faveur de Guillaume Marcelly.
Dans cer aéte , donr on ne produir qu'une note. & non pas
l'exrrair, M e. de Saletis flipule pour !Id & pour touS fes fuc:;
celTeurs à l'avenir: per ft" & fùas 'luafcum'lue ilz ante.:! ,fi'ccelfores. Mre. Meifredy prétend que ces d(lrniers mors déGgnentexprelTémenr le Coreéteur qui l,Ii a été ci-devant nommé.
Deux ans après, Azany, Reéteur de la· Châ, elle nie , reçoit,
par aae -du 10 Mars 1399 , la défemparation qui lui en f.lite
de la part de Jacques Bernard, d'une balbde , & l'accepre
en paiement de vingt florins qui lui étoienr dus. C'en ici,
fuivant Mre. Meifredy , que la preuve du Coreaorar devient,
complet te. Car cette même année 1399, & même dix ans
après, Pierre de S]!etis vivoir encore, & fe trouvoit conremporain, & par conféquenr collegue d'un autre Reaeur de
la Chapellenie Ste. Catherine. En 14.0\\, Mre. de Saletis
achere une vigne de Foulques Ricany. En 1399 , où nous
avons Azany pourvu & concraa]nr ea Reaeur, Mre.• e Sa'Ieris déclare à l'Evêqlle dè Marfeille qu'il polfède une Chapelle fondée par Pierre de Vacquier , &' donr le Jufpatronat
lui apparcieni; déGgna~ions qui ne permet~ent pas de mé, COlllioÎrre la Chapellenie dom il s'agit.
Mre. Meifredy conclm mal-à-propos de l'exill:ence de Pierre
de Saleris après l'apparition d' Azany, que ces deux EccléfiaUiques onr été Coreaeurs de la même Chapellenie. Pierre
de ,Saletis l'avoit effeétiveme~t encore en 1408, puifqu'à
cette ép'oque il fair l'acquiGtion d'une propriété; mail' dans
l'aae .d'achat' il ne prend plus le ritre de Chapelain ni de
ReÇteui: de la Chapellenie Ste. Cathuine. Dans la dédara~ion
�DU
PAL AIS
D Il
PRO v Il N C B;
349
de 1399 elle-même., le Bénéfice qu'il déclare poffédèr encore
11 une époque poll:érieure 11 la potre/lion d'Azany, ne paraît
pas bien c!airemenr,à beaucoup près,êrre la Chap~lIenie Sanc1iZ
Catherinœ extra muras. Il eH au coiHraire déllgné (ous' lé
cirre bien différenc d'une Chapellenie fondée par le même de
Vacquiers, il ell: vrai, mais dans un local dérerminé dans
l'enceinrè de l'Egli(e Sr. Marrin , & non pas hors des murs
,de la Cité. Après- Az,lny. , on voir figurer comme Chapelain
Ancoine de Manuerii. C'ef! en 141 ( qu'il commence à êrre
quell:ion de lui. On le perd, de vue en 1434, époque de la
derniere reconnoiffance patrée en (a faveur. Mais on ne voit
paraîrre (on (ucceffeur pour la premiere .fois qu'en 1443. Ce
(ucceffeur ell: Heétor Ricany, Reéteur d'une Cha'jJelle qui
porre le nom de Sre. Carherine hors des murs, ell:-il. dit
dans deux aétes paffés par ce Chapelain. Ce n'elt qu'li la fin
du Reétorac de Manuerii, qu'Heétor Ricany commence à
figurer à (on cour, & de l'apparirion de Ricany au rell:ament de Manuerii, il ne s'ell: écoulé qu'environ deux années, que celui-ci peur forc' bien avoir vécu encore après
fa démi/lion. Ce qui vienr encore 11 l'appui de cerre ob(erva- .
tian, c'ell: que Pierre de Sal'etis qui, depuis fa poffe/lion,
comme d'Azany, ne prend plus dans (es aétes le rirre de
Reéteur de la Chapellenie Ste. Catherine, Aucoine de Ma~nerji s'intit'ule au/li Gmplemement dans fon teftamenc, ClercBénéficier de l'Eglife Cathédrale de Natte-Dame, & laiffe
abfolumenr à l'écar' la qualiré de Chapelain.
En ~48 l , il commence 11- être q.uell:ion d'un All:urge Ri.
cnay ; & cependant Heétor Ricany n'écoit pas mort, puifqu'il reparoîc en 148). L'un & l'aucre ef! également Bénéficier de l'Eglife Cathédrale. En 1491, on voic Jacques
Laurenc,ii (eul Reéteur de la Chapellenie Ste. Catherine. Dans
'Ie courant de la même année, plufieurs aétes de reconnoiffance paffés à cette dace inll:ruifent que ce La.urenrii avait
. un Collegue ou un Coreéteur. Commenc' cette Chapellenie
fe divifa-t-elle cout d'un coup en deux Bénéfic"es ? Cetce fectian' fut-elle l'effet d'un arrangement convenu entre deux
•
.. ,
•
�~)o
.
JOURNAL
gompétiteurs également forldés, également favorables, ou
le réfult'at des manœuvres ambitieufes des Jufpatrons qui, en
établiŒant ce aouvel ordre des chofes, s'affuroient
le droit
,
de difpofer de deux places au lieu d'une feule? C'eil: ce
qu'on ignore parfaitement. En fuppofant même que c~s deux
nouveaux Chapelains· n'euŒent fait que fuccéder aux deux
Ricany, Heél:or & Ail:urge, on auroit" toujours à faire la
même que!l:ion fur la maniere dont' les deux Ricany euxmêmes fe parragerent la place du feul Manuerii. Plus de
doute, plus de controverfe fur le point de favoir fi depuis
149"1 "'époque convenue de l'établiŒement du Coreél:orilt,
il Y a toujours eu ces deux Reél:eurs en poŒeffion de la Chapellenie de Ste. Catherine, au moins jufqu'en l'année 1632.
Mais cette .efpece de preuve tombe en lifant les aél:es paŒés
en 1)) 7, 1) 70 & 1606. Dans le premier, Guillaume Medally & Barthelemi Bernard, quoique Coreél:eurs, ne font
défigc.és que fous le titre de Reél:eurs. Dans le deuxieme, un
autre Medally & le même Bernard font encore qualifiés ciu
titre de Reél:eurs , au lieu de celui de Coreél:eurs , & Medally
el1: même feul préfent à l'aél:e. Dans le derni~r , qui el1: une
tranfaél:ion pa,Œée entre les Religieux Dominicains de Mar{eille & noble Jacques de Caradet, qui, par cet aél:e, acquiert le Jufpatronat de la Chapelle Sonaœ Catherinœ extra
muras, cette Chapelle, e!l:-il dit dans ce même aél:e, a
pour Reél:eurs, & non pour Coreél:eurs , Jacques Rapollon &
Pierre Jourdan. Cette coexil1:ence de d~lX Chapelains ef!: fi clairement défignée & même exprimée, que le terme de
Coreél:eur eil: plus' que fuflifamment filppléé.
L'aél:e du 9 Janvier 1632 contient à la fois une quittance
du droit de lods ou de partie de ce droit de la part du Seigneur direél: , & une reconnoiŒance- de la part de l'emphytéote. II eil: dit que celui-ci poŒede fous la majeure direél:e,
domaine & feigneurie de Mre. Honoré Jourdan, ftipulant en
qualité de Reél:eur de la Chapellenie Ste. Catherine, pour
avoir été unie à un feul Reél:eur, par indivis toutefois avecles hoirs de Beoullon. Tel cft , felon Mee. Fauchier , l'aél:e
•
�]) U
PAL AIS
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PRO VEN C R;
3') {.
indicatif de l'union, & après lequel la Chapellenie n'a plus
été po!fédée que par un feul Tirulaire effeaif, quoiqu'en
apparence il y ait eu fouvent plufieurs prétendans , & quelquefois plufieurs po!feifeurs ou ufurpateurs de ce Bénéfice. Le
26 Septembre 16 JI, quatre mois feulement avant ce dernier
aae où l'union eH citée comme déja faite, Mre. Ferrier &
Mre. Jourdan traitent & s'arrangent enfemhle en bons collegues. Mre. Ferrier réalife pour· fa part un droit de lods &
des arrérages de cenfives qui leur font dus en commun, &
les cede en totalité à Mre. Honoré Jourdan-, moyennant 12.
liv. 12. r. qu'il en reçoit. Il eH dit, dans cet aae, que Mre.
Jourdan pourra donner jnvel1:irure tant en fon propre, comme
Coreaeur de la Chapellenie, qu'au nom de Mre. Ferrier
1Ji- même. Dès-lors voilà l'intervalle pendant lequel a dû néceifairement s'opérer l'union reiferrée de plus de la moitié,&
réduit à trois mois & demi. Mais ce n'efi pas la feule induction que l'on puiife tirer ·de cet.te piece ; l'on y trouve le
principe & -l'explication tout à la fois de cette c1aufe inférée
dans l'aae : c'ell: comme ayant pouvoir & char~e de Mre.
Ferrier fon collegue,de retirer les cenfives dues à la Chapellenie, & de donner invel1:irure aux emphytéotes, ue Mre.
Jourdan dit en avoir réuni les droits fur fa tête. Fia-ce ambition de fa part, fût-ce inadverten~e de la p_arc du Notaire,
c'ell: ce qu'il ell: impoffible de favoir; mais ce qu'il y a de
bien fûr , c'eLl qu'il n'y a jamais eu d'autre union de la Chapellenie que cette ceffion des revenus communs, confencie
par Mre. Ferrier en faveur de Mre. Jourdan.
fuivant l'hiltoire de la Chapellenie après cet aae , l'on
voit toujours deux Chapelains en titre comme auparavant. Il
- eLl vrai que l'on perd de vue pendant un certain temps Mre.
Ferrier, qui avoit fait fi bon marché de fes droits à Mre.
Jourdan. Mais en 1642. , Mre. Theric le remplace. Mre. Jourdan, qui s'étoit démis en 1641 , reparoît en 1642., exerçant
-les droits de Chapelain de la Chapelle de Ste. Catherine, &
en percevant les revenus; tandis qne de fon côté Mre. Theric
exerce auffi , ce qui dura de part & d'autre jufqu'à la nouvelle
En
•
�3)'2.
JOURNAL
démi/lion de Mre. Jourdan en faveur de Mre. Jean Bourguignon en 1661', & jufgu'à la mort de Mre. Theric en 1667,
A Mre. Theric fucce!le Bernard Bourguignon. Boniface Dille
& Jean Coter troublerent d'abord ta polfe/lion de Jean Bourguignon; mais par deux concordats palfés entre chacun de
ces deux compétiteurs, celui-ci conferva la Chapellenie de
Ste. Catherine. Jean Bourguignon, Je plus ancien des deux
Chapelains, mourut au/li le premier en 1692. Sa mort fit
éélorre un nouveau prétendant, Jean-Baptille Bourrol ; mais
celui-ci ignorant le véritable état du Bénéfice, & Bernard
Bourguignon fe préfentant avec fes anciennes provifions, eut
l'arr de lui perfuader que la place qu'il demandoit ne vaguoit
point, & que c'étoit lui-même Bernard Bourguignon qui la
remplilfoit. Bourrol fe défilla -en eltet; mais Bernard Bourguignon craignant qu'il ne fe préfentât un nouveau compétiteur,
eut recours à la Cour de Rome & au Souverain, & parvint à
opérer fur fa- tête la réunion de la Chapellenie.
~
L'état dés chofes ne changea point en 1641. par là promotion de Mre. Theric à la Chapellenie Ste. Catherine. Pourétl'e convaincu que ce n'eU pas'à Mre. Ferrier que Mre. Theric
/ a fuccédé-, il n'eU hefoin que de lire fon a&e de mife enpolfe/lion_, dans lequel fes provifions font relatées. On y voit
que c'eU de)a Chapellenie entiere,& non du Core&orat que
Mre. Ferrier poffédoit , que Mre. Theric s'eH fait pourvoir.
On y voit que ce n'eU point la mort de Mre. Ferrier, mais
tout autre genre de vacance exprimée par la c1aufe générale
certo modo qui a autorifé Mre. Theric à impétrer cette Chapellenie. On y voit enfin que c'eU de la totalité. de cette
Chapellenie, ainÎl que de celles de St. Lazar.e & de la Ste.
EuchariUie gu'il s'eU fait pourvoir.
'
En rapprochant la dare de la démi/lion de Mre. Jourdan en'
164r ,de celle des provifions de Mre. Theric , on voit qu'elles
font de la même année; & ce qui porte encore plus à penfer
que celles-ci ne fOnt que le ré[ulrat de ceJles-là , c'eU que la
Chapellenie Ste. Catherine n'eH pas le feul objet également
compromis dans la démi/lion de MEe. Jourdan & dans les
provifions
�DU
PALAiS
353
DI! ·PROVIlNCE.
proviûons de Mre.· Theric. Ce dernier recueillir encore de fa
dépouille la Chapellenie de St. La1ar~; mais Mre. Jourdan qui
s'éroir dépouillé li facilement en 164 [, ne tarda gueres à
changer de façon de pen fer , foir qu'il fe repenrîr de fa dénliffion , fait qu'on lui eût perfuadé qu'elle écoir nulle, pour
av-oir été faite entre les mains du Vice-Légat en temps de
vacance du Siege, au préjudice du droit de Régale. II n'el!
pas difficile en effet de faire naître des fcrupules à un B~né-
ficier fUT un aél:e qui le dépouille. Mre. Jourdan fe remit en
poffeiIion de la Chapellenie Ste. Catherine. Cerce même année
r6.p. , & dix jours feulement après la prife de po:lfeffion de
Mre. Theric , on le voir tàire aél:e de propriétaire. Il eH vrai
que Mre. Theric ne fe défilla pas pour cela de fes prétentions, & qu'il continua à jouir par imervalle d'une partie des
droits & des revenus; mais il n'en eH pas moins cenain que
la plus grande partie -des aaes de propriété font émanés de.
Mre. Jourdan, même a-près la prife de peffeffion_ de Mre..
Theric•. D'ailleurs, cette po1Teflion de Mre. Theric 'ne peu.r
être référée qu'à fon tirre même. Or, quel eH le titre de
Mre. Theric? UÀe lignature prife à Rome, non pour une
Coreél:orerie vacante en la Chape11enie $te. Cat/urine , par le
décès de Mre. Ferrier précédent Coreaeur, mais pour la
toralité de la Chapellenie. Mre. Theric a enfuite po1féd~,
comme Chapelain unique, abfolu & indépendant de la Cha-.
pellenie. Ainli, loin que Mre. Jourdan & Mre. Theric aient
jamais poffédé la Chapellenie Ste. €atherine dans un état de:
communion & comme propriétaires' par- indivis d'un patri_
moine eccléliafiique formant deux titres dillinél:s de Béné~
fiée, [Out prouve en effet que ces deux Bénéficiers ont. vécu,
dans un état perpéruel' de guerre, & dans la feLme croyancequ'ils s'excluoient 10US deux mutuellement de la poifeffion_
d'un Bénéfice unique & indivifible. Cepend-ant on_ [rouve un,
Arrêt rendu en faveur de Mre. Theric, contre Mre. de Grelfer,
Tréforier de France, qui vouloit lui difputer fon droit defuzeraineté fur une terre mouvante de la Chapellenie Ste. Ca ...
tlzerine. On trouve auai' un aél:e d'éthange de plulieurs cen.~
Z z
Années q8:z. G' fuiv.
•
/
�3H.
•
.
JOtlaNAL
!ives, pall"é entre Mre. Jourdan & Mre. Antoine de Valbel1e ,
Lieutenant de l'Amirauté du Levant au Siege de MarC.:ille.
Tel ell l'état dans lequel vécurent Mre. Jourdan & Mre.
Theric ; état d'une part équivoque & douteux, mais peut- •
être Cuffifamment éclairci de l'autre par' les événemens qui,
remplirent cette ép'oque, p!lr le tableau de la firuarion refpeél:ive des Parties & des prétentions oppoCées qu'elles pacoiffoient être en droit d'élever, & fur-rout par l'énoncé des
aéles les plus graves & les plus décififs, tels que ,la propre
collation de Mre. Theric lui-même.
En 1661 , Mre. Jourdan Ce s1émit de nouveau. Mte. Jean
Bourguignon, pourvu par, l'Ordinaire, le rempla~a. A peine,
éroit-il en poffeffion de fon titre, que Mre. Ange Cotta,
pré[enré par un prétendant droit au Jufparronat, le lui di[pura ~ & fe fit même mettre en. poffeffion le 9 Août 1662
de la Chapellenie Ste. Catherine. Cet Ange Cotta- avoit
même cumulé le titre de dévolutaire avec celui d'impétrant.
Avant lui, Mre. Boniface Dille avoit auffi dévolu té les Bénéfices dont Mre. Jourd,an s'étoit démis, & il avoit enfuite cédé'
volonrairement touS [es droits à Mre. Jean Bourguignon.
Ml'e. Cotta [uivit en tout [011 exemple, & par un concordat
paffé avec Mre. Bourguignon le 19 Mars 1663 , il convint de
le laiffer en paifible poffeffion de la Chapellenie .'1t. Nicolas,
& de celle SanR,e Catherin.'e extra muras, à condition que celuici lui céderolt à. fon tour celle St. Larare.
La Chapellenie Ste: Càtherine demeura donc 11 Jean Bourguignon. Mre. Theric vivoi -il encore, poffédoit.il encore à
_ cette époque ~ C'eft ce qu'on ne peut [avoir. Ses aél:es pof[elloires ne s'étendentpas jllfques-là. Cependant ce n'eft l1u'en
1667 que Mre, Bernard Bourguignon eft à fan tour pourvu
de cette Chapellenie vacante, eH·il dit, dans la collat!on ,
par le décès de feu Antoine Theric. Les provifions de Mre.
Bernard Bourguignon font d'onc encore conformes à celles
de Mre. Therit hii-même ; c'eH de la totalité, & non d'une
!impie portion ou d'lm titre Céparémenr établi dans la Chapellenie Ste. Catherine, que l'un & l'autre a été également
•
�DU
PALAIS'
DR
PROVllNél!.
3H
pourvu. Enfin ce qu'il y a de confiant, c'eil: que Jean Bourguignon paroît avoir feul joui, puifque par une Sentence
rendue en faveur du Monafiere Sr. Viaor de Marfeille , il fut
dit que la Chapellenie Ste. Catherine avoit empiéré fur fes
direaes & cenfives. En conféquence, Mre. Jean Bourguignon, comme feul Reél:~ur aél:uel, & fes devanciers, furent
condamnés à la refiitution des lods & autres droits induemeiJt
perçus. Qu'y voit-on pourfuivis pour cette refiiturion? Les
feuls héritiers de Mre. Jourdan, prédécelfeur immédiat de
Bernard Bourguignon, font mis en caufe , & refiituent pour
cet objet I~ fomme de 108 liv. ID f.
Depuis 1695 jufqu'à préfent, l'érat de la .Chapellenie Ste.
Catherine n'eU plus un état de lirige ni d'incertitude. Il elt
convenu qu'il a toujours été polfédé par un feul Titulaire,
& que trois différens Chapelains, en comptant Mre. Faûchier, ont (accédé à Bernard Bourguignon. Le temps qui
s'eil: écoulé depuis lors dl-il alfez long, efi-il fuffifant pour
que le Bénéfice eût changé de face? A ne compter que de
. cette époque feulement, de ·quelle nature efl: le changement
, qui s'efl: 'opéré dans la Chapellenie Ste. Catherine? Enfin
tout eU-il prefcriptible par le feul laps de temps en mariere
de Bénéfice? Telles font les queil:ions de qr.oit qu'on il traité
dans cette caufe.
-,
Rien de plus connu & de plus inébranlable que ce premier
axiome du Droit Canon: Beneficia non nafi:unlur, fed fi..u.,it ,
120n moriuntur, fed viv/{nt. La premiere partie de cetre
grande maxime profcrit cette efpece de feaion par .laquelle
les corps moraux & p.oliriques même fe mulriplient & fe propagent en fe divifant. La feconde prohi~e exprelfément roure
ufurparion, toute prefcriprion qui rendroit à anéantir une
propriété facrée , & dès-lors imprefcriptible. Il ne faur pas
que le nombre des -Miniflres arrachés au Service de Dieu &
de l'Eglife puiffe être diminué au g,ré de l'ambirion &'de l'avidiré d~ quelques-uns d'enrr'eux. Quel ell: le Chapirre Gui ne
fe verroit pas infenfihlement & même bientôr .réduir à un perie
Dombre d'Ecc!éfiafiiques ) Ji chaque place parriculiere étoi~
,
Zz~
•
�'3 ~6
J '0 U II. }i A t
<
prefcriptible, & fi 11 chaque vacancê on pouvoit fe partagu',
les dépouilles du Bénéfice v.acant?' Que deviendroit l'Eglife'
elle-même , fi le nombre & la fuffifance de fes Minill:res
étaient des objets mal affurés & précaires; qui dépendi/fe!1t
des révolutions des temps & du caprice des hommes? Tout
Bénèfice ell: 11 ce titre fous la double-proteaion du Droit Pu'blic & du Droit EccléliaHique. Comme portion de la propriété publique, la loi de la prefcription, établie feulement
pour protéger les propriétés particulieres, & a/furer la tranquillité ·des citoyens, ne s'étend pas ju!qu'à elle. Comme
porc ion du domaine de Dieu même, un Bénéfice ea hors du
commUfl & des enèreprifes des, hommes, & bien plus élevé
encore au detfus des arreintes de la prefcription.
En le défini/fant un droit perpétuel & irrévocable, on a eu
en vue un double rapport. Ainli, tout comme celui qui eq eil:
pourvu a droit du moment de fa collation légitime de percevoir ~ jamais les fruits & le prix du fervice qui y ell: arraché,
l'Eglife, du moment qu'un Bénéfice ell: légalement & canoniquement établi, a droit de compter pour toujours fur les [ervices du nouveau Miniare que la fondation de ce Bénéfice lui
donne. Les formes qui font obfervées dans l'éreaion d'un
rnJuveau Bénéfice, en conll:atanr l'utilité dont il doit être,
foit pour le publi~" fait pour \'Eglife, puifque le ·concours
des deux pui/fances eH aujourd'hui néce/faire, doivent en
même temps en garantir la durée immorrelle. Il ne feroit pas
juGe que le feullaps du temps pût détruire ce que de li grands
motifs font établir. Qu'on parcoure en effet tous les Auteurs
qui ont tl".illé-du Droit Canol}ique & de l'empire de la prefcription fur les Bénéfices; tous diainguent préliminairement
ce qui ne forme que leurs qualités accidentelles, de ce qui
leur ell: fuoHance même, ce qu'ils appellent l'état ou la modification du Bénéfice, de fan titre lui-même ou de fan exifceDee; & lorfqu'ils difcourent enfuite de ce qui peut être
prefetit , on voit clairement qu'ils n'entendent parler que de
ce qui forme feulement fa maniere d'être. '
'Qu'on ne dife pas, pour éluder l'application de cette grande
�•
nu PALAIS bl! P1tôVIlNCI!;
,357
regle; qu'il eft des Bénéfices' plus importans & plus favorables les uns que les aurres, & q).l'il paroît peu conféquent.
d'appliquer aux moindres d'entr'eux ce qu'on n'a vraifemblablement établi qu'en faveur des plus con!idéra.bles de ceux
dont l'exifl:ence eH effentiellement liée au bien de l'Eglife &
dü Public, au maintie.n de l'ordre & de la hiérarchie ecclé-·
!ia!l:ique. Sans doure les Bénéfices !impies, par exemplé, ne .
peuvent foueenir aucune comparaifon avec les Cures, avec
les Challoinies, avec toUt Bénéfice qui emporte avec foi réfidence perfonnelle ou charge d'ames. Mais·!i ces Bénéfices
n'ont pas pour eux la grande faveur de leur utilité, il leur
reHe celle oe leur origine. Etablis pour la plupart par la pieufe
libéralité de quelque fondateur, il paraît être d'une juftice
extrême que la mémoire & la volonté de celui-ci foient auffi
immortelles, auffi imprefcriptibles que fes bienfaits.
Tel eft auffi le privi!ege attaché à [Qut Bénéfice de fondation laïcale, par le titre de la fondation elle-même. Ce n'eft
qU,e par une forte de tolérance affez facile à critiquer, qu'on
a laijfé palfer en regle ou en ufage , que les formes données
par le fondateur lui-même à fa fondation pouvoient être
preLèrites.; mais ce qui en:eft l'effence même, c'eft-à-dire ,
l'éreél:ion d'un nouveau Bénéfice, ne peut jamais l'être ., par'
cette gr:lOde regle que perfonne ne peut prefcr,ire contre [Ql1
titre, & que l'Eglife n'ayant re~u tel bienfait que fous la condition exprefiè d'adopter & de con[etve~ à jamais tel Bénéfice, perdrait en quelque fone le droit de jouir du bienfait
aù moment même ôù elle celferoit d'obferver la loi de [on
bienfaiteur.'
..,
Auéun laps de temps n'a pu dérober à Mre. Meifredy le
Bénéfice qu'il pourfuit , fi c'eft réellement un' titre diftinél: &
abfolu du Bénéfice qu'il réclame. Eft-ce le titre, eft-ce feulement l'état du Bénéfice qui a été preterit ?" Tout dépend
donc déformais de la folution de ce feul problême. Deux titres
de Bénéfice ont-ils été mal-à-propos réunis en un feul? On
le dira fans doute à regret, fi la JoŒ~ffion eft déjq ancienne,
& fi chaque titulaire unique pareît depuis long-temps avoir.
•
�~S8
Jou RNA L
.
eté de bonne foi; mais cette union dell:ruc9:ive el!: entiérement inexcufable & vicieufe. Ne s'agit-il au contraire que des
diverfes révolutions éprouvées par un Bénéfice unique & indépendant? Chaque révolution a pu fucceffivement établir un
différent ordre des chofes ; & c'el!: dès-lors d'après la pof{effion feule que le procès doit être jugé. Mre. Meifredy
n'avait qu'une feule côndition à remplir, pour avoir en fa faveur 'les plus faines & les plus inviolables maximes du Droit
Canonique'; il devait prouver la duplicité des titres, & alors
il aurait pu -en acquérir un.
De droit commun, tout Bénéfice fimple , & filr-tout un
Bénéfice auffi !impIe que la Chapellenie Ste. Catherine, n'el!:
pas cenfé avoir été partagé en deux titres différens. Il n'el!:
pas vraifemblable q'u'uo Bénéfice auffi peu étendu, auffi peu
embarraffant que la célébration de fix Meffes feulement par
année, ait été réparti en'tre deux différens Titulaires. Le
défituc de produc9:ion du. tirre de la fondarion conduit à croire
que le fondateur n'a érabli qu'un feul tirre; ainli, parce qu'on
verra'un Bénéfice unique & indivilible, poffédé à la fois par
deux Titulaires pendant un certain temps, fera-t-on fondé
à en conclure que ce Bénéfice a été réellement établj par le
fondateur fous une forme fi inuntée & fi illégale? Ne ferat-on pàS mieux fondé à imputer au contraire J'abus d'une pareille fec9:lon à J'ignorance & au défordre des fiecles p'affés ,
plutôt qu'à la volonté du fondateur lui~même ? D'ailleurs,
entre deux poffeffions différenres , dont l'une efLconforme au
Droit commun, & l'aurre y déroge en quelque forte, la premiere , lorfqu'elle ell la plus ancienne, la plus voiline du
temps de la fondation, a fur l'autre tout l'avantage que pourrait avoir le titre lui-même fur la fimple poffeffion. Dix-huit
ac9:es différens, relatifs à.la premiere époque, ont été,pro_
duits pa-r Mre. Fauchier , comme propres à établir fon fyftême d'unité. Dans aucun on n'y' trouve le mor de Corec9:eur,
ni rien enfin qui déligne l'exiflence du CoreàDrar. L'état poftérieur n'ell qu'un état étàbli, ou , pour parler plus exac9:ement encore, acquis par prefcriptioD. Or, il ea certain en
�,
.
DU
PAL AI!!
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'3 ~ 9
.P R 0 V B Ne B.
principe que la preCcription n'eft pas plus capable d'établir
elle feule un titre réel de Bénéfice, que de l'anéantir. La poCfeffion immémoriale vaur un titre & en a toute l'efficacité;
mais c'eft feulement lorfqu'elle eft vraiment immémoriale,
, c'eft-à~dire, lorfqu'elle fe perd dans la nuit des temps re. culés, & fur-tom lorfqu'.entr'elle & l'époque de l'aB:e origi• ' naire, il n'y a point une lacune immenfe ; à plus forte raifon
une poŒ~ffion contraire, qui a toujours fur celle qui la fuit
l'avantage décilif d'être plus voifine du titre primitif, eft vrai·
femblablement plus conforme à ce que cet aB:e originaire a
réglé.
Si Mre. Meifredy n'a en fa faveur qu'une prefcription intermédiaire, & non une po/feffion immémoriale, la queftion
qui'agite'les Parties ne peut porter que fur l'état, &,no,n fur
la fubftance ou fur'ie titre même du Bé,néfice. Or, M..re., Fauchier n'a pas feulement en fa faveur la 'po/feffion la plus antique, la plus immédiatement liée au titre priinitif" mais encore la plus conforme au Droit commun.
De Droit commun en effet, tout Bénéfice' n'ea pJéfumé
devoir être l'apanage que d'un feul Bénéficier i '& par une
fuite néce/faire de ce premier principe, la mulciplicité des
Titulaires rte prouve pas feule la muldplicité des titres de
Bénéfice. Il faut, difent tous les Auteurs , que cette mul·
tiplicité foit prèuvéè, d'ailleurs ou par celle des fonda:" •
tians, ou par celle des, J ufpat'conats, QU même par une feule
fOr;ldation qui parle {xpre/fément de pJufteurs titres, ou enfin'
.par une po/feffion vrai,ment' immémoriale, c'e(t-à-dire, ·non
jnterrompue, non précédée d'une po/feffion contraire. Hors
dé ces feuls cas, quelles que foient d'ailleurs les révolutions
que le Bénéfice ait e/fuyé , ce n'eft jamais que fon état, qui a changé, & ce n'dt jamais que \:le fO,n étai.qu'il peut s'agir,
lors mê":1e qu'il eft queftion de favoir s'il doit être réuni fur
une feule tête ou partagé entre plufieurs Titulaires.
Mr. l'Avocat-Général difcura, de nouveau tous les titres
produits
par Mre. Meifredy, & 'il obferva qu'il eft certain
/
en principe qu'on ne peut h~gitimérnent accorder des provi.
\
�'3~
10uiNAL
'fions que pour un Bénéfice exiHant & certain. C'ell: donc à
Mre. Meifredy à jull:ifier les fiennes, c'ell:-à-dire, à prouver
démonllrativemem l'exill:ence du Bénéfice qu'il a impétré.
Or , l'exillence d'un titre de llénéfice , & fur-tout celui d'un
double titre dans une fimple & feule Chapellenie, ne peut
fe prouver que de deux manieres. Il faut avoir ou l'aéte de
fondation lui-méme qui manque ici, ou une poifeffion immémoriale que. Mre. Meifredy n'a pas non plus en fa faveur. La
poifeffion immémoriale eH en effet celle qui fe perd dans la
,nuit des temps, qui s'accole avec le titre primitif, encre
lequel il ne refie aucune lacune, à plus force raifon aucune
·poifeffion contraire. Ici tous ces caraéteres manquent à la
poifeffion alléguée par Mre. Meifredy. Elle a avant elle une
poifeffion ahfolument oppofée, & elle eH fuivie & couverte
par une autre poifeffion qui fe réfere, qui fe lie à la premiere.
Ces deux poifeffions, entre lefquelles la poifeffion inteFmé~
diaire doit néceifairement être étouffée, foot auffi clairement,
auffi fortement établies que celie-ci. Elles le font précifémeot
de la même maniere, c'eH-à.dire, par l'énonciation expre1fe
de tous les aél:es qui y font relatifs.
Mr. l'Avocat-Général couclut à ce qu'il mt dit y àvoir abus
dans l'impét!ation de Mre. Meifredy, & dans les provifions
par lui rapportées.
Arrêt du 17 Février 1783 , prononcé par Mr; le Premier
Préfident , conforme aux conclulions ; Mre. Meifredy fut
'condamné aux dépens. Plaidant Mes. Gailler & Porialis.
Mre. Meifredy fe pourvut au Coofeil. Sa requête fut rejettée par Arrêt du 21 Février 1785, fur les motifs qui
furent demandés.
�DU
PALAIS
DB
PRO·VBNCB.
La déclaration du teJlateur dans l'aBe de fufcription, qu'il a
écrit' lui-même, ou fait écrire [on teJlament [olemnel.. doit
être exac7e & conforme
celle qui eJl contenue dans le
teflament,
peine de nullité de la difPofition.
a
a
J
,
Acques Gerbaud .eut d'Anne Sauvan fon époufe, Franc;ois,
. Franc;oife & Marie Geroaud. Anne Sauvan mourut le 7
,Mars '1743, après av'oir fait des legs à fes deux filles, & inftimé Franc;ois Gerbaud pour fon héritie(. Jacques Gerbaud
fe remaria en 1749, & Franc;ois Gerbaud décéd.a en I7So•
.Jacques Gerbaud abandonna entiérement'fes enfans du pre- .
.mier lit, & profita de' taus les biens de .leur mere, fahs leur
.donner le moindre fecours. Des conrefiations furvenues entre
le pere & fes deux filles les obligea de prendre des ari'angemens; il intervint une Sentence arbitrale qui condamna
,le pere à défemparer juCqu'à la concurrence de 200 liv. des
biens de fon époule' pour le montant d'un legs avec intérêts,
,& qui fournit Gerbaud à prouver qu'il avoit expédié à Marie
,fa fille, lorfqu'elle était en âge de les porter, les habits,
.Jjnges & hardes de fa mere, & dont eile avoit fait legs 11
Marie Gerbaud ; ordonna un rapport des biens & des dé.prédations que le pere pouvoit y avoir fait, & fournit Marie
.Gerbaud à ju/.l:ifier de la vente faite par Jacques Gerbaud
,de la moitié d'une écurie. Il y eut appel de ce,tte Sentence arbitrale, qui fut confirmée par Arrêt du 6 Juillet
.I779~ Il fut procédé au rapport qui cooftata les dégradations. Gerbaud pere mourut La même année, après avoir
ét,é log temps malade. Pendant fa maladie il ne fut en",:
touré que par Me. Duclaud & fon époufe. Les enfans ne
furent appellés que par le Confe1feur; & ce fut dans c~
temps de maladie & peu de jours avant fil mort 1 qu~
Années z78:z. & fuiv.
Aaa
.\
�352.
J 0 11 a N A r.
Gerbaud fit un tèftament folemnel, dont lès enfans ne
furent inll:ruits que par l'affignation que Me. Duclaud leur
fit donner pour voir procéder à l'ouverture; ils apprirent
qu'il était tout en faveur de Me. Dudaud héritier inllitué;
& comme ils n'avaient pas démérité de leur pere, ils
demanderent" au Lieutenant d'Arles la caffation de ce tell:amenr. Sur l'intimation de la requête, Me. Duclaud prétendit que l'infiitution faire en fa faveur était rénumératoire,
& qu'il fe défifieroit de la fucceffion, fi on voulait payer
tout ce que IUF devait le défunt. La caufe fut enfuite évoquée
pardevant la Cour.
"
"
On difoit pour les epfans de Gerbaua, que le tell:ament
était nul, parce qu'il renfermait une contravention formelle à l'Ordonnance. Cette contravention était fondée
fu.r les propres termes du tenament in fine, qui font COOliuS
en ces termes: C'eft mon dernier tejlament & dilPcifition de
derniere volonté que j'ai dic7é & fait écrire , & feulement
figné au oas de chaque page, pour le dépofer entre 1er mains
de Me. Claftre Notaire. Les rermes de la fufcription émient;
le' uflateur a déclaré au Notaire, en préfence des témoins fus
nommés, que ce qui dl contenu danil cette feuille de papier.
ejl [on tejlament [olemnel '1u'il a lui-même écrit de là propre
main, & Jigné à chaque Jin de page.
\ "
Cette contrariété ell une nullité radicale qui doit anéantir
le teltament en entier; pour démontrer 'cette 'nullité on établiffoit trois propofirions : la prémiùe, que le Notaire efl:
obligé dans l'aél:e de fufcriptibn d'atteHer, d'après la déclaration du le!l:ateU!, fi le papier préfenté 'comme tefl:\Iment ell écrit de la main du tellateur, ou s'il efl: écrit
d'une main étrangere; la feconde, que l'attellation du Notaire
ell requife, à peine de nullité; & la tro'ifieme, qu'il faut que
cette attellation foit véritable & conforme au fait attell:é,
pour qu'elle puiffe prouver l'identité & la validité de l'aéte;
c'eU ce qui efl: porté par l'art. 9 de l'Ordonnance des tefta mens de 173~; & c'ell: ce qui efl: attellé par Furgole,
tom. l , pag. 78; par Aymar & Serres fur les infl:itutes,
pag. 2.16.
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
363
Le tefiament' donr s'agit e!l: vicieux en lui-méme; on y
"oit des enfans déshérités par leur pere, &. une in!l:itution
en faveur d'un' étranger. Cer inilitué e!l: Procureur au Siege
d'Arles; le te!l:ament avait été fait dans le temps que les
cnfans plaidaient, contre leur pere la fucceffion de leur mere.
Inutil~ment Me. Duclaud fait valoir la prétendue caufe de
l'itiilitution pour des fervices rendus; il Y a dol &. fraude,
puifqu'on ne coharte pas ces fe.rvices, & qu'il ne conile
pas des avances que Me. Duc1alld prétend avoir faites au·
te!l:ateur; en un mot, ce reilament e!l: contre la, narure ,
l'honnêreré &. les bonnes mœurs.
En réponfe pour Me. Duclaud on renouvelloit les offres
par lui faites d'abandonner la fucceffion, en étant payé de
œ qui lui étoit dt'i. D'ailleurs le teilament e!l: régulier
dans la forme, &. ju!l:e relativement au fonds, & confé-:que~meot -les demanderetres font non recevables & mal
foodees" parce qu'il n'y a point de nulliré, fait dans le teftament qui eH entier &. parfait dans la forme, fait dans
l'aél:e de fufcription où routes les formalités ont été exae-.
tement ohfervées;
Il e!l: bien vrai que l'aél:e de fufcription pmte que le:
teilateur a écrit fan te!l:amenr, &. que le re!l:ametit au contraire démontre que le tefiateur J'avait· fait écrire; mais
l'atrertion du teilament e!l: véritable, & celle de l'aél:e de \
fufcription e!l: erronée; d'où l'on peut rirer certe coriféquence, que fi le reilament e!l: bon dans l'état de vérité
de l'atrertiOn qui s'y rrouve, on ne peut pas le catrer ,.
parce qu'il'.e!l: bon 'dans fa forme. fubilantielle, & que ~ès:
qu'il. n'y à point de contravention à l'Ordonnance, il n'y a
point de nulliti: En effer, dès -qu'il y a e"rreur dans la.
dé<>laration du tefiament, peut-on conclure qu'il y a nulliré?'
Non fans dou'te ; l'erreur ne vicie pas la volonté, pourvu qu'iL
en' conŒe. Or, ici 00 voit que le tell:ate\Jr a voulu teiler ~
il a 'rempli le vœ'u des Loix en faifant toures les déclara rions,
Cju'elles exigoient ; conféquemmem il ne reLte qu'une fimpl~
-erreur .indifferente à' la validité du tefiament. Parmi les;
,
Aaa2.
�364
,
JOVRNAL
précautions que le Légiilateur a éxigé, les Ul1es font étàblies pour éviter les fraudes, & leur omiffion annulle l'aéte.
Le Statut exige, par exemple, pour la validité d'une donation, la préfence du Juge & du Conful; s'ils n'y affiHent ,
pas, l'aéte dl: incomplet & nul; roures les preuves de la
non caprarion fone inutiles. Les aurres fone pour donner
toujours de nouveaux lignes de volonté, & leur ,omiffion
peur n'êrre pas une nulliré. Le Légiilateur veut que le tefnreur déclare s'il a' écrit ou fait écrire fon t~Hamen[..; s'il
ne le déclare pas, qu'il y ait nullirp.; à la bonne heure: mais
ici il y a dans le teHamene une déclararion exacte. Rien deplus folemnellement requis que la date des te Ha mens ; néan.:moins à Paris même on a confirmé des teftamens, quoique'
la dare fûr incomplete & erronée, pourvu qu'il conHât d'ailleurs de l'époque par certaines circonllances du reftament..
DOllc poirie de nulliré; fimple' quellion à décider par les
principes généraux.
•
L'erreur de la déclaration pefera dans la quellion d'identité,
elle fera préfomprion conrraire; mais dès qu'il n'y a point
de Loi qui aie dit que fi le rellateur fe trompoit dans la
déclaration, !e .ceHamérit feroie nul, quelque nécelfaire qué
foie la déclararion, il n'y a poinr de nullieé d'Ordonnance;
c'ell le cas où un teHareur Jàchant figner, déclare ne pas
le_ (avoirj fon teHament n'eH pas pour cela nul;, le vœu de
la Loi el!: rempli, la déclaration ell faulfe & erronée; il
relle feulement à examiner fi l'aéte eH pur. Il exille une
grande préfomptian. pour foupçonner la volonté; c'eŒJe refus
de ligner; mais le eellamene n'ell pas nul, par cela feu]que la déclaraeion n'ell p.as exaéte ; même pari ré d'hypoehe'fe, ainfi forme du eeHament inaetaqIJable.
,
'
Quant au fonds du re(lament, le Procureur ad lites.n'elb
,pas incapable' d'inllicurioll; Me. Duclaud avoit été Procureur: de Gero'aud j il Y avoit rrois ans "dans un feu1.,procès..
Lors du rellarn<;nt, c'éraie Me. Chapus qui étoit::fon 1 Pra...
cureur. On ne peut pas' dire qu'il y ait 'ceffion de dro'itSlo
Iirigieux, puifque le teftament entraîne un abandon nécelfaire.
(
.
�DU
La
l'ALAIS
J)!, l'ROVE Ne E,;
365'
captatiolJ' 'qu'ol! oppofe eft. fan~ preuve; Me•• Duc1aud
avait des créances juGes, légitimes-&' im;onieGables, comme
frais de procès, fomllles p,ayées à la" d..éeparg~ de l'hoirie,
frais funérajres, prêts d'argent & autres ar~ic1es qui abfor:bent la fuccellion."
" ._,
"
,
.s.,
.•
Mr. l'Avocat-GeÇleral, de Cah1f~nne),dIfcuç~n,t. les moyelJs'
fonciers de ca.1fation, demo-ntra que le. te(tament de Jacques
Gerbaud ne prefentoit aucune forte de cellion de droits liti.
gieux, rép,FOllv'ée par ,les Ordonnances, ni en droit, ni en.'
fait; qu'en drojt" ,Me., Dllc)aud, Proc\lrellr ad lites du ter:.
tateut:" avoic..pu êtrç ipfiitué fon héritie~, ~ qu'en fait oh
n'avoit pas jHHifié que Me. Dllc1aud, etût . été conGan~me~~
le Procureur, de Gerbaud; qu'on avq,it fo.utenjl> au cont~air<1
qu'il n~ l'é~qiç p~s~ ~J'ép~que du.. teHam,enr, & qu'on n'avC?it
,ien dit pour détruiçe cette allégation; que n'y ayant eu: d~
Ja p~r.t, de Me. DllcIauÀ ~u~l1necaptation ni.~~?lence pOUl;
fe fair~ ,infl:itller, il n'y, avait rien d'odieu~, A:jnju,f1:e ni
d'i\Jiei~ dans l'in!!itution, .qu.e conféguemmenF le t~f1:ament
,devqit çtre entr~tenu relativement à~es moyens, gui n'étaient
pas fondés.
" I.t"
,
Qu'on ne, pouvait pas ,à la' vérité fe refu(er à .la faveùrd~s enfaos qui réclame:pt la fucce/lioq dfl leur ,pere, fllr-t';lUS
Ruaod ~lIe fe réduit, pour ainfi dire, alj; f~lll titre d',héritier,;mais ce~ce ~.onfitiération efl: vaine, &,., la faveur, devient
inutile" fi la difpofition efl: légale.
,
'. Examinant enfuite s'il y avait nullit~ du non dans le tefl:a.,
ment attaqué, Mr. J'A,vocat-Général rappella les ?ifpofirions
d~ l'Ordonnance des tefl:amens, l'.article 9, qui porte qu~
lorfquè le cefl:ateur, voudra faire un teGanlenr myGique &
fecret; il fera tenll..de figner fes' difpofitions" foit qu'il les
ait écrites lui-même, foit qu'il les ait fait écrire par un autre;
& fera! dl-il dit) le papier' qui contien..dra lefdites di!prlji~
tionJ., .enfemble le papier qui feryira d'enveloppe"' s'il y ~n
U/1e, clQ~ & caçhetté avec les précautions en tel cas .requifè.
(j accoutumées; l, teflateur pr,éfe'ltera led.i"IiP,tjpjq ai'nji clqs,6i
peRé fept témoins au .mgins, y c0"1prisd6.J:!,~tqir~'lLif.
~
l
' . .
'~J
-.
.... ~
,
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a
�•
•
�J)U
PALAIS
Ill!
367
PROVENCE:
~ans l'aae de fufcription & dans le tell:ament. La Loi ne
forme des 'deux a8:es qu'un feul & même a8:e; la volonté
& les déclarations du teilateur en forment deux cliflinéls
& féparés, incohérens, & qu'il el!: impoflible de jamais
~
réunir & confondre, comme l'exige l'Ordonnanl;~.
Mr. l'Avocat-Général conclut à ce que fans s'arrêter aux
'offres de Me. Duclaud; fairant droit aux requêtes des filles
Gerbaud ~ le tell:ament folemnel fait par Jacques Gerbaud , qui
inll:itue Me. Duclaud fon héritier univerfel, fût déclaré nul,
& comme tel ca1fé, & les filles Gerbaud mires en po1feflion
de l'héritage de leur pere, avec défenfes de l~s y troubler,
à peine d'amende ~ d'en être informé.
~
,
Arrêt du 27 Février 1783, prononcé par Mr. le Préfident
de Jouques, conforme aux conclulions; condamne Me.
Duclaud aux dépens. Plaidant Mes. Port!ilis & Gaflier.
ARR Ê T
X'L 1.
Le 'Prîeuré érigé en PEgiift St. Michel de la ville de Sallier,;
e.fl Prieuré jimple (j régulier.
J
,
'Ereélion de I.a 'Cure dé ~olliérs remonte au cinquje~.e
fiecle de l'Eghre. C'el!: l'epoque où l'on elfeélua la dlVlfion géhérale des Paroi1fes dans les Provinces de l'Empire;
des Prêtres féculiers eurent le gouvernement de la Cure de
Selliers. La de1ferte même des, Cures étoit alors le feul
objet des ordinations. Ch'aque Paroi/fe eut un Prêt~e citu.Jaire; leurs travaux étaient payés par des oblations volontaires, d'abord très-abondantes, & enfliite fort modiques; on
exhorta les fide1es à montrer plus d'empre/fement & de
:rèconnoi/fance; ils le firent, & leur foumiflion aux delirs
de l'Eglife amena enfin l'obligation de payer la dt,me telle
qu'elle eH aujourd'hui.
.
.
.
On voit par un aéle .de '1°38, que Jaufredus, Comte de
L
,
�J)U
PALAIS
Ill!
367
PROVENCE:
~ans l'aae de fufcription & dans le tell:ament. La Loi ne
forme des 'deux a8:es qu'un feul & même a8:e; la volonté
& les déclarations du teilateur en forment deux cliflinéls
& féparés, incohérens, & qu'il el!: impoflible de jamais
~
réunir & confondre, comme l'exige l'Ordonnanl;~.
Mr. l'Avocat-Général conclut à ce que fans s'arrêter aux
'offres de Me. Duclaud; fairant droit aux requêtes des filles
Gerbaud ~ le tell:ament folemnel fait par Jacques Gerbaud , qui
inll:itue Me. Duclaud fon héritier univerfel, fût déclaré nul,
& comme tel ca1fé, & les filles Gerbaud mires en po1feflion
de l'héritage de leur pere, avec défenfes de l~s y troubler,
à peine d'amende ~ d'en être informé.
~
,
Arrêt du 27 Février 1783, prononcé par Mr. le Préfident
de Jouques, conforme aux conclulions; condamne Me.
Duclaud aux dépens. Plaidant Mes. Port!ilis & Gaflier.
ARR Ê T
X'L 1.
Le 'Prîeuré érigé en PEgiift St. Michel de la ville de Sallier,;
e.fl Prieuré jimple (j régulier.
J
,
'Ereélion de I.a 'Cure dé ~olliérs remonte au cinquje~.e
fiecle de l'Eghre. C'el!: l'epoque où l'on elfeélua la dlVlfion géhérale des Paroi1fes dans les Provinces de l'Empire;
des Prêtres féculiers eurent le gouvernement de la Cure de
Selliers. La de1ferte même des, Cures étoit alors le feul
objet des ordinations. Ch'aque Paroi/fe eut un Prêt~e citu.Jaire; leurs travaux étaient payés par des oblations volontaires, d'abord très-abondantes, & enfliite fort modiques; on
exhorta les fide1es à montrer plus d'empre/fement & de
:rèconnoi/fance; ils le firent, & leur foumiflion aux delirs
de l'Eglife amena enfin l'obligation de payer la dt,me telle
qu'elle eH aujourd'hui.
.
.
.
On voit par un aéle .de '1°38, que Jaufredus, Comte de
L
,
�'3'68
Jou
RNA L
~ ,
Provence, donne à Fulco, Vicomte de Marfeille- & à' fa
femme, ce qu'il po1Tédoit à Sixfours & à Solliers, pour,avoir
part aux aumônes & aux libéralités ,qu'ils faifoient à Dieu
& au Mona!l:ere de St. Viél:or. En 104'1-7 Fulco &'Audile fa
femme fonf donation -au Monall:ere de St. Viél:or de la moitié
du Fief, 'dè la dîme & de la Paroi{fe de Sàlliers. Les Papes
Pafcal II, Innocent II & Honoré, par leurs .Bulles de 1114,
1136 & 1218 confirment le MonaHere de St. Viél:or dans
la po1Teffion de llEglife de St. Michel de Solliers. En. 1134 ,
les Moines de St. Viél:or' fe plaignoient des pfurpations de
,l'Evêque de, Toulon; il fut pa1Té un tranfaél:ion 'par laquelle
il fut d}, 9ue l'Evêque po1Téderoit l'Eglife de Pierrefeu, &
:le Monallere" St. 'Viél:or 'tominueroit de pà1Téder ceBe de
Solliers avec les dîmes & oblations.
Jufqu'à cette' époque ,les biens étaient confondus dans la
manfe; le Monallere fe contentoit d'envoyer dans les divers
oratoires & dans les divers lieux des Moines pour adminillre\:. Tout le monde connaît l'origine des Prieurés réguliers'; les Moines admin'illrateurs ,cherchaient à fe perpétuer
dans leur adminillration, & ils finirent par fe faire donner
'en tit;e les biens de ia" manfe~ C'ell' ce qui arriva pour .les
biens & les dîmes que le .Mona'frete Sr., Viél:or' po1Tédoit
dans le territoire de Solliers.. OQ trouve l'exillence du' Prieuré
'è'n" 1338' fX.. én 1"IJ4:9·· Eillo{ 47~, Aufrerius, Allbé .de Sr.
Viél;or, réùmt à Foffice élau'fl:ral & l-a'difpenferie, qui n'était
pas 'fufIifamment doté', 'les· reVenus du Prieuré,lde 'Solliers,
dépendant, 'ell-il dit, dé 'toute 'ancienneté du Monajlere, St.
·Viaor. En 1 ~o3, lè,Piièurél retourila en titre, &.Mrè: . e
Forbin, Mairie de St7Viéldt,. en.fut pourvu Ipar l'Abbé ô-ap ès
lu·i, Mré. Claude d'AŒonviHe, Prêtre Religieux lle l'Eglife 'dè~t. Amant, en prit po1Teffion. Le 9 Mars' 1613 , Mre. Teiffier,
qui était Prieur de Solliers, pa1Ta un aél:e devant' Notaire"
dans le Palais épifcopal 1 dé la- villè d·e·:Lroulon ,-lintitulé~
fimdatio EccleJiœ Paroehialis'Sàflc7i'Mickaelis de Soleriis,,' cilm
au,torifatione, nominqtione §.' co/lationi:. Cet ~él:e renferme
-l'ereél:ion d'une Vicairîé perpétuelle, &ria ',nomination de
Mre.
�DU
PALAIS
DB
PROVENeL
3~
Mre. Claude Teiffier, Prêtre du lieu de LanCion, neveu du
précédent. En 1623, Mre. Teiffier réfigna ce Prieuré à
Henri de Forbin, & déclara 'qu'il tenoit le bénéfice en
commande depuis cinquante ans. Enfin, tous ceux qui furent
pourvus de ce Bénéfice déclarerent le polféder en commande.
Mre. Alexandre de Mailly fut pourvu du Prieuré de Solliers
en 1721, & s'en démit en 17')1 en, faveur du Chapirre
de St. Viaor, (ous la ré(erve d'une pen fion de 3000 liv.
A cette époque ce Prieuré fut uni comme Prieuré fimple,
fous le titre de Notre-Dame de la Farlede, St. Michel Olt
de la Trinité du ,lieu de Solliers, dépendant du MonaJlere de
St. Vic70r de Marfeille, Ordre de St. Benoit. En 178 [, Mre.
Le Roux croyant ne trouver dans l'aél:e de [6 l 3 aUClJna
rai (on ni prétexte valable de (cinder la Cure de Solliers ,
quel que fLlt~ce alors fon érat, impétra ce- Prieuré, (oit à
. ture de Bénéfice (éculier, (oir en commande, en cas qu'il
fût poffible qu'il fût encore en 16[3 dans un état de régu_
. lariré; il prit polfeffion, appella comme d'abus de la (eél:ion,
& incidemment de l'union de 17') 1.
On di(oit pOUf lui, que j'aél:e de 1613 érait un aél:e de
feél:ion, & de (eél:i()O d'un Prieuré-Cure. Ce bénéfice exifloit
en 16 [3 dans la plénirude de (on titre; il n'avoit fubi. nÎ
changement; ni démembrement antérieur; le TituJaire éroit
indifpen(ablement obligé d'en faire les fq.nél:ions; il ne çeff'ld'en être chargé qu'en les livrant alors à un Vicaire per_
péruel. Il s'agit donc d'un aél:e d'injuHice & d'abus, & il
ea en effet un tableau révoltant de contraventions aux Loi~
de l'Egli(e & .de J'Etat. Défaut de formalités; défap[ de
pouvoir; défaut de cau(e; (eél:ion purement perfonnelle;
feul objet de J'intérêt du Tirulaire {eculier; démembrement
illicite dll ritre; diHraél:ion fcandaleufe des biens; arrentat
aux Réglemens de- difc.ipline & de proteél:ion, , foit que la
Cure eût repris fon état de (éctllariré, (oit que le Titulair~
reconnu 'féculier eût été p.ourvu en commanqe du Prieuré,
Cure encore régulier, & régulier Bénédi3:in,
,
On abu(e en vain de ce[te qualité dOJJoée au B~néJiclJ
Amlées 1782. & jJJiv,
Il p b
•
�370
10
U RNA
r.
par le fait même de la po1Teffion en titre & de la delterte
des Religieux Bénédiétins. Ce n'e!!:. point une preuve de
propriété pour l'ancien Mona!!:ere; le patrimoine de la Cure
n'ell: pas venu de lui; il ne lui a jamais été' donné; il n'e!!:
jamais encré dans fa manfe. Simple po1Teffion du PrieuréCure en titre & de1Terte .eJfeétive par les Bénédiétins; fim~
pie droit de collatIon & de dépendance pour le Mona!!:ere
& pour l'Abbé. Que feroit d'ailleurs que le Monaftere eût
eu à une époque quelèonque des droits fur la temporalité
de la Cure? Le Bénéfice dans ce cas même fe roit devenu
purement perfonnel Cur la tête des Religieux qui en écoient
pourvus en titre; le partage de la manCe, la perfonnalité du
titre auroient éteint les droits du Monaitere; & Fe Prieuré~
Cure ayant exifté avant la feétion, les Titulaires ne s'étant
pas même jamais permis d'en diftraire les revenus ou la
dotation ,- on devoit abColumenr le laitrer tel qu'il écoir.
Les lèculiers Titulaires, CucceŒellrs des Religieux, ti'écoient
plus què les dépofitaités & les fimples uCufruitiers du Prieuré·
Cure. Mre. Teiffier, quatrieme Ticulaire en commande,
était, comme Ces prédéceŒeurs, capable de po1Téder le
Prieuré-Cure, & d'en continuer les fonétions qu'il rempliŒoit déja depuis plus de quarante ans. II n'yavoit/do'nc
abColumenc' &. fous aucun point de vUe, ni ju!!:e motif, ni
cauCe probable, ni prétexte admiffible d'en faire la feétion;
en un mot, ce' n'e!!: donc point ici l'hyporheCe d'un démembrement fait par les Bénédiétins au profit de leurs Monafteres, Cuivant l'eCprit & la lettre des Conciles de Poitiers,
de Clern:lOnt & de. L~tran; c'e!!: évidemment le fpeétacle
fcandaleux d'une Ceétion purement perConnelle par un féculier
capable de pofféder, & .qui ne pouvant obtenir une union
, . perConnelle du titre, le dénatura dans le feul objet d'en emPOrter la dotation.
"
Mre. Teifiier pourvu du' Prieuré - Cure deHine à fon
neveu la Vicairie perpétuelle qu'il Ce propoCe de fonder; il
l'envoit à Toulon avec Ca procuration.' Le neveu & le
Procureur confiirué vont à l'Evêché fuivis d'un Notaire, &
"
�DU
PAL AIS
D Il
PR 0 VEN CE.
371
eft dreffé un aéte purement civil, portant fondation
d'une Vicairie perpétuelle: l~ le Procureur de Mre. Teiffier
diéte au ~Q[aire les conditions & les charges de la pré~
tendue fondation; il difpofe en maître abfolu, & l'on
femble ne demander à l'Evéque d'autorifer cet aéte que
dans le feul objet d'avoir de lui l'inftitution qui érait néceffaire - au Vicaire perpétuel. Toutt; la charge du fervice
curial eft rejettée filr le Vicaire perpétuel; on l'oblige de
la remplir, d'avoir trois ,Secondaires, de les payer & de
les nourrir; on n'affigne cependant à la Vicairie qu'une
très-mjnce dotation; le Prieur fe réferve expreffément &
perfonnellement le patronage de la Vicairie perpétuelle. Un
nouveau_ titre fe forme pour la Paroiffe, pour la Cure de
Solliers, & le véritable Pafteur dégagé du foin des ames
emporte -avec lui les trois quarts des biens & des revenul>
de la Cure. A des traits fi frappans peut-on ne pas reçon?
noître J'aéte de 1613 comme une véritable feétion?
Le Vicaire perpétuel inftitué en 16 l 3 a eu pour fuc~
ceffeur d'autres Vicaires perpétuels, & Mre. Teiffier, Ti{u~
laire du Prieuré fimple, le réGgna dès 162.3, & fes fuc~
ceffeurs encore en ont joui fans interruprion jufqu'en 17) l ,
époque de l'union au _Chapitre de St, Viétor. Qu'a- r~on
donc fait en 1613, fi ce n'ell: un aéte de feétion? N~y
avoit-il pas un Prieuré-Cure à fcinder? En avoit-on faie
une feétion antérieure? Dès 1)74 Mre. Teiffier al'oue être
obligé de faire téparer l'EgliIe paroiffiale. Il fe' montre
comme Prieur, comme jouiffanc de tous les revenus dij
Prieuré-Cure; il charge un Macon de travailler aux réparations; l'aéte de prix-fait eft ra'pporré, Il plaide en 160p & fur les menues dîmes donc il vouloit érre payé, & fUF
les aumônes & les r~ararions que les habitans lui de~
mandoient. 'La Sentence arbitrale qui termina cel différens,
ie qualifie Prieur de l'Eglife de Solliers. C'en la qualir~
qu'il prend dans I~ p'rocurarion faite au Théologal de l'Eglifà
de Toulon; l'aéte de feétion en juftifie. C'ell: à ce rien;!
'lu'i1 charge le Théologal de fonder la Viçairie perpétuelJ~f
I~
-
lH b ~
�Jou RNA t
& le Théologal affigne à la Vicairie perpetuelle une- por~
1371.
'rion des fruits décimaux; il promer que l'expédition en
.fera faite au moment de chaque récolte; il .déclare que le
Prieur payera les... Préflicateurs, les répa.rations de l'Eglife ,
& les fmis de vi(ite; il préfenre 'en fon nom le Vièaire
perpétuel; il oblige enfin, pour l'obfervation de l'acre,' rous
les biens du Prieur & ceux du Prieuré; c'ef!: donc- lui.même qui jufques-là avoir occupé la maifon curiale, qui
avoir fair u'ne réGdence perfonnelle, & qui avoir rempli
tous les devoir.s arrachés à (on titre, comme il en avoit
habimellement per<;u rous les revenus.. Con<;oir - on après
cela que le Prieuré - Cure n'exiGâr plus à l'époque de la
[ecrion de 1613? & qu'érait donc le titre dont on a fait
. alors deux nouveaux Bénéfices diHincrs, féparés. & diifemblables, fi ce' n'érait un Prieuré.-Cure exiflant. dans .fon
entier fur Iii rête de Mre. Teiffier auteur de la fecrion?
En vain diroir-on que les Conciles de Poiri~rs, de Clermont & de Larran ont fcindé les Bénéfices curiaux, fécularifé la cure des ames, & féparé le Bénéfice du ritre ;
ces Conciles n'eurenc que le feul objet d'engager les Moines
à quiner le fervice des Cures & à rentrer dans le cloître.
Les Evêques redouraient les li.lires de l'indépendance .alors
affecrée par' les Moines. Le danger érait preffanc; on laiifa
aux Monafreres raus leurs droits fur la temporalité; on leur
enjoignit' de ,préfenter & de faire inftituer des Prêrres
[éculiers., capables du fervice curÎal. C'ef!: le commandement, c'ef!: l'injoncrion de la Loi; mais l'exécution reHoit
à faire. Les feél:ions éraienr perm ifes d'u chef des Monafreres , parce qu'à quelque prix que ce fùt on vouloit donner
-aux Cures des MiniHres fécu.Jiers ; mais ces fecrions permifes, de'firées, il reaoir à les effeél:uer, & cela même
on he pouvoir \.e faire que par l'établiifement en ritre d'une
Vicairie perpétuelle dans. chacune des Eglifes deifervies par
les Moines. Alors feulement pouvoit fe former le ritre purement féculier, dont la cure des am es écoit l'objet; alors
lèuJement les Prieurés-Cures démembrés ou iè:Î"ndé:; [aifoient
�DU
PAL.AIS
Dl!
PROVENel!;
373
place 11 de nouveaux titres de Prieurés fimples & de Vi_cairies perpétuelles; alors feulement la charge éwit féparée
-<le l'office; les Monafieres avoient le droit de conferver
Je temporel, & les Cutes avoient d'autres Minifires que
ceux' qu'ils avoient perdus par les feél:ions.
Le Concile de Poitiers, tenu en 1078, canon 6, exige
l'établiffement d'un Prêtre qui réponde de la cure des ames.
Celui de Clermont, tenu en 1°9'1 , veut que ce Prêtre en
réponde 'uniquement, qu'il foit inHitué par l'Evêque fur la
préfentation des Religieux, & que l'Evêque feul {oit le
maître de le dépofer & d'infpeél:er fa conduite. Le quatrie me Concile de Latran, tenu en 121'1, ordonne nommément aux pourvus de Dignités & Prébendes d'établir
des Vicaires perpétuels dans les Cutes unies 11 leurs titres;
, il veut que rous ceux qùi font pourvus de Bénéfices curiaux,
en falrent eux-mêmes la deffene, fans pouvoir la confier 11.
de fi mples Vicaires; & .dans l'exception qu'il admet pour
,les Cures' uni,es, il exige l'écabliffement d'un Vicaire .perpétuel. C'éroit donc une chofe abfolument néceffaire d'inftituer des Vicairies perpétuelles, comme le difent les Con.~iles & les Auteurs, tels que Mr, de Marca, diffèrt. ad
. Concil. Claromont; Piales , rir. des c.oUations, tpm. 7, pag.
297'; Furgole, Curé$ primi!ifs , ch. l, n. 22, pag. 7 ;
,Camus, des pottions congrues, rom. l', pag. 89.
'
Que portent les aél:es rapportés ou produits par le Chapitre de St. Viél:or? L'aél:e de 1338, qui ell k premier ou
le plus ancien de ceux qui parlent de la defferre .du Prieuré,Cu{'e, prouve que. le Bénédiél:in qui en éroit titulaire,
venoit d'en faire .la .permutation avec le Prieuré - Cure
d'Ollieres que poffédoit auffi en titre un autre Religieux du
Monafiere de St. Viél:or. Cet aél:e jullifie pleinement la
poffeffion en titre du _Prieuré-Cure, que les Prieurs-Curés
-co-permutans étoient obligés de. réfider & de faire perfonnellement le fervice, affillés des Religieux qu'on leur donnoit pour compagnons. L'aél:e de 1349 prouve que le
Prieuré.Cùre de Solliers continuoit d'être po1fédé en titre,
•
�374
Jou RNA L
'
~
puifque l'Abbé de St. Viél:or y charge les Prieurs-Curés dé
Belgencier & de Solliers de mettre en po1feffioh du Prieuré
de Sr. Laurent Mre. François Florent qui venoir d'en êrre
pourvu. Celui de 1476 eft un Décret d'union, de ce Bénéfice à l'office c1auftral de la difpenferie du Monaftere; mais cette union n'eut pas lieu; lè décret de l'Abbé rella fans
exécutÎDn, & le Religieux pourvu du Prieuré-Cure en difpofa c0l!1me \.l' !.~ trouva bon, aïnli qu'il conHe par l'aél:e
de 1 )03 ,qui el!: une collatÎon du Prieyré-Cure faire par
Ogier d'Englure, alors Evêque de Marfeille & Abbé de
St. Viél:or, à Claude' Au1fonville Religieux Bénédiél:in.
Après Claude Au1fonville, le Prieuré-Cure pa1fe à un féculier dont le nom ~ft inçonm1'; mais le fait de fa po1feffion
en titre el!: prouvé par l'aél:e de 1) 26. Que voir - on en
effet dans cet aél:e? C'e1l:"1a prife de po1feffion du PrieuréCure de Solliers par Mre. Antoine Arumeti de Bon Repos;
prife de po1feffion requife, effeél:uée & con(ornmée en exécution de la permutaüon qu'il avoit faire du Prieuré-Curé
de Sinard, village du DallPhiné dans le Diocefe de Die,
avec le Prieuré- Cure de Solliers. L'aél:e déclare qûe le
Prieuré - Cure de Sinard eH dépendant de l'Ordre de St.
AuguHin. II prouve donc qu'Arumeti de Bon Repos,en étoit
pourvu en commande; il prouve encore 'que [on co-permutant
qui lui cédoit le Prieuré-Cure de Solliers, étoit en effet
{éculier, puifqu'i~ eut [ucceffivement le Prieuré-Cure de Solliers dépendant de l'Ordre de St. Benoit, & celui de Sinard
dépendant de l'Ordre de St. Augullin. Ammeti de Bon Repps
prend po1feffion du Prieuré-Cure de Solliers, avec toutes les
formaliiés requifes pour la po1feffion d'un bénéfice curial; enfin
il po1fede ce Prieuré-Cure nombre d'années, & n'imagine
pas d'en faire ,la feél:ion, parce qu'il n'avoit nul- intérêt de
fcinder.
C'était un abus général avant l'Edit de I))7 de livrer
la de1ferte des Cures à des .Prêtres ll:~endiés, à des Prêtres,
de louage que les Curés payoient, & qu'ils renvoyoienL pour
en louer d'autres lorfqu'ils le trouvoient bon. La po1feffiol1
\
•
�nu PALAIS nI! PROVENCE;
37S
d'un âutre bénéfice était alors une difpenfe même de rélider
dans une Cure, & un jufte motif d'en lailfer le. ferviceà un
Prêtre mercenaire, ainli que liobferve Fleuri, ir!/Ht éccl. tom.
l, pag. 498. Delà l'Edit du premier Mai 1)) 7 ,arr. l , qui
enjoignit aux Parlemens'd'obliger les Curés & autres ayant
charge d'ames de fe retirer. Delà les vives inltances de la
France pour avoir du Concile de Trente un Réglement fur
la réfidence des Titulaires (Hiftoire du Concile de Trente,
tom. 2, pag. )I).) Delà le décret du Concile, felf. 23,
chap. 1, qui en 1 )63 enjoignit exprelférnent aux Curés de
réfider dans leurs Eglifes & de les delfervir. Delà enfin la
déclaration faite par la Congrégation du Concile, qu'un
Curé pouvoit feulement fe difpenfer de la réfidence & du
fervice, lorfqu'un Vicaire perpétuel avoit été établi dans
l'~glife & chargé du foin des arnes par l'inftitution même
de la Vicaire perpétuelle; Après ces Réglemens il n'y eut
plus moyen pour les Curés de fe foultraire à la Loi de la
réfidencè, & de fe faire remplacer par des Prêtres à gages.
Qu'importe que dans les' aél:es que l'on a fait connaître,
les Prieurs réguliers & les Commandataires aient eu feule·ment la qualité de Prieurs, fans qu'on les ait dit PrieursCurés? Qu'importé encore que des Monalteres & d'autres
CommllDautés éccléûaltiques aient fait delfervir les Cures
unies à leurs manfes par des Vicaires amovibles,) avant d'y
établir des Vicairies perpétuelles? Elles ont joui du fruit
des unions, fans remplir dans les commence mens la charge
qui leur étoit impofée. Les titres des Cures & des PriéursCurés exiftoient en leur entier fans être placés fur aucune
tête; les Eglifes n'avoient point de Titulaires, &. plufieurs
étaient encore dans cet état avant la Déclaration de 1686.
Le Monaftere de Sr. Viél:or n'a fcindé dans aucun temps;
plufieurs de fes Religieux ont été Titulaires perfonnels du
Prieuré-Cure; ils en ont fait des réfignations & des permutations. Jamais le Prieuré-Cure n'avait fouffert de démembrement: peut-on douter après cela que ce titre n'ait exifié
tout entier en 1613, & que la feél:ion faite à ~ette époque
�376
Jou
RNA L
ne fait "en .effet un aél:e defl:ruél:if d'un Prieuré- Cure per-'
fonnel qui jouilfoit de toute la dotation de fan Eglife, &
dont les droits & les charges s'étaient invariablement con,.
fervés.
On relevait enfuite plufieurs moyens d'abus. 1°.' Défaut
de formalités. II s'agilfoit d'une innovation effeél:ive dans
l'Eglife de Solliers, & cerce innovation ne pouvait être
, fuite fans demande préalable, fans i'nHruél:ion & fans jugement. Cerce maxime efl: arceRée par d'Hericourt j Loix
eccléfiafliques, lett. B, n. 2, & leu. F, n. 29; Traité de la dif
pojitioll forcée des hél/pee:! " tom. l,pag. 393. & 399;
Dic7ionnaire du Droit Canon au mot feaion; Duperray, objë,!!at. fur le concordat, pag. 12.8; 'Augeard, tom. 1, pag.
92.4; Goaid, tom. 4, pag. 46; Decormis, tom. 1, c<;>1. 2.79.
La COUt le juge<r de même en 1768 fur la (eél:ion du Prieuré..
Cure de Callian. '
. 2.°. Défaut de pouvoir. En effet, quel éfl: le genre de pouvoir dont on avoit revêtu Mre. Teiffier? Simple Bénéficier,
fimple Titulaire de la Cure avait-il d'aurres droits que ceux
que lui donnoient (es provifions? Que pouvoir-il donc, fi ce
n'eH de percevoir les revenus du Prieuré - Cure, en remplilfanr les fonél:ions de [on miniHere? 3°. Défaut de caufe.
Quel jufie morif pouvoit avoir Mre. Teiffier de faire la
feétion? Y avoir-il rien en 1.613 qui follicirâr ce démembrement que les Loix regardent comme l'abus le plus. violent
& le plus nuifible que puilfe Ce permerrre un Titulaire? Mre•
. Teiffier étoit capable de polféder le Prieuré-Cure en titre;
il en érait pourvu depuis plus de 40 ans; il pouvait .Ie po(féder encore, fi la Cure avoit. repris (on érat de [écularité;'
il pouvoir conrinuer fa polfeffion en commande, s'il efl: vrai
•qu'il fût fimple Commanda taire du Prieuré-Cure; il' n'avoit
donc & ne pouvoit avoil:, aucun' morif de faire la (eétion.
C'elt d'un Prieuré fimple que lion a [olliciré l'union. C'efl:
un Prieuré !impIe que le Roi a entendu donnèr au Chapitre
de St. Vrétot', & il n'y avoit
de Prieuré .!imple, fi la
feél:ion de 1613 p.'efi qu'un aél:e illiçite & nul; la Cure
pJS
étoi~
�DU
..
PALAIS
DE
PROVENCE.
377
éroir encore dans [on entier; elle exilloic en titre de Prieuré.
Cure; & chacun fair que nos Loix, bien loin de [ouffrir
l'union des bénéfices ·curÎ!ux à des Collégiales quelconques
prohibent expreffément cette attribution injulle des droits
& revenus des Curés.
On répondoit pour le Chapitre de St-. Viélor ; 1°. que
le bénéfice dom s'agit a toujours été régulier, & régulier
Bénédiél:in. 2°. Qu'il n'a jamais exillé ni pu exiller un aél:e
proprement dit aae ahtifif de fec7ion. L'aél:e de 1038 renferme une donation faite à un tiers, avec une dellination
expreffe & marquée pour le Monafterc. Celui de 104f renferme égalemenr une donation au Monallere St. Viél:or de
la moitié du fief, de la dîme & de la Paroiffe. Mezeray
penfe que les dîmes oor été des redevances civiles, avane
que de devenir eccléfiaHiques. Il ell certain que tous "les biens
quelconques ont apparrenu à la focié:é avant que d'appartenir
à l'Eglife. Si les Miniftres de l'Eglifc ne tiennent le dépôt
de la foi que des mains de <Dieu même, il ell conHant que
tous leurs biens œm-porels leur viennenr des hommes. L'ori.
gine de toute propriété eccléfiaHique & civile eil: purement
humaine. Le MonaHere de St. Viél:or pem donc invoquer
comme un rirre légitime de propriété les conceffions qui
lui ont été faites par des hommes refpecrables, par des
Princes Souverains.
De ce que le Monaflere ne poffede plus aujourd'hui tels
ou reis biens, il ne s'enfuir pas qu'il ne les ait poffédés autrefois. Le patrimoine deol'Eglife fuit les mêmes r~voluti6ns
que le patrimoine des familles. La foi el!: inaltérable, elle
durera jufqu'à la con[ommation des fiecles; mais les mémes
promeffes n'ont pas été faites pour les biens temporels
qu'elle poffede. Les Bulles accordées par les Papes [e réferent
à un titre originaire de propriété; elles font encore fourcnues
par la poffcŒon aél:ucHe & coniFanle dcs biens ,qu'elles coofirment : or, un ritre de confirmation toujour-s [ourenu &
toujours réalifé par une poffeffion eifeél:ive, vaur litre origi_
naire & fondamentaL Les titres de coufirmatioo, quand ib
Aanies Z7Bri. &fuiv.
C&~
�378
Jou
A N A L
font ancie'l1s & qu'ils ont été fuivis d'exécution, filppléenr le
titre primirif: La reconnoiffante de la proprieté du Monallere
fe trouve dans les aél:es de t 134, 133 8 , 1349,. 1476 ;
1p6, 1)42 & 1)69'
,
EI1 16 [3 Mre. Teiffier étoit Prieur de Solliers; il poffédoit le' bénéfice en commende; cela ré fuite de la réfignation par lui faite du Prieuré en 162.3 à Henri de Forbin,
dans laquelle réfignation il déclare qu'il renoit lé bénéfice
en commende depuis )0 ans. En 1633 il eH dit dans la
procuration ad rejignandum, que le Prie\lré dépend d'J Jùfpatronat de Sr. Viél:or; il en eH de même des aél:es qui
fuivent. La régularité 'éwit fi' conHanre, que d;,ns la plupart
des proviGons on croyoir avoir befoin de déclarer que le
bénélice n'éwit pas conventuel; le bénéfice n'a donc jamais
ceffé d'être régulier. Qu'dl-il arrivé enfuite ? 11 a été réuni à
la manfe 'du MonaGere, lorfque l'Eglife & l'Etat prépatoient
le grand ouvrage de la fécularifil!ion de ce MonaGere. '
Par la réunion à la manfe, l'Eglilè & l'Etat n'ont fàit que
rendre hommage au droit 'de propriété qui avoit toujours
compété aux Moines fur un bénéfice qui avait toujours été
·fous la dépendance immédiate & intime du Monallere. La
puiffill1ce eccléGaltique & la puilfance civile n'oot fait que
réalirer le droit toujours fubfi!l:anr qu'avait le Monallere d'être
doté de fon propre bien, & de diriger à fan plus grand
avantage la maniere dont il pouvoit & dont il devoit jouir
d'un patrimoine qui lui était affeél:é depuis huit fiecle~. Le
bénéfice n'a jamais changé de nature, & n'a jamais ceffé
d'être le patrimoine du Monaltere. Or, le Monallere étaie
foumis à la regle de Sr. Benoit; le bénéfice a donc toujours
été régulier, & régulier Bénédiél:in. II efl: _donc impoffible
d'admertre l'idée d'une feél:iol1 proprement dire, d'une feél:ion
abufive. En général, fcinder un b.énéfice, c'eft le divifer en
deul1 titres diffùenrs j c'elt, da ilS le fens réprouvé par les
Canons, établir au préjudice d'une Cure, un bénéfice fimple
avec tous les revenus, & lailfer la Cure fimplement avec
t~' !e- tr:wail. Voilà les fçtl:ions ,qui répugnent à l'efptit de
l'.Eghfç & à la difpofition de toutes les Loix.
�D U
,
PAL A' l S
D E
PRO V Il Nell.
379
Dans les premrers terrlps il n y 1 avoit ni Prieurés-Cures.
ni Prieurés fimples, ni bénéfices quelconques; il n'y avoie
dans chaque Diocefe qu'un régime 'd'adminifl:ration, & ce
régime éroit entre les mains de l'Evêque; le Clergé n'a~oit
qu'une manfe. Les donations de dîmes, de prémices,
d'oblations & de fonds de terres qui éroient alors faites à
l'Eglife, prenoiellt la forme de l'aclminii1:ration générale de
l'Eglife; elLes n'app<lrtenoient à aucun Titulaire particulier;
elles ne devenoient l'annexe d'aucun titre, puifqu'il n'y avoit
ni titre, ni Tirulaire; c'éroie. l'Evêque qui dépuroir les MiniChes inférieurs, & qui les rappelloit à volon ré ; c'éroir lui
qui difl:ribuoir les revenus fuivant tes befoins & les occurrences. Il n'éroir quefl:ion alors ni d'union, ni de feél:ion de
bénéfices, puifqu'il n'y ayoit pas même de'bénéfices. D'abord
le Clergé féculier reliut rour; il s'érablit enfuire des Monaf'terès; le Clergé féculier. perdit de fon lufl:re. Au mili~u des
guerrés qui ravager'ent le monde chrérien, la vertu & la fcience
fe réfugierenr dans les Monafl:eres, comme dans un, afyle,
pour y profpérer à l'ombre de la paix & dans le filence de
la folirude.
Tous les grands Seigneurs, tOllS les hommês puiffans
rournerent leurs bienf;rits & leurs libéralités vers les Moines•
• On, leur concéda les plus grands biens, les, plus grandes
polTeffions. Cerre révolution s'opéra fur-rout dans le dlxieme
& onzieme fiecles. A ces époques reculées, la difcipline actuelle fUlLles bénéfices n'éroir pas connue. L'Eglife avoir des'
polTeffions; mais ces poffeffions n'éroieoe. que des rempo-.
ralités vagues qui n'avoient encore reliu aucune forme cànonique. C'e(l préciCëment dans ces remps que furent faires
p~r des Seigneurs Laïques les grandes conceffions qui en- .
richirent le Monaltere de Sr. Viél:or, & qui firent palTer
dans fa manCe ranr de fiefs & tant d'Eglifes difFérenres. Qu'arriva-r-il? Le Clerg~ féculier Ce ravi[a.• On [enrir que le Moine
éroit fait pour travailler à fa propre perfeél:ion; mais que
le Clergé féculier avoit feul recu la miffion de communiquer
la perfeaion <lUl( <lurres. Délà' les Conciles rappellerem Je.~
CÇC:l,
�~o
JOURNA~
Moines dans leurs cloirres, & ils rendirent la cure des
ames a c"eux à qui elle appartenoit par l'infiirution divine.
Les grands coups furent prin~ipalement portés dans le
douzieme uecle par le dernier Concile de Larran; mais fi
les Moines étoient incapables d'exercer les fonaions curiales,
ils n'étaient pas inc-apables d~s conceffions temporelles qui
leur avoient été faites. Il falloir refpeaer ces conceffions,
& la volonté des Fondareurs; il ne falloir pas que de grands
Mona!l:eres fiJffent fans dor. On devoitrécompenfer les fer- vices pa1fés, & proréger des infliturions encore utiles;
car les MonaHeres conrinuerent d'être les dépôts' des plus
graodes lumieres, & de préfenrer l'exemple dés plus grandes
verlUS. Aliffi les Conciles déclarerenr formellement qu~i1s ne
vouloient point toucher à la propriété des MonaHeres, maisqu'ils les foumerroient à enrretenir des Prêrres féculiers pour
la de1ferre des Cures :- redditus heneficiaque retineant, Prer_ hyter tan~en curâ animarum Epifcopo refPondeat. C'eO: la diCpourion du Concile de Poiriers renu l'an 1109, renouvellé
enfuire par le Concile de Larran renu en 1179. Le Monafreœ _de Sr. Via-or fur donc aütori/ë comme taUS les aurres
à conferver fes .po1felllons & 11 prépofer des Vica-ires.
, -La régularité eH le mur de fépararion qui a roujours
exilté enrre la Cure fécularifée par les Conciles, & une
'remporalité que les Conciles ont déclaré devoir reHer réguliere. Cetre temporalité, tant qu'elle, a été réguliere.,n'a point éré & n'a pu êrre la dot de la Cu~e. L'Ordre de
Sr. Benoit & le Monallere de Sr. Viaor, membre de cet
Ordre, n'ont jamais perdu un bénéfice qui a toujours de-meuré régulier & dépendant de l'Ordre & du MonaHere.
l?onc les Moines de Sr. Viaor ont toujours vécu fous les
Loix- qui les ont autorifés à garder les bénéfices & les biens
fervant de dotation aux bénéfices, en commerrant un Vicaire
pour la deflert'e des Cures.
-.
" Les Religieux de St. Benoit, " dit Piales dans fonTrairé
des collations, tom. 8, pag. 13'5, " Ont été rendus à leur
" premier -état j ils font folitaires par leur in!l:itucion, devoués
t'
�nu PALAU nB PROVENCE;
381
" uniquement 11 la priere, & 11 la'retraire, incapables' du n.i" nillere public, L<üques par leur inllitution." Ita Gibert
dans fes' inllit. eccléf. tom. l , ·pag. 376 ; Duperray, des
portions congrues, pag. ~ 67; l'Auteur des définitions canoniques, pag. ,623; Augeard, tom. l , pag. 629;' Sanleger,
réfol. bénéf. chap. 36, n. 7; Mezetay dans fon abrégé
chronologique de l'HiHoire de France; Furgole, des Curés
primitifs, chap. 3 ,pag. 2~. Ces Religieux fe font conformés
aux difpofitions des Conciles, de maniere qu'ils ont ceffé
d'êrre Curés; mais de ce que les Conciles s'appliquenr aux
BénédiB:ins, il faut leur appliquer auffi touS les textes qui,
d'après les Conciles, autorifent ces Religieux à garder les
biens, & à prépoCer des Vicaires pour la cure des ames.
Plufieurs Arrêrs Ont déclaré n'y av,oir abus dans la fimplificarion d'un Prieuré-Cure dépendant de l'Ordre de St. Benoir;
tels font c~ux du 19 Décembre 169) 'pour le Prieuré-Cure
de Bouc; celui du 2'6 Mars 1708 pour le Prieuré-Cure de
Carces; celui du 10 Mars 1768 pour le Prieuré-Cure de
Callian, & pour celui de Ventabren.
Quel ell donc l'aae de 1613? C'eil: une fimple éreB:ion
de Vieairie perpétuelle; le titre de l'aB:e lui-même le porte,
& Ilout le corps de l'aB:e le fuppofe. On a vu que pes
{j.ec es avant 1613 , le Prieur, conformémen aux Conciles,
commettait des Prêtres féculiers pour la de rte de la Cure.
'En point de droit, le 'Bénéfice ayant toujours demeuré régulier, a toujours été le patrimoine du Monailere, & non
de la Cure que les Conciles ont fécularifé. L'état continu
de régularité, reconnu dans Je Prieuré, a été un état légal
I!i. néceffaire de divifion & de féparation d'avec la Cure.
Il n'y a plus de CeB:ion poffible dans une poûtion Cemblable,
& on ne peut regarder l'aB:e d~ .1613 que comme une
fimple éreB:ion de Vicairie perpétuelle, qui bien loin d'être
un abus, 'n'eil: que la ceffation de l'abus.
.
Avant de dif«uter les quellions foncieres de la cauCe,
Mr. l'Avocat-Général de Califfanne parla des .principes génécaux qui pouvoient y avoir r-apport; il diffetta fur la quefiion
•
�39"'2.,
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") ,
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RI li A<L ~ 1
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,
de fav'oir fi .l~()n pouvait unit ou fdnder mi .Bénéfice curial,.
Il établit q.ue les Cures q\ioi'que 'd'unl}:narure priv'ilégiéeil' fe
rrouvant dans là marre des 'biens ecc1éfiafiiques, 'éroient
ftJfceptibles des mémes révolmions que les' aurres' Bénéfices, & que dès qu'il y avoit néceffité ou Otilité pour
l'Eglife, la feél:ion de Cu.re n'étoit pas abulive.
• 'Il prouva que les dîmes données en général à l'Eglife
ou comme oblarion' de devoir, ou comme libérarion de
ferveur, n'avoient point été données aux Cures en paniculier, & qu'ainli ce que l'on' appliquoit aux Cures dans
cette c.aufe, pouvoir fe dire de toute forte de Bénéfices,
puifque iOute union ou feél:ion tenqoit à féparer les revenus, à changer la defiination primitive donnée par les
Fondateurs, & qu'ainli la prétendue affeél:ation des dîmes
aux Cures exc1ulivement à touS autres Bénéfices contrariait
également l'efprit & la difcipline de l'Eglife.
Il démontra que le foin des ames' n'avait jamais été
l'apanage du Clergé régulier; que defiinés à vivre. dans la
retraite & fous le joug de l'obéiflànce, voués' aux pieds
des Autels, les réguliers s'éloignoient nécdfairement de
,leur infiitur, en alliant le foin des ames 1 avec la Regle
& les' Vceux; que dès qu'il s'agiflèir d'un Bénéfice régulier
.Bénédiél:in, là préfomprion étoir qu'il n'éroit pas' fujet à la,
cutialiré, mais que leur incapacité n'étoit pas fans exceprion,
fuivant les Conciles &' les Auteurs.
Il démonrra que les Paroiffes, par-rout où il y a peuple
chrétien gouverné par un Prérre, fom auffi anciennes que
la ~eligion; mais que comme tirres de Bénéfice , elle~'
n'onr exifié que dans le douzieme fiec1e; que dans le"
principe les Paroiffes nJétoient deffervies que par desPrétres dépurés par l'E\'éque , & qu'il rappelloir à volonté.
Les oblarions reçues par les Prétres locaux étoient référées à l'Evéque, qui, après avoir prélevé ce qu'il jugeait
convenable de lainer fur les lieux, difpofoit du refie foit
pour lui, foit pour le Clergé qui formait fon confeil,
foit poue doter des Monalleres. Aioli il n'y avoir pas dans
i
�D U
,
D Il _ PRO V Il N c: li.
PAL A J S
'.383
,les Paroiifes aucune remporaliré affeétéé; mais toUt' ce qui
étoit donné à J'Eglife dans la p-erfonné de chaque Minifl ré iocal, venoir former la ,manCe générale des biens du Diocefe.
.
,
1
Les Evêchés 'comme les Paroiifes n'u.voie"nt aucune ma,nre
'}larticuliere; il 'Y avoit communauté entiere de biens, '&
nulle diflinél:ion de patrimoine.,
'.
1
'Les Bériéfices '- Cures ne pouvoient donc être connus,
poifque les Bénéfices n'ont po naître qu'avec la dillinél:ion
-des différens patrimoines ecc1élial1iques, avèt les· formes
canoniques 'qu1ont' Z;e'iu les, différentes ,temf>ora.iirés;
,p'Il ramena la quellion pàrticuliére de -fa'voir,' e'n fait de
,/ Cures Bénédiél:ines, à qoi appartienr le llroir élé ü:inder,
s'il n'ell réf~rvé qu'au Monaflere & ·aox Moines fur la tête
defquels le privilege efl perfonnel, ou au commendataire.
Il di 2inglla le Bénéfice régulier & ifolé qui ne' feroir devenu rel que par la poifeffio'o & queiques collarions 'faitéS
à des Religieux, cj'avéc le Bénéfièe dépendant d'un Mo~
naflere exiHànr , & fur lequel ce MonaHere a,voir des droits
'originaires primitifs & facrés;' il diftingua même relativement à ces droits la propriéré acquife au Monartere avant
h deiferte des Cures, de celle qui -n'étoir que le réfultat
ne ce -fervice; '& il condu~' que dans' le premier. tas, le
'Commendataire, quoique ,ayant moins de' droirl peur - être
(jué' le ritulaire 'régulier, re'préCenroit le' Monafi:ere, étoie
{lUX mêmes droÎts; il pouvoir faire tour ce que pouvoir le
Monaflere lui-même, parce que la commande qui ne peue
pas par, aucunl laps de remps '_changer la natùre du -Bénéfice,
-ne peur dêtériorer la condirio'n du Mbrianere dont le Bénéfice :eH' la propriçré & la ~épendance; & que li au
conrraire il s'agiifoir d'un Bénéfice réguiier & ifolé, alors
tour étoir pour J'intérêr du titulaire, & l'on ne pouvoie
plus, faire valoir les mêmes, principes. Il prouva que 'quand
mêfl.le dans la rigueur, on pourroit diré qu'il y a abus de
la paré du cQmmendar,aire fcinaallt un Bén~fice régulier Bénédiél:ln, ce ne pourtoie être- qu'un abus 'felatif: &: non ab-,
(
,
�•
384
Jou Il N A L
folu; un :tbus fujer ~ la prefcription ; un abus qui ne l'étoit 1
pas, puifqu'il étaie dans les vues de l'Eglife qui avoit· ordonné les feélions de droie de toutes .les Cures Bénédictines; un abus qui ne feroie en lui-même qu'un aéle légal
faie par un poffeffeur momentané qui n'avoie pas 'Ie pouvoir
de le faire; up abus qui écoit un aéle néceffaire fair par
un régulier; un abus qui pouvoie ceffer & être couvert dès
le lendemain par la poffeffion d'un régulier qui donnâr la
{anélion à la feélion ordonnée de droie, & mal opérée de
faie par Iln commendataire; un abus enfin qu'on ne pouvoie pas appeller de ce nom, parce qu'il pouvoie toujours
êere dans le cas de ceffer, & qu'il ne feroie certainement
pas accueilli, fi d'ailleurs la feélibn élOir faite fui~ant coutes
les formes canoniques.
Paffant enfuite aux vérirables quefl:ions de la caufe, Mr.
l'Avocat-Général examina quelle éroit la narure du Prieuré
de Solliers; s'il étoie régulier ou féculier; s'il éroie ~égu-.
lier, de quelle régula ri ré & par voie. de conféquence à
quelle époque avoir·il pu & dû ceffer d'être Prieuré-Cure,
ou avoit - il pu cpnferv.er ·Ia curialiré jufqu'à l'époque de
·1613? S'il étoit féculier, l'éroir-il d'origine, ou l'étoit-il
par prefcription, & dans quel état' éroit- il lors de l'aéle
de 1613? Il examina fi les biens qui formçient le parrimo~ne du Prieuré de Solliers, avoient toujours appartenu
à la manfe ou au Monafiere Sr. Viélor en vertu des tirres
ou des donations particulieres , ou s'ils n'avoient· été acquis
que par la defferte de la Cure, & confervés après avoir
ceffé le fervice ·curial en vertu des décrets des Conciles.
Parcourant enfuire les tirres depuis T038 , il difiingu3
dilférentes époques. La premiere, depuis 1038 jufqu'en
1338, premier infianr où le Bénéfice de Solliers parut
comme titre de Prieuré.
.
La feconde, .depuis 1338 j!lfqu'en 1S72, momenr où
Mre. TeilfJer fur pourvu.
•
La troifieme, depuis IS72 jufqu'en 1623, remps de la
poffeffion de Mre. TeiŒer, dans laquelle fe rrouve l'aéle
attaqué de 1613_
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•
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PALAIS
DB
PROV'ENCIl.
38)
La quattieme & la derniere, depuis la réfignarion de Mre.
Teiffier jllfqu'à préfent.
.
Dans la premiere époque, le premier titre de 1038 et!
un aél:e de donation faite à Foulque, Vicomte de Marfeille,
par Joffret, frere du Comte de Provence; donation poGérieure à l'établiifement de la Cure, qui ne parle pas de Paroiffe, & d'où on ne peut rien conclure ni pour ni contre la
donation.
En 1044, Foulque fit' donation à la manfe de St. Viél:or
d'une temporalité eonfidérable à Solliers, dans laquelle et!
comprife la moitié de la dîme, indépendamment de cou te
curialiré. En 1116 cette donatiQn fut confirmée par une
tranfaél:ion paifée entre les Moines de St. Viél:or'lIe ·les Sei.
,gneurs de Sollh>rs, fans qu'il y foit parlé de eurialité.
Les Papes' Pafcal .II. & Innocent II. eonfirmerenc
la donation par des Bulles. En 1144, il fur paffé une tranfaél:ion entre I;Evêqlle de Toulon, l'Abbé & les Moines de Sr.
Viél:or, qui porte que MOT/achi SaT/ai Vic10ris haheallt &
po.iJidealll i.T/ pace Eccle/iam Parochialem SOT/éli Miclzaelis de
So/eriis cum decimis & ohlatitmihus.
C'eG le feul tilre qui dans l'efpace de plus de fept fiecles
donne la propriété de l'Eglife Paroiffiale de Solliers aux:'
Moines de St. Viél:or. A cette époque la temporalité que
poifédoit à Solliers le Mo.naGere de ·St. Viél:or, ne fut plus
confondue dans la manfe; des' Moines envoyés pour admi.
niHrer les revenus fe p~rpétuerent dans leur adminirtrarion,
& les biens du MonaGere changeant de defiinalion, devin.
rent un titre de Bénéfice régulier, & le pa.trimoine partieu.
lier d'un des Moines.
Dans 'la feconde épQqué, c'efi-à-dire en 1338, deui
Moines de St. Viél:or permUlerenc les Prieurés d'Ollieres &
de Solliers; l'Abbé de St. Viél:or donna pouvoir à deux: de
[es Moines qu'il délégua Commiffaires à cet effer, de meure
en poffeffion nofiros diélos Frotres de cous les àroits & ap.
parlenances des Prieurés de Solliers & d'Ollieres, & qu'ils
feroient inventaire de tous les biens, revenus, meubles, &~,
.dtlflé~s 1782 tS' fuiv.
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386
-
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VaN A L '
pour en rendre compte au Monaftere. Il n'ell pas polIible
de trouver un aél:e qui prouve une, propriété plus entiere &
plus précife; les Prieurs ne furent abfo,lument qu'ufufruitiers
précaires; mais rien dans cet aél:e qui prouve " qui indique,
<jui laitfe même foupçonner la curialité; jamais on n'y trouve
les mots Prieurs-Curés, ni Prieuré-Cure.
En t 346 , l'Abbé de St. Viél:or donna une commiffion pour
mettre en poireffion de ce Bénéfice un Religieux; mais il
n'y a pas la moindre énonciation de Prieuré· Cure , Jamais
d'indice du foin des am es confiées au Prieur, & raujours
propriété do Monaftere' fur le Prieuré régulier & non curial
de Solliers.
En 147.6., Ogerius, -Evêgue de Marfeille ~ Abbé de St.
Viél:or, airembla le Couvent; & d'après l'avis unanime des
Membres qui le compofoienc, il unit le Prieuré de Solliers
à la manfe de Sr. Viél:or, donc il avoic primitivemenc faie
partie, ce qui exclue touIe id~e de curialiré. Tant que l'établiiremene de la Cure ne fera pas conHacé par quelque aél:e
décifif & précis de Cure, on ne pourra regarder ce Prieuré
comme Prieuré-Cure; car enfin avanc de difcuter la feél:ion
de la Cure de Solliers, il faue qu'il y aic preuve de l'éreél:ion
en citre de Cure.
.
En l 'i 03, le même Abbé de Sr. Viél:or conféra ce Bénéfice à Mre. de Forbin, fans parler"de curialit'é. En 1)26,
ce Bénéfice paira fur la têce du fieur Arumeci de Bon Repas
qui fe die dans un aél:e d'arrenremenc qu'il- paira le 18 Juin
I ( 26, Prieur-Commendataire du Prieuré de Sc. Michel de
S~lliers. Ce qui prouve la régularité de ce Prieuré, c'efl: la
, commande; & ce qui prouve que ce Prieuré n'éraie pas uni
avec la Cure, c'eH: que dans cec aél:e le Prieur s'oblige de
payer au Curé, au Secondaire & Diacre telle & relie redevance; ce Prieuré n'éraie donc poine le pacrimoine de la
Cure, puifque le Curé, Secondaire & Diacre éraient nourris
aux dépens du Prieur; ainfi les fonél:ions curiales, Je foin
des ames étoient étrangers au Prieur,
En 1)42 , l'Abbé de Sc. Viél:or conféra le même Prieuré
•
�•
•
DU
PAL AIS
~ Mre. Gafpard de Ponte,
•
DE
PRO V Il N C J!.
387
Clerc d'Avignon. Ce Prieuré fe
conferva toujours dans le même état de Prieuré {impIe,
puifqu'il fut conféré à un Clerc; qualité qui exclut reute idée
de curialité. CI! Prieuré ell: toujours régulier, puifque c'ell:
l'Abbé qui le confere.
.
Enfin en 1,69, rranfaé1:ion entre l'Econome du Monafiere
de St. Vié1:or & Mre. de Ponte, qui avait été condamné
par Arrêt de 1')66 à payer les arrérages de penuons que le
'Prieuré faifoit à l'office de la cellérerie & table commune
du MonaHere. On n'y trouve rien gui change l'état du bénéfice : même régularité, même foin des ames confiées
à des Prêtres amovibles & fans celfe étrangers au
Prieur.
Dans la troiueme époque, c'ell:-à-dire depuis 1')72 jufqu'en 162.3, Mr. l'Avocat-Général ne parla que des aé1:es
palfés fous un feul Titulaire, Mre. Teiffier.
En 1)7 ') , Mre. Teiffier, Prieur du !rieuré de l'Eglife Paroiffiale de Solliers, donne à prix-fair la réfaé1:ion d'un coin
(je muraille de la maifon claull:rale, & il {igne TeiJfzer,
Prieur. Cerre répararion répond parfàitemenr à l'aé1:e de 1') 2.6
ci-delfus, qui établit la non curialité du Bénéfice, & la curialité précifément de!I.'ervie par des Prêtres amovibles, en
donnant la charge des réparations au Prieur.
Rien donc dans cet àé1:e qui établilfe', qui indique même
par de {impIes énonciations la curialité.
En 1) 9J & 1600, la Cam munauré de Solliers & le
Prieur tranugerent fur la demande que la Communauré faifoit
au Prieur de la réédification de l'Eglife, & fur la demande
pu J'rieur de la dl:ne; de la quotité & des objets décimables; la demande de la dîme écoit fondée fur l'aé1:e de 1044
ci-delfus, qui l'avait tranCfiQrrée au Monaflere de St. Vié1:o!.'
indépendamment de re,ure curialiré.
Rien encore dans cet aé1:e qui indique Ja curialiré; Mre.
Teiffier n'en par-rout que {impie Prieur.
En 1613, le Procureur fondé de Mre. Teiffier, Prieur dll
Prieuré de l'Eghfe Paroiffiale de Solliers, au nom du lieUI'
D d d
2.
..
�388 .
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0 V RN A L
l'rieur & de fes fucceifeurs, paifa un aél:e ( c'elt l'aél:e atta~
qué par Mre. Le Roux) par lequel fiât, ordinavit, inflituit
& fundavit titulo verœ formll! & irrevocahilis fundationis perpetuam Vicarianl dictœ Ecclefiœ Parochialis Sané1i Michaelis, cum
onerihus & emolumen{is quœ [equuntur.
Efr-il un mot qui indique une feél:ion? Non. Un Vicaire
amovible nommé Curatus exer~oir les fonél:ions curiales. Par
l'aél:e de 161), c'eH un Vicaire perpéruel.
Ce Vicaire perpétuel fur chargé d'a,dniiniHrer les Sacremens,
de deifervir l'Eglife Paroiffiale, de renir trois Prêrres à fes
dépens. Le Prieur éraie obligé de payer les Prêtres deiTervans; il tranfmie ce foin au Vicaire perpéruel. EH-ce donc
là changer la nature du Bénéfice?
Pour fuppcirter ces charges, Mre. Teiffier donna au Vicaire
perpétuel une partie de la doeaeion du Prieuré, beaucoup
plus conûdérablè que celle qu'il éraie obligé' de donner,
d'après l'aél:e de 1'528; il rie mit pas les revenus d'un côré,
& la charge de l'aurre; fa rérribution du Vicaire perpétuer
fut prife fur les' fruirs & revenJls' dl( Prieuré, & non 'fu)"
ceux de la Cure: il ne divife donc pas les revenus de la Cure,
il ne fcinde pas le Bénéfice.
Mre. Teiffier fé· réferva le Jus-Patronae de la Vicairie.
Pourquoi? Parce que le Curé érait auparavant amovible à
fa volonté, ,& que devenant perpétuel, il devoie êJre à fa
collation; l'Evêque de Toulon autorifa & confirma la fondation de cette Vicairie p~rpé[Uelle.
.
Mre. Teiffier, Prieur du Prieuré de St. Michel du lieu
de Solliers, dépendant du Monaflere de St. Viaor, réligna
'ce Prieuré en faveur d'Henri de Forbin, Clerc du diocefe de
Toulon: quem Prioratllm, efr-il dit, diaus Prior ohtinet itz
commendam il 50 annis. Ce Bénéfice éroit donc r~gulier
fimple, puifque Mre. Teiffier poifédoie 'en commande.
Mr.l'Avocar-Général prouva enfuite qu'il n'y avoie point
eu de feél:ion en 1613, puifque les Titulaires immédiars
avant & après cerre époque avoient été pourvus de même,
& qu~ le Bénéfice de Solliers avoit été conféré de la "même
�DU
PAil'Is
XlIl
PROVENCB;
'389
façon aux perfonnes de méme grade dans la hiérarchie ecclé/iafiique, toujours comme Prieuré /impie régulier; que
cette régularité n'avoit jamais éprouvé de changement, qu'elle
qu'eût été la collation de M re. TeifIier & fa poffefIion;
que d'ailleurs c'eût été à M~e. Le Roux, & non au Chapitre, à fournir la preuve de la fé.cularité qu'il alléguoit ;
mais que, foit qu'il fût féculier ou régulier, il étoit Bénéfice
./imple, & dans cetre hypothe{e il ne pouvoit pas être fufceptible de feaion; la ql!alité décifive étoit la curialité; &
d'après les titres le Bénéfice n'étant pas curial à l'époque
de l ~69, il refioit tel, foit que Mre. TeifIier poffédât comme
féculier, foit qu'il fût pourvu en commande. Cependant Mre.
Le Roux a foutenu que, même fous ces deux qualités, le
Bénéfice était devenu féculier, parce que comme pourvu en
commande, Mre. TeifIierétoitle quatrieme, & trois commandes
fuffifent pour rendre le Bénéfice régulier,' Céculier; que cam me
poffeffeur à titre de féculier, Mre. TeifIier poffédoit depuis
plus de quarante ans, en 16 l 3 , ce qui fllffifoit pour rendre
un Bénéfice régulier, féculier, & que dans 1\10 ou l'autre
cas, le Bénéfice ayant ceffé d'être régulier à l'époque de
1613, il avoit été fufceptible de feaion.
Sans Ce jetter dans un océan de Doarines) Mr. l'AvocatGénéral fuppofa d'abord Mre. TeifIier commendataire, &
prouva" avec l'Auteur du Répertoire de JlIrifprudence, que
ce feroit une erreur de croire qu'un Bénéfice régulier fût
féculariCé par des provifions données en commande; que
l'effet propre de ce titre était de le concilier avec la maxime
regularia'regularihus, de confirmer la régularité du Bénéfice,
& d'en être le dépofitaire, la commande n'étant aut-re-chofe
qu'une gardé d'un dépôt qui -Oe porte aucun change~ent au
Bénéfiçe, & le conferve au contraire dans fon premier état;
cela efi même fi vrai, que le Bénéfice venant à vaquer par
réfignation ou par mort, le Bénéfice pou voit être poffédé
par un régulier, comme s'il n'avoit jamais été en commande, parce qu'il n'ell: jamais forri de fan état de régularité, & qu'il a toujours été conféré comme régulier.
.
.
�3~
JOURNAL
Il fuppofa enfuite Mre. Teiffier comme pourvu en fécularicé, & il prouva que le Béoéfice régulier ne pouvoit pas
devenir féculier par quarante ans d'une potrdIion tranquille,
parce qu'il s'agitroit de la fubHance du Bénéfice, & non de
l'érat; que le laps de quarante ans pouvoit changer fon érat.,
mais jamais la fubflance, fuivanr rous les Auceurs; que ce
Bénéfice n'avoit donc éprouvé aucun changement, & avoit
roujours rené régulier.
Dans la quatrieme époque, c'efl·à-dire depuis 1623 jufqu'en 1722, MI'. l't\vocat-Général démontra que par l'aéle
• de 162.3, Mre. Teiffier avoit réCigné un Prieuré Cimple régulier qu'il tenoit en commande du Monaflere de St.. Viél:or
à Henri de Forbin; Mre. Teiffier n'avoir pôr conféquent
-point changé la nature du Bénéfice; que les Bulles & proviCions poHérieures à r623 jufqu'en 1722 avaient toujours
éré en commande du Chapitre de Sr. Viél:or, par conféquent
que le Bénéfice n'avoit jamais cetré d'être régulier, puifque
depuis 1338, époque oll il avoit été à titre de Bénéfice,
tous les Tirulaire~ l'avoient ·potrédé comme cel.
Qu'en fubHituant un Vicaire perpécuel à un Vicaire amovible exiHant depuis long-temps & chargé du foin des ames ,
iittendu la régularité du Bénéfice, Mre. Teiffier avoit fait
ce que les Loix générales du Royaume, ce que le Concile
de T,rente & une foule d'autres avoient confeillé depuis
long-temp de faire;' qu'il avoit fait un aéle licice que lè
. bien de l'Eglife rendoit légal; qu'il n'avoit point fait d'un
titre curial deux titres ditremblables, mais feulement lailfé
filblifier l'ancien tirre, en lui donnant une nouvelle modi.
fication conforme aux Loix de l'Eglife & de l'Erar.
.
Qu'en vain Mre. Le Roux avoit avancé que l'aéle de
1613 avoit écé fait fans formalité, fans pouvoir, fans caufe :
& quelle aurre formalité que celle de fe recirer à l'Evêque
pour lui demander l'éretlion.& l'autorifation d'une Vicairie
perpétuelle; quelle autre caufe que celle de l'ucilité de l'Eglife
&: celle du falut du peuple, qui a plus de confiance au MiniQre chargé du foin des ames lor[qu'il eH ina~ovible, que
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tlu
PALAÎS
DI!
l'n.OVBNCE:
39.t
lorfqn'il éfl: deLlituable à volonté; que' Mre. Teiffier avolt
facrifié fes propres intérêts au bien & au falut des ames,
puifque Curé primitif, il était obligé d'avoir un Vicaire
amovible & quelques Prêtres pour delTervir la Paroilre donc
ta dotation était moins confidérable que celle qu'il abandonna au Vicaire perpétuel; dotation qu'il prit {ur les revenus
de fon Prieuré; que delà .il ruivoit que l'union faite par Mre.
de Mailly en 17S l du Bénéfice en faveur du Chapitre feus
le titre de Notre-Dame de la Farlede, St. Michel ou de la
Trinité, comme Bénéfice fimple, étoit légale & devoit être
confirmée; que tout annonçoit, que tout indiquoit que Mre.
Teiffier avoit fait un aB:e légal, licite, avec toutes les formalités requifes & fuivant les Loix de l'Eglife & de l'Etat:
donc poinè d'abus.
MI'. l'Avocat-Général conclut à ce que fans s'arrêter aux
lettres en forme d'appel comme d'abus envers l'aél:e de
16 l 3, non plus qu'à la requête incidente de Mre. Le Ronx
en appel comme d'abus envers l'union faite en 17S l du·
P.rienré de Solliers, & en révocation de l'Arrêt d'enrégiftrement des Lettres-patentes confirmatives de cette union,
dans lefquelles Lettres & requête ledit Mre. Le Roux feroit
'déclaré non recevable & mal fondé, il fût dit n'y avoir
abus dans l'aél:e de 161'3, ni dans l'union de 16S l , & Mre.
Le Roux fût condamné à l'amende du fol appel envers le
Roi.
Arrêt du 6 Février 1783, prononcé par M. le Premier
Préfident, conforme aux conclufions; Mre. Le Roux fut condamné à l'amende de l'appel & aux dépens. Plaidaut Mes.
Portalis & Efirivier.
1
•
,
�392-
".
JOURl/AL
ARR Ê T
XLII.
S'il Y a néceffité dans l'éreRion d'une Eglife ParoifJialè, /a
dotation du Curé eft a la charge du Prieur, quoique lqs habitans s'en fujJènt chargés.
E bameau de Fouilloufe, dans la Vallée de Barcelonette;
diocefe d'Embrun, faifoit autrefois partie de la Paroilfe
de St. Paul; il n'y avoit à ce hameau qu'une chapelle. Les
habitans préfenterent \lne requête à M. l'Archevéque d'Embrun, aux fins d'obtenir gue leur Chapelle fût convertie en
Eglife Paroiffiale, en payant par eux la dotation du Curé.
Le 16 Mars ~'Î34, le Grand-Vicaire dépuré démembra. de
la Paroilfe de St. Paul, Eglife matrice, la Chapelle, de Fouilloufe, & il l'érigea en titre d'Eglife Paroiffiale, à condition
que les habitans donneroient annuellement à leur Curé vingtquatre feptiers de bled & dix florins mon noie , & qu'ils entretiendroient l'Eglife à leurs dépens.
Plus de quatre-vingt-dix ans après, les revenus du Curé de
Eouilloufe ne paroilfant pas fuffifans, quelques-uns des habitans de la Paroilfe qui étoient 'Patrons d'une Chapelle fous'
le titre de Notre-Dame d'Humilité fondée dans l'Eglife de
, St. Paul, engagerent le Titulaire à la réligner pour caufe
d'union en faveur' de la Cure de Fouilloufe; l'union fut
effeéluée par décret du Grand-Vicaire de l'Archevéque d'Embrun du 'Î Novembre 161 l ,avec le confentement du Patron
laïque & du Titulaire. En 173 'Î' le Curé de Fouilloufe &
les habitans demanderenr contre les décimateurs la portion
congrue de 300 liv. établie par la Déclaration du 29 Janvier
1686. En conféquence ils firent affigner pardevant le Préfet
, de Barcelonette le Curé de St. Paul, un des co-$lécimateurs. Sentence du Préfet conforme à cette demande. Le
Curé de Fouilloufe requit que la Sentence rendue'contre le
L
~uré
�DU
PALAIS
DIl
P"ROVIlNCIl,
393
Curé dé Sr, P3ul fût déclarée commune & exécuroire contre
le Chapitre Mérropolirain, aurre co-décimateur. Le Chapirre
appella de cette Senrence, & confentit à payer la portion
congrue au Curé, à condition qu'il imputeroit les revenus
de la Chapellenie & le~ vingt-quatre fepriers de bled' &
les dix florins mon noie que les habitans s'étoient engagés
à payer à leur Curé lors de l'éreétion. Les habitans & le
Curé contefierenr ces fins, mais elles furent enrérinées par
Arrêt du 6 Juin 1736.
Le 2 Août t78 1-,' les habitans de Fouilloufe prirent des
lettres d'appel comme d'abus envers· I:aéte d'éreétion, &
conclurent fubudiaire.mem à ce que par Experts il fût fait rapport de l'érat des -lieux, de la diHance du hameau de Fouilloufe à la Paroilfe marrice de Sr. Paul, de l'érat, rigueur
& difficulré des chemins, des inconvéniens & dangers qui
s'en enfuivenr en toUS les temps, & fur-rout en hi\'er, pour
raifon defquels inconvéniens &: dangers les Experts feroient
,toures 'les obfervations nécelfaires. Ils faifoient conufier leur
.moyen d'abus en ce que: les fecours fpiriruels font à la charge
.de la dîme,.& que -conféquemmem M. l'{\rchevêque d'Em_.b.run ~ou fon Grand-Vicàire ~'avoit Pli, fam abus, en érigeant
la Cure. de Fouilloufe, reJerter fur les habitans l'enrrerien
du Curé. L'abus de cette claufe, difoient-ils, eH manifufie.
elle a tous Jes vit'~s enfemble. Lès habirans de Fouilloufè
payent la dîme; c'eH fur le produir de cette dîme que doit
être prife imprefcriptiblemeot la portion congrue de tou~
les Prêtres paroiffiaux qui delfervent dimS l'enclavement
de I~ dimerie. La defiination des dîmes aux porrions con.
grues a exil!é dans rous les temps; l'exemprion prononcée
là~delfus par l'Ordonnance d'éreétion - & le rejet de cett~
~harge fur le peùple renferment une contravention formelle,
tant aux Canons qu'aux Ordol)nances du Royaume. On ne
peut pas dire ici que le décimareur air rien donné pour com~
penfer cette chalge accablanre dOQt les habirans de Fouil~
'loufe fe rfOLlVent grevés; le tirre eH connu. On donna d'une. ,
part aux habirans le droit d'avoir un l'rêrré paroiffial chez
Annùs_I7,8z & fuil'.
E e <: '
•
�"
394,
10 U R. NA L
eux, & ce droit leur appartenait en force des difpolitions
canoniques. L'établilfement d.u Curé ne fut qu'un aéte de
jufiice; on le leur fir pourtant payer comme s'il fe fût àgi
d'un tirre de faveur. Ce titre annonce que les habit ans de
Fouilloufe étoient fondés à demander l'établiffement d'un
Prêtre paroiffial; qu'il avait été fair un accédit fur les lieux;
qu'il avait éré procédé à une enquête; qu'il exifioit' une procédure lors de laquelle les formalités ~e droit avaient été
gardées, & que la vérification qui s'en étoit enfuivie, étahliffoir inconeefiablemenr les morifs légitimes de l'éreél:ion
.qu_e le ritre prononce. L'offre fàite par les habitans ne fut
donc pas le principe de l'éreél:ion.
.
L'abus dont il s'agit en imprefcriptible, tout comme le .
'droit de lever la dime; tout titre qui difpenfe le décimateur
des charges du fervice paroiffial, efl: néceffairement abulif.
C'efl: ce qui fur jugé par l'Arrêr du 8 Février 1776, qui
déclara abulives les c1aufes d'un tirre d'éreétion de Cure dans
le hameau du-Verner & Molanés faite par M. l'Archevêque
d'Embrun fous les condi.rions offerres par les habirans: rO.
que la Cure ferait deffervie pat un Curé amovible. 2°. Que
les habirans filpporreroient ra us les frais de confiruétions &
de réparations. 3°. Qu'ils feroiene chargés en ourre de la
portion congrue du Curé.
On répondoir pour l'Archevêque & le Chapirre d'Embrun,
qu'en général les fecours fpirituels fonr' à la charge de la
dîme, mais que ce principe n'efi applicable qu'aux Cures
de néceffiré, & non aux Cures de commodiré; tous les Auteurs font précis fur ce paine. Jouffe fur l'art. 24 de l'Edit
de 169'5, notes 2 &- '5 ; Duperray, dans fan Traité d,s
droits honorifi'lu,s & utiles, pag. 362; & Mr. Camus dans
fan Commenraire fur l'Edir des congrues du mois de Mai,
1768, tom. 1, pag. )46 & fuiv.
'II réfulte des maximes de ces Auteurs, que les Cures de
commodité ne fonr point à la charge des décimateurs, &
que l'on répute Cures de commodité celles qui oor été érigées fur la demande des habitans., & fur l'offre par eux
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
395
fuite de doter' le Cl:lré, fans appeller dans ce cas les décimateurs qui ceffent d'avoir intérêt à une éreaion qui ne
doit pas retomber fur eux. La Cure de Fouilloufe a été érigée
fur la demande des habitans, & fur l'offre par eux faite de
aoter le Curé, fans appeller les décimateurs.
Dans la caufe préfente, on ne peut pas dire que c'en: p~t:
omiffion que les décimateurs n'ont pas été appellés; c'en:
parce que les hahitans ne voulaient pas fe donner un contradiaeur dont ils faifoient ceffer- l'intérêt, en offrant euxmêmes la dotarion du Curé. Donc la Cure de Foui!loufe
n'eH: par le titre de fon éreaion qu'une Cure de commodit'é.
C'ef!: précifément là le cas prévu par les Auteurs, & notemment par Mr. le Camus en l'endroit déja cité, où il
obferve que quand la néceffiré de l'éreaion d'ulle Cure ef!:
moins évidence, quoiqu'il puiffe y avoir des raifons pour juftifier cerre éreaion, les habitans qlli, pOllr ôrer tout doure,
offrent b dotation du Curé, fe lient irrévocablémenr. Le
Chapirre e{l; donc autorifé à faire dire qu'il n'y a point abus,
& à faire regarder l'a8:e d'éreaion comme une foooation
faite par les habitans, & comme teUe irrétraaable, parce
que les fondatio.ns font de droit public, & qu'elles doivent
être protégées par les Loix, bien loin de pouvoir ê.tre :réformées;
Il efl: certain en droit, que lorfqu'une Paroiffe a· été dotée
par les habitans d'un lieu, & établie pour leur propre commodité, le gros décimateur n'en: point tenu du fupplément
de la portion congrue; c'efl: ainli que l'attef!:e l'Auteur de~
Mémoires du Clergé, tom. I:l;, pag. 369, qui cite plufieurs
Arrêts qui l'ont jugé de même.
S'il éroit poffible de toucher à la fondation, & dire que
c'ef!: une Cure jufqu'ici gouvernée par le"s principes qlli régiffent les Cures de néceffité, il faudrait dans ce cas établi.
ce bénéfice fur un nouveau tirre, lui donner une nouvelle
nature, un nouvel êrre canonique. Or, alors il faut entiérement anéantir 1'aae de 1 ~ 34 envers & contre tous, &
faire entiérement une éreaion nouvelle. En bonne regle"
la voie de l'appel comnle d'abus n'était pas celle qui com- 1
E.ee2.
•
�•
'3 ?6
Jou a N A L'
peroit; c'eil: ainli que la Cour le jugea par l' Arr~t que Mc.
de Bezieux rapporte, pag. 117.
Mr. l'Avocat-Général de Calilfane obferva qu'il n'y avoit
rien de plus {impIe que la queltion fur laquelle la Cour avait
à prononcer. On dénonce comme abu{if un titre d'éreél:ion
d'une Cure, en laiffant fur le peuple une panie~n{idérable
du paiement du fervi!=e parroiffial; & cet abus vrai, réel,
fondé fur tMS les principes & ab[o!ument imprefcriptible,
elt, pàur ainli dire, reçonnu, s'il y a néceffité d'éreél:ion d'une
Cure: mais d'un autre côré, on nie cerre néceffité; on foutient 'que la Cure n'était 'pas·.néceifaire alors, & qu'elle
ne 'l'eft pas plus aujourd'hui; 'on allegue qu'elle n'a jamais
été que de commodité; on [emble même en trouver la
preuve dans le titre primordial. Tous les décimareurs ne
furent pas appellés; ils devaient l'être pour un élabliffement
de néceffiré; donc l'établiffement n'était que de commodité;.
il en illégal, irrégulier, nul, & doit crouler par ce moyen
d'abus vifcéral fur lequel les décimareurs non appellés avoient
gardé. le filence, tant que la Communauté n'avoit pas attaqué
l'atte dans la panie de la doration qui leur était impofée,
mais qui rentrent dans 'rous leurs droits pour prouver la nullité de l'érecrion, dès que la Communauté réclame contre
. les pacres qu'elle renferme.
La queil:ion fe trouve /Jonc· red"uire à' ces deux propolitians: y avait-il néceffiré d'établir uné Cure? étair-ce une
Cure de commodiré? Eh fait, les habitans du hameau de
Fouilloufe dépendant ae la Parpilfe de. St. Paul, préfentent
.à M. l'Archevêque d'Embrun une fupplique pro' conJlruc.1ionei
nOVŒ EccleJiœ parrochialis; ils alleguent la diltance de.l'Eglife'
paroiffiale : difi:rimen viarum· maxime !empore hiemali; ils
offrent la dotarion de l'Eglife & du Recreur qui la deffervira :
en conféquence l'Official nommé par M. l'Archevêque d'Em- '
brun fe tranfpone [ur les lieux, reconnoît la jullicè de la
demande des habitans, vérifie les difficllltés du· local, la
dilbnce de l'Eglife de Sr. Paul, des.. gens mourants fans
Sacremens, "& ordonne EccleJinm novam in loco de Fouilloufe
conJlmendam aux dépens des habitans qui donnerent fi"
•
�nu
P AiIH,l)B Ihl.o'VBNcll:
397
charges de bled annuellement & la florins en ~rgent pro
dotatione Curati. L'éreaion -li lieu en œt éea~'; mais pem-on
conclure ,qu'alors il y avoit nécefiité de Cure, ou qu'il n'éroit
fimplement befoin que d'un Prêtre de fecours? Peue-on aufii
conclure que la Cure n'était que de commodité? Dans le
doute, il femble qu'on devrait plutôt- céder aux ptéfomptions
de nécefiité préfentées par les habitans, qu'aux preuves de'
commodieé qu'allegue le Chapitre; mais en l'état·, la n~
cefiité de la Cure ne paroh pas 'airez conltatée; la fimple, commodité le paroÎt encore moins; il Fdùt donc vérifier s'il
y a néceffité d'établir une Cure, ou fi elle n'ef!:, que de
commodiré; les partjes ont, requis fub,fidiaire,méht 'dê' Pun'
& de l'autre côeé'des<vérifiè:àtiorls. Mais aux"dépens:,iè' qui
doivent - elles être faites? Il femble d'abord que c'e{l: aux
dépens de la Com munauté, parce que les habitans font de~
mandeurs , ac10ris efl probare; mais comme,les chofes ne
fonOt. pas" dans, leur eneier, &.qu.e la l)~ce{fué 4éja yréfumée.
par l'aéte de 1 n+ & par des aéfes. pp~é~je\lrs 1'~ e,nçore
aujourd'hui par 'les nouvelles fins du Chapitre. ,
Mr. l'Avocat-Général conclut .à ce qu'avant,.dire droit. à
, l'appel comme d'abus émis par les hàbitans du hameau ,de
Fouil1oufe, il fllt ordonné que par Experts convenus'ou pris
d'office, il fetoit fait ra.pp.ort aux f.rais & dépens qe,la P?rtie.
la' plus. diligence" [auf d'é,n faire, d~ Yétat des !Î\;UX, de l!t
di{l:ance du hameau de Fpllillpufe à la ParoiJI:e de .~t. Paul,
de l'état & difficulté' des' chemin!', des dangers qU'j' s~en en'fuivenr, fur-toue en hiver, pour 'raifon de quoi les,Expe~t.s
ouiroient témoins ft befoin étoit, & en rédiger,oient les dépofitions, feroient le dénombrement des m'lifons: & habieans
du hameau-, & feroient eouçes les çl~claraeions dont 'ils feroient requis par les parcies préfentes ou duement appellées,
pour le rapport fait & les parcies plus amplement ouies,
leur être définitivement dit droit.
Arrêt du 12. Mai 1783, prononcé par' Mr. le, Premier
Préftdent, conforme aux,conc1ufions, dépens réfervé~. rlai~)
,dant Mes. Gafiier & Por.ralts. _
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ARR Ê T
R. N'A L •
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1.
LOIfqu'il s'agit du dérangement des affaires d'un Négociant,
, ,les créanciers peuvent pourfuivre en direc7ion marchande,
t;, s'ofPofer
l'ouver.turede la difcuffion.
Deux Juges étant égaux, l'un ne peut pas ordonner des-dé-l'autre de connoître d'une affaire dont il,eJl faifi.
fenfes
Le Lieutenan.t ayant rendu un décret fur la requifition du
. J:rocureur du Roi, il n'y -a 'lue le Procureur 'du Roi 'fui'
i ,puijJè êtr~ intimé fur l'appel de ce décret.'
.
a
a
;
1 .
• [
L
'E lieur Gondran, Négociant de la ville de Marfeille ,
s'aofente vers la fin de l'année 1780. A cette époque
{es affaires étoient dérangées. PJufieurs de fes créan.ciers
obeie'nnent ' contre lui des Sentence,s du Tribunal confulaire, & procedent à des' exécutions•. Le I l Janvier 1782,
trois des créanciers- hypothécaires ou privilégiés préfentenc
une r~quête au Lieueenant de Marfeille en ouverture de la
difcuffion, défenCes à touS les créanciers de pourfuivre·
aucunes exécutions, & ajournement contre la _maife pour
Je voir ainq dire & :ordonner. Décret conforme, qui fuc
lignifié' au fieur Greling ·l'un des créanciers.
Le 7 Février fuivant, le fieur Greling préfente une' re";
quête au -·Tribunal confu,laire, pour demander l'aifemblée
des créancier·s, à l'effet de délibérer fur ce qu'ils auroiènt
à répondre à la demandé 'en difcuffion. Décret. conforme.
Deux jours après, les demandeurs en diCcuffion font fignifier,
un· aB:é au fieur Greling 'en 'oppofition & appel du décret
rendu par les Juges-Confuls. L'atfemblée îndiquée par les.
Juges-Confuls n'eut p.as lieu, & le 16 du même mois Je
Procuriur du Roi en la Sénéchauifée requiert que défenfes
f~flènc faites au fieur Greling de faire aucunes procédures.
aIlleurs que pardevant le Lieutenant, à pein~ de .6000 Iiv•
................ ••'1........ -
•
�DU PALAU DI PllOVIlNCJl:
'399
-a'amende & d'en être informé. Décret conforme, lignifié
aux Juges - Confuls en la perlOnne de leur Greffier. Le
même jour l'affemblée des créanciers a lieu,. & délibere
de traiter la faillite du lieur Gondran en direétion.' marchande; elle nomme des Sy~dics,' & les c'harge de préfeoter dans l'infrance en difcuffion, & d'y requérir en fon
nom le déboutement des fins prifes par les' demandeurs.
La délibération fut homologuée par les Juges-Confuls. Le
25 Février, Sentence du Lieutenant qui déboute la maffe
de fon oppofition, & ordonne l'ouverture de la difcuffion.
Les Syndics appellent de cene Sentence pardevant la' Cour.
Les demandeurs en difcuffion appellent égalemènt' des décrets & Ordonnances rendus par les Juges - Confuls. La
Chambre du Commerce' intervint dans l'infrance , pour y
requp.rir l'ajournement cortre Ile Lieutenant-Général-Civil
-de la Sénéchauffée, pour venir voir déclarer;·le décret par
lui rendu le 16 Février nul, iniurieux, anentatoire aux
droits des Jurifdiétions; & comme tel le voir caifer, avec
défenfes d'en rendre de femblables à l'avenir, fous les
peines de droit. Les Juges-Confuls prirent les mêmes fins.
La Sénéchauffée prit le fait & caufe du 'Lieutenant.
.
On difoit pqur les _Syndics de la maffe , -qu'il falloit
examiner avant tout li le lieur Gondran étoit véritablemeÏlt Négociant. Or tous les Kuteurs qui oht' édit fur le
commerce, nous ont ,indiqué les circonfrane-es néceffaires
pour que l'on pût regarder comme Négociant un particulier ddnt l'état paroîtroit équivoque. ( Stracca, iraa. de mercaturâ" part. l , n: 4,) Cet Aureur ajoute au 'n. I2, qu'il
fuffit ,pour être réputé Marchand, d"être défigoé .foüs cette
qualité par la voix publique. On citoit Toubeau , inJlit. conf.
'tom. l , pag. 275 ; le Praticien des Juges-Con[uls , pag. I2
'& 102.;' Mr. le Préfident Boyer fur la coutume de Bourges,
:tit. l, §. 5, va. Marchande puhlieJue , & Jbuffe .fur l'arr. 1
du titre· I2 de l'Ordonnànce du COD:;lmerce•. A l'appui de
ces Auteurs on" rappelldit les' divers aétes que le· lieur
pondran avoit fait pour conltater fa qualité de Négociant.
�400
(J ta U RNA L ,
,
En général~; lorfqu'on 'difcute 'un débitel.!r, on veur, ~ar
le rangemf'l.nt de tous les créanciers, fuivan,t l'ordre de leur
hypotl.leque " par la vente judiciaire ~e fes, biens & l'adminiHration fage. & vigilante de ,l'J JU,fiice,' d'ul)e p:art
wévertir les.av.antag~s inj!lfres q)Je- des créanciers' pqHérieur,5
voùdroien..t fI: .procurer fur les antérieurs, &. de ~'autre em;pêcher la difiraél:ion des effets, réunir dans une feule maire
l,e,s biens .ç1u débiteur comm\ln, pour en fa.ire enfuire une
élÇaé):e" répartit iO,n toujours proportionnée à la nature des
ArÇ>it,s"fle "èh!JcuQe qes parties.,' Les créanciers dont les '
,droits Jont,Aoljteux JI!;<. non encoJe avérés, ont alo~s le plus
,grand', iv.té~ê~ à les cqnfiarer par une difcuffion qui fubof,~dànpe au i\lg.en)ent du Magifrrat la validité des tit-res que
cljaql;le p'Jrtic.ulier vienr foumeJtre à fon exa'men. Ceux dont
. Jeli' droits: font l inc.ont~.fiaqle~,. mais, qui peuvent craindrll
·l,a c.qncu~repc: de~' çréanc~~rs ~ga.lll'·Je!1 tirre~ & en. pr,i,vir ,'
)eges; ,i ou qUI d~:l1venç velller a ,~e, que des partlcu!Jer~
avide,s 1\e. vienne!ltr point ..ab}prber 1 par, des .foufrraél:ions
Jrauduleufe~, les, fommes deHinées à leur pa'ement, ont
ég~lement ,le plus grand' intérêt à fubordonner routes les
opér~rion,s :que le péra1Jgement ~e.lleur débiteur repd néce1Jaires', à des-formes I!ç. à .des, précautiorys qui en affurent
l!f,tég\ltarit~. ' . ' .
, J , ".
r
.' Geux· au) contraire dÇ>nt les droits f\lpérie~rs,.à' tous Jes
,autres ,ne, peuvent rien craindre des. atteintes qu'on vouqroit,.leur ,porter, qui ,d,ans l'erifience des effets fournis à
leur Rrivilege trou,ve'l)r t,~\liQursfll'atfu~"nc.t:;. de J.Jeurs , droits,
n'oJl~ r3UC)jp I,int~rêt' à' C!; q\le:_d~s 'p:é"nciers pofiérieurs.,
~ :cJovr 1 pai~mentl~doit I.r,ouig~rs~être fub~~d9nné au leur,
faH:eqt les, dé.nlaré~es qui peuvent leur être convenables.'
Lepr intérét fe borne· à,.ne point permettre qu'on leur enleve 'Iç gage dç legrs, créances. Leur titre veille pour eu.x;
il. les! r-e!!d. ~trangnSt à~,toutt:;s 1es. réfolutions qui ne peuv~nt
• l~ur. ~ui,re ji,il ,1çs rf<~}l~ Q.oq,]ec,eva.b1es.à s'e~ plainiye, s'ils
I!~ont ~ aucuq rt;Iotif p,la9ligle~~ 1I: s tlcrf~!queFi'
.,
L'o~r ne~proJuvera point ici que la forme d'une direél:ion
•
mercantille
•
J
�D U
PAL AIS
DE
PRO V B N C B,.
401
mercantille eH infiniment plus avantageu(e que celle d'une
di(cuffion; mais ce que l'on doit obferver comme une
raifon décifive, c'eil qu'abflraaion faite des avantages ré·
fulcans d'une direaion marchande, il faut au moins convenir que l'intérêt des' créanciers, dans le but qu'on s'y
propo(e , y dl: également rempli. Ses effets (onr. les mêmes
que ceux d'une difcuffion judiciaire. Elle rend les créanciers admini{hateurs des biens dont la répartition doit être
faite fuivant l'ordre & la nature des créances. Elle conferve les effets du débiteur contre les [oull:raaions frauduleu(es que le failli ou des créanciers de mauvaife foi
pourraient (e permettre. Elle affigne à tous les membres
de la ma1fe le rang qu'ils doivent occuper dans l'ordre des
paiemens, & [ubordonne toujours l'acquittement des créances
poflérieures, à celles qui (ont d'un rang privilégié. Elle
procure il tous les créanciers la facilité de di(curer leurs
titres, d'épurer leurs droits, de veiller à le.ur sllreté; enfin
elle conferve à ceux q'lj auraient été injuflement dépouillés
par des préférences illégales, le droit d'intenter l'aétion
révocatoire que per(onne ne· peut lenr enlever.
- Sous ce rapport, les effets de la difcuffion & de la di·
reaion marchande font les mêmes. JI n'y a de \"fâjmenc
remarquable que les moyens qui les proauifent, & rout
l'avantage eil pour ce derniér genre d'adminiilration qui
n'eil jamais auffi longue & auffi coûteufe. D'ailleurs qu'ont
à craindre les fieurs Icard & ,Confons? Ils (ont créanciers
privilégies dont les droits éminens fie fauraient jamais être
fubordonnés à ceux des autres; ils ont dans les immeubles
fournis à leur paiement l'a1furance la- plus pofitive & la
plus certaine de l'acquittement de leùrs créances. Que
leur i!1,porte ce que peuvent délibérer des particuliers avec
lefquels ils devroient avoir la prétention de n'êue pas confondus. Il I.:ur importe donc e1fentiellement de s'affranchir
des entraves qui pourraient ralentir leurs démarches &
reculer l'époque de leur paiement. La direaion marchande
aura pour eux cet effet !àlutaire; ils agi1fenc donc Contre /
Années l782. {; fuil'.
F ft
�~~
JOURNAL
leur propre intérêt, fan5 autre motif que celui de contre~
din;, [,1ns aurre objer que celui de nuire. Ils demandent
la difcullion ; 6ç fi quelqu'un peur fouhairer qu'elle n_ foit
point ordonnée, c'efl: celui qui plus que tour autre 'devroit
en redourer les fuites.
L'arr. 2 du rir. 3 du Réglement de la Cour de 1678
porre qu'à l'égard de la difcuffion demandée par les créanciers, elle ne pourra être ordonnée par le Juge qu'à la re-.
qui!ition du plus grand nombre des créanciers, enfuite de.
leur procurarion & fuivanc la formalité établie par le Srarut
de la Provi.nce. Cerre regle eH claire; il elt effeoriel pour
une maffe de créanciers qu'une demande auffi impQrrame
que celle qui rend à les foumenre à des formes multipliées.
& coûreufes, qui leur enleve l'exercice perfonnel de roures
leurs aB:ions, pour les tranfmerrre à un c.urareur ad lites,
ne foir poinr le fruir du caprice ou de la légere déterminarion de quelques particuliers donc les vues peuvenc fouv.enr être fecrétement oppofées au bien général. D'ailleurs
toures le~ fois qu'il, s'agir des intérêts d'un Corps, il efl:
inoui que qvelques OiIembres aienr ofé prérendre qu'il dép.endoir d'eux de lier la généralité. Chacun peut apporter
dans ~e conCOll,rs de·!! volonrés & des fuffi-ages l'influence
que peuvenr hli donner fon crédir perf,onnel {5(. l'empire
qu'a toujours un efpri~ fupérieur fiJr l'opinion d'autr~i. Il
peut proparer des doutes, exporer fes rairons, faire parler
fa volonté & rdufer, fon acquiefcemenr à llne dél1bérariQIl.
qu'il ne croir pas· dèv:oir appro.uver.. Mais il n'<t jamais ledroie de maîrriCer la multitude; c;'efr en elle 'que ré!ide
le pouvoir de faire des lo~x, & la liberté de flndividy
n'en eH pas moins refpe~ée, lorfqu'il elt forcé de s'y{aumenre.
C'ef!: pour pré,'enil' ces inconvéniens, qu'en matiere. de·
direB:ion rJ;larchande '- l'Ordonn~nce a égalemenr voulu qlle
les réfolu-rions prifes daB9l'alTemblée des créanciers le fuffem:
à la pluralité des \'oix. L'arr. 6 du rir. I I pone que les voix
cl s cr' anciers prévaudrom, n.oo par le nombre- des pet".
�DU
PALAU
DI!
PROVENCE.
403
{onnes, mais eu égard à ce qui leur (era dû, s)il monte aux
trois quarts du total des dettes. Il n'y a dans route faillite
d'autres créanciers reconnus par les Loix & par la matTe,
que ceux qui ont affirmé la vérité de leurs créances, (uivant la Déclara~ion du Roi du l t Janvier 17 t6, & celles
qui (ont intervenues après, qui (ont l"apportées par Jouffe
_ dans (on Recueil des E-dits & Déclarations, tom. 3, pag.
2tO, 22.5, 318 & 418. A l'époque du 5 AoCzt 1732., l'attribution des faillites aux Conruls demeura (ufpendue; les
attributions (e faifoient en conréquence pardevant les Juges
ordinaires, auxquels la connoiffance des faillites avoit été
rendue. On vit bientôt que des créanciers fuppo(és craignoient
moins d'affirmer pardevant ces Juges, dont ils n'éraient pas
connus, que pardevant les Juges-Confuls, qui par leur état,
dit la péclaration du 13 Septembre (739, (ont plus particuliérement infiruits des affaires du commerce & de la réputation de ceux qui fe difent créanciers. En conféquence
cette Détlararion ordonna qu'à l'avenir les 1 affirmations ne
pourraient être faites que pardevant les Juges-Confuls. Ces.
difpofitions ont depuis été renouvellées par l'arr. 7 des Lettres-patenres du 25 Novembre 1758, par l'arr. 7 des Déclarations du 7 Janvier t760, 23 Juin 1773, I2. Avril
1775, & de l'arr. 4 de celle du 1 Juillet 1781.
Les formes établies pour l'adminifiration de la jul1:ice ont
toutes un objet direél: & particulier. Il ferait abfurde d'appliquer à des matieres d'une certaine efpece les mêmes formes
de procéder que l'on ob(erve dans d'aurres. Ainu un Bourgeois (era dérangé dans fes affaires, un Négociant éprouvera
les -mêmes revers. On ne doit pas employer dans la liquidation des affaires du fecond les mêmes moyens que l'on
employeroit à l'égard du premier. Des relations plus importantes lient le fort a'un Négociant & de ceux qui ont traité
avec lui, à l'intérêt public. Le citoyen que (es fpéculations
placent dans un rang où rautes (es démarches om une influence réelle (ur le commerce d'un grand Royaume, ne doit
point être afireint à des regles qui ne fauraient être faites
Fffi
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�~4
JOURNAL
pou_r lui. Ainli le commerce décef!:e les gênes & les entraves;
il ne faut point foumettre les opérations du Commerçant aux
formes embarraffànres de la procédure ordinaire. C'ef!: cet
efprit qui a diété l'Ordonnance de 1673 & la Déclaration du
10 Juin 171).
Ces principes font le réfultat des Loix qui font incervenues fur cette matiere. La Cour les a el1e-même confacrés
par une foule d'Arrêts. Le lieur FaSre, Négociant de la
vil1e de Marfeille, faillit; il introduiGt une difcuffion pardevant la Sénéchauffée. Me. Etienne, Procureur, avoit été
nor:nmé curareur ad lites. Les créanciers voulant adminif!:rer
les biens du fail1i en direél:ion, s'affemblerent &: révoquerene ce curateur; leur délibération fur homologuée par Arrêt
du 2) Juin t74); il fe pourvut au Confeil en caffation,
mais il en fut débouté par Arrêt du 8 Janvier [748. Pareil
Arrêt du [9 Août [749, fur les conclufions de Mr. l'AvocatGénéral de Cafiillon, en faveur des créanciers de Gafpard
Bourguignon: Aurre Arrêt du 30 Juin [767, en faveur des
créanciers des lieurs Martin fils & Compagnie. Erifin pareil
Arrêt plus récent intervenu dans la fail1ité du lieur Antoine
Molin. Tous ces Arrêrs porrenr fur cetre maxime inconteftab\e', qu'en matière de faillire c'ef!: à la maffe des créanciers qu'il apparrient de. fixer les loix de l'admini1l:rarion des
biens du débiteur.
"
On répondoir pour les fleurs d'Icard, Giraud & Menre,
que la difculIion avoit éré légalement demand_ée ,qu'elle érait
néceffaire. Les prérendus Syndics, qui ofoient plaider pardevant le Lieutenanr, en convenoient, puifqu'ils offroiene de
payer les frais de la difcuffion flits jufqu'alors; ils reconnoiffoi-ent que tout Tribunal doit demeurer faifl de la caufe
jufqù'au bour, quand il en aéré légitimément invefl:i: ubi
judicium ~œptum eJl, ibi lis tumiflari debet. Cette regle ef!:
encore plus cerraine en matiere de difculIion, done la feule
demande, quand elle ef!: légirime, vaut autant qu'une failie
genérale de tous les biens q'Ji fe rrouvent dès-lors placés
fous la main du JlJge qui doir en faire la difl:riburion. D'ail-,-
�D U
PAL AIS
D JI
PRO V JI N C JI.
401
leurs n'éroir-il pas de toure évidence que la difcuffion éroit
dans l'ordre de routes les convenances de droit & de ju{lice,
relativement à la perfonne, au parrimoine, aioli qu'à la conduire du lieur Gondran. .
On préfentoir la queilion de favoir fi le Marchand occalionel eH un vrai Marchand. Il l'eil fans contredir, à l'effet
d'êrre jug-é par les J uges-Confuls dans les cas particuliers
qui peuvent fe préfenter à raifon des engage mens de commerce qu'il a pu contraéter.1 Le préjudice n'eil pas grave
dans ce cas. D'ailleurs c'eG: juilice que le Marchand occalionel foir jugé comme Marchand dans les caufes parriculieres qui concernent les engage mens qu'il a pris comme
Marchand. Mais en d!:-il de même quand il s'agir de décider
de r.oute fon exiHence, & de régler l'intégralité de fon parrimoine? S'il falloir abfolumenc trairer les affaires de ce
citoyen en faillite, rien ne feroir difcuffion dans la Place
·de Marfeille. Il faut, pour conilituer le vrai Marchand celui
fur l'érar duquel on n'a poinr de doute à fe former, qu'il
ait un commercé permanent & monré; il faur qu'il négocie
par érar & avec continuité; il faur fur-tour qu'i1 ait un
comptoir & des livres. C'eH ce que difent Sabellus, §. 1I1ercator, n. 2; Stracca, de mercaturâ, parr. l, n. 8; T ufcus ,
lett. P, (·onclur. 2°9; Mafcardus, de jure mercat., lib. l , cap.
7, n. 3 8 G' Je'!.
Ici c'eH un Marchand qui n'a jamais eu de livres, ni de
comptoir, oi de Commis, qui quelquef~is en fa vie a fait
occalionellemenr des incurfions dans le commerce. Il avoit
fair un projer pour le privilege exclulif de la rraire des
Negres, & cette combinaifon a reHé dans les termes d'un
limple projer; il avoir armé un navire p<1U~ la courfe. C'e il
fa feule fpécularion qui n'ef!: pas même mercantille. Il a fair
en fa vie une vente de vin & \lne vente d'huile. Il auroit
pu vendre encore des marchandifes, ce qui n'eH pourrant
pas prouvé, & ce qui étant, il ne feroir pourrant poinr
.Marchand. Qu'eil-ce donc qui, conHitue le vrai Marchand?
C'eH l'c:xiHence permanenre d'une efpece ou de plufieurs
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Jou RNA 'L
efpeces de négociations affidues. C'el'c le verfemeni: de là
plus grandI! partie de la fortune du citoyen dans la caiffe
de cene l]égociation permanemment fubfil'cante. Ce fom les
livres, les Commis, le comptpir, l'affiduité des affaires &
,des négociations qui fe fuccedent les unes aux autres. !Delà
vient que Gondran n'offre à la Jul'cice qu'un patrimoine ordinaire, & non marchand; cinq immeubles & des meubles
meublans compofent tout fan avoir; il n'avait pas la plus
petite partie de marchandifes. Or, tout homme qui tombe
en déconfiture fans marchandifes, a droit de dire qu'il n'éraie
paine failli, parce qu'il n'étoit point Marchand; dès-lors
pourquoi traiter en faillite un patrimoine qui ne confiHe
-qu'en immeubles fur lefquels les Juges-Confuls .n'ont aucllne
efpece d'empire ni d'aptitude pour en avoir? Tellement que
fuivane la Déclaration de- 1715, les Juges-Confuls, même en
cas de faillite, n'ont jamais le droit ni de graduer les hypothécaires, ni de dé.cider les conteHatiol1s relatives à la ré.vendication des immeubles ou aux droits à exercer fur
Iceux.
Dans les maffes marchandes on a des comptes à régler;
<les livres à épurer, des négociations.à liquider fur les livres
& à confommer, des marchandifes à réalifer. Tout cela peue
.exiger l'ioterpofilion des Adminifirateurs Ma.rchands. Telles
font les bafes du [yndicat."Dans le cas préfenc, il n'y a que
des créanciers à graduer; & la valeur oe oinq immeubl~s à
dil'cribuer eotr'eux, fuivant l'ord're de leur préférence & 'hypotheque. Gondran avoir le droit de dire à [es créanciers,
qu'il ne- voul01[l point tomber en faillite, fur-tout à Marfeille où il exil'ce un_ Statut non abrogé par le Réglemeoe
de la .Cour, qui - permet à tout débiteur quelconque de
- mettre fes biens ell difcuffion, d'éclairer lui-même la marché
de l'inl'cance, de nommer fan Procureut, qui fait de i:lroit
les fooél:ions de curateur ad lites, cootre l'exprelfe difpofition du Réglemenc de la Cour qui le prohibe .par-tout
ailleurs. Tous ces poims olle été jugés dans la caufe du' fieu.;
Beau.
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PRO V B NeE.
4°7
Il faut voir aél:uellement quel1e eft la regle & la maniere
-de procéder qui conviennent le mieux à la maife aéluelle.
Il s'agit d'un concours des créanciers hypothécaires; il n'exiHe
plus de communion entre créanciers du même rang. Tous
doivent être gradués par ordre de leurs titres hypothécaires.
Dans les ma1fes marchandes, les chirographaires formenr
une efpece de corps, ayant même droit & par conféquenr
un intérêt commun. Ici tous les créanciers font hypothécaires. Tous les titres font exclufifs & ennemis l'un del'autre, route communion difparoît; il ne relle plus q!l'une
graduation à faire, & non' des effets mercantilles à liquider
& à divifer. Quand il s'agit même d'un vrai Ma-rchand, on
roule de la faillite à la difculIion. La Déclaration de 171,
le décide de même. La difculIion devient néceifaire même
en' faillite, quand les hypothécaires ne fane poinr d'accord,
fur-tout quand tous font hypothécaires, fur-tout quand il
_ n'exill:e plus que des immeubles dont les Juges-Conlills ne
peuvent être luges, ni principalement ni par acceffion. Ainu
l'on a vu en 176, les créanciers d'Alexandre 'Duclos n'étant
point d'accord fur la graduation, délibérer de [e pourvoir
au Lieutenant pour la faire, Le débiteur étoit abfene, le
Lieutenant fut invell:i; Me. Senés, Pro<;ureur,- fut nommé
curateur ad lites. Après la graduation faite" quelques créanciers voulurent revenir au [yndîcat & à la direélion marchande. L'Arrêt jugea que les; pouvo-irs de Me. Senés devoient
durer jufqu?à la fin de ta difwffion, l'arce qu'une fois le
Lieutenant inlleHi, les biens foUl fous fa main & ne p<:uvenc
en fOs:tiD La même chofe fut jugée en 1782 dans la caufe
du fieu v Seguin, Marchand. Dans l'efpece des Arrêts qui ont
été cités par les appellans'). les fail'Iis avoient remis leurs
bi-lans & leurs livres,. & la. direél:ion en faillite avait précédé
celle en difcuffion.
On réflondoit pour les, Iuges-Co-nfuls, que la Loi a lailIé
aux Juges le droit de prononcer eux-mêmes fur leur COUlFétence, & en même temps elle leur enjoint de délai1fer
d'office le6 caufe'_ dQoc,i1 ne leur cft pas permis de coo-
!
�4~
JOURNAt
nollre. C'efl un témoignage de confiance qu'elle leur a donné,
parce qu'elle a préfumé qu'un motif d'intérêt perfonnel ne
pouvoit balancer aux yeux du MagiHrat les intérêts majeurs
& publics fou mis à fa proteél:ion; elle a permis aux parties
. de conteller cette compétence, de propofer le déc1inalOire.
Les décrets rendus par le Lieutenant renferment deux
efpeces de contravention: 1°. inhibitions & défenCes de procéder pardel'anr les Juges-ConCuls; 2°. amende prononcée
contre les parties. Sous ce double rapport, il a violé les
Loix les plus refpeél:ables, il s'ell: rendu l'arbitre de fa propre
contellation, & il l'a décidée en infligeant aux parties des
peines que la Cour elle-même n'auroit pas cru devoir prononcer.
C'eU une maxime confiante, que quand il s'agit d'un conflit de Jurifdiél:ion entre des Tribunaux inférieurs, ils ne
peuvent décerner· des inhibitions & défenfes de procéder
ailleurs que pardevant eux, & fur-tout condamner les parties
à des amendes. C'efi la difpolition de l'art. 47 de l'Or90nnance de Blois, de l'art. 15 du tien, I2 de celle du
Commerce, & de l'art. 28 du titre 2 de celle du mois
d'Août 1737, C'efi auffi fur ce principe que fone fondés
les Arrêts rapportés par Boniface, tom. l , liv. l , tit. l ,
n. 4 & 5, & par Guenois en fes conférences fur les Ordonnances, corn. I.
Toutes ces regles font encore fondées fur un principe
d'équité. Le Tribunal Confulaire efi un afyle domefiique.
dans lequel la pui1fance du Juge s'exerce bien plus par le
mioifiere de la 'confiance, que par celui de la force coaél:ive.
Ces Magifirats populaires ne fone point environnés de cet
appareil impofant avec lequel les Juges ordinaires peuvent
faire exécuter leurs Ordonnances; ils n'one ni Huiffiers, ni
Records, ni lOute cette cohorte d'aide.s de juHice. dom un
Lieutenant peut employer utilement le fecours coorre les
. réfraél:aires à fon autorité. Le Légiflateur n'a pas voulu que
l'efpece de foible1fe dans laquelle fe trouvent ces Tribunaux
carrulaires, bien éloignés de ,0nte1l:er aUlii SénéchauJTées la
.
préémineo,e
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l S
DE
PRO V B NeE.
409
prééminence de leur autorité, l'éminente dignité dont (es
membres (ODt revetus , devint un tirre d'opprelIion contr'eux,
& d'injufiice envers les parties qui n'auroient plus le moyen
de recourir à des Magifirats' dont les. déci lions feroient inutiles, & dont -le Tribunal deviendroit inabordable; c'efi à
ces motifs réunis de bienfaifance & de jullice qu'il faut
attribuer des regles dont la Sénéchauifée ne parviendra jamais à détourner l'application.
Les Juges-Confuls, en dirigeant leur aélion contre le Lieurenant, ont-ils prétendu menre en caufe le Chef du Tribunal? Ils oot voulu faire réprimer un anenrat commis par un Juge, & ils oot aélionné celui qui l'avoit commis. Ce
fait perfonnel au Lieu'tenant de Marfeille demandoit une
réparation; on ne pouvoit l'obtenir que contre la per(onne
qui e'n érait l'aureur; c'étoit donc contre le Juge qui avoit
décerné le décret, qu'il falloit folliciter les réparations
qu'il rendoit i,ndi(penfables. AulIi les Arrêts rapportés par
Boniface, tom. l , pag. 2, ont touS été rendus fur des quefrions pareilles à celle dont il s'agir. Il ne s'agir point ici
d'une ,prife à partie; c'efl feulement la réformation d'un aéle
de juflice injurieux au tiers qui n'efi point (on jufiiciable.
Cette dininélion efl fondée (ur les Arrêts rapportés par
Denifarr, va. prife à partie, n. 22 & 23· Ainli il ne peur y
avoir lieu à la prife à partie que lorfqu'il s'agit d'une demande
intentée par un jufiiciable contre le Juge. envers lequel il
forme une répétition de dOl7lmages & intérêrs. Mais dès
qu'il n'efl queflion que d'une aélion exercée par un Tribunal
par des fairs fur lefquels le Magifirat artaqué ne peut avoir
prononcé en (a qualité de Juge, non feulement il n'y a
poinr de priee à partie, mais les regles (uivies en pareil ca~
ne peuvent être appliquées à un corps qui n'étoit point fon
jufliciable.
.
'On obfervoit pour la Chambre du Commerce, que la'
faillire en dans le commerce un de ces événemens malheureux autant qu'inévitables, que 'Ia prudence humaine ne (au.roir prévenir. En arrêter, en diminuer, 's'il en poHible, les
Années 1782. & fuiv.
G gg
'.
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~ '0 U RNA L
triaes effets, .c'ef! 'tout ce qu'elle peut fe promettre. Ce
feroit confondre toutes his idées que de la comparer avec
la déconfiture civile, la difcuffion. L'une & l'autre,.i.l ea vrai,
dérivent ,également de -la même fource; l'une & l'autre font
également l'effet & le 'réfultat de 1'1Inpuilfance du débiteur
failli ou difeuffionné. La faillite ea Je dérangement abfolu
-du Négociant; la difcuffion eH le dérangement abfolu de
tout citoyen qui n'eH pas Négocianr. Mais fi fous ce rapport la faillite & la difcuffion fe-mblent avoir quelque chofe
de commun, que de différences ne trouve-t-on pas entr'elles, '
tant dans leurs caufes que dans leurs effçts!
La difcuffion n'eH' jamais que la fuire des diffipations
du débiteur, de fa muuvaife conduite ou de fa négligence;
la faillite peut être quelquefois, l'dfet de. l'imprudence ; elle
ea le- plus foul/ent l'effet du malheur. 'Tous les hafards font
contre le Commer'1unr; tous les événemens publics ou privés,
heureux ou malheureux, peUVent égalemens opérer fa ruine;
,l'intempérie des faifons, l'inconHance 'des élémens, la guerre,
;]a paix, les révolurions politiques, celle. des gouverne mens,
la crainte même de ces révohirions, toue influe fur les opé,rations & les viciffieudes du commerce; tout peue dans un
'infta-ne précipirer le Gommer'1ant le plus avifé dans le dé'rangement le plus -·abfôlti. J?lacé dans 'un 'tourbillon .qui l'entraîne, il'n'éH pas toujours le 'maître de calculer les rifques
& de les borner; le bien ·du commerce exige qu'il fe livre,
& le cas de frauèle .excepté, 'rarement il feroit juae ou pof.
fible de lui impm,er fon malheur.,
La difcufiion eH toujours un ,événement ra're; la -faillite
fera toujours .d'autant>plus.c'ommune, ,que le,col'nmerce lui'même devierrdra plus' étendu; JlIbfolument ,'dépendante des
temps' & des circonfiances." [tout concourt à ~l~ .produire,.&
il n'eH aucun moyen poffible de l'éviter. L'eifet de la ,difcuffion eft naturellement très-b.0rné. Qu'un IHJTticulier fe
dérange dans fes aitàires., cer événement eft prefque indifférent à la fociéré; d'.llltreS profiteront de·1à ruine; rarement
l:etre ruine entraîne celle ,de qut:lqlles uns de fe-s 'créancier,s.
•
�DU
PAL AIS
DE
4 Il
PRO VEN C E.
Circonfcrite dans de certaines bornes, l'effet en efl: toujours
limité. La faillite au contraire peut faire elle-même révolution dans une place de commerce; rarement elle arrive
fans en déterminer d'aueres. La place de Marfeille n'oubliera
jamais qu'en 1774 une feule faillite en a déterminé cent
vingt-fept. Ce trille enchaînement, plus funefie encore au
commerce qu'au Commen,anc 1 refferre le crédit, éteint l'activité, fufpend les opéra rions , & jecreroit' bientôt le commerce dans un langueur .morcelle, fi une fage prévoyance ne
cherchait à l'affurer le Négociant, en adouciffant par des
ménage.mens falutaires le malheur du failli & celui de fes
créanciers.
Ce ferait do!)c une erreur de croire que la faillite d'un
Négociant puiffe & doive "êrre trairée comme le dérangement
d'un fimple particulier. La fociété ne doit rien à celui qui
s'efi manqué à lui-même; l'intérêt de fes créanciers n'ea
jamais que l'incérêt d'un bien petie nombre de perfonnes
dont la plupart ont fouvent à fe reprocher d'avoir favorifé
fes difiiparions. Le bien public qui demande .que cout citoyen
hors du cercle du commerce fe conduife en pere de famille,
exige que l'on acr3che à fan dérangement une efpece de home;
l'aél:e de, la difcuffion, la lemeur & la folemnité des formes,
la régie',. la veme judiciaire des biens fom les moyens les
plus propres pour opérer cet effet. Appliquer ces vues aux
faillites, ce ferait toue dénarurer, coue détruire, roue bouleverfer; ce feroie une injuLlice à l'égard du failli qui le
plus fouvent n'a pas. mérité fan malheur; une injufiice plus
criante envers fes créanciers déja trop malheureux d'une perte
qu'il n'efi pas toujours en leur pouvoir de prévenir. Ge fecoit
enfin anéantir le commerce lui-même, nécefliter fouvent de
nouvelles faillites, & retenir dans une fiagnation funefie
les fonds qui l'alimentent par leur continuelle & rapide circulation.·
.
Tout efi fujee à des frais immenfes dans la difcuffion;
chaque pas dans cette infiance, chaque procédure foDt !Jn
acheminement rapide à la confommation des trifies débris
G gg
2.
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'4 t2
JOURNAL
que le di(cuffionné peut offrir à (es créanciers. Le recouvrement des effets, la régie des biens, les ventes, les options,
les collocations, le moindre aéle de mis en notice, tout exige
l'autorité du Juge; la fignification aux créanciers, leur concours judiciaire, les droits royaux, ceux du Tribunal, ache- .
vent de tout dévorer. Aucun de ces inconveniens ne Ce
pré(e.nte dans l'adminiA:ration marchande; tout s'y conduit
avec autant de promptitude que de fimplicité; les Syndics
s'emparent des biens, les régiffent avec économie; les ventes,
celles même des immeubles, fe font traélativement.& à peu
de frais, & le produit verré dans la caiffe eA: employé, à
des répartitions qui fe (uccedent comme les rentrées.
L'art. 240 de l'Ordonnance de Blois avoit enjoint aux
Juges ordinaires de vuider les affàires de commerce fommaireinent & fans plus de frais ni de.longueurs qu'elles eu(lent fupporté pardevant les Juges - Con(uls, à peine de
concuffion. La Déclaration du Roi du 10 Juin 171) veut que.
tous les procès & différens civils mîls & à mouvoir pour
raifons des faillites, foient, pendant le temps fixé par cette
Déclaration, portés pardévant les - Juges Con fuis. Des
rairons parriwlieres s'oppofant à l'exécution de cette Loi
dans le Tribunal Con(ulaire de Paris, la Déclaration du 30
Juillet même année attribua la connoiffance des faillites au,
"Prévôt de Paris ou à (0,] Lieutenant; elle voulut en même
tem'ps qu'elles y fuffenc traitées comme elles l'auroient été
pardevant les Juges - Confuls, (ans frais, fans miniA:ere de
Procureur; ce qui fut confirmé par les Déclarations des
7 Décembr,e 17 1 ), I I Janvier & 13 Juin 17 16 , 4 Août
173 1, rendues (pécialement pour la place de Marfeille, &
par un Arrêt du Confeil du 9 Septembre 1749, par les
Lettres- patentes de 17')8, & par les Déclarations des 7
Janvier 1760,23 Juin 1773, & 12 Avril 167)'
L'objet de ces Loix a été de trou\'er le moyen d'arrê.!er
Jes fuites dangereufes que les faillites pouvoient avoir pour
Je commerce &; pour le bien public; le moyen qu'elles ont
pris à cet effet, a été d'accorder la connoilfance des faillites
,
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PALAIS
DI!
PROVENCE.
413
aux Juges du corn merce, qui préfentoient le double avantage
de la connoiffance du commerce & de la jullice gratuite;
elle ne pouvoit faire ufage de ce moyen qu'en dépouillant
les Juges ordinaires de la matiere, en l'attribuant aux JugesConfuls; elles n'ont point entendu laiffer la connoiifance
en concours de ces mêmes faillites aux Juges ordinaires;,
leur' objet au contraire a été de les dépouiller de cette
connoiffance. Défendons aux Juges ordinairés de connaître
des faillites, a peine de nullité. Les J uges-Confuls ne connoiffent en général dans les matieres qui font de leur compétence, ni concours, ni prévention; leur 'jurifdié1:ion el!:
exclullve, fuivant l'art. 13 du titre 12. de l'Ordonnance du
Commerce. Tous les principes s'oppofent donc à cette
convedion frauduleufe de la faillite en difcuffion, pour en
porter la connoiffance au Lieutenant que la Loi a dépouillé
de cette matiere.
De quel droit le Lieutenant a-t-il pris fur lui de connoître de la faillite du fieyr Gondran? Trois créanciers fe
font pourvus à fan Tribunal; ils lui ont expofé que le fieur
Gondran élOit Négociant, que le défordre s'étoit emparé
de fes affaires; ces termes lui indiquoient une faillite; il
devoit donc s'abl!:enir d'en connaître, lOut a,u moins quand,
toutes. les parties en qualité, il a vu fept créanciers oppofans à la difcuffion : de quel droit a-t-il retenu 14 matiere?
L'incQmpétence du Lieutenant el!: donc natojre & abfolue;
elle el!: la plus forte de toutes les incompétences, puifqu'elle
réfulte de fon défaut de pouvoir [ur la matiere dont il a été
dépouillé par l'attribution. 1
00 difoit pour la Sénéchauffée, que la maxime el!: invio r
lable en France; nul Juge ne peut être attaqué per[onnellement, [ans permiffion expreffe de la Cour dans le reffort
de laquelle il exerce [es foné1:ians, li peine de nullité des
procédures; _elle el!: fondée. [ur l'art. 147 de l'Ordonnance
de Blois, & [ur les Arrêts de Réglement des Parlemens de
Paris & de Provence, rapportés par Mf. d'Agueffeau, tom. l,
~équiE 4, & par Mr. de Reguffe, tom. l , pag. 241. Les
�414
.
JOU~)lAL
parties ont le drOIt de fe plalOdre de leurs Juges. Un Jnge
peut fe plaindre des el1treprifes attentatoires. d'un autre; mais
ils font également obligés de dépofer préalablement dans le
fein de la Cour les griefs qu'ils peuvent avoir contre .le
Juge qu'ils veulent faire defcendre de fan Tribunal pour
qu'elle les pefe, & qu'elle voie, avant tour, fi ces griefs ont
pour bafe ou l'erreur de l'homme, ou la f.1ute proprement
dite du Juge. C'eft bien le moins, en effet, qu'une attaque
auffi injurieufe au Juge qui doit ell être l'objet &: auffi avililfante pour fon caraél:ere, fait méditée intermédiairement
par ce même Tribunal qui en: le fouverain protedeur de
touS ceux qui font en premiere inftance les organes des Loix
& parricipans à la puilfance publique.
.
Le Tribunal Confulaire n'a cependant pas rempli ces formalités; au lieu de demander à la Cour la permiffion d'attaquer le Lieutenant en fan propre & ptivé nom, & d'obtenir
un décret qui lui permît expretrément de le faire ajourner
dans cet objet, il s'eft contenté de demander par 'requête
l'ajournement contre ce Magifirat, tout comme s'il fe fût
pourvu contre un {impie particulier. Le Tribunal Confùlaire
n'eH donc point en regle; il a attenté aux droils facrés de
la Magifirature en attaquant le Lieutenant; il Y a donc lieu
à la révocation du décret d'ait l'ajournement mis au bas de'
1à requête, &.à la calfalion de l'exploit d'ajournement qui a
été fait enfuite. Enappellant pardel'ant la Cour, Juge de
l'appel déja émis par les créanciers de la prétendue faillite)
le Lieutenant, pour r~ndre compte de fan décret, pour le
voir calfer & pour fe voir inhiber d'en. prononcer de pareilsà l'avenir, & condamner à des dépens, ce Tribunal eftl devenu une partie propr.ement dite, qui, en attaquant le Lieutenant, l'a pris à partie de la maniere la plus formelle, puifque
fan objet eft de faire réparer le prétendu tore que. le Lieutenant a fait à fa jurifdiél:ion" par. fes. décret & jugement.
Or, cet attentat elt un. de ceux que l'Ordonnance· a; voull)..
punir, en permettant la prife à partie.
Un Tribunal ou un Juge peut faire valoir les droits dt;
�DU
PALA'IS
D1l
PROVENCE;
4'15
fa Jurifdlél:ion, & s'élever contre toute enrreprife faire à fon
préjudice; cela ell: indifputable. Elulieurs voies s'offrent à
lui: ou il fe pourvoit purement & limplemenr devant la Cour
pour révendiquer fa Jurifdiél:ion, la faire régler pour l'avenir,
.& obtenir des défenfes de contrevenir au régIe ment qui fera
-fait; & dans ce cas il a/Iigne, non le ~uge qui a prononcé,
mais le Procureur du Roi ou Jurifdiél:ionnel ayant les aél:ions
du Tribunal; & il n'y a point de prife à partie, parce qu'un
Tribunal a/Iigné pour venir voir régler fa Jurifdiél:ion, n'dl:
qu'un particulier obligé de venir (oLitenir les .droits qu'on
lui conrel/:e. C'eO: ainli que s'eO: comp.orté derniérement
le Tribunal de l'Àmirauté envers la Sénéchauffée. Ou il fe
pourvoit devant la Cour conrre les parties qui ont obtenu
un jugement pour le faire caffer, & obtenir des défenfes
'même contre le Juge qui l'a rendu, fans' cependant l'ap'peller au procès; c'eft ainli que la Chambre.du Commerce
en ufa en 1727 & 1738. Mais s'il fe poürvoit devant la Cour,
non contre le Tribunal, mais perfonnellement contre le
'membre de ce Tribunal qui a jugé, pour faire caffer les Ju:gemens qu'il a rendus, & fe voir inhiber perfonnellement
'd'en rendre de pareils à l'avenir, & le faire 'condamner aux
dépens, dès-lors c'eH u"ne prire à partie; il arraque ce Juge
pour fait de fa charge;- il l'attaque ..cOtl1me Juge, & veut
le "faire punir comme tel; il le fait defcendre de fon Tribunal pour lui faire rendre compte .de fa jufiice; il le met
de niveau avec le Juge avide, frauduleux .ou .concu/Iionnaire;
il le prend à par~ie, parce qu'enfin ~ .pre·ndre un Juge à partie,
c'eO: faire d'un Juge une partie.
L'objeél:ion à .laquelle l'on répond., :fuppoferoÏ"r que les
Ordonn~nces & les Réglemens qui ont établi la forme de
p~endre les :Tljges ,à .panie, n'ant re.u:en vue que les fimples
particuliers,.& qu'ils ont laiffé "à chaque Tribunal la liber-ré
de' pl'miquer enrr!eux .cerre guerre indécente à l'abri de laquelle on a voulu Jes meH~e .tous_, ,de .Ja 'part des fimples
parPicu~iépS. JI1I1'y l3(point <ù'except:ions, ni dans f~OrdonJ)ance
de Blois, .ni dans -les .-Arrêt~ ,de .t.Réglernent; Cel> Ida,fè':l{~SJ
�,p6
1
JOURNAL
frappent contre les Tribunaux eux-mêmes; dans le cas où
l'un d'eux voudroit attaquer un Juge en fon propre & privé
nom, pour faire caifer contre lui le jugement qu'il li rendu.
Un Tribunal de jultice qui en attaque un aurre, a-t-il plus
de droit que les particuliers pour le faire punir de fes erreurs?
Compromet-il moins fa dignité? Et qu'importe qu'Ü n'attaque pas fon Jugè? Ne fufEt-il pas que celui qu'il attaque
{oit Juge, & qu'il l'attaque à raifon de ce qu'il a fait comme
Juge, pour qu'il ne puiife lui demander compte de fa juftice qu'avec la permiflion de la Cour?
Mr. l'Avocat-Général de Calilfanne obferva que pour mettre
de l'ordre & de la clarté dans cette affaire, il falloit d'abord
établir en point de fait fi l'on devoit regarder le.fieur Gondran
comme un Bourgeois difcuflionné, fournis aux Loix générales,
ou comme un Négociant failli, fournis fous la premiere
qual1té & pendant la geltion qu'il fait de {es biens à la Juri{diaîon Confulaire; & fous la {econde, après l'abandon
- réel & fiaif de ces mêmes biens, aux Loix partjculieres
& fimples du commerce qui, avant de le rendre à la c1aife_
générale des citoyens, avoient établi des regles, & pxé des
principes auxquels la volonté feule de fes créanciers pouvoit
donner ou non l'exécution.
Ces deux points de fait établis & difcmés relativement
à la perfonne & aux biens du fieur Gondran, il examina
fi en l'état du dérangement des affaires du fieur Gondran
il y avoit faillite ouverte; & conféquemment néceflité abfolue de s'adrelfer aux Juges-Confuls; ou fi au contraire la
difcuflion étant le feul remede offert par les Loix à {es
créanciers, il n'y" avoit pas eu attentat en s'adreffant à la
Jurifdiaion Confulaire. II établit d'a'près cet" examen, fi
la difcuffion étoit néCeffitée par l'état des procédures &
les conteltations fur les hyporheques, ou fi elle ne l'étoit
devenue que par la prévention du Lieutenant, ou les pré."
fentations dans l'inltance pendante pardevant·lui.
Si cette néceffité n'étoit pas abfolue, la difculIion étoie..'
elle au moins légitime, fi elle étoit poffible en droit &
.
en
�DU
PAL ..U S
DB
PROVllNCB.
'P7
en fair. En droir, fi elle étoit avamageufe Ou nuifible 'à
l'inrérêt général de la malfe ; en fait, fi elle étoit réguliere,.
c'efl - à - dire, le réfulrat d'un vœu jufle, celui des trois
quarts & même de la pluralité des créanciers. Il examina
enfuite fi la difculIion demandée ou comefiée pouvoit être
regardée comme ('étant fans intérêt. D'après l'éclaircilfement de ces différens poinrs de vue, il démontra quels
éwienr les appels fonciers auxquels il fallait faire droir ,
ou à celui du fleur Greling' comme Syndic de la malfe,
qui avoir appellé en cene qualité, ainli que la Chambre
du Commerce, de la Sentence qui déclaroir la difculIion
ouverte, & de tour ce qui avoir précédé & fuivi, ou à
celui des fieurs Icard & Confons qui demandoienr la calfalion de tout ce qui avoir éré fair pardevanr les Juges-Confuls~
Ces objers 'difcurés embralfanr taures les qualités fubfidia ires du fonds de la caufe, il pa!!:'! aux quefiions acceffoires. F aur-il, fuivant les luges-Confuls, calfer'.Ies figriifications f,iÎres au Tribunal confulaire, & anéanrir le décret
du Lieutenant poftant inhibitions & défenfes au lieur
.Greling de pourfuivre ailleurs que pardevant la Sénéchaulfée,
à pèine d'amende & d'en être informé, ou menre la Sé.
néchaulfée hors de Cour fur ces qualités t Faut-il enfin ré.
voquer le décret ait l'ajournenutlt rendu fur la 'requête des
Juges-Confuls, &' calfer l'exploir de ~ lignification fait en
vertu d'icelui, ou confirmer le tout?
Tel eil: le tableau exaél: de la difculIion dans laquelle
entra Mr. l'Avocat-Général.
Le lieur Gondran étoit - il Négociant,.. pouvoir - il être
regardé comme fàilli?
Il Jaut regarder comme .Négociant celui 'lui a.1Jiduitatc
quâdam & fre'luenti negociatione ad hujufnlOdi merea/oris:
arum feu veriùs officium fe dedit; celui qui exetce par lui.même mercaturam quam projitetur. non femel, fed pluries~;;
celui qùi met dans le commerce la plus grande partie de f.à
furwn~
.
'·Efl~il coe de ces qualités qui n'exifte pas filr la téte da
Années l782 & jùiv.
H h h:
,
•
�'1,18
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1
0
U Il N
A L
,fleur Gondran? Un certificat d'une foule de Négocians;
l'état du fleur Gondran reconnu comme Négociant, la renommée, le cri univerfel, le vœu général, l'aveu même
de fes Adv~rfaires dans toutes leurs requêtes affurent au
'fleur Gondra,n la. qualité de Négociarit.
Quel aùtre état que celui de. Négociant le fleur Gondran
exerça-t-iL depuis 1770? Il a toujours pris depuis cette
époque cette qualité; il a été condamné à la Jurifdiétion
Confulaire pour de !impies billets ~ ordre non attributifs
de Jurifèliétion comme les lettres de change; il a tenu des
comptes courans qui Iconllatenr la mife de place en place
d'une quantité de papiers de commerce, le virement d'une
quanricé .de blllets à ordre &: de lettres 'de change fur les
différens Banquiers du Royaume; il a. follicicé & obtenu
un privilege pour la rraire des negres; il d'onne des aétions
dans cette enrreprife, & a pris des affociés. La guerre
lui offre-t-elle.la -poffibilité de faire des fpéculations plùs
,vafres , 'il 'prend des intérêts fur différens navires, &, arme
lui-même .en cGurfe"; fuivant fa déclaration à l'Amirauté; il
vend, achete des marchandifes ; il fe trouve dans une faillitè
pour une créance de plus de 12.000 liv.; il continue juf. qu'en 1780, & pendant cette année encore il foufcrit
,nombre de billets à· ordre, ,& difparoÎt' fans .met·tre le
,moindre ordre à les affairés, fans fatisf.ure au~un ..engagement, fans même prendre le moindre arrangeqlent avec
.fes créanciers.
JG
.
Si avec toutes ces qualirés, le lieur Gondran ne doit
.pas être regardé comme Négocianc, qui faudra-t-il donc
rega rder corn me tel?
,Ce El>iot de fait étant certain, il faut examiner li la
conduire de, quelques créanciers il l'égard du lieur Gondran
qui 13voit difparu de la place, a pu & dû dérerminer à une
difcuffion ou à une faillire.
,
Le fieur Gondran, Négociant avant fa difparution, n'a
pas perdu cerre qualité après cette époque; il a été alors
un Négociant en failli:;~; & parce qu'il n'aura point remis
,
�DU
PALAIS
1)E
PROVENCE.
4-I9
de bilan, faudra-t-il ne pas le c'roire Négociant failli? Combien de fois des Négocians n'oDt-ils remis ni livres ni bilan!
Ce défaut de rérr:iffion, fur lequel l'Ordonnance a fratué,
fait préfumer la banqueroute frauduleufe, mais n'empêche
pas la faillite d'un Négociant; en difparoilfant, raut difparoÎt. Point de remife de livres, point de bilan; tous les
papiers font protefrés. Le lieur Gondran efr donc véritablement
en faillité; prefque raus fes créanciers, fal)s fe réunir, obtiennent en 1781 des titres contre leur débiteur à la Jurif·
dié!:ion Conful.ire, & continuent leurs exécutions par des
failies; point de malfe ni faillite ouvèrte, ni difcuffion;
chaque créancier, fans penfer aux droits des autres, n'eH:
guidé que par fon intérêt.
La vente des immeubles efr pourfuivie; c'eIl: dans cet état
que trois créanciers hypothécaires demandent au Lieutenant
la difcuffion contre le débiteur & la malfe de fes créantiers.
D'après le dérangement du lieur Gondran, falloit - il
s'adre1fer aux Juges-Confuls? Une faillite efl: réputée ouverte,
d'après l'Ordonnanc'e, du Jour que le débiteur s'efr retiré
pour éviter les pourfuites de [es créanciers, ou qu'il y a eu
plulie.urs jügemens qui l'ont condamné à payer des lettres
de change, des billets, &c. Il faut conclure de là qu'y ayant
faillite ouverte, il Y avait néceffité de s'adrelfer .aux JugesConfulL
' .
Mais e!t-ce 'donc une direél:ion marchande que l'on a demandé au Lieu'teriànt? Non; c'en une infrance générale de
difcuffi?n. Et où eH la Loi qui oblige les créanciers d'ün
failli de pourfuivre la difcuffion de leur débiteur, quanà ils
ne le veulent pas, & qu'ils préferent la voie de la faillite!
En ce cas ils ont pour Juge ceux du commerce, des Juges
de privilege & d'attribution; ils ufent de la liberté db ciJoix
<:lui en la bafe de toutes les Loix fur le commerce, le bien
·public & particulier. fe troùve d'accord; il faut donc aUer
aux Juges-Confuls: mais fi au lieu d'une faillite, quelques
créanciers veulent une difcllffion, que devient la compétence
Hhh:z..
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R :Il' A L
des Juges-Confuls, car la difcuffion ne peur pas avoir lieu
pardevant eux? Le vœu de la rna1fe fixe felll le Tribunal,
parce que la liberré ell: la véritable bafe.de routes les Loix
du commerce; l'intérêt de la rnâ1fe _forme feul le bien public & général. Si le choix de la ma1fe fixe le Tribunal,
elle ne le fixe pas irrévocablement; & le principe elec7a urla
via Tlon datur regrt1Jùs ad -aiteram, ne peut être appliqué
dans ce cas. D'après rous ces principes & la Jurifprudence,
on pourroit citer une foule d'exemples-où le fyndicat ouvert,
on a eu recours à la difcuffion, & réciproquement de la difcuffion au fyndicat, lorfque la généralité des créanciers la
delire par un vœu de rna1fe. En fuppofant, par exemple, ici
que la ma1fe efH adhéré à la demande en difcuffion forméè
par quelques éréancrers, & qu'èlle s'apperçût dans la fuite
combien cette procédure ell ruineufe, il ell: certain que cette
même rna1fe pourrait réclamer la diretl:jon marchande, parce
qu'alltremenr il ferait cruel & barbare de lui voir perdreune partie de fes fonds, pour avoir adhéré légérenienc à un
premier vœu donc elle aurait reconnu le danger & l'abus;
c'ell: le but de toutes les Loix du commerce.
II y avoir donc, d'après rous les principes, poffibilité de
difcuffion & de dirétl:ion marchande.
Dans cet état, troi~ creanciers ont demandé au Lieutenanc la difcuffion,. & ont ajourné le débiteur & la ma1fe.
Le lieur Greling a demandé aux Juges-Confuls l'a1femblée des créanciers du lieur Gondran.
Cette demande étoit-elle attencatoire à l'infiance en difcuffion?
'
Le fieur Greling demandait d'ufer du droit qll'a tout
créancier de confulter la ma1fe fur les intérêts de la généralité.
Le décret du Lieutenant portoit ajournement contre la
mafI'e, pour voir ordonner la difcuffion; il fallQit dOQc que
la mafI'e délibérât fi elle de,'oit la con~eaer ou l'accorder.
Les demandeurs en difcuffion devaient, donc attendre le
réfulrat' d'une afI'emblée qui était, pour aioli dire, leur
ouvrage.
�!lU
PALAU
!Ill
PROVENCB;
42.f
TI n'y avoit donc point d'attentat dans la d.e~1ande du
fieur Greling•
• Cette a1femblée n'étoit que préalable; elle ne pouvoit avoir
lieu .que pardevant les luges-Confuls; il n'y avoit pas encore
de difcuffion ouverte; & fi le Lieutenant. eût pu fe croire
compétent avant que. d'ajourner la maffe pardevant lui, il
auroit préalablement ordonné l'affemblée pour former cette
même malTe; donc encorè point d'attentat.
L'affemblée étoit libre dans fa détermination; elle délibéra
de ne pas adhérer à la difcuffion, & de préférer la diteélion
marchande; elle nomma des Syndics pour porrer ce vœu;
elle leur donna même pouvoir d'appeller de la Sentence, fi
elle venoit à ouvrir la difcuffion; mais tout cela n'éro'it que
la fuite néceffaire du droit de délibérer fur la demande en
ajournement; ainfi point ·d'attentat.
Mais un luge invefl:i d'une infl:ance générale n'a-t·il pas
le droit d'inhiber à tout créancier de procéder devant rout
autre Juge? Non, parce que les inhibitions contenues dans
le décret du Lieutenant du I I Janvier ne pouvoient poner
fur un objet exc1ufivement attribué à un autre Tribunal, à
un Tribu~al de privilege.
N'importe que le fieur Greling eût mis fa préfentation
dans l'inltan{;e en difcuffion;' cette préfentation ne pouvoit
pas donner aux inhibitions une force qu'elles n'avoient pas•
.En fait,. le lieue Greling avoit préfenté après fa requête
aux Juges-Confuls; en droit, il contefl:oit la difcuffion comme
particulier, & demandoit une affernblée pour avoir fon vœu.
Sa demande aux Juges-Confuls ne formoit point d'infl:ance;
il ne dépouilloit pas le Lieutenant; il n'invelliffoit pas deux
Tribunaux; il demandoit une afiemblée, un vœu pour conteller ou accorder la demande en difcuffion: ainli point d'attentat de la part du lieur Greling contre le Tribunal de la"
Sénéchauffèe.
. '
Mais n'y avoit-il pas une irrégularité manifelle, & la dif~
c:uffion du lieur Gondran n'éroit-elle pas également néceffitée
par l'état d~.s procédures faites par les créanciers avant cette
�' ' 2.'2.
Jou RNA L
epoque, par la n;lture des contefiations fur l'antériorité des
hypotheques, enfin par la prévention du Lieutenant?
On a fait un reproche à plufieurs créanciers d'avoir fait
procéder à des exécutions après la difparution du lieur
Gondran, en, qualité de créanciers hypothécaires, fans avoir
regardé leur débiteur comme failli, pour en conclure que
par-là les créanciers antérieurs en hypotheque avoient été
forcés à ouvrir une difcuffion.
C'eil pour la premiere fois fans doute qu'en fait de ma/fè
de créanciers & de failIite, on a dit à UI~ éréancier particulier: vous qve? agi comme individu; vous êtes lié, vous ne
pouver plus aonner votre vœu dans la majJè comme créancier;
vous ne pouver pas tenir une autre conduite 'lue celle 'lue vous
ave? tenue avant 'lue d'être appellé pour délihérer.
N'efi-i1 pas arrivé dans cette faillite ce qui arrive dans
toutes, plus encore dans celles qui n'ont point d'époqu~
cer'taine ? L~s créanciers.qui fe' perfuadent que ce n'eH qu'un
voyage qui permet d'efp'érer le retour, cherchent à a/furer
leur créance, & ne connoiirent d'autre intérêt que le leur;
mais la faillite ouverte, la maire a le droit de folliciter par
un vœu général la direétion marchande, fans qu'on pui/fe
dire i1\l.X créanciers, qu'ils ont crié la faillite & néceffité la
difcuffion, parce qu'ils ont acquis des titres depuis la difparutlOn.
Qu'importe à la ma/fe réunie, qui l)'agit que pour fintérér'
général, que quelques' créanciers aient exécuté le débiteur!
les pourfuites particulieres, la plupart obtenues à la Jurir.
diaion Confulaire, peuvent-elles changer' fon état, néceffi- .
tent-elles, la difcuffion? Li! ma/fe. n'avoit point encore fait
de choix, elle n'avoit pas délibéré. Comment donc oppofet'
à cette maire des procédures féparées? Donc point de né.
ceffilé de la difcuffion d'aprés les procédures faires par quelques créanciers.
Mais, dit-Oll, quand il y eut conrefiation fur cet objeti
il falloit s'adre/fer au Lieutenant.
Il n'y avoit nulle connexité avec la difcullign. D'ail1eur~
1
�D u P Â L Â 1 S D Il PRO V Il Nell.
.'p.J
IUr quoi y avait-il conteflation? Sur une faifie tnobiliaire
dont les Juges-Conruls pouvoient" nommémënt conm:>1tre.
Comment donc, fous prétexte de conteflations imaginaires,
demander la difcuffion & la faire regarder comme néceffaire
pardevant le Lieutenant par fa prévention un mOIs avaqt
la faillite? Mais peut-il y avoir prévention entre deux Juges,
l'un d'attribution exc1ufive ,& l'autre fimple Juge ordinaire?
S'a.giifoit-il d'une dircuffion? Le Tribunal ordinaire devoit
en connaître. S'agiifoit-'il d'une faillite? C'était le Tribunal
COlJfulaire; lUais jamais de prévention poffible entre ces
deux, Tribunaux. Et quand même l'il1flance eût été liée pardevant le Lieutenant, ce qui n'efl pas, le vœu de la maife
qui demandoit la direél:ion marchande ne pouvoit être porté
que pardevant le Tribunal Confulaire.
Delà Mr. l'Avocat-Généra1 conclut que rien ne néceffitoit
la difcuffion; mais il examina cependant' fi elle pouvoit être
regardée comme légitime.
Le I I Janvier, la faillite du fieur Gondran ouverte de droit
depuis fa difparutioll !le l'était pas de fait; les fieurs Icard
& conforts purent donc demander au Lieutenant la difcuf. fion, fuivant la forme prefcrite par les RégJemens. Ce~te
dema~~e ,é~oit alors' jufte & r.égulie~e 'Mais q9an~ la, maife
eut. delIbere de- s'oppofer à cet,te ,~I(cu.lIion ,.&.de,p~ndre
la voie de la direél:ion marc.hande, pour l'in~éçêt géné'ra.~ des
créanoiers', cette demande el} difcu/fion ne paroi.if9if, plus
légitime; elle n'étoii ni poffible ni ava'Dtageufe à la maife;
elle était irréguliere; la difcuffion entra,noit des 109gueurs
& des (olemnités de (forme toujours ruicieufes. La failli e
au contraire étoit cond,~ire. avec célérité;' Ces opérations
étoient. rapides, & la juftice fommaire & fans frais. Ainfi
P~>n ne p.9uvoi~ R~ douter .que la faillite & le fyndicat ne
fuifent préférables à la difCllffion toujours ruinéuf~ vis~à-vis
de fOUS I~s çitoy~ns.
•
J'
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'1 Il ,efr lJéceffaire pour le qien du comtpercC:'1 que. le ,creaJ;lcier du Négoci,ant jouiife des avantag~~, qu~ ,les J;-oix .l~i
(Jonllent fur taus.. les autres 1citoyens qui ne) • peuventL 4<0.temr
leurs droits, que de la Juffice.
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' Jou R. N A L "
La demande en difcuffion élOit irrégu\i"ere; foit que le
fieur Gondran fût regardé comme Négociant failli, ou comme
fimple Bourgeois.
Comme failli, il falloit, avant de 'demander la difcuffion.
-au' Lieutenant, fàire affemblH la maffe, avoir' fan vœu de
renonciation au Tribunal de privilege, & fon confentement
à la difcuffion; ce vœu n'eût pas été néceffaire dennt le
Tribunal légitime du lieur Gondran, les Juge-s-Confùls; un
feul des créanciers pàuvo:t l'invefl:ir; mais le Lieutenant
'n'érdit vis-à-vis des Juges-Confuls, par rapport à un Négo'ciane,' que le T~ibunal fublidiaire & d'exception; il fallait
'néceffilirement la pluralité des fuffrages, le vœu de la m~,1Tè,
pour être autorifé à fe pourvoirpardevant lui.
, Comme citoyen, fm)ple Bourgeois, la dif~uffion ne pouvait être deman8ée que par la plurali.té des créanciers, fui~vant le Réglèment de la Cour non' contredit en eene partie
par le Statut de MFfeille. Rien de cela n'a été fait; il Y a.
,donc irrégularité, Mais entre qui la Sentence qu'i ouvre la
difcuffi~n d'une faillite de 36000 liv. de créances hypothécaires', & de 136000 liv. de chirographaires, a été rendue?'
Elle l'a été entre, 'dix-huit, créanciers, donc neuf pour 1'a
'difcuffion, &. nelif copere• .Jufqu'à· préfent la 'niaRe paraît
,,egaie; mais ée n'e,ft 'p'a!> p~r le nombre. qu'il 'faut compter,
c'eft par la fomme' des créances.- , 1 •
< 'La fomme des créance~ des nellf qlli veulent la direél:ion
marchande eft d~ 9'8447 l."dont 80447 1. de chirographaires;:
celle"des nèuf'qui 'veulen,t· la difcu'ffiàn eil' de 30)97 liv.,
dont 12057 liv; 8e 1éhiro'grafjhairès! On fent facilement pàC-:1'à
qui' pouvoi' avoir 'le plus'" d'interêt,là 'la ·di{~uffion· ou) à ilia
,Id'
.a.."
..
or r '
~ lfeC(lOO.
..'
\
l,.
r-'
~,l
Qùe les créanciers hypothécaires neartliv~nt pas les Loîx
'de la faillite pardevant 'les Juges-Confuls', à la bonne heure·;
mais qu'ils veuillent forct;.f le~ chirograph'aires <le fuivre la
~oie,'Figoureufe dé '1~ a'ifcuffion parclèvant les, TrilninauJ' ordi-;
caires, c'eH ce qui ne fauroit être ordonné.
., ..•
Il faut d9nc conclure que' ce qui a été fait pardevant les
Juges-Confu~
�DU
PALAIS 'DI!
PROVENCE.
425
luges-Confuls; Joio d'être attentatoire, efi au contraire légi~
rime, & que tout ce qui a été fait pardevant le Lieutenant
efi irrégulier & illégal. Il faut dooc, quaot à la quefiion
principale, faire droit à l'appel des fie urs Greling & Fauchier,
Syodics de la maffe des créanciers du fieur Gondran. '
Mr. l'Avocat-Général parla enfuite des quefiions fubfidiaires & acceffoires. Les Juges-Confuls demandent la caffation des fignifications à eux faites en la per(onne de leur
Greffier; les fieurs lcard & conforts (outiennent qu'elles
éraient néceffaires, parce que le fieur Greling leur avait
diffimulé les procédures faites pardevant le Lieutenant. Il
efi prouvé au procès que ces procédures éraient connues
des Juges-Confuls. Il n'y avait donc ni néce.ffilé ni motif
pour faire ces fignifications au Tribunal ConfuJaire; elles
étaient injurieufes à ce Tribunal. Les fiems lcard & conforts' crurent par-là dépouille les Juges-Confuls. Mais qui
ne (ait que chaquë Tribunal eH Juge de fa compétence,
les Juges-Confuls plus que tout aurre? Si les Juges.Confuls
avaient été incompétens, il fallait, non par des lignifications
per(onoelles, c'eH-à-dire, d'égal à égal, mais comme jufriciable, comme fuppliant, propofer l'incompétence par
requête & la leur faire juger; les Tribunaux fon,t des fanctuaires dont tous les citoyens ne doivent jamais approcher
que comme jufiiciables.
Quant aux inhibitions & défenfes, il eH cerrain, d'après
toutes les Loix, que deux Juges égaux & indépendaos n'ont
point d'empire l'uo fur l'autre, & n'ont pas le droit de fe
difputer leurs jufliciahles, fait en caffaot les affignations,
fait en faifant des inhibitions & défenfes de diHraire leur
Jurifdiél:ion; c'eH par les voies ordinaires que les Tribunaux
inférieurs devaient procéder, & non prononcer des défenfes. _
Les Cours fupérieures ont feul,es ce pou\'Oir. S'il en écoit
autrement, ce ferait un état de guerre continuel qui contrarierait l'honneur de la Magifira ture, & qu'on fubHiEueroic
li l'état de grandeur qui efi la fource de toute jufiice. Les
inhibitions & défenfes ne peuveut portet que contre les'
Années z 78:2. & fuiv.
1i i .
�:4 26
Jou RNA L
parties, & jamais contre les Tribunaux; & toutes commiffions, mandemens, Ordonnances des Jug~s en révocation de
celles des Juges-Confuls, fane nulles, fuivane l'Ordonnance
de 1673, les Commentateurs & l'Arrêt de Réglement du
Parlement de Paris de 1698.
La Cour a toujours caffé les. décrets d'un Lieutenant portant inhibitions & défenfes contre_une partie de dillrarre
fa Jurifdiél:ioll. Il y en a un Arrêt àprès dans Bonnet, du
5 Février 17 26 , qui ca.ffa la Seneence des Juges-Confuls
-Çomme incompétente, & le décret du Lieutenant fut auffi
-caffé comme nul & attentatoire à l'autorité des Juges':ConfuIs. Bonnet ajoute: cet Arrêt a jugé que les Lieutenans
ne peuvent pas décerner des défenfes de procéder pardev,!-nt
les Juges-Confuls, & il cite deux Arrêts conformes rapportés
par Guenois.
En vain a-t-on dit que ces principes fone fans effet vis-àvis du Juge faifi d'une infl:ance en difcuffion qui attire à elle
.toutes les inllances particulier.es.
L'iactance générale attire toutes les particulieres; mais
ici l'inllance pendante pardevant le Lieutenant était une
difcuffion bourgeoife; l'inHance pendante pardevane les JugesConfuls étoit une difc;uffion marchande; ce n'était point une
infiance' parriculiere ; les Juges-Confuls écoient les Juges de
privilege de cette difc;uffion. D'ailleurs les Juges ordinaires,
même légalement 1:1ifis de l'inll:ance générale, ne peuvent
attirer à eux les inllances de privilege à raifon defquelles ils
feroient ioco.mpétens, parce que d~s. qu'il 'y a privilege "
plus de Jurifdiélion univerfel1e, plu.s de jull:iciable à 'rappeller.
Les décrets du Lieutenant éta.nt illégals & attentatoires à
la Jurifdiél:ion des Juges-ConCuls, font donc nuls & doivent
être caffés.
Mais était-ce le Lie\ltenant qu'il falloit aél:ionner, étoit-ce
la Sénéc;hau!fée?
Il ne s'agit pas, dit-on, de prife à partie,. mais d'un
attentat commis par le Lieutena(lt, donc il doit feul ré-
�DU
PAL A J S
DB
PRO v B Ne ]l.
427
pondre, pour lequel conféquemment il devoit feul êrre
ajourné.
•
Il eH certain en droit qu'il ne peut pas y avoir de prife
~ partie de corps à corps, c'eH-à-dire, de Tribunal à Tribunal; elle ne peur avoir lieù que du Juge au juflicier. Le
moÎif de la permiffion néceffaire pour prendre à partie eH
de faire ce/Ter rous le~ rapports de décence & de Jurifdicrion du Juge à la partie, & de rendre le Juge J'égal de la
partie. Or, enrre deux Tribunaux exiGe-r-il quelque rapport
~ faire difparoîrre; donc impoffibiliré de permiffion, & dèslors impoffibiliré de prendre à partie un Tribunal qui ne
peur pas agir vis-à-vis d'un autre Tribunal. Mais ce n'el~
pas la Sénéchau/Tée de Marfeille qui a éré ajournée; c'eH
le Lieureuanc en fan propre & privé nom qui aéré feul
arraqué comme Juge pour le fair de fa charge & pour un
arrenrat commis par fui à la Jurifdittion Con{ulaire. Cet
ajournemenr ef!: nul, parce que le Lieutenant 3 décerné le
décret du 16 Février fur la requiurion du Procureur du Roi.
& rout indique, rout prouve que c'ef!: un droit de compétence que le Corps de la Sénéchau/Tée a cru lui :lppanenir,
& qu'elle a voulu foutenir & réclamer. C'éroit donc le Corps
'lu'il fallait appeller; il faur donc révoquer le décrer d'ajour.
nement contre le Lieutenant; s'il fub/inoit fans y avoir de
poffibilité de droit de prife à partie, il Y auroit une aétion
per/cnnelle intentée contre un Juge pour venir voir caffer
fon Jugemenr, & voir faire des inhibitions d'en rendre de parèils, & ce feroie une véritable prife à partie pour laquelle il
faudrait une permiffion.
Mr. l'Avocar-Général conclut ~ ce que fans s'arf't!er ~ la'
requêre des fie urs Içard & 'éônforrs-du 24 Mai 1782., en appel
des décrets,rendus par les Juges~Conluls les 7 & .6 Fevrier, & de rour cé qui avoir précédé & fUlvi, dont ils feraient
démis & déboutés, leur appell.Hion ftH mife au néant, lefd.
décrers & Ordonnances til1ffent & forti/Tent leiir plein &
entier .effet, avec condamnation à l'amende du fol appel;
& faifJQC dtoit à l'appel émis }lar les Srs. Fallchier & Greling t
Iii 2.
•
�'4 18
•
Jou RN;': L
'
comme Syndics de la malTe des créanciers du fieur Gondran
envers .la Sentence du 2) Février 1782, & tout ce qui
avait précédé & fuivi, ainfi qu'à la requête d'intervention &
appel des Echevins & Députés de la Chambre du Commerce, l'appellation de ladite Sentence & des décrets &
Ordonnances rendues avant & après, & ce dont étoit app"el,
fulTent mis au né~nt; & par nouveau jugement, fans s'arrêter
à la requête des fieurs Icard & conforts du I I Janvier, le
décret rendu fur icelle, la Sentence du 2) Février & les
décrets ou Ordonnances qui avaient précédé & fuivi fulTent
déclarés nuls & incompétens, & comme tels caifés, avec
reUirution de l'amende ;..&. au moyen de ce, il fut dit n'y
avoir lieu de prononcer fur ,les requêtes refpeél:ives des 1 l
& 23 Mars 1781; & de même filite, que faifant droit, quant
à ce, à la requête d'intervention des,Juges-Conful~ du 29
Mai 1782., les fignifications à eux' faites à la requête des
fieurs Icard & confons_fuifent caifées, comme indécentes.
& injurieufes, les lieurs Icard .!5' conforts cGndamnés à telle
amende que la Cour arbit'reroit, avec inhibirions & défenfes
de récidiver; & qu'en ourre faifant droit à la requête incidente des Officiers de la Sénéchauifée, & ayant tel égard
que de raifon à l'expédient par eux offert & aux fins de la
requête des Juges-Confuls, lé déèret d'ait l'ajournement contre
le Lieutenant mis au bas de ladite requête ffit & demeurât
révoqué, & l'exploit d'affignari-on donné enfuite d'icelui fût,
déclaré nul & irrégulier ,. & comme tel caifé; & néanmoins
que le décret portant inhibiti.ons au fieur Greling du 16
Février 1782. flIt déclaré nul, attentatoire à la J urifdiél:ion
Ctln(llra'ire'f &; çor;nm~':rel"caifé'; avec défenfes aux Officiers
de, la Sénécllauifèe d'én. r~rulre çe femblahles à l'avenir, fOl)s
les peines de droit, & -'en'cet état les parties & mariere
fuilent: renvoyées' jJardevant les Juges-Confuls, pour fair.e
exécuter la délibération du '16 Février, les décrets qui
alloient. précédé & fuivi,. & IIi\rrêt fuivant leur forme &
teneur.
h
i.
,
Arrêt du 28 Ma-Î l'j:83' pronpncé par Mr: le Préfident
1
.1.
•
•
�DU
PALAIS
DI!
PROVENCI!.
4~9-
(le Jouques, co nforme aux condulions, ,avec' dépens (omre
les lieurs Icard & conforts. Plaidant Mes. Gallier, Port~lis,
Guieu, Roux & Dubreuil.
ARR
:fi: T
XLI V.
-IlArtifan reçu Maîcre dans une ville de Parlement & dans un
Corps, même non étahli im Jurande, peut travailler comme'
Mdîcre dans tout le reJfort.
.
1
•
•
A
Ndré Arnaud fe préfema aux Syndics des Fabricans de
chapeaux de la ville d'Aix pour être reçu Maître; ce
Corps fut alfemblé à la Salle de Police dans l'H6tel-de-Ville,
préfens les Lieutenans-Généraux & requérant le Procureur
du Roi. Arnaud y préfenta fon aéle d'apprentilfage., &. fut:
admis au chef-d'œuvre. Les Chapeliers de nouveau alfeIIlblés,
dans la même Salle, préfens & requérans les Officiers 'de
Police, & notamment les deux Maîtres jurés Fabricans de
chapeaux, fuivantl' Arrêt du Conreil du l Avril 1710, le chefd'œuvre fut examiné, la capacité d'Arnaud reconnue; & après
avoir entendu le Procureur du Roi, l'afpirant fut admis'à'
la Maîtrife ~ & prêta le ferment entre le~)mains des Lieutenans-Généraux de Police.
'Quat~e jours après ra rééeption,' André Arnaud préfenta
une requête à la Police de Marfeille, pour) être admis dilns \
le. Corps -des 'Fabricans ne' chap'eaux de_cette Ville; ces,
derniers s'y oppo(erent, fur le prétexte que .Ie Corps -des!
Eabricans de chapeaux d'Aix ne formoit point une ComlI)u-'1
nauté légitimémenr érablie, puifqu'elle n'était autorifée d'au~
cunes Lettres-patentes & ne formoir pas Jurande. Les Lieu- .
renans-Généraux de Police, par leur Sentence du 19 Jan-'
vier. 178 2., firent droit à la demande d'Arnaud. Appel par-rI
. "
l '
"
devant la Cour;
On d'ifo it pour les Fabricans de 'c:hapeaux ,de Marfeille "
•
�~G
JOURNAL
'lu'il s'agifToit de favoir fi les Chapeliers ù' Aile n'étant pOlne'
en Jurande, n'ayant par cotiféquent point de titre prohibitif,
leur Statut particulier 'lui le leur affeéioit ayant été cafTé,
& le droit de fabriquer des chapeaux étant par conféquent
libre & arbitraire dans Aix, Mrs. les Chapeliers d'·Aix peuvent s'arroger le privilege de conférer la maÎtrife qu'ils n'on't
pas eux-mêmes, & en feignant d'attribuer ainli le droit de
travailler dans Aix, droit qu'ils ne peuvent pas refufer, &
qu'ils ne peuvent par conféquent pas conférer, traafponer
r
auffi à quiconque voudra s'établir à Marfeille, le droit d'y
travailler malgré la Jurande.
.
11 efi convenu que le Corps des Chapeliers de Marfeille
efi établi en Jurande, fuivant les Statuts & Réglemens du
1 Août 17[6, aurorifés par Lettres-patentes de 17[7, homologuées par Arrêt _du 2.3 Septembre de la même année. Les
Chapeliers d'Aix au contraire ne font point établis en Jurande; ils avoient [enté de fe l'arroger par des Sratuts rédigés
en .tiy'32.)" & enrégi!hés dans le même temps riere le Gr.elfe
de la Coür; mjlis ces mêmes Statuts furent cafTés par Arrêt
du Confeil du 14 Juin 173), fauf aux Chapeliers d'Aix à
fe p:ourvoir. à Sa Maje!lé pour en obtenir, s'il y avoit lieu,
des Lem'es-patentes d'homologation des nouveaux Statuts
'lu'i1s pour.FOient~ dr;efTer.
.
"
Les Chapeliers ,d'Aix ont vécu fous la loi de l'Arrê,t du
Confeil de 173)' 'lui cafTe ceux qu'ils s'étoient arrogés, '&'
au moyen de ce' la fabrication des chapeaux a été libre à
Aix" & il f"flit. de contribuer aux charges que le Corps
peu av.oir', ou que le Gouvernement ~ trouvé à propos de
lui)lirrrpafér. L'on avoit cru pendant quelque temp§ 'lue de
fimples,Statuts drefTés par les particuliers pratiquant un certa'id
:lrt, &_tevêtu de l'homologa-tion de. la Çour, avoieot l'effet
de la Jurande, c'efi-à-dire de refireindre la liberté publique
& d'afTervir les afpirans aux précautions & aUll formalités
ulirées en fait de Jurande; mais 00 a recon/lU enfuite que
l'exercice de toutes les profeffions étoit néce!fairement libre,
& que' tant que la liberté publique n'avoit pas été renceinte .
�DU
PAL AIS
DB
PRO V B N C B . '
431
par l'autorité fouveraine, il n'étaie pas poffible d'}' apporter
aucune gêne, & de donner ainli à aucun Corps d'arcs &:
métiers le privilege de la Jurande; c'eH ce qui fut décidé
par l'Arrêt du 1[ Janvier 1744. Les Arrêts contre les Tailleurs & les Boutonniers de Marfeille, ceux des ChiJfoniers
de la même ville, &: ceu]' des, Tanneurs de Brignoles ont •
confirmé Ja, même maxime, qui eU auf!i rapportée par Mr.
d~ Montvalon dans fes notes à la fuire du Précis des Ordonnances in va, Statuts.
Il eH donc invariablement cerrain que eoute profeffion
quelconque qui n'ell point fondée en Lettres-patec:ces ,. e{~
exaél:ement libre, qu'elle ne co.nnolt ni Jurande, ni Maîrrife,
&: qu'en payant les .impo!irions du Corps, toue nouveau_
venu peut auffi bien la pratiquer que' celui qui la- pratique
de pere en fils depuis dix générations. La regle ne foull:re
d'exception que quand il s'agie de ces profeffions délicates, comme celle d'Apothicaire; &: qui p~r leur influence
fur la vie des hommes exigene une approbation parriculiere~
Il ell certain que le MaItre de Paris, c'eH-à-dÎre 15,
Maître d'unè Jurande de Paris, a le droie de travailler dans
tout le Royaume, d'après l'Edie de Henri III. confirmé par
une foule d'Arrêts qui forment I~ droit co.mmun même
ç1es Provinces oll l'Edie n'a p.as éeé enrégiaré. On ne peut
pas concefl:er avec plus de fondemene que par une fuite de
l'émanation du privilege des Maîrres, d.e Paris, les Maltres
dès villes de Parlement ne puilfent travailler dans tout le
relfore; c'ell ce qui fe trouve encore décidé p,ar le même
~Ai[ '\ par, les Arrêes. Cet Edit, en accordan.t le privilege aux Maltres de Paris ou des ,villes de Parlement, ne
le leur a accordé que parce qu'lIs. avpiene la préfomprion •
pe capacité réfuleante 'des précautioll~ requifes (lat la Jurande; voilà pourquoi l'on die que quiconque e(l: reconnU
capable de travailler à Paris, a la préfompiioCl; de capacité
néçelfaire 'po\lr· travailler dans ePllt le .Royalime; ita du
MaItre' rec;u d,\ns un corp.s de ville de Rarle.cnept pour [Out
le relfo[e; mais c'eft ce,qu'on ne peuç pas dire d'un attifan
•
�43.2.
Jou RNA L
qUI exerce une profeffion libre dans Paris ou dans unë ville
de Parlement; cet artifan n'a qu'à' dire, je veux exercer tel
métier, & il l'exerce, parce qu'il veut l'exercer. Or, ferait-il
jufl:e que parce que cet homme a voulu être Chapelier, fans
que les Chapeliers euifent pu l'empêcher, il eût le droit
d'aller dans une ville .du reifort -exercer [a profeffion, lors
même qu'elle efl: en Jurande? que deviendrait alors la Jurande
des v.illes du reifort? Ce ne [eroit plus qu'un titre inutile,
ou un frein pour ceux qui n'auraient pas l'erprit de venir
fe faÎre agréger à Aix où les Chapeliers ne pourraient pas
les. refu[ec, & de cette ma.CJiere la Jurande à Mar[eille ne
ferait plus un titre' prohibicif pour les Chapeliers de Marfeille.
.
L'Edit de Henri III. .ainli que l'ob[erve l'Annotateur dans
-le Code Henri, a 'pour objet" d'établir un ordre politique
" dans tous les arts, afin que la faculté de travailler [oit
" le but & la 1 récompenre du tr~vail; & li cet ordre
" n'étoit ob[ervé, ce [eroit jerter en confufion tous les arts,
" & faire ufurper .par les ignorans la qualité des Maîtres,
" contre la regle de toute dircipline. " Et delà la néce[..
fité de l'apprenti{fage , du compagnon age , & du chef-d'œuvre qui [Oot les préalables de la maîrrire & l'apanage des
Juràndes. Si ce n'eH: que de ces maîtri[es que l'Edit entend
parler, ce n'efl: donc que d'une maîtri(e jurée, & non d'un
art libre dont chacun peut [e mêler [ans apprentiffage, &
_ fait qu'il [oit en état de le pratiquer ou non. Cela efl fi
vrai, que tous les articles de cet Edit [ont relatifs aux Jurandes, comme l'obrerve Brillon, va. Communauté, pag. 2.30,
nO ~ 16. Le premier à l'apprentiifage; le [econd au chefd'œuvre; le tpoilieme à la réception; le quatrieme au droit
de réception, ce qui, comme l'on voit, ne [e réfere qu'aux
arts en Jurande.
. '
L'article 4 dé lignant les Maltres des arts dont il s'agit;
les appelle indifféremment Jurés ou Maîtres. Or, fi les
termes de Juré. ou Maître ront [ynollymes, on n'entend
donc par M~itre que le Maitre de Jurande, comme le terme
de
•
�DU
PALAIS 'DE
PROVENCI!.
_
'433
de 1uré l'indique naturellement. Cer Edit lne fe propofe
que l'établi1femenr des Jurandes; Farricle 7 exige que tous
Marchands, Artintns & gens de métier ré,digenr les Statuts
de leur Corps & les fa1fent imprimer, ~près qu'ils' auront'
été autorifès par nous, & fur ce obtenu nos lettres de permiJ/ion. Ce font préciCément ces ·lenres de permiffion qui
forment la Jurande. L'Edit n'entend donc parler que des
Corps en Jurande. L'article 13 qui fait le titre des Maîtres de Paris, déclare formellement n'attribuer ,le privi~
lege de Maître de Paris, qu'au MaÎtre juré, afin de régler,
y eil-il dit, le fait des Maîtrifes par toùt notre Royaume',
& o'b-vier aux différents qui pourroient y furvenir, tant elltre
les Corps des 'villes d'icelui, que des Maîa-es & Jurés derdits métiers; ordonnons que tous Arlifans qui auroi/t éte
reçus Maîtres en notre ville de Paris -, pourront exercer leur
métier dans tout le Royaume, en faifant feulement apparoir
de üur réception ,zola .Maîtrife. Il: faut -donc que le Maître
de Paris ait été re<;o à la Maîrrife de Paris, pour jouir du
privilege; comme Juré de Paris, il ell bien cenCé Juré dê
tout le Royaume; mais il répugne que celui qui n'ell pas
feulemènt Juré, pui1fe, par fon agrégation à une profeffion
libre à Paris, fe dire Juré de telle & telle ville du Royaume.
Avant d'être Juré de tel art ou de relie Ville "i~ faur corn,'
mencer d'êrre Jl)ré. L'Artifan qui n'efl pas feulemenr
membre d'une Jurande de Paris, n'ell pas Juré; &: s'il lJ'dl
pas .Iu'ré de Paris', il ne peur pas l'êrre de tour le Royaume.
L'article 14 qui do'nne le privilege .aux Maîtres de viIfe
de Parlement, fournit une nouvelle preuve de cerre vérité;
ceux, y'eil-il dit, qui ferOT/l inJlitub ej' villes de Pa"lem~lIt,
&c. Il faur donc commencer d'êrre inflitué dans les villes\
de Parlemenr, pour pouvoir aller" dans le re1fort; & ce
n'ell pas êrre inflirué que d'exercer une profeflion libn!,
par cela feul qu'on vem la pratiquer. Auffi le n!ême article
difpofant fur ceux qui font re<;us Maltres ès fauxboprgs, &;
qui, veulen'[ aller travailla d~ns les villes, 'dit qu'ils n~ ,
pourront aller travailler en icelles, ni exercer !~l1r mêti,er i
4nnées l782 & fuiv.
l\k k
/
7
�434
_
J,
1
0 U R-N A L
s'ils n'onç été Jurés efdits fa.uxbourgs. Il faut donc toujours
commencer 4'çtre J~ré ou Membre de la Jurande, pour
pouvo.i.r j9 uir du privi)ege des Maîtres jurés de Paris, ou
.ges villes de Parleme.nt. Ce n'eH pas pour ceul' qui travaillent ail)u d'une R-t<1.(e)Jio_n Hb,re que l'Edit de Henri nI.
ef!: fait; 01) pep~ voir à çe {ojet ce que dit Boniface,
liv. 4, ür. l,,!, èh, I.
Il eH donc certjlin que les Corps que nous çonnoilfons
·ep Jurande, font' ce.s - mçm.e.'i Corps qui ont le privilege de
ref!:reindre la. liberté publique, da.ns la profeffion defquels
pn ne pe_ut s'entreQlettre fans avoir été reçu Maître à la
.forme de droit; &. il eft tQut naturel. qü'il n'y a que le
Maîtr.e. juré, fujvane. l'Edit de Henri III., qui puilfe jouir.
du privilege & du bénéfice dù même Edit. Ôrnaud ne peut
donc être envifagé que comme un ·intrus, fans titre, fans
cap:tcitè, parce qu'il n'a pour lui qu'une agrégation aUlÇ
Chapeliers d'Aix; agrégation forcée que les Chapeliers d'Aix
ne pouvoient pas refuler., mais agrégation qui ne l'établit
pas Maître juré, & ne lui tranfporte pas par conféquent le
droit de s'établir dans les villes du re{fort où les Chapeliers
font en Jurande.
La délibération des Chapeliers ell: nulle, parce que n'étant
point etablis en Jurande, ils ne fonc pas Corps, ou s'ils
font Corps, ce n'eil qu'improprement .& relativement aux
charges qui leur font impofées, mais nulle.ment à l'effet de
r,elheindre la liberté pl-lblique: or, s'ils n'ont pM le privilege de reHreindre la liberté publique, ils. n'ont donc pas I~
<lroit de,[.1ire des MaÎtres ; leur profeffion fe trquva.nt par cela
même libre, s'ils s'arrogent le privilege de recev.oir: à. la.
Mûtrife, ils s'arrogent nécelfairemenr une faculté qu~ils.
n'one pas. La délibération ell: encore nulle, parce que~ les
Clllpeliers fe font eux-mêmes érigés e.1l véritable Corps;
parce qu'e.11e a été prife évidemment en fraude de la. Jurande des Chaoeliers de Marfeille.Le véritable 'drair des Chap.eliers d'Aix vjsr-à-v.i... de .qui.
'poque veue ,~~v(liller de le.ur métier, n'dl: pas de. le . re~
�DU
PALAIS
DB
PR~VllNCB.
..
43~
cevoir Maitre, car ne l'étant pas eux-mêmes, ils rie peuvent
pas conférer la Maîrrife'; tout leur droit conline à cônférer
une fimple agrégation dans leur Communauté, & à. la
conférer parce qu'elle ell: forcée, & qu'elle n'ell: fuborcionllée
ni à aucpne épreuve, ni à aucune forte de formalités., Mais
aurre chofe eA: l'agrégation, & autre chofe ell: la collation
âe la MaÎtrife : l'agrégation donne bién le 'droit d'e travailler à Aix, puifqu'on' contribue aux charges du Corps;
mais. elle ne donne pas le droit d'aller travailler dans ,une
Jurande du reffort. Ce privilege n'éll: que le privilegè des Jures;
& quiconque n'ea pas membre 'd'une Jurande, n'ell: pas
Juré.
On répondait po~r Arnàud, qué cehii qui a été jugé
capable d'exercer un art ou un métier, n.e doit pas êrre
fournis à donnér une feconde fois des preuves de fa capacité.
Si Arnaud a jllll:ifié de fan ap,prenriffage, de .fot) compagnonage; fi les deux MaÎtres jurés des Fabricants de cha. peaux d'Aix établispa~ l'Arrêt du Confeil du premier Avril
1'7 io lui ont donné un ".hef-d'œuvre à faire, préfems &
& requérants les Officiers de Police; s'il l'a exécuté; ft
ces Jurés l'ont examiné ;.s'ils l'ont trouvé parfait; li ces mêmes
'Jurés que le' Prince a établis pour juger de la capacité des
artifalls, ont aneHé aux Lieutenants - Généraux de Police
"l'ne l'afpirant ~toit capable, digne de la MaÎtrife; li ces M'aginrats municipaux l'ont admis; s'ils lu} ont fait prêter le
ferment requis par l'Edit de Henri III., peut~on trouver rien
de' plus, régulier & de plus folemnel ?
Le privilège des artifans reconnus capables dans les villes
de Pâr:e.nenr eH indivilible de l'authenticité de la capacit~.
Le défaut des .Letfres-parentes ne peut rien contr~ le motif
& Id é1ifpdfirion de l'Edit de Henri III. L'arr. t eH précis
pour les H:irmaljrés que l'afpitant ddlt faire: après les apprelltiffages fail~, dit c"et article: " fera donllé temps préfix pour
". {crvii- :Ies Maîrr'es du métier, avant que pouvoir parvenir
,j 11 la maîrrife, après Jefquels les Maîtres de{<:lirs mériers
u feront tenus receV'oir celui qui les en requerra incontinent
Kli:b..
�'1\-36
,
. Jou
RNA L
,
qu'il aura bien & due ment fait fon chef-d'œuvre, & qu'il
leur aura apparu qu'il eO: fuffifam. L'art. 13 ordonne que
toUS .Ies Artifans qui auront été reçus Maîtres en la ville
de Paris, pourront aller demeurer & exercer leurs métiers
en}oûtes les villes & fauxbourgs , bourgades & autres lieux
du .Royaume, (ans être pour ce renus faire nouveau ferment efdires villes & lieux J mais feulement faire apparoir
de leur aél:e de réceprion à ladite Maîcrife, & Elire enrégi!trer ledit .aél:e au Greffe de la Ju!tice ordinàire du
lieu où ils iront ,denîeurer, foit royal ou fubalre:rne. L.'fl rr ...
14 veyt que ceux qu.i feront in!titués ès, villes 0\1 font
les autres Parle mens , puilTent aller demeurer & exerce
leurs métiers dans toures 'les villes, bourg"s & endro"its
du relTort defdits Parle mens. " ,
•
.
1
En partant de ces points invariables, il s'en enfuit que
l'Artifan reconnu capable & admis à la Maîrrife ,dans une
ville de Parlement, 60: difpenfé d~ fàire un no~vt:.au'chef-·
d'œuvre; de prêter un._nàuveauJerm~l1~, &.qu'il !1'e(l: obligé
qu'à faire apparoir de fon aéte de réception à la Maîrrife;
& à le faire enrégifl:rer au Greffe de la Jurifdiél:ion ordi·llaire du lieu où il veut s'établir. Ces articles 1, 13 .lx 14
qui fixent la qualité requife pnur jouir ,du priyilege, 'lle~
parlent que de ces Maître~ déclarés t~.ls ep exé.cutio~. dé IÇ~'
premier article; ils, ne dife:nt pa~ un feyl tll0:C des LeJrrespatentes & de ces Corps fondés ou aut,orifés pat icelles.
Cet 'Edit ne parle d'es Lerrres,patentes qu'à l'art. 7; il n'y.
a aucune clauCe rétroaél:ive pour la validité ou invalidité' des
:micles précédents. Permettons, dit cet article,' à JOus
Marchands, Artifans &; gens de méfier d~ faire voir & ae)
rêrer en langage intelligible leurs Statuts" & de .les faire,
imprimer après avoir obtenu fur ce Lettres de permiffi.on.
Le mot permettons n'el! pas impératif; il n'exige pas; il ell:
feulement facultatif d'avoir. ou de ne pas avoir de$:,Statuts.
Si les Arrifans veulent fixer ~ntr'eux une ce'rtaine,pift-ipl"ine
& établir des Loix gé,nérales, iL lelJt faut des St<!tuts;; il,
faut des Lettres-patent~s qui les autorifent; s'ils,font, dé~.
"
"
"
"
"
"
"
"
"
"
"
"
"
"
�DU
PALAIS
DE
PROVI!NCI!.
431,
nués de ce titre corroboratif & coaaif, leurs Statuts ne
peuvent avoir exécution forcée contre le tiers; mais l'on
ne peut pas induire du défaut des Statuts aurorifés par Le[[res~
patentes, que les Maîtres fdbricans de chapeaux qui exifloient
11 l'époque de.J'Edit de H,enri III., n'aient pu fucceffivement
, concourir à de nouvelles Maltrifes dans une ville de Jurande
auffi ancienne que celle d'Aix, en fe conformant à l'arr. 1
de l'Edit de Henri III: qui eH la feule Loi établie fur cet
objet. Que peut donc opérer le prér-endu Arrêt du Confeil
de 1735 qui ca{fa les nouveaux Statuts de 1732.? L'établifCement des Chapeliers à Aix el! des plus ?nciens; l'Edit
. de Henri III. n'y: a pas dérogé; ils Ont continué jufqu'à
aujourd'hui ,d'approuver la capacité des nouveaux afpirans &
de concourir à la Maîtrife.
L'alternative de Maître ou de Juré établie dans les arricles de l'Edit fullit pour perfuader que le Maître ou le
'lufé eH capable de concourir à ia Maîcrife, & qu'il n'el!
pa~ ,befoin que l'Artifan fait Maître & Juré tout enfemble,
po~r coopérer à la vérification de la capacité de l'Afpirant. Mais fi les Fabricans de chapeaux de la ville d'Aix
font c\irigés par _ d<;ux Maît,res jurés, fuivant l'Arrêt du,
Çqgfei,l de 1710 , ,s'ils. 9nÇ payé la finance de ces d,eux
OfE:ces, il s'epfuit, que l~s C(lapeliers d.e Marfeille ont
inutilement établi q/Je les Arrifans n'ayant poirt ,de Maître
juré " & n'étaur point par co.nféquent conl!itués .en Iurande,
ne peuvent PilS concourir, à la Maîtrife. Pour la définition
Q~s Jurés &. de,s villes jurées, on. peut voit le D~él:ionllair~l
q~S Arts & Métiers, va. .Juré, & Sayary dans.fon Diaion.Q~jre .du, commerce•.' .
. La demande en ca{fation de la délibération qui déclare
la capacité d'Arnaud eH irréguliere; cette délibération el!
appuyée de l'a{fertion des Lieute,nans-Généraux de Police.
Npl préjudice pour les Chapeliers de Marfeille, puifqu' ~r
nalJd. el! recru comme Maître à Aix; & la délibérq[ion ne.
dit pas qu'il pourra aller travailler. à Marfeille. Ce monum~?t de la caplicité de cet Afpirant leur eft étranger;. il
,
•
)
�'43 8
Jou RNA L
'aucun vice, & en eût-il quelqu'un, les Fabticans de
clla'peaux de Marfeille n'ont aucune infpeél:ion fur ceux de
la ville d'Aix.
Le fyllême aél:uel- du Gouvernement ell de ne pas gêner'
les ans & métiers, de les' encourager, bien loin de les
arrêter & de mettte le moindre obllacle aux talens des
Areilles ou des Anifans, de les difpenfer de tout ce qui
ne concourt pas â la petfeé1:ion des arts & métiers. Le
défaut de Lettres - patentes ne doit pas interdire les lI,rts
& métiers; il ne doit pas les empêcher de fe dillinguer.
On a laiffé les Communautés des Anifans 110n légitimées
par le Prince fous la difpofition de l'arr. 1 de l'Edit de
Henri III. & fous la difcipline des Lieutenans-Généraux de
Police. Ces Communautés payent toutes les taxes que le
Souverain impofe comme les autres Corps légitimés.; ce
n'eH que dans le cas de néceffité qu'on accorde ces Lettres-patemes. On laiffe ces areifans fous une' exiHence
précaire'; chaque art & chaque métier eH fous l'autor!té univeffel~e d~ Souverain; Jchaque art & cha.que méfIer a des 100x qÙl ne font propres qu'à ,ceux qUI fe foot
oliIigés de' les ob'ferver; lé Commu~autés non légitimée~
fe confohlient' 11 l'Edit de Henri III.': voilà iout ce qu'il
fauç pour for'mer des ouvriers capables & des' Maîtres. )
Quels feroiedt donc. les droits & les_privileges des ou-.
vtiers des villes capitales travaillàris fOlls la proteél:ion. des
Parlemens , fi leurs arrellations de capacité d'uri afpi~ant 1
faires en exécûtioll' & en cicihformité de l'Edit de Henri III
ne pouvo'iént tien; fi ces ouvr'iers voulant: alIer .rravailler
dans les aurres villes du reffort, les Arrifans du ëhêmë mériêtl·
de ces liéux,. établis en'Letrres"-p'atenres, p'ouvoient méconnoître lit capacité des ouvriers des vllles Capitales q:ui vrll!
procédé aux opéra rions prefcrites par l'Edit'l & exiger dé
ëelui qui a été reconnu caF>~ble de cètte fac;on '1 u~ nouvet
examen, un chef. d'œuvre , & le paiemenf des droits fixés'
pour chaque réception qu'il a déja payés.
Arrê'f du 30 Mai· 1783, au rapport de Mr. le C()nfeille~'
~
~
�DU
•
PALAIS
D&
PROVBNC~
439
'de Mons, qui confirme la Sentence, avec dépens. Ecrivant
Mes. Artaud & Pafcalis•
ARR Ê T
XLV.
Après avoir ordonné que le procès fera pourjùivi au petie criminel, le Juge peut civilijèr la matiere, & recevoir les parties
elz procès ordinaire.
AR aél:e du 4 Oél:obre 1779, lean-Baptifie Trotobas,'
Travailleur du Luc, fit une donation de deux immeubles
à Laurens Digne aufIi Travailleur du même lieu. Ce bienfait
fut bientôt oublié; le donateur fut outragé; injures, propo's offenfans, févices, menaces, tous cès mo}'ens odieux
fl!rent .employés par l'ingratitude de Digne, de fon époufe
lie de fa fille. Trotobas. préfenta .Ie 22 Août 1780 une' requête en information au Bailli du Luc, dans laquel\e il fe plaignit d'avoir reCiu des foutRets, d'enlévement d'effets,
denrées & papiers; il intervint des décres d'ajournement' &
d'affigné; les délits pouvoient èonduire 11 des réparations
& 11 des amendes; en c;onféqüence le Bailli ordonna., par
Sentence du 13 Oél:obre· 1780., " qu'avant dire droier 11 la
.. p.lainte de 'Erotobas; & [ans préjudi!=e des faits juflifi.. catifs propofés pa.r Digne, Trotobas prendroit extrait
... dans; la huitaine de fa requête· de plainte, enfemble du
fi. nom, furnom , ,âge·, qualité & 'de.m.eure .des témoins ,. pOUe"
...commu.niquer le tout aux que.rel\és, 11 l'effet par iceux
.. d'obje6l:er les .témoins, fi bon leur [emblojt, & que les
.. parties produiroient .dans la qU.inzaine leurs requêtes À..
,~, fitis civiles, p,our y avoir, en j\lgeanc, tel égarçl que. de
'" ra.i(oo. "
Le plaignant & les, aCCl,lfés do.nnerent leurs..requêtesremonLlratives; l'rotobas demandait u.ne réparaiion, une,
am.end.e' d,e S00 li.,.., la re1l:icutioJl. des.. mepbles, la can-
P
•
"
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.'
'JouRNAL
ccaince par' corps, la révocacion & l'annullacion de la' doDarien du 4- Oaobre 1779, avec dépens.
Laurens Digne concluoir à la calfacion de la procédure•
. Le procès in!l:ruir, le Bailli rendir une Sencence le ).
Mars 178 c , par laquelle il reçur les parries en procès or-,
dinaire, convenir en enquêce l'informacion prife à la requére de Trocobas, & permir aux accufés d'enquêcer 'pardevanr lui dans le délai de l'Ordonnance fur les faics contenus en la plaince & en l'informacion de Trocobas, dépen~ réfervés.
Trocobas mourur après avoir iollicué pour hériciere la
DUe. Elifabeth Caron, époufe du lieur Henri Florens. Cerce
hériciere appella de la Sentence du ) Mars 1781; elle renferma fa défenfe fur ces deux moyens: injuHice & irrégularicé de la Sentence.'
On difoir 'pour la Dlle. Caron, 18. que l'inju!l:ice écoir
évidente, parce que Trocobas ayanc écé olfenfé, menacé,
frappé, dépouillé de fes meubles, de fes ,denrées & de fes
papiers, le Bailli n'avoic pas pu civilifer une maciere qui
écoir fufceprible de répararions & d'amende.
,
On examinoir là narure & Id gravicé des injures dont
s'écoir plaint Trocoba" la qualicé de la ilerfonne olfenfée
qui écoit ici un donateur gratuic, & celle des pedonnes qui
avoienr olfenfé qui éroient des donacaires. On difoic fur
l'injure du foumer, que les François li jaloux de la délicacelfe
des fencimens & des principes de l'honneur, ont toujours
r,egardé un fouftlec'comme l'oucrage le plus fenlible ; ils en
eurenr cerce idée dans les premiers temps de la monarchie,
dans l'origine du point d'honneur, dans l'érablilfemenc de
ces préjugés heureux qui ont peur-êcre contribué à conferver
~ la N acion cette noblelfe de fentimen, & cecre grandeur
de courage qui la dill:inguerent parmi les peuples policés.
Un fouf1l~t d!vint un~ injure qui devait être lavée par le fang,
parce qu'un homme 'lui l'avait reçu, avait été traité comme un
vilain. ( Efprit des Loix, liv. 28, ch. 20.)
On prouvait que la reltirution des meubles & papiers étoit
due,
�,
D U
PAL AIS
D E
PRO VEN C E.
44 r
due, & on établiffoit d'après la Loi ult. cod. de revocand.
danat., & d'après d'Olive, liv. 4, chap. )' Ricard, tom. r,
parr. 3, chap. 6, & Catelan , liv. ) , chap. S4, que 'la donatjon pouvoit être révoquée par l'iogratitude du dooataire.
Ces demandes & ces faits graves traités au petit cri mine!
devoient être jugés fans aucun retard. L'Ordonnance exige'
que les procès inGruits, il foit procédé tout de fuite au
jugement. Le Bailli s'eG écarré doublement de l'objet de
l'Ordoooance, 1°. en ne pas -[latuaot tout de f"ite fur un
procès iollrui., & c'ell une injul1ice qui doit faire réformer
fa. Sentence; 2°. en. civilifant la matiere faos coofulter fa
premiere Seoteoce du 13 Oélobre 1780, ce qui eU une
iHégularité inexcu(able.
2.°. On difoit eocore que ce jugement irrégulîer bleff9it les
principes de l'inlhuélion criminelle, cootrarioit l'ordre de
la procédur,e adopté· par le Bail1j, &- érait incompatible
avec la qualité de la mariere & l'efpece des preuves.
Au grand criminel fom toures' les accufations de çrimes
qui peuvent mériter des peines affiiélives ou infamantes.
au petit criminel font tous les délits dont la fin de l'aau.
fpelon ne peut aller qu'à des cond,amnations & des répara.,
tians civiles ou pécuniaires.
Le petit criminel Ce rapproche du grand, en ce que le
·décret de foit informé, l'information, les Mcrets & les in.
terrog;Hoires fublille.nr. L'information demeure .piece fecrete,
& 1'00 ne procede pas à la çonfr'ontation,
LorCqu'uoe 'informario.n p été décrétée, que l'a,ccufé a
pris droit par les charges, ou la parrie civile par les ,con.
feJIions de l'aeçuCé; li le crime n'dl: pas d'une nature â.
mériter peioe affiiélive, alors on ne civilj(e même pas la
maIiere; on jllge dé6nitivernem (ur le réçit des ioformations~'
{J.Iivaor l'Ordonnan.ce de 1670, tit, 14, art, 20., .& Jouffe
fur' Je tit. 20, art. 2.
L'aven de l'accuré dl: une 'premiere voie 11 la cîvilifation.,
Cette tl13Xime ,eG retracée .dans 1e pro.cès-verba1 .des Or.
40noances fous le même t-Ître' 'Unt: .oBjaT/. t,:rjm.ildlt: efl ch';..
.AJlaies J.7fh (;. Jùiv.
L Jl
�,
~t
•
JOURNAL
lifée, lorfque c~lui qu'on acCtlfe ne défavoue pas l'ac7io,n ql/'M
lui impute, mais prétend être en droit de la faire, en dihlnt,
feci, fed jure feci; maïs fi le délit efi grave, cette confeffion
ne fuffit poine pour faire ceifer la forme criminelle & opérer
la civilifation. Dans ce' cas Trotobas s'eH: plaint de crois
délits: 'd'injures atroces, d'ufl complot de famille ,"à la fuite
duquel il redut deux foiJffiets, \i'enl~vem'ent de meubles &:
papiers; le~ àccufés "ont nié les uns' & pallie les autres.
Par leur -nature, leur qualité & leur dépe[Jdance, chacun
des trois fait~ de plainte _requéroit d'être inHruit & jugé
dans la forme ~du'petit criminel. Si un feul des délitS avait
exigé cette efpece d'inHruél:ion, il ~e- falloit pas moin-s laiifer
les autres au petit criminel, parce qu'il n'eH ni poffible ni
régulier de civilifer en partie un procès, & de l'in{hoire
criminellement dans un autre cheL
.
La Sen-rence du 5 Mars eft véritablement infeétée d'un tas
d'ir régula ri tés. ,
,
"1°. Lès délits expofés dans la plainte excluaient la civilitarion; l'inftruétion au petit criminel étoit li feule voie convenabl~ & réguliere.
"
2°. Cette Sentence eil dia~éfralement oppofée à celie
du 13 Oétobre 1780.
3°. Ce n'~roit point le cas de rendre un j6gement de
civilifation; il falloit exécuter ta Sentence de procès au petit
criminel, & juger définitivement fur l'état des procédures &
. demandes formées en exécution de cette Sentence, juger
définitivement le I?rocès infiru'Ît, fans engager les parties
dans de nouvelles conteHations.
" '
4°. ' Il n'y avoit pas 'lieU ?e roecevoir les parties en procès
éivil & ordieaire. __
l ' ...
'
5°. En recevant lés parties 'en procès ordinaire, & en adoletrant Digne à uné ebquêrê 'conrràire, il Y avait une forte
de néceffiré d~articuler les faits fur lefquels cette preuve contraire devoit' être appuyé~. C'ea ie V'œu de l'Ordonnance de
1670, tit. ,20, art. 3, & le fentiment des Commentateurs.
6°. Le Bailli a-t-il' voulu fournir aux parties. le moyen de
;
•
�DU
PALAIS
DE
PROVBNCE.
443
produire de nouvelles preuves? S'il n'a pas eu cet ohjet,
il a civilifé fans motif & fans caufe ; fi relie a été fan intention ;il a civiliré fans intérêt & fans réflexion, puirque fJ,ns
changer l'état & la forme du procès, il lui étoit loi Cible par
avant dir,e droit d'ordÇlnner les interlocutions qui lui paroir.
[oient convenables.
civilifation n'ef!:
Sous tous les rapports, l'Ordonnance
appuyée fur .aucune hafe folide; elle ell: inconcili"ble a\'eC
les principes de l'inlhuaion criminelle & le plan de la
procédur~ qui avoir été ordonnée & exécutée.
On répondait pour Laurens Digne, fan époure & fol fille,
que la Sentence du ~ Mars 178 l étoit juUe & réguliere.
1°. Elle était julle, parce que touS les délits qu'on .lui
imputoit ét.oient faux & prouvés tds par la procédure, &
le prétendu vol un aae légitime & de- néc,effité, puifque
les denrées prires dans la mai fan de Tr.otobas lellr appartenaient.
On examinoit la nature des injures en général, celles qui
prennent -leur fource' dans la malice & dans la volonté de
ceux qui les fairoient, & dans l'inten-tion d'injurier; celles
qui n'avaient pour but que la remontrance & la correaion, &
qui dans ce cas ne pouvoie.nr être appellées injures; on diHinguoit les in jutes entre les gens du peuple, & les gens d'ù~:
état fupérieur que l'éducation & l'urage du monde tendaient
nàturellement plus fenfibles, & l'on concluait que la pro_
cédure ne renfermait que des remontra n,es & des propos.
ufités parmi les gens du peuple, mais toujours faits faos
intention d'injurier.
En -convenant qu'un fcumet était ulle injure réelle fj, can~
jidérable, on niait que Trotohas en eût reçu, que deux témoins fellLeme-or de la procédnte en parloient pOLIT ,l'avoil;'
entendu dire à Trotobas; mais que ces deux témoins ne·
pouvaient être crus,. parce que, tilivaot tous les Doaeurs.
& les Praticiens, &. fu.-tout Meooch de arbitr. judo liv. ~,
cent. )' cauf. 47), les témoins dit audiw oe( font p~s foi;,
qu'un feul dépofoit fur ce fJit d'une maniere poGrive_ &:
de
..
LIb
.'
�'444
Jou
1t NA' L
pour avoir vu, mais qu'un' témoin feul ne pouvait étre cru;
On difoit encore qu'il étoiê vifible que la Dlle. Caron
Florens avait porté Trotobas à préfenrer fa requête de plainte,
dans l'obie't de priver Laurens Digne de la donation qu'il
avait méritée par fes fèrvices auprès cie Trorobas, & done il
ne devoie jouir q,u'après la mort de celui-ci.
Pour cela, il falloit le repréfenter comme un donataire
indigne; c'étoie le feul moyen d'annuller les donations; mais
le Bailli convaincu de ces vérités avoit d'abord décidé que ~
la matiere ne comportoie pas l'Jaion criminelle. A\'ant
de prendre une détermination à cet égard, il avoie voulu
être mieux inChuir. Dans cee obiee jl avoie rendu l'Ordon-.
nance du 13 Oaobre 1780, qui. n'étaie point une Ordonnance de petie criminel, mais de pure infiruaion. Par cette
Ordonnance il avoie biffé rout en l'état, fans rien décider,
fans rien préjuger fur la nature de l'aaion; enfin -ce Bailli
pleinemene convaincu par les infiruaions & défènfes .des_
parties, que l'accufation portée contre Trotooas éroit calomnieufe & frauduleufe, avoit voulu fournir aux accufés le
moyen de fe jufiifier enriérement, en rendant la Sentence
de civilifation du ) ·Mars 178.1.
'J.o. Une Sentence efi réguliere, quand elle ne renferme
àucun vice de forme, ni aucune contravention aux reg.les
établies pour l'ordre de la procédure & pour l'inllruéHon
des procès.
Chacun fait qu'un procès commencé au criminel peut être
civilifé & converti en procès civil \ roue comme un procès
civil peut être converti en procès criminel.
.
_ Un procès peue. être civilife toutes les fois qu'il confie
que le fait ou l'injure p'réfentés comme des délits graves,
ceffene d'en avoir le caraaere par l'information, l'infrruaion
ou les circonHances. C'efi le vœu de l'Ordonnance de 1539,
art. ) 0; c'eft l'avis de Bornier fur l'art. 3 du tit. 20 de
l'Ordonnance de 1670; de Lacombe, mat. criminelles, parr.
3, chap. 19, pag. 400.
Ces principes s'appliquent parfaitement à la caufe. On a
�DU
PALAIS
DI!
PROVBNCll;
44~'
imputé des faits graves à Laurens Digne & à fa famille;
mais 1?information ne. prouve pas les fouillets d ont on fe
plaint; @l1e ne prouve pas les injures, mais feulement des
avis & des correélions groffieres, fi l'on veut, mais ufitées
parmi les gens du peuple; elle prouve l'enlévemenc des effets
& denrées; mais Laurens Digne ,.en avouant cet enlévement,
a prouvé qu'il l'avoit fait en plein jour a.u vu & fu de Trotobas ,. parce que les effets & denrées lui appartenoient; il
a dit ,Jeci ,fedjurefeci; ces faits par leur nature ,leur qualité
ne pouvoient comporter 1'aélion criminelle.
C'efl: une- erreur de prétendre que le Juge ayant permis
l'information, laxé des décrets, pris les réponfes des accufés,
il n'y avoit plus lieu à la converuon. L'art. 3 de l'Ordonnance, en difant " que s'il paroÎt avant la confrontation que
" l'affaire ne doit pas être pourfûivie criminellement, les
" Juges recevront les parties en procès ordinaires,,, fuppofe nécetrairement qlie la converGon peut être ordonnée
après les décrets & les réponfes des accufés. Lacombe obferve même que celui dont le procès a été civilifé, doit être
élargi des prifons, ce qui filppofe qu'un procès criminel peut
être converti en civil, lors. même qu'il efl: intetvenu un
décret de prife de corps. Ainli les décrets & les réponfes,
bien-loin d'être un obHacle, font au contraire un préalable
oécetraire à la civilifation.
• •
C'e!t une erreur de dire que l'Ordonnance du 13 Délabre
avait décidé que l'affaire devait refl:er au petit criminel, &
que la Sentence du ., Mars eH contraire & oppolee à
celle-là.
L'Ordonnance du 1-3 Délabre n'étoit qu'un aéle préparatoire, un avant dire droit qui n'avait pas fixé le fort de
la ·caufe.
.
C'eH en vain que la Dlle. Caron dit qu'après l'Ordonnance du 13 Délabre, le Juge n'avait plus qu'à juger le
procès au fonds. C'eH précifémenc lorfqu'un Juge procede
au jugement, qu'il peut convertir un procès civil en criminel,
ou un procès criminel en ci~il, comme nous l'apprend La-
�•
44 6
Jou R )1 A L
combe, & comme il ef!: décidé par tous les Auteurs.
Une autre irrégularité qu'on impme à la Seorence du 5
Mars, c'ef!: qu'en civilifant la matiere & en admettant Digne
à une enquête coorraire, on n'a pas articulé les faits fur
lefquels cette preuve coorraire devoit être appuyée.
Les nullités I)e foor pas arbitraires; elles n'oor lieu qu'autani qu'elles ont été expreffémene prononcées par quelque
Loi; & fi ~erpillon a die que le jugement de, civilifation
doie contenir les faits coorraires door l'accufé entend faire
la preuve, ce n'ef!: qu'une opinion ifolée, combattue par
l'opinion gén~rale, par l'ufage & par' l'Ordonnance de 1670,
,tit. 20, art. 3, qui ne dit àutre chqJe, finon " que les Juges
" ordonneront que les informations feront converties en
" enquêtes ,- &' permis à l'accufé d'en faire de fa part dans
" .les fo'rmes prefcrites pour .les enquêtès. "
II. ne fut donc jamais de jugement plus fage, plus régulier & plus éonfOll11e à la rigueur du droie que celui-ci.
Arrêe du ,18 Juin 1183, au rapport de Mr. le Confeiller
de Fonfcolombe" qui confirme la Seorence, avec dépens.
.
Ecivant Mes. Bremond, Barlet& Pafcalis.
ARRÊT
XLVI.
Un Prêtre régulier peut-il être recu dans la Congrégation des
Pl-êtres du St.. Sacrement?
•
N l'année 177 8 , MTe. Bertrand, ci-devant Capuci·n;
enfuiee Bénédiél:in pat .bénévole, forma le deffein d'entrer dans la Congrégation du' St. Sacrement à Marfeille. Mre.
Jacques Bonhomme, Prêtre, furpris de ce qu'un régulier
vouloie eorrer dans une Congrégation féculiere, s'y oppofa,
en foutenant que c'étoie-là une rnfraél:ion évidente du Statut
& du droit commun; il fie d'autres repréfentations auxquelles
on n'eut pornt d'égard, ce qui l'obligea à faire fignifier un
E
•
�•
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Jou R )1 A L
combe, & comme il ef!: décidé par tous les Auteurs.
Une autre irrégularité qu'on impme à la Seorence du 5
Mars, c'ef!: qu'en civilifant la matiere & en admettant Digne
à une enquête coorraire, on n'a pas articulé les faits fur
lefquels cette preuve coorraire devoit être appuyée.
Les nullités I)e foor pas arbitraires; elles n'oor lieu qu'autani qu'elles ont été expreffémene prononcées par quelque
Loi; & fi ~erpillon a die que le jugement de, civilifation
doie contenir les faits coorraires door l'accufé entend faire
la preuve, ce n'ef!: qu'une opinion ifolée, combattue par
l'opinion gén~rale, par l'ufage & par' l'Ordonnance de 1670,
,tit. 20, art. 3, qui ne dit àutre chqJe, finon " que les Juges
" ordonneront que les informations feront converties en
" enquêtes ,- &' permis à l'accufé d'en faire de fa part dans
" .les fo'rmes prefcrites pour .les enquêtès. "
II. ne fut donc jamais de jugement plus fage, plus régulier & plus éonfOll11e à la rigueur du droie que celui-ci.
Arrêe du ,18 Juin 1183, au rapport de Mr. le Confeiller
de Fonfcolombe" qui confirme la Seorence, avec dépens.
.
Ecivant Mes. Bremond, Barlet& Pafcalis.
ARRÊT
XLVI.
Un Prêtre régulier peut-il être recu dans la Congrégation des
Pl-êtres du St.. Sacrement?
•
N l'année 177 8 , MTe. Bertrand, ci-devant Capuci·n;
enfuiee Bénédiél:in pat .bénévole, forma le deffein d'entrer dans la Congrégation du' St. Sacrement à Marfeille. Mre.
Jacques Bonhomme, Prêtre, furpris de ce qu'un régulier
vouloie eorrer dans une Congrégation féculiere, s'y oppofa,
en foutenant que c'étoie-là une rnfraél:ion évidente du Statut
& du droit commun; il fie d'autres repréfentations auxquelles
on n'eut pornt d'égard, ce qui l'obligea à faire fignifier un
E
•
�·
DU
PAL AIS
DB
PRO V B N C B.
447
atte proteHatif. La Maifon fut alfemblée le I I Février de
la même année; on propofa.de recevoir Mre. Bertrand, qui
avoit obtenu du Pape un Bref d'agrégation; & quoique Mre.
Bonhomme repréfentât que la regle réCiUoit à cette réception, on recut Mre. Bertrand à la pluralité des voix.•Mre.
Bonhomme ;oyanr qué tout efpoir de ramener h regle étoit
perdu, prit des lenres d'.ilppel comme d'abus envers la
réception de Mre. Bertrand, & appella incidemment, en tant
que de befoin, comme d'abus du Bref du Pape qui préparoit
les voies à cene agrégation, & des aél:es exécutifs; il intima
fur ces appels Mre. Bertrand & le Supérieur de la Maifon.
On difoit pour Mre. Bonhomme, qu'avant de développer
fes moyens d'abus, il devoit établir qu'il étoit recevable;
il l'éroir, par<e que la Maifon de Marfeille exi!1:e; elle a un
régime fervant rout au moins de louable courume; lorfqu'il
y a infraél:ion notable à ce régime, la voie de l'appel comn,e
d'abus dl' ouverte; & quoique leurs maifons [oient féparées & indépendantes, elles [ont cependant réunies par la
loi de l'in!1:ieur, comme les anciens Moines de Sr. Ba!ile ,
comme les Religieufes; elle dl: érablie légalement, elle a
doubles Lenres- patentes, les premieres enrégi!l:rées aux
Compres, & les fecondes au Parlement. L'appel comme
d'abus n'e!1:" pas [ans exemple; les Arrêrs qui ont prononcé
.là-delfus l'ont J"egardée exiltanre, à l'effet de pouvoir "ad:
mettre les appels de cette efpece; il e!l: encore recevable,
parce qu'on ne procede pas chez eux par agrégation; leurs
Maifons fe communiquent leurs fujets. Cet ufage e!l: connu
par la Cour, elle l'a même approuvé. Delà qu'importe l'agré~
gation? D'ailleurs elle n'e!l: pas connue à Marfeille ; elle fe fait
par les faits. Lorfqu'il manque un fujet, on le demande à
une Maifon de l'Ordre; elle l'envoi(, il e!l: reçu, il Y vit,
il e!l: de tous les' Chapitres, il e!l: membre de la Maifon.
Tel efl: [on état depuis vingt-deux ans & demi; il jou~t
des droirs des vocaux; il remplit les charges & fes obligaiions ; il e!l: membre de l'inUieut, membre du College légitime, & voué à cet inUirut. Ainu Mre. Bonhomme e!l:
1
�.'448
Jou
R N A-L
re~evable;
il a été jugé tel par l'Arrét qui ordonne l'exhibition des titres qu'il demandoit.
Paffant à la difcuffion du fonds, il difoit que la réception
de Mre. Benrand était abufive fous trois points de vue;
le pr~mier, parce qu'elle' n'avoit pas été précédée d'un .aél:e
de probation; le fecond, parce qu'on avait çontrevenu au
Statut qui exige une année de probation, & ici on ne trouve'
pas ce temps. L'on pourrait objeél:er' que ce temps peut être
abrégé par le College ou la Communauté j mais pour cela
il faudrait un titre de difpenfe & de dérogation; ici on
n'en a point, & fi l'on ouvroit les Archives, on y verroit
qu'il ne peut point y en avoir. Le troifieme, parce que fa
qua.1ité de régulier l'empêchoit de devenir féculier 1 & con. trarioit l'inHitllt. Q~ojque le Pape ait, permis à Mre. Bertrand
de pa1Ter de l'Ordre de St. Benoit dans la Congrégation du
St. Sacrement, & d'y faire fa profeffion après fan année
de Noviciat, cela ne fait pas que fa profeffion ne fait abu-.
llve. En elfet, l'abus eft évident; Mre. Bertrand ell régulier;
le Bref qu'il a obtenu ne fécularife pas fa' perfonne 1 & ne
caffe pas fes vœux; les fécularifations arbitraires ne font
point re~ues en France, ni les -fécuI3rifations gratieufes; fi
cela était, le Pape pourra it .contrevenir aux infliruts des
Congrégations fran~oifes, jener des régulie.rs dans des Congrégations Iéclllieres par inflitut ; mais il a cru que les membres .de la Congrégation étaient réguliers, parce qu'il
parle de profefIion & de Noviciat; ainG vice mal couvert;
mais de plus abus de ce titre. Il eH clair- que, Mre. Bertrand
a fait entendre au Pontife qu'il ~,J[roit dans une regle nouvelle; fans .cela jamais ce Bref n'auroit paffé à la Chancellerie Romaine ; dans ce tens il y a obreption, & le Pape
a été trompé; obreptioo .encore plus évidente, en c.e que
Mre.• Bertrand n'a expofé .aucun motif légar pour fonir de
l'Ordre de St. Benoit, dans lequel il éraie entré en fortant
des Capucins; ainG Mre. Bertrand 'eH & a IOujours .été dans
lUl ·éu·t .de régularité. Tout ce que 1'00 -aurait pu faire pour
lu:i t
•
,
•
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PAL AIS
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PRO VEN C E.
449
lui, <;'~uroit été de le garder dans la Maifon comme auxiliaire,
& il ne fallait -ni Bref ni difpenfe pour cela.
La Congrégation des Prêtres du St. Sacrement efl: établie
à Marfeille comme toutes les mai fans d'Ordre & d'Infl:itut;
elle a & ne -peut avoir qu'un infl:itut; les Lettres-patemes
de 1677 les autorifent à exiller comme Collégialité. & l~s
appelle 'Maifon d'inHitut. Il n'eH pas befoin que les inftituts foient au tarifés pac Lettres-patentes ,. & homolog~és
par les Cours. On voit nomhre de MonaHeres & d'Ordres
Religieux qui font autarifés feulement par le St.' Siege, &
non par Lettres-patentes; s'il en était autrement, ce ferait
tout renverfer; il ne dépend pas des Evêques d'anéantir
ces inllituts; jamais ils ne leur ont donné des fupérieurs;
jamais ils n'ont touché à ce qu'ils prefcrivent. Depuis l'Arrê'c
de 1693 les Maifons particulieres ont éxillé comme Congrégations-, & les membres ont été obligés de vivre fous
le régime; c'efl: ce régime' (ous lequel Mre. Bonhomme a
juré de vivre, & fou~ lequel il veut vivre.
. On répandait pour le Supérieur dIe la Communauté &
. Mre. Bertrand, que ce dernier autorifé à vivre féculiérement
dans le Diocefe de Marfeille, cherche un afyle dans la maifan des Prêtres, fe difant de la Congrégation du Sr. Sacreme!lt; Mre. Bonhomme trou'>!e mauvais qu'on l'y re<;oive;
il ,appelle comme d'abus de fa réception, incidemment dll
Bref de fécularifation & de .l'Ordonnanèe rendue par l'Evêque
de Marfeille, & Mre.. Bertrand demande la révocation d~
IiI c~mmunication demandée des titres, de la part de Mre.·
Bonhohlme; telles font ,les qualités de la caufe. '.
Mre. Bonhomme n'ell ni fondé ni. recevable; il n'ell pas
recevable, -parce que la Congrégation n'exilte point en
corps', parce qu'il n'ell .p~s mêm'e membre de la Mai(on;
il n"ea pas fondé, parce que h Congrégation n'exiHe poine
dans l'état; ce n'eH: qu'une Eglife de fecours &. d'hofpice';
il n'y a ni inftitut. ni régim,e, ni Congrégation quelconque:
Mre. Bertrand a donc pu être appellé par l'Evêque de Marfeille. Le Pa~lemenr..de Paris l'a décidé de même en t67c)'
Aml4!s 1782. & fuiv. .
NI. m m
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Jou Il. N A r:
par l'Arrét qu'il rendit fur le 'requifiroiré du Proc\lreur-Général du Roi. Dans la fuite quelques Eccléfiafliques voulant
pourfuivre leur union, il fut déterminé qu'on n'en voulo)t
point, & aél:uellement ils ne vivent fous aucune regle qui
foit aurorifée & par .l'Eglire, &. par l'Etat; leurs' prétendus
Statuts n'ont aucune exifience légale. Les Lettres-patentes
• dont Mre. Bonhomme excipe, ne portent rien fur le Statut;
elles ne peuvent faire Loi, attendu que ces Statuts n'oot
jamais été préfentés au Souverain ni à la Cour., Les Lettrespatentes qui aurorifent l'établifI:ement, fom différences de
celles qui autorifênt 'le régime; quand le régime efi autorifé,
il faut que l'établilfément local le fait également. La Congrégation dont il s'agit n'a point d'ifJfiitut aurorifé ni admis,
pas même de polfeffion; leur établilfemenr à Marfeille n'ef!:
qu'un établilfément particulier. Les Lettres - patentes dOllt
on excipe, autorifent la Maifon comme gens de main-morte,
& les énonciations y contenues ne peuvent être regardées
comme des approbations d'une regle, d'qn régime; ces
Lenres-parentes ne font accordées que pour venir au fecours
de l'Evêque de Marfeille. En 1693 la Cour a reconnu que
leur Maifonn'écoiC' pas .congrégation; elle leur dit de fOl
conformer à l'Arrêt de 1679; à cerre époque un VicaireGénéral de l'Evêque de Marfeille, fede vacante, fit une vj{jte
dans leur Maifon, & rendit une Ordonnance ·de laquelle
çn appella comme d'.abus. Les moyens ne portaient pas fu·r
des contraventions à l'in!litut, mais fur des points de procédure; & Ce 'qui fut profcrit ,Jur l'abus d'autorité,' attendu
qu'il ne dépendoir pas de l'Evêque de difpofer arbitrairement
d'une Maifon qui avait un Fondateur. L'Arrêt qui fut rendu
ne jugea ni l'inllitut ni le régime; en forte que rout démontre que cerre Congrégation n'ell: pas maifon d'infiicut ;
& à bien confidérer les chofes, ils font fimples Ecclélia'lligues & gens de fecours. Ces Staturs ne peuvent pas même
valoir comme louable coutume, parce qu'ils n'exiflent pas
comme Congrégarion. Le Corps pourroit les changer, &
leur maifon n'eH qu'une vraie Saccurfale; les réguliers cornille
,
�DU~
PALAIS
DE· PROVENCE.
4~[
tes' réculiers peuvent exercer dans cette Mai[on léurs fonctions. Mre. Bertrand demande la révocation de l'Arrêt
que Mre. Bonhomme a obtenu au [ujet d'une communication
de titrAs; cet Arrêt doit l'être, parce que cette coÎnmunicaoon était inutile, attendu que ces titres exifioient dans
des dépôts publics, & les dépens qu'il a payés doi.vent lui
être r.eHirués, parce qu'il les a payés 'comme contraint &
forcé.
Mr. l'Avocat-Général de Magalon ob[erva que les (ources
de l'appel comme d'abus [ont connues; il Y a àbus lor[qu'il
y a arrentat aux Saints Dé{;rets & Canons. reçus dans le
Royaume; l.orfqu'il y a attentat aux. concordats, Edüsi Üi'donnances du Roi, & aux Arrêts des Parlemens; lorfqu'il
y a attentat aux droits, franchifes, libertés & privileges. de.
l'Eglife Gallicane & enrreprife de Jurifdiélion; telles font les
regles généra:1es. En les rapprochant de la.caufe dont il s'agit,
on t.rouve dans un.e jn.finité d'Auteurs quelle eH. la .re'gle'
d'ans cene efpece particuliere. !?'Herico'urt dit que les nOll.!
veaux Statuts, ainG que les nouvelles regles, n',ont poilu:.
force de Loi en France, même, ;>ar rapport aux 'membres
de la Congrégation, qu'ils n'aient été aurorifés par. des ,Let-'
nes-patentes légitimémenr .enrégiflrées; qu'il efLde principe'
qu'il -n'y. il de . Congrégations légitimes dans qe Roraunle ;"
<jue) celles dont ·il a plu aù Roi -c!'au!Orifer P.ét<lbliffem'.en/:i
par des Lettres-patentes enrégjfirées en la C{lur, ilpr.ës avoirL
examiné les Sratuts.
.
'
; Uneobfervation bien ,iimple fuffir. Pour qu'une. c-ontravention à des Statlllts [oit abufive '.' 'il f"ut que ,I:es Stan.l!il
aUj(queh {ln ..a conrre~eriJ.l.'ai.ent une' exiH~nce légale. il fa.ut '
<j\l'ils .aient forl;e <;le t LQi parmi nous, & t.iJs· ne' peul/ec!:
l'ayoir que p~r l'autarifatio.n & ,l'ho.mologation.• plufiea.s:s.::Af'-'
• rêts Ont éré rendus conformém.em 11 œ prrnçipe, & ~;Q-'
tr!aurre.s celui ~u ParleOlent de"P-aris rendu' en 172.7~' .,
_SI de-s St. ruts rel1feriltto.Îenr des. pâncipes déja L:onfanêl'
p~r ·Ies Saines Décrets, :par ilei Canons, .s'ils 'en cenôpV.el... ,
~ojeu( la Loi d'une .maniere exprelfe, la conrtal/entioll Iho.ÎC''''
,
Mœro 2.
'
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0
V RNA L
abufive; s'ils exilloient déja dans les temps les plus reculés;
s'ils avoient acquis par leur ancienneté une exifience facrée
& refpeé1:able, & fi les Loix qui portent que tout Statut
féra homologué, étoient pofiérieures, les Statuts exil1:anrs
devroient êrre obferÎ/.és; .hors de ces cas, lorfque des Statuts
.prefcrivent des regle.s parriculieres qui ne font point déja
~tab1ies par les Saints Décnets & Canons, lor/qu'ils font
poHérieurs à la Loi qui R0rte que toute regle fera homologuée, la contravention ne peut être abufive.
Ce .principe retracé, reHe à examiner fi la Congrégation.
du St. Sacrement. s'eH conformée à cette regle. En 1679,"
l'Gi1 voit qu'elle .n'avoit. point rempli cette obligation ,.que
1 s Lettres-patentes· dont Mre. Bonhomme e.xcipe, n'ont
trait. qu'à un droit d'amonÎifement, & rien de relatif à
J'ioHitut de la Congrégation 'du St, Sacrement,' rien qui
faife préfurner que le Roi ait voulu l'autorifer; & fuppofé
qu'il fût parlé tFaolltoirement dans ces Lettres-patentes de
J'Înfl:itut, cela ne fuffimit' pas; il faudroit que la volonté
du Roi fût précifc:., en déclarant que ces Réglemens feroient exécutés. Lors de l'Arrêt. qui fut rendu _par le Parlement' de. Provence fur les condufions de Mr. de St.
Martin A,.v.ocat - Généra!.;, les moyens d'abus qu'on pro po- 1
foit envers l'Ordonnance' d\)" Grand-VicaIre de l'Evêque.de'
Marfeille n'avaient aucun rapport•.à la que!l:ion ql.li eH agisée
aujourd:hu!, aucun qui .efit quelque rapport avec l'in!l:itllt.
La ·màifon des Prêtres du St. Sacrement doit être affimilée
à. la', Gl!lngrégarion généralè;.. leurs StatLlts ne font point
homoJogués., formalitéi qui ;n'a pas été "remplie & qui les.
rt;no làl1s.!lexill:eoce. , La 'Contra';60lion à ces StatLlts n'ell:"
pas ,un moy.~n d'abus, & l'appel! de Mré. Bonhomme n'ell:
p:as rel:.~"iable. En fuppofant: que la"formalité de l'enrégiftr.ement eÎlt été remplie, ~ en lè rapprochant de la Bulle
d'Innoctnt X. oo.voit qu'elle permet au Supérieur eccléfiaO:ique d'y dé.roger, fi les circonllances & les confidératiLlhS'ip.erfonoelles l'exigent. Eu fI.' borna,nt aux Statuts feuls,
el)' Jes cohÎldér.ant d'ap r,ès la Bulle qui leur donne l'exif'r
�), u
P Ât I i s
1) II
P ItO Vl!: N C 1!;
4~3-
tence j notl feulement le Pape, mais l'Evêque ont pu y
déroger; rien d'illégal, .rien d'irrégulier par conféquent
dans la Bulle & dans l'Ordonnance. En fe conformant aux
Statuts, Mre, Bertrand a pu être admis; l'objeélion de
Mre. Bonhomme fur ce qu'il n'avoit point fait fon temps de
probation, tombe par le même motif; quand cette dérogation feroit juHifiée ,. elle ne feroit pas aifez grave pOUl"
devenir un moyen 'd'abus.
La regl~ regularia regulari6us que l'on oppofe à Mre.
Bertrand ne peut être - appliquée à l'efpece ptéfente; elle.
D'eU relative qu'à la poifeffion des Bénéfices. Un Bénéfice
féculjer ne peut être polfédé par un _régulier; un _Prêtre
régulier peut être admis dans cette maifon même par la
nature de l'inHitution, parce que les membres qui la com- ,
pofent, doivent être regardés comme gens de fecours; &
fous .quelque point de vue que cette caufe. fait erivifagée"
les moyeqs d'abus qu'on oppofe à Mre, Bertrand. ne font
fondés ni d'après nos Loix, ni d'après les Srarurs que· l'on
invoque concre lui; le tirre de la fondation & la nature
de l'établilfement lui font également favorables.
.
Quant à. la demande en révocation de l'ArFêt de la r
Cour, elle doit être jugée par les mêmes principes.. Si
l'appel. de Mre. Bonhomme n'ell: point fondé, l'exhibition,
des regi{hes eU pat contëquenc inutile; d'a'illeurs les titres
qu'il demande étaient dans des dépôts publics; il pouvait
fe les procu.rer, & fa demande étoit fans objet..
-.Mt. l'Avocat-Général conclut à ce que faifilnt droit à 1a
requête .de .Mre. Bertrand ,&' à fon'lOppolition envèrs l'Arfét du I.~ Décembre précédent,. JI Artêt· fût & demeurât
révoqué 'e'n tant 'que 'de befoin; & de même' fuitè, que
Mre. ,Bonhomme fût déclaré non recevable dans fes appels.
comme.. <I'abus des aéles de réception de Mre. Bertrand, du .•
Bref & Ord,onnan,ce', de l'Evêque 'dont s'agit.
"
Arrêt du premier' Mars ù:784 ,'prononcé par Mr; le Pré- ,
fident de Ca'bre, par lequel' la Cour, fans s'arrêter à la re- .
quête eq oppolitiQtl & révpcation de l'Arrêt de la CQur,
�~~
JOURNAL
t'aifant droit aux appels comme d'abus principal &- incident·
de Mre. Bonhomme envers la réception de Mre. Bertrand,
l'exécution du Bref de tranGation d'icelui, les Ordonnances
de fulmination dudit ,Bref & de difpenfe, & la probation
de Mre. Bertran!!, a déclaré y avoir abus en ladite réceptian, exécution du ,Bœf, Ordonnances & probation; ordonne
que l'amende de l'appel comme d'abus fera reflituée; condamne le Supérieur & Mre. Bertrand aux dépens les concernant, fan~ que les qualités puilfent nuire aux parties.
Plaidant ,Mes. Gaffier & Ponali.s.
,
ARRÊT
XLVII•
.l.,es pa~1I/res peu.vent-ils ltro inJlicués héritier.s dallS les hûns
, immeublu & 'autres' pl'ohilJés par l'Edit de t749?
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1
N 1780 , Me. Jo[eph-Simon Maillard; Avocat établi
à Arles, fit fon tefiamenc folemnel, dom la difpoIi-'
tion principale, .après ,p!ufieurs legs préliminaires, efi celle
q~i fuit ;·Bt ,en ~ touS' me hiens- 'meiJbles & immeubles, je
nomme 1 f,' ùzfliUlC- P.fJ/(r m,es héJ:itiersuniverfels les- pduvres
qui ftront, chaijis 'da,nslles . do,Ues ,jùivames des citoyens de,
œtte ville, .& nOII.dans toute autre; [avoir, z0. des Avocats
au Parlemelu, citoyens d'Arles; 2°. des Médecins agréMs au
Co.llege ,d'Arles,' fjui auront' pris leurs grades dans les UnilIeJjités de Montpellier- 'Ou. Je Paris, 'lui auront exe~cé. pen-I
daTIt dix ans., ta; médeâne dans cette 1!ille., & ..i1o(méj,leurs:
charitables fOins al/x malades de l'liI6tel du St. EfPrit; f. des·
Maîtres en Chirurgie & - Maîtres Apothicaires 'lui. àuront·
>exerci leur profeffion pendant dix ans confécutifs dans cette
llille; 4°. des veuves des' mêmes l'éitoyens, chargées de Yamille, pour 'lue les pauvres, c!toifisdans ces claffis ruirent
ies revenus de mon Jréritagt:! d~ )a maniere exprimé!;! ci-après,
fiuzs gue jamais dans aucun cas lefditcs ûqffis de ~.itoy'ns ~
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PALAIS
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PaOVENCE;
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4H'
corps ou en partie puiJJent, fous quelque prétexte que ce [oit)
inquiétfr mes c:dminijlrateurs, & pénétrer dans leurs opérations.
S'il arrivoit qu'il n'y eiÎt poim de pauvres dans les claffis
des citoyens fus mentionnés, pour -ab[orber les revenus de
mon héritage, ces revenus, au lieu d'être placés, feront annuellement dijlribués aux pauvres malades incurables de la
- ville d'Arles de tout état, fexe ou condition, qui ne font point
reçus [oit dans l'Hôtel-Dieu, [oit dans la maifon de charitê
de ladite ville.
. Pour affurer l'exécution de fes intentions Ibienfaifantes,
Je tefiareur érablir. enfuire une efpece de bureau d'adminillrarion. Il nomme cinq adminiHrareurs qui doivent êrre
à perpétuité tous cinq Avocars, tous cinq citoyens d'Arles;
& choifit lui-même aétuellemenr Mes. Moreau,. &c. C'HI:
à ces cinq adminiHrateurs à fe complerrer à mefur.e que
la mort en diminue le nombre, & à choifir entr'eux chaque année un Tréforier dépofiraire des fonds. Le reHateur
choifir pour la premiere année Me. Balrhafar. A défaut de
cinq Avocars adminifirareurs, ou fur leur refus, le teHa-'
teur veur que l'adminifirarion foit déférée à cinq Reéteurs
de l'œuvre de la Convalefcence des hommes au choiK au
b'ureau, & dans ce cas il legue .à cette œuvre la fomme de
~ooo Hv. La difiribution des femmes ,à donner aux p.au'vres
des c1alfes choifies par le ·tefiareur efi 'enfin fixée de.puis
cinquante jufqu'à. deux cent livres, & fans de rr.ès-forres
raifons , le même individu ou la même famille ne peut pas
êrre .l'objet de ces libéralirés pendant plus de fix années.
Par requête préfenrée à la Cour au mois· de Février
'1783, la Dame Barbaroux, mere de Me. Maillard, demanda III ·caffation du tefiamenr, au chef qui déféroit aux
pauvres l'hérédiré des biens immeubles & aurres biens de
Me. Maillard, prohibés par J'arr. 9 de l'Edit de 1749.
ûetre requêre fut f1gnifiée tant aux' adminillr-ateurs de
l'œuvre 'qil'aûx Re'tl:èurs' de la Convalefcence des' hommes.
CeuJC-ci déclarerent ne prendre aucune part au procès. Les
admini!kareurs chaill:> par Me. Maillard ·àéfendirent felils
�'4'~t$
'"'.
JO.URNAL
. ies difpolitions. La Dame Barbaroux étant décédée, la
Dame Sauze fa fille & fan héritiere pourfuivit le procès,.
'& demanda la dot & droits de celle-ci à prendre proportionnell~fnent tant fur les immeubles que fur les meubles, &c•
..on pifoit pour ·Ia Dame Sauze, que pour prouver que
les ~ifpolirions de Me. Maillard (ont proferites par la Loi,
il fulEt d'établir deux propoGrions donc la démonfiration
ell: aifée'; la premiere, qu'un texte précis de l'Edit de 1749
défend exprelfément de léguer des biens immeubles aux'
pauvres & autres gens de main-marre; la feconde , .que
çette prohibirion fubfifie encore malgré les Déclarations pofréri,eures 'de !-76 l & 1762.
.
L'objet que le Légiflateur a eu en vue dans l'Edit de
1719 efi clairement manifeflé dans le préambule de cette
Loi. Il veut conferver dans les familles les fonds defiinés
par la narure à leur fublifiance; il a fenti de quel inconvé.
nien.t il étoit pope le commerce, & même pour la valeur
jntrinf~qu.e des biens fonds, qn'une trop grande partie de
ces biens devînt inaliénable, en palfant à des corps auxquels il n'efl: plus permis d'en difpofer..
Un trop grand nombre d'hommes a la vaine ambition
de palfer à la pofiérité avec le titre faftueux de Fondateur,
pour que l'utilité publique, & quelquefois les droits du fang'
& de la naJure ne foient pas fouvent facriflés à la vanité
particuliere. En conféquence l'Edit de 1749 fia tue fur deux
objets bien effentiels; le premier, efl: l'établilfement de
rna.in-morte dont cetre Loi regle la forme & la police; le
fecond efl: la· nature des bIens qne ces mêmes établilfe.mens
peuvent acquérir.
Il elt des' établilfemens de différens genres : ceux qui
forment un nouveau corps & qui ne peuvent avoir lieu que
par des aél:es entre-vifs, & avec le concours de l'autorité
. fouveraine; ceux qui forment ce qu'on appelle limplemene ,
llne fondation qu'on peut établir par aél:e de derniere volonté,
qui (one feulement fournis à l'homologation des Cours. Dans
les étdblilfemens formant un nouveau Corps, il faue difl:ingue~
\
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
457
guer la dotation prerniere des legs, & les acqui!irions pollérienres. Le Légi!lateur fe tait avec raifon fur -le premier
article-' parce que dès que la dotation ne peut avoir lieu
fans le concours de fa volonté fouveraine, il e!l: clair qu'il
pol;rra veiller lui-même à ce qu'elle ne fait point formée.
de biens prohibés.
Quant aux accroiffemens poaérieurs, la Loi défend exprefiément aux Corps déja établis & formés d'acquérir ou
de recevoir, à quelque titre ou fous quelque prétexre que
ce fair, d es fonds de rerre, maifons, droirs réels, rentes
foncieres " ou mêmes renres con!lituées fur des particuliers.
Taures difpo!irions tefiamenraires qui leur laifferoient des
biens d'une pareille narure, font formellement annullées.
Relient les érabliffemens qui ne forment point un nouveau
Corps, mais une !impie fondation. L'art. 19 Y pourvoir;'
& c'e!l: cet article qu'il faut arrentivement pefer, car c'e!l
lui qui régit & qui- doit jl.Jger la caufe, puifqu'on convient
de bonne foi qu'on n'en point dans le cas d'un érabliffenient formant un nouveau Corps: Voulons qu'a l'awnir,
dit cet article, il ne pui.f1è être donné ni acquis pour l'exécution
des fondations mentionnées en l'art. 3, que des rentes de la
qualité marquée par l'article précédent, lorfque le[dites fondations feront faites par des difPojitions de derniez-e 1'010nté;
& fi elles font faites pçr des ac7es entre-vifs, il ne pourrà être
donné ou acquis paur l'exécution de[dites fondations aucuns des
hiens énoncés dans l'art. 24, qu'après avoir ohtenu nos Let-tres-pàtentes &' les ayoir faites enrégiflrer, ainfi qu'il eJl porté
par ledit article, le tout a peine de nullité.
C~rre prohibirion en claire, pré"cife, ablOlue, générale ~
\. & la nulliré qui en ré fuite , irréparable. Que le teltateur aie
ordonné on non que fes biens fond~ feroient vendus par
les Admini{hateurs -de la fondarion nouvelle, cela en in-'
différent. Le droit de vendre fuppofe un droir de propriéré
antérieur, & ce fecond droit ne peut compérer à la fondation fur les biens dont l'acqui!itioo lui en prohibée. Pourautorifet les Hôpitaux à recevoir fous la condition expre1fe:
.Années z782 & [uiv.
N nn
•
�.'4S B
Jou
R N' A L
de vendre .dans l'année, il a fallu un texte précis de. la
Loi.
Un article de l'Edit de 1749 prononce d'ailleurs la nullité des legs des biens prohibés, même quand ces le17s
feroient 'accompagnés de l'injonél:ion. de. vendre. Les di'li>~
fit ions de Me. Maillard font donc profcrites par l'Edit de
1749·
On oppofe les Déclarations de- 1761 &. 1762. D'abord il paroît clairement par le texte même, que celle de 176 l n'ell: relative qu'aux Hôpitaux & autres Corps duement établis & déja
exi!1:ans. La Déclaration de 1762 ell plus générale, & véritablement une Loi nouvelle; au lieu que la Déclaration de
176 l n'écoit qu'une \ modification paffagere de l'Edit de
1749. Mais que porte cette Déclaration? L'article 3 énumere quelles foor les fondations qu'on doit comprendre au
nombre des fondations autorifées par l'article 3 de l'Edit
de 1749. L'artitle 8 pourvoit feulement aux revellUS des établiffemens déja fubfillans. L'article 9 leve, en confidération
de la faveur que méritent les Hôpitaux & autres établiffemens énoncés en l'article précédent, les prohibitions portées par l'article 17 de l'Edit de 1749. M:ais on a déja vu
que l'article 19 écoit le feul article de l'Edit de 1749 qui
fût relatif à la dotation des fondations nouv.elles. Or l'article
9 dè la Déclaration de 1762 ne déroge point à cet article.
Les trois Loix donc il s'agit oor également diHingué les
'fondations faites des fondations à fair.e•.
Il y, a un inconvénient frappant à trop laiffer multiplie.,
les fecondes; il elt à craindr,e qu'elles ne fe nuifent réciptoquement·, ou même qu'elles ne foie nt fouvent I>lurôt l'ouvrage de la vanité & du caprice, que d'un véritable amour
du bien public & .de l'humanité., Nul article des deux Déclarations de 1761 & 1762 n'a changé le régime des fondations nouvelles, tel qu'il ell: prefcrit par l'art. 19 de l'Edit
de t749. C'ell: ainu que la Cour l'a formellement jugé dans
l'affaire du Bduffet, & conrre une fondation beaucoup plus
favotable que celle de Me. Maillard. 1
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PAL AIS'
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4~9
PRO V Il Ne l!.
On répondait pour les Adminillrateurs, que Me. Maillard
n'avait oublié aucun des égards que la voix du fang & de 1
la natur~ devait ed eJFer lui rappeller. Sa mere, qui n'avoir
à prétendré qu'un droit de légitime, a eu l'ufufruit général
de fes biens; aucun de fes neveux ni de fes nieœs n'a étéomis da~s fan tellament; & dans le cas que le furplus de fes
revenus leur devienne un jour néceffaire ,le teHateur le leur
a expreffémenr réfervé.
Il ell vrai qu'en 1749 deux confidérations d'ordre & de
bien public, l'intérêt du commerce & celui des familles ,.
avaient déterminé le Légiflateur à défendre de léguer ou de
donner, à quelque titre què ce fût, aux gens de main morte
des biens fonds ou des rentes cOhllituées; mais alors la prôhibition fut générale, elle s'étendit à toutes les œuvres, à.
toutes les fondations, comme à tous les cas•
. On prétend que la Déclaration de 1762 n'a dérogé à:
l'Edit de 1749 qu'en faveur des établilTemens déja formé!;.
En fuppofant que cela fût, il n'y auroit alors d'invalide dans
le tellament de Me. M'aillard que l'établiffement d'un bureall
d':tdminillration de cinq Avocats, & l'Hôpital général remplaceroit de droit ce bureau' illégalement établi, & reéueillirait l'héritage pOUT en difhibuer les revenus conformément
aux intentions du teHateur. Mais le tellateur a fait lui-même
cette fubllitution; l'H6pital <.le la Convalefcerice des hommes
eft appellé à défaut des cinq Avocats, comme chargé de
déléguer l'adminillration dans ce cas à cinq de fes Reéteurs ~
& comme légataire.
Mais au fonds, fur ql1oi, eft fondée c.ette diHinétion pré- •
tendue entre les fondations faites & les fondations à faire jI>
Elle n'eft ni dans l'e(prit ni dans la lettre d'aucune des trois:
Lo.ix qui font le fiege de la matiere. Cette diHinétion eH:
d'ailleurs plutôt une dillinétion de mots que de cho(es;, puifque, fuivanr l'obfervaiion de Mr. d'Agueffeau, il y' a également fondation, foit qu'on legue aux Corps déja établis ,.
Eour dillribuer aux pauvres, fair' 'qu'on lâiffe fes biens aux:
pauvres aireaement. Cette diftinél:ion ne [e trouve pas' no.lll
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1..
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•
�4~
JOURNAL
plus dans les Lettres-pateDte~ de 1761; elle en eil n1éme
totalement écartée par ces mots frappans du Légiflateur;
que fon intention elt d'affurer aux pauvres tous les moyens
de fubli!l:er. Les mêmes motifs préfiderent encore à la Déclaration de 1762, plus générale, & fur-tout plus détaillée
que la Loi paffagere de 1761. L'objet du Légiflateur dans
cette Loi ell; encore d'abolir la mèndicité, & dans' cette
vue de fournir d'âilleurs aux pauvres toUS les moyens de fubfifler, & par conféquent d'acquérir.
La Loi ne dit pas que les difpofitions ne feront valables
qu'autant qu'elles auront pour objet des établiffemens déja
valablement établis, mais feulement les établiffemens énoncés
en l'article ci-deffus. Quels font les établiffemens que l'article précédent détaille? Tolites les efpeces de fondations
pieufes que la Loi autorife. Il y a plus, & l'on peut même
foutenir qu'il s'agit ici d'une fondation déja établie, puifqu'elle
.recru[ la fanélion de l'homologation de la Cour; déja dotée
en partie, puifque le legs des meubles n'elt pas atçaqué; .
déja capable par conféguent de recevoir, même en adoptanc
[out à la rigueur de cette diltinélion, qu'aucun texte pourtant _de la Loi n'autorife. Enfin donner ou léguer e"n augmentation d'une fo~ation ancienne, n'dt-ce pas toujours
fonder réellement & n~uvellement, & il décifion d'une caufe
fi intérelfante, fi favorabJe, doit-elle dépendre d'une pareille
, fubtilité, d'une pure diflinélion de mots?
L'Arrêt du Bauffet qu'on a cité elt totalement étranger à
la caufe; les motifs fur lefquels on fe détermina à calfer ,une
.fondation nouvellement établie, furent que l'exécution de
cerre fondation étoit abfo!ttment lailfée à la difpofition arbi-.
traire de quelques particuliers que le 'tell:ateur avoit choilis.
Ces particuliers étoient ,cependant fans caraélere, fans miffion publique; ils s'étoient d'ailleurs prudemment condamnés
eux-mêmes; aioli les chofes o'étoient plus en leur entier.
Mr. l'Avocat-Général d'Eymar de Montmeyan obferva que la
cauf~ était intéreffante, puifqu'il s'agilfoit d'une part du fort d'une
fondation pieufe, d'un établilfement de charité & de bien~
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PAL AIS
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PRO VEN Cil:
46{'
faifance, & de l'autre, de l'intérét & du droit toujCUI"S fi
favorable des héririers du fang & de'la nature.
Il s',agit, di [oit-il , uniquement de favoir fi depuis l'Edit
de 1749, qui avoit pris, ce femble, des précaurions fi rigoureu[es pour empêcher que les gens de main mo~re, qu'auçun
événement 'ne dépouille, ne puifent [ans celfe augmenter
le nombre de leurs polfeffions, & la Déclararion de 1 762.
qui s'efl: relâchée de cerre premiere rigueur, les' érabliife.
mens ré cens , les fondations nouvelles ont continué feules
d'y être foumifes, .& ne peuvent encore aujourd'hui êrre
ck>tés' avec des biens prohibés.
Il el!: différentes fortes d'érablilfemens de piété ou de bienJai[ance par lefq~els la charité impérieu[e de chaque ciroyen
peut fe fignaler. Les uns, del!:inés à former un Corps nouveau, une Communauré, un College, occafionent un changement plus confidérâble dans l'Erar, & font fournis à la
furveillance plus immédiate du Souverain; ils ne peuvent recevoir leur exil!:ence polirique, fans avoir éré auparavant autorifés par des Lettres-parentes que le fondateur- eH tenu de
rapporter. D'autres fondations dont le rég(me eH plus fimple
& l'objet plus reiferré, ne font point [ol,lmifes à des formali,rés fi folemnelles & fi coûreu[es. L'Edit de 1749 permet
qu'on conrinue de les érablir par des aél:es de derniere
volon ré , & n'exige pour leur, validiré que l'homologarion.
des Cours fouveraines.
Avant cet Edir, qui a fait époque dans notre légillation "
les ciroyens j9uilfoient prefque d'une liberté indéfinie en ce
genre; rout particulier pouvoit, au gré de fon caprice ou
de (a vaniré, quelquefois même de fon humeur envers fes.
héritiers légitimes, fonder un nouvel érabliifement, & chaque,.
établiffement acquéroit avec l'exil!:ence le droit de recevoir,
d'hériter, d'acheter. Ce n'el!: pas que les anciennes Ordon-'
nanees ~u Royaume n'euffent prévu" n'euffent voulu' prévenir tous les inconvénieos que pou voit avoir la multiplication prodigieufe des érabliffemens pieux, des fondations;
des ferviees; mais l'ufage, ou plutôt l'abus, avoit toujours
~
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~~
JOURNAL
préva1u fur les prohibitions les plus féveres & les plus- fages.
Il était pourrant fenfible. que tous les êtres politiques compris fous la dénomination antique & générale de gens de
main morte, ne pouvant jamais diminuer le nombre de le.urs
polf'effions, il falloir, à peine de les voir devenir un jour
propriéraires uniques & univerfels de tous les biens fonds
.... du Rbyaume 1 reiferrer & gêner pour eux la faculté d'acquérir'
ou de recevoir·. Delà le commerce plongé dans unétat de
langueur, & la dégradation rapide des biens fonds eux.mêmes,
dont la valeur & la fécondité, quelque panldoxale qlle puilfe
d'abord paroîrre cette opinion, font toujours en proporrion
inverfe de l'opulence des propriéraires. Ferrilifés par le travail affidu d'un cultivateur pauvre & laborieux, ils deviennenr prefque ll:ériles entre les mai~s de tous grands propriéraires. Delà encore l'appauvrilfemem fucceffif, & enfin
la chût·e. de la Noblelfe. Un feul homme' pieux & libéral
pouFr<Jit dans un momenr de ferveur & de zele ruiner pour,
toujeurs, & peur-être faire difparoîrre une longue fuite de
biens.
Toutes ces conféquences immédiates des l'l'Op grands
prqgrès des gens de main morre .frapperenr enfin le Lég-illateur, 'lU point de lui paroître un desobjers les plus dignes
de fon attention; & le premier des momens de loifir que lui
rendit la. cejfa~ion d'une guerre- imporranre, fut. confacré à
y. remédier. Il exill:oie différens abus à réformer; il était
donc nécelfaire que l'Edit réform1teur renfel'mât p1ufieurs
difpofitions différentes. Cerre varie~é ell: annoncée pal'- le
titre même de la Loi. Ee titre npus lIpprend qu'elle ell: éga..
_ lement relative aux établilfemens & aux acquifieions des' gens
de main morre.
Le premier & le plils grand de rous ces abus, celui. dont
le LégiOareur fut d'abord occupé, eH: l'abus réfuléa.nt de la
rn\lltiplicarion trop facile de ces fortes d'éeabJJlfemeos. Delà
les difpofitions contenues dans l'arricle premier & fecond
de l'Edit, qui porrent qu'à l'avenir il ne pourra êrre fait
aucun nouvel établilfement formant Corps, Communauté ou
,
�463
College, fans l'autorifation expreffe du Souverain, & que
routes difpofitions de derniere volonté qui ordonneraient un
pareil établiffemenr, même à la charge de rapport r des
Lettres-patentes, feroient nulles de plein droit.
Le troifieme article efi uniquement relatif à des fond~tions
plus fimples & moins folernneUes. Telles font les fonda rions
de meffes ou d'obits, la filbfifiance néceffaire à des étudi:ans
ou 11, de pauvres eccléfiafiiques ou féculiers, les legs faits
pour des mariages annuels de pauvres filles, pour des écoles
de charité, le foulage ment des prifonniers ou de ceux qui
ont fouffert de quelque incendie, & autres œuvres - pieufes
ou utiles au public, qui ne tendent poim à l'ére8:ion d'un
nouveau Corps. Le Souverain exige pour celles-ci l'àutorifation expreffe des Cours fouveraines.
Tous les articles fuivans, jufqu'au quatorzieme exclufi.vement, font purement relatifs à la formation des établiJlèmens mentionnés en l'article premier, & prefcrivent les
formes qu'il faut fuivre, Four que léur utilité foit comme,
,débatt\le' & prouvée. L'article 9 déclare nuls & de nul effet
rous les établiffemens non autbrifés par Lettres-patentes duement enrégiHrées, qu'on pourroit tenter d'introduire à l'avenir.
Les arricles 10" II & 1 2. permettent aux enfans ou autres,
héritiers préf-omptif,s ou légitimes des ·donateurs ou tell:ateurs,
à leur défaut aux Seigneurs dont les biens relevent, &' à dé.
faut enfin de' ceux-cÎo aux Procul"e'll1'S'-Généraux., de 'réclamer
la pro prié té, & la po1feffion des biens donnés ou légués en
contravention à l'Edit.
L'article 13 enfin pto'no:nce fur le fort des établiffemens
toujours de même nature que ceux- portés par l'ar.ticle pre':'
mier, mais antéritéurs à. la public:ation de l'Edit. L'article
14 & les trois fuivans p.our\tojenr- à: ce que les étahliffemens
déja formés. ne puiffent acquérjr, recevoir, ni pofféder àl
l'avenir, à quelque titre qua ce puiife ê'rre, des biens d'une'
certaine nature, tels., par exemple, que les fonds de terre "
les mairons, les> droits ré(lls, les rentes. foncieres ou non
rac~etables, ou même les rentes confiituées fur des particuliers, à moins que pour parvenir à l'acquifition & amor-:
DU
PAL AIS
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PRO V Il NeE.
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JOURNAL'
tiffemênt defdits biens, on n'ait rapporté des Lettres-patentes qui feront foumifes à l'enregi!l:reme nt des Cours
fouveraines, à la forme' portée par les articles fubféquens.
• L'article 1 S déroge' à cet effet à quelques Statuts particuJiers, fuivant lefquels quelques-uns des biens fus mentionnés
font réputés meubles. L'art. 16 étend la prohibition de
J'article 14 à roure forte d'acquifirions. L'art. 17 y foumet
'texruellement les actes de derniere' volonré qui porteraient
{ur des biens de la qualité marquée par l'arr. 14.
L'ani,cle 18 excepre des biens prohibés, les rentes conftituées fur le Roi, le Clergé', les Diocefes, Pays d'Erar,
villes ou Communautés; vient enfin fe célebre art. 19 dont
tous les rermes fane précieux à, tranfcrire. Voulons, dit le
Legi{lareur, fju'a 'l'avenir il ne puif!è être donné 'ou aCfjuis
pour l'exécution des fondations mentionnées en l'art. .1 (c'~ll:
à-dire, de ces fondations moins folemnelles pour l'autorifation 'defquelles on nJef-l, pas tenu de- rapporrer des Lettr.espatentes), 'lue des rentés de la fjualité marfjuée par l'article
précédent, lorfque lefdiies fondations feront faites par des difpofitions de derniere volonté; & fi elles font faites par des
aaes entre-vifs, 'il ne pourra être donné pour l'eicééution defdites
fondations aucuns hiens, énoncés dans l'art. 14 fju'apres avoit
ohtenu nos Lettres-pat~ntes,' & les avoir fait enrégiJlrer 'ainfi
fju'il eft porté par ledit article, le tout a pein'e' de nullité.
Il ell: aifé maintenant d'appercevoir que la Loi de 1749
fe .divife d'elle-même en' trois parties abfolument dill:inél:es
& prefque indépendantes l'une de l'autre; la preriJiere traite
des nouveaux érablitfemèns les plus conlidérables, tels que
ceux qui forment un Corps" une Communauté ou un College; la feconde traite de la formation des étàblitfemens
du fecond ordre, c'e,ll: - à ~dir'e, des !impies fondations; la
troifieme partie rend uniquemene à retferrer, même pour
les établitfemens déja formés & les plus favorables, la faculré de recevoir ou d'acquérir à quelque titre qye ce puiffe
être. C'ell: dans cet érat des chores que font intervenues
, les Lemes-pateores de 1761, & la Déclararion de 1762,
interprétative~
\
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PAL AIS
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46 ~
PRO V H Ne 11.
interprétatives & limitatives de l'Edit de 1749. Ces deux
dernieres Loix n'étant que fimplement dérogacoires , & non
révocatoires, ne Contenant que des dérogations limitées, &
non une obligation totale & abfolue, il faut, en cherchant
[a'ns dOL'te à en pénétrer les motifs, à en connoître route
l'étendue, ne point perdre pourra nt de vue, ne point oublier
même l'objet général que la Loi primitive s'ell: propofé. /
Les trois Loix enfemble n'en font qu'une; elles rentrent
fans ceŒe les unes dans les autres, & malgré leur contrariété
apparente dans quelques articles, elles fe confondent, &
nous donnent par leur réunion, feulement (ur un poim imporrant de notre légiflation, l'opinion & la volonté du
Souverain éclairée par l'expérience, modifiée par les repré[emations de fes Cours.
Le Légiflateur dans la Déclaration de 176~ commence"
par y rappeller l'Edit lui·même qu'il va interpré{er & mo..:
difier; il fait plus encore, il déclare en iermes bien exprès
que cet Edit renferme les dilpofirions qu'il croit les plus
propres à concilier la faveur que méritenr des établiŒemens
faits par des motifs de charité & de religion, avec l'intérêt
des familles. Que) elt donc l'objet & l'occaGon de la Loi
nouvelle? Il s'agit de rerminer les uns,"& d'accorder aux
aurres rout ce qui femhle être dû, en effet, à des établif.,
[emens deltinés à procurer des inHruétions ou des fecours
temporels aux citoyens.
Que refulte - t - il de cet expo(é fuccinét des vues & des
motifs du Légiflateur? Que la Loi nouvelle eil: feulement
del1:inée à rendre plus clair & plus précis le texte de l'Edit
de 1749, & rout au plus, 11 Y ajourer peut-être quelques adoucitremens en faveur de ce que peuvent mériter des établiffemens pieux & charirables. Dans les Lerrres-parenres données
pour la Provence en 176
on y voit par-tout que l'état
d'embarras & même de détrelTe où fe trouvent les Hôpiraux
& autres œuvres de charité du pays de Provence, les a feul
déterminées, par leur multiplicité, leurs concours, les frais
auffi indifpenfables qu'inutiles qu'enttaînent l'entretien d'un
1,
Années l782 & fuiv.
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�466
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0 V R N -A L
plus grand nombre de bâlimens, les gages d'un plus grand
nombre de colleél:eurs & d'employés, le poids des engagemens que le malheur des temps a forcé de contraél:er;
que la modicité de quelques immeubles inaliénables, le peu
è'urilité d'un grand nombre de fnndations dont fe trouvent
furchargés les établiffemens qui feroient eux-mêmes les plus
utiles, exigent néceffairement qûe le Souverain vienne à leur
fecours; que le moyen le plus naturel & le plus prompt
d'y pourvoir qui s'el\: préfenté, a d'abord été d'employer
une formll d'adminiftration moins compliquée & plus économique, & de veiller à la di(pen(ation de~ revenus qui
louvent font donnés au hafard & mal appliqués; que le projet d'abolir la mendicité dont le Légiilateur paroît s'occuper
aél:uellement, exige des me(ures préalables, & que le fecours
de l'aumône ne peut être interdit aux pauvres qu'après leur
avoir affuré tous les moyens de fubiifl:er.
Or quel ef!: le but apparent & feniible de cene Loi
particuliere à la Provence & infl:amanée, de pourvoir aux
hefnins des établiffemen~ de charité alors fubiil!:ant dans
.cene Province, & qui fe trouvoient dans un moment de
crife? C'ef!: ce but unique auquel fe rapporte la totalité
des difpofit1ons de la Loi. On y voit le Légiilateur fans
"ceffe. occupé à donner une forme plus fimple & moins
coôteufe à l'admini!lrarion de ces différentes œuvres, à
leur fournir les moyens de fe libérer par l'aliénation de
leurs immeubles les moins précieux, & même pa.r des
emprunts à rente viagere. L'article 10 el!: le feul qui paroiffe avoir quelque relation, quelque rapport à l'Edit de
] 749 , & qui dérogeant à la difpofition des articles 14 &
17 de cet Edit, permet pendant dix ans aux Hôpitaux &
autres œuvres de charité du pays de Provence de recevoir
taures les libéralités qui pourron't leur être faites par tel!:ament & donations à caufe de mort ou entre-vifs. Mais
cet article, fOÎt qu'on en coniidere la contexture, ou qu'on
en pefe les expreffions, foit qu'on le réfere à l'enfemble
de la Loi & à fon objet général , el!: trop vifiblement
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PALAIS
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PR OVEN C E.
467
re!lreint aux œuvres de charité déja [ubfi!lantes à cette
époque eo Provence. Il n'e!l per[onne qui oe Ce rappelle
dans quelles circonfiances les Lettres - patentes de 1761
[am intervenues, & que [ollicitées par les Adminifirateurs
du Pays, dans un moment où malgré les. emprunts les plus
ruineux, les mai[ons de charité de cette Province ne pouvaient [ubvenir ni à leurs engagernens précédens, ni aux
néceffités preifantes des pauvres, elles eurent moins en
vue de déroger' à l'Edit de 1749 qui formait à cetre ipoque la loi générale du Royaume, que de leur pré[enter
quelques reifources, [oit eg perfeél:ionnant leur adminill:ratian en économie, [ai: [ur I~urs frais de manutention &
d'entretien, [air en leur accordant pour un remps limité
le droit [olliciré par la néceffité même de recevoir un plus
grand nombre de libéralités. Ainfi cette dérogation à cet
Edir eH con<;ue dans des termes qui paroiifent la rel1reindre
expre{fémenr aux Hôpiraux & aurres œuvres Ile charité déja
fubfil1antes en Provence, dont il el1 d'ailleurs uniquement
queHion dans le texte de la Loi. Y voir l'intentiori abfolue de favorifer roures les fondations oOl.lvelles, ce [~roit
méconnolcre bien évidemment l'objer principal de la Loi,
q:JÏ fut de venir au recours des érabliffemens de charité
déja formés, qui fut encore de fimpJifier autant qu'il était
poffible ces érabli{femens trop multipliés, & de les réduire
cl1 quelque forte à nne [eule œuvre , à un [eul régime.
L'article ID, qui eU celui dom 00 excipe, [e trouverait
donc en conrradiél:ion avec le reHe de la Loi, & en âétruiroit toure l'économie, en rem'erferoit de fond en comble
le fyUême entier.
L'article 1 & 2 de la Déclaration de 1762 font uniquement relatifs aux Séminaires & aux éreél:ions de nouvelles Cures & Vicairies perpéruel)es. Le Légifiateur adoucit
eo faveur de ces objers privilégiés feulement les difpofirions de l'Edit de 1749. L'art. 3 comient une énuméra_
tion plus longue & plus déraillée des fondations dont il
eft patlé dans l'article 3 de l'Edit de 1749; fondatiDllJl;
0 0 0 :l.
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qui ne tendent ~ l'éreaion d'aucun nouveau Corps, Col-'
lege OU Communauré, & en faveur defquelles l'Edir de
1749 dérogeoit lui-même ~ l'obligation impofée par l'arr.
1 & 2 à rous les nouveaux établi/femens de rapporrer des
Le~tres-parenres.. L'arcicle 9 parce: En: can/idératian de la
faveur que méritent les Hôpitaux & autres ét.:l6fi/fèmens
énoncés en l'article précédent, voulons que les difPofiûons de
derniere volonté par lefJuelles il leur aurait été donné d{:puis
l'Edit du mois d'Aoat I749, ou leur ferait donné a l'avenir
des rentes, biens-fonds & autres immeubles de toute nature.
[aient exécutées, dérogeant il cà égnrd il la di/po/ition de
l'art. I7 de cet Edit, [aus les claufès, conditions & réferves
énoncées dans les articles fuivants.
Dans ces arricles fiJbféquens. le Légif1Jteur prévoit différentes hypothefes, & impofe aux établilTemens de chariré, légataires ou donataires différentes obligations fuccefllVes. Tous ces articles foOl également étrangers à la caufe ;
car fi la fondarion efl: confirmée, les adminilhateurs de
l'hoirie de Me. Maillard ne refufent pas de [e [ou mettre à
ces différentes dilfJOfitions. II ea vrai que les expreffions
donr le Légil1ateur s'efl: fervi paroi/feOl d'abord bien généraies; ce n'eH pas feulement à l'emploi des deniers comp:.
rams app.artenans aux Hôpiraux qu'il pourvoit, mais ceux
des Paroi/fes, F ahriques d'icelles, Ecoles de charité,
rabies ou bouillons des pauvres des Paroi/fes, lui paroi/fent
mériter la même faveur. Or ces établi/femens étant de la
même narure, & quelques-uns d'entr'eux érant prêcifément
les mêmes que ceux énoncés dans les articles 3 de la Déclaration & de l'Edit de 1749. rien n'empêche de croire
& rout porte au contraire à pen[er que le Souverain les a
tous regardés du même œil, & n'a voulu établir entr'eux
aucune diflinaion.
C'efl: en effet en faveur de tous les écabli/femens éuoncés
dans l'article précédel}t, que l'article 9 adoucit la rigueur
des difpofitjons de l'Edit de 1749, & permet, malgré les
prohibitions portées par cet Edit, qu'il leur [oit donné ou
�D U
PAL AIS DB PRO V Il NeIl.
'469
légué à l'avenir tolite force & nature de bi~ns. Qu'imporce après cela que la dérogation li[[érale ne foit pas
bien précife', quand .la çlérogation de fair eH inconteHable;
& fût-il bieo vrai qu'en dérogeant aux ânicles 14 & T7
de l'Edit de 1749, l'article 9 de la Déclaration de 1762
eÎIt dll déroger encore à l'article 19 de ce même Edit,
-comme plus parciculiérement relatif peue-être aux fonda'rions nouvelles; Cene fimple omiffion de la claufe dérogatoire t~'elt-elle pas plus que fuffifamment fuppléée par
la difpofition poljtive de l'article 9, expliquée auffi clairemenr par l'arcicle précédent auquel elle. fe réfere ?
N'eH-il pas évident, n'eH-il pas fenfible que le concours
de certe multieude d'établilfemens de toute efpece nuit à
ces établilfemens eux-mêmes; qu'il fe confomme ainfi en
frais d'adminilhation & de régime une portion confidérable du bien & de la fubHance des pauvres qu'on économiferoit par la feule réduétion; que d'ailleurs la plupart de
ces fondarions parciculieres ne font pas d'une utilité bien
certaine, bien pure, bien dégagée de toute fingularité, de
tuut orgueuil? Voilà pour l'intérêt des' pauvres eux-mêmes;
mais li l'on confidere enfuite le 111ême objet fous un autre
point de vue, on fera auffi frappé de la ,confufion que
met dans l'Etat, dans la fociété, c~tte foule de corps,
d'œuvres & de fondations différentes. On ,fera choqué que
des établilfemens qui n'ont après tout qu'un feul & unique
<5bjet, fe reprodui[ent fous tant de formes différentes, en
rrop de détails trop minutieux, qui occupent ainfi & ablOrbent prefque en pure perte le temps des citoyens qui
auroient pu devenir uriles, & que l'habitude de ne s'occuper que de petites chofes, rend enfin incapables de
s'élever à des objets plus importans,
.' Les accroilfemens trop rapides des établilfernens déja
formés fairoient perdre pour le commerce, pour la [ociété,
pour les familles un trop grand nombre de biens fonds
& d'immeubles de coure nature. La multiplication exceŒve
de ces mêmes- établilfemens enleve eo quelque [orte à l'Etac,
�47 0
Jou "R N A L
un trop grand n-ombre d'hommes qui, dans une adminiftration trop bornée & toujours rivale d'une infinité d'autres, contraélenc enfin un efprit de petitelfe, de jaloulie
& dë rivalité. De deux abus auxquels l'Edit de 1749 avoit
voulu pourvoir, il en érait donc un donc la réformation
ne portoit aucun préjudice aux pauvres. Le projet de remédier à l'autre au contraire, iilivi avec trop de rigueur,
pouvoit diminuer leurs reHources. Telles furent les conlidérations puilfantes qu'on fit valoir auprès du Souverain,
& qui le déterminerent fans doute à modifier, à adoucir
les difpofitions de cette feconde partie de l'Edit. Qu'ori
parcoure les Lettres-patentes de 1761 & la Déclaration de
1762., on n'y trouvera aucun article, aucune phrafe qui
puilfe do.nner à entendre que le Souverain eût voulu donner
plus de faveur, plus de facilité que par l'Edit de 1749
lui-même, à la créatio'll de nouveaux établilfemens, & que
fan unique objet n'ait pas été de venir au fecours des ét<;blilfemens déja fubli!l:ans, que l'exécution trop rigoureufe
privoit d'une trop grande partie de leurs relfources.Qu'on vienne au fecours des pauvres dont fourmillent
les états les plus fertiles à la fociété, & qui par une
malheureufe inconféquence font prefque raujours les moins
lucratifs, à la bonne heure; que le 1 pauvre laboureur qui
par fan travail & fes fueurs contribue fi elfentiellement à
notre fubfi!l:ance, & ne -peut néanmoins le plus fouvent
parvenir à s'alfurer fa fuhfillance à lui-même, foit fecouru
dans fa vieillelfe ou dans les- temps de calamité, rien de
plus humain & de plus juGe. Mais' des Avocats, des Médecins , des Chirurgiens dévoués à une profeffion qui n'efr
pas de premiere néce:ffité, & qui pourtant alfure à ceux
qui l'exercent avec fuccès des honoraires importans, ne
font guere pauvres que parce qu'ils méritent de l'être, par
leur parelfe 'ou par leur défaut de' talens. Quelles raifons
pourrait les lier d'ailleurs à une profeffion qui ne leur convient pas, qui n'efr pas la, leur du moment qu'elle..ne peut
les nourrir?
.
-
.
�DU PALAIS DB PROVBNCE.
47 1
Dans l'hypothefe de l'Arrêt du Bauffet, le fleur Sicard
-avoit voulu q;l'unè certaine ponion de fon héritage fll[ confacrée à marier annuellement des pauvres filles. Malheureufement il defiina à ce pieux ufage des biens prohibés par
l'Edit de 1749, des rentes con(1:ituées fur des particuliers.
Sa fondation fut attaquée fur ce fondement; & le procès
qui s'engagea d'abord avec les héritiers & les exécuteurs
teHamentaires chargés de' veiller à fa fondation, fut "terminé
par un jugement arbitral' qui déclara la fundation nulle.La Communauté fe rendit' partie pour l'intérêr des pauvres, & par l'Arrêr rendu en 1768, il fur décidé 'en point de droir que la Déclaration de 1762 n'avoit point touché à l'arr. 19
de l'Edir.
.
MI, l'Avocat-Général conclut à ce que faifant droit à la
requêtè- principale de la Dame Sauze, & à fa demande 'en
rétraélari"'ln, en rant que de befoin feroir, de l'Arrêr d'homologatiop. rendu par la Cour, la fondation dont s'agir
fÎlt déclarée nulle au chef par lequel les pauvres de la fondation font inHirués héritiers des 'biens immobiliaires du
Fondateur, & autres prohibés par l'Edir de 1749, ladir~
Dame Sauze envoyée en poffe1Iion defdits biens immobiliaires; & faifanr droit au premier ehef de la demande
incidenre de ladite" Dame Sauze, les admiriifirateurs de
l'hoirie" de" Me. Maillard fuffent condamnés à contribuer au "
paiement de la dot & droits de ladire D,\me proportionnellement à la valeur des biens n{obiliaires, lefquels feraient à cet effet eftimés par Experts convenus, aù.trement
". - - ,
pris & nommés d'office.
Par Arrêr du 1') Mars 1784, prononcé par Mr.)e Préfldent de Cabre à l'Audience du rôle, la Cour fit tegiltre,
qui fut vuidé le même jour au rapport de Mr. le Confeiller"
de Thorar~e. La fondation fut caffée au chef qui infiitudit
les pauvres de 'certaines c1affes de citoyens héritiers univerfels dans les biens immeublés de la fucce1Iiôn? & .wU'es
probibés par l'artkle 19 de l'Edit de 1749. L'Arrêt d!ho'mologation fut révoqué'; il fut permis à ladite Maillard
,
.
'
"
�~2
JOURNAL
Sauze de fe faire mettre' en poffeffion des biens immeubles
& des capitaux fur des particuliers pour fa ponion la concernant; & au moyen de la déclaration faite par les Reéteurs,
& acceptée par ladite Sauze, comme 'ils abdiquoient l'ad,miniftration qui ·Ieur écoit conférée par ledit Me. Maillard,
il fut dit n'y avoir lieu de prononcer fu~ la commune exécution par elle demandée contre l'œuvre; les admini!l'rateurs de la fucceffion de Maillard furent condamnés à payer
à ladite M'lillard Sauze le montant de la dot de Jeanne
Barbaroux fa mere, ainli que Je prix. de fes coffres & fes
avantages nuptiaux, proponio~nellement à la valeur des
meubles & effets qui re!leroient aux admioi!lrateurs, & ce
fuivant la liquidation & la répanition qui en ferojent faitt;,5
.Rat' Expe.rts; les admini!lrac'eurs furent condàmnés à tous
/ les dépens. Plaidant Mes. Portalis, Gaffier & E!lrivier.
2
ARR Ê T
•
;
X L V J 1 J.,
,
En PrçJVence les Communautés ne peuvent impoferJur les objets
de commerce & d'induJlrie.
'
Les imprfitions doivent porter fur la généralité', & ne peuvent
être établies fans nécejfzté.
un Copfeil de laC.ommunauté-de Roquevâire du
f) Ans.AoÎlt
1_782., il fut impofé fur chaque quintal de
2)
ca pres étrangeres venant des lieux circonvoifins & autres,
fix livres; fur chaque quintal de figues venant a:uffi de l'étranger, quatre livres, & fur chaque quintal de rai uns fecs çu
pences provenant de I~étranger, trois livres. Le 27 du même
mois laCommunau.té demanda l'homologation de la délibération. Jean-Baptifte Negrel, qui avoit formé fon oppofition au bas' de la délibération' & pluueurs autres Commi!:
fionnaires, en demanderent la caffation;. il yeut des requêtes
refpeétives à la Cour des Aides qui furent renv,oyées en
Jugement;
�DU
PALAIS
D!!
PROVENC!!.
473
jugement; après que les parties eurent confenti à ce qu'il
fût établi un prépofé pour exiger l'impolition, la Commu• namé prit pendant l'inflance des fins tendaoces à ce qu'il
lui fût concédé aae comme elle n'avoit pas entendu impofer les fruits en tranjit, & au bénéfice de cet ,aéte, elle
demandoit la confirmation de la délibération, à la charge
toutefois d'établir un magalin d'entrepôt pour cous les fruirs
fecs & etrangers qui feroient introduits dans le lieu, après
une déclaration préalable qui auroit été faite des fruits au
prépofé qui feroit établi à cet effet.
On difoit pour les oppofans, que cecce impolition écoit
injufle, inégale, contraire au privilege de la Province & à
l'avantage du commerce; elle écoit inutile, & la délibération qui l'établiffoit écoit infeétée d'un vice qui la rendoit
nulle; elle écoit iojufle, parce qu'elle porteroit coup aux
Cornmiffionnaires, & les obligeroit d'aller s'établir ailleurs,
ce qui feroit lé mal de la Communauté, en ôtant aux cultivateurs un débouché affuré, proche & facile de leurs denrées; elle écoit inégale, puifqu'elle ne frappoit que fur les
oppofans, qui n'étoienc qu'au nombre de quatre, & qu'eux
feuls ne devoient pas fupporter toute une impolition.
En prJncipe, les impo{jrion~ ne peuvent être établies que
fur les fruits & denrées de confommation; la Cour J'a touj.ours ainli jugé, notamment par fon Arrèt du 10 FÉvrier
1770, entre la Communauté de Marfeille, le fleur Peyron
fon Fermier, & le {jeur Blanchard & la Province, au fujec
des jambons en tranjit. Les privileges des Communautés de
la Province ne s'étendent qll'à impofer fur les confomma-tions; elles ne peuvent affeaer une marchandifé de commerce d'un droit d'encrée ou de péage; ce feroit décourager
le Négociant, & détruire le' commerce & l'induflrie.
D'ailleurs les Communautés ne peuvent impofer que pour
leurs befoins, & la Communauté de Roquevaire dans ce cas
n'a pu impofer; elle e!l: beaucoup au deffus de fes affaires,
& les certificats produits au p'rocès du Tréforier & du Receveur de la Viguerie le prouvent; enfin la délibération qui
Almées l78:z. r;. fuiv.
Ppp
�~4
JOURNAL
établit cëtte impolitidn en nulle, parce qu'elle ell: contraire
à l'article 24 du Réglement, qui veut que les Confeils foient
compofés, pour l'impofition, de v'ingt-cinq perfonnes, & il
n'yen avoit que 13. Soutenir que la Communauté peut impofer ces fruits, c'ef!: aner contre le droit des gens. En
admettant ce principe, les marchandifes feroient foumifes à
Une efpece de péage à chaque territoire qu'elles parcourroient ;
àuffi les Arrêts de la Cour font-ils contraires. La Communauté du Bar avoit impofé fur les huiles qui ref!:eroient plus
de vingt-quatre-heures dans le lieu. Stlr la réclamation, des
Muletiers porteurs de ces huiles, "\a 'Cour, par fon Arrêt du
14 Juin 17) l, calfa l'impofition.
On répondoit que la Communauté avoit été forcée d'impofer les fruits fecs, pour arrêter les abus & la malverfation
des Commiffionnaires, qui s'arrogent à eux feuls tout le
commerce de Roquevaire. Il ell: permis à toutes les Com-'
munautés de la Province d'impofer fur les entrées; le Statut'
eH formel. Les fruits fecs entrent à Roquevaire; ils n'y
entrent pas fous balle & fous corde pour en fort'ir de même;
ils ne font donc pas en tran/it; la vente de ces marchandifes fe confomme l:Lins le lieu; on peut donc les impofer.
Ce n'èf!: point la marchandife expédiée pour l'étrangèr que
l'impolition affeéte; c'efl: la marchandife que le Commiffionnaire ache te ; l'impolition rie regarde pas l'ufage que le
Commiffionnaire peut en faire par la fuite. En principe,
les Communautés peuvènt impofer fur les den rées qui entrent chez elles,' & dont la vente y eH confommée; les
fruits fecs font dans ce cas; ils font donc fufcep,tibles d'impolition.
,
Les Commiffionnaires manipulent lès denrées; ils les affimilent à celles du crô; ils profitent des avanrages de la
localité; ils doivent une partie de leur gain au lieu qu'ils
habitent; leurs concitoyens doivent donc en profiter, fur-tout
par cette grande confidération que la grande quantité de
fruits étrangers qu'ils inrroduifent font bailfer la valeur de
~eux du terroir, & les lailfenr quelquefois invendus. L'im-
,
"
,
�-.
475
polit ion attaquée a pour elle plulieurs Arrêts de la Cour,
'celui emr'autres' du mois de Mars 1736, avec l'intervention
de la Province, qui' rejeita une demande en caffation d'une
délibération portant impo(ition fur les vins forains; celui du
12. Mars 1754 rejetta la même prétention du fieur Negrel
e.nvers une délibération du 2.3 Juin 1753. Une pareille délibéra·tion fut homologuée par Arrêt de la Cour du 2. Oél:obre
DU
17 66•
PALAIS
DE ,PROVENCE.
' . .
On a impofé pour foulager le malheurèux cultivateur dont'
les tailles font exceffives; donc l'impofition n'eH ·pas abufive.
& fi le Confeil n'érait pas compofé de v.ingt-cinq perfonnes.
aù vœu du Réglement; cela dl. indiffétent, parce que la
Cour par fondécret du 9 AcCu 1773 avait permis aux préfens .
de délibérer pour les abfens, en quelque nombre qu'ils fulfent.
Ainficene impofition a pour elle l'équité & la jurifprudence
des Arrêts.
Mr. de Remuzat, Avocat-Géoéral, obferva qu'il faue' des;
impôts dans un Etat. C'eil: un-'principe d'adminiil:ration que'
la néceffiré a foodé; c'eil: par eux que le-citoyen el!: protégé,
défendu; c'eH par eux que regne la tranquillité & que fe fou-·
tient l'ordre public; ils font ce que les voiles font à un
vaiffeau pour le conduire, l'affurer, l'amener au port, mais.
non pour le charger, le gêner dans fa marche & le filbmerger. Auffi ne. doivent-ils jamais frapper le commerce ,.
fait qu'on le confidere dans fan rapport au corps politique ,.
c'eil:-à-dire, comme circulation intérieure des deniers du,
pays ,. exportation du fuperflu & importation même des.
denrées étrangeres, quan.d en les travaillant on peut y trouver'
dans la vente extérieure un bénéfice pour l'Etat; foit que·
confidéré au contraire que comme occupation d'un citoyen,
membre du corps politique, il Ile confiil:e plus que dans.
l'achat & la revente des marchandifes dont' on a befoin poue
y faire un profit.
Sous le premier point de vue " impofer le commerce ,. c'ea:
empêcheè la libre circulation des deniers; dès-lors la balance·
entre la nation & fes voifins n'a plus lieu, & les pertes ne:
.
Ppp~
i .
�47 6
JOURN"AL
peuvent étre que très~conlidérables pour elle. Sous le recond
point de vue, le commerçant qui dans fes fpéculations, dans
fes opérations fe dégoûre, craint de faire lt:s avances de
l'impôt mis- fur la marchandife, de ne travailler que foiblement, & la circulation des deniers languit. Auffi un des
premiers principes de l'adminilharion générale doit être de
protéger le commerce & l'induChie; ils font regner l'abondance & la tranquillité; ils vivifient les .Provinces les plus
arides; ils doivent en tout être favorifés dans un pays flérile
comme le nôtre, dans un pays où les bras feuls du cultivateur induflrieux font l'unique reffource, où le commerce qué
notre politioh ph~que nous rend prefque patrimonial, fait
tout notre bien être. C'efil'induflrie feule qui nous foucient;
c'efl elle feule qui nous donne les moyens de pouvoir payer
nos charges; auffi taxer l'induflrie en Provence, mettre des
gênes, des entraves, des prohibitions au commercè ," ce feroie
écrafer l'habitant & opérer dévafiation. Il faut dans un Etat
policé éteindre' touS les privileges exclulifs, & n'en laiffer
"qu'à la nation & au travail. Ce principe doit bien -plus
encore être adopté dans les, pays oll les richeffes naturelles
manquent. Le draie concédé à nosl Communautés d'impàfer
fur les denrées, fait des entrées ou forties, ou des rêves,
ne peut ni ne doit nuire à cette liberté. "Ce droit que les
Déclarations de nos Rois reconnoiffent, & que les Arrêrs
de la Cour maintiennent; ce droit qui fait le bien des cités
& le foulagemenr des peuples, efl un droit diél:é par la néceffité. Il élOit impoffible, dans un pays où la nature. fournit li peu, de faire porter" toutes les impolltions fur les
fonds; c'eut été décourager le cultivateur & écrafer l'agriculture; il a fallu établir une forte d'impôt direél: que le
malheureux cultivateur ne payant pas direél:ement pour l'objet
de" fa récolre J croit ne pas payer; trouvant fa fubfiflance
dans fon travail, il n'envifage pas ce qu'il paye d'ailleurs.
C'eR ainli que par l'impolilion elle-même on efr venu à
hou! d'exciter l'ind ufirie.
Mais èe droit facré des Communautés ne peut, s'étendre
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·P A LA. l
S
P1t 0 V! Nell.
]) Il
'477
jurq~'ll impofer les denrées e~ tran.fi.t, ni les matieres p.ro-
chalnes du commerée & de l'mduHne; ce font des objets
qui fortent de la fphere dès affaires municipales. Impofer
le commerce & l'indufl:rie, c'efl: impofer des objets qui fone
fpécialement fous la proteél:ion du Princej par les principes
du droit des gens, la franchife du commerce doit être
entiere; & fi quelquefois des raifons politiques néceffitent
des impôts, ce ne pem être du partage des adminifl:rations.
-particulieres & locales; cette matiere ne peut appartenir
qu'à la fcience économique qui embralfe tous les lieux, à
l'office de légiilateur qui placé à la tête de l'adminiliration
générale, a feul le pouvoir & les vues nécelfaires pour concilier les intérêts divers des peuples foumis à fa domination,
& les balancer avec ceux de fes voifins.
Notre fage conLHtution ~efpeae cerre partie de l'adminiliration; elle n'a jamais autorifé une cité à taxer les denrées en tranjit, ni celles qu.i font dellinées au commerce;
fon intérêt particulier n'ell point un motif fuffifant pour lui
permettre d'aller contre. l'ordre public. C'efl: la doél:rine du
nouveau Commentateur de notre Statut, qui s'appuye fur
l'opinion de Grotius, parce que le commerce efl: de l'intérêt
de la faciété humaine, & gue perfonne n'en reçoit du dom-
m..
.
Bien-loin de pouvoir à leur gré faire porter les impoûtions indillirrél:ement fur tOUte forte de marchandifes, les
Communautés fO"'t tenues de ne pas s'écarter dans l'affierte
de ces impofitions, des regles' de l'équité &. du droit de_s
gens. II faut chercher à préfent fi la Communauté de Roquevaire dans l'impofition dont il s'agit, ne s'ell P?int écartée
des principes du droit.
.
- La Communauté, en fe fairant concéder aél:e fur le barreau
de ce qu'elle ne prétendoit pas impofer fur les fruits en
tranjit, a-t-elle bien lavé fon impoûtion de ce dont on
l'accufe? Elle n'impofe pas fur les denrées en tran/it, mais
elle impofe fur l'entrée de ces denrées; elles ne doivent pas
l'impôt, parce qu'elles paifent à l'étranger, mais parce
l
,
..
�~8
JOURNAL
qu'elles entrent dans le lieu de Roquevaire, & -qu'elles y foni
attachées, quoiqu'eUes y encrent pour y être- préparées, &
delà expédiées pour l'étranger; elles y entrent pour être
manipulées par l'induflrie. L'impolition affecle donc une
matiere premiere de commerce, une matier~ etTentielle qui
tombe dans le cas du commerce général, & qui doit par~
eiciper à fes franchifes. L'Arrêe de 1736 ciré par la Com_
munauté efi conforme au privilege général des villés de la,
Province de pouvpir établir des droits d'encrée; mais l'impolit ion qui écoie alors attaquée n'aftèél:oit pas l'indufirie;
il en eH de même de celui rendu le 12. Mars 1714; il s'agiffoit d'une impolition fur le vin. Quant à l'Arrêt du 30 Mai,
qui- condamne des Marchands de foie de Cotignac qui querellaient une impofieion établie fur les cocons, ce dernier
Arrét eH en effet dans la nature de la quefiion préfence;
les cocons font bien matiere à l'indufirie, & à une indufrrie
qui mérite une proteél:iQn fpéciale. Mais fi cet Arrêt fut
furpris à la religion de la Cour, elle ne tarda pas de le
contredire bientôt, & d'en anéantir les effets par un Arrêt
de Réglement réndu à la pourfuite des Procureurs du Pays
du 30 Juin même année, qui prohiba nommément aux Communautés d'impofer fur les cocons & les foies, comme- étant
du rapport de l'indufirie.Il eH de principe que les impolitions dQivent chre géné-.iale's; elles ne peuvent affeél:er une feule datTe de citoyens
plutôt qu'une autre; elles doivent porter également fur cous;
il vaudrait encore mieux '},ue queJque~ par~iculiers ne payaffent pas alfez, que _s',1 s en trou VOIt qUI payatTent trop;
l'aifance des premiers revient coujours au public, & la ruine
des feconds fe trouve toujours contre lui. Auffi la Jurifprudence efi-elle conHante fur ce point. Toutes les fois qu'.on
a préfenté une' impolition portaôe' f~r quelques particuliers,
& non fur la généralité, la Cour l'a toujous profcri-te, comme
cOJ1traire au droit d'un chacun. L'impolition de la Communauté de Roquevaire affeél:e une denrée qui- ne peUl guere
entrer dans - ce village que pour le compte des Commi[\
�•
D U PAL AIS D 11 PRO v B Nell.
479
'ûonnaires, qui ne font qu'au nombre de quatre pu cinq. C'dt
donc fur -ces quatre ou cinq feulement que porte cette impofition ;. elle eft donc non feulement contraire à la franchife
du commerce & au privilege de la Province, mais elle eft
en~ore inégale & injufte; elle eft encore inutile.
La premiere loi en fait d'impofitions, c'eft la néceffité j
car pourquoi les établir, fi l'on n'en a pas befoin? Auffi ell-ce
'peut-être à tort qu'on fe figure que les Communautés ont
.le droit .de s'impofer pour le feul motif de fou tenir leurs
-,denrées territoriales; elles ont le droit de s'impofer pour
[outenir plus facilement les charges de l'Etat; & pour y
parvenir, elles peuvent' choifir tel genre d'impofition qui lui
convient le plus; mais elles ne peuvent'pas, fans aucun befoin,
élu fans diminuer les impofitions d~ja exiHantès l établir une'
impofition nouvelle, par la feule raifon qu'elles veulent entretenir le prix des denrées de leur crù. Or, la Commu,nauté de Roquevaire n'étoit pas dans ce cas, pllifque les
certificats produits attef1:ent què toutes les impofitions étoien't
acquittées, & qu'il y avoit en cai{fe de quoi fournir à routes
les dépenfes & à tous les paiemens des charges.
Mr. -l'Avocat-Général obferva encore que quoiqu'il y eùe
un décret fur requête portant permiffiol) aux préfens de délibérer pour les abfens, en quelque nombre -qu'ils fu{fent,
ce déCret ne pouvoit détruire un Réglement fait & confenti
.par la Communauté, qui avoit recru la fanaion de la Loi
par l'Arrêt d'homologation; & d'ailleurs, à prendre ce décree
à la lettre, le Confeil pour l'impofition n'y ell point exprimé, & en conféquence il n'innove rien à cet égard. Il
étoit donc illégal; il ne pouvoit donc r)en Hatuer.
Mr. l'Avocat-Général. conclut à ce que fans s'arrêter à la
délibération, qui feroit déclarée nulle & injuHe, & comme
teUe carrée, inhibitions & défenfes fu{fent faites aux Confuls
&. Communauté d'en prendre de pareilles à l'avertir, à
peine de 3000 liv. d'ap:1ende, & d'en être informé.
Arrêt à l'audience de la Cour des Aides du I I Avril 1783,
�480
_
Jou
Il N A L
conforme aux. condulions ; la COmtùunauté fut condamnée
aux dépens envers toutes les partie,s.
ARRÈT
XLIX.
LCë Communauté d'Aix a le domaine direa & utile des régales
fur les tours, murs & folfès de la ville.
ES nommés G\ligou & Gavot avaient acquis de la Communauté d'Aix, à bail emphytéotique, un terrein attenant le remp:1rt de la ville, p,our y bâtir des magafins. Ces
particuliers demanderent au Bureau des Finances la permiffion de bâtir; la fe<1.uête de Guigou 'fut communiquée au
Receveur des Domaines, qui répondit que le terrein vendu
fe trouvant dans les régales appartenantes ~u Roi, Guigou'
ne PQuvoit fe prévaloir de fon acquiiition; celui-ci repliqua
qu'il luiétoit indifférent de payer la redevance à la Communauté ou au Roi. Ordonnance du 10 Juin 1771 qui déclare l'aéte de tranCpor! & défemparation' à titre de bail emphytéotique palfé par les Con(u!s à. Guigou nul & de nul
effet, lui permet de faire bâtir .un magafin (ur le terrein,
à la charge par lui de payer, fuivant fon offre, à l'avenir
à perpétuité par chacun an ,au Domaine de Sa Majefié, &
non à autre, le cens de 141iv. 14 fols porté par l'aéte, de reconnoître tenir le terrein fou,s la majeure direéte de Sa
Majefié, toutes les fois qu'il en ferait requis, comme auill
d'en payer le lods à Sa MajeHé à chaque mutation, & tous
autres droits & devoirs apparrenans au Roi, .comme Seigneur direét. Un mois après ,. Gavot ay.ant demandé la même
permilIion au Bureau, il intervint une p.1reille Ordonnance
à la requilition' du Procureur du Roi, qui fut fignifiée aux
Con fuis , Alfelfeur & Communauté d'Aix. Appel de la part
de la Con1muoauté, qùi deEUeura impourfuivi.· Pierre
.
L
qUI
"
�v l! N C B.
48 ~
qui avoit obtenu une conceffion emphytéotique des Confuls,
trouva les mêmes obllacles de la part du Bureau. En conféquence, le 27 Avril 1779 nouvel ap'pel de la part des Confuis d'Aix' envers les Ordonnances ~u Jugemens rendus en
faveur de Guigou, Gavot , &c.
On difoit pour la Communauté d'Aix, que la Reine Jeanne"
par fes' Lettres-patentes du 4 Septembre 1369, donne à la:
ville la permiffion de retirer omnem utilitatem & commodum
fuœ provenire poifimt ex dic7is muris, torellis & vallatis civilatis eju[dem. Cette permiffion n'ell point gratuite; la Ville
avoit fait confiruire les murailles & les tours; elle avoic
ouvert les foffés à fes dépens: deduélis in cOlifideratùJne magnis
expenjis faais per diaos fideles flOJlroS cives A'luenfes in conJlructione dic70rum murorum & vall.atorum. La ville ell foumife à les<
enrretenir &' à les réparer: ita 'luidem, 'luod prœdic7œ commoditates percipiendœ ex eis conferventur & expendantur pe'"
univerjitatem ipfam ir; reparatione & conflruaione diaorum mumrum & vallatorum, cÙ!n for/itan reparatione & conJlruc7ioneali'luâ indigebunt.
Pour faifir le véritable fens de ces difpofitions, il ell né_
ceifaire de fe tranfporter à l'époque où ces murs & ces;
f.()ifés furent conllruits. La Ville était alors en franc-aleu;,
c'ell un droit dont elle a' joui dans tous les temps, non
feulement 'en force du droit commun qui régit la Provence"
mais encore en vertu d'un droit particulier. 'Les Comtes'
de Provence n'ont jamais po/fédé à Aix la direéte univerlèlle;.
tous les biens y ont été tenus allodiale ment. Les ennemis
de là Reine Jeanne voulurent s'emparer de fcs Etats; ils.
affiegerent la Provence; la ville d'Aix conHruic des murs,
elle arme des tours, en garantit les approches par des foifés;,
elle épuife les forcés de fes habitans pour tOUS ces ouvrages;.
elle en fournit toute la dépenfe, & cette dépenfe embraife·
généralement toue ce qui pouvoit être è/fentiel à ce genre·
de conllruétion, les terreins fur lefquels les murs, les toms.
& les fo/fés font placés, le travail' & les matériaux.
La Reine Jeanne veut récompenfer ces généreux habitans~
Années 178:1. & fuiv.
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JOURNA~
Que pouvoir-elle leur accorder en indemnilé de cette conCtruétion? La propriéré des murs, des' rours & des foirés?
Ces objers, eu égard à leur dell:inarion, éroienc hors de
rour commerce; ils écoient infufcepribles de lran(parrs; ils
font rangés dans l'ordre de cho(es faimes ; fane?)! tju0'lue rei
veluti muri & portœ civltatis 'luodammodo divini juris fam,
& idd nullius in Donis fime. ( InGir. li\". 2, rir. 1, §.. la.)
Le Souverain n'en a pas plus la propriété que (es (ujers.
Les murs, raurs & falfé.s matériellemenr pris, c'eG-à-dire,
& le (01 & les marériaux, n'apparrenaienr pas mieux à la
Reine Jeanne; la ville en avoir fair la dépen(e cora le. Ce
fol & ces marériaux canverris en nature de remparrs furent
res. fanc1œ, ru rll/llius, res divini juris. Per(onne ne pouvait
en di(pa(er; mais leur valeur incrinfeque n'en ,apparrenait
pas moins à la ville; l'emplacemenc & cour ce qui incérelfait
la con(huétian , n'avoienc painr perdu la trace de leur aureur ;
la main qui les avait focolés, ne celfoit pas d'en êrre la
rnaÎcrelfe. La ville, en demandanc à la Reine Jeanne une indemnité pro relevatione ipfarum expenfarum, ne pouvait donc
follicirer la propriété des murs, raurs &'"foflës; lU. parce
que ces objers en nature de remparrs n'écojem point dans
le commerce; 2°. p·arce que marériellement pris, la propriété n'en éroie paine à la Reine Jeanne. Les Aueeurs difene que les fo~s & 'les murailles n'appartiennent point
au Seigneur· juHicier. (Caeelan, IiI'. 3, chap. 41; Loi(eau,
des Seigneuries, chap. 3 & chap. 12; De(peilfes en fon
Traieé des droits Seigneuriaux, tir. ') , arr. 2, feét. 10. )_L'an
el! étonné de voir que l'Auteur de la Jurifprudence féodale
de Provence, rie. des régales, arr. 1 t, ait ofé comprendre
dans la c1affe des régales mineures, le fol des remparrs &
les rempares eux-mêmes; il a cité -!?all:our, de Jeudis, IiI'.
tie. 4; & cer Aueeur qui faie l'énuméraeion de cous les objees compris dans les régales mineures, ne parle paine des
murs, falfés & cours qui compa(ene l'enceince des villes.
Il ell: donc cereain que la propriéré des murs & des
[olfes"des l'i11es, confidérés comme rempares, & .t<l'nt qu'ils
1,
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483
ont cette defiination, n'appartient point au Souverain, qu'il
n'en a que la police & la furiotendance, & qu'au' contraire
l'ufage en efi dévolu aux habirans. Il en également certain
que les fruits & émolumens des murs '& folI.'és des villes
font fufceptibles de commerce & feigneurie privée. Le vœu
des Auteurs a toujours été qu'ils fuIrent artrjbués aux villes
& Communautés pour la réfeél:ion & entretien des chofes
dont ils proviennent. Il étoit au pouvoir de la Reine Jeanne
de permettre, e [a qualité de Souveraine, à la villè de
profiter des émoillmens & commoèités des cours, murs /lç
foIrés tant qu'ils étoient en nature de remparts, & c'ef!:
ce qu'elle a pe,rmis. En donnant à la ville les fruits & émo~
lumens de ces murs & de ces foIrés, elle vouloit l'indem~
ni fer de dépenfes que leur confiruél:ion avoit entraîné" &
la foumenre à l'obligation de les entretenir; la Reine Jeanne
ne fe réferve point le domaine direél:, parce qu'elle n'y
avoit' aucun droit de propriété.
Rene la queHion de [avoir fi la ville pouvoit donner à
,nouveau bail, foit les foIrés qui entourlint les remparts,
foit les loge mens praticables dans les remparts. Le droit
commun prohibe de faire des fenêtres, des portes, des
ouvertures, & de commettre la plus légere altération fur
les murailles, porres, tours & foIrés des villes i il défend
d'y habiter, parce que les chofes quœ [unt nulliu , ne doivent point 'être à l'ufage privé d'un feul ou de quelques uns•.
Mais il eH confiant que le 'Roi dans les villes & les, Sei;
gneurs dans les lieux, proteél:eurs des murs, tours & foIrés,
& en vertu du- droit de .tuïdon qui leur appartient à titre
de Souveraineté ou de Seigneurie, peuvent en, concéder la
permiffion, lorfque l'encejnte de l'habitation n'en fouffre·poinr.
Les murs & les foIrés font indeHruél:ibles & inaliénables.
mais la jouiŒance des murs & des foIrés, lorfgue la fûreté
publique n'en eH point offenfée, n'ell: poinr conGdérée comme
une caufe de defiruél:ion, ni comme une aliénation. Tous
les Auteurs ci-devant cités anefient cette vérité; il en etc.
même qui [outienneQt que les villes peuvent s'arroger d~
Qqq2.
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pareilles facultés (ans la permiffion du Roi, li elles one
fait conllruire les remparts de leurs propres deniers. Rollandu1
Valle, liv. 2, conf. 84; & Cancerius, var. réfol.
parr. 3, cap. 12-, font de ce fentimenr; il eH vrai que cene
maniere d'ufer des .murs, tours & folfés des villes eH cans
le commerce, qU'aD peut -en acquérir la polfeffioD par la
pre1ËriprioD; tel ef!: le fentimene de d'Argentré, tit. des appropriances, arr. 266, cap. 23. Cet Auteur ne parle que
des chemins; mais ce qu'il en dit s'applique aux remparts.
Il efl: permis d'en ufer _, pourvu que leur def!:in!ltion prin. cipale ne fait point dénaturée.
Quand donc la Reine Jeanne a concédé à la ville omnem
utilitatem & 'commodunz qUIl! provenire, po.ffùnt ex dic7is muris,
torellis & val/atis, elle a entendu lui accorder la permiffiOll
c1'enfemencer les folfés, d'en percevoir les fruits, d'y bâtir
même pour fan ufage & fa commodité; de bâtir près des,. ,
remparts, de fe, ménager des logemens dans les <tOurs; en..
un OlOt, d'en retirer taus les profits & tous les avantages
dont iJs pouvaient êrre fufceptibles, fans nuire à la clôrure
de la. ville: Taures ces bafes de jouiifance fane enveloppées.
dans le fens de ces mots : omnem utilitatenz t;, commodum .
(jUil! provetlire po1fùnt. La ville auroit pu en profiter -pour
elle-!TIême ;, elle a pu p.ar la même raifon en transférer le
droit à d'a'u"rres. Il ne lui était pas moins permis de donner')
à nouveau bail. Une ville peut acquérir par la poifeffion le
droit de donner à nouveau 'bail les tours & les foifés qui
entourent ces mlll"s; on. trouve cette quef!:i(}n doél:emenc
trairée par Bertrand, vol. 7, conf. 183. Mais combien mieux
llDe ville qui' a elle-même fourn.i l'empl2cement de fes murs,
tours & folfés, & qui en a fait l'entiere conf!:ruél:ion à fes
dépens, pourra-t-elle en bailler des portions à emphytéofe,
lorfque le Souverain qui en a la tUÏtion, aura jugé dans fa
fageife que ,cene maniere d'ufer & de profiter ne porte
aucun préjudice à la fùreté publique.
En force de ce premier aél:e, la ville donna -à nguveau
bail en 1.1-17 & 1442 à Pierre Alberti, Archivaire du Roi
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48)'
Réné, les foffés depuis l'ancienne porte St. Jean, qui érait
au commencement de la rue du Pont-Moreau, en montant
vers le nord, jufqu'à l'endroit où (e trouve aéluellement
la rue du College. Cet Alberti que fa charge conftituoit'
dépoGtaire des tirres & des droits du domaine, auroit - il
penfé à (e charger de ces baux emphytéotiques, s'ils euffent
été infeélés d'un défaut de pouvoir? n'était-il pas à raifon
de fon minil1:ere prélilmé connoltre les droits du fifc, &
-porté à repoulfer toure entreprife contraire à ces droits?
Ces aéles furent paffés q~ns 'le lieu de la réGdence des
-Comtes de Provence, fo~s les yeux du Roi Réné.
Ir el1: vrai que la Reine Jeanne, par Uh Edit donné 'à Naples
le premier Mai 1368, avoit juré & promis de n'aliéner à l'avenir ni en total, ni en partie, les domaines qui étaient unis aux
Comtés de Provence & de Forcalquier fous le Roi Robert
(on a'ieul. Elle avoit même promis, par un Edit du 17 Septembre 136), donné à la requiGtion des habitans d'Aix,
de refufer raut hommage, & de réGHer à main armée a:lX
acquéreurs de ces domaines; ce qui prouve que la permiffion
contenue dans les Lettres- patentes de 1369 n'étoit ni un
don', ni ,une aliénation.
Quand on pourroit envifager les Lettres-patentes de la
Eeine Jeanne comme une aliénation Ou une donation,
Louis II. Comte de Provence l'auroit confirmée par fes.
Lettres-patentes du ') Septembre 1399, où il appràuvoit en
tefmes -exprès les donations, conventions, li!Jertés, gr~ces
oélroyées par la Reine Jeanne. Les Rois de France qui
ont regné en Provence après la mort de Charles d'Anjou, &
qui ont fucceffivement approuvé les dons, conceffions &
droits accordés à la ville par les Comtes de Provence, l'auroient également confirmée. Les Lenres-parentes de la
Rein'e Jeanne n'ont donc point été révoquées.'
Sont-elles maintenant révocables? Elles (ont dans lé patrimoine de la Cité, & rous les principes s'oppafent à ce que
la Cité en (oit privée. La Reine Jeanne pouvait faire ceffer
la permiffion qu'ellé avait donnée à la ville, pour en jouir
�~6
.
JOURNAL
ufque ad beneplacitum; mais les Fermiers du domaine ont
eux-mémes avoué dans l'inflance pendanre devant la commillion en 1688, que le ben plaifir de la Reine Jeanne
avait fini par fa mon. Perfonne n'ignore que le domaine
des Comtes de Provence, qui en foi n'écoit paine aliénable,
qui ne l'a été qu'en force des Loix que les Comtes _de
Provence s'écoient impofées à eux-mémes, écoit fujet aux
Loix générales de la prefcription. Ce principe incomeflable
a écé conracré par une foule de citres, & nocamment par
les célebres ,Lettres-patentes en for me d'Edit du mois de
Juin 1668.
.
Les Fermiers du domaine avoient eu autrefois la prétention de comprendre dans la claife des domaines engagés,
les domaines aliénés par les Comtes de Provence. Les Gens
des Trois-Etats du Pays avoient obtenu divers Edits qui
confirmoient ces aliénations. L'Edit du Roi Louis XII. du
.8 Mars 1 )03 avoit établi que la prèfcription de trenre ans
les metcoit à l'abri de coute recherche, l'Edit du Roi
Franc;ois 1. du 2.2. Mars 1) 17, l'Edit du méme Roi du 2
Novembre 1 ni, la Déclaration du 20. Juin 1)32; celle
du 21 Septembre 1533, l'Edit du 22 Sepren1bre 1543,
la réponfe au cahier préfeneé à Louis XIII. par les Etats
de ·Provence Je dernier Avril 1612, divers Arrêts.du Confeil
du Parlemeilt de Paris, du· Parlement de Provence avoient
maintenu ces aliénations, ~ femblaient préferver à jamais la
Provence des prétentions du domaine. Les Fermiers furprirent enfLTÏte au Confeil deux Arréts, l'un du ) Oélobre
1666, & l'autre du 3 Délobre 1667, qui leur permettaient
de fe l1)eccre en poifeffion des aomaines & droits aliénés
par les Comtes de Provence; mais la furprife fut réparée
par l'Arrêt du Confeil d'Etpt du 15 Juin 1668, & les. Lettres-patenres en forme d'Edit du méme, jour. L'Arrét d'enrégilhement fait au Parlement ordonne que l'exception &
réferve portée par l'Edit, Arrêt & Lettres ne pourra avoir lie/J
pour les domaines prefcrits contre les Comtes de Provence,
& dOllt la, condition efi échue trente ans avant l'union du.
Comté à la Couronne.
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S'il étoit nécelfaire de recourir à d'autres titres, quel tme
plus viél:orieux & plus propre à impofer mence à l'Adminif[rateur du domaine que les Lettres-patentes de Louis. XJII.
donnees en 1618, après l'époque où-la Ville eut permis à
Adam' Bonfils d'enolorre les preds & jardins qu'il polfédoir,
& qui ont formé le quartier de Villeverte; il avait obtenu
des Lettres-patentes portant don des murailles démolies.
La Ville fe pourvut en révocation du don; elle expqfa fous
les yeux de Sa Majefté les Lettres -patentes de la Reine
Jeanne; en conféquence celles que le Li~utenant Bonfils
avait rapportées furent révoquées, & les droits de la Ville
furent confirmés.
Si le droit de la' Ville eùt été litigieux, 'le Cardinal Mazarin n'en auroit·il 'pas triomphé? Des Lettres-patentes du
mois de Janvier 1646 avaient accordé à ce Prélat le draie
d'enfermer dans la Ville le fauxbourg St. Jean & l'encloS'
du jardin & preds de l' Archevêch~, avec don des vieux
folfés, lices, murailles, droits de régale, pour en difpofer
à fon plaifir & volonté; il voulut en pourfuivre l'exécmion ;
la Ville s'y oppofa; & par la tranfaél:ion du 6 Avril 1647,
il fut convenu que la Ville céderait au Cardinal tous les droits
qu'elle avoit & pouvait avoir en la direc7e des foJ/ès ' viwx ,
'compris depuis la porte St. AuguJlin /ufJu'a celle de St. Jean,
enfemble les cenfes, droit d'exiger le lods ou de rétention eIl
cas d'aliénation, faculté d'égout, arrofages & tous autres droits
"Ju'elle avoit & pouvoit avoir fur iceux, en quelle façon q
maniere que ce fÛt, pour en jouir' & difPofèr par M. l'Arche1!êque & les fiens "ainfi que Don 'leur jèmhleroit, fuivant le
don a 'lui fait par Sa MajeJlé; & de même fuite M. l'Archevêque cede & défempare a la Ville ]èmhlahles direaes & faéultés' de droit de lods & tentes fur les nouveaux foffis, pour
la même 'contenance des foffis a lui remis, avec la même
cenfe dont les vieux fo'/Ji!s fe tl1'ouvent chargés, jùivant la
liquidation qui en fera faite fur le pied des nouveaux Daux•
. La Ville auràit-elle donc tranfporté au Cardinal Mazarin
des droits qu'elle n'avoit' p'as? Cependant l'Adminiftrateur
1
�'488
Jou
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N
li. L
des Domaines n'a jamais penfé contellèr à M. l'Archevéque
d'Aix les direél:es que la Ville lui avoir cédé fur les vieux
remparts, & la po1Teffion du rerrein où ils écoienr conHruirs;
il ne conrelle même pas à la_Ville la direél:e & cous les
droits qui en dépendenr fur les murs, cours & fo1Tés du
nouvel agrandi1Teml';nr d'Orbi relie & de celui de Villeverte.
Comment arriverait-il donc que la ViHe elÎt le domaine
direél: fur ces part~es de murs, tours & folfés, &. qu'elle ne
l'eût pas fur toutes les parties refiantes?
Par les lettres d'amorri1Tement du 14 Avril 1674, la Ville
fut confirmée dans la polfeffion des direétes & cenfives qu'elle
avoir en la place du marché, pred bataillier, folfés; lices,
murailles, cours & régales dedans & dehors, enfemble du
droit de cens, &c. Si la Ville n'avoir pas eu la direél:e de
ces folfés, de ces lices, de ces murailles, l'auroit-on comprife dans les objets fournis à l'amortilfemenr ? Dans l'Arrêt
du Confeil du 19 Juin 1691, portant abonnement des vieux
droits domaniaux, Sa Majefié déclare n'avoir enrendu_ comprendre dans cet abonnement la rédevance de 300 liv. due
à la recette du Domaine par la Communauté d'Aix -pour
la bafiide de Perignane •. Il femble par-Be que le Roi a convenu qu'il n'avoit à Aix d'autre droit domanial. que ceice.
rente.
Mais comment réfiller à cette longue po1Teffion dans.
laquelle la Ville a été & s'efi conl!:ammenr maintenue? Elle·
el!: à la fois interprétative du titre, & prefcriprive. Depuis.
la Reine Jeanne & Louis II., une multitude de nouveaux
baux, une multitude de reconnoilfances fe font fuccédées.
Or, deux reconnoi1Tances fuffifenr pour fonder la direél:e à
défaur de titre primordial. Ici la Ville a pour elle le titre,
primordial, & elle joint à ce titre les nouveaux baux qui
en font l'exécution, & aux nouveaux baux des reconnQi1Tances.
inombrables.
On répondoir pour le Fermier du Domaine, qu'il el!: in-conteHdble que les murailles, les remparts, les folfés' & tous
les lieux qui fervent ou on.t fervi aux. clôtures & aux forti,_.
1
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489
fications des villes du Royaum~, appartiennent au Roi en
pleine propriété, & fom partie de fon domaine par droit
de fouveraineté. C'eU ainli que s'exprime Godefroi, lib. 2.,
feud. ad tit. 56, litt. A. Indépendamment des Doél:ril1es fans
Dornbre-que nous avons fur ce point, il exifte une foule
d'Edits, de Déclarations & d'Arrêts, tant du Confeil, que
des Parlemens du Royaume, qui De permettent pas d'élever
le moindre doute fur la vérité d.e cette propolltion; on le".
trouve rapporrés Clans le Diél:ionnaire raiConné des Domaines,
O
v • Paris. C'eU une autre maxime non moins certaine qu'au~
cune polTeffion, quelque longue qu'elle Coit , ne Cauroit portet
atreinte à ce droit du Sou'verain i & que tout ce qui eft. du.
Domaine eU impreCcripvible.
La Communauté d'Aix convient de ce principe, mais elle,
en contelle l'applicaticHl; il s'agit donc d'examiner 1.es titres;
qu'elle a prodtlit, de 'Ies apprécier, & de favoir en quoi, c.on-.
fiftent les d"roits qu'on lui a tranCmis. 11 ré Culte des Lettres-patentes de 1369, [o •. que le don qu'elles renferment!
en faveur de la. Communauté d' Aix, ne porte· abColument:
que Cur le domine utile, & nullement Cur le dom-aine dire8::
0
. des murailles, tours & folTés de la Ville; 2. • que la Reine.
Jeanne ne· donna à la Communamé que l'uCufruit ,. Ou fi 1~0ll;
veut, une jouilTance révocable de ce domaine utile•. Ces mors,.
omnem utilitatem & commodum...... u{que ad beneplacitum.
noJlrum, ne fJuroient être plus clairs ni- recevoir d'autre ap_
plication. Il n'eU perConne qui ne convienne que la c1auCe·
. u{que ad heneplacitllin noJlrum, porre ave.c elle une condition ,.
un paél:e eITentiel, une des parties intégrantes du contrar.,
J;Jomy, pag. 2. 1 de 'Ces Mêlanges, où il fait l'énumération,
des libéralités que la ville d'Aix tient de la mllnificellCe de:
fes anciens Souverains, dit que la Communauté a re'iu de·la PrinceITe Jeanne le don de l'uCufruit defdites murailles,.
tours & folTés. Cet Auteur n'a déGgné par-là qu'un~ jouiC_
iànce révocable; la Communauté d'Aix l'a reconnu elle-même,
dans ,un ouvrage qu'elle fit imprimer en 1741', intitulé: Re.-.
cueil de plufleurs pieces concernant le.s priyileges, Statuts, .
Années z78z &'fuiv..
R r 1;
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10
'0' !l N A' L
,
On y -rrouve, pag. 184, que la Ville, en conremplarion d"e
fa fidélité, a reçu plufieurs libéralités de fes anciens Comtes
& Comteffes, comme de la Reine Jeanne l'ufufruit de fes
murailles,. tours & foffés. Nos Souverains ne s'étoient donc
pas dépou;lIés en
faveur de tous leurs droits fur les régales
de la ville; la propriété leur en appartenoit toujours, & ils
ne lui avoient jamais cédé qu'un fimple ufufruit, une jouir~
fance qu'il dépendoit d'eux de faire ceifer. VOl!toir que la
dauCe dont il s'agit foit indifférente, de pur ftyle & de nulle
valeur, c'efl: hafarder une erreur d'autant plus infourenable,
d'autant plus évidente, que fi cette claufe n'avoit été fl:ipulée
dans les Lettres-patentes, le don qu'elle renferme fêtoit
abfolumenr & radicalement nul. C'eft ainli qu'on le trouve
décidé dans le· Diél:ionnaire du Domaine, vo. dons du Roi.
La fl:ipulation du retour a été faite dans les Lettres-patentes,
& il eH: indifférent que pour les dons & aliénatio,ns faites
par les anciens Comtes de Provence, cette Hipulation ne
dût pas être de droit. D'ailleurs en fait, le principe de
l'inaliénabilité du Domaine a été établi par les anciens Comtes
de Provence, comme par tous les autres Sauvera;ns; la
preuve en efl: dans lés articles de paix dont la Reine convint' avec la ville d'Aix le 29 Oél:obre 1387; il Y efl: dit expreffémem, pag. 8: Item, que nous & notre fils le Roi Louis,
Cômte de Provence, maintenant -& lorfqu'il fèra d'âge compéteTlt, &. tous les Rois & Com~es fes fucceJfèurs, feront tenus
jurer & promettre de ne donner ni aliéner aucunes chofès de
tout ce qui a été de l'ancien domaine, foit cités, lieux, châteaux, villes, droits OU jurifdic1ioIlS, aucune Communauté ,perfonnes privées ou Eglifes, ains recouvrer, en tant qu'il fera pof
liMe & raiJonnable, tout ce qu'ailra été diflrait, & principalement ce qil'appartient la Viguerie d'Aix & autres Vigueries
icelles confMérées t· unies.
La Communauté d'Aix a tellement été convaincue qu'elle
n'avoit que la jouiffance précaire & conditionnelle des murailles, tours & foirés, que de regne en regne elle a eu le
foin de faire confirmer les privileges, immunités .& dona-
ra
a
a
a
�DU'
PAL.~IS
DE
PROVENCE.
4,9.
tians' que lui âvoient accordé fes Souver.i~s; précaution
qu'elle n~e('lt certainement pas prife, fi elle l'eût crue inutile,
& fi elle avait regardé ,fes titres comme des titres irréfragables.
L'on convient que lorfque le Souverain ne manifefl:era pas
d'une maniere claire·& pofitive l'intention de retirer la gence,
ou, fi l'on veut, le don fait à la Communauté d'Aix' par la
Reine Jeanne, des murailles, tours & f9ffés de la ville, perfan ne né fera fondé à la troubler dans la poffeffion des droits.
que lui donnent les Lettres-patentes. de 1369; mais ce n'el!:
pas à dire pour céla, & parce qu'en l'étai les fucceffeurs de
la Reine Jeanne n'ont pas ufé de la faculté que s'en réfervée
cette Pri~ceffe, n'ell: pas. à dire que le titre de la Communauté foir un titre irréfragable. Ce que lâ Reine Jeanne n'a pas'
fair, le Souverain a·éluel peur le faire, parce que quand même,
les prihcipes du droit public ne l'y autoriferoient pas, la.
daufe' inférée dans le titre de la Communauté 'efl: inféparable & indivifible du contrat qui la renferme; parce que·
fuivant le droit commun, ce. qui efl: de mere faculté eH:.
imprefcriptible; parce qu'enfin perfonne, comme le dit la:
Loi, ne peut méconnaître le titre en vertu duquel il poffede, & dénaturer ou changer la caufe de fa poffe ffi ou.,
Sur le tout, cette quefiion n'efl: pas celle qu'il faut trairer;;
!e procès roule fur
point de favoir fi les titres de la
Communauté d'Aix lui donnent la direéle des anciennes.
murailles, tours & forrés dont il s'agit. La Communauté·
a' Aix prétend que la Reine Jeanne a tout donné, omnem
utilitaum & commodum quœ provenire poffimt ex dic1is rnuris ,
torrellis & vallatis. L'argument pourroir être bon, fi la Reine.
Jeanne-, en fe fervanr dans les Lettres-patentes au mot tout,
l'avait emp10yé dans un fens indéfini & abfolu ;.1i, par exem_
pie, elle avait dit qu'elle donnait à la Communauté d'Aix,
tous les droits qu'elle pouvait avoir lur les murailles" tours"
& foffés de la ville. Mais ici ce n'efl: pas cela. Le mot.
tout qui fe trouve dans lès Le'nres-patentes en fuivi d'une,
expreflion qui le circonfcPÎt & le limite, &. dont il ne [au,..
Rrr2,.
ce
le
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raiL étre fépare. Ce n'dt" pas tous les droits qu'eUe avoj"t
que la Reine Jeanne a donné à la Communauté; c'ell: la
totalité de l'un de fes dro.Îts, c'ell: tout le domaine utile.
A la bonne heure que lorfque les termes d'un don, d'une
conceflion faite par un Souverain font équivoques & obfcurs
on fuive la regle que rappelle Julius-Clarus: henificia Prin~
r:ipum latijJimé funt interprecanda. Mais il ell: des Auteurs qui
penfent que cette regle ne doit pas être fuivie en matiere
de donations faites par le Souverain d'une partie des biens
dépendans du domaine de la Couronne; c'efl entr'autres
l'opinion d'Antunez Portugal, de dOllat. regiis, tom. l , liv. l ,
c'ap. 3, n. 26.
Dans le cas préfent, les termes des Léttres-patences de
y 369 ne fauroient être plus clairs &
plus précis. omnem
lItilitatem & commodum. Ces Lettres-patemes ne fùrent pas
accordées par la Reine Jeanne eX' motu proprio; ce fut filr
la demande que fit à cette Prince/fe la Communauté d'Aix
qu'elles furent données; la fupplique de cette C;ommunauté
y eH littéralement tranfcrite, &' cette fupplique .ne doit
"jamais ê"tre confondue avec la conceflion qui s'en ell: enfuivie. Elle demandait un tranfport ahrolu, indéfini, fans
condition ni reilriél:ion; la Reine Jeanne ne lui accorde
qu'un - fimple ufufruit, une fimple joui/fance révocable.
Qu'importe que la -Communauté d'Aix ait difpofé des
murailles, tours &"fo/fés, comme fi elle en eôt eu le domaine
utile & le domaine direél:? Qu'importe qu'elle en ait difpofé
par des baux emphytéotiques? Cette circonfrance ne conclut
rien; elle efr, on ne peut pas plus, indifférente.. Que fait
en effet la po/feflion dans une matiere comme cellé-ci? Ii
n'en "eil aucune, quelque longue qu'elle fait, qui pui/fe porter
atteinte aux droits du Souverain, & le dép0l,liller de ce qui
efr de fon domaine.) L'Edit du mois de Décembre 168 l
porte que la proprieté des places, des remparts, murs,
foirés, contrefcarpes & dehurs de toutes les villes du Royaume
aflparriennent au Roi, fans que qui que ce foit y pu-i/fe prétendre aucun dr'oi~ de propriété, ni feigneurie direél:e &
,
•
/
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PALAIS
DB
P Il. 0 VB N'c B;
493
lIutres droits feigneuriaux, en quelque f~çon que ce puiif~
ê~re.
La Déclaration du 20 Février 1696 maintient dans la
poifelIion les détenteurs des places des anciens foifés, remparts & fortifications des villes qui les tiennent à titre de
ventes ou concelIions à eux faites par les Maires & Echevins
des vilJe-s, Oll qui s'en font emparés par bienféance; faie
inhibitions & défenfes auxdits Maires & Echevins de les
rroubler en leur jouiifance, fous quelque prétexte que ce
puiife être l' même pour le paiement des cens, rentes ou
redevances prétendues par lefdites villes & Communautés
dont Sa Majell:é -décharge lefdits poifeifeurs, à la charge de
tenir lerdites places en fa cenfive, & de payer par chacun
an douze deniers de cens par chaque arpent defdites places,
& les ·Iods & ventes aux mutations fuivant les coutumes.
On trouve dans le Diél:ionnaire des Domaines, vo. Paris,
plufieurs Arrêts du Confeil. Celui du 26 Août 1678 déclara
que la direél:e & feigneurie fur une partie des murailles,
remparts & foifés de Paris, appartenoit au Roi, & non à
l'Abbaye de Sr. Germain-des-Pre~. Celui du 26 Avril 1681
débouta l'Abbeife de Fontevrault & les Religieufes FillesDieu de leur prétention fur toutes les places des anciennes
& nouvelles for~ifications de Paris, depuis-la "rue Montor·
gueil, jufqu'à la porte St. Denis. Celui du 14 Avril 1691,
en mainteflaor les Prévôts des Marchands & Echevins de
Paris dans la jouiifance & difpofition des places, des fortifications de ladite ville, fires entre la porte St. Bernard
& le lieu où étoit ci-devant la porte St. Viél:or, ajouta que
ce ~ feroit fans préjudice
des cens & droits feigneuriaUlc dus
"
au domaine du Roi aux mutations. L'Arrêt du Parlement
de .Paris du 26 Août 1748 débouta l'Abbé de Sr. Viél:orlès-Paris de la direél:e qu'il prétendoit avoir fur deux maifons
bâties fur les terreins des anciens remparts de Paris. On
trouve un pareil Arrêt dans la colleél:ion de Denifart, vo.
murs, n. 4.
Pour que la poffeffion dont la Communauté excipe fût
�494
ue
1
0
U RNA L
quelque conlidération, il faudroit qu'a fût évident que les
Comtes de Provence ont eu une connoilfance exaéle &
parfaite du genre & de la nature de cette polfeffion. Si lorr.,..
que les prétendus baux emphytéotiques ont été palfés, les
Comtes de Provence n'en ont pas été infiruits, on ne peut
rien conclure de ces aéles en faveur de la Communauré. Or,
tant que les Comtes de Provence ont ignoré que la COO)-'
munauté eût difpofé du domaine direél de ce même terrein,
ils ont pu & dû croire qu'elle n'uroit de fan droit qu'en
conformité de fon ritre, & qu'elle n'en avoit pas franchi
les limites. Quoique les prétendus baux emphytéotiques aient
été palfés dans le lieu de la réfidence ordinaire des Comtes
de Provence; quoique le premier de ces aéles ait été palfé
long-temps apres les Lettres - patentes de 1369 à Pierre
Alberti, A,rchivaire du Roi Réné, il ne s'en en(ùit pas né-.
celfairement que les Comtes de Provence ont dfJ connoître
ces aéles.
La Communauté d'Aix oppofe une Feconde exception, qui
de dire qu'elle auroit pu prefcrire la direéle, parce qu'en
la poffédant, elle ne l'auroit pas polfédée conIre fon tirre,
mais au delà de fon titre. L'autorité de Dunod qu'oppofe
la ComlT.unauté n'eh point applicabiè à la caufe. Si les
Lettres-parentes de 1369 n'ont tranfporté à la Communauté 'à iimple rirre d'u(ùfruit, que le domaitie utile des.
murailles, tours & folfés de la ville, il ne faut pas rai:.
fonner ici d'a pres les principes généraux de la prefcription;.·
il faue recourir à ceux de la féodalité, qui., comme l'obJerve Dumoulin, font des J'l-rincipes particuliers, feodorum
jura funtjingularia. La Communauté d'Aix, d'après fon ritre,
à l'inHar d'un emphytéote: or l'emphytéote efr à l'infral'
d'un Fermier, qui nonjibi,[ed Domino po[Jidet, & qui, porfédât-il mille ans. 1 ne peut jamais prétendre qu'il a polfédé
le domaine direél,' à moins que par l'interverfion expre!fe,
il n'ait donné ouverture à la prefcriprion. Mais il ne s'agit
point ici d'un droit féodal ordinaire, mais d'un 'objet' privilégié, d'un droit qui -fait partie du domaine- du Sou,"
verain, & qui en; conféquemment impl'efcriptible.
en
en
�lH! PRO V Il Nell;
'49~
Le quatrieme & de~nier argument de la Communauté.
'ConGUe à dire qu'il n'exiUe point de domaine direél: [ur
'Un fonds qui eU poffédé allodialcment. Ce principe efl:
vrai; il l'eH encore que [uivant les maximes du droit
.féodal; celui qui tranfporce ·Ie fonds allodial qu'il poffede,
ne peut retenir ou créer le domaine direél: en [a faveur
que par une fl:ipulation expreffe. A la bonne heure que le
pcilfeffeur du fonds allodial ait befoin de [e faire une réferve de la direél:e-, lorfqu'il s'en dépouille par vente ou
par donation' purement & !impie ment ,& [ans fe [ervir
dans le contrat du terme d'emphytéofe. Mais·la Reine Jeanne
n'a pas donné ou rranfporcé puremert & !implemenr les
murailles, tours, & foffés des rem parcs de la ville; elle a
donné taxativement & limitativement à la Communauté le
<lomaine mile defdites murailles, tours & folfés. Or les
principes invoqués ne fallroiellt convellir à un aél:e de cette
naNre. Etoit - il befoin d'y faire ·llne réferve du domaine
direél:? Ce domaiiJe fe trouvant dans les mains de la Reine
Jeanne tout comme le domaine utile, dès qu'elle n'en a
fait forcir que' celui - ci, l'autre y eU inconteUablement
rené.
- Il ré fuite des autres titres communiqués par la Commu:namé, 1°.' que les Lettres~patentes de Louis XIII. du 2.1
Avril 16rS ne-donnent à la Communauté' rien 'de plus que
ce que lui avoient donné les Lettres - patentes de 1369;
2. 0. que quand la Communauté follicita ces Lettres-patentes,
toute la comeUation qu'il y avoit entre la Communauté,
Mr. Bonfils & Mr. le Procureur - Général, ne rouloit que
fur les 'matéria'llx des vieux remparts. La feule choCe qu'il
y ait de remarquable dans ces dernieres Lettres-patentes,
c'ef!: que l'on y explique ces expreffions, omllem utilitatem
& ..commodum, par celles-ci, tous les profits & commodités. La Communauté ne pem donc en exciper comme
d'un titre qui lui donne droif à la direél:e fur I~ terre in
des murailles, tours & foffés de. la ville. Il en ell: de
même des 'Lettres-patentes ,de Louis XIV. de l'année 1646;
1)
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JOURNAL
de la tran(aél:ioD palfée en 1647 avéc M. le Cardinat
Mazarin. De ce que la Communauté a payé le droit d'amorrilfement en 1674' des murailles, tours & folfés de
J'an€ienne ville; de ce qu'il a été dit dans les lettres d'amortilfement, qu'au moyen de ce le Roi confirn:e la
ville dans le droit de polféder à titre de propriété incommutable les direél:es qu'elle a (ur les folfés, licés, murailles,
tours & régales dedans & dehors, il n'eH pas permis d'en
conclure que par ces Lettres-patentes il (oit reconnu que
la Communauté a la direél:e (ur tout le terrein des murailles, tours & folfés de la ville. Ces lettres d'amorti('fement ne (ont pas conflitutives d'un droit nouveau en
faveur de la Communauté d'Aix; elles ne (ont pas non plus
explicatives des droits de cette Communauté; elles ne fonc
que confirmer ceux qne lui donnent (es tirres auxquels iJ
faut toujours recourir & s'arrêter. Il en efl: de même du
Jugement de 1681.
En 1682. le Roi ordonna la confetrion de (on papiel1
terrier en Provence.. il établit une Commiffion' extraordinaire pour décider toutes les conteHations qui pourroient
s'élever dans le cours de cette opération, Les Confuls
d'Aix ayant en conféquence fourni .leur déclaration au papier terrier, le Procureur du Roi qul crut devoir blâmer
cette déclaration fur plufieurs points, préfenta contre les
Con fuis une requête à la Commiffion, par laquelle il demanda qu'ils feroient condâmnés à fournir un état conte-,
nant la défignation & l'emplacement des anciennes murailles, lices & régales qui aV9ient été converties en bâtimens lors des agrandilfemens de la ville. Sur cette requête
il intervint un Jugement conforme le 9- Juillet r686... Les
Confuls ne fatisfirent pas à ce Jugement. Nouvelle requête
du Procureur dl,1 Roi., à laquelle les Con fuis d'Aix donnerent des défenfes; & par plilfieurs Jugemens ils furerit
ci:Ondamnés à fournir .leur éJat qu'ils remirent' enfin, & dans
lequel l'on voit tout ce qui a été errclavé dans Ja ville. Ce
fut enfuite de cette rémiffion. qu'intervint, le Jugement du.
&
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PAL AIS
D B
PRO V B NeE.
497
6 Mars 1688. La Commiffion déclare les maifons, fonds
& héritages fis dans les anciens foffés, lices & régales de
la ville d'Aix, être mouvants de la direél:e de Sa Majefié,
&c. Qu'ea-il arrivé enfuite de ce Jugement? Que peu de
temps après touS les propriétaires des maifons, fonds &
héritages fis dans les anciens fo/fés, lices & régales de la
ville, en Ont pa/fé leur reconnoilTance au Roi, fous 'les
yeux, au vu & fu des Adminifirateurs de la Communauté.
En lifant ces reconnoiifances, on peut d'autant moins
domer qu'elles ont été pa/fées en exécution du Jugement
en quefiion, que dans toutes on voit la direél:e reconuue au
Roi, & le cens ou rente 11. la Ville. Or eH-il raifonnable
de penlèr que tout cela ait été fait fans que le Jugement ell
quefiion eCu été lignifié? Tous les aél:es qui peu~ent fervir
à confiater l'exécution du Jugement donl il s'agit, fe réuni/fent pour en fournir la preuve la plus parfaite & la plus
inconteHable. Qu'importe après cela que depuis 1688 la
Communauté d'Aix ait fucceffivement & de temps 11. autre
exigé des reconnoi/fonces de quelques-uns des particuliers.
qui po/fedent des maifons, fonds ou héritages fis dans l'emplacement des anciennes murailles, tours & foffés de la·
ville? Qu'importe qu'elle ait donné des invefiitures & re~llI
quelques lods; qu'ene ait enfin donné 11. nouveau bail avec
rétention de direél:e des parties de cet emplacement qu'elle:
a repris, o.u dOGt e'lIe n'avoit pas difpofé encore? Rienl
ne fauroit être plus indifférent que ces divers aél:es; c'eil::
de ces aél:es qu'il faut dîr.e qu'ils font clatjdellins, qu'il <Il
été facile à la Communauté de Ce les procurer, & qu'ils ne·
peuvent être d'aucune conlidération. De quels poids pour_
roient être en effet des aél:es po/fe/foires conrre leCquels.
s'élevent tout 11. la fois le titre primordial, un Jugement.
contrad·iél:oire exécuté, une longue po/feffion contraire, &
ce principe cerrain, inaltérable que rien ne peur portet'
atteinte aux droits fdcrés du Sou\'erain, & que le Domai.ne.
de 'Ia Couronne eH imprefcriptible?
Par Arrêt du 7 Mai q8f ,. au rappott de Mr. le CoOr-Années 178:4 & fitiv..
S 5,5,
�49 8
"
0
U Il. N A L
feiller de Robineau de Beaulieu, la Cour a carré le Juge.:
ment avec dommages-intérêts; & faifant droit à la requête
des fleurs Maire-Confuls & Alfelfeur de la ville d'Aix, a
maintenu lefdits Confuls & CommuDnauté dans le domaine
direa & dans le domaine utile des régales fur les tours,
murs & folfés de ladite ville; a fait inhibitions & défenfes
au Direaeur des Domaines, auquel la Cour a impofé perpétuel Glence, de les y troubler, fous les peines de droit;
a ordonné la reHitution de l'amende; a condamné le Direaeur des Domaines à tous le; dépens.
f
ARR Ê T
L.
La fa!!ffè érlOnciation.inférée dans faRe de haptême ne peut
rien CfJlltre la regle, pater ell: quem nuptire demonftranr.
Arthelemi Barbier nâquit à Eguilles le 2. t Novembre
1724' & fe maria le t S Mai 17S2. avec Marguerite Simian;
il vint habiter Toulon avec fa femme, & étant allé travailler à
.Pierrefeu , village près de cette ville, avec d'autres payfans,
il fut trouvé noyé le 17 Avril 1761. La procédure qui
fut prïfe, con Ha te que le cadavre qui fut tiré du puits,
était le cadavre de Barthelemi Barbier. A l'époque de fa
mort, il )ailfa ~n garçon nommé Laurent Barbier, âgé.
feulement de deux ans. Il ré fuite de fon extrait-baptill:ere
qu'il nâquit le S Septembre 17S9; que cet extrait qui lui
donne Marguerite Simian, époufe de Barthelemi Barbier,
pour mere, .déligne pour fon pere André Tournel vigneron,
& on déclara dans cet aae qu'ils étaient mariés. Le 2.6
Novembre 1764 Marguerite Simian fa mere fe remaria
avec André Tournel donc elle eue d'autres enfans. Les
freres de Barthelemi Barbier s'étoient emparés ·de fes biens
après le défall:re qui lui étoit arrivé. En 1783 Laurent
Barbier ajourna:, patdevanr la Cour les hoir~ de Jofeph
B
�DU
PALAIS
DB
499
PROVBNCB.
Barbier fan oncl~, 'pour fe voir condamner à la défemparation des biens appartenant à Barthelemi Barbier foq
pere. Il lui fut répondu qu'il n'était point fils de Barthelemi
Barbier, & que le regiHre de baptême lui donnait un autre
pere.
Par une requête incidente Laurens Barbier demanda ci'êrre
maintenu exprdfémenr dans la qualité de fils légitime de
Barthelemi Barbier, & que l'Arrêt qui interviendroit, feroit
infcrit en marge des regiHres de baptême de l'Eglife de
Toulon, & qu'au lieu du nom d'André Tournel il y ferait
fubctitué celui de Barthelemi Barbier.
On di(ait pour Laurens Ba~bier, que s'il était paffible
d'entrer dans la difcnffion du point de favoir s'il était fils de
Bart!Jelemi Barbier, les tOnGdérations favorables ne manqueraient pas. Barthelemi Barbier vivait avec fa femme .. Il
ell: donc plas Gmple de croire que l'enfant né de Marguerite Simian était fan fils, que de donner cet enfant à un
autre homme. Il eH inutile de pouffer plus loin cette dif-.
cuffion de fait; la nature a enveloppé le myfl:ere de la.
conception d'un voile impénétrable; c'ell: une vérité reconnue; la certitude de· la mere eU de nature à pouvoi['
être mife dans le dernier degré d'évidence; il n'en efr pas
de même' de celle. du pere.
Dans. des fiecles d'ignorance, Jlufage avoit inrroduit différentes efpeces de preuves pour jultifier la vérité de la
naiffance , & pour affurer aux enfans la qualité de légitimes;,
on s'en efl: déC: bufé ; la frivolité de ces preuves ell: aujour":
d'hui généralement reconnue. Il a donc fallu néceffaire-·
ment s'en rapporter à cet égard à des préfomptions. C?efl:·
fur le plus ou le' moins de. probabilité qu'on décide de ·la.
certitude du pere. Ces principes s'appliquent aux filiations.
bâtardes comme aux filiations légitimes.
Dans le cas de la filiation bâtarde, celui que la mere;
déGgne pour le .pere de fon enfanr, & 'lue l'enfant réclame, a-t-il eu une affiduité fréquente auprès de la mere?
L'enfant a~t-il recu de lui ces fecours que le pere ne donne)
.
.
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2.
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.
Jou RNA L
qu'à fan fils? La Loi le préfume pere, & les Tribunaux le
jugent ref. Cela ne peut avoir lieu pourtant qu'envers une
mere libre. Dans ce cas les déciiions de la Jufiice ne font
fondées que fur des préfomptions; elles peuvent conduire à
une erreur; ces apparences de la paternité peuvent être
trompeufes, & celui qui eO: condamné à en remplir les
charges, n'en a pas toujours .Ia vraie qualiré. Mais telle eO:
la na'ture de ces quef.lions, qu'on ne peut les juger que fur
des préfomptions.'
Il n'en eO: pas de même, à beaucoup près, de la filiation
légitime. Ici la Loi a une hafe plus fol ide , les Juges un
appui plus fatisfaifant. Un mariage exiHe dont l'intérêr civil
ell affuré par un contrat folemnel, & dont la fainteté eil:
confacrée par la religion. Des enfans nai1fent: quel autre
pere pourrait-on leur fuppofer que celui que la (ociété avoue,
& que la religion déiigne? En ne confidérant le mariage
que du côté de fan uriliré polirique, il faut conve.nir avec,
tous les publiciaes, qu'il ne fut érahli que pour affurer l'état
des enfans, & pour prévenir le défordre que la légéreté des
paffions humaines auraient pu introduire dans les familles
& dans la fociéré. Refufer de reconnaître pour fils du mari
celui qui eO: né fous la foi d'un mariage légirime, ce ferait
retomber dans les défordres que l'érabliffement des' mariages
a voulu prévenir; ce ferait encore faire dépendre l'état des
enLlns 'de l'incon!l:ance, de la légérefé & des caprices de
leur pere & de leur mere. Il ferait réméraire de tenter
d'avoir une certitude parfaite de la vérité du pere; une préfomprion viél:orieufe fe préfente:. c'eO: celle qui croyant à
la vertu, invite à croire que celui-là ea le pere qui a folemnellement acquis le droir de l'être; que deux époux, en
donnanr un nouveau citoyen à la fociéré, n'oht fait que
remplir leur devoir. 'La Loi, qui préfume toujours pour l'innocence, pourroit-eile refufer de fe rendre à cette pré.
fomption? Lè plus grand mal qui réfulte des crimes pour la
[ociéré, ea celui que produit le fcandale. On doit donc
s'eil:imer heureux) lor[qu'on peut .le prévenir en ne pas
,.
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PALAIS
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PROVIlNC'Il;
10r
'tJ!oyant au crime; il ne faudrait pas, on l'avoue, que cette
'Confidérat!on nous conduislt à une fiupide incréduliré fur ceux
dont nous ne pourrions nous diffimuler l'exifience; mais
lorfqu'il' eH: également poffible de préfumer pour le crime
comme .pour l'innocence, lorfque le nombre des probabiliré~
efi égal, l'intérêt des bonnes mœurs invire à croire à la
vertu; c'eH encpre une de's bafes de la préfomprion de la
Loi: pater efi quem nupcia: demar!flrant. L. 5, if. de in jus
vacand.
.
" La maxime qui oblige de reconnaître pour pere de'
,. l'enfant, dit Mr. Cochin, tom. 4, pag. 492, le mari de fa
" mere, n'ell-elle donc, comme on l'infinue, qu'une opi" nion populaire, fruit de l'ignorance & de la créduliré ?
" C'eH au conrraire le fondement inébranlable de l'érat des
" hommes; c'eH le lien le plus facré de la faciéré; c'eH
" la religion; c'eH la dignicé du mariage; c'eH l'honnêtecé
'1 publique',qui l'a diél:ée, & qui en fait une loi impérieufe
" qui fubjugue tout; doutes, incertitudes, préfompcions ,.
".foupc;:ons diél:és ou par la malignicé ou par une force de
" vraifemblance, tout doit être captivé fous le joug d'une
" loi fi fage & fi néceifaire. L'utilicé publique-, difoit Mr.
" -d'Agueifeau, plaid. 23, le repos des familles, la cranquil-,
" licé des mariages, font les fonde mens folides fur lefquels
" elle a écé écablie. "
La préfompcion capable d'attaquer celle de la Loi, doit
tere écrite dans la Loi même; elle doit être fondée fur un
principe infaillible, pour pouvoir détruire une probabilité auffi
grande que celle qui fert de bafe à la maxime que l'on,
invoque. En s'attachant à certe maxirrie, l'on ne peueJrouver
. que deux exceptions à la regle générale, fondées toutes deux
fur une' impoffibiliré phyGque & certaine d'admeccre ,cecce
p;réfomption i elles font propQfées par la Loi 26, if. de his
qui fui vel alieni jur. funt, qui définit ce que c'eH qu'un fils
. légitime: filium (/lm definimus qui ex vira & uxare ejus nafâtur; fed fi fingamus abfuijJè maritum', verbi- gratiâ, per
.dt:cennium...... vel fi ea valetu~ine fuit, ut generare non p!!lIit,
,;
,
�;ot
Jo
q RNA L
hune quJ in domo na~us ~, liee! vicÎnis fcientibus, filiumnon
~.
.
Il n'y a donc que deux preuves contraires qui puilfent
être opgofées à la préfomption favorable de la Loi; une
longue & continu~ll~ abfence du mari, ou fon impuilfance•.
Cochin, .au corn. 4 de fes Œuvres, attelle que dans l'urage
on n'a jamQis étendu plus loin les exceptions à la regle;
Mr. d1Aguelfeau en [on vingt-tJoifieme plaidoyer affirme la
même cho[e.
1
Pour la feconde des exceptions, qui ell. celle de l'impuilfance du" rna'ri, il ell inutile de s'arrêter à en fixer les
caraél:e.res; la· raifon' dit alfez qu'il faut qu'elle foit telle au
moins·au moment de la concept'ion, qu'il foit impoffible que
l'enfant foit du mari; l'impuilfance qui lailferoit le moindre
doute, donneroit cours à la préfomprion. qui favorife l'hon'neur de la femme & l'élat d~ l'enfant. On en rrouve un
exemple dans le pnHnier rome du Journal des Audiences,
liv~ 8~,· ëha'p. ·2l2. '"
.
,
Lés caraéteres de la feconde, qui eft celle' de l'abfence
du mari, ont' befoln d'êrre un pell plus circonftanciés. Il ne
fùffit pas d'une abfence quelconque, pour que la préfomption .
. de la Loi cerre. ,Si, par-exemple, le mari habire dans quelque
lieu voifin ôe~ -çelu\ où habite [a femme; s'il ne s'abfenre
que pour un certain remps & pour certaines affaIres; en !Jn:
mot" fi' llalilfen'ce n'efl:, p.oint relie qu'il y ait impoffibilité
abfolue à la cohabiration, elle n'eft qu'une, confidération
impuiffante', & la préfomprion favorable de la Loi demeure
'
daris coure fll. f\)rce.
La-Loi' (ilppofe .que le mari eft, le pere de l'enfant auquel
la femme' a Gonné ila. naiJraQ.Çe, parèe qlfe cela doit êrre,'
& qu'à défaut de~ h{ll1ieres> p.lùs 'ceri jn~s qu'elle exigeroit en
vain, elle c-roit à la Ner'tu de la femme, au dev.oir 'du mari
& à l'état légirime de l'enfant.'Cette certitude à laquelle
elle s'arrêre, dt la' plus alfyrée, cQmme die eft. la plus
favorable. ,Pour la dérruire, il faut donc une preuve cO'O-,
,~(aire , à la vérité ,d~ laquelle il foit impoffiQle .de fe refufeq )
•
�DU
PALAIS
DB
P'aov llNCB;
503'
'Une vérité certaine ne peut être détruite 'que par une vériré'
·d'une certitude égale; le moindre doute fur la vérité du [,it
deftjné à détruire celui qui ell déja reconnu pour vrai, biffe·
ce dernier dans tout·e [a forée. Donc fi l'ab[ence efi telle,
qu'elle laiffe la moindre prife à la poffibilité de la cohabitation, elle eH infuffifante, & l'enfant eH préfumé du ma'ri f
c'eH ce que tous les Auteurs attellent. ( Fontanella, de pac7is
,nupt. , part. 4, pag. 3°1; Cochin" tom. 4, pag. 493; Mr.
'd'Agueffeau dans une caufe pareille; Bruneau dans [on traité
des matieres criminelles, part. 2., tit. 22. )
,
Soit que l'on écoute les Auteurs, [oit que l'on apprécie
le vœu d'une Jurifprudence conftante, il eH donc impoffible
de [e diffimaler que pour que l'ab[ence / du mari faffe ceffer
. l'empire de la regle', pater efl ql/em nllptiœ demonflrant, il
fauç que cette abfence' [oi,t telle que la cohabitation entre
le mari & la femme [oit tout-à-fait impoffible'; enfin 'telle
eft la faveur & la force de cette tegle, que l'aclultere conftant de la femme n'y fait pas obfiacle. Il ell bien difficile
de croire qu'un mari qui a un pareil reproche li faire à fa '
femme, ufe- encore de [es droits avec elle. Le lit conjugal
fouillé par un crime dont tout l'effet frappe [ur [on honneur;
ne doit plus avoir aucun attrait à fes yeux. La crainte de
mêler fan fang à celui d'un étranger , d'embraffet comme
[on fils celui d'un autre, de donner à un intrus des droits
fur les biens de fes enfans, [emblent élever dans ces circonfiances une barriere infurmontab1é 'entre Je mari & la'
femme; cependant dans ce cas même la regle a [on effet.
Quoique la cohabitatioll' du mari & de la fi mme [oit alors
peu vraifemblable, cependant elle ell: poffible; ,!a craintê âe
n'admettre un' étranger .da~s la famille :pourroit en' faire
exclure le fils légitime; il n'en .fa,ut pas davantage pour que
la Loi, qui aime à éloigner l'idée du crime aufant qu'il el!:'
poffible 2 qui veUf fa~ori';el" l'honn'eut du mari & d~ la femme,
& [ur-touf l'etat des èhfans, préfume qùe"celui 'lu! eH né
p.endant le ,mariage appartiene au mari: non utique,· di! ·Ia
Loi miles, §. '9, ff. ad' Leg. 'llt. de adul-t.;' crimen adiilterii
.
�'504
Jou RNA L
lJuod mulieri ohj~citur, infanti prœjudicat, càin fq(Jii & il/a.
adultera t1fè, & zmpuhes defunaum patrem hahuiJ!è;, & c'efl:
ainli que s'expriment Cochin & d'Agueffeaii dans une caufe
femblable.
,Combien d'autres Doél:rines & d'autres Arrêes- ne pourTOit-on pas citer, pour prouver que l'aveu même de la :mere
f~r l'illégitimité de fan fils ne peut pas llli nuire, toujours
par c~tre raifon filpérieure & décilive que ces circonClances
& ces aveux ne détruifent pas la poffibilité de la filiation
légitime: or il ne faut que cette poffibi!ité pour affurer l'état
de l'enfant. Il efl: d'ailleurs de principe que les aveux &
les déclarations, tant du pere, que de la mere, font du plusgrand poids & ont la plus .grailde force, lorfqu'elles tendent
à favarifer l'état des enfans, mais qu'ils font tout-à-fait impuiffans, lorfqu'ils tendent à leur nuire. Il en efl: de même
de la mere; les termes de la Loi y font exprès: mulier
gravida repudiata filium enixà ahfente marito, jiJUrium in aais
profe.ffiz efl; quœ/itum efl, an is in poteflate patris fit & matre
mortua inteflata ju/Tu ejus hœreditatem macris adire pojJit ,
nec oijit profejJio Il matre irata fac7a , refPondit: veritati locum
/ùper fore. Il n'eCl guere vraifemblable qu'une mere veuille
dépouiller fan fils de fan érat par un menfônge qui la désho- .
-nore; cependant il efl: poffible que _fan. aveu ne fait que le
fruit d'une erteur, il n'en faut pas davamage;, la Loi, fans
égard à cet aveu, confe-rve la chafl:eté du mariage, l'honneur
du mari & de la femme & l'état de Ilenfam.
Ce font ces principes précieux que les Arrêts ont toujours
pris pour bafe. Lebrun, dans fOD traité des fuccejJions ,. en
ra,ppor:e un du Parlement de Paris. du I2, Août 1649, qui
décl'ara un fille légitime-, quoiqu'elle. fût née dix mois. &
neuf jours après l'abfence du mari, & que la mere eût déclaré
qu'elle n'écoit pas de lui.Un autre Arrêt du '::.6 Janvier 1646
reconnut lm enfant légitime, quoique l~ rpere eût avoué qu'il
~toit né de fon_afJultere, .& que le jll~ri fût âgé de foixance. '
dix ans & accablé d'infirmi.tés.,
Far cela feul que l'avç'u de la mere ne peut pas nuire ~.
l'éta§
�nu
PALAIS
DE
PROVENCE.
)0)
l'état de- fon fils, l'on peut conclur; fans doute qu'une fauffe
ênonciation dans l'extrait baptifiere ne peut pas avoir cet
eKet; & s'il eH une fois décidé que l'aveu de la mere ne
nuit pas à l'état de fon enfant, la reg!e s'applique à cet
aveu, quelque part qu'il fe trouve. La mere phyfiquement
certaine étant mariée, la vraifemblance morale réfulrante de
l'aél:e de baptêmé, quant au pere fauffement défigné, difparoît entiérement; une déclaration imprudente &' frivole
çede à la préfomption légale de la Loi. Bmneau, da ns fon
traité des matieres criminelles, rapporte un Arrêt du 2.9 Février 1712., qui déclara légitime une fille née depuis une
longue abfence du mari, baptifée fous ljn amre nom, &
qui n'avoit jamais été regardée comme fille des mariés.
L'Arrêt du 13 Janvier 1779, rendu par la Cour, intervint dans des circonlbnces décifives. Une femme de la
ville d'Aups, abandonnée par fon mari qui s'éroit retiré à
Tournon, fit fon expofirion de groffeffe pardevaot le Juge
d'Aups contre 1e nommé Richard; l'enfant, bapJifé conformément à l'expofition, fur porré à l'Hôpital de MarCeille;
cet Hôpiral affigna pardev'ant la Cour pour fon rembourfement, 1°. la Communauté de Tournon, lieu de la réfidence
du mari; 2.°. celle d'Aups,' lieu de la réfidence de la femme;
3'0. le nommé Richard que l'expofition défignoir. L'Arrêt
condamna la Communauté de Tournon, lieu de la réfidel1ce
du mari, fauf Ion recours contre' lui. Cet Arr~t jugea bien
pl'écifément que la faulfe énonciation de l'extrait baptiHere
n'empêchoit point que le mari de la femme ne 'fût le pere
légitime de taus les enfans donr elle accouchoir.,
'
Laurens Barbier eH né à Toulon le ) Septembre 17)9, .
de Marguerite SJmian; c'efi-Ià le feul fait dont fan extrait
bapti!l:ere fournilfe -la preuve cenaine. Si Marguerire Simian
était à cette époque épaule légirime de Barrhelerni Barbier;
fi celui-ci vivoit encore, on ne peut 'pas douter que celui
qui efi né de fa femme oe fait fan fils légitime. A J'époque
où Laurens Barbier efi né, fan pere vivoir; quand même
il n'auroit pas vécu avec fa mere, il feroit préfumé être
Armées. z 782. t;, fuiv.
T tt
�~o6,
Jou RNA r.
le pere. Le Îleur de Vivantes, 19rs de l' Arr~t rendu par le
Parlement de Paris, fur les conclulions de Mr. d'AgueŒeau,
était fép'aré de fa femme; il l'accu fait d'adultere, il l'en
avait convaincue; cepend1lnt comme l'abfence n'empêche pas
la rejonétion momentanée, la préfomption de' la Loi fut
adoptée; le mari fut déclaré pere légitime. Lors de l'Arrêt
rendu dans la caule de Jean-BaptiHe Gras, rapporté par
Bonnet, ,le mari étoit outre, mer; fa femme avait avec fan
maitre un corn merce capou. Dans,la caufe de Marie Merles
& du lieur Auzilly, la féparation était marquée à des caraéteres bien plus frappans; le mari fan étoit enfermé dans
ùne maifon de force; les circonllances les plus forres & les
aveux les plus déciufs délignoient le lieur AuziJ1y comme pere,
naturel; cependant l'enfant fut déclaré légitime par l'Arrêt
que la eour rendit.
L'e~mait baptiHere dont s'agit ne peut pas êt,re oppofé
à Laurens Barbier, parce qu'il eH fulCeptible d'erreur. Le
Curé rapporte dans ces aétes ce qu'on lui dit, & ce n'eH
pas dans ces aétes qu'il faut chercher la parernité; ils ne
font prenve que comre la mere. Barrhele i Barbier ne fut
pas'plutôt aux galeres, que Marguerite Simian fa femme fut
à Toulon pour le voir. A l'époque de la naiŒance de Laurens
, Barbier,\ (on pere étoit encore aux galeres, & 'il n'eH pas
lùrprenant que dans l'aéte de baptême Marguerite Simian
D'ait pas voulu l~ préfenter comme le fils d'uh homme cg.uvert d'ignominie; c'eH une peine qu'elle s'eH faite, & elle
a dit qu'il éto;t fils d'André Tournel, comme elle aurait
dit qu'il était fils de taut autre. II ell: certain que les galeriens font libres, fait à Toulon, fait li M3Jfeille, & furtout ceux qui font condamnés à terùps, que Pan ne furveille
pas àutant que les aurres. D'ailleurs il ell: conHant que Mar-:
guerite Simian a quitté fan domicile pour alkr à Toulon;
il ne lui a donc pas été difficile de voir fan mari.
On répondQit pour les hoirs de Jofeph 'Barbier du lieu
d'Eguilles, que Marguerite' Simian ne vivait pas avec Barthelemi Barbier; qu'il avoit été détenu aux galeres pour l'avoir'
/
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PAJ;AIS
DE
SC?
PROVENCE.
maltraitée, & que lors de [a mort on trouva dans [es poc/:Jes
la cl f d'une des chambres qu'il avoit à Eguilles, lieu de fa
rélidence, ce qui ôtoit toute idée de cohabitation avec elle;
qu'à ces époques Aôdté Tournel fréquentoit Marguerite
Simian; qu'ils eurent deux garçons, defquels eU Laurens
Tournel né en 1719, le même qui [e prétend être Laurens
Barbier; qu'après la mort de Banhelemi Barbier, Mar"uerite
Simian & André Tournel [e marierent" & firent :n aB:e
prouvant la reconnoilfance de ces deux enfans;, que Laurens
Barbier n'a jamais pris dans tous les aB:es qu'il a palfé que
la qualité de fils d'André Tournel:· tel eH [on état;, il n'a
pas la polfeffion de celui qu'il réclame;, la Loi pater efl1uem
nupliœ demonJlrant, ne veut pas qu'on s'aveugle. Banhelemi
Barbier n'a jamais reconnu Laurens' pour [on .fils, mais
bien André Tournel qui l'a pré[enté au baptême, qui s'eU
déclaré. en être le pere, qui l'a préfenté une Feconde fois
lors de [on mariage, & qui lui a donné l'éducation;, route
préfomption doit 'celfer, lqr[qu'il y a adultere public, pnJ"uvé
par la cohabitation publique & par le mariage qui a [uivi.
L'on convient que l'aveu -& dé[aveu des parens ne peuvent
pas nuire;, mais les déclarations faites au moment de la
nailfanc.e enchaînent & attirent la confiance;, car quel intérêt avoit Tournel de' [e déclarer le pere de Laurens, s'il
ne l'avoit été; il n'auroit pas été ohligé de pa nager fa [ucceffion entre lUI & fes en fans ;, [a femme auroit été tutrice
de Laurens; André Tournel auroit. joui des biens du pupille ~
rout concourt par c6nféquent à démontrer avec évidence
que Laurens eH le fils de Tournel, & qu'il polfede depujs
vingt-cinq ans l'état qu'il veut abdiquer.
.
Le regi/he prouve la paternité;, les Curés font obligés.
d'énoncer dans les aél:es de baptême les noms des pere &.
mere de l'enf: nt qu'ils baptifent; les parens de Laurens.
Tournel l'ont reconnu pour !-ln des enfans d'André qui l'a
nourri & éd uqué; on ne voit pour lui qu'indifférence de la
pan de Banhelemi Barbier, & du cdté d'André Tournel,
la plus grande attention. Dâns fon aB:e d'apprentilfage il
prend le nom de Laun:ns Tournel;, quand il y auroit. 1..:·
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moindre doute fur fon état, il faudroit fe décider pour celui
qui a la po1feffion publique depuis vingt-cinq ans; il eH fils
d'André Tournel, reconnu pour tel; s'il en étoit autrement,
il y auroit toute forre d1inconvéniens par rapport- à la fociété & par rapporr à l'intérêt public.
Mr. l'Avocat-Général de Magalon obferva que des vues
d'ordre public firent conferver la regle pater ejl 'luem nuptiœ
demonJlrant; des motifs d'équité firent étab);!r les exceptions
à cette regle. Le fils né fous le voile du mariage eft le fils
légitime; ce principe eft rerracé par-tout dans les Loix
Romaines..; c'ell l'efprit de la Loi; c'eft tout-à-Ia-fois on
principe de mœurs, de regle fociale qu'elle établit, & qu'elle
reproduit coutes les fois qu'elle trace des regles fur cette
-queftion. _. _
_
"
Si l'on confulte la Loi filium, elle établit dans quelles
circonllances le pere de famille peut repou1fer celui qu't,ne
époufe infidelle lui pré fente pour fils; cette Loi fuppofe deux,
efpeces de circonllances, l'abfence & l'impuilfance; ce font
les caufes phyfiques qui peuvent être oppofées à la paternité:
vd alia caufa (ajoute cette Loi.) Mais ce dernier fyllême
feroit d~ll.ruaeur de la tranquillité des fJmilles, il ell inutile
d'en démontrer les caufes funeHes; elles font trop fenfibles,
pour qu'il foit néc~1faire d'infiller; il vaut mieux donner à
cette Loi fi utile pour la fociété une interprétation plus'
fage. Lor[que la Loi ajoute alia caufa, elle fuppofe par ces
mots les autres caufes phyfiques qui peuvent n'être p"as
comprifes dans les premieres, & qui prouvent cependant d'une
maniere invincible que le mari de la femme n'ell pas celui
qui a donné le jour à l'enfant. En confultant les autorités, en
interrogeant la Jurifprudencedes Arrêts, & en prenant leur
déeifion pour guide, il eft facile de reconnoirre la vérité
de ce qu'ils avancent.
'
Mr. d'Ague1fean rappellant la regle pater efl 'luem nuptiœ
demonJlrant, parle du refpeél qui eH dû à cerre préfomprion; elle efl écrite, dit ce Magiftrat, dans la Loi; elle
eft revêtue de [on autorité; elle porte un cataélere que les
•
�DU PALAIS nE FItOVllNel!:
~'o9
Doél:rines & les Arrêts ont tou'jours refpeélé. Il rappelle
quels principes l'ont faite introduire; il examine enfuÎte
quelles exceptions peuvent lui être oppofées; il n'y a, dit-il,
que deux preuves contraires; la longue abfence cenaine &
continuelle du mari, & l'impuiifance ou perpétuelle ou paifagere, & la Loi n'en écoute point. d'autre; & tant que
l'abfence ni aucun autre obl1:acle n'aura point féparé -ceux
que je mariage unit, on ne préfumera jamais que celui qui
efi le mari ne fait pas le véritable pere.
Mt: Talon dans une caufe (emblable difoit qu'il fulEfoit
qu'il y eût poffibilité qIJe Je mar~eût yu fa femme, pour rendre
l'enfant légitime; que la déclaration de la mere ne pouvait
point changer la naiifance des enfans, lefquels dans le moment qu'ils éroient conçus pendant le mariage; éroient cenfés
légitimes,· & que le mariage était un titre fi puifiant pour
fixer l'état d'un enfant, que routes les declarations d'ùn
pere ou d'une 'mere ne pouvaient por·ter aucun préjudice 11
un enfane né pendant leur mariage, s'il n'y avait une preuvecenaine du contraire, & une impoffibilité naturelle & phyfique que l'enfant fût provenu. des œuvres de celui duquel il
prétendait être né. Mr. Joly de Fleuri, dans une caure rappanée au Journal des Audiences, & Me, Cochin établiifent la
même regle.
D'après ces principes, Mr. l'Avocat-Général obferva qù'il
fulEt qu'il y eût eu poHibilité que Barrhelemi Barbier eût vu fa
femme, pour que fan fils fût déclaré légitime. Lorfque Barthe~emi Barbier fut condamné aux galeres , les gale.res éfOiel)t
11 Toulon; Marguerite Simian y fut à cette époque i il ell:
vraifemblable qu'un motif d'attachement pour fan mari l'y
avait attirée, & qu'elle y était venue pour partager fan
affliél:ion; il était facile à Barthelemi Barbier de voir fa
femme, parce qu'à l'époque de fit détention aux galeres,
les galeriens avaient des barraques; là ils pouvaient· recevoir
plus librement les perfonnes avec qui ils avaient à faire;,
d'ailleurs il ell: certain que les galeriens vont à Toulon
& à Marfeille dans diJferens endroits, n'ayant qu'un anneau
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à la
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jamb~, accompagnés par un gardien qui les conduit
oÙ ils defirent; il en ell: même qui ayant acquis la confiance
de celui qui veille fur eux, ont la liber.té de fe rendre
feuls aux endroits où ils veulent. On diflingue encore ceux
qui font condamnés à temps ou à perpétuité; ceux dont le,
rerme efl éloigné, & ceux dont la peine touche à fa fin;,
& il ell: à obferver qu'au moment de)a conception du fils
de Marguerite Sirnian, Barbier n'avoit environ que neuf ou
dix mois à refler encore aux' galeres; la plus grande partie
de fa peine étoit déja fubie; on lui permettoiL plus facilement de fortir, foit qu'il fût accompagné ou qu'il ne le
fût pas.
Or, il fulEt qu'il y. ait eu poffibilité que Barthelemi Barbier
ait vu fa femme, qu'il y ait eu de relation' entr'eux, pour
que leur fils foit mis au rang des enfans légitimes; d'ailleurs
l'époque de la naiffance de Laurens Tournel étoit celle où
il dewit être rendu à la liberté; il n'ell: pas yraifemblable
que Marguerite Simian eÎlt relté à Toulon pour y faire fes
couches & vou1Îlt s'expofer au recherches danger\!ufes d'un
mari dçnt elle connoiffoit le 'caraél:ere violent, & dont' elle
avoit déja éprouvé la filreur.
.
L'extrait baptifiere ne peuL être oppofé à Laurens Tournel
que comme renfermant la déclaration de fa mere. Il efl de
principe certain que les regiflres de baptême n'ont été établis
que pour conllater l'âge de celui qui ell: né, & non pas fan
état; il font foi pour là naiffance, pour le moment où il eH:
né; ils n'ont aucune autorité pour fixer à quelle famille il
appartienr. Les Auteurs & la Loi elle-même établilfent que
l'extrait baptiQ:ere indique l'âge, la nailfanée i mais il n'y a
rien qui ait un rapport direél: à l'étar. La déclaration. ne
peut le priver d'un état que les Loix lui affurent; 'Ïl ell: né
d'un mariage confacré par les Loix, & d'après ces' mêmes
Loix, il étoit fils de Barthelemi Barbier. Quant à la poffeffion d'état, fût-elle relative. au nom de Tournel- plutôt
qu'à celui de Barbier,' il faudrait qu'on eût produit quelque
aél:e ou papier domeH:ique où ce nom lui eût. été donné ~
�DU
PAL AIS
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PRO V Il Ne
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d'ailleurs il ne feroit qu'une fuite de l'erreur qui réfulte de
l'aél:e de baptême, & il ne pourroit produite que le même
effet.
A l'égard de l'éducation, Laurens Tourn'el a' fans doute
été nourri par fa mere dans fes premieres années; II n'a
été dans ce moment confié, ni aux foins d'André Tournel,
ni à ceux de Barthelemi Barbier. André Tournel en a-t-il
pris enfuite un foin plus particulier? C'ell: parce qu'il l'avoit
.a~o~té en quelqu,e maniere, lorfqu'il avoit époufé Marguerite
Slmlan, parce que devenant le mari de fa' mere, il était
dans fa maifon, & pour ainfi dire fous fa dépendance; il
a pu à ce titre prendre foin de lui, être fon bienfaiteur.
Ces aél:es de bienfaifance doivent rendre chere à Laurens
Tournel la mémoire d'André Tournel; mais ils ne doive~t
pas le priver d'entrer dans fa famille. Laurens Tournel réclame des mains de la jull:ice le plus précieux des titres;/' il demande encore la (ucceffion de fan pere, & la reflitution
des fruits depuis la mort de .celui-ci; néanmoins Mr. !' Avocat-Général penfa que les fruirs ne devoient être rell:itués
'que depuis la demande, attendu les circonll:ances parricu-'
lierel\ où étaient les freres de Barthelemi Barbier.
Mr. l'Avocat-Général conclut à ce qu'il 'fût ordonné que
faifant droit 11 la requê~e principale de Laurens Barbier &
à fa requête incidente, il fllt maintenu dans la qualité de
fils légitim.e cie Ba'cchelemi Barbier, & au moyen de ce,
que l'Arrêt qui interviendroit fût noté en marge dans les
'regill:res de l'Eglife Cathédrale de Toulon par le Grefl!er
commis à cet: effet; que dans le même extrait baptiltere
au nom de famille Tournel fût. fubllitué celui de BarDier,
& aux mots fils d'André Tourn~l1Jigneron, & de Marguerite
Simian mariés enfemhle, fuifent fub{,ticués ceux-ci: fils de
Barthelemi BarDier ménager, & de Marguerite Simian mariés
enfemhle; & au moyen de ce, les hoirs de Jofeph Barbier condamnés à laiifer à Laurens Barbier dans la huitaine de l'Arrêt
qui interviendroit, tous les biens, meubles & immeubles de
la fucceffion fie feu Barrhelemi Barbier fon pere, avec ref-
�sn.
'.
.JOURNAL• .
,
.'
•
titutlon de fruits depuIs la demande tntentee, le tout furvant
la -liquidation & fixation qui en feroient faites par Experts
aux formes de droit, & qu'inhibitions & défenfes filffent faite~
. aux hoirs de Jofeph Barbier, & à tous autres qu'il appartiendroit ,de le troubler dans la poffeffion & jouiffance des
meubles. & immeubles.
Arrêt du 27 Mai 1784, prononcé par Mr. le PréGdent
de Jouques, conforme aux conc1uGons; les hoirs de Jofeph
Barbier condam.nés aux dépens. Plaidant Mes. Verdet neveu
& Cappeau.
ARR Ê T
L.l.
-
. Le Capitaine d'un Navire ne peut, malgré les Matelots &
autres gens de fan,. équipage, changer la deJlinarion de fan
'Voyage.
•
E Navire Le Baron de Befner, commandé par le Capitaine Geraldy, fut armé à.Marfeille pour faire un voyage
à Cayenne, & retourner à Matfeille.
'Migonni, Orchefe & Luogomariny furent du nombre des
matelots engagés à raifon de 60 liv. par mois; ils reçurent
l'avance de deux mois fuivant l'ufàge. Le Navire mit à la
voile, & arriva heureufement à Cayenne; 1e Capitaine y
'vendit fa cargaifon , & en fit ,une autre qu'il devoit naturellement tranfporter à Marfeille; mais il avait fans doute un autre
but, & il voulait faire une fpéculation de commerce.
En effet, Geraldy trouva 11 propos de relâcher à Ste.
Croix de Tenerife, "l'une des Ifles de Canaries. Là il vendit
fa cargaifon, po\!r en former une aurore encort: pour Cayenne,
au lieu de continuer fa route vers Marli ille. Cette opération qui était fans doute convenue avec les Armateurs, &
relative à 1 ur'inrérêt, avait befoin d'un prétexte pour être
colorée, & pour affranchir le Capitaine des peines auxquelles il
L
s'expofoi~
�sn.
'.
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titutlon de fruits depuIs la demande tntentee, le tout furvant
la -liquidation & fixation qui en feroient faites par Experts
aux formes de droit, & qu'inhibitions & défenfes filffent faite~
. aux hoirs de Jofeph Barbier, & à tous autres qu'il appartiendroit ,de le troubler dans la poffeffion & jouiffance des
meubles. & immeubles.
Arrêt du 27 Mai 1784, prononcé par Mr. le PréGdent
de Jouques, conforme aux conc1uGons; les hoirs de Jofeph
Barbier condam.nés aux dépens. Plaidant Mes. Verdet neveu
& Cappeau.
ARR Ê T
L.l.
-
. Le Capitaine d'un Navire ne peut, malgré les Matelots &
autres gens de fan,. équipage, changer la deJlinarion de fan
'Voyage.
•
E Navire Le Baron de Befner, commandé par le Capitaine Geraldy, fut armé à.Marfeille pour faire un voyage
à Cayenne, & retourner à Matfeille.
'Migonni, Orchefe & Luogomariny furent du nombre des
matelots engagés à raifon de 60 liv. par mois; ils reçurent
l'avance de deux mois fuivant l'ufàge. Le Navire mit à la
voile, & arriva heureufement à Cayenne; 1e Capitaine y
'vendit fa cargaifon , & en fit ,une autre qu'il devoit naturellement tranfporter à Marfeille; mais il avait fans doute un autre
but, & il voulait faire une fpéculation de commerce.
En effet, Geraldy trouva 11 propos de relâcher à Ste.
Croix de Tenerife, "l'une des Ifles de Canaries. Là il vendit
fa cargaifon, po\!r en former une aurore encort: pour Cayenne,
au lieu de continuer fa route vers Marli ille. Cette opération qui était fans doute convenue avec les Armateurs, &
relative à 1 ur'inrérêt, avait befoin d'un prétexte pour être
colorée, & pour affranchir le Capitaine des peines auxquelles il
L
s'expofoi~
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PRO VEN CE.
P 3
s!expofoit par le défaut de rapport d'un congé de l'Amirauté.
Ce dernier trouva un moyen de s'excufer; il prétendit que
fan équipage s'était révolté, & n'avait pas voulu continuer.
J.e voyage jufqu'à Marfeille.
.
La vérité ~tojt au contraire que l'équipage avoit été
alfemblé ; qu'on lui avoit expofé qu'il fallait retourner à
Cayenne; mais les Officiers & les Matelots avaient repré[enté qu'ils ~'étojent engagés' pour un feul voyage, c'eH-àdire'; pour aller & venir;- que
nouveau voyage qu'oa
l'eur propofoit , fortoit du cercle de leurs engagemens, &
qu'il était juŒe en c.onféquence de leur payer. les falaires
dus jufqu'à cerce époque, fi J'on ne voulait pas retourner
direél:ement à Marfeille. Le Capitaine Geraldy refufa obfti,.
nément les deux partis;.Ia plupart des -Matelots & autres.
gens de l'équipage quicrerent le bord. Le Capitaine' furprioC
alors des ordres du. Conful de France pour les fa-ire emprifonner, fous prétexte qu'ils étoienc déferteurs. Quelques.
matelots refterenc environ deux mois dans les pr.i(o.lls;:
.pegdanc ce temps le Capit~ine fit une nouvelle expé.ditiolJ-}
forma un nouvel équipage, & repartit pOUT Cayeflne. Après
fon dép~rc. les matelots emprifonnés préfenterenc uge filp-,
plique au Gouverneur Efpagnol ,qui brifa lems fers, & les:
fit embarquer J fur un navire Vénitien qui les condui(it à
/ -Cadix ';j delà. ils' recournerenc à, Marfeille pour acrendre k
.capitaine, & lui demande.r le paiement de leurs filaires •.
A fan retour, le Capitaine· fu.c traduit dev~nt les Qfli.ciers' de J'Amirauté de Marfeille' par les treis matelots cir·
;delfus nommés; ils formerenc contre· lui leur demande en,
"paiemél'lF des falaires .qui leur écoient dus jufqu'au jour de,
leur débarquemenr à Ste. Croix de T.ene6fle , & mêm.e;
del:céux qu'ils avoient mérités pendant Ièur· détention..
Le Capitaine refufa toute efpece de paiel:nen!', fous pré-.
. texte. de la 'prétendue révolte des matelots: C~ux-cj de-.
•marrderent.- la communication du journal de. fa navi~ati,on."
'& de fa coneCpondance ayec.Jes:.arrnat€ursj pour avoir des.'
jdajrciffeme,115 , ouq.u'il leur fllt permis. de; tirer du dffiutl:
le
Années z782 & fuiv..
-;
\\ v. v,
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]OURN/.L
de communication toutes lest induCtions de draie: une prê~
miere Sehtence leur accorda ce qu'ils demandoient.
Le Capitaine ne voulue riel!- ~produire; & par Sentence
définitive de l'Amiraute de Mar[eille du 14 Novembre
. 1783, il fut €ondamné à payer en entier les [alaires dus
·aux matelots ,ju[qu'au jour de ·Ieùr départ de J'ille Teneriffe,
-avec intérêts & dépens.
Le Capitaine appella de cette Sentence. On établit pour
,les matelots pllrc\ev3nt la Cour deux propofitions.
Premiere propofition. ,; Lorfque le voyage pour. le'luel le
" matelOt a loué [es jervices efl changé, ce dernier n'ejl pas
" obligé d'en faire un autre; il peut 'luiller fi /Jan lui .femMe,
'" & il doit 'êtt:e payé en ce cas de [es Jàlaires. "
.
Un Capitaine de navire, diCoit-on., n'eH ni un de[pote
'ni un Souverain; en loualit des matelots pour [on [ervice,
il ne contraCte 'pas avec des efclaves; delà vient qu'il ne
'peut [ans leur aveu changer la dellination de [on voyage.
" Si le voyage, dit Mr. Pothier, pour lequel le ma" teloe a loué [es [ervï'ces érait changé, je ne penCe pas
" que les ayant loués pour un certain voyage, il pÛt être
" obligé d'en faire un autre. Le voyage pour lequel il a
" loué [es [ervices, ell le principal objet du contrat; c'efr
" exiger de lui' autr,e cho[e que ce qu'ir a promis, que
" d'exiger qu'il faJfe un autre voyage. On peue tire, argù" ment de ce que l'Ordonnance décide: i'l y efb. die que
" fi après l'arrivée' du vaiffeau au lieu de [a deHination ,
" le maître ou patron, au lieu de' faire Ion retour, le
" frete ou le charge pour 'Iller ailleurs', le matelot pourra
". 'quitter fi bon lui Cemble, s'il n'eH autrement porté par
" [on engagement. ,.
,
" C'eU: une caure légitime (dit Me. Valin [ur le tir. 7
" du liv. 2 de l'Ordonnance de 168 l ) pour le maeeloe de
" rompre ['Jn engagement, fi le voy:age elt enciérement
" changé. " On citait encore le ConCulat,. chap. 1)8 ;
les us & coutumes de. la mer, pag. 170; le Traité des
aff"rances' d~ Me. Emerigon, tom.
pag. )6, & les ~rt. 3
2,
.,
..
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DU
PAL AIS
D Il
PRO V Il Nell.
SIS
& 6 de l'Ordonnance de la Marine au titre de l'engagement & des loyers des matelots. Or dans le fait particulier,
les matelots du Capitaine Geraldy s'étoient embarqués à
Marfellle pour aller- à Cayenne & retourner à Marfeille; au
~ lieu de fuivre cette deHination, il plut au Capitaine de
relâcher à Teneriffe, d'y vendre fa cargaifon, d'en former
une aurre, & de retourner à Cayenne, c'eft - à - dire de
faire un fecond voyage. Cerre opération n'av oit poine' été
convenue avec les matelots engagés.
Ces derniers n'éroient donc pas obligés de filjvre le nouveau voyage; c'étoit le Capitaine qui avoit volontairement
- rompu & changé le voyage; il éroit donc obligé de payer
en enrier fes matelots, ou de les indemnifer.
Seconde propojition. " Les matelots du jieur Geraldy ne
" font pas accufès légalement, ni jugés coupa6les de révolte,
" ni d'aucun crime qui emporte la privation de leurs falaires.
" la prfrendue révolte dont on les accufe n'eft pas même
" vrai[emblahle. "
Pour étayer cerre feconde propofirion, on foutenoit que
les Confuls de France établis dans les pays étrangers pour
protéger le commerce national, n'éwient pas faits pour
connoitre de la punition des crimes; c'eft à d'autres Juges pIus inHruits des formes judiciaires que le Souverain a départi ce pouvoir; les Officiers de l'Amirauté peuvent" feuls.
connoitre des crimes où il peut écheoir des pein'es afflictives ou inf.lmantes: or la révolte. ou la rébellion de l'équi_
page comre le Capitaine 'eH un délit & un crime grave
où il écheoit peine de mort, fuivant l'Ordonnance. C'éroit
donc aux Juges de 'l'Amirauté que le Capitaine Geraldy
devoit s'adreffer pour faire punir fes matelots, fi réellement ils fe fuffent révoltés. La procédure faite dennt le
Con fuI de France à Teneriffe éwit incompétente, irrégllliere, & ne pouvoit f: ire ra bafe d'aucune condamnation;
les matelots n'avqient aucun intérêt à fe révolter, ptlifqu'~ls
ne rtofufoienr pas de joindre l'équipage pour retourner l
Marfeille; c'eH le Capitaine qui a pris pOllr un aae de ~éVVV:l,
'
�~16
JOUn.~At
volte un aé1:e permis par l'Ordonnance, c'eO:-à-dire, le refus
de faire un fecond voyage pour lequel les Marelots n'éroient
point engagés.
On difoit au' conrraire pour le Capiraine, -<ju'il y avoit
eu réellement & de fait une révolte manifefte de la part
des gens de fon équipage; que la. révolre prouvée par la
procédure faite devant le Con fui de France à Teneriffe
l'avoit empêché de continuer fa ra'ure, & que des Matelors révoltés & déferreurs ne pouv~ie[lt prétendre aucuns
falaires.
Cependant comme cette pr.étendue révolte n'étoit point
jtiflifiée, & que ce n'érait qu'un. prétexre, le Parlemenr,
par fon Arrêt du 29 Mai 1784, rendu au rapport de Mr.
le Confeiller de Thorame pere, confirma la Semence des
Officiers de l'Amirauté de Marfeille, &. condamna le Capiraine Getaldy à payer les [alaires dus aux Marelots, n01\
ièulement pegdam le voyage de Marfeille 3 Cayenne, &
de Cayenne à Teneriffe, mais encore pendant l~ deuJ<
mois de leur détention jufqu'au jour de leur départ de l'HIe
Teneriffe, avec intérêts, dépens & contrainre par corps.
Cet Arrêt juge bien précifément qu'il n'eft point permis
]l un Capitaine de navire de changer la deHination de fon
'Voyage fans l'avis des gens de fon équipage•
•
,
. Ji R RÊ T
LI 1•
•
L'ac7e de haptême dans le'luel le pere & la mue d'un enfant
font déc/crés mariés, joint la poffiffion d'état df/ cet enfant,
forme une pret ve fuffifante de fa légitimité.
Autorité des ac7es.de haptême dans les 'lueJIions d'état.
a
T
Rerefe Imbert, fille de Jacques Imbert & d'Etienne
.. Reynier, nâquit à Lajavy dans le diocefe de Digne le
{3 Oaobrc 1718, & Y fut baprifée le même jour.
"
(
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PAL AIS
DE' PRO VEN
<.: R.
P1
, ~ette fille ·éroit encore èllfanr ,-Iorfqu'elle perdit fes pé're"
.& mere; les droits Iégirimaires dé cette derniere n'élOie'nt
pas acquirrés à fa morr, du~mojns en enrier. Therefe lm:'
bert fa fille voulant en pourfuivre la liquidation, fit affigner'
lé 13 Novembre h8 l Noe! Reynier fOI( oric1e, en qualité
d~héritier de fes aïeul & aïeule marernels, au' 'paiement de'
[es 'droits légitimalres. Cerr~ demande introduiré devanr les
Juges ordinilires .de Seine, fut bientôt évoquée pour caufe de
'pauvreté pardevanr la Cour.
Les défenfes propofées par Reynier à cetre aemande an·noncerent l'intention où il étoit de conte Ger l'étar de Therefe
Imberr: vous devez juGifier, lui dit-il, ,que v'ous êtes fille
de Jacques' Imbert & d'Etienne Reynier.
"
Therele Imberr communiqua fon extrait baptifiere, conçu
en ces termes:
" L'an 1718 & le J3 Oél:obre, efi née & aéré baptifée
" Theréfe Imbert, fille dé Jacques, originaire d'O'rvilles,
" Maître; Maçon, & d'Etienne Reynie,r mariés. Le p,arrain a été
" Antoine-Jean, fils de feu Hon'oré, Hôle à Champregnard,
" & la marraioe Marianne Jea'n, fille dudit Antoine, p~é
;, fens Jofeph Mille, fils à feu Vincens, & Pierre Jaubeh,
" -témoins requis & fignés, hors .le pere" & ledit Pierre
" Jaubert & ,la marraine. A. Jean, Mille, Touriaire, ainfi
;, fignés à l'original. l , '
,
Cette communication n'empêcha pas Reynier de perfiGer
dans fa conrefbrion par de nouvelles défenfes; il prérendit
que l'extrait baptifiere ne préfentoit qu'une preuve incpmpierre; que l'ilél:e des époufailles de Jacques Imbert avec
Erienne Reynier pouvoit feul prouver la légitimité de leur.
fille. En même remps il renforça ce premier moyen de la
communication d'une quittance privée d'Etienne Reynier pOUl:'
[es droits légirimaires.
Les quefiions que fit naître cetre quirrance rouIerent fur
, le défaut d'avération de la fignature d'Etienne Reynier, fur
la préfomption que cerre femme ne favoit figner, fur ce
,que le pere vivant encore en fannée fous la date de laquelle
,
.
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t 1 0 U ,RNiL
étoit cette qU!ttanèe , il étoit impoffible de droire qu'e N 0,,;1
Reynier eût payé à fa fœur' des droits légitimaires fur l'hoiriê
de leur pere encore vivant; & ce paiement elIt-il été fait,
,'eût été un un paél:e de fu.turâ fuceeflione, que les Loi"
declarellt~nbl ; -enfin 'fut: ce que la légitime étant liquidée 'en
1:)loc dans',lâ q'uittance, 'cette piece étoit infeél:ée d'une nul-lité cerca,ine qui èmp~choit que Therefè Imbert fÎlt déclarée
mal fondée 'dans fa demande. Ces différences quefiions agirées
au procès aboutirent de part ~ d'aurre à conclure que leur
décifion dévoit êrre remife, lorfqu'il s'agiroit de l'iquider'la
légitime, fuppofé que Therefe Imbert fût déclarée recevable
à en pourfuivre le-paiemenc.
La quefiion de l'état de cette fille fut donc la feule fur
laquelle on défendit principalement; & l'Arrêt que nous
rapporterons ne laiffe pas à domer qu'elle ait été la feule
décidée. Ainfi nous n'avons parlé de la quittance que pour
n'y plus re~~·nÎr. ,
'
Theréfè,' Imbert défendoit fon état par le bàprillere- &
parla polfeffion.
Les preuves légales de l'état des hommes font fondées,
non pas fur le degré de certitude" mais [ur le degré de vra!femblance. t Mr; d'Aguelfeau, plaid. 34,) Il efi néceffaire qu'oH
reconnoitre des preuves de l"état;'il efi imp'C5ffible'que 'ces
preuves foient évidences; il a donc fallu' que les LégiDateurs
en adoptalfent qui futrent fondéès uniquement fUr une grande
préfomprion de vériré. Les titres' les plus authentiques, le
baptitlere, les époufailles des parens ne pr~fentent qu'un
'principe de vraifemblance; ils fuppofenc la filiation & là
légitimiré, mais ils, ne les prouvent pas réellement.~
,
La premiere regle que l'on obferve fur 'cette matiere ell:
fondée fur ce principe naturel, que tout de,nlandeur doit,
'prouver ce, qu'il demande. L'état eH-il réclamé par une'perfonne qui n'en a jamais joui & n'en jouir pas au' monient
de fa réclamarion, elle doie e'n rapporter 1J. preuve. En jouif.
foit-elle lorfqu'on efi venu le lui comener, fa polfeffion lui
fuffit; c'ell à celui qui la trouble, à juHifier fa demarrde ou
'fon exce,prion.
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PALA,I~
DB
P.aOVBNCB.
19
1 r.herefe Imber~ pourroi ·.ce. borner. à ce dernier l1,19yèn;
,mais eUe en '.a. d'au très ' enc~lre:1I oppofer à Noêl ReynIer,
& elle défend fon· état par fon baptillere, par cene poffeffion aél:ueUe qui foumemoit Reypier à la preuve de bâ,cardife, enfin Ear la longue \1offeffion jointe a'u baPfillqe,
8u.i éxclut [Out recours à la preuve contraire. ~
.~ .
_ L'autor,ité deS baptilleres gans les. quellioni d'état ell fi
généralement avouée ,aujourd'hui, qu'il fuiEroit d'invoquer l'expérience, fans être oJ;lligé ~€ncore de l'engager dans le détâil
des motifs qui l'ont dé,terminé.e, La preIbiere inHruél:iofl gue
l'on exige d'un é'iéoyen qui réélame fon /adg' & fa~ co~aitï~n,
c'ell de favoir .s'~1 inon't~e' n baptiHere; c'eP.: Pq~ ce 'titre,
difoit Mr. Cochin, que 'l'on fait 'fon' entrée Jans le monde;
_c''e{l à ·Ia faveur de ce paffe-port que l'on peut être admis
& reçu dans une f,unille. On' n'en exige pOInt dYau:tr~:lPoqr
~l'adn.;i.ffi?n ,aflx Orpref l;p.,f
~ ,ainG qq'~u}C eLFPJ~~~. ,~e iobe
JouJ)d~ep~e. () ( .. ~ . ~l"'"
1
'r J:. ~I;.
~i/1 La néceffité,~e'r, Jonng1tre une preuve P,~lqC\pale d,e l'ét~c
_ es h9t]mes, l'imp~ffibl1!ttld'en d~co.:wrir quel::Iu'une dont
le's caraél:eres fuffent plus Impofans que celle refullante des
bal;>tilleres, '& en même temps les dangers d't,mê rëch'èrche
tr<lp curieufe dans les, que (lions d'état ~ :onc éIé: les' motifs
~ ~~ScS' grapd,c:., au!o;ité r4(~11l;ée à c~ tj'trf'; 1~( p,reu'le';qui
~,l,l;;éfu,lt~ efr.,éErit ; Telle' ~fl era b1ie fllr l:aveul~u .pere" Jur ia
ecqn\loiffanJ=e rd:.e.~"pa~ens, tur l'atteHation du 'Ç.u'ré & dès
,témoins. Aux yeux de la _~aifon, ce concours de témoignage's
·ell la plus fone. ~t: tomes les, démonllratic;ms ,p,offibles dans
.1~~. que11; i9l)s .d~ét<ah~es form \it~~, qui ;dol~ent G~(re' ,r?bfe~·vees ,daÇê.les aéte~ qqh}'enferl/l,c::nt <.c~s .t~mOJgnages, l,es. pre_calJtioos psefc~tt:sj PRP~ ila .,.cog[er~atioq des" rrgihres but ifteres, démolHr:eryc l'impor,tance, que les Légiflateurs,ont at~tachéerà leurl'exillence. La Déclaration -de 1736, qui el! la
deroier~ Loi gén~rate, !nterveJ1tte fur cette m.atier~, ~nonce
~lèl!1iremeAc l;iDtç,n~,iRo, Au J;égil1~tepr., .d'aJJjlrq'J {;s, p!euves de
l'état des hommes par des titres authentiques.
,
- EnfinY'lél:e"de, baplême ell i1a weuve néc'effaire
l'etat-
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Toute autre n'a quëlque autorité que parcë qu'elle fuppofe·
le bapti'llere. A (on défau't, on ne fauroit reconnoitre des
-regles certaines de l'état des citoyens;. mais dès qu'il paroît,
les ~oix. ont une bafe affurée, & \es différentes quefiions
, 'un-point de' ïéunion, & un pliincïpe poûr les réroudre; & en.
reconnoiffant q'u'il' feroit. dangereux de porrer les recherches
au"delà' de 'ce titre ,"6n ne tard~,-pas. de trouver en· lui Iii fo~
lution de tous )e's problêmes; le baptifiere nait, pour
~infi, dire, avec l'enfane'même; & parce que dès fa naiffance
'l'eqfant a rang dans la [ociété, dès fa naiifaoce auffi il trouve
f(titre qüi lui donlie .c.e râng, & la 'focieté lui doit )'affurance
de ce titre, puifqu'alors- il n '1"auroit encore fe l'affurer luimême;
;1
~.
{~
De cette a\ltori,té d sïbaptiil:er~s fuivent plilfieurs conféquences.
'
. "Le oaptifl;er~ prouve l'état 1,II,'fa donc s'en tenir à cetce.
preuve, tapt 9u'on n'en ,rappone & qu'on n'offre point d'en
~appo~rter de contraire.'iNier' cette fcpnŒquence, ce feroit
nier le principe de l'autorité de's baptifieres; ce feroit erefque·
les annihiler.
Mais de plus', l'autorité de.s haptifteres eft grande, la
preu'l.C qui en réfùlce elt,confidérab1e.; cene qui peut lui être
oppafée doit doné',etre grave ; ~Ie doit préfencell des'fairs
relevans, &''èli'e fera "rarement' admife, '&'toujours difficile.,
Cetêe conféquence 'eft teUe; que ~oit que la déciRoit doive
être ai(antageufe ou conrraire au réc1amataire, c'eft toujours
de l'exiGence de l'aéte de. baptême qu'elle dépend; & tout
comme les 'préfomEt'ons les F!ns fones ne ;peuvent rien
.conrre tûi s~it"e'iifle, . les préfomptions' fes'. plus fortes auffi
ne P?uvent rien fansJIlli. TIeS' Loix' ne' permeccelJt de fuppléer les b~Etifieres 'que dans des cas- difficiles & rares',
comme, celui de Ya perce dès reg,fl:res, & s'il n'en-a iacmais
exiGé; par II e'conféquence n~ce!faite, dal?s l'.efprit de-la J;..oi,
on ne pelit< en comqanre 1'-autortté que danif'dès' cireGnfiance.s
extraordinaires.
-, Il
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, '10," • ~ \ \
..,
Âinfi des Arrêts ont admis" à la preuve'que' le· bapti-Rere
J
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PRO V l! Nell.
~ 2.I
'produit n'étoie pas celui de l'enfant qui l'exhibe; mais ce
cas ne pré fente même pas une exception à la regle-; ce n'ell:
pas le vice du titre que l'on y objeé1:e; c'en efi le défaue
abfolu. D'aurres Arrêts one reçu précifémene la preuve deftrué1:ive du baptiHere, mais ç'a été lorfque cee aé1:e a été •
combanu par d'autres de même natur.e ou d'une autorité
égale. Ainfi on trouve à la même époque plufieurs baptilleres
de différens enfans nés du même pere, m'ais de plufieurs
femmes, touresqualifiées d'époufes; ces aé1:es s'entre-détruifenc
réciproquement, & il reHe à prouver l'érat des enfans d'une
autre maniere.,Ainfi encore un enfant produit l'on ba'priltere;
on lui oppofe l'aé1:e d'époufailles de fon pere avec une femme
autre que fa mere à l'époque précife de fa nailfance, ou à
une époque antérieure, mais peu éloignée, ou l'aél:e de profellion religieufe ou de promorion aux ordres .de fan pere;
cene preuvé prévaudra nécelfairemene à l'autre.
Mais hors de ces cas le baptiHere l'a toujours emporré
fur les plus fanes préfomptions, ainG que les préfomptions
les plus forres n'ont jamais fuppléé lé baptillere. C'el!: ce
qu'ont jugé des Arrêrs dans Soefve, fous la date du 2.
Mars 1741, & du 2.7 Mars 16'59, & dans le Journal des
Audiences, fous celle des 27 Janvier 1660, 12 Janvier 1686,
& 19 Mars ,691.
Le propre défaveu des parens de l'enfant ne fauroir lui
préjudicier, lorfqu'il efi contraire 'à l'aveu configné dans
l'aé1:e de fa nailfance. La,. rétraé1:ation faite au moment de la
morc' n'a jamais été op pofée utilement à la reconnoilfance
contenue dans le baptillere. C'efi ëe qu'one jugé les Arrêts
intervenus dans le feprieme plaidoyer de LemaÎtre, & (i.1t'
le vingt-deuxieme plaidoyer de Mr. d'Aguelfeau, & ceux des
1 l Aoîlt 1667 & -du IJ Février 1674 '!:Iu'on trouve dans
Soefve.
Une derniere conféquence de l'autorité des baptifieres,
clefi qu'on ne fauroit exiger d'un enfant l'exhÎbit.ion des
époufailles de l'es pere & mere.
L'objeéJ:.ion faite aux enfàns, fondée fur le défaut de cette
Années z782 & fuiv.
X x li.
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0
t7 ll. N A r.
exhibirion, n'eG: point nouvelle.; elle a été propofée dans
prefque taures les caufes d~érat; jamais elle n'a é!é accueillie·.
Il fuffit d'indiquer les préjugés qui érabliifenr cerle regle.
Le Parlement de Paris les confacra dans la caufe de Barchelemi Bourgelat, pour lequel plaidait Me. Cochin. L'Arrêt
rendu par la Cour en 1763 ,dans la caufe de la Dlle. de
.Brecourt, contre le lieur de La Ribiere, eCl: encore 'un
préjugé fameux contre l'objeél:ion rirée du défaur des époufailles. des par,ens. Le' Parlement de Paris rendit un pareil
Arrêt le 29 Mai 1770; on le rrouve dans L:enifart. Aurre
Arrê.r femblable du Parlement de Touloufe du 9 Juiller de
la même année. Aurre Arrêt de. la Cour du mois de Mai
1776, en faveur de Jacques Gimer, conrre Pierre Gimet;
il eft rapporté dans le Journal du -Palais de Provence. Enfin
le Parlement de Touloufe il récemmenrconErmé la maxime en
1783, dans une caufe fameufe rapportée dans le Journal
encyclopédique de 1784, rom. 2., parr. 3.
Les morifs de ces préjugés font 'que le .rirre des époufailles des parens n'eCl: poinr perfonnel aux enfans ; les rirres
qui leur font propres font leur exrrair bapriCl:ere, ou ce qui
le fupplée. Il n'y a jamais eu ni Loi ni Ordonnance qui
. .ait exigé qu'ils portem.la preuve jufqu'à établir que la qualiré
de mari & femme' prife par le pere & mere leur appartient
légitimément. Combien d'en fans qui élevés tranquillement
fous les yeux de leurs parens n'ont jamais penCé à demander
cll leur pere avait éré marié! Combien de mariages fe font
avec diCpenCe du Curé des parties dans des Paroiifes éloignées ! Si la néceffiré de remonter ainfi juCqu'au titre de
lès ameurs eCl: une fois .admiCe, cela n'aura plus de bornes;
le petit fils, pour recueillir la .(ucceffi~n oe fon aïeul, devra
rapporter les époufailles de fan pere & celles de leur aïeul;
l'arriere pe.tit fils celles de fon. bifaïeul, & ainfi à l'infini"
ce, qui dégénere dans une abfLJrdité manifeCl:e.
Ces morifs étaient développés par Me. Cochin dans la
'cauCe de llarrhelemi Bourgelat, & ils ont roujours été rappellés dans des caufes [emblables.
�D U
PAL AIS
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PRO VEN C E.
5'l. 3
On a encore appliqué à ces cas cette Loi fage du Droit Romain, qui défend d'élever des quefiions fur l'état d'une perfonne
vivante, lorfque par-là on peut porter préjudice à l'état de
celle qui efi motte depuis au delà de cinq ans. L. l ,if. Ill:
de .Jlatu defunB. pofl 'luin'luenn. 'luœratur.
, Un Arrêt qui jugeroit précilement que les époufailles font
néceffaires à l'enfant pour qu'il jouiffe de fon état, feroit
un titre de deuil" un Jugement de profcription pour une
daffe déja trop malheureufe de citoyens dont tous les Tribunaux aujourd'hui cherchent à l'envi les uns des autres à
faire ceffer Jes craintes, à affurer les patrimoines, à protéger l'état. Qui pellt pénétrer à ce [ujet dans le fecret
des familles, & percer Je voile qui couvre, peur-être tant
de noms illunres & révérés?
On rapporte des certificats de deux Curés, gui attefient:
n'avoir point dans leurs regiHres l'aél:e des époufailles des,
pere & mere de Therefe Imbert. Le moyen n'eH point'
nouveau; on y a toujours répondu que cet aél:e étoit étrangeraux enfans, & que les époufailles p'Ouvoient avoir été célébrées dans une infinité d'autres Paroiffes que celles des,
Curés donc on produifoit l'attefiation. En point de fait, les
Curés dont on rapporte les certificats ne font ni ceux du lieu,
de la naiffance des deux époux, ni de leur réfidence connue
depuis leur mariage.
'
Il efi une obfervation plus importanre fur l~s faits; c'ell:.
que Therefe Imbert n'avoit que tràis ans lorfqu'elle perdit"
fes pere & mere; elle étoit donc encore enfant à l'époque.
de leur décès, & cette époque date d'au-delà de trente
années. Les motifs qui difpenfenr les enfans de produire,
les époufailles de leurs parens, rrouvent donc dans cette~
caufe' une application juHe & néceffaire.,
.
Dans ces circonnances, la conféquence particuliere que'
l'on peur tirer pour Therefe Imbert des princi'pes & des;
obfervations gue l'on vient de faire, en fimple & facile •.
Therefe Imbert produit fon baptifiere; ce titre eH véri-:
tablement celui de fan état " il lui fuflit;, fes parens y fant:
X_x x.2..
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1 o' V RNA L
déclarés mariés; & quoique cette déclaration ne fût pas
néceifaire, felon la Jurifprudence, elle ne peut qu'ajouter à
l'autorité du titre. Jofeph Reynier veut - il le combanre?
Qu'il rapporte une preuve contraire, qu'il o1fre au-moins de
la rapporter.
Cette preuve n'ell même pas annoncée par Reynier; c'ell:
parce qu'il ne pouvoit pas parvenir à la remplir, puifgu'à fon
baptiHere Therefe Imbert joint un autre moye n, IJ poifeffion
d'état.
La poifeffion fut roujours un moyen eifenriel dans· les
quefl:ions d'état. Avant l'introduél:ion des regifl:res ba[}till:eres
elle feule décidoit de la condition des citoyens; & l'établiifement de ces regill:res, s'il a fervï de remede aux abus
qui pouvoient fe gliffer dans la preuve de la poifeffion, n'e'n
a pas détruit l'autorité; elle peut être employée utilement
encore, lorfque les regifl:res fe taifent; elle ell: toujours
invoquée avec fuccés, lorfgue appuyée fur. les regill:res, elle,
préfente la plus forte de toutes les preuves poffibles de l'état
des citoyens.
.
On a dj{l:ingué fur cene matiere, comme fur toutes les
autres auxquelles la poifeffian ell: applicable, la poffeffion
aél:uelle fuffifante jufqu'à la preuve contraire, & la longue
poifeffion qui repouife d'avance route preuve contraire.
Par la premiere, l'enfant fe défend par cette raifon générale, & qui a lieu dans les matieres les plus communes,
que [Out poifeifeur qui ell: attaqué n'a rien à prouver, & que
c'erc à celui qui le trouble, à jufiifier que (a poifeffion efi
injurce; c'erc la doél:rine de Me. Cochin, rom. 3 de fes
Œuvres, conf. 64, & tom. 4, cauf. 102: de Denifart, va.
queltion d'état;. d'AugeJrd, 'Om. l , pag. 20). Delà vient
la maxime que c'ell: du moment d.u trouble qu'il faur partir
pour juger de, l'état du citoyen: in eo /latu in quo quis invenitur, in eo judicatur; maxime que l'enfant troublé dans fa
poŒ:ffion invoque avec bien de faveur, puifgue les Loix préfument toujours pour la légitimité, ainli que pour la liberté
& pGur l'innocence.
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PRO V Il Nell:
~ 2.;
Par la longue poffeffion, l'enfant répond aux argumens
les plus forts; il repouffe même les titres que l'on pourroit
lui oppofer. Toujours invoquée dans les quefl:ions d'état,
toujours avouée comme moyen effentiel, il ne s'efl: jamais
agi que de l'établi~ en fait, ou de la combattre. Toutes les
caufes d'état rapportées dans le Journal des Audiences, dans
le Recueil des caufes célebres , ont vu répéter ce principe;
il étoit invoqué dans les caufes jugées par la Cour & déja
rappellées. La poffeffion d'état fut feule le fondement d'un
Arrêt rendu en 177~, au rapport de Mr. de St. Marc, pour
la Dame Sauzey contre la Dlle. Gautier Pinattel. C'efl: ici
fur-tout que l'on invoque le motif d'intérêt public, qui ne
permet pas que l'état des hommes foit toujours flottant &
illcertain, & que l'on puiffe, malgré le laps de temps, jetter
le trouble & la confuGon dans les familles, & par conféquent porter le défordre dans la fociété.
C'efl: donc par le fait particulier que la caufe de Therefe
Imbert doit ici être défendue·; & il fournit d'abord une
obfervation importante.
Therefe Imbert a fon baptifl:ere qui déclare fes parens
mariés, & elle efl: âgée de plus de 3 ~ ans. N'ifolons pas
c·e titre, mais raifonnons d'après lui fur la po/feffion ,& nous
dirons: cette fille a 3) ans, elle a donné une po/feffion d'état
ou favorable ou contraire. Si l'on ne pouvoit recueillir aucun
détail de cehe poffeffion, il faudroit la préfumer conforme
au titre qui a pu lui fervir de bafe; il feroit injufl:e & inconféquent de la fuppofer contraire. Nous dirons encore que
cette préfomption favorable ell: néceffaire entre perfonnes
illitérées, & par rapport à une condition telle que celle de
Therefe Imbert & de fes parens. Dans cette c1affe de citoyens, les aétes de familles, ces. regifl:res du chef de la
maifon, ces correfpondances de pere à fils, ~e frere à frere,
de l'oncle au neveu, ne font pas connues, ou elles font bien
rares. Enfin nous ajouterons que l'enfant qui connoît fon
baptill:ere, celui fur~tout qui peut invoquer l'ancienneté de
ce titre, celui qui pendant plus de 30 ans n'a pas été troublé
�~ 2.6
, Jou RNA L
dans la joui/fance de ce même titre, n'a pas dû fé ménagerdes moyens particuliers pour l'appuyer &, le canfalider. La.
jaui/fance de tous les momens durant cet efpace de temps
a été de tous les mamens la même. Que l'on foumetre'
alors, s'il el!: poffible, celui qui ne craine pas de le rroublerà rapporter des preuves jul1:ificatives du trouble; & la preuve
contraire, que rapportera l'enfant, (era celle de fa joui!fance'
pailible & uniforme qui par là même a dû paraître juf-"
qu'alors plus dénuée de preuves légales.
Eclairés ainli par le baptil1:ere de Therefe Imbert, entrons dans le détail de fa vie. Née à Lajavy, reconnue par
fan pere dans l'atte de fan baptême, avouée par fa mere"
ce fut avec eux & dans leur domicile qu'elle a refté tant
qu'ils ont vécu; encore enfant à leur mort, & à peine âgée
de trois ans, elle fut retirée dans la maifon de fan aïeul'
maternel; c'eH là qu'elle a été élevée, nourrie pendant fonenfance par cet aïeul & fous les yeux de Jofeph Reynier
fan oncle, qui.--cependant aujourd'hui ofe lui contefter fan
é~~
,
Depuis l'âge de fept ans ju(qu'à quinze, rucceffivement au
fervice, (oit au château de Monclar, fait chez un autre
Reynier, parent commun des parties j & employée à garder
des troupeaux, la maifon de (on aïeul maternel, _fut toUjGurs & {on domicile de droit, & fan domicile de fait dans
les intervalles ordinaires d'un fervice à l'autre; durant ces
intervalles ellè vivait donc encore fous le même toit & à
la même table que Jofeph' Reynier.
Si à quinze ans elle fortit pour la derniere fois de chez
fan aïeul maternel, elle demeura d 1abord à Seyne fous les
yeux ~e cet aïeul, & au (erv·ice d'une Dame diftinguée. du
pays.
A l'âge de vingt ans elle quitta Seyne pour venir en cette
ville d'Aix; un fervice non interrompu depuis lors de quinze
années dans une maifon honorable & honnêre, s:jl ne prouve
pas la légitimité de celle qui a fu s'y maintenir, juftifie au
moins cette bonne cond\J.ite perfonnelle que quelques Au."
�DU ~ALAIS DI1 PROVBNCE.
S"'7
,tiurs ont regardee comme un csraél:cre attaché h llne naiffance légitime.
A ce Jableau de la vie & de l'état de ThereCe Imbert
fe joignent quelques détails relatifs à Ces pere & mere, & à
la maniere do~t elle a été traitée par la famille depuis qu'elle
e~ en cette ~Ille. Se.s pa,re~s éroi~nt réputés ma.ri~s à Lajavy
'Ou elle eft nee; ce lIeu erolt celUI de leur domIcIle; là d'autres .e?fans foor né~ de I~ur uO'ion légitime, & Y, oor été
haptlfes C?~s cerre defignatloD; enfin Jacques Imbert, maçon
de fon metler, & prenant des pri~-faits dans différens lieux:
·de la coorrée, y étoit toujours fuivi par fa femme & fa
famille. La preuve de ces faits eft fournie au procès.
Depuis quinze ans que Therefe Imbert eft en cerre ville,
-,elIe a fait divers voyages à Seyne & à Lajavy pour revoir
[es parens. Reçue par une ta ore maternelle, Cœur de Jofeph
Reynier, elle y a été traitée comme fa niece; -c'ef!: comme
relIe qu'elle y a éré reconnue par les parens & par Jofeph
Reynier lui-même; lui eu/fenr·ils fait de pareils trairemens,
fi elle n'eût éré que la fille naturelle d'Erienne Reynier?
'Eloignée de ces parens par fon retour en cerre ville, elle
a écrit par occafion à fa tante, & en a reçu des réponfès
où fe trouvent confignés les mêmes ~émoignages. Trois
de ces lettres ont été confervées, & font verrées au procès,
,'dans une deCquelles la Cante fait des complimens à fa niece
·de la part de fori oncle Jofeph Reynier. La derniere de ces
lettres par la date ef!: remarquable; elle a éré écrire pendant procès. Therefe _Imbert demandoit - à fa tanre une
tlttef!:atién de fa légitimiré. (Une pareille de'mande ef!: déja
une preuve; un bâtard oferoit - il la faire aux: parens qu'il
fauroit infiruits du. vice de fa nai/farice?) La tante arrêtée
'Par le peu d'éloignement de fon frere , ~imide ,
craign~nt
de l'indifpofer contre elle, donne une reponCe qUI, en defi.
gnant les craintes, eft une véritab!e .atteftatio~ & une re-connoi/fance non fllfpeél:e. Elle ecrIt à fa Dlece que fes
pere & mere ont refié pendant trois ou fix: mois dan~ la
'maifan de l'aïeul maternel; elle rengage à ne pas lal/fer
&.
�)2.8
1 0 U RNA L
.là le procès, parce que cela ne lui ferait pas honneur;
elle lui rémoigne qu'elle ne fair comment s'y prendre pour
lui faire renir l'arrellarion; elle, s'y qualifie à plulieurs'fois
de rante, appelle Therefe Imbert fa niece, & lui réirere,
lorfqu'elle viendra à Seine 1 de venir loger chez l:lle.
Enfin depuis que' Therefe Imbert ell en cene ville,
toujours elle s'el! préfemée fous la qualiré qu'on lui conteHe; les perfonnes auprès derquell~s elle dt au fervice &
roures celles de fa connoi/fance ne l'ont pas reconnue fous
une aurre qualiré ; les unes ou les aurres ont vu les lertres
qui lui éraient écrites, & les envois qui lui éraient fairs
par fa. rame; les unes ou les aurres fe fom prêtées, à répondre à ces letrres. Si ces faits étoient conteHes; la
preuve en ferait facile.
Concluons que Therefe Imbert a la po/feffion de fan
état: mais quellé ell cene po/feffion? il fuffirait que réclamant comme légitimes des droits fucceffifs , on n'eû~ propofé
la bâtardife que par exception, & que cene excepti,on n'eût
été produire que plus d'un an - après la demande, pour que
cette fille fût maintenue jufqu'à la preuve contraire: mais
la po/feffion qu'invoque Therefe Imbert a lln caraétere qui
la rend inébranlable" & elle doit certainemenr prévaloir
en fa faveur jufqu'à ce qu'une preuve contraire fait oHe rte
& rapportée, puifqu'elle pourroit fervir à 'la comb~ttre, &
qu'elle futErait même pour conrefler l'admjffion de route
preuve de bârJrdife.
'
Cetre po/feffion eil: fondée fur le baprifiere, c'elt-à...;
dire " qu'on ne peut reprocher à Therefe Imbert de l'avoir
ufurpée. Elle a eu raifon de fe craire légirime, en érant
rrairée & reçue dans la maifon de fan aïeul matemel & de
fa tante; puifque l'aéte de fan baptême' lui donnoit cerre
qualité, elle a eu raifon de fe préfenter roujours & partout où elle a été, à Seine & à Aix, comme légirime;
& ce n'eH pas un vol qu'elle ait fait de ce ri'ue, puifqu'el1e
le 'rrouve conligné ,dans l'aéte de fa nai/fance.
Therefe Imbert défend donc fan érar par les deux genres
de
./
�.:
DU
PALAIS
DE
PROVENCE.
~2.9
de preuves les plus authentiques en cette matiere, celles
dont la réunion bit difparoître tous les doutes, & elle
peut s'appliquer ce' que dirait Me. Cochin dans -one caufe
d'état, " qu'il ne peut jamais [e former une queftion férieufe
" fur l'état, d'un citoyen, quand les titres lX. la poffeffion
" font d'accord à fan égard. "
Pour répondre à ces différens moyens, VOICI ce .qu'oppofoit le défenfeur de Jofeph Reyniér.
Toute la défenfe de Therefe Imbert fe réduit à [outeDir que l'atl:e de baptême eH Je véritable titre de l.a
légitin]ité, & qu'ayant en outre une poffeffion d'état fufE-,
L1nte, cette réunion de la poffeffion & du titre .forme la
preuve .parfaite de fan état. Il faut dooc examiner l'une,
après l'autre. ce·s deux propofitions.
L'ôÎ~ convient que fi Therefe' Imbert avait une poffeffion d'élat .fuffifante ,. elle pourrait fe flaner d'çtre mai,ntenue dans un état dont elle auroit toujours jOlli. Mais
comme cette. poffeffion n'exille pas pour .elle, d'après les
preuves qne l'on donnera bientôt, il ne lui reHe -donc que
fan aéle de haptême. Il s'agit par conféquent d'.examiner
a~ec foio quelle eH l'autorité d.e cet aéte; & s'il réfulre de
cet ,exameo' qu'il n'eil point capable de ·prou\'·er feul la.
lég.itimité, il faudra en tüer cette conféquence ,que Therefe
~bert n'a ni titre ni poffeffion, & que la preuve de-fou
état eil nulle.
•
'pour déterminer a'lec préci(.ion qllelle eil l'alltorité de
l'iltl:e de baptême ~ .& pour mettre' quelque ordre dans
.cette difcuffion, il faut ·établir d'abord en général quelles
font les qualité", néceffaires à tous les atl:es;' pour qu'ils
p.uiflènt fournir la pre.uv.e de certains faits; après qlJoiil'
fuffira -d'exanii\)er li l'atl:e de baptême réunit ces caratl:eres,
,~ l'on fera en état de .décider s'il eü Hai qu'il fait par
lui-même la preuvË de l'état.
•
:P,ollJ qu'un a,tl:e puilfe fournir pa'r lui - même la p-re.uve
.d'un fait, il faut le concours au ,moins ~es quarre Ûr.
iCfloila.nces {uivanres.
Annùs l782. & jùi~
YYY
•
�i~o
'louRNA-:r.
--'Il faut LO. que cet aélie foit deHiné par les 'Loix à fairé
la preu.ve de ce fa.i..
_
2-°. Qu'il n'y ait pas d'autreS actes uniquement deltinés à
cette preuve, & qui exigent de plus grandes formalités.
3°. Que ,I?a& foit revêtu lui-même de tormalités fuffi-'
fances pour donner le degré de certitude néce1faire.
4'6. (Et 'cer~e condÜion. elt la plus importante) Que
celui qui rédige l'aéh~ & les tém9ins qui le fignent, foient
p-arfaitenient inll.-ruits du fait qu'ils attefient. Il n'y a nulle
djfficulté à montrer que ces dilférences conditions font néce-lfairl!:s à cout aG1:e:
On voit d'abord que la divèrlité infinie des intérêts qui
agitent la fociét~, & les différens degrés d'importance que
peuvent avoir les aélions ou les volontés des hommes, ont
forcé les Légi.flateurs d'établir différentes manÎeres de conftater, c<:s aéliO'ns ou ces volontés. La deHination particuliè·re· de' cbaque aéle a été,' fixée par lès Loix; ell'es ,ont
voulu que chaque chôre fût prouvée par le genre de preU\'e
particulier qui lui a ér~ affigné. Ainli, par exemple, pourroit-on croire qu'il fCit permis de faire une donation dans
un aéle de bail, -Ou un tel1:ament dans un comrat de'
,'ente? Non fans doute; & en voyant que ces aéles fonf
évidemmehr defiinés à un autre ufage, on ne pourrait
ajouter' foi· à ce qu'ils contiendroie.nt' d'étranger à leur nature & à leur defl:ination.
( Voilà donc une premie~~ vérité démontrée. Il. faut.' pour
qu'un' aéle prouve par lUI-même une chofe, qU'II-fOlt def-'
tinE; à faire la, preuve de cette chofe.
~ De ce principe il fuit néceifairemenr que lorfq!le 'les
Loix ont donné exclulivemenr à un certain aéFe le pouvoir
& l'aurorité néce.!faire pour· conH,arer un fait, les cieoyens fone' ttllU9 d'employer la forme prefHite, que cout chan~
gemellt dl: une vrai,e violation de la regle, & q~'il el1: ill-·
difpenfable ée rejetter la preuve faite par tout auti~ aéle
.
qui n'a pas la- même deHination,
Ceci devient encore plus évident, lorfque l'aéle de{J:iné li
-
\
�DU
PALAIS
DE'
PROVENCE,
53'1
la preuve d'un certain fait a des formalités . fupérieures à
telles de l'aéte qu'on voudrait lui [ubdituer. Il [eroit effectivement bien ab[urde 'que la Loi accordât la même autorité
à des preuves etrentiellemeor .plus faibles les ,unes que les
autres, & qu'elle eût la même confiance là oÙ il n'y a pas
i'
la même certitude.
•
Il fal][ par rnnféquent., pour qu'un aél:e p:rouve une chore,
qul/i] n'y ait pas un autre .<léte de Hi né à cette preuve, ~
qui exige de plus grandes formalités.
La troifieme condition dom il a é.té parlé, c'en: qu'un
aél:e doit être revêtu de forma1ités fufEfaores pour donner
le degré de certittrde nécetraire.
l '
Il ,ne peur y avoir de dou.te fur .la vérité de .ce principe t
la 'feule bafe de la ca'nfiatlC'e qu'on 'accorde à un aél:e, &
de la foi qu'il peut f.aire .en juHioe, c'eft la certitude' que
l'on .cr.oit avoir de la vérité de ce qu'il coorient; & d'où fe
tire cette certitude, fi ce n'eH des formalit~s dont il en:'
revêw, des fignatures plus ou ruoï'ns nombreufes des tém,oins t
des Magilhats ou de l'homme public qui rédige les différeils
aél:es? -Les formalités d'un aél:e doivent par conféquent être
[ufEfantes 'pour conllater les faits qu'il contient, & relatives
à leur importance; l'on ne peut donc accorder a.ucune autorité à ce' titre, .lorfqu'on a'pperçoit uni difproportion évi-èel1te .el'ltre les objets qu'il doit .prouver, & les -tîlOyens qul
fOot. employés pour cela.
.:.
. .• Il relle une quatrierne condition plus nécelfaire encore'
que roures les autres; celle dont le défaut vicierait l'aél:e
dans. wn .origine, & par couféquenc .dàn~ tous res effets;.
celle enfin fans laquelle l'aéte [eroit abfolumen~ 'nu!, ou"
pOOl' mieux dFre,' [d-Î1s. l'I1'uêlle .il· n'-auroi'c'jamais exil1:è! .
Cette condition indifpenfable pour la validité de tour aél:e;
_ c~efl: q'!e celui qui le récJ.ige, & les témoins qui le lignent"
foient parfaitement infl:ruits du fait qu'ils attellent
; Il. feraif 'in~i1e d'inG(<!'el"' fur' 1 unè m1axime auffi' é~idènre
que' pour ar'tefier' Lln fa-ir. -il rfail.1e]e conno~rre; c'efl:- un;
de::. ces vér.iréS' qili; 'pour .êtréJ ~ecdnn'l'ib, d'one befuin que,
Yyy2.
�B2-' 10
V RNA L
d'être prérentées: la lconnoiffance parfaite des chares que
l'on aneHe, fait feule la validité du témoignage que l'on
porte. Quelle confiance peut-on accorder à un aél:e qui contient un fait abfolument inconnu à touS ceux· qui l'affirment?
Ces principes ne peuvent fouffrir aucune difficufté. Les
qua!re. conditions qu'on a pré[entées cçmme néce!T:lires à
lOut aél:e, doivent donc concourir enfemble pour lui donner
cette auéorité complerre qui fait regarder comme indubitables les faits qui y font l?lentionnés.
Il ne refte donc" plus qu'à ex~miner fi l'aél:e de baptême
réunit ces caraél:eres par rapport à la preuve de la légitimité, & l'en verrà avec;: !furprife que non feulement cet aél:e
n'a pas toutes les qualités dont la néce!Iiré vient d'être démontrée, mais qu'il n'en a pas une feule, ce qui détruit
entiérement l'autorité qu'on voudrait lui attribuer dans celte
,manere.
,
"
1°, L'aéle de baptême n'eft point det.:1:iné à prouver la
légitimité.
Ceci eO: évident par le texte même des Loix," qui ont
ordonné les regiO:res des naiffances, des mariages & des
fépulcures.
Nous connoitrons en, France quatre Ordonnances qwi [e
font occupées Ide cet objet. La premiere eO: l'Ordonnance
de Villers-Correret. L'arr. 'l l porte: ,,' qu'il fera fait regiftre
" en forme de preuve des baptêmes qui contiendront le
" temps de la nativité, & par extrait dudit regillre fe pourra
" prouyer la majorité iOU minorité., & faire pleine foi à cet
" effet. 1" .
... . r
L'Orlil?nnance de . • 6P7,' tit.' 20, art. 7,'" ordonne que
" les preuves de l'âge, du m'adage & du témps du décès
" feront rec;ues par des regiftres én bonne forme qui feront
" foi en 'juHic~. "
,
La.Déc1arqtion de 1736,ar,t,. 4," yellt gUe d'ans les aétes
".,de bJBtéltl)}' il foi"t faie mejlr\.;Jn du j.our de la naiffance,
l" du 1 am qlÛ fera-don~é,à l'el?fant). de celui. de ,fes pere
1
�DU
PALAIS
'P~OVENC'l!:
DE
~3J
;; & mere, &c....... que l'aél:e foit (igné par le pere, s'il eH
" préfeOl, le parrain & la marraine; & quant à ceux qui ne
" fauront ou ne pourront ligner, il ferJi fait mention de la
" déclaration qu'ils en feronr. "
On voit. que jufqu'ici il n'ell: nullemeOl quellion de la.
légitimité. Les Ordonnances n'établi1fent les regiflres des
baptêmes que pour prouver l'âge, la majorité ou la miporité ;
elles \'eulent qu'on fa1fe mention du nom du pere & de la
rnere, & non pas de leur état: l'aél:e ne peut donc faire foi
à cet égard.
Mais il y a plus, & la derniere Loi portée fur cette matiere, la Déclaration de 1782-, s'exprime avec tant de clarté
fur ce fujet, qu'il fulEt d'en rappeller les principales difpo- 1
litions pour diffiper les moindres doutes.
" Nous avons ~té infOffi1és , dit le préambule, que quel" ques Curés-ou Vicaires n'ont pas difl:ingué, lors de la
" rédaél:ion des aél:es de baptême, le fait relatif au facre.,.
" ment qu'ils ont admin~{tré, & les faits relatifs à l'état
" de l'enfant à l'égard duqùel ils certifient feulement que·
') les parrains & marraines ou le pere ont fait telles ou
" telles déclarations: voulant faire celfer ces inconvéniens,
" enjoignons à tous Curés & Vicaires, lorfqu'ils rédigeront
" les aél:e.s de baptême, de rec'evoir & d'écrir~ les décla" rations de ceux qui: préfenceront les enfans, leur défent' dant d'inférer dans les regifl:res' aUCUlles autres claufes
" ou énonciatiolls que celles fait~s par ceux qui auront pré" fènté les enfans, & fans pouvoir faite aucunes interpel" lations fur lefdites déclarations. "
L'a6l:e de baptême ell: donc Ii peu dell:iné à faire la
preùve de l'état des enfans., qu'il ell: défendu aux Curés de
s'informer de la vérité des faits relatifs à cet état; il faut
par c'onféquent le renreindre, fuivaOl le texte des Ordonnances; à prouver l'âge, la filia'rion & le facremenr. __
• La premiere qualité nécelfaire à un aél:e pour faire foi par
tui-même, manque dQnc.à l'aél:e d~ baptême. On va vôir qu~i\
dt également privé des autres.
.
.
,
�) 34 " J ~'lu Il N ;'" LI 1'" ., '1 C d ' •
On a vu que pour qu J prouvat a egltlm~te, J rau rOle
qu'il -n'y eût pas d'autre aél:e deltiné à' cet urage. Or tout'
le monde fait qu'il en ell: un qui eil fpécifllemeut affeél:éà cet objet:. c'eil l'aél:e de célé"bration du mariage; &. c'ef!::
encore une maxime inviolable & atteItée par. tous les Auteurs, que l'aofre d'épouf'lilles eil le feul qui prouve léga'lemerit
le mariage, qu'il e:fl: par co'ilféquene le véritable titre de.la
légitimité, & que I~s enfans ne fom difpeAfés de lesrapporter que dans le cas de la perte des regill:res.
.
Il en: donc impoffible de faire fervir l'a8:e de .baptême
de remplacement à celui des époufailles, d'autapt plus que
ce dernier eH reVêcu de fçrmalités bien plus amhemiques
que le premier. Pour l'aél:e de baptême, il fuflic.de la 'figna~
cure .du Curé; & fi le pere, le parrain & la 'marraine ne
[avent .ou ne peuvent ftgner, on les en difpenfe. Mais'
.pour l'aél:e de mariage, quelle différence de précautions &
de foins!
.
La Déèlaratiàn de 1736 veut" que- dans Jes aél:es de
" célébration d~ mariage on 'infcrive les noms, Curnams,
," âges, qualités & demeures, non feu.lemeut du mari &, de
" l'époufe, mais encore des quatre témoins; que Fon men" lionne encore ft ces témoins fone parens otf alliés, des
" contraâans & en quel degré, & enfin que l'aéte, fok
" fig né fur les deux regiltres, lant / par celui qui 'c.élebreral
" le mariage, que par les conlraél:ans & qU'lIre té-rnoi'nso au .
." mOlns. u
. On ne peut cerlainern'ent -pas affimiler l'itél:e d'e 'baptême.
à celui de mar~age revêtu -de - lant de- formal:ités, li puhlic,.
fi authemiqlle
peu fujet à -erreur; les Loix ne peu"ene
leur accorder la même cdllfian.ce & leur .:donner le rrl~me'
pouvoir.
.,
.
_
..
. Mais quand l'a8:e de célébralion du mariage ne ferEl-it pas
fpécialemenc deltiné à la preuve de la légitimi.lé, le baptiltere ne pourmit jamais' Iii 'rémplir, parçe qu'il .n'el]; -pas
~evêtu 'des formalilés fuffiCantes. pour canHater un~fà!ie auffi
Important.
,u
�·
DU
PAL AIS
DB
l' li. 0 V Il Ne B ' B ) '
'Que l'on examine en effet ce que les Loix exigent, lori:'
que la perte des regifires étant prouvée, il ell: impoffible
de rapporter l'aél:e de célébration; elles demandent alors
un commencement de preuve par écrit; il faut des baptifteres, des contrats de mariage, des titres de famille qui
toUS concourent à annoncer la vérité d'un mariage réel;
il faut encore des témoins qui en confiatent la célébration,
& une longue poifeffion d'état en qualitê de mari & de
fèmme.
.
, Croira-t-on qu'un fimple aél:e baptifiere dont les formalités fe réduifent le plus fouvent à la feule figna[Ure du Curé ,_
& font fi peu équivalentes à celles de l'aél:e de célébration,
puiife, malgré ce défaut d'authenticité, lilppléer à tant de
preuves, de titres & de témoignages dont la réunion eil:'
néceifaire, lorfque le hafard a fait perdre le titre primordial ?
Non fans doute; il doit paraître au contraire que pour
établir un fait auffi important que le mariage des ép oux ,
l'aél:e de baptême manque d'une qualité in~ifpenfable pour
tout aél:e, c'e!1:-à-dire, des formalités fuflifantes pour conftater le fait qu'il <tnnonce.
L'aél:e lie baptême e!1: enfin privé de la condition la plus
importante pour faire foi à l'égard du mariage des' parens;
car il e!1: certain que le Curé qui le rédige & les témoins
qui y affi!1:ent, ne peuvent connaître le fait qu'ils atleflenr.
Qu'un homme & une femme s'éloignent du lieu oÙ ils ont
vécu long-temps; qu'il leur naiife un enfant, qui pourra
1lî\'oir dans leur nouveau féjour fi cet enfant eCl légirime ou
non ? Sera~ce des témOIns fouvent pris au hafard & dans la
lie du peuple? Sera-ce le Curé, qui peut-être pour la prenliere fois de fa vie entend nommer le pere & la mere;
lé Curé, à qui il n'elt pas même permis de s'informer de
li vérité des faitS' qu'on lui expofe, & à qui les Loix ordonnent d'écrire aveuglément tout ce que l'intérêt, le caprice
ou la fraude peuvent fugg~rer à ceux qui préfentent l'<:nfant
;tU baptême'?
�.'3 6
Jou
RNA L
"
Il réfulte de tour ce qui vi~nt d'être expofé, que l'aél:e
de baptême n'a aucune des qualités qu'un aél:e doir ré4nir pour
faire une preuve légale, & que ni par fa deHination, ni par
[es formalités, ni par la qualité des perfonnes qui le rédi-,
gent ou qui le fIgnent, il ne peut établir le mariage des
parens ou la légitimité des enfans.
Cependant l'on a beaucoup inGHé en faveur de Therefe'
Imbert, Glr ce que les Auteurs difent que le bapriHere forme
une grande p.reuve de l'état des enfans, & fur ce que plufleurs Arrêts ont décla[é légirimes des enfans qui n~ rapportaient pas l'aéh~ de mariage de leurs pere &. mere.
;
La réponfe à cette objeétion eH trè~-facile: il eH v.rai'
que le baptiHere prouve l'état des hommes; & voici comment:
on a vu que cer aél:e eH defiiné par les Ordonnances 11·
prouver l'âge & la filiaticm; ainfI il prouve que l'on e!l: fils
de telle & telle perfollnes. Il ne rene plus après cela .qu'lI
favoir fI ces perfonnes éraient mariées ou non, & l'aéte de
bapt.ême établira ainG la légitimité ou la bâtardife de~ enfans, non pas direél:ement & par lui-même, mais par fes
rapports avec d'autres aétes & d'aurres' preuves. AinG les
Auteurs n'ont pas dit que le bapriltere. faifoit la preuve de
la légirimité, mais feulement de l'état, parce que ce mot renferme 11 la fois la légitimité & la bâtardife, & que l'aéte de
baptême peur fervir à confl:ater l'une ou l'autre, fuivant les
cîrcon!l:ances.
Il fuffit de citer deux Arrêts qui marquent bien cette dif~renœ.
•
•
1
Le premier fur rendu dans une caufe défendue par Le
Maîrre, reptieme plaidoyer; il 'plaidair pour Marie Cogpot.
Cerre fille avait été baplifée fous le nom de deux perfonnes
qui la défavouaient formellement. Cependant on jugea avec
raifon qu'elle était fille légitime de ces deux perfonnes; cai'
fon a.é1:e de baprê~e prollvoit qu~elle érait leur fille; & ces
deux per[Qnnes re trouvant mariées, il prouvait encore fan
é.tat de légitimité.
Veut-on un exemp1e dans le fens CODtraire? On va en
choilie
_
..
,
•
�•
DU
•
PALAIS
DB
H7
PROVBNCB.
choilir un dans les Arrêts même cités par Therefe Imberr.
La nommée Laurens avoit d'abord eu commeKe avec le
Marquis de Termes; elle eut enfuite d'Antoine de Salvone
deux enfans, qu'elle fiç, baptifer fous le nom du Marquis de
Termes; après cela Antoine de Salvone l'épou[a & mourut;
mais avant [a mort il déclara que les enfans baptifés fous
le nom du Marquis de Termes lui appartenoient. Sa femme
fe préfenta en juf1:ice pour demander que fes enfans fulfent
déclarés légitimes par mariage fubféquenr, & leurs baptÎf1:eres
corrig~s; elle fut déboutée de cette demande [ur les conclufions de Mr. Talon.
A la vérité leur pere les reconnoitroit; mais l'aé1:e de
baptême prouvoit leur filiation, -&' les perfonnes' qu'il an_noncroit comme leurs pareRS n'étant point mariées, il prouvoit en même temps leur état de bâtardife.
Tous les Arrêrs ralfemblés pour la défenfe de Therefe
Imbert ne prouvent rien ·dans la caufe préfenre; car dans
toutes ces différentes caufes [ans exception , {lu il y avoit
eu perte des règif1:res, ou le mariage s'étoit fait en pays
étrangers, ou enfin il s'agilfoit des mariages des prote Hans,
Or, tout le monde [ait que dans ces trois cas les enfans
font difpenfés de rapporter l'aé1:e de célébration du mariage,
D'ailléurs une circonfiance déci live qui s'eH toujours rencontrée dansl'efpece de ces Arrêts, c'efi une po/feffioll
d'état confiante & reconnue qui fuppléoit au défaut des titres,
& qui 'devoit faire conferver aux eofans un état dont ils
avoient toujours. joui.
Si Therefe Imbert avoit en [emblable avanrage; Ii fa
m ere , Ii elle-même avoient joui, l'une de l'état d'époufe ?
l'amre de celui de fille légitime, on n'entreprendroit pàs
de leur en difputer la '{JolfelPon. Mais un court examen de
la maniere dont l'une & l'autre ont 'vécu, en montrant qu'il
n'exiHe aucun indice d'une polfeffion d'état légitime, prou_
vera en même temps que. Therefe Imbert efi réduite à [on.
feul aé1:e de baptême, titre dom I~infuffifance eP.. démontrée,
lorfqp'il n'ef1: fomenu par aucune autre preuve.
'Annùs 1782: & fuiv. .
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Pour connoitre ,quel efi l'état qu'on doit accorder 11 Theret'e
Imbert, il faut examiner filr-tout, ce qui a rapport à [a mere;
'car il ~{t !énfible que la légitimité de ia fille dépend du
nlariage de la mere: or, efi·i1 Certain, eH-il feulement probable que cene n'lere ait été mariée? Sait-on le lieu où
le mariage a été télébré? Enfin a-t-elle o[é prendre publi:'
quement le titre d'épou[e, & le lui a-t-on accordé dâns les
lieux où elle a paffé [a yie?
Les détails que l'on s'efi procuré [ur la vie d'Etie nne'
'Reynier, mere de There[e Imbert, éc1airciffent tous les
doutes. On [ait d'abord qu'elle fut enlevée par Jacques Im~
bert , & rien n'annonce que [on ravi1Teur lui ait accordé la
qualité d'épou[e; on ne rapporte aucun contrat, aucune promeffe de mariage; & c'efi en vain qu'on a fjit vérifier les
regiHres des qua'tre Paroiffes, les plus voifines du lieu où
habitoit Etienne Reynier. Depuis le moment de [a difparut ion , on ignore quels [ont let. lieux qu'elle parcourut, &
quels [ont les noms qu'elle y prit; mais cette ignorance ne
peut être regardée comme une preuve en [a faveur. Le [eul •
endroit duquel on ait pu tirer quelques renfeignemens plus
précis, c'ell le village de Lambruiffe, qui efi le tieu de
fa mort. Le Curé de ce village qui la cpnfe1Ta, & qui par
conféquent devoit être bien inGruit de fan état, [e garda
bien, dans l'aél:e de fépulture qu'il rédigea, de lui donner
'la qualité de femme mariée, quoiqu'il eût dû le faire [elon
les Ordonnances, fi elle l'eût été réellement; il b défign~
feulement fous le nom d'Etienne Reynier du côté de Sdr.ze.
Un certificat de plufieurs habitans de Lambruiffe dit auŒ
que le nommé Jacques Imbert était dans la chambre de la
malade; mais' il ne donne pas à cet Imbert le nom de
mari d'Etienne Reynier. Il eG donc certain que la' po1TeŒon ,
d~ la mere ell nulle, & qu'elle n'a point eu cene publicité
qui feule pourroit en conGater l'exillence & [uppléer au
défaut des titres. Il relle à examiner celle de la fille.
Elle e!l: bièn moindre encore. Après avoir été nourrie par
un fimple [emiment d'humanité chez [on aïeul pendant fe::;
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PAL.US
DI!
PROVENCI!.
n9
p.remieres années, elle a palTé route fa vie en qualité de
domeHique dans différentes maifons, fans qu'aucune relation avec [es parens annonce une reconnoilTance qui lui
feroit cependant indi[penfable. Il- y a plus: cet aïeul qui
la connoilToit , qui l'avoit. fous fes yeux, fait [on tefiament ;
fi elle eût été légitime, il .ne pouvoit éviter de la nommer;
cependant un certificat du Notaire qui a rédigé le teftament, prouve qu'il n'y ell: fait aucune meneion de Therefe
Imbert. Il ell: vrai que dans les différens pays où elle
a vécu, elle a pu fe donner comme fille légitime; mais
dépendoit-il d'elle de fe donner un état qu'elle n'avoit pas,
& au lieu des aél:es mu1cipliés de la nororiété publique,
qui [one nécelTaires pour établir une véritable polfeffion
d'état, fuffira-t-il de fimples allégations non [e~lement dénuées de preuves, mais contredites encore par des preuves.
formelles?
. Il faut conclure de ces réflexions que la polTeffion de la;
fille ,comme ,celle de la mere ne mérite point de porcer
ce nom, & que celle-ci [e trouvant ab(olumene' réduite à
[on aél:e de baptême, le titre feul ne peut fuppléer à tous.
ceux que les Loix, exigent pour prononcer fur l'état des'
hommes.
Mr. l'Avocat - Général de Montmeyan commen~a par
pofer deux quefiions. Therefe Imbert ell: - elle la flle &
l'hériciere légitime d'Etienne Reynier- fa mere? Jofeph
lleynier i1rt-il effeél:ivemene & légalemene payé ce qu'on.
lui redemande aujourd'hui? Originairement,. difoit-il, l'in-·
,érêt, feul .~yoit paru divif~r l'oncle & la niece, II s'agilToit
de r.a~oir uniquement fi l'une érait créanciere, fi l'autre·
~t9it ç~biteu!. Mais aujourd'hui que Jofeph Reynier a con!~Hé l'~tat de Theiefe' Imbert, la queftion de. légitimité a,
formé celle qui doit préalablement être jugée.
_ Depuis que les Loix one fait du lien conjugal le contrat
le plus faine & le plus indiffoluble ; depuis que la Religion
l'a élevé 11 la dignité augufie de Sacremene, la Religioru
.& les Loix fe [ont réunies pour veiller à ce que touteS>
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JOURNAL
les formalités dont il doit être revêtu fuirent fcropuleuCe":
ment gardées, & à ce qu'il conHât d'une ma'niere légalé
& authentique de leur obfervation. Delà toutes les folem~
!lités qui chez les Romains beaucoup moins aufleres pourtant que nous fur ce point, accompagnaient la cél,ébrarionl
du mariage, & le diHinguoiel1t même du concubinagè licitel
auquel ils accordaient pounant des' privileges & les effets
les plus elfentiels de l'union conjugale. Delà fans dome
encore les précautions qu'ils prenaient pour tranlrnettre à
la nouvelle famille la mémoire de ces lolemnirés, de cette
union à' laquelle elle devoit le jour & le rang, & que l'on
confervoit ce qu'ils appelloient tahulil! nuptiales Delà parmi
nous les cérémonies publiques de l'Eglife, & fur-tour les
regiHres ~es mariages. deainés à con Ha ter à la fois la fainteté & l'indiffolubilité dés engageinens qu'on a conrraél:és.
Pourquoi ne remonteroit - on pas à l'aél:e d'époufaill'es.
,pour prouver la légitimité ,,& comment la prouverait-on fans.
cet aél:e, dès qu'il n'exine paine de légirimiré quand le
mariage n'a pas précédé? D'un autre côré, il femble que
cet aél:e touche de plus près aux deux époux; qu'il
plutôt
leur propriété & leur preuve perfonnelle dans le cas où
l'on éleveroit des doutes fU,r leu'r étar , que celle des enfans
qui naiffent de leur union. Cer aél:e précede en effet fouvent d'un grand ..nombre d'annéés leùr nai,ffance. Peut-on
exiger fans dureté, fans injuaice même que ,l'attenrion des
Loix, que leur vigilance remonte fi haur? Ne fuffir-il pas
qu'ils paroiffent avoir joui de l'érat d'enfam légirimes dès
l'époque -même de leur exifience , & que' dans cout le cours
de leur vie il ne. fe reocontre pas un feul infiailt que la
. calomnie puiffe obfcurcir de nuages, 'ou f1érrir par fes
-foupçons? Tout ce' qui prouve plus direél:ement l'érat &
la poffeffion de leurs parens que la, leur, leur efi rrop
étranger, efi rrop éloigné d'eux en quelque fone ; il pourrait arriverainfi que par l'effet d'une négligence qui ne
peur êrre leur ton perfonnel, ils fe rrouvaffent eux-mêrnes
profcrits & dégradés du rang qui leur nppartient légitimé;;
. ment avant que d'avoir commencé d'exifier.
ea
,
�»U PALAis h. PR6vllNcÎl.
L'homme s'informe naturellement du lieu ou
1
h
des (Ir;'
conllances de fa naiifance ; mais eH-il beaucoup d'enfans,
eH-il beaucoup d'hommes dont la curiofité ou même la
défiance fonge 11 aller plus loin? Ces confidérations font
fpècieufes ; elles (ont d'abord une vive impreffion; malheureufement il n'en eH" prefque aucune qu'on ne pÛt également oppofer à)a néceffité de produire l'aé1:e de baptême
lui-même. Ainli, pat exemple, il n'eH guere plus facile
que l'attention & la vigilance d'un enfant remonte à l'époque de fa naiifance qu'à celle de l'union même des deux:
époux auxquels il doit le jour; la fraude & l'iniufiice peuvent également abufer de- fa ficuation dans l'une & dans
J'autre hypotlfefe; la négligence de ceux qui doivent veiller
pour lui peut également lui nuire dans les deux cas. Aina
on pourrait dire à la rigueur que l'aé1:e de baptême ell:
lui-même aoffi étranger que l'aé1:e d'époufailles de fes pere
. & mere; iLn,e dépend pas', plus de lui de fe procurer l'un
que l'autre; l'un'& l'autre (ont également hors de fa ponée.
C'eH donc trop prouver peut-être 'que prouver la difficulté
excellive dont il peut être pour un e,nfant de rapporter
l'aé1:e qui cqnfiate la légitimité de l'union de c/;ux dont ,il tient le jour , puifqu'il peut être à peu près auffi difficile quelqlléfois de rapporter l'aé1:e de' -bap.têm~. Il femble
flOurtanD qu'il exiHe une diHiné1:ion à faire entre l'aé1:e
tl'époufallles & l'aé1:e 'de baptême ; on la, propora avec
fuccès dans une caufe où la pofition de celui dont on attaquait l'état, dont on fufpeé1:oit la légitimité, était fans
doute 'plus favorable, mais_ p.eut.être peut-elle même s'appliquer~à celle-ci. '"
"
"; ,
.
L'aé1:e de mariage eH deHinéJ! cobl1:ater non feulemenè
l'état des parens entr'eux & par rapport à leurs enfans,
mais encore relativement aux deux familles qlJi s'allient ,
en en formant une troifieme qui leur 'appartiendra égale-.
ment. L'aé1:e de' baptême conl1:ate " plu;s direé1:ement &
même, up!quement la filiation légitime. & la de[cendance ,
,
'
�S4'2.·'
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c'eff-à-dire " la tranfmiffion ,de' nom " d'état' & de forflU1.e •.
Lés deux époù'x ne peuvent prauver ILt'légitil'\1ité de l'eur
union que par l'aé1:e même qui la légitime; les deux familles.
ne fe 'rapprochent & ne tiennent g~ere 'l'une à l'autr~ que
par ce traité commun :qu'elles Ont foufcrif. Les enfans ".
quoique intéteirés -f~ns doute à ces diftërens aé1:es, n'ont.
cepéndant de' réellement COmmun entr'eux. & les auteurs
de leur- exinencé, que leur aé1:e de baptême & la preuve
de leur filiation. A mefure qu'ils deviennen.t eux - mêmes
]a génération préfente, la génération pairée ne tient plus
pour ainll dire qu'une feule place & un feul poine;' on:.
conferve alors l'anneall principal qui prouve & qui fait la
coneinuité. de la chaîne. Mais on néglige les liens parti.·
culiers, les liens perfonnels à la gén.ération qui paire, &
dont les rapports s'éloignent & ne fublifrent plus; le titre·
de pere & de mere (uffi.t & abforbe e.nfin touS les autres"
parce que c'en principalement par 1 ce titre que' III génération flairée tient à la générarioq préfenee..
.,
II exifl:e ·encore ·une.)rpifon bien naturelle & bien fenfible,
pour qu'après un certain temps on donne à l'aé1:e' de baptême le dFOÎt de fuppléer l'aé1:e d'époufailles ; c'eil qu'entre
plufieurs aé1:es., celui qui eil le réfultat & le dernier de
tous' les fait ',orchnàirèment .lJégliger, fur - t0tlt quand cgs.
aé1:es précédens '1commencent -il dater' d'une époqiJe ,airez'
recu·lée. L'aefe ·dé baptême fuppofé -& fupplée l'ade d'épàU:
failles; quand' il k meniionne, il en efr la fuite &' 'Ie
complement en q.Celque fo;te; il eil l'aé1:e véritabl~men~
commun a.ul{ èeux gépérat.io.ns. L'enfant qui vo~droit :P,rO\l7
ver fa légiti91ité particuliere par Paé1:e d'épo.ufaiJles de ,ceJllf
dont il fe diroit j'iru; ne pr.où~eroit rieil; la 'preuv:e de ia
légitimité ·en genéral feroit bien r.emJplie; .celle de l'iden..,
tité, de l'applicatiofl de cette légitimité, s'il efl permis de·
.
s'exprimer ainfi, lui relteroit à faire..
Quelques-~llls de ceS raifonnemens reçoivent une réponfe; mais il ea e·n- auxquels' il' en diffu:'ile de rien oppofer de-' /
�,
'DÛ' PAI~Ai~ ni' PROVBNCi:
'S43'
fatisfaifant. Dans la caufe où les Gens du- ,F.oi les firent
valoir, il Y avoit à la vérité une génération de plus dOllt on
troubloir les cendres. Jàcques Gimet réclàmoir les droits
égitimaires & fucceffifs de fan grand pere, & c'éroit fan
grand pere dont on coorefroit l'état. ,On ne laijfoÎr. pas que
de relever a\'ec force coorre lui un li long filence; on lui
difoir que [on pere s'étQir lui - même rendu jufrice, qll?il
n'avoir jamais rien ofé demander de ce qui lui feroit revenu, s'JI avoit été en effer le fils légitime de l'aïeul commun ; & pour affoiblir cette' efpece de fin -de non recevoir,
Jacq'ues Gimet s'e!for<;oir de prouver que fon pe're avoir luimême commencé le procès, & demandé le premier la [uc~effion & le titre qu'il réclamait.
Dès-lors on peut, ce femble, oppofer à jofeph Reynier ce
dilemme embarralfant, pour prouver la refIemblance des deux
hypotheCes: ou la réclamation ·de Jacques Gimet datait en
effer du ~ivant même {je [on pere, & alors cette calife
dans laquelle la Cour pronon<;a en faveur de la légitimité,
éroit ab[olumenr femblable à celle-ci; ou fi Jacques Gimet
1 troubla le premier la paix
de 'fa famille, à la vérité il s'était écoulé beaucoup plus de temps depuis la mort de ceUl(
dont on révoquait en doute le mariage; mais le ,long intervalle de tranquiHité & ,de filence dans un état -d'opprellion
ne' lailfcit pas que d'être fufpeé\; lui~même, r&I'de fournir
peut-être. un argument de plus contre l~ légItimité. Il yavoit
en outre dans le-'procès de Gimet une déclaration formelle'
(je l'état de bâtardife inférée dans .Ie teHament de l'aïeul,
& une efpece d'aveu que cet aïeu'l & la femme qui étoit
oevenue enfuite' [bn époure, avaient en effet commencé par
le libertinage, & mené long-temps 'une vie eHante & \'agabonde. Il y avoit"à la vérité auffi quatre aél:es de baptême'
, lie plus que dans le procès aaue!. Six enfans avaient été
fucceffivement baptifés comme enfans, légitimes de l'aïeul
Gimet j mais l'aél:e d~époufailles manquait précifément rout
comme ici; -& quant au plus grand nombre d'en fans , ce
n'ef!: pas fans 'doute le plus'J:>u le moins de fécondité -qui
,)
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J ci
U -R oN A L . > ...
rend le mariage légitim,e, &, [a légitimité plus ai[ée 11
prouver.
Etienne Reyn ier n'a eu que trois en fans de Jacques Imbert;, ce ne doit pas être. [ans doute concr'elle un inâice
de plus du con'cubinage. Therefe Imbert produit deux aél:es,
de,bilptçme q.u.î i~d1Çjuenc, qui attefient [a légitimité, & cellé'
d'un de [es Jrer.es; ellè invite Jo[eph Reynier à chercher &_
à produire le tr.oilieme qu'elle n'a pas pu fe procurer, &
qu'il connoÎt peüt-être, pui(qu'il paroît avoir des notions
particulieres fur le [Qrt de ce m)ifteme ,enf"nt., C?n -ne pellt'
pas' du-moins hlÎ oppofer- le filence; il efi reconnu & avoué,
que-[ [a, mere,étoit fi.ll~ légitime de Noel Reynier; ce n'e/\
que [a lé,gitimité à elle qu'on lui 'concefie.
,Sofl aél:,e 'de- baptême, lu! ~it-on, n'en efi pas' le titré
confiiti,l.cif; il faut qu'elle remont<; ju[qu'à l'époque de l'union
qui [eule, en effet a,pu la fair,e naÎt're fille,Iégitjme, & qu'eUe'
en, confiate rexiHence. Point de légitimité [ans mariage;
point de preuve de légitimité [ans la pr~uve - du mariage,
fans'l'aél:e d'ép:oufa.illes.. Plulieurs rairons déci lives s'oppo[ent
à c.e -que l'aél:e de baptême Joit le titre conflitutif de la lé:
gitimité; d'abord ce .n'efl point [a deHinatiol1 légale; il el!: .
un autre aél:e plus dire8:ement, plus effe,ntiellemenc COI1facré à cet objet, & cet aél:e-~H l'aél:e d'épq~r~illes;. ce [econd
aél:e efi revêw d~ beaucoup plus de [olen:nités que l'aél:e de
baptême; enfin le Curé, rédaél:eur de l'aél:e de baptême,
ignore lui-même ce qu'il atteHe, ou ne le [ait qu~ d'après
des déclarations [ufpeaes d'erreûr ou de faufferé.
'
Cette, énumération en d'abord impofance; chacune des
raifons particulieres qu,i la co}npo(enc étant d'abor~ [pécieu[es
au prell}ier coup-d'a;il, ell~s ne p~uvenc former toureS;jenfemMe qu'un corps de preuyes redoutables qu'il eH, ce [emble;
diffici1e d'anaquer & de renverfer de front. Mais c'efr d'abord avancer une propolition bien hardie, que de dire que
l'aél:e de' baptême n'dt pas defiiné P'lr la Loi à prouver
par lui-même la légiriD;lité, de, celui qui. l'a en fa faveur;
,c':fl le dég~ader. terriblement qu,e de
le réduire à ne. prouver
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PRO V B N C B.
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que l'tige, l'époque de la nai1fance, la majorité, ou même
la filiation; & pourquoi le Légiilateur auroit-il pris des précautions li étendues, s'il ne defiinoir réellement les regifires de baptême qu'à leur ufage parciculier, pour' ainfi
dire, fi l'objet de leur infiitution écoit de lui procurer un
tableau fidele des forces & de la population de fon empire?
Les regifi.res de baptême 'ne feroient donc parmi nous
que ce qu'écoit à Rome le regifire du cenfeur, fur lequel
chaque p.ere de famille écoit obligé de faire infcrire le nouveau fils qui lui venait de naître; ou plutôt ils fervoient
beaucoup moins encore, car c'écoit chez les Romains une
de~ plus forces preuves de légitimité que l'infcription d'un
enfant a/ligné à telle ou telle famille fur les livres des cenfeurs; & ce feroit même un fophifme que de vouloir oppofer à une pareille preuve cerre Loi fameufe, pater eft
fjuem nuptiœ demonjlrant, qui peut compter au nombre de
fes plus écl;ltans triomphes l'Arrêt que la Cour a 'rendu
réc~mmeor.
.
La regle pater eft érablie en faveur de la légitimité, ne
fauroir guere lui être oppofée avec fuccès; c'ell: bien en
effet .alors en changer la deflination primitive; elle oblige
par refpeél: pour les mœurs & pour la tranquillité des familles tout homme à reconnoÎtre les enfans d'une femme
door il eH l'époux, & par cela feul qu'il en efl l'époux; mais
on n'a pas penfé à en induire coorre le fils infcrii ou baptifé
comme enfant légitime, la néce/lité indifpenfable de produire l'aél:e. d'époufailles de ceux dont il a reçu la nai1fance.
On ne peut refufer d'être pere quand on efi époux; voilà
tout ce que cerre Loi célebre décide; il Y a loin encore de
cette dééifion à celle-ci: tout enfant légitime eJl de plus ohligê
de prouver dimonjlrativement l'union de fis pere & mere, de
produire l'ac1e d'époufailles. Combien des ~oix Romaines
décident au conrraire que la fimple reconnOl1fance du pere,
,que le nom de fils donne au public, ou par -un écrit !igné
de trois témoins dignes de foi, à un enfant, fuffifent pout'
lui a1furer le titre & les droits d'enfant légitime! Ce n'ell:
AI/liées l78z & jùiv.
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donc pas fur cès toix qu'il faut chercher à s'appuyer; Jofeph
Reynier l'a recon.nu lui-même; auill s'dl-il beaucoup plus
occupé du foin d'éluder & d'affoiblir leur autorité. Il a prétendu àvec raifon que le"s Romams connoilfoient pluGeurs
fortes d'union., & une efpece de concubinage licite & autorifé qui pareicip9it en quelque maniere à tous les effets du
mariage; mals il a peut-être tiré de cette différence entre
lèurs mœurs & les nôtres une conféquence trop étendue,
quand il a ajouté qu'ils étoient & qu'ils devoient être beaucoup·
moins difIiciles que nOIlS fur. la preuve de la légitimité.
Rien ne prouve en effet que dans ce point, ainG que
dans beaucoup d'autres fur lefquels on ne fe permet fouvene
de blâmer les Loix des Romains que faute de les avoir
alfez étudiées &. comparées I~s unes aux autres', ils fe' foiene
écartés des vr:;is principes, de l'équité naturelle & de la
faine raifon; l'on v.oit au contraire que fur cette' mariere
nous 'avons adopté leurs Loix & même leurs préfomptions.
Ce feroit donc une véritable inconféquence que d'accorder
à nos regi!l:res de baptême, furveillés, p~rfeél:ionnés par un
plus grand nombre de Loix, confacrés par la religion ellemême, moins de foi que les Romains n'en ajoutoient aux
fivres de leurs cenfeurs; il étoir inutile que le Légiilatetlr .
cherchât à leur donner tant d'authenticité, s'il n'avoir pas
voulu les confl:ituer les premiers Juges de l'état des hommes.
. L'Ordonnance de 1139 veut que les regifires f9ient faits
en forme de preuve & pour en fervir. Celle de Blois an~
nonce d'une maniere bien pofitive l'imporrance extrême
qu'elle attache âux regi!l:res, & le cas particulier qu'eiIe fait
(le cette. efpece de preuve, par les précautions qu'elle prend
pour ~n prévenir la perte & le dépérilfemenr. L'Ordonnance
de 166'] a addpté, érendu & pçrfeél:ionné ·toures.les difpo{irions des Loix précédentes; le Légiflareur ne dedaigne pas
·de s'occuper long-temps & en détail de cet objet, parce
qu'il le regarde comme très-important: & quoi de plus important en .efFet que ce qui fert à con!l:ater l'état des hommes! Il prend toutes les mefures poillbles pour écarter le~
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PRO VEN C E.
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'doutes & les foupçons, parce qu'il n'a pa's voulu 'qu'on pûr
en oppofer aucun à ce titre; n'eG:-il pas naturel d'en induire qu'il l'a voulu rendre le titre confritutif & décilif de
l'état des hommes?
II eG: difficile de lire avec une attention réfléchie la partie
du titre 20 de l'Ordonnanc~ de 1667 relative à cet objet,
fans penfer que rel eG: en effet le vœu du Légiilateur &
l'éfprit de la Loi. L'Ordonnance de 1736, qui eG: plus détaillée & plus précife encore fur ce point, nous fournir un
nouvel argument encore; l'ordre des ,regifires qu'elle a réglé,
la forme dans la.quelle chaque aél:e doit être dreifé, qu'elle
détermine, le fcrupule avec lequel elle veut que toutes les
folemnités foient gardées, la févérité avec laquelle elle ne
permet la moindre violation & même le moindre oubli;
tout prouve que le Légiilateur toujours rempli de grandes.
idées, toujours occupé de grands intérêts, ne pefe' & nl}
s'étend fur cet article, qui paroît d'abord li peu importanr,
• •
que parce qu'il eG: devenu un des garants les plus conli_
dérables de notre légiilation, par l'influence extrême qp'il a
voulu qu'euifenr les regifires dans les queHions d'érat.
Si des textes :les Loix on paife à. l'opinion des Aute'urs,
on verra qu'ils fe réuniifent auffi à nous donner la plus
.haute içlée .de la preuve qui réfulte en faveur de la légitimité de l'aél:e de baptême. Voici comme Danty envifage
.cene queA:ion : les uns fuppofent, dit-il, qu'on veut fe fervil" /
·de l'aél:e ,de baptême pour fixer un malheureux enfant qu'on
a prjvé du rang qu'il devoir avoir dans la fociété, à un~
place qui n'dl: pas la lienne ; d'autres craignent qu'on n'abufe
de l'abfence du prétendu pere, pour lui donner comme Jils.
,légitime un enfant qui ne lui appartient même pas;. mais.
cet Auteur eH bien éloigné d'appliquer fon opinion particuliere, déterminée par de pareill,es craintes, au cas où le
pere eG: lui-même préfent, & avoue ainli folemnellement la
:9éclaration de légitimité qui eA: faite en faveur de l'enfanè:
{Iouveau né au MiniA:re du Sacrement, par le parrain t la.
.ll;larraine & les autres témoins.
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JOU&NAL
Telle ell: cepèndant l'hypothefe de la caufe. Jacques Imbert, ce pere ,à qui l'on contell:e aujourd'hui un titre à la
fois fi honorable & fi doux, ell: venu lui-même reconnoîr re
à la face des autels l'enfant fur la légitimité duquel on afr~B:e
des doutes fi offenfans. Il n'ell: donc pas 'exaB: de dire que
l'aél:e de baptême n'eH pas defiiné à annoncer par lui-même
la légilimité ou la bâtardife, à devenir le titre cor.llitulif
& déclaratif de l'état" des enfans; tOUt femble au contraire
dans le texte des Loix annoncer l'importance" enrême qu'elles
ont attaché à cet ade; & le pelit nombre d'Auteurs qui
s'efforce d'en diminuer l'autorité, raifonne plut6t dans le
cas oll il formeroit un obllacle à la légitimité d'un" enfant, que
dans celui où il ell: en faveur de la légitimilé même, ce qui
eH: en effet bien différent.
Il ne relle d'autres re{fources J Jofeph Reynier pour étayer
fon aife rt ion , que, d'invoquer une Loi pofiérieure à toutes
celles que l'on vient de citer, & qui en auroit abrogé ou
expliqué les principales difpofitions (telle el!:, fdon lui, la
Déclaration de 1782) & de s'appuyer fur-tout de cette circonl!:ance eifenlielle en effet, que les Loix, lorfqu'elles ac:
cordent tant de confiance & attachent tant de poids aux
regil!:res publics, entendent parler de 'tous les regil!:res à la
fois. Et d'abord eH-il vrai que la Déclaration de 1782
ait donné aux Lpix précédentes un fens tout différent de celui
que nous lui prêtons, & diminué en effet l'influence des
aétes de baptême" dans les quefiions d'état? Jofeph Reyniera eu la bonne foi de rappeller lui-même les abus qui ont
donné naiifance à cette Loi. Querques Curés s'ingéroient, en
adminil!:rant le Cacrement de baptême, d'ajouter de leur fait
quelques énonciations, quelques déclarations relatIves à l'état
de l'enfant; plus Couvent encore ils fatiguoienr de quel!:ions
importunes, qui pre1'que toujours amenoient des menConges
"& des parjures de ceux qui les leu!' préfentoient. Ainfi au
lieu de la déclaration libr & fincere de" la famille de l'enfao"t ou de ceux à qui elle avoit confié fon f~cret, on n'avoit
plus que le témoignage Couvent fautif dû Curé, ou qu'un
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roman diété par la contrainte à ceux qui avôient préfemé
le nouveau né. C'eG: pour prévenir de fi funeG:es in con""
véniens, qlle la Déclaration de .1782. rappellant & renouvellant les difpofitions préci(es de l'Ordonnance de 1736,
prohibe févérement aux Curés -& à cous autres Prêtres qui
adminiHreront en leur place le (acrement de baptême, d'ajouter par leur propre f~ir, foir dans la rédaétion de l'a.él:e, (oic
ailleurs, fur les regiHres aucunes c1au(es ou énonciarions autres que. celles fa ires par les parrains, les marraines ou les
témolOs, dont ils feront renus de recevoir & d'écrire fidellemenr les déciarations, (ans pouvoir les provoquer lui-même,
faire aucunes inrerpellario,ns fur lefdites déclarations.
Que réfulre-t-il de l'efprir & même des difpofirions littérales de cerr.e Loi? Que le Minilhe du_ (acrement ne nous
tranfmer pas fur l'érat de l'enfan't (on opinion per(onnelle,
qui (ouvent en. effer pourrpit êrre erronée, mais la déclaration que lui en ont faite des perIonnes. qui en doivenc
être mieux inG:ruires, puifque la famille qui les choifiç ordinairement, a pu lui comlIJuniquer fon opinion ou (ôn (ecret, quelquefois le pere lui-même de l'enfant., qu'on lui
préfente. Si le Légiilateur n'e6é réellement arraché aucune
valeur à çes déclarations, auroit-jl fait du (oin 4e les (:on(truire, fojt aux mépri(es, (oit à l'afcendant· des PaG:eurs ,
. l'objet d'une Loi expre1fe, ,explicative & extenfi,ve d'une foule
,de Loix précédenres? Le choix des. per(onnes dont ces déclarations pourroient émaner, devenoit dès-lors auffi indifférent lui-même; il écoic bien minurieux (ur-cout d'exiger
qu'on les écrivît avec urie fidéliré fi (crupuleufe, & qu'on
fe gardât également dè l~s provoquer ou de les étendre.
L'efprit & le texte de la Déclaration de 1782. réfill:e rrop
ouvertement à l'interprération forcée de Jo(eph Reynier; &
fi cerre Loi fi récente a produit en effet quelque révolurion
dans .cerre partie importante de la légiilation, c'eG: en réuni1fant l'importance des aétes de; baptême, oont, à la, différence de coutes les Loix précédentes, elle s'eG: en effet uni:'
quement occupée; c'eft en augmentant leur influence dans les
queftions d'état,
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JOURNAL
La Déclaration de 1736 au contraire, & toutes les Loix
intervenues fur cette l,Ilatiere qui l'one précédée, fia tuait
cumulativement fur les baptêmes, & fur les mariages & fepulcures: de forte que 'fi l'on ne peut guere comelter fé.
rieufement que nos Loix n'aient établi les regifires publics
comme les Juges fouverains de l'état des hommes, Jofeph
Reynier pouvait cependant répondre qu'il fallait que les
regiltres offrilfent en faveur de la légitimité le double témoignage réfultant de l'aél:e d'époufailles & de l'aél:e/de baptême,
pour que leur décifion fllt en effet fouveraine & irréfragable.
La Déclaration de 1782, qui ne porte précifément que fur
les aél:es de baptême, femble avoir affaibli d'avance éette
objeél:ion.
Poillt de légitimité fans mariage; cela efi julte & vrai en
généra! & ~ans toutes les hypothefes pareilles à celle de la
caufe. Point 'de mariage fans célébration; cela ef!: vrai
encore, mais ,devient pOl~rtant équivoque. Il ell: cert.ain q.ue
là oà il n'y à point eu de 'célébration, il n'y a point eu
de mariage, parce que le facrement ne fe fupplée point.
Mais de ce que l'aél:e de célébration n'exifl:e plus, en cOllclure que le mariage n'exifte plus lui-même, cela ferait contraire mêm~ à la dignité du facrement; cela feroit fawx dans
toutes fes conféquen,ces. II' eft d,es cas où la célébr~tion
qui ne paraît plus, peùt fe préfumer même d!l vivant des
deux époux, & nos ancêtres en fourni{fent un-exemple fameux; mais on la préfume fur-tout bien plus facilement
encore, lorfqu'après la mort des époux dont elle formoit
le titre perfonnel, i'l n'dt 1l1us queftion que de l'état d!(s
cnfans. Alors fur-tout on peut faire valoir la Loi fameufe
qui défend qu'après cinq armées l'état des perfonnes mortes
fait de nouveau compromis, & qu'on les arrache en quelqge
forre de l'afyle inviolable des tombeaux pour prononcer fur
leur honneur'& fur leur deHinée, lorfqu'ils ne peuvent plus
'même fe défendfe. Ce raifonnement fi fpécieux n'dt donc
qu'un fophifme qui ne' fauroit ré{j{~er à celui que 1'00 vient
d'oppofer à Jofeph Reyoier j il feroÎt au cootrqire bea,ueoup'
�ur c É.
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pfus exa& de dire: point de foNde légitimité [ailS Paéle de
IJaptême•.
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PRO V
L'on vient de prouver jufqu'à la démonilration que fans
ce fecori~ a&e, Patte d'époufailles prouveroit bien moins
par lui-même; il fe lieroit difficilement avec la poffeffioa
elle-même; il reileroit toujours entr'elle & lui un' vuide
immenfe à remplir, la preuve de la filiation, dé l'id enciré,
<le la fécondité du mariage. L'aél:e de baptême au contraire
joint àla polfeffion, forme, de l'aveu de Jofeph Reynier
lui-même, un corps de preuv'es invincible en faveur de la.
légitimité. Qu'importe après cela q~'un de ces deux aél:es
foit revêtu d'un peu plus ou d'un peu moin~ de folemnités;
dès qu'il
prouvé qlJe celui à qui on -reproche d'êrre moins
[olemnel, a d'ailleurs tam d'avantages que 1'autre. L'introauél:ion du· plus ou du moins de folemnirés ea fouvent roure
arbirraire; ce feroit une maniere affez fautive d'apprécier &
de comparer ces différens aél:es; il vaut bien mieux, comme
on vient de le faire, les juger d'après leur narure même,
d'après leurs effets.
Le Curé rédaél:eur de l'aél:e, a-t-on dit, atteae ce qu'il
ignore; il 'peut êrre trompé par ceux qui lui préfentent l'enfant; il ne rédige que leur témoignage; ce témoignage peut
~tre faux & menteur. Tout cela peut être fans do ure ; mais
ôù s'arrêtera-t.Jon, & quelle preuve ne pourra-t-on. pas fufpeél:er, fi l'on préfume par-cout la fraude & l'impoaure ?
Suppofons un complot fait entre des fcélérats qui ne redoutent ni le parjure, ni le facrilege; ne' parviendront-ils pas
également à donner à deux époux dont ils ufurpefoDt les
noms, un enfant qui ne leur appartient pas? Le Curé évicera-t-il
plus facilement leur piege dans ce cas que dans celui où
l'on transforme un pere naturel en pere l'égirime. Dans cous
les deux cas également, il ne voit que ce qu'on lui' déclare. Il
faut donc fe renir à ce grand principe , que la fraude ne Ce pré{ume pas; à plus forte raifon quarid elle
accompagnée de fa'Crilege &. de parjure, & que celui qui l'allegue eil au moins tenu
de la prouver avant que <Pen pouvoit tirer aucun avantage : par~
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tOut elle peut également fe gliifer; mais par-rout par refpeél: pour les mœu.rs publiques, le MagiHrat en repouife
égalemént le foupçon, jufqu'à ce qu'on lui eri offre ta preuve.
Sans doure un aél:e de baptême peut êrre frauduleux & menteur, donner à l'enfant un pere qu'il n'a pas, un état qu'il
ne devroit p3S poiféder; il peut même l'être dans le cag où
la préexiClence du mariage eH d'ailleurs prouvée; mais le
prétendre, mais quereller l'aél:e de faux, c'eCl s'impofer par
conféquent l'obligation de prouver le faux qu'on dénonce ou
dont on excipe. Qu'ùn pere lui-même hafarde une pareille
dénonciarion, on ne l'~n croirait pas certainement fur fa
parole; on diroit: la colere offufque peut-être fa raifon; la
haine peut avoir étouffé la tendreJJe paternûle, peut-être aufli
l'amour de fil/dépendance i' entraîne; il1ioudroit pouvoir anéantir" une IInion indtJfoluble, mais dont les premieres traces onl
difParu. Combien une pareille" dénonciation eCl-elle plus fufpeél:e encore dJns la bouche d'un {impIe collatéral que l'inrérêt peut égarer! Ici le pere a affiClé lui-même à l'aél:e de
baptême donr on fufpeél:e la foi, & c'eCl un oncle, dépo{iraire des bieni qu'on répere, qui veut le faire fufpeél:er:
fan témoignage peut-il fuffire pour faire regardèr comme
d~s impofleurs & Je pere, & les témoins qui ont concouru
à l'aél:e," & qui ont tous arreHé la légitimité de l'enfanr?
De ce qu'ils ont pu l'être, s'enfuir-il qu'ils le font, & n'eCl-ce
pas à celui qui l'allegue à le prouver? Ainli s'écroule -de
route part ce fyClême de fufpicion & d'incertirude élevé avec
tanr d'art.
.
Mr. l'Avocat-Général difcuta enfuite les différens certificars des voilins produits par Jofeph Reynier; mais, dit-il;
au fonds, où rrouve-r-il Ja preuve que les perquilitions des
parens d'Etienne Reynier ne furent jamais plus heureufes
que le prem~er jour; qu'ils ne retrouverent pas leur fille,
& qu'ils ne confentirent pas à leur mariage, ou même qu'un
mariage fait peut-être un peu trop brufquemenr dans l'origine, ne fut pas dans la fuite confirmé, fait par le confencernent du pere, foit -par le long inrervalle de remps qui
s'eil:
..
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,1.
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~ 53
s'en écoulé depuis, &: la bonne foi des deux époux. L'on voit
que les certificateurs de Jofeph Reynier évitent de s'expliquer fur tous ces points avec une circonfpeélion peut-être
a1feélée ; ils n'attellent précifément que ce dont il a befoin,
mais ils attellent enfin que les parens firent des perquiûrions, qu'ils témoignerent du !e1Tentiment & des alarmes.
Les faits du procès apprennent que quoique les deux époux
aient fouvent voyagé, fouvent changé de domicile, Etienne
Reynier ne s'ell: guere jamais écarté du voiûnage de fa
patrie & de fa famiile. Efl-il vraifemblable qu'on Ile les
eÎIt jamais retrouvés, ou qu'on eût tout de fuite pa1Té de la
plus vive fenÇ1biliré à la plus parfaite illdiff-érence? Que
fera-ce fi, comme Therefe Imbert l'allegue, nOll' fans quelque CDmmencement de preuve, elle ell tevenue dans la
, la maifon paternelle? Ce qu'il y a de bien fûr, c'ell: qu'elle
ne paroît s'être jamais mife entiérement hors de Id portée
pu re1Tentiment de fa famille, & que par conféquent tout
paroÎt devoir faire préfumer qu'elle l'a prévenu, qu'elle l'a'
appaifé par une -meilleure conduite, quoiqu'elle ait débuté par
un trait d'im'pn1dence trop marqué.
Ainfi rolltes les circon(1:ances qui ont accompagné l'aél:e de
baptême lui donnent un uouveau degré d'authenticité, lui a1Turent
plus d'inAuence encore. Il ne reLte plus qu'à ,examiner dans
~uelles cirçonl1ances on le produit. Thelefe Imbert a-t-elle touïours été parfairement étrangere à la famille à laquelle elle veut,
aujourd'hui appartenir? Sou aél:e' de baptême ell-i1 entre
fes mains ut.; titre jfolé & privé de l'appui de toute autre
efpece de premiet Non. Therefe Imbert allegue la po1TeŒon~
& Jofeph Reynier avoue lui-même, après s'être pourtant
efforcé de priver de toute inAuence, de. toute valeur l'aéle
de baptême, que fi Therefe Imbert a pour elle ce titre &.
la poffeffion, elle ell: à l'a-bri de toute critique•.
Mais cette po1Teffion ell: atta.quée, cQnteiléè; elle le fut
toujours, même dans les caufes où elfe a triomphé tOUfe
feule. Çombien ell:-il plus facile encore de 1a cOl1lefier, d'ell
- co(:npromettre la certitude, d'en dénaturer les circonl1:an,e5.)
..AllIues z78z & jiJiv.
.
B h b h-
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JOURNAL
dans l'état o~(cur où ont toujours vécu lès parties! Il ell:
inutile de s'~tendre (ur la nature & (ur les effets de la po(feffion, p,ui(que Jofeph Reynier en reconnaît tout l'empire.
Parmi les faits que Therefe Imbert allegue comme érabliffa nt la polfeffion, il.y a celui du retour d'Etienne Reynier
dans la maifon paternelle a~ec Jacques Imbert & fes enfans.
On voit par la lettre ~'une tante d'Etienne Reynier, qu'elle
attefie que cetre femme a demeuré trois ou lix mois chez
fon pere après fon union avec Jacques ~mbert, & felon toute
apparence, conjointement avec Jacques Imbert lui~même.
Or, efi-il naturel que li Erienne Reynier n'eût en effet éré
lié avec Jacques Imbert que par un commerce illicite, Noel
Reynier fon pere l'eût paiGblemeQt reçue chez lui fortant
de fes bras, & qu:i1 eût permis paiGblement encore qu'elle
quittât de nouveau la maifon paternelle pour y retourner?
Sont-ce là les fenrimens & la conduite qu'on doit prêter à
un pere, & Jofeph Reynier ne crainf-il pas qu'on lui reproche de calomnier, de déshonorer le lien? C'en donc-là
un premier fait de polfeffion très-grave.
Les fairs concernant l'afyle ,donné à There(e Imbert dans la
maifon de fon aïeul, l'éducation & la nourriture pendane fa premiere enfance, la prorogation, linon des 'mêmes [ecours, dumoins des mêmes foins dans un âge plus avancé, fone autant
des faits avoués ou contefiés feulement pour la forme, & que
JoCeph Reynier range dans la clalfe des limples aél:es de
charité & de bienfaifance pour une érrangere, pour une
orpheline qui appartenait à la fàmille, quoique d'une fa.'
mille il!ici~e. Mais quoi! d~ l'aveu de Jofeph Reynier !ui-même,
des faits de polfeffion alféz graves, alfez relevans pour prouver par eux feuls a~ moins l'état de bâtardife, & joints à
un aél:e de bJprême qui les 'précede, qui leur fert de bafe
& d'explication naturelle, & qui attefl:e que Thece(e Imbert
ell légirime, ne prouveront pas cette niême légitimité!
L'aél:e de baptême ne fe prêre-t-il pas avec la polfeffion UQ
appui & un jour muwe'ls? N'explique-t-il pas la polfeffion,
comme la polf~ffi Jn le fôutient & le corrobore lui-même?
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PROV ENCE.
~~~
Si fans lu! la poffeffion fuffiroit pour établir l'état de bâtardife, al'ec lui n'établiroit-elle pas l'état de légitimité? Si
fans elle il pourroit être à fon rour fufpeél: de faux & d'impollure, avec elle ne forme-t-il pas, de l'aveu fouvent réitéré
de Jofeph Reynier, un corps de preuves invincibles? C'eH
donc fdire un raifonnemem bien vicieux, bien fophillique,
que de dire que l'aél:e de baptême confidéré leparémenr, ne
pourroit prouver lui feul la légitimité dont on a pourtant
établi qu'il fourniffoit un très-puiffant indice. .
L'aél:e de fépulture d'Etienne Reynier, qui ne lui donne
pas la qualité d'époufe légitime, & le certificat de quelques
témoins de fa mort, fe tailent fur l'état, fur la qualité
d'Etienne Reynier; cet aél:e ne dit donc rien par fon filence;
il efi pourtant l'ouvrage du même Palleur qui reçut fes derniers aveux, & dans le fein duquel elle épencha fans doute
le fecret funefie qui devoit tant pefer à fon cœur. Cet aél:e
ne devroit-il donc pas être regardé c0t11me la confeffio n
d'Etienne Reynier elle-même? Telle efll'objeél:ion dans toute
fa force. Mais cet aél:e, qui a fi peu de valeur par lui.même,
n'acquiert pas plus d'importance par le certilicat qui y eH
. joinr. Ceux qui l'ont figné, attellenr qu'au moment où l'on
adminifiroit les derniers facremens 11 Etienne Reynier, Jac_
ques Imbert éroit dans la même chambre .appuyé fur une
lenêtre dans l'attitude oe la douleur. O,r, peut-on pré(umer
en effet que fi Jacques Imbert n'eût été que le concllbinaire
public & le corrupteur de There(e Imbert, le Curé ~n'eût'
pas cherché du-moins à foullraire à fes derniers regards (a
viél:ime ou fa çomplice, qu'il n'eût pas écarté cet objet de
fcandale dans ces momens confacrés aux cérémonies les plus
augufies de la religion? Non, il n'y a qu'un époux & un6
épou(e légitime qui puiffem obtenir du Palleur le droit d'af.
filler 11 ce fpeél:acle plus religieux encore que lugubre; .mais
un vil féduàeur, un concubinaire auroit été écarté mêm6
avec i"nominie, s'il eût eu l'imprudence de fe préfenter,
La p.ré"fence de Jacques Imbert' à la 111ort' de fon époure ,
fous les-yeux & de l'aveu du Pafi~ur qui l'a reconciliée ~
'l3l>bb~
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l'Eglife, qui lui a a"dmini!l:ré fes derniers fecours, paroît donc
auffi décifive, & plus décifive encore que le retour d'Etienne
Reynier dans la maifon paternelle après fa filite avec Jacques
Imbert. Le !ilence que Noel Reynier a gardé dans fon tefta ment ne peut être auffi d'aucune confidération, parce· qu'il
eG: poffible que Jofeph Reynier lui ait. perfuadé qu'il n'avoit
pas be[oin de rien laiŒer·à [a petite fllle, pu ifQu'il avoit
lui-même payé Etienne Reynier fa mere de toUt ce qui
lui revenoit; il n'eG: -pas bien merveilleux qu'un pauvre &
vieux Payfan n'ait pas d'ailleurs connu la néceffiré d'une in{:.
'titution ou d'une vocation purement honorifique.
J ofeph Reynier a convenu' lui-même que la poŒdIion
jointe à l'aél:e· de baptême le rendoit inamquable. Ii dt
certain d'ailleurs, on l'a prouvé, que l'aél:e de baptême ex-"
plique la pôŒeffion & en bannit toute équivoque. PourCJ..uoi 1
voudroit-on que Therefe Imbert· -eût poŒédé contre fon
titre, plutôt que .conformément à fon titre? Ce feroit du-,
moins à Jofeph Reynier à prouver pour lors cene étrange
aŒerrion.
Mr. l'Avocat-Général difcuta enfui te la demande de Therèfe
Imbert fur· les droits légitimaires de fà mere, & conclut à
ce que fai(.1nt droit aux fins de l'exploit libellé d'ajournement de Therefe Imbert, fans s'arrêter aux exceptions dilatoires de Jofeph .Reynier propofées dans fes défenfes, Jofeph
Reynier fût condamné au paiement de la légitime afféranre
à Etienne Reynier fa fœur ,. & mere de Therefe Imbert, fur
-les hoiries de Noel Reynier & d'Anne Barrioo. [es pere &
mere, aux formes de droit, avec intérêts depuis leur décès.
Arrêt du 14 Juin 1784, conforçne aux cooclufions; Jofeph
Reynier fut copdamné aux dépens. Plaidant Mes. Panier &
Bouteille.
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ARRÊT
PRO V l! Ne I!;
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LIlI.
Le Médecin ·a le privilege d'empêcher un Orfevre de trou/;/er
fis études pa~ un lJruit incommode.
M
E. Jofeph Joannis, Doyen de la Faculté de Médecine
en l'Univerfiré d'Aix, & Profelfeur Royal en cette
Faculté, polfédoit, depuis plus de foixante ans, la maifon
qu'il habiroit dans Aix. Le fieur Brezet, Orfevre, acheta en
178 rune maifon voifine, & Y plaça fon artelier.
Jaloux de fon privilege, Me. Joannis vouloit s'oppofer à ce que le lieur Brezet habitât fa maifon; mais par une convention du 18 Janvier 178 {, entre Me. Joannis & le fieur
Brezet., il fut convenu que Me. Joannis confentoit que le fieu,.
Bre{et continuât a demeurer dans la boutique qu'il'occupoit,
condition qu'il ne feroit al/cun bruit capable de le déranger
& incommoder dans l'exercice de fa profeffion, l'effet de quoi
le fieur Bre{et difcontinueroit {on travail, lorfiJu'il en feroit
requis par Me. Joannis.
Me. Joannis interpella .Ie fieur Brezet de faire ceffer le
bruir. Le 3 Avril 178 { le fieur Brezet répondit qu'il ne
feroit aucun bruit capable de l'incommoder, lui déclarant
qu'à Sr. Michel lors prochain il prendroit des moyens capables de lui prouver fes bonnes intentions.
Toujours plus jaloux de fon privilege, Me. Joannis vouloi.t
exiger que le fieur Brezet difcontinuât entiéremerit fon trav.ail. En conféquence il l'ajourna, l~ 10 Mai fuivanr, pardevant le Lieutenant d'Aix, en inhi.bitions & défenfes de
faire du bruit dans fa maifon; il l'affigna en inhibitions &
défenfes provifoires qui furent jointes au fond par un premier jugement.
Le fieur Brezee contefia le pril'ilege; il avança que fon
travail ne caufoit aucun bruit capable d'incommoder les voi-
a
a
..
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Jou RNA L' ~
fins, & rapporta à cet égard les atteflations des voilins les
plus refpeélables- & bien dignes de foi, de plufieurs Magiftrats en Cour fouveraine.
Le Lieutenant interloqua; il concéda aéle au fieur Brezet
de ce qu'il avoit exécuté la convention, ,& de ce qu'il offroit
de liexécuter, & admit Me. Joannis à prouver que poflé..>
rieuremenc à la déclaration de 1781 & à' l'aéle du 3 Avril
fuivanc, le lieur Brezet avoir fait du b;uit capable de le déranger dans l'exercice de fa profeffion.
Appel de la 'part du lieur Brezet.
,
Pardev3nc ta Cour, le lieur Brezet propofa par des fins principales la réformation de ce jugemem, l'exécution de la convention, le déboutement de la demande de Me. Joannis ; & par
des fins fubfidiaires il propofa une preuve vocale plus légitime,
plus réguliere, plos décilive; elle~ comenoienc un aéle de
ce qu'il acc~pcoit comme judiciaire & irrévocable l'aveu de
Me. Joannis, qu'il avoit requis plulieurs fois le lieur Breze!
de difcominuer fon travail; & que celui-ci l'avoit difcominuh
& avanc dire droit à la demande ck Me. Joannis, il le foumettoit à prouver que le lieur Ifrezet avoit fait habituelle_
fuent, au préjudice âe la requifition de celfer'de travailler,
un bruit capable de le déranger dans' l'exercice de fa pr'ofeffion. fauf la preuve c9ntraire; &c.·
, .
On difoit pour le fleur Brezet, 10. que la 'Sentence étoit
contraire au droit commun; à cet effet on étab}i/foit l'utilité
des fciences & des Loix, & les privileges de ceux' qui les.
étudioient. On difoit que la préférence & \a prédileélion fur,
le arts & métiers leur'étoit due; mais qu'à leur cour les
arts & métiers mérico'etH beaucoup de faveur. Les art!:
llailfeot & fieurilfent à côté des fciences; ils acquierent une'
lloblelfe & un éclat qui les' éleve. Che'Z les Grecs, les invemeurs des arts étoient· Rois, Prêtres, Juges; en France,
le Gouvernement en a 'conklcré"l'orilité par diverfes Loix
qui,font des regle ,de légiflation, &.un modele 'de Httérarure;
les fcieoces& -ks arts ont ch'acun leur degré"d'efiim:e &
d'utilité. Il eft donc JuGe & fage d'accorcler aux favans &.
aux artiGes une proteéliod égale.
•
�,nu
PAt AIS
D
B
PRO V l!
Nez:
H9
On n'a jamais douté du privilege accordé aux Avoc:us,
'd'empêcher les artifans de faire du bruir; l'importance & la
continuité de leur profeffion ne permettent aucune diClraction. On doit refpeél:er le fil~nce & le repos des perfonnes
dév~uées. fans celfe à un travail pénible. Boniface, tom. 3,
liv. 2., tir. 1., chap. 2., rapporre un Arrêt qui l'a ainli or.,.
donné; il yen a quelques-uns de 110s jours qui' ont fixe cerre
Jurifprudence. Le 4. Mars 1749, Arrêt en faveur de Me.
Mazet, Avocat de cette ville, contre le nommé Brunache,
Ménuifier. En Avril 1764, Arrêt femblable en faveur de
Me. Vial, Avocat de Si Cleron. Le 1 Février 176), Jugement de la Chambre des Requêtes du Palais en faveur de
Mes. de Colonia & EClrivier, Avocats, contre les Freres des
Ecoles chrériennes d'Aix.
Les Médecins ne jouilfent pas du même privilege; ils ne
font pas compris dans la Loi RotVaine, au tirre du code de
fludiis li6erali6us. La légiflarion fran-roife ne renferme aucun
titre -fur ce droir perfonnel; & fi les Médecins aVaIent... c~
droir, quel feroit le forr des artiCles, dans Aix [ur-tout,
ville de peu d'étendue, oll l'on compte deux Cours fouveraines & plu rieurs Juri[diél:ions, & par con[équent une infinité de privilégiés! Les arriCles ne [auroient où fe placer;
ils rencontreroient des privilégiés dans chaque rue; d'ailleurs
le Marchand Orfevre [e pré[ente avec beaucoup de faveur.
Si cet art [err 'au luxe des hommes, il en employé aux
Autels & au [ervice du Dieu vivant; il [ert à augmenter la
fplendeur des SOl~verains. L'orfévrerie fuit immédiarement
les arrs libéraux; elle exige' une réunion de talens, le deffin,
.le modele, l'archireél:ure, la cifelure & la gravure; cet arc
mérite des faveurs. Dans Aix plurieurs Magifhats de Cours
fouveraines, proteél:eurs des arrs, facrifient leur privilege
perfonnel au bien de.1a [ociété. Me. Joannis, dont la profeffion n'exige pas une continuité de travail dans [on cabiner,
ne veut pas faire ce facrifice.
Sous ce premier rapport, 1'1 Sentence eft contraire au
droie commun.
�.~
JOURNAL
La Sentence ell: oppofée à la convenrion.
Les "Iaufes d'un aéèe ont toujours un fens utile. Ici
l'Orfevre s'ell: fournis à quitter fon travail à la premiere
r :quilition de Me. Joannis, _& Me. Joal)nis de fon côté :r
permis l'habitation. L'engagement ell: mutuel; il doit être
refpeéèivement exécuté. Le fieur Brezet a difcontinué, lorfqu'il en a été requis; Me. Joannis l'avoue. La réponfe du
fieur Brezet à l'aéèe du 3 Avril ell une preuve de l'exécution de l'accord. Depuis la demande, t04s les moyens
polIibles ont été mis en ufage pour exécuter la convention. L'interlocution ne fe concilie donc point avec le-droit commun, ni avec le titre & l'exécution du titre;
elle admet une partie de la convention, & rejette l'autre
partie. Le fieur Brezet a exécuté la convention, puifqu'on
lui concede aéèe de cette exécution; il n'obtient pas néanmoins définitivement gain- de caufe, & on l'immole à une
interlocution•
3°. La Sentence éfl: contraire aux regles de l'interlocutlon; elle eft inutile, frulhatoire. Qu'importe que le fieur
Brezet ait fait du bruit pollérieurement à la convention &
à l'aéèe interpellatif! il ne s'ell point inrerdit d'exercer
fon art; il s'ell: obligé de difcontinuer le bruit incommode,
Iorfqu'il en feroit requis; l'interlocution eH donc frull:ratoire.
Le Lieutenant ne propofe pas un fait pofitif, lorfqu'il
admet la preuve vague & inconcluante que le fieur Brezee
a fait du bruit capable d'incommoder; il falloit motiver li
lors du -bruit, Me. Joannis érait livré à l'étude ou à l'exercice de fa profeffion; l'exécution- de la convention l'exigeoit. Me. Joannis a trouvé qu!il n'étolt pas raifonpable
d'envoyèr à chaque inHant prier le fieur Brezet, de ceireé
fon travail..... Telle eH pourtant la loi de la conventio(}:
legem enim c(Jntraaus dedit. Veut-il adoucir cette loi, q<l'il
indique les "'heures du jour qu'il voud ra que le fieur Brezee
dlfcontinue ce travail, & il fera obéi; mais qu'il ne dife
pas qu'il lèroit forcé de quitter fa maifon, & de renpncer
2. 0.
..
,
~
�DU
PALAIS
DE
PROVENCE,
')6r
à, (es. érudes. pendant ces terriMes momens. Demollhene ,..
Pline, S~ûeque, Cujas ont compofé leurs ouvrages au milieu
du rinramarre des forges & des enclumes; Seneque difoie
que ce bruir ne l'inquiéroir point: At me Hercules, ego iflum
fremiium non magis CI/ra, 'II/am jluc71/m aut adjec7um a'luiZ.
L'inrerlocution ordonnée par le Lieutenant en: infeétée
, de vices; elle eH contraire au droit commun; elle elt oppofée à la convention; elle elt contraire aux regles: 'elle
doit donc êrre anéantie, d'autant mieux que rout iocerlocutoire eft préjudiciel-; & en jugeant définitivemeoc, le
Tribunal eH obligé de [e conformer. li l'interlocution, &
de rendre un Jugement an"l1ogue, & alors le lieur Brezet
[eroit obligé de perdre [on rirre & [on étar.
On répondait pour Me. Joannis, 1°•. que le privilege
de faire écarter l'exercice des ans bruyants appartenoit à.
tour Doéteur verè fludens, & qu'il étoit .commun aux rrois.
Facultés, [uivane le trairé magiltral de Carrocius, de local•.
t· conduc7. parr. '), qu. ') ; le Cardinal de Luca, de preeminent. di[c. 3'), & Guipape , quo 394. Lors donc que les.
Arrêts de la Cour one admis le privilege en faveur des
Avocars , ils l'one admis en force du principe recor.nu par:tous les interpretes en faveur des Doéteurs; auffi comprennent-ils les Médecins comme les AV,ocars..
Dans ces matieres la prévention a lieu, [uilL:loc Bui!fon,
au titre de Advoc. divàf jud.;. c'eH.à.dire, que Ji l'prti{arz:
s~efl logé premier, on ne pel/t pas le contraindre a déloger ,.
'luel'lue incommodité qu'il donne au voifinage. Expilly, plaid•.
34', cjte un Arrêr qui le jugea de même;. fous Ge pre-mier point de vue la Semence n'eH donc pas contl'aire:
au droit commun.
.
On difoit en fecond lieu que la Déclararion du 18 Janvier.
n'étoit ni nne convemion, ni une rran[aétion, parce qU'àl
cetre époqne il n'y avoir poinr' de coocefiarion, il n'y eut:
.poine d'arbitrage, & l'écrire ne fur pré[eocée que comme
une déclararion qui devoie con(eriter les droies de Me..
]oannis, &. les empêcher de périr par prefcriprion; delà,o
Annùs t782. 6· fuiv..
~ c. c C:'
'.
•
�~62.
,
)
Jou
RNA L
ajouroir-on, elle ne fut poinr faite double, & Me. Joannis offroir fan ferment la - delfus, quoique le mot douhle
fÎlr inféré dans la déclararion. La déclaration n'eU qu'un
tirre pour Me. Joannis, & non pour le lieur Brezer. Me.
Jaannis reçoit (a (oumiŒon, & ne veut lui en donner·
aucune. Il con(ent à la vérité que le lieur Brezet continue
à demeurer dans la boutique qu'il occupe, mais à condition qu'il ne fera aucun bruit capable de l'incommoder
dal\s l'exercice de (a profdIion. C'eU-Ià le point principal
de la déclaration; ce (eroir le comble de la dérifion que
de Ja pré(enter dans le f~ns que le lieur Brezer veut lui
donner, & de lui faire dire qu'il pourrair reprendre fon
marteau & frapper (on enclume à chaque moment, pourvu
qu'il quierât l'ouvrage à l'inUant Ol! il en (eroit requis;
c'eft-à-dire, qu'il auroit impo(é à Me. Joannis' la (ervitude
de le faire avenir à chaque inHant de la journée où Il
plairoir au fleur Brezet de frapper. Ce (eroit un jeu, un
en(emble perpétuel d'opéra rions bruyantes, de requifirions
de ce{fer, de ce{fations & de repri(es. Le véritable (ens
de la déclaration eH donc celui de ne - faire aucun bruit
capable de déranger Me. Joannis dans la profeffion de fon
érat: la Sentence n'eU donc point oppo(ée à cette déclaration.
On difoit en troifieme lieu que la Sentence éroit véri.
tablement conforme aux regles de l'interlocuroire. Il éroit
inutile de détailler les jours & les heures auxquels le bruit
avoit été fait, ni fi lors du bruir Me. Joannis éroit occupé aux
méditations de (on état. L'homme de Loi, le Doél:eur penvent
défendre le travail bruyant à route heu~e & dans tous les temps.
On ob(erve en vain qu'il ne pouvoit être queHion de
preuve qu'autant qu'il y aurai,r contravention à la convention. Cette convention n'dl: qu'une fimple déclaration qui
n'a jamais privé Me. Joannis (Je (on privilege. Sous ce rap.
pan la preuve du bruit incommode fuffit & efl: légale;
fous ce rapport encore la preuve que le lieur Brezet demande par (es ,fins fublidiaires efl: inutile: il faut donc
�DU
PALAIS
DI!
PROVENCE.
S63
confirmer la Sentence comme I.a feule légale, concluante
& conforme aux regles.
Arrét du 12. Juillet 1784, confirmatif de la Semence
avec dépens.
ARR Ê T
LI V.
La quittance du lods conc.édée par le Seigneur performellemene
efi une invefiiture.
_
La quittance privée du lods efl auffi valaMe en Provence que
fi elle était notariée.
L'acquéreur du fOllds emphytéotique 'lui re/eve d'une direaeindivift étalle invefli par la quittance du lods acquitté perfonnellement au Co-ftiglleur, efl préférable au ce!fionnaire:
de la prélation de l'autre Co-ftiglleur.
E 16 Décemb;e 1766 le fleur Jofeph Moutte du lieu
de Pourrieres acquit un domaine dans la feigneurie de
Rians; Mrs. de Valbelle & de Simiane en éraient Seigneurs
par indivis. Le 6 Janvier 1767 le fleur Mourre paya le lods à Mr. de:
Simiane; il en rapporta une quirrance perfonnelle.
Le 6 Mars 1776 le fleur Brun de ~arlemond du lieu de
Rians obtint de l'Agent de Mr. de Valbelle la ceffion de
la prélarion.
Le- lieur Mourre préfente au contrôle la quittance du lods_
le lendemain 7 Mars.
.Le 9 'Mars la ceffion e!l: intimée, avec affignation (XIrdevant Notaire en défemparation; le fleur Moutte fe préfente & Iii cOrJteHe.
,
Le 10 Avril d'après, le lieur Brun Ce pourvoit pardevant:
le Lieutenant de cette ville.
Sentence le Il Janvier 1782- qui condamne le fleur Moutte
à la défemparatioD.
'
L
CCCC2.
�') 64
' J 0 t1 11. N A L
Appel de cette Sentence.
On difoit pour le fieur Moutte, que G la Loi romaine
prononeroit des' peines graves contre le plaideur lémérair,-,
à quelle punition auroit-elle fournis le plaid~ur injuHe qui,
vainqueur dans un premier combat judiciaire, aurait ell la
coupable hardielfe .de préfenter une feconde fois à la décilion des Tribunaux la négative de la même quefl:ion qui
aurait déja été jugée affirmativement en fa fJveu!".
Pou.r appliquer ce-début à la caufe, voici le préjugé qu'on
citoit; il eft perfonne! au fieur Lebmn de Barlcmood.
Le ) Août 17)4 Me. Gautcaume, Prélident - Tréforier
de France, vendit audit jieur Brun un domaine érigé en
arrier.e-fief fous le nom de Barlemond dans la terre de Rians.
La direél:e de cene teire appartenoit par indivis à Mrs.
de Valbelle & de Simiane.
Le1!.8 Août 1764 Me. Solliers, Avocat expéditionnaire
en Cour de Rome, obtint de Mr. de Simiane la ceffion du
droit de prélat ion:
1 Le fieur Brun avoit payé le lods, & n'avoir exigé qu'une
quinance privée; averti de cette ceffion, il fir c.ontr61er fa
quittance.
,
Le 4 Oélobre fuivant, intimation de la c~ffion & affignatian en défemparation i le fieur Brun ne comparut pas.
Le 13 il fut ajourné aux mêmes fins pardevant la Chambre
des Requêtcs:
.
.
Le fieur Brun contefl:a1la ceffion; la' caufe fut compromifè'
à des Arbitres; Sentence le 16 Novembre qui admet la ceffion, &, ordonne la défemparation.
•
Appel: Arrêt le 18 Juin 176) , au rapport de Mr. de'
Ba!lon, qui réforma la Sentence, ·déclara Me. Solliers non
recevable & mal fondé dans fa démande, & mit le fieur
Brun hors de Cour & de procès, avcc dépens.
Ce préjugé eH-il précis, difoit-on? la queHion jugée, pitr
cet Arrêt eit-elle formelle? Qu'on fubfl:itue au nom de Me.
_Solliers celui du fieur Moutte, & l'on verra que la caufe
la même.' Cependant le fieur Brup, après avoir [ourenu
ea
�J)
U
PAL A lS
nT.!
~ 5~'
P 1t 0 VEN' C Il;
en 176') que l'acquéreur invefli par le lods payé au Seigneur
el1: préférable au ceffionnaire de la prélation de l'autre Cofeigneur, foutient en 1784 que le ceffionnaire peut exclure
l'acquéreur invelli par l~ paiement du lods.
'Ce procès fera remarqué avec étonnement dans les falles
de la Jurifprudence; il fera cité comme un exemple de l'injullice des hommes, & .de la préfomprion des plaideurs.
La quirtance du lods concédée par le Seigneut vaut inveflirure.
Cette vériré, continuoir-on, ell puifée dans la définition
du mot. inveJlùure; " ce terme dérive du larin wJlire, qui
" lignifie tradition, mife en po!feffion. " (Encyclopédie, vo.
inveJliture.) Le lods eH le prix de l'approbation que faie'
Je Seigneur du nouvel emphyréore : laudimium
laudando
fèu probando.
A la mutarion de J'emphytéote, le Seigneur a un double
droit, l'exercice du rerrait perfonnel1ement ou par ceffion ,
& la perception du lods; mais ces droirs ne lui font préfentés quJalrernarivemenr, de maniere que l'option .de l'un
eH une rénonciarion à l'aurre : itaque fundo vendùo, duplex
jus acqlliritllr domino, videlicet laudimiorum fi retrac1us fi
4 utrum'lile eJl in ob!igatione, alternativè tamen .fi e!ec1ivè.
(Ferriete (ur la queition 173 de Guipape. )
S'il exerce le reirai.t, il ne peut exiger le lods; s'il relioit
le lods, comme ce choix dl une reconnoilfance de la mutation, il s'interdit la voie du rerrait, fuivant la Jurifprudence
féodale, tit. du retrait; n. 3 aux annot.; la Livoniere, Traité
des Fiefs, liv. 'Î, ch. 10, pag. 'Î [7.
Delà vient que le lods payé au Seigneur perfonnel1ement
réunit cous les effets d'une vérirable invellirure. Comment
n'auroit-il pas invelli le nouve! acquéreur, puifqu'il a reliu
le prix de l'inveHirure?
La feule exception à cette regle e~ en faveur du Seigneur
qui n'a reliu le lods que par un Procureur général. Dans
cette hypothefe le Seigneur ne reconnolt pas la mutarion;
mais ce cas excepté, ou n'a jamais Jévoqué en doute que
a
�lU
JOUR.AL
la quittance perf0nnelle du lods ne foit une véritable inveaiture.
Mr. de Valbelle autre Co-feigneur d'auroit pu être empêché de retraire pour lui-même par la faveur de la réunion
de l'emphytéofe au fief, & par une fuite du .dr-oit perfonnel
attaché au Seigneur. Le Co-feigneur ell préférable à l'acquéreur invelli par l'autre Co-feigneur; mais cette prédi/ Jeétion ne fubfille plos, lorfqu'i[ n'agit pas pour lo;-rnême,
qu'il n'ea plus queHion de la réunion au fief, enfin lorfqu'il
ced'e fon droit à.un tiers. Cette ceffion ne peut ê.rre efficace
que dans le cas ou l'acquéreur n'aura pas été invelli par
l'autre Co-feigneur.
Ces principes' ont été confirmés par deux·Arrêts de ce
Parlement, qui. ont décidé que l'acquéreur invefii par le
Co-feigneur excluoit le ceffiorinaire de l'autre Co-feigneur.
Le premier ell rapporté par le Commentateur de nos Statues,
tom. 1, pag. 329, n. 20; le fecond ell celui du 18 Juin
"I 76 'l obtenu par le fieur Brun lui-même contre Me. Solliers.
. Il eil. donc certain, il eH jugé que la quittance du lods
vaut invefiilure; & fous ce rapp'ort le fieur Brun eil non
recevable & mal fondé en fa demande.
. Mais la quittance privée du lods eil-elle auffi valable en
Provence que fi elle étaie notar.iée.
On difoit que fuivant le droit commun & la Loi générale
de la Provence, la quittance du lods fous feing privé participe aux av~ntages attachés aux libérations publiques. Une
quittance ea probante, lorfqu'elle cil revêtue des formalités
requifes par le droit Oll la coutume: quanï:lo apocha hahet
de!Jitas folemnitate5 de jure vel confuetudine requifitas, fuivant
Mr. de Clapiers caur.' 2 l , quelt. 1.
Dans l'jnltance contre Me. Solliers" le titre unique du
fieur Brun confilloit en une quittance privée du lods; avec
ce ·titre il parvine à fe maintenir dans fon acq~Jifition.
La Loi n'inte·rdit pas en général aux citoyens de pa/fer
des aétes obligatoires fous. fignature privée. Suivant les
Elémens du droit, les obligations font formées .par le feul
,f
,
�D U
PAL ÂI S D l!
pi 0 VEN C E.
.~ 67
coofentemenc des' parties: nudo confenfit contrahuntur ohligationes. La quittance privée du lods efi. conféquemment
dans une forme légale: omne licitum 'luod non prohi6itum.
Aucune Loi n'oblige de faire paifer au contrôle les aéles
privés, à moins qu'ils ne renferment un tranfport, & qu'ils
ne- donnent ouverture au centieme denier; à l'exception de ce
cas, le citoyen gzrde paifiblement fan titre fous lignature
privée, & n'encourt pas la peine du triple droit; le contrôle ne devient une formalité néceifaire que quand on fe
{err de ce titre pour imroduire une aélion, 'po\lr former
une demande.
Ici d'ailleurs la quit.tance du lods a été rendue publique
avant l'intimation de la ceffion ; l'invefiiture a donc une
date incontellable antérieure à la ceffion. N'importe que
la ceffion ait précédé le contrôle de la quiecance1 la ceffion
ne fait titre contre le lieur Mource que depuis l'intimation.
En matiere d~ retrait ligoager & féodal, on exige feulement que l'aéle dont on excipe fait rendu public avant la
dénonciatioo' de la ceffiou; le titre du lieur Moutte éraie
public, lorfque la dénonciati?n de la ceffion a été faite.
Le lieur Mource ainli invelli & mis en p-e-ifeffion était
préférable fans doute au ceffionnaire de la prélation. La
raifon en efl: que fuivanr la Loi 'luoties, Cod. de rd vindicatione, toutes les fois qu'une même chofe eH accordée
à deux, celui-là doit être préféré qui le premier a pris pof[effion. C'efi le fenrimenr des' Auteufs ; de Sanleger, réfol.
civ. ch. 3 ,n. 10; do Commentateur de nos Sratuts ,
tom. 1. pa". 330 , n. 2. 1'; c'ell le vœu de la Jurifprudence
de ce Parl:ment. Me. d'Aix dans fes décilions à la fuite
des Statues de Marfeille, ch. 16, rapporte un Arrêt du 2.6
Oélobre '1617 qui le jugea ainli; de Boniface, tom. 2.,
liv. 4, tir. 19. ch. 2.; de-Mr. Julien qui rapporte l'Arrêt
pll!S lTIoderne du 18 Juin 1765, rendu en faveur du lieur
Brun contre Me. Solliers.
On répondait pour le ûéur Brun de B:ltlemond, que
l'Arrêt du 18 Juih 1765 'intervenu en fa faveur contre Me.
�~6g
]
OUR N A L
Solliers avait eu pour bafe des circonll:ances oien dilférentes de celles dont il s'agilfoit dans, cerre caufe; on
pofoit ainu le fair.
Le S AoCIt 17S4 acquilition du lieur Brun du domaine'
de Barlemond fous la direél:e indivife de Mrs. de Valbelle.
& de Simiane.
,
En 17')7 le lieur Brun paya le lods à Mr. de Valbelle,
& rapporta de lui l'inveftirure & la ceffion du droit
de prélatinn; il fit une vente de bois de haute - futaie
en 1763 & l'acquéreur du bois paya à Mr. de Simiane
le lods dû à raifon de cet objer. C'eroit - là une option.
exp.relfe pour les profits féodaux, & conféquemment une
renonciation au retrair. Cependant Me. Solliers obtint de.
Mr. de Simiane la ceffion de la prélation fur cet Arriere.fief.
Le lieur Brun fit contrôler l'invefiiture & la quittance
de '17)7 pofl:érieurement à la ceffion, mais antérieurement
à l'imimation. Me. Solliers l'affigna en déff.'mparation; ,il
oppo[oit l'antériorité de la ceffioD dont il éroit porteur"
qui ayant une date publique, celle du 18 Août 1764, devait êve réputée antérieure à celle des titres du fieur Brun ,.
contrôlés feulement le '7 Septembre fuivant.
Mes. Artlulphy, Verdet oc Gaffier, Avocats, furent nommés Arbitres; les deux premiers penferent que la date
publique du 28 AoCIt devait être préférable à celle du 7
Septembre, quoique l'intimation de la ceffion n'eût été
faite qu'après le 7 Septembre.
Me. Gaffier penfa que Mr. de Simiane ayant rec:;u en
1764 le lods d'une coupe de bois faite en 1763, avait
clairement opté pour les profits féodaux, & qu'il n'avoit
donc pu céde,r valablement & utilement fan droit de prélation pour la mutation•.
Appel pardevant la Cour; Arrêt le 18 Jilin 1765 qui
adopta l'avis de Me. -Gaffier.
D'après l'expolition du fait, qu'on juge de la différence
qu'il y a entre la caufe contre Me. Solliers, & celle qui no s
agit~
~I
�DU
PALA.IS
DE
PROVENCE.
<{69'
Nul dome, con'linuoit-on, que l'acquéreur inveni eH:
préférable au cdIionnaire ultérieur du droit de prélation.
Mais le lieur MOulte a-t-il été invefli? Non; le lieur
Moulte a p,ayé le lods à Mr. de Simiane; celui-ci .lui a
concédé une quittance pure & limple; cette quittance
valut-elle jamais une inveHilure de la part de Mr. de Valbelle?' Aujourd'hui, comme à l'époque même de l'origine
des fiefs, un nouveau vaifal, un nouvel emphytéote n'eHil pas cenfé teni~ du Seigneur dominant tous fes droits.
de poifeffion & de propriété? comment donc peut - il les
recevoir de lui, li ce n'en par une déclaration exprelfe de
fa volonté, li ce n'en par une conceffion immédiate &
formelle?
.
Que par la réception du droit de lods Mr. de Simiane
ait renoncé à évincer l'acquéreur par prélatioli ou par
retrait, cela n'en pas domeux; mais avoir reçu le droit de
lods. & s'être par conféquent interdit à foi - même rout
exercice de retrait, ce n'eH pas avoir donné à l'acquéreur
un tilre dont il puiife fe prévaloir contre les il1lérêts &
les droits quelconques d'un Co - feigneur p'lr indivis; ce
. n'ell: pas lui avoir donné un titre de préférence fur le
ceffionnaire du chef de l'autre Co-feigne ur ; une inveniture
eH néceifaire pour remplir. cet objet, & la quittance du
droit de lods n'en rien moins qu'un aél:e contenant invef.
toiture. Le valTal qui paye le droit de lods, n'eH: cenfé acquitter le prix de l'inveniture qu'autant qu'il la demand'e
, enfuite ou la requiert par un aél:e fpécial , ou par ulle offre
légale de l'hommage ou de la reconnoiifance.
Les difpofitions de l'Arrêt du 19 Avril 1689, rapporté
dans la Jurifprudence féodale, rom. 2., pag. 192., prouvent
que le paiement du _droit de lods dû au Roi n'eH rien
moins qu'un aél:e emportant ou contenant inveHiture. C'ef!:
après ce paiement qu'un acquéreur des· biens mou vans de .
la dire-él:e doit requérir l'inveniture & faire· enfaifiner fan
contrat, s'il veut êlre affranchi du rerrait. Il eH donc
évident qu'en Provence, amant que par - tour ailleurs, la
.quittance du droit de lods n'eH point LlO tirre portant
Annit:s l782 <; fuiv.
D cl cl d
�JOURN"AL
~7°
invefiiture, & que le lods & l'invelliture font deux objets
difiinél:s & féparés~
. Mais en fuppofant que la quittance de Mr. de Simiane
foit une inveHiture, -Ia ceffion' rapportée par le fieur Brun
d! amérieure à cette quittance; elle ell: du 6 Mars 1776,
& la quiTtance n'ell: rendue publique que le lendemain' 7.
C'ef! donc le fieur Brun qui a été inveHi le premier. C'ell:
une maxime d'ordre général, que les pieces privées n'ont
de dare en ce qui concerne les intérêts du tiers, que du
- jour de leur publicité atteHée par les reg.iHres du contrôle.
Le fieur Moutte n'échappe point à ce réfultat, en prétextant du défaut d'intimation de la ceffion. L'Arrêt du 17
Juillet 178 [ (rapporté dans notre Journal, année 1780,
pag. ')83) a décidé en faveur du fieur Ricaud contre le
fieur Lambert, qu'entre 'deux ceffionnaires du droit de préJation, le premier titre devoit l'emporter fur celui dont
le titre écoit poHérieur, quoiqu'il eût exercé le premier. _
Lambert avoit acquis une partie de maifon relevant de
la direél:e des Chanoines réguliers de la ville de Marfeille;
il avoit payé le lods & paifé reconnoiifdnce le même jour.
de la vente le 6 Juin 1780. Sept jours après, le fieur Ricaud Ce préCente avec un aél:e public du 27 Janvier 1762,
par lequel il avoit rapporté ceffio.n du droit de prélation
pour la premiere vente qui Ce feroit de la .mêm~ partie de.
mai Con. Cet ~él:e fut fignifié au fieur Lambert {ept jours
après fon acquifilion. L'Arrêt fit droit à la demande du
fieur Ricaud, & condamna Lambert à délaiifer la partie
de maifon.
L'ancienne JuriCprudence ne donnait de date valable' à
de pareilles ceffions que celle de l'intimation; Jllais aujourd'hui route préférence eH donnée à l'antériorité du titre.
Arrêt cout d'une voix du 13 Juillet 1784" au rapport
de Mr. le Confeiller_de Gras, .qui réforme la Sentence du
8 Janvier 1782; déclare le fieur Brun non recevable & mal
fondé en [a denlande; met le fieur Moutte fur icelle hors de
Cour & de .procès, avec .dépens. Ecrivant Mes. Bremond
& Efhivier.
�1
DU
PALAH
Dl!
ARRÊT
l'ROVllNCll~
571-
LV.
Le Fermier d'une rêve', ou d'une impijition fiir la denrée d~
confommation ne peut pas réclamer une indetnnité pour la
perte occajionée par la contreban'de.
'.
L
E 2.S Novembre {77,S la Communauté de la Valette dé-
livra la ferme du Piquer au fieur Givaudan, (ous le cau~
rionnement du fieur Amie, pour le terme de fix années.
Par requête du 26 Novembre 1782, la Communauté de!
manda à la Cour des Aides la condamnation cohtre les Fer-'
nliers de la fomme de 1780 liv. S (ols po'ur arrérages de
leur ferme.
Le.3· Juin d'après les Fermiers prétenrerent une requête
incidente, pour demander que la Communauté fût condamnée à payer l'indemniré de la perte par eux foulferte aux:
'années 1780 & 1781, (uivant la liquidation par Experts)
avec intérêts & déRens. ,
La requête principale ne fut pas contefiée ; ce procès ne
roulait que' (ur la requête incidente.
On di(oit pour les Fermiers, que les pertes dom ils (e
plaignoieut avaient' été occafionées par deux cau(es principales. La premiere écoit le manque de pain en 177 8 , & '
dans les années (uivanres, & Ja, (econde la' conf!:ruél:ion
du four de 'Bauduen, qui (e trouve enclavé dans le terricoi're
même de la Valetre.
C'ell: une maxime incontefl:able, continuait-on, que tout
locateur doit faire jouir le locataire de la chofe louée; c'ef!:
une autre maxime que tout locateur eH tenu de droi.c de
la non jouitfdnce foulfene rar le locataire, & cettc Jlon
_ jouitfance ouvre l'aél:ion eil garantie contre' le lo.cateur; c'eH:
cette garantie que les Fermiers ont, exercé, ~ontre la Communauté, & non une demande c'n mdemlllte. La demande:'
Dddd2.
.
/
,
�~7'!'
J'OURNAL
,_.
en indemniré fe régir pàr d'autres principes que la demande
en garantie. La Communauté fouriene que c'eH une indem~
nité donr il s'agir ici. Les Fermiers fouriennene que ce n'el1:
qu'une garantie. En effer, ils fe plaignent de ce que les
Boulangers locaux ne paîrrilfoient pas du pain à fuffilànce
pour' la 'confommarion. Lé fJit' eft pro'uvé par lé compa':'
ranr tenu à la Communauté. Le dèvoir des Adminiitrareurs
étoie de prévenir le manquem'ent de pain, & de veiller à ce
que les habirans pulfene fe pourvoir fur les lieux; ce n'éraie
p'lS aux Fermiers à exercer des exécurions rigoureufes &
barbares conrre ceux qui alloieoc fe pourvoir du pilin ailleurs; c'étoit aux Adminiitrateurs à veiller fur cee objet de
polic'e; leur négligence a éréla caufé de la non jouilfance de
la chore louée; ils doivenr donc garantie aux Fermiers.
Quant à la confiruéèion du four de BJudùen, ajoutoir-on ,
de deux chofes l'une: ou la Communauré .pouvoir s'y 01"pofe.r, ou elle ne le pouvoit pas; fi,elle pouvoir s'y opporer,
& fi elle ne 1:,) pas fair, elle eit nécelfàiremene garance d'un
dommage qu'elle a elle-même occafioné; fi par conrraire elle
ne ppuvoit pas empêcher cerre conArpéèion, dès-lors. l'abus ,.
la fraude & la conrrebande font des fairs qui lui fone per-.
fonnels, & qui dégénereoc en éviéèion d'une panie de la
chofe affermée, pour 'n'en avoir pas parlé dans l'eéèe de
bail.
L'érablilfement d'un four dans le terroir de la Valette
étoit un, monument public & fubfiitane élevé contre la ferme
du Piquet de la farine, qu'il n'étoir pas au pOUl'oir des Fermiers d'empêcher.; la Communauté feule en avoir le droir;
la négligence des Cdnruls a occafioné eqcore des perces
confidérables aux Fermiers; il Y a donc lieu à, garanrie.
La Communauré répondoit que la demande des Fermiers
éroir une véritable demande en indemnité; & en point de
droir, il n'eH dû aucune indemniré aux Fermiers, fi la perce
.ne procede d'ulle force ma'jeure ou d'un cas forruir, qui
excogitari non pot/ât, ou d'une perre intolérable; il ne leur
en e[t dû aucune, li la perce a,été occafionée par un objet
�,
DV
PAt AXS ,nT!
57 f.,
P n. 0 V II N° CE;
de contrebande. C'eO: la Jurifpru'denc:e de la Cour; reconnue --formellement par une décifion- arbitrale de 1..']80, qui a été
~c~uiefcée entre là Communauté de Marignane & fon Fer;
mler.
En fait, il n'eO: pas vrai qu'il y ait ~eu à l:ç Valette un
mahquement de pain capable de faire accorder une indemnité aux Fermiers; les' Boulangers ont ~empli leurs obligations avec exaél:itude, & les habjtan,s ont trouvé le pain
~éce1f.lite à la confommation. Si, cette fourniture lavoit cefr~, '
la clameur publique ~4roit a,n.non,cé la difet,te g#llérale" &
la CommuO'f1uté n'auroit pas relt(dansYinaél:i?o).fi cep~n
dant quelques particuliers Ont introduit du pain paitri ailleurs qu'à la Valette, .c'étoit aux Fermiers à furveillercette
contrebande; le bail & l'Arrêt d'homologation leur donnoient
le droit de la faifie: mais la Communauté n'était tenuè à
aucunè garanti~ ~i à indemnité. .
.
"
1
Le fo~~ d~.Bau.duen, tominuoi,r-on, n'a pas ét~.f_on!huit
par la Communauté; il n'a pas été confrruit dans fon ferroir; elle n'a donc pu ~'o,ppolèr à, fa"co9f!:ruél:ion ; les"Ferrniers om pu & dû prévenir, lors de la déli~rancf: du ,bail,
que_ les propriétaires d.~s terres limitrophes du lieu ,de la
Valette avoiem ly droit de difpof~r de l~urs fonQs_ pc; d'y,
copHruire des fours; c'étoit aux 1 Ferrpiers à veiUer, fi;r la
c,ontœbande qui pouvoit réfulter de la conHruél:ion 'de ce
four. '
La demande des Fermiers ef!: donc une vér-itable indemnité inadmiffible; mais qu'elle foit llne indemnité ou une
Ka.ramie, il faut toujours ~xa'mjn!,r l'origine de la, perce,; e.lle
procede invariablement de la con.treba.nde donc la Communauté ne peut être tenue.
_ .
Arrêt du 11 Juillet 1784, au rapport de Mr. le Confeiller
de Fontienne, qui fait droit à la demande principale de la .
Communauté, avec dépens; débo\lte les Ferm!ers du premier chef de leur requête incidente" relative à la conHruc- v
tion du four de Bauduen; & avant dire droit au fecond chef"
foumet les Fermiers à" vérifier que dans lès, ann~es ~78o ilç /
l
j.
l
...
�~74
.
Jou il. N A L
1781 la fourniture du pain a manqué dans le lieu, & pat'
quelle caufe elle a manqué, fauf la preuve coorraire, dépens
de cette qualité réfervés. Ecrivant Mes. Bremond &- Portalis.'
/
?!!
..
ARRÊT
LV J.
Le tiers poffiffiur attafjué par ac7ion hypothécaire ou de regrès
ne peu~ oppofer aucune compenfation.
Les alimens donnés à titre d'amitié ne peuvent être répétés.
E 8 Juillet 1782 , Marguerire Juramy fait alIigner en
regrès, pour le reGaor de la dot de fa mere, Paul Silve ,.
Ménager du 1ieu de la. Seyne, poifeifeur d'une rerre foumife:
à fon hypotheque.
.
Ce dernier, pour fairediverlion à l'aaion de regrès, imagine
de préfenrer le 22 Oélobre fuivant une requêre incidente
pardevant le Juge de Seyne, en compenfarion &- en condamnation contre Marguerite" Juvarny de quatre-vingt-cinq
jours de nourriture par lui pré rendue fournie depuis le 4
.
Avril 1781', jufqu'au 28 Juin de la même année.
Le 9 Novembre fuivant, Marguerire Jurarny donne des
défenfes, dans lefquelles elle oblerve que Jes fins de certe
requêre étoieor fans aucun fondemenr, parce que les alimens
qui lui avoient été fournis par la femme de Paul Silve,
dont elle éroit la filleule, l'avoient été à titre graruir, par
pure alfeaion, &- en reconnoiffance des fervices que ladite
Juramy avoir rendo à 'fa marraine dans fes infirmités.
Ces deux demandes furenr évoquées pard~vant la Cour;
en vertu du privilege donc jouiffenc les pereonnes pauvres, &renvoyées à l'audience.
Marguerité Juramy fourenoit que l'aéliôn en regrès in-.
tentée de' fa part éroit aulIi ju!l:e que la demande de Paul
Silve étoir abfurde; on ne voit pas fur quel fondement l'aaion.
en regrès pourroit être conre!l:.ée •
L
•
�~74
.
Jou il. N A L
1781 la fourniture du pain a manqué dans le lieu, & pat'
quelle caufe elle a manqué, fauf la preuve coorraire, dépens
de cette qualité réfervés. Ecrivant Mes. Bremond &- Portalis.'
/
?!!
..
ARRÊT
LV J.
Le tiers poffiffiur attafjué par ac7ion hypothécaire ou de regrès
ne peu~ oppofer aucune compenfation.
Les alimens donnés à titre d'amitié ne peuvent être répétés.
E 8 Juillet 1782 , Marguerire Juramy fait alIigner en
regrès, pour le reGaor de la dot de fa mere, Paul Silve ,.
Ménager du 1ieu de la. Seyne, poifeifeur d'une rerre foumife:
à fon hypotheque.
.
Ce dernier, pour fairediverlion à l'aaion de regrès, imagine
de préfenrer le 22 Oélobre fuivant une requêre incidente
pardevant le Juge de Seyne, en compenfarion &- en condamnation contre Marguerite" Juvarny de quatre-vingt-cinq
jours de nourriture par lui pré rendue fournie depuis le 4
.
Avril 1781', jufqu'au 28 Juin de la même année.
Le 9 Novembre fuivant, Marguerire Jurarny donne des
défenfes, dans lefquelles elle oblerve que Jes fins de certe
requêre étoieor fans aucun fondemenr, parce que les alimens
qui lui avoient été fournis par la femme de Paul Silve,
dont elle éroit la filleule, l'avoient été à titre graruir, par
pure alfeaion, &- en reconnoiffance des fervices que ladite
Juramy avoir rendo à 'fa marraine dans fes infirmités.
Ces deux demandes furenr évoquées pard~vant la Cour;
en vertu du privilege donc jouiffenc les pereonnes pauvres, &renvoyées à l'audience.
Marguerité Juramy fourenoit que l'aéliôn en regrès in-.
tentée de' fa part éroit aulIi ju!l:e que la demande de Paul
Silve étoir abfurde; on ne voit pas fur quel fondement l'aaion.
en regrès pourroit être conre!l:.ée •
L
•
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DU
PALAIS
DI!
P1\OVIlNCIl;
~7~
Il ef!: de maxime, fuivant tous les Auteurs,,, que l'aél:ion
hypothécaire ou de regrès eQ une aél:ion réelle, par 'Ia-
" qUelle le cr~ancier pourfuit contre le tiers détenteur le
" paiement .de ce qui. lui ef!: dû fur l'immeuble fujet à fon
" hypotheque, aliéné par fon' débiteur. "
.
" Cette aél:ion contre ·le tiers polfelfeur ne peut être
" intentée qu'après que le créancier a difcuté le débiteur
" & fes caurions, s'il y en a. Si le débiteur & fes cau" tions font infolvabJes, alors le créancier a fon recours
" contre le tiers polfelfeur: datur regreJlùs contra tertiUTn'
" poffilforem. ( Mr. Julien fur nos Statuts, tOril. 2, pag.
157· )
.
, .Le créancier, par l'aél:ion hypothécaire 'ou de regrès', conclut à ce que le tiers polfelfeur lui indique' des biens en état
fur lefquels il puilfe être payé de ce qui lui était dû en principal, intérêts & dépens. Si .les ti rs polfe1feurs prétendent
que le .débiteur a.des biens en état & non aliénés, ils en
fo'nt l'indication, & le Juge ordonne qu'e ces biens feront·
difclltés par le créancier, au rifque, péril &' fortune dès
tiers polfelfeurs. A faute d'indication des biens en état, .les
regrès font laxés, & l'aél:ion hyothécai,re ef!: ouver~e. Enfih
cette aél:ion ne fe prefcrit que par le laps de dix ans entre
préfens, & de vingt ans' entre abfens.
Dans l'hypothefe de la caufe, toutes ces formalités ont
été remplies; on a difcuté le principal débiteur; on n'a trouvé.
aucuns biens libres ni exploitables, à l'exception de deux.
petites portions de terre qui font infuffif.1ntes pour le paiement de la do~. Paul Silve, partie ad.verfe, n'a indi,qué aucun
autre bien. L'on s'ef!: pourvu contre lui .-dans le térop's de
droit, puifque Guillau'me Juramy pere n'ef!: mort que le 3
Mars 178 1, & l'aél:ion en regrès a été formée de 'la part
de fajille le 8 Juillet 1782, c'ell-à-dire quatorze mo.is apr1!s.
Cette deQlande elt donc bien obvenue, & elle ne fauroit
fouffrir la moindre contradiél:ion.
'1'
t
" Le tIers polfelfeur attaqué par aél:iofl hypothéoaire n'a,
.~ fuivaot le nouveau Commentateur de nos. Staturs (- tom:
f
�n6
Jou RNA L
" 2., pug. ))9 ) que deux moyens pour faire ceffer toute
" pour[uite; le premier, ep accordant le délàiffemc!lt du
" fonds, afin que le créancier _y [oit colloqué, de maniere
" routefois que le poffe!Tèur évincé [oit payé des répara,., tions utiles & néceffaires qu'il a faites, & de rout ce qu'il.
" a payé à la décharge du fonds.
,
" Le [econd moyen eH de [e maintenir dans la poffe[" fion de l'immeuble, en payant ce qu'il vaut & ce qu'il
" fera ef!:imé valoir lors de l'introdllélion de l'inHance, en
,1 l'état qu'il éroit quand il fut aliéné par le débiteur; c'dl
" un d~ojt d'off~ir qui fait ceffer l'intérêt du créancier ~y-.
" pothecaire. "
Paul Silve, partie adver[e, 'n'a pris ni l'un ni l'aurre de
ces deux moye'ns; il doit donc [ouffrir regrès.
A l'égard de la demande incidente en prétendue compenfation, elle ef!: auni ab[urde que mal fondée.
En effet, il ef!: de principe certain que les alimens fournis
par libéralité, ou donnés -par affeélion, ne peuvent être répétés. C'ef!: le [entiment de rous les Auteurs; de Dornac
dans [es Loix civiles, rom. l, liv. 'l, tit. la, n. 16; de
Catelan, liv. )' chap. 36; ~e Ferriere, Dié1:ion. de Droic
au mot alimens.
" Les alimens fournis par une mere, par l'aïeule ou par
" un
ne peuvent être répétés, dit Fromental; on pré~
" [urne qu'ils, ont été fournis pietatis caufli, fi ce n'ef!: qu'il
" paroiffe du contraire par une déclaration-antérieure à la
" fourniture, ou faite en même temps, ou du-moins peu de
" temps après, & il cite la Loi 1 S fi pauma, cod. de neg.
" gefl.;. la Loi alimeTlta, cod. eod. "
Enfin Brillon fous ce mot, n. ,4, ef!: auni d'avis que ceS
forres .d'alimens ne peuvent être demandés que lorque la
protef!:ation & déclaration qu'on n'a pas intention de les"
donner, [ont faites avanc ou lors de la 'fourniture, ou du-,
moins bientôt après.
• ,Dans l'efp'eee- de la caure, Paul Silve réclame de la parc
de la filleule de fa femme des' alimens qu'il prétend lui
avoir,
'ami,
�. D U
P.\ -I.
AIS
J
"
~ 17
Dl B Cp- R· 0 V B N C J!.
avoir fourni dans les mois d'Avril & de Mai de l'année
J781,-& il n'en a- formé demande que le 22. OB:obre 1782,
c'ell-à-dire, envüon' deux ans après. Il ne paraît pas que
d'epuis la fourniture.'il ait fait '·auéun·e proteltation au fujee
de ces alimens; il n'a fair m'ême aucune déclaration anrérieurè\·ni"p'ôfl:.érieure,l(JlIi _âDfion~~.IÎinredtion d' lés r~péter;
ib,a.,doQCI tell. inMl'ltitln"· de .Ie~ ·flonn·er,.ltty' a "plus: 'ces
alimens ·ont. été fournis à la dé,fende~ejfe pans un ~emps où
elle prenait foin ,del'lll' femme, de l'adverfaire '_pendanrfes
infirmités;' & dè's-Iors ce -n'l'ft· qu'uBe' recompenfe des îerviées qu'dl'èl\ùÎ1a remhil;.~ll1 . ,1' " ,~." . ".i • ".f .1'
• L'arr répondoltrdé'liilopaft~deSiNe:. l";''''~ U'i l ' f
"1l~Aè1J~!t'FaB:ion ëlè1 rëgtês'éroie o'dieufé, i& qu'elle devait
être fufàiitible de t;ofnp~nration. 1.
1."
.
1 2"": Que les alimehs.foù'f~is à· Milrgueri:te Jùramy n'avaient
été. donnési ni "Par Ja'/feB:iob jlfl~'rpar a-ln/tié, ni pour raifon
de parenté &lde fepvil::~s;-& 1J'ii!âinG ils ·pôQvoie'ilt. ·êt e' fré_ l
_péres & co(npen{és~i ·.. i·.J .... ~~r <. ').;- 1 ...,G
""t" 1"
1 .... ";Ir 1 fI'
:; Dan~J ces 'circonllantes,' il Îôrer~in'r le '13 Décembre
J784,-au Rôle"des pauvres,' Arrêt .prononcé par M. le ·Premier PréGdent, qui fit droit à l'aétion en regrès, avec dépens.; & 'quant aù paie'ment dès alimeiJs, il filt ordonné que
P-auL;Silye rprouve~oit Ipar toute fané .&:rm'aniere de preuves,'
. qu'ils. n'avaient, .poi'nt1 ' éré donnés 11 ~arguèrire !ur;lmy"a 1
titre d''(lmitié fauf, 'Ia)prê~è conrrair~, 'les dépens de ce éhef
réfervés. Plaidant Mes. 5ilvy &; Darbaud·(· .
!
- · . I F } ' : ; > :...
~·r(
.~J.
Il'
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. ~{]ee A~rét<:juge·i'd~:ux· poinrs.dientiCls.: li'?. que J'aélion'
en règrès n'elt fu.~l!pi-Jblèld'auc.uhëeOlnperifatiob; 2°. que les,'
alimens fournÎS>là'lt,j[PEni'àÎnitié1 !k peuvellt' êne1répétés.
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mort, rinrent un comparant au Pro~ll.re\l!'·rJllri[dja:jonneh du.
même lieu, ponant 4é,p.qqçi'lt;ÎoJlc oQ{reb l1hQmlls:~8o.mbè ,
~~gocial};ll,' r- !:aifoJi.A~J Ijfllr~s2tÀ~~1 Clj1mgreP q\l'iblJf~~r. oit
dans le pays, & notamment .4 Jeulj,iganh.d'lrls les difrerèntes
lif.pif9J}s: de,rbJed. q.u'iC leur7,\vQi& faites. ,.c;~{re, dén~n'éJatl.On
éf9jF. ·Sorpy ci é e.l d<è vingt-deulC{.ç~e~ij;jE:;~lainte.; ils~inrabpel.
kryn 1~~P!'9~uJ~~~!l/tif4j~i6~:!)eC)dr.:;>f~j~e"infor.ct)ei" fe'fou,
mettant à prodUIre les témolOs néce1faiteS;,,'&ç.méJlornojn •
cpm~e ) PrQcu!:eur:"iJil[iJ.Etiajpnpeh:p~i1rrj)Ü;')f'aüe, qufÙque
diffi,cflh~ vi~-it-yi~A'e.u-x, q.upique I.eu;:; nO!Ilbrè\~res' .r,ep8ît·
alfez fÇlJvl\bl~,,4l qu'ils f'!1ft!n~ caurio~ les. uns d.e~ 11 rres it
cepe,np,anc,1. ,pP~& é9i fèr, ,tqû~e a gnrefl tjOJ1" J.em-Bieci.e .Du"-l
rand"JMaîsrs: ~9rdp.I;'JDi rc,: J~ li',~i(~l1jC .. PQyr COUOfpllV dédiai;!'
r~!1c. I:~.. illdJ"hJlJirrnêll1t dftOM5i~; url,e' rcas ~eJ':~épaa're..
me% des ~xl!ofan.s., ,(;;~ • ,,>0 mparaj! \fU~'fg..(lifi.é,1au·.&lSlire.u"
J urifdiaionnel, ar'tendu , f<,Jt- Ï' d),t , q\l'il \1 ~'ki(l;e;..a'u·cun reg.iHjlè
public pour recevoir les dénoncianons; &. comme Donnaud
&. ROl;!le !!,'al,!oi.enr MLr1!o~né le 'co~rllnt ,ilsiitte.nt aùc
l'HuifIie :aJte(}.erll)lH~.r,1RS'U!'WJ .Jdbrsli~iq!.l. tmI les 'cs_
énonéé? .. f.e',IB-J ~Qtl "of! J~ e 'i}ln' ( .Il' trpejlitfii . !AÙ. P'l'oClli!
reur-Jurifdiêl:ionnel, à l'effèt de pourfuivre fur la déooncialion, .& de faire fubroger un Lieutenanc de Juge à la place
de Me. Roux, parent de tombe. Sur la fignification, le,
Procuceur Jurifdiaionnel demanda vingt-quarre heures pour
fournir fa réponfe ,_ & après ce âélai il répondit qu'il avoit
re~u le 5 Aoûc la dénonciation; mai~ que comme l'aae n'étoit
L
r
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• " .. :..i '"
'-
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,
DU. fAL'AYS' DB',
.PiOV,BNCB.
}13~ ligne par Donnaud & Roux, ll.les inrerpéll.1 de
te
579
rendre
au Gre1fe le 14, pour:faire tr:lofcrire!)fur' le reglflre la dénonciation, & Durand fué' pareillement incerptllé de s'y
porter, pour affiHer à ladite rranlèr'iption, déclarant que lorf<Jue cette formalité feroit remplie, il agirait par les voies
de droit.
' 1 •
"Le 16, nouvel exploit, dans lequel les dénonciateurs expofent, qu.e s'étant rendu au Grelle le 14 pour faire tranfcrire leur dénonciation, le Procureur Jurifdiétionnel fe !èroit
refufé à la faire écrire coute au long, & n'auroit fait mettre
qlle les arriclés .qui~rieLportoieDt ful- rien. On Interpella de
nO,uveau le Procureur
Jurifdiélionnel
de -don'ner
,
.
. . . une heure
pour meltre toutes chofes, eh regle, lui déclarant qu'à
défaut its le rendroient refponfable de tous les événemens
qui pourroient en réfulter. Le- Procureur Jurifdiélionnel répondit que les .dénonê,i~teurs' avoient eux-mémes refufé dè
faire écrire la dénôn'dalion toute- all lo.ng; que -cependant
pour les facisfaire,. il ·Jeù"j, donno!t' affignation aU~:18. _ J
Le' 22, a.éle tenu pau le. Procureur Jurifdiélionnel aux dénonciateurs & à la cal.ltion; aux premiers, à l'dfet de comparoltre le 23 au Gre1fe, pour entendre' la leélure de la
dénoncia.tion, & ex-a'miner fi elle étoit conforme à celle du
~ Août, & 'la figner, lmendu que ll'ayant po;nt comparu-à
}'affignation donn~e pour 'le 18, le P.rocureur :Jurifdiélionnel
l'avoit faite tranfcrire, avouant qùe 'c'écoie par inadvertance
qu'elle n'avolt pas été tranfcrite la premiere fois dans fon
entier, & à la caution pour figner fon aéle de cautionnement. Le 2:3 les dénonciateurs reconnurert' que la dénonfiBtion étoit là méme; DU,rand fe déclara caution, & donna
tout de fuite l'é'tat de fes biens. Le 29, Noul'el exploie inrerpellatif au Procureur Jurifdiélionnel de pourfuivre dans
les vingt-quatre heures pOlir coue délai, lui déclarant qu'à
défaut ils auroient recours à l'autorité fupérieure poûr' l'y'
ebliger. Le même jour le Procureur Jurifdiélionnel tiar un
aéle aux dénonciateurs, le'ur déclara que Durand n'avoir pas
jullifié de la propriété de~·bjens dont il avoit donné l'écali
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que d!ailleurs, ces biens; [en !es (tipp,ofallt ~éel~;ne, fQ~fOiene
,pas pour répJ"ndre ,ites dQmmagoes & ·intérêt~. qui pourraient
être accordés à l'accufé, s'agiifant de crimes~imputésJ un
Négociant qui jouiifoit ,d'une. fortune aifée', donc le com,rnerce étqit éte)ldu',.& Qui rempliifoit .d'aiIleW's (jes fOenc,.
tians publiques; que relativemenr à ces circonHanceS' ,. il
.étoit el) qroit 4.'exiger ;.pour fan aifurance, une caution dont
les biens fuifent au m'oins de 20000 liv.; les 'dénonciateurs
devoient encore ..configner une fomme de J 200 liv. pour
fournir aux frais d,e l'jnfiruél:ion; & tous ces préalables rempUs, il leull déçlara 1qu:i1 agi.roit enfuite de ·Ia dénonc,i,arjon
aioli' ql)'il av,ifero.it. >
, ' .
1
Sur .la lignification, Pierre Terri~ ,)un des dénonciateurs,
répondit qu'il paroi/foit que le Procureur Jurifditl:ionnel fouçenoi~ Combe;, !llI'ils n'étaient pas obligés de donner caution, étant tous' les trois cautions le:; uns des auu:.es; que le
cautionn~ent de Duraod était fuffifant; qu~ils n'éraient pas
oblig~s de coÎ1figner pour la pourfuite de la' proc~dur~; que
l'ufure de Comb,e était li publique, que le Procureur Ju':
rifditl:ionnel. auroit dû, a.gir, & que s'iL ne pourfuîvoit pas
dans ,les vingt-quatre. heures, on porterait plainte.
Le 23. Fév~ier I.7~4, les dénonciateur.s tinrent Ut! corgparant à Me, Pellenç, ~ Jljge de Malemort, dans lequel" après
avoir rappelle I~ dénol}ci3tion, qu'ils ,avoient f"itll" JI~ coni
duite du Procureur J~,,:ifditl:ionnel, fon défaut d~ pourfuite,.ils dirent qu'ils avoient éte inLlruits que Corn~~ lui avoiç
préfenté une requête en réparation de prétendues ,di/ramarions; ils l'ioterpel)erent 4e leur déclarl\r li vérit~blè,men~
la requête, avoi~ été préfentée, lui déqlarant qqe:dans ce ca!!
ils é,to,ient à même d'admi~illrer des témoins poLJr prouver
la v~riré de rous les faitS dénoncés. Le 26 du même mois,
comparaot tenu au Procureur Jurifditl:ionnel, POUt qu'il eût
à faire difcootinuer' la procédure de Combe, & à faire informer fur la dénopci~tiol! déja offerte, & fous l'offre de
renforcer le cau1ionnemen't, s'il y avoit lieu. Le 12 Mars,
aél:e tenll. ~u Procureur Jurifdi~!Ollnel de la. part,des,#non~
.
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'1)~
P1l0VBNeB;~8r'
-f;iattlurs, dans lequel ils offrent pour caution {jeur Pierre Jourdan
Bourgeois, {jeur Jofeph Jourdan, Négociant, & Pierre Durand, Cordonnier, avec offre de fournir aux frais de la pro.cédure, comme encore de remetrre le rôle des témoins
.qu'ils éraient en état de produire, & en conféq~ence ils font
donner affignation au Procureur Jurifdiél:ionne1, afin que les.
trois camions palfenr leurs foumiffions. Sur ·Ia fignification,
le Procureur Jurifdiél:ionnel repondit que les offres n'éraient
pas fatisfaél:oires, & qu'elles ne pourroient l'être qu'autant
q!Je la folvabilité des camions feroit juflifiée. II donna enfuite affignation aux dénonciateurs, pour compàroître au Greffe
~ l'effe~ de rerpertre les titres juHificatifs 5!e propriété &
des biens compris dans l'état. Tomes les parties comparurent au Greffe; les. camions y dépoferent les titres de
leurs, propriétés; les dénonciateurs offrirent de remettre fur
le chanlp la fomme de 288 liv. pour fournir aux frais de
la procédure, & demanderent· que les cautions pàlfalfenc
leur foumilIioll : fur quoi le Procureur Jurifdiél:ionnel répondit
q\l'il prenoit aél:e' des offres, & qu'il feroit ravoir incelfamment aux dénonciateurs ~'il devoit ou non les accepter après
l'examen qes titres.
, ,
• Le' 2) ,du' même moi's 'les d~nonciateurs prérenterent une
requête (au Juge, pour. faire •. ordonn~r qu'il ferqit furfis. à
j'exécution de la procédure prire à la. requête de Cç>mbe,
lufqu'à ce que celle en infiigarion fût prife & ,infiruire. Le
Juge ordonna que la rêquete fût montrée au Procureur Jurifdiél:onnel; c,elui,ci conclut : ne pouvant rien ,requé,ir en
l)d;at ,a',; no.m d~s( inJligateur:s •'lui . ne ft font Roint'mis. en
regle, je .requiers être ordonné 'lue fur leur. priftnte r.e'l.lIête
ils pourfuivront en l'état ainji qp'il appartient. Le décret fut
conforme aux conclufions.· Le~ inHigateurs, déclarerenr au
Proc'ureur Jurifdiél:ionnel qu'ils éraient appellans de ce décret,
& qu'il eût à faire Iurfeoir à l'inllruél:ion de la procédure
dé Combe': Celui-ci répondit que l'apl?el n'étant ligné d'au.,
cu~e des parties, ni par deux témoins, il ne pouvoit y avoir
é'g.ard: Le 26 Mars ~ç.Procureur Juri$iél:ionne1 déclara aux
�~r8i.
_
, . ~ 'J ~ ti,R'N AL".
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infligareurs par un' aéte qU'Il ne pouvOIr pas comprer tur
l'offre de Jean-"Pie~re Durand' pour caution, parée qu'il
n'avoie remis aucun eitre, & que ceux r mis par les Jourdan
n'écoienc pas fuffifans pour 'juflifier les biens énoncés' dans
les cequilieions~ 'Le premier Avril, nouvel aél:e de la' parc des.
dénonciateürs- ,lU Procureur Jurifdiél:ionnel, dans lêquel ils
rappellent eous les faies meneionnés dans les précédens aé!es,
..- offrenc de nouveau pour camion les fieurs Jourdan, lui dé•
clarene qu'ils remettroient au Greffe leur cote cadafirale
po,ur juflifier de leur folvabilité, & le requierent de pourfuiv{e fur 'les faies. dénoncés dans trois jours, de recevoir
à cet effet' la foumiffion des cau/ions dans le même delai,
donnent l'état & rÔle de douze eémoins, & remerrenc 'les
288 liv. pour les frais de la procédure, promertane d'y fuppléer. Dans le même -aél:e ils déclarent fe dépareir -de l'appelenvers le décret' du 2 ) . "
,.{
Le même 'jour, les inltigae,eurs & les ,càueiqns co.mpa1
roiffent au Greffe, le Procureur Jurifdté!ionnel demanda
l'exerair du pareage des fieurs Jourdan aveè leurs freres, /lé
l'exerair du 'reHâmeni, de feu Jofeph Durand oncle de Pierre
Durand, tro.ifieme camion. :ç.es inHigareurs déclarent '1-u'il
étoit impoffible' de- reméme ies pieces p<lr lùi demilDdèes,
parce qu'il n'exifloit enfre les freres Jourdan qu'un. pariag~
verbal; que chacun d'eux avoir faie tranfporrer fur T'l, ège~
cadaHrale ce qui le concernoit dans la fucceffion de leur
pere; que Durand avoit également fait porcer fur fa core
cada'!Vale les bieps imm~ubles délaiffés par fon oncle; qq'iJ
~n youiLfoit depuis au delà de trente ans, &- gue -chre
feilion équivaloit au titre le- plus aurhehtique ;ils< 'J'rnter:.!
pellerent dé nouveau de faire informer inceffal11menr;' proteHant en cas contraire de déni de juflice, d'en appeller 11
la forme de l'Ordonnance, & de fe pourvQÏr en remps & lieu
pour le faire 'contraindre perfonnellemenc à cous les depe'ns ~
dommages & intérêts. Le 14, nouvel aél:e en déni'oe jMHce,
au bas duquel le Procureur Jurifdiél:ionnel répondit 'tju'à
caufe de J'infolvabilité des dénonciatèLlrs & des 'qutions) &
11°0-
-
�DU
PAtAIS
DB
PROVENCE,'
.S83'
Ilprh 3voir interpellé' les -:eàutiollS dé fournjr les tirte~' jùftificàrifs de leurs 'prol'riét,és, il leur rép.ete pour la d~rjliere
{ois de 'Ce meme en regle, & qu'il fera après~ce que· foo,
miniltère exige. Quelques jours après I,e Procùreur ~Juri{
diél:ionnel leur obferva qu'il confenriroit à I~ pa/faJÏoll
l'g&e.:4è.'C~utionne]!1eD6 'dès à préfenr, pourVll q.ue lesJie\lrs
Jeurdap déclara/fentt.exprelfémeot .que les biens. rnentiolln·és.
dans lès cotes "cafiaHrales de leurs' frerès leur appartenaient.
entiéremenr. Ceux- ci déclarere'nr que les p'ropriétés men-,
tionné~s dans les cotes c"adafir.ales & les capitaux -appar-.
tenoienrréellemenc à leurs freres, & qu'ils n'y demandoient.
rienG8ireél:eèbeiJ ni iodiretlemenr; ils remirent 'leurs titres
&l'olfrirenr de pa/fe.r leur Tburniffion, &'le. Procureur Ju .
rifdféliennel di :qu'il oe -.pouvoit les- recèvoir Jans. 'àvoir p<ris
fQn confeil, & déclara prendre un delai de !Î'ois jours•
• 'Le, '28 Mai les dénonciateurs .préfe'nterent tequête à la
Gour. Il l'effè.t.l'd'être. reçus. appell;ios comme de. déni deI
jtl!hice'f'& djo1Jteoir.la perrniffion de pren(ire: à-partie le
IlrOlrllteU 'Jurif'ldiéhonnel. ·\Décret:t<.le. foji montré ~.;partie'
& fur 'leS requ.êtes. refpeél:iv.es inrerv'in~ un' reOl[oi);eb juge...
. lt_ 110
'~\ .. .~
meot...
1.'l'·~·''·'
?~
I.l
L
:. Me. Meriaud SubHitut" ,ohf"rva q.ue J'<Drdonnaoce trace
lâûfolUèl 'u.è' les .dénonciateurs,..do.ivent
lIfuivre; .
il Jalloit'
,
f"n.sv dQute séiablir' ,des ,IJJrmwilés"poul 3utcuifer une .àéHo,w:
au
o:dJi~uli parr ellè-mêmtl.lbil'"fa:\IowrH11011~e.rl.des)rnoyensJ
~uri'éyHër :que l'honnèteté.!ne. ft! 'trduvât P'3'$ ,en but~'à IiI
clilQ1lJo:ie; à la,;mécbanc té.1Suivant l'arr'. Ii (du ,tit.1 3 de,
l'Ordonnance criminelle, les Pro.cureurs du Roi doivent avoir'
ae
,i
.
ulll.1'GlJiJfre' pou réhvoir & fairé iéaïrel!Us dénuuCJÏaûQns" qui
d~i'll{'db '-6/ft: •.ciu:.onJlanéiéés . &.jignées par les dénoncÏate!lrs;
s1th [a'lleilt.,jigner; if'inon.ellej doivent être. écrites en) .le.ur
préfence 'par le') Greffier. du Siege 'lui en ~oit faire ment!Qn.
El rùivanr' l'art; 7, les accufareurs & denonczotellrs qlll fe·
trfUvetont maLnfnndés ,.fero!)! .coTJd~ml1t!s aux dépen,s, d~m~'
nwge • .-& ilU'ér,êts iJe!iÎ act"ufè,r, {}.. a ,pUis gmrrde. pemJ:. sl,ll"
é.m{f){t ',LeS:.. déod.oc:iations nè;.reftent ipas! ,dàn~ les!;p..co,Çco-"
~~li~~a:lol
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RNA L
dures 'l lés parcies puhliques doivent filire un .reqùilitoire
féparé, pour que le Juge en puilfe faire leél:ure àux témoins
qui ne doivent pas avoir 'connoilfance . des dénonciations.
Une partie pub/irlue, dit Serpillon-, ne dQit reàvoir des'
dénonciations que pour crimes graves dQnt là punition inté.
reffi le puhlic, c'eJl-a-dire,. qui méritent peine alJliaive Oll.
infamante. Il faut 'lue le dénonciateur. fait falvable, afin de
pouvoir 'être 'gaMht des dommages-intérêts,; & dans le cas'
d'infalvahilité, il efl·ob/igé de donner une caution :qui puiJfè
fupplier a cette infalvahiliité dans le cas des dommages &
intérêts.
Le miniLl:ere puhlic feroit lui-même foumis'à ces dom-'
mages-intérêts, s'il a\'oit trop légérement recru une dénonciation', & s'il 'avoit négligé de remplir routes ces formalités. Mr. d'Aguelfeau o15ferve que quand les Ordonnances
Je font repofées fur les Procureurs - Généraux du foin !le
recevoir les dénon~iateurs qu'ils jugent à propos d'écouter,
ce n'a pas été fans doute pour. les 'putorifer à prendre pour'
dénonciateurs tous ceux qui; fe pééfentent à eux fans examen
& fans difcuffioÎl ni de .Ieurs caraél:eres ni de 'leurs facultés;
elles ont fuppofé qu'ils feroient fur cela les diligences. nécelfaires pour le hien de la juLl:ice ,& pour la décharge de
leur minill:ere. Il n'y a point Ide.hon Procureur-Général qui'
ne ,foit trèsoiatrentif fur ce point &; qui',vètlilJe' :recevoir"
une dénonciation, à lmoins' 'qu'elle me foir' faite par un~ per.~
fonne notoirement' folvahlè ,. ;l~b 'qui "en cas qu'il' ait, du'
doute à ce fujer, n'exige une caution de celui qui .fe. rend...
dénonciateur. '
.
, La honne répuration du 'dénonciateur ell: encote àeco"".u
fidérer pour en 'accurer un autre; il faut être integri flatil'sc;-.
il .feroit datigèreux de recevoir, des plaintes., même des
dénonciations de gens fufpeél:s ou infames, fur-tout Eoorre
des domiciliés. de honne renommée. Les paffions fone
fouvent des motifs fecrets de plainte: .il ell: donc intérelfanr.,
difent les CriminaJiCles,: d'examiner fi les plaignans ou.
dénoncjateurs fane bien famés 1 & folvables. Toutes.' ces
for~alité$!
�DU
PALAIS
DI!
PROVI!NCI!.
585'
formalités obfervées, le Procureur du Roi ne peut fe refufer à pourfuivre fur la dénonciation, & faire affigner les
témoins dont le rôle lui a été fourni. Une conduite différente de fa part pourrait faire préfumer un concert frauduleux entre lui & la perfonne dénoncée, & dans ce cas
on ferait fondé à fe plaindre de déni de jufiice & à le
prendre à pa nie. Mais fi le Procureur Jurifdiél:ionnel de
Malemort a eu des raifons pour fe méfier de la dénonciation qui .lui était panée; s'il a jugé que les dénonciateurs
fuccombant dans leur pourfuite feraient expofés à des
dommages - intérêts qui reromberoieur fur lui perfonnellement en cas d'infolvabilÎté des accufateurs & des cautions,
pourquoi lui feroit LlO crime & attribueroit - on à partialité
ce qui n'ell: que l'ouvrage de fa modération & de fa prudence, fur-rout s'il efi prouvé que dans aucun temps il fe
fait refufé à pourfuivre fur la dénonciation, & qu'il ne fe
fQ.Ît arrêté que fur des formalités que l'Ordonnance & tous
les CriminaliHes lui prefcrivoient de fuivre?
Or de quoi s'agit-il dans cette caufe? D'une dénonciation faite par trois payfans du lieu de Malemort, contre
le fleur Cornbe, Négociant du même lieu. L'état & la
qualité des dénonciateurs contribuent beaucoup à rendre la
dénonciation plus ou moins favorable; cette voie roujours
odieufe par elle-même, puifqu'elle rend à dévoiler la vie
d'un homme, à infliguer roUle fa conduite, & à lui attirer
l'opprobre & la haine de fes conciroyens, ne peut être autarifée que pour des objets graves, & dont la punition int;érefJe .tout le public.
_ La- dénonciation de Vincent Roux, Pierre Terris &
Donnaud n'a pour but que de prouver l'ufure dont Thomas
Combe s'eH rendu coupable; à l'exception néanmoins de
quelques articles qui panent fur des prêts exorbitans, on
peut dire que toute la dénonciation. ne ro~l~ que fur le
prix du bled, !il[ la bonne ou mauvaJfe qualHe de ce ble?,
Les mêmes objets avaient excité dans un temps la de·
Années 1782 6- jùiv.
Ff ff
�~86
J
0 Il li. NAt.
.,.
nonciation du nommé LaEol, qui s'.en ..ét.o.ie faCuièe ,dé;
parti par aéte pa!fé pardevant Notaire.
Le Procureur }uriCdiétionnel pouvojt ,donc .fe méfier
d'une nouvelle dénonciation calquée [ur' les plêmes faits
que la premiere, & à Jaquelle- on n'av.oit donné aucuoe
lùite. Il s'agitroie d'attaquer un Négociant dans [on .état,
dans fon honneur; il pouvait écheoir en fin de caufe une
adjudication de dommages-intérêts très - conGdérables; ce
fut par ce motif que le Procureur Jurifdiaionnel -exigea une
caution de vingt mille livres, & douze cene livres pour
fournir aux frais de la procédure.
La dénonciation de Vincent Roux & Pierre Terris
n'avait pas été tenue fi fecrette qu'elle ne ftit parvenue à
la connoiifance de Thomas Combe; auffi porta - t - il fa
plainte au Juge, à l'effet de faire informer contre toutes
les calomnies que l'on ne cetroit de répandre contre lui.
L'information fut prife. Cefar Jourdan, Vincent Roux &
Jean-Pierre Durand furent décrétés d'ajournement; JeanPierre Jourdan Notaire, Jofeph Jourdan Marchand, François Lafiol, André Donnaud & Pierre Terris furent décrétés d'affigné. Il réfulte de l'iuformation que l'inl!:igation de Lafiol n'avait été faite qu'à la follicitation de
Jour<\an; que la feconde a eu le même principe. Ce _fut
néanmoins cette procédure qui détermina les dénonciateurs
à' reprendre leurs pourfuites & à tenir un comparant aL!
Procureur Jurifdiaionnel pour lui offrir d'autres cautions. Ce
n'el!: -donc que depuis lors qu'il faut examiner la conduite'
du Procureur Jurifdiaionnel, & juger .fi les difficultés qu'il
a élevées depuis cette époque font de nature à donner lieu
à l'appel en déni de Juitice & à la permiffion de le prendre
à partie; car jufqu'à ce moment les d~nonciateurs ne peuVent imputer qu'à leur inaél:ion le défdut de pourfuite;
inaaion qui a donné lieu à la procédure dans laquelle ils
avaient été décrétés. Ils éroient dès-lors dans les liens de
la Juilice, & expofés perfonnellement à des dommages-
�DU
PALAfS
DE
PROVENCE'
"~S7
intérêts envers le lieur Combe. Ce font cépendant ces mêmes
parties qui fe préfenrent pout' exciter les pourfuites du minifrer'e p~blic; ce font ces mêmes parties que le minifiere
public ne refufe pas de recevoir d'une maniere abfohJe,
mais à l'égard defquelles il cherche à prendre des renfei~
gnemens qui le [hettènt à l'abri de critique & de crainte pour
les fuites de l'accufation.
M'e. Meriaud conclut à ce que fa'ns s'arrêter à la requête
de Pierre Terris, Vincent Roux & André Donl1aud, donc
jls feraient démis & déboutés, M~. Pouffel, ProCUreur Jurifdiaionnel de Malemort, fût mis fUr icdle nors de Cour
&. de procès.
Arrêt du 12. Août 17S4, prononcé par Mr. le Prélidenc
de St. Vincent, conforme au): condulions; Terris, Roux &
Do.nnaud furent' condamnés auX: dépenS'. Plaidant Mes. Parwlis; & Dubreuil.
ç
ARR Ê T
LVIII.
On-m· peut: délihérer que dans un ConfeiL de tous chefs de'
- fltmille"j1J.r des objets qui intér~fJèn't chaque habitant e;.
poffiddttt-hien eh ·partiéulier, ut linguJos.
L'oppofition il la délibération a un 4fet fufPenjiJ.
li'
ID
9
Décêltibre 1'78,1, il fut pris une délibération par
JL.I'\a Communauté de Bèrre ,.eu formé de'Réglement, conerlfan:t les troupeaux qùe chaque particulier pourrait intrl(doire dans> le! terroir, 1,a maniere 'de faire conduire les mêmes
rroupeauJl', & les peines que la contravention de ces mêmes
particuliers pourrait détetminer. Cette délibération renfermait fil! articles, dont trois firent la matiere de l'oppoliti.on' relevée par le lieur Ricard. Ce Régl~ment fut homologué par Arrêt de la Cour· du 2.1 JanvIer 1782. Le,
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1
fleur Ricard en demanda la ,caffadon & la révoeation')dé
l'Arrêt d'homologation, & cependant la furféance, qui fUI:
renvoyée en jugemenc, demeurant jufqu'alors tout eT! état.
On diroit pour le fieur Ricard, que. la délibération était
nOlle., parce qu'elle avoit été ptiifè à l'inru des fQrains' &
de ,?eaucoup d'habitans de Berre ;' tandis que .s'agiffam d'un
intérêt majeur, commun à cous les polledans-biens, il falloit.
néceffairelllenc conrulter cous ces intéreffés; que l'arr. l
çle cette même délibération lui écoit effentiellement nuifiblè, parr,e qu'il' le gênoit dans la garde de fon troupeau;
qu'il le privoit du dro.it qu'il avoit d'envoyer paître dans les.
propriétés qu'il poffédoit dans le terroir de Berre;. que la.
çommunaut'é n'avoit àucun droit fur ·Ies chofes qui ne lui
apparrenoient point, fur-rout fans entendre la partie .il1té~
reffée; que l'arr. ) n'écoit propre qu'à produire une ml:llti~
tude d'abus, & qu'on pourroit juger d'ava(lce de la ,inulti
tude de fauffes dénonces que ce Réglement enfanterait, dès
que cout le monde aurait intérêt à lachofe.
On répondoit pour la Communauté, que le feu! intérêt-de
l'habitation avoit diél:é le Réglement; que ce Réglement,
néceffaire & utile avoit été approuvé par rous ceux qui avoient
droit d'en connoître. On convenoit de la rlêceffité de con~
voquer lés forains, qui, fuivant l'arr. 13 du Régleme'nt, doi~
vent avoir un Syndic qui efl: obligé d'élire domicile dans
la ville de Berre; mais que depuis plus d'un Iiecle Jes forains:
n'avoienc aucun Syndic, & n'affiftoient par conféquent à
aucune dél'ibération; que la délibéràtion acraquéé' avoit;: été'
prife dans un Confeil g~néral de tous chefs ,de famille; que le
petit nombre qui l'avoit foufcrite, écoit ·indifférent, puifqu'il
écoit prouvé 'que la coni/ocation avoit ~té généralement. faite:
. Me. Meriaud, Subfli:ut, obferva qu'il s'agiffoit de favoir
fi l'oppofition envers une délibération produit l'effet d'arrêter l'exécution de cette même délibération pendant procès.
La décifionde tette queflion dérive à la vérité. de la
queHion principale; car Ii la Loi que la Communauté de
0 11
N' AL'
�D'Il
Pu,Ais
1).RJVa,OVIlNCtl.
~8~
nerre"~ PQrtée ~ft',jufie, péç~1f'!lre;,lfi clle,eft émané~du
vœU. unanime -pe toutes les panies intére1fées; fi les formalités~o()nt ,étér-obfervées, il ~ne; paroît pas jufie que la. réçlam;uip.n de certains pa~ticul.iers pui1\e e;n a.rrêter l'ex~cu
~ioQ, & que fous le prétexte d'une opp_ofit~o.n bien ou 1pa~
forq-,ée, l'habitation e'n' g4nérill ft)t ;pr.i~~.e~p~n9;)nt un t«fllPS.
des qV'<lntages dont elle s'écoit propqfi~ :.d~ ~ouj't.!'Y1ai~1
li,
contraire la délibération a été prife illégalement; fi co'utes
les parties intére1fées n'ont pas été. entend.ues ;" fi le RégIe':
men~ qui s'en ell: en.(uivi"bi~n-loiJr)d:ê-tr~ '!:~mv!iag~[d~,)vO?u:
géné~~I,;) n'e~ q~eJe fruit <I.e .l'intri~ue''' ~I 'd(j' ~'ilrpb~ ti~!b deJ
lferta!n~~partJcubers; ji les ~bJ6ts qUI y ,font ~ete'rnllnes",a·~.
lieu d'intére1fer l'habitation ep entier" n!on,t en vue que,
I.'avagtage de.l:es mêmes particuliers, dh-Iors, la, récIafl1atiÇlO. du Ji,eur Ricard.& g~rie,s adh,ér,ans fe"pr~[enJe avec une
çe 'aine faveur, & on pel!ç fa9S pré,j\l.dic~ aH~e ~d~s aujq,ur7_
d:lwj \!exécJltion d'une dé!ib~ri!ti.on_.q~i, peu:c ;être ané1tn~e
en fin d!l.):a.ufe,
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. Il elli/,le dans chaqll,e Comnlunauré des 'Réglemens qui
el] filient le régime & l'adminillration. On difiingue Iles Con;[eils orçliJlaires des, ConfeiIs g~nér'lOlh~~' 'les: 4~r(l5ers d~s
ColjfeiIs .de'cous c11efs,ge .famille,.On ne )p~LJ.t.av.qir };eC9~rs'
•
aux CenfeiJs ~le) t09s c,hefs de famiJ1.e·, -q,u.e. lorf<ill!'il_ll'ag~t;
de1 d~libére'r fur ides pbjets. qui inrérelfeJlt ;!OUS ks ha..bit~'ns,
en"paniculier. On ne, peur l,mêrH; ,<-on.y~q!Je.r c~s for!~s' de
Qpjj{eils-que de l'qutorité de la. C.our, & en{uite d'une re-.
quê\e.qu'o·n lui pré{ente à cet ~ffet ,_dan~ làgu,ell~ on.expofe. _
I,e!!: motifs & la néce!lité g'une' a1fe..~J:J1ée de, cette nature.
Il, n'écoit pas il1ll:e [ans doute de donner aux Confeils ordinaires de la Communauté, même aux Con{eiIs généraux, !a
•
faculté de faire, une Loi, un Réglement qui couchât tous
[es habitans en particulier, ut jingulos, fans. apporter le con[enrement exprès & tacite de cous; il faut tout au moins
qu'il paroiffe Qu'on s'eLl adreffé à eux pour obtenir ce coo-.
fenremenr.
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é0~fianee quel lés hàblrans on d nné llu·x <konfei s
généraux & à{lX Co-rtfeils' ordinai e~, n'efr-f re1afi"-é qu1auX'
objees d'adminifl:ration: "lui inréreifent l~ fociété eO' corps
& comme ~orps; elle ne peut pas s'etendre', à ce'tI~1 qU'i
leur font' propres & pàrticùl'iers, lX! qui leur appartiennérit
fuoihs èomme memores -de la cité & én concours~ avec
fous les 'autres; qlie èornme lliul & uniques m'aîtries de .la
dîo{e. ' ,
Oh- ne peut pas difcomrenir qu'il s'agiifoit dans le Confeil/de la 'Communauté de Berre de ra·ire un Ré'glemenr {ut!
unlobjet qui int~reifoit 'tous 'lés hnbit3-n> de ln Commun'au ré ,. puifqu'il é,toit -,queHion >de fiker 'le nombre dé' bêteS'
que' chaque'~partitulier pounoir inrroduire' dahs1 fa ' prôpriétê.
La Communauté fe proPO(Oif donc de déliberér fur un objet'
de propriété (ur lequel il falloir- néèefft,iremem qIJ'elle: cof1t.'
fuH~ & 'rapl'foNat- lë vœU" ae tout,es- lés" parties i!,térHfée'S?
Le €dnfeil' draina/re ,? le --Gollfeil-générai> Ife pMvoi con-'
neître d'une pareille matiere; il falloit dono'uh' Confei! de'
tous chefs de)famiÎle, &'s'adreifer à la'Cour 'pdur'obte'nir
la perm:iffion (le le 'ctinvoquer. ee préalable étbit néceifa!rè'
pQur~ valider 1
opératiorl.si! <Jui è devt»e·nt"être·fa ites.'
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ê IPeftlde 'regleQdans réert'è" Freviil~e' que les) ferairis - fbt1~
a{ip;llés ' en Hf l perfer,me' ,~e. l'eurs, S)"ndits da'Às'le~ dé1ib~
ràtion's' brll'ihàires J dès~'Q;omn\:L!'hâu't~srl mais 'Iorf'l'u'il' slag.i~
de' quelque' affaire, e'ù de' ,quelque étabHifement' nol>vèaul qOÏ'
iocéreife tous' les -particuliers,zJtlfiitguMs ~ &n,on~p'aSJfiit!pll:!h\e-bt:'
ut univerfts,Lalors t il' d~~J pas 'ju-fie ~ e ,des 'fdr3-'ir\~J~fëieHf'
repréfe'nté'p?~un'feul' Syndiéi' il§ dl>-iveîït3 être !Ou,; appellêf.!
Il eft! de principe que'Lperidan proeèsJon n'e peue poin
enger J'état des chofe~" lorfqu'il doit en réfulter des inconvéniens & un préjudice irréparable; il el!: même nécef-,
faire, pour l'inrérêt de toures les-parties, ,de ne faire aucurlé
forte d'innovarion pour, évirer une condamnatien de frais
qui pourroir devenir confidérable; elles font toutes égale-J
ment intéreifées à ce qu'il ne foit pas dérogé à· 1',ancie'Q'
�DU PALAIS 'In!: ::l'llovBNel!:
.
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uCagè' jufqu'au' ry,ugem.én~ défulhif. ;S~ da',déLihéra:tioo"'de_ Ja
Communauté de Berre é[Oit exécutée provifoiremenc, &
qu'elle flit -enfuÎte' calfée, cette Communauté Jeroit [oumife
à. des dépens., àl desdommages-inténêts. Le pllir~w.u;li.er,prille '
pendant "un temps .de la fdculté de vèrfer ,;dans [es lernes
une telle quantité de troupeaux, l'attaqueroit avec raifon pour
obtenir l'indemnité que cette privation lui aurait occafioné.
.
Il s'agit dans ce procès d'une oppofirion à une délibération; l'oppofirion relel'ée à ta forme de droit, a de fa nature
un efFet fufpenfif; te Réglement de la Cour de 1703 en: précis
fur ce point, L'art. 113 en: conçu en ces termes: le Réglement de la Cour, au jüjet des annotations générales, qui permet en l'art. 20 de venir par oppojition contre les délibérations des Chapitres & Communautés, fera exécuté felon fa forme
& teneur, & les requêtes d'oppoJition auront le même effet
jù./penfif, que Ji on avoit pris un relief. Ainfi, fait que l'on
examine le titre en lui-même, fair que l'on confulte les
regles & les principes, il eCl aifé de fe convaincre que la
furféance obtenue par le fieur Ricard doir être continuée,
& que ce feroit aller direél:ement contre l'intérêt de la Communauté que de la foulever; ce feroit même alter' contre
fon propre vœu, puifque dans la délibération prife au mois
de Juin dernier, le Confeil général de la Communauré confent de fe défiCler des trois chefs fur lefquels le fieur Ricard
& fes adhérans ont élevé leur conceHation pour évirer
l'événement du procès, pourvu qu'ils falfent abandon des
frais fairs jufqu'alors.
Me. Meriaud conclut à ce qu'il fût ordonné que fur le
fonds & principal il fût pourfuivi ainfi qu'il appartiendroit;
& cependant que fans s'arrêter, à la requêre de la Communauté, dont elle feroit démife & déboutée, le cout en état
de la Cour fût continué, & au moyen de ce qu'inhibitions
& défenfes provifoires fulfent faites à la Communauté de
Berre & à [Ous autres qu'il appartiendroit de mettre la dé-
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libération 11 exécution, jufqu'à ce qu'autrement'fOt 'dit &J
ordonné.
. Arrét du 3 l Juillet 1784, prononcé par Mr. le Prélident.
de Sr. Vincent, conforme aux condulions; la Communauté
fut condamnée aux dépens. Plaidant Mes. Meyfret & Lager.
r
FIN.
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Publication en série imprimée
Description
An account of the resource
Périodiques imprimés édités au cours des 18e-20e siècles et conservés dans les bibliothèques de l'université et d'autres partenaires du projet (bibliothèques municipales, archives et chambre de commerce)
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Journal du Palais de Provence ou Recueil des arrêts rendus depuis les derniers journalistes par le Parlement et la Cour des Aides, 1775-1784
Subject
The topic of the resource
Parlement de Provence
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Adibert, Veuve d'Augustin (17..-179.? ; imprimeur-libraire). Imprimeur / Imprimeur-libraire
Adibert, André (1717-1788 ; imprimeur-libraire). Imprimeur / Imprimeur-libraire
Janety (17..-17..? ; procureur). Éditeur scientifique
France. Parlement de Provence
France. Cour des comptes, aides et finances de Provence (1555-1790)
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Méjanes (Aix-en-Provence), cote F.0768
Publisher
An entity responsible for making the resource available
André Adibert (Aix-en-Provence)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1782-1785
Rights
Information about rights held in and over the resource
domaine public
public domain
Relation
A related resource
Notice du catalogue : http://www.sudoc.fr/196603536
Vignette : https://odyssee.univ-amu.fr/files/vignette/Janety-journal-Palais-vignette.jpg
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
6 Vols.
600 p., 600 p., 588 p., 598 p., 598 p., 600 p.
In-4
Language
A language of the resource
fre
Type
The nature or genre of the resource
text
publication en série imprimée
printed serial
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Provence. 17..
Provenance
A statement of any changes in ownership and custody of the resource since its creation that are significant for its authenticity, integrity, and interpretation. The statement may include a description of any changes successive custodians made to the resource.
Bibliothèque Méjanes (Aix-en-Provence)
Abstract
A summary of the resource.
Jean-Baptiste Janety fut procurateur en la sénéchaussée d’Aix au XVIIIème siècle. Il fut l’auteur d’un Commentaire sur le règlement de la Cour du Parlement de Provence de 1672 publié en 1780 (disponible en ligne). Il publia le Journal du Palais de Provence, mentionné par Camus et Dupin dans leur Bibliothèque choisie des livres de droit aux côtés, entre autres, des œuvres de Boniface, Duvair, Debézieux, ou encore la Touloubre (disponibles en ligne).
Roux-Alphéran dans son ouvrage Les rues d’Aix et Masson dans son Encyclopédie départementale créditent également Auguste ou Augustin Laurent (ou Laurens) comme rédacteur de ce Journal du Palais.
Publié entre 1775 et 1786, ce journal présente de manière chronologique une sélection des arrêts rendus par le Parlement d’Aix ou la Cour des comptes, aides et finances de Provence, commentés par Janety.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
https://odyssee.univ-amu.fr/items/show/88
Description
An account of the resource
Sélection d'arrêts rendus par le Parlement d’Aix et la Cour des comptes présentés par ordre chronologique
Cours des aides -- Provence (France) -- 18e siècle
France Parlement de Provence -- 18e siècle
Jugements -- Provence (France) -- 18e siècle
Provence (France) -- Moeurs et coutumes -- 18e siècle