Paul Petit, professeur à la Faculté des sciences de Nancy et directeur de l'École de brasserie de la même ville (en 1896) nous propose un rapide panorama des produits phares de l'industrie (agro)alimentaire de l'époque, comme le pain, le sucre, les huiles et les graisses, composants de l'alimentation de base.
Difficile d'imaginer que c'est sans rapport avec ses fonctions pédagogiques, qu'il consacre deux chapitres aux boissons alcoolisées : le vin, le cidre, et la bière, d'une part, et les boissons davatange titrées, eaux-de-vie et alcools forts, d'autre part. On notera que les boissons alcooliques sont assimilées à de l'alimentaire (la Guerre de 14-18 renforcera l'idée que le vin est un reconstituant indispensable à la bonne santé des Poilus) et que les trois types de boissons obtenus par fermentation naturelle (vin, cidre, et bière) sont qualifiés d'hygiéniques, contrairement aux produits de distillation (eaux-de-vie et autres alcools).
Bouteille d'Appert (début 19e siècle)
P. Petit achève ce tour d'horizon par les conserves, technique maîtrisée et décrite par Nicolas Apert en 1810 (contrat avec la Marine française). Que mettait-on en boîtes à l'époque ? À côté de produits de base comme les viandes, les sardines et autres poissons, les légumes salés ou confits, on trouve des produits de plus grande valeur ajoutée et qui font partie de la gastronomie française : gibier, foie gras, homard, truffes. Une offre d'épicerie de luxe toujours présente sur le marché national et omniprésente, malgré une forte concurrence, avec les vins et spiritueux sur les marchés d'exportation (les chiffres d'import/export fournis par P. Petit datent tous d'avant la Grande Guerre, de 1913).
Boite de conserve anglaise (N. Appert)
Préoccupé par l'avenir (et les erreurs passées...), P. Petit est au courant des derniers développements de l'agro-alimentaire : depuis quelques années, les bouteilles d'Apert ont tendance à être remplacées par des bocaux en verre et les boîtes de conserve en métal (fer-blanc) se généralisent. À l'opposé de la lyophilisation alors inconnue, les industriels ont imaginé une nouvelle méthode de conservation en desséchant le lait par la chaleur pour le réduire à l'état de poudre. Une technique encourageante qui peut s'appliquer également au lait écrémé, voire même au petit lait et permettre de fabriquer des oeufs en poudre : l'avenir de l'agro-alimentaire, tout juste naissante, s'anonce particulièrement radieux...]]>