Ces rapports d'activité ont pour mission de présenter au Grand Conseil de la Tunisie (créé en 1922) le budget annnuel engagé par l'administration du Protectorat : comme pour tout exercice comptable, ils exposent les recettes et dépenses de l'année en cours, les prévisions budgétaires de l'année à venir et la réalisation budgétaire effective (en général, l'année n-1 , parfois l'année n-2).
Les bilans statistiques annuels peuvent difficilement éviter un certain aspect rébarbatif mais toutes ces données purement quantitatives et comptables présentent un triple intérêt dans la mesure où elles livrent :
- un état des lieux matériel et financier précis et évolutif de la Tunisie sous domination française
- le périmètre (très stable) des compétences du protectorat (finances publiques, communications, justice, agriculture, commerce, colonisation, intérieur, éducation,... sauf l'armée)
- des informations éparses, parfois de simple portée locale, qui renseignent beaucoup sur la vie quotidienne des tunisiens : par ex. pour 1934, nous savons que les maraîchers utilisent les semences provenant de la Métropole et approvisionnement bien le marché local, que l'emploi des superphosphates se généralisent pour la culture des fèves, que la lutte annuelle contre les sauterelles et les criquets dure tout le mois de mai, et qu'il faut intensifier la fixation des dunes pour protéger les ressources en eau et stopper la progression du désert...
Si les rapporteurs (du monde entier) entretiennent une tendance à embellir les statistiques supposées répondre aux attentes de leurs commanditaires ou des décideurs politiques (ici, la hiérarchie), ils laissent passer quelques commentaires plus critiques comme cette note du bilan de 1930 qui explique, respectueusement mais sans détour, qu'il est impossible de régler les questions foncières indigènes avec seulement quelques agents alors qu'elles concernent plus de 25% du territoire !
Quelques trop rares tableaux proposent l'évolution des chiffres sur plusieurs années : dans la période considérée ici, parce que limité à l'exercice comptable par nature annuel, on regrettera l'absence de compilations sur de plus longues séquences qui permettraient de mieux comprendre les orientations d'une administration coloniale et les mutations de fond qui ont façonné une économie nationale qui ne jouissait pas de sa totale souveraineté.
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Cette collection a été numérisée avec le soutien financier de la Bibliothèque Nationale de France qui en assure une diffusion nationale sur sa bibliothèque numérique Gallica. Qu'elle en soit ici grandement remerciée.
La section des Travaux publics est la rubrique la plus étoffée : elle offre un bilan extrêmement détaillé des infrastructures comme les routes (dont les routes de colonisation !), les ouvrages d'art, les ports maritimes et aériens, les stations océanographiques, l'hydraulique agricole et urbaine, les réseaux d'assainissement, les constructions civiles, les chemins de fer et les tramways, les services des mines et les services météorologiques...
Pour des raisons techniques, les tableaux statistiques présentés en double page ont été rassemblés en fin de volume, un signet y renvoie.
Pour y parvenir, un seul remède : la science, qui a pour but de faire connaître l'histoire, la géographie, l'agriculture, le commerce et l'industrie des pays d'outre-mer. Et pour réussir, une seule méthode : revoir l'organisation et le contenu de ces enseignements si indispensables aux nations colonisatrices et s'appuyer sur les outils, les lieux et les institutions qui ne manquent pas : les écoles, les musées de l'éducation nationale, les musées d'histoire naturelle et, bien sûr, les musées coloniaux qui ont fleuri dans toute la métropole : Marseille, Nancy, Lyon, Bordeaux, Nantes, ...
Le détail des cours donnés par ces instituts nous indique qu'E. Heckel se tient bien informé de l'offre existante et pas seulement en France : davantage sources d'inspiration que sources d'inquiétude, les formations à l'étranger sont moins des concurrences menaçantes que des expériences intéressantes : Angleterre, Allemagne, Belgique, Anvers, Congo, Vilvorde, Mons, Hollande, Haarlem, Italie, Naples, San-Demetrio Corona, Turin, Florence, Russie, Portugal, Espagne. L'enseignement colonial, une idée pas toujours partagée, mais qui s'impose à tous les pays colonisateurs...
Si la métropole attache tant d'importance au développement de ses colonies, c'est qu'elle prend conscience que ses territoires d'outre-mer ne sont pas seulement des réservoirs de richesses plus ou moins dociles mais aussi un espoir de nouveaux débouchés dans un monde qui s'annonce de plus en plus concurrentiel.
Quant au progrès apporté par les colons au cours des années 1900-1905 et annoncé dans le sous-titre, bien des autochtones ont dû penser que les bonnes intentions des uns peuvent devenir un enfer pour les autres...
]]>1. Chronologie de Marseille - Wikioédia
2. Le Grand port maritime de Marseille - Wikipédia
3. Le port de Marseille entre 1850 et 1914, témoignages d’un temps révolu - Le Stéréopôle, l'univers des images stéréoscopiques
ANNUAIRE ILLUSTRÉ DU ''MIDI-COLONIAL ET MARITIME'' POUR 1923-1924
Couverture du Bulletin Office Protectorat tunisien (1921)
Les charmes de Tunis n'effacent pas la réalité du contexte : la Tunisie est toujours proposée sous forme de lots de colonisation, littéralement vendue en tranches et les terres sont mises en vente au profit des futurs colons qui souhaitent s'installer. Nous sommes bien dans le cadre d'un protectorat, régime où l'administration coloniale maintient formellement quelques institutions natives du pays protégé (1). L'attitude des deux personnages est sans équivoque sur le rôle de la France : c'est le jeune européen (l'écolier) qui instruit l'enfant indigène, et non l'inverse. Que pourrait donc bien enseigner un autochtone ?1. Protectorat français de Tunisie - Wikipédia
]]>Au milieu des années 1920, la France, affaiblie par le 1er conflit mondial, voit dans ses colonies l'espoir d’un redémarrage économique rapide. Dans les échanges avec la métropole, l’Afrique y tient, et de loin, la première place avec 68% des valeurs du commerce extérieur (en 1926, l'Indochine vient juste de dépasser les 12% de ce total).
Probablement en raison de leur proximité géographique et de l'ancienneté de leur occupation par la France, l'Algérie, la Tunisie et le Maroc réalisent 60% des exportations et 52% des importations de toutes les colonies, l'Algérie à elle seule 38% des importations et 36% des exportations en valeur. Situation qui favorise considérablement le port de Marseille. Au delà de cet avantage compétitif local, réunir ces données est un préalable capital à toute politique économique coloniale selon l'Institut Colonial.
Pourtant l’équation est d’une grande simplicité : pour chaque produit, il suffit de comparer le chiffre des quantités totales qu'elles exportent et celui des quantités que la Métropole leur demande complété de celui de ce qu'elle importe de l'étranger. L’écart entre les deux montre le besoin réel de la Métropole, sauf s’il existe des raisons qualitatives objectives de vouloir importer de l’étranger des denrées que l’on produit déjà.
Les bilans peuvent être excédentaires : obliger les colonies à exporter la totalité de leur production vers la Métropole est une mesure simpliste qui pouvait prévaloir pendant la guerre mais ne se justifie plus aujourd’hui. A l’inverse, la balance peut être déficitaire et la France doit alors en tirer les conséquences.
Par exemple, en 1926, le ratio importation des colonies françaises / importation de l'étranger est excellent pour certaines denrées (les colonies couvrent 100% des besoins en vanille, 87% pour l'arachide, 92% pour le manioc) alors que le taux de couverture est totalement désastreux pour d'autres : 98% des importations de coton proviennent de l'étranger, 97% pour le café, 92% pour la laine, 87% pour le riz, et que dire du sucre, des peaux, ou du coprah...
L’Institut Colonial reste fidèle à sa doctrine : le développement des colonies doit s’appuyer sur une expertise scientifique. Les statistiques ne sont pas une fin en soi, comme le sont les rapports officiels du Ministère des Colonies, mais doivent servir de guide aux actions correctives à apporter à l’économie : en cas d'écart considérable entre le besoin d'une denrée et sa production, si les chiffres ne résolvent pas les problèmes, ils donnent au moins toutes les bases pour calculer objectivement les investissements nécessaires en matière de surfaces, de capitaux, de main d’œuvre et de moyens de transports pour rééquilibrer la balance. CQFD.
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Note : les Archives nationales d'outre-mer et la Responsable de sa bibliothèque, Sylvie Pontillo, ont prêté ces précieux documents à Aix-Marseille Université pour leur numérisation, leur diffusion en ligne et leur valorisation scientifique. Que cette grande confiance soit ici chaleureusement remerciée.
2ème partie - Les produits
Le Blé
Le Riz
Manioc, Arrow-Root et Sagou
Les Matières Grasses
Le Café
Le Cacao
Le Thé
Le Sucre
Les Poivres et Piments
Les Bananes, Oranges et Citrons
Le Tabac
Le Caoutchouc
Le Coton
La Laine
Le Jute
La Soie
Les Cuirs et Peaux
Les Bois
Jusqu’à cette époque, le chargement et le déchargement des navires accostant à Marseille sont confiés à la Société des portefaix, littéralement porteurs de fardeaux, une corporation bâtie sur l'esprit de solidarité. Les portefaix, et plus encore les maître-portefaix, bénéficient de salaires élevés, ont un rang social reconnu et entretiennent de véritables dynasties familiales, certaines multi-centenaires. Il ne s’agit pas là d’une particularité marseillaise : la plupart des ports connaissent ce type d'associations corporatistes, comme à Gênes (1), associations qui étonnamment ont survécu à la loi Le Chapelier qui les avait pourtant supprimées 70 ans auparavant. Forte de ses privilèges et prospère, la confrérie était maitresse des quais de Marseille : elle jouissait du monopole du pesage, étendu par la suite au portage des marchandises à toute la ville.
L’apparition des docks-entrepôts en France va marquer un tournant dans la gestion portuaire : après la création du premier entrepôt de ce type en 1844 au Havre, un second suivra à Paris puis à Marseille en 1864 (2). La Compagnie des docks et entrepôts, le Dock, est un établissement public qui a pour rôle de simplifier et d’accélérer les opérations commerciales liées aux tâches de manutentions portuaires, ce qui veut dire aussi de les rendre plus expéditives et plus économiques (3).
Pour la Confrérie des portefaix, l’obligation d'entreposer les marchandises dans les entrepôts du Dock est un casus belli : elle est accusée de tuer la liberté du travail. Conflit d’autant plus mal vécu que certains membres quittent alors la Société pour rejoindre le Dock. Mais cette rivalité administrative occulte une évolution plus préoccupante : la concurrence permanente des robeirols (ou crocheteurs) et l’érosion de son monopole quand les minotiers décident de ne plus faire appel à ses services pour la manipulation du grain.
Charles de Ribbe affirme vouloir rester impartial et se limiter à comprendre l'origine de la Société et son fonctionnement : mais en fait, il prend fait et cause pour une corporation qui mérite le label, très nostalgique, de vieille confrérie provençale. Le second rapporteur n’est pas en reste et réfute les accusations portées sur la Société des Portefaix, qui profitant de son prétendu monopole, ne serait ni performante ni bon marché.
Il est clair aujourd’hui que cette polémique met en lumière une évolution plus fondamentale, celle de la modernisation de l'outil industriel et de l’activité du port elle-même dont le Dock est l’acteur central : son extension avec ses nouveaux entrepôts, la mise en circulation de plus gros cargos, l’arrivée du chemin de fer, l’application de tarifs préférentiels pour les minerais, les investissements dans de nouveaux outillages (grues hydrauliques à vapeur, par ex.) qui annoncent l’émergence d’un complexe maritime-portuaire-ferroviaire (2) très intégré à la recherche d’une productivité élevée : peu compatible avec un modèle clientéliste, incapable d’évoluer vers les nouvelles formes de syndicalisme. Après la période faste avec un taux de syndicalisation de plus 90%, la profession évoluera considérablement avec la généralisation mondiale de logistiques ultra-performantes et très automatisées (porte-conteneurs) : les dockers sont aujourd’hui majoritairement des ouvriers professionnels salariés mensualisés dans des entreprises de manutention.
A partir de 1928 et jusqu’à la décolonisation, les 52 Chambres de Commerce françaises implantées dans les pays qui bordent la Méditerranée se réunissent tous les ans à Marseille (elles sont entre 20 à 30 à y participer réellement), passage obligé des personnes et des biens qui remontent vers les pays nord-européens : à leur congrès sont invités les représentants des grands secteurs (agriculture, commerce, industrie, structures portuaires) impliqués dans le développement économique du bassin méditerranéen.
Après les destructions de la guerre et les illusions d’une nouvelle prospérité apportée par la paix revenue, la paralysie du commerce international est perçue comme la principale cause de la grande dépression économique (c'est tout au moins l'analyse qu'en fait ce réseau consulaire) : l’Europe retrouve une fois de plus la réalité d’un monde angoissé.
Au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale (1946), les Chambres de Commerce métropolitaines et nord-africaines, face au nécessaire redressement économique des pays méditerranéens, sont convaincues que si l'Afrique doit venir en aide à la métropole, la collectivité impériale doit prendre également sa part au développement de l'Afrique française. Et de rappeler aussi que certaines d'entre-elles connaissent des situations difficiles, entravant leur mission de promotion de l'activité économique et d'aménagement du territoire.
Les documents originaux des 10 conférences présentées ici proviennent du fonds d'archives de la CCI métropolitaine Aix-Marseille-Provence (CCIAMP). AMU l'en remercie chaleureusement.
9ème Conférence - 1934
11ème Conférence - 1936
12ème Conférence - 1936
17ème Conférence - 1941
18ème Conférence - 1946
24ème Conférence - 1949
26ème Conférence - 1951
Elle faillit pourtant bien disparaître : en 1791, dans le sillage de la loi Le Chapelier, elle est assimilée à une corporation et supprimée comme toutes les autres chambres consulaires commerciales. Elles seront reconstituées dès 1802.
Au cours des 19e et 20e siècles, elle jouera un rôle majeur dans la définition et la réalisation de nombreuses infrastructures nécessaires à la vie économique, industrielle et commerciale de la région.
Rebaptisée Chambre de commerce et de l'industrie métropolitaine Aix-Marseille-Provence (CCIAMP), elle fait partie aujourd'hui d'un réseau national (créé en 1898) de 126 établissements chargés d’importantes missions en matière de soutien aux entreprises, d’aménagement du territoire et de formations (4).
Héritière d'une longue histoire, la CCIAMP a la responsabilité de veiller sur 3 patrimoines remarquables : son siège, le Palais de la Bourse, situé si symboliquement à quelques encablures du Vieux Port, son musée de la Marine et son centre de documentation qui abrite un fonds d’archives exceptionnelles et qui attire des chercheurs du monde entier. La bibliothèque numérique patrimoniale Odyssée a l’immense privilège de pouvoir numériser et exposer certains de ces documents si importants dans l’histoire économique de la ville et de l’université d’Aix-Marseille avec qui elle entretient des liens très étroits depuis le début du 20e siècle.
Mais il présente l'intérêt de ne pas suivre l’hostilité de l'administration aux zones franches (raison du double rejet de ce texte) pour qui la prospérité de Hambourg, Copenhague, Trieste ou Gènes n’a rien à voir avec leur statut de ports francs mais à leur situation géographique, au perfectionnement de leur outillage et au développement de leur arrière-pays. Et inversement, Anvers et Rotterdam, qui ne sont pas des ports francs, sont parfaitement prospères.
La vraie question est donc celle plus politique de la conception protectionniste du commerce que partagent l'Allemagne, l'Italie et la France : la Hollande, l'Angleterre et la Belgique n'ont pas de ports francs ? La belle affaire, ces pays sont tout entier des zones franches ! Pour la Chambre de Commerce, la cause est entendue : ce qu’il manque à la France, et à Marseille en premier lieu, ce sont ces zones franches portuaires, libérées de contrôles douaniers contraignants, véritables outils des réexportations. Sous réserve que la France soit toujours intéressée par le commerce extérieur...
Si l’histoire n’a pas démenti cette vision très libérale, les ports francs, aujourd’hui transformés en gigantesques zones d’entrepôts, renforcés pour certains de coffres-forts abritant des collections de valeur, ne vont pas sans soulever des questions au sujet de leur opacité et de leur support possible aux trafics illégaux.
Réfs
- Port franc, Wikipédia
- Port franc, Encyclopædia Universalis
Jules Charles-Roux (1841-1918)À l'Exposition universelle de 1900, Charles-Roux avait créé une section des colonies et en 1906, il avait organisé la première Exposition coloniale de Marseille dont il fut le commissaire général, assisté d'Édouard Heckel, son adjoint. L'énorme succès de l'évènement (la seule grande exposition bénéficiaire) lui vaudra de nombreux honneurs et une très grande autorité en matière coloniale.
Une promesse de la Chambre des députés (1933)A l'opposée des années 1920, pleines de confiance dans l'avenir, les années 1930 amènent leurs lots d'inquiétudes et d'interrogations face aux périls du monde extérieur et se traduisent par une question pleine de pessimisme : avons-nous réellement une politique économique, que l'on peut comprendre également comme : avons-nous réellement une politique coloniale ?
Une Europe des colonies : une proposition jugée peu sérieuse (1933)
Une prise de conscience tardive malgré de nombreux signaux d'alerteSi des crédits supplémentaires peuvent résoudre temporairement les déficits budgétaires, ils ne suffiront pas à endiguer un malaise grandissant et qui dépasse le seul cadre économique.
L'Afrique du Nord : un révélateur de l'état d'esprit de l'Empire colonial ?
Pendant que l'Académie des Sciences coloniales tient des conférences sur la "mission civilisatrice" de la France et que la métropole poursuit ses investissements dans les infrastructures lourdes (routes, électrification, lignes de chemins de fer, radiophonie, hôpitaux, etc...) faites pour le long terme, le sénateur Manfroni rappelle cette définition qui a été donnée des colonies : « des fruits qui se détachent de l'arbre qui les a nourris, à peine ont-ils atteint la maturité ». Et d'ajouter : « Aujourd'hui prédomine chez ces peuples un sentiment croissant d’intolérance de la domination européenne, plus ou moins vivement ressenti et exprimé, mais dont les symptômes sont assez préoccupants" (n° 1352 du 15 juin 1933).
Notre collection s'achève sur l'année 1936 (le Journal des colonies cessera définitivement de paraître en 1939) qui fait une large promotion de l'Exposition Internationale de Paris de 1937 au titre enthousiaste "Exposition des Arts et Techniques dans la Vie moderne". Et qui rappelle que dans un idéal commun, "la France totale est faite d'infinies nuances...".Journal des colonies illustré - Carte de l'EmpireLe nouveau frontispice de la revue, qui a remplacé l'ancien représentant des monuments tropicaux hautement symboliques, annonce sans détour que la France se situe bien au coeur de son empire colonial. Coïncidence, le planisphère la situe aussi au centre du monde : les biais de la cartographie, sans doute...
Journal des colonies illustré - FrontispiceParadoxe, à l'heure où la revue paraît avec un titre enrichi du terme "illustré", la gravure haut en couleur fait place à une version monochrome assez assombrie, conforme aux restrictions du moment et très éloignée des chaudes tonalités exotiques.
Journal des colonies illustré - le pont de Caronte (cliché 1915)
Assurer la liason entre l'Étang de Berre et la Méditerranée aux navires à haut tirant d'air
Déchargement des céréales (port de Marseille, 19e siècle)
Déchargement des huiles (port de Marseille, 19e siècle)
Le hall d'exposition de la Section métropolitaine (Grand Palais, 1922)Contrairement à d'autres publications parallèles et publiées à la même époque, les nombreuses illustrations présentées dans l'édition de 1922 du journal "L'économiste colonial illustré", montrent davantage de photographies prises sur le terrain que de clichés des palais ou des stands de l'Exposition. Elles en font un témoignage intéressant et complémentaire aux publications plus officielles.
Un centre d'apprentissage à Conakry (Guinée)
Un quai d'embarquement de marchandises à Lyndiane (Sénégal)]]>
Les paquebots à vapeur, moyen le plus sûr pour se rendre dans les colonies
Le tramway, transort le plus rapide pour se rendre à l'Exposition coloniale de Marseille de 1922
Le Palais de l'Exportation, un rôle central dans l'économie coloniale
Saint-Louis Sucre, une marque toujours en activité et présente à toutes les expositionsEn 1920, le port de Marseille a reçu plus de 4 millions de tonnes de marchandises et en a exportées plus de 2 millions : assurant 1/3 du commerce colonial français, la ville n'a jamais autant méritée sont surnom de métropole coloniale.
(universelles, internationales et coloniales)
le destin national d'une exposition locale
de la pose de la première pierre |
à l'inauguration officielle |
1913 |
1919 |
1921 |
En 1913, la 1ère grande Exposition coloniale de 1906 est encore très présente dans la mémoire des marseillais qui se souviennent encore comment elle avait été conçue : un Grand Palais de l'Exportation complété de deux annexes : la section de l'art provençal (Musée Longchamp) et le Palais de Marseille et de la Provence (Art et histoire). Y était présentée l'histoire de la matière grasse sous tous ses aspects, scientifique, industriel et commercial, sachant que les corps gras constituent depuis des siècles la source principale et traditionnelle de la richesse industrielle locale : huileries, bougies et glycérines.
Convaincu de l’action humaine et civilisatrice quelle mène dans ses colonies, la France veut montrer à ses nationaux et aux étrangers tout ce que les colonies lui apportent : elles sont donc invitées à participer à une seconde Exposition, beaucoup plus ambitieuse que la précédente, et basée sur une double organisation géographique et thématique qui sera confiée à Jules Charles-Roux qui a déjà présidé celle de 1906 (il décèdera en 1919 et sera remplacé par A. Artaud).
Le JO proposé ici est un authentique journal de bord, quasi au quotidien, de la conception et de la construction de l’Exposition, de la première pierre jusqu’au denier jour précédent sa fermeture, des meilleurs jours jusqu’aux petits différends : destiné à faire connaître au plus grand nombre l’état de l’avancement des travaux (chaque grande colonie se voit construire un véritable palais en contrepartie d'objets d'art ou quotidiens), il est imprimé sur un papier glacé de luxe et illustré de très nombreuses photographies (monochromes de qualité), loin du standard de la presse classique.
Avec ses 10 millions de km² (presque 25 fois la surface de la métropole), l'Empire colonial permet aussi à la France de rappeler à l’Allemagne, dénoncée comme étant « pangermaniste », qu’elle n’est ni défaitiste ni sur le déclin démographique (de fait, sa population double). Ne pouvant oublier l’engagement des troupes coloniales, Albert Sarraut rendra un hommage appuyé aux locaux (1921) «Pour nos Frères de Couleur » en faveur des indigènes qui représenteront leurs territoires respectifs ou qui viendront visiter l’Exposition (par chance, le calendrier la cantonne aux plus beaux mois de l’année).
Parallèlement à l’Exposition, sont ouverts des stands et des salons plus spécialisés et se tiennent des congrès coloniaux consacrés à quatre grandes thématiques : Santé, Production, Outillage et Organisation. Une synthèse révélatrice des préoccupations majeures de l’administration française.
L'agriculture coloniale y tient une place de choix (le JO rappelle la crise du caoutchouc de 1914) et c’est tout naturellement que l'Institut Colonial de Marseille, qui s’était illustré par la création d'un Laboratoire d'Études des Céréales et Plantes Féculentes (1914) et ses travaux sur le palmier à huile (1921), se voit chargé par A. Artaud (commissaire général de l'Exposition) de l'Exposition du matériel agricole.
L’Empire colonial couvrant de grandes surfaces océaniques (suite au nouveau mode de calcul de 2018, la France revendique aujourd’hui le second domaine maritime avec ses près de 11 millions de km², juste derrière les États-Unis), un Palais de la Mer Coloniale s’imposait et fera dire à ses organisateurs : « l'Exposition Coloniale doit être la source d'un enseignement colonial permanent. Il faut que dans tous les ports français, des musées coloniaux soient créés, rappelant la richesse de nos colonies et les débouchés qu'elles offrent à notre commerce et à notre industrie ».
Le JO étant d’abord un organe de presse à destination de la presse, de nombreux journaux couvrent l’évènement : le journal leur rendra hommage en toute fin d’exposition en offrant au public une galerie de portraits des directeurs de publication présents sur le site. La publicité n’est pas un accessoire et c’est elle qui assurera le retentissement de l’évènement : une véritable propagande est organisée, jusque dans les écoles, et, progrès technique oblige, l’Exposition promeut un Cinéma lntercolonial.
L’Exposition connaîtra un très grand succès, local, national et même international, auprès des autorités belges, par ex. : les politiques doivent s’y montrer, les Présidents de la République française n’y manqueront pas, et les maréchaux héros de 14-18 en feront tous la visite, très largement médiatisée et relayée dans le JO, entourés d’officiels, sinon obséquieux, tout au moins très déférents.
Inquiets de son futur succès, les organisateurs alertent très tôt la ville de Marseille sur l'accueil des visiteurs et la possible crise du logement. Les accès ne sont pas en reste : l'Avenue du Prado, chaussée défoncée et pleine de fondrières tant redoutées par les automobilistes même les plus intrépides, est entièrement refaite et reçoit un revêtement d’un bleu du plus bel effet.
L’Exposition prend alors des airs de fête et à côté des animations, des tables populaires gratuites sont installées pour permettre aux moins fortunés d’y organiser leur propre pique-nique et de pleinement profiter de l'abonnement qu’ils ont pu prendre pour toute la durée de l'Exposition.
Une nouvelle offre apparaît : le tourisme. Mélange de technique et d’audace, on propose alors des croisières en hydravions jusqu’à Monaco. Le tourisme exotique aux Colonies pourrait aussi séduire les classes plus aisées et aventurières : la France a les moyens de vous faire voyager aux quatre bouts de monde : ne seriez-vous pas tenté par une croisière aux Antilles ou dans le Pacifique ?
Comme l’Exposition pense à tout, les tables à manger en témoignent, elle n’a pas oublié les Français plus modestes qui n’ont pas la possibilité de partir dans les îles : un stand propose donc des articles de camping (le tourisme à la ferme !) et le très fréquenté stand du tourisme, qui fait la promotion de nos belles régions de province, souligne, en feignant de ne pas en saisir toute la possible ambivalence, combien la France métropolitaine est assurément « la Maison du Bonheur ».
Peu avant de fermer ses portes, naissent déjà les projets d'une foire coloniale et d'un jardin colonial. A suivre…
]]>Le Second Empire colonial français (1919-1939)
Cochinchine - Culture de cannes à sucre sous hévéas (1923-1924)Allier culture traditionnelle et expériences agronomiques : introduction d'une double culture hévéas / cannes à sucre pour une double récolte. Un exemple où l'exploitation rationnelle et scientifique de terres devenues agricoles se substitue aux cultures indigènes. Un des très rares documents photographiques qui n'apparaîtront que dans le Tome 1 de cette collection.]]>
La devise de l'Académie des sciences coloniales (1925-1938]]>