1
200
13
-
https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/1048/Paris-T-6516_Mangean_Condtions-travail-enfants.pdf
1d0cb883d87e4029352cdf06c22ab6fb
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Monographie imprimée
Description
An account of the resource
Ouvrages imprimés édités au cours des 16e-20e siècles et conservés dans les bibliothèques de l'université et d'autres partenaires du projet (bibliothèques municipales, archives et chambre de commerce)
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
conditions du travail des enfants dans les petites industries de l'alimentation (Les)
Subject
The topic of the resource
Droit du travail
Droit social
Industries agroalimentaires
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Mangean (P.). Auteur
Université de Paris (1896-1968). Faculté de droit et des sciences économiques. Organisme de soutenance
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence), cote PARIS T 6516
Publisher
An entity responsible for making the resource available
impr. Arhtur Rousseau, (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1910
Rights
Information about rights held in and over the resource
domaine public
public domain
Relation
A related resource
Notice du catalogue : https://www.sudoc.fr/054423856
Vignette : https://odyssee.univ-amu.fr/files/vignette/Paris-T-6516_Mangean_Condtions-travail-enfants_vignette.jpg
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
1 vol.
303 p.
In-8
Language
A language of the resource
fre
Type
The nature or genre of the resource
text
monographie imprimée
printed monograph
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
https://odyssee.univ-amu.fr/items/show/1048
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
France. 19..
Abstract
A summary of the resource.
Thèse de doctorat : Droit : Paris : 1909-1910 ; 238 (Thèse)<br /><br />Le 19e siècle n'a pas le triste privilège d'avoir inventé le travail des enfants : dans les pays qui commençaient à s'industrialiser, il l'a seulement généralisé à toutes les industries où le travail n'exigeait pas d'être très qualifié ni de porter de lourdes charges. Une embauche qui entraînait les familles ouvrières dans une spirale de paupérisation : les salaires versés aux plus jeunes étaient très faibles parce que le patronat les considérait comme des ressources complémentaires, ce qui les motivaient encore moins (pour autant qu'ils auraient pu l'être) à augmenter le salaire des adultes. Avec comme autre conséquence que le travail des enfants était ressenti comme une nécessité presque naturelle.<br /><br />Si on évoque souvent le travail des enfants dans les secteurs miniers et textiles, les industries agroalimentaires ne sont pas en reste, notamment tous les métiers de bouche tels les charcutiers, bouchers, boulangers, pâtissiers, cuisiniers (les marmitons) qui, dans un cadre industriel, transforment la matière pour les besoins du consommateur, objet de la présente étude (à partir des dernières décennies du 19e siècle, les doctorants en droit s'intéressent de plus en plus souvent aux législations sociales et industrielles nouvellement enseignées en France).<br /><br />
<div><img src="https://odyssee.univ-amu.fr/files/thumbnails/travail-enfants_19e.jpg" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></div>
<div style="text-align: center;"><em>Le travail des enfants au 19e siècle</em></div>
<br />Dans son introduction, l'auteur prend la défense des enfants sur le plan juridique puisqu'il rappelle que l'abus de leur force de travail, aggravé par de mauvaises conditions d'hygiène, était déjà dénoncé en 1896 à la Chambre des Députés alors qu'il était encadré par la législation depuis 1841 et que la loi du 2 novembre 1892 "<em>sur le travail des enfants, des filles mineures et des femmes dans les établissements industriels</em>" prévoyait des règles administratives bien définies (la journée de travail étant fixée à 11 heures !).<br /><br />Sans compter que certaines professions, boulangers, pâtissiers, restaurateurs, par ex., argumentant sur la nature <em>industrielle ou domestique</em> de leurs activités, obtiennent rapidement des dérogations à l'interdiction du travail de nuit (embauche à 3 heures du matin et non à 5 heures). Les années suivantes, les organisations syndicales patronales et les syndicats ouvriers ne cesseront de s'opposer sur le périmètre des lois de 1892, 1893 et 1894... et de remplir la <em>liste interminable</em> des désidératas et des textes qui encadrent l'activité des petites industries de l'alimentation. <br /><br />En ce début du 20e siècle, le constat est sans appel : la réglementation est toujours aussi faible et de moins en moins respectée en raison du nombre insuffisant d'inspecteurs. Comme le souligne une enquête sur le travail dans les usines en 19e siècle (1), "e<em>n 1900, 1 534 procès-verbaux furent dressés pour violation de l'interdiction du travail de nuit, mais, </em><em>en 1904, 22 130 nuits étaient autorisées, par l'administration, dans des conserveries</em>". En clair, une régression sociale dûe à l'illégalité ou totalement légale puisque arrachée à l'administration par voies dérogatoires et validée par décisions du Conseil d'État, un comble.<br />
<div style="text-align: center;"><br /><img src="https://odyssee.univ-amu.fr/files/fullsize/manufacture-tabacs-USA.jpg" /><br /><em>Une question mondiale. Manufacture de tabacs (USA, début 20e siècle)<br /><span class="fs-legende">Lewis Hine, début 20e. Musée d'Orsay, Paris. © RMN - Grand Palais / J.G. Berizzi</span><br /></em></div>
<br />Aspect pour le moins paradoxal, les familles embauchées dans ces industries consacrent de moins en moins de moyens et de temps aux repas (3) : on désapprend à préparer des repas élaborés, à transmettre le patrimoine gastronomique des générations précédentes, à donner une éducation du goût, bref à faire de la "<em>vraie cuisine</em>". On déjeune sur place, dans l'atelier, le plus rapidement possible (une seule pause autorisée) et, s'il reste un peu d'argent, les restaurants abordables deviennent le cadre de quelques repas familiaux importants (en milieu urbain). Si elle n'était tragique (5), cette histoire sociale, où misère économique et enfance volée se conjuguent (6), ajoute un aspect cruellement ironique : davantage encore que les adultes, les enfants ont tendance à expédier leurs propres repas pour pouvoir jouer un peu avant de reprendre le travail !<br /><br /><br />1.Gillet, Sophie. - Le travail des enfants Bref aperçu historique général. - <a href="https://perso.helmo.be/jamin/euxaussi/famille/travenfg.html" target="_blank" rel="noopener">https://perso.helmo.be/jamin/euxaussi/famille/travenfg.html</a><br />2. Les enfants au travail dans les usines au 19e siècle. - <a href="https://www.google.com/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&cad=rja&uact=8&ved=2ahUKEwiGkdr27JyBAxWbUKQEHboaArUQFnoECBQQAQ&url=https%3A%2F%2Fwww.icem-pedagogie-freinet.org%2Fsites%2Fdefault%2Ffiles%2F172_Travail_Enfants.pdf&usg=AOvVaw2BpIleSxr6PhzGrvm48uNA&opi=89978449">https://www.google.com/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&cad=rja&uact=8&ved=2ahUKEwiGkdr27JyBAxWbUKQEHboaArUQFnoECBQQAQ&url=https%3A%2F%2Fwww.icem-pedagogie-freinet.org%2Fsites%2Fdefault%2Ffiles%2F172_Travail_Enfants.pdf&usg=AOvVaw2BpIleSxr6PhzGrvm48uNA&opi=89978449</a><br />3. Scholliers, Peter. - Le temps consacré à l’alimentation par les familles ouvrières en Europe aux 19e et 20e siècles - OpenEdition Books - <a href="https://books.openedition.org/editionsmsh/8136?lang=fr" target="_blank" rel="noopener">https://books.openedition.org/editionsmsh/8136?lang=fr</a><br />4. Didry, Claude- L’enfant-machine Note sur la fabrique et la machinerie dans Le Capital. - Cairn - L'Homme & la Société 2017/3 (n° 205), pp. 133-151 - h<a href="ttps://www.cairn.info/revue-l-homme-et-la-societe-2017-3-page-133.htm" target="_blank" rel="noopener">ttps://www.cairn.info/revue-l-homme-et-la-societe-2017-3-page-133.htm</a><br />5. Bourdelais, Patrice. - L'intolérable du travail des enfants. Son émergence et son évolution entre compassion et libéralisme, en Angleterre et en France. - Cairn - Les constructions de l'intolérable (2005), pp. 91-109 - <a href="https://www.cairn.info/les-constructions-de-l-intolerable--9782707145109-page-91.htm" target="_blank" rel="noopener">https://www.cairn.info/les-constructions-de-l-intolerable--9782707145109-page-91.htm</a><br />6. Des statisiques belges ont montré qu'au début du 20e siècle, les enfants de moins de 15 ans constituaient jusqu'à 1/3 des effectifs de certaines industries des pays européens les plus engagés dans la révolution industrielle. Données pour le moins étonnantes quand l'on songe qu'à partir de 1882, l'école était supposée obligatoire en France jusqu'à l'âge de 13 ans. L'apprentissage professionnel aura au moins eu le mérite d'augmenter le niveau de qualitification de certains adolescents et de retarder leur entrée dans la vie active. Au début du 20e, hors économie souterraine, une estimation basse évalue à 250 millions dans le monde le nombre d'enfants au travail. N'étant pas toujours assimilé à de l'esclavage, ce travail forcé n'est pas formellement inscrit dans la liste des crimes contre l'humanité.<br /><span class="fs-legende"><br /></span>
Provenance
A statement of any changes in ownership and custody of the resource since its creation that are significant for its authenticity, integrity, and interpretation. The statement may include a description of any changes successive custodians made to the resource.
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence)
Table Of Contents
A list of subunits of the resource.
Sommaire
Introduction
Chapitre 1 - Règlementation légale actuelle
Chapitre 2 - Ce qui existe dans l'alimentation (La vie et le travail des enfants)
- Pâtissiers, cuisiniers
- Boulangers
- Pâtissiers dans les boulangeries
- Bouchers
- Charcutiers
Chapitre 3 - Ce qui a été proposé et tenté
- Action parlementaire (projets et propositions de lois)
- Oeuvre de l'initiative privée
Chapitre 4 - Ce qui reste à faire
Bibliographie
Table des matières
Description
An account of the resource
Quand on est pas riches, les enfants, c'est bien, mais c'est beaucoup de petites bouches à nourrir. Les enfants, c'est bien aussi parce que ça fait plein de petites mains pour travailler. Et dans les métiers de bouche, le travail ne manque pas !
Conditions de travail -- France -- 19e siècle
Conditions de travail -- France -- 20e siècle
Enfants -- Travail -- Droit -- 20e siècle
Métiers de l'alimentation -- Droit -- France -- 20e siècle
Travail de nuit -- Droit -- France -- 20e siècle
-
https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/1019/Mejanes-JP-131-34_Ribbe_Corporations-ouvrieres.pdf
fd510e66f3d8d99a7c82c265f174ac14
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Monographie imprimée
Description
An account of the resource
Ouvrages imprimés édités au cours des 16e-20e siècles et conservés dans les bibliothèques de l'université et d'autres partenaires du projet (bibliothèques municipales, archives et chambre de commerce)
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Corporations ouvrières de l'ancien régime en Provence (Les)
Subject
The topic of the resource
Histoire de la Provence
Droit coutumier
Droit du travail
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Ribbe, Charles de (1827-1899). Auteur
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Méjanes (Aix-en-Provence), cote JP 131-34
Publisher
An entity responsible for making the resource available
impr. de Illy (Aix)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1865
Rights
Information about rights held in and over the resource
domaine public
public domain
Relation
A related resource
Notice du catalogue : https://www.sudoc.fr/157622177
Vignette : https://odyssee.univ-amu.fr/files/vignette/Mejanes-JP-131-34_Ribbe_Corporations-ouvrieres_vignette.jpg
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
1 vol.
98 p.
In-8°
Language
A language of the resource
fre
Type
The nature or genre of the resource
text
monographie imprimée
printed monograph
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
https://odyssee.univ-amu.fr/items/show/1019
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Provence. 14..
Provence. 15..
Provence. 16..
Provence. 17..
Provenance
A statement of any changes in ownership and custody of the resource since its creation that are significant for its authenticity, integrity, and interpretation. The statement may include a description of any changes successive custodians made to the resource.
Bibliothèque Méjanes (Aix-en-Provence)
Abstract
A summary of the resource.
Quand Ch. De Ribbe évoque les corporations, il ne cache pas sa sympathie pour l'Ancien Régime, ce bon vieux temps où régnait un ordre social harmonieux et sa dette envers Frédéric Le Play, son maître à penser, qui vient de publier ce qui sera son best-seller "<em>La réforme sociale en France déduite de l'observation comparée des peuples européens</em>" (1864) dont l'enseignement se résume à un diagnostic décisif : l'instabilité sociale est due aux désordres moraux.<br /><br />Aux inégalités créées par la monarchie et qui ont engendré la révolte de 1789 (par leur rôle <em>naturel</em> d'exemplarité, la responsabilité des évènements revient aux élites - c'est bien connu, les corps pourrissent toujours d'abord par la tête) ont succédé les inégalités créées par la liberté : les ouvriers, aujourd'hui (1865) plongés dans l'idéologie individualiste, génératrice de conflits, regrettent amèrement la disparition de leurs anciennes corporations, alors que les économistes s'en félicitent (des irresponsables).<br /><br />Pour Ch. de Ribbe, l'idée corporatiste mérite à elle seule une étude (du 13e au 18e siècles) qui n'a jamais été menée pour la Provence : les corporations, devenues aujourd'hui un simple souvenir, étaient pourtant le mode d'organisation des métiers le plus stable, le plus efficace et le plus juste qui soit : elles avaient leurs chefs, leur discipline, leurs coutumes, leurs lois, leurs droits et leurs privilèges. Un cadre de statuts et de règlements qui permettait à toutes les professions et à tous ceux qui y travaillent de trouver sa place.<br /><br />
<div><img src="https://odyssee.univ-amu.fr/files/thumbnails/MA-communautes-metier.jpg" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></div>
<div style="text-align: center;"><em>Les communautés de métiers : structuration et organisation des professions et du marché du travail</em></div>
<br />Ch. de Ribbe est assurément un précieux historien dans sa minutieuse analyse de la société provençale antérieure au 19e siècle et dont il démonte, un à un, tous les rouages qui sont à ses yeux essentiels à la cohésion sociale. Mais ses postulats idéologiques l'amènent aussi à rechercher tous les rouages arrachés par la tempête révolutionnaire, unique cause de la casse de cette grande horlogerie : "<em>Le caractère du régime nouveau est de détruire systématiquement les influences qui maintenaient </em><em>autrefois dans les masses une sorte d'égalité </em><em>forcée, ou tout au moins de donner à chaque </em><em>individu la faculté de s'en affranchir</em>".<br /><br />Sa nostalgie obsessionnelle d'une ancienne harmonie idéale cimentée par les institutions politiques, professionnelles, sociales, familiales et morales les plus solidement établies, l'amène à concevoir une physique inédite dans laquelle la Provence se réduit à un espace à une seule dimension, la ligne temporelle du passé révolu.<br /><br /><em>Le document original du milieu du 19e siècle reproduit ici appartient aux collections de la Bibliothèque Méjanes de la ville d'Aix-en-Provence. Nous la remercions ici grandement ainsi que sa directrice, Mme Aurélie Bosc.</em>
Description
An account of the resource
La Révolution Française a mis fin aux corporations. Paradoxalement, les principales victimes de cette erreur historique sont les ouvriers eux-mêmes qui subissent maintenant le despotisme d'un individualisme féroce et sans limite.
Corporations professionnelles -- Provence -- Ancien régime
Corporatisme -- Provence -- Ancien régime
-
https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/959/BUD-41433_Raynaud_Vie-eco-internationale.pdf
c4faa67bc028eab86e1c8da604e7221b
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Monographie imprimée
Description
An account of the resource
Ouvrages imprimés édités au cours des 16e-20e siècles et conservés dans les bibliothèques de l'université et d'autres partenaires du projet (bibliothèques municipales, archives et chambre de commerce)
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
vie économique internationale (La)
Subject
The topic of the resource
Économie
Droit du travail
Droit social
Droit international
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Raynaud, Barthélemy (1876-1948 ; économiste)
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence), cote BUD 41433
BU Saint Charles - Sciences, Lettres et Sciences Humaines.(Marseille), cote BUSC 14501
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Société anonyme du recueil Sirey (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1926
Rights
Information about rights held in and over the resource
domaine public
public domain
Relation
A related resource
Notice du catalogue : http://www.sudoc.fr/266475442
Vignette : https://odyssee.univ-amu.fr/files/vignette/BUD-41433_Raynaud_Vie-eco-int_vignette.jpg
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
1 vol.
499 p.
19 cm
Language
A language of the resource
fre
Type
The nature or genre of the resource
text
monographie imprimée
printed monograph
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
https://odyssee.univ-amu.fr/items/show/959
Provenance
A statement of any changes in ownership and custody of the resource since its creation that are significant for its authenticity, integrity, and interpretation. The statement may include a description of any changes successive custodians made to the resource.
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence)
BU Saint Charles - Sciences, Lettres et Sciences Humaines (Marseille)
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
France. 19..
Description
An account of the resource
Barthélémy Raynaud étudie l'économie à travers le prisme de l'international : en prenant tant de recul par rapport aux années 1920, ses analyses pourraient facilement être transposées un siècle plus tard sans excès d'anachronisme
Abstract
A summary of the resource.
La thèse B. Raynaud est claire : tout bouge et tout s'échange et plus seulement au niveau local mais entre les États eux-mêmes. Au 20e siècle, on assiste à un étirement géographique généralisé des lieux de production, de transformation et de consommation. Le nouveau dénominateur commun de toutes les activités humaines, c'est le transport. On peut tout acheminer, on doit tout acheminer : les matières premières, les denrées alimentaires, les animaux et les hommes. Par voie terrestre, maritime et aérienne, tout s'exporte et tout s'importe, matériel comme immatériel : les produits, le commerce, le travail et les travailleurs, la force motrice (l'énergie), les capitaux, les monnaies, les crédits, les maladies, les pensées, les idées... Dans son domaine, B. Raynaud écrit le traité général du mouvement du 20e siècle.<br /><br />
<div><img src="https://odyssee.univ-amu.fr/files/fullsize/bureau-telephonique-Gutenberge-Paris_1920.jpg" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></div>
<div style="text-align: center;"><em>La communication de la pensée : <br />l</em><em>e bureau téléphonique Gutenberg (France Telecom, Paris, 1920)</em></div>
<br />Paradoxalement, au lieu de favoriser leur dispersion, l'éloignement des centres de production s'accompagne d'un mouvement de concentration des moyens de production et des capitaux : c'est l'ère des cartels, des trusts, des ententes et de tout qui peut fausser le libre jeu de la concurrence. Dans cette nouvelle jungle où tout circule, les frontières sont parfois floues et la frénésie d'échanges pose la question de la juste répartition des richesses, du niveau des salaires, du juste coût et du juste prix des choses. L'assiette des impôts et le périmètre de leur recouvrement deviennent moins évidents et favorisent des comportements répréhensibles comme la fraude, l'évasion fiscale et trafics en tous genres.<br /><br />B. Raynaud n'est ni partisan d'un libéralisme hors contrôle ni d'une économie intégralement dirigée : la garantie d'un juste équilibre ne peut venir que d'éléments modérateurs, protecteurs, redistributeurs, régulateurs et correcteurs, au niveau collectif comme au niveau individuel : les traités, les pactes, les barrières douanières, les droits du travail nationaux et le droit du travail international. Mais le sujet de l'international est si vaste qu'il est impossible d'être exhaustif : quelques thèmes auraient mérité une approche plus critique comme le colonialisme (une internationalisation imposée qui nie le droit de propriété et le droit du travail, timidement abordée dans le dernier chapitre) ou auraient pu être davantage développés, comme le poids économique de la contrebande ou celui du tourisme international, question largement présente dans une étude publiée deux ans plus tôt : "<em>Les industries touristiques en Provence et sur la Côte d'Azur</em>" (in <a href="https://odyssee.univ-amu.fr/items/show/109" target="_blank" rel="noopener">Annales de la Faculté de droit d'Aix. Série Essai d'enquête économique</a>,1924).<br /><br />À quoi reconnaît-on les ouvrages d'économie de Barthélemy Raynaud ? Sur le fond, tous intègrent le droit social et le droit du travail qui protègent les travailleurs. Quand il parle d'économie, B. Raynaud n'en oublie jamais la dimension juridique. Et quand il parle de droit, il n'en oublie jamais la dimension humaine. Sur la forme, quand il aborde les grandes questions de macroéconomie, B. Raynaud est toujours soucieux de pédagogie et de clarté : ses cours se suivent comme des livres et ses livres se lisent comme des cours. <br /><br />"<em>L'étude de ces problèmes et la lecture des pages qui s</em><em>uivent nécessiteront de la part de nos contemporains une grande liberté d'esprit, une parfaite souplesse d'intelligence pour s'adapter, sinon à de nouveaux problèmes, du moins à de nouvelles positions de problèmes anciens</em>". En terminant son avant-propos par cet appel au lecteur, il résumait tout ce qu'il s'était déjà imposé à lui-même.
Droit international privé -- Droit du travail --20e siècle
Histoire économique -- 20e siècle
Relations économiques internationales -- 20e siècle
-
https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/937/RES-44057_Raynaud_Droit-international.pdf
4b31d27b6f363ee1f634e3b230d73090
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Monographie imprimée
Description
An account of the resource
Ouvrages imprimés édités au cours des 16e-20e siècles et conservés dans les bibliothèques de l'université et d'autres partenaires du projet (bibliothèques municipales, archives et chambre de commerce)
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Droit international ouvrier
Subject
The topic of the resource
Droit du travail
Droit international
Droit social
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Raynaud, Barthélemy (1876-1948 ; économiste)
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence), cote RES 44057
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Domat-Montchrestien (1933)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1933
Rights
Information about rights held in and over the resource
domaine public
public domain
Relation
A related resource
Notice du catalogue : http://www.sudoc.fr/264729781
Vignette : https://odyssee.univ-amu.fr/files/vignette/RES-44057_Raynaud_Droit-international_vignette.jpg
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
1 vol.
236 p.
24 cm
Language
A language of the resource
fre
Type
The nature or genre of the resource
text
monographie imprimée
printed monograph
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
https://odyssee.univ-amu.fr/items/show/937
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
France. 19..
Provenance
A statement of any changes in ownership and custody of the resource since its creation that are significant for its authenticity, integrity, and interpretation. The statement may include a description of any changes successive custodians made to the resource.
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence)
Abstract
A summary of the resource.
Quand il publie la seconde édition de son ouvrage consacré au droit international ouvrier, B. Raynaud réfléchit à cette question depuis 27 ans et pour cause, en 1905, il avait donné un cours sur cette branche du droit international encore naissante. Il apparaît clairement que dès cette époque, l'embauche d'étrangers est très encadrée et que, contrairement à une idée reçue, les émigrés ne déferlent pas sur le pays : en témoignent les facsimilés des formulaires de déclaration d'embauche et de contrat de travail reproduits par B. Raynaud, qui montrent le souci de l'administration de contrôler ces mouvements migratoires (contrôle exercé à de multiples niveaux administratifs territoriaux). Les employeurs sont bien loin de pouvoir recruter en toute liberté et doivent non seulement annoncer au préalable le niveau de salaire mais motiver les éventuels écarts par rapport aux moyennes de la profession : l'Europe n'est pas à l'aube de devenir un espace commun qui promeut la libre circulation des personnes et des biens et encourage le dumping social. Pour s'en convaincre, cet héritage législatif, promulgué pendant la Guerre de 1914-1918, qui impose aux étrangers une carte d'identité bien normalisée (dans les pièces à fournir, prière de joindre quatre photos de face et sans chapeau) et qui annonce les sanctions sévères encourues pour les embauches jugées illégales.<br /><br />
<div><img src="https://odyssee.univ-amu.fr/files/fullsize/controle-recrutement.jpg" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></div>
<div style="text-align: center;"><em>Le contrôle administratif des étrangers à tous les échelons territoriaux (années 1930)</em></div>
<br />Ce qui pourrait surprendre, dans ces contrats de travail, c'est la corrélation établie entre secteurs professionnels et nationalités : si cette association peut être prévue dans le cadre d'accords bilatéraux (par ex., aménagements particuliers négociés avec la Belgique), elle serait sûrement mal comprise ou jugée nulle aujourd'hui sur le plan juridique, tout au moins dans le cadre de l'UE.<br /><br />
<div><img src="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/embauche-italien.jpg" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></div>
<div style="text-align: center;"><em>Un besoin d'ouvriers agricoles mais d'origine italienne exclusivement</em></div>
<br />Parce que venant d'un pays frontalier réputé pour ses fruits, ses légumes, ses cultures céréalières et ses massifs boisés, le travailleur italien est d'abord recherché dans les secteurs agricoles et forestiers. C'est aussi le secteur où la France connaît un grave déficit de main d'œuvre avec son million et demi de morts déplorés quinze plus tôt, agrravé dans les zones rurales par une dénatalité marquée et un exode soutenu vers les villes.<br /><br />
<div><img src="https://odyssee.univ-amu.fr/files/fullsize/embauche-Polonais.jpg" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></div>
<div style="text-align: center;"><em>La main d'œuvre polonaise : un profil-type d'ouvrier d'usine<br /></em></div>
<br />Après l'Italie, l'Europe Centrale est le plus gros réservoir de main d'œuvre étrangère (au cours des années 1920, près de 200 000 personnes s'installent chaque année en France). Les Polonais, réputés pour être durs à la tâche, ont les faveurs de l'industrie, alors que les paysans représentent toujours plus des trois-quarts de la population polonaise de l'époque. La Tchécoslovaquie, toujours majoritairement rurale dans l'Entre-deux-guerres, apporte également des bras au secteur agricole.<br /><br />
<div><img src="https://odyssee.univ-amu.fr/files/fullsize/embauche-tchecoslovaque.jpg" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></div>
<div style="text-align: center;"><em>Pour la main d'œuvre tchécoslovaque, les sains et rudes travaux des champs</em></div>
<br />Un siècle nous sépare de ces formulaires administratifs mais combien de Français n'ont-ils pas partagé un temps ces stéréotypes : le BTP pour les Espagnols et les Portugais, les mines pour les Polonais et les Marocains, les vendanges pour les Italiens...<br /><br />Il faut noter que cette législation du travail prenait cependant en considération des éléments autres que la qualification et la rémunération comme les conditions de vie et d'hébergement : ainsi les ménages et les familles (donc avec enfants) qui avaient droit d'accompagner le nouvel embauché pouvaient prétendre à un logement à part : une manière sociale, dénuée de toute idéologie apparente, de traiter la question du regroupement familial.<br /><br />Comme dans plusieurs de ses ouvrages, B. Raynaud conclut son étude par une réflexion sur l'avenir, ici celui du droit international ouvrier qui ne pourra se trouver, selon lui, que dans l'équilibre entre le point de vue national el le point de vue international (ceci vaut autant pour le pays d'origine que pour le pays d'accueil). Mais cette harmonie n'est pas assurée et reste menacée par deux courants antagonistes : "<em>les quelques partisans </em><em>attardés d'une Économie nationale complète et </em><em>d'une Souveraineté politique absolue</em>" opposés aux "<em>publicistes trop pressés peut-être qui tendraient à la constitution immédiate d'un super État avec la Société des Nations et à la prédominance presque exclusive de la convention internationale comme facteur de progrès</em>". Certaines questions, comme certains problèmes, ont une longue espérance de vie...
Description
An account of the resource
Après la 1ère Guerre Mondiale, la France recrute de la main d'œuvre étrangère mais tient à maîtriser cette immigration : de nouvelles législations définissent des modèles de contrat de travail protecteurs mais contraignants
Droit international privé -- Classe ouvrière -- 20e siècle
Droit international privé -- Droit du travail --20e siècle
-
https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/932/RES-42906_Raynaud_Action-internationale.pdf
1cdf40445bed761fc755f3a73eb7dca7
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Title
A name given to the resource
Monographie imprimée
Description
An account of the resource
Ouvrages imprimés édités au cours des 16e-20e siècles et conservés dans les bibliothèques de l'université et d'autres partenaires du projet (bibliothèques municipales, archives et chambre de commerce)
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Title
A name given to the resource
action internationale des Puissances contre les abus coloniaux avant et depuis l'établissement de la Société des Nations (L') : Cours professé à la Semaine sociale de Marseille (août 1930)
Subject
The topic of the resource
Droit international
Droit du travail
Histoire de la colonisation
Économie coloniale
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Raynaud, Barthélemy (1876-1948 ; économiste). Auteur
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence), cote RES 42906
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chronique sociale de France (Lyon)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1930
Rights
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domaine public
public domain
Relation
A related resource
Notice du catalogue : http://www.sudoc.fr/264437993
Vignette : https://odyssee.univ-amu.fr/files/vignette/RES-42906_Raynaud_Action-internationale._vignette.jpg
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
1 vol.
24 p.
22 cm
Language
A language of the resource
fre
Type
The nature or genre of the resource
text
monographie imprimée
printed monograph
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
https://odyssee.univ-amu.fr/items/show/932
Provenance
A statement of any changes in ownership and custody of the resource since its creation that are significant for its authenticity, integrity, and interpretation. The statement may include a description of any changes successive custodians made to the resource.
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence)
Abstract
A summary of the resource.
Quand B. Raynaud, professeur d'économie politique à l'Université d'Aix-Marseille, s'interroge sur l'impact de cette nouvelle institution internationale majeure qu'est la Société des Nations créée en 1919 (remplacée par l'ONU en 1945), la question n'est pas rhétorique : fondée sur une préoccupation éthique ancrée dans une tradition d'humanisme chrétien (il s'agit de la <em>Semaine sociale de Marseille</em>), elle est surtout d'ordre juridique et économique : c'est en tant que spécialiste de législation industrielle que Raynaud regarde l'évolution du droit du travail colonial international (dommage qu'il laisse aux théoriciens et aux historiens le soin d'expliquer les "lacunes" des colonisateurs en matière de<em> charges </em><em>sociales de la colonisation...)</em>.<br /><br />
<div><img src="https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/Travail_force.jpg" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></div>
<div style="text-align: center;"><em>Travail forcé vs esclavage : le subtil distinguo juridique d'une certaine réalité coloniale (cliché Wikipédia)<br /></em></div>
<br />Dans ce domaine, les conventions internationales sont récentes et datent seulement du début du 20e siècle, comme celle de Berne de 1906 interdisant le travail de nuit des femmes et prohibant l'utilisation du phosphore blanc, cette dernière disposition étant applicable par décret dans les colonies françaises.<br /><br />Mais à partir de 1920, des clauses s'imposent à tous les membres de certaines organisations internationales comme le Bureau international du Travail. De ce fait, la France n'a plus ratifié les conventions qui s'appliquaient par automaticité (aux) à ses colonies, à l'exception de celle en matière d'accidents du travail. D'où l'échec de la convention de Genève de 1930 qui montre que les intérêts (nationaux) de quelques pays colonisateurs ont eu raison de l'idéalisme du devoir international. Un épisode qui illustre, comme les périodes sombres des 20e et 21e siècles, combien, par définition, les grandes puissances ne ratifient et n'appliquent que les règles internationales qui ne les contrarient pas.<br /><br />Alors un avant et un après ? Certainement mais pas au niveau espéré et dans le décevant constat, qu'au niveau politique, une régression est toujours possible. Si B. Raynaud vivait de nos jours, il prendrait la mesure du chemin parcouru, ce chemin tant défendu par Roger Badinter : la seule réponse irréversible à ce siècle de barbaries est l'incrimination de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre (1945), leur imprescriptibilité (1968), la reconnaissance de l'esclavage comme crime contre l'humanité (France, 2001) et enfin la création de la Cour pénale internationale (CPI, 2002). Quand il est universel, le droit est un humanisme.
Description
An account of the resource
La création de la Société des Nations en 1919 a-t-elle mis fin aux abus infligés aux populations coloniales dans leur ensemble, comme l'esclavage, et amélioré en particulier la situation juridique et économique des travailleurs coloniaux ?
Colonies -- Droit -- 20e siècle
Droit du travail (droit international) -- 20e siècle
Esclavage -- Lutte contre -- 20e siècle
Société des Nations -- 20e siècle
-
https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/890/RES-9595_Raynaud_Cours-legislation-indust.pdf
72fa54d793b6d72f7c9982d435c3cf0b
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Title
A name given to the resource
Monographie imprimée
Description
An account of the resource
Ouvrages imprimés édités au cours des 16e-20e siècles et conservés dans les bibliothèques de l'université et d'autres partenaires du projet (bibliothèques municipales, archives et chambre de commerce)
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Title
A name given to the resource
Cours de législation industrielle : 3ème année de licence, 1946-1947
Subject
The topic of the resource
Droit du travail
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Raynaud, Barthélemy (1876-1948 ; économiste). Auteur
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence), cote RES 9595
Publisher
An entity responsible for making the resource available
[polycop.] (Aix-en-Provence)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1947
Rights
Information about rights held in and over the resource
domaine public
public domain
Relation
A related resource
Notice du catalogue : http://www.sudoc.fr/262089467
Vignette : https://odyssee.univ-amu.fr/files/vignette/RES-9595_Raynaud_Cours-legislation-indust-vignette.jpg
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
1 vol.
165 p.
27 cm
Language
A language of the resource
fre
Type
The nature or genre of the resource
text
monographie imprimée
printed monograph
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
https://odyssee.univ-amu.fr/items/show/890
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
France. 19..
Abstract
A summary of the resource.
<span style="font-family: Calibri,Helvetica,sans-serif; color: black; font-size: medium;"><span style="font-size: 12pt;" id="divtagdefaultwrapper"><span style="color: black; font-family: Calibri,Helvetica,sans-serif,EmojiFont,Apple Color Emoji,Segoe UI Emoji,NotoColorEmoji,Segoe UI Symbol,Android Emoji,EmojiSymbols; font-size: medium;"><i>Avertissement : les cours dactylographiés ou polycopiés des années 1940 et 1950 font l'objet d'un programme particulier de numérisation et de valorisation en raison de leur valeur scientifique, de leur fragilité matérielle (papier et encre très dégradés) et de leur rareté (cours donné à la bibliothèque de l'université en un seul exemplaire). L'autorisation de diffusion de ce cours a été accordée par l'auteur ou par ses ayants droit.</i></span></span></span><br /><br />Dédicace de l'auteur : "<em>A la bibliothèque de l'université d'Aix-Marseille. Hommages de l'auteur. Signé B. Raynaud, juin 1947</em>".<br /><br />"Barthélémy Raynaud (1876-1948), avocat à la Cour d’appel, soutient une thèse à la Faculté de droit de Paris sur <em>Le contrat collectif de travail</em> en 1901, et une autre sur <em>Les accidents du travail des ouvriers étrangers</em>, l’année suivante. Il est chargé de cours à l’Université de Dijon en 1906, puis enseigne à la Faculté de droit d’Aix-en-Provence à partir de 1913. Ses recherches portent sur le droit du travail (il est l’auteur, entre 1924 et 1927, d’un Code du travail) et l’économie politique : il publie ainsi <em>Une industrie sans grèves : les mines anglaises</em> en 1905, le <em>Droit international ouvrier</em> en 1906, <em>Vers le salaire minimum</em> en 1913, et participe aux travaux de l’Association internationale pour la protection légale des travailleurs, dont il estime que l’action a permis à la législation industrielle d’aboutir sur le plan international.<br /><br />Raynaud s’intéresse particulièrement à cette branche nouvelle des études juridiques, à laquelle il consacre un manuel en 1922 et un cours polycopié en 1946 et 1947. Confronté à ceux qui affirment qu’elle n’existe pas ou n’est qu’un <em>« amalgame bizarre, un pot pourri malvenu de diverses disciplines juridiques »</em>, il répond que la législation industrielle n’est pas le résultat d’une conception a priori fondée sur la seule logique mais un produit de l’histoire. En effet, <em>« la législation industrielle résulte d’un double mouvement de faits et d’idées, accompli au cours du XIXe siècle, qui seul en explique la création et le développement »</em>. L’évolution de l’industrie, cause <em>« d’abus regrettables au point de vue social »</em>, l’extension du suffrage et le mouvement syndical d’une part, la réaction contre les idées libérales (socialisme de la chaire, catholicisme social, école solidariste, etc.) d’autre part, aboutissent à la nécessité d’un interventionnisme plus ou moins accentué, et donc à la création de la législation industrielle, qui peut être définie comme <em>« l’ensemble des interventions du législateur en faveur de la personne du travailleur »</em>. En ce sens, la législation industrielle peut également être appelée « législation du travail », car elle ne concerne pas seulement le travailleur de l’industrie". Résumé Luc Bouchinet (à confirmer)<br /><br />
<div><img src="https://odyssee.univ-amu.fr/files/thumbnails/Arthur-Groussier_1914.jpg" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></div>
<div style="text-align: center;"><em>Arthur Groussier (barbe blanche), précurseur du futur Code du travail (1914)</em></div>
<br />Le droit du travail apparaît dans les travaux académiques dans les années 1880. Les recherches dans cette nouvelle branche du droit de B. Raynaud, qui soutient sa thèse en 1901, sont donc totalement contemporaines de la naissance de ce nouveau droit et de ses fondateurs que l'histoire a retenus, comme Arthur Groussier.<br /><br />Comme le rappelle B. Raynaud, la difficulté dans l'étude et l'enseignement du droit du travail, qu'il appelle encore <em>législation industrielle</em>, est qu'il se situe au carrefour de trois domaines : celui de la loi nationale (aspect législatif), celui de l'association professionnelle (aspect collectif) et celui du contrat de travail (aspect inviduel). Difficulté redoublée par la transformation rapide de ce droit. Mais difficulté d'autant mieux acceptée que ces transformations sont toutes positives et sont le signe d'une législation toujours plus protectrice des travailleurs. Par sa dimension humaniste, le droit du travail tel qu'il se construit à la fin du 19e siècle et au début du 20e siècle, c'est bien plus que du droit, et B. Raynaud est bien plus qu'un juriste.
Provenance
A statement of any changes in ownership and custody of the resource since its creation that are significant for its authenticity, integrity, and interpretation. The statement may include a description of any changes successive custodians made to the resource.
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence)
Description
An account of the resource
La réglementation du travail ne cesse d'évoluer en raison des mutations de l'industrie, du développement démocratique et du mouvement syndical : un tout nouveau cours pour les étudiants qu'il faut déjà réactualiser
Droit du travail -- Manuels d'enseignement supérieur -- 20e siècle
Faculté de droit -- France -- Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône) -- 20e siècle
-
https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/884/RES-40483_Nogaro_Main-oeuvre-etrangere.pdf
f3082de523dd990cd98269d3d18fa826
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Monographie imprimée
Description
An account of the resource
Ouvrages imprimés édités au cours des 16e-20e siècles et conservés dans les bibliothèques de l'université et d'autres partenaires du projet (bibliothèques municipales, archives et chambre de commerce)
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Title
A name given to the resource
main-d'oeuvre étrangère et coloniale pendant la guerre (La) : la guerre et le travail
Subject
The topic of the resource
Histoire
Économie coloniale
Droit du travail
Description
An account of the resource
Au début de la Guerre de 1914-1918, la France peine à fabriquer un dixième des munitions réclamées par l'armée : après ce réveil brutal sur la pénurie de travailleurs, les regards se tournent vers la main-d'œuvre coloniale et étrangère
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Nogaro, Bertrand (1880-1950). Auteur
Weil, Lucien. Auteur
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence), cote RES 40483/I/14
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Presses universitaires de France (Paris)
Yale University Press (New Haven)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1926
Rights
Information about rights held in and over the resource
domaine public
public domain
Relation
A related resource
Notice du catalogue : http://www.sudoc.fr/261948938
Vignette : https://odyssee.univ-amu.fr/files/vignette/RES-40483_Nogaro_Main-oeuvre-etrangere_vignette.jpg
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
1 vol.
XII-79 p.
26 cm
Language
A language of the resource
fre
Type
The nature or genre of the resource
text
monographie imprimée
printed monograph
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
https://odyssee.univ-amu.fr/items/show/884
Abstract
A summary of the resource.
Publications de la dotation Carnegie pour la paix internationale. Section d'économie et d'histoire, Histoire économique et sociale de la guerre mondiale. Série française (Appartient à la collection)<br /><br /><em>L'ambition de la Dotation Carnegie pour la paix internationale n'est pas d'écrire la chronologie historique exhaustive des évènements qui se sont déroulés durant la Première Guerre Mondiale mais de présenter le bilan synthétique et analytique des conséquences économiques qu'a eu le conflit sur l'état et le destin des pays belligérants.</em><br /><br />Quand l'État-major français comprend que c'est faute de main-d’œuvre et de planification que les usines d'armement ne peuvent pas fournir les munitions demandées, il est déjà trop tard : il n'y a pas de réserve disponible puisque les hommes valides sont envoyés au front et que les femmes les remplacent déjà, aussi bien à l'usine que dans les champs.<br /><br />La seule solution est de faire venir des travailleurs de l'extérieur. Du point de vue de la France, le monde n'est pas d'une extrême complexité : il se résume à deux grands gisements avec, d'une part, la main-d’œuvre coloniale (Annamites, Kabyles et autres Africains du Nord) et la main-d’œuvre chinoise (qui ne doit pas être confondue avec les travailleurs coloniaux d'Indochine) et d'autre part, la main-d'oeuvre étrangère de race blanche.<br /><br />
<div><img src="https://odyssee.univ-amu.fr/files/fullsize/Ventilation-main-oeuvre-etrangere.jpg" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></div>
<div style="text-align: center;"><em>Ventilation origine géographique de la main-d’œuvre étrangère (1914-1918)</em></div>
<br />Si la main-d’œuvre d'origine nord-africaine constitue 60% des travailleurs arrivant en Métropole, les Chinois et Indo-chinois représentent près de 40% de ces effectifs. Ces chiffres doivent d'autant plus être comparés avec ceux des troupes coloniales (475 000 hommes, dont 180 000 Africains noirs, notamment les tirailleurs sénégalais) que la France a dû concilier ces deux exigences totalement concurrentes (1).<br /><br />
<div><img src="https://odyssee.univ-amu.fr/files/fullsize/Travailleurs-Chinois-Le-Figaro_1916-08-23.jpg" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></div>
<div style="text-align: center;"><em>Les travailleurs chinois en France - Le Figaro, éd. du 23 août 1916, p. 2 (2)<br /></em></div>
<br />Ce sont donc plus de 220 000 travailleurs qui débarqueront à Marseille (à l'armistice, beaucoup seront déjà repartis, pour raisons diverses) au cours des 4 années de conflit : pour gérer ces flux, le Ministère de la Guerre créa le 1er janvier 1916, un organisme spécial, le <em>Service des travailleurs </em><em>coloniaux</em>. <br /><br />Parallèlement à la main-d’œuvre coloniale et chinoise, la France recrute une main d'oeuvre étrangère de <em>race blanche</em>. Pays d'émigration, le fait n'est pas nouveau pour les frontaliers mais les Belges, Italiens et Espagnols qui venaient jusqu'alors étaient surtout embauchés sur des contrats temporaires, notamment saisonniers dans le secteur agricole (moissons, vendanges, récoltes des fruits) dans le Nord et le Sud-Est de la France. Évolution déjà observée quelques années avant la guerre, l'agriculture et l'industrie ont davantage besoin d'emploi plus stable. Les contingents vont alors s'élargir à d'autres nationalités : Grecs et Portugais par ex. (fort taux d'illetrisme chez les seconds mais très dociles !), contrôlés par des bureaux d'immigration installés près des postes frontaliers (Italie) ou dans certains ports (Marseille, Bordeaux, Nantes).<br /><br />
<div><img src="https://odyssee.univ-amu.fr/files/thumbnails/annamite_ouvrier.jpg" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></div>
<div style="text-align: center;"><em>Les ouvriers annamites en France (Première Guerre Mondiale)</em></div>
<br />Les administrations déjà existantes ou créées ad hoc contrôlent toutes ces populations et établissent des contrats de travail type adaptés à chacune des trois catégories de travailleurs. Les besoins liés à l'effort de guerre ne font pas oublier un certain réalisme économique : comme le précise l'article du journal<em> Le Figaro</em>, il faut prendre "<em>toutes les mesures pour que cette main-d’œuvre ne concurrence pas la main-d’œuvre nationale ou locale"</em>. <br /><br />Après le conflit et le rapatriement de ces travailleurs, l'appel à la main-d’œuvre étrangère a laissé des traces durables dans la société française et infléchit sa politique d'immigration : la paix revenue, les besoins de la reconstruction et des secteurs miniers et agricoles allaient développer des courants migratoires comme ceux venant d'Italie et de Pologne et justifier des accords bilatéraux.<br /><br />____________________<br />1. Alban Sumpf. - Les troupes coloniales dans la Grande Guerre. - <a href="https://histoire-image.org/fr/etudes/troupes-coloniales-grande-guerre" target="_blank" rel="noopener"><em>Ministère de la Culture, l'Histoire par l'image, mai 2009</em></a>.<br />2. Les travailleurs chinois en France (Le Figaro, éd. du 23 août 1916, p. 2). - <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k291143n" target="_blank" rel="noopener"><em>Gallica</em></a>
Provenance
A statement of any changes in ownership and custody of the resource since its creation that are significant for its authenticity, integrity, and interpretation. The statement may include a description of any changes successive custodians made to the resource.
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence)
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Colonies françaises. 19..
France. 19..
Émigration et immigration -- Indochine -- Histoire
Guerre mondiale (1914-1918) -- Aspect social
Guerre mondiale (1914-1918) -- Participation coloniale
Travailleurs -- Déplacements professionnels -- Indochine française
Travailleurs étrangers -- 1900-1945
-
https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/836/RES-38035_Raynaud_Contrat-collectif.pdf
e19a836f91cf16f3d3bc4b5c30934922
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Monographie imprimée
Description
An account of the resource
Ouvrages imprimés édités au cours des 16e-20e siècles et conservés dans les bibliothèques de l'université et d'autres partenaires du projet (bibliothèques municipales, archives et chambre de commerce)
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Title
A name given to the resource
contrat collectif en France (Le)
Subject
The topic of the resource
Droit du travail
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Raynaud, Barthélemy (1876-1948)
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence), cote RES 38035
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Rousseau et cie (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1921
Rights
Information about rights held in and over the resource
domaine public
public domain
Relation
A related resource
Notice du catalogue : http://www.sudoc.fr/259024783
Vignette : https://odyssee.univ-amu.fr/files/vignette/RES-38035_Raynaud_Contrat-collectif_vignette.jpg
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
1 vol.
285 p.
23 cm
Language
A language of the resource
fre
Type
The nature or genre of the resource
text
monographie imprimée
printed monograph
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
https://odyssee.univ-amu.fr/items/show/836
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
France. 19..
Provenance
A statement of any changes in ownership and custody of the resource since its creation that are significant for its authenticity, integrity, and interpretation. The statement may include a description of any changes successive custodians made to the resource.
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence)
Description
An account of the resource
Les conventions collectives créent un nouveau type de rapport entre un salarié et son patron : l'employeur ne traite plus avec un travailleur isolé mais avec une organisation. Un progrès qui ne doit pas menacer les entreprises
Abstract
A summary of the resource.
Comme le rappelle est une excellente synthèse (1), les relations entre les employeurs et les salariés n'ont cessé d'évoluer depuis les <em>Lois Le Chapelier</em> de 1791. Dans ses recueils d’articles "<em>Pailles économiques"</em> (1918-1941), Barthélémy Raynaud, professeur à la faculté de droit d’Aix-en-Provence, montre qu’il est un observateur attentif de toutes ces évolutions économiques et sociales (2).<br /><br />Dès 1901, date de la 1<sup>ère</sup> édition du présent ouvrage, il s’intéressait déjà au droit du travail à travers notamment la réduction du temps de travail, les lois et les réformes sur les retraites ou encore les syndicats. Sans oublier les questions sociales comme le chômage, le salaire et le budget des travailleurs ou encore l’idée nouvelle d’orientation professionnelle. Tous ces aspects sont autant le point de départ que l'aboutissement de l'évolution des rapports entre le salarié et son employeur : pour B. Raynaud, le fait marquant de dernières décennies du 19e siècle est incontestablement le passage d'un "contrat" imposé individuellement à un contrat négocié collectivement, ce qui modifie, par définition, les rapports de force en présence. Dit simplement depuis l'Antiquité, l'union fait la force.<br /><br />Si l'histoire a retenu la Convention d’Arras du 29 novembre 1891 comme étant la première convention collective française, signée entre les syndicats de mineurs et les compagnies houillères du Pas-de-Calais (suite à une grève), pour B. Raynaud, les contrats collectifs ont proliféré dès la période révolutionnaire.<span class="field field--name-field-bloc-paragraphe field--type-entity-reference-revisions field--label-hidden field__items"><span class="field__item"><span class="clearfix text-formatted field field--name-field-corps-de-texte field--type-text-long field--label-hidden field__item"><br /></span></span></span><br />
<div style="text-align: center;"><img src="https://odyssee.univ-amu.fr/files/fullsize/convention-arras-1891.jpg" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /><em>Convention d’Arras, première convention collective française (illustr. La Voix du Nord)</em><span class="field field--name-field-bloc-paragraphe field--type-entity-reference-revisions field--label-hidden field__items"><span class="field__item"><span class="clearfix text-formatted field field--name-field-corps-de-texte field--type-text-long field--label-hidden field__item"></span></span></span></div>
<br />Et si ils ont pris ont pris tant d'importance, c'est qu'ils ont bénéficié de l'évolution des textes juridiques qui encadrent l'organisation du travail et ses différents acteurs (contrats, syndicats, droit du travail, droit d'association,...) autant qu'ils l'ont provoquée. <br /><br />
<div><img src="https://odyssee.univ-amu.fr/files/fullsize/OIT-1919.jpg" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></div>
<div style="text-align: center;"><em>Réunion de l'Organisation Internationale du Travail (1919)</em></div>
<br />Près de 20 ans après sa publication, B. Raynaud tient à mettre à jour son ouvrage en 1920 parque cette évolution a pris un caractère mondial inédit l'année précédente avec la création de l'Organisation internationale du travail (OIT), fondée par la Conférence de la paix de Paris en 1919 et qui a pour devise "<em>si vis pacem, cole justitiam - si tu veux la paix, cultive la justice"</em>. L'OIT est devenue en 1946 une agence spécialisée de l'ONU. <br /><br />
<div><em><img src="https://odyssee.univ-amu.fr/files/fullsize/grenelle_1968.jpg" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></em></div>
<div style="text-align: center;"><em>Les accords de Grenelle (mai 1968)</em></div>
<br />20 ans après son décès, les accords tripartites de Grenelle entre le gouvernement Pompidou, les organisations syndicales et patronales, marqueront une date dans l'histoire des négociations collectives en France mais resteront indissociables d'un certain climat conflictuel qui n'a jamais totalement disparu alors que d'autres pays européens recherchent prioritairement les solutions de consensus. Est-ce pour cette raison que B. Raynaud, partisan d'un certain libéralisme économique, estimait nécessaires les conventions collectives nationales autoritaires pour limiter l'ingérence des syndicats dans la vie de l'entreprise et la concurrence en uniformisant les conditions de travail (l'enjeu est le redessement du pays) mais pensait que l'avenir était plutôt du côté des accords libres et autonomes qui seuls peuvent favoriser la productivité ?<br /><br />Réfs.<br /><span class="field field--name-title field--type-string field--label-hidden">1. Chronologie : histoire des relations du travail depuis la loi Le Chapelier de 1791 - <em><a href="https://www.vie-publique.fr/eclairage/268879-chronologie-les-relations-du-travail-depuis-la-loi-le-chapelier-1791">Vie publique au coeur du débat publique</a></em><br />2. Pailles économiques - <em><a href="https://odyssee.univ-amu.fr/items/show/415">https://odyssee.univ-amu.fr/items/show/415</a></em><br />3. Marcel Gillet. - Aux origines de la première Convention d'Arras : le bassin houiller du Nord et du Pas-de-Calais de 1880 à 1891 - <em><a href="https://www.persee.fr/doc/rnord_0035-2624_1957_num_39_154_2234">Revue du Nord Année 1957 154 pp. 111-123</a></em><br /></span>
Contrat de travail -- France -- 20e siècle
Conventions collectives -- France -- 20e siècle
Négociations collectives -- France -- 20e siècle
Syndicats -- France -- 20e siècle
-
https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/804/RES-32270_Estier_Usages-locaux.pdf
66ebdcd2781899baa3f7429b31b1ac9d
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Title
A name given to the resource
Monographie imprimée
Description
An account of the resource
Ouvrages imprimés édités au cours des 16e-20e siècles et conservés dans les bibliothèques de l'université et d'autres partenaires du projet (bibliothèques municipales, archives et chambre de commerce)
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Usages et règlements locaux ayant force de loi dans le département des Bouches-du-Rhône constatés et recueillis [...] par des commissions cantonales, vérifiés et révisés par une commission centrale / mis en ordre par Nicolas Estier,... Albert Vidal-Naquet,.... - 2e édition revue et augmentée
Subject
The topic of the resource
Droit coutumier
Droit du travail
Département des Bouches-du-Rhône
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Estier, Nicolas (18..-....). Éditeur scientifique
Vidal-Naquet, Albert (1862-1942 ; juriste). Éditeur scientifique
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence), cote RES 32270
Publisher
An entity responsible for making the resource available
P. Ruat, (Marseille)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1910
Rights
Information about rights held in and over the resource
domaine public
public domain
Relation
A related resource
Notice du catalogue : http://www.sudoc.fr/257098496
Vignette : https://odyssee.univ-amu.fr/files/vignette/RES-32270_Usages-locaux._vignette.jpg
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
1 vol.
379 p.
23 cm
Language
A language of the resource
fre
Type
The nature or genre of the resource
text
monographie imprimée
printed monograph
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
https://odyssee.univ-amu.fr/items/show/804
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Bouches-du-Rhône. 18..
Bouches-du-Rhône. 19..
Provenance
A statement of any changes in ownership and custody of the resource since its creation that are significant for its authenticity, integrity, and interpretation. The statement may include a description of any changes successive custodians made to the resource.
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence)
Abstract
A summary of the resource.
Moins de 15 ans après la première mise à jour du recensement initial de 1856, la réimpression du recueil des droits anciens toujours en vigueur en Provence en ce début du 20e siècle n'était pas envisageable sans son actualisation. Tous les juges de paix du département des Bouches-du-Rhône acceptèrent de participer à cette nouvelle mise à jour de ce qu'il faut bien appeler un véritable <em>code des usages locaux</em> légalement applicables : ils firent alors observer que pour l'essentiel, le recueil édité en 1897 était resté inchangé, soulignant la très grande stabilité de la société provençale au cours du dernier demi-siècle.<br /><br />Le chapitre traitant des contrats de louage (plus de la moitié de l'ouvrage) est un véritable catalogue des métiers qui existaient en Provence à l'époque. Si certains nous sont encore familiers, bien d'autres ont depuis disparu : amidonniers, cochers de remise, giletières et pantalonnières, moellonniers, pilonniers, raffineurs de soufre ou encore vermicelliers. <br /><br />Le détail des contrats est tout aussi instructif sur les modes de rémunération. Ainsi, un berger pouvait-il être payé soit en salaire soit en nature par l'octroi d'un cheptel de 70 brebis par an que le propriétaire devait entretenir à ses frais.<br /><br />Il dévoile également une certaine sociologie des actifs : les oliveuses, femmes chargées de récolter les olives, étaient embauchées pour toute la durée de la cueillette, l'olivade (1). Leur journée commençait au lever du soleil et finissait à son coucher pour celles qui étaient nourries et logées, de 7h30 à 15h45 pour les autres.<br /><br />
<div><img src="https://odyssee.univ-amu.fr/files/fullsize/Vaucluse_cueillette_olives.jpg" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></div>
<div style="text-align: center;">La cueillette des olives : l'emploi saisonnier des oliveuses (Vaucluse, début 20e siècle)</div>
<br />Le code rural n'est pas en reste : grâce à ses détails - c'est son rôle de prescripteur -, nous savons ce qu'est le glanage (on ramasse les épis détachés et abandonnés sur le champ après la récolte), le râtelage (on récupère les brins de foin restés après le fauchage) et le grapillage (on recueille les grains de raisin et les olives oubliés pendant la cueillette).<br /><br />
<div style="text-align: center;"><img src="https://odyssee.univ-amu.fr/files/fullsize/Anciennes-mesures-aires.jpg" /></div>
<div style="text-align: center;">Mesures de surfaces agricoles : le cercle des termes disparus</div>
<br />Certaines servitudes peuvent être conformes aux prescriptions du Code civil : par ex., dans les cantons de Marseille, les arbres à haute lige doivent être plantés à 1 canne ou 8 pans du fonds voisin, soit à 2,0127 m. Mais à Allauch, la canne (ou les 8 pans) ne vaut que 1,9887 m, comme le rappellent avec rigueur et précision les tables d'équivalence des anciens poids et mesures. Le dépaysement est au bout du chemin...<br /><br />1. Huile d'olive de Provence - in <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Huile_d%27olive_de_Provence_AOC" target="_blank" rel="noopener" title="Olivade début 20e"><em>Wikipédia</em></a>
Description
An account of the resource
Quand les vieux usages sont toujours en cours et les anciens règlements toujours appliqués, ils prennent force légale : une source d'informations incomparable sur la société provençale
Droit coutumier -- France -- Bouches-du-Rhône (France) -- 19e siècle
Droit du travail -- France -- Bouches-du-Rhône (France) -- 19e siècle
Usages locaux -- France -- Bouches-du-Rhône (France) -- 19e siècle
-
https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/627/RES-AIX-T-226_Chavernac_Essai.pdf
758f25038ead4704aa3024448375afa9
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Title
A name given to the resource
Monographie imprimée
Description
An account of the resource
Ouvrages imprimés édités au cours des 16e-20e siècles et conservés dans les bibliothèques de l'université et d'autres partenaires du projet (bibliothèques municipales, archives et chambre de commerce)
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
responsabilité (La) des accidents dont les ouvriers sont victimes dans leur travail, Loi du 9 avril 1898 : thèse pour le doctorat
Subject
The topic of the resource
Droit du travail
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Thoulon, Edouard. Auteur
Université d'Aix-Marseille. Faculté de droit et des sciences économiques (1896-1973). Organisme de soutenance
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence), cote RES-AIX-T-222
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Arthur Rousseau (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1898
Rights
Information about rights held in and over the resource
domaine public
public domain
Relation
A related resource
Notice du catalogue : http://www.sudoc.fr/252782828
Vignette : https://odyssee.univ-amu.fr/files/vignette/RES-AIX-T-222_Thoulon_Responsabilite_vignette.jpg
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
1 vol.
176 p.
25 cm
Language
A language of the resource
fre
Type
The nature or genre of the resource
text
monographie imprimée
printed monograph
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
https://odyssee.univ-amu.fr/items/show/627
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
France. 18..
Abstract
A summary of the resource.
Thèse : Thèse de doctorat : Droit : Aix-Marseille : 1898
Provenance
A statement of any changes in ownership and custody of the resource since its creation that are significant for its authenticity, integrity, and interpretation. The statement may include a description of any changes successive custodians made to the resource.
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence)
Description
An account of the resource
En cas d’accident de travail, quelle est la responsabilité du patron ? Suivant l'évolution industrielle, la jurisprudence retient de plus en plus souvent la notion de délit, accorde des indemnités et s'oppose à une théorie purement contractuelle
Accidents du travail -- France -- 19e siècle
Droit du travail -- France -- 19e siècle
Responsabilité (droit) -- France -- 19e siècle
-
https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/626/RES-AIX-T-221_Pittie_Salaire.pdf
5464f86fae3899bbc61c540ff0f42d89
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Title
A name given to the resource
Monographie imprimée
Description
An account of the resource
Ouvrages imprimés édités au cours des 16e-20e siècles et conservés dans les bibliothèques de l'université et d'autres partenaires du projet (bibliothèques municipales, archives et chambre de commerce)
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Title
A name given to the resource
Du salaire à la tâche et du marchandage : thèse pour le doctorat
Subject
The topic of the resource
Droit du travail
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pittié, Marcel. Auteur
Université d'Aix-Marseille. Faculté de droit et des sciences économiques (1896-1973). Organisme de soutenance
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence), cote RES-AIX-T-221
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Arthur Rousseau (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1899
Rights
Information about rights held in and over the resource
domaine public
public domain
Relation
A related resource
Notice du catalogue : http://www.sudoc.fr/252782585
Vignette : https://odyssee.univ-amu.fr/files/vignette/RES-AIX-T-221_Pittie_Salaire_vignette.jpg
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
1 vol.
198 p.
26 cm
Language
A language of the resource
fre
Type
The nature or genre of the resource
text
monographie imprimée
printed monograph
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
https://odyssee.univ-amu.fr/items/show/626
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
France. 18..
Abstract
A summary of the resource.
Thèse : Thèse de doctorat : Droit : Aix : 1899
L'auteur se prononce en faveur du salaire à la tâche, qui lui apparaît, contrairement aux opinions socialistes qu'il critique, comme le meilleur moyen d'améliorer le sort de la classe ouvrière. Cette modalité de rémunération stimule l'activité du salarié et conduit à mieux le payer. Marcel Pittié se prononce en faveur de la participation des salariés aux bénéfices. Ensuite, il défend le marchandage, mais dénonce le "sweating system", forme dégénérée de celui-ici qui conduit au travail à domicile dans de très mauvaises conditions de salubrité et de moralité
Provenance
A statement of any changes in ownership and custody of the resource since its creation that are significant for its authenticity, integrity, and interpretation. The statement may include a description of any changes successive custodians made to the resource.
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence)
Description
An account of the resource
Le salaire à la tâche ou aux pièces est fixé d'après le travail effectué. C'est apparemment la formule de rémunération la plus juste mais elle peut aussi amener à des abus en cas de concurrence : le législateur doit encadrer ce type de contrat
Droit du travail -- France -- 19e siècle
Salaire aux pièces -- France -- 19e siècle
Salaires -- Droit -- France -- 19e siècle
Travail -- Pratiques déloyales -- France -- 19e siècle
-
https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/625/RES-AIX-T-219_Jaubert_Rupture-contrat.pdf
2d0f8b8375556eb1657164ade5eb6b19
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Monographie imprimée
Description
An account of the resource
Ouvrages imprimés édités au cours des 16e-20e siècles et conservés dans les bibliothèques de l'université et d'autres partenaires du projet (bibliothèques municipales, archives et chambre de commerce)
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Title
A name given to the resource
rupture (La) du contrat de travail et ses conséquences au point de vue juridique : thèse présentée et soutenue devant la faculté de droit d'Aix
Subject
The topic of the resource
Droit du travail
Description
An account of the resource
Au cours du 19e siècle, le nombre de ruptures individuelles du contrat de travail a augmenté. L'extension de la grande industrie et de la concurrence a accéléré les ruptures collectives, avec des ingérences extérieures à l'entreprise
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Jaubert, Ch. (17..-18..). Auteur
Université d'Aix-Marseille. Faculté de droit et des sciences économiques (1896-1973). Organisme de soutenance
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence), cote RES-AIX-T-219
Publisher
An entity responsible for making the resource available
B. Niel, Typographe-Lithographe (Aix)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1899
Rights
Information about rights held in and over the resource
domaine public
public domain
Relation
A related resource
Notice du catalogue : http://www.sudoc.fr/252782429
Vignette : https://odyssee.univ-amu.fr/files/vignette/RES-AIX-T-219_Jaubert_Rupture-contrat_vignette.jpg
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
1 vol.
226 p.
25 cm
Language
A language of the resource
fre
Type
The nature or genre of the resource
text
monographie imprimée
printed monograph
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
https://odyssee.univ-amu.fr/items/show/625
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
France. 18..
Abstract
A summary of the resource.
Thèse : Thèse de doctorat : Droit : Aix : 1899
Provenance
A statement of any changes in ownership and custody of the resource since its creation that are significant for its authenticity, integrity, and interpretation. The statement may include a description of any changes successive custodians made to the resource.
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence)
Contrats -- France -- 19e siècle
Droit du travail -- France -- 19e siècle
Licenciements économiques -- France -- 19e siècle
-
https://odyssee.univ-amu.fr/files/original/1/448/RES-AIX-T-142_Heimann_Organisation-travail.pdf
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MÈRE
�L' homme ne peut pas vivre isolé. Il a besoin de ses
semblables pour se procurer tous les avantages de la vi e.
C' est de ce principe que sont nées les associations politiqu es ou religieuses.
Nous ne voulons pas dans cette étude rechercher la
légiLimilé du droit d' association en général, mais réduisant
un sujet si vaste, nous nous proposons d'examiner celle
question au point de vue particulier de l'organisation du
travail.
Le droit au travail est évidemmen t le droit primordial,
puisque G'est sur lui qutl repose le droi t de propriété.
Tout homme doit avoir la liberté du travail. Ce droit doit-il
êLre exercé isolément ou bien peut-il être exercé par une
collectivité? En d'autres termes, la liberté d'asssociation
est-elle légitime?
Poser la question, semble-t-il, c'est la résoudre. Comment, en eiîet, ce qui est licite pour un seul ne le serailil pas pour plusieurs? Il est certain que l'associalion entre
�-2travailleurs doit assurer à ceux-ci de grands avantages.« Un
ouvrier seul ne représente rien, il est sans force tant qu'il
est seul, par ce qu'il peut toujours être remplacé ~, dit
M. Jules Simon dans son Traité de lfl liberté civile, et il paraît
dès lors que rien ne saurait empêcher l'institution de ces
associations qui par leur nature doivent développer l'industrie et assurer une condition économique meilleure aux
ouvriers.
Cependant ce n'est qu'après de longs efforts, que nous
voyons enfin aujourd'hui la liberté d'association proclamée,
et c'était à notre siècle qu' il était réservé de comprendre
le rôle de l'association en matière de travail.
Nous voulons dans le cours de cette étude montrer les
entraves qui se sont dressées con tre cette institution. Nous
examinerons à Rome les collèges d'artisans d'abord prohibés sous la République à raison d'une confusion entre
l'association et la réunion. Puis nous verrons les empereurs enrégimen ter tous les ouvriers dans les collèges.
Dans l'histoire du Moyen-Age, nous trouverons les
corporations dans lesquelles l'artisan était forcément incorporé sans aucune liber té ni initiative.
La Révolution, éclairée par les abus et les inconvénients
des corps de métiers, supprimera la liberté d'association
et édictera des prohibitions pour empêcher la reconstitution
des maitrises et des jurandes.
Et enfin nous examinerons la loi du 21 mars 1884, admettant pour la première fois la conception de l'association
libre combinée avec la liberté de chacun des associés.
-3Nous nous demanderons dans quelles conditions doivent
s'établir les associations ouvrières, le rôle que le gouvernement doit jouer dans leur constitution.
Enfin nous rechercherons quelle est dans les autres nations la législation relative à ces matières et nous étu.dieron s le mouvement qui tend à créer partout les syndicats
professionnels dans lesquels on espère trouver le remède
à la crise actuelle.
�CHAPITRE 1.,.
Des collègc8 d 'artisans sous la royauté.
On s'est demandé si en Grèce les ouvriers ont jamais
formé entre eux des associations. Les documents à ce sujet
font absolument défaut. Les textes parlent d'une fête qui
se célébrait à Athènes et connue sous le nom de Chalkeia.
C'étaient les forgerons qui se réunissaient pour sacrifier
en l'honneur de Vol cain , mais cette seule indication ne
suffit pas pour établir la preuve de l'existence d'une corporation. D'autre part les inscriptions de l'Asie Mineure
mentionnent bien des communautés de boulangers, de
po.tiers , de corroyeurs et de tisserands à Hiérapolis, à
Laodicée, à Magnésie et à Smyrne. Mais comme ces inscriptions son t postérieures à la conquête romaine, on
croit avec juste raison que ces communautés ont été fondées à l'instar des collèges existant à Rome 1 .
l Saglio et Darembcrg, Dictionnaire des antiquités grecques
et romaines, v• A1·tifices.
�-6Nous devons donc, à défaut de renseignements précis,
nous borner à étudier le rôle de l'association dans l'organisation du travail dans la société romaine.
Dès les premières années de la création de Rome il est
certain que des associations se formèrent, tant l'idée d'association est naturelle à l'homme. En effet, les historiens
nous disent que Numa organisa les collèges d'artisans 1 •
Ce serait d'ailleurs d'après les commentateurs dans un but
éminemment politique que ce roi se serait ainsi préoccupé
de l'organisation du travail. li réu nit les ouvriers du même
métier en collège et leur donna une divinité commune pour
faire fon dre en une seule race le peuple Romain et le peuple Sabin , qui venaient de se réunir. Il avait compris
qu'entre des gens unis ensemble par le lien d'un intérêt
commun , d' une religion commune, des relations fréquentes d'amitié s'établiraien t qui suffiraient pour faire disparaître les ditlérences de race et les haines en résultan t.
Faut-il admettre cette raison poli tique pour supposer
que Numa créa complètement les collèges d'artisans? nous
ne le pensons pas et il semble plus rationnel et plus vraisemblable de croire que Numa ne fit que consacrer un
état de choses existant déjà en Etrurie. Les Romain s, en
effet devaient être moins civilisés que les Sabins et ne for maient qu'un peuple de pasteurs. Chez eux l'agriculture
était seule en honneur et l'industrie était fort dédaignée.
Ce fut là d'ailleurs une tendance qui ne fit que s'accentuer; et en effe t Cicéron ne s'érie-t-i l pas, dans son traité
-7De officiis : « Opifiœs omnes in sordida arte versantur nec
enim quidquam ingenuum potest habere officina 1• » D'autre
part Salluste met sur le même rang les artisans et les
esclaves : « Opifices et servitia ad Lentulum eripie-ndum
sollicitabant. » Ce dédain que les textes nous expriment
fut certainement une des causes du peu de splendeur des
collèges d'artisans, dont les résultats ne furent pas ceux
qui auraient dû être produits. Nous aurons d'ailleurs à
revenir sur ce point.
Quels furent les collèges d'artisans créés par Numa?
M. Dezobry en donne une longue énumération. D'après cet
auteur on aurait réuni suivant le genre d'industrie de chacun les ouvriers en collèges de musiciens, d'orfèvres, de
charpentiers, de teinturiers, de cordonniers, de tanneurs,
de forgerons, de potiers de terre, de foulons, de pêcheurs,
d'ouvriers en airain, etc ... 2 • Cette liste est certainement
un peu exagérée et la division du travail ne s'était pas encore vraisemblablement assez répartie pour que l'on put
compter dans la Rome naissante un nombre de corps de
métiers aussi considérable. La civilisation n'existait pas
encore et chacun pourvoyait lui-même à. ses propres besoins . C'était l'époque heureuse où les femmes pétrissaient,
faisaient cuire le pain et tissaient les étoffes pour les vêtements de la famille.
D'après Pline l'Ancien 3 , Numa Pompilius aurait constiDe officiis, 1-B.
Dezobry, Rome au. siècle d'Auguste, t. I, p. 24-1.
s Pline, IIist . naturel. l. 18, c. 11.
1
2
l
Plutarque, Vie de Numa .
�-8
tué les huit collèges des œrarii, des figuli, des tubicines, des
msrificines, des {abri tignarii, des linelores, des suiores et
des futwnes . Cette énumération plus restreinte est peutêtre plus exacte.
On voit par là qu e les métiers les plus anciens à Rome
sont ceux qui se rapportent au culte des dieux, tels que
les tubicines, les joueurs de flûte, dont la présence était
indispensable dans les cérémonies religieuses, et cenx qui
sont nécessaires ponr la guerre, tels les œrarii et les {abri
tignarii. Ces dernières professions étaient de beaucoup les
plus considérées; aussi Servius Tullius leur réserve-t-il
le premier rang d:rns l'institution de sa grande mobilisation
militaire. Les charpentiers et les forgerons étaien t rangés
dans la première classe du penple romain et votaient avec
les seniores. La raison de celte préférence s'explique aisément: il faot en efTet dans les armées des ouvriers pour
faire les armes et des ouvriers pour transporter les machines de guerre. C'est pourquoi Tite Live disait : « datum
munus ut in bello machinas facerent 1 • »
Qoaot aux autres ouvriers, ils furent confondus dans
l'organisation de Servius Tullius dans la dernière centurie
'
celle <les prolétaires qui ne portaient pas les armes.
Pendant toute cette période de la royauté, il est certain
que le droit d'association, et partant celui de réunion, furent
absolument libres. Aussi voyons-nous se former ces collèges particoliers de vicani et de pagani que nous retrouverons plus tard sous le nom de collegia compilalicia. Ces
-9unions fondées dans un but religieux commirent-elles des
excès? ou bien les colléges d'artisans, mécontents contre
Tarquin qui avait fait venir d'Etrurie des ouvriers pour la
constructions des grands travanx entrepris à Rome 1 , manifestèrent-Ils leur hostilité contre le dernier roi? C'est difficil e à préciser, mais ce que nous savons, c'est que ce
2
monarque supprima les collèges de vicani et de pagani •
C'est là la première restriction apportée à la liberté
d'association et encore ne fut-elle pas d'un grand elfot,
car il est vraisemblable que ces corporations ainsi supprimées ne furent jamais dissoutes et qu'en s'unissant les
unes avec les autres, elles furent la cause de la chute de
Tarquin.
Préciser exactement la constitution, la vie intérieure,
Je rôle juridique ou économique des collèges pendant cette
première période est chose absolument impossible.
D'ailleurs, au point de vue économique, il paraît hors
de doute que ces associations n'ont pas dû briller d'un
vif éclat, tant à cause de l'état primitif de civilisation dans
lequel se trouvait Rome, qu'à raison du discrédit et de la
déconsidération qu'entraînaient les profes. ions manu elles.
Nous avons déjà eu des preuves certaines de l'aversion des
Romains pour les artisans, et cette antipathie devait encore
s'augmenter du dédain d'un peuple belliq ueux pour ceux
qui ne pouvaient pas porter les armes,
Au point de vue juridique, nous verrons plus t~rd que
i
l
Tite Live, 1. I.
2
Ti10 Live, 1, 50.
Denys <l'Hal. 1. IV
�-10 -
toutes les fonctions de la vie, ainsi que l'exercice de tous
les droits étaient absolument interdits aux collèges.
Pendant toute cette période, les collèges ne pouvaient
pas en effet posséder un patrimoine, contracter des obligations ou ester en justice, à raison des empêchements
apportés par la théorie de la non représentation qui ne
doit disparaîlre de l:i. législaLion que sous Ju stinien. Comment dans ces conditions les associations auraient-elles pu
devenir assez puissantes pour arriver aux améliorations
que nous rêvons de leur voir accomplir ? Comment dès
lors auraient-elles pu donner un grand essor au mouvement
de civilisation qui commence à poindre dès cette époque?
CHAPITRE Il.
OC8 collège8 d'arti8ao8 8008 la R épublique
A la chute de Tarquin et à l'avènement de 1a République, les associations, - si tant est d'ailleurs que les mesures prohibitives du dernier roi les ait réellement diminuées, - se multiplient et prospèrent de plus en plus.
C'est ainsi que nous voyons à cette époque les municipes
se fonder, et dans chaque municipe se créent des corporations ouvrières. A côté des collèges d'artisans , nous trouvons les collèges sacrés des prêtres. Nous assistons à la
c.réation dans les classes hautes, chez les patriciens, de
confréries pieuses entretenant un culte particulier à côté
du culte public et général.
Ce devait être là. une occasion de réunion recherchée
entre personnes de même condition, de goûts semblables :
t: Je faisais des banquets avec mes sodales, dit Caton, à
très peu de frais d'ailleurs 1 • » Il s'établit entre les diJJéi
Cicéron, De Senectute. Xlll.
�-
12 -
rents membres de l'association un certain droit, le jus sodalitii. L'expression se trouve chez les anciens auteurs.
Ovide dit:
Propertius
Jure sodalitii qui mihi junctus erat 1•
Cicéron, plaidant pour Norbanus, dit qu'il devait le
considérer comme un fils parcequ'ils étaient unis par les
liens d'une sodalitas 2 • II était défendu à un sodalis de se
faire l'accusateur d' un de ses confrères dans un procès
politique 3 • Enfin la loi repetundarum lui interdisait d'accepter les fonction s d'avocat pour l'adversaire de son sodalis et le sodalis du demandeur ne pouvait pas être juge 4 •
A côté de ces asso~iatio n s d' un ordre relevé, apparaissent les collegia compitalicia , qui pareils aux collegia vicanorum et paganorum supprimés par Tarquin sont composés
des gens de la basse classe qui se réunissent à certains
jours autour d'un e statue grossièrement taillée à l'angle
d'une rue. On immolait des victimes et on fêtait par des
jeux - les ludi compitalicii, - le di eu qui servait de patron.
Il n'y a d'ailleurs dans ces sociétés à proprement parler que des faits de réunion. Les gens qui se grou pent
ainsi ne sont pas liés entre eux par des intérêts communs,
Tite Liv. II cl. 10, 1-5 el 46.
Cii;. De oratore, Il, 49.
3 Cie. Pro Cœtio, II, 26.
t
- 15 signe caractéristique, des véritables associations. Ces réunions devaient du reste commettre des excès tels qu'ils
entraîneront la perte du droit d'association.
Les associations ouvrières proprement dites constituées
par Numa, créées pour permettre aux associés de se concerter sur leurs intérêts communs, continuent à se développer concurremment avec les sociétés dont nous venons
d'examiner le caractère général.
A ce moment là. en effet les droits de réunion et d'association sont absolument libres et les réunions avaient
trouvé la véritable formule qui doit limiter la liberté pour
les hommes de s'unir les uns aux autres, pour faire ensemble ce qui est permis à chacun isolément : « His (sodalibus)
autem potestatem facit Lex , pactionem quam sibi ferre velinl,
dum ne quid ex publica lege corrumpant 1• 1> Les collèges
peuvent se donner tous les règlements qu'ils voudro~t
pourvu qu'ils ne portent pas atteinte à la liberté d'autru1.
Tel est le précepte édicté par la loi des Douze-Tables. C'~st
là nous l' avons dit la meilleure façon d'entenùre l'exercice
du droit d' associati on et les efforts de notre société moderne tendent vers ce but.
La République se montre dès l'origine très favo rable aux
associations ainsi libremen t formées . el c'est ainsi qu' une
des premières lois que fit voter Valerius Public?la fut un~
loi dégrevant \es artisans pauvres des lourds impôts qui
pesaient sur eux.
2
i
Mommsen de collegiis, p. 4.
i
Dig. l. XLVll, î:2, 1. L.
�- 14 Cette loi, dit Plutarque, contribua beaucoup au développement de l'industrie.
Nous arrivons d'ailleurs à la période où Je nombre des
corporations va en augmentant à raison des progrès de la
civilisation. C'est ainsi qu'apparaissent successivement les
collèges des barbiers et des boulangers.
Est-ce à dire que pendant la République les corporations jettent un écht plus considérable que sous la royauté
et que leur situation économique s'améliore ? en aucune
façon. La civilisation augmen te, il est vrai, avec les conquêtes de Rome, mais les artisans sont dans un état tout
aussi misérable que par le passé. Le dédain des citoyens
Romains pour le travail manuel ne devait jamais disparaître et suffisait pour maintenir à. un degré très inférieur
la condition des ouvriers.
D'ailleurs si Rome, par ses co nquêtes, devenait plus
riche, et si mise en contact avec des populations plus civilisées, la vieille cité prenait le goût des jouissances du corps
et de l'esprit, il se produisait dans son sein une révolution
de nature à faire sombrer l'industrie nationale. La so umission de la Sicile, de l'Espagne et de l'Afrique amena dans
la Ville une foule innombrable d'esclaves de tous genres.
Désormais les collèges d'artisans ont à. lutter contre une
c0ncurrence redoutable, le travail servile.
Comment s'organisa le travail des esclaves? Il est certain, tout en tenant compte d'ailleurs des exagérations des
historiens sur ce point, que, grâce à. la guerre, les esclaves
coûtaient très bon marché et que tous les riches citoyens
avaient des familles très nombreuses. C'est ainsi par exem-
-
i?S -
ple qu'on cite des familles d'esclaves s'élevant à. 400 personnes, comme celle de Pedanius Secundus 1 , et Pline
parle d'un certain Crecilius Claudius, qui tout en ayant
beaucoup perdu dans les guerres civiles, laissa à sa mort
entre autres richesses quatre mille cent seize esclaves 2 • Il
est bien évident que cette quantité d'hommes ne pouvait
pas travailler pour le maître seul, et que l'on songea vite à
\irer profit de leurs servie.es; c'est alors que l'on vit des
esclaves travailler pour le public au profil du maître qui
devenait entrepreneur de services, et ce fait nous est rév'3lé
par les actions exercitoria et institoria qui sont créées pour
permettre d'atteindre le maître derrière les esclaves qui
le représentaient.
D'autre part les textes nous signalent un contrat de
louage de service : les esclaves étaient employés par des
étrangers qu i payaient un salaire au patron. Ces ouvriers
esclaves devaient être préférés aux ouvriers libres, car ils
étaient plus dociles, le maître ayant sur eux droit de vie
et de mort, et d'au tre part ils coûtaien t moins cher. Aussi,
nous le répétons, la concurrence faite aux artisans libres
fut-elle redoutable el la condition de ceux-ci, de plus en
plus méprisée, devint fort misérable. D'autant que la même cause se produisant dans les provinces de tous les coins
de l'empire romain, tous les malheureux ouvriers attirés
par l'espoir de vivre plus facilement dans la grande ville
affluaient vers Rome. Dans de semblables conditions, le
l
2
Tac. Ann, XIV, 42.
Phne, XXXIIl, 1.7.
�-16travail devait forcément arriver à. manquer, et nous trouvons sur le Forum toute une populace nombreuse qui sera
un élémen t de trouhles le jour où, comme cela devait se
produire, elle sera endoctrinée et enregimentée par les
fauteurs de guerre civile.
Des associations nombreuses se forment à ce moment-là,
ou plutôt tous ces déclassés, tous ces prolétaires sans ressources, usent de leur droi t de réunion ; les collegia compitalicia sont fréquents et nombreux ; ils ne se composent
pas d'une seule catégorie d'ouvriers de la même profession,
comme les véritables collèges industriels, ils réunissent
tous les habitants d' un même quartier. Leur but primitif
avait été de fêter en commun les dieux , mai s les jeux dégénèrent vite et ne ne sont plus qu' un prétexte aux débauches les plus éhontées et aux excès les plus grands ; et en
l'an 586 le Sénat donna l'ordre aux consuls de dissoudre
le collège des Bacchanales.
Ces réuuions nombreuses de gens, sans élveu pour la
plupart, vivant con tinuellemen t sur le Forum, devaient
nécessairement jouer un rôle dans la vie politique, et nous
avons la preuve que ces réunions intervenaient souven t
dans les élections. Cicéron en écrivant à. son frère : «Tu
as pour toi les publicains, l'ordre équestre tout entier, un
grand nombre de municipes , beaucoup de gens de tout
rang que tu as défendus, et quelques collèges 1 >, indique
bien en effet que les collèges avaient une certaine influence
électorale. D'ailleurs la loi romaine suffit à démontrer
1
Cicer. De petitione consulatus .
- 17 comment les associations pouvaient se former pour faire
parvenir un ambitieux. La brigue étai t interdite au candidat sous la sanction de diverses peines, mais la loi ne punissait pas les complices. De sorte que des associations se
formai ent pour briguer en faveur d'un candidat.
A partir de ce moment, l'histoire du droit d'association
se confond avec l'histoire des troubles de Rome. Mariu s,
le premier, comprit de quelle utilité pouvaient être ces
réunions de factieux, et c'est sur elles qu'il s'appuya pour
entamer la lutte contre le Sénat.
Après son exil, le Sénat, elJrayé des dangers que loi
suscitait cette agglomération de prolétaires, que les lt1di
compitalicii réunissaient périodiquemen t, supprima par un
sénatus-consulte, rendu sous le consulat de Crecilius Metellus et Q. Marcius Rex, tous les collèges, "prœter pauca
atque certa quœ utililas civitalis desiraret ut {abroru.m lictorumque 1 . » La date de ce sénalus-consulte est contestée,
mais généralement on se plaît à croire qu'il fut rendu en
l'an 686 de Rome 2 • Il résulte de la citation d' Ascooius
que la mesure de rigueur du Sènat frappa surtout les
réunions des faubourgs, bruyantes et dangereuses, plutôt
que les collèges d'artisans, qui continuèrent d'exister.
Ce qui d'ailleurs confirme cette opinion, c'est la lutte que
ces réunions soutinren t pour le rétablissement de leurs
solennités. C'est ainsi que nous voyons, en 693, un tribun
l
Asconius in Pisonom, IV.
2
Mommsen.
2
�-
du peuple arrêté par Q. Crecilius Metellus Celer pour avoir
tenté de rétablir les jeux de carrefour.
Clodius dans sa lutte contre Cicéron, fut plus heureux, car il réussit, en 58, sous le consulat de Calpurnius
Piso Cresonius et de Gabinius, à faire célébrer les compitales par son sodalis Sextus Clodius, et fit rendre une loi réta1
blissant les collèges supprimés et les jeux compitaliciens •
Son triomphe, d'ailleurs, ne fut pas de longue durée.
Cicèron exilé revient à Rome, grâce à son ami le consul
Lentulus Spenther, et le jour même le Sénat décidait :
« Ut sodalt'tates decuriatique discederent ; lexque de iis ferretur, ut qui non discessisselit ea pœna quœ est de vi, tenerentur 2 • ])
Les collèges, malgré ce sénatus-consulte, ne disparaissent pas à Rome, et la preuve en est la loi votée sous le
consulat de Crassus et de Pompée, la loi Licinia de sodalitiis, en oo av. J.-C. Ils jouent encore un rôle dans la lutte
entre Pompée et César, et le jour où celui-ci s'empare du
pouvoir, il promulgue une loi supprimant toutes les associations : ([ Cunela collegia prœter antiquitus constituta dixtraxù a. l> Auguste renouvela la prohibition de se réunir
en collège.
La liberté d'association avait donc sombré, entrainée par
les excès des réunions constituées pour la brigue électorale.
Dion Cassius, 38, 13.
Ad Quint. fratrem, 2, 3.
3 Suétone, Cœsar, 42.
-
18 -
19 -
D'ailleurs, ainsi que nous l'avons. déjà remarqué, toutes
ces prohibitions n'atteignent pas les collèges d'artisans,
objet principal de notre étude. Il est certain que la plupart
des artisans faisaient partie des !'éunions contre lesquelles
des mesures restrictives et prohibitives étaient prises ; nous
avons déjà étudié les causes qui amenèrent ce résultat,
mais d'autre part il résulte de ce que nous avons vu, qoe
les corporations ouvrières continuèrent de subsister. Le
sénatus-consulte de 686 laisse subsister les collèges liclorum et fabrorum. Nous savons de plus par Cicéron, que les
collèges restaurés par Clod ius se recrutaient surtout par
des esclaves 1 ; or l'organisation du travail servile ne permet pas de supposer que les esclaves pouvaien t faire partie
des collèges d'artisans. Comment en efiet auraient-ils pu
payer leurs Qo tisations, et entrer dans une association ouvrière sans l'assentiment de leur maître? Enfin, la loi promulguée par César nous est la meilleure preuve de l'existence à ce moment-là de notre institution, car la loi excepte les collegia antiquitus constituta, et cette exception est
évidemment portée en faveur des associations dont on attribuait la création à Numa, c'est-à-dire aux associations
d'artisans.
Si d' un e part les membres de ces associations jouaient
un rôle dans les tristes périodes que nous venons d'examiner, en s'enregimentan t individuellement dans les réunions dont nous aYOns vu les agissements, il est certain
d'autre part que les associations en tant que collèges, no
l
2
l
Cie. Pro Sexto, 15 ; Pro Domo, 5.
�- 20 se départirent pas de leur but et qu'elles continuèrent à. se
préoccuper seulement des intérêts profess ionnels, et c'est
ce qui explique les exceptions faites en leur faveur.
Faut-il conclure de là. que la liberté pour les ouvriers
de s'associer ne subit pas le contre-coup des excès de la
liberté de réunion? Non, si les collèges ouvriers déjà exis-.
tants continuent d'exister, nous allons voir qu e la liberté
d' en créer de nouveaux est supprimée, les empereurs
pourront maintenant s' immiscer constamment dans les
affaires des collèges existants, et peu à peu ils finiront par
établir dans chaque corporation une règlementation si minutieuse, que l'industri e finira par décliner pour disparaître au moment des invai;ions barbares.
En résumé donc, sous la République, liberté absolue
pour les ouvriers de se réunir en corporations. Leur droit
n' est limité que par le respect qui est dû aux droits d'autrui. Puis à. raison des excès commis par des collèges entre les membres desquel' aucun lien d'association n'existe,
et avec lesquels on confond les véritables associations,
leur droit est restreint et finit par être supprimé.
Au point de vu e économique, les collèges d'artisans
auraient dû certainement jouer un rôle brillant, sous un
régime aussi libéral. lis auraient dù déterminer des progrès sensibles dans les dilTérentes industries et assurer
une condition heurense aux ouvriers. Nous nous sommes
rendu compte que le dédain des Romains à. l'endroit des
classes d'ouvriers et la concurrence du travail servile,
avaient eu pour effet d'empêcher ces résultats.
Pendant toute cette période de la République, il est
-
21 -
encore assez difficile de déterminer exactement comment
étaient constitués et fonctionnaient les collèges, les documents manquent à. peu près absolument, mais il est permis de croire que ces associations, qui au point de vue
juridique n'avaient aucune existence, dont la personnalité morale n'était pas encore créée, ne devaient avoir
qu'une constitution rudimentaire. S'il en eût été autrement, il eût été difficile que les progrès économiques
n'aient pas été plus appréciables.
Au point de vue juridique, les colléges n'avaient aucun
droit. La personnalité ne pouvait pas se constituer, car
elle n'apparaissait pas d'une faço n manifeste, las collèges
n'ayant pas besoin d'un e autorisation préalable. D'ailleurs
eut-on admis que ces collèges d'artisans étaient des personnes morales avec les rigueurs des principes de l'ancien
droit, ces personnes morales n'auraient pu exercer aucun
des droits juridiques. La représentation n'était en eITet
pas admi se et partan t il n'y aurait eu pour les collèges aucun moyen d'acquéri r aucun droit. Lorsqu'un coll ège
possédait une propriété quelconque, c'était seulement parce que les dilTérents associés s'étaient réunis pour l'acquérir, et la situation des biens était une indivision existant
entre tous. En un mot, le collège ne pouvait pas avoir un
patrimoine distinct de celui de ses affidés.
Nous verrons comment on arriva à. donner les fonctions
juridiques aux personn es morales.
�-
25 -
et nous avons vu que
parmi ces collèges autorisés doivent forcément être comprises les sociétés ouvrières. D'ailleurs les empereurs étaient
trop bons administrateurs pour se priver des services des
populations ouvrières.
Mais une fois posé ce principe de droit d'association
pour les ouvriers, il faut se demander dans quelles conditions ce droit s'exercera? Sera-t-il absolu comme pendant
les deux. périodes qu e nous venons d'examiner , ou bien
au contraire sera-t-il restreint par la volonté impériale?
La forme seule du gouvernement dictatorial suffit à indiquer que les empereurs ne pouvaient pas abandonner leur
droit à s'immiscer dans la constitution et l'existence des
corporations. Pour les collèges déjà existants, on les laisse
subsister tels qu'ils sont, en se rèservant de les dissoudre,
au cas où ils deviendraient des réunions illicites; pour ceux
qui se form eront dans l'avenir , l'autorisation du prince
deviendra absolument nécessaire.
L'historique du droit d'association que nous allons
faire durant cette dernière période nous révélera toute
une série de dispositions prises par le pouvoir législatif ,
tantôt pour supprimer et restreindre la liberté, tantôt pour
réglementer l' organisation des corporations.
Et d'abord il faut remarquer qu'en dehors de toutes
les constitutions, édits et mandements des empereurs,
un sénatus-consulte paraît dominer la matière et être en
quelque sorte la loi organique de la liberté d'association.
Quelle en est l'origine et la date? il serait difficile de l'établir, mais il es t cité par Marcien dans la loi 1 § 1, L. 47,
« prœt.er antiquitus constituta
CHAPITRE III.
Dc8 collègc!t d'aa•tl8ao8 80U8 l' Empire
SECTION
1.
ll is t or i que.
On dit généralement que sous l'empire Romain la
liberté d'association fut su pprimée. Il faut expliquer le
sens et la portée de cette propositi on.
Il est certain que les empereurs , instruits par l'expérience, essayéren t de se prémunir contre les associations
qui , sous prétexte de réunion, avaient joué un rôle si néfaste pendant la triste et sanglante histoire des tro ubles.
Aussi ces réunions furent-elles dissoutes et leur reconstitution sévèrement prohibée. Dorénavant les textes conti endront sournnt l' exprebsion de collegia iUegitima. Mais si
certains collèges sont illégitimes, il va de so i que certains
autres sont autorisés et continuent à subsister. Les term es
mêmes de la lex Julia prouvent bien qu' Auguste permet
1' existence de certaines association s, car tous sont dissous
~,
�-
24 -
t. ?l~. et dans une autre loi au même titre, la loi 5 § 1.
Souvent aussi dans les inscriptions où des associations
sont mentionnées, on rencontre ces mots : « Quibus ex S.
C. coïre licet 11, et c'est ainsi notamment que dans une
longue inscription, découverte à Lavinia en 1816, et intitulée : « lex collegii salutaris cultorurn Dianœ et Antinoï 1> ,
l'acte de société est précédé dans cette inscription par un
article d' un sénatus-consulte : « Caput ex S. C. P. R. 1>
Les termes mêmes de cet article, à raison de leur généralité, prouvent bien qu' il s'agit d'une loi applicable à
toutes l ~s associations. Il est permis de croire qn e ce sénatus-consulle avait été rendu pour Rome seule, et que la
plupart des rescrits des empereurs eurent pour but d' en
étendre l'application dans les prov inces.
Etablir la portée de celle loi est malheureusement impossible, puisqu'elle n'est co nnue que par un ex trait
assez court, mais il est vraisemblable qu'elle ne fait qu e
poser les principes qu e nous venons d' énoncer et que tout
dans la législation impériale confirme.
A cô té de cette loi générale, nous voyons chaque empereur, selon ses tendances plus ou moins libérales, promulguer un document législatif pour se prémunir contre
les associations.
Après Auguste, Claude, à son tour, les supprime. Mais
sa décision nous prouve une fo is de plus que la haine des
empereurs pour les associations venait de la crainte du
droit de réunion ; c'est ainsi que par la même décision on
ferme les cabarets où se réunissent les buveurs, on défend de vendre de la viande cuite, on châtie les oontreve-
- ~?S nants Ce qui du reste démontre que la mesure de Claude n'était pas dirigée contre les corporations ouvrières,
c'est la théorie émise par quelques auteurs soutenant qne
cet empereur n'avait voulu viser que les associations de
1•
juifs ~.
Néron continue le système d'interdiction de ses prédécesseurs et se mootre à son tour sévère envers les associa..
tions qu'il confond avec les réuuions. C'est ainsi que
Tacite nous racoote qu'à la suite d' uo affreux carnage entre les habitants de Nucérie et de Pompeï, « Collegiaque
quœ contra leges instituerant dissoluta 3 • >
Sous Trajan, un fait raconté par Pline, indique bien que
la crainte des empereurs était surtout de voir des hommes
se réunir et occasionner à on moment donné des émeutes
et des séditions. Un incendie avait éc.laté à Nicomëdie,
alors que Pline était go uverneur de Bythinie, et avait causé
de grands dégâts. Celui-ci, pour éviter de pareils accidents,
avait donné des seaux et des tuyaux à la ville et songea à.
organiser un corps de pompiers; mais auparavant il en référa à l'empereur , en lui indiquant qu' on pourrait réunir
cent cinquante ouvriers, qu'il serait facile de surveiller
à raison de leur petit nombre. Trajan refusa, parce qu'il
se souvenait que la provin ce avait été autrefois factieuse,
et qu' il était dangereux de constituer une corporation quelconque, si peu nombreuse fut-elle"·
Dion Cassius, Hist. Rom. 606.
l\Iomsen, De colleg. § 11 .
3 Tac. Ann. 14., 17.
.1 Pl. op. X, ti2 ot 43.
1
2
�- 26 En somme toutes les prohibitions ne touchent à proprement parler que les associations qui peuvent faire craindre pour la stabilité du gouvernement impérial, exposé
plus que tout autre à succomber devant une révolution de
la rue. Mais en revanche les collèges d'ouvriers ne sont pas
soumis à des difficultés rendant leur existence impossible.
S'ils sont surveillés et si on empêche les nouveaux collèges
de se constituer, les anciens continuent à subsister, et les
empereurs, même ceux qui redoutent le plus la liberté
d'association, leur accordent des faveurs, Claude concède
des privilèges aux naviculaires, - les marins transportant
le blé à Rome - ; ils ont droit à une prime en cas de
voyage heureux, et à une indemnité en cas de naufrage.
Trajan lui-même règlemente le corps des boulangers.
Sous le règne d'A drien, les corporations semblent fort
en faveur. Cet empereur s'occupe dans ses voyages d'embellir les villes et il est accompagné par des cohortes d'ouvriers divisés en centuries.
Marc-Aurèle et Septime Sévère n'accordent aux ouvriers l'autorisation de se réunir que dans des cas très
restreints : a: Paucis in causis concessa sunt corpora i. J> Et
cependant ce dernier au t•>rise les collèges à recevoir des
legs 2 et leur donne la potestas manu,mittendi.
Alexandre Sévère va encore plus avant dans cette voie
favorable aux ouvriers : il crée des fabriques à Rome, il
accorde de grands privilèges aux marchands qu'il veut
1
2
Dig. 1. III, t. 4, 1. 1. p.
Dig. l. XXXIV, lit. v, 1. 20.
27 attirer 1 , il organise en collèges presque tous les métiers.
C'est l'époque où nous voyons le plus grand nombre de
corporations. Les inscriptions révèlent que dans toutes les
provinces les collèges d'artisans sont en pleine vigueur, et
dans le triomphe de Gallien, après le massacre de Byzance,
les associations d'ouvriers, avec leurs bannières, viennent
immédiatement après l'armée.
Deux faits, se reliant d'ailleurs de très près, sont la
cause de ce regain de faveur dont jouirent les collèges d'artisans. Le premier, c'est la diminution du nombre des esclaves lorsque les guerres cessèrent; car ils ne furent plus
alors fournis que par la naissance, sans compter que la
tendance à aiTrancbir les esclaves devint telle que l'on fut
obligé de prendre des mesures restrictives pour empêcher
les affranchissements. C'est à cette époque que furent portées les lois !Elia Sentia et Juriia Norbana. Ces affranchissements euren t pour elîet de jeter dans les rangs des sociétés omTières un grand nombre de membres , ét de plus
d'augmenter considérablement le nombre des prolétaires
-
â Rome.
D'autre part, l' histoire nous apprend que l'on avait pris
l'habi tude de faire des distributions de vivres au peuple.
c'était là un des moyens de gouverner des empereurs. Rien
n'est plus aimable que le peuple quand il a mangé. Or depuis la fin de la République, les prolétaires s'étaient très
facilement accoütumès à vivre aux frais de l'Etat ; les empereurs durent con tinuer ce système de distributions qui,
i
Lamp. Alex. Sov. 22.
�-
-
28 -
d'abord intermittentes, dev:tient devenir régulières. A côté
de ces distributions, l'usfge introduit des largesses, on distribue à la plèbe des vins fin s. Tibère, pour célébrer son
triomphe sur les Germains, fait dresser mille tables en
plein air, chaque convive reçoit soixante-quinze francs.
Néron jette du haut de la basilique Julia des billets donnant droit à des animaux, à des esclaves ou à des bijoux.
On comprend sans peine que ce peuple ainsi gàté serait
devenu furieux si l'on avait négligé de lui servir ses repas;
aussi le gros souci des empereurs fut-il de songer constamment à l'approvisionnement de Rome. De là les faveurs
accordées aux corporations d'ouvriers destinées à faire cet
approvisionnement, et voilà le double fait qui nous fait
assister à cette nouvelle splendeur des colléges d'artisans.
D'ailleurs cette splendeur ne fut qu'apparente et de
courte durée, car il est des faveurs dont on meurt. L'immixtion des empereurs devait forcément amener la ruine
des corporations. Nous avons vu le pouvoir pendant un
temps obligé de se montrer généreux envers les collèges
dont les circonstances lui avai t démontré la nécessité ,
mais toujours poussé par sa hain e des réunions, il vou lut
éviter les révoltes populaires en enrégimentant tous les
ouvriers dans les corporations et en leur sup primant la
liberté individuelle.
A celle époque, en effet, l'ouvrier devient l'esclave de
son métier, et nous savons que l'artisan ne peut, dans aucun cas se soustraire aux rigueurs de son état. Si las de
son existence misérable, il cherche dans la fuite un moyen
de se soustraire à cet esclavage, il est poursuivi, traqué et
29 -
obligé de venir reprendre ses chaines. A ce point de vue
notamment, les ouvriers des fabriques impériales sont
dans une situation réellement attristante. De même qu'autrefois dans nos bagnes les forçats étaient marqués au fer
rouge, pour éviter leur évasion, de même les ouvriers de
l'Etat portent un signe distinctif, qui permet de les rejoindre dans leur fuite. Ils sont marqués au bras avec un fer
rouge 1, et comme Je vêtement pourrait dissimuler ce stigmate, on imagine dans la suite de leur imprimer le nom
de l'empereur sur la main 2 , Des amendes très fortes sont
prononcées contre ceux qui cachent dans leur maison des
ouvriers fugitifs.
Ces malheureux ouvriers n'avaient pas même la libertè
du mariage. Il leu r était interdit d'épouser des femmes
étrangères a leur fabrique, et de même il était interdit aux
filles des ouvriers d' un métier, d'épouser d'autres hommes
que ceux qui avaient la même profess ion que le père.
Si l'on examine la situation des ouvriers faisant partie
des corporations nécessaires à la subsistance du peuple,
on se convainct vite que la situation qui leur était faite
n'était pas de beaucoup préférable à celle des ouvriers impériaux. Il est certain que ces corporations étai~nt devenues si nécessaires à l' existence même de l'empire, que
les empereurs devaient se montrer fort tyranniques à leur
égard pour éviter leur disparition. C'est un fait à constater que plus un gouvernement s'ébranle, plus il devient
Coù. Theod. liv. X, t. xxu, l. 4-, ann. 388.
2 Cod. Just. , 1. VI, iil. XLll, 1. m.
1
�-
50 -
despotique. Comme les autres ouvriers, ils ét.aient les esclaves da métier.
D'abord, au poiot de vue du recrutement, les afTrancbis
possédant au moins trente livres étaien t forcés par une 101
de l'an ?S68 de faire partie du corps des chargeurs. Et ceux
qui avaient commis une faute légére étaient enregimentés
dans la corporation des boulangers 1• Le fils d'un boulanger était fatalement, par sa naissance, destiné à la même
profession que son père. Celui qui épousait la fille d'un
boulanger, devenait aussi membre de la corporation et
le divorce même ne lui rendait pas sa liberté.
D'autre part une foule de lois nous apprennent que les
artisans cherchaient, comme les ouvriers des fabriques, à
se débarraser de ces servitudes par la fuite, et les empereurs donnent les ordres les plus sévéres pour ramener
les naviculaires, les boulangers et les membres de toutes
les corporations de Rome.
Enfin il est certain que les mêmes mesures étaient prises contre les membres des collèges libres. Chacun dans
l'éta t romain avait son poste qu'il ne pouvait pas déserter.
L'ouvrier était donc privé de sa liberté individuelle dans
une association qui elle-même n'était pas libre. Que pouvaient donc produire comme résultats économiques des institutions aussi mal conditionnées? Rien de bon, sans doute.
Un développement de l'industrie, qm peut-être aurait
arrêté la décadence de l'empire Romain, sans cependant
pouvoir empêcher son anéantissement et sa ruine au mili eu
l
Cod. Theod . IX, LX, 1. 9, ann. 368.
- 3t des invasions, ne pouvait être produit par des corporations
à qui toute liberté d'initiative était interdite et qui étaient
condamnées, de par la force des règlementations, à suivre
les errements de la routine, avec la crainte de disparaitre
d'un jour à l'antre et de voir leurs capitaux confisqués par
l'Etat.
Au point de vue de l'amélioration de la situation des
ouvriers, on forçait les artisans à embrasser telle profession plntôt que tell e autre, et on ne leur permettait pas
d'en changer. Or les principes de l'économie politique
démontrent qu e chacun doit se livrer au travail pour lequel
il a le plus de disposition, c'est le moyen d'obtenir de bons
ouvriers , aimant leur métier et s'y consacrant volontiers.
D'ailleurs ce qui à Rome devait toujours con tribuer à rendre très dure la situation du travailleur, c'était ce mépris
profond du travail que nous avons constaté pendant les
premières périodes de son histoire et que nous retrouvons
encore à la fin de l'empire.
Enfin et pour achever d'énumérer toutes les causes qui
amenèrent la disparition complète des associations ouvrières dans la ruine de l' em pire, il nous faut encore mentionner les lourdes charges que l'impôt faisait peser sur la
classe laborieuse.
La conséqueor:e des générosités des empereurs et de
leurs distributions devait être une fiscalité exagérée. Pour
satisfaire à des dépenses aussi considérables, il fallai t beaucoup d'argent et l'on s'en procurait en créant le plus grand
nombre possible d'impôts. Caligula et Vespasien mirent
une taxe sur quelques professions. Alexandre Sévère
�- 351 l'étendit à toutes les professions : c'était l'aurum negociatorium. Constantin augmente la liste des professions soumises à. l' impôt et taxe même les filles publiques et les
mendiants. C'est sous son règne que cette contribution est
complétement modifiée 4uand à la perception et prend le
nom de chrysargire, ou celui d'or lustral parce qu'elle était
perçue chaque lustre.
Le chrysargire, à raison de son mode de perception, fut
on impôt des plus durs. A l'origine il devait être perçu
tous les cinq ans, à chaque nouveau lustre , comme l'indiqu e le nom d'or lustral, sous lequel il est quelquefois
désigné dans les textes, mais en réalité il était payé tous
les quatre ans. Dès qu'arrivait le commencement de la
quatrième année, l'empereur rendait un édit par lequel il
en ordonnait la perception ; des collecteurs, choisis parmi
les artisans, Je repartissaient d'une façon arbitraire sans
doute, entre les contribuables. On ne connaît pas la quotité de cet impôt, mais il est facile de comprendre qu'il
devait peser trés lourdement sur les malheureux ouvriers.
Il est certain que celoi qui gagne sa vie au jour le jour ne
peul pas arriver à réaliser des économies, à se constituer
une épargne. Si tou s les mois ou tous les ans il est obligé
de donner une somme modique à l'Etat, il pourra, à la
rigueur, à force de sacrifices, arriver à se la procurer, mais
si pendant quatre a~s on ne loi réclame rien, et que dans
Je courant de la qaatriëme année on exige de lui une somme qualre fois plus forte, et surtout s'il lui faut la verser
en une seule fois entrt3 les mains du fi sc. il lui sera matérIBllement impossible de faire face à semblable exigeance.
,.... 53 -
Il cherchera à gagner c\u temps, mais le fisc impérial ne se
paye pas avec de bom~es raisons, il poursuit rigoureusement les mauvais payeurs, et c'est ee qui noas explique
pourquoi tous les autenrs constatent que la levée du chrysargyre amenait une misère éponvantable dans toutes les
villes.
Il y avait là, on le conçoit sans peine, une cause de décadence et de ruine pour l'industrie. Ceue décadence se
manifeste de la façon la plus évideote à l'époque où nous
sommes arrivrs, c'est à dire au commencement des invasions, le goùt disparait complétemcnt, les monuments,
rares d'ailleurs , qui datent de oetle période, sont faits sans
le moindre sentiment artistique, et bien que les documents
soient peu nombreux, nous savons que dans certaines villes
ouvertes, on construit des remparts pour se protéger des
barbares, avec les matériaux provenant des démolitions
des édifices publics.
D'ailleurs ce qui mieox que toutes ces considérations
doit nous convaincre de la précarité de la situation dans
laquelle se trouvait la société romaine, c'est le fait économique qui nous est dévoilé par diverses inscriptions. Il
résulte en efiet d'une inscription découverte à Stratonicée
que Dioclétien rendit une ordonnance pour fixer Je prix
des différentes denrées et Je salaire des ouvriers. Cela nous
prouve que l'argent avait à ce momen t-là. acquis une valeur
considérable. Or l'argent n'étant qu'une marchandise
qu'on échange contre d'autres, si sa valeur augmente,
c'est que les autres marchandises sont en excès. Le tarif
�-
-
3.f.-
établi par Dioclétien était imposé à peine de mort pour
les contrevenants. Il y eut des nombreuses exécutions
qui ne produisirent qu'un seul résultat augmenter encore
la cherlé des denrées.
Les mesures qui furent prises à cette époque contre les
usuriers témoignent encore de l'augmentatlon de valeur de
.
l'argent.
Ce qui enfin devait porter le dernier coup aux ouvriers,
pour qui nous l'avons vu la corporation devient dans le
temps de misère une gêne et une prison en fai sant baiss~r
les salaires, c'était incontestablement la période d'anarchi e
que devait subir l'empire romain avant de disparaître. La
guerre civile éclatant partout devait forcément accentu er
la misère. La crainte des barbares fit le reste.
Les membres des corporations ouvrières, qui avaient
toujours essayé de se soustraire à l'asservissement croissant, abandonnèrent les cités et s'enfuirent dans les
champs. C'est en Yain qu' en 400 Honorius rappelle dans
les cités les fu gitifs. Les associations qui remontent à l'origine de Rome avaient cessé d'exister tout comme l'empire
Romain allait disparaitre elTondré au milieu des invasions.
55 -
SECTION
II.
Vie intérieure des collèges.
Après avoir érudiê les difTérentes phases par lesquelles
passèrent les collèges et les rôles qu'il s jouèrent dans la
vi e politique et économique de la société romaine, il est
intéressan t de rechercher la façon ùont ils se constituaient,
leu r mani ère d'être, les rapports existant en tre les divers
membres de l'association, en un mot d'étudier leur vie intérieure.
Au point de vu e de la constitu tion, il est utile tout
d'abord de remarqll er que les corporations ètaient organisées à l'instar des ci tés. Nous verrons en effet que de nombreuses analogies existent en tre l'admini stration municipale et celle des collèges. D'ai lleurs Gaius lui-même constate le fait: les associations sont constituées « ad exemplmn reipublicœ 1• Elles formaient ea. quelque sorte des entités parfaitement régulières dans l'entité de l'Etat.
1. - Comment se formaient les collèges?
Nous avo ns vu que la crainte des réunions nombreuses
et dangereuses avait amené les empereurs à ne laisser
l
LI, III, 4, D1g.
�-
-
56 -
subsister que les associations autorisées. Pour qu'un c0llège pùt se former, il fallait d'abord et avant tout l'autorisation impériale, qui n'était accordée que paitcis in causis .
Cette autorisation avait au reste un avantage: c'était en
quelque sorte l'acte de naissance révélant l'apparition ou
mieux la création d' une personne morale appelée à avoir c t
à exercer des droits, car nous verrons plustard que la conception des personnes morales avait enfin été comprise
par les Romaios et que les collèges étaient de véritables
personnes morales ayant une vie juridique.
Qui dit association, suppose au moins la réunion de
deux personnes. Pour une société c'est suffisant. Donner
le nom de corporation à. une semblable société semblerait
actuellement une extension trop excessive du sens attaché
au mot. Les Romains l'avaient bien compris, et alors que
deux personnes suffisaient pour constituer une société
civile, il en fallait au moins trois pour un collège : « Neratius Priscus tres facere collegium existimat ; et hoc maxime sequenduni 1• 1>
Pour obten ir l'autorisation impériale, on s'adressait dans
les provinces au go uverneur, qui en référait à. l' empereur;
l'exemple de Trajan, que nous avons cité, nous renseigne
sur cette procédure; à. Rome les d emand~s étaient présentées par le préfet de la vill e qu i les transmettait à l'empereur. Les associations étaien t au torisées tant par décrets
que par sénatus-consultes ou constitutions impériales.
Le collège une fois formé était libre de se donner sa loi
intérieure, et l'autorité administrative n'intervenait pas
dans la CO[lstitu tion de l'association, qui avait le droit
absolu de rédiger la charte de ses droi ts et de ses obligations. Cependant il est certain que ce droit si absolu
était limi té, comme il conv ient du reste, à la liberté d'autroi : « /lis autem potestatem facil lex pactionem quam velint
sibi ferre dum ne quid ex publica lege corrumpant 1 ]) ; tel est
le principe que nous avons déjà signalé.
Une difficulté s'est élevée relativement au point de savoir de quelle façon cette charte intérieure était votée.
Fallait-il le consentement unanime de tous les membres
de la corporation, ou bien au contraire snffisait-il d'une
simple majonté? Chacune des deux opinions est appuyée
sur des textes. Il y a même à. ce sujet quelques systèmes
mixtes. Les nns veulent que les règlements des collèges
n'aient pu être réd igés qu'à. l'unan imité des collegia ti, el a
preuve c'est que toutes les inscriptions portent C[ placuit
universis. >
D'abord on peut pour réfuter cette théorie faire remarquer que les inscriptions dont il s'agit se réfèrent presque toutes it des mesures qui devaient avoir été prises à
l'unanimité, à raison même de leur sujet. Elles s'appliquent
en effet pour la plupart à l'élévation de statues soit aux
dieux protecteur de collèges, soit aux patrons ou clefmsores dont nous verrons l' institution . D'ailleurs il se peut
1
1
L. 85, D. 50, 16.
57 -
Dig. L. IV, 1.7, :H.
�-
58 -
que justement cette unanimité ne se soit trouvée que sur
la pierre, car la raison indique très nettement que pour
peu que la corporation fut nombreuse, il est bien difficile
de pouvoir, pour tontes les décisions, réunir l'unanimité,
tant l'esprit de contradiction est naturel à l' homme.
D'autres interprètes ont voulo, par analogie avec les
décurions dans l'organisation municipale , croire qu' il
fallait la majorité des deux tiers des membres présents.
Rien ne permet celle assimilation un peu trop libre, d'autant que les décuri o11s étaient un pouvoir représentatif dans
une société ordonn ée. Qu elques-uns enco re ont voulu admettre que tantôt l' unanim ité élail nécessaire et tantôt la
majorité suffisait. Celle disLinction ne se justifie par aucnn
texte et doit être rejetée.
Quant à nous, nous reportant. au texte formel dn Digeste : « Refertur ad universos quod publice ftt per majorem
partem 1• -o Nons admeLLons que la majorité faisait la loi,
ce qui d'ailleurs est assez vraisemblable dans le pays où
nous avons puisé notre régime parlem entaire.
Les statuts devaient évidemment se préoccuper d'abord
du mode de recrutement du coll ège. Au point de vue des
conditions relati ves aux personnes, nous savons d' un e part
que pour appartenir à un collège il fallait ne faire partie
d'aucun autre 2 , et d'autre part que les esclaves ne pouvaient faire partie que des collèges tenuiorum et encore
devaient-ils rapporter l'autorisation de leurs maitres.
1
2
Dig.1. 160, 1. L. p.17.
C. Th ., X, '22.
-
59 -
Ceci nous prouve que la corporation ne se recrutait pas
seulement par l'origine et la naissance, nous savons en
effet que l'origo est le principal mode de recrutement du
collège. Etant donnée l'importance des corporations dans
l'économie de la société romaine et leur assimilation à de
véritables fonction s publiques, on comprend sans peine
que pour assurer le service de ces fonctions on enrégimentait de force les enfants des collegiati. li est certain d'autre
part qu e ces enfan ts commençaient très jeunes l'apprentissage du métier, Les tex tes nous parlent d'un jeun e esclave
de douze ans très expert et très habile dans l'art de la
joaillerie. Une fois l'apprentissage terminé, l'enfant faisait
partie du collège. Nous avons vu d'autre part, dans la
première parti~ de notre étude que l'origo ne résultait pas
seulement pour les coUegiati de la naissance, mais que
pour les bo ulangers notamment, le fait d'épouser la fi ll e
d' un boulanger suffisait pour être incorporé.
Quant aux modes de recrutement volontaire, les textes
sont muets à leur égard, mais il est vraisemblable que l' on
pouvait être admis en vertu d'une sorte d'allectio, vote du
collège. D'ail leurs, en examinant les divers magi trats qui
administraient les corporations, nous verrons qu e les fon ctions de curatores consistaient surtout à faire une enquête
pour savoir si les membres qui se présentaient à l' élection
étaient ou non membres d'un autre collège. Les curawres
devaient aussi obtenir l'autorisation des maîtres des esclaves. Cela prouve bien que des membres pouvaient se présenter pour faire partie des collèges.
Le pouvoir administratif pouvait aussi à. son gré ouvrir
�- 40 les rangs d'un collège à qui bon lui semblait. Livie oblige
Tibère à faire inscrire une de ses créatures 1• D'autre part
nous avons oot~ àt\ passage que pour certaines infractions
on rondamne les artisans à entl'ét dans la corporation des
pisiores.
Enfin , comme malgré toutes ces dispositions le recrutement était parfois difficile, on autorisait les collèges à s'adjoindre tous ceux qui étaienl vacui officio publico 2 •
II. - Comment s'administraient les coll~ges?
C'est surtout au point de vue de l'administration et des
charges de magistrature que se remarque la ressemblance
que nous avons signalées entre les collèges et les municipes. La raiso n en est faclle à comprendre et à trouver :
les corporations en eITet dont l'origine nous le savons es'
fort ancienne, ont dû forcément se modeler sur les seul es
personn es morales qu'elles voyaient autour d'elles, c'està-di re sur les cités. On peut aisément diviser le coll ège en
deux classes distinctes : l'ordo, comprenant les divers fon etionnaires, et la plebs.
L'ordo comp renait les administrateurs, et nous allons
voir que nous y retrou verons les mêmes dénominations
que parmi les magistrats mun icipattx.
D'abord une première ressemblance est à noter : les
magistrats des corporations étaient nommés par toute la
in Tibor. li.
2 Cod . Th. boi ô, ~ 39.
1 Suétone,
- 4i corporation réuni e ; nous savons même à cet égard que
le fils pouvait donner son suffrage à son père, et inversement. Or il est certain qu'à l'origine le peuple du muni-cipe nommait lui-mème se~ dignitaires. Que si plus tard
c'est la curie municipale qui a seule ce droit, cela tient ace
que les décurions acquirent dans l'ordre politique une influen ce que les décurions industriels ne purent jamais
obtenir.
Dans les collèges il y avait en effet des décurions. Dès
qu'une association devenait puissan te et nombreuse, elle
se subdivisait en un certain nombre de centuries et à la
tête de chacune se trouvait un décurion. Une inscription
en attribue douze au coll ège des {abri de Lorici 1 • Les collèges d' Apulum, de Sextium et de Salone avaien t leurs
décurions. Quelles étaient les fonctions de ces magistrats?
Il est vraisemblable que leurs attribu tions devaien t être les
mêmes que celles des décurions des villes, ils devaient surtout surveiller les finances de l'association et statu er sur
les comptes qui leur étaient soumis. Nous savons par
les iuscrîptions qu e leurs décisions portaient le nom de
décrets ci.
A côté des décurions on trouve quelquefois dans les inscrip tio ns le nom de principales. Etait-ce là une magistrature
particulière et fau t-il vo ir la les chefs de la corporation.
Cela se pourrait mais il semble plus vraisemblable de
croire que cette épi lhè.le servait à désigner les décurions
1
2
Orelli, 4·055.
Corp. Berol. Ill, 5659.
�-
42 -
par oppos1tion à la plebs. Notre opinion se fonde sur ce
que dans le droit municipal tous les textes relatifs aux
principales sont assez difficiles à expliqu ~r et qu'on admet
généralement aujourd'hui que les principales dans les municipes représentaient ce qu'on pourrait appeler les notables.
On rencontre aussi, tant dans les collèges que dans les
municipes des duumviri et des qttatuorviri, dont il est difficile de détermin er les attribu tions, des édil es â. qui vraisemblablement étai t réservée la garde des monuments appartenant à la corporation, des quinquennales, dont les fonctions correspondaien t à celles de censeurs, et qui évidemment devaient être les personnages les plus importants du
collège. On parle effectivement d'un certain Claudius Chresimus, quinquennalis de la corporation des dendrophores de
Rome, qui fit des largesses aux corporati ob honorem quinquennalitatis 1 • Et de plus, pendant toute la durée de sa
charge, le quinquennalis , qui prenait une part double dans
les distributions fa ites au collège, était immunis a sigillis,
exempt de tou te cotisation.
Les wratores étaient chargé:; de \'administration du patrimoin e du collège, tout comme les curatores reipublicœ,
avaient pour mission de placer les capitaux, de surveiller
les travaux des villr.s . D'ailleurs nous avons vu qu'ils
avaient un certain contrôle à exercer sur les admissions.
En étudiant le rôle juridique des collèges, nous verrons encore les actores et le syndicus.
Enfin les questeurs étaient chargés de faire rentrer les
1
Orolli, 4074.
45 -
cotisations et de garder les fonds de la caisse commune,
arca communis , d'où Je nom d'arcarii qu'on leur donne
souvent.
En dessous de ces fonctionnaires de l'ordre supérieur,
qui à eux tous réu nis composaient l'ordo, nous trouvons
des emplois subalternes. Toutes les corporations avaient
en effet des soribœ ou tabularii, qui rédigeaient les procèsverbaux et gardaient les archives.
Tels élaient les différenls magistrats qui se partageaient
l'admin istrati on des collèges. Pour être complet sur ce
point, il faut in diquer que les ouvriers des fabriques impériales avaient eux aussi une organisalion spéciale. Ils
étaient sous la direction d'un magistrat qn'on appelait
tan tôt prœfectus, tantô t magister , tantôt encore primicerius
ou secundicierus. Sous le Bas-Em pire il n'est pas rare de
trouver des chefs d'ateliers gralifi és du titre de comte.
Parallèlement avec ces magistratures, que nous pourrions qualifier administratives, on trouve une sorte de
magistrature judiciaire, sur laquelle les renseignements
sont peu nombreux et qu'il serait cependant intéressan t
d'étudier. Lampride raco nte qu'Al exandre Sévère donna
des juges aux corporation, qu'ils avait créées 1 . De plus,
un e co nstitution d' Anaslase défend aux artisans el aux
marchands de décl iner la compétence de ces juges particuliers : c ,td quos earnm professionmn seu negotialionum
cura pertinel. » Ne serait-ce pas là l'origine de nos tribunaux de commerce et des prud' hommies?
1
Lamp. in Alo>... Sov. c. 33.
�-
44
~
Il ne nous reste plus, pour en avoir fini avec l'administration des collèges, qu'à signaler la tendance qu'ils
avaient tous à se ranger sous la protection d'un homme
illustre qu'on appelait patronus. Cette habitude des collèges, d'ailleurs empruntée encore aux usages des ci tés et
même des simples particuliers, se conçoit et 8'explique
très facilement. L'histoire du droit nous montre en effet
la création des patronicia vicorum, destinées à protéger dans
les temps de troubles les faibles contre les forts. Le patronage des corpo rations a certainement une raison analogue.
Pour lutter efficacement con tre les rigueurs du pouvo ir cen tral, un e, ou quelquefois plusieurs corporations,
- les inscrip tions parlent en elîet d'un certain Méléagre
de Lyon, patron de tou tes les corporations 1, - se fai saient protéger par un homme puissant par sa fortune, son
talen t ou ses all iances. Le rô le de ces patrons, qui du
reste ne s' ingéraient jamais dans les détails de l'administration des collèges, consistaient uniquement adéfendre les
intérêts de la corporation et ses privilèges ; généralemen t
il faisait de grandes largesses en argent ou en nature, et
ces liens d'une clientèle de nouvelle forme rattachaient aux
ouvriers la famille tout entière du patron : on devenait
pater, mater, filia collegii. Les femmes elles-mêmes pouvaient être patronœ , et les résultats de ces liens de patronage étaien t tels que le pouvoir impérial, qui sévissait très
1
OrBll. 194, 4109 .
- 4?> fortement contre les patronicia viœrum, essaya, sans pouvoir y r.irriver, de réprimer les patronages des collège:; 1•
III. -
Quelle
~tait
la vie intérieure des coUèges?
Les collèges ne s'occupaient-ils que des intérêts généraux de la profession et avaient-ils pour but unique d'améliorer la condition des dilîérenls corporati? En un mot, les
liens qui unissaient les membres de ces associations
étaient-ils purement professionnels, ou bien au contraire
y avait-il des intérêts communs d'un autre genre? Nous
pouvons tout d'abord répondre à cette question qu'une
idée reli aieuse rattachait les uns aux autres tous les membres d'un même collège. Nous savons en eITet que toutes
les corporations avaient un culte pour une divinité particulière , et c'est ainsi par exemp le que les dendropbores
ou les coupeurs de bois s'étaient placés sous la protection
de Sylvain, dieu des forêts, et leur attachement à ce dieu
était tel qu'après l'établissement du christiaoisme, on
eut grand peine à les faire reooncer à leurs pratiques
païennes 2 •
A raison même de ces cultes spéciaux, nous savons que
les corporations se réunissaient pour offrir des sacrifices à
leurs divinités. Ces réunions avaient généralement lien
pour la fête du dieu; elles étaient précédées de jeux dont
on a gardé le souvenir grâce aux inscriplions ; les lttdi
l!)
l
L. '1, 2, C. Th. De navibus non
2
L. 20, C. Th. 16, 10.
excùsandi$.
�-
46 -
pisca1orii se faisaient chaqoe année avec une très grande
solenni té. Tous les ans les tubicincs se réunissaient dans le
temple de Jupiter Capitolin.
Ces fêtes religieuses étaient l'occasion de grands banquets qui dég~néraient toujours en orgies.
Il y avait d'autres or.casions de se réunir. Nous avons vu
défiler en elTet dans le co rtège qui attend Gallien, après
son expédition de Bizance, toutes les corporations avec
leurs bannières en tête. C'est donc qu'elles avaient l'habitude de se mêler aux manifestations de la vie publique.
Enfin réunis, les ouvriers avaient aussi au cœur le noble
culte des morts, qu'ils professaient tous isolément. A certaines époques déterminées, les collèges se rendaient
processionnellemen t sur les tombes des membres décédés
pour y déposer des fleurs, c'était la fête des rosalirz, pieux
et touchant usage qui s'est perpétué jusqn'à nos jours.
En ce qui co ncernait les intérêts mêmes de la société il
est évident que des réunions avaient lieu assez fréque~
m~nt'. a~ point même d'inspirer des craintes au po uvoir
qui limite ~ e nombre <les assemblées à douze par an,
une par mois 1 • Ces assemblées avaient lieu à jour fixe
dans u.n local spécialement aITecté à cet usage et qu'on
appelait .se.hala. Au point de vue des décisions à. prendre, il
semble ev1dcnt qu'elles devaient êtres prises à Ja majorité,
tout comme pour la nomination des dignitaires. Les scribes inscrivaient les délibérations qu'ils dataient par les
- 47 noms des consuls de l'année. Quelquefois les collèges formulaient des vœux qui étaient soumis à l'empereur qui
y faisait droit; c'est ainsi qu'on trouve des constitutions
rendues ad decretum naviculariorum.
Après avoir ainsi examiné l'organisation des collèges,
diverses questions se présentent à l'esprit.
Les corporations jouissaient-elles de monopoles, comme
devaient en avoir plus tard au Moyen-Age les maîtrises et
les jurandes? Rien ne permet de supposer un tel état de
choses. Il est bien évident que pour les professions relatives
à l'approvisionnement de Rome, il y avait en quelque
sorte un droit exclusif accordé aux collèges; c'est ainsi
que notamment nul ne pouvait se passer du ministère des
décbargeurs pour transporter ses denrées du port jusque
chez lui 1 • Mais c'était là. un privilège accordé pa.r les empereurs pour assurer Je recrutement d'une corporation
nécessaire, recrutement qui du reste était assez difficile,
puisque pour l'assurer les empereurs sont obligés d'inscrire d'office tous les a!Tranchis possédant au moins trente
livres 2 •
Quant aux professions libres, on ne trouve rien de emblable, et il était réservé à la féodalité de renc,;bérir encore
sur la fiscalité des empereurs Romains, qui n'avaient pas
songé à vendre à. prix d'or des monopoles qu' ils étaient
quelquefois obligés de concéder gracieusement.
D'ailleurs il faut rendre cette justice aux empereurs que,
Co<l. Thood. Liv. XIV, lit.XXI, l. •I, ann. 364.
2 Cod. Theod. Liv. XIV, tit. 11 , l. 9, ann. 368.
l
1
L. 1, D. 47, 22.
�-
48 -
soit dans un but intérossé pour attirer les 0uvriers, soit
au contrairt1 avec l'intention plus élevée d'encourager le
développement de l'industrie, ils ont prodigué les privilèges à la classe ouvrière,
Les membres des corporations étaient dispensées de la
tutelle, sauf pour les enfants de leurs collègues 1•
Arcadius et Honorius accordent l'immunitas a. tutela aux
naviculaires de Rome 2 , et une constitution de 554 étend
cette immunité aux naviculaires d'Orient. Les pistores
jouissaient de la même faveur et n'étaient même pas astreints à la tutelle des mineurs rle leur corporation 3 •
Dans certains cas le jus libtrorum était concédé aux corporations. Claude l'a,·ait accordé aux constructeurs de
navires 4, et étant donnée la facilité avec laquelle celte
faveur était accordée, il est vraisemblable de supposer
qu'elle fut étendue à d'autres collèges.
En matière judiciaire, les empereurs, par des rescrits,
autorisaient qu elquefois les plaideurs à. assigner leurs adversaires devant des juges qui n'étaient pas ceux de la
compétence du domicile. Constantin décida que pour juger
des contestations civiles contre les naviculaires, les juges
ordinaires seuls seraient compétents 5 • Cette f:tveur pour
les naviculaires s'explique très bien ; ils ne pouvaient pas,
Dig. ~7, XMVIL L
Cod. J. 24, V, 62.
3 D. 41, § 3, XXVII, 1.
1 Suet. in Claud. C. 18 ot ~ 9.
6 Cod. Th. 1, 1. 9, 1. ~.
l
2
- 49 eux dont la route était limitativemont tracée, se déplacer
et aller sonvent très loin pour faire juger leurs litiges.
D'ailleurs, cle toutes les corporations, à raison même
des services qu'ils rendaient à Rome en apportant le blé,
les naviculaires étaient les plus favorisés; c'est ainsi par
exemple qu'au cas où l' un des membres de celte profession
était poursuivi criminellement, il n'était pas soumis à la
torture.
Un des privilèges les plus appréciables pour les corporations était la dispense du service militaire. Cette dispense
fut établi e par une novelle de Théodose II et de Valenti·
nien III rendue en 440.
Enfin pour en termin er avec les privilèges accordés aux
collèges, il nous reste à ignaler l'i mmunité des fon ctions
municipales. On sait comb ien pénible était la charge des
décuri ons et combien diffici le était leur recrutement, pour
y parvenir on avait été oLligé d'y astreindre tous ceux qui
possédai ent une certain e fortune. Cependant on admit
hientôt l'immunité pour les naviculaires, et plus tard on
étendi t ce bénéfice à toutes les corporations. Seulement il
faut remarquer que la ~u alité de collegiatus ne procurai t
l'immunitas qne a munere uon suscepto 1 , et qu'une foi entré dans la curie on ne pourn1t pas en sortir par le fait de
l'incorporation à un collège . Comme ce bénéfice de l'immunité avait donné lieu à de nombreuses supercheries de
la part de personnes ri ches, qui se fais:iient admettre dans
l
D. L. 5, H, 1. 6.
�- 50 une corporatien uniquement dans le but de se décharger
des fonclions municipales, les empereurs eurent soin de
limiter le privilège à ceux qui faisaient réellement partie
de la corporation 1 •
Une autre question se pose. Les corporations avaientelles pressenti la force de l'association au point de vue des
institutions de bienfaisance? Aujourd'hui les corporations
ouvrières ont en effet compris tout le parti qu'elles peuvent tirer d'une sage administration de nombreuses co tisations : partout se forment des caisses de défense pour les
grèves, des caisses de secours, des caisses de retraite. En
un mot on cherche à retirer de la collectivité des avantages
pour chacun individuellement. Cette idée-là s'était-elle
développée à Rome? Au point de vue de la manifestation
extérieure et des form es de ces institutions, on peut hardiment répondre non. Cependant nous croyons que le germe
de ce progrès se trouve dans les collèges que nous venons
d'étudier. Nous avons vu que les corporations romaines
avaient un culte particulier pour leurs morts. Ce culte leur
avait inspiré l'idée d'acheter sur les fond s communs des
terrains pour la sépulture de leurs morts. Cette idée se
répandit vite et nous voyons des associations se fonder dans
1e but unique d'assurer une sépulture aux divers affi liés.
C'est so us la forme de semblables associations que les
premi ers chrétiens se réunirent pour détourner les soupçons des empereurs.
l
Dig. L. 5, 12, 1. 6.
-
~i -
Les corporations étaient-elles fermées et ne pouvaientelles recevoir que des membres exerçant la même pro.on ?. C' est l'a une question fort intéressante et que nous
f ess1
retrouverons dans l'étude du droit d'association dans notre
société moderne. Mais alors que nous déciderons que nous
croyons que les collèges ouvriers doirent être ouverts et ne
peuvent pas, à raiso n même de la difficullé de classer
les diverses professions dans des associations spéciales
être exclusifs d'une profession; il semble que dans les
collèges de la société romaine, la solution contraire était
seule admise. Cela se Cùnçoit d'ailleurs aisément dans
une société où chacun avait son rôle déterminé. Mais
si en fait chaque corpus ne comprenait que des membres d'une seule profession , en droit rien ne s'opposait à ce que diverses corporations se réunissent en une
seule. Des exemples nous so nt parvenus qui nous prouv~nt que ces associalions générales se produ isaient quelquefois et nous savons que dans certaines villes où les
collèges ne disposaient pas de ressources suffisantes, tous
les métiers relatifs à une même industrie se réunissaient
pour former un e seule. corporation puis3ante et riche.
C'est ainsi que dans divers cas tous les ouvriers du bâtiment constituaient une seule corporation .
IV. - Comment se dissolvaient les corporations?
La personne morale une fois établie vit d'une existence
distincle de chacun des membres qui la compose, et ceux-ci
venant à disparaître olle se reconstitue immédiatement
par des éléments nouv~ux, et comme elle a uo rôle assi-
�- !S2 gné dans l'organisme intérieur de la société, il semble
qu'elle doit se perpétuer toujours. Cette conséquence avait
été si bien comprise par l'esprit juridique des Romains,
que les jurisconsultes qui exigeaient l'existence de trois
personnes au moins, pour la constitution d'un collège,
reconnaissaient que la corporation continuait à subsister
tant qu'un seul de ses membres vivait.
Cependant, de même que les personnes morales ne
devaient leur existence qu'à. la vo lonté de l'autorité, de
même il devait suffire d'une volonté contraire pour les
faire disparaître. Les empereurs, dans leur absolutisme ,
supprimaient des cités et faisaient labourer le sol pour
qu'il n'en restâ.tancun vestige, à. plus forte raison pouvaientils anéantir un collège. D'ailleurs telle éventualité pouvait
se produire amenant la suppression d'un collège en faisant disparaître le but même du collège. Dans ce cas-là.
dans quelles conditions se liquidait l'actif social?
Un texte parle de distribution par part égale, entre tou s
les affiliés, du ca.pital au cas de dissolution d'un collège illicite. Cette décision s'étendait-elle à tous les collèges .
Nous ne le pensons pas. Il ne s'agit en effet dans l'espèce
visée qu e d'une société illicite dont l'existence n'a jamais
été reconnue et qui dès lors n'a jamais eu une personnalité distincte de cell e de ses membres. Quant aux collèges
autorisés, au contraire, ils ont eu une personnalité. Les
biens qui leur sont advenu s ne sont pas la propriété des
membres du collège, mais forment au contraire le patrimoine de la personne morale. Si cette personne morale
- ?S5 vient à. mourir, son patrimoine doit se transmettre suivant
les règles ordinaires de transmission des hérédi tés ; or aucune loi ne prévoit la dévolution de ce patrimoine aux
associés, il faut donc s'en rapporter au pripcipe général
qui régit la matière. Lorsqu'une personne meurt intestat,
sans hériti ers, la succession en desbérence appartient à.
l'Etat. Ici donc, puisque nous nous trouvons dans cette
situati on, c'est évidemment le fisc qui devient propriélaire
des biens délaissés par la personne morale.
Est-ce à dire que les corporations ne pouvaient pas
échapper à un résultat aussi fàcbeux qu'injuste? Non certes, à. notre avis du moins. Il y avait évidemment un moyen
pour l'éviter, c'était d'indiquer dans les statuts à qui devaient revenir les fonds de la corporation dissoute. Il est
certain que dans ce cas les biens revenaient alors à ceux des
affili és encore ex istants, et cette solution est bien plus rationnelle, puisque ceux-là qui avaient contribué à mettre
les biens dans le patrimoine de la société, pouvaient un
jour obtenir la restitution de ce qu'ils avaien t fourn i.
�-
54 -
SECTION
Ill.
Situation juridique des roUèges
Nous avons vu , en nous préoccupant de leur dissolution,
que les collèges avaient, sous l'Em pire, une personnalité
morale absolument disti ncte de la personnalité in dividuelle
de chacun de leurs membres. Si nous voulons expliquer cette
proposition, nous dirons que le collège avait des droi ts
séparés de ceux des individus qui le composaient; il avait
un patrimoine à lui propre qu'on ne devait pas regarder
comme indivis entre les membres. Il pouvai t être créancier et débiteur sans que les divers associés eussent le
droit de réclamer les créances, ou fussen t de rien tenus ;
bien plus, il se pouvait qu'il fut créancier ou débiteur personnel des affiliés. De cette façon nous com prenons sans
peine l'idée un peu abstraite de la perso nnalité morale.
Comme toutes les idées de ce genre, comme toutes les
conceptions de raison, il était impossible que le droit
Romain créât la théorie des personnes morales composée
de toutes pièces. D'ailleurs plus qu e dans aucune autre
législation naissante, l'espri t essentiellement matérialiste
des jurisconsultes Romains devait se refuser à. admettre
cette théorie. Comment en eITet aurait-on pu songer à
-
~ :>
-
accorder des droits à un être n'existant pas, ne pouvant
dès lors ni posséder ni être propriétaire, puisqu'il ne pouvait avoir l'animus possiàendi? Comment une entité morale
pouvait-elle, sous Je régime des actions de la loi, exercer
ses droits, puisqu'elle ne pouvait pas venir comparaitre
en perso nne devant le magistrat et prononcer les paroles
solennelles.
Cependant et dès l'origine nous trouvons une personne
morale : l'Etat. Dans une société organisée comme la
société romame, où l'on considérait l'Etat comme seul propriétaire des terres, il fallait évidemment admettre que le
patrimoine de l'Etat était distinct de celui des citoyens.
Aussi voyons-nous, dès la période la plus ancienne l' idée de
la représentation en justice de l'Etat admise, et c' est ainsi
qu' il était permis, sous le régime si rigoureux des actions
de la loi, d'agir pro populo.
Plus tard, et le besoin s'en faisant sentir, on finit par
étendre cette idée aux collèges. L'époque où ce progrès se
produisit est difficile à déterminer, mais il e~t vraisemblable que c'est sous l'Emp i r~ seulement. Nous examinerons
comment cette idée finit par triompher de la répugnance
du droit Romain contre la représentation.
C'est sous l'Empire en efiet que nous trouvons la néces·
sité d'une autorisation préalable pour l'existence des corporations. Cette autorisation, le jus weundi, entretenailelle forcément la personnalité juridique? Une discus ion
s'est élevée sur ce poin t et l'on a di t que ces deux droits,
évidemment distincts, ne devaient pas se confondre, et que
généralement lejiis corpus habere devait faire l'objet d'une
�-
-
56 -
décision séparée. Nous ne croyons pas qu'il en soit ai nsi
et nous estimons qu'en autorisan t la création des collèges
les empereurs leur acco rdaient en même temps l' exercice
des droits juridiques.
Quels étaient ces droils juridiques, c'est ce qui nous
reste à clétermi r.r.r ponr ache,•er cette étu de. D'abord il est
bien éviden t qu'il ne saurait être question des droits ùe
fam ille, et d'autre part, puisque la personnali té juridique
est une concession du pouvoir, cette concession peut êlre
limitée par le pouvoir. Les empereurs l'ont quelqucfoi
étendue, mais ne l'on t jamais réduite.
De la Propriét é.
Il est certain que le dro it prim ord ial qui devait être concédé aux collèges c'était le droit de propriété. Il faut donc se
demander commen t les personn es morales pouvaient acquérir ce droi t. Pour cela nous allons successivemen t examiner les divers modes d'acqu isition de la propriété.
1. - A/odes d'acquisition entre vifs.
Parmi les modes d'acquisition de la propriété entre vifs,
il en est trois qui reposent sur la possession , ce sont l'occu pation, l'usuca pion et la trad ition ; il faut don c, pour
savoir si les personnes morales peuvent acquérir par ces
modes, se deman der si la possession leur est accessiulc.
o7 -
La possession suppose la coexistence de deux éléments
essentiels, le corpus et l'animus , c'est-à-dire la détention
matérielle et la volonté d'acquérir. La personne morale ne
peut évidemment pas avoir l'animus et par conséquent,
dans la riguaur des prin cipes elle ne peut pas posséder.
Ces prin cipes devaient fléchir devant les nécessités de
la vie pratique et Paul rapporte une controverse entre
Nerva et d'autres jurisconsultes. Nerva soutenait qae les
cités acquéraien t la possession des choses que leurs esclaves
faisaient entrer dan s leur pécule 1 . Les autres soutenaient
avec beaucoup de logique que les cités ne pouYaieol posséder par leurs esclaves, puisqu'elles ne pouvaient pas
même posséder des esclaves. Cependant on finit par donner une entorse à la logique, el Ulpien, contrairement à
Paul, décide que : «Er pvssidere et usucapere possiut municipes ; idque eis et per servmn et per liberam personam adquiratur 2 • » Et ailleurs il ajoute que ce qui a été dit des
cités doit s'entendre oussi des collèges et des corporations:
3
e1. Idem et in collegiis ceterisque corporibus dicendum erit • »
Per servum, il entend que l'esclave, peculiari causa, peut
posséder pour la corporation, et per liberam personam, il
fait allusion au syndic, qui sans avoir reçu de mandat, peut
acquérir pour le compte de celui dont il est le mandataire.
Il est à remarquer d'ailleurs que celle théorie est comD. XLI. ~- 1. I, 22.
D. XLI ,~. l. 2.
:i L. 7, § :3, D. 10, \,.
1
2
�-
-
58 -
mune au tuteur et au mandataire. L'enfant, en eITet, ne
peut pas plus quo la personne morale manifester l'intention d'acquérir, et il faut bien que quelqu'un puisse avoir
pour lui la volonté de devenir propriétaire, et par l' e.fJet
du mandat donné, le mandant manifeste bien son animus.
Quant aux autres modes d'acquisition de la propriété,
la mancipation, l'in jure cessio et l'adjudicatio, ils ont complétement disparu à l'époque classique, mais il est certain
qu'ils devaient être absolument interdits aux personnes
morales.
L'injure cessio éLait en eJiet un procès fictif dans leq uel
quelqu'un réclamait devant le magistrat une propriété qui
n'était pas contestée par le cédant. Il fallait de tou te nécessité que le revendiquant fut présent devan t le magistrat.
Or les personnes morales ne pouvaien t pas remplir cette
conditi on.
De même l'adjud ication leur était impossible, puisque
ce mode d'a~quisitioo supposait un procès que le juge tranchait en accordant la propriété à l'une des parties.
Quant à la mancipation, elle consUai t en une vente
fictive et exigeait aussi la pré.ence de l'acquéreur. Il est
vrai que l'on admit que l'esclave pouvait acquérir pour son
maitre, mais alors nous nous heurtons à la même difficulté que plus hau t. Comment puisque la mancipatio étai t
interdite aux collèges, pouvaient-ils avoir acquis une res
mancipi comme l'était l'esclave?
Relativement aux divers modes d'acquisition, nous ne
nous sommes préoccupés que du droit de propriété; qu'en
étai t-il pour les démembrements do la propriété?
?$9 -
Pour les servitudes prédiales, il ne saurait y avoir
l'ombre d'un doute; comme elles ne se constituaient que
par l'in jure cessio et l'adjudication, ou bien encore par le
legs per vindicationem, elles ne pouvaient pas pendant lapériode de l'ancien droit être acquises aux corporations. li en
était de même pour les servitudes personnelles, telles que
l'usufruit, car la deductio, qui était un autre mode d'acquisition, n'était pas ouvert aux cor porations. Plus tard, lorsqu'avec les tempéraments apportés aux rigueurs de l'ancien droit, on put acquérir les servitudes par quasi possessio, la capacité des corporations devint plus considérable
et elles purent acquérir même l'usufruit.
D'autre part, comme les personnes morales ne meurent
pas et qu'on ne pouvait laisser se perpétuer indéfiniment
1
un droit.éminemment viager, on fixa la durée à cent a~s ,
et comme ce laps de temps parut encore trop considérable
lorsqu'il fallait comprendre un legs d'usufruit dans le cal2
cul de la quarte Falcid ie, on le réduisit à trente ans •
Il. - Hfodes d'acquisition à cause de mort.
Le droit de succession
suppose des liens de parenté, et dès lors il est impossible
que les collèges puissent recueillir des biens par ce mode
de transmission dtl proprièté.Aucun lien de paren té n'existe
entre l'association et les membres qui en font partie.
i° Sucrnss10N AB INTESTAT. -
i
~
L. 56, Dig. 7, il.
L. 68. Dig. 33, 2.
�- 60 D'autre part, au cas où la corporation vient à être dissoute,
nous avons vu que, sauf le cas prévu par les statuts, les
associés n'héritent pas et qu e les biens sont dévolus au
fisc à défaut d'héritiers.
A cette régie générale fort bien justifiée, le droit Romain
apporte une double exception.
D'abord nous savons qu e les rapports d'a.firanchi à patron créent une véritable succession ab inleslat, et qu'une
partie des biens de l'a!Tranchi, à. défaut d'héritiers, revient
au maître. Or celte situation pouvait se produire vis-à-vis des
personnes morales qui en effet pom•aient avoir des esclaves.
Cependant une distinction do it être établie. Tant que les
principes rigoureux de l'ancien droit sont en vigueur, la
liberté n'est concédée aux esclaves que par la vindicte, le
cens et la manumission, tous modes d'alTranchissements
qui sont interdits aux personn es morales, car ils exigent
l'intention d'affranchir chez le maître. Les collèges ne
faisaient donc jamais que des alTranchis Latins Juniens.
Lorsque ceux-ci mouraient, leurs biens revenaient aux
patrons non par jure patronatus, mais jure peculii.
Plus tard lorsqu'une loi vectibulici 1 eut concédé aux
municipes la pleine faculté d'a!Iranchir leurs esclaves et
que ce droit eu t été éten du aux collèges par Marc Aurèle 2 ,
un véritable droit de succession est élabli en faveu r des
corporations qui peuvent dès lors recueillir les biens de
leurs affranchis au cas où il$ ne laissen t pas d'enfants.
1
t
Cod. 1. 3, De servis Roipublicre manumütendis
'
Dig. 1. 1, De manum1ssioniLus tiu:.c servis.
-
61 -
La seconde exception apportée à l'incapacité pour les
collèges de recueillir par successioo , se trouve daos la préférence sur Je fisc qui est accordée à certain d'entre eux,
au cas où un de leurs membres vi ent à. décéder sans testament et sans héritier légitime. Cette faveur fut d'abord
accordée aux naviculaires, et puis plus tard aux curies et
aux ateliers des fabriqu es 1 • La raison de cette faveur se
comprend aisément comme le patrimoine de chaque associé est affecté au service de la corporation, on n'a pas voulu
priver celle-ci d'un patrimoine lui appartenant.
2° I NSTITUTION TESTAMENTAIRE. - Les collèges ne pouvaient pas être institués héritiers 2 • M. Gide en donne la
raison suivante : les Romains n'avaient accordé aux personnes morales qu e les droits indispensables à leur existence, et le droit d'être institué héritier n'est pas un droit
essentiel. Celle explication n'est pas satisfaisante, puisqu'elle ne tient pas compte de la formation progressive des
personne morales , et suppose au contraire que cei.le
théorie a été construite tout d'un coup par le législateur.
Ulpien donne une double rai~on; d'abord, dit-il , les collèges ne peuvi;nt ètre institués parce qu'ils sont des personœ incertœ, Ce n'est cependant pas là. la cause de l'interdiction prononcée à. l'encontre des corporation , car d'après
Ulpien lui-même les personœ incertœ sont celles dont on
ne peut pas se faire une idée déterminée , telle par
1
Cod. Do hrored. dec. lit. LXII.
2
Ulp. Reg. 22,
s 5.
�-
62 -
exemple la perso nne qui sera en tête du convoi du testateur.
Mais en ce qui concerne les associations, si au moment
de la confection dn testament le de cujus ne se souvient pas
exactement de toutes les personnes qui les composen t, il
se fait une idée parfaitement exacte de celle qu'il institue
en tant qu'universitas. Le véritable motif est donc seulement celui qu'Ulpien cite en seconde ligne, l'impossibili té
de faire adition. L'adi tion d'hérédité suppose en eliet so it
des paroles solennelles, soit un acte fait avec la ferme in tention de devenir héritier. Les paroles solennelles devaient forcément être prononcées par l'héritier, qui devait
aussi personnellement affirmer sa volon té, et à ce double
point de vue, l'incapacité des perso nnes morales était
absolue.
Cependant comme la capacité des personnes morales
dépend du pouvoir qui les a créées et qu'elle peu t être
étendue dans certains cas, nous savons que des mun icipes
avaient été formellement autorisés à être institués héritier :
Marseille, par exemple, jouissait de ce privilège 1. Il est
vraisemblable de supposer que, dans certains cas, ce privilège fut accordé à des collèges.
Une autre exception à cette incapacité résu lte aussi des
jura patronatus 2 • Ler corporations héritaient ab in testat
de leurs aITranchis et on permit à ceux-ci d'instituer les
collèges. C'était d'ailleurs le seul moyen de permettre aux
l
Tac. Ann. !*, 43.
2
L. 2, D. 40, 3.
65 affranchis de faire un testament valable. Si en eITet ils
avaient testé sans instituer les collèges, ceux-ci, en vertu
de leurs droits de succession auraient obtenu du préteur
une bonorum possessio contra tabulas qui aurait fait tomber
le testament. Que si d'autre part l'institution n'avait pas
été permise, dans aucun cas le testament n'aurait produit
-
un eliet.
Au point de vue de l'adition d'hérédité, l'introduction
par le préteur des bonorum possessiones n'étendit pas la
capacité, car elles ne s'appliquaient qu'au cas d'une hérédi té légalement acquise. Le seul avantage procuré aux
collèges par la législation prétorienne, c'est que leurs représentants pouvaient demander la bonorum possessio.
D'ailleurs ce qui en fait diminuait considérablement
l'incapacité testamentaire des personnes morales , c'est
l'institution des successions fidéicommissaires. Le Sénatusconsulte Apronien étendit en elîet aux municipes la faculté
d'être institués fideicommissairement 1 • Ce bénéfice accordé d'abord aux municipes doit forcément être étendu
aux collèges.
5° LEGS. - Le droit Romain accordait le droit aux
personnes morales de recueillir des legs. Et cela parce que,
d'après les Sabiniens, dont l'opinion parait avoir prévalu,
le legs est acquis au légataire sans qu'il ait rien à dire ou
rien à. faire. Il devient propriëtaire de la chose léguée par
le fait seul de l'om·erturo de la succession, même sans le
l
L. 26 Ad se îl'ib.
�-
savoir. Les Proculiens on t bien soutenu que c'était seulement du jour où le légataire voulait devenir propriétaire
que le legs prodnisait so n efJet. mais cette opinion n'a pas
triomphé.
D'ailleurs il faut bien reconnaître que si, en fait, rien ne
s'o pposait à ce qu e les coll èges pussent recevoir des hgs,
en droit , celte capacité ne leur fut accordée qu e par un
sénatus-consulte rendu par Marc-Aurèle 1•
Si l'on s'en Lient à la classification des legs telle qu'elle
était admise avan t Justinien, on est obligé de reconnaître
que le legs ad prœceptionem qu i suppose une institution
d'héritier ne pouvai t être valablement fait. Quant aux autres legs ils étaien t réguliers quelle qu'en fut la forme.
Pour les legs faits aux collèges reconnus, il n'était pas
besoin d'autori ation pour les recueilli r. Les legs faits aux
corporations non autorisées ne produisaient aucun efTet
. comme nous savons que dans ces collèges le patri-'
mais
moine était indi vis en tre les associés, le legs fait à tous les
membres inùividuellement était valable, la loi romaine
n'interdisan t pas le legs par personne déguisée 2 .
Les legs aux collèges étaient généralement faits sons
co ndition. Les inscriptions nous apprennen t que beaucoup
de testateurs indiquaient l'emploi des biens qu'ils laissaient: tantôt ils imposaient l'obligation de construire un
monument ou une stotue, tantôt ils consacraient leurs
dotations à des banquets annuels ou à dt!s jeux solennels.
1
2
L. 20, De robus <lubiis.
L. 20, D. 3/L 5.
-
64 -
6ts -
Lorsque l'emploi imposé à la ville ou au collège devient
impossible à raison de la diminuti on du legs par la quarte
Falcidie ou à cause d'une mesure d'ordre public prohibant
l'emploi désigné, le legs ne devient pas carluc et si les légataires ne peuvent pas s'entendre avec les héritiers pour
changer l'affectation édictée par le testament, l' empereur
consulté peut autoriser on changement 1•
Au cas où la condition imposée est résolutoire, si elle
est impossible elle est réputée non écrite 2 •
Nous ne trouvons aucun document duquel on puisse
induire que les collèges pouvaient recevoir des fidéicommis à titre particulier. Mais la ressemblance de ceux-ci
avec les legs fai t supposer qu'ils n'étaient pas interdilS.
D'autant que le sénatus-consulte Apronien autorisant les
fidéicommis universels, il n'y avait aucune raison pour les
prohiber.
Ill. -
Des obligations.
Les collèges ayant une personnalité juridique devaient
forcément avoir des droits et des obligations.
Les obligations naissent soit d'un fait licite, tel qu'un
contrat ou un quasi-con trat, soit au contraire d'un fait
délictueux, d'un délit ou d'un quasi-délit. Voyons lesquels
de ces procédés sont accessibles aux corporations.
1° Des
1
~
CONTRATS. -
L. 4., D. 50, 8.
L. z'I, § 3, D. 33 , 1.
En principe et à cause des
ri-
�-
-
66 -
gueurs du droit Romain, les collèges ne pouvaient pas
contracter. Le contrat exige en effet une volonté que la
personne morale ne peut pas manifester, et comme on
n'admettait pas la représentation, l'impossibilité était absolue pour les corporations qui ue pouvaient en aucun cas
acquérir des obligations ou êtl'C obligées. Plus tard et
utilita-tis causâ, on admet d'abord que l'esclave peut stipuler pour les collèges et on donne aux collèges l'action
directe ex stipulatu. Contre les personnes morales, on admettait pour les obligations contractées par l'esclave l'action de peculio et de in rem verso. Lorsque les actions exercitoires, instito ires, tributoi res et quod jussu eurent été
créées, on décida qu'elles ne pouvaient ètre donn ées contrf:\ les collèges, ces actions supposan t en effet un certain
dol et le collège étant doli incapax, on les accordait seul ement contre les représentants qui avaient préposé les esclaves aux différents co mmerces , ou en ver tu des ordres
d~ qui les esclaves avaient agi. Contre les personnes morales on donnait une sorte d'action utile quod jussu à raison
du bénéfice qu'elles avaient pu retirer.
Lorsque le préteur admit le principe des actions utiles,
la théorie de la représentation per personam extraneam
était créée dans la législation romaine.
On s'est demandé si les représentants pouvaient engager
indéfiniment les perso nnes morales par les emprunts qu'ils
contractaient pour elles. On décid e généralement que les
villes n'étaient tenues que dans la mesure du profit qu'ell es
avaient retiré. D'ailleurs, tout comme les pupilles , les per-
67 -
sonnes morales avaient l'action de in integrum restitutio
contre leurs représentants infidèles 1 •
Les administrateurs pouvaient, au nom des corporations, aliéner les biens de celles-ci; aucune loi en efTet
n'interdit ces aliénations et les collèges, nous l'avons vu,
étaient libres de prendre toutes déterminations qui leur
convenaient en vertu de Jeurs statuts. Placuit universis,
disent les inscriptions.
Cette faculté était-elle sans limite? Nous savons que les
curies ne pouvaient vendre leurs biens qu'avec on e autorisation préalable, et qu' en outre elles devaient remployer
le montant de l'aliénation , il est vraisemblable que cette
disposition devait s'étendre à. toutes les corporations dont
Je pztrimoine servait à l'exécuti on d' une fonction publique : telle est la corporation des pistores.
Il est évident que si les représentants avaient Je droit
d'aliéner, à plus forte raison avaient-ils le droit d'administrer le patrimoine. Ils pouvaieot louer les biens de la corporation. La forme la plus ordinaire du contrat de louage
était assurément l'empbythéose 2 • C'est là en effet, pour
ceux qui veulent, comme les personnes morales, s'assurer
longtemps le même revenu , le procédé le plus commode.
Une questi on reste à examin er. Au cas où le patrimoine
des collèges était insuffisant pour le paiement intégral de
ses dettes, les membres pouvaient-ils en être tenus? En
aucune faço n, et cela résulte de la définition que nous
1
2
L. 4 c. g., :2, [)/i..
lnsl. 3, 1. 3, t. 2~.
s
�-
avons donnée des personnes morales. Elles avaient leur
palrimoine dislinct d~ celui des membres, qui dès lors ne
pouvaient répondre des dettes de la corporation que dans
la limite de l'émolument qu'il s pouvaient retirer de
l'actif.
2° DES QUASI-CONTRATS. - Les corporations pouvaient
être tenues des obligations nées quasi ex contractu. C'est
ainsi que leurs représentants pouvaient devenir leurs
créanciers par le quasi-contrat de gestion d'affaires et exercer contre elles leurs droits.
5° DES DÉLITS ET QUAs1-otL1Ts. - Au point de vue
pénal. il est cerlain que les corporation s ne pouvaient dans
aucun cas être tenues des délits et des crimes de leurs
représentants. Décid er autrement c'eût été supprimer le
principe d'après lequel celui-là doit être puni qui a commis l'acte repréhensible et à. raison même de la personnalité de la peine, les Romains ne pouvaient pas prononcer
la responsabilité pénal e.
En matière civile il d ~vai t forcément en être de même.
Des obligations ne peuvent pas résulter pour la personne
morale de la fraud e de ses représentants. D'autant qu'ici
on ne peut pas, comme en matière de con trats, dire qu e
la personne morale a donné mandat à son représentant.
On ne donne pas en effet mandat de commettre un dol.
Dans ce cas c'étaient les représentants senls qui pouvaient
être poursuivis et tenus d~ l'action de dolo i.
t
L. 15 § 1, D. 4, 32.
-
68 -
69 -
11 va d'ailleurs sans ùire que la corporation, au cas où
elle était victime d'un délit, avait le droit d'exercer con tre
les auteurs de ce délit toutes les actions mises à sa disposition par la loi, et c'est ainsi par exemple qu'elle pouvait
intenter l'action furti.
Les corporations étaient-elles tenues des délits de leurs
esclaves? D'abord, au point de vue général, il est certain
qu'elles ne pouvaient pas s'enrichir par les délits de leurs
représentants et de leurs esclaves, et que dans la mesure
du profit qu'elles avaient retiré, elles étaient civilement
respon sables ; mais de plus, à raison de la règle générale
que le maître est responsable des faits de son esclave. elles
étaient tenues in inlegrum des agissemen ts des leurs, et
elles n'avaient pour dégager leur responsabilité que l'abandon noxal.
La conséquence des principes que nous venons de poser
c'e~t que l'action de dolo n'était pas donnée contre les collèges à l' encontre de qui on pouvait au contraire intenter
l'action quod metu causa, qui n'est pas pénale 1•
Ce que nous venons de dire des délits s'applique aussi
aux quasi-délits.
IV. - Des actions.
Le droit d'ester en justice est la con équence d~ la possession ù'un patrimoine. Dès l'instant qu'on pos ède un
droit il faut pouvoir l'exercer. Or suivant une définition
l
L. 9 3, D. 4.,
z.
�-
-
70
très exacte, l'action n'est que la mise en exercice d'un
droit. Les personnes morales devaient donc forcément
avoir le droit d'ester en justice. Comment l'exerçaientelles ?
Pendant toute la première période de la législation
rcimaine, tant qu e les actions de la loi restèrent en vigueur,
les collèges ne pouvaient certainement pas agir en justice.
Pendant celte période, en efiet, nemo alieno nomine agere
potest. Deux exceptions seules étaient admises à cette règle.
On pouvait plaider pro libertale et pro populo 1 • C'était
d'ailleurs grâce à cette derni ère action que l'Etat, seule
personne morale existant alors, pouvait plaider.
Lorsque la loi .1Ebwia vint remplacer le système des
actions de la loi par le système formulaire, les rigueurs de
de la rel'ancien formalisme furent adoucies et le réaime
l!>
présentation comm ença à s'établir. Deux moyens forent
alors offerts pour plaider an nom d'autrui : la constitution
d'un cognitor ou d' un procurator in rem suarn.
Ces deux modes de pl:iider étaient-ils accessibl es aux
collèges? En ce qui concerne le premier il ne sau rait y
avoir l'ombre d'un doute; il est certain , pu isque la datio
cognitoris exigeait des paroles solennelles, qu e les personnes morales ne pouvaient y reco urir. Quant au second,
la logique l'interdisai t aussi. Le procuralor fa it en effet
naître l'action judicali en sa personne et le mandan t est
~bligé po ur en retirer l'effet de poursuivre le procurator,
11 Ya donc un circuit d'actions et on ne faisa it que reculer
la difficulté pour les corporations. Cependant l'utilité fit
donner un e entorse à la logiq ue et bientôt l'on voit toutes
les corporations plaider par un actor ou un defensor 1•
A l'origine, ces actores ou defensores n'avaient de mandat
qu e pour un e seule affaire 2 , mais plus tard ils devinrent
les représentants de la personne morale dans tous les
procès.
Ces représentants difTèrent des procuratores in rem suam
en ce qu'ils ne sont pas tenus de fo urnir la cauti on de rato.
An cas où le procès exige la prestation d' un serment, ce
sont eux ou des ad mini lrateurs nommés spécialement qui
le prêtent.
La fo rmul e qu'on délivrait devait cependant, comme au
cas de co nstilution d'un procurator contenir dans l'intentio
le nom du collège, et dans la condemnatio le nom de
l'actor 3 .
L'action judicati n'était pas don née conlrel'actoret il n'en
était pas tenu .
Au cas où le collège n'avait pas constitué d'actor, le
proconsu l le représentai t, si aucun des membres ne voulait I ~ fa ire en fournissant la cau tion de rata 1 • La cause de
cette disposition se comprend par Je désir qu'on avait de
faire représenter les personn es morales.
L'actor pomait êlre révoqué pour les causes qui faisaient destituer le procuralor.
lL. 1 ,~ 1 ,D. l. Ill, t. l \' .
~ L. 6, O. l. Lli , t. lV.
3
i
Gaius, Comment. lV,
~
82.
71 -
1
Gaius, Comment, Il, § 87.
L. 1, § 3, D, 1. Ill , T. IV.
�- 72 Lorsque la corporation avait été condamnée, on pouvait
faire exécuter la sen tence sur ses biens personnels, soit par
un e saisie-arrêt 1 en tre les mains de ses débiteurs, soit par
l'envoi en possession qui permettait au créancier de faire
vendre.
DES C:ORPORA.TIONS.
Telles étaient les associations d'ouvriers dans la société
romaine. Nous allons les étudier pendant la période du
Moyen-Age, pour avoir une transition qui nou s permette
de suivre les conditior.s dans lesquelles le principe d'association a été admis jusqu'à uos jours.
1
L. 8, D. 1. Ill, T. IV.
(
~
1
Les invasions des Barbares avaient fait sombrer l'empire
Romain et avec lui avaient disparu la prospérité et la
civilisation.
Ce résultat de la tourmente était d'ailleurs forcé et inévitabl e, et en Gaule surtout, - la. seule province du vieil
empire dont nous devions nons occuper dans cette étude,
- il ne pouvait en être autrem ent.
C'était là en efTet qu e les Germains, attirés par la
richesse du pays, devaient faire le plus grand nombre d'in cursions, et lorsque les Francs se rureut définitivemen t
installés dans le pays, les rois forent obligés pour asseoir
leur conquête, de s'y livrer à des guerres continuelles
jusq u'à la féodal ité.
La dévastation était partout, le ruines remplaçaient le
monuments de la civilisation romaine • les campagne
étaient désertes et abandonnées; tous les ans et à chaque
nouvelle expédition, le villages étaient brûlés, les villes
détruites. Dans l'espace tle soixante-cinq ans Tréves fu t
�-
74 -
cinq fois saccagée, et de 447 à 7ts2 Orléans vit huit fois
l' ennemi camper au pied de ses murailles.
Dans de semblables conditions le commerce devenait
matériellement impossible, et l'activité humaine concentrée du côté de la guerre devait déserter l'industrie et les
arts. Les mœurs romaines tendent alors forcém ent à disparaître, sans cependant être complètement remplacée par
les mœurs des nouveaux conquérants.
conséq uence de cet effondrement !'>aénéral , il
Comme
.
dev1ent inutile d'indiquer que les associations ouvrières
ne pouvaient pas continuer à subsister. Cependant l'association est un phénomène social tellement naturel que nous
en remarquons la manifes tation chez les Germains. Il n'entre pas dans le cadre de ce travail d'examiner les ghildes
ger~ani4ues, mais nous sommes forcé d'en esquisser trèsrap1demen t le fonct ionnement, car quelques auteurs ont
prétendu Y trouver le germe des corporations ouvrières.
. Nou_s savons en cfTet par Tacite 1 que les Germains ,
qui avaient_une profonde horrenr du travai l manuel et qui
se pro_cura1ent tout ce dont ils avaient besoin par la guerre,
formaient entre eux d'étroites associations pour se défendr~ les uns les autres. C'est ainsi que se constituaient les
ghildes ou banquets à frais communs, dont las membres
s'appelaien t convives ou conjurés, et faisaient serment de
se défendre et protéger mutu ellement. Ils étaient tenus de
;enge'. le meurtre d'un des leurs, de procurer des secours
a celui d'entre eux qui étai t dans le danger. Si l'un d'eux
1
De mor. Germ., 7, 113, 14..
-
7?S -
était appelé en justice, tous les autres devaient l'escorter.
Enfin, en cas de maladie ils devaient se soigner mutuellement 1 •
Ces sociétés dont le besoin se faisait sentir à une époque où la loi du plus fort était seule en vigueur, contiennent évidemment Je principe des sociétés de secours, tout
comme les associations des premiers chrétiens. Peut-être
mème doit-on reconnaître qu'elles ont été l'origine des
confréries et des associations secrètes que nous rencontrons au .Moyen-Age, mais nous ne pensons pas qu'elles
aient donné naissance aux corporations d'ouvriers qni vont
se développer petit à petit. L'organisation seule du travail
pendant toute cette période de troubles et pendant les
premiers temps de la féodalité défend une pareille supposition.
Comment en effet et dans quelles conditions le travail
s'organise-t-il après la conquête des Germains?
Les Germains asservirent tous les esclaves romains qu'ils
trouvèrent et de plus ils réduisirent en esclavage tous les
artisans libres qui étaient dans les villes. D'autre part la
propriété foncière resta tout en tière entre les mains de
quelques privilégiés, el c'est ainsi que se formèrent ces
immenses domaines de l'Eglise et de la Noblesse. On sait
par exemple qu'au IX• siècle l'abbaye de Saint-Germain
possédait 221,187 hectares de terrain.
A ces vastes domaines étaient attachés des quantités
1
Aug. Thierr), Consid. sur l'histoire <le France, ch. V.
�-
76 -
considérables d'ouvri ers serfs qui travaillaient pour le
compte du maître. li y avait des ouvriers en tous genres
qui suffisaient à tous les besoins. Charlemagne, dans un de
ses capi tulaires, recommande qu' il y ait dans chacune de
ses fermes des forgerons, des orfèvres, des cordonniers,
des boulangers, des foulons et tous autres ouvriers qu'il
serai t trop long d'énumérer 1•
A côté des ateliers d'hommes on trouvai t les gynécées
ou ateliers de femmeb, à qui les travaux plus déli cats de
la filature, du tissage des éloffes étaient réservés . Ces
gynécées ont d'ai lleurs laissé un triste souven ir au point
de vue des mœurs, car au IX0 siècle ce mot de femm e de
gynécée était synonyme de courtisane, et l'attirail des dispositions prises pour e sayer de sauvegarder l'honn eur et
la dignité des ouvrières, prouve bien les débauches qui
s'y commettaient.
-
77 -
au contraire firen t reculer fort en arrière les arts et
l'industrie.
Dans de semblables conditions on comprend sans peine
qu'aucune association n'au rait pu se former entre ouvriers.
Celles-ci n'ont en efîet leur raison d'être que dans le désir
légitime des artisans de chercher à. améliorer leur situation. Semblable aspiration ne peut se rencontrer chez des
esclaves, ou du moins reste irréalisable, car leur condition
dépend uniquement de la volonté de leur propriétaire .
La lib erté est la condilion essentielle de l'association.
Il en est si bien ainsi que pendant tous les premiers
temps de la féodalité on ne rencontre aucune corporation
d'ouvriers. Les artisans étaient les vassaux des seigneurs,
des comtes et des évêques. Et c'est par exception que
quelques-uns obti ennent le droit de travailler. Ce droit leur
est en quelque so rte concéd é comme un fief. Et nous ci terons ici l'opi nion d'un économiste éminent: Le lief. ditil , est la concession d'un droit de propriété, de jouis ance
ou tout autre, à charge de prestations, de redevan ces d'un
ordre pins ou moj ns élevé. Cette propriété, ce droit, on Je
tient toujours de quelq u' un : point de terre, point de
droit, sans seigneur. Le régime féodal étend son réseau
sur tout et p:irtout, villes et campagnes : dan les villes on
est soumis au co mte ou à l'évêque; dans le campagnes on
est serf du mano ir ou du couvent. Tout est érigé en fief,
te droit de travaiUer au si. Des artisans obtiennent, à Litre
de fief, le droit exclusif ùe travai ller pour le seigneur qui,
pendant cc temps, leur paie une somme d'argent et leur
fourni t des sulJsistanccs déterminées par Je contrat. Nou
1(
fi s'était en somme produit un phénomène id entique
à celui que nous avon s étud ié à Rome après ses conquê-
tes. Le grand nombre d' esclaves avait annihilé complétement le travail li bre. Les esclave. travaillaient pour leurs
maitres et ce n'est qu'exceptionnellement et moyennant
des redevances très élevées qu'ils pouvaient livrer leur
travail aux parti culiers. D'aill eurs l'assimilation entre celle
époqu e et les co nquêtes romaines ne sanrait exister complétement, car à. Rome les co nquêtes furent la cause de
grands progrès dans la civilisa tion, tandis qu e les invasions
1
Ca p. de villis, ann . 800, ch. XLV .
�-
78 -
-
avons des actes ainsi con çus : ceci est le fief d'un tel, charpentier du seigneur évêque ou du seigneur comte 1• »
Cependant, dans certaines villes, notamment celles du
midi , qui avaient conservé plus longtemps les mœurs romaines, on trouve quelques traces des anciens collèges industriels. Les chartes municipales de Ravenne font mention, en 945, d'un collège de pêcheurs 2 • Mais ce furent
certainement des faits isolés qui ne contredisent point ce
que nous avançons plus haut, et il faut remonter jusqu'à
l'époque de l'affranchissement des communes pour voir
renaître le travail libre et les corporations qui en devinrent
bientôt le rempart.
Pendant le cours du X• et du XI• siècl e, le servage est
partout dans les domaines des seigneurs féodaux et dans
les villes. Il ne nous appartient pas d'examiner la situation
des serfs et de rappeler à quelles dures exactions ils étaient
soumis. La formul e qu'on empl oyait à leur égard dépeint
avec une concision remarquable leur triste condition : ils
étaient taillables et corvéables â. merci.
C'est d'ailleurs la violence même du servage qui explique
comment les populations devaient chercher à s'en aJTranchir. Lorsque les serfs curent acquis des sommes assez
fortes pour tenter les seigneurs, ils commencèrent à racheter leur liberté, et ce qui devait surtout terrasser et dé-
1
Alfred Jourdan, Conrs d'économie politique, p. 108.
2 Fa ntuzzi, .Mo11umenla Ravenn1lici, T. IV, p.
Aug. Thierry.
1 7~,
cito par
79 -
truire le servage, c'était la concession des chartes municipales et l affranchissement des communes.
C'es't surt~ut à partir de l'affranchissement des communes qu on voit les corporations prendre de l'extension et
se répandre .u~ peu partout. Dans toutes les villes les gens
~u mê~e m~t1e~ se' trouvaient group és dans le même quart1.er; c est am s1 qu on retrouve dans presque toutes les
villes et dans les vieux quartiers des rues portant le nom
d' un métier. Ces artisans, qui se voyaient journellement
qui avaient les mêmes occupations et partant les même~
intérêts, se réunissaient les uns avec les autres, se faisaient
des règlements qu'ils juraient d'observer. Bientôt ils considéraient leurs conventions comme des droits et s'efforçaient de les imposer soit aux officiers féodaux , soit aux
artisans forains. Mais pour arriver à ce résultat ils ttaient
obligés de s'adresser au seigoeur pour obtenir la sanction
de ces droits. Une fois Cfls chartes concédées, les corps de
métiers étaient fond és.
1
Le caractère particulier de toutes ces association s fut un
exclusivisme absolu et le monopole. Le droit au travail
était bien admi s, non pas d' une façon générale et indisti.nGte, mais au contraire d'une façon privilégiée : à l'origme, nous l'avons vu , c'est un fief. Comme justement
leurs droits leur étaient concédés d' une façon expresse,
elles voulaient, par égoisme, les réserver pour les seuls
membres qui les avaient obtenus ; de là les chiffres déter~inés pour le nombre des maîtres de chaque métier, de
la les mesures si rigoureuses à l'endroit des forains. Ces
vices originaires laisseront leur empreinte sur toute la
�-
80 -
durée des corporations et nous expliqueront ces querelles
et ces procès qui remplissent l'histoire des corporations
pendant tout le Moyen-Age.
. .
.
Les corporations une fois fon dèes se multtphent rap1~
dement et il serait trop long d'énumérer tou tes celles qui
se so nt constituées dès cette époque. C'est pendant cette
période qui s'écoule entre le X et le xm:. siècle ~ue nous
assistons à. une véritable renaissance de 1mdustne due en
grande partie à l'influence des Croisades. Aussi ce fut
peut-être le plus beau moment de l'histoire des corporations. Elles louent, avec l'appui de la royauté , contre
l'influence féodale, elles sont libres de mener leurs affaires
comme bon leur sembl e, elles font leurs statuts librement
et aucune autorité ne vient s' immiscer dans le règlement
du travai l.
On s'exp lique d'ailleurs très bien en l'état de la situati on
de la royauté cherchant à établ ir sa puissance en même
temps qu'à fonder l'unité du royaume, qu' il lui était alors
absolument impossible de songer même a intervenir pour
réglementer les corporations. D'autre part, il était évident
qu'elle ne pouvait pas, en présence de certaines crises et
de cert:lios phénomènes économiques, se borner à ce rôle
platoniquement contemplateur, et si les Capétiens, dans
un but politique, avaient laissé les corps de métiers dont
ils avaient besoin pour lutter contre la féodalité se développer librement, nous verrons les Valois au contraire chercher constamment à régenter le travail et partant les associations ouvrières.
Pour comp rendre et apprécier la portée des réformes
0
-
81 -
que les rois voulurent introduire dans les agissements des
corps de méti er il faut examiner rapidement le fonctionnement et la vie intérieure des corps de métiers.
Il va sans dire que les limites étroites qui nous sont
impos6es par notre sujet nous interdisent a· examiner dans
tous leurs détails les statuts des di!Térentes associations
qni couvraient la France à ce moment-là et que nous nous
bornerons à étudier eo quelque sorte le type général
auquel on peut les ramener toutes 1•
Le corps de métier était l'association formée entre les
artisans de même profession dans la même ville. On a
assim il é les collèges industriels de l'empire Romain aux
municipes et l'on peut aussi comparer les corps de .métiers
aux communes. En eITet on y trouve comme dans celles-ci
une adm in istration nommée à l'électi on de l'assemblée
générale; les magistrats qui sont ainsi nommés s'appell ent
généralement les syndics, les prud' hommes, les gardes du
méti er ou bien enco re les jurés. Ces chefs de la corporati on so nt chargés de faire respecter les privilèges et les
règlemen ts et ~ ·occupen t des intérêts de la communauté.
C'est ainsi que nous verrons les corporati ons ester en
justice par leurs syndics ou leurs gardes. A l'origine ces
magis trats sont nommés par l'assemblée gtinérale et pour
un certain temps, mais plus tarù le droit de rote est ré-
t Tous les rcnsei• noments sur le· corpo1·:i tion sont puisés .oit
Jnns I' ll1sloire d •sn classes ouvrie1·es do LeHLseur, ::oit dan le
Livre <Les Metiers !l ' Etionno Boi l<'a u, soi l dans !'Etude sur !'in
dustrfr de Fagnier..
6
1
�-
82 -
servê aune partie seulement des membres de la corporation aux mailres seuls.
Il y avait en eliet trois ordres de personnes dans le corps
de métier, les apprentis, les ouvriers et les maîtres.
Les apprentis ne faisaient pas à. proprement parler par·
tie de la corporation, ils aspiraient à y entrer. Leur nombre, d'ailleurs fort restreint , était déterminé par les règlements. Généralement un maître ne pouvait pas avoir plus
de denx apprentis. Certains statuts permettaient d'en avoir
trois, mais c'était l'exc~ption 1 • Le temps de l'apprentissage était aussi déterminé et il était fort long. li variait,
suivant les professions. entre cinq et douze ans, et les
corporations qui admettaient l' ouvrier sans un stage préalable de trois ans étaient rares. Cependant la durée de
l'épreuve imposée à l'ouvrier pouvait être rachetée et voici
comment : l'apprentissage en principe se payait au maître.
mais lorsqn'on traitait avec lui, si on s'engageait pour
douze ans, par exemple, on ï:onvenait qu'il ne lui serait dû
ancuoe rétribution. Que si, au contraire l'apprenti s'engageait pour un temps moindre, il devait payer une somme
qui était d'autant plus forte que la période de l' engagement devenait plus courte. Une exception était d'ailleurs
faite au profit des fils de maitres, qui quelque nombreux
t Livre aes Métiers de Boi leau. - Le~ statuts des orfèvr<'s ne
leur permettaient pas d'avoir plus d'un apprenti qui ne rut pas de
sa famil le. L'apprenti devait '"oi1· au moin di x ans. - Les cordiers peuvent rivoir auta11t d'ou\ riu1·:> qu' ils vo udront, mais ils ne
peuvent prend re qu' un soul appru11ti ot au moins pour q11at 1·u ans.
-
85 -
qu'ils fussent, avaient toujours le droit de se faire instruire dans le métier de leur père, et dans la plupart des
professions ne payaient aucune redevance.
Le contrat d'apprentissage se faisait devant témoins,
deux maitres dans certains cas et généralement devant le
maître du méti er. Il était, une fo is conclu , absolument
irrévocab le pour l'apprenti qui ne pouvait plus quitter son
maître. S'il prenait la fuite il était recherché et nul n'avait
le droit de lui donn er asile sans s'exposer à des peines
sévères. Il devenait en quelque sorte la chose de son
maître, qui avait le droit de le vendre 1•
En échange des services rendus par l'apprenti , le maitre
devait le loger, le vêtir et le nourrir pendant tou te la durée
de son engagement. Il devait surtout lui apprend re le
méti er. Cette dernière ob ligation a même servi de prétexte aux différents statuts pour colorer la dureté du règlement concernant les ap prentis. Leur nombre, disait-on,
est restreint, parce que le patron qui en aurait beaucoup
autour de lui ne pourrait pas s'occuper d'eux. suffisamment et serait obligé de les négliger. La vérité est que les
statuts étaien t faits dans un but de monopole et que Je,
difTérents membre. de corporations ne se souciaient pas
de voir surgir de nombreux concurrents, et que d'autre
part on craignait qu'un artisan ne prit de trop nombreux
apprentis pout· remplacer les ouvriers et produire ainsi on
travail à meill eur compte.
l
Uu bl.lt't-Vallel'oux, Corporations et syn<ticals .
�-
84 Lorsque le temps du stage était terminé, l'apprenti
devenait valet ou ouvrier. Certains statuts cependant exiaeaient de lui la confection d'un chef-d'œuvre pour montrer qu'il connaissait son métier, mais c'était là. une ex iaence fort rare d'ailleurs. En général il suffisait de prou::> •
ver par témoins ou par certificats que l'on avait accompli
le temps fixé par les règlements. Dans certaines villes,
les ouvriers qui v0ulaient s'embaucher devaient se rendre
à heure déterminée dans un endroit convenu qu'on appelait la place jurée, et c'était là qu'ils s'abouchaient avec les
patrons qui avaient besoin de leur service. Ce qui aujourd'hui encore s'est conservé comme une vieille tradition était
alors un règlement obligatoire.
!')
Avant de prendre un valet, le maitre était obligé de
s'assurer si celui-ci était li bre de tout engagement, s' il
éLait de bonne vie et mœurs, et enfin s' il avait des vêtements suHisants pour être touj ours mis décemment. Sur ce
point on trouve un détail qui montre jusq u'à qu el point
la règlementaüon des corporations était min1Jtieuse et autoritaire: il fallait dans certains métiers, chez les foulon s,
par exemple, que les ouvriers eussent au moins cinq robes,
pour que leur saleté n'éloignât pas les nobles gens, comtes,
barons et chevaliers qui quelqu efois venaient dans les
ateliers 1•
Le nombre des valets n'était pas déterminé par les règlements, la seule prescription existant ~\ ce suj et, c'est
1
Levasseur, Classes onVl'i~res.
-
85 -
qu'un maître ne pouvait pas avoir plus d'ouvriers que ne
le comportaient les besoins du travail. Les ouvriers étaient
loués au jour, à la semaine ou à l'année. lis ne pouvaient
s'engager que chez un maître de leur métier et ne pouvaient sous aucun prétexte aller travaill er chez un particulier. Ils étaient tenus de se rendre chez leur patron dès le
point du jour et devaient y res ter jusqu'à la nuit. Si Je travail pressai t, ils ne pouvaient se dispenser de travailler le
soir, mais cependant moyennant une augmentation de
salaire. Il ne leur étai t pas permis, sous peine d'amendes
sévères, de quitter lenrs maîtres avant l'expiration de leur
engagement, et d'ailleurs la réciproque à ce point de yue
leur était rendue, car le maîlre ne pouvait les congédier
que s'il avait des motifs érieux approuvés par les gard es
Ju mrtier. Il s avaient enfin un privi lège général ement
admis : les ouvriers d'un e ville étaient toujours et devaienr
toujou rs être préférés aux ouvri ers du dehors.
A cô té de ces deux classes de personnes que nous
voyons dans les corporations et dont la condition était en
somme assez dure, nous trouvons l'ordre des pri,·ilé11iés
0
'
c'est-à-dire des maîtres. Le nom qui leur avait été donné
a servi à dé igner qu elqu efoi les associations des corps
de métiers. C'est en effet de là qu'est venu le mot de
mailrise.
Cette classe était évidemment de beaucoup la moins
nombreuse. Nous savons d'aill eur et nous l'avons déjà vu
à propos des apprentis que les corporati on~ redoutaient
d' augmenter le nombre des concurren ts, c'est même la
cause que la plupart des règlements imposaient des condi-
�-
86 -
tions fort dures pour arriver ~t la maîtrise. L'esprit d'exclusivisme et de monopole se montre à cet égard dans
toute sa force et nous all ons voir combien il était difficile
pour l'ouvrier de franchir la distance qui le séparait des
maitres.
Pour obtenir la maîtrise il ne suffisait pas d'avoir été
apprenti et ouvrier, il fallait encore et surtout acquitter
différents droits fort coûteux soi t à la corporation soit au
roi qui, ainsi que nous l'a,·ons vu , vendait le métier. Il
fallait de plus subir l'épreuve du chef-d'œuvre. Si un ouvrier s'était avisé de s'installer pour so n compte sans s'être
conformé à cet usage, ses outils auraient été saisis avec ses
marchandises et il aurait été condamné à une forte
amende.
Le chef-d'œuvre est une institution trop importante de
l ' bistoir~ des co rporations ouvrières et a eu une trop
grande influence sur leur sort pour que nons puissions
ne pas en dire quelqu es mots. C'était en quelqu e sorte
l' examen que la ~o rpora tion faisait su bir à l'artisan qui
voulait ouvrir boutique. li va sans dirr, que ·le chef-d 'œuvre
variait selon le métier; il était généralemen t imposé par
les règlements 0u bien par les jurés du métier. Dans quelques professions cependant il était laissé au choix de l' ouvri er. Les règlemen ts déterminaient d'une façon exacte et
minutieuse dans quelles condi ti ons il devait être fait.
Généralement c'était dans la maiso n d'un des jurés ou du
moin s dans une maison dêsignée par eux qui~ l'ouvrier
devait confectionner l'objet qui lui étai t im posé : on voulait
éviter de cette façon qu'il ne put s' inspirer des co nseils ou
-
87 -
de l'aide d'an ami complaisant. Il travaillait seul, personne
ne pouvait pénétrer dans la salle qui lui servait d'atelier,
si ce n'est les jurés qui venaient de temps en temps le
surveiller. Le chef-d'œuvre terminé, il devait être agréé
par les jurés, après quoi l'aspirant était reçu maître et
jurait entre les mains du magistrat de se conformer aux
règlements du métier.
Les mémoires de l'époque prouvent que cette épreuve
entrainait souvent des fraudes. De plus, comme le jugement des jurés était par trop intéressé, il y avait souvent
des procès et les candidats en appelaient souvent de ces
décisions à des magistrats supérieurs qui étaient loin de
leur donner toujours raison 1•
On voit par tout ce qui précède combien difficile était
l'accès de la maitrise, sans compter qu'il fallait être très
riche pour tenter l'épreuve ùu chef-d'œuvre, car sans parler des droits multip les à acquitter à la corporation, il
fallait de plus payer les matières premières deslinées h la
confection de l'œuvre et avoir les moyens de vivre penùant
tout le temps nécessaire pour la mener à bonne fin.
l'on ajou te encore que, t0ujours sous l'influence de l'idée
de monopo le, certains règlements interdisaient le chefd'œune à tous ceux qui n'étaient pas fils ou gendres de
maitres, on se rend bi en compte qu'elTectivement dans la
corporation tous les privilèges étaien t pour la classe des
maîtres.
1
Levasseul'.
�- 88 Aussi, à raison même de celle situation voit-on bientôt
se créer, à côté des corps de métiers, des associations purement ouvrières destinées à protéger l'ouvrier, ce sont les
devoirs, les compagnonnages, la franc-maçonnerie. Ces
institutions sont curieuses à examiner au point de vue de
la manifestation du droit d'association. Les ouvriers, en
effet, repoussés de la maîtrise par les difficu ltés dont on
l'avait volontairement entourée, pauvres pour la plupart,
sont obligés de quitter les villes qu 'ils habitent pour ailer
chercher du travai l un peu IJartout, et en même temps
pour se perfectionner dans leur art. Ils commencent .:Jonc
à mener un e vie nomade et à faire ce qu'on a justement
appelé le Tour de France. Ils comprennent vile que l'individu isolé dans une ville qu'il ne connaît pas sera souvent
exposé à des mi sères très grandes el par l'association il s
cherchent à remédier à ces in convénien ts. Les ouvriers du
même métier se rénnissent non plus dan s un senl cenlre
mais au contraire ùan s tou t le pars. Partout il y a une mère
du métier qui héberge les compagnons lorsqu'i ls arriven t
el leur procure du travai!. De cette façon une vaste société
de secours mutuels se trouve formée, et tell e est l'origin e
des compagnonnages.
-
ciés se reconnlisscnt à première vue par des signes particuliers.
De toutes ces associations l'une d'entre elles a survécu
josqu·à ce jour et nou s a fourni l'occasion de les étudier
toutes d'une façon complète. Nous voulons parler de la
Franc - maçonnerie. Prenons-là. telle qu'ell e fonction~e
encore aujourd'hui. Dégageons-fa des formes étroites
qu'elle observe et qui aujourd'hui nous paraissent grotesques et surannées, et nous voyons de suite les services
immenses qu'elle peut ren dre. Un franc-maçon arrive-t-il
quelque part, on lui procurera des seco urs ; s'il est pauvre, on lui fera trouver du travail; au lieu d'être isolé, il
sera en touré d'amis ; s'il court un danger, il aura à côté
de lui un soutien : en un mot, les avantages dont il jouira
seront considérables. S'il en est encore ainsi aujourd'hoi
où les cond iti ons de la vie sont, par le fait d'institution ·
gouvernementales fonctionnant régu li èrement, ab solum ent
assurées, à plus forte raison en devait-il ètre ainsi à l'époque où la liberté individuell e n'exis tait pas et où l'arbitraire et le privilège r~gnaient complétement.
•
Ces sociétés cependant ne pou vaient pas s'établir d'une
façon ouverte et ostensible. Ell es avaient à lutter contre
l'influence des patrons et c'est secrètement qu'ell es se
développent en s'entou rant cle form es mystérieuses. C' es t
ainsi que l'affiliati on se fait avec des cérémonies bizarres
et syml>oliques, c'es t ainsi encore qu e les différents asso-
11
t
89 -
Aussi voit-on ces ociét6 ' se multiplier au Moyen-Age
avec toutes leur qualité et leurs avantages, mais aussi
avec leurs défau ts. li est certain en effet que la ociétê a
une tendance toujour. marquée à l'exclusivisme, et i l'on
se trouve à une époque où l'édoe<i tion n'est pa. encore
faite, cet e prit cl'cxclu. ivisme s'affirmera par de violences
et des excès. et c'est ai nsi que l'histoire nous a laissé Io
triste souvenir de ce rivalité, san glante~ qui se produi-
�-
90 -
saient journellement entre compagnons de deux devoirs
différents.
En même temps il se produisait dans une même société
de trop fréquentes occasions de réunions qui dégénéraient
trop volontiers en débauches : l'atelier était trop so uvent
déserté pour le cabaret; sans compter que dans ces fêtes
trop nombreuses les bénéfices dus aux tr!l.vail étaient vite
absorbés, de so rte que la condition SO(.;iale et économique
de l'ouvrier ne pouvait pas s'élever mais tendait au contraire à. baisser. Nous savons en eITet que lorsqu'un compagnon arrivait, on fèta1t sa bienvenue; s'il s'éloignai t,
c'était so n départ qu'on célébrait; tout en un mot était un
pré tex te à réuni on et à. orgie. Enfin , à. cause même de la
rivalité qui existait entre maitres et ouvriers, les associatious dont nous nous occupons faisaient so uvent naître des
grèves qui loin d'être fontlées sor l' intérêt des ouvriers
n'avaient d'au tre raison que la hain e du patron et qui
so uvent duraien t fort longtemps et occasion naient des
désordres profondément regrettables à tous égards.
Par cet exarr.en rapide que nous venons de faire des perso nn es qui faisa ien t partie des corporations , on voit facilement que l'association ne devait pas dans le Moyen-Age
produ ire des résu ltats autres qu'à Rome et ne pouvait pas
améliorer la situation des ouvriers ni facil iters le développement et le progrès des arts et de l'industrie.
Si maintenan t nous examinons les entraves qui étaient
mises à la liberté du travail par les diITérents règlements,
nous verrons dans quelle situati on désavantageuse se trouvait l'industrie, et oous comprendrons sans peine les efforts
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91 -
qui furent faits par la royauté pour parer à ces inconvénients.
Oe même que tout ce qui concernait les personnes était
minutieusement prévu et prescrit par les statuts des différentes co rporations, de même en était-i l pour le travail.
Les règlements posaient en principe que toute marc.handise
doit être loyale et marchande, mais pour arriver à ce résultat ils indiquai1mt d'une façon précise la qualité el la
quantité de la matière première, Je poids, la forme et le mode de fabrication des [Jroduits. De plus, à côté de ces pre. criptions s'en trouvaien t d'autres qui marquaient une
grande défiance à l'endroi t de l'artisan qu'on soupçonnait
toujours de vouloir tromper l'acheteur. C'est ain i, par
exemple, qu'on défendait aux cou teliers de fabriquer des
manches de couteau couverts de soie ou de fils de fer, de
crainte que l'acheteur s'imaginât avoir un couteau précieux,
alors que le manche était seulement en bois blanc.
Le maître ùevait travailler :ivec ses ouvriers, mais cle plus
il devait exercer son métier à la vue du public, et c'est
ainsi que les serrurier et les orfèvre devaient avoir leur
établ i près ùes fenètres ùu rez-de-chaussée. C'est d'ailleurs
ce qui explique pourquoi, dans ces deux profc ion ,
l'u age 'est maintenn de faire du magasin l'atelier. Dans
certaines professions, le tra\'ail de nuit était interdit 1 •
Pour s'assurer de l'exécu tiou de ces disposition., les mai-
1 Nus 01fèvre ne 1mel 011t•rer de 111Lil , se ce 11 'est à (œrwn:
/on Ifoy , la lloyne, leurs r•nfctns, le11rs ,frères, et (J::vesq11e de
Paris. - E1ie11ne lloill'au, livre des l\Je11ers.
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92 -
tres du métier faisaient des visites domiciliaires confisquaient les marchandises défectueuses et imposaien t des
amendes aux délinquants. Les artisans ne pouvaient pas
appeler les chalands et leur faire des olTres de service.
Enfin dans chaqu e profession il était dans l'intérèt de la
conservation du monopole absolument interdit d'empiéter
su r les autres métiers.
Chacun sait à quels procès interminables ce règlement
donnaiL lieu. Tout le monde connait en effet ces rivalités
arden tes qui ont existé entre les fripiers et les tailleurs, et
les véritables poèmes tragi-com iques, qui on t été enfantés
µar les luttes des rô tisseurs et des marchands de volailles.
Nous n'insistons pas sur ce point. Ces querelles de métier
à métier, qui du re te troublaient profondément l'harmonie économique, n'étaien t que la conséq uence de l'idée de
monopole et de privilège. Mais nous retenons un point en
passant. car il a son importance au poin t de vue juridiqne,
c'est que les corporations avaient une perso nnalité morale
et pou,•aient plaider en justice par des mandataires qui les
représentaient. Ces mandataires étaient généralement les
syndics ou les jurés.
Quelle fut l'infl uence économique de ces divars règlements? Ce fu t évidemmen t de favoriser la routine au détriment du progrès par les en traves mises à \' initiative
privée et par le défau t de concurrence. Il y avait là un
résultat tell ement déplorable, au point de vue de notre
industrie nationale, ~u'il dut justement faire l'objet des
grandes préoccupations des rois qui, par diverses mesures
législatives essayèrent4 de réagir contre l'aulorité despotique
-
95 -
des corporations, sans avoir d'ailleurs jamais la force de
rompre complètement cet ordre de choses en supprimant
complétemen t ces associations.
En présence de semblables résultats, aggravés d'ailleurs
par les calamités qui affli gèrent si longtemps le pays, il e t
certain qu e le pouvoir législatif dut à. jnste titre se préo~
coper de l'organisation du travai l. Il nous reste donc à examiner les différentes mes ures qui furent prises soit pour
limiter, soit pour snpprimer le dro it d'association. Cette
étoùe historique qui part des premiers temps de notre
histoire se con tinu e jusqu'à nos jours.
Les Valois, nous l'avons vu, ne suivirent pas, à l'égard
des corporations, la même politique que le Capétiens.
Alors que ceux-ci s'étaient alliés à. la bourgeoisie pour
combattre l'influence de l'aristocratie, ceux-là, au contraire, trouvant l'influence des nobles moins redoutable
que celle de la bourgeoisie, essayèrent d'abattre celle-ci .
D'ailleurs on commence à comprendre les incoménient des
corps de métier. Lape te étant en effet venue décimer les
populations ouvrières, les prix de toutes choses avaient
augmenté et on attribuait ce renchérissement aux règlements sur le travail, et le roi Jean, par son ordonnance
de février f 561, es ayait de les opprimer. C'e t ainsi
qu'après avoir fixé le prix des différentes denrées, l'ordonnance ajoutait que dorénavant le nombre des ouvriers de
chaque métier ne pourrait plus être déterminé par les
règlements, mais devrait au co ntraire être libre; c'e t ainsi
encore qu'elle admet la liberté absolue pour tous en proclamant qu~ tout ouvrier pourra partout exercer son
�-
91,, -
métier à la cond ition que son œuvre soit loyale et bonne.
L' ordonnance ne fut d'ailleurs pas appliqu ée et resta
lettre morte. La royauté se trouvait alors trop de besogne
sur les bras pour so,oger à. faire respecter les lois qu'ell e
édictait. ll fallai t en effet continuer la guerre de cent ans,
il fallait trouver sans cesse des ressources financières nouvelles, et enfin il falltit lutter contre la bourgeoisie qui
voulait surveiller l'emp loi de son argent. C'était l'époque
oü les paysans se soulevaient contre les seigneurs, et où
Etienne Marcel, venu trop tôt dans un siècle trop jeune,
était le véritable roi de Paris : dans les campagn es , les
Jacques, à Paris, les Maillotins. Des émeutes chaque jonr;
enfin, pour mettre le comble aux malheurs publics, la
lutte des Armagnacs et des Bourguignons.
Comme dans toutes les périodes troublées, les corporations devaient jouer un rôle. Mais ce qu e nous avon s vu
se produire à. Rome avec Clodius se reproduit avec Etienne
Marcel et le duc de Bourgogne. Cc sont surtout les classe~
basses de la popu lace qui jouent un rôle dans les massacres des Armagnacs, et c'est, ainsi que nous l'avons déjà
fait remarquer, la conséquence du droit de réunion plutôt
que du droit d'association.
De toutes ces lultes la royauté sortit plus forte qu e par
le passé. Elle avait définitivement repoussé les prétentions
de la bourgeoisie qui voulait s'ingérer dans l'administration du royaume, et c'était elle qui au contraire allait faire
sentir aux corporations son pouvoir et sa force. Son intervention dans les affaires des corps et métiers allait devenir
incessante et continuelle et le prétexte qui permit cette
-
95 -
immixtion fut certai nement l'état dans lequel se trouvaient
le commerce et l'industrie à la fin de la guerre de cent ans.
Le travail avait en effet cessé partout et pour le faire reprendre les rois alléchèrent les artisans par l'appât du
monopole.
Charles VII, dès que le calme fut rétabli en France,
rendit de nombreuses ordonnances pour confirmer les
statuts des anciens corps de méti er, pour rétablir des règlements anciens, pour créer de nouvelles corporations.
Mais en même temps le roi se résen·ait une part des droits
et des amendes, d'autre part les corps de métier étaient
soumis à la surveillance des officiers royaux, et enfin le
rot avait le droit de délivrer, pour la naissance d'un prince
par exemple, des brevets de maitrise. Louis XI alla même
plus loin qu e son père et s'arrogea le droit de dispense r
certains ouvriers des épreuves de leur métier, mais bien
entendu moyennant paiement au fisc de sommes plus ou
moins fortes.
D'ailleurs le caractère de l'intervention royale fut surtout la fi scalité. Des besoins d'argent plus grands incombaient à la royauté au fur et à mesure de l'unification du
royaume et de l'extension de l'administration, aussi les rois
battaient-ils monnaie des privilèges qu'ils s'étaient arrogés.
Ils vendaient le métier, suivant l'expression consacrée et
exigeaient des redevances fort élevées de la part de tous
ceux qui voul:tient obtenir le titre de maitres. Les privilè·
ges se multipliaient à chaqu e nouveau besoin d'argent. On
inventait des sinécures et des charges grotesques, tels que
des conseillers du roi contrôleurs aux empilements de bois,
�-
96 -
des essayeurs de beurre salé. Ces extravagances, dit Vol·
Laire, font rire aujourd' hui , autrefois elles faisaient pl eurer. Le mot de Pontchartrain à Louis XIV dépeint bien les
mœurs de la royauté à cet égard : «Toutes les fois , di sailil, qu e Votre Majesté crée un office, Dieu crée un sot pour
l'acheter. »
Cependant, pour être juste, il nous faut énumérer toutes les réformes utiles au commerce et à la tlasse ouvrière
que les rois tentèrent de réaliser. C'est ai n ~ i que nous ne
pouvons pas passer sous sil ence l'ordonnance de François 1.. , rendue en 1540 , établissant par tout le royaume
une mesure unique. Il convient d'ajou ter que trois ans
après il dérogeait lui-même à so n ordonnance en perm ettant aux marchands drapiers de se servir de leurs aulnes
anciennes.
C'est a1u i à cette époque qu e se place l' institution des
tribu.oaux d ~ commerce : c'es t en eITet rn 1 !)!~9 que furent
fondes les tribunaux de Lyon, de Toulouse et de Nîmes et
'
en 1 055 celui de Paris.
Ces deux réformes prouvent bien dans quel état se trouvaien_t le commerce et l'industrie à celle époyne ; d' un e
part ~l e~t . certain que les marchand s trompaient l'achet~ur a 1aide de mesures mullipl es, et d'autre part les proces des corporations étaient si longs et si désastreux que la
nécessité
. d'une juridiction plus commod e et p1us rap1.de
,.
s 1mposa1t.
C'est encore dan s la situation écon1)m ique créée par les
..
qu'il faul rechercher la causo des prem1cres
corporations
h'b' .
pro t tt1ons empêchant l'entrée du royaume à. certain es
97 -
marchandises étrangères manufacturées et la sortie des
matières premières nécessaires à la confection des mêmes
marchandises. On voulait développer l'industrie nationale
qui déjà n'était plus à même de lutter contre la concurrence étrangère, et de là devait naitre le système protecteur.
Il faut d'ailleurs indiquer, pour être complet sur ce
point et bien comprendre la politique de Charles IX, qu' un
évènement économique important s'était alors produit,
nous vo ulons parler de l'inondation des métaux précieux
importés d'Espagne en France. Il est incontestable que
l'or affluant sur les marchés, il s'était produit une dépréciation considérable de la monnaie et partant un renchérissement très for t de toutes les marchandises. De tous
les coins du royaume sont formulées des plaintes sur le
prix excessif à quoi sont \'enues toute chose, et la royauté
imputant tout le mal aux corporations ouvrières fit tous
ses efforts pour règlementer les marchés, et par l'ordonnance de 1567, confirmée par celle de 1!)77, crut trouver un remède dans un tarif des denrées. A côté d'ailleurs
de celle mesure, qui ne devait avoir aucun e!Iet, nous
trouvons dans cas ordonnances une réforme très-sage, la
réunion de plusieurs corporations rivales en une seule.
On s'explique aisément que la royauté se soit trompée
sur la cause première de la crise que le pays traversai t à ce
moment. Les désordres et les troubles occasionnés par les
corporations étaient alors tels qu'on devait évidemment
croire que de fa naissait tout le mal. C' est ainsi qu'on comprend que les rois se soient efforcés de couper le mal dans
7
�-
98 -
la racine, et comme à leur sens c'était l'esprit de lurbulenc~ q~i ~e renc?ntrait surtout dans les confréries qu'i l
fallait repnmer, tls luttaient hardim ent contre cell es-ci.
L'Eglise avait donné Je signal de la lutte i.;ontre ces associations qui ne semblent être 1Uabties que pour favoriser les
monopoles et les crapules de lei débauclie, et avait lancé contre
elles ses anathèmes. Le Parlement, de so n côté, avait vo ul u
meure un frein à leurs excès et avait décrété l'empriso n~ement contre tous ceux qui assistaient à des banquets ou
a de~ ~s~emblées so us prétex te de confrairies. Mais ces
pr?h1b1t10ns étaien t restées sans eITet, et en 1 ?'.S39 Fran~01s I~' rendit une ordonnance par laq uelle furen t abattue~,
tnte~d'.tes et dé~en~ues toutes confrairies. Les exceptions que
': 1o1 autorisait rendirent vaines les prescriptions de
1ordonnance. Pendant tout le cours du XVI• siècle de
nombreuses ordonnances vinrent renouveler ces défe
nses,
et • t · .
c.es ~rns1 qu'on peut citer J'ordonnance de 156 1, cell e
de ~lou l ms de. 156 6' et enfin celle de Blois en 157 9.
, Enfin Henri .Ill voDlut, ap rès toutes ces ten tatives inf1 uctu eu~es, reformer compl étement l'o rganisati on des
. .
corporations. Son ordonnance de 1 xg1
supprimait com"
.
..
pletemen t les monopoles d
es maitrises et des jurandes or. .
gan1sa1t des corps. ~e métiers pour tou tes les professi~ns,
et _ces corp~ de metier élaien l corn plètemen t sous la sur.
d
ve11lance directe de l'au torité Cett
e or onnaoce, qm aurai t
•
,
cl' ·11
a1 eurs rendu de grands services à la classe des tra ·1
va1 .
. .
leurs, ne fut pas mise:
a execut1on a cause des troubles
.
. .
re'1g1eux qu i ensanglan taien t alors Je p ,
a)s .
a ·1
enr1 V, en H>97, confirma J'o rdonnance
de 1~ 8 1 ,
-
99 -
mais ne sut pas mieux l'appliquer que ses prédécesseurs.
Bien que toute sa politique ait eu pour but de favoriser
le commerce et l'industrie, nous savons par
l'aariculture,
!!>
les cahiers du Tiers-Etat, lors de la dernière réunion des
Etas-généraux, que les excès des corporations étaient tels
qu'on réclamait la suppression de toutes maitrises de métiers.
La royau té ne pouvait d'ailleurs pas renoncer à. une constitution qu i, au point de vue fiscal était si productive.
Richelieu, avec sa poli tique si autoritaire, ne songea jamais
à réaliser semblable entreprise et pendant tout son mini tère, au co ntraire , il concéda de nombreux privilèges aux
corporations dont il n'avait rien à redouter. La générosité
était d'aill eurs intéressée , car chacune de ses faveurs
était payée à prix d'or.
Colbert se propose pour but de multipli er les corporations, mais en les mettan t absolument sous la dépendance
de l'autorité royale ; c'est ainsi qu' il fut amené à. promul guer ses ordonnances de 1669, qui réglementaient d'une
façon minutieuse \' industrie des draps. JI commit, d'ailleurs,
dans l'intérêt de l' industri e, la faute d'impostlr des prescriptions trop rigoureuses aux artisans; c'est ainsi qu'en
décembre 1670 il lit rendre un arrêt par le Parlement, punissant du pilori toute infraction aux règlements. Loin
d'arrêter la fraude et de mettre un terme aux abus, cette
politique n'eut pour elTets que d'augmenter encore le- entraves apportées au commerce et à l'industrie et d'anéantir
complètement ce qui restait de la liberté du tra~ail.
En somme de tous ce efforts tentés par la royauté aucun n'eut pour résultat d'accorder au travail la protection
I'
~-"
, 1
L
-
l .
�-
100 -
qui lui est due et cela par une fausse conception de son
organisation. Celui-ci, en effet, ne doit être régi ni réglementé par des dispositions spéciales, et les corporations,
telles qu'elles étaient constituées au moyen-âge, n'étai ent
que des entraves inutiles qui arrêtent tout progrès en favorisant la routine. Le véritable moyen de donner de l'expansion aux arts et à l'industrie, c'est la liberté. Telle devait
être la solution à donner au problème qui s'était imposé à
l'esprit des législateurs.C'est à Turgo t que revi ent l'insigne
honneur d'avoir seul su trouver la clef de la situation et
d'avoir fait tous ces efforts pour réaliser cette grande réforme, supression des maîtrises et des j uran<les.
Turgot seul comp rit quelle entrave apportai t à la liberlé
du travail le privilège des corporations et dans son édi t de
février 1776, il les supprime, et voici en qu els term es :
([ Nous voul ons abroger ces institutions arbitraires qui ne
permettent pas à l' indigent de vivre de son travail, qui repoussent un sexe à qui sa faiblesse a don né plus de beso ins
et moins de ressources et qui sembl en t en le condamnan t 1
une misère inévitable seco nder la séduction et la débauche
qui éteignent l'ém ulation et l'industrie, et rend ent inutiles
les talents de ceux que les circonstances éloignent de l'entrée
d'une communauté, qui privent l'Etat et les arts de tou tes
les lumières que les étrange rs y appo rteraient, qu i retardent les progrès de ces arts .. . , qui enfin , par la facilité
qu'elles donnent aux membres des communautés de se
liguer entre eux, de forcer les membres les plus pauvres à
subir la loi des riches, deviennent un instrument de monopole et favorisent des manœuvres dont l'eITct est de hausser
-
101 -
au-d essus de leur proportion naturelle les denrées les plus
nécessaires à la subsistance du peuple. l>
Cet édit présenté en même temps que celui qui supprimait la corvée suscite un mouvement général parmi tous
les privilégiés. Pour faire enregistrer les édits le roi dut
tenir un lit de justice et l'avocat général Séguier prononça
un vrai réquisiloire contre la liberlé de l'industrie. ' La
suile inévitable de cette liberté sera l'anéantissement total
des arts, des artistes de la confiance et du commerce. .. .
La loi, sire, a créé des jurandes, a établi des règlements,
parce que l'indépendance est un vice de la constitution
politique .... Le but qu on prop-0se à Votre Majesté est d'étendre le commerce, en le déli vrant des gênes, des entraves .. .. Nous osons a·rnncer la proposition diamétralement
con traire; ce sont ces gênes, ces entraves, ces prohibitions,
qui font la gloi re, la sûreté, l'imm ensité du commerce de
la France.»
Malgré tout les édits furen t enregistrés. Mais dans celle
lulle sou tenue par Turgot, sa popularité avait. sombré.
Celui-ci s'en doutai t bien lorsqu 'il avait dit en arrivant au
pouvoir : ([Le peuple est si aisé~\ tromper que peut-être
j'encourrai sa haine par 1es mesures que je prendrai pour
le défendre contre les vexations.» Et Voltaire avait écrit:
([ M. Turgot fera tant de bien, qu'il finira par mettre tout
le monde contre lui . l> 1
L
.t.::s1;ui
s11 r
fr
111111 islèrl'
cfr
1'111
r1ot, par M. Fonein.
�-
102 -
Après la retraite de Malesherbes, le roi a.ccepta la ~émis
mission de Turgot le i 2 mai 1776, el un simple arret du
conseil rétab lit les corporations dès le mois d' Août suivant.
Heureusement la Révolution devait bientôt reprendre
l'œuvre de Turgot et la mener à bonne fin.
DES ASSOCU TIONS
dans le droit iutcrmédiah•c.
,
Le rn février 1791, le député d' Aliarde, an nom du
co mité de contributions publiques, déposait son rapport
sur l'abolition des corporations et l'Assembl ée nati onale
votait la loi du 2 mars, promulguée le 17 mars uirant,
supprimant toutes les maitrises et jurandes et proclamant la
liberté ah. olu e du travail. L'article 7 de la loi décidait qu'il
serait libre à tou te personn e de faire tel négoce ou d'exercer tels profession, arL ou métier qu' elle jugerait bon.
Mai le désir cl 'a seoir définitiv ement celle réforme et la
crainte de Yoir reparaître un e in stitution réprouvée par
tous. pou sèrent l'assemblée dan un e voie de réaction qui
devait avoir un ré ultal fàcheux. Le décret des 1'~ et 17
juin 1791, édi cté en vue ~ urtout de prohiber le rétabli, ement des maitrise et de jurandes upprimait le droit
d'association pour les Ollvrier .
L'article 1•r di posai t : « L'anéantis emcnl cle toutes les
espèces de corporations Jos citoyen du même état et pro-
�-
-
104 -
fession étant une des bases fondamentales de la constitution française, il est défendu de les rétablir de fait sous
quelque prétexte el sous quelque forme que ce so it. »
L'article 2 étail ainsi conçn : « Les citoyens d'un même
état ou profession, les entrepreneurs, ceux qui ont boutiqu ~ ouverte, les ouvriers et compagnons d'un art quelconque ne pourront, lorsqu'ils se trouveront ensemble, se
nommer ni présidents, ni secrétaires, ni syndics, tenir des
registres, prendre des arrêtés ou délibérations, former des
règlements sur leurs prétendus intérêts communs. l>
Le décret décidait ensuite que les municipalités et les
corps constitués ne devront tenir aucun compte des pétitions que les associations pourraient formuler relativement
à leurs prétendus intérêts communs et édictait des peines
sévères contre ceux qui pourraient ainsi se réunir.
Le décret supprimai t donc, et d'une façon absolue, le
droit d'association pour les classes ouvrières. So us aucu n
prét;xte il n'était plus permis de s'assembler pour délibérer
sar les intérêts communs. On suppose même qu' il ne peut
plus y avoir d'intérêts communs. Défense est faite d'i:lvoir
des règlements. Interdiction de nommer des présidents,
syndics ou secrétaires, inhibition formelle de se concerter.
D'ailleurs la Constituante n'avait pas cru, par ce décret,
porter atteinte à la li berté d'association. Le texte même de
l'article premier indique très nettement l'idée qui l'avait
inspirée, c'était uniqu ement la crainte de voir renaître les
privilèges et la règlementation des divers corps d'état qui
l'avait préoccupée.
A ce moment où pour la première fois le travailleur
1
to?> -
jouissait de la liberté tant individuelle que professionnelle,
on ne s'était pas rendu compte des avantages qui pourraient
résulter d'une association entre patrons et ouvriers. On
avait cru que par le fait seul de l'association les maitrises et les jurandes pourraient el devraient même renaître.
On n'avait pas fait la distmction de l'association fermée,
privilégiée et réglementée, avec l'association ouverte à tons
et librement formée. On connaissait les entraves apportées
au commerce et à l'industrie par ces institutions réprouvées
on ne soupçonnait pas les avantages qui pourraient résulter
des syndicats.
On savait qu'avec les maitrises et par le fait des privilèges le progrès de l'industrie était impossihle. Les maitres
n'y avaient pas intérêt, la concurrence n'existant pas et alors
même auraient-ils voulu le favoriser, les prohibitions et les
défenses qui pesaient sur eux les en auraient empêchés.
Pouvait-on supposer que grâce aux syndicats des centres
de renseignements précieux permettraient aux patrons,
d'ailleurs stimulés par la concurrence étrangère de s'emparer des perfectionnemen ts nouveaux et surtout de les rechercher!
La Constituante avait voulu assurer aux onvriers Je libre
exercice de leur travai l qui, avec les règlementations des
maîtrises était absolument impossible, mais elle n'avait pas
envisagé tons les bénéfices que les syndicats leur procureraient. On ne s'étai t pas imaginé qu e, par l'association,
les ouvriers pourraient librement discuter leurs droits sans
recourir aux grèves. On n'avait pas entrevu pour eux la
�-
106 -
possibilité de créer des écoles professionnelles, d'établir
des caisses de secours, des bureaux de placements.
En un mot on avait voulu faire disparaître à tout jamais
les abus engendrés par les maîtrises, et on ne s'était pas
aperçu qu' on faisait disparaitre un droit primordial, le
droit d'associat10n, si fécond en ntilités et en avantages.
Pour inaugurer un régime de liberté, on créait d'autres
entraves, et aux prohibitions de l'ancien état de choses succédaient de nouvelles pfClhibitions, et cela, d'ailleurs, d'une
façon inconsciente et certainement avec les meilleures intentions à l' endroit de ce ux envers qui on prenait les mesures sévères.
Il est juste de faire remarquer à propos de cette loi , que
des coalitions nombreuses et turbulentes descendaient chaque jour dans la ru e et que redoutant les réunions tapageuses, on a\•ait par cette loi proscrit la liberté d'association
en haine de la liberté de réun ion et que c'es t de là que part
la confosion que nous avons indiquée et qu e nous verrons
plus caractérisée de JOUr en jour.
C'est aussi sous l' impulsion de ce sentiment que la loi
uu 22 germinal an Xl fut édictée. Les émeutes dans les rues
devienn ent chaqu e jou r plu s fréqu entes, et pour y mettre un terme le législateu r déclare que la coalition est nn
délit et édicte des peines spéciales. Cependant la loi de
ge rminal ne punissait que les coalitions form ées entre les
ouHi ers et non celles que les patrons anraieot pu form er.
Qu elles ont été et qu ell es devaient être les di spositions
du régime impérial relativement à la liberté d'association?
Nous avons dit, en étudiant les collèges d'artisans à Rome,
-
107 -
que plus le gouvernement est absolu moins grande devient la liberté d'association. Napoléon, qui rêvait une règlementation générale, ne devait pas se montrer favorable à
l'expansion de cette liberté. Si nous nous plaçons à un point
de vue général et absolu nous trouvons, en efîet, dans le
Code pénal de 1810, l'article 291, qui interdit les associations de plus de vingt personnes.
Arrêtons-nous un peu à cette disposition, qui nous régit
encore et tout d'abord examinons les termes mêmes de
l'article. li est ainsi conçu : " Nulle association de pin s de
vingt personnes, dont le but sera de se réunir tous les
jours ou certains jours marqués, pour s'occuper d'objets
religieux, littéraires, politiques ou autres, ne pourra se
former qn 'avec l'agrément du gouvernement et sou les
conditions qu' il plaira à. l'autorité publique d'imposer à la
société. ])
La première réflexion qui se présente à l'esprit à la lecture de ce tex te de loi, c'est !"étrange confusion qui y règne
dans les termes. Le lég islateur emploie tour à tour les mots
association, se r~unir, soci~t~. Cette co nfusion des mots doit
forcém ent se retrouver et se reproduire dans les idée .
Nous voyons là de la faço n la plus évi dente le défaut de
distinction entre l'association proprement dite et la réuni on.
Une seule chose a préoccupé les rédacteurs de l'article : le
trouble qu ' un e réunion de plus de vingt personnes pourrait, ~t un moment donné, occasionner dans l'ordre social
et cette crainte, doublée par les préoccupations poli tique .
les a empêchés de discerner qu'il y avait une différence
dans Io fait du se réunir t)n commun pour penser, ce qui
�-
108 -
caractérise la réunion, et le fait de se réunir pour agir, ce
qui conslitue l'association.
Le législateur a donc apporté la même limite à l'exercice
d'un double droit et nous avions donc raison de signaler
cette confusion, qui s'est perpétuée jusqu'à notre époque
et qui d'ailleurs n'a pas disparu depuis bien longtemps,
car la loi sur la liberté de réunion qui depuis de longues
années était à l'ordre du jour de la Chambre, n'a été votée
que récemment.
f\lais nous n'avons pas à nous préoccu per ici de l'entrave
apportée par le Code à la plénitude du droit de réunion,
mais seulement des obstacles mis par l'empereur à l'exercice du droit d'association. Notre article 291 nous prouve
que , d'une façon générale, aucune association ne pouvait
librement se former puisqu'il fallait une autorisation préalable du gouvernement. Nous avons déjà vu qu'à ce point
de vue cette me3ure est sage, l'autorisation gouvernementale est en quelque sorte pour rappeler un e expression par
nous déjà employée, l'acte de naissance de la personne
morale. Nous ne saurions donc blàmer cette disposition,
mais ce que nous reprochons à l'article, c'est de laisser un
pouvoir arbitraire au gouvernement relativem ent aux conditions dans lesquelles la société devra se constituer. Une
association quelconque ne peut vivre et prospérer qu'à la
co ndition de pouvoir se form er libremen t, si donc le gouvernement est libre de déterminer les cond itions qu'il lui
plaira d' imposer il y a dès l'origine un vice qui entraînera
la chute de l'association. li ne peut y avoir d'autres limites
à. l' exercice de ce droit, que le droit des autres citoyens et
- 109 et l'on doit laisser la liberté absolue à ceux qm s'associent
dans un but déterminé.
.. 1 .
resprit de la 1eg1s
at1on
. Ainsi donc d'une façon générale
a cette époque est loin d'être favorable au d. 1oppement
eve
du droit d'association.
Voyo~s maintenant ce qui concerne plus spécialement
~otr.e su1et. Et demandons nous si celui qui a fait édicter
. .
1,article. 291 pouvait se montrer favorable aux· assoc1at10ns
Poser la question c'est la résoudre , et Napo1.eon
d ouvriers.
. .
q~1 avait une si grande peur de la foule turbulente, ne de-
vait pas montrer une grande sympathie pour cette classe de
la société, qui, il faut bien le reconnaitre n'est souvent que
.
d.
trop isp.osée a causer du dèsorclre. N'était-ce pas lui, en
effet, .qui sous le Consulat avait fait promulguer la loi de
Germmal ? Est-ce qu 'il n'avait pas déjà prouvé au moment
de la rèdaction du .Code civil qu'il estimai t mieux les pat~ons que les oumers, en décidant qu'au cas de contestation le maître est cru sur parole? Dès lors peut-on s'étonner de voir les articles 414, 4 1~ et 416, sur la coalition
des ouvriers? Evidemment non.
Nous .nou~ bornons en ce moment à une simple revue
de la .lég1slatwn et dès lors nou s ne pouvions pas ne pas
~enttonner cette disposition importante, sur notre mat:er~ ~ nous nous réservons d'en discuter la légitimité et
1utilité dans l'examen de la loi de 1884, et pour arriver à
c~tte partie de nôtre tâche il ne nous reste plus qu'à examiner les diverses transformations que la section dans
laq~elle se trouvent comprises ces articles à subi jusqu'à
OOSJOurs.
�-
110 -
Pour bien comprendre la portée de ces transformations
il nous faut d'abord examiner le texte et l'esprit de ces
articles.
Le Code de 18i0 disposait de la laçon suivante :
Article 4U. - Toute coalition entre ceux qui font travailler des ouvriers tendant à forcer injustement et abusivement l'abaissement des salaires, suivie d'une tentative ou
d'un commencement d'exécution sera punie d'un emprisonnement de six jours à un mois et d'une amende de
deux cents à trois mille francs.
Article 41 :S. - Toute coalition de la part des ouvriers
pour faire cesser le travail dans un atelier, empêcher de s'y
rendre et d'y rester avant ou après de certaines heures et
en général pour suspendre, empêcher, enchérir les travaux,
s'i l y a eu tentative de commencement d'exécution $Cra
punie d'un emprisonnemen t d'un mois au moins et de trois
au plus. - Les chefs ou moteurs seront punis d' un emprisonnement de deux à. cinq ans.
Article 4-i 6. - Seront punis de la peine portée par l'a rticle précédent, et d'après les mêmes distin ctions, les ouvriers qui auraient prononcé des amendes, des défenses,
des interdictions ou toutes proscriptions, sous le nom de
damnations et sous qu elque qualiti cation que ce puisse être
soit contre les directeurs d'ateliers et entrepreneurs t.l'ouvrages, soit les uns con tre Jes autres. - Dans le cas du
présent article et dans celui du précédent, les chefs ou moteurs dn délit pourront, après l'expiration de leur peine,
être mis sous la surveillance cle la haute police, pendant
deux ans au moins et cinq ans au plus.
- 111 Notons on passant que 1 C d
que la loi de Germinal e e o .e se montre plus rigoureux
ciation, puisqu'il répr(men lcel~bu1 concerne le droit d'assoa i erté que les
d
patrons avaient
.
e se con~erter et de s'a
ssocier C'es t d' 'li
a1 eurs évidem·
ment dans un but d'é 'té
tée. Il fallait après a q~1 que cette restriction a été porvoir protégé les p t
'
.
a rons contre les ou. .
vriers, assurer aussi à
ceux-ci une prot .
.
ectwn contre les
maitres. Le Code porte d
u reste en soi 1
a preuve de la
.'
sympathie que le législateu.
r avait pour ceLL 1
e casse, car on
ne peut s'empêcher de
remarquer que les .
. .
pem es corporel1es edictées à l'encontre d
es patrons sont pl lé .
us gere que
!es pénalités encourues p 1
.
ar e ouvriers A'
. Joutons encore
1· .
que les promoteurs des
coa itions ouvr·è
r res sont recherchés
et punis très sévèrement 1
i.
, a ors qu e la loi
d. .
ne ait aucune
.
istinction parmi les t
pa rons qui se ont coalisés
.
Mais là n ' est pas pour nous l'intérêt d 1 ·
e a discuss ion.
Nous nous placons à un point de v
..
ue general et nous ne
•
distinguons pas en tre 1
·
es maitres et les
ouvriers. Nous recherchons ce qu 'a ét. 1 d .
e e rort d'as · ·
so~1at1on jusqu 'à nos
. jours et nou s avons à nou - d
de 1810, l'exercice en éla·~ emander sr en l'état du Code
syndicats tels que no 1 ' on non pos ible? En un mot le
us es comprenons a . d'h .
. UJ~ur u1 et tels
.
que nous les voyons fonctio
. nu er pouvaient-lis se constituer
so us l'empire del d
. a octrme des articles 414, 4 1o et 416 ?
Pos 1
·
er a qucs twn c' 1 ·
es t a reso uûre. Il ne pourrait venir à
l'idée de .
que ni l per so~ne d~ so utenir l'affirmativ e et il e t cerLaiu
.
es ouvriers nr les patro
ns ne pouvaient s'associer
•
pour défendre 1 , .
~ur s mtérets communs. En effet les patron
à raison d'
. diminuant' le prix de
un e Cll'CO nsuance extérieure
�- tU . , vre voulaient-ils se concerter pour adopter
la mai~ d œu d' l . es l'article 414 se dressait menan abaissement e sa atr •
. . d ·
u
ê her Les ouvriers avaient-ils e 3ustes
çant. pour lesden em!r\a diminution des heures de travail
motifs po~r eman . li leur fallait exercer individuelleet \'élévation des prix.
,. , · ·ent ils commet·
ment leurs réclamations, car sils s um~sai
.
de
..
,
posaient
aux
pemes
.
l d Tt
de
coaht1on,
et s ex
.
ta1ent e e 1
.
laient constituer
1
l'article 4i 4, et si au cas de gr~ve l s vou
de l'arti. de réserve ils tombaient sous le coup
une caisse
L'
· f on était
cle 416. Ainsi donc de liberté, aucune. associa l
matériellement impossible.
.
l'b . l ne devait pas
Ce régime si rigoureux et s1 peu l era
.
et de nombreuses conêtre modifié par la restauration,
.
,
damnations furent prononcées contre les ouvriers e~ ,er~u
de ces dispositions. Le seul fait intéressan~, . au pornt tr:
vue de \'association, pendant toute cette per10~e. de no
d1fferentes du
histoire ' fut la tentati~e faite à deux reprises
·
d
rétablissement des maitrises et des 3uran es. Nous . nous.
exp liquons et nous comprenons très bien ces essais q~1\
·
·
1 er t'e du trava1
ne réussirent pomt.
La l'b
heureu~ement
~
·
ï pparte.t e'té proclamée par la Révolution française, l a
ava1
. 1 · l mentanait à la Restauration d'essayer de rétabltr. a re~ e
tion Cette entreprise échoua grâce à la délibération ded1.a
Cha~bre du commerce qui dans son rapport en 1 8~ 1 eclarait que : cc Nulle cause n'a contribué au perfect1~nne-.
·
ment des manufactures françaises,
autan t que la ltberte
· lies ' par \'aboendue à l'exercice des professions in dustne
r
• .
·
d'arts et
lition des jurandes, maitrises et corporations
métiers 1 • l>
1
Moniteur clo'~ 821, p. 398.
-
H3-
Après la Révol ution de Juillet la misère qui régnait dans
les classes ouvrières depuis longtemps déjà ne fit qu'augmenter dans de notables proportions. La lutte entre les
patrons et les ouvriers menaçait à chaque instant d' éclater.
C'est ainsi que nous voyons les ouvriers de Lyon réunis en
sociétés de secours mutuels, s'emparer de la ville par la
force el obliger les troupes envoyées contre eux à batlre en
retrai te. Les associations ouvrières poursuivies el condamnées devan t les trib unaux, changent de caractère el deviennent politiques et à la suite de troubles su rvenus dans Paris,
le gouvern ement propose et fait voter la loi de 1854, permettant d'atteindre les sections des sociétés secrètes dont les
ad hérents étaient en nombre inférieur à 20 et pendant toute
celte période de l'histoire nous voyons de r.ombreoses condamnations pron oncées contre les coal itions d'ouvrie1·s
(grève des charpentiers, en 1852, 1855 et 1845 grève des
mineurs) .
Un fait curieux à noter, c'es t l' importance que l'on commence à attacher au phénomène de l'association. A cette
époqu e n0us voyons, en efTet, tous ceux qui ~ e préoccupent de la question sociale. proposer comme remède à l'état
de misère qui règne partou t, l'association sous toutes ces
formes. Nous assistons d'abord au dévelo ppemen l du
Saint-Simonisme, et nous voyons à l'hôtel de Gèvres
d'abord, à Ménilmontant ensui te, les disciples de celle
nouvelle rel igion tenter leur utopique essai de la rie en
commun. Cette œuvre est reprise par les Fourriéristes, qui
foot eux aussi, un e vaine tentative de phalanstère. Tous
ceux à qui l'liistoire a réservé le nom de socialistes, rêvent
8
�-
114 -
une réorganisation de l'état social par des associations,. et
Louis Blanc cherche à instituer dans l' intérêt du prolétaire
des ateliers nationaux. En 1839, l'académie des sciences
morales propose comme sujet de c~nc? urs ,: « R~c~ercher
les applications les plus utiles du pr10c1pe d assoc1at1on volontaire et privée pour soulager la misère. »
A la suite de ce mouvement irrésistible de l'opinion en
faveur de la société, nous constatons d'abord la création de
quelques sociétés coopératives J'ouvri~rs (~sso~iati ons des
ouvriers bijoutiers de Paris, des ouvriers imprimeurs) ~l
ensuite de nombreuses sociétés de seco urs mutuels desl1nées adonner des soins et un salaire aux ouvriers malades.
Ces sociétés, d'abord assez mal vues par le gouvernement,
obtiennent cependant sa faveur sous le ministère de M. de
Rémusat 1. AMarseille une so rte de syndicat des sociétés de
secours se forme et il est dirigé par un grand conseil d'administration comp osé des présidents des différentes sociétés.
Nous n'avons d'ailleurs pas à nous occuper ici de l'association ouvrière sous ces deux. aspects, sociétés coopüatives et sociétés de secours. Ce sont des faces distinctes de
la question, prévues par des lois spéciales et nous n'avons
à nous inquiéter que des syndicats professionnels, qu.e
dès cette époq ue nous voyons apparaître, (chambres syndicales des charpen tiers, maçons, serruriers, couvreurs fumistts, peintres, imprimeurs lithographes). C'est, en eITet,
1 Circul. du 6 ao1'1t 184-0. Monit. cl e 184-0,
p. 1853.
- 11?> sous Je règne de Louis-Philippe que ces diverses associations prirent naissance à l'instigation des patrons de Paris.
Mais ces divers syndicats, à raison mème des articles 414
et 415 du Code pénal, n' étaient que tolérés et la précarité
de leur si tuation les empêchait d'atteindre le développement auquel ils devaient arriver plus tard.
La Révolution de 1848 ayant été faite par les ouvriers,
le Gouvernement provisoire et plus tard la République, devaient forcément s'occuper de toutes les questions intéressant les classes ouvrières. Au point de vue spécial que
nous traitons la Constituante fut saisie d'une proposition
de loi tendant à abroger le délit de coalition ou tout au
moins à ue punir les coalitions que dans les cas où « elles
emploient des moyens de violence ou des paroles d'intimidation . 1> La Constituan te se sépara sans s'être prononcée
à cet égard.
La proposition fut reproduite à l'Assemblée législati\·e
par M. Greppo le 25 juin 1849. Elle donna lieu a de longues discussions. Mais malgré le talent dont firent preuve
les adversaires du Code pénal après trois lectures la loi du
27 novembre 1849, fut votée.
Cette loi modifia ainsi qu'il suit, les articles 4t4, 1~1 ?>
et 416 :
Article 4 14 . - Sera punie d'un emprisonnement de six
jours à trois moi s et d'une amende de seize francs à trois
mille fran cs : 1° Toute coalition entre ceux qui font travailler des ouvriers tendant à forcer l'abaissement de salaires, s'il y a eu ten tative ou commencement d'exécution;
~ Toute coalition do la part des ouvriers pour faire cesser
0
�-
116 -
en même temps de travailler, interdire le travail dans un
atelier, empècher de s'y rendre avant ou après certaines
heures, el, en général pour suspendre, empêcher, enchérir les travaux, s' il y a eu tentative ou commencement
d'exécution. - Dans les cas prévus par les deux paragraphes précédents, les chefs ou moteurs seront punis d'on
emprisonnement de deux ans à cinq ans.
Article 41 5. - Seront aos i punis des pein es portées
dans l'article précédent et d'après les mêmes distincti ons,
les directeurs d'ateliers ou entrepreneurs d'ouvrages et les
ouvriers qui de concert auront prononcés des amend es au tres que celles qui ont pour obj et la disciplin e intérieure
de l'atelier, des défenses, des interdictions, ou toutes proscriptions sous le nom de damnations ou sous qu elque qualification que ce poisse être, soit de la part des directeurs
d'ateli er ou entrepreneurs contre les ouvriers, soit de la
part de ceux-ci contre les directeurs d'ateli ~ r ou entrepreneurs, soit les uns co ntre les autre -.
Article 416. - Dans les cas prévus par les deux articles
précédents, les chefs ou moteurs pourront ap rès l'expiration dr, leur peine, être mi sous la surveillance de la haute
police, pendant deux ans au moins et cinq ans au plus.
Quelle est l' éco nomi e app ortée par cette nouvell e loi au
Code de 18 1O? On la comp rend de suite a la lecture seule
des articles. Le législateur de 1849 a voulu établir une
égalité absolu e cotre les coaliti ons des ouvri ers et cell es des
patrons.
H7-
Si en théorie le projet était bon - et nous reconnaissons sans hésiter que la justice et la logique exigeaient l'assimilation des deux. délits similaires au point de vue de la
répression. - Il faut reconnaitre qu'en pratique la nouvelle loi ne devait pas produire de grands effets. Il est, en
effet, bien difficile de pouvoir atteindre la coalition des patrons. Le nombre restreint de ceux-ci leur permet, en
effet, de se concerter très facilement et le concert ne se révèlera pas co mme le co ncert des ouvriers, soit par des faits
extérieurs, soit par des violences commises envers ceux qui
ne voudrai ent pas en faire partie. Enfin , d'autre part, il
semble difficil e qu e les patrons poissen t imposer des damnations, so it envers les ouvriers, soit envers eux.
En somme la législation laisse sob ister avec une nuance
les principes établi s par Napoléon l" . Le fait eul de e
réuni r et de se co ncerter constituait pour la clas e ouvrière
un délil.
Cependant malgr6 cette menace perpétuellement suspendu e sur leurs têtes les yndicats co ntinu ent à se développer et à progres,er. On commence à apprécier leur services. Par leur -age méd iati on de graves difficultés sont
aplanies, des cen tres de renseignements sont créé . De
tous cô tés commencent à surgir des association professionnelle , ùont l'organisation e t calquée sur les trade union ,
fon ctionnant entre ouvriers en Angleterre.
Il appartenait au gouvernement de changer la tolérance
en on droit el d'assurer une exi tence moins précaire à ces
institu tions, dont les :ivaotages se faisaien t de jour en jour
sentir ùe plus en plus.
�-
-
tt8 -
les coalitions, elle est loin de favoriser les associations puisqu'elle interdit tout concert entre ouvriers.
L'empire fil voler la loi du 2~ mai 1864, abrogeant les
articles 414, 415 et 416 du Code pénal remaniés en 1849
et édictant ainsi qu'il suit :
Article 414. - Sera puni d'un emprisonnement de six
jours à trois ans et d'une amende de seize à trois mille
francs ou de l'une des deux peines seulement, quiconque,
à l'aide de violences, voies de faits, menaces ou manœuvres frauduleuses, aura amené ou maintenu, tenté d'amener ou maintenir une cessa tion concertée de travail dans le
but de forcer la hausse ou la baisse des salaires ou de porter atteinte au libre exercice de l'industrie ou du travail.
. Article 41 ~. - Lorsque les faits punis par l'article précedent auront été comm is par suite d'un plan concerté, les
coupables pourront être mis, par l'arrêt ou le juaement
sous la surveillance de la haute police pendant deuxl) ans a~
•
plus.
Article 416.- Seront punis d'un emprisonnement de six
jours à trois mois et d'une amende de seize francs à. 1rois cents
francs, ou de l' un e ou de l'autre de ces deux peines, seulem~n.t ~o~s ou,vriers, patrons et entrepreneurs d'ouvrage,
~u 1 a l aide d amend es, défenses, proscriptions, interdict1on.s prononcées par sui te d'un plan concerté, auront porté
attemte au libre exercice de l'industrie ou du travail.
Nous n'insisterons pas sur ce texte de loi qui est celui
qui nous régit encore et que nous allons avoir à di scuter
dans l'examen de la loi de 1884, mais nous remarquons
en passant que si la loi du 2;) mai 1864 , ne réprime plus
1t9 -
\
Mais malgré cette prohibition, la tendance marquée qui
avait poussé les ouvriers à constituer des chambres syndicales pour trancher am iablement les difficultés pouvant
s'élever avec les patrons, ne fait que s'accentuer de jour en
jour. Les services marqués dus aux associations professionnelles en développent le nombre, etc'estainsi qu'en 1884,
au moment de la promulgation de la nouvelle loi, on comptait 422 associations syndicales, dont 184 patronale et
258 chambres ouvrières .
Pouvait-on laisser subsister indéfiniment un semblable
état de choses? Toutes ces association s qui n'étaient que
tolérées se trouvaient dans une situation anormale, puisque d'un jour à l'autre elles pouvaient être poursuivies et
dissoutes. D'autre part, au point de vue juridique, elles
n'avaient aucun droit, n' étaien t soumises à aucune conditi on et par conséquent échappa ien t à. tout contrôle.
Une so lution à ces difficultés s'imposait an législateur.
Il fallait une loi proclaman t la légitimité du droit d'' sociati on et d'autre part règlemen tant l'ex ercice de ce dro1l.
Dès 1876, M. de larcère avait fait une première tentatirn
en faveu~ de ' yr:dicats ; en 187 , ~I. Lockroy fit à son
tour un e proposition à la Chambre dans le même sens, et
enfin en 1880, le gournrnemeot présenta un projet qni esl
devenu la loi du 21 mar 1884.
Nous allons maintenan t commenter cette disposition
�-
120 -
législative qui peut-être imparfaite encore au point de vue
des détails, marque cependant un grand pas dans la voie
de la civilisation et du progrès en reconnaissaut l'efficacité
de l'association· pour l'amélioration du sort des classes ouvrières.
LOI DlJ 21 ltl.UlS '1884.
Il nous reste maintenant pour achever notre étude sur
les syndicats professio nnels, à commenter la loi du 21
mars 1884.
Notre plan pour ce commentaire est des plus simples en
même temps des plus rationnels. Nou, examinerons la loi
arti cle par article. Nous avons en elTet la bonne fortune de
nous trouver en présence d'un document législatif qui dispose d'abord de l'existence des syndicats, de leur composition et de leur objet, des formalités imposées pour leur
création, ensuite de l'étendue de leurs droits et enfin des
sanctions.
ARTICLE PREMIER.
Sont abrogés, la loi d11 14-17 juin 1791. et l'article 416
du Code p~nal.
le~ articles
29 J, 29 :2. :295, .294 rl 11 Code péual et la loi du
�- 122 10 avril 1854 ne sont pas applicables aux SIJndicats pro{es-
-
siomiels .
L'article premi er est en quelque sorte une préface absolument indispensable à la loi.
Nous avons vu en effet dans l'ex posé historique que
nous avons fait de la matière, qu'en fait et malgré les prohibitions nombreuses qui existaient , un très grand nombre
de syndicats s'étaient constitués. Mais en som~e leu~
existence n'était qu e tolérée et partant très précaire et 11
fallait dès l'instant qu' une loi les reconnaissait, abroger
toutes les dispositions prohibitives qui les ccincernaient. 11
fallait, en effet, que les syndicats pussent être composés
d'ouvriers sérieux, s'occupant volontiers des choses de
leur métier et pour attirer cette catégorie de travailleurs il
était nécessaire de ne point laisser suspendues sur leur tête
des menaces pénales, sinon c' eut etélaisser le champ ouvert
anx discoureurs de clubs, aux parleurs de réuni ons publiques, aux adeptes des doctrines sociales, qui vol onti e~~
s'in titulent ouv riers sans travail et qui ne sont bons qu a
semer dans l'esprit de leurs camarades, des germes de ré·
volte et de fausses idées écono miques et philosophiques.
Le législateur a compris la nécessité qui s' imposait à lui,
il a commencé par abroger la loi des 1 ,~ et 17 juin 179 1.
No us avons vu dans quel esprit cette loi avait été votée. 11
s'agissait au lendemain du jour où les corporations avai e~t
été suprimées, d'éviter leur reconstitution . Il est certain
qu'au moment où l'Assemblée législative promulgua cette
l
125 -
loi elle ne s'était pas rendu un compte exact des bienfaits
que l'ouvrier trouverait dans l'association, c'est ce qui explique qu'elle soit allée jusqu'à nier l'existence d'intérêts
communs entre ouvriers de la même profession. Toujours
est-il qu e cette loi votée dans ces conditions, prohibait formellement toutes associations entre ouvriers. Cette loi qui
d'ailleurs en fait n'avait d'autre sancti on que la dissolution
des associations qui pouvaient se former entre ouvriers ne
pouvait plus subsister le jour où l' on reconnaissait que
dans la société actuelle, grâce aux conditions économiques
du travail, l'association entre ouvriers devait être permise.
Le législateur de 1884 a donc sagement agi en abrogeant
une loi dont le prin cipe était suranné.
L'article 1•• abroge encore l'article 416 du Code pénal.
Ce n'a pas été sans difficultés que cette disposition a été
inscrite dans la nouvelle loi. Si nous suivons pas à pas la
discussion devant la Chambre et au Sénat, nous voyons en
efTet qu e la Chambre abroge d'abord l'article 416. Le Sénat
le main ti ent en vigueur. Lorsque le projet de loi revien L
devant la Chambre celle-ci ne se déjuge pas et maintien t le
texte tel qu'elle l'avai t pri mitivement voté et enfin le Sénat
ne l'admit qu'a près une très vive discussion qui dura plusieurs jours et grüce surtou t aux énergiques efforts du r:ipporteur de la loi, l'honorable .M. Tolain.
Nous croyon que le législateur a sagement disposé
en décidan t ain i. Nous avons vu de quelles faço ns 1''1rti cle 4 1G du Code pénal avait été ucces ivemen t modifié depuis la rédaction du Code. L'empire libéral avait
vouJu avoir l'air de o mon trer généreux vis-à-vis des classes
�-
-
U4-
ouvrières en supprimant le délit de coalition , mais en réa~
lité si de nom le délit avait disparu , de fait le texte de la 101
du ~t) mai 1861., le laissait subsister, en efîet l'article M6
pun it l'atteinte portée au libre exerc~ce de . l'ind~strie par
suite d'un plan co ncerté. Or qui dit syndicat s occupant
des intérêts d'une profession, dit forcément plan concerté.
Il est bien évident, en effet, que ce ne sera jamais qu'à la
suite d'un accord intervenu entre les membres d' un syndidat qu'une grève sera déclarée, et d'autre part il ~st ~ertain
que le syndicat, s' il n'a pas pour seul but l'organ1sat1on d.e
la grève, devra dans certain cas y recourir. ~n se trouvait
donc en présence du dilemme suivant : ou bien ne pas a~
toriser les syndica ts, ou bien abroger l'article 416. La 10 1 a
pris ce second parti et nous le répétons, nous croyons
qu'elle a sagement agi.
Mais peut-on dire : pourquoi abroger comp lètement l'article 1.,16? On conçoit à la rignenr qu'i l ne soit pas applicable aux syndicats. Mais pourquoi décider qn e le plan concerté par qnelyues ouvriers, en dehors de tou te association
ofîranl plus ou moins de garanti es en vue d·une grève par
exemple, ne sera pas punissable? A cela nou s répondons,
que si d'une part on admet comme conséquence forcée du
syndicat le plan concert é, on ne peut pas le refu ser à un
aroupe déterminé d'ouvri ers non réuni en syndicat. D'ail~eurs à côté de cette distinction qu i pourrait devenir bien
souvent bysantine, il fau t faire remarquer qu'il serait bien
facile d'éluder les dispositions de l'article td6, en fon dant
un syndicat même pour un cas déterm iné, pour une seule
grève, pour reprendre l'exemple déjà donné. Il était don c
125 -
beaucoup plus sage de disposer d'une façon générale que
l'article 416 était abrogé.
Cette disposition aurait à notre avis du êlre plus générale encore et les articles 414 et 41 n auraient dû subir le
même sort que l'article 416. M. Allain Targé, dans la
séance du 17mai1881, avai t demand é leur abolition. Les
délits prévus dans ces articles, sont en eJTet des délits de
classe ({ qu e notre code égalitaire n'aurait pas dû recon naitre. » La Chambre ne se rangea pas à son avis et accueillit le main tien con formément à l'opinion de M. Ribot,
qui argum entait surtout des législations étrangères. li faut
espérer qu'a\•ant peu une réforme sera établie dans la loi
pour réparer cette omission, il est certain que le délits
ouvri ers ne devraient pas être prévus par loi pénale.
« Pourqnoi, dit M. Jules Simon, dans son traité de la
liberté civ ile, faire un code pénal contre les violences exercées par les ouvriers, quand tou tes le' violences, quels
qu'en soient les au teurs , sont prévues et punies par la loi
commune? 1 :o
Enfin il existait encore dans nos lois pénale des di positions absolument contraires avec la coo~litution des syndicats. Nous voulons parler des prohibitions portées par
les arti cles 29 l et suivants et par la loi du l 0 août 1831~,
contre les réunions de plus de vingt per·onoe ou des .ection de moins de vingt personnes d'une même association. Il était évident que toutes ce disposition ùevaicnt
1
Ln liborLé civilo, p. 231.
�-
-
U6-
être déclarées inapplica.bles aux syndicats ouvriers et c'est
ainsi qu'a disposé l'article I••.
Relativement à cette disposition il résulte très nettement
des débats auxquels ont donné lieu la loi de 1884, que
seuls doivent en bénéfir.ier les syndicats réellement professionnels. De sorte que si une société politique ou religieuse
se fondait sous Je nom de syndicat professionnel, il ne s'ensuivrait pas forcément que grâce à son étiquette elle pourrait se soustraire aux prohibitions du Code pénal. Les tribunaux auront dans ce cas le devoir et la missil)n de
s'assurer si la sociét9 poursuivie est oo non un syndicat
formé conformément à la loi nouvelle.
ARTICLE
2.
les syndicats oit associations professionnelles même de plus
de vingt personnes, exerçant la même profession, des métiers
similaires, ou des professions connexes, concourant à l'établissement de produits déterminés pourront se constituer librement
sans l'autorisation du gouvernement.
L'article 2 pose le principe de la liberté absolue des
syndicats. - Le syndica t peu l se former sans avoir besoin
au préalable de rapporter l'au torisation du gouvernement.
Étant donnée l'intention, chez le législateur, le désir de
dévdopper dans les classes ouvrières l'esprit d'association ,
li était de toute nécessité de supprimer la demande d'au-
t27 -
torisation qui à raisorr même de son aléa était de natnre à
empêcher la constitution d'un grand nombre de syndica.ts.
D'ailleurs les intérêts qui sont en jeu dans ces associations
étant des intérêts éminemment privés, quel intérêt y avaitil à admettre l'ingérence gouvernementale. Si l'article 2
n'avait pas disposé comme il l'a fait, la loi sur les syndicats, serait restée lettre morte.
Quelle est la condition primordiale exigée pour les syndicats? Il faut absolument que toutes les personnes qui en
font partie exercent la même profession, des métiers similaires ou des professions connexes.
A ce sujet un e première question se présente, qu e faut-il
en tend re par profession? La profession dans le sens usuel
des mots, s'entend de l'exercice habituel et régulier de certai ns travaux. L'avocat, le médecin , le militaire, exercent
des professions.
La loi établit-elle un e distinction entre les professions
au point de vue de la constitution des syndicats . En aucune
faço n et dès lors il sembl erait que toutes les professions
sont aptes à former des syndicats.
La Cour de cassation en a décidé autrement. Par son
arrêt en date du 27 juin 1885 1, la Chambre criminelle
refuse aux médecins le droit de former un e chambre syndicale : «Attendu, dit l'arrêt, que la loi sur les syndicats
professionnels n'a point été rendue applicable à toute les
professions; que les travaox préparatoires ont constamt
Gaz. du Pnl. 1885, 2• semestre, 188.
�-
128 -
ment afllrmé la volonté du législatem d'en restreindre les
e!Tets à ceux qui appartiennent, soit comme patrons, soit
comme salariés, à l'inùustrie, au comm erce et à l'agriculture, à l'exclusion de toutes autres personnes et de toutes
autres professions ; que la loi n'est pas mo ins abso lue dans
ses termes, puisque d'une part , dans l'article 6, elle réserve les droits qu'elle confère aux seuls syndicats de patrons et d'ouvriers; que d'autre part, dans l'arti cle 5, elle
limite l'objet de ces syndicats à l'étude. et à la défense des
intérêts économiques, industriels, commerciaux et agricoles, refusant ainsi le droit de former des syndicats à tous
ceux qui n'on t à défendre aucu n intérêt industriel, commercial ou agricole, ni par suite aucun intérêt i'conomique
se rattachant d'une faço n générale à l' un des intérêts précéden ts; qu'en déclarant, en conséquence, que les médecins, dont le nom n'a été prononcé ni dans la loi ni dans
la discussion de la loi du 11 mars 188/i., n'avaient pn régulièrement former un synd icat professionnel dans les termes
de ladite loi, l'arrêt attaqué en a justemen t in terprété les
dispositions.
l)
Nous n'acceptons pas, pour notre part, l'opinion de la
Cour suprême. No us ne voyons pas, en e!Tet, que le législateur ai t entendu restreindre exclusivemen t l'effet de la loi
à ceux qui apparti ennent, soit comme patrons, soit comme
ouvriers ou salariés à l'industrie, au commerce ou à l'agriculture. li a au contraire entendu parler de tontes les professions, si telle n'avait pas étê sa pensée il se serait servi
plotôt de l'expression de métiers, qui est applicable à
toutes les professions relatives au commerce, à l'ind ustrie
-
129 -
et à l'agriculture. Quant aux termes de l'article 6, on ne
saurai t y voir l'expression de la pensée dn législateu r. En
parlant de patrons et d'ouvriers il s'est préoccupé du quod
plerumque Îll et a supposé que la plupart des syndicats comprendraient des patrons ou des ouvriers. D'ailleurs l'article 6 se préoccupe de la personnalité civile des syndicats et
nous verrons en étudian t cet article qu'un lrnendemenl
avait.été dé~osé pour n'accorder la personnalité qu'aux
s!nd1cals m1xte.s de patrons et d'ouvri ers, de là les express10ns de cet article. De plus, dit l'arrêt, la loi ne permet
que les syndicats ayant pour objet exclusivement la défense
cl l'élud e des intérêts commerciaux, industriels ou aarizcoles ou des intérêts économiques se rattachant aux préi;éclen ts. Le mot exclusivemen t se trouve bien dans la loi
mai ~o.u s croyons qu'i l vise surtout les intérêts politique;
ou religieux et qu'i l n'a pas pour but de s'appliquer à une
catégorie de professions. Enfin la Cour de cassation suppose
que les syndica ts ne peuvent avoir pour objet que des intérêts économiques se rattachant seulement au x intérêt commerciaux, industriels et agricole . Pourquoi cetLe distinction que l:t loi n'a pas fa ite en mettant les quatre épithètes
sur la mème ligne. Ne peut-11 y avoir d'intérêt économi_
ques en dehors de ceux du commerce, de l'industrie et de
l'agriculture? Les médecins, par exemple, n'ont-ils pa
intérêt à rechercher quelles peuvent être les condition le plus avantageuses pour le ernce de la santé. N'y a-t-il pa
là, à proprement parler, un intérêt économique très important. Mais avec la théorie de la Cour de cas ation on
atLeindra un liut tou t oppo.é il celui qu'on poorsuivait.
9
�-
130 -
Nous voyons depuis fongtemps déjà. fonctionner des syndicats de journalistes et d'artistes. Dorénavant il faudra les
supprimer, car il s n'ont pas d'intérêts économiques se rapportant au commerce, à l'industrie ou à l'agriculture. Enfin
i nou recherchoos dans les travaux préparatoires voici ce
que disait M. Tolain , le rapporteur cle la loi au Sénat 1 :
«On a cru tout d'abord parce que la commission s'était
servie des mots, syndicats professionnels, qu'elle voulait
en restreindre, limiter et circonscrire l'application aux
seuls ouvriers qui travaillent manuellement, aux seuls ouvriers industriels. Jamais elle u'a eu une telle pensée, elle
espère bien, au contraire, que la loi qui vous est soumise
est une loi très large dont se serviront un très grand nombre de perso nnes auxquelles tou t d'abord on n'avait pas
pensé; les gens de bureau, par exemple, les comptables.
commis, employés de toute espèce.
En un mut toute personne qui exerce une profession
ainsi qu' il est dit dans la nouvelle loi, aura le dro it de se
servir de la nonvell e législation qne voo s al lez voter. »
Il nous semble qo e sembl abl e déclaration dans la bou che
du rapporteur de la loi est la négation dn prétendu sil ence
des travaux préparatoires dont :.trgue l'arrêt que nous étndions. Le mot de médecin n'a jamais été il est vrai pendant
le cours de la discussion , prononcé, mai s 011 a voulu entendre le mot profession dans le sens le plus large relativement à. l'applicati on de la nouvelle loi, et dès lors poor ..
1
Sénal , .Journ. off". 188 i , p. fi.:i 1
-
151 -
quoi refuser aux médecins les bénéfices qu'ils pourraient
retirer de la formation d' un syndicat.
Noos croyons donc que l'arrêt de la Cour de cassation a
mal interprêté la nouvelle loi et à cô té des considérations
que nous venons d'énumérer, nous en ajoutons une dernière. Comment et en quels termes le législateur s'occupet-il des médecins? Ne dit-il pas dans l'article J•r de la loi
organ ique des écol es de médecine du 19 ventôse an XI :
«Nul ne pourra exercer la profession de médecin.
Dès
lors si la loi reconnait l'exercice de la médecine comme un e
profession, pourquoi ne pas comprendre celte profes ion
dans les termes si généraox de l'article 2 de la loi sur les
syndicats 1 .
Une autre question peu t se présenter. Que faut-il entendre par profession similaires ou connexes? Le législateur pour éviter sur ce point tout équivoque a, sur le rapport de M. Tolain, tenu à ac.coupler les deux épithètes. Il
n'est pas nécessaire qu e tous les membres d' un syndicat
exercent le mème méti er. 1on, il fau t au contraire admettre qu'une associati on peul se former en tre ouHier exerçant des méti ers ayan t une certaine analogie . Ain i les tisseurs en soie pourront se yndiqu er arec les tisseur ' en
l)
J
1
Lo légi ·lateur so préoccupe ùcjà des inconvcnicnts de cette 1ur1sprudencc ot à la SL'anro du lnnùi zl juin 1886 , :\f. Colfa\rU ot
plu ·icur~ do se~ collcgues ont déposé sui· le bureau Je la Chambre
une proposit ion <le 101 ay:rn t pour objet <l'étendre à toutes les prufcssi?ll$, notamment au\ profc ·sions dites liberales, le béuélko de
la 101 du z1 nuws 188.i sur los S) nchcats profo siounels. - r. Jo11n1.
Off. Chambro, Oéb. parlomcnt. p. 1160.
�-
t32 -
coton. Mais \a loi va même plu loin et elle admet que des
syndicats pourront se former ent~e tous c~u~ qui' conc.ou~
rent à \a produl?.Lion ù'un produ it détermme. C est a1_ns1
par exemple qu'une association pourra relier toutes les 10dustries relatives au bâtiment ou bien encore tous les ouvriers travaillant à la confection d' un navire.
Nous n'avons pas besoin de légitimer cette disposi tion de
la \oi . Elle s'explique d'elle-même, il est certain qu'elle est
édictée dans \'intérêt de tons el qu'on comprend très bien
\a facu lté accordée par la loi . H est en effet très compréhensible que le syndicat ayant pour objet, ainsi que nous
le verrons bientôt, de s'occuper des intérêts généraux de
l' industrie, il eut été absurde d'empêcher des gens ayant en
somme des intérêts communs, ùe pouvoir se syndiquer
entre eux. N'y aurait-il qu'un intérêt d'économi e et d'ordre
privé, - les dépenses du syndi ca t devenant moindres _s i l e~
associés sont plus nombrenx - le législateur aurait du
dispose r ainsi qu'il l'a fait. Mais il y a plu s encore et. un
autre motif devait déterminer l'insertion à la nouvell e loi de
\'article 2, c'est la situation particulière des petites localités
où chaque corps de métier comprend un nombre d'ouvriers
trop restreint pour former une association.
Cette si tuati on avait d'ailleurs préoccupé la Chambre et
lors de la discussion en 1881, ~IM . Dautresme el Beau quier
avaient proposé chacu n un amend ement pour permellre
dans les centres de moins de ?W,000 âmes l'association
entre des profess ion s ni ·imilaires ni connexes. La Chambre avait repoussé ces amendemen ts, d'abord parce qu'il
était dangereux do créer deux législations différentes pour
-
155 -
le~ grandes villes et pour les petits cen tres; ensuite, parce
que la nouvelle loi permet l'union des synd icals, et enfin
parce qu'il est certain que l'association entre métiers con nexes permet imméd iatemmen t au syndicat d'avoir une
certaine surface.
Si, an point de vue de la connexité, on se demande
quell es sont les profess ions qui peuven t être considérées
comme connexes, il faut s'en référer à la circulaire du ministre de l'intérieur du 2J août 188?'.S, reconna issant que
les termes de l'article 2 étant très larges, il faut se montrer
très large dans l'application de la loi,
Ainsi donc la loi exige formellement pour la constitution
d'un syndicat, l'exercice d'une profession, mais là se bornent ses exigences. D'où il ressort qu'au cune condition de
lieu n'es t imposée et qu'un se ul syndicat pour une industrie déterminée pourrait se con tit11er dans toute la France,
reliant entr·e eux tous les ouvriers de la mème industrie
dans tontes les villes.
Relativement à la composilion du syndicat aucune restriction n'est apportée. C'est ai nsi que le femmes et mème
les enfant , n' étant pas frap pé d'aucune incapacité, peuvent parfaitement faire partie ù'une a~socia tion syndicale.
Pourquoi les excl urait-on en effe t et le priYerail-on des
bénéfices qui peuvent f'n résulter'? Il n'y a aucune rai on à
notre avis ùe les écarter, et ici encore nou ommes obligés d'appl auù ir à la nouvelle loi. Qu e lorsqu'il ,'agit de
l'administration ou de la ge tion , on impose aux admini tratcurs l'obligation d'être capable, rien de plus naturel. Il
serait en e!Tet bizarre que ceux qui n'ont pas la capacité
�-
t54 -
pour administrer leur propre patrimoine puissent administrer les affaire' d'un e association, mais lorsqu' il s'agit de
faire partie de l'association il ne doit pas y avoir d'exception. Tout le monde doit profiter de l'institution créée dans
l'intérêt de tous.
Aussi et malgré le silence de la loi ne faut-i l pas hésiter
à. accorder aux étrangers, admi s ou non au domicile en
France, le droit de faire partie d'un syndicat. La loi en
elTet ne fait de prohibitions que contre les immigrants dans
nos colonies. Nous retrouverons plus tard cette disposition
au sujet de laquelle nous nous expli querons.
On s'est demandé si les pa trons pouvaient fa ire partie
d'une association d'ouvriers. Nous répondrons sur ce point
avec M. Floq uet 1 : «La loi est conçue en tels termes que les
sy ndicats de patrons et d'ouvriers sont possibl es. »
Un dernier point reste maintenant à. examin er. Les syndicats peuvent-ils renfermer des membres honoraires?
Nous n' hésitons pas à répondre non. Les membres honoraires so nt, d'après le se ns usuel des mots, des person nalités
en dehors de la société à. qui à raison, soit de leu r situation, soit de leur générosité,· on con fère un titre pu remen t
honorifique. Dans les synd icats, peut-on se permettre la
distinction en tre les membres actifs et les membres honoraires, non parce que cela est contraire à la loi. Nous
avons vu en eITet que l'article 2 exige formellement l'exercice de la profession pour chaque associé. Dès lors si les
i
Ch. des Dép. 20 juin 188:.1 .
-
t55 -
membres honoraires exercent réellement la profession
comment établir une diITérence. Que si au contraire il s'agit
ainsi que c'est plus rationnel de le supposer de membres
qu i n' exercent pas la profession, on s'expose à introduire
dans le sein de la société des éléments étrangers qui, sous
couleur des intérêts de l' industrie s'occuperont d'intérêts
tout dilîé rents, la plupart du temps politiques et religieux,
et c'est là justement le danger ;l éviter avec les syndicats.
ARTICLE
5.
Les syudica ts professionnel.s ont exclusivement pour objet
l'étude et la défense des intérêts économiques, industriels, commerciaux et agricoles.
Cet article établit très nellement l'objet des syndicat
professionnels,
Nou l'avon étudié par an ticipation en cherchant à réfu ter l'argument que la Cour de ca sation a l1ré de sa rédaction . Cet article do it êtl'c comme. toute la loi, ù'aillems
interprêté ù' unc façon très large.
Les travaux prépara toires nous indiquent très nettement
à cc poi nt de vue la pen ée J u législateur.
Les syndicat peuvent s'occuper des intérêt économiquc·s, ind ustriels, commerciaux et agricole . Mais ils ne
peuvent pas ùépasser lour but et c'est pourquoi l'article
contien t le mot exclusiveml)I// . Le mot a été ajouté il la rè-
�-
-
156 -
daction primitive, sur la demande de l'honorable sénateur
M. Béranger, pour qu'il ne puisse pas y avoir d'équivoque et
que gràce à une fausse étiquette des sociétés religieuses ou
politiques ne puissent pas se fonder.
Que faut-il entendre par intérêts économiques? Faut-il
accepter la distinction établie par la Cour de cassation et
décider que les intérêts éco nomiques dont les syndicats
pourront s'occuper sont ceux-là seul ement qui se rapportent au commerce, à l'industrie ou à l'agricultu re? Nous ne
le pensons pas d'abord p:ir la raison que nous avons déjà
donnée, à savoir qu'il y a en dehors du commerce et de
l'agriculture, des intérêts économiques très respectables
et très dignes d'être étud iés et défendus, et ensuite parce
que d'après nous la distinction qu'on voudrait établir est
repoossèe par la contex ture de l'article qui met en tête do
ligne les inLérèls économiques.
Notons que lors de la rédacti on primitive la loi ne prévoyait qu e les syndicats ayan t pour objet les intérêts commerciaux et industri els el que le mot agricole a été ajouté
sur la proposition de M. Oud et, par le Sénat. Nons ne sauri ons trop approuver cette addition et nous avons constaté
avec plaisir que des syndicats agricoles s'étaient créés dans
les départements du No rd de la France depuis la promulguation de la loi du 2 1 mars 1884. Il y a nne tendance
qu'on doit développer et que l'administration doit encourager. L'agricullure subil en eJiet un e crise très grande el il
faut espérer que dans l'association on trouvera peut être
un remède à cette crise . Les agricnltenrs s'unissan t pour
l'achat de machines pour Je travail à faire en commun réa-
157 -
liseront en partie au moins la belle idée développée par
Edmond About Jans son admirabl e roman de Madelou. Ce
sera la mise en pratique de ce qu'on considérait jusqu'à ce
JOur comme une utopi e.
Le projet primitif de l'article 5 contenait l'énumération
des en treprises que pourraient tenter les syndicats, caisses
d'assurances, de retraites, etc .... L'article était assez confu s, on n'ind iquait pas si les syndicats étaient soumis aux
règles du droit commun relativement à ces élablissemenls
et celle partie de l'article a été supprimée
ARTICLE
4.
l es fondatettrs de tout syndicat devror•l déposer les statuts et
les noms de ceu.r qui a un titre que/couque seront chargés de
l' admiuistrat ion ou de la direction.
t:e dép6t aura lieu à la mairie de la localité oi1 le syndicat
est établi et à Pans à la préfecture de la Seù1e.
Ce dép6t sera renouvelé à chaque changement de la direction ou des statuts.
Comm uuication de tatw devra être donnée par le maire ou
par le préfet de la Seine au procureur de la République.
Les membres de tout syndicat professionnel chargés de l'administ rot ion 011 de la direction de ce syndical devront élre
français et jouir de leurs droits civils.
L'art icl e'~
én um ère Je, formalités nécessaire pour la
co nstitution ùu ~yntl i cal. Il a éte complété et ùeYait l'être
�-
158 -
par la circulaire ministérielle du 25 aoù t 1884. Le~ disposilions ùe cet article ont trait à deux objets bien distir. cls :
1° Dépôl des statuts; 2° Capacité des adminislrateurs.
Nous examinerons successivement chacune de ces parties
de l'article.
1° Dépôt des staluts.
Nous avons déjà. indiqué qn'il était nécessaire que la
naissance et la constitution des syndicats soienl manifestées
par un acte ex térieur. De même en effet que la loi donne
un état civil aux personnes, de même el à plus forte raison
doit-il en être ainsi lorsqu'il s'a~il d'une personne morale,
dont l'existence secrète et cachée pourrait devenir un danger. Le législateur pénétré de cette idée devait forcément
songer à organiser la publicité destinée à faire connaître les
syndicats. Tel est le but de l'article 4.
Le premier paragraphe dispose que les fondateurs de
tout syndical, doivent déposer les statuts et les noms des
admi ni strateurs. On avail d'abo rd dan s le projet primitif
de loi ex igé le nom de tous les membres du syndicat. Mais
on a vite compris les inconvénien ts qui pourraient résulter
de celte exigence et oo y a, avec juste raiso n, renoncé.
Comment en elîet déposer la liste, souvent lrès nombreuse,
de tous les membres d'une association syndicale et en admettant que cette liste pût être facilemen t établie, il aurait
fallu des modifi cations continuelles pour indiquer les retraites et les nouvelles adhésions. La loi en elTet dispose
1
-
139 -
dans le paragraphe 5 que le dépôt doit être renouvelé a
chaque changement de direction. Si donc on eut maintenu
le projet primitif il au rait fallu des dépôts continuels et
comme on devait tenir compte de l:l difficulté &t des ennuis
résultant de formalités officielles pour la classe ouvrière on
a sagement agi en réformant le projet de la commission.
D'autant plus qu'avec le texte actu el on obtient le résultat
souhaité. Par le dépôt des statuts on a connaissance du but
du syndicat et par le dépôt du nom des administrateurs on
sait au cas d'infra~tions à. la loi con tre qui on peu t agir.
Où doit étre fait le dépôt? Le dépôt est fait à la rpairie de
la localité ou le syndicat est établi el à Paris à la Préfecture
de la Seine.
On avait d'abord proposé, pour Paris, le dépôt à la Préfecture de police, seu lement on fit remarquer que, pour le·
classes ouvrières, la Préfecture de police était tenue en suspicion et qu'il ne fallai t pas décourager les fondateurs en
leur imposant Llnc démarche qui leur répugnerait peut-être
et on renonça à celle idée. En outre, en t 885. on aYait
songé à instituer au ministère du commerce une commission spéciale chargée de centraliser les ren ·eignements relatifs aux syndicats, et, en vue de faciliter la tâche de cette
commission, on avait exigé le dépôt , pour les syndicats ùe
Paris, au ministim: du commerce. Le ministre de l'intérieur s'oppo a à l'in titu tion de cette commi sien qui enlevai t à son déparlemen t la surveillance ùes yodicats, et la
Chambro lu i donna gain du cause. Dès lors, lo dépôt au
ministère du com werce ùevenait inu tile et fut supprim~.
�-
140 -
Au sujet de la mairie où le dépôt doit être elTectué, un
seu l ca peut se présenter otirant un e diffi culté. C'est celui
d"u o syndicat fonctionnant daos di,·erses localités à la fo is.
Nous avons vn, en effet, qu e la loi ne s'op posai t pas à la
constitution d' nneassociatioo syndicale dans ces conditions,
mais alors, dans ce cas, quelle sera la mairie compétente
pour recevoir la declaration ? La questi on, qui n'est prévue
ni par la loi , ni par la circulaire, ne s'es t pas présen tée en
pratique, mais elle peut être réso lu e par les principes généraux. Il est certain qu' il y au ra toujours nn endroit où se
trouvera la direction centrale. C'est là que sera le domicile
de l'association et c'est à la mairie de ce lieu que devra être
fait le dépôt 1•
Comment se fera le dépôt. Sur ce point la loi est muette
et il nous fau t nous adresser à la circulaire ministérielle du
25 août 1884 po ur être fixé sur les conditions pratiques
exigées pour le dépôt.
Le dépô t est fait conformément à la pratique du ministère de l'intérieur, à double exemplaire. li est, en effet,
utile de conserver dans les archives les statuts des syndicats
et l'on ne saurait trop prenùre de précautions pour assurer
cette conservation. Il n'est pas nécessaire que les exemplaires soient transcrits su r papier timbré. De même on
n'exige pas leur impression. En pratique cependant, il vaut
1
Commen tait'O de la loi du 2 1 mars 188.i.. Marcel Mongin ,
n• •12.
1
141 mi~ux qu' il en soit ainsi, car il est certain qu'il sera plus
facile pour les membres du syndicat de prendre connaissance des statuts s' ils sont imprimés.
Les statuts et la liste des administrateurs doivent être
certi fiés par le président et le secrétaire. Tout dépôt doit
être constaté par un récépissé du maire et du préfet de la
Seine. Ce récépissé est exigible immédiatement.
-
Dans chaque mairie il doit être tenu un registre , pécial
où seront mentionnés à leur date, le dépôt des statuts de
chaque syndicat, le nom des administrateurs ou directeurs,
la délivrance du récépissé. Ce registre fait foi de l'accomplissement des formal ités et permet de remédier à la perte
possibl e du récépissé de dépôt.
Telles sont les formalités exigées pour la constitution
d'u n syndicat et il n'y en a pas d'au tres. C'est ain i qu'on
s'était demandé s' il fallait, en même temps que le dépôt,
une déclaratio n spéciale, et la circulaire ministérielle répond négativement.
En résumé, la pub licité qui , d'après les termes mêmes
du ministre, est le corollaire essentiel de la liberté d'association, e t suffisamment assurée, et, pour répéter l'expression dont nous nous sommes déjà servi, l'état civil des
syndicats est créé.
De même, en elTet, que les actes de l'état civil, les statuts déposés ~l. la mairie sont à la disposition de tous ceux
qui veulent les consulter.
En assimilant le dépô t aux actes de l'état civil, nous
nous trouvon s on présence d'un e di position de l'article 4
�142 qui ordonne la communication au Procureur de la Répu-
blique.
Cet alinéa a été très vivement critiqué. Pourquoi, en
effet, ordonner la communication, disait-on, puisqu'elle es t
de droit ? Les statuts sont publics et dès lors le Parquet
peut en prendre connaissance. M. Marcel Barthe a, au
Sénat, très nettement expiiqué celte di sposition. La communication est de droit , en efîet, mais il importe que le
ministère public so it mis au courant de la constituti on . Si
donc, par le fa it de bureaux, la communication n'étai t pas
faite, il pourrait y avoir des incoménients. Dès lors, nous
sommes fü:és sur la portée de cette disposition, c'es t une
obligation imposée aux maires et au préfet de la ·seine, el,
au cas d'inobservation, la responsabilité du syndicat ne
saurait être engagée. Cette disposition est d'ailleurs en ellemême assez platonique, la loi n'indiqu e même pas de délai
pour cette commu nication.
L'intérêt n'est, en effet, pas très immédiat, car le ministère public n'a, relati\'ement à. la rédaction des statuts, aucun pouvoir. Son seul droit sera, lorsque la société fonctionnera, soit de la poursu ivre pour vio lation de la loi de
1884, soit an cas où l'objet du syndicat ne sera pas un objet économique de la poursuivre en vertu de l'article 291
du Code pénal.
Dans quel délai le dépàt doit-il étre fait'? Le projet de loi
portait que le dépôt devait être effectué qu inze jours avan t
le fonctionnement ; la commission de la chambre récluisit
- 145 le délai de quinze jours à. huit jours et enfin pendant le
~ours de la discussion cette men tion disparut complètemen_t. Q~e faut-il en conclure? c'est qu e le dépôt es t obliga~oire des q~e le syndi cat commence à. fonctionner. Sur ce
a posé au ministre M• TI'alde
pomt M. Tolarn
ck Rousseau,
n
.
une .qu es~1on pour savoir exactement à quel moment on
cons1déra1t le syndi cat comme foncti onnant et à la tribune
c?mme plus ta~d da~s. sa circulaire le ministre a répondu
~ un e '.açon tres prec1se : les syndicats fonctionn ent dès le
JOur ou
. les sta tuts sont devenus définitirs . On n'a po·10 t (\.
se preoccuper de la période d'élaboration et d'études
toute latitude doit être laissée aux syndicats pendant cetl~
période.
. Si ce dépôt n' est pas efTectué qu'adviendra-t-il ? le syndicat tombera sous le coup de la sanction de l'article 9
q~e nous étudierons pl us tard et le dépôt ultérieur ne saurait empêcher les poursuites.
. T~us les syndicats sont-ils soumis au cl~pôt ? A cette qncst1on 11 rau t sans hésiter répondre oui. Le texte est formel
et les travaux préparatoires ne lai sent aucun doute à ce
sujet. Cep1rndant pendant la discussion de la loi on avai t
vo~lu établir une ùistinclion. Seuls, disait-on, les syndicats
qui voudront jouir de la personnalité civile seront astreint
à cette forma lité. Cette distinction a été rejetée et c'e. t avec
brèche au
raison car on aurai t aio i OU\'ert une larae
juste
~
. .
principe de publici té tel qu'il avai t été admis.
Une autre qu e lion s'est po ée lors de la discus ion de la
loi· Les syndi~a ls cxistan t an térieurement deYront-il, dépo -
�-
144 -
ser leurs statuts et au cas où ils ne le feront pas seront-ils
poursuivis pour infraction h l'article 9 ou bien pour infraction a l'article 29 1 du Code pénal ? La discussion sur cette
qnestion n'a pas été très explici te mais cepêndant on pent
en dégager les concl usions suivantes :
Dès l'instant que la loi sur les syndicats professionnels à
été promulguée il ne peut y avoir deux sortes de syndicats
les uns astreints à. une formalité et les autres dispensés. Il
faut une égalité absolue entre ton et les syndicats prtlexistant à la loi ne sauraient trouver dans une si tuation précaire an térieure, le germe d'un préjudice. Il faut donc
décider que ces syndicats doivent déposer leurs statuts.
S'ils n'accomplissent pas celle formalité sous quelle
inculpation les poursuivra-t-on? Il nous semble qu'il ne
peut pas y avoir de difficu lté . On doit lellr app liquer la
sanction de l'article 9. Ils fonetionnen t comme syndicats
professionnels ils doivent exécu ter les prescriptions dt: l'article 4, s'ils ne le font pas ils ne peuvent pas arguer de
Jenr existence passée pour évi ter de tomber sous le coup
de l'article 9. D'ailleurs l'article 29 1 du Code pénal a été
abrogé en ce qui concerne les syndicats professionnels.
Dans les débats auxquels cette question a donné lieu
une déclaration importante est à. retenir c'est que le go uvernement a promis d'user d'un e tolérance très large vis-avis des syndicats déjà. existants.
-
u.~
-
2° Capacité des directeurs.
Nous avons vu dans l'article 2 que la loi absolument
g~nérale per~ellait aux étrangers de faire rarti e ''es syndicats profess10nnels. Le projet primitif excluait tous les
étran ger~. Sur la demande même des synd icats existan ts
cette prohibition fut supprimée. Elle aurait eu en efTet
d'augmenter l'animosité si rearettable
conséquence
pour
0
.
.
qui existe malheureusement si souvent entre nos nationaux
et les étrangers. Cependant le parlement n'a pas voulu
aller jn5qu'au bout dans celte voie de libérali me et sur les
instances de M. Pierre Legrand à la chambre et de M.
Barthe au Séuat on a exclu les étrangers de l'admin istration des yndicats. Cette dispositiou e t une innovation
facheuse dictée par un sentiment de patriotisme exagéré.
On a crain t d' une part que des syndicats étrangers n'acquièrent en France une trop grande puissance en disposant
d'hommes et d'argent, d'autre part on a voulu éviter la
concurrence étrangère. On n'a ra ougé qu e ce dangers
pouvaient se présenter el devenir même beaucoup plus sérieux grâce au foncliounemenl de société~ anonymes qui
n'excluent pa l e ~ étrangers et qui attirent à elles des capitaux beaucoup plu considérab les que n'en pourront jamais
réalise r les syndicat et on a porté tle cette façon une grave
atteinte ~t la liberté individuelle. Nous partageons ii ce
point de vuo l'opinion do MM. Worms et Ledrn ùans
rn
�-
146 -
-
leur commentaire sur la loi sur les synd icats et nous pensons que cette di position est fâcheuse. La loi tout au
moins aurait pu accorder au:\ étrangers admis à établir lenr
domicile en France la. faculté d'administrer les synd icats.
La commission de la chambre avait établi cette distinction
qui fut repoussée par le Sénal.
Il faut donc que les admini strateurs soient Français ; il
faut de plus qu'ils jouissant de leurs droits civils .
La loi, dans cette seconde partie de son article, était un
peu vague, mais la circulaire ministériell e complète ce qu' il
peut y avoir de donteu:\ dans ses termes . li faut, pour être
administrateur, 1ouir de l'intégralité de ses droits civils.
Une dernière question se présente relativement à cet article. La femme mariée peut faire partie d' un syndicat,
peut-elle l'administrer ? Avec l' autorisati on de son mari,
l'affirmative n'est pas douteuse. Mais pourrait-elle se passer de cette autorisalion ? Nous ne le pensons pas. En eITet,
la qualité de membre dn un reau d' un syndi cal ne saurait
êtr e assimilée à la qualité de marchande publiqu e, et dès
lors l'autorisati on doit être rapportée. La même solution
doit être admise po ur le mi neur .
ARTICLI~
!'J .
Les syndir:ats professionnels rég11li~remen t const iturs d' aprés
les prescriptions de la présente loi, pourront librPmenl se concerter pour l'étude et lei dé{w se de leurs intérêts éco11011dques, industri.els, commerriaux ct aqricolcs.
147 -
f:e.s unions devront faire connaitre . conformément au
deuxième paragraphe de l'article 4, les noms des syndicats qui
les composem.
Elles ne pourront posséder aucun immeuble ni esler en
justice.
l
•
L'article !'.> , en autorisant les uni ons de syndi cats, ne fait
qu e consacrer une pratique très ancienn e. Depuis lonotemps déj,à fon~ti~nnent des syndicats de chambres syndi~
les, et c est ainsi que l'on peul notamment citer à Paris
1' union nationale du commerce et de l'industrie, rondée en
18ts8, et comprenant 107 syndicats, en province l'union
synùicale de Bordeaux. et l'union syndicale de Marseille.
Malgré l'ancienneté de ce t état de choses et la tolérance
absolu e du gouvernement, cette disposition rencontra nne
très vive opposition au Sénat: deux fo is l'article !'.> fut
~~jeté et '.I n~ fu t vo té en troisième discussion que grâce à
l 10tervent1on 1nc1}ssante du ministre, M. Wald1ick Rousseau
et du rapporteur, M. Tolain.
Pourquoi, d1~ai ent les adrnrsaires de l'article alors
qu'on a mterJit la formation de syndicats entre méti~rs dirfére~ ts, admettre l' union des syndicats de toute' les professions. On formera ain.i une vaste a sociation ouvrière
qui comprendra tous les ouvriers ùe France et peu t-être
même de l'étranger, et cette armée, qui aura une direction
cen trale, obéira à un mot d'ordre et deviendra, en s'occupant de questions politiqu es et religieuses. un véritable
danger pour le go uvernement. Pour éviter ce danger, on
�- 148 interdit tout concert entre les conseils municipaux, les
conseils généraux, qui cependant sont des corps élus .. Dès
lors, pourquoi le faire nailre en autorisant les synd1cals,
œuvre spontanée et libre, à se rénnir les uns aux autres?
C'est le véritable moyen de faire renaître une nouvdle
associaiion de l'Internationale, c'est créer nne entrave absolne a la liberté individuelle des ouvriers qui ne feront pas
partie de l'union.
A quoi l'on répondait d'abord que le danger n'était pas
aussi grand qu' on semblait le craindre, puisque jusqu'à ce
jour il ne s'était pas produit sous le régime de la toléranc~ ,
et qu'aG ca8 où il se produirait, le go uvernement aurait
toujours contre les unions les mêmes moyens de réprimer
les excès que ceux qu'il avait contre les syndicats. La
crainte de voir un trop grand nombre d'adbérents à une
union est une crainte vaine, puisqu e ce danger peut se
produire pour les synd icats, le nombre des membres n'étant pas limité par la loi . O'ailleurs, il y a un très grand
intérêt à admettre ces unions : « C'est, en e!Tet. la diversité des métiers, disait le rapporteur, qui prémunira contre les crises dangereuses et les entraîn ements irréfléchis ;
c'est elle qui empêche les grèves d'éclater. Les observations
de tous les métiers non similaires et non connexes, mais
intéressés , prévienn ent so uvent des résolutions extrêmes.
l)
De plus, il est certain qu e des intérêts co mmuns existent
entre les diverses profossions, et l'union des syndicats
pourra utilement discuter sur la créati on des sociétés de
secours mutu els, des écoles d'apprentissage , sur les tarifs
-
l
U.9 -
de transport, de donane, sur les traités de commerce,
etc.. . ..
Enfin, on faisait remarquer que jusqu'à ce jour les
unions ne se sont jamais occupées de politique et que
notamment l'union des ouvriers, solli citée pour adhérer à
la ligue formée pour la révision de la constitution, s'y était
constamment refusée.
Ce sont ces considérations , aidées surtout des garanties
que la commission consentit à prendre contre les unions,
qui déterminèrent le vote de l'article.
Ces garanties consistent dans les formalités imposées et
dans certaines prohibitions.
Quelles sont les formaliMs. Le paragraphe 2 de l'article t>
exige comme publicité le dépôt dt! la liste des chambres
syndicales faisant partie de l'union . Il va sans dire qut> le
dépôt devra être renouvelé à chaqu e adhésion nouvell e. Ce
dépôt doit s'effectu er de la même manière que le dépôt
prescrit par l'artide 1.,.
L'union n'est-elle astreinte qu'au seul dépôt de la liste
des chambres qui la composent. ou bien, au contraire,
doit-elle aus i. co mme les autre syndicat' , déposer ~ es
statuts et la liste de ses administrateurs? Nous penso n. ,
d'accord sur ce point avec la circulaire ministérielle, que
l'article 4 doit être combiné avec l'articl e?>. Ce dernier
n'es t, en effet, qu'un supplément de publicité impo é aux
unions. Quell e raison y aurait-il eu de se montrer plus favorables pour les unions qui, nous venons de le voir, ont
rencontré une très vive opposition de la part <lu Sénat.
�HW D'ailleurs, si l'on n'admettait pas la combinaison des
deux articles, on serait amené à décider que les unions
peuvent être adminislrèes même par un ètranger, car l'article 5 ne dispose rien relativement à la capacité des administrateurs.
Cependant la qu estion a été discutée et M. Mongin estime
que la seule formalité imposée aux unions consiste dans le
dépôt de la liste des syndicats qui les composent. La loi
ti ent à cette formalité, parce qu' elle ne veut pas que des
syndicats irrégulièrement constitués, n'ayant pas effectué le
dépôt de leu rs statuts, puissent faire partie d'une union.
-
i\lais, d'autre part, cette formalité est la seule, et l'on ne
doit pas éleudre aux unions les dispositions de l'articl e 4,
car, au cas d'infraction à l'article 4-, on ne pourrait pas
appliquer des peines qui ne sont pas édi ctées en vue des
unions. Cette solution ne saurait, à notre avis, être admise.
car il y aurait alors, ainsi que le constate lui-même M. Mongin, un manque d'harmonie dans la loi.
A côté de ces formalités, la loi a prononcé des prohibitions contre les unions.
Elles ne peuvent posséder aucun immeuble ni ester en
justice. Le but de 1~etle disposition est èvidemment d'éviter
que, par la perso nnalité civile ou pal' la constituti on d'une
caisse, le danger prérn par les adversaires de l'article ne
puisse se réaliser. li n'est pas besoin d'indiquer cependant
que plusieurs syndicats ont le droit d'ûster collectivement
en justice ou d'être copropriétaires d' immeubles.
Enfin, comme su pplément de garantie, la loi a tenu à
-
1?H -
bien préciser l'objet des unions qui ne peut être différent
de l'objet des syndicats ordinaires.
ARTICLE
6
les syndicats professi.onnels de patrons ou d'ouvriers auront
le droit d'ester en justice .
Ils pourront employer les sommes provenant des cotisations.
Toutefois Us ne pourront aquérir d'autres immeuble.~ que
ceux qui seront nécessaires à leurs réunions, à leurs bibliotMques et à des cours d'instruction professionnelle.
Ils pourror.t, sans autorisation, mais en se conformant auJ'
autres dispositi.ons de la loi, constituer entre leurs memb1·es des
caisses spéciales de secours mutuels et de retraites
'
Ils pourront librement cr~er et administrer des offices de renseignements pour les offres et demandes de travail.
Ils pourront e'1re consultés sur tous les différends el towes /es
questions se rauachant à leur spérialité.
Dans les affaires contentieuses, les avis du syndicat eront
tenus à la disposition des parties qui pourront en prendre communication et copie .
L'article qu e nous allons étudier a une importance capitale. 11 établit les ùifféren ts droits des synù ical , et comm e
la rédaction n'en c. t pas absolument parfaite, de que lions très délicates pcu,•cn t être soulevées.
Qu'il nous soit permis, pui qu e nous avons <l'une façon
�-
152 -
générale indiqué que la rédaction n'était pas à l'abri de
toute critique, de rappeler que l'expression de syndicats
professionnels de patrons ou d'ouvriers nous paraît contraire à l'esprit de la loi. Nous avons déjà vu, en étudiant
l'arrêt de la Cour de cassation relativement aux syndicats
de médecins, l'argument qui avait été tiré de cet article
contre les associations formées pa1· les professions qui
n'ont pas à défendre des intérêts commerciaux, industri els
ou agricoles. Cette expression re. trictive a dû forcément
échapper au législateur qui n'a eu en vue, comme nou s
l'aYonsdéjà dit, que le quodplerumquefil, mais elle a eu pour
elTet de détP-rminer la jurisprudence que nous avons comballue et qui, pour les considérations qu e nous avons déjà
développées, nous parait diamétralement opposée à l'intention du législateur. Nous so uhaitons qu'au cas d'une révision de la loi, cette expression disparaisse pour ne plus
laisser place à. un doute.
Ceci dit, exam inons dans son ensemble l'article 6.
Sa disposition la plus importante est la création de la
personnalité civil e du syndicat. Nous avons vu, en analysant l'article 4, que. par le fait de la déclaration des statuts, tout syndicat acqui ert la perso nn alité civile. Nous rappelons, en effet, pour mémoire, la distinction qu'on voulait
faire pour la déclaration entre les syndicats désirant cette
personnalité et ceux qui ne vou laient pas l'acquérir. La loi
a rejeté cette distincti11n en établissant l'obli gation du dépôt pour tous les syndicats. Tons les syndicats on t donc la
personnalité civile.
Nous n'avons pas iri à étudier les caractères des persan-
-
155 -
nes morales, mais nous devons nous demander quelle est
l'étendue de la disposition nouvelle.
Des syndicats peuvent ester en justice. Nul ne peut, en
France, plaider par procu reur, tel est le grand principe qui
défend chez nous la représentation en justice. Ce principe,
venu du Droit romain, devait, dans notre Droit moderne en
présence de la création des syndicats, recevoir la même dérogation qu'à Rome. Il est certain qu'un syndicat formé
pour l' étude et la défen e d'intérêts professionnels, peut
être obligé de recou rir à la justice et, l'obliger à plaider par
chacun de ses membres, c'était le mettre en présence d'une
impossibilité. Dès lors on devait forcément l'autoriser à se
faire représenter soit par son président, soit par tel de se
admin istra teurs désigné dans les statuts. Ce n'est d'ailleurs
là que la conséquence de la jurisprudence unanimement
admise, reconnaissant que le président d' on cercle peut
valabl ement agir au nom du cercle lorsque les statuts lui
ont conféré ce pouvoir. Il y a, disent dans ce cas les tribunaux, mandat su ffi sant pour justifier la qualité.
Lorsque le sy ndicat sera poursuivi, l'assignation, conformément aux règle ordinaire de la compétence, devra être
Jonnée au siège de la société, et le tribunal compéten t devra être, en principe, celui de l'arrondi s.ement du lieu où
la déclaration aura été faite.
La seconde con équ ence de la perso nnalité civil e, c'e t
la possibilité d'avoir un patrimoine et de l'admini trer.
Celle facullé e t-elle illimitée. ou bien y a-t-il des restrictions soit quant à. la nature des biens, soi t quant aux
modes d'acquisition ?
�-
1~4
-
-
En ce qu i concerne 11 nature des biens, il ne peut y
avoir de difficullés. La loi a pris le soin de préciser quels
sont les biens que peuvent acquérir les syndicats. Les biens
mobiliers de quelqu e nature qu'i ls soient ; les immeubles
nécessaires aux réunions, aux bibliothèques ou à des cours
d' instrnction professionnelle. Ainsi donc , un syndicat
pourra, grâce à une administratio n économe et sage, réaliser un e véritable rortun e mobil ière, posséder des rentes ou
aes actions, mais il ne pou rra pa placer son argent en acqui, itions d' immeuble_ des linés à être loués. On comprend
ans peine quel a élé le but du législateur, il a \'Ou lu éviter
le rétab lis ement des biens de main-merle. l\Iais cependant
nous croyons que le législateur qu i accorde le droit sans
restrictions aux sociétés reconnu es de posséder un patrimoine, au rait pu se montrer aussi généreux pour les syndicats sans se laisser arrêter par une crainte qui n' est pas
bien sérieuse , puisqu 'avec les associations reconnu es, le
danger de la main-morte est évité, au mo ins en partie,
pour la perce ption des dro its de mutation. Si, en effet, un
syndicat co nsacrait ses écon omies à l'élablissement de cilés
ouvrières pour le logement <les sociétaires, n'y aurait-i l pas
une amélioration sensible dL1 sort des ouvriers. Ce rêve
qu i, au premier abord , peul paraître irréalisable, ne pourrait- il pas sorlir a eITet et, une fo is les dépenses faites, le
loyer ne serait-il pas supp rimé pour les ouvriers ?
Lorsque les synd icats, par un fonctio nn ement régulier,
auront fait disparaîlre les cl'aintcs et les préjugés du législateur contre eux, il l'au t espérer q11c l'on étendra les ter-
l
.!
15?5 -
mes de l'article 6, et qu'aucune prohibition ne sera plus
portée relativement à la nature des biens 1 •
En ce qui concerne los modes d'acquisition, il est certain
que tous les modes à titre onéreux sont libres aux syn dicats. Ils peuvent acheter et vendre, et, d'autre part, ils
pruvent faire tous les contrats du droi t commun . La loi est
sur ce poi nt rormell e: a lis peuvent employer les sommes
provenant des cotisati ons.
Peuvent-ils acquérir par légs ou donations ? La question
est délicate et demande i1 ètre examinée allentirnment.
Elle est, d'ailleurs, con troversée, et la négative est so utenue par M. Charle. Brunot, dans son commentaire de la
loi sur les syndi cats profession nels, tand is que M. \ longin
défend l'affirmative.
A l'appui du premier ystème, on fait Yaloir d'abord un
argument tiré des travaux préparatoires : LorsquP. le projet
de loi fut présenté à la Chambre, il n'accordait aux yndicats aucune personnali té civile; la commissio n créa cette
personnalité et le rapport indiquait qu'elle de\'ait ètre restreinte. Le texte de l'article 5, qu i <levait devenir l'article 6,
portait: <t Ils (les syndicats) pourront el.Ilployer et posEéùer
les sommes produi tes par leurs cotisations; ils pourront
posséder les immeubles, olc. , Le mot posséder fut , à la
suite de quelqu es observations, remplacé dao le premier
t La lhéorio que nous sonlenons n'est 1l'ailleurs pas neu1·e. En
Dancmarl, clos socit'tés sn sont r1ablics pour la t·on ·truction dr:.;
rités oui i·ièros ol proùuiscnl li o\1•ollcnts 1·ésulta1s. - \'oir Larollco,
Classes 01wrières c11 Huropc, t, l., p. H 5.
�-
membre de phrase par le mot acquérir qui , d'après M. Goblet, ne comprenait que les modes d'acquisition à titre
onéreux. Au Sénat, on ajoute à la loi un article interdisan t
les donations et les legs. Lorsqu e la loi revient devant la
Chambre, on supprime cette disposition, mais si le texte ne
parle plus de legs et de donations, c'est qu'on a voulu autoriser les dons manu els. On se sert encore comme d'un
argu ment de l'amendemen t déposé par MM. de Mun et de
La Bassetière, tendant à autoriser les syndicats mixtes à
r1!cevoir des legs et des dons même immobiliers.
Enfin, un dern ier argument est invoqu é en fêveur de ce
système. Il y a actu ellement en jurisprudence un principe
génëralement admis qui veut que les personnes morales
n'aient la capacité d'acqu érir à titre gratuit que lorsque un
lexte formel la leur a accordée.
On peut répondre, pour so utenir l'affirmative, que les
trava ux préparatoires ne so nt ni assez clairs, ni asi;ez précis
poor déterminer l'intention du législateur. Si, en effet,
pendant toute la première partie des débats, le texte de la
loi porte prohibition pour les syndi cats d'acquérir par legs
ou donations, cette disposition disparu t après la déclaration
que ~I. Lagrange fit à la Chambre au nom de la commission: e1. La commission n'a pas voulu enlever aux syndicats
la faculté de recevoir des dons. Il est à présumer que, dans
la pratique, les bibliothèqnes syndicales et les écoles professionnelles recevront de nombreux dons de livres, d'ou-
1
Rapport Lagrange, p.
/~0 ·1.
-
H;6 -
157 -
tils ou d'instruments. Il serait injuste de les obliger à dépenser, pour l'acquisiLion de ces objets, des fonds qui peuvent utilement grossir, les ressources des caisses de retraite
ou de secours 1 • » On peut donc dire, en somme, que le
législateur a voulu autoriser les syndicats à recevoir à titre
gratuit. Il est vrai que les exemples cités par le rapporteur
sont des exemples de dons manuels, et l'on dit que le législateur a seulement voulu au toriser ce genre de libéralités,
Pourquoi et à quoi bon au toriser les dons manuels qui, par
leur nature même, échappent à tout mode de contrôle?
N'est-il pas plus logique de supposer que le législateur a
voulu autoriser les modes d'acquisition à titre gracieux sans
autre restriction que celle relative aux immeubles.
Il n'y a donc pas là un argument suffi.ant pour admettre
un système plutôt que l'autre. li en est de même de l'argument tiré du rejet de l'amendement de MM. de Mun et de
La Bassetière. Si la proposi tion de ces Messieurs a été rejetée, c'est que le privilège qu'ils voulaient créer était réservé
à. des syndicats mixtes et que l'on a craint de favoriser le
rétablissement de véritables corporations.
Enfin, le principe de jurisprudence invoqué ne nous parait pas aussi général qu'il en a l'air, car un jugement du
tribunal de la Seine le repousse formellement 1 et se rapproche ainsi du principe édicté par l'article 902 du Code
civil.
La négative ne nous paraît donc pas su rnsamment éta-
1 Trib.
Soine, 30 mar$ 188 1. S. 8 1, 2. %4-9.
�-
-
158 -
blie; d'autre part, nous nous rangeons volontiers i1l'autre
opinion, d'abord à cause d'un argument de texte tiré de
l'article 8 de notre loi, qni sanctionne l'article 6 et dispose
qu'au cas d'infraction à cet article : a la nullité de l'acquisition ou de la libéralité pourra être demandée par le procureur de la République ou par les intéressés. l> L'article
se préoccupe du cas où un syndicat aurait acquis des immeubles autres que ceux prévus par l'article 6 et suppose
que des immeubles peuvent être advenus par libéralité.
C'est donc que les legs et les donati ons d'immeubles desti nés aux réunions ou aux bibliothèques peuvent faire l'objet
d'une libéralité.
D'ailleurs, à l'appui de ce tte opi nion, il y a encore un
argumen t dP. raison. Quel est le but du législateur en créant
les synd icats? Améliorer la si tuation des ouvriers. Eh bien!
pour arrirnr à ce résultat, il faut évidemmen t que le syndical ait des ressou rces suffi.saoteg pour entreprendre tou te
une série d'établissements utiles. Dès lors, pourquoi la priver d'un mode d'enrichi ssement tout naturel et lui imposer
l'obligation de restreindre son œuvre en restreignant ses
resso urces.
En somme, la question n'est pas tranchée. Elle se présentera certai nement dans la pratique et nous form ons le
vœu que les tribunaux la décident dans le sens le plus favo ble au développemen t de l'institution. Cette peur du rétablissement de la mai n-morte ne sau rait être assez forte
pour arrêter l'essor du principe d'association dont les con séquences doivent être fécondes en bienfaits.
Le jour où la question que nous venons d'examiner se
l
•
1?S9 -
prégentera, une au tre question subsidiaire surgira. Si l'on
aùmet en effet la validité des legs et des donations. les syndicats seront-ila soumis à l'autorisation administrative exigée par l'article 910 du Code civil pour les legs faits aux
établissements reconnu s d'utilité publique? Nous partageons à. cc point de vue l'opinion de M. Mongin et nou s
croyons que les termes cle l'article 910 sont limitatifs et ne
sauraient êlre étendus aux syndicats.
Les partisans de l'in ca pacité des syndicat. reconnaissant
que cette incapacité est illogique puisque les établis emenL
reconnus ont en somme la capacité en tière. se demandent
si le gouvernement ne pourrait pas relever les syndicats de
celle incapacité e.l les recon naissant comme d'utilité publique. Nous répondons sur ce point, non. très catégoriquemen t. D'abord parce qu e accorder au gouvernement le
droit de faire des di. tinctions entre les divers yndicats, cc
serai t détruire l'égalité absolue établi e par la loi et ensuite
parce que si la loi n'a acco rdé qu' une capacité restreinte,
un décret du go nvernement ne saurait pas modifier les di positions établies par le législateur.
Après avoir établi la person nalité civile des syndicat et
les droits en résultant, l'article G énumère les différentes
œuvres que le syndicat peut entreprendre. L'énumération
de l'article 6 n'est pas limitative et le texte même de l'lrticle précédent nous donne la preuve que le syndicat ne
son t pas exclu ivement réduits k1 ne créer que de caL es
de secour, et de retraites et de. offi~e de ren'eignements.
nous savons en eITet qu'ils peuvent organiser des cour. professionnels. Nous espérons que les yndicat développeront
�-
160 -
les associations coopératives, qu'ils créeront des banques
populaires de crédit, des caisses d'épargne et tous autres
établissements de ce genre.
La raison des dispositions de l'article 6 se trouve dans
les dérogations au droit commun qu'elles contiennent, examinons-les rapidement.
Les syndi cats peuven t consLituer des caisses de retraite
et de secours. - En principe une société de secours mutuels ne peut se créer qu'avec l'autorisation admin istrative.
La loi a supprimé celle autori ation, mais dans quelles
condi tions, elle ne le dit pas, et sur ce point encore la circulaire ministérielle supplée à son sil ence : « Les sociétés
syndicales de secours mutuels doivent posséder une individualité propre et avoir une administrati on et un e caisse
particulières. li en est de même des sociétés de retraite qui
peuvent bien se grelTer sur les sociétés de secours mutuels
et faire caisse commune avec ell es, mais don t le patrimoine
ne do it pas se c0nfondre avec celui du synd icat. li C'est
d'ailleurs fa une interprélaLion qu e l'article 7 justifie très
bien.
Les caisses de secours ainsi constituées seront-elles absolument libres ? En aucune façon ell es sont soumises à toutes les règles imposées par la loi aux autres sociétés du
même genre. Des diffi cultés peuvent s'élever à ce sujet, les
sociétés de secours sont régies par la 10 1 de 18!50 et le décret de 1852 et certaines prescriptions sont inapplicables aux
sociétés fondées par les syndi cats, ainsi la prés idence de la
société donnée aux maires, l'exclusion de certai ns membres
etc., etc. A ce point de vue la combinaison de la loi sur les
-
161 -
syndicats avec la loi organique sur les caisses de secours n'a
pas été suffisamment étudiée et il serait nécessaire qu'un
document législatif vint un peu élucider cette matière.
De plus les syndicats peuvent fonder librement des offices
de placement. - Les offices de ce genre doivent en droit
commun être autorisées, l'autorisation est supprimée pour
les syndicats. On s'est beaucoup effrayé de la conséquence
fâcheuse que cette disposition pourrait avoir pour les ouvriers indépendants. Ces offices, disai t-on, refuseront toujours de s'occuper de l'ouvrier étranger et dès lors que deviendra-t-il? A quoi l'on peut répondre qu'à côté de ces
offices ceux qui existent actuellement continueront à exister
et qu'en outre les syndicats de patrons installeront de leur
côté des offi ces où tous les ouvriers seront accueill is.
Enfin la loi dispose que les chambres syndi cal~s pou rront donner leur avis dans les questions contentieu es. Une
pratique assez ancienne existait dans certains tribunaux de
commerce. Dans les procès techniques on consultait volontiers les chambre syndicales qui pouvaient donner des
renseignements très utiles. En 1874, M. Tailhand, ministre
de la justice, mterdit par une circulaire de procéder de
cette faço n, contraire disait-il à. la loi, car les arbitres où
les experts aux termes de l'arti cle 429 du Code de procédure civile doivent être nommément désignés et doivent
prêter serment. Le parlement, dans la nouvelle loi, a sagement fait de rétablir cette pratique fort utile pour les justiciables. Il es t d'aill eurs bien entendu que les chambres dont
chacun des membres peut être individuellement choisi
comme expert nfl font lorsqu'elles sont ainsi consultées ni
li
�- t62 · m· un arb1'trage, elles fournissent seulement
une expertise
de simples renseignements.
.
..
En leur conférant ce pouvoir contentieux le leg1slateur
s'est surtout inspiré de la pensée qu e bien des procès et
bien des différends pourraient être évités par l'intervention
amiable des syndicats. Que de frais inutiles on évitera de
la sorte et il serait presque à souhaiter que les cbambres
syndicales puissent jouer en matière commerciale le rôle de
conciliateur du juge de paix en matière civile.
ARTICLE 7.
Tout membre d'uu syndicat professionnel peut se retirer à
tout instant de l'association nonobstant toute clause contraire,
niais sans préjudice da dl'oit pour le syndicat de réclamer la
cotisation de l' année courante.
Toute personne qui se retire d'un syndicat conserve le droit
d'être membre des sociétés de secours mutuels et de pensions de
r~traites pour la vieillesse, à l'actif desquelles elle a contribué
par des cotisations ou versements de fonds.
En thèse générale lorsq u'un contrat d'association est
formé entre diverses personnes, la convenüon des parties
peut fixer un laps de temps pendant lequel aucun des associés ne pourra se retirer. Le législateur voul ant sauvegarder
la liberté individuelle des ouvriers a cru devoir, avec JUSte
raison, apporter une dérogation à ce principe au poin t de
-
165 -
vue des syndicats. Il s'est en eflet préoccupé d'une hypothèse toute spéciale, celle des grèves. Il ne fallait pas qu'un
ouvrier fut obligé malgré sa volonté et par le fait de son
affiliation à un syndicat de continuer une grève fâcheuse
pour ses intérêts. Dès lors on devait lui assurer le droit de
se retirer du syndicat à son gré, tel est l'objet de l'article 7.
Cet article qui tout d'abord n'était qu'un paragraphe
additionnel de l'article 6 et qui a été confectionné par pièces et morceaux, dispose que tout membre du syndicat
peut à tout instant cesser d'en faire partie. Mais pour que
cette disposition ne restât pas lettre morte M. Trarieux
proposa et fit adopter un amendement qui ajoutait à l'article les mots Cl nonobstant toute clause contraire. l>
Les syndicats pouvaien t en effet chercher dans les statuts
un moyen de retenir les membres dissidents. C'est ainsi
par exemple que les statu ts auraient pu imposer l'obligation de ne se pas retirer pendant une période déterminée.
D'autre part on aurai t pu imposer une amende pour les
démissionnai res, ou bien encore faire déposer à tout adhérent un cautionnement devant rester à la caisse de la société au cas de retraite. Il est certain que tous ces moyens
eussent été de nature à paralyser le droit des sociétaire· .
Aussi le parlement a-t-il sagement fait d'introduire les
mots, nonobstant toute clause contraire, dans le texte de
la loi. De cette faço n en effet un terme ne peut pas être imposé. Ces amendes doiven t être déclarées nulles et les cautionnements qui seraient de natu re à empêcher un sociétaire de quitter le syndicat dans la crainte de perdre son
dépôt doiven t être annulés.
�-
164 -
Ainsi donc le droit individuel de chaque membre du syndicat est assuré, mais il fallait aussi sauvegarder les intérêts
de la société. li ne fallait donc pas qn' un membre put se
soustraire à ses obligations pécuniaires par une démission
et l'on a ajouté un membr~ de phrase pour assurer au syndicat le droit de poursuivre le paiement des cotisations arriérées et de la cotisation courante.
A ce point de vue la loi dispose que le syndicat peut réclamer la cotisation de l'année courante. Les termes de
l'article 7 doivent-ils être entepdus dans un sens restreint
ou au contraire d'une façon large? Nous pensons que le
législateur s'est surtout préoccupé de ce qui se passe généralement et il a parlé de l'année courante parce qu'il a
pensé que les cotisations se paieraient surtout par année.
Mais si les statuts d'un syndicat déclarent les cotisations
payables par semestre, par trimestre ou par mois, le membre démissionnaire ne devra sa cotisation que pour le semestre, le trimestre ou le mois courant.
Une dernière crainte s'est présentée à. l'esprit du législateur. Nous assurons bien, s'est-il dit, la liberté de l' ouvrier
contre les statuts du syndicat, mais comme les syndicats
peuvent former des caisses de secours et des caisses de
retraite, si nous ne réservons pas les droits des dissidents
dans ces caisses de secou rs que leurs versements ont constituées en grande partie au moins, nous réduisons les sociétaires à la double alternative d'abandonner leurs droits
acquis ou de rester indéfiniment liés à la société. A
quoi on répondait en disant : Le droit commun prévoit
cette situation et de même qu'un membre d'une société de
-
t6?S -
secours mutuels peut s'en retirer sans perdre ses droits à
l~ pension de retraite de même en sera-t-il pour les syndicats. Cependant pour ne pas laisser place à aucune équivoque on a ajouté un paragraphe complémentaire établissan t nettement le principe.
Ce paragraphe complémentaire nous fait comprendre
pourquoi la circulaire ministérielle exige une administration distincte pour le syndicat et pour la caisse de secours.
Si ces deux administrations étaient confondues il est certain
que le membre démissionnaire du syndicat ne pourrait pas
conserver ses droits dans la société de secours.
Du reste remarquons en pas ant que cette garantie des
droits du démissionnaire rP,sle bien illusoire, car en somme
il est certain que l'administration de la société de secours
et même des pensions de retraite sera touj ours moins favorable à celui-ci qu'aux membres actifs du syndicat.
Relativement aux autres rapport du syndicat et de ses
membres, la 101 resle muette. laissant les statuts règlementer ces diverses questions.
On s'e t demandé si au cas de retraite les membres
démissionnaires n'auraient aucun droit sur le fonds social
du syndicat.
A défaut de stipulation contraire dans les statuts nous
pensons qne celui qui e retire perd tou ce droits à l'actif. Les syndicats ne sont pas en effet fondés dans un but
de gain. D'ailleurs un des principaux effets de la personnalité morale est de distinguer le patrimoine du syndicat de
celui de ses membres et on comprendrait difficilement que
la retraite <le quelques membres fit cesser cette distinction.
�-
166 -
M. Brunot, dans son commentaire, fait encore valoir à
l'appui de cette thèse que les biens des syndicats sero nt
presque toujours peu considérables eu égard au nombre
des adhérents, qu'ils ne seront jamais liquidés tant que durera le syndicat, qu'enfin ces biens provenant des cotisations doivent suivre le sort de ces cotisations. Puisque la
loi impose aux membres sortant..c; l'obligation de payer
leurs cotisations ils ne peuvent pas réclamer les cotisations
antérieurement versées.
ARTICLE
8.
Lorsque les biens auront été acquis contraire-ment aux dispositions de l'article 6, la nullité de l'acquisition ou de la libéralitiJ
pourra ~tre demandée par le procureur d'l la République ou
par les intéressés.
Dans le cas d'acquisition c1 titre onéreux, les immeubles seront vendus et le prix en sera déposé à la caisse de l'association.
Dans f.e cas de libéralité les btens feront retonr aux disposants
ou à leurs hérilùm ou ayants cause.
L'article 8 contient la sanction civile de l'article -O. Au
cas où des immeubles seront acq uis ayant one autre destination que les réunions, les cours pro fession nels ou les
bibliothèques, l'acquisition pourra être annulée.
Quel est le caractère de cette nullité? Est-elle radicale
TJu relative? Les ter·mes mêmes de l'article répond ent à. la
- 167 question de nullité pourra être demandée. Il s'agit donc
d'une annullabilité et non d'une nullité absolue. Dès lors
tant que la null ité n'est pas prononcée l'acquisition est valable et si avant la nullité le syndicat transmet les immeubles par vente, échange ou tout autre mode, ces transmissions seron t valables aussi.
Quel sera l'e!Tet de la nullité prononcée? S'il s'agit d'un
immeuble acquis à. titre onéreux, il sera vendu et le prix
de vente déposé dans la caisse de la société. S'il s'agit
d'une acquisition à titre gratuit l'immeuble fera retour au
disposant on à. ses héritiers et ayants cause.
La disposition de la loi nous paraît incomplète en ce qui
concerne la sanction de l'acquisition à titre onéreux. L'immeuble sera vendu, mais dans quelles conditions. Tl ne
peut évidemment pas s'agir d'une vente volontaire et dès
lors on aurait dû préciser dans quelles formes se ferait la
la vente judiciaire, alors surtout que nous allons voir que
le poursuivant sera dans la plupart des ca le procureur de
la République. Or l'Etat ne plaide pas par procureur, et
comme dans les ventes judiciaires le ministère de l'avoué
est nécessaire, on peut se demander ce qui arrivera dans
le cas de nullité poursuivie par le ministère public.
Qui peut provoquer la nullité? D'abord les intéressés, et
sur ce point il ne peut y avoir de difficultés; ensuite le procureur de la République. Cette disposition est une dérogation absolue aux principes généraux. C'est le seul cas où
le ministère public peut sai ir directement la juridiction
civile. Car il est hor de doute que l'article 8 ne vise exclusivement que la sanction civile et la loi ne s'occupe en au-
�-
168 -
cune façon de la juridiction correclionnelle qui n'est visée
que par l'article 9.
ARTICLE 9.
Les infractions aiiœ dispositüms des articles 2, 3, 4, 5 et 6
de la présente loi seront poursuivies contre les directeurs ou administrateurs des syndicats et punies d'une amende de 16 a
200 f ra.ncs.
Les tribunaua; pourront en outre, it la diligence du procureur de la füpublique, prononcer la dissolution dn StJndicat et
la nullité des acquisitions d'immeubles {ailes en violation des
prescriptions de l'article 6.
Au cas de fausse déclaration relative aux statuts et aux noms
et qualités des adm·inistrateurs ou rlirecteurs, l' amrmde pourra
atre portée à cinq cellls francs .
L'article 9 contient la sanction pénale des ob ligations
prescrites par la loi. Sont punies d'un e amende invariable
de seize francs à deux cents francs toutes les infracti ons à
la présente loi, c'est-à-dire le fait pour un syndicat de comprendre des personnes de professions différentes, de s'occuper d'intérêts autres que ceux prévus par l'article ::>, de ne
pas faire les dépôts exigés par l'article 4 ou les renouvellements de dépôt, de nommer pour admin istrateurs des incapables, c'est-à-dire des étrangers, d'acquérir d'autres im·
meubles que ceux nécessaires aux réunions, aux bibliothè-
-
169 -
ques et aux cours professionnels, et pour les unions dt·
syndicats le fait de ne pas faire le dépôt prescrit ou bien
d'acquérir des immeubles.
Nous pensons qu'à raison même des termes de l'article 9
cette énumération est limitative. D'ailleurs nous sommes
sommes en présence d'un texte pénal qui forcément doit
être interprété limitativement. D'autre part nous croyons
que toutes les infractions que nous avons relevées peuvent
être poursuivies, un doute en effet peut se présenter relativement à l'article 4, le fait de nommer pour administrateur
un étranger est-il punissable et dans ce cas qui doit être
puni? Nous pensons en elîet à raison de la généralité des expressions employées que c'est-là une des infractions prévues
par l'article 9 et comme toutes les infractions ont poursuivies à l'encontre de administrateurs, la responsabilité
doit peser également sur l'administrateur étranger.
Le principe de responsabilité édicté contre les administrateurs est d'ailleurs éminemment rationnel. Il serait injuste en effet de poursuivre les membres de l'a ociation
pour des infractions à des obligations qui sont toutes à la
charge de ceux qui son t à la tête du syndicat.
Les disposition du paragraphe 2 nous emblent d'aillenr être en opposition formelle avec ce principe. Dans la
première partie la loi déclare en effet que les tribunaux
correct10 nn cls po urront pro noncer la dissolution.
Dans quel cas? La loi ne l'indique pas, elle laisse <lonc
le pouvoi1· d'appréciation aux juges et celle liberté d'appréciation ne va jamais sa ns un cerlam arbitraire qu'il e t fâcheux d'introd ui re surtout dans une loi nouvelle. Si les
�-
170 -
tribunaux prononcent la dissolution dans tous les cas des
infractions prévues au paragraphe premier, en somme on
frappe celui qui n'a pas commis la faute. Supposons par
exempl e que des membres de professions différentes aient
été admis par les administrateurs ou qu'un renouvell ement
de dépôt n'ait pas été fait si le syndicat est dissous il supporte la conséquence du défaut de vigilance de ses administrateurs.
D'ailleurs le paragraphe 2 tout entier nous parait pas
avoir été heureusement inspiré. La seconde partie nous
paraît en effet être une répétition de l'article 8 qui prévoit
les cas d'acquisitions contraires à. l'article 6. La peine édictée est la même dans les deux cas, nullité de l'acquisition.
Mais, dit-on, l'article 9 s'ex plique car les intéressés ne peuvent P,as saisir le tribunal correctionn el et que seul le ministère public peut suivre cette voie. Mais pourquoi puisqu e par une dérogation spéciale on a dêja reconnu au
procureur de la République le pouvoir de s'adresser à la
juridiction civil e lui accord er le droit de saisir la juridiction
correctionnelle? Pourquoi créer une nouvelle dérogation
aux principes généraux en accordant à la juridiction correctionnelle de prono ncer sur des intérêts absolum ent civils
tels que. la dissolution d' un syndicat ou la nullité d' une acquisition?
Notons en passant qu'au cas où la di ssolution sera prononcée l'actif du syndicat devra être partagé entre tous les
sociétaires, il y a bien distincti on de patrimoines à raiso n
de la personnalité morale, mais à côté de celle distinction
-
171 -
subsiste toujours la copropriété des différents membres de
l'association au cas où l'être moral vient à disparaître.
Enfin pour terminer le chapitre des infractions l'article 9
édicte une amende de 500 francs pour le cas de fausse déclaration. Il est certain que la fau sse déclaration suppose
un degré de criminalité plus grand que l'omission qui peut
même parfois être involontaire.
On s'est demandé si l'article 25 et 24 de la loi du
29 juillet 1881 sur la presse et relatifs à la provocation de
crimes ou délits peuvent être applicables aux syndicats. Les
travaux préparatoires nous prouvent que le parlement n'a
pas voulu admettre ce délit pour les syndicats en repoussant un amend ement proposé au Sénat, tendant à admettre
que ce délit commis dans les réunion pourrait être poursuivi . On a en effet jugé que les réunions de syndicats
avaient un caractère privé et que l'on ne pouvait pas se
préoccuper de ce qui s'y passait.
Une dernière question reste à examiner, c'est la combinaison des articles 1 et 9 de la loi. Dans quels cas se trouve-t-on en présence des syndicats qui restent sous le coup
des articles 291 et 292 du Code pénal ? Ou en d'autres
termes dans quels cas peut-on dire qu'il n'y a pas à pro prement parler de syndicats professionnels ? Le fait seul
d'avoir commis une des infractions prévues à l'article 9 ne
peut pas su(fire certainement pour changer le caractère du
syndicat. li y a donc une question de fait que les tribunaux
devront apprécier. Ils ùeVl'lrnt rechercher dans qu elles conditions l'association s'c t formée, quels sont ses agissements
habituels, en un mot s'entourer de toutes sortes de rensei-
�-
172 -
gnements moraux. Il est certain que de cette façon nous
retombons dans la théorie de l'arbitraire que nous combattons plus baut, mais c'est la théorie de la loi car on ne peut
pas admettre sur ce point l'opinion de M. Mongin qoi veut
qu'on ne puisse plus dans aucun cas faire l'application des
articles 291 et 292 do Code pénal.
ARTICLE
10 .
La présente loi est applicable à l'Algérie. Elle est également
applicable aua:; col-0nies de la Martinique, de la GuadekJUpe el
de la Réunion. Toutefois les travailleurs étrangers et engagés
sous le nom d'immigrants ne po11rront faire partie des syndicats.
La seule question soulevée par cette disposition additionnelle est relative aux immigrants français. Il a été formellement entendn que nos nationnaux et les in diens de Pondichéry qui sont électeurs pourraient invoquer le bénéfice de
la loi.
Alors qu'en France les étrangers peuvent faire partie
d'un syndicat, dans les colonies ce droit leur est enlevé.
Cette distinction ne s'explique guère et devient d'au tant
plus singu li ère qu'il ne leur est même pas permis dans ces
colonies d'adhérer à un syndicat ayant son siége en France.
Telle es t la loi organique des syndicats professionnels.
Elle est loin on le voit d'être à l'abri de toute critique,
-
173 -
mais le jour où les syndicats, qui ten den ~ de plus en plus à
se développer fo nctionnant régulièrement, auront produ it
les avantages qu'on attend d'eux, le jour où ils auront supprimé les grèves et amélioré le sort de la classe ouvrière
par la création des sociétés coopératives, des ateliers sociaux pour les ouvriers sans travail, des banques populaires,
des caisses de secours, le jour enfin où la pratique aura démontré les inconvénients et les vices de la loi actuelle, il
faut espérer que le législateur révisera une loi qui telle
qu'elle est fera faire a la question sociale un grand pas, car
nous sommes convaincus que le remède à la crise que nous
subissons se trouve dans le principe si puissant et si fécond
de l'association.
�-
175 -
Nous trouvons-là la division de ce chapitre. Nous examinerons d'abord la législation dans les Etats où les corporations se sont maintenues. Puis nous rechercherons dans
quelles conditions se créent les associations ouvrières dans
les pays où le droit individuel au travail est reconnu .
DROIT CO!tlP..lRÊ .
AUTRICHE.
Le mouvement qui s'est fait sentir en France en faveur
de l'association ouvrière s'est également produit dans toute
l'Europe. Dans tous les pays en elîet des associations s'établissent entre ouvriers, soit pour la création d'établissements de secours, soit pour le développement de l'industrie, soit encore pour la fond ation de sociétés coopératives
pour la production ou la consommation.
Il nous parait intéressant de rechercher la législation ouvrière dans les divers états Européens et cette étude no us
a semblé être Je complément nécessaire de nos recherches
sur le rôle de l'association dans l'organisation du travail.
Tout d'abord un premier fa it s'impose à notre obbervation. Dans certains Etats la liberté individuell e n'existe pas
encore et les corporations telles qu'elles avaient été constituées par le Moyen-Age continuent à subsister. Dans d'autres au contraire la situation est la même qu'en France,
les corps de métiers ont complètement disparu, soit qu'ils
aient été abrogés ou qu'ils soient tombés en désuétude. ·
Nous commencerons notre revue par l'Autriche.
En Autriche les corporations ne son t pas abolies et cependant la liberté ind ustrielle a été proclamée par la loi
de 18!S9, qu'on appelle généralemen t la Gewerbeordnung
ou Code industriel.
Comment concilier ces deux propositions qui chez nous
tout au moins semblen t être absolument contradictoires?
La réponse est bien faci le. La liberté de s'établir comme
commerçant et indu trie! est accordée à. la condition de
faire une déclaration spéciale et de $8 soumettre à certaine
prescri ptions de police. Une fois ces formalités accomplies
l'artisan doit faire partie de la corporation du métier. En
d'autres termes la loi de 1 8~9 a eu po ur effet de changer
le caractère des corporations. Alors qu'autrefois elles
étaient formées et ne se recrutaient que par leur choix elles
deviennent accessibles à tous sans condition de stage ou
d'examen.
Les corporations jouent un rôle identique à celui qu'on
veut fai re jouer à nos syndicats. Elles sont avant tout ociétés de secours, elles reçoivent les contrats d'apprentis-
�-
176 -
saae veillant à ~e qu'ils soient fidèlement exécutés, elles
~ '
servent d'offices de placement, s'occupent de l'instruction
professionnelle et lrancheot comme arbitres les différends
qui peuvent surgir.
Mais ce régime de liberté n'a point été accueilli favorablement et la loi de 18?>9 a sobi des modifications importantes en 1885. Les petits arti sans atteints par les progrès
de la grande industrie ont en effet attribué la crise qu'ils
subissaient à. la liberté du travai l et on t à diverses reprises
réclamé le rétablissement des anciennes corporations.
La loi du 25 mars 1885 a fait droit à ces réclamations,
en partie au moins.
Actuellement en Autriche les industries sont divisées en
trois catégories. - La première co mprend les industries
concédées par l'autorité administrative ; la seconde comprend les industries libres qui peuvent être exercées moyennant une simple déclaration préalable : - La troisième
classe es t dite : de métiers i> et comprend les professions
qui exigent un certificat d'apprentissage et nn e.xamen.
(l
En fait c'est là le rétablissement des corporations. Cependant en droit la loi nouvelle a cherché à raj eunir cette
institution surannée et à la mettre en rapport avec les tendances modernes. C'est ainsi que notamm ent les corporations
doivent, lorsqu'elles n'existent pas, organiser des caisses de
secours. Ces caisses sont formées par les cotisations forcées
des ouvriers (5 0/ 0 du salaire au plus). La qu otité des secours est fixée par la loi. L'administration de la caisse est
exercée par un conseil formé pour les deux tiers d'ouvriers.
- 177 Ce comité n'a d'ailleurs presque aucune initiative tou t
étant régi par la loi.
Les corporations doivent former des tribunaux arbitraux
qui ne sont obligatoires que s'ils sont acceptés par les deux
parties. Ces tribunaux sont composés moitié d'ouvriers
moitié de patrons.
J
Elles doivent veiller à l' établissement d'un système d'ap·
prentissage bien ordonné en se préoccupant de la proportion numérique des apprentis avec le chiffre des ouvriers.
Elles peuvent former des sociétés coopéralives.
Le caractère dominant de la loi de 1885 est tout entier
dans l'ingérance absolue de l'administration. Les lnnungen
ainsi restaurées relèvent entièrement de l'Etat Leurs statuts
doivent être approuvés par l'autorité supérieure. Leurs
assemblées ont lieu so us la présidence d'un fonctionnaire,
elles peuvent être dis outes par le pouvoir.
Cette loi n'a pas produit jusqu'à présent de très grands
résul tats, on demande sa révision et à notre avis au moins
elle n'est pas née viable. Les principes de l'assoc.iation s'accommodent mal avec une tutelle absolue du gouvernement.
Les associations ouvrières devront forcément en Autriche
comme partout ailleurs devenir absolument libres.
HONGRIE.
La situation ouvrière est en Hongrie assez semblable à
celle de l'Autriche. Los anciennes corporations ont continué
~2
�-
178 -
à. subsister avec leurs privilèges et leurs monopoles jus.
qu 'en 1872 ' époque où la liberté du travail a été proclamée.
Depuis lors est intervenue la loi du 21 mars 1884 qui est
.
en quelque sorte le Code industriel.
Un chapitre de celle loi a trait aux corporat10ns de métiers ..Les professions sont comme en Autriche divisées .en
trois classes. Dans toutes les villes renfermant au moms
cent industriels de la classe des métiers le gouvernement
doit créer sur la ùemande de la majorité de ces industriels
et avec l'avis de la chambre de commerce et l'autorisation
du municipe une corporation qui comprendra tous les corp~
de métier. Mais à l'exception tle la ville de Buda-Pesth, 11
n'y aura dans chaque ville qu'une seule corporation.
Lorsqu'une corporation est fondée, toutes les sociétés libres qui existaient entre les membres des professions de
métiers doivent se fondre dans la corporation
Ces corporations ont pour but de faire la police intérieure et assurer l'exécution des règlements sur le travail,
veiller aux relations entre patrons et ouvriers, faire des rèales pour l'apprentissage, établir des tribunaux d'arbitres.
Ces tribunaux sont composés moitié de patrons, moitié
d'ouvriers et présidés par un fon ctionnaire officiel. Toutes
leurs décisions sont susceptibles d'appel.
Les caisses de secours sont administrées par les patrons
et les ouvriers, mais Je président est toujours un patron .
Les caisses sont alimen tées par la retenue sur les salaires
et par des cotisations des patrons. Un ouvrier gréviste ne
peut recevoir aucun secours en cas de maladie.
-
179 -
ALLEMAGNE.
J
En Allemagne les corporations se soot maiotenues telles
qu'elles étaient autrefois, jusqu'en 1869. Mais la loi en les
abrogeant n'a fait que reconnaitre un état de chosi:s qui
s'imposait, car depuis longtemps déjà les corporations
étaient tombées en désuétude. Après la loi de 1869 , chacun
eut la liberté de travailler sans être astreint à faire parti e
d' une corporation et à produire un diplôme. Les corporations purent subsister comme sociétés libres ayant surtout
pour but l'administration des caisses de secours.
La loi de 1869 avait été faite avec des intentions hostil es
à la classe ouvrière, on e pérait qu e les corporations disparaitrai ent. Plus tard et pour protéger au contraire le co rporations sur les plaintes du parti des artisans et des industriels allemand s, M. de Bismarck présenta au Reichtag
on projet de loi pour le relèvement des anciennes corporation, projet qui est devenu la loi du 18 juillet 1881.
Cette loi d' une façon générale di po e ce qui suit : « Les
artisans ne sont pas for~é · de former d ~s corporations,
mais lorsque dans unP. localité il en existe une le ouHier~
pourront s'en faire recevoir s' il remplissent les conditions
exigées par les staLn Ls. Ces conditions con istent généralement en un examen ou bien en un certai n temp d'apprentissage. Ont le droit d'être admis ceux qui ont fait partie
d'une corpo1·ation dan une autre localité. L'autori té, lor qu'une corporation est formée pour une profession , n'au-
�-
-
180 -
torise pas la création d'une seconde corporation, ce qui
prouve son désir de n'établir qu'une seule corporation par
métier. La loi allemande plus large à. ce point de vue que
la loi française, autorise \'admission des membres honoraires et ne limite pas le patrimoine de la corporation. En fait
cependant cette liberté absolue d'acquérir est restremte,
car toute acquisition doit être approuvée par l'autorité.
Ces associations ainsi formées ont pour but aux termes
mêmes de la loi de maintenir et fortifier le sentiment de
l'honneur professionnel. Elles règlent les rapports entre
patrons et ouvriers, s'occupent du placement de ceux-ci,
tranchent les questions d'apprentissage, délivrent des diplômes professionnels. Elles peuvent de plus former des tribunaux d'arbitres composés comme en Autriche, moitié
d'ouvriers, moitié de patrons et présidés par un fonctionnaire. Elles ont le droit de fonder des caisses de secours et
peuvent organiser le travail en commun. c'est-a-dire fonder
des sociétés coopératives. Mais ces derniers établissements
ne doivent pas figurer dans les statuts des corporations. La
caisse de secours doit être administrée à part et ses fonds
ne se confondent pas avec ceux de la corporation. Cependant le membre de la corporation qui donne sa démission
perd tous ses droits sur le fond de la caisse de secours.
Tout comme en Autriche, l'autorité a un grand pouvoir
sur ces associations. Elle peut leur imposer des règlements.
Le fouctionnaire qui préside les asssemblées peut dissoudre
la corporation elle-même.
Cependant, tandis qu'en Autriche la corporation peut
recevoir des ouvriers de toutes professions, en Allemagne la
181 -
corporation ne comprend qu'un métier. La corporation, au
point de vue territorial, ne peut s'étendre que dans la ci!conscription administrative.
I
Enfin la loi allemande se rap proche de la loi française en
autorisant les unions de corporations. Cependant, d'autre
part, elle décide, et le point est à noter, qu e les corporations ne peuvent en aucune façon participer aux grêves.
Depuis la loi de 1881, le Reichstag a encore voté deux
lois importantes au point de vue des associations. Une première loi, promulguée en 1884, porte que nul patron qui
ne fait pas partie d'une corporation ne peut avoir d'apprentis. Une seconde loi, présentée par M. de Bismarck, règlemente les assurances contre les accidents. Pour que les
patrons ne soient pas exposés à une responsabi lité trop
lourde, ils penvent former entre eux des sociétés illimitées
quant à. la territorialité pour supporter la charge des acci dents.
D'ailleurs la liberté d'association est de droit commun
en Allemagne; il y a, à côté des corporations, de nombreuses associations ouvrières et nous devons notamment signaler des associations agricoles fondées en Westphalie et en
Bavière sous le nom de Bauernvereine, qui ont de véritables chambre syndicales. Elles s'occupent de. intérêt
généraux de l'agriculture, elle constituent des tribunaux.
d'arbitres et créent ùe institution de ecours. de crédit
et n'as man ces. C'est ain i qu'elles ont obtenu de conditions très avantageuses des compagnies d'assurance. et
qu'elles ont trouvé le moyen de faire emprunter sur hypo-
�-
-
182 -
qui sont un contre-sens dans notre civilisation moderne, on
voit actuellement se développer des institutions se rapprochant des syndicats. Les artels sont des associations librement formées entre to us ceux qui ne font pas partie des
tsecks. Elles comprenn ent généralement les domestiques, les
employés, les commis. Les associations s'occupent de placer leurs différents membres, ell es touchent leurs appointements et répondent vis-à-vis de leurs maîtres des détournements qu' ils pourraient commettre.
thèques sans courtage el à lrès bon marché. Ces associations n'onl d'ailleurs pas de personnalité morale.
Enfin , et comme conclusion , on peut dire qu e la liberté
d'association est de droit comm un en Allemagne. Mais,
comme c'est le pay, de l'Europe où Je socialisme a le plus
de racines et comme le parti socialiste s'est déclaré l'ennemi acharn é de M. de Bismarck, celui-ci a voulu se prémumr contre les excès qui pourraient ré ulter des associations ouvrières. Il a fail rnter la loi du 21 octobre 1878 ,
qui met enlre les main du gouvernement les droils les
plus étendus. Celu i-ci peut, en effe t, même arbitrairement ,
prononcer des interd icti ons con tre Lou le société suspecte.
Il n'y a aucun reco urs po ur ces interdictions. Les co ntrevenants sont punis de peines très sévères. Toute perso nne ne
résidan t pas depuis ix mois dans une localité peu t en être
expulsée sur un simple rapport de police, et enfln on peut
priver les imp rimeu rs, lib raires et les cabaretiers du droit
d'exercer leur pro fession.
185 -
;
Tels sont les dilTérents Etats de l'Europe où se sont perpétu ées les vieilles trad itions du Moyen-Age en matière
d'organisation du travail. Il nous reste maintenant a examiner quels sonl, au contraire, les pays qui permettent au
mouvement ouvrier de se développer par la création de
syndicats.
Hussm
En Ru ssie, les co rporati ons tell es qu' elles on t èté crées
pzr l' impératrice Catherine, continuent à subsister sous le
nom de tseclis. Dans chaque métier, nu I ne peut s' installer
s'il n'est maîlre, et on ne peut pas être reçu maître sans
avoir été apprenti et ouvrier.
Mais, à cô té de ces corp orations form ées et obligatoires,
ANGLETERRE
Nou s plaçons l'Angleterre en tête de la liste des pays où
les ouvriers peuvent librement 'associer pour se concerter
sur la défen se de leurs intérêts communs. Cependant, en
droi t, les corporations n'ont jamais été abolies, et si l'on
s'en tenait à la surface de chose . on pourrait croire
qu'ell es existent encore telles qu'au Moyen-Age. Ne voit-on
pas dans les cérémonies les douze corporations dites
�-
i84 -
honorables ~ de Londres, déployer au vent leurs bannières? N'ont-elles pas conservé le privilège de nommer le lord
maire? Enfin ne sait-on pas qu'elles ont conservé leurs
hall, leurs archives, leurs sceaux. Leurs hérauts sont encore
vêtus de costumes du xue siècle. Mais pour peu que l' on
étudie la société anglaise, on s'aperçoit vite qu'il n'y a là
que des vestiges surannés d'on état de choses tombé en désuétude. Ces anciennes corporations ressemblent fort à des
cercles où l'on reçoit toutes les classes de la société, mais
surtout les gens riches, car les cotisations y sont très élevées et ne servent qu'à offrir de somptueux repas aux personnes de distinction 1•
t
En réalité, les corporations ont complètement disparu,
et ce phénomène s'est accompli de très bonne heure à raison de la faço n libérale dont les magistrats anglais ont toujours interprété les chartes corporatives. Loin, en efJet,
d'étendre les privilèges des corporations, on les restreignait le plus possible.
D'autre part, la grand e industrie qui ne s'est nulle part
développée comme en Angleterre, a eu pour conséquence
la formation des sociétés ouvrières. Dès la fin du siècle dernier, des Trade unions se formèrent et cela d'un e façon légale et régulière, car le droit constitutionnel anglais a toujours reconnu le droit d'association.
Pendant la Révolution française , des troubles ayant
éclaté dans les classes ouvrières, le Parlement supprima le
1
Hubert-Valloroux, op. cil.
- 18!'.S droit d'association. Dès lors, les trade unions continuèrent
à subsister d' une façon secrète, et, comme le gouvernement reconnut alors qu'une société clandestine est plus
redoutable que celle qui ne craint pas le gran d jour, la
prohibition fut abrogée on 1821~. Depuis ces unions réglementées et autorisées n'ont pas cessé de fonctionner avec
autant de régularité que de sagesse.
Cependant, elles n'avaient point la personnalité civile.
En 1871, frappées de l'inconvénient qui pouvait résulter
pour elles de cette situation anti-j aridique, elles la sollicitèrent et l'ob tinrent par l'édit du 24 juin 1871.
Nous savons que, dans la loi anglaise, les grèves et les
mises à l'index d'an atelier sont permises. Mais si les
unions ont le droit de décréter la grève et de la soutenir
par des fonds de secours, les grévistes qui commettent un
acte de violence ou d'intimidation quelconque, soit vis-à-vis
d'un patron, soit vis-à-vis d'un de leurs camarades, sont
sévèrement punis.
Les trades unions obtiennent la personnalité civile lorsqu'elles comprennent au moins sept membres et qu'elles
font enregistrer leurs statuts.
L'enregistrement n'est pas , comme en France, la tran ·cription d' un acte sur nn registre. Cette formalité consiste,
au contraire, dans le dépôt des statuts entre les main d'un
magistrat spécial qui les examine et qui décide s'ils doivent
0 1J non être aci:eptés. Lo reg1strar est un fonctionnaire
d'un rang élevé choisi parmi les avocats ayant au moins
douze ans do postulation. On peut appeler de ses décisions
a la co ur du banc do la reine. Le registrar a le droit de su •
�-
f86 -
pendre ou de dissoudre les sociétés, Annuell ement le registrar fait paraitre un co mpte-rendu de l'état des sociétés
enregistrées et signale les réformes à effectuer dans la législation ouvrière.
A côté des associations enregistrées, il y a, en Angleterre, beaucoup d'associations libres. La question ouvrière
est une de celles dont on se préoccupe le plus. Tous les
ans des congrès se tiennent et forment des vœnx pour obtenir des lois favorables du Parlement, et on ne saurait trop
recommander aux classes laborieuses l'emploi d'un pareil
procédé pour améliorer leur situation.
Si maintenant nous recherchons rapidement les conditions dans lesquelles s'exerce le droit d'association pour
les ouvriers dans les autres états de l'Eu rope, nous verrons
qu'il s'exerce partout librement et nous nous rendrons facilement compte que l'association a surtout pour but l' institution d'établissements de prévoyance. - En Danemarck,
la liberté industri elle a été établie en 185ï, les langs ou
anciennes corporations obligatoires ont été abolies et transformées en sociétés de secours. - En Norwège, les guildes
aussi ont disparu et il ne reste plus que des soCiétés am icales entre ouvriers. Elles sont au nombre de soixante-dix
environ et ont toutes pour but la distribution de secours.
- En Suède, on trouve la li berté la plus absolue d'association . Aussi rencontre-t-on des sociétés sous to utes les
fo rmes. Sociétés de secours mutuels, unions de méti ers,
sociétés coopérati ves de co nsommation et de production.
Pour donner une idée de l'é tat de prospérité clans lequel
-
..;
187 -
se trouvent les sociétés de secours, nous indiquerons que
la société de Norrkoping a ouvert un théàtre réservé à ses
seuls sociétaires 1 • - En Suisse, la situation morale des
ouvriers est excellente, et ce résultat a été atteint par le
développement de l'esprit d'association. Nous trouvons là
un modèle type de l'association, c'est celle de Bâle, fondée
en 1777, par Isaac Iselin, elle comprend actuellement
1752 mem bres et a fo ndé cinquante-quatre institutions
pour les sociétaires, telles que caisses de secours aux ouvriers, aux malades, aux condamnés, écoles primaires, écoles professionnelles de dessin, de modelage, cours de chant,
bains publics, conférences populaires, etc.. . L'association
ouvri ère du can ton de Zurich a pour organe la Gazette des
Ouvriers 2 • - En Belgiq ue, le mouvemen t d'association
ouvrière est aussi très marqné. Très nombreu:es sont les
instituti ons aéées par ces associations, caisses d'épargne,
caisses de retraites, caisses de prévoyance et sociétés coopératives de consommation et de prod uction et banques populaires. Celle de Liège est notamment très florissante. En fi n, et pou r terminer cette revue rapide, signalons qu'en
Italie il existe 209 1 sociétés ouvrières de secours mutuels
et qu'au 3 1 décembre 18 5 il y avait 2?:S2 banques populaires, ayan t entre toutes un capital dépassant cinquante-cinq
millions.
1
Lavolléc, Les clcisscs ouvrières en Europe
1
hl.
�-
188 -
On voit, par ce qui se passe dans toute l'Europe, que
c'est dans l'association seule que l'ouvrier peut trouver une
amélioration ason élat social et dès lors la voie du législateur est toute tracée , il doit chercher a favoriser et à développer les sociétés ouvrières sous toutes leurs formes.
.1
POSITIONS
Brou Romain.
-
~ --
1. Les créanciers d' un défunt ayant demandé la sépara-
tion des patrimoines, peuvent, s'ils n'ont pas obtenu entier
paiement, poursuivre l'héritier.
Il. La servitude de passage légale au profit d'un fonds
enclavé existait à Rome.
III. Le simple consentement ne suffi t pas pour éteindre
les servitudes.
IV. Les fi lles de famille s'obligent valablement.
�-
190 -
-
191 -
Droit Chll.
Droit Constltotlonnel.
I. L'acceptation du remploi par la femme fait tomber
toutes les aliénations ou tous les droits réels consentis par
le mari depuis l'acquisition en remploi.
1. Un parlement doit se composer de deux chambres.
II. Les ministres seuls doivent être
II. La femme étrangère a hypothèque sur les immeubl es
de so n mari , situés en France, si sa loi lui reconnaît l'hypothèque légale.
Vu pm· le Professeur P1·ésident de la Thèse,
EDOUARD
JOURDA~.
Ill. L'enfant naturel reconnu peut être adop té par son
Yu
PAR LB DoYBN,
Ch evalier de la Légion d'!Ionneur,
père ou par sa mère.
ALFRED JOURDA\'.
IV. L'acte régulièrement fait par le tuteur avec les fo rmes prescrites est inattaquable.
Vu et permis d'imprime r .
LB R ECTBU R,
V. Les jugements rendu s par les tribunaux étrangers
ne sont exécutoires en France qu e ~'ils sont rendu s exécutoires par un tribunal français.
Droit Pénal.
1. Le verdict négatif du jury laisse subsister le fait matériel comme base possible d' une action civile en dommages-intérêts.
Il. On n'applique pas au complice l'aggravation de
peine tenant à une qualité personn elle de l'autenr prin-
cipal.
respo n sabl~s .
Chevalier de la Lé910n d' Ilonneur.
1
BELIN.
�TABLE
DES
'
MATIERES
INTRODUCTION . . . . . . . • . . . . . . . . . . . . . . . . . . • .. . . . . . .
page
Des collèges d'ar1 i am; it Home.
Chapitre f" . -
De collèges rl'arlisans sous la· royauté
Chapit1·1· Il. -
Des eollègc· cfarlisans :;ou" la République.
11
Chapi11·0 111. -
Deg «0111\:es <l'arti san sou l'empire.....
2z
~cc Lion 1n.
5
Hi ·torique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Scclion z. - Vic intûriourn Lie collège- . . . . . . . . . . . .
Section :3. - Situation ju1·iLlique <les collège · . .......
~H
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Des corporation ~.....................................
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Des as·orialions dans IP droi1 in1ermécliaire . . ........... IOH
Loi du z l mai·~ 1884 ................................. l ~I
Légis lation 1·omp:11Pt'
.....•..•...................... lî\
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Dublin Core
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A name given to the resource
Monographie imprimée
Description
An account of the resource
Ouvrages imprimés édités au cours des 16e-20e siècles et conservés dans les bibliothèques de l'université et d'autres partenaires du projet (bibliothèques municipales, archives et chambre de commerce)
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Title
A name given to the resource
De l'organisation du travail : collèges d'artisans, corporations, syndicats professionnels : thèse présentée et soutenue devant la faculté de droit d'Aix
Subject
The topic of the resource
Droit du travail
Droit romain
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Heimann, Henri
Faculté de droit (Aix-en-Provence, Bouches-du-Rhône ; 1...-1896). Organisme de soutenance
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence), cote RES-AIX-T-142
Publisher
An entity responsible for making the resource available
A. Makaire (Aix)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1886
Rights
Information about rights held in and over the resource
domaine public
public domain
Relation
A related resource
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Vignette : https://odyssee.univ-amu.fr/files/vignette/RES-AIX-T-142_Heimann_Organisation-travail_vignette.jpg
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
1 vol.
191 p.
23 cm
Language
A language of the resource
fre
Type
The nature or genre of the resource
text
monographie imprimée
printed monograph
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
https://odyssee.univ-amu.fr/items/show/448
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
France. 18..
Abstract
A summary of the resource.
Partant de l’idée que l’homme ne peut vivre isolé et qu’il a besoin du secours de ses semblables, cette thèse s’intéresse à différentes formes d’organisation du travail, de l’Antiquité aux associations ouvrières de la fin du XIXe siècle.
Provenance
A statement of any changes in ownership and custody of the resource since its creation that are significant for its authenticity, integrity, and interpretation. The statement may include a description of any changes successive custodians made to the resource.
Bibliothèque droit Schuman (Aix-en-Provence)
Description
An account of the resource
Des collèges d'artisans aux corporations, la liberté d'association en matière de travail a longtemps était entravée jusqu'à la loi du 21 mars 1884 (loi Waldeck-Rousseau) qui instaure la liberté syndicale
Associations professionnelles -- France -- 19e siècle -- Thèses et écrits académiques
Corporations -- France -- 19e siècle -- Thèses et écrits académiques
Droit du travail -- France -- 19e siècle -- Thèses et écrits académiques